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If
I
THRESOR
DHISTOIRES
ADMIRABLES
ET MEMO RABLES
de noftre temps.
Recueillies de flufieurs AuthenrSy
Mémoires , d" Auis de di^
uers endroits.
MISES EN LVMIERE PAR
Simon Govlart
Senlisien» !
A GENEVE,
POVR SAMVEL CRESJHèfc^L^
biblioth:ica
PN
A lEAN GOVLART,
ESLEV ET CONTROLLEVR DES
Aydesôd Tailles peur îc^
Roy en PEflcdion
deSenlis.
1^^^^^^ 0 N Frère , Durant nos mi [ères
^ M ^^Pid^^^ ^^ pouuant future d'vn
^d^^^^^^\ train lejlude que i'aime Icflm^
wSf^^M^^ fi^^^'^^^^y ^^ fois A autre & a
diuerfes repnfes l'hijîoire depuis cent cinquan-
te ans , oh ie marqmy des particidari-
tez. notables a milliers. le commence a faire
qtielque corps de ces membres ejpars : cr four
ejfayie "vous offre ce premier 'volume y qui fera
fuiui d'vn grand nombre d autres ^ fi i'enîcn
que mes recueils vous agréent , dr f ruent a
quelques perfonrtcs ftlon 7non intention. Con-
tinuez, dereceuoir de bon œil ce qui -vous vient
de mes mains. No (ire amitié fncere , fer-
me , O' dont ie recueille vn grand contente-
ment , me permet de mettre icj vofre nom-^
Ô* m'affeure que vojhe candctr fupvortera
ma hardiefeffivous voulez, rmmner ainfict
aue tef^y maintemnt, UmaU nojtre mutuelle
bienvneilUncen a fommeillé : aujjt ne la ref-
ueille je point par cejlefreface-t ninepreten lui
donner acroijl par quelques fueilles de papier.
Ce fer on vn trof mince renfort, ledefire que
'veniez le premier 'vohs ajfeoirpres de moy , ^r-
fnqu'enjèmble ( é'deux on trois autres auec
nom) contemplions les meruetlles de Dieujuîie
(^ mifericor dieux ylequelie vom fouhaite pro-
pice y& h ma fœur 5 & ^ tous ceux qui le reue-
rent d^ qui nous aiment. De Sain^i Geruais
cexîj. iour de May y l'an mil fx cens.
Voftre frerc & iîngulier ami i famais,
Simon Govlart-
i^DVERTIS SEMENT
au Leâeur débonnaire»
*A I marqué depuis quelques an-
nées pkiîîeL.rs milliers d*Hiftoires
recueillies de diuers autheurs , à
la conrciencejdefquels ie vous
renuoye,ne pleigeât rien de leurs
efcrits que le fidèle extrait que
i*en fais, & voulant toutefois penfer qu'ils n'ont
auancé chofes faullès ou ineptes , ains ont penfé
& repensé àcequ'ilsauançoientenpublic.Ieles
si^^cUc Admirables, àcaufeque les raifonsd vne
gcand'partd'icellesfontforteiîongnecsdemon
appreiienfion5& qu'il y a du miracle, ce me fem-
ble.Elles font M^wor4/?/^;aulTî, pour le contente-
ment , rinlku6i:ion,&: les coniolations que les
bonnes Ôc paillbles âmes en pourront recueil-
lir. Je n'ay point voulu palï'cr au delà du fieclc
duquel nous ne faifons que fortir que fort rare-
ment 5 & m'en abftiendray encor d'auantage é$
liures,qui ruiuront,ri Dieu le permet. L'hiRoiic
de nofire temps cft vn abrégé d&toutes les m.erueil-
les des (iecles paiTez. ne me (achez point m.au-
uais gré fi i'ay de(iré vous f:n prefenter quelques
clchantillons , pour rekiciller voftre penfee.
Quand vous^auicz veu la fuitc,s*il vous fouuient
de chofes dignes d'eftreramencues a noftrepo-
Herité/urmontez noftre exemple. Ce vous fera
chofe aifee. Je vous y conuie 6c adiure. Dieu ne
6 .
\Q\n eflre trop conn ni reueré de nous en la voye
de- (qz iu«;cmcns & mifeiicordes. Ceux qui peu-
uenr lefai.c d'vn plus haut ftile, ne derdaignc-
ronc ma foible affcttion. Quant aux autres qui
ne pcuuentou nevculentrien faire que ceniurec
& inue6î:iuer,ie leur (buhaite droite rcience& cô-
Iciéce. A la micne volôté qu'en ce nouueau (ieclc
Dieu fuCcicc à^s perionnagcs,qui en diuers lieux
foicr foigncux de iTiarqueren Diaires & Annales,
tout ce 'jue nous voyons digne d'eftre referué
pour r^nieigncncnr de nos ibcccircuis. len'ay
point voulu lehanfTcL' de couleurs les limpleshi-
floircsque ie voiisprcfente. Comme aux bons
cftomacs il ne faut pomtde Taupicqucts :iesc-
iprirs robuftcs aufTi Te contentent de ledure
fî;"pple, laquelle ils rumine»:, pour la conuettir
en (ubftançe viuifianrc. Le but de ce recueil OC
des ruiuans(eia,Criignez Dieu, gardez Tes com-
mandernens:voilaletOtitderhomme,CarDieLi
amcnera route œuurc en iugcment 3 touchant
four ce qiji eft caché/oit bieujfoit mal.
INDICE
TABLE DES
MATIERES ET CHOSES
principales de plus remarquables craidcesôc
contenues au i. & 2. volume des Hiffcoires
admirables & mémorables : félon l'ordnalphÂ'*
betique.
Le nombre tnottpeUpâge.
A
Y^^^ Bfces,ou apoflemes au corps humain pag.6o
■ '^^îVl Abjîinence nomparetlle , ^ vie merueil'
Çy^ fê^ -^^^^^^ '^bfl^i^cnce mentor allé. 5^?
j^^^^^^'jîj Accident merueilleux en 'vnefdU, pag. l
y^r<3.-:^:'is^^ Accouchée abondante en lai5. 16. 17
Atcufateur niefchant exterminé. ^6%
Accufationfaujfe grauement reprirtiee. 6
Aduertijfemtns ^ auant coureurs de grandes ruines ^ con-
fufions. 6}i
A duertijfeur merueilleux. Jj .'autre, 18
Adultère, caufe' de grands maux, $69
Adultères chajlie:^. - 19
Agilité cr force. 35
Ambition fleflrie.^'ji. ridicule. 4I
Amitié coniugale. ^y/[.jociale. 57^
Amour de la patrie. 577
Apoplecîiques. 57 S
Apparition merueilleufe. 4^»
Apparitions diuerfes en l'air. ^6 fataniqties. 4^
Appétit de boire ^démanger perdu. 64
Appétits ejlranges. 6$
Appréhendons fortes (^véhémentes. 581
A rmee dcsfaiâe par froidure extrême. i ^
TABLE.
Armée grunderuinte pluspxr elle me/me , queparfes ennt^
tnù. ^oj
Armée nnuale desféitepar U feif. 5 ^4
Autre mrmee riAuaU desfAtiU par les njents ér plttyes. ^ 8?
Autre armte nauale , fttrnommee l'IrtnincibU , dijftpée en
moins de rien. 59^
Armée trej^uijfa»te dijfîpet, 5 9 î
Armée puijfavite de sfaiiîe. , $9^
Ajf*illant téméraire puni^ ^9
Affopijfement ejirange. ^13
A jlr dogues iudieiaires. 6it
Attentat indigne, puni. ^15
Auftleurs. _ 70
Atianture notable, ^14
Auarice punie 61^
B
B Arhares prudemment adoucii» 78
Blajphemutcurs punis. <î37
HLffure à la tefie, fuiuie d'ejîr^n^es accidents 6^0
^lejfures Ugerts, neAntmoins mortelles. 7P
^lejfure pertlleuje à U langue Mextrement guérie. ^41
Jîléljiires guéries. 80
C
CAs eflranges , horribles , ^ extrêmement pitoya-
bles. 108
Charité maternelle. 100
Cœur humain, ^ fa taye. 64^
Ce nibat hardi ^ nonjanglant. 64 4
Combats fur mer. 6^%
Comètes. 115
CompAJf.on véhémente. 117
Con'eptions ^ enfantements auant aagi, îi8
Confiance pei iUeufe. 6 5 Z
Confcience. l\9,& 660
Corne il oportun mefprisé, fuyui de terrible ruine. . 662,
Cmferuation meruetUeufe, ^ c»mme miractéletéfe, 66^
CoK fiance en aduerfité. 679
Continence mtmorahU, 61"). notable. 113
Çontiuljiçn efirange, ^86
Cffrfgé
TABLE.
Cârne au front d'vn homme. ^ ^^
Corps hum^n pétrifié. 12,4
Correatonexcejfmeyé* cruelle.cftufe de tres-grfinimfil. 189
Cruels exterminez iz*^. punit ^9^
Curiojitétnefchmteé* detefifiblecht^fliee. 69^
DEhy dangereux. 7'^o
Deiiurmces notables , éf* p^^ moyen, extraordinaire.
Beliurances. 7oi
Déluges dangereux. 7^4
jiutres déluges. lo%
J>0moniaques. Exemples de àiuerfes illupons de Satan. 14 J-
ï>€nt d^or en la bouche d'vn ieune enfant de Silefie, J6o
Dejejpere^ K^i
De/ir infâme chajîté. 7^7
Diffoluttons punies. 7°^
Dormeurs merueilUux. i7?
Duel. 7op
ETficace ejlrange de Satan. i?^
Effort audacieuxjinutile éf perMleux, 7 15
"Embrafement de feu. 185
"Embrajemens de feu. 7^4
Enchanteurs ^ magiciens punis, 7 » ^
"Enfant de pierre. 2-2,?
Enfant efleué parmi les loups. T^-o
Enfantvif très petit. 72-4
Enfans. Cas mémorables auant ^tofi apresh naiffance
d'aucuns. i8<?
Enfans ingrats ^ peruers. iif
Enfans miraculeufement conftruex., 2. 08
Enfans morts au 'ventre de leurs mercs^^ mis hors par mer-
ueilleux moyens. 198
in/mh^n nombrit & A'vn§ venir te» W
TABLE.
J.nftins nonrr'uptttmi les loups. zit
Er;fjns prat/tquez. zii7
J-nfans produtti à diuerfes fovi , demefme groffeffepar fuper-
fecation. 19^
Hnfimtemcnt CAfahen. 114
JLcfuiuoqtte pertUeux. ^ 7if
"JEfnteute de Flandres . 716
JEfmeuteJedttieufe à caufe dexations. z^i
Hj} rcu ue notable. 719
JE-lpriffamiiùr. 7jo
HJprusdiuers. 754
ILfprits prodigieux. 234
t-jiiiscelicsdefeH. x^6
TP Atnines.
731
XFantaJliques.
.56
I-'aiteur particulière au hefgin.
7^?
^cmrfje ayant quatre tetins.
7<Î4
Iremmes deuenues hommes.
»37
Ttlleefiimee enceinte,mai4 vierge,^ comment guérie.
7<îr
fille -vrifiantpar le nombril guérie.
765
ilux de fang.
z66
Torce corporelle.
259
Tohldre.
141
Toaldres, orages, tourbillons ejlranges*
76i^
Trttyeur extraordinaire.
777
Trenetiques meruetUeux.
78^
Tureur horrible.
27^
Fureur du mMin ejj>rit limitée.
G
/^>Eants.
* ^jGracieufeté heroique.
7i?o
^46
791
Goûteux garenti.
7Ç1
Cuerijon extraordinaire.
Z50
iJuerifons tno^inQas.
803
H«-
TABLE.
H
HArangueursmtuts. 8oÇ
Homme auant l'ange. ^ î >
Homme aymt du ImB taux mammeU.es, 808
Homme merueiUcux Soy.robufte. ^<^^
Hydropijie guérie en plufieHrsferfonnes. So 9
Bypocrifie punie. ^ • ^
IAloufie horrible. ^55
Imagination. "^^
Impietéreprimee. ^^
Impieté ridicule ^deteflable. °^^
Imagination 'véhémente. ^^^
Impojîures <^ impojleurs ejîranges. 2.65
Imprécations ^ paroles de^iteujes ^ bla^hematoires. 282,
Inhumanité punie. ^^*'
Inondation terrible. 814
lugemens précipitez., i p; .remarcjuables. ^^^
2uges,non iuges,mais tres^iriiques ^ detcjîabks, 3 ^r
lujnemeruetlleux 'y09
Jujîice.^n. redoutable ^ ^re5 i«/?e rf« lugefouueraiuyfur Sa-
tan.e (^rit meurtrier , ^- fur fes injîrumcns ^ ndherens,
Hz6,
L
LArron m erueilleux 512^
Léthargiques ^ au très tels mttlades ajfopi^ , gele:^Jlupi''
des, ^tranfis.
Libéralité.}! ^.mémorable. SjJ
X-iberalité ajfaillie, de fendue, opprimée. 845
M
M
Aladies eftrangesefirangement guéries, ^60
Malcadfic,malf(icré,malde tern* 8$i
TABLE.
Manage cUndeflin ^ ttop inefgal tref-tnalheureux. 5 1 7
Mariages cUndejUns, malheureux. U 8
Mmudtjfons detejîables. 315
Mtlanchûlique werueil/eux. 87 1
•MeUncholi^ues.hjfenfer/renetiqueSyfurieux , «»r/rgfz,,c3'^-
5x4.
^tmoire perdue ^retrouuee. 55^4
Mtre fertile en ligna ilfued:eUe. 35 (î
^«/rtf wrre, 'Voyant fe s defcendunts iu/quau 6. degré. 5 5 7
Af rt-^j ^ en fans prefiruez. de mort. 5^ 7
JWrrf ; 'Vigoureufes. j j 7
Mejpris de douleur. 5^ 8
Meurtriers chaJliez.S7j. defiouuer/spar notables moyens (^
punU. 3ç^
Mmemerueilleufe. 88^
Mocquettr infâme chaftié. " 8S5
Mocqueursmocqutr. 575
Mortpreueue ^ prédite , fans potiuoir eftre enuiecypar vt^
terrtble iugement de Dieu. 089
JVftrrr remarquable. ^7^
^itîilattontndtgHefHrieufe. ^9?
N>^/«rtf extraordinairetJunt foulages. 987
Naturel changé. ■^'j-j
Naturels merueilleux, 578
iJaufrages. 898
i^onchalance punie, 910
JUûpces douloureufei, 3 85
OCcafion mef^rifee fait perdre la viâoire)ô'U vie 911
Orages. ^12.
P
PjiiUards punis. ^85
Parricides ptruis, 913
fajfionviijimmte, pt4
TABLE.
Talfiùns ve^mentes de dtteilje toye, de ialotifie. depeur , de
trijiejle, à'C. 389
felerin Turc merueilleux» 41S
ter jUre puni. 410
terfonnss qui viumt long temps ftms hoirey ni manger. 4x1
Tejle , jieAu très- redoutable. pzp
Filîards cruels tha/itez. 93Ç
J^laye merueilleu(e. 93 S
Tluyesprodigieufes érditterfet 43 j
Totfonsy veninst c^ leurs ejfeéis. 5^3 7
TrediHion. 437
Frejdges (^ vifions notables, ^44
Prefomption peu heureufe. ^947
Frifonnier deliuré. 434^
Troces vuidépar moyen extraordinaire. 440
Tronoflications dangereufes. 44I
Proscrite mondaine renuerfee dejlrange façon* 048
Protecîton excellente. ^So
RAnçon merueilleufe. 441
Kapt malheureux. ' 442,
Râtelle du corps humain^f^ diuers accidens Vieeux. 9 5 j
Rauiffettrs exécrables chajltez, de vaillante (^ herfisfue
main. 44^
Jiauijfeurs punis. ^yo
Hecompenfes dénature. 44^
Reflux merueilleux. ^^q
Remède trouué inopinément à vn mal contagieux ^ ex*
treme. ^j^
Rejiftancevaleureufe. ^7^
Refolutiongenereufe, merueilleufe, 0> mémorable, 45 1
Rejolutions martiales. <,y j,
Rejfemblance. '^^£
Rttraicîe remarquable. 084
Reuoltitions notables. çj^I
Richejfes d'or ^ d argent mejprifees. 45 4
Ruine pitoyable. 4^^
TABLE.
nuines ejlr anges. 4^^
Rufcs de l' esprit S erreur. 5^8
SAecagement horrible. looi
Saignée meruet^leuje. ^61
Sautieg.trde tr tuflice notable. I08
Sauueg'iriie mcmorable. loo^
SeMtt9ris en Efpagne (^en. Sicile. 101 r
Sépulture dcfirce. 465
Seruitetir courageux. lo^yr.fideU. 10^4.
Seruuude infime ér cruelle^ emtee par tnoyensmerueilleuxy
1035
Soldat courageux \o^6 fmuémiraculeujement. 1057
Songei extraordinaires. I j8
Sorcelleries , tmpojiures ej> ejlranges illufians de Satan def-
couuertes. 464
Soulagement notable. 10^6
Sueur jangUnte. 47^
Suffocation de matrice. 1047
Super (iitions. . J050
Sympathie mémorable. le 5 j
r
TEmerité miferable. 47?
Threjorstrouue'^h4tine:^perduS)recerchez en vain ^
perilUufemcnt. 4?^
Tourmente mont agneuje. 1054
ZTraiJîres punis ^St
Tremblement de terre. 4X5
Traijlres punis losf
Tumeur merueilleufe. Io5j
Tumultes ejlranges des payfans en diuers endroits d'jilema-
gne. lc6j
Tumultes Anabaptifles. *. 1075
VAillattce. 4Pi-io74.
Vanité. ^ozfurieufe. 5f^4
F4.
TABLE.
Vanité du monde magnifiquement reprefentee.
JOi
Veilles du tout extraordinairei ^ prodigieujes.
lOÇT'
Vengeance horrible.
507
Vers au corps humai». $ o2.au nombril..
lo5>>
Viâoires,
lo9i
Vieillards.
5-?
Vieille jfe rajeunie.
52.r
Villes brufiees. ,
iior
Vin gardé.
1104
Violence infâme ^ cruelle chafliee.
1104
Vif ions ejîranges, effroyables ^ horriblei.
530
Vtfions merueilleufes en l'air.
549^
Voleurs chafiiez..
Y
\\o6
Y
Vrejfe. Turongnes , caufe de grands maux , punis,
IIIO
HISTOIR E S
ADMIRABLES
ET MEMORABLES
de noftre temps. .
Accidens mermiUeux en vneflle.
Orneille Gemme , ProfefTeur
en Médecine à Louvain à la fin du
4.chap.de fon z. iiv. de l'œuvre inti-
tulé di natuTA diuinU chara£îerifmis,
recitevne admirable hiftoire bien au
longjacjuelkicreprefenteraiicplus
fommairemcnt que ie pourrai. Vne
ieune fille demeurant(dit-ii)en mon voiiînage, dont le
père eftoit tonnelier , aagee de quinze ans , de bonne
confticution de tout le corps^belle & de bon elprir^ayât
vn vifagemeflé d'humeur melancholic & fangum^nom-
mee Catherine Gaulthier , vint à eftre afi:oiblie & affli-
gée de diuers accidés. Enuirô le mois de lanuier de Tan
1^71. fes flueurs s'auancercnt deux ou trois fois : mais a-
yans efté arrcitees incôtinent par la violence de fa ma«
ladie,lui engendrèrent vne fort grande lafTitude de tout
le corps.On eut foupçô qu'elle auoit elle empoifonnec
par vne certaine femme mal famée , laquelle lui domia
vne pièce de gafteau. En le mangeant elle lentit queU
que peine à raualler.Depuis,elle commença de tomber
en àcs douleurs eftranges de poidrinc & d'eftoraach , X
s'amaigrir , à vamir par interualles,à perdre Tapperit , à
fcnt^r des çowrjooyeraeas d^ teite, & auçres acadcns ^ui
A
X mjioires admirables
lourmenrcnt les femmes enceintes, notamment au ^.9L
7. mois. Car cnuitoh la mi-Iuin les fieurcs cachées fc
dclcouurircnt, aucc alteration,erpecc de conuullîon, &
de fyncope. La douleur vint confequemmêt à croiftre,
C\ que comme furieufc elle ne cefToit de trâcaflcr, deue-
nant enflee>pafle,& trauaillee de courte halefine: puis a-
prcs tellement prefl'ee que la foce lui dcuint toute noi-
rccommc d'vne pcrfonne qu'on eftranglcroit. Elle e-
ftoit tellemét agitée qu'a peine quatre hommes la pou-
uoyent ils tenir , car le jettant du lid en terre , il n'y a-
uoit forte de conuulfîon qui no la tourmentaft. Telles
tortures ayans continué par interualles iufques au neu-
fiefmc mois, elles fe renforcèrent merueilleufement : &
lors commencèrent fes parens de recourir aux Méde-
cins. On m'appella le premier pource que ie demeurois
au voi/înage. Mais n'eftant lors au lods, on recourut à
M. Beaufard, lequel confîderant cefte maladie, iugeû
qu'elle eftoit tourmentée de vers. Il auint en ces entre-
faites , après de terribles tourmens , que la vigueur de
Nature, s'esbranflant comme de foi-mefme, pou fia par
le fondement vne anguille toute viue , laquelle me fut
incontinent apportée. C'eftoit vne vraye anguille, plus
groflc que le poulce, d'vn pied & demi de long , auec la
forme & fes parties entières. Trois iours auant que for-
dr, &la fille &ceux qui luy aflîftoyent ouvrent au ven-
tre d'icelle vn grand bruit, comme d'vn fimet clair & re-
Ibnnant. Et en fortant la fille declaira qu'elle auoit fen-
tï que Tanguille , fortie la tefte deuant , s'eftoit retirée
en dedans, puis eflancee dehors impetucufement , Ôc
comme tout à coup. Cefte anguille meilee parmi les
cxcremens y demeura long temps comme amortieimais
jettce en vne cruche pleine d'eau,elle le remua fort. A-
pres cefte vuidange , les douleurs extrêmes qui l'auoy-
cnt tant tourmentée commencèrent à s'alentir. Mais
ranguillc, qu'on auoit curée de Tes tripailles, & pendue
en lieu ou les chats & autres belles ne pouuoyent at-
teindre, s'efuanouit en moins de rien, Toft après la fille
fcprînt à vomir vne grande abondance d'eau , laquelle
ie vins voir , & reiicmbloit à de rvriue , d'vn gouft du
tout
cf mèmorMes, 5
tout eftrange, ce difoic la patiente. Ce vomifî'emcnt du-
ra i^.iours,en chafcun defquels elle rendoitplus de 14.
liures d'eau par la bouche. l'atteftc ces choies non par
oui dire> mais pour les auoir veuës de mes yeux; & tou-
chées de mes mains. Et ne fus pas moins cfmerueillé de
voir qu'outre tant d'eaux ietrees par la bouche elle ne
laifloit d'vriner en abondance deux ou trois fois le iour,
fans auoir eros ventre ni enfleure aucune qui aparuft en
tout le refte du corps: aufli ne beuuoit-elle que bien
peu, à fçauoir vn gobelet de vin, ou de bière, ou d'autre
liqueur par iour.Ie lui demandai,fi elle fentoit point de
douleur en Tvn des hypochondres. Elle me relpondit
que le cofté gauche lui auoit toufiours fait grand mal,
depuis cefte vuidange de Tanguille , & auparauant
qu'elle y auoit fenti-quelque pefanteur.-mais depuis,ce-
la eftoit acreu de morfures & pointures afpres;qui la fai-
foyent crier quand ie prelTois vn peu du doigt defTus.
Apres tant d'eaux vomies, elle commença à ietter par
la bouche des toupeaux de poils, les vns longs comme
le doigt, les autres plus, & quelques vns moins , tels
qu'on les void tomber à des vieux chiens: en telle quan-
tité dans quelques iours , qu'il y en auoit pour remplir
des eftœufs à douzaines. Elles les reiettaauec grand
fouleuement de cœur & beaucoup de peine. Et fur vn
foir, elle tomba en merueilleufes pafmoifons. L'ayant
trouuee prefque femblable à vne perfonne qui feroit
fur le point de rendre l'ame , & prenant foigneufement
garde à toutes chofes , ie l'apperceusjde couchée qu'elle
eftoit fur fa poitrine, fe ietter de telle viteflfed'vn cofté
fur l'autre , que fî on ne l'euft retenu bien foudain , elle
donnoit de la tefte fort rudement contre la par oy, ou
contre IVn des piliers de fon lid. Elle tenoit les mains
clofes & ferrées (î fort, qu'il eftoit impoflible les ouurir.
Quelquesfois elle fe donnoit du poing fur la poidrine
de telle roideur, qu'elle fut en danger defebleflerà
mort.Ce paroxj'fme duroit depuis 7. heures du foir iuC-
ques à 9. & lors elle ne conoiifoit perfonne. Souuen-
tcsfois, comme en futfocation de matrice, elle deuenoic
roerueiUeufçm©ut rouge , paroiffoit fort laiTe & trauaiJk
4 Hiftoires admirables
lee, aucc quelque comincnccmcns de fieure lente. Vne
fois ou deux on lui vul quelque efcume autourdela
bouche. Et vne autre fois, coimne elle eftoi tau fore de
fon accès , il lui auint de fe prendre foudain à rire i gor-
ge defployee, puis incontinent à pleurer tendrement.
Eftant reuenue à loi,& incontinent retombée, en ex-
tafc aflcz long, elle commence en vn inftant à parler,
ne plus ne moins que fi elle fe fuft adreflce à Dieu , &
tendant les doigts vers le ciel dit ces mots en fubftance,
O grand Dieu, puisque ta bon té eft fi grande, & in-
croyable, iufques à quand faudra-il que nous demeu-
rions ici bas?Quâd me rauiras-tu de ce monde, afin que
ie iouiflTe de toi?Celadit , comme en fe refueillant , elle
s'adreflant à ceux quiTenuironnoyent, Quieft-cede
vous (fit elle) qui m'a fait ce tort,de.me rappeller en ce •
champ de mirere,& en la prifon de ténèbres, lors que ie
repofois fi fouefuement,&: me iouois es plus beaux iar-
dins qu*il eft poflible d'imaginer? le ne péfe point quV-
ne fille idiote & ignorante, comme celle-là, ait peu dire
telles paroles,qu*en extafe. Cependant furuenoyent en
quelques vomi(remens,de grands Acquêts de poils auec
beaucoup de matière blanche , & efpaifl'e comme boue,
par fois telle que de Texcrement de pigeon ou d'oifon.
En ceft amas d'ordurefe voyoyent des petis morceaux
de bois, & des lopins de parchemin. Peu après voici vn
autre vomilTement de matière noire comme charbon,
vous eufliez dit que c'eftoit pure cnae,ou du fuc de fei-
che> ou pluftoft des charbons puluerifez & méfiez en
eau: ce qui continua bonne pièce de temps, deux ou
trois liures par iour : quclquesfois auec tant de poils
blancs, longs & durs, qu^ily en auoit pour faire vne pe-
lote. Au bout de deux iours^elle vomit du fiing tout pur,
comme dVne veine ouuerte , enuiron deux hures. Ce
vomifiement de fang fur fuiui dVne liqueur noiraftrc
& comme teinte en antimoine , au poids de cinq ou fix
îjures par iour. Telle vuidange monftrueufe dura vne
fèmaiuô entière, reuenant toufiours à certaine heure
préfixe : & lors cefierent les accès <f Epilepfie , dont elle
t(ioit baauc tous ks iours , qui continuèrent néant-
niomç
C^memonhles. 5
moiiT; quelque temps, de trois iours Tvii , & finalcmenc
de fept en fcpt iours. Cependant elle iettoit encordes
poils, non pas tantque decouftume: mais plus noirs,
plus courts, & qui fembloyent auoircfté hachez fore
menu:& parmi tout cela vne humeur vifqucure,& com-
me de la boue efpaifle.
Enuiron la mi-Septembre elle vomit de grandes pic-
ces de parchemin, rcfifemblantes à la taye efpefle & char-
nue du corps humain, d'vne demi paulme de long. Il en
vint d'autres apres,plus tenues,mais toutes noires.Fina-
lement encores d'autres fort déliées, mais tr es-fer mes, &:
entre icellcs trois qui auoyent chafcune plus dVn pied
de long, faites enlozenges, auec des figures & traces
merueilleufes. Apres ces peauxjs'enfuiuit vn nombre in-
nombrable de pierres , qu'elle iettoit par la bouche tous
les iours reiglément à certaine heure au foir , auec
grands bruits & pafmoifons, telles qu'on les oid es mu-
railles qu'on abat , les vnes efpailTes, les autres cornues,
inefgales en forme , couleur, gro fleur : toutes petites, &
telles neantmoins qu'on penfoit qu'à tous moments la
fille en feroit eftranglee : il y en auoit aucunes couuer-
tes de chaulx , & cimentées diuerTement enfemble, tel-
lement qu'on euft proprement dit qu'elles auoyent e-
fté arrachées des parois. Vne fois en ma prefence elle
vomit vne pierre cornue , de la grofleur de deux chafta-
gnes. Cette pierre lui demeura plus dVn quart d'heure
en la gorge , & durant ce temps eUe demeura priuee de
pouls & de refpiration , tellement que lui mettant fur
la bouche vne légère plume, icelle ne branfla nulle-
ment ; les pieds & les mains lui deuindrent firoids , le
corps aufli roide que fi c'euft efté vne ftatue. Penlàric
qu'elle fuft au bout de fa courfe, & oultré de douleur à
<auie de tant de miferes, ie fortois de la chambre, difant
que c'en eftoit fait-.quand la mère me t'appela foudain,
affermant que fa fille bougeoit & ouuroit les yeux. In-
contment que ie fus rentré , elle ietta hors cette pierre
auec vn grand effort : ie la vis fortir,ie l'entendis cheoir
auec bruit dedans vn bafTm > au grand eftonnemenr de
moi & de tous ceux qui cftoyent; en la chambre.A TiA-
A 5
^ Hiftùires admirables
fiant mcfmcelle cracha vn cfclar de bois de la lonçucuf
& grofTeur du pouice, mais auec moindre difficulté que
la pierre : item quelques poils noirs,mais peu, Suruint
puis après vn autre accident,prerque incroyable,& dont
la fille faillit i eftrceftranglce.Car elle vomit vn os fait
en triangle, folide au dehors, creux & fpongieux au de-
dans. Le lendemain forrirent des olfelets, des dez, des
dojgtiers, àcs petites roues de dm crfes formes & pro-
portions. Parmi tout cela l'on voyoït des pierres & des
poils,puis d( s pièces de verre & de cuiure.
Corneille Gemn^e fait vn grand récit des remèdes
qu'il y appliqua, & maintient qu'il y auoit en partie des
caufes naturelles, en partie des impoftures&illufions
du malin efprit ; qui fut le principal agent en ces acci-
dens que nous auons reprcfcntez. Cefte hiftoireeft
dcfc-ire par Marcellus Donatus au i. liure de fes admira-
bles hijloires medectnales,chaj>.j.
M
jicctifationfatijfe grmement réprime^.
Iulian Taboue , Procureur gênerai du Roi au
'arlementde Ch3mberi,irrité de quelques remon-
trances qui lui furent faites par la Cour, fc mit aux
champs , & hazarda Ton honneur par accufation , qu'il
cntreprint, & commença contre melTieurs Maiftre Ray-
mond PelifTon Prefidcnt, lean de Boiflbnné Preftre,
Louys Gauflerant dit du Rozet, lay , Craffins, & autres
ConfeiUers en ladite Cour, leur mettant fus vne infini-
té de corruptions & crimes de faux : & iuiques à foi in-
fcrire, tant au grand Confeil , qu*au Parlement de Gre-
noble,& ailleurs, fur Tinpugnation de treize pièces pro-
cedans defdits Prefîdent PelifTon & ConfeiUers fufdits.
La première eftoitvnarreft donné audit Parlement de
Chamberi pour le Comte de la Chambre du ii. May,
iJ59.rautre & féconde , Tarreft pour Maiftre André PÛ-
Ict du i^.Iuin, audit an. Autres deux arrefts pour TEueC
quû de Morienne , le i9.Mars,& xo. Septcmb. l'an 1540*
h 5.1e5 remonflrances datées du ii.i3.&i8.Ianuier, 15:41.
faites
^ memorahy. 7
faites & prononcées audit Taboue le t. Fcurier 1^41. la
fîxiefmc , vne commifTion de ladite Cour de Chamberi
audit Boiiîonné du 6.Feurier if 4i.la feptiefine , les arti-
cles enuoyez audit BoifTonnéile 15. Feurier 1541. la hui-
Aiçfn^e, autres remonftrances faites audit Taboue, &
Tarreft du ij. Fcuriçr audit an. La 9. vn arreft donné en
ladite Cour le 23. Décembre audit an. La dixiefme, vne
commifTion baillée à maiftre Nicole delà Chefnayc
Côfeiller en ladite Cour. L'onziefme , vne mifliue à lui
baillée & efcrite fous le nom d'icelle Cour à Mon/îeur
le Chancelier de France,du i.iour d'Auril 1J4Ç.L3 dou-
2iefme,vne refponfe faite par les gens tenans ledit Par-
lement deChamberi le ly.Decembre iy4i.aux aduertif.
femens enuoyez au Roy par ledit Taboue, dénommez
au procesjfur les cinq points.La 13.& dernière, vn arreft
donné en ladite Cour le ij. luin Tan 1^40. au procès
d'entre le Procureur gênerai du Roi , & le Seigneur de
rEfchelIe. La matière rapportée au Roi, 8c trouuee ar-
due , & d'importance, pour la grauité du fait & des per-
fonnes , fut commife au Parlement de Bourgonene à
Dijon , où lefdits Prefîdens & Confeillers (e rcncGrenc
prifonniers, & Taboue pourfuiuanï. Apres le procès
criminel & extraordinaire contre eux feit, furent don-
nez plufîeurs arrefts diffinitifs. LVn & premier du i. de
May 1551. contre Craffins Confeiller, que Ton crouuoic
le moins chargé , qui fut neantmoins condamné à lîx
cens liure?» d'amende au Roy , & ioo. liures enuers Ta-
boue : fufpendu de fon office pour vn an. Tahoué lors
plaida de grand apparat , prenant, fuite des propos de
Moyfe , lofué , & autres , pour remercier Dieu de la \u
ôoire qu'il voyoit lui auenir,tout ainfi qu*auoycnc fait
(drfoit-il) les anciens peres,des viftoires que Dieu le^ir
enuoyoit:commença & conclud fa harangue par le ver-
fet de Dauid, Hu ejl dies quam fecit Dominup, ^e. Mais
le pauure homme,ce faifant,chanta l'hynine du Cygne.
Ledit Craffins fe tint à ceft arreft , & ne s*en voulut rcC.
fentir.Lc deuxiefme arreft fut du i9. iour de Juillet at*-
dit an 155^. aontre ledit Pcliflbn Prefident : par lequel
fat dit , que les arrefts y contenus Çc impugnez par ip*
A 4
s Hijlûires admirables
bouc faits par ledit Prefidcnc , dloycnc faux & fauflc-
nic'ncfabriqucz.-declaira ledit Prefident incapable de te-
nir iamais office Royal , & le condamna à crier merci à
Dieu, au Roi, & à Iurtice:& en dix mil liures d'amende
au Roi, & deux mille à Taboue, fes biens confirc]uez:&
à vTer fa vie en tel lieu qu'il plairoit au Roi ordonner.
La folennité de la prononciation & exécution fut , que
ledit l^refident , perclus de la moitié de fon corps, vieil,
& calle d'aage, de maladies , & d'ennui , fut apporté au
parquer,» huis ouuerts,laCourfeant en pleine audien-
ce,du Challcau de Dijon , où il eftoit pnfonnier , par
deux Archiers dans vne chaire , habillé de taffetas noir
picqué, d'vn faye de fatin noir,vn petit bonnet de foye,
ion bonnet quarré à la main. A ce fpedacle & en fa pre-
Tcnce Taboue déclama. L'Arrell fut après prononcé,&
le pauvre vieillard malaifé de tous poinfts lors con-
traint, à l'aide des mortepayes qui Taucyent apporté,
mit les genoux en terre , tenant es mains vne torche de
cire ardante , pefant quatre liures:cria merci à Dieu , au
Roi,à Iullice,& à Taboue. Furent en fa prefence lefdits
arrcfts lacerez auec les autres pièces impugnees.Ce fait
il requit qu il pleuft à la Cour le mettre hors du Cha-
fteau pour la foibleile & grande infirmité de fa perfon-
ne.Lui fut dit , que la Coury aduiferoit. Le troifiefme
Arreft fut eu 4. lour d'Aouft contre le furnommé Boif-
Tonné Prel]:rc;& Confeiller, qui fut prononcé connain-
cu du crime de faux , & autres mentionnez en fon pro-
ce2,& les arrcfts,remonftrances , & autres pièces declai-
rees faufl'esrpriué de fon eftatde Confeiller: condamné
c\\ l'amende de mille livres au Roi, & quatre cens à Ta-
boué,aux defpens,& à tenir prifon:& pour le delid com-
■mun reiuioyé à fon luge d'Hglife. Le 4.Arreft fut dudit
lour contre Rozet autre Confeiller , tout vn comme le
précèdent, fors du rcnvoy.
Apres tout, lefdits Prefident , Boiflonné & Rozct
Confeiilcis ., ayans en eux fermeaffeurance de n'auoir
failli pour rcccuoir telles peines, fe retirent au Roi :rc-
monftrent , que fi les crimes,dont ils font ainfi condam-
ï^Zjfont prouuez contre eux , ce n'eft que monftre à la
Kepu-
^ mémorables. 9
Kepublique de les voir vivre. Aufli,au cas que par ca-
lomnie de l'accufateur ils fe treuvenc conduits a ce
pointjce n'eft pas lu raifonjouc pour la digniré , dont fa
Majefté les a voulu eftreilluftrez en la fouucraincré de
Savoye ;, Ton fe confie à vn Parlement feul , de peu de
compagnie, pour les dégrader & décapiter ainfi de leurs
noms, fortunes & honneursjfans leur laiflcr que refprir,
•]U! n'eft autre reftec]ue d'vn regret & ennui perpétuel.
le fuppliant d'vne revifion,qui eft accordée & commifc
au Parlement de Pari<: là ou, le tout bien reveu & exa-
mine , fut dit,& jugé par arreft du \6. May,i555. que les
arreftsfufdits du 28.1uiller,&: 4.Aouft,donnez àDijon^
eftoyentnuls,& que le procès criminel, fur lequel ils a-
voyent efté donnez ,(eroitveu& jugé de nouveau,
fans avoir efgard aufdits arrefts. Meflieurs de Dijon ad-
vertis de ceft arreft,à la pourfuite de Taboue , fort effa-
rouché de ce commencement, viennent au Roi , débat-
tent leurs raifons, fouftiennent leurs arrefts, remon-
ftrent louverture faite pourTimportunité des crimes
d'importance , & pour abolir la fouveraineté de Tes Par^
lemcns.Ils furet bien ouys avec ledit Taboue alléguant
nouvelles chores,& n'efpargnant aucun point à defcou-
vrir,par où il conoifloit pouvoir amender fon fait : &
mefmes que Taccufation par lui faite eftoit roufiours
conduite en qualité de Procureur General du Roi , re-
ceué& non jamais réprouvée :& partant qn'ilne de-
voit eftre condamné aux defpens , dommages , & inte-
refts,tout ainlî qu*vne partie privee:ores que ladite ac-
cufation ne fuft lî bien fondée qu*elle eftoit. Aucuns de
Meffieurs du Parlement de Paris , qui avoyentafllfté à
"f-^^eliberation dudit arreft de nullité , font mandez,
vienent,& font ouys avec ceux de Dijon. Apres tout,eft
donné arreft au privé Conicil du 7. Mars, i^çf, par le-
quel eft dit que ledit arreft du i5.May , fur lefdites nul-
lirez , fortiroit fon plein & entier efteft ; & pour procé-
der fur le prîncipal,les parties renvoyées en ladite Cour
à Parisjpour eftre jugé en la prefence d'vn Prefident, &
deux Cohfeillcrs d'icellc Cour,nommez par ledit arreft,/
10 Hijloires admirables
& trois autrc<j Confciners ayans afllfté au ingcmen*^
dcfditcs nullités , trais Confeillers au. Parlement de
Dijon nommes par ledit arrcll , & trois autres de ladite
Cour de Di;on ayans affifté au iugcment donnécn i-
cclle contre ïcÇàn^ accurez,& de Ç\x Maiibes des requc-
ftes ordinaires du Roy , quiferoyentpar lui choifîsdc
douze, dont les parties feroyent tenues conuenir , pour
procéder au iugement dudit proces,ainfi qu'il apartiçn-
draparraifon. Depuis, &parplufieurs & réitérées let-
tres patentes du Roi,du î8. d'Auril, \6. & z8. Iuillet,&
iS.d'AoulM'an 1^56. interinees par arreft du io. luillet,
7.& ly.d'Aouft, furent nommés & arreftés les Prefident,
Maiftres des rcqueftes, Confeillers, parlcC^uels ledit
procès deuoit élire iugé. Le procès mis fur le bureau.
Taboue, craignant ce qui depuis auint, pour fortifier
Taccufation par lui conduite, ou bien pour cuiderem-
pcfcher la vuidange,met en auantnouuelles charges,
dont n'auoitau premier procès efté parlé.Ce que les ac-
cu fés empefcherent. Là defrus,le Roi, par fes lettres pa-
tentes du 15. Septembre audit an, fait déclaration qu'en
faifant le renuoy audit Parlement de Paris, il n^a enten-
du que ladite Cour conuft d'autres cas , charges & cri-^
mes, finon de celles pour lefquelles les accufez avoyent
efté condamnez audit Parlement de Dijon , & dont ils
s'eftoyent plaints au Roy , fiuf au Procureur General,
où il cognoiftroit par U vifion dudit procès iceux accu-
fès chargés d'autres crimes, d'en faire pourfuite, ainii
qu'il verroit eftre à faire. Outre ce eftoit mandé par lef-
dites lettres de faire droit fur les répétitions des deniers
taxés audit Taboue pour la pourfuitte dudit procés,lin-
Ç\ que deraifon.Lefdites lettres font par arreft du 18. Se-
ptembre interinees. Les accufés font derechef intcrro-
gués & ouis par la Cour fur les casa eux impofés. Ta-
boue receu à faire uouuelles produdions , & bailler ad-
uertiflement : lefdits accufez à contredire. A la fin ceftc
matière examinée en fi bonne compagnie, futiugeepar
arreft,duqucl fera ici mis la difpofitiue du didon qui eft
telle que s'enfuit,
La Cour en failànt droicfè^fur le tout , & fans avoir ef-
gard
^ mentêrâhles. ii
garci à la qualité de Procureur General en la Cour de
Chambcri, par ledit Taboue pnnfe efdits proccs,qu'en-
tant que touche les faulFetés par ledit Taboue préten-
dues contre ledit PelifTon , pour raifon des arrells don-
nés en la Cour de Chamberi les ii.May,i4.Iuin,i559.25.
luin , 1540. veu les remonftrances dattees des n.i5.& \t.
lanuier, 1^41. faites & prononcées audit Taboue le i.Fe-
uner 1541. la commifTion adreflant audit le 6. Feurier,3c
articles à lui enuoyés le zç. dudit mois audit an 1542.
autre commiffion adreflant audit delà Chefnaye , &
lettres miffiues de ladite Cour de Chamberi du i. Auril>
1^4^. par lui portées audit Chancelier de France : ref-
pôfe faite par ladite Cour aux t. & 3. articles des aduer-
tifTemens appelles les cinq points.Semblablement,quât
es faufl'etés pretédues par ledit Taboue contare lefdits de
Boiflonné & du Kozet , pour raifon defdites remôftran-
cts datées des 11. 15. & iS.Iâuier faites audit Taboue le i.
deFeurierTan i54a.& de ladite commifTion adreffee au-
dit Boiflonné le id.iour de Feuiier,& articles à lui enuo-
yés, le 15. defdits mois & an , & des remonftrances & ar-
refts de ladite Cour de Chamberi du x3.Ianuier,i^4i.dc
la commiflîon décernée audit de la Chefnaye ledit i,
iour d'Auril , & les mifliues à lui baillées au nom de la-
dite Cour dudit iour 1545.& auflfi des refponfes faites au
Roi par icelle Cour, fur les i.&3. articles defdits aducr-
tifTements appelles les 5. points:Ladite Cour a abfous &
abfout lefdits Peliflon, Boiflonné, & du Rozet refpedi-
uement defdites prétendues faufletés , & a condamné
& condamne ledit Taboue pour ce regard es defpens
defdits procès , dommages & interefts defdits Peliflon>
Boiflonné, & du Rozet : lefquels dommages & interefts.
ladite Cour, pour aucunes caufcs à ce la mouuans, a ta-
xés,& moderésjà fçauoir,enuers ledit Peliflon à la fom-
me de deux miUe liures parifis , & enucrs ledit Boilfon-
né à la fomme de huid céts liures parifis, & enuers ledit
du Rozet en pareille fomme de huift céts liures parifis,
& ce outre autres defpens, dommages, & interefts à eux
adiugés par ledit arreft du i^.May,i55Ç.Pourle payemét
dûfquels dommages & interefts ledit Taboue i;^endp<
^T2 Hïfl cire 5 admirables
piilbn. Et^uantau furplus defditcs accufatiôs & autres
cas, &crimesimpore7. par ledit Taboue contre Icfdifî
Pelifloii, Boiflonné, ^àw Rozer, defqucls la conoifîan-
cc a cfte attribuée à ladite Cour, elleaicclles parties
niifes & met liors de cour & de procès , fan»; detpens,
dommages, & interefts , dVnc part & d'autre , & neant-
inoins a referuc & referue au Procu'çyr gênerai du Roi,
de loi pouruoir contre lefciicsarreftsdu ii. May, 1539.9.
Mars & zo. Septébre 15 4'^- donnez au profit defdits Cô-
te de la Chambre, & Eueicjue de Monenne, par voye'de
nullité, ouautremcnt, ainfî qu'il verra eilre a faire par
railbii : & auldits Cote de la Châbre & Euefque de Mo-
riennc leurs defenfes au cotraire.Et pour réparation des
faulfes & calomnieufcsaccufationsinftitueesparicelui
Taboue contre ledit Peli(ron,Boiironné & du Rozet,&:
autres nialuerfations refultans tant des anciennes que
modernes produdions faites audit procès , ladite Cour
a condamné ledit Taboue a faire amende honorable au
parquet d'icelle, iour de plaidoyé &au4ience,à huis ou-
ucrts, nuds pieds & tefte, à genoux,en chemife, la corde
au col^tenant en fcs mains vne torche de cire ardante du
poids de deux liures : &illec dire, &declairerà haute
&intenigible voix, quefaufl"ement,malicieurement,ca-
lomnieufement, à tort,& contre vérité, il a chargé & ac-
cufé lefdics PelilTon , Boifionné , & du Rozet, defdites
prétendues faufretez,crimes,& délits, dont il s'en rcpét,
& en requiert pardon & merci à Dieu , au Roy, à lufti-
ce, & aufdits Pcliffon , Boiflonné, & du Rozet. Et a or-
donné , & ordonne, que les remonftrances & doléances
par ledit Taboue prefentecs au Roi, enfembleles'mo-
yens de faux parlui bailles,:î l'enconn-e defdites pièces,
Icront lacérés &rompusenfaprerence : Sccefàiteftre
mené enTclfarquedeflus, conduit par Huilïîers de la-
dite Cour, furie Perron & pierre de Marbre citant au
bout des orands degrez du Palais , & illec faire pareille
amende honorable, & dudit lieu mis en vne charrette,
6c conduis au T*illovy des Halles de la ville de Paris
par rcxccuteur de la haute iuftice, pour y cftre tourné
tiois iour>, & après ramené a la Conciergerie èMàÀt
Palais.
O* mémorables, 13
PâlaisXt outre ceh.a condamne & condamne ledit Ta-
boue à faire amende honorable au parquet & audjencc
de la Cour dudit Parlement de Chamberi,ou il fera me-
né fous bonne &: feure garde. Et fi l'a condamné & con-
danne en deux mille liurcsparifis d'amende enuers le
Roi , & à tenir prifon audit lieu de Chamberi iufques a
plein & entier payement defdites amcndes,d€fpcns,dô-
mages, & intérêts adiugés , tant au Roi qu'aufdites par-
ties: pour, ladite fatisfadion & payement faits,eftre per-
pétuellement confiné audit pays de Sauoye,ou autre tel
lieu de ce Royaume > qu'il plaira au Roi ordonner. Et a
dcclairé & declaire fes autres biens confifquez à qui U
apartiendra, lefdites amendes, defpens, dommages, &
inteieftspreallablement payez & acquittez.Et,pour au-
cunes caufès & confiderations à ce mouuans , ladite
Cour a ordonné & ordonne , que ledit Peliifonfera
mandé en icelle pour Lui eftre faites les remonftrances
par elle ordonnées, & auquel Peliffon la Cour a cu-
ioint de garder & faire garder en ladite Cour de Cham-
beri les ordonnances Royales, & defenfes d'y contreue-
jiir, fur peine d'amende arbitraire.Donûé en Parlement
i Paris le ïi. iour d'Oûobre , 15c (f.
Tous ledeurs de bon iugementdoyuent prendre ce
fait fans charge des luges , qui l'ont defpefché d'vne cô-
trarieté,qui eft fi grande, qu'il eft impolTible d'en auoir
iamais entendu vne pareille. Mefîieurs de Dijon s'at
ièuroyent en opinion de bien faire fans dol& fans ma-
lice.Mrs.de Paris, à leur couflume, mirét la main, qu'ils
ont fupreme & ferme , fi auant , que peut eftre, pour a-
uoir conu quelque chofe de nouueau faite, en elladuc-
nu ce que defl'us.Ce n'eft pas à moi,fimple recolledeur,
& qui crains de parler de telles compagnies , d'entrer
es raifons defdites contrarietcz. Suffit d'expofer le fait,
coinme il eil,de parangonnerla grandeur du Parlement
de Paris en toutes choies furies autres. le ne veux taire
ce que l'ai oui dire à vn Confeiller de l'vn des Parle-
ments fufnommez, qu'en la concertation de la iufticc
^s arrefts ainfi contraires, fur vn mesfaift plaidé dc-
Hant le Roi, cim voulut bien enteji^dre tout le fubie^
14 Hljloires admirables
d'iceux , 1 on n'auoit eu de lui & de Ton Confcil autre
refponfc , finon que ceux de Dijon auoyenc iugé félon
leurs Gonfcienccs , & ceux de Pans Icgicimeinenr & eu
iuilicc. Auâr que à^t lailfer cefte matière tant exemplai-
re, pour infinité d'affaires pareils iournellement oecur-
rentSji'aduertirai les ledeurs , de noter en partant la fin
de celle accufation , qui ell vne chaflc où le veneur eft
pris. Ce pauure Aâicon ayant fiance à fu qualité, & s'e-
ûant laille conduire par fes paflrions,en eft venu là,apres
auoir mis plufîeurs grands perfonnages en peinc;car fai-
fant Ton deflein de venir à fa feule vindide , s'eft trouué
aueuglé. Qui eft pour feruir d'exemple à tous,qui vou-
dront entreprendre d'accufer autrui. Il eftoit Procureur
General du Roi en vne Cour fouuerainc,& par ainfi ac-
cufatcur public, & auoir en cefte qualité puillance de
déférer tous ceux qu'il conoiffoitpreuariqucr & faillir,
fans crainte de peine reciproque./.ow»«.^tf delutorib. lik.
X. C. Mais il ne s'cft pas trouué garni des parties requi-
fcs a tel cftat, ains au contraire a efté defordonné en Ces
aftedions, & furpiis en calomnie:auquel cas, fans auoir
cfgard a fh qualité, il eft fubjed a la peine réciproque
comme calomniateur, l.ficautiones. C. ijsquiacc.nonpo.
la où faifant fon deuoir félon la ncceflité de fon office,
5t non autrement, il n'euft deu craindre aucune chofe.
/. montntty c. tit, ^l. PrAtoréiit. §, fi public anus meum. ff.
vi bo.ra. Et de vrai,tout ainfi qu'il eft trefvtile , parles
continuelles plaintes que l'on void contre toutes fortes
de gens rombans en faute , auoir hommes pour la de-
fenfe & conferuation du icpos public, des loix & bon-
nes mopurs,qui accufencles malfaiteurs: il fautaufïî, &
eft neceffaire qu'ip, foyent diligents , fermes, véritables,
bien viuans,&d*intcgrité lînguliere.Car celui qui prend
charge d'accufer, doit exaftement faire preuue & examé
de fa vicpremier que d'examiner celle d'autrui : & doit
cftimcr , qu'à la fin il fera honteux, & trouué confus, &
infâme, d'auoir voulu faire rendre conte à autrui de fa
vie , s'il fe void & conoit lui mefme en peine d'en faire
autant de la fîcne. Là deffus vaut beaucoup la fîmplicité
deraccufatcur:carinimitiez,vindicle$;& autres affediôs
doiuen;
ér mémorables. 15
doîuent cftre forclofes de telles charges , pour eflre cô-
traires à la fincericé qu'il y faut auoir : d'autant qu'il cft
malaiféjque Ton puifl'c auoir fàin jugement auec telles
paflions,qui empefchentle vrai office, & le poinâ: plus
falutairc d'vn accufateur , quieft, qu'en accufantil ne
doit moins craindre & preuoir fur Ton honneur & re-
nommée , qu'vn accufé fur la confer-uation de fa vie &
de fon bien : & doit ledit accufateur , s'il eft homme de
bien, penfer & croire , qu'en commençant d'accufer , il
entre en danger de fon honneur, qui lui doit eftre oc-
cafion de ne mettre en auantchofe dont il ne Toit afleu-
ré,fans rien hazarder. A ce propos eft fort notable & di-
gne d'eftre fouuent leuè la loi criminis.C.de tjs,qui0ccuf.
non fof. qui comprend les parties fufdites . Il eft vray-
fembiable que MefTieurs de Chamberi s'eftoycnten-
tr*eux enchaifnés de beaucoup de chofes, & que Ta-
boue , pour eftre reuefche aux remonftrances à lui fai-
tes, s'eft mis à telle pourfuite contre fon chef & Prefi-
dent,qui auoit puiftance de lui commander & foubs le-
quel il auoit exercé fon eftat de Procureur gênerai du
Roi , à qui il deuoit déférer , & endurer quelque choie
de luijconfîderant que la difTimulation des iniufes,qu^il
a prétendu auoir particulièrement foufFert de fondit
Prefidcntjlui euft apporté plus d'honneur & de conten-
tement au long aller , que n'euft peu faire la vengeance
qu'il auoit obtenue par l'arreft de Dijô, encor qu'il euft
forti eflFeft. Le conflift de telles fortes de gês eft iniufte
& inhumain: & a efté anciennement par plufîeurs iuge-
més reprouué à Rome.L.Philo voulant accufer C.Ser-
uilius fon Prêteur & chef, duquel il auoit efté Threfo-
rier,fut déclaré non receuable.Autât en fut dit cotre M.
AureliusjpourL.Flaccus sô chef.T.Albutius auoit gou-
uerné vn an lesSardes & fous lui Pôpee Threfo ri er. Les
deux s*eftoyent conduits de façons differétes , Albutius
en pillard,& Pôpee en home de bien. Les Sardes drefTc-
rent leur plainte à Cefar pour accufer Albutius.Pôpec
i'empefchoit , difant qu'il cftoit mieux auerti de fa vie,
pour auoir elté tou/îours auec lui,le feruant de Threfo-
acr,& demâdoit la charge de racçufer,dôt il fut débouté
] 6 Hiftoires admirables
Cjccro en fa première accufarion contre Verres , pour
obtenir la prefcance d'eihe accufateur, & pour faire de-
nier audience à Q^Cecilius,c]ui fe prefcntoitjlui oppo-
lii les trois raifons principales ci dcfl'us touchées, l'vne,
&. première, qu'il n'elt pas entier & aflburé, &: qu'en lui
y a a reprendre , & notamment au gouucrncment de
Verres, fous lequel il a eu charge en Sicile. La féconde,
qu'il fe dit Ton ennemi,& par ainfi empefché d'affodion
qui cil toujours fufpede.La troilicfme , que Verres eft
Ton chef,& Prcteur,& ne doit ni ne peut de lui eftre ac-
cufé , fans violer l'honneftcté publique. Au procès qui
fut fait par Nonius le Noir, Preuoft Romain contre les
complices de Catilina , fut trouué mauuais , que ledit
Nonius es interrogatoires auoit cnquis les priionniers,
C\ lui. Csefarlors Prêteur elloit point àc la coniuration:
pour la dignité Pretorale qu'il tcnoit, des plus hautes,
& égales à la confulaire : dequoi ledit Preuoft fut repri-
mé,& emprifonné,encores que Tvn des prifonniers nô-
mall C^far , & qu'il y cull: de la faueur 6: fecours prôpc
du falutdelarepubhque à confiderer: ce qui ne peut
lors empefcher telle publique honneiletéji fçauoir de
n'accufer vn Magillrat durant fon tcmps,& notamment
par vn de fa famille, & a qui Ton a commandé. Qui eft
vn cas que la loi a dedairé intolérable, & digne de pci-
ne,ainfi qu'eft contenu en la loi, ji quu exfamiltAribus,
en ce mo: familiaribus , lointe la railbn de la loi finale,
C.deiis qui accu.non po[f. ïz où les Empereurs declairent
telles abfolutions abominables, fans en excepter autre
crime que de lefe Majefté. au refte , vocemfamiliarium
funeftam amptitfiripotiusvoluntqHàm a-udiri. l'aircpre-
fenté cefte hiftoire au long , pource qu'elle eft tref-no-
toblQ.l.PApon au iç.liure du recueil de* Ar/effs,f^c.arr.ç.
Accouchée abondante en laici.
I'A Y veu en la ville de Breflavv la fille d'vne fagc fem-
me en fa gefine auoir telle abondance de lai<fl aux
mamelles:qu'en deux ou trois iours,elle en rendit plein
* n grahd vaifl'eau de bois contenant plus de douze pin-
ces
^ mémorables, 17
tes de Paris. On en leua la crcfme dont fut fait du beur-
re & du frommage fort fauoureuxi&n'ofoitceftevaf.
che i deux pieds prefques rien manger, autrement elle
rendoit du laid en quantité mtt\jié\lQ\kÎQ,MartinVVein-
richjenfon Comment Atrt des monjlres.
ADVERTISSEFR
merueiUcHX.
IAqv E s IV.du nom, Roy d'Efcofle, ayant en Tan 15:007
ou enuiron deffié Henry VIII. Roy d'Angleterre, co-
rne il s'acheminoit vers fon armée , eftant en vn temple
à Limnuch , pour y ouyr Verpres,on vid venir vn vieil-
lard,ayantla cheuelure tirant fur le roux, & pendante
fur les erpaules,le deuant de la tefte chauue, & fans cha-
peau,auec vne longue robe bleue, ferrée d'vne ceinture
de lin,ayant vn port graue & vénérable, lequel deman-
dant à parler au Roy fendit la prefTe , & fe fit faire large.
Puis eftant approché , fans autre cérémonie vint s*apu-
yer fur la chaire du Roy , & lui dit:S ire, i*ay efté en-
uoyé vers vous^afin de vous admonnefter de rebroulfer
chemin, fans pafTer plus auant. Si vous mefpritez mon
auertiffement,mal vous en auier.dra,commeau{ri à tous
ceux de voftre fuite. D'auantage,il m'a efté enioint de
vous dire que fi vous hantez trop priuément lesfem-'
mes, & fuiuez leur confeiLce fera voftre honte & ruin e.
Ayât dit ces paroles,il fe fourra parmi la prefte. Velpres
acheuees,le Roy fitcercher ce vieillard, lequel ne fe
trouua point : &, qui eft encore plus à remarquer , pla-
ceurs qui lui auoyent ouy faire cefte remonftrance , &
defiroyent fcauoir de lui les particularitez,n'auoiét peu
aperceuoir,de quelle part il s'eftoit retiré. Entre autres
s'y trouua Dauid Lindes du- Mot , perfonnage doclie^fa-
ge,& de vie entiere,duquel i'ay entendu ce que deflus.
Peu de iours après, le Roy mefprifantlebon auis des
principaux Seigneurs de fon confeil,8{ pourfuiuant fon
deffein,donna bataille aux Anelois, en laquelle il fuc
tué fur le champauec toute la fie ar de la nobleife d'Ef*
CQi[Q,G,BH(hans?f,fH i^Murê tU lUipin d'EjcoJfe,
i8 Hiflûires admirables
A V T R E.
IE AN, Baron dcKitlitz , Seigneur fort renommé , m'a
raconte qu'autrcsfois il a dcuifé auec vne Dame hon-
norable,dc fort noble maifon en Silelie , lac]uelle difoit
qu'ayant eftéenuoyee fort ieuncpoureftre fille de châ-
bre de Marie fœur de Charles cinquiefme , & de Ferdi-
nand Empereur , femme de Louys II. Roy de Hongrie,
tué en bataille contre les Turcs, fur la fin d'Aouft 15 id.
après cefte perte , comme le Roy fe fauuoit auec fon
train, elle ferra la couronne royale lailfeeà l'abandon
pour J'mcroyable frayeur de tous,à caufe des Turcs. Or
adiouftoitelle,quc peu auantlamortdu Roy,cômeile-
ftoit à Bude,& félon la couftume les portes du chafteau
fuflent clofes durant fon difné,arriua à la porte certain
en forme d'homme , tout contrefait & boiteux , lequel
commence à crier qu'il vouloir parler au Roy, auquel il
auoit à dire chofes concernantes fon grand bien , & le
repos de tout le royaume.Du commencement l'on n'en
tint conte,i la façon de la cour , où les pauures & mai-
baftis font mefprifez :maiç il fe print à pleurer & à crier
il haut, fuppliant qu'on allait en faire promptemcjit
rapport au Roy , que quelques vns des gardes meus de
CCS recharges,& pour fe deliurcr des cris importuns de
ccft homme qui proteftoit ne vouloir parler à autre o-
reiile qu'à celle du Roy , allèrent luy en faire rapport.
I.e Roy commande à vn des plus braues de fes courti-
fans d'aller fçauoir ce fecret , & fe feindre eftre Roy.
Mais le boiteux lui dit incontinent , tu n'es pas le Roy,
ie n'ay rien à fe communiquer :& puis que le Roy ne
tient conte de m'ouyr , va lui dire qu'il périra bien toft.
Prononçant ces mots, il s'efuanouit de dcuant les yeux
de tous.Le courtifan , les gardes,&le Roy uiefmes, ne
prenans pas garde à cela, furent toft après au bout de
leurs vies. /. LeondfMim es PanMes de l'Hiftoire des
Turcs,
^ mémorables. 19
ADVLTERES chaflieT^
IL y a nouante ans ou enuiron , c^ue certain Seigneur
Piedmontois defcouurit de longue main que la fem-
me, ifTue de moyene maifon ,& qu'il auoit erpoufce
pour Ton plaifir,oubliant l'honneur de Dieu, l'honneur
c]ue Ton mari lui auoit fair,fon honneur propre,auoit e-
fté lî exécrable que de fouiller la maifon^ la chambre,&
la couche de Ton Seigneur & mari, par fréquent adul-
tère auec vn gêtilhomme fien voifïn qu'elle auoit mef^
chamment desbauché. Voulant les attrapper tous deux
à fon auantage, &fans qu'ils peulfent tergiuerfer ni
s'excufenapres diuerfes rufes il s'en auife d'vne, qui fut
de fe faire aporter vn paquet, par lequel fon Prince l'a-
pelloit pour venir en Cour , & de là faire promptement
vn voyage & long fcjour en France. Il monftre les let-
tres à fa fcmme,demcure auec elle vn iour entier , la ca-
rcfle fort,lui communique plus priuément queiamais
auparauant de tous Tes affairesrlui laifle fcs moyens,ioy-
aux,& tour ce qu'il auoit de précieux en fa maifon,auec
la clef de foncabinettSc après vn fort amiable Adieujde^
part de fa maifon auec tout fon train. Sur le foir il s'arre-
fte chez vn iîê chaftclain , auquel il defcouure fon mal-
lieur & fon dcfîcin. Cependant la mcfchante femme a-
uoit enuo)é quérir fon adultère ,& enclos en mefme
chambre continuoyent en leur crime. Le Seigncur^fui-
ui de fon chaftelain & de fon valet de châbre feulcmêt,
bien armez & pourueus de ce dont ils auoyét befoin,la
nuiâ: toute clofe &auâcee,approche de fon chall:eau:où
le chaftelain commence à fe faire conoiftre au portier,
difant auoir vne lettre de confequvnce de la part
du Seigneur , laquelle il faloit rendre promptement
à la Dame. Le portier ouure à ce perfonnage bien
conu : & foudain tous trois entrent : le Seigneur
défendant au portier de faire bruit » & lui com-
B ^
zo Hijfoiyes admirAhles
mandant d'alluiner \n iianibcau , s'acheminent droîdà
la chambre du fcignciir , ou le chaftelain heurte. A ce
bruitvne vieille qui auoit lerui de maquerelle aux adul-
tères , lans ouurir demande que c'eft. Ceft inoy teLref-
pond le Chaftclair.,qui apporte vne lettre a Madame de
la part de Monfeigneur, lequel paflant haftiuement pat
ma maifon m'a commandé de la lui aporter (ans delay.
Celte femme, enyurée de fa vilemc, dit à la vieille, re-
ceucz la lettre à la porte , fans qu'U entre , & ie feray le
conrenu. La vieille entr'ouurant la porte, fut rudement
pouir<»e par terre. Alors le Seigneur & les deux autres,
auec les armes en main, entrent , fainHent lc« adultères
nuds Sw confus de leur honte. Les domeiliques du cha-
fteau prôptemét appeliez, en leurprefence le Seigneur
ayâc fait vn graue & afpre procès à fa detcftable femme,
la condâna à pendre & eftragler de Tes mains en prefen-
ce de tous Ton vilain adultère, auquel on auoit lié bras
& ïambes auec les hcols des cheuaux. Ceft arreft pro-
noncéjle Seigneur enuoye quérir de gros clous de cha-
rette,qu'il fit attacher à vne poutre de la chambre,fit ap-
porter vne efchelle, contraignit la mefchante d'attacher
le cordeau au col de fon adultère. Et pource qu'elle
auoit befoin d'aide en ceftc exécution , la macquerellc
fut condamnée à la féconder. Elles deux donc pendi-
rent & eftranglerent le malheureux: après la mort du-
quel ce Seigneur fit brufler le li(5l,& routTequipage du
crime de ces adultères, tranfporrer ailleurs les autres
meubles de la chambre, n'y laifTant qu'autant de paille
<ju*il en faudroit pour le pîkQ de deux chiens : ordonna
que le corps pendu demeureroit là, que les àtux fem-
mes le garderoyent iufques àjce que la puanteur d'icclui
les euft eftouftees,fit murailler toutes les fencftres & la
porte mefme , referué vn pertuis eftroid , par lequel on
leur donnoit du pain & de l'eau. Ayans demeuré quel-
que peu deioursen ceftepuanteur, fans confolation,
vamcues de douleur S^ de defelpoir , finirent ainfî leur
inifcrablevie.
HiJioiresfU noftre temps.
Vn aduocac de Grafle en Prouence, fuincmméToIo-
nio.
^mémorables, ii
nio,marié à vne honnefte Damoifelle, ayant charge des
affaires du Sieur de Ghabrie, gentil-homme demeurant
en vn chafteau proche de la : Veftant vn iour entres au-
tres rêconrré en la maifon du gentilhomme pour lors
^ abfent, fuiuant Tacces qu*il auoit à lui & à la Dame (aa-
gee d'enuiron quari!:eans,& mère de quatre enfans,dôt
les deux eftoicnt près d'cllcieuncs gcntils-hômes bien
nez) môte en la chambre,& trouue celte Dameencores
au lid, près de laquelle e-ilant aflîs, après auoir commu-
niqué de quelques affaires , pour Iclquels il eftoit venu
au chafteau , entrèrent en àcs propos eftranges & detc-
ftables contreThonneur de Diei!, &toutrerpeftd'hon-
nefteté & de vertu. La fin fut qu'ils fe polluèrent deflors
enfemble par vn trcl-infame & horrible adultcre.Eftans
tombez en ceft abyfme , Saran & leurs fales phifirs les
précipitèrent en d'autres du tout effroyables. Car ayans
idiuerfcs fois complotté enfemblcle premier ctforr de
leur cruelle mefclianccté fut contre le Sieur de Cha-
brie,lequel fu c afTaffiné & maflacré , fe promenant feul
dedans vne fiene garenne, par deux meurtriers maA
quez , apoilez par TAduocac. Apres ce parricidejes a-
dulrercs reco/nmencent leur tram , & ne fçachans que
c'eftoit plus de honte & de remord, lafclient la bride à
leurs voluptez exécrables. Ce quele fîlsaifné nepou-
uanr digerer,& voyant fa mère ne pouuoir durer en pla-»
ce fi l'Aduocat n'eftoit auprès d'elle > lui en fît vne fe-
rieufe & graue remonftrance , yadiouftant beaucoup
d'excufcs pour eftrc fupporté en fa hardiefle.La maudi-
te mère diffimulant fa rage contre fon fils , fe pleind de
fes opinions,fe iuftifie & couure fièrement : & ces gout-
tes d'eau de bonnes & necclfaires remonftrances ne fer-
uent qu'a attrlèr d'auantage le feu de fa concupifcence
effrénée. Apres auoir accufé fort aigfementrindifcre-
cion de fon fils, & haut loué Tadultere & meurtrier Ad-
uocat , elle contraint fondit fils de baftir vne harangue
pleine d'excufçs & d*amende honorable. Dont non
contente,elle délibéra de le faire mourir. Il y auoit vne
gallerieau chafteau , où le ieune gentil-homme fe pro-
mcnoïc fouuent , pour voir vn beau payfage d*alencour>
B 3
11 Ht (loir es admirables
& le jardin. Elle clioit aunnccc ,& dclfous y auoit vn
rocher en pcntcau pied duquel eftoit ce lardin. Lad-
uocatjpar î'aduis de ceflc maudite mère , dcfcloue dex-
rremcnt quelque aix delà »^allerie , tellement que le
ieune gentJl-homme venant toR après félon fa couftu-
me ,dcs le marin prendre l'air fur icelle, ayant fait quel-
que pas & mettant le pied fur les aix deioin«;, tomba
furie rocher la telle la première, cù il cuft latefte cf-
carbouillee,& le corps tout brife.Hn voila deux. Reftoit
encores \ n fils puifné en la maifori , lequel ne prefumâc
nullement quefamcre fuil: caufe de ces deux parrici-
des & toutefois trel-marri des deportcmens de l'Aduo-
cat,finalement dcfcouurit tant de mefchâcetez en leurs
priuaute7.,qu'ilfenticaulfi que s'eftoyét les cruels bour-
reaux de CQ^it noble famille,& commence à monftrer le
dcfplaiiîr qu'il auoit de voir leur brutale conuerfation.
Il ne parle que rudement à TAduocat^Sc ne regarde plus
fa mère que de trauers. Ces mefchans furent d'aduis de
lepreuenir/e doutans bien qu'iUeurdrefferoit quelque
partie.L'Aduocat gaigne par argent vn alfaflln domelli-
que lequel cheuale fi diligémentle ieune gentil-hôme,
qu'vn iour eftant à la chafie , & tandis que fes valets &
veneurs donnoyent curée de quelque venaifon à ces
chiens & s'arreftoit fur vne croupe de rocher, qui regar-
doitvne bafle campagne ,& dont la defcente eftoit pe-
rilleufe du cofté de la vallec,à caufe des précipices , Taf-
fa/Tin^qui tout le iour auoit efpfe fon aduantage , acou-
rut par derrière, &lepoufla fi rudement en basque le
pauure gentil-homme fut pluftoft au fond priué de vie,
que de fentir le meurtrier qui Tauoit fi outrageufemenc
mis à mort. Les parricides voyans après cela que les do-
meftiqucs de la' maifon auoycnt Tail fur eux, complo-
tèrent de fe marier enfcmble.'AIais il y auoit vn entre-
deux.-c'eftoit la femme de TAduocat. Ils coniurerent la
mort d'icelle : & TAduocat s'eftant tourné fur diuerfes
penfeesjfinaJement vne nuiâ: cllant couché près d'elle
i'eftrangla dVne feruiette, & comme elle eftoit aux der-
niers foufpirsjCÔméce à crier fort haut,apel]ât fes dome-
ftiqucs & voifins à TaidcOn y acourc de toutes parts.Il
cricfe
dr mémorables. 25
cricfe lamente , & dit qu\n catharre violent auoit faili
fa femme à la gorge,& TauDit ainfî eftoufFee. Le fimple
vulgaire adiourta fby à ce rapport.Mais le père de Fhô-
nefte Damoifclle y regardant de plus pres,'& voyant v-
ne face cxtraordinaircmét enflée, la gorge noire & liui-
de,aucc autres indices de mort procurée de dehors , fei-
gnit eftre del'aduis des autres, & ayant exhorté fon
gendre de pouruoir à la fepulture de fa femme , s'en va
promptement au iuge criminel , Tameine auec fuite
d'officiers & d'amis pour vi/îter ce pauure corps,& de-
mande iuflice.Le gendre accufé nômement, fommé pat
le Magiftrat de relpôdre,perd fon eloquêce, & fe taifanc
corne vn muet,confefl'e tacitement fon crime. Les Mé-
decins & Chirurgiens ayans rapporté que ladamoifelle
auoit efté eftrâgleede Magiftrat emprifonne l'exécrable
parricide,lequel fans torture côït&^c fon crime. Le Par-i
lement d'Aix aduerti le fait amener feurement pour le
voir.Quant à fa deteftable complice, ayant oui ce vent,
elle fc charge du meilleur qu'elle auoit , & fe fauue de
viftefle fur les terres de Sauoyej,& de là dans la ville de
<jcnes,où elle châge de nô. L'Aduocat mené à Aix,ou-
tre fon dernier parricide defcouute & confefle encor les
énormes crimes fufmentionnez , auec toutes leurs cir-
conftances. Il eft condamné , par arreft de parlement, à
eftre renuoyé à Grafle pour eftre efcartelé tout vif en
la grand' place,où il fut exécuté au grand contêtemenc
de fon beaupere & de tous ceux du pays. Quant à la
cruelle Dame de Chabrie, elle fut côdâneepar côtuma-
ce,& exécutée en effigie.Elle s'eftoit accôpagnee en fon
voyage de Gènes d'vn homme de neât, nommé laques
Pallier, lequel fc doutant aucunement de l'occafîon de
fa fuite,au bout d'vn mois après fon arriueo à Genes,vn
matin tandis qu'elle eftoit allée en ville,fe faifit de tout
ce qu'elle auoit, ne lui laiflant rien que ce dont elle
eftoit vcftue,& fe fauue , fans que iamais elle en peuft
auoir nouuelles. A fon retour fe trouuant defnuee,
après diuers difcours , entre infinis foufpirs & defel-
poirs , elle fe range au fcruice d'vne femme veufue,
dont elle gouuerna quelques filles, viuant encor quel-
B 4
14 Hijlôires Admirables
qucs annees,couuerte enfon ame de continuelle hon-
te & confufion,& mourant entre les mains delaïufticc
de Dieu, ayant efchappé celle des iuges du monde. Ht •
foires de noftr» temps.
Lors que le Roy Louys Xll.eftoit Seigneur de i*E-
ftatde Milan, vn gentilhomme y demeurât, homme vi-
cieux,oubliantrnonneur de Dieu, le fien propre , celui
de fa femme,fuft H mefchant que de quitter (on lia , &
courir après vne courtifanne fe polluant par infâme a-
dultererauquel train il fut longuement fupportédela
patience de Dieu. Sur ces entrefaites vn autre genuU
nome s'eftant retiré du territoire Milanois , en la ville,
pour y viure plus à fon aife , fe rencontra en vn feftm,
où eftoir la femme deTadultere fufmentiônee, Damoi-
felle peu chafte,comme elle le monftra. Car fe laiflant
acoflerpar ce nouueau venu, homme plongé en- deli-
ccs,& qui ne cerchoit que telles vilaines proyesàls s'ac-
cordèrent tellement enfemble , que tandis que le mari
«Telle fe fouilloit deteftablement d'vn cofté:eux de leur
partatciroyent par horrible adultère , le iugement de
Dieu fur leurs telles. Ce train de péché dura plus de
quinze mois,la Damoifelle receuant fon adultère en I2
Couche que le mari abandonnoit, lequel en finfentic
quelque flair de cefte fumée infernale : au moyen de
quoyfe tenant vn peu plus près de fa femme que de
couftume, finalement refolu de s'en efclaircir , & d*en
fçaaoir la ver]té,ii s'accofte dVn cordelier confeifeur de
fa femme>& fait tant qu'il obtiêt de lui ce qui s'enfuir,
Vn iour de quarefme,approchât de Pafques, la Damoi-
felle à (à manière accouftumee enuoyedireau corde-
lier que le lendemain furie'-, deux heures après difné
elle r-'roit trouuer pour defcharger fa confcience&a-
uoir abfoluaoR.Le cordelier accepte rheure,& en dône
aduis fecret au mari,lequel ne fait faute de fe rendre vn
peu auparauant près de lui. Leur couftumc eft de de-
meurer en vne châbrctte obfcure,de laquelle nulle fé-
TOC n'approche qu'à Tendroit d'vn treillis, où le confef-
leur Ci. ia confcffante peuuent parler Tvn à l'autre fi bas
qu'il leur piait,fans pouuoir s'étietouchei que du bout
des
(^ mémorables. 25
<lcs doigts,à traueis le treillis qui eft ePpais & ferré. Le
confefleur eft debout ou afTis à fa commodité,& la^con-
fefTante i genouxrCefte miferablc venue li, fon mari e-
ftoit au deflous du treillis entédant tous les mors qu'el-
le difoit au côfefTeurJequel Tayat enquiie de quelques
autres péchez, cômence à entrer fur celui d'aduiterc , &
à&s circôftanccs , en outre fuit de fi près cefte femme,
qu'ellelui confelTeauoir^qonobftant rablblution qu'il
lui au oit donnée l'an précèdent du melme forfait, con-
tinué en icclui toute l'année fuiuante , s'excufant en
quelque forte fur les desbauches de sô niari,&: pioreiHc
d'auoir repentancc de tant de fautes. Or pouice qu'elle
fit entier refus de déclarer au confefleur le nom du Gc-
til-homme à qui elle s'abandonnoir,ayantn)efme tancé
ce confefleur de ce qu'il pafloit fi auantvil ne voulue
non plus lui donner l'abfolution .-teliement que l'ayant
remile à y penfer,elle le quitta pour faire fes deuotions
en i'Eglife fainâ: Ange,où elle eftoïc venue. Le mari a-
yant prins congé du confefl"eur,& outré àts confeflPons
qu'il auoit entendues , attend fa femme en rue efcar-
tee,& la voyant retourner en coche luy vient au denant
&luy ayant en peu de paroles reproché fa vilenie &
liefloyautéjtire fon poignard, dont illui enfonce tel
coup dedans le fein , qu'elle tombe roide morte en fon
coche. C^uant au mifcrable ,apres ce coup il fe fauue de
viftefle furie pays àts Vénitiens , & ne fut plus veu de-
puis à Milan.Mais les parens de fa femme le ponrfuiui-
rent,& firent tailler en pièces quelque temps après.
L'autre Gentil-homme adultère demeura impuni de-
uant les hommes au regard de ce forfait,' demeurant
prifonnier es mains du fouuerain iuge, pour en rcfpow*
dre en temps & ïieu.Hiftoires d'Italie',
Il y a eniiiron cinquante ans qu'vn autre Milanoi>
ayant entendu en France que fa femme fe gouuer-
noit mal,& ( comme il efl: à prefuppoiêr ) en efianc
bien informé, print la pofte , pour plufloft i'e rendre en
fa maifonàMilan : où eftant arriué , fans monter iuf-
ques en haut, fit appeler fa femme, laquelle cÛmr.
incontinenc dcfcendue pour le carcffçr , comme
26" Hîjlôires admirables
feignant fe refîouir fore de la venue de Ton mari , rcceut
par lui d'vn coup de dague vne contre carcfle & \ n mer-
ucillcux rabat-ioyc, non fans elhe appellcc pluficurs
fois vilaine Scmeichantcdefloyale &: traiftrcfle. Apres
le.]uelcoup, avant laifle fa femme en tel eftat, cju'il n'a-
uoic plus peur qu'elle luiiouaft vn mauuaistour, il
monta à cheual & fa fauua.HïV/o/m it Italie.
Pluficurs années auparauant vn riche gcntil-homme
Sienois, nommé Ncllo , eftantia fur l'aagcefpoufa vne
ieune Damoifelle , laquelle fe laifla corrompre par vn
ieunc gcntil-homme, feferuant, pour la pourfuite de
fon crime , d'vne fienne fille de chambre qui faifoitles
me/lagcs & leur feruoic de maquerelle. Mais Neilo a-
yant dcfcouuert parrentrcmife d'vn /ïen fcruitcurle
tort qu'on lui faifoit,& ne pouuant bien à fon auantage
atrraper le ieune gcntil-homme qui auoit fi vilainemét
pollué fa maifon/e vengea fur fa femme & fur la fille de
chambre , lefquelles il fie eftrangler toutes deux en vne
/îenne maifon champellre où il s'eftoit retiré pour plus
commodément faire cefte exécution , & s'y tint comme
confiné le refte de fes iouïs, Hiftoires d'Halte.
Vn gentil-homme François , queie ne nommeray
point, ni le lieu où cela aduint,pour quelque bon re-
fpeft,eftanr marie deuint amoureux d'vne ieune fille de
Tvn de fcs fubieds, & commença a fréquenter là dedans
plus fouuent qu'il n'auoit de couRume , & plus priué-
ment qu'il ne deuoit.Cefte fille auoit vn frère qui eftoit
pre{lre,mais au demeurant homme de bon cœur. Ce-
îkiiici s'aperceut incontinent ou vifoit ce gentil-homme
& que ces allées & venues ne tendoyent qu'à mcfchan-
ccté :toutesfois n'en fit fembîant pour quelque temps.
En fin voyant que le gentil-homme ne celfoit de cour-
tifer fa fœur ( laquelle il corrompoit ) & mefme le ren-
contrant vn iour comme il en fortoit,lui dit, Aîonfieur
pardônez moy,fuif le rcfpcfl &: l'honneur que ie vous
doy , ic voy que ce que vous venez faire céans n'ell ni
beau ni honneile.Et pour ce ie vous prie de vous dépor-
ter d'y vcninaucrcmeac ic vous lurtjquc fi ic vous y re-
trouuc
C^ mémorables, 17
trouue plus îe vous feray vu mauuais tour. A ce propos
le gêtil-hommc ne fit que fecoucr la refte, & fe mocqua
du preftre:mais au bout de quelques loursil reuint co-
rne de couftumc,& ayantalTouui Ion vilain defitjfort.Le
prcflre, qui Tauoitprefcjue furpris furie fait, efrneu de
iufte douleur leva choifîr fur vn pont tout au beau mi-
lieu de fes gens ,& lui donne d'vne dague dans le fein
fans queperfonne peuft l'empefcher.Q^uantà lui, il fut
maffacré fur le champ par les feruiteurs de ce miferable
adultère, lequel emportante dague dans Teftomach,
s'en alla mourir entre les bras de fa femme. Ade vraye-
ment heroique,& dignc,non pas dVn Preilre, mais dVii
Brutus,ou de quelque autre encore plus généreux &
vailhntyVrh.Chauuetonyenfes difcoursfur le ip.chap.4u i.
Hure de Vhiftoire du nouueau Monde , où Benzo autheur
d'icelle raconte que les Efpagnols eftans allez cercher
de For près du goulfe d'Vraba,leur Capitaine enleua
prifonnierc de certain village la femme du Cacique ou
Seigneur du lieu , lequel s'en vint vn peu après vers ce
Capitaine,accompagné de quelques vns de fes amis, &
feignit eftre venu là tout exprès pour la racheter, & dô-
ner telle rançon qu'il demanderoit. Mais quand il fut
arriué en la prefence, non feulement il parla à lui bra-
uemcnt,iufques à l'outrager de paroles iniurieufes,mais
mefmes Toffença de fait,defcochant contre lui vne flef-
che enuenimee, prétendant le tranfpcrcer de part en
part.Mais il ne Fataignit qu'en la cuillc,dont il fut guéri
tellement quellement par l'application d'vn fer bras é,
qui fut le falaire de fa mefchanceté.
Los Çfpagnols ayans ouy le bruit accoururent foudg^fn
telle partjles efpees traites,dont ils tuèrent le Cacique,
fa femme & leur compagnie fur la place. Mais quelque
temps après eux & tous leurs compagnons perirétmal-
heureufement. Quant à ce vilain Capitaine furnommé
Hojeda,Benzo dit,qu'ayant enduré toutes les peines du
monde fur fa retraite hors du pays, en fin il arriua en
riile Efpagnole fe trouuant fort mal de fa playc,dontil
mourut dedans peu de iours auec extrêmes douleurs,
il perdit prcfqucs toutes fes gés fur mer en ce voyage.Ec
iî Hiffoires jtdmirâhUs
Gomara au r. liure de Thift. gen. des Indes , ch. 57. ait
que defefperé de ne pouuoir pourfuiure Tes conquêtes
cncomniencces , il quitta tout, fe rendctnt Côrdclier a-
uecracu'fle mal accommodée, & mourut en ce nouuel
habit par Ini veftu. Les autres reftez en Vraba au nom-
bre deTeptarite feulement, fous la conduite de Fran-
çois Pizarre , chaflez par la famine de deffus la terre,
s'embarquèrent en deux brigantins,mais les vents &:les
vagues leur firent la guerre d'eftrange forte. Ramaflez
fur mer par vn autre nommé Ancifo ils retournèrent
en terrcou après vne infinité de trauaux, les vns furent
tuez parles Indiens, les autres moururent de dinerfcs
maladies , & fort miferablement, comme £«»7o fjy* Go-
mars îe confefTent.
De noftre téps vn bourgeois d'Vlme,ville impériale,
defcouurant que fa femme commençoit à faire quel-
que desbauche,raduertit ferieufement de le comporter
d'autre force : voyant qu'elle tenoit peu de conte de Cci
remon{}r*Tnces, vn iour il feignit s'en aller aux champs,
puis fans eftre apperceu fe gliffa dedans ia maifon ôt fc
cachant en heu propre,il delcouurit que les fcruanrcs e-
ftoyenr occupées à aprefter vn fcilin, vid le paillard en-
trer & carefl'é par celle mauuaifc femme , neantmoins il
fe retint lufqucs après le foupé,que les voyant entrer en
la chambrepour fecoucher,vfans de propos infâmes tef-
moins de leur mefchanceté partie exécutée , & qu'ils
vouloyent continuer, il fort de fon embulche, tue pre-
mièrement le paillard,puis la femme: & ayant prou ué à
la luftice toute fa procédure, obteint grâce de ce charti-
mcnt procédé de lufte indignation , J.Honfdorjfenfon
thsatre a exemples.
Tandis que nos Rois de France tcnoyentle Milanois,
auint à vn François, logé chez vn homme d'hôneur ca
îa ville de Milan , d'œilladcr lafciuement la femme de
fon hofte , la careflTer , & foliciter à adultère. La femme
defcouure telle indigne prauque à fon mari.Ilsrcfoluét
de cliaftier ce vilain folhcitcur. Elle lui aprefte vn ban-
quet,faignàt c/lre flefchie par fes prières. Au heu de vin
délicieux , elle lui donne vn bruuage qui ralfopit & cn-
&C11-
^ memorahles. 29
<!orc profondément : le Milanois furuicnt & couppe la
gorge i fon hofte ingrat. Lk mefme.
L'an mil cinq cens & iîx,enuiron Noël, vn Aduocar,
en la ville de Conftance;,debaiicha la femme dVn Pro-
cureur, lequel, ayant fenti le vent de leur forfa'd dete-
ftable,feipnu auoir vn affaire preflé qui le contraignoic
d'aller aux champs pour quelques iours. Il part & re-
tourne le foir , fceut qu'ils eftoyent aux bains chez vne
vieille du voifînage , il s'y tranfporte auec trois fiens a-
mir-,lefquelsillaiffç en rue, p©ur empefcher lefecours:
puis entre dedans auec vnc forte ejRrille de fer toute
neufue en la main,re ruefurTAduocat tout nud,le grat-
te fi rudement qu'il lui arrache les yeux de la tefte , les
tedicules Sf. prefque toute la peau du corps : il en fait
'prcfque autant à fa femme, encores qu'elle fur encein-
te. L'aduocat mourut en grands tourmens au bout de
trois iours. Le procureur fe tranfporta ailleurs & la fem-
me demeura couuerre d'opprobre le refte de fes iours,
H.Hedio en la ^^.partie dejn Chronique.
Quelques années auparauant, certain perfonnage fai-
fantprofefllon d'enfeignerchafteré auxautresjfollicita
fcrtinftamment vne femme honncfte pour lui rauir
fon honneur, & l'esbranlarle mari defplaifantde ct^ç.
iniure, menace l'autre de le chaftrer s'il le rencontroic
en fa maifonrii ne celfe pourtant:au moyen de quoi vn
iour comme il paffoitdeuant la porte, (la femme ayant
donné le mot du guet à fon mari) commence à lui
faire des mines &carelîes qui l'attirèrent à la fuiure
iufques dedans fa chambre, où le mari entre & auec vn
grand poignard deftainé dit,que l'heure eftoit venue
d'élire chaftré. L'autre changeant fa peur en fureur , fe
rue furie mari,lui ofte le poignard, le ferre de près & le
contraint promettre qu'il le lairra aller fauf. Ayant ex-
torqué ceftc promcfle,illafche pnfe,&eft fi defpourueu
d'entendement qu'il met le poignard fur la table! Le
mariddi'jré, ne fe fo u ci an t de celle promefle forcée,
fe lette de vitelfe fur fon poignard, puis de fureur nou-
uel'e,aidéde fa femme, empoigne fon ennen?i,lelie
fi eftroitteme;it , que fur i'h,eure ille chaftre, & ren-
30 HiîUires admirables
uoye tout fanelant en Ton logis, ou ayant efté fort ma-
lade longue clpace de tcmps,en fin il guérit: mais il cef-
fa de courir après les femmes. L<5 mefme.
Vn boulanger ayant efpouré la leruantc d'vn riche
Clianoine, c\Tcouurit que ce maillre desbauchoit fa
femme ,& le pria de quitter cefte infâme pratique,mais
en vain. Les ayant furpris vn iourily eut du vacarmerle
Chanoine fut emprifonnéja femme aufll. Finalement
ce ne fut qu'vne rifeccôuertic en chanfon, dont le bou-
langer irrité quitte femme & maifon pour prendre parti
ailleurs. C'ependant ii cfpioit le Chanoine,& l'ayant au
bout de deux ans furpris à fon aduantage en certain
lieu champeftre,ou il ciloit aile s'esbatre , fans fe douter
de rien ; lui donna tant de coups de dague , qu'il lui fit
rendre l'ame fur le champ. Là mejme.
La femme d'vn Alemand de Voitland fut fi impudi- ,
que de permettre que pluiîeurs qui renrrctcnoyent fe
trouuafîent au nombre de trois en certain banquet
qu'elle leur auoit appreftc. Mais le mari qui n'auoitpas
elle fcmond,nclain"a pas d'y venir, pour leur donner v-
nc terrible aubade & fanglantc deflerte. Car ayant vn
cfpicu en main il entre au poifle^tue celui qui elloit af.
fis près de la femmc:court après les deux autres;qui fai-
/îs de peur fautent par les fencftrcs en bas,& fe tuent,Il
retourne à la femme , & la perce de part en part. Vvolff
Schremh en fes Narrations.
Vn gentil-homme Alemand s'cflant deshonneftc-
ment acoilc de la femme de certain citadin , le mari de-
iîreux de fe venger de ccil affront infupportable ,fe ca-
che en vn recoin fccret de la maifon , & void venir fon
cnnemi,lequcl continue fes infolences. Lefoirvenu
ces dcuxmifcrables fc retirèrent en vne chambre,où ils
foupcnt & couchent.Lc mari fort de fa cachette, entre
en la cuiiîne,& voulant boire fait du bruit en remettant
le pot à l'eau en fa place. La femme veut cfueillcr fes
feruantes, mais n'entendant plus lebruit,ellc retourne
vers fon adultère. Cependant le mari eftoit entré au
poifle pour prendre vn cafque & fi cuiraflc. La femme
cfueillee à ce bruit feleue, vient au poifle , démande
quicft là.Mais le mari , ne fonnantmotj la fuie de fi
^mémorables. Ji
près qu*il fe iettc de villefle dedans la chambre , & de
premier abord tue le gentil-homme,nonobrtant Ir refi-
llance qu'il fit auec vn efpicu, lequel elloit près du lid.
Hors ce lid s'eftoit iettee la femme , à laquelle le ma-
ri (qui la defcouuroit àlaclairté dVne chandelle allu-
mée) cric^hors de là,putain , autrement ie te perceray X
coups d'efpee. Elle lui ayant crié merci plufieurs fois>
fort,& ne pouuant Tadoucir^e fupplic permettre qu'el-
le fe confellaft & communiaft,auant que mourir. Quoy
donques dit-il , te repens-tu de bon cœur de ta faute.
Helas;Oui, refpond-elle. A ce mot il lui donne de Tet
pee à trauers du corpsrpuis les ayant mis Tvn auprès de
Tautrcfermc la chambre. Le lendemain , tout ce faid
diuulgué,& le mari prifé de telle exécution, par le con-
feil de Tes amis, s'efloigna du lieu , pour ne tomber es
mains des parens du Gentil-homme. A. Honfdorff,at*
théâtre des exemples.
Vn gentil-homme Hongrois ayant furpris en fa cham-
bre certain venu pour commettre adultère auec fafem-
me,le ietta dedans vne prifon, délibéré de Vy faire mou-
rir de faim.Et pour le tourmenter d'auanrage , il lui tai-
foit de fois à autre approcher du nez vne poule roiliie
afin queTodeur d'icelle lui aiguifaft Tappetit , & que
cela rendift fa faim plus violente : brief qu'vn tel fup-
plice haftall fa miferable mort. Ayant efté fix iours en-
tiers en tels tourmens , au feptieime on le vifîta de plus
près , &fut trouué qu'il auoit mangé à belles dents les
moignons de fes deux bras. LVvier au traitti de ieiuniis
€ûmmentitiis.
Nous auons au Théâtre des Exemples de M. André
HonfdorffvnQ femblable hiiloire d'vn ieigneur Allemaii
enThuringe,lequcl traita de mefme certain gentilhôme
adultere,lequei velquit ii.iours de l'odeur de viandes
délicates qu'on lui mettoit au deuant : fon forfait atro-
ce eftant chaftié par ce fupplicc atroce. Le mefme re-
cite trois autres hiftoircs notables d'vn perfonnage,
qui fous ombre de dcuotion corrompit pluficurs fem-
mes parauant honneftes ; viinfi que iadis fit en Alexan-
drie Tyrannus facnficateur de Saturne. EiUnt dcfcou-
5 1 Hi^oires admirables'
ucrt&conuaincuiHuc exécuté i mon:. Vn autre pcr-
fonnage fort clo(flc,& en grande dignité entre les fiens,
furpris en adultère par vn cordonnier fut poir» lardé &
laiflé mort en la chambre d'icelui.tntre autres dons àcÇ-
quels li abufoic mcfchammenc , il parloic prooiptemenc
& purement François,Italien,Erpaj4nol,Aleman , Polo-
nois,Latin,&eftoitbien veu de l'Empereur & des Prin-
cesjil y a enuiron 80. ans. Au mefine temps vn autre
perfonnape notable voulant aller voler Thonneur d'vne
femme,trouua en lieu de lict vne trape dedans laquelle
venant à tomber il cheut au fond d'vne caue&fe rom-
pit le col. Vn chirurgien defdaignant fa femme honne-
fle , s'eftoit abandonné a vne adultercfle. Certain iour
montant à cheual, &enquis par fa femme où il alloit,
refponditd'vn fouris mocqueur, Au bordeau. S'eftant
toft après rendu vers Taduiterefle, au bout de quelques
heures remontant àcheual, & voulant le manier en
rondjfon cheuai s'efchaufFe, ronfle & rue fi rudement
qu'il jette le miferable hors de Telle par terre , tellemenc
toutcsfois qu'il demeure prins entortillé parl'vn àts
pieds à la bridc.Cecheualirrité commence à courir fu-
rieufementfur le paué,trainantceft adultère de telle
roideur, qu'il lui fit voler la ccruelle furies careaux, &
ne cefla de courir iufques à ce qu'il fut deuant le bor-
deau,où le pauurc trainé demeura mort eftédu fur terre.
L'an 1553. certain perfonnage en la ville de Clauenne
au pays des Grifonsjayant regardé d'œil impudique vne
trel-belle fille du lieu,eiraya plufieurs fois de la desbau-
cher & corrompre. Ne pouuant y paruenir , fous ombre -
d'apparitions , & reuelations, abufant du facré nom de
Dieu, de la bicn-heureufe vierge Marie , d'vne façon e-
>:ecrable,& que ie m*abftié de defcouurir, pour n ofFen-
cer l'oeil ni Toreille du ledeur honnefte & déuorieux;il
feduifit la pauurefillejaquelle ayant trop tard àç.Çco\x-
uert l'impofture, ce malheureux empoigné prifon-
nier,nonobftant l'allégation de fes ordres ,immunite2
&franchifes, fut décapité publiquement, &fon corps
réduit en ctiiàvQs.StHmpJius au lo.lsHrt de fin hifiàindt
Suifi.
AGI'
C^ mémorables.
AGILITE ET FORCE.
ON met au nombre des merueilles de nature le vol
& balancement de ceux qui courent & fe guindent
furla corde. Ily aquelcjues années qu'il y enauoitvn
aflezconu par toute l'Italie , nommé le petit Véni-
tien , tantpource qu'il eiloit natif de Venile, qu'à caufe
de fa petite ftaturc:au refte fi adroit, & agile à courir fur
la ccrde fans peine aucune,que par fois il fe coufoit dâs
vnfac, n'ayant que les mains libres pour manier fon
contrepois. D'autresfois ilmertoit fous chacun de fes
pieds vnbafljn. tout rond, ou des boules à fes talons,&
ainfiequippé montoit& couroit de hardiefle &vitefl'e
incroyable fur vne lôgue corde attachée au faille d'vne
maifon, depuis la tour du palais, iufques à la place du
marché. D'auantage il eftoit C\ fort & robuftc,qu'il pou-
uoit rompre au gcnouil l'os de la cuilfe d'vn bœuf tant
grosfuft-il. Auec fes mains enuelopees d'vn mouchoir
il tordoit enfemble trois doux de fer de la grcflcur du
petit doigt comme s'ils euifent efté mois &ployables.
Il chargeoit fur Çls, efpaules vn foliueau de plus de
vingt pieds de longueur & d'vn pied d'cfpaifleur, & le
foufteaoit longuement deflus, fans qu'il touchaft à ter-
re,ne qu'il s'aidaft de Ç^s m^ins,puis le faifoit palTer d'v-
ncefpaulc fur l'autre. Mon fils Théodore , dodeuren
loix,qui aveu ces traids d'agilité & deforce,auec plu-
fieurs autres tefmoins,m'en a fait le vtcit.LFijler aHprc
mier liure àc prxjliviis dtxmonum^chap.l 8.
lean Langius dofte Médecin de noflre temps fait
mention du mefme, ou d'vn femblable, lequel il dir a-
uoirveuà Augsbourg.Item vn autre en Siieficlequel
cmpoignoità belles dents vne grande pipe , contenant
plufieurs feptiers de bière , comme font les grands ton-
neaux d'Allemagne , laquelle il fouleuoit de terre fans
autre aide,& la iettoir par dcflus fa telle. £n la d^xlejm«
Epiîiu dtfon premkr Ut*re,
c
34 Hijloires admirables
Ferdinand d'Aualos, Marquis de Pcfquairc, Lîcuttf-
nantdc rr.mpcrcur Charles cinquicfmc enla DucJ'é
de Milan, aiioit en les troupes vn Efpacinol nomme Lu-
pon^homme /îrobulte . & Ç\ léger du pied , qu'auec vn
mouton chargé fur les efpaulcs,!! deuançoit à la courfe
tout autre homme qui enrreprenoit d'aller plus vij>e
quelui:vaillanr & hardi pour entreprendre & exécuter
ce qui lui eRoit commandé , pour la confiance qu'il a-
«oiten Ton agile force. Le Marquis , dcfîrant eftre cer-
tainement informé de Tcftat dcTarmce Françoife lors
afle?. proche de lui^donne charge à Lupon de faire vne
courfeiufques àleur camp pour en defcouurir quelque
chofe.Lupon ayant ruminé ce qu'il auoità faire, prend
auecfoy vn^pieton harquebufîcr , en qui illefioit,&
quelque peu denantiour s'cftant rendu près du camp
confiderafoigncufcment Tafr.ete d'icelui , puis apro-
chant d'vn foldat François pofé en fentinelle, &lors
aflez malefueillé,en vn inftant s'approche &fc lance de
vifteiïe fur lui. Et combien que ce Ibldat fuft de haute
taille,& gros à l'aduenant , Lupon le vous troufle &
chargefur fes efpaule'^:& quoy que ce pauure corps fe
clebatift,rcfiftaft le plus qu'il pouuoit,& criaft àjpleine
tefte^qu'onvinft :U'aide,rEfpagnol l'emporte fur fon
col,comme fic'euft efté 'quelque veau ,& commence à
arpenter en diligence , fouftenu de fon harquebuzier,
ialuant à coups de boulets ceux qui entreprenoyent
s'approcher vnpcu trop près d'eux. Arriuéaucamp E-
rpagnoLilfedefcharge gaillardemêt de fon fardeau aux
pieds du Marquis,,qui ayant ri tout fon fioul de cellra-
tageme', & fceu de la bouche du prifonnicr, fi plaifam-
ment porté fur ce genêt :î deux pieds , Teftat du camp,
alfaïUit promptemcnt les François , leur donnant /î
chaude alarme, qu'il les empefcha d'exécuter ce qu'ils
auoyeat entrepris contre lui & les Cidn^.PauL Jju€ enla
vit (il* AiArqmf de Pcj'qi*aire,
Vn Efpagnol nommé Pierre, vint à Naples l'an mil
cinq cens cinquante cinq,& dedans ma maifon fitpreu-
ue de fa force comme s'enfuit. Vn home robufte & pe-
faïucrtoitallibà cheuauchon fur fon efpaule droiCte,vn
autre
cjr mémorables. ' 5 j
autre fur h gauche. Surlebras droit il portoic encor
vn hommer& ^ur la gauche vn autre. Il auoit fur Tes
deux pieds deux autres hommes, lefqucls en tenoycnt-
a autres embraliez.il cheminoit auec toute cefte char-
ge,côme s'il n'euft rien porté. Puis eftcndant & baillant
fes mains contre bas faiibit monter vn homme fur cha-
cune d'icelles: quoy faiftjiifereleuoit debout &hauC.
foit ainfî 'ïts mains iufques à refgal de fa tefte. Apres ce-
la nous lui liafmes les deux mains d'vnc forte corde,
laquelle à^\yi hommes empoignèrent , 6i Tenuironnant'
de cofté & d'autre,en fe roidiflant ferme de leurs pieds
contre terre,elfayereat de Tesbranler : lui au contraire,
retirant fes mains à foyjes mit eu croix fur fa poitrine
de telle fecoufîe , que plu/îeurs de ces àiy. tombèrent
par terre.Defon front, comme d'vn marteau de fer il
pouffa vn clou iufques à moitié dedans vue paroy :
vray eft qu'il fe blefla quelque peu de ce coup. En e-
ftendant le bras il fermoit la main fi ferré , que ces àiyi
enfemble,ne pouuoyent ni ouurir cefte main , ni faire
plier ce bras.Deux brigans le trouuans à l'efcart voulu-
rent l'arreftenmaisil les empoigna tous deux au colet,
les tint fi de court , & fît chocquer fi rudement la tefte
de l'vn contre celle de l'autre, que les ceruelles en vo-
lèrent au loin, 6c furet trouuez ainfi efcrafez fur la pla-
ce.Il auoit le regard agreable,rœil vif,& gracieufement
feuere,non de trop haute taille, mais bien proportion-
né,& de chair tellemêt amaflee & nerueufe,que quand
il eftendoit le bras & fermoit la main, il m'cftoit totale-
ment impofTible de le pincer.Sa voix eftoit forte , hau-
te , & chantoit fort bien. Il ne mangeoit pas beaucoup.
Jeun Baptijte Porte Neapolitain au 4. liurc de fa Phijlognomie
huw.chaAz.feÛ.^»
Antoine de Nebriffe dit auoit veu à Seu ille vn hom-
me né en Tvne des Ifles nommées Canaries,le^uelfan$
ofter le pied gauche d'vn rond ouil le pofoit , s'expo-
foit en bute à quiconque vouloitlui iettervne pierre
de huid pas loin,& n'en eftoit inm.ais atteintrcar ilfecô-
tournoit fi proprement & foupplement , en tant defor-
jçs §c façons:qu'iinpofrible eftoit le touchcr,& pour va
C i
3^ Hijloires admirables
Jiard donnoit ce paflctéps i quiconque le vouloit prea-
6lC.Nebrkjf.en lu z. dccadc de Ch-jî -d' Efpaigiie^liu. Z.chap.l.
Nousauonsveu en Italie vn certain , marchant &
danfant fur vnc corde tendue en Tair , tenant deux lon-
gues crpecs,avant les cuifl'cs armees,tellement que for-
ce lui elloit d'clquarquiller les ïambes. Ilmarchoitlà
deflus hardiment, &fermcment:puis il attachoit à Tes
pieds des cfchall'cs,& auec icellcs couroit fur la corde,
faifant tels autres tours de foupplefle , incroyables à
ceux qui ne les ont veus. Simen Mayol Eue/que Italien,
snfes tours Caniculaires, coUoq.^^.
L'an i^Sz. en la lolcnnité de la Circoncifion de Ma-
l'.umet III, fils d'Amurath^Sultan des Turcs , entre di-
vers paflctcmps qui y furent rcprefcntez , comparurent
cinquante hommes à cheual bien armezjes cimeterres
au cofté,les boucliers au col,les arcs en la main gauche,
& en la droite des baft ons comme demi-picques à l'A-
rabefque.L'on auoit drefl'é au parc des lices à Conftan-
tinople huiâ: moncea ux de fable d'efgale hauteur & âi~
ftance,quatre d'vne part,& quatre de l'autre. Au milieu
vn chemin afTez eftroit,mais bien couuert de fable de-
lié,afin que s'il aucnoit à quelqu'vn de tomber en cou-
rant ,1a cheute fuft moins perilleufe. Sur ces monceaux
de fable eftoycnt fichées des perches , ayans les quatre
d'vn cofté des blancs tout ronds au bout :& les quatre
autres des bhcs en ouale,le tout f;iit de cuir &de papier
bien proprement. C'eiloyent les butes où vifoit le jeu
de ces cinquante coureurs , qui commencèrent à
marcher par ce chemin au pas , premièrement en gros,
puis en reng, & comme en bataille. Sur ce ils partent,
fe desbandenr tout à coup , & commencent à cou-
rir à bride abat uc, les vns après les autres , de tant près,
&iîiuilemenr,que les cheuaux elloyent les vns aux
talons des autres. En courant ils prenoycnt leurs
flefches du carquois & deCcochoyent de telle adreC
fe qu'ils touc h oyent aux ronds , fi ville que l'œil des
fpecliteur^ ne po uuoit a^ez promptement remar-
quer les traits ni les coupi^'Ala féconde courfe , en
lieu qu'ils a'a uoy€ nt.açit.i|^?^ux ronds,ils deicocherent
•^''^^' contre
cf mémorables. 37
contre tousles deux, tant ronds qu'oiiaIcs,dVncermer-
ueillablc promptitude, s'aidans tantoft de h main gau-
che, tantoft de la droitte , Hms varier ni flefchir. Pour la
troiiîefme chargejendefcochantils defcouuroyenr par
fois Tefpauledroitejpar fois la gauche auec leurs bou-
cliers,& ce d'vne vitcfîe incroyable. D'auantage, en
courant à toute bride, ils defgainerent leurs cimeter-
res,& coupèrent ces ronds,& tranfporterent lesouales:
ce qui fut fait en vne mefme courfe. Puis tournans bri-
de tout court defcocherent contre les butes, & auec les
cimeterres,qu'ils defgamerent derechef, abatirent cela:
par mefme moyen retendent leurs arcs & font vne ti-
rade en Tair.Ils firent merueilles de leurs demi-pic-
ques en diuerfes fortes de combats, & pour la fin ef.
planèrent ces butes à coups de cimeterres , arrachèrent
les baftôs ou pieux fichez dans les monceaux de fable,
les jettcrent en l'air , & en courant les receurent & re-
tindrentdelamain. Puis feleuans debout en pieds fur
lesfcUes delcurs cheuaux,recommencerent à courir&
manier comme deuant leurs cimeterres , arcs , & longs
bois. Sans m'arrcfter à toutes les particularitez,ie tou-
cherai vnfaiâ: des plus remarquables,& que Ton tien-
dra peut-cftre,pour chofe controuueeimais ie l'ai veuë.
Du nombre de ces cinquante fe retirèrent à part deux
ieuneshommes,beaux& braues entre les autres. Uvn
femit en pieds fur la felledefon cheual,& receut fur
fes bras fon compagnon tout debout fur fes pieds. E-
ftant en ceft eftatils donnent carrière au cheual, & fc
tiennent fermes, mefme le plus haut monté tiroit des
coups de flefche contre vne pefle de bois que tenoit en
la main droite celui qni le portoit. Outre-plus cts
deux mefmes ayans rangé & attaché deux cheuaux
par les brides,rvn monta, mit vn des pieds fur vne des
felles, & l'autre j)icd fur l'autre felle : fe tenantauffi fer-
me fur les deux qucs'ily euftefté collé, & ponant fur
fes bras fon compagnon tout debout,& tenant en
main cefte pefle de bois contre laquelle l'autre ainfî
haut monté defcochoit habilement & fans faillir, tan-
dis qucics deux cheuaux couroy ont de grande vitefl'e.
[C 3
3? Hijloires admirables
ILycn eut d'autres, quiayans fix cimeterres dcrgaincj;,
&atrache7. les pointes contre mont aux Telles de leurs
chcuaux,re mirent la telle fur les (elles , & lespieds con-
tre-mont, fiiifans en ceil cftat courir leurs cheuaux de
telle yireircqu' on cuil dit qu'ils voloyent. D'vn autre
cortéil y en eut qui le mirent deux en vne mefme fclle,
& comme le cheualcouroit a toute bride, fautoyent en
terrcpuis remonroyentpromptemcnt(S«: Tans délai l'vn
apresl'autre. D'autres fctournoyent dans la Telle ( le
chcLirJ courant de roidcur) tantolt derrière ,tantoil:de-
uan!:,& parmi cela faiToycnt d'autres vire-voulles &
fouplelTcs admirables, Cela fait tous coururenten trou-
pe , & montez à deux pieds Tur les Telles des cheuaux
defcocheren t force fleTches. Pour la hn , eftans ai n(î de-
bout , ils coururent les ^ ns contre les autres auec leurs
demi-picques , faifans diuers exercices que les lan-
ciers ont accoutumé défaire es courTes de cheual. Bref
tout ce qui Te fait en eTcarmouches, courTes, combats,
duels, batailles, retraites, & autres ades militaires, Te
yià. induftrieuTemcnt lors pratiqué par c^s cinquan-
te caualiers. Oeor^e L&heblX^Polonois^cn la defcription des
chofes faite-, k Conîiantinople en la dreoncifion dn fils ^t>i-
murath-it an 1582.
En celle meTmc fefle de la circoncifion TurqueTque
plufîeurs danTeurs Tur la corde firent de belles preuues
de leur adrefle : mais il y en eut vn qui gaigna le prix
fur tous les autres. le ne lâche homme qui ne Toit de-
meuré raiii,le voyant courir filoudainement, defî bon-
negrace, Tans relaTche & de telle hardiefl'e. Certain
Poète ancien diToit en quelquVnede Tes comedies^que
leiîmplc peuple demeura arrefté après vn quidam qui
cheminoit Turlacorde:Mais fi ce Poète euftvcu vn cou-
reur pareil à ceftui-ci il en euftperdu ci itenance. Car
il montoir par les cordes attachées aux» Toliueaux & py-
ramidc>,au plus haut lieu qu'on euftTçeh voir , de telle
vitelTe qu'on eull dit que c'cftoyent eTchellons ou de-
grez:puis delcendoit hardiment, ou à reculons, ou en
deuant,n'ayant pour tout appui autre choTequ'vn petit
bafton dont il Te faiToit contrepoids. Par fois il Tautoit
Tur
^mémorables, 39
furies cordes aiicc les deux pieds, qiielquesfois d'vn
fcuLtantoft du gauchc,tantoil du droit , ores uud , ores
monté fur des efchaffcs , puis cmbrallant la corde auec
les piedsildemcuroit pendu ôcfc tournoitaurour, pui"?
rcmontoit.I! gliffoit jnerueilleuicmcnt droid & hardi-
ment;duplushautau plus bas:&ce que i'eftimeleplus
en ccfte agilité, de nuiâ:,il s'attachoità chafouc pied /îx
cimeterres dergainez;,& continuoit fon ieu à la clairté
des flambeaux , auec tel esbahiiTemc-nt & aplaudiffe-
ment de tout le monde , que lî d'auanture quelqu'vn
des rcgardans auoitenuie de dormir, ccftui-cipar fon
agilité du tout admirable le refueilloit incontinent.
Au moyen dequoyparla voix de tous les grands &: pe-
tits de celte folennelle alTemblee, il fut appelle le pre-
mier maiftre de ce meftier. Le rnefme Lebtlsl7:J,en U mefnic
defcription.
Tay veu fouuentefois auecesbahiflement en la Cour
du Prince de Bamberg vn certain payfan Aleman,nour-
ri& efleué(comme lui mefme Tauouoit )parmi les be-
i}es,& montagnes proches delà,lequeleftoit fî difpoft &
agile de fon corps , que tous ceux qui le voyoyent en
fcs mouuemens & tours de foupleffe demeuroyenttout
eftonnez, voire eftimoyent qu'il vfoit d'enchantemens:
cequeie nepenfepas.Ce qui eftoit fur tout efmerueil-
lable en lui , eft qu'il monftroit fon agilité , non pas
droidfurces pieds, mais marchant fur les pieds & les
mains comme vn chien ou vn chat. En la mefme Cour,
y auoit vn nain , quimontoitfur ce payfan , comme
îiirvn cheual, le faifant tourner & vireuolter en diuer-
fes fortes , ainfi qu'vn efcuyer feroit quelque genec
d'Efpagne : mais quand il plaifoit au payfan , il iettoic
aifé ment fon nain par terre , quelque effort qu'il peut
faire pour fe tenir ferme dclTus. Quelquefois il fe bat-
toit auec des maftins fort puilfans &des dogues d'An-
gleterre qu'auoit lePrince,& par certain aboy qu'il cô«
trefaifoit naiuement,& vn furieux grôdement de chien,
leur donnoit la cha{re,& les faifoit defloger delà falle.
Cela fait , il fe mettoit à fauter fur fes pieds & mains,
ç» auaot,en arrière, d'vne foupleffe incroyable > ôc
C 4
40 Histoires admirables
grimpant plus vifte contre les coings & vers le lambris
de la fallcque n'eiift peu faire vh fingc .-quoi qu'au re-
flc ce fuft vn ruftique , puiirant,& de grolfe pafte. l'ay
veu par deux fois;,eftant à la table du Prince, après qu'il
eu fl: jette bas fon nain, Sfcliafle de la chambre tous les
chiens qui y eftoycnt, il faillie fur les efpaules dVn des
conuiez : de là, fur la table , fans renuerfcr plats ni go-
belets, puis s'cflança de telle viftcflfe vers le plancher,
qu'on euft dit que c'eftoit vn efcuncu ou quelque chat
fauuage.Il eftoit couftumier de courir aufTî ville çà & là
furies toitfts des tours & des maifons bafties enpoinde,
que fcroycnt nos chats domeiliques.Il faifoittant d'au-
tres toups de chat & de fînge, qu'on parloit de fes tours
endiuerslieux,comme dochofedu tout extraordinai-
re,& non ou ye.Ic n'en euHe rien auancé en ce liure,fî
de mes yeux ie n'auois veu fes tours de foupplefle , &
s'il n'y auoitencores en vie beaucoup de perfonnes di-
gnes de foy, qui l'ont veu. Quand ie recueilloy mes
mémoires hift-oriqucs l'an 1^-90. il eftoit encores viuant
& marié Ph.Camerariué.docie lurifconfulte Aleman,tHjei
méditations hi (toriques y chap 7 s .
Lors qu vn certain Turc dançoit fur vnc corde en la
ville de Paris,les pieds dedans vn baflinjplufîeurs le vo-
yans en péril de fe rompre le col , bras & iambes^trem-
bloyentdepeur ne Tofans bonnement regarder Ambr,
Paré au z\.liurechapM.
Le plus fçauant, le plusfeur, le mieux aduenant à
mener vn cheual a raifon , que i'aye conu , fut à mon
gré Monfîeur de Carnaualct, qui en feruoit noftre Roy
Henri fécond. l'ay veu homme donner carrière àdeux
pieds fur fa felle, démonter fa felle, & au retour la rcle-
uer,reaccomiiioder,& s'y raffcoirjfuyant toufîours à bri-
de aualee:ayant pafle par defîus vn bonnet , y tirer de
bons coups de fon arc:amafler ce qu'ilvouloit , feiet-
tant d'vn pied à terre,(tenant Tautreen reftrier)& au-
tres pareilles fîngeries,dequoy il viuoit. // adioufie puis
atres en peu de lignes, ce que nous auons^defcritci deuant
des Turcs à Confiant inople. Et tout à la fin : En mon
Ciifan-
^ mémorables. 41
enfance,dit-il, le Prince de Suimone à Naples maniant
vn rude cheual, de toute forte de maniemens , tenoit
fous fes genoux & fous Tes Grreils,dcs reaies comme iî
elles y euflen»: efté c)ouecs:pour monftrer la fermeté de
fon ziTiCnc. Michel de Montagne au premier Hure de fes
E(fai4 chapitre 48.
l'a y veu feu mon Père par delà foixanre ans fe moc-
cjuerdenos alegreflestfe ietterauec fa robbe fourrée
fur vn cheual, faire le tour de la table fur fon pouce , ne
monter guère en fa chambre, fans s'cflancer trois olU
quatre dcgrez à la fois. Le me/me au i.liu.chap.z.
K^MBIT ION
ridicule.
CE conte me defpleut, quVn grand me fitd'vn mien
allié homme affez conu & en paix & en guerre.
C'eft que mourant bien vieil en fa Cour , tourmenté de
douleurs extrêmes de la pierre, il amufa toutes fes heu-
res dernières , auec vn foin vehement>x-difpofer l'hon-
neur & la cérémonie de fon enterrement , & fomma
toute la Nobleffe qui le vifitoit de lui donner parole
d'aflifter à fon conuoy. A ce Prince mefme , q ui le vid
furfes derniers traits , il fit vne inftante fupplication,
que fa maifon fuft commandée de s'y trouuerremploy-
ant plufieurs exemples & raifons a prouucr que c'eftoit
chofe qui aparteaoit à vn homme de fa forte: & fembla
expirer content^ayant retiré cefte promefTe , & ordonné
à fon gré la diftribution & Tordre de fa monftre. le n'ay
gueres veu de vanité Ç\ perfeuerantc. Cefte autre curio-
fité contraire ;, en laquelle ie n'ay point aulTi faute d'e-
xemple domeftique ,me femble germaine à cefte ci,
d'aller fefoignant&paffionnant à ce dernier poinâ:,à
régler fon conuoy à quelque particulière & inufitee
parfimonie,à vn feruiteur & vne lanterne. M Je Monta"
gneau iMu.de /es Ej[ati,ch.^.
A 2, Hïfloires admirables
K^PPAR iriON
merneïlleufe»
VNperfonnage digne de foy, qui auoit voyage en
diucrs endroits de TAfie & de l'Egvpte , tefmoi-
gnoità plu/îcurs auoir veu plus d'vncfois en certain
lieujprochc du Caire (où grand nombre de peuple fe
trouue à c.ertain lonr du mois de Mars , pour eftre fpe-
élateur de la refurreftion d,e la chair , ce difent-ils ) des
corps des trefpafTczjre monihans , & fe pouflans com-
me peu â peu hors de terre : non point qu'on les voye
tout-entiers, mais tantoft les mains , par fois les pieds,
quelques fois la moitié du corps : quoi fait ils fe reca-
chent de mefme peu à peu dedans terre. Plufîeurs nç
pouuans croire telles merueilles, de mapart defîrant
en fçauoir depluspres cequi en eft,ie me fuis enquis
d'vn mien allié & lîngulier ami , gentil-homme au-
tant accompli en toutes vertus qu'il eft pofliblc d'en
trouuer , cfleué en grands honneurs , & qui n'ignore
prefques rien. Iceluy ayant voyagé es pays fufnom-
mez,auec vn autre gentil-homme aufTi de mes plus fa-
miliers & grands amis^nommé le feigneur Alexandre
de SchuUembourg ,m'a dit auoir entendu de plufîeurs
que ceftc apparition eftoit^-chofe tref-vraye , & qu'au
Caire & autres lieux d'Egypte on ne la reuoquoit nul-
lement en doute. Pour m'en afleurer d'anantage, il me
monftra vn liure Italien^imprimé à Venife, contenant
diuerfes defcripuons des voyages faits par les Ambaf-
fadeurs de Venife caplufieurs endroits de l'Afie & de
l'Afrique: entre Icfquels s'en litvn intitulé Viaggio di
Meffer Aluigi di GeouMnni,di jilejfandria nelle Indie. l'ay
extrait d'icelui vers la fin quelques lignes tournées de
l'Italien en Latin(& maintenant en François ) com-
me s'enfuit. Le 2j. iour de Mars , Tan 1540. plufîeurs
Chrefticns,accompagncz de quelques laniifaires , s'a-
che-
^memorMes. 45
cheminèrent du Caire vers certaine montagnette fte-
rile,cnuiron à demi lieuè de là iadis defîgnce pourcœ-
niitiereaux trcfpaiTez.-auquel lieu s'aficmble ordinaire-
ment tous les ans vne incroyable multitude de perfon-
ne«.,pour voiries corps mortsy enterrez, commefortaiis
de leurs fofles&fcpulchres. Cela commence le leudi,
& dureiufqucsau Samedi, que tous dirparoilTenr. Alors
pouuez-vous voir des corps enuelopez de leurs draps,
à la façon antique, maison nelesvoid ni debout, ni
marchans:ains feulement les bras,oules cuilfes , ou au-
tre partie du corps que vous pouucz toucher. Si vous
allezplus loin, puisreuenez incontinent, voustrouuez
que ces bras ou autres membres paroiffent encor d'a-
uantage hors de terre. Et plus vous changez de place,
plus ces mouuemens fe font voir diuers efleuez.En mef^
me temps il y a force pauillons tendus autour de la
montagne. Car&fains & malades qui vienent là par
grofîes troupes croyent fermement, que quiconque fe
lauela nuift précédente le Vendredi , de certaine eau
puifeeen vn marell: proche de là , c'eft vn remède pour
recouurer& maintenir lafanté,mais ien'ai point veu ce
miracle.C'eil: le rapport du Vénitien. Outre lequel nous
auons celui d'vn lacopin d'Vlme, nomméFeZ/x,quia
voyagé en ces quartiers de Leuant , & a publié vnliure
en Alemand touchant ce qu'il a veu en la Paleftine &
en Egypte. Il fait le mefme recit.Commeie n'ai pas en-
ti-eprisde maintenir que celle apparition foit miracu-
leufe , pour confondre ces fuperftitieux & idolâtres
d'Egypte , & leur monftrer qu'il y a vne reliirredion &
vieàvenir,ni ne veux non plus réfuter ce]a,ni main-
tenir que ce foit illufîon de Satan , comme plufieurs e-
ftiment : auflii'en laiffe le iugement au Ledeur, pour
enpenfer & refoudre ce que bon lui fembiera.p/ï.c^-
merarîus 3 ConfelUer de la Repuhliqttt de Nuremberg , mu fi"
ptantetroifiefme chapitre défis miditatîons hifioriques,
Tadioufteray quelque chofe à ce que delTus, pour
le contentement des Lefteurs. Eftienne Duplais , orfe*
urc ingénieux , homme d'honnefle & agréable coh-
44 Hilloires admirables
uerfatiorijaagé maintenant crenuiron 45. ans, tjui a eftc
fort curieux en fa icunefl'cdc voir diuerspays, &a foi-
^'ncufemencconfîderc diucrles contreesdc Turquie, &
d'Bgyptcme fit vn ample récit de ccfte apparition \'\xÇ-
mentionnée, il yaplus dcquinzeans , m'aftcrmant en
auoir efté le fpcdateur aucc Claude Rocard Apoticai-
rede Cably en Champaene,& douze autres Chreftiens,
ayans pour truchcmanSc conducteur vn orfeure d'O-
trante en la Pouillc,nommé AlexandreiManiotu.il me
difoit d'au:uitage auoir ( comme aufîi firent les autres^
touciié diuers membres de ces rcirufcirans. Et comme il
vouloir fe fai/:r d'vne terte cheiicluc d'cnfa.n, vn hom-
me du Caire sefcria tout haur,2C<«//,lC.«//, antémutaraf'
</^:c*Ci} à direjaiffè, hijfe.tH ne fcais que cejl de cela. Or
d'autant queic ne pouuois bonnement mcpcriuader
qu'il fuft quelque choie de- ce qu'il me contoit apporté
de fi loin, quov qu'en diuers autres recirs , conterez a-
uec ce qui fe lit en nos modernes, icl'eufre toufiours
trouué fimple & verirable,nous dcmeurafmes fort lôg-
temps en cefte oppofition de mes oreilles à fcs yeux,
iufques à l'ani59i.queluy ayant raonftré les Obferua-
tions rufmenrionnccs duDofteur Camcrarius : Orco-
gnoiirez-vous(me dit-il) maintenant queie ne vousay
point conté des fables. Depuis , nous en auonsdeuifé
maintesfois , auec esbahiflcmcnt & rcuerence de la fa-
gelTe diuine.Il me difoit li deiTus qu'.n Chrtllien ha-
bitant en Egyptclui a raconté par drucrfes fois , fur le
difcours de ccfte apparition ou refurrecflion, qu'il auoic
aprins defon aycul & percque leurs anceftres recitoy-
enr,rayant receu de longue main , qu'il y a quelques
centaines d'années, que plufieurs Chreftiens, hommes,
femmes, enfans,s'eftans alfemblez en cefte montagne,
pour y faire quel']ue exercice de leur religion , ils fu-
rent ceints & cnuironnez de leurs ennemis en tref-
grand nombre (la montagnccte n'ayant guercs de cir-
cuit ) left]ucls taillèrent tout en pièces , couurirent de
terre ces corps, puisfe retirèrent au Caire. Que depuis,
cefterefurrcdion s'eft demonftree l'efpace de quelques
iours deuant & après celui du maflacre. Voila le fom-
maire
^ mémorables, 45
maire du difcours Q'£l>icnne du Plais, par lui confirmé
& rtnouucllé à la fin d'Auril idoo.queic defcriuois ce-
fte hiftoircà laquelle ne peut prciudicier ce que recite
Martin de Baumgartenen fin voyage d! JE^ypte , fa'iEï Can
^oy. pt4Ùltépar/esJf*cceJfeurs j f;^tmprime à Nuremberg
l'an i5i^4.Car au i8.chap.du i.liu. il dit que ces appari-
tions fe font en vne mofquee de Turcs près du Caire.
Il y a faute en Texemplairc : & faut dire Colline ou
Mont2gnette,non à la riue du Nil.comme efcritEaHm-
garten, mais à demie lieuèloin, ainfî que nous a-
uons dit.
AP PARiriON S
Sataniques,
Lorsque i'eftudiois en droit en TAcadcmie de
VVitemberg,j'ay ouyfouuent réciter an: es prece-
ptcurs,quVn iour certain vcftu d'vn habit eftrange vint
heurter rudement i la porte d'vn grand Théologien,
qui lorslifoiten icelle Académie, & mourut Tan 154^.
le valet ouure & demande , qu'il vouloit ? Parler à ton
maifl:re,fit-il. Le Théologien le fait entrer : & lors ceft
eftranger propofe quelques queftions furies contro-
uerfes qui durent pour le fait ce la Religion. A quoi, le
Théologien ayant donné prompte folutionji'cftranger
en mit enauant de plus difficiles, le Théologien lui
dit, Tu me donnes beaucoup de peine : car i'auois de
prefent autre choie à faire; & la defl us fe leuant de fa
chaire , monftre en vn liure rexpofition de certain paf-
fage dont ils debatoyent. En ceil: eftrif il apperçoit que
Tcrtranger auoit au lieu de doigts des patres & griffes,
comme d'oiîeau de proye. Lors il commence à lui dire.
Eft-ce toy donc ? Elcoute la fentencc prononcée contre
toi:(lui monftrant le pafî'age du troifiefme chapitre de
Genere)la femcnce delà femme briléra la tefte du Ser-
pent II adioufta,Tu ne ne us engloutiras pas tous. Le
malin efprit tout confus, defpité & grondant, difparuc
auec trefgrand bruit, laiffant fî puante odeur dedans le
4^ HiJIoires admirables
poiflcqu'il s'en fcntir Ljiiclc|ues iours aprcs , & verfa
de l'encre derrière le fourneau. leanGtorge G<^ddinutiy
DoSlenr en droicî a Rojioch , an traité de Ma^is y yenepcus^
L Amis.^c. Hure premier jihap.'^»
En h ville de Friberg en Mifne,le Diable fe prefen-
ta en forme humaine à vn certain malade, luy mon-
trant vn liure, ScTexhorcanc dénombrer les péchez,
dont il le fouuicndroitj pource qu'il vouloit les mar-
quer en ce liure. Du commencement le malade de-
meura comme muet : mais recouurant & reprenant Tes
efprits il refpond , Oeft bien ditjc vay te defchifrer
par ordre mes péchez. Mais efcri au \defl'us en groflc
lettre ces mots,la femence de la femme brifera la teftc
du Scrpent.LeDiablCjOyant ceftc condamnation fien-
ne s'enfuit, laillant la maifon remplie d'vne extrême
puanteur.Lrf mejme.
L'an mil cinq cens trente quatre, M. Laurent Toner
paftcur en certaine ville de Saxe , vaquant quelques
iours deuant Pafques à conférer auec aucuns du lieu,
félon la couftume , des cas diuers & fcrupules de con-
fcienccSatan en forme d'homme lui apparut & le pria
de permettre qu'il communiquaft auec lui i fur ce il
commence à dcfgorger des horribles blafphemes con-
tre le Sauueur du monde. Toner lui refifte , &le
réfute fi courageufement par tcfmoignages formels
recueillis deTEfcriture fainfte, que ce malheureux
efprit tout confus , iSiflantla place infeftee de puan-
teur infupportable s'cfuanouit. loh Fincd at* premier li^
me des 7niracles,
A P P A R I r I ON s
diuerfes en l'air.
*An mil cinq cens , l'on vid en Alface près de Sa-
rfuerne vnc :elte de taureau , entre les cornes de la-
drmemorahks. 47
quelle eftincelloit vnc fort grande eftoile.
En la raefme année le vingtvnicfme iour de May
fur la ville de Lucerne en Suifl'e fe vid vn Dragon de
feu, horrible à voir^de la grolTeur d'vn veau;& de dou-
7 e pieds de long,lequel vola vers le pont de la riuierc
de Rufs qui y palle.
L'an mil cinq cens trois,en la duché de Bauferc, fur
vne villette nommée Vilfoc fut veu vn Dragon
couronné , & iettant des flammes de feu par la
gorge.
Sur la ville de Milan , en plein iour,le ciel net & fe-
rain , furent veuè's plufîeurs elloiles merueilleufement
luilantes.
Au commencement de lanuier Tan 1514. enuiron le$
huiél heures du matin , en la Duché de Vvitemberg
furent veus trois foleils au Ciel. Celui du milieu e-
ftoit beaucoup plus grand que les autres.Tous les trois
portoyent la figure d'vne longue efpee , de couleur
îuifante& marquettee defang, dont les poindes s'e-
ll:endoyent fort auant.Cela auint le douziefmc iour du
mois.Le lendemain fur la ville de Rotvil on vid le So-
leil montrant vne face effroyable , enuironné de cer-
cles de diuerfe couleur. Deuxioursauparauant, & le
dixfepticlme de Mars fuiuant, furent veus trois So-
leils:& trois Lunes aufli ronziefme delanuier & le ài-a^
fcptiefme de Mars. lacques Stopel medecm de Mem-
minge fit vn ample difcours & prognoftic fur fes ap-
paritions,fuiuies de grands troubles , notamment en
Suaube.
L'an mil cinq cens dixfept, le iour de Noel,es cnuf-
rons de TAbbaye de Vinaire en Saxe, fur la minuid, le
Ciel eilant defcouuertSc cler^fut veuë au ciel vne croix
de couleur roufaltre.
Au mois de Septébre l'an ^^oXon remarqua à Vien-
ne en Auftriche diuers prodiges au cieL Lepremier
iour,d€puis trois heures après midi, iufques a cinq , le
Soleil fut veu enuironné de deux grands cercles. Trois
iours après enuiron vne heure après midi , Ton vid vne
torche ardante. Le cwqmdme, au matija «ois foieiis
4^ Hifloires admirables
apparurent auec pluficurs arcs en ciel de diuerfes for-
tes. Le fixiefmcj cnuiron neuf heures du foir , la Lune
aparut pleinement traucrfce d\ ne croix en la face , en-
clofc en vn cercle ceint au dcifus d'vn grand demi-cer-
cle Au point du fepticfme iour, furent encore veus
trois foleils :& depuis fîx heures iufques à fept l'arc en
ciel auec trois lunes. Pamphile Gengenbach fit tailler
ces météores prodigieux, & en publia vn difcoursen-
uoyé à l'Empereur Charles V.
En la mefmc année les bourgeois de Vviflreinbour£;,
ville afTîfe au bord du Rhin, entendirent vn iour en
plein midi bruire eflrangement en Tair vn horrible cYu
cjuetis d'armes, & des courfes de gens combatans &
crians comme en bataille rangée. Ce qui donna telle
efpouuanre, que tous coururent aux armes ,penrîms
que la ville fuft afriegee,& que les ennemis fuflentpres
des portes.
Lors que l'Empereur Charles V. fut couronné en la
ville d'Aixla chapelle, on vidle Soleil enuironnéid'vn
pr:md cercle, auec vn arc en ciel. En la ville d'Erford
furent vciis trois foleils.Outrc plus vn cheuron ardant
terrible à rcgarder,a caufe de fa maffe & longueur. Ce
cheuron baillant en terre,y fift vn grand degaft:puis re-
montant en l'air fe conuertit en forme de cercle.
lob Fincel en fon recueil des merueilles de noflre
temps,re marque que l'an 151^. vnpayfan de Hongrie
faifant quelque voyage auec fon chariot, fut furpris de
la nuiCt & contraint demeurer en la campagne , pour y
attendre le iour. Ayant dormi quelque temps il fe rep
ueillcaiefccnd du chariot pour fe promener , & regar-
dant en haut vid en l'air les femblances de deux Prin-
ces combatans auec les efpees es mains l'vn contre
rautre:Il y en auoit vn de haute taille & robufte : l'au-
tre cif oit plus petit , & portoit vnc couronne fur la te-
•fte.Le grand mit bas & tua le petit, puis luy ayant ofté
Ja couronne la ietta comme contre terre , tellement
qu'elle fut defpecce en diuerfes pièces. Trois ans après
Ladiflas Roy de Hongrie fut tué en bataille par les
Turcs.
Au
C^ mémorables 6 49
Au mois de May de la mefmc anncc furent veus trois
Soleils &diucrs cercles cntremcflcz à Zurich en SuifTe;
Deux ans après , peu auant la desfaite du Roy de Hon-
grictrois autres Soleils furent veus auiTi en Hongrie:
c]u^aucuns interprétèrent fîgnifier que Ferdinand depuis
Roy des Romains, le Vaiuode Iean,& le Turc,auroyonr
guerre enfemble pour le Royaume.
En Tan 1525. fut vcu en Saxc,enuiron le temps au ixcC-
pas de rElcfteur Frédéric ;, furnommc le fage , le Soleil
couronné dVn grand cercle entier & tout rond , refem-
blant en couleur l'arc cclefte. Au mois d'Aouftdela
mc.rme année le Soleil femonftra refpnce de c|uelqucj<
ioursainfî qu'vne groile boule de feu allumée, & de
toute autre couleur que rordinairc. S'cnfuiuit toil a-
prcs la fcdition des payfans en Alcmagnc.
L'an 1525. près de KaufFourem, ville renommée cii
Suaube, on vid trois Soleils eneourez de plufïeurs cer-
cles. Pource qu'il a e-fté défia parlé piufîeurs fois, & fera
encore de l'apparition de trois Soieils,qu'on appelle Pa-
rclies, ie ferai vne digrefllon , pour dire que c'eft , leur*
génération ou fignification. Autour du feul vrai Soleil
créé de Dieu , & failant en Ton ciel au milieu àcs cicux
des C\\ autres planettes , le cours qui lui eil prefcrit , pa-
roiflent es nuées des fplendeurs , qui en clarté & figure
rcfl'emblent proprement au foieil : tellement qu'à peine
peut oii difctrner le vrai d'auee ces apparcns , nommez
Parelies, ^%* «"/iG^comme qui diroit,pres ou vis à vis du
Soleil. Carrelles images, refplcndifiantcs & formées
comme le Soleiljfcmblent vis avis de lui,côbien qu'el-
les foyent pinceurs milliers de lieues au dcfibus. Carie
Iblcil eft au milieu des cieux des phnere£:& les parelies
font en l'air. Quelquesfois aufii par ce nom font enten-
dues les fcmblanccs de la lune. Et quand elles fe font,
Pline dit qu'on les appelle Soleils noclurnes.Lcs folaires
ne fe font que de icur. Les lunaires ^a.ai>bJ'j.i de nuicft.
C'eft chofe certaine qu'ils fe font es nuecs , non pas éii
cieux qui ncpeuuentreceuoir telles imprefilons, à cau-
fc de leur ténuité & tranfparence continue& non tcr^
minec. Or faut-il qwe toute figura foie receue en vu
jô Hijlûlres admirabUs
corps tcrminépaicjLiclcjut moyen c|ueccroit. Lcscho-
fes c|Ui fc fontes cieux durennau contraire Icsparelies
s'c-ruanouiflencbien toit. Aufiinefc ront-ilspas en Tait
/impie, qui eli tranlp-arcnr & non limité. Neantmoins
ils aparoi fient en Ta-r, c;uj eft l'hofte des cxhalaifons
& nuages. D( nt s'« nlujt que les parelies le font ev
Miices. tn après, il faut que la nuée ou ils fe font foitvn
peu erpaiMe,ergaJc,humi(ie,af:n que ce foitvncorps au-
quel fepuiiîe enipraindrerimage du Soleil ou de laLu-
ne, &L d'vne erpaifieur médiocre s pource que fi ellel'c-
ftoit trop elle ne pourroit rectuoir celle empreinte.
AufTi doit-elleertrevnrc? comme font les miroirs : au-
trement lareprelcntation ne s'y pourroit fairerEthumi-
dc,afin quebrplendeur&lafembîance y pénètre, pour
€n faire réflexion. Telles images ne peuuent cftrere-
ceucs qu'en vn corps tranfpnrent. Outre plus,ceftenucé
doit eftre oppofet au Soleil, pour enreceuoir Strepre-
fentcr toutelaface,laquellc n'aparoiftroitqu'i demi, il
ellecftoit de cofté : ou point du tout, file Soleil don-
noità plomb delTus lanuee.Itemla réflexion des rayons
y cil neceiTaire. Car s'ils tranfperçoyent la nuce, nulle i-
mage n'aparoiftroit. Ilconuient aulîi qu'alors l'air l'oit
coyj& nullement agité. Car fi les \cnts fouffloyent, la
nuecferoitesbranlee , & par conibquent nullement dif-
|)ofeei receuoir telle imprefi":on. Comme vous ne pou-
uez voir l'Image de voflre face es vagues d'vn torrent,
ou^ bien en vnc eau coye , laquelle terminée dedans vn
baflln ou autre vaificau , Ç\ le foleil luifant frappe telle-
mcnr qu'il y air réflexion de rayons, vous voyez la fem-
blance du foleil en celle eau , tout ainfi que dedans vn
miroir. Le mefme fe fait en la nuée compofee d'eau
comme dit a eOé. Narurelkment ces parelies font pro-
gnoiliques de pluye^rpoin-cc qu'ils ne Te forment qu'en
nuces moyennement efpai'ies. Or telles nuées font
matière pour lapluye. Supernaturcllcment , ce fonta-
uai. coureurs des iugemens de Dieu , chaftiantlc monde
pa p elfes, guerres, famines: comme on voideftrcauenu
ce noftre temps, non moins qu'anciennemcnr,
inlamcûneanntîc; J5i7.fuç çucçiWu vn grand bruit en
l'aio
tjT memorMes* 5t
Tair , comme de gens armez , & qui fe cîonnoycnt ba-
taille. Toft après le Soleil luifant en temps ferain a-
parut foudainemenc ènuironné d'vn grand cercle né-
buleux.
L'an mil cinq cens vingthùift , enuiron ïa mi-May
f:ir la ville de Zurich frircht veus quatre partlies enui-
tonnez de deux cercles entiers & le SoJtiI entoure de
quatre petis cercles. Aii mcfme an la ville d'Vtrecht t-
ftroittement afllegee, & finalement prinfe par les Bout-
guignonsjappritut en Tair vn progholHc de ce malheur,
dont les habîtans furent aufii mcrucil'eufemenr elton-
nez. C'eft à fçauoir vne grande croix qu'on lurnomme
dt Saind André, laquelle elloit de couleur blafarde, &
hideuleà voir.
Enuiron dix heures de nùiâ: à-\x neuf èfn-îe de lanuicr
15x9. futveueén Alemagnevne ouuertiire au cicLdef-
crite par louianiîs Pontanus en Tes météores. Deux ans
après, fur Lisbonne en Portugal furent veucs des apa-
renccs de feu &: fanglantes au cieî,& toft après tombe-
ront force gouttes de fang des nuecs en terre.
L'onziefme iour d'Auril mil cinq cens trente deux,
cTiuiron fept heures du matin,furent veus à Vcnife trois
foleilsluifans & diftiads, auéc deux arcs en ciel , oppo-
fczau Soleil. Lepremier ne dura guercsje deuxieline
plus petit fe maintint lufques furies neuf heures, Tvn e-
iloit tout rond comme vrie couronne, le vray foleilau
p'iilieu,& les dcuAparelies fur les bords vis à vis : l'autre
?;rc à la couflume par dcflus cefte couronne, fortample,
& dont les deux bouts eftcycnt ergalcment diftans de la
terre. Les parclies eftoyent fi refpIendiiTansquela veuë
nepouuoitles porter,non plus que la clairre du vray fo-
lèil: mais celui du collé gauche veisle raidi refplendil-
foitplusquerautrc,TegardaritauScptentrion,requel en
efchangc dura vn peti d'auanrage , i^ fût plus luilantfur
le déclin. Ils cftoient rougeaftrc.s,eftendans leurs rayon*
fort auant en rair,& iufques à terre.
Sur la fin du mefme mois d'Auriï audit an, vn grandi
cercle blanc,luirant comme criftal,enuironnantle Soleil
'tfoïi leuer,futyeuen SuifTc, En pluiîeurs Prouùfcts 4^
D ?,
5^ Hiftoires admirables
rEuroperoinid des Dragons volans en l'airpargron.
les troupes , quclc]ucs fois iufques au nombre ie
«quatre cens, ayans tous des couronnes royales fur la te-
li[ci& les telles,comme celles des pourceaux.fur tout au
regard du groin. Ceux de Munltercn Vvefphalic virent
en plein iour, le ciel cftant clair & fercin , vn Cl.cualitr
tout armé courant en Tair.
Le grandcommandcurde Malte fit pubb'er Tan 1531.
par toute Tturope , vne aparition mcrueiUeufe auenue
en Aflyrie,celle année mefme dont le fommairc eft tel.
Enuironle rcptiefmeiour de Mars,vncfemmenommce
Rachiene , d'entre le vulgaire , accoucha d'\ n beau tîls
qui auoit les yeux cllincellans & les dents luifantes.Au
mefme inftant qu'il nafquit , le ciel & la terre furent c-
ftrangemcntenncusje Soleil apparut luifant à minuid
comme en plein midi : & en plein iour dcuintfi tenc-
breux,que depuis le matin aufoir, l'on ne vid goutte en
tout ce pays là. Puis après il fc monl1:ra,mais d'autre h-
gure que de couftumc auec diuerfes eitoilcs nouuellcs>
errantes çà & là au ciel. Sur la maifon en laquelle naf-
quit ceft enfant, outre quelques autres prodiges tomba
le feu du ciel, qui tua des pcrfonncs. Apres l'eclypfe de
Soleiljfuruint vne horrible tempefte en Tairtpuis il tom-
ba des perles du ciel. Le lendemain on vid a oler vn dra-
gon cnfiamme par tout ce climat. Dauantage vne nou-
uelle montagne plus haute que nulle autre aparut , la-
quelle fe fendit incontinent en deux parts & au milica
d'icelles fut trouueevne colomne,oii elloit certainecP
criture en grec, portant que la fin du monde aprochoir,
puis fut ouye vne voix en l'air exhortant chafcun à fe
prepaicr. L'enfant ayant vefcu deux mois,commencc à
parler en homme d'aage, & par diuerfes illufions fcmet
en crédit , iufques là qu'il ,fut reueré & adoré comme
Dieu , fe dcfcouurant élire vn malin efprit,qui eut Vne
merueilleufe efficace d'erreur en tous c^ s pays là.
Près de luban ville de Lufatie , furent veus au ciel
ferein & coy, le lendemain de Pentecolle, i535.enuiron
deux heures après midi , des troupes armées s'auan-
^ans du Septentrion à la partie oppofite , & ouit-on
des
^mémorables. 55
-des cris en l'air, comme de gens mcflcz au combat. Sur
la ville de Viiiaire en Saxe furent veus trois chcurons
de feu en rair:& le iour précèdent la prinfc de Muntter,
aparutfur la ville en temps defcouuert vne croix & vne
clpee nue. Sur la fin de luillct en la mefme annee,es en-
uirons de Zurich en Suifle , furuint vne furieufe & pa-
rauant non ouye tourmente en l'air, lors tout en feu,
iointc à des tonnerres du tout horribles. Il tomba de
l'air en terre des flammes ardantes fort fpacieufes , qui
bruflerent entièrement cmq maifons auprès d'Adel-
finge. Ce mefmc mois, comme les habitans de Smelvvic
clloient en leur Eghfe à leurs dénotions deuant difner,
vne clairté merueilleufe du ciel aparut tout à coup;
puis la fouldre furuint, qui tua deux hommes, & de l'ef-
fort de fon exhalaifon en ietta par terre trente autres à
demi-morts, ayantbruflé tousleurshabillemens. Mais
les corps furent garantis, & eurent plus de peur que dç
mal.
Lefepticfmeiour deFcurierif^^. cnuiron deux heu-
res après minuid , furent veus au ciel, fur vn quartier
d'Efpaigne , deux hommes armez , & çourans fus l'vn à
l'autre auec TePpee au poing, l'vnportoit au bras gau-
che vne rondelle, où eftoit peint vn Aigle auec ce mot
autour, Regnaho , c'cft à dire , le re^ncay. L'autre auoit
vn grand bouclier auec vne cftoille &' vn çroiflant, &
ceftc infcription Régnant, c'cÛà duc, iayre<^né. Celui
quiportoit l'Aigle renuerfa l'autre. Pareil combat fut
vei* en Hongrie, vingt ans après, que nous marquerons
en fon ordre.
En l'an 1537. le premier iour de, Fcurier fut vcu en I-
talic vn aigle volant en l'air, portant au pied droid vne?
bouteille, & au gauche vn Icrpent entortillé, fui ui dVn
nombre innombrable de pies. Au melmc temps fut veue
audl en Tair vne croix Bourguignonne de diuerfes cou-
leurs. Qu^inze iours auparauant, fut veue en Franconie
entre Pabenberp & la foreft de Turingc , vne cftoile de
grandeur merueilleufe , laquelle s'eftant abaiflec peu i
peu, fe reduifit en forme d'vn grand cercle blanc, dont
cpll après fortirent des îourbillons de venr, 6c des towW
j ^ Hijloires admiraf?les
fes defcu, qui toinbans en terre firent fondre des poin-
tes de picques , fers & mords de chenal fans oftcnfer
homme ni édifice quelconque.
L'an 1538. furent yeiis en l'iiir fur diuers endroits d'A-
Icmagne , des hommes armez , cpmbatans, Sccomme
s'entretuans. Vers Orient luifoit vnc el^oile de gran-
deur non acouftumec , ayant les rayons rouges comme
fang,&:pres d'icelle vne croix toute fanglantc , & vn c-
ftendard volant en l'air. Deux ans après futveucvne
autreei^oile fortrefplcndifîante dedans la nuée, com-
meraubeduiourparoifî'oitlez^. de Décembre. Le len-
«îemain fortirent delà Lune dpux eftoilcs cftinçellantes
& luifantesà mcrueilles.
Onvidrani54i. trois Sokils embraffez d'yn arc eri
ciel. L'an fuiuant furent veucs fur le pays de Saxe des
ver£;cs& flambeaux dcfcu en l'air. L'an 1544. Ie7. iour
d'A\irilàS.heurcsau foir , le ciel eftant fort defcouuert
futveue fur vnc vilette de S uiffe nommée VVyl, c^
Turgau , dedans la face de la Lune, vne croix blanche,
fortiuifante , & dont Jes quatre bouts paffoyent beau-
coup (nommément celui d'embas) hors de celle face de
Lune. Deux iours après fut veufurvnc autre vilette en
Suiffc, vnp heure dcuant midi, le temps eftantfort clair,
yn ^rand ceiçlc blanc, oC luifaut, dont le centre depuis.
ja parrie droite lufques à la partiç gauche citoit occupé
del'arcen ciel, félon qu'il aacoullunié defe monftrcr.
Ce cercle tournoya 4. heures durant droit au deuant dii
milieu du rond du Soleil.
Le ZQ. lourde Mars, 1Ç45. enuiron les huiâ: heures
du matin çheut es enuirons d^ Cracouie vn efclat de
fouldre après vn tonnerre fî impétueux , que toute U
JPoloîzneenfutefmeuc. Incontinent aparuientau ciel
tTois croix rouflalhes, eiitre lefquellcs ello:t vn hom-
nie armé de toutes pièces , lequel auec vne cfpce ar-
dantecombatoit vne armée laquelle ildcsfit:&la dclfus
ïuruint yn horrible Dragonlequpl engloutit celt h om-
•me vidorieux. Incontinent le ciel s'ouurit comme
rfiut CI) feu , & fut ain/î yeu Tpfpacc d'vne tonne
liciire. Puis aparurcm trois 'arcs en ciel auec leur;
■ ' ' ■ codeurs
cjrmeworahles, 55
touteurç acouftumccsjlur le plus haut cîcrqueis eftoir la
forme d'vn Ange,comme on le reprefenre , en figure de
feune homme qui a des ailes aux efpaulcsjtenant vnSo-
leil en l'vne de ces mains;, vne Lune en l'autre. Ce deu-»
xiefmefpci^acle ayant duré demie heure en prefence de
tous ceux qui voulurent le voir , quelques nuées s'efle-
uerent qui couurirent ces aparences.
En labalTe Hongrie futveuTan 1^46'. l'elpace d'v-
ne heure entière le ciel s'ouurir, dont vne fort grande
abondance de feu cheuten terre, deflus cefeu apparue
vn bœuf noir, lequel fembloit piller du feu.Deifus BcU
gccn ville de Mirne,&: le pays Girconuoifin,futveue vne
autre ouuerture de cicHaq-oelle dura i. heures de nui<5t>
ledixiefme iourde Feurier;, & cnuoya ces rayons iuf-
ques en terre. Au mefmG temps furent veus trois che-
urons enflammez , & de diucrfcs couleurs , errant
en Tair.
En Tan mil cinq cens quarante fepc , onviddefFus-
Halberftad en Saxe , vne boule noire partant du milieu
de la Lune,& courant impetucufementvcrs \c Septen-
trion. Le quinziefme lour de Décembre au mcfme an,
les mariniers de Hambourg aperceurent en Tair à la
minuiâ: vn globe ^rdant & luifant comme le Soleil,
roulant vers la partie Méridionale, les rayons duquel
elfoyentfi chauds,que les paffagers ne pouuoyét durer
dedans les Nauires : mais furent contraints fe cacher &
mettre i couuert , cuidant que leurs yaillcaux deul-
fcutbrufler. L'on y\à aufli en Tair au pays de Suifle
deux armées attaquées au combat.-itcm deux lions ram-
pans pour s'cntredeichirer , dontl'vn arracha des dents
la telle à l'autre. Delfus eux paroiiToit vne croix blan-
che eif édue en long,iiyanr le bout d'embas forme com-
me vn fouët.Cefte mcime aiincclc douzième lourd' A-
uril & l.es deuxluiuans, toli après midi, le Soleil fut vett
en fon ciel comme vn globe de feu , & en plein lour
les eftoiles aparurent. Dix lours après , qui elloit le Z4.
on vid en SaxcThuringe, Suifle, France & Angleterre,
le foleil d'vne facefombre & fanglàte,rerpace de 4. heu-
r£s,au grand eitgnneméc df pluficurv.il côtinua en ccft
O 4
5^ Hijloires admirables
eftat quelques autres iours fiiiuans. Leiour ifOfto»-
bre ruiuant,enuiron les 7. heures du matin , fut veue au
pays de Saxe la forme d'vne bière de trerpaHe couuertc
d'\n drap noir , chamarré d'vne croix de couleur roul-
fc, précédée & fuiuie de plufieurs figures d'hommes
en dueiljchacun d'iceux portantvne trompette, dont
ils commencèrent à fonnerfi haut, que les habitans du
pays en entendoyentaifement le bruit. En ces entrefai-
tes aparutvn homme armé de toutes pièces, de terrible
regard , lequel defgaignant fon efpee coupa vne partie
du drap, puis de (es deux mains deichira Iç refte , quoi
fait lui & tous les autres s'efuanouyrent. Au mois de
Décembre en la mefme année es enuirons de Rome,
aparut en l'air trois iours confecutifs , enuironles trois
heures après midi , vn balay comme mouillé en fang,
& vnecroixrougc, au delfus de laquelle voltigeoit vn
aigle. Au mois de May précèdent , es enuirons de
Saxe & du Marqutfat de Brandebourg , furent vcus
deux globes de feu, iautellans autour du Soleil, le plus
grand defquels couunt tellement le Soleil, qu'en plein
iour il paroifîoit comme tout rouillé. On vid auffi le
feu du ciel tomber en terre & fur des villes, parauantau
moi^dcFeurier , il en eftoit tombé en diuers endroits
de Saxe : Où l'on A-ui auili en la niellne année vn fu-,
rieux combat de deux armées en l'air fur la ville de
Qu^cdelbourg.
L'an ir.il cinq cens quarante h ni ft , le vinottrofficl--
mciour dcluillct, la Luncquieiloit au plein aparurdc
couleur de fang fur Rofenfeld ville de la duché de Vvi-
temberg: & dedans celle lune fut vcu vn bras de cou-
leur noiraftre auec vne main ellendue , puis après ccfte
Luncayanrrecouuréfacouilumicreciairce fut derechef
vcuc ayant trois cheurons ou larges barres de mefme
couleur que ce bras, qui la trauerfoyent diftindement
& en droite ligne. Ces barres efuanouyes aparut vne
croix Bourguignonne noire audeflusde la Lune, aux
•deux collez de laquelle on vid deux autres petits ronds
^ç Lune.
tn Tan fuxuant: , qui fut ij4^.r ur le matin , le folcil
Ci^<3n;
^ mémorables. 57
- cOantfoi't clair, au moisdc Mars, fur vn autre quartier
d'Aicmagne fut vcue en Pair la iigure d'vn homme vc-
ftu,equippé comme vnPrinceAleman,ciu defl'us duquel
dVn autre cofté paroifloyent vnlion & vn mouton, qui
s'cmbratToyent comme de bon accord cnfemblcideuant
ce Prince eftoit vn grand chappelet de fleurs qu'il vou-
loitempoigner delà main, mais ne pouuant, il empoi-
gnevnccfpee laquelle eftoit fous fes pieds des lecom-
mencement : puis en fit trois ou quatre tours par def-
"""tw^a tefte : finalement tout cela difparut dedans les
nuées.
L'an 1550. furent veusdenuid fur la ville de Lipfîc
en Mifne trois globes de feu. Et au mois d'Aouft de la
mefme année, es enuironsde Nuremberg, le ciel eftanc
fort dcfcouuert, on vidle Soleil de diuerfcs couleurs*
ëcfuricelui vn vaifieau , lequel venant à panchcr , en
fortitdufangdontle Soleil fut arroufé. A cofté puroif-
foitvn aigle ayanf les ailles cfpandues , bigarrées aufli
de diuerfcs couleurs,maîs fans pieds. Vn peu au deffous
du Soleil& de T Aigle eftoit l'Arc en ciel, & droit fous
icelui vn homme tenant de la main gauche par la bride
vn cheuai harnaché , &de la droite vn chitn de challc
tout blanc.
Ledixncuficfme iour de luillet précèdent afl'cz près
de VVittebcrgen Saxe fut veue au ciel la forme d'vii
tiGsbeau cerf , & au deft"ous, des armées qui combatoy-
entauec grands bruits & cris cftroyablcs. Il tomba lors
dececonnidvne pluye de fang en terre, le Soleil appa-
rut fort hideux & comme hors defoncclyptique, fendu
en deux, & en apparence aprochant de terre. Quelques
femaines au parauant, l'on auoit veu aufil prcfques im
mcrmc endroit vne efpcefanglante en rair,& \ ne pièce
d'artilierie,montee fur roues. Item le ungtquatiiefmc
jour de luin entre fix & neuf heures du matin , le
temps fort ferein, fe monftra au ciel vne croix noire,
auec vn jauelot ayant vn hameçon à IVn des bouts,
a l'autre trois petites barres en façon de chcuilles ou
arrefts.
PçfTus Lisboi^nc en Portugal aparuc le vintgthmV
5* Hffl cires admirables
Ôicfmc iourdelanuicn55T. vnc gro (Te poignée de ver-
ges fanglantcs au ciel, item des feux cfpouuantables: \\
plut du fang, & s'cnfuiuireiKtcls trcmblemens déterre,
<}ue deux cens maifons furent csbranlees & renuerfces,
«ionts'enfuiuit aufll la mort de plus de mille pcrfon-
nes. Le vingt vnicfme lourde Mars enuiron les fcpc
heures du marin on vid à Magdebourg fept arcs & trois
Soleils au ciehaufoir trois Lunes, donc celle du milieu
lavrayceftoiten fa couleur ordinaire , les deux autres
clloyent de couleur de fang. Ces trois Soleils furtnr
aulli veus i VVitebergen Saxe, auec dix ou douze cOi-
clcsqui les en uironnoyenr, les vns tous ronds, les autres
demi ronds,fortfpacicux i quelques autres moindres, &
ci'autrespetis , prefques tous de la couleur de Tare en
ciel. Le dernier iour deFeuricr, c'eft à di re trois femai-
nes auparauant , ceux d'Anuers en Brabant auoyent
auflî veu trois Soleils enclos en diuers ronds , & enui-
ronnez de «quelques arcs.
L'an mil cinq cens cinquante deux, le dixneufiefme
iour deFeurier,enuiron trois heures après midi, ceux de
Malinesen Brabant virent le Soleil premièrement de
couleur bleue, puis de couleur rouge, enuironné d'vn
grand cercle auec l'arc en ciel, enuiron onze moi^a-
presafçauoirle vingtroiftefme iour de lanuier 1553. fut
les huic^t heures du loi- Ton vid iBaflela Lune enuiron-
Jice dVn cercle entier fort aparent , & grand , de mefme
Couleur queTarc en ciel, lequel dura trois heures entiè-
res. Au mois de luin fuiuanr, furent veus en Tair Icrain
&dercouuertfurla ville de Cobourg , entre cinq & lîx
heures dufoir , diucrfes forces d'hommes , puisdes ar-
mées, qui fe donnoycnt bataille , & vn aigle Voltigeant,
les ailes tout efpanducs. En Juillet furent veus au ciel
«ieuxferpenstntrelalfez, fe rongeans Y\n l'autre, & au
milieu d^'eux vne croix de feu. Au mefme an la ville de
-JMagdeboufg fut afl'<egee de prcs,& entre autres merucil-
les le Icndemrjn de Pifques le Soleil aparut fortiuifanr,
incontinent après fou leuer, & enuironné d'vn grâd cer-
cle bUrie co,sjine laiét , Icçjuei çlioic uauerfé de quatre
trrcs
cf mémorables, 59
arcs en cie),les plus beaux qu'on enft oncques veus. Cc-
In ic monllrarcfpacede demi-heure, &le Soleil ayant
leprins fa clairté naturelle continua fa courfe.' Dix
iours au parauant entre fept &huiâ: heures du matin,
furent veus fur la mefme ville trois foleils : le vrai e-
ftoittn fa clarté ordinaire , les deux parelies auoyent
couleur de fang, Ayans duré prefques tout le iour, fur
le foir on vid trois lunes , dont tous les habitans du lieu
furcntfort eftonnez , leurs couleurs eftoyent du tout
bigearres: & après eftre monftrees quelques hcuiesdu-
rant, les deux lunes apparantcs, ou parafelenes , deuin-
drent rouges comme fang , puis s'ellans efpandues ei^
|-ayons de longue eftendue, finalement difparurent : la
yraye lune qui eftoit au milieu retenant fàfplendeur&
joute acouftumee.En cefte mefme année deccdale Duc
George:, Prince d'Anhalt, excellent Théologien. Le
iour qu'il trefpafl'a , Ion apperceut de nuid au ciel fur
la ville de Vvittebergvne croix bleue. Quelques iours
deuant la bataille donnée entre Maurice Duc de Saxe &
Albert marquis de Brandebourg , Tirnage d'vn grand
homme apparut es nuées en vn endroit de Saxe. Du
corps de celt homme , lequel paroiilbit nud, commen-
ça tout premier à découler du fang goûte après goûte:
puis on en vid fortir des cilincelles de feu, finalement il
difparutpeu à peu.
Av mois de lanuier mille cinq cens cinquan-
tequatre , aparurent par deux fois en Saxe trois So-
leils. Le premier iour de Feurier fuiuant , es enui-
rons de Chaalons en Champagne , fut veu en l'air vn
grand embrafement de feu . qui tcndoit du leuantau
coucliant , en forme & figure d'\ne torche ardente
courbée comme vn croiiTant, Le feu craquettoit »
& dardoit de toutes parts des eftincelles , tout ainft
qu'vne malfe de fer fortant de la fournaife , &
fur laquelle les forgerons frapperoyent de leurs
marteaux , le plus fort qu'il feroit pofl'ible. Au-
cuns adiouftent que cefte torche aparut autour delà
'Lune,, 6ç iQonliiou à rvft des boucs la pointe d'vne
^o Hi/loires admirables
lance. Le dixncuficrmc iour de Fcuricr furent voues i
Ncbrc deux croix de couleur bleue au ciel. Et le mclmc
iouraGriefen en Tliuringe, l'on vid dedans le Soleil,
c^ui luifoit clairement, vne croix bleue, C^ grande qu'elle
couuroit toute la face du Soleil. Des deux coftez
elltauoitvn p.rand chcuron de feu auec diuers cercles.
Le neuficfinc iour d'Auril,dellus Sult7.feld,à demi iour-
necprcsde Schumfurt , ville impériale, furent veues
de nuid: deux Lunes. Au mois de Mars précèdent eftoy
cnt apparus des Soleils de diuerfes grandeurs auec
quelques cercles , en Bauicre & es pays voifins. Pre-
mièrement le (ixicfmeiourde Mars , entre h uiâ:& neuf
heures du matin , furent veus deux Soleils auec Tare en
ciel. Le 15. iour du mefme mois cnuiron vne heure a-
près midi, ceux de Nuremberg en virent autant , & d'a-
Uiintate vn autre arc vers occident , & les Soleils enclos
de cercles tout-blancs aparurent trois heures durant, a-
uccvn long cheuron ardent. Lehuitiefme iourfuiuant
on \ià trois Soleils à Reinsbourg.Leur commencement '
futenuiron vne heure après midi. Entre deux & trois ils
femonftrerent clairement, & finirent à 4. heures. Ils
lettoyent des rayons d'vn cofté comme d'vne Comète,
celui du milieu vers Septentrion, les deux autres à l'O-
rient & àl'Occidcnt. Au mois de Mars de la mcfme 2\\-
necfurdiuerlès villes d'Aîemagne, entre quatre & cinq
heures du foir , furent veues au ciel diuerfes fortes de
croix furnommees Bourguignonnes, mais blanches &
aucunement touchantes Icsvnes aux autres. Le ving-
troiiîefmeiour du mtlmemois, vn peu auantquele So-
leil fe couchaft, furent veues deux parelies enuironnez
auec le Soleil dVn fort grand cercle. Deifus le ^ ilage de
Blech,non guercs loin deNuiemberg,aparut ronziefmc
jour de luin vne baguette de couleur de fang au trauers
duloieil, auecdescfloiles ou boules de couleur d'azur.
Incontinent après furent veus deux cTcadrons de gens
armez , qui auoyent des cornettes bleues lefquels deux
heures, durant fe meflcrent en furieux combat \ts,
vns contre les autres , au trefgrand cftonnemcnt àc
plu^curs qui virent le commencement , la fuiie
.& h fia
^memor4hles. 6i
& la fin de cefte aparition. Le treiziefmeiour de Juin,
cnuiron les cinq heures après midi fur la ville dlenc le
Soleil fut veu tout de couleur de fang , duquel inconti-
nent après aprochcrcnt deuers Midi & Occident au
Septentrion , des grofles boules de feu en grand nom-
bre , lefqMcHes obfcurcirentla claitcé d'icclui. Confe-
queminent deux cheurons de couleur fort rouge appa-
rurent, trauerfnns le rond du Soleil.
Le vingt quatrielineiour de I[/illet aparurentcn Tair
cnuiron les dix heures du loir , au quartier du pays
nommé le haut Palatinnt du Khi n, -vers la forcil: de Bo-
hême^ deux hommes armez de toutes pièces , i'vn des-
quels eiioit de beaucoup plus haute iLiture que l'autre,
ayant à l'eftomach vne elloile fort luilànte, & vne el-
pee flamboyante en la main, comme aufh au oit le plus
petit. Ils commencèrent vn rude combat, la fin duquel
fut que le petit fut aba-U;, & ne ponuoitfe remuer : ii
delTus fut apportée vne chaire au vi<ftoneux,en laquel-
le s'eftant ailis il demeura quelque temps, & ne celia de
menacer de Tefpee qu'il tenoit en la main celui qui «i-
Ibit à fes pieds , coir.me C\ a tous coups il eull voulu''le
frapper d'eiloc & de taille. En fin tous deux difparu-
rent. Le cinquiefme lour d'Aouft eufuiuant, à neuf
heures du lbir,pres de Stolpen, en la partie méridionale
du cieJ,aparurent des troupes guerrieres,quiauec çrâds
cris, & cliquetis d'armes le donnèrent les vns au'x au-
tres trois charges furieufes. Quand la première charge
fut acheuee,iliortit des nuées du feu en abondance qui
empefchoit de voir ces troupes. Ce feu dilparoiflan^oii
les vid retourner d la féconde charge. Puis le feu fe ral-
lumant, oneuft dit qu'ily auoit quelque manière de
retraittepour fe rallier de part & d'autre. Ouoi fai(ft,
onrcuintà,la troilîefme charge, laquelle finie, tout
difparut.
En la mefme année à Friberg en Milhe fut veu en
plein iour la femblance de nodre Seigneur lefus Chrilt,
felouque plufieurs peintres ont accouilume de le re-
prerenter,afl'is defTus vn arc en ciel , dont les couleurs c-
lloyent mcruciileufemenc viucs. t»; enuirons d'vxie
et Histoires admirables
autre ville nommée Zopcde le Soleil iciantaparutroii"^
ee comme fano , ayant au dcH'usvn palais magnifique,
lequel eftoic touccnfcu. Auxdeuxcoftésdu SoleilTon
voyoit deux hautes colomnes fort artiftcment façon-
nées , & de mefine couleur que Tare en ciel :il fembloit
que leurs foubafTcmens touchafient la terre, & s'eilen-
clifîent fort en largeur. Le lendemain le Soleil fe leu.i
auecvnc couicur paflc, & ce palais eitoit au delîus fort
reluifant. Aulli Ics colomnes aparurftnr,mais non fi bel-
les & longues que le iour précèdent.
Ledixierme iour de Feuriermil cinq cens cinquante
cinqfu'^ent veus trois Soleils à Vinaire en Saxe , & le
treiziefme de Marsaparutau cielcs quartiers de Turin-
ge, vne efpee flamboyante. L'ony.iefme iour de lanuier
1^56". vers les montagnes qui ceignent d'vn coiK- la vil-
le d'Augsbourg, le ciel s'ouurit, & fènlblafe fendre,
dont tous furent mcrueilleufement eftonnez: fur tout i
caufedcs cas pitoyables qui auindrent incontinent a-
près. Caraumefmeiour le meilager d'Augsbourgtu.i
d'vn coup de piftolc certain Capitaine aux portes de 11
ville. Lclendemain la femme dVn forgeur d'efpees, e-
ftimant faire vn grand burin, tua dedans famaifonvrf
marchant. Incontinent après fa feruante fe tua foi mef-
me dVn coup de couileau.Vn iour après en querelle vit
boucher fut renuerfé mort d'vn coup d'efpee : ocdeux
villages furent tous bruflez. Le quinziefme iour du mcÇ-
iiie mois la garde de la foreft de faincle Garhenne fut
tranfperce & trouué occis 4 vn coup de harquebufe. Le
le dixfeptiefme , vn valet d'orfcure, pouffé de defcfpoir,
fe noya. La nui(5l (uuiante plufîeurs furent blefîez à
fnort par les rues. Toubliois à marquer que ce mefmé
onzicfmeiourde lanuier queleciel s ouuritver.s Augs-
bourg, furuintvn tel changement en Tair furie quar-
tier de Milhulè en Bauiere, & vne clairté fî grande apa-
rutde nuiâ: , qu'elle efteignit la fplendeur des chandel-
les allumées en chambres & boutiques,fi que trois heu-^
res durant ceux qui voulurent trauaiîlcr n'eurent be-
foin d'autre lumière que de celle qui les efclairoit du
ciel. Quelques mois après le cïclaparucouuert en vn
autre
d" fnemoralles* 6^
autre endroit de Suaube , doncfortoit teU« abondance
defcu, c]ueplu(îeùrs en deuindrcnt muets de peur, lly
eut quelques bourgades & villages qui en furent at-
teints & ruinez. On vid aufll au ciel des femblances
de Chameaux , lefquels deuoroyent des hommes ar-
me/.
Endiuersiours& mois de la mefme année i^')6. fu-
rentremarquecs autres apantions s comme en Feuiicï
furent veus au ciel fu: la Comte de Eœts des armtes à
pied &acheualquicombatoyentfurieuIement.Auraois
de Septembre lur Ane villette du irLarquilat de Brande-
bourg , nommée Cuftiin, enuiron les neuf heuresdu
foir,on vid infinies flammefches de feu faillans du cii^y
& au milieu deux grands cheurons ardans. Sur la fin fut
entendue vne voix criant, malheur, malheur a rF.gli{c.
Nous auonsditci dcuant quel'iin i^^^.auoitelle vei: en
Efpagne vn combat au ciel de deux ieunes hommes.
VVolfgang Strauch de Nuremberg cfcrit que Tan 15Ç/Î.
fur vne ville de Hongrie quil nomme Br.batfcha fut
veueie(5.iourd'0<ftobre peu auant Soleil Icuant , i»
femblance de deux garçons nuds combatans en Tair a«
ueck cimeterre es mains, & le bouclier es bras. Cduî
quiportoiten Ton boucher vn aigle double chamaiUi
fî rudement fur rautre,dont le bouclier portoit vncixjiit
fant, qu'ilfemblaquele corps nauré deplufîeurs playes
tombaftduciel enterre. Au mefme temps & lieu fut
veu l'arc en ciel auec fes couleurs accoullumees, •& aux
bouts d'iceluideux Soleils. Non gueres loin d'Augs.
bourg fut veu au ciel le combat d'vn ours contre vn ly-
on, au mois de Décembre en la mefmeannee:& àVVir-
tebergen Saxe le fixiefme iour d'icclui mois trois So-
leils, & vne nuée tortue, marquetée de bleu & de rouge,
cftendueenarc, le Soleil paroiifant paile& trille entre
les parelies. Qwatie moisauparauant trois Soleils auo-
yent elle veus entre Ensheim & Bafle.
Quant aux fignificarions de toutes ces aparitions CuC-
mentionneesjie n'y entre point. Depuis celle annce-li,
j)iufîeurs ont remarqué en diuers climats du monde»
noramémeniidiîrE^ropCi 4c$am;ie^ lïjcrueillcs au ucJ#
^4 Hifioires admirables
iufcjucs au fîeclc prefent. En d'autres liurcs nous pour-
rons faire mention d'icellcs. Pour le prefent, nousrc-
prcfcntons celles que Conrad Licafihenes a recueillies dc
lob Fmccl.de Mare frytrch,& de plufieurs autres , en (on
grand volume de Prodi^ni.i^ Ojlenti>. Quant aux corne
tes, pîuyes de fang , «^relies prodigieufes, & autres nici-
ueilles du ciel, nous en parlerons en leurs endroits
propres.
APPETIT DE BOIRE
CJr de manger perdu.
NO V s auons l'cu en certaines maladies les patiens"
auoir tellement perdu Tappctit de boire & de
manocr , qu'ils ne prenoyent aucune fubftancc qui va-
lu file parler. De ce nombre fut vue nonnain au con-
ucntde faincle Barbe à Delft, laquelle cftant tombée
malade de laiaunifle, Tan 156'i. demeura au lift malade
fîxfepmaines entières fans boire ni manger. Tout ccf
temps elle ne toucha nourriture quelconque , fors
cjuclques gramsdecitrons , qu'elle tenoit en la bouche,
& fucoit par fois. Le père de ce conucnt m'y mena, non
pour'lamedeciner, mais pour la voir comme par mira-
cle , à caufe d'vne/î longue abilinencc. Mais le lende-
main de ma vilîte elle trefpaira. Or cequci'adiouftcv
cft dis"C de plus grande merueille. En la mefme ville
deDclfr,ie vifîtai,acompagncd'vn Chirurgien, certai-
ne fille malade, aagee de vingtfeptans & demi , au mois
iteMavl'amsé^. Depuis Taage de rei7C ans clJen'auoit
bouoe du lid, n'ayant mangé par iour depuis ce temps,
qu'vn bien petit morceler de fromage (ce du pays, com-
me aftermoit fa garde , & n'auoit elle po^lblc lui faire
auallcr bruuage quelconque, encores qu'au rcfte elle
vrinaftalTez : elle n'alloit à Tes neccffitez qu'en huiâ:
iours vne fois. Outre plus elle eftoit aueugle nec , dé-
mine hydropique en l'aagc de vingt ans, puis ccfte eau
C^ fnemorahleÊt 6^
^^efuanouitj&ruruint enfon ventre vu bruit comme de
grenouilles viues en grand nombre,dont on oyoit le
cri,accompaené d\-nk)uleucment & abaiflcmentmer-
Ueillcux de Ion vencrctcUemcnt que maugré que i'ea
eulie;,iTiamain mifcdcfTus fit foulcuee fort haute. Ce
rnouuementcroiffoit en pleine lune auec grandes dou-
leurs,comme au/fi au flus de la meranais au dccroirt de
ia Lunc,& au rcflus de la mer, elle fcntoit quelque allé-
gement. Cemouuementlui dura 7,ans:& de è^iy. en dix
lepmaines elle auoit fes flucurs , comme fa garde me
Confeila.P.Foreji Medicin /lolUndois an iSMu» de fes obfer^
uationsfecI.S,
i^PPÉTirS EST RANGES.
IL n'y a prefque perfonne au monde , qui ne fâche
quelques hiftoires particuHeres de« extraordinaires
appétits de certaincsfemmes enceintes, dont les Dodes
médecins rendent raifon.Nous en alléguerons quelques
exemples pour inciterleledeur, entrant en la conlide-
ration d'iceux & des autres dont ilTefoumendra, de rs-
uerer Dieu en tant demerueilles.
Sans toucher au fpccial dénombrement de tels anpe-
tits,quifontautantdiuer,sque les vifages& conditions
des femmes enceintes , l'enay veu vne i qui citant fur-
uenul'appetitde m.ordre bien ferré vn ieune homme
furie chignon ducol,& pour s'eftre quelque peuabite-
nuedcfatisfaireà ce dclîr furieux, comniencaà fentir
des trenchecs , & infupporrables douleurs de ventre.
Pourtant comme vnedelefperee elle feietre deflus le
ieunehomme, rempoigne,& fiche li auant les dents en
la chair de fon col, qu'il en cuidamourir. L. y tues an
Comment.fnY U zyMu.de la cité de jDk w^r/^rt''.^ 5.
Ma mère me portant en fon vcntre,rappetitlui vint
Je manger des efcreuifl'es. Elle en enuove prompte-
ment quérir ,& fans auoir la patience qu'elles fullcnC
lauces,accommodees &cuites,commcnce alesm'nccc
«rues ôc viues iufques à ce qu'elle cuft aflouui ce dcfir,
JE —-..••■;
'€6 îiijloires âdmirahles
TrnicaucUe aiij.litt.ch.'î.du moytn dcgnerirUs maîadieipartU
eulieres du corj^i uttmAi»-
Vne Alcmandc de Mifiiccnccintc voyâr vn iciine cô-
^agnô foulon qui auoit les ianibes nues, approche dcx-
trcniént,Sc à belles dents lui empoigne vne ïambe, & en
emporte vn lopin de chair. Il endure cjuc par deux fois
tlle le carefTc de telle forte : mais voulajit y rôrournc?
|)OUvlatroi/îefraeil rcfufe& fe retire. Lapauuretce a-
ëouche quelque tempsapresdc trois fils, deux defqucls
cftoyent vifs & vigoureux,le troifiefme mort. George le
yeitrCiat* ^.Ijh.iUs KnnaUs de Aîtfne e.t l'an <)06.
Quelque autre enceinte, conuoiteufe de Tefpaulc
«l'vn boulanger , qui poftoit fon pain au four , reicttoic
toute autre viande >& nepenfoitqua celle li, Son mari
defiraru la contcnter,fait tant que le boulager,moyenàc
certaine foni me, accorde que la femme talle de celle cC*
paule conuoitee.De fait il fourtint deux viues atteintes
<Ie fes dentsmiais elle l'auoit pincé fi rudement qu'il ne
f oulutpas foufîrir vne troifiefme charge.La femme de-
meurée en trop grand appétit acoucha de trois fils, deux
Viuâs, le troifiefme movt.L.ingiuf m Cepifire ïz. du tome z.
En \ n village non guère loin d'Andernac ville afî^ze
fur le Khein, apartcnant à Tl.uefque de Cologne , vne
payfanne enceinte & defgouilee eutfantafie.deman-'
ger de la chair de Ton mari.Son appétit s'enflamma fi fu-
rieufemcnt , qu'elle le mit à. mort,mangeaIa moitié du
corps/ah le reileipuis toft apres,la rage de TappetitpaC-
fee , confcfla franchement le tout aux amis qui ccr-
choyent par toutle dciuwù.Enla mefme epifirè,
A Lambergen SileficjViilc demanaiflance, vn hom-
me fortantdu bain les iambes nues auec des pantoufles
en fes pieds, fut fuiui <l*vne femnîe enceinte , laquelle
defireufe de tailcr de telle viande, fe lance par derrière
aux iarrets do l'hommcSclui empoignant à deux mains
Tvnedes cuifl.es lui emporta du talon vn lopin de cha
à belles dents,& rauala,<juoi que l'homme criall à Tn
me & au meurtrc.Car elle ne lufcha poiac fa prifc qu u-
■ près auoir fait le coup.Làmefîtie.
lenepuispalîeiTousiliçpçece qui.cû aucnuàla con-.
ér Jnemorahles. €j
cnbine de certain grand Seigneur laqBclle mangcoic
par diucrfcs matinées des groflcs poignées de lin ou d'e-
lle uppcprcftes à filer.Eftanc tombée par tel appétit en.
mahulie d'cftomach , vne vieille m'apporta de fon vri-
ne,ayant entendu parauant qu'elle, eiloit de(goull:ce,8c
enquis de la vieille ce qui me fcmbloit de ccfte vrine^ie
• lui hs refponfe que la ddmoifelle tordoit plus de lin de
Ta bouche qu'aueclcfufenu. La vieille pcnlant que l'in-
fpe6i:iondei'vrinem'euRfait deuinercda, fit courir le
bruit par toute la ville, que l'eftois vn cxcellontdeuin,
ce qui fut tellement receu,quc depuis chacun mcregar-
doit par admiration./.^ meÇmc,
Ma femme Eue Sibylle auoitvncfî^ur nommée Gc-
neuiefuc^aiitrefois mariée a Picrrele Feure de HeideU
bergjaquelle enceinte l'an î^6z. & ja fort auant en fa
grollciTcalla vers la boucherie pour auoir quelque piè-
ce de chair. Ayant attendu long temps , & ne pouuant
plusfe tenir en place..elle empoigna vnmorceau,,prianc:
le boucher deleluipefcr. Ce lourdautle lui arrache
<ies mains, le pere<<c le baille à vne autre femme pro^
chainerdont celle-ci futteUemcntefmxsuë^ que le tang
commenccincontinent à luidilcillerpar le nez. Vou-
lantle torcher de deffuslaleured'enhautjrcnfantqa'el^'
le aiî oi: en rcceut il rude empraintejqu'aubour de quel^
ques (cpmaines & le terme accompli elle fe dcliura
d'vn fils qui n'auoitqujE la leure d'embas,& vcfcat ain][î
difforme vn an entier :puis mourut de pelle. M. laines
Suterjcnfes remarques de Aiideàne»
layconu desfemmes enceintes, qui ontdeuôré des
anguilles viucs/ans ritn iaifl'er de relie :& n'agueres en
la ville de Delft y en eut vne qui mangea toute la
peau d'vnsiiouron auec la laine. Vne aurrecn la ville
d'AlcmarJaquelle aualoit à pleines cueillerees du go-
<lram dont les matelots fe Ceruét à enduire & calfeutrer
irs nainrcsjcomme fi c'cuilellé quelque potage bien
, refté.Tels appétits furieux ne tourmentent pas feu-
iement lesfemmesiînccintesvmaisfiiefmesles hommes
& les cnhri'^.P.Foreftyiîi l^diH.ohfirtiAtion 7.
Maiie fille de Pierre Sasbout;eftanc enceinte mâgecû;
é 8 Hifloires admirables
Je Licroyecn trcfgrandcquantitc.Làwy^Jc.Nouspour-
rionsallcgucr tliucis exemples de femmes qui durant
leur oroireHc' en lieu de painSc de bonnes viandes n'ont
mangé que de la terre , des cendres & charbons du foy-
cr,du plaftre pinceau long des murailles , du falpcllre
des cauesjdcs limaces, grenouillcs.poires, pommes:, pru-
nes nullement meuresj & quand leur appétit n'a elte
faoulé entièrement, leurs enfiins en ont porté la peine.
Et quant aux figncs& marques,à peine de cent enfans
s'en trouuera-il dix,qui n'ayent quclqucmonftre de ce-
lle violente paflion de leurs mères.
Quelquestois, fî en tels appétits lesfemmes enceintes
n'obtiennent ioudain, ce dont elles ont-enuie, elle^ s'en
Tentent mefmcs long temps après eftre deliurees.En vn
village nomme Schuuedcn en rEuefché deFuldcjfc
trouua vnc femme groHc quipnflant chemin rencontra
Tn pefcheur , lequel elle pria de lui vendre tout ce
<]u'il auoit prinsdepoifi'on.Mais le ruftique pefcheur
larebuta,fans fefoucier de fesini'iantesrequeftes.tftant
retournée fort trifte en fa maifon , ce fut à pleurer amè-
rement, pourauoirefté ain/î fruftreedefon defîr. Là
delVus elle fent furuenir foudaincmcnt en foy vn extrê-
me appétit de boire de l'eau : mais plus elle en aualoit
plus l'cnuie croifioit : tellement qu'en vn iour , elle but
plus de trente liurcs d'eau,qu'elle rendoit toft après par
vrine.Ceif e auidite d'aualer de l'eau 1 ui dura iufqucs au
terme de Ion enfantement. Eftant en couche elle beu-
uoit tous les ioursvnigtliurcv d'eau. Six mois après elle
continua de boire par chafcun iour fans interruption
quatorze liures d'eau, puis vint me demander auis & re-
mède à ceftepaflion, accompagnée d'autres femmes les
parentes & amies,quiauec elle me iurerent cefte extra-
ordinaire beuuene eifre vcritablc.i>/.I*i^»«:i Oeth.medc^
çin oifes obferuutioui.
La femme du magnifique Francifque Barbarin , en v-
ne fiene grofleflc mangea à diuerfes fois enuiroa
vingts liures de poiure^ fans auortcr. Apres fon a-
couchement lui iclU vn flux de mcnftrwcs cholériques
&rub-
ér mémorables. 6^
&rubtiles, qiiilui caufa vn vlccrc en la matrice donc
elle mourut. A/. AT.r/c Florence , ait chal>itrc ^6. di* 4. traité^
ferrrion^,
l'ay veu vne femme ,à qui ceft appétit extraordinai-
re Scdefreglé duravn an entier après eftrc rcleuee de
gefincice qui la rendit pafle , phlegmatique & fort mai-
gre.Son enfant ne vefquit guercs. Gefner cnChiJloire des
oifeaux pjirLintde la pi:.
AS SAILLANT
téméraire yptmi.
M Arc Schutingius citoyen de Mime^ayant querel-
le contre vn autre de la mefme ville,& le renco n-
trant fans armes,commencc à le picqucr & prouoquer,
l'autre s'approche, luy arrache Ton cfpee,& d'iccUe lui
donne huift coups dedans le corps, dont il meurt fur la
place,le vingt cinquiefmeiourd'Aouft 1554. G. le Fe-
».«re AH ^.liure dus ,_Annales de AJifne,
hu infinis duelsjtolerez de noftre temps, notamment
au royaume de Francc,il cil fouuent aucnu que les pro-
uocatew'sontefté tue? fur la place parles prouoquez,
11 n'y aura guc e -Je le(n:v'ur. de celle fedion , qui ne fe
Ibuuicne de pluiicurs exemples diuers. Dieu iuge,&: cft
redoutable par tout.
Il n'y a pas long temps qu vn gentil-homme François,
fort qucrelleux , pour TadreHe qu'il le fentoit auoir au
maniement des armes , fit forger vn poignard, & grauet
furicelui ces mots, /c nereîieBc perjonm. D'ordinaire il
portoitce poignard: folaltrant certain iour ', Ton poi-
gnard tombe,& lui deflus,dont il fe donne tel coup dc^
clans la cuiffe qu'il en cuida mourir, le ne fcay s'il dc-
uint plus iagcpourtantpuis apres,mnis chacun voidque
fon poignard ne le refpe^^ta pas. Audi n'auoit-il fait ex-
ception quelconque en l'efcrituie. Au moins deuoi:-il
rcreruerfaperfonne , & faire grauer,»:e ne rejpecîe ^Hemon
m4/^re.Es guerres de noftre temps , infinis ont efté fur-
prins & tuez par leurs propres armes. De quoy les
guerriers peuueu^ faif^ ^^^ Uwrcs ♦ ^ ils veuleac cii.
E s
7© fJtJlûires adminhtes
•prendre le loifir.
^r kA h £ V R s.
ijijiotresmerueillcttfes de certains , qui ont anaîé par la^orge
en Cefiomach dttteyfes chofes ejtran^es, ^ de ce cj^i i'en ejl en-
fiiiui,
Ï'Ai veiivnhommcqui pout vn liardaualoit des pie-
ces de verre,dc clous de fer, & autres chofes en cjuan-
tité : puis incontinent après en fe ferrant le ventre il
rendoit letouc j>arlabouchc.Lemefnîe , pour vn coup
àualaquatfe vingts porrcaux ciuds. A telles gens le ven-
tre fcrr de fac,& font du naturel des plongeons. Cardatt
au Un, de h d^uerfité des chofisjcJiAp./^o,
Nous auonsveu à Fcrrare vn ie ne fcay qui lequel ^
iialGit,cuifoir& digeroic des morceaux de cuir, des pic-
ces dépôts de terre & de verres caliez : tellement que
chafcunlefumommoitrAujftruche : oifcau qui digère
le fer comme nous auon$ faitl'efprcuueen vnc, laquel-
le eftoit en lavûlçd'AnuQïs , ^^matus Portulan , en U
deuxi'efme centuvkiCti:: 60'
Il mefouukntauoir vcu en monieune aage vn ca-
pirriine Alcmancn rarmcede France, lequel aualoit le
yinlan.s mouuemcnt quelconque de lagorge.Cn-J^;; U~
»re ^.chap.^o.dela diuajjîcdei chofes. On a veu plufîeurs
Comédiens & enfanslans fonci de noilre temps, aualc;
le vin &la viande , ne plus ne moins que s'ils l'cuflent
îetté dedans vn Hic , tout ce qu'ils auoyent mangé & ce
fa n s e ffort q u elco n o. u e.
l'ay conu certain pcrfon nage, qui pour vnc pièce d'.ir-
gcnt aualoir plufïcurs cailloux , puis les rendoit par ba:;
àuec fes excréments. i^hrab>tnt de Porulcon ei dialoguei
ttetor. \
Certain icune garçon mendiant alloit par les porter
ideBafle, ilyaquelquesannees, gaignantfi vie par va
vniferable moyen : car pour deux deniers li aualoit for-
ce pierres qu/U crouuoic, ^ des noix cucicres , donc
■ ' il rcmpliP^
ff memûrahles, 71
^ remplifloit Ton ventre, tcllemcnc qu'nu toucher on les
cnrcndoit s'cntrechocquér, comme iî elles euflent efté
dedans \n fac.Puis rendant le tout par la bouche, & les
lauant, il les aualoi: derechef ou d'autres félon qu'il
plaifoitù ceux qui lui donnoyent quelque aumolhe.Ai;
bout de quelques mois ielc trouuai à Fribourg, où il
fiifoit le mefme meftier. Mais ie n'ai peu fçauoir depuis
qu'il eft deucnu.i>/cFe/;"x 'PUterAfedecin k hajle , en fis oh-»
feruation^.
De noftre temps , vn Efpagnol engloutit en peu
d'heurcsjà certaine courtifane de Venile quarante bel-
les grolfcs perles > auec vue croix d'or garnie de cinqf
pierres precieufes , &le cordon à quoi tout cela pcn-
doit. Lui l'ayant follicitee fort pour en iouir , elle vou-
lant vendre au poids de l'or ce plailir illicite, lui deman-
da cinquante efcusd'or pourvue nuid. L'Hpagnol ac-
corde , & promet auant les approches de les lui conter.
Ellepenfant auoirattrappé ce pigeon, prie vn gentil-
homme Vénitien qui rentrctcnoit de Taccommoder
de qocl-quc précieux ioyau de l'a femme , afin d'aparoif
tant plus braue,S: d'allccherlc Caftillan: lequel voyant:
celle proye lui conte cinquante efcus.Puis l'ayant eu en
fapuilfiince dcsleroir,îa Tentant profondement endor-
mie,ofta le colher à la belle, auala les perles j la croix &:
Je cordon:puis fe retirade matin, laifiTant fa courtifannc
compoTerpuis après de fa perte auec le Vénitien, ^^a
yefdius au ^Attire defon t^natomie-^ch.'^.
Il m'aefté dit qu'vn certain aiioir aualé Japoinde
rompue d'vncouileau,pu.;s Tauoit rendue parle fonde-
ment, P,Forc^)f an î<).linie defes oùfcrnathns , jcc/.zS.ew l'aur
notation,
Monfieur de Rohan çuoit vn fol nommé Guyon,
quiauallala poindte d'vne efpee tranchante , de lon-
gueur de trois doigts ou euuiron , & douze iours apre&
iaictta parie fiege: ce qui ne fut Hins beaucoup d'acci-
denseftranges.Toutesfoisil rcfchappa. Plufieursgen-
tils-hommes Bretons la lui virent aualer, M.^mbroiji
Var^ i^H t'inpquatriefme Uitre chapitre i6. Il y raconte 7#
Heauae luiioirc, que i'adioullerayi celle-ci, Cabr»l
£ 4
7 2. Hiftoires admirables
Chirurgien de mon/ïeui le Marefchal d'Anuille m'a
certifie, ouc François Guillemet Chirurgien de Som-
micres, petite \illc à quatre licucs près de Montpeflier,
auoitpenfc & guéri vn berger, auquel des voleurs a-
uoyentfaidaualer vncoufteaujlong de demi pied, le
manche de corne^de lagrofleur d'vn poulce, qui fut Te-
(pacedefixmoisenfon corpSjfe plaignant fort à caufe
des douleurs qui le rendirent fec & fort maigre. En fia
lui furuint \n apofteme , au deflous de Tainc , iettant
grrrnde quantité de pus fort puant & infeft. Par cefte a-
pofteme,en prcfence des officiers de iufticc,fut tiré le
coulttau.lequd Monsieur loubert. Médecin célèbre à
Montpclher, garda en Ton cabinet, comme chofe admi-
rable,memorablc,&: monilrueufe. Ce que pareillement
Jacques Guillemcau, Chirurgien iuré à Pans, m'a affer-
me auoir veu au Cabinet dudid loubert.
Adiouftonsencor du mefme liure & chapitre deux
autrcshiltoircsdechorcsaualees, par imprudence, non
moins mémorables que les precedentcs.M. Antoine Be-
aiiuenius, Médecin à Florence, efcrit qu'vne certaine
femme,auala \ ne aiguille d'airainjfans en auoir fcnti au-
cune douleur, Tefpace d'\n an.Iceluipafle lui furuinc
grande douleur au ventre,& pource cull: Taduis de plu-
fîeuis mcdc cins , touchant cefte douleur , fans leur faire
mention de l'aiguille aualee. Nul n'ayant fceului don-
jier aucun allégement, elle vefcut ainfi refpacc de dix
ans,enfiTi defquels tout à coup cçfte aiguilleiortitpcrj:
vn petit trou près le nombril, & fut guérie en peu de
pemps.L'autre hiftoirecft d'vn efcholier nommé Cham-
fecllanr,natif de Bourges , efludiant à Paris au Collège
de Piefie. Icelui auàla^ n efpi d'herbe nommée Gra-t
mcn,lequcirortit quelque temps après d'cnnelescoftcs
tout entier, di>ntilcuida mourir,& fut penlé par Mei-
lleurs Fernel&HuguetjDodeurs en la faculté de Mé-
decin c.
Nous auons par potions conucnables, lenientes , pui-î
fortes,gucri vn (eruiteurdç Madame delà Val, Icquef
auoitaualc vnc clef de fer:&vn fol, lequel en la ville
4c Tours; ipjs ^u'vîi cfcrimoit dcuancle Rpy, rccueiii^c
dcccuc
^mémorables, 7J
déterre la pointe d'vne tlpcc > laquelle il auoicfouilain
aualee, & qui eiloic prcfque d'vn demi pied de long.
Alont. a» i<^.chap. de fa Chirurgie»
Quelqu^M^ , Ton ne içaic pourquoy , ayant aualé vn.
bafton de longueur & grolleur du doigt mitoyen le gar-
da refpace d'ni an entier dedans Ton corps, en fin du-
quel lui furuint en certain lieu où il eftoit aii;s auec plu-
fîeurj, autres vne colique très afpre , qui le contraignic
s'en retourner en fa maifon , ou il rendit par bas ce ba-
fton de bois. P. Foreji en U i8. annotation fur le 15. Hure dç
fis obferuations Aledecinales.
Il y auoit à Zurich vn pécheur bien conu lequel a-
yant certain iourofé aualer vneangBilleviue, laiendic
entière & viue par en bas. Gcfncr 3 parlant des ^yingiéilies
lU* quatrîefme Hure defon hijlolre des animaux.
En la cour de l'Empereur Charles V. Te trouua vn
goulu, lequel aiiala auec vn grand traift debiere vn gros
hareiic tout entier. Et en la ville d'Alcmar en Hollan-
de certain autre tout d'vn traid auala trois dallcrs d'ar-
gent, en vn pot de bicre : & trois iours après les rendit
par bas. Le mefme P^rre Foreji au mefue Uurc a^ chapitre
fufmentionné.
LES HISTOIRES SVÎVANTES SB
rapportent aux dangers oufefofit tromtcH^ plufteurs ift*i trnr-
prudemment ot* atttremfnt ont aualé des chofes qui leur font
demeurées en lagor<^e ou ailleurs , dont fe font cnfulups diuers
fafcheux ^pitoyables acctdens. ,
VNe payfane HoUandoife aagee de cinquante ans
& d'auantage, mangeant vn iour de trop grand ap-
pétit : mit en fa bouche certain gros morceau de chair
durcie à la fuinee,& Payant au^le fans inafcher il lui de-
meura en la gorge, &y fut trois iours entiers fans qu'on
peuft y remédier. Elle ne pouuoit prendre nourriture
quelconque , le paflage à la viande & au bruuagc eftanc
du tout eftouppé. M'ayant en fin appelle, ie defcouuris
<Quc l'c morceau eitoit tort auant , iJc y appliquay diuer:>
74 Hijf dires admirables
TLiHcJcs. Elle n'atcciuioïc que la morc,Sur la fin duqua^
ricrmciour,commc elles'amufoità buuotccr du petit
îniâ, ce morceau tomba impccueufemeiu en icllo^
niach,au moyen dcquoi elle retourna en fanté.Fore/?a«
La fille d'vn pcrfonnagc delà ville de Delft,aagec
*îe vingt trois ans, ayant mangé auidemcntdes tripes
«îebœufjdures ^n: glueufcs , quelques morceaux lui e-
llouppcrcntla gorge tellement que refpacc de trois
iou'-s cntiersil fui fut impofi'iblc de rien aualer. le lui
^s donner vn fort fu j)pofitoire ^ & après auoir fai<!:l oin-
dre (on col d'huile de lis & d'amendes douces , puis en-
ijelopper d'vn cataplafiriC co^iuenable au mal, lors que
tous ceux qui lui aillitoyent n'attendoyent que la mort,
die fut gucrie. l.a mcfine.
VncautrefilJeaac'cedc vingrhuictanç,ayantau moi?
<îc Septembre i58i.aualé vn'morceau de chair dure&
neriîcufcfut es meilnes dangers que la précédente, l'c-
fpacede i4.heures : & finalement foulagce,le morceau
cftantdeuale en Tcftomach.Irt we/îr>e.
Certain pcrfonnagc qui mangcoit à gros morceaux
vne pefchcvoulut aualer auffi le noyau, lequel lui dc-t
meura en la gorge, où ayant arrcilc quelque peu, ce per-.
ronnngcprclieboit An fi pr.ind trait tout d'vn coup»
qu'il poulie ce noyau enreil:oma£h,d'où eftant deuaU
its boyaux il s'arreila au boyau cuilier non loing du fon--
dément, tellement que trois jours durant le patient ne
}'>eutdcfcharger Ton vcntrc,cn fin ce noyau fortitauec
lescxcrcmcns,auec tout tel bruit que d'vn coup de pi-
ftolc que l'on laicheroit. Afais depuis ce tenij-^s la il fur
toufiours tourmenté d'hemcrroides, à caufe de refcor-
chcure en celte partie, faite par le noyau rabotteuxôc
Vne ieune hile ayant mangé beaucoi^p de poulmon
«le mouton, & Tentant Ton cftomach charge , eut enuic
^e vomir. Mais le morceau s'arrcfta au haut de la gorge,
où il falut appliquer par dedms les fers pour auoir ce
jmorceau qui s cftoit enflé Se auoit eftoupé le conduit
Âoiu tUe cuida m9mir^i././/tf*f//fr.Autaat eu auiut i
VTtt
^ memorahles, 7Ç
yne autre oui auc.ic mangé du poulmon c!c boeuf Scliu-
gioctoitfans cell'cnepouuanc rien aualcr. Elle futfou-
lagec fans application de fericmens , n ais i l'aide des
ventoufes & autres remèdes , elle reietf^ta finalement le
morceau qui dcreftomach lui cftoit monté en la gor-
ge. Les SchûUogrtiphcsfnr le l.UJt Md.l^^ouUir, des maladies
internes,
Vnieunc enfant dehniftans ayant aualé l'vn des
lettons dont Ton père fe fcruoit pour compter, nefe
fentit point autrement de ceft excès pour lors : Tetile-
mcntiî commença pou à peu à deuenir greflc & perdre
delbnenbonpomâ:. Au]bout dVn anil le defchargca
de ce letton auec fcs excremens , lequel tut trouuc
demi vfé & tellement confumé parla chaleur naturelle,
que chacun s'en esbahifroit.ty^;j(r;zf.Por/^f;»irw.2.r«r.^p.
Certaine honnelle mère de famille de DuITcldorp,
voulant veftir&: accommoder vn Cicn petit enfant au
mois de Mars i^^4.a)'ant deux efpingles , True grande,
l'autre petite,en fa bouche , furuint que Tenfant fut en
danger de choir au feu. Ce penl fit oublier à la merc fes
efphigles qu'elle au ala fur ceftepeur, nepeniant qu'à
fauucr Ton petit. Les efpingles lui demteurercnt quel-
ques heures en la gorge auec grande douleur. Appelle
pourlafccourir^i'ordonnai que l'on gardait de lui don-
ner A'iandenibruuage, que premier ie n'culfe cflayé
auec "V n engin propre de tirer ces cfpingles.Là delîus e-.
liant forti , puis rentré , i'enten qu'on lui auoitfait hu-
mer vn bouilloH,qui poufla les efpingles plus bas , iuf-
ques vn peu au dcfûis de l'orifice de l'elicmach. Ce
fut nouucllc &: poignante douleur. Pour y remédier
ie lui ils boire vn grand trait de bicre , auec du beur-
rcSc des morceaux du pain de fciglc , affez gros
méfiez parmi, cfperant que le poids du pain poulîcroic
aueclc bruuage cescfpmgles en reft(*inach, attendu
qu'il n'citoit plus pofiible de les auoir par haut. Ce
quiauint non fi toil, mais quelques heurcsapres. Le
lendemain iela fis nourrir de bons bouillons , & boire
iie labierc^auecdu beurre , puis repofcr fur le collé
*;îroit;lc vécrc non prcfi'épaucc des couflîns fous fes bras.
7^ Hïftoires admirMes
^fouslescuiflcs, pour donner plus d'aide aux erpingleç
de dcfccndreaux boyaux, A près midi on la leua, mais ic
Jcftcndi qu'on ne l'csbranlaft: en la tournant de cofté
& d'autre , ainscjuclans fe courber en auant ou arrière
ellemarchaft doucement, afin que les efpingles deualaf-
fennce quiauint,& les rendit ,1a plus grande citant vn
peu courbée. Hlle fut extrêmement malade de ceft acci-
denrrmais toft après remife au àQi^\xs.le'inynjicr,enfei oh-
feruatiom wtidichuxlesyfur la fin.
Vne fille Vénitienne fe couchant auec vixe aiguille
longue de quatre doigts en labouche, s'endormit & l'a-
uala.Aubout dedixmois,ayantefté griefuementtour-
mentce,elle la rendit auec fon vrine : mais en merueil-
Icufe forme : car vne pierre de la grofleur d'vn œuf de
poule s'eftoit concrcec autour de cefte aiguille, ^^lex,
Befioij} auz.lÎHre de fon ^^natomU ichajy.^.
Certaine Damoifelle de chambre de la Ducheffe de
luillersfe coiftant,& tenant en fa bouche cinq efpm-
gles, fut frappée par derrière par certain Gcntil-hom-
me,dont elle treflaiUit , & de peur auala lefdites efpin-
gles,qu'elle rendit aueclVrine deuxiours après, fans au-
cun dommage,I.L.ïrt;;/mf en L'eptfire aAu. z.itolume,
A Nieumegue certain homme dilfolu voulant l'vnc
des fcftes de Pafqucs donner du pafletcmps aux au-
tresjs'ingerad'aualer vn aufde poule entier.-maisl'œuf
fctreuuant trop e;ros s'arreftaenla gorge , & boufcha
tellement le conduit , que tout a l'heure ce diflblu
fut cftoufté.I. y-vier au qiiatricfme Uitrc depntjît'rihichapl-
tre 2.
L*an milcinq cens huitante huicl,vn autre diflolucn
la ville de Rouan, difant par gofl'erie qu'il n'y auoic
pointd'osen vn pieddebœuf, fit gageure d'en aualer
vn cuit en vn morceau. On lui en apporte vn : il Tem-
poigne&le fourre en fa bouche: mais l'ayant en la gor-
ge, le pied demeura li , fans defcendre ni remonter.
Qiuelquc diligence & remède que les Médecins yap-
pliquaflcnt, il demeura en ceft eftat l'efpacc de neuf
iours,au bo-ut defquels il mourut fans parler , ayant le
vilagc monflriicufemcnt cnâc. Chacun Talloit voir , &
Icr-
l
dr memorMes. 77
femitde fpcdacle du lugcment de Dieu. Mémoires de
nojire temps.
Bernard des Noirs, Gentil-homme Mantouan , aagé
de foixante fcpt ans,homme grelle , mais vigoureux^ a-
antcnla bouche vngros morceau de chair ncrucufc
'engloutit fans le bien mafcher. Ce morceau s'atna-
chant à l'orifice delà gorge^faifit tellement le paflage,
qu'il lui eftoitimpofljble d'aualer chofe quelconque,
nonpasmefme de l'eau claire. Une pouuoit prefques
refpnerrla chair vifiqueule tenoit Lellement,qu'ilfutin^-
pof^lble aux Chirurgiens de la tirer dthors.ni de la poul-
feren auant. Au bout de fept ioursicellc el]:ant }?ourrie
&dirioulte deuala en Teltomach: tellement que le pa-
tient fut garanti de fufiocation.Maisiln'cfchappapour-
tanticar la gorge s'eftant enflammée par la douleur &
les applications des fcrrcmens, outre la foiblclfe furue-
nue a faute de manger refpace defeptioursjcequi auoic
abatu toutes les fcrrces & facultcz de la vie , au quator-
2.icfme iour il momut.AiarceL Donat,au^.Uure defss hiftoi-
res admirulleiicha.%.
M.Pierre Forelljdode Médecin HoUandois , raconte
qu'vn autre fçauant Médecin attelle auoirveu certain
perfonnage^lequel ayant efté tourmente d'vnos poin-
t\u 'tidié dedans Ton golîer,au bout de deux, mois ceft
osfortitpar àtrauersla çq^lu.Es annotât ionifnr CohferuA-
tiomS.defonl^Mu.
Vn barbier ayant à mettre vne tente au fond de la
bouche d'vne femme, laifla efchapper imprudemmcnc
icclle tente, laquelle deuala parla gorge en l'eftomach,
dojit s'enfuiuit telle indifpofîtion en la pauure femme,
qu'cllant dcuenue toute lèche, après auoir langui plu-
fîeurs années elle mourut. Lcmejhse en C annotation fnr la
ï^.ohfsruation de lel^.liu.
Il me fouuient qu'vn ieune homme de Haerlem,qui
auoitaualé des guernettesviues^ce font petits poilfons
de mer, qu'aucuns appellent fquillesou pinnotheres)
en fentit de grandes douleurs en Teilomach , & finale-
ment mourut tout fec.£» l' annotation jiir L'obferh. z8. de la
7 8 H'tjlûires admira^ blés
Vn autre pourauoiraualc crois goujons vifs iVn apr«f
l'aune , fut cfloufte du croificfme , & en mourut. La'
7nejme.
Certaincfcmmcayanrfans y pcnfer nualé vnc aiguille,
ne peut cilrc garantie, ains niaugré cous remèdes ayant
langui quclijuccemps, mouiuten chartre. Entdbjtrua-
tion ly.dc ce l^diurc,
Charles Soderin auoit do fois à autre la fieure faiis
taufe manifefte , dont finalement il mourut, aa^é de
trente cinq ans. OuuertJ'on trouua vne aiguille à'zcyQv
£chee dedans le foye. Ba^.ance Chirurgien la tira toute
dentclce,roU2C du nemps,& me Fa monllree. Charles
aagc feulemer.t de trois ans rauoi'c aualce par mef.
garde. N entée Aledecm deï^lorencc , en Jh oiferuatlons.
BARBARES P RF-
demment adoucis,
ROt5 E R T de Sainâ: Scncrinfort vaillant Capitaine
en Ton tempsjfaikint le voyage de Syrie & tirant au
mont Sina ( pour acomplirvn certain vœu parJuif::ic
itlon la deuotion d'alors ) ayant dcfconuerr qi; cl-
oque nombre de cheuaux qui venoyerit le rencontrer,
demanda à ceux qui le conduifoyenc par le fauf-con-
duit qu'il auoit du Sultan , quelles gens c'eftoycnt.
Qu^and ils eurent refpondu en tremblant, que c'eftoy-
cnt Arabes , les plus hardis & dangereux brigands du
mondcluifans fe monftrer aucunement effrayé, & au
contraire acourageanr fa compagnie, leur dit qu'il fa-
Joitdefployer là le bagage, afin que ceux-ci qui venoy-
cnt, trouuaflcnt le difnë preft incontinent qu'ils fe-
royentarriuezjSuquelilsauroyenfe grand befoin , veu la
faiclicrie (]ue la chaleur & la poudre du chemin Icurau-
royenc donnée. Tandis que fes gens faifoycnt ce qu'il
auoit commandé,il s'en alla au deuant , les falua dVnc
façon fort gracicufe ( cilant aulfi oatmçUement beau
^memorahles. jf
^erfonnage & de taille & cic traift de viTage 3: cnrcfij-
riant leur ditqu'ils eftoycnt les-biCn venus .-adioullanc
Jjliifîeuis petits propos , par le moyen des truchemeaç
qu'ilmenoit, en les carcflant,& montrant n'auoir aiv-
tune desfiancc d'eux. Lefqucls propos ayanselié agrea^
tles à ces brigands» Arabes, ils acceptèrent volontiers
l'offre qu'il leur failoit , tellement qu'ils difnerent auec
lui ioyeufcment : & après auoir reccu quelques pctitsf
prefens, s'en aUerent,ayans oublié toute leur cruauté
barbarefque, & au contraire auec pluiieurs remercie-
mens de ia bonne cherc.F.n ce récit nous voyons dVne
part vn traift^dc merueilieufc prudence en - vm homme
tôbant foudaincmcnt & au defpburueu entre les mains
(de gens ians pitié. D'autrepart vn traid de grande hu-
manité des nommes , femblans n'auoir lien d'humam
que la facCj&retenans en cruauté du naturel <^,^s lions»
tygres , & autres beftes fauuages. De forte que ie croy
que les Poètes n'eu/Tcntdonné guercs moins de louan-
ge à ce Capitaine qu'ils donnoycnt à Orpheus, d'auoir
fceu par les doux fons de fa harpe , amollir les cœurs des
beftes fauuages & cruelles. Conformité des mernsillcs an-
tiennes aufcles moderne^,
B LE s SV RES LEGERES.
ncA'ntmoins mortelles,
\J N mien frerejc Capitaine Saind Martin ,aagé de
vinot trois ans , qui auoit defîa faid affez bonne
preuue defa valeur, iouantala paume reccutvn coup
d'eftœuf;qui Taflena vn peu au deffus deTaureille droi-
â:e,fans aucune apparence de contufîon ni de blelfure.
Il ne s'en affit ni repofa:mais cinq ou iîx heures après il
mourut d'vne apoplexie , que ce coup lui caufa. AlÀe
Xylontagne^AH iditudefes E(ftii,chap.l9-
Querelle' s'cftant efmeuc entre deux ieunes hom-
mes, l'vn eftend le bras adonne vn foufflet à l'autre,
dont lui furuient apoplexie , de laquelle il eilel-louffe,
Ujg^^rt j^p bj^;.i peu d'heure. Le frapeur eit conftitué
8o Hijiûircs admirables
proniptcmentpiilonnicr, & appcllc-oii les Medccim,
pour entendre Jeurauis fur la caufc delà mort de ce
ieunc homme. Les vns rattribuoyent au coup mefme,
difans que Ja matière auoit elle efmcue pariccJui :les
autresà replctjon & fuperfluicé d'humeurs caulees par
tropm<in^cr&boire:lesautre,sà riiumidiré dulicu , où
le mort auoic parauant dormi par longue cfpace de
temps. Ceftc diucriitc d'auiscnipcicha le iuge depro-
noiîcer fenrenccdchnitiue. Nousauons aufil conu ^ w
foulon nomme Picrrclequcl tua vn ieunc homme d'Mi
coupccpoin quillui donna contre rcllômach. o/4"f.
Bemitenius ai* cent dixiefme chapitre de [es exemples meduh
7MltX,
Ardoufn du Fcrricr ieunccnfant, aagé de treize ans,
futk'uercment bicire d'\ n ballon defaulsc-]ui dauan-
ture Uiifutie-îté J'vn grenier delfusla tcftc.On n'y re^
conoifloit fiacturcni entamcurc quelconque: mais le
iîxiefme iour vne infîamauion liiruintenla blefleurc,
le lendemain conuulfion ¶lyfieen la cuiflc droite
& au bra,sgauciîe,auec fieureScrefuerie. L'onziefme
iour il rendit relprit. Fr. y allerioU en la i. oh fer nation dit
S'iiiire,
B L E s SF R ES guéries.
FHANçorsde Lorraine , Comte d'AumaJc , depuis
Duc de Guifctué dcuant Orléans, fut rudcmer.t
blcIledcuantBoulongne d'vncoup delance,quiaudcf.
fous uel\i'il droictdeciinant vers le ncz,cntra & palîa
outre de l'autre partjcntre la nucque&Taureille , d'vne
il grande violenccquc le fer de la lance auec vne portio
duboisfutrompue,&dcmeuradcdans en forte qu'il ne
peuteftre tiré hors qu'a grande force , mefme auec te-
nailles de marcfchal.Nonobftant toutesfois celle gran-
de violence, qui ne fut fans fradurc d'os,nerfs, veines,
arteres,& autres parties rompues &br!fees par ce coup
delaiice , il fut gucri , & vcfcut plufîcurs années après*
tue
^ memorahles. ii
tùéaufiege d'Orléans, fur la fin des premières guerres
ciuiles de noftre temps en France. H/^. de nofire temps,
Henri de Lorraine Ton fils , en vne rencontre prés de
Dormans, l'an 1^75. ayant eu le dcCus , &pouriUiuanc
quelques fuyards , receut vn coup de piilolc en laioue,
lesaurrcsdifentquc ce fiit d'vne icopecce: dont il tom-
ba demi mortfur le champ. Neantmoinsilenfut gueri,
puis tué i Blois l'an 158^. H^j^om- âe Kcnry m.
Le fieur de Saindieanefcuyer du feu Roy Henri i,
en vn tournoi deuant l'Hoftel de Guifc, receut vn coup
d'cfciac de lance par dedans fa vifîere , de la longueur &
«grolfeur d'vn doigr/ous l'œil dedans Torbice, pénétrant
trois doigts ou enuiron dedans la telle. le le traitai, a{^
lillé de pluficurs doCles T\îedecins & Chirurgiens: &
combien quclaplaye faite par vn fi grand coup fuft tref-
perilleufc, fifutelle gueriei l'aide de Dieu. M. t^mb,
Pjtré Ai* 9. lU.th.ip.ç.
Vn feruiteur du fieur de Champagne, gentilhomme
Angeuin,fut nauré d'vn coup d'efpee à la gorge,en forte
qu'il auoit Tvne des veines iugulaires coupée auec la
trachée artère , au moyen dequoy furuint vn bien grand
flux defang,'hoint qu'il ne pouuoit aucunement parler,
iufques a ce que fa piaye fuft courue& medicamenteç.
Or pendant que les medicamens eftf;yent hquides , il
les atriroit entre les poinds d'aiguille , & les rendoic
par la bouche.- Dont conaderant: la grandeur de la
playe, &la nature des parties' blcfiees, principalement
de la trachée artère & veine fugulairc , lefquclles font
fpermatiques , froides & feiches , par amfi dimeilcsà
rérnir , auec ceaufiiqucla trachée artère eil fujette
au mouuement qui fe faid en la dcglurion , à raifba
delatunique interne , laquelle tient à celle de i'œfo-
phage (qui eftla voye du boire & du manger) obeilîanc
i'viie à l'autre par mouuement réciproque , comme
corde i double chef dedans vne poulie : confideranc
auflli l'vfage defdites parties, afçauoir que la trachée
artère fert à la refpiration , laquelle eft neceffaire i la
lyrameuie Se chaleur vitale du cœur, & qu^laveiuq
F
tt Hijlûires âdmirMes
iugulairceftfortrcquifc à la nourriture des parties fff-
pcricurcs:Dauant.igc ;iyant cfgard à la trcficrandc quan-
tité dcfnne qu'il auoit perdu & perdoïc par fj playc (le
fane tftaiîtle thrcfor de nature , le conlcruatcur delà
chaleur naturelle &: des cfprits vitaux ) 6c autres acci-
densiicfaifois mon ]ir(jgnoftic de mort prochaine: tou-
tcsfois ie vous puis afl curer qu'il en eichapa. Ce que ic
€roy eftre plultoll aducnu parla grâce de Dieu, que par
moyen & aided'homivicni des médicaments. ^\/.,^,<;/vr.
Eftanti Thurin au feruicc de dcffunâ: Mon/îcur de /
^Montcian, ie fus ajîpellé pour penlcr \ n foldat nommé
iTuclquc, natif uc Paris, lequel eftoit lors fous la char-
ge du Capitaine Renouart, bielle de trois orandi coups
d'efpce, dont l'vn aurv)jc donné au cofté droift fous la
mammcUc, ou la playe eftoit affe?. grande,penetrant cn|
la capacité de la poic'^trine , & eftoit decoulce grandu
quantité de fangfur le diaphragme , qui cmpefchoit
la refpiration , &:ne pouuoit parler qu'à l>ien grand
peine , ayant vncficure fort véhémente , & auec la
toux icttoit le fâng par la bouche , & difoit fentirvnc
douleur extrême au coftc blclîe. Or le chirurgien qui
premièrement rauoitpcnfé, auoit du tout coulb fa pla-
yc , de forte que rien n'en p(;uuoit fortir : & le lende-
main ie fus appelle ponr viiirer lemalade, ou eftant ar-
riuc, voyant lc«; accidens, Se la mort proche ,fu-,d'auis
de delcoudre la playc , à l'onficc de laquelle ic crouuai
du fang caillé, dontfoudain ie hs cfleuerlc malade par
les ïambes , la tefte en bas , iaiffant vne partie du corps
deffus le liét , s'apuyant vne main fur \ ne efcabellc
MusbaHc que le iid:. Eftant ainfi fitué ic lui fis fer-
mer la bouche & le nez, afin que les poulmons s'enfla!^
fenr , & le diaphngme s'cnlcuaft , & les mufcles in-
tercoftaux, cnfemble ceux dclepigaftre fercfcrraflîc^wt,
sfinquele fmgdecoulc en la poitrine fut ierté hors
par la playe;& encore pour mieux faire, mettoi.s le doigc
aflC7. } rofondenlaplayc , pourdesboucher le fang cail-
lé , dont il en fortitpresde fept a huid onces dciîa
puant & corrompu. Pui^iclc fislîcucraulift , faifanc
des in-
^ mémorables, 'Sj
cJcsinJeftionsen i:i. phyc aueccau liorgc, en laquelle
i.'auois fai(ft bouillir miel rofat ^fucrc Qànài , puis le
faifoiv tourner de coité & d'aurre: & derechef le Hs elle-
uer parles iambes, comme auparauant. Lors on voyoït
forcir aucc ladidc inie(fïion des petits grumeaux de
Tang. Cela fait Içs accidcns diminucrent , & petit à
petit cefl'erent. Le lendemain ie lui hs cncorcs in-
iedion , en laquelle TadioulUi centaurée 3 abfynthe^
aloès , pour encore mieux nettoyer ; mais le malade
m*ayant di(ft toit après ou'il fenioit grande amertume
en la bouche &volonté de vomir, ic conu que telles in-
ieâions amercs profitons d'vn cofté nuiioyent de l'au-
tre t & ne les continuai pas , mais traitant plus douce-
ment la playe , outre mon erpercnce ce malade gué-
rit. Lemefme 3 en et muficjîne Hure , chapitre trcnudcti^.^
xi e fine. " ■[
M. Pi £ R R I Solery , fameux Médecin d'AurillaQ,
pourfuiui durant les premiers troubles par certains co-
ualiersqui cerchoyent fa vie , & atteint a vn quart de
licuè d'Argentat en Limo/in , ain/î qu'il cuidoit le fau-
uer comme quelques autres , receut plufieurs coups
tres-dangereux , & neantmoins fut mir.^culcufemcnc
garCnri : comme le tout fat vérifié oculairemenr par
ceux qui viiîterenti>:pearer.cnc Tes piayes. 'Première-
ment il receut vn coup dliarqiiebuze le prenant au
deifusdelos delà cuific , & pallant de l'autre coité
au mclme endroid tiraatfur le deuant: en après vnc au-
tre harquebuzadcdellbusle Bras gauche à quatre doigts
del'efpaule qui emporta la pièce: vn coup de piftolélur
3a nieline efpaule , tirant en bas : vn autre au vifagC; le
prenant fous Tceil & Ibrtant fous la mâchoire : quatre
coups d'efpee fur le bras gauche dtt couldc cnibcis : vn
coup de dague fous la mammelle gauche , qtif ren-
contra la coite fanspalfer plus auant : vh autre coup
àepiltolcprefquesau mefmc endroiéi , coulant entre
la^eau & les coftes , & forçant par derrière : vn grand
/coups de rcucrs d'cfpec dcfTus l'yeil : vn autre fcuaaijt
lurktçlk,
^4 Hijfûires admirables
Ellanr ain/î naure & laiffé comme pour morr , les aflaf^
/înslui ayansolic la bourfc & trois baguc<; d'orcju'il a-
Uoic aux tloigtsjlui, ayant demeuré cnuiron deux heures
fur la place, tînalemcnt fc leua, & comme il tafchoit de
fetraincr, vidvnfoldat acourant vers lui auecTcrpee
nue, auquel ayant demandé fecours au nom de Dieu,
cela fut caufc que ce folJat ne lui fit nul mal,air!s Tayant
vcu en ceft eftat , s'enfuit comme si\ euft eu l'ennemi a
dos. Sur cela s'eftantvn petit traîne Icmieux qu'il pou-
uoit, voici vn fïcn fils aagé feulement de huift ans, fuy-
ant a ufll cfga ré parles champs, qui le rencontre, & le
foufleuant d'vn cofté comme ilpouuoit, le conduit iijfl
qucsàvn village , auquel tout le fecours qu'il peura-
uoirfutqu'on n'achcua point de le tuer, combien qu'il
, fuft en 11 piteux eftat, &i que ce pàuure enfant auecquc s
pleurs & larmes leur prcicnraft Ces habillemens, & fe
vouluft defpouillcr deuant eux, à ce qu'ils fccouruflcnt
fonpauurepcrc. Partant outre, tantolt debout , tcnto le
couché. Dieu lui prefcnta au mefme inftantvn autre*
delcsfilsaagéd'enuiron dix ans, par lequel eftantfouP'
leué d'autre cofté. Dieu voulutqn'il euft aifez de forcé'
pour arriuer en vn autre village, la où, non fans diffi-i'
culte, il rccouura deux œufs aucc quelques cftouppes,*
qui furent appliquées fur fes principallesplayes , puis,
luycftant baillé vn petit de vm,&: monté ( comme orr"
peut) fur vneiument, il fut conduit à vn autre villaoe
auquel fafemrae, retirée ehczvn Gentilhomme voi/in
de ce lieu, le vint incontinent trouuer: &futtellemenr
affifté dVne fînguHere & extraordinaire grâce de Dieu,
qu'il réunit en pleine vie & fanté. Uipire de Vrance forts
Charles nettfiefme,
D v R A N T les mefmes premiers troubles entre autres
batailles données, fc remarque celle de Sainâ: Gilles
en Proucnce,le 17. iour de Septembre \^6z. En iccllc
fe trouuerent quelques Capitaines Elpao;nols auec
leurs compagnies , lefquels voulans tenir bon fur*
la dcfrouce furent rudement blefiez ^ à caufe qu'ils
$*obiU*
L
^ mémorables. 8 j
^obftincrent à vouloir foullcnir l'effort des vidiorieux.
Maisilsne gaigncrenc que des coups, furent prcfqucs
tous taillez en pieces,& expirèrent furie champ.
Ce V X c]ui furuefquircntfc couchèrent par terre, &
contrefirent les morts. De ce nombre furent deux Capi-
taines, Tvn nommé Alfonce ,riiutre Manric , tous deux
Cartillans. Alfoncc receut fept coupji de couftc-
las fur la tefte , fon cafque ayant efté abatu , &
lui terrafle : quatre d'iceux auoyent entamé le teft,
les trois autres n'auoyent fait que fendre le cuir iufi
quosàTos : fur chafque bras on lui auoit fait quatre
erandes taillades : deux autour d'vn des couldes & du
oignet. Il receut outre-plus fix coups d'eftoc dedans
es cuilfcs. Lui & Manric auec deux cens foixante
autres bleÛez fc fauuerent comme ils peurcnt , 6c
furent apportez à Arles ville proche de là , où ils
furent penfez. Manric fut blellé de plufieurs coups â
la tefte, au bras , à la poidrine , aux coftez , à la fa-
ce , & fut deux iours fans parole & fans poulx. En
fuyant il s*eftoit iccté dedans le Rhône, où il eftoit de-
meuré caché près de quatre hcuresiulqucs an menton,
tantoftleuant vn peu la tefte, parfois faifantle plon-
geon, iufqucsà ce que la nuid venue , Sclesvidlo-
lieux rerirez , il paifa la riuiere à nage. Plus de cent
autres blelîez auoyent enfemblc voulu traueiferce fleu-
ue, aimans mieux fe bazarder ainfîquc de tomber en
iapuiftance des François, merueilleufement & iuftc-
ment indignez contre eux. Mais plu/îeurs de ces lia*
geurs furent noyez, la force leur défaillant au milieu
des ondes.
C E V X qui efchapperent demi morts moururent preC-
que tous en THofpital d'Ailes. Les deux capitaines fuf-
nommez, après auoir fouftert des nouuelles morts
entre les mains des Chirurgiens & Médecins, furenc
au bout de quelques fepmaines remis fur leurs pieds;
Wais bien marquez en diuers endroi<fts, pour s'enfou^
uenir&feruir d'exemple à leurs patriotes, qui toutes»
fois n'y ont pas bien penfé. Manric auoit rccci*
deux COUPS dç baicbatde eiiwe les coftes , dootf
f6 BiHoires admirables
il ne forti't guère de- pus par les pcrtuis des playes :'maf«
au bout de crois Icp mai nés vue grande quantité de pour-
riture lui fortic par le fondeinciu, au grand csbahilîc-
inentdu Médecin , attendu que delà poidri ne aux bo-
yaux il n'y a point de voyc commune pour le pus conte-
nu en icellc poiCtrine. En cette mcfmc batajlle,vn pi*:-
tonreceutvn coup de liarquebu/e , qui lui perça la
tempe gauche , 6i fcrtit par l'autre cofté vn peu au àcÇ-
fusdelarempedroirte, ayant fracafleje tendes deux
p?rt<v:neantinoins il tut miraculeufementgueri. Il auoit
eite penfe à Nifmcs , mais ne i'e Tentant pas bien guéri,
il vint i moi, & iclc Iccourus ce tout mon pouuoir. Ce
n<.n.,b"antT d^puur^.au' ui-ie &: lourd de ce coup. Ni
leccrueau ni les rayes d'icelui n'auoycnt cfté atteintes:
mais le boulet ayant rompu le tctl ar.oit erté poulie rez
■à rez d'jcelui iniques à le percer de l'autre part. Au rc-
fle, à caufe du coip&de la contufîon, quelque por-
tion du Ihnr, s'efpancheant es nerfs de la veuë & de
i'ouye, procTui/ît 6biir;i(ftion, dont s'enfpiuit l'aueugle-
nient& lalburdcfie. Vn autre, natif de x^îar^eîlïe, 8c j;n-
feignc d'vne compagnie, receut vne harqucbu/adc à la
rofârincdont le boulet fortit par le dos. Ncantmoins
il fwr guéri.
V K autre , d'Arîcs , eut le col i demi couppe
dVn coup de couf^eias , tellcmear que la tcfte auoit
beloin d'eftrc fouftenuc , le coup citant donné en-
tre la première & féconde vertèbre , fi profond &
Jarge j ^u'on y n-.ettoit la main : toutesfois il fut
l^ueri , & viuoitencores quatre ans ?prcs ccfte mci-^
peilleufeblefl'eure. Vn autre nomme Claude de Sa^
lîoye , avant eu la teite fendue prefque de part en
partd'vn coup de couilch^s , n'en eut lamais fieuiq
niaccidentquelconque , afcouilumé en telles playe«,
ruais les os brifez ayans efte oftez , félon que l'arc
de chirurgie porte, en deux mois il fut debout. Deux
autres, l'vn ayint eu la cuifle froiffee d'vn coup de
faucouncau , dont le boulet lui fut tire hors : ôiTau-
trcattcint à la chenille du pied , après auoir beaucoup
endure ifiirent guéris , Uns <ju'pn Iç^ur coupaft cuifle ni
érmemoraffles. 8t
iambe, Fr. ^ aller ivLi au 4. Ut*, de fa ohjèritations meiecino;^
Ui , obfevH.lo. rccitc CCS hiltoircs fort amplement , &
rcprcfcntc les remcdes applique? , & moyens tenus en
la cure de ces hlcHez , lefquels nous ne dcfcnuons,
cela apartenant aux doétcv médecins & chirurgiens»
qui outre Les medicamens ont cr^,ard à plu/leurs cir-
conftanccs necplfaircs d'cftre coniidcrce^ en tels au.
cixiens.
En la rencontre près de Cifteron , vn gentil-homme,
nomme le Cadet du Monltier, fut atteint dVne harque-
buzade entre la cinquiefme & fixiefmccofte : le bou-
let trauerfa la poidrinc , & fortit par le dos à deux
doigts près de rcfpine. Aucc le boulet furent tirez
douze annelets d'vne cpfte démaille que portoit ce
Cienril-homme ; plu/îeurs autres annelets de la rnelme
cofte demeurèrent parmi les mufcles , enirelescofles
Si. le dos , & quelques autres pouffez iufqucs dedans la
poi6trine en fortirent auec le pus de la playe , çle la-
quelle il fut guéri en Tefpacc d'vn an. Mais vne dif-
f.culté derefpirer lui dura le relie de cesipurj^à caufc
de ce coup. Le fcruiteurdu fîeurde Meiaiïej; , Gen-
til-homme d'Arles , blefîé en la mefme rencontre, d'v-
nc harcjucbuzade au bras droift , entre le coulde & l'ef-
paule,& mal traité par les Chirurgiens qui eftoycnterj
i'armeejvint à Arlcs,ayant le bras fphacelé , puant fi fort^
qu'on ne pouuoit durer auprès .tout noir,moJ, extre-
n-iementfroid,& le patient tombant de fois à autre en
pafmoiron. Les Chirurgiens a(}^t:ml!)ics? auec moi, nous
fjufmcs d'aduis de lui couper promptement le bras,pour
fauucrle reftc du corps. Ayant donc à CQup» de ra-
foirdefchiqucré le bras au dcffus delà chair morte, a-
lîcc la fcie on luy coupa l'os : & retenant le flus de
fiingauec cautères propres , dansvn mois ccll homme
fut l'ueri. V AÎlerioU en la mefme ohfernaùoUf
F.n cefte mefme rencontre , vn foldat Prouencalfuc
atteint au bras dVne baie de moufquGt, laquelle lui
caflalesos Ôcdefcbira tellement tout le refte , quele
Ufis n.e lenoit p;is i refpeffçur d ru doigt , qu'ii iilî
% 4
88 Jii^ûires admirables
tombaft. Les Chirurgiens cftoyeiu d'aduisdelccou«
per, fors vn nommé Maiftrc Didier Tefte , homme
fort expert en Ion art , qui dans vn mois guérit ce fol-
dat; lequel eut prefqiies entiers Scfams tou^ Icsmou-
uemens de ce bras ainfi fracafifé. Vn autre foldat frap-
pé dVne harquebuzadc a laface , le boulet lui donna
dedans la bouche , Séfortit par la future coronale du
cofté gauche vers les os furnommez pierreux , & la
tempe gauche, lui ayant brizé lamafchoire d'enhaut:
neantmoins il fut guéri & fe porte bien. Certain cro-
chetcur de la ville d'Aix , s'eftant rengé aux armes , en
vne rencontre rcceut vn coup d'elloc trois doigts def-
fous le nombril à coftc gauche , lancé de telle roi-
deur qu'il donna dedans la poidrine, la pointe ayant
percé le dps entre la troifiefme & quatriéfme coftc au-
près de rcfpine. Neantmoins il fut gucri par le Chi-
rurgien rufnommé. Nousauons ( dit V3lcriola)iugé
dignes de reçit les cures fus déclarées , afin que nul
ne defefpere en chofcs difïicilcs^ni ne fe confie trop en
celles qui femblent légères : veu que par fois nous vo-
yons mourir celui que le Médecin s'afl'euroit de voit
bien tofl debout,& refchapper l'autre dont il auoit per-
du tu utecfperance : & que le Médecin (& tout autre
qui lit ces cccidens ) fe fouuicne que mcrueillcs a-
uienent en telles blefleu^cs & guerifons , ainfi qu'ci,
autres oeuuies de n-iturc , à la louange de Dieu toiit-
puiflant.
En la guerre de Sauoye l'an i<^î§. & fuiuans , vn ieu-
ncfoldatreccut vn coup de harquebuzc au milieu du
front dont le boulet lui demeura dedans la tcftc. Il
fut penfé & traité pc-r vn expert Chirurgien, en telle;
forte qu'au bout de quelques mois il retourna foire le
meftier des armes. Le en certaine efcaladc cftant tom-
bé de fort haut en vn folfé , le caffa tellement la telle,
qu'il en mourut. Le boulet demeuré des la bleffeure
précédente, lui fut trouué fur le derrière du teft , fans
dommage de la partie cirçonfèante. Alemoires denofire
iempu
Vn 2ut:c en ji^ mçrmc guerre ay^nt receu vn copp
C^memoYtihks. %^
dcharqucbii7adc traucrlanc cntrclc boyau cullicr, la
vernc)lcstcfticulcs,nc fut nullement offencé en aucun
endroit, ains après auoirefté foigncufcmcnt traite s'cft
toufioursbicn porté depuis, comme il fait encoreà prc- ,
îç.y\X. Me moire de 7ioj}re temps.
Tai penfé plusieurs qui auoycnt des coups d'cfpec &
de piftoles au trauers du corps,quiibnt c^ucris.Pour tcf-
moignage, icpcnfai^Melun l'argentier de TAmbafla-
dcur de Portugal,qui auoit vn coup d'elpce au traucrs
ducorps, par lequel les boyaux furent tellement blr,l-
fe7. , qu'en l'habillant il fortoit par la playe alie/ grande
c|uantité de matière fecaic : neantinoinslediâ: argen-
tier fut guéri, le fus aufll en autre temps appelle pour
vn Gentil-homme Pari/îen , nommé Gilles le MailViC,
fîeurde Belle-jambc, demeurant en la rue fainft André
des ArsjCn laprefencc de MefTicurs Botal^, Médecin or-
dmairc du Roy & delà Roine, Richard Hubert Chi-
rurgien ordinaire dudit Seigneur, & lacques GuiUe-
mcau, Chirurgien du Roy & luré à Paris , hommes ex-
pcrimcntezenlaChirurgicrlequel auoit reccu vncoup
d'efpee tout au trauers du corps.-dont par plulieursiours
il icttale fangparla bouche & par Ic./iege, en affcz
grande quantité, qui dcnotoit lesinteftms eftre ofien-
ie7.:toutesibis en quinze ou vingt ioursil fut guéri. /»/.
f^nihr.PAré (iu dix is fin? liii. hap. 55.
Vn icune homme de Ta^-afcon , Bis de Dame Elco-
ncr Labiancmaniantimprudcmmcnt vn piftolct char-.
ge,lela^chacontrc^oy-mefmc,tcUell^ent que le boulet
lui entra dansles boyaux trois doigts au dellusdu petit
ventre. Les Médecins & Chirurgiens dçfefpcroyenr de
favie, maisau bout de quelques iours , avant prinsvn
cl'ftcrcilrendicle boulctparlc fondement, & contre
rcipcrancc de tous quelque temps après il fut guéri.
F r. Kalieriolit en la ^.alferuiition dn 4Jiu.
Gafpar de Varadere,gentil-hommc d'Arles , ayant re-
ceude nuidvn coup de pillolet lafché de fort pre*;,
fut tellement garanti que le boulet le print au long de
1 poidrine depuis Tvn des coftez iufques à l'autre»
lyan: defchirélcs mufclcs,&pafle tout oatrc; ilfut
9 9 Hiftoires admirables
loigneufcment pciiic,& gut ri dedans vn mois après, le
wcjf'tfcn lo-'ilirHation S.an ^.liitre.
Vn cordonnier d' A uignon, ayant cftc rudement blel-
fé de nui<fl:d'vn coup d'cfpcc fur la telle , entamée iul-,
c|ucs à la première membrane , dont s'enfuiuirent plu-
/îcurs redoutables accidents,! iifcjues li qu'après les pre-
miers appareils, faignecs & médicaments , il tomba en
fyncopes, & fut fcpt iours fans parler , finalement fut
|;ucri,& remis au deflus. Le mejhje tn l'ohferuation y.t/e ce 5.
luérr.
Anroinejferuitcur de mon pcre , Fhment de nation,
s'eibnt charge devines fcftcs qu'on appelle les iours
i;ras, & monte envne haute chambre de la maifon il
s'approche des fcneftrc^ouuertes, où alî'opi des fumées
du vin,la teftc emporta le corps , tellement qu'il tomba
en la rue fur le paue , où il Te cr.ila prefques toute la te-
fl:e,cftant tenu pour mort:car il ne remuoit membre
quelconque, ii'auoit fcntimenr ni parole aucune, ains
ilupide & comme expirant demeura fept iours en tel c-
ilatauli^h Ce nonobftaiu trois des principaux Méde-
cins pour lors à Monrpellierjàfçauoir Gvifon l'ancien,
Tremolet & Faucon , accompagnez de Pierre Alzine,
Antoine Barrelier & Nicolas le Blois Chirurgiens , le
f arentirent de la mort,à l'aide de Dieu. Vray elt qy'il
iiemeuraprcfque aueugle & totalement fourd de celle
cheutCjtoutlereftc de fa vie. lemefuteen U ^.objerHatioit
Jfé 6 Mure»
BRIGANDS ET
meurtriers,
VN Joftc Théologien de noftre temps recite vnc
hiftoireprerqiiefemblable à celle d'Ibycus. Car il
<litqu'vnAîemaneftant en voyage comba es mains de
«quelques brigands qui eftaus fur le point de refgorgcr,
cepauure homme defcouurant vne volée de corneil-
les, commence i dire , O «ornçilles* /cvotîsprpns i
C^ mémorables* 9I
tcfmoins & vengercfrcs de ma mort. Il fut mé touc i
l*hcurcpar les brigands, qui trois iours après buuans en
vnchodeleric, voici venir vnotroupc de corneilles qui
fciuchentfurlcfais du logis. Alors les brigands com-
mencèrent à rire & à dire IVn à l'autre , Ho, voila ceux
qui fe vengeront de la mort de celui que nous dcrpcf-
chafmcsauanthier. Le valet entendant cefte rifee la
defcouureà fonmaiftre qui en fait rapport au Magi-
ftratJcquelfe faifît des brigands , fur leurs variations &
diucrfesrerponreslesprelTc tellement, qu'il en tirevc-
rité,donts'enfuitleur exécution à mort, ^^a recueil des
pYojJOi mémorables de ce T heolo^ien.
Conrad de la Rofejfecretaire de l'Empereur Maximi-
lian premier du nom,gentil-hommc vaillant & rage,a-
yant trauerfé vnc lonc-ue foreft, & contraint à cauïe de
lanuidfuruenantc àt^Q loger comme il lui futpoffi-
ble,cntra en vne boftellerie dontl'hofte eftoit brigand.
Eftant en fa chambre affc?. honneftement recueilli , il
appcrçcut la feruan ce larmoyer , & fccettenlcnt en-
tendit d'elle en queldangeril eftoir. Elle lui àh entre
autres chofes , que la couftume deThoftc eftoit de Ton-
ner vne clochettc,au Ton de laquelle plufieurs brigands
cntroyent aulogis,& incontinent vn d'entr'eux entroit
en la chambre ou elloyent logez les paflans,& faignant
moufcherla chandelle l'efteignoit : les brigands en-
troyentfur ces entrefaites, qui fe ruoycnt furlespaf^
kins,& les tuoyent.Conrad penfant à foi fe fit apporter
vnc lanterne par la feruante &vnc chandelle allumée
qu'il mit dedans & cacha h lanterne fous vn banc, tint
fes armes preftes,& attendit fes ennemis. A peine ei^oit
il à table, qu'\n payfan entre , lequel conrrefaifant le
valet,amortit la chandelle. Mais Conrad faifant prom-
ptemcnt tirer lalanternc&lumiere, & ayant les armes
en main comme aufll auoycnt fes fcruiteurs, repouflb
vaillamment lesaffaflins , cntueles vns,met les autres
^n fuite,failit fon hofte au colct,remmeinc,&le liure au
Maoiftrat,qui en fait iuftice.,^» mcfme.
Ilya^juulqu es années quei'ay veureuërparfentlçç
9 i Hijloires admirables
<iu Bailli de Morgcs,I'ousla domination des illu ftrcs Sei-
gneurs de Berne , vn ieune homme aagé d'cnuiion
vingtans, lequel conrrcfaifantle muet , &!demandant
l'aumorneauxpafl"ans/©us prétexte de palfer chemin a-
uec vneclocheteen m;?in, qui eftoit le fignalàfcs com-
pagnons (le nombre des coups leur feruant d'indice
pour difcerncr lespcribnnes au nombre & à la qualité)
s'eAoit trouué en vmgt deux meurtres, & de fa main a-
uoircfgorgépluiicurs hommes. Il mourut milcrablc-
ment, en mugiflant comme vnbeuf auquel l'on bnlc-
roit les os.Extrait de mes mémoires.
L'Empereur Charles V.cftant en Alemagnc , où les
afairesdela guerre le retenoyent, fut contraint d'enuo-
yervn des principaux de fa Cour en Efpagne, pour a-
uoir 1 œil aux afaires & difficultcz qui s'y prefentoyent.
Ce Viccroy^ieune Prince fort addonné à la chaffc , e-
ftant\niourau royaume de Grenade, àla pourfuite
d'vne beftefauuage , s'eflongna tellement de {es gens,
que brolTant après fa proye, à trauers vn grand bois,f3ns
prendre garde à l'heure ni au chemin, fe vid en lieux el^
cartez&presdelanuid. Au moyen dcquoiil commen-
ce à ietter l'œil de tous cofte7.,pouï defcouurir quelque
mailon où ilpeuftfe mettre à couuert. Làdeflusilap-
perçoit vne maifonnette, &picquant celle part , prie le
payfan qui y demeuroit de le loger pour celle nuid.
Ce que le payfan lui accorde, & le reçoit en famaifon-
nette,où eiloycntlorsfîx pcrfonncs, afcauoir lepay-
fan,fa femme, fon fils aagé de vingt ans, la belle Hlle de
nouucau efpoufee , vn valet qui gardoit le beftail du
payfan, homme robuile & de mauuaife rencontre , puis
vne petite fille. LePrince defcendu decheual le baille &
commande à ce valet,puis entre chez le payfan , &s'a-
proche du feu , tandis qu'on lui aprefte le fouper , fans
foupçonner rien de mal. Tous ces ^ens ne conoiflant
nullement ce Prince,lequelnefe dcfcouuroirà perfon-»
ne d'eux,ie voyant richement vellu, de fort belle apa-
rence , eftimerent que c'elloit quelque riche homme,
^ ptnfans qu'il ne faloit laiflcr cfchapper cefte graifç
proyc, commencèrent à dcuifer enfcniblc des moyens
delc
d* tnemorahîes, ^
?de le tuer» pour en auoir la defpouillc. Apres foupéjils
luiapreftent vn liift en certaine chambre , qui n'auoit
iju'vne porte foible , aiiee à enfoncer , & ne fermant
gueresbien.En allant & venant, la belle fille , nouuelle
manee , qui auoitfenri lèvent de ce cruel complot,
ayant pitié Je ce icune Pnnce qu'elle voyoit de belle
taille , d'honorable port & façon , Tayaiit tiré à part^
prie de tenir fccrct ce qu'elle auoit à lui dire , lui ddt
couurit bricfucmcnt rcntrcprife, tandis que le père , le
valet, le fils complottoyent eniemble de n^^uueau en
Tcftable.Le Pnnce ei'mcu àcce rapport , & enclinant i.
en croire quelque choie, fut fur le poini't de romprelc
coup,pour defcouurir qui il cftoit.Mais foudam ic dou-
tant que ce ferait auanturerfa vie en la commettante
la foy de tels barbares, quivioloycnt fimefchammenc
tous droits d'humanité & d'hofpitalité , de contpirer
contre vn homme, qu'ils voyoyent en braue équipa-
ge, bien monté & par eux courtoifemcnt rcceu , aima
mieux reconfier,apresDicu,en (à valeur & preud'honv-
mie , qu'en la parole de gens qui n'auoyent point de
foy,ainsdonT le cœur eitoit couuerc de feintife &de
fang. Il fclaiile donc conduire parle payran dans la
chambrette , & ayant fermé lapor^c delTus foy , traine
pour contrebarre vn coffre allez pelant : qui fetrouua
dedans lachambrette,puis tient fon cfpee prefte,&pres
de foy vnc longue piilolc chargée, bandée Se amorcée,
veillant & attendant que ce fcroit du rapport de la bel-
le fille. Incontinent lepayfanqui Teièimoit endormi
à caufedu trauail de la chalfe & du chemin , s'appro-
che tout bellement de l'huis, qu'il tafte& toiiche pen-
fànt entrer fans difficulté. Mais fruftré de fon attente»
il com.mencc à prier fon hoftc de vouloir ouurir , pour-
ce qu'il vouloir prendre en ce cofire quelque couueî)-
turc de Mù. dont il auoit neceflaîrement affaire. Le
Prince qui ne dormoit pas lui refpond , retire toy , inv
portun , ie repofe , & ne t'ouuriray point pour celle
heure. Alors le paylàn commence a faire du mauuais,
jreplaindr€,cwer,direqu*iJeitoitpcrdu,qu'onvouloit le
gourmander en fa maifon : prend les^rmcs j ôc menace
(f 4 Hijioires ddmirAhtei
de rompre tout , voirc de ruer celui qui eftoit en îâ
chambrettcs'il ne taifoit prompte ouuerturc Ôcnefc
rcndoità famerci. Lu: & Ton valet approcbaiu pour
rompre la porte Je f K tafchoïc entrer en la chanibrette
par vne fcntftrc : è^L conimençoyent a faire vn merueil"-
leuxctfort. Le Prince fc voyan: réduit d l'extrémité,
donne de l'a piftole n la porccU peice aifëmcnt , & tue
le payian,puis riranc le cofre arrière fort auec l'tfpee au
poing, ck.petchcle rL ,& court après le valet , cjui Itt
iàuuc de viilèlTe. Ce ne fut pas fai«5l pourtant , car les
cris de l'hoiteAe , (S: le bruit extraordinaire qui le taifoit
lors , efueille d'autres bergers voi/îns,qui y accourent a-
ucc leurs armes, enuironnent la mailbn, crient au meur-
tre & alarme. Le Prince fc donnanc g^rde d'cirx, patien-
te iufqucs auiour,& vovcnt queceftc troupe de mutins
fe renforçoit, commence à leur faire entendre qui il e-
ftoit, menaçant de les fane tous pendre , s'ils rcfuibycnt
de lui faire main forte Si le reconduire. Q£e s'ils ne
vouloyentle croire, quils allalTent quérir la iuftice au
plus prochain lieu: & que s'ils n'acceptoyent telle con-
dition,leur ruine & confuiîon n'eftoit pas loin. Lux
efmcus du langage &dela prefcncc d'vn perfonnage
d'cftoffe fi dillemblable a la leur , commencèrent à ^'a-
doucirien telle forte neantmoins qu'ils s'en faifiifcnt,le
garortent , & s'acheminent pour le mener au Gouuer-
neurd'vne ville , quieftoiti quelques licués loin de
li. Les gardes du Prince arriuans en ces entrefaites,
le voyansentcl équipage ,furent fur le poincl de tail-
ler en pièces celle troupe depayfans : mais le Prince
le leur défendit tres-cxpres. Tout ce que delTus defcou-
ucit& examine, les complices du payfan furent punis
fclon leurs démérites. Le valet roué, lamaifondc ces
brigands fut réduite en cendre , & la belle fille fut riche-
ment recompenfce de fon hdele raporr.uU.t>^«ûVr/ioM/.
é9rlf en Jhn théâtre d'exemples,
Vn Italien, nommé Francifquin, après auoir demeu^
iù quelque temps à Boulongae Iâ Gra% , en l'vne
é' mémorables ^5
<ïcs boftric<; maifons de Gentil-homme qlii fuft là,& ë-
flé'tcnupour quelque honnefte fcigncur, & de bon
lieu, veu les magnificences dcfquelles ilvfoit^fut en
fin defcouuert mener le train qui s'enfuir. C'eft que
fous prétexte de tenir le brelan de tous jeux de cartes
& de dez, & fous couleur aufii d'eilre fort defîreux d'à-,
uoir touiiôLirs nouuclle compagnie; & fe monilrer ma-
gnifique,il fe'faifoit n/îccr par ceux mefme qui elloyenc
nouucUcmentarriue/. en la ville. Et fi toil: qu'ils elïoy-
cnt entrez, après leur auoir faid les carelîes accouftu-.
mees au lieu , il le nicttoit à louèr auec eux , comman-
dant qu'on apprcftait cependant ledifner, ou le fou-
pcr, ou la collation, félon l'heure qu'il eftoit. Mais en
lieu d'apprcfter cela , Francifquin auoit vn brigand ou
aflommeur, lequel fc tenoit derrière, & s'apprelloit
pour frapper à mort celui qui n'y penfoit pas , qunnd
Francifquin en faifoit figne. Jl conrinuace train ii lon-
guement , qu ond'C^îii^ quand ils furent pris,& qu'ils
curent tout confefic , on trouua en despriue/. quator-
7.e ou quinze corps de ceux qui auoyenL elle ainfî tuez,
tantpar ceft affommeur que par Ion niaiilre Francif.
quin.En fin leur fupplice fut tel, c'efh qu'après auoir e-
ilé tenaillez, on leur fendit lapoidrine:puis on Icurrira
hors fou dainemcnt lecaur, lequel on leur monftra.
Conformité des înerHf.:!les (incitnres atacles modernes, lintc
prenier.
Vn aufe brigand de noftre temps , nommé Villeui-
neufjde la Comté de Tonnerre ,, menoit quai^c & ici
vn valet qui lui feruoit d'alîommeur,& vn laquai. Tous
trois furent attrapez finalement &chaitiez à Parls:lc la-
quai fouetté, l'aflbmmeur brufié yifjSi. le mailtrc roué.
x^H mefme Ut*tt,
Certain Hermite , demeurant en vnc montagne do
Suilfcou durant quelques années il auoit vefcu aulte-
rement & auec vne réputation de faindeté entre ceux
■âiu pays, vin tvn loura LiicerncoC fc logea chez, cerraî-
4ic temme vcfue,de laquelle tol^ après voulat i'acoAer,
9^ Hilioïres admit Me s
du pour lui oftcr Ton honneur, ou fa bourfc , elle s'cfcri-
ant acourut vn valet , que l'hermite tua fur le champ
d*vn coup de poignard. La vcfuc fc icttant de viftelïc
horsTamaifonconimcncc à crier à l'aide. Vn payfan
entre dcdan.s au Tccours, & cft tué comme le valet ; con-
fct]uemmcnt vn bourgeois de la ville, puis Ion Icruir^
teur. Quck]uc'i autres y acouranç, &deuenus plusaui-
lez: en l'auantuie dc•^ prccedens, s'cquippcrcnt i3c muiii-
tindrcnt Ç\ bien , qu'il; laccagcrent ce brigand , lequel
tombant par terre, ne dit autres paroles, finon , ieti^h.tl^
un -jjfder tAfhcn: c'eilà dire, maintenant i'ay delTusU
ïc. i: ë. L. St»nipfl i et: Chifioire des Smjfe.
Vn tirteran natif de Bafle, s'ciUnt adonné à desba^i-
clic & gourmandife > & ne pouuant, à caafe du peu de
moyens qu'il auoit , continuer ce malheureux train,
machina vn infigiie origan da<j;e. Demeurant furies ter.- .
res de Solcurre , il s'auife d'ailcr à Bade chez ion parain
nommé André Ager relieur de liures.hommc de vie ir-
repreheniîble , & qui auoit efté tuteur & comme père à
ce mauuais garçon nommé Paul, lequel refould de tuer
Ion parain & tuteur,& piller la maifon d'icclui. Il vient
Iccinquiefmciourdc Feurieri^^^.de grand matin heur-
ter à faportedcfon di: parain ; la chambrière qui le co-
noilfoit ne foupçonnant aucun mal, luiouurj. Il entre
en la chambre d'André lequel eiloit encore au lia;,
homme d'aage & maladif.Ala coul^umcdu pays, André
l'iiuerrogue gracieulement de la caufe dcfon Aoyage,
CQinment (a femme &. fes enfans fe portoyent. Pour rel-
ponfc , le brigand empoigne vn marteau de libraire &
tn alibmmclebon vieillard. Ceftcferuante qui auoic
oUuertla porte eiloit vne honnelte ieune fille nom-
mée S.^ra Falckifc, parente d'André , & qui gouuernoic
le melnaged'icelui , laquelle le iour précèdent auoit
eftépromifeen mariage & fiancée i leati Hofpinian
profclfeur euphilolopliie à Baflc Icelle acourant au
bruit, {ut atterreed'vn coup du mefme marteau parce
birigand.puisefgorgcc auec vn couReaù crenchantdoru
les relieurs de liures feferuentordinairemenr. Cela fait
Uouurelescûfrcs, trouue quelques gobelets d'argent,,
maie
^ mémorables» 97
Ihâispeu de monnoye, & s'en charge. Pour couuiir ("on
îiornbleforfaÏMlinctlefeuau poifle, efper.Tnt rju'auec
rcmbrarement de la mailon , ces deux corps lerpyenc
réduis en ccndres.Maislefeu ayanr cH:é <>})portunemenc
cfteinc parles voiiins,on trouueces dciiAperfonncs a:n-
fî afi'ommecs & miferableinent meurtries. Le mcrchanc
agite de fureurs vent;erG(]'cs , & tellement arrellé par les
cordeaux de fa melchante conîcience , cju'il ne pouuoic
plus cheminer de iour, futattrappé envnviila^ie près
tie Baflc,&: ramené en la ville , ou à caufe de Ton brigan-
dage, larcin & embrafèmcnt , il fut exterminé & exécuté
vif par trois fupplices, de la roué" , du gibet & du feu , le
dernier iour du merme mois, jh.ztt^ii-^^er *w 19. ■voLde
fon théâtre f litt.i.
Thomas Rodolphe de Schafouze du nombre de ceux
qui fous le nom d'cil:udians fe donnent quelquesfois;
plus de licence qu'il ne conuient , ayant defcouuert que
lean SchuanfeldcrSc fa femme, en la maifon defouels
il auoit fréquence auparauant, eftoyent allez à Franc-
fort, fe tranfporta foudain à Seprcndelinge village pro-
che de là , ou demcuroyenc les lulhommez , fait enten-
dre quils eftoyent fur leur retour & bien près dcii,
fuiuis de bonne compagnie, & (iu'illesauoit deuanccz
pour faire appreder le difné. Il enuoye donc la feruan-
re quérir au poiflon , puis commence à prier h file de
la maifon nommée Amélie, qu'elle lui allait tirer du
vin. Lile difant qu'il faloit attendre la venue de fcn pe-
ie,il entre en cholerc, &lui demande vn couikau pouf
peler vne pomme. De ce coufteau il tue vn enfant de
quatre ans, petit fils de Ican Schuanfelder , puis Ame-'
lie, laquelle vouloit défendre fon nepueu. il le fauue:
les payfans courent après , Taùtrapent , lemcinentau
Chai1:eau d'Ofenbach , où il confefie ce que dcllus.
Mais vne nujdt fuiuantc, par vn moyen du tout extra-
ordinaire, il fe dcsfcrre, fort de fon cachot , entre fubtji-
, lemcnt en la chambre du Comte lors ablent, y demeure
<; caché deux jours, crochette vn coffre, prend vn fac
.où il y auoit cinq cens florins de Rliin , & le ict-
tç fur k bgui; du ^lin > fieuue paflaoc au long de ce du-^
G
'^B Hiftoires Admirables
âeau : puisdcualc parvncfeneftrc treilliflee , à l'aict^
d'vne corde dcbaftcau qu'il y trouua attachcc , & s'cn-
fuità Francfort, ou dcfcoauert par les payfans &dccclé
au Magiftrat, le iz. iour de Fcuner ijyo. il tut tenaillé &:
roué. Lk Tnefme.
Deux Anglois logez cnfcmblc près la porte fainift
Marceau i Paris, dontTvn auoit quelque fommc d'el-
cus & vne groffe chai ne d'or , auec quelques autres ri-
chcs bagues qu'il portoit ordinairement fur loi : Ton
compagnon voulant s'emparer de tels loyaux , fit tant
t\u'i\ le mena iouèr vers le bois de Vincennes , & eftant
dedans les vignes fe rue fur lui , lui coupala trachée ar-
tère &rœfophague, lui donna certains coups de dague,
&pcnrant bjen Tauoirtuc, le lailfa prefquc enfache-
mife.Ayantfaid ceftetrahilon & mcfchancetCjilretour-
rieincontinent en la ville. Le nauré qui auoit faitlc
mort feleua puis après, & fit tant qu'il fc traina\ ers la
maifon d*vn payfan, lequel par pitiéle fitpenrer& mc-
dicamenter. Il fut apporté a Paris,où toft après vn de fes
compagnons m'cnuoya quérir pour le pcnfer : & tiou-
liai qu'il auoit la trachée artère & l'cefophague ( qui eft
la vôyedu boire& du manger) enticrementcoupec. Su-
bit icrecoiifu la playe prenant la trachée artère , & ra-
prochanricplus près qu'il me fur pofl'ible les deux ex-
tremitez l'vne contre l'autre: mais de l'aefophague non,
parce qu'il c'eftoit retiré vers l'eRomach :puis ija'playe
appliquai remèdes auec comprcfie & ligature propre.
Incontinentquilfutainfi habillé, il commença à par-
ler , & nommer celui qui lui auoit faiâ: ccll excès. Le
meurtrier fut pris toft après au fauxbourg faind Mar-
ceau,& le trouua on faifi des hardcs du patient , dont il
full conftitué prifonnier,!: le fait vérifie après la mort
du patient, laquelle fut le quatriefme iour de Ta bleflu-
rc. Toft après le meurtrier fut rompu & mis fur la roue
près fainfte Catherine du Val des clcholiers. M. ^m^
iroije Paré an iicujicfme littre ch>if,^l.
Avx premiers troubles vn Gentil-homme ioint aux
troupes qui afîiegeoyent Moulins en Bourbonnois , fut
jurprisd'vne celle ttioladie qu'^ lui ^W fort difficile de
(^ fmmoy/ilksl j»)
fuiure la compagnie qui tleflogeoft : & Te froMMant Io~
gé che7-vn boulanger nommé Ican Mon, qui fc difoic
eftrefonami Scfcruireurj, fe lia tellement en lui , qu'il
aima mieux demeurer en arrière que palier outre, ayant
monllré à fon holte Targcnr qu'il auoitjequellui pro-
inettoit de le bien garder contre la coniinune , auec vii
autre petit frcrc d'icclui r*agé de treize a quatorze ans.
Mais tant, s'en faliit que ce malheureux leur tint pro-
meiî'c, qu'au contraire fî toft quelanuidfut ciofc, il les
mena hors delà maifon fur letofl'é, là où il ne les tu»
qu'a demi, tellement qu'ils y demeurèrent refpace'd'vn.
iour à refpirer j fanspouuoir viure ni mourir , & fan*
qu'aucun en cuft compaflion. Mais Dieu en fit la ven-
geance quelque temps après : car il adliirit que ce meur-
trier eftaiiten garde, vn lien compagnon fans y pcnfcr,
lui perça le bras d'vne harquebuzadc , dont il languie
l'efpace de trois mois,puis niourut enrage. H*j;?Jl« Fr^w^
(ejoui Charles ^.
La ville de Bourges ayant eftë rendue par le "neuc
d'Iuoy durant les premiers troubles , on y fit defcnfes i
Ceux qui l'auoyent tenue auparauanc, de parler ni en la;
ville m aux champs, ni citre plus de deux enfemble. En-
tre ceux qui prenoyerit plaiiir , fous couleur de cefteor-?
doniiLincc , de meurtrir ceux qu'ils rencontroyent par-
lons enfemble, il y auoitvn nommé Garget , Capitaine
tîu quartier de Bourbonnc,qui en failoitmeÛier, lequel
tofl; après. frappé d'vne fieure chaude courut publique-
ment parles rues , blat'phemant le nom de Dieu , inuo-
quant les diables, è^ difantà tous, que il quelqu'vn vou-
Joit venir aucc lui en enfer, il payeroit les defpens, 8ç
ainlî mourut infenfc^-furieux, dont fes compagnons ne
faifoycnt que fe rire. £>i la mcfme hiji,
Pierre Martin chcuaucneùr d'efcuirie du Roy, te-r
nât la porte au lieu appelle Liege,vers Poiâ:ou,hommc
làns reproche, fur vnc limple accufacion , fans autre for-
me ni figure de procès, fut condamn<f par vn grand Sei-
gneur ,durantj la fureur des premiers troubles , à eftre
iioyé.Ce Seigneur commanda à vn ficn fauconnier d'aU
tçifurlexhauip jexfifu^g: cffte feacence , fous poiiQ
Q
K *
100 Hifioires admirables
d'eftvc noyc lui mcfmc. Ainfi fut-il fait : mais Dieu n'ar-
refta guercs à en faire la vengeance , eftant aduenu trois
iours après que ce fauconnier & vn laquay cftans entrez
en querelle pour la defpouillc de ce perfonnage , s'en-
tretucrcnt fur le champ. Ce qu'eftant rapporte au Sei-
gneur, iuge très inique, le contraignit d'auoir quckjuc
remord, &de dire tout haut, qu'il voudroir qu'il lui
cuft couftc cinq cens el'cus , & quece pauurechcuau-
cheurn'cuft point elU- noyc.Maisc'eftoit trop peu eili-
Bier la vie d'vn homme innocent. En la mefme h:j}.lii*,7,
Qv E L q^v E s troupies de paylansdc Coulours, Ceri-
iîers, & autres lieux en Champagne , ayans fait plu/îeurs
meurtres, & rauagesen diuers lieux, furent dcsf.iits cj &
là, &perirentprelquestous de mort \iolcnte durant!
premiers trouble^ le marquerai ici des particularité,
notables touchant deux de ces troupes. L'vn voulr.nc
mettre le feu en vue maiion , tomba roide mort par te. -
le, frappé d'vn coup de harciuebuzclafché par vn de les
compagnons. L'autre tramant vn pauure homme & fa
femme ivn pofteau , pour les y faire harquebiJ7cr, re-
ceut aufll.vn coup de harquebuzc qui lui ofta la vie , &
ICipiilbnnicrsefchapperent par tel moyen, ^umejme
lime. Il a L\\r remarqué en rhillone de France depuis
Tan 1560. iufques a la dernière paix , c}ue de mille meur-
triers qui y lont demeurez inipunis,au regard des hom-
mes, il n'en cft pas relié dix, que tous ne lovent priiez
parles mains vcngcrefles de Dieu , & n ayent fait ties-
>i, ai-heure ufe fin.
CAS EST RANGES, horribles, &
extrewement ptoyables.
E nollre temps vn laboureur de Beaufle, quinuoit
'aflez bien dcquoi , lianr des gerbes aux champs,,
^nuoya Ton fils en la inaifou pour lui apporter quelc]ue
choie. Contre lequel, eftanc retourné, il fe choiera
^pource cju'il auoi: ciop demeuré à fon gré ) tellement
qu'il
d;
C^ memord'les, lor
qu'il lui îcttavnc morte à la telle, dont l'enfant tomba
mort par terre. Ce que voyant il le couurc de gerbes, &
tout dcfcrpcré s'en va vers fa maifon, où fa femme cftoic
fe baignant & baillant à tetcr à fon petit enfant, duquel
elle eitoit fraifchemenr accouchée ; entre en fa grange
& fe pend. Lefaid rapporté à la panure femme , pap
quelqu'vn qui y cftoit entré bien tollapres,de grand ef-
froi qu'elle eut, en le iettant hors du bain pour y courir>
fit tomber fon petit enfant dedans, lequels'y noya.Toft
après, la pauure femme , cfpcrdue du trifte fpeclacle
qu'elle venoit de voir , trouuant à fon retour ce, petit
enfant noyé, entra aufli en tel defefpoir qu'elle .s'en re-
tourna en la grange,& là s'eftant entermce fe pendit au-
près de fon mari. Quels horribles efFefts & fruids c-
ftrangeiîient amers delà cholere d'vn père maî-auiré!&;
combien, pères, mcres, enfans , ont ils occafion defe re-
commander humblement & incefl'amment a Dicu!Co»-<
formitpdes merueilles anciennes au>cc les modernes.
L'an 1578. vnc femme en la ville de Bochne,baignanc
fon petit enfant , oit hors de la maifon la voixlamenta-
ble d'vn (îen fils ia grandelet. Elle y court hatiucment>
& trouuc ce garçonnet tombé par terre ^ tranfpercé par
foy mefme infcicmment d'vn coufleau qu'il auoit en la
main. La mère outrée de douleur retourne vers le pe-
tit au bain , & le trouue noyé. Sur ce le mari entre, &
deuenu furieux à tel fpedacle , empoigne fa femme , &
l'afiomme de coups. Voyant ces trois morts li eftranges,
prcfi'é de faconlçience, 6c de compaffion d'vn tclfpe-
d:aclc,il cerchc & trouue vn cordeau duqucUls'eltrarx«
£;le. tendre Duditiw, an tra:cté dc:> Comètes,
Au marquifut de Brandebourg, certaine mcre , tranf-
portée de fureur du tout ciliange, tua fon mari & deuiC
fîensftls, puis ayant attaché des grofles pierres à leurs
cols, les ieita tous trois au fond du ticuue Odeie. M*
^^ndré Hofifdorjf tnfon théâtre d'exemples.
L'an 155^. en vn village de Sileiîe , nommé Kuken-
dorfF, vn autre femme tua trois fiens enfans, en Tabfen-
<e de fon mari, puis fe tua aufli foi fliefme. Mnarneja^
thsiitret
ÎÔL ïiîjtoires admirahln
L'an 1540. en vn vilhgc prcs d'AnncbcrgiCCrtain paya
fan eîeorgca & clcorcha vn veau en pielenccdc quel-
<Jues ncnspctiscnfans. Eftantallc toll apics à quelque
■afairc, & la femme fortic de la maifon , les enfuis qui
y eftoycnt demeure?., auccvn petit couché au berceau,
Tont exécuter vn horrible cas. Ils prenent vn cou-
■ftôau , & cfgprgent le petit, chantans nousefgorgerons
le veau. Mais voyans Icfangôc le petit roide mort , ilc
'commencent à s effrayer , & vont fe cacher dedans le
fourneau du poiflc; pour n'cftre point trouuez. La me-
Tc ne foupçonnant rien de mal^rcuient en la maifon , &
deuant qu'entrer au poidc, allume vnc giolîe poignée
dcchencuottt>,& la iette dcdanslefouincaurpuis entre
au poifle,& voyant Ton petit mifcraWcmcnt efgorgé , &
i)aignant en fon fane^s'enfuit demi defefperce en;laruc,.
criant mifericordc. Les voifins accoururent, demandent
que c'eft;clleles mcineau poiHcleur nionftre ce mafl'a-
cre. Comme ils s'occupent a dcfucloper & vifiter l'en-
fant;la mère demande les autres. On les appelle , on le?
cerchc haut & bas : en fin fur le bruit que le dernier ex-
pirant auoit faid , on les trouue cftouffez dedans le
fourneau. Quelque voilîn les auoit ouy; chanrans,Nous
cfgorgcronsie \eau. lùh rinctldtizJnrtedei tneinteiUcs de
xc ieinps.
Le vingtitAnc Jour de Nouembrcif^ï. en vn village"
âe Hcirc, nomme Vvcidcnhaufcn , vne femme cilran-
ceraent dcfeipercc , ferma en toutes les fortes qu'elle
peut les portes de fi maifon, puis empoigne \nc hache
irenchante, & court après fon fîl.saifné , aagc de huicl
ans. Lui voyant le mauuais courage dcfa mère, s'en-»
fuiten lacaue, & fe cache derrière vn grand tonneau;
ÏÎIc allume vnc lampe, & commence a cerchcr par tous-
les coins de celrccaue. Le petit carçon la \oyant venir,
pleurant à chaudes larmes, & les mains loin tes , la fup-
plicdelui pardonner. Mais elle ne fe fouciant de plcuri
nidepriercsjluifcndlatcfteen deux , puis lui coupcles
iras en plufieurs pièces. Cela fait , elle fort de la caue,
^ court fus ù vrve fîene fillette aagcc de àmi anj,
iiiaquçUc cUc itiidla tcftci la noiftrincj & les brax.
Derrière la porte cftoic caché tu ioli pérît garfonner,'
dctroisans, que cefte enragée empoigne parles clic-
ueux,Ie trame en vne petite cour, &lui coupe le col. Il
yauoitdans le berceau vn cnfançon de fix mois qui
plcuroit tendrement : elle le tire de fon repos , le iette
en h cour, puis lui tranche la telle. Quoi açheué , ne
rcftant plus perfonnc , elle 'ic donne d'vn coufteau de-
dans la gorgCjduquel coup toutesfois elle ne meurt pas
foudain. Les voifîns qui auoyent ouy vn peu trop tard
le cri des cnfans , après auoir heurté quelque temps %.
la porte, finalement l'enfoncèrent, & trouuansce pi*.
rcux rpedaclc > vii^drcntà la mère , laquelle rcuenue S»
foi , & demeurant encor vn peu de temps en vie , dc^
ckra ce que dellus, & auec grande reconoillance de Tes
péchez , &efpcrance delà mifericordc de Dieu , rendis
rcfprit : lôb F ineel^at* premier Uurc, M.t^udr^Utnfdorjf
fnfon rheatre.
En Tan mil cinq cens cinquante, auint au pays d*Al-
facc, en certain village, ce qui s'enfuk. Adam Stckmaw.
payfaii qui eaignoit fa vie à labourer les vignes, ayant
receu quelque fomme pour les iournees dVn fîe%^
maiftre qui le mettoit en befougne , alla cnvne ta~-
uerne & perdit fon argent au ieu de cartes. Bien.
fafché, Scluifuruenantli deflusvne douleur de teftc»
il tombe en defefpoir. Les feftcs de Pafques venues la.
femme contrainte parla nece{rit;c , prend fon fils aifaé
ia grand auec foi & s'en va trauailler aux vignes:
priant le mari de garder la maison & les enfans, Ertant
feul il fe remet fi auant ertfes pcnfees, que furmonté dç
defefpoir à caufc de fa pauurecé , il délibère defe tuer
foimefme. Il prend vne coignee, & choiiitvn endroit
où il puiOc fichervn clou pour y attacher quelque pot-
de & s'en eftranglcr. Mais ne trouuant aucun heu pro-^
pre, voici venir à lui vne fiene fillette aagee dcfept ans»
qui lui demande , mon père que cerchez vous ? Sans lui
rcfpondre , il entre au poifle , où vn petit garfoo-
pet plus ieune le fuit & lui demande du pain : Ap-
porte vn coufteau , dift-il , &: ie t'en douneraL La
^e;ceacvurs& lui prçfeacçlç conftcau : donc il l9S^
Q 4
ar o 4 Hijloires Admirahles
^Igorgctous c!cux, puis \n aune petit au berceau, la
fiiere de retour voyant ce piteux fpcdacle , fc pafme , &:
de douleur rend Pcfprit. Le parricide ell empoigné , te-
tialllc,& roue vif. ta mcÇmc.
L'an 55c. -y n payfan pics d'Aldendorff en HcfTcayant
i'efpritrout brouillé , demandant à fa femme quelle
fuidonnaiHdifncr, ÔceUe embefoignec ailleurs, nei'e
halbnt pas afTez à ion gré : ce malheureux s en va cou-
|>crrvne des cuiflcs à vn lien petit enfant au berceau:
puis le portant i la mère : Tien, diâ:-il,pren ce gigot,&
te taitroftir, Gujpard GijU-f^'vrrnsMttrMdedesmerueilUs,
hn la mcfme .innce,vne femme fort enceinte,du dio-
cefe de la Coince dlfcnberg , pria doucement Ton man
deconuierà dilncr quelques femmes, qui deuoyentUu
3fiiitcr& aider quand elle accoucheroit. Lui furpris de
fu reur eftrange la frappe du pied , puis lui donne quel-
que coups de poignard &.la tue fur la place auec fo«
fruia,& le fauue. /• incfim,
La femme de George VVedering de Halberftad, aa-
çecdc vingtquatrc ans, modeJl:e& vertueufe , eftant a-
couchccle z5.iour de Nouembrc i5Ç7.d'vne fillebapti-
y.t.-c.e lendemain, ne le tiouua point en fonli<fl. La
fauanre oyant pleurer l'enfant, Aint au Vid , cL'idant y
fouuer fa maiilrelfe,& rcfueiller. Eilonnee de l'ab-
f ace, clic court efueillcr Ion maiilre , qui mcrucilleu-'
îl.ment e {il ay éprend l'cnfrtnt en fcsbras, & ccrclicU
inerepar toute la maiibn. Les rues & autres chemins e-.
iloyentcouucrcs déneige , Si ne paroiiibit traces quel-,
conques dont l'on peuftconiecfturerque la femme fuit
fortie de la maifon. Finalement le mari , la feruante, ë:
autres dcfccndcnt en la caue , ou ils ne la treuuent
point -.bien entendent-ils patouillcr dedans l'eau du-
puits proche d'icellc eaue. Le mi:ri tout perplcx, eA
licillc les voiiin.s,& leur raconte fa inifere. La dcfl'us on
entend quelque perfonne au iardin del'vn d'iceux , qui
vient heurter à la porte, & lui ayant ouuert, ils virent
lapauure accouchée prefque rranfîe de froid , ;Cc plai-
gnant cf au oi; trempé longtemps au puits, dont far-
it>^entfuy l^svvIlçmcajJtÇUtaiOUiUeî, Enquife corn.
^memorMes. lo^
iment elle eftoit ilcLi?.lee en ce puits bicfi couuert&
cîoS;&c|ui n'auoitqu'vne petite lencllrc forteftroitte>
clic n'en fçauoit rendre raiibn, & n'y auoit homme qui
pcull comprendre comme cela s'efloit fait. Ayant de-
puis elle griefuemcnr malade refpacc de quelques iours
elle commença de fe bien porter :tellement que le qua-
torziefme tour de Décembre elle fe leua du ii'ft , eni-
jnaillotta Ion enfant,& le mift à table pour difacr. Cô-
ine laferuante tull allée en la caue pour tirer delà biè-
re., elle fe remet au lid & s'endort. La feruante de re-
tour void fa maiftrefle dormant^mais elle trouuele ber-
ceau vuide. Toute effrayée elle court au puits,qui lu£
leuint en penfee,& void l'enfant fur l'eaujequel en fut
tiré hors par deux Sénateurs de la ville , en prefence de
Conrad de la Perche patleur de l'Eglife. La mcre dor-
moit comme vne femme du tout aifopie. Apres la priè-
re faite au pied de fon lidjellc ouure les yeux, & com-
mence à dire aux afilftans, Pourquoy m'auez-\ ous ef-
^ uc!llee?ieiouyffois d'vn contentement indicible: i'ay
vcumon Sauueur,i'ay oui les Anges. S'eftanrremife à
dormir,au bout de quatre heures elle s'efueille , fefou-
uient de fon enfantje demande, & ne le trouuantpas
s'afHige& fe tourmente dVne façon pitoyable, lob Jrir.-^
eel ai* deuxicfme liurs.
Il y a quarante ans ou enuiron quV n certain Itaheii
nommé Barthelemi, ayant perdu quelque procès à Ve-
riife,lcqucl lui iinportoit de tout fon bien, oublia telle-
ment lapuifiance& la mifericorde de Dieu : qu'il f tfl
concluuon, que force feroit que fes hlles venues en
aagcfe pioiHtuafl cnt , en lieu d'eftre honorablement
mariées. A quoi il ne trouua autre expédient. (En la
boutique de celui d;iquel il prcnoit lors confeil , &qui
lui auoit misteiieconciu/îon en la fantaiîe)que de leur
couper la gorge,pendsnt qu'elles cftoy cnt cncores peti-
tes. Ce qu'il exécuta en vne nuid , ayant emprunté
le foir de deuant le rafoir d'vn barbier. Le lendemain
on courut à ce piteux fpc(ftacre,&: trouua-on que l'vnc
de ces filles auoit la main prefque à moitié coupée,
4ç J?-<|ueUe U «ft »» prefujocf qu'elle auoit pciifo
J^^ Hijloires admirables
faire bouclier contre la raL;c paternelle. Le briiîtcouri»
«depuis que ce malheureux s'ertoit précipité du hautdc
«juclquc mouraone,veisla Comté de Tirol,ouilseltoic
lauue. Traulédtlacênf^rmitgdH ratritcilltt ancktmêi au<$
il s nie dentés.
Vn Suiilc, ayant furpris fa femme en adultère , & lui
ayant paidoné àriicuic , au bout de quelques ioursfc
xauiià , ^ircrra<5tant ccpardon,latua:alleguant que fon
/:œurnepouuoit porterquil laiflaitviure vncfemmc
<îui lui auoit loue vn tel tour. Ce qu'ayant fait , il def-
pefcha aufli Tes cnfr.n.s,alleguant qu'il ne vouloit point
auoird'enfansqui fuflent nonmiez cnfans de putain.
iît dit-on qu'après auoir eftc ainfi meurtrier de fa fem»
.«le & de Tes cnfans,il fut aufli meurtrier de foi-mcfmejfe
prccipitantdu haut dVme tour, après auoir cfçrit en vu
papierjequcl il mit fur foi^l'ai^c qu'il auoit commis, &
J€s raifonsquiluiauoyentiuduit:,&: que fâchant que la
luftice leferoic mourir pour raifon dudic ade, il auoit
Jui-mennc mieux aimé s'cxccuter, que d'endurer vnc
^^onhontcuCc^M ntejhe traiclé.
Au mefme temps, ou peuapres , vne femme de SuilTc
ayanr reccu vn autre en fon lid en la place de fon ma^
rij6cs'aperccuant qu'elle auoit eilédeceué,& que ce
«elloit point fon mari qui auoit couche aucc ellc,vn il
^rand courroux & creue-coeur la failît , quelle s'aili
«»'-»ycr.<_xâf„ ntefvxt traité.
Certain fecretaire d%ne ville de SuiCTe rudemen:
jjourfuiui par fa propre confcience ( comme aufli fes
xûcfchancetez elloyenralfc?. diuulguces ) apres^auoir
.failli fouuent à fon coup, exécuta f nalemcntrarrelHe
faf confcience , alors qu'on l'en penfoit mieux garder.
Car ayant eftc trouué vue fois es bains fe defchiquetanc
le corpi à coups de caniuet,futretenu:mais le iour mef-
me il trouua moyen de fe rompre le col en defpit d^
tous ceux qui legardoyent, fe iettantdu haut d'vnefc-
Jieftre en bas. tàntepne,
Bonaucncure des Periers, autheurd'vndjsteftable II-
■ tire iaticulé C^tiàd*fm MWi«^>y ù ii fp »ipcqi;e de la vrayc
rcligiun.
•I
f^'
ér mémorables. 107
igion,autant & plus que des rupcrftitions^nonobftanc
)a peine qu'on prenoit à le garder (à caufe qu'on le voy-
pit ertré dercrperé,& en délibération de fe desfaire ) fut
trouué s'eftre tellement enferré de Ton efpecfur laqucU
le il s'cl^oit iettéj'ayant apuyec le pommeau contre ter-
re,quc la poinde entrée par reftomach fortoic parTcl-
chine. L^we/îwe.
lean Guy fils d'Emé Guy bonnetier en la ville de
Chaftdionfur Loin,auoit cfté toute fa vie fort desbau-
ché& grand coureur:à quoi auoit fort aide la trop gra-
de indulgéce paternelle. Auint vn Samedi pcnultiefme
de Septembre, Tan mil cinq cens foixante cinq , que ce
fils fe desbaucha félon facouftume, & nereuinten la
maifon iufques au foir bien tard. Dequoi fon pcrefe
courrouça bien fort à luijiufquesà dire, puisqu'il conti-
nuoit ce mefchant train , il fer'oit finalement contraint
le chafl'er hors de fa compagnie. A quoi le fils plein
jd'orgueil relpondit fort audacieufement , qu'il eftoic
tout prcftdcs'en aller,voire des l'heure mefme, pour-
ueu qu'on lui baillaft fesacouflremens. Sur celle difpu-
te le peres'en alla coucher:& eftant au lift fut contraint
(de menacer fon fils, pour le faire taire ,tantil repliquoit
fièrement contre lui. En fin , voyant qu'il ne gaignoic
rien, & ne pouuant plus porter tant de longues & or-
giieilleiîfes replii|ues , fclcua en cholere de fon li(5t
pour aller cballier l'arrogance & irreuerencedece mau-
liais garfondcquel voyant que fon père approchoit en
courroux pour lebattre,iette viftement la main fur fon
efpee qureftcit en la mefme chambre , & fe rebellant
centre fon père lui donna d'icelle au trauers du corps.
Duquel coup il tomba foudainement à terre , s'efcriant
i haute voix,qu'il cftoit mort. Les voifins eilonnez de,
ce cri furuindrent incontinent, & toil après la iuftice:
iefquels trouuercnt le panure pcre eftendu fur la pla-
çp, & n'attendant plus que la mort , laquelle s'enfuie
uitbien toil après. Aulïlfut trouuee l'efpee toute fan-
plante auprès dU fils qui fe chaufoit : auquel le perc
tneu de compaflion ,& oubliant la cruauté qu'il auoic
|çççu^ ^ç Im auoic ia ditpluiieurs foi*,Sauue toi,S^wuc
*o8 Hijloires admirables
toMiionfiîSjie te pardonne ma mort:aufliauoic h mcre
vie <ic niefmc auerrillemcntpoiirlc faire cuadermais la
pujfrancede Dieu l'arrcfta tcUcmeiu, qu'il n'eut onc la
force de deHoger.Mené es prifons & intcrrogué, du
commencement il pallia Ton parricide, accufant mefme
ion pcrc & alléguant qu'icelui >>*eftoit enferré. Mais Tes
exaifcs trouuees friuoles , il fut condamné à auoir le
poing dextrc couppé, puisa eftre tenaillé vif, finale-
ment pendu par les pieds à vne potence , & eftranolé
<1'\ ne pierre du poids de fix vingts liures qu'on lui^at-
tacheroit au col.Vn mefchant fauflaire prifonnier auc^
fui, le confcilla de fe porter pour appellant à Paris.
Mais après ayant franchement confelle fon parricide^
îlreuoqua fon appel, & fut exécuté, H^Jiouede no(ï,e
temps» •'
C OEFR HFM A IN.drfa iaje.
Diuerfes biftoire sd'icelui^en
nojlre temp,
AYakt percé vn apoftcme formé des long temps
fur la rcptiefme vertèbre, ou ilauoit fair,parla vi-
rulence de fon pus,vne grande ouuerture, &rongé la
membrane intime du cœur, ceux qui eftoyent prefcns
virent vn bout du cœur que ieleur monftiai.t^.^f/;»«e-
«/w>,rfM lime de x^ibditu caufiSj^cchap. i z.
Deux frères gentils-hommes , eilans entrez en-conte-
ftcà table, Tvn donne vn coup de coufttau à l'autre,
eîroid au ficge du ca^ur : force fang fort delà playe : on
porte le bielle fur vnlicl.-les veines commencent às'uf-
foibhrje vifagc paflit,vne fueur froide s'efijand par tout
le corpsjes artères jie battent plus , tous ngnes de mort
aparoilfent-Ellant appelle , ie fais appliquer fi^r le cœut
ce qui efl: propre pour le fortifier. Le blcilé ayant cfté
comme au dernier pas de la mort iufques à minuid,
coiîunence à fe reprcndrç.ic pouriui , lui appliquant cç
dont
érmemorahles, lo^
«^ontie puis m'auifer pour là conreruation,& finalement
îele voy gueriidontiecogneu que lecœur n'auoicpas
cfté atteint ,. comme ic craignois au commencements
maisquelatayc,membrane,oucaprule d'icelui (nom-
mée péricarde des Grecs,c.fus-cœur) auoit cftélcgtre-
iîicnt touchée, k mefme, au fotxante cinqnicf/ne chapitre d»
rfiejîne Hure.
Nous auons vcu Antoine Algiat bîefle,& n*ayantle
péricarde entier. Vray eft qu'il ibufpiroit haut & feu-
uent, & mourut quelques années après ccite bleiTure,
Les parties internes bleiFees attirent la mort en quatre
iortes:ou par neccdité de leur funftion & oflîce , coiPr-
me le poulmon:ou acaufe de Texccllcnce de leurna-
ture^comm'eie cœur:ou par grande perte de iang, com-
me le foyejes grandes arteres,les vemes:ou par la mali-
gnité des rymptomes&: accidens,comme les parties nei-
ueufesjle ventricule, la vefîie. Encores que des parties
foyent incurables, elles ne font mortelles pourcantde
neccffité abfoluerautrcmentjla mort s'cnluiuroic de la
bicirure incurable des os,cartilages,& ligamens. Le pé-
ricarde donc n'eft point mortel de foirmais à caufe qu'il
cft comme impollible de Tatteindre, que pluiieurs au-
nes parties nobles ne foyent ofFenfees. Cardan oi fo»
CommetUaire fnr les x^phorifmei d'Hippocrates , linre â.a^
jp/jor.i8.
;^natomizantvn mien difciple mort en l'Académie
de Kcmc,ie trouuaique ce ieune honmie n'auoit point
de péricarde : au moyen dequoi viuant il tomboit fou-
uent tnlyncopej&fembloit comme mort: de laquelle
défaillance auHi finalement il mounit.ColHntÙHi au anhy
Z^iejme liitre de fou x^natomie.
Vn certain brigand^ofté du gibetjoù il auoit efté pen-
du,& nçn du touteilranglé , fut foigneufement penfé
& guéri. Mais comme c'eiioit vn defcfperé garnement,
il retourne âfon mcfchant train, eil attrappé, & c-
ilranglé tout à fait. Nous en voulufmes faire l'anato-
mie , & trouualrncs qu'il auoit le ca-ur tout velu. Ce
que Ton raconpe aufïi entre les Grecs d'Ariifomenes>
licKermogencs ic Ki^etoticieajde Leomdasjds Lylaa-
iio Tîiftoiires admlrâhles
tlcrf&: autresjvoire d'vn chien d'Alexandre le GrJin^.Ct
poildenotenon feulement promptitude de couraçc, &*.
obrtination mauuaifejmaisauflî quelcjuesfois vaillance
mclprifant tout danger. Benimnim m* chap. gj. de abdkn
euufis,
Faifantiadisà FerrarcrAnatomicd'vn homme, nous
lui troiiuarmcs le cœur tout couuert de poiLaulVi eftoit-
ce de ion viuant vn détermine Tpadaflin, & voleurinlî-
^nc.f^nj.itus Fortn^atf itn U cenlur:c 6. cure 6^,
Ertant à Venife , ie vis tranciier la tefte à vn brigand
fort renommé , auquel le bourreau qui fit des pièces du
corpSjtrouuale cœur merucilleufement velu. AL^yl,
JVittret ai* iz.Uure de Ces dli^t. .jh le^ojSj ch.ipJO.
rayvc\ien qLciqucs corps humains l'en tredeuxd i-
^inguant les ventricules du cœurelbc vn cartilage : es
autres le ventricule défaillant ou li petit qu'à peine
pouuoit-onlereconoillre. CoUmb.au 15.//**. defoni^na-^
tomie.
l'ay trouuéen deux corps d'hommes par moi ouuerts,
vn os aux racines de la grande artère , h de la veine ar-
teriale. com. Gemme auUure de fa\cyclognomte ypa<^.7$.
Envn autre ic trouuai vn offelet entre les cercles carti-
lagineux du cocur,derartere aorte , &dela veine artc-
riale,telquelesosqui letrouuent au coeur du cerf. c o>-7.
Gemme au l.lin.chap.é.de fon C ofmocritic.
Le fils d'vn Imprimeur de Balle , ieune enfant bien
dîfpoft , prenant plaiiîr à faire fouuent la roue fur les
deux mains en terre , à la couilume des garçons qui le
deledcntà donner du palletempsà qui les regarde, vn
iour en ceft exercice commença de fentir vn grand bat-
tement de cœur à l'endroit du petit ventre au coftégau-
chc,iufques où le coeur s'elloit abaifîé , ayant fait relaf-
chc de les vafes & membranes, & futtrouué toutren-
uerfe, quand on Touurit apresfon trcfpas. vdix PUterm
enfes ohferuations an.ttomiqms*
LeDodeurMelanchthon en fon premier liure de
l'ame , attende deCafimir Marquis de Brandebourg,
Prince grandement affligé en fa vie de diuers ennuis,&
accablé dt; longues veilles > q^u'ciUui; ouiiCK après fon
♦fcfj>as,il fut tfoiiué que riuimcur encîoi en la tayc du
cœur cfloit entièrement îiireché , & que le cœur eftoic
rolli & tel qu'vne poire bruflec au feu. ï/;. Iorclau.an i,
iiHre des apparcncfs de U pefieychap.lé.
Il n'y vi paslong temps que mourut vn gentil-hoiu-
mc Romain, après auoir longuement langui. Onlou-
unt,& trouua-cn qu'il nauoitplus de cœur,& quericï*
ne lui en clloitrcfte que la tayc:la delmefuree chaleur
de falonguc maladicjiui ayant conflimc le cœur. Bern,
T tlcfim au xSuh^ft-du- ^.liu.de Nature reri*in.
Vn jeune Prince, valctudmaire,& forcprcfle de dou-
leurs de cœur^ficaflcmbler force Médecins pour conful-
fccr de la maladic.Entrc autres fe trouua vn ieune Méde-
cin lequel propofa auoir Icu en certains mémoire?,
t[uc Tviagc des aulx tous les matins challoit vne forte
de vcrsquisatcachoyentau cœur. Etle remède, & la
jeune homme qui le propoloit, furcntmefprilez. Quel-
que temps après ce l^rmce mourut , & le corps d'icc-
lui fut ouuert par le commandement de ion percpouo
trotiucr la caufe de celle maladie & du trefpas.La dilfe-
Ction faire fut trouué vn ver blanc, ayant vn becpoi»^
Au & de corne comme celui d'vn poulet, attaché air
cœur. Les Mcdccinsle font tirer vif&poler furvnc
table-, dans vn cercle fermé & couuertcnfon tour de
fuc d'aulx. Le ver commence à ie pliera contourner ci^
maintes forresjfe donnant garde de touchera cefucqui
J'cnuironnoit. t'inaleniA^nt lurmonté par la force & To-
dcur des aulx, il mourut dedans ce cercle, àreltonne-
ment de ceux qui auoyent mefprirc vn iî aifé rcmcdc
1. H ebcijieirt enfon trait té de laptjle.
Il n'y a pas long temps qu'au palais du grand Duc de
Thcfcanc, certain Florentin alllftant aux plaifans récits
que faifoit vn charlatan, fut lai fî tour à coup demorç
(oudaincdont Tafliftance & Tes amis ettonnez , pour (e
>efoudre, après qu'jl fut conu roide mort, le firent ou-
ur!r:&ne trouua-on caufe dételle mort fînon vn ver
viuanc&fe remuant , que les Anatomilfcs trouuercnt
detlans la capfub ou taye du cœur, IKS^herer Aîcdtiâu hk
Jls objlïitkitioui,»
m Ftt(Ioirfs admirables
Vne certaine fcnimc ayant rendu rcfpacede qiieK
<:|Lics iours Ton vrinc erpaiffc & purulente , morte au
bouc de quatre mois, & ouuertc , fut trouuee intcrclfee
au cœur, de quelques apoitemes , & de deut pierre*;^
/, Houlicr j cominent. i, fitr le 6. Uure Jecl. Z. aphor:f. 4. dtf
Co.ujues pr»d'Hippùcr» <^ au comment, j'itr le 75, aph,du/\^
Uure.
L'on ttouua au cœur de l'empereur Aîa>;{milHan fé-
cond trois petites pierres , grolîes comme vn pois, non
d'efgrJe qualité 3: pefantcur, & l'vne de couleur cirant
fur Tcnrouilie. Tn fon viuant il eftoit fort affligé d'vii
battement de caur. /. f^Tier an 4. Uur,ch.\6.de l'i/njwft:* €
des malins ejpr»
Dedans le cœur de lerome Schreibct mort à Paiit
l'an 1547. & ouucrten prefeiice de mefl. Syluius, Hou-
lier & FerncL ProfelTcurs en Mftiecine, fut trouuee ^ ne
pierre de la grofTcur d'vne noix mufcade , dure , notra-
lirc, ronde /pefant quelques drachmes, au grand cilc-^ii-
iiement de tous. ^^hr. Mur^d Médecin,
Hn phdîcurs cœurs humains fe font trcuuez des cals
ou durillons , comme pierics de la grolleur d'vne noix-
csaiUres de la g rai fle es vcntricaies, ou ài:s carnofïtc -
fort efpaiiTes , parfois iufques x\à. pefanteur dedcuv
Jiures: ou autre lubilance , comme de la moueile de
bœuf,ia cuite. Item des tumeurs & apoilemes de la grof-
feur d'vn œuf de poule,qui ontcaufc es mis corruption
de la raye du ca-ur, es autres erohon du cœur mefme, es
autres des vlcercs purulens &concreez de longue main.
Leshiftoires en font defcri tes par les Dodeurs Méde-
cins BcnittiniiiSylacot 3 BanhtUi f-^efid , Enift. Colnmliny
yerTicl^ UcM-lier > louhcrt , ^autres en leivi OhferuationSy
Commentaires , & dirj»tes. Ce qu'il fufîit toucher eu
vn mot.
Qv A n: t aux blefluresdu cœur , Fernei au $. liu. i\c
Ta Pathologie, chap.u. tientque l\ elles ne font profon-
dcs,&: auant dedans les ventricules du cœ^ur, laperfon-
ne blelfee ne meurt pas incontinent. Auquel propos
Ican Schenk de Grafenhergy Dotieur Médecin a fribour^^y
raconte ah î. Un, de jh ohjerttahous vtedectufiUsj qhjer, zo^r
auoir
auoir entendu d'vn autre dode Mcdecîii , que certain
efcolier eftudiant à Ingolftad , bleûé d'vn coup de poi-
gnard au cœur, dont les deux ventricules ib treuuerent
jperccTi de part en parc , courut bien loin tout fanglant,
6i vefcutencoresvne heure entiere^-pariant iSi fc rcccm-
mandantà Dieu.
le protefte auoir veu à Thurtn vn gentil-homme le-
quel fe combattoit aucc vn autre.qui lui donna vn cot-p
d'efpee fur la mammellc ieneitre , pénétrant luiqucs en
la fubilance du cœur , & ne laifTa de tirer encores quel-
ques coups d'efpee contre Ton ennemi qui s'enfuyoîtje
pourfuiuantla longueur dedeux cens pas , piîis tomba
en terre mort,&en fis oiiuerturc^ou ietrouuay vnc pla-
ye en la fublliuicedu cœur, de grandeur, à mettre le
doigt, & grande quiniité de fang tombé fur le dia-
J'hragme. ^Amhr. Part ait oMu.chap.i^,
Quant aux diuerles hiiloires des maladies & niorts
précédées en plufreurs perfonnes par vne £''equente&
prefque ordinaire palpitation de cœur.caufee d'extrême
chaleur de foye^prefques en la plufpartrd'autant que les
exemples en font prefqucs infini.s , & conus de chacun>
ien'enreprelente aucuns , pour ne faire en ce recueil
des obferuations médicinales plus aua;it que mon in-
rmrion ne requiert. Referuant vn très-grand nombre
• d'nuticshiftoircs mémorables des accidcns ésprincioa-
les parties du corps humain , pour les liures fuiuans , fï
Dieu le permet. Le Dofteur Schenck,pvofe{îcur à Fri-
bouig,clt celui duqueli'ay reciicilli la plus part des pré-
cédentes hiiloires du cœur, &queie fliiuray es autres
qui concernent les mcrucilîes des corps humains. Caril
a publié pluiîeurs liures d'Obfcrijatiôs inedecinalcsdes
anciens modernes Medccins,auec grande louange, pou"?
fa diligence. Qusnt à larecerchc des csuibsde tantd'ac-
cidcns autour du peric monde , qui eix Hiumme , nous»
lahillons deprefent aux Théologiens & Natutaliilcs,
COMETES.
EN cefte fe d'ion , ic reprefenteray briefiicmcnt Ici
CoiHCtes vcues en l'Europe depuis cent aas on
H
114 Hiftfiires admirables
tnuiron , y adioullant ce'<]uc Garcazus en (à mcteorol^
gje, l,ycoil:henes& autres ont rcmarcjué fur ce poin^.
L'an mille cinq 'cens, au mois d'Aurilvnc Comere
apparut au Septentrion ibuslefigne du Capricorne, tn
1.1 intHnc amicc naftjUJt le Prince Charles, depuis Em-
pereur , oC cinquiefme du nom : &: Soliman Sultan des
Jures. S'cnfuiuittoft après le raua^e que les Tartares fi-
rent en Pologne-la famine en Suaube,la peftc par route
r Alemagne,la prinfe de Kaples par les Françojs,le fou-
le uement des payransauDiocefc de Spire contre PEuef^
que & les CIianoincs,lc iiege de Modon & de quelques
autres places en la Moree par les Turcs , Ifniael Sophi
clialfe les Turcs du royaume de Pcrfe duquel il s'empa-
re. Au deuxiefme an iuiu.mtla \^ti\e fît vn horrible ra-
liage prclque par tout le monde, laquelle eut pour a-
uaiit-coureurs àcs figures de croix tombantes de Tair lur
les habillcmens des perfonnes. La guerre s'efaieut en
Bauicre deux ans après celle pefic : s'enfuiuit aufl'i la
mort de plufieurs grands perlonnages en diueilcs vo-
cations ecclelialHqucs i^: politiques. L'empereur M.f
milian premier dompta le Ducde Gueldrcs, ]>uis];
Hongrois, qu'il reduilît fous Ton obeill^.nce.
En Tan mil cinq cens iîx vne Comète aparut au m ,
d'Aoulcvers le Septentrion, couur.mt Jes lignes du Iio
Scdela Vierge, ayancprci du chariotyiie queue efpaiiic
ikluilànte , clpanduc entre les roue!, de ce chariot^à rai-
fon dequoi quelques Ailronomes la furnommcrent
queue de pan. Au mois de Septembre s'enfuiuit le rief-
|)as de Philippe I.Roy dTfpagne,pcredeChaiies& Fei-
dinand depuis Empereurs.Au meime an lesTurcs {"ureac
d&>taits en bataille rcngce par les Perfes , &: d'autre part
prir.drentfur les Chrétiens Modon en laMoree,& desfi-
rêt leurs flottes. Puis furuint guerre ciuile entre l^aia? et
&fon filsSclim. Prancifque Sfurce Duc de Milan fut
prins en Italie par les François. Qj^ant à ce qui cp laruc
es années fuiuantes, riiilloirc de noflre temp:> lemou-
ilrej foitan regard des guerres , inondations , mort d'il-
lullrcs perfonnages, changemensmerueilleux en l'Eu-
cppC; dont nous n'attribuolis les caufes iinon aux iuiies
^memorMcSo 115-
îiiigcraens de Dieu,piiniirant les péchez du môde.Nous
«liions feulement c]ue fouuenresfois les comètes fem-*
bient eilre comme les auant-coureurs & trompettes de
ces merueiilcux lugemens du Souuerain , ajnfiqucle
Poète François parlant d'vnc comète venue Tan 1577^
dilbit au 2. lour de la femainc,
(^ nt fuh-titprojit^ô frcnetique Fravce
Vsifigiu'i dont le cul t'appelle k repcntnu<e}
Peux-'.ii -voir d'njn œiljec cefenprotUgieuxj
Qui nous re)id chafqnefoir ejji oyal'le les cknx^
Ceji ajtre cheuelujC^ui menace la terre
Du pejïe,gmrreifuini-itroii pointes di* tonnerre)
• Q^tn ft plm vrand fureu-r Di>:i: foi droye furnotu»
' Mais confîdcrons les autres comètes félon i'orJrc ae«
années.
Au mois de Nonembse dcTan ip^.fut veuè' vue co-
mete,& toft après ie ciel tomba tout en feu, hncant a ne
infinité d'el"ciairs& foudres en terre, lac)ucllc trembla:
puisfuruindrcnt dcseftranjes rauines d'eaux, notam-
ment au royaume de Naples.Peu après s'enfuiuitla pii-
fe & cantiuité de François T.Roy de France,rAlemaizn<? "
fut troublée dhorribles fcditions , Louys Roi de Hon-
^>ric fut tué en bataJUe contrciesTurcs.il y eut par rou-
te TLurope de merueiilcux remuemcni.Komc fut prie-»
fe & pillée par Tarmce impériale.
En celle mcfme année de la prinfc & du fac de Ro-
nic,a fçauoir Tan 15'Z7. on vii vr.e comece plus tfiroya-
blc que les precedcntes^Aprcs icellc furumdi ent les ter-
ribles vauagcs des Turcs en Hongrie,la famine en Su?u-
be,Lombardie & Venifc,la guerre en Suiiic, le ITege de
Vicne en Auftriche,la Suete en A 'i g le terre;, le cesbord
dcl'Ocean en Hollande & Zelande, où il noya granJe
'tendue de pays , & vn tremblement de terre de huicc
ui s durant en FortugaL
L'an 1531. depuis le fixiefme iourd'Aoufl iufqucs au
I troifiefme de Septembre aparut vne Comète, marchanc
! aflc/ lentement par les iigncs del'Efcreui(Te,du Lio, de
^a Vierge^ de la B4auce;luiui de plufîeui-s troubles fit
H * .
iify fîijfûir^s admirables
xliucrs changcmcns en Alemagnccn Danemarch & ail-
Icurs.Vne autre Comcte fut veuè Tan fuiuant, cncores
plus grande que ccUc-b.Toll après, a icauoir l'an 3553.
iuruinc vne autre Cometclur lafin de luillct. Les Hi-
ftoriensdefcriuansles merueillcux chan^emcns dont
elle fur fuiuie.Cellcs de Tan 1c58.1555.155 8. Et e. année*
fuiuantesjiufques à la fin de ce iîecie-la , on: eité mer-
ueillcufes, précédées pour la plufparc des grandes ecli-
pfci de Solcil.Etquâtàcc qui cil auenu depuis enTlu-
rope;,nuI ne Tignorcs'il n'ert extrêmement ignorât.La
f\\i% redoutable de toutes les Comètes de noltre temps
fut celle de l'an 15 17. Car le regard d'icelle donna telle
frayeur à pluiicuis qu'aucuns en moururét, autres tom-
bèrent malade^.Hllefut vcue de plufieurs milliers d'hô-
. mes paroiiîant fortlôgue & de couleur de fang. Au fom-
metd'icelle fur veue lareprcientation dVn.bras courbe,
tenant vne grade efpee en fa main, corne s'il eull voulu
frapper. Au bout de la pointe de celte efpee, il y auoic
trois eiloiles:mais celle qui touchoit droitemct la pom-
te elloit plus claire & luifante que les autres.Aux deux
collez des rayons de celle Comète fe voyoyent force
haches»poignards,efpees ianglantesjparrni leiquellcs on
remarquoit grand nombre de telles d'hommes dccapi-
te'/-,ayans les b^irbes & cheueux hcriflcz horriblement.
Et qu'a veu l'elpace de 63. ans depuis touue l'Europe fî-
non les horribles eifeds en terre de ceil horrible prcfa-
ge au ciel? Mais il ne faut oublier l'eiloilc nouuelle,
grande comme l'eftoille du lour, laquelle aparutau ciel
des eftoilcs h"xes,aupres de la Cafîiopee le p.iour de No-
uébre içji.ayâtla forme d'vnclo/engç. Cornélius Ce-
rna & autres doctes Allronomes qui en firét des liures
imprimeZjdisêt qu'elle ne bougea de fa place l'efpace de
3.fcpmaines,&: tiennent qu'elle refsébloit à l'elloile la-
quelle aparut auxfagei venans adorer I.Chriil enBeth-
lehcmjiiicôtiaér après fa naifsàce.tUe le môlVa au ciel,
Itlpace de p. mois ou enuirô. Les autres disét qu'elle du-
ra iulquesau cômécemét de Marsi574. défaillant peu à
peu.Géma en dit inerucilles au z.liu.dc ià Cofmocnti-
^iiCch.^.Aîiaispource qu'il 4ifcourt&dilputc fort am-
ple,
^ memorAhlcs* i{y
plcment, il nous hifrK tic. marquer ccftc mcrue!lIc;qu'i^
c^llime merucilleuie ( comme elle a efté) entre toutes
les mcrueilles extraordinaires du ciel , depuis Ja natiuiré
de noilre Seigncur.Ce récit des Comètes (uf-efcrit eft
extraie de Gatcaus en fa météorologie 3(le Lycojlenes enfin re-
(uetl des prodiges ^(^ autres*
COMPASSION yehemevte,
HAOan AgaJVn des chambellans de Sultan Soli-
man,enuoyé par fonmaiftre pour traiter quelque
accord auec le Perfe, fuiuant la commifllon à lui don-
née fe faifit deBaiazet fils deSolymanjprifonnicr enPcr-
fe, & par le cômandement du père l'cltrangla d*vne cor-
de d'arc. Ses quatre fils paflcrenr le mcfmepas. S'en-
fuyant d'Amafic , il y en auoit laillé vn nouueliemene
né,queSolyman auoitf^.it porter à Prufe cnBithynio,
où il eftoit eflcué.Mais les nouuelles venues que Baia-
•aet eAoit dcpcfché, Solyman enuoyc vn valet de cham-
bre, en qui il fe fioit beaucoup pour aller à Prufe faire
mourir le petit en fant. L'Eunuque ou valet de cham-
bre , homme débonnaire, auoit mené quant &foy va
des huiiliers de la chambre, fait à exécuter toutes corn-
millions ruincufes&fanglantes, pour s'en feruir à e-
flrangler le petit fils deBaiazet. Icclui entre dedans la
chambie , & mettant autour du col de l'enfant le cor-
deau pour rei^ran8lcr,renfant commence a lui foufrire>
^ fc fpufleuât lui tend fes petits bras pour l'empoigner,
clfayantdelebaifer. Cefte contenance donna fi rude
coup au cœur du barbare , que fanspouuoir pafTer ou-
tre tombe pafmé &roide mort fur la place. Au côtraire*
i'tunuque esbahi du rctardenièt,monte en haut,& vou-
lant entrer tronuelhuifTier efttndu toutdefon long à
la porte de la chambre,mais n'ofant faillir d'exécuter là
comnuilion>il eftrangla de fes mains le pauurc petit en-
fan t.Ce qui monftra quele perc grand Solyman n'auoic
pas efpargué fon petit fils quelque temps,par pitié qu'il
iSj^ euft,inai3 dcboyit/niuawt; Vopimoa des Turcs, c^ui
H ?
ïi8 Hijloires admirMes
diskCt c]ue Dieu eft auteur de toutes les chofesqui fe fôt;,
pourucu que rcucncmcnt en (bit à leur gré.Pourtât tâ-
dis que les afaires de Baiazet furent en dqute & contre-
poids, Solyniâ ne vouloit point qu'on touchaft au petit
enfant, de peur que s'il profpcroit on ne dit, que Soly-
man auroit voulu relîftcr à la volonté de-Dieu. IVIaisa-
prcsla mort de Baia/et, tenu comme pour condamné
par fentenceduiine, puisqu'il auoit efté recule de leç
oeflcins;,puis cxtc miiné fans rcfource , Solynian fut d'à-
uis que l'enfant ne fu: pas garde d\iuant3ge. lefieur de
Busbeijhcat* dijiotf.s defes -voyages de Turquie, epifi./^,
CONCEPTIONS (irenfante-
?ni'}i5 atta?ît au^e.
T E tref-illuftre Prince de Salerhe , Fermnd de S. Se-
JL^uerin, dernier decedé , m araconté autresfois en la
Ville d'Aîar«,ou il s'ell:oit marie, que pour certain en fon
pays de Svdernevne fille auoit enfante à neuf ans, & quo
l'enfant veiquit.I'ay ouy parler dVne autre , qui à Paris
enfanta.» dix ans.Onafîeritie auri:(&:ceci eft bié tefmoi-
gi;é)q j'à Leclore ville de Grdcongnc, vnc fille enfanta
À neuf ans.Mle cil enco- e viuantc , nommée Iean»e du
Peine,quifutmarieeà Vid^uBcpjie en Ton viuantrc-
ceueur des amendes pour le Koi ue Nauarrc audit lieu,
lilîe auorta d'vn fis à Taage de neuf ans;> puis ù onze ans
enfanta vue file qui vefquitjS; a eu dêo enfans,& à qua-
torze vn fils nommé Laurept,cnçores viuant,d Cci7.e vn
autre aurîlviuantjiiomr.ié Pierrc.Cinq ans apres,quifut
le vingt vnici'nican de fon aage , e'ieenfanta vnc fille:
poiule iourd'hui veufue dHn apotiucaire. Et depuis
ceiTud'cngrciiiCi'j'iaçoii: ouc fon mari vefquit. C'eftvnc
petite femme de moyenne corpulence qui an mois d'A-
uri (5 7.7.e.(loit aagce de 44.ans.Ie Vay veuè" & parle à el-
ie de tout ce que defTus.Llle me dn entre autres choies,
que depuis ion premier enfant , duquel elle auorta n'a-
y*nt que neuf ans, elle ciii toufîours fcs ilucu is bien ré-
glées. Ayant ccfic au 21 2n depoitcr enfant, elle demeii-
raeiicort. aiicç iuu niai4 1 cfpace dz dixneuf ^ns.^!/. x .î«-
^ memùrMes. ii 9
rf?i^ ^otihcrtian deuxiej-me lin.dei erreurs pofyulalrei.rljap.l.
MonfîeurChappcIain médecin du feu Roy François
premier m'a proccftë auoir veu vne fille qui en l'aagç
de neuf ans fut enceinte , & porta Ton eufant à term*e>
puisacoucba. Sy^uim »i» comnKHialre des wo>i des femmes,
I.Foxius a efcrit le mefme dVnc autre fille de neuf ans.
1 .Dansait ai* Z.Utt, de ces Ethiqms Chrcfiie^neSych.ijt.i 4.
CONSCIENCE.
IL n'eft rampart tel qucla bonne confcience,nibourw
reau plus cruel que la mauuaifc. Les exemples deVv-.
ne & de l'autre font infinis. Qu^ant aux efforts delà con-
icience torturée du (buucnir des forfaits , fur tout au rô-
gard du fang innocQot, en voici quelques hiftoires.
Certain hofte vieillard honnoiable, en vne ville d*A-
lcmagne,auoit vne fille vnique,bien inflruite, & de bô»
moyens. Le fcruitcur de la maiCon,honnefte homme 8c
allez adroit, pourchalic de Tauoir en mariage, dont il
fut efconduit^pourcc qu'il eO:oiteftranger,pauure& fer-^
uiteur delà maifon. Neaatmoins, pource qu'il s'eftoit
touuours monilré loyal^lepere de famille voulant aller
aux bains , & mener quant & foi fa femme &fa fille*
lui iaifle en charge fa maifon. Durant leur voyage»
vn marchant vient à ce logis , où la nuid faïuanteil eft
efgorgé par ce feruiteur, qui l'enterre en Tcftabie, vend
leïendemain fon cheual & Ces hardes. Ce meurtre de-
meure caché.L'hoftereuenu des bains, peçifant que fou
fcruitcur euft gouucrné & mefnagé coii^^me il couu^
noit,continue de l'aimer encore plus que deuant. Quel-
que tcps après ce brigand s'auife d'vnc ru/x.H cRrric des
lettres, au nom de certains fiens parons , qui l'auertiC
foyent delà mort de fon perc, '6c lui confcilloyentde ro*
tourner au pays. Rcuenant du luarciié il môftre feslec-
tresaucc quatre vingt pièces d'o^ ù fon maifire, adiou-
ilantcôbicnque fesparens fufi'ent dauis qu'il achctaft
vn cheual il ne voulûit pas fairo fi grand frais , &dcU*
bieroic il'^Wçi à pied. Qu'il iailbic ce voyage à regr<;i;.
Jioi HiFi cires admirables
TIC dcfîrant rien tant que de demeurer près de Ton mâf-
îlrc. Aucjuel ayant baille en garde la plufparr de ces
pièces d'or, aucc pronieflc de retourner , h fe mec en
chemin. Combien que cela fufl; incommode pour lors
au pcrc de famille de lui donner congé , ncanrmoinse-
ftimant cev Icrtres trcl-vrayes , il le laifTe aller. Au bon:
de quelques Icmaincs il retourne: commet autre plus
jgrandTommcà ion maiftre, lui fait entendre que la lue-,
ctfîi ;n patcrnellemonroitbcaucoup,& fait fi bien que
Thoite lui donne fa fille à femme : finalement il de-
tiient héritier de Ton bcaupere. IVIefmes , pour ce
qu'il ie compo:coit honncilcment, &lans reproche,
jl fut eflcu & mi^ au rang (àcs Seigneurs Je la ville : où
ils'acquita fi bitn de Ton dcuoir, qu'il n'y auoit rien a
re ifre en lui. iMais fa confcicncele trauaillant & tenail-
lant rudement, il aima mieux fe delcouurir & mourir,
quelangnir d'auanrage. Eftantvn lour appelle parles
autres Seigneurs Tes compagnons, pour iuger le procès
d'vn brigand , il le loue de grand matin , va ouir Mefle,
prie fa femme, auec laquelle il auoittoufiours vefcu en
bonne paixt& amitié,de lui aprefter quelque viâde d'ap-
pecit, alléguant qu'jl n'eftoit pas à fbn .'iirc,& fe trouuoic
en peine d'aflifttr ce iour à vn procès & arrcrt de mort,
Filant reuenu de la Mclfe au logis , on lui dit qu'il y a-
uoit pour Ton à^Cxciiné vnc telle de vcau>viandc dont il
mangeoit volontiers. Defircuxdcla voir,il outivel'ar-
mairc<^ùeftoitcefte tcite;mais hiCi d'horreur & de fra-
yeur, il commc;ice a fepbind'-e & demander qui auoit
jH lérré vne tefte d'hôm.e ? Sa fçmme lui remonftrc gra-
fieuiemem qu'il fe Lrompc:luifc retient, deiieunelege-
temcnti,\ichcmine en la cîiambrç du confcil, & s'aiïîed
en fa pfice acoullumee. Qn^and ce fut a lui de dire Ion
auis ,^yan: dcclarc qur-felon les loix le brigand dont c-
floit quefticn dçuoif eitrc decapité,il fe Icue en pied.s,&
cômence à dire, ijull auoit mérite mcrmeTupplicc. Sur
ce il repreiente par ie menu toutes les circonftances du
^Ticurtre par lui perpétré au logis de feu fon maiftre,
^ tout ce qui s'en eftoit enfuiuirfuppliant à ioinétc»
p^ins; miÇ lufUce le çoptent^Hç iui f^irc tranche:
is tçfrc*
é' mémorables. 12.1
( tefte. Aucuns eftimoyent que quelque humeur
.lancholiqucle faiibitainfî parler, lui confcilloyenc
.' rccourner en Ton logis, & fe mettre es mains des Me-
' cins. Ilreprintla parole difant, lefçaj, me(lieurs,que
vous m'auez en bonne réputation : aufll ne iu!s-ie coul-
pable de crime quelconque puniflable par les loix hu-
maines, que de celui là. Toutesfois ie vousfnppliein-
ilamment , que m'oftant la tefte de deffus les efpaules,
vous me deliuriezde l'horrible tourment que l'endurc
;(& à bon droiâ:) depuis le iour de mon forfait : & don-
nez ordre que la iuftice de Dieu ne me pourluiuepa^
d'auantage. Surce , les luges vont faire fouiller au lieu
parlai de/Igné, ou Ton trouue les os du marchand aC
{alÏÏnérpar ainfî ce pcrfonnage eft'mené de fon plein gre
au heu du rupphce,& ell décapité auec l'autre brigand.
lean lacqMs Grincta ^ do3e Théologien 3 en fon c ommentiiire
fur le Prophète loufti jch.l.p.li^.(^c.
l'ay entendu que depuis quelques années en ci. cer-
tain perfonnage en la ville de Lip/îc alla de fon bon gre
vers le luge criminel, auquel il confelfa franchement
^'eftre trouue au vol& faccagement des chariots de l'E-
JeCteur de Saxe, adiouftant qu'il aimoit mieux mourir,
que de lupportcr plus long temps la geine de fa conf.
cience. /A7/;c/77/c.
Il y a enuircn 4^. ans, quedeux frères demeuransJ
Laufannceflans allez coupper du bois au mont lura,
le plus ieunc defpité pour quelque légère occafion, don-
na tel coup de fa hache fur la tefte de rairnë,qu illeré-
uerfe par rerre,où il l'acheue, puis l'enterre. Rccouvné
en la mairon,il fait entendre à leur mcre,que fondit fre-
^e lui auoit donné charge de faire fes excufes, &s'cn:oic
mis au chemin de SuiiTeS: d'Alemagne, pour voirie
pays,cfperantde retourner au bout de quelque têps. La
mercfe payât de telle excufe , le panicidc montoit prei-
ques tous les iours en la montagne , fe profternoit à ge"
noux fur la foîTc de fon frcre,pleurantà chaudes larmes,
cnant merci i Dieu, & fouhaitantque l'ame de fon frère
fut en repos. Ayant côtinné ce train plusieurs mois/ans
que |icrronnelcaicrcrcufi en force quclGonquc dVntel
121 Hî [foires admirables
forfait , micnant vn lour de c(i''\c montagne en la viîîc^
comme il approchoit de fa rue, il reç^arde derrière foi,
& defcouuranr aflez près le Bourcmairtre(q'.ii ert le prc-
Diiercîu confeil des Seigneurs en ce lieu , ibusla prorc-
^ton du Canton de Berne ) fuiui tle fon officier portant
manteau de Liurce, il commence à fuyr de toute fa force
Tcrs Tautre bout de la ville. Le Bourgmairtre crmerucil-
Ic de tel fait , commande à Ion officier de courir après.
L'officier diligcnte,& cric à pleine tefte, Arreftcarrelte.
Qi^elqucsgens forcent en rue, &fe mettent au deuant
du coureurJcquel voyant rofficier,puis le Bourgmaillre
approcher de lui, commence à dire, le ne Tai pas tué, le
ne Tai pas tué. Le Bourgmailire , homme prudent , le
fc'.t mener en prlfon,promptementrinterrogue , en peu
d'heures entend tout le fait, en vérifie toutes les circon-
ftances, & peu de iours après fait exécuter de fupplice
rieritc ce miferablc parricide , marchant à la mort auce
vne confiance & repentance fi grande , que tous les fpc-
^ateurs fondoyent en larmes, /e tien ce récit d''unex^
ctlUiii perjmnA^e , qui fut prej'çnt att procès ^ 'vid lafind'i^
eelnl.
Vn nommé N.la Laincenfant de Toulourc;,ayant en-
trepris fur la vie de fon père , fefauua d'heure & fercrira
tîedans Gencuc, où il demeura quelque-temps ftnseftrc
conu. Vn iouv fepourmcnant au long des foifczdela
vilkj&dcfcouurantde loin quelques Syndiques fuiuis
«le leurs ufficicrs,fe donne l'alarme, & commence à fuir
rant qu'il peut vers le pont d'i\rue proche de là, pour fe
fauner en autre Seigneurie. Les officiers courent âpres,
^ par rencontre d'autres pcrfonnaoes , fur le chemin , il
c'carrcilc. L'on defcouure en fes paroles vne confcien-^
ce mal afleuree. Mené es pnfons & tenu de près, il con-
fcfTc finalement fon deteftableatLcntac. Les Seigneurs
di4Gcncue ciiuoyentvn héraut à Touloufc, entendent
p.Tla cupic du procès qu'on leur enuoye , la vérité des
confcnîcns de la Laine, lequelcftcxecure à mort, &
monilre jufqucs au dernier foufpir vne viue& remar-
quable repentance de fes faute?. Aîentoim de iniftoire de
tf memorahks. tij
CONTINENC E nouUc,
LVchin Viualde riche geiitil-hômeGeneuois, ieiine,
beau, de bonne grâce, s'eftant extfememct amou-
raché d'vne paaure jeune fille, belle par excclk-nccnô-
luec Ianic}uette,fit tous cftortspofllbles pour la icdniie,
6r.s'en fcruir de concubine. Majsen vain , à caufe de la
chafteté & pudicité inuincible de cefte vierge, laquelle
finalement fut manee à vn barquerot, auec lequel, quoi
qu'elle vefcui} auec peine du trauail de Tes mains,neant-
moins elle fe comporta vertueuremcnt& eut plufîeurs
çnfans en ce loyal mariage. Luchin , qui auoit efpoufé
vnel>ellc & riche Damoifelle , par l'aduis de Tes parens,
nelaifToit d'aimer toufîours Ian:qMette,&fous prétexte
de faneur &bien-vueillance enuersle barquerot j el^
fayoit defoisà autre de lui coirompre fa femme, la-
quelle fe maintenoit inexpugnable, au grand esbahif-
femenc de Luchin, qui admiroit celle itnpuliere vcrtu:&
finalement fcmbla lui auoir comme donné trefucs, fan'?
.toutesfois renoncer ^.u tout à Tes pourfuitcî's & vicicufes
efpcrances.En ces entrefaites auint que le barquerot fuc
pris prifonnier par àcs Couiraires,& mené en tel endroit
que (à pauure féir.e le vid tout à coup corne acablee de
idifctte & de deferpoir. La cherté eltoit grande à Genesi,
elle eiloit chargée de quatre ou cinq petis enfans,crians
après le pain,dont clic eftoit defnuee, & de tout moyen
humain pour y rcmcdier.La charité maternelle la poul^
fecnvn confeil de dcfefpoir. Elle va droit au logis de
Luchin , qu'elle rencontre feul. Lui raui de la voir^ fut
/encores plus eftonné de fa contenance & des propos
qu'elle lui tint.S'eftant ictrec à fes pieds, elle lui dit e-
ftrc venue pour le donner à lui, quYllc eiloit prcfte de
fe foumettre entiers met à ia volôtc fans refiliace quel-
ce quc,ainfî que pur le jialle.Lc fuppliât au rcRc de fou-
lager Tes petis cnmns ailaillis de la faim. Luchin arrcfté
itout court par diucrs mouuemcs,fut à l'inilant furmôté
car celui delà vraye raiibnjS»: pouifc à\'ï\ bon cfprir,dit
A la pauure fc^ncproilcrnec à fcii pied^Je incvainciaf
ii4 Hijfoires admirables
maintenant moy-nic;mc,ie gaidetai entier voftrcho».
iieurciuci'aytanrpourchaHc devousofttr contre mon
deuoir,& vousafiilleray de iînccrc aftection, comme
jnaiœur propre.Quoi diidntjillamcincà fafemmclui
récitant coût le paffc , & recommandant la panure lani-
<îuctre,!a(]ueIJcfur ft;ulagee aucc toute fa bmille : & la
conrincncc de Luchinincontinent publiecpar tout,3u
grand esbahiflemcnt de ch2.k\xn.uifiA"itaUe.
CORPS HF MAIN pétrifié.
L'A N mil cinq cens nonantc (îx , Monfîeur Billio<5l-i^
homme d'honneur, de la ville d'Aixen Proucnce,
citant à Lyon recita à Monficur & Madame de Bo^
thcon , plufîeurs autres perfonnagcs prefcns , puis mit
auf^. par efcrit & foufllgna de fa "main ce qui s'enfuit.
L'an m'î cinq cens huitante & trois , vn citoyen delà
ville d'AiX en Prouence , ayant vne plantée d'oliuicrs à
vneharquebu7ade des portes de la ville, print certain
iour ai'is de f^iirc rompre vn petit roc , qui eftoit en ce-
lle plantée, tt comme il eulH'air auancerlabefonenc,
fiit trouué au milieu du roc le corps entier dVn hom-
me de petite ftature,incorporé dedansce roc, de telle
façon que la pierre du roc rempliftoit le vuide & entre-
deux,qui eftoit d'vn membre a Tautre. Ce qui eftoit
encorcs plus admirable, ores queîes os fuflent forten-
^urcisjfi eft-ce qu'en les grattant auec l'ongle onlesre-
duifoit en poudre. Mais la moucile d'iceux eftoit h du-
re,qu*vne pierre ne Teft pas d'auantagc , & n'eftoit pof-
fîble d'en rien enleuer. Voire que le cerceau eftoit en-r
<lurci & pétrifie, qu'en le touchant d'vn fulîl , on faifoin
voler les eftincelies comme d'vn caillou à feu. Ce fke-
Ictceft demeure en la puifl'ance de M. Bakazar de la
Biîrle habitant à Aix,&. premier audiancier en laChan-^
cellerie de Prouence. Tout ce que dellus ai-ie oculai-
rcmcntveujdifoitBilliodia'cnfuis bon tefmoin, ayanc
jnefnie tenu entre me . mains le cerucau de ce corps,
iouucrt u os en vne partie. Ce quçi'actcftç eftrc yerita-
(^ mémorables. iiç
blctt en foi de ce i'ay fîgné la prclcncc le iz. iourcîeNcA
uenibre 159<>. Billiodi, AIcmuires de Lyon,
C R K E L s extermineX^
L'An mil cinq cens quatorze , furuint en Hons^ric
Thorriblc leduion 5: boucherie des Croifez. Vn
bruic& propos commun couroit entre le peuple con-
tre le Roy t<. les principaux du Royaume, ài^ct queloa
ne tcnoïc conte de reconquefter furies Turcs, lors fort;
empcfche/.jlcs places qu'ils occupoyent dedans la Hon-
grie. Mais le Roy Ladiilas aimant le repos nes'efmou-
woit point pour tout cela : & les grands Seigneurs le
gouuernoyent tellement , qu'il ne leur commandoic
en rien. Sur ce le Légat du Pape mit en auât des pardcns
pour tous ceux qiii fc croifcroycnt, pour aller à la guer-
re contre les Turcs. En vn initant fe fit vn meruciUeux
amas de biigandeaux , cueillis de tous les coins delà
Hongrie. De mefmc vol s'eHeucrent de-grolîes trou-
pes de payfans,qui ne pouuansplus porter^les infoîen-
ces delà Noblelîe,moins encore celles des Euefques, a-
couroyent de toutes paits au camp. La nonchalance da
Roy auoitlaifiC prendre racine à l'audace , diflolutioa
&.cruauté inrupportabic dc-s Seigneurs fur leurs fub-
jets. Ccfte^rmee de payiàns s'eilant créé vn chef > en
n-Hjiris de rien s'efpandit^ & fit vnrauage le plus horri-
ble qu'on fçauroitpenfer prcfqucs par toute la Hun-
grieimallacranttous les gentiis-hoaime.> & Eucftjues
qu'elle pouuoit attrapper. Les plus riches & de plus
grande maifon eiloyent ampalcz tout» vifs. Ccile
rage cruelle continuant , le Roy s'efueilla, &i par foa
commandement quelques villes ayans leué des trou-
pes , & icelles iomres a bon nombre de nobleffe fous
la conduite d'vn Seigneur nomme Bornemilfe , il y eue
quelques rencontres, ou grand nombre de ces Croi-
fez demeura fur la placc,& piufieursprins furent exé-
cute/à mort en la ville capitale du Royaume. Fma-
lemeac leau fiii du Vaiuodc Lfwene , lequel s'empara
11^ tiijloires /tdmirablei
puisaprcsduRoyaume,délitccsCroi(l-z en bataille rari-^
gee:& ayant taillé en pièces la plufpaïc, attrapa leur;»
chefs,qu'jl{it mourir de fuppplice fi eftrange qucc'eii
horreur de s'en fouuenir.Car il fit eftcndre n-ud le gêne-
rai de ccspayfans nommé George , auquel le bourreau
mitfi.ir latefte vnc couronne deferardantrpuisillui ou-
in it quelques vcir.es, & fit boire le fang qui eu dccou-
loit.î Lucatiustrere de Gcore.c. En après on amena les
principaux decespayi'ans qui auoyent efté gardez trois
jours lans manger,& les confiai gnit-on de fe ruer à bel-
le dents fur le coips de George encore rcfpirant , & en
emporter & manger chafcun leur pièce. Au milieu de
ces horribles cou; mens George ne crioitpointifculemét
il prioit qu'on euil pitié de fou frère Lucatius , qu'il a-
uoittiré par force en celte guerre. George ayant elle
puis après defciiiré par piecesjon lui arracha les entrail-
les qui furent hachées en morceaux,lcs vns bouillis , les
autres roftisiquoi fait on contraignit les prifonricrs de .
faire vn repas de ce cruel aprel];:puis après tous, tât qu ils
tlloyent/auec Lucatius,furent mafracrez à pecits coups,
&: les fit-on languir tant qu'il fut po/îible. A peine f:;
trouucra-il vn exemple déplus grande cruauté depuis
que le mode ei't monde. Et nefautpass'esbahir fi Dieu
apunile KoySile Royaumede Hongrie à caufe d'vne
cruauté \\ enragée , ayant lafché la biide aux plus cruels
peuples de Septentrion, à fçauoir les Turcs ; pour y faire
les rauagcs que chalcun lçait,&: qui continuent eucores*
Chaibmens cruels font apreftez aux cruels & inhumains
loach.Curxni enfes x^nnalcs de Silefic^ p.t^. 155. Les li urcs
fuiuans reprefenteront très-grand nombre d'autres hi--
ftoires de cruautez efirangcs.
Durant la guerre des payfans en Alemagne , l'aliifi^,
parauant S: depuis,vn gentil-homme leur ennemi , non
courent d'en auou- malfacré trel-grand nombre, mef-
me de ceux qui lui demandoyeat pardon à iointcs
mains, confeflans qu'ils auoyent efie mal confcillez, fe
glorifioiten toutes compagnie^ de fes braues exploits*
adiouftanten outre les louanges de fes picorees, ayant
«oupc fo;ccbourib> bieo garujes , ôctué mefmc grande
Ijuantitë de beftail. Quelques mois après cefte furie ,il
tôba malade & languit plufieursiours ci'\ne ellrange&
incurable douleur de reins , Irquelle le précipite tcllt>
met en deferpoir, qu'il ne cefla de dei'pitcr & renier ion
Createur,patient, iuRc ik redoutable en Tes vengeances»
iufquesà ce que la parole lui faillit auec la vie. Laleue-
ritédiuinepourfuiuitencorcs famaiion. Cartollapies
fon fils aifne voulant exalter les prouclfes de Ton père,
qui en la guerre des payfans auoit fait les merueilies iuï-
mentionnees, & furmonte tous fes compagnons, &ïe
vantantfort de telles vaillances en pleiii banquet, va
villageois irrité de telle braucrie defgainc Ion ^oi-
gnard, & en donne fi rude coup à ce fils, qu'il le tue
toi'troidefur la place. Quelques iours après la pe-ic
s'allume en la maiibn du cruel, & tue tout ce qui y r^
iloit. Ie<z;?. le Gaftj dt B^vj5Cîf ^ au Z. tome dtipropoi de tubls^
L'an mil cinq cens iëptante-lept, lurlaiîndc Se-
. J>tembre,& au comnicnccmcnc d'O dobrC; le feli des fé-
conds troubles r'allumé en France, le Prefîdent de îiira-
gucdcpuis Chancelier &Carûinal,eftant pour lors go«-
uerneur de Lion, le trouuerent audit Lion dcuxfreraB
nommez les Bourgats , orfeures de leur ellat , mais fort
desbauchez, Comme la licence d'alors clonnali moyen à
plufieursd'afiouuir leurs paifions iur ceux à quiiUen
vouloyent: les Bourgats mirent la main fur ^ n compa-
gnon teinturier, fous prétexte qu'il efloitde conriaire
religion, mais pour fe vcger d'vne querelle qu'ils auoy-
.enteuë patauant contre lui, & non.defiiicll( càlcurgrç.
Ils renleuent,& le meinent en la maifon de leur habia-
tiô,vcrs Tabbaye d'Efnayjlieu aflez efcarté,le garrottent,
& après lui auoir eftroitement ferre les mains ratta-
chent par le col à la cheminée, de forte qu'il pendoïc
tout debout, lànspouuoir s'afleoir ni pancher aucune-
inct.Ils le laifsent en cert eif at tout le iour,auec menaces
de mort prochaine. Lefoir ils amènent à fouper gens
de leur forte, pour eilre fpedatcurs de la tragédie , font
bonne chère , & après louper paifent le temps les vu»
^iouè'r aux cartes, les autres i pincer , jnqutr, uazar-
4^; iJc Ûaieboyer Icncjdu p;iuure prifgnruer^ acuciié
1 li fJifloires admirables
pieds & mains , &pcnduau coin delà cheminée. Cefâf
dura iufques fur les on/.c heures, c|ue les compagnons'
fe retirèrent. Quant aux Bourgats, fans pourfuiured'a-
uantage, ilsleietccnttout-voftus, leurs efpces au coil:é>
fur leur lift, où ils s'endorment incontinent. Leur la-
quay, qui eAoït au coin du feu, fait comme ['es maiftrcs^
Le prilon nier Tentant Tes gens endormis, & feramcnc^-
uant les menaces quMs lui auoyent faites , commence
àpenfcraux moyens d'cfchappcrj&s'eftant recomman-
de à Dieu, duquel feul il attendoit fecours , fait en fortes
& tourne tant, qu'il fc dcftache vue main, 6: de celle la
l'autre, puis des deux le col, conl'equemment les pieds.
Cela exécuté il demeure fort perplcx de ce qui lui fe-
ftoit à faire. Car Ci fes gens le fufîcnt cfueilîe'z il tftoit
morr,n\;vant moyen de fe deicndre, eux armc2,hii de-'
farmé,&feul contre trois: carie îaquay eftoitia grand.
S'ileuft eu vnenape,ou vn linceul, ou vnecouuerture,
ilpouuoitdefcendre parla fenelhe: mais Fouurant, le
bruit pouuoit les efueiller tellement qu'ils rcufTenria-
trapé, les places cllans lors gardées près à près. En celle
perplexité il defcouuic que le Iaquay qui dormoit à
l'autre coin du foyer, auoitvne dague à fa ceinture. I^
fe refould de tuer fes ennemis auec celle dague. Mais il
y auoit de la difficulté & du ha7ard à la prendre, pourte
que le Iaquay s'efueillant euil donné Talarme. Neant^
jmoins à la clairté du feu il s'approche bellement , & rire
celle dague fi dextrement , que le Iaquay ne s'en remua
nullement. Soudain qu'il l'eut il faute fur les Bourgais,
&leur enfonce a chafcun detoutefa force vn coup de
celle dague dedans le fein. Comme il vouioit redou-
bler, l'vn d'eux fe iette en pieds par la chambre , empoi-
gne vnehalebarde, & court après le teinturier qui {e
iauuoit par les degrez , au bas defquels ce Bourgac'
tombe, &inconrinenty mourut, ayant elle frappé à
mort. Le teinturier remonte Se trouue l'autre ellendii
mort par la chambre. Il commence à menacer le Iaquay
de le tuer tout roide fur la place , s'il fonnoit le moindre
mot : prend vne chandelle 3llumee,meine le Iaquay en
la caue ,,le coutrainî de manger & de boire vn yerre de
vini
dr mémorables. ii^
vîn.puîs rattache & lie fermement, fans autrement i'of-
ien{er,fermc la porte d'iccUe caue au vcrrouil , remonte
en haut,s*accommode de ce qui ciloitplusaifé i empor-
ter de la chambre de les ennemis. Et comme les gardes
des places furent leucz au pointdu iour., part du logis
cju'il ferme à clefiforr par la porte S.Sebailiâ/ans qu'au-
cun Tarreftaft , ni Tcnquill ou il alloit : ce qui fut mer-
ueilles, attendu qu'on ne laiifoit forcir aucun fans paf-
feport. Les amis & compagnons des Bourgatsn'ayan*
veu ce matin ni Taprefdince ces deux frères entrercni: en
quelquefoupçon,& après aduertifTemcnt donné au Ca-
pitaine du quartier , fous lequel ces Bourgatsauoyenc
charge, du confcntementd'iceîui enfoncèrent la porte,
tirèrent le laquay criant à l'aids en la caue , trouueren't
le refte en Tellat que hous auons dic.Le teinturier à vei»
eu quelque temps depuis > a conté à pluficursceftc hi-
iloire, & cft mort ailleurs. Aïemoires de L yon.
DELIFRANCES notMes ^ & far
moyen extraordwaire.
Simon Grynee, tres-dofte perfonnage^cncre pluficurs
de Rollre tcmps,eftant allé Tan I5ip. de }ri(iiciQ.loç.i^ X
Spire, où le tenoitvneiournee impériale, voulut ouyc
certain prefcheurTTort eftimé à c.'îufe de fon éloquence,
Mais ayant entendu diuerspropofirions contrçja Maie-
fté &: vérité du fils de Dîei«,auiortir ^\i fèrmon,!! fuit le
prefcheurjefaluehonorablcinent, &lepricd'ci}re fup-
porté en ce qu'il auoic à dircllseiiti-ent doucement en
propos. Grynee lui remonftre viuement&grauemenc
les erreurs par lui auancez, lui ramentoïc ce qu'auoit a-
couftumé faireS.PolYcarpe,difciple des Apoltresjs'illui
auenoit d'ouyr desfaulTctezÔc blafphemcs en riielife.
L'exhortât au nom de Dieu de penfer i la confcicr.ccà
fc départir de fes opinions erronées. Le prefchcur de-
meure court, & feignant vn defîr de conférer plus par-
lticulieiement,comme ayant halle de fe retirer chez f^ y,
^çniande i Cryuee Cbn nom^furnom^logis, &lc coiiuicî
i}0 JRift pires admratlei
à l'aller voir m^ndemain pour deuifcr amplemenr , &
Jemonftre afTc^ftionner ramitië de Grynee , adiouftant
<juele public rccueilliroitvn grand profit de ceftclcur
Goiifcrcncc. Outre-plus il monftre fa maifon à Grynee,
lequel dclibet é fe trouuer à l'heure afTisnecfe retire en
ion hoftcller.'C.Mais le prefcheur irrité delà cenfurcqui
lui auoit cftc faite , badit en fa penfee vne prifon, vn cf-
chaflaut&lamort à Gryi.cc : lequel difnant auecplu-
ficurs notables perfonnagcsjleur raconta les propos qu'il
auoit tenus à ce prefcheur. La dcfTus^ on appelle le Do-
cteur Philippe aifis â table auprès de Grynee, lequel
fort du poiflej& trouue vn honorable vieillard, beau de
vifagchonnorablcment habillé , inconu, qui de parole
ÇraucSc amiable, commence à dire que dedans Theure
d'alors arducroyét en Ihoftcllerie des officiers enuoycz
dt la part du roy des Romains , pour mener Grynee en
prifon. Le vieillard adioultcvn commandement à Gry-
nee de deflogcr promptement hors de Spire , exhortant
Philippe à ne différer d'auantage. Et furce le vieillard
<}ifparoit. Le Dodeur Phihppc, lequel raconte Thiftoi-
re, eufon Commentaire fur le Prophète. Danid) chap. (îtxicjhte^
adioufte CCS mots. le rcuin vers la compagnie , ie leui
commande de fortir de table , racontant ce que le vieil-
lard m'auoitdit. Soudain nous trauerfons la grande plaw
ce, ayans Grynee au milieu de nous , & allons droi<ft au -
Rhin , que Grynee pailc promptement auccfon ferui-
teur,dcdans vn cfquif. Le voyans à fauuetc,nous retour-
tions i rhoilellerie , où l'on nous dit qu'incontinent a-
prcsnoftrc départ, les fergens eftoyent venus cercher
Gr\ nce. Dieu foit loué qui nous a baille les SainûsAn-
«es pour tuteurs & gardiens, afin que de penfees plu*
paifibles nous facions noftre deuoir en la vocation i
laquelle nous fommes appeliez de lui.
L'an 1559. au commencement de Iuin,vne honiiefle
femme vefuc,chargec de deux fils, au pays dcSaxe,n'ayâr
dequoi viure en vn tcmprde griefue famine,fc vclHtde
fes meilleurs habits , & fes deux fils aulli , prenant fou
chemin vers certaine fôtaine,pour y prier Dieu qu'il lui
|»lcuil auoir pitié d'eux , pour Ip fçmjagçr, £û forçant,.
C^ memorahlesl tri
file rencontre vn homme honorable , qui la faluc dou-
cement, Se après c]uclqucs propos, lui demande iî elle
penfoit trouuer à manger Vers celle fontaine? Lafcm-
me refpond , Rien n'elt impoflible à Dieu. S'il nelui^
point efté diflfïciie de nourrir du.Ciel, par Tefpace de
quarâte ans au delert les enfans d'Ifraeldui l'croit-il maU
aifé de luftanter moi Scies miens a ucc de l'eau ?Difeiît:
CCS paroles, de grand courage & d'vn vifage aifcuré , cfc
pcrlûnnage(lc4ueli'ell:ime auojr efté vnîaind Ange;^
lui djt,Voici;puis que tu as vue foy fi conftantc, retour^
ne & rentre en ta maifon: tu y trou ucras trois charges de
farinc.EÛc reucnuechez loyjVidrcfFeift de celle promcf-
fe.D.o^n^re llon'^dorff^enfin tînutr: cCex'empUs'.
Le i4.ioui de Feuriençig.aprei Soleil couché furuinç
yn tourbillon de vent, lequel mit en racrueilleux efFrov'
tous les habitans deErellawen Silefie.Ilyauoità Sain-.
^teElizabct, eglife parocciale dchi ville, vne haute-
vieille tour,dontle faifteeftoiccouuert de cuiure & de-
plomb, trauerfé de grofl'espoultrcs dechcfne, qui char-
geoittcUementla voute;queparplufieurs fois les Sei.
gncurs du lieu auoycntcerché les moyens de faire def-
mohrceftetour fans dommage dii temple nidesmai^.
fons voifinc.',:maisles charpentiers;appcllez pour en di-
re Icurauis^n'auoyét encorepeu troi-iuer les moyés de I*
mettre bas. Or es tourbillon rompit & renuerfa tellcmêt:
celle tour,qiril en fit cômo deux pièces entaifees droic
Tv ne fur l'autre , & fans toucher àncnla fit tomber
a plomb fur terre. Le temple ctlenuironnë demaifons
idc toutes parrs:mais ccûc ruine n'atteignit en forte quel-
conque pas vne d'icelles , fort vne des plus baires,donc
elle brifa le haut du toift,iî doucement & vi jlement que
ceux qui yhabitoyent n'en fentirent rien. Lesvoifîni
idc l'Eglife n'entendirent bruit quelconque de celle;
rheute,coDibieri que le fracas d'icellc reteniifl forcloiri
hors delaville,!:ousles Seigneurs te habitansdelaquel-
furent merueilieufemenc csbahis de voirie lende-
.aain matin vn.telfpeâ:acle,& bénirent Dieli qui auoi!;
monftré fa main pour leur deliurance. ^/. t^mluc^h
1 i
j}i Hijloiresadmrahlef
L'an l^^^.^c iS.ioiir de Nouembre,auint à Schildc, vfl-
lete du Dioccfc de Torge,ce qui s'enfuiL Vrbaiii Ermc-
traut citoyen du lieu, ayant vn puits profond enfonlo-
gis,raais demi fec, à caulc de quelques pierres cheutes
de la muraille au fond, fit marché auec vn maflbn nom-
mé Vrbain Hembcrg,pourremettre ces pierres enleurs
tndroits.Icclui s'cftant accommodé,aucc des engins &
picccs de bois,vn cfchafaut au puits en endroit propre
defcendit par vnc efchellc plus bas^afin de reprendre 6c
rapporter vn fîen marteau laifle entre certaine ioinôu-
re de pierres. A peine eftoit-ildefcendujqued'cnhautU
terre &les pierres commencent à s'esbouler en telle
quantité qu'elles emplifl'ent le fond,& couurent le maf-
fon lequel elloitau pied dercfchelle. Tout le monde y
accourt, fie chacun tient que ceA homme eftoit efcar-
bouillé,adiouftant qu'jl faloit combler du totît le puits,
qui lui feruiroit de fcpulchre.La iuftice au contraire cft
d'anis qu'on leue les encombres,& ordonne que le corps
du niaflbn foit enterré auec les autres Chreftiens au ce-
mitierc cômun. Suiuant ceft arreft,on met la main à
i'oeuure le ii.iour du mcfme mois. Sur les deux heures
après midi les ouuriers trauaillerent à tirer vne grolle
pierre,& Tentant qu'il y auoit du creux delTous , deualc-
rent vnc longue perche pour fonder refpace du haut de
ia terrcjiufqucs au fond.Du bout de celle perche,ils pic-
^uêt le nez du panure mafl'on , lequel cômencc à crier
éi prier qu'on le tire de là. Les ouuriers cntendans le Ion
confus de ccfte voix,prenét courage à trauaillcr mieux
que deuant , & furies dix heures du foir le defcouurent
debout derrière les efchelles , ertant enfoncé dans terre
iiifques au deflus des genoux. Tout ioyeux ils^s'appre-
ftent à le tirer ; mais voici vn autre aualanche de terre
qui vient à le couurir par dell'us la telle. Alors tous cui-
dans que ce furtfaitdelui,eltoyentfurle pointdc quit-^ "
ter bcfongne: mais par Taduis & cômâdemct du Bourg-
maiihe nommé lacques le Feure,ils fe remettent après,
& ayans ofté la terre enuironla minui(flilslerctrouuc-
rent vif>ransblefl"eurc quelconque, & le tirèrent fain &
faufhor$dupuics,oùUauQicdW prcs de quatre iour»
^memorâhïes. 155
le nui Asfans boire ni manger, ni voir cLiirté quclcon-
c|uc,mais fortifié de lapreicnce diuinc,par le miniftere
des Sainds Anges, loh Fmctl a» z.Ume du recueil des ?w^-
tteilles de nofirc temps»
L'an mil cinq cens cinquante deux,François Pelufien
faifeur de puits ,aagé de foixante ans , fouyflant le cin-
quiefme iour de Feuricr vn puits à Lyon, en la grange de
JLouys d'Hexc,fîtuee en la cofte ou montagne S. Seba^
ilian,vers la croix roulTcque tient auiourd'hui vn mar-
chant Lionnois nônié Particclly:côme ce puits(duquei.
on fe fert encore)eull ia quarante pieds de profondeur,
voici la terre qui fe lafched'en haut,& comble I0, puits»
Xe bon home cftât au fond fur cefte cheute,femet fous
vn ais qui fe trouua près de lui , par le moyen de quoi il
fut garanti d'cftrc acablé de ce pefant fardeau de ter-.
re,qui autremêtTeuft eftoufï"c,& eut moyen de refpirer^
enfonçât quelquesfois le poing dedans la terre prochai*
ne,pour auoir plus d'air.Il demeura fous ce fardeau,& e»
ce fond ainfî couuert fept iours entiers fans mâger, con-
tentant fon cftomach;auec fa feule vrine , fans trifteffe,
au contraire plein d'efpcrâcc que Dieu le deliureroit. Il
crioit par fois à l'aidcmais il n'cftoit aucunement entê-
du & toutesfois il entédoit bien le marcher des gés , &
le bruit que l'on faifoit en haut,voire le parler des gens,
lesheures&lcfon des cloches.Lefepticfme iour venu,
côme Yon. faifoit eftat de le trouuer mort,& qu'on lui a-
preftoitfontôbeau,ceuxqui trauailloyent audefcôbre-
niêtdupuits,entêdirét vne voixdu profod comme s'ils
cuflcntoui la voix d'vn efprit fouterrain:ce qui fit hafter
la bcfongnc;le cri & la voix pourfuiuât de celui qui de-
mandoit fecours.En fin on le defcouure , & après lui a.
uoir faitprendre vn verre de vin, on le tire fain &faufi
l'aide d'vne corde cju'il empoigna vigoureufement,
t:incilefloitcncoresrobuftc& gafllard^letmt fort bien
fans cftre lié pi aidé de perfonne.Eftât dehorsXain d'en*
tendcmét & de corps,apres auoir remercié Dieu , il ou-
unt fa bource eu prefence de plufieurs, & ayant compté
fon argent leur dit en iouant, qu'il auoidogé chez à^s
bôshofte^pvcu qu'en fcptiôurs qu'il n'en e.\loicbou^^
l 3
^54 Tîi/tûirâs admirables
il n'auoit rien cîcrpciidu./'V/f//ic</r<'i- de Lyon,
Beaucoup de gcs efchapcnt des danger»;, au fortir def^
4^ucls;par la cofidcratiô des cuencmens cflrâgcs, ilsTonc
toncrains côrefl'er q ue Dieu les a deliurcz fans aide d'au-
trunes caufcs fécondes. De plu fîeurs exemples i'en choifï-
«ai & reciterai vn qui efl remarquable. Les Ducs de Sa-^
?xe,Friderîc Eledteur & Ican fon frère, mutèrent vniour
Idir la riuicre d'Elbe , pour aller de Torge à Vviteberg,
l'eau eftoitcou'iertede grandes pièces de glace fraii-
thcment rôpue. Ces pièces heurtèrent tellement le ba-
'fleau^qu'incontincntqueccs Piinces eurent prins terre
<au port le plus proche du chafteaude Vvitéberg,lefond
«lu bafteaus'entr'ouurit;,& les aix de collé & d'autre,tô-
^JCrentrtcUement queTcau entra dedans de toutesparts.
9- es Princes confidérans de defiusle riuage luec grand
*tsbahiflcmcnt;vn tel fpeéiacle , & en quel danger ils a-
•iioyent c{}'c(à caufe delà largeur.profondeur & roideur
*le cefte riuicre)reconurent que Dieu auoit conferué le
*bafteau en foncnticr,iufqucsà ce qu'ils en fufl'entfor-
itis.Ayans eftc tous deux aîVc?- long-temps en cefte con-
•fideration, fans fonncr mot , TEleâteuv dit a fon frère,
XZIonfellons que Dieu nous a garantis , & le remercions
<ie fon affiftaiicccnce danger,& en d'autrcs.Majs quant
*à ce qucycusvoye?. Icbafleau en pièces incontinent a-
*p^cs noilrcfortic:ccitainenient ic cain bien qu'après \i
mort de nous deux ,nGftre maifon de Saxe n'aille eiv
^ieçcs.Pf «ar 3 d» Commentaire des priti^ipalei fortes de dettl-
-Wiahonijliure J.cljap,!^.
L'ani5:4^.vn grand perfonnageAlemand, ayant eftc
tirrcfté troisioùrs il-Iale en Suaube parles eaux desbor-
^ecs , finalement , prelfé, de paifcr outre ; s'embar-
Vua dan-:vnc naflellcpour traucrh?rla riuicre , aconi-^
^agné de trois ficns fils,& d'vii doflc Théologien deCcs
amis.Eftantfur le point devoirfon bafteau rcnuerfcjui
^ les autres noyez-jfansaparence de refcoufî'e, plein de
Toi & d'cfperâce en Dieu;.il côrrience à dire à ce fié ami."
<Juel triuphc Satan fcra,& quel plaifir lui fera-ce,à vo-
i^rc auis/i nous deux & mes trois fils , fommcs noyez en
ife dchige.Mais avansfurmonté Ki pcril;iisamoerét fains
ér mémorables, 13 j
& fîiufs enterre & ceperfonnagc ayant pourueu à cer-
tains grands afaires, mourut quelques fcmaincs aprcs
paifiblement, en Tinuocation du nom de Dieu.A/.o/^/i-
dré Uonfdorffenfon théâtre d^ exemples y pag.l^ 6.
L'an i5Ç(î. le 14. iour de luin fur le foir, vne horribl®,
(tourmente s'efleua fur la mer Septentrionale au deffous
de Noruegue, laquelle engloutit 'plu/îeursvaifleaux, &:
en fracafl'a d'autres contre les efcucils. Le pilote d' vu
grand nauire, home fort expert, vieil, & quiauoit paffé
toute la vieen nauigations, grimpe de fois à autre au
maft pour abaifler les voiles. En fin voici vn tourbillon^
qui Tenleue de force;,& le précipite loin delà dedans les
vagues.Incontinêt après, nouuelles bourafques accueil»
lent le nauire, &le poufl'ent de violence indicible à tra^
uersdes bancs , efcueil.s,rochers&rables,parlefquels ci%
nuls temps calme vn vaifteau n'eu/lpeu paffer fans pé-
ril de naufFrage, & portent ce vaiil'eau tout entier en vu
port,au grand eilonnement des matelots, des paflagers*
& de tous ceux qui virent ccko. mcrueille. Làmcfme.
L'aniççS. aduint à Mecheirodeen Alemagne, vn cas
merueilleux , confermé par les tefmoignages de plu-
fîeurs hommes dignes de foy. Suilefoir^enuirôlesneuf
heures, vnperfonnage veftu d'vne robe blanche, fuiuî
d'vn chien blanc , vint heurter à la porte dVne pauure
honnefte femme,& l'appelle parfon nom. Elle cftimanir
que ce fuft fon mari , lequel auoit efté fort long temps
en voyage lointain, courut viftcà la porte. Ceperfon-
nage la prenant parla main, lui demande en qui ellç
mettoit toute la fiance de ion fahit ? En Icrus-Chrift,re-
fpond elle. Lors il lui commande de le fuiure : dont fair
fantrefus, il l'exhorta d'auoirbon courage , denecrain-
dre rien :quoy dit, il la mcnatoutelanuid parvnefo-i
reif. Lelendemain,il la fit monter enuiron midi fur vnc
tref-haute montagne, & lui monftra des chofes qu'elle
nefceutiamais direnidefcouurir de parole à perfonne.
Il lui eniointdes'en retourner chez foy, & d'exhorter
chafcun à fe deilourner de Ton mauuais traintadiouftani;
^u'vn ambrafement horrible eftoit prochain : & lui
^o|nmâ^a aupi de fc reposer huit ^ours en fa 9iîii(o;i, Çi?
X 4
j^6 Hijfûires ndmirahUs
fin defcfuels il rcuicndroit à elle. Le jour fuiuant au ma-
tin,lafemrre fut rrouucc à l'entrée du village, & emme-
née cnfon logis, où elle demeura huit iours entiers fans
boire ni manger. Comme Tes amis & voi/îns Texhor-
laflent de prendre quelque nourriture, fa rcrponfe fut,
«^u'cftant cxtrcmemcnt lafTe , rien ne lui eftoit plus a-
greabicque le repos : que dans huit iours l'homme qui
Tauoit emmenée viendroit,& lors elle mangeroic. Ain-
Ç\ auint-il:mais depuis,ccfte femme ne bougeadi} lid le
plus à\.i temps , foufpirant du profond du cœur , & s'ef-
criant fouuentcsfois : O combien font grandes les ioyej
dzctÇit vie-là!u quelavie prcfcnteell: mifcrable.^ Quel-
ques vnslui demandans, il elle eilimoit que ceperfon-
-nage veftu de blanc , qui lui clloit ainfî aparu , fuft vn
bon Ange, ou pluftoll: quelque malin efprit J lequel fe
full: transformé en Ange delumîcrcPellcrefpondoitjCc
n'eft point vn malin efpritx'eft vn faindAnge dcDieu,
cui m'a commandé de prier Dieu foigncufement, d'ex-
horter oiands& petits à amendement de vie. Si on Tin-
terrogoi^t de fa créance: le côfcfrc(difoit-e]le)que ie fuis
vne pauurc pecherefle : mais ie croy que lefus Chrift
in'aacqujs pardon de tous mes péchez, parle bénéfice
de fa mort & pafllon. Le pnfteur du lieu,rendoit tefmoi-
cnagc de iinguliere pieté & humble dcuotion à cefte.
femme, adiouifant qu'elle eftoit bien mihuite, & pou^
ucit rendre laUon de la religion, lob fmcel au troifiefrne
liure des AlirncuS,
Va s i^ST-fur vne villctte de Silefîe, nommée Olfte,
furuint vnetempeftccnrairla plus cftrange & furieufc
que l'en cufi oncques veuc : car clic faifoit crouflcr les
plus fermes edi&ces baftis de picrics de tailles, & c^
renuerfa plusieurs de fond en comble. Vn des habitans
eu lieu, nomme Laurent Thofarofquc, ayant fon logis
•près de la grand place, &. tenant pour certain que la fiii
du monde fuiHenuc, à caufe que l'air eftoit tout allu-
mé , Se que des grands fiambeaux de feu voloyentde
outres parts : s'enfermccn famaifon , & fe profternant
i genoux auec fa femme & fes enfans, comméce à prier
i Dieu d'affectioa tref-ai-dence, & à chanter auec fà fa-
mille
(^ mémorables, ijj
mille des Pfeaumes de pénitence. Durant ccsfainâs e-
xcrcices voici vn efclat de tempefte : qui d'impctuolîté
merueilleufc arrache k haut de la maifon bafti tout
de pierre dctaille,cnséblc le toid, fracaflc & pouldroye
tout cela : fans que le perc, la mère ni les enfansfuflenc
offenfe/. en forte que ce fuft. Mais en vn autre cndroi^.
ccfte tempefte fit vn coup pitoyable : car ayant rcnuerfé
vn pignon de l'hoftel de ville , fait de gros quartiers de
pierre , cimentez proprement , ^ attache?, par tenailles*
clefs & gros crampons de fer , cinq perfonnes furent
acrauanteesdela ruine des maifons fur lefquelles ceft
encombre fondit. Au contraire , il s'en trouua troi$
«utres & vn enfant couché en vn petit licl qui furent
cûcferuezen vn autre logis fous lamefme ruine, &
quan<l onjdemandoit à ceft enfant , qui commençoiti
gazouiller, qui lui auoit affifté en ce danger , il hauifoit
(a petite main, & monftroit le Ciel. Al» t^mbroife Moi-
hixn en Cexpofitîon di* Pfeamne I9.
Non moins horrible & efp ouMan table fut vne autre
tempefte qui courut par le pays de Mifnc le treziefme
lour d'Aouft.l'an i5^9.Cômeelletonnoit cftrangement
cnTair, & venant à heurter la terre , rcnuerfoit tout ce
qui lui eftoit de rencontre : vne mère de famille fe reti-
ra haftiuement dedans fon poifle auec quatre fîens fils
& fa fcruante.Puis fe tournant vers fes fils leur dit,Nous
auonsfouuent ouy parler du dernier iour, nous n'yar
uons point penfé , maintenant nous le voyons s'appro-
cher : quoi dit, elle & eux fe mettent à genoux , inuo^
quant la miftricordc de Dieu. La dcftus vn vent impé-
tueux enleue & rcnuerfé le toiét de la maifon, puis abat
vn mur mitoyen d'iceile , fracaffe & efpard çà & la des
cloifons,coiôneS;fueils, foîiueaux,lâbris& planchez du
poifle,auec vn bruit horrible. Or quoi que ceftc tépcfte
fut effroyable, la mère, les enfans , la fcruante demeure^
rentfains & faufs en leur petit recoin , encore que les
pièces de bois,les aix & les pierres volafsét autour d'eux
de toutes parts. Satan fcmblanc meflé parmi ceft orage>
& confondu pai- la prière ardente de ccfte petite trou-
f^> cflaiice vne grofic poukic de douze coudcc^ de
if^i ' Hijioires admirables
long à l'aide d'vn tourbillon impétueux, de vlnçx. qua-
tre pas loin de là, comme fi c'cuft cité vue flefchc vo-
lante , qu'il defcoclu il: droit f-àr la fencftre du poille,
§)renant pour mire celle humble compagnie, apuyee à
igcnoux contre vn banc. Mais les lainfts'^Angcs dé-
tournèrent le coup , -tellement que ce trait furieux alla
<lonner contre vn coin oppolîte du fourneau de cepoi-
le.Celie mefmc ternpeilc ayant renuerféla maifon d'vn
Î)ayran, fa femme & certain de leurs voifins qui fe trouua
ors chez eux, furent couuert? du plancher & des encom-
fcrcs;, fans toutefois eftre endommagez de la ruine.-F/»-
t^elau^.liit.des menteilies de nojlre ternes.
lean Spangenbcrg, paiteur de Northeufejeflantallé
aux efteuues à la façon des Alemans , y demeura quel-
<jues heures àfe baigner auec les enfans. Eftans fortis de
là , tout le lieu fondit , & tomba par terre, fans endom-
■nager perfonne. I.Aîanlinsau l. litire dtfes recueil^,
Tayconuvne femme honorable, de lînguliere pieté
& modeftie , laquelle il ya enuiron vingt ans , par vne
extraordinaire & longue fu ppretTion de menftruesfut
ireublee du cerueau , à diuerfes rcprifcs , & aflez long
«éps:durant lequel elle fut plu/îeurs fois en volpntc'de
tuer Ton mari dormant, & elle après. Vn iour fa garde c-
dtant allée en quelque paît où il conucnoit, ellefelcue
f>romptement du h6t , & en chemiff' s'encourt au iardin
^tÙL maifon , où elle fe deuale par la chorde du puits
îufquesaufûd,quiell: deCcpt ou de huict toifes, puis s'en
a-emoute par la mefme chordc,& s'en reuient en fachâ"
jLrej toute mouillée, &ayanr efté en l'eau iufquesau
»ienton.Quelquesioursapres,feignant fe porter mieux,
iclic fort en rue , cmmeine quand Se ell^ vn fîen fils, au-
jourd'hui de trcs-grande cfperance , lors aagé de quatre
pu cinq ans, en délibération de le ietter & elle après de-
4^ans vn fieuue prociiain,iufquei fur le pont duquel elle
£l diuers voyages , Tenfant fe fouriant à elle, & dcflors
l'entretenant de paroles de confolation. Reucnue chez
foi, peu de temps après elle fut foula^ce&dcliurec par
moyen avfc, c'eit a içauoir parvnefaignec à la faphene,
^ pa-quelquc bcnignc puigauc^i. D.epuis clkpat en-
é" mmorahles. 13 5
^ore quatre ou cinq beaux enfis.Elle m'a déclaré main-
jtesfois dcpui.s,qu en ces accidés vn home veftu de blane
& de face merucilleufementaereable;, lui aparoifToitjle-
quel lui renoit la main , & rexhortoit bcnignement , &
côme en fouriantjd'clperer en Dieu. Comme clleeftoit
dedans le puits,& ie ne fçai quoi de fort pefanrjui poul^
Ibit la tefte,pour la plonger du tout en Teaujôc tafclioic
yui faire lafcher la corde^pour couler en fond: ce mefme
perfonnage vint à clle,la fouleua parles ailTelles , Si lui
aida à remonter: ce qu'elle ne pouuoit nullement fair^c
de foy-mefme. AufTila confola-il auiardin , & la remena
doucement vers fa chàmbrejpuisdifparut. Le mefme
luivint à la rencontre, comme eUc approchoit du pot:
&lafniuoitcleloin iufqucsà ce qu'elle fuft de retour.
Eftant pleinement guérie , elle ne fouhaitoit rien plus
que de fortirdu monde, Scfes prières ordinaires ten-
doyentlà:finalementDieurexauça,& cnuironvn mois
deuant fa maladie mortelle , entrant en fa cuifine pour
îauer fes yeux &fes mains,la dét œillère de delTus la mâ-
choire droite lui tôba dans la main,fans quelcôque dou-
ïcur précédente ni fuiuâte.S'eftantlauee & cfl'uyee pai-
?îblemént,e].le vient à fon mari cftant encoresau U(ft,lui
monftre la dent,8i adioufta ces mots, Mon mari , Dieu
i"n'appelle;c'cft raccôplilfement de mesfouhaits.O que
ie fuis heureufe ? Le mari efmeu, eflaye neantn^oins de
îa reiîouir,& deftournât do uccmét le propos fe leue,prie
Dicuj& chacun s'cmploye à fon deuoir. Depuis, cefte
femme honorable ne ceflade monftrer vne chère plus
ioyeufe que de couftumc à fon mari,à fes parens,à fes a-
misjcftant graue & feuere à fes enfans.Aurefte plus bel-
le Scdifpoftc qu'elle n'auoitoncques efté,en dixfept ans
qu'elle vefcut en mariage. Au bout du mois , lors qu'il
îi'y en auoit aparence quelconque, comme elle vouloit
feleuer,debô matin,dlbn acourtumcc, pour remuer vn
^'en petit enfant,& vacquer aux affaires de fon mefnagc,
elle eft contrainte demeurer nu lia:. Son mari reucnu
quelques heures après , elle lui ramentoit les paroles
de la dent tombée , & l'exhorte de fc ref«uldf c à la vp-
lontpdeDieu. Lui monté en haut pour recomman-
flcr àpa;c fa chçrç gjoitic *i ^eluj (ju^ jj^ reietcç
Ï40 Hijlûires admirAhles
point I« prières des /îcns, elle le fait apporter Tes ba-
Çues,Ies met dâs rabourre,& l'enuoye par fa fille aifnce
à fon mari,lc priant de ferrer le tout foigncufcnienc a-
uecfon demiceint ,les chaincsdela bourfcdercrpin-
£licr,& àcs cifcauxric tout d'argent. Le mari defcend , &
la tance doucement de cefte apprehenfion.Ha ! mon a-
nii dit-clle,ie n'ai plus faute de rien qui foit au monde.
le m'en vai au mon Dieu.O que ie fuis heureufe! Du-
rant fa maladie,qui dura vingt iouvs , ie lui affiliai pour
la confolerjy eftant tenu pour plusieurs raifons. Elle nie
ramenteutcequedelTus , dont autresfois elle m'auoit
fait quelque déclaration pour eftre confolee, & prenoic
argument de tant d'excellentes dcliurances des'alTeu-
rcr defoRfalutdont ie lui propofai quelques tefraoi-
gnages: mais elle lesauoit imprimez tellement en fa
pcnlce,qu'elle m'en fuggcroit plufîeurs autres,& me fit
de beaux fermons.Le iour de fon trefpas aprochant elle
fe rourioiCp& comme ie lui demandarfc la raifonielle me
ïefpondit tout bas, le voy mon homme. O qu'il elt
bcaulpuis s'efcriant,Attcn,atten moijdifoit-elle.Duranc
fa maladj celle ne tint conte ni d'enfans , ni de parens,
311 d'alliez^ni d'amis, ni de chofe quelconque du mon-
«le.Et comme fon mari lui amenaft de fois i autre leurs
enfans,cllc nedifoit autre chofe , finon , Dieu vous bé-
nie,Dieu loit voftre pcrc & merc : &: au plus icune d'i-
€eux,Ha petit foldat .'Elle les recommanda vnc fois feu-
lement à l'on mari. Depuis elle les regardoit fans dire
mot.Vn quart d'heure auant fon decesjcUc fe fit appor-
ter fa cotte pour fe leuer, & comme elle eftoit pour for-
tir du li<fl, elle requiert qu'on la deuefte , &. s'eftantre-
couchee,fait appellerfon mari, lui dit ct^ mots , Voici
la Sn àc mon louhair,&le commencement de ma féli-
cité : Iclus Chrift eft mon efperance : mon ami , ie ne
vous demande plus qu'vnechofe.Pric? Dieu pour moi.
le mari bc les cnfans s'eftans profterncz à gcnoux^apres
vnc ardan te prière à Dieu , elle ferma les yeux comme
pop- dormir , &: expira auecvn vifage le plus agréable
quoncqucs cileèuft eu dçfon viuant. Extrait de mes
é* wemorahks. 141
îl y a enuiron iS.ans, qu'vn perfonnagc, qui n'a vou-
lu eitre nommé , eftant enla duché de Bourgongne,
pour afaires d'importance, après les auoir expediees,de-
uant que partir fut coauié de difncr auec notable com-
pagnie de lo. ou ix. liens fanaiiliers& bien vueillans. £-
liant tout bottéjefperonné.refpee au cofté^vn long ma-
:cau fur fes efpaules , il fe met à table, fait bonne chere
auecfes amis;& entre autres deuis fut longuement par-
lé entre eux des merueilleuxaccidés de nollre vie, Tho-
llequilestraittoit de bonne aftedion,& i-ttentifà leurs
difcours,ne print garde a ce qui auint toit après. Grâces
rendues à Dieu par ceperfonnage,ilfeleue le premier,
& pour dôner moyen aux amis de faire le mefme à leur
aife, commence à reculer en arrière en la chambre affez
cftroite.Les autres fe leuans en foule,ii recule tant, que
fans voir vne trape derrière lui , par laquelle on deualc
14. ou iç.degrez eitroits de bois pour aller en la caue du
logis,laquellc auoit efté lailfee ouuerte par impruden-
ce de rhoftelfe 911 de la feruante,il tombe i la renuerfe,
les pieds contre mont, latefte contrebas, &en vnin-
ftantfe trouue tout au fond, fansfonnervn feul mot.
Ses amis penfans qu'il fe fuft rompu le col, commencée
à lamenter & crier à haute voix. Qu,elques autres de-
meurent tranfis depeur,& fans bouger fe tenoyent plâ-
tez furie bord de la trape. Lui comme fe refueiliât dVa
dormir commencer les appellergracieufement. Deux
ou trois dcualent,& le releuent, à caufe qu'vn de fcs ei-
peronseftoit acroché,il remonte gaillardement en hauc
cft contemplé d'eux tous , & tallé comme par miracle^,
n'ayant blcfleure, froiffure , ni efgratigneure quelcon-
que, nulle efmotion de fieure , nul vomiflementni cra-
chement de fang , nul changement de vifage : fon man-
teau boutonné n'eftant defchiré ni agencé autrement
qu'avant la cheute, fon efpeelôgue& eftroite non fau-
cee m gailee.Ayans enfemble loué Dieu de cefte excel-
lente conferuation, il monte foudaineraent à cheual,
taid vne traide defîx lieues Taprefàinee, en vn Diman-
che du mois de Iuin,& ayant voyagé encore à chenal (:7Ç
OU fcpt idurs apresparujét en ftîmç fanté çn fa maifon^
142. HiftoircS admirables
où ilvit cncoresà prcfcnt, fans s'eftre iamafs fcntiû^'
ccfte chcute,à laquelle il n'appliqua auflfi lemcclc quel^
conque ni intérieur ni extérieur, ni n*cn perdit repas iiî
repos. Le mefme perfonnàge dix ou douze ans aupara-
uant, loge en l'hoUelcrie de la cloche à Dijon après fou-
pé voulant dcfcendrc d'vnc haute chambre en Teftable
pourvoir Ton cheual tomba n.ou 12. degrez deTefcalicr
<lc bois, en telle forte qu'il fe trouua affis, s'esballilTanc
de ce qu'il ne s'eltoit rompu bras &iambçs mais fe rele-
vant il fit ce qu'il prctcndoit , remonta , repofa & para-
cheuafon voyage. Souuent il fcramentoit telles & au-
tres dehurances , & m'a conté vne chofc mémorable fur
ccfte cheute de Dijon : ceft qu'au bout de quelques
mois il s'en fentit , en telle forte toutesfois que s'eftant
commis à Dieu, illaiffa les remèdes. Au bout de 15. ans
après il s'en eft encore fenti , & dit que de prcfcnt vue
■fois ou deux l'année il en a quelque legcrt atteinte:mais
cela pafTcSc lui fert pluftoft d'aucrtincment pour fe fou-
uenir du palTé , & en remercier Dieu , que d'occafion de
recourir aux Mededns ni aux Chirurgiens. Extrait ds
mes mémoires.
Au mois de Nouembre 1^70. vii déluge d'eau furucnu
en quelque endroit d'Alemagne emporta la maifoni;
champeftrc d'vn notable perfonnàge , laquelle flotta
«juelque temps fur l'eau, & fut portée fore loin de fa pre-
mière Situation , fans dommage de ce pcre de famille ni
de ce qui eftoitdedansla maiîbn aueclui. H, Aiollcr en
icxpojition diipfsiiiiwe cent -vinjy^t-cjHAtrtefme.
D E M O N I ^ QJT ^ S.
t xempUs de diiterfes illufions de Satan,
GO M B I E N qu'il y ait par fois quelques caufes natu-
relles de la phrenefieou manic-.c'cft toutesfois cho-
fc affeureequc les diables entrent en certaines perfon-
ncs,& ycaufcnt des fureurs &tourmcns,ou aucc les cau-
fes iraturelles, ou fans iceiles:veuque Ton void par foii
|d|^mdadç5 eftre guéris parrçiaedss qui ne font point
""' " n*
naturels. Souuent auffi tels fpeftacles font autant dé
J)ro(liges& prcdidions dechofcs àvenir.Ily a douze
ans,quVne femme du pays de Saxe , laquelle nefçauoic-
lire ni efcrirceftant agitée du diabicle tourment cefTé,
parloit en Grec & en Latin dclaguerredcSaxe,qui a-
aintpuisapresj &prononçoiten GrccSc en Latin des
mots^dont le fens ciloit , Qu'il y auroit grande angoiiTe
çn terre,& fcdition entre le peuplc.P. AleUnchthon en 'v-^
nedejhepifires.
Quatre ans auparaunncyanoit eu vne fille au Marqm"-
fi.t de Brandebourg , laquelle en arrachant des poils dic
vertement de quelque pcrfonnage que ce fuft, ces poils
eftoyent incontinent changez en pièces de monnoye àvt
paysjlcfquellescefte fiile miifchoit auec vn horrible cra-.
quetis de dents. Quelc,ues vns lui ayans arraché de ces
pièces d'entreles mains,trouuerent que c'eftoyét vrayes
pièces de mônoye,& les gardét encore. Au refte,cefte fil-
le cftoit fort tourmétec de foi^ a autre : m.ais au bout de
quelques mois elle fut du tout guérie, & a vefcu depuis
en bônc sâtc.On fitfouuêt prières pour elle,& s'abftint".
on exprelTément de toutes autres cérémonies, le mefme,
l'ay entendu qu'en Italie y auoit vne femme fort i-
iliote,agitec du diable,laquelle enquife par Lazare Bo-
nami,trcs-doâ:e perfonnagcaflifté de fes difciplcs, quet
cftoit le meilleur vers de Virgile^reipôdit tout foudain,
Dtfcite iujlit^amnionkîy^ non tcmnere Dluos.
C'cft,adiou{l:a-elle, le meilleur & plus digne vers que
le Poète Virgile fie oncquesiva t'en & ne retourne plus
ici ^om me tenter:. Ph.MsUnchhort en fei i^ijîres: G.Peu-
(er^aul.liu're de fon Comment dire des Deuin4tl<jns jchap.^.P^
^odiJîtéattjaH z6.ch4p.de fei hîftoi'rcs prodigîeufes.
Antoine Beniuenius au 8. cha.du liure des caufes cà-
cheesjdes maladicsjcfcritauoirvcu vne ieune femme aa->
gee de feize ans^dôt les mains fc retiroyét eftrangemét.
Il toft que certaine douleur la prenoit au bas du ventre.
A fon en effroyabie,tout le vêtre lui cnfloit fi fort, qu'6
l'euft eftimee enceintedchui(5tmois:cn fia ellcpcrdoiç
le roufle;& ne pouuant demeurer en place fe tourmen-
toitçàSc là dedans fonlid, mettant quclquesfois fes
X 4 4 HiBoires eulmirahUs
culcbucc. Ce qu'elle recommençou tant & lufquesàce
que fon mals'accoifart peu à peu , & qu'elle fuu aucu-*
nemcns foulagee.Lors cnquilefur ce qui lui ertoir auc-
nu,ellc contciroK ne. s'en reflbuucniraucuncmér.Mais,
ciit-il,rccerchâc les caufcsde cefte maladie, nous eulines
opinion qu'elle procecioit dVne TufFocation de matrice,
& de vapeur:, malignes s'cfleuan.s eu haut, au détriment
du cœur & du ccrucau. Toutefois après nous eftre ef-
forcez de la foiilaper par medicamens , & celane feruant
de rien, iccllcdeuint plusfurieufe, & regardant de rra-
iiersfemit finalement à vomir des longs doux de fei
tout courbczjdes aiguilles d'airia picquees dedans de la
cire, & tntrclaflecs parmi des cheucux, auec vne portion
de fon defiunc , fi grand qu'homme quelconque n'cuit
peu launllei entier. Ayant en maprefence recommen-
ce plufieurs fois tels vomiflemens , ie me doutai qu'elle
eftoit poftedec d'vn elurit malin , lequel charmoit les
yeux à(^s, afldl:ans,pcndàt qu'il remuoit ces chofes. Aufîl
inchofe fut bien-toil aueree par fiî^nes & preuues
plus manifelles. Car depuis ijous l'enteuddûncs faifanc
des prédictions & autres chofes qui furpaifcnt toute vé-
hémence de maladie, voire toute inteUigence humaine..
/. y-oier AU 4. Hure des impoflHrti diaboliqusi)cha^.6.
MeinerCiath, gentil-homme demeurant d Bouren-
brouk, chaftcau de la Duché de Iuilliers,auoit vn lèrui-
tcurnommé Guillaume , qui quatorze ansdurantfuc
tourmenté du diable. Vniour, commelagorgeluifuil
deuenue fort enflée, la face ternie , & qu'on craignoit
qu'il ellouftail tout a l'heure > ludith femmede Clath,
honnerte damoireIle,enicmble fes domeftiques,c6men-
cerent à inuoqucr Dieu : & foudain de la bouche de ce
Guillaume fortit entre autres barbouillerics toute la
partie de deuant des braycs d Vn berger, des cailloux les
vns entiers les autres rompus^des petites pelottesde fil,
vnefaufle perruque, des aiguilles , vn morceau de dou-
bleuredu layed'vn petit garçon, & vne plume de paon.
Enquis de la caufc de fon mal , refpondit auoir rencon-
tré vne femme près de Camphufe, qui lui auoitfoufflé
au vifage^Ôc que tout fou mal ne venoit d'ailleurs. Mais
^memorahleU 14 j
eftant guCri , il nia que celle accufarion fuft vraye, con-
feflanc auoir cité induit par le diable à dire cq qu'il auoic
dit.Dauâtage, il adioufta que toutes ces matières prodi-
gieufcs n'auoyent point efté dedâs Ton corps, ains auoy-^
C)Ucftépou{lces contre fa bouche par le diable, pen-
dant qu'on le regardoit vomir. Satan le deçeut par lUu-
flons.On pcfa plusieurs fois qu'il vouluft fë tuer,ou s'en,
vouluft fuir. Vn iour s'cftant letté dedans vn teâ: à por-
ccaux, & gardé plus foigneufcment que de couflume, i\
demeura les yeux ccllcmcnr fermez , qu'impofîlble fuc
les defclorre. En fin Gcrtrudc filie ailiiee de Clath , aa-
gee d'onze ansrs'approchnnt de lui J'admôneilade prier
Dieu, que Ton bon plaifir fultlui rendre la veué.Sur cela
Guillaume la requit de pricr^cc qu'elle fit,& incojitinét; .
elle lui ouuritles yeux, au grand esbahiflcment de cha-
cun. Le diable l'exhortoit fouuent de ne prefter l'oreille
ni à fa maiftrefle, ni aux autres qui lui rôpoyentla telle,
en lui parîant de Dieu , duquel il ne pouuoit cftre aidé>
puis qu'il eftoic mort vnefois,ainfi qu'il Tanoit entendu
prefcher publiquement. Or comme vn autre fois ils ef-
Torçoit de tafter impudiqucment vne chambnere de
cuihne , &; qu'elle le rançall par ion nom , il refpondit
d'vnevoix cnrouée^qu'ii ne fenommoit pas Guillaume,,
JnaisBcelzebub: à quoilamailbeilererpondit, Penfe-tu
donc que nous te craignons > Celui auquel nous nous
fions, cil: infiniment plus fort & puilîant que tu n'es. A-
lorsClath poufle à'\ n faind zele,en prefence de tous les
domeiHqueS;CÔmence à commandera Satan qu'il euftà
fortir, au nom de Iclus Chritl , liHint ronziefme chapi-
tre de l'EuâtTile feLon famâ: Luc, où il eil fait métion du
diable muet ictté hors parla \)VA{sbiC(i de noftreSauueur,
: aullidcBeclzebub prince des diables. A laparfn,Guil-
•unie commence? rcpofer, & dortiufques au matin>
commc*"n homme cluanoUi: puis à;Y?.nt prins vn bouil--
lon,& le fénrâtdu tout allégé, il fut remei.ié chez (es pa-
tés,aprcs auoir remercié les mail'tre & maiilrcfic, & prié
Dieu qu'il vouluft les recôpenfer pour les ennuis qu'ils
ûuoyent receus de celle affii(ftion. Depuis ilfe-mari*»
tiut des ç;jfans, & oe foitit plus da tourment du duble^
i4<3 Hijfûirâs a^mirahles
X.r'vîer^AU Uti.ify' ch.fufmentionué.
L'an mil cinq ccnsfoixantc fixjledix-huidfefme îouf
de Mars, auiiu enla ville d'Amftcrdanen Hollande vu
cas mémorable , duquel M. Adrian Nicolai Chancelier
deGucldres fit vndifcourspublicjcontcnant ce qui s'en-
fuir. Il y a deux mois ou enuiron(dic-iI)qu'en cefte ville
trente enfans commencèrent à crtre tourmentez d'vnc
façon eftrange, comme s'ils euflcnt efté maniaques ou
furieux.Par interuallesils fe iettoycnt contre terre, & ce
tourméc duroitdemie-heurc,ou vnc heure au plus. S'e-
ftans relcuez dcbout,ils ne fe fouuenoyent d'aucun mal,
ni de choie quelconque faite lors, ains penfoyentauoir
dormi. Les MedecinsVaufquels on recourut, n'y firent
tien, pource qu'ils eftimoyent que ce fuft vne maladie
procédante decaufes naturelles. Puis après leurs parena
cftimans que les forcierss'en fufTent meflez,eurent leur
refuge à eux : mais ils ne firent rien auec toutes leurs
forcelleries.Finalement,à caufc que l'on croyoit que ces
en fans cftoyentdemoniaquesjons'adrella versplufieur";
cxo'.ciftesrpource que les enfans difoyentjfans y pcnlcr,
beaucoup de chofes qui furpalloyentleur portée & leui*
iaage.Cesexorciftes defployerent toute leur fcience , &
perdirent temps. Durant leurs exorcifmes les enfans
vomirent force aiguilles , des efjnngles, des doigtiersi
couldre, des lopins de drap,des pièces de pots caliez, du
verre, des cheueux, & telles autres chofes : pour cela
toutesfois les enfans ne furent guéris, ains retombèrent
en ce mal de fois à autre, au grand eftonncment de cha-
cun pour la nouueauté d'vn {{ eftrâge fpeducle.Lf^tÙT
^n /^.Uu.chap.S.
LemcrmeauintàRomc,ran 15^5. car en rHofpftal
deà orphehns,en vne nuift, enuiron Tep tante ie unes fil-
les deuindrent démoniaques, & demeurèrent en ceft c-
' -flat plus de deux 3.ns.Cardati3au ^.liurAe varieiateicha.jâ,
lean Langius tres-dode Médecin , cfcrit au premier
iiurede Tes epiifres élire aucnul'an 1559.3 Fugêllal, vil-
lage dcrEuerchcdT.yileten, ce qui s'enfuit, vérifié par
grand nombre de tetmoins. Vlnc Neufelferlaboureur
demeurant en ce village çftoi^ urf^raWcoiçnt tour-
mente
^ mîmordUeFé 14;^^
Imcnte d'vne douleur de flancs. Vn l'ourle chirurgie a^
yant fait quclc|^ue incifîô en la peau ,ron en tira vn clou,
de fenpour cela les douleurs ne s'appaifercnt , au con-
traire acreurcnt tellement, quclepauure homme tom-
be en dcrerpoir,d'vn couftcau tranchâtfe coupe lagor-
ge.Conlrae on vouloir le cacher en terre,dcux Chirur-
gicnslm ouurirent l'eftomach en prefcnce de plufîeurs,
& dans icelui trouucrcnt du bois rond & long , quatre
coufteaux d'acierjles vns aigusjcs autres dentelez corn-»
me vne fcie:enfcmble deux baftons de fer, chacun de
neuf poulces de lôgucur : & vn gros toui'pillon de chc-
ucux. le m'esbahi comment celle ferraille a peu eltrc
^mafl'ce dedans la capacité de l'eftomach, & par quelle
oUuerture.C'eft fans doute vn artihce du diable, lequel
luppoledextrement toutes chofcs, pour fe mointcnip
& faire redouter. f.7/''y/cr aï* ^.Uv..ch:i»9.
Lestourmens que les diables firent à quelques Non-
nains enfermées à Vvcrteten la Com.té de Horne, font
efmcrijeillablcs. Le commencement vint ( à ce qu'on
dit) d'vne pauurc femme , laquelle durant le Carefmc
emprunta des Nonnains vne quarte de feLpefanc enui-
ron trois huresj& en rendit deux fois autant, vn peu de-'
uantPafques.Denors elles commencèrent à trouuer de-
dans leur dortoir iles petites boules blanches , fembla-
blcs à de la dragée de fucrCjfalees au gouft , dont tou-
tesfoisonne mange point, & ne fcauoit- on d'où elles
venoyent. Peu de temps après elles s'apperceurent de;
cjuelque chore,qui fembloit fe plemdrc , comme feroic
vn homme malade -.ellex entendirent auflî vne fois ad-
monncftant quelques Nonnains deCe leuer&venirà
Taidcd'vnc de leurs fœurs maladerinais elles ne trouuc-*
rent rien, y citant courues.Si quclqucsfois ellevouloy-
cntvrinercn Icurpotdc châbrc^illeur cftoit foudaine-
ment ofté , tellement qu'elles gaftoyent leur lid. Par
fois elles en cftoycnt tirées par les pieds , trainees aiFeis
loin,& tellement chatouillées par les plantes, qu'elles
en pafmoyêtderirc.On .arrachoitvne partie de la chair
à quelques vnes,aux autres on retournoits'cndeuât der-
licreles iaiïibes;les bras §ç la f^çç. Caciques \n^^ ai^iJJ
4 ^
i 48 Hijl&ires admirMes
tourmentées, vomifToyent grande quantircdeliqueuf
noirccomme ancre j c]uoi que auparauant elles n'cuf.
lent mangé lix fcpmaincs <iurant,que de ius de raifort?,
.sâspain.Ceftc liqueur cAoït fi amere & poignâte,qu'el-
le leur efleuoitia première peau de la bouche,& ne fça-
uoit-on leur faire Tau ce quelconque quipeuftles mettre
en appétit de prendre autre chof'e.Aucunes eftoyét efle-
uecs en Tair à la hauteur d'vn hôme,& tout foudain re-
iettees côtrc terre.Or come quelques vns de leurs amis,
iufques au nombre de ij.fultcnt entrez en ce Conuent
pourrefiouircellcsquisébloycnt foulagces& prefqucs
gueries,Ics vues tomberennn continent a lareuerfehors
delà table ou elles eftoycnt , fans pou uoir parler ni co-
noiftre perfonnejc s autres demeurèrent étendues co-
rne mortesjbrai & iambes renuerfees. Vne d'entre elles
fut fouleuee en TairA quoi que les afi^iftans s'efl-orçaf-
fent répefcberjôc y mifTent la main , toutesfois elle leur
eftoit arrach ee maugré eux,puis tellement reiettee con-
tre terre^qu'eilefembloit morte. Maisfe releuantpuis
apres; comme d'vn fomne profond , elle fortoit du refc-
^oir,n'ayn.nt aucun mal.Les vnes marchoyent furie dc-
uant des iâbes^côme fi elles n'euiîent point eu de pied'.,
& fembloit qu'on les trainaft par derrière, côme dedans
vn Tac deflié.Les autres grimpoyent au faifte des arbres,
comme des chats,& en defcendoyent à Taifejdu corps.Il
adueint aufli côme leur Abbefl'e parloir à madame Alar-
gucrite Contefl'e de Bure, qu'on lui pinça fort rudeméc
la cuifiejcomme i^\ k pièce en eu il cité emportée^, donc
elle s'efcria fort.Ponec incontinent en fon lid,la playe
fut veuè liuide & noue,dont toitesfois elle guérit. Ce-
lle bourreillerie de Nonnains dura trois ans à defcou-
uert,depuis on tint cela cache./. /'-v/Vr an /^diu. ihaf. 10.
Ce qui aduint iadis aux Nonnains de Brigitte ,en leur
conuentpresdeXante^conuient i ce que nous venons
de reciter,Maintenât elles trcflailloyent ou beelloyenc
côme brebis,ou faifoyent des cris horribles.Quelqucsfois
elles eftoyent poulfees hors de leurs chaires au teniplc>
ou là mefmes on leur actachoit la voile delfus la telle;6c
^ucl^ucsfois Icirr gauioa cftoii çeilciiiçai5 cftouppé.
^memoYiihles* 149
oa'impoflîble leur eftoit d'aualcr aucune viande. Celle
eilrangc calamité dura rcfpace de dix ans en cjuelques
vnes.Et difoir-on qu vnc icune Nonnain, efprifc de Ta-
inour d'vn ieurte homme,en eftoit caufcpouuce que fcs
parés le lui auoyent rcfufe en mariage. Et que le diable
prenant la forme de ce ieu ne homme s'eftoit monftré à
elle en fcs plus ardâtes chaleurs,& lui auoit confeillé de
fe rendre Nonnain,commc elle fit incontinent. Enfer-
mée au conuent elle deuint corne furieufc&mDnftra à
chacun des horribles & eftrangcs fpedacles. Ce mal fe
glifla comme vnepefteen plufîeurs autres Nonnains.
Ccfte première fequellirec s'abandonna à celui qui la
gardoit,& en euft x.enfans.Ainfi Satan dedans & dehors
le conuent fit Tes efforts deteftables;,^MWfyȕe/^ ^ ch,
l'ai entêdu que le diable tourmenta durant quelques
années les Nônains de Heflimot à Nieumeghe.Vn iour
il entra par vn tourbillon en leur dortoir , où il cômen-
ca vn ieu de luth & harpe lî mélodieux , que les pieds
fretilloyent aux Nonnains pourdanfcr. Puis ilprintU
forme d'vn chien, fe lançant au lia d'vne foupçonnee
coulpable du péché qu'elles nomment muec.Autres cas
eftranges y font aduenus, corne aufli en vn autre conuét
près de Cologne,enuirô l'an 15^0. le diable fe pourme-
noit en guife de chien , & fe cachant fous les robes des
Nonnam8,y faifoit des tours honteux & fales. Autant en
faifoit-il a Hensbergen la Duché de Cleues,fous figure
de chats.c/^« me^mc llure (<; chapitre*
Antoine Sucquet, cheualier de l'ordre de la toifon,
perfonnage de grande renutation par toute laFlâdrcSc
Confeiller au priué Conieil de Brabant , outre trois en-,
fanslegitimes^eut vn baftard;qui print fcnmie à Bruges^
IccUepeu après les nopces comme ça d'eitre miferabic-
ment tourmentée par le maHn efprit, tellement qu'en
quelque part qu'elle fuft , mefmes au milieu des damci-
&damoifelles, elle eftoit foudain emportée &trainee
parles châbres,& fouuentesfois iettee puis en vn coin,
puis en l'autrcquoi que ceux qui eftoyét presés tafchaî^
lent de la rctenir,& de l'épefcher. Mais en fes agitations
cUç n'eftoit pas beaucoup intcreilee en fon corps.Chacti
K --;
^p Hijleires admirables^
^pcnfoitque ccmal luicuîl cftéprocururépar vnegar-^
'4c,aiitrestois entretenue par fon mari,ieune homme de
Ibclle taille, gaillard &: difpoft. V.n ces entrefaites cllede-
^«int enccintc,& ne laifla refprit de la tourmenter. Le
'lermc de l'accouchement venu , il ne fe trouua qu'vne
'femme en fa conipagniejaquellc fut incontinent cnuo-
yee vers la fage femme & autres qui pouuoyentluifub-
fuenir en ccfte nccefîîté. Cependant il lui fut auis que
•celle garfejdont \:\i parlé,entroit dedans la châbre , &
lui ieiiioicdefa^e femme, dontlapauure damoifclle
'fut il cfpeiducque le cctur lui faïUit.Keuenue àfoi^cl-
'îe fe trouua dcfchargee de fon fardcau.-toutcsfois il-n'a-
yarut enfant quelconqucjdot chacun demeura elperdu.
le iourfuiuâcracGUchee trouua en fon rcfueilvn en-
"îant^emmaiilotté & couché dedans le lid:qu'elle allaita
•par deux fois. S'eRât peu après cnuormie^renfantluifuc
*pris de Tes coft e7.j& oncques depuis ne fut veu. Le bruic
courut que l'on auoit trouué en la ferrure de la porte
«quelques billets aucc descharaderes magiques. Celle
hiftoire m*a elle racontée par mon beau-frere, gétilhô-
me dode & \'ert!ieux,qui Tauoit apprinfe du mari , du
frercjdubcau-frcrc dcl'accouchec&de qlques autres
<jui l'auoyct vifitec en fa couche.LK'v/er .w J.//W/7.34.
Nous pouuons ici rapporter lesconuulfions mon-
îlrueurcs& innombrables nuenuesaux Nonnains du
conuentd.e Kcntorp en la Cote de la Marche presHâ-
monc.Vn peu deuantlcur accès 6: durant celui elles
poufToyétdelcur bouche vnc puante halainc,.qui con-
tinuoitpai fois quelques heures. En leur mal aucunes
jic laiifoycnt d'auoir i'entendemct fain,d'ouir & de re-
conoiftre ccuxqui eiloyent autour d'elles, encores qu'à
caufe des conuulfions de la langue & des parties feruâ-
tes à la refpiration, elles ne peufîent parler durant l'ac-
rcs-Orcftoyentlcs vues plus tourmentées queles au-
tresjSc quelques vues moins. Mais ceci leur dloit corn-
mun-qu'aulli toft que Tviie elloit tourmentee,au feuj
■bruir,lesa:itrcsrepareesen diuerfes chambres eiloyent
tourmcrccsaulh.Vne des plus anciénes de ce conuent,
',^§e<; 4espreniiçrçs,nômee Anne Lengon, m'a fait le-
récit detoutc rhiil^Mvc.Dcs qu'elle fe fcntit mal au cofté
gauche, & cfu'on eut opinion c|U cilcfull: attaiiKe à'epi^
Icpfie , elle fut enùoyce au monaftcre ào. ÎNonhertic: â
quoi elle condcicciidit par quelque deuotion , & après
auoir beu là, dedans le tefl de S.Corneille,le bruit cou-
rut qu'elle fe portoit beaucoup mieux que de coullumc:
ce qui fe rrouua tout au rebours. Car elle & les autres,
(en pire eftat que deuant, enuoycrcnt vers vn deuin ,1e-
quelleuc^t entendre qu'elles auoyentefté toutes em-»
poifonnces par leur cuifînierc , nommée Elfe Kamenfc.
Le diable empoignant celte occafîon commence à le^
tourmenter plus que deuant, qui pis futles indui/ît<k
s'entremordre , cncrebatre, & fe ietter par terre les vne»
les autres. Ce qu'elles faifoyent fans aucun mal, & aulït
aifémentquefî elles eufTentietté des plumes, tellement
qu'elles aperceuoyent bien que leur volonté n'eftoit cif
leur pilifTance. Qu^and on les ^mpefchoit de fraper oqi
faire autre violence, elles fe tourmétoyentgriefuement:
& Il tofl qu'onles laifioit faire, elles s'entremordoyent»
. fans toutesfpis fentir blefl'eure. Si Anne parloit en fort
accès, cela fcmbloit fe faire par le moyen de quelque au-
tre, qui tiroit & repouiîoit fon vent. Elle s'entendoie
bien parier ; mais, les paroles finies , elle ne ferefouue-^
noit nullement de ce qu'elle auoit dit > lî ce n'eftoic
qu'on lui repetaft; car lors elle fe rcmemoroitles auoio
prononcées : mais la honte faifoit qu'elle aimoit mieux
fe taire. Si quelquesfois elle fe mettoit en oraifon, fou-
dain elle eftoit troublée par le malin efprit : tellement
quelle ne pouuoit, comme elle euit bien voulu, atten-
tiuement pourfuiure fon propos, ni mouuoir fa lan-
gue. Mais s'ilauenoic qu'elle murmuraft , fansypen-i
fer, lc5 prières ou heures vulgairement nommées Ca-
noniques, tant s'en faut c|u'alors elle fe fentit empef-
çhee,que mefmes elle fcatoit allégement. Au refte^
elle demeura to ut hebctee, dellitucc defens , de difcre-
rion, & deiugemcnt:fi qu'elle ne peut onques penfcp
attentiuement à quelque chofpque cefuft. S'il aduc-
poitque quelque homme de bien deuot,& craionani:
Dieu, parlaft à elle , lors il fcmbloit que le (ïiable
fca puiii^, .{m fgnuairc ^ iî Ifis autres fci^jmt^
% 5 1 Hijloires admirdbUs
«icuifoycntaucccllc de menus afaires,& dechofescîo
néant, clic y prcnoicplaiiîr, & en cftoit allcgcc. De^
puis aulîljors qu'on rcxorcifoit , elle ictta grande quan-
tité de ling par la bouche, fans que pour l'heure il lui
en aduint autre irul. Or toutes ces Nonnamsainfi tour-
iTicntces,rcntoycnt vnc douleur, laquelle gaignoitinef-
galement depuis la plante de leurs pieds , qui leur fem-
'bloitellrebruflec d'eau chaude. Etencoresque toutes
fullentain/î cftrarigement affligées, fi n'en perdirent-
elles point Tappctit , &: ne laiOcrcnt de prendre nourri-
ture. Le diable pailoit rouuentesfois& beaucoup par la
bouche des ieunes , lefquelles auoyent Tefprit troublé,
aurqaelîes aufli il fc reprefentoit en forme de chat noir,
&:fouslaligurc d'Elfe Kamenfc, ou fous celle de fa mè-
re, ou bien celle de fon frère: tellement que toutes pen-
foycnt,mais faufl'ement , que ces perfonnes funTent caufe
dctelstourmcns. Anne s'eRant refoluc de ne plus re-.
tourner auConuentjduquelfesparenil'auoyent retirée,
mais deferuir à Dieu dcuotcment , &parvn iugement
beaucoup plus arreftc, cefte calamité lalaifiTa: toutesfois
il elle reccuoit feulement des lettres deTAbefle, elle
fentoit vnlTemifl'cmçnt par tout fon corps, comme ft
iii<^ bref elle euft deu retomber en ce premier mal. Peu
ce temps après elle fc maria, & oncqucspuis ne fercfen-^
titdccclVj calamité. Elle me racoiitoit aufl'i qu'Elfe
Kamcnfc efloit affligée de mefmc mal que les autres , à
f^auoir d'epilepfie , & que inefine quelqucsfois elle te-
jicit des propos fans raifon : qui fut caufe que les Non*
nains penferentqli'elle s'eftoit enforccUec > afin qu'on
ne la foupçonnail de mcsfait,tellement que toutes, tant
qu'elles citoyent , fe prenoycnt à cefte femante, que le
deuin leur auoir dit élire forcicre cefte pourc fille , tireo
en iuftice , confcfta pFcmiercmcnt qu'elle auoit efté
caufe de ce trifte fpeiftacle, excité par le moyen du mcr
flangc de quelques venins: toutesfois eftant au fupplice,
^ fur le poinft de mourir, elle protefta n'auoir onc vfé
4e poifoii:i , ains feulement prononcé par fois quelque?
n^audiftbns,
Ap.rç§ ^u'^Qacf;iK;Q;ççmcn: çftg bruilees, quel.
^U€i V^î
i
cf memorahles. X55
«juès vns des habîtans de Hammonc, bourgade prochai-
ne de là, commencèrent à eftre rourmentez du malin e-
fprit. Le palpeur de l'Eglife en appeila cinq en fon lo-
gis, afin de les inftruirc& fortifier contre lesimpoftu-
rcs deTennemi. Mais après auoir recité quelques arti-
cles de la créance des Chreftiens , ils commencèrent â
ic mocquer du Pafteur , & à nommer certaines femmes
du lieu, chez Icfquelles ils difoyent vouloir aller, mon-
tez lur des b6ucs,qui les y porteroyêt. Incontinent l'vn
d'eux fcinet à cheuauchon fur vnc fcabelie , s'efcriant
qu'il alloit& cilioit porté là. Vn autrefè mettant à crou-
pcton,re recourba du tout endeuant, puis fe roula vers
h porte de la chambre, par laquelle , foudainement ou-
ucrte,ilfe iétta, & tomba du haut en bas des degrez fans
îe faire mal. Au mefme tei^ïips , en vn village nommé
Houel , près la mefme bourgade , plufîeurs hommes fu-
rent encore tourmentez cruellement par ce malin cl^
prit. I. f^-vier au ^.Un.chA.U,
Les Nonnainsdu-Conuent de Nazareth à Cologne,
furent prefquc tourmentées côme celles de Kentorp. A-
yanseiîé par long efpaçe de temps tcmpeftees en diuer-
fes fortes par le diable , elles le fuient encore plus horri-
blcmêt l'an i^6^. Car elles eftoycnt couchées par terre>
ikrebraffees comme pour auoir compagnie d'homme:
Durant laquelle indignité leurs yeux dcmcuroyct clos,
qu'elles ouuroyent après honteufcmcnt, & comme /î
elles eufsét enduré quelque griefuc peine. Vne fort ieu-
pe fille, pommée Geitrudc,aagee de quatorze ans, la-
quelle auoitefté enfermée en ceConuent,ouurit la por-
te à tout ce malheur. Elle auoit fouuent efté tracaflce
de CCS folles apparitions en fon h<ft , donc Tes rifees fai-
foyent la preuue, quoi qu'elle eflayat parfois d'y remc-
dieT,mais en vain. Car ainfi qu'vne ficne compagne ^i^
foit en vne couchette , tout exprès pour la dcffcndre de
celle apparition , lapauurettccut frayeur entendant le
bruitquife faifoitau lidde Gcrtrudc , de lacjuelle le
diable print finalement poflcfiTion , & comença de Taf-
8iger par pluficurs fortes de conuullîons. En fon accès,
elle fcmbloit çommç aucuglcCp profcrant paroles trc5-
IH Bisioires admirables
erttanges, inconllaïucS; & (]ui tcndoycnt à dcfcrpoi'r,
i\utant en faifoycnr plu/icurs autres , & ^infî celle pclte
^aii^na périt à petit , &i s augmenta encore ù'auancagc,
«juandces pauurcs affligées commencèrent i recourir
auxrcmedes illégitimes. Or tandis que le diable les
tjourrclloit ainfi, aucunes d'elles furent faifies de pcilc,
^ tandis qu'elles en furent affligées , le malin efpdt ne
"îes tourmenta nullement , par vne iînguliercibonté de
Dicu,qui limite à Satan certaines bornes , lefquelles il
^cpcutoutre-pairer(tcrmoin Iob)en affligeât ceux que
Dieu lui liurcpour vn temps en ce mode. Lecômence-
^nét de toute celle calamité proccdoit de quelques ieu -
ncs homes desbauchez,qui ayans prinsaccointance par
^n ieu de paulme proche delà,auec vne ou deux de c es
SNonnains,eftoyct depuis montez par deflus les murail-
1cs,& auoycnt iouy de leurs amours. Mais ayans defifté
<îepuis, pourcc que les moyens leur en furent oftez , le
-tîiablc corrompit la phantafîc de ces miferables , & les
^traita comme a efté dit. /. K-v/er att ^Mu.chap.ii,
On peut mettre en ce rang vn autre Nonnaim du
Conuét de BollcduC;pres le temple de fainâ: lean Bap-
tifte, nommée Judith , laquelle i'ay vcu tourmentée du
diable par ellianges conuulfions : car il luifcrroit la
€;orge tellement, qu'elle ne pouuoit aualer aucune vian-
.•cle,&: lui tenoit aulfi la lâgue par fois en telle fort e, qu'il
i'épcfchoit de parler. D'autresfois ie lui ai oui proférer
^es propos ridicules & horribles. Padioufterai encorv-
*ie autre icune fille fcruante d'vne religieufe de noble
maifon.Vnpayfan lui auoit promis mariage : mais il s'a-
mouracha d'vnc autre:dontceil:e-ci fut tellemét contri-
ftee.,qa'cilât allée enuiron vne demielienë loin duCon^
ftient, elle rencotra le diable en forme d'vn icune hom-
me, lequel cômcnça à deuifer familièrement auec elle,
lui delcouurant tous les fecrets du payfanj & les propos
<ju'il auoit tenus à fa nouuelle amie ; & ce afin de faire
rombcr cefteieunc fille en deicfpoir,&; en rciolution de
s'eilrangler.Eftans paruenus près d'vn ruilleau, lui princ
l'huile qu'elle portoit, afin qu'elle paHall plus ailement
Ja ^I.khc ; i^ l'ir.uiu d'*iiki: çn i^T^Uii^ Iku tju'il nômoit:
^ memorahlcs. 155
^t qu'elle refura,clifant eue voulc/-vou<; que i'aille fai-
re parmi ces marefts & elKitîs? Alors il dirpariit, dôt la fi-
le coçeut tel cfTroy qu'elle tomba pafmeecft maiftreP-C,
en eftât auertic la fit rapporter au Côuent dedans, vne
liftiere.Là elletut malade,& comme tranfportee d'en-
tcndement,eftant agitée de façon eftrâge en Ton t'î'^nty
& par fois le plaignoit eftre miferablement tourmen-
tée du malin, qui vouloit l'ofter de là & l'emporter par
lafeneftre.Depuiselle fut mariée à ce payfan, & recou-
ura (a première fauté, l a n:?fme.
Il y auoit à Leuenfteet,village apartenant au Duc de
Brunfuicvne ieane fille nô.nee Marguerite Achels, aa-
^ee deio.ans,laquelle demcuroit auec fa fœur. Vn 2.
Jour de Iuin,voulâc nettoyer quelques foulicrs^elle prie
Tvn de fcs coufteaux^de demi-pied de lôgueur : & côme
elle côméçoit,airireen vn coin dechàbre>& encore tou-
te foible d'vne fieure qui l'auoit tenue lôgtemps , entra
foudain vne vieille, qui l'interrogua fi elle auoit encore
la fieure,& cômét elle fe portoit de fa. maladie , puis for-
tit hors fans dire mot. Apres que les fouliers curent efté
ncttoyezjccfte fille laifla tomber le coufteau en sô girô,
lequel depuis elle ne peut retrouuer,encores qu'elle le
cerchall diligemmét:ce qui l'efFroya, mais encores plus
quâdelle defcouurit vn chien noir couché deffous la
table,qu'clIcchafla,e(perâttrouuers6coufteau.Cechié
tout irrité comêce à lui monftrer les dcnts>& grondât fe
lance en rue,puis s'enfuit.Ilséblaincortinêtà cefte fille
qu'elle fentitie ne fçai quoi, qui lui defcendoit par der-
rière le lez du dos,c5me quelque humeur froide,& fou-
dain elle efuanouitjdemeurantainfi iufques au troificf.
me iour fuiuât,qu'elle commença a refpirer vnpetit,&
^ prêdrc quelque cho fe pour fe iuftanrer. Or eftant di-
ligemment interroguee delà caufedefon mal, elle réf.
pondit fçauoir certainemêt que le couReau tôbé en fon,
^çir5 eftoit entré dedans fon cofté gauche,& qu'en cefte
partie elle sêtoit douleur. Et encore quefes parenslui
tOrrediflentjd'autant qu'ils attribuoyét cefte indifpofitio
à vn humeur melancholique, & qu'elle refuoit i raifon
de la maladie, de fes longues abftincnces & aut res acci-
-^en^iineçcflVcUcpoiui; de perlîftcr en fçs plainiesj.
i^^ Hijloires admirables
larmes S: veilles continuelles, tellement qu'elle en a-
woit le cerueau troublé, &.cfloit quclquesfois Tclpace
<ic deux iours fans rien prcndrc,encores qu'on l'en priaft
par c{ouccur,&quelqucfoison la contraignoir par force.
Or auoit-elle Tes accès plus forts en vn temps qu'é Tau-
trctelleinent que Ton repos duroit peu, à raifon des con-
tinuelles douleurs qui la tourmcntoyent: tellement
qu'elle eftoit contrainte de fe tenir toute courbée
fur vn ballon. Et ce quiplus augmcntoit Ton an^oifle
6c diminuoitlbn allcgcmcnt , eftoit que véritablement
elle croyoït que le coufteau fuft en Çon corps , & qu'en
cela chacun lui contredifoit opiniaftremét^&lui propo-
foic rimpofllbilité, iugeant qu'elle auoit la phantalîe
troublée , attendu que rien n'apparoifl'oit qui pcuft les
"^induire à tel auis, fors Tes continucUeslarmes & plain-
tes, efquelles on la vid continuer l'efpace de quelques
i.nois,&iurquesàce qu'ilaparut au cofté gauche, va
peu au deffus delà râtelle, entre les deux dernières co-
lles que nous nommons faulfesjvne tumeur de la grof-
feur d'vn œuf,en forme de croifîant , laquelle acreut 8f
<iî mi nu a, félon que l'enflure aparut,& printfin. Alors
celle pauure malade leur dit, «ufqucsà prefent vous
n'auez voulu croire que le couftcau fuft en mon corps
rcaisvous verrez bien toft comme il cft fiche en mon
cofté.Ainfî le trcntiefme de luin^à fçauoir enuiron trei-
ze mois acomplis de cefte affiiclion, forritli grande a-
bondance de boue hors de Tvlçere , qui s'eftoit fait eri
ce cofté , que l'enflure vint à diminuer, & lors parut la
poinfteducoufteau, queiaiîlle defiroit arracher : tou-
tesfoiS elle en fut empefchee par Çits, parcns,lçfquels en-
uoycrent quérir le chirurgien duDuc Henri, qui pour
lors z^oit au chafteau de Vvolffbutel. Ce chirurgien
venu le qiratriefmeiour de Juillet pria le Curédecon-»
folcr, inftruire & acourager la fille, & de prendre garde
aufli;ïfcsrefponles, pour autant que chacun la repu-
toit démoniaque. Ellecondefcenditàeftre gouuerneç
parie chirurgien , non fans opinion que la mort fou-
daine s'en cnftjiuroit. Le Chirurgien voyant la poindg
à*^ couik-auoui fe moaftrou lous ics coftes, le tira
cf memorahlesl ij7
auec fes inftrumens : & fut trouuéfemblable à l'autre
qui eftoitrefté en la gaine, & fort vfé enuiron le milieu
du tranchant. Depuis Tvlcere fut guéri par le chirur-
gien » t>^« mefme liiire chapA/^.
Cardan efcrit qu'vn laboureur l'îen ami, homme de
bien, lui raconta que par longues années ilauoitefté
malade d'vne maladie inConue:pendant laquelle par le
moyen de quelques charmes , il auoitfouuentesfois vo-
mi du verre,dcs doux & des cheueux : & encores que
depuispar cemoyen ileuftefté guéri, que toutesfois
C\ fentoit-il en fon ventre vne grande quantité de verre
rompu , lequel faifoit vn bruit pareil à celui qui fe faiâ:
parplufîeurs pièces de verre rompu enfermées dedans
vn fac. Il adiouftoit que ce bruit le trauailloit fort , &
que de dixhuid en dixhuid: nuits furies iept heures,
encores qu'il n^obferuaft le nombre d'icelles, fî eft-ce
qu'il auoit fenti par refpace de dixhuidt ans , qu'il y a-
uoit qu'il en eftoit guéri , autant de coups en fon cœur,
comme il y auoit d'heures à fonner : ce qu'il enduroit,
non fans vn grand tourment. ,^u mefme Hure ch.tp.j»
Pour monftrer encor les entortillemens & rufes de
Satan, qui auec efficace d'erreur agite ceux que la iufti-
ce diuineluiliure, i*adioull:e vne autre hiiloire touchât:
vnieune enfant démoniaque, efcrite par le Docteur
Henri Colen de BoHeduc, à Auguftin Hunarus Doâ:eur
de Louuain le 5. iour de Mars 1574. comme s'enfuir. Va
ieune enfant de noftre ville prédit , que le raefchani:
& tyrannique complot des gueux du pays bas s'ea
va prendre fin. Nous craignons toutesfois que ce ne
foit vne fourbe du malin efprit : combien queperfonne
d'entre les hommes docles qui font pardeçà , n'en aie
peu encores rien defcouurir. Cert enfant crie & deman-
de qu'on prie Dieu continuellement & d^ bon cœur:
lui mcfmes tro'is heures du lour prie i bras eilendus. Il
a prédit mcrueillesdc noftre temps, & tout ce qu'il a
prédit eft aduenu, lans qu'il fe foit abufe en aucune cii-
conftance. Il ditauffique l'Ange Gabriel luiareuelé
que toutes ces tragédies de Flandres prendront fin, a-
liïtiit que U Jïigitic dç l'cftc prochain foit expires; que
i ^ 8 m (loir es admirables
le Roy d'Êfpagnc viendra es pays bas, & .ipaiTera toîi^
par trcs-hcurcux moycns.Il a prédit aufTi le moment de
temps de la prinfe de Midelbourgj& infinies autres cho-
fes auenues félon Tes predi«5i:ions. Moi indigne ay eflé
aiilli appelle pour examiner ce ieune enfant , & ay elle
tout eftonnc & raui de voir vn (î fîmple enfant, oui ne
fçait ni lire ni efcrirc,refporiire fî promptcméta toutes
demades.tc fouldrc les plus grades dîtficultez qu'on lui
euftfçcu propofer. Etpourcequc Satan fetransfiguc
en Ange de lumière, ie lui ay faid pîufîeurs & diuerfes
c|ueftions:mais tant s'en fautquc celbit vn Ange qui ait
horreur de la croix du Seigneur ou du nom de lefus:
qu'au contraire il t aprins vne pierre à ceft cnfant,côte-
nât en fiibftance ces mots.-O lelns de Nazareth , qui as
efté crucifié pour nous,aye pitié de nous , fubuien aux
pourespecheurs,afin que nous retournions a la foi. I,
V'-ijler eiH i.U.ch.io.oii il adioufte cefte cenfure.L'cuene-
metcôtvaire a môftré que ceft enfant eftoitpolTedé du
diable;,qui parloit&prognoftiquoit paria bouche d'ice-
lui. Car les troubles de Flandres n'ont pas prins fin l'c-
llé iuiuât ni trois ans(difons,nivingtcinq ans) après, &
n'cftoitni n'eft nouuelle delà venue du Roid'Efpagne
cspayS'bas.Aucotraire il y elt furuenu dcschangemés,
efquclslesdo<ftcursde Louuaia& leurs compagnons
perdent leur latin. Or Tefprit ce Dieu ne peut errer ni
faillir au moindre point du môde.Parainiîrô peutvoir
qui eft ce GabrieLqui a peu annôcer le momêt du têps
de la redditiô de Midelbourg tn Zelandc , à fcauoir le
<liable,qui pour cftre efprit , en vn inftant ic ainfportc
de lieu en autre,à caufc de fa viftefl'cincomprehen/îble.
Lemefme a incité ce ieune enfant aux prières fufmen-
tionnees,afin de donner couleur à fes impoftures & fauf.
fête/.. Ainfia-ilacouftume de méfier la vérité auecle
menfonge.Cc que le Doîleur Colen peut recohoiftre,ft
d'auanturcil eft encores en vie,en ce commencement
dunouueau fieclc i^oo. S'il eft hors du mondeji'en
laifl'e la decifîon à fes compagnons.
L'an T^P4.au Marquifat de Brandebourg furent vcus
|)lus-de huiâ vingts perfonnes demoniaqucspc^ui profe-
ïcrit
t^ wemorahlesl ij5i
:6ïioyent chofcsefmcrueiilables, conoifîbyent & noni-i
hioycntccux quils n'auoycnt jamais veiis : entre ces
perfonnes on en remarquoit qui long téps auparauanc
eftoycnt décédez, lefquels chemin oyét , criant qu'on fê
repétift>& qu'on quittaft lei dilTolutionsen habits, &e,
denonçoyétle lugcment de Dieu , auouans qu'illeure-
ftoit commandé aeparle fouuerain de publier, mau^é
bon grc qu'ils en cuirent, qu'on s'amêdaft, & qu'ain/iles
pécheurs fulTent ramenez au droit chemin. Ces demc
niaqucs faifoyentrage par où ils pafloycntjVomifToyenc
vne infinité d'outrages contre les pafteurs de rE^life^ ne
parloycntquc d^appr.ritions de bons& mauui^s Angesj,
le diablele monftroitfous diucrfes fembIances:lors que
le fermon fe faifoit au temple j il voloit en Tair auec
grand fiffl[emêt,& par fois crioit Hui,hui :femant parles
places des efguillcttesj de pièces de mônoye d'or & d'ar-
gent, laques H orft Docicur Médecin en fen H ijioire delà dent
d'or de tenfunt Sileften. Adiouflons ce qu'en reprefcntc
aufli vn certainFrifon^en Ton recueil d'Hiftoircs intitulé
JKlcrcmiin Gallobel^:cui,cnVa.n 15^4. en ces mots; le veux
clorre ce diicours par les paroles de laques Coler Do-
âeur'& Frefcheur au MarquifatdeBrandebourgjqui en.
ipubLic vn cÇcm en Aleman. Apres auoir exhorté les
Alcmans de quitter toutes diilolutions^exces & dcsbau-
ches,en habits principalement:puis tous luremens, exe-
crati6s,imprecations,finalementil condâne &dctejfte U
mefchante couftume de fon pays ; où quand quclqu'vii
veut maintenir que ceci ou cela eft véritable , il dit in-
continent, Si ainli n'eÛ, que tel & tel diable m'emporte.
Quand on veut ibuhaiter mal à quclqu'vn c'eilàprier
que plufieurs pipes de diables puiffent lui entrer au ven-
tre, & y demeurer (î bien clos,que nul n'en puilTe fortir.
De là vient (dit-il) que l'on entend maintenant à Span-
davv,d Friberg, & autres villes du Marquifat de Brande-
bourg,les diables s'efcrier. Vous nous auez appeliez de-
puis vn téps,forcenous aeftc de venir,nous voici. Vous
ii'auez tenu conte de vos fupcrieurs, &: vous nous obéi-
rez, vueillezou non.Nous vous prcfcherons l'amende-
»ient d^-viçj quoi que contre goitre gré. Coinmç
î/S'o Hijloires admirables
le malin crpric vouloir faire noyer vue fille de Sçtti^
davvjl.iquclle ilpoiTcdoic, & quelques gens de Bieîi
s y opporafieiit , allcguans i'hifloire des Gadareniens,es
pourceaux defqucls les diables n'auoyent peu entrer
que parla licence & pcrmifîion de IcfusChriil : le dia-
ble cftendant les doigts commence à dire, Vouseftc?
CCS pourceaux là puis que vous ne cclfez de gourman-
de: & d'yurongner, vous ci^cs en ma puifîance. Les au-
fies enquis , pourquoi ils tourmentoyent ainlî les créa-
tures de Dieu, rcfpoildoyent , Le Souuerainle nous
commande.Vous ne voule? ercouter,obcyr,croire,prier:
pourtant Ibmmes nous vos bourreaux. Ce nousell pci-
îic & douleur d'cftrc contraints de vous parler de chan-
£;ement de vos mefchaiiccte?.. Le Dofleur Horft mon-
îire par diuerfes rnifons que cefte reiurreclion de morts
fufmcntionnee ell diabolique , & telle que l'apparition
d'vn f^ujx Samuel eu oqué parla Necromantiennc men-
tionnée en rhiftoire fainCte : & en tout le refte , piouuc
qu'en tout ce fait Tondefcouure rimpofture& fureur
Je Satan execureur redoutable dc3 iuftes iugemens de
Dieu.
DENT D'OR enkhcnched'vn
ieune enfant de Sile fie,
VN payfan nommé lean Muller charpentier & muf-
nier de Ton eftat,demeurant à VVeigeldorff, villa-
ge deSilcfie, apartcnant a vn gcntil-hôme nommé Fri-
dcricde Geihorn , fouslarouucraincté de l'Empereur,
print à femme vne nommée Hcdvvigk, d'Enderfdorfi",
village en la Duché de Brcflavv aumefme pays. Ces
deux mariez viuans honell:en>ent & fans reproche en
leur bafle condition eurent vn lîls qui leur nafquit le
aa. iour de Décembre 1585. fut baptife quatre iours a-
pres,nommé Chriftoflcfoigneufemcnt cHcué, puis l'an
i^pj.enuoyé à l'efcbole du village auec les autres en-
fans, Vnpcu deuanc Pafques^ çciuùje filiq 4cic<)uure
ér?nemorahlesl i^i
<ju'à ce ieune enfanc aparoilToit la dernière <iétmafchc%
liere du cofté gauchcjd'or affez luifant : piufîeurs autres
incontinent vnent le mefme. Soudain le bruit de cela
s'efpand de telle forte , ciuclcs Ducs deSilefîe , de l.i-'
gjuts, de Brige, de Munllerbevg, &:c. piufîeurs gentils-
hommes & citadins le firent apporter ceft enfant pour
le voir. Entre autres^monfieur André.KuefoucdelNifre,
grand gouuerneur de Silelicde fît venir exprcz vers lui ^
Niffe, & par les chirurgiens fit artentiuemér côfîdtrer la
forcera matiere,torme & difpofîtion de cefte dent. L'aii
1594. au mois de Septembre cilantallé en Silelie pour
vendre quelque maifon que l'auois à Sueidniz , & m'e-
ftant arrefté a Reihcnb;?cJi, ville dillantedvne heure de
cheminloinde VvcigeldcrfF, l'obtins aifement de Fri-
deric de Gellion , duquel ie medicamentoisle fîls niaia»
de , que ceft enfant me fuft amené par fa mère au logis
de Melchior Horft notaire mon parent,oii auec les prin-'
cipaux du lieu , ie rcgr.rdai vn matin , deuantle djfné,
bien attentiuemét par deux fois^ccfte dent d'or de Chri-
ilotîe.aeren-' poigne de mes doigts,ie la touche ScremuiS
de cofté & d'autre: mais iela trouue ferme & immobile.
Lui ayant fiiit ouurir la bouche, ie voy Tor luifantd'i-
celie dent;,qui eftoit la dernière mafcheliere ;, en la maf^
choire d'embss du coftë gauche , eitant vn peu plus ef^
paifTc que les autres maichelieres, mcis de mefme forme
6: hauteur que les autres, ayant la genciue entière , mol-
lc;rouge,& tellcqu ilconuient. le remarque aufJVqu'en
ce temps l'enfant aagc de huid ans auoit toutes fes ^cts,
excepté la mafchjeiicre proche de cellcd'or j, qui par ce
moyen pavoiiroit encore mieux par vne fpeciale proui-
dcncedeDicu. Sur ce, eftant en doute, s'.'l mcfchoitdc
celle dent, comme des autres, ie priay mon hoftc de fai-
re difner la mère & l'enfant. Ils n'auoyent pas atheué,
queie r'appelleles principaux delà viiie ôcenleurpre-
fcncei'ouurc: la bouche à l'enfant, & trouue encore dd
la viande mafchee (ur ceft.e dent d'or. leluifailorslauer
la bouche auec eau pure, &d'vne pierre de touche le
irottcla dent, & trouue quel'.r approchoitdu carat de
ççlui de Hongrie. Au refte^ceft enfajjceiè de complexée».
r.
16 z Hijlûtres admirables
chaude & feichcle corps grcHcdc belle taille, de vif cC
prit, paifîblc & forttraitable, ftudieux mcrueillcufc-
rient :&falutquc ic lui donnaflc deux liurcs qu'il nie
demanda. I. Uorfi y Doîkur Alcdccimcn fou dtfcours hijhn-
qiic ^ Philofophiqttede U dsnt d^or de Voifint Silejten,
DES ESPEREZ.
VN dercfpere de noftre temps difoit en mourant(cn-
tre beaucoup d'autres difcours horribles ) qu'il euli
dcfia V oulu eftre en enfer. Et enquis de la caufc d'vn ii
mcfchant deiir : pource (dit-il) que rapprchcniîon des
tourmens q*ii m'y attendent, me font de celle heure-
xn double enfer:quand ie ks fentirai du tout,ie n'atten-
drai plus rien, l'ay ouy vn autre defefperé,lequel ellant
ïemonftré& exhorté de feconueitir de latrop viueap-
rehenfion duiugementde Dieu à la mifcricorde, qui
ui eftoit fort amplitiecrefpondoitfort froidemét, vous
<iites vray, Dieu eft Dieu,mais de les enfans , non pas de
moi : fa mifericorde eft certaine , mais à Ces elleus, & ie
fuis reprouué , icfuis vaifleau d'ire & de maledidiion , &
défia ie fens le tourment des enfers. Quand on Texhor-
toit d'appeller Dieu fon père, & lefus fon Sauueur , ma
bouche le prononce(diloir-il)mais mon cœur en a hor-
reur, le croy bien qu'il Teft des autres,mais non pas de
moi. Quand on lui reprefentoit qu'il auoit leconu
DicUjOui fa parole? communiqué aux facremens : il rel-
pondoit, Oui,maisi'eftois(adioull:oitil) vn hypocrite,
coulpable de beaucoup de blalphemcs contre Dieu.
Puis retournoir a fcn ordinaire , le fuis vaifleau préparé
à ire & damnation : ic fuis damné, ie brufle. H. Belon ait
threfor de famé Chreftiewje,
Vn dofte perfonnage à Louuain nommé M.Gucrlach
ayant efté auancé tellement à l'cfrude qu'il elloit des
premiers entre lesfç'-uâs de noftre temps , atteint d'vne
gnefue maladie, neeclfoitdc foufpirer, & fe fentanc
près de fa fin, commença à defcouurir le fond de ï^ç:^
roufpirs, dil;yitdesparoWefpouuancablç$ , que gens
d^fcfi
cf memora Mésl i6j
cîererpcrez ont acouilumé de proférer :& continuant de
s'ercricr& lamenter qu'il auoit mal-hcureulemcnt vef.
eu, qu^ilnc pouuoit foulicnir le iugcment de Dieu:
d'autant qu'il conoifloit Tes péchez eftrc R graiid>,que
iamais il ne pourroit en obtenir pardon : de forte qu'ea
celle deftrcfTc il mourut accablé d'vn horrible defc-
fpok.HJenoftre temps.
M.ArnoulBomcl, perfonnage dofte au mefinelieirV
s'eilant laifle imprimer au cerueau par certain Sophiftca
des opinions cllrangcs touchant noikefalut, commen-
ça à deuenir comme farouche & hebeté. Vn iour eftanc
forti de Louuainjauec trois cicholiers , comme pour fa
|>romener , fur le retour en la ville s'affit auprès dVnc
fontaine,feignâtferepofer. Les efcholiers alloyent va
peu deuant fans fe douter de lien.Cepêdant Bomel teic
fecrettement vn ûen petit co ufteau , & s'en frappe bien
àuantdansIapoidrinc.D'aucrepartlescfchohersretour-"
nans vers lui aperceurent qu'il felaifloit cheoir,& acou-
rans virent la fontaine rouge de fang.Ils s'approchent»
tout efFray ez:ie regardent par tout le corps,& defcouurâs
laplaycl'emmenentau mieux qu'il leur fut poflible en
vne maifon prochaine:& doutans fî laplaye efioitmor-
tellc,rexhorroycnt à crier merci à Dieu , de ce qu'il a-
uoit ainfi forfait à foi-mefmc.Il monftroit (ce leur fem-
bloit)quelque/ïgnedc deplaiiîr, tant par contenance
extérieure;, que par quelques mots prononcez de voix
ianguiffante. Mais fur ces entrefaitcs:,apcrceuant vn cou-.
ilcau qui p-cndoit en la ceinture de Tvn de ces trois ef.
cholicrsjil s'en faifît de villeife, & s'en donne Ci ferme
iufques au cœur, qu'il expira fur le champ. La mefme.
M.Iaques Latomus,rvn des principaux do<ftcurs ds
TAcademie de Louuain, ayant en vn femion dcuanc
l'Empereur Charles le Quint perdu toute parole Se
CDnucnablea<fcion,s'en retournant honteux & confus
de Bruxelles à Louuain,toit après entre en telle appjrc-
henfion de ce deshonncur,qu'il tomba en defefpoir,dôt
il rendit plufîeurs tefmoignages en public: cequiin-
i^i^i fcs compagnons à ie fee ter^r fermé de<iaH^
I. i
1^4 mjloires admirables
fa maifon. Depuis ce temps iniques au dernier roufpli
«k^favicilcpauure Latomus ne tcnoit autre propos, /î-
Bon qu'il clloit rcicttc de Dieu, qu'il eftoit damné,qu'il
n'efperoit plus aucun falut, ni pardon^ comme ayant de
certaine malice bataille contre la grâce & vérité de-
Dieu. 11 mourut en fe defefpoir , & ne fut pofliblc ni aux
Medecnis du corps m à les amis de lui faire changer d'a-
Sur la hn de l'an T548.fetrouua en vnevillettc du ter-
ritoire de Padouè" , nommée Ciuitelle , vn do«fle luriC-
confulteSc Aduocatjhommefngejriche honorable perc
de famille, nommé Francifque Spicra lequel ayant dit
& fait contre fa confciencediuerfcschofespour mainte-
nir foi & les fîcns au monde, eftant de retour en fa mai-
fon ne peut oncques repofer vne feule hcure,non pas v-
ne feule minute de temps,nifentir aucun allégement de
rançoifie qu'il auoit en fon cfprit. Et mefmes des cefte
iiuiS:-la,il fut tellement eftôné, &eut fî grande horreur
de fon fait,qu'il fc tint pour perdu. Car ( ain/î que lui
mefnie confcfla puisaprcs)il voyoit clairement deuanc
Tes yeux tous les tourmens, toutes les peines àcs enfers
& desd.âncz, & oyoit desfentences redoutables en foa
amc jtiré deuant le fîege iudicial de lefus Chrifl.Le len-
demain & les ioursfuiunnsjilfut impoffibledele voir re-
prendre courage ou rcfpit:au contraire fon efprit cftoic
ellrangcmcntagitCj&la terreur qui renuironnoit,luio-
ôoit aufli le repas & le repos. C'eiUnconucnient fut fî
grief à tous fes amis & domeftiqucs, qu'aucuns fe re-
pentoyenr grandement d'auoir cllécaufce d'vn C\ gràd
mal par leurs prières &c6fcils. Lcsautresj,eftimans ce-
la procéder de quelque humeur cholérique ou melan-
choliquc, (dont les cffefts font ellrangcs fouuentesfois
cscerueaux qui en font trop rudcir.ent atteints) furent
d'auis de l'enuoycr à Padouc,pour y eftre medicamérë
par les do(fles Médecins, refîouy &redrelVé par les Ho-
norables compagnies & cômunications des gens fçauâs
qui y eiloyent,& d'aucuns defquels il eftoit conu. Sa
femme, fes cnfans,& quelques plus familiers amis l'y a-.
t6pagnerçtp& futlogé ea vu.ç dcspriocipalcsmaifons.
cf mémorables. k^j
FiiTimilega,Bclloquat, &Craflus renommez & cxcel-
Icns mcdccins,le vilitereiit & traitcerent de fîngulierc
aftcélion : &conurentbien toft qu'il n'eftoit comme
point malade au corps,mais griefucmêc en l'ameicar en
toutes autres chofes & propos ilparloit & iugeoic gra-
iicmentôc conftamment en forte que nul de fesgius fa-
miliers ne pouuoit conoiftrc que la viuacité du dif^
cours fut diminuée en lur, ou que fa raifon fut afoiblie
en forte quelconque. Perfcuerantdonc en fon angoif^
fe continuelle ,plufîeurs en furent grandemêt efmeus,
& tous les iours fa chambre cftoit pleine de gens, les
vns curieux de voir &d'ouir, les autres ( mais en petit
nôbre)dc/îreuxdeleredreller en bon efpoir de la mi-
fericorde de Dieu Je fusprefent à pluficurs de cespro*
posjauec quelques homes d'hôneur & doftes. Pour dire
cequeiepeuxyremarquerriecômençaipremiereméta
côfiderer fon aage,& toute fa façon. Il eftoit d'enuiron
jo.ans,eflongnédcs bouillons &eflansdeieunefl*e;, &
du refroidiflement de vieillefTe. Rien nefortoitde fa
bouche quifuft dit legeremeiU,ou fottement, ne qui
defcouuriftaucûfigne derefuerie enlui;quoiquetous
les iours il deuifail de chofes graues& importantes a^
uec lesdodes,& qu'aucuns propofalfent des queftions
hautes;fur tout en Theologie.Ie reciteraribriefuement
quelques vns des propos qu'on eut auec lui , durant
fon feiourà Padoue:& n'oublierai ceilui-ci,qu'ildecla-i
roit de fcns raffis qu'il voyoit la vengeance de Dieu e-
ternelapareillee manifellement contre le péché qu'il
auoit commis.D'autant qu'il fentoit bien en foi que les
chofes que Dieu a données aux autres, pourre/îouir
leurs efprits,& pour bien &heureufement viure,auoyét
toutes confpiré contreluien defpit de fon forfait exe-
crablc.Car combien (difoit-il) que Dieu pourvn grand
bénéfice euft promis à plufîcurs fainds perfonnages
belle lignée & grand nombre d'enfans,en l'amour Se o-
beifl'ancedefquelsils peufibnt ferepofer en vieillefle,
& qu'il n'y euft rien de plus doux que ce bien en la vie
prcfente:toutesfois au milieu de ces maux jles mains 8c
les faces 4c ces enfanslui e^ftoyejit auflî horribles c^uç
J- 3
^^6 Hijloirs admirables
celles desbourreaux. On ne fç.iuroit bonnement cxpri*
mer combien d'angoifrc & fafcheric il monftroit rece-
noir quand fcs cnfans lui aportoyent à manger , le fai-
fant aualcr par force la viandc,& le menaçant lors qu'il
la rcfufoit.Il côfefioit que ces cnfans faifoyent leur de-
tioir:&: neantmoins prcnoit le tout en mauuaifcpartjdi-
fant qu'il ne recQiioiiroit plus Dieu pour père , ains le
ledourant corne aducrfaircarmé de vcngeance.Caril a-
iioit eflé trois fcmnines en ccftcapprehcnfîon,quandil
tlifoit CCS chofcs.fhns rien boire m mâger,{;non ce qu'ô
luifailbir entrer à force par la bouchc,& qu'il prenoit
r. grande difficulté, y rcfiftant de tout l'on pouuoir , re-
iettât & crachant ce qu'on le cÔtraignoit de prédr-cAu-
eus des afiiitaps furent d'auis de lui faire peur, pour le
difpofer mieux à rcceuoir pafture à l'ame premieremêt,
puis au corps:& lui demandèrent s'il craignoit point de
plus arpres'& plus grands tourmens après cefte vie,que
ceux qu'il fcntoit lors^Il confefl'a qu'il en attendoitde
"beaucoup plus arpres,& les auoit dcfia en horreur : tou-
tesfois qu'il ne fcuhaitoit rien tant que d'y eftre fi-
Tialemétprecipité,aHn de ne plus craindre d'autres plus
griefs tounnés. On lui demâda cncores.s'il cftimoit que
îbn péché fuft fi cnovnic, qu'il ne pcuft eftre pardonné
par la mifcricorde t< bonté infinie de Dieu? Sarefponfc
fut qu'il auoit peçhé connc le S. Efpritipeché \\ grand,
*]u'il eft appelle pechc à la morr.c'eft à direailrint à la
vengeance éternelle Je Dicuj& aux peines d'enfer. De
cfuoi ce paiiurc mal-henreux dî(couro;tamplement,di-^
5crtement,6i: trop fubtjlcment contre foy-mefine. Les
hommes dodes & craignans Dieu, qui lui afllftoyent
?ie iaifTerr.nttelmoignaee aucun en arrière, dont l'on
puifrealfcarcr vne conicience eitonncc, que Dieu eft
mircricordieuxjbcnin , prompt & affcdionné à pardon-
ner. Mais ces tcfmoignagcs ne pouuoycnt le diuertit
<ie Ion opinion : & n'eftoit pofîlble arracher autre cho-,
fc de îuijfinon qu'il voudroir bien & defiroit fort pou-
noir retournera quelque efperancedepardon. Mais il
m'en prend (difoit-iljcomme aux criminels enclos ea
prifon bien fçrrçe, enferrez de fortes chainespar \i:s
drmemorahles, 16*7
jjîeds &: les mains. Qu^elquesfois ils font falfiez p^r
leurs amis pafTanS;, qui les admonelleiic de rompre leurs
fers s'ils peuuciit, & dé tromper leurs gardes pour fc fau-
uer. Telsprifonniers dcfîreroyent fuiure ce confcihmais
c'eil; vn vain defîr. Aufli eft le mien, difoit-il. Qu^anr aux
paiîages,qui lui cftoyent alléguez, touchant l'adedioa
miiericordieufe de Dieu le Père à caufe de fon fils le-
fus-Chrirt^il les auouoic, adiouftat qu'iceux apartenoyêt
feulement a ceux que lefus Chrift reputoit Tes frères
&. mcmbres:mais quant à lui , qu'il auoit renoncé ccfte
amitié, & de fon propre gré reietté toute alliance frater-
liclle:& qu'il n'ignoroit point en combien grande tran-
quilité & repos d'efprit pouuoyent eftre ceux qui auoy-
ent vne fois cmbraffé les promefTes de falut, & fc repo-
foyentincefTammentenicellcs. Pour confirmation de-
^uoy ce trifle fien inconueniêt (di (oit-il) eftoit propofc
pour exemple deuant les yeux de tous:ques'ilscftoycnt
fagcsilsne deuoyent eftimer cclacliofe légère ou fui-
uenueàrauanturemiaisaprendrecn fa ruine, quel dan-
ger il y a de fe dclliourner tant peu que ce fdit de ce qui
aparticnt à la gloire du fils de Dieu. Adiouftant que c'ç-
ftoit vn paffage dangereux & gliifant , voire tref-redou-
rable à quiconque ne feroit foignçufement fur fes gar-*
des. Outre-plus, d'autant que tels euidens exemples
de la vengeance de Dicufcprefentoyent rarement aux
yeux des hommes, d'autant plus attentiuement meii-
toyent-ils d'eftre confîderez. Qu'au milieu de ce grand
nombre de reprouuezau monde, fa calamité n'eftoic
point particulière ;ains que la punition & ruine de lui
feul fuffifoit i Dieu, iufte iuge , pour aduertir tous Içs
autres depenfer à eux.Il adiouiloit ençrorc, qu'en cela il
reconoifloitia feuerité du iugement de Dieu,lequel l'a-
uoitchoifî pour le produire en fpeélacle pluftoft quq
quelque autre : afin de dire à tous par la voix d'vn qu'ils
s'abftinfcnt de toute impiété, confefiant en outre qu'il
n'y auoit opprobre ni fupplice qu'il n'euft bien mérité,
3 caufe de sô forfait fi énorme. Apres auoir fur ce poin6t
«lifcouru fincerement& crânement delà iuftice diui"
;}C^iI dit ençprcp (^u'ilnp iaiiloit pas ciouuer cilrafigç ^
€(d^ Hijloires admirables
long propos fîcn , touchant la vraye raifon cîc la volon-
té de Dieu; veu cjuc bien Ibuucnt Dieu a celle couftu-
me d'arracher de la bouche des rcprouuez des tcfmoi-
gnages tres-veritablcsde fa Maiefté , de fa iufticc, de fa
vengeance redoutable: comme on void en ludascon-
feflantfon propre peché,S<:iuftifiant Ton maiftre. Tenâc
plufieiiH'» propos fur cefte rcntcnce,& voulant monftrer
qu el abyline c'edoit que des iugemens de Dieu : il y en
a (diroit-il)aurqucls toutes chofes viencnt tellcmenc
à fouhait qu'ils vjuent en toutes délices, fans crainte ni
aprehcnnon d'aucun mal, comme parucnus au comble
de toute félicite : qui toutes-fois font enrôliez à perdi-
tion,dontIcfus-Chrill propofe l'image en ce riche iou-
ilTant de tousplaifîrs à cœur faoul au monde, & après fa
• mort fe trouuant tourmenté en enfer : comme il en eft
parlé aufeiziefme diapitre de l'Euangile félon fainft
Luc. Que Dieu propofe fouuentvnc efperâce de loyers
au genre humain, pour l'attirer à la droicle croyance de
fa fainde volonré:bien fouuent aufll il vient le deftour-
ner d'impiété par prodiges &: fîgnes efpouuantablcs. Et
toutcsfois comme l'impiété eft naturelle aux hommes,
ils ne font point leur profit de telles inftrudions, & ne
penfent point que cela les touche : au contraire le rap-
portent à toute autre chofc qu'à la fageffe de Dicw,
pour le craindre &reueicr.Sur ce propos ilfit vne afpre
inuedhuc; contre vn certain philofophe, lequclilauoit
conu plus de vingt ans auparauant , en ccque cemoro-
fophe auoit efté C\ iinpudentde dire en fes leçons,voire
cfcrire, & publier par îiures imprimez , que tous les mi-
racles que lefus-Chrift auoit faifts en terre , pourroyeiit
bien auffi eftre îàhs par vn homme qui feroit fçauant
€s chofes naturelle:;.
Il feroit mal-aifc de reprefenter l'esbahiflementdonc
cftoyentfurpri^, & de quelle compaflion fe trouuoyent!*
efmcus ceux qui venoyent le vi/îter, pour les propos
qu'ils entendoyent de fi bouche. Chacun s'efForçoitde
franche atîedion à remcncr ce pauurc homme à quel- -j
que fiance de fon falur. Entre tous autres , s'en
trouua yn ; perfonnagc vcneiabk pour la famftc-
té da
(jr memorahles. i^^9
té de vie, lequel ne bougeoir prekjue du Uà du ma-
lade. IceluicftoitEuelquede Capod'Iftria , furies
terres de Venicierrs. Il ne cefToit d'exhorter Spicra^
&parfrequens tefmoignagcs de rEfcnture fainde cf-
fayoitledeftourncrdcfonapprchenhon : le fuppliant
parleur amitié, par fa chanté enuers fa femme & fes
cnfans,& autant que fon falut lui dcuoit eftrc preciciiX;,
qu'il euft efgard à foy-mefme , qu'il imprimai!: en
l'on cœur l'efperance & la fiance de falut par lefus-
Chrift. Adiouftant qu'il ne lui fembloit pas que fon
efpfitfuft du tout vuide & deftitué de quelque bonne
& celefte infpiration , veu qu'il parloit fi faindement
& dcuotement de l'excellence de la rehgion Chrcitieii-
ne. Or combien que le mahide conufl que ces re-
monftrances procédaient dVn cœur fîncere & entier:
toutesfoispource qu'il les auoit purauant & à diuerfcs
fois rebutées , il commence à ce renfroigner, & dit
i l'Euefque : Vous croyez , comme iepenfe, queie
nourrifle de mon propre gré celle obllination en mon
tfpiit, &queieprene plaifircn cefte véhémente paf.
fîon de defefpoir. Si vous en elles là logé , ceft abus.
le vous dirai feulement ( afin que vous fçachiez où l'en
fuis) que /îiepouuoisme pcrfuadcr que le ingénient
deDieupeullpar quelque moyen ertrc changé oua-
douci en moi, il me defplairoit d'cftre tourmenté dix
mille ans entiers des plus afpres peines d'enfer, afin
.que quelque efperance de repos m'aparufl au bout de
ce long terme. Mais en cela niefmepar le moyen dc-
quoyvous m'exhortez de cueilHr quelque efperance,
ie voi que toute attéte de falut & de pardon m'cll oilec.
Car fi les tcfmoignagcs de l'Efcriture fainâ:c ont quel-
que authorité ( comme ils ont) pcnfcz-vous que Icfus-
Chnltaitditenvain, Qifil renoncera deuanr fon Pcre
celui qui l'aura renoncé dcuant les hommes ? Voyez<^
vous pas que cela m'apartient , & qu'il cft comme parti-
culièrement vérifié en ma perfonne ? Qu'auicndra-il i
celui que le Fils aura defauoué deuant le Père , quand
Vous dites qu'il ne faut efpcrer falut finon en Tefusr
Chrilt?ll cxpofa la deffus quelques paflages de rcpiiUc.
^7^ Hijloires admirables
aux Hebricux , & delà féconde epillrc Catholique de
lai n 61 Pj erre, defqucls il tiroic des terribles cbnclu/Ions
contre foi-mefine. On ne fçauroit croire de quelle
'£rauitc& vehcmcnccfa parole elloit acompa^nee : &
n'ouyt-on lamais homme mieux plaidant pour foi,
*:|ue Spicra fit lors contre foi. Ilalleguoit chofes tre.s-
iiotableçdclaiurticede Dieu, dcteilant fa vie pallcc:
admoncftant fort exprès tous ceux de la compagnie de
*ie penfcr point que la vie Chrefticnne fuft chofc legc-
îe & de petit acquit. Que ce qui fe rapporte à icelle^^c
confiftc point en auoirla tefte baptifce , lire des verfets
& du texte de TEuangilc, &s'appeller homme debien:
fnais qu'il eiloit befoinde viure ielon queladodrine
ide vérité le commande. Sur ce il recita vn paflage ds
ïaind Pierre,nouv exhortant à monftrer par faindeté de
^ie des fîgnes certains de la bien-vucillancc de Dieu en-
tiers nous, & de la confiance que nous deuons auoir eji
îui. Difoiten outre auoir vcu plufîeurs, qui après auoir
f;oufté les douceurs de la vrayc vérité , fe laifloyent tel-
emcnt aller qu'il ne leur chaloit plus de faire ce qui eil
f^\x deuoir dVn enfant de Dieu. Proteftoit auoir elle
-«^uelquesfois en ccfte pcnfee , que Tes péchez efloyent
sachez, & qu'il n'en pourroiteiîre puni : pourceque
Chrill: auoit fatisfaiï pour iceux : mais pour lors il co-
ïioiiîoit trop uird que ces chofes apartenoycnt aux c-
ïîeus de Dieu, encre les péchez dclqucls &: le thronc ce^
icllc , Icfus Chriit met fon fang précieux & la dignité
<ie fon obciiTance, comme vn voile p our les cacher : &
les plantes à la rencontre de la vengeance diuine,ainfî
quVn haut & ferme rcmpar,afia q.uclcs pecheursrepen-
.xans nefoyent acablez & noyez du déluge de leurs of-
fcnfcs. Qu^ant X lui,pui:^ vju'il auoit renOcc lefus Chrilî,
il auoit par manière de dire démoli ce rcmpfir de fes
propres mains : tellement qu'après cefte ruine, 1 abyfiqe
ii'eaux de cçfte vengeance auoit couucrt 5ç englouti fqn
,*tme.
Vn de fes plus familiers dit là defTus , qu'il cftimoiç
l.-caufe à\-i\ fi grand tourmentproceder d'abondance
ri'hunicarmsjancholique, (jui lui troubloic »iuii Je cer-,
(Cf mémorables. 17 1
ucau. Spicra fe fouiicnant d'auoir defîa plufieurs fois
amplement refuté ceftc opinion,& voyant cjuc c*eftoit à
lecommcnccrjdit à l'autre, Vous pcnlerez ce qu'il vous
plaira: maisvrayemcnt Dieu m'a bien troublé l'efprit,
priucde vrayeraifon , puisqu'il m'cft impoflible d'a-
uoircfperanccdemon falut.Ayantpcrfeucré en tel<î &
fcmblablcs propos durant Ton fcjour à Padouè,on le rt->
porta en Ton logis à Ciuitclle, où il mourut en ce ddi-^
efpoir. Ce que dcftus digne de coniîdcration entre
les hiiloires de noftre temps,,eft extrait du difcours
qu'en a publié par cfcrit Aï.Hcyir.Scrim^eriDoch lurif-
comjulte de nojire tejnpsAcquelpom lors cftoit à Padouè" S:
parla plufieurs fois à cepauure Spicra.
Enuiron vingt ans auparauant vn Dodeur fort reno-
mé par toute l'Alcmagncnommé Kraus , demeurant à
Halle en Suaubc,ayant plufieurs fois tourné faconfcic-
ce,tantoft deuers Dieu , tantofl deuers le monde ;, pour
s'eftre finalement rangé au mauuaispartijdit & confclTa
publiquement, qu'il eftoit perdu, & tomba fi auant en
dcrcfpoir,qu'ilnereceuoitconrolation ni remonftrance
quelconque qu'on lui fceuft propofcride forte qu'en ce
miferablc eftat de fon ame il le tua mal-heureufement,
Hiftolre d^ t_yilemagne.
Le Cardinal de Crefcence eftoità Vérone , pour s'a-
cheminer plus auant à caufe d'afaires importans,fuc
fort empcfché le vingt-cinquicfme iour de Mars à efcri-
rc,& ayant trauaillé iufques bien auant en la nuiftjfe Iç-
liant de fa chaire pour reprendre vn peu fes elprits ,vid
ce lui rembloit,yn chien noir, de grandeur excefliue , a-
yât les yeux flamboyâts,&les oreilles pendâtcs iufques
en terre>lcquel entroit tirant droict à lui, puis fe cachoic
deflbuslarablc. Al'inftant il demeura comme pafmé:
maiseftantreuenu à foi, ils'efcria fort haut appellant
les feruiteurs,qui eftoycnt fur la chambre de deuant , &
leur commanda de cercher ce chien auec la lumière.
Mais pource qu'il ne fe trouuoitlà, ni en l'anticham-
bre: la fieurclefaifit,& d'heure à autre fc renforça, de
forte qu'il en mourut. Sur la fin de fa vieil crioit fou-
uent à fes gcnsrChafl'ez ce chien qui môtc fur mon lid.
îlncfullpofliblcùelc coiiTolcrui icil»iuirç:^iiis en vu
17^ Hifloires admirables
grand ellonncment"& ddefpoiril mourut en la ville de
'^'^'-'Onc.Hijloirc de nojlre temps. SLeid. au l^.Uif.dcfesCom-
Pientaîre<i.
Sousie règne du Roy François II. l'Aduocat duKoy
'au Parlement de Dauphine, furnommé Ponfenas.a-
,prcs auoir aliéné Ion panimoine , celui de fa femme , &
beaucuup d'argent dcfcs amis pour acheter cellcftac,
confominace qu ilauattdereftc,à tenir maifon ouucr-
^-îefpcran t d'en cl>ie bien toit rembourfé au double.
Mais eftant tombé au lia: d'vne maladie inconue aux
Mcdecms.jl entra en defefpoir de l'aide & mifericordc
lie Dieu:&le rcprcrentantprefcjue toufîours la mort de
X|ucloucs hommes innoccns exécutez à Romans & i
Valence,lac]uelleil auoit pourfuiuie^renioitDieu, ap-
5>elloit les diables,& hKoit toutes les fortes d'impréca-
tions horribles cîu'ileftpofTiblc de penfer. Son clerc le
voyant en ce deiefpoir lui parla delà mifericordc de
I>ieu,& lui ramentut q uelaues paflages de TEfcriture à
ce propos. Mais en lieu de le retourner à Dieu, & lui de-
siiander pardon ce fes offenfes , il dit à fon clerc , O E-
itiene,c]uc tu es noir ! O Eftiene, que tu es noirîLe ieu~
«e hoinme,c]ui eiloit roufTeaUjs'excufa: mais l'Aduocat
rechargea difant, Que tu es noir! mais c'cft de tes pé-
chez.Trop bien cela,repliqualc Clercmaisi'ay efpcrâ-
<:eenlabonté& mifericorde de Dieu. Puisadioultant
vnc expolition aflcz ample i fon dire , Ponfcnasfe
|>rcnd a crier comme vn defefperé ,, deteftant fon ferui-
teur.comme iVn des plus mefchans& miferables hom-
mes du monde. A ce criacoururent quelques amis, auf-
<îuelsil commanda qu'Eltiene fuihnené prifonnier, &
qu'on lui fiil: fon procès. Sur ce le defefpoir fe renforça
tellement en lui.qu'auccfanglots & hurlemensil ren-
oicreiprit d'vne façoncfpouuantabic. Ses créditeurs ne
donnèrent quafi loi/îr de tirer le corps hors du lift. Car
chacun enuoya ieans rauir fi peu de meubles qui e-
ftoycnrreftezà Ponfenasdc tout ion bien : mais beau-
coup s'en falutqu'iisculfent leur compte. Cequel'ou
trouL'oit mcruciileufementeftrangc: attendu qu'auant
t^u'ilfciuailfurlcs offices,il efloit houiiue licheSc ai-.
(^mémorables. 173
fé,autant que nul de Ibn ellac. Ncanrmoins iamais tel-
le pauurecé ne fut veuë:car il ne demeura que la paille
à fa femme & à Tes enfans , qui furent par compafTioii
pris l'vn deçà, l'autre delà, pour Icsnourrir : autremenc
ilseftoyent prefts d'allerinendier ou mourir de faim,
tant celle maifonfe trouuadefuuee. ^ifiM France, fot^
FrAnfon deiiXiefme,
DORMEF RS meruei lieux.
I'Ay conu vn ieune homme , lequel fongcant de
nuid, qu'il faloit monter i cheual pour quelques af-
faires, fe leue profondément endormi ,iiors de Ton liâ:>
s'habille, febottejs'efpcronne , & montant du planché
fur vnefcneftrcfemet deifusà cheuauchons,& com-
mence à piquer de cofté & d'autre la paroy , comme /î
c'euft eftéfon cheual , criant & Tacourageantà mar-
cher. Refueillé puis après , il eut telle horreur de cel^
accident , qu'il vint vers moi pour remédier à Ton mal.
p. Sdhn DiaerfurS, Médecin, au i8. cha^. de fin traité de ajfe-
^ibt-ti partie ut .
l'en ay guéri vn aurre^ cholere & qucrelleux , lequel
fongeoit ordinairement qu'ilfe battoit.auec quelqu'vn;
&fur celafelcuoitdu liift, couroitaux firmes , dcfeni-
" noit ibn efpee, & s en efcrimoit d'eftrange façon , frap-
pant de tous coftezjd'eftoc & de taille, les parois deli
chambre oùilfe trouuoit. Force fut de lui ofterdedc-
uant toute chofe quelconque , qui peuft oftenfer lui
mefmeou autre , lufques à ce qu'il reconuftle dan-
ger oùileftoit i en le refuciilant. ,_^« mejme traiClé
Outre ces dçuxi'ai conu vnartifan , qui dormant fe
leuoit de fon lid, & fortant delà chambre rodoit parla
maifon , montant i^ defcendaut les degrezlàns fe faire
mal. Vne fois il s'en alla tout nud , dormant , vers fa
ooutiquejl'ouurit auec les clefs. Sur ce eftat efueiHé par
^uelc^ucs ai;ftis quilcrcncougrerefit; ijlei^ conceut: celle
174 Hijloires admirables
honte & horrcur.quc'iiepuis cela ne lui zumt.lumefmei
Ainfî que l'cfcriuois ces chofes, i'.iy efté appelle poiif
viHtcr ^ ucicunc fcmine;.laquellc dix lours après Ton ac-
couchement , fur la niinui*':! , vint à fongcr qu'il faloii
donner ordre à quelque; aff lires du.nierna^e:& fur ce au
Coeur de rhyucr le Icue en clicinife , & voulant defccn-
dre de la chambre haute où elle cltoit couchée, en bas,
le brui«ft delà porte cfueillcra mcre couchée en mefmcï
licl:,qui appellanr à haute voix fa fille , commence à Li
ranccr.Ellc efueillcc retourne au li (51. Trois femai nés a-
pres couchée auec Ton mari, elle fc iette à bas du lic^ e-
ilant à Ton pren-iier romnCj& court vers la portccommc
poinrs'enfuir.Son mari l'ayant refu cillée-, ic fongeois,
dit-elle, queie tafchois de me fauuer des mains dVn
qui vouloir me violer. le fus appelle pour lui donner
quelque lecours contre ce m^l.SJiui .w mefme chapitre (3^
truite.
Comme i'eftois couché en vne châbre haute du collè-
ge de Francfort fur Odere auec M. Martin Cuttembcr-
ger,eftudiant en Médecine , ieune homme d'efprit vif^
de petite taille,greile;,mais de cerueau humiderm'efueil-
lâtiele vis tout nud cheminant endormi parlacham-
bre,puistailônatK il monta fur vne grande feneRre ou-
uerte,Sc y demeure debout.Soudain ie l'empoigne, crai-
gnâtqu'il fe precipirall:,& l'ayant retiré dedâs la châbre*
ie lui demâde,Que faites-vous? Rien, dit-il , & rcfueillc
ne fe fouuint nullement de ce qu'il auoitfait. i.Horfij
Aiedeàn,en fon doSl'^ traité de Natirra. Noffambulonu7n.
Auant qu'aller elludier es arts & en Médecine à Frac-
fort fur le Viadre defireux de voir quelques autres Aca-
démies, ie fus appelle pour élire précepteur de ^. ieune<î
gentils-hommes de Mifne , le père defquels nommé
<jeorgede Schleints, Confeillerde plusieurs Princes,
pcrfonnagegraue & irreprehenfible, m'a raconté que
lut& deux autres (îensfreres,auoyét plufieurs fois che-
mine de nuift & tout endormis,ciurant qu'ils eftudioy-
cnt à Liplîciufques à monter es greniers & fur les toid:ç
des maifons:dont auint vne fois àl'vn de fes frères de
tomber & fc brifcr la cuilfe. En fin leur prece-
pi;eM|
^ memoYahlcs^. ij^
ptcur prenant de fore prcs garde a eux , les fouéttoit al-
prcmentjfi toft c^u'iisfe icttoyentbas du li(ft;ce qu'ayant
continué par deux ou trois fois iufcjucs à leur refueda
il furent guéris par tel moyen, Vu me (me.
Trois leuncs gentil-hommes frères , furnomme?. de
Bcrileinjdormans en mefme chambre , l'vn d'iceux fe le-
ue nud & profondement endormi , emporte fa chemife
en Tes mains, & s'en va vers la fencilre , empoigne vnc
chordc pendante à certaine poulie , & fc guinclanrau
faille de la maifon , rencontre vn nid de pies , le rompr,
enuelopeles petits en fa chemife, redeuale , r'entre pat
lafeneftre enlachambrejfe recouche, cache fa chemife
& les petits dans le liLl,& dort comme deuant. S'efucil-
lant le matin il commence à dire à Tes frères, Vous ne
fjauez quei'ayfcngé, ilmefembloit queie meleuois*
marchois, & montois au faifte de la maifon , où l'a-
uoisrompuvn nid de pies, & emporté les petits. Ses
frères commencèrent à nie. Apres quelques autres dé-
nis, voulant feleuer, il cercheëc reccrchci'a chemife la-
quelle il trouue auec les petits ciuiclopc?. dedans, & en-
core tout-vifs. Ilsccfurentfoudjin vers la tour du lo^is^
& voyent ce nid de pies rompui, là mefine.
Vnieune cfcholicr à 13lankenbourg faifoit diuerfes
befongnes en doimaat. Si toil qu'il auoit l'oupé,iis'en
dormoit fî profondemct;,q;jcpour crier ùl iieurcer ou'oa
lîft,on ne pouuoitleiiieilicr.Apres qu'à force de pincer,
& pouifer & tépeftcr,on lui au oit fait oaunr l^s yeux , iî
©nleportoîtaulicl, ils'endormoitcômc deuanc. Mais
ilfe fouuenoit auffi peu le matin de rouîlcmai & tour-
ment du foir,comme fi rien ne lui fufl auenu. Dauanra-
ge,totit ce qu'il tenoit^ainiî endormi, fuit vn bout de ta-«
blcvne cheuillc,ou vn clou de la paroy, \ ne nappe, om
quelque habillement , il faloir deux ou trois hommes
pour lui ouurirles doigts, ficlui fôire lafchcrprife : teU
lementque force eftoit de iaiffer par fois les habille-
nicns en fesmains,& Je porter ainlî au lid, iufques à ce
qu'efueillé il les laiflaft &. rcpiinil pour s'en accommo-
der conuenâblemenr,/ù mtfine.
^du^jtà v^ fçmicfUï doruianc dciQontç;: ^u. i^^iiiç^
l'y 6 Hijîûires admirables
d'v ne rouèMaqucUc fciusit à leucr & dcfccncirc àci fi;-
liciiux. Iiluint au plus hautil s'aiî'eoic,& la rouefe mou-
uaiu il dcfccndoit, puis l'ans mot dire fe recouchoit. Le
maiihedcla mailbn dcfcouurant vne fois ce tout mer-
ucilleu'c, cipialcltvuireur , isifir prompccuicnc aporre.
force li<fts, puis appelle à haute voix ce dormeur aflii, au
faiftedclaroue. Iccluis'eruciilanren furfaut, & toute-
itonne tombe bas/ans (c blcll'er^mnis depuis ne remon-
ta plus fur ceitc roue. Ht mcjmc
Vn dodc t': cxccllcn lurifconfulte m'a raconte, qu*ea
îli ieuneircilTouloitrcleuerdu Ud , cheminer longue*
ment dormant parla chambre , puis fe recoucher: dont
il n'auoit f^nrinicntouclconqucni aucun louucnir, iî-
non ce que Ion pcrc & fa mère ciui le rcgardoyent fai-
re,luicn rccitoycnt. Il a velcu fort long temps, feruani
heurcufcment à fa patrie : & es autres aagcs de fa vie
rien de tour cela ne lui efl aduenu. la mcfme.
Il n'y a pas long temps que le cuifînicr du Duc de
Holface s'ciiant Icué dormant,defccndit en bas, puis a-
vant traucile la cour du logis, vint en la cui/îne,cntra de
dans le puitSjefquaiquiliant les pieds cotre les murailles,
& s'y acrochat des doigts fi ferme, qu'il defcend de cell:e
fortc,touten cheniireiufquevprcsdc l'eau, où fachemi-
fecômençantà tremper parle bout plus auancé , enui-
ron quatre doigts , & ce linge ainfi mouille lui donnant
contre les talons , il s'efucille, & commence à crier en
fon langage, O main heinhelfft i.tir. C'cil à dire , O mes
iambcs,aidc7. moy ! Lesdomcftiques efucillcz au cri,&
difcernans aucunement la voix , le cerchcnt , le trou-
uent acrochc de pieds & de mains, à la paroy du ^uiis,
luitcndent \ne efchellc auec vne chandelle allumée
en vne lanterne. Mais ne pouuant remonter par tel
moyen ils deualent vne grande cruche TauertilTant de
mettrele pied droit dedans, & delà main droite em*
poigncr la chaine du puits. Par tel moyen il fut tiré à
mont. Or ayant efte comme gelé dedans ce puits,on le
porte au lid, où il perd la parole , & n'ouure les yeux
qu'à force & rarement. Elhnt appelle pour le fecourir,
ic çombdcis cOwç çeiour l'apoplexie^ Ûfç r^fliua quel-
dr mémorables^ ijy
que peu,commençâ à murmurer quelques mots, vomir
auec langloc , tout hebccé , & comme hors du fcns. Le
lendemain ie le trouuc remis & parlant : il médit auoir
longé la nuit de Ion accident qu il chcminoit, &auoic
branffépour cheoir , qu'il lui fembloit que du feu lui-
foit furîui, &quilauoiccfté fousTeau. Que fixiours
auparauantil nepouuoitoller de fa telle que quelque
grand mal lui aduiendroit bicii-toft. Finalement au
bout de quelquesiours il fut foulage. La mifme.
Vn gentil-homni';; Blpagnol furnomme Tapia , fe le-
uoit fouuentesfois de nuift en donnât , pour faire main-
tes choies en fa maiibn, allât de lieu en autre fans fe ref-
ueiller: & aHn qu'il ne lui mcuàuinll , on mettoit touf-
iourspresdc Ton lift vn bali:n auec de Tcau. Orvne
nuit d'efté il fc leue, prend vne cape fur fachemife , fore
delà maifon,toulîours dormant & rcn cotre ( ce lui fem-
ble) vn autre homme qui lui demande où il alloit ainfî
tard.Tapia relpôd,;! fait iî chaud^que i'ay délibéré m'al-
1er baigncr.Et moi auPii,fit l'autre. Sur ce ils vont vers la
riuiere,ou Tapialailfant cape & chcmife voulut fe met-
tre en l'eau : maisl'autre le raillant dit, Vous ne fçauez
pasn?ger:le gentil-homme répliqua, Si fai, peut eftre
mieux que vous.Er bien,adiouiie l'autrcjuiucz moy. Il
va defî'us vn pont proche de là,& fc ictte au haut en bas
dedans vn creux d'eau, & nageât appelle le gcnril-hom-
me,difant,Puis que vous vous vantez tant, faites ce que
i'ay fair. Tapia le fuit,& fe précipite en reai'.Côme toun
cela ic fuft fait en dormant , ainli qu'il toucha des pieds
la riuiere il s'efueiUc , & lors faifant tout eiFort à lui pof-
(îblc, comméce a appeller l'autre qui ne paroiifoit plus.
Se doutant lors qu'vn malin efprit l'auoit poufle en ce
danger,aprcs s'eftre recommande à Dieu il trauerfe la ri-
lUerc, reprend fa cape & fa chemife, & retourne vers f»
imifon , racontant ce qui lui eftoit aduenu : & depuis
dbnna ordre de ne tomber en telmiferableperil.t^.ror-
^Memadt k Ujinde la troifiejhe tournée dejun /Jexamcron,
Il s'en eittrouué plullcurs, qui feleuantainfi dor-
mans,& montez fur des fcneftres ouuercr^,font tombeï
i^^ h^uteabas^fe rompant bra^ 6c ïambes : aut^resoac
M
lyS Hijloires admirables
elle trouucz roidc-morts ': autres fi gncfuementble/îeX
cjue toft après ils ont rendu l'amc. Mais il nous fiiffit de
propofcr ceux qui font efchappez , & dont les exemples
font marauez. es cfcrits que nous auons peu voir : atten-
dant que le temps ncusdefcouure le refte, par quelque
"homme plus diligent que moi , lequel remarquera le
tout,s"ilIuiplait.
l'ay oui parler d'vne fille à Paris, qui fouloit aller
chafquc nuid fe baigner dedans la riuicre tout en lon-
geant.Ce qu'elle continua long-tcps, iufques à tant que
fon pere,cn eftantaduerti, Tattcdit vnc fois au chemin,
fie la fouè'ta tres-bié^pour lui faire perdre ccftc enuierde-
cjuoy la fille s'erueilla,& fut fort ellonnce de fe voir tou-
te nue cmmi la rue. 717. l. 'louhert uu^AittJu rnjckip.io.
On raconte auffi qu'vn efcolicr, ayant eu querelle le
foir auparauant auec vn de fcs coinpagnons,fe leua tout
endormi,& alla tuer fon enncmi,en vnc autre chambre,
dedans fon lid:puis s'en retourna coucher, fanss'cfueil-
1er, ainfî qu'on prefuppofe. Carie lendemain matin la
iuftice requife de par Thofte le trouua encor endormi:
& faific que fut la dague , trouuee langlante , il confclFa
d'auoir fongé qu'il tuoit celui que Ton difoit meurtri.
là rnefine.
Il y a (dit-il, fur ce récit) plufîei^s tels exemples , par
lefquclson peut confirmer qu outre les facultez. natu-
relles & vitales de Tame (qu'il conitc eitrc tres-puiflan-
tcs es dormans) les animales auffi trauaillent :ie dis cel-
les qui font dédiées & fuicttes à noftre volonté , faites
par le moyen des mufcles : comme le cheminer , l'em-
Kraficr,lc parler.
EF F IC f^C E eflran^e de Sut An.
M. Théodore fils deCorneiiJciadisCôiul delà ville
dcGoudecn Hollande, m'a recité Thiftoire'qui
s'cr.riiit:,l'affcrmanttres-veri'table. En vn village nom-
me Ofi;brouchpresd'Vtreâ:,'re tenoit vnc veufue , au
fcruice de laquelle eftoitvn quidam, s'occupant à ce
ijuî elloit requis pour les afaircs de ia maifç^. Icelui,
ayauC
^ memorahUs. 179,
fiyantprins gaid>c,commc les valets font curieux, enco-»
rcsquece nefuft qucconamc enpaflancque bien a*
ûant eiilanuiâ:,& lors quetousles domelliqueseftoy^
entcoucheZjCcfte veufueentroic d'ordinaire en l'efta-
ble vers vn certain endroit^lorseftendant les mains elle
cmpoignoitle raftclierd'iceile eftabie,ou lo met d'or-
dinaire le foin pour les belles : Luis'esbahifiant qua
vouloic dire cela, délibère àt faire le mefi le au deîceub
de fa maiftreflc- , & eflaycrrefted dételle cérémonie.
Ainfi donctOil après, en fumant fa maiifreilcjqui eftoic
çntrec en Teftableàly va & empoigne le raftelier. Touc
foudain ilfe fentcnleué en Tair & porté en vue cauer-
nefous terre, fn vnc villette ou bourgade nommée
yvych,oùil trouuevne fynagogucdeforcieres , deui-
fautes cnfemble de leurs maleiîces. SamairtreiTe efton-,
heede telle prefenccnon attendue, lui demanda pac
quelle adrefle il s'cftoit rendu en telle compaçnie-
II lui dicfchiftre de poind enpoinâ: ce que delfus.
Elle commcnceà fe defpiterfii courroucer contre lui,
craignant que telles aficmblces nocturnes ne fufîene
defcouucrtes par tel moyen. Neantmoins elle fut d'à-,
uis dcconfulter auccfes compagnes ce qui feroit de
faire en k^difHculté qui fc prefcntoit. Finalcirient elles-
furent d'auis de recueillir amiablement ce nouucau vc-
nu,en ftipulant de lui promcfle exprclfe de fetaire,& da
iùrer qu'il ne manifeilieroit à peifonne les fecrets qui
lors lui auoyent eftc delcouucrts, centre fon opinion &
mérite. Ce pauurc corps piomet mons& merueilles,
flatte les vues & les autrci,& pour n'eftre pas rudement:
traité feint auoir tvefgrande cnuie d'cftre de la çn suant;
admis en leur fynagogue , s'il leur plaifoit. £n ces con-
fultations,rheure fc pafle , &le temps de defloger apro-
choit.Lors fefait vne aurreconfultation à l'initancedc
delà maif{:reire,fçauoir,fipourla conferuation de plu-
fieurs , il eiloit point expédient d'égorger ce feruiteut;»
ou s'il faloit le reporter. D'vn commun confentemenc
fut encline au plus doux auis,dele reporter en la mai-
fon, puis qu'il auoitprefté ferment de ne rien déceler.
,1*4 maiftreile prend ceftç thargç ^ ^ après prooa^Çj
lîo Hijloires admirables
cxprefre'.&recipïoqiie, elle cfiargc ce fcruftcur furfc;
ei'paulcs,promettant le reporter en îi maiibn. Mais
comme ils turent faittvne partie du chemin, ils dc(-
couuvirent vn lac plein de ioncs & rolcaux.La maifhcl-
rerencontrantcell:eoccafion,& craignant toujours cjuc
ceieune homme Te repentant d'auoir tllé admis à ces
fefte.s d'enfer ne dclcouariftce qu'il y auoit veu s'cfla-
cc impetueuiemeiit , & fecoue de dclFus Tes efpaules le
ieune homme,clperant (comme il cftà prcfumer ) que
cemal-auifé perdroit la vie, tant par la violence de la
cheute du fort haut,quc par ion enfondrcment en l'eau
bourbcufe de ce lac,ou il dcmeureroit enfeueli.
Mais comme Dieu efl infiniment mifericordieux, ne
voulant point la mort du pécheur, ains qu'il fe conuev-
tifle&viuc, il borna les furieux defleins delaforcicre,
&: ne permit que le ieune homme fut noyé,ains lui pro-
longea la vie, tellement que fa cheute ne futpasmor-
telle.Car roulant & culcbutant en bas, il rencontre vne
toufteerpaiffe de cannes &rofeaux qui rabattirent au-
cunement la violence du coup,en telle forte toutesfoj
qu'il fut rudement blefl'é,& n'ayant pour aide que ht
langue,toutlereftedelahuidilfentit des douleurs ex-
trêmes en ce lid de ioncs & d'eau bourbeufe.
Le iour venu, en fe lamentant & criant, Dieu voulut
que quelques paiTans cftônez de celle clameur du tout
extraordinaire; après auoir diligemment cerché,trouuc-
rcnt ce pauure corps demi tranfli, tout efrené & froifle,
ayant outre-plus les deux cuilîes delnouces. Ils s'en-
quierentd'oùilelfoit,quirauoitmiscn tclpoint:& en-
tendans J'hi/loire précédente , après Tauoir tire de ce
mircrablegifte,le chargèrent & firent porter par chariot
à Vtreft. Le Bourg-maiftre nômc lean de Culébourg,
Gentil-home vertueux, clincu &rauien admiratiô d'Mi
rasfî nouucau,fit loigneule cnquefte de tout, décerna
jjrinic de corps cotre la ibrcjerc,& la fit ferrer en prifoii,
où elle confefla volorairemcr, fans torture & de poinét
en poind,toiitcequis eitoitpafl'c:fupphant qu'on eufl
\nùé d'clie.La conclufion du procès , par commun auis
«le jouc kçonfcil ; proçluiiî; çoud^ttouaùontiemorr^
é* mémorables. lîi
i lîcment que cefte fcinmc fut bruflce.Le fcrufteur ne
fut de longtemps après guéri de fa fvoiflure vniuerfcl-
le,& particulièrement de fcs cuilles , chaftié deuant
tous de fa curiofire detcllable. A/. ^mdoHoin de Ronjjey,
en fis epifires inedicinaleSyepi.^o.
Eraimc cnfes epiftrcs,.furle rapport de Henri de
Glaris dodc perfonnage de noftre temps, cfcrit que le
dixicliiie iour d'Aurild'an mil cinq cens trente trois, en
me horteileric de Sciltac ville au pays de Suifle^diftan-
te de celle de Fribourg quclquc's h uid bonnes lieues,
comme la nuift commençoit dvcnironouyt certain
fîfflement, quifembloit partir de l'vnc des chambres.
jLc maiftrede la mailon foupçonnant que ce fufTenc
quelques larronSjacourtfoudain celle part,là où il ne
trouuaperfonncjmais il ouyt encore la mefmcvoixau
grenier, & de là fur le fummct du tuyau de la chemi-
née. Alors prefumant que ce dcuftelcre vnmauuaise-
fpritjht venir deuxpreftres pour le coniurerjlefquels a-
yans commencé leurs exorcifmes , le fanrolme leur fie
relponce qu'il ne fe donnoit pas peine d'euxjCarTvn e-
fioitpuner,& tous deux larrons:au moyen dequoy,iTiaI-
gré qu'ils cufientil vouloitbrufîevla ville , corne il Ta-
uoit entrepris. On eftimeque ccfutdcialoufîepar lui
conceuë contre le fils derhoftc, pour vne chambrière
delà mailbn^auec laquelle il auoit eu acointâce char-
nelle par Telpacc de 14. ans, comme ellcconfeira depuis
à la mort. Ayant doncques tout à ruiftantenleué cefte
créature fur le tuyau de la ch eminee, il lui commanda
d'cfpâdrc du feu qu'il lui bailla en main. Ce qu'elle lïr,
& en moins d'vnc heure toute la ville fut réduite en
cendres, iansqu'auec aucune eau ni vinaigre onpeuft
trouucr remède d'amortir cefcu.Or cftoit ce chofe réel-
le,& par confequcnt le feu aulli , que ce doemon appor-
ta jrccl& matériel, mais d'vne autre nature quclc
commun,mtous les artificiels que nous fçaurions fai-
re. Et Ci ne venqit pas d'cnhaut > comme le feu des
foudres qui brufle peu, fi d'auanture ce n'cft pas acci-
dent en tombant dans des poudres à canon, inflamma-
bles : comme l'an mil cinq cens , ilarriuaa Parii c{i
«Si îlljlôircs admirables
la tour de Billy:depuis à Maltncs enBrabant, &à Vcni-i'
fe, -rIM Figenen au traiclé des Comètes, l'adioufteray fur
ieftehiftoire,cec^u'cn récite cncor M.Philippe Came-
Tarius,lequel dit que le feu tomboit çà & là fur les mai-
fons,en forme de boulets enflammez, 8c quâd quelques
vus couroyent pour aider à •eilcindre rembrafement
chez leurs voifins^on les rappcUoit incontinent pour
fecourir leurs propres maifons. On eut toutes les peines
«iumondeà empcfcher qu'yn cluilcau bafti de pierre
*de taille, & aflez loin de la ville ne fuft confommé de
reftembrafemenc. Tay entendu ( dit Camcrarius)les
|)articularitezde celle terrible vifîtation delà bouche
"propre du Cure du lieu & d'autres habitans di'gnes de
foy.qui auoyent efté fpedateurs de tout, félon le Ibm-
maire ci deuant propofé. Le Curé me raçontoitque ce
malin & cruel cfpritcontrefaifoit au nr.turelies chants,
ramages & mélodies de diuers oifcaux.Plufieurs qui me
tenoyent compagnie,s'esbahifl"oycnt auec moi, de voir
<iuece Curé auoit comme vne couronne entour fe^.
îongs cheueux qu'il portoit à rantiquc^toute de diuer-
ies coulcurs:i^v' difoit que ceb. lui auoic eftc fait par ceft
efprit,lequcl lui letta vn cercle de tonneau à la teftc. I!
adiouftoitquelcmermc efprit lui demanda vniour&
a quelques autres, .s'ils auoyent iamais ouy crailler vi)
xrorbcau ? Quelà dell'us ccil ennemi auoit crouaflc (î
Jhorrlblement, quêtons tant qu'ils eftoycnt demeure-
xent fi efperdus,que Ci ce ram;is;e infernal euft duré tant
Toit peu pluslongtemps,ilsfuirenttous traniTis de peur.
X3utrcplus ce vieillard affermoir,non fans rougir , que
fouucntesfois ceft ennemi de falut dcfchifroit à lui &
aux autres hommes qui Tacompagnoyent , tous les
yechez feciets par eux commis, (î exactement que
tous furent contraints de quiter la place,&fe retirer en
ïeur maifons:tant ils ej'loyent confus. j^'s mtdiîatkns hifio-
^ memorMes,
EMBRASF^MENT defcu.
ÏE n'entre pour le prefent en confideracion des embra-
femeni caufcz par la fureur des guerres-, ayant refc^^
uc la dcfcription d'iccux au dénombrement des in-
croyables maux furuenus es guerres de noftre temps.
Seulement en celle fetftion nous traiterons des feux al-
lumez par autres moyens. Il y a enuiron cent ans que Iç
dernier iour de luin , fur le foir le feu fe print à Craco-
uie capitale du Royaume de Pologne, laquelle il brufla
prefque toute. Ce fut vn ruine mer ueilleufcà caufe de
plufîeurs milliers de maifons que le feu reduifiten cen-
dre ccHq niiid là. M, Cromen an trernUfme linre de Chiftoire
de Pologne,
L'an mil cinq cens quatorze, ronziefmeiourde lan-
4iicr furie foir, le feu fe print en Rcalte à Venire,& deC-
pcchn premièrement les riches boutiques qui y eftoy-
ent en trcf-grand nombre. La bife qui fouffloit en ve-
liemcnfe porta rembrafemcnt es maifons prochaines:
en moins de tien Ton vid tout allumé , dont s'enfuiuic
laruine d'infinis édifices, du temple de fainâ:Iean,de la
place aux farines, du marché aux farines, & de tous les
baftimcns des cnnirons. • Les boutiques des changeurs
& oïfcures furent bruflees. Le feu dura toute la nuid:,
& ne peut eftre cfleint , qu'en lui faifant place large
par la ruine des maifons & rues e.itieres. La pluiparç
de la ville fut delfigurec pa: tel accident. Depuis elle
a erté tellement rebaftie, embellie & agrandie , que ce-
fleperue deslongtemps neparoit plus. P.Ioue 4ti la. Uttra
de fcshijïoires..
L'an 1518. au mois de luin , vae horrible ecb'pfe de
Soleil fut fuiuie à la mefme heure d'vn terrible cmbra-
fementdefeu à Vienne en Autriche, lequel brufla va
quartier de la ville. L'empereur MaximiliamLeftanc
auec fa Cour à Infpruk tomba malade entendajir.
tclk nouuellc , & fut emporté du mondç pas
184 Hijloires admirables
Vnc fieure lente. Cujpiniuu en U -vie dcsEmperettrs.
Van i^^6. Le dcuxicfmc iour de May , vn tombillon
de vent ayant crpandii çà &: là des cdinccUcs , le feu fe
print en plu/ïcurs maifons à Delfc ville grande , belle
Se rcnoniinee en Hollande, tellement qu'en peu d'heu-
res la plurprrt d'icclle ville fut ruinée ,& peu s'en falun
«qu'elle ne fut du tout confumee & mile en poudre par
cell embrafemcnt. Maiselleaefté tellement reftauree
depuis, que cciï auiouvd'hui l'vne des plus plaifantes &
agréables villes que l'on fçauroit voir. Auint au refte
en ceft cmbraicment vn cas mémorable. Gens dignes
de foi virent lors vnc Cigongne , dont il y a grand
nombre en Hollande , qui reuenant de la quelle,
dcfcouunt que la flamme auoit enuahi le nid où e-
ftoycnt Tes petits. Elle commence à fe lancer dciTus,
poureflayerdelcs garantir du feu : mais pourcq qu'ils
eftoycnt cncorcs fans plumes & n'y auoit moyen de
les tirer de U, elle fe iette à ailes bai(îees,& couurant Tes
petis fut réduite en cendres quant & eux. Quel procès
ce charitable oifeau a fait aux percs & mères qui n'ont
rien de nature & d'humanité que la face I t^dr. lun.Hs
efiju defcriplteti. de MolUnde.
L'an mil cinq cens trente neuf entre luin & Juillet,
furlefoir d'vn Icudi le feu fe print à Conilantinoplc,
auprès delà piitcn des criminels, es boutiques des
vendeurs de gvaifle , fuif , noix refîfles , liuiles& telles
denrées : doù il fe lança dedans celle prifon , bien clofe
& treillifiee , & y eftoutFa Icpt cens homme,?. De là il
s'epandit à droi<fte tk à gauche par la ville : & parucnu
iufquesàvn autre pnfon nommée de peagcrs, force
fut de les laifler fortir , autrement ils elloyent tous
perdus : car en vn inftant toute ccftc maifon ou
prifon fut réduite en cendres. Puis rembrafemcnt
s'auanca versla poite du bois, où font les boutiques
des forgerons & arrifans qui manient le fer. De
ceft endroit il gaignela m.aifon du Capitaine àos la-
jiifl"aire>, & defoefchctous ce qiii fe rencontre en ce
quartier là. En après il gaigne la rue des Tour-
neurSi&iceUcconfuinee,fiiiiîtvnc grande placcnom-
mee Ta-
érmemorahles. i8^
mec Tachtal Cala ,ci'ou il tourne \crs les cîiaudcrou-
nicrsj puis aux vitriers , cnuironnant tout le quartier
qui eft aurour des cftuucs peintes. Pouflant outre, il
jjaruient à la luifucric , où il fait vn terrible rauage>
à caufc c]ue les maifons y cftoycnt fort ellroittes &
ferrées. Les flammes s'efpandirent de là iufciues d la
portedelapoiflonnerie, engloutilfant tout ce cjni fc
rciicontroit depuis ccft endroit iufques à la rue des
ïuifs , toutes les maifons dcfquels furent réduites en
cendres. Et ne fut onc poffible d'cpLeindrc ce feu, quoy
qu'on y iettalf pour Teftouftcr ou pourrcRcindre : tel-
lement qu'il dura toute la nuift , & tout le lendemain
iufques au foir , ayant confumé la meilleure partdcla
ville & des fauxbourgs au riuage de la mer. t_yînndes de
T ui(jiule.
L'an mil cinq cens quarante fix, le Samedi fcptierme
iourd'Aoufllefcu du Ciel crtant tombé à Malines en
.^rabant donna fur vne tour où il y auoit plus de cent
cjquesde poudre à canon. Celle tour fut prcmicre-
n»ent rcnuerfce de fond en comble aucc vn pan de mu-
railles de la ville, près d'icelic tour/ iufques à deux cens
pas de long. Puis le feu de tanç de poudre faifit les
lieux prochains , & embrafîa tellement coure la vil-
le, que fans vne pluye véhémente qui iurumt, cefte
grande ville s'en alloit eftre réduite en poudre. Le
lendemain on rrouua plus de cinq cens corps morts
& fî puans , qu'en toute diligence il conuint faire
des grandes fofles , ou ils eftoyent charriez & enter-
TC/ par douzaines, à la fois. Tout le Dimanche fut
5îmployc à telles fepulturcs. De blelTez le nombre mon-
ta à plus de deux mille. On trouua vne fomme enceinte
acableede quelques ruines & encombres, laquelle c-
ftantpromptemcnt ouuertc, fon enfant encore refpi-
rantfutbaptile. Vne damoifelle fe iettant du iid à bas
pourouurir vne feiieftrc de fa chambre, vn efclatlui
coupa le col , tellement quelatcfce pendoit fansvie
àvnbouc de peau. En vn coin de vue près le Palais
Bernard, vn Tauernier furnommé Crocs cftant del^
ccndu ,en lacaue pour tirer de la bicrc à fes holUsjau-
iS^ Hilîoircs acbmrMes
c.tnsdefquel.siouo'/cnr aux cartes , la maifon fut en vu
l'-irtrintrcnncrfct* par terre, les loueurs entre autres fu-
rciit tous .icrauantcz , ayans les cartes cncores es mains,
«7uaniîon les rira de dcirous les ruines. Nul de la mai-
fon n'efchappa/inon rhoile, garentj par le moyen de
Jj caue voutcc en laquelle il eftoit dcfcendu. Trois ou
*{uatrciours après ce pitoyable accident , furent troii-
ifc? cscaucs plusieurs morts de faim, autres cllouffe?,
ru iranfîs d'cfpouuantcmét &: de rinfupportable puan-
teur de la foudre. On trouua vn homme & vne femme
.<:mportC7,,& comme ferrez de force, entre les branches
<^Vn arbre. Vnfauxbourg entier fut prefques tout ruiné.
Cefte ville là, tantpiailante & belle auparauantfutpai
^out défigurée & comme defchi récries ma2;niiîques ba-
itimens caliez Sirenuerfez ; entre autresles Palais de
l'Empereur, de Madame Marguerite de Bergue, foui-
«iroyezSc renuerfe/. La maifon des banquiers Italiens
auince de fond en comble:tc logis de la polie galfé , Te-
ilablc emportée auecques les chenaux. Vne partie du
conuent des AagulHns&: des autres temples de la ville
futbrifee. La maifon du Conte de Hocftrate foulbnt &
brilalechocde Toiagc , qui s'appaifa l'ayant abatue.
jSans cela rien ne fuit demeuré debout ni en la ville ni
ics enuirons. A plus de fix cens pas des murailles furent
trouuez des gros quartiers dcpierre de taille iertez par
îa tempcite au grand dommage des lieux où elles tom-
i)erent. Ce fut vne cftroyable tcmpefte : preiagp de la
guerre d'Alcmagncà laquelle s'achcminoit lors TEm-
pereur Charles cinquicfme.
I
EN F AN S, Cas mémorables auAnî &
toji après U naijf^nce d'aucuns,
L'A N mil cinq cens cinquante 8c vn au mois
dAouft , certaine Alcmande de Mifne acou-
cjiHti'vnc lîUe, liçjuuUciDourucdcla petite vairoie iî •
^ mémorables, 187
jiqois après. Cinq ioursauant que forcir & venir en a-
pantau monde, on Touyt fore intelligiblement crier
clans le ventre de fa mère. lela prefenrai au fainft Ba-
pte(me auec la femme de MaiRre Ican Kentman , Do-
cteur en medecine.G./e Feme au 5. Imre des ^ylnndes de
Mifne.
Au commencement de lanuier 15^8. vne autre femme
de la mefme vllle,eftant au fermon, l'enfant qu'elle por-
toit en fon ventre,y cria par trois fois (i haut , que ceux
& celles qui eftoyent au tour de la mcre l'entendirent
clairement. Vn moisapres,ccil enfant vint au monde en
bonne profperité. là mefine, *
]ENF AN S* en nomhre-,& d*vne ventrée,
ÏE reprcfenrerai ici quelques hiftoires desfieciespre-
cedentS;à c ufedeleurraretc,efperantquelc difcours
en fera agréable , auec proteftation cependant de me
contenir ailleurs en mon intention, qui eft de ne pafler
que peu fouuent des merueilles du iîecle , dont nous
nefaifons quefprtir, dontieproduiray aufTi quelques
exemples.
Aupaysd'Agenoisy al'Illuftre maifon de Beau-vil-
leâadis fort opulante, & de grand' efcenduc en biens &
honneursrDe laquelle eft fortie Madame laMarefchnle
deMonluc. On tient pour vraye hiftoire que l'aycuUe
de ladite Dame fit d'vne ventrée neuf filles , qui toutes
furent mariees,& eurent des enfans.La mere& lefdiftes
filles fucceffiuement furent enterrées à S.Crepafî,Eglife
Collégiale d'Agen,baftie & fondée de ladite maifon de
Beau>ville :1a mère ayant fait drefler fa fepulrure au
cœmitiere fur vn portail en ;re les neuf qu'elle fit auffi
pour fcs filles, en mémoire décela. Ton ayveu cncor
quelques vnesj eftant à Agenl'an mille cinq cens fe-
ptnnte fcpt en la {\x{^\diç. Sglife: les autres ont efté rui-
nées par les guerres ciuiles. L'hiftoire eft telle. Mada-
fnpjfçUc de Bcau-viUc auoit vne fille de chambre belle
i88 HÏÏhircs admirables
6<. r^illardccîe Incjucilc Ton mari Icmbloit cftre amou-
reux. H!lc, poui s'en desfaire plus honncLlemcntJa ma-
nc. Ceftciillcûcs h première croffcHe faid trois cn-
f msulecjiioy la DamoifcUc prinr fantafie , que fon mari
y auoic parcicipcmcfepouunntpcrruader qu'vnc fem-
me peuil conccLioir dVn fcul homme tel nombre d'cr.-
fans. Dont elle redouble la ialouiic, 6c quoi qu'on
Içeuft lui remontrer au contraire, fc print d diffamerez:
liayr d'auantatic la panure fille. Auint delà à quelque
temps, que laDamoiicile fut enceinte , & tantgrolFe
qu'elle enfiinta neuf filles. Ce qu'on interpréta élire
ti'vne punition àc Dieu^afin qu elle eull: honte de fa ca-
îomnie,puis qu'on pouuoit lui obiedcrvne plus grande
fiurcscommc d'auoir eu acointance auecplufieurs. Car
ellelouftenoit toujours opiniâtrement que la femme
ne pouuoit conccuoir d vn homme au plus haut que
«ieux enfans.Ain/i fort hontcufccraignant d'eftrc difta-
niee &: condamnée par fa propre Tentencc , fut telle-
ment tentée du mauuais efprit , qu'elle refolut de faire
noyer huid de Tes filles^ik n'en retenir qu'vnc : ayant la
clîofefecrctte entre lafîige femme &vne chambrière,
à laquelle fut donnée celle maudite commiffion. Mais
Dieu voulut que le mari reuenant de la chafle ren-
tontra la chambrière , &, defcouurant le fait , preferua
^c mortfes filles innocentes , les fit nourrir au del-
ceu de la mère , & au baptefme les nomma routes
td'vn nom,à fçauoir Bourrue : comme aufl]laneufief-
mequclameres'eftoit rcieruce. Puis quand elles fu-
rent grandettes,les fit venir en fii maifon, toutes habil-
lées d'vne eftoffe & femblable façon, ayant aufii fait ha^
biller de mefme celle delà maifon. Lilant mifes cnfcm-
l)le dans vnechambrc^il y fait venir fa femme, acompa-
encedes parens communs &. familiers amis, & lui dic
qu'elleappellailBourfTue. A celle appellation chafcu-
nedes neufs relpondicDequoi la mère bien eftonnee,
&. plus cncor de les voir autant iemblables de taille,
de face , contenance & voix , que d'habit, fut confufe
c\\ elle mcime : &foudaiu le cœur lui dicquec'c-
iloycnt fts neuf ailes; & que Dieu auoitpreierue les
huiél.
^mémorables. il<)
huifflj qu'elle auoic expofées & cuido.t eftre mortes.
Dequoilc mari rcfclaircit mieux, lui reprochant de-
uant toute la compagnie Ion inhumanité, & remon-
ftrant, que cela pouuoitcilrcaducnu pour la confon-
dre delà mauuaife opinion qu'elle auoit toufîourseuë
de lui à l'endroit de Çà lîlle de chambre. Voila a peu près
comme on le recite. /,/. L. lou'jrrt ait tfûificfme Urne de fa
^rrcirrspophLures^chjt'.l.
l'enten , qa'enla maifon de Stourneau, en Peri-
gort, arriua vn faid fembiable , il y a plus de trois
cens ans. La Dame fit neuf cntans mafies d'vne ven-
trée, & en voulut expofer les huid : qui furent heu-
reulement preleruez (parla grâce de Dieu) du ren-
contre de leur père. Tous les neuf vcrouirenr, 8c furcnc
pourueusde grands eftats, quatre en l'Eglife, & cinq
au monde. Des Ecclefialliques, Tvn fut Euefque de
Perigueux& Abbé de Branlaume : L'autre Euefque
de Pamie-/ : Le tiers Abbé de Grand-Sclue , & le quart
delà cafe-Dieu. De ceux du monde, l'vn fut Lieute-
nant de Roy à la Reole contre les Anglois: L'autre eue
vn gouuernement en Bourgongnc : Les autres trois
furent en grand crédit auprès du Roy. On void encore
auiourd'hui tout cela peint en vne fale du Chafteau de
Srourneau , ainli que m'a did le iieur de Stourneau»
yffu de celle tres-illudre & ancienne maison, l'vn des
maiftres del'hofteldu Roy de Nauarre , depuis Roy Je
France. L e mefmej ait 4 . liitre des erreurs populaires , chapi"
trei, ^ «
Prefque fembiable eft le fait des Pourcelers de la
ville d'Arles en Prouence , d'où ell ibrtie la noble mai-
fon des Conuertis : lefquels furent ainli nommez, parce
que la chambrière qui portoit noyer les huid , e-
itantrencontiee du mari, dilbit que c'eltoyen: pour-
celers qu'elle alloic noyer, d'autant que lacruyen'eii
pouuoittant nourrir. On dit que ce fut par l'impréca-
tion d'vnepauure femme, qui dcuiandoit i'aumoineà
la Dame de la maifon , iccUe femme eilant enui-'
ronnee deplufieurs ficns pcarscnfans. Ceouela Da-
Ijjc lui reprocha, comme procédant dclaiciueté. Se
190 Ht (loir es admirables
d'cftrc rrop adonncc aux hommes. Lapauure fcmmfjl
qui ciloir femme de bien,fitlors ceftc imprécation, qu'i-
ccUe Damepeuft tncrolTci- d'autant d'cnfans , qu'vnc
truyefaitde cochons.Ilen auintainfi, par le vouloir de
Dieu, pour monftrer à la Dame , qu'il ne faut imputer à
vice ce qui cil dVne grande bcnedidion.
On en dit autant de la magnifique famille Dcllx
Scroua à Padouè,qui porte en armoiries vne truye , en
Italien dite Scroft,8i en langage corrompu Scroiu , fur-
nom de ladite famille. Es annales de Lombardieon lit
que du temps d'Algimont premier TRoi des Lombards:
vne purnin acouciia de lept fils,& que Tvn d'iceux fuc-
ccda avdir Algimonr.Ican Picus Prince de la Mirando-
le efcrit en Tes commentaires fur l'hymne recond,qu'cn
Italie vne Alemandeacoucha en deux fois de vingt cn-
fans:Ia première ventice eilant de douze^ & que ce far-
deau pefoit tant,qu'ellc le fourtenoit auec vne feruiet-
te.Albucafis , grand Médecin & Chirurgien Arabctef-
moigne dVne fem.me qui fît fcpt enfans , & d'vne autre
qui auorta de quinze bien formez. Pline fait mention
dVnc qui auorta de douze. Martin Cromer en Ton hi-
ftoire de Pologne efcrit que la femme du Conte Vir-
boffas en Cracouie fit dVne vcntrce trente fix enfans
vifsjl'an 1:69. Mais ce qui excède tous autres exem-
ples,& qui cft extraordinaire, furnatiirel & miraculeux,
eft ce quePon efcrit d'\neConreirc d'KoUande , dont
ie reprefentcray ce qu'en remarque Louys Guichar-
din en fa defcription du pays-bas,felon Pinfcription
qui en eft en vne Abbaye près de la Haye, & mife dé
Latin en François: Marguerite fille d'IUuftre Seigneur
Florent Conte de Hollande, & de Mathildc fille de
Henri Duc de Brabant,fœur de Guillaume Roy d'Alc-
ma^ne eftant en Paage de 41. ans, acoucha le vendredi
deuant Pafquesjà 9. heures de mann,ran ii275,(la mer
deshiftoires met l'an I5i5.)dc 5(î^5. enfans vifs, maf-
les & femelles , qui ( en prefcnce de plufieurs grands
Seigneurs & gentils-hommes ) rangez ' dedans
vn grand baffin proprement accommodé furent
tous bapufez par vn Euefciuc 3 les malles nommez
4'y4
^vn mefmc nom, Ican:& les femelles Elizabeth. Tou5
moururent toft après, comme la mère; & furent rous
enfemblc mis en vn nKTme lepulchre. L.ViuesjHrafme,
& autres,c]ui racontent cefte hiftoire , difent que ce fut»
d'autant qu'icelle Damcs'eJloitmccfjucc d'vjiepauure
femme qui lui demandoit rauraofne, portant deux bel-
fons. Elle la tança fort, difanteftre irnpofîlble quVne
femme eulldeuxenfansà vn coup, engendrez dVii mel-
me père. Sur cela pauure mendiante fit vne prière i
Dieu, que pour prcuue de Ton innocence, chargée i
tortjla Contefle lill autant d'enfans d'vne venrrce, qu'il
y a de iours en Tan.
Pourreueniraux hiiloircs de moins d'enfans d'vne
portée. Nous auons veu vne femme d'Aubenas en VI-
uarets,qui de la première ventrée fît deux cnfans , de la
féconde trois , & de la troifîerme quatre! A Orillac en
Auuergne,la femme dVn nomjiié Sabatier enfanta trois
fils d'vne ventrec. Le premier & le dernier vefquircnc
vingtquatie heures. Ceiui du milieu ( qui pour ce fut
nommé lean de Trois)deuinthorameparfair,futhiané
à Paris,(Si a vefcu long temps. Ir. femme d'vn bonnetier
en la ville de Rouan , bolfue & de peu te taille , fit ciûq.
.mafles dVne ventrée rani55o.Tout ce que deiîus eft es-
tratde M» Laurert loubert att ^.liure de jcs erreurs popu-^
lairesychap,!. Adiouflons encore^ quelques autres lu--
floires.
L'an mil cinq cens cinquante quatrc,à Berne en Suif^
fcla femme de lean Gchnger l^ofteur enfanta d'\ne
portée cinq enfans, trois malles, & deux femelles. Pline
parle d'vne Grecque qui en q-udv.c portées htvinet en-
fans, defqucls la plufpart \ eiquirent. Dalechanlps^en la
Chirurgie Françoife ditquVn gcntil-hommc Sienois,
nommé Bonauenture Suuclli , lui a aftcrmé qu'vne
/ïenne efclauc & concubine Ht fept enfans d'vne poi-
r.'je,dontles quatre furent baptizez. Et de noftre temps,
entre Sarte& Maine, paroi lie de Seaux, près Cham-
bellay , il y a vne maifon de gentii-iiomme appellce
la Makiemerc , la femme duquel eut la piemiere
iU),nee qu'elle fuit mariée deux enfans , h féconde
192, Hïjloires admirables
année trois , la troifiefmc quatre , la quamefme cinq , \t
cmquieiine fix , dont elle mouruu. Vn de ces lix entane;
elt viuant auiouvd'hui , iîcurde ce lieu delà Maldc
merc. Aï. i^mUr. P.ué att •viagtc^UAtriej'me liitr. ch.x'u:..
L'on aveu maintesfois en.noftrc Efpagnc ynetcni-
me faire trois cnfans : Si n'y a pas longtemps qu'vn.
femme le deliurade quatre d'vne ventrée. Il y a aflV/
longtemps que le bruit courut par tout dVnc grand
Dame acouchee àMedinc dclCamp,oii elle fît fept t\\-
fans. Et dit-on qu'à Salamanque la femme d'vn Li-
braire en fit neuf. Puis que nous fommes fur ces hiltoi-
les admirables d'cnfans produits en nombrc,ie raconte-
rai ce qu'Auîccnne teilnoignc au g. liurc des animaux,
«.iVnefemmclaquelle auoit enfante d'vnc rentrée foi-
xante & dix enfans bien formez. Et Albe^tlcGrand ci-
critauoir entendu pour chofe affeuree d'vn Médecin,
qu'ellant appelle en certaine ville d'Aleniagne, pour
vifiter vne dame malade , trouua qu'elle auoit enfanté
dVne venrree cent cinquante cnfans , tous enuelopcz
en vnc petite taye ou pellic:ile,aulî! grands que le petit
doigt de la main , lefquels fortircnttous en vie , & for-
mez, '^yi. T orcjucrnade en lu l.i'jHrncedc fon Hexameron.
Cela eft admirable qu'vne femme idlTc desenfans vifs
en fi grand nombre , lî petis , neantmoins formez & vi-
iians, comme ce que nous auons veu dclaComtelie de
Hollande, & des femmes mentionnées prefentemenc
après Auicenne 6: Albevcje tefmoigne.Pour etclaircii-
fcmcnt de tou.t, i'adiouileray ce qu'efcrirConiiant Va-
Tol philofophe & médecin c^ Bologne la Graflc,au qua-
trielmeiiure de fon anatomie. l'ai veu (dit-il) vn auor-
ton de trois femain ;s, confufément figuré , de la gran-
deur d'vn grain d'orge, où ie remarquai la teife&la
poi(ftrine, mais nuls bras ni cuiffcs encor. Outreplirs
i'ay v^u vn autre auorton ou germe de fîx fcp-
jnaincs , ayant forme diifinc^c de la groflcurd'vnea--
beiUe, où paroifîoyent les yeux, Ic^ narines, la bouche,
le cœur, les poulnions, les coilcs, le dos , le foycle dia-
phragmeareilomach, les rcius , les boyaux ^ le membre
érmemorahlesl 195 '
Tinl,& autres parties;cc t^ue ie monftray à plu/îeurs.Lcs
bras & les cuill'cs conimençoycnt a pulluler , cflans fore
petites en proportion au rcftc de ce petit corps : car les
cuiflcsn'eiloyent pas plus groU'ei-qu'vn grain dérailler.
Les bras deux fois autant. Tay veu plulîcurs autres tels
fruits abortifs,de la grandeur & grofîeur d'vne feue,d'vu
cfcarbot, d'vncgrenouillc,où i'ay toufiouis trouué tou-
tes les parties , & remarqué que Icscxtremitcz eftoyenc
touliours moindres ù proporriô que le refteten telle for-
te neannneins que Tciprit vjuii:antcei^emaire,fcrmc &
figure toutes les pairies d'icellcs cnfemblc r mais il in-
troduit fuccefliuement le plein 6i entier accompliffe-
ment de la forme. C'ell en fomme vne riche & admira-
ble; tiflure, ou pièce de tapifferie de haute lific , que no-
'ftrc corps i qui nous doit induire a pcnfer fouuentau
contenu du pfeaume 15^.
Conrad Lycojihthc en fou recueil des prodiges recJtanC
rhiftoire de TAlcmande , qui fit vingt enfans en deux
couches, adiou fie qu'au territoire de Modene vne Ita-
lienne nommée Antonia , aagec d enuiron quarante
ans, &qui parauant au<jiL acoultumé de faire touliours
quatre enfans à la fois,ou trois du moins, en fit lors qua-
rante,comme atteirc TEuefque de Come qui en efcriiuc
rhiftoire.
LailTant les hiftoires anciennes , que Jious pourrions
produire en grand nombre : nous en alléguerons enco-
res quelques vues de noilre temps, v^ne payfanne Sui/ie
acouchaTan ; 53^. de quatre malles qui \eicurcnt quel-
ques heures. Vn raitrc es enuirons de Zurich fit aulîî
d'viic ventrée quatre mafles qui furent baprifcz. Su'M"
ffiui e*r Lycojihaics.
Vne Sicilienne nommée Pamique, mariée à Bernard
Bellouardd'Agrigente, fut iî fertile qu'en trente cou-
ches elle fitfeptante troii enfans. Vne femme deMefilne:
aagce dcvintquatrc ans eut d'vne ventrée neuf enfans,
dont s'cftant deiiuree elle & tous les enfans moururent.
jh.Faz.el.aH 6. Uttrc de la I. décade de Chijtoire de Sicile.
L'an 1579. YÏuoit ençor viie femme nommée àalullt^.
N
194 HîHûirfs admirables
graifc & de petite caille, laquelle en deux acouchemeiïs
fit dixhuit enfans. /. Mich-d vafih.l es jchol.jur le l.Uttre de
de P.Paid Pende , de Li'nten'fond^s m.dadies, chu. ^9. A Bo-
logne la Grairelule Scatmairc, homme qui a beaucoup
d'enfansjcft le repticlme enfant d'vne ventrée. Sa mcrc
eftoitfœurdu Seigneur Florian de Dulphemon allie.
Et l'ay V eu vnc femme de la ville de Garpi enfanter d'v-
ne ventrée cinq fils. Curptïi en jon anatomie. On lit es
annales de Gencs , cfcrites par t^Au^ujiinlufiiniMi^au*).
liure y que de la mémoire de nos pères Bartholomec
femme de lean Anthoine Boccanegre en vn leul enfan-
tement fit dixneuf enfans, chacun de lagrolfeur dVnc
datte , & ayant forme , mais confufe. La femme d'vn
Confeiller'de Bologne â la première couche eut deux
befTonsjtrois en la féconde, dont Tvn eut vie, quatre à la
troifiefmequi moururent incontinent, i rincauelle liitre
Jl.cha. 17. de U^nerifon des muladies.
Du temps de TEmpereur Maximilian premier vnc
femme Suifleacoucha de trois filles en mefme heure,
lefquelles velcurent & paruindrent toutes en aage de
marier. I. Ruejf.au ^.liure de la coiiceptton ^ génération de
tho'i-nme cha. 4. Ccs années palfces la femme d'vn artifaa
nommé Brandimarr, aagee de vingtfix ans , enceinte de
huiâ: mois,ne pouuant plus porter Ton fardeau , fe deli-
ura de quatre enfans bien formez, deux maflcs & deux
femelles , qui toft après auoircflé baptifez moururent,
' la mère demeurant en vie. Tout le peuple de Matitouë
courut voir cefte acouchee & Tes quatre enfans. La Du-
chefie mefme honora de fa prefence la pauure femme,
& lui fit de grandes aumofnes. Marcel, Donat^a» 4. Uurt
de fis hiftoires ynedecinules cha. i^ Vne femme de la vill'e
de Leyde en Hollande, vman: encoreTan mil cinq cen»
nonanre fept , & lors aagee de trente hind ans auoit fait
dixhuid enfans eu quatre portées , dont les douze 01*,
«rcize viuoyent alors. Mémoires de mjhe temps.
KN-
i^mimorahîes. i^y
BNFA2i S produits a diuerfesfois^de mefmt
grojfcjfe^farfuperfetation. *
IL n'y a pas long temps qu'au pays d'Agenois> on aveif
vne portée de trois gcmeaux^qui font créez huidû
iours IVn après l'autre. On cicrit dVne femme d'Ale-
xandrie, quiûit vcueà Rome du ttmps d'Adrian, aucc
cinq fils, defquels le cinquiefme eftoit né quarante
iours après les quàtres.nez en mefmc temps. M. l. ioh^
bert nu yliure des emun f>opulaires, cha.Ii
A Beaufort en Vallée, pays d'Anjou, vne ieunt femme
fille de feu Mace Cliaunicrc, acoucha d'vn enfant, &
huid ou dixiours après d'vn autre , qu'il falut lui tirée
hors du ventre,dont elle mourut. M. t^mbr.Paré^au 24.
Vne grand' Dame Hfpagnole, eftant en trauail d'en-
fant fedeliura d'vn: dont la nouuelle portée à Ton Sei-
gneur & mari,fa refponfe fut,à ceux qui lui en faifoycnc
le recit,rctoarnez,ce n'ell pas aclieué , elle en fera bien.
d'auantage.Il dit vraircar quelques heures après, par in-
teruallcs elle fit encore cinq cnfans.i^. Torquernade etil^A
prennert: tournée de fon \iexamero7u
\ ^ La femnK' de Zacharie de Scarpairc , ellant acouchee
d'ynfîls, trois mois après acoucha d'vn autre, & tous
deux vefquirentjl'vn ellât elpicierà Florence au bourg
Saind Laurent.,v*fo/.*î^» 6Jifcûi*ri,triUchaf>.zi.Vnc cer-
tainefernmefedeliurad'vn beau fils, & le lendemain
d'vn fort laid. Elle fut eftimec auoir forfait à fon hon-
neur.Gorr/o/z/w Mi Uure intitulé Lilinm fefl.j .ch.t.z.
Combien que lanaiirance des monltresfoit chofê
rare toutesfois la fuperfetation Tell encore d'auantage,
voire fi rave qu'aucuns reAimentimpofiible. Ce non-
obftantnous en auons eu vn exemple euident en la
femme d'vn honnelfe homme. Elle acoucha dVn fila
bien ù terme le 7. iourde Décembre içyo. i^i\ hcu-
4C> du fojr , auçc deliuwiicc dç tout ce qui a açQUn
19^ Hîjlôires admirables
ftumé de venir aprcsTcntantcmcnt heureux, le lende-
main à mefmc heurccontrc toute aprelien/îon d'elle &:
de la fage femme, elle acoucha d' vn autre fils , mais qui
n'efloit pas encore a demi terme , pource que les yeux,
les narines & la bouche n'auoycnt point leurouuertu-
TCDodonaiis enfesobfcmationsfHrchap.lll.de ^yi. Beniin^
mus.
Lafemme de Monfieur Gaillart, Prefidentenla Châ-
celleric de Valence,quatre mois après le trefpas de Ton
mar; acoucha d'vn nis,& cinq mois après d'vn autre. P.
Paitl p^red". l'ay veu vne damoifelle portant deux ge-
meaux,dontIe premier fortit mort le i. lour du 5?. mois:
puis le y.iour fumant elle acoucha de l'autre , qui eftoit
MUZni.t^. l. aurcnt.au zdime defon t_y4}iatoînie,qutiFi.$l.
Dame Marie de Neufchaftcl ayant eu du Baron de
Cremaille neuf enfans^deuint en fécondes nopces auec
le Sieur de Malorcie grolle de trois fils enfemble,duquel
nombre( petite comme elle cil) ellcelloit iî chargée,
cju'enuiron le 5. mois, elle en acoucha dVn feulement.
Etcuidant;(comme aufîl)M. Thibaut célèbre médecin
à Chafteauthierry,qucles deux autres ne fuflentque
ijuelques fardeaux : lui ordonna vne forte purgation
propre à vuider ceschofes laquelle abatit deux autres
enfansjfi entiers & viuaces,que le médecin melme fe re-
pentant de fon ordonnance,difoit qu'ils cftoyent indu-
bitablement pour venir à terme nonobllant l'auorte-
ment de Tautre^fi la purgation ne leur euil fait tort. De-
puis lors elle eutplufîeurs grofieffcs, Se prefques toutes
de iumeauxjtantoil mafles,tantoil:femellcs;en l'vne def.
quelles elle fut par le violent heurtement d'vn chien
tellement blecee,qu'incontinent fe trouuant fort mal,
elle ne douta point que fon fruid ne fut mort : de façon
que quinze iours après elle acoucha de deux enfaiis,
l'vn defquels eftoit mort , & manifcltemcnt recognoiQ
fable d'auoir efte long temps auparauant .eileintrrau-
tre eftoit vif, maisiî débile , pour la communica-
tion du mal de fon frere,compagnon &voifin , que
par trois iours il ne peut teter. Neantmoins il fut
iî bien fubilanté quil reuinc , & fuc depuis page
çhQZ
C^ mémorables. 197
che7lc Roy en la grande cfcuirie. /V/. François Rohfjlt m
Joff cornwetJt.de t evfu^nimttit Cefirin^chnp.J .fi.fl.6 .
Quant aux ruperfxtationsnaî:urcl!cs,il elt certain que
<icux cnfansjconccus par interuallc de temps l'vn après
1 aucrc,dcclairent afïez. cela:cc que ( long temps y a)i'ai
remarqué vne fois àPithuicrs le vieil,en vne femme qui
coucha d'vn fécond enfant trois femaines après vne au-
tre cnfantcmcntjdont elle clloitia releuec. Lamef-
me.
Lafcmme delean Pliegc dVn village appelle Rix-
lieim à deux heures de chemin loin deBafle^ayant por-
te à terme deux befl'ons,le premier vefquit vn an entier,
le fécond ne vint au monde que fîx femaines après fou
frère , a vefcu long temps , s'ell marié , & a eu huiâ: en-
iâV\S.Ai.Gus^.BaiihÎ7i en fis ohfiruations.
Chreftienne Schichtin , ayant eu de fon premier mari
dix enfans , efpoufa en fécondes nopccs Michel Vogel
preuoft de BoUickhcin, village a trois heures de chemin
loin deBafle,& deucnue enceinte enuiron le cinquan-
tiefmc an de fon aage( &: le trenticfme de mariage )ratt
1575. vn Dimanche du mois d'Auril, fon terme venu elle
fcntit les douleurs d'enfantement, & fc dcliura d'vne
fille nommée Mariejaqueile mourut au bout de quin-
ze iours. Eftant relcuee,& faifant fon mcfnage , cinq fe-
maines & cinq iours aprc^s ce premier cnfantement,nou-
uellcs douleurs furuicnent, oui rarrellenta tellement
qu'elle acouche d'A n fils , nommé Michel , comme fon
pcrc,& vitencores à prefent. Depuis elle nefîtpluii
d'en fans. L^iwe/we.
L'an 1584. mourut à Hirshon villctte au Palatinat
proche de Heidclbcrg,vn gcntil-homme. Seigneur du
licu^nomé Philippe Ludouicde Hirshorne , fanslaiffer
aucuns hoirs viuans procréez de fon corps, mais bien
fa vefue enceinte. Ceux quife prctendoyent héritiers
de lui, cas aucnantquela vefue auortaftjon ne gardait
fojifruid long temps en vie, commencèrent inconti-
nent à molefter,luiarrachans par force toutes les clefs
des chambres, coffres, cabinets , caues & greniers : ce
qui la coutrifta de celle forte , que mettant fcs mains
N i
VpS Hijloir es admirables
fur fa teftcelle fe piint à crier de toute fa force : & peif
de iours après acoucha d'vn beau fils,mais mort & n'ay-
ant point de tcftc. Les héritiers acoururcnt inconti-.
jjcnt,& faillirent la fucceflîon du defund.Maisils n'en
iouyrcnt pas long temps. La vcfuc rcleuec de cou-
che fe fcntoit fort pefentc, & pcnfoit cjuc ce fuft c]uel-
€jue enficure, & amas d'humeurs en Ton corps affligé de
tnlkflc. Quelques Medccinsjaufjucls elle demanda
iiuis^difoyentic mcfme,n'cftimans nullement ce qui a-
uinttoft après. Pourtant lui confcillerent-ils d'aller à
certains bains & eaux minérales au long du Rhin , où
elle s'achemina acompacnee d'vne fcruante,&: s'y ren-
iait au mois de luillct. Alors l'Eledeur de Saxe y eftoit
aucc fa femme, enfcmble plufieurs autres Princes &
Trincefles : tellement que la pauuie vcfue ne pouuant
Irouucr logis , fut contrainte recourir au Preuoft ou
jMaire du lieu, lui dçclairantfa condition. Somme elle
obtint a grande rcqucfte licence de loger pour la nuift
Suiuante en la maifon de ce Preuoft. En cefte nuift^,
^ dix fcpmaincs entières après le premier cnfantemct^
elle acoucha A'xn autre beau fils: dont les Princes auer-
tis le lendemain, & de toute Thiftoire , honorèrent l'a-
couchcc. CarlLledeurde Mayencelui fitvn magnifî-
<|ue feltin/clon la couft umc d'Alcmagnc. Celui de Sa-
^elui donna mille djJlers.On contraignit ceux qui s'e-
l^oyent empare? de la fucceflîon de la iaifter entière au
légitime héritier nouucau néjaiftc en la garde noble
de fa nicrc &: tutrice.Ccft enfant fut foigneufement efr
leucSSc ell: en xic.Lamcfme.
XNF AN S morts au ventre de leurs meres^
e^ mis hors par merueillettx moyens.
LOvYSE Paupard femme de maiftre Nicolas Sc-
uin.dit Champgafté, d'Orléans, penfant que cc«
mois ne fulTenr 'retardez que pour vne fieurc
quarte ( Cpir.mc U nduicnc ordinairçmçnf T"'^ }^^l
^ "- i^ççiîçnt;
C^ Tncmôrahlcs. 19^
lis ccflenr)auoit neantmoins conccu : mais ne fe dou-
tant pas d'eilrc groflc, nelaiiTad'vfer de telles liiedeci-
;-;c'>,(ragnees,& autres applications, dont on p. acoulèu-
mc dVferjtant poutlad)te quarte, que pour les duretcz.
Jufoye,& delà rate, furucnantcsà ce mal, Icrquelles
on prenoit lors pour l'enfant eftant au ventre , fans
qu'on le reconuft pourccqu'ileftoic,maispluftcfl:pour
quelque fcirrhe , ou autre amas fait de la prétendue ré-
tention fymptomatique du fang menftrual. En fin
l'enfant mort, & les parties d'icelui plus molles ellans
pourries, fans y auoir apparence d'enfantement , les os
îedefnuerent là dedans a.uecle temps, apercèrent la
matrice fur le derriere,vers le gros inteftin,de forte qu'el
le commença deflorspcu à peu à les vuider par le jfîe-
ge allant à fes affaires, & entre les autres vn os entier de
la iâbe.Ayant ainlî long tempslangui,elle inourut,& fuc
ouuertelefîxiefmeiour de Feurier , mil cinq cens foi-
xante cinq,par M.Florent Philippe & Michel Pichard,
lefquels ne trouuerent leans qu'olTemens pourris, &
principalement ceux de la tefte^auec admiration d'auoir
peu fubliftcren ce bourbier matrical.Cettefemmefem'
ble,quantà cela, auoir efté curable par la gaftrotoinic,
ou feûion du ventre,fi le maleull: eifé conu d'heure,lc
remetii; pratiqué es enfantemcns C^fariens receu en
viage, & pratiqué difcuetement. Vr. Ronfjcttnfon Upjle^
rotomotne,
Catherine des Fiefs, Damed'Oucy près Milly,dc«
uint en fécondes nopces nialade,& grofîe en niefm»
temps,ne pcnfant pas ellire enceinte, & i\xz à Paris pen-
fec malade, comme l'aune auoitefté à Oilcans^par v-
nc infinité d'aidcs>voire iufques à la dicTte fudatoire>
nonobllant que quelque fage femme de la Roinela
iugcant grofre,par tous les accidens de groireiTe , remar-
quez par elle félon leur ordre, depuis l'aircir des mois
iufques au laidt des m ara m elles , & de U au neuf-
iefme mois: auquel temps tous ceflerent auec le mou-
uement libre de l'enfant : furuenans adonc douleur
d'çnfuntcmcm; faïui cfifeCt , ficincontincnr après fui-
N 4
200 Hifloires admirables
uanstous fignes d'ciifanc mort : àcjuoycncor ne prc-
noir-on Svîrde. Ainfi retournée de Paris en famaiibn,
porta toujours dcpuis'l'enfant clicinc , qui fut po'..:
Tout,de compte fait, uifqncs au iourdc Ton dcces , qun
2.e mois outre les neuf preccdcns qu'il cftoit vif. Lt
parties molles s'en allans en pourriture par en bas fu-
rent ( non fans quelque raifon ) eftimees par N. Ponet,
do(fce Médecin de Melun , pour boue lortant d'vlcere
matrical , &les os y reftans pour Icirrhe de rate. Yn
fin citant morte , & ouuertc le troifiefme iour A'O-
^obre mil cinq cens feptantepar Luc Champenois &;
laques D'^?ier , barbiers à MiUy, es prefences des
$iicurs de Vertau & la Gamiere , auec plufieurs
autres , hn trouuee en icellc encore force boue,
.point de matrice, &tous les os d'vn enfant, quelques
"vns pourris, les autres entiers, & entre iceux Tv-n des
<îeuxclauiculcs ayant de/la percé le péritoine, & les
inufcles de l'abdomen, n'y rcdant plus que le cuir, qu'il
nç paruft dehors par le cofté fcnellrc de(îa tout
liuide , lequel auoit longtemps au parauant efté
prins pour va fcirrhe de rate. Si le mal euft efté
bien reccrché par la concurrence & fuite de fîgnes en
la grofieffe de ^enfant mort , & autres coïnciden-
ces bien remarquées par ordre : & reconu pour tel
^u'ileftoit,iiy auoit erperancc, lorsqu'elle nepouuoic
acoucher, dcfauuereilc & ion fruiifl parla gaftrono-
mie ou fcdion Carfàriennc : ou bien encore après
l'enfant mort ( qui fut vn long traid de temps ) de (au-
uerpour le moins la mcre , pnrle moyen de celte me^.
mefeûio'n, lorsf£ul(Sc necellane remeder. ^u înc/me
traitée.
Pareil & aufil trifte efted eft bien enfuiui de pareille
caufe en 1". femme d'vn chirurgien mcfme, de Montpel-
lier nomme Aufme , gratifie (comme il eft bien à croi-
re) des plus fiuneux Àledccins de ce vénérable collège,
laquelle ( comme recite M. Rondelet au foixante cin'
quiefme chapitre de fa méthode curatiue ) ayan-
vn enfant pourri en la matrice , en ictta vne part
tic par monceaux , les grantis os rcftans à vuider-
def*-"
C^ mémorables, 2 o i
cîc façon c]uc lûngrcmps aprcs clic en mourut. ^^«
Tncfme.
M. I. d'Aliboux, Aodio. Mcdccin à Sens en Bourgon-
ne, cfcrit: en vnc fîene Ictrrc à F. RoulTcc ces mots. Ici,
près mon logis , eft aduenu vn cns aufTi eftrange que vo-
îl-rc feélion CrEfaricnnc. Vne femme enceinte , &
pourcftreia aagee, ou auti"ement> n'ayant peu acou-
clicrfinon par morceaux : auoitlVnSc l'autre cofté du
pcrif ventre fort enfié , à caufe de la violence dcsfcrrc-
r.'cns, aucc tous fîgnes d'apoileme, lelqucls le conimu-
inquoyent auffi auxvoycs de la Nature. De ce lieu du
ventre amplement ouuert par cautère Ibrtit grande
quantité de boue, & cncor autant de pareille fubftance
& couleur par les parties bafle". Elle ne voulut fouflrir
que ie la fifle fonder au ec lefpecule , pouriuger à rœil
le fond de la finuofité : mais làns cela il aparoilToit
afles que TapoiU'me & l'ouuerture d'icelle penetroit
iufques dedans la matrice, parles communs accidcns
eilimcz lelon Tordre des temps , & par les excremens
fc^mblables: eftant laguerifon de IVne & l'autre partie
parmclmc moyen venue à pareille fin , &enmerme
temps. ,^t> mcfine.
Ayant à vne nommée Collette Simon, boulangère
en la ville de Sens , efté auscfcr violentement tire vn
enfant mort fans la fuite des vuidanges , & fans la fe-
condine , il lui furuint en cinq iours au bas du ventre,
d'vn coité & d'autrc,vnefort groliç tj.meur, aucc mani-
fcftesfîgncs d'apofteitie, & fut par cautère actuel ou-
licrte profondement d'vn defdits coftez : d'où le chi-
rurgien tira awecla main quantité de fang caillé,pourri,
& puant , fans que l'autre cofté s'abaiflait , ni que ledit
chirurgien pcuft rien amener de la fccondine : qui lui
fut caufe de faire nouuelle ouucrture de l'autre part,
d'oii il tira ladite fecondine. Ce ne fut pas fins ex-
trcmes douleurs en tel hazard & dcfefpoir : car elle en
rcfta comme à demi-morte , & garda trois ans le lift,
& deux ans après elle alla à potences , puis à vn bafton,
ipres qtioy redcuint peu à peu en telle fanté qu'el-
le eut depuis pluiîcurs enfans , & entre Içs autres
^01 Hijloires admirables
vn nomme Sebnftian,pius a vcfcu long temps, ^it mtC-
me traie fê,
^ M. N. de Villcnciifuc ancien médecin en Prouence
clcnt au mefmc Fr. Koufl'et ces mors. le confefle en ce
long temps que Tay vcfcu (il auoit lois 5o. ans , & en
vcfcut depuis plus de vingt cinq en grande vigueur de
corps & d'cfpritjn'auoir onques vcu celte pratique que
m'efcnuez delà femme acouchee parle codé ', qui foit
rcikeviue. Bien ay-ic fouuenancc que tout le bas du
"ventre ellanr trcsfort tumcfîé à madame de Piles No-
nics, ie lui fis parmairtre Maurice chirurgien de celle
ville de Vaurcas faire ouucrture en l'abdomen , par cau-
tère aftuel , pro fondant iufques à la cauité de la matri-
ce, d'où fortit tant parle bas , que parle lieuainfiou-
L'crr.plus de fcptliures debouc, pareille iVnc à l'autre:
& pour ellrc à l'œil plus certifiez du lieu, nous dilatafl
mesle basauecle fpeculum, où nousvifmes la gran-
<leur dePvlcere matrieal , que nous guerifmes dedans
lefixiefmemoisj depuislequel temps elleeutvne fille.
Ce fut l'an 1351. ViUencufuc femble defigner vne con-
ception,& le fruid totalement putréfié , voire fondu &
réduit en ccfte merueilleufe quantité de pus : combien
que M. R'julfct ci-lime que c'ait efté feulement vn apo-
iîemc en la matrice. Le mefme Villencufuera'conte en
vnc autre lettre audit RouHctauoir fait faire fcmblable
cauterifation de Thypogalbe d'vne femme mariée à
BriHet apoticaire de ÏMontclimar , l'an 1558. profondanc
iufques à Tinterieur delà matrice , dont le pusiaillit
outre les pieds de la couche & en meline inftant Ibrtii;
quantité de pareiUe ordure par cmbas. Elle fut guérie
en trois mois, & ibudain après conceut i & depuis lors a
enfanté trois fils & vne fille. t_^u ynefmt tratClé.
M. Matthias Cornax, dode Phiiofoplic , & médecin
de l'Empc-eur à Vienne en Auilriche, recite en vn trai-
té Latin, plu/îeurs fois imprimé , quelques hiftoires mé-
morables & admirables cj^ui fe rapportent aux prece-
dcnte.^.Ic Irâflcrai vne infinirc decirconrtanccs de lieux,
'àns,iours,pcrronnagcs & tcfmoius y alléguez , pour fuir
prolixité 3 k Ibiiiiiwire cil tel.
Km-
cf memorahles. 2.05
Marguerite,femme deThoile de i'Efcreinire rouge à
Viennc,aagee de vingt ans, & qui pnrauant , eftoic a-
couchée de quelques enfans, deuenue enceinte pour la
troilîcrme ou quatriefme fois^l'an 1545. ayant fenti com-
me d'ordinaire bouger Ton enfant , & le terme venu
d'enfanter, par vn effort du fruid au dedans, ne peut
rien produire :tellement que" par refpacc de quatre ans
entiers elle porta Ton enfammort, icclui eftant pafie
( comme il aparut ) de la cauité de la matrice pour-
rie par autrauers ducorps vlcerc d'icelle, vers les inte-
ftins, & la reprefentant au venn-e auec grande tu-
meur,fut ouuertepar Taduis de Cornax, au milieu de
i'epigaftre , comme pour vuider vn abfces. Les Méde-
cins & Chirurgiens ne pouuoyent penfer qu'il y cuft en-
fant , attendu le laps de temps, durant lequel la pauure
créature auoit efté trauaillec de douleurs eftranges.
Neantmoins lui fut tiré vn enfant non encor fî pour-
ri ( chofe admirable ) qu'il ne fuft reconu pour
malle. Vne autre meruciile furuint : que celfe honne-
jîeicune femme , qui auoit vefcu dedans la mort par
tant d'années , fut comme rairaculeufement tirée du fc-
pulchrc&reuint en pleine conualefcence. Adiouftons
vne troifiefme merueille:au bout d'', n an elle conceut,
& porta à bon terme vn autre enfant maflc. Le terme
de l'acouchement venu, comme elle fe trouuaft en dif-
ficulté &impofr»bihté d'enfanter à la façon ordinaire
des femmes , Cornax appelle pour la féconde fois con-
feilla la metc & autres femmes li prcfentes de
crouuer bon qu'on l'ouurift comme à l'autre fois :
monftrant les raifons de fon confeiljà quoi laieune
femme s'accordoit. ?vlais la mere& les autres fem-
mes s'y oppoferent fort& ferme, dilans qu'il faloit re-
mettre le tout àDieu,&: laiffer faire nature , en la
loulageant de quelques autres remèdes moins hazar-
dcux. Cornax ainfî rebuté fe retire auec le Chirur-
gien qui auoit faiét la fecftion précédente. Mais in-
continent après la ieune femme rendit rcfprit fans
pouuoir enfanter. Incontinent on court les rap-
pcUer 5 & fut d'çlle morte tiré par fedion va
i04 Htjîoires admirables
beau fils fort viablc,n on l'cull l'ccouru aucc fa mcre,
comme ce ciodc Mcdccin prcteiiuoir.
En ce mefme opufculcilya \ne lettre cfcritc à ce
ir.cfine Cornax par Maiftrc Achillcs GaHar , dodc Mc-
«iccin d*Augsboure, contenant pareille hiiloire en mcÇ-
mcscirconltanccsjd'vne femme à laquelle près d'vnan
aprcs auoir failli d'acouchcr en fon temps, l'enfant le-
cjuel (ainfi que Tautre de Vicnnoife) cftoit paffé de
îr. cai'.ité de la matrice vlcerce verslcsinteilins(comme
il aparoifloiteuidemment, parce v-nu'ilauoitfait appa-
rence d'apoftcme en l'abdomen , & principalement au
colèe ^i.auche) fut tire par le Chirurgien os après os.
La iricre gucriceut encore enfant naturellement de-
puis.
Il raconte en ce mcrme liuret Thiftoireà lui enuoyee
par M. Gilles de Hertogccelcbre Médecin à Bruxelles,
d'vne femme^aqucUe n'ayant peu acoucher , les chairs
& parties molles de l'enfint eftans vuidees en forme
de pourriture par cnbas, onfentoit les os craquetter,
fi:lesremarcuoit-on à la main/ous repigaUïe/ans que
tel accident, quoi qu'efcrangemcnr fafcheux & infup-
portable à vne femme délicate , empefchaft beaucoup
lesadionsdecefte femme courageufe .-laquelle porta
ccRe croix trei7c ans entiers. Cela ne pouuoit crtre fans
auoir percé la matrice, laquelle neantmoins cftoit gué-
rie,comme il faioit bicn:parce qu'il n'en diftilloit poinc
de boue par en bas , comme autrement il euft fait,ioint
qu'elle auoit fesflucurs bien rciglees : &: mefmes ne
iouhaitoitrien tant quedetrouuer Médecins & Chi-
rurgiens qui entreprinfl'ent lafe«ftion conuenable, pour
Textradion de ces os ain/î craqucttans.
M. François Roufl.et, reprefentant en fsn traiclc de
renfantementCcfaricn les trois hilloires fufmchtion-
iiecsdcCornaXjlesconfcrme par vne autre dutoutad-
mirabîe d'Albucafîs Medccm & Chirurgien, laquelle
ïe defcriray ici quoi qu'ancienne > pour digiefl^ion qui
ne fera dcfagrcable,commc l'clptre & defire. l'ay veu
(dit-il,au fecoud liure de fa Chiiurgic ) vne femme , au
ven-
ér mémorables. 2 o ç
ventre de laquelle cibnc mort vn enfanr, redeuînt groP-
fe dVn autre , lequel auffi y mourut long temps après
s'cnleua vue enflure au nombril,qui fut ouuertc, & rern
dit matière. l'y fus appelle & lapenfàylongtcmpSjnefe
pouuantconfolider. :parquoi l'y appliquay de forrsat-
tradifs , & fortircntplufieurs os, Tv-n apics Tautrc-ce qui
m^eftonna , fâchant qu'il n'y a point d os au ventre. Par-
quoi faifant recerchc de LOUt,ic conu que s'eiloyent ot-
femens d'enfant mort, de forte qu'après en auoir tire
plufieurs,ie la rendi guérie : toutcsfois il refudoittouf-
lours quelque chofc de Tvlcere. ^^lexandre Benaiji
JViedecin de nojlre tempsycn fa ùraticjuc y au traité de Ix difjictil-
té des enfajjtemensficcitc vnepareille hiftoire à celle d'Al-
bucafîs.
Aufauxbourgde SuUyfur Loire, Marguerite Prc-
uoftifemme de Pierre Doret Mufnier, cftant manifefte-
mentgrofle, &venu le terme, n'ayant peu acouchcr>
quelque aide qu'elle euft des matrones , deuintpeu:;?
peu extrêmement malade,& en tin fi tendue, pour l'en-
fant & les enuelopes fe putréfiants, qu'outrela générale
enflure de tout le ventre il lui furuintlehuiâ:ouneu(-
iefme mois, vne particulière tumeur fort efleueeenui-
ron le nombril, reprefentant apoftume molle , rcugé,
prefte à percer : ce que fit maigre îcier Gallement Chi-
rurgien^ l'an 1550. le lour de Noël , auecvn cautère a-
ducl. Lelendemain au fécond appareil, voulant fça-
uoirquepouuoyent eflre quelques poils fe reprefen-
tans à Tonuertiire , trouua que c'elloit la telle d'vn en-
fant iapourriifante, quil tua par l'orifice amplifié de
ladite ouuerture aucc le relie du corps, reconu pour vnc
fiUe. Elle en guérit en aflcz peu de temps : & après la
mort dudit Doret fe remaria, & vefcut depuis bien fiinc
tnuiron 37. ans , trefpalfec d'vn flux de ventre l'an 1557,
elle n'auoit eu auparauant aucuns enfans & n'a eu cn-
corcs depuis. Fr. /iot^ffet ait traité de Ctufanttment C^-
farien.
M. I. Houlier, fur la fin du premier tome de for»
liure intitulé des maladies internes , ditvne femme a-
noir eu enfant i Paris,lequcJ par ij. jours auant que aai,-'
2LO(3 Hijtoircs admirables
ftre eut le 'oras hors d'elle parle nôbril , qui nenntmoîns
vcfta viuc,cômc rcnfanc auflu II ne fpcciali/c point co-
rnent elle enfanta, ne par où, wqCx elle eut encore enfant
depuis: ce qui euft bien mérité d'elVie recherché & mis
en hiftoire, veu que c'eftoit a raporte:co'îdcvee la gran-
de importance de cela, tant pour la tneorique que pour
la pratiquc.Tanty aquecela nepouuoit eflrefans bien
grand vlccre matiical, encore que l'enfant fe fut depuis
tiré par en bas. C'eft d'autre part chofe fort efmerueil-
lablcquVn enfant ait peu tâteilre vif en ccil: eftat, ayant
fait vn tel mefnage en la matrice & en fcs cnuclopcs, la-
quelle il auoiîpar le haut trauerfezaueclc bras: car au-
trement ne pouuoit il élire, ^^n mefmc traicfé.
l'ay apris de monHeur Bunot tres-docle Médecin de
tref-illuftre Princelîc, Antoinetede Bourbon, douai-
rière de Guifcqu'elle luiaraconté par diuevfesfois que
quelque tcps auantfon mariage, de lia âaiîecde 2.0. ans,
& encore nourrie fous fa mère , elle vit cUanten vnc E-
glifedela Fere en Picardie, qu'on prefenta à fadite mè-
re vne ieune malade decoulouree, foibîc, ériflee, & fî c-
flrangement tourmentée de douleurs , qu'on n'y co-
noiiroit& efperoitrien. La Prince/îe l'ayant fait vifi-
ter par quelques lages femme^ , defcouurit ce qui en e-
ftoit rfçauoir eil, que cefic malade, qu'on penfoic eftre
fille & pucelle,auoit en clic vn enfant conceu 8ciagrâd
qui cftoit de long-temps mort & pourri dcdansle ven-
tre. Dequoi neanrmoins en brief elle guérit, & vefcut
longtemps après en bonne fan te. ^1: m.fmc tnùfié.
Barbe Fhirer demeurante Zupfringe au bailliage de
Brcmgartcn en Suifle , ellant enceinte de fon troificlnic
enfâtj'S: prefte d'acouchcr,fut en trauail hui^ïioursen-
tiers auecgriefues douleurs, fans dcliurance. Au bout àd
ce temps, & n'en pouuant plus , elle demeura tout i fait
au lid : finalement lui aparut fur le* ventre au deflus du
nôbril vne vcfcie de la grolVeur d'vne noifette , qui lui
ayant caufé griefues douleurs durant trois iouis entiers,
finalement fut, à fon inftante prière , percée & ouuerte
par certaine fiene voifîne , s'aidant à ceft efleâ: d'vne a-
iefnc. La vefTie ouucrte &fort eflargie à cauie de l'en-
fle uré
cf* Tvemorahles, i^y
Heure du ventre, incontinent l'enuelope de l'enfant a-
parut. On appelle Ican Bourgeois Chirurgicn,le<]uel
ayant confideré auec les fages femmes , & de commun
auis d'icelles, fit auec le rafoir ouucrture telle , c]uc IVn
descouldesde l'enfant fortit & fe monltra. Le Ch -
rurgieh l'empoigne auectenailles propres, Sctireren-
fant entier par celte ouuerture , mais mort & ia demi
pourri : la mère n'ayant fouffcrt autre mal que quelque
légère défaillance durât l'opération. La playe ayât cfté
adoublee félon les préceptes de Chirurgie , cefte acou-
chee fut debout trois fcmaines après , non fans grande
incommodité, pource qu'il faloit qu'elle vfaft d^vn
bandage continuel,& nepouuantfe fouftenirqu'à tou-
te peine : au moyen dcquoi elle trefpalfa au bourde
deux ans. M.Gnf^- Bauhiny tn t addition aux hiJJoiresde
t enfantement Cxfarieii.
Vne payfanne enccinte,& défia au huidiefme mois de
fa grolVeffe , eftantcn clicmin pour aller au marché à
Sanccrre , fut iettee par ion cheual , & tomba donnant
contre vn caillou : de ceftecheute elle demeura vingt-
quatre heures fans parlev' ni mouuoir. Le lendemain
vne Heure aiguë la faiiit, fuiuie de fort rudes accidens,
comme défaillances fréquentes , vominemens & refue-
ries.On la purge & faigne,& fait on ce qu'il futpofliblc,
pour apaifcr l'ardeur de la ficurc. Au bout dVn mois a-
parut près du nombril vne enflcure de la grolleurdit
poing. Icelle ouuerte il en fortit du pus viruleutea
quantité, p^iis des morceaux de chair pourrie, finale-
ment pieceà pieceles os du petit enfant qu'elle porttDÎr.
Ayant eu cefte playe dix mois , finalement elle en gue-
fit, demeurant toutesfois ilerile. On eftime que fi Ton
Teurt aidée par difledion au ventre, l'enfant cuit peu e-
ilre garanti. Maurice C o-rde , ait i.comm.ftir le iMu, d'Hip-
f ocrâtes des maladies des femjneSitext.lJ.
Vne Flamcnde ayant fon enfant mort au ventre , ne
peut s'en dchurcr , telleinent qu'il pourrit là dedans,
fans que diuers remèdes appliquez par dedans léruiit
fentpour en faire fortir les pièces. Finalement,ellc raef^
|ge emprunte vn inflrumenc Chuurgique, nôme bec do,
•io8 Hiftôiresadmiréihles
grue , à r.iide duquel , de les propres mains elle tira le*
os de ceft enfant pourri : puis s'eltant foulagce parlaue-
mens , fomentar;o!is , cituucs & autres aides conuena-
bles, reuinr en pleine lantc. /?. SolaKindre an. 5. im. de fa
coiifcils 5 f /i . 1 5 . . i )■/ . 4 o .
E NF A N S miracaleufement
conferuezj.
L'An mil cinq cens quarante fîx, en lîi ville de Mifne
en Saxe , h feruance de Thomas le Feure threlbncr
du publiCjtcnantvn petit enfant en fcs bras & regardant
par vne fencfoc haute, ik du troifiefine eftacc , par mcf-
garde le laifia efchapper de Tes bras, teliei^ient qu'il
tomba en vn inftantfur le paué , d'où il fût rccuilli,
fans ellrc bielle ni endommagé en endroit quelconque
de fbn corps. George le Feurcenjl'S ^^ylnmdes de AIijij<^
linre 5*
Aumoisdeluin i^^z. vne fillette de Pierre Pelicepa-
ftifîler en la me.rme ville & rue' du thrcforier furnommé,
ciiant montée a li plus haut de la maiion, le laiiTa cheoir
à bas & ne (c fit mal aucun, ai* mcjhte Uurc.
Le fils de Simon Cramer Conleiller delà mefmc vil-
le , & demeurant en mefmc rue que les deux preccdens
tomba d'vne fcnclire haute , &: emporgna le challs d'v-
ne feneftre au deilousjmais il nclaifla de tomber incon-
tinent fur le paué qui ell de pierre fort dure , & toutes-
fois ne fc blefla en nui endroitxc qui auint lan 1559. ai*
mcfme linre.
Au mois de Septembre Tan i<^66.\?. feruante deSimon
Richter, citoyen de Mifne , logé cliez Vvolfgang lier,
lailla tomber d'vne fort haute fenellrc vn petit garfon-
net qu'elle tenoit en fes bras. Il chcut fur vn bout à<:.
chariot, puis de là fur le paué : mais il ne fut endomma-
gé ni ofFenfé en forte que ce fuli au mefme Hure,
L'an 15^8. au mois de Juin, Lrafincfils de Vvolfgang
.Beme;,aagé de quatre ans, tomba d'vne feneftre du logis
ilc fon pae en laruè;& ne fc fit aucû mal, ah tueftue linre.
Eu
C^ mémorables. 209
En vn village proche de Cygnee, cerranie payfanne
con-^iianda à vn lien ieune fils d^aller queiir & ramener
à Teftable Içurs hauts paifrans à Tentree du bois. Tandis
que l'enfant tardoit, voici de la neige en telle abon-
dance qu'en moins de rien les chemins furent couuerts
& la nui(ft toute noire luruint, tellement que ce garçon
demeura enclos es montagnes , fans en pouuo^r fortir.
Le père & la merc penfans moins aux bœufs cu'àleur
fils, felcuerentde grand matin pour en auoirnouuel-
ics : mais la neige efioit fi haucc, qu'ils ne fçiuioyent oùt
l'aller cercher. Leiour enluiuanc ils tracnlîentpar jafo-
reft, pour trouuer le corps. qu'ils ellimoyent priué d'à-
ine:mais en fin ils le trouuer en r en vn abri, que la neioe
n'auoit point couuert ni touché, oùileftoitafîls , ^&
qui commença a leur morillrer ioyeufe chère d'aufli
loin qu'il les defcouuri t. Ils lui demandent, pourquoy
il tardoit tant à reuenir? L'enfi-nt reipond, fans auoir
fenti neige, ni froidure, ni bleflure quelconque,c]u'ilat-
tendoit le vefpre. Derechef, ils l'enquierenr, s'il auoit
mangé ? Vn homme que ic ne conois point,dic-il,eft ici
venu qui ma donne du pain & du fromage. Ils le reme-
nent tour-ioyeux en la maifon. I. Alanlna , atypemier i/-
Mre defs reçut ils.
L'an 1565. fur la hn de Septembre, vnehlle delà ville
deMifiiclaqueUc des quelques temps auparauint efioit
idiotc,& de petit Icns, emmena (fans que l'on s'en don-
iiaftaurrc ment garde) hors de la ville certaine fillette
aagee de trois oiis , Se l'ayant conduire iufques auprès
il'vne riuicre nommée la TrcbiP^, allez large à caufe des
Îduyes,defpouilla cefte fille, la charge d foa col, rrauerfe
ariuiere : puis reuient , & reueit ce pauure enfant : &
laflec du fardeau iaiHc l'enfant à tene à la pluye&au
•vent , qui eftoyent fort afpres alors. La fillette de-
meura toute la nuid, & la moitié du iomfuiuant, a-
bouchee fur la terre , où elle fut trouuee ( cymme
Dieu voulut) par vn ieune villageois , Icqueila princ
en Cts bras , & la porta en vne mellaine proche de ià.
D'où elle fut reportée à Tes père & mère cfperdus de U
PS^Sî i<i \^ fiy^^wc. En<luU'(4 qui lui auoit âlllfté , ref-
210 Hijfûirâs admirahles
pondit qu'elle auoitefté toujours enuironncedcpeti'^
ciiicns blancs qui l'auoycnt garantie. C.L- Feurcau^.lîH.
defes ^nnuUsdi Mtjr.c.
L'an 1Ç58. furuint vne tempeftc & pJuye fi horrible en
Thuringc, qu'en peu d'heures elle ruina pluficurs édifi-
ces, Scies torr en s furent fi furieux qu'ils cmporterenc
grand nombre de pcrfonncs de diuers aagcs. Or comme
vnc impecueufc rauinc d'eaux fuft venue heurter U
maifon d'vn pauurepayfan de Burcktonne, en laquelle
fa femme eftoitacouchec quelques heure-s auparauanc
é\\\ fils , la maifon commence i branfler , & en vn in-
ftantTeau emportepierres , bois , toid , & engloutit la
paùurc acouchee, emportant l'enfancon qu'on auoit
ocu auparauant couché en vn auge en façon de mct,qui
fut arrefté par vne branche de pommier , où il demeura,
iicfut trouué l'enfant fain &fiuf quelquesheures après
que la rage du torrent fuft efcoulee : chafcun rcconoil-
fant la vérité de ccfte notable fentence que le fecours
de Dieu commence a fe monftrer , lors que celui des
hommes vient à desfaiJlir. vh. Lonicer au thcutrcde!' exem-
tiesp.in-.^^é. H.HuranusIurifconfulte dcfciiten beaux
vers Latins vn pareil miracle qui auint lors en certain
autre endroit du melme pays à l'efgardd'vn petit enfant
au berceau, lequel fut emporté fort loin par la fureur
des eaux, puis poi'e doucement en vn aflcuré nuage , où
ilfuttrouuc viuant.
André Merkcr récite , en certaine oraifon funèbre
parluiefcrite touchant les afflictions, ou'eftant ieune
garçon jî lui cft aucnu d'auoir efté miraculeufemcn:
conferué des eaux , & du manifeftc danger d'cftre noyé,
par trois diuerfes fois :1a première à Scchoufe, la deu-
xiefme a Vviteberg , la dernière à l'erleberg, où ce qui
s'enfuitlui auint. Comme il cftoit fur le pont fort haut
de celicu , certains Rciilres en grand nombre , courans
impetueufement & en foule par Li , le pouficrent C\ ru-
dement, qu'il chcutpar dellusles apuis du haut en bas
au plus profonddu courantdu fieuue, d'où il remonta
far trgis toia au dclTus , en prefcnce de plusieurs crians
mife*
^memorahies, ni
tnîrerkordCj& le tenans pour perdu. C'cftoir en hyuer,
& les pièces déglace le couuroyenr: tellement qu'em-
porté du hl de l'eau fous la glace, ilfutpotffié iufquasi
vn moulin afi^sfur Icflcuuc, ou l'eau ne fe trouuant
glacée, à caufedu mouuemeut rapide & du faut des
eaux pour faire tourner les roues de ce moulin ,il fut ti-
*té,&rauué de mort. vh. honicer au tmf/ne théâtre.
En vn village nommé i^MmHe/wc/jt/î, près deFriberg
en Mifnervn petit garçonnet, fils d'vn tifîcran de toiles
cheminant enfantilcmentcscntours delà maifon,cheut
dedans vn large canal d'eau qûifert à vn moulin, &
ibu dain emporté par le roidc courant de 1 eau, palfc par
delVus cefte maifon paternelle , qui couure le canal puis
deffusvn pont,&e(l porté fi loin, que c'eftoir pour e-
ftre noyé dix fois , îans la protection diuine,qui voulue
quel'enfant fut porté iuiques au moulin, ou il empoi-
gne de Tes petites mains la barre qui fertà fermer l'eC-'
clufe de Teau , & fe prend à crier tant qu'il peut. Vnc
vieille femme rentcnd,y acourt, Rappelle le mufnier,
tellement que le petit garçonnet eu reciré fain & fauf
lîors des eaux imperueulés. iJ» loefnte.
L'an 1565.1e dîxiefme iour de Mars, fur les fcpt heures
Au matin,le threforierdc Rotembourg, ville afllfe fur le
fleuueSala^;acheminât delà ville au cliafteau,pafle(cô-
me ilfaloit neceiTaircment) par dclTusle pont , fuiui
d'vn fîen fils leune enfant, lequel s'eftanc amusé à re-'
gpi-der l'eau impetueufc,Scà oller quelque ordure atta-
chée à fes foulicrs , glifla tellement en vn endroit mal
clos,qu'il tombe au profond de Tcau. Vn pefcheur de-
meurant en certain jardin proche du pont , oit le bruit
de ccfie chcute,court viftement celle part , & au grand
péril de fa vie fe iette a nage après ce pauuie petic
corps , que les flots auoyent porté au long des mu-
railles du chafteau. Il l'empoigne par la robe ,maisli
pièce lui demeurant en main , & le corps retom*
bé en l'eau , pour la dcuxiefme fois il le happe
par Tvn des pieds, & le porte a fapauurc mère de-
■li-mortc Se outrée de frayeur , qui ratteadoiç
O 2.
2fi Hijl cires admirables
à la tiué.Au bour de deux heures rcnfantreuint à fo/,
&fut cotalemcnc iiucii deux iouis après, à laioye de
tous qui louercntDicu de fon afllllancc miraculeulg.
1 a mefme.
La veille de Pafques en la mcfmc annecapres quel-
ques horribles tourbillons de vcntSjConnerrcs, grefles,
efclairs/ouldres 6i figncs de feu enTairjvneimpetucu-
fc rauine d'eaux desbondatout à coup fur vn gros vil-
lage nommé Gr^fz,du Dioccfe de Friberg en Mifne;
dont les torrcns & ruilfeaux s'eniicrent de telle furie en
vn inftantjqu'ils ruinèrent & renuerferent 40. maifons
cncevillagcfanspertcdeperfonnequed'vn eiif.mt. H
y en eut pluficurs conferuez comme par miracle : deux
autres auec leur mère furent trouuez à (te fous les rui-
nes dVnemairon;,dedansvn monceau depaille,qu'icel-
Ics ruines n'efcraicrcnt.point: item deux autres en vne
faulaycjvne nourrifle auec fon petit enfant apuyé à vn
efcalier ,vn aueugle à Tcntree de famaifom& plufîeurs
autres grands & petits en des lieux eileuez.^qui auoyent
fubfiftc contre la fureur de l'eau, l 4 mej'me.
Ce mefme iour & an, fur le foir,vnc autre rauine d'eau
s'eftant desbondec fur la ville d'Iflebe en Saxe, donna
fpeciaicmcnt,&: comme de complot fait entre les eau>,
contre le logis à'yn honncfte citoyen du lieu nomme
Bcrthold Vogt.Incontmentle dcuant de ce logis & viv
partie du poille tombentb:is.Ded*»nsce poiflc ettoit vi.
petit enfant au berceau. Le pcre & la mère eltonnezde
vifîtationiî foudaine,&oyans le bruit du berceau agité
des vagues, pallent à trauers , emportent Tentant en la
Inaifon de Michel le Feure leur voifin. Reftoyent qup.-
tre autres enf:ms couchez en vne chambre haute du
logis. Le pere,foucieux de leur vie plus que de la fîenc
propre rentre dedans la mort prcrente,& aya nt trauerfé
dç.s très-grands périls monte en hauncmbrafie deux <\''u
ceux enfans pour lesfayuer. Lùdefl'usle planché lui
fond fous les pieds , tellement qu'il tombe en l'eau,
laquelle l'emporte iniques à a n ^ros pau de bois où'
il s'aneif c & y demeura enuiron demi-heure , s'y fou-
ileiianc;! grand' pciuc diaigc dcfçs 4çusÛls, & criant
5 haute voix au fecours. Mais peifonnc n'ypouuoit al-
leri caufede la fureur cftrange des ondes imperucufo.
Se voyant dcfnué de toute alfiftancc humaine, & com-
me defefperant de la vie de foi & de Tes enfans , ilfe re-
commande & eux humblement à la mifericorde de
Dieu , fcfouucnanc du Prophète louas, qui auoit efté
preferué dans la mer , & au ventre du poiflon. Tandis
qu'il inuoquoit ardamment le Seigneur , voïci vn gros
foliucau,qui pouflé des vagues lui arrache & emporte
vn ce Tes fils. Vn autre plus gros ruruenant& roulant
d'incroyable roideur,lui fait lafcher ce pau où il auoit
demeuré quelque temps, & maugré qu'il en euft rem-
porte auecfon autre fils en vn iardin derrière fa mai-
fon.Ilsn'auoyentque les telles hors de l'eau fort enflée:
fe fouuenant de l'autre fils,il fe prend àl'appeller : l'en-
fant refpond de defl'usvnfoîiucaujoù le père le def^
couure afllsacheuauchon.il nage droit celle part,&les
chargeant tous deuxfur fésefpaulcs, gaignevn haut &
grand monceau de bois/ur lequel il grimpe & s'y repo-
le auec fcs deux fils,enuiron cinq heures. De grand ma-
tin les eaux s'eftans cicoulees , il les porte au poifle du
Feure fulnommé,©!! ils commencèrent à fe reprendre.
Quant aux autres deux ewfans refl:ez au lia: en la
chambre haute, la bonté de Dieu les y conferua de fa-
çon excellente. Le père n'y pouuant aller parl'efcalier
acouftumé , obtint de fon voifin de faire percer la mu-
raille mitoyenne , & entré dans la chambre les trouue
dormansaulift^lapuiflance diuinc ayant fouftenu de
fa main cerefte de chambre,comme en l'air, tout le re-
ftc du logis ayant efl:é renuerfé & emporté par les
eaux. Aufll toft qu'il fut forci par l'ouuerture, & euft
emporté hors fes enfans, lachambrclelid & le reftc
de la maifon tresbucherent incontinent. Les mai-
fons voifines auoyent efl:é grandement endomma-
gées par cefte ruine d'eaux: mais Dieu les fiipporta;cel-
fedcBertold ayant efl:é renucrfee , toutcsfoisauec ce
fi'pport miraculeux que nous venons de voir, t^
mefme,
O 1
^14 Htjloires admirables
L'an mil cinq cens huitantc,Ic vingtcinquiefmcfour
de luin/ur les dcuxheures après midi Anne du Pré fillet
de Monfieur du Pré confciller au fîege Prcfidialdo
Lyon,&: deDamoifelle Catherine deBonuoi/ïn^fa me-.
re aagee de deux ans trois mois ou enuironjeftant mon-
tée au hautd'vn cfcalicr & vis de pierre, fcruant à trois
cftagcsjdcla hauteur de foixante deux marches, en la
mailbn quia pourenfeiene vn flacô de relief fur la por,
te,'pource nommée le nacon d'argent, en rue S.Iean à
Xyon,& s'eftant auancee par vn treillis qui cftoit fur v-
^e platte forjnp au haut dudit efcrJierjtombe bas en la
cour du logis toute pauee de pierres de taille:& peu s'en
falut quelle ne cheut dedans le puits prochain de là.
Soudainement on accourt au bruit, mcfmemejit vnc
ieruantc qui i'auoit veu cheoir. L'on trouue celle fîllc
en fon feant , laquelle commence à nrc à ceux qui l'a-
bordèrent , fans le monftrer eftonnee , en forte que ce
-/uft.Le bruit va par la maifon & iufques aux voifins. On
l'emporte en haut , on la met fur le lia:, feu monfîeur
Dalcchamp,3fmpniîcur Ponsençorcs viuans, Dodcs
medccinswppellcz , y ^indrent proniptenient acotnpa-
gnezd'vn Chirurgien, Le perc & la mère pçnfoyeni
Cîue leur fillette fut toute brifee.Nous la trouuons ( dit
]MonfieurPons,au difcours qu'il en a drelfé , & de qui iç
l'ay eu comme le prcecdcnr , & quelques autres hiftoi-
rcs admirables ) cfucilke , &: qui d'abord commence ii
nous rire. Nous la faifons defpouiHer, la manions & vi-
fîtons par tout , noys n'y trouuons rompure aucune,
point de dcfloueure : upus lui faifons mouuoir tous Tes
membre*^,point de doukur,rien d'offcnfé , non pas meA
inevnç feule marque de froifl'urc tn endroit quelcon-
«^uede tout (on corps, nul mal de coeur, nulvomifle-;
mennnul afloppiffement, nul crachement ou difiilla-
tion de fang. Bref nous la trouuons faine & dç fesfens^
& de toute <a oerfonnc, & en toutes fes actions point Cr
fiqneC;,pointfafçhee:au çôtrairçriants ehafçuo, &"ous
entretenant de fes petites mines. Ceipur elleipangca
dcbonppnctu>dormit bien;leuee le lendemain, chemi-
na ^ufTi faine & drue qu'elle eiloupsrauant facheute^
(^mémorables, zi^
Au commencemcnc de l'an i5oï. que i'afïciribîois ces
hiftoire.s,elIc cftoit cncorcs en vie, belle & grande, de
force taiile^&preftc à :n2.nQT. Manches de Lyon.
EN F ANS Ingratscrperuers.
ENVIRON l'an 1470. ilyaLjoic vn icune Duc de
Gueldrcs, nomrnf^ Adolt, qui commit vn cas trcs-
hurnblc. Carilauoit prins Ton pereprifonnier vn foir,
comme il Te vouloit aller coucher , & mené cinq lieuè's
d'Alemagnc à pied, fans chauiTes,par vn temps tresfroid,
oc le mit au fond d'vne tour, où il n'y auoit nulle clarté>
queparvnc bien petite lucarne , & là le tint /îx mois:
dont fut grand guerre entre le Duc de Cleues (dont
ledit Ducprifonnierauoit efpotirélarœur) &ceieune
DucAdolf. Charles dernier Duc de Bourgongne plu-
sieurs fois les voulut apointer: mais il ne peut. Le Pape
& l'Empereur à la fin y mirent la main , & fur grandes
peines fut commandé au Duc deBourgongne , de tirer
l'autre nommé Arnoul , hors de prifon. Ainfilefit, car
Adolfn'ofale lefufcr, pourcetju'il voyoit que tant de
gens de bien s'en cmpefchoycnt, & C\ ciaignoit la force
du Duc. le les vi tous deux (ce dit Philippe de Commi-
nes) en la chambre du Duc de Bourgongne, par plu-
sieurs fois & en vne grande allcmblee de Confeil, oh ils
pLaidoyent leurs caufcs:&vi le bonhomme vieil pre-
fcnter le gage de bataille i Ton fils. Le Duc de Bour-
gongncoefiroit fort les apointer, Scf^uorifoitle ieunc,
& lui ofFroit le pays de Guddrcs auec leieuenu , fauf
vnepcticc ville nommée Graue , aHr/.e auprès de Bra-
bant, qui deuoit demeure;- au pcre auec lereuenu de
trois mille florins, & autant de pcnfîon. Ainfile toutlui
cuft valu ftx mille florins,auec le tiltie de Duc. Commi-
nés auec autres fut commis pour porter celle parole à ce
îcunc Duc, lequel fit refponfe qu'il aimcroit mieux a-
Moirietté fon perc,late{te deuant , en vn puits, & de
i'elheictté après, que d'auoirfaict cettapointcmentî
<iu*il y auoit «quarante quatre ans que fon père
O 4
^i6 Kjloires admirables
cftoit Duc , & cju'il eftoit bien raifonnable que lui
le full : mais que trcf-volon tiers il lui laifTcroit troii
mille florins par an , par condicion qu'il n'entrtroir
îamais dedans la Duché : &:aflez d'autres paroles très-
mal fagcs. Ccciauint comme le Roy Louys on/icf-
me print Amiens ftrrte Duc de Eourgongnc , lequel e-
ftoitaacc ces deux-ci à Dourlans, où il fe trouuoit:
trcf-cmpefché , & partit foudainement pourfe retirer
à Hefdin, & oublia celle matière. Ccieune Duc print
vn habillement de François, & partit, lui deuxiefme
feulement, pourfe retirer en Ton pays. Pafiantvneri-
uicre il fut reconu en payant le poit , piins prifonnier
&: amené à Namur , ou il demeura ferré iufqucs au tref-
pas du Duc de Bourgcngne(lcquel tut tué dcuantNan-
ci au commencement de Tan 1477.) que les Gantois
le mirent dehors , & auoyent vouloir de lui faire c.Ç~
poufer par force celle qui depuis fut Duchcflc d'Au-
ilriche & le menèrent auec eux deuant Tournay , où il
fut tué mefchamment & mal acompagné : comme /î
Dieu n'euft pas efté faoul de venger ceil outrage qu'il
auoit fait à fon pcre, qui çftoit mort auant le trcfpas du
Duc de Bûurgongne eftant cncores fon hls en prifon, &
à fon trefpaç laifTa au Duc de Bourgongne fa fucccfTion,
à caufc de ringraticude de fon fils. Ph. de Commines ait 4.
liare defes mémoires, ch.l,
Vn quidam, dcuenu riche , voyant mendier fon pcre,
eut quelque honte, &:le retira en la maifon. Vn iour
comme on lui .aportoit à table vn plat de viande fort
exquifc , entendant que fon perc entroit en la chambre
il fit ferrer ce plat, puis quand le père fut forti, ayant
commandé de rapporter la viande, le feruitenr trouua
leplatplein de ferpens. Ce qu'dyautfait entendre à fon
inaillrc,il voulut aller voir que c'elloh. Aprochi-nt près,
le plus grand de ces ferpens fe lança à fa face, ioignant
fa bouche tellement à celle dclhommc , que ianiviis il
ne pouuoit manger que le ferpenr n'en euft fa part:
& demeura en ceft eftat tout le reftc de fa vie. Aïan-
lias en Jes recueils, Ph. Lotiicer en fon théâtre d'exemples^
£a^elSs,
Vn
^memoYciUes. 217
Vn père vieil & pauiire, vint prier Ton fils de lui afli-
i\cr. le fils eftimantcjuecelui fcroit déshonneur de
s'auouer dVn tel père /faignit \z mcrconoiftre,& l'ayant
t2i\^cc bien rudement lui comanda de fc retirer. Lcpau-
ura père auec les larmes aux yeux Te retira : mais à peine
3uoit-il tourne le dos , que ce fils ingrat deuint enragé,
& mourut en ce miferable cftat. ManUns en fss recueils,
Ph. L onicer enfin théâtre 3 pa.iS^.
L'an mil cinq cens cinquante, en la ville capitale de
la Duché de Prufe, nommée Coniksberg, vnferrurier,
ieune homme fort dtsbauché , tua Ton père & fa mère
auec vn pilon de fer, fous efperance d'auoir leur argent.
Incontinent après le coup il fe tranfporte en la bouti-
que d'vn cordonnier où il acheté des fouliers neufs, &y
iaifîe fes fauates , que le fils du cordonnier iette fous
vnbanc. Deux ou trois heures après, la boutique du
perc ayant efté ouucrte par commandement du Magi-
llrat, qui auoit entendu qu'ily auoit du defordre Icans,
l'on trouua les deux corps aHomme?, , dont le fils fe
montra en aparencc fi outré & affligé, que perfonnc
ncpcut fe douter qu'il fut auteur d'vn fi exécrable for-
faid.Or auintque le cordonnier,remuant fous fon banc
appcrctut les fauates ou vieux foulicis de ceieirtiefer-
rurier, marquetez de fiing. Et fut aufli remarqué par
ci''autres,quc ce malheureux auoit outre coullume bon-
ne bourfeSc bien garnie. Ce qifcflant rapporté à iu-
ftice, on remprifonne.Soudain& fans torture il confeffe
fon parricide, &eft exécuté comme il mcritoit. Le pi-
lon attaché au palais de iuftice branfle continuelle-
ment , ce dit-on. Philip. Lonicer en fin théâtre , pa^e
284. fir le rapport d'i/n des prcmien Théologiens de nofire
tewps.
L'an mil cinq cens foixante , en ia ville de Baf-
le, vn mcfchant garnement fit mourir par poifon fon
propre père, homme riche & de bonne conuerfation.
Ce parricide ayant efté dcfcouuert & conuaincu, fut
parfentcncedu Magiflrat attaché nudàvnaix, rrainé
pai les rues , tenaillé es quatre places principales , puis
^ I o Hi (loir es admirables
bnle, & laiflé vif fur vnc roué, où ayant langui en
^^randstourmcns rdpace de neuf heLn'cs , auccreco-
noiflancc&dcccftaciondcfon forfait, il expira. Caf^At
UedLoy en la <^t4xtriemepart. defes Chroni<ji*es.
Vn mien ami homme dcgrand cfpnt, & digne de foy,
citant vn iourà Napleschez vn ficn parent, entendit de
imià en rue la voix d'vn liomme criant à Taidc , qui fut
caufe qu'il alluma la ch-a43dclle , &y courut pour voir
<]uec'elloit. Eilant fur le lieu, ilvid vn horrible fan-
cufme, d'vn port effroyable & du toutfurieux , lequel
■^ouloit à toute force entraincrvn leune homme. Le
pauure miferable crioit & fc dcfcndoit : mais voyant a-
procher ceflui-ci, foudain il courut au douant , l'empoi-
gne par la main & faifit fa robe le plus eftroittement
<îu'iIluifutpoirible, & après s'eftre longtemps debatu,
commence i inuoqucrle nom & Taidc <ïc Dieu , & ef-
chappe, Icfantofme difparoifTant. Mon ami meinccn
ion logis ce ieune homme , prétendant s'en desfaire
doHcemcnt, &lcrenuoycrchcz foy ; maisilne fçcuc
obtenir ce poinà. , car le ieune homme eftoic tellement
eftonncS qu'on ne pouuoit le ralfeurer , treflaïUant fans
celle de la peur qu'il auoit pour /i hideufe rencontre.
Ayant en fin rcprîns aucunement Tes efpiits , il confclîa
<l'auoir mené iufques alors vno fort mcfchantc vie, elle
contempteur de Dieu , rebelle à pcrc & i mcre, auf-
quelsil auoit dit & fait tant d'iniurcs & d'outrages in-
fuporrablcs, qu'ils l'auoycnt maudit. Surce il eftoitforti
delamaifon, & auoit rencontré le bourreau fufmcn-
lionné. t^ltxutidreiCt^Uxandiiei au^.littre de fes iûhrs
Vn icunc homme natif de Gabies , non loin de Ro-
me, & de petit lieu, eftanc d'vn naturel farouche, fal-
cheux, inrupporcablc &du tout mcfchant , dit,&tîc
beaucoup d'outrages à Ion perc : puis agité de rage
commence à fc doliner au diable , & fort incontinent
dclainaifon^s'acheminant à Rome, pour y machiner
quelque nouucllc mcfchanccté contre fon dit per^
tîtUïlL çhciiîai il rencontre le fiable ; en guifc de bri-
cand
cf memorahles, 119
grand furieux , la barbe & les chcucux mal-pcigneï: , le
veftement fale & rompu lequel s'acoflant de lui l'inter-
roguc descaufcs defon mcfconrcntcmcnt. Leieunc
homme rcfpond qu'il auoit quelques paroles auec fon
pere,& fcdelibcroitdc.lui faire vnmauuais tour. Alors
le diable adioufle , que tel inconuenient lui eftoit aue-
nu,&le prioit qu'ils fufient compagnons, pour auifer
çnfcmblc aux moyens de fe venger des tors qu'on leur
auoit fait. La nuiél venue ils entrent en vne hoftellerie
iurleur chemin,& couchent en mefmeliâ.Mais le mal-
heureux compagnon fai/ità la gorge le pauure ieune
hommc,lcqucl dormoit profondement, &reufteftran-
glé, fî le ieune homme fe refueillant n'euftiuuoqué
Dieu à fon aide. Dontilauint que ce cruel & furieux
^ifparut,& en fortant esbranla tellement toute la cham-
brcquc les roliueaux,le toi<5(: & les tuiles en furent fra-
caffces. Le ieune homme efpouuanté de tel fpeftacle,
& prcique demi-mort, fe repentit de fa mefchante vie,
& guidé de là en auant parle bon efprit^dcuint ennemi
des vicesjpa/Ta fa vie loin des bruits du peuple,& feruic
de bon cxeipplçà {(^s prochains, ^ume^mz liarc ^ ch^^
EJSIF AN S pratiquez,
Y 'In v E N T I o N a efté rrouuce par aucunes femme:»
JL-ftcrilcs(lcs vues portées à cela de leur propre mou-
Viemcnt,pour complaire à leurs maris , & amener vn hé-
ritier en la maifonfous leur charge,au preiudice des
vrais héritiers : les auprès confentîintes aux impofturcs
de Içurs propres maris, pretendans auanccr leurs affai-
res par telles pratiques deteftablcs ) de garnir leur ven-
tre de force linge & petits coufTmcts, toutesfois peu à
peu,pour ne faire croiftrel'enfiure qucpar mcfurerde
contrefaire les defgouftees, les chagrines , lesenuieufes>
Jes pelantes & malairees;& au terme de neuf mois fupo-
i'br quelque enfant apporté recrcttçnjéc delà maifoii c^
i io Hîjloires admirahles
<Iuclqucpourevoiiînc ,,ou(à faute d'aune) de rhoflcl
r>icu;p.-îrtbîs acheté a beaux deniers contant, ou fuppo-
lé par le mari^rayanc eu dVnc concubioe. Ce n*cft pa-î
toutjcar comme celles qui font fteriies fe font feruies du
iiioyé de telles fiippofitiôstaufTi s'é font aidées aucunes,
<îui au lieu qu'elles defîroyentauoirvngarçô pour plus
S"and contentement de leurs maris,voyoyentque Dieu
leur auoit donné vne fille. Comme on fcait aflez qu'il
3^ a cnuiron cinquanteans qu'vneDanic de Dauphmé
iic' \ oyant cllre en la maie grâce de fon mari, de ce qu'el-
le ne lui izxÇolx. que des filles, forgea vne rufe telle pour
3c rendre côtentjC'efi qu'elle gaigni vne femme de baf-
ie condition, des le commencement delà grofleflc d'i-
■cclle,&la fitconfentirà lui donner fon enfant, incon-
tinent qu'elle feroit acouchrce.Apres laquelle pratique^
■celle Dame ayant vfé de touteslcs mi nés ci deiîus mcn-
rionncesuequifes pour contrefaire l'enceinte, enfin,
fiounouër le principal 8c dernier ieu,incontinent qu'el-
le entendit que la fufdite eftoit en trauail d'enfant, &
tju'elle eftoit deliurce d'vn fils/e mit au lift feignant e-
ilreenla mefme peine, attendant qu'on lui aportall ce
garçonnet, qui lui auoit cRé promis. Ce qui fut fait , &
lui tut apporté par certaines fagcs femmes fî fecrette-
nent, qu'il fut rcceu du mari, comme ifl'u du ventre de
4*a fcmme:tenu aufli & réputé pour tel de la plufpart du
y cuple. Surquoi ic ne veux omettre vn exemple nota-
î)le du iugement de Dieu.Car celle Dame, qui ne pou-
noit naturellement élire induite à porter aucun amour,
nia donner aucune puiflance en fa maifon à ceft en-
Tant(combien qu'au moyeiideladitefuppofîtion il eulï
elle laide héritier par celui qui penfoit élire fon père)
rayant toujours en mefpris de plus en plus , en fin le
contraienitd fe bander contre elle : &: auoir recours à
iuflicejpourfuiuant Tes droits comme fils héritier : iuf-
quesà vouloir lui faire rendre comprc.Cc qui irrita tel-
lement ladite DamCpqu'eUepourchaifa fa mort :pour le
•moins a etle tenu que le meurtre commis en lui , fut
parla follicitation d'icelle. liu.i.deU conférence des mer-
italles ancic.tixs ^ modernes.
dr mémorables. zit
E NF ANS nourris far mi les loups,
DIe V fe repentit d'auoirfaitrhommejce dit Moyfe,
Gcncf. ^. Etlesliuresdes Philofoph^s font rem-
piisdc plaintes touchant la malice du coeur humain.
Platon au y.liurc dcsioix, ditquVnieune enfant cilla
belle la plus farouche , la plus violence , & plus mal-ai-
fec a apriuoifer d'eurre toutes les belles ; & qu'on ne
fçauroitlerefcner de trop près. Item Arillotc au i. li-
ure de ces Politiques confermc le mefiiie. ^^^ Lions,
les Ours Vautres belles fauuages font intraitables : non
pas toutesfois tant que les enfans laiHez à leur aban-
don,& deftituez de leur adreffe. On recite,qu'vn ieune
enfant d'vn village au Landcraviat de Heffe , fut perdu
par la nonchalance de fon père &: de fa mère, qui le cer-
clîcrent longtemps puisaprcs^ & ne peurentle trou-
uer. Cevillage cftoit plein d'arbres &; de iardins, af-
fcz proche d'^-ne forell , d'où lés loups fortoyent pour
aller à la |»icoree. Quelques années après , on aperceuc
entre les loups qui enrroyent dedans les iardins;, vn a-
nimalnon du tout t.el qu'vn loup , & qui ne fautoitpas
fi difpoilement pardeffusleshayes.Cequ'ayanteflé veu
plufieursfois auec ellônement paries payfans,& cuidans
que ce fuil quelque belle d'autre eipece^ils en firent rap-
port au gouuerneUr du lieu, lequel en donna auisau
Landgtaue.Icelui ayant commandé que ceit animal fuft
chafi'é, prins vif, & amené, par vn moyen ou autre : les
pàylans firent en forte qu'ils l'attrapèrent & l'amené-
Tcnt, cheminant a quatre pattes comme vn loup, & dV-
ne mine truculente. Eftant en la laie du Prince, il i^j ca-
che fous vn banc , où il commence à fiffler & huiler
comme vne belle. Or ayant defcouuert en lui quelques
traits (quoi quedesfjgurez) de face humaine, le Pnncc
commanda qu'icclui tuft nourri quelque temps entre
lèihommci.'iufquesà ce que l'on peull conoiitre plus
Cicattcme'ot (JkTc ce pbuuoiteftre. Ccui qui en auoycnc
m Hijloires admirMes
charge s*y employèrent tellement , que Tanf mal corrt-i
mençaà s'appriuoiler,&re tcnirdebour,6: marcher co-
rne Icsautre*. hommes, finalement à parler diftinfte-
ment:& lois ( autant que fa mémoire peut fournir ) il
raconta & confcf^a aùoir vcfcu dedans vne foffe anec
les loups,qu' le f^aitovcnt doucement, & lui baiilovcac
toufiours la meilleure parc de leur chafle. M» DreffinU»
enfon liwc de la vo'mellc ^ ai:ci«'nne dtfcipane.
Plufîeu'-sgcnrils-l:ommes François ont peu tcfinoi-
gnerauofr vcu vn homme,lequcl fut pris enlaforeftde
Compi. gne, & amené au feu Roi Charles IX.lequcl
marchoit à quatre pieds, comme vne pauure beftc, &
couroi: plus vide quVn chcual. II ne pouuoit Te tenir
debout,auoitla peau fort Jure, eftoit velu prefque par
tout, & pour tout langage s'aidoit d'vn cfpouuantable
cri qu'il acompagnoit d'vn refrongnementde vifage iî
hideux , qu'il nVa bcftc fauuagc plus mal-plaifante i
voir que ce pauure corp v,qui auoit vefcu aucc les loup\,
& apris d'eux à hurler. Au demeurant il eftrangloit les
chiens à belles dents,&s'il pouuoit atcrapper les hom-
mcsjil ne s'y feignoit non plus. le n'ai peu fçauoir qu'il
eftoit dcucnu. Exh'Mt des mcmoin'S dennjlretem^i.
Quant à la première hiftoire extraite de Dreflerus, ic
ne fcay fi c'eft la mcfme que reprefente le Dodeur l'h,
CumerariU6 enjes belles incdit étions hiftorlques, chapitre J^.dté
La répétition (pour en eftrc courte) ne fera point défi
agrcablccomme i'efpere. C'eft (dit-il ) choie merueil-
leufcfi véritable, qu'on lit esadditions i liiiltoire Je"
Lambert deScharnabourg,comme s'enfuit. L'an 1544.
on printés quartiers de Hcfl'e vn enfant, lequel ( à ce
<ju'ilrecita depuis & fut ainfi verihe ) n'<iiyant que trois.
ans fut emporté , puis nourri & efleuépar lt<Ioups.
C^uand ils aportoyent quelque proye,ils apportoyent
toufiours la meilleure part autour d'vn arbrej, & la
bailloyent à l'enfant qui la mangeoit. En temps d'hi-
uer& de froid , ils creufoyent vne fofle , qu'ils ta-
pilToyent d'herbes & de fueilles d'arbres , fur quoi
lis couchoycnc ce petit > & l'cnuironnaiis de toutes
parc^
cf 7n emorahles. iz^
T»atts le garantiffoycnt .contre l'iniure du temps : pms
Us le côtraignirent de marcher fur les pieds & les mains,
& de courir aucc eux , tant que par vfage & à la longue*
ilfccuc fauter & courir comme eux. Eftant prinsonle
contraignit peu à peu d'aller feulement fur les deux
pieds. Ordifoit-il fouuentque C\ cela cuit cfté en fi
puillance, laconuerfation auec les loups lui elloit plus
agréable qu'aucc les hommes^ Ilfut apporté pourlpe^
ttaclccnla Cour dcHcnri Landgraue de HefTe. l.nlz
mefmc année auint le mcfmc en la meftairie d'Echrzcl:
car vn enfant de douze ans, fumant les loups en la fo-»
rclt prochaine, fut prins en temps d'hiuer par quelques
gentils-hommes qui chaflovcnt aux loups.
ENF K^NT de pierre.
VNe femme de la ville de Sens en Bourgongnc,
nommée Colombe Chntry, mariée à Louys Chan-
té coufturicr, ayant elle fort long temps auec lui ihns
i?,uoir cnfans , finalement conceut , & durant fa groP-
feife eut les diuers accidens de femmes enceintes. Mais
le terme d'acoucher venu , les efforts de la pauure Co-
lombo > &les aides des fages femmes, furent inutiles,
tellement que fon fruift mourut : &: fut trois ans en-
tiers au li(5t en beaucoup de langueurs. En fin telle-
ment quellementfoulagee , elle commença à fe trai-.
ner, & languit encore vingt cinq ans , portant ce fruift
mortjdont en fin elle deceda auffi , Tayant porté vin£;r-
huict ans entiers en fon ventre. Son mania fit ouurir,
&futtrouué Tcnfant cftre conuerti en pierre nefdu-
rc, puis tiré de fon ventre , gardé depuis par grand mer-
ueiUe, comme pluficurs l'ont veu bien formé,& comme
fi quelque Sculpteur ingénieux l'cult taillé dedans ce-
rtecauerne, ayant fcs membres entiers à leurpropor-
rion,refaits comme l'aage d Vn enfant de neuf mois bien
nouiri le requiert. Le dedans creufé : on trouuaaudî le
Coeur, le foye, Iccerucau & autres parties foit dures:
mais; non du tout tant que les externes. C'eil vne fîî-
mcUc. Ce cor^>s n'eit fuict ni i pourriture ni
214 Hijioires admirâhles
à vermoulure, non plus qu'vne pierre des plus dur<rj
que les maiftresStacuaires puifl'cnt mctcrccn befongne.
jM.Jean d\y4liboux j & Simon de Prouuunchtres , dodcs
Médecins de noftrc temps , qui ont vcu ccil enfant de
pierrc,& eu en leurs mains ccfte merucille, en ont cfait:
riiiftoirc , &: publié vn nes-amplc &beau dilcoursfur
le tout.
l'adiouftcrai à cela vue autre hiftoire mémorable
ilefcrite par M.Iean Schcnck de Grafcnberg Médecin i
Fribourg on Brifgau, duquel i'ai tiré vne grand' parnc
des récits des accidens mcrueilleux au corps humain
mentionnez, en ces recueils d'iiiltoires de no tire temps.
Claude de iaind Maurice, Médecin renommé &pro-
fclleurà Dole , eicrit à monfîcur Qu^enz Sénateur &:
premier Médecin de Fribourg , quele vintciiiquierme
iour de lanuicr mil cinq ccnsnonantc cinq, failani ou-
urir vne femme decedee, en l'aage dc57.ans,ontrouaa
qu'elle auoit le ventre de pic'rre, & pefoit fept liures, le
foye auec vn fcul lobe cartilagineux , la râtelle ronde,
la vefîîe de pierre , le péritoine lî dur qu'à peine le ra-
foirdu Chirurgien peut l'entamer. Ces choies,, dit-il
nous tirèrent en grand esbahiflement , & en dilpute par
quelle voye les elpiits eftoyentportez partoutle corps:
éi comment ii fut polfible à colle femme de viure/î long
temps fans aucune manitefte maladie. le fis incifcr ce
Tentre de pierre, eiperant y trouuer quelque fruit de
iiiefme, comme celui de la femme de Sens en Bourgon-
gne. Maisietroauai que ce n'elloit que pierre dedans,
comme dehors.
ENFANTEMENT Cdpirem,
L'H K F A N T E M E N ï ca^farein eil vne extraftfon dcx-
trement faite de l'enfant par le colle de la mère, ne
jT'Ouuant autrement acoucher que par furtifante inci-
fîontantdel'epigallre, ou ventre extérieur , que du
iUjrpsmacrical, îans toutesfois preiiidiciçr i U vie de
(jr mémorables» zaç
de l'autre : ( pourueu que d'ailleurs ne leur furuiennc
mal ) voire melmc fans que la mère laiflc pour cela de
porter puis après enfaar. Ce qui s'entend pour l'en-
fant encore vii dans le ventre de la mcre. Sous ceftui-cî
eftaufTicomprifc vne autre pareille extradion de l'en-
fant défia mort dedans la miire, quand par autre aide de»
lago femme,ou de médecine, ou de chirurgie, plus faci-
le, plus feure , &: plus commune, il n'y a moyen de Ta-
uoir,&: qu'autrement on void qu'il doit emporter la mè-
re auec foy : comme de iour à autre il auicnt par tout en
femmes de toutes qualicez , après auoir cité eu entrées
& rompues mifcrablement.
N'a pas long temps que l'ay fu/fifamment defcouuerc
par le rccit de quelques anciens prf.-ud- hommes près
Milly en GaiHnois cela eiirc vray , duntencoreson ne
fait doute fur le lieu , que la femme dSn nommé Go-
dart, demeurant lors au Melnil, parojfTe de Miliyauoic
quelques ansauparauant enfante par iîx fois en celle
nysde, aifauoir l'enfant ayant elî-é ciré par incifion faite
jTu cofté d'icelle mère, ôciamais autrement toufîours
cnfans viuans. L'operateur fut Kiculas Guillet, barbier
de Milly>apiesla mort duquel, par faute defecoursacou-
ftume, celte femme mourut,nepcuuantacoucher. Ar-
gument vrai-ferablable que c'elloit vue profonde phy-
mofe, ou embouclurc naturelle , fufftfanteà rcceuoir
la geniture , mais non à rendre l'enfant. Fr. Roujja , aj*
traité de V enfantement c^fari^n.
l'ay fceu veritablemcnL par M. Ambroife le Noir,
chirurgien de Pithuiers, fôrt''expcrt, & par Gilles le
Brun, qu'ils auoyenr cnfemblemcnttiré u pluficurs fois
parie coité trois enfant; viuans à vne pauure femme prc«
Mcrinvilie en Beaufle : vers laquelle me voulant tranf-
porter, pourvoir le lieu de l'inci/ion, ic fceu qu'elle e-'
îloit vn peu auparauant morte de pelle , lors fort conta-
gieufe iJc violente en ces pays-ia.
l'ay vne dofte epiixrc de monfieur Alibous Médecin
à Sens, deduifant au long &. par bon ordre, comme lean
des Marais chirurgien i la Chaftrc en Bevry , fils de
JL^uys (ies ^fcM:aJ$ çijifurgien w^naiic de l'Atciitfn^-
P
ii6 Hijloircs admirables
cjue de Sens , tira par le coftc à la femme mefme vn fils
nommé Simon des Marais, depuis aufll chuurgien & va-
Jet de chambre de la Roinemcredu Roi. Apre»quoy
elle ne laiflavne autre fois d'acoucher bien & naturel-
lement d'vne hlle nommée Renée , depuis mariée à vn
grenetier. D'icelui Simon (qu'on furnommoit fans me-
re)& de Rofe Gallardet forcirét Claudejefpoufee à Mai-
ftre François Artus d' Ylloudun , & Françoife mariée à
Oliuicr Gannier:toutes deux fuffinintes tciHficatrices de
la naiffance paternelle, tant parle cômun bruit, cjue par
le fréquent & domeftique récit de leurditpere. Uimjim.
Monfieur Pelion fameux Médecin à Angers, ^ant
par ci deuant recire à maille Laurent Collot chirurgien
cyftotomique de Pans, vne femblable opération en An-
ioujlui en a de nouueau ratifie la vente par vne miiîlue
qu'il m'a baillée, portant cela auoir cité exécuté par
Math urin Débonnaire chirurgien.
M. Denis Armenaut Médecin à Gyen & moi , auons
veu enfemblemcnt vn peu auant les troubles , en l'hoP
pital de Chaftillon fus Loir, vne femme y cftant malade
de Heure continue, ayantau collé feneftre du petit ven-
tre vne grande hargne, & en icelle vne longue cicatrice,
auec apparentes marques de points d'aiguilles , rellans
del'ouuertuied'icelles parties recoufues , par laquelle
fon mari& elle teflihoyent lui auoir elle tire quelque
temps auparauant vn fils,lors que nous parlafmes a eux,
d'enuiron7.ans,qu'ilsnousmonftrerêt, n'ayantpcunai-
fire autrement. Cela futfait en Bouvgongne par vn viel
barbier de leur village merme,expert(d leur dire)en tel-
les opéra tions. La fcme n'auoit point côceu ne porté de-
puislors,côbien qu'ils fufiént tous deux leùnes. Li mejme.
Bernarde Arnoul, femme d'Hftienne Mafllcaule de v_
Nangeuille,entre Lilarnpes,Puireaux & Pithiïiers,apre$
vn extrême &: vaintrauail de quatre iours à enfanter,
merccerchant par fon itKu-i mefme fur le dernier auis
de fon fecours, eut bien le courage contre le gré de fon
dit mari, de fè faire par mon confeil ouurit , voire C\ ha-
ftiutti'Cnt, après auoir oui la refolution, qu'elle ne vou-
ut pas attendre M. Ambroife Ig jSoir , Mnoaimé , que
ie pro-;
^ mémorables, X ty
îepromcttois lui cnuoycr, comme ia expérimenté ert
relie opération, parce que ie ne m'y pouuois trouuer,
pour cftrc lors au lict griefuement malade : mais y em-
ploya le premier trouu<f,qui futlean Lucas, ieuAe bar-
bier demeurant lors à Bunou, petit village prochain,
qui exécuta dextrcment celle opération à lui nouuelle,
en prclcnce de gens,aucuns defquels font cncor , com-
me lui, tcfmoins de ce fait.Ce fut le lourde Paiqucs mil
cinq cens cinquante fix. L'incifion commcnçoit à la
partie dcxtrc du vcntre,vn doi?,t plus bas que l'endroit
du nombril5& plu*, de quatre doigts à cofté d'icelui, &
delà delcendoitdiredemoiLiufquespresdu penil/ans
toucher nullement aux niufcles droits, defquels elle c-
ftoit par le haut diluante d'cnuiron trois doigts ; & par
le bas quelque peu moins. Apres les mufcles , & le péri-
toine aufTi de haut en bas incifez , fans guercs faigner,
apparut manifeftemeutramarry. Laquelle il inciia aafîi
à parr,voirc allez amplement, afin quels playe futlUf-
fifantepour en lirerplus aifémènt l'enfant encore vif,
auec fa fecondine.Puis il rccoufut à la façon commune
desplayes , non la matrice, maiî les mufcles & le péri-
toine auec cinq pomts d'aiguille , comme ie noray
bien , y eftant exprcfl'ëment allé pour la viiîtcr , /î tofî
que ie fus rcleué du li6t. Ce que i'ay fouuent depuis re-
marqué en elle mcfme, lui cuidant faire guérir vne
hargne,quilui en eft tou/iours depuis reliée , pour n'a-
uoir pas cfté bien coufee, ous'eftre trop toft releuec.
Et faut noter que ce barbier ne fçauoit que c'eftoit ni
de mufcles, ni de péritoine, procédant en tout ce fait
comme s'il euft percé vn apofteme, ou détaillé d'vn
coufteau tranchant quelque pièce de chair, comme le
remarque M. Maurice Corde, en fon commentaire fur
Hippocrates des maladies des femmes, liu.i.text.ii. En-
uiron vn an & demi après eftant fon mari decedc,& elle
remariée à Pierre Chanclou,rcdeuintgrolVc,& enfanta
naturellement vnefille,& demeure maintenante Nan-
euiUe, .uquel lieu font encore plulleurstefmoins de ce;
peftacle.LrtOTe/w*.
P ^
%
zii mjloires admirables
A Vry en Biercpres Fontainebleau, à deux lieues de
Nemours , Collette Beranj^ci,fenime de Simon de la
Gardo, outrepallant defialedixiefme moisdefa grof-
fc{l"e,& portant de long temps Ion fruift mort, fans cjue
pour le rendre les parties balles s'ouuriflent, manda en
fin Vincêt Valleau chirurgien de Nemours^lequcl n'a-
yant autre moyen appoient de lui aider Tincifa fur la
fin de lanuier,mil cinq cens quarante deux non au co-
i\é dextre,mais au feneihe , quelque peu plus hautque
n'auoit elle celle de Nangeville , couppant première-
ment rabdomcn,ou ventre extericur,puis la matnce,de
laquelle il tira le fruid mort , enflé & puant, aucc la
lecondine ia pourrie. Puis fans recouldre la matrice , re-
print(commcparacquit,&àla defefperade ) par cinq
points d'aiguille la peau auec quelque petite partie des
mufcles, comme long temps après il aparoilfoit aile/,
n'y ayant que le iîmplecuir cicatrizé lur les intertins.
Sa gefine fut pour tout d'vn mois & demi , deux ans a-
près lequel temps elle acoucha naturellement d\ ne fil-
le;& deux autres ans après d'vn fils nommé Pierre de
laGardcdepuismarefchal dclbn eflat.tUe exerça de-
puis l'office de fagc femme audit Vry,feruant aux autres
femmes & rcceuantleurs enfans. Lrf mejme.
Agnes Boyer , femme de lean Canipan ,lab9ureur a
Villereau,prcs Neufuillecn Beauflc , après auoir cité
par quatre lours toute rompue par l'importunitc des fa-
ges femmes,fans V rien proriter,fut ouuerte, &ce au
cofté dextrcpar Philippe Migneau barbier de Neuhiii-
le,l'an mil cinq ceusquarantequatie,puis rccoufue aux
mufclcs& au cuir,fur lelourd,& comme il peut. De h-
quelle incifîon elle fuft toft guérie au ventre : mais les
mcurtriflcures, que les matrones auoyent faites : à la
nature , cmpefchcient le chirurgien plus de lept mois
aies guérir. Elle eutaufli vnc belle tîUc , qui vefcut
feptmois& plus^bien faine : mais au huidiefmede-
uint malade à nourrice au village mefmc , dont elle
moUriit.Peu de temps après elle redeuint groife, por-
tant i'enfanc prefque toufiours pendant vers la
hargne , qui luircftoit «omme aux autres* fajj^s dou-
leur
leur neantmoins. Mais elle ne pouuoit non plus que
dcuant acoucher,pour quclqu'vnc clcs fufditcv caufes,
comme il ell: à coniedurcr.Parquoy volontairement re-
quit d'cllreinaiee comme cieuant : ce qu'elle ne peut
(pour prière qu'elle fit) obtenir de deux autres ieunes
Ciiirurgicns illccexprelVcmcnc mandez de Neufuille,
ou ils fe tenoyent après la mort peftilentiale audit Plii-
lippe:ce quifutcaule qu'elle & fonfruift moururent pi-
tcufemcntenremblc, parleur pufillanimité : fi toutes-
fois la foiblelle delà femme, ou quelque autre piteux
accident nclcs empefcha decefaire.z:^ msfme.
L'an 157cr.le12.iour de Juillet, à Ambedoye, près S.
BrilTon au territoire deGien,fut aufTiounerte Antoi-
nette André , femme de Louys Garnier maneuure,par
AT. Adam Aubry, natif de Pithuiers chirurgien demeu-
rant à Aubigny , lequel m'en a fait le rapport.Depuis i-
ccUe deuenuegrolTe, naturellement acoucha d'vn au-
tre enfant vif.La mcfme.
Encore de plus fraifche mémoire , le premier four de
Feurier, mil cinq ccnsfcptaHte & huift , leanne Mi-
chel natiue d'Argent, femme de George Renauld, de-
meurant aux faux-bourgs d'Aubigny , auancee en
la gïoirelîc plus que dudixiefme mois , portoit des
long temps fon fruid mort , ne laiflant neantmoins
de tracalTer à ics afEiires-, tant qu'en fin elle fut con-
trainte s'arrefterau lid , où après auoirefté tourmen-
tée long temps fans effe<5l,es mains des fages femmes,
enuoya quérir mailtre Adam Aubry iurnommé,&: M.
Guillaume Collas dode Chirurgien, Icfquels ayans
coupé à l'enfant vn bras tout liuide , qui fortoit de
long temps auparauant pi:r la nature de fa mcre:
mais nepouuansauoirprinlefurlercilc du corps, in-
ciferentlecoflédextred'iccllejvnpcu orbiculairemenr,
ik d ouuerture allez eftroitte , pour efpargncr la mère:
quifutcaufed l'extradion de l'enfant de caufer fort
grandes douleurs à ladite mère : pource que la matrice
ne pouuant quitter l'enfant (pour l'ellroitte ouuertu-
tc) luiuoit le traid du petit , comme fi l'on eutt voulu
Varracher elle mefmc.LefqueUcs douleurs neantmoi«s
ijd Hijioires admirables
cefferent incontinent que l'enfant & la fuite furent mis
hors. Ainfiapreslesdcfcharges ordinaires de la gefine
{qui vindrent aufli bien que /î elle euft acouché natu-
TcH.cmcnt)pcu de temps après elle fe releua , S: eut Tes
xnoisacouihiniez au bout de cincjfemainesr&inconti-
rient après fe trouua groflc , fcauoir cil: à la fin de May,
fefouciant défia pour la fraifche mémoire du pafle,de
ce quipourroitauenir de ccftc grofl'efl'e. Auquel temps
elle acoucha naturellement: &: combien que l'enfant
prefentall vne des ïambes feulement la première (qui
eftvn trcs-mauuais commencement de deiinarche en
tclchcmm)toutcsfois icelle eftant remifc par la fage
femme;,lc tout fucccda très-bien. Depuis lequel temps
deuenuc enceinte derechcf,elle eut heureufe deliuran-
cc,& fe porta bien en après, l^ rnefme.
Enuironl'an mil cinq ccnsliuidantç deux, leanlacot
chirurgien demeurant en vn village auprès d'Auxerre,
pommé Tirouailie , rencontrant M. lean Aliboux Mé-
decin de Sens allant en pratique , le pria de fe deftour-
ner pour quelque peu de temps de fon chemin, pour
aller en vn village prochain nommé Marry,pour foula-
gcrvne pauure fcmme,3 laquelleil auoit quelques heu-
res paraunnr tnélc fruid par fcftion de Tabdomen.
Aliboux cltonnc de la hardielfe de ce chirurgien , ap-
pelle le fieurde Vaux,baillid'Auxerre,& fa femme, pour
>ihtcr ceftcacouchee , leur chaftcau cllant proche du
village ou elle elloit.Ils trounerejuTenfant au berceau,
où ilfe dcmenoit : criant & demandant à manger : mais
la pauure mcreacablce de rourmcnt , de fieurc,de veil-
lcs,ne pcnfcit ni à loi ni à Ton petit. Le Médecin defcou-
ure la femme, void lafcCtion radoubée grofTiercmcnt
auec dix ou douze points d'aiguilie:pouvuoit /î dextre-
iTient à la merc 'àc à l'enfant ^ que tous deux ont Acfcu
longuement depuis, e xtruitdç la Uiire de M. Daliboux cf-
'Crlte le zo.de Décembre 1> 8^.
Enuiron l'an i5oo.tliAabet Alefpachm femme de Jac-
ques Nufer operateur & chirurgien demeurant au vil-
lage de Sigers-Haufem en Suifî'e, enceinte de fon pre-
^^licr enfant j au terme d\Kouchcr preflcc de gran-.
àç,s doUi
^ mémorables. 2ji
(îes douleurs , appclla grand nombre de fages femmes &
de chirurgiens pour la fccourir : mais en vain. Le mari
voyant fa femme à rcxcremité lui defcouure à Toreille
Ton intention. Elle raprouuancil va trouuer le bailli de
Frauvenfeld, lui expote Tcilat de fa famille, fa délibé-
ration pour foulager fa fcmnîe,& demande congé d'exe-
curci ce qu'il auoit entrepris, tn fin le bailli conoiflant
foninduilrie, & l'amitié qu'il portoit à fa femme , lui
odroyc fa requefte. 11 retourne promptement au logis,
parle aux fages femmes , exhorte les plus courageufesi
luiadiftcr, prie lescramtiues de fortir hors du poiflc,
pour n'entrer en pafmoifon, & troubler la compagnie:
pource qu'il entreprenoit chofe vrayemcnt perilleufe,
mais dont il efperoit heureufe ifluc , moyennant Tafli-
ftance fauorable de Dieu tout puilîant. Ces femmes c-
ftonnecs de farefolution fortirent toutes, exceptées
deux, Icfquellcs demeurèrent auec les chirurgiens pour
affilier à la patiente.Son mari ayât au préalable inuoqué
Dieu par vne ardantepricre, & ferme foigneufemcntle
poiflejprendfa femmej'eftend fur vne table, & dVn ra-
loir tranchant lui fait vne mcïÇion au ventre , fi heurcu-
fement, que foudain l'enfant en fut tiré fans dommage
ni offenfe de la mère ni de fon petit. Les fages femmes
qui efcoutoycnt à la porte , cntendans crier l'enfant,
heurtoyentpourentrer:mais on les contraignit d'atten-
dre, iufquesàce que le périt full ncttoyé,&bien accom-
modé, & la playc coufue , laquelle fe foulda en peu de
iours , fans ficure ni fafcheux accident quelconque à l'a-
couchee,qui puis après fit d'vne ventrée deux fils , l'vii
defquels nomme lean Nufer viuoit Tan 1585. aagédc
60. ans, Prcuoif de Sigers-Haufem. tlleacoucha depuis
de quatre autres enfans. Quant au fils qui lui fut ain/î
tiré du ventre parl'ouuerture dont nous venons de par-
ler,ilvefcut iufques a l'an 1577. Auiourd'hui cncoreon
voiden ces quartiers là iesenfans de cefte femme iuf-
ques en la troifiefme & quatriefme génération. G.tjpard
Baithm do^Q Alcdtcia a hafe 3 cnfes hijloira de t enfanternent
C£pirien,
le penfoy trouuer entre autres hiftoires que i'sd
^ 4
251 Hiflûires admirables
parmi mes papiers celle que ie vous ai piomifc dVn en-
fantement c^farien , mais elle cft demeurée parmi d'a'u-
tres mémoires en ma maifon en France. le «ionncraj or-
dre de la me taire apporter entière à Montbeîliard,où ic
fuis à prcient, pour la vous cnuoyer. Il me fouuicnt du
nom du village & du chirurgien, item de l'an & du mois
<]uand cclaaduint : mais i'ai oublié les noms du père &"
de la mère. Le village eft en la Duché de Bourgongnc
s'appelle Marfilly, près du mont faind: lean. Le chirui-
gien, Antoine Robin, natif de Beaunc,dcmcurant à Re-
né le Duchoinme fort adroit en fa \ ocation. Ce iut au
mois d'Auril, Fan mil cinq cens huiClante deux.Lafcm-
me, ieune oc robuflc payfannc , auoit efté en grand tra-
uaildeuxiourscntiers,&routfritneantmoins courageu-
fcment Tincifion , laquelle fucceda heurcufcraent.
X'enfan: ne vcfcutgueres :1a mère fe porta bien, & fub-
fîfta au monde long temps après, la. mcjme,
ESMEFTEfediîieufe a caufe d'exaclions.
L'An mil cinq cens quarante huid,les communes de
Guyenne, Saintonge, & Angoulmoisfe foufleuc-
rcnt à caufe des cxtor/îons que leur faifoyent les gabel-
Icurv & fermiers du fcl. En peu de femaines fe trouue-
rent amaffez près de quarante mille hommes armez de
tous baftôs de rcncôtre, aufquels fe ioignirét les infulai-
rcs.De commun accord ils coururent fus aux gabelleur*;,
& cûbien que du cômcnccmentle Roy de Nauarre cu\k
effayé de les efcarter, cencâtmoins ils fe mainrindrct, &
pourfuiuirent leur pointe aucc extrême furie, contre
tous ceux qu'ils pouuoyentattrapper.Lcs communes de
Gafcogiicfc foufieuerét en diuers cndroits:donts'cnfui-
uicle maiTacre de plu/îeurs Ofhcicrs du Roy , quiabu-
lans de leurs charges auoyent cilé caufe de cefte muti-
nerie. Les Maire,Iurats,&autres,ayans charge en la vilJc
de Bourdtaux,& le Cicur de Monncms, qui y comandoit
en qualité de Lieutenant pour le Roy, en lieu de remé-
dier a ces tumuiccs des le commencement téporifcrent
trop>
trop, nommément Monneins,qui pour n'aiioir reprime
l'inffjlence d'vn chef de ces mutins, nommé la Vergne,
lui donna hardiefle de faire f'jLil eu er pnis aprc's tout le
peuple parlctocfain. S'cftât enclos au chafteau du Ha,
de fois à autre il lettoit dehors quelque nôbre d'arquc-
buficrs pour donner Tcffroy au peuple : mais ceil expé-
dient ncfucceda pas.Car telles fortics efcliaufcrcnt fi a-
uantles citadin»;, qu'ayâs trouué gens à leurpofte, com-
mcla Vergne,rEftônac, iMaquanâSi autrcsjfoudain on
\ intaux armes , les gabelleiirs eurent la cliaU'e, & plu-
sieurs maifons honnorablcs ( fous prétexte d'y ccrcher
les exafteurs qu'on fouftcnoit y ei^re cachez) furet C^c--
cagces. Sur ce, les Communes receuès enla ville, on
ionna le tociain,nul n'olant marcher qu'armc,& accom-
pagné des mutins, autrement s'enfuiuoit mafiacrcdes
pevfonncs quifc rencontroyentJ-csConfcillers duPar-
Icment furent contrains quitter leurs robes, pour le met-
tre en pourpoint , & affublez de bonnets i la matelotte
portèrent la picquc & marchèrent parmi la racaille , la-
quelle contraignit aufil les iîeurs de Saulx , frères , IVn
Capitaine de la ville , l'autre du challeau Trompette, à
élire chefs , & afl'ifter au faccagement de plufieurs mai-
fons de leurs concitoyens &amis,lef<;ueis on maflacroit
deuant leurs yeux. L'hodelde ville muni d'armes en
nombre prefque infini, fut pillé. Monneins ay^int cfté iî
malauiféque dequitterfon fort pour venir haranguer
des enragez, cruellement aiTafliné:& les Carmes en dan-
ger de faccagementî'pour l'auoir honnorabicment enfc-
uclien leur temple. Toit après les pillards chargez
commençans à fe retirer', le Parlement rcprint courage,
ire empoigner & exécuter quelques vns des principaux
dcccfteefmotion, entre autres la Vergne, qui fut ti-
ré à quatre chcuaux. Le Roy aucrti de ces defordres
efcriuit aux Communes, les afleurant qu'il pouruoiroic
en brief à leurs doléances : & leur enioignitde pofer
les armes : au moyen dequoi chacun fe retira, l'Efton-
nac dextrement chafle hors du challcau Trompette,
Cependant François de Lorraine , Comte d'Auma-
Icj fuiui de quatre mil Lanrqucnets& de force caua-
-^34 Hijloires admirables
Icrie Françoifccncroit en Saintongc , laquelle il p3-
afia fans-refillancc & punition. Anne de Montmorency
Coniieftable, aucc toutes les forces, &: les dciix armées
Jointes en vne, entra dedans Bourdeauxparvoye autre
Qiidacouftumee iSisclliantrcndu maillre de tout,(ans
<.oupferir , oftaaux citadins (en vertu de la comnulîion
- lui décernée) tous les tiltrcs , rcgiilrcs & documcns de
leurs droits & franchilcs , les priua de toushonncurb,
brulij cous leurs priuilegesjfxtceffer le Parlcmentjdefar'
i?î.i entièrement les habita ns, fit abatreles cloches,priua
toiir le Bourdelois de les immunitez & franchifes : con-
trJii^nit les principaux delà ville de Bourdeaux,au nom-
l-re de cent quarante, d'aller quérir aux Carmes le corps
*îu /leur de Moiîneins, &le conuoyer en dueil iuiques i
^-André , ou il fut inhumé : ayans auparauant auec vn
cicroc allumé en mam crié merci àDieu,auRoy,& à lu-
i^iccdeuan tic logis du Connelhble. L'Eftonnac, les
deux frères de Saulx, & autres, eurent les teftcs tran-
chées. Vn Preuofi: des Marefcliauxaucc puiflante trou-
pe courut le BourdeloisjBazadois, AgenoiSjfaifant mou-
rir les fonneurs de tociain. 11 attrapa finalement les
deux Colonnels des Comnuines,nommcz Talemaigne
& Galaffrclelquels furent rouez après auoir elle cou-
TonnezdVnc couronne de fer toute ardante , pour fup-
plicede la fouueraincré qu'ils auovent vfurpec. Quel-
ques mois après Bourdeauxfutrcltablien Ton premier
cîtat;, &, moyennant grandes Ibmmes de deniersjes exa-
â;ions,caures de ce troublc,abolics. Hijloircs^ t^rmales
de France fot*s Henry z,
Diuerfes efmeutcs remarquables aucnues depuis cent
ans en diuerles parties du monde le verront ( li Dieu le
permet) es volumes luyuans. Pour le prêtent nous pre-
îentonsThiftoiie précédente, pour efpreuuc des autres.
ES P RI T S pYûâi'T^ieux.
ÎL n'y a pas long ternp^ qu'eft mort vn certain nomé
Conilantm, qui rcprefentoit prcfques toutes fortes
vie ycix , uucoflic chant des I^oflij^aols , qui n culfenç
pas
^mémorables. 25^
pas mieux fceudefgoircr leurs ramages que fuijtantoft
le bravement d'vn arnc,tantoft les voix de trois ou qua-
tre chiens qui fc battent, & en finie cri de celui qui
pour eitreraordspar les autres le va plaignant :auec vn
peigne mis dans fa bouche il reprefcntoit le Ton d'vn
cornet à boucquin:Toutes ceschofesfïà propos,qucni
rafncni les chiens en leur naif;ni vn homme iouant du
cornet à boucquinn'euffent eu l'auantagj^furlui. l'en
parle comme celui qui l'ai veu fouuêtesfois en ma mai-
Ibn : maisfurtout eftoit admirable qu'il parloir quel-
quesfois d'vne voix , qu'il tenoit tellement cnclofe de-
dans Ton eftomachjfans ouurir que bien peu lesbaleu-
resjà manière qu'eftantpres de vous, s'il vous appelloit,
vous eufllcz crcu que c'eftoit vnc voix qui venoitde
bienloinySc ainfi ay-ie veu quelques miens amis trom-
pez par lui. A/. Pafqi':israi* ^. lucre des recerches de la Fr.incc
cha.z^.Lù. il recite encor deux autres exemples d'efprits
prodigieux quci'adiouftcray ; Leprcmier eft prirrs de
Moulinet vieil poète Françoisjlcquel dit auoir veu ho-
me chantant d'vne mefmc teneur & promptitude de
voix le defTus & la taille d'vne chanfon. L'autre eft d'vn
ieunehommelequel vint à Paris l'an 144^. aagé de 20.
ansreulemcnt,lcqucirçauoit( ce lent les mots d'vn ef-
criuainences temps-là) tous les fcpt arts libéraux par
le tefmoignage de tous les Clercs de rVniuerfîté de
Paris, & fi fçauoitiouè'r de tousinftruments, chanter &
dcfchanter mieux que nul autre , peindre & enluminer
mieux que nul autre qu'on fccut à Paris ne ailleurs. I-
tem,en fait de guerre nul plus expert, & iouoit del'ef-
pee à deux mains fi merueiUeufement , que nul ne s'y
côparoit:car quâd j1 voyoit ion ennemi,il ne faloit point
à faillir fur lui vingt ou i4.pieds à vn fault. Item, il cil
Maiftreesarts, Maiftre en médecine, Dofteur enloix
& décret, Dodcur en Théologie : & vraycment il a dis-
puté à nous au Collège de Nauarre,qui cftions plus de
cinquante des plus parfaits Clercs de l'Vniuerfitë de
Paris,& plus de trois mille autres Clercs: & a fi haute-
ment refpôdu aux queftiôs qu'on lui a faitcs,que c'eft v-»
pe droite merueille à croire à qui ne l'aiiro i: veu. Icern
^3^ Hijloires admirables
il parle Latin tropriibti],Gvec,Hcbricu,Cbal(laiqae,A-
rribuiuc>8:pluficui\s autres hnaaucs.Iccm il cft Chcu.i- •
lier en arine^:& vraycmcnt Ci vu homme pouuoitviure
cent ans,ransboirc,fans ma ngcr,raris dormir, il n'auroit
pas Icsfciences que celhu-ci a du tout par cœur aprifev.
Fr pour certain il nous Hr trcfgrand frayeur : car il iVait
plus c]ue nepeutfçauoir nature huma:ne:car il reprend
tous les (juatre Bodcurs de laindc Egbic. Bref c'cft de
lupicnce la nompaicilie choie du monde. Voila quant
ù ceil cfpnr prodigieux par defius pluiîcuvs autres qu'on
a veu depuis & de noilrc temps, entre iefquels on nom-
jnc lean Picus &Ican François Picus Ion neueu,Frin-
cc? de la Mirandoie,ïulesCa:iar Scaligerjoleph Sca-
liger Ton fils,S: aunes, la plulpart hors du monde quel-
qMQs vus cncoves viuans, Iefquels ie me déporte de
nommer.
E S TINC ELLES de feu.
IL eft auenii de mon temps à vn Carme, que toutes &
quancesfois qu'il tiroit ion capuchon du deuancde
La telle fur le derrière, Ton > oyoït fortir des bluettcs de
feu du pofi de Ja teite. Ce qui continua en lui l'clpace
de treize ans entiers, ^.Carduri SUiure du U dhterjltctLs cho-
Madame de Caumont , femble ietreides eftincelles
de feu de la relief en ténèbres elle peigne les cheucux.
ScaL'^cr en jcs exarcitatijus çop.tte Ca,\Lin.
Efiant vn iour auenu^ certain prefcheur en Efpaçnc,
cjue depuis le fommet de la telle iul'quesaux clpa'ules
on vidlbrtir vne flamme de feu , cela fut tenu pour mi-
racle. Herm.IiarharurS ait ^ .Uia-e de Ju phyfique.chap.^ .
1
FANTjiSTlQV ES.
L y a des nations qui fe couurent en mangeant. le
ùay vne Dame,& des plus grandes, qui a ccfte mcrme
opi-
C^ mémorables. i-^j
opinion , que c'eil vnc contenance defagreablccfe ma,C
cher:qui rabat beaucoup de leur grâce , & de leur beau-
té, & ne fc prefente pas volontiers en public auec appe-
tir. le fçay vn homme cjui ne peut fouftnr de voirman-
eer,ni qu'on le voyc,& fuit toute afllUancc, plus quand
il s'emplit, que s'illevuide. EnTcmpiredu Turc, ilfc
void grand nombre d'hommes, qui pour exceller les
autres ne fe laiil'ent lamais von quand ils font leurre-
pas,qui n'en font qu'vn lafcniaineiqui fe defchiquetent
&decoupcntla tacc.'& les membres, qui ne parlent ic-
mais à pcrfonnc. Gens fanatiques, qui penfent honorer
leur nature en fe dcfnaturant , qui fc prifent de leur
mefpris,& s'amendent de leur einpirement. Quel mon-
ftrueux animal, qui fc fait horreur à foi-mefme ! à qui
fes plaifirs poifcnt, &qui fe tient à mal-heur. M,dt
Alonta^fne ai* 5. linre des ejj.itfj ch.ip.'').
le ne puis tenir rcgilhe par mes avions : fortune les
met trop basrie le rien par mes fanrafîes\ Si ay-ie veu vu
gentil-homme qui ne communiquoit fa vie que par les
opérations defon ventre. On voyoit chez lui, en mon-
tant vn ordre de ba{Tîn^,de fcpt ou huid iours. C'eftoy-
ent fes eihides,fes difcours : tout autre propos lui puoit.
Z« nitjive au i9.chap.dtt ^J.iure.
FEMMES deuenues hommes,
A M A T V s Médecin de grande eftime en Portugal,en
fes centuries, recire, qu'en vn lieu appelle l'El-
gueyrie,à neuf lieues de Coyinfcre, demeuroit vn Chc-
ualier , pcre de certaine damoifclk* nommée Marie Pa-
chcco, laquelle parucnui.' en i'a.ige auquel les hlles
ont acouftumé d'auoir leurs f}ueurs;en lieu d'icelles lui
(brcit le membre viril qui luf.'^ues lors eiloit demeuré
caché au dedans , par ainfî de femine elle deuinthom-
mcjfut hahillee en homme, <il chanpciint de nom, com-
me dcfexe,fut nommée Manuel Pacheco. Ceft homme
nouueau pafla en l'Inde Orientale, & retournant de U
i^i Hijioires admirMes
fortrichc& aucc rcpucation debraiic Chcualicr ,ef-
poufa vue noble Dame. Ainatus confcflc n'auoir fçcu,
s'il en cutcnfansoii non : ditauoir remarqué , que la
barbe ne lui crtoic iamais venue,& qu'il auoit vn vifagc
{cïï\inin.'V oyc^i4emA(ie en fa I. iou,fnee.
Ce quci'aylcu cnHippocrate au <?. liuve des mala-
dies populaires de Phetula femme de Pitheus(& en Pli-
ncau 7.1iurech.4. ) m ennardicà mettre en auanrvnc
hiiloire queic n'ai iamais \oulu dive à perfonne , elli-
mant que ce fuft vn conte fait à plaifir. Vn mien ami
bommede grande autliorité, & digne de foi, m'a recitc
qu'en certain beu d'Efpagne vne icune femme, mariée
.i vn pauureîaboureur,entraen quelque contefte con-
trcluijpavialoufic ou autre occafîon. L'cflrifs'enPiam-
iTla dételle forte, que la femme trouuant de nuift le<;
veftemens d'vn icune garçon, qui demcuroitleans, s'en
equipa,puis s'en allantauliaur & au loin fe faignit cibc
homme, feruantfous ce nom pour gaigntr fa vie. h\\
ccll cibt,loit que nature opcrail en elle fi puiilamment
queGcbruffiftifoit qu'vncardantc & exccffiuc imagi-
nation de fe voir equippee en homme euft la force
d'en caufer l'efi-'eftielle deuint homme , & fe mariaà vn
autre femmc:ce qu'elle tcnoitfecretjiufquesà ce qu'vn
certain honime,qui parauantla conoifi'oit, fe trouuant
auUeuoù elle eftoit , &voyantla femblance <le cell
homme nouuellemcnc imprime, auec ia femme qu'il a-
uoitconuclui demanda s'il n'elloit point Ton frerc.
Lors celle femme, fai de homme : fe confiant en lui,
dcfcouuritccqui eftoit aucnu, priant inftammcntque
cela fuft tenu fecret.L.f tncjme.
louianusPontanus cfcritd'vne femmeà Gayette nu
Royaume de Naplcs , laquelle après l'cfpace de qua-
torze ans qu'elle auoit elle mariée à vn ieune pefcbeur,
fut châgec en homme, & pource qu on fe mocquoit de
lui, fe rendit moine en vn cloiftre , où il dit Tauoir co-
nu,&y eftantmort futenfeuclià Rome en l'Eglife de
fainde Marie,à la Minerue. Il adioufte qu'vne autre
nômee -Emilie ayant efté mariée à vn nommé Antoine
Spcnfc par l'cfpace de douze ani,fut finalement châgce
e«
^mémorables. i^t)
en homme , & efpoufa femme, après auoir reftitué ion
<lor par le com.mancicment de Ferdinand Roy de Sicile.
De noftre temps à Bruxelles en Brabant, onavcuvn
nommé Peter ou Pic-ne > parauant Life ou £lizaber,à
caufc qu'il auoitefte du fexe féminin. Philippe dt Mur-
nix att premier tonte duTahlean des dtjferevs delà. reUgion,p:ii^
tic $.chap.l^.
Paflant à Vi(ftry le François;ie peuv voir vn homme,
ciucrHuefque de So'fTons aiioit nommé Germain, ea
conFrmation , lequel cous leshabitans delà ont conu &
vcu fiUejiufques à Ixige de vingt deux ans , nômee Ma-
rie. Il eft deuenu fort barbu , a vefcu long temps , & ne
s'eft point marie. Failant, dit-il , quelque eftort en fan-
tantjfes membres vinls fe produifirent: & eft cnccrcs en
vCagejentre les filles de là, vne chanfon, par laquelle el-
les s'entr'auertifîent de ne faire point de gi an des enjam-
bées , de peur de dcuenir garcoas, comme Marie Ger-
main. Af.de AîoiU.vrne ai* l. Vitre de [es efjuificihtp.il,
FORCE corporef/e.
AV Royaume dcGaîice s'cft t'oauc de nollre temps
vn appelle le M.ircrch;il Pcrc-; Pardo de Kibade-
ncyra , lequel nuoir inimitié capitale auec vn certain t-
ucfque,dont ne pouuantauoi^ raifcB comme il preren-
doit, par entremife d'amis qui le mefioycnt d'appointer
le différent ,& les réconcilier, il confcnrit à vne enrre-
ueuè. Comme ils approchèrent Tvn de Tautre, ce Ma-
rcfchal feignant auoir oublie tout le pafle , &: vouloir o-
fire ami de TEuefque pour rauenii , courut rembralTer.
Maiscefutvnecarefle mortelle à Ttueique : car Icm-
brafl'emcnt fut /î rude, & le Marcfchal Icfcrra fî forr,
qu'il lui briûi les coftes, luicreualecœur, & les autres
entraillesJelaifTant mort fur la place, o^. ïQrqttciniideei*
la I. tournée defon Hexarmeron.
Tayveuenla ville d'Aft vn homme, lequel en pre-
fencedu Marquis de Pefcairc empoigna vn pilier de
marbre ayant trois pieds de long , & vn pied de dis-
z^o Htsiotres âdmuahles
mctrc, lequel il letcoic haut en l'air, puis Juieccuoir c ;
fesbiM>, foudain lcreLinçoii:,ores dyne fiicon > ores d'\
ne autre, comme fî c'cuil elle quelcjue cllœuf dont il ic
tull iouc. Il fe iî: apporter de ia boucherie, des pieds de
bœuffraiichcnien.teicorché , mitvn coufteau dcirous,
& frappant ilu poing deflus , les coupoitde traiicrs en
deux pièces : prenant vn autre pied de ce bœuf,il le càÇ-
fa contre Ton front , comme s'il en eulb frappé contre- \ -
ne pièce de marbre,rans fe bleifer nullement. En nofti ^
fneience il en empoigne vn autre , & à coups de point^
c mit en plufîcurs petites pièces. Ilyauoitd Mnncoue
vn nomme Rodamas, homme de petite raille: mais !Î
fort, qu'il tovdoit & rompoit ce fes mains vn fer de chc-
ual;& vn cabledcla grofl'curdu brasjcommeiic'euircn'.
ciié des bvins de cheneuottes. Monte fur vn courfiti .
& menant l'autre en lefle, il leur donnoit carrière à tou-»-
tes brides, & les arrcftoitau plus fort de leur couri'el-t
où bon lui fcmbloit. Simsn jlfaiol jEaejyhe Ita'ten , enjcs
tours canHid.f.irtSy co'lo(j,:\..
L'an mil cinq cens huiclante deux , es mois de May
&de luin, en certain efelle Iclcnneile de la Circoncis
fionde Mahumctf.ls d'Amurat Sultan , fut veu entre
plufieurs liiitteurs vn , mémorable entre les autres,
homme puiiiant > robufte à merueilles , &. digne d'cllre
comparé à ce tât célèbre Milon de Crotone.Pour preu-
uedcfaforceprodigieLle, jI efieiioit hautvne longue
pièce de bois que douze hommes ne pouuoyent foule-
ucr de terre qu'auec peine, puis lareceuoit& pofoit fur
fes efpaules , où il la portoit fans la foullienir de fes
mains. Y.n après, ellant couché toutplat, enchaîné par
les efpaules & par iescuillcs, ilfourtenoit fur fa poitri-
ne vne grande & grofl'c pierre que dix hommes y a-
uoyent roulée : mais il ne faifoit que rire de ce fardeau».
Et, qui eft chofe encore plus efmerueiUable , quatre
hommes fendoyent de longues pièces de bois fur fon
ventre. Outre ce il brifa aucc les dents & les mains vn
fer de cheual, de telle force, que la moitié lui demeura;
entre les dents, du reftc itcn fit deux pièces, en chafquc
main vae. Au noiiicfme coup de poing (iouné fur vu
ço\ùr:
(jr mémorables. x^i
couître de charue il le rompit. Il lechoit de fa langue ce
niefme coukre mis au feu,& tour rouge. On le couuric
dVn grand monceau de pierres : mais il ne s'en bouge.i
d'vn feul pas^ains demeura ferme & immuable en fa pla-
ce comme s'il y euft efté planté. Le mcfme auec Ces dents
feulement, felh,brida, & harnacha vn cheual, & fit plu-
sieurs autres merueillcs , à raifon dequoy il récent gran-
de femme de deniers , &:fut loué de tous, à caufe de fa
force du tout extraordinaire. George Leheskl PolonotSiCn I4
defcription dti chofes fuites a, Cû)ijl.wtinople ^ en lu circoncifion
(ittjUi itt^mfiratjl'itn l$'èz.
Entre les vobuftes Alemans denoflre temps l'on en
1 ematcjue deux: George Baron de Fronfperg,& lean Ba-
ron de Schuuarzebcrcr. Ils rompoyent fort aifément dç
leurs mains des fers de cheuaî. Fronfperg ne trouuoic
homme fi ferir.e en pieds,qu'iine pouitaftaifémenthors
de pbce, auec le feul doigt moyen de la main droite. Il
arreftoit tout court parla bride tel cheual que Ton vou-
loit , quoy qu'il couruft impetucufement, & remuoic
feul auecl'efpaule vn gros canon , le poufî'ant où bon
lui fcmbioit. Celui de Schuuarzcberg tordoitles fers de
cheual , comme s'ils eufl'ent elle de quelque matière
ployablc. Potocoua, Capitaine àts Cofaques Polonois,
décapite par le commandement du feu RcyEftiene,
rompoir auflîaifément des fers de cheual , que nous fe-
rions vn morceau de gros papier. Camerariws en fes medr
tatio7ishijlori(jueS)ch.:J'.Si.dii l.uolume.
George le Feure^dode Aleman,reciteque defon têps,
enuiron l'an mil cinq cens vingt neuf, viuoit à Mifne
cnThuringe, vn perfonnnge nommé Nicolas Klun-
cher, PreuofI: de la grande Fglifc , lequel eiloit fi robu-
ïte, que defccndantenvnecaucilen tiroitluiieuifans
cable, fans poulains, fans aide quelconque, vnepipe
pleine de vin, l'embiafToit & portoit dehors , puis l'erfe-
uoit fur vn chariot. Vn Chanoine delà meOne Eglife,
nommé Erneif , de la maifon des Comtes de Mansfeld,
homme robufte & de haute taille, voulut s'elfayerva
iour à la lutte corps à corps contre lui. Nicolas l'em-
141 Hiftûires admirables
poigne , rcflcue haut en l'air , puis le iette 6e telle foi-
deur contre vnc porte clofe > qu'il en rompit& fit voler
au loin la ferrure defclou ce. i^u^.lmredcfeSi^nnalei
di Alifne.
Le Roy Charles IX. prenoit plaifir aux exercices du
corps. Eftant vn lour à Blois, on entra en propos de la
lutte corps à corps, & lui fit on cas d'vn Preftre Breton,
qui pour lors eftoit en cour, lequel il fit venir. CeftoJt
vn petit homme trappe, mais difpoft & robufte a mer-
ueilles. Plufieurs grands & petits s'efprouucrent contre
luijaufquels il aprintdiucrs faults de Breton , ietranc les
vns par deflus fa tefte , les autres les pieds contremonr,
aucuns comme s'il euft fait virer vue fonde, les autres
comme des pierres en Tan- ou iettees contre terre : n'a-
yant efté pofllble à aucun de le terraiier. Quelquefois il
fecouchoit par terre : mais quiconque scw aprochoit
deuoit s'attendre de faire quelque fault qui donno/t du
pafle-temps à la compagnie. Finalement,vn autre braue
lutteur voulut le colleter, &furent_aux prinfes quelque
peu de temps. Mais en finie preilre ayant du genouil
donné vne rudefecouife à fon aduerfaire, le foulleua en
l'air, puis le ferra de telle vigueur entre fes bras qu'il le
fit defaiUir, l'ayant tout froiiié : puis pour 1 acheuer de
vaincre le letta de telle violence contre terre, qu'ayant
erté releuc & porte demi mort en fon logis , il y movirut
bien toft après. Mémoires de mfire teinpi.
TOVLDRE.
L'An mil cinq cens foixantc deux,eftanten Champa-
gne , & partant par vne petite ville, nommée Ville-
ncufue L'Archeuelque , non gucresdiftantcde Sens,
quelques gentils-hommes & autres gens honnorables
recitoyent vn faiteflrâge, aduenu par la foudre fur deux
ieunes Prelhes du pays,lefquelsati rempsde moiffons,
comme ils,venoycnt de chanter meflc jpour vn tref-
paffé^ fort riche , fc retirans après difaé turent acueil-
lis dVne tourmente d'air, accompagnée de tonnerre
& d'ef-
C^ mémorables, 2.45
8c d'efclairs'eftranges. Ces icunes hommes firent tant
qu'ils fe rendirent en vn petit verger à Tefcart , où ils
s'aiîirent ibus des arbres près Tvn de l'autre. Mais ils fu-
rent tuez parle tonnerre,où le lendemain leurs parens
les rrouuerentjaprcsles auoir diligemmentcerchez.On
cftimoit qu'ils dormiflent : mais c'eftoit du fommcil de
mort.Les fouillant & viiîtant. Tonne trouuefur leurs
corps blefl'ures ni marques quelconques , /înon qu'à
chafcun de leurs bonnets quarrez,& au milieu, y auoit
vn pertuis de la grandeur d'vn carolus.Leurs pauures
corps puoyenteftrangement , tellement qu'on ne pou-
uoit durer autour d'eux. J\^. de Beanliett aifon traiâéda
tonnerre iefchxiTi^c.
Enuiron l'an mô.vïi lour de Dimanche en cfté/e fi-^
rent des nopces fort excefTmes & diiîolucs en certaine
petite ville à demi-iournee près de Poidicrs, laquelle
n'a qu'vne rue eftroitce èc aflez lôgue.En ce jour & lie»,
enuiron midijfuruint vn tonnerre,grand & efpouuanta-
ble,duquel tomba en vn des bouts de la ville vn globe
de feu, delà grolfeur d'vn boifleau^lcqueirans oftenfer
pcrfonne , pairatoutlelongdelaruciufques àTEglifc
nommée faind George, oîi citant entré il fit vn eftian-
gcrauagcleuant plusieurs tombes de morts , & alla au
grand autel, où ilgafta vnc belle image de la Vierge te-
nant l'on petit enfant entre Tes bras : outre-plus defchira
en plufieurs endroits les parois d'icelle Eglife. Quoi
fait il rompit vne chai ne de fer , qui de la voûte fou lie-
noit le Crucihx,auquel il rompit vn bras. En après, gra-
uiliantle long des murailles à main gauche , fans faire
mal à ceux qui fonnoyent les cloches , iînon les efpou-
ijanter& mctrreen fuite,il monta au clocher,baftiment
tort beau,lcquclil embrafade telle forte,que toutes les
cloches grofles & petites fondirent, & tomba le métal
fondu fur le pauement du temple. L^m^/me.
Le Vicaire d'vnc paroifle nommée Chappelk-ba-
fton,rurlesfronticrcs d'Augoumois& de Limofin , preç
la ville de Charroux, s'cftant ingéré de vouloir coniu-
rer quelque furieufe cempeftecïmeucen l'air, com-
Q.1
244 Hifloircs admirables
me il fc fuftauancé derEclife au cœmiiiere pour faire
ccfTcr le tonnerre & les ciclairs efpouuantablesjfurumt
tout foudain autour de lui vn tourbillon de vent impe-
tueuxjlequel chargea prcftre,rurplis,eftole , &: afpcrges.,
cmportanttoutàdcmielicuè de là, où il laifla tomber
ce pauure vicnire dedans vn efpais hallier,oii il fut trou-
ué le lendemain par fes pair oillî eus , après Tauoir lon-
guement Sifoigncutement ccrché iufques àn'yelpav-
gner leurs cliiens,comme s'ils euiTent voulu faire quel-
que groHechafîe, & fans Tes habits à peine reufl'ent-ils
peu rccognoiftrercar il auoit la face & les mains tout ef-
gratigneesjfa robe & Ton furplis en pièces & lambeaux,
6c Talperges auflibrifé & rompu. Il eut encore plus de
peur que de mai,& depuis quitta tout a fait fon grimoi-
rc^ayantietté au,feu celui dont il s'clloit ferui aupara-
Eftanten Italie, comme ie marchois par pays > non
gueresloind'F.ugubio, ievi la foudre tomber fur deux
payfans, qu'elle tua fur la place auec les deux afnes fur
lefquels ils cftoyent montez. Ilseiloyent acoinpagnez
d'i n troiiiefme , auquel la foudre poudroya tellement
les os de l'vn des bras , que fans que rien de tel eflort a-
paruft, ce bras branfloit comme vn lopin de chair pen-
dant de refpaule,fans que l'on peuft remarquer qu'il y
euft os quelconque. Ce coup etincut des douleurs in-
dicibles en ce pauure homme , don: il ïui tellement
tourmenté , qu'à tout propos il fouhaittoit la mort. h.
Moller en la prefaee de lu ^.partie de fon commentaire fttr Us
rftauines.
l'ay veu deux hommes>pere &: fils, dont les corps fu-
rent tellement cftonnez & ^iupcHez de la foudre , que
i'elfimois entièrement qu'ils fuiicnt frappez d'apople-
xie.Ils demeurèrent fept iours fans boire ni mangerjni
parler, ni fe mouuoir. Finalement ie leur fis tirer du
fang, donner desclill:eresacrcs,frotcer longuement les
corps, les nourrir peu , fî qu'en hn ils recouurerentlcur
première ùnté,,_y4.Bet}iueniut ah J^.chap.dealidith,
Quelque mois deuant la mort d'Hippolyte d'Ei^
Cardinal deFcrrare> la fou drvi tomba delîus fon palais,
à vuit
^ mémorables, 145
&:vm: îufqucs à ma chambrcou elle atteignit Iclpieu
dVii de mes feruireurs pendant au cheuetdulid, en
fondit la poirite,& en fit vn petit boulet , fans entamer
ni endommager aucunement le fourreau. Aiuret en fs
annotations fur le ^i.chap.dii zJiure dss quefî.nattérellcs de 5*?-
iieque.
Enuiron l'année 1550. prcsdeBenavide village d'E-
rpgne,CGnime àcu\ hommes chcmino) cnt de compa-
gnie en raze campagne fe Icua vne tempefte fi eftran-
ge^quc chacun en eftoit ei^onné.Lorsces deuxvoulans
fuir peur gaigner quelque couuert , & fentans la tem-
pefte fe renforccrfe ietcerent tout plat contre terre : où
ilsfentirent la tourmente les acueillant commçpour
les enleuer.En fin Tvn d'eux entendant le bruit cj:fie,fe
leuafortmalaifément, tant ce tourbillon Tauoit battu.
Ceux qui le rcgardoyent venir,voyansque l'autre nefe
leuoitpointjfetranfporterentvers lui, & le trouuercnt
niort,ayant les os tellement bvoycz,qu'on plioitfesbras
& ïambes comme vn gan,tout le corps relfemblant vne
m.îfi'c de chair. D'auantage il n'auoitpoint de langue,
car la foudre la lui auoit arrachée , & ne futtPouuee
quelquerecercheque l'oneti fit. Il y eut diuersiuge-
mens fur ceft accident. En fin chacun vint à dire^quc
ceft homme eftoit vn iureur & blafphematcurordinai-
rerpourrant auoit-il efté challié particulièrement en ce
membre , dont il s'eAoit ferui à deshonorer fon Créa-
teur.,^. Tor^w^wd^c cnU $.îûtirnee de fon Hcxameron.
Par vn tel tourbillon que le rufmcntionné, vn village
d'Efpagne.nommé Algadefie , fut totalement r^inéjes
maifonsSc édifices y ayans elle abatuesâflcur de teire.
1 a niefim.
Le ,15. lour de May i5(J ^.furies 5. heures après midi
la foudre tomba fur le chaileau de Mime,brullaleplan-
ché dVne chambre, fendit les grolfes poutres & les fo-
liueaux du toJc>:courut & rauagea par toutes les cham-
bresjcntrant & forçant par les fenefties, puis donna iuf-
quesau fondement descaues,au grand eftonnement
de tou' ,1 ans blefier perfonnc. CleFenre ah troifitfme limç
dejh annales de AUjhe.
^4^ Hijlûires admirables
Trois an^apresje ip.iour de luillet, les tonnerres a-'
yans canonné depuishuiâ: heures du matin jiufquesâ
<juatrc après midi Ja foudretomba cnuiron vnc heure
furTEglifedu collège delà maifon de ville. Es champs
force beftail futtué:& trouua-on des hommes morts,
intre autres mémorables accidens, vnieune payfan at-
t€in delafoudre,troisiours durant brufla par tout Ion
Corps,puis expira, l a rnefme.
La mère de lerofme Fracaftor excelIentphilofophc>
admnable poëtej& tresheureux Médecin de noftre téps,
lors qu'il alai<5loic encores , le tenant vn ioiir entre les
brasjfut atteinte &ruec d'vn cfclat de foudre , fans que
renfançonen fuft atteint ni oft en fé en forte quelcon-
<iue;qui futvn prefage de la gloire dont ce perfonnnge
(qui vefcutlongtcmps,& mourut d'apoplexie) deu oit e-
ftre couronné. L'4f4fe/*r de fa a/c.
FFREV R horrible.
DE la mémoire de nos anceftrcs yn charpentier de
Vvifmarcvillc renommée en Saxe^agité dclrcne-
fie par interualles,trauaillant vn iour auec quelques au-
tres de fon cflatjcmpoigne fans dire mot la hache,&s'eu
va vers fa maifon , où cftant entre il fend par le milieu
deux fîcns cnfans : fa femme enceinte acourt au bruit
pour garantir le troi/iefme,leq.uel il laiffa, & s'adreflant
à fa femme la met en pièces , cnfcmble le fruiâ: qu'elle
portoit. Ainlî couuert Je fang il retourne vers fes com-
pagnons;& enquis qui l'auoit ainfi acouftré , l'efprit lui
reuint.Lorî fe fouuenant de ce qu'il auoit fait,il retour-
ne vers fa maifon, où il empoigne vn coufteau, s'en don-
ne vn coup dedans la poitrine, & tombe mort fur la pla-
ce.Cran\iHi a'-t lO. Httre de fa yandaucjchap.lo.
Ù E^N s.
L'An ifii.l'Empereur Maximilian premier, cftant à
Ausbourg en vnc iopmec des EftatS;on lui prcfenta
vq
I
^ memorMes, 247
vn homme de dcrmefarcc grandeur & groffeur, le-
quel mangeoit en peu de morceaux,& fiins s'arrefter, v-
ne brebis ou vn veau, fans ^ç. foucier que la chair en fuft
cuite: difantque cela ne faifoit que lui aiguifer l'appé-
tit. S mi m , en [on cofn,nentaire des chofes memor^ihles de noftre
temps.
loachim TI. dece nom Eledeur de Brandebourg a-
uoit vn paifan en fa cour nommé le petit Michel , par
antiphralc ^ car il auoit près de huid pieds de haut. Qui
cftvne grande ftature d'homme de nolhe temps, mais
médiocre & petite à comparaifon des grandes de iadis,
notammentdc Goliath & autres es cnuirons delà lu-
dee, Matthieu Uorji j en fi recevchefi*r Is duel de Dauid ^
de Goliath.
l'ai veu vneieunc fille de flaturcgigantale, qu*on
menoit de ville en autre , pour la monftrer comme
chofe prodigieufe , & pour laquelle voir grands &
petits contribuoyent volontiers leur pièce , dequoy
l'a mère qui la conduifoic & elle eftoyent entrete-
nues. Elle eftoit en vnc chambre de louage à part,
& s'y faifoit voir auec eftonnement. Y cllant allé
comme d'autres , ie m'cnquicrs foigncufement de
tour> &apren desrefponfes d'elle &de fa mereaufïi,
qui eftoit femme de moyenne taille , que le père de
la fille n'eftoit pas grand , qu'en tout leur parentat^c
il n'y auoit aucun ni aucune , qui furpalTaft en hau-
teur les autres perfonnes : que la fille iufques à Taa-.
ge de douze ans auoit elle petite : mais qu'ayant au
mefme temps efté faific ^swo. ficure quarte , qui
1 auoit tenue quelques mois , venant à la quitter, el-
le commença lors à croillrc , tous les membres cor-
rcfpondans par cfgalc proportion à ccfte hauteur: tel-
lement que quand ie la vis elle auoit cnuiron vingt-
cmqans, & ne remarquay en elle depuis la leftc iuf-
ques à la plante des pieds difproportion quelconque en
pas vn des membres : mais vne rnefure continue & con-
uenable en chacun d'iceux. En ceft aagc de vingt cinq
ans elle n'auoit point encore eu fes flueurs : naturefein-
blant auoir requis & retenu ce fang excrementcux
Q 4
14^ HtFioires admirables
pour la nourriture & conicruation dVn fi grand corps.
Elle fc porcoit fort bien , vn peu laide de vifage, noire,
d'efpritfimple&grofikr, & tout le corps pelant. Car
la vertu animale infufe des le commencement en ce
corps, félon la nict'ure deuè à la grandenr d'vnc pcvfon-
ne vulgaire , efpanduç puis après en vne fi grande &
lourde mafie, ncpouuoit d'efgale puilî'ance monftrcr
l'efficace de Ton oeuure, comme en vn corps médiocre:
& l'expérience monftre que la vertu recueillie & ramaf-
fee fe monllre plus vigoureufe , que quand elle eft: ef-
parfc & trop eirenduc. Au regard des caules naturel-
les de cefte grandeur extraordinaire , par le moyen
de la fieure quarte, nous en lailFons la decifion aux
médecins , & n'en difputons auec eux : mais en vn mot,
fî vnéperlbnnc en l'aage de douze ou vingt ans vient i
prendre cruifTance parla maladie , tellement qu'en pro-
portion de corps elle deuienc deux fois aufïi haute que
les autres, il faut confeffer qu'vn tel effort de nature
elf extraordinaire & admirable. Nous auons tiré cefte
hiftoire de Alarcel Donat, doâe ptedecinj an troijiefme linrey
chapitre qtiatorX^efme jOU il traite amplement àcs caufes de
ccfte hauteur gif,an:ale, félon que fa profefhonlere-
queroit. En ces recueils, nous nous contentons d'vn
flmple lecit.
Apres la vidoireque le Roy Louys douziefme ob-
tint en la iournee de LoJceftantalléàAhlan, ie rrou-
uai dedans Thofpital \n leune homme fi grand, quM
ne pouuoit fe tenir debout : n'ayant fccu obtenir de
nature aScz de nourriture pour rcfpaiiieur de fon
corps & la proportion de fes forces. Pourtant eftoit-
îl couché fur d>-nix li(fl:s , ioinâ:s en long l'vn à l'autre,
lefquels il emplifFoir de fa longueur. Les Saniogiticns,
qui habitent entre la Prufle & Liuonie , font de fort
haute taille : Scncantmoins ils engendrent quelques-
fois des cnfans qui paruenus en aage font de petite
ftature , par fois d'autres qui dcuiennent merucil-
leufement grands. Scuhger en U z^^. cxe-rcitation contre
Ciirdar>f
llyac
e^ memora h le s 249
Il y a eu de noftrc temps en Bourdclois , vn lioni-
mcde grandeur ou hauteur dciniefuree , à rai Ton de
laquelle il eftoit furnommé k Géant de Bourdeaux.
Le Roy François , ellonné dt voir vn \\ long corps, or-
donna cju'il fut du nombre de Tes gardes. C'eftoit vn
payfan de groflcpafte, au moyen dequoi nepouuant
sacommoderàla vie de Cour , au bout de quelques
io^ursquitra la hallebarde, & s'en retourna en fon -vil-
lage. VnpGrfonnage honorable , qui le vid archer de »
la garde , ni!a- a^ermé qu'il eftoit de telle hauteur»
qu'vn autre homme de îrature ordinaire pouuoit paf-
fer tout droit & debout entre les jambes cfquarquiUecs
d'iceîui. I. Chajfignion en [on tmiité de Glgantihus , cha-
■pitre 6.
L'an mil cinq cens feptante \n fut à Paris vn Géant,
après lequel chafcun couroit pour le voir. 11 fe te-
noit à requoy en vue hollellerie , & nul n'enauoit la
vcué , qu'en payant. Entrant dedans la chambre,
où il eftoit enfermé , l'on voyoit auec eftonncment
vne homme d'énorme hauteur aflls en vne chaire:
li.nis l'eftonnement redoubloit à tous, lors qu'ils le
voyoyent fcleuantde fa chaire. Carlors il touchoit
'^^i't refte le planché de la chambre , lequel eftoit fort
haut , à la couftume de la plufpart des trauaifons
Françoifcs. On le difoit eftre Polonnois ou Ttanf-
fyluain. Ce géant auoitvne femme d'ample corfagc
&fortgraft'e : mais de petite-taille à comparaifon de
lui , de laquelle leur eftoit né vnhls lors bienieune,
&quiauoit Taparence de deuoir eftre vn iour à peu
près aufti grand que fon pcre. Es Indes Occidentales,
dcfcouuértes il y a cent ans pafle/, fe fontveus plu-
fîcurs Geans , comme attcftcnr ceux qui enontefcric
les hiftoires. Près du Pôle Antarcftique , il s'en trouue
de dix & de douze pieds de haut: comme auffien Tlfle
de Sumatra ou Taprobane, qui eft vers l'Inde Orien-
'e. lamejhte.
Mtlchior Nugnez en fes lettres , où il difcourt des
afanesdu royaume de la Chine ^ récite quen la ville
capitale nommée Paquin , les porutri font grands de
^ 5 ^ Hiflotres admirables
<]uin7e pfcds de haut. l:n d'.:utrcs lettres efcrites l'an
mil cinq cens cinquante cinq, le mefme attcfteque le
Koy de la Chine entretient & nourrit cinq cens de tels
hommes, pour archers de fa garde. Simon Muiolen [es
tours camruL'Jres, colloq.i.
Louys Viues, dofte Efpagnol , en Tes annotations fur
lei5.1iurede faind Auguftin delà Cité deDieu,ch«pi-
tre p. efcritauoir veu au grand temple de ValenCc vne
<îentmeuhere d'vn homme , plus groflfe que le poing,
loieph Acofte en THiftoire des Indes , dit en auoir veu
vne encore plus groffc , & les autres à l'equipoUent.
Mais pource qu'ileft à prefupofer, que telles dents c-
lloyent d'hommes morts plufieurs fiecles auparauant,
nous n'y infiilons d'auantage.
De noftre temps on a veu entre les archers du feu
Roy de Nauarre vn Bearnois de Ç\ haute taille , qu'il ef^
gaioit Ton maiftre , eftant monté fur vn grand cheual,
tellement qu'il furpafloit en ftature depuis les efpaules
en fus les plus grands qui fuflcnt en tout le pays. C'e-
iloit vn beau perfonnagejdifpoft & alaigre. Au contrai-
re on aveu à Paris vn nommé le Gi?.nd Marefchal, hom-
me mal balli : mais aufh merueilleufement haut &
grand , a comparaifon de plufieurs de moyenne
taille.
Antoine Pigafcttc Itahen , grand voyageur de fon
temps , afferme auoir veu vers le Pôle Antardiquc vn
géant jfî haut, que les autres afl'e/ grands hommes ne lui
pafloyent du haut de la rcfte à grand peine le nombril:
& d'autres par delà ledcflroitde Magellan , quiauoy-
cntlecold'vnecouldee de long, &lercftcdu corps à
Tau en an t.
V
GVERIS ON extraordinaire.
N certain Italien ayant eu querelle contre quel-
que autte,coinbi malade Ti ^riefuemciu, qu'on n'y
^memoYohles, 2.51
ïattcndoit plus de vie.Son ennemi fâchant cela vient au
logis:s'enquicrt du fcruitcur,& lui demande , où eft ton
iTiaiftre? Le feruiteur refpond.il eft aux traits de la mort,
& ne pafTcra pas ce iour. L'autre grondant à bafle voix,
#epliquc,il mourra par mes mains. Quoy dit,il entre en
la chambre du malade, lui donne quelque coup de poi-
gnard,& fefauue. On adoube les playesde cepauure
malade,qui par le moyen dVne (î extraordinaire faignec
reuint en conualcfccnce.Ainfi rccouura-ilfanté &vic
par les mains de celui qui ne dcmandoit que fa mort.
/(.SolenamUryait ^Mttr.dcjes co)ifeils,qmnz,iefme conf, netipef-,
meftil.
Il raconte en mefme endroit d'vne femme qui fe
purgeoit de fcs mois par les narines, ordinairement 3 en
grande abondance , l'efpnce de treize mois durant : la-
quelle ayant elle faignee à la fiphcne & purgée fut
guérie, Et d'vn homme qui ayant cnTcfpace de vingt
quatre heures rendu parla bouche vingtfixliures de
fang.cajllé, liuidc & foit noir, fut guéri par diete>
repos , & clyfteres, fans prinfe de medicamens par la
bouche.Vn payfanfailî dVne ficure ardente, mené à
J'hofpital , & medicamenté foigneufcment , vmt àTex-
tremité. Le médecin , dode perfonnage , lui demande,
que vèux-tu , mon ami? comment gouuernois-tu ci-
deuant ? le n'auois acouftumé (refpond le malade ) de
manger & boire comme on mcttaittc ici , ie nefca-
uois que c'eftoit de fyrops , de drogues, ni de méde-
cines : ie ne fçaurois dormir fur la plume. Il y a
près de vingt ans qucie n'ai rcpofé en aucun lia:. Ma
nourriture ce font des oignons , du fromage dur,
& telles autres délices , mon gifle fur de la pail-
le à Tcnfcigne de l'eftoille , & couucrt de mes
habillemens , c^ft à -dire tout chauile &toutvc-
flu. Le medecm lui permit de coucher vne nuiftfur
li paille , lui fit donner des oignons , du fel & del'eau
fraifche : eftimant qu'il faloit lui complaire en ce-
fte extrémité. Mais le lendemain il trouu e fon ma-
^5^ H'tjloires xdmirdbles
lade à demigueri,lc chauffant auprès Ju feu. Nousa-
iions rcmarquc(dit]c rùefmc Solcnander) certains ma-
lades pour foulagejricnt en leurs tourniens auoir mal-
ché & aualé les rcceptes efcritcs par leurs médecins , cc
elle gneris par tel moyen. Vn ouicam eftimé hydrop:-
cjue,&pcu foigncNpar le bénéfice particulier de natui\
permit refaire ouucrture en fon corps au cofté gaucl
foDs la râtelle, entre le péritoine & les mufcles du vêcrt,
dont nous lui tirafmes plus de deux cens veilles pa-
jcilles à desa-ufs de poules, qui eiloyent molles , &;
pleines d'eau pourrie & puante, in ceconfcil i^M ^Mm..
GOFTEFX lArantu
L'An mil cinq cens hui(flnnte neuf, Guillaume des
^liche"5,honi;-ac ancien, tout eftropié de goutes,eut
enuie d'allci voir vue Abbaye de moines au defiusde
Lyon,que l'on nomme illle Barbe , où il y auoit vogue
ce iour là. Des le matin il fe «et en vn bafteau auec fa
iille,fon gendre,&. quelques voifîns. Ayant vifitë i'Ab-
^3ve,faitfesdeuotionsA' bonne chere,lui & fa compa-
gnie fcrembarquent.JLe baftelierquilesconduifoit a-
yantbeupliîs de vin que d'eau, comme ilfahit pafler
fous le pont de Saône, au lieu de drefler fa barquette
fous Tarcqui eil grand & fpacieux,donna contre la pile,
tellement quef^-barquctteeft renuerfec &: tous ceux
qui eftoycnt dedans noyez, fauf le pauuve goûteux, qui
fans fepouuoir bouger fut porté par l'eau au riuage,
d'où il fut retiré &: reporté chez foi:& depuis a vefcu
quelques ^nueQS.Aleawircsde Lyon.
HOMME auantl'Aage,
I'Ay conu vn homme en Efpagne,lequelau b<iut de
quelques années le rendit moine, de l'ordre des Cor-
deliers, ce a demeure au Conucnt nommé noltre Da-
me
é'memorAhles, 253
me du Val,puis en celui del Soto,p res la ville de Zamo-
TC. Il eft de fi petite :ailie,quefans lui faire tore on peuc
" l'appcller Nain : quoi qu au rellie il ait belle î^on^ Se le
corps bien acompli. Chacun fçair, & pluheurs moines
defon ordrem'ont afleuré pour chofe certaine , c^u'il
nafquit en vn village nommé Taind Tiio, Se que venant
i au monde, il auoit toutes Tes dents qu'il auoiten Taage
de i^. ans, & a toufiours eu depuis , ians ks auoiriamais
changees,ni qu'aucune d'icclicsfoit tombée; de maniè-
re qu'ilfut nourri &eî]euc auecpcine, &teta peuau/ïi.
Quand il fortit du ventre de la mère , il auoit les parties
lecrettes auflî velues que les a vn homme fait. A Taage
de feptans il eut le menton couucrt de barbe, & engen-
dra vn fils à dix ans : ayant en tel aage toutes fesfucul-
tez naturelles, vitales & animales , aufli entières , qn'vn
homme de trente ans. ^. Torqitunade en U prermere tour-
née de [on hexameron.
l'ay veu en vnc ville d'Italicnommee Prato^enuiron
deux lieues & demie de FiorencS;Vn ennint nouueau né
ayant le vifage couuerr d'vne barbe efpaiiTe , dvn grand
demi pied delong , fort blanche , douce & déliée com-
me lin. Ayantatteinti'aage de deux mois , ceîle barbe
vint à tomber,ne plus ne moins que li le vifage lui fuit
pelé par quelque mr.ladie. Là msfm,
Vn certain perfonnage alloit par toute VLÇozonQ
monftrant vn fien fils pour de l'argent. L'enfant an^é
de dixou onze ans auoit au vifage tant de poillono-^ qÇ^
pais,&crcfpé,queronncku voyoitquc la bouche ^;:
les yeux. U mefmc.
Vn leune gaixon aagé feulement de neuf ans en-
groffa vne nourrifie, ce dit lean Foxius. L. Danean un h».
Uefa phdofophie morale ^chapA^.
lALOFSlE horrible. -
ENuircjn l'an i5i7.vnieuneCitoycn de Modene,forc
riche , & non marie, nommé Fiancifque Torte , s>.-
bandonnaiu aux plaifiii du monde , fe prait à frcqucn-
254 Hifloires admirables
ter en la iTuifon dVne dainoifelle mariée qu'on Tur-
nommoit la Calore , laquelle tenoit maifon ouucrtc,
parlaconniucncc de Ton mari, pour le bal, lesieuxde
cartes & de dez,les deuis & carelfes, à tous venans , de
qui elle tiroit toufiours quelque plume , cftanc au lellé
fort attrayante^ magnifique en habits,meublcs,fen:;ns,
& tout ce qui en dépend. Ce ieune Modcnois qai a-
uoitde quoy dcfj^cndre , commence à hanter en ce
porche d'enfer , & dans peu de temps s'cnyure telle-
ment des allcchemens & appafts de celte courtilannc,
qu'il ne cefTede la pourfuiurc dételle forte qu'ils s'ac-
cordent fe porter de lien auant amitié mutuelle &
plusfpcciale qu'à nuls autres. Ils viuentcn ceft eilat
enuiron trois ans, que le ModenoispolFeJoit & eftoit
totalement pofl'edé de ceile Calore , à laquelle il don-
noitfa perfonne & Tes biens , plus qu'il n'cuit fait à vne
ftmme légitime. Elle le manioit dextrcment; mais vn
iour comme elle louoit aux efchccsauec vn certain
Gentil-homme , aduint que fe fouriant elle empoigna
la main de ce ioueur j & la lui ferra en femme dcfoii
mefl-ier. Francique prend la mou^chc fur ceftc conte-
nance,& de là en auant fait du renfrongné.Calore,fem-
me licencicure,& non acouftumee à la bride, com.nen-
ce à ruer &; à le rabrouer.En fin le defdain croift de pa-
role en autre, tellement que lui ayant dit qu'elle nefe
loucioit de Tes quintes & deipits-lc mallieureux s'enfer-
me en vne chambre,ou ayant izit quelques billets con-
tenans ce qu'il ordonnoii de Tes biens, & qu'il ne vou-
loit qu'aucun fuft accufc de fa mort que lui-mefmes,
il les accomnioda dans fcs efcarpins , tellement qu'on
pouuoitincontinentles voir, puis auec la ceinture de
fon efpee & les iaitieres i:t vne façon de licol, & fe lan
çant de dellus vn grandcoft're-s'eftrangla tout i l'heure,
C'eftoit en la maifon melmc de Calore, qui depuis vef-
cutplusrcferrce.En ce temps François Guichardin , ex-
cellent hiitorien de noihe ficelé , eftoit gouucrneur de
Modcne pour le Pape,H//fom d'Italie.
Enuiron Tan 1518. auint à Rimini ville de la Ro-
magncjvnc hiftoire notable. Certaine ieune Damoi-
feUe
^ mémorable/, 2^<
îelle mariée à vn vieil Gentilhomme,oubliantfon hon-
neur , fe proftitua vilainement par adultère à vn ieunc
gentil-homme du lieu nommé Pandolfe. Et continua
leur train infâme parTcntremife dVne fille de chambre
leur macquerelle l'efpace de deux ans. Il y auoit en la
chambre de celle malheureule femme vn grand coffre,
où elle ferroit vnc partie de Tes loyaux & deniers .-de-
dans lequel fecachoit le paillard , fi quelquefois furue-
noit tel cas ou furprife, qu'il ne peut fi toll:euader. Et le
coffre auoit air par vn endroit iecrct,tcilcmentquePan-
dolfey demeuroit par fois endos aÛez long temps. A-
uint au bout de ce temps, que la iuffice diuine commen-
ce à appeller a compte celle adultereffe,par vne griefue
& incurable maladie,en laquelle le voyant abandonnée
des médecins , elle le fut encore d'auantage au regard
de ion ame. Son mari furuenant fur la minuiâ: comme
àTimprouiile, Pandolfe fe iette dans le coffre fermant
aifément tie ibi-mefme. Alors celle femme ttanlportec
d'vn horrible elprit, commence^ après quelque haran-
gue , à faire vne humble requcfte à ion mari , lui faiiant
promettre auec ferment qu'il ne l'efconduiroit point,
C'eft qu'il fit mettre dedans Ion fepuichre au caueau.
près de fli quaifl'c ce coffre que elle lui montra , fans
vouloir regarder ni permettre que aucun.quel qu'il full,
regardai!: dedans , y ayant quelques hardes.& meubles»
dont elle ne vouloit qu'aucun euil Tvlàge après elle.
Ce quele marilui odroya. Le miferable Pandolfe en-
tendoit ces terribles propos , qui lui firent maudire mil-
le fois fes mefchancetez , &. celle adulterelfe fa compli-
ce, laquelle enukon deux heures après expira , fans re-
pcntance ni confeffion de fes plus énormes péchez»
voulant traîner auec elle à la mort celui qui auoicefté
compagnon de fa mefchante vie. Apres fon trefpasjcom-
mc on donnoit ordre à fa fepulcure , quelques domefti^
qucs & parens vouloyét qu'on laifiaft ce cofre en la mai-
fon, ou du moins qu'onl'ouurill & vifiraft. Mais le mari
fe tenant à la promeffe folcmnelle par lui faite , empef^
cha celle ouuerture,& fit enleuer le cofre clos,lequel a-
preslesoblequcs^ela defûcc futdeualç auecla quaifle
1^6 Hijloires admirables
dedans le caueau , & vne groffe tombe mifc dcfTus Çzw'^
cimenter, pourcc que défia il eftoit nuid , & qu'on s at-
tcndoic d'agencer promptement le tout le lendemain.
Le miferabic Paadoîfc qui auoit cyuy chanter dedans le
temple S. Lataldc, faifoitlors Ton conte de mourir de-
dans le coffre, & en le remuent en iceluifentit quelques
lacs pleins de io)aux : mais fans penfer à orni argent il
fc dilpoloiL à autres penfces, quand Dieu voulut lui
donner nouucau rclpit pour pcnfer à r-aucnir à fa coii-
fcicnce, mieux qu'il n auoit hit parle padc, Vn ieunc
homme domcftiquc, & qui Icauoitquela défunte auoi
cje bonnes hcrdes en ce cofre , & conuoitcux de tel bu-
tin, trouua moyen d'entrer fur les dix à onze heures du
loir dans le temple de ùÀnci Cataldc , où eftoit le ca-
ueau & fepulture de la: trcrpaffcc. ATaice de deux liens
compagnons illcue la pierre, &com.mencc à croch.c-
ter Ôc ouuriv le cotre , prétendant cmpoirervne bonne
proye. Pandolfc prenant refolution foudaiîieen acci-
dent fi eftrange Çc leuc , & fort du cofre , auec vn tel cri
que les autres peniàns que ce fuil quelque diable, fè
lauuerenr de viilefîc. Pandolphe s'eftant mieux rcconw
allume vne torche , &, vifitauc fo;i cofrc, fe charge des
basues, ioyauxSc deniers qally trouua, puis fortant du
temple fefauuapailcsiardins duconucntcn fa muifon,
ayant ferme le cofrc , &: remis la tombe en fon heu. S'il
cutoccafion depcnferau fupport de Dieu ,&dranicn-
ccmentdefavie, ielelaifl'e à pcnfer au leéleur. Hifi,
d'jtalie.
IMAGINATION,
FEr K E L, tiCsdode Médecin de noftrc tcmps,fc moc-
que de l'opinion de ceux qui difcn: qu'il y a trois
ventricules diftinfts au cerueau : l'vn pour l'imagina-
uue, i'autrepour l'entendement , l'autre pour la mé-
moire : & eftime que ces communes fundions de no-
ftreefpric, aflauoirimaginatiuc , iudicadi»e &memo-
riale.
cf mémorables. x^j
mie, y font confures , faifans chacune d'elles leurs ope-
tarions à leur rang , fclon que chacun de nous tend les
nerfs defon cfprit à riiTiagniatton,iugement ou mémoi-
re. Il vouloit en peu de paroles dire;,que noftre efpntne
rrauaille que là où noftre coeur eft fiché. l'en parleray
comme vn aucugle de coulcursimais lî vous me permet-
tez de commenter ce grand perfonnage : croyez que ft
fon opinion n'eftbonne^fi eft-elle afhftee détroit grands
prétextes : car fi dar s noftre ccrueau il y a trois ventricu-
les feparez , il faudroit en Timaginatiuc autant de cel-
lules diftindcs , comme il y a de diuers effeâ-s ; Nous a-
uons veu vn Tulcnus , pleni de doctrine &fçauoir, qui
ne failloit en Timaginatine que de deux points : c'eft à
fçauoir> en l'amour d'vne grande Princeffe, qui eftoit
long temps auparauant decedce,& en l'opinion qu'il e-
ftoit Euefq ue de Cambray.En toutes autres chofcs^piein
de dodrine&bon fubiet. Soudain queTon le mettoit
fur l'vn ou l'autre de ces points > vous le voyez trauerfer
&fortirhors de foy-mefme. Voire qu'i la première ren-
contre de Damoifellc jfoudain ilfe donnoità la penfee
que c'eftoit celle pour laquelle il eftoit tant efpcrdu. Ec
auparauant lui, fous le règne du grand Roy François,
nous eufmes en VillemO'nochejquinepechoiccn toutes
lesfundionsde fon entendement, finon lors qu'il en-
troit fur l'efpoir de fes mariages : eftimant qu'il n'y a-
uoit grande Princcffe qui ne fuft énamourée de lui. £■.
Pa^qmer au ô.liu.des Recerches de la FrancCycha.S.
Vn luif reucnanr des champs de nui(ft en fa maifon
s'endormit liirTafiie qui le portoit. La bcftequi conoif-
foit les chemins, pafîe vn pont haut &: profond , fur vnc
planche cftroitte : le lendemain ce luif imaginantpro-
fondement le danger qu'il auoir paflé , de par la force de
l'imaginât: ue le rcprefentant à fes yeux , en fut frappé
de rtUc horreur, qu'il en mourut, l. F lues au yl.dc rj/i'
fne parlant de lapeur pioctdante de trop ^runda imagination.
. Vn domeftiquc^apothicane de feu mon père, hooimc
lîmple & Sauyfie , nation peu vaine , me contoit auoir
conu long temps vn marchant à Thouloufe, maladif,
&fujçt; àla piene, qui auoitfouueut befom de clyilerej
K
15 8 Hisiûires Admirables
&felcs faifoit diueifcment ordonner aux'7Mcdcanj;
fclon l'occurrence de fon mal. Apportez qu'ils e-
Aoycnt , il n'y auoic ncn omis des formes acouflu-
mces. Souuent il taftoit s'ils eftoyent trop chauds : le
voila couche,venuciTé & toucesles aprochcs faites , fauf
qu'il ne s'y faifoit nulle inic(ftion. L'apothicaire reti-
ré après celle cérémonie, le patient accommodé com-
me s'il cuit véritablement pris le clyftere, en fentoit
'pareil efteft à ceux cjui les prenoyent. Et fi le Méde-
cin n'en trouuoit l'opération futïifante , il lui en redon-
noitdeuxou trois autres, de mefme forme. Mon tef-
moiniurc, que pour efpargner la defpencc (carilles
payoït, comme s'il les cuft rcceus ) la femme de ce ma-
lade ayant quelquesfois efTayé d'y faire feulement met-
tre de l'eau ticde , l'etfeâ: en defcouurit la fourbe , &
pour auoirtrouué ceux-là inutiles, qu'il falut rcuenir
à la première façon. Le S» de Aloatagne un iMure dcfes tf-
Ces jours paiïezjvncfemmejpenfantauoiraualévnc
cfpinglc auec fon pain , crioit & fe tourmentoit , com-
me ayant vne douleur infupportable au goficr , où elle
penfoitlafcntir arreftee : mais parce qu'il n'yauoitni
enflure ni altération par le dehors, vn habile homme
ayant iugé que ce n'cftoitque fantaifie & opinion, pri-
fe de quelque morceau de pain qui l'auoit picquee en
paflant,la ht vomir, &iettaù la defrobc^^, dans ce quelle
rendit, vne efpinglc tortue. Ceftc femme cuidant l'a-
uoir rendue, le fentit foudain dcfchargce de fa douleur.
là mefme.
le fcai qu'vn gentil-homme ayant traité chez lui vn c
bonnc^compagnie jfc vanta trois ou quatre iours après,
par manière de jeu^(car il n'en elloit rien) de leur auoir
fait manger vnchat en pafte :dequoy vne damoifclle de ,
la troupe print telle horreur , qu'en citant tombée en
vn ^rand defuoyemcnt d'cilomac &; de fieurc , il fut im-
pofllble de la fauuer. la mefm^.
Icncpenfe auoir leu es hiftoires chofe prefqucsplus
admirable , que cela qui eft cfcrit par ce dode perl'on-
aage Louys Viucs,cn ibii Commentaire fuf le 1,5. chap.
du 12.
^ memorMes. i j 9
^U tî.liure de la Cité de Dieu: Les li'ures des Naturali-
ftes,dit-il, font pleins,que les chofes veuès en conce-
uant,ont grande efficace en la femme enceinte &eii
Ton fruift. Au moyen dequoi ils commandent aux fem-
mes d'auoir de belles images & pourtraidures autour
de leurs liâs.Il y a vne ville en Flandres nommée Bof-
leducen laquelle, comme es autres de ce pays-là , tous
les ans le iour de la dédicace de la grande Eglife de ce-
fte ville,onfaitdiuersieux & paflTetemps. Aucuns fe
defguifent en Anges,Des autres en diables. L*vn d'iccux
cfchaufé du regard de certaine ieune Damoifclle , en
fautant & gambadant fe retira en Ton logis , où rencon-
trant fa femme, tout mafqué & barbouillé qu'il eftoit,il
la iettefur vne couchette, difant qu'il vouloit lui faire
vn petit diable.De ccfte aproche la femme conçoit:mai«
fî toft qu'elle fut acouchee , renfant,dont elle deliura»
fe print à fauteller, eftant tel qu'on a acouftumé de
peindre les diables.Marguerite d'Auftriche fille de Ma-
ximilian, & tante de Charles depuis Empereur, cin-
«juicfmedu nom , recitoit ceftehiftoireà lean Lamus
ambafladcurde Ferdinand Roy des Romains. A/. A/<îrf/>»
V'venrich Medecinjan Commentais traitant des jnonjlres cha-'
pitre 17.
Ambroife Paré,Chirurgien expert & renommé , ra-
conte, qu'à certaine femme en Beaufle, fut liée dans la
paulme de l'vne des mains vne grenouille viue, iufques
à ce qu'elle fuft eftouffee en icelle main , & ce pour la
guérir de quelc][ue fieure.La nuiftfuiuant celle femme
fut engroflee par fon mari, &: fit vn enfant de cefte por-
tée, qui auoitle vifage tel que le mufeau d'vnc gre-
nouille.t^M mefme Commentaire ^ chapitre.
Vn dofte & fçauant Théologien raconte en certain
fîen Commentaire fur Genefe auoir vcu vne femme
honnefte, belle & charte, qui acoucha d'vn loir. Ce
qui auint, de ce qu'vn des voifins ayant prinsvn loir
lui attacha vne fonnette, afin qu'il esfarouchaft & don-
nait la chafTc aux autres. Celle femme enceinte
rencontrant ce loir en conceut tel efFroy , que fotk
iiuiCt en print la forme enuerç ^ par vne imagination
R *
X^o HiftoîresadmirahUs
eftrangament vehemenrc.il lacontoïc aufîî auoir vcu 5
Vviteberg vn homme d'aagc lequel auoit la face d vu
mortipoiirce que la mcrc, enceinte de lui , s'eftoit don-
né peur d'vnmort, & auoit empreint par Ton imagina-
tion telle couleur à fon enfant.Z-ù mefme.
Nous auons veu en la ville de Brefîavv en Silefic, vno
femmequiregardantvn enfant nouueauné, fansper-
tuis au fondement,peu de temps après en fit vn demel-
me.Item vnepayfane enceinte, qui retournée de la vil-
le feule en fa maifon,y ayant mangé vn Ibrpent en lieu
d'anguille ^ fon mari de retour fut fi mal-auifé de lui
dcfcouurirceft erreur, dont elle conceut telle horreur,
que foudain elle en mourut. Plufieurs emprifonnez
pour forfaits, &imaginans perte de leur vie, en vne
nuid, de noirs ou roufi'eaux & blonds qu'ils eltoyent,
comme en fleur d'aage,{ontdeucnus tous blancs cojii-
me vieillards. On recite que certain eilantcn doute
qu'vnautreattentaft à fa vic,encores que celle appre-
henfi'onfuft fa uffe,vint à le rencontrer :& comme l'au-
tre par jeu lui donnait d'vne grofl'e laue qu'il tenoit
fous fon manteau contre la poitrine, il s'imagina que
c*eftoitvn coup de poignard, & tomba roidc mortfur
la place. Le mefme à peu près fc dit d'vn plaifant qui
condamné par feinte à eftre decapité,pour auoir mis vn
grand Prince fon maiftreen danger de mort,commeon
culfdifpofe toutes chofes a l'exécution , en lieu de le
fraperdcla hache , le bourreau luiicttavn feau d'eau
froide fur le col.-mais venant à le desbander, il le trouua
roide mort , autant que s'il lui euft tranché tout net la
IzitQ. la mefme.
Il y a enuiron vingt-cinq ans , qu'vne damoifellç
en Balfignys'ellant trouuee en vn notable fcllin auec
honnorable compagnie, au bout de trois femainesren-
contrant vne partie des conuieZ:>quelqu'vnfe jouant,
dit qu'en ce feftin au lieu d'vn quartier de cheureul
on les auoit feruis d'vne cuifle de chien bien afiai-
fûnnee,&qu'elle,aufl~i bien quelesautres,en auoit biea
tiré fa part.Soit qu'il fut vrai ou non, celle damoi-
iellc conceut tçut i Theurç islle boïrçi^r d& cela,
qucie
^ mémorables. ±6t
rjue fc leuant de table elle tombe en parmoifon, vomif^
fenicns continuels/yncopes & fieurc fi violentcqu'im-
poflible fut delagarâtirdeia mort.f.rn-.i^^ we5 mémoires.
Il y a peu de temps qu'vn de nos Princes : en qui la
Soute auoit perdu vn beau naturel: & vne alaigre com-
pofitiôjfe lailla {i fortperfuadcr au rapport qu'on faifoit
des merueilleufcs opérations dVn Preftrc , qui par la
voye des paroles, & des gcftes , î^ucrifToit toutes mala-
dies,il fîtvnlôg voyage pour l'aller trouuer,& par îafor-
cc de Ton aprehenfion pcrfuada & endormit Tes ïambes
par quelques hcures;>fi qu'il en tira du feruice , qu'elles
auoyent defapris lui faire, il y auoit long temps. Si la
fortune euftlailTé emmonceler cinq qu fix de telles a-
uantures, elles eftoyent capables de remettre ce pauurc
miferable en nature. On trouua depuis tant de fimplef.
le & fi peu d'art en l'architedc de tels ouurages , qu'on
le iugea indigue d'aucun chaftiment, M Je Montagne at*
i . lime de < Ejfan^chapitre 1 1 .
IMPIETE réprimée.
L'An' mil cinq cens & cinq , certain Curé dVne des
paroiiTes de la ville de Mifnc en Turinge^regardant
de dcflusle pont de rElbe,riuiere large & profonde,lcs
bafteauxquipafloyent: fans qu'aucun le touchaft,ne
qu'il fuft altéré de cerucau,maispar lefecretiugement
deDicu,cheutdu pont en bas dedans l'eau, &fe noya
tout à rheure.ll auoit acouftumé, toutes les fois qu'on
lui prefentoit des fille? àbaptizer, après leur auoirad-
miniftré le baptcfme , par mcfpris du fcxe féminin , &
fans efgard à la dignité des amcs Cbrcftiennes , dire
qu'il ne faloit point les rapporter en la maifon , mais
les ietter dedans Vtzxx.Ceorgi le Feurc au $.liure defes ^yin-
nalcs de Aiifnt^
Vn Imprimeur de Tranflyluanie^ ayant efté C\
mal-heureux que d'ofer imprimer des liurcs & poui-
traids exécrables drcflcz par certains hérétiques enne-
mis de lafainfte Trinité mourut defcfperé & enragé.
R 3
i6t Hijlûires admirables
Jofias Slmler en la prefiue dejcs Uures, tonchunt le fils éternel de
Z>/e».Lcsnouueax Arians, Samofateniens & Tritheitcs
de noftrc tcmps,commc Michel Seruct, Valcntin Gcn-
til,& leurs difciplcs en Pologne, en Tranflyluanie & es
cnuiron.s> font tous péris malheurcufcmentjau regard
de leurs âmes premièrement, & la plufpart aufl'i au re-
gard de leurs corps : Seruet ayant efté bruflé vifjfansia-
mais vouloir reconoiftre lefus Chrift pour fils éternel
de Dieu>Valcntin dccapité,les autres morts furieux,dc-
fçfJ3erez,tuez ou de leurs propres mains , ou exécute/,
pariuflicc, fans abiuration ni detcftationdeleursim-
pietez deteftablcs,qu'il faut enfeuelir aucc les noms de
Jeurs Auteurs.
Enuiron l'an i^5o.certaingarnimcnt,qui des long téps
faifoit eftat dcfe moquer de toute religion , & des pcr-
fonnes deuotes, entra dedans vn temple , où lors fe fai-
foit la prédication par le Pafteur du lieu. Ce mal-heu-
reux faifant tout au contraire des autres là prefensjcom-
mcnce à grommeler, & par diuerfcs contenances tcf-
moigner qu'il cftoit vn profane:à quoy le paileur,attcn-
tif à fa prédication , ne dit mot,ains foufpira feulement
à Dieu, priant qu'vn tel gaudiiïeur fuft reprimé : lequel
voyant que le prefchcur ne contcftoit contre lui : &
meiprifbit Tes indignes façons:fort hors du templc.Mais
toutàTinftant vnc tuile du toiâ: lui tombe fur la tefte
&le tue fur laplace.Cela auint au royaume de Danne-
marccommcTatefte N Jiemmingidotie TheologienjcnÇon
expf>jitlon^Hr le l.ch np.de f F. uaiigile feloiï S. ï ean.
Chriftofie Turc, Confcillcr\i'eftatd'vn grand feigneur
Alcman,montant vniour à cheual,&fe mocquant d'vn
Prince excellent , alors prifonnier entre les mains de {es
ennemis , commence à dire, que font deuenus ces ga-
iands,qui chantoyent tantlcsvns aucc les autres, e;»^;.^
jie borchtiis on Je Godt,ce(i à due en nollrc vulgaire,t>^»/
fi toft (jne C cti nous off^ncs j Dieu 7io»s cjl fecours ç^ defence,
Maisà pemeauoit-il :rcheué de parler qu'vn mal fou-
dain le fai/ît , tellement que contraint de mettre pied
à terre, on le porta au licft, dedans lequel «n heu de
fhanter il ton^ba ^ mourut eu defc/poi retirant & mon-
^ memerxhles, i ^j
ftrantla langue noire comme vn chavb&n , & pendante
hors de la bouchclcneufiefme lourde luin , Tan 1^47.
Au merme temps certains autres gaudifîeurs s'apreftans
à vne grande feftc, en lieu de trembler fous la puifTantc
main de Dieu qui frappoit rAlemagne,& s'eftans aflem-
blez en troupe , furent chaflez à coups de tonnerres &
fouldres eftrangesqui les contraignirent de demeurer
COIS, M.Atartin Lidms dofleT heologienyen jonUitret intitulèy
Celebratiû dextrx E xcelfi, ^c»
IMP os rVR ES & imfojleurs
ejlranges,
L'An mil cinq cens foixante, comme M. Adrian Tur-
ncbus, lors profefTeur en Grec à Paris , interpretoit
xno. comédie d'Ariftophane , intitulée les Guefpes , où
il eft faid mention de certain Eurycles,infîgne En-
gaftrimythe , il afferma en vne de Tes leçons publiques,
ou fe trouuerent mes deux fils , Théodore lunfconiul-
te,& Henri Dodcur Médecin : qu'autresfois il auoit
veu dedans Paris vn tel impofteur qu'Eurycles, lequel
s'appclloit Piene le Brabançon. Icchii , quand bon lui
lembloit , parloir du ventre , tenant la bouche ouuerte
fans remuer les leures : &par telle d'exterité , ou par
l'impofture du diable, il affrontoit bcaucoup^de gens.
Il deuint amoureux d'vne ieune & belle Paniienne, or-
pheline de père. Ne pou uant induire la merc au maria-
ge qu'il pourchafToit : finalement, comme vniour ils
en eftoyent en propos , il commence à taire fortir vne
voix de fon corps , comme fi lo defund mari fc fuft
plainâ: d'eftre tort tourmenté en purgatoire, à caufc
de ladeftiancedefa vefwc, qui refufoit de bailler leur
fille à Brabançon , lequel l'auoit tant de foisdeman-
dce, & qui eiloit C\ homme de bien. La femme ef-
frayée de telles complaintes , ayant compaflion de fon
mari, confentit a la demande de cell afîronteur , le-
quel aucc la fille cerchoit aufl'i certaine grande fom-
mc de deniers à cUc laiITez par le telkmcnt de fon
K 4
2^4 Hiftoires Admirables
perc , comme il apariit bien toft après. Car ûx
mois après les efpouraillcs, & qu'il cuft mangé tout le
mariage de fa femme , il lalaiffe auecfa bel}c mère , &
s'enfuit à Lyon. Il y aprinc qu'vn riche baiiquier eftoic
mort quelque temps auparauanc, lequel auoit elle mal
renommé defon viusnr, à caufc de Tes viurcs & rapines.
Sur ce il va rrouuer le fils & héritier vnique de ce ban-,
quierjequel fe promenoir en vne galeriepres du ceme-
tiere,& lui fit entendre qu'il eftoit enuoyé vers lui, pour
lui aprendre quclc^oie casimportant , dont il auoic à fai-
re. Et fur ce qu'il l'admoneftoit de pcnier plus à l'hôii'
neur &à l'ame de feu fon père qu'à fa mort,on entendit
foudain vne vaix contrcfaifant celle du percjaquelle le
Brabançon faifoit fortir defon ventre, & cependant il
iouoit à l'esbahi auec vne dcxteritc /înguliere. Par
cefte voixle fils eftoit admoncllë de l'cftat auquel le
père eftoit réduit p.ar fa merdianceté , & de quelles
peines il eftoit tourmenté au feu de purgatoire , tant
pour foy que pour foa-fils , qu'il auoit laifle héritier
de tous fes biens acquis en mauuaife confcience :
déclarant qu'il ne pouuoit eftre deliuré , ft fon fils
ne fatiifaifoit dcuèment , diftribuant des aumofnes
à ceux qui pour lors pouuoyent en auoir plus grand
faute : que ceux là eftoycnr les Chreftiens prifon-
niers des Turcs : & qu'il s'en fiaft au perfonnagequi
parloit à lui , lequel eftoit enuoyé en Conftantmo-
ble par d'autres gens de bien : & que Dieu l'auoit adref.
fé bien à poind vers ce fils pour ce mefme tffeâ:. Le filj;
qui n'eftoit pas des plus auifez du. monde , encor qu'il
ne fe doutaft d'aucune fraude , toutesfois ne pou-
vant bien digérer ce mot de fournir argent, refpon-
dit, qu'il y pcnferoit, & aftîgne le Brabançon au lende-
main en ce niefme lieu. Cependant il fut en mcrueil-
leufc angoiiTe , tenant pour fufpefte la place où la \oiyi
auoit parlé, pourcc que c'eftoit vn lieu couuert à
l'ombre , rcfonnant, &. propre à faire quelque four-
be. Parquoy le lendemain il mcinele Brabançon en
vn autre lieu defcouucrt , plat, &' où il n'y auoit buiffoa
tli ombre quelconque, Neantmoius deuifans eafcmbie,
le fils
drmemorahïes 16^
le fils ouyt la chanronfufmenrionnee, aucc addition,
que fans aucun délai il baillaft fîx mille francs au Bra-
bançon , & que tous les iours il fill: chaiiter trois Méfies
pour le falutde Tainedefon père : autrement il eftoit
damné pour tout iamai's. Le nls , confciencieux , & c-
ftonnc, fans s'auiferde plus ferme refolution (les biens
mal acquis ayans des ailes) mit es mains de l'importeur,
aflcz à regret toutesfois , cefte fomme de fîx mille
fiancs, fans en prendre recepifle, ni tcfmoin des cho-
ies qui fe pafl'oycnt. Le père ne reuint plus importu-
ner Ton fils , ains demeura en fon lieu. Quant au fih>
après auoir did: à Dieu au Brabançon (lequel s'en alla
viftement hors de Lyon auec fa proye) comme il fe
monftraft plus ioyeux que de couilume,dont les autres
banquiers eltoyent esbahis; après en auoir entendu l'oc-
caîîon ,ilsfe,mocquerentdelui, pource qu'auecfi peu
de lugement il s*ci^oit ainfî laiflë aftronter , &lui def-
couurirent rimpofturercc quile picqua tellemenr,que
peu de lours après il mourut , & alla vers fon père pour
Içauoir la vérité de ce faid. l.^'vier au> z. Uure de pr^fii-
gm chdp. 14.
L"an mil cinq cens douze fur veuë en la ville d'Augs-
bourg vne fille , aagee d'enuiron quarante ans , la-
quelle affermoit auoir vefcu plufieurs mois-ians boire
ni manger , ni dormir. Pour vn tcmp.v elle fit croire ce-
la non feulement au fimplcpeuple,mais mefmes à l'em-
pereur Maximihan , & à plufîeurs Princes & grands
leigneurs, qui Tayans fait garder & veiller, croyoyent
qu'elle eltoit conduite par Tefprit de Dieu , & nourrie
miraculeufement. Mais enfin Çon impoil-urc futdef-
couuerte, tellement qu'elle s'enfuit d'Augsbourgheu
de fa naiflance à Fribourg en Suifîe , où cftant defcou-
ucrte on lui fit fon procès & fut noyec. tycofthenes enfin
recttril desprodi^es^page Çl8.
Enuiron lan mil cinq cens quarante fix , Marguerite
fil'e delcan Vlmer d'Eflii-igeen la Duché deVirtébcrg,
feignit de fentir des douleurs extrêmes au ventre, qui là
deUus commence à s'enfici de telle forte qu'en peu de
iours il parut fi gros que c'efloit comme va tabourim
i66 Hijloires admirables
Elle fe plaignoit Je ("cntir en fon vcnrrc diucrfcs for-
tch; d'animaux , qui fe nourrifloycnt de fon Tang, di-
iànc ne pouuoii manger viande quelconque , finon vu
f eu de conhtures , & flairer quelques frui«fls. Les pcr-
fonnes qui approchoycnt de Ibnlid encendoyent Ai-
uerfes vojx en fon ventre , &rembloic qu'onyouyll
chanter Acs coqs , des poules cloquer, des oycs canctcr,
des ch'ens abayer,des brebis beeller,des porccaux gron-
f,ner, d'auantage, des bœufs mugir, des chenaux hennir,
& d'autres cris de beftes furpallans de beaucoup le bruit
cjueplufieurs hommes euflent peu faire. Ellefe plai-
gnoitfortlà dcffus , difantquc ces animaux la deîchi-
loyent miferablement. Pour coulourcr encore mieux
«efteinuention , elle tira hors de fon cofté des vers, le-
5:aids& autres ferpens, de merueilleufe longueur iuf-
ques au nombre de cent cinquante ou enuiron. Au bruit
de chofe C\ nouuelle,acoururent gens de toutes parts,de
près & de loin,pour contempler ce prodige, & par pitié
fît on de grandes & riches amnofnes au pere& à la me-
iej>qui gardoycnt cefte fille. On demande confeil à quel-
<i;ues médecins & chirurgiens. Certains gentils-hommes
i^ médecins de l'Empereur Charles V. & de Ferdinand
Koy des Romains y vindrent&ne defcouurirent rien
^e celte impoltuve. Marguerite ayant iouefesicux qua-
tre ans entiers, comme iljfemblaft que les douleurs a-
creufl'ent, le Magiitrat ( ou par pieté, ou foupçonnant
cjuelquc fraude) appelle le pcrc &la mere,leur deman-
de s'ils voudroyent côfentir que par aduis des médecins
on fiftincifion au ventre de leur tîUe. Le père, homme
iîmple,&; qui ne fçauoit rien de cefte impolture,côfent.
Mais la mcre complice de toutk* mal , commence a s'y
oppofei formellement , menace les iuges de la male-
«iiction de Dieu , en ce qu'ils vouloycnt que fa fille fuft
en manifeftc danger de mounr entre les mains des chi-
rurgiens : infiftc fort fur laage & fur la foiblelfc de ccfte
panure patiente, a laquelle on enuoya gens lui remon-
ikcr qu'elle auoitfouucntestois de(îrc,qucles médecins
la fouiagcafient, qu'iceux eftoyent prcfts ou de la dcli-
l)rcr du rout;OU d'appliquer quelques ieuitjfs à fon mal.
Elle
^memorMes. ^^7
Elleinftruiteparramcrerefpond fa rcfolution eftredc
fouftnr patiemment celle douleur, puis qu'ainfi plaifoit
à Dieu,& que l'ayant fupportee l'efpace de quatre ans,
elle efperoir forces pour acheuer fans fecours d'homme
viuant.Le magiftrat ayant oui la refponce du père com-
mande à vnDodeur en médecine, a trois chirurgiens,
&à vnefage femme, de vifîter foigneufementceftefil-
le,& venir iufques à la feftion d'icelle, félon qu'ils co-
noiftroyenteftrede befoin. Eux entrèrent en la cham-
bre,leuerent par force IcscouucKures de deflus la fille
criant à pleine tefte , & comme ils voulurent mettre la
main à bon efcient à cefte cure , defcouurirentla four-
bercefte fille ayant vn ventre artificiellement fait & ac-
commodé fur le fien naturel aucc des engins en arcade,
des couflinets,& autres inuentions. Le tout ayant efté
defcoufu & tiré hors par la fage femme on vid cefte fille
à nud,d'vn corfage bien compofë ^ & beau au pofTible.
La tromperie aueree,le pere,la mcre,la fille,& quelques
côplices, qui de nuidauoyêtfaitgrâd chère enlemble&
dilfoluemcnt gafpillé tout ce que les allans& venans a-
uoyent libéralement aufmofné furent ferrez en prifon,
puis appliquez à la torture. La mère tenue & ferrée de
près confeffe que par la perfuafion & aHlftâce du malin
cfpritjCÔtrefaifantles diucrs bruits fufmêtionnez,elle a-
uoitparTefpace de 4.ans joué cefte tragedie.Parfentéce
de magiftrat elle futeftrâglec& bruflee. Quanta la fille>
ayant eu les ioues fleftrics d'vn fer chaud, elle fut con-
damnée à prifon perpétuelle entre 4.murailles.Le Pcre
conu innocent de telles impoftures , fut relafché auec
quelques vns non coulpablcs,les autres punis félon les
circonftances àcs forfai<fts. ^nce mefme traité.
le puis bien adioufter à Ihiftoirc précédente ce qu'on
recite d'vne fille Angloife, qui eftimce s'cftre abftenue
fortlongtêps de boire & demanger,futreueree de tous
du téps de nos anccftres & appellee la fainde vierge de
Câtorbery. Faignât vouloir prendre quelque nourritu-
re,clle fe mettoit à genoux deuât le grâd Autel , & ou-
urât la bouche receuoit d'éhaut rhoftie,comme vn pain
defcédârduuelpourfon repas: chafcun la regardant de
^^8 Hiftoires admirabhs
loin, &auec grand eftonncirient raui en li contempla-
tion Jç ce miracle. Ellcfc glorihoit delà nourriture
d'vn tel pain celclle , dont s'cnfuiuoit félon Ton dire fa
Trgucur corporelle & Ton en bon point, fans qu'autre
viande entrai! en Ton corps: ayant au relie l'apparence
de fainâete de vie, tellement que le Koy, les Princes
&: Seigneurs du royaume, & autres perfonnagcs d'auto-
rité, venoyent la voir comme par deuotion. Cefte tra-
gédie dura aflcz longtcmp«;.En fin,le confeil du Roy fc
coûtant de quelque impofturc, enuoye des Commif-
faircs en l'abbaye ou celle fille dcmeuroit lors,^our fai-
re diligente cnquefte de tour. Ils feignent eftre venus
Il pour quelque deuotion. Puis ayansfoud-^in referré à
parT,& faitfoigneufcment garder cefte fillciliui fut im-
poûlble de iufneriufquesà trois iours;& comme le fexe
fememn eftimbccillc,eileconfefle toute Pimpofture.a-
fçauoir qu'on lui deualoitThoftic par vn pertuisdela
voure du tcmpie^attachee à dcîfort déliiez cheueux de
femme qui ne pouuoycnt eftre difcernez par ceux qui
lîefegardoyent /inonde loin.Qu'au partir delà elle aU
loît faire grand chère auec quelques Abbez qu'elle
nommoit,quiauecelle a caufe d'autres mefchancetez
furent mis à mcf t.,^» mej'mc traie fé.
Vne Vénitienne prétendant mettre tant plus en crc-
Cît certain ordre iurnomme de perfection , nouuellc-
mcntinuenté,fe fit accommoder deux liurcs de mefme
grandeuril'vn dcCqucis eftoit la Bible ; l'autre vn coffret
garni de fermoirs, où elle cachoit des bouteilles quar-
rees pleines de maluoifie, & des marfepains fort deli-
^'cux. Auec ces deuxliures , ellcs'enfermoit en vne
chanibretre,où elle demcuroit clofe en contemplation,
fsjis fortir durant cinq ou C\x iours , fueillctant , ores vn
îinre,ores Tauticle bruit courant qu'en ceft cxtafe elle
ne prenoit aucune noinnttfre:. Ayant pippé pourquel-
^]ue temps la ville de Vcnile,en fin l'on dcfcouuritfoa
inipofrurcuf lui trouua-o« outre ce coftVet force lettres
•1 amour , tellement que par fcntcncc de la Seigneurie
clic Ai t reicc uce. L a m-^fme.
Au Maïquilât Je SenctenEfpagnefu; defcouuerte
Taa
C^ mémorables > z6^
Tan mil cinq cens foixante cinq vne ieune fille aagec
d'enuiron feize ans , de laquelle on faifoit acroire que
par la vertu du faind Efpric elle auoitdefîa vcfcuraas
manger, ni boirC; ni ietcer excrcmens de fon corps, lef-
pacede deux ans. Deux fils du Duc de Médina cctU
voulans voir que c'eftoit , entrèrent en fa chambre > Sc
leuans la couuerture du lid ou elle eftoit couchcc>trou-
lièrent les linceuls tout-mouillcz de iVrine d'icelle. La
fourbe couue, elle fut liuree auxinquifîteurs]pourlui
former procès. La rnefme.
On a furprinsen telles impoftures certaines filles es
pays bas,comme à Vianc près de Maeilncht, a Gorconi
en HoIlande,à la CapcUe es enuironsdu Liège. Otïk
mcrueille de Tentendement humain, qui fe lertdela
vanité de Ton fens, pour acquérir bruit de fainâ-etéSc
de perfcdion. Les gens de bien ne veulent pas feule-
nicntfemblerreftrc, mais s'efforcent de Teftre déplus
en plus,& deuant Dieu.
Ces impoftures de ieufneurs me ramentoiuent vne
hiftoire marquée au z. hure des faits & àits mémora-
bles d'Alphonfe Roy d'Aragon & de Naples , grand on-^
cle de leanne mère de TEippereur Charles V. L'auteur
raconte qu'on vint direnouuelle vniourau Koy, delà
morthidcufe de certain moine Auguftin nommé An-
toine, lequel peu auantfa mort voinic plufieurs horri-
bles outrages & blafphemes contre lefusChrift &rheu-
reufe Vierge fa mère. Ce moine eftoit tenu par toute
ritalie, la Sicile & rEfpagne, pour vn laincl homme,
quiauoitieufné quarante lours & quarante nuids fans
boire ni manger, s'enfermant alors qu'il faifoit tels ip.i-
xles dedans vnechambrette, où n'y auoit viande ni
v rcuuage quelconque, & ou il eftoit gardé par gens qui
le vcilloycnt. Lebruit eftoitquelcs Anges le feruoyenc
& dcuifoyent auec lui. Mais il faifoit porter dedans U
chambrctte force grofles chandelles , la plufpartdcf-
quellescftoycnt couucrtes legereriient d'vn peu de ci-
re, crcufcs au refte , & remplies de tuyaux pleins de
marlepains & de fauciftons faits de chairs de cha')ons &
dcpiiaifaiis, faupoudrez de fucie , de cançlle & autres
170 Hijloires admirables
t)onnes efpîces. Il portoic vne large ceinture Creufe , St
garnie d'vne longue bourafic plcmc d'hypocras. Ces
friandifcs , dont il u'auoit faute, feruoyent à maintenir
fon ieufnc , fc comportant fi dextrcmcnt en Ton impo-
fture,quc le peuple tenoit que ce moine menoit vne vie
Angelique.Lors que le Roy Alphôfcreceutlcsnouuel-
le9,que finalemét la fourbe cfloit dcfcouuerte, & que la
vermine auoit mange tout vif ceft impofteur, il dit que
Dieu traittoit ainfi luftement les hypocrites , quife
couurent du prétexte de fon faincT: nom pour trom-
per les hommes. Que bien fouuent en leur vie, &
deuant les yeux de tout le monde , ils cftoyent def-
couuerts & chaftiez extraordinairement , afin que
ceux qui contemploycnt tels fupplices , aprinlTent d'a-
uoir toute hypocriiîe en abomination, t^nt. de Païenne
ai4 2. Hure des dtcli ^ faiBs mémorables d'^lfonfe , chapi-
tre i).
L'an mil cinq cens fcptante trois futdefcouuerte en
la Comté delà Mark , fous la domination du Duc de
Cleues , vne infigne impofturc. Barbe fille de feu Hcr-
man Kremers & d'Anne fa vcîut mariée en troiliefmes
nopces à Eurad Leidecher , aagce d'enuiron dix ans , &
fubornec par fa mère, contrefit fi dextremcnt Tabfti-
nence au boire &au manger par refpace de pluficurs
mois, que grands & petits y furent amnez : tellement
que quiconque reuoquoit en doute ce miracle cftoic
eftime prefq-ucs autant qu'hérétique. M. Ican VVier,
médecin ordinaire du Duc de Cleues, homme dofte
entre ceux de faprofefllon , prudent & autant adroit
qu'autre de noftrc temps à delcouurir les impoftures,
ayant parla permifi'ion du Duc de Cleues vifite celle
fîlle,& conuparlacoiifiderationde toute lataille,du
vifagCjdes paroles, de la contenance de celle fille (qui
le fourtenoit fur des potences, & feignoit nepouuoir
marcher au-tre met) qu'impofllble elloit que le portant
fi bien corne elle faifoitjvermeille, fraifche & alaigrcfa
maladie fuft telle que fa mère & elles difoyent: après a-
uoir obtenu du Duc permiflion de rctciur chez foi pour
(juel^
cf* fnetnarahles* zyx
«quelques fcmalnes ccfte fille auec vne fîcnne fœur pi ^J»
aagee, il defcouurit finalement, à l'aide de fes domcft i-
(|UGs,que tout ce miracle n'eftoitqu'impofture, dont a-
uoycnt efté trompez les principaux de tout le pays &
le peuple : tellement que les efcrits qui en auoyent efté
imprimez & publiez en Latin & en Alcman furcntfup-
primez, & la fille auec fa mercfupportees& renuoyees
fans bruit chez eux. A Toccafion de cefte impofture ain-
li defcouuerte, ledodeur VVier monftrepar preuues
infaillibles, tirées de la médecine , que les perfounes qui
font en bon point, comme eilioit celle là , ne peuuenc
fubfîfter longuement fans boire & manger : & requière
qu'on examine diligemment toutes circonftances: fur
tout au regard de la face, de la conftitution de tout le
corps , & des diucrs excremens. Si la face cft viue , Iç
corps fuccalent, s'ily a excremens, es yeux , narines , pu-
ftules, gales , vrines, & repos : il y a occafion de prendre
garde à foy pour n'eftre deceu. Ce qui eft trcs-rcquis,
pourdifcerner le menfonge d'aucc la vérité. .^utrMté
de ieimiin commentitips.
En la ville d'Artigues, diocefe de Ricux , rcfTort du
parlement de Thouloufe , auintqu'vn Martin Guerre,
ayant elté marié Icfpace de dix ou onze ans auec Ber-
trande Rofli , depuis , par vn ie ne fçay quel mefcon^
tentemcnt qu'il eut de fonpcre, abandonna fa maifbn,
fe retirant au feruice de l'Empereur Charles cinquief-
me, & depuis du Roy Philippe fon fils , ou il futl'efpa-
cededeuze ans , iufques a ce qu*à la prife de la ville
de Saind Quentin il perdit vne iambe. Or y ayant
enuiron hui<ft ans que fa femme n auoit eu ni vent ni
voixdelui, vn nommé Arnaut Tillier , (aucunsl'ap-
pellent ArnautduTil) natif du Comté de Foix, que
<]uelques vns eftimoyent auoir efté nourri en la Ma-
gie, print argument de iouèr le perfonnagc de Martin
Guerre, aidé en ceci tant delà longue abfencedelui,
comme aufti que les traits & Hneamens de fon vifagc fc
rapportoyent aucunement à ceux de Tautre.S'eftantpre-
fente àla femme , du commencement elle ne le vou-
loïc reconoiftre : mais outre Içs conformit«2 du corps, U
2.7 i Hïjhires admirables
luidifcourutdespnuautc/ quis'eftoyeiit paflTees enfro
eux deux , mefmcs la première nuift de leurs nopces,
voire iufqucs aux harJts qu'il auoit laiflces dans vi>
coffre, lors delon partcment. Chofcs qui ne pouuoycnt
eftrefceuès qucpar le vray mari : tellement qu'eu fin
non feulement elle , mais lapiufpart defcs proches pa-
ïens & ami"), le recognurcnt pour Martin Guerre :oc en
celle opinion s'efcoulerent quatre ans entiers lansau-
cune contradiction. Au bout deiciuelsvn foldatpalfani
parla dit, que Martin Guerre auoit perdu vne ïambe.
Peu auparauant celte femme elloit entrée en quelque
desfîanccde Ton mari putatif : au moyen dequoy elle
prinîtaflcfous mainpardeuanrdcûx Notaires delà dc^
datation du foldat. Ceftc dcpofîtion , pour bien dire,
elloit efuolcc: premier mal-heur to'jtesfois de ccmife-
rablc Tillicr. Car comme il cil malaifé à vn menteur de
nevaricr, auffi recueillit la femme pluficurs propos de
lui, qui la firent esbranflcr contre lui: & de fait folli citée
par Pierre Guerre, oncle de Martin, non feulement l'a-
bandonne, maislepourfuit extraordinaircment par de*
uantle Senefchal de Kieux , où il fut condamné a mort
par fentcnce, de laquelle il appella au Parlement de
Thouloufc , lequel fe trouua mnnimentpcrplex fur U
nouueaute de ce fait. Card'vncoilé TiUicr dcfcouuroir
de point en point toutes les particularité/, qui s'eiluycni:
paflecs entre lui & Eertranùedcuant fa dcsbauche , ks
difcours qu'ils auoyent eus enicmblement le premier
foir de leurs nopces,nommoit ceux qui leur auoyent ap-
porté lelendcmain matin le chaudeau : qu'on leur a-
uoitnoiK: l'aiguillette l'cfpacc de huiet ans entic s, la-
quelle lear fut depuis defnouee par le moyen d'vne
vieille, racontant par le menu le temps, le lieu , les pei-
fonnes qui auoyent. elle employées.! ceil afaire. Que
depuis ellans allez aux nopccs d'vn de leurs parens, aux
champs, pour autant que Iclieueftoit trop ellroit pour
les coucher , & qu'il faloit que fa femme couchaft aucc
vne autre: il fut enti'euxaduife que, lors que les autres
feroyent endormis, iliroit fc coucher àuec fa femme:
ûu'iUauoyen: eu vu enfant^ uomniant le nom du Pre-
^ mémorables. 2,75
lire qui le baptifa, & des parrains qui l'auoyent tenu
fur les fonts : le tout d'vne telle franchife & afleurance>
quclafemmcyperdoit pied : adiouitant les motifs de
fon partement , les fatigues qu'il auoit eues tant en Ef-
pagne qu'en France. Toutes lefquellçs particularité?: fe
trouuerent depuis eftre vrayes ^ par le raport de Martin
Guerre.
Ce qui rend ceftehiftoire plus efmcrueillable , c"c{i
que ce fuppoie mari n'auoit iamais familiarifë aucc
l'autre. Les prefomptions qui combatoyent encore pour
lui eftoyentvne dent eemellc; vn ongle enfoncé en la.
main dextre , certains pourrcanx, & en l'œil vne tache
rouge , tout ainfi comme Mavtjn Guerre : mefmes qu'il
reflembloit aucunement a fes lœurs , lefqueiles s'cifoy-
ent tellement aheurtecs à vne fotte opinion , qu'elles
Tauouoyent pour leur frere.D'vn autre coftéfaifoit con-
tre lui la depofirion du foldat, vne infinité de tcfmoins
produits parla femelle; entre lefqueis vn hoflelicr d'vne
ville prochaine depofoit, que le conoiffant, & l'ayant
veu palfer, puis appelle Arnault par ion nom , il le pria
en l'aureille de ne le nommer ainfî, mais bien Martin
Guerre. Outre cela fe troiiua autre preuue d'vn fien on-
de, lequel le voyant en voye de perdition , vint tout ef-
ploré de«erslui,pourraéHionneiler de fa faute , & qu'il
fte vouiuftachcuer de fe perdre. Ce neantmoins ces
reuues n'eftoyeiit fî pregnantes , qu'elles annuiiaffcnc
es autres : car à toutes les obietftions qu'on lui faifoit, i\
tefpondoit conftamment, rej errant tout l'artifice de ce
qu'on le tourmcntoit contre Pierre Guerre fou on-
de, lequel il auoit quclqiJ-c temps auparauaat mena-
cé de lui faire rendre compte de la tutelle , & curatelle
qu'il awoit autrefois eùë de lui. tt pour donner fueille à
fon dire, il requit que fa femme fuit a(lcrmentec,fcauoir
fi clic ne vouloir le rccognoiftre pour fon vrai mari -.'de-
clarant qu'il remcttoit fa vie eu fa mort au fermenr
qu'elle teroit.Ce qui l'eftonnatellejnent qu'elle ne vou-
lutl'acceptcr. Circonftances <]ui.eiincurent tellement
ies luges eo la faueur 4c i'accui'é , qu'ils firent mettrer
S
l
174 Hijloires admirMes
en prifonsTeparecs Toncle &: la nicpccafin qu'ils n'euH.
fcnt à prendre langue Tvn de l'autre. Lftimans que ce-
fie femme audit elle fubornee à faire ccftc accufation
par les menées de l'oncle , qui eftoit en danger de fa
perfonne.
Or commclcsiugcseftoyent en ccft eftrif , ilauint
que le vray Martin Guerre retourne en fa maifon , où il
fut des la première falutation reconudetous fesparens
écvoilinsy &:de5 Tinftantauerti de Tafront que l'autre
lui auoit fait, il s'achemine droit à Tholoufe , ou il pre-
fcntereqacfte, pour eftrereceu partie. Des lors les lu-
ccs ferrouucnt plus eftonnez qu'auparauant ; parce
qu'Arnaut auec honte effacée fouftenoit que ceitui c-
ftoit vn affiontcur,atil:ré par Tes parties aduerfcs. C'e-
floit proprement la rencontre de Mercure & de Sofias,
dedans l'Amphitruon de Plaute.En ceil: eftrif,les luges,
pour s'afleurer, firent atteindre de prifon l'oncle, tout
pafle & desfait , & mirent Martin Guerre au mihcu de
quelques autresjhabillez de mefme parure que lui^pour
voir s'il le reconoiftroit : mais foudain il vint le choi/îr'
auec vne infinité de carefres& accolades. Lefemblable
fit puis après Bertrande, lui requérant pardon du tort
qu'elle lui auoit faitinfciemment. Toutesfoisle mari '
ne prenant ces paroles en payement, d'vn mauuaisocii
commença delà blafmcr. Comment ell-il po/Tiblc, lui
dit-il, que tu ayes predc confcntement àceft abus ? car
& en mon oncle, & en mesfoeurs, il y peut auoir quel-
que excufe. Mais nulle en l'attouchement del'hom-
ine à la femme. Et en celte aigreur perfeucra longue-
ment, quelques remontrances qu'on lui fill. Ce qui
£echit les cœurs des luges, & leur donna aucunement
à penfcr que celle violente douleur elloit vne tres-
poisnante prefomption pour le recognoiftre vrai ma-
ri. ^Toutesfois ce qui les tint aucunement en fuf-
rend, fut que les Commiflaires de la Cour interro-
ruans Martin Guerre, s'il auoit iamais eu le Sacre-
xiient de Confirmation, refpondit qu'ouy, en la vil-
le de Pamiers , & cotta le temps , l'Euefque , Tes
parrains & jnauaiacs. A qtioy Arnaut; feparémcnr
fittOlKC
I
idrmcfkorâbles, 17^
Çt toute pareille rcfponre. Cenonobftant, en fîn,parar-.
left du mois de Septembre 15^0. il fut déclaré atteint &
conuaincu du fait dont il eftoit acculé., & en ce fajfanc
condamné a faire amende honorable en themilè,la tor-
che au poing, en plein parlement,& en après dcuantla
porte de la principale Hglife d'Artigues,puis à eftrc pen-
du & eftranglé,fon corps brujflé & conucrti en cendres,
luçement qui fut prononcé aux grands arrelh de Thou-
loufe en la mi-Septembre , & depuis exécuté : ayant ce
mal-heureux homme parauantque mourir rcconu toute
la vérité de Thiftoirc , dcfcrite depuis & pubHce par M.
lean Corras,grand lurifconfulte , rapporteur de procès,
aucc certains Commentaires, E.PaJ,juter au^.Utt.des Re-
cerches de laFrance,ch.Ic).
Souslercgne du Roi Charles IX. vn certain Touran-
geau,de légère tailie/e retira dedans Geneue ,Cq faifanc-
nommer lean Allard,peu conu , pource qu'il viuoit du
mcfticrde Jardinier. Ayant beaucoup enduré , pour le
peu de profit & grand trauaii de telle vacation, il s'en aU
la au bout de quelque temps en Aleraagjie, finalemenc
en Suéde , où il fit tant qu'il paruint à élire iardinier du
Roi. Par fes artifices il s'auancapeua peu, iufqueslà
quedextrementil obtint charité d'agent pour le Roy-
vers la feigne uric de Venife,ou ellant il fait vn voyaçe à
Miliin,vi{îte le Duc de Selfe,lequel y commandoit p'our
le Roy d'Efpagne, & iouë C\ dexireincnt fon perfonna-
ge,que le Duclui prcfta enuiron huUt mille efcus.Non
content de celle bourfe ^iicU'aye d'en faire vne autre,
retourne à Venife, pî;opofe aux Seigneurs certaine ven-
te de vailleaux & d'art!llerie,& fonne de fi douce chale-
mie , qu'il tire d'eux pur forme d'emprunt iufques à 14.
mille efcus.
Il dcfioge pour fe retirer en Suéde. Etpaflant par Mi-
lan retourne fane la reuerence au Duc , & lui rend feç
Sooo.efcus.I-ftant à table au logis , & la rclk vn peu ef-
chaufce;il parle d-u Pape 6c de les cérémonies fi rudeméc
qu'on Tarrefte prilbnnier,& de Milan ilelf côduità Na-
pies. Le Pape Grégoire Xlll. ayâtentcdu qu'vn prifon-
■icr,fc qualifiât ai»bûlladeur du ^oïdc Suéde eitgit €«
%j6 Hijloires admirables
mains de riiiqUilkion commande qu'on l'amcinc dç
Maplesà Romc:ou elUt il veut le voir &ouyr,dôt naift
€n fan fi grande priuauté encr'eux, que le Pape lui pro-
met d femme certaine fiennc parente ou fauorite. Puis
SI lui donne garde librejogis commode , & permiflion
de vifiter fa promiiejlaquelle aufll FaUoityoïr: priuauté
xjui s'embraza telleiÀent,quele ventre commença à en-
fler à refpoufepretcndue.Ce qui fut couucrtd vn brujc
d'indirpofition;qui requeroit que la Signorc changeait
«l'air.
Allard preuoyant que bien toft on luiiouèroit \n
mauuais tour à caufe de ceft atfront/ait tant qu'il prati-
que vn Angloisferuitcur de certain Cardinal François,
fciournantpouriorsà Kome: & par le moyen d'icelui
fut mené fur le Tybre,& fe fauua dextrement, puis fans
arreftergaigna la Prouence , ou eilantarriue au porc
d'Antibe,il fe fit conduire chez le Baron d'Alemagnc,&
y demeura quelque temps auec fon Anglois. Le Baron
s'en défait, &lcs enuoye auec deux ou trois autres fer-
uiceursdcleur fuite vers le feigneur des Diguieres en
Dauphiné. Icelui dcfiranr faire fcruice au Koy de Na-
uarre , comme aufli pour fcdefcharger de ladefpenfe
d'Allard& des iiens , donne auisau Koy, qu'outre celle
qualité d'ambafiadeur , Allard mamtenoit auoir les
moyens alfeurez défaire toucher plus decinqmilhous
d'or.
Allard s'cftant rendu près du Koi de Nauarre, &lui
ayant prefcnté les lettres du feigneur des Diguicres, &
conferme de bouche le contenu , on fit pour vn temps
aflcz d'cllatde ce prometteur. Le bruit de fes dilcours
paruint toft après aux aureilles de laKoinemere , qui
en eut moufche en tefte,pour quelque temps. Le Koi
de Nauarre eftant venu en la Rochelle en cesentrcfai-
tes,&: Allard en fa fuite,quelqucs nainres de Suéde vm-
drent furgir au port de la Rochellc,dontles Capitaines?
Marchans, Patrons & MaiftreS;, a)^ns eu nouuelles d-Al-
Iard,auquel ils parlerent,firent entendre à quelques vns
de leur conoilTance , que ceft Allard eftoit vn affron-
|cur,4ui auoi; feduuJrC Roi 4€ Suéde > & aiiec vn fîe«^.
cf mémorables. zyy
compagnon natif de Gafcongne eftoit caiife de la diui-
(îon liiruenue entre le Roy de Suéde & Ton frerc.xe <^u{
auoit mis le Royaume en combuftion.
L*impofteur fe Tentant defcouuert fe retire prompte-
ment auec les fîens vers le feu Roi Henri III, & vers la
Roine mère , aufquels il fit entendre bien au long les
moyens qu'il auoit de les feruir , leur faifant recouurer
ces cinq millions d'or fufmentionnez, & encore d'à-
uantagc. Qu'ayant efté fort prefle parle Roi de Nauar-
re V de lui déclarer les lieux & places où efloyent tels
grands threfors , & les moyens de mettre la main deifus,
pour n'eftre contïaint i ce faire , s'eftoit retiré comme
en la cachette delà Cour & fuite du Roi de France.
Le Roi & fa mère ioycux de telles nouuelles, firent
bien traiter Allard , la venue duquel publiée en Cour,
il s'acofta des vns & des autres , entre tous du fieur de
Cleruan, auquel il fit entendre qu'il auoit à Rome des
papiers de grande importance, lefquels ilnepourroit
ailement retirer que par le moyen des Suifrcs,afin qu'ils
en efcriuifîent au Pape, lequel en leur faueur les feroir
reftituer. Qu'en cas de retraitte d'iceux papiers il feroit
prcfent de foixante mille Tallers que la ville de Nu-
remberg lui deuoit de principal auec les intcrefts de
<lou7.eans, a raifon de cinq pour cent par an , telle-
ment que tout enfemble montoit à la fommede no*
nante mille Tallers. Cleruan 5'achemine en ces entre-
faites vers fa Baronnie de Coppet , ou ayant pourueu à
quelques affaires particuliers, il fc rend à Berne , à deux
iournees & demie de là:fait entendre le tout à plufieurs
Seigneurs de ce Canton , les priant de vouloir prendre
la charge d'efcrire au Pape pour r'auoir ces papiers, 8c
tirer ce profit en Icwrs cofres. Eux refpondent qu'il y a-
uoit danger qu'Allard ne fuft quelque aflronteur.
Qu'ayant accès vers la Roine mère bien voulue du Pa-
pedequci ne les aimoit point , il n'e^oit befoin y em-
ployer autre qu'elle. Ou que fi Allard dcmandoit autre
adrcflc , qu'il allaft vers les cinq petits Cantons leurs
pliiez.
îiur ce , Cleryan reçoprne à Coppet proche de GenCr
s j
Xyi Tïtfiûires admirables
■ue,oii il parle de ce fait à vn marchant notabîe,nommé
îean Ternault, & le prie d'en cômuniquer auec le Cai-
ionnel Pfifterdc Luccrne.l'Ammâ Luci d'Vndervvaldi •
«8rau:rcs Seigneurs des 5.Cantôs,cilans lors en ce quar-
tier U.Cc qui fut exécuté, &: eux y prefterét L'orcille,rc-
feruans la conclufion apresauoir communiqué de bou-
che auec AUard & Cleruâ, Icfquelsauertis que ces Sei-
gneurs Suifiescntroyenten France ( on ils Ce rendirent
es mois de'Nouembre & Décembre 1581. ) allerentlcs
trouucrâ Paris, où ayant fait quelque cntreueuë, futre^
folu qu'ils s'affcmbleroyent à S. laques de THolpitali
pout conclurre ccli afaire. Tout fut avreftc, a conditiort
<rju'Allardbciilleroit en main lespromeffés des Seigneurs
de Nurcbérg , touchant le principalSc intcreft fufmcn-
tiormé,n1ontant à lafoiriméde rionante fix nulle Tal-
ler^,de laquelle Icfdits Seigneurs des 5. Cantons auroyét
les trois quints montans 57^co.Cleruan & Ternault le
refte par moitiéjoui cftoità chacun i5?ioo.Tallers.D'a-
bondantjAllard deuoit fourniv de contant fix mille cinq
cciis effu*: ]>oiir faii-c le voyage de Rome ^ & Naplcs, à
cjuoy Ternault deuoiteftre employé, '
• £n ces accords 31 reiolutions ', Pfifter homme d'enten-
dement fe fermti en fa première opinion , qu'Allard c-
ftoit vn infigne iirpofteur. Neahrmbins il efcrimoit /î
foupîcment delà lahguc,ayant le Fr:"ncois,rAlemâ,lT-
talié en main, qu'en vne nouucllc aflcmblee auec iceux
Seigneurs il leur propofa de vifa^e rafFs & pofémcnt à
fon acouftîimee , qu'il cftoit après à contra<fler auecle
Koy,2uquelildeuoitprefter deux millions d'orjiç'.iours
après Triccc-d fairt fcnuoir fèize cens mille (fciis com-
ptant, & quatre cens mille eicus à prendre fur les
Verisdtffeu monfieuvle Çoniieilablc de France, du-
quel il difoit kuôii- & promettoit bailler 'a cedule &
promeffe au Roy,lcquei aiioit eu route ceft-e onùerture
pour àgreable/conime Ailard ail'euroit. Il mefloit à là
muerfe vne difFculté ; touchant la feurrë de fi nôta-
\j\q. fonimè de deniers i à quoy \c Conff'il condefcen-
^loit,pfoniettant lui bailler Icsfalines dé Brouage, &
mtcnu d'icelui : ce qu'jUIard-difoir troiJî»er bon,rerer-
C^ memorahles, 2.7^
né qu'il fe doutoit qu'on ne reuoquaft telle affeurance.
Pourtant pria-il les ambafradeurs du Canton de Lucer-
ne de vouloir faire en forte vers leurs Seigneurs , qu'il
fuftreccu au nombre de leurs bourgeois : offrant pour
reconoiflancc de telle faueur la fomme de vingt mil-
le efcus à la Seigneurie de Lucerne, & à chacun d'iceux
AmbaiTadêursdeux mil cinq cens efcus. Là deffusil
court à Lucerne, preftele ferment, retourne en France
auec douze Suilfcs pour fa garde , fans toutesfois rien
fournir, mais endormant tout le monde auec fespro-
melfcsd^or, & urant de grands & petits en diuers en-
droits bonnes fommes , dont il fe maintenoit en fes al-
lées & venues. Tous y eftoyenttrompez,excepté leCo-
ionnd FfitFér, lequel eilant trcf-riche, nefe foucioit
de telles promeffes, & fe founoit de la crédulité des
autres.
Comme les affaires paffoyent de la façon , hu Mada-
me la Connectable eut aduis des propos «^u'Allard auoit
entremettez delà cedulede feu monfîeur le Connefta-
ble. Elle efcriuit incontinent que l'on fe donnait gar-
de de ce parleur : fouftcnant que feu fon Seigneur&
mari n'auoit pas elle fi mauuais mcfnager , qu'il fuftre-
deuable de telle fomme à vninconu , que Ton trouue-
roit finalement eftre vn trompeur. Suruint encore vn
Rochellois, lequel aduertitplufieurs qu'on fe donnait
garde d'Allard. Ce qui efmeut Ternault d'efcrire par
home feur au fieur Gargouillaud, Maire de la Rochelle,
lequel fitrefponccqu'Allard eftoitvnabufeur.Les Am-
bafladcursSuilîcsayansiurë l'alliance auec le Roylaif.
ferent Ternault en Cour pour l'expédition de certains
dfaircs qu'ils y auoyent. Comme ils montoyent à che-
nal, Allard acompagné de gens honorables , partici-
pans au nci^occ , leur promit & cuxauffi , qu'au dépare
de Ternault , ils le feroyent acompagner de deux hom-
mes auec les (^500. efcus aHigne/. pour le voyage dq Ro-
me. Comme Ternault fut prcft à fe mcttrç en chemin,
ces hommes ne le furent pas : mais lui promirent d'ellre
auflj toft à Lyon que luicotfransneantmoins de lui dclir
IJrçr ç^fte fomme dp ^500. clcus s'il vouloitla prejidi-ç
-M
jjtSo Hi/loires admirables
à fa rifque: ce qu'il ne voulut faire , puis qu'Allard & fe^
affociez deuoyent enuoyer après lui.
Qu^elque temps après le départ des SuifTcs, le Pape
aduerti qu'Allard eftoit en la Cour de France,s'en plci-
gnic au Roy . lequel fit emprifonncr AUard en la Con'r
dergeric; ou il rrouua certain Gentil-homme qui fe fai-
foit nommer Comte de SanfiTyjeftimé de vif efprit, père
de trois ou quatre fils , dont l'vn auoit efte' nourri chez
l'Eledeur Pakrin ,item d'vne fille, laquelle durant ce-
ftepiifon il promit à vn nommé du Val par l'entremife
d'Allard, qui s'appellpit oncle d'icelui du Val ; &lu;
promettcit denjc cens mille clcys de mariage.Mais toutç-
cefte pratique demeura imparfaite , à caufedc ce qui
s'enfuiuit. Au bout de ccrtum ternps AUard fut eflargi
lors il pria par lettres Ternault de Taller trouuer à Pa-
ris, dont Xernault s'excufa, mandant, à l'autre que s'il
vouloir venir en Suiflc, en Sauoye.ou à Laufanr,e,Gex,
Morges;& autres lieux voifinS;Ternault l'iroit nouuer.
Sur ces lettres AUard fe met en chemin, acompagné
• jdes deux fils du Comte & de Ton train: vient en laCom-i
jtéde Bourgongne, ou il s-'acoll:e d'vn Geatil-hommc
du pays, auquel il fill de grandes promeiïes, l'ameine a
Morgcs,& fe loge à la Croix blanche:enuoyequcrirTer-^
ijault à Geneuc, lequel arriué , Allard tafche à l'induire
de lui faire prcllcr millpefcus , adioullant qu'il defiroit
jqueTernauit vouluil prendre la peine d'aller en Suéde,
pourreceuoii & apporter dix huicl cens mille Tallers,
dont il auroir cent mille pour fa peine ; & d'auantage
promettoit vn trcf-riche prefent 4 certain honncfte pepfc-
Tonnage bcaufrcred'iceluiTcrnault,qui ne voulant riea
entreprendre de tout cela,tous contracts furent rompus^
moyennant niillecfcus,qu'Ajlarddeuoit payer côptant:
irais ih font encorcs à payer. Ce prcjmcttcur renoue v-
ïie autre pratique aucc IcsSeigneursBaillifsdel.aulannc
<Sc de Morgcsjlci quels le conduisirent a ik-rne , ou il con-
îraftc auec quelques Seigneurs, aufquels entr'autres
firoits il promet ton bailler vne obligation de ]a fomme
de cinq cens mille eùus à lui deuëpar Emanuel Phili-
jbe?tpuc de Sauoye, laquelle obhc;;?rionildifoitauoii
cf* mémorables. til
ïaiffee à Paris. Sortant de Berne auec promefTe d'eftre
honoré & recompenfé,il tira vers Neufchaftel. Cepen-
dant Tes impofturcsfe dcfcouurirent dediuers endroits.
On fçeut l^ien-roft que ccfte obligation du Duc de Sa-
uoyc eftoic de mcfme nature que lacedule du Conne-
ilable, & que toute la negotiation auec les AmbafTa--
deurs des petit? Cantons n'eftpit qu'vne fourbe du co-.
fté d'Allard. Pourtant fut doyfné ordre qu'on Tarreftail
prifonnicr à Ncufchaftel Se doutant bien qu'en brief
on lui drefl'eroit de terribles articles , & par les deman-
des quon lui auoit ia faites çonoiilant vne partie de
fcs importâtes defcouuertes, Ton train s'eilant fondu
prefque en vn inftant, il refolut en foy-mefme d 'inuen-
ter tous moyens d'efchapper. Mais ne rencontrant rien
d'afleuré, vne nuid. voulant cffayer de fe couler par vne
haute fcneflre delà prifon ou il eftoit enclos, cequjile
fouftenoit venant à rompre comme tout à coup , fa
chcute fut de fi haut , & fur vn plan fî rude , qu'il fe tua
tout roidc , mettant fin h fa vie & à fes impollures touc
enfemble.
Le Gentil-homme Comptois; qu'il auoir amené à
Morgcs, ayantrefponduà l'hoftedela Croix blanche
pour les àc^^cns qu'AlIard y auoitfaits, fut conftitué
prifonnier & contraint de vendre Ton bien pour fatisfai-
re. Infinis furent les affronts & farciures de cemaiftre
iardinier en diuerslieuK,& à l'endroit de toutes fortes de
^cns. Ce fera aflez pour conclufion de marquer le mef*
chant tour qu'il ioua à Phollc delaci^onp.neà Baile, où
il auoit longuement feipurné, faifant gioifc defpcnfe.
Comme il voulut partir pour aller ailleurs , en lieu de
payer, encore emprunta-il de ce bon Suiffe nouuclle
fomme de deniers : & pour gage lui hifia vne valife fer-
mant à trois clefs & bons çadcnats , affermant qu'icelle
(îftoit plaine d'or , de bagues de grand prix & de papiers
d'importance : promerrant que fi Ton en faifoit bonne
gardci au ietour;iJ dotieroità fondit hofte outre fon deu
fa Ibmme de trente mille TaÏÏers. JLes nouuellcs de ce-
île mort apportées à Balle , le pauure liol>c bien cfton-
-Tcfait par auchorité dçiiîfticc ouurir c'v,itc valize , la-
fS-S t Hijîoires admirables
quelle fur trouuce pleine de briques & cailloux propre?
ment empacquecrcz. i\xy ce récit dnficur TernMdt,é> m.unf
duquel îay ueu plujïeurs coh\its,afhs ^ papier s, fui fan > foy cL\-
ne partie de Chiftoire de ccfle infi^ne impofieur : le procès duaueL
ejî es mains des Seigneurs du Cou fil de la njille de Neufchaftel.
JMP RECATIONS & faroks dej^ï-
tcttfes ér hUjfhematoires,
/^V A N D nous voulons obtenir quelque chofe fort
V^de/îree, nous promettons beaucoup,bien hardimér:
Scfouuentesfois il aduient à plufieurs de faire en ccft
cfgard des imprécations , contre eux mcfmcs ou contre
les autres, dont ils recueillent les fruids à leur ruine.
Nousenauons rexemple notable en Charles Duc de
Bourbonjequel corne recitêt duBdlay ai* ^.liu.^Fr. G ui-
chardin at* ijdiu.des guerres d'Italie^ vo'ulât tirer deniers de
la bourfe desMilannois,pour payer Tes foldats:& nepou-
uant obtenir vne grande fomme qu'il demandoit,à caufe
des groîTes charges que portoit la ville durant la guerre:
il leur promit,que fi pour cefte feule fois ils lui côtoycnt
l'argent demandé, casaduenât quepuis après on leur fift
la moindre extorfion du mode, il prioit Dieu qu'à la pre-
mière rencontre, ou au premier allault qu'il donneroit,
vn boulet de harquebuzc le trauerfaft & réucrfaft mort.
Ou, comme dit Guichardin, que Ci la ville de Milan lui
vouloir fournir trente mille ducats pour la paye d'vn
mois,qu'ilferoitfortir l'armée deMilan A' ialogeroit au-
tre part.-afleurant que fi autres-fois ils auoycnt efté trom-
pez en femblables promefl'es, que maintenant il ne leur
en auicndroit pas ainfi, parce qu'il ne voudroitiamais
côtreuenir à fa parole & tlÙi. foy, fur laquelle ils fc pour-
royent tres-feurement repofer : adioultant, qu'il priôic
Dieu , que s'il leur failloit de promcflc , la tefte lui fuft
emportée du premier coup de Tartilleric des ennemis.
Sur celle promefl'eles Milannois firent vn effort & con-
tèrent la fomme. Mais ils furent tellement foulez puis
apies, que piuficurs par dclefpoir le pendirent de
é^ mémorables, 2.83
leurs propres mains : les autres fe précipitèrent du haut
Jestoids de leurs maifons furie pauc des rues. Peu de
temps après , le Duc de Bourbon mit aux champs fou
armee,& tira vers Rome pour s'en emparer : mais il fut
tuéd'vnearquebuzade fur lerempar en donnantraf-
faut.Ce que plufieurs(dit du Bellay) attribuèrent à ven-
geance diuine,à caufe qu'il n'auoit tenulapromefl'e fai-
te auxMilanois auec telles imprécations. Sa mortef-
cheut le fixiefme de May, i^zy.
Fadioufteray à ce propos vne autre hiftoire,quoi que
anciene,recitee par ,^lhcrt Crant\. an 6. liuJcs affaires de
Saxe . chap. 45. où il efcrit que l'Empereur Fridericprc-
mier.eftant au Conuent de S. Pierre d'ErfordJe plan-
cher fur lequel il marchoit fôdit tout à coup;& s'il ne fe
fuft prins aux barreaux de fer d'vnefencftre , iltomboit
dedans les latrines de ce Conuent:efquelles cheurent &
furent eftouffc?. quelques Gentilshommes , entr'autres
Henri Comte de Schuartzebourg , lequel portoit le
prefage de fa mort en vnc imprécation ordinaire , Si \q,
fai ceci ou ccla^ie puilTe ( difoit-il) eflre plongé dedans
leslati'ines.
'^' Mais laiflant pour cefte fois les autres hiftoires ai>cié-.
nés , noftre intention n'eftant d'y toucher en ces rc-
Jçueils^ains referuant cela pour quelques autres mains &
'ouuragesrie reprefenterai des exemples de noftre temps,
touchant les imprécations & paroles de defpit contre
Dieu, ou contre le prochain.Vn homme de guerre voy-
ageant par le Marquifat de Brandebourg, fe fentahtma-
lade & arrefté en vne hoftellerie,bailla fon argent à g^ar-
der à fon hoftelîc. Quelques iours après eftantgueri il
le redemandai cefte femme , laquelle auoit defia déli-
bère auec fon mari de le retenir, parquoy elle lui nia le
dcpoft,& Taccufa comme s'il lui euft fait iniiire ilepaf-
fant au contraire , fc courrouçoit fort , accufant de dcf-
loyauté & larcin cefte fiçnchoftcftc. Ccqucl'hofte a-
"> ant entendu , maintint fa femme , & ietta l'autre hors
ij fa maifon, lequel cholcré de tel aft'ront tire lonef-
ce, & en donne de là pointe contre la porte. L'hofte
•jinmencc à crier à\x voleur , fe complaignant qu'il
t^4 Hiftûir es admirables
vouloftforcer famaifon.Ce quifutcaufc quelefolda:
futpns,mcné en piifon,& Ion procès faicpar le Magi-
ftracpreft aie condamner à mort. Le iour venu queU
fcntcnce deuoit eftre prononcec,& exécutée , le diable
entra en la prifon , ^<: annonça au prifonnier qu'il tlloic
condamné à moiirir:toutesfois que s'il vouloir fe don-
ner a lui, il lui promcttoir de le garantir de tout mal.Lo
prifonnier fît rcfponfe qu'il aimoit mieux mourir in-
nocent , que d'eftre dcliuré par tel moyen. Derechef le
diable lui ayant reprefente le danger ou il eftoit,& fe
voyant rebute , fit neantmoins promellc de l'aider pour-
lien, & faire tant qu'il le ven^^eroit de Tes ennemis. Il
lui confcilia donc lors qu'il feroit appelle en lugement,
de maintenir qu'il clloit innocent: & de prier le luge
de lui bailler pour Aduocat celui qu'il verroit là pre-
fcntaucc vn bonnet bleu: c'eftafîauoirlui quiplaide-
roitla caufe. Le prifonnier accepte l'offre : & le lende-
main amené au parquet deiuftice» oyantl'accufation
<lefes parties &raduis du Iugc,requierc ( felaa4a cou^
ftume de ces lieux-là) d'auoir vn aduocat qui remon-
ilraft f^^n droit: ce qui lui fut acordé. Ce fin Dofteur es
loi X commence à plaider & à maintenir fubtilement fîi
partie,alleguant qu'elle eftoit faulfementaccufce , par
confcquent maliugce: quel'horteluidetenoit fon ar-
gentine rauoitforcc:iiicfmes il raconta comme tout l'af-
faire eftoit paffc,& declaira le lieu cù l'argent auoit clf é
ferré. L'hofte au contraire fe defendoit,& nioit tant plus
impudemment, fe donnant au diable , & priant qu'il
remportaft,s'il eftoit ainfi quil l'euft pris.Alors ce Do-
CtQur au bonnet blcu,Iaiflant les plaids, empoigne l'ho-
fte , l'emporte dehors du parquet , & l'efleue fi haut en
l'air que depuis ori ne peut fçauoir qu'il eftoit deuenu.
^-P^uicr au ^.l turc de Prxfiù'r^iis D£mor,nin, ch.zo. PauI e*>-
Z,en an éJUi.dtfcs Morales \ cl). 19. dit que ceci auint l'an
1541.&: que ce foldatreuenoic de Hongrie.
L'an mil cinq cens cinquante & vn, il auint près Mec-
j£clbourg,ioignâc Vvilftat es feftes de laPentecofte,ain-
li que le peuple s'amufoit à boire & yurongner, qu'v-
n::; femme laquelle eftoit de U compa^^iue^iieftoit ordi-
dr mémorables. 28 j
^inairement parmi Tes iuremens le nomdu Diable , qui
prefent chacun l'cnlcua par la por:e, & l'emporta en
rair.Ceux qui virent ce rpeélaclc fortircnt incontinenc
touteftonnez , pour voir où celle femme eftoit ai niî
portée , laquelle ils defcouurirent hors du village,
iufpendue quelque temps bien haut en l'air, dont elle
tomba bas j & la trouucrcnt après morte au milieu d'vi*
champ, l.y^-vier ai* mefme littre <^ chapitre.
Pierre Alvarado Capitaine tfpagnol, faifant la guerre
auîi Indiens du Peru , fut rudement blelTé en vne ren-
contre, dont il mourut deux jours après. Eftant au lid,
& enquis qui lui faiioit mal. C'eft l'ame, dit-il, qui me
deult extrêmement. Les nouuelies de fa mort appor-
tées à fa femme Beatrix de laCueva, femme fuperbe,lors
refidenteà Guatimala, on l'entendit fe defpirer, faire
des imprécations, &re prendre à Dieu , iufques à dire.
Qu'il ne lui euftfçeu pis faire, que de lui auoiroflé fou
mari. Quand & quand elie fait peindre & parer fa mai-
Ion tout de noir , & fe met à mencrvn dueïUepluse-
ilrangedu monde. On ne pouuoit la faire manger, ni
difpofer à receuoir confolation quelconque. Elle ne
failbit que pleurer, fe veautrer parterre, s'arracher les
chcueux, &feportcr en femme forfence. Parmi les
pompeufes obfcqucsde fon mari (duquel Gomarae-
fcrit qu'il au oit cfpouic les deux fcturs , & s'eltoit pol-
lué d'incelle fort long temps) & tout ce dueil dcfpi-
teux, ellcn'oubliapasde faire affembler en confeil les
principaux de la ville , & là fe faire déclarer gouuer-
nante detoutlepays , &leur fit prefter à tous ferment
de fidélité entre les mams. Or entendons ce qui furuinc
fur fes imprécations & dcfpits.Lc huictiefnc Septembre
IÇ41. il plut tout le iour & la nuift aufli de fi grand ran-
don ,quele lendemain enuiron les neuf ou dix heures
du foir, deux Indiens vindrent aueitir l'Euefque de
Guattimala , qu'ils auoyent ouyvn tracas ellrangcau
pied de la montagne , proche de la ville. L'Euefque les
renuoyarudement, &leutditque ce n'eitoycnt qu'il-
iuiîons. Mais fur vne heure après la minuid , voici vn
4cii»ge d'eaux qui commence à fe desboider du fon: de
iî 6 Hifloires admirables
la montagne,& vcrfcr en la plaine , de furie {{ violentCj,'
<qu'il abatoit des rochers tout entiers, dVnc efpaifeur in-
croyableiCcs monceaux roulans impetueufement con-
tre bas brifoycnt tout ce cjui eftoit à leur rencontre.
Parmi cela vous n'eufTiez ouy que des cris &voix ef-
pouuantablesen Tain&y en eut qui remarquèrent vue
rache noire de^Ians ce rauage d'eaux, laquelle alloit ex
&là faifant beaucoup de dommage. La première maifon
Tuinee par ce deluge,Fut celle d'Aluarado , & y mourut
Beatrix fa veufue , auec tous ceux & celles qui l'accom-.
pagnoycnt en vn Oratoire , où elle s'eftoit retirée pour
faire Tes deuotions. Au mefine inftant la ville fut cnCz-
uelic dans les eaux. Il y mourut cnuiron fix vingts per-
fonnes, tant hommes que femmcs.Ceux qui s'enfuirent,
au commencement du bruit efchapperent. Le déluge
cfcoulé l'on ttouuoit les Efpagnols çà & là mutilez de'
bras &iambes.radioulteray cemotVqu'vne petite fille.
qu'Aluarado auoit eue d'vne Indienne, emportée du
déluge comm'e les autres, fut rroauee allez loin de la'
■ville , fans blcircure ni dommage quelconque en fon
corps,/. BenX^ enj'onhijioire du Miuteau, monde 3 lia. 2. chapl~
Pourrcpafferen Europe, il n'y a pas long temps (dit
le Dodeur Ph.Camcrarius)que mon frère nommé ïoa-
chin retourné depuis quelques iours du paysdcHcflc,
inc conta ce r]uis'cnfuit,T'ay \eu n'agueres, dit-il,en la
Cour du Landgraue Guillaume, vn ieune garçop muet
&: fourd, fi ingénieux que ie ne pouuois affcz m'eCmer-
ueiller de fon adrefle à faire tout ce qu'on lui comman-
<loit:car au clin de l'œil il difccrnoitcequele Prince Gc
autres vouloyent.Le Lâdgraue le voyant ainfi,picqué/
Vous voyez(nie fit-il)ce muet? tout ce qui furuient dé,
nouueau en ma Cour & par la ville,s'il le peut fentîr 5c '
<lefcouurir tant peu que ce foit,il le méfait entendre
fort dextrcment par Tes contenances. Mais ie veux vous
dire encor' vne hiftoire notable de laiuftice deDicu.
Sa mère , accufee de larcin , ne voyant moyen d'efcha-
per,eut recours aux imprécations : & d'autant qu'elle e-
itoitlors enceinte dcceft cnfaiU;pour adiouikr plus
d<5
^ mémorables. 287
^e poids à Tes paroles ^ fit telle imprécation, Queiîcc
qu'on lui imputoit elloit véritable , elle prioit Dieil
c|ue l'enfant qu'elle auoit au ventre, venant à rortir&:
croirtrc,ne parlait nullement, ains demcûraflmuettouc
le temps de fa vie. Ses imprécations l'ont defcouuerte,
ayant adioufté le pariure au larcin. Caînerarim an 85,
chapitre defts meditatiojis hifioriques^Luol.
N'y a pas long temps qu'il auint en noftre voi/i-
nage à certain GcntU-homme de tourmenter par im-
précations & maudiflons fes pauures fubieds, & les
contraindre par grandes couruees à lui baftirfon cha-
fléau. En les challant à la belbngne illesappelloic-
ordinairement fes chiens. Le bailiment n'eftoit pas
acheué, qu'il tomba malade : & comme il continuaft
fes imprécations, maudiflons &iniures, Dieu l'en repri-
ma tellement qu'il deuint muet, & comme l'eicriuois
celle hilloire , il ne pouuoit prononcer parole quelcon-
que articulée , ains leulcmcnt il hurloit comme vu
chien. La rnefme.
Vn autre exemple noîi moins mémorable auint n'a-
gueresenla Courd'vn Prince voiiîn où certain Gcn-
til-homme chargé de plufieurs iniurieufesparoles dites
à la volée , pour les couurir & faire croire que ceflc ac-
Cufàtion eftoit controuuee, commence à iurer& prote-
fter: adiouftantque s'il ^'uoit prononcé tels ouirases, il
defiroitquc Dieu l'en cha{liaft tout a Theure en Ton
corps,&que fi Dieu di[Fcroit,le diable le fit. Sur ces pa-
rolcs& autres telles imprécations, il tombe foudaine-
mentfurle vifage à terre,rai(i d'epilepfîe (qu'il n'auoit:
iamais rentie)fi rude ment,qu'apres auoir ietté des grands
cris & hurlemensjpuis demeuré comme demi-mort , on
l'emporta dedans vne chambre , ou il eftoit encore grie-
uement maladel'an 1591. que ie recueillois celle hilloi-
re,challié de la téméraire & impie imprecatiô. Lamefine,
lean Vvier récite en fon œuuredc rimpofture des
diables, vne hilloire mémorable auenue en Gueldrcs
cnuiron l'an 1575. Vn Capitaine portant les armes pour
le Roy d'FJpagne, marie à vne honefte Damoifelic , la-
quelle il traitoit indignement, entendant qu elle clloiç
288 Hijloiresadmirahtes
enceinte commence à fiure àcs imprécations contre ct-
le,&; lui dire, lepoignarderay cediableton que tu as au
ventve. Peu cie ccn:}>^ apies , elle acoucha d'vn fils qui
depuis les hanches eabaseftoit bien formé : mais le
haut eftoit tout couuert de taches rouges & noires, les
yeux au froncla bouche ronde, noire, hideufe,les oreil-
les longues , comme d'vn chien de chafTe, deux corni-
chons rtcoquillez au haut de la tefle, qui deuenoyent
Touy,es comme fang, (i toft qu'on les touchoit. Platon
efcrit au 7.I1U. des loix, qu'il n'y a rien plus redoutable>
qucles maudillonsdu père concrel'enfant. Le contrai-
re eft fouhaitable en toutes (brtès aux bons enfans. C'eft
vn /îngulicr ^ermoignage de k faneur de Dieu à^tn a-
noir, qui défirent & pourchaiTcnt legitimemenc la bé-
nédiction dcleuis pères & mcres. U mcpne.
M. André Honldorfl-", en ion thcatte d'exemples , Tut
le 4. commandement, propolc encoresquelqucshiftoi-'
res au propos que nous traitons , lelquciles le toucherai
briefuemeat. Vne mère demeurant en la Duché de Sa-
xe , amena vnefienne fille démoniaque à Vvitebergj
pour receuoir quelques aunK>lnes , & la recommander
:uix prières de l'Egliie. Elle confeflciî ceftc afflidion e-
jtrcfuruenue à fa filic , vn lour qti'eftmt ftn courroux
tUe auoit faict vne imprécation que le diable faifill ce-
i\chllc:cc qu'il auo:: faitincontinent, &l'auo"30it auil^.
Ayant vne fois eftc inencc en l'Eglife, comme on prioit
pour elle, vn docle perfonnage encendant qucHucs fu-
reurs deTelpritmabn lui dit, 6 Satsn,. l'rtcrnel te tcdar-
i;uc, i'Efprit refpondit foudain^ Q^'il me redarguc,qu'il
jne redargue : puis fe tei:t.
A FribeigcnMifne , auiiitqu'vnperebouillât de cour-
toux contre vn fien fils, qui ne depefchoit pas afl'ez toll
çuelque afaire,co'rimenccH dire, Duu vucille que tu ne
lénifies bouger àcM. Aufii toft dit , aufli toil fait : le hl',
demeura tout ioudain côme planté & cloue fur la place,
i\.\ns que par force aucune on ptuft l'en arracher.Lt d'au-
tant qu'il ne pouuoit plier ni courber fon corps pour
s'aileoir , on mit derrière lui vn appui pour le foulager.
iVyant demeuré enccfl eiUt tioii ans enucrs;Dieu exau-
^au£
cf mem&rahles. l8^
çimt les prières qu'on faifoit pour ce panure enfant, pei-*
mit qu'il pouuoit s'afleoir & baifTcr , puis releueri II fut
en ccft eftat quatre autres années fuiuantesja face mai-
gre & defchernecmangeant fort peu, & ne parlant pref-
qucs point. Enquispar fois, comment il feportoit, fa
tefponfe ordinane fut que Dieu le chaftioit , que la mi-»
Icricorde d'icelui fcauoit qu'elle ilTue auroit cefte affli--
ftion , laquelle n'empefchoit point TafTeurance qu'il a-
uoit de Ton falut éternel par lefus-Chrili Au bout de
fept ans , il mourut paifiblemcnt, plein de l'efprit de rc--
pentance , de foy, & d'cfperance en la grâce de fon Sau-
ueurjl'onziefmeiour de Septembre, Tan mil cinq cens
cinquante deux.
Il n'y a pas long temps , dit M.André HonfdorfF,que
nousauons vcu vn certain Alemanfottpauuie S^imalar-
«iif,malheureux&; n^iferable en toutes fortcs,à caufe des
imprécations qwe fon père âuoit faites peu atiantfon
trefpas contre icelui î fouhaitant que tout malheur l'a-
cueillift & pourfuiuift, tant qu'il feroitau monde.
Vnemere ayant certain fih fort rebelle, fe mit à ge-
noux , priant Dieu quece mauuais enfant peufteitre
bruflé d'vnfeufecret. Cefte imprécation netombapas
à terre : car le fils eltant foudainement laifî de ce feu par
tout le corps , commence à s'efcrier , Mère , mère , vos
prières font exaucées : & ayant langui trois iours ea
tourmens indicibles fut confumé de ce feu.
Vn fils rebelle en la ville de Milan , fe mocquoit de
fa mère, efquarquillant& eilendantles doigts, tordanc
la bouche,& lui faifant la moue. La mère indignée d'va
Il vilain mefpris : Pui(fcs-tu ( lui dit-elle ) faire vn lour
telle grimace au gibet. Auint peu de temps après,
que ce garniment furprins en larcin fut condamné i
cilrc pendu:& comme le bourreau le tiroit par l'efchelle
en haut chacun le vid tordre la bouche & faire la moue
ne plus ne moins qu'il Tauoit faide à fa incre. Ces hi-
ftoires & infinies autres prefques fembiables (dont chaf.
cunpcutfefouuenir,carlaplufpart d« cesmilerablcs qui
finilîent leur iours es mains de luilice , i caulc de leurs
larcins, meurtres, ou autres dcceilables forfaits, auoucnc
T
2.9 o Hi/!ûires admirables
©rdinaitement cnrrc autres caufes de le u m mal-heurs,'
la rébellion à pères & mères, item les imprécation»
d'iceux) admoneftent les percs & mères de fuir telles
paroles , & par remonftrances ou punitions opportunes
ramener leurs enfans à quelque deuoir. Elles exhortent
aufTi les enfans de fe monftrer humbles, traitablcs & o-
beiflans/à celle fin de n'eftve accablez parle iufte luee-
ment de Dieu , maintenant le droit de ceux qui font ia
viue image en terre.
En Silefic auindrent deux mémorables hiftoires , qui
monftrent le dangereux fruit des imprécations, & le
fupportde Dieu, nousafliftant par le minilH-rede Tes
fain»fls Anges , à l'encontre delà fureur des malins ef-
prits. Vn Gentilhomme ayant conuie quelques amis, &
l'heure du lomptueux feftin venue, fc voyant fruftré
parrexcufedesconuiezjentre en cholere,& commence
à dire. Puis que nul homme ne d ligne eftre chez moy,
ouetous les diables y vienent. Quoydit,il fort de fa
maifon , & entre au temple, où le Pafteur de l'Eglife
prefchoit, lequel il efcoute aflcz long ttps & attcntiue-
ment. Comme il eJtoitli, voici encrer en la cour du lo-
gis des hommes à cheual, de haute parure & tout noirs,
qui commandent au valet de ce Gentil-homme d'aller
dire a fon mailxre, quefeshoftcsei^oyent arriucz. Le
valet tout eifrayc court au temple ,auertit Ton maiftrc,
lequelbieneÛonné demande auis au Pafteur. Icelui H-
niffant Ton fermon coni'eillc qu'on face Ibrtir toute la
famille hors du logis. Aufl'i toft dit , aufTi toft exécuté:
mais de halle que ces gens curent de dcfloger, ils laiiTc-
rent dedans la maifon vn petit enfant dormant au ber-
ceau. Ces hoftes, c'eft à dire les diables,commcncent à
îf muer les tables, à hurler, à regarder parles feneftres,
en forme d'oiîrs,deloups,de chats , d'hommes terribles,
tenans es patte s des vc^res pleins de vin , des poifTons,
de la chair roftie & bouillie. Comme les voifins,le Gen-
tilhomme.lc PaiUHir,& autres contemployent en grand
h^ytm vn tel fpeéfacle , le pauure père commence i
cKér,hclas,pù elt mon enfant?ll auoic encore le dernier
mol
é
ér mémorables, t^t
ittôtcnlabouchcquaid vn de ces hoftes noirs appor-»
te en Tes bras rcnfaHt aux feneftres , & le monftie a tous
ceux qui cftoycnt en rue.Le Gcncil-homme tout efper-
-du , Ib prend à dire i celui de Tes l'eruiteurs auquel il fe
fîoitleplus ,Mon ami, queferai-ie? Mo<îfieur,refpond
le feruitcur,ie remettrai &: recômandcrai ma vie à Dieu,
puis au nom d'icelui l'entrerai dâs la maifon,d'ou moy-
ennant fa faneur & Ion fccours,ic voub rapporceray Ten-
fant. A la bonne heure, dit le maiftrc, Dieu c'accompa-
gnct'afllftc & fortifie. Le fcruitcur ayant receu la bene-
di(frioR du pailcur & d'autres gens de bien qui l'accom-
pagnoycnt,entrc au logis, &aprochant du poifle ou e-
iloycnt CC5. hoftes ténébreux, fe proikrne à genoux , fe
recommande à Dieu, puis ouure la porte,& voidles dia-
bles en horrible forme,lesvnsafî]s,les autres debour,au-
cuns fe pourmenans , autres rampans concre le planché,
qui tous accourent à lui, crians enfemble, Hui, hui,que
viens-tu faire céans? Lclcruiteur fuant de deftrefl'c,&
neantmoins fortifié de Dieu , s'adrell'e au malin qui te-
noit l'enfant, & lui dit,ça, baille moy ceil enfant. Noa
feray,refpondrautiC:il eft mien. Va dire à ton maiil:re»
qu'il vienc le receuoir.Le feruitcur infillc,& dit,ie fai la
charge que Dieu m'a coinmife , & Tçai que tout ce que
ic fai félon icelle luiel^ agréable. Pourtant à l'efgard de
mon office , au nom , en 1 allUUncc & vertu de lefus
Chrift,ie t'arrache & i^2L[C\ ceft enfant, lequel ie reporte l
l'on pere.Ce difantjil empoii nel'enfant^puis le ferre e-
ftroittementcn Tes bras. Les hoftes noirs ne relpondenc
que cris effroyables & ces mots, Hui mc.chant,huj gar-
nement, laillclaiffc ccil enfajK : autrement nous tedcf-
pecerons. Mais lui meljjnrant leurs menaces forritlâia
& fauf, & rendit l'entant de mcfine es mains du Gentil-
homme Ton pcre. Qu^eiques iours après tous ces hollcs
s'efuanuuirent ,& le gentil-homme deuenu iiige & bon
Chrefticn,retournaen la maifon.!)?.»;» Geov^e Goddmun,
Dofleifr en droicl a Rofioch , eiifon traité de Ai.ign, f'^enefiafp
(jp'c.litt.l.chitp.l.
Vu autre gcntilhomir.': couflumier de fe donner aux
T X
i^L Mifloires admirables
<iiiiblcs,allant de nuiCt par pays , acompagné d'vn valèr;^
fut alfaïUi d'vne troupe de malins efprits , cjui vouloycc
remmener à toute force. Le valet defireux de fauuer
fonmaiftre commence à l'embraflcr. Les diables fepre-
ncntà cner,Valetlafche prife:mais le valet perfeuerant
en radcliberation,fon maiilrecfchappa. Larnefme.
En Saxe,vne ieune fille fort riche, promit mariage X
vn beau ieune homme,mais pauure.Lui preuoyant cjue
les richefl'es&la légèreté du fexe pourroycnt aifémenc
faire changer d'auis à cq[\q. fille , lui defcouurit franche-
ment ce qu'il en pcnfoit.Hlle au contraire commence à
lui faire mille imprécations , entre autres celle qui s'en-
fuit : Si l'en efpoufc vn autre, que le diable m'emporte
le iour àt% nopces. Qu'auicnt-il>Au bout de quelque
temps , l'inconltante elt fiancée à vn autre , fans plus fe
(bucierde celui-ci, qui l'admonnefte do*icementplus
d'vne fois de fa promeûe & de Ton horrible impréca-
tion.Elle hochant la telle à telles admonitions s'apprc
ftepourlescrpoufaillcsaucclefecondrmais le iour des
nopces^les parens, alliez , &amis faifans bonne chère
l'elpoufee efueillce par fa confcience fe monliroitplus
trifte quedccouftume. Sur ce voici aniuer en la cour
du logis où Tefaifoit Icfeftin, deux hommes de che-
nal, qu'on ameine en haut,oii ilsfe mettent à table , &
après difné , comme l'on commencoit à danfci^on pria
i'vn d'iccux (comme c'eil la couitume du pays d'ho-
norer les cltrangcrs qui fe rencontrent en tels feftins)
de mener danfer Felpoulee. Il l'empoigne parla main,
&.lapourmeineparla fallc:puisen prelence desparens
&amis, illafaifît criant à haute voix,fort de la porte de
lalallcrcnleuecnl'air, & difparoit auecfon compa-
gnon & leurs cheuaux. Lespauuresparens SfamisTa-
yanscerchee tout ceiour,comrac ils continuoyentie
lendemain, cfpcrans la trouuer tombée quelque part,
afin d'enterrer le corps : rencontrent les deux chcua-
liers, qui leur rendirent les habits nuDtiaux auec les
bagues & ioyaux de la fille : adiouitans que Dieu
leur auoit donné puiflance fur celte fiUc, & non fur les
acou-
C^memorahles, 293
acouftremcns d'iccIlc:pLiis s'efuanouirent. Lrfw>e/î»e.
IF G EM EN S freàpitez.
L*An ijf o. auixit-eii vnc ville des plus famcufcs de la
Duchéde Saxe que certain marchant notable al-
lant en voyage laifTa fa femme, fa fille , & raferiiante en
iamaifon.Presd'Kelle cftoitlogérexecutcurdeiuftice,
lequel ayant efpié celle occafion , trouua moyen d'en-
trer & dcfe cacher en la caue du logis où la feruantc
defcendant le foir pour tirer d'vn vin il raHomme. La fil-
le defcend pour appeller la feruante,& eft tnce aufluFi-
nalcment la mcre y va,& reçoit mefme traitement: puis
ce bourreau icttc les trois corps en vn coffre, pille la
maifoni&re retire en la fienne. Quelquesroiirs apresje
marchant de retour , & Tauteur de tant de forfaits inco-
jiujce bourreau vient accufer auxiuges lepauure mar-
chant5& dapofa que le iour auant Ton départ il auoit eu
fort alpre querelle aucc fafcmme.Le marchant eft pris
& appliqué fi rudement à la toTture,qu'il confelfa auoir
commis ces trois meurtres, eft condamné & roué. Mais
peu de iours après le bourreau fc defcouure foi-aiefme,
en la vente de quelques goubelets d'argent , porrans la
marquedu marchant. Empoigné, il confelîa Tes me(^
chancctez,eft tenaille & mis en pièces. PaitlEitT^en ait 5.
littre d'j jl'S Ai or de i, chapitre 15.
En vne autre ville de Saxe r^uint qu'en certain feftin
de nopccs quelque lanon defroba vn gobelet d'argent.
Comme ceux du guet couroycnt apres^ il rencontre en
la place vn valet dormant pour auoir plus beu que de
couftume,& cache le gobelet en lynfaye.Le ^uetayant
cfueillé ce dormeur le trouuclaiil du gobeleclc meinc
en prifon , où furmonté par la torture il confeiîe auoir
commis ce larcin, dont s'enfuit lenrencc de mort , & eft
pendu &eftranglé. Quelques iours après le larron fur-
pris en autre larcin , confeifa ce premier,& eft exécuté.
En ce mefme hn.^ chap.
Vne icune femme demeurant en certain chafteau de
TArcheuefcbé de Brcme,auec fon fils marié,fc laifla ac-
cointer d'vn fienleruiteur domeftique.Ce que le fils a-
T 5
194 Hijî (lire s admirables
yant dcfcouuert & ne pouuant lupporterjlupplia fa mè-
re de fb déporter de telle mefchanceté. Vn iour reue-
nant de dehors en lamaifon jlc Sc':uircu;qui cftoit a-
uec la mcre en fa chambre le deicoLuirant de loin j.'en-
fuit.Lc fils court après, &d*A ne houillne qu'il tcnoitcn
main lui abat le chapeau tit terre. Ce feruitcur cfcha-
pe, & s'en va au feruicc d*\ n nouueau maiO.re à deux
journccs de chemin loinde là. Ses parens le cerchent,
& le demandent au fils , qui leur dit commcles chofes
cftoycMt aduenucs, adiouftant quclon chapeau eftoic
demeuré , mais qu'il ne fcauoit pr^s qu'cfloit deuenu ce
feruitcur.} ux prcnans cefte rcrponfc au pis, accufent ce
icunchonune d'auoir tué leur parent. Incontinent le
luge ferre ce fiLsinnocent,& l'.ipplique à la tortuTC, où
le tourmenrmfupportablclui fait confefTer qu'il auoit
tué ce feruitcur, & ietté le corps en vne riuierc proche.
Il cil: condamné à perdre la tefte, Comme on le mcnoit
cîufupplicc, on Tadmonnefte de dire franchement la
verité.-il refpondjie fuis innocenranais oi;e me fert de di-
re ver: té?ieriy tué. Somme il cil exécuté à mort &rcnd
Tamcen l'inuocation du nom de Dieu. Toft après le
ftruitcLir &:!a\erue font dcfcouucrts , attrapez & ch a-
ilie? ce tel fupplice qu'ils mcrito\^nr./. Gcor<^'^ GodeLnuit
4if trdpté de Afa-^^-)'vc?^(ji.ny^-c,li»-^-c>iaJ'Ao,
Deux icuncs artilans Alem-ns partis de leur ville
pour aller voir du paysj'vn rcuicnt uA\ après \ efiu des
fjabi'kniensde fon compapnon , ai;ecquiil en auoit
fancfchanec. Les parens S: amis de Tabfent conieâu-
ranspar çc chanf;ement dhabitsqi'C leur parent auoit
cfté tué par ctftuj-ci , l^'ccuflnt de meurtre deuant
le iugedulieu, lequel emprifonne promptcmcnt l'ac-
cufe. Icclui niant le fai(ft cil applique à la torture,
où d force de tourmens il confelTe auoir meurtri fon
compaGron,s'ellicreueftu àes habillemcns du defunâ:,
ayant mangé les iTenscn vne hollcllerie. Ileftcon-
ijamné à mort, & roué, expirant en bon Chrcllien.
Quelques iours après fon compagnon retourna fiin 5c
fauf.Pour perpétuelle mémoire de ce procès & de l'ini-
que fentcnçe contre rinnaccm^au temple du lieu fe
void
C^ memorahles. 2^^
voidtaillcc en pierre rcflrigie d'vn homme mis fui- la
roué'. Car il ne faut procéder à torture, fi raccufé n'efl-
chargé par beaucoup cTnidiccs , & ( comme dit Vlpian,
l.i.§.z.iS.§Aj.%o.l.fin.D.deq»xJ}io.) prer^uc conuaincu •
par tefmoignaqes euidcns : eftanc requis es procès
criminels que les prcuues foyent euidentes & plus
claires que le iom*. l, ScUatcmâi.i'). Cde ^rob. La '
mcfme.
Quelques querelles fur uenu es en certain mefnace
dedansla ville de Bafle , la femme ne pouuant plus
fupportct les outrages de Ton mari, qui ne ccfioit de
la molcllcr, s'enfuit delà maifon , & s'tftant retirée ail-
leurs & cachée chez quelques gens de conoifTancc, les
pria de s'employer à faire fa paix auec Ton mari. Auint
au temps de Ton départ qu'vnc autre femme s'eftant
noyée dedans le Rhin futicttee abord. On y court, 8c
pource qu'elle eftoit veftue tout de mefme que lab-
l'ente, & qu'elle auoit le vifage tout meurtri , tellement
qu'on ne pouuoit plus la reconoiftre, incontinent la po-
pulace aiiiairee fe met i crier que ce cruel mari auoit tué
la femme , puis l'auoit ainn iettce en l'eau. Le Ma^i-
Ihat prenant plus de pied qu'il ne faloit fur ce brmt,
fai<ft mener cil prifon le mari, qui fui l'heure futfi roidc-
ment torture, qu'il confefla ce qui n'elloitpas, à fcauofr
d auoir tucfa femme , puis iette le corps au Rhin ; fui-
uantlaquelle confcfi on il fut condamné &: exécuté à
mort,comme parricidc.Trois iours apresi fa femme fugi-
tiue reuientpour le reconcilier à fon mari : n^ais enten-
dant les pitcufesnouuelles de ce fuppliccfondant tou-
te en larmes,&i courant comme \ ne infenfee vers lamai-
fon de Ville,elle fe prcfente aux Seigneursjprouuerin-
nocencede fon mari, les accufed'iniurtice. Eux baifians
la telle & les efpaulesj&condamnans leur fenrenccpre-
cipitee;pourueurcnt au moins mal qui leur fut poflible
i ccile panure vcfue. Aï. ,^>idré Honfiorfenjonthcatre
aexempUs.
Deux brigands fe cachèrent en la ville d'Erford, chei
vne femme vefue en intention de lui couper la gorge
& cmporccr le meilleur de Ton bien. Pour la tira hors
T 4
1^6 Hijloîr es admirables
de fa chambre où elle repofoit, ils entrèrent en l'efta-
ble du logis,& commencèrent à pincer vnc cheurc qui
y cftoit , afin d'attirer la chambrière à defcendre en bas;
comme il aduint. Car la fille venant vifiter la cheure, ils
la raifififent au collet & lui coupent la gorge. La vefuo
(qui n'auoit autre chambrière que celle là ) oyantla
cheure crier, & la fille ne reucnant pas, fort de fa charn-
brc,defcend,& eft tuce par ces meurtriers , qui pillent la
maifon, & fc fauuentauantqu'il fuft iour. Le matin vc-
jiu, lesvoi/îns entendent hurler vn petit chien delà
jnaifon, dont ni maillrelTc ni feruante ne fortoit, finale^
ment firent ouurir la porte, & trouucrent ces deux per-
fonnes efgorgees. Soudain ils commencent à charger &
accufer certain homme, lequel auoit la garde d'vn tem-
ple prochain , pource qu'il hantoic pnuément icelle
vcfue. Laiufticc s'apuyant fur quelques coniedures &
ïapportSjfe faifît derhomme,& le géhenne fi rudement,
qu'il cDnfcfl'e auoir commis ce que iamais ne lui eftoiç
venu en penfee. Toute la ville commence à crier au
meurtre après celi innocent, donts'cnlumitrcxccutioii
à mort d'icelui. Les brigands y ^ihlloyent en la prefTe»
&qucUjucs fepmaines après attrapez & emprifonnc?
pour autres maléfices, conférèrent à la torture ccft af-
îaiîinat de la maiil:ielie& de la chambrière ; 2c furent
exterminez, comme jIs meiitoycnt, 11% mefmf'.
Ladiflas Roy de Hongrie, ayant eftabh Preuoft dç'
fonhoftel lean Capirtran , auint qu'vn certain Corn-
rc fut accufé de trahifon , & appliqué à la géhenne con-
fcfiace dont il eftoit condamné : rellcmenr que Capif-
tran condamna le Comte à eftre décapité enfemble ion
filsMTiajsfousvn r^.e.ifMw fecret , que le père feulement
feroit exécuté à mort le premier , & qu'on efpargneroïc
)efils, fiTon defcouuroit tantfoit peu qu'il fuft inno-
tentanais qu'il feroit mené iufques au lieu du fuppUcc.
Le fils voyant trancher la tcfte à fon pere,&: tenant pour
certain que la fiene feroit bien toft abatue, frappé de
frayeur vçhemcntc tombe roide mort par terre. Ca-
pirtran fort troublé de td accidcnt j tjuiwc Tefpec & Ce
Tcndac cordclier. là meftm,
Viimar-
é" mémorables. 297
Vn marchant de la ville de Mets eftant allé aux châps,
le bourreau nouua fnoycn de fe cacher en la caue de fa
maifon : ou fur l'heure du fouper la chambrière dcfcend
pour tirer du vin,& y cil efgorgee par ce mefchant , qui
toft après tue aufTi la maiftrefTe , venant cercher fa
chambrière. Quoy fait il fouille à fon aifc par tout>
& emporte du plus beau & du meilleur de la maifon.
Xeniarchant de retour voyant ce carnage & faccage-
nientjcourt à la iui1ice& implore Taidc d'iccUc. Eftant
deuantles luges, plufîeursy acourent pour entendre
te plaintif : entre iceux fe trouuecebdurreau , lequel
commencer dire, fur les diuersauis touchant ceft hor-
rible aflaillnat, que le bruit commun eftoit que le mar-
chant & fa femme eftoyent en perpétuelles noifes en-
femble : & que nul autre que lui ne pouuoit auoir com-
mis telle mefchanccte. Ces propos & autres qui s'y rap-
portoyent fe recueillent, & courent d'oreille & de bou-
che en autre, paruicnent aux luges, qui y adiouftans
^rop légèrement foy cmprifonnent le marchand,OTdon-
nent fur fort légers indices qu'il fera appliqué à la tci-
tur^* , à quo}' ce bourreau s'cmployc de grand courage,
& donne la géhenne fî crucJlcment au bon perfonnage*
que tout defmembrc il confcfla ( quoy qu'innocent) a-
uoir tué fa femme & fa feru:inte:&: cft exécuté d'horri-
ble fupplicc par les mains dudeteftable bourreau, le-
quel , enyuré de fa fureur pour v n temps, fait grand chè-
re de fon malheureux butin. Mais l'ail de la iuftice à\-
uine ne fommeillant point , Tartrappa lors qu'il y pen-
foit le moins. Ayant gourmande , yurongné & dilTipé
_^fes larcins, &fe trouuant labourfe vuide, il porte à cer-
'tam changeur demeurant en la ville, vn gobelet d'ar-
gent en gage pourrccouurcr quelques deniers. Le chan-
geur recognoit au gobelet la marque du marchand exé-
cuté i mort. II le reçoit fans bruit , & après que le bour-
reau fe fuft retiré , va porter le gobelet en iuftice , dé-
clare que c'eftoit, &quileluiauoit apporté pour gage.
Soudamementle brigand eft empoigné, ferré en' prifoa
cftroitte, &cnqui.siurlagcfne d'où eftoit venu ce go-
-bektpar Im engagé. Ducoinnienccmcnt,iltergiucrft;;:
^9^ Kjlofres admirables
mais en fin il confcile tout le fait. Ainfi fut aucrcc(trop
tard dcuant les hommes) l'innocence du marchant,&: le
cruel coulpable raclé du monde, par duier-, fuppliccs
toXs cjuc Tes horribles mefchâcctez mericoyenc. U najinc,
Bapcifte Fulgofe raconte que Hermolas Donat , I'yii
des Seigneurs des dix i Venifc, perfonnaLC de grâdeau-
thoritc , ayant charge de faire le procès crimmel a va
icunc homme accufc de crime infâme, le ht torturer &
tirer plufîcursfois pour en tirer U verité.Ce que ne pou-
uant,vn comphce de ce prironnier,voulanc fe venger de
telle pourfuite, & procurer quelque foulagement a 1 au-
tre délibéra de iouër \ n mefchant tour au ScigncurHci-
juolas ; de fait il l'efpie retournant vn loir fort tard du
Palais en fa maifonjacompagné d'vnleul homme , por-
tant vn flambeau, lequel foudaincmct eitdnt,Hcrmolas
reccut vn coup de poignard , &: tomba roide mort fur la
place. Tous les Seigneurs de Vcnifc mcrueilleufement
e^meus & irritez de Tatrocité du fait & ne pouuans def-
couurirlc meurtrier délibérèrent de rccerchcr foigncu-
lement toutes circonftances qui y pourroyent feruir. Il
leur fouuient qu'au nesfois il y auoit eu groflc querelle
€nnc Hermolas &Iacques filsdcFrancifque Fofcari Duc
de Venifc. Edimans Lî dcfl'us que lacques.appuyt fur U
dignité defon pereauroitpeu entreprendre ce meurtre,
Icfontemprifonncr & gciner rudement. Mais n'ayant
voulu confefler ce dont il n'eftoit coulpable, neâîmonis
ils le reléguèrent en Candie,ou il mourut. Le meurtrier
chafTe de fa confcience fouillccs'ellant rendu moineau
bout de quelques années venant i mourir defcouunt à
fon confefleurce forfait : ce qui fut après Ton trel'pas , fî-
gnifiéàla Seigneurie. Cela eftaucnu dcuant Jc fiecle
nouuellementpafie: mais nous rauonsioint aux autres
hiftoires, pour le rapport qu'il y a. ,^u6.Ut*Jejls exèpUs,
\1.
IFGEMENS remarquables.
gentil-homme Italien fort riche & bien vou-
d'Alexandre de Medicis premier Duc de Flo-
lenccj
dr mémorables. ^99
rencc, s'eftant amouraché d'vne fort honncfte &trcs-
bcllc fille>mais pauure & de bafle condition , clUnt fil-
le d'vn mufnier demeurant es champs, non gucresloin
de Florence, cfTaya diuers moyens de la corrompre,
maiscn vain, la pucelle ayantfonhonneur cnfingulic-
re recommandation. Finalement outré de fapaflion
vthcmcntc,& fuiui de gens qui adheroycntâ Tes vo-
îontcz, il fe tranfportc de nuift vers ce moulin, raiic
la fille d'entre les bras de Ton pauure pere,& l'emporte
troufTtefur vn cheual en vneficnne maifon champê-
tre , où elle eft violée. Ce pauute pcre s'achemine
prompremcnt vers Florence, & le iour venu attend le
Ducfurfon retour de la Mefle, lui fai t fa plainte,& dc-
n^andciuftice. Le Duc celant fa penfee lercnuoyecn
fj maifon , promettant qu'il y pouruoiroit. Inconti-
nent npres fon drlhé , il monte i cheual feignant vou-
loLt aller d la chaflc: & tire vers ccftc maifon du gen-
til-homme , s'arrcftant auprès en vn lieu plaifant. Le
^,cntiI-hommcaucrti qucle Duc eftoit fi proche, & f n-
yu'-é de fa pafl'on, ne peni'ant que le mufnier eull tilé
fi hardi de fe plaindre , & fe confiant en fon crédit , en-
ferme la fille en vn endroit efcartc &: bien accommo-
dé de fa m.aifon , puis va faire la reucrcncc au Duc,
prcfcnte Ton palais pour logis : ce que le Duc acce-
pte,& feint prendre grand plaifir au baftiment de ccfte
maifon dcplaifnncc, vifite& contemple fort curieufc-
mcnt tous les coings , endroits & membres d'iccUc,
anec leurs ornemens & dépendances : fe tait ouurir
toutes les portes des chambres & cabinets. Fina-
lement il entre en vne belle & longue gallerie, au-
bout de laquelle y auoit vne porte clofe, mais pein-
te ^ enrichie- de belles & gentilles inuentions. Le
Duc fait femblant d'auoir^cela plus agréable que
tout le reftc, & en fe fou riant dit, qu'il efiimoitque
là eftoyent les tiltres, threfors &: bagues plus precieu-
fcs du gentil-homme. C'eftoit la prifon de l'honnefte
fil'.e rauie & violée. D'autant que le gentil-homme
delayoitd'en faire ouuerture ,leDuc fe douta incon-
tinent que là cftoit ce qu'il ccrçhoit,Pourcant comman-
30© Hijlûires admirables
de-ilqu'onouurc: mais le geiuil-homme allègue qu'vn
iîenferuitcur eftoitallé a Florence & en portoitlaclef.
Mais voyant que le Duc infiftoit tant plus a vouloir en-
trer dedans , il s'approche,& après vne grande reueren-
ce,Iui à\t en roreillc,quelcans eftoit vne garrcjaquclle
il nede/îroiteil:revcuë,s'jl ncplaifoitau Ducfonfei-
gncur de la voir.Oyi,oui, refpond le Duc,c'eft ce que le
cerchc. Le gentil-homme cflimant que cela paireroit en
niee,i caufe que le Duc eftoitlui-mefmcfort adonné à
telles desbauchcs, qui furent caufe puis après defâ
r'iort,ouurc la porte. Alors la pauure fille , elcheuclcc,
cfplorec, déshabillée, fc proilerne aux pieds du Duc,
lui demande luftice du tort qui lui auoit cfté fait. Sur
cc,le Ducluienuoye quérir promptement le mufnier,
tance fort afprementlc Gentil-homme & deux fiens
principaux complices .-propofe au gentil-homme deux
conditions, ou la mort fansremiflîon quelconque, ou
qu'il efpouraftla fille par lui rauie. Le gentil-homme
quinepenfoit pascfchaper : attendu la cholcre de ion
Seigneur,accepte le mariagc,& paricntence du Duqeft
condamne à donner à la femme pour douaire trois mil-
le ducats. Quoy fait en prcfence du Ducdcfa fuite, &
du mufnicr,la fille licnorablcment parce , iirefpoufcla
tient pour femme légitime, & elle cil tenue pour telle,
nimce de lui reuerec en toute la Torcane,& le Duc fort
honoré de chacun pour vn fi bel ade deiuftice. niji. de
Florctrre.
Il y auoit vn citoyen de Corne détenu prilbnnier par
vn capitaine Efpagnol &accufe d'auoir cômis vn meur-
rre,à raifon dcquoy ilciloitcn grand danger de fa vie,
1 an mil cinq cens quarante fept. La femme de ce pri-
lbnnier,bcllc & de bonne grâce entre celles d'alors, au
reftcpudiquej&treflbigneufc du bien & delà deliuraii-
ce defonmari, alloità. venoitfoUicitantpour lui en
toutes les fortes dont elle pouuoit s'auifer. Sellant pré-
sentée & agenouillée deuant ce Capitaine, elle le lup-
plie de fauuerla vie à fon prilbnnier. Le mal-heureux
la tirant à part, lui dit , il y a vn moyen de garantir vo-
ihe mari^fans quoy,acccflaireméc c'cll fau de lui. Apres
quel;
cf memoYâhles. 301
qujeîques propos là deffus , il defcouure finalement Ton
vilain cœur, lafoUicitantde s abandonner à lui , auec
promefl'eque puis après il luirendroit ce qu'elle defî-
roic tant. La pauure femme retombée en nouuelle affli-
ôion, après auoir longuement combatu en fa penfee , &
en extrême amertume de cœur, déchire à Ton mari la.
crucUe&vilaine volonté du Capitame. Le mari defi-
reux de fauuerfa vie confeille la femme d'obtempérer
au brutal defirderEfpagnol; lequel ayantiouy du corps
de celle femme defolee;, voulut encore qu'elle aflouuift
ion auari.ce , & lui contall deux cens ducats. Il adiouftc
à ces deux horribles crimes , vn troifîefine du tout detc-
ftablc : c'cft qu'ayant fait tirer le mari hors desprifors
comme pour le remencr en fa maifon , & le rendre à fa
femme qui refperoit ainfî , ce deP.oyal Capitaine faic
incontinent remener en prifon le pauure homme, puis
lui fait trancher la telle. La femme outrée de douleur,
raconte toute l'hilloire àfesamis, &parleur confeilfa
plaint au Duc de Ferrare , lequel extrêmement irrité de
tels forfaits enuoye promptement quérir le Capitaine,
lequel interrogué & conuaincu,puis demandantpardon
eft premièrement condamné à rendre fur le champ les
deux cens ducats, & à en adioufter encores fept cens au-
tres. Secondement il fait venir vn Preftre , & contraint
le Capitaine d'efpoufer la vefue en prefence de tous.
Tiercement, tout à l'heure enheude lidnuptial, aui^
partir de TEglife , il fait drelTcr vne potence , ou le Ca-
pitaine Efpagnol eft pendu & eftranglé : la vefue hono-
rablement enuoyce en fa maifon. Hijioire ci' Italie.
IF G ES mn iugesy mm très -iniques
dr detejlahles,
EN certain lieu d'Alemagne que ie ne nomme poinc
pour bonnes confiderations,ciduint l'an 1557. aux lu-
ges de iaifir au collet certain foldat pafTant, lequel auoit
commis quelque infolence punilFable , mais pluslegcn
301 Hîflûires Admirables
remcntquc de fupplicc au corps. Aucuns difent qu'vnc
bonne bouifcdont il crtoit chargé , fut caufc qu'ils le
condamnèrent à mort.Lors qu'ils prononcèrent fenten-
ce contre lui il leur dit d'vn vifagc afleu'-é , Vouseftes
iuges iniques , qui pour complaire à vos fouuerains , ou
pourauoir mabourfe, m'cnuoycz au fupplicc. Mais fi
vous eftes tant aflfnmcz d'argent , prenez tout ce que
i'ay & me lai (lez aller : ie ne veux, ni ne puis , quand ie
le voudrois, me venger du rort que m'auez fait: & vous
promets de nemettre iamaislepied en celicu. Pour
complaire à deux ou trois , gardez-vous d'efpandre le
fang innocent. Redoutez le lUge, auquel rien n'ell ca-
ché,qui rendra à chacun félon ce qu'il aura fait,foic bien
foit mal. Mais n'obtenant rien par toutes fes plaintes &
remonllrances, iladioulla, Puis donc que vous bouf-
chez les oreilles à mon cri , ie vous adiourne deuant le
fîegeiudicial deDieu. Vous elles luges mefchans&
corrompus par argcnr.îleft exécuté à mort. Mais deuaut
que Tannée fut expirée , quatre de ces iuges iniques pé-
rirent mal-heureufement. L'vn fut tuéd'vn efclatdc
foudre , l'autre poignardé en vn banquet , le troifiefmc
pendu & eftranglé au gibet , à caufe de quelque larcin:
le quatriefme trauaillé d'vne fieurc rref-ardantc acom-
pagnee de gnefues douleurs & tourments , mourut dcG-
cfperé,& peu deuantque rendre l'ame s'efcrioit difant,
Satan , que tardes-tu ? que n'arraches & n'cmportes-tu
mon ame hors de ce corps :ie t'ay ferui iufqucs à pre-
fent:ie fuis donques à toy. le ne veux pas comparoir
deuant Dieu auec le foldat. ic.xn le G.iji dz b r/^ùr , w» 2.
'-^ohtme de fci propos de table j^a^^^Al'),
L'hiftoire fuiuante cil: encore plus eftrange. Vn fils
defpouille rellcmeat le nom de lîls qu'il accufe Ton
propre père de s'elbe méfie auec vne berte.Le perc cft
cmprifonné, & appliqué à la torture, oùil confeflca-
uoir commis Tade. Hors b rorrur - il nie:puis confefle
y eftant ramené , fon corps eftant Ci foible qu'impofllble
lui ertoit de fupportcr tels tourmcns. Auffi difoit-il,
i'aime mieux mourir, qu'elbe plus ainfî defpiecé. Ame-
né dcuantles luges auparqucc,&: derechef enquis félon
la C0U2
é^ memârMes. 505
la ccuftumc , s'il auoit pas commis ceftc enormité , nie
fermement, & adioulte que la torture lui auoit extor-
€\\xé telle confeflion. Que iamais il n'auoit eu en penfce
de fe fouiller fi vilainement, tant s'en faloit qu'il cuft
commis l'afte. On lui confronte fept tefmoinsjcfquels
maintiencntlui auoir ouy confcffer en prifon tel for-
fiit. Sur ce il eft condamne à eftre bruflè vif.Commc on
le menoitau fupplice,il ne celîoit de dire au peuple , le
regardant palfer , qu'il eftoit totalement incoulpabic 8c
innocent de telle accufation braflee par fon fis , lequel
ne ccrchoitquefa mort pour elhe maiftre des biens &
les difllper. Il fut bruflé \ïi , mourut conilammenr,
&: rendit Tame paifibiemcnt à Dieu. Mais dedans va
mois après les luges & les tefmoins périrent tous mi-
ferablement:& le parricide exécrable s'eftant defefperé,
s'eftrangla dVn cordeau. Le tntjme , en ce fecoud, ■voUmey
pageizé.
Les hiftoiresdoquelques luges non iuges, mais iu-
gez défia dcuantDicu,deuanteux-mefrnes , deuanties
homme-s , comme luges tres-iniques& deteftabless ne
font mifesenauant pour fauorifcr tantpcu que ce (bit
aux fureurs dciifantaftiques, qui pour les fautes de cer-
tains particuliers ont ofé condamner les vocations lé-
gitimes des adminiftrateurs de luilice. Que les iniques
continuent d'aprcndre à ceux qui aiment le vrai hon-
neur, la paix de leurs confciences, la gloije de Dieu , la
conferuarion du droit a qui il aparticnt, de s'acquiter
honnorablement & fidèlement de leurs charges. le
continue de toucher aux iniques deportcmens de quel-
ques vns, ce qui fert d'efchantillon au lecteur , pour lui
ramenreuoir plufieurs autres exemples. On ne s*cll
point contenté de noftre temps de prendre des prefens
buuables & mangeables , pour l'expédition des procès:
on ne s'eft point contenté de voir apporter les eftof-
fes precieufes pour monfieur & madame, nidelaiifer
cmbraceler, ou enchainer , ou cmbaguer madame &
inadamoifelle , fans faire femblant de Içauoir que c'cfi^
ni d'en voir rien ; on ne s'elt point contenté de faire
demander & prendre par fçruiteur domcrtiqucs, par
304 HiHoirfs ndmirahles
amis &courraticrsdcxtrcmcncapoftcz: on ne s'eft point
contenté de trafiquer de la iuilice auec toutes fortes do
mcftiers, pour tirer es maifons toutes pièces de mefna-
ge, ne trouuer rien trop chaud , trop pcfantà trop viî>
brief on a vendu les orphelins , lesvctucs, lespauure.s,
les perfonncs innocentes , pour des bottes , des ioulicrs;,
des chapeaux, &c. Mais on eft venu info ues à dire, que
me donneras-tu? Orçaiquand & quand tendre la main:
voire ( fauf l'honneur du prouerbe qui défend de regar-
der en la bouche au cheual donné ) on eft venu iufquc--
aie manier, tantoft derrière le dos feignant fe prome-
ner auec le marchant, puis à le regarder , le fonner , le
".pcfer, deuant que vouloir dire, Or bien, or doncafleu-
rez vous de moy. Encore ne s'eft on point contenté df
celaicar on eft venu lufques à fe faire donner par le pau-
urc inftantla vigne de dix arpens pour lui faire iuftice
de la vigne de cinq ou /îx arpcns:a demander vn cheuai
àc cent efcus pour en taire gaigner cinquante : à fe faire-
veftir de pied en tefte auec la femme, pour donner voi.x
fauorableen vne cauferoigneufc. Etquelquesfois fi \c.
droid a moins donné que le tort, il eft dcuenu inutile
&,côme difoitquelqu'vn, les quatre chenaux du dernic
ont entrainé le coche qu'auoit donné le premier venu.
On a encore palfé plus auant : car on eft venu iufques i
demander ce que Ton fçait ne fe pouuoir ni félon Dieu,
ni félonies hommes, prefter, ni vendre > ni engager : ce
dont la perte eft beaucoup plus grande, & n'elt moins
irréparable que de la vie. L'on eft venu (di-ic) iufques à
vouloir faire acheter la iuftice d'vn payement, qui eft
non feulement contraire à toute honneftete & iuftice,
mais duquel Tinfamie redonde iur ceux qui font enco-
res à naiftre. Et pour parler en termes non ambigus , de
noftre temps s'eft trouué vn Prciidcnt mort Abbe, qui
voulut eftendre fes prétentions iufques là , de demander
à vne honorable Damoifclle qu'elle lui preftaft fon de-
uanr,à la charge qu'il lui preftcroit audiancc.
On allègue l'hiftoirc dVn qui fit encores pis. Ce fuft
Ic^Prcuoft la Voufte, lequel loua vn tref-mefchanr tour
à certaine honnefte dame. Elle cftanc venue vers lui , à
ceU<;
dr mémorables* 305
celle fin d'intercedci pour Ion mari que cePreuoft dcce--
noit en prifon , fut requiic par lui du piaifîr dVnc nuicl:,
à la charge de lui odroyer tout ce qu'elle lui deman-
doit. Ceite femme ie trouuant fort empcfcheejdVn co-
fte regardant la foy qu'elle romproit i ion mari , d'autre
coftéla vie qu'elle lui fauueroit, voulut communiquer
de cefaift à Ion mari. Lui Payant dirpenfee, clic condcf.
cendit à la brutalité du Preuoft/c tenant route aiTcuree
qu'il lui ticndioirpromelfe. Mais au matin ce mclchant
trimefchantifiime après lui auoir fait pendre & eftraii-
glerfon mari, le vous auois (dit-ilj promis de vous ren-
dre voftrc marj::e ne le garde pas,iclc vous rend.
Ce mefme Preuofteilant après pour faire pendre vn
homme lequel cltoit défia deflu^refchellc, on^ vint lui
due a Toreilie , que s'il le vouloir deliurer , on lui
donneroit cent efcus comptant. Aufquellcs nouuelles
ayant prins gouil, fit figne au bourreau qu'il atrendiit:
puis ayant longé vn efchappatoire s'approcha^&dit tout
haut en Ton barragouin , ce que nous.dirions ainficn
noltre vulgaire: Regardez i mefixurs, en quel danger
ce mal-heureux me mettoit. Car il a couronne (encore
equmoquoitiliur cemot,qui lignifie vn cfcu d^orlbl, &
la couronne de ceux qui commencent à eftre in facrts
comme on parle, Si au premier degré pour deuenirpre-
ftre ) & il ne le me difoit pas. Maude terre te vire,
deuale , deuale, tu feras mené dcuant TOificialton
iugci
Vn autre Preuoft defirant fauuer la vie a vn larron
qui elloit tombé entre fes mams , à condition qu'il par-
ticiperoit au butin, dont ils eftoyent d'accord: d'autre
parc confidcrant.quc le murmure feroit grand s'il ncn
taifoitiuilicc, & mefme qu'il Te mettoit en grand dan-
ger, vfa de ce moyen. C'ell qu'il fit prendre An pauure
bon homme, auquel il dit qu'il y auoit long temps
qu'on le cerchoit, ^: que c'cftoit lu; qui aufâit fait vn
tel ade & vn tel. Ccil homme ne faillit à lui nier fort &
ferme , comnie ayant la contéicncc netce de tout ce
qu'on lui mettoit a fus. Mais ce Prcijoft eftant refoiu
Uc palTcr outre , lui fit rçmonftrer ou'il gaigneioïc
V
jo^ Hijloires admirables
bien mieux de le confcfTcrjpuis qu'aufll bien ain/î qu'en
çailluifaloit perdre la vie : & que s'il confefloic , le
Preuoft s'obligeroit par Ton ferment de lui faire tanc
chanter de mcflcs qu'il pourroit eftre afleuré d'aller eu
"paradis : au lieu qu'en ne confefl'ant pointilnelairroïc
d'eftre pendu, & ii iroit à tousles diables , d'autant qu'il
n'y auroit perfonnc qui fift chanter vne feule melfe
pour lui. Ce pauure homme oyant parler de mort &
d'enfer aima mieux eftrc pendu, & puis aller en paradis.
Tellement qu'en fin il vint à dire qu'il ne fefouuenoit
point d'auoir faid ce dont on le chargeoit. Tourcsfois,
que fi on s'en fouuenoit mieux que lui, & fi on en eftoit
bien afTeuré, ilprendroit la mort en gré : mais qu'il
prioit qu'on lui tint promefie touchant les méfies. Il
n'euft pluftoiHafché 1? parole qu'on le mena tenir la
place del'autre qui auoit mérité la mort. Maisquand il
fut à refchelle,il entra en des propos par lefquels il don-
noit à entendre qu'il fcrepentoit, nonobftant tout ce
qu'on lui auoit promis. Pour à quoy remédier ccPreuoll
fit fione au bourreau qu'il ne le laiiïaft acheucr. Et ainfi
fut faid. Lmr. 1. de la conférence des merueilles anciennes (J*
modernes.
Vn Lieutenant ciuil voulant gratifier quelqu'vn, a
l'endroit duquel ildeuoitfe monllrer feuereprotedeur
dciuiticc , ne fe contenta pa^ d'auoir engagé facon-
fcience trop auant, mais qui pis fut vfa de telle rhétori-
que à l'endroit de plufieurs pcrfonncs , qu'il leurper-
fuada de fe perdre comme lui. Car il fut Ci afpre à la
pourfuite d'vn procès contre la Comtefie de Senigan
(laquelle on chargeoit à tort d'auoir faift efchapper le
Ducd'Arfcot, prifonnierauboisde Vmccnncs) qu'il
vintiufques à fubornervn grand nombre de tefmoins
contre icelle , s'aidant en cefte pratique d'\n Commif-
faire nommé Bouuot: maisl'vn & l'autre clchappans a
bon marche, après auoir cfté condamnez pour crime
de faux commis à l'inftrudion du procès contre la Com-
tefle, firent amende honorable, puis furent pilotiez aux
haies,& relegu cz. ^tt înefjnç littrc (hap.lj. l tem en Chijï. dt
France foHS Heurt z,
Guy de
&memOYâhles, 307
Guy de Seruille foi difant Lieutenant du Preuoft des
MarclchauxenlaSencfchaufree deXaindonge, ayanc
fai/î prifonnier deux ieunes enfans, les fit pendre vn iour
de Dimanche , fans leur faire procès entier:& par lequel
procès ils fe trouuercnt prefques innocens. 11 efl: prins
à partie , comme Ion aacouftumé de faire contre luges
procedans ex officia ,& fans partie pourfuiuant & reque-
rant.-car en ce cas ils tienneut lieu d'accufateur: Apres le
procès veu, par ordonnance delà Coutil efl conlHtué
prifonnier & mené en la Conciergerie de Bourdeaux:
là ouileftenquis: &parfes refponfes il fouftientqtie
Icfditsenfans auoyent mérité la mort^ pour plu/ieui.scaç
qu'il met en auant. Ce trait empefcha la Cour de Bour--
deaux,s'ildeuoiteftrereceud'en faire preuue. Aucuns
grands lurifconfultes eftimans qu'vniugc après l'exé-
cution peut aubefoin par preuues & produftions iu-
ftifier fon iugement, notamment contre les vagabonds,
coureurs & pillards, aufquelsles Preuofts des Marel^
chaux font procès fommairement,ioint aufTi qu'vn iuge
peut interpretcr,declarer & fouilenir fa fcntence.La ne-
c^atiueeft plus commune. Car tout ce que deflus a lieu
en cas d'imminent péril, & en temps de guerre: autre-
ment Ton ne doit fans propos foy tant eflongner de la
loy&deiuftice:&n'eftreceuable vniugeà laiuftifica-
tion de foniugement par autres moyens que ceux qui
font au procès , & qui font efcrits par deuant lui. Car le
condamné & exécuté cuit peu fe défendre & iuflificr,
ou bien reprocher les tcfmoins, en forte que toutfuft
venu à fon innocence. Mais de tout cela l'occafion lui
a efté oftee auec la vie ce qui ne fe doit faire. Ce
neantmoins par arreft de Bourdeaux fut Seruille re-
ceuà faire preuue parades , ou tefmoins des cas donc
il chargcoit les deffunds. Et pource que depuis il n'en
fit rien,& furent les deux ieunes garçons trouuez inno-
cens , par autre arreft prononcé le z4.iour d'Aouft 152,8,
il tut condamné & exécuté à mort,i. im/jo», at* quatriejme
Hure dtt reciteU des ^rrejis donnez, es Cours fouhcr Aines,
arrejl^.
V X
5o8 Hijloires admirables
Vn foy difanc fauil'cnicnt, & fous ce nom de Preuofl
desMarefchauxcMiIa Scnelchauflec des Landes nyant
fait mourir fcpt femmes accufccs dcforccUerie à tort &
fans preuiie,fLic dccapité par arrcll de Bordeaux , donné
le ^.lanuier '515,11 auoit commis trois fautes. LVncdc
i unfdi die a,tel fait n'cltant Preuoftable. Lafecondcdc
ce qu'elles n'eifoyentconuaincues. La troifiefme,de ce
c]uefiuirementilfe difoit Preuofl: , & fous couleur de
charge publique auoit perpètre autant de meurtres. Lt
HHpne Pupon en ce mej'mc lini Cyarreft. 7 .
Le Confal d'vne ville de Suiîîe ( i'efpargne les noms
pour le prefent)homme riche , faifoit baftir \ ne maiion
magnifique l'an 155^. tntre autres ouuricrs excellens
qu'il tecercha, il fit venir delà ville de Trente vn tref-
expert fculpteur & architecte nommé lean, lequel pour
iullesraifons fie refus de venir : finalement ayant receu
promelfe de toute feureté & gracieux traitement, il vint
&trauailla long temps pour l'autre. Sur la fin delà bc-
fongne, venant Tarchicedc à demander les ialaires ils
entrèrent en quelque conteftaticn,dont l'iffuc fut que,
parle commandement du Conful , lean fut conftitué
prjfonnier, 6c parle mcfme Conlul ( contre fa foy &
promefîe) accule d'auoir parlé contre quelques céré-
monies. Le Conful,accufateuriuge &partie3pouriui-
uitfa poindc fî furicufement , que lean fut condamné
à auoiria telte tranchée. Comme on le menoit au lup-
pliceilmavchoitauec vn vifage ouucrt, & mourut fort
conltamment. Adioullant au rellc,apres vn long pro-
posjtefmoignantla conf!;ance,& fincereafi'cdion , que
le" Couiul autheur de fa mort mourroit aulli dedans
trois iours,&colTiparo!iîroit deuant le ficgeiudicial de
Dieu , pour rendre railbn de fa fentence. 11 en aduint
comme ce perfonnage auoit prédit : car le ConfuI
(quoi qu'encorcs en fieur d'attge & bien difpoft de
fa perfonne ) coriinença des le mefme iour à élire M
aflailli tantoit c'vne chaleur, puis d'v^ie froideur ve- »■
liemence 6c extraordinaire, bnef à eftre frappé d'\nc
nauîielle maladie : tellement q',u: dedans le troifîcl-
nieiour
/^ memorâhles, 509
me iour il alla refpondre à l'innocent, duquel il auoit e-
fté trcf-iniquc partie, accufateur, & luge: eftant arraché
de la terre des viuans par vn terrible iugement de Dieu.
Aï.lûjlus Simler de 7 urich^en la vie de H.BydUnger.
1 V s N Emerueilleux.
H En r I de Hafleld, s'eflant tvanfporté des pays-bas à
Bergen Norvvergue,ou il trafiquoir ,y veicutirrc-
})rchen/îblcmcnt,rans élire mane,fort charitable enuers
les pauuresj lefquels il reueftoit libéralement, &em-
pîoyoit à cela vnc partie de fcs draps dont il faifoit
marchandife. Vn iour ayant oui certain prefcheur par-
lant mal à propos des iufnes miraculé ux,comme s'il n'e-
rtoit plus en la puiflance de Dieu de maintenir auciihe
pe"fonne viuante fans aide de viande & breuuagc, &in-
digné que ce prefcheur efloit vn homme difîolu , qui
poluoit les chofes fainfles , cfi'aya de iulher & s'abftenir
totalement de boire & manger. Ayaiit continué troii»
iours entiers il fentit la faim afle?. rude. Pourtant print-
il vn morceau de pain en intention de Taualer auec vn
verre de bière. Mais tout cela lui demeura tellement en
la gorge , qu'il demeura quarante iours &: quarante
nuifts fans manger ni boire. Au boutdecetemps,ii re-
letta par la bouche la viande & le brcuuage qui lui e-
ftoyenr demeurez en la gorge. Vne ii longue ablHnence
l'aftoiblit de telle forte , qu'il f.ilutie fubftanter& re-
mettre au delfus auec du laiâ:. Le gouucvncur du pays
ayant entendu celle merueille , fait \enir Henri, î'en-
quiert delà vérité du faid : & nepouuant adioufter foy à
la confefl'ion de Henri , voulut en faire vn nouuel elfai.
Pourtant le fit-il enferrer , veiller & garder foigneufe-
mcnt en vne chambre Tefpace de quarante iours &
quarante nuifts , fans qu'on lui donnall: nourriture
quelconque. Ce qu'il fupportafans bruit,& auec moin-
dre difficulté que la première fois : ne fc glorifiant nul-
lement, ni n'attribuant ticnàfoi-mefaïc, mais rappor-
V z
3 i o Hijloires adm trahies
tant le toutà la puiflancc &: à l'honneur de Dieu. A eau-
fe d'v ne fi rare & furnaturelle abllinence,& pourcc que
fa vie eftoit fans reproche , il fut iurnomme de piuficurji
le Saind de Norueguc. Quelque temps après cftant
venu pour Tes négoces à Bruxelles en}3rabant, vn Ç\én
débiteur n'ayant aucunebonne monnoyc pour k payer
&: moins encore de confcitnce, l'accufe d'herefie,à rai-
fon dequoy il fur pris & mené en prifon , ou il demeura
lans boire ni manger longue efpacc de iours:aubout
delquels il fut condamne elhe brufle vif, fans que rien
de (on procès fuft expofc au peuple qui le \id marcher
au fupplice auec mefmevirage & contenance que de
couHume. On l'attacha d'vne longue chaine de fer à
vn gros pof}:eau,& alluma-on des fagots en abondance à
quelques pas tout autour de luiichafcun eftimant, qu'il
courroitiulquesau dernier Ibufpir autour de ce poftcau.
Lui au contraire fe proftemant à genoux, & leuant les
yeux au ciel,tit vne prière ardantc à Dieu :puis fe leuant
debout,s'approche couragculcmcnt des flammes arden-
îes,entrc,s'aîTieddedans , &yrubfiilefi pailiblemcnt,
que nul ne lui vid remuer bras,niiambes, telle ni corps:
ainsfans bougerni fe tourmenter il expira dedans le
feu. L'on netrouua parcelle quelconque de Tes os : &:
pluficurs pallans depuis par Tendrojt ou il auoit e-
ft-é réduit en cendres tenoyent celle place pour vn
lieu de dcuotion. Cela aumt enuiron Tan mil cinq cens
quarante cinq: ce que i'ay aprins de la boucljc de
î^ens trei-dignes de foy , bons amis de ce perfonna-
oe , aucc lequel ils auoyent hanté fort familiere-
jnent.L V-oier nti trui^iê de witvnn Commentitiis,
N'y a pas long temps qu'vn Chanoine en la ville de
Liège voulant faire eflay àc^Qs forces i iufncr, ayanc
continué iufqucs au dixleptieli-ne iourjfe fcntit telle-
ment abatu, que fi toutfoudain en ne Teuftlouftenu
d'vn bon reftaurant,il defailloit du tout./à mefmc.
Vne ieunç fille de Buchold j au territoire de Munftre
tnVvefphalie, affligée de triftefle& ne voulant bouger
dclamaifon/utbatcucâcaufe de cela par fa m ère. Ce
qui rc~
^ mémorables. jir
qui redoubla tellement Ton angoifle , qu'ayant perdu le
repos elle fut quatre mois fans boire ni manger , fors
que par fois elle mafchoit quelque pomme cuite , & Te
lauoit la bouche auec vn peu de ptifanc. Elle deuint ex-
trêmement maigre , en fin Dieu la remit fus , & a vefcu
longtemps, en grande modeftic> & douée de fînguliere
pieté. i4we/we.
Au mois d'Odobrcde Tan mil fix cens , monfîeur
Rapin, lequel ie nomme par honneur, perfonnage tres-
digne de foy , me certifia d'auoir veu , comme ont aufli
plusieurs autres, à Confolant en Poidou , enuironla
fin du mois d'Aouft précèdent , la fille de lean Balan
marefchal, nommée leannc, aagee de quatorze ans j la-
quelle auoit lors ia vefcu dixhuit mois fans boire ni
manger en forte quelconque. Elle auoit la langue fore
retiree,les dents blanches & nettes, le petit ventre tout
retiré , comme vn Skelete par deuant , vn peu charnue
par derrière. Si tofl qu'elle eft leuee le matin, elle
ouure la feneftrc , & fe tient à l'air faifant au reftc quel-
que menue befongne parle mefnagc. ixtraiCi de nos
IV sr icE,
IEa N des Marefts ayant cftë meurtri parle Seigneur
Je Talart , de haute & ancienne lignée, & gentilliom-
me fupporté deplufieurs grandes alliances , nommé-
ment de meirne lean du Bellay Cardinal , qui en faifoic
Ton propre faid,ilfembloit queTexpedition de laiuftice
n'en fuil fi prompte , comme la vengeance rcxigeoit.
L'aycule du defund ayant fon feul recours au roy
François premier fe iettade genoux deuant lui , tou-
te elploree , à Fontaine-bleau. Dequoy le roy e-
ftonné lui demanda qu'elle chofe elle vouloit de
lui ? luftice j Sire (refpondit-elle) s'il vous plait. A la-
quelle parole il lui coiuaianda de fc Icucr promptemcnç
y 4
312. Hijloires admirables
&s'adrefrant à toute la compngme qi!i Tenuironnoit,
foy de Gcnril-hommc, dic-il , ce n'eft pas raifon que ce-
flc Damoirclicfcpiofterneen vain dcuantnioy, me de-
mandant vne chofcquepourle deu de mon eftat ic lui
doisnniis c'cft à ceux qui m'importunent fur les rcmif-
iîons & abolitions , Itfquelles ic ne leur doisfînon de
grâce & puifî'^nce royale. Parquoy après Tauoir longue-
ment entendu fur le difcours de la requelle, qui tendoit
feulement à fin debriefueiuftice , & la lui avant promi-
fe, il monltra que la parole dVn tel Roy le troua en
tout acomplie par i'eucnen'.ent qui s'en cnfuluit. D'au-
tant que ne pouuant eilrc Q.Qi'cm 'par aucune prière de
ceux qu'il fauoriibir,ni mefmcs par ambafladeurscftvan-
gcrs, voulut la punition en ei^t: faite , telle que la gra-
uité du delidl portoic. Comme de faid ie vi décapiter
Talartauxh.^llesde Paris, l'an mil cinq cens quaraiite
fix. A/. E .l\ijquicr an (■h:qi4icjmc linre des nccrchcs de la Fran-
ce, clutl'.j.
L A RR ON merucillcux*
EN V I R o N- Tan m:l cinq cens trois viuoit .ï Geneue
vn terrible larron nommé le Mortaic. en françois
le Mortel. Il euchantoit les cens dételle façon, que nul
nenouuoitle garder de dcfrober, ni le pu, iir après le
forfait. Chrfcun fcauoit que c'eitoit vn larron, & le gar-
doitondelui du mieux qii'6 pouuoit.îl y auoitlors vne
voix commune en toutes les mailons de la ville , quand
la niii^f^eûoi: clofe, des maiftres & mairtreiles à leurs
valets & chambrières, ferme à caufe du Morra , dont fut
faitvn prouerbc vfîtc depuis quad on fe doute de quel-
qu'vn qui a les doigts crochus. Mais , il n'y auoit porte,
ferrure r.iverrouil, qui le gardait d'entrer où bon lui
fembloitifans toutesfois qu'il allait par tout , ains feule-
ment chez ceux qui le regardoyent de traucrs , & mon-
ftroyent fe desficr de lui. Car il prenoit plai/îr à defro-
berpour cftre ellimé habile 5c meruciJlcux;& ne le îou-
cioic
dr mémorables. 313
cioit nullement de fane cfpaiiinc ou monceau, ioinc
qu'il fe contcntoii: tic peu , ne preiiât cjue ce qu'il lui fa-
loïc pour vnc cinquantaine de bons icpas auec certains
bons conipaonons qu'il menoit banqueter cà &îà fur
fil bourfe, quand il Tauoit remplie. Et n'eftoit queftion
de le garder d'acomplir fa volonté. Car il enchantoit
tcliement ceux de la maiTon , qu'ils perdoyent parole &
tour moyen de lui rcfiftcr , les rendant immobiles com-
me des ftatues, lors qu'il entroit en leurs maifons. Or
dcuant que gripper ce qu'il pretendoit, c'eftoit au pré-
alable à repaiflre tout à Ton aife.La première cbofe qu'il
failbit eftoit d'allumer la châdelle, puis prendre les clefs
de la maiibn , voire lulqucs fous les ccufîms & oreillers
des maiPjres & maillrefles,encores qu'ils veillaifent.Non
qu'il eull faute de clefs, car Tes doietslui feruoyent de
cela.-maisil vouloit monftreren telle procédure fon au-
thorité larronefque.il alloit ouurir puis après la defpen-
fe £: la cauc , d'où il apportoir la a iande & le vin , cou-
uroicia table, buuoit& manî^eoità fonloiiir& plaifîr,
fans que perfonne de toute la maifon fe remuaft pour
Tempcfcber ou aconîpa?ncr,ni pour crieï,ou autrement
parier i lui,fuK en mal>fuft en bien. Cela fait,en lieu de
monnoyc de Cordelier, comme oii dit , il payoit à l'E-
fpagnollc\- car il aiioit ouurir les cofrcs de fon hoftc , &
prenoit de l'argent qu'il y trouuoit ce qui lui faifoit bc-
foin pour faire bonne chère auec fes mignons , l'efpacc
de trois fcmames ou dvn mois en quelque cabaret. Le
lendemain lui & fa bande fe campoyent oii il y auoit du
meilleur :& les tnuerniers acueilioyenc gracicuièrnent
toute ccftc brigade : car ce Morta ne faifoitpoiat de mal
es lieux où il frcquentoic d'ordinaire ,& dont les mai-
ftreslecarefîbyent. Apres auoir faid pliifieuis bons re-
pas, quandcevenoità compter, ilneportoitpoint d'ar-
gent; mais difoit à l'hofte, va quérir ton payement au
coin de telle ou telle chambre de ton logis, qui peut c-
ftre n'auoitcfté ouuerteni f;-equentee d'vn mois aupa-
rauant. Ce que faifanti'hofte, il trouuoit fa fonimc en-
tière iuflement , fans qu'il y eull: vnc maille plus ou
moins. L'on pourroit s'efuicrueillcr^commcntla iuftice
314 Hisîoires ddmirahles
nelepunifloic. Il fut Ibuucncesfois cinprifonné : mais
les Syndiques n'ofoyent outrepafler les loix qui défen-
dent de condamner aucun accufé, deuantqu'auoircon-
ferté. Or ce Morta eftoit fi ferme à nier la vérité , qu'il
n'cftoitpofùblerien tirer de fa boucheifoit qu'il ne len-
nk point les tourmens , ou qu'il les mefprifafl:. Car il
craignoitaufll peu vn traicl de corde que de danler vn
branfle.Si on lui donnoit quelque rude cftrapadc,il fai-
gnoit endurer bcaucoup,& crioit,mettez moy bas,ie di-
ray la vérité. Quand on l'auoitdeualé & defl:aché,il di-
loitaux Seigneurs, Qu^e voulez-vous que le die? On
luidemandoit làdefTus, Sçais-tu qui a fait ceci & celu?
luifc mocquancreiteroit telinterrogat, difant, fcais-tu
quiafaitceci&cela ? puisadiouftoit en gau (Tant, don-
nez moi encore vnc eftvape pourl'amoiir des Dames:
tellement qu'on eftoit contraint lelafcher : Il fit des lar-
cins fans nombre de la forte rufmcntionnee : mais il ne
mourut pas Ç\ honteufement qu'il meritoitrouy bien au-
tant cruellement; la pefte l'ayant fiiifi tellement à la gor-
ge,cu'il en perdit la parole,fa mère le gouuernant.cram-
te qu'il cfchapaft, pour aller au gibet , Tenfeuelit & en-
terra tout vif. Ainfi vcfcut & mourut le mortel. hxtrMcl
iies f^nnules de Gettcue,
LIBERALITE.
LEmperevr Maximilian I. s'eftoit fié du manie-
ment de bonne fomme de deniers à vn gentil-hom-
me prodigue^du mauuais mefnagc duquel eftant aduerti
il rappelle & lui demande compte d'vn refte montant
deux mille efcus & d'auantagc. L'autre demande terme
pour le dreficr, qwi lui efi: accordé. Ayant prou rauafl'é
fur fonafaire, il renient des le lendemain fe prefenter
à l'Empereur, qui efmerueillé de fi prompt retour le
remet fur les termes du iour précèdent. Sacrée maiefté»
dit lors le gentil-homme, ievous reprefentcray fom-
maircmciutoutela vérité démon fait, afin de nevous
cmpercher
drmemorMes, 31^
cmpefcher longuement.Vous eftes bénin cnuerstous.Ic
confefle auoir employé la plufpart de vos deniers en
entretenement de putains , en achept de cheuaux, en
ieuxjcn banquers:& fans m'excufer a auantage , l'ay mal
faitji'ay mérité d'eftre puni par iuftice. Mais il vous plai-
ra fupporter ma ieuneiTcSc pourTamour de mon paren-
tagc me faire grâce : s'il plaift à voftre Maiefté fe leruir
de moijie ferai fage ci après. L'Empereur efco utant ce-
il:e franche & naifue confefllon , fe prend à foufvire , &
commande tout à l'heure qu'on appellaft fon Barbier,
auquel il ditjtondez viftement ce gentil-homme,& lui
faites au rafoir vne belle couronne furlatefte. le veux
tout maintenant en faire vn Abbé.L'on auoit à ce mef-
meinftant apporte lettres d'auis à l'Empereur de la va-
cance dVne Abba)'e , par le deces de l'Abbé & deuifoit-
on en prefence de Maximilian, qui auroit ce deuolu.Cc
fera cellui-ci , dit l'Empereur , monftrant du doigt fon
gentil-homme entre les mains du Barbier. Puis l'ayant
fait venir tondu & couronné, il lui dit, le te donne telle
Abbaye :fî tu continues comme tu as commencé , tu
mangeras les Moines & le Conuent. Le gentil-homme
a quilebien eftoit venu en dormant ( comme au cha-
noine du Roy Louys onziefmc) ayant accepté cefte col-
lation auec beaucoup de reuerencc & de remcrciemens^
printpofl'eflion de l'Abbaye , deuint bon mefnager , &
gouuernalcsnioinesà leur contentement. l.U Cuji da
hrifiCjJH %.tome de fcs propos dt table.
Mcffirc George d'Amboife, Cardinal, l'vn des princi-
paux ConfciUcrs du bon Roy Louys dou/icfme , louvf-
foit du bien de Gaillon,dcpcndant de fon Archeuelché
de Rouen, qu'il augmentoit & accemmodoit de tout
fon poffiblc, comme maifon de plaifance, iclafche de
fes plus ferieufes occupations.il y auoit vn gentil-hom-
me ficn voifîn, grandement afairé , lequel pour fe met-
tre au large , parle à l'vn des domeftiques du Cardi-
nal, à ce qu'il vouluft moyenner enuers fon maiftrc,
qu'il achetais vne fienne terre, qui eftoit grandement
à la bicnfeance de Gaillon. Or comme la nature
de tous Courtifans cft prompcc à telles négocia-
3 1 ^ Hï (loir es xdmïrAhles
tiohs,ccrtui-ci çiw ndiicr-i-rjudaiii Ton iiiailhc, l'auifant
qu'iîpourroir auoilà bon cotnpre cel^c rerrc dont illui'
portoir parole. A quoy le Cardinal , d'vnc face gave &
TiantcrcfponJir, qu'il nedeniandoitpas mieux que de
communiquer de cell afaire auccle gentil-homme ven-
deur,& que partant on le conuiall à difncr.Cc comman-
dement fut incontinent mis en œuure par le Courti-
lan : & de faid quelques lours après le gentil-hommc
ayant pris la refedion auecce bon Seigneur, les tables
leuees,&: vn chacun retiré, pour leslailîer de^iifer i leur
aircfur ce qu'ils auoyent à fairc,le Cardinal commença
dclui tenirpropos decefte terre, l'admonncllantà Ton
pofîlble comme voifin & ami de ne vouloir le défaire
de ce lieu , qui eftoit de Ton ancien eftocl'au'irc au con-
traire in fîll:ant,alleguoit pour les raifons , qu'il efperoit
rapporter de ccftc vente trois profits : Tvn en gaignant
par ce moyen fa bonne grace:l'autrc, parce que d'vne
partie de l'argent il mariait vne fiennc fille: & la derniè-
re, qu'il cmployeroit le refte de fes deniers en rentes
couranre'J^qui lui profiteroycnt tout autant, comme le
reucnu de fa terre entière: & pourcc , Monfeigncur (ad-
iouîtoit-il) qu'elle vous eft trop plus fcante qu'à nul au-
trcîc me fuis adrelfc a Vous , pour vous en faire tel mar-
ché que fouhaitcrcz. Voire mais,mon voifîn, refpondic
le Cardinal , fî vous auic2 argent d'emprunt pour loger
voflre f.lle en bon lieu,n'auric7.-vous pas beaucoup plus
cher que la terre vous dcmeuraR? Ac^uoi le gcntil-hô-
me fît rciponfe que celui feroit vne autre difficulté de
rendre à iour nomme l'argent qu'il auroit cmprunr-
Mais il on vousattermoyoit à tel tcp/(pourfuiuitlerc.
gneur)que fans vous malaifer pcullîe/. acquitter voifie
debce,que dirie7.-vous?Ha, monfeigneur, rcpliquaTau-
rre,vcus dites bien : mais où font maintenant ces pre-
neurs ?Ainfî eftans tombez en vne tailible altercation
tirée delà vente & du prcft, en fin ce bon Cardinal s'el-
cria , & vrayemcnt ce feray-ie & non autrc,qui vous fe-
ray ce parti. Ce qu'il fit:car il lui prclfa argent conuena-
blcaucc term^ \\ long,que comblant , comme l'on èiii^
de la terre le foilé j ce geiitil-hommc maria fa fille à ion
deiîr.
^ mémorables. 3 1 7
dcfir/ans fc dcrpouiller de fa place. Or Comc fonttou,
tes gens de Cour foucicux des auaiuages de leurs mai-
ftres, par vn droit de bien rcâce,au preiudicc des a.ucrcs;
fof^ans de ce confeil eitroit furuint rentremcttcur , le-
quel en particulier demande à Ton maiftre s'il auoit ccn-
uenu de prix ? O uy,dit-il,& penfc y auoir trop plus çai-
gnc que vous n'eftnnez. Car au lieu delà Seigneurie
dont vous m'auiez parlé , i'ay fait acquifiiion à\n aniî,
aimant trop mieux vn bonvoifînque toutes les terres
du monde. Le pauurc Courtifan confus, de W en auanc
ne fe fouuint plus de telles pratiques. A la nijcnc volon-
té que tous Seigneurs fe ionuinilént bié de ccile liiitoi-
re. £t toutesfois ce Cardinal en mourant rcgrettoit a-
uec pleurs & larmes le temps qu'il auoit cmplovc plus
à la fuite de la Cour d'vn Roy que d'endodriner fes
brebis . iM.E. PufijHier au 5 diK.dejcs reccrchesjch.').
MAGNANIMITE,
LE Capirafne Bayard, du temps de François I. fe fen-
t^înt blcfie à mort d'vne harquebuzr.de dâs le corps,
coufeillé de fe retirer de b meflce , refpondi: qu'il ne
commcnccroit point fur la fn à tourner le dosa Tcn-
nemi : & ayant combatu autant qu'il eut de force/e fen-
tant défaillir 8c efchapper du cheual, commandai fon
maiftre d'hoftel de le coucher au pied d'vn arbre : mais
que ce fuit en façon, qu'il mouruft le vifage tourné vers
rcnnemixomme il fit. Ai. de Alonta^^^na an i.liure de fes e/-
fa^f , chapitre ^. Plufîeurs autres exemples fe verront es
volumes fuiuans.
MARIAGE clandeJUn^ dr trop wef
galy tref- malheureux.
N feigneur Lfpagnol s'eftant amouraché dVne fil-
le d'exquife beauicdont le pcrc auoiL efic orlcurC:>
V
j i8 Hiftûires admira hles
en la ville de Valence, l'ayant follicitee en diuerfcs ^or-
tes pour en ionir, fut rebuté. Vaincu de Ton afFe(fî:ion,iI
lapourchaflc à femme , l'erpoufe en chambrejprefens la
mère & les frères d'icelle. Sous ce prétexte l'ayant entre-
tenue vn an & demi ou enuiron , finalement tranfporté
d'autre nouucau défini erpoufe publiquement vnc da-
me de grande maifon. La hllc qu'il auoit C\ mal-heure:i-
fementfcduirctrouue moyen par lettres Scmeflagesce
l'attirer derechef à foi, feint & lui perfuade d'eftre con-
tente qu'il fe férue d'e'le comme de concubine , venant
en fa maifon deuxfoisla femaine. L'amadoue tellemer,t
qu'il prometla venir voir le lendemain. Ellelui braf-
fe vn terrible potage. A l'affignarion , il vient auec \n
fienferuitcur , auc^ttd il donne charge de le venir re-
trouuer leiourfiiiuant. Receu auec grandes carefles
aulogis, ilypaiîe leiour enplufieurs propos meflc/.
La nuid venue il couche auec elle, qui trouue tantd'cx-
cufes que ce feigneur eft remis lufques après le premier
Ibmnc à iouïr d'elle. S'eftant endormi profondement,
cefte fille outrée de douleur & de fureur, aidée d'vne
fiene efclauc qui lui auoit fait prouifion de deux grands
coufteaux tranchans, & d'vne forte corde attachée à vn
des coftez du lia: , îdi'it ferrer la corde à trauers le corp«
de ce feigneur endormi, puis empoignant foudain l'vn
des coulteaux en donne de toute fa force vn coup de-
dans la gorge de fon homme. Il trelfaure auec vnpeu de
vie. Mais d'vn colfé l'efclaue tiroit tant qu'elle pouuoit
la chorde dont fe mifcrable ertoit tellement ferre par
les bras & le corps, que comme il tafchoit fe delpellrcr-
ilelt rudement chargé de plufieurs autres coups de
danslefcin, qui en vninftant lui ollent la voix& la vie.
La chandelle allumee,cefte fille tranfportee de fa fureur
douloureufe,procedanted'vn tref-iufte defdain, cerne fie
tire les yeux de la telle a ce mort , lui arrache la langue,
puis le cœur, qu'elle defchiquette par pièces, le perce &
mutile en diuers endroits de fon corpsjequel à l'aide de
l'efclaue eft ietté parla fenêtre fur le paué d'vne rue
forthantce.Leiour venu chacun acourt à ce fanglâtfpe-
<^acle. On parle diuerfement du faid , le corps ne pou-
uanc
(^ mémorables. 319
uant eftre reconu,tant il eftoit desfigurc , n'ayant que la
chemife fanglante & defchirec de coups.Commeles vns
& les autres difoyent leurs auis , la fille defcend en rue,
declairc afl'earément, & dVn oeilfec, tout ce que defl'us,
qui eft vérifié outre la confelTion par les déportions du
feruitcur de ce feigneur^du preilre qui auoit fait les c(-
poufaillcs , de la mère & des fi:eres qui y auoyent afTifté.
Si^oft que le corps cuft efté ietté en la rue , la fille don-
ne à Ton cfclaue bonne fomme d'argent, &auisdefe
fauuetjce qu'elle fit des le matin. Qjjant à la fille / e-
ftantafl'ouuic d'vnc fi extraordinaire vengeance , elle
auouafranchemcntpluficurs fois deuanties iugestou!:
ce qu'elle auoit fait , & ayant cité condamnée à perdre
la terte,marchaconftamment,alaigrement,&la teftele-
uceau fupplice, endurant trcs-volontiers la mort, au
grand eftonnement de tous les habicans de Valence.
Uij}. d' Efbagne,
Queîquestemps après la bataille de Raucnne don-
née Tan 1511. vn Gentil-homme Neapolitam, nommé
Anthoinc Bologne , ayant ferui de maiftre d'hoftcl Fré-
déric d'Aragon roy de Naples, qui delpouillé de Ton e-
flatfe retira en France, fut appelle par laducheilede
JMalfijpuiifante dame,fortie de la maifon d'Aragon,rceur
d'vn Cardinal des plus auancez de Ton temps,vcfue dVn
grand fcigneur , & mère d'vn fils vnique, pour lui feruir
demaiftre d'hoftel. Ce qu'ayant accepté , quelque
temps après cefte vefue , ieune & belle , l'ayant regardé
d'autre œil qu'il ne faloit, le conuoiM:mais pour prétex-
te a fa faute , elle cercha la couleur du mariage , & après
pluficurs vains difcours en fa penfec, en lieu de recourir
auconfeilSc bon auisdefcs frères & honnorables pa-
rcns, quelle auoit en bon nombre , & accepter parti de
fa qualité, qui fe fuft trouué aifcment près ou loin :em-
t)ortee de Ton defir, defcouurit fa penfce au gentil-
lomme , quienyuré de Ton fcns , & laifTant en arriè-
re le refped qu'il deuoit à fa dame , au parentage
d'iccUe, à fa petitefl'e , ne voulut s'excuier, ni fe re-
tirer, ni donner confeil tel qu'il dcuoitenccfte oc-
currence ; mais prcfompcutux & voluptcux accepta
310 Hifloires admirahlesi
de s'approcher fous le voile de mraiagc' clandcftin de
celle qui s'clloit oubliée à luiiettcr de longue main
beaucoup d'ailladcs peu chaftes,&de laquelle il s'eftoit
imprudemment ce contre tout dcuoir amourache. Ces
deux malaciuifc/, donc fe couchans , en prefence d'vne
fille de chambre feulement, fous la couuerturc du ma-
ria<:e,comnKnccrér à faire tel train qu'au bout de Qiicl-
cjues mois laDuchefic dcuint enceinte^ & acouchad'va
fil.s,qui fut efleiîc aux champs. Ce premier enfanrcmenc
demeura fecretimais deucnue enceinte & dcliuree d'v-
ne file, le bruit en vcîa inconcinentpar tour,& paruint
aux oreilles du Cardinale d'vn ficn autre frcrc à i\o-
mc. Comme ils efroyent après a s'enquérir, qui pouuoic
élire celui qui s'eftoit approché iî priuement de leur
fotur , Bologne voyant qu'elle cftoit cfptee de tous co-
ft.c/,print congé d'elle' encei/ire uu troiîicfme enfanta-
fin de fe retirera' Naplcs,puisà Ancone^pour y attendre
quelque autre euentmeiit à leurs afanes. Ayant moïC
fes deux enfans auec foi , & loué maifon conuenable, la
Ducheflc y enuoya fcs plus précieux meubles , U coil a-
pres fouscouleurd'vn pèlerinage à Lauretce, au retour
elle fe rendit dedans Ancone aucc tout fon train, où des
ielédemain de fon arriuee ayàt fait appeller tousfe:» do-
meftiqués &: gentils-hommes dcfifuitCccUc leur fit en-
tendre que Bologne efioit fon mari, & c|u'eile auoit re-
foludcs'arrericr auec lui : permertanrà ceux qui voii-
droycnt aller faire feruiceau leune Duc fon fils, àcÇc
retirer,& pro:r.etraut bonne rcco'i-penfe à c^iw oui dc-
meaveroyent près d'elle , K'Ur r-ionftrant leurs deux en-
fans. Les domc(tii]ucs elperdus au bruit de celle haran-
gue quirtcrét la Duchicile6<: Bolcgni;:puis eilansdcflo-
gezde leur prefence, enuoyerent vn d'entr'euxà Rome
auertirle Cardinal <Sc le Prnice fon frerc , iic tout le fait
de leur fœur. Le premier cftoit de ces deux frères contre
Bologne & fa prétendue, fut de le^ hure clia/fer d'Anco-
ne parItjcredirqLi'ils auoyctenuer Sigifnond de Gon-
zagueLcf-af du Pape en ce lieu.ïls ic retirerc't à''ic vi^àQ-
ment à Sienermaisforceleur fin à'cn fortir , chalfcz par
Alphonfe Caftrufe , Cardinal de Sicnc , & par la iuiiace
du lieu.
^f^emorahles. 321
<îu lieu. Apres diuerfes conlultationsjils refolurent cic fe
rerirer i Venife , & prendre pour ccft efFcdl le chemin
dela'Romagne. Maisclians fur le territoire de Furli,
ils defcouiireiit de fort loin Mie tronpe de chcuauxve-
nans au galop à eux. La Duchcflefut promptemenc
d'auis que Bologne fe fauuaftauec fon fils défia grand:
ce qu'ils firent eilans tous deux montez à i'auantûge,
& fe rctuerét à Milan. Les caualicrs ayan . failli vnc par-
tic de k ur pioye, pailcrent gvacicufementà la Duchef-
fe, &:la conduifirent auec Tes deux autres enfans, au
Koyaume de Naples , en vn des chafieaux d'à icune
Duc loii fils , où elle iwx. incontinent cmprifonnec auec
Icvdeux enfans qu'elle auoit eus de Boloene , & il fiUe
de chambre. Quelques iours après , trois de ceux
qui rauoycnt prinfe en la plaine de Furli , vindrent en
fa chambre , lui annoncent la mort , permettent qu'elle
fe rccomm.ande à Dieu, puis lui artcchentvne cordeau
col, & l'citranglent. Qu^oy fidt , ils faifillert la fille de
chambre, laquelle crioit à pleine tefte , &reftranglenc
auffi. Confcquemraent ils empoignent les deux petis
enfans , & leur font pafTer le pas de la mère & (cruante.
\^Q.s deux frères pourfuiuans leur pointe font confifquer
à Naples les biews de Bologne , & ayans defcouucrc
qu'il eftoit à xMilan , apoitent gens pour le paiftre d'ef-
perance qu'auec le temps on feroit l'a paix , en lui fai-
lant croire qi^t fa femme & Tes enfans eRoyent en vie,
Orquoy qu'il fuil aducrti par vn gentil-horame Mi-
lannoisde la mort de laDuchefle , & de Tembufcbe
qu'on lui dreffoit , il n'en voulut rien croire , ni fe reti-
rer de Milan, oiiil y auoit des aflaif ns apoflez pourlc
tuerrdu nombre dcfcuels fe trouua vn certain Lombard
capitaine de quelque com.paniie de gens de pied : tel-
lement quetoft après Bologne foitantdes Cordcliers,
où il eltoit ailé ouyr MelTe , fe trouua enueloppé
d'vne troupe de folciats bien aimez S: de leur capi-
taine, qui le maflacrerent fur la place incontinent, cn-
uiron deux ans après la mort delà Di'.ciicffe. Quant
à Ion Hls, qui n'eiloit lors à la fuitcfoiceiui fy.t s'enfuir
de Milan, changer fon nom, &: fe retirer loin, ou il mou-
X
3it Hijloires admirAbles
l'ut inconu> fans que l'on ait peu fçauoiilc lieu de C2 re^
traite & fin. Hifi. d'Italie.-
Du temps que le Pape Iules dcuxicfme faifoitli
ffucrre en Italie, Icsfaftions cftansprefquespar toutes
les villes, vnieune gentilhomme Romain nommé Fa-
bio s'amouracha d'vne Damoifelle nommée itmylie:
fille d'vn des mortels ennemis de Ton père. Elle enflam-
mée demefme affeftion par rcntremife de fa gouuer-
nante,ils efcriuirent des lettres l'vn à l'autre , puis s'cn-
treparlcrcnt , finalement fe firent mutuelle promefle de
mariagcfur vne vaine cfpcrance que ce feroitle moyen
de reunir leurs nriaifons ennemies. Le pis fut qu'ils con-
fommerent ce mariage. Au bout de quelques ioursle
pcrede Fa^iole fentant vieil , commandai fon fils de
prendre parti, & lui dire quelle fille il defiroit à fem-
me. Fabio ayant différé de refpondre, finalement lui
nomme i'Emylie,dontilfuteftrangement& en extrême
courroux rebuté par fon perc , aux defirs duquel finale-
ment ilfelailla aller, abandonnant j€niylie , après s'e-
ftre excufé comme il peut enuers elle. Ceftc dolente fil-
le,enragec qu'on lui euft ioué tel tour , feignit auoir a-
ualé la pilule , priafa gouuernantc d'obtenir de Fabio,
que du moins il lui pleuft la venir voir quelquesfois la
femaine , pour la refiouir, & ainfi petit à petit enfeuelir
leur amitié palfee. Fabiofelaiflantaller à tcllepalfion>
]a vint voir. Elle lui fit grand acueildeuifantfortpriue-
menttoutlefoirenfemble, iufquesà coucher auec elle,
comme auparauant. Mais l'ayant prié de ne lui toucher,
ains d'attendre fur le matin , alléguant fes fafchenes&
douleurs paflTecSjfi toft quele milerable fut cndormi,el-
le empoigne fon poignard & le tuçtout roide : puis
ayant appelle fa gouuernante, en prefence d'i celle fe
donna du mefme poignard tel coup dedans la poitrine
«jue fur l'heure elle rend l'efprit. Ce pitoyable cas rendit
le iour fuiuant les deux pères , leurs familles & tousfort
ellonnez & durement affligez : attendu que tout rcmc-
niedecitoit perdu. Hijî.d Italie,
(^ memorÀle^. 31$
MAFDISSONS detejlables.
EN vne ville d'Efpagnc certain perfonnage dodc &
honnorable auoit deuxfilsjl'vh defquels aagé d'en-
uiron treize ans fit quelque traid de malicc,dont la mè-
re fut tellement indignée & oultrce de cholere qu'elle
commence à le maudire '6l donner aux diables , priant,
qu'ils vin fient l'emporter.C'eftoit fur les dfx heures du
foir:& comme la mère continuaft fes maudiirons , Ter. -
fanttout eftonné defeendit en la cour du logis, où il ài-^
fparutde manière qu'ij^po/iiblc futle trouuer, quel-
que enquefte que l'on en fit. Tous cftoyent cfp^rdus de
cell: accidcnt,attendu qu,il ne fe trounoit ouuerture de
portes ni feneltres pour fortir. Au bout de deux heures^
le père & la mère fort àe-Ahltz entendjîct grand bruit ciii
vne chambre au delTus de la leur, & l'enfant qui lamen-
roit douloureufemcnt.Ils y montent, & ouuran5.auecià
clef la porte d'icellc chambre bien fcrmec,trouuent ccit
cufant en fi pauure eftat,que c'ertoit la plus grand' pitié
du monde de le voir. Car outre ce que (es veilcmense-
ftoyent rompus & defchirezjil auoitle vifagcles mainsi,
& quafi tout le corps meurtri & cfgratigné comme d'ef^
pines:tant deffiguré 5ç troublé, que dé toute cefte nui<i:t
il ne peut reuenir à foi. Le père & la merc firent pour
fonloulagcment tout ce qu'ils eftinicient eonuenuble:
puis le lendemain voyans qu'il eftoit aucunement re-
uenu à foi, lui demandèrent raifon de Ton aduanture ca
la nuid précédente, llrefpondit qu'ellant enla cour
certains hommes defmefurement grands, laids & eflroy-
abless'aprochans delui,rans dire motrauoycnt prins ^
enleué en l'air d'vne viilefic incroyable, puis defcendans
en certaines montagnes pleines defpincsl'auoyenttrai-
né àtrauers d'icelles,& mis enl'eftatoii il auoit efté re-
trouuc.Qu^e finalemétilsTeuIfent tué tout à fait,n'eu{l
elle que fe rccômâdât en fa pelée a Dieu , ces bourreaux
rauoycnt remportée fait entrer par vne petite tenC'
ftrc de la charabre,puis s'cftoycQt.çruanouis.Ce ga' ^orî
314 Hijhires admirables
demeura fourd & tort mal en point: de telle vi/îratiorij
honteux & ennuyé fi quelqu'\ n Tcn encjucroit ou la lui
\ZïnQntC\Xoil.^_yi. T or qtiewaàe en la jJoh) me de fon hexamer.
MEL ANCHOL I^ES, infenfez^fre-
netiques^furteuxe^nragez^^é^c,
IE n'entre point esdifputcs des dodes Médecins tou2
chant la différence qu'il y a entre ces maladies , feloa
que rhumeur domine le plus , ou au cerueau , ou es hy-
pochondres, ou par tout le corps: moins encores en Ja
côfideration des remèdes qu'ils y apportent.Ht fans m'af-
luiettir à(|uclque ordre cxad pour ce commencement,
ie tafche d'cfueillerles elprits du ledeur par celle diuer-
£té entremeflce, afin de le difpol'er a plus hautes confi-
derationsjuc fur chacune hilloire l'amener à la reueren-
ce de Dieu toutpuiilantjiufte & mifencordieux.
Quant aux malades frappez d'humeur raelancholi-
quc , dont iereprelbnteplufieurshiftoitcsen celte fe-
ction, nous en auons veu& ouy parler auHî de diucrfes
cfpeces. Tousbleffez en la faculté imaginatiuc princi-
palement ont des apprehenfions fortes & merueilleufe-
ment bigeavres. Les vns pcnfcnt eftrc dcuenus pots de
terre,oudeverre,en tout k corps,ou partie d'icclui, fuy-
enttoutes compagnies peur d'ellre caliez. Ltsautres
cuidenteftrc deucnus loups ou coqs,hurlans,chanrans,
& fe battans des bras , comme fi c'ertoycnt des aiflcs.
Il y en a qui redoutent infiniement que la rené ne s'ou-
urc fous leurs pieds: d'autres qui ne le reprelentent que
des fantolines hideux, 6c la mort. Quelques vnsfe in*
^enttrefpaficz , & ne veulent plus manger ni boire.
Certains penfent auoir des cornes de cerfs en telle. Au-
cunsfe font précipitez dedans les puits &riuieres, ou
ils font peris,ou bien le font trouuez en dangers exrre-
me,& ont elle retirez àla bonne heure pour eux. Ils'ell
troui-é vn moine Italien , eue l'humeur mclancho-
iiqije poufla à Te ietter dedans la vafe de la mer de
Vcnile , ou il fe pcrdii.Vn autre confclTa que les njalms
cfprics
érmemorahles* ^z^
cïpritsrauoyent fouiicnt rcfueillé la nuid , & confcillc
Je feprccipiter dedans vn puirs.Prcfques tous. craignent
chofes de néant, &.ne redoutent les vrayement nuifi-
blcs. ris ont apprchenfion d'vne queue de renard dont
en voudra les fouetter , de brins de paille dont on vou-
dra les garotter,& C\ auec des fellus on les attache par les
ïambes a vn pilier de lidijne bougeront non plus que des
flatues : au contraire rompront quelquesfois les cor-
deaux & chaine de fer dont on pcnfera les retenir. Par-
fois ils chantent &: parlent inceframmentjd'autrcsfoisils
pleurent & demeurC4it muets. L'humeur venant à s'al-
térer d'auantage , la fureur croill: , ils tombent en defet
poir& perpétuel defir dcmort , ne fontqu'efpicr cou-
Iteau pour s'oftcnfer cux-mcfiTies, feneftres pour fe pré-
cipiter, portes pour efchapper & faire quelque rauage,
:^find'euiner celle peur qui les agite. Pourtant les void-
on toufiourstriftes,eftonnc7.,efiTaye2 comme petits en-
fans qui marchent en ténèbres, la fumée de Thumeur
bjlicufe & noire à merucilles troublant le Ciege de ]*en-
tcndeatcnt, dont n'aillleurefpouuante. Aufllles fages
cftimcnt que les humeurs du corps altèrent noftrc com-
plcxion,dont procède puis après le changement des a-
(ftions de l'amc : tellement que les facultez del'amc
fuiuent l'habitude du corps. Ils'eft trc^ué melancholi-
quequiseil!moitvraycmenteftreriHistefi;e:pourà quoi
rcmcdier,onlui chargea la teflc d\ n chapeau de plomb,
qui le prelîoitlans celle tellement, qu'en fin il fut gué-
ri de ion imagination. Celi'i qui pcnfoit cfire tout de
verre fut remis fus par Taj-prochc d'vn ficn aiv;iqui fe
d.loit eftre encore pks frelle , S^^c i<iuanr dextrcment
autcluile tirapar bellesparolcs loin de Ton imagina-
tion.On en a vcu vn qui le iugeant condamné à mort,
n'a cfté retiré de fon apprehenîion qu'en voyant lettres
de grâce, coatrefaitcs à cefte fm , & qu'il prcnoitla pei-
ne de lire lui mefmes pour s'affeurer d'auantage. Va
Jutie fe difant mort & au fepulchrc, en cft retiré par
Vadteffe d'vn fîen com.pagmon , qui s'enferme auec lui,
& mangeant le perfuada démanger , allegantquecela
fc prarique entre les morts. Lesvns ticnent tounouis
X î
1 1 ^ Hijloires admirables
les yeux fichez en terre, font infiniment dcrpitcz d'ouïr
liréjnc trouiientrien de bon, de beau ni de bien faitfoit
près foit loin , penfcntà tous coups qu'on vucille les
cmprifonner, battre ou tuer, crient merci au pieds d'vn
cnfant,ou deuant vn petit chien , n*aimenc que cachet-
fes & lieux obfcurs, fe font acroire qu'on les a charmez,
cnforcelczjempoifonnez. Ccfte maladie en fommc eft
vn arbre dont l'on ne içauroit conter les rameaux ni les
fucilles. Toubiiois à dire qu'il y en a qui craignent &
haiflent leurs plus familiers & grands amis : les autPCs ne
peuuent fupporter perfonne, & ne redoutent rien tant
c?ue d'crtre \mus. Les vns ont peur de toutes créatures
C|uelconques,de quelques vnes particulièrement : ceux
oui ontefté mords des chiens enragez , ont infiniment
peur de rcau.Bref,autant qu'il y a de particulières fanta-
«cs & de maladies d'humeur mclancholique, autant fe
trouuent de refueriçs Se frenefiçs.Maisc'elt vn mal com-
mun prcfques d toutes perfonnes atteintes d'humeur
mclancholique, excefhf i?^ troublant le ccrueau fimple-
ment agité ces fumées ci^rangcs qui procèdent de ccftc
humeur vcnimcufe, ou doublement truubic par acci-
dent noiiueau, comme dg morfuresde chien enragé,
d'îUu/îon extraordinaire , ou autrcmcKt , de fe donner
peur, nom,niCmcric de çhofcs qu'il ne faudroitnullc-
m en r craindre.
Keftemaiiitcnant.quenous confiderions quelques hi-
ftoires notables de nollre tcp^ , toucliant telles pafllons.
Aïon intention en la lifte d'icelles eit de monftrer com-
bien nous ceuons tous redouter nos propres mifercs,
nous loiuienirde noibc vanité ? penfcrque Dieu n'a
que faire de courir loin pour trouuer des verges , afin de
îiousfouétter;Veu que nous les portos en nos entrailles,
^ue la mort cil en celle chaudière de nos corps: & que
nos âmes y sot en vne cantiuité miferable , Ç\ la lumière
cîe grâce & de vérité celefte ne les efclaire incefl'ammét.
De noftre tempç vn Seiçneur tomba en telle melan-
fholie qu'il ne futpofllblc au fort de fa maladie lui orter
ç;iflc opiniO qu'il ellojtmprt.'tcllcintc que fi ics amis^
(truitcuri
é* me mot a. blés. ^ij
fcrnîtcurs vcnoyent le flatter, prier & preflcr de prendre
i|iielque nourriture ou médicament, il lettoit tout au
loin, difantquc les morts n'auoyent bcfoin de telles
chofcs. Ayant eftéfixiours entiers fans prendre nour-
riture, & le feptiefme venu , qui eftmor:âlaux faméli-
ques , fcsamiss'auiferent d'vne rufe pour lui ofter cefte
fantaifie. On fait entrer en fa chambre,rendue artificiel-
lement obfcure , certains hommes mafquez , vcftus de
Imceuls, bandez & agencez comme ceux qu'on enfe-
uelir. La table eftoitcouuerte de viandes: dont ces maP
quez commencent i fe farcir fans guère de bruit que
des mafchoires , & à boire d'autant. Le malade voyant
ce icu, demande qui ilsfont,& ce qu'ils font là. Eux rcfl
pondent, qu'ils font morts qui banquettent. Comment
donc?dit le malade :lcs mors mangent ils } Oui,direnc-
îls , & de bon appétit. Si vous voulez cftre de la compa-
gnie , vous verrez que nous difons vérité. Incontinent
le malade fecoue les oreilles , fe ietto à bas du lid , & a*
uec ces morts commence i mordre de bon appétit. S'e-
ftant biengouifé, le fommeilîe prtnd à Taide d'vn bru-
uagc qu'on lui auoit apprcllc & fait aualer en ce ban-
quet des morts. Ce fut le moyen de le foulagcr de (a
meiancholie. Lemn Lemne Mt 6. chaf). du X.lntre de Lt Com"
fflcximdu corps luim.nn.VaïCiWç hiftoirc fe lit cn loiiianus
Pontanusu» 4. lii*r« De prtidenti.i:>ckip.U.
Vn autre s'eftant fait acroitc qu'il auoit non
feulement vn pied , mais plusieurs pieds & toifes de
nez de longueur dcfmefuree , & s'cllimant porter
vne trompe d'elephant , qui lui pcfoit & l'empeP-
choit à merueillcs, difoit-il : iufqucs la qu'il croyoit
furmcment que fon nez trempoit dedans les fauces
& plats qu'on feruoic fur table : vn ho^o. Médecin
appelle pour lui affifter , & s'accommodant à fon hu-
meur d'vnc habilité giandc approcha du nez de ce
patient vn long boyau plein de fang & empoi-
gnant le nez auec , d'vn coup de rafoir trancha ce
boyau : puis donnant foudain vn brcuuage endor-
mant à fon malade , à fon refueil lui fit acroirc
^uccçftc ^laadc croiflance Ue nez auoit cfté Coupccj
X 4
318 Hifioircs admirables
& lui ayant prefcnc vn bon régime de viiue, le garan-
tit de (à mclancholie. Lcuin Lemne at^ure ^ chap. fuf-
went-otmé.
Vn autre trauaillc de mclancholie hypochondria-
que, fe pcfi-adoitqiîe lc> grenouilles & crapaux lui
pciçoyent le vi-ncre , & n'y auoit moyen de lui oftev ce-
fte opinion de la teilc. Son Médecin lînaicmentlui dir,
qu'il efèimoit voircment qu'il v auoit de telle vermine
en Ton corps. La delfus il lui donne vnc purgation , &
fait dextrement ierter dedans Ion bafîin quelques cra-
paux & grcn(;uilles. La médecine ayant opéré , le mala-
de le dcfcharge amplement: & foudain on lui monibc
les excreiiîcns, & CCS beftioi'^s nageans dciTus : ce qui
chaflala mclancholique qui le pofledoit. Leum Lemne
au traiclê fiifhicyitu n'ié.
Vn autre imaginant qu'il auoit les fcfles de vene, ne
pouuoit eftre pcriuadé de s'afîeoir pour quelconque
afaire qui lui furuinft : crdignanL que s'il fe mettoitlur
vne chaire ou autre fîege, lesTcIIes ne ferompiflent, &
que les pièces en volailcni: çà is: H. £7 ce mrjht: traité.
l'ai^cu Vil nrelancholiqi!e:,leque' imaginoitque tou-
te la fuperficic du monde c'it\ih de verre tori: délie , que
le dcflous eftoit tout plein defcrpcns , & que Ton lict c-
floit comment vne ifle, duquel s'il le bougeoit , c'elloit
pour rompre le verre,f<: tomber entre ces fcrpens : pour-
tant n'cftoit il podlble le tirer de là. ic^i hjftijlc Monta-
ji.ti en fis Coiijctb de Médecine ^ Cuuf.Z^.
Vn Bourguignon malade de tîeure ardantc à Pans>
aftermoit cnfil cftoit mort ; puis la fantaifîe venant à
changer, il prioit les Médecins de ne poiiil cmpefchcr
que Ion ame qui ciloit en Purgatoire ne s'cnuolaft e«
Paradis. Qucloucsfoisil contrefaifoiL le mourant , qui
lend l'eiprit : puis difoit, regardez comment ie rrefpaire:
puis après il eiloir fiirprins de delefpoir & de peur mer-
ueilleufemenc eftrange. On lui prouoqua les h^mor-
thoides , &: auec autres remèdes opportuns il fut remis
t n fan té. Schol.Jfér le i7.ch.du iMuJe Ai. i . H ottUer , des ttia-
Lîdfes internes,
Prdqijcs ordinairement il aduient aux mclancholi-
ques
CrmemorMes, 32.9
qucsS: gens trouble/, du ccrueauce ne pouuoir dormir,
Il durer longuement en tel eftat pluiîeuis iours& nmiy.
comme il auint à vn,lequel fut i4.mois entiers fans dor-
mir. Fer>:eL an $.Uu.defa Patholo^^ie^ch-Z.
Deux gentils-hommes Italiens,affiigcz d'humeur me-
lancholique & d'epilcp/îe alternatiuemét , fans pouuoir
repofer , Tvn Telpacc de quelques iours , l'autre {\x mois
entiers, ne celFans de crier, & fans fieure, furent par m.oi
guéris tellement en rtfpace de huidiourspar buemenj
cndormans, dillillez fur la te(le,& bruuage de chryfolitç
puluerifee ficinfufe en vin,que depuis ils n'ont efté tour-
mentez de ces maux. Caïdan an Uttre des cures admirable^
cttre ^.
Vn melancholique courant de nuiâ: par les vues , fut
d'auâture blelfé en la cuific,& ayant perdu beaucoup de
Çàn fang fut allégé & giieri par tel moyé. uouUer anccm-
yutntaite furie é.Uu. des ^phortfnes d'Hippncrat<:Syi:phor.zi.
La vefue d'vn orfeurc de Lyon prefl'ec d'vnc mclan-
choliccxtrcnic, à caufcde diucrfes fafchcries depuis la
mort de Ton mari, en la maladie donna beaucoup de pei-
ne à fc faire garder.Ht ne fçeurcnt ceux qui la vcjlloycnt
auoir h blé l'œil fur elle, qu'vn iour en moins d'vn tour
ne main elle i'c letra delà feneftrc d'vne haute chambre
ouelleeftoitfurlepaué en rue Raifin, où elle fe blefla
rudement à la tefte, dont fortifie fang en trei-grande a-
bondance,& par tel accident rcuint en Ton bon fens, $c
fut dans quelques iours guérie de celle clicute. Ce qui
cil: aucuu depuis 25. ou 30. ans en ci. Extruu'l de mes
mémoires.
Vn Alcmau demeurant à Paris en la rue des noyers,
failî d'ÎTumeur melancholique &tranfporré de frene/Te>
la nuitfc fe coupa la gorge d'vn couileau , & fc dôna plu-
fîeurs autres coups tant en la poitrine qu'au ventre, dont
aucuns penetrwyentau dedans , &lcs autres cftovent fu-
perficiels. Lclcndemain aucuns de fes compagnes voy-
lans le vifîter en la maifon d\n banquier nomméPeror,
où il eftoit en pcnfîon , le tiouuercnt ainfî accouftré, a-
ucc grande quantité de fang rclpandu autour de lui.
Vovins tclfpcéuclc, ilspuifcrcnt & creurcnt que fon
55® Hijlôir es admirables
îeruitcuil'aiïoitainii blefTé , parce qu'il couchoir en fa
chambre. Il eftprins&mené prifonnicr au Challclct,
en lui mettant fus d'auoirainfî meurtri Ton maiftre. Or
ie fus enuoyé quérir pour viiiter & pcnfer le malade : &
voyant la trachée artère & rœfophague coupé, auec plu-
fleurs autresplayes,n'eusaucuneerpcrancc delà vie.Par-
<îuoyfus d'auis qu'on appcllaft Eftienne delà Riuiere,
chirurgie» ordinaire du Roy , & Germain Cheual , chi-
rurgien iuréà Paris, & fut conclu entre nous qu'il faloit
recoudrclaplaye de la gorge. Promptement la playc
coufuc S: bandee,le patient Aleman commençai parler:
& confefl'a que lui-mclme s'eiloit fait tel excès , & d'^l-
chargea du tout Ton pauurc feruiteur en nosprefcnces,
& de plufieursautrei,principalemcnt de deux Notaires,
& d*vn CoramifTaire du Chailelet : par ce moyen fut mis
le feruiteur hors de prifon, & abfous entièrement par la
cofefsion que fitfon maiftrc, lequel velcut quatre iours,
faiii^ pouuoir auajer durant iceux aucune nourriture,
mais eltant aucunement alimenté par clyilercs nutritifs,
Scchofes odoriférantes nutritiues, comme mie.dc pain
cha ud trempée en vm^ & autres fcmblables. M, ^^mhr.
Paré nu p.liu.chup.p.
Vu artifan fari;ier,nommé Efiienae, homme paisible,
&bon ouuricrde fon eliat , ayant laiflc gaigiicrfur foi
l'humeur melancholique, engendrant peur & desfiance
CQ iui,fe dona de plein iour quelques coups de coufleau
dans le vétre,cftât allé pourceft erfedenvn fien iardin,
Ainfi blelTé il retourne en fi chambre, fe fait coucher, S:
penlàntiîfacôfciences'humilie deuantDieuJui deman-.
<ie pardon de tous fes pechc/ , fpcciaîement de celui la,
pcrfeuere en fa repentance èc confeflion, en prefencc de
plulîcurs qui le vifîtercnt durant qucKiues iours qu'il
languit. l'en fus l'vn, &le vis raerueilieufen>entefmeu
des paroles qui lui eftoyent dites , tant au regard de fes
pèche?, que delà mifericordedeDieUjenl'apprehenfîoa
de laquelle il rendit paifiblemcnt fon ame , en vne ville
où ilauoit longtemps demeuré, f.xtrat^demes mémoires.
Ican Cranequin Aduocat au fiege prcfidial de Bour-
^csjhûmme de fort bon fcns naiurd, & grand praticien,
mais
^memorahles. 551
fna's fort ignorant en droi<ft efcrit & es bonneç lettres»
ayant en Tan ijjj.fcrui mal à propos en despourfuitesà
l'appétit d'vn tref-mefchant hommc,qui abufoit de lui,
tomba malade d'humeur melancholique & frenefîc
nicrueillcufcmenteftrange.Cartoutcequi lui effcitre*
prefcntc deuantfes yeux lui fembloit eftre des fer^
pens fe remuans:te]lcment qu'après auoir en vain eilayé
tous remèdes lufqucs à faire venir des forci ers & dc-
uins,finalement il deuint tout infenfé, & mourut en tel
Ci\^t.H iftoire de 7ioJ}re temps fom Frans^oU I.
Vn autre dode perfonnage.faifantprofefTion du droift
ciuil , ayant commis quelques cas indignes de fon éru-
dition & iugcment , fut tellement pofledé de frencfie &
d'humeur mclancholique,qu*eftant tombé n^aladcfans
grande affliction en fon corps , pour fa nourriture man-
gcoit fes propres excremcns:& ayantlangui en cefte mir
fere quelque tcmps,mourut fans fc rcconoiflre. uijîoire
de nojire temps.
Vn gentil-homme fort fage & modéré fut furprinj
d'vne iîeure continue au mois de Juillet 1574. dont lui
furuintvne frcncfic, &fc précipita des fenelhes du fé-
cond cftage de fa maifon furTclpaule de monfîeur Va-
terre Médecin ordinaire du Duc d'Alençon , puis fur le
paué,où il fcblefla auxcoftez, &fe fît vne grandçcon-
tufion fur Tos ifchion.Si toft qu'il fut tombé ,& rappor-
té en fonlid ,ilreiiint en fon bon fens, par rranfporcdc
niatiere.caufantlafrcnefiedehauten bas.Auffin'aguc-
res vn Gafcon malade d'vnc tieure ardentc,tôbéenfre-
neficertât logé en la rue Pauee à Paris,fe ietta de nuid
d'vne fencftrc dufccôd eftage furie paué, &feblcfraen
plufieurs endroits de fon corps, où ic fus appelle pour le
medicamenter , & fubit qu'il fu t pofe en fon li<ft, com-
mença à difcourir par raifon,perdit fa frenefie, & quel-
que temps après fut du tout gaeri. Monfîeur d'Ortomâ,
dodeurregenc, &profefl'eur du Koi en l'vniucrfité de
Montpelicr , m'a aft'ermé qu'vn mufnier demeurantà
Broquiersen Albigeois,dcuçnu frénétique, feiettapar
me fcneftre dedans l'eau, d'où cftant tiré, tout foudain
fi perdit la ùcncdc.M.iuivthrotft: Ftiitau derot^r (ha^itre.
35^ Hijloir es admirables
de fin t'utroduHion a la Ch:.t*:-i^:c, ^
Anne, nourrice de Pierre fils de M. François Biord,
iieutenant du Preuoft d'Aix , ieune femme de tempé-
rature chaude Scfeiche, atteinte au plus fort de rhyuer
«i'vne phrcneiîe au cofté gauche , auec vne fieure crefai-
grc>acompagncc de courte haleine, de douleur fort poi-
gnante au collé , & ne crachant que fang à grande dif-
Éculté , tombaenrefucrielc 7.iour. Sur ceelle fe leuc
de Ton li(ff,ouure fon cofre, où d'auanture il y auoit du
fublimc,& en auale enuiron demie drachme;pui fe don-
rcplufîcur^ coups decoufteauau ventre & aux cuiflcs.
Le niclmeiour enuiron minui(ft,elle court toute nue à
A ne feneftrcfe précipite furie paué d'vne cour fait de
f icrres tref-durés:& demeure là toute ellenducfansfen-
timenr/ans voix , fans pouls,roide de froid ( car c'elloit
au folfticed'hyuer ) iufques à ce que les domcftiqucs de
lu ma!fon,voulansfçauoir qu'elle faifoit, vindrent à foii
îiift.où ne la trouuans point,f ut à crier. En fin ils la trou-
itentau miferableertat queie vien de dire, la portent en
fa chambre,&m'appcllent,pourcc queie demcurois au
voifr.age.ry acours auec fa maillrcfie , Damoifclle ver-
tutufc, qui me prie d'v faire tout ce qui fcroitpofTibJe.
Combien quei'eneuflepeu d elJ3erance,toutc.sfoisplu-
iloll par mnnicrc d'clîay qu'autrement ie me mis après
en toute diligence, & par diners remèdes la fai leuenir a
foi, peu à peu ic la refchauftîs, ie pouruoy extérieure-
mental intérieurement à ce fublimé,qui lui auoit vlce-
T'- la bouche 5c la gorge, &vai au deuant de ladyffen-
tcrie que ce poifon a uoit caufee.Sommc, au bout de ilx
femaines elle fut entièrement guérie de tous fes maux
j-ar vne faueur fpeciale de Dieu , & fe porta mieux de-
puis qu'elle n'auoit oncquesfait auparauant. fV. K.iUt-
rtoll.i en CohferHation SJu I .l:tt,
Vne femme Romaine,deuenuc melancholique,pour
auoirefté mariée contre fon gré à vn qu'elle n'aimoit
pas,& couuant fa fureur fous vn trifte filcnce, M.Antoi-
rc Brafauole Ferrarois , excellent Médecin de noftre
temps eflayade diuertir ceft humeur pardiuers remc-
ilcs,qui ne icruiicni: de rien. Pour:anc il s'aa;fa d'vne
rufe
^ mémorables. 3 jj
lufeineJecinale, dont ayant donné auis au mari, lequel
s'y accorda, comme les parens d'elle fuflent venus vn
lourde fefte la vifîter, Braiauole entre dedans la cham-
bre, s'approche du li (51 delamal;ide, la falue amiable*
ment comme fi elle eullefté fa femme , & s'approche
d'elle pour la baifcrxUcieune&robufte le repoulTetluî
continue de plus fore: elle arrache le chappeau , labar-
retce, & tout ce queBrafauole portoit en rcitc félon Ion
aage& la façon d'alors, &iettc tout par terre. Toute la
compagnie fe prend à efclatcr de rire à ce plaifant ipc-
(ftaclc. La ieune femme penfant que ce médecin hom-
me d'aagefull y urc, commence de fon cofte à rire à gor-
ge dcfployee. Depuis lequel temps fa melanchoiic
commença i s'efclaircirS: efuanouir. Th. T^ungemu je-
ftiejhte 'volume de fon thcatre pliure 2.
Vn notable perfonnage, aagé d'enuiron quarante ahs
agité de maniejlafentoit comme venir, le lang cômen-
çanri bouillir en la poidrine : lorsfaveue s'obiCurciH
loit ,& incontinent vn vertige furuenoit .-puiïil fe met-
toit à crier à gorge dcrployce , à fe debatre ol tourmen-
ter,tellemét qu'on eftoit bien empcfché à le tenir.Com-
bicn qu'on l'euii faignéau bras droiifl, & tiré grande ?.-
bondance de Hing, toutcsfois la frcncfic ne diminua
point. IlrGcitoit force vers par cœur, chantoit , crioit à
pleine tefte,rautoit,efl~ayoit de fe précipiter : à caufc de-
quoyfalut le lier bien ferme, &auoir l'œil fur lui. L'a-
yant medicamenté conuenablcmcnt , ilreuinten con-
ualefccncc. Mais au bout de quelques fepmaiHes il re-
tomba en mefme maladie. Finablenientpourcc que les
fumées efpailTesdu fimgne montoyent plus en quanti-
té à la tcftc , la frcnefie cefla : mais il lui iuruin: vn cra-
chement defang auec toux violentcpuis vn crachcméc
ile poulmons:teîlcmentque la première maladie termi-
na en phtifie, de laquelle il mourut. Aï. Ramba-t Dodo-
ncat* en fis obferuatiom medici-nale^johfirAO.
le fus appelle pour vifîter vn ieune home luif, nom-
mé Raphaei,fur les deux heures de nu'-'l:. Il eftoit cou-
uert de tumeuis ou eipeces d'enthracs en diuers en-
droids de fon corpr: entre ajAtre d'vnc allez large au col.
i 5 4 Hi/fûires admirahUs
laquelle fc fit petite incontinent,& lors Raphaël fe i^iint
à rirc,& vouloit d'vnc clef qu'il tcnoit ouurir la veine à
ceux de la compagnie: maisccfte folie fe tourna tout-
foudain en farcur:car il nous vouloit battre tous,& cou-
roit ci Sclà dc'chirant tout ce qui lui tomboit entre
mains, fi forrau reftc en ceft accès qu'à peine pouuoit-
il cftrc rcccnu par fix hommes robuftes & puiflans qui le
gardoycnt. Y ayant appliqué quelques remèdes ic me
rctirc,&lc venant voirie lendemain , dernier iour d'A-
urilisjH.ieletîouucaflcz quoy.-mais après difné il fut
faifî de grand appétit de dormir , que ceux qui lui afli-
floyenr nepouuoyent en Tortequeccfuft garder qu'il
ne fommeillaft.LaniaLicre chaude efmeutprcmicreméc
lafrcnefîerpuisla froide eut Ton tour. Eflât defpcftré de
ce fommcil ptofondàl commence par intcru ailes à fe ba-
tre les cofte?. , & rcfpacc de quatre heures demeura ec-
flatique,courant comme agité du malin cfprir. En ces
entrefaites il contrefaifoi: les voix des oifeaux & beftes
à quatre picds,parl oit entre fesdcnts^auoit dcsmouuc-
mens du tout extraordinaires : tellement que tout cela
feiTlbloit pluftoft vn miracle que chofe procédante de
caufe naturelle. Il eftoit ainfî agité deux fois le iour, &
Ventrée de ce mouuemcnt venoit des hypochondrcsi
fon mal le prenant parle faut du corps.Icclui paiTcTon
éuftdit que ce icune homme n'auoit fouflcrt douleurs
quelconques.il ne voulut plus vfcrde remèdes* , Tes do-
meftiques difans qu'il auoir efté enforcelé, & lui faifant
vferde prefcruatifs contre les forcellerics : ce qui ne lui
feruit de rien. Pourtant ils changèrent d'aduis, pubiians
qu'il auoic le diable au corps,&: le firent exorcifcr , mais
en vainxar c'eftoit maladie qui fe chafl'e par bohs remè-
des ou par laps de temps. Comme de fait il auint qu'aii
bout de huiâ mois il recouura fa fanté / en laquelle il z
continué depuis. B)\ifxnole ai*coinmcnt.fHT le 6^. aphorifme
du 5 . liu re d' H ippocr ate.
levi dernierenient vn perfonn.tgc tel qu'il potiuoit
feruir de patron à qui eufl voulu peindre la melancho-
lie mcfme. Avant efpoufé enuiron le commencement
de luiilct vne gaillarde icune femme il lafcha la bride de
tell«
Cr mémorables, 3 j j
telle impetuofîté à l'adc VencrJen,qu'au bout de quel-
<juesiours il deuint furieux. le le fis enchaincr,& àfor-
celauemens de tefte refraifchir le ecrueau & prouoquef
le dormir : item i l'aide d'vn régime de viureconutna-
ble ie le remis deflus : mais non pas tellcmcnc , que ic
mevoulufTcgueres ficrenlui. Car fesycux& fa force
fombfe ne pfefagent que fureur, lacclnn en fou Commen"
taire fur le ^.Intr.iie Rajisjchap.l').
II. y a trois fortes de refucric aiguc. LVnequâdenrac-
ces delà ficure ou au plus fort d'i celle le malade refuc,
oc dit chofcs elhangcs : mais après la fieure reuicntea
bonfens. L'autre nommée frencfîe, toufioursacompa-
p^çc de folie : pource que combien que le malade aie
des interuallcs moins troubles vne foi*, qu'autre, toutes-
foi^ il a tou/ioursTentendemcnt agité de quelques fan-
tofrnes.La troiiîcfme cil: plus dâgereufcà fçauoir quand
lafolie n'a point d'intcruallcs ciiiremcnt : mais outre
plus fait toutes cliofes imperucufcmêt &: aucc violence,
Vne leune Damoifellc eibmt tombée e« ceitc troi/îef^
me forte de refucric, iefusippelle fur la minuidpour
la vifitcr,Ô: la trouuay en relie furie, qu'elle s'eflancoit-
impetueufcmentjtantoft d'vn collc,tantolt de rautre,&
tout ce qui lui venoit au deuantjdle Tcmpoignoit, def.
chiroir/ou tronconnoit à belles dents, fufl-ce chcueux;.
bras, ou mains d'elle ou d'autres , ou quoy qu'elle peuft
attraper, elle en emportoit la pièce , tellement qu'il fa-
îut renchainer,de peur qu'elle ne fift mal d'auantage ni
à foi ni aux autres. Au bout de quelques heures, cefte
tcmpertc vn peu appaifee, elle fe print à dormirprofon-
dément. Enfin par diuers remèdes , à rvfagcdefquels
elle fe monftroit fort difficile , elle recouura ia pre-
mière fanté. Mais à la couftume des femmes, nommé-
ment des Damoifelles , ne fe foucians pas de fuiure les
expcdicns qu'on lui auoit propofez pour la mainte-;
nir en fanté, & viuant àfon plaifir, vn mois après elle
retombe en mefme maladie, & vingt quatre heures a-
pres rend l'efprit, fans qu'aucuns remèdes y peufTenc
leruir. Beniucmuf nttp^. chA^.dnlmre intiinUde t^bditm
Ttrwn €4Hfu.
33<î Hijlmesadfmrablcs
Vn homme ayant pafTe trente ans fe portait bien de
iour , ayant l'entendement fain & les fens entiers ; mais
la nuict venue, s'il Te niet:oicauli(fr &dormoir, inconri-
nentil entroiten fienefic, crioit de fois à autie tant que
fa gorge pouuoit porter, ne ccfloit d'efcrimer dcsbra-
& iksjnainb, quelquesfois fe leuoit, lautoit, couioitpai
laniailon , fînon qu'on le rctinft. Eitant refueillé & le
iour venu, dcreclief il recournoit à Ton bon fcns, ma-
nioit dextrcmcnt (es afîaiics d'cfprit raffis entieremcn',
ennemi de foluudc, quiaimoità deuiferauec icsaniii
bi domeiirîqucs. Dodo-nxan cnfs obferuatious.
Daniel Fedenc chciuderonnicr demeurant à Triboui .:
en B!irc;avv,de Taage de vingt fcpt ans, hit alfailli d'vi: ..
manie tres-dan^^ereule, qui le tranlportoit fur Icstoict-.
des mailbns', ou il f rimpoit & couroit au péril de la vie,
fans rien n| pvchcndcr. On fut contraint dttl'cncli.iincT.
Au bout de quelques mois, Dieu lelbulagea benigr.e-
ment , à Tnide des^roiîcs veines ou v.irices qui lui aoa-
rurentescuifles , lercuiellcs s'eftnns eflargics dcmefurc-
ment& finalement ouuertes , il farfouîagé. Et depuis
tous les ans iufques au 50. de fon aage où il fe retrouuoit
l'an 1585. vfant d'incifion propre en icelles veines, il a c-
uité la renchcute , & fai-js ce remède ne pourroit fubli-
if cr en fante. Sccmkim en U z^d ohferuution du i.littre dej'cs
doch's ^ dui:^t?ites recerches.
Aux hirtoues précédentes, nous en adioindrons quel-
ques autres touchant les Lycanthropes & enragez , lef»
quels nousconfidero.ns de deux fortes. Car il y a des Ly-
craithropes efqucls l'humeur ir.elancholique domjne
tellement , qu'ils penfent vcnrr.blement eftrc tranl-.
mue/, en loups. Celle maladie, comme tefmoigne Ac-
tius au fîxiefmeliure chapitre n.& Paulusau3.l1u.chap.
1(5. & autres modernes , eft vne efpece de meJancholie,
mais eltrangcmcn: noire & vehementc.Carceux qui en
font atteints forcétdc leurs maifous au mois de Feurier,
contrefont les loups prefqucs en toute chofe , & toute
nuid ne font que courir par les cet mi ti ères & autour
CCS fcpulchres , tellement qu'on defcouure incontinent
en eux vne mciueilicule altération deccrueau , lurtOuc
en
^ mémorables, 337
^\ rimagination & ppnlee mifcrablcment corrompue:
en telle forte cjuc leur mémoire a quelque vgueur,
commeicTay remarqué en vn de ces melanchohques
.Lycanthropes,quenous appelions Loups garoux. Car
lui qui me conoiHoit bien , eftant vn lour faifî de Ton
mal,&me rencontrant, ie me tiray à quartier craig;nanc
qu'il m'orFcnfalt. Lui m'ayant vn peu rcg.-îrdépafia ol.-
trCjfuiuid'vnc troupe de gens. Il portoitlorslur fes ef^
paulcs la cuille entière & la lambc d'vn mort. Ayant e-
fté loigncufcment mccîic.-îmenté, il fut gucri de celle
maladie.Et me rencontrant inc autre fois me demanda
iîi'auoispointcu peur, lorsqu'il nie vint à la rencontre
en tel endroit : ce qui me fait penllrquefa mémoire
n'citoit point bleflee en l'accès & vcliemence de fou
mal, combien que fon imagination le fuit grandement.
Donat du ll.wte ymr mi y. ch.ifitre de jht trait lé De la f'ueri^
fon des maladies.
Guillaume de Brabant a efcrit en fon hiftoire , quVa
homme de fens & ent *idemcnt raffis, fut toutesfois tel-
lement trauaillé du malin efprit, qu'en certaine faifon
de l'année il penfoitellrevn Loup rauiifant, coufoit çà
& là dedans les bois, cauernes & deferts, fur tou: après
les petits enfans:mefmes il dit que ccil homme fut îbu-
uenttrouue courant parles deierts comme vn homme
hors du fens, & qu'en fin par la grâce de Dieu il reuin: à
foy & fut gucri. Il y cuft auin , comme récite iGbFii.cel
tit* z. lin.dcs Alirades , vn nilageoii pre$ de Pauie , l'an
mil cinq cens quarante & vn, lequel penfoit cftreLoup>
&alfa:llit plufieurs hom.mes par les champs : en tua
quelques vns. En £n,prins & non fans grande diff.culté,
il afl'eura fermement cu'jI eiloir loup, & qu'il n'y auoic
autre différence, fînonque les loups ordinairement e-
ftoyent velusdehors , & lui l'eiloit entre cuir & chair.
Quelques vns trop inhumains Se loups par efte<fr , vcu-
lans expérimenter h vérité du fai(ft , lui firent plufîeuis
taillades fur les bras & fur les iambcs : puis cojioiffans
leur faute, & l'innocence ùc ce pauure mclancî-.oli-
que, le commirent aux chirurgiens pour le pcnfcr, en-
tre les mains dcfqucls il mourut quelques, iours après.
3 5? Hijlôires admirables
Les afflige?, de telle maladie font pafles,ont les yeux en-
foncez & haues, ne voyent que malaifcment, ont la
langue fort feichejfont altérez & fans falme en bouche*
Pline & autres cfcriuent que la ceruelle d'Ours efincut
des imaginations belliales. Mefmesilfedit que l'on en
fitmangoi de noftrc temps à vn gentil-homme Efpa-
gnol, lequel en eut la fantaifie tellement troublée , que
peniant eftre transformé en O urs il s'enfuit dedans les
montagnes & dcfcrts. I. ynjîer au 4. liure des preftiges
ehap.z^.
Quant aux Lycanthropcs, qui ont tellement l'ima-
gination blcflee, qu'outrepluspar quelque particulière
efficace de Satan ils aparoillcnt loups & non hommes
à ceux qui les voyent courir , & faire diuers dommages.
Bodin en difputeforr amplement en fa Dcmonomanie,
chapitre 5. du luire i. ou il fouillent que le diable peut
changer la figure d'vn corps en autre , veu la puilfancc
grande que Dieu lui donne en ce monde élémentaire.
Il veut donc qu'il y ait des Lycanthropcs transformez
réellement & de fait d'hommes en loups, alléguant di-
uers exemples & hiitoires à ce propos. En fin après plu-
fïeurs difputes , il maintient d'vne& Tautrc forte de Ly-
câtrophie.Etquant à celle-ci ,reprefentc tout à la fin do
ce chapitre le fommaire de fon propos, a fçauoir,quc les
hommes font quelquesfois tranfmucz en befte, demeu-
rant la forme & la raifon humaine : foitque cela fe face
par la pui flan ce de Dieuimmcdiatcment,foit qu'il don-
ne cefte puiflance à Satan , exécuteur de fa volonté, ou
pluftoft de fes redoutables iugemens. Et fi nous confef-
fons (dit-il) la vérité de Thiitoire facree en Daniel,tou-
chant la nansformarion de Nabuchodonofor , & de
l'hiftoiredelafemmede Lot changeeen pierre immo-
bile,il eft certain que le châgement d'iiomme en bœuf,
eu en pierre,eftpoflible:& par confequentpofi^ible en
tous autres animaux. Mais pource que Bodin allègue
Peucer , touchant la transformation des Pilappiens
& ne recite nettement ce qu'tcelui en remarque,
digne de confideration fur ce propos , ic le tran-
fcnray
^ me?norahle5c ^^
cfcriray fclon qu'il elt contenu en Ton dofte œuurcini
litu{é)CoumtentéiiYe des principales fortes de cltmnutijns lime
4.c/7.i/>.9. félon l'édition Fiançoife. Aur?ng & nombre
des Hcftatiques font mis ceux qu'on appelle Lycaons &
Lycanthropcs, qui penfcnt eftrc changez en loups , &
en forme d'iceux courent les champs, & fe ruent fur les
troupeaux de gros & menu bcftail,defchirenten pièces
ce qu'ils rencontrent, rauilient ce qu'ils pMiuent , &
vont rodant autour dcsfcpuichres& cœmiticies. lîyà
en Hérodote au 4. liure vnpaffage touchant les Neu-
riens, peuples de Scythic, qui ic transfornioycnt en
Loups, ce que lui dit n'auoirpeu croire , quelques rap-
ports & difcours qu on lui en fiif. Quant eft de moy,
i'ayautresfois eftimé fabuleux & ridicule ce que l'on
m'afouucnt conté de celle transformation d'hommes
en loups.Mais i'ay apns par certams & efprouuez indi-
ces,&par tefmoignages dignes de foi, que ce ne font
chofesdutout controuuees &: incroyables de ce qu'ils
difent de telles transformations,qui auiennent tous les
^ns douze iours après Nocl en Liuonic &es pays limi-
trophes xomme ils l'ont fceu au nay par les confeflîons
de ceux qui ont efté emprifonnez & tourmentez pour
tels forfaits. Voici commet ils difent que cela fe fait. In-
continent après que le iour de Noël eil pa(rc,vn garçon
boiteux va par pays appeller ces efclaucs du diable, qui
font en grand nombre , Ù. leur euioint de s'acheminer
apreslui. S'ils diftcrent ou retardent , incontinent vienc
vn grand homme,tenant vn fouet de chaifnettes de fer,i
dontiUes haftebien d'aller, & quelqucsfoiseftrille /i
rudement ces miferables , que long temps après les mar-
ques du fouet demeurent,& fontgrande doiileur à ceux
<iui onterté frappez.Incontinenr qu'ils font en chemin,
les voila(ce leur femble) tous ciiangczc^ transformez
en loups, llsfe trouuentpar milliers, ayans pour coudu-
deur ce porte fouet , après Icquelils maichenc, s'eiti-
mans eibe deuenus loups. Eftans en campagne , ils fé
ruent fur les troupeaux de boRail qui fc nouuent , de!-
chiient Se emportent ce qu'ils peuuent , font plui>eurs
autres dommages : mai^ il ne leur cil pomt pcrm;;,d<:
y j.
34© Hijîoires Admirables
toucher ni de blcfler les perfonnts. Quand ils aprochent
desriuieresjlcur guide(dii'ent-ils)fendles eaux auec fon
fouëtjtcUement qu'elles femblent s'cntr'ouunr,& laifTer
"Vn entre deux pour pafler à Icc. Au bout de douze iourj»
toute la troupe s'efcarte , & chacun retourne en la
maifon, ayant defpouillé la forme de loup , & repris cel-
le d'homme. Celle transformation fe fait, difent-ils , en
telle forte. Les translormez tombent ioudainemcnt
par terre , comme epilepnqucs ^ & demeurent eftenùus
comme morts & priucz de tout fcntiment. Or ils ne
bougent de li;nine vont en lieu quelconque, ni ne
font aucunement transformez en loups, ains relfctn-
blent à des charongnes. Car quoy qu'on les roule & l'c-
couè,ilsnc monftrent apparence quelconque dévie. L'c
là eft née vne opinion, que les âmes extraites des corps
entrent en cesfantofmesjcourans en forme de loupsrpuis
quand Tœuure entrcprife par le diable eft acheuec,ellcs
retournent en leurs corps qui lors recouurentla \ie.Les
Lycanthropes mefmcs conferment celte opinion , con-
fellans que les corps ne defpouillent point la figure hu-
maine , ni ne reçoiucnt celle du loup : mais feulement
que les âmes font poufîees hors de leurs prifons,& s'en-
uolent dedans des corps de loups, par qui elles font
portées vne el'pace de temps. Les autres ont maintenu
quettansenchainez en vn cachot,ils ontprms la figure
d*vn loup, & l'en font allez trouuer leurs compagnons à
plufieurs lournees loin de là.Interroguez,comme ils ont
peu ibrtir de la prifon eftant bien clofe , pourquoi ils
lont reuenus , comment ils ont peu traucrlcr dcsriuie-
resfort larges & profondes? ontrcfpondu que les fers,
murailles & portes n'auoyent peu les empefcher de for-
tir , qu'ils eftoyent retournez par contrainte , qu'ils
voloyent par defl'us les riuicres , & couroyent par
rerre.
lufques ici i'ay reprefentc les paroles du doâeur
Peucerjlefquellesmonilrent , que celle transformation
de Lycanthropes, non plus que celle des forciersmen-
tionnezpar Bodin, n'a point de rapport aueclatranfl
muta--
^mémorables, 541
mutation du Roy de Babylone, , ni celle de la femme de
Loth : & qu'en cefte Lyc.inthropic il y a des manifeftcç
illulîons de Satan , lelquelles ne doiuent cftre cowUm-
duesaueclestefmoignages euidens d'vne vifitation di-
uine fur certaines perfonnes : comme lesTheologien'î
cjuiont cxpcfé les hiftoircs le monftrent amplement.
Aurefte, lean Vvkreft d'opinion contraire à Bodi»
touchant les Lycanthropes dont nous parlons : &en di-
fpute amplement au fixielme liurc des preftiges chapi-
tre 13.& 14.0Ù il nie la transformation réelle de Bodin^Sc
maintient qu'elle ell: feulement en la phantafie troublée
parrmdifpoiîtiondelaperfonne, & parTimpcflurc de
Satan.Mais nous lairrons leur débat, à qui en voudra fai-
te recerche,& propoferons quelques exemples touchant
les enragez.
Il y en a de deuxfortes.Aucuns le deuienent par la vi-
rulence de l'humeur melancholique, tant en tout leur
corps,que principalement au cerucau, à quoi n'ayant c-
fté remédié d'heure , la fîmplemciancholie deuientfrc-
nefic , celle la fureur, & finalement rnge redoutable &
du tout incurable. De quoy M.Pierre Salins & Marccl-
lus Donatus, do des Médecins traitent, & en pro^o-
fent quelques hill:oires.Parlons-cn rpres eux,& leur fer-
uons detrucheman à nos François, On demande /î l'hu-
meur vcnimeufe ou virulcte(nommee Rage)quife pro-
crée en tant de fortes d'animaux,lcfquels la cômuniquent
iThomme, comme nous fçauons , peut commencer par
laperfonne mcfme & des principes internes, fans qu'au-
cune contagion furuiene de dehors. La raifon nous fait
cnchner àceftauisj^uis que,du confenrcmcntdetous,
les venins mortels peuuent eftrc engendrez en i'hom-
me,quela rage auH: ne doit eftrc forclofe de ce rang,
l'homme ne difterant d'aucc leferpcnt, qui crache le
venin , non plus que des autres beftes fuiettcs à la
rage, ains ayant plus de rapport auec les ferpens qu*a-
i^ec les autres animaux. Mais d'autant que les ancien*,
pourlaplufpart , onteftimc qu'vnc perfonne ne pou-
uoit deuciiir enragce,fi elle n'auoit elle atteinte au de-
hors par vue autre perfonne oubcftc enragée » il fcm«
Y i
314 Hifl aires admirables
tic que nous ne dcuons pas aifémcnt nous cflongnef
cic leurs auis. Toutcsfois puis que l'expérience pcuç
rclouldrc ccfte dil-ncuUé j ic diray ce que incs yeux;
en ontvcu. Vnc femme aagecce trcntefîx ans, trauail-
Icc d'\ ne fît^ure lente, m'appeila po'irhfecourir, icla
tiouue faille d'vne fieure pefi:ilen:;eUe, ie la traitte,
tellement, qu'onze iours après elle cit pucrie.Au bout
^'autres n. iours elle eft affligée d'vnc fort douloureufç
dyficntcrie, acompagnee de fleure. le fuis rappelle : ic
commence a combatrc celle maladie, & la furmonte de-
dans fept iouri après. Reftoitvn peu de Heure , laquelle
voulant exreimincr,ruruient à celle femme vn fi grand
cicldain de toutes liqueurs^ que non feulement elle ab-
îiorroit tous medicamens liquides & tous bruuagespour
farefedion,.nais encoresne pouuoitfupporter ceux qui
buuoycnt en fa prelence. le conu par ce feul accident
qu'elle eiloit atteinte de rage,laquelle s'augmenta telle-
ment qu'elle ne pouuoit lupportcr qu'on portail en fa
chambre rien de clair pour le regard de fa nourriture, a-,
bommant & tous bruuai^es & tous medicamens liqui-
des. Et d'aucantquela fieure 5y la|ongueurde fa mala-
die ne lui permettQi t de fe pouiioir ailëment mamtenir
par folijp^' alinî>:i,,L!lc deuint extrême ni eut foible, mais
elle languit fcpt iours entiers depuis qu'elle euft ain/ï
commei^vc a'reictter toutbruuagc& nourrirure liqui-
de, I e n c r r o u ij a y e n e 1 le a u rrç c a u fe dt' 4 efa u t , fo r s ce
^cuhiVi de boire Si prendre ce qui elluit clair. Aufti ne
le pin)gnoit-clle de lien, fiiicm quand on le lui prc-
lenroirtlorson la voyoit s'cfmouuc.ir d'cftrange forte.
Kors cela j s'eRojt vncfoit paihbk malade , SiTinterro-
guant,fi iamaiscUc auoit eltc atteinte des dents de quel-
que chien cnragé,farelponfe fut que chien aucun, quel
<ju'ilfurt,ne l'auoit onç touchée, n'en ayant eu chez foi,
ni elle en compagnie où il yen euft. Sa inere enquife
par moi,fi iamais chien n'auoit touché fa fille en quel-
<]ue temps & aagp que ce fuft 4e fa vie , m'afferma que
non, Cela me fît douter, fi vneperfonncpouuoit point
<des principes internes , & de fa propre corruption deue-
nir cnragcc. Car ii'aya^t en cçfle maladie ci coniedure
^UCUllQ
C^ mémorables, ^43
aucune de contagion de dehors, ^cefte h^-drophobie,
ou peur de bruuage& dechofesliquides , n'ellant point
coniointeaueclesaccidensqui oncacouitumé d'acom-
pagncr ceux qui font mords par les belles enragées :ie
me penfay que ce mal procedoit d'vne cauie interne,qui
ne fut pas (î violence, n'ayant efté communiquée du de-
hors par vne befte enragée : iî nous ne voulons dire que
fa violence fut rabatue par les contrepoifons donnez
cnlacurc de la fieurc peflilente, Scàcaufe d'vne eui-
dente& notable euacuation des mauuaifes humeurs en
la dylfcnterie. Outre celle expérience , i'eftois confer-
mëparrauthorité de Cœlius Aurelianus^efcriuant que
quelques fois vneperfonne dénient enragée fans caufe
manifefle: & par Thiftoire que raconte Soranus, difant
auoir veu vn enfant lequel auoit horreur àcs mammei-
les de fa nourriflc , fans aucune contagion précèdent*,
P» Sulitti au liu, JJe affccitiH^ partimlaribui.
Il aumtran 1573.au mois de Scptembre^quc Gabriel
Nouarc homme aagé de cinquante ans , & vefue, de-
meurant fur les terres du Duc de ATantouè , en difnant
(cncit le ne fçay quoy qui lui racloit le golier. Il com-
mence à prendre fon verre pour oiler ce mal : ma^»
il lui futimpcfl'ible, quoy qu'il fift, dV.ualer ce qui eftoit
dedans. Defpite contre foy mefme il coutt à vne feilie
pleine d'eau pour boire auec la main: mais l'appio ch ant
de fa bouche il tombe à la renueiic : il le relcue prom-
ptement,&s'en va,& n e loup c point ce iour là. Le len-
demain, tant au diincr qu'au (biiper, il foudVe le inef^
me accident. Au troinefmc iour il vient à moi à cheual;
en chemin il mange à fon aiic force railins. Ayant en-
tendu delui tout ce que deiTui» , pour conoiftrc exade-
ment le mal , ie lui porte d la bouche vne , deux»
trois diuerlcs fois vn verre plein d'eau , i'appelle de mes
amis à ce fpeftacle : à chafque fois le cœur lui
bat & fouleue , il tremble , il défaut , &rcntcom»
me vn eftranglement. Sitoftque ie tire le verre arric-
re,il reprend les cfprits, entend &difcourt, fe inonftrc
vigoureux , n'a point de fieure,eft fans douleur , toutes
fci fuaâioiis fottt entières , excepté qu'il ne peut boite,
Y 4
344 H'tjloires admirables
le lui prcfcri des coiurcpoifons. Dedans trois tours i{
meurt. le ccrchciefondcjieconfîdere tout:& ne trouue
nulle caufc euidcntc de ceft accident. Alarccltm Uona-
titi ,m premier clh:ffitr2 duô.lmrc des hijloires admirabUseh
médecine.
L'an T57/;. au mois de May^îa femme de Blaife deVold,
hommcc Magde!ainc,r.;ntit vn iour douleur au col, puis
au bias droit. Le lendemain elle b'alitte, fbn bras oultie
la doiulcur ayant commencé à trembler. Cofte douleur
ceila au troiilerme iour , mais il lui furuint vn tremble-
ment par ton: le corps , puis après appétit de vomir
fansaucun cfi-'ct, cllcfue, iJ: fe fcnt comme' eftouftce.
QjMnd on lui prefenroit du \in, de l'eau, cpclqucs cou-
lis, àcs conuulfion^; & pafmoifons lui furuenoycnt : elle
mangcoitbien des œufs &: du pain. Son altération eûoit
grande, les faculté? principales entières en elle, &Ics
fens exterieuisaufiT: Son efprit doux , & fa parole paifî-
ble. On cuil dit qu'elle n'auoic fieure quelconque. Le
Chirurgien du lieu fit plufîejrs rcuuliîons. ÎS'eant-
moins elle mourut ûu ciuquieline iour, la.viefmc.
Au mois deFcuiier, ra'M57v Dominique Pancauld,
ieune fille dcfeizc ans , ayant', eu quelques xnsit vou-
lans entrebattre auec les eîpecs trairtes, en fut eOra-
yee , & la nui^t fe l'enrit faif^c dVne grolfc fieure : tout
ùrinlhnt lui vindrcnt des pullules autour des leures.
Dou7.c heiiies après l'accès elle deuint toute eflonnee:
& !2. autres j-i cures après, il lui fcmbla que la (îcure le
paifoit.ïlle felcucpercliife <Xu bras c;auchc. Quand on
le lui touchoit , elle l'entoit douleur au coilé côme fî on
le lui cuO: perce à\-n coup dcpoirnard iufques au cœur,
tellement qu'elle defailloit. On n'oublie rien pour la
foulager. Au quarriefme iour vn friffon la contraint
de fe mettre au Ikl, fa douleur croift, furuientvn ap-
pétit de vomir , ellefe tourne detou»; coftez fans arrell:,
cfcume par la bouche , ne peut fupporter la clairté,
pleure,crie à gorge defployee, s'efl^raye, repouile &: chaf.
fe tous ceux delà maifon. On lui prefente à boire,
elle rire la tefte en arriere,a horreur du bruuage, tombe
cnpafmoifon, par incerualics elle parle de lens rafifs:
puisaprcs
cf mémorables. 345
piiL«. après cllecommcncca craqueter des dent?, fe tron-
çonne Li langue, 8c rend lefprit au commencement du
J.iouv. Urnefme.
L*an 1^76. au mois de luin, Dominique Beretjpayfan,
m.irié , homme robufte , aagé de trente fept ans , fcntit,
huiâiouvs duran:,d©uleuren Tes bras, fans fcauoir d'où
ce mal procedoit,S: ne cefla de trauailler , n'ayant point
de fieurc. Vniour après, qui eftoit le ncufiermc, voulant
prendre \ n potage à Ton fouper , vn frilTon rempoigne,
au moyen dequoy il fe met au lid fans fouper. Sur la
m!nui(ft vnc frayeur le faifit, tellement qu'il ne peutfe
contenir, ainsellonné &treflaillant, ils'efcrie, & com-
mence à prier ceux qui lui aiî'irtoyenc de vouloir le te-
nir, comme de fa part il fe tint comme collé à eux. De
grand matin Ton va au ccnfeil vers vn Médecin proche
de l:»,qui lui ordonne de pF€Xidre vne decoftion deici-
chorec fauuage , lacruelle il vomit peu après l'aucir a-
iiaî]ce,aucc quelques grumeaux de fang, ce difoit-oii.
L'cliant venu voir après difné , ie ti:e à parties domefti-
qnesjle Curé du l!C!ij& autres illecafieip.blcz:ic leur d:,
vous verrez a cefte heure chofes efiranges : c'^ft que ce
patient ne boira point , quoy que l'on len prellè^ & s'il
s'efTayc de le faire , il tombera en pafmoifon , & mourra
bien coft. O n apporte vn vecrc , & lui prefcnte-on à boi-
re : ce qu'il refufe a ucc horreur, &icvoulanr contiain-
dve,le cœur lui faut ; dont tous furent merueilleufcjnenc
cftonncz.-cncorcs plus qurind ils le virent quatre heures
après rendant l'efprit, a^-iresauoir cfté agité d'vn ticm-
blementinefgal Scinc-anfiât^, auoircrié fuisccfîeà plei-
ne tcftceftéen inquiétude continucUe, fuantpar tout à
groflcs gouttes, fors es extrémité?, qui eftoyent froides:
au reftc en refuerie & manie eftrange , acompagnec de
fantolmcs diabohqucs,comme il difoit. La mefme.
Le g.iourd'Auril l'an 1^75?. lacques Piuc, laboureur,
ieune home marié,fain, robufte, reuenât des châps en fa
maifon,fans aucune caufe manifefteprecedentc,cômen»-
Çafu'- le foirà fucr, & fentir fon cœur comme ferré &
angoiiïe. La nuiiflilfrifonnoit & tremblottoit par in-
tcrualcsjfe icctoic bas de fou iid j ne ccffou de cuck fore
3 4^ H/ flaire s Admirables
hautj&fuoit.Lc Chirurb^icn du lieu lui donna de grand
matin quelque tontrepoifon. Sur le loir citant appelle
pourlc voir,ic conus quec'cftoit vnc maladie aiguc, &
derechef j'auerris ceux qui lui afllftoyent ( dont ils fu-
rent fort eftonnez ) qu'il auroit en horrear toute force
dcbreuuage , & que pour certain il mourroit bien toft.
Ce qui fut incontinent vérifié. Car lui ayant efté pre-
fenté à boire , il commence à fe tourmenter & i s'efua-
nouir. Le breuuai^e cflon^^né, foudain [\ reuint i foi. Il
nepouuoit foufirir qu'on le touchaft, & fi toft qu'on
l'approchoitjc'eftoità crier. On n'ofoit,tant doucement
<5uecefuft,lui efîuyer la face Tuante. La nuid venue, il
voulut faire fon teftameii^, mais les Tueurs &conuuU
fions, qui fe renforçoyent , ÎN^mpefchcrent. Quelques
heures après il mourut de fens taflis. lamefme.
Il y a vne autre forte de rage procédante aufll de cau-
fe externe , à fçauoirdela morfure des bcftes enragees>
^ont nous auons à dire quelque chofe,& produire des
hiftoires, félon noftrcintention:pourdefcouurir déplus
en plus nos mifercs , & nous induire de recourir dcuote-
ment à la mifcricordieufc proteclion de Dieu tout-puiP
fant. Voici ce qu'en dit le doiflcFernel, nommément ,
au regard des chiens enragez qui mordent les hommes, '
le chien enrage en mordant iette quelque faliue ou hu-
meur venimeufe^ laquelle, pénétrât par la partie acrcin-
te, corrompt foudainemcnt les cfprits , le fang , les hu-
meurs: puis (ci^lilfe périr à petit au loing es parties prin-
cipales, mais îî lentement, que le mal ne le defcouurc
au piuftoil que trois femaines, quelquesfois tant feu-
lement au bouc de l'an , encores obfcuremeiit. Durant
cefte intcrualle de temps le patient ne lent fieure,ni au-
tre douleur , brief ne fe doute nuUcmétdela mort qu'il
porte en fes entrailles. Mais quand le venin par fuccei-
fîon de temps cft paruenu au cœur, toutes les autres par-
ties nobles font comme chatouillees,le malade dénient
chagrin , ne peut demeurer alTis ni debont, il s'agite &
cîemeine corne vn furieux, s'efgratigne la face, mord les
autres, l'efcume lui fort de la bouche , il regarde de tra-
itcis èc affrcuicmcnt : il Cil prcfl'é de la ficure , cxtreme-
C^ mémorables . 3 47
nient altcré, toutesfois il abhorre tellement les eaux &
toi'tcs autres liqueurs, qu'il aimeroit mieux mourir,quc
de boire,ou d'cftre plongé en quelque riuiere.Cesmaux
là finalement Taccablent & lui oftent la vie. ^A** ^dittre
de t_y4l>ditts rerum caufis ch.rp.ï^.
Ce venin là eit chaud extrêmement & au quatriefme
degré, comme l'expérience en fait foi : car ayant fait vrp
iour ouurir Iccorps de certain perfonnage , mort de tel
accidenr,on y defcouurir trois chofes remarquables. Pre-
mièrement il n'y anoitau péricarde humidité quelcon-
que pour rcfraifchir le cœur : ains elle au oirefté toute
confumee par ce venin ardant. Secondement les ventri-
cules du cœur parauât fecs & du tout delHtuez de fang.
Ticrcem.ent on remarqua quVnc portion du péricarde
çftoit preiqucs bruflee & réduite en poudre, lero^e
Capde-ijache an y.Uu.defaprKticjueich^p.lz.
l'ay vcu vn ieune enfant lequel ne fe fentit àc ce mal
quehuiâ: mois après la morfure^maisaufli toft quecela
fe defco^iurit l'enfant mourut. FYacAftor auz.liuJeim.jLi-
dies coi.'tayietifeSych'.ip.^O.
Qiiclquesfois la morfureeft (î afpre & violente, ioint
rapprchen/îondesperfonnes oftenfees-que dans peu de
ioursla mort furuicnt.Cômei'ay veuenplulieurs,nom-
mément en vn rnonnoyeur nommé Martin Butin, & en
vn maiftre d'cfcole nommé Robert. Vn iour d'hyuer,y a
cnuiron xo.ans,allansdc grand matin de leurs mairons>
l'vn trauaillcr i la nionnoye,rautre,faire dire la leçon X
quelques amfansjils furent i'vn après l'autre aHaillisd'vn
mefme chien enrage qui les mordit , & eurent chafcun
prou peine à s'en dcTpefirer. Le mefme iour ils fe met-
tent au lid-,& peu de temps après moururent de fens rai-
fi^,ayans eu plufieurs fafcheux & pitoyables mterualles.
L'vn eftoit mon voifîn,& ie le viiitois fouuent. Il prc-
noit plaifir à ouyr parlçr de fon falut , & mourut Chre-
iliéncmentjCommeaufTi fit l'autrç.Mais ce mien voifin à
mon entrée s'efcrioit qpe ic ne m'approchaflc point de
lui, fi ic ne vouIgis qu'il me mordift.Vne fois, n'y péfanc
pas.pourlacôpaflGon quei'auoisde Ton tourmét,carila-
bayoït de fois à autre CQmç vn çhiê;iç m'approchai plus
54^ Hijioircs aamirahles
jrciiquc dccoulliime. Il le lance de viitciTc contre moi
pour ni'empoigncr le bras auec les déts:c:qui n'eut au-
cun cftc(^,à caulc que fon mouuemen't ne fut fi foudain
c]ue le mien. Il conut promptement fa faute, m'en de-
mandant pardon, & s'cxcufant fur la véhémence de fon
nialAutanr de fois que ie pcnfe à ce que i'ay veu en la
maladie de ces deux bons pcrfonnages , autant de fois
m'auicnt de frifonner en mon amc, & de m'efcrier ,
IJhÎ dans Lipdclc cachette .
Dit ti-ef-huut je 'va tapijfint,
Jl i'efi imf en fènrc re truite
D(j]o!iS l'ombre du tout-pn.iJfant.
0> doue ai* Seivueur ie -veux dire,
1 » es mu force ^ mon remf)art.
Aloii. Dieit^t'ejl It toi que la^irs»
A /on cœirr n a. refu'^e a:*trepart:
Et ce qujs'cnfuitau Plcaume^i.n'cnrcndanrpour cela
condamner ceux que la lagcfle de Dieu mile & miferi-
cordicux veut ainii vifitcr en ce monde. Cardequel-
ciucs verges & ballons qu'il vue:lle frapper ceux qui a-
parcienncnt à fon fils , fa grâce éternelle ne leur défaut
pomt.-ains ils entrent par toutes portes,Laat Ibyent-cllcs
iîidcufes au ferts humain , dedans ie palais de vie bien-
•neurcLife & de eloirc afl'eurcc. Extrait de mes mémoires.
le fus appelle Tan 1545. vniourde grand matin pour
aller voir vngcntil-homme nommé Alexandre Braf que:
auec quelques autres Médecins. XI ne vouloit boire en
forte que ce fu{l,& comme on s'enqueroit de la caufe de
fa maladie , ceux qui lui afl^iftoycnt confefee-ftt qu'il a-
uoitbaifë vn certain chien qu'il aimoit fort, auant que
renuoyereftouftcr dedans l'eau ou autrement, pource
qu'il elloit enragé. Il mourut le lendemain comme ic
l'auois prcdn.Curdanufi traiCfé <)Mti.z.coittradici.9'
Vn payfan deuenu enragé, & entendant qu'il n'auoit
plus gueres à viuife au monde, pria auec grande inftance
ceux qui le pcnfoyent & tenoyent eftroittemcnt lié(cai:
il auoit des interuallcs paifibles, durant lefqucls il parloit
dcfens rafris)qui lui fut permis de baifer vnc fois fcs
enfanspourlc dernier adieu. Cela lui ayant eftë ac-
cordé
cf mémorables.^ 349
corclcilbaifc Tes enfansy & toft après rend l'efprit. Mais
au 7.iour fuiuant,les eiifans deuienent enragez, & après
diuers tourmens meurent comme leur père. Aï, Paitmier
enfon traité des maladies conta^ieujesj pag. i66. l'ay veu en-
cores d'auantagc, des cheuaux, des bœufs, des brebis, &
autre forte de beftail dcucnir & mourir enrage?, pour a-
uoir mangé tant foit peu de paille fur laquelle auoyent
couche des pourceaux enragei'. '^' ^h mefine traité pa-
ge zôy.
Adam Schneidtlin, ChiYurgicn,m'a affermé pour cho-
Te certaine , qu'il y a trente ans qu'à Haffuclfelen Ba-
ujere, vncheuahcr voulant monter a cheuaUut raords
au pied par vn chien enrage , dont il ne fit cas ; mais vn
an & demi après, ilcom.mença a deuenir furieux & en-
rage : tellement qu'il mordoit les bras à belles dents, &
ne fur malade euidemment eue deux iours, J.Banhin
Docltur Alcdecin a Bajh ^^enfa doiie Ivjîoire des loups e7iTage\^
coitrans antoHr de AlomLelliardj l'an ' 5 90.
L'an 15 5^ vn certain hoRe en la Duché de Vvirtem-
berg,feruit lur table à fes hollcs de la cl'iaii de pourceau»
qu'vn chien enragé auoit mordu. Eux après aucir tafté
de celle chair deuindrent enragez, uiji. d'^^y^lema^ne.
Quelques chafTeurs ayans attrapé &. tué vn loup , fi-
rent des diuers aprefts de fa chan-. Mais tous ceux qui
en mangèrent deuindrent enragez , & moururent mile-
rablement. TerneLtii z\ De t^bditis rerum c,uifis-,chap.l^,
Tay remarqué que la morfure des loups enragez fait
mourir incontinent les beftes atteintes de leurs dents.
Ai. ^auinieren fon tr ai fié des maladies contagieufes. l-'lufieurs
ont remarqué , que des loups non enragez , ne laiUcnc
pourtant à caufe de leur fureur & imp.etuofîté ordinai-
re , tefmoignee parTeftincellante clairté de leurs yeux,
Scieur gloutonnie infariable , détendre fort dange-
rtufe la chair des beftes qu'ils touchent ou cllranglent,
fi on la garde tant foit peu. Vnillullrc Prince m'a iuré
qu'vn de fes pages ayant trouué chez certain gentil-ho-
me vne efpee cachée fous vn liifl, dont quelques années
auparauantl'on au oit "occis vn chien enragé , pria qu'on
la lui donnaft. Quoy fait comme il vouloir nettoyer &
550 Hijloir es admirables
^olir cède cfpcc ci.rouillee en diuers endroits, par mcH.
garde il s'en blefîa légèrement a l'vn des doigts , dont il
Jcmnt enragé, & mourut fans que l'on eult preucu ni
[preuenu fon mal. Ey^/e MtUhfner médecin 3 enfes obferua-
On a veu en Portugal vn homme mords par rn chien
enrage, qui couua fa rage trois ans, au bout dcfqucls il
parut & mounit.^_y4!nAtns inedecm Portu^dn en fa 7. centurie,
cure 41.
Balde,renommé lurifconfulte , fc iouanr auec vn /icn
petit chien, quieiloiccnragc,ne fâchant qu'il fuit tel, en
fut légèrement mordu en laleure, dont il ne tint autre-
ment conte. Mais au bout de quatre mois il mourut fu-
rieux6c enragé, & n'y eut remède quipeuft lefauucr,
pour ne l'auoir prins d'heure. M. .^mhroijc Paré ait -uing-
ticfmc liure chapitre vin'^t-vmefme. En CC mefme endroit il
propofe diuers remeaes contre la morfure du chien en-
ragéjlefqucls il cftime valables, moyennant qu'on vfc
promptement de l'vn d'iceux,& dit auoir gucri plufieurs
perfonnes atteintes de telles morfures. Entreautres il
ipecifie l'exemple fuiuant.L'vne des filles de madamoi-
iélle Grom, natiue de Paris , fut mordue d'vn chien en-
ragé au milieu de la ïambe dextre, ou le chien imprima
Tes dents bien profondement en- la chair: laquelle fut
gucrie.Entietousrcmcdcs le thcriaque (dit-il) eft fin-
gulier^lefaifant difloudre en eau de vie , ou en vin , en
frottant aflez rudement la playe, tant qu'elle faignc.
Puis faut lai (Ter dedans du charpi imbu en iccllc mix-
tion: & par defl us la playe appliquer deux aulx ou oi-
gnons pilez auec miel commun & térébenthine. Tel rc-
mcdeeft excellent par deflus tous ceux que i'ay veus
par expérience. Et l'en vray(dit-il) enlaguerifondc la
fille rufnommee.
K/indré BOccidf en fi préface fur te tittre des -venins ^ con^
trepoifons, dcfcrit Pcpitaphe û'vnc femme Romaine , la-
quclr*
w
ér mémorables. ^<^t
«jucllc mourut enragée, pour n'auoir remédie? prompte-
ment à la playe de l'on doigt mordu par vn chat qu'elle
tiroit par la queue. FuJ^ allertol. en [on comment.fttr le liurc
d'iitppocrat. de artu mcâic£ conjlùtttione, ch,io. fau mention
d\n /îen mulet enragé. ^ M citthiol fur le ^é.chuJh 6Mtt,
de Diofcond. dit auoir veu vn chenal enrage,lequei ayant
rompu tout ce qui le retenoit, courut d'imperuofîte par
certain endroit, oii trouuant vne panure vieille il lem-
poigna auec les dents par fa coifture, & la porta plus de
dix pas , lufpendue en Taitjfans lui fafre playe. En ce
meime chapitre il remarque l'hiftoire de Balde lurifcon-
fultc, rut-mentionnec.
Vn marchant Portugais & quatre fîeiis do melliques
furent blefTcz en vn mefme iour des dents & grifcs d'vn
chat enragé, dont leur furuindrcnt de terribles 6c pitoy-
able^ accidents, finalement la niorr. ,,yirihitu{ Purtugatfp
centur.T .cur. 6^.
Ces années pafTces vn lardinier Italien fut aSsilli fans
y penfcr par vn vieil coq qui lui apartenoit, ayaiitie bec
poinclu , Les plumes rougeaftïcs , qui le picqua Ci rude-
ment en la main gauche qu'il en fortit quelques goures
de liing. Le mefme louu ic fus appelle poiir le voir , &,io
trouuay défia tordantla bouche , & n'y eut remède de
fcarificationsjincifions, cautères, ni d'applications par
dedans ni par dehors qui feruit: tout levoifînage efton-
né vidcepauurehommeauli6tayantle vifagerouge,&
les yeux ellincellans & enflammez cô«ïme ceux d'vn
coq cfchaufte au combat,tellement qu'au troifîermeiour
de fa bleflTure ce patient mourut.Cela me fit penlcr que
ie Bafihctant renommé entre les ancieus,eft noftre coq.
qui me donna occafion & à plufieurs autres d'y faire dî-
ners epigiammes , dont le fens eil compris en ces deux
vers:
Dum fwit lu dominum gallus , peremitqne veneno
Commorfum, ervo a,Um non bajiitfcus ern.
C'cftce que remarque ^yindré HAccim en la préface de fon
Uure des iienins (^ contrepoifons.
Il adumt à vn ieune homme Italien d'cftre mordu
par vn chien enrajjéjdôtilnc tint contc:mai$ au bouc de.
3)1 Hifioirâs admirables
«quatre mois il commence à s'eftonncrA fe donnerpeuf
incroyable de la viande & de tout brcuuagc,cjuoy cju'au
reftcil culirelprurairis, tellement qu'au bout de quel-
ques iours il mourutdefaim & de foif. Kidiui en U z.pai^
tie djfa mcd> duc. Secl.z.ch^^p.ô.
11 y 2 des rtfmoins dignes de foy & en grand nombre>
qui artcllct auoir v eu es vvincs des hommes mordus par
des chiens c nrartz des rcprelentations de chiens , & des
lopins ccinme de chair de chien, ihonjo^s de f^etgtt ancour
wciH:. f"r L' ^^,ch.xi)Je art.med. G al. Alatthtoljlir le 6. li». de
Viofcoiidey ih.:f>.^6. clciit ces mots : Auicenne dit qu'il
aduientqiiclcjutsfois que ceux qui l'ont mordus (I'mî
chien enrage rendent auec Tyrine c,uci<]Ucsmorccai!X
de chc:ir:,noii fans grade douIeur,qui rcircmblencquaiîà
des pecis chiens: ce que i'aïaufh. ouy dire à aucuns mo-
dernes , mclmcsa ceux qui difoyent auoirpifle de ces ^
petis chiens. Ce'qui n'eft vray-lcmbiablc , Se toutcstois
qui voudra fcauoir les raifons & tclrnoignages veriHans
Cela, qu'il liie Gentihs commentateur d'Auicenne, 8c
Pierre d'Apone, dinerence 179. Delà il entendis com-
ment quel(]UCsfois telles chofcsauienentcontrerinteii-
tion de nature. Le merme auteur dirnuoir vcu vn Cicn '
voifin ouuricr delaines,qui ayant eftégarcnti delamor-
fured'vn chien enragé, pourauoir battu la laine auec
des veiges de l'arbre nommé Sorbier, deuint enragé &
mourut. Cci\ arbre a quelque fympathie en Ton bois a- ;
uec la rage, par îe rapport de plulîeurs médecins. IJ nous i
relie pluficurs autres liiiloires de gens affligez de ce ,
lleau eftrangc , Se des accidcrîs merueiUcux de leurs ma- ,
Radies , que nous releruerons à vn autre \olumc,cepi- ^
toyable chapitre des nutcrcs humaines ncîlant délia',
que trop long,&: par confcquent ennuyeux au ledeur. 1
MEMOIRE excellente,
A4 A î s T R L Théodore Zuinger au i. Uu. dm. 'vclwne -
'1 à<:\on ^iAnd thcutnde U u:e hHma:ne , 'a recueilli les
noms .
/ (^ memùrahleS» 3y)
ilioms, dcplufîeiirs perfon nages du vieux temps & d j
nollre qi ont eu excellente inemoir^ .
/ Entreiutrcs n'eiT: à oublier vn certain jeune efcholitfr
natif dd'Ifle de Corfc , letjucl rediioii pioiuptcment:
^ufijucsà trente fix mille mors de toutes fortes difFcren-
tes,& d- diuers langages, & affaires, entrcmefiezÔ: con-
fondussftrangement, incontinent ou quelque temps a-
prcslesauoir ouy prononcer, & les difoit auffi aifcment
àreboïîs, & à les prendre par le milieu, comme parlé
commencement, làns broncher ni deuiner , d'vn vifage
alaigre,6c auHi peu cfmeu que s'il les cutleus dedans wx
liure.Il difoit i'auoir apris d'vn François fon preccpreur>
&;enpcu deioursfit comprendre fa fciencc à Francit-
quedu Moulin genril-homrac Vénitien, lequelpar^
uantauoitla plusfoibleSi pauurc mémoire qu'il elloic
poillble de trouucr.
L'auteurdeU-viedeChriftoflcde Longueil cloquent per-
fonnage de noPtre temps, raconte qu'il au oit la memoi"
re fi ample & ferme , que le temps n*cn pouuoit effa-
cer ce qu'il auoitleu & ouy. Quand on l'inrerroguoit
(& fouuent) de pluiicurs &: diucrfès chofcs , dont il n'a-»
uoit rien Icu (\qs longues années auparauant , ilrei-
pondoit fur pied de chacune , ne plus ne moins que iî
tout à l'heure il en cuft Icu les mots & fcntences dedans
vn liure. _ Si quelquefois on parloir de mcfmes chcfes,
mais traitées par diuers autcuis,ii en parioit nettement,
mais en telle forte qu'il propoibit dilb'ncicmcnt & mot
à mot tout ce que les autheurs grecs, latins, philofo-
phes, orateurs, poètes, hiftoriens, rhaphodes en difcnt^
fansequiuoqucr, cottanc les liures, traitez, chapitres, fe-
rions de chacun , au grand esbaiiiffement de tous Ceux
quil'cfcoutoyent.
Subdlic Alt loAiu. de fa exemplei , chap.ç. fait mention
d'vn Antoine de Kiuenne , qui approchoitdc l*adreffc
du Corfefufmentionné. Cufpir.ian dit que l'Empcreux
Maximilian premier auoit Ci bône memoire,que fi quel-
qu'vn auoit vne fois parlé à lui, au bout de pluficari; an-'
«ces le voyant il le rcconoiffoit, ramentcuant Ici chofet
^ui lui auoycnt clU dites par celui-Ia. leao Francifquc
Z
354 HiHoires Admirables
récite de fon oncle lean Picus prince de la A^ânrfoîei
que s'il oyoit prononcer grand nombre de vet , fans
autre répétition il les rcdifoit à droit ou à reboik , ainfi
quelon vouloit. \
Il y a auiourd'huy plufieur-s doftes perfonnageulico-
logicns, Médecins, lurifconfultes, Philofophes, Vlathe-
maticiens, Profeiî'eurs en éloquence, & es fciencts libé-
rales & humaines, queie pourroy nommer énigrand
nombrcqui n'ignorent prelque rien de ce qui eAen lu-
micre.Qui parlent de toutes chofes aufTi promptennent,
& enfuiuant les autheurs ancicns,qu*on diroit qu'Us ont
infinis liures ouuerts deuât les yeux. A qui Ton ncpeut
rien dire ni alléguer qui leur foit nouucau. l'en conoy
vn,que ie ne nomme point, pour grandes cofîderations:
lequel outre Tadmirable conoifTance qu*il a des lâgages
diuersdu monde,&desrcienccs,rerouuientdc moindres
chofes qu'il aitveues en fa vie en diuers paysjiufques aux
noms des perfonnes viles , de bourgades , de villages &
hameaux , marquant les circonftances d'infinies chofes:
tellement que fi on le met en difcours d'vne ville , où il
n'ait efté depuis 15. ou 30, ans, il parlera de toutes les
particularitez d'icelle plusexadcment qu'vnquiyau-
roit demeuré ^o.ansfans en bouger, & qui ne fcroit que
d'en fortir.Ie ne touche point à plu/ieurs autres grandes
& excellentes mémoires en France, Italie,&: aillcurs,mc
contentant de celle la pourle prefent,dont quelque au-
trefois ie diray d'autres remarques admirables.
Mémoire ferdttCy & retromee.
VN Sienois nommé Antoine retournant à conua-
lefccnce d'vne maladie , fctrouua fi court de me-
moîrcqu'il ne fe fouuenoit de rien. Eftant à Florence il
penfoit eftre à Siene , ne fçauoic difcerner fes amis d'a-
uec fes ennemis. Eftant abandonné dcn médecins com-
me infenfé , au bout de trois fcmaines vn flus de ventre
luifuruint, à l'aide dequoi il le purgea d'humeurs e-
Aranges, dont les vapeurs virulentes auoyent donné à
cefte faculté de rame,& au fiege d'icelle. Au moyen de
iaqHelle euacwatiqn l'entca^j^ment & la mémoire lui
içuindrcnc
i^ memorahlesl 5 ^ç
rcuindrcnt en telle forte , qu'il ne fe fouijenoîtnuljb-
ment de ce qui lui eftoit auenu,& qu'il auoic fait durant
ces trois remaines.t^.Be/î/.W;«W au chap./[j.
Tay veu vn coidclier , lequel garanti d'vne Heure ai-
guë & véhémente qui l'auoit tourmété , fe ti-ouua priué
de memoire:tellement que lui qui parauant eftoit grand
Théologien ne conoifloit lors ni A.ni B.ayant efté qua-
tre mois en ceft eftat^il retourne à refcholc , à Texercice
des petits enfans, aprenant à coftoilirc Scaflembler les
letcres.On commença à lui appliquer diuers remèdes. 3l
Taide defquels la mémoire lui reuint comme tout i
coup, tellement qu'il fe monftra docte comme douane
fa maladie. Chrèjhde Fcgue^au l.limede arte msdendi y ch:^^
fitre 10.
Francifque Barbaro,dode ycnitien,oubIîa en fa vicil-
lefl'c la langue grecque en laq^ieUe il citoit rrerdo<5î:e:
combien au rcfte qu'il euft le lugement bon , & Terpric
prompt à efcrire & diùcr. Baj^iau. l antw-,at*i'Uure de l'hi,^
Jielre de Chomme» 1 1 mefine ayant à faire vne harangue
deuantIcDuc de Milan, demeura «ourt ayant oublié
ce qu'il auoit entrepris de dirc/J^/^^e/^e f^olterre aniu
littre de fon antlyropolot^ie. George Trapezonce, trei-do-
<fte Grec deuenu vieil oublia tout ce qu'il auoit fce'u.
l a mefme.
Monfieur Rondelet do<fte médecin de noftre temps
racontoit qu'vn ieunc homme eftudiantà Montpellier
allant de nuift par les rues rencontra des batcursdepa-i
iié,qui lui tirèrent v ne tref-dangereiife eftocade au corps
& lui oftcnferent grandement l'vn àcs yeux.Par la dili-
gence des médecins & chirurgiens il fut garanti: mais
tne oubliancc des arts/ciences , & particulièrement de
la faculté de médecine, en laquelle il eftoit fort aucncé>
lui furuint, qu'il ne fefouuenoit de chofc quclcohque>
tellement qu'il falut le traiter comme vn enfant de fepc
ans, & le remettre à l'abc. Thomas loutdMi, au i.ch.di* i.
i'aité des apparences de îupejlc,
l'ay conu vn homme d'aagè en Frarice,lequel pàrloit
bon François & Latin , iouoit excellemment de la flu-;
P^f fort adroit i x,o\is les ÇXf rejçes du corps , 8c qui ma^
55^ Hijiûires admirahles
oioîtbîen les armes , par maladie deucnir tellement pri-
ué de toutes ccsjchofcs, qu'il n'en fçauoitpas mefmcs
lesnoms.nin'auoit adrelFc quelconque autour d'icel-
les,non pins qu'vn petit cnfant,& falut le uaitter ainfi,
€c le remettre à aprendre,comme ne fâchant rien. r.04-
mian.au l^.ch.defa Théorie de médecine.
Gonfaluc Gilles de Bourges , dode Théologien Ef-
pagnol, eut defon temps Tv-ne des plus belles mémoi-
res du monde, laquelle neantmoinc il perdit entière-
ment par vne griefue maladie , qui le faifît à Ton retoui
<Ie Pans en LCpa^ne.^Utar.Gomel^z.aH 4. linre de thijhr
re dM Cardinal xiiiîrenes.
Certain perfonnage rudcmcntblefle à la tcftc,& guei i
à peine au bout de trois mois,pcrdit la mémoire de tout
ce qui lui efloitauenu.F^me/ an i.li. de [a Pa(holo^ie,ch.';.
MER E fertile in ligme ijj'ue d'elle,
NOvs voyons dans la ville de Paris, au cœ mi ci ère
de Sainâ: Innocent. vn epitaphe d'Yolant le Bail-
ly , vcfue de*maiftre Denis Capeî procureur au Chaftc-
Ictjportant qu'elle auoit velcu quatre vingt<i huidnns,
auoit peu voir deux cens quatre vingts hui<f^ liens en-
fans:& trcfpafla le ly.iour d'Auril 1^14. Imagine?, com-
bien elle euft elle empefchce s'il luieuft conuenuap-
pcllcrd'vn vrai mot ceux qui eftoyent dillans d'elle en
la quatre ou cinquiefme génération & lignée. E.Pafqitier
au 6, lime des Recerches de U Pranceycha^.^6.
Père fertile.
De la mémoire de nos pères on a vcu en Efpagnc vn
village d'cnuironcent maifons , donttous les habitans
eftoyentifTusd'vn certain vieillard, leuu cl viuoit, lefdi-
âes maifons ainfi fournies: tellement que le nom de
proximité (en montans & dcfcendans, tant en ligne di-
redc que collatérale) defaïUoic.pour de/îgner &diftin-
^uer comment les pluspetis enfans deuoyent l'appel-
iCT.i. frittes enfin eommtnt aire fur k ^.çhaji, att IJ. ln*r^ de la
Citfdç Phh»
cf memorMes. 357
K^iitre werej'voyantfes defcendani tuf-
quci an 6 , derré»
T>c noftre temps on a veu en la noble famille des Dal-
bourgs, vue dame laquelle vi4 de fa race iufques au fi-
xiefme degré. Les Alemans en ont fait vn quatrain ren-
du en ce diftique Latin ainfi. i. Mater ait i. NatXjDic 3*
IS^aufîliai/^.Natam,
y t rnmtat^^^N at£ pUu^erç é.Viliolam»
c'eft à dire.
L .1 mère dit 4 fa fille, Ma fille 3 di a ta fille quelle auertijfe fii
fille ^que la fille defafillepUurt»
Cela eft recité & defcritpar Ai. Théodore Zumger. Mede»
cin 4 Btijleyatt 3. 'vol.de fon théâtre de la -vie httmaineJLii**lU
Aleres njiçrpitreufes.
VNe femme ayant eu vomiflcment defangrefpace
de fept mois-entiers & continuels , ne laifia de con-
ccuoirSc enfanter vn tref-beau fils & vigoureux. Certai-
ne autre enceinte auoit fcs flueurs reiglees, & en plus
grande quantité que deuant fa grofl'elTe.Elles continuè-
rent lufqucs à fon acouchcment, & ne rempefchcrent
d'auoir heurcufe deliurance. Item : i'ai veu vne autre
près Greucmbrouch, qui proche de renfantement,eut
Tes mcnftrues en quantité du tout extraordinaire, dVw
faiig caillc,& à gros grumeaux : neantmoins elle efchap-
pa auec fon ïmiù..R,Sokmundtr ait<^.liuïe defesconfi:ils,ch,u
^.art.s6.sS.S9.
Mères ^ enfans preferuez, de mort.
L'An ij^4. cnuiron dix ou douze i»urs après Paf-
ques, comme plufieurspcrfonncs de la ville d'Aft
nauerfaflcnt en vn ballcau la riuicrc picfonde & large
qui pafleaulong de la villc,lcballeauellantau milieu
de la riuiere , il commence à pancher & va en fond :tcl-
lement que tous les baftcUers&paflagers dcm curèrent
cnfcuelis dedans les vagues & furent noyc/.. Il y auoic
en la troupe vne pauure femme,bquclle s'cftoit mife au
baiteau pour aller cueillir du bois , & ainii fubucnir à
la difette de foi & de deux fiens petits cnfans , l*vn deT-
quels elle tengic de fa main gauche à fa mammeUcai
Z 1^
35^ Hifloires admirables
l'autre delà main droi<flc , aagé de trois ans.Ellc fut ^où
tee fur l'eau, faine & fauue aucc fts deux enfans; au ^iu^
gCjfans aide quelconque de fcsbrascinperchez ailleurs,
& tous les autres du balleau perirent,tors CCS trois. HUe
ayant plus de foin de fcs petis que de foi-mefrae,futain-
fî miraculé ufeiuent conrcrueeaueceux.5/wio»A/<ryo/ E-r
uefijHeltalkn^UH I5. Dc«»5 de [es iours caniculaires.
MB S P R I S dedouleur.
' A I^PR^CHANT deBudclcBafianousenucye au
jtTLûcuanî: quelques vns defesdomeftiques auec plu-
sieurs heraux&officiersrmais entre autres vne belle trou-
pe de ieunes hommes à cheual, remarquable à caufe de
la nouueautc de leur équipage. Ils auoyenr la tcfte def-
couuerte &rare,rur laquelle ils auoycnt fait vne lon-
gue taillade fanglantc , & fourre diuerfes plumes d'oi-
fcau dedans la playc, dont ruifleloit le pur lan^ : mais en
lieu d'en faire femblantjLsmarchoyent à face riante &
la tefte leuce. Deuanc moi chemnioyciit quelques pie-
tons , Tvn defqucls auoit les bras nuds 8c fur les colic/,
chafcun defquels bras au diefTus du couldc cftoirpercé
d'outre en outre d\n couiteau qui y eiloit. Vn autre e-
iloitdefcouuert depuis la tefte lufqucsau nombril, a-
yantla peau des reins tellement dcfcouppec haut&; bas
en deux endroits, qu'a traucrs il auoit fait palier vne
inafle d'armes qu'il portoit comme nous fcri(.>iis vn cou-
fcelas en efcharpc. l'en vis vn autre.lequel auoit fiché
"fdr le fommet de fa teik* vn fer de cheual auec plufieurs
cloux,& de fi long temps que les doux s'ciloycnt telle-
ment prins & attachez à L chair, qu'ils ne bougcoyent
plus. Nous entrafmes en celle pompe dansBuoe , & fuf-
mes menez au logis duBalTa , aucc lequel ie traitai de
jncs afaircs. Toute celte icunefle peu foùcicufe de bief,
fciares eftoit dedans labafle cour du logis : & comme ie
m'amufois à les regarder, le Bafla m'enquit & demanda
ce qui m'en fembloit ? Tout bien,fis-ie: excepté que ces
gens-lifont delapeau dclcurs corps ce queienevou-
'drois pas faire de ma r*bc,car l'c/îayeray delà garder
j^nritrc. Le jBaiu ic puiit a rire, ^ notis donna coi-»gq
^ mémorables. 3j9
l efieur de B usheqtte au dtjcours defon^yîmbajjade en T (tr<^hie ,
MEFRTRIERS defcouuerts par
notables moyens^ ô* punis,
MAisTREEmeryBigot, Aduocatdu Royau Par-
lement de Rouan, m'a autresfois conté l'hiftoire
qui s'enfuit: m'ayant dit ies noms Scfurnornsdesperron-
nes,quc l'ai oubliez,me fouuenant feulement de la fub-
llance du fait. Il y auoit vn marchant Lucquois qui s'e-
ftoit habitué des longtemps en Anglcterrc,auquel ayant
prins enuie d'aller mourir auec fes parens , il les pria par
lettres de lui aprefter vne maifon, fc délibérant de les al-
ler voir dedâs fîx mois pour le plus tard,&: finir auec eux
fes iours. Vers ce mefme temps il part d'AngIeterre,fuiui
d'vn ficn feruiteur François , auec tous fes papiers & o-
bligationv , & defcend en la ville de Rouan , où après a-
uoir tait quelque feiour, il prend la route de Paris: mais
côme il etl fur la montagne près d'Argentueil, il eft tué
par fon valet , fauorifé de la pluye & du <ni;îuuais temps
quilorseftoit, & le corps ictté dedans les vignes. Com-
me cela fe faifoit palfe par Li vn aueugle, conduit de foa
chien, lequelayant entendu vne voix quife dueilloit,
demanda que c'cftoir li ? à quoi le meurtrier xefpond,
quec'eftoit vn malade : qui aloit à fes afaires. L'aueu-
gle pafie outre, & le valet chargé à.Q.% deniers & papiers
de fon maillre fe fit payer dans Paris , comme porteur
des obligations & ccdulcs. On attendit dans Luc-
qucs vn an entier ce marchant, & voyant qu'il nevç-
noit , ondcfpcfcht; homme expies pour en auoir àt^
nouuellcs, lequel entendit dedans Londres le temps de
fon partcment, & qu'il auoit fait voile ;i Rouan. Ou pa- '
reiliemcntluifut ditenl'vnc des hoftelleries, qu'il y
auoit enuiron fix mois qu'vn inavcliât Lucquois y auoic
iogé, &eftoit allé à Paris. Depuis, quelque perqui-
fition qu'il fift, il fe trouuaen défaut , & ne peut a-
uoir vent ni voix de ce qu il cerchoit. Il en fai<fl fa
flaintc àla Co-ur de Parkmct de Rouan , laquelle com*
Z 4
j^o BîfloiresadmtrMes
jnencc d*embrafler ccft afaire , coaimandant au Lieute-
nant criminel d'en faire diligente recerchepar la ville>
& à monfieuv Bigot au dehors.
La première chofe que fit le Licutcnant,fur décom-
mander àrvndefes fergens de s'mformcr par toutelî
villcs'ilv auoit point quelque homme, qui depuis fept
ouhuidmois en la euftleué vnenouuelle boutique.
Le mcurchard ne faut au commaadement,& raporte au
luge qu'il en auoit trouué vn, duquel ayit fceu le nom,
IcLieurenâtfait fuppofcrvne obligatiô par laquelle ce
lîouucau marchand s'obligeoic corps & biens de payer
la fomme de deux cens efcus dans certain tcmp.^ , & en
vertu d'iccîle, commandement lui eftantfait depayer,il
lefpond que l'obligation deuoit eÛrc fauffc , & qu'il ne
fçauoit que c'eftoit. Le fcrgenr prenant ccfte rerponfç
pour refusée conftitue prifonnienSc comme il alloit do
compagnie,ilauint au marchâd de lui dire, qu'il fe fçau-
Toit bien défendre contre ccfle procédure ; mris n'y a-il
çointautre choie ? adiou'fta-il. Le fergerit dreflc Ton ex-
ploiâ:. Se rapporte au Lieutenant cnmincl comme le
tout s^ctloit pâlie. Lequel s'attachant à zos paroles, S'il
n'y auoiL point autre chofe , dcflors commar.da qu'on
iuiamcn.Uileprifonnier, & arriuc deuantlui, il fait «c-
tirer chaican:puis d'vne douce parole lui d:t,qu'jl auc:t
fjitretirer tous les autres, voulant traiter doucement
ceftafaireaueclui. (^'à la vente ill'auoir fait mettre
en prifon fous vne obligation fuppoiee, mais qu'il y i-
uoit bien autre anguille fur roche. Car ilfçauoitpour
certain que le meurtre du Lucquois auQit cité pat lui
comiTiisrque do cclu il en nuoit certaine preuuc , tourcf-
fois dellroir m.înier zq.{x. afaire aucc toute douceur.
Que îe defunft cftoit eiirangerjdcrpourueu de toutfup-
port:partant efloitforc ailé de faire oalTcr toutes chofes
par oubliance, moyennant que le pïilonîiicr vouluft de
Ion coftc s'aider. CeL: fe difoit de telle façon, comme iî
le luge l'euit voulu fonder peur tirer argent delni, à
quoy il n'auoit veine qui tendilL A cefk parolelcpri-
fonnier fo]lic;:c■d^■n co'iié du remords de iàconfciencc;
4'autre çHiman: que i'ar^enr le garaiiaroiC , rcipon-
C^ mémorables, 3 6'i
^itau luge , qu'il voyoït bien <]u'cn ceciil viuoi:de
Toeuure de Dieu , puis que où il n'y auoit autre telmom
que lui cela çfloit venu à conoiflancc, &; que fur h pro-
meflc qui lui èiloit faite, il reconoifticir franchement
ce qui eftoit de la vérité. A ccfteparoîcle luge cdimant
eflrearriué à chef de fon intention, mande quérir le
greffier. Mais cependant le prifonnier voyant qu'il a-
uoit fait vn pas de fot , après que le luge lui eutl fciit \c-
uer la main pour dire la vérité, commence à iouer autre
roolc,& foullenir que foute cefte nrocedurc cftoit plei-
ne de caloniîlie i^ defauil'etc.Le luge aucunement fru-
ftré de fon opinion , rcnuoye le marchand aux priions,
attendant plus ample preuuc. Mais lui après auoir prin*?
langue des autres prifonniers ( qui font maifircscn tels
afaires) appelle de fon emprironnement,& prend à par-
ties tant le fergent que le lieutenant criminel. le vous
laiffe à penfer /i la caufe eftoit fans apparence de raifon.
Il s'infcript en faux contre Tobligation. Il n'y faloit pas
grande preuuc : parce que les parties en eftoyent d'ac-
cord. Et de fait le Ireutenant vint exprès au Parlement,
où il difcourur tout au long comme les chofes s'^^ftoyent
pafTecs. La Cour qui conoifloit la procédure de ccit
nor»icftehomm.e, rufpendit le cours de celle pourfuite
iniques à quelque temps.
Cependant elle donna charge à mon fîcur Bi^^ot, de
s'informer fur tout le chemin de Kouen à Paiis s'il en
pourroit fcauoirnouuelles : ce qu'il fît auec toutes les
diligences à cerequi fes. EnfinpafTant par Argentueil,
le Bailli lui die, que depuis quelques mois on auoic
trouué vn cadauer dans les vignes, mi-mangé des chiens
& corbeaux, dont il auoit fait fon procès verbal, duquel
le lieur Bigot printla copie. Sur ces entrefaites furuint
raucuglcdemandantl'aumofne en rhodcUeiie ou il e-
ftoitlogé, lequel entendant la perplexité en laquelle
ils eftoyent , leur difcourut amplement ce qu'il auoit,
verslemefme temps entendu fur la montagne. Bigot
lui demande , s'il recognoiftroit bien la voix ? l'autre lui
rcfpond, qu'il eftimoie qu'ouy. Sur cela, il le fait mettre
en trouffefui vn cheual,a^ l'oineinc en U ville dcRouan»
Hijlotres admirables 5 6* z
lamaisnait n'juoiccrté plus hardi m luftice que cAui
dulieurensnt criminel, toutesfois grandement fuiet i
calonînic. Celui que ie recit|:rai maintenant ne fera
de moindre eflcd. Le fîeur Bigot eftant de retour, après
auoir rendu compte de facommifTion, on fe délibère
«i'ouirccinueugle, &:cn après le confronter au prifon-
laicr. Lui ùoncjues ayant tout au long difcouru ce qu'il
auoit entendu fur la montagne & ce qu'on luiauoitre-
fpondu.-interrogué s'il reconoiilroit bien la voix^re-
ipond qu'ouV. On le confronte de loin au prifonier,
ù.n% lui faire parler. Apres que l'aueugle fe fut retiré, on
demande a l'autre s'il auoit moiens de propoicr re-
proches contre lui ; Dieu fçait s'il fut lors en beau châp.
Car il rcmonliraque iamaison n'auoit prartiquc tanc
<l*artihces pour calomnier l'innocence d'vn homme de
bien, comme l'on auoit fait contre lui. Que première-
ment le lieutenant criminel en vertu d'vne faufle obli^
gationTanoit fait conftiruer prifonnicr: puis lui auoit
voulu faire acroire tefte 1 tefte qu'il auoit fait vnere-
conoifiance particuHere de ce qui n'eftoit point i&ai»
bout de cela lui reprefentcr maintenant vn aueugle
pour tefmoin , c'eiloit outrepafTer toutes les reigles de
fens commun. •
Nonobftant cela , la Cour voyant qu'il ne difoit aU'
trechoib , on fait parler vnc vingtaine d'homes les vns
après les autres, & à mefure qu'ils fe teurcnr, on demâ-^
^aà l'aueugle s'il reconoilVoit leur voix. Aquoy il fie
leipOfc que ce n'eiloit aucun d'eux. En fin ie prifonniei
iiyâtparléjl'aueugle ditquec'eltoitla voix de celui qui
lui auoit refpondu fur la montagne pies d'Argentueil.
Ce mefme brouillement de voix ayât elle deux & trois
fois réitéré , l'aueugle tomba toufiours furvn mcfme
poinftfans varier. Prenez fcparément toutes les rencô-
tres de ce proceb,vous y en trouuercz. beaucoup qui iôc
pour l'ablolution. Mai$quand vous aurez meurement
confïdcré le contraire, il y a yi»e infinité de circonftau-
tes c|ui vont à la mort:vn nouueau citoyen, qqi auoit
çlieRc nouucllc boutique quelque temps après b dilps-
îicioii d;i LucquQ>S;la preudlioimnic duUçutçuant cvi-
drnu^morables. ' 3^5
fiuncl conuede tous,la depofition par lui faite, afliilee
de celle du Scrgeîitrmais fur tout la miraculeufe de rtn-
côtrc de Taueugle , qui fe trouua tant a la mort du Luc-
quois,que depuis en l'hoftclleric où el}oitBigot:& fina-
lement que fans artifice il auoit reconu la voix du meur-
trier au milieu de plufieurs autres. Toutes ces confide*
rations mifesen la balance, firent condamner ce pauurd
malheureux à eftre roué: & auparauant eftant mis fur le
meftier , il confefla tout à la defcharge de la confciencc
des luges: & fut le mefmeiour exécuté à mort. i^.Pa^
quisr au^.linre des Recerches de la. Francejch.ip.ZQ.
En l'an 1551. la nuid de Noël vn homme afiomina d'vn
marteau près de l'Eglife fainfte Oportune de Paris vne
ieune femme allant à la mefTe de minuift, & lui ofta ces
bagues. Ce marteau auoit efté defrobé le mefme foir à
ynpauurc marefchal voi/in , lequel pour cefte caufe
foupçonné d'auoirfait ce meurtre , fut tref-rudement
traiâé par la iuftice. Car,pour en tirer quelque preuue,
on Texpoia à vne torture extraordinaire pour Icsprc-
fomtions violentes qui couroycnt encontre lui. De ma-
nière qu'on le rendit eftropié, lui ollât le moyen de gai-
gner f.i. vie,& mourut ainfi mirerablc,apresauoirci"le re-
auit.à vne grande pauureté.O a demeure près de ican-;,
lansreconoiilre le malfaicleur , &fembloit que la mé-
moire de ceft afTafFm euft eftéenfeuelic dans lafofle
de celle pauure femme. Or entendez comme cela vint
en fin à conoilfançcquoy que bien tard.Ican le Flamég>
fergêt des tailles de Parjs , qui depuis fut premier Huif.
fier en la Cour des Généraux des Aides, eftât au village
de S.Leu près Môtmorêcy,pour exécuter vne cômifTioa
des Eleus,vn iour d'elle pendant Ton fouper,en prefencc
de quelques habitas du Heu, racontoit en quel eftatil a-
poit laiifé la mairon:Qu^e fa fcme y eiloit malade , afli-
ilec feulemét d'\n ieune garçô, Il y auoit lors prefent vu
vieillard nommé Mouftier,& vn iîen gendre lefquelsfur
celle parole , partent la nuid portans chafcun d'eux vn
cofin de cerires,& vn oiibn, & arriuent fur les dix heures
de matin en U maifon de Flameng. JLà ils bucquent,la
fcnimcfe métaux feneftrcs,pour fcauoir qui c'cftoit. Us
lui refpondent qu'ils auoycnc charge de Ton mari de iui
3^4 Hifloires admirables
aportcr ccftc oiTon & des cerifes. A cefte parole la porte
leur cftant ouuerte par le ieune garsjilsla referment fur
lui,& à l'inflant mermc lui coupent la gorge. Ce pauure
enfant fe debatanr, la femme oyant le bruit , le met en
vnc gallcnt:,qui rcfpondoit fur fa chambre , pour voir
que c'cftoit. Elle aperçoit vnruiflcau defang dans la
cour. L'vn d'eux lui dit que c'eftoit du fang de roifon.
Cepédantrautrc montoit de viftelfe pour penfcr la fur-
prendre. Elle fe doutant delà vérité dufaitrcgaignc
pjomptcmentfa chambre , ferme fa porte au verroud.-Sc
commence de s'efcrier par la feneftre , qu'on vinftla fc-
courir.&qu'iiyauoit des voleurs en fa maiso. Ces deux
malheureux,voyans qu'ilsauovent failli à leur entrepri-
fejveuleniibrtir auant que la rumeur fuft plus grande.
La porte s'ouuroit Scfermoit à clef par dedans. Dieu
veut que la voulant ouurir, la clef fe rompt dans la fcr-
rure.Se voyans pris comme le rac dedans la ratière , tou-
te leur efperancc fut d'auoir recours aux cachettes. Le
plus ieune femulTe au fommet d'vne cheminee,le vieil-
lard au profond d'vne cauc , & defcend dedans le puic'
par vn foufpirail qui y regardoit: Le tumulte fe fait grâd
par tout le voifinage.Plufieurs y accourent auccques ar-
mes ; la porte enfoncée dedans, on trouue le corps du
ieune garçon eftendu fur la place. On court part tourc
iamaifonxcluiqui ertoit dedans lachemince futleprc-
'inierpris:& après vne longue reccrchc , l'autre qui au
■profond du puits ne monftroit que la telle. Ils font me-
nez auChaftellet, le procès leur eft fait& parfait du
iouraulcndemain, condamnez à eftre rouez, & à trois
"ccnsliures de réparation enuers leFlameng. Appelrla
fentence confirmée par arreft , ils font menez aux Hnl-
les pour eftre exécute/. Comme ils eftoyent fur l'el-
chafaut, le vieillard requiert qu'on lui amenaftla vef-
ue du marerclial,dont i'uy n'agucres parlé. Venue qu'el-
le eft, lui demande p^don , dit qu'il ne veut mourir fa
confcience chargée do ceft autre meurtre. Que c'eftoit
lui qui auoit tué la ieune femme, près fainftc Oportu-
ne.Le GrefBcr rédige tout au long par eitrit fa confef
fîon.Ce fait ils font rouez.
ç^ mémorables. ^ ^6^
levousay iufqucs ici difcouLU comme ces mifcra-
bles furent pris pcr vn exprcs miracle de Dieu, & qu'en
fin c*e mefchanc vieillard acquitta le démente du meur-
tre par lui commis , il y auoit vingt ans pafTez. Ce que
ie diray maintenant parauanture meripe bien de vou$
eftre reprefentc. La vefue du marefchal demande par
deuantle Preuoft de Paris réparation fur les biens du
vieillard : qui lui eft adiugee par fentence , iufques à U
fommc de quatre cens hures. De là (ourdvne autre
quelHon , d'autant que ccftç vefue fouilienoit deuoir e-
ftre payée deuant les trois cens liures du Flamcng, Se
ainfi fut iugé pour elle, don: le Flnmeng ayant appelle,
fa caufefut par moi plaidee contre i\l. lean Chipart, ad-
uocat delà vefue, pour laquelle il dilbit que le delida-
uoitellé commis vingt ans pafîez, & puis que Ton mari
innocent en auoit porté la tare , laraifon vouloir bien
aulfi que l'amende de quatre cens liures fufl la pre-
mière payée: embcUifTant fa caufe de plufîeurs autres
railbns. Au contraire, ie fouftenois qu'il ne faloit aifé-
mentadioutterfoy à la dcpofition du vieillard, au pre-
iudicedu Flameng, car lors il eftoit ^ ne perfonnc morte
ciuilemcnt^iointque mourant fur la pourfuite qu'en a-
uoitfaitle Flameng, ce mefchanc homme pouuoit a-
uoireflé induit à faire celle depolîtion pour fe venger
de lui. Qu'en matière de deliéls il n'y auoit point d'hy-
pothecque : & finalement , que fans la pourfuite fai-
te par le Flameng, iamais le vieillard ne fuft venu à
rcconoiifance. Que tout ainu que, celui qui fait des
defpenfes neceffaires pour la conleruation d'vne mai-
'fon , eft payé auparauant tous autres créanciers hy-
pothécaires, ores qu'il leur foit fubfequent de date : auH
ïî deuoic-il eilre le femblable au cas preCent en faucur
du Flamcng. Sur cela Ips parties appointées au con-
ieil, en fin s'enfuiuit arreft , par lequel il fut ordonné
qu'elles feroycnt payées par defcontîture , c'eft à dire
au fouis la Jiurc , fur les biens de ce vieillard. £ . Pa/quier
ai* mejme Unrç ^ chapitre mentionné (n l'exemple precc
dttit.
Qozfi 9tt 4pvixç Çemilif-hoflinDes Danois aflem-
^66 Hifteires admirables
bIe7,&deuiTans certain iour au foir dedans vn poifîo
s'cAneut débat de paroles entre eux , ce qui s'efchaufta
tellcment,que les châdelcs foudainemcnt efteintes \\n
fut tué d'vn coup de poignard. Parmi ces gétiI<;-hommcs
ciloit auflivn certain courrier du Roi de Dannemarc.
Or comme le meurtrier fuft inconu à caufe du nom-
bre, combien que les gentils-hommes en accufafrent le
courrier, le Roy ne vouloitlesen croire^difant qu'ils a-
uoyent confpiré contre Ton feruiteur. Sur cefte perple-
xité il les fait tous arrefter dedans le poifle, &ranger de-
bout autour du mort , puis commanda que les vns vinf-
fcnt après les autres eftcndre leur main droite fur la poi-
trine nue du meurtri, iurant qu'ils n'auoyeRt point don-
né le coup. Les gentils hommes obéirent promptement»
& ne furuint aucun indice contr'eux. Reftoit le courrier
Icquclconuaincu défia en fa confcience,alla baifer pre-
mièrement les pieds du mort: mais fi toll qu'il appliqua
la main fur la poiâ:rinc d'icelui, le fang commence à re-
iaillcren abondance hors de la pîaye ,& hors des nari-
ties : tellement que prefle de ceftc euidente accufation,
il confefle le meurtrc,& par fcntence diî Roy eft incon-
tinent décapité. H'eur* de Ra7iz,o'v^} Lieutenant pour le
Roy de Dannemarc enlaDuché deHolface,faitce ic-
citen -vue fiene lettre imprimee:& adiouftc que le Roi fon
mairtre lui auoit raconte l'hiftoirefusefcrite, &i fon
gendre Vlric Duc de Meckelbonrg, adioullant ces mots^
Auiourd'hui premieriour de luillet i55>i.viuoycntcn-
corcs aucuns des gentilv-hommes accu fez de ce meur-
tre. Et que depuis ce temps de l'exécution du courrier,
le Roy Chriftierne II. auoit permis que par totftfon
royaume les meurtres inconus fuffent ainfi fecer-
chez.
l'adioufteray vri autre exemple ( dit-il en ceftemtfl
me lettre enuoyec au DodeurChytrxus) qui auintà
Itzehovv en Dannemarcdu téps de mon père. Vn paf-
fant fut tué fur le chemin , & pource qu'on ne poauoit
defcouurir le meurtrier , h luttite d'Itzehovv , fit enlew
lier le corps, & recueillir vue main coupée d'icelui, la^
Quelle fut portée enlapriiisii du lieu, &peudue «i'vne
corde-»'
dr memorahles» ^6-^
cordolctteau planché d'vnc des chambres. Au bout de
<ijx am,comme le meurtrier , pour certain afairc fuÛ ve-
nu en icclle prifon , la main feiche de fort long tcmps^
commencer dégoutter du fang furla table qui eîloit au
<ie{rous.Le geoher voyant choie fi extraordinaire arreftc
rautrc,& auertit la iuftice , laquelle fait ferrer cftroitte-
ment l'homme : puis appelle mon pcre,en prefence dit-
quel ce meurtrier , donnant gloire à Dieu, confclTalc
meurtre qu'il auoit perpétré tant d'années auparaaant;»
fe foumettant à touterigueur de lufticeJaqueUcauflî le
fit mourir du fupplice qu'il auoit mérité.
Hierofmfi Magius, tk>cte Philofophc, difputantde
tels accidens au 3. tùfJe fcs Aïejlun<ycs. chu. 6. après auoir
cotté les autheurs anciens & r.ioàcrnes qui en ont trai-
té , & propofé ce qu'il penfe pouuoir fcruir i telles di-
fputes, eonclud finalement , que ces dcrcouuerrcsdo
meurtiiersfont chofes miraculeurcs. Les Autheurs qu'il
allègue font Homcrc au 17. linrc de Tliiade, parlant
du corps mort d'Euphorbe ea prefencc de Mencîas qui
rauoittué:lepoëtcLucret.3u 4.1iureen ces vers, Ntf?M^««
hominci pltrumquc cadant in -jnlnut 3 Scc. Thaddec Floren-
tin en Tes er^pïîcations furllfagogc de Ioannirius:Hc*u/
de Gand en fez QuodlibcLs, Gilics de Rome en la que*-
Uion z^.duç.quodlibet : leaii Alaior fur le 4. îiure des
Sentences,dift.i^.qua;ft.i4. L'Autlieur du liurc intitule
Vcrf'rr inarum qttxflionttm 3 en la queftion 6. de la rroificf-
me Décade : Marfille Ficin au 16. luire de l'immortalité
des âmes, ch.ç. Galcoc. Marcius au ii.chr.p.dc fon Jiure
de VotirinaproînifcuA : lean Langius Médecin en fa 40.
€piftre:& Leuin Lcmnius au x. liurc des Miracles de na-
ture, ch.7. îtem Gaudcnce Merulaau4,liuiedcschof©s
mémorables, chap.18. Paris de Puteo , au traité de Synif
f4fM,fur lemot Tortura : HippolyteMarUlJe en fa prad-
qu«,au paragraphe DUigentfr , nombre 81. Marc Anthoi-
HC Blanc au Comrhcntairc furla Loy final. num. ^©8. C.
de qiijeftiombw : Ludouic Carere , au co.nm en cernent de.
fapratique.num.i4o.& François Cafon d'Opiterge, au
traité de iftdicïps ^ Tortura' Le Lcftcwr curieux aura <le-
quoy s'esbacre.
3^8 Hîfioires admirMe^
Eiilaviilccle Tubinguc, certain palfanr arriuéea
l'ijoftcUcrie, i^: tleuifant à table du clicmin qu'il auoif
à ^airc:, dcmanJanc à rhoilc s'ilpourroi: point trouuer
<]uelqa'vn de compagnicpource qu'il ciaignoitfcfour-
iioyci , vn autre inconuliiidit , le vai en ce quartier &
fautqucicpaffcpar laforeft , dont ie fçai toutes Ifsa-
drcllcs. S'eftans acheminez cnfemblc danJlcboisWe
dernier cuidant faire quelque grand gain le rue fur le
palTant &le tue. Mais ne lui ayant trouué prefques rien
vnillant, il s'en reuint trille & foufpirant vers celte ho-
Itcllerie. Toll après , le bruit court d'vn hommerronué
meurtri dedans laforeft. Et pourcc que le meurtrier fc
defcouuroitrifiezparresfoufpirs , onTempoigne & in-
terrogue. Ilauouèle forfait & cil exécuté a mort. Ph,
£.onicsr enfin théâtre d'exempas.
En certaine ville d'Alemagne fe firent desnopces,
où vn icunecoullurier ayant mené danler quclqucieu-
ne iîlle,comme chafcun des conuiez elloit après à fc re-
tirer, & iecouilurier ne fe trouuant pour reconduire la
iîllc;vn leune cfcholier la conduiiît honneftcment mi-
ques au logis de Ton percToll après le GOuil:urier,vienr,
& cftimantauoirrcceu quelque atFront en cela,court au
logis de ce pere,appelle aimablement l'clcholier , & lui
donne tel coup d'cfpce en trahifon , qu'rlle renuerfc
mort fur ie paué. Le père de lelcholier accablé de tri-
ftelfe rend l'ame ù Dieu trois iours après , & ert enterré
auprès de Ion fils. La mère du couilurier trefpalîede
dueil. Ce coultuner defefperé fe iette en \n courant
d'eau & te noyc. Lumefme. Ccfte hiitoirc fe peut rap-
porter au chapitre des. Cm horribles (^ pnoyabUs.
Vn meurtrier, qui auoittué plufieurs hommes &
quelques femmes enceintcs,éftant\ en u la veille dePa{^
ques en la ville deVvinshcin tin Alcmagne,ncheta d'vn '
boucher en la boucherie publique tfois telles de veau,
lefquellcsil mit dans vn facfait en forme de filé, & char-
geant le tout fur foQ efpaule reprint le chemin de fa
maifon. Surceilfutauis a ceuxquile voyoyenc palTer
par les rues qu'il portoit des telles d'hommes, tellemenc
qu'on courue en aucmcU luilice/ qui cnuoyedcs fer-*
O' f^C9norahle$> 3<^
gensapres.Ilsrempoigpcnt:,ramcinent deuant les lu-
ges.Enquisoù ilaiioit piins ces teftes d'hommes ? ref-
pond qu'il les auoit achetées en pleine boucherie. On.
enuoyc quérir le boucher , lequel maintient auoir ven-
du des teftes de veau non pas d'homme. Le Confeil ef^
meu de ce prodige enuoyc Tacheteur en prifon , Tinter-
rogue de pres,& finalement lui prcfente la géhenne. Il
confefl'e Tes meurtres : foudain les trois teftes tirées du
fac rcprenent leur première forme , & ce meurtrier eft:
exécuté à mort.L<i mefme.
Vn gentil-homme de Chalanccen FofTigny eftant eri
l'armée du Duc de Sauoye au mois de Septembre Tan
i589.contrifté d'auoir veu lescruautcz & vilenies exer-
cées fur les panures habicans du Bailliage de Gez , refo-
lUt fe retirer de ladite armée. Or d'autant quil n'y auoic
chemin bien feur ni abrégé pour lui que de traueribr le
Lacpuis fe rendre en Bonne, n'y ayant que pour trois
heures de chemin à faire cela (en lieu que pafTanr au
pontde Chanciillui faloitpres de iournec& demie a-
uec danger) il s'adrcfle à vn homme de (a conojifance
nommé lean Villain du ^ illage de Thaney au Balliage
de Nyon , près du bourg de Coppet, &le prie delui
trouuer gens qui le pafTenr delà le lac. Villain l'ameine à
Coppet , où vn des principaux du lieu mené le geutjl-
homme en vne tauerne, & après vn bon repas de quatre
teftons,fut accordé ci-e deux bafteliers du heu , là pre-.
fens,le paflcroyent. Lui s'achemine vers Thaney pour
amener fon cheual & bagage. Eftant à fon retour, \cÇ^
dits bafteliers ,dont le prmcipal le nommoit iMartin
Bourry,feruentfurlui&lui couppent la gorge. Villain
furuient toft. apres,qui fe plaignant défi cruelle perfi-
die,ouyt pour rci'ponfeque c'eftoit vn ennemi qu'on a-
uoit defpefché. Ce meurtrier fe doutant qu'il en pour-
roiteftrerecerché , afin d'amortir le tout,fit prefent du
cheual de grand pris de ce gentil— homme à vn. certain
maiftrc,& retint le rcilc pour lui: tellement que l'on ne
parla depuis de ce meurtre : Villain mefme nofanc
cnfake beaucoup de bruit, pour crainte qu'il lui en
rtieCatnnft; Mais Dicw y pourucut. Car cnuiron le
Aa
57^ Hîjtoires admirables
l^. Juillet de l'an 15 91. ce Bourry s'apreftant auccplu-
fîcurs autres audit lieu de Coppet pour tirer à quelque
prix, comme ilpenfoit charger , & accommoder la
propre harqucbuze qu'il auoit volée au pauure gentil-
homme alors qu'il le meurtrit, eftant apuyé fur icclle
harquebuze,elle fe defchargea (l'on ne fçait comment)
& tranfperça ce meurtrier,qui fans parler ni mouuoir,e-
ftant frappé au cœur,éxpira fur la place. Mémoires de no-
Jire temps,
lacques d'Aqueire gentil-homme d* Arles, ayant efté
bleflë au ventre d'vn coup qui perçoit les boyaux,
mourut au ç.iour.Celui qui auoitfaitce meurtre ayant
efté amené deuant le corps par le commandement du
magiftrat , le fang commence à bouillonner & couler a-
uec cfcume méfiée hors de la playe & des narines du
mort,en prefence de plufieurs acourus à ce fpe<flacle,du
nombre defquels ie fus. Sur quoy l'on demanda pour-
quoyle mort faigneainfî deuant celui quiluiaoftéla
vie. C'eft merueilles qu'en vn corps , dont toute la vi-
gueur eft efcoulee & difloulte,le fang viene par certain
inftinâicômeà crier cotre celui qui a fait la playe. Pour
en dire mon auis en Philofophe & Medecin,cela doit e-
flrehors de difpute,qu'en vn homme fraifchemcnt tué
toute chaleur ne s'efuanouit pas incontinent , encores
que la vie s'en aille: ce que nous auons defcouuert par
experience.Car nous voyons que les corps de ceux qui
font décédez depuis peu , demeurent chauds quelques
heures apres,quelque refte de chaleur vitale s'arreftant
après le departrcomme nous fentons es poifles,eftuues,
& fourneaux , arrière defquels on ofte le feu. Encore
qu'il n'y ait plus de braifes la chaleur cachée s'y fent,8f
y dure vn iour ou deux,com me chafcun fçait.Ainfî dôc
puis que toute chaleur n'eft pas cfuanouie d'vn corps
fraifchement tué,ni toute agitation & vigueur intérieu-
re amortie: (am fi qu'on Tapperçoit es beftes efgorgees,
lefquellcs font chaudes quelque temps après, & leurs
chairs tremblottantes)ils'enfuit,quc par la vertu fecrcc-
tc & cachée au corps mort,lcs humeurs, Ipccialcment le
fang
drfnemorables. y^x
fa^ig & l'humeur bilicuxjfont efmeus & esbranlezrd'au-
tant que par certain fecrct & non afl'ez comprchcnfîblc
mouucmenc dénature, celle vertu intérieure fcmblc
quafî requérir vengeance: puis tout foudain l'humeur
bihcux efmeu par cefte vertu cachée du fangfe refueil-
ic& trefTaute a caufo delà viftcfl'c & promptitude de
fonmouuemcnt. Icelle efmeue & enflammée le fang
s*esbranle,court & fort par la playe, qui eft la porte pro-
pre à le monftrcr.L'efprit vapoureux qui eft au fang lui
vient auffi à la rencontre , lequel d'vn certain mouue-
raent fpiritucux s'eflance foudain tout droit contre le
meurtrier, nommément s'il regarde atcentiuement le
meurtri. Qui eft caufe que la playe efpanchc du fang
par ceft admirable & fccret mouuement , & le iette vers
le meurtricr:pource que la chaleur demeure au corps du
meurtri iufques a huid ou dix heures après le trefpas.A
Taide & au mouuement d'icellele fang rappelé les e-
fprits,&au réciproque les efprits rappeile4it leur fang:
dont prouient fon flux par la partie entamée: Voila vne
raifon probable que peut inuenter vn homme nonigno-
rant de la Philofophic,en afaire tant difficile & enuelo-
pé. Mais certainement ilconuient pluftoft croire que
tout cela fe fait par le fecret iugement de Dieu, qui par
telle marque veut defcouurir le meurtrier. Car le fane
des meurtris crie de la terre à Dieu,lui demendant vcn-
geance,comme quand Moyfe au 4. chap.de Genefe par-
le d'Abel tué par Cam,il declaire que le Seigneur Dieu
dit à ce parricide, La voix du fang de ton frère crie à
raoy de la terre. Ne nous arreftons donc point a des re-
cerches qui furpaflentla portée de nos entcndcmcns;
mais foyons médiocrement fages. Tr. VallerioU en la 9,
êbferuMton du iMure.
• Le dodeur loubert en propofe fon aduis en ces ter-
mes.Il eft confermé parle tefmoignage deplu/îeurs &
receu des plus fages lurifcôfultes , que le corps de ceux
qui ont efté tuez , fi le meurtrier eft prcfent , faignent,
combien que lamortfoit extindion delà chalcurna-
turcUe , & que de fa froideur elle fige & arrefte le fang.
Pirons-nous auec certains Philofophes, que quelque*
Aa i '
37^ Hifloires admirables
forces cîc l'ime rcn/îtiue(rçauoir cft,la cupidité âcvtxr
Çeancc ) fubfiftciu cncorcs après la mort dans le fang,
lufques à ce qu'il pourrifTejQÛât àmoy,pour rauthorité
de ceux qui TafFermencic fuis content de croire , que fi
le meurtrier furuint dedans fept heures ou enuiron , le
fang peut eftre eflancé contre luy. Dequoy aucuns ren-
dent ccfte rairon,que le meurtri , lors qu'on le tue , ell
tout attentif au meurtrier.il fe voudroitreucnger,& ne
penfe qu'à la vengeâce en tres-grâd marrilTon.Adoncla
cholere s'enflammcjde laquelle foudain eft cfchaufFé le
fang qui haftiuement de toute fapuifTance acourt à la
playecôme pour la défendre. Les cfpritsenfcmble y vo-
lent de toutes parts,& de naturelle légèreté , incôtinent
fc icttentà Tentour du meurtri er,& s'entretiénent quel-
que téps de cefte chaleur.Dôt,{î cependant le meurtrier
regarde de près la blelVure,le fang fe vcrfe cotre lui : par-
ce que la chaleur n'cft encoies ellteinte, & que i'agitatiô
intérieure n'a pas cefré:& aufli d'autant qu'il s'eiloit au-
parauantauancéau dehors,Maisfaudroit-il point que,
pour ce faire,reftaft dedans le corps quelque intelligen-
ce,à pouuoir reconoiibc le meurtrier ? comme il auicn-
dra bien aifément à celui qui n'eft du tout mort ; iaçoir
qu'on le tienne pour tel,d'autant qu'il eil à l'extrémité.
Autrement il ne fc peut faire naturelleméc que la playe
ait telle difcrction , qu'elle reiette du fang de là a quel-
ques heures contre qui que ce foitià quoy reuienent les
fufdites raifons. Aucuns des Théologies Scholaftiques,
fuiuans les précédents difcours , veulent que les eiprits
fortans de la playe caufent l'effluxion du fang, quand il
les rappelle,& puis ils répètent le fang. Ce qui aduient
par la volonté exprefle de Dieu, pour plus grand' hor-
reur & deteftation du pcchc. Dont en Genefe Dieu dit
à Cain,le fang de ton frère crie à nioy, M.Papon a traité
cefte queftion en fon liure des arrefts : liu.4.tiltre 9. art.
^.Imbert en la préface de fon z.UuJh rit.
MO DESTIE Singulière acquieffant à vne feuereeenfure.
ILfeirouuepeu d'hommes, notamment entre ceux,
qu'on appelle dotfles , qui ne prife beaucoup fes ou*
Ura^cs i & ne porte impacieramcnt les rcprehcn/îons
^ mémorables. 37}
S'il s'en rencontrcils méritent d'eftre adrnireîL & enfui-
uis. MarfîllcFicintrcs-dode Philofophe& renouuellé
difciple de Platon en noftrc temps , ayant mis la main
aux œuures de Platon, pour les traduire de Grec en La-
tin,porta & prefenta fa verfion à vn autre tres-doéle per-
fonnagc nommé Marc Mufurus Candiot, pour en auoir
fon auis. Mufurus voyant que .cefte tranflation eftoit
précipitée ,& qu'elle ne rcfponudoit pas à Pefperancc
que plufieurs, quiladefiroyent afFeduieufement , en
auoyent conceue , pour n'expofer en rifee fon ami , &
s'acquitter de la promelTc , empoigne vneefponge, la
plonge en vn ancrier^Sc en barbouille toute la première
page de la tranflation de Ficin , puis fe tournant vers
lui, dit , tu vois comme i'ay corrigé la première page : fî
tu veux i'en feray autant aux autres. MarfiUe fans s'esfa-
roucher ne refpondit autre chofe finon , Il n'eft pas rai-
fonnable que par ma faute Platon doiue eftrc ainfi cha-
foun-é,Puisre retira, & ayant eu des fécondes penfees
mieux digérées fitvne nouuelle tranflation digne du
maiftre ^ du difciple. ZHtnger tM premier tome de fon
théâtre, liure i.
MO JQVEVRS mocquez.
CERTAIN perfonnage, demeurants Onzainpres
d'Amboife,perfuadé par vne hoftelTclaquelle com-
mettoit le crime infâme d'adultère auec lui,de faire fem-
blant(pour oflier à l'auenir tout foupçon au mari ) de fe
faire tailler par vn nommé Maiftre Pierre des Serpens,
opcratcnr,de Villantrois en Berri,enuoya quérir fes pa-
ïens, & après leur auoir dit qu'il n'auoitiamais oféde-
dairer fon mal, mais qu'en fin il fe trouuoit réduit i
tels termes, qu'il lui eftoit force d'en pafler parla : fit
fon teftamcnt. Et pour faire encore meilleure mine,
après auoir dit à ce Maiftre Pierre (auquel toutcsfois
il auoit baillé le mot du «uct de ne faire que fem-
blant, &pource lui auoit donné quatre cfcus)qu*il lue
pardonnoit fa mort de bon cœur, s'il aucnoit qu'il en
Diouruft : fe mit entre fes mains & fc lailfalier & du
Aa 5
574 Hijtoires admirables
tout acouftrcr,cônîc celui qu'on voudroit tailler vrayc-
mcnt. Or faut-il noter que comme le paillard auoit
baille à Maiftre Pierre le mot du guet de ne faire que
rcmblant,aufl~i le mari de Ton colle, après auoir entendu
celle farce,auoit donne le mot du guet,dc le faire à bon
efcient, auecpromclfe de lui donner le double de ce
qu'il auoit receu du paillard,pour faire la mine.
Tellement que lui perfuadé par le mari > & tenant le
paillard en fa puiflance, après l'auoir bien attaché,lië &
garrotté;, exécuta Ton office realemcnt & de fait: puis le
paya de celle raifon, qu'il n'auoit point acoullumc defe
mocquerde Ton meftier. Voila comme le paillard fc
trouua de l'inuention de l'impudique adulterefle, &
comment au lieu qucfuiuant ceflefinefle ilfeprepa-
roit à tromper le mari plus que iamais, il fut trompé lui
mefme d'vnc tromperie beaucoup plus preiudiciable à
fa perlbnne. Conformité des merueiîles anciennes nuec Us
modernes.
Vn marchant drapier en Tvne des principales villcf
frontières de France,ayant oublié Dieu , fon honneur,
le refpetfl de fa femme, honnefte & vertueufe , iufqucs
là que de prétendre à desbaucher vne /îene feriiantc,
fiancee,& niepcc de faditefemmc , penfant à quelque
expédient de couurir Ton ordure , s'en aduifa dVn mer-
ueilleufement deshonnefte & infâme. Il auoit vn ferui-
teur ieune homme de zo.ans,honteux,& qui ne fçauoit
encorcs gueres que c'efloit du monde. Le Maiftre lui a-
yant promis rccompenle de fon fcruice & fîlence , l'in-
dui/îtà aller tenir la place en fon lid, lors que fa femme
feroit endormie: & que d'auanturc elle commençoit
feulement à fommeiller, il fe contentall de lui dire bon
foir tout basjla touchant de la main à la poitrine , puis
lui tournant le dos,& ne s'approchant d'auantage. Lui
ccpendât va trouucr fa feruante , peu auant les nopces
d'icelle. Le ieunogLi-fon touteftonné de la commif^
iîon qui lui eftoit donnée jobeyt neantmoins à la des-
honnefte volonté de fon maiftrc,& obfcrue diligem-
ment ce qui lui auoit efté dit. Mais la femme , eftimant
que ce fuft fon mari , le carcffe Screlmcut tellement,
que
^mémorables, J7J
éjue cette nuiâ il la coiiut plufîeurs foii, fans qu'elle le
conuflDe grand matin le maiftre & le feruiteur fc re-
tire. La femme ietcant priuément & en particulier quel-
que trait derifee au mari du traitement delà nui<^
précédente ,eftimant que lui & non autre s'eftoit appro-
ché d'elle, il defcouurit, mais trop tard , fon malheur.
Dont irrité contre le ieune homme , par Ton rude trait-
tement il le coniraignit de s'enfuyr, & de defcouurir ce
qui clloit auenu : mefme procura que près & loin la iu-
fticc vill cefte turpitude, & fut honnie du fouuenir de
telle ordure. La femme ayant fceu le mefchant tour que
Ton mari lui auoit ioué , finalement meurt de regret.Lc
mifetable mari demeure mocqué & expofé en rifee aux
gens de néant, hors de la réputation & du relpeft def
gens àc hiç.n.Mtmoirede nojire temps.
MO R T remarquable.
GVi L L AVM E Nelènus, perfonnage excellét en fça-
uoir& crainte deDi ev, s'eftantietté dedans vne
barque de pefcheur,en temps d'elle, pour trauerlèrrEU
be,riuiere qui pafle à Vviteberg en Saxe , comme c*e-
iloit fa couftume de s'esbatre quelquesfois à pafTer ain-
fî cette riuiere , & conduire lui mefme fa barque , alla
heurter alors contre vn tronc d'arbre caché dedâs l'eau»
qui renuerfa la barque , & Nefenus au fond , dont il ne
peut efchapper,ains fut noyé. Cela auint fur le foir. Le
mefme iour vn peu après difné , comme il fommeilloic,
auiî lui fut qu'il entroit en vne barque depefcheur,&
qu'il tomboit en l'eau. Surce arriua uers lui Philippe
Melanfthonfon familier ami, auquel il fit en riant le
conte de ce fion fonge , tenant fa vifîon pour chofe vai-
ne. Vn autre grand perfonnage, le voyano mort eftendi*
fur la riue de reau,s'efcria,les larmes aux yeux , O Nc-
fcnusjfi i'auoy' le don des miracles, que ie te reflufcitc-
roy volontiersîll fut infiniment regretté des grands fiC
des petits. Mclandhon & Camerarius deuifans enfcnv
ble de ce fonge §c tiiftç accUcn; , fe ramenturent l'va I
Aa 4^
37^ Hljioires admirables
l'autre ce qui leur cltoïc aduciui & à Ncf"enus peu de
iours auparauant. Ils faifoycnt eux tiois quelque voya-
ge en Hcfle , & ayans couché en vne petite ville nom-
mée Trcfejlc matin pafierent vn ruifl'eau proche de là,
pour y abrcuuer leurs cheuaux. Comme ils cftoycnt en
l'eau, Nefcnus defcouure en vn coftau proche àc\i
trois corbeaux croquetans , battans des aifles , & faute-
lans.Surceil demâde à Mclâchthon,que lui lembloit de
cela?Melanchtlîon refpondit promptcmcnt, Cela /îgni-
fie que i'vn de nous trois mourra bien toft. Camerarius
conieffe que cefte refponfe le peignit iufques au cœur,
& le troubla grandement .-mais Nefenusne fit qu'en
fecouèrla teftc, & pourfuiuit Ton chemin alaigrement.
Camerarius adioulle qu'il fut en termes de demander
à Melanchthon laraifon de cefte fiene coniedure:&
que toft après Melanchthoa lui dit , que fe Tentant foi-
blc& valétudinaire il ne pouuoit eftimer que fa vie
deuft cftre gueres plus longuc.Et ic ne ramentoy point
ces chofes (dit-il) comme (ï l'attribuois quelque effica-
ce au vol & mouuement des oifeaux ,"ni ne fay point
de fcience des couicdures qu'on voudroit baftir là def-
fus : comme aufTi ie fçay que Melanchthon ne s'en eft
jamais foucié. Mais l'ai bien voulu faire ce recitpour
monftrer que par fois on void auenir des chofes mer-
ueilleufes, dont il ne faut pas fe mocquer , & qui après
l'eu enement fuggerent diuerfcs penfces à ceux qui les
voy entou en entendent ^?.ÛQx.loach. Cumerarius en la
'viedePh. Melanchthon. Et Abr.Bucolcer en fin Indice
Chronologique ide /'*» 1514.
Cefte hiftoire me fera faire vn pas en arriere,pour en
propofer vne autre non moins efmcrueillable,du fiecle
précèdent : fur l'efperance que i'ay queles ledeurs ne
me fçauront mauuais gré pour telle difgreffion. Am-
broife Grimani Gcneuois eftant en garuifon dedans
rifle & ville de Chio , l'an 1451. où il fe portoit fidèle-
ment & vaillamment , dormant profondement vn foir,
eut la vifion fuiuante. Auis lui fut qu'vn fort grand &
grosferpent venoitdroidà lui les yeux eftincellans &
lageule ouuerte pour l'engloutir. Effrayé de tel fpe-
aade a
^ memorahles. 377
^acle il s'efueille en rurfaut,&: en grand trouble d'crpnt
examine ce fongejdont il fait récit le lendemain d quel-
ques amis,aucuns defqucls lui confcillcrent de s'abfte-
nir de là en auant d'aller aux efcarmouches , & de quit-
ter la guerre : eftimans que ce monilre le mcnaçoit de
mort violente.Lui refoluc de les croire. Quelques temps
après lesfoldats & habitans du lieu prouoquez par Ten-
nemi firent vne fortie. Grimani fc fouuenant de la \u
fîonjfuit de loin au petit pas les autres/eulement pour
voir la meflcc , & iuger des coups, & pour n'eftre aucu-
nement en danger fe cache derrière vne muraille efpail^
fe.Mais entendans les cris des combatanS:,il ne peut fe
contenir d'auancer la tefte,& de regarder par vn trou de
ceftc muraille. A Tindant vn boulet de canon donne
droiâ: à cefte couuerture,& emporte à Grimani la telle
de deflus les efpaules^le corps tombant de l'autre cofté.
F. Bizarre es hifioires^ Annales de la République de Gènes,
page 7S7.788.
NATFREL changé.
DE noftre temps aduint en Brcflavv en Silefie que
certaine ieune fille alTiftantauec plufieurs autres
au fupplice dVn brigand,que l'exécuteur décapita , fut
tellement efmeue & troublée , qu'elle deuintepilcpu-
ique.On y appliqua diuers remèdes qui ne feruirent de
rien.Quelque voifin, fe meflant( à la couftume du vul-
gaire ) d'en dire fon auis,alla dire que fi on bailloit du
fang de chat à boire i cefte fille, le mal cefleroir. Ceux
qui la gouuernoyent, fuiuant ce fol confcil,lui en font
aualcr.Mais toft après la pauure fille change de naturel,
& par interualles prend le naturel des chats, miaulant,
fautillât,fe côtournant & courant comme font tels ani-
maux,efpiant fort coyemét les rats & Iburis par tous les
coins de la maifon:& elTayant en toutes fortes de les at-
traper.Elle continuoit en tels exercices de char,iufques
à ce que la véhémence de l'accès fuft paffe. M. Martin
Veinriçh en fon Comment.de l origine des monjîres.
37 8 Hijloires admirables
N AT F RE L s merueilleux,
ILs*efttrouué vn gentil-homme qui nepouuoicfouf»
frir,quVne vieille femme iettaft la vcuë fur lui:& co-
rne vne fois fuft auenu qu'en vn banquet s'y en trouua
certaine, qu'on y auoitinuitee, fans que lui en fceuft
rien , ni ne peuft euiter qu'elle 'e regardaft , fon apprc-
hcnfionfat fi vehemente,qu'il en mourut foudain.Enrc
tnefme Comment xire des monftres.
Les chats ofrcnfent plufieurs perfonnes de leur rc-
garcî:tellement qu'aucuns oyans ou voyans vn chat tré-
blcnt,& en ont grand peunce que ie croy prouenir non
feulement du venin des chats , ains auffi du propre na-
turel de ceux qui les regardent ou oyentrcar tels ont de
hature cefte influence du ciel, qui ne s'efmeut iamais à
faire fa propre adion , fans que l'obicfl de fon contraire
fe prefente. l'en ay veu plufieurs de ce naturel en Ale-
magne,& aucuns de cefte nation demeuras en Goritic.
Or que cela viene feulemêt d'vne qualité naturelle qui
cft en peu de gens, ceux qui y font fuiets le monftrent
euidemmcnt.Car eftant enAlemagne,& foupant en bô-
necôpagnie dans vn poifle en temps d'hyuer , l'vn de la
troupe eftoitfuiec à cela. L'hoftcfle conoiflantle natu-
rel de l'homme enferma dans vn cofrc qui eftoit au poiC
le certain petit chat qu'elle nourrifioit : de peur que ce
perfonaoe le voyât ne fe courrouçaft.Mais encorc.s qu'il
ne le \'in,ni ne l'ouift, peu de temps après ayant attiré
l'air atteint de l'haleine du chat, fa téperature(ennemic
des chats,)irritee,il commence à fuer,paflir , & en trem-
blant crier, non fans esbahifTement de tous, qu'il y auoit
vn chat caché en quelque coin du poi{\c.MAtthiol,/Mr le
6. Hure de Diofcoride>chap.i^.
Tay conu vne Princelle , ornée de toutes vertus , la-
quelle ne fçauroit fupporter de voir vn chat, eftant au
refte d'vn efprit vif,& muni contre les plus difficiles cf-
preuues du mode.Ellc wpportoic la caufe de cefte peur.
^ TnêmorMes. 579
à et qui eftoit furuenu à fa mère enceinte d'elle.Car vn
iour quelque chat lui fît telle peur , qu'elle tomba pafl
mce,& fut malade afTez long temps de ceft accident.Les
chats ne l'eftonnoycnc auparauant,lors qu'ils luy appa-
roifToyent: mais eftant auenu que celui-là cheut à Tira-
prouifte comme à Tes picds.cUe en fut ainfî effrayee.T^.
Erafiui e» /es diiputes.
Hippolite Lanzon,gentil-homme Mantouan, abhor-
roit tellement voir vn heriflon , que fi on ne l'euft tiré
foudadainarrierciltomboiten fueur & fyncope. Mar-
tell. Don^t. tnfes admimbles h ift. médicinales , liu. 6 xhup.^ .
l'ay conu vn payfan en Normâdie, qui n'a iamais gou-
flé nipain,ni chair,ni poiflon, ni fromage. Les œufs sot
fa vi'^èic & wouxnturt.BrHgerin.au \.ti des viandesy ch. 14.
Nousauons veu aulfi Ican de la Chefnaye Parifien>
fecretaire du Roy François premier , hayr & auoir telle-
ment à contrecœur la fenteur des pommes , qu'il eftoit
contraint fortir de table, fi toft qu'il en defcouuroit
quelqu'vne.Et fi on Ics lui approchoit du nez , inconti-
nent il faignoit parlés narines. S'ilenvoyoit inopiné-
ment,& qu'il ne peuft bonnement fe retirer du tout ar-
riere,il fe boufchoit promptement les narines auec des
morceaux de pain.
Nous auons entendu que la noble famille de Canda-
les en Guyenne a eu plufieurs yiTus d'elle,qui ont eu ce
naturel, de ne pouuoirfupporter l'odeur des pommes.
tk mefmt.
Jacques de Forly,excellent Médecin de Ton temps, at-
tefte de foy-mefme , qu'autant lui faifoit de mal & de
tourment vn ail mangé, qu'vn breuuage de poifon aua-
lé en fon eftomach : & adiouftoit que les mcfmes fym-
ptomesqui paroifl'ent en ceux qui ontbcu de la poifon
lui aduenoyent ayant mangé des aulx.Quelquesdode*
cftiment que cefte haine" prouient de l'opinion que
nous auons que \c% chofes que nous auons à contre-
cœur font mauuaifcs,ou à tous en gcncral,ou à nous en
particulier.!* mefme.
Ilyauoità Chauni en Picardie vnc fille d'honneftc
niaifon,aagee de fcizc ans ou cnuiron , laquelle iufqucs
3^0 Hijloires admirables
lors n'auoit efté nourrie d'autre viande que de laid.^1-
le ne pouuoic fupportcr le flair du pain:& Ci l'on en euft
ierté tant foit pente miette dedans fon laid, elle la fen-
toit de loin, ce que i'ay veu de mes yeux , & foigneufe-
ment remarque. Le mefme Brugerin auz.liu.chAp.6.
l'ay conu vn homme haiflant fort le frommage,que fi
Ton en mefloit tant foit peu parmi les viandes , il le
fentoitSc quand & quand rendoit fa gorge de façon e-
Rrâoe. Adarcel.Donat.au Hure j^ defes obferu. médicinales.
LelaquaydVn Comte Italien ne pouuoit manger
des œufs , que tout foudain fes Icures- ne commençât
fent à grofllr , fa face à deuenir violette , & tachetée de
noir en diuers endroits , refcume lui venant à la bou-
che,comme s'il euft aualé de la poifon. Làmefme.
Vne Dame Itahenncbelle & vertueufe^nômee Fran-
cifquine, femme du Comte Matthieu Phrygepan , feir
gneur puiflant & excellent , auoit atteint l'aage de qua-
torze ans auant qu'on peuft lui faire manger de chair
quelconque. Vn certain Cardinal abhorroit l'odeur des
rofes.Les médecins modernes difent qu'à Milan y auoic
vne famille cntiere,à laquelle.lVfage de la cafle eftoit R
contraire, que fi quelqu'vn d'icelle en euft pris il mou-
roit.Le nombre de ceux qui ne peuuent goufter,ni boi-
re quelconque goutte de vin, fans fe faire mal, cft grâd.
l'ay vn de mes hls qui a les choux en abomination.Si ie
voy du creiToHïil me fait horreur. Chacun a quelque af-
feÀion particulière. Scaltger en la IJ5. exercitation contre
Cardanyfeci.io.
Tay conu vne vieille femme, qui fuyoit l'vfage des
melons,en vn pays chaudreftimant telle viande (infini-
ment agréable aux autres peifonnes de mefiiielieu,&dc
fon aage)la plus mauuaife du monde. Mon père n'aia-
mais fceu aualler morceau quelconque de heure , ni de
volaille aucune.N'y a pas long tempsqu'\ n Seigneur de
marque mourut, lequel ne pouuoit mafchcr, ni aualler
viande aucune , Ci elle eftoit falcc tant peu que cefuft.
Murante au ^Jiure de la méthode de conoijlre lesfimples,
La fille puifnee de Frédéric Roy de Naplcs Princeflc
très-
tres-illuftre,quclquesfois traidee par moy pourceft ef-
feâ-jne pouuoit manger de chair, non pas melmes en
goufter.Si elle en mcttoit vn morceau dedâs fa bouche,
elle tomboit en fyncope tres-vehemente , & iettoit de
terribles cris,& hurlemens, tombant de Ton haut en ter-
re,ou elle fc debattoit. Cernai lui duroit demi heure:
puis elle rcucnoit^ i'oy. Brafxuol.auComment.^/^.fitr le i.
iu d'Hipp0crates,de la manière de viure es maladies argues.
Nousauons conu pluîieurs perlonnes qui ne pou-
uoyét en forte que ce fuil: manger chair. Des autres qui
euifent mieux aimé goufter de la poifon que mettre vn
morceau de fromage en leur bouche.Il me fouuiêt dVn
Efpagnol, qui n'auoitiamais mangé de poiflon , Toit de
mer,ou d'eau douce, quel qu'il fuft. Vn iourconuiéà
foupcr par vn fîen ami, on le feruit d'vn plat d'œufs par-
mi lefquels on auoit dcxtremét mellé du poiflon broyé.
Mais il le fentit incontinent, & en eut tel mal de cœur,
que le vomiflemenr & le flux de ventre s'en enfuiuifent
tout à rbcurcfi véhéments, qu'on cuidoit qu'il en deuil
rendre Vame.jimatus Portugais en fa z.CertturieiCure ^6.
Tay veu vn homme qui ne pouuoit manger, ni voir,
ni fentirles anguilles: qui plus eft, s'ilentroiten quel-
que maifon &lieu où il y en euft de viucs fecretcment
cachees,il lui eftoitimpofîible d'y rubiîfter,& l'apperce-
uoit-on incontinent en eftrange peine. Af. Vveinrich, au
comm.des MonJlres,chap.B.M. Amhroife Taré fait mention
en quelque endroit d'vn Seigneur en France , lequel
tomba pafmé à table en vn banquet,où Ton auoit ferui
d'vn anguille.
Vn dode perfonnage m'a recité auoir veu en la ville
d'Anuers certain homme qui ne failioit de tomber en
fyncope,fî ésbanquets,où ilcftoitconuié,ron apportoic
cochon farci. Car i\ toft qu'il le defcouuroit de Ci loin
quecefuft , onle voyoit changer, & la défaillance de
cœur le faifir. Lacques Horjlitu en fes annotations fur L.
Lemnius.
Vne grande Dame eftant à table chez vn Côte , ayant
tnangé vn morceau de rétine de icune vache (viâde dé-
licate i plufieurs^fcs leures commencèrent incontinent
jSi Hijloir es admirables
a s'enfler & grofllr merueilleufemciu: Elle confefloit ai-
mer telle viande , mais qu'incontinent qu'elle en gou-
ftoit celle cnfleurc de leures furuenoit; fans qu'elle
fceuft }poux(\\xoy. Là mejme.
Tay remar que le Comte d'Arnftad auoir en telle
horreur Thuilc d'oliue, qu'il faloitpromptcmcnt leuer
de deuant lui toute viande où il y en eut tant foit peu,
voire l'emporter toute hors de fa chambre , autrement
tout foudain il tomboitcn fyncope merueiileufemenc
dangereufe.L/i mefme.
Plufîeurs de noftre temps n'ont point mangé de pain,
l'ayant à contre-cœur.Ie conoy vne famille,dontlcs fils
ne p«uuettt manger du fromage : au contraire les filles
en mangent de fort bon appétit. Leur père n'en man-
gcoit poinr>& le haiffoit: la mère en mangeoit. P. Torefl.
en l'annotai ion fur l'okferuations.du ^.Uu.ou iltraitttdes
fiettres,
Vn payfan de certain village près d'Alcmar en Hol-
lande,n'auoit pour viande & bruuage choie quelcon-
que que du laiâ: de vache, &feportoit auffi gaillard
qu'homme defon quartier.L« mefme.
Conrad Huber;,payfan Suiifejdu village de Tornac en
Tur^oUjbon ioueur de fifre entre ceux de noftre temps,
depuis fon premier an iufques au ibixantiefme qu'il
mourut,ne prit \ iande ou nourriture quelconque^fînon
debouinie,fai(5le de farine deftrempee en laid ou ea
eau. Etfi parefprcuuc ou autre finelle onymcfloità
fon defceu la moindre miette de pain , ou autre chofe,
tant petite qu'elle fuft , il vomifloit & reiettoit tout ; &
ne pouuoit aualer tant peu que ce fuftde laid crud.
Quant aux autres viandes,il en fupportoit le flair : mais
impoflîble luieftoit d'en goufter. Quant au vin,il en
gouftoitquclquefois,rarement& peu. Zuingerau é.li-
ure du i.vol defon théâtre.
Il fe trouue beaucoup de gens qui ne peuuent porter
l'odeur des rofes. EftantàKomc l'ayveu le Cardinal
Carafe, feigneur fort renommé de fon temps : lequel
tout les ans au temps des rofes eitoit contraind fe reti-
ra
dr mémorables» 3S5
rer & tenir clos en vn fîcn palais cfcarté , dont il faifeit
fermer les portes, & y cftabliiToit-on des gardes , pour
donner ordre que fes amis , feruiteurs & autres qui ve-
noyent lui faire la reuerence & receuoir Tes comman-
demens,par mefgarde ne portafTent des rofes en leurs
mains. Entre les gentils-hommes Romains , y en auoic
vn nommé Pierre Melin, dode & ingénieux , lequel e-
ftoit merueilleufement interefle en fa fanté par le flair
des rofes. Pierius Valerianus au 8. Uure des Hiéroglyphe'
ques .traittant de l'efcarbot.
Tayconuvn moine lacobin , de noble maifon en la
ville de Vcnifc , lequel fentant vne rofe , ou la defcou-
urantdeloin, fentoit incontinent défaut de cœur, &
tomboit à terre tout pafmé , où il demeuroit comme
mort. Pourtant les Médecins lui confeilloyent de ne
bouger de la maifon du temps des rofes ,pour fe main-
ceoir tnÇznté. Am<nttit Portugais en fa x. Centurie, cure ^6,
Dom Henri de Cardone,Cardinal,tomboit en fynco-
pc,fî toft qu'on lui prcfentoit des rofes : ce dit Philippe
Ingrajfe Médecin, en la queRion de la Diette. Et de noière
temps il y a eu vne Prnicefle qui ne pouuoit fouffriren
forte que ce fuft le flair des rofes , ains efuanouifl'oit lî
l'on en portoit dedans fa châbre. Martin Cramer au 8./J-
ure de Phijloire de Pologne , tefmoigne qu'vn Euelque de
Breflavv,nômé Laurét,fut eftouffé de Todeur des rofes.
Le Dodeur Ican Echt, médecin ,au moindre flair de
chofe odorante,efchaufee & fumante ,fentoit vne mer-
ueilleufe altération de cerueau: & fi toft qu'il fentoit v-
nc rofe rouge;ilcfternuoit fort. Cronenbourg au lo. liu,
decom.med.
Quelqu'vn ayaut fenti mal au coeur de voirie ius ti-
ré d'vn bafton de cafle, eftant malade priafon ^AcA^cin.
de ne mefler rien de cefuc en remède quelconque pour
fon fouIagement.Le Médecin ayant oublié ceft aducr-
tiflemcnt, ordonna vn médicament ou il entroit de la
caiTc. Le malade l'ayant prins,commence à crier, ie fuis
mortjla cafl'e me tue,& roft après ç^\nxz.AlexAnd. Bene-
diâ.en U préface du Uure de la fieurepeftilentielle.
il y a toute vne noble famille en la ville dôîie fuis^dc
384 Hijioires admirables *
laqucUcpcrfonnCjnihommc, nifcmme,nigrand, nipc-
tit,ncpcut fupportcr ca mccîicamens le ûiaphenicon:
ains tous le vomiflcnr,comnic ie l'ay veu pluficurs fois.
Mareel.Dottat.au liure du Mechoacan.
Bernard Bony,dc la noble famille des Ragoufesjieunc
gentil-homme aagé de vingt ans,&de tempcracine bi-
licu(e,ertant venu vers moy pour me faire voir de (on v-
ri!iCj& eftrcfecouru de mon aduis^fi ie conoiflc»is quel-
que indifpofition en lui : ie defcouurcdu mal en Tes
reins,& des commencemcns de grofle vérole. Pourtant
ie commence à efcrire l'ordonnance de quelques fyrops
poùrrenuoyer àl'Apoticaire. Mais il dit,que ie ne me
haftaflc pas, d'autant qu'il abhorroit Toutes cholbs dou-
ces,ainfi que ic l'aperceus puis après: comme le mieil, le
fucre,& tout ce qui en eftoit comporé : poifon pour le
faire mourir en peu d'heures , s'il en taftoit. Il né man- '
geoit nullement de raifîns,de figues, de poires, de pom-
mcs,de coings,de grcnadcdepefchesjde prunes , difanc
qu'il y trouuoit de la douceur.Il mangeoit des noix, de*
amendes & pignons. Le vinaigre eftoit fa faulfe , & pre-
noit gouft aux chofes falees , ne pouuant boire du vin
blancni de la maluoific. Son brcuuage eftoit de l'eau.
Ccfte difpofîtion confideree, ielui ordonnay des reme-*
des propres à fa maladie , dont il fut foulage. Amatus
Pfirtugais,en la 6.centur.eure 6.
Il y a des corps aufciuels les medicamens doux & bé-
nins font autant de peine que les violcnsrce que les mé-
decins ontmaintcfois obfcrué en vnc grand' Dame de
noftre temps , luidonnant vn peu de manne pour la.
purger doucement. Car après î'auoir prinfejonroyoit
plaindre le vctrc,auoir appétit de vomir , crier , eftre a-
batue,ruer de façon extraordinaire,& agitée d'autres di-;
uers accidcnts:& toutc.sfoisellc aefté fouuent purgée
par autres plus forts mcdicamers, fans aucune molefte.
Vn fien neueu, feigneur belliqueux & dode en toutes
fciencesjde tépcrature bilieufe,n'aiamais peu eftre pur-
gé par prinfe de manne : tellemct que cefte famille fem-
ble auoir celade propre que la mànc lui eft cô traire. Af/^-
runte au iMn.de la Méthode de conoijire Us Jimples,chap.^i
Nous
é^ memouhles. jgj
Nous auons conu vn vaillant ibldat, lequel ne pou-
uoit voir ni Centir la rue, herbe commune : mais m1 la
dcfcouuroitdeloin, on le voyoirincontinentgaignei:
le haut, & s'enfuir comme vn homme vamcu. Marcel,
DonatiOH 6Mt*re des hift. admirables de médecine, chup./^.
NO PC ES dûuloureufei.
ANtoin'e PeriUe Neapolitain , ieune homme ri-
chômais deftitué de confcil , ayant defpendu pre(^
<jues tout fon bien aux leux de cartes & de dez , s'amou-
racha comme tout à coup de la fille d'vn notable mar-
chant>& ayant fondé la volonté d'icellcla requit en ma-
riage. Le perc nommé Pierre Minio , lui en fit refus, ^
caufedefon mauuais mefnageconu partout, PeriUc
picqué de honte & d'amour commence à Te rcrucjiler,&:
ramaflant Ion refte délibère faire vn voyage en Alexan-
drie d'F.gypte;pour commencer quelque trafic. Il s'em-
barque aucc quelques marchans pourceft eiled : mais
ayant faitvnc bonne partie du chemin, il ell acucilli d'v-
nc furieufe tourmente demer,& au boutde.troisiours le
raifleau qui le poitoitprinspar vn cotrfaire. Ayant ert4
captif en grand qiilcre, Minio riche marchant , & chari-
table, (couîlume qu'il auoit de longue mainjeuchar-
gca quelques fiens fadeurs faifans voile en la coite de
Barbarie,de racheter des majns des courfaires Mahume-
tains dix prifonniers Neapolitains , defquels (s'il*
auoyent quelques biens au pays ) il fe faifoit rembourfer
auec le temps. Et quant aux pauures , il les gvatifioit de
leur rançon. PeriUe fut du nombre des dix,& de retour
à Naples ayant communiqué fecrettemeut auec la fille
de Minio, qui lui promit mariage , il trcuue m.oycn de
le rembourfer de fa rançon, &. Cx: faire vn nouucauvoy-
ageenLeuant, où il ht heureux trafic, & en peu de
temps fe vid plus de biens 'que fon père ne lui en auoic
Iflifle : le comportant au tefU û vcrtueufemeatiq w*il ac-
JÎ6 Mijloires admirables
<juit la bicn-vueillance de tous,rpccialeir»cnt cîc Minfa,!
auquel ayant pour la féconde fois demandé fa fille en
mariaecjcllc lui fut accordée, au grand contentement de
tous les parensflc amis. Les nopccsce célébrèrent en
grand ioycau mois de luin : & comme fes ie unes gens
cfteyent au lift deuifans des merueilles paffecs voici vn
orage impétueux qui s'eflcue , & des tonnerres du tout
cftranges, acompagnczd'eidairs terribles : finaieirienc
furumtvncoup de foudre, lequel tualerpoufé ScTef.
poufecqui le tenoycnc embraflcz , finiflant le plaifîr de
leur mariage folennizé ce four, auec les douleurs &
Ibufpirsde leur vie. Ils furent enterrez enfemblc fore
îionnorablement , & auec vn magnifique conuoy ti«
toute la ville, nijl. di Italie.
PAILLARDS funls.
LO R s que le Roy Louys Xll.fit la guerre a ux Véni-
tiens, & que ritalie eftoit rudement csbranflcc par
la fureur d*vne longue guerre , certain Gentil-homme
Milannois ennuyé de tant de maux fe retira en vnfien
chafteau,poury viure en Ion particulier.il eftoit veuf,^
aagc de 6o.ans,ayant vn fils aagé de xo. ans. & vn autre
beaucoup plus ieunc. Son aage,la mifere du temps,& fa
qualité dcuoyent le retenir en la voye d'honneur : mais i
oubliant le deuoir dVn gcnul-homme il s'amouracha v
dVnepayfane fille de fon piellayer, laquelle il acheta a
deniers côptant de l'exécrable pere,qui laluivêdit&li- i'
ura. Ccftegarcelubrique&defcfpercment impudente, ji
ayant ferui quelque têps à la vilenie du père deuintef- );.
pcrduemêt embrafec de l'amour de fon filsaifné,lcquel \)
ayant chcualé par diucrfcsrufcs,finalcmentvniour:>'ai- i ,
dât d'vne ficne coufinc & macquerclle, raborde,& après I i
les préfaces acouftumees à telles impudiques lui defcou-
ure honteufementfa poitrine & fon coeur, eilayantauec
larmes & foufpici; de l'induire au crime d'incefte.L'hon-
pcftç adolefcent, «ffrayé de telle refponfç eil tellement
forcifié
(^ memgrxhles. %%y
fortifié de Dieu , que ^on content d'cxcufe modelle &
^ fimpk refusjil tance ^riefuemcnt & celle qui le ten-
roit , & l'autre qui la fccondoujles renuoyant & mena*
çant par beaucoup de paroles.
La.conuoitife furieufedc cefte chienne le conuerric
incontinent en haine horrible, qui lui fait prendre
le chemin de confufîon.Si toft que le pcre eil: de retour,
la paillarde fc plaind à lui, que ion tils auoit trois ou
quatre mois durant cilayé de la corrompre : finalemenc
s'el^oit eftorcé de la violer , fans laferuante qui eftoïc
acourue au fecours. Lui adiouftant foy à cemefchann
rapportjconhrmé parla maqucrelle , commence à mur-
murer entre les dents: & fur ce voici entrer fon f.ls^
contre lequel, fans dire autres parolcb, /inon , ha! mef^
chant traiftre , eil-ce a moi que ru veux t'adrefîcr , pour
iouër tels traits ? ilfe rue Tefpee au poing. Le ieune
Gentil-homme fe dellournîmt pour euiter le coup:
& ne fe ibuuenant qu'il eftoit fur vn deftroit non a-
puyé refpondant a deux logis, toicbe à la rcnucrfe
de haut en bas, latelledeuant, laquelle fur efcrafee,
ayant donné contre vne pierre au fond du folle, telle-
ment qu'il expira foudain. Le parricide penfant qu'il
îuiliauté de ion mouuement, courut après vfant de
nouuelles menaces. Mais defcenJu à bas , & voyant
fon fils en tel eftat, après des cris de fureur & de del-
crpoir,ioind à vne deteftation de Tes forfaits prece-
<lens,&de la mefchanceté de fa paillarde, il le perça
de part en part de ion efpee, tombant fur le corps enco-
les chaud ^ trcmblottant de fon fils, & fe veautrant au
fang commua d'eux deux s'en alla en fon lieu. Quant ^
la paillarde , entendant par les clameurs cflVoyables
des domeifiqucs ce qui elloit auenu, toute agitée de
fureurs vcngcrefl'cs, ou pluftoft pourfuiuie du redou-
table ujoemcntde Dieu, vengeur du fang innocent^
elle s'enfuit deuers vn puiîis de la maifon , où elle fe
lance la telle deuant,&: y ell eltoufce. Le Podcilac
de Milan appelle pour voirie tout, le laifitde la 1er--
nante, lui fait coutelier à la queftion tout le fait : au
»oyen dç quoy çllc fui pendue & clbanglce : les
'388 Hijloires admirables
corps d'elle , de la paillarde & du vieillard, exjiofcz 6R
proye aux oii'eaux&aux loups. Mais le ieune gentil-
homme fut en grande pompe porté en terre,& pour fa
vertu regrette de grands 6c de petits,autant que les coul-
pablcs furent &: font encorcs detcftez de la pofterité.
Hifi. d'Italie.
Vn Flamand, natif de Gand,de fî bas liei, qu'on ne le
conoifToitpoint^ayant couru & rodé par la France & au-
tres régions pour le defpayfcr , y aprint à eftre hardi en
paroles &: ehtreprifes, & deuenu homme fait,rufé , par-
lant diuerslangages,& afTez bien équipé vint à Bruges,
où il fit en forte qu'il eut entrée & demeure en la niai-
fond'vn fort honnefte & riche marchant, pered*vne
tres-honnefte fille,aagce d'enuiron feize ans.Ce galand
fait a croire qu'il eftoitde bonne maifon d'Alemagnc,
& que pour n'eftre forcé d'efpoufer vnc certaine hlle
qui lui eftoit defagrcable , il s'eftoit abfenté pour vn
temps de la maifon de fon pere.Sur ce il fc comporte a-
oec tant d'artifices , que fous prom efle de mariage , il
desbauche mefchamment la fille de fon hofte,& fanale-
ment TengrofTe. La merc ayancau bout de quelques fe-
maincs defcouuert ce fale mefnage , tire la fille à part,
cjuien prefencedu pere^defcouure fa faute. Lepcr%
homme decœur,nepouuantrouftrirvn tel affront, fait
empoigner ce matois, &lepourfuit criminellement.
Tenu de près par fes iugcs, il confelTe ne fçauoirquie-
ftoit fon père , fa mère eltoit perie de pauuretc , n'auoic
parentage ni aueu de perfonnc ni à-GandjOÙ il eftimoic
eilre né;ni ailleurs. \.qs luges voyant l'audace de ce bc-
liftre,quiauoitfi indignement fouillé vne maifon ho-
norablc,le condamnèrent & firenc publiquement exécu-
ter à moK.uijiûire de noftre temps.
Nicolas prince d'Opohc en Silefie fut de fon temps
homme eil:rangement adonné à corrompre femmes, &
filles,tellcment que la pudicité des plus chartes n'eftoic
pas alTeurec près de lui. Ayant continué ce malheureux
train quelque temps, le iugemcnt de Dieu Tattrappa
J an i458.comrae s'enfuit. Lui & le Prince lean ion frè-
re îT^
C^memorAhles. 389
Tcs'eflans trouuczà Nifl'e enrafTemblee des eftats de
Silcfie,conuoque7,par Cafimir prince & gouuerneur du
pays: d'auanture Ton apporta en pleine afTcmblee à Ca-
fimir vn paquet , lequel ouuertil bailla les lettres à l'E-
uefque de Niffelà prefent pour les lire.NicolasJioramc
turbulent & impetueuxjimaginant que c'eftoit quelque
partie drelTee contre lui,pour s'emparer de fa perfonne,
met la main au poignard , & devitefl'e férue contre Ca-
/îmir & l'Euefque , Icfqucls ils blefla, mais légèrement:
pource que plufîeurs Seigneurs & gentils-hommes fc
mirent incontinent entre deux.Nicolas ayant failli fo»
coup fe fauue en la franchife du temple , d'où il fut tiré
parlccommandcmét de l'Euefque, qui allégua que To»
ne deuoit eu tel cas fc foucier des loix Ecclefiaftiques,5t
qu'aifément il reconfacreroit le lieu. Nicolas ramené e«
l'aflemblec & afprement rabroué , fut ferré en prifon,&;
le lendemain 17. luin , par fentencc du naagiftrat ordi-
naire décapité publiquement. La couftume de ce temp»-
li n'eftantque l'onportaft hauts de çhaufl'es en ces
lieux-là,quand le corps de Nicolas tomba, il fut veu en
tel eftat que Nature, par lui tant corrompue fembla luî
reprocher deuant tous les ordures palfees. JoâcluCm<£M^
tnfes annale i de Silefiejpag.zi^.
PASSIONS vehemenies de dueiU deioycy
de idoufie^defeuYyde trijtejfey&c.
DV temps que Csefar BorgiaDucdcVaIcntinois,5^'
fils du Pape Alexandre fixiefme , dominoit en U
Komagne, comme François Guichardin le monftre ei>
fonhiitoirc des guerres dltalie , fe trouua dedans la
ville deCefenc vnieune homme nommé Liuio, le-
quel s'eftant amouraché de la fille d'vn fien voifirr^
nommé Camille , & fe voyant rebuté du commence-
ment tomba en maladie qui le menaïufque.^ au fueil
de la mort. Camille entendant ceftc nouuelle , changp
«i'auis , & cftant allée voir la foeur de Liuio, laquelle Çj-
3 9 © Hijfoires admirables
ftoitaufïî griefucmcnt malade en vne chambre proche,
fa voix rcconucpar Liiiio, ilfutfaifi de fi vchcmcnte
pafïron, qu'après quelque cri la parole & toute vigueur
lui fiiillic.Sa loeur & Camille y eHans courues , car ji n'y
auoit ou'vne cloifon de bois maliointc entre deux, Ca-
mille ne pouuant plus fe feindre , commença à ioindre
fa hcc à la fiene , tellement cju'il reuient à foy , & en-
tend d'elle , que fi Ton père trouuoit bon leur mariage,
elle n'y contrcdiroit point. Liuio guéri fait demander
Camille fclon Tordre acouftumé entre gens d'honneur,
le père remet la decifion au retour du voyage de Ton
filsaifiié lequel eftoit à Rome. Camille attendant ce
retour s'apprmoife tellement de Liuio, que fanspou-
uoir patienter d'auantage, il fe promettent mariaoc par
Jjaroles de prefent. Or ce frère nomme Claude,nt tant
qu'ildcftournafon père de ce mariage, tellement qu'on
donna congé & refusa Liuio, dont Camille fut fi do-
lente , qu'après eftre tombée en diucrfes pamoifons
«'alitta. Liuio d'autre cofté la foîlicite par lettres &mef-
fagcs fccrets à raccompliffementdc leur mariage. Eux
trouuent moyen de dcuifcrenfcmble,& prennent hcu^
rc au foir pour leurs nopces clandeftines. Ce qu'ayant
"fait, & couche/ enfemble , le icune homme tranfporcé
de ioye & de Timperuofitc defon dcfir, au bout de
quelques heures trefpafla près de Camille , laquelle le
ftntant froid & expiré rendit aufli Tcfprit. La fer-
i.Tntcqui auoit fait lcsmcflages,conimencc àcrier ,l,c
frère accourt,& voyant ce inelhage lui donne vn coup
mortel, tlle dedure tout, & meurt deux iours après,
Claude û la telle n^uichec pour ce meurtre. Hifioire cCi-
faite.
En la guerre quele Roy Ferdinand mena contre la
Vefue du Roy Ican de Hongrie:autour de Bude,vn gen-
darme fut particulièrement remarqué de chacun pour
auoir excenîuement bien fait de fa perfonne en cer-
taine mçllee ; &jinconu, hautement loué, & plaint,
y eftant demeuré. Mais de nul tant que de Raifciac,
Seigneur Aleman , cfpris à'\nQ Ci rare vertu. Le
toip eilant rapporté , ccftui-ci d'ruc commune cuno-
/îcéi'a/K
érmemorahl», 391
(îté s'approcha pour voir qui s'eftoit : & les armes
oilccs au Mcfpaiîe ilrcconut Ton fils. Cela augmen-
ta la compaffion aux aflillans : lui feul i'ans ri eh à\-
rc , fans filler les yeux, fe tint debout, contemplant
fixement le corps de Ton fils , iufques à ce cjue la vé-
hémence de la trilteflc , ayant acablé fc$ efprirs vi-
taux,lc porta roide mort par terre. Paul loue en [es hifii»~
rei, Aîichel Seigneur de Montagnes aie iMure defei EffxU^chx-
fitrex,
L'ani^oi. lors que les François conquirent po*ir la
féconde fois le Royaume de Naplcs,fous la conduite du
Seigneur d'Aubigny, Lieutenant du Roy Louys XII.
vn de fils des GilbertDucdc Montpenfier , eftant allé
à Ponzzol pour voir le fepulchre de fon pcrc ( mort es
précédentes guerres d'Italie, & Li enterré) fe faifît telle-
ment, qu'après auoir refpandu vne infinité de larmes, il
tomba mort fur le fepulchre mefme. GmcharilnauciiT-
^uiejme U un des guerres d' Italie, fe^l,').
Sur la fin deTan mil cinq cens cinq , le Cardinal Hip-
polyte d'Eft, aimât ardemment vne ieune fille fa paren-
te, laquelle n'aimoitde moindre affedion Don lulcs^
frercbaftard du Cardinal, & confcilant elle mefme au
Cardinal que fur toutes chofcs, ce qui la rendoit fi fore
amoureufe,eiloitla beauté des yeux de Don Iules : le
Cardinal plein de furie,ayant efpié le temps auquel Iu-
les fortiroit de Ferrare pour aller à la chafTe, Tenuironna
en la campagne, & l'ayant fait dcfcendre de cheual , lui
fit par quelques fiens rftafficrs tirer les yeux hors de la
tefte,pource qu'ils eftoyenccopagnons dcibn amour, de
eut bien le cœur de regarder vne relie mefchanceté : ce
qui fut depuis caufe de trcfgrands fcandalcs entres le«
ircTCS. F. G uichardin tout à lifin du 6.liu. des guerres d'itaUs.
Ferdinand frerc d'Alfonfe Duc de Ferrare, & de Iules
(fufnommé) auquel le Cardinal Hyppolyt^ d'Ert auoic
fait arracher les yeux , mais Icfqucls par la propre & dili-
gente cure des Médecins lui furent remis fans perte de la
vcue,côfpiraensébleauec leditluleslamort duDuc.Fcr
<iinâdqui eitoit le fccôd après le Duc fut incité i ce fai-
Vpar la côuoicife des'tparcr de la duché;& Iules,pour-
Bb 4
39^ Hiffûires admirahks
ce qu'il lui fembloit qu'Alfonfc ne s'cftoitrcfTcnti du
toit qu'on lui auoit fait, & parce qu'il cftoit hors d'ef,
perancedefepouuoir autrement venger du Cardinal.
De leurs confeils & cntreprifes eftoit participant le
Comte Alberrin Bofchct, Gentilhomme de Modene: &
comme Us cuiTentgaionc & corrompu quelques gens
de baffe condition , qui eftoyent continuellement près
d'Alfonfe pour lui donner plaifir, ils eurent plufieurs
fois vn trefgrand moyen de le taerî: mais retenus d'vne
timidité fatale, ils laifTcrent toufîourspaiTer Toccafion,
en forte que (commeilauientprefque toufiours, quand
l'exécution àcs coniurations eft différée) la chofe eftant
venue en lumière, Ferdinand & les autres complices
furent emprifonnez , & Iules, qui (la confpiration dcC-
couuerte) s'en eftoit fui à Mantoue vers fa fœur,fut par
l'ordonnance du Marquis enuoyé prifonnierà Alfbniè,
après auoirreceu promefle qu'il ne le feroit point mou-
rir. Le Comte Albertin fut efcartelé auec les autres coul-
pables, & les deux frères condamnez à demeurer perpé-
tuellement prifonniers dans le Chafteauneuf de Ferra-
re. ». GtHcharcUnait 'jMa.f.cl.^.
Le Cardinal de Pauie , Légat du Pape,s'en eftant fui
de Bologne aff cgee par lesFrançois l'an 1511.& efté cau-
le de laperrc à'icclle , &deplu/îcurs grands defordres
<\\.n s'en ciloycntenfuiuis, fut accufé d'infidélité parles
vns,de couardife & d'imprudence par les autres. S'eftant
retire à Rauennc, pour fe purger de ce qui eftoit auenu,
flenuoyaiîgnifier fa venue au Pape, & lui demander
audiance. Dequoy le Pape , qui l'aimoit grandement,
futfenrtioyeux, Ôcle conuia au difncr auec lui. Mais
comme il y alloit, accompagné de Gui de Vaine fon
beaufrere , & de la garde de fes gen« de chenal , le Duc
d'Vrbin, chef de l'armcc du Pape, ancien ennemi de ce
Cardinal j encorcs enflammé de defdnin & defpir, de ce
qu'il difoit la rébellion & perte de Bologne eftve aue-
nue par fa faute, & au moyen d'icelie la defroute de l'ar-
mée, dont il eftoit chef, l'alla trouucr, & eftant entré
parmi leschcuaux defagarde, qui par honneur lui fai-
foycm largue, iJytua àc fa propre main auecvn poi-
gnard cç
S'^cmorâbles. 593
grardcc Cardinal, parauanture digne j pour le degré
c]u'iltcnoit,de n'eftrc point violé & outragé : maistrcP
digne de tout cruel fupplice , à catife de fes vices enor-
Jnes infinis. Fr.Gttlchardin au ^Mi*re fefl.lS,
Le Sjeur Yucsd'Alegre , chef d'vnc compagnie de
gcnfdarmes en la bataille de Rauenne,donneel'an iju.
voyant vn bataillon de piétons Italiens faire telle aux
Gafcons , leur donna fi rude charge qu'il les fitrcculer,
inaisauec plus grande valeur, que bon-heur au regard
du fucccsrparce que le fieur de Viuarais , Ton propre fils,
ayant cfté prefques aufTi toft tué deuât Ces propres yeux,
lui ne voulant furuiure après vne fi grande douleur , fe
iettaauecfon chcual en la foule la plus efpailfe de fes
ennemis , où il fut tué ( après en auoir fait mourir vn
grand nombre ) combattant comme il apartenoit à vn
vaillant capitaine. Fr.Gmchardm ait iz.littre feâ.n^. '
Philippe,pcre de Pierre Strofli,chef des bannis de Flo-
rence contre le Duc Cofmc de Medccis,ayant efté prins
prifonnier en bataille, craignant d'eflre exécuté à mort
parles mains de iuftice,refolut defc deffairc foi-mefme.
Là defTus auint quVn Efpagnol qui le gardoit,fortant de
la chambre où Philippe eftoit,'fut Ci mal-aduifé d'y laif-
fer fon efpee. Si toft qu'il fut vn peu eflongné, Philippe
ferme la porte au vcrrouil dcfl'us foi, & empoigne prôp-
tement cefte efpee , dont il met la pointe contre fa gor-
ge, & fe panchant de toute fa force deflus, fe tranfperça
& tua fur la place.On trouua fur la table vn petit billet
efcritdefarnain, portant que lui quin'auoitfceu viure
comme il apartenoit , s'cftoitabregé fesiours, pour ne
fubfifter pltis long temps au monde. Entre les Stoiques
ce fait feroit au tant célèbre, qu'il mérite d'cftre detefté
de tous ceux qui font inthuits en lavrpyc Philofophie.
P. Joue en fes hijioires. Shpplcment de SubcUù.
Antoine Vrcé, furnommé Codrus , ào6tc perfonnage
de noftre temps, côme fes cfcrits imprime/, en font foy,
auant fa chambre Si. cHudc en vn endroit reculé du pa-
lais de Forli , mais R obfcur furie commencement du
jour lufques fur les neuf heures , qu'il faloit neceflaire-
tiicnx allumer la chandelle pour y voir viair, 11 fe fer*
5 94 Hijioires admirables
lioit dVnc lampe de terre, fort belle & ingcnicufcment
faîte, au haut de laquelle eiloit emprainte vne deuiie
iatinc, pji^rtant en fommaire, Que les eOudcs , qui fcn-
tcnt la lampcfeiucnt bon. L'ayant laifle allumée en fa
chambre, auint qu'il en forticdu matin pour vaquer à
ç|uclque.s ataires par la ville. Surce,on ne Içait commet,
le feu le pnat a des papiers , & en peu de temps enuahit
tous les coins & endroits de ceft eftude, où tout fut con-
Tume^cât papiers,liures,que meubles. Entre autres efcrits
dciamainfutbruflé vnliure, intitulé Paftor, corne tout
îcrefte de fbn vaillant , au regard des biens du monde.
Onditqu'aux premières nouuelles de ceft embrafe met
il entra en tel delpitôc courroux contre foi-mefme , que
i»'craianc comme vn forcené, & courant par les rues vers
le palais,eftâtpres de la porte de fa «chambre, où il n'ofa
entrera cauic du feu, il commence à djre, adrcirantfoii
propos au Fils de Dieu , Quet*ay-iefait, O Chnft, ou
qui ai-ie oiFcnfé des tiens, pourquoy tuayes^ume
frapper, & delployepfur moi le tcfmoignagcd'vne hai-
neincxpiable ? Se tournant puis après vers vne image
<iela vierge Marie : Efcoute vierge , dit-il, ce que ie te
(declairc d'entendement raffis, & comme ic le penfe. Si
«î'auanture fur l'heure de montrefpas ic me recomman-
<îc a toi , ie te prie ne m'exauce pas , ni ne m'accepte au
nombre des tiens, ie fais cftat d'eftrc damne. Ses amis li
prefcns firent tout leur poflible , pour adoucir cefte fu-
reur : mais la cholcre bouillante & faifant vn feu dc-
«iansTamedc cemiferable, plus ardant & violent que
nulfeu du monde, nepcrmettoit qu'il peuil ouyrpa-
lole quelconque qui le redrcflaft. Il fut tellement aca-
blé de fa pad'ion, qu'ayant menacé tous Tes amis s'ilss'in-
^croycnt de la fuiurc , il fortit de la ville , & fans pou-
noir s'arreiler courut Te fourrer dedans vne foreft efpail-
fe proche de Forh , ou ilpafla tout le iour en terribles
<ii(cours &. tracas d'elprit, comme chacun peut p<;nrer.
Jîftant reuenu fort tard , & tronuant les portes fermées,
il fe coucha fur vn fumier, où il attenditle iour. Au ma-
tin il lentrp , & fe va cacher en la maiibn d'vn char^
f cutierptn lac^uellc il demeura lix mois eucieis , fans li-
uros
^ mémorables. 59^
u'esquelconques,& fans communiquer nuec perfonnc.
lî vefcut aHcz long temps apres,deuenu tout autre qu'il
ii'ciî:oitparauant, pculoucieux de vraye ou fauflc reli-
gion,&raourut mirerabl,nncnt.B4rr/?Wt'/?«Ve Bologne en la
'Vie d'i celui.
L'an 1551 Aldana Efpagnol, lieutenant du Roi Ferdi-
nand en la guerre de Hongrie; s'cilant acheminé au fîc-
se de Segedin , commit Figucroc capitaine Efpagnol , â
la garde des bafteaux au pafTage d'vnc riuiere nommée
la Tiffe.îcclui ayant eu nouucUcsdela honteufe fuite
d'Aldana , lequel s'eftoit donné vnc vaine efpouuante>
lit comme fon maiflrc , & ayant quitté le paflage penfa
.i faire retraite. Toil après defpité contre foi-mefmesde
rafaute,ilrefolut de fctucr,ceque fon cfcuyer empef^
cha tant qu'il peut:mais Fi^ucroe délibéré de faire fon
coup, pria fon efcuyer de l'attendre fous vn arbre , iuf-
qucsà ce qu'il euftefté a fcs neceflltcz. L'efcuyerqiri
rauoit deffaifi de fcs armes lui obéit au refte.Mais cftant
i repos fous l'arbre, il s'endormit en attendant fon mai-
ftre.Figueroe rapprochant tout bellement toftapres,fe
failît furtiuement d'vne pillole, qu'il lafclic contre foi-
mefme,& fe tue fur la phcc^^^fcaniHi Centonu6:,au ^.Intre
de f:n hijhire dela<;^uerre de rranjjyluanie.
Les Vénitiens ayans efté dcstaits à la Guiaraddadc par
le Koy Louys XI. le i4.iour de May if o«?.puis après def-
pouillezdela plufpart de ce qu'ils tenoyeut en terre
fermeTcftonnez de leurs maux, & craignansmerueillcu-
lèmeiitquc le Roy ne paiTall outre,& les affaires par
ieu/ opinion iugees réduites à l'extrémité , la crainte
CQnceuë en leurs cœurs fut fi violente, que fans prendre
l^ifir de regarder à eux,& fe bien confeiller , & leurs
compagnies retirées en vn lieu nommé Mettre , viuan-
tes lans difciphne militaire:ils deliberevcnt de quitter la
Seigneurie de terre ferme, afin de n'auoir plusTEmpe-
rcur, le Roi & le Pape fur les bras» comme ils auoycnt
eu parauant: & pour oftcr aufli au Koy l'occafion d ap-
procher de Venife. Ils craignoyenr qu'en leur ville ne
îcfift quelque tumulte par le peuple > ou parla grande
multitude d'cftrangers qui y Labiccnt , ceux-ci px)m k
39^ Hifloir es admirables
défît de piller, & ceux la pour ne vouloir endurer, puis
qu'ils eftoycntnezpar longue fuite d'annccs en mcfme
cite, voire plusieurs de mefme faug & famille, de fc voir
priucr des honneurs & charges publiques , & en toutes
chofcs prefqucs fuicts aux gentils-hommes. Pour acroi-
ftrelcdefcfpoir&ia faute décourage, ccil^c raifonfut
cncoreallcguecau Scrtat,queiî volontairement ils quit-
toyent la Seigneurie, pour fuir les dangers prefens,la
bonne fortune retournant, ils la recouuroyétplus ailc-
mennpar ce que les peuples qui auroycnt cfté volontai-
rement fcparez d'eux,ne reiîlleroyent Ci fort pour ne re-
tourner fous l'obéi fiance de leurs anciens Seigneurs,c5-
me ilsfcroyent , s'ils en eltoyent partis auec manifcfte
rebelhon.Pour ces raifons^lagenerofitë Vénitienne mi-
Icfouslepied, enfemble la grandeur d'vne fi glorieufe
Kepublique , contents de fe retenir feulement les eaux
falccs, ils enuoyerent des mandemens aux Magiftrats &
oflicicrs qui eftoyent dedans Padouë,dans Verone,& au-
tres villes deftinees par les articles de la ligue,à l'Empe-
reur Maximiiian,le(quels portoycnt qu ils eulfeiu à en
panir aufli toft, les laiflant au pouuoir des peuples.
OutTepîus,afin d'obtenir de Maximilian la paix i qucl-
«îue prix & condition que cefuft,ils luienuoyerent en
grande diligence Antoine luftinian Ambafladeuv, le-
^ <îuel admis douant lui en publicfit vne harangue pitoy-
able,& auectref-grande fubmifiTion: mais en vain , parce
<ïue l'Empereur refufa de faire aucun accord fans le Roi,
auec qui les Vénitiens ncvouloyent traitter en façon
<jue ce fufl:. Cefte harangue fe lit tout du long en Gui-
chardin, & monftre (comu^c portent les annotations
<iui y ont efté adiouilees en marge) la petiteflede la
grandeur humaine,à qui Taduerfité olle les efchaflcs , &
Ja fait voir ce qu'elle eft,à fçauoir chetifuc en toutes
ibrtes:& que quand Tcloqucncc humaine eft eftonnec,
les difcours font en^antiles,& pleins de flatterie impor-
tune & infupportabLe. Briefen toutes les foumiHions
des Venifiens,qui fercndoycntla corde au col à vn qui
ne les pouuoit gueresfoulagcr , on defcouurit lesfrui(fts
delà crainte ouiproftiti^e à chofcs viles a uUi bien va
■ ■" corpj
^ mémorables. 397
corps d'eftatqu'vn particulier :& le luge fouuerain aba-
tantlcs puiflansdeleuts lîeges, & vendangeant les ef^
prits des grands de ce monde.Fr. Gi*îchardm attS. limefe'
En la bataille tant renommée à Pauiel'an 1^14. leaa
Diefpach , Colonnel des Suifles, voyant Ton bataillon
charge & mis en route par le Marquis Del Guaft gêne-
rai de Tinfantcrie ImperialejCans auoir prefté aucun cô-
bat, & que de paroles ni à coupsd'cfpee ilnepouuoic
arreftcr les pori'enfeignesjfut faifî de telle douleur,qu'il
refolut n'auoir part à (î honteufe retraite. La deflus il fe
iette à tefte baifîee à trauers les ennemis où auec les ar-
mes au poing il mourut en digne chef de guerre. i?ai»1
lotte en la 'vie du Marqmii de Pefqttaire.Uur.l6 .
Pomperan , gentil-homme François , voyant Aucrfe
prinfc par les troupes de l'Empereur Charles cinquieC
me, cltonné de telle defconuenue , Icuant les yeux au
ciel &faifi de douleur extrême, tomba tout defonlong
à terre,&lesyeuxain(î ouuerts expira : fans que par re-
mèdes aucuns Ton peuft empefcher l'ame de quitter le
corps. Va»l loue au i6. lium de (es hiftoires.
Zeangirfilsdu Sultan Solyman, voyant par terre le
corps de Ton frcre Muftafa , eftranglé d'vne chorde d'arc
parle commandementdu ptre, en prefencede ce parri-
cide defgaina fon poignard , & après quelques repro-
ches fe tua foi-mefme. ^^fcaniii^ Centerius au 6. Hure dei
vuerres de T raujjyluanie.
Alfonce Albuquerque Lieutenant pour le Roy de
Portugal enTIndeOriencalcayant enuiron l'an 1514. e-
ftabli gouuerneurs en Malaca, pour adminiftreriuitice
aux marchands, deux Seigneurs du pays, l'vn nommé
Ninachetuen, l'autre Vtetimutaraia, quelque temps a-
pres changea d'aduis, & pria Ninachetuen de refîgnet
fa dignité pour la bailler à vn autre Seigneur, Roy de
Campar, qui cftvn petit royaume en ces pays là vers le
midi. Ninachetuen fâchant qu'où eftoit allé quérir ce
roitelet, pour l'inflallcr en fa place, conclud enfoi-mef-
me ne fouffrirnullementd'eftreainfi dégradé. Pourtant
fic-U drcffer vn efchaflfaut cfleué ^longuet, apuyéfur
398 Hiftûires admirables
tjuelqlies colomnesjtapifTé orne de fleurs & parfums e«'
abondance. Cela fait,il fe veftit d'vnc robe de drap d'or,
& tout couucrc de pierres precieufes fortit en rucainlt
ccjuipé)moiuâtpar des degrez fur rcfchafaut. Il yauoic
au bas vn bûcher de bois odoriférant bien agence & al-
lume. Cwile pompe extraordinaire de Ninachetucn fit
leuer les yeux & les oreilles de tout le peuple, ne iachinc
que vouloit dire tout ceft appareil. Nmachetucn com-
mença lors à faire vnc piteufc Jiaranguc , & en premier
lieu ramenoic Tes fcruiccs faits aux Portugais aïKint la
prife de Malaca : ce qu'il auoit fait depuis en faucur de
leur Roi: & combien il s'eftpit monllré ferme &fidele
en Ton deuoir : auec quelle refolution il auoit hazardé
fa vie en plj^curs endroits , pour prcuuc de fa loyauté.
Qu^e pour recompenfc de tant de bons deuoirs,les Por-
tugais vouloycnt diflamer de telle forte fa vieillefîe,
qu'il eftoit impoflible de ttouucr homme ayant fon
honneurcn quelque recommendation, qui voulu 11 ni
pcuft digérer telle honte en aucune façon.-car ils le de'.-
pouilloyent de la charge qu'eux mefmcs lui auoycnc
commife,le dcgradoyent de fes honneurs, le reputans ii
peu que de vouloir qu'il acheuaftfcs ioursignominicu-
fement, &fcrui{l defable & derifce à tout le monde.
Qu'il auoit quant à lui , tou/îours moins eftimé fa vie
que fon honneur, & fait mcfmcs fa refolution de mou-
rir pourconferucr fa réputation : pourtant qu'i l'heure
prefenteil changcoit volontiers fa vie à lamorcplulloft
qiîC de receuoir l'afifront qu'on lui vouloir faire. Hinif^
fant ce propos il fc ierte dedans le feu.oii il cxpira.Cha-
cun regretta & pleura ce perfonnage ainfi mort, con/îds-
rant ce qu'il auoit fait pour les Portugais, fa fidélité en
tous accidens , & la pitoyable fin de fa vieillelfe : telle-
lîicnt que leschcueux drelToyent en telle à plulicurs
qui s'efloyent trouué à ce fpcCtaclc.O/r»-/**; ►♦/♦ ^.U.d^jbn
htjl.de PortnrraUcU. 17,
Vil riche marchand s*cftant amouraché de cerrauie
fille lafcha tellement la bride i fa paffion , qu'elle l'em-
porta hors des limites de toute raifon, tellement qu'il
«ieuinc infenfc» 6; dc/i diran^chumcuc mclancho-
Uquc^
é* memoYahles* '3 9^9
liquc, qu'il eftoit agité d'horribles vifiohstantdeiour
que de nuid:quelquesfois criant & temp^ftant, par fois-
riant à gorge defployee. Iliuroit que fa bicn-aimeee-
ôoit continuellement deuant Tes yeux , la fiattoir &: ca-
reiToit corne fi elle eufteftéprefentc : puis tout foudain
la tançoit & l'outrageoit de toutes façons, pource qu'el'-
Je refufoit de Taimer. 11 ne parloit que d'elle, tout le
iour il nç cefloit de foufpirer & plaindre : la nui<fiil a-
uoit toufiours les yeux ouuerts en gemiflant : & fefuil
maintesfois tué roi-mcfme , fi fcs païens & amis ne len
euil'ent gardé. Ayant efte i\x mois entiers en tel ei}ar,ie
fus appelle où il eftoit pour y remédier, & auec beau-
<ïoup de difïicultez,parh grâce de Dieu, ie le medeclrfay
fi heureuremeur,qu'il fut remis en Ion bon fens. Fu^u^
4f:riola^cn fes obf:rH.mtdecmales,Utt,z.obfcru.7 ,
Vn Confeiller au Parlement de Grenoble, efpri^ de
l'amour dVne Damoifellc , en fut fi extrêmement ppfl
fionné, qu'il quitta fon eflat & toute honneftet^j oour
Ja fuiure par tout où elle alloit. Mefprisé d elle , il s*a-
nonchalit tellement, que ne tenant conte de fa propre
pcrfonncil fut acueilli de poux , qui prindrent telle ha-
bitude eu lui,qu'on ne peut iam,ais l'en defenger.Car ils
croifloyent fur lui , & fortoycnt de toutes les parties de
fon corps comme Ton void iortir les vers d'vne charon-
sne pourrie.Finalcment,quelques iouvs deuant fa mort,
fe voyant atteint de la main de Dieu , il commençai
defefperer de la mifericorde d'icelui : & pour abréger Vcs
iours,concluddefelaifler mourir de faim : joint que les
poux le renoyét de fi court à la gorge, qu'ils fembloyenc
vouloirTeibangler. Ceux qui voyoyent ce fpedacle
furent grandement efmeus , & de pitié conclurent de le
contraindre à manger, vouluft-il ou non:5: pour lui fai-
re prendre de coulis & prefTis, d'autant qu'il y refiiloïc
«le toute la force , ils lui lièrent les bras , & le baailloii-
nercnt d'vn ba{lon,pour tenir la bouche ouuertc, pen-
dant qu'on y mettoit la viande. Eilant ainu baaillonné,
ilmourutcomme vn beiU- enragée , de l'abondance des
oux, qui entrèrent iufquescn la gorge. Cela auinc
au 155^. \ii^Uiu<U fYnii(jhJsç(/nd,
ï-
400 Hijloires admirahles
Le Pape Léon X. ayant efté aduerti de lapriiife àMi^
lan,qu il auoi* extrêmement fouhaitee, entra en tel ex-
cès de loy c,c]ue la fieure Ten print , & en mourut. M. de
Alontavne an l. Ut*re de fa ^Jfuh 3 ch.z, Panl lout en lu uie de
Léon y.. Un, 4.
Sinas, gênerai des galères Turquefques , ayant recou-
urcvn iicn fils vnique,qu'jleftimoitperdu,moururtouc
foudain de grande ioyc. vatU lohe en fis h/Jtoires. Quel-
ques femmesfont mortes deioye, de trillefle , & d'au-
tres pafl~ions véhémentes. Mais nous referuons d en par-
ler nilleursr& leur gardons vn liure à part.
J\. la iournec de ScrifoUes monfîeur d'Anguyen eflTaya
deux fois defe donner de l'efpce dans la gorgcdelefpe-
ré de la fortune du combat , qui fe porta mal à l'endroit
où il eftoit : & cuida par précipitation fe priuer de la
iouyfianced'vne fî belle vidoire. L'Iflc de Goze forcée
par les Turcs, il y a quelques années , vn Sicilien qui a-
uoit deux belles filles preftes à marier, les tua de fa
main, & leur mère après qui acourut à leur mort. Cela
fait fortant en rue auec vne arbalefte,S: vne harquebou-
2e, de deux coups il en tua les deux premiers Turcs qui
s'approchèrent de fa porterpuis mettât l'efpec au poing,
alla fe méfier furieufemcnt , où il fut foudain enuelopé
& mis en pièces, fe fauuant ainfi de feruagc , après en a-»
uoir deliuré les fiens. Aï Je Montagne au z.Um, defei ijfau.
On m'a conté qu'vn prifonnier de qualité, eftant en
nos conciergeries , Tes parens aducrtis qu'il feroit certai-
nement condamne , pour euiter la honte de telle mort,
apofterent vn preïlre pour lui dire , que le fouuerain re-
mède de fa deliurance,cftoit qu'il fe recommandait à tel'
faindj auec tel & tel vœu , & qu'il furt huKft iours fans
prendre aucun aliment, quelque défaillance & foiblelîe
qu'il fentift en foi. Il l'en creut,& par ce moyen fe desfit,
fans y penfer de la vie. Ihmefme.
Il y a quelques années qu'à deux lieues de ma maifan
vn homme de village, qui a vefcu long temps depuis,
ayant la terte de long temps rompue par la ialouûe de iTa
femme rcuenauc vn lour de fa befongne» de elLele bieiv>
veignanç
C^ mémorables* 40I
veigaaût de fes criailleries acoiiftu'rnces , entra en telle
fjiricque fur le champ à toutla feipc cju'il renoit enco-
re en fes mains, s'cftâtmoiflbnné tout net les pièces tjiiî
la mettoyent en Heure , les lui ietta au nez. Ht il fe àizy
<ju'vn ieune gentil-homme des noftres , ayant paiia
pourfuitc feduit vne damoifclle, defefperé de ce que fur
le point d'en iouyr, ils'eftoit trouué mol lui-mermcs&:
défailli , il fepriuafoudain de fes parties honteufes ; en
fon logis, & cnuoya celle cruelle & fanglante vidime
pour la purgation de fon offenfe. Mje Montagne an iMtK
tU fes ejjun il h.2. 9.
André Contarin gentil-homme Venir'en, maladif, &
à caufc de fon indiipolîtion , vu peu tendre du cerueau,
faifoit inftance pour obtenir quelque charge d''\!-,por-
tance. Ayant cfte refuf:- en plein confeil , toft après il fe
trouua parmi quelques ieunesgentils-hommesjlefquels
cuidans fe railler auec lui , dirent que François Fofcarin
Duc de Venife aucut efte caufe de ce rebut,Sc que tnndis
qu'il viuroir, Contarin ue deuoit pas s'attendre d'ellre
auancé. Lui pcuile de paffion véhémente de cholere &
dedcfpit, efpievniour qu'il defcendoit en la chapelle
dorée pour y ouyr Mefle. Il Tarrefte fur les dcc,rez, , fei-
gnant a uoir à lui communiquer de quelques ati'airesdo
confequence.Ceux qui accorapagnoycntleDuc fe tire-
rerent vn peu i quartier , afin que Contarin pcuî}. parier
mieux à fon aife. Alors il tire de dedous fon manteau va
poignard, dot il tuoitle Duc,(i l'Ambairadeur de Sienc,
n'euft faifi le bras de Contarinjteilemét qu'en lieu de lui
dôner dedâs le feinde coup porta en i'vne des ioues près
du ncz.Incontincr plufieurs Seigneurs acourctli,côfer-
uét le Duc,& faififlcnt Côtarin qui tafchoit fe fauuer.U
eut puis après le poing coupé fur ces mcfmes degrez,
puis fur pcdu & elhâglé en le place acouilumee.Tel fut
Je loyer de fa pafùon veheméte. Sahdl.aa i.ii. dcfuVuud,
La véhémence du defefpcr fat eilrange en Laurent
L aurentian dofte Mctierrin à Florence. . Icelui ayant a-
cheté vne nlaifon, Ce payé le tiers d'iccllc,auec paiï qu,e<
«'il ne fatisfaifoit du relie dedans f x njois après , ce tiers
payé feroit perdu pour lui : le terme efcheu, n'aya^iç
C c
4 o i Hijloires admirables
deniers pour fournir , ils'crmcut tellement , que fans
confulter d'auantage, il s'en alla fe prccipitcr dedans vn
puits profond,au temps que Pierre Soderin grand gon-
falonnicr de Florence , gouuernoit la République , peu
auant la dommatjon des Medgcis. P. loue en U -vie des
hommes ilhtjhes,
l'ay veu vn homme lequel s'efpouuantoit de foy-
mefme , & fe mcttoit par fois à crier comme vn enfant;
Se en tout le demeurant , il auoit autant de force & de
couraçequ'vn autre hommecuftpeu auoir. L'on racon-
te aufli d'\ n Seigneur Efpagnol , qu'il ciloit fî peureux,
que fi on lui fermoir quelque porte de la mailon en la-
quelle il eftoit a certaine heure de la nuic^il prenoit tel-
le frayeurj& le troubloitfi fort,queplufieurs fois il vou-
loir fe ietterpar lesfeneftrcs en bas. f_yînt.Torqi*cmude eit
la ^.iûttrnee defes difconn.
l'ay veu vne femme;,ma proche parente^trauaillee de
certaine maligne humeur melancholiquc j, nommée
d'aucuns Mirrachie , caufe fouuent de frencfie & de fu-
rie en ceux qui en font atteints , s'aider tellement de la
difcretion & raifon, que lamais celt humeur nepeutl'a-
cheuer de vaincre. Ceftoit merucillcs de voir le combat
de la raifon & de la melanchohe en celte femme, laquel-
le fciettoit à bouchon contre terre au fort de l'accès,
dcfchiroit Tes habillemens,, iettoit des pierres à ceux qui
la regardoyent , fcbattoit contre ceux qu'elle rcncon-
troir, Scfaifoit tout plein d'autres telles tolies : maispar
la raifon ellefe maintint fi ferme, qu'en fin ceit humeur
s'efcoula, demeurant en fon iugement fain & libre,com-
meauparauant, Latnefine.
L'an mil cinq cens cinquante huid , le Curé de Cu-
pre en tfcoile , voyant que fes paroifllensjau mefpris de
Tauthonce qu'il pcnfoit auoir acqiiife fur eux, clloyenc
mausrélui entre/ dedans le temple de fa cure , yauoy-
ent abatu les images , fans en laiiîcr \ ne entière ni dc-
bout,entra en telle cholere,melanchohc & dcfefpoir , à
caufe de cell ade, que la nuiâ: fuiuantc telle exécution
iliedesfit&tuafoy mefinede fa propre main. Buchu-
nan,Uhilixief>m ln*re dtfon hijioire d' tfcojja.
Vn
^ memomhles. ' 40c
Vn quidcim auoit les mcdccincs en tel dcrdain , que
l'odeur feule d'vne fentie contre fon ^ré lui dcfuoya
tellement le ventre, qu'il fut contraint a aller fept fois à
fes affaires à l'inliantjiufqucs à en auoir vn accès défie-
ure,là où celui qui auoit prins volcnraiiement la mede-
cincn'en fit que trois. Al. ,_Ambroife Paré en fon introJu-
dufl:on alachirttrgicych. iz.
L'homme de chambre du fieur de Lanfàc le ieunc ra-
contoit,qu'vn gentil-homme François eftant en Polon-
gne ayant la fieure quarte fe promenant le long de I2
yiftuie fleuuc,au commencement de fon accès fut pouf-
fé par vn fien ami, en rinnt,dedans ledit fleuuc:dont il eut
telle frayeur , combien qu'il fçcuft bien nager , comme
aufli l'autre qui l'auoit pouifé,, que depuis il n'eut la he-
ure. L a mefmeych.z^.
Du camp d'Amieiisle Roi Henri T I. m^ commanda
«l'aller à Dourlan pour pesfer plulieurs Capitaines &
foldats,qui auoyenc elle hleffez par les Efpagnols,en v-
nefortie. Le Capitaine Saint Aubin dcmeurantprcs
d'Amiens , gentil-homme vaillant , s'il y en a eu de foji
temps en France,quoy qu'il fuft lors de l'alarme en l'ac-
cès de fa fieure quarte,le lèua du lia: ;, monta à cheual
pour commander à vne partie de fa compagnie, fut bief-
le d'vnc harquebufade tout à trauers du col, dontil eut
telle apprchenjfîon de la mort, qu'à Tmftant il perdit fa
fieure, & depuis fut guéri de fa blcflinc^a vefculong
temps après. Qui voudroit faire recerche de tel-
les hiftoires, il s'en trouueroit vn grand nombre, l^
mefme.
François Valleriola, Médecin tte(-renommé d'Arles,
çfcrit en l'obferuation 4. du z. liure de fes obfcruations,
<l*vn habitant en ladide ville d'Arles^ nommé Ican Bar-
Icn , lequelauoit efté par plufienrs années confine en
vnlidjciraifon.d'vne paralylie. Auint que le feu fe mit
«nia chambre ou il eltoit couché, & fut tel qu'il
brufla le planche & quelques meubles aflez près de fon
iid.Lui lè voyant en danger d'cllre brufit-, ''c lant qu'il
gaigna vne feneilre par laquelle il fe ictte en basj
èi. commença iiiconrincnt a cheminer , 8c fut gucri
Ce i
404 HiBûires admirahles
de fa pai-aly/îe. Le mcfme Vallei iola'efcrit en ceftc ob-
feruation vnehiftoiremerueilleurede ce qui :4uincà vn
fîen coufin maternel nommé lean Sobirac, lequel eftoit
en Auiî^non perdus de deux iambes,ayans les iarrecs re-
tirez deconuulfion , enuiron fixans y auoit. Ceftui-ci
vn iour fe colera tellement contre Ton valet, & s'efforça
de forte à l'attendre pour le battre, qu'à l'inftant les nerfs
s'eftendirent & amolIirent,dont il recouura la force & de
les iambcs & marcha droit, comme il a toufîours fait de-
puis, laniefme,
L'Archcuefque de Bourges , homme fort ancien, &
«]ui n'auoit che miné depuis enuiron quatre ans , ayant
oui le bruit de certain nombre de cauallerie, que le
comte de Montgommery auoit amené d'Orléans, moy-
ennant quoy il s'eftoit rendu maiftre de Bourges, & fa-
chant combien il cftoit coulpable enucrs ceux qui e-
ftoyent pour l'heure les plus forts emporté de cefte ap-
prehenfion trouua jfî bien fcs ïambes qu'il s'en alla à
pied depuis fachambre enlaruc& iufques dedans la
grolî'c tour,faifant aporter fon argenterie. h t/îo/j-e despn-
7iHers troubles de Frame^joHS Charles ^.UikJ.
En mefme temps, & près d'Iffoudun en Bcrry le fieur
de Coudray ( chafteau afllegé parles troupes du fîeur
d'Yuoy) ayant vn peu auparauantprins quelques pau-
ures gens,& iccux liurez au fîeur de Sar/.ay , aiors com-
mandant à Kfoudunjqui les auoit fait prendre, craignant
d'cftre attrappé,fe fauua de bonne heure en vne fienne
inc{lairie,appellee Roziers,où ilmourut de peur. En la
mefme hifiûire3(^ au /nejmc liure.
En vne ville d'Italie nommée Eugubio, certain fort
tourmenté de ialoufîe , voyant qu'il ne pouuoit conoi-
flrefi fafcmmes'abandonnoita vn autrcl'ayant mena-
cée de lui iouer vn mauuais tour,fe cliaif ra foy mefme,
afin que fi elle deucnoit groffe puis aprcs,elle fut incon-
tinent conuaincue d'adultère. Liwe i.dc la confereme des
mertteilles anciennes ^ moderne:.
Enuiron l'an ]54o.lebaftard delamaifonde Campois
près de Romorantin, après auoir fohcite vne damoi-
/îrlJeJ'efpacc de deu.\ans, &i'auoir finalement leduire,
elknt
cf* mémorables, 40 j
cftaiit auenu qu'à rheuie qu'elle s'eftoît prefêntec & a->
bandonnee à lui,il ne s'elloit trouué difpoft pour en
iouyr,fe retira en fon logis à Chabris,fî derpirc contre
Iby-mefme qu'ayant pris vn ralbir cbez vn barbier,il s'en
couppa la partie, Tindirpcfîtion de laquelle l'auoit fru-
ftrëdcfon efperance , &'du fruift condamné d'vnefî
aialheureufe attente. Et l'ayant couppce l'enferma en
vn bufter.t>4« mcfmc liu. Ce peut eftre le gentil-homme
duquel parle M.de Montagne,comme nous l'auons mar-
qué ci deuant.
Vn certr.in pafl'cmentier furnommé Perauld, marié à
vne fcmme'non fufpcdte de maluerfation de fon corps,
mais peu agréable à fon mari , pour n'eftre pas aflez à
fon gouil , s'auifa finalement de le feparer du lid de fa
di&e femme, qu'il abandonnoit obliquement à Ces fer-
uiteurs logez près de la chambre d'icelle :& continua ce
^t,ain pluiieurs mois , prétendant la furprendre pour lui
ioUer vn mefchant tour , mais ellcfe maintint honne-
ilemtnt. Au contraire le miferable fc pollua d'adulterc
en ces entrefaides,& depuis a fait pauure fin. Mémoires
de nojlre temps.
Tay veu de mes yeux vn gentil-homme aflîs près de
certain^ damoifcUe vefue honnelle, laquelle il pour-
chaifeitd'auoirà femme,&: l'eut auec le temps. Comme
ildeuifoit auec elle en difnant, vne veine delà tempe
près del'aureillG , vint à s'ouurir d'elle mefme , dont il
fortit beaucoup de fang,qu'iltafcha de rellrcindre auec
fon ipouchoir.l'eftois afl^is auec eux à mefme table en vu
chafleauoù i'auois efté appelle pour traiter vn gentil-
homme m^hdc.Aiatth'Corihix ai* i.Uure dt fis confdîatiom
de médecine, chap.^.
Vne leune hlle que l'on empefchoit de fe marier, fe
contnllia tellement que ne celfant de pleurer, fans vou-
loir adm.cttie.confolation quelconque, s'enfuiuit vne
extrême douleur de tefte,dont nalquit l'cpilepiie, &
roft après la mon.hk mefme.
Certain cheualier Albanois ayant par diuerfcsfollicî-
tations tant fait qu'il eiloit parucnu à obtenir en maria-»
ge vne honneite femme vefue Italienne , Tvne des
Ce î
40^ Hijloires admirables
plus belles de fon rcmps,au bouc de quelques mois cfe-
ïiint lans caufe quelconque ialoux d'elle , d'vne paffion
du touteftranpc.Car il ii'auoit opinion quelcôque quel-
le forfirt m qu clic vouluft forfaire à fon honneur : mais
leulcmenr il eftoic en peine de ce qu'elle feroit après la
anortdelui:craignâr quequelque autre iouift après fon
Trelpas d';^'ne fi rare beauté.Sur ceftepaf/îon qui legei-
noitfansccUe il prend refolution furieufe. Vnenuid,
*]i!i fuftla derniere^ayant fait toutes les carefles dont il
•feutsauilcrà fa femme, laquelle raimoit/încerement,
pour la fin il tira de deflbus le cheuet de fon lia: vn poi-
gnard nud , &tcnantfa femme embrafîcc d'vne main
li poignarde de l'autre. Quoy fait,il fe donne tel coup
«u mefme poignard tout à Tinftant, qu'il expire incon-
iment.Sa femme non du tout morte , raconte à ceux qui
acourcnt au cri à'vnt fille de chambre furuenue au
oruit, cequeie chcualierlui auoit defcounert defa ia-
loufîe ettrange «S: crucllc,peu auant qaie la frapper, puis
meurt paifiblement. lufl. dltalie.
Vnieune gentil-homme en la cour de l'Empereur
CJiarles cinquicfme,s'eftant amouraché d'\ nedamoifcl-
le^fit tat:,queparcie par amour,partie par forccil cueillit
la ficurdc la virt^inité d'icelle.-ce qu'cftant defcouuerr,
pour auoir fur toiiz cor^mis Tade au logis de l'Empe-
reur,ayant efté emprifonné.ilfut condamné à perdre la
tcfterdontayanteu auislc foii que le lendemain termi-i
neroitfa vie, celle nuid là lui fut fi cfpouuantable &
de tel efted , que le lendemain venant à fortir de pri-
Ion, pour comparoir deuant le fiege de iuftice , afin
fl'ouyrla fentence de mort,tous le mcfconnoiffoyent,&
rinnpereur mefme. Car la peur TauGit tellement chan-
ge , qu'en lieu que le iour précèdent il auoit vne cou-
leur vermeille , le poil blond, les yeux agreables,tout le
tiaid du vifage fait pour regarder :lors il cftoitdeuenu
comme vn corps déterré , auoit les cheucux & la bjr-
be blanche ainfi qu'vn fcptuagenaire , & fcmbloit
pluftoft à quelque pendu qu'à vn homme viuanr>
ij'Empcreur ^ilimant qu'on euft fait quelque frau-
de ; & ^UG ce fuft vu autre cnnùaei fuppofe en
ia place
(jr memorMes, 407
la place Ju icuiic gentil-hoinine , Jequel n'auoit pas
atteint range de vingthuitans , fitfoudafn enquérir,
&receTchci"d'où vcnoitce merueilleux & fubit chan-
gement & confîdeicr de prcs la chofc : puis regardant
de fort près ce pauurc criminel eÔrayé , le defîr de
iullc vengeance fe conucrtit en mifcricorde : & com-
me rcucnu d'v n profond ell:onncnient en fa penfee , lui
dit, le tc.pardonne ton forfait : & commanda qu'on le
laiflaft allef , adiouftant qu'il auoit efté allez chaftié
défia de Ton forfait : fans y laiflcr encores la telle. Leuin,
Lemnini au 2. chapitre du fécond Uure de la. complexion di4
corps humain. Où il adioufte quelques raifons d'vn fî
notable changement : dont i'ay extrait ce qui s'en-
fuit , y adiouftant quelques mots pour plus grand
efclaircinemcnt. Enquisparvn grand perfonnage de
la caufe de iî prodigieux changement , ie refpondis
qu'il falloit la rapporter à la profonde apprehenfioit
i^ tref-attentiue penfee de la mortprocliaine , tranfper-
çant l'ame comme de part en part : car ceftc aftedion &
paflion de l'ame cftonnee , fut i\ violente & tant aipere
au ieunc genril-homme, que le chaud & l'efprit vital
eftoit prefquc amorti &ruffoqué en lui , toutesles par-
ties du corps perdans leur couleur viue & agréable
fe fleftrircnt & paifercnt foudain : tellement que,
les racines du poil , nourries & arrouzces parla fu-
mante vapeur qui eft entre cuir &chair,commc les hef-
besdela terre atteintes d'vne froide & feiche quahté»
s'aiîecherent & derpouillcrent promptemct leur naifue
beauté. Cartout ainlî quclesfucilles verdes d'arbres &
de vigne , en plein efté deuiencnt quclquesfois iau-
naftrcs& blafardes, àl'arriuee d'vnc chaleur trop ar-
dante, d'vnc grefle, d'vne pluie, d'vnc bife froide : aufsi
la vigeur du corps , la couleur , l'aparence extérieu-
re, le poil qui n'eft pas vne partie , mais fimplemcnt
vne dépendance du corps , prenent vne teinture de
grisou de blanc, à caufe que ce qui les maintenoit eft
cfteint. Ce que nous voyons aucnir à la plufpart de ceux
qui fe trouuent es hazarJs de la guerre , & es périls de
Ximcr, ou qui loue prwû'ti Uc maladies dangercufcs;
Ce 4
4û8 Hîflôir es admirables
carlorsilsncpenfcntcju'à vncchofe, fçauoir efl:, quels
mort les tient au colet : finonque d'auanture par lon-
gue acouftumancc (& folideinilrudion &: bonne refo-
lution parles cnfeignemens de la viaye philofophie , &
par raÔiftanceid'vn efp rit autre qu'humain) ilsfoycnc
accouftumez à ne le donner tant depeur.Ce qu'on void
nuenir au regard de l'accowftumance es vieux foldars 8c
mariniers : & quant à la louable refolution es gens de
bien.Orquâd l'horreur delà mort vient à faifîr vn hom-
me, ou que l'imagination d'icelle, plus atroce que li
mort mefme fe forme en la penfee , on meurt quelques-
fois deuantque mourir, comme il cftauenuù plufieurs:
ou bien les fens fe lliupificnt , tellement que les crimi-
nels ne Tentent point les coups, ain/îquc nous auons
veu en piufieurs décapitez &roue7,refl'emblans à àcs. a-
popleâ:iqucs,lethargiques,cpilcptiques,palmez, ou au-
tres qui ouurentlesyeux, & ne voycnt ni ne conoiflcnt
perfonne. Les dangers occurrens fur mer & fur terre,
cfquels l'image de mort paroic deuant les ycux,& fe for-
me encore plus en la penfccfont trembler & paflir ceux
Cjuis'y trouuent , le langie retire & s'enfuit de toutes
parts vers la forterefle du cœur : toutes les parties da
corps fetrouuent en vn inftantdeftituees de leur fuc
viral , nulle ne s'acquitte de fa charge , ains on void les
pieds chancelier, la veuë s obfcurcir , la force fondre,
Tcntendemcnt deuenir moufle , refprit abatu,lesioues
pendantes & flacqu es, la langue beguaye , & les dent?
craquent en la bouche.
^An-c^hque h )rrore romt -oox fcimih'M n.eret.
ce dit le p.ocre.Brief il n'y a homme (î lobuiic & afl'eurc,
qui ne branfle quand quelque danf^cr mortel vient i'a-
cueillirfoudain. Vray cflque le C.hrcllien conceuant
cfperaacecn la grâce de ion Dieu , reprend peu à peu
fcs elprits, fecouë la peur,s'aft"ermit , & dcuient inuinci-
ble, s'oppofantd'vn courage alaigre &: inexpugnable au
danger qu'il void cftrcinefuitabie. i^xceptc celui là , li
mort eifc horrible & eipouuantablc à toute nature qui a
rofpiration de vie : pc-urcc qu'elle deicruit celt nature.
Ilictiouucbien des flupides, des fuueux , des rcfucurs,
& autrci
e^ mernorahles. 4^9
& autres cerueaux altérez par vieilleffc décrépite, indiP
j ofitions corporelles, par enfcignemens erronne?:, par
jr^ifTions violentes & defreiglees ciicorcs plus que la
peur, qui n'appréhendent rien , ains pcrifTc^nt au dan-
gcr,8ifont eftcints auantciue s'en eftre doutez.
Vn autre ieune gentil-homme Efpagnol , nommé
laques Ororio,né d'^'illulhe famille, deuenu amoureux
dVnc Damoifelle de la Cour , ayant fait quelque com-
plot auec elle, grimpe en vn arbre toufu duiardin du
Rov,& s'y cache attendant fa commodité. Là dclTus vn
petit chien iuruient lequel par Tes abois defcouure le
perfonnagc, que l'on fait defccndre pour, aller en pri-
ion , afin de refpondre aux defpens de fa tefte de ceftc
faute tenue capitale en ces lieux, pour diuerfes raifons.
L'aireftde mort donné contre lui refpouuantafifort
que le lendemain matineôant deuenu tout blanc com-
me vn vieillard de quatre vingts ans, on ne le reconoiC-
foit non plus que l'autre. AufTi obtint il grâce du Roy
d'Efpagne ayeul de Charles cinquiefmé. W-air. lumuiiHte
Commeniaire de Conta, ch.ip, lo. L, Vlua en fa préface fnrle
Sonnre de Sclpion,
La raiion enreigne,.& les exemples confcrment , que
de peur, le poil noir ou d'autre couleur blanchit. Si l'a-
liment défaut au poil, nous dcucncns chauues : «'il ell
corrompu, il blanchit, pourcc qu'vne humeur non natu-
relle fucccde à celle qui fe refroidit. Nous en auons vne*-
Inilonede noftrc temps fous Francifque Gon/.ague. I-
celui, ayant pour furped de trahifon vn fien allié , le fit
cmprifonner en vne forte tour, en délibération del'ap-
plicjuer à la torture & le faire mourir.Le lendemain ma-
tin,le oeolicr vint lui dire que ce pnfonnier eiloit deue-
nu tout bianc. Vn tel accident amoUit le cœur du Prin-
ce,6«: fut caufe qu'il pardonna 6c donna la vie au prifon-
nier. lulcs C^far scaliger f. fu}\z. hxercitation 5 contre
Ciirdiiu.
Vn chaffeur cerchant au haut de certain rocher des
petisdeipreuier , Tentant que la corde dont il s'aidoit
pourdercendrererompoit>conccut telle peur,querou-
<iain k poillui deuinttouc blanc. Cdl. lihudi^imfi an 13.
4ÏO HifloiresâdmirMes
Ui^chAp.zj. de fcs a)iti(]ites leçons. l'en ayconu qui cfchnp-
pez contre cfpcranccd'vn naufrage,ciloyenten vn mo-
WiCntdcucnus tout chenus. H^dr. lunim uu co7nimnt. de
Coma,cJ}.i*>Ao.
le ne lui V pas bon naturalifte (qu'ils difent) &nerçay
guiere par quels reflortsla peurai^itcn nous , mais tant
y a que c'ell vnceftrange palfioniSc difent les médecins
.«qu'il n'en eft aucune, qui emporte plu^ort nolheiuge-
menthorsdefa deuè alTiette. De vray i'ay veu beau-
coup de gens deuenus infenfez de peur : & au plus rafsis
il ert certain , pendant que Ton accès dure, qu'elle en-
gendre de terribles esblouiflcmens. le lailfe à partie
vulgaire, à qui elle reprefcntetantoft les bifayculs for-
TÀs du tombeau , cnueloppez en leur fuaire , tantoft des
loups garous, des Lutins & des Chimères. Mais parmi
les guerriers mefme, où elle deuroit trouuer moins de
place, combien de fois a elle changé vn troupeau de
brebis en cfquadron de corfelets? desrofeaux & des can-
lîescngensd'armes&lanciers 5 nos amis ennos enne-
«lis? & la croix blanche à la rouge? Lorsque Monfieur
*ie Bourbon print Rome , vn port-enfeigne qui eftoit à
Id garde du bourg faind Picrrc,print tel effroy à la pre-
mière alarme,quepar le trou d'vne ruine il fc letta, l'en-
ieigne au poin,hors de hî ville droit aux ennemis , pcii-
Tant tirer vers le dedans de la ville & à peine, en fin vo-
yant la troupe de Monlîeur de Bourbon fe ranger pour
lefouftenir, ellimawtquece fuft vncfortic que ceux de
la ville fiflcnt,ilfereconut ,& tournant r;fte t'entra par
ce mefme trou par lequel il eftoit forti plus de trois cens
pasauantciilacampagne. Il n'en auint pas dutout(î
heurcufement à l'enfeigne du Capitaine luillc,lors que
S.Polfut pris fur nouspar le Comte de Burc&monfieur
Au Reu. Car eftant fi fort efperdu de la frayeur , que de
ic iettcr à tout fon cnfcignt hors de la ville, par vneca-
nonierc, il fut mis en pièces par les aifaïUans. Et au mel-
mefîegetut mémorable la pcur,qui ferra, faifit, & glaça
Il fort le cœur d'vn gentil-homme, qu'il en tomba roi'
de mort par terre à la brefche , Hms aucune blclfeure,
ef memorMes. 411
le Pape Paul troifîcfiiae ayant en l'an 1556". exhorté
r£nipereur Charles cinquJefme & le grand RoyFran-
i^ois de s'aboucher a Nice , la flotte de l'Empereur vint
inrgir au port de Vilie-franche^où ellefe mit à l'anchre.
Vn iour, enuiron midi comme quelques Imperialiftes
le proumenoyent , regardans la mer, & les Alpes fort
hautesjils defcouurirent vne nuée cfpaille, qui s'ede-
uoit comme fumée d'vn bafliment efleué en vn coftau
non trop loin d'eux. Etpource que celle nuée ^^rolfif-
Toit peu à peu , quelques v^ns commencèrent à mainte-
nir,que c'elloit vn tnite fignal & que Barberoufîe gêne-
rai de la flotte du Turc aprochoit pour attraper le Pape
& l'Empereur.Sur cefte peur ils crient alarme. Toute
i'armade prend Tefll-oy, /î chaud, que le Marquis del
Guafl: Colonnel de l'infanteriejconfeilla l'Empereur de
gaigncr le haut de l'Apennin, «Se André Dore qui com-
mandoità la flotte fît leuerlesanchres & tourner les
galères, l'Empereur ne bougea, diiant que e'eftoit vn
faux bruit. Auf/î fut-il fceu tofl après qu'vfi payfan ef-
couant des feues en l'aire à defcouuert. pour les tirer de
leurs gouflcs, auoitefmeu force pouffiere & à trentelîx
repnfcs fait efleuer cefte fumee,queplufieurscontoyenc
pour trente /îx galères, au commencement de leur peur,
& y eut mefmes des mattelots l'afFermans ainli ^ & que
c'eftoitla flotte Turquefque.Mais la fourbe dcfcouuer-
te^cefte peur qui auoit fait paflir & trembler la plufpart
futchangee en contes plaifans , ^ en ris i gorge def-
\)\oy (^Q.Paitl lûHc au 17 Mure defes hifioires. le ne marque
point ici la peur des armées au royaume deNaples,&
de la bataille de Montlheii:en l'vne deiqucUes on print
vn troupeau de cerfs & de biches pour mi bataillon de
genfdarmes: en lautve deschardons, pour vn cfcadroii
^e picquiers:comme loman.Pontanw au z.lùt. deUgtterre
de JVaplesj^h.de ComnUnes en Chijtoire de Louys XI,^ VauI
t^Emile au loMure en fontmcntionrpource que ie m'ar-
reite principalement aux hilloiiesdu /iecle 3 duquel
iious ne faifons que fortir.
Jin 1^ troifleimc guerre ciu;lc des François, fous le
41^ Hiflotres admirables
rcg, e de Charles ÏX.l'an 15 ^8. les armées eftansen Vol-
^o près de lafenucil aduint que le Prince de Condé
aya r failli quelque entrcprife &fe recirant furie loir,
tou le bagage de Ton infanterie vints'arrcftcr au long
d'vn bois.alicz près de la queue des genfdarmes : ou les
goujats & valets s'accommodèrent , penfans qu'on y
«leuit camper, y faifant quatre mille feux &d'auantage,
& n'appcrceureut l'armée du Prince fc retirer à caufe'de
la nuid, de manière que plufîeurs maillrcs foupercnt
bien maigrement ce foir li.Qu^elques vns de larmec du
Duc d'Anjou oppofee à celle du Prince , apcrceuans ce
^rand nombre de feux, tcnoyent pourcertain.que c'e-
fioyent l'armée du Princc,&: s'attendoycnt d'auoir ba-
taille lendemain.-ce qui les rcnditplus diligent a fortiher
leurs armées. Le Capitaine Garics s'oftrit d'aller conoi-
flre que c'elloitrmais on ne "oulut rien bazarder contre
ces brauesguerricrs,quicaufoyenc, chantoyent, &fai-
foyent grand chère auprès de leurs feux, fans appréhen-
der chofe quelconque: ils laiiToyent la peur aux autres,
cjui s'imaginèrent ce qui n'eftoit pas. Hifioire de noTirc
temps.
11 y a enuiron vingt fix ans qu'vn faux bruit femé de
rarriucc de l'armée Turquefque enuahit dételle l"or:e
toute la h^utc £c bafie Auftriche, que citadins & pay-
sans ,fans fjauoirl'autheurjfe donnèrent vue alarme c-
i^range, difans les vns aux autres que le Tuic auec tant
& tât de milfcrs d'hommes approchoit , & n'auoit plus
Tien à faire fînon entrer dedans le pays. La peur fut tel-
ie,que tous abandonnans leurs maifons, villages, bour-
J'.ades & A-illettes commencèrent à dellogcr par grofles
.troupes auec leurs femmes & leurs enfaas, les vns à che-
uaf.les autres en chariots, & la plufparr à pied, courans
tant qu'ils pouuoyent vers les villes & places fortes,cn /î
^rand' foule & de telle impetuofîte , que pluiîeurs cn-
fans tombe/ parterre , y furent mifcrablemcnt efcrafez
ious les pieds des chenaux & les roues des chariots cou-
rans impetucuicment.La Baronne de Kolcniteiii, dame
honorable & de finguliere pieté , m'a dit de fa bouche,
que ion mari citant pour lors i LiiUi , le Capitaine du
chov
(^memoTAhles. 4Tj
chafteaudeSchallenbourg, afllsfur l.i croupe d'vn ro-
cher où elle eftoitlors,viiit l'auertir que plu/îeurs baiT
des d'hommes , de femmes, d'enfans , acouroyent celle
part. Qu,'ellemit lors la telle à l'vne des feneitres, &:
vovant ces pauures gens courir comme moutons elpars,
fit monter à chcual l'vn de les valets, pour leur aller au
deuant, &fçauoirla caufc dVne teHe efpouuantc. Ce
valet de retour dit , que ces pauures gens aftermoyenc
que les efcadrons des Turcs eftovent i leur queue. Sur
cerapportlaBaronncrcçoitlcsfuyards, tellement que
le charteau, les bafles courts & fofîez en furent remplis.
Ceftc frayeur courut depuis Vienne iufqucs a Lints,
Teipace de trente heures de chemin. Le trompette de
Lints,quieilau gueten vnefenrinelle,d'ouil dcicouure
de fort loin,donneralarmc, comme files Turcs eulTenc
cité tout auprès , tellement que tous ceux de la ville
coururent incontinent aux armes. Mais ayant elle deP-
couuert toft après que c clloit vn haras de bœufs de
Hongrie , qui en rafe campagne auoyent efmeu force
pou(hcrc,chacun fe retira: & les fuyards cipars en mfinis
eudro!ts,ieprenans peu à peu leurs cfprits s'en retournè-
rent chez eux. Ai. Jacques H orfi medecm-i enfon hijhîre deld
dent d'or de l'enfant StUjïcn. *
L'an 1591. vn autre peur csbranfla tellement toute
la ville de Labac, capitale de Garnie, quc4qu'vn eilant
venu rapporter qu'vne puiffante armée Turquefque e-
floit près delà, que fans dire qui a perdu , nequiagai-
gne,tous grands &petis, ieuncs& vieux,commcnçent i
Te donner l'alarme , & i troufler bagage. Vous cufTiez,
veulesvns&les autres faire pacquers, charger chariots
du plus beau & meilleur qu'ils cuffent : les pauures ac-
commoder à leurs efpaules des ballots de tout ce qu'ils
pouuoyentporter, femmes chargées de leurs pctis en-
fans & menans les grandelers par la main. Les rues re-
tentiffoyent de hauts foulpirs , de lamentations, de cris
&brayemens miferablcs , meflcz dedans vn bruit con-
fus & tintamarre eilrange p:'.r toute la ville :briefvn pi-
toyable fpedaclc. Tcll^nacnt que lesnouuellcs vcûans
414 Hijloires admirables
àcontinucr que les Turcs apiochoycnt , il nefutplifl
cjucftion que de voir vnc fuite horrible de tous^aucc tel
dcfordrc,& tumulte fî impétueux &aueugle, qu'en la
foule des perronnes;dcschcuaux & chariots, plufieurs
enfansSc quelques femmes perdirent la vie , ayans elle
eftouffez.La peur dura trois iours, fans qu'il fuR polTiblc
par moyen quelconque der'aflcurer ni de ramener les
fuyars^qui finalement remis en autre pcnfce ,pardiuers
auis& mefl'ages, retourneront en leurs maifons; lo,
mejjne,
Aldana, Capitaine Efpagnol, lieutenant du Roi Fer-
dinandcn TraniTyluanic, craignantque Mahumet Bal-
fa de Bude ne vinil; ailleger Lippe , felaifîa tellement
gaigner par cefte peur, qu'il délibéra de ruiner la ville
& le chatlc'iu. Deux genfd'armcs ayans efté enuoyez ;î
la defcouuerte , n'ayans eu vent ni voix quelconque du
Baiïa,approchans delà plibce commencent à picquer &
courir à bride abarue,pour annoncer qu'il n'y auoitricn
à craindre. Ils elloyent fuiuis à'vn gros haras de beftail.
Aldana fe figurant que c'eftoitTarmee du Turc , dcuant
laquelle ces deux genfd'armes, fuyoycnt^ fans ruoir pa-
tience qu'ils fuflentarriuez, Sctraiifi de peur , fit mettre
le feu à vne traînée de poudre , qui rcnuerfa les toursjc
challeau, & brifales canôs au grâd regret de les foldats,
condamnans vne telle lafchete: quoy faitil s'enfuit en
Tranllyluanie. LcBalIa s'empare incontinent desrui-
nes,& d'vn chafleau inexpugnable, nomme Solimon,a-
bandonné des Chrcrticns eftonnez, lefquelsil pourfui-
uitcn telle diligence, qu'il les atteignit & tailla en pie-
ces.Puis ayant empoigné la Tranlîyluanie par ces deux
corn es, la loumit aifémcnt au ioug. /Mdana emprifohne*
&;conuaincu de fa lafchetéifut condamne a perdre la te-
lle , mais parrinterceflion de Marie Roine de Bohême,
fille de Charles le Qiiint & femme de Maximilian fe-
cond,il eutla vie l au uc.^_y4 fi am m Centoriu^ au 5. //.^ 6 dé
jon Cormnentairc de Li 'riicrre de TranjjylHanie.
Le Turc Solyman'ayant alTiegé Vienne en Auftriche
lei^.iour de Septembre ifi5?.lcs aflx'gez firent vne for-
tie en laquelle y auoic hui(fl milhoinines , le/ixiclme
iouf
ef" mémorables, 4 15^
îourd'Oélobre , en intention de chaiïer les ennemis
hors des fauxbourgs,& d'efuenter leurs mines. Ils chaf.
fcrent les Turcs qui eftoyent vers la porte du chaAeau,
& taillèrent en pièces plufîeurs vers la tour de Carin-
thie.Orcommeils eftoyent furie point d'entreprendre
d'auantage,&: qu'ils s'auançoyentcourageufement^ie ne
fcai qui vmt crier à haute voix qu'on le retiraft , & qu'il
faloit fe ranger en ordre de bataille. Ce cri donna G.
foudaine& telle peur aux foldats, qu'ils commencent
à le desbander,& fuir vers la ville, en tel defordre , qu&
Icsvnspouflez impetueufemcnt des autres tombèrent
dans les feffez & tranchees,où plufîeurs furent blel^"ez&
tuez de leurs propres armes. Le Capitaine Vvolfgang
Hag, voulant recueillir fes foldats, &leurramenteuanc
la valeur des anciens Alemans,fe trouua enueloppe par-
mi les Turcs, & abandonné des liens mourut les armes
au poing. Uiftotre dufie-re de V ienne.
Aullun, feigneur Gafcon, vaillant & de grande expé-
rience au faid de la guerre & duquel on auoit fait telle
eftime en Piedmont,quefaproueire eiioiten la bouche
detous:fetronuantà laiournee de Dreux , aux premiè-
res guerres ciuilcs de l'an 15 ô"!. print telle efpouuante
à la première chargcqu'jl fut chaflé delà peur iufquesà/
Paris, où fc reconoiflant il mourut de regret. Htjioire d&
Jrr^nce foiii Ch.trles IX.
lean Defgorris , tresdode médecin de noftre tempç>
comme fon liure des définitions médicinales en fait fo y,,
ayant efté appelle par l'Euefque de Melun , afin dele-
traiter en quelque maladie, pour retourner feuremenn
a Paris , ou il demeuroit , & afin que ceux de la vil-
le eftanslors en armes (c'eftoit durant les premiers trou-
ble^) ne lui fiffent dommage à caufe de la religion , TE-
ucfquele fit monter en ion coche , & conduire couuerc
& caché en icelui. Quelques marcha/is au fqucls l'Euef'
quedeuoit bonne fomme, & n'en pouuoyent rien ti-
rer,ayâs ienti le vent de la venue de ce cochclefontar-
refterpar desfergens, en intention de f;u(îr aufii tout le
meuble qui y pouuoiteftre. Cefte laificfaifit tellement
Defgorris , & Un donna telles afFrei;,péiant elhc tôbê es
41 ^ Hijloires admirables
mains de gens qui l'crgorgcro)^<ît , qu'il en fut pour
quelque temps blefTé en fon cnteildcment,& eut on aP
fez d'afairc à le remettre au deffus. T h. x^iivg^r au premier
Uurc dit premiers njolnme de fon threatrCypar le rapport de Hu-
bert La!\^ttet.
Charles du Moulin dofte iurifconfulteParifîen citant
en l'académie de Tubingue , pour y lire en droi6t , aux
gaecs du Duc de Vvirtembcrg, fut logé comme par for-
ce en la maifon d'vn certain Aleman natif du lieu , le-
quel ne prenant plaifir d'auoir vn tel hofte , qu'il appel-
loit"'eftranger,pour lemolerter fit vne recerche de ats
Se de fouris, & en lafcha bon nombre par les membres de
fon logis. Ce que voyant du Moulin , qui hailFuit mer-
ueilleufcment tels animaux , tout effrayé deflogea au
mefnie iniiant , & s'encourut cercher autre demeure,
T^hs^sr e7icemijmcUirfc.
Vn Lfpagnoirurnommé ValladarC:, eftanten prcfcn-
ce du Cardinal Ximencs, entre ceux qui afpiroyent .î
cil:re graduez en Théologie , & voyant qu'on en auoit
delîanommé cinq ou fixdeuant lui , entra en tel àcÇ-
pit&: fafchcried'efprit, fc voyant poftpofe aux autres,
qu'vne conuulfion le faffît,tellement que tous fes mem-
bres trembloyent : & eitant appelle le huidiefme , en fe ^
leuant delà place où il clloit, pour s'en aller feoir au
banc des graduez,ceiU^ place fut vcuc toute mouillée de
l'vrine : qui lui cftoit efchappeeen celte detrefle.,^/M4-
rj** Gcmez.iau' ^.liUrc de ihijl.du CardiuM Ximciies.
L'an mil cinq cens trente fîx , Nicolas Groupe eftant
enlaville d'Annebcrg, où des longtemps il attcndoïc
la première bonne prébende vacante que i'Euefquede
Mifne lui auoit promife , ayant receu lettres d'icclui qui
le declairoit fon fuftlagant & grand Vicaire, fut tel-
lement esbranic delà ioye qu'il feinoit, que fansauoir
ncheucdclirc relies lettres iulqucs au bout , tout à
l'heure il rendit felprit. c;. le Peui-t;^it 3. Uure de j}s aihîU"
les de MtJ'uc.
De noftre temps la lugeffe de Vic-fezenfac en la cô- |
té d' Armaignac, aagee de foixante ans , a laquelle on a- l
uoicdic(pourlarcurer de quelque compagnie) que fa !
fiXLer«
ef memoYahlesl 4 \f
fille fe mouroit, cftant arriuce , & la trouuant frîinc &:•
gaiUarde,mourut fouciain. loubert atiiUlure c{ttrh3cha.u.
Apres la iournec de Moutconcour,vne honnefte Da-
moirelle,eftimanteftie vefuc de Ton mari,braue Gentil-*
homme , duquel^iilui auoit faitrappor.t, qu'il y aucic
cftétué, le voyant au bout de quelque mois de retout
inopinément, fut efprife de telle ioye qu'elle mourut
foudain entre Tes bras. UtjlJc n^fire temps.
Durant la ligue vne autre Damoifclle, ayant après
beaucoup de folicitudcs, foliicitations, dcrptnfes, peurs
& grandes fafcheriesjrctiré Ton mari, doftc perfonnage,
& prifonnier plufieurs mois,en trefcruelles mains, ou il
fut garanti & conlerué comme par miracle , & prefques
ainh que Daniel en lafoflc des lyons , le voyant fain &
faufderetûur,futrauic de tel contentement, que toft a-^
près fon arriuee , die rendit Tauie à Dieu. Uijt. de noft-e
temps.
Vne femme honnorablecftimant que fon mari euft
cfte tué à Paris le ^4. iour d'AouJf 1^72.. pource qu'il ne
paroifi'oit point au terme qu'il lui auoit promis , d'eftre
de retour vers elle au comi^enccment de Septembre,
entendant trois fcmaincs après qu'il approcjioit fain &
fa uf de fa mailon, perdit la parole, <3<: ne peut lui dirt,le
voyant>mot quelconque,fînon le regarder comme touc
cfperdue: Ayant elpandu force larmes, ellereprint quel-
que peu la parole, comme reticn-int à iby de quelque
paîmoifon. Lesnuifts fuiuantcs iufcjucs à plus de quïïI'-.
zciours après, il lui fut impoflible de clorre l'œil plus
de rrois quarts d'heure chafquc nui<ft, touchant de fois à
autre fon mari dormant, & de iour le regardant par ad-*
miration, comme il elle n'euft point crcu à Tes fen^,. Fi-»
nalement elle fc rcprint tellement qu'elle m'a confefl'é
plus de dix ans après, que ccfte palTion l'aucit indici-
blemcnt choquée, ècesbranlee. Meîmcs par fois ie lui
ay oui dire bien à certes qu'en la grofîeifc d'vndeies
^nfrms ne plus d'on/e ans après ceft accident, elle auoii:
Icnti vne nouuelle recharge en la phantafie deccc;ui
cftoit auenu , îk tenoit pour allcuié que Ton fruids'cn
ientiroit : en quoy elle u'a pas equiuocjué. Mais le rcl^
Dd
4i8 Hifloiresadmirdhtss
ped que ie porte à iccUe famille me garde dédire le re-
lie. Etcequedefluseftà mon propos de la véhémence
des pafTions. E^ttrait de mes mémoires.
l'ai oui parler dVn ieunc homme, que deux filles en
iouaiu chacouilloyenc tant & C\ importunément que
l'ayans efmçu à rire, il rit tant qu'il cefl'a totalement de
rire, & ne dit plus mot. Elles penfoyent qu'il fut efua-
liouy,quandcsbahies lecognurcnt mort citoufFe./o;</;e)-t
aul.UuÀti rh)chj.zj.
Monfîcur BoilToiinade, médecin d'Agen , trefdoâe,
expert, diligent , homme de bien & d'honneur , m'a tef-
moigné quelapaumicre(c cft à dire,lamaiftrefle du icii
de paume de ladite ville d'Agen) femme aagec, mourut
à force de rire,oyant conter vne chofe fort inopinée, e-
llrange & ridicule. ^_yiit, ^.Utt.chap.iS.
En cemefmeliure troifiefmcchap. 14.1e dofteurlou-
bert recite trois plaifantes hiftoires de certains mala-
des abandonnez des médecins , guéris inopinément .1
force de rire, voyans quelques plaifans aftcs de certains
cinges(animaux ridicules ) fc iouans en leur chambrcsj
tels moyens excitans & releuansla nature accablee,aba-
tue,& comme eftoufïec du mal.
PELERIN Turc y mertieilleux,
ÏE veux vous conter merucillcs d'vn pèlerin Turc. I-
celuicheminoit veftu d'vnc foutane & d'vn manteau
blanc, ioignant iufques aux talons, auec vne longue
barbe : bricftclque nos peintres nous rcprefentcnt la
plufpart ddsApoftres. Sousvn graueportil cachoit vne
^imecauteleufe. Les Turcs Tadmiroycnt & honoroyent
comme vn fainâ: & faifeur de miracles : melmes in-
citèrent mes truchemaiis , à le m'amcner afin que ie
levifle. Il difna en ma table fobrcnicnt & modeftc-
ment. Puis defcendit en la cour du logis , & rcuinll
toll après , ayant Icué de terre vn fort gros caillou,
dont il le donna des coups contre la poi^flrine nue , af-
fez roides pour aflommer vn bœuf. Cela fait il iettc la
main fur vn fer,qucroi:i auoit expreircii^eut mis au feu,.
cf" mem&rablesl 4r^
-tcîlemenr qu*i] elloit tout rouge. Il le mie dedans £a
bouchc,& l'y tourna defrous,dcflus,de touscoftex, la fa-
liue freniiflant comme fait Tcau dedans laquelle vn for-
geron plongeroitfon fer chaud. Ce fer cftoit allez long»
gros au bout en la main,&quarréparlebout, qui entra
dedans la bouchcfi efchauffé , qu'il relTembloit du touc
à vn charbon tout enflamme.
Ce fait il remet k fer au fcu.puis m'ayant fait la reue-
rence,&rcceu quelque prefeut, ils'enva.Mesferuitcur?
ellonnez d'vn tel fpcdacle^i) y en eut vn qui s'eftimanc
plus habille que Tes compagnons,commence à leur dire^
Pauuresfots dequoy vous csbahiirez-vousPPenfcz-vous
que ce triacleur ait réellement & de fait mis ce feu en fa
bouchePCe font impofturcs & tours de pafle-pafTc: Di-
fantcelail empoigne le fer parle fin bout hors du feu,
fourmonftrer que l'on pouuoitlc manier fansbruflu-
re ni bleffure quelconque. Mais il ne l'eulf pas pluftolt
îferre de la main qu'il lefecoua bien viftemcnt : non
de telle habilité que par l'cfpace de pluiieurs iours il
lî'euil la paume & les doigts de la main tellement at-
teints de l'ardeur du feu qu'on cuil beaucoup de peinç
à le guérir.
Ses compagnons ne peurent toutesfois fe contenir de
rire tout leur raoul& lui demander , s'il commcncoit
point i croire qu'vn fou ardant & enflammé fuft chaud?"
adionftans qu'il cftoit enlui d'en faire vn de uxiefmeef-
fay,fî bon lui fcmbloitjpour conuaincre ceux defquels il
i'elloit tant mocqiié. Mais il ne voulut plus s'y frotter^
En difnantjce Turc qui fe dilbit moine, me contoit que
Ton Abbé , homme faind & renommé pour fes mira-
cles, auoit la couftume d'eftendre Ton manteau deil'uç
vn lac proche du conuent , puis s'afleoit deifus , & s'ef-
fcatoit à i'aife fur Teau en celf équipage , comme s'il
i^uft vogué en temps fcrain i& paiiible dedans vnc gon-
dole. Qii^tcuajid on efcorehoitvn mouton, la cou-
ftwine elloitde couldvc ceft Abbé dedans la peau, telle-
ment que les pieds de deuant eftoyent accommodez
au bras , & ceux de derrière aux cuifies : puis en cel^ c-
ijyuippagc, on le ieuou dedans vn fout ardant, ^uil
DU »
!4 20 Hijleires admirables
•Jcmeuroitiufquesà ce que le mouton fuft roûj,puiso.a
le tiroit fain & fauf de la fournaifc , pour manger i©yeu-
fcmcntfaparcdu mouton aucclcs moines. Si vous me
dites , que tels miracles de Satan , font impafturcs auf-
cjuelles vous n'adiouftez nulle crcâccne fay-ie pas moy,
le vous reprefente le récit du moine : maisquant au fer
ardant, ie vous recite ce que i'ay veu de mes yeux. Ce
qui n'eft pas tant admirable qu'on cuidcroit de prime
face. Car ie ne doute point que ce triacleur miracleur
feignant chercher vn caillou par la cour du logis pour fe
battre la poidrine ,n'euft muni lors fa bouche de médi-
cament propre contre la violence du feu : comme, vous
fçauez qu'il s'en trouue.Ilme fouuicnt auoirvcu en la
place de Vcnife vn charlatan^lcquel manioit librement
Ju plomb fondu, & s'en lauoit les mains fansbruflureai
dommage quelconque, te Sieur de BufUque .miLiffadehr
des Empereurs Ferdinund ^ Maximilian il. atfon d^fcoHn dit
njoy.ige en Turquieippifir^ 4.
Terme pum.
ENlavilledeRutlingue , certain paflant arriué e«
rhoftellerie baille en garde àfon boftc vne bou-
gcttcoù y auoit grande fomme d'argent. Répétant fui
fon départ ce depoft,rhoftenierauoirreceu,riniuiie&
Icmocquc dclui.Le paflant le tire eniuftice , & pource
c]uetout cclas'eitoit manié fanstefmoins, ileftoit furie
poind d'en faire preilcr ferment à l'holle, lequel ne de*
mandoit autre chofe,& délia fe donnoit au diable au cas
qu'il euft receu & recelé labougettc dont eftoit que-
ftion. Le demandeur requiert délai pour auifer s'il dc-
fereroit le ferment au défendeur : &fortant des plaids
rencontre deux hommes,qui lui demandent l'occa/îon
de fa venue en tel Ij^u, il leur recite le faid.Et quoijui
difent-ils,veux-tu bien que nous t'aidions en celte cau-
rc?Ily confentit,ne fâchant qui ils eftoyent. Là deflu»
tous trois,retournercntdeuant le luge: où les deux der-
niers venus commencent à foullenir à l'hoile, qui ne
ï'eneftoit pas encore allé,que la bougerte lui auoite-
fté baïUee , qu'il l'auoù rcceuè'& ferrée en tel & tel
endroit
^memorahks. ^n
ecidroit,qu'ils dcfignent.Lc periure mal-heureux neiça-.
uoitque rcfpondve: & comme le iuge deliberoic Tcn-
uoyer en prifon, les deux tefmoins commencent à dire»
Il n'en eft pas befoinmous fommes enuoyezfjour le pu-
nir de fa mefchanceté.Difant cela,ils empoig nenc & ef-
leucntcc periure en l'air , où il difputaauec eux : fans
qu'oncques depuis on peuft le trouuer. i. le GjJI de Br^-
fac auz.uoUrme defesprojjos de table. Gillebert Confinde JVo-'
Jeret enfes tiarrutions.
P i R s o N N E s qui 'xjiuent long ternes
fans boire m manger,
M Aiftrei- Gérard deBucold Médecin de Ferdinand
depuis Empereur, attelle par cfcrit, imprimé en
Latin & en Alemand , que l'an 1559. fe trouua en vn vil-
lage près de Spire vne nommée Marguerite fille de So-
froy Vucis & de Barbe fa femme , laquelle en Taage de
dix-huid ans atteinte fur la fin de Septembre dVn mal
de tefte & de ventre , allez légèrement , commença de
perdrelegouft des viandes, ce quilui duraiufques à Ix
fin de l'année : qu'ayans reprins quelque appétit elle fie
vn repas ou deux : mais depuis ceffa totalement de man-
ger, &beuuoit quelque peu. Apres Pafque de l'année
fuiuante, elle refufa de boire, tellement qu'es plus gran-
des chaleurs de l'Efté elle ne beuuoit point: dont s'en-
fuiuit qu'elle nerendoitni vrine ni autres excremens.
Ferdinand lors Roy des Roniains, la voulut voir , 6c
pour obuier à toute fiaude la fit foigneufement garder Ôc
confiderer par ledit de Bucold entre autres, lequel en 2
fait ce rnpport,confcrmépar pluficurs autres tefmoins.
Vn gentil-homme, qui s'eft acquité dignement de
pluficurs charges, difoit où i'eftois , qu'il eftoit allé do
Madril à Lisbonne , en plein Eilé,fans boire. Il fe porte
vigoureufement pour ion aage, & n'a rien d'extraordi-
naire en l'vfagc de fa vie , que ceci , d'eftre deux ou trois
mois, voire vn an , ce m'a il dit,faas boire.Il fent de Tal-
teration , mais illa laiffe pailerV^c tient que c'cft vn ap-^
petit <jui s'alanguit aiféiacnt 4c f^i-werinp > & boit plu%
l>4 i
j^ii Hijloires admirables
par çapriccpour le bcfoirijou pour le plai/îr. Le Sieur et
Atontugncun ^.tiure dejès tjjuh^chup.clernter. On rccitc le
Inermc dVn grand Sci^zncur en France, lequel a cfte
;?mbafl"acicur à Rome. OrsIls'cJt trouue iadis& Uc no-
ilre temps des pcrlonncs oui ontfait des abftinences fore
^randes;dont nous auons produit ouclques vns parlant
ipi-deilus des iufhes merucilleux : mais n'ayans exemple
^lus remarquable entre plufîeur,sc|uc celui que nous
iîdiouflerons incontinent , nous laurons «u Icdteur le
loifir de fe ramenteuoir ceux qu'il peut auoir veus , &
«iont on lui aura parlé. Cependant nous lui prefcnterons
celui qui s'enfuit,
Le mardi 14. tour de Nciicmbrc i584.par le comman-
•djment de trei-illuilre Prince lean Cafimir Comte Pa-
latin du Khindc gouucrneur& fupcrintendantde Kai-
ferlauter acompagné de Henri Smctius & lean lacques
Theodore,dodtei!rs Mcdecins,fircntcnquelle au village
<le Schmidvveiler en la lurifdiâion de Colbcrg , do-
maine dudit Seigneur Prince , couchant la fille dont
hous auons à reprefcnterrhiitoirc.
Kun To)inciier natif de Spishcim> honncftcpayfan,
C.iquis de ces Commifïi>ircs,cntre autres articles afferma
c]ue Catherine , aagec lors d'enuiron vingt fcpt ans fille
de lui & de fi femme aufii nommée Caiherine, s'ellant
bien portée iulques à auoir fes purgations mcnllruales,
au retour de certaines nopces fur lài(ie de heure , qui
lui oifa l'appctit de man^'cr viandes chaudes Tefpacc
de cinq ans > durant lefc'uels elle ne lailVa de fe bien
porter,trauaillcr,le rt-ndantfort obeifl'antc , inuoquant
Dieu^deuote & aftcdionnte .i opu fa pa<-olc,& bien in-
l^ruitecniccile. Pour lui faire rccouurcr le gouft des
viandes chaudes, le père & la mcre outre quelques mé-
dicaments ordinaires la mirent entre les mains d'vn em-
55 yriquc , lequel en heu de la fouJager par certain bru-
tiage , lui fit perdre Tappetit de toutes viandes;& chau-
des & froides:tclIement que depuis lufques alors, ceft
à dire Tefpace de fcpt ans entiers , aucune viande
ni breuuage n'auoir peu paflcr parle go/îcr de celle
Èlle.cjui lix mois après cç %IcigoulU'mccit:cçoit le lus de
drtncmtrrahles. 41 j
^^nelqucs poires & pommcs,& en crachoir le marc. Mais
n'ayant peu longuement vTer Je ce remède , elle fe la-
uoit la bouche de pure eau de vie , fans pouuoir en aua-
Icr vne feule goutte. Cclauementla tortifioit en quel-
que forte : mais eftant trop afpre , elley mefloit vn peu
<i'eau fiaifchc. Son père adiouftt)it que pendant ce téps
il n'auoit apcrceu aucune euacuatfon de matière fccale
m dVrines enicelle fille, ni lueur ni vermine en endroit
quelconque du corps ; ams touiîours trouué fon \[6t net
èi fon corps fans tache nifouillure ou crallc aucune : ex-
cepté que par fois elle fembloit auoir quel<jue diftila-
tioii de cerucau,qui lafaifoit cracher, mais fort peu. Ec
quelques fois feleuoit au coite quelque vapeur qui lui
montoitaucœur, & caufoit douleur de tefte, dont lui
furuenoit grande foiblefl'e, mais de petite duree.Quant
auxviandesjaveuënilcflairne lamoleftoit, mais elle
n'auoit appétit ni deiîr quelconque d'en vfer. Si quel-
<}ues défaillances lui furuenoyenr,cllefe frottoit fous le
nez de quelques eaux de fenteur, commcauffi auxtem-
pes,fur la poiâ:rine,& aux poignets. Ce qui la fortifioit.
La dcpofition delà mère & des voifîns fe rapportoït à ce
<]ue delTus.
Icelle Catherine vifitcç parles quatrcs CommilTaires
à\x Prince, fut trouueed'vn vifage beau & entier , de
bonne ceulcur, pleine de vie &de bonne difpofîtion,
les yeux clcrs , vifs & bif n voyans , comme vne perfon-
ne faine,excepté qu'ils lui eftoyent aucunement enfon-
cez en la tefte , & que par fois s'ef.euoit fous iceux vne
tumeur qui ne continuoit pr.s longuement. Elle n'a^
Uoit aufl'i aucun defiut es fens de l'odorcment , de
Touye & du gouft. Sa parole eftoit douce , gracieufe,
décente, clairc,fignifiante,8c intelligible. Seulement U
bouche lui eftoitdcuenuè fi eftroite, àcaufe des deux
iouës qui lui faifoyent fort mal (comme elle mef-
medifoit) qu'elle n'y pouuoit pas mefmc faire entrer
fon petit doigt ; toutesfois fans apparence d'enfleure,
Eftant debout elle ne pouuoit d'elle mefmc leuer la
tefte & la tenir droite,^ caufe de fes eflourdiifemens.I-es
thçucux lui çftans tombez. du tout, recommençoyçiîj;
4 ^ 4 Bijloires admirables
à croiftre. En cefte (îcnc maladie ou infirmité , elle n*a-
lioitprefque eu aucune parole ni entendement trois
ans dcuant : mais le Icudi deuant Pafqucs 1585. elle re-
couura la parole nucc entendement beaucoup meilleur
<;juc lamais elle n'auoit eu es iours defa faute , & ce de
l'admirable façon qui s'enfuit.
Comme fon perc en ce temps \\ fuft allé en la forcit
Î ►roche du village faire des planches de marrain , & que
a mcre iud forcie aufîi de h maifon pour aller vers lui,
ayant fermé toutes les portes , & lailTé leur fille toute
feule : vn homme, en habit de Pafkur de l'F.î?life,entra
dedans le poifle,s'approcha du lici, print la fiile par laif-
felle gauche,la leua, fouftint, & fit pourmener : puis lui
•demanda fi elle fçauoit prier Dieu. Catherine aucu-
nement eftonnce de ceiledemande,nc pouuoitrefpon-
'dre ellant muetce. Il commença donc à reciter les dix
Commandemens de Dieu en langue vulgaire , puis les
articles dcfoy , TOraifon Dominicale, rinftitution du
S. Baptefme,&dela faindc Cencircxhortant outreplus
a paticncc,la confolant Scralfcurant, que de briefla pa-
role lui reuiendroit. Suiqucy il fc départit foudain d'a-
uec elle. La parole lui reuint incontinent, tellemét que
fa merc eftanc de recour en la maifon , la fille deuifa a^
uec elle intelligiblement , &auecfon père puis après
donc tous deux furent merueilleufcment esbahis &
commeeftrayez. Depuis cctcmps là ,lapalole&^en-
tcndement nelui ont point défailli.
Le rapport des Médecins contient cncores rcqui
5'enfuit,quei'adiouilepourlecontéteincn'' diiLedeur,
(.^antà ce qui concerne ûpoirrine ou ertomach , elle
^ vne hr.laine fouefue &: bien fcnrRnic,\ n pouK- naturel
viux bras &aux pieds,,bicn ordonne , proportionné & ef-
• gahmais par dehors deuant & dcrric.e les aifl elles, haut
€l bas,elle ed aucunement matte &: laffc. Les deux ma-
melles lui font plus longuettes, plus molles, & pendan-
tes,qu'elles ne font coullumiercmét aux filles. Elle fent
parfois de la douleur aux à^ux cortc/. au dcfTous des
f:ii;fics coftcs, qui tend & paHe vcr^ la fofléttc de Tefl-o-.
;3iaçhA h rcijd, ii abatHe , qui peins peut elle rcfpirer„
^fcm-
(^ mémorables. 42.5
fx femble quelquesfois que le fouffle lui doiuc faillir.
Toutesfois celte douleur le pafic bien toft,par Tapplica-
tion & frottement de quelques eaux de fenteur. On ne
lui peut toucher la foifete de rcftomach , qu'elle n'en
fente douleur. Qu^ant au petit ventre, il lui eft aucune-
ment abaifle comme vn corps vuide : toutesfois parle
dehors il eft aflcz bien fourni, charnu & graflct, comme
auffi Tentour des hanches,8c le bas de Tefchine. Elle ne
ientaucunes ventoficez ne coliques dedans foi, ni au-
cunes pointes , hocquets,ou autres tourmês eu fon efto-
mach. Et combien que fbuuent, fans contrainte ni ne-
ccllitc, elle fe foit efforcce'de prendr£ & aualer quelque
chofc , elle ne l'a peu nuU'cment , encore qu'elle puifle
endurer &fentir les viandes, & ce qu'on mange"& boit
près elle, mais en vn temps plus qu'en autre. Car elle a
cfté & eft encores , comme C\ le gofierlui eftoit entiè-
rement clos & eftouppé ; aufsi n'a elle ni felle , ni vrint,
ri purgations menltruales ,lefquelles elle a eu quelque
cfpace de temps parfaitement &: ordonnément deuanu
fon intirmité,& maintenant luifontcnticrement defail-
iies. Scnibiablemcntelle n'a iamais foif, neantmoms el-
le prend quelqucsfois vn peu d'eau fraifche & d'eau d"c
vie méfiées eniemble , pour lauer fabouchc feulement,
&. la crache foudain. Ce qu'elle a fait par ci deuant auec
de l'eau de vie toute pure, mais maintenant ne la peut
plus end urer,efl:ant trop afpre & forte en fa bouche^ qui
lui eft ores trop tendre & délicate, & ne fait cela que
pour récréation & foulagement de la tcfte & du cœur.
Au regard des bras & des ïambes, les bras font charnus
& entiers : principalement le feneftre lui eft à\x tout àx-
fpos,& en bô point,nins aucii défaut. Mais quant au bras
droit,illui eft perclus depuis le cou!de, iufquesauxcx-
tremitez des doigts, & lui en eft deuenue la main couiv
be,&les doigts roidcs , tellement qu'elle ne peut Icsre-
jnuer. Toutesfois elle peut aucuncinêt mouu(Mr le bras
dextrcpar le hautjpres Faiftclle , mais non pas le porter
fur ['à tefte,ni le paffcr de coftc à autre,faivs aide. Les iâ-
bcs&les cuiftes font aucunement pleines & charnues;
imaisfoûtclçucnuçs tortçs teUcmcftO cju'cll.c |ie J)eutlftç
42-^ hlijloires admirables
cftendrc: toute^fois elle meut aucunement fcs pieds &
icsorcils. I.t lui clt cleuenu ledit bras perclus , &lcv
jambes ainfi tortcsjdcpuis qu'elle a eu pafle trois ans ^i-
lantcfans rien mander. En tout Ton corps enricremeiu
y a vne clialcur tempérée , naturelle & gvacieulc. Les
ongles tant des pieds que des mains font d'vncbelle for-
me, longuette, &; en bonne difpofîtion , telle qu'il con-
uientà vne perfonne faine.
Les Médecins ayans fait ce rapport , tout examiné 3c
bien conîîdcré j les Comniilfaires furent d'auis , pour
grandes raifons, que Ton choifiroit quatre femmes fa-
gesjbien entendues & propres à tel affaire , qui feroyent
enuoyees à Schemidvveilcr,pour garder cefte fille alter-
natiuement , deux de iour , & deux de nuit , Tefpace de
deuxfemaines auec toute diligence , à ce qu'aucune
viande, ou bruuage ne lui fuft adminiftré par perfonne
quelconque: & que le li<fl: fur lequelle elle couchoitlors
fuft change, vn autre mis en la place , & que par tout le
poifle on fift diligente recerche. L'on auoit entendu de
la bouche mefme de la fille, quedeTeucfcbé deTrcucs
venoyent vers cllehômes& femmes, quiTenqueroyent
de reuelations&prcdidions. Outreplus l'on auoittroii-
ué près d'elle des lettres efcrites comme à vne fainde
vierge, l'intention de ces efcriuans eftantd'en faire vne
jdole,& drellct autour d'elle vn pèlerinage. L'cnquefte
<les payfans ne parloir que par ouy dire , & faloit fe rap-
porter de tout au pere,à la mere,à la fiUclaquelle ellant
iî vigourcufe , les Commiffaiics fc trouuoyent comme
perplex en tel rapports. Pourtant ils font leur rapport
Aie tout ccque delfus au Gouuerneur de Neuftad & aux
Confeillers du Prince , lefquels toft après décernent
commifli'jn au Gouuerneur de Kaifcrlautcr pourpour-
uoii i ceft afaircà quoy il fatisfait en diligencc,& en fait
toft après fon rapport, que l'ay tranfcnt, tranllaté de
l'Aleman,es termes fuiuans.
Suiuantvoftre Commifllon du 24.de Pccembre 1584.
à n©us adreffantc , touchant l'atfaire de la fille du villa-
ge de Schinidvveiicr,nous auons de tout co\}cé f:iit dili-
gente pc;quiliuû de quatre icruiucs honoiableio & "'^i^
Cr mémorables. 4^7
•jons vn long temps peu trouucr aucune qui voululfc
. c mployçr à tel afaire,iu!ques à ce qu'en fin nous auons
a ce induit & pcrfuadë AnaeBrening,vefuecie feu An-
dré Zils de celle ville, appellee autrement la vieille mc-
nuifjcre:Anaihfîe vefuc de feu de bonne mémoire lean
Ebcrard en Ton viuant paftcur de VValhalben : Agnes
femme du paftcuroui eft à prefcnt à Stcinvvcrden, &
Marguerite vefue delcan Gauffcnenfon viuant bour-
geois de ceftc ville,&icelles menées de puifTance & au-
thorité en tel cas requifcs.Et aprc-s les auoir côpetémét
inilruites & informées de leur deuoirjfclon la teneur de
Tauis qui auroitdésle commencement elle enuoyé à
Monfeigneurj,& de toutes quatre pris & receu le fermét>
icclles auffi fait côd uire le i(5.iour de lâuier derrfîet paf^
fé audit lieu de Schmidvvciler, aueclefieur Loleman
fuperintendant , ou elles ont demeuré près ladite fille
iuiquesau 3o.iour du mefmc mois:eftans retournées en
ce lieu elles nous ont recité & au long raconte le iour
eniuiuant, ce qu'elles auoyent aprins, deicouucrt & ex-
perimentéjtouchantceft afaire,ainfi qu'il s'enfuit.
Commcleditfieur Superintcndant,auec les quatre
femmes lufmentionnees fut arriué le i<î.Ianuier vers le
foir à Kolbelbeig, ils ne voulurent pas s'auancer d'auan-
tage.pour ceile nuidiàimaisle lendemain fe rendirét en
chariot à Schmidvveiler, où^abordansde prime faccle
père & la mère leur firent entendre;, comme par le com-
mandement des Gouuerneursils comparoilloyent audit
lieu, aucc charge de garder leur fille quinze iours durât.
Et que cela ne fe faifoic finon afin de fermer la bouche
ceux qui de tous cofte?. parlét en mauuaife part de leur
fille, voire mefnics du Prince.d'autant qu'il adioulle foi
aux paroles delcurdire fiile^aflauojrqu'vn iî long temp«
clic n'a rien mangé nibeu , & fe perfuade entiercmenc
t]u'ellenc ditcholespar mcnterie 6:impofturc,bref c'eft
afin quVne fois pour toutes l'enticre a ericé puifl'e fortir
en lumière. Acelalc pcre& la mcrc le font volontiers
fuhmis & accordez, receuans iceux ainiablement,& alai-
grement, &|escondui(ircnr \ ers la fille en fa chambre
Où cllans,le Superintendant auroit parlé de mefinema-
fiicrc àiafi,lle,^onvne auparauant ùresperç& lyççc.
4-^8 Hijfoires admirables
& fait entendre bien au long loccafion de leur venue.
Surquoy la fille auroic commence à fc plaindre & de-
mander à quelle occasion on vouloit ores commencer à
Iatancrrauailler& moleiler.Principalementelle fcicn-
toit fort: grcuee de ce que fon peie &. fa mère ne dc'
Vioyent coucher h nuift près d'elle en fa chambre,donc
elle pleura forrmiais incontinent après le départ du Su-
perintendant Anne Brennig auroit parle li gracicufe-
menta ladite fille ^ qu'elle s'accorda fr;inchement à ce
qu'on vouloit , & permît non feulement qu'on empor-
tai!: la couche de fon père & de fa mcre: maisaufli qu'on
vifitaft fon proprclid , voire qu'on l'oftaft du tout , &
qu'on lui en drefl^all de nouueau vn autre en autre en-
droit dedans le petit poillerde forte que le père & la mè-
re n'y couchèrent point.Et quand ils entroyent deiour
en la chambre, ils n'aprochoyent de leur fille,ninecô-
muniquoyentenfecretauec elle. Or pendant les iours
& nuits de ces deux femaines les quatre femmes enten-
tlirent d'eux bieii.amplement comment auoit commen-
cé ct^Q maladie delà fille , & combien elle auoit paiie
d'années fans manger ni boire. Ce qui conuient Se s'ac-
corde <iu tout auec ce qui en auoit efté dit& déclare
jpremierement aux Seigneurs Commilfaires. AufTi on:
trouuéleiditcs femmes qu'icelle fille eft en vn temps
flusfoiblc & débile qu'en l'autrej&ront tounours veil-
Jee,deux de iour&dcux de nuid. Et pour plusexafte
recerche de vérité, auroittouhours c]uelqu'vne des qua-
tre couché la nuid presladite fille en fon lict,a ce qu'eii
nulle manière ^.il n'ypeuil entreuenir aucune fraude,
Aquoy elles ont diligemment obuie,& prins foigneu-
iementgardeiour &nuic1:,& neâtmoins n'ont rien trou-
vé,finon qu'il en va tout ain/i , comme ladite fille au-
loit ci deuant dit & aileuré de foi en toute vérité. D'a-
uantaoe, toutes lefdites quatre femmes , & finguliere-
rrientladitc Anne Brenning , ont confclfé deuant nous,
folennellement aftcrme& aileuré qu'elles ti^nent la
faluation de leurs ames,& veulent là dclTus mourir que
ladite fille n'a mangé ne bcu^ ne morceau ni goût-
te,ne prins nielmcs aucunes confitures. Qu'elle n'a
auiU
C^ mémorables. 4^9
aufïî rendu" aucune vrine, ni aucuns autres excremens
hors de foi. Qu'elle a encores moins dormi. Et, que
Suiconquesreuoque en doute ces chofes fait tort àl2
lie.
Ce rapport fut enuoyé de Caiferlauter le dixneufief^
me Feurier mil cinq cens huidantc cinq,figné du Gou-
uerneur & de fon fccretairejau confeil du Prince àNeu-
ftad. Quelques temps aprcs l'hidoire en fut imprimée
en Alemand^ puis rourncc en François , & publiée Tan
mil cinq ccnshuidante fcpt. Lctranflatcur, homme de
qualité, ayant adioufté au bout de fon liuret, dédié au
Baron de Pardaillan lors ambafladeurdu roy de Nauar^
rc en Alemagne, les mots quis'enfuiuent: Lesledeurs
feront aduertis que ladite Catherine eft encores viuan-
tc, en mefrre dirpofîtion & eitat que porte ce récit, Et
ainil a duré & vclcu fans manger/;ans boire , & fans dor-
mir , rcfpace de neuf ans entiers & complets , &. vit en-
core miraculeufement, d'vne linguliere pure &incaro-
prehenfible grâce de Dieu tout-puiflant. -Extrait de
fliifiotre entière de et: faicl , imprimée a> Fi-aiicfort , cheXjlean
l'entens qu'il y a pour le prefent en Auignon,vn hom-
me de foixante ans, qui mange fort peu fouuent , & par
longs intcrualles,de cinq,fix, dix, & plulîeurs iours. Ce
qu'Albert efcrir eftfemblable, qu'ily auoit vnefemme>
laquelle pall'oitquelquesfoisvingtioursians manger, &
bien fouuent trente. Il dit aufn auoirveuvn homme
mclancholique,lequel vefquit fept fepmaines fans man-
ger,ne buuant que de Teau, vn iour, & Tautre non. Per-
lonncsgraues rapportent auoir elle veuëen Efpagne
vne fillcqui ne mangcoit rien,entretenoit fa vie ne bu-
uant que de Teau, & auoir dciia vingt & deux ans. l'Ii.-«
J(îeurs ont veu en Languedoc vne garfe , qui dcmct ra
trois ans fans manger : & nous fçauons par ce qu'en ont
efcrit quelques bonsS: dodes perlbnnages , qu'il y en 2.
eu vne autre à Spire en Alemagne , oui vefquit a::!anc
d'années fainemét,rans autre viande ou bruuagc que de
rair.GuillaumeRôdclctattellcd'cn auoir \ eu vne autre,
<iui de pareille manière de viure parulat lufques à di:ç
43^ HiBoius admirables
aiis,pui's quand elle fur grande fe maria,& eut de beauj*'
cnFans.Iean Bocacc efcrit d'vne Alcmande,laqucllc vef-
c|uirrrcnteans,rans manger aucunement. Pierre d'Aba-
no racontcdVne Normande qui ne mangea rien de dix
liuiâ: ans,& d'vne autre qui dura trente fix ans fans man-
ger.On tient pour fccrtain qu'à Rome vn Preftrevcfquit
quarante ans de la feule infpiration de Tair , cela cftant
bien obferuéjfous la garde de Léon di^ciefmc , & de plu-
/: eu rs Princes , &fidcremer.t tefmoigné parHermolao
Barbare. Alexandre Bcniueniu.^ raconte d\n Italien
qu'il iufna quarante ioursen la ville de Venifc. l . io«-
hcrt ait z. paradoxe de fa première Décade ^ aui. Hure défis
tr-renri populaires fur la fin , où il adiouftc vn difcours no-
table, que ie n'ay voulu pafTer, ains ieTofirc au Le-
i^cur.
le preuoy facilement,dit-il qiic deux fortes de gens fe
}>euuétefmouuoir,oudufeulfujct4e ces difcours(tou-.
chant ceux & celles qui ont vefcu fans manger) ou de
icspreuues.Les vns fontignorans de la philofophic na-
turelle & de la Médecine, perfonnes vénérables pour
leur /implicite & pieté, comme le fimple peuple,& tous
ceux qui n'appliquent leur eftude à examiner les eau-
fes de chafque chofe. Les autres font diaboliques, qui
pourfuiilcnt de calomnie tref-impudente ce qu'ils fça-
tientclhe bien dit. le ne m'arrcfteraypoint à ceux-ci,
parce qu'ils n'attendent pas l'explication de mon dire,&
qu'ils dcprauent& infectent Je leur poifon tout cequi
teitreccu de leur penfce impure. Aux autres il me fem-
bic qu'il conuient fatisfairc benignement & fînccvfe-
meiit.Ie voy qu'on me pourroit obiefter ceci. Les luf-
*es de quarante ioiirs entiers,lefquels leliis Chtift, Eiie^
& Moyfe ont foufténus, ainfi que tefmoignent les fain-
des Efcritures diiflees parle S.Hfprit , ne feront plus te-
nus pour miracles, /î par quelque raifon naturelle oa
peut endurer le ieufne i voire par plufîeurs mois & ans;
Certainement il feroit vray, fi On ne reconoiil'oit que
cela euil elle doniié tellement contre les loix de Natu-
re,à des hommes paifaidemenè fains , par certain priui-
legc i comme nous croyons piègient. Car il Jpur fut àU
ér memOYahlesl 4ji
umcmentoâiroyé exemption de rinfirmité cte la chair
pour vn temps: de force que leur condition elloic pour
lors autre que du genre humain. Mais ceux que nous a-
uons aprins des hiftoires profanes auoir vcfcu durant
quelques années fans manger, fî elles difent vray, il faut
que ces gens-la ayent tous cfté malfains & pleins de
beaucoup de fuc froid, duquel le corps a peu cllrc nour-
ri longuement. Ainfî nous aprenons de ccquiauient
iournellement , que plufîcurs malades n'ont point d ap-
pétit, à caufc que leur ventricule eft farci de mauuaiies
kunieurs : Se ils prencnt moins de viande en vne femai-
ne,qu'ilsne prenoycntchafquciour, quand ils le por-
toycnt bien. Maisqu'vn homHic de corps tref-fain puif-
fe paffcr feulement vn iour ou Jeux fans vkinde , & n'a-
uoir pas faim, cela excède les bornes de Nature, & eft
vn miracle diuin. Combien plus eft-il admirable, quVa
tel homme iufne quarante iours entiers , de forte qu'il
ne fente point de faim, n'ait à combatte la conuoitife
de manger , & n'appete la viande , ou le bruuage , norj
plus que l'vn des Angcs?Nous croyons que lefus ChriR-
a eu le corps extrêmement tempéré & pur, iaçoit qu'il
fuft fuieità nosinfirmirez félon la condition de fa na-
ture humaine , excepté péché. Nous reconoiffonsfem-
blablcmentque Moyfe&Elie, quand ils s'abftindrent,
durant quarante iours, de manger & de boire , eftoyenc
parfaitement fains pour lors , & par certaine prerogati-
ue exempts de la commune yie des hommes. Dcquoy il
s'enfuit qu'à bon droit on eftime cela illuftrcs miracles,
par lefquels Tauthorité de ces Prophètes & de lefus
Chriftfutellablie. Orcen'elVpas chofenouuellequ,e
femblables effeds auienent par l'ordre des chofcs que
Dieu tref-bon & tref-grand a prcfcrites à Nature, &par
vn miracle euident contre les loixdela mefme Na-
ture. Caries fieures &pluficurs autres maladies, que les
Sain<ftsontgueries,lesMedecinsles ortcnt aufTi. Mais
les moyens dcfqucls Us vfcnt, y apportent tref-grande
jdifferéce.Car les Sainfts de leur feule parole,ou de l'at-
touchcmét desfaifoycnt, moyennant la grâce de Dieu,
lescaufes de tels efteds , auec la nccefïité impofee à
X>Jaturç. JLes Médecins ue font; auçre ahofe qu'op-
451 Hijiûires admirMes
poicr aux caufcs naturelles d'autres Icmblablcmcnt na-^
turellci, pariclliucUcs, fî la \crtu des remèdes donnée
du Créateur cft plus puifTante, &c]u'il ne vueille cjuu
pour lors clic foit ^ aine, la caulc qui fait le mal cil: elVa-
cec. IciusChrill guérit parfaitement le fang mcnO.rual
inueteré, du feul attouchement delà frange de (a ro-
be : & dit auolrfenti que vertu citoitiirue de lui pour
celtcfted : mais la femme toucha en foy ce qui fe {^rc-
fentoit à fa main , embraflant en fa penlèe la puiifancc
dcrhonuiie-Dicu. Nous par art mcdccinal (' duquel lui
mehrics, comme pcre bénin, ayant pitié de la condr^
tion humaine, eit auteur 6c vray iniliturcur) remédions
à fcmblable mal par certains medicamcns. Ainfi certai-
nement l'humeur phlcgmatic plus copieux, peut indui-
re naturellement le iufne, conimcil a cité aux fufnom-
mez le porta ns bien , deia feule volonté de Dieu t\ es-
haut. Mais outre ceux-ci il y a infinis miracles, quiex-
ccdentnoftre cntendcment,lefquels ni l'art humain , ni
la Nature mefme ne fçaitimircr en aucune manière.
Telle eftjaguerifon dci'aueugkment naturel: de chaf.
fer les eipnts immondes du corps humain: reiî'ulcitcv les
morts ja demi-pourris, & femblablcs , qui confirmenc
l'authorite deDieu rout-puiiTant. le penfc qu'il appert
de ceci, que les chofes qu'on dit aucnir par certaine loy
dcNaturc ( ia^oit que rarement) ncrepvouucnt point
les vrais miracles ni ne diminuent leur certitude :& que
celui ne contredit à la foy Chrcltiennc, qui cxiiminc di-
liaemment Icscaufes de tels euenemcn^ : ains plulloft,
n'en confirme Ton pas mieux la vcritc des miracles non
fcints,en oftant quand & quand l'occaiion des impollu-
res,afin qu'elles n'abufent facilement le peuple mal ex-
pert : Car fi quelquVn de ceux qui viuent fans mangcT
à caufe de leur intempcrature froide , i><: l'abondance de
phleçmc, vouloir contrefaire le prophète mfpire de I
Dieu, combié de milliers d'hommes precipitcroit-il en
trcf-grands erreurs & ruines ? Certainement celui ell
impie & ignorant de la vrayc ( c'eiUa diuine) philofo-
phie,qui penfant à ces chofes, & les eftimant , pronon-
cera citie impie & ties-irrelieieux de vouloir diilin-
guer
L,
J
drmemorMes. 435
çTuer par raifons non fardées les œuures & ( comme les
Tiollres parlent) miracles de Nature, des miracles diuins.
Cequetoutcsgensde bien & de pieté confeflcrenr li-
brement conuenir à vn homme de bien, religieux & no-
tamment charitable. Ce font les mots du Doflettr loubertj le
Uurc dftquel a ejîé Imprimé a Paru 11 an If 79*
L*on m'a dit pour chofe fort certame cju'à Salaman-
que s'ell trouué vn Chanoine,qui alloità Tolède, & re-
tournoir , y ayant demeuré quinze ou vingt iours , fans
que depuis qu'il eiloit parti de fa maifon , iufques à fou
retour, il beuft aucune goutte d'eaunide vin. Maiscc
dont ic fuis plus efmerueillé eft de ce que lean louian
'du Pont efcrit au liure de Météores , d'vn homme le-
quel en toute fa vie ne beuil pas vne goûte : ce que La-
dil^asroyde Naplcs fâchant le fit boire vn peu d'eau,
quilui fit grand mal à l'eilomach. l'ay oui dire auflî à
pluiîcurs perfonnes dignes de foy , qu'en la ville de
MAnfillc près de Léon le trouue vn homme viuant, le-
çjuel à couftume de demeurer deux ou trois mois fans
boire , & ne reçoit de cela fafchcrie ni dommage quel-
conque. iy4.Torqttem.idc eti la l.iournee de fou hexamero??.
P LFTES prodigietifes dr diuerjès.
L'An mil cinq cens & deux 5 le vingt deu::iermeiour
de luin , tout le pays d'auteur de Bcrne,Soileure, &
Bieniie, de grande eilendue, fut battu d'vnegrefie fore
drue,dont les grains eftoyent plus gros que des œufs de
poule. Sept iours après , vne autre plus grofic grefle ra-
uagea tout le territoire de Zurich,tua plufieurs payfans,
le beftail domeftique qui paill'oit es champs , force vo-
laille & beftes fauuages.
Huiftansapres , à fçauoir l'an 1510. cheurent du ciel
en Lombardie enuiron douze cens pierres, entre lef-
quclles , comme recite Cardan au liure d.' rerum -varie tate,
fut trouuee vne du' poids de fixvingts hures, vne autre de
foixante. On en porta plufieurs aux grands Seigneurs
de France, ;ilors commandans pourle roy en ces lieux-
là. Ces pierres çftoycnc de couleur de rouille , trel^
454 Hiftoires admirahles
durcs,& fentoycnt îc foulphve.Dcux heures âuant cefte
pluye, le ciel fut vcu comme tout en feu. Quel fut de-
puis le milcrable el^at de Milan & des pays voi/îns,
Guichardin le monftieen Ton hiftoirc des guerres d'I-
talie.
Lcdixncwfiefmeiour de Juillet i^-iS. Le pays es en-
uironsde la ville d'Augsbourg fut infiniment endom-
mage de pierres de grefle , plus groflcs que le poin^
d'vn puifTant homme, tombantes du ciel par l'efpace de
c]uelqucs heures. Trois ans après chcut de la grefle iî im-
petueufe es enuirons de Bafle, que toutes les vignes fu-
rent entièrement fracafTees. A Lisbonne en Portugal il
pleut du fang en grande quantité. II pleut du fang l'an
i) 4t.au diocefe de Munilre es enuirons deSalTembourg,
non guercsloin de VVarcndorfF.
L'an mil cinq cens quarante quatre, il tomba de la
■ grefle en trcfgrande quantité es quartiers de Sile/îe>
dont les grains eftoyent gros comme àcs œufs d'Auihu-
che,en iccux paroifioyent figurées proprement des lon-
gues chofl'cs balafrées à la lanfquenette. Item parmi
plufieurs de Tes grains caflcz furent trouuez àcs pierre?
faites en façon de turbans Turquefques.
En la haute Alface , es enuirons de Colmar ville im-
périale cheut du ciel vne grolîc pluyc de grenouilles &
de crapiux:,ran mil cinq cens quarâtc neuf. Les payfans
furent cmpefche/.rcrpace de quelques ioursatucrceilc
vermine à coups de bafèon : puis afin queTair n'en fufl.
infedé, le Magiftratlesfiramaflcrpar monceaux, dont
on remplit de grandes folfes.
L'an mil cinq cens cinquante, quelques iours deuanr
Pafques au mois de Mars,deux heures durât, il cheut du
ciel es enuirons de Chgenfurt& Villac, villes de Ca-
rinthic, de bon froment en grande quantité, que les ha-
bitans des lieux recueillirent, & en fircuc de bon pain
vn long temps pour leur nourriture.
Vn an après qui furif^i. il pleut du fangfur Lisbon-
ne en Portugal. En celle mefmc année vn peu dcuantla
Penrccofte, les nuées s'eftans creuces , il cheut de telles
lauincs d'eaux es cnuiroasvlç ICicçingeu çij Franconie>,
qu.ç
t^ memorMeii 43 c
queles torrens d'i celles en terre cftoufferent vn grand
nombre 'ie gens & de beftail, prefques en vn inftanc. V-
ne grande mertairic compofecdc plufîeurs maifoiis ea
fut renuerfee,& prefque tous; ceux qui y habitoycnc
noyez.Lepont de Kittingenfutabatu & emporté :&ii
Ton n'euftpromptement donné paflageàleau perçanc
les murailles de la villc,cout eftoit perdu. Cinq maiioiis
y furent entièrement renuericcs. Troisautresen vn vil-
lage nommé RotoUecrcinq en vn autre endroit. Plu-
sieurs perfonnes & Force beitail périrent en ce déluge.
Quinze hommes furent noyez à Speckfurt,8cforcc mai-
fons abatuesjcomme aufli à Pabenberg,ou les vignes &
terres à bled furent rauagees de Façon clFrange. Au mef-
me temps entre Gotlie & Ifeniic en Thuringc , les plu-
yes continuelles enflèrent & Hrent tellement desbordei:
lesriuieies , qu'au village de Theutlebe cinqmaifons
furent emportées auccvn fermier &cinq enfans/îens.
En vn autre village les eaux noyèrent le beftdil, qui fc
trouua es champs , enfenible les ieunes garçons quile
gardoyent. Vers Schalkcnvvals, ou font les mines,ccs
déluges y Hrent des dommage? inelHmables. L'Elbe en-
flée deseatixdu ciel ht beaucoup de maux en s'elpan-
dant parle plat pays,comme firent aufli les autres riuie-
rcs en ce mefme temps.
Le vingtquatricfme lour d'Aouft mil cinq cens cin-
quante deux,vne rude tempeile en l'air s'eftant efmeuë
îur la Hollande , il y tomba de la grefie en abondan-
te, dont chafque grain peibit vne liure pour le moins:
èc eftoycnt tous dediuerfes Formes, Aucuns rclFem-
bloyent au Soleil , les autres à vne couironne d'efpi-
nés ; les autres à des roués, & autres chofes. Le Soleil
les ayant fait fondre, ilen fortit vne trefpuantefumeei
laquelle infeda l'air, donts^nfuiuit grande mortalité
de bcitail. Quelques mois auparauant ,lcSal &lé
Mein , fleuues renommez d'Alemagne , fe dcsborde-
rcnt, renuerfcrent force cdiFces , &. noyèrent gens &:
t>elFc3 en tref-grand nombre. Il pleut du fang en Eran-
f€ I & près de Maipurg vn eftang Fut veu plufieuœ
JBs ji
4î^ Hljlûirâs admirahlcs
fois tout fanglant.
BudidinejVille afllfc au pied des montf,c]uc PcoIc.Tice
nommée Sudeces:à l'entrée de la haute Lufarie, à vnc
lieuèloindclafourccdu flcuueSucuus, fcntit letrci-
7.icfme iour d'Aouft au mefme an 1551. le mal qui s'en-
fuit. Sur le foirvne nueeefpaiflc s'cftant creuee& ef-
pandue impetueufemcnt dedans les vallées , ou il y a
force eftangs & viuiers,iceux ellansremplis,&lcs chauf^
fccs rompues,reau trouuantpaflage commence à pren-
dre fa courfe vers ce fleuuc proche delà , le fait groifir
& enfler en hautcur:telle que Ton netrouue point que
iamais il ait cfté fî grand , eftant fa courfe roide & fou-
dairie,attendu qu'il tombe des montagnes. Lors acom-
pagnë de ccfte abondance d'eaux impetucufes, ilrom-
pit,renuerfa& arracha iufques auxfondemcns tous les
ponts, iardins& édifices qui eftoyent vnelieuë autour
de lui: tellement que ()uis après on ne pouuoit remar-
quer trace quelconque de iardins ni dci> ballimcns pre-
cedens. De mefme fureur ce torrent d'eaux emporta ^
noya trente deux perfonnes , qui ne peurent gaigner la
ville à temps.Pluiieurs qui eftoyent dehors fe fauuercnc
de viftefl'e es montagnes prochaines. On tient qu'en ce
déluge furent noyez plus de cent perfonnes.
L'an 1555. ^" fréquentes & extraordinaires pluyes fi-
rent tellement enfler le Rhin, qu'il fe desbordn , dont
s'enfuiuitlc degaft d'vne infinité de pays proches de Ces
liuages. La ville de Ruftach entre auttes fut en danger
d'eftrefubmergé par le torrent que fit ce flcuue alors,
qui s'eftantefcoulé en peu d'heures, laifla pour recom-
pcnfc les degafts qu'il auoit faits, vne merueilleufe a-
bondance de poiflbns tr0uue7.es champs, es prairies &
niarefts,mefmes dedans les caues de la ville. Il plut du
fang à Erford, le ç.iour de luin en la mefme année ; & à
LipficleS.iour deluillct.En ce mefme mois, quelques
loursauant la bataille entre Maurice Eledeur de Saxe>
& Albert Marquis de Branidebourg, vers H ildeshci meu-
rent veus pluficurs arbres & herbes couuerts de fang
tombé du ciel.
En Tan 1554.1e itf.iourâe May il pleut du fang près de
Dupçkefpuel
cf* mémorables, Ji^^y
Dunckefpuel ville d'Alemagne.L'an fui'uant il plut auf-
/î du lang à Friberg en Mifnc. Et le fixicfme de luin dâs
lefofféduchafteaude Vinaircen Saxe , fut vcue vnc
fôtaincde fang.Item vne autre entre Erford, & Vinairc,
&vne autre à Erford^qui parauât eftoit d'eau belle & clai
re.L'an lyjd.enuiron le douziefaie & treziefine de May
il tomba delaroufee du ciel es enuirons de Brefle, Ôc
près de Don;au Canton de Bernc,laquelle auoit le gouft
plus doux que miel. Deux iours apres,il pleut du fang
auprès de Schatoufe. Le fécond iour de Septembre les
pluvcs tombèrent du ciel en telle abondance fur la vil-
le de Locarne,qu'elle en fut prefque toute gaftee , & en
danger de ruine.C« hijloiresfont extraitei du recueil des pre"
digespar C.LycoJlhene,
Au mois de Juin Tan mil cinq cens quatreuingts/îx,
s'eflcua fur la ville de Conftantinople vne nuce obfcu-
ïe, laquelle venant à s'cfcarter fut fuiuie dVne pluye de
fauterellcs qui broutèrent tous les fruits & fueilles des
arbres. L'an fuiuant au mois de Décembre furuint chofc
non moins eibange es frontières de Croatie près de
Vvithiizjchafteau apartenât à Charles Archeduc d'Au-
flriche.On y vid vne nuec de canards & d'oifons à mii-
lieiSjlcfquels baiffans en vn eftang proche delà , drefle-
rent la nuid fumante vn combat fi furieux , quetoutle
voifinageTenteiidit. Au matin les foldats & payfans y
courent,trouucrent vn nombre prefque infini de ces ca-
nards & oifons , qui s'cftoycnt entretuez , & en amaflc-
lent en abondance : les vns cent , les autres deux cens^
qu'ils accommodèrent à leur façon, & en vefcurcntlong
temps. Ce qui eftoit rcfté de celle pluye & armée de
combatcansjs'cftant reconu en vne grande prairie , print
le vol & fe retira ailleurs, i. teonchiUm , au fuplemcnr dus
tonnait s de Turquie.
F R £ D I C T I O N.
Edixiefme iour de Septembre Tan mil cinq cens
<crei2,e,lac^ues c|uatiiefme de ce nom, Koy d'Efcoi-
4 3 8 Bijloires admira, blés
ÏCjayantembrafTc le parti de France, s'eflcuacôtrcrAn-t
jglcterrc:& la querelle s'efchauffa tellement , c|u'i] y eut-
bataille donncccn la(.juclleleRoiIacques6i: la fleur de
la noblefle d'Efcolle mourut fur le champ. Lors y auoic
Tn gentil-homme fXcoilois ferre fort cftroittementcn
çrilbn à Londres,lequel dit tout haut,plufieurs Toyans^
«quelques heures dcuant la bataille, Si les deuxarmccs
^Angloife & Efcofîoife)combattcnt aujourd'hui, ic fcay
cour certain cjueleKoy mon fei|îneur fera le plus foi-
ble. Cariercmarquc en ceconm(ft& tourbillon des
vents en rair,quc les vents font merucilleufement con-
craires à l'Efcofl'e.Cefte parole ne fut fans raifon & fans
'cuenement:car il eft certain que les Anges conferuateurs
desEllats publics, & de Tordre eftabli de Dieu combat-
lent fermement contre les malins efprits oui prennent
ylai/îr aux meurtres, & au renuerfement du bon ordre
■<]ueleSeigncnraprouue:comme on lit en Thilloire de
'PcrfejOuTAnge raconte à Daniel , que par longue cfpa-
ce de temps il a reprimé le malin elprit , lequel incitoit
les Grecs a aller ruiner la monarchie Perfique. louchim
C'ttr£:*fy doéle PhUofophe &rnedecm de noîir: temps cnfes ai.-,
\i aie s ce SU fie.
Quelques années parauant l'Empereur Maximilian
|)remicrnuo:tfait la guerre aux Suifles, & ayant cfté
desfaid en diucrfcs rencontres, certains Allrologues &
ileuins lui confejllcrent d'alfaillir ces gcnv-ii par autrçs
endroits, & nueç noputlles troupeç , aliegunns que cer-i
ïainç cftoile fauorifante aiix Suiflcs s'en eltoit aile cou-
tcher, & que d'autres clîoiksfauorablcs aux Princes &
Monarques aparoiHoyent. Pour auoir creu ces predi-
feurs,mal lui enprintrcarà la première rencontre, non
^uercsloin deBafle,lcs Suiffes demcurercntvidoncux
& gaigncrent tout le bagage : H.Mmua uu 50. Iture de j^
4:h,< n.iiKyiicrnngne. Es liures fuyuans nous propofcrons
piu/Icuis autres hiftoires des prcditaons.
y Kl SON'
. i
^ memorMes, 439
FRlSON'^ilER. deliuré,
VN gentil homme Lombard,nommé Pccchfo, vail-
lant & fagc, mais goutteux , eil:ant entré en la dif^
^race d'vn grand Seigneur , cojnme vn iour fans y pen-
(«r il fuft allé fur Ton mulet à quelques licuès loin de fa
maîfon , futcheualé, allaiilipar ce Seigneur fuiuide
cjuelques foldats, puis mené prilbnnier en vn fortcha-
iieau à l'elcart , ferré en vne haute tour, & commis en
garde à vn valet des plus alleurez. On le nouiriffoit là
de pain & d'eau , comme vn criminel condamné à pri-
foji perpétuelle , fans qu'aucun fceuft quel homme c'e-
Jftoit. Cependant on cerchoit cà & là Pccchio , duquel
n'entendant voix ni vent, Jaiuftice du lieu où il demeu-
Toit cftima qu'il auoit efté tué. Car on auoit trouué
fon mulet -, & quelque goutte de fang fur icelui. L'on
fait diligentes informations, & font chargez deux cer-
rains pcrfonnages , contre lefquels il auoit eu querelle
autresfois. Sur cell: indice on les emprifonne& torture
Il rudement qu'ils confelfent auoir tué Pecchio : telle*
ment que Tvn eil pendu, l'autre décapité. Mais Pec-
chio elloit en l.i prifon , ouil demeura dixneuf ans en-
tiers, fms changer ni defpouillcr l'habillement qu'il a-
uoit lors qu'on le faiflil: muni d'efperancc que Dieu le
deliureroit quelque iour. Ses fils,felon la coutume, lui
auoyent fait fes funérailles, puis partagé fes biens. Ha-
uoicellé prins l'an 1Ç40. &: fut deliuré l'an 15Î9. en la
manière qui s'enfuit. Ce Seigneur qui le trairoit de tel-
le forte, eftant mortjtmcontinuoit à Pecchio fon trai-
tement acourtumé : fans qu'en tout ceft efpace de temps
aucun le vill ou parlaft à lui. Auint q uc l'héritier de ce
Seigneur printfantaifie de baftir près de cel^e tour, &
comme on dcmolilfoitla muraille qui fermoit de tou-
tes parts Pecchiojlequel n'auoit clairté que par vne fête
iort eftroitccpar où ilreceuoit fon boire & manger : on
vid ceft homme auecfes habillemcns tout-rgmpu$ , lit.
te 4
44® Hîjîoires admirables
barbe longue iufqucs aux genoux,&,lescheueiL\battans
furie dos. Chacun acourt à ce nouucau fpcftacle.
Quelcjucs gens aduircz-confeillcrcnt qu'on ncramenaft
pas fi toft au iour,dc peur que la claircé ne roft'ufquaft,
&quc trop d'air ncTaffolblift & amortift.Peu à peu donc
il fut remis en lumière &vigeur. Lors il fait entendre
qui i\ eftoit, & toute fon auanture : finalement il eft re-
conu, rentre en Tes biens aliénez par Tes fils, & eftanc
nettement gueri de fcs gouttes vit alaigre & difpoft le
rcfte de les lours. Ce que i'ai entendu de fa propre bou-
che en la ville de Milan, où ic le priai de me faire le dii-
cours de ce que deflus ce qu'il fit amplement, l'an 1^5^.
Simon Aiayol Eitefc^t^ Ital/cnjsnfes loan cMu'culaneSidtfc.'^.
PROCES vuidepar moyen
extraordinatre.
DV temps que Grégoire XIII. a eftéPapcycuft
querelle 6i procès en fait de religion contre lean
Cafier grand maiftre de jMalte. Les iuges déléguez , les
Gre fiers, les Procureurs & les tefmoins, auoycntfait à
JVIaltemefme tout ce qui pouuoit les concerner en ce
fait. LeChcualier Ronicgaseftoit le principal accufa-
teiir, & comme partie. Tous furent adiournez à compa-
roir deuant le Pape Grégoire à Rome l'an 159T. où i*c-
flois, &y visarnucrau mois de Noiîcinbrc Romcgas &
le grand Maiflre.Au mois de Décembre fuyuant Rome-
^as mourut, &incontinent apre^îc gr.ind Mniflre, &
fijrcnt enterrez tous à{:.u\ au temple de la Tnnitc.
Qu^ant aux luges, Greffiers, procureurs ^c tefmoins,
embarquez en mcfme nauire auec les informations &
pièces du procès , ils périrent tous iur mer en ce melme
jiioisj&nereftapas vnfueillet de toute celle procédure,
iùrquoy Tonpeuft fonder iugcmcnc quelconque. Si-
7iKn Aluyol j E:H'f£U3 Italien , en Jes tonn caaictilaireh
FJRO
é" mémorables. 441
P RO GNOSriCATIONS
dungereufes,
FRakçois Marquis de SallufTes^Lieutenant du Roy
François en Ton armée delà les monts, infinicrnent
fauorifc de noftre cour , & obligé au Roy du Marquifat
mernie,qui auoit elle confifqué de fon frère : au refte ne
fe prefentant occafîon de le faire , fon affettion mcfmc
ycontredifant, feJaifla û fort efpouuanter, comme il a
efté aueré,aux belles prognoftications qu'on faifoir lors
courir de tous collez , àl'auantage de l'Empereur Char-
les cinquierme,& à noftre defauantage ( mefmes en Ita-
lie,où ces folles prédictions auoyent trouué tant de pla-
ce, qu'à Rome fut baillée grande fomme d'argent au
change,pour ccftc opmion de noftreiruinc)qu'aprcss'e-'
lire fouuent condolu à Tes priuez , des maux qu'il voyoit
meuitablcment préparez à la Couronne de France , &
aux amis qu'il y auoit, fereuolta S: changea départi : à
fon grand dommage pourtant, quelque conftellation
qu'il y euft. iMaisilVy condui/it en homme combatu de
diueifes pa{Fion«; : car ayant & villes & forces en fa main,
Tarmee ennemie fous Antoine de Leuc à trois pas de
lui.&nousfans foupçon defonfaid, il ciloit en lui d*r
faire pis qu'il ne fit. Car pour fa trahifon nousneper-
difmcs ni homme,ni ville, que Fofran,encores après Ta-^,
uoir long temps conteftee. M. de Montaigne au l. Ui*. defr,
RANÇON merueilleufe,
LE s Hiftoriens Efpagnols parlent amplement delà
rançon qu'Atabalipa Roy du Pcrupaya poureftre
cteliuré des mains de Pizarrceftimee monter à plu/îeurs
millions d'or : nonobftant quoy les Elpagnols le firent
mourir, & pillèrent infinis thrcfors ; partie apportez en
4 4 - Hlfloires adm trahies
rEuropcoùils ont cite nialhcurcurcmciug:7rpiîlc7, par-
tie perdus aucc les pillards Scieurs vallFcau au fond de
la mer.
Mais en la guerrefaite de noftre temps par le Vayuc-
<3e de Valachic auxTurcs.à fçauoir Tan mil cinq cens fc-
ptante quarre , quelques gcnfdarmes Polonois ayant
ticsfaic \n puiflant fecours prindrent vif prifonnier le
chef des troupes, homme de haute taille, & gros à laue-
nant, Seigneur fi riche, qu'il offrit vne rançon prefqucs
incroyable: combien que plufieurs ayent affermé qu'il
•auoit moyen d'en donner cncores d'auantage. Il oifrit
lioncaux Polonnois , s'ils vouloyent lui lauuerlavic,
& nelc point mener au Vayuodc , delcur payer deux
foisautant d'or , trois fois autant d'argent, & vne fois
autant de perles , qu'il fc trouucroit pefant. C'cftoic
fommc fuffifante pour gaigner les cœurs de gens déplus
haute qualité. Neantmoins ces Polonois, gens qui vi-
uent duport des armes,& vont fouuentàla folde de qui
plus leur donne,, aimèrent mieux tenir lapromefle par
eux folenncllcment faite au Vayuode, de lui amener
fidèlement touslcs^prifonsiiersqu'ilsauroycnt attrape?,'
que fe charger d or, d'argent , ni de perles. Ils ramenè-
rent donc au Vayuodclcquel fans demander ni accepter
rançon : le fithalcher en pièces auec les autrei prifon-
iiiers : & toft après lui mefme fut tué par vn Bafla Turc:
&les Polonoisfe fauuercnt. Léonard Goret^n thiftoirc dt
la guerre a l itone f^ayuode de l-^nUchie.
RAPT malheureux,
DV temps que les François faifoyent la guerre en I-
talic fous le règne de Louys XII. vn riche mar-
chant de Milan ayant vn fils vniquc nommé Galeasaa-
gé de dix ans, vint à deceder,laillant force bicsà Ton he-«
ritier, lequel la mcre , honorable & vertucufc Damoilcl- '
ie,fit cfleuer fongneufcment &. inftruire en rous exerci-
ces honnelles & conuenables.E.ftant paruenu à l'aage de
^ixhniifta vingt ans,il commence d'vne part i entendre
jÂiiac dp ich uioi^ei , Xa mtrc n'ayant point voulu fe
(^ mémorables. 445
remarier: de l'autre à eftre tenu par diuerfes exhorta-
tions pour fe contenir en la voye de vertu. Là defTus,
aduintqu'eftant c]ueftion durecouurement de certai-
ne grande partie deue par vn gentil-homme Veni-
tUîn lequel faifoit grand trafic cnLeuant, Galeas qui
n'auoitencores gueres bougé delainaifon , requit fa
merc lui permettre de faire le voyage de Venile , pour
donner ordre i ceft afaire,ayantl'erprit prompt Se propre
à tout.Lamerey confenrit, & après plusieurs belles re^
inonftrances;lui ayant donne vn feruiteur pourl'acom-
pagnerje laifla partir.S'eftant rendu à Vcnife, le gentil-
homme debteur le recueillit courtoifcment j & au bout
de quelques iours le conduifit à Padoue où eftoit fa
famille, afin depouruoir au payement defadebte.Lc
Vénitien auoit vne fille nommée Lucrèce, aagee d'cn-
uiron feize ans, de laquelle à la première entre-veue
Galeas deuint amoureux. Et la nuid fuiuante eut \ix
fonge effroyable , lui eftant aduis qu'vn certain inco-
nufendoitla poitrine à lui & à Lucrèce > puis, le paii^-
foit de leurs cœurs. S'elueiUanr en furfaut tout elton-
né , & criant, il conte à fon feruiteur te pafllon fur hr
quelle il auoit fait puis après ce fonge. Le feruiteur qui
lelloit vn fin macquereau , lui donna vne expofition de
ce fonge, telle qu'il conoilfoit propre d Thumeurdc
ce paliionné, &:fit tant que bien toil après le ieune
homme & la ieune fille parlèrent fecrettement en-
femble, Galeas promettant à Lucrèce de Tenleuer &
mènera Miian , ou quand tous deux feroyent parue^
nus en plus grand aage il Tefpouferoit. Leurs concupil-
cenccs defordonneeslesaueuglerent & tranfporterenc
tellement, que merprifans tous honneftcs&legitime^
lîvjvens , qui elloyent aifcz , ils fe précipitèrent es
malheurs qui s'enlbiuent : Galeas viant de diuerfes
trahifous feignit renuoyer fon feruitcnr à MiUn
auec force lettres d'afaircs :, à: auec fon gcntil-liom-
me retourna à Venile, où il toucha deniers, ik mie
prdrc a toutcc pourquoy il y auoitelté cnuoyé parla
piere.Au bout de troi*- iours on apporte nouuelles au
pauurc geuùl-homnic Vénitien , uuc Ton ne f<jauo;ç
444 Hijloires admirables
qu'cltoitdcuenue la fille Lucrèce. Maislc feruitcur Je
Galcasjcnchc à Padoue, Taucit cnleuee&mcnccà Mi-
lan,ou il auoitlouë maifon, & baillé Lucrèce en garde
à vne vieille femme iadis nourrice de Galcas,qui fai-
foit'du pleureur auprès du Venicicn : lequel entendant
<]ue fa fenune rerccc à Padouë fe defcfperoit pour la
perte de leur fillc;)- alla pour la confolerjaiflant Galeas,
lequel incontincntprend vne autre route, difant qu'il
s'en alloit vers fa mère 3 la quelle le rappelloit. Venu à
Milan , après auoir rendu railbn des affaires communes,
il s'accofte de Lucrece,laquelle il entretint en œ[\c mai-
fon/î dextremcnt ,que durant trois ans entiers rien de
tout ce mefnagc ne fut dercouucrt.En fin Galeas futaf-
failli de d. ux endroits. Dcl'vn par Lucrcce,qui deiiroit
acompliflementde fa promcfTeiderautre parla mere,la-
c]uellele lollicitoitde prendre parti. Ilcnclinoit totale-
ment à garder fa parole^Sc à efpoufer Lucrèce. De i'au-
tre,il eftoit en peine de s*ea del'couurir i fa merclaquel-
lelc voyant autre que de couftume, & fort changé de-
puis Ton raour de Veniie , fut plufîeurs iours à deuiner
<]ue vouloyent dire les excufes de Ton fils, qui deucnu
robufte,trcs-riche, & en fleur d'adolefcence , eftoit fou-
iiaitté des meilleures familles de Milan,qui n'en euflcn:
î>as defdai^nc l'alliance. En fin elle fit tant qu'elle efuc-
ta la mine , & defcouurit que Ton fils entrecenoit d'ordi-
naire vne fort belle ieune fille en ce logis ou la nourrice
auoit efté acommodce : mais en lieu d'y procéder fran-
chemenr,elle print vn coafeil oblique, qui produifit de
terribles ctFeâ:s,la iuitice diuine fe feruant de tels moyés
pour l'éxecution de fes arrefts redoutables & irrepro-
•chables-.Efpia]it vne heure propre, elle enuoyc quelques
rnafqucsen la maifon où eftoïc Lucrèce. Ils lui mettent
Tn baaillon en la bouche, le menacent de mort/î elle
crie,puis la tranfportcnt Iccrettementcn vn monaftcre
<lefemmcs,ou elle eftcommilcen mains fcures. Galeas
reuenant tv^rd en ce logis,& hc la trouu.ant.entcndit de
la nourrice ce qui eftoit aducnu : dont il entra en furie
cftrange,&: demeura couc le lendeaiaia lans vouloir
manger. Lamereaucrtieyacourt,& voyant qu'il eiloïc
en train de defetpoir, commence Taireurer que Lucrèce
cftoitenlieu, dont elle fcauroitluireadre bon compte.
Qu'il reprinft courage^ fiit bonne chère. Lui fc remec
vn peu au deflus , mais ayant eu promelFe qu'on lui ren-
droit dedans le foirfuiuant fa Lucrèce. Cependantil va
s'imaginer que les mafquez en auroyent abulé,& autres
fureurs eftranges que l'cxcreme courroux lui fourra de-
dans la telle : tellenient que fur le foir Lucrèce lui ayanc
efté ramenée & rendue^il lui fit affez maigre acueil,puis
s'approchant plus près d'elle lui dit,il ne faut plus qu'on
nousfepare , ainsconuientqu'vne mcfmemort nous
ralfemble ; quoydifantil tire fon poignard, & lui en
donne dedans le fein fî rude coup qu'elle tombe roide
morte à fcs pieds. Dumefme poignard tout fumant du
fang de Lucrèce , il s'en donne promptcment àtrauers
reitomach,& tirant aux trait de la mort,dit quelques pa-
roles, puis expira. La mefme nuitfl tous deux furent en-
terrez, fur vn bruit que c'elloyenc corps de pelliferez,
que la contagion auoit cllouffezfoudauiemcnt. uijloire
d'Italie.
RAFISSEFRS exécrables chajliez, de
V Aillante & héroïque main.
LA ville de Gènes ayant efté prinfe par Tarmce de
l'Empereur Charles le Quint, les rues, places 5: mai-
fonsretentilfoyentde pitoyables cris de femmes & de
filles,crians mifericordejSciecours. D'autre-part c'eftoïc
vn horreur du terrible bruit que faifoyciirlcs Ibldats,
loinpans portes &feneftres, pillans les riches pa'a s&
demcures,d'vne impetuofité du tout eftrange,les autres
s'cftorçans de violer filles & femmes qui fetrouuoyenc
dedans les maifons.En cefte horrible confulîon , Alton-
le d'Aualos, Marquis de Pefcairc , Colonnel de l'infan-
terie Impériale, courant à cheual par lesrues , pcurueuc
wc remédia à ce tortqucl'on alloic faire à l'honneur des
44^ Hijlûires admirables
femmes. Carvn gcntil-hommc Geneuois , le prenanf
{)our quelque Capitaine, commécc à le fupplicr de vou-
oir rcpnnicr l'infolencede deux foldats Efpagnols, quî
vouloyent violer fa femme , damoifclle honorable , la-
quelle crioir à Taide.Soudain le Marquis met pied à ter-
re^monrc en la chambre , tranfpercec de fon efpec Tvii
de CCS mcfchans qui tcnoit la pauure damoifclle par les
cheacux,& s'efForçoit la rcnucrfer par terre. Celui la dc-
pefche,il court après l'autre qui fuyoit par les degre7,&
lui deflerre tel coup, qu'iilui fend la tcfte en deux. Puis
les ayant faitietter tous dcuxroide morts parles fcne-
ftres de la chambre fur le paué , fait defenfes par fon
trompette à peine delà vie> qu'on n'cuft a offcnferde
fait ni de parole tille ni femme honnelle. Cefte exûcu-
tion retint Irlubricité des foldats,& le Marquis pour vu
aftcfiheroiquc, fut magnifié de tous les gens de bien.
PAoue an ^. Un. de fis iujî.de jiofire temps,
RE C 0 M? EN s ES dénature,
LA prouidence & fohcitude que le Créateur de tou-
tes chofes a donné à Nature eft efmeruéillable. Car
icellc par couftumcioiirnaliere fournît telle force & a-
«Ireflc aux animaux,qui ont les membres tords> ou man-
ques,ou foibles , ou qui en font priuez du tout , ou qui
en ont,faifans outre ce qui leurs cil prcfcript: que l'on
jpourroit dire que la perfeftion de l'animal coofirte,non
pointen diftindion de membres, mais au continuel vfa-
^e d'iceux.I'ay pcnfé maintesfois à cela,lors que nous e-
ftionsà Cobourgaulogisd'Erafme Neufteter, fage &
vertueux gentil-homme Aleman. Nous ayant faid toud
iegracieux acucil& bon traidement dont ildeuts'ad-
iiifcr:,il enuoya quérir en certain lieu, non trop eflôgné
dcla%certain ieune homme aagé de trente vn an , venii
au monde fans bras , lequel faifoit de fes pieds tour ce
qu'vn habile homme fçauroit faire dcfesmains :tclle-
mentque lui-mefuie aôermôiÉ àuoir efté recoœpenfé
ér memorahleSé 447
«S'rn don pour l'autre. S'eftant afTis en vn endroit efga-
îàt la hauteur de la table furlaqucllc on pofoit la vian-
de, il print de les pieds vn coufteau commence a cou-
perdu pain & détailler des viandes , qu'il porcoit de Tes
pieds à fa boucliejCûiiimeaufl'i Ton gobelet , auflî aifé-
ment qu'aucc fcs mains. Apres dilné il commence à eS-
crire fi droit & élégamment des exemples en charade-
res Latins & Alcman.s,que chacun de nous en voulut a-
noir pour les garder par fîngularité. A ma requeile , i\
tailla d'vnganiuet des plumes fort propres pour efcrire^
dontilfitprefentà moi &à d'autres. Eitant ainfî embe-
foigné , ic confideray foigneulement la forme de fes
pieds : & viquc les doigts en eftoyent longs, propres
pour empoigner les chofes , & à les contempler de loin
fembloyent doigts de mains : quant aux ianibes ce per-
fonnage les tenoit honellemcnt couuertes de fon man-
teau. Ph.Canierarltfs lurifconjitlùe ^yiLemMi, en fa doèhs mè'*
dUdtions hiftoriqueSjchap.^j.
leviende voir chez moi tn petit homme natif de
Nantes, né fans bras, qui a fi bien façonné fes pieds ara
feruicequclui deuoyentfcs mains, qu'ils ont â la vérité
à demi oublié lear office naturel. Au demeurant il les
nomme fes mains , il tranche , il charge vn piftolet & le
lafchc, il enfile fon cfguille , il could , il efcrit j il tire le
bonnet, il fe peigne, il louc aux cartes & aux dez, & les
remue auec autant de dextérité que fcauroit faire quel-
que autred'argent que ie lui ai donné , il Ta emporté en
fon picd,comme nous faifons en noftre main^l'cn vi vu
autre eftant enfant,qui manioit vnc efpee à deux mains,
& vne hallebarde,du pli du col à faute de mains, lesiet-
toit enrair&lesreprenoit, lançoit vne dague , &. fai-
foit craqueter vn fouet aufii bien que charretir de
France. Aïichel Seigneur de MontagnCiUn idmre déjà Ejfais,
thap. 2z.
De ce dernier,à mon aduis,ou d'vn autre , non moins
efmerueillable,fait auffi mention M. Ambroife Paré, ea
ces termes. On a veu depuis quelque temps en ca à Pa-
ris vn home fans bras,aagé de 4o,ans ou enuiron , fort &
robufte, lequel faifoit prefqucs toutes les aj^ioiis qu'vn
4 4-8 Hijloires admirables
autre pouiioit faire de Tes mains; à fçauoir auec Ton mol*
gnon d'crpaule,& La telle, luoit vne coignee contre vnc
pièce de bois, ;iuln ferme qu'vn autre homme cuft fçcu
faire en Tes bras. Pareillement faifoitclic|uetter vn foue-
decharticr 5 Scfaifoit plusieurs autres adions j aueclc
pieds,mangeoit,buuoic,iouoitaux cartes & aux de/: à 1^;
fin fut voleur & meurtrier, & exécuté à mort en Gucl-
dres. t>^w %/^.lturejtraiflant des monjhrehchapM.
De récente memoire,on a veui Paris vne femme fjr.
bras, qui tailloit , coufoit, & failbit pluficursautre? ;2-
à.iom.inmefme. Tay parlé maintesfois au frère d'viK.
nommée N.Madame,laquelle ayant eu dansle berceau
en Taage d'vn an & demi , les deux mainsj mangées pai
les pourceaux , s'aidoit de fcs poings & moignons eftar.r
deuenuegrande,au(ri bien que nous de nos doigts, tllc
trauaiUoit exceliement en tapiflcrie, enfiloit dextre-
ment&promprcment Ton aiguille, & coufoit bien e ni
lin^e. Memoirci de nojlre temps.
Nous auons à Nuremberg, vnieune homme , & vne
ieune fiUcnez de mefme père 6c nicre , de inaifon hon-
neile, lefquelsfont fourds & muets de nature. Neanr-
moins ils içauent tous deux fort bien lire, efcrire', chi-
frer,& drelfer vn compte. Le ieune homme compieni
du premier coup, aux lignes qu'on lui fait , ce que l'on
requiert de lui : iî fa plume lui defaut,par Tes contenan-
ces il reprcfente fcs penfees, citant le plus habile &a-
droitioueur de tousieux de cartes & de de/ qu'on fcau-
roit trouuer entre les Alemans. Sa fœur paflc toutes les
autres filles à trauaiUer de Taiguillc , en tous ouuragcs
de lingerie , de tapifferie , broderie, &c. Mais entre ic^
merueilleiifeî recôpélbs de nature,ceci eft remarquable,
que prelques ordinairemct voyans remuer lesleures aux
perfonncsjilsfemblent entendre ce qui fe dit.Ils aflirtent
Ibuuentes-fois aux fermons , & diroit-on qu'ils puifcnc
&perçoiucnt de leurs yeux les paroles des prédicateurs
comme les autres ont acouiluine de les receuoir par
l'ouye. Car toutes & quàtesfois qu'ils veulét,& fans que
perfonne les induife , ni leur en monftre des pourtraits
&cxempici, lU cfcnuciu l'oraùbu Dominicale & au-
tres
C^ memorahles. 449
Vtesfaînftes prières , fcauenc par cœur les textes des H-
izangiles, que Ton prefche esiours de fcftes , & peuuenc
les efcnrc prompcemcnc. Quand es fermons le prcdica-
ceur fait mention du nom delcfus-Chriftileieune hom-
me deuance tous les autres afiiftans à mettre la main an
chapeau,& à plier le gcnouil en grande reuerence.
Du temps de nos pères on aveu en Flandres lean Fer-
<linand,aueugle né, & pauurc, lequel furmonta rcutes-
fois tellement ces deux difficultez ennemies des iiom-
mes dodcs,qu'il deuint dodc Poète & Philo fophe: ou-
treplus Ç\. excellent Muficien, qu'au grand plaiiir de tous
ceux qui Tefcoutoyent il iouoit exccllément de diuer-
fcs fortes d'inftrumens de Musique : & mefmcscoir.pofa
<le fa mémoire quelques chanfons muiîcales f"ort harmc^
nieufes à quatre & cinq parties. Ilyavn peu plus de
cent ans; qu'on vid merue.'Ucs en Nicaife de Vverdc>
natif de Malinesen Brabant. Eftantdeiienu aueugle,
lors qu'il n'auoit'pas encore trois ans acomplis , néant-
moins il profita tellement en route dodrme diuinc&:
humaine (combien que iamais il n'cuft veu A ni B) que
tous en furent efmerueillez. Il fut fait mailîre es : rts à
louuain , regcnt des efcholes i Malines, puis créé hi-
centié en Theologie,leut en public les liures des Euai:-
geliftes. Depuis ayant receu en rAcademic de Cologne
le degré de Docteur en droit ciuil&: Canon , ilyîeut
publiquement en i'efchole des liures de l'vn & l'autre
droit , recirant les textes par cœur : & continua long
temps en cefte profefilon. vh.Camsr<x;-m< enjcs Trcdùano?is-
hi'ftoriqueSfch.'^J.
N'yapas long temps qu'on a veu en Italie Louys
GrotOjfurnommé ordinairement ilnecod^iiadria y le-
<juel,tout aueugle qu'il eft des fa naiifancc , defcouurc
en fcs harangues & poefîes mifcs en lumière , vn efpnt
non moins vif & prompt, que lî tout à l'aife &si:ecde
bons yeux il auoit fueillctté tous les dodes cicrjcs an-
ciens & modernes. l'ay leu en fcs poefies des epigr.imes
aufli pointus & ingénieux , qu ileft pofnble dercncon'
trer aillcurs.Ln France auffi l'on a veu l'aucugle Romi-
glxus,lcqueU efté de uoilrc tcps grand Philofophcdo-
F i
'450 Hîjloircs admirables
^te grammairien , fubtil difputeiir, & excellent preC
cheur d'vniugcmtnc vif &ii'vnc mémoire prompte.I'ay
parlé à lui deux fois, & ay profité en fesdilcours graues
& folldcs. Extrakl de mes rruînoires.
REFLFX merueilleux.
LE Rhofne eÛ vn des plus rapides fleuues de l'Euro-
pe. Et neantmoins par v n fecret merueillcux on la
veu remonter & lailTcr a Çcc fon lid. Dont i'allegueray
deux hiftoires. Sortant du pays de Valais , il entre fort
enflé dedans le long&fpacieux lac Léman, depuis la
Villcneufuc où il demeure méfié Tcipace de douze
heures de nauigation aifee iufqucsà Gcneue, où for-
tantdu lac en fonlid: particulier, d'vne ville courfe il
dcfcendà Lyon. A vndemi quartdelieuè de Geneue,
TAruc fieuue ou torrent ordinaire & profond venant
du cofté du Fofsigny fe rend dedans le Rhofne. Tay en-
tendu de gens digne de foy ( ce dit Aïaijke Nicolas da
Gédlan > en ftn Com>mntaire fur le 14. chapitre d^ Exode)
cjue de noftre temps comme foixante ou feptantc ans
font ou enuiron, qu'à l'endroit où le Rhofne fort du lac
il Geneue, pour entrer en fon iid: ou canal, parla vio-
lence dSn vent Auftrial fut tellement repoufle contre
mont , que les eaux s'amoncelantcs au lac , le canal de
mcura fccprcsd vne heurc,& fut veu de pluficursen tel
eltat, lefqucls ontvefcu long temps depuis. L'an 1^00.
fe fit vn autre reflux du mefme fleuue à trois ou quatre
reprinfcs depuis le grand matin du iei/iefmc iour de
Septembre , iufques furies on/.e heures, précédé de
çrands tonnr.rrcs. Lcsbafleaux demeurèrent à fec. Ce
qui parut admirable , fut que le reflus ne fe monftra
qu'en vne partie du YïOl du coflé de la ville à l'Orient
d'hiucr/Sc deflbus vne partie du grâd pont , où les ferui-
teurs des couflcliers allèrent anrafler des doux&ferrc-
mcns.C'efl: vn des bras du Rhofne, ayant là plus de cincj
piedsde hauteur alors. L'autre plus grand bras vers les
moulins recula de moitié d'eau. Ce icflus dura peu : s'il
eut continué vn quart d'iiewrc d'cftoit pour noyer tout
Ûlbuorg
é* mémorables^. 4fî
le bôurg de faina Gcruais. Tel aduertiflement eftonna
«quelques pej:ronncs:& coll après le Roi de France s'epara
de la BrctTe & de la Sauoye^laus coup ferir:puis rendit la
bauoye par traiâé de paix au 'Dac.Memolres de nofiretejjU
RESO LFT 1 0 N gêner eufe^ mer-
ueilleufe dr mémorable.
LE Roi Ladiflas de Hongrie ayant efté àQ^^{Q.Sltué
parles Turcs à la iournee de Varne^entre autres pri-
lonniers menez à Conilantino^lc/e trouuercnt douze
icunes gentils-hommes Polonois , qui furent mis à parc
pour élire circoncis & feruir aux mfamctez abominables
de Sultaiî Amurath,au ferrail duquel ils furent conduits
^our tel horrible etfe<5î:. Eux délibérez de n'endurer ia-
mais tel opprobre, confpirercnr genercufement de tuet
ce vilain nran. Mais leur délibération ayant efté efuen*
tee par certain traiftrej,eux le fentans deicouuerts, pouf
fe deliurer tout à faid de la bruftalité & cruauté Tur-
quefque , ayans fermé foigncufement fur eux les portes
de leur ferrail, empoignèrent leurs efpees & poignards,
& s'entretuerent tous par vne efcrime fanglanre ; telle-
ment qu'après que parfradion de portes Ton fut entré
oùilseftoyent on les trcuua tous roides morts cften-^
dus ci & la fur le planché fors y\\ qui refoiroit encores,8c
quiauantqu'expirer,commeii fit tcil apres,dcclaira touc
ce que delfus,p!iis mourut ioyeux & content. Cramer at*
Zl.ltthile Chlji»de Pologne. loachim ÇnrAH^ es annales de Silefie^
RES SEMB LANGE.
LOvYs Viues , dode Efpagnol , récite auoir veU
en la ville de Malines deiixieunes enfans hercs>
l'vn nommé Pierre, Tautre lean , iîls d'vn Confeiller
de laviUc , beaux &biea formez, nuis ferellemblang
"4^^ ^i^oires âdmirahles
tellementj«juc non feulement les cibangers, mais lepe*
re & la mcre merme/e mcrprenoycnt oïdinaircmenr,
prenans lean pour Pierre & Pierre pour Ican. infes ah-
ftotations fur le U.chap.xl.litt.de la cité de£)ic».
Don Rodrigue Giron & le Comte d'Vrucgue fe ref-
fembloyent iîbien que ceux mcfmequiles fcruoyenc
& hantoyent tous Icsioursjiiepouuôyentle difcerne»
ni cognoiihe , fi non par leurs habits & agcncemens de
leurs perfonnes,v/^. Tor^«emu£/c enfen fjexameran^remicr
iour.
Le Comte de Benauentauoit vn laquay , lequel cer-
tain homme vint trouuer difant qu'il clloit fcn frerc, &
qu'eftantplus ieune il cftoit parti d'auec ^ts parens.Ilsfe
reflembloyent fi bien,qu'onneles pou uoit aucunement
difccmer , fînon en ce que celui qui eftoit furuenu , fe
monflroit plus aagéque l'autre. Et combien que leJa-
quayfuft appelle par lui pour aller prendre fa part de
certain héritage, il difoittoufîours à l'autre ie ne vous
conoy pointjie ne fuis point de voftrc pays;& iuroit qu'il
oeluiattouchoitdefang. L'autre au contraire perfeuc-
roit à Taimcr comme frère : fî qu'en fin le Comte leur
commanda d'aller cnfemble vers vne certaine femme
ancienne qui fcdifoit leur mère. Le laquay s'y tranfpor-
ta : eftant chez eUc.q uoy qu'il alleguaft,il ne peut ofler
à ceftc femme l'opinion qu'il eftoit fon propre fîls. D'a-
uantage> pour l'cfmouuoir tant plus elle lui dit,fî vous
cftesMion hls vous dcuez auoir vne marque en tel pied,
& en tel endroit , qui vous cft aucnu d'vne bvuflurc , e-
ftant petit. Le laquay s'efmerueillant de cela confcffa
d'auoir telle marquc:neantmoins perfcucra de nier qu'il
fuft fon fils^affermant qu'il n'auoit iamais eltc en ce lieu
la,commela vérité elloit :car depuis fut aueré , que fon
naturel elloit différent de ce peuple, & fccut-on au vray
qui efloycnt lès parens. La nnfmc.
Eftanticunc garfon, i'ay vcu vn autre cas merueil-
leux, en vn lieu pies de Segonie , ayant feiourne 4. ou
cinqiours enlamaifon de certain pcrfonn.agc dont la
femme viuoicauffi. lis auoyent deux filles lî fcmbla-
Mc5;que roiirnanclcsycuxonnc pouuoit conoiflrcni
dif^
^ mémorables. 4j}
n; difcrrnerrvne de l'autre. Ces ieunes filles poMuoyenc
juoir treize ou quatorze aiis:& comme l'euli'e demande
à la mcre,Iaquellccftoitrairnce,elle m'en môilrarvne>
& me rcfpondit qu'elle eftoit de demie heure plus aa-
«^eeque l'autre : pourcc qu'elles eftoyent toutes deut
d'vnc mefme ventrée : & qu'auec elles eftoit pareille-
ment venu au monde vn fils, lequel le tenoitauecvn
fîen oncle en Segonie. Et comme ie m'esbahiifois de fo»
propos, elle me dit : Le frère reffemble tellement à fes
deux fœurs , que comme il-fut venu nous voir, Scfcref-
iouir aucc nous les fefîes pafî'eesde Pafques , vniour
lui& cefte llene fœuraifnec changèrent leurs habille-
mens & nous deceurent lepere&moy, tout le long d»
ioutjfe mns auec grande ioye de ce que nous ne les co-
noiflîoîis pas,& que nous prenions l'vn pour l'autrciuf^
ques à ce que furie foirils fe donnèrent à conoiftTc;
& ce nonobftant à peine le pouuionsnous croire. Li
mtj'tne.
De noftre temps ontefté veusenla ville d'Auignon
deux Gentils-hommes frères, fe rajpportaijs Tvn â l'au-
tre , tous deux nez d'vne ventrée, hls d'vn Audiancier
de la cour du Pape, Ilsparuindrtnt à grand aage,biea
forme7,,membrus & puilfans, de poil blond , ayans tous
deux la veuë courte , la parole douce , refprit gentil^
de contena-ice & conuerfation amiable. Tous deux do-
iftes , aflfeftionnez à fuiurc les grands Seigneurs &
vaquer aux afaires : tous deux iouans du Luth , chan-
tans en mufique, efcriuansl'vii comme l'autre, ayans
lefon de la voix,la parole , le gefte , !e cheminer, les
trai<fcs,rair,la façon de faire , & toutes leurs adionsii
femblables , que leurs propres pcrc , mère & frcres,fc
trompoyentà en marquer la diATercacc. lean Vville-
mindodc perfonnage, m'afouucnt confeÛ'équeplu-
lîeurs fois , lui viuant prefques ordinairement auec ces
deux frères , & parlant comme à toutes heures enfeni-
ble,il s'eiltrouuéne f^ioir lesdifcerner , tellement,'
^uepenfant conim>miquer à l'vn quelque rccrct,ille
trouuoit puis après que c'eftoit à l'autre: de forte que
i'i^iioulc leaguueUcmeiu du double SoHas eaTA^çp:
4 54 Hifloires admirables
jphitruon de Plaucc. 11 y a d auaiuai;e : c'eft qu'on a
Surpris en mcHnc temps ces deux frères, fepare? i'vn de
TautrCjtouchczdc mefme défit Scpenfee fur ledcficin
<iechofc particulière. Ceftencores plus , que I'vn fc
trouuant aucunement malade , l'autre pareillement en
lento]trapprehcnfîonj& fouffroit Aqs atteintes du mal
<iefon frere.D'auantageA'vn nefçachantrien dcTautie,
el^ans affedioniiez à vne Damoifelle,lui tcnoyent méf-
iées propos,ouoy qu'à part & a diuerfcs heures jau M-
w:eurvn de i'aïuie.-aulquelsla damoilclle refpondoit,o-
ics à Tvn , penfant que ce fufl l'autre , puis au fécond
<îu'ellc carefioit fous ce voile qui la dcceuoit Au. rap-
port de fon vifage à celui de fon frère. Au rcfte , iamais
on ne pouuoit en tirer la différence , que pnr eux-mef-
iTîes,rvn monftrant au côlcertaine marque apportée
du. ventre de fà merejcnfiniprcffon de laquelle nature
iiuoit voulu cncor ttacor quelque difTeiîibl'J^t^ejpouro-
iicrence traidlapaii-ud'ertfieir!blance,&; tenir com-
me fapropiieté , qui cil de s'cnouiren la diucrfiré des
fhofes, Ùl ne faire du tout efrrangeen l'opinion ce qui
eit de fon cilence.,^» i.tom.da hifioncs prodigisufes par-
tie i.hifioire i.
Du temps de François SforceDuc oc Milan, y eut en
fa cour vji bouffon nommé Marquelîn , lequclrappor-
toit tellement de vif;:ge , geftcs & contenances a S'\%iC-
jnor.d Mabtcftc, Seigneur'dc Kiminy , ictpel auoit cf.
j'oufé la fille de Sforcc,que (î Aîalatelte venoit à Milan,
Sfûice fçachant qu'il fe defplaifoit de Aoir quVn plai.,
fant tue p::ns pour lui de ch-'ciir ; eftoit contraint d'cn^
iioyer ailleurs Marquc/în, tandis que Sigifmondfeiour-
n oit à ^Vihn.h.Fulgûh^cnjei LxewpUsi lm.9.
RICHESSES d'or & d'argent y mej^rifecs.
IE A N Reuchlin,ayant cfl-c enuoyc par Eberard Duc de
Virteuiberg en ambaffada vers l Empereur .-îprcs a-
UOXï
\hles.
^oirfidelen:iéc exécuté telle commifïlon, comme l'Em-
pereur fift aux vns & autres de tref-riches prcfens, Reu-
chlm refufa tout net ceux qui lui eftoyentoflerts , &
fupplia TEmpereur c]uile prefloit d'en prendre , puis
qu'il n'eftoit raifonnablc de rcfufcr quelque choie de la
libéralité d'vn grand Prince , de lui vouloir donner cer-
tam exemplaire d'vn Bible Hcbraique efcrite a la main,
pluficurs hecles auparauanr:ce qu'il obtint. l.Brajitcan en
fa PrejAce fur S^duian^de U providence de Dieu.
RFI2iE ptoyMe,
L'An 1540. trois gentil-hommes Bourguignons, des
premières maifons de France , le Baron de Senecé,
le Baron de Corberon , &le Baron de Sarry tous trois
ieunes, grands feigneurs, François , bons amis , venus
tous trois à Lyon , pour acheter des ioyaux & draps de
loyespour leur fiancées, fe logèrent en l'hoftellerie du
pouicelet , rué de Flandres , logis renommé^ mais vieil
de baftimcnt, & fort ruineux. Pour l'amitié qui eftoit
cntre-cux ils voulurent eilre en mefme chambre,& après
auoir pafle certain iour le matin & l'aprefdinee ioyeufe-
ment, voulurent coucher enfemble , pour auoir plus de
commodité dedeuifer. Orauint il comme ilsfurenn
couche7,rvn d'eux lifant en vn liure,les deux autres de-
batansqui tiendroit le milieu du lid, que tout à coup le
planché de la chambre leur tombe deflus,tellement que
tous trois demeurèrent acabkii tous le faix de cefte rui-
ne. Ils furent fort regrettez : & fur ceft accident pi-
toyable 6c efpouuan table fut faiét le qua drain fuy-
uajit.
Dedans le corps a'vn Lyon mcrucilleHX^
Trou K^dcnvs 'vn poitrceat* périlleux
Tua fans dent, ^ fans les at*oir mords.
Qui enterrcT^ fu-rent plujlojl ^m rnêrts.
Mémoires de Lyon.
Ff ♦
45^ Hijloires admirables
RVItiES €p anges.
IE donne tiltre tel à Thiftoire fuiuante, merueilleuf^
en toutes fortes , efcritc par vn marchant des pays ba^
en vn difcoiirs de fon voyage de Molcouie , non enco-
Tcs imprimé que iefçaclic. Et ie^le reprefenterai le plus
brief qu'il mcferapoflible. Mofcovv , capitale des pays
du grand Duc de Mofcouie , cil vnefort grande ville,
mais mal allcniblec, ayant de circuit trois lieues & de-
mi d'Alemagne,compris lesfauxbourgs, autant jiabitcz
que la ville , l'entourdc laquelle n'a point plusd'vne
bonne lieue Françoife. Les rues & chaulfecs font de
Grands arbres rangez près à près , & des pl.inclics à co-
ite des maifons : & y fait fi fangeux en temps de pluye.
^u'il eftimpofsible d'aller par la ville autrement qu'à
chenal, à la coulhiine du pays où les cheuaux font à vil
prix, & de petite defpenfe , fans eftre ferrez, pour long
chemin qu'on leur face faire , iinon durant les glaces.
X.QS maifons ne font guercs que dVn eftagc, ou deux au
piusjtoutcsbailies tie bois arrange l'vn fur l'autre. II y a
tanten la ville qu'es f3uxbourgs& auchafteau, cinq mil
cinq cens temples, qunfi tous comme des chappelles:
plufleurs conftruits aucc grands arbres rangez l'vn fur
l'autre: & ont des hautes tours de bois, fans fer ni piei»»
re, fort bien faites Le logis du grand Duc eft aufsi de
bois : qu'il eftime beaucoup plus fain , que s'il eftoit de
p:erre. Le challeau eft alfcz fort de muraillcs& ce fef-
ie/. largcs.Il tient autant déplace que le reite delavil.'e.
A vn des codez d'icelui demeurent les Sins, à i'atitrc les
Oprifsins, qui fon: comme les intcndans des finances
du grand Duc. Içeux defpefchentles marchans eftran-
(fers;& fi tofl: qu'elles arriué la, faut configner es mains
des vnsou dçs autres toutes vos marchandifes. Ellant
parti deNcrue cnuiron le dixicfme de luillct i^yo.i'ani-
11 ai fur le comencement d'Aoult à Mofcovv, ou ic trou-
udy le grand Duc 6c Tes gciis cmpcichezà ccrchercnui-
ion 504
tf memorahles, 457
Tonjo.perfonnes ciuipaffcrcntpar refpcc du bourreau:
& yen eut vn ietté tout vif en eau bouillanLc:& ce^our
auoir reccu prefens & argent. La plufpart li'iceux eftoyét
jrands Seigneursjdes plus familiers duDuc. Les autres,
fliarchansde Novvgart,auec leurs femmes, enfans& fa-
iiiiUes^accurez de trahifon en faueur du Roy de Polon-
gue. Peu de iours après vnc peftehorrible enuahitla
ville de Mofcovv & les enuirons , de telle violence
qu en moins de quatre mois moururent plus de deux
cens cinquante nulle perfonnes. Et fut remarqué par-
ticulièrement qu'en hui(ft iours aOauoir depuîs le lo.
lufques au 18. d'Aouil moururent 1705. preftres, de
comptcfait: & continua ccfte pcfte Ç\ horriblement,
qu'en fin d'icelle chafcun s'efmerueillûit; rencontrant-
quelqu'vn de fa conoifl'ance.
Ccûe mifcre extrême fut fuiuie Tan d'après ct'vnc
ruine eftrange, le quinzicfmeiour de May. L'occafîon
fut que l'Empereur des Tartares mal contant de ce que
les Mofcouitcsne lui payoycnt plus certain tribut an-
nuel, &:e3itendint d'autre part que le grand Duc, par
fcs tyrannies & maffacrcs, auoit tellement desfriché Tes
pais^que la rcfiftence ne feroir grade de ce cofté,ie fom-
madcpayer Ictnbui.MaislcDuc ne rcfpondit qu'outra-
ges & mocqueries. Au moyen dequoy îe Tartare partit
de Tes pays enuirô la fin de JFeurier, fuiu' d'vnearmee de
cent mille chcuaux,qui en deux mois & demi firctpres
de cinq cens iieuès d'Alcmagne.Eftans à deux iournees
près desfrôders du Duc^d délibéra leur aller au deuant,
& de fiitjeur donna batai]le,mais il ]j perdit, auccvne
horrible defroute & carnage de les gens, i c Duc conoif-
fant que le Tartare le cerchcroit,s'enfuit à grandes iour-
nees au plus loin qudpeiit.Tl r.'elloit qu'à neuf liencs
de Mofcovv, qiîund les.Tar.t iCb vindrent ceindre la vil-
le,eliimans qu'il y fut. Ils mirentle feu par tous les vil-
lagcb d'aJenuiron:&voyans que la guerre tireroit trop en
lôgucur pour cux,refblurcnr de bruflcr celle grâd' ville,
ou du m6ins le faux-bourg d'icelle. Pour ccH cfFe<5l ayâs
difposéleurs troupes tout au tour, i!i mirent le feu pat
tout;Cclicnicncqucc'cibuvn cercle enflauuuc. Adon^
45 s Hifloircs admirables
E'clleua vn tourbillon de vent fi furieux qu'en moins de
rienil poufla de toutes parcs les cheurons & lon?s ar-
bres allume? des fauxbourc-s en la ville. L'embrafe-
ment fut fi loudain, que peHonne n'eut loifir de fe
rauuerfinonà i'endroitoù il fe trouuoic tout à l'heu-
re. Les perfonnes bruflecs de cefte embrafement mon-
tèrent à plus dedeuxcens mille: ce qui auintpar ce que
Icsmaifons cftoyent toutes de bois, & mefme le paué
toutde grâd fipinsarrâge?., qui eftant huileux rendiréc
rembrafement extrerae;tcllemét c,\itn refpace de qua-
tre heures la ville &le.s fauxbourgs furent entièrement
confumcz. Ajoi,& vnieunehôme delà Rochelle , mon
trucheman.crtions au milieu du feu , dedâs vn magazin
♦out vouré de pierTe,meTueilleuremcnt fort, dot la mu-
laillc auoit trois pieds & demi d'efpaifleur, & n'auoit
ouuerture que de deux coftezil'vn par où l'on entroit &
^ortoft, qui eftoirvne aflcz longue allee^cn laquelle il y
auoit trois portes de fer , diftantes l'vne de l'autre enui-
xon fix pieds. De l'autre cofté il y auoit vnc fcneftre ou
cerneau , muni de trois huis de fer, à demi pied l'vn de
l'autre, Iclquels ouuertures nous bouchalinespar de-
dans au moins mal qu'il nous fu^- poflib.'ercc neantmoins
il y entra tant de fumccque c'eftoit plus que trop poui;^
nous eftoufter,n'euft efté qu'auiôs vn peu de bicre,dont
nous nous refrai fchiffions de fois à autre. Pluficurs Sei-
gnciirs & Gentils-hommes furent ettcints cscauesoù
ils eftoyent retirez, parce que leurs maifons , faides de
gros arbres, venans à fondre , foudain accabloyent tour.
Les autres réduites en cendre boufchoyét toutes ouuer-
tures & emboucheures:tcllemcntqu'i faute d'air les en-
fermez pcrifloyét. Les pauures paifansjqui s'eiloyét fau-
uez de viii^t lieuës à la ronde aucc leur beftail , voyans
i'enibrafementfeiettercntenlapius grande place de la
ville, laquelle n'eft pauce de bois côme les autresmeant-
nioms ils y furent tous roftis , dételle forte quvn hom-
me delà plus haute raille ne fcmbloic qu'vn enfant,tanc
l'ardeur du feu les auoit retirez : & ce a caufc des gran-
des maifons a Tenuiron. Chofc la plus hideufe&z ctFro •
yablcà voir, qu'il cft pofl'iblc de pcnfer.En pluficurs en-
droiD, d'icellc place les hommes eftoycc par h?uts moB-
ér memoYd hles, 4 S ^
ceaux plus de demie picque: ce cjui m'cftonna mcrueil-
Icufementrncpouuantcomprcniirc comincilseftoyent
ainfi cntafle'/. les vns fur les autres.
Ceft horrible cmbr^ifement fit tomber la plufpart des
créneaux des murailles de la ville , & crcucr aufli toute
l'artillerie c]ui eftoit fur icelles murailles faite de brio ue
à Tantique aucc créneaux , (ans rcmpars ni foflez à Tcn-.
tour.Plufieurss'eftans fauuezlà au long y furent neant-
iVioinsroftisjtantle feu eftoit véhément : entre autres
beaucoup d'Icalicns & de Wallons de ma conoifiance.
Tandis qucle feu dura,il nous fcmbloit qu'vn million
de canôstônoyent enremble;& ne pt'fions qu'à la mort,
cftimansquele feu dureroit quelques iours:à caufe du
grand pourpris du chaftcau de la vilie^ô: des fauxbourgs.
Mais tout cela fut dcpcfché en moins de quatre heures:
^n fin derquelles le bruit s'amortiflantjil nousprint en-
uie de voir fî les Tartares eftoyêt entrez, deiquels nous
n'auions pas moins de peur que du feu.Ce font gcs faits
à la guerre,encores qu'ils ne mâgcnt que àzs racines ou
autre telle fubftance , & ne boiuent que de Teau , & lest
plus grands Seigneurs d'entre eux ne viuét que de cha:r
cuiteentieledosd'vn cheual&la felle en laquelle eil
monte le caualicr. Si IbiiL-ils hommes robuftes faits à la
peine,Gommeaufll fontleurschcunux qui courentmei-
ueillcuremét viil:e;& font plus de chemin en vn iour^ne
mangeant que de Therbc; quv': les r.oftres ne fçauioyenc
faire en trois iours,eji leur donnant force auoine. Ccft
pourquoy les Tartaies vienent aifément défi loinaf-
iaillir les Mofcouites. Or ont-ils cr^fte adrefTe, de ne ve-
nir quertfté, pour ia commodité de leurs chcyaux.
Leur pays efttéperé, duquelils partent à la fin de Fc-
inicr^pour eftre en MofcoLie au cômenccmcnt de luin,
& s'en retournent à lafin d'ic^îui en leur pays,pour n'e-
jftre furprins de Thyuer en Ùuflîe : ce qu'aucnant ils
mouiroyent tous oc faim , eux à caufe des grands dc-
fcrts contenons plus de crois cens lieues d'Alcmagne>
inhabiccz,& partant hors de toucfccoursde viurcs,&
leurs cheuaux aufïi n'ayant aucune herbe : ce qui les
contraint de faire t^\ voyage , qui eft de plus de
VmÇQ. lieues d'AlemagnC; ou quatre ou cinq mois^uçc
4^<^ Hïjfoires admirables
toute leur armée, f]ui cil ordinairement de centcinquS-
t-' nul ou ^twx ccnv nulle cheuaux , bons au poflible;
tt>ajsic.s caualiers font malequippcz, ne portans pour
toutes armes <]u'\'ne chcmile de maille aucc vne jaucli*-
nc,vn arc & des flefches , ne fcauent que c'eft d'artille-
iicniharqucbufern'ayanscntoucleurpaysquedeuxvil-
lesoù leur Empereur tiene fa Cour, (ans bourgs, villages,
ni nu-'irons : ains fe contentent de demeurer fous des pa-
uilloas qu'ils remuent tantoft çà,tantoft la.
Pour reuenir à noilrc mifere , ayans efcouté quelque
peu, nous entendifines courir à trauers la fumée deci &
«îelà quelques Mofcouitcs, qui parioyent de murer les
rortes , peur empeicher l'entrée aux Tarrares qui atten-
tioyent que le feu fuft du tout efteinrt. Moi &mon
nucheman fortis du magazin , trouuafmesles cendres fi
chaudes qu'a peine ofions-nous marcher; mais la nccefli-
re nous contraignant, nouscourufmes vers la principale
porte: où nous trouuafmcs 15. ou 50. hommes refchap-
pezdufeu, auec lefquelsenpeu d'heures nous mura(l
mescefte porte & les autres, & fifmes le guet route la
nuicl auec quelques harquebu7.cs garanties de l'embra-
leriient. Au matin voyans la ville non tenablcpir lî peu
ce î?ens que nous eftions, cerchafmes moyen d'enrerr au
chaftcau dont Tentree eftoit lors comme inacceflible.
Celui qui y commandoitfut tref-aife d'entendre noilrc
intention>& nouscria que nous yferiôs les bien-venus.
Mais il elloit tres-difficile d'y entrera caufe des ponts
ferulle7,de force que force nous fut de monter par deflus
les murailles, ayant pour eichellcsdes hauts fapins que
l'on nous auoit iettez de dedans, & aufquels Ton auoic
♦donné des coupv de hache de pied en pied , pour nous
garder de glifler. NoiLsmontafinesdonc à toute peine:
car outre Tincopimodité euidente de ces efchelles fca~
breufes,nous portions fur nous la fomine de quatre mil-
le tallers & quelque pierrerie : ce qui nous empefchoic
jnerueilleufemcnt à grimper au long de ces arbres :& ce
qui redoubloit noftre peur eftoit que dcuant nos yeux
nous voyons quelques vns de nos compagnons, n'ayans
«}uc ieiir^tforps à ikuuer,roulct ncantmoins du milieu
C^ mémorables. 46"!
ou du haut de ces arbres dedans le fofTé pleiruie corps
bruflez : & ne pouuions marcher que fur des morts,les
monceaux delquels eftoyenc fi "drus & efpais prefques
par^tout.qiie force nous cftoïc de palier par deflus, com-
me fî c'euffent efté des coilaux à monter. Et ce qui nous
redoubloitTenuieftoit qu'en marchant deHus , bras Se
iambesrompoycnt tout net,lcspauures membres dcc^
créatures eftans tout calcinez parTardeur dufeu. En-
fondrans ainfî dans ces miferables corps , lefang & l'or-
lîure rcjaillifl'oit fur nous. Ce qui caula telle puanteur
par route la ville, qu'impoisible eftoit d'y fubiîller.
Le 15. May furie foir, comme nous attendions eïi
grande perplexité ce que les Tartares entreprendroyenç
contre nous, qui eflions au nombre de quarte cens ou
enuiron dedans le cha{leau,les Tartares , aufqucls nous
auions fait vne falue d'arquebuzadcs, & abatu quelques
vnsqui s'eftoycnt approchez trop près d'vne des portes
du challeau , commencèrent à tourner vifage droit vers
ic chemin par où ils elloyent venus, de telle viileûc que
le lendemain matin tout cctorrcnc fut efcoulé : donc
ayant loué Dieu,& donné ordre à nos afaires, co nme la
calamité ptefentelc permettait, nous partifmesde ce
pays defolé.
SAIGNEE merueille\fe.
IE fus appelle aux fiuxbourgSaindGermin desprez>
à Tenfeigne de S.Michel au logis du SircIeanMatiau,
pour vifiter& medicamenter vn icunehomme aagé -.le
28. ans ou enuiron, & de tempera: irc fanguincdomeili-
quedVn des maiftres d'hofléliie l'Amiral de Brion. Il
çftoit tombé la refte dcuant fur vne pierre, & s'eftoit
blefie à l'endroit de l'os pariétal , partie fcneftre : & au
moyen du coup s'eftoit fait vne phyecontufejfanstou-
tesfois aucune fradure de l'os par le moyen de laquci!(î
luifuruintlcfcptielme lour vne heure continuée: ref^
aeric,auec grande inflammation phlegnioneufejcauiec
4^2, Hijloîrcs admirables
parla bicflure du pcricranc, acompagncc d'vne cnflt/rô
inerucillcufe de toute la telle & le col , ayant vn vifaoc
mcrueilleufemcntdcsfiguré, ne pouuant voir ni parler,
& moins aunlcr aucunes chofcs, C\ elles n'elloycnt bien
liquides. Soudain voyant tels accides , cncor que le iout
de dcuaut, qui eftoit le hui^liernie de la blclTurcil cull
elté faigne par Germain Agace maiftre barbier , lequel
lui auoit tire quatre palettes de sâg , & voyât les accides
i? grands, &la force du panent bonne , ie reiteray la fai-
gnee,&lui tiray quatorze palettes pour celle fois .-puis
le lendemain voyât que la fieure ni aucuns des accidens
nes'eftoyentnullemétdiminuczomaispluftollelloyenc
augmétezjie réitérai la faignee , & lui tirai encore qu.v
tre palettes. Le lour luiuantjles accidens n'eftans dimi-
nuez,ie fus encore d'auis de leiefaigner, cequcien'o-
fai faire feul, veula grade euacuation qu'on auoit ja fai-
re, le priay dôc moniîeur Violaine,dod;eur régent en la
faculté de iMedecine,hôinc doite& de bon iugemét,de
voir ce malade. Lui ayant taftë le pouls, le irouuant fore
robufte, voyant aufli la grande enfleure & rimpetueufe
véhémence de Tinflâmation, fut d'auis qu'on le faignail
promptement:& lui ayant dit que ja Ton auoit tire Z2.
palettes, me dit que quand on lui enauroittiré d'auan-
rage, fi ell-ce qu'il lui en faut encore tirer : attendu que
les deux indications principales qui nousihduifent à tai-
re la laigneejiont prefentes, à fçauoirlagrandeut de la
maladie & la force du patieut. Adoc bien ioyeux, ie iuî
en tire encore trois palettes en la prefencejSc lui en vou-
lois tirer d'auantagerce qu'il remit i raprefdinee , ou ie
lui en tirai encores deux,qui font vingtl'cpt palettes(les
palettes de Paris ticnent trois onces i>c plus ) qui furent
tirées au patient l'efpace de quatre iours. La nuit fui-
uante il repoia fort bien , & le lendemain ic le trouuay
fans fieure, l'entlure grandement diminuée , l'inflamma-
tion prefques toute eileinte , hors mis les paupières fu-
perieures des yeux,&le mollet des oreilles, lefqucls en-
droits s'apoilumerent , ôcictterent aflez grande quan-
tité de bouc. Ainii fut-iiendcrcmviutgucri, grâces à
Dieu,
dr mémorable f. 4<5^j
r)i«J^ par les remèdes , qui fans la benediiftion d'icclui
font du tout in unies. M.Kyimhr'Paréan ^Mtt.cha.l^.
Baptifte Fulgofe au i. bure de fes exeniples,ch.^. ra-
conte cju'vn Preftrc Italien nomméGcrmain^ayantcfté
laigné,perdittoutclouuenanccdcslcttrcs,non pas des
choies communes & ordinaires: tellement qu'il nefca-
uoit ni lire ni efcrire> non plus que s'il neleuIHaniai.sa-
prins : & demeura ,vn an en tclcftat. Au bout dérangea
mefme temps, & en mefme endroit, ayant eilé fàigné,il
recouura la fcience de lire & d'eicrire , qu'il auoit aupa-
rauant. t h. Xutnger am. -vol. de fin théâtre , litt. I, Tadioa.
ftc ceftc hilloirc , encore qu'elle Toit d'vn (lecle précè-
dent le noftre : eftanc fur la rencontre d'vne faignee
mcrueilleufe.
SEFFLTFRE defiree.
AV temps d'vne pcftiltnceaffligeantle quartier de
pays;Ou le demeure, leremarquay vue nierucilleu-
fe rcfolution en la fimplicité de tout le peuple: & pour-
ce que tous ceux a vne maifon mouroycnt en mefme
mois,cnfans;,ieunes,^cillards, \}is neseltonnoyentpius,
ils ne pleuroyent plus. Ten vis qui craignoyent de de-
meurer derrière, comme en vne horrible folitude:& nV
conus communément autre loin que des ie'-»ultures. ït
leur fafchoit de voir les corps efpars einmi les champs,,
à la merci des beftes,qui y peuplèrent incontinent. La
feule fcpulture eiioir eltimee heureufe entr'cux. Tel
fain faifoit deiîa fa fofl'e : d'autres s'y couchoyent cncor
viuans. Et vn maneuurc des miens, aucc fes mains & lès
pieds, attira fur foi la terre en mourant. Eftoit-ce paç
s'abrie^ pour s'endormir plusàfon aife ? d'vne entre-
prifc en hauteur aucunement pareille à celle è^o.^ foldats
Komains , qu'on trouua après la iournce de Cannes , la
telle plongée dans àzs trous qu'ils auoycnc faits,& com-
blez de leurs mains en s'y fuHoquanc. M.àe Manti^i^
^u yliitre dei î.jjkhifh'-t^.li*
4<3 4 Hijloires admirables
SORCELLERIES^ tmpojhires & eftran-
ges illufions de Satan dcfcouuertes.
IL y a des luges qui puur delcoaurir les forcicrcs , &
leur faire confefTcr à la torture les péchez énormes paf
elles commis , ont celle couftume de leur faire rafcr le
poil de tout les endroits dû corps, & changer leurs ha-
billt^mens, auec celle peribalîoii que lors elles conftr-
fciitpluftoft ce dont elles fonrVoulpables. Bodin en fa
Dcmonomanie l'cmble approauer ceftc couftume par
dellus tous autres expédiés. Aufii fait Sprangcr au mail-
let des Ibrcieres. Et y a cent ans qu'vn inquifitcur fuf-
nomméCuman tintceRe procédure à l'endroit de qua-
rante vne forcieres qu'il fit bruller. Le Mefme aefté ob-
'erué par ^1/. icj^ D^^nhoudcrcAo^e luriÇconj'ulte enFLindrt^.,
lequel en fa pratique criminelle ^uu ch .^6 . nomb. II. récite vue
hiftoivc mcmorable i ce propos. Ce n'eft point fait n\-
confidcrcmment , dit-il, que Ton rafc tout le poil du
corps À certaines perfonnes puis après appliquées à li
torture ; car on veut par tel moyen cmpeichcr Tcrflcacc
^es remèdes qu'elles ont pour fc rendre impaflibles cs=
tourmcns : ce qu'elles ont acouftumé de pratiquer par
arts magiques, fovcelleries , enciiantenu ns & charmes e-
xecrables , comme moy-melmeray v* u du temps que
l'cftoisConleillerdela ville de Bruge^ j fur tout en
vn vieille, qui en Ion port,veftement, en fa façon de vi-
iirc,en les meurs,irreprchenlîbles en apparcnccfe com-
povtoit tellement que tous Tanoycnt en reucrcncc , la
prilbyent&eftimoyent autant qu'vn des Apoftires de
lefus Chriit , pource qu'elle gucrifloit comme miracu-
Icufement les fils & filles <ic pluficurs honnorables mè-
res de famille, redreflant les bofles , remettant foudain
en leur lieu lev ïambes & cuiAcs rompues ou dcfnouces>
non point par a\^t ni par medicamens : mais par paroles,
& ioignant quclèïuc dcuotion parucuherc , comme vn
iufne de trois iour<; au pain & à l'eau , dire trois fois l'o-
railon dominicale , aller en pelerinageànoftreDame.
d'Aïc
t^ memorahlei. 4<5'ç
^'Atdenbourg , ou à S. Arnoul d'Audenbouîrg, oui
Saindlofle, ou a SaiiiCt Hubert es Ardenncs :ou faire
chanter vnc ou deux McfTes le iour, & y afiiiler dcuotc-
ment,ou faire dire quelquesferuiccs,& menus Tuffrat^cs:
à leurs deTpcns. Ces deuotions cxafteirient acomplies,
dedans peu de iûurs après les malades eftoyent guéris,
pour refperance qu'eux & les leurs mettoyent en ce-
lle femme. Les deportemens & miracles de laquelle
cflans publiez par le pays, les Confcillers & gens de i\x-'
fticc (qui auoycnt l'entendement rafils & voyoyeni;
plus clair que la populace ) firent empoigner de nuid:
celle vieille, & l'amener en prifon, non eftroitte , mais
aflez libre, en laquelle le lendemain elle fut cnquife,
comment , par quels moyens, en a erru de quelle al-
liance , & fur quelle confiance elle faifoit fes gu^n-»
fons ? Ellerefpondit touliours afleurément , qu'elle
auoit faidle tout en bonne intention & deuotion,
pourraifonsfainâics, S^ que pour auoir /î bien befon-
ené , il ne faloit pasl'enleuer ni emprifonner ignomi-
nieufement. Ce neantmoins, le Confeil efmcu par
des indices certains & manifeftes , ordonna qu'elle fe-
roit appliquée à la torture , y eftant amenée, &. dou-
cement exhortée de dire vérité , d'v n vifage afleuré el-
le pcrlillacn fa negatiue, affermant n'auoir rien fait
que par moyens licites , & fans communication auec
aucun malin efprit. Lors afllftoit aux interroeats le,
Bourgmaiilre de Bruges , perfonnage fort atîiigé des
gouttes , à l'occafion dequoy failant Texam-en , par
fois il foufpiroit & s'efcrioit comme vn homme que
Ton torture. La vieille fe tournant vers lui , dit, Mon-
iîcur le Bourgmaiftre, voulez vous élire nettement de-
liurc du tourment de vos gouttes : Si vous voulez,
ie vous en guérirai du tout , & bien toft. Seroit-il
pofTible , dit le Bourgniaillre ? le voudrois auoir donné
tl^ux mille crcus& en eilre foulage : ie te les conterai, Ç\
tu effectues ce que tu dis. Alors les Confcillers & Gref-
fiers qui luiafliftoyent , fe prindrcnt à dire s Moniteur,
pieaez garde l ce que vous ducs îic voulez taire. Cro-
J^6é Hijlùires admirables
ycz nous, & renuoyant ccrtc forcicrc en fa chambre, ef-
coûtez paifiblement ce que nous auons i vous remon^
flrcr. La femme eftancramenee,ils adiouftercnt, regar-
dez à quel danger vous elles réduit par vne vaine per-
fualîon, queceftefemme, comme efgale aux Apoltrcs,
peut par moyens licites vous gucnr de ccfte vortre
goutte. En apparence, tout ce qu'elle fait femblefaind
& diuin, mais (i vous prenez de presgardc à Tes adions,
il y a bien à dire. Faitesla rapellcr deuant nous, que l'on
s'enquierc comme elle prétend vous guérir : fi elle pro-
met vous guérir miraculeufemcnt comme les Apollrcs
ont fait les maladies de leur temps & qu'elle fuyue
le moyen qu'ils ont tenu , nous n'y contredirons
point , fachans que la main de Dieu n'eft point
acourfie. Si elle s'aide de moyens illicites, & qu'elle s'y
confie , à bon droit elle & toutes fesinuentions vous
doyuenteftrcfufpefres, ànousauflî. Eftant donc rap-
pellee, l'vn de ces Confeillerslui demande, fi tu prefu-
mes de guérir Monfieur le Bourgmaiftre de l'es gouttes,
quels remèdes & moyens y appliqueras-tu ? nul autre,
dit-elle , finon que le Bourgmaiftre croye & tiene pour
afleurëquei'ay la puilfance de le guérir : lors il fera
guéri & remis fur Tes pieds. Ce propos entendu elle fut
rcnuoyee en fa chambre. Alors les Confeillersd'N ne
mcfme voix & penfee, dirent au Bourgmaiftre & aux af-
fiftans: Vous entendez, Mcflleursquede la refponfede
ceftc femme refuke qu'elle ne fait rien que par l'efficace
de Satan, & qu'elle entreprend de guérir par moyens il-
licites monfieur lcBourgmaiftre:car en fa cureclle n'cn-
fuitpaslesfainâs Apoftres, qui gueriftoyent les mala-
des en la foy Sc^^uillance diuine , difans au boiteux. Au
nomdenoftre Seigneur lefus Chrift, leue toy ôiche^
mine. Et à Taueugle , au nom de noftrc Seigneur lefus
Chrift, fois illuminé, L'vn fut remis en pieds, l'au-
tre recouura la veuc, non point par fecours humain,
mais par la puiflancediuine au nom& en la foy de le-
fus-Chrift. Or cefte forcicre ci fe vante de guérir, pour-
ucu que le patient Te fie en elle , & croye qu'elle le fera.
Telle
cf memofahles. \Gy
Telle foy(ou perfidie) ell diicdement contraire ï la foy
des Apoilres.Ccfte relponfe bien comprifc, & les chofes
biçn digérées, le Eourgmailbc marri de ce cju'il auoit
diCjne voulut Te commeccre à la vieille, &lereftedefà
vie eut regret de la légèreté. Pour reuenir à la forciere,
àcaufe qu'elle pcrfeueroit en la negatiue des forfaits
tjuiluieftoyent mis fus auec manifeftes apparences de
vérité, derechef il fut dit qu'elle feroit appliquée à la
torture : ou ellant rudement tirée elle fit confefllon de
quelques légères fautes. Quant aux rorceileries& maie*
fices ellcles nia fort & ferme. Pourtant fut-elle relaf.
chee & ferrée en fa chambre. Qu^clque temps après re-
chargée par nouucaufc indices ,, elle fut rcmife à la tortu-
re,ou elle confelîoit certaines légères fautes , comme i
i'autrefois. Orfe fentant tourmentée, elle commence à
crier,& dire, Oftez-moi d'ici,autrcmenti'cmpuantiray
vous & ce lieu de ma fiente que ic ne puis plus retenir.
Il y auoit près de là certaines latrines , où quelques afil-
llans furent d'auis qu'on la lai il ail: aller. Les autres plus
auife/ n'eiloyent nullement d'auis qu'on la relarchall:„
de peur que delà ne furuinft quelque nouuelle difficul-
té pire que les précédentes.
Mais à la pluralité de voix> elle fut dcHieeSc menée
où elle pretendoit, y ayant feiourné demi-heure & plus,
fans reuenir, quoy qu'on l'appellaiè par deux & trois
fois, en fin on la contraignit de fortir de là , pour eftre
rcmife a la torture , laquelle on commence à lui donncf
plus rude qucdeuant. Hlic fans fc lamenter & efcriér
comme prarauant fe met à rire, & cliquetant de fes doigts
fe moquoit de la iuRice,difant, Vous autres , meflieurs,
& toy mefclîant bourreau , faites tout ce eue vous
voudrez , vortre cruauté ne peut rien contre moy. La
plus part des afiTiftans edimoyent que le diable l'eiift
rendue impafiible. Car elle ne vouloir rien auouèi'
de ce do m elle elloit gricfuement chargée par les
nouuel^es informations: mais cilendue a la geine elle
lioit ou dormoie. Au moyen dcquoy relalchce &
lîiife bas >. dcr<;chcf on la mcine en ion heu acou-
ituraé. Dcpuis,cj^uelque> autres tefaioins furent ouyi., ôC
4^8 Hijlûires admirables
nouucllcs prcuucsicccucs.fiircjuoi futordônéque pour
latroificfmc fois on lui donneioit la geinc. Mais auant
qu'y cftrc mifcnousla fifmcs tondre & raferjtout le poil,
puis on reftcnclit& tira rudement. Poùrce qu'elle pcr-
feucroitcn fon obllination, quelques vns de la com-
pagnie fc fouuindrent qu'on nelui auoit pointrafe le
poil fous lesaifelles&en quelqucsautres endroits que
le ne nomme point.On appelle quelques femmes , Ici-
quelles en y mettant la main trouuercnt des billets de
parchemin fourrez dans les parties balFes , &contenans
des noniseftranges de malins elprits^ & quelques croix
entre-deux. Ces billets prcfentez à iullice furent caufe
qu'on Teftcndit derechef fur le banc , où lors elle com-
mence à crier au premier trait, & confefl'cr de pomdt en
poindtout ce dont ellecftoit chargée par trois informa-
tions. Enquife de la caufe de fa perfeuerance obftinee
en Tes negatiues précédentes , dir,que fi on ne Teuft en-
tièrement rafee^èc dcfgarnie de tclsbrcuets,iainais la ac-
rité ne fuft fortie de fa bouche ; d'autant que l'efficace
du mahnefpriteftoit telle, qu'auec fon poil & Tes bil-
lets elle demeuroit impafllblc : comme il eitoit aparu.
Les chofcs ainfi auancees , il fut queftion de lui faire &
parfaire fon procès. Aucuns la condamnoyent à eifrc
bruflee viae^ies autres pour la plufpart à vne rigoureufc
amende honorable en publicpuis i eftrc bannie à per-
pétuité fur peine du fcu.Suiuant cedeuxiefme auis elle
futcfchafaudee^vne faufle perruque qu'on lui auoit ac-i
commodee, prinfe dedeflus fa telf e par les mains du
bourrcau,puisiettee dedans vn feu allumé pour ceû ef-
fc(5t;elle menée par deux Sénateurs & TAduocat de Bru-
ges hors du territoire. Ainfi elle fc retira de Flandres
en Zelande, &: demeura quelques lemaines à iMiddel-
bourg.ou elle retourna incontinent à Ion premier me-^
ftier.Florent Dam^iuge delà ville , futaducrti par nous
de ce qui s'eftoit pâlie au procès de celle femme , & en
faucur deiuftice lui fut cnuoyee copie des informa-
tions de les depofitions à la torture, & delafentence
donnée contre elle. Au moyen dequoy il eut l'œil
dcûu$
C^ mémorables. 46^
^îcfTus 8c defcouurant par diuers indices afleurcz qu'elle
■connnuoit en fcs forcellciics diaboliques, la taie lai/!i&
cmprilonncnou l'ayant ciiquilè de près , par Tes volon-
taires conftfl^.onsi&fuiuaunleiugementprecedentjilla
condamne à eftre bruflee viuc: ce c]ui fut exécuté. Puis
il enuoya lettres d'auis au Confeil de Bruges de tout ce
■t]ui s'eitoitpalTé,& en hc de bouche vn ample difcours à
Damhoudere,duquelnous auons ce récit. /. George Go-
dehn.vi an traiBéde Aiagn ^ ^ 'venejicts , Ihre 3. chapitre I o.
F.nuiron Tan mil cinq cens quarante cinq , fe defcou-
urit à Cordouè ville fort cclcbre , tk. renommée du roy-
aume d'Andanoiîe en Efpagne, ce qui s'enfuit. Vnc fille
de pauure maifon nommée Magtlclaine de la Croix,
des i'aage de cinq ans fut mile par fes parensou tuteurs
en vn conuent de nonnains. L'on ne fçait fi c'efloit par
deuorion^ou à caufe de pauureté.Eflant en ce bas aage»
<)ui ne fçait encor que c'e'i: de mal , on dit neantmoins
{tant les iugemcns de Dieu font profonds ) que le dia-
ble lui aparuten forme de more , fort noir & hideux.
Combien que de prime face elle en eull: grand hoireur,
toutesfois cell ennemi la fiatta tant & lui promit tant
<ie ces menucsbefongnes àquoy les petis enfans prc-
nentplaifir, qu'il Tacoufrumaà dcuifcr auec lui, touA
ioursîui enioignantfortexprcsqu'elle(quieft-oit encor
craintiuc)ne dcfcouurift rien de celle aiîociation. Oreii
ce temps la fille monilira auoir vnefprit mcrueilleufe-
mcntprompt& vn naturel difFcrent des autres : dont
<:llc cftoit tort eftimec des nonnains aagecs &c des au-
tres ieunes filles. Fftant paruenue à I'aage de douze ans
<^u enuiron, elle fut folUcicec par le diable de fe marier
^ucc lui : & pour fa dote il lui promit de faire que par
l'efpace de trente ans ou enuiron elle viuroiten telle
opinion de faindeté par toute l'Eipagne , qu'il n'y en
auroit iamais la pareille. Tandis que^ Magdclaine
loi'.s l'opinion de ce contrat palloit le temps en fa
chambrette auec ceftefprit immonde, qui l'cntretcnoit
jjarfcsiUufions : vn autre diable prenoit la forme Sc
Iknblance de Magdclaine, fc trouuoit au tcmplcjau ie^
<^ë S
47^ HiHoires admirables
train , au cloiftre , & en toutes les aflcmblees des Non-
jiainsyiucc grande aparence de deuotion. Item il faifoit
fçauoir j Mandela ine,apres auoii fait Ton Icruicc en l'E-
glifc , tout ce Ciui le manioit au monde : dcnr elle don-
nant aduertiflement à ceux qui lauoyent defiaen gran-
de reputatHMi j fut eftinice eftre vncfainfte vierge, &
^■ommençad'auoir le nom de Prophctcflc. A caufe de
<]uoy,& combien qu'elle n'euft pas encore atteint Taa^
£e,elle fut eflcuè Abbefle parles \oi\ de tous ]es Moi^
Ties& de toutes les Nonnains,vnanimement.Quandle5
iNonnainsfaifoyent leurs Pafques es iours acouftume/.
entre elles , le preilre crioit toufiours qu'on luiauoic
pris vne de Tes hoiries, laquelle eftoit portée par TAnge
fufmentionnee àMagdelame, qui eftoit au milieu de
fes rœurs,& qu'elle mettoit dedans labouchc&la leur
monftroir comme par grand mnacle. On dit d'auanta-
ge , qu'auenant quciquesfois que Magdclainen'ertoïc
pas prefente quand la meile fe ^iÇfÀt , combien qu'il y
curt vne paroy entre deu>:,neantmoins quand on leuoit
le coYpuy Donnni, ccHc paroy fc fendoit en dtux,3fin que
J^.Iagdelainc vif^rholne , &. qu'elle la mangeaft puis 2-
p-es.C'eil suiTi vie choie toute not:oiie,q2iefî en quel-
que iour de feRe folennelle les Nonnainda menoyent
en procefiîon , pour rendre l'afte plus vénérable , par
c]uclc]^iîe mcrueille extraordinaire, elle eftoit foufleuee
dereire en prefencc dctous, de la hauteur déplus de
trois couldees. Par fois elle porioit vne petite image de
I E <; vs-Ch rt st , nouueau ne ci nud , S: en pleurant
Ccar elle cfpandoir des lanî^es en abcnci>.rce quand il lui
f !airoit ) les chcueux lui croifloyent iu<~qucs aux talons,
dont elle couuroit l'image : puis fes cheueux paroill
Joyent foudainement en leur première longueur.
3- île faifoit plufieurs telles autres iliufions, principa-
lement les iours folennels , pour rendre le tout plus
recommandabk. Ce fuient (es principaux mira-
f clés.
tn ces entrefaites les Papes , l'Empereur, les grands
Seigneurs d'Elpagne lui elcriuoyeut ,& par leurs lettres
Ja iuppUoycnt d'auoir çax ^ leurs afaires ponr re-,
com»
^ mémorables, j^ji
rommande:?'. en fes prières : mefmeslui dcmandoyent
auis en chofes de tref-grande importance : comme il a-
parut par lettres trouuees puis après en Ton cabinet. Ou-
treplus il fe trouuoit plusieurs Dames & Damoifelles,
cjui n'enuelopoyent leurs enfans nouueau nez que pre-
mièrement TAbbcile Magdeîaine n'euft de fes mains
facrecs touché & bénit les bandelettes. AufTi toutes
les Nonnains d'Efpagne efloyent merueillcufemenc
contentes d'auoirvne telle mère, à qui elles attribuoy-
ent vne bonne partie delà faindetc de leurs ordres. En
fin Dieu voulut que cefte fraude Satanique fut mani-
fcftce. Car Magdeîaine , après auoir employé trente
ans pour le moins en cel-te acointance aucc le diable, &
cftéAbbe/fe douze ans, fc dcfpieut en fa vie paflée.
Partant après auoir detcfté les arts diaboliques & Thor-
riblc focieté de Satan , clic defcouurit franchement, &
lors qu*on y peiifoit le moins , aux vifîteurs de Tordre,
cefte infîgne mefchanceté. Qijelques Efpagnols dignes
<lefoy, &fort do des , m'ont recité que Magdeîaine a-
uoit conu que fes Nonnains apperceuoyent la fraude:
& que craignant d'eftreaccufec, elle lespreuint;&con-
fcfla la première fon forfait : pource quelacouftume
d'Efpagne eft que fi quclqu'vn conl\;f]e volontairement
vn forfait méritant grief fupphce, neantmoinsonlui
fait grâce.
A cefte confefllon chacun dcuint tout efperdu,
tant ces nouuellcs eftoyent eftran£:cs , & fut on d'a-
uis de s'enquérir fort curicufjment de ceft afairc.
Pour y procéder légitimement , & par meilleur or-
dre , Magdeîaine fut emprifonnee au ccuiuent donc
elle eftoit Abbeflc. 0\\ Tinterrogue ; elle confcT-
fe tout ; cependant le More continuoit Çqs iUu-
fions. Car tandis qu'elle eftoit en prifon , veillée de
prcs par gens qui eftoyent d'ordinaire i la porte de
fon cachot , &que Ton cxaminoit fon afairc , les Non-
nains eftans entrées au temple à minuid pour chanter
iiiatiacs; le fantofme . de Magdeîaine fc vint aûeoir e^i
47^ Hiftoires admirables
la principale chaire du chaur à la manière p.couftunicc>
& fut vcu à p,cnoiix comme priant , & atrcnd.-rnt les au-
tres Nonnains : tellement que chacune d'elles penfoit
<]uecefutlcur AbbeflTej.&quelcs vifiteurs lui eulîent;
permis de fe tro'juer à mannes, pour les grands tef-
Xiioiqn.''gcs qu'elle donnoit de fa repentance. Mais le
jour fuiuant les Nonnains cntendans que Magdelaine
elloit encore en prifon , rapportèrent aux vifitcurs
cja'elieauoitefté veuë la nuit précédente. Eux ayans
examiné le fait, trouuercnt que Magdelaine n'eiloit
point Ibrtie de prifon. Son procès fut en uayé Hnalc-
mcnt à Rome : & pource qu'elle nuoit volontairement
confeflé Ton maléfice , on lui donna abfolution. CajUc-
dore Reney en [es relations, z uhiger an théâtre de la -vif hum^ii-
9ie) -voLime 5. lin. qu.itriefmc. ^odin ait i. Un. déjà Vsmonom.
le vousdirayce que i'ay veu eftant à Calaris ville
en rifle de Sardagne , où lors on parloir du procès de
certaines forcieres, Iciquelles on difoit auoir commu-
nication aucc celles de Fiancée de Nauarre , quia-
iioyenc efté recerchees& chaft ces, n'y auoit pas long
temps. Vne fort belle damoifellc,?.agee de dixfcptàdix-
huict ans , alléchée par vne de cesforcieres, vint à auoir
intelligence & communication auec vn diable , lequel
venoit auciinesfoisla voir,cn forme de trcs bel homme:
an moyen dequoy il la deccuoic & en faifoit à Ion plai-
iîr, elle ej^ant deuenue fort amoureufe de lui. L'ayant
entretenue quelque temps , on defcouurc qu'elle eiloic
forc!erc,& combien ou'clU fui}: coiui-incue , neanc-
nioins on ne peut gaigncr cela fur elle , de lui faire con-
fefîer fes fautes, ains demeurant obl^inee & arreftee
furcepoin<fl: , que le diable lafauucroir, comme il lui
auoit promis, & mcf.nes elperduedc l'afTedion qu'elle
luiportoit, difoit maintes chofes qui failbyent peur à
ceux qui Tentendoyent parler. Sonune clic fe laiiîa
illettré toute viue dedans le feu , appeilant toufioursce
diable : & périt ain/î malheureulement. ^4nt.de Torque^
mnde en la j. iournec de fou hexam.
Vnc autre damoiicile nchc, belle ; 6c de fort grande
qualité.
^ memorMes. 47^
<|ualité, voyant vncliciialicr fon voifîn , gentil-homme
de moyens & trcs-agrcab!e , s énamoura de lui, le regar-
dancde grande affedion , fans routcsfois lui defcouurir
d'auantr.ge fa piMifee. Quelque temps s'eft-int ainiî ef-
coulé , vn diable, cfoiant, ceRc damoiielic, piintla figu-
re deccchcualicr,&: pioccde tellement ciu'il gaigne la
damoifelle , à condition de Terpoufer. Elle qui penfoit
que ce fuft le cheualier, l'accepta , & le rcccut plufîeurs
YiUits en fa chambre ou il couchoit auec elle. Ain(ï fe
paflcrcnt entre eux quelques mois, durant lefqnclsU
diable lui pcrluada de ne lui enuoycr meflage quelcon-
que:pource qu'il faloit que leur afaire demeurail: fccret:
ocque quand il la verrou, il ne leroit aucun femblant
delaconoiilrc ; parquoi, combien qu'elle fe trouuail
aucunefois deuant le vrai cheualier , c'eftoit à ne mon-
Ibcr ficnc aucun de fon afîcdion, comme aufl^. elleim-
putoit a difTimulationce qu'il ne parloit point à elle , &
ne donnoit aucun indice de ce qui concernoit leur al-
liance.
Quelouc tcm.ps aprcs, la mcrc de la damoifelle don-
ne à ia fiile certaine relique pour porter fur elle , dont
le feint cheualier feignant prendre i'efpouuante nere-
uiét plus:& ainfî fe paflcrcnt quelques mois, durant le'-
quels la damoifelle conoilfant cfue le cheualier faifoit
l'amour autre part, elle entre en vnc extrême ialoufie:
& ne pouuant plus porter ce cintam.irre en fa teftel'en-
uoya prier vn iou.r de venir parler à elle, ayant quelque
chofe à lui dire. Le cheualier ignorant la raifon , mais
au rei^' gentil-homme gracieux, s'achemine inconti-
nent vers ellcla trouue feule , & lui èi\\. qu'il eftoit ve-
nu pour Touir & receuoir fcs commandcmens. La da-
moifelle le voyant &; oyant parler comme celui qui à
peine la conoiiloit , commence à fe plaindre de lui , de
ce qu'il va uoit fi long temps qu'il ne s'ciloit foucié de
Li voir ni dépariera elle. Le cheuaher fort efmerucil-
lé,comme celui qui ne comprenoit rien de l'intention
de ccfte femme,lui refpondit en forte,qu'ellc penfa que
c'eftoittropdifTmuler, attendu qu'il n'y auoit là per-
l'onng auec eux. Pour ccile caufe eutran: eu cholere, cl-
474 Hijloires admirables
leconimcncc à le tancer, ciifaiu puis qu'îl.uioirjouy Ci
loDCtcnîps d'elle, ce n'eftoit raifon qu'il pcnfafi i Li
«Jufrrer, ainsfaloit qu'il acompliftln pvomefle qu'il lui
aïioft faire de l'erpoufcrSc que quand il voudroit faire
autre m en r, outre ce qu'elle en feroit Tes plaintes à Dieu,
5tau monde, elle mettroit toute peine de Icfaire venir
par force à l'cxecutiô de fa promefl'e, puis qu'il ne vou-
îoirracomplirde Ton bon gré. Le chcualicr encore plus
eiîonné que deuanr , fitrerponfe qu'il n'entendoïc rien
m tout ce îangaoc,& qu'elle fe mefprenoit: pource qu'il
n'auoir oncques parle à elle fccrettemcnt, ne lui auo'it
den promis , & qu'elle ne lui pouuoit rien demander.
l^:i damoifcllc forcenée de telle refponfe, en répliquant
dit , Sçauez-vous pas bien que vous auez fait auec moi
telle & telle chofe, en luiracôtant de poind en poind
ce qui lui eftoit auenu auecl'impofteur fous la forme
du cheualier , adioufianr, vous ne pouuez ciiiter d'eftre
mon mari,& moi voftre femme. Le cheualier fort con-
fus&esbahi , commence à protefter qu'elle s'abufoit
de penfcr que cela fuft vrai : & debattâs V\ delFus , la d^-
naoïfelîe lui remarqua le iour delapromefle, quiauoic
efté en vne feftcioicnncllc & notable. Alor^ le chei; ;-
lier lui iitra que tel iour, & trois femaines dcuant , :
trois femaines après , il n'auoit efté en la ville , ni en .
mairon,ni en la maifon d'elle: ce ouq ie vous prouuern.v
ficlairement, dit-il, que vous en ferez contente ; & ix
cjuelqu'vnvousa trompée fous mon nom, ie n'en puis
mais,& n'en dois porter la pénitence. Mais afin que ne
doutiez de la vérité de mon dire , ie le vous verifieray
prefentemcnt. Lors fans bourjer d'auprès d'elle, il ht
venir feptou hui<1' persônes de (^^à maifon , ik de dehors
<|Uifans fcauoir la hnàt l'afaire, iurerent& declairc-
rentque le cheualier difoit la vérité, & que tout ce
temps il auoit efté abfcnt, à plus de cinquante lieuè's de
là. La damoifclle cfmerueillec & fort efmcué de telle
déposition, commence à fe fouucnir d'aucunes particu-
îaritczau fait pafle , & appréhenda foudain qu'aucun
Jiommc mortel ne pouuoit les auoir faites, & illuminée
Ciii'clpac conuc que c'cftoycuc iinpofturcs de Satan:
tel-
^ memorMes. ^Jy
tcllciTîcnt que peu après la retraite ci'vn vrai chcualier,
cîlc commença de voirla fourcc de l'abus: & dcteftant
fcs folles concupifcences^s'humiliâten roi-mcfme , déli-
béra ne plus penfcr à mariage, ains fe rendant en vn mo-
iiaîîere,y acheua le rcfte de Tes iours. t^i* meftve Hure.
SFEV RfafigUnte.
LA pcftccllantfuruenuc en la^-ille de JVîifne en Sa:<e,
qui emporta grand nombre de perfonnesjl'an mille
cinq cens cinquante deux au mois de Juillet aduint
qu'vnc femme honnefte, nommée Agathe Alterman
tomba malade,& par lefpace de quatre iours fua du fang
à grofles gouttes par le front,tellement que /ï toft qu'on
lauoitelfuyce, d'autres gouttes fourdoyent. Elle mou-
rut enuiron le zo.iour de Septembre. George Feare es an-
nale} de Mi fie liure J.
T EMERITE miferMe,
CL A V D E , Elle baftarde de Sinibald Fiefque Comte
dcLauagné,ayanteftc mariée à vn gentil-hôme de
Chiauaripres de Gencs.rurnomme Rauafchier/ur folli-
citee plufieursfois de fou deshôneur, par vne autre gen-
til-homme du mcfme iiciJ, nomme lean de la Tour, le-
quel abufant de i'itmitiê eue lui portoit Rauarchier,s'ef-
foiÇoitlui defrobcria femme. Mais ceil:e vcrtucufe da-
moifelle l'ayant rebuté plufîeursfoisjil fut fi aueuglc de
fe faire acroire que les refus elloyét des femôces Ôc aile-
cheniens,& s'imprimât au cerueau ceil.e indigne penfee,
cfpi:!nt vn ioiir rabfence de Ton ami il stw alla coucher
dcfiousle lia: delà damoiieliCjefperâtquc la nuit venue
&icclle couchée feule,il en pourroit louir facilement.
Elle s'eftant retirée le foir & milb en fon repos, auât que
faire retirer fa fille de chambre en vn cabinet procham.
47 '^ Hiftoires âdmirahles
lui commande de ic^iiidcr par tout s'il y auoitrien cjuî
durant la nuid pcuiî: troubler leur fommc. La fille ay5c
regardé çà & làlîn.aJement le baille &void fcfusleiift
de fa mailrreire ie ne fçay quoi de noir. C'cR à crier &. x
s'enfuir toutes deux hors celle chambre ,&bicnvifte-
iiient, en vneautre Judeirusoù eiloit le beau-pcre de
Ja damoirclle. La Tour revoyant defcouucrt , ouure vi-
ilemcnt les feneftrcs de la chambrcfe ietce en rue, ou il
ïn froifle mirerablemcnt,&: aTaide dVn ami qui furuict,
& l'emporte, eft mis à couuert chez foi. Quelques heu-
res après on fcait la tragédie, pource que Chiauari ell \\\
petit lieu.Lebcau-pere enuoyeletttesà Rauafchier&à
LoysFjefque fi'ere de la damoifelle, lequel cnuoyo
Corneille leur frère auec Rauafchier & quelques fol-
<lats,qui fecrctement vienent en des barques à Chiaua-
li^ie font donner entrée de nuidau lieu, quieftfort,&
bien gardé pour les Geneuois:enfonccnt incontinent la
porte de lean de la Tour, détenu de fa cheute tout plat
au lid,lui coupent la eorge,& le hachent en pièces : puis
fc fauuent.TcUe fut la fin de fa témérité. /:fi>/.cfitu//e.
"T H RE SO RS troHuez-i hutinez^ferda^i^re-
cherchez en vain d^ferilleufemcnt.
ENviRox Tani^^cprcs dcDeue, villeen Tranflyl-
uanJe, Ip. pi u ves &. raui nés d'eaux ayanseibé fort
f rades >&: le beau tépsreucnu , quelques payfans fortis
pourcrauaillcrdcfcouurent & appcrcoyucntà lareuer-
berationdu Soleil ,vn grand threfor eltincellanr , fous
vn arbre toutpourri & ronge de > ieiilcfle. Ilyauoic
premièrement vn ferpent tout d'or , lequel après la
mort dVn moine nomme George, qui s'en eftoit l'aifî, &
futtué,paruintesmainsdcrKmpjreur Ferdinand. On
yrrouuavn tref-grand nombre de médailles d'or, du
poids de trois efcus la pièce , ayans la figure de Lyfima-
ciius Roy de Thrace dVn cofté, &au rçuers vne vi-
âoire
dr mémorables. 47-7
fioire.Lespayfans eurent la valeur de plus cîe vingt ml
efcuspourleur part.Lereftefut enuoyéà Ferdinâdlors
roy de Bohême par lean Baptifte Caftalde Ton lieute-
nant, auec deux médaillons d'or de Ninus&de Sciiii-
ramis, donnez à TEmpereur Charles cinquielme. Ce
threfor fut eftimé valoir plus de cqwz mille eicus. ^jc.
Centorim nu ^.ItPi.df. la <ruerre de Trttnjjyhtanie.
Vn pauurepefcheur demeurantà Breflc,nomméBar-
thelemi,ayeul d'Antoine CodreVrcé dodegrâmairien
de noftre temps, en fouillant dedans terre trouua vnc
grade vrne,toutc pleine d'argent, dôtilachetà vne héri-
tage fuffifant à nourrir honneftement la famille quie-
ftoit grade : & outre-plus drclTa \ne belle boutique d'eî-
picerie^ deuint Tvn des plus aiicz hommes du pays,
"Biirthelcwi de "Bologne ^en la 'vie d',^)itonie Cadre Krc\
Le Marquis de Pefcaire ayant gaigné Tunis fur Bar-
bcrouife, & introduit en la Citadelle par les Chrcftiens
qui y e{loyentdetenus,vn d'iceux, Geneuois de nation,
luideicouunt vn threfor cache dedans desiacs de cuir .
iertezen vncifterne, où fe frouuerenc plus de trente
mille ducats en or, defquels l'Empereur Charles cin-
quiefme fit p^efent au Marquis. P, loue att'^^. lin. de fei
' hijhire^ de nojlre temps.
Le threfor de Charles Duc de Eourgongne gaigné par
les Sui{rcsj,es batailles qu'ils lui donnèrent près Granfoii
& Morat,montoit X tref-grandes fonimes d'or & d'argcr»
monnoyé & non monnoyé : dont toucesfois l'on n'a
fceu iurtementla valeur, pource qu'alors IcsSuiffesnri-
foyent plus le fer de leurs picques, hallebardes 'de efpcesv
que l'or & l'argent des Princes eftrangers.
Enuiron l'an mil cinq cens vingt, vne ieune homme,
fimple en toutes fes façons nommé Léonard , furnom-
mé Lieniman, filsd'vn couilurier de Bafle, eilant entre,
l'on ne fçait commentjdedans vne grotte , qui n'eft gue-
res loin de la ville , où il s'eftoit auance plus auantquç
nul autre,en raconta merueilles au retour. Ayant porté
quand & foi vn crand cierge bcnit& allumé lorsqu'il
voulut entrcr,defcendu allez auant en la grotte , rêcon-
tra&trauerfa premièrement vne porte de fer : delà il
47 8 Hifloires admirables
penctre & va de chambre en chambre iufqucs à tarie
qu'il trouue des iardins verdoyans& magnifiques. Au
milieu Ion voyoitvne fale richement parée , &dedan3
icellc vne fort belle fillc,portant fur la telle vne couron-
jie d'or,lcs cheueux efparpille?., mais depuis le nombril
en bas c elloit vn horrible ferpent. Elle empoigne Léo-
nard parla main,& le nieine vers vn collVe de fer au-
tour duquel eftoyent couchez deux fort grandschier.s
noirs qui commencent a abayer horriblemeut contre
lui. Mai^ la fille commence à les menacer , & les ayant
fait taire , tire de ion col vn gros trouffeau de clef-;
quelle portoit : ouure le cofïre,en tire toutes fortes de
médailles d'or, d'argent, & de cuiure:de la plufpart ànÇ-
quellcsellc fitprefent à ce ieune homme , qui en fit
jnonllre puis après à plufieurs dedans Balle. Il adiou-
iloitqueccftc fille lui dit, qu'elle eiloit ifl'ue de iang
royal : que dés long temps, par horribles imprécations,
elle auoit eftë aiiifi monllrueulement transformee:Sc
n'efperoit deliurance, finon après qu'vn ieune homme
chaile,&:qui n'auroitencoces eftclouillé de pollution
quelconqucl'auroit baifee par trois fois. ^^\ilorsèlle
recouureroitfa première forme, &donneroitaulfi pour
recompenfe au ieune homme quil'affrâchiroit, le thre-
for enclos en ce coffre. Il aficrmoit que là deflus il s'e-
ftoit approché d clle,&rauoit baifee par deux fois: mais
qu'elle auoic fait à toutes les deux fois des grimaces-
tant horribles qu'il penfoit à chafquc coup qu'elle
ê.c\i^ le deuorer ou defchirer en mille pièces. Ayant
elle mené par quelques desbauchcz en vn cabaret, ia-
mais depuis il ne peut retrouuer ni l'entrée , ni la dcl-
cente en celle grotte : Dontla miferable lamcntoit fore
fouuent,& en pleuroit à chaudes larmes. Chacun void
<?ue celle fille eiloit vn fantofme Satanique Et d'autre-
partjles très anciennes médailles Komaines, qu'il rapor-
ta de celle caueine,& qu'il vendit i plufieurs bourgeois
de Balle, monllrcnt qu'il peut y auoir quelque threfor
caché en celle grotte , garde par quelque auaricieux
compagnon de Satan, comme es mines d'or lesouuriers
rencontrent parfois des malins elprits , qui ks tounnen-
tçnc
cf mémorables. ^yc^
îcnteftrangement. Apres ce icune homme, certain na^
tif de Bafle , preifé de grande neccfïité en vne cherean-
nce , defcendit en la grotte , fous efpcrance d'y trouuer
cethrefor, pourlefoulagemcnt & anobliflement de fa'
famille. Mais ayant fait bien peu de chemin, & n'y trou-
uant que des os de morts, il eut telle frayeur , que fans
regarder derrière foi il regaigna villement l'entrée de
la grotte, & les mains vuidcs s'en retourna tout elptrdu
en la maifon. Stnn/j>f. en Vhifioire de Sitiffe,
L'an mil cinq cens trente, le diable monftra à va
Preftre au traucrs d'vn chriiial , quelques threibrs près
la ville du Nuremberg. Mais ainfi que le Predre its ccr-
choit dedans vn lieu fofToyé dehors la ville , ayant prins
vn lien ami pour fpefflateur , commençoit a voirTn co-
frc au fond de la cauerne,aupres duquel elloit vn chiea
noircouche, il entra dedans , ou incontinent il fut e-
flouftc & acrauanté de la terre , laquelle lui tomba deC-
ius,&; combla derechef la cauerne. lean y^vier m z. Uurt
Enuiron à huiâ: lieues & demie de la ville de Léon
en la nouuelle tfpagne, y a vne montagne, au fommec
de laquelle ontrouuc vne ouucrture & gueule mcr-
ueilleufementgrande,dont elle ierte quelquesfois défi
grandes flambes de feu, que Ton en void reluire de nuit
la clarté à plus de vingtcinq lieues de la\ Pluiîcurs ont
eftimé que ce fut quelque veine d'or fondu qui fut îi
dedans,& qui entretinitce feu. Cela fut cauie qu'vn Ia>
copin en voulut faire refpreuue. Pour en venir %
bout il fit forger vne chaine auec vn Ibau de fer au
bout, & s'en alla furie lieu auec quatre autres Elpa-
gnols. Là ei-tans,ils aualcnt le feau auec la chaîne à bas:
mais le feau demeura foitdu auec quelques anneaux de
la chaine. Le lacopin retourne tout fafché vers Léon,
fe plaind au ferrurier de ce qu'il lui auoit fait fa
chaine beaucoup plus menue qu'il ne lui auoit com-
mande. Le ferrurier en refait vn autre beaucoup n\us,
grofle que la première. Icelle acheuee , le feau
ilc cjualibre conuenablc au bout, le lacopin fc craiif.
4S0 Hijloires admirables
porte pourladeuxicfmc fois xcxs la montagne auec Tef
compagnons : &: font couler la chaîne &lcfcaii à bas,
comme la première fois. Il en auinr de mcline, & quafî
pis :car toiitàrjnllant,il vafortir de ce creux vnboulec
de feu fi gros , cjue le lacopin & fcs compagnons y pcn-
ierentdcmcu'-cr, Ôcpenrcnt bien conter pour vnc : au
moins en demcurerent-ils fi eitonncz, qu'ils n'eurent
garde d aller plus remuer ni attifer ce feu ains s'en re-
tournèrent tout effrayez en la v;lle, fans parlcriamais
plus de la montagne ni du thrcfor. l'ay conu en la mcf-
me ville vn preftre, lequel ayant conoilfance auec vn
threforier Efpagnol, eut moyen par entrcmife d'icclui
de faire tenir vne lettre au roy d'Efpagne, en laquelle il
fupplioit fa Mniclté le faire prouuoir de deux cens e(-
claues,pourouurir ccfte montagne, & promertoitd'en
tirer de grandifluncs threfors. Le roy lui manda qu'il
rouuriit à ils defpens , s'il vouloi tiquant à lui , qu'il n'a-
uoit point d'efclaucs pour y cnuoycr. Par ainfi la mon-
tagne eil demeurée en fa place, finis eftre remuée ni vi-
fitee d'auantage du prell;re,ni d'autres après lui . -lerofme
Bt'»^ xMiUnnois , cw^. liure de Chijloire du> hchucah inonda
Encifo Efpagnol, ayant auec les fiensdesfi?it en ba-
taille quelques Indiens qui Tcmpefcboyent de fourra-
ger leur pays, entra dedans leur principal village, &y
trouuant force pain , fruits, racines, C>c autres choies à
manger,rc reiit , & challa la faim d'encre fes gens. Puis
tous remirent a cercher le long delariuc d'vn fleuue?
proche de là,& trouuercnt force bagacc,couucrtcs, & v-
tenfiles de terre & de bois que l'on auoit cachez parmi
des rofeauxjauec enuiron douze cens mille eicus en or,
clabouré & mis en œuure,que Coir.acco Seigneur de cô
village auoit ferré là , pcnfant bien le iauuer d'entre les
mains des Efpagnols. De fait n'euil elle que certain»
Indiens leur enfeignerent ce threforli , lamais il ne
l'eufient trouuc:cncore falut-il qu'ils les geinaifentpouif
leur faire confelîer ou il eil oit. Benijo ui* dei4Xtejht& Linre
fhAp. z.
Mais ce chrefor & autres particuliers deçà ou delà la
cf memorahlesl 481
mer, defcouuerts de noftre temps, ne font que poignée
d'argent,à côparaifon de ceux des Rois du Peru, tant en
Icuriardin magnifie , où tout eftoic d*or, qu'en leur ca-
binet, où fe trouuoit toute chofe crée & artificielle de
pur or. Puis la rançon d'Atabalippa montant à plus de
foixante deux milions d'or , & qui euft monté à plus de
cent millions, fi Pizarreeuft eu patience: & finalement
les threfors du temple du Soleil, qui cftoyent encore
plus grands,& furent pillez parlesErpajnols,qui puis a-
près s'encrctuerent , les autres deipouillercnc la terre
pour enrichir la mer, comme leurs propres Hiftoriens le
rcconoi{rent& confeflfent.
Lorsque l'Empereur fit la guerre aux Prince d'Ale-
magncvn riche gciuil-homme fit dcftourner certaine
riuierepaflTantau long de fon chafteau , & en vne pro-
fonde folle crcufcc an canal cacha tout ce qu'il auoit de
précieux, puis fit ramener l'eau en fon cours acouP.umc.
Neantmoins les Efpagnols defcouurirent d'eux mernies
cefte cachette , deftoHrnerent l'eau, & trouuerent tout>
puis fouillèrent encores encore plusauant, ils rencon-
trent d'autres bicns,mais prefquestous confumezparla
longueur du temps. Ph. Camcmrius au 6^. chapitre de [es
méditations hijlo,'.
Le Roy Philippe dernier decedé,s'eftant après la paix
faite auecHenri 2.. Roy de France embarque es pays bas
pour eftre tant pluiloft en Efpagne, auecgrand nombre
denauires, & toutes les plus precieufes bagues & io-
yaux, que le feuEmpercurCharles V.fon père auoit peu
acquérir en toute TAlemagneSc l'Italie, durant fes vi-
<5loires &. profpcritezjauec les riches tapifferics & autres
choies magnifiques faides à grâds frais & defpés es pays
de Flandres :ainfi qu'il arriuoit au port de S. laques en
Galice, ils'cfleua vne tourmente fi grande , que de tout
ce magnifique equippage , amaille de Ci longue main,&
auec tant de trauaux, rien n'arriua à fauueté", ains fur la
nier héritière de tous ces riches thrcTors , X la veuë des
'HCpagnols , qui en mcnoycnt vn merueilleux dueil. £c
quant au Roy Philippe, cefte tourmente l'efpargna (i
peu, qu'à peine pcuc-il mettre lopied dedans VHçbar-
H h
48 1 Hijloires adrnirahlei
que,quc le nauire dedans lequel il cftoit n'cnfonçaft au
profond de la mer , tant grande clloic la fureur d'iccllé
& des vents. //;/?. deFawçon II.
Les threfors apportez des Indes,cn or,argcnt, perles,
pierresprccieures,& riches marcliandifes, depuis cent
ans, font commcinombrables. Quel en a eftc le fruid,
ic m'en rapporte au Ledeur. C'ell matière pour vn li-
ureenticr,dontlaconclufîon fera , Tout cfl vanité fu-
rieufe & pernicicufc en infinies fortes.
r RAISTRES îfunls,
EN T R F, autres fortes jplaces que le Turc a prinfes en
Hongrie fur les Chreftiens , on peut nommer Giu- à
ia,rendue par le traiftre Ladiflas Kcrct/in, lequel y com- i
mandoit au nonideTEmpcreur Maximilian aucômcn- f
cément de luin 156^. Combien qu'on Teuftaucrti que
dedans deux iours îl feroit fecouru infailliblement. La
place, rendue par compofîtion, premièrement les Turcs
cfgorgerent tous les foidats , rcferuez quelques vns qui
fe fauuercnt dextrement. Quant à Ladiflas, il fut mené
pieds & poings liez à Sclim, accufc d'auoir fait cruelle-
ment mourir quelquesprifonni ers Tares, condamné par
Selim,&liuré à Tes accufateurs,pour le traiter à leurpîai-
flr. Ils l'enfermèrent dedans vn grand tonneau , qu'il
garnirent puis après de clous aigus , puis le roulèrent
d'vne montagnecnbas , en telle forte que donnant fur
fes doux qui le perçoyent de toutes parts , il expira en
destoufmcns hotribles.Son fils,complice de la trahifon,
mourut miferablement,dernué de moyens , abandonne
de chacun , après auoir vendu tous fes biens meubles &
immeubles & mefchammentconlumc tout fon vaillant,
I. leoucluuiuiyuu jhppletnent des ^nnaks de Tt*rquie.
Soliman pcre de Sclim fit cruellement mourir les
foldars de la garnifon de Budc : lelcjuels auoyêt côtraint
leur Capitaine de rendre aux Turcs celle fortereflc im-
prenable. QuantauCapitancilfut garanti, & honoré.
Vn trairtrc en la ville de Rhodes fit plufieurs feruices i
Solyman,rous promciTc de grands ellats, & d'auoir vne
dcJ
^ mémorables. 483
des filles de Solyman en mariage.L'ifle & ville gaignee
il fe ircprefente à Solyman , lequel le fit cfcorcncr tour
vif,all'e^ant qu'il eftoit Chreflien, &il p'tetendoit cl-
poufer vne fcmmeTurquefqucàl falciit lui oiler fa vieil-
le peau. Am/îcicorchë 5 on le couche fur vn licltouc
couuert de Tel , où il expira cli tourmens indicibles, p]).
CamerarlHi cnfes meditatians hiJlonqi*eS}chap.y.
r R EMBLEMENT de terre,
L'An mil cinq cens & hui(5l ; la nuicl: entre vn mardi
& mecrcdîjà deux heures la terre le print a trembler
à Conftantinople,de telle fccruflc, nue quelques tours
de Mofquces tombèrent, les voûtes d'icelles Mofquees
is'entr'ouurirent,& les autres fondirent à terre. Les che-
minées des maifons furent renucrrees , les murailles
partie entr'oiiUerres: partie ruées jus.-le? créneaux des
murailles de la villeictiez bas , & des pans entiers d^-
ccUes murailles aiiec leurs tourrions bouleuerfeT-.. Plu-
(îeurs fupcrbes baftimcns renuerfez de fond en com^
ble , & grand nombre de perfonnes acrauantées delfous
les ruines.îsJul ne içauoitoù fê lauucr. Le peuple Ibr-
rant des ch ambres &maifons (e ietiroit es balles courts;
les plus rpacieufcs^ou es grandes places^ou es iardins.afin
de fe garantir. Car le tremblement dura ians intcrualle
toute la nuicl , & continua quarante iours api ts , telle-
ment qu'on pouuoitle ientir & difcerner d heure en
heure. ^^nn.i.les de iHrij^i*'': , publiées ^^r l, leoncUt-
uitu.
Le Doflcur Garcaews en fa Météorologie defcïitfom-
mairemcnt cent foixante cinq tremblcmens de terre
mentionnez es hiltoires deuant&: après la venue de
nortre Sauueur lufquesenran 1564. nous repicfente-
rons ce qu'il en dit de ceux de nolhc temps , l'uiuaiu le
but de ce recueil d'hiftoires.
L'an 150p. le qiiacorzieiirle tour de Septembre , vu
horrible tremblement de terre csbranla fi rudement
la Ville de Conii-witinople , l'elpace de dixhuid loursj
Hh a
484 Hifioire$ admirables
que toutes murailles qui regardent la mcr& toutes îes
maironsvoifincs furent renucrfees,& les fofl'ez combler,
de ruines. AuHî futmis basie chalteau oùic Turc tient
Tes threfors, aucc cinq tours , & le palais où l'on nourrie
les lions. Semblablcment tous les aqueduds du Danube
à Conlhntinoplc furent esbranlez & gaftéz.Le deftroic
de mer entre la ville & le bourg de Peras'efmeut telle-
ment, que Teau reiaillifloit par deflus les murailles de
part&d'autre.Lamaifon du pcage,fut entièrement ren-
uerfee dedans l'eau. Treize mille perionncs furent acca-
blées de ruines en ce tremblement.Le chailcau de Gai-
lipoli fut toutbrifé,& n'y eut maifon c« enuirons qui re-
fiaftentierd'eftimeque c'eft letrembbpmeiit tiré des
Annales de Leonclauius,&rufmentionné.
L'an fuiuant prefques toute l'Italie fut eflochcepar
plufieurstrembleraens réitérez. L'an 1517. vn tremble-
ment de terre en Alcmagne rcnuerfa deiix mille mai-
rons& granges à Nordlinges & es enuirons. Tout le
Portugal fut esbrâléTan ijji.Quinze cens maifons bel-
les &rpacieufes furent renuerfees en la ville de Lisbon-
ne,& prefques tous les temples abatus. Ce tremblement
dura huid iours,donnant par interualles des fecoufl'cs &
7. ou S.fois chafcun lour. 11 fc fit aufli des ouuerturcs de
tcrre,dont fortit vn air contagieux,qui produi(ît vnc pe-
fte,laquelle emporta fore grand nombre de perfonncs.
Deux ans après y eut vn tremblement en Turgovv en
Suiire,qui dertourna vn afle/large fleuue de fon lid,où
il ner'cntra qu'après auoircreufe &renuerfé vncoftau
qui le rcfcrroit. Toft après la ville de Baflc fut fecoueç
de j.tréblcmés diuers en l'efpace de quelques femaines.
En l'an 1557.1a contrée de Pouzol fut firudemét agi-
tée par mouuenicns de terre J'elpace de zo. mois & d'a-
uantage,qu'il n'y relia quelconque edihce entier. Mais
fur la lin de Septembre de l'an fuiunnc , ce bruit recom-
mença de telle véhémence , & l'ans difcontinuer ni lour
ni nuid,que la meirccula dedeuxcens pas, dont s'cn-
ruiuitprinfe de grande quantité de poillons, & vit-on
fourdre des eaux douces. 1^.5o.iour du mefme niois,vn
grand continent de terre entre le pied delà montagne
nommée
^ mémorables. 48 j
jiommcc Barbaro , & la mer près de lac Auerne, fembla
s'cflcucr , & prendre foudain la forme dVnc montagne.
Ce mefme iour,fur les i. heures de nuift,ce mont de ter-
re s'cntr'ouurant commence à vomir des flammesauec
vn bruit merueilleux. Parmi ces flammes il eftançoit àcs
pierres ponce & des cailloux, auec tant de cendrespuâ^
tes,qu*il encouurit toutes les ruines de Pouzol, & les
campagnes voifines^es arbres furent fracaffcz, & les vi-
gnes iufques à vn quart delieuèes enuirons réduites
en poudre. Lesoifcaux &beftes des champs en eurent
leur part. Qu.int aux habitans de Pouzol, ils fe fauue-
rent de nuiâ: dedans Naplcs. Ces cendres puantes s'ef-
pandirentà plus de huid lieues loin , eftans toutes fei-
ches près de ceftc ouuerture, maisbouèufes & humides
plus loin : Qui plus fut^ceftc montagne de pierres pon-
ce & de cendre née autour del'ouuerture, futamaflee
en vne nuid à la hauteur de mille pas & d'auantage , a-
yant plufîcurs rourpiraux,deux defcjuels y ont duré long
temps depuis. L'ambrafementdura quelques mois.
Le lo.iour delanuieri538. Baflefut derechef esbran-
leepar mi tremblement de terre , & deuxans après au
mois de Décembre toute TAlemagne s'en fentit, à la
ruinedeplufieursbaftimens. Etl'an 15:41. vne valee de
Suifie fut esbranlee,& près de l'Apennin fut veu vn tor-
rent de foulphre merueilleufement puant , courir par/^
campagne. L'aniy5i. le vingthuiftiefme iour de lan-
uie^ , Lisbonne en Portugal fut agitée d'vnnouueau
tremblement, qui renuerfa deux cens maifons , & tua
plus de mille perfonnes.En Tan fuiuant, au mois de Se-
ptembre,y eutnouueau tremblement à Bafle,& en plu-
/îeurs villes de Mifne,& es enuirons , dont s'enfuiuirent
beaucoup de ruines,peftes& morts violentes. Au mois
d'Aouft de l'an fuyuant le pays au long de la riuie-
Tc d'Hlbe en Saxe , euft fa part de telle vi/îtation.
Garcarus adioufte vn autre merueilleux tremblement
en vn quartier d'Alemague , où quelques bourgades
& villages furent engloutis auec grand nombre deper-
fonnes:& ditqueceft ébranlement déterre dura quin-
ze iours. Ce <]ui auint aulTi dc»x mois auparauanç
Hh 3
48^ Histoires âdm'tr Me s
à Cattaro ville de Sclauonie,aparte'iantc aux Vénitiens
en lac)uelle périt jurande multitude de^en* engloutis
par ouuerturc de terre. L'an içyo. la ville de Fcrrare fut
csbianlcc d\ n tremblement refpacc de plufieurs iours,
aucc vne ruine de plu/îeurs beaux palais & autres riches
édifice:.. Lesguprrev , pelles , famines , déluges de mers
&riuiercs, furucnus après tels coups du ciel, font les
marquez es hiftoires dp noftre temps : comme aufli
jious en reprefcncerons ks hiftoircs en leurs endroits
"propres.
Le Dimanche premier lourde Mars 1584. es pays de
Lyonnois,Mafconnois , Dauphinc, Sauoye,Piedmont,
Valais, Suifles & Bourgongne , .1 onze heures & demie
Tenant à midi,l'air eftant coy , allez clair & fcrain , & le
Soleil luilant, fe Et vne rccoulfe ou prompt efiance-
ment & tremblement de terre, qpi ne dura pas plus de
dix ou dou?e minutes d'orlooe pour ce coupla. Ilfut
fcnti principalementpar le cliquetis des verrières , cra-
«^uetisdcs édifices, branflcment des planchez & lam-
brisjcrouflement des paroi.s,murailles bi arbres, auec grâd
"bruit ou mugi/Tcment en l'air. Beaucoup ce cheminées
tombcrcnt. Qucsqucs murailles furent entr'ouuertes,
^' des rondemcn.s d'cdifices esbranllcz , notammentcs
cnui^rons du Lnc de Laufanne/ur tout es pays de Vaut,
î"of!'gny,Chriblais & lieux \ oiiîns. Trois ou quatre che-
jr.inecs , & la muraille d'\n vieil edififc tOiiiberent à
<jencue,&n ycutautremal. Le lendemain ce tremble-
jncnt redouble es quartiers du bout d'enh.nut du lac de
Laufarnc &^ renfo'-ct le mardi au nvuin 3c aufoirauec
■■> n vent & ncigc,auint ce qui ^'enfuit en \ n quartier de
pays cflcnene de ce bout du lac , enuiion deux heu-
rc>» de chemin ,à quairc harqucbufades ou cnuirou
ôe la ville d'Aillc, apartenante au Canton de Berne,
^ ce le Mecredi quatriefmc iour,entre neuf & èi\y. heu-
ics de marin. Grande quantité de terre tombant
des iommcrsoc replats des ipontagnes (de aiçlme
prcfqucs que feroit vne rauinç dVaux précipitées
i val d'\ n rocher , s'edança de bien loin , & comme au-
cuns on; atccftë d'cnuiron vucUcuC; non t;ant de ion
mouuement
ér mémorables, 487
mouiic ment naturclqai tend du Faut en baS, que poul^
fe par vents & exhalaifons niellées parmi. Ccrte terre
fur fi rudement agitée, qu'en vn inl1:an telle couuritles
lieux prochains du bas fur lefquels elle fc verfa , &
fChaHant deuant foy toute l'autre terre qu'elle ren-
controit, l'emporta licelleaufri confentit tant plus ai-
sément qu'elle eftoit efmeuè de ces tremblemés & vents
remuans aufll rudement que la première : &en print
comme xi Vne mer agitée , ou vn flot poulTe l'autre flot
tour de fuit<!.Lespétes& vallées ne fclafcherêt pas feu-
lement: mais (ce qui ell: eftrangc) les terres eminens au
dellus des combles & v-alees en furent fcmblablcmét re-
muez. Or eilà noter que le lieu dcceremuementefti
l'endroit d'vnc gorge caufee de pluiîeurs terres & crou-
pes qui le trouu-ent ordinairement es recoins & abou-
rilfemens des rochers & montagnes. A l'endroit & iifue
de celle première gorgeclloit le haut de Corberi , pc-
•tit village ou hameamd'enuiron huidmaifons , &dix
ou douze granges, aucc quelques moulins, tournans à
l'eau d'vn ruilTeau.La terre donna d'enhaut fi roidemanc
fur ce village, qu'Ufut toui' couuert en vn inilant, ex-
ceptée vne maifon,ou auint que le maiftrc , eilonné du
grandfracasqu'il-cnccndoit,ditifafenime qu'il croyoic
quela fin du monde eftoit venue , & qu'il filoit prier
Dieu,i ce qu'il leur fill mifericordc. Sansdelay fe met-
rans à genoux dans leur maifoniisfentirent vn icïhm^t
<ie leurs prières que la terre qui rouloit, comme a elle
<lit,pafla en forme de vague impetueufe per deiîus leur
mailbn lans l'endommager ni ofrenler aucun leans, fors
le maiilre mefme, vn peu blclfé i la tefte , Ion chapeau
ayât cfté perec. Quant aux autres maifons&. grâgcs elles
furet toutes abatues & prcfques entièrement couuertcs.
Il auint en ce mefme lieu vn autre chofe notable. C'eft
qu'vn enfant de douze ou treize femaincs fut trouué
(ain & faufen fon berceau , & a vefcu depuis , ayant au^
presde foy fapauure mevc morte, laquelle eftendant
fcsbrasfur cel>erceau pourgarentir fon enfant auoit
^rté toute froïifee par la ruine de la maifon. Cas pa-
reil auiiui vne iilleut aa^cc d'vn an oucnuiron cruu-
Hh 4
4^8 HiJ} cires admirables
Vee fauuc & entière parmi les ruines d'vnc maifôn.
Quant aux moulins ils furent tousbrife/. Vne chofr
mcrueilleufc auint en l'vn d'iccux. Car , cftant plante
en lieu bas , l'arbre de la roue , & la roue mefme furent
trouucz en leur entier au haut d'vn tertre eflcué de cin<^
cens pas, plus c) uc n'cftolt la fituation de ce moulin.
Aurefle, la defolation s'augmenta, tant plus la terre-
vint à val. Car s'adrcfTant fur le village d'Yuorne , qui
eftoitaudcfi'ousde ce haut de Corberi, elle enfeuel!?:
tout vif enuiron cent perfonnes ( aucuns on dit d'auan-
tage) deux cens quarante vaches à laid : force bœufs &
cheuaux.Ellecouurit foixantcneuf maifons, centS: fîx
granges, quatre caues , & deux batoirs fequcftrcz de ces
granges & maifons,auec grande quantité de bleds, vins,
meubles & pafturc. De faitcc village cftoit tresbien a-
commodé de toutes chofes^eAimé l'vn des meilleurs de
tout le pays des Ligues, prix pour prix. Lafîtuationc-
ftoit fur vne pente doucement cltenduedu leuant au
couchant, en lieu fi. fertile , que d'vnc mefnic terre Ton
faifoît chafcun an trois cueilletcs , de ble , de millet , &
deraucsraufiin'y auoit-il point de pauures ni de men-
dlans entre eux, mais tous lufques au moindre , s'entre-
tenoycnt honneftemcnt de leur bien Se trauail , cftans
gens fimplcs , laborieux , eflongnez de mauuaifes prati-
ques,d'\furcs & de procès, au tcfmoignage de tousleuri
voifins. On dic que la ruinefut fi loudainc, qu'il n'y a
coup de canon quifedcflachepluflollque tout cela fut
exécuté. Qu^elquesvns ont teftifié qucdeloinils vi-
rent enuiron vingt perfonnes , la plufpait femmes &
cnfans, qui , couransà valpourlefauucr , furent envn
moment acueillis, acablcz, & couucrtsde terre. Il y
demeuraquclques hommcsimais le plus grand nombre
fut de femmes & d'enfans : d'autant que prefques tous
les hommes cftoyent au labeur des champs. Parmi cefte
vifitation Dieu vfa d'vne telle mifericoJrde , qu'il n'y
eut maifon dont ne reilaft en vie quelque homme
ou enfant. Outre l'effroyable tintamarre que faifoit
la terre,tombantauec vn mellangcdegrelle, & de pier-
res volantes en Tair, on vid foice cfUnccllcs de feu
& VilC
^ (^mémorables, 4S9
& vnc^rofrc& fort efpaiflenucc, dont ibrtoitvn odeur
de foulphre. Ce déluge de terre s'arrcfta en fin,ioignant
-deux maiions , qui relièrent chargecsjiufques à mihau-
tcur de murailles , fans eftre autrement endcmmagçes:
outre IcrqucUes refterent fept ou huit autres maiions, a-
uec autant de granges,& quelques petits édifices cham-
peilres. La longueur de c^fte auallanche fut depuis h
pente de la montagne lufques à ces deux maifons, la lar-
geur de douze arpens : la hauteur inefgalc , mais la
moindre fut de dix pieds. C'ctt merueilles au rcftc que
celle eitendue de douze arpens ou cftoycnt les édifices,
fut rendue \\ vnie, qu'il fembloit que ce fuft vn gucret
toutfraifchement labouré ou herfë , fans qu'il y eut ap-
parence de ruine , non plus que fi iamais il n'y cuft eu
édifice quelconque. Hnla ville d'AïUe les tuiles tombè-
rent du milieu de la couuerture du temple, ians que cel-
les du haut ni du bas fc remualTenc. Près ce mefme heu,
dvne montagne prochaine tomba vne pièce de rocher»
qui s'arrelta en vue fente d'iccllc montagne , fans faivc
aucun mal. Plufieurs cheminées furent abatues, main-
tes murailles creualîecs , car le tremblement y continua
plufieurs iours. auprès du village de Moteru , le lac de
L'aufannc s'auanca en large d'enuiron vingt pas plus
que Ton ordinaire , emportant vne portion de vigne , à
Taidc d'vne ouuerturc de terre, comme l'on eftimoit. Le
branflc fut fi violent qu'à la ViUcncufue, bourgade à la
telle du lac, & eslieuxprochains, les tonneaux de vin
(grands comme pipes) furent drcflez tout-pleins fur
leur fond. En lavillede Veuay plufieurs cheminées def-
rochcrcnt, &yeur force murailles csboulecses vignes
de la Vaut. Extruicl des ^annotations ^ 6hjcrihîtù)ns jur le
frand Altroir du monde de I.dit Ch.fne.
Le einquifmciour de Septembre 1590. félon le ftile
ancien, vn famedi enuiron vne heure dcuantSoleil cou-
chant,la terre commençai trembler en Auftriche, Mo-
rauic, Bohême , Mifnc', Silefic& Lufatie. Mais peu de
temps après, à fcauoir entre la minuid & vne heure, ce
tremblement recommença par toutcslcsprouinces iul-
n©innitcs;auec vu racrut/ileux esbraiïilcment , fur tout
4 9 o Hï [loir es admirables
en la villr (le Vienne capirale de rArchcdiichc d'Au-
ftrichc. I- n icclle donc le faille de la grand tour du tem-
ple de Sainct F.iliennc,fiit tellcnicnc esbranlc , qu'il en
comba fui le coid du temple des grandes pierres arti-
•ilemcnt r:i!llecs:& tout le baftimétd'icclle tout fccoué
de telle vehemécc, que l'on parla toit après des moyens
<lc remuer Préparer le tout;^il eRoit pofl'ible. Vneau-
trc<ourproche de celle-là, en laquelle eftvne cloche
•des plus grofîe.s de r£uroj)e,fut aiîfliesbranlce. Pre^ de la
porte des Efcolfois , vne tour fut renuerfee par terre , &
le temple ioignant fondit tellement par le milieu , c]ur
lors fut iugc qu'il conucnoit le démolir. Auintlors auc
certain boucher, couftumier de dormir les nuits en foi
<?ftau proche de celle tour des Eicoiflois,fentiten vn in
ilant Ton couuert brifé & defpecé par les quartiers d.
pierre tombantes deflus en tref-grande quantité , faiii
•toutesfoiseitrc tant Toit peu ofFenfé ni atteint d'icelles
en fon corps. Au contraire l'hoftellerie du Soleil fut
entièrement efcrafee de la cheute d'vn cloché baftj près
àeU, 1-c furent accablées fous telles ruines quelques
pcrfonnes , à f çauoir la dame du logis , fa fille, la merc,
deuxriches marchands aufquels on trouuacinq mille
«feus en or, lemeffagerde Lint/, & trois autres hom-
mes : dont les corps furent finalement tirez, de delîous
les ruines. D'auantage tomberentlesclochez de Saind
Micheljdu temple deslefuites, & lesfommets des tours
de S.Laurent & de S.Ican. Outreplus, il n'y eut balli-
ment, bouleuan, temple , ni mailbn dedcms l'enclos des
muraillcsdc Vienne, que ce tremblement n'ait esbran-
ié,fendu,creuafféoc endommage en quelque forte.Tous
les bourgeois & habitans fortirent en toute diligence,
&fe retirèrent hors la ville es iardins & autres lieux fpa-
deux & defcouuerts.
En Vn village près de Vienne , nommé Hernalfi , le
temple & (juclqucs maifons trebufchercnt. Autafit en
auinr-ilnu bourg de Dula. Vn autre village nommé
Siegcit?kirchen"eut fon téple,la maifon du Cure , ^ les
iiiuraillosdu cœmitiere par terre. Pixcndorf autre villa-
ge fui tout ruiae.Scinblabluucnc Ptaifcnilcd, & le cha-
ftcau
C^ mémorables. 49i
ftcaude Iucicnovv,baftitoundc neuf trois ans aupara^
uaiu,&vn autre nomme Sit/berg tellcmêt cflochcque
nul n'y a ofe habiter depuis > finon c|u1l ait elle rebaili.
Fn d'autres cmiroitsplufieurs perfonnes furent bleflce.s
& tuecs par lesruincs des édifices. A deux lieues près de
Vienne, vn moulin accommodé fur l'eau, en fut enlcuc
& ictté iur le fcc aflcz loin de là. Ce tremblement iettA
au riuagc de la mcime eau de ce moulin vne fort grande
quantité de poiffons. Au deflousde Vienne, ille fit v-
ne ouuerture de terre^dont fortit vne vapeur C\ puante
& pertilcnte, qu'impoOible fut aux habitans d'alentour
d'y pouuoir fubfîAer. L'ouucrtuve eftoit de la largeur de
quatre pieds, fort lon2ue,&fî profonde que nul ne Ta
peu fonder ,& ne peut on qu'auec danger vifiter ces
creux effroyables. En Mprauie, Boheme"& autres pays
voifins,cc tremblement continua pluficurs iours , mais
non du tout fi violent. /. Hedenc, enfa har.vipe dt* trcm-
ILynent de terre en ^uflruhc. On remarque que ce trem-
blement horrible, qui tua prefque toute la garnifon du
challcau de Canifium en Hongrie,auint le premier iour
que fut efleu Pape Vrbain V 11. lequel ne tint le fiege
de Rome que dix iours. D.C hjtY£Ui,enfi chronique de Sa-
xs,pag. 871.
VAILLANCE.
LE nombre des vaillans hommes de noftre temps&
de leurs braues exploits eft merueilleufement
grand. Les volumes fuiuans en fourniront diuers exem-
ples.Ici nous en remarquerons quelques vns, en inten-
tion de n'oublier pas les autres. Pour le prcfent nous of-
frons \ n meflange d'hifloircs. Vne Dame Portugaifes'e-
ftantcmbarquceenl'an 1510. auec deyx ficns/reres no-
me z lean & Arias Coeillo , & vn pefcheur nommé An-
toine Grimaldi , conduits par quelques matelots en vne
caraucUe , eftans en pleine mer furent inueftispar v-
ne frégate de courfaires, huitl dcfquels (après auoir
icroché la caraucUc ) fautent dedans. ^ Mais leau.
492^ H'îjlotrcs admirables
-Arias& Antoine acourciu & fc défendent dételle a-
«ireffe c]u'ik tuent quatre aflaillans, & contraignent les
<^uarrc autres de fc i-etirer plus vifte encore c|u*ils n'y e-
itoyent entrez. Cependant les matelots reprcnenttclle-
inentlcurroufccu'ilslaiflcntia frégate loin d'eux. Sur
ce, les courfaircs entendans des quatre efchappez , qu'il
n'yauoît que trois combattans en la carauello,& quele
rerte n'cftoitqu'xne troupe de femmes &: de mariniers,
commencent à ramener de toute leur force, & derechef
acrochcntlacarauclle.'puisfeize d'entr'eux bien armez
iàutenr par la proue au dedans. Les deux frères leur fon-:
tcfte auec vne prouefTe finguliere. Antoine fe ioint ;i-
liec eux , n'ayant pour toutes armes qu'vne hache en In
luain droitc,& \ ne chemifole de matelot autour du brn'^
gauche. La meflee fut tref-alpre , & plus que s'ils cuf-
Icnteftéen nombre efgal de part& d'autre. En fin les
courfaires ayans perdu la piufpartde leurs gens, fe reti-
rèrent auec le refte en leur fregatte.Comme ils clloycnc
aind aux mains,quelques autres de leurs gens fautèrent
par la pouppe:mais ils furentrepouflez par les mariniers.
Antomc courut au foyer de la carauelle, print les char-
bons, & les cendres qu'il y trouua , & les lerta dedans
Icstrcgates^au dommage de quelques vns qui en furent
d'chaude/. 11 fur blefî'é en diuers endroits mais non à
mort.La Carauelle arriua lauuc ou elle pretendoit mau-
gré l'cftort des courfaires, qui depuis celle deuxiefme
baftonnade n'oferent en approcher que de loin, oforius
at* douz^iejme Hure de thijloire de Portitgd , chapitre dctr-
xicJiTte.
Manuel Pachcco , Capitaine Portugais , cnuoyé par
le gouuerneur de Malaca en l'Inde Orientale, pour mo-
lelter ceux de Pacem, qui auoyent tué vingt-cinq Por-
tiigaisjs'acquitta diligemment de fa charge. Orayanr
delîr debonede l'eau fraifchç ilcnuoye en vnelquif
lean Almeidc , Antoiiie Pazagtje , Antoine de Vere,8c
î-rançois GraipaxclbldatsalFeurcz , prendre terre alfez^
} rcs de Pacem,pour puifer de celic eau douce. Ces Toi-
dafSjfiiiui-, d'vn barbier Portugais, homme vaillant, en-
trèrent auiicuucaucclcursmactciocCj& firent aiguade.
- JVÎais
cf memorahles. 4 <fj
Maiscomme ils remontoycnt vers leurnauire, voici
arrmer les ennemis à la foule furies riuagcsde part&
d'autre , lefquels auec vne nuée cie cailloux & de flcH
ches Guidèrent accabler les foldars & enfondrer 1 efquiil
Toutesfoislesfoldatsfecouurirct/î bien de leur pauois,
& les matelots firent tel deuoir de ramer qu'ils fe tirerenc
de iariuiere, &gaignerentlc haut. iMaispource que le
flus de la mer les repou{roit,& qu'ils n'auoyent point de
vent, trois grands vaifleaux fournis de tout ce (^ui eftoic
requis pour la guerte , & qui portoyent bon nombre de
gentils-hommes du pays vmdrent les inueftir. Le chef
nommé Zudamec?eftoit de lauc, qui s'approche auec le
principal vaifieau portant plus de cent cinquante honî-
mes.Quant aux Portugais,iIs refoulèrent de mourir,piu-
ftoll que fe pendre pour ellre faits efclaucs : & après s*c-
ftrcrecommandez à Dieu, s'apprelterent courageufe-
ment au combat. Le barbier commence , & empoic^e
de telle force la proue de ce principal vaifieau que Tes
quatre compagnons curent moyen d'entrer dedans, &
lui fauta incontinent après. Alors ih fe ruèrent de telle
furie à trauers leurs ennemis , que plufîeurs d'iceux
troublez de peur fe ictterent hors le bord. Zudamcc c-
ftoit derrière fes gens, qu'il poufloit au combat, tenant
l'efpec nue , auec menaces de tuer celui qui reculeroit.
Mais voyans que ^^s paroles ne feruoyent de rien, il en
tua quatre. Les autres ne fçauoyent de quel cofté tour-
ner:carceux qui vouloyêt faire telle aux Portugais fcn--
toyent la pefanteur de leurs bras, & ceux q ui reculoyenç
nepouuoycnt attendre autre chofe que la mort parles
mains de leur capitaine. Ayans donc combacu quelque
temps,ils furent tous tuez ou noyez, eftans faifis de tel-
le frayeur , qu'ils fe precipitoyent en la mer, nommé-
ment Zudamcc , qui après auoir cftc blefl'é en plu/îeurs
endroits fe lança dedâs les vagues. Les deux autres vaif.
féaux voyans ce qui ciloit auenu n ofcrcnr s'auanccfj,
combien que les cjnq Portugais fuficnt/îlas, &naurez
en tant d'endroits de leurs corp';, qu'ils ne pouuoyct re-
muer ni bras niiambes.Le vaiifcau gaigne l'ur Zudamcc
fut tiré auprès de la flotte de Pachcco, puis mené eu
49 4 Bijlûires admirables
MaUca, mis à fac , & couucrt , afin de fcruir cl*vn long
mémorial de ce combat miraculeux. Le Roi de Paccin
cftonnc de il e'iirange accident, demanda & acheta la
paix.qui hn :"ut accordée. o/^<# mefn-: Un.chAp. 4.
En la incline année içio.lc capitaine Vaique Fcrnan J
C::e far courant aucc vn baileiu de guerre h deilroit de
Gi'^r.iicar, fut iniicili de fixfa'-tcs de Mores. Iceux ne
dciîroyent rien plus que cefteproye, & pcnfans qu'il lui
fcroit importable d'efchappcr commencèrent X huer
en ligne de ioyc : puis à coups de flcfchcs , de hnrque-
bou7.cs,& moufqucts, tafcherent Taccablcr. Or Cxfar
les canonnoit viucnlent , pour empefcher qu'ils n'ap-
prochaircntde Ion bafteâu , déclinant leurs coups par
diucries KKoni de voguer , & touiîours tuant quelque?
vnsrau moyen dcquoy leur cholere fc refroidit fort. Ce
que lui voyant courut lus à trois de ces fuites arrellees
enfemble, le vent ayant chaffé les trois autres , & les
cmpefchant d'approcher. Lcsenilcmislui vienent aufli
à la rencontre. Sur quoi il fît mettre le feu à vn grosca-
non^dontle boulet donnant en long, de proUc en poi;-
pe de iVne de ces trois fuftcs en rompit les rames, l l'^^
Mores retirèrent cefte fulle mutilée entre les deux au-
tres,&la remirent en équipage félon queleursafaireslc
permettoycnt. Lors ilsfcreioigncnt& enuahilfent de-
rechef Ca:iar,lequcl courant auec braue rcfoliition par
tout,& encourageant i haute voix tics foldats * canon na
de telle forte les fuiles, que les afl'aillans tronucrent
beaucoup plus forte partie qu'ils ne penfovent. Finale-
ment vncoup de boulet emporta la plufpart des forçats
de l'vne des fuftes : au moyen dcquoy les Mores del-
nue/. de plusieurs toldats tuez du canon , voyançdcux
de leurs fuites brifees, & que la prinfc de C^far leur
coulteroit trop cher :, quittèrent le combat. Ce capi-
taine,d'\ n naturel toulîours vigoureux , ilimit les fuftcsf
mais pourcc qu'elles voguoyent à larame , & Ibnba-
lleau à la voile i qui le vent failloit , il ne peut les at-
reindre:au moyen dcquoy if alla furgir au port de Mala-
e , pour faire enterrer le- ntorrs de fon collé , & penfer
es foldacs bleflez durant ce c'ô'rtrbat.^/^« mejm s Utt.chapi-
tre 11, Tf K
f.
î
ér mémorables. 49 j
Triftan Vafque de Vciguccapitaine Portugais,hom-
jiieclcsbauche & diirolii , mais de tel courage (|ue la-
mais danger aucun ne Teftonna , à caufe decjuoy plu-
jfÎGurs rciîimoycnt infcnfé & defefpcré : voyant la cita-
delle d'Ormus en danger d'clhe perdue pour le Roy
Manuel , fans beaucoup niaichanders'embarcjuc tiedans
fon bafteau de guerre aucc trente foldats ieulenieat,
prend la route d'Oinuis, d'où il approche, & voyant le
pafl'age clos fe fourre a trauers la flotte des ennemis,
combat fi vaillammont toute leur puilfancc , que mau-
grélapluye des baies de canon , des harquebouzadcs,
de feux artificiels , des coups de flefch es & autres traits,
après auoir fait merueilles , & des adcs furpailans toute
force humaine , il pafla & le rendit dedans la citadelle.
Ce valeureux exploit cftonna bien fort les ennemis, &
remplit de bonne elpevace les africgez , le chef defquels
pria Viguede de s'en retourner & fe ioindre auec le ca-
pitaine Soufc, qui auoit quelques vailfeaux pour cndô-
«m^gcr plus aifément cefte flotte. A quoy Veiguc s'ac-
corda,quoy qu'il euft querelle particulière contre SoUi-
Ic;oC qu'ilfut blelfé. Derechef donc,auecaufli grand ha-
zard qu'àla premierefois, il trauerfe la flotte des enne-
mis,aducrtit Soufe de l'eftat des afliegez, & côme la ma-
rée montoit , eux deux auec leurs foldats attachent le
côbat fur mer , qui dura longuement & fut tres-funeux.
Les ennemis perdirent dix vaifieauxqui coulèrent en
fond, grand nombre d'hommes tuez , îk plulïcurs blel-
fez. Du cofté de Portugais y en eut vn fokiat tue , qua-
tre vingts bieflez: mais maugré larefilknccdes Ormu-
fiens, Soufc & Tiguearriuerentà la porte de la CitadcU
le. «_y^M wefme liwe chup.l^.
Galcrs de fainft Scuerin,fdgneur Italien, portant les
armes pourleroy de France à laiournee de Pauic l'aa
mil cinq cens quatre, fit tout ce que peut faire la v.iill.î-
ce mefme , courant par tout ou il voyoit le plus de gens
du parti contraire , & faifant de tresbeaux exploits d'ar-
mes. Rn fin combattant près du Roy, fon cheualayanc
efté tué entre fes iambes , & lui terralfc de coups , ap-
pellant le fieur de Langey qui combattoit auprès de
lui> Se vouloïc le fccourir; lui dit, Alonfils, c'cll ici
4 9 ^5 Hijloires admirables
qu'il faut que ic meure les armes en la main : ne vouS
cmpelchcz plus de moi , mais allez en diligence fecou-
rirle Roy noftre lire : &, iî vousefcliappezjlfouutnei
vous de moi, &queie fuis mort au li(!ii d'honneur, p,
I oite au 6. Uit.de la "die du Aïarqmf de Pefjuaire.
En la bataille de Varne , ou Ladiilas roy de Hongrie
fut tué & Ton armée desfaite, vn gentil-homme Fran-
çois, vaillant à merueilles, trauerfa tous les efquadrons
dei Turcs, Scdonnainlques dedansles gardes d'Amu-
rath, auquel il porta vn coup de lance , puis lui defcliar-
gea vn coup de cimeterre. Mais ne pouuanr,i caufc de
plusieurs milliers d'ennemis qui lui boufchoycnt le pal-
fagc, retourner en arrière , après auoir tué vn très-grand
nombre de Turcs, il fut abbatu fur les monceaux d'i-
ceux, oii il expira glorieufement. Cnfp inUn en fes Em-
pereurs,
GalcasBardaflin , cheualier Sicilien , eftantau fiegc
de Plombin, s'efcarta vn iour allez loin du camp , pour
contemplerla ville, d'où foi tirent trois chcualiers poiir
l'attraper. Lui marche àTencontre, en heu de s'enfuir,
& domic il rude coup du pommeau de Ton efpee au pre-
mier armé qui l'accofte, qu'il le iette tout eftonné du
coup de Ton cheual en terre: il empoigne le deuxicfme
par les deux bras, l'enleuc hors de fa Telle, & le tire bien
loin, courant à bride abatuc après lautre iufques auprès
des portes de la ville. Fulgofe au "^.Uu.chdp.x.
L*jBmpereur Maximilian premier , ayant aflailli le»
Grifonsfurla fin de l'an 1499. en la première efcarmou-
che qui fe fit près de Vuerdenberg, vn Suilfe de Glarjç,
nommé lean du Val, fouuint tout feul en vn dcftroit
vingt hommes d'armes, & Icvempefchade pafl'cr aucc
h picque au poing, de laquelle il renueria trois d'iccux
parterre. Les ennemis eilonnez delà vaillance de ce
braueSuilTc, lui promirent bonne guerre, & le menè-
rent fain& lauf en leur camp, d'où iL le renuoycrcnc
fans rançon , auec ample tctmoignage de la valeur.
SturnpjiM tn Lhijioire des SuijJ'es.
L'ani55i. SolymanfitalTiegcrpar MahumetBafTa v-
ncforte place de TranfTyluanic ,;nomniee Thcmufear,
gar-
(^mémorables, '497
gardée par le Comte de Lofan/., pour Ferdinand roy de
Hongric,dcpuis Empereur. Ce Comte voyant vne puiH?
fante armée autour de lui , forclos delecours , &: trahi
par deux Efpagnols cjuirauoyent abandonné ; pour s'en
aller rendre aux Turcs,commence à parlementer, & ob-
tient compofition de fortir auec tous feslolJars vies &;
bagues faunes. Le Balla contre lafoy promifc fait tuer
tous les foldats,&: trancher la telle au Comte. Vnche-
ualier Efpagnol iiommé Alfonfe Ferez de Sa;aucdre;fè
faifant faire large à coups d'erpcCj&rcnuerfant ceux qu^
vouloycntrarrefter , fe fauue à bride abatue vers le dIus
prochain heu de retraite , fuiui de cniq cens chenaux
Turcs qui ne peurent l'attraper. Comme il eftoit fur le
poind d'eftrc hors du danger , il tombe en vne fondriè-
re auccfon cheual^où tous dcuxperjfient. Les Turcs le
\oyansbaspourruyuent, & coupent la teûe de ce vail-
lant homme, laquelle portée à Mahumet, & entendant
que c'eftoic d'vn Efpagnol, le le croy,dit-il , car il cftoit
vaillant, ^^fc. Centorias an 4. //«. de la guerre de Tranfj^l"
uante.
Lors que \c\ Turcs afTiegerent Belgrade en Hongrie,
vn delcursfoldats, voulant planter vn enfeigne en lieu
eminent,monta en vne haute tour.îl fut fuiui prompte-
mentpar vn Hongrois, ou Bohême, lequel vovant ou'à
pcjne lepourroit-ildcfnicher delà, rempoigneôc ferre
etlroittement, puis aucclui fc iette du haut en bas de la
tuur,, ou tous deux expirèrent, efcrafez d'vnc fi lourde
cheutc. Bonfin. liu. 8. Decad. 5. Duhrauiu^ an 'viugt nctijitf-
me Hure 3 dit que le Chrcftien cria tout haut au Légat du
Pape,regardant d'embasde la tour : Si ie me précipite a-
uec ce chien Turc, ou ira mon ame ? Et que le Le^ac
l'ayantalleuré qu'elle feroit porteepromptementcnPa-
radis, il fc précipita fans délai a uecfon Turcduhauten
bas:& futcaufe que la place tintencores bon. Vn autre
Hongrois fit le mefme a u fiege de Liyza. Bonjin au di-
xicfme ItH'r.Decad.^.
On tient que lors que les Efpagnols furpriudreric
Confiance ville frontière des SuiHes , l'an milcinq cens
quarante hui6t , va des bourgeois , voyant que Tvu des
Ix
4 9^ Hijfûires admirables
chefs s'auançoit & acouragcoit les autres Efpagnolsà
pourfuiurclcurpoinde,& que la ville s'en alloir per-
due, fe ierte de viftefTe contre lui , Tembraffe & (é préci-
pite aucc de deflus le pont dedans lefleuue, où tous
deux furent noyez. Alemoira de noftrc temps,
Fulgofe raconte qu'au premier fîcge de Rhodes, le
grand Maiftre nommé Pierre d'Aubuffon , François de
nation, print charge de garder la plus ha/.ardeulc brcP
chc, fécondé dedeuxfîcns nepueux, & quatre autres
foldats, lefquels firent fî vaillamment auec lui,que com-
bien qu'on lui euft tué à diuerfes charges les foldats qui
venoycnt au fecours les vns en place des autres , & qu'il
cuft efté bleffc en cinq endroits , fon harnois de guerre
faufTé &rompu, neantmoinsles Turcs ne peurcntiamais
rien gaigner fur lui : ains furent contraints leuer le fic-
ge. ^^U').lin.chap.z.
L'an 1501. le roy de Fezs'eflantmis en campagne a-
iicc puifl'antes troupes pour aflaiUir Tingi ville forte en
lacofte de Barbarie tenue par les Portugais, legouuer-
neur fit vnc fortie furies Mores : mais trouuant la partie
trop forte, il fe retira non fans grande difficulté dedans
les foflez de la ville. Auant que d'y pouuoir parucnir 1^
combat dura plus de deux heures, & y fureut tuez le fils
du gouuerneur, & huiâ: autres vaillans hommes de che-
ual ; le gouuerneur mefmc ayant efté fort bleffc au
vifage d'vn coup dciaucline. Les Mores fuiutnt leur
poinde, prcffent les Portugais, & font tous leurs ef-
forts d'entrer peflc-mefle en la vill. Ce que voyant le
gouuemeuriaucc vngros de caualerie ilenfonce fiim-
petueufcmentIesMores,quecependant tousccux quie-
ftoyent forris rentrèrent aifcment en la ville. Le dernier
s'appclloit Lopes Martin , homme courageux, lequel e-
ilant entré ferma la porte à moitié feulement : & com-
me pluficurscriaffent après lui qu'il la fermaft cntiere-
itient:ie ne fcray jamais ccfte faute, dit-il, que de fleftrir 1
les Portugais , en faifant penfcr qu'ils ayent peur. Ad-
iouftant qu'il eftoit preft de combatre iufques au der-
nier foiifpir de fa vie , pour empefchcrque perfonne
n'encraft par ccftc moitié dcporcc. Le dire & le faire
fut
(^ memorablesl 499
fut tout vn. Car les Mores cibnsacouruslà pour entrer,
il fouftintle premier choc fort vaillamment,iijrques à ce
que plufieurs vindrent à lé fecourir , au moyen dequoy
les Mores contraints de prendre autre parti feretirerenc
en leur camp. Obforius anjccoful liitre de Portu^d 3 ch.ifitre
iouXiefme.
La vaillance extraordinaire d\n Suille du temps de
nosanccftres fera ici, auec licence du débonnaire Je-
deur,adiotiftce,commetrer-digne d'eftre ramentue plu?
dVncfois. Les Suiflés au nombre de 1800. ouenuiron,
ayans auprcs de Bafle rompu les troupes & grandes for-
ces amenées par le Dauphin de Franre,furent tous tuez
fur la place,combatans d'vne force & valeur du tout ef»
mcrueillable pour le falut de la patrie. Auint qu'après la
bataille rnjMOÉns Smtri nommr Kiirfrnrj , lequel auoic
faitle voyage en France du confcntement de l'Empe-
reur, pour amener ceftc armee,fortant a chenal en cam-
pagne, comme pour triompher de cefte desfaitc de fes
compatriotes , bi marchant le heaume en telle , mais
la vifiere abaillee, & 2 face defcouuctte , pour mieux CSc
plus à fonaife contempler les morts à trauersleiquclsil
marchoit;, commence à s'efcrier , ô le plaifant fpedacle,
qu'il fait beau marcher par ccfte prairie parfcmée de ro-
fes:à ces paroles vn Suifle eftendu fur la place , & refpi-
rant d'à uantage pour la liberté delà patrie que de fa vie
proprcjproche de la morf qu'il ell:oit , & l'aèrontant de
nouuelle forreje refueille & leuc comme il peut fur Tes
genouxjparvne vigueur du tout extraordinaire , & em-
poignant vn caillou le ietce de telle adrefl'e qu'il atteint
Burcard au milieu du front fî rudement, que reiniersé
de cheual en terre, furie champ il exfpire , receuanrle
loyer de fa cruelle ingratitude & feloniiic. SiumipH. en
thiîicire âcs Smjjes.
L'an mil cinq cens trei7e,lcs Suifle^ eflans aile? au fe-
cours de Maximilian Sforce Duc de Milan , gardèrent là
Mlle de Nouare auec telle afl'curance,que combien que
les François hlfent vnefurienfc batterie contre les mu-
railles,neantmoins les Saifîes montrèrent lorsauoiriî
peu criUntc d*cux;4u'ils ne fouffrwcut laraais qu'on fcr-
li J.
500 Hifloires adminbles
maft la porte de la ville qui rcgardoit le camp. La Brét
chefaite>ils foullindrent courageufementraflault&rc-
pouilercnrlcsaflaillans. Qui plus eft la nui(flfuiuantc,
conduits par le vaillant capitaine Motin,ilsaUercnt(ran9 ,
attendre le renfort qui leurvenoit) attaquer Tarmcc
Francoifejdonnans droift àrartillcrie , laquelle ils gai-
•guercnc vaillamment , au nombre de vingt deux pièces,
& remmenèrent le lendemain en triomphe à Nouare, :
ayanstué vne partie de l'armée Françoife j& mis le re- '
fte en route; ce que nous defcrirons plus amplement es
lecueilsfuiuans jOÙ nous parlerons des batailles don-
nets en diuers endroits du monde, depuis cent cinquan-
re ans ou enuiron. Fr. Cuichardin au ImAUdefon hijloire ï
des guerres cCltalieich.l/^. i
La vaillance des ftiefmes SuifFes aparut Uan mil cinq .
cens quinze à S. Donat ^au Milannois , à laquelle Gui-
chardin rend ce tefmojgîiage. Encores que les Suiffeç
combatiirenttoufiours(pour la féconde fois) auec gran-
de hardiefleôi valeur voyans toutesfois qu'on les battoit
rudement par le front & par les flancs;& que l'nrmee Vé-
nitienne approchoit pour leur donnera do«, deferpere-
reat delà viftoire (dontilscftimoyentauoir empoigné
la robe le iour précèdent } tellement qu'eftnnt ja haute
heure,ils Tonnèrent la retraite, & chargeans fur leurs eC
paulcs l'artiJlerie qu ils auoyent menée auec eux, ils
deftournercut leurs efquadrons, tenanstoufîours leura-
coultumce ordonnance, & cheminant au petit pas vcjs
Milan, auec vn tel cftonnement des François, que de
toute l'armée il n'y eut homme de pied ni de cheu.îJ>
quieuftlahardicfl'e de lesfuiurc. Il y eut feulement
ticux compagnies des leurs, Icfquels s'ai ellans fuys
dans vne melîairie, y furent bruflez par les chcuaux lé-
gers des Vénitiens. Le rcfle de Tarmee s'en retourna i
Klilan , fins rompre fon ordonnance , monitrant encore
en contenance & en vifage la mefnie aflcurance & har-
ditlïc : & quelques vns dilcnt qu'ils enfotiyrent en tene
quinze niecc> de groiTe artillerie gaignccs à la premiè-
re rencontre , & que ce fut pourcc qu'ils n auoyent
h
C^ memoTAhles, joi
la coimnodité de les emmener. Tous leshommes,d'vn
commun confentcmcntafl'euroyentqiie depuis vn très-
long teni>s,on n'auoitveu en Italie vne bataille plus fu-
rieufc & plus efpouuantable. Triuuice,capicaine qui a-
uoit veu tant de chofes , aflcuroit que cefte bataille de
fainft Donat auoit efté fiiite non par des hommes , mais
par des Geans , & que dixhuiiTt batailles efquelies \\ s'c-
rtoittrouué,auoyenteftcà comparaifon de celle-là ba-
tailles de petis onfans : & tient-on que fans l'artillerie la
viftoire fuit demeurée aux Suifl'es, lefqucls cftans en-
trez des la preiT^erc charge &impctuofi te dans les for-
tifications des François,^: leur ayansenleué la plus parc
de leurs pieces,auoyent toulïours gaigné ôi\x champ. Fr,
Guichardm au Uwiz.chap.l^.
Enuirou Tan mil cinq cens quatorze, les François af-
iîegezen vneforterefle nommée la Lanterne de Gènes
fupplierentle Roi Louys XII. de les faire fecourir de
viures. Vn Capitaine Efclauon auoué du Roi, fc com- •
portail dextrement que maugré les Galères quifer-^
moyentlepalfage, il palToitauec fa galère chargée de
viures&enprefencedetous les Gencuois a«i'(fliiailloic
la place. Là dcfl'us Manuel Canal capitaine de marinCy
fort expert entre ceux de fon temps , monte en vne ga-
lère auec trois cens ieu nés ho m mes fous la charge d'An-
dré d'Auriaji&fortantde la garde où il eftoitpofé , com-
mence à s'eflargir en mer, pour auoir plus de vent, afin
d'aller a rames & voiles. Lors il flnglc droift contre la
galère derEfclauon,& fans redouter les coups de canon
qu'en lui tiroitinceifamment de la Lanterne , accroche
icellc galere,& faute dedans le prcniier , puis ayant faid:
couper les cables defquels cefte galère clloit tenue at-
tachée aux anneaux de fer de la fortcreilc commandant
i la ville 4e Gcnes , tire en vn inftant après foi cefte ga*.
1ère, tournantia proue delà ftenc & la conduifant de
telle adreflc entre les efcueils, & la galcre conquife, quç
maugré tous empefchemens il arriua fain&i fauf recçu
auec aplaudiffement de tout le peuple: & honore podf
tefmoignage de fa vaillance de la fomme de cinq cen^
,cfcus;le buua de la galcre conquife diftribué entre Ics
i* 5
50^ Hijloires admirables
ibldats. Quant au Capitaine Efclauon, il s'cftoit icttc de-
danslamcr, pour gaigner à nage les bancs & efcueils
ï)rochesficla forcerefTé où il pretcndoit fe fauuer. Mais
l'nicunc gcnnl-homme, furnommé lulljnianjfeiettant
dedans la mer apreslui, le fuiuit de telle vitelle qu'il
î'attaignir, &rempoignant par leschcueuxle tiraainfi
au nuage. Les Gencuoiss'eftans rendus maiftrcs de la
Xancernp, qui non feulement cfclairoit de trop près»
mais eftouffoic aufll leur liberté , la ruinèrent & delino-
lirenr de fond en comble. P./a;*e an ii.Uu.defis hifi.
VANITE,
ÏE vis il y a quelques années vn perfonnage,de qui i'ay
la mémoire en recommendation fingulitrc, au milieu
«e nos grands maux qu'il n'y auoit ni loi ni iuftice,ni ma-
•^iftrat qui fit fon olHcCjnon plus qu'à celte heure , alla
^-jjublier le ne Içay quelles çheciues reformations fur les
JiabiUemeirsjfur h cMifine;& lur la chicane. Ce font a-
inufoiresj dcquoi on paift vn peuple mal mené, pour di-
re qu'on ne Ta pas cju tout misen oubli. Ces autres font
de mcfme , qui s'arrcftent à deftcndre à toute infiance
«les forn.es de paiierjes dances èv Ipsieux à vn peuple a-
bandonné à toutes lortes de vices exeçrables..v/.t/e Mon^
tugne un^.Uu.dti Ej]ah,ih.ç}.
V AIS^IT'E du monde magnifique-
ment reprefentee.
P\lii.ivvic furnomméîe 15on,Ducde Bourgongne,
de la mémoire de nosanccftres, eilantà Uruxelles
2UCC fa Cour , & le promenant vn foir après fbupe par
les lues delà ville, acompàpié de quelques fïcns fami-
liers, trou ua couché tout de fon long furie paué cer-
tain arti fan fort yurc , &quidormoit profondement.
!{1 plut au Prince faire preuue en cellartifan delà vani-
té de nolbe vic'jde laquelle parauant ilauoitdeuifé a-
jyec les familiCii. Donquc5> il tait uUeucr ce dormeur»
le port«^
dr mémorables. y 05
le porte en Ton palais: le fait coucher en vn des plus
magnifiques lids du Prince , lui mettre en tefte vn pré-
cieux bonnet de nuiftjle defpouillerdela fale chemife
cju'il porcoit , & le veftir d'vne autre de fin lin. Quand
i'yurongneeutcuué Ton vin, & commença àfercfueillcr
voici arriuer autour de luft des pages & valets de cham-
bre du Duc,c]ui tirent les rideaux, font plufieurs grandes
reuerenccs,lui demandent i teftc nue , s'il lui plaifoit de
Te Icuer &: quels habillemens il vouloir veftir ce iour-là.
On lui apporte des veftemens trefprccieux. Cenou-
ueau Monsieur eftonné de telles careHes, & nefcachant
s'iiiongeoit ou veilloit, fe laifTc veftir & mener hors
de la chambre. Grands Seigneurs fe trouuent qui lefa-
luent en tout honneur,le mènent à la meflcjOH en gran-
de cérémonie on lui baille à baifcr le liure desEuangiles,
& la paix , comme on faifoit ordinairement au Duc.
De la mefteon leremeine au palais : il laue les mains»
&eft aftls à table bien garnie. Apres difné le grand
Chambellan fait apporter des cartes &vne grand' fom-
mc d'argent. Le Duc fantaftique iouë auec les princi-
paux de la Cour. Puis on le mcine promener au iar-
din , & de là prendre l'esbat de laçhafie du heure,
&du vol de roifeau. Il cft ramené au palais & foup-
pe magnifiquement. A la clarté des chandelles , les
ioueurs d'inftrumens commencent i Tonner, & les ta-
bles leuces les gentil-hommes & Damoifelles fe pre-
nent à danfcr, on iouc après vne plaifuntecommedie, li
collation s'enfuit, ou Ton prefente force hipocras & vin
précieux ; auec confitures & dragées de toutes fortes à
ce Prince de nouuelle impreftlon: tellement qu'il s'eny-
ure & s'endort profondement. Sur ce le Duc comman*
dequ'onle defpouille de tous fcs riches hab;llemens.
Il cft reuei^u de fes lambeaux , & reporté en la mefmç
place, ouUauoitefté trouuélefoir précèdent , où ii
paûTa la nuid. pfucillé le matin , il commence à fe fou*
nenirdcce qui lui eftoit auenu auparauant, ne fçaiç
Ç\ c'eftoit chofe aucnne , ou quelque fongç qui lui
cuft brouillé le cerueau. Finalement fur le choc dç
iiuers Uifcyurs , il coiulud que ce n'cftoit que rcfuciiq
li 4
î o 4 Hifîoires admirables
de tout ce qui lui ertoit auenu , & en enrrctintain fi fi
femme, fcs cnfans , & fcs voifins, fans en auoir autre ap'
prehenf-on.
Ccile liiftoiie me ramentoit ce que dit Scnecquc
fur la Fn defa 59.1etcreà Lucilius. Nul nepeut(dic-il)
s'efiouir,s'il n'e!-t magnanime, iufte , tempérant. Quoy
donc ? les mefchans foi^t-ils priuez deioye ? ils font
joyeux,commeles Lyons quionttrouuë proyc.S'eftans
faoukzde vin & de paillardife , ayans paflc la'nuid à ca-
blcquandles voliiptez verfecs dans ce vaifl'eau du corps,
trop eiboicpouren contenir tant commencent à fup-
j'Urer, cts miferabies s'efcrieut auec celui dont parle
Virgile,
Ta fçaii, comme a» milieu cf-vn faux ^ 'vain déduit
A' ota ako?:s acheté noj'tre demie fe nui fi.
lesdifloluspairentla nui â:, voire la dernière , parmi
desfaufles ioycs. Somme, autant fert à Tartifan rufmcn-
lionné ce magnifique traitement , qu'vn fonge qni paf.
fc. Et ce ficn beau iour & ics ans d'vne vie mefchante ne
différent que félon le moins & le plus: II a ronç,ci4.heu*
les: les autres mefchans quclquesfois 24. milliers d'heu^
res.Ceft vn petit ou grand fonge ;& rien d'auantage.
VANITE fuYÏenfe.
BERNARD Scardeon, au troifiefme liurc defon hi-
loire déPadoue, récite que deux frères germains
de famille honnorr.ble, cftans vn iour d'elle en certaine
icur maifon champertre,apres foupé dciccndircnr àTcn-
trce du logis & «îeuiftns tout debout de diucrfcs chofes,
commencèrent à contempler les ertoilcs luifantes lors
en grand nombre,commeil auient en temps lernin. A-
lors vn d'iceux commence à dire en riant, le voudrois a-
lîoir autant de ba-uh d moy aparté n ans, que ie voy d'é-
toiles. L'autre refpondant de mefme,&moy,ie voudrois
auoir à moy vn pré auili long & large que toute Teftcn-
duc du ciel : puis fe tournant versfon frerc.adioufta, Ou
tneaciiez vous paiilrc vos bœufs ? £n Vûikepi'é repli-
érmemorahles. 505
«que le frère. Ouy bien flic voulois, fit l'autre. Maiigré
bongréquevous en euffiez recharge celui des bœufs.
MauL^ré moi ? recommence l'autre. Ouy,Ouy, réplique
encor le frère. Ainfi conteftans , le ieu fe conucrtit en C\
îudeeflrif,que des langues & paroles picquantcsilsvm- ^
drcnt aux mains & defgainans leurs /cfpees fe tranfper-
cercnt Tvn l'autre , tombans qui çà , qui là , veautrcz en
leur fang.Lesdomcftiques qui les auoyent entendus de-
batre de paroles , acoururent au bruit des efpees , & les
emportèrent dedans la maifon , où ils expirèrent incon-
tinent, rh. Zuiiiger Mt iMi*rc ditpremier wlttme defon^raud
thcxtrc de la "vie hmnaiuf..
Nous auons vn autre hiftoirc de noftre^ temps réci-
tée par P. luftinian au 14. liure de i'hiftoirede Vcnifc,
non moins tragique que la précédente. Cofme Duc u€
Florence entre autres fils en auoitvn, Cardinal, nom-
me Iean,prince de grande efperance.Icelui eTcant ailé à
ia chaflcauec deux Hens autres frères Fcrnand 82 Gar-
iîas, luiuisde quelques pencils-homme^ , lcu:S chiens
fontleucr vn lieure , qu'ils pourTuyu-en': en raie-campa-
gne, & l'arrelient. Sur ce , les frères enriciit en debar,
chalcunfouftenant que les chiens auoyent fait la def-
couuerte&laprinfe. De parole à autre lis commencent
à fe picquer & iniurier. Le Cardinal ne pouuant fouf-
fvirvnmot plus haut que l'autre , donne vn fouftietà
Garfias. Lequel outré de cholcre , met lainam à rcfpee,
& blefle fi rudement le Cardinal , que toft après il rend
l'amc. Vn àts feruitcurs du Cardinal fe rue fur Gardas»
ÔcToftcnce dételle forte qu'il fuit fon frère au bouc de
quelquesiours. Ainiî pourvn rien , en peu d^heiiîesle
Duc Cofme perdit deux fils. i-h. Camerdriuscnjesmeduu-
ii'oiis hijlori(jues.chaJJ.9i.
Quelques efprits turbulens, indignes d'eftre nom-
mez, jemerent querelle entre George & Albert, Mar-
quis de Brandebourg;ce qu'ils étendirent & acreurenc
lidextrcmcnt, que ces deux Printcs, confins germains,
dcuindrent tout à fait ennemis Lvn de l'autre, & par-
tagèrent les biens qu'ils auoyent parauant en commun,
& en firent dreiTcr des conua<^s authentiques. George,
J 0 ^ Hijloires admirables
le plus vieil, ayant dclongucmain vcu c) u' Albert felaïf^
foit manier par gens tjui le pouireroyent tînalemcnt en
plus grand trouble , print vne rcf<ilurioJi cjuc la cholcrc
lui faggc^a. Car ayant entendu qu'Albert eftoit venu
à Ncuboug, fans en dire mot a perfonne il lui efcrit de
famam, que voyant Albert lui dire & faire beaucoup
<l*indignitez, il ne vouloir pourtant efmouuoir guerre:
ni permettre que les pauurcs fuieds innoccns , &qui
ne fçauoyent que c'eftoit de telles querelles , en payaf-
fent la folle enchère. Qu'il faloit vuider ce différent
entre eux deux. Pourtant, encores qu'il fuft beaucoup
plus vieil , ilprefentoit le combat au marquis Alberr,
rauertiflant, (s'il aimoitfon honneur)dc fe trouuer feul
i cheual, armé en Prince & cheualier, en certain lieu &
endroit efcarté , qu'il lui marquait auprès êLwnc foreft:
où il le trouueroitainfi &ain(î equippé. Qu'iUec eux
<Ieux, fans autres arbitres , viendroyent aux mains &
mettroyent fin à tous leurs débats. C^'auec fà barbe
blanche il vouloit attaquer & ioindre le poil fplet &
roux d'Albert. Il ferme Tes lettres;, appelle vn iîen page,
Polonois de nation , lui commande fort exprès de les
porter au marquis Albert, & neles bailler à autre qu'u
lur. Le page voulant exécuter le mand;jment de loti
Prince, pouruoit à fon 4çpait. Mais comme il vouloit
montera chenal vn autre page fciouantàlui , & ma-
niant imprudemment fa pirtole, ladeflachcfansy peiv-
fer,& tue ce page Polonois. Onle vifîte& dcrpouillc:
les lettres dont il eif trouuc lailî fon rapportées, & l'iiir
tention du Prince defcouucrte parles Confcillersjon lai
lemonftre fcricufemcnt fur tout ce qui clfoit furuenu,
& l'arred que Dieu fembloit lui donncr.Il changea d'a-
uis, &fuiuit d'autres expediens , faifant grâce au page
mal auifc qui auoit imprudemmeut tue l'autre. Cela a-
uint Tan 1541. vh. Camerariits en a fttcfme ^i, cha^. de fts
■fMcUi^tmn î hijïorUjues.
y EN-*
VENGE ANCE horrihlç^.
LAferuitudc extrême veut eftre doucement maniée,
•utrementellecouue vn horrible feu de defefpoir.
Vn gentil-homme Efpagnol nommé Don Riuiero de-:
nieurantenTifle Maiorque, entre autres efclaues auoic
vn More, contre lequel s'eftant vn iour courroucé tort
afprciTjent, il lui donna tant de traits de corde ^ que le
pauure efclaue fut fur point de mourir. Mais efchappé il
feignit plus d'affcdion de bien fcruir Ton maiftre que
parauant.Kiuierp auoit vneforterefle ou n'y auoitqu'v-
11e auenue bien gardée d'vn profond folle , & dVn pont
ieuis, lequel haulî'é celle place eftoit imprenable fors à
coups de canons, ayant la mer qui battoit au pied d'vn
roc fur qui elle eftoit baftie.Vn iour Riuiero eftant allé
loin de Ton logis à la chafte , le More voyant Toccaficn
&le temps venu de fc venger, fur tout pource que la
Dame,femme de Riuiero,qui auoit vne maifon au vil-
lage prochain , eftoit venue en la forterelîe , pour voir
fur la mer ans galères qui y flottoyent , & auoir le plaifir
de Tairjfe iettp après Schauftc le pont, empoigne la da-
ine, tklajieà yngros coffre en vne falle bafi^e près vu
petit lia: verd , & enferme Tes trois enfans qu'elle auoic
menez auec elle,dans vne chambte prochaine : puis il la
viole honteufemcnt : & comme nu cri d'elle & des en-
fans les villageois fulfent allez quérir Riuiero , quia-
^ourt en diligence, ie Morp nefé fouciant de menace ni
<le prières lui ictte parles fcncftrcs furie roc fon fils ail^
jié,aagé d'enuironlept ans, lequel futaufli toftefcrafé
que tombé. Le pauure gentil-homme réduit com-
me au deferpoir eflayc d'adoucir le cruel More pour
fauucrlc rcftç ; & le More feint y entendre , mais à
cojidition que Riuiero fe coupaft le nez , pour
réparation des tors qu'il auoit faits à Ton efclaue.
Penfant gaigner quelque chofe en fe mutilant ainfi,
au gré d'vn qui fc glorifioit d'auoir honni fa femn^e.
5^ 8 Hîjloïres admirables
& c]ui vcnoir ce meurtrir fi cruellement Ton nîsailnc;,
lîeantnioinsfe coupa le ncz,cIont l'cfclaue merucillcufc-
mentioyeuxciiiieude rabacre quelque chofe de lafe-
lonnic dermcfurcc , fe mocquoit de tout ce qu'il auoit
promis, & tic b iîmplcfle defon maiftre, empoigne in-
continent les deux autres petits cnfans par lespieds,lc!>
febilîc de plufîcurs coups qu'il donne de leurs tcftes co-
tre les murailles, puis les iette fur le rocher après leur
aifné.Etfe fouciant aufli peu de cris de la populace a-
maflee à ce terrible fpedacle, que de ceux de Ton mai-
Arcempoigne la Dame, laquelle il efgorge en prefence
<îetous,S: précipite le corps du plus haut de la tour en
bas. Quoy fait efcumant deragcilfeiettela tefte deuanc
fur le roc du collé de la mcr:& fe brife en pièce , finiilanc
promptementfa detellec vie,à Textreriie regret de Ri-
Miero,qui n'auoit peu fauuer aucun àcs ficns,ni chaftier
ce furieux efclaue félon fes démérites. Plufîeurs ont def-
crit celle hiftoire en Efpagnol , Italien & François fort
ainplement.-maisien'ay peu ni voulu la faire pluslon-
çue^cftant Çi eftrange,qie ie tremble toutes les fois que
i y penfe. H//?.^'jE:Ç^»«e.
L'Abbe de Sainci Simplician à IVIilan, ayant donné vn
foufflet à vn C\Qn more , la nuid fuiuante ce barbarejc-
<)ucl auoit feruiTAbbé plus de trente ans , lui coupa la
gorge,lors qu'il eftoit au plus profond de fon fommeil.
iiifi, d'Italie,
F E RS au corps humain.
LE fils d'vn bouchernommé Laurent, aagé de fept
ans,maladc de vers qui le tourmentoyent, demeura
trois lourj, comme mort, n'eilant iuftanté que de Uruua-
ç,e comp(;fe d'eau de gvamen auec vinaigre & fucre. Au
ruituefn-je iour on lui fit aualer vnc porion d'aloes, ce
nivrre & de fafran.qui lui fit ietper par bas cent quarante
huit veis-.quoy fait il i"e porta bien, ^ennicniiti an chu^M*
l'ay
î'ay conu vne femme , aagee de plus de quarante ans»
îatiuclle affligée de fois à autre de griefues douleurs eu
l'ellomach iointes à grand degouftement & enuiede
vomir, ayant vfé de la confeâion nommée hiera pi^r-a,
fit enuiron quarante grands vers. Dodoneatt en Hobfcruutio-*
fur ce ^). chapitre.
I'ay gouuerné malade vh vieillard aagc de huitante
iieuxans.Et ne conoifTanr pas de prime face fou mal,a-
unit qucm'aprochàt, lefenti qu'il auoic l'haleine puan-
tcscooime les petis enfiins qui ont force vers. le delibc-
ray lemedicaraentcr comme vn corps plein de telle or-
dure. Lors il fcmbloit comme mort: &lc grandaiaiftre
d'hoftel du Duc de Fcrrarc auoit ia commande que i'oii
apreftart tout ce qui eftoit requis pour la fcpulturedc
ce perfonnagc. le lui iis prendre vn bruuagc propre, ou
il entroit du fcordium & de la moufle- de mer,au moyen
dequoy il fe defchargca de plus de cmq cens vers , ^xi fut
guéri. Cefut vne cure carueilercnr jen'euffeiamaispen-.
le qu'vn vieillard décrépit euft eue atteint de tel mal.
"Rrafuml au commentaire jUr le i6. f^phoyifme du ^.liitre
d' H ipp ocrâtes,
Vne ieune (îlle Candiote demeura huid iours fans
parler, & les yeux ouucrts , laquelle ayant ietté quaran-
te deux vers non meflez auec excremens quelconques»
fut guérie, ,_Akxandre -Rencdici.
L'an 1545. ie vi certanie Damoifclle , qui en peu de
iours poulla hors mille vers , & quatre cens en 1 efpacc
de quatre heures,les vns morts , les autres vifs, & depuis
celle vuidangefe porta bien, p.pjw/ ^erede,au\.uHrc de la
guerifondei muladieSychap.S.
I'ay veu vn malade qui toute a vne fois vuida par cm-
bas cent feptante fept vers, dùncin^ati treiz,tefine chu, du
Commentaire de Ittmbncps.
Le Doiftcur ManuelEetulcius auoit vn petit garçon-
net aagé de quatre -ns nommé Sixte , lequel fut atteint
d'vne grofle & extraordinaire Heure , côiointc auec dou-
leur de teile,toux,grande altération, tréblemcnt en dor-
mant, haut-CTi , qui ma fît dire qu'il eiloit plein de vers.
-Au moyen dequoy luiayanr fait boite vne décoction de
5 1 o Hiflûires adintrahles
Tanacetou Tenafic, trois matins , il icttaplusde ccnf
Vers d'vn pied de long :& fut foudainement guéri delà
ficure & de tous autres accidens. V-vtcker enfesol)fert*ur
rions.
Vne ieune fille ayant ietté vn grand ver rond , le pcre
l'efcrafa , & le trouua tout plein d'autres vers. Lafill^î
pleine de cefte vermine mourut au bout de quelques
iours.AïïiMus Portu^.iii en la, ànqmefme Centurie, Cure qua^
r un te fi y.
Vn garçonnet de quatre an'; fort tourmenté des vers,
après pkidcurs remèdes, fit par bas vne veille ronde co-
rne vnefteuf. La mère Touurant en prefence d'autres,
trouua Li dedans enclos plufieurs milliers de vermil^
féaux. L'cnfaut penfé foigneufem.ent fut remis fus toft a-
pres.E»/^ z.Centurie^Cure ^o:
l'ay veu vne autre pelote pîeiiie de vers , tous enchai-
iiez & attachez les vns aux autres , & peiifoit-on de pri-
me face, que ce n'en fuft qu'vn. La, mefine.
C'eil: merucillesdecc qu'Erafme raconte en certaine
harcnguefaite àlalouangede la faculté de Médecine.
Il dit auoir veu vnltalietr, lequel n'auoitiamais veu ni
hanté l'Alemagne, ni liure ouhoitime decerte nation,
ou autre qui en fceufl: rien : & toutcsfois narloit bon A-
Icman, tellement qu'on l'eftimoit démoniaque. Ayant
cfté penfe parvn dode Médecin , Se par le moyen d'vn
breuuage dcfchargé d'vn fort grand nombre de vers, il
fut guéri de fa maladie, mais iln'entcndiB ni ne parla,
plus Aleman. C4r<^.în. an^.tthre de la dinerfité des chojèsych^-
fitrc^S. .
l'ay vendes enfans tellement tourmentez des vers,
qu'ils en enduroyent des conulfionseliranges,& (î rôdes
qu'ils touchoyent prefque de leurs talons à leurs telles;
Trincaftcl an ^.Uure^ch.ip.li.de rattotte ci*rund.part. hitm.corpo
affeclus.
Jean Baptifte Cauaîhire dofte médecin, m'a protefté
auoirvcudes vers fortispir le nombril d'vn enfant de
trois ans.OmntboKHS at* quatriefme liure chap. 13. di* traicié de
laquer kion des enjavs.
Maiilrc Pierre Barque Chirurgien des bandes Fran-
£ûifcs/
drn^eTvorahief, ^]i
'«o!fes,& Claude le Grand chirurgien, dem'eurans àVer-
dun , m'ontafFcrmë auoir pcncé la femme d'vn nommé
Gras bonnet, demeurant en ce lieu, laquelle auoitvn
apoftemcau vcntrejdontfortitauecle pus grand nom-
bre de vers, gros comme les doigts,la telle aiguë, lef-
quels luy auoycnt roHgé Icsinte&ns, en forte qu'elle
ietta par pluiieurs iours la matière fecalc par rvlceie , Se;
finalement fut du tout guérie. M.^mbr.Paré ait dtxyien-
fief/ne Uur.chap,^.
Vnc femme en la vile de Df^ift , aagee de quarante
ans,enccinte defcptmois, tombe en fieure &en des ac-
cident fafclieux: dont en fin s'enfuit ouuerture au ven-
tre, par où fôrtoit, nommcmcnr par îe nombril , de l»-
matière iaune& puante comme les cxcremens ordinai-
res. En fin le dixneufiefmeiour de Septembre 1575. va
veiayant.'pied&demi de longueur fortit par le nom-
bril. Deux iours après, elle en letra vn autre plus grand.
La Heure fe renforça le premier iourd'Odobre : telle-
ment que ie craignois auortement : au troi/îefmed^
nicrmc mois fortit vn troifîefme ver par le nombril^
moindre quclesprecedens.Le i5.d'0(ftobre ellcaccou-
chad'vnfils, & fept iours après ht vn quatrieline vct.
par le nombril :& le 14. d'Odobre vncinquiefmeavfii
grand que le premier. Et pource qu'elle eftoit maltrai-
tée à caufe de fa pauureté & baffe condition , elle traiiia
quelques mois, deuantqucrccouurer fafanté. P. Foreil
ai4 j.UiKobfcr. 55.
Le dodeur h oulieri an premier lîure des maladies inter-
nés y chapitre $/^. efcrit qu'il efl auenu à d'autres , que les
vers leur font fortis du csrps parle nombril & par les
aines.
Thomoi de l^^gue, en fun commentaire fur le 5. chap. dm
I.lli*r.de Gallende locis ajfci}. dit auoir vea deux hom-
mes tourmentez des ^ ers, qui les fentirent en vn inftant
fortir par les aines, ayans percé les boyaux & les mem-
branes qui les couurcnt. La playe fut refermée à iVn,
mais elle demeura ouuerte à l'autre tout lerefte de fa
vie , &: par celle ouuerturcil vuidoit les excremcns.
Trincauel. ait ^. llhr. (hap. II. dit auoir veu vn enfant de
ju H'tjloir es admir ailes x
cinq ans,auqud les vers pcrccrciu le vcnrre,&fortjren^
par le nombril.
l'ay vcu Sortir du corps d'vn homme va ver long de
quinze pieds, de lu largeur d'vn grani de femencc de
courge. ^Icx. vcncdici. en la prefence du 2,1. liure du fa
pratique. Au territoire de Siene certaine femme ay-ni:
beu de l'eau des bains qui y lont , & condnué fept iours
6t des vers de celle longueur. Ils cftoyent tcUemenc
attachez Tvn à l'autre , qu'ils failbyent vn tour de qua-
tre coudée s,& euft-on dit, à les voir de loin^ que ce n'c-
lloit qu vn grand ver. Beniuemus anHj.ch.ip. l'ay pcnlé
ëc i^ueri vn honnefte perfonnage , qui tira par bas près
décrois aulnes d'vn verlargeraurefte depuis, quoi qu'il
Icmblaft le porter mieux, neâtmoins il elloit toutplcin
dc^ ers,quilui caufoycnt par fois vn furieux appétit de
manger, Sctoil après vn inerueilleux defgoultemenr.
Dodoneau en l atmotution fur ce 87. chiif. l'ay ^ eu de tels
vers larges & de longueur prcfques incroyable à la Mi-
randole,au grandcsbahiAernencde ceux qui eifoyenc
auec moi . Aiuinard en Lil.epijlre du ^.Inu
Vn aune Medecin,renommé entre les Alemans, nom-
mé îui;«> C«ivm/-/«i, efcritauoir fait fortir du corps de
certain perfonnage demeurant en la ville de Northufe
vn ver fort large, de la forte de ceux que les Grecs nom-
ment fi>;/<f5pource qu'ils font longs & larges en forme de
bandelettes, lequel auoit dix coudées de long , & penfc
que ce n'eiloit qu'vne moitié de ver , l'autre ayant cité
parauant arrachée.
Vn petitenfant de l'aage de deux ans & ountrc mr.:s
à llecineen Italie l'an i-jjS. Er vn de ces larges vers en-
tiers &. de prodigieufe longueur , pour lequel voir a-
courutprefque toute la ville : car ce ver long de pUi-
iîeurs aulnes fut gardé vif prcs d'vn iour en vn baJlln
plein d'eau ou il fc. remuoit comme vn ver rampant fur
terre. G-tbucin au 15, ch/.p. de fin Coi^nftetitaire de Lambrici^ .
l'ay veu vnefemmc Scla6onne , qui en touffantietta
parla bouche vn de ces vers,de forme ferpentinc, & qui
auûit quatre coudées de long. y^mAtta Fortu^ut , Ceu^
tHrk Çixiefme} Cmt 7 4.
Nous
drmemorMs. 51J
Nous pourrions alléguer vne douzaine d'hiftoires de
tels autres vcrs.qui auoyenn pour le moins vne aulne de
longueur : mais d'autant que grand nombre d'autres re-
lient encores à marquer, ie m'arrcfteray aux principales.
La femme d'vn SuifTe au Cantonde Zurich, ieune &
fertile, fut malade trois ans durant , à caufe d'vn de ces
vers larges & longs concreé dedans Tes boyaux.Elle m'en
enuoya vne pièce iZurich,aF.n de voir que c'eftoir,pour
lui en dire mon auis, &la foulager. Cefte pièce auoit
plus de cinq aulnes de long, fans queue" nitefte , cou-
uerte d'efcailles comme vn ferpent, de la largeur du pe-
tit doigt,de couleur cendrée. L'an 1571. qu'elle mourut,
elle en ietta vn autre de longeur incroyable: car il auoit
plus de vingt aulnes:& i'en vi vne longue pièce Je plu-
îîeurs aulnes , que Tes domeftiques auoyent dcfiechce â
lafumec, pour la garder. Durant telle maladie , cefte
femme conceut&acoucha deux fois. Ellantà ieun, ces
vers la mordoyent cruellement: /i tolf qu'cJk; auoit beu
& mangé ils lui donnoyent rclafche. Ce mal fut acom-
pagné&fuiui d'autres griefues maladies , comme de
conftipation , de coliques, 'puis d'hydropifîe dont elle
mourut. T hiid, Dunm an qHDiz^iefme chapitre defes mejlan-'
ces de Médecine.
l'ayfouucnanced'auoirfait fcrtirdu corps de diuer-
fcs perfonnes des vers,ayans treize couldees de long. c.
Gefner au 3. Hure de fei epiftres ipag. 90. La femme à\n.
SuifTe m'apporta vn ver qu'elle auoit fait, enuclopé,
de foy meime comme fi c'cull efté vn peloton de fil de
la groflcur d'vn œuf, qu'elle auoit ietté par la bouche.
Il bougeoit encor , & eifendu en ma prefence , ic trou-
ua de trois aulnes de long, efcailicux & cendre com-
me vn ferpent. Vne miene parenre,aagee de vingtdcux
an§ affligée de tels vers tomba en vne faim infatiable, &
arrelt de flucurs menilruiiles. En f n , nature lui aidant,
elle tira de Tes mains par bas pièce à pièce vn veç de plu-
fieu» aulnes de longueur :dont s'enluiuic Ta guerilbn.
i. Schenik en fjs objcruatiofn mcdecmaUs 3 Uh,e troifiejhie
>(f/. io8.
L'an mil cinq ccnsfoixante vn , le reiziefme de Fe-
JI4 Hîjlûirâs Admirables
uricr vn vigneron d'Arles, vuida vn tel ver large &
long , par pièces, donc rvnauoit vingt paulmcs de lon-
gueur,rautrc huid.Cela lefTembloit a des peaux déliées,
ridées, de couleur cendree,mollcs. Apres que ce malade
fut deicharge de telle ordure , il efuanouit , & demeura
fans pouls & fans vigueur ; finalement fut remis au def-
fus. vuL-rioU au I. Hure obferu.ç. Tay monftré à des efcho-
liers vn ver large & long d'cnuiron treize picd^yforti du
corps d'vne perfonnc. C. Gemme.
Les yerslongs& larges ou plats tienent quelquefois
le long des intelHns , & tels font comme vne fubftance
glaireufe j dont vn nommé Lucas Farel cuifïnier de
rArcheduc Matthias eftoit tourmenté de trois en trois
mois, &vuidoit telle pourriture par pièces, de iîx, de
dou2e,& de quinze pieds de longueur, ce dit ch.deU
dt*fe enfes unnotétions fur le troifiefine liure dcsfimPlesde AIu~
nardis l'enaiveuvn qui fortit hors d'vne femme, &
ïeflembloit vn ferpent, de longueur de plus d'vne toifc.
Dequoy ne fauts'efmerueiiler , veu que les anciens ef-
criuent en auoirveu déroute la longueur des inteilins>
qui eftfeptfoisla longueur de nollre corps, parce que
les boyaux de chafcun homme ont telle longueur : & le
fcai pour l'auoir veu, &: monftré quelquefois es eu:hoIc?
de médecine à Parisjfaifantdes difTedions anacomiqucs
en public. D'auancagcican Vvicr, tres-do<fle Mcdecii:
duDucdcCleucs, elcrit en fon œuurc dcrirapofture
des diables, qu'vn villageois ictta vn ver de huid pieds
& vn doigt de long lequel auoit la gueule prcfqu c fem-
blable à vn bec de cane. AI. x^mlraift Pure» aux dixiuu-
fiefme littre chap.^.
Il y a vne trefdangereufe forte de vers, naiflans d'hu- '
mcurbilieufe^ qui reçoinent nourriiure des medicamcs
dont Ton fe fcrt pour faire mourir le? vers. On en a veu
vn denoftrerempsà Zurich lequel auoit cnuiron dix-
neuf pieds de Ions. BarthcLmi C.ivruhteri en fesohfsruu'
lions. Ayant fait donner vne purgation à certaineifem-
nie Alemande fort trauaillee des-vers, elle en ietta vn
qui me fut apporté &trouuéde longueur prodigicuie.
Caijl auoit quaramççijiq pieds de lun^. Çlkcii ht en-
lé* mèmorahlesl yr j
jborés deilx autres puis après, mais qui enfemble n'eftoy-^
cnt à beaucoup près iî longs que ce premier, icn^n^i Of*
theaittnfes obferuations.
l'ay vcii vne fiUectte de quatre ans faire des vers tout»
vifsjdc vingt aulnes de long. G.Hamlfergérproffjeur en m.-^
deàne à Tu\)inge,9n cerÈaines thefts di^utees l'an 1574. Vnc
icunepayfanne de quatorze ans en pleine fanré fit Mt
ver ayant quatorze pied de long, i.iajtées \ -uther en fes.
vbfertt^thns. Vnc autre payfannc aagee de trente cinc|
ans,ayant efté fort trauaillee de vers , en fit vn qui auoic
dixhuid pieds delong.Lc fm/mc. Certaine pauure fille
payfanne fit à deux fois vn tel ver long & large , qui a-
uoitpres de cinq aulnes de longueur. Ga^.v-uolff.eitfefi
ohferH.
Vay quelcjuesfois vcu des malades rendre de ces verg
larges de quarante pieds de long , de telle impetuofité*
qu'on cuft dit qu'ils alloyent ictter hors tripes & boy-
aux.Ces vers n'ont cauitc quelconque , mais font com-
pofcz d'vne façon de peau blanche jClpaiHe , glairettfo
tachetée de noir,& fans mouuement. Elles relicmblenc
à des aiguillettes oubandelcttcsjfont eugendrecs du lue-
pourri es boyaux. Ff//x l'/^/ertfrt pi oLfernatiom. Vn bar-
bier Padouan, demeurant à Mantouë , fur l'autonne de
l'an 1^56. après quelques atteintes de fieures,ietta vn dcL
ces vers larges d'vn doigt , & de fept couldees de long»
tel que le do(fteur Plater le rcprefenre ci deiTus.A/^m/L
Donat ati ^.Ua.dejcs hifloires admirables chaf), 'i.6. I^cs do~
deuis Schenck& Qucnts en leurs obleruations mar-
<juent deux autres hilloircs de tels vers de fîx;, ou fcpt,vfc
de huid couldees de longueur.
Ferncl an é Antre de fa Pathologie} ch, 10. parle dWne au-*
tre forte de vers, nommez Ascarides, qu'il dit fortir du
fondement, d'où ils s'attachent aux fefTcs &aux cuifl'es»
Et le dodttur laande lejjen en Ces obferHatio»s,dn le meOiie
racontant que le petit enfant dSn des premiers Con-
fcillcrs de l'Empereur Rodolphe fécond ^ affligé d'epile-
pfie , pluûeurs Médecins aflembltz pour confulter des
caufcsdu mal violent & torttrequcnt , fe trouuerent
jpcrplcx & empef^rhez à iça tefouldre. leflen Iç hi
^i6 Hijîûires admirâhles
d'efmaîllotterjvifîra fondement, où il trouuadcs Afçarf^
rides. Lorsd'vn commun aduis on y <ip]>liqua dcxtrc-
ment le cautere,& la caulc du mal oftce, peu à peu s'en-
fuiuit l'entière conualefcence ùc l'enfant.
Mais il nous faut encorcs propofer d'autres hiftoircs de
vers monl^rucux , & tous difterens de la forme commn -
nc,afin que le ledcur voye de plus en plus à quelles mi-
feres nous fommcs tous alluiettis par le péché , & prenc
occafion de tels récits de s'humilier deuant ion Dieu £c
iu^c fouuerain. Vn Chanoine tourmenté delacholi-
queprintdela confeftion nommée hiera piera, &ietta
Tn ver tel qu'vn laizardjmais plus gros , verd, velu, & a-
yantquatrepiedsjlequclfut garde vif en vne phiole de
verrc./>/em/*«* rtw4.//«.f^. 19.de la .nemoire de nosperci;,
vne femme enceinte à Cracouie en Pologne,fit Ton en-
fant mort,lequel auoit au dos vn grand ver de la forme
d'vn ferpentjlequeliongeoit celle petite créature, lj-
cofchen.enfon hijiolre da prodiges.
Vne icune fille de I.ouuain enErabant, aagee de 15-,
ansiîîprcs auoir fouftert beaucoup , vuida par haut & par
bas des chofes eftran[;cs : entre aunes par le fiege auec
les excrcmens vn ver de pied & demi de long , plus gros
que lepoulcc,reprefcntantau vif vne naturelle anguil-
le. La différence eftoit qu'il auoitla queue fort velue.
C. Gemme auz.litt.ch.z. A. Bcniuenius Médecin de Flo-
rence, elcrit qu'vn Charpentier nomme Ican, aagé de
4o.ans,eftoit prelle d'\ n continuel mal de cœur,ransre-
mede.Beniucniuslui ayant donné quelque potion, auec
grande quantité de matière qu'il rendit, vomit encor vn
ver aire7.1ong,ayantla telle rouge, ronde, & de la grof-
feur d'vn gros pois,lc corps tout couuert de poil folet,la
queue fourchue en forme de croiflant , quatre pieds
comme vn laizarà.^mbr. Parîoit I9.li:p.(hup.^.
VneDamoifelle Efpagnole retournée du Peru m'at-
tefta y auoir elle malade plufîeiïrs années , fans auoir
trouué roulagement.Enfîn vn Indien tenu pour grand
herborilfc ^^nt la voir,& lui fit boire du lus de veruaine
bien puiiHe,parle moyen dcquoy toft après elle ictta vn
v»jr(qu'ellcappdloitcoulcureau) tout > élu, 4'^'" pied
dt long.
^mémorables. ^ij
<îelong,&h quelle. Quoyfaic elle rccouurafa Hinté.
fÇ.Alonardisati^.linredesjlrttl)lcs dun^iHneau- monde ^ au ch.
de la ycrttaine.
Antoine Capitaine médecin Mantoan m'a conté plu-
/îcurs fois qu'vn gcntil-bomme du lieu nomme Lau-
rent Zaflard ayant efté rrau aillé dVnc freure bilieufe a-
compagftee de defdain de viande, & dVn mal de cœur
lui faiibitietter de grands cris^comme vn ver,lequel vef-
cut fcpt heures d\ n pied de long,ayant deux cornes ea
telle, & cent pieds de chafque cofté , dont il faifoit des
démarches eftranges, de couleur rouflaftre & de forme
plate. A/rf)rf//. Douât. au /^.Uu.defcs hij}.ch.l6.
Boniface Coc de Padouëauoitvn petit fis, qui de-
meura pafmé & comme mort rcfpace de fix heures.Fal-
lopius dofle Médecin lui donna quelque remède à Tai-
de duquel il rcprint Tes efpritSi&vnc heure après fit plu-
sieurs vers iufquesà quarante : entre Icfquels s'en trou-
ua vn noir,velu,i deuxteftesj& d'vne couldeede long
qui vefcut trois iours. Schemk en Cobfermtion 2.18. dn 3. /t-
me.
Vne fillette de neuf ans ayant prins de la poudre à
vers,ietta hors des petites chenilles viues. Dodonean en
l\ximotMuonfur Ij 58. chap. de Beniuenim. Medecinant vne
Vieille malade depleurcfie , elle ietta vn efcharbot noir,
ayant les pieds noirs, des comeslongnes& molles, mar-
querettes,vif,plein de pus,long de deux doigts. Gefneraa
^.liure def.sepisîresjp.ig-^^.
Fay veu vn verqui n'^eftoit pas plus long que quatre
doigts en largeur, tel que font les ronds , maisayantle
dos velu & çouuert de poil roufl'aftre. Ce ver auoit tour-
menté certain ieune homme;tcllement qu'on n'y atten-
doit plus de vie:mais en fin à l'aide d'vn bruuage conue-
iiablcil vomit le vcr,& ainiî refchappa. Gabttdn an conf
ment.de Lwnbriasjch.l^.
Vncoufturier en Languedoc , non gueresloin de
Montpcdier, Jbulagé de diuers remèdes en vnefieurc
eftrangequileprefl'oit, vomit finalement vn ver ayant
trois quartiers de long, ron d, efpais, & vif,aucc force hu-
meur bilieufe ôcaoïre. QaC^. K'^olf. enfes ohferH.'.mn^
Kk 5
*5iS Hiflû ire s admirables
Vn SuifTc du canton de Zug,hommc robufte,rentant
•Jifclque d'ordinaire ie ne fçay quoi qui le picqiioitjà l'o-
rifice de l'eftomach , foulage par quelques potions con-
licnables , vomit fort grand nombre de vers , de deux &
trois pieds de long. Là mcfme.
VnehlledelaBrieleen Hollan(îc> vomit vnc grande
c|uantité de vers , qui plus eft vn an après elle rendit par
la bouche des efcarbots que la mcre me môftra,m'affer-
inant en auoir gardé vnqui auoit vefcu deuxiours. p,
Worejl.ait iH.llti.obJènt.ip.
L'an 1c78.au mois d'Oftobre, Thienete Charrier de-
tiieurant à fainft Maur les fofle?, femme vefue aagee de
quarante ans,malade d'vue fieure tierce? vomit au com-
Incneement defon accès grande quantité d'humeur bi-<
lieux, auec lequel elle reietta trois vers,qui eltoyent vc-
lus,&dutoutiemblablesen figure,couleur, longueur,&
îgrofleur à chenilles, fînon qu'ils eftoyent plus noirs,Ief-
tquels depuis vefquircnt huiâ: iours & plus,fans aucun a-
îiment. Et furent iceux apportez par le barbier dudit
lain<fl Maur à M.Milotdoftcur &le<5leur es efcholes en
^'îedccmc , qui penloit lorsladiteChartier, & me les
xnonftra, comme auflià plufîeurs autres. Aï. K^îmlroife
Tarèau,xe^,ltu.ch.\6.
Adiouftons cncor quelques hiftoircs de vers,produits
-(tn diucrsciidroits du corps humain, pour cnfeignemcc
j)lus exprès de noftre mifcrable a anité. Traitât en Pied-
Tnontvnfoldat, laquay dcdefund Monfieur de Gou-
laincsjlequel auoit efte bleffe d\n coup d'cfpee fur l'os
parietnl,au bout âc quelques femaints le pcnlant, ic vis
foi tir certaine quantité de vers dedcifous ceftos pour-
ri;, par aucuns trous dclapourrituie , qui fut caufe de
me hiire haftcr d'extraire & leucr ledit os , lequel bran-
loît long temps auparauaMt:& deffus la duie-merc trou-
liai ou nature engendre chair troiscauitc?. à mettre le
foiilcejrempliesdcAersgronflans & mouuans, lefquels
eRoyent chafcun de groifcur enuiron d'vn fer d'aiguik
lette,âyansla ic'îic noire. ^^tnhrDife Paré au ^.liureihapi'
'Plulkurs 4o»^cs Medj^cuis de n^itre ctipps entre :>u-
^mémorables, 51^
ires i.HoM/*>r au i.liu. des maladies internes., chap.i. l.
ioi*beri:d.u. ç.cha.du traidc des playcs de la telle, AîontHii*
&i Veq^A cienenc qu'on void louuenr des vers es cerneaux
dcpiuiîeursperfonnes , comme aulTi en d'autres parties
du corps. BalthaTar Cenradm au lo. chap. dç Ton liure de
laficure peltilentielie en Hongrie , efcrit auoir veu des
vers fortans de diuers endroits des corps atteints d'icellc
iîeure,nommement aucuns alfez longs, qui prenoyenc
iflue par les oreilles , nccelîairement nez & produits es
ventricules du cerueau. Pourcantaufli les Hongrois en
diuers lieux nommoycnt celle ficureleverdu cerueau.
C.Gemme, en l'apendicc de fonColmocriticjfait mention
d'vnt femme des pays bas , à cjui citant morte de Heure
pellilcntitlle, Ton ouurit le tell, & fut trouué force pus
autour de la fubftance du cerueau , auec vn nombre in-
croyable de vermifleaux & de punaifes. i. Uoulier efcric
en fa pratique , auoir traité vn Italien tourmenté d'vnç
extrême douleur de terte> dont il mourut. Et l'ayant fait
ouurir fut trouué en la fubftance du cerueau vn animal
femblableà vnfcorpion , lequel comme eftimeledic
Houlitr, s'eiloit engendré pour auoir ceil; Italien conti-
nuellement fen ti & porté de rherbc nommé bafelic.
Vne ieune fillette d'enuiron huidans tombée en
pafmoifon, demeura fcpt iours fans parler, feotir, ni
hiouuoir,rerpirantfort,Si ne prenant nourritureque de
bouillon ou decodion de pourpié. La mère voyant fa
fillette fï rudement frappée à la telle, lui donne vn fup-
pofitoire, lequel attire par bas quarante deux vers en-
tortillez enfemblc en forme de boule: donts'enfuiuit la
guerifon de l'enfant. ^Uv. Bou-dtcL Un. z. (h.xp. i6.de la
cftredts muUdes, Vn mien petit fils aagé de trois ans,
nomme IcanConrad, tombé en fpafme foitfafcheuxjdc
promptemcnt aidé de theriaque& vinaigre appliquez
a la bouche & aux narines, s'eftant endormi puis reiueil-
lé, nous trouuafmes en fon petit li(ft, vn ver encore
bougeant, qui auoitle muffle pointu &marquttcé de
rougcjvelu & rampant es linceuls. I. schcmk enfes «bfer"
il auiut À vue fillcuc de croit ans, qui fe portoit forj
Kk 4
5 2. o Bijloires admirables
bien , le changemcMit mcrucillcux & mémorable gu(
s'cnfuit.Comnie elle eftoit fe louant auprès de certaine»
femme; , foudain commence à paroir au grand coin de
l'œil droit par dedans, la tcfte d'vn ver , dont le corp";
occupoit& couuroit prefques tout l'œil mefme. Le-î
femmes eftonnees s'approchent, &rvne d'icelles aucc
les doigts tire doucement ce ver tout entier, vif, long
comme vne aiguille commune, blanc, & groflet, fans
ejuc la fillette en fuft endommagée , ni qui rilTue euft
laillé quelque ouuerture preiudiciable a l'œil. xylmAtus
Portn^/^aisjcefitttr.^.cureâ^,
l'ay veu fortir des aureilles d'vn ieune homme tra-
uaiilé de fieurc violente trois vers tels que des grains de
pin,& plus gros, y eUfyiie^Uu.^.ihHp.lo.
Monneur Fernel au 5. liure de fa Pathologie , chap. 7.
cfcrit d'vn foldat , lequel elloit fort camus , tellement
c|u'iinepouuoit fe moucher aucunement ; dont s'en-
fuiuit que de rexcrement retenu & pourri s'engendre-
rcnt deux vers velus & cornus de la grolleur d'vn demi
<ioigt, lefqucls lui caufercnt la mort , après auoir efté
furieux l'elpace de io.iours. M.^^inbro^jc Varé, an t$.UH,
chapitre 5.
L'an r5(^z.lc5.iour de May,vne ieune femme alaitant
fon petit garlbnnet aagé de fîx mois, en fe baiilantpour
attaclier fon foulicr fit par vn bcftion de la grandeur
d'vnc chenille, groflet , & hideux a voir. Il vefcut
trois iours, nourri de laid. Mort, il fut trouué pléiade
pus cholérique, vcrd & venimeux , fur tout autour de
iatefte. La ieune femme ne fentit incommodité qilel-
conque en telle vuidange. Le fils d'vn nommé lean
Michelbach demeurant à Mœrs vuidoit par le fonde-
ment de vrais poils. l'en ay veu vn aagé de trente trois
ans,filsde N. Rockelfinger, qui en vrinantrendoit des
vermiffcaux bougeans, comme ceux qui naiflent es fro-
mage? pourris,mais ils auoycnt Its teftcs noires. A d'au-
tres i'ay veu fortir des vers par les oreilles. Vn certain
■gentil-jiommé furnomme de Capollc , ayant efté fî
mal-heureux & mcfchant que de battre fon pcre , dcue-
îiu niaiadCi on Im vid forar de vers hors des yeux de fa
^mémorables, 5^1
teflc. Vnc femme deDuflcldorp, ayant efté fort malade
longue efpacc de tempsj enfin certain apofteme luruc-
nii fur le ventre au deifus de Taine fut rompu par les vers
forme?, dedans, d'où ils fortirent en grand nombre noirs
& rouffaitrcs. RSolenande-fenU ^.ftfUondefes confiilsMedi-
cinaitXjaHconfell I^. art.z.^./^.i/^.
Es Heures ardantes , nommément es contagieufes &.
peftilentes, on void les malades iecter des vers à queue,
& autres beftions d'horrible & nouuelle forme. N'a-
gueres vne pauure femme vcufue, de Rcinfpourg,ayant
efté fort affligée d'vn long dcfgouilemcnt , de toux , de
courte haieine,dc maux de cœur & de tefte, en fin après
diuers remèdes print de reilence de Turbith que ie lui
donnaijàFaide deouoi après s'eftre defchargee de quel-
ques excremens vicieux, elle rendit par basvnlaizard
rout vif, dont s'enfuiuit fa guerifon. le ne parle point
d'vn amas de grenouilles que Paul Fifcher clludiant au
collège de l'abbaye de S.Efmeran rendit, ayant efté lon-
guement trauaillé de douleurs cfcrangcs d'eftoinacb.
Maisdepuis ceft.c dclcharge , il s'eft bien porté. Marti.}'
Rulitnci médecin , en jon auis touchant la doit d'or de l'enfant
SUeficn,
Quelquesfois furuient douleur aiguc&tres-dange-
reufe de tefte, dont s'enfuit obfcurciUemcnt de veuè", a-
lienation d'entendement, luppreftion de voix, vomifle-
ment, refroidiilement de chaleur par tout le corps , &
fyncopc. Vn mien amy nommé Philippe, agité de tous
CCS maux, dontl'on n'attendoit que la mort au feptief-
me iour, les remèdes ne le ioulageans riullcmenc , en fin
à l'aide de nature, encores force en lui , letta hors parla
narine dextrevn ver long de quatre ou cinq doigts en
largeur; ce qui lui âporta guerifon. ncmnemui au \oo»
chapitre.
î'ay veu vn àcs Seigneurs de Vcnifc tourmenté de la
fieurc, mais beaucoup plus la nuift que le iour. Finale-
ment ilietta par le ne/, vn ver grifiUlre , d'enuiron qua-
tre doigts , lequel en ia longueur auoit des pieds à pro-
portion du corps, & mis dans vnvcrie plein d'eau , fe
pouflbù de viileHe. 11 forut. du nez enuclope en de la
5^2, Hifïoires admirables
morve aucc Ç.m^ clpais & noir. ■\riticAu«l.ai* 9.li.,h.u.
Vncicunc Hlle malade au logis de la lanterne j>rcs la
porte S. laques à Pans , pou lia hors pari' vne des narines
>n ver afle/ gros & large, blanc,8«: long de quatre doigts,
fans touxni vomiiîcnicnt précèdent. Ce fut le 9. lour
d'Auril l<)<)^.i_y4>motations fur U l.ltJe AIonfici*r Honikr dei
m.daiu s interne i^i chjtlr.^^.
l'ay conu certain pcrfonnage ayant vn vlccre es na-
rines, dont diltilloit du pus virulent. Par mon aduis il v
htcoukrdu lue de fueiUesdc tabaco. A la féconde fois,
ilTortit des narmes grand nombre de vers , puis vn peu
moins : au bout de quelques lours l'vlcere fut gueri,
Monar»iu enfin recueil iiesfim^les d'oittre m<.r, Montuus en
ion œuure des maladies naill'antes,chap.4. raconte apre^
Valefque , qu'il naift des vers fous laiangue desperfon-
nes. i.Schnik en fis obfirttatio):s, lin. I. fi[}. 387. Plufieurs
autres do(5tes Médecins, accordent & maintienent après
Auicenne& autres anciens , qu'es dents de la bouche
naiffent de vers , que Ton fait fortirà l'aide de parfuns
diuers. ^^lexun.Benedifl. au 6.liu. chap.13. de la cure de^
maladies, ^^j', nenihetnui ^u chuy. 109. Dodoticau en Con
Scholialtique , Ji^^tidcletcn Ton hiftoiie des poilfons , au
ch. de l'efcreuifle de riuiere, rhomusde Fe^ne en Ion
comm.fur le i.ii.ch.ç.delocis affedis de Galien,f/o»//:er
en fes annotations fur le ^.li.dc Gaiien de compof.med.
Tay fait mention ailleurs dSn ieune prince , auquel a-
pres lamort,elbntouuertfutr ouué vn ver blancayant
le bec poin<flu & de corne, côme celui d vn poulet,acta-
che au cœur. Les auteurs des annoiutkêtu furl'œuurede
Alonlîeur Houlier des maladies internes,remarquent/»#r
ieiç.ih.dui* lit4. que par foisil auicnt que les vers cha-
touillans non feulement Torihce de reitomach , mais
auflî le caui mefme, la mort s'en enfuit. Pay aufl'i parle
à\n Florentin qui mort d'apoplexie, tutonuertSc trou-
wa ce vn ver le remuant dedans la taye du ca ur. Rondtr-
lit parlant de l'elcreuifle de riuierc , en fon hilloire des
poiflons, dit auoir veu vnver né dedans l'vu des tenus
d'vn honorable damoifelle. B.iMt^;..yr de Roiijjey , méde-
cin xiola«ùo>ç>; cnPx:piilicJi9. ikici) BlUluagcs ; en du
an»
cf' memorMes, 5 2.5
autant d'vne autre femme.
H.A/on^»^- do (fie médecin attefte qu'il naift des vers
es veines du corps humain, p/merefcrit auffi au z^.liure
c\^i\>.\l.\Scmc\i att^.Utrre dejkSohjerHiXtkim,Ç26i.'^r.
On demandoit confcilpar lettres à vn Erpagnol,& re-
mède pour vn graueleux, qui ayant fait quelques pierres,
& vuidé force fablcauGitaufllpoufle par la vergedeux
petis vers ayans le bec poindu , deux cornes fur la tefte>
comme vnlimaçon.lc dos & le ventre durs comme cou-
uerts d'vnc efcaille^noirs ainfî quVne tortue,fors fous le
ventre:,qui eftoit rouge, ^nnotaticmi [ur U 50. chap. du r.
iiH,de Al.Hoidier des maladies internes.
le me fuis efmerueillé de voir en mon vrine des vers
en grand nombre, courts & menus comme des petits
j^ouls.Cardan au comment, fur le y 6 .aphor.dtt ^.lii4. d^aippo"-
çrates. Gilbert Griffon , médecin excellent, & iadis mon
précepteur , m*amonftré quelqucsfois en des vrines des
vers défiiez comme chcueux , lefquels on ne pouuoic
voir qu'en y prenât garde de fort \>rt$.Ro7iddit enfin hiji»
despoiffoiis^au ch.de Cefrcuijje de rim'cre. Tciy veu en de Tv-
rinedcs vers larges comme grains de courge, plats, &
xih.MontHns an 4.///is.o^.i5?.Argenterus,tres-do6îc méde-
cin , afferme auoir veu vne forme de dragon aiflé forri
quant & Vxxint.Rottdelet au traiBé de la convt]]ance des ma-
ladies. M, Duret médecin m'a affermé auoir ietté parla
vergc^apres vne longue maladie , vn beflion vif tel qu'v-
ne cloporte , & qui efloit de couleur rouge. Charles
Comte de Mansfeldcftant malade d'vnc grofle fieure
continue ietta par la verge vn ver de mefme forme qu'v-
ne pie noivc.^^. p are auicf.liu.chap.^.Vai veu es vrines de
pluficurs malades de la grolTe vérole des vers tels que
des fourmis. Lewn/M5 au z.U.ch.i o.des miracles ficrets de na-
titre.Qut\(\\i\n ayant elté trauaillé d'vne difficulté d'v-
rine, rendit par la verge vn petit fcorpion vif. i.Schenck
au ^.'i. de fes obfer.fi fl. ^11. ¥.n la vcfTîe de quelques vns fc
forment des vers &beftions pareils à des coquilles de
l^cr.t^lex. Bened.liu.z. ch.zi.de fion nnalomie.
l'attribue beaucoup de foi en la médecine & chirur-
gie aux expériences accômodecs à là raifon. Vne femme
toiiorablc ictta parie çol de la matrice grande multir
5^4 Ht Hoir es admirables
tude d'arcnri(ies:& peu après recouura fanté. GarÇicA Lo-
fes enfes di'.erfs IcÇovs de medeane^^rhjiJ.i^. ' -,
_Vifî tant Frédéric, feruiceur de François BourHii: lu- Ê
rilconfukc , griefucment afflige dVn apoftemeau bout 1
du doigt moyen , le pus eftanc formé ie fis ouurir l'apo- '
fteme , duquel fortir incontinent vn ver blanc , velu,a-
yant la teltc noire, de mefmc grandeur que ces gros
Vers qu on trouue es fromages. Apres celle vuidange j
Frédéric fut guéri. Marcel. Donat.au 4. liurcde Jh hijÏM^ '
^csjchip.i6.
Certain portant au col vn goitre delà groflcur dVn
«?uf,parcas d'auanture fe méfiant en quelque querelle,
fut atteint en celle part dVn coup d'efpecqui fit grande
ouuerture :1e goitre fut trouué plein de vers ou pouls
"VUS, & le patient guéri du coup, du goitre, & deceftc
"y c^minc. p. ForcTi enfes obf mations. M. Corneille H ey-
dius Médecin à Delfcm'a raconté , que pratiquant en la
Franche Conte il penfa vne fillebofFue,laquelle Tentant
grande demangcaifon en celle part, il iugea que c'eftoic
quelque apoftcme;&: pour lefairemeuriry ficappliquer
vn cmplallre propre. L'ouuerture faite, il en fortit auec
le pus,cler comme eau, grande quantité de pouls, là
mefne.
l'ay veu vn apofteme en l'aine dVnefilleJcqucl ayant
trouué plein i!c vers. v-dUojyc a» 4. ch.ip. des tumeurs outre- |
9iuturcUes. Vi/îtant le corps d'vn foldat Modenois mort ^,
■enrhofpital des Carmes,ie le trouuay plein d'apoile-
mes dedans & dehori, tout remplis de vers femblables à
"des pouls. L^./A/e/"we.
Vne damoifelle Alemandc, trauaillec de diuerfes ma-
ladies, entre autre à diu^frfcsfois vomit perla bouche
tiouze cens vcrmillcaux & d'auantrige, n'y a pas fîx ans,
les vns longs d'vn doigt,lcs autres d'auantagc:de laquel-
le nous parierons plus amplement en autre endroit, i.
Schenck recite celle hilloire en la dernière fSion di*'j. liu.
iicft'S ohferuafious.
Rcfte de dire vn mot delà vermine fortant entre cuir
éc chi»ir,îîialadie nommée Phtiriafgoupediculaire. Plu-
sieurs grandi di pciits^ ancicus & modcrnesi eu ont efté
frap-
frappez & emportez hors du monde. Es vus on a fim-
plemeiic remarqué rindifpofidon naturelle , dont les
Médecins rendent pertinent raifon : es autres quelque
fpeciale vifitation deDieu, l'en ay recité quelque hi-
iloire ci deuant à laquelle i'adioufte ce qui s'enfuit. A-
matus Portugais, en la troifielme centurie , cure 58. die
auoir guéri vn plîtiriafique ou pouilleux, à l'aide èi'wn.
onguent, précédé defaignce, &: de purgarionsconuena-
bles.Il efcrit aufTi qu'vnPortugais de Lisbonne fiirnom-
mé Tabora, fut fi rudement pourfuiui de telle vermine,
que àtuy. fiens efclaues Mores ne faifoyent autre chofe
que porter des paniers pleins de poux formillant de fon
corps,& les alloycnt vuider en la mer tout auprès du lo-
gis de ce malade. Vnieune peintre fe démangeant fut
confeiilé d'approcher nud fort près du feu. Il fe forma
des ampoules en fon dos , defquelsfortit vn très-grande
quantité de poux. P. Forefi un é.Uu.obferuJ^.
Qu^ant aux ma!-heureux que la main de Dieu a pour-
fuiujs de tout temps, & qui ont eil:é toutvifs deuorez
des ooux, i'en laide la recJierche & confideration aule-
^eur. le pourroy nommer des perfonnages cileuez en
charges honnorables félon le monde, riches & opulens,
qui depuis vingt cinq ans en ça , notaminent en noftrc
France, pour n'auoir pas efté ch aftiez des hommes , fé-
lon leurs démérites , n'ont pas pourtant efchappé la iu-
fte vengeance du Tout-puiffant.Les vns font morts ftu-
pides ries autres ontfenti quelque ver en la confciencc,
maisdeftituezdela vraye conoiffance de Dieu, &:deux
mefmes,font morts tres-miferablement. Il n'y a peut e-
Itre prouince au royaume, qui n'en puille fournir des
exemples en bon nombre. Tels fupplicesramcntoyuenc
i grands & petis ces deux vers,
t^ bien faire fjyeT^ foigneuk d'aprcndrey
Et par mefprh du grand Diett ne mej'prendre,
VIEILLARDS.
LE Capitaine Laudonnieic , clicf de trois vaiffenux
bien equippez , fit voile Tau nul cinq ctnsfoixante
51^ Hijlûires admirables
c|uatre vers la Floride où eftant arriucle fîeur d'Ottigny
fon lieutenant fut mené par vn Paraoufty , ou Sei-
gneur du pays,au logis de Ton pcre,l\n des plus anciens
perfonnagcs c[m fuft viuant en la terre.Les François rc-
fpcifrans de la vieillefî'c de ce Floridicn commencèrent i
le gratifier par l'appellation de ce ternie commun,ami»
ami,dont le "leillardfe montra fort ioyeux. Puisi'in-
rerroguerent fur le cours de fon aage:à quoi il fitrefpô-
lc,monftrantc;uedelui eftoyentfortisc/nq générations.
Outre-plus illeur montra vn autre vieillard ,aflis vis X
vis de lui, lequel l'outrepaîroit de beaucoup en aage«
Aufli eftoit-il ion père, & refîembloit mieux à vne car-
caflc d'os,qu'i vn homme viuant : car il auoit les nerfs,
les veinesjes. artères, les os,& les autres parties aparoif-
fantes C\ clairement au defifus du cuir,qu'airément on les
euft nombrecs & difccrnees lesvnes des autres. De
faitauflî la vieilleffe y eftoit'H grande , que le bon
homme auoit perdu la veuë , & nejpouuoit parler que
fort peu&àgrandiirimepcine.Le /îeur d'Ottigny ayâc
vcu choie (i clbange/e retira vers le ieune vieillard , le
priant de vouloir refpondre à ce qu'il auoit demandé
touchant fon aage. Lors le vieillard appella vne troupe
ci'Indicns,puis frappant par deux fois fur la cuifle,&mcL-
tant la main fur deux d'iceux^lui fit entendre par fignc?
que ces deux eftoyent Tes cnfans. Frappant encore fur
fescuiflcs, illui en fitconoiftrc d'autres moins vieux,
iffus des deux premiers, ce qu'il continua en ceftc ma-
nière,iufques à la cinquiefmc génération. Or combien
que ce vieillard eull: fon perc encore plus ancien , &
que tous deux portaflent lescheucux longs & blancs
aupoflible, fî ell-ce qu'on leur dit que félon leur port,
naturel ils paroiiToyent pouuoir encore viure trente où
quarante ans:& fi le moins vieux des deux n'auoit moinîl
de deux cens cinquante ans.H//?o/rc Aq ix Floride 3 par Aï,
Uafatmier lisent il-homiïH F ranfon»
ri El Si*
Cr memormes.
VIEILLESSE raieume.
VEl AS Qjv E de Tarente fait mention en fonFilone,
d'vne Abbeflequieftoitaii monafterede Monvic-
<lrc, laquelle de Ton temps atteignit quafi Taage de cent
ans : & comme elle paruft fort vieille, nature qui decli-
noit en cllcreprint force & vertu figrande,queles men^
ftrucs ou moiç,qu'elle auoit perdus depuis tSt d'années,
commencèrent d lui rcucnir , & à couler comme quand
elle eftoit ieune: outreplus toutes les dents lui reuindréc
en la bouche, les chcucux commencèrent à lui for tir
noirs, & à chaffer les blancs , de manière que reprenant
Ion embonpoint elle vint à perdre les rides de fa face , îe
fcin lui enfla , & finalement elle deuint aufll belle 8c
fr^aifche qu'elle eftoit à raa<;2 de trente ans: de forte que
plufieurs l'allerent voir , comme chofe autant admira-
ble qu'ils euifent oncques veuë. Elle fecachoit &nc
vouloit pas qu'on la vift , ayant honte delà nouueauté
qu'elle voyoit en roi-mtfme. Et combien que Vclafque
ne fe foitfouuenu de marquer le nombre des années
qu'elle vefquit depuis, il eft i prefuppoier qu'ilfuft ai-
fez long : puis que naturcfur le déclin auoit fait vn /î bel
&; extraordinaire ctfort. ^. Jarcj^mm.ïdeen Ui.ioHmet
defes dijcours.
Eftant à Ronieenuiron l'an 1531. bruit commun e*
ftoitpar toute l'Italie qu'a Tarente demeuroit vn vieil-
lard , lequel eftoit raieuni à l'aagedeccnt ans , de la
mefme manière que l'Abbcfle. Il auoit changé de peau
comme la couleuure, &;en auoitrepris vne nouuelle, e-
itànt dt'uenu fi ieune & frais, que ceux qui Tauoyent pa-
jrauantconu&le voyoyentlors,à peine pouuoycntcroi-'
,re leurs yeux. Comme il euft demeuré plus decinquan-
te ans en ceft cftat il retourna eftre tant vieil, qu'il fem-
bloit proprement eftre fait&compofé d'efcorces d'ar-
bres. La mefme.
L' Adrairaj Doa Fadri§ue,paflant en fa ieuneflc par va
5 18 Hijloires admirables
lieu nommé la Kioj.i, y vid homme de cinquante anç.^
fon aduis lequel Un dit auoir efté laquav de fon grand
père. EtcômerAdmnal ne peuft le croire, pource qu'il
yauoitfortlongtempsque l'on grand père elloit mort,
ceil homme retourna lui dire qu'il ne doutaft point de
cela, pource qu'il auoit cent ans : &: qu'el>ant defîa vieil
il eftoit redeuenu ieune: de manière que Nature auoic
change en lui &: renouucllé tout ce qui lui caufoit la
vieiirefrc & ce qui le faifoic trouucr moins aage de
beaucoup, qu'il n'eRoitpas. L'Admirai en voulut fça-
uoir la vérité, &: trouua qu'il citoit ain/î que le vieillard
lui auoirdit. Lamefme.
Cequcdeffusn'eil: pasimpofl1ble(adioufl:e Torque
made) puis que de noftre temps on fcait certainement
vne choie fort mcrueilleufc d'vn homme nientionrié
par Fernand Lopez de Caftngncde, hiftoriographedu
roy de Portugal , au huidiefmc liure de fa Chronique,
ou il dit qu'eftant Nugnez de Cugne Viceroy de l'In-
de en l'an 1)5(5. lui fut amené vn homme comme chofe
di^nc d'eilie admirée : pource qu'il fut aueré par prcu-
uegrandcs&Lcfmoignagesfuffifans, qu'il auoit atteint
raa"c de trois cens quarante ans. Il felouuenoitd'auoir
veufaas peuple celle cité où il habitoitjeftantjors qu'il
en parloirl'vne des principales de toute Tlnde Orien-
tale. 11 clloitraieuni quatre fois-, laiffantlc poil blanc &
lui venant derechef i fourdie de nouucUcs dents. Quâd
le Viceroy le vid , il auoit les clieueux noirs & la barbe
aufli, combien qu'il n'en eulliguercs.tt comme d'auen-
tuve vn médecin fc fuft trounc là , le Viceroy voulut
qu'il taftaftle pouls à ce vieillard, lequel il lui trouua
auliibon & ferme, qu'à vn ieune homme en ilcur d'aa-
ge. Ceil homme eftoit natif du rojaumc de Bengala,&:
atlermoit auoir eu de temps en autre près de fept cens
femmes,dont les vnes eftoyent mortêî. , & il auoit repii-
dié les autres. Le roy de Portugal aiierti de ccfte mei-
ucille, s'en enqueftoit fouucnt , & tous les ans en auoic
nouuellesparlaflotte qui en vcnoit. Il a vcfcu plus de
trois censfeptante ans. Le mefme Caftagnede adiouO.e
c^uc du temps de ce Viceroy, le trouuoitaufla gt, la ville
I
drntemouhlef. \i(^
'^c Bcngalavn autre homme, More ou Mahumetan,
nommé Xequcpir,natird'vne prouince appellceXeque,
lequel auait trois cens ans, félon qu'il diloit : tou,s ceux
qui leconoifToycnt , le certifioyentaufli , pource qu'ils
^cnauoyentcic grands indices & tefmoignages. Ce More
cftoit tenu entre les autres pour vn faind homme , ^
caufe dcl'aufterité & abftinencede ravicLesPortupais
s'acoftoyent familièrement de lui :& outre ce que les
hiftoires de Portugal font tresfidcllemei;t recueillies,
> & certifiées par tefmoignages fort authentiques , on
trouuoit d'abondant de mon temps en Portugal , & eu
CaftiUe auce plufieurs tefmoins qui auoyent veu ces
vieillards. t^<^ Twe/me //m.
Alexandre Benedid récite en fapratique auoiryea
vne femme nommée Vi6toire,laquelle auoit perdu tou-
tes fcs dents , & eiiant deuenue chaune^ autres dents lui
reuindrent toutes en i'aagede quatre vingts ans. M»
f^m. Vitré au Zj^.Uu.chap.lj.
l'ay oui raconter à MadamoifcUe de Desbccfejqu'elle
aùoit conu vne femme aagee de feptance ans , laquelle
en certains mois durant quelques années , auoit fest
fiueurs( qu'on appelle ordinairement flueurs bien rei-
glees) Enfin, icelles eftausfuruenues en trop grande
abondance, elle en mourut. Elle m'a a£ermé vne autre
hiftoire mémorable , auoir veu & conu vne femme ho-
norable,aagee lors de cent & trois ans, 8c qui toft après
ileceda : laquelle, en laage de cewt & vn an eut lès mois
? fluansreiglément, dont elle fe fentic merucilleufement
' foulagec&: comme reniife en nature. Cequi lui dura
c'eftan ici. puis le ioz.105. lufques au dernier mois de
fa vie. La Marelchale de Pletcenbourck, gentil-femme
de la noble famille de ÏCetlers enVvel}phalie,ayant paf-
fc feptante ans,retourna a auoir fes flueurs bien reiglees,
& tut veucie porter plus alaigre que fort long temps au
parauant. Ce flus reguher dura quatre ans entiers, au
bout defquels elle continuèrent , mais en plus grande
abondance que parauant^ & fe porta bien ainfî iulques à
i'an 84. tUc vçicut encore iix aus;& mourut l'an nonan-
5 3 o Hifi cires admirables
tiefme de Ton aagc. R. SolenaïUer uu^.U»,defes eJjJeriMtîoftt
medeànalesj Ccnfeil I5.)?(^.4i. 41.43.
DISIONS ejlrarjges.cfroyahlcsy
C^' herrihles.
ES VIES de Dion & de Bru tus en Plutarqueonh'tdcs
hiftoires de certains fantolmcs? horribles qui leur a-
parurent peu auant leur mort s & le lit es hiftoires d'Ef-
colTe en la vie du Roy Alexandre III. vn cas notable du
fontolmeciui luiaparutle ioMtde fes troifîefmcs nop-
ces , prefage de la mort en la niefme annce. Mais fnns^
toucher aux hiftoires anciennes , oultrc celles cjue nous
auonsreprefenteescidcuant nous adioufterons encore
lesfuyuantes.
Il y a vne noble & ancienne famille à Parme nommée
des Tortelles , ayant \xv chafteau dedans lequel fc void
vnesrand'falle, fous la cheminée de laquelle fe void
quclquesfois certaine vieille paroiflant aagee de cent
ans. Cela lignifie que quelqu'vnde la famille mourra
bien toft. l'ay oui raconter à Paule Barbiane , Dame il-
luftre, de cefte famille-la, foupans vn iour enfemblci
Bel-ioyeufe , qu'vne ieune fille de la famille cftaut
malade , la vieille aparut , ce qui fit eftimcr à tous,
que la fille mourroit bien toft : mais le contraire auiiu:
caria fille malade efchappamiais vn autre d'iccllc famil-
le,lequel parauanr,fe portoit fort bien, mourut loudaiii.
Ils difcnt que cefte vielle dont Tombrc aparoit,eftoit 1:1-
dis vn riche Dame,qui à caufe de Ton argent fut tuée par
{ç.^ ncueux, qui hachèrent le corps en pièces , & le ietre-
rent dedans les latrines. Cardan .ut 16. lin.dc U diuerfiU du
Antoine Vrceus, du defefpoir duquel i'ai parle ail-
leurs, la nuift dernière de fa vie , eftant couché , penfa
voir vn fortçrand homme , kqacl auoi: la tefte rafe, la
barbe pendante lufques en terre , les yeux eftincellans,
d'-uxHambeaux es mains, fc hcriflant depuis les pieds^
iuf ,i!ts à la tefte, auquel Antoine demanda, Qu.i es ru>
«jiufeul en équipage de furie, te promenés ainfî hors
hcurCi
^memorahïes. 53 1
(heiire>& quand chacun rcpole ? Di moy^que cherches-'
tu^ou prcccns-tu?En diranccclawVntoinc le ictce en bas
du licl pour fe fauucr arricrc de ce vilîtcur , & mourut
jiniferablemenc le lendemain. Banebmi de Bologne mlit
'vie a iccUii.
laques Donac riche gentil-homme Vénitien , eftant
couché auec fa femme, payant vn cierge allume en là
chambre, deux nourriircs,doimantcs en vne couchette
balle près d'vn petit enfant, \ià qu'on ouuroit tout bel-
lement l'huis de fa chambre, & vn homme inconu met^
tant la telle à la porte. Donat fcleue , empoigne fon e{^
pecjfait allumer deux grands cierges, & acompagné des
hourrices entre en )à falle &trouue tout clos.Il fe reare
en fa chambre,fori: esbahi.Le lendemain, ce petit enfanc
âagé d'vn an non encore acompli , & qui fe portoit bien
miLWn.CardiiniaH linre ^ ch^^.fujtnen'iciw.e.
Deux marchans Italiens, eilans en che min pour paf-
fcr de Picdmont en France , rencontrèrent v n homme
dcbeaucoup plus haute ftaturc que lt?s autres, lequel
les appcUantà Iby, leur tint tels propos , retournez. \ ers
mon frère Ludouic, &lui baillez ces lettres que ieluy
enuoyc. Eux fort eifonnez , demandent , qui cile$
vous?Ic fuis, dit-il , Galeas Sfoice , &tout foudain
s'efuanouir. Hux tournent bride vers Milan , de là à Vi-
gcvenc, où Ludouicclloit pour lors, llsprientoacn
les face parler au Duc, dilàns auoir lettres cîlui bi^ilier
' de la part de Ion frère. Les courtifans fe mocquent
( d'eux : & pource qu'ils faifoycnt touliours inllance
I de mcfme , on les cmprilbnhe , on leur prefente la
] queftion : mais ils maintienentconllamment Icurpre-
\ miere parole. Là defl'us les confeillers du Duc furent en
I dilpute , de ce qu'il faloit taire de ces lettres , ne fa-
chansqucrefpondre , tant ils ciloycnt efperdus. Vn
d'entr'cux nommé le Viconte Galeas empoigne les let-
tres efcrites en vn papier plié en formede briefs de
Rome , le fermant attache de menus filets de laiton,
) dontle contenu cftoit, Ludouic, Ludouic , pren garde
à toy : les Vénitiens & François s'allieront enfemble
kpour le ruiner ^ & rciinçifçr cug^crfuicnt tes alancs.
Ll i
5 3 i' Hîjlôires admirables
Mais fi tu me fournis trois mille cfcus, icdonncray or-
dre que les cœurs s'adouCiron t, & que le mai t|ui te me-
nace s'cflongncra : me confiant d'en venir à bout, fî tu
veux me croire.Bicn te ioit. Et au bas, TeCprit de roti trc-
re Galeas. Les vns cftonnez de la nouucaute du fait,lc>
autres fe mocquans de tout cela , plusieurs confeillans
qu'on nnft les trois mille efcus en depoft au plus près
de rintention de Galeas,le Duc ellimant qu'on fe moc-
qucroit de lui,s*il lafchoit tant la main, s'abftint de def-
bourferrargent&dele commettre en reftrangc main,
puisrenuoya les n.archans en leurs maifons. Mais au
bout de quelque temps il fut deietté de fa Duché de
Milan, prins & emmené prifonnier. Arluno en la première
fcclion de thijhivc de M iLvi.
L'an mil cinq cens trente fix , vn marchant Sicilien
allant de Catane à Mclîinc, logealc vingt vniefme iour
de Mars à Tormmio,dit des anciens Taurominium. Re-
montant à cheual le lendemain matin, n'eftant encores
cueres efloigné de la ville , il rencontre dix maflbns, ce
fui fembloiritous chargez d'outils de leur meftier. En-
<]uis de lui où ils alloyentyiefpondirent , au MontgibeL
Toft apresilenretrouuadix autres,qui font melme réf.
onfe que les precedens: & adiouftent que leur maiftre
es enuoyoit à caufcde quelque baltimentau Montgi-
bel.Queimaillre réplique le marchant! Vous le verrez
bien to{l,fitrvn d'entre eux. Incontinent après lui vint
à larencontrc en ce m cime chemin vn géant, auec vne
fort longue baibc noire, comme.leplumache d'vn cor-
b(.au, lequel iaiis autre préface ni falutation s'enquierc
du marchant;, s il auoit point rencontré fesouuriers en
ce chemin.l'ay,ditrautre,veu quelques mall'ons preten-
dans aller baftir au Montgibel > maisienefcay parle
commandement de qui:fi vous eftes l'entrepreneur de
telbaftimcnt , iedefire entendre comment vouspen-
/cz faire en vne montagne , tellement couuerte de nei-
ge,que le plus habile piéton du monde léroit bien em-
pefché d'en forur.Ce mailhe baftiil'cur commence à réf.
pondrequ'ilauoit lafcienceôcles moyens pour en xc-
«wàJjouc, voire pour fairç plusgraudes diofes quand
bo^^
l
cf 7nemorahles. ^ 35
Il lui fembleroit: que le marchant qui ne faifoit gue-
_i d'cftat des paroles en croiroic bien toit fes propres
yeuxtquoi difant il difparut en l'air. Le marchant efper-
^u de telle viiîon commence à paflir & chancelier, &
peu s'en falut qu'il n'efuanouyt fur la place. 11 tourne
bride demi mort vers la ville , où ayant raconté à 2Ç.ns.
dignes de foy ce qu'il auoit veu , donne ordre à fes afai-
res3& penfé à fa confcienccil rendTame fur le foir de ce
jiicfme iour. Au commencement de la nuid du iour fui-
uant , qui eftoitle vingttroificfmc de Mars vn horrible
tremblement de terre le ht^Sc du taille de ce Montgibel,
du cofté d'Orient fortit aucc bruit merueilleux vne ex-
traordinaire abondance de fcu^qui s'cflançoitfortimpe»
tueufement de ce mefme cofté : dontleshabitans de
Catane eftansbien eftonncz s'amafl'erent, criansmife-
licorde : & continuans en lupphcations & priè-
res , iufques à ce que le feu vint à diminuer &s'e-
fteindre.G//&ert Cottfin , au huiCliefme linre defos recueils ^
récits.
Certain Italien ayant fait enterrer honneftementvii
iîcn ami trefpafle:& commeilrcuenouà Rome,lanui6t
l'ayant furpris il fut contraint s'arrefter en vne hoftelle-
rie furie chemin , ou bien las de corps & affligé d'efpric
il fe met en la couche pour repofer. Eftant feul & bien
cfueillé , illui futauis que fon ami mort tout pafle &
defcharné,lui aparoififoit, tel qu'en fa dernière maladie,
& s'aprochoit de lui, qui leuant la tefte pour leregarder
&tranfi de peurj'interroguc, qu'il cftoit.Le motrnc ref-
pondant rien fe defpouille,fe met au lid , & commence
a s'approcherdu viuant.ce lui fcmbloit. L'autre ne fça-
chant de quel colle fe tourner fe met fur le fin bord , &
comme le dcfundaprochoit toufioursille rcpoulfe. Se
voyant ainfi rebuté , ce fut à regarder de trauers le vi-
uantjpuis fe vcôir, fe leuer du Utt , chaufl'er les fouliers
5: fortir de la chambre/ans plus aparoir. Le viuant eut
telles aft'res de cefte careflc-, que peu s'en falut aufiî qu'il
ncpaffaftlepas. Ilrecitoit quequandce n]ort aprocha
«ie lui dans le li(ft;il touoha rvn de les pieds , qu'il uwttn
534 Hi flaires admirAhles
ua fi froid, que nulle glace n'cft froide à comparailoii
^yilex'tndre d'x_yîLx.xndric aul.liurc de fes tours Géniaux
thap.Ç-T'naaucau en fes annotations furcc chapitrejnu '
toutes telles vilîons au rang des fongcs. C'èft couper li
nœud. Mais ie ne difputc point ni pour,ni contre, pou.
leprcfcnt.
Vn mien ami, nommé ^Gordian^pcrfonnage digne de
foy, m'a recité qu'allant vers Arezze auec certain autre
de fa conoifl'ance , s'cftans efgarezen chemin , ils entrè-
rent en desforefts,ou ils ne voyent que de la neige, des
lieux inaccefi~;bles,fv: vne effrayablc Iblitude. Le Soleil
cftant fort bas,iis s'.iff.rent par terre tous recreus. Sur ce
leur fut auis qu'ils entendoyent vne voix dhomme af-
fcz près de là.Ils lîprochent & voyent fur vne terre pro-
che trois gignnralcs & efpouuantablcs formes d'hom-
mes , veftusde longues robes noires , comme en dueil,
auec grands cheueux & fort longues ba:bcs, lefquels les
ïippeÙercnt. Comme ces deux pallans approchoyenr,
les trois fantofmes fe firent plus grands de beaucoup
cju'à la première fois i&l'vn d'iceuxparoiifantnud , fil
tlesfauts mouucmens & contenances fort dcshonne-
iles. Ces deux fort eftonnez de tel fpec^aclc com-
mencèrent à fuir de viAeiTe à eux pofPble, ik ayans rra-
lierfë des précipices &: chemins ? du tout farchcu>,
Te rendirent à toute peine en la logcrte d'vn pay-
faii , où ils pafferent la nui et. t^« jvtj'we liurc ^
chapitre.
Ce quei'ay par tefmoignagc de moy-mefme , & dont
îe fuis bien alîcuréjieradioulle.Eftant malade à Rome,
Çi couché dedans le- li<ft; ou l'eftoisbien elueillé , m'ap-
parut vne fantolme de belle femn;e,laquellc ie regardai
longuement tout penlif&: fans dire mot , difcourantcn
moy-mefme, fi ie rcfuoiSiOÙ fi i'ei^ois ^ raycment efuei-
le. Et conoiflanr que tous nies fens eftoyent en leur
pleine vigueur, & que cefancofme fç tenoit toufiours
deuant moy,ielui demandç qui elle cftoit. Ellele CouC-
riant repetoit les mefmes mots, comme par mocque-
rie,^ m'ayant contemple longuement j> en alla. c^<*
c
ér mémorables. ^^r
« efnte Uure (^ ch.tpii re.
V^n moine nommé Thomas , perfonnage dicjne de
foy, &la prcud'hommie duquel l'ay efprouuce en plu-
iîeursafaires m'a raconté pour choie vraye , auec fer-
jiient , qu'ayant eu dcbat de grofles paroles auec cer-
tains autres moines , après s'eftre dit force iniurcs de
part & d'autre, il fortit tout bouillant de cholere d'a-
ucc eux , & fe promenant feul en vn grand bofsren-».
contra vn homme laid , de terrible regard , ayant la
pbarbe noire , & robe longue. Thomas lui demande où
ilalloit? Tay perdu refpondit-il, ma monture, & vai
la cerchcr en ces prochaines campagnes. Sur ce i]^
marchent de compagnie pour trouucr cefte monture,
&. Ce rendent près d'\ n ruiifcau profond. Le moine
commence à fe defchauflcr pour traucrfer ce ruifleaii:
mais l'autre le prelle de monter fur fes cfpaules , pro-
mettant le pafler à Taife. Thomas le croid, & chargé
dcffus i'embrafle par le col : mais baifiant les yeux
pour voir le gué , il dcfcouure que fon portefaix a-
uoit deçpieds monftrucux &du tout eftranges. Dont
fortelionné , il commence à inaoquerDieu à fon aide.
A ccfte voix l'ennemi confus ietùc fa charge bas,& gron-
dant de façon horrible difparoit auec tel bruit & de fî ex-
traordinaire roideur , qu'il arrache vn grand chaîne pro-
chain ; S)L en fracaflc toutes les branches. Thomas de-
meura quelque temps comme demi-mort, par terre,puis
s'cftantreleué , reconutque peu s'en eiloitfalu que ce
cruel aduerfaire nereult fait périr de corps & d'ame. ,^»-
Lxxddve d'^yiliXMidrit ai* tjuairiejme Haye, ch.ipitre diXtieu-
Le Seigneur d'vne villetxe en la principauté de Sul-
mone au royaume de Naples fe monftroit auare &
luperbe en fon gouunerment : de relie forte que fes
pauuresfuiets ne pouuoycnt fiibfiller, ains cfloyent
cftrangemeut gourmandez de lui. Vn autre hom-
me de bien au refte,mais pauure & m efprifé , battit
rudement pour quelque occafion certain chien de chaC
fe aparcenaiu à cçfei^ueurj lcc|ucl griefuementiirité de
L I 4
5 5 ^ Hijloires admirables
la mort de Ton chien , fit empoigner &: emprifonncr
ce pauure homme en vn cachot. Au bout de cjuelc;uc3
io"urs les gardes , cjui tenoycnt toutes les portes dili-
Çemmentclofcs , venans à lesouurir fclon leur con-
ilume, pour lui donner quelque peu de pai^,netrouue-
Tent pomt leur prifonnier en fon cachot. L'ayans ccr-
ché&rccerché partout , fans pouuoir remarquer tra-
ce ni apparence quelconque d'euafion , finalement
rapportèrent cefte merueille à leur fcigneur , qui de
prime face s'en niocquoit & les mcnaçoit, mais en^/'
tendant puis après la vérité , ne fut pas moins eftonné
iqu'eux. Au bout de trois iours après celle alarme, tou-?
tes les portes des prifons & du cachot fermées comme
deuant , ce melme prifônnicr, fans le fccu d'aucun , a-
^arut renfermé dedans fon précèdent cachot , ayant
face '& contenance d^iiom me cfpcrdu : lequel requit
que fans délai Ton le mcnaft vers ce feigneur , au-
«juel ilauoit à direchofes de grande importance. Y
^yant efté conduit, il raconte qu'il eftoit rcuenu des en-
fers. L'occaiîoM auoit efté que ne pouuant plus por-
ter la rigueur de fa prifonjvaincu de dcfcfpoiijcraignant
la mort , & dcftitué de bon confeil il auoit appelle
le diable à fon aide, à ce qu'il le tiraft de cefte cap ti--
Xiité. Que tcft après le malin en forme hideufe &: ter-
rible lui eftoit apparu dedans fon cachot , ou ils auoy-
^nt fait accord, fuyuantlequcl, il auoit cftcdesferré&
=tiré non fans griefs tourmcns hors de là , puis précipité
-en des lieux foutcrrains & merucillcufcmcnt creux,
<onime au fond de la terre , où|il auoit vcu les cachots
des mefchans , leurs fupplices , ténèbres & miferes hor-
ïibles , des fîeges puants & eftrayablcs : des Rois>
Princcs,& grands Seigneurs, plongez en des abyfmcs té-
nébreux : où ils bruOoyent au feu ardent en destour-
iriens indicibles : qu'il auoit veu de Papes , Cardinaux,
■& autres Prélats magniiîqucmcnt vcftus, & autres fortes
de gcRs , en diucrs équipages , affligez de fupplices di-
ilinds , en des goufresfort profonds, oùijs eftoyenc
lourKiciuez inçciîauimciu, Adiouftaju qu'il y auoit re-
çonu
ér mémorables. ^^7
conu plufieurs de fa conoiflance , notamment vn de fes
plus grands amis d'autrefoisjequeiraiioit reconib&en-
quis de fon eftatrle prifonnier lui ayant raconté que leur
payseftoit en main d'vn rude maiftre ^ l'autre lui cnioi-
gniftqu'cftant de retour il commandaft à cerude Sei-
gneur de renoncer à Tes tyranniques deportcn-hens : &
declaraftque s'ily continuoit, fa place eftoit marquée
en certain fiege prochain qu'il monitra au prifonnier.
Etafin (dJtceft efprit au prifonnier) que k Seigneur
dont nous parlons adioufte foy à ton rapport , di lui
qu'il fe fouuicne du confeil fccrct &dcs propos que
nouseufmcsenfemble , lors que nous portions lesar-
piesen certaine guerre, &fous les chefs qu'il lui nom-
ma. Puis il lui dit par le menu ce fecret, leur accord , les
paroles & promeflbs réciproques : Icfquclleslc pnion-
tiicr raconta diftindement les vnes après les autres , par
leur ordre , à ce Seigneur , lequel fut merueilleufemcnt
eftonné decemeffagc, s'esbaiiilfant comme il s'efloit
peu faire que les chofcs commifes à lui feul, & qu'il n'a-
uoit iamais defcouuertes a perfonne, lui fuifent defchi-
frees C\ hardiment par vn pauure /îen fuiet, qui les repre-
fentoit, comme s'il les euftleuës dedans vn liure. On
adioufle que le prifonnier s'ellant enquis de l'autre a--
uec lequel il deuifoit es enfers , s'il eftoit poflible& vrai
que tant de gens qu'il voyoic û magnifiquement veftus>
lentiffcnt quelques tourmcns ? l'autre rcfpondit , qu'ils
cftoycnt bruflez d'vn feu continuel , prenez de tortures
&fupplices indicibles , &que;tout ce parement d'or
& d'cfcarlaten'eftoitquefcuardantainiîcoulouré. Que
voulât fcntir fi ainfi eftoit , il s'eftoit aproché pour tou-
cher cefte cfcarlate j que Tautre l'auoit exhorté de s'en
déporter : mais que l'ardeur de feu lui auoit grillé tout
le dedans delà main, laquelle il monllroit tout roftie,
& comme cuite à labraife d'vn grand feu. Le pauurepri-
fonnicr ayant efté relafché, paioilfoit à ceux qui l'abor-
dercnts*en retournant chez foi, comme vn homme touc
hebeté,qui n'oit ni ne vojdgouttCjtoufiours penfif,par-
lantfort peu, & nerefpondantprefque point aux q^ue-
iiions qw'on lui faifoit. Son vifagc au rcftc cttoit deuc-
5 3 s Bïjfloires admirables
Jiu Ç\ hideux , Ton regard rant laid & farouche , après c -
Voyage, cju'i peine fa femme & fesenfans le reconiiienr-
ili:&lereconoiirant, ncfut t^ueftion c]uc de cris & de
larmes, le cc»nceiiiplancain/i changé. 11 ne vcfcut que
fort pcudeiou^s après ce retour , & auec beaucoup de
difficulté peut-il pouruoir a les peti.e'» ataires , tant il c-
ftoit efperdu. ^_Alexaruii-e d'yyiUx<nu<i.ie au 6.lttirey ih.tpi-
tre 21.
Vn do<^eur en l'Académie de Heidelberg, ayant don-
né congé à certain fîen feruiteur de f^^ire vn \oyage en
fonpavs, au retour comme ce feruiteur aprochoit de
Heidelberg, il rencontre vn Reitre monte furvn i-rand
chcualjequel par force lenleue en croupe. Fnteleftat
ile/Taye d'empoigner Ton home , pour le tenir plus fer-
mermaisle Reitres'efvanouit ileferuiteur emporté par
le cheual bien hautcn l'air , futiettébas près d'vn pont
hors la ville, où il demeura quelques heures fans rc^
iiiuer pied nimain:en fin reuenu à roi,& entendant qu'il
ciloitpres de fon lieu , reprint courage, fe rendit au lo-
gis,© u il fut iix mois entiers attaché au li(ft, deuantque
pouuoir fe remettre en pieds. Extraul des hjîoires impri-^
iiti es a Lipfjc , Cmi mil ciruj cens qttatre"Tjingts dixjept } jovn le
tMlrc dt A!ir,thils UijiorU defpeihU.
Vies de Torge en Saxe certain gentil-homme fepro^
menant par la campagne, rencontre vu homme lequel
le falue, & lui ofl^ie fon feruice. Il le faitfon palefrenier.
Le maiilre ne \ aloit gueres. Le valet elK>it la mefchan-
teté mefmc. Vn iour le maiiIre ayant a faire quelque
promenade vn peu loin,il recommâdelescheuaux, Ipe-
cialemeiic \n de grand prix à ce valet , lequel fut /î ha-
bile , que d'enleuer ce cheual en ^•ne fort haute tour.
Comme le maiflreretoiuNoit , fon ciieualqui aiioitla
telle à la feneftre le reconut,&: eommence a hennir. Le
liiairtre cilonnc , demande qui auuic logé fon cheual en
Ç\ haute ef'iuirie. Ce bon valet refpond, quecelloit eu
intention de le mettre feurement, atin qu'il ne fe per-
diJl: pas,&. qu'il auoit foigneui'einent exécute le côman-
tîcmct de fon maiilre. On eut beaucoup de peine à gar-
i'jîicïh. pauuicbelie&ladeualwr aucc des chables d|^
hau;
^ memorMes. 539
bauc de la tour en bas. Toft après quelques vnsque ce
Gentil-homme auoit volez, delibcians de le pourfuiurc
en ]urtice,lepalefrtnier lui ditjMaiiIre : i"auLicz-vous,lui
monftrantvn facjduouel il tira plufieurs fers arrachez.
par lui des pieds des cheuaux, pour recarder leur courfe
au voyage qu'ils cntreprcnoyent contre ce raaiftre île-
quel finalement actrappé & ferré prifonnier priafon pa^
lefrenier de lui donner fecours. Vous eftesjrefpondle
valet, trop eiLoitccnicnt enchaifné:ie ne puis vous tirer
de là. Mais le maillre faifant inftance , en fin le valet dit,
ie vous tireray de captiuité, moyennant que vous ne fa-
ciez figne quelconque des mains pour penCer vous ga-
rantir.Quoi accordé il rcmpoigne aucc les chaines, ceps
& manoctes,& remporte parTair. Ce mifcrable maittre
cfperdu de fe voir en campagne fi nouucUe pour lui,
commence à s'cfcrier. Dieu éternel, ou m'emporte-on?
Tout foudain le valet (c'eft à dire Satan ) le laifle tom-
ber en vn mareli:puis le rendant an logis fait entendre à
ladanKvifellc Teftat&lelieu où clloicfon man , ahn^
qu'on l'allaft dcfgagcr & deliurcr.
Vnriche hommede Halbciftad ville renommée en
Alemagne rcnoit d'ordinaire fort bonne table , le don-
nant en ce monde tous Isplaifirs qu'il pouuoit imagi-
JKT Ç\ peu foigncux de ion ialut , qu'vn iour il ofa vo-
mir ce blafphemc entre fiss efcornifleurs , que s'il pou-
uoit toufiourspafTerainfi le temps en dçliccs, il nedefi-
rcroit point d'autre vic.Maisau bourde quelques iours,
& outre fa penfecil fut contraint mourir. Apres fa mort,
on \oyoit tous les iours en fa maifon fupeibementba-
flic i dcsfantofmes furuenant au foir , tellement que
les doinelliqUes furent contraints cercher demeu-
re ailleurs. Ce riche apa/oilloit entre autres aucc v-
ne troupe de banquctceurs en -vne fale > «jui nç fer-
uoit defop viuant qu'i faire feftins. Il cftoic en-
touré deferuiteurs qui tenoyentdes flambeaux en let«s
mains , & feruoyentfur table couuerte de coupes & go-
jsclets d'argent doré ;, portans force plats , puis dcfl'cr-
uans : outre plus on oyoit lefon desfiufies:luths,efpi-
f ettes & autres inftmmciis vie luu/îquc : bref toute la
5 4^ Hifioires admrahles
lïiagnificcnce mondaine don: ce riche auoir eu Ton paf-
Ictcnipsen fu vie. Dieu permit que Satan rcprcfcntajt
nuxycux de plufîeurs telles illufions , afin d'arracher
Timpieté du cœur des Epicuriens, lob rincel au lUittre de: .:
tncrueilUi de noflre temps. \
L'an mil cinq cens trentedeux,vn gentil-homme Aie- ■
in3n;,crucl cnuers les fuietsjcommanda à certain payfan
<îc lui aller quérir en la forell prochaine vn grand chef- j
«c, Scie lui amener en fa maifon, à peine d'eftrc rude- J
ment chaftic. Le payfan tenant cela comme impoflîblc,
partenfoufpirant & larmoyant. Entré dedans la foreft,
îl rencontre vn homme (c'clloit rennemi ) qui lui de-
mande la caufe de ù. triftelfc > a quoy le payfan fatisfit,
ï*autre lui ayant commandé de s'en retourner promet de
donner ordre que le gentil-homme auroit bien toft vn
chefne.Apeincle payfan eftoit de retour au village, que
îon homme de la foreft iettctout contre la porte du
gentil-homme , & en trauers,vn des plus gros & grands
chefncs qu'on euft peu choifîr, auec fes branches & ra-
meaux. Qui plus cil cell arbre (e rendit durcommefcr>
lellement qu'il fuft impofllble de le mettre en pieces,au
Jiîoyen dcquoy le gentil-homme levid contraint à fa j
irontc^fafchcrie & difpenfc tic percer fa maifon en autre '
<:ndroit,& y faire fcncilrcs& portes nouuelles. lob ^m-
cel au t.Uu.
Il y a vn village en la Duché de Brunfuic nommé Ge-
licrnàdeuxlie2ié"s de Blommenavv. L'an 15^5. vn pai-
ian Ibrti au matin de ce lieu autc Ion chariot, & fes clic-
iiaux pour aller qiicrir du bois en la foreft , defcouurit à
J'entrtedicelle quelque^ troupes de Kcitres, couuerts
de cuiralles noires.Hllonné de celle rencontre, il retour-i 1
ne en porter les nouuelles au village. Les plus anciens |
du lieu acompagne/. de leur Curé ou pafteur,fortent
incontinent en canipagne,fuiuLsdecenîperfonnes,taiic
iiommes que fcmmes,pour voir ccfte caualerie , & con-
rentquatcrze bandes ou troupes diftin «ries , lefqucUes
en vn inftant fe mirent en deux gros, comme pour com-
batre à Toppoutc Tvn de l'autre. Puis nprcsjon apçrccut
Icrrir de chafc^ue gros vn grand homme, de eontcnan-
ce fierc , & fort effroyable à voir. Ces deux de cofté 8c
d'autre defcendent de cheual , faifant foigneuCe reueue
de leurs troupes:quoy fait tous deux remontent. Incon-
tinent les troupes commencent à s'auanccr , & à courir
vne grande campagne/ans fe choquer : ce qui dura iuG*
ques à la nuift toute clofe , en prefence de tous ces pay-
fans. Or en ce temps ne fe parloit en la duché de Brun-
fuie ni es enuirons d'aucune cntrcprifc de guerre, ni d'a-
mas de Reitres :'ce qui fit eftimer que telle viCion eftoic
vn prefagc des maux auenus depuis parle lufte iugemenc
de Dieu. lob TlnceUitiMitre,
L'an mil cinq cens foixantefept, EftieneHubener
demeurant à Trautcnavv, ville au royaume de Bohême,
profpcra tcllenrcnt en amas de richcfics , & en nombre
de baftimens magnifiques, que chafcun l'admiroir Se rc-
ucroit.commel'vn des grands mignons de félicité mon-*
daine. Finalement il tombe malade , meurt, & cfi fort
pompeufement porté au fcpuîchrc. Bien to/i après il a-
parut viuant derechef, & carciïantpîu/îturs, en embraf^
fa fi ferme & roide quelques vns , qu'aucuns en mouru-
rent,les autres furent gricfuement malades: tous ârfer-
mans que le riche Hubcner les auoit ain/î maniez , 6c e-.
floit tout tel qu'en fon plein viuant. Laiuftice dulicii
defcouurant que c'eftoit vne illufion Saranique, ordon^»
naparfentcncequelecorpsde H ubenerfcroit déterré»
Combien ou'il fuit en terre des cinq mois auparauant,
fi n'eltoit-il aucunement atteint de pourriture,ainsauflî
frais qu'auant fa maladie , & comç lontles corps refaits,
êcenbon poinét. Lebourreaule traineau gibcr,oii Von
executelesmalfaitcurs,lui tranche la telle jdontlefanff
reiaillitjcomme fi Hubener euft eilé en pleine vie > ain(i
aufll que de la poiftrinc de laquelle il tira le cœur touc
fanglant. La teftemifc encre les pieds fut bruOeeauec
tout le corps en prefence dVn© trefgrande multitude:
& depuis TeHRcace de Satan cefia, Hiji.de Bohême.
Antoine Coftillc, gentil-liomme Elpagnol demeu-
rant à Fontaines de Ropel , Jortit vn lour de fa maifon
bien monté, pour aller ù quelques heuè's de là expédier
4es afairçs, aufquclies ayant pourucu , & la nuià. apro-.
542- HiBoir es admirables
chantjil délibère retourner en fa maifon. Au fortir Jrf'
village ou il elloitalleil trouue vn }>ctit hermirage &
thappcUc garnie decertain treillis de bois au dcuant,&
vnelampe allumée au dedans.Dcfcendu de chcual il faic
fesdcuocions , puisiettanrla veuëdedansl hermitage,
void ce lui fcmble rortir de deflous terre trois perfonncs
cjui venoyent à lui les teftes couuertcs,puis fe tenir coy-
cs.Les ayant vn peu contemplé, voyant leurs cheueux
tftinccller,c]uoy qu'il full: elUmé fortvaillât,il eut peur,
èé remonte à cheual commence à picqucr. Mais leuanc
les yeux il defcouuic ces pcrlonne, qui marchovent vn
peu deuantluij&rembloyentl'accompagner. Se recom-
mandant fans celle à Dieu , il tourne de part & d'autre;
mais cefte troupe eftoit touiiours autour de lui. Finale-
ment il couche vne courte lance qu'il portoit & brocha
des efperons contre, pour donner quelque atteintc:mais
cesTantofinesalloycnt de mefmcpas que le cheual, de
manière qu'Antoine fut contraint les auoirpour com-
pagnie, iulques â la porte de Ion logis ou ily auoitvne
grande cour. Ayant mis pied à terrcil entre & trouueles
fantofmes:montcàla porte d'vnechâbre ou fa femme e-
ftoit^qui ouunt à fa parole: & côme il entroitjles vifîons
diiparurent.Mais il aparut tant ef perdu, fi desfait & trou-
ble,que ia fcmeeftima qu'il auoit eu quelque rude crai-
<flemcntde la part de l'es ennemis en ce voyage. S'en e-
lkintcnquilè,& ne pou uant rien tirer de lui, elle enuoyc
appcllcr \ n grand ami qu'il auoit,hom:nc fort docte, le-
quel vint tout i l'heure: &le trouuant auflî pall'equ'vn
mort, le pria inltammcnt de defcouurir fon aihanture.
Cortilleluy ayant fait le difcours, ccll ami tafcha de le
refoudrejpuisle fit fouper,le conduilit en fachambrc,lé
lailla lurfonlidauecvne chandelle allumée furîata-
ble,& fortitpourlelailfer en repos. A peine fult-il hors
de la chambre, que Colfille commence i crier tant qu'il
peut,i l'aide, à raide>fecourez-moi. Lors tous les domc-
lliques rentrèrent en la chambre, aufquelsil dit que Ics^
trois vifionseiloyét venues à lui leul ,& qu'ayant crcufc
la terre de leurs mains,elles la lui auoyent lettee deiluç
k'sycuxjdc mamc^e qu'il ne voyoïc goutte. Pourtant ne
la
O" memoravies. j 4j
Vabandonnerent plus Tes duinc{tiques; ain«; à toute heu-
re il eftûitbicn acoinpatiné : mais leur aHiftancc & viii-
lance ne le peut garder fle mourir le leptielme lourlui-
uant, fans autre accident de maladie. Torquemade en l.t 5,
pct*itKedefn Hexurnerotit
lean Vafques d'Ayola & deux autres ieunes Efpa-
gnols partis de leur pays pouf venir eftudier en droit à
Boulogne la grafle , ne pouuans trouuer logis commo-
de pour faire efpargne,furcntauertis qu'en la rue , où e-
iloit leur hoftelleric, y auoit vne maiibn deierte & ah?.-
donnnee , à cauic de quelques fantofmes qui y aparoif.
foyét,laquelle leur feroitlaiflcepoury habiter fanspaycr
aucun louagejtandisqu'il leur plairoity demeurer. Eux
acceptent la condition > font mcfmes accommodez de
quelques meubles, & fontioveufemét leur mernace en
iccUe refpace dVn nu)is. Au bout duquelcôme les deux
compagnons d'Ayolafe fulicnt couchez d'heure, & lut
fuft cnfoneftude fort tard, entendant vn grand brnit
comme de plufîeurs chaincs de fer, que l'on braniloir fit
faifcit cntrcchoquerjorritde fon eftude,auecfon dpce»
& en l'autie main fon chandelier 8^ la chandeDeallu-
mce, puis le planta au milieu de la falle , fans refuciller
les compagnons,attendantque deuicndroitce bruit, le-
quel procedoit a fon aduis du bas des degrez du losfis.,
refpondans à vne grande cour que la falle regavdoir.Siî!:
certe actête, il defcouure i la porte de ces degrez vn fan-
tofme effrayable , d'vnQ carcalfe n'ayant rien que les os,
trainant par les pieds ôc le faut du corps , ces cliainesquî
bruioycntainfî.Lcfaïuofme s'arrefte, & Ayolas'acoura-
gcant commence i le coniurer,demadanr qu'il eu le i lui
donner à entendre en façon côucnablc ce qu'il vouloit.
Le fanrofme cômence a croifcr les bras , ba.ffer la tc'àc»
^l'appeller d'vne main pour le fuiure par les degrez.
Ayola rclpond, marchez deuanc,& ie vous fuiuray. Sur
celefantofme commence à dcfcendre tout belUmenr,
comme vn home qui traineroit des fers aux pieds ttului
d'Ayola, duquel la chandelle s'eifeigmt au ii.ilieu des
degiez. Cefutrenouucllcmét de pcunneanrnioinss'eC.
ucrtuàtdcnouueau,il dit aufantofuie, vous voyez biea
j* 4 4 Hijloires admirables
cjuc ma chandelle s'eft amortie , ie vaylar'allumer : Q
vous m'attendez ici ierctourncrayincontincnt.il coure
au foyer , r'allume la chandelle \ reuient furies dcgrez,
ou il trouue le fantofmc,&: Icfu't. Ayât trauerfé la cour
du loçis, ils entrent en vn grand iardin , au miHcu du-
quel cftoit vn puits: ce qui fit douter Ayolaquelc fan-
tofme ne lui nuiiît:pourtant ils'arrefta.Maislefantofmc
le retournant fit figne de marcher iufques vers vn autre
endroit du iardin : & comme ils s'auançoyent celle party
le fantofmc difparut foudain. Ayola refté feul com-
mence à le rappeller , proteftant qu'il ne tiendroit i lui
de faire ce qui feroit en fa puiflance : & attendit vn peu.
Le fantofmc ne paroiiTantplus , l'Efpagnol, rerournc
en fa chambre refucillefes compagnons, qui le voyans
toutpafle , lui donnèrent vn peu devin & quelque con-
fiture , Tenquerans de fon auanture, laquelle il leur ra-
conte. Toft après le bruit femé par la ville de ceft acci-
dent, le Gouuerneur s'enquit foigneufementde tout,&
entendant le rapport d'AyoIa entoures les circonftan-
ces fit fouiller à Tendroit où ie fantofme eftoit difparu.
J,à futtrouueela carcafTe enchaînée, ai nfî qu' Ayola Ta-
noit veuè'jCn vne fepulrurc peu piofonde,d'où ayât ertc
tirée, & enterrée ailleurs aueclcs auti-cs ; tout le brun
qui parauant auoit efte en ce grandlogis ceiFa , les tfpa-
gnols retournez en leur pays, Ayola futprouucu d offi-
ce de iudicature : & auoit vn fils prclîdent en vne ville
d'Efpagncdu tempsde TorqttcnKide ^ lequel fait ce dif-
cours en la troifieinie ioiirneede fon hcxamcron. Ce
qui conuient aucc le récit que fait Pline fécond di»
Philofophc Athcnodorus tnl'Epiilre à Surc,au feptiel
nie liure.
Théodore Gaza , dofte peifonnagede noftre tefnp
auoit obtenu en don du Pape certaine meitairie. Son
fermier foifoyantvn iouren certain endroit trouua vne
huye ou vrne, en laquelle y,auoit des os. Sur ce vn fan-
tofme lui aparut& commanda de remettre cefte vrnc
en terre, autrement fon fils mourroit. I: t pource que le
fermier ne tint conte de cela , bien peu de temps après?
fon fils fut tué. Au bout de quelques iours le fantofmc
érmemôrahles. J45'
retourna menr.ffant le fermier de lui faire mouîir Ton
nucrefils, s'il ne remettoic en terre Tyme &. les os qu'il
auoit trouuez dedans.
Le fermier ayant penfé à foy , & voyant Ton autre fils
tombé malade, conta le tout à Théodore , lequel eftant
allé en fa meftairie , & au lieu d'où le fermier auoit tiré
l'Trne, fit refaire vnefofle au mefme endroit, ou ilsca-
cherentrvrne & les os : ce qu'eftant fait le fils du fer-
mier recouuraiilcontinent fa fanté. Manliwen fes lieux
tommwis. La'uater au l.Uu.de tapp.tr. des cspriis-^chapAl.
iMelanchrhon en fon traire de l'ame cfcrit auoir eu
luî-mefmes plufîeurs apparitions, ^ conu plufieurs per-
fonnes dignes de foy qui affermoyent auoir parlé à des
Cfprits.En fon liure intitulé examen ordinandornm^ià dit a-
uoir eu vn tante fœur^Ic fon père , laquelle demeurée
enceinte après la mort de Ion mari , ainfî qu'elle eifoic
àlTife près du feu , deux hommes entrent en fa maifon>
Tvn defqncîs reffembloit au mari mort , & fc donnoit à
conoiftre pour tcljl'autre de fort haute taille eftoitveftu
en cordclier. Celui qui reffembloit au mari s'approch e
du fouycr,falue fafemmeja prie de ne s'crtonnerpoinc:
difant qu'il vcnoitlui denner charge de faire quelque
chofe. Sur ce il commande au cordclier de le retirer de-
dans le poifle. Et ayant deuife longuement auec la fe m- '
me lui parlant de prcifres > & de rtiefl'es , eftanr prcft à
partir,illui dit,tendantfa main, Touchez là : mais pour-
ce qu'elle cftoit failie d'cftonncment , il l'alfcura qu'el-
le n'auroit aucun dcfplaifîr. Ainfi donc clic le toucha:3c
combien que la mam d'icelle ne deumlc impotente,
tanty a qu'il la brufla tellement, qu'elle fut rouiiours
noire depuis. Cela fait il appelle le cordeliçr,puis tous
4eux difparurent. Lauaterain.Utt,-^ ch.ipitrei^.de r,%pp,
des efprits.
Pierre Mamor recite qu'à Confolant fur Vienne a-
parutily a plùsdei4o. ans en la maifon d'vn nommé
Capland,vn malin efprit,fe difant élire l'ame d'vne fem-
me trefpaflcé , lequel gcmilloit & crioit en fc complai-
gnant bien fort , admoneftanr qu'on fift plufîeurs prie-
«es & voyages , & reueh beaucoup de chofçs véritables,
^4^ Hijlciyes admirables
Mais quclcun lui ayant dit fî tu veux qu'on te Cfoye d'y
Aiiferere met Dettf j j'ecundum magnam nnfericordiarn tuam. Sa
refponfe fut,ie ne puis.Alors les afliftans fc mocquerent
de lui,qui s'enfuit en frcmiflant. Le femblable aduint à
"Nicole Auberide Vcruin , de laquelle M. Barthelemi
Faye confeiUcr en Parlement a efcrit Thiftoire , où il àh
que Satan apparut à elle, priant fur la fofle de fon père,
commefortantdufepulchre, & lui dit qu'il faloit dire
beaucoup de mefles, faire quelques voyages fpecifiez,
pour le tirer de purgatoire & après tout cela ne laifTa
de tourmenter cefte pauurc femme , combien qu'au
commencement il fe ài{\. eflrc Ion ayeul : neantmoins à
la fin il dit qu'il eftoit Beelzcbub. Il y a vne plus récente
hiftoire, notoire aux Pariiîens, & non imprimée, adue-
nue en la ville de Paris en la rue faind Honoré au che-
ual rouge. Vn Paflementier auoit retiré fa nicpce chez
lui la voyant orpheline. Certain iour la fille priant fur
la fofTe de Ton père à fainâ: Geruais, Satan fe prefente à
cUç feule, en forme d'homme grand & noir, lui prenant
la main & difant, m'amie, ne crain point , ton père & ta
mère font bien. Mais il faut dire quelques meires,& aller
cnvoyageànoftre Dame des vertus : &ils iront droic
en paradis. La fille demande à ceft efpritjfî foigneux du
falut des hommes,qui il eftoit. Il refpondit qu'il eftoid
$atan,& qu'elle ne s'eftonna point. La fille fit ce qui lui
eftoit commandé.Qiî^oy fait il lui dit qu'il faloit aller en
voyage à S. lacques. tllc rcfponditjicnefçauroisaller'.
il loin. Depuis Satan ne cclfa de l'importuner , parlant
familièrement à elle feule faifantfabefongnc, lui difans
ces mots. Tu es bien cruelle;elle ne voudroit pas mettre
fescizeaux au fein pour l'amour de moy. Ce qu'elle
faifoit pour le contenter & s'en defpccher. Mais cela
fait il lui deman-doit en don quelque chofe,iufques à de
fcs cheuçux, dont elle lui donna vu floquct. Quelques
iours après il voulut lui pcrfuader de fe iettcr dedans^
l'eau, t:intoft qu'elle s'cftranglaft, lui mettant au col à
cefte fin la corde d'vn puits: mais elle cria tellemétqu'ili
ne pourfuiuit point. Combien que fon oncle voulant
vniour
Vnîour lareuancher fut/î bien battu , qu*il demeura
malade au lid plu s de quatre iours: Vue autre fois Satan
Voulut la forcer & conoiftre charnellement, & pour la
refîftance qu'elle fit,elle fut battue iufques a eftufion de
fang. Entre plufîeurs qui virent ccftc fille fut vn nom-
mé Choinin,rccre taire de rEuefque de Valence,leauel
lui dit, qu'il n'y auoit plus beau moyen de chafier l'eG*
prit,qu'cn ne lui refpondant rien de ce qu'il diroit : en-
corcs qu'il commandaft de prier Dieu , ce qu'il ne faic
iamais qu'en le blaj"phemant,& le conioignant toujours
auec (t& créatures par irrifion. De fait Satan voyant que
la fille ne lui refpondoit rien , ni ne failbit chofc quel-
conque pour luijla print & la ietta contre terre,& dcpui»
elle ne \ià tien.M.Amiot Eucfoue d'Auxerre & le Curé
de la fille n'y auoyent iccu remédier, i. -Kodin au ^MnJe
fi dejiionomanicchap.ô .
Vn cheualier Lfpagnohriche & de grands authorité,
s'amouracha d'vne Nonnain , laquelle s'accordant à ce
dontillarequcroir,pourlui donner libre entrée lui con-
feilla de faire forger àcs clefs iemblables à celles des
portes de i'Egliie,où elle trouueroit moyen d'entrer pac
autre endroit,pour fe rendre en certain lieu defigné. Le
cheualier fit accommoder deux clefs, l'vne feruantou-
urir la porte du grand portail deTcglife irauticpourla
petite porte d'iceile eglife.Et pource que le conuent
des Nonnains eftoit vn peu loin de Ton village , il par-
tit fur la lîiinuiét fort obfcure tout feul ', &, .laiflant fou
cheual en certain lieu feur, marcha vers le conuent*.
Ayant fait ouuerture de la première porte : il vid l'eglife
ouuerte,&:au dedans grande clairté de lampes & de
cierges,& force gens:qui chantoyent & faifoyent le fer-
uice pour a n trerpairé. Celal'eitonnc : neantmoins il
s'approche , pour voir que c'eRoit :& regardant de tous
collez, appcrçoit l'eglife pleine de moines & depre-
Itrcsqui chantoyent liinli à ces funérailles, a)ians au
milieu d'eux vn aix en forme de tcmbcau fort haut,
couucrt de noir:& à l'entour force cierges allumez en
leurs mains. Son eftonnement redoubla, quand entre
^as ces chantres il o'çn peut remarquer pas vn dç^la
M m 2k
H 8
Kjlâires Admirables
cognoi{rance:rourtant après les auoir bien Contemple/,
il s'approche de l'vn des Preltrcs, & lui demande pour
qui Ton faifoit ce feruice. Le prcftrc refpond que c'e-
ftoit pour vn cheualier , defîgnant le nom & furnom de
lui qui parloir , adiouftantque ce cheualier eftoit mort
& qu'on faifoit fes funérailles. Le cheualier fe prenant
à rire refpond, Ce cheualier que vous me nommez eft
en vie:per ainh vous-vous abufez. Mais le preftre répli-
qua,Oui bien vous:car pour certain il eft mort, & eft ici
poureftre cnfeuçli: quoydit-ilfercmit à chanter. Le
jcheualicr fortcsbahi de ce deuis , s'adrefie à vn autre &
lui fait la mefme demande. Ce deuxiefme fait mefme
refponfe,aflFermant vrai ce que le premier auoit dit. A-
lors le cheualier tout eftonné>fans attendre d'auantage,
fortit de l'Eglife remonte à cheual, & s'achemine vers fa
maifon.Il eft fuiui & acompagné de deux grands chiens
noirs qui ne bougent de fes coftez : & quoi qu'il les mc-
naçaft del'efpeejils ne l'abandonnent point. Mettant
pied à terre à la porte de fon logis, &. entrant dedans,fes
feruitcurs levôyans tout changé le prient inftammcnt
cie leur reciter fon auantute : cequ'ilfair de poinâ en
point.On le mcine en fa chambre , où acheuant de ra-
conter ce qui eftoitpafle, les deux chiens entrent , fc
ruent furieufement fur lui, Tertranglent & defpeccnt,
fans qu'aucun des fiens pcuft le fecourir. Tor^jnemadj c»
lu troifiefme iot.rnee de fon hi'X.i,ncron.
Antoine delà Cueua,cheualierEfpagnoI,pourrairon
à nous inconnues, & parla permiflion de Dieu , fur ten-
té & trauailic en fa vie de fantofmes, & vifîons , de ma-
nière que pour la continuation il en auoit finalement
perdu la aainte , combien qu'il nelailîaft pasd'auoir
toufîours de la lumière en la chambre où il couchoit.
Vne nuiâ: , eftant en la couche , &: lifant en vn liure jil
fentitdu bruitdeflbusfacoucliccommes'ilyeull quel-
que perfoHne : & ne fâchant que ce pouuoit eftre , \ià
fortir d'vn cûfcé du lia: vn brasnud, qui lemblojt eftre
de quelque More: lequel empoignant la chandelle !;j
ictta /
cf memoYAhles. ^ 4 9
fccM à bas,auec le chandclier,ix: refîeignic. Alors le chc-
ualier fencit ce More monrcr, fie le mecrre Juec lui en la
couche. Comme ils fe fuflent empoignez. 6: cmbraifez,
ils commencèrent à lutter de touce leur force menans
tel bruit que ceux de la maifon fe refit eillerent,&vcnans
voir que c'elloit ne trouuerent autre que le cheualier
lequel eftoic tout en eau, corn me s'il fuil forti d'vn bain,
& tout enflammc.Il leur conta fon auanture , & que ce
More les fcntant venir s'eiloit desfait de lui , Se ne fça-
uoit qu'il ciloit deucnu. Lrf wepïc.
En TEglife cathédrale de Mersburg près de Lypiîcy
avnEue!quc&desChanoines,'iufquelsilcftoitloifikIc
defe marier. Ils ont laili'é en icclle de grands & riches
joyaux donnez des long temps,& ont fait conicience de
s'en accommoder. Pour la garde du temple il y a ordi-
nairement quelques hommes, qui tour à tour veillent
en icelui tant de iour que de nuid.Iceux rapportèrent a-
uoir obferué de fort long temps,& entendu de leurs de-
uanciers gardes que trois femainei auant le dcces de
chafcun chanoine, de nuift fe fait vn grand tumulte de-
dans le temple: & comme fi quelque puiflant homme
donnoit de toute fa force quelques coups dupoinclos
Tur la chaire du chanoine qui doit mourir : laquelle ces
gardes marquent incontinent: & le lendemain venu en
aucrtilfent le Chapitre. C'cft vn adiournementperfon-
nel à ce chanoine>lequel meurt dedans trois femaines a-
^i^s.Mcmoifts dcnâftretem^:.
VISIONS merueilleiifes en l'air.
'An mil cinq cens trente deux , presd'Infprucic'fu-
L
(rent veucs ces images-ci en l'air. Vn aigle fur vn co-
ftaujtoutestarouché , au deuant duquel vcnoyent trois
autres imagés,comme pour le destanc. La première e^
ftûit vn chameau eftandant le col , & enuironné de feu
tout àTentour. La féconde vn loup iettant le feu par
ia gucic , & entouré d'vn cercle de feu. La troifiefmç
y a. liou,a qui vn hoaune grme de toutes pièces , 5c dç-«
Mm 3
5 5 o HiJIoires admirable^
bour,à l'entrée des montagnes , manioit doucement ïc
crin,&fembloit quccelyon f^.ifoit fefte à rhommc ,lui
tendant la patte cij fignc àc f^luzo.ncn. AÎ.Gas}ur Peucer
Bien peu de temps auant la mort de leaa Electeur 6^
Duc de Saxe , l'on vid en l'air fur Ifenac les figures fui-
uantes.Premierement , vn vieil aibre fec renuerlé par
terre.Seeondcmeut, vnhoi-nmede cheualqui portoic
rarbre,mais tout csbranché : en troifîeme lieu vn chien
«iecliafTe: pour le quatricfme vne grand' aoix noire,
en vne nuçe efpaifle : pour lecinquiefme on vid fortic
<ie cciic nuec la foudre aucc vn Ci horrible & impétueux
efclatde tonnerre , armé de tantd'efclairs& de feux,
c]u'on penfoit qu'il deuil confommer vn village, fur
lequel il fembloit vouloir fondre : & y auoit vne fille ef-
•frayee,qui d'vn cri violent appelloif la mère à Taide , 8ç
prioit aeftrc receuc & mife à couuert. Combien que ic
ne vueille pas entrer en l'expoiition de telle vifion,
toutcsfoisie recueille de ce qui seft enfliiui dcpuis,quc
telles images ont reprefenté les changemens furuenus
en la maifon de Saxe , enfemble les çalamitez & ruines
<ics Fplifes. Lrf mefme.
Au mefme temps que fut faite la Ligue d'Alemagne,
furnominec de Smalçaldc , on vid reluire en Tair des i-
jnagcs,quifemblentauoir marqué Tiflué de toute ceftc
oiTociarion. Premièrement, ic prefenterent quelques
cens de cheual , fuiuis de paylans, armez de mafl'ues &
jcuicrs.-puisaparut vne haute tour près d'vne riuiere , &
non guercs loin d'icelle tour vn homme quipuifoitde
l'eau , après lequel venoit vn grand dragon. Les
deux premières figures s'efuanouircnt incontinent:
le§ deux autres fe nionftrcrent allez long temps. L^
;pierme.
L'an mil cinq cens trente quatre,le troifiefme iour de
luillet après midi,le ciel eftant clair & defcouuert, ceux
<lVne petite ville nommée Sçhefvvitz , virent en Tair
iles lions acourans de diuers endroits pour s*entre-
banrcdc près d eux vn homme de cheual armé de tou^
teipxecçs, braftila^cvae jauçiuw, JNoa guercs lom
drtncmorahles, 5ji
j cefl homme gifoit vu telle humaine , fans corps, or-
-cedVn diadème impcrial. Aflez presyauoit vne hu-
re de fanglicrauec Tes broches, & deux dragons vomif.
fans ie feu. Puis aparut Tmiage d'vne bien grande ville
rt3ule,pres d'vn lac , alfiegee par terre & par eau , & def^
fus icellev>ie croix de couleur de fang , qui peu à pew
deuint noire. Vn autre cheualier, flamboyant & portant
en tefte vne couronne d'Empereur, fe prefcnta inconti-
nentjfuiui d'vn cheual fans ccnda£leur puisaumilieu
d'vne fpacieufe plaine apparurent deux chafteaux en
feu, proches d'vne haute montagne , fur laquelle eftoic
vn grand aigle cachant la moitié de Ton corps derrière
la montagne , & apparurent auflfi quelques petits ai-
glons ayans le pennage blanc, & fort luifant , enfemble
la tefte d'vn lyon couché & couronné, vn coq frappant
du bec cefte tefte , tant & fi longuement qu'elle fut fe-
parce du corps (lequel on vid longuement) &s'efua-
nouit. Il y auoit d'autres lyons , & près de la hure du
(angliervne licorne qui fechangeoit peu à peu en fi-
gure de dragon : auec grand nombre d'autres animaux
de forme & grandeur non acouftumee. Outrcplus , fur
vne haute roche paroifToit vnefortercfl'e enuironnee de
deux camps, & tout le pays fembloit plein de villes,
bourgades & chafteaux : mais incontinent tout cela fut
faifi & confommé par feu, & toutes les ruines de cefte
cftcndue femblerent fondre & fe perdre en vn grand
eftang, ne reftant rien que quelques tours, à l'endroic
où la grande ville eftoitaparue. Alariue du lac fut veu
"vn puiffantchameau, faifantfemblantde boire ,& corn-
me arrefté fur cefte riue là. Va mefmc.
L'an mil cinq cens trente huid, deuantla première
expédition de guerre du Landgraue, vn notable per-
sonnage, Conful de la ville de Smalcalde , vid de nuiâ,
comme tout deuantfoy les images fui uantes. Il y auoit
vn vieillard à table & dormant à tefte baifleeifur vn bâc
aupreseftoitcouché vn lyon. Dedans lamefmecham-
trc eftoyent plufieurs hommes veftus de longues ro-
bes,quifcnibloyentconfulter touchant ce lyon, qui fi-.
Mm ^
552, Ht ft êtres admirables
^lalementriuM de fonbatic, comme pour les entiahiVi
auc^fcs pactes de dcuant. Eux fe lerransenrembles'op-
pofcnt au lyon ^s: lui donnent plu/îcurs coups de poi-
gnard: finalemeiu- l'ayans enclos par le moyen d'vnc
«haircquiJsiettcrcncdelTus, lui coupèrent U queue:
piiîis tort après s'elhntdefpetré de dcfïbus cefte chaire,
ilrecouLirefa queue , & eux s'cftans enfuis hors de la
chambrcil retourne en raplace,&rautc furie banc. De-
rechef, comme ces hommes eu lient recommencé à en-
trer &rortir,comme pour machiner la mort du lyon, il
entre en fureur & s'eflance impetucufement contre
eux, qui fe prindrent à crier & tendre les bras au vieil-
lard dormanr.lccueî s'eftant efueillé.&L hauflant la teflc,
du branflc de fa main droite menaça le lyon , qui Tap-
perceuant, fe retira, & regardant de fois à autre fon
vieillard, faura fur le banc, ou il fut transformé en le-
fus Chrill: prcfciiant tout debout , deuant lequel ces
hommes s'cftans prollcrnez , comme pour demander
pardouj ScTayant obtenu, toutes ces images s'euanoui-
rcnt. Lanicfme.
L'an mil cinq cens quarante cinq , Iplendemain de
Pentecpfte, furent veuës en Silefie les images fuiuan-,
tes. Vn ours vcnoit d'Orient conduifant vne armée
bien equippec.au deuant duquel marchait vn lyonpar-
ti de rOccidcn t auec des troupes.tntre les deux armées
luifoit vnc eftoille fort claire. Incontinent fe commen-
ce vne afpre mefîec , tellement qu'il fcmbloitque le
l^ngcouladJe toutes parts des corps blelfcz , & que
pluiieucs tôbaffenr morts fur la pkce. Durant le combac
vn aigle partr.nt de certain rocher fort haut voltigeoit
lurles troupes du lyon. Apres long combat, & lors
que la mefice fembloit cilre finie, le lyon aparut de-
rechef reluilànt au milieu ^iQ.i'cs bandes : maison ne
içeut rien remarquer quant à l'ours , ains le corps de
icsarmccs demeurèrent efpars & gifans , autour dcf-
quels fe trouuercnt des vieillard chenus & de regard
vénérable. Le combat acheué , le lyon remena fon ar-
JTjeevers Occidenc,& eftantaflez auanten chemin,cer>.
taiii mcncé fur vn braut chcwal biauc liiiTararniee , &
vintai^
dr mémorables, 5 55
Vint au champ de bataille , & montafur ceclieualvn
Jeune homme tour arme, lequel eftoit là tout clebout:&
l'ayant accompagné vers Orient , toutes ces images s'ef-
uanouirent. tamefmc.
L'an mil cinq cens quarante neuf, quelques nota^îe^
bourgeois delà ville de Brunfuic, allans denuifccnce
voyage pour afairesneceffaires, virent la Luneenuiron-
née d'vn cercle fort apparent , & près d'elle deux autres
Lunes.Ce cercle faiioit quatre tours à l'cnuiron d'elle:&
près des deux autres Lunes ils aperceurcnt vn lyon tout
en feujvn aigle qui fe perçoit la poiftrine,puis la figure
du trcn-iUultre Prince Ican Frédéric Dux de Saxe,& vne
autre figure de la création d'Eue tirée de la cofte d'A-
dam : en après Dieu afîls^&tenantà fesgenouxAdam &
Eue qu'il cherifloit amiablemcnt , comme font qucl-
quesfois les pères leurs enfans. Apres cela fe prefenta v-
ne horrible apparence de villes tout en feu,enuiron lef-
quellesy auoitvn chameau, la figure de Icfus Chrill
pendant en la Croix,& autour d'icelle la compagnie des
Apollres. La dernière imagefutla plus effroyable de
routes. Ilyauoit vnhonime debout, de regard cruel, te-
nant au poing vne cfpee defgainee , dont ilfembloic
vouloir fiapper vne ieune fille agenouillée deuantlui,8:
qui auec les larmes aux yeux le prioit d'cl-tre cfpargnce.
D'autres telles images furent vcues en quelques autres
endroits, limefme.
A cequedelfusle doâ:eur Peuccr adiouftece qui
s'enfuit. Combien que de tout temps Ton ait demandé
par quelle vertu telles images fe forment en l'air ; ^cà-
uojr puis que les régions de l'air ne fontiamaisfansex-
hahiirons^ fî ces exhalaifonspar rencontre , ou efparlcs
après quelques iiTterualles viencnt point à fe rencon-r
trcr, & à caufer telles images, en forte que la lumière
dcscieux venant à leur donner teinture , les vnes font
blanches, les autres rouges & ardantes, félon la qualité
des vapeurs :oubien , C\ les natures intelligentes) &:qu«
prcuoyent les chofes à venir , expriment point telles i-.
inages,où à l'aide des fumées Scexhalaifons , ou de quel-
que fplcudçur apparente ? Qu^ant à moii*eilime que.Ia
ï 5 4 ' Hifloires admirables
plufpartde tels Oltcntes font faits & formez par le Sci-
|:ncur Dieu mcfmc , ou par fes fainds Anges,qui pour
rameur du genre humain , qu'ils voyent cftre aime de
Dieu, nous inetrcnrdcuant les yeux , parle moyen de
tellesimaccs, vnc bien exprelTe rcprefcntation & fuite
dcseuencmcns ; nonpas afin que nous preuoyons fini-
plcmencceque nousnç pouuôscuiter: mais afin qu'ad-
moncftez par tels auertiflemens nous penfionsànos
pechez^foHdions la grandeur des dangers,ramenteuions
a nos cœur^ Icsremonftrances 8c confolatioiis qui nous
fontpropofecscn l'Efcriture fainfte , tellement qu'au
milieu des traits qui nous font lancez , & lors qu'il n'y
aura apparence que de confufion extrême fans refl'our-
ce, nous nous profternions humblement à fes genoux,
& HC cefîions auec les mains & confciences pures le
jprier & fupplier^que fans regarder à ce que méritent les
iniquitezdumonde, il nousreçoyuecn fa garde, nous
inaintiene&garentiflcde la riolenee des ennemis de
;noftrefalur, & dcûourne tous les maux qui pendent def-
fus nos telles. II eft vrai-fcmblable aufli que les diables
jncttcnt par fois la mam à tels oauragcs. Mais , au de-
meurant , les vagues ôiinconrtantes rencontres des ex-
halajfons ne peuuent com.pofer des fîgnes fi beaux , fî
bien range/. , & des chofesfuiettes àla prouidencç
de Dieu : linon que Ton voulull maintenir me-
ptementSc mcfchamment auec les E-
picurien.s,quc le monde confîfte,
cllgouucrné &cooduit ,
i l'auenture.
FIN DV PREMIER
V O i V M F..
D E VX lE SME
V O L V M E
DES
H I sr O I RE s
admirables^ ^mé-
morables.
C I D I D C X X.
A lEAN GOVLART
EJleu^ ControUenr des Aides
^ Lailies pour le Roy
en l élection de
Senlis.
On FRERî,Ie vous enuoye
le dcuxiefme volume de nos re-
cueils d'hiftoires admirables &
mémorables, a me^lne intention
que le premier. Ce font pièces
rapportées & enfilées groflierc-
ment , aufquelles ie n'adiouflc prcfque ricu àxi
mien , poun laifîcr d vous àc a tout autre débon-
naire Icdleur la méditation libre dufruict qu'on
en peut & doit tirer. Dieu y apparoir en diuerfcs
fortes près & loin , pour maintenir Çx iuftice
contre les cœurs farouches de tant de perlbn-
nesqui le regardent detrauers : Item pour tef«
moigner en diueries fortes fa grâce a ceux qui
lereuerentdepure affeélion. Nous auons d'au-
tres enfeignemens plus briefs& pathétiques : ic
le confefle. Mais comme tous n'y prenent pas
gouftji'eftimeque cefte façon d'efcrire par ré-
cits diuers n'eft pas du tout infriidtueufè. Du
moins i'ay ce contentement en moi-mefme,
que i'ay defiré méfier le doux & l'vrile enfenu
blc. Si quelques autres çnfuiucnc 6c furmon-
/^^^ ËPISTRÏ.
cent l'exemple que ie leur monftre , no(!re Citdé
aura de mois en mois quelque labeur nouueau,
pour foulagcrôc recréer les plus feueies fronts. le
luis entré envnefpacieu le torelt d'hiftoires mer-
ueiUeufesttS^ rien ne me reticnt( li ce u'cft le de-
(ir d'agréer a plufieurs pour leur mitruction) que
ie ne puille aifement en fortir toutes de quan- "
tesfois qu'il me plaira. Nul n'y eft obligé , non
plus que moy. Cefte vacation férue tint & à
qui elle pourra. le me foucie peu ou point de
toute ma pemc:qui n ell qu'vn exercice d'heures
mefnagees , tandis que quelques autres plus in-
duftrieux fe fontarnufcz à regarder leurs doigts.
Encores moins apprehende-ie ce qu'en peu-
uentpenfer & dire les mal-vueillans, fi aucuns
fc trouuent fi mal difpofez que de ne vouloir
point de bien à celui qui ne leur fait point de
mal. le ne redoute nullement mon ombre , ÔC
fuis content de me perfliader que ce petit effort
cft agreable:fiàvous,ce m'eft beaucoup : fi nul
ien'en perds , ni repos ni repas pourtant. En la
plus ferme afUette de noftrevie il y a beaucoup
•debranlle : qui par le haut reffemble ceux qui
cheminent fur descfchaffes : & vérité fe trouue
cnuironnee de vanité dedans maintes rencon-
ires. Auecquipuis-ie rire &c pleurer plus fami-
lièrement qu'auec vous? Ilyadequoy pourl'vii
Se l'autre en ce volume. Courez-le de l'œil quel
quesfois, pour l'amour de lui mcfmes , de vous^
ècdc moi aulîi. Mais n'eftimcz point que ce
foitvne lettre de pa{ïèporr,de créance, d'infinua-^
don, de recommandacion» C'eit vnbouquec
du
ËpistueT 5^9
^uPrintemps : s'il vous agrée quelques heures»
l'en ay ramalfë les fleurs à celle tin. Si l'odeur ea
demeure plus longtemps , aunnt qu'il fe pafïc
nous cfïayerons d'en cueillir vn troifîefme de-
dans noftre parterre hiftorique, qui n'aura moins
de grâce que les deux precedents.Contmuez
ladefTus en voftre fraternelle bien-vueil-
lance vers moi. De S.Geruais ce
15. iour d'Auril l'an
CID. lOCIV.
Voftre frère & fîngulicr ami à iamais
Simon Govlart.
tyo Hijloires admirables
qABSCE S, OV APO-
Jîemes^ au corps humain.
s T A K s plufieurs Médecins &
Chirurgiens appeliez à Montpel-
lier , Tan if?^. le zy. iour d'Auril,
^our confulter d'vne grande mala-
die cju'auoit le fieurdcla Tour,fuc
:onuquc c'cftoit vn abfces. Apres
auoir confulcé j tous fufmcs d'aduis
qu'il fuilouueriauec le cautère potentiel. EftantoU-
uert nous trouuafmes dedans àç.s chofes les plus eftran-
ges qu'on fçauroit voir , comme poils , roignures d'on-
gles, doux, chaftaignes, raifîns , figues ,fromagc^bouil-
lie, iiîicl, aulx, ou chofes reflemblantes à tout cela, &
encore d'auantage, pleins d'autres chofes encorcs plus-
cftranges , lefquellcsrelîembloyent à petits animaux
Il demeura fort long temps ouucrt j auec grande c;i-
uité& de perdition de la fubrtance des trois grosmuf-
cles qui conftituentlafeflc, & ferucnt tous à l'cxten •
fîon de la cuiiîe. Mais Dieu grâces , auec les re-
mèdes necefîaiies , celle grande cauité & déperdi-
tion de fubrtance full remplie de chair , & le tout
bien confolidé, demeurant guéri l'efpace de trois ans. II
lui reuint en l'année 1^86'. mais tout autrement : car il
fut plus grand au double , & rempli de matière pliis c-
ftrange. Nous fufmes r'appellez pour confulter vné
autre foisjà fçauoir,s'ileftoit befoin de le r'ouurir : & fut
frrefté comme dcflus, faufque l'ouuertureferoit faite
auec le cautère aduel, item qu'elle fcfcroit en croix, dé
la grandeur d'vn bon demi pied , & beaucoup de cautc-
les mis dedans.afin de bien confumer la racine du guiil.
la matière qui en decouloit n'cftoit point de diuerfe
nature comme la première foisanais eu forcoit à pleins
pla®
dr memorahles» j ^x
plats (Jeux fois le iour, & q uelqiiesfo is troisielle refi'em-
bloit i des grofles perles, cUacune aynt sô guift ou enue-
lopoir. Dansccguiil y en auo^t quatre ou cinq autres,
chacune dcr<juelles auoit aufl~i l'on guiil , & derechef en
icellcsfî petites s'y trouuoyeiic , d'autres encoresplus
petites toufioursenueloppecs,&qui efloyent comme
grains de miliet. L'euacuation delà matière dura fora
long temps, & n'en fuflions iamais venuà bout, fans
l'huile de fouffrc, vitriol & mercure. Par ce moyen il fut:
fort bien guen. Dieu merci , &. s ell pcrt^ bie i depuis
refpacc de plufieurs années. Aï. Bunhdemi Cah oi , eitjes-
olferuiitiom anathorniques, objeru.Z'J.
En l'année 1578. M. NoclTouitct& moyfufmes ap-
peliez pour ouurir le corps de feu Antoire Riquomme>
honnorable marchant de la ville de Montpellier , aagé
defoixantcansou enuiron:ille trouua auoirdansla ca-
pacité du ventre inférieur vn grand abfcesauroignori
gauche, rempli de matière piirulente.Ceft abfces fut ap-
porté dans la maifon tic Monfieur Hucher , Chancelier
de rVniuerfité, pour chGfemonftreufe. Deuantque
Touurir nous fufmes tous d'aduis dcle pefer^^ trouuafl
mcsqu'ilpefoit quatorzehures &: demie, auecfon guift
& roignon à collé. Ce guiftou enuelopoir efioit de i'ef^
paiifeur quaii d'vne bonne peau de mouton ou de mar-
roquin, lequel , après auoir olié ceJlc matière purulente
contenue dedans , fut embaufmé & gardé fortfoigneu-
fcment. l c mejme en tolferuatliyn i8.
Vn icune homme nommé Gouron , Marchant de Pe-
7enas, ayant en mefme endroit vnc douleur fort gran-
de , appella les Médecins & Chirurgiens qui furent de
diuerfc^s opinions, aucuns eftimairs qu'il auoit vnc pier-
-reaux reins , d'autant qu'il rendoit par fwis quelque peu
de pus par les vrincs: moy au contraire tcnois que c'e-
ftoicvn abfces , mcmoratif de celui deRiquomme. La
compagnie s'eftant retirée, le malade m'ctiuoyc quérir,
me prie inftamment de l'ouurir , aimint mieux (difoir-
il) mourir, que viurc fi mifcrablement aucc la grande
douleur qu'il lentoitd'ordinairc.Vaincu des prieres,tant:
de Im que de Tes par eus Se amis , ilippciby tous ctux
N 0
^6z Hîflûircs aJmirahles
«juis'eftojrcnt trouucz à la confulration ^puissj'anf a;r*
pliquc mon cautcrc dedans vn ponâuel c|ue i'auois fair
faire, ie trouuay lacauité &le licti delà maricrc, mai*
il n'en forcit rien. Deux heures après i'y fus pour chan-
ger le premier apparei);& la rente cftant fortie, fus con-
traint prendre vn bafTin de barbier^leouelfuc rempli de
pus plus que de la moitié, & contmuay deux fois le iour
\n plat le matin, & vn autre le fuir. Cela dura Tefp.-^ce
d'vn mois ou de cinq femaincs : mais en fin il fut bien
guéri, & depuis s'eft retiré à Marfeillc , pourpourfuiure
là trafique. Lamefme,
Sur la fin du mois de Nouembre Kpp. ie fus appelle
en la maifon de iM. Charles de RofeLConfeiller du Roy
en Ton Parlcmenrde Thoulouzc, pour voirvncfïenc
petite fillcjaageed'enuironfcize mois, ayant le ventre
fort enflé & tendu, qui empefchoit tellement la refpirïZ-
tion,que celle fillette fembîoit preftc à eftouffer. L'.i-
yant tallcc^conoiOant l'enflure cftreau dedans, & qu'cî-
ieabouriffoit vn peu à tous les ^tvx flancs, ie fis affcm-
bler quelques Médecins & Chirurgiens. Combien que
chacun fifl Ton pofl'ible de recercher& trouircrrcflcn-
ce du mal , & le fiege d'icelui , fi furent les opinions fore
diuerfes : car les vns tenoyen r que c*cftoit vne hydropr-
iîe toute formée, les autres iugeoyent que c'ertojt \ n
ablces, mais différemment : ceux-ci l'eftimans eftrc en h
lubftancedu foyc , ouenlaratte : ceux-là fouitenans
qu'ileftoit au pancréas , & quelques autresenrre les
mufcles de l'epigaflie. Pour moy, voyant la firuarion de
la fillette, TcnflureS: forme d'iccDe auec certaine cir-
confcriptionquei'y tïouuois , la tallant ie iugcayaLiflî
incontinent que c'ertoycntdes abfccs. Mais icpenfois
certainement qu'ils fuflent au foyc & en la rattc, pour en
auoir veu d'autres auec femblables fympromes. Nous
fufmes tous d'accord,quant au progiioflic : car tous \'na-
nimemcnt iugeafmcs f|ue la flJetce mourroit dedans
peu de temps,& n'y auoitpcrlbnnc en la compagnie,qui
rcnfaiUjU'cllepeuilviure encore 11 ui<fliours: toutesfois
êllcvefquir (côbien qu'auec grand' peine)iufquesau 17.
loui du mois d' Auril 15^7. eufuyuanc , <^i]i font plus de
quatre
I
cf mémorables. 56"j
'mjatremois&dcnii.Incontincntapies, eftant decedce,
ie fus appelle pourTouurir: ce quifutfait en prefence
de beaucoup de perfonnesjnommémcnr à\n rres-dode
Médecin &d'vn Chirurgie luré.Enceiico'.iuerture nous
trouuafmes des chofcs miraculeufes & prodioicufcs,
pour Taage d'\ n fi petit enfan c : car du cofté feneftre fe
trouuavn abfces d'admirable grandeurdéqucl arraché' .Tr.
uec foncnuelopoir pcfoiccnuiron dixliures. Mais ce
que nous trouuafmes encore plus prodigieux fut que
dans cet abiccs trouucrent encore crois autres abfces,
chacun couuert de fa tayc,&; de la pcfantcur de liure &
demie chacun,rempljs de la mefme mariere, femblablc i
delà bouillicji des œufs cuits, à des f gués, &ide la
chair auccfes fibrcs,& autres matières eftranges, dutouc
hors de là reigle & du régime de narurc.Du cofté droit
furent trouuc?. auflR deux grands cbfccS; cômeiumeaux,
pcfans enuiron quaneliurcs chacun, remplis de mefme
matière que les autres. Chofe du tout montlrueufe,
qu'vnfi tendre &;ieunecnfançon air peu fubfifter por-
tant fi grande quâticé de telle matière. Aufîlauoyentlef-
dits abfces tellement preffé le diaphragme en haut vers
lesclauiculcs, que les poulmons n'auoycnt pas *^QA\yi.
doigts d'cfpace, ce qui la fit mourir comme eftouftcc.
Voila comment cefte maladie cftoit autant dimcilc à
conoiibe qu'impofllble à guerinSc ne peut-on rapporter
la caufe de ce mal à la femence & première conforma-
tion:carlepere& la mcreelloycnt d'vne fort belle ha-
bitude,d'vn louable tempérament, & de très-bonne ex-
traction :ioint que toutes les parties nobles- de cepetit
corps,comme coeur.poulmons, foye,ratce, eftomach , &
tout lerefte,eftoycat de cref-belle couleur &confillan-
ce.Ec n'y auoir autre différence en laconthtution , fois
tjue ce petit enfant n'auoir point d'vuule , mais vn trou,
aufond dupalais,qui incommodoic fort fa nourriture.
Car fucçanrlelaid, &nepouuant l'aualler commodé-
ment, cliceiloit contrainte le reietter le plus fouuenÈ
parles narines. Ce qui ncurroit bienauo'r aidéiU
génération de beaucoup d'e::cremens pituiccux, faute
de conuenablc nourriture. iMaiide fcauoir proprcineû^
Nn X
i[ ^4 Uijlûires admirables
où nature auoit dcfchargé fcs immondices,là p{i la plu?
grande difficulté. Car nature voulant toujours fe fecou-
lir clic mefmcellc crcufc des cachots,conduits, & réce-
ptacles inopinez,& fait chofcs merueillcufes. Et ne faut
s'eftonncr fï auxaffcftions internes quelquesfois on ne
dcfignc proptement la partie , pourueu qu'on conoifle-
le mdX.temefiiK en l' oh[e*i*ation particuUcre 55.
K^ EST INENCE nompareillç^
ér vk merueilleuje.
IL yafîxvingts&troisans,quela Suifleaveu vnhom-
mcmerucilleux entre les autres. On le nommoit Ni-
colas d'Vnderuald.Cc perfonnagc ayanteu en loyal ma-
riage cinq fils & cinq filles de fa femmcvn iour les quit-
ta tousjfe retirant en vn lieu fort folitaire & efcarré , où
il vefcut refpace de vingt vn ans , fans boire ni manger.
Il fut eftimé de tous,hommefaind,&fçauoit parler clai-
rement des plus hauts myftercs de l'Efcriturc faindcen- .
cores qu'auparauant il n'euft point eftudié, voire fuft vn
idiot,ignor3nt,qui ne fçauoit ni lire ni efcrire. Il paroif^
foit toufîours ioyeux. Ses exhortations ordinaires c-
ftoyent de preflcr les Suiffes qu'ils fe conuertifTent ^
Dieujdemcuraffcnt de bon accord enfcmble.gardaficnc
de fe laiffer corrompre par prefens, & d'entrer en allian-
ce auec les Princes étrangers. Es iours de feftcs ilfc
trouuoit en l'Eglife prochaine , où il faifoit quelques
fermons,edihantplusparfa vie que par fa voix. Illbu-
Joitfermer les prières de certains mots en fon langage,
qui fignifient au noUi^ )Sei^neur,ojic moy a moyyt^ me don-
9t€ tout à toy. En Tes deuis ordinaires auec ceux qui Ta-
bordoyent, ildeclaroit franchement ne tenir à moin-
dre miracle en fa vie ce qu'il auoit peu quitter vne fem-
me & des enfans qu'il aimoittant , que fon abflinence
de boire & de manger. Ses yeux eftiocclloyent d'vne
clairté terrible. Lors qu'il parloit;,ics artères & veines du
col lui enfloyentdc telle force, qu'on euft dit qu'elles
cfloyent pleines d'efprit en lieu de fang. Ce grandper-
fonnagc&quin'aeu fon pareil de noftre temps, mou-
rut fort paifiblement l'an mi! cinq cens & deux. Stttnt-
^ mémorables, s^G^
<< \]ui en efcric rhiftoire e»p Chronique de Sulffe^ridiou-
.„jAla miene volonté que nous autres S uilTes nous rc-
glilTions félon les admonitions de ceft homme. Vn au-
tre Suifle voulant l'enfuiure , lui demanda confcil com-
ment ils pourront paruenir à telle fainfteté & abflinen-
cc. Mais Nicolas lui remonftra fciicufement, quefon
faidn'cftoit pas vue inuention humaine , ains vne a-
-drelTe diuine , & que les dons d'enhaut , n'eftoyent pas
egalementdiftnbuez à tous.Pourtantleconfeilloit-ilde
fc contenter de fa condition , de s'acquitter fidèlement
de fon deaoir en l'eûat qu'il excrçoit , fans vouloir par
imprudente émulation cacher en terre le talent que
t)ieu lui auoit commis pour fe faire valoir. Ce galand
pafifa outre, &, contre î'auis du bon Nicolas, fe rendit
hermite. Mais lui eftant aduenu de commettre certain
iour vn aéle tref-vilain,la iufticc le failît au collet , Tem-
prifonna,chaftia par amende, tellement que defcouucrt
hypocrite.Sc tout confus , il retourna à fon premier me-
ûicr.StanipJit^i ^ Rodolf. Hof^inian at* zMure de t origine de
la Moineritichap.^,
{^ VT R E ahjlinence mémorable.
T'Ai fait mention au premier volume de quelques fil-
Iles qui ont vefcuplufieurs années fans boire ni man-
ger. Maintenant ic prefenteray Thiftoire d'vne qui vf-
uoit encoresenla prefente année i/îo4.felon qu'elle m'a
eilé communiquée par M.Elie de Molery tref-do(5lepcr-
fonnage,&qui aveu la fille doiiteft qucftion. ïetour-
ncray quelque chofe jen François du difcours qu'il m'en
a cnuoyé efcrirdeta main en Latin. Apolline Schreyer
fille d'Ellieae Schreyer & d'Anne lung, encore viuans
en vn petit village nommé Gakz auBalliaged'Erlac,
fous la domination des lUuftrcs Seigneurs de Berne
en S ui (Te, enfantée, nourrie, & efleuec comme Icsauties
cnfans,cnuironran 1588. commença d'abhorrer toutes
viandes chaudes , tellement que p?.r l'efpace de dixhui(5t
/pois elle ne voulut &lui fut impolTible de gou^lcr vian-
tc 4uelco^<lU€ t^uifuil chaude. Ce r.onobftant€Uelçj:*
^66 Htjloires admirables
noir Ton perc & fi iT.crc au indna|;c.Tcl dcTgouftenieiK
&indifpo/îrion croiirant,fes ciiillcsjfon ventre, fa poi-
^trine s'cnficrcnt , tellement quelle commença à reitt-
tcr& abhorrer toute viande & breuuape. Samerecjui
l'aime tcndvcmcnt,& qui a quelques moyenS;n'ei'par<ina
rien pour laroulagcr,fulfent bons potagesjfucrejvins dé-
licieux,& autres remèdes. Du cômencement la fille s'ef-
força d'en prcndrcjpour complaire à fa mère y mais elle
Tomifloitle toutincontinent.Ainfi deuanrla fin de Tan
ï59o.clle n'a peu ni voulu depuis goufter viade ni brcu-
uage aucun, ni n'en peutfuppcrter en facoucrie Todeur
en façon que ce foit.fî on l'approche tantfoit peu de Ton
rez ou de fa bouche.Elle ne crache point ni nefemou-
çhe;,ne vuide aucuns excremcns,par bas,n'vrine point,a
toulîoursla bouche ieichejles boyaux eftoupcz,nefai-
gne nullcmçnt^ni n'a point Tes mois.Le50.iour de luin
36o2.fairanc lors fort chaud, en prefcnce de quelques no-
bles & honorables peifonnaecs elle futveuë en qucl-
o^uc fueur.Elle ell: foiblc, & ordinairement en la couche:
lui taftant 1e pofgnct,cn rentiepouls,& mettant la main
fouslamnmmellefcneltrclemouuemcntducoL-urjmai
le tout foiblc ce intcrmittent.Elle a elle \iC\z<:(z de plu-
/ieurspcrfon nés de toutes qualité?. :& comme c'eft la
couftumc de la plufpirt de raller le pouls jux malades^
il s'eil r.ouuc en celle-ci qu'vne fois plus que l'autre ion
pouls s'cft mon ftré véhément , inégal , ^c comme celui
des fcbricitans. Dont on peut recuciHir que Icsobicts
çfmeuucnt &: esbranîcnt .les fens t:'nt intérieurs qu'ex-
tcrieur^jSc quelc csj ur , roi de tous les fens qui lui fer-
lî.ntiyilefiiiuentccn'.ine Icurfouuerain , v'ngite quand
&i toutes Tes arteresj dépendantes de lui coninie de leur
pnncipe.Q^andlespcrfonncsqui auoycnû àcu'iié auec
eliefc retiroyen'-j& l'on ia touclioit, le pouls cfloit fore
foibîe ^ languillant,
\ Elle a les yeux clairs & Vigoureux , l'ouie aigiic, \\>-
idorat fi prompt qucmcrutilîes.Ie geull délicat, Tattou-
çhement vif& entier par toutleco'ps ; la voix forte,
la parole p.rticulee i^/i difl.r.dcnue tous ctxix quil'en-
tendenr s'en esbahyfltnt.Elîc afpirc, rcf}>if e & foulpire
9 fon ùiç,l^<i dedans de Ton nç j: ^ de ics 0 ' *
^memorahles, ^^j
fânscxcremcns aucuns : les chcueux aflc7. cÇ^nis , nulles
ordures en lareilc depuis i'oi\ ablbncce.-lc vifagc graflet
& de bonne couleur , la poittrine fort large , les mam-
jnelles aile?, rondes, fermes !U charnues. Elle n'a poinc
de ventre, ains depuis la poicTirine , à caufc delà totale
vuidangedes fîxinrcftins, le relie efteftroid, ferré, &
comme attaché contre refpine du dos. Lcshanchc-s,
cuilfes, ïambes & pieds , font de competante charnure.
Elle dore la nuià, mais légèrement , & aucc quelque in-
quiétude. Au commencement elle fut preiTee de vents
& coliques : maintenant elle n'eft atteinte d'aucunes
dottk^Urs, Il ce n'eft qu'on lui touchée prefTe trop la
poidiipe & les autres parties du corps. 11 y a plus de
deux an$ qu'elle ne bouge du lid, oi ne peut plus fe fou-
ftenirfurfes pieds.
(Tuant à la vérité de ce récit, fur la fin d'Auril en l'aa
î^oi.lesilluftres Seigneurs de Berne firent amener en
leur ville cède Apolline & fa mère , les logèrent en vn
hofpical nommé rifle, bien commodément ; firent met-
tre la mcre en chambre à part , donnèrent gens vigilans
à la fille, quiprindrent Joigncufement garde qu'il n'y
cuft fiaude quelconque en celle abftmence admirable.
Ils n'y ont defcouuert artifice ni dol aucun. Oncques
Apolline ne leur demanda viande ni brcuùage : quand
ils lui en prdentoyent , elle rciettoit le tourauec hor-
reur & efmotion , comme aufï: tous medicamens. Les
deux Médecins & les quatre Chirurgiens ordinaires &
iurez en la ville de Berne, attePieronL le niefme, aucc
beaucoup de Seigneurs^ gentih-hommes , citoyens , &
hommes de diuers autres lieux qui ont viîité celle fille:
laquelle ayant eilé ainlîfoigncufement leconuè en ce
merucilleux eilat, auquel il piaiil à Dieu la tci^ir (pour
inilrudion&aduertiflcmcnt notable à toute la nation
Suiile, parmi laquelle il n'y a que trop àc 9,cns honteu-
(cmentexceflifs en leur manger Se boire ) fut gracieufe*
ment & honorablement renuoyce auec fa merc par ces
illullrcs Seigneurs en ce village fulhommé, ou elle cft
en ion ellat que le vien de reprclenter.
CequcnousauonsfominaircmcMit touché au i. volu-
œe de leanneBaian dcConfolcnt ville fïomiçr^jlsPoi-
5^8 Hijloires admirables
^ou & Limo/în , elt confcrmc par le dode difcours La-
tin de M.François Cuoys Médecin à Poitiers, cfcrit Tan
36oi. lequel dir que ccfte fille aagee d'onze ansji'an 1599.
au mois de May a demeuré depuis iufqucs lors qu'il trii-
toit de cet accident fans boire ni manç^er , ayant au reftc
bon fcns & mouucment , occupée à filer , ballier la mai-
fon, aller au marché, & faire autres levers feruices. le ré-
pète cefte hiftoire pour rendre ces merueilles plus rc-
commandables , & arrefler eux qui ne veulent croire fi-
iion ce qu'il voyent, hochans la te4te contre tout ce qui
clleflongnédc leur apprehenfion. le leur propofcrai
feulement vn quatrain appofé entre autrcsEpigrammes
au hure de monfieur Cytojs.
Kon^ji -jentrc glouton y à L'abord de ce littrcy
Si tu lie -veux paslir an iugement de Dku»
Q^ feras-tii , ch:lify en ce terrible UeUy
Fuis qu'on peut ici b(t^ lon<rtemps njiurcfans 'vittre}
ACCFSATEFR mefchant
exterminé,
EN l'an 151^. Le^ Portugais s'eftans rendus defîa re-
doutables en plulîeurs ports Scillcsde l'Inde Oc-
cidentale,comandoyét nommément en Malaca. Certain
frand Seigneur du pais leur y feruantbeaucoup pour
î'auancement de leurs afaires, en fut pauurcrncntreco-
penfé par les menées de quelques Indiens , & fur tout
par les fnuflcs accufntions d'vn Portugais , nomnîé Bar-
thclemi Pereftrci , threforier des guerres ,. lequel pour
gratifier à certains ennemis de ce Seigneur qu'on nom-
nioit Abedalla , fut fî hardi que de le charger de trahi-
fon vers George Albuquerque Viceroy de Portugal
en Malaca. Qu,oy que ce Seigneur propofnft Çts raifons
fort euidentes , & requift d'eftre admis à feiuttifier , à
^uoy le Viceroy fembloit cncliner,voyât qu<r c'eftoyent
menées & artifices deslndiens mefmejneâtmoins les fo-
l/ciratiôsiniHtcsdc cet accurîteur eurent tel poids, que
lepuuurc Seigneur fut cô4âûé fçmcné en lagrad'piace
de
^memomhles. 5 <^ 9
At Malaca,puis décapité publiquemenr,:tu grand regret
detoutlc pcuplcqui en murmuroitbicn fcrt. Allant au
fupplicc, iltendoitlesmainsau ciel, demandant à Dieu
vengeance deceuxqui par leurs fauflcs accufations e-
ftoyét canfe <]u'on le faifoit mourir à tort. Dixfcpt iours
apresjce Barthelemi Pereftrel fut frappé & emporté de
mort foudainerfupplice que plufieurs rapportèrent &
attribuèrent à vniulteiugement de Dieu fur ceft accu-
foiur. Oferîttf an lo.Uiire de thijloire de PortHgaU
JDFLTERE, caufe de grands mmx^
EN l'an 1517. Goa ville &haurc de renom en l'Ind^
Orientale fut furie poinft d'cftrc perdue pour le*
rortiîgais , par vn accident proucnu d'adulterc , auancé
par haine & appcrit de vengeance, accompli par cruelle
efFufion de fang humain, dont s'enfuiuirent de grands
maux.Fernâd Caldeireefleuéen la maifon d'Albuquer-
quc, Viceroy es Indes , auoit prins femme en la ville de
Goa. Il fut accufé d'cfirc courraire,& quindifteremmét
ilpilloitamis & ennemis: au moyen dequoy le Roy Ma-
nuel commanda qu'on le lui amenaft. Mais Caldeirefe
iuftifia & maintint iî bien Ton fconneur en Portugal, que
le Roy lui donna quelque rccompenfe , & lui permit
de retourner franc & libre en Inde , ce qu'il fît s'embar-
quant en la flotte de Soares, dedans la nauirc deGautier
Monroy. Durant leur voyage fur mer, Caldeire para-
uant fortoffcnfc de Monroy, lui dit tour plein d'outra-
ge, tels que l'autre s'en tin: pour griefuemcnt intercflé.
Si toftque la flotte fut arriuee en Mozambique , Cal-
deire monta en vn yaiiTeau de louage , puis en toute di-
ligence printlaroutede Goa, où Monroy s'eftoitpara-
uant ingéré de regarder d'ail lafcif la femme de Cal-
deire 3 ce qu'on difoit , & vn nommé Henri le Taw en
auoit faid lesmeflages. Monroy &Ic Taur arriuez ià>
Caldeire ne pouuant plus fe contenir , donne vnccou-
ftillade au vlfage de ce Taur,Sc lui coupe vnc iàbe;^uoy
57^ Ht ({cires admira blés
faid il s*cnfuit à qunrrc lieues de Go.i, en certaine bour-
gaJe nommée Ponde, tenue par la garnifon de Z.i'oaim
pjraaanr Prince de Goa, fous la charge d'Ancotkin,
vaillantcapitame Indien. Cnlddre fe voyoir dcftitué de
la prorcvftion d'Albuquerque^ cxpofé à lafurcur de les
ennemis , arrcndu que Moin-oy auoit obtenu le gouuer-
ncmentde Goa, &: voyoitbien que ce qu'il auoit dit &
fait lui caufcroif la mort , s'il ne s'cfloignoit. Monroy
pi' m de courroux, & de dc/ir de vengeance, pria Anco-
•ftam de lui liurcr cet homme , qui auoit cftropié & ba-
iaifrèle T3t:r, pour le punir, ce qu'Ancoitam ne vouJuc
accorder :ranr à caufe qu'il conoiifoit Caldcirc homnie
vaillant, iage , bien entendu , des plus experts aux atfai-
Tc>, & duquel il prctendoit lefcruires guerres, qu'auflî
powtc^qu'il ellimoit choie indigne de la qualité d'vn
hcme d'hôneur, vouloir expofer à la fureur d'vn cnne-
m» vn pairure fuppliât réfugié & receu en protei^ion.Ce
nonobftant Monroy refolut d'auoir la vie de Caldeirc,
^«juelqueprix quecefuft, tantatîn de venger l'outrage
pretcdu faiftau Taiir & à lui,quepouriouyr plus à foa
aifc de la femme. Pourtant il enuoyc i Ponde Ican Go-
me2.e fcaetaire de laDouâne,hôme propre à faire telles
commifllon'„afin de tuer Caldeire, lui faifant beaucoup
<lc promcfics pour r'^conoill'ance & rccôpenfe de ce fer-
uicc. Gomeze prend hardiment cc^^c charge , fe retire ;î
Ponde, difant qu'il eltoit venu li palîcr lerefte de fcv
Jours, fous la fauuegarde d'Ancollam , ne pouuant plus
fubfîfter en Goa , pour les torts & outrages que le mef-
chai.t Monroy lui auoit faic^s. Ancoftam qui croyoic
cela, le receut humainement , & Caldeire le banquctta
aufîi en fa maifon. Or auint qu'Ancoitam voulut aller
s'esbare aux champs , & entre autres mena Gomeze &
Caldeire. El^ans en caippagne Gomeze feignit vou-
loir communiquer quelque fecrct à Caldeire, & le tire
arrière d'Ancoltam, puis tout loudain letranfperce d'vn
foiip mortel, ()Uoi fait il talche le fauuer à force d'cfpe-
Tonç. Mai«: Ancoftâenuoye après les gens de chcual qui
iu! ttnoycnr compagnie,ei^ant indigne iufques au bouc
fluçl'ou cuit Cl liialiiçmcuTeiDéc meurtri vn pcrfonnage
receii
dr mémorables. ] 7 r
'.eu fou^ faprotedion. Scsgés rattaignent Goine7.e,&
ic lui ayans amené, fans pluslong dclaiAncoilam dcfgai-
na Ton cnneterrc,dont il lui trencha la tcftc fur le châp.
Mcnroy, extrcmcmcnt defpité de la mort de Ton bour-
reau , délibéra contre toute ccjuitéde tuer Ancoftam.
Pour exécuter cefterefolution^ii feignit vouloir courir
la bague, ^ pour auoir plus de plaifir allaiufquesà Bc-
naftarin,où ilpaffa vniour entier à ceft exercice. Sur
le commencement de la nuiî^il prie Tes capitaines de
defpcfcher Ancoftam. Eux trouuentmauuais ce confeil
^tafcbent de deftourner Monroy d'vne lî mefcbantc
cntreprife. Lui au contraire réplique que la mort d'An-
coftam dcnneroit pied ferme à la domination du Roi de
Portugal en Goa. Perfonnc n'ofant contefler d'auanta-
gc'joyant mettre le no de Roi en aiiant,toi;ss'appreflcnt
pour l'exécution , môtent en dc«; naflellcspour trauerfcr
le deltroit , dcfitllent leurs cheuaux.-les font paffer à na-
£,e,cnlesconduiritntparles reines. Fernand Monroy cô-
duifoit les gens dccheual, lean Machiade les piétons.
Machiade eflant paiîc le premier , attrapa deuxpaylans,
dcfquelsiicnrenditqu'Ancoflamrepofoiten fa bourga-
de de Ponde, fans le tenir autrement fur Ces gardes, coiu-
me ne fe doutant de rien. Pourtant il exhorta Fernand
de lui permettre d'aller au pas, s'afleurant de furprendre
Ancoit3m. Fernand cllimant que celui feroit vnchon-
tc,nc voulut lailfer faire Machiade. Tandis qu'ils conte- V-
flo}entvne partie de la nirift s'efcou]e,& Fernand ne fit
telle diligence d'entrer en Ponde que la refolutionle
requeroit: aull- le hcnniifemcnr & bruit àcs cheuaux
refueilla la plufpart des hiibit:ms, de forte qu'Ancoltam
fut incontinent aducrti qu'on venoit le charger. Sou-
dain il palle vn pont ( d'autant qu'vne riuiere coule là»
feparant quelque peu la ter!c)& range les troupes. Fer-
nand entré dedans Pôde,n'y trouuât ame viuâte.LeSo-
leil leuât aiioit par les rayons dcfcouuert la trahifon des
Portugais.Fernand réconciliant fa faute , mais trop tard»
voulut tourner en arrière , après auoirainh rracaife en
vain,côfeillant Machiade de faire retraite auecfes gens.
Mais Ancoftam rcpaiîc ic pont, & donne à touçc bnUe lî
V7i Hifloires admirables
brafqucmcnt à traucrs Monroy & fi troupe qu'il rompe
iotttj& en fait tomber grand nôbrc fur la place. Les fuy-
ards. t*aufi'crentlc<; rangs de Machiade, & contraignirent
Icspiecons de fc fauueroù ils pouuoyent. Ancoftam en-
Doye incontinent vnc partie de fes gens gaigncr le de-
fhraitpar où les fuyards pouuoyent e(chapper,tellemcnc
oueles Portugais ayans leur ennemi i dos & en telle fu-
rent desfaits, plufieurs prins, &la plufpart taillez en pie-
ceSiîaifians vne belle viâioire à Ancoftam. Machiade co-
batic valeurcurement,& lit de mcrueillcux coiips de fa
main deuantque mourir.Cela faiâ:,& toA après l'Ifle de
Goa fut fourragee , la ville réduite à l'extrémité , tout
par la vilenie & audace de ce Monroy, lequel eftant fur
le poinâ: de confufion extrcmceut fecours d'autres chefe
Portugais , à l'aide defquels il r'afleura fon gouuerne-
nsent en quelque forte, oforim ai* Uure li. delhiftoire de
^MBiri02ifiepie.
C^Equ Vn ancien Payen difoitiadisj que
J 51 -uicler la iiiflice ^ le droity
Il ejî loiftble a l'homme en qttclque endroity
C'efipour rcvnir t^nU le fe doit permettre ^
An demeurant rkn de mal ne commettre ^
a efté pratiqué par trop en tous fîeclcs par les efprits am-
bitieux & conuoiteux de domination. Maisla vertu eft
louable tou(îourspar tout,& en quiconque ellelctreu-
ue.Flcftriffbnsrinuafion tyranniquc par le récit dèl'hi-
iïoire d'vn pauure Mahumetan , qui en vne extrémité
<lumondefait le procesà infinis malheureux, lefquels
fous ombre du nom de Chrcftien ont commis des maux
innombrables.François Akneide , Viceroy de Portugal
es Indes Orientales.au mois de luillet l'an if o6.vint fur-
^irauecfa flotte au portdcQuiloa, villeenlacofte de
l'Ethiopie, en laquelle regnoit pour lors vn mal-heu-
reux, qiii pourparueniràccfte domination auoitfaift
mourir
cf memorahles. j7j
Riourit fon predeceffeur. Almcidc qui ne fçauoitnen
dételle nagedie,enuoy a gens pour falu crie Koydeïa
part, mais ce Roy troublé de ramefchantc confiience
fortit de nuid hors de la ville. Almeidc s'eftant emparé
de la ville , & entendant les deportemens de ce fugitif
eftablit vn nouueau Roy, nommé Mahumct AnconjUèi*
gneur fort agréable à ceux de la ville & du pays, à cauie
<le fa fidelité,prudence & prcud'hommie. Icelui ayant
efté couronné roIennellcmét,vintraluer à fa façon Lau-
rent Almeidc , & le pria de vouloir lafcher tous les Ara-
bes détenus prifonnicrsccc qui lui fut accordé. Orcofii-
me il remercioit Almeide de telle courtoifie, en prefea-
ce de plufîeurs Portugais , il fit la harangue fuiuante au
mefme Viceroy s Tay eu (dit-il) grande intelligence, a-
mitié & cftroitte alliance auec le feu Roy Alfudail, que
ce tyran, par vous dechalfé du royaume, tua tiaiftreuîc-
•âTient.Si Alfudail viuoit, ie lui quitter ois fccptre & cou-
ronne: carie ne fuis pas celui qui vucille préférer les ri-
cheflcs &: popes royales à la fidélité & au rcfpeift que ie
dois porter à monfuperieur. Mais puis que ce Prince cîl
mortjie vous prie &rupplie, autant qu'il m'eil poiïïblc*
me permettre de faire venir près de moi le fils d'icelui,
pour fuccedcr après moy au Royaume. Vray ell que i*ay
des fils nô du tout indignes de tel hôneur. Toutesfoisic
les auâce pour régner après moi, & que i'é fruftre les en-
fant du defûâ:,ie me deshonoreray d iamais: & outre que
telle tache fouillera ma réputation , elle diffamera aufli
toute ma race. Pour tât l'aime mieux laifier par telhméc
à mes fils vn exéple de fidélité & d'honnefteté,quVn ri-
che patrimoine.Cefte requefte rauit en esbahifTemét les
Portugais, voyant vn Mahumetiile fc monftier fi fidcle
ami, & mefprifer ainfi genereufement les richelTesdVa
Royaume , en préférant de franche volonté fon dcuoir
enuers vn ami trefpafré,à Tamitie paternelle. Pour celle
caufe fut-il grandement eftimé de tous,&iugé digne de
régner fur beaucoup plus de pays, pour auoir ainh tran-
fporté au fils d' Alfudail ce qui aparteaoït aux fiens,
Suiuantcela l'on fit venir ce fils du Roy dcfunâ:, au-
quel tous ceux de Quiloa preftercnt ferment de fideli-
574 HiJ} cires ad?mrahles
te, du coivrentcmciit d'Almcidc pronicccans de le recc-*
uoir pour roy. ojorinsait i^Hutricfme Hure de Chijïoirede Pot"
Albert Duc de Bauicre requit inftammciu par les E-
flatsdc Bohême d'accepter la couronne,la rcfufa cxhor-
tantlcs Sci;?,neurs & lepeuplc d'attendre que le pccic
enfant Lad: fias fils du feu Koy Albert II. d'Autriche fut
paruenu en aage, Sigifinoud Roi de Pologne refufii la
couronne de Suéde; après Tcxpul/îon de Chriftiennc, ni
ne voulut accepter celle de Hongrie & de Bohême aprc;?
la mort de Ton nepueu Louys desfaift en bataille par
les Turcs. FridcricDuc de Saxe refufa l'Empire après le
decczde Maximilian I. & lui-mcfme donna fa voix .ï
Charles V. duquel il ne voulut receuoir prefent quel-
conque ni ne permit que Tes domeftiques en toucha
fcnt argent aucun.JSo/i/î«. c romor.sUidun,
AMITIE coniii(rnU.
LEs Portugais Taifans la guerre l'an mil cinq cens &
^cize^conrre les Mores & Alarbes au Royaume de-
Mavoth,les furprindrent le dix-neufiefme iour de May^/î
foudainemcntque les Mores & Alarbcs n'ayans lûifîr de ,
prcfter combat fe fauucrcnt comme ils peurent , plu-
lîcursayansellé tue? fur la place. Du nombre des ef*-
chappezeftoit Benxamut vaillant capitaine & degr.
de crtimc entre tous les Alarbcs. Les Portugais cô'.a.j .
par leur gênerai Atayde, s'eilans misiur le retour ."îuec
force burin , eilians à deux lieues de Maroch dcfcouuri-'
rent Benxamut luiui de feptante chcuaux, aufquels phi-
fîeurs autres fe ioignircnt fecours acourant à lui de tou-
tes parts. Entreles prifonniers & priibnnieres que lc5
Portui'ais emmenoyent , cftoit vne des femmes de Ben-
xamut^,nommcc Hotcbelle entre les autres , & qu'il ai-
moit aufli tout outre.Icelle commence à crier tout haut,
Bêxamut.Béxamut.Luis'airefte toutcourt,& elle ayant
obtenu congé des Capitaines de pouuoir dire quelques
mots
^ ?ncmorMeS4 ^j^
mots à fon mari , lui tinc ce langage : Combien de fois,
JBenxamut, m'aucz vous dift , oiic vous exporcnc;z vo-
ftrc ne à tout hazard , plultort que loufirir qu'on m'cni-
mcnartprifonnierc? Vousie voyez maintenant , &rou-
tesfois vousTendûrez. Qu'cft dewenuramourque voi »
me portiez? ou eft voilire promeile, & ccftc vaiUance
«dont vous fnifiez vos b'auades fi fouuent ? Le iour n'eil
pas pafle>refpondBcnxaniur, la vidoiregiftenla main
de Dieu, l'exploiâ: en la force de mon bras. Mais Hore
ietra pleine ia main dcponfliere en Tair , adiouftant ce
mot. Le vent emporte la fermeté de vos paroles: aller
donc & iouyffez à voftre aife d'vne autre femme , de la-
quelle vous faides plus de compte que de moi , a ce que
l'en puisconoiftre. Cependant ie me plaindray toute
ma vie ou de voftre defloyauté , ou de voftre couardifè,
fans que ie puiffc dire maintenant lequel de ces deux
^icesdeshonnorcplusvn homme qui doit auoirquel-
«luccœur. Benxamutderchaufla incontinent Tvn de les
fouliers, &le ictta droiclà Hôte, laftcurant par tel (î-
gne (acouftumé entre cefte nation) qu'il ne faulîcroïc
poin c la foy qu'il lui auoit proiralb. Là deiîtis fe tournant
vers les troupes, il leur fit vne harangue fort pathétique:
puiscouràti tcfte baillée dedans ravriercgarde des Por-
tugais,chargea de telle furie qu'ils fe trouueréc b.cn ei9-
pclchez de parer aux coups, Ataydequi eftoit cnl'auât-
gardeacourut celle part pour foulager Alfbnce Noro-
£ne Ion gendre lequel fouftenoit la charge des Aiarbes.
Mais Benxamut cfpiantla commodité de faire vn beau
coup apperceut qu'Atayde n auoit point de haulTc-coI,
lefieno'eftantdei'cloué. Pourtant il lui lance de toute fa
force & de telle adreiTevniaueloî qu'il lui perça le go-
fîcr &le renuerfa more iur la place. La perte Accc çrand
CapitainCjlequelauoittantde fois dcsfaitleMGres7rrou-
bîa toucd'armee , où s'cfleua vn riunultecaufc de la to-
tale desfaitedcs Portugais. C.-^r en lieu de reiîfterd'vii
mutuel courage i leurs eni;emis,iis furet Iur le poinûde
i;'entretuer, fur le débat touchant \n 'uccellcur d'A-
cayde. Mais or les accorda bien toit : car les Mores con-
tcJctcz & méfiez ci ti:oupci d'Atayde , voyant vu te^
5 'j6 Hijloires admirshles
defordre fe ioignireiu à Bcnxamut, afin d'auo/r part auif
defpouillcs : tellement que prefque tous les Portugais
furent tue?, ou pris ^prifonniers, le tout par leur pro-
pre orgeuil,∥lanîefchantc reuoltedc leurs alliez.
Norogne & pluficurs gentils-hommes demeurèrent
morts fur le champ. Bcnxamut fer etira, emmenant la
vidoire , Thonncur, le butin, & (ce qu'il eftimoit plus
<^ue toutes autres chofes ) fa femme bicn-aimee , telle-
ment que tous l'admiroyent & efleuoyent fa vertu par
dcfl'us les nues. Mais fa femme lui rendit la pareille de
cclk' grande amitié ; carcftant aduenu quelque temps
après celte vidoire, que le Xerif donna bataille au Roy
de Fez, Benxamutfuttuépourfuiuant vn des ennemis,
qui tournant vifagc, &à bride abatue, le tranfperçadVn
coupdclance. Hôte fit les obfcquesde Ion mari auec
vneinfinité de larmes & lamentations, mitle corps en
vn tepukhre fort magnifique y puiss'abftint de boire 6c
de manger neuf iours durant , ce qui la fit mourir, &
fuyuantfon commandement exprès , elle fut enfeuelie
auprès de fon mari , ejftimantchofe indigne d'eftre fepa-
rce par mort du tombeau de celui qu'elle auoit vnique-
ment aimé,& lequel lui portoit de fa part vne Singulière
affedion. Oforiui au lo.liu.de Vhijioire de Portugal , f:^io,t
Z4.^ z5.Nousreferuons pluficurs autres excmplespour
les volumes fuiuans , nommément pour celui que nous
drclfons à part, intitulé le Théâtre des femmes illuitrcs
de nolfrc temps, & delà mémoire de nos ancellres.
AMITIE foetale.
ALEXANDRE Guagnin tefmoignc auoir veu de Tes
yeux ce que nous rcprefentons ici fommairement.
Deux ieunes hommes allant de nuift per la grade place
deVilne capitale de Lithuanie,rencontrcnt deux autres
embaftonnez qui commencent à les charger. En fc dé-
fendant Tvn tue fon aduerfaire , & le fentant par terre
s'en-»
dr mémorables. 577
s*enfuit. Son compagnon eftpns& condamné à perdre la
tefte comme autheur de ce meurtre. Comme an i'tull
mené le lendemain au lieu du iupplice>& l'exécuteur àtC-
giinoir l'cipee pour le delcapitcT , voici accourir l'autre
tiui auoit fait le coup , lequel commence à dire tout haut
aux officiers de iuftjce : Laifl'ez aller ce pauure innocent:
carc'eft moy qui ai tue Cdiui qu'on a trouuë mort. Là del-
lîjb aprcs vne briefue reccgnojj'îancejil jnet Us genoux en
terre^ rend le col au bourreau (]ui lui met la teite bas , &
Ion compagnon s'en retourne libre chez, iby, Gnagninen
la defcription de Pologne.
Amour de U patrie.
IAnus Fiegofe Geneuois incité par les promefifes & re-
compenfes du Pape Iule. Il fit mafiacrer au fbrtir 'du
confèilIerormeFielque, lequel dedans Gènes renoit le
parti de France, & obti/it le filtre de Duc. Mais toll après
les Fiefques, aidez par les Adornes, chafî'erent les Frego-
/psliors dr Gènes: tellemétqu'AntoniotAdorne fut créé
Duc. Finalement les François ayans elle battus à Nouaii e
par la valeur des Suiiîèsjîe Pape Léon X.poufla tellement
a la rouë,que \qs E/pagnols ramenerét Odauiam Frcgnie
vers Gènes. lerofme 6c Otliobon Adornes frères, voyans
que c'citoit choit hazardeuie de fe confier au fecours àcs
Fran joisjdeclarerent en plein confeil, qu'ils preferoycnc
Icialutpubl c àtoutce qui concernoit leur particulier:
&pour dcfgager la ville de tout tumulte & danger de pil-
bgcpolcrent bas hs armes, fortirent de Gènes , y ayans
commandé Telpace de trois femaines : dont ils furent tel-
lement admirez & prirez,que le confeil \&s remercia tres-
alFedueufement:& plufieurs bonsPatriots le condiiifirent
fort loin hors des portes , non fans pleurer à. chaudes lar-
iDeSjfe voyans priuez de fi dignes citoyens. Les Fielqucs,
qui auoycnt vengé la mort de leur frère lerofine , )e reti-
rèrent aufli en leurs chafteaux , làns voulourieo entre-
prendre: quoyque les moyens &. partilàns ne leur de-
failliflent point. Ainfi Odauiam Fregofe entra fan$
Uruit dedans Gène*, qui Je leeeutpour Seigneur, iàns
Ôo
57? HiBoires admirables
tumuht ni perte que]concjue.P./i>«e a» Uttre llJefes hijioî^
res,^ en la i.ic de Léon X.
APOPLECTI XF ^ ^'
IE VIS vn iour certaine perlbnne ttllcment atteinte d'a-
poplexie, que le mal laifit feulement le colle gauche de
Ja tefte , ks doigts du pied droit & de la inam droite.
Tiiud.Dunm au i.liurt de lafaignce-,{h.:p.^.
Il lè tiouue àes kmmes enceintes qui au temps que
leur frui(ft commence à bouger, & eftre animé > à içauoir
à fix femaines pour le mafle & au troifielrnc & quatriefme
mois pour la femelle, (ont atteintes de légères apople-
xies. L<;5 SchoUagrajhesfur le S.cha.du l.liu.de M. Jean How
lier^des maladies internes. Outre l'exemple qu'ils en allè-
guent, ils'entrouue en tous lieux. layveuvne femme
honorable à qui cela aduenoit fort louuentjfe eftoit plul-
toft par terre iàns fenijment ni mouuement que Ton ne
i'eneftcir jpe"ceu. Ce qui lui a efté ordinaire en toutes
fès g' oficOes. Telles ap plt-xies (qu'on lui nommoit dçf"
f»:iiiarces}duroyLnt peu,Jvfuiuenoyent lors qu'elle eitoit
afTi e,6! i requcy;ccmme pour efcouter. En adion , rare-
mcntjCU \>(n\n.Lxtrai^ de mes mémoires,
Vn It:*!.- n tx mn:é Antoine demeurant i Friul , fut le-
ge emcnt r.ttcint d'rip'-p^cxiequi le tourna en paralyfîe,
ti y^tcut 3flc7. Icng temps perclus d'vne partie de ion
CcrpSo^/fX BejK-'i/cf?..!» l.lin. de la cnre des maladies» ch.^^.
Ie5 l-iLmiplcx'cs >•; t fiequentes en diuers lieux. l'ay veu
d:s hemipk<ftiqtes p-iiiez iuftement du Tentiment &
mouL-emeir dt h moitié de leurs corpsacomme fî on hs
éuft tort CL! icuîcmcnt ajiifî partis depuis le haut de la te-
lle en ba . En quelques vns Nature fe contente de rede-
mande quc'qiîCsmtmb-cs, non fi exactement: &c'elt
merueille Jes/upportsdu Tout-puifiânt en nos pauure»
corps, ^\VQ la figefle maintient fi benigncment,au milieu
de tant dcnoits dedans lefquelles nous croupiflbns.
Quant aux t/feds àcs apoplexies aiguës & fortes , nous
n'y touchons point ,mais luffira de propolêr quelques hi*
iloires d'apoplectiques guéris.
Donat
C^ mefnorahles. 579
DonatdeHautenicr , do(^te Médecin Italie^ , dit ces
mots en fon commentaire des remèdes auX maladies dt* corps
humain, le tien qu'il ne faut point appliquer de remèdes
à vneforteappoplexie , attendu que de là nature elle cft
jiiortelle , ielon Taduis d'Hippoci; tes. Mais 1! elle eft
foible, quoy qu'au relie falcheuiè à tra:tter , fî pourra' el-
le iè refondre & gueiir 3 y appliquant à poind le fècours
quiluieil propre, tefmoin Galien : comme aufîi nous
en auons gucri quelques-fois , comme entre autrexle
feigueur Fabric Maramauld, qui en diucrs temps fàifî par
deux fois & frappé d'apoplexie , fut à l'aide de Dieu re-
mis en pieds par \ts remèdes conuenablesque nous lui
donnalmes. Item la Comtefle de Rubes 3 nommée
Chrylbitome d'Aquin , Dame aagee d'enuiron Ibixante
ans , tombée en apoplexie, &prompteinentiècouruë5ea
futgarentie , recouurant d'entrée les principales fon-
dions Siconfequemment après que la defluxion fe fut
comme retranchée au corté gauche du corps , elle gaigna
le fentiment du bras & de la cuifl'e, puis après Je inouue-
inent de la cuiflè3& Hnalem.ent celui du bras. Ainfî donCj
il conuicnt mettre la main aux cures dts apoplexies légè-
res ; & d'autant que cefte paflion eft aigiië & violenteji'e-
flime qu'il faut commencer par hs moyens qui prelèr-
uent nature d'eftie totalement accablée, pluftoft quepar
le régime de viure. Ceft ce qu'il dit 4» ip. chapitre decefien
Commentaire.
Èfcoutons vn autre Médecin , lequel parle plus har-
diment. La femme d'vn honnefte citadin aageede qua-
rante-huid ans , fraifche en bon poind , & d'vne tempe-
rature chaude & médiocrement humide , fîgne d'abon-
dance de fangjfut frape ed'vne tres-forte apoplexie, dont
elle tomba foudainement comme cfteinte Quelques Mé-
decins anciens appeliez eftimoyent que c'en eftoit fait.Fi-
nalement quatorze ou feizc heures après l'atteinte , ie fus
appelle pour la vifiter , eftant encore icune,& commen-
çant à exercer la Médecine. le reinarquay vne trcs-grief-
ue apoplexie auec la relpiration fort mal-aifêe , le pouls
haut & fort, qui me fit penfer qu'il faloit efl'ayer s'il y au-
toit point remède. PourtiUit ie la fis (àigncr deux fois ce
Oo z
580 HiFioires admirables
melme iour, & tirei- bonne quantité de fangjtant: du bras
cjue du pied droitritem bailler deux clylteres aflez acres
auflî le mefiiic iour5&: les iours fùiuâs vn par iourj^appli-
quant quelques remèdes topiques. Ainfi, la pauurt tem-
me entre le huict 6c ncuHefnie iour recommença à reco-
gnoiflreiès ^omeftiques, & dire quelques mots en béga-
yant. Puis après elle fut medecinee tellement , qu'elle Te
reprint , fans toutesfois pouuoir rcgaigner ce poinét d'a-
uoir l'cntendciivent , ni \cs fens fi entiers qu'auparauant.
D'auantage elle demeura impotére des ïambes, tellement
qu'il foloit h porter en vne chaire , & vefcut en tel eibt
encore <\utV\uts ^v\n^cs.Kcmh.D'odo}t£U43(iH'è.clia.de fii oh-
ferttations medeclnales.
lerofme Fracaftor excellent Médecin & IVn des plus
dodes hommes de noftre temps , auoit guéri vne Non-
nain à Veronne abatue d apoplexie 3 lui Failànt appliquer
des ventoufes 3 & tenoit le remcds très- propre pour Je
foulagement du cerucau, paroù ce malcoinmencc Tes
efiforts. Or lui-melme eftant vn lour atteint en là maifon
de cefte violente maladie y qui lui ofta du premier coup
la parole > Ht plufieurs fois (îgne à Tes domeftiques,
portant la main fur la nucque du c©I 3 qu on lui ap«
pliquait promptement des ventourcs ;• mais n'eftant
point entendu , après auoir langui quelques heures il
expira Joucementace dit celui qui att commencement desœw^
xtres de Fracalior a eicru fuccindemenc le dilcours de /à
vie.
Vneîcune fille Ferraroifè frapee d'apoplexie fut laifi»
fee morte par les Médecins. Sa mère qui Taimoit ten-
drement, ne voulut permc'ttre qu'on l'enuelopait iîtoft
eo Ton linceul mortuaire 5 le rell'ouucnant que quelques
vns luiauoyentdit qu'en maladies foudaines 5c violen-
tes, qui oftent dVn coup le fentimcnt & lemouuemcnt,
il fie faut pas fi tort appel^er h& Prcfti es pour chanter,
tandis que les amis pleurent. La mère fît ainfî gar-
der ia fille trois iours entiers, contre Taduis d» tous:
au bout delquels la fille reumt à iby, & a vcfcu
long temps depuis, ^mat, LHfitdnHs ertju ij. cHUiCenr
tHïie A. •
u
dr memorMes. 581 •
Le Médecin d'ifabellc Roin-.* d Elpagne , & femme de
Ferdinand R ->y d'Arrngon , v.lîtant certain malade qui a-
uoit le pouls aHcz L-on,dit à ceux qui lui nffiiloyent que le
malade n'eft oit pas pr^s de Li morr Retournant le voir c^
iour melfîie au lôirjcomme il deueridoit de fà mule quei-
quVn de ceux qui ndîltoyeu au malade lui vient dire que
s'en eftùit fait. Le n-.edccinjfc confiant en fà conoifl'ance
plus qu'en paroles de ce rapporteufjmonte hardiment en
la chambre 3 où il t-ouue le patient iacouuertd'vn linge
fur la face,& veitu de la rob? d'vn cordelier,enuironné de
moines qui recitoyent de^' prières autours du corps. Mais
fans rclpcCl: plus grand de leurs cercmories il fait defcou-
urir celi hommcj^ommenceà l'ei-npoigner , & lent que le
pouls lui battoit. Pourtant le fait-il reporter fur fonlift,
où lui ayant donné remèdes conuenabîes , la parole & les
feni lui reuindrentj& veicut long temps àt\>Uii.Enlamef-
me cure f/y centitric.
APPREHENSIONS
fortes çjr véhémentes.
IE pcnfe fôuucnt & demande à par moy., d'où vient
qu'auiourd'hui , autant ou plus que iamajs ^ Xts medi-
camensjlîjrtout ceux qu'on appelle compo/ez , font trs.
telmc:ipris & deldain , qu'en les oyant feulement nom-
mer, lans les voir , fiairer ni goulter ^ tant de perfonnet
fremiflènr5paili/]"ent,& fentcnt vn roufieuement de cœur,
comme pour fendre tripes & boyaux , ainfi que dit le
VDlgaire?Cela procedejà l'auanture , de ce que la medeci-
ncffeule maiftrefle des plus grands du monde, ce dit Pli-
ne) s'z^ tant mutipliee & acouitree de fortes (îdiuer-*
it^ y que pour chaflcr rnc maladie légère & commune^
elle prefcrit maintenant vnecharretree d'herbes , de ra*
cines, de femenccs,de fleurs, & d'autres chofes de gouil
^de flair différent fc fefcheux , que, les Apothicaires
meflent, brouillent, & font aualer à leurs malades , deP-
çouftczàmcrucilles daillcurs,{ànxccla. ladis , tefmoia
Senccquc > U mcdêciuc tftoit ^ne fciencc quixe %9C.*
Oo ;
581 Hijloires admirables
tentoit de peu d'herbes. Maintenant, elle le Icrt de tant Je
reccptes , que le /èul ibuuenir ptouoquc plufieurs à le
vuider de tous coftez , fans vomitoires ni clyftcres quel-
conques. Antoine Gainier , doàte Medccm de Pviuic,
cfcntaucirveu vn médecin du Duc de Sauoye , lequel
portant des breuuages de Ja boutique dVn apothicaire en
U niaifon dVn malade s'eirnouuoit tellement de l'odeur
d'iceux 5 qu'il en eltoit purgé ne plus ni moins & autant
que s'il euH aualé telles médecines. len'eftimepas
moins' admirable & mémorable ce qu Antoine Mufa^h-
meux médecin entre ceux d'Italie, raconte iur ce propos,
de Iby-mefme^de (àmere & de ù loeur. Il m*auint (dit-il^
qu'en maniant vne Coloquinte , & louurant en prelen-
çe de ma mère 6i de ma fœur 3 nous fumes tellement ef^
meus 5 moi par ceft attouchement , elles par l'odeur,
ique chacun de nous le defchargea dixfoixauec grande a-
gitation esboyauxj comme lî nous euflîons vlédecefte
drog^je.
"le cuirai ce qui m'eft quelquesfois auenu. l'auois or-
donné à vn prcftre quelque brcuuage necefîàire pour
fbn lôulagemenr. Lui qui ne prenoit pas plaifîr à telle
boilîbn 3 tint tout le relie du iourm'a recepteen main,
peniànt & repcn/Imt au moyen de ne s'en point fèr-
uir. Sur le foir , comme fa maladie le preflbit , dé-
libérant d'aller vers l'apothicaire lui porter ce bil/et,
vn flux de ventre lui vient qui le defcharge totalc-
«lent. Le lendemain il vient tout ioyeux & riant à moy,
flie rend mon papier , adiouftant que leportdjceluilui
auoitplus aidé le loir &lanuidfuiuante, que les méde-
cines purganues de tonte vne femaine : qu'il le portoit
gaillard , & me rtrn^rrioit aftedueulèment, l'ay veu de
mes yeux vn dotke perfonnage , lequel ne pallbit iamais
pardeuant la boutique dvn apothicaire fbn voifin , que
k feule odeur àc^ médecines purgatiues qu'on y com-
pofbit ne lui lèruift de bien fort cliftere , tellement que
tout ce qu'il pouuoit faire eftoit de gaigner virement
fàmaifbn, autrement Ibn pourpoint iui eulè fcruide fèl-
]e perlée , & fbn haut de chaufle de balTin. l'ayconu
auffi vn Gentil-homme 3 qs*! ne faifanc qu'entrer & for-
tir en
^mémorables, 5?}
tir en vne boutique d'apothicaire fentoit fôn ventre .s\i-
mouuoir & lafcher teUementjque force lui eltoit d'en for-
tir pour fe defcharger toutà Thcare > tant l'odeur ou l'ap-
prehenfion de la prinfè de quelque drogue forte Tesbran-
\o\X..t_y4.nt.M'y'X^Hld. en la préface dcfon littreyintitH'lcjArtijkia-^
fa Melhidtn com^Arandomm Uortenfi^mfrti^mim, ^c.
ARMEE desfaite par
froidure extrême.
IL y a enuiron cent ans, que fcprante mille Turcs entrè-
rent par la Valachie cnRufllejOÙ ils firent àcs Hiaflacres,
rauages & pilbgeseftranges.Ceftoitau mois de Nouem-
bre. En va inftant la geHee & froidure le« vient acucillir,
& la neige commence à tomber en telle abondance^qu'il
leur fut comme impoffible d'aller auant ni arrière. Ce
leur eftoit chofe nouuelle , ayans acouitumé vn air doux.
En moins de rien'leurs cheuaux de feruice & de bagage
moururent pour la pIufparr.Qnant aux hommes, le froid
fè renforçât en tua plus de quarâte mille,qui furent trou-
uez tout-roides. Plufîeors furet auflî trouuez qui auoyent
tué & efuentré leurs cheuaux , puis arrachans toutes les
entrailles s'eftoyent cachez là dedans pour iè garantir du
froidanais en vain. Les reftes s'eftans fauuez en la Molda-
uie^y furent mis à mort par les Valaques & Polonois: tel-"
îement ou- de tout ce grand nombre n'en refchappa que
fort peu. Aucuns difent quatre ou cinq mille, les autres
neuf ou dix mille.CroTwer d^r<o. Uitre de i'h'fi nre de Vologne.
Louys Tuberon , Abbé de Dsiimitie , fait mention dV-
ne desfaite d'armée Turquefquc , laquelle perd't au mois
de lanuier il y a 90. ans & plus , es cnu rons du Danube,
plus de dix mille hommes tuez de froid, & »rand nombre
de cheuaux. Item quel ]ues m'Hi^rs à-i f(>l Jat^ y pe*-dirent
les doigts des mains & des pieis , le^ oreilles , le nez,
tranfis Se amortis par le froid. Les autres firent C\ mal
accommodez 3 qMe les Turcs firent 1 -)rs plus grand e per-
^» qu'ennui coaiba tprecedent contre leurs ennemis^
Oo 4
584 Htjlcires admirables
comme eir: meiînes Je reconoii'bycnt 6i confeflbyenten
Jeur retrairc on difllpation miiciabJe. Au â.ltnM l htftotre
de fon torps.
Ces hiltoirc<? d'armées desfaites par froit^ure me ramen-
toiuent ce qui aduintà quelques Mores l'en 1515. Barri-
gue, capitaine Portugais en la coHe de Barbarie , lortit de
Ja Ville de Safin,luiui de grofiès troupes de Mores confe-
derez pour afiiegcr certain chafteau. Approché près , ces
Mores defcouuiirent Lut le haut d vne montagne vnPrin-
ce de ces quartiers montueux qui amenoit quelques gens
de renfort au chafteau. Cela les eftonna de telle iorte que
ils Ce desbandent Se gaignent au pied , laiflàns Barriguc &
Jes Portugais au fiege. Mais ces fuyards ayans vne piuye
/ùr le do's^fans pauillons pour fe retirer au iec, haralfez du
cheminjfàns viures, & n'ayans accouftumé que le chaud,
furent faifis de froid ^ qui en tua plus de cinq cens celle
nuid-Ià. Par ainfi la crainte de mourir leur ayâr fait aban-
donner vilainement les tentes où ils pouuoyent demeurer
à couuert^les poulï'a en vne fin honteufcjaccompagnee de
déshonneur & marque de lafchete. Ojonm an lo.liure de
thiftoire de Portugal, fifl.8.
K^rmee nauale desfaite far la fêif.
ENVIRON Tan mil cinq cens & neuf, la flotte d'Eipn-
gne, Ibus la charge de Pierre de Nauarrc Admiril , ht
entreprife fur Tlflc de Zeibi , pour afleurer les nuages de
Ja Sicile ^es courfes que faifoyent les Mores. La flotte
en approcha duratit les plus grandes chaleurs , & s'eftant
rendue tout auprès fur la fin d'Aouft,! Admirai fut d'aduis
qu'on attendiltà faire defcente fu»- le foir , à caulè de l'ex^
treme ardeur du Ibleil.Garfias de Tolède fils ailhc duDuc
d*Albe, alleguoit qu'il n'y auoit plus d'eau douce es naui-
res.Car lur Teipcrance certaine que les Efpagnols auoyct
de s'emparer de l'I/le -, ou d vne partie dicelle 3 on auoit
permis aux lauandicres de faire vn grand degaft d'eau
douce ei galères. Ainfi dôc des le matin les troupe? s'ap-
preltent pour prendre terre. Les luruLûres preuoyans ce-
& mémorables. 58^
qui auint, mirent auprès des puits tous leurs cordages,
percheSi féaux & vafes de cuiure propres à puifer de l'eau,
afin que Us Efpagnois fuflcnt prjns par tel moyen. Les
Capitaines & loldats chargez de leurs armes , enrageans
de /bifgaignentau plus fort de la chaleur le çiuagejS: s"a-
mafient furieufèment en troupes autour des puits pour a-
uoirdeleau. Lesgens decheual Mores difpo/èz en em-
huÇcA^zs aeourent à bride abatue, tranfpercent ;, abatenr,
tuent i plaifir ces pauurcs altérez, qui ne pouuoient s'en-
fuir ni fe défendre , tant ils eftoyent attentifs à pui/er de
l'eauj de laquelle ils eftoyent ncantmcins frufirez à caufc
delà foulej& dts fables esenuironsjefquels ils enfonçoy-
ent& perificyent. En cit{\.c ardeur de iour furent tuez
quatre mil des plus vaillans de la flotte , a'uec leurs Capi-
taines & Colonels. Ceux qui elchapperent de la desfaire
tout accablez de ducil & de chaleur , fe làuuerent es galè-
res j où ils m.oururent pre/ques tous de foif^n'ayanf trou-
ui de l'eau douce pour fe raflàfîer tant (bit peu. L'Admirai
auec ]es troupes qui lui reftoyent fut contraint faire voi-
le en diligente autre part, pour remédier à cefte mifere.
Ky^luares GomeX^fur la fin dt* ^.liure defon hiftoire d'£fpa^ne.
Vide de Zerbi a efté fatale auxEfpagnolsjComme rhiAoi-
re de leur desfaide Tan 1550. en fait foy. Voyez ce qui en
efï marqué au chapitre intitulé , Confeil opportun mef^rijçy
jititéi de terrible ruine.
Autre armée naaale desfaite par les vents
à* flnyes.
ENviRONrifl iÇ4i.I'Empcreur Charles V.confiderantr
que lesTurcs eftoycnt trop forts du collé de Hongrie,
oùjiauoitenuoyéfccoursàfon frerc Ferdinand , délibéra
de porter la guerre aux Turcs en leur p.iys , afin de les ef^
loigner des fiens, ou du moins efcarter leurs forces. Pour
ceft effcd fur la fin de l'Eilé il vint en Italie , fit leuec de
gensaNapl6s& à Gennes,pour aller en Barbariceftimant
5 8 /î Hijlûires admirables
qu'il faloit commencer par \k ahn de paffer outre plus aP-
feurément puis après. Il prjnt fa route en vne tres-puif-
lanre flotte dioit aux Illes Baléares ,& finalement arriua
près d'Argier , ville maritime de Barbarie. Ses vaifl'eaux
portoyent vingt-deux mille pietonijAlemans & Italiens:
&enuiron douze cens cheuaux. Apres quelques elcar-
raouches j afin de gaigner lieu propre pour accommoder
lecamp^eftanc fur lepoind défaire viuement la guerre
aux Turcs, Dieu en commença vn autre: car vu foir
du mois d'Odobre, il (è prmt à pleuuoir rudement:
les vents impétueux donnans à trauers la pi uye^ de tel-
le/brte que les foldats qui n'auoyent tentes dre/Tees, ni
Iiabillemens qui peuflent refîfter à telle violence , furent
en peu d'iieures à demi vaincus. Au mefme temps la mer
s enfla & irrita tellement, qu'elle rompit les cables de
plusieurs vaiiîeaux , & en bnlà quelques vns contre \ts
bancs & rochers, auecquesgraode perte de viures & de
ioJdatf.
Le lendemain matin la pluye & les vents ik renforcè-
rent fi furieufement queperfonne ne pouuoit demeurer
en pieds : ce que voyans , les ennemis firent foudain vne
/ortie hors d'Argier le plus coyement qu'il leur futpoffi-
ble 5 forcèrent quelque corps de garde 3 & donnèrent de-
dans le camp de l'Empereur.
Les Chreftiensqui auoycnt les vents 3 la pluye & les
cnnemisentefte, ne reculèrent pourtant, ains félon ce
qu'ils Ct trouuoyent lors marchèrent refolumcnt au
combat , & firent tourner les efpaules aux aflaillans 5 qui
fcignoyent eftre rompus po»r les attirer envneembuf-
che, comme ils firent: car eftans près de certain coftau,
lesgen^ qu'ils y auoyent difpofèz , commencent àdefco-
cher flefches & cailloux contre les Chrétiens , qui nî
pouuoyent s'aider aucunement de leurs harquebufes,
âcaufe debpîuye. M lis ce qui leur nuifoit le plus, e-
l^oit rhabilete dos Mo-es , qui de vifteflc merueilleufc
fçauoyent reculer & aprocherà leuraduantage. Le meP-
me iour fortirent d'Argier q-islques cheuaux fuiuisde
piçtons mcrucilleu^e nent difpoib , & qui couroyent
âuilî vil^e que les cheuaux meûnes. Ceux-là vindreot
cf mémorables, 587
recommencer la meilee^ attirant (fous vne fuite iîmulee)
hs Chreftiens, qui ne ceflerent de les pourfuiurejiufcjues
à ce qu'ils furent près des portes & murailles. Alors s'e-
ftans retirez de merueilleufe vitefle, ils commencèrent à
faire foudre fur les Ibldats de l'Empereur vne nouuelle
pluye de boulets jde bales^de flelches & de pierres tout à
coupjdontpluiîeurs furent tuez.
Les Chcualiers de Malte & ciuelqi>es Italiens firent lors
vn merueilleux deuoir.Sur leur retraite ils furent chargez
derechef^auec perte nouuelle du coftc de l'Empereur^tant
les Turcs fpuoyent lors bien choifir leur aduantage.Cela
contraignit l'Empereur d'y courir en peribnne auec groP-
ic troupe,tellement qu'il defgagea Tes gens,&: contraignit
Jes Turcs de s'en retourner encore plus ville qu'ils n'e-
iioyentroitis.
Pendant que \ts Chreftiens ertoyent ainfi aflaillis Je
haut & bas en terre , \ç^ vaiilèaux eftoyent en extrême
penl fur la mer , tellement efmeuë & agitée des vents,
que cables ni anchres ne pouuoyent empefcher que \ts
vagues furieufes ne iettafl'ent Us vaiflèaux aux riuages,
où ils eitoyent brifez : & quant à ceux qui demeuroyent
anchrez par la force Aqs cordages , la tourmente les bat-
toit de telle furie , qu'il s'entreouuroyent , & failbyent
tant d eau que finalement ils couloyent en fond. Lçs
Mores apcrceuans ce naufrage , acoururent au bord de
la mer , pour couper la gorge à ceux qui prenoyent terre,
tellement qu'il eftoit malailë de iuger quel danger eftoit
le plus grand, ou de ce laifîèr à l'abandon de la mer cour-
roucée 5 ou de fè foumettre à la merci des Barbares deP-
|)ouillez de toute compaflion. L'Empereur efmeu de tant
de malheurs , enuoya deux mille Efpagnols pour chaP
fer \cs ennemis arrière du riuage , & fecourir ceux qui
pourroyent aborder. Mais ce fecours aporta vne autre
ïncommorfité.'car les matelots Te voyans afleurcz en apro-
chant de terre , ne refifloyent pas à la tcmpelte comme
auparauant , qui fut caufe que la plufpart de leurs vail^
féaux cfchouërent :, & que le naufrage fut plus grancf.
Ccftc tourmente engloutit (ix vingts & dix vaiiîëaux:dont
588 Histoires admirables
quatorze galères jbnlèes par le con dit des vents & des va-
lues, turent poufleesàbord. Vn accident fî pitoyable
crtonna merucilleufement J'armce ; car lors que les 16I-
dats descendirent en terre , ils ne s'eftoyent chargez d'an-
cun bagagcjafin de marcher plus à raire,& n auoycnt por-
té des viurcs que pour deux lours. Or le voyans defnuez
d'habillemens & de viures , Ja plufpart de Icuii vaiflèaux
perdusjic relie en grand dangerjlei orages , la faim, & la
fureur à^s ennemis deuant leurs yeux , ils demeurèrent
vingt-quatre heures entières en eftrange perplcxite.Deux
îours après la mer ne fut pas fi farouche , toutesfois l'on
ne pouuoit pas apporter encores des viures dedans les
rfquifs : pour à quoy remédier l'on fit tuer des cheuaux
amenez en terre , & le camp vefcut de cela l'elpace de
trois iours. Mais iln'elioit prelques point demeuré de
viures : car les vaifi'eaux auoyent elle engloutis en la mer:
Jescî^euaux moururent pour la plufpart : l'artillerie fut
perdue autc tous Çiis attellagc* , équipages jfournitures &
munitions.
L'Empereur ayant remis l'aiTieg^ment d'Argier à l'Efté
prochain enfuiuant , commanda que chacun rctournaft
vers le refte des vaifTeaux^afin de s'emb«rqujr. Mais pîu-
fîeurs Ibldats- accablez des trauaux paflVz moururent par
le chemin,dedans les boues & torrent*. Ceux qui eurent
meilleur courage trauer fcrcnt trois ruiflcaux ^ où A filoit
entrer en l'eau lufques aux elpaules , & furent trois lours
àgaignerle riuage. Tandis que les Alemans & Italiens
montoyent fur mer , l'Empereur fit demeurer en terre les
Efpagnols, aufquels ij. fe fioit beaucoup , afin de repoufler
les ennemis s'ils vouloyent approcher , & donna ordre
que hs foldats fuflent viilement tranfportez es nauires,de
peur que fi la tourmente rccommenjoit 3 le» elquifs^e
peufiènt venir à bordjioint que le nombre d'iceux cftoit (î
petit 5 àcaufequeles'autrescftoyent coulez en fond ou
îiacaflczjqu on fut deux iours à charger les galères & au-
tres vaiileaux.
- Lts premiers chargez furent les moins malheureux,
car ils hauflêrcnt les "voiles , auant que la mers'agitaft
dcrcchcf,& gaignerent le large. Mais les derniers firent
çon-
^ mémorables^. 589
contrains demeurer , à caulè d'vne nouuelle tempelte,
tellement que les cables dVne des galères de Malte ayans
efté rompusjpeu s'en falut qu'elle n'allait donner àtrauers
Us efcueiis. Toutes fois les matelots & forçats firent tant
à force de rames^qu'ils la tirèrent vn peu plus haut. Lors
les pilotes furent d'auis qu'on la laill'aft flotter à ia merci
à&s vaguesjdilans qu'il y auoit moins de danger ainfi^que
de fc roidir contre la tempefie. Trois autres qui la fuiui-
rent fè làuuerent auec toutes \ts peines du monde au port
deBagie.
Quant à l'Empereur , il attendoit que l'impetuofîté à^i
vents ceflaft quelque peu 3 afin de faire poulllT les galères
en haute met; & puis remettre à la voile. Mais ayant fait
cflàyer cet expédient fans aucun bon efteétjcraignant qiîe
la tourmente ne ferenfor^aft pour Ten^loutir lui mermes
finalement, il partit auec quatre galères qui s'efto vent
en lieu plus afl'euré que \ts autres , Ôc luiuit celles de
Malte. Vn iour après /on arriuee 3 Bugie , les galères
qui auoyent efté près d'Argier pour iecourir les autres
vaifleaux prindrcnt port auiîi , & rapportèrent que ce^
vaifleaux ne pouuans plus tenir coup auoyent elîé bri-
(èz de la tourmente des vents & àt^ vagues, \ts pièces
pouflces au riuage, grand nombre de fbldats noyez,
les autres qui s'euoyent lauuçz enterre par diuers moy-
ens, ne voyans aucun elpoir de fubfîfter par les armes,
auoyent prins Je chemin d'Argier, pour fe rendre aux en-
nemis,qui les auoyent tuer, fans en efpargner ni refèruer
aucun.
Outre tous ces malheurs en furuint encore vne autre.
Le port de Bugie n'a point déterre ni d'obiectde terre
qui le défende de l'impetuofité des vents de TEurope:
ce qui fut caufe de nouueau mefchef. Car la mer agi-
tée des vents battoit furieufement \q$ galères , tellement
qu'elles eftoyent en non moins grand péril que près de
Argier. Or il auint, de bon heur , qu'vn grand vaifleau
chargé de viures fut en cqs entre-faites chafîé en ce
port-là, ce qui vint bien àpoindpour rauidtuailler les
galères : mefmc tofl: après en prefcnce de chacun ce ba-
Seau cQula en fond , ne pouuant reûÛer k la fureur des
59© Hijlûires admirables
La mer ayant ainlî ronfle & elcumt plufieurs iours, fur
vn fbir commença à fè tourmenter ïc elcumer plus que
deuant : & tant plus la nuict croifl'oit , plus ceft élément
s'arpnfl'oitrbref elle iè courrouça de telle lbrte,que'par l'c -
pace de quelques heureschacun failbit fon compte de le:
uir là de paltureaux poill'ons. Mais fur le iour ayant voim
toure là colère , elle prmt vn autre vilàge , tellement toi.-
tesfois que les vents & \ts vaguesjpour leur dernier coup,
donnèrent telle furie contre la galère du General deSici-
le^ que les voiles & malts furent iettez dedans l'eau. Vn
tourbillon de vent aflâillit vn autre de telle force , qu'em-
poignant vn àcs forçats il lui briià l'vne des iambex 3 rom-
pit hs bancs d'vne auti e galère de Maltejtua deux forçats,
^endommagea grandement quelques autres.L'Empercur
fe remit puis après à la voiIej& gaigna Melïîne finalement.
Telle fut la fin de ce grand voyage de mer entreprins hors
de làifbn,rur la confîderation duquel le Leâeur a dequoy
s'exercer fuffilamment , pour adorer hs hauts (ècrets de
DieUj& déplorer l'infirmité à&s plus grands de ce monde.
JFIiJ}.<te Charles K .ait 6, Uurei des chroniques de Carions
AVT RE armée nauale furnommee l'inuiu-
cible j dijfîpee en moins de rien.
L'An 158S. l'armée nauale de Philippe Roy d'E/pa*
gne mit en alarme laFrance,lesPaJs bas , &]'Angle-
terre.Onlarurnommoitpartoutrinuincible; car l'on a-
uoit employé trois ans entiers à la drell'er , cftat d'vn a-
pareil admirable. Ils y auoit cent trente grands vaifleaux,
aucuns delquels elioyent de douze cens tonneaux & d'à*
wantage de milj de huid cens, & les moindres portoyent
trois cens tonneaux : & infinis moyens & petis vaifleaux
en fuite. Les vailîeaux portoyent deux mille pièces d'ar-
Jllcrie de diuers calibres auec tout leur attelage & e-
uipage ncceflàire tant fur mer ^ue fur terre. Sur cçs
^.^ifleaux eftoit embarque Alfonfe Perez , Duc de Me*-
dina
cf mémorables. 5 9 ï
dina Sidonia, gênera! de Tannée , a/Tiftc de vingt-deux
Seigneurs d'authorité, deconièiJ & d'expérience, aucc
quatorze pages, dix ieunes gentils-hommes ou caualier<Ï3
& très-grand nombre de feruiteurs. Outre-plus il eltoic
fuiui de cent vingt-neuf gentils-hommes Elpagnols em-
barquez à leurs delpens, qui menoyent quatre cens cin-
quante-fîx leruiteurs bien équipez : item de dei<x cens
vingt-fix colonels , capitaines , enfèigncs , lieutenans, &
autres princi paux membres , de trente regimens ayans
cent leptante-deux enfeignes, & vingt mille combat-
tans , de qui l'on fai(oit grand cftat , entre lesquels y a-
uoitpiufieurs appointez pour cftre de cheual ^ fuiuant
les apprefts que Ton en auoit faits en trois cens autres
vaiflèaux ou enuiron, qu Alexandre Fainefe Prince de
Parme tenoit près de DonnerKe & autres ports , &y fai-
foit charger plulîeurs harnachemens pour acommoder
Jes chenaux que l'on pretendoit trouuer en Angleterre:
outre douze cens qu'on auoit embarquez en Eipagnca
& ceux que le Prince -de Parme deuoit mettre fur fcs
bafteaux. Cefte flotte auoit pour Amiral lean Martin
deRicalde Bifcain, fort eftimé des Elpagnols. Chafque
vaifl'eau & chafque régiment auoit fon vifiteur , fôn four-
rier, fon threforier. Ion commiflàire âçs prouifîons, fbn
chirurgien. Lts officiers de iuftice eftoyent d'vn audi-
teur gênerai & /on lieutenant, d'vn aignazil du Roy a-
ucc fon lieutenant, de quatre autre agnazils, quatre
(ècretaires, fix huilTiers, vn geôlier. Alfonce deCepedcj
maiilre de camp, eftoit afTillc de vingt gentils-hommes,
afindeprouuoirfur mer & fur terre aux difficultez qui
fe prelcnreroyent,aucc àzu\ ingenieurs.Le grand Maifire
de i'artiilerie auoit fes litutenans , fbixante maiftre ca-
«onniers, & force ièruiteurs. Outre-plus vn gênerai des
chariots préparez pour la terre, & vn gênerai de tous les
inftrumens de fer préparez pour l'équipage, entretene-
inent & conduite de l'ariree , vn commiflaire dts mulets
auec deux conducteurs. Pour l'holpiral des malades il y
auoit vn genea-al adminiitrateur, fon heutenantjcinq mé-
decins, cinq chirurgiens, cinq coadiuteurs, quatre ban-
deurs de piayes, vn reuifîteur , vn grand maiftre , fbixan*
4e^deux kruiteurs : cnuiron deux cens moines de diuers
59^ Hijloires admirables
ordres, & grand nombre de prcltres.
Cefte flotte de tant de vaiileaux chargez de tant d'hom-
mcsjcanonsj pouldres, boulets, auoit aufli (b fournitures
& munition:, de viures neccfiàires pour fix mois entiers
bien largement , infinis vlkncilJesdc toutes iortcs pour
tous euenemens. Plus vn attelage complet à part pour
douze doubles canons &douze coleuurines qu'on vouloit
mettre en terrejlàns defgarnir pas vn vaifleau grand m pe-
tit. Outre ce que tous les capitaines & Ibldatseftoyent
cquippez. de pied en tefte fans que rien leur defaïUiit, il
y auoit force armes de relèrue j àlçauoirfept mjlle har-
quebouzes Schs fournimensjmille inouiquets, dix mille
lances, mille pertuifancs & halcbardesjfix mille picques.
Se tous inftrumens neceflaires pour mettre en ocuure ièpt
ou huid cens pionniers. L'Angleterre eftoit fort menacée
par cefte fiotteyqui^iointe à celle du Prince de Parme,/e-
ion l'apparence humaine eiloit inuinciblç. Défait en Ita-
licenAlemagne bailleurs 5 où furent imprimez diuers
diicours de ce grand appareil , l'on tenoit TAngleteire
pour perdue, & faifoit-on des difcours d'autres change-
mens ailleurs, voire de rcftablifl'emen^ d'vne nouueîle
Monarchie, plus grande qu'aucune autre des précédentes
en l'Europe.
Le trentiefme iour de May I588.cefte armée inuinci-
ble defînara & (è mit à la voile en trcs-grande confian-
ce , les grands vaifleaux , canons , cornettes , eltendards,
ayans cité bénis* en grande pompe, 6c les chefs & ibldars
s'ellansdilpofezà grandes iic hautes exécutions. Mais à
peine le furent-ils mis â la voile , pour tirer vers le Cap
de Crongne en Gallice , que la mer s'clineut de telle
forte, que toute la flotte fut contrainte approcher de
terre, mouiller les anchres , &: attendre le calme , ayant
perdu à cefle première lècowfle quatre vaiifeaux moy-
ens, &plufieurs autres efcartez <1>^ bril€z,qui demeurè-
rent inutiles pour la pouriinte du voyage. Ceit orage
appairé,par commandement exprès du Roy d'ETpagne»
le gênerai de la flotte fit r'embarquer tourelles troupes-
& haufl'er les voiles , ayant le vent fi 1 propos depuis le
zS* iouc de Iuillet<^u'4U c^mqiencemeiu du mois d'Aouft
lar*
é^'' mémorables] j95
rarmee defcouunt la poinde de Cornouaille. L'An-
gleterre commence à s efm.ouUoir a ce danger prochain>
& les vaiflcaux de la Koyne paioillent au porc de Plim-
niouch , mais non fi forts , ni en tel nombre que ceux
«i'Efpagne. Toutesfoisla \\Qcc\iKé prelcnte , la rcfolu-
tiondes Anglois fc voyans perdus, s'ils ne failbyent
quelque effort au befoin ,, & la commodité du vent quî
tesfauorjfoit, i:t qu'ils approchèrent, &. contraignirent
parvnebraue efcarmouche les plus auancez vaiffeaux
d'Efpagnedeicretirer, oiiil y eutdu defordre, vn des
grands gallions prins , dedans lequel eik»it Pierre Val-
desjfeigncur Efpagnol , l'vn des principaux en Tarmee,
Les Anglois trouuerenten ce galiionvne partie des fi-
nances pour la Iblde, &lesmenioires de l'ordre que le
'gênerai deuoit fuiiire ayant conquefté l'Angleterre.
Celle deuxiefine lecouflc fit que la fiorre tira vers la
manche de Calais , en intention dé joindre le Duc de
Parme, pour faire confcqucmmenr Ton grand efTort»
Mais l'armée Angloifc refoluc au contraire d'empeP
cher & rompre ce coup. D'vne part aidée de la flotte de
Hollande & Zeelandeefpiant le Duc de Parme,de l'au-
tre contrainte de hazardertout, &neantnio;nsder]>lo-
yant diucrs avrifices pour efcorner ccùe puiflance re-
doutable de chafteaux de bois voguans Tur la mer , fui-
uit, moiefta, & prcffa, comme il lui fut po{fible,la flotte
d'Efpagne, laquelle quitta Ion rendez-vous , & en quel-
ques efcanr.ouches perdit plu% de quatre mil hommes,
& dix ou douze vailîcaux. Mais cela n'eftoir rien , fi les
Anglois n'euffentefté pour lors fauonfcz d'enhaut. A-
yans appreité quelques vaifieaux & aidez d Vn vent fort
qui leur fauorifoit , ils y mirent le feu portant droit
contre la flotte îXpagnole, Scfc mettons a la\'oile pour
fuyure. Les pilotes Efpagnolsleucnt les anchres en ce
danger, hauflenthafliuementles voiles, pourgaigner le
large. L e vent (e renforce qui chaîi'e quelques vailfcaux
versZcclande, le gros prend le haut du collé de Se-
ptentrion vers Norvcgue, tirant vers E Ico Ife & Irlan-
de, nepouuantà ca-ufc ^cs vents tourner en arrière, a-
Vf
594 Hijloires admirables
yant aufll derrière foy la flotte d'Angleterre, la'mer ^f
Septentrion à caufc de rAutoinne eihicuè' ja beaucoup
de roy-mefme, & de renfort par les vents impétueux, à
aduint que cède flotte d'Hfpagne en fut le miferablc
iouèr, tellement que dix-fcpt des plus grands vaifleaux
d*icelle , furent mis à fond en la cofte d'Irlande, les
autres efchouèrent, fracaflez & affablez çà & la. De
forte que de cent trente grands vaifl*caux il n'en refla
pas trente qui peuflfent regagner TEfpagne : encore, la
plus-part de ceux qui eftoyent dedans périrent de fra-
ycur,de langueurs, de maladies. Etainfi de trente ou
trente cinq mille hommes qui s'eftoyent embarquez
penfans aller à la conquelle de l'Angleterre , il n'en re-
tourna pasla neuf efme partie : ains excepté quelque
Î>etit nombre de prilbnniers, le refteferuit de iouct à
amer, de paftureaux poilTons, de fpedacle effroya-
ble & d'inftru die n à grands& à petispour reuerer Je
Tout-puilTant. Tant d'équipages , de munitions de
toutes forces, & de prouifions comme infinies, coulè-
rent en fond auec Tartilleric d'Efpagne & Ton attella-
ge, fcs cheuauxjfcscheualiers&fes chariots : dontfu-
rent publiez diuers liuresen toutes langues , d'aucuns
defquelsjnommementf/w 3. Ut4.de Chijl. cIls derniers tronbles
de Francs , nous auons extrait vne partie de ce que àcC-
fus. Celui qui a recueilli ces mémoires- là , r'imprimez
l'an 1599. adioufte que le bruit du fucces de cefle fiente
courut tout autrement qu'il n'eftoit vrai , & que l'im-
pudence depluficurs fut telle qu'ils afl^curerentquela
viftoire eftoic demeurée à l'Efpagnol, en firent les feux
de ioye , voire en imprimèrent des difcours tous entiers
(vcrrfiansleprouerbcqu'il fait bô battre glorieux) pour
couurirlahontcufefuiteduDuc de Medine, lequel ne
trouuaaurre excufe de ccfte route enucrs Ton maiftre,
querinfidclitc & l'ignorance des matelots , & le peu
d'expérience qu'ils auoyent en ccfte mer Septentriona-
le, le défaut de fccours du Prince de Parme, la rigueur
du temps, & les naufrages. Ce font les mots de Tnifto- ^,
rien. L'Angleterre ne vitquedeloin cefte baleine effro-
yable qui eimouuoit TOceau , & ouuroicla gorge pour
touc
i
ér mémorables. ^9^
fouteftgloutir.Lci perfonncsdefain entendement re-
marquèrent là vn viiible «k merueillcux coup du ciel*
Quant au Prince de Parme, entendant que la Hotte Ed
pa« noie s'en cltoit enuoletj fans laquelle il ne pouuoic
r]c"nfaire,ni elle fans la fîene&lans lui: pour nereftcr
inuciicj remena Ton armée hors de Flandtes (ja toute
mangce)en Brabant , ou il ne fit entreprile qui valut»
Depuis ils'ingera d'entrer en France par deux fois: donc
le fucces fut malheureux & honteuxpour rEfpagnejqut
après auoir confumé vne infinité de richefîes & nombre
innombrable d'hommes 3 cuidant eflargir Tes limites , a
efté contrainte de demander la paix , laquelle lui ap-
porte ordinairement beauconp plus de profit que la
guerre.
ARMEE treJpHîJfante dijftpee,
L'An mil cinq censfoixante neuf , Selim Sultan 6.cs
Turcsjvouiant s emparer d'Allrachan , qui eft l'vne
des portions de cefte grande eftendue de pays qu'on ap-
pelle Tartane, fortitdeConllantinople le vingtiefme
jour de Mars , luiui d'vne tres-puiflante armée tcrrellre
&nauale. Ily auoit ccntcinquante galères chargées de
foldats , &fuiuiesde fort grand nombre d'autres vaif-
feaux, portans les viures & munitionSi Auecluimar-
choyent vingtcinq mil hommes de cheual, & trois mil
laniirairesjaufquclsfeioignirent quatre vingt mil Tar-
tares Precopites tous à cheual. Gefte armée ayant fait
des deftours &: longs chemins fort fafcheux, fur tout^ar
terre,à trauersdes marefts, dc3torrens& des campagnes
defcrtes, après auoir mangé les viuresjfans auoir rien ex-
ploité,diminua tcllementjà caulé de la faim , de la foif &
des maladies, que de tout ce grand nombre d'hommes
n'en retourna que deux mille à Conlîanrinople, fur U
*in de Septembre en la mefme année. Al Xandu Gha*
gmn en fa. dejcnpUon àt Turtar^^^
Pp %
l
K^6 Hijloires admirables
t^RMEE piijfante desfaiîc^.
L*An mil cinq cens quarante &vn,Ferdmand Roy de
Hongrie, délibère de faire telle viucmét aux Turcs,
enuoyavn puifTant renfort fous la conduite du Comte
Rokcndolf pour fc ioindve aux aatrcs:ce qui fut exécu-
té. Le Comte, ayant vne armée compofce d'enuiron
trente mi! hommcs,refolut dalncgcr Bude , où après a-
uoirfaitbrefche raifonnable il donna vn afTaut. Mais il
fut viuementrepouflé parles afliegez, & perdit plub de
huiâ: ceiu hommes.Quelques iours après la viUefaillit à
cftreprinfe par intelligence : mais Kokcndolf n'ayant
pas pourueu à tout pour le rendre le plus fort , cefte cn-
treprife ne feruit fïnon àefueiller d'auantagc les affic-
hez. La defTus Solyman icfould en fon confeil de faire
a guerre plus viuemcnt que iamais à Charles cinquief-
me&à Ferdinand. Il cnuoyc MahumetBafla en Hoiv-
gric& commande à Vftref defc trouuer aucc fes trou-
|)cs à Belgrade pour fccourir Mahumet , fi les forces de
Ferdinand cftoycnt trop puiffantes. BarberoulTe eue
charge de fe mettre en mer pour faire tcfte à André Do-
ré > lequel s'eûoit emparé. de diueries places fur les
Turcs , & les auoit remifes fous la domination de Mu-
leaflcsRoy de Tunes. D'autant aufli que Solyman fça-
uoit que N.Maylar,Vayuode de TranflVluanie tenoitlc
parti de Ferdinand , & fc prcparoit à la guerre , il com-
manda au gouuerncur de Nicopoli nommé Muftapha,
d'y aller aucc fcs troupes, & au Prince de Valachie d'af.
lîiler à Muftapha. Les afaires ainfi dirpcfces, Mahumet
arriua en Hongrie fur le commencement de Telle , & fe
vint camper affez près derarmcedc Ferdinand, qui e-
ftoit encores au fiege de Budci& après s'ellre retranché,
Raccommode, demeura coy l'eipace de quelques iours,
durant lelquclsles vaiiTeaux du Turc flottoyent furie
Danube,pour faire teftc à ceux de Ferdinand, lequel en
auoit plus grand nombre. Les armées eftans ainiîpro-
ches,fpecialcment fur terre , tous les iours fe drelioyent
cfcarmouchesà pied & à cheual.-en telle forte que pref-<
que or-
C^ mémorables. 597
que ordinaire ment de part & d'autre on laifloit par mu-
tuel confentcment Icsharqiicbouzes &piftoles, pour
s'efprouuer à coups de lances , picques , couftelas , & ci-'
«leterre : par ainfi la vaillance des vns & des autres apa^
roifloit.Entre autres :icciàcns mémorables , l'on en reci-
te vn,qui mérite eftre ramentu. Il y auoit entre les Co-
lonnels AUemans vn gentil4iomme Suaube nommé
Raifciacle fils duquel, icunc & braue cheualier, s'eftant
vne fois au dcfceu de Ion père fourre en vne efcarmoa-
che^faifoit tel deuoir que chacun & Ton père mefmeslc
regardoit auec eftonnçmcnt,& tous louoyent infinimêc
la vertu de ce pcifonnage que l'on ne conoifToit point.
Mais auant que refcarmouchc ceflaltj ilfutenuironné
dVne grofie troupe d'ennemis » & finalement renuersé
mort furie champ. Raifciac efmeu de l'accident d'vn(î
vaillant homme,& ne fçachant pas que cefte perte Tat-
touchaft de fi pres,fe tournant vers les autres capitaines;
Vrayement, dit-il,ce braue cheualier mérite d'eftre loué
entre tous autres,& d'eftre folennellement cntcrré^pour
auoir fi bien faid fon deuoir.Comme tous aprouuoyenc
ceftaduis, magnifiant la prouèfrc& déplorant la perte
de ce gcntil-homme,on aporta le corps mort au pere,lc-
quelfut faifi de telle douleur,quefans pouuoir pronon-
cer vn fcul mot,ains ayant les yeux fichez fur fon fils , les
fenslui défaillirent en vn coup, & rendit l'efpri ta Tm-
ftant.
Pour reuenir aux Turcs, la prefcnce de Mahumct,&
fes forces acourageoyent les aiiiegez a Bude. Quant aux
Chreftiens , encores qu'es efcarmouches les Turcs eufl
fent toufiours du pire , toutesfois eux eflioyent tantha-
rafîezque l'on aperceuoit leur dcfaide eftre prochai-
ne. Ncantmoinsils prenoyent courage par les lettres
que Ferdinand leur efcriuoit, & l'opinion qu'ils auoyenc
que l'Empereur aideroit fon frère. D'autre-part Roken -
dolf s'eftoit tellement aheurté a ce iiege de Bude , qu'il
cfperoit finalement en venir àbour. Or s'eftoyent-^'is
campez en vne Ifle , tellement fituec qu'elle cmpef-
choitles Turcs de mettre gens dedans la villc:&auoy-
cnt entre cefte Ifle & le catppde^ Turcs le plus fort dft
59S HiFi aires admirables
leur armée , à laq-uelle ils fe ioisncnt par le moyen dVn
pontdrefle fur vn deftroir d'eau lèparant l'ifle d'auecla
terreferme. Les Turcs loge? en lieu haut , ayansdef-
couuertquelcsChicftlens faifoyent afle/ mauuaisgu-
cn rjflcjdeljbererent d'aflailiiren mefme tcps les Chrc-
iliens par deux endroits , & vn iour d'efté de grand ma-
tin abordéten Tifle auec quelques fregates:,de telle dex-
térité, qu'auanteftrcdefcouucrtsils coupèrent la gorge
à plus de fîx cens homaiesmi-endormisjles autres felau-
uerentde viftefle, mais en pafl'aht le pont fort cftroift,
plusieurs furent poufl'ez de leurs compagnons mefme^
dedans Teaujoù lis mouroyeut milerablement, & ceux
«jui gaignoyent terre fe fentoyent incontinent tranfper-
cez a coups de fiefches , pource que les Turcs auoyenc
auflldcs efquifs chargez defoldatsen cert endroit, afin
de les enuclcpper de touscoftez. Tout Je camp reccut
lorsvne tei nblc alarme , eihntafTailli des Turcs en dî-
ners endroits. Neantiroinsparl'cxhortation du maiftre
t)c camp nomme Hcrbeftulf, après auoir pourucu à ce
cjuieftoitle plus nccefl"airc,les principales forccsrctoun-
nertnt en l'ille^ôc i l'aide du gênerai dts vaiflcaux Chrc-
iliûJis(qui amena bon nombre ce foldars promprement
vers vnc autre defcenre dcrifle,maugrélescnnemis,rur
lefqucls il prinr trois frcgatescn enfonça quatre à coups
de canon , tell6ar.cn t qu'ils perdirent beaucoup plus
d'hommes que les Chrefticns) Tiflc fut rcprinlc , les
Turcs chaflTcz d'icelie auec grande perre de foldats,
écdvnc partie de leur artillerie. Heibeftulf combat-
tant vaillamment es premiers rangs , fut bleffé de
trois coups de flcfclie, dont il mourut incontinent a-
pres.
Les iours (uiuans, encores que les Turcs eufl'ent efté
ïepouiTez plu/îeursfois , neantmoins ils continuèrent
leurs efcarraouches,s'af]'eurnns qu'à la longue ils \à{ït-
roycnt & desfcroyentlesChreft:ens , Ici quels fç voyans
ainfî hara/Tez fans mterualle, commencèrent a preuoir
leur ruine. Surcevn gentil-homme Hongrois, eftant
en Tarmce des Turcs, qui vouloit mal de mort aux AL
Jeiîîans,aduGrtitparvn homme feurvn capjuinc Hon,
^ memoYâhles. 599
grois , qui guerroyoit pour Ferdinand , de fe retirer ds
bonne heure auec tous les Hongrois, pource que loa
auoit nouuelles certaines, que Solyman venoit en Hon-
grie auec nouuelles forces. Ce capitaine ayant libre-
ment déclaré à Rokendolf & aux autres chefs, ces nou-
uelles, protefta, que iî Ton ne prouuoyoit à loger les
troupes en lieu plus fcur, lui & les autres Hongrois ad-
uiferoycnt à leurs afaircs. D'autre cofté , deux efpions
partentdu camp des Chreftiens, & par eux Mahumet
lieutenanrde Solyman entend en quelle perplexité e-
ftoyent Rokendolf &les fîen^. Au moyen dequoy il
faid marcher promptement toutes Tes forces de pied &
dechcual, auecrartillerie, qui de nuid vienentauec
horribles & eftranges huées aflaillirle camp des Chre-
ftiens. Les compagnies d*Auftrichc ne firent pas gran-
derefiflance : maisles Bohémiens & Allemansquigar-
doyent le pont de l'ifle fe défendirent vaillamment.
L'alarme eftantainfî inopiné & furieux, tant à caufedc
rimpetuofîté des aflaillans, que pour les ténèbres delà
nuid, ft que pluhcurs gaignerentà courfe decheual
les frégates, & que les commandemensde Rokendolf
& des autrescapicaines furent bien peurefpedez. "Lç.^
gens de pied demourans derrière, en heu de prendre re-
folutionde bien combatre, ne faifoyent quebranfler,
& parer aux coups , tellement qu'en moins de rien ils
furent efcartez & difTipez. Ceux de Bude empoignans
l'occafîon qui reprefcntoit fortent aux champs, &vie-
nent aflaillir leurs ennemis d'vn autre coftc , tellement
que l'armce de Ferdinand , qui cftoit en terre, perdit le
camp , toutes les tentes , & le bagage , auec nombre de
gens tuez çà&li. Les piétons tous efperduss'cftans re-
tirez au nombre de trois mille fur vn petit tertre fu-
rent enuironnez des Turcs le lendemain matin , hacher,
en picccs,pourlaplurpart. Les furuiuansfe rendirent à
la merci des vidorieux, qui les rctindrent piifonniers
pour en faire prefent à Solyman.
La rencontre nauale futaufTi déplorable pour let
Chreftiens,que celle fur terre: car le gênerai de la flotte
Tur^uef^uc nooutté CaEoa aiTaïUit fi funcurcoient les
PP 4
^o^ Hi [loir es admirables
vaifTeauxde Ferdinaïui, cju'cn peu d'heures i\ en mie
ciuelques vns à fond aucc grande perte d'hommes , fe
faifit de pliificurs, & contmienic le refte de fe fauucr \ i-
ftement. Le flciiue demeura couucrc de corps morts
tuczaucombatnaual , ou qui s'cftoyent içctez dedan.-î
pour euiter les mains dci îaniflairesquiles pourfuiuoy-
enr de près. Apres cefte desfaite , Calfon vogua mconri-
nent vers la ville de Pefth , & donna tel alarme à la gar-
nilon qu'ils s'enfuirent tous ,. exceptez quelques foldac?
Hongrois , qui poiipofans le danger de mort à l'amour
du butin, fe mirent à piller quelques boutiques &ma-
gazins de marchands. Mais Caflon entra incontinent
dans la place qui n'elloit gardée d'aucun homme,& tail-
la en pièces quelques vns de ces pillards trouuez parles
rues : puis fit tuer toute anie viuante , fans efpargner lc5:
femmes, ni les malades, fors quelques perfonnes vigou-
reurts,ieuncs, & de belle taille , que Ton^jarda prilbn-
jiiers pour receuoir le traitement que les Turcs ont a-
coullumé défaire à ceux qui tombent en leurs mains.
Ceilic guerre emporta plus de vingt mille Clireftiens.
Les lurcsy gaigncrent trente fîx double canons, cent
cinquante couleurines, & autres pièces de campagne,
item vne incroyable quantité de poudres, boulets, ba-
ftons,&: autres munirions de guerre. Kokendolf malade,
lors que ce rauagc luruinc.fut emporté par Ton médecin
& ton valet de chambre en \ n efquif , & fauué en vne
lflc,pu!s de là en vne bourgade afiez efloignee , ou il
iiiourut bien toft après.
Solyman cftoit lors en chemin pour venir en Hon-
grie, & au cinquiefme iour fuyuantarriua près de Bu-
de ayant fait vn fort long chemin en peu de iours. In-
continent on lui prefente les prifonniers , au nombre
dchuidcens, lefqucls il fit hurer entre les mains des
gouiats de Ton armée , qui efgorgercnt & tuèrent à
coups de dagues &: d'efpees ces panures miferables : &
pour defpitcrcncor plus la nation Alemâde.Solyman fit
choifir le plushaut&: pui/Tant Az tous ces prilbniiiers^
yiarif du terroir de Nuremberg, puis anpella vn nain ier-
iwiudepaircceir.psùfcs enfansj lequel naacignoif pas
de U
^mémorables. <^oi
ae la tefte aux genoux de ce foldat, & lui commanda de
tuer ce prifonnier, voul.it inefler le plailir auec ^^^ cuau-
té.Lc nain tenant au poin vn cimeterre conuenable a la
ttature , commence a fraper fur les iambes de ce milcra--
ble: après plufieurs coups le fit tomber p ai" terre, ouk
Tacheua à toute peine, faoulâtd'vn fi malheureux Ipe-
aacleles yeux de Solyman & de fcs troupes; Ainli péri-
rent tous ces prifonniers, exceptez quelques capitaines
& gentils-hommes en bien petit nombre, qui efcbapc-
rent depuis par argent ou par rançon. Apres ce cruel ex-
ploit, ^olymancnuoyn au petit Roy trois cheuaux ri-
chement harnachez , trois grandes robes de drap d or &
à chacun des feigneursde Hongrie vne longue robe de_^
grand prix & vue chaifne d'or. Ceux qui portoyent.cs.
prefens prièrent la Roinedela partde Solyman d'en—
uoyer au camp le petit Roy acompagné des Seigneurs;
qu'elle s'alFeuraft qu'on feroit bon trai(^lcment tant à
cile,qu àfon fils. La Roinceftonnee d'vne telle deman-
de ne fçauoit que rcfpondre : mais George Euefquc de
Varadinfon pn'ncipnl confeiller , à caufe de tous ces rc-
muemens en Hongrid'exhorta d'enuoycr Ton fils, ahn
d'cuiter quelque plus grande confufion. Elle fuyuâr ce
confeil fit magnifiquement parer le petit enfant, & 1 en-
uoyaaucc fa "nourrice , & quelques dames en vn coche,
fuiui des Seigneurs aufquels Solyman auoit fait des pre-
fens. Solyman enuoyaaudeuant, comme par honneur,
quelques troupes de gens de cheual , 8c fit rager en bel-
le ordonnance tous fes la nifl aires , afin de recuciUir &
faire paflnge au petit Roy & à fa compagnie. Eftans ve-
nus en la tente de Soiyman,il regarda nttentiuement,&
d'vn œil allez doux, ceft enfant, parla quelque têps fore
amiahlemcntauec lanouincc, commâdai resdcuxhls
Selym & Baiazct, lors prefens, d'embrailer & baifcr l'en-
fant.Alaispendant ces carefû s,& que lesfeigncurs Hon-
grois difnoyentaueclesBaflasjil enuoya pr«mptemcnt
des compagnies de gens de pied & de cheual s'emparer
dcBude, & toll après Ton lieutenant fit pofcr les armes
aux habitans, fan's aucun bruit, ^ les mit en lieu propre
Tous la puilTaacc; diitribuaa; (cb ioldacs endiuers ça-^
^oi Hijloires admirables
«iroits de la ville , ou ils le comportèrent douccmcnr^ c-
ftans contenus en dcuoir par la difcipline militaire : en
telle forte ncantmoins que ceux de Budefe trouuercnt
mcrucilleutement pcrplex en vn tel changement.
Commelanuirtapprochoit, Solymanrenuova le pe-
tit enfant,auec fa nourrice, & les dames en la ville : mais
il retint les Seigneurs au nombre dcfquels elloit l'Euef-
querufmcnrionné. LesBaiîas quiauoyentioyeufement
difiié aueceux,changerent incontinent de vifage, & cô-
menceréta interrogucr orgucilleufement ces feigneurs
touchant les plus importans afaires du Royaume. Sur ce
la Roinc efcrit à Solymanjlefuppliant en toute humili-
té de fe fouuenir de fa promefTe , & de renuoycr les Çti^
gneurs.Cepcndantjlui délibère en fon confcil touchant
Tordre & l'eftatauquel il faloic laiflcrla Hongrie pour
s'en bien afleurer; & ceftecôfultation dura quatre iours.
Au bout defqucls , & fur la fin du mois d'Aouft de l'an
1^41. Solyman, entré dedans Bude, facrifie à Mahumet
dans le grand temple, commande à la Roine de fortir
de la ville & du chafteau,en vn quartier de Hongrie de-
là la riuiere Teiffa, quiluifut affigné pouf Tcntretene-
nient d'elle, 8d de fon fils :1a Roine n'ofa délayer, ains
ayant laiffé toutes les armes & munitions de guerre en
lapuiffance de Solyman , fe ret'ra auec grands regrcrs,
acompagnee des feigneurs de Hongrie, que ce tyran en-
uoy après elle. Telles furent les reuolutions de ce mi-
Icrable royaume , & les lugenicns de Dieu fur les vns &
les autres. Hijl.de uoirrie. Depuis ce temps lufqucs i
prcfenr,par Tefpace de foixâte ans, fous l'empire de Fer-
dinand,de MaximilianlI. & de Rodolphe II. ce pau-
«re royaume ueHôgrie,iadis l'vn des plus plaifans,com-
inodes& riches pays du monde, a tfté fourragé parles
armées des Chreitiens & des Turcs, qui ont fait fur ceil
cfchafaut de guerre tous les ades d'hoitilité qu'il ell
pofl'rble d'imaginer. Les autres pays voifinss'en font
fenns. On a fiit desincroyables Icuees d'hommes & de
deniers de part & d'autre. Le grand gouuerueur de l'v-
riiuers exécutant p?r tels inftrumens , que fa fagelle a
dtpure/ pour tel cffeft^lcs iiîitib de fa redoutable iufti-
•Cjconue grands ficpcàs. i^^ Mr
\^ RM EE grande ruinée pltfs par elle mef-
me.que par fes ennemis,
L'An 1587.1a France eftoic pleine cie gens de guerre.
Le Roi tenoitvnc armée près de fa perfonne , ayant
plus peur de la Ligue cjue d'autres ennemis.II y en atioit
vne autre en Guyenne fous la conduite du Duc de loy-
eufe. LcsDucsde Lorraine& de Guife auoyentlaleur
pour coftoyer celle qui vouloir entrer en France. Quât
au Roy de Nauarre(a prefent Roy de France)ilr'afrem»
bloit Tes forces en Gafcongnepour venir en Poiélou^où
le Prince de Condéje Comte de SoifTons, le Vicomte
deTurenne,le Comte delà Rochefoucaud, le fîeur de
la Trimouille&autresfaifoyentvn grand amas. Le Prin-
ce de Conty rccueilloit des gens au Maine , & ailleurs,
pour aller ioindredes Reiftres. Onamafloit vnc armée
en Languedoc, & des troupes en Dauphine.Reftoit pour
lurchargeà la France Tarmee Allemande, de laquelle
cftoit clrcf le Baron de Dona , & en Nauarrele Duc
de Bouillon , affiftc de dix ou douze feigneurs Fran-
çois. On cftimoit cède armée compofee de cinq mille
Reiftres , ou chcualiers Allemans,cinq mille Lanfque-
nets , douze ou quinze mille SuifTes en trois regimens,
deux mille harquebufîcrs François , & quatre à cinq
cens maiftrcs. Le fieurdc Chaftillon ayant trauerfé
de grands dangers depuis Languedoc iufques en Lor-
raine , auec vne petite troupe de feptà huift cens hom-
mes , s'y joignit fur la fin de Septembre. Cefte ar-
mée fit quelques degafts de villages en Lorraine , mais
point de notable exploit de guerre , & faillit au pont
Saind Vincent de combattre & desfaire le Duc de Qnu
fe, lequel fceut dire depuis, que s'il euft eu lors tel a-
uanragcque fes ennemis, il les euft chaflez iufques en
Alcmagne. DesTentreeen Lorraine ceft armée tut a-
cueiUie d'incommoditez. Son gênerai cftoit vnieune
§eiotie\ir,i>ott encore façoaaé aux afjjires, peu rçfpc^é,
•^o 4 Hijioires admirables
oui perdit toft aprcs par maladie le Comte de la Marclr
fon frercpuirne,liardi;& de grande cfpcrancc. Le chef
«les Reiftrcs^fîmple gentil-homme, vaillant de Ta per-
lonne,do<ftc & de bon iugement^mais peu entendu aux
afaires de Frâcc,trop foible pour porter fi pesât fardeau,
ayant la ligue en telle , & quelques gens autour de loi
qui lui failoyeju de mauuais officiers. Les pays, par ou
Tarmee pafloit,eftoyent defolez , & les Ducs de Lorrai-
ne & de Guife firent rompre fours,moulins, & ofter du
chemin tout ce qui pouuoitaccômoderles Reiftres^qui
en tout leur voyage ne moniherent gueres de conten-
tcment.Ils'y trouua toufiours quelques cornettes qui a-
uoyentbeaucoup derefolution &nedemandoyentquc
combats, eftans incitez par le fieur de Chaftillon & au-
tres.Commc près la ville de Chaftillon fur Seine,il y eue
vneefcarmouche aflez rude au defaduantage de la Li^
gue.De la on vint à Ancy le Franc ,d'ou l'armée tira vers
la riuiere d'Yonne qu'elle pafla,receutadu!s du Roy de
Nauarre de montera la fource de Loire, ou il eiloic
<lelibcré lui venir au deuant,lafaifoneftoit pluuieufc
3u commencement de rhyuer,& y ayant beaucoup
«l'artillerie, faute de vinres,leschefsiireiolus , les trou-
pes marchcrentjle confeil remettant à fe refoudre furies
occaûons. Faute de diligenter on perdit en vingt-qua-
tre heures la commodité du paifage de Loire à laCha-
Jfité,où Id Roy prouueut fi bien, que les Rciftres & Fran-
çois n'oferent en approcher,non plus que de quelques
endroits gueables.'de Loire en ces enuirons , à caufc
que les chefs ne furent prompt à marcher d'vn mefme
pied: les vns ellans d'aduisde diligenter, les autres v-
fans de délais & remifes.Multitude de chefs efgauxen
Vne armee,où dont les vns portent laloufie aux autres,
cft trcs-p cri lieu fe : comme cefte grande armée L'expéri-
menta. Près de Neufui, celui qui poitoit la parole au
confeilpoiir les Alemans fe plaignit des fauue-gardes,
quel'on donnoit aux gentils-hommes François, pour-
ce que c'eftoit aflamer larmee , demanda la paye d'vn
mois,autremenr ils ne pailereyent point outre, pjopo-.
fa pjuficuii dithculcci lui le palfage de Loue , & qu'U
«y
é^?nemorables, ' 60^
n'y auoit plus que deux mois pour tenir la campagne,
lis furent priez d'attendre qu'on euft recharge du Roy
de N^uarre, & que cependant Farmee iroit faire feiour
en BeaufTe , où il y auoit des bleds & du fourrage. En
ce mefme temps les Suifl'es priuez de Tielman leur Ço-«
lonel y decedé de maladie , firent efcrire par Ton lieute-
nant au fieur de Cleruan ( au nom des trois regimens)
qu'ils eftoycnt refolus défaire entendre au Roy les rai*
Tons de leur voyage en FrancC;&: pour ceft effed lui en-
uoyer des Ambaffadcurs : ce qu'ils exécutèrent puis a-
pres , combien que cela fuit tres-fufpeâ: auxieigneurs
& gentils-hommes François, & aux Colonels des Rei-
ftre«.
L'armée eftoit en ce temps,à fcauoir au mois d'Odo-
bre^fur les terres du fieur de ChaUillonJequelfitouuer-
ture premièrement pour furprendrclc Duc de Guiie,
qui s'eftoit allé loger auec deux ou trois cens cheuaux
dedans Chaftcau renardrmais on allégua en confeiltanc
de difficultez,que ce deffain, tres-aifé à exécuter, fut rô-
pu. Toft après il drcflavn autre cntreprife, pour enga-
ger au combat les Ducs de Guifc & de Mayenne (qui a-
uoyentleurstroupesfortefcartees, aufquelles onpou-
uoit enleuer prefqucs tous leurs logis auec peu de dair-
ger) auant qu'ils fulTent plus près de l'armée du Roy ou
deMontargis, qui pouuoit lesfauorifer. Mais c« coup
fut encore rompu par ceux qui imaginovenr le péril
trop grand, & (comme Ton dit) faifoyent leloup plus
grand qu'il n'eftoit. Le vingtfepticCmc iour d'Odobre,
prcfquestous lesfeigneurs de la maifon de Guife, &
autre chefs delà Ligue , quiiufques lors depuis le monc
fainâ: Vincent, auoycntlogefort àl'elb.îrt, vindrcnt a-
uec quinze cens cheuaux 'X cinq mille harquebuziers,
fe rendre à Montargis & es enuirons, au delà de la ri-
uierede Loing , laquelle eftantenrre deux cmpefchoic
Tarmee d'aller i eux, & au contraire leur donnoit com-
modité de paflcr à volonté versTarmee , parce qu'ils :^-
uoyent les guais & paflages :î leur commandement : au
moyen dequoy ils firent entreprife fiT le Baron de Do-
ïxalogé auec fept ou huid cornettes do Reiftres dedans
^o6 Hifloires admirahtes
Vimorry,a vne lieu è & demie de MoïKargis.IIs y arr/ tin-
rent fur le foir. A l'alarme les ReirtresTcrallierétprom"
ptcment à leurs cornettes , tandis que les gens du Du6
de Guife s'amufoyent au bagage. Le Baron fît pluiîeurs
charges tant à rinfanterie,c]U*à la caualerie;Ia première
fut fur le Duc de Mayenne,lequel faifoit la pointe. A cc-
fte charge les Rciftres firent vaillamment , & fans le ton-
nerre & la pluyc la perte eftoïc grande. Lesaflaillans
ylaifrercntfurlaplace près de quarante gentils-hom-
mes, & enuiron deux cens argoulets &fantafrms,auec
trois cornettes.il y eut cinquante Reiftres tuez, enuiron
cens valets & trois cens cheuauxdechariotpcrdus,auec
quelque bagage. Le iour venu vne trompette vint de-
mander les morts de la part du Duc de Guifejefchâge de
prifonniers,& les trois Cornettes. Ce dernier article fut
refufétles morts furerttenleuez:quant aux prifonniers de
part & d^autre le temps en fit la refolution.Mais les Rei-
ftres allèrent fe prefenter deuant Montargis, ofFrâs le cô-
bat de iour,& après auoir attédu vne heure/ans que pcr-
fonne paruft , fe retirèrent. Cefte perte de bagage & de
cheuaux à Vimorry fit derechef mutiner les Reiltrcs , &
fut tout le refte de l'armée bien empefché à les appaifer.
Les Ambafladeurs des trois Regimens de Suifles(qui
liaifoyent moitié de l'armée) eftans retournez deucrs le
Roy, lequel auoit traitié auec eux pour l'entremife du
Duc de Neuers , firent changer à leur arriueele courage
deleurscompagnôs,qui cômencerent à fe mutiner tout
ouuertement & demâdercnt trois mois de paye, ou con-
gé. Le Duc de BouiUon/on confcil , les colohncls des
Reiftres s'employèrent tous à appaifer cefte efmcutc;
mais ils n'en peurent tirer autre chofc , finonqucccs
Ambafladeurs retournèrent encore vne fois vers le Roi^
capitulèrent pour eux^Sc peu de temps après les vns prin-
drent parti auprès du Roy , lesautres retournèrent en
SuifTe, où depuis quelques vns de leurs Capitaines fu-
rent décapitez. L'armée diminuée de plus de la moitié
par cefte feparation àc Suifl'cs.fort haralfce au refte, & fe
iesbandant à toutes heures y à caufe des incommodi-
^ez il longues , & quilereocloyentinrupportables,le9
t^ mémorables» 607
'éVcfsrefolurent de ne dcfcendrc point plus bas , cariis
eftoyent près de Chartres : preuoyans que ii Ton venoic
leur donner bataille il y auroïc raanifefte hazard pour
eux. Le Duc de Guife fore en infanterie & caualerie,de-
fîroic quelque renfort pour remporter vne vidoire fî-
gnalce&du toutafl'curec.Maisilne vouloir rien bazar-
der, fc referuant à d'autres entreprifcs , ioint que laprc-
fence du fieur de ChaftiUon Tarreftoit court , quand il
cftoitqueftiondcpcnferi combatre en bataille rangée.
Quant au Roy , quiauoit fans coup ferir misbasvne
moitié de l'armcc par la capitulation auecles Suifics , il
fouhaitroit que les Seigneurs de la maifon de Guife
jouitaiTent contrelereftcefperantque quoy qui en ad-
uinft ce feroittouficursaduantage pour lui. Mais il ne
vouloir pas prefter Tes armes au Bue de Guifcqui eiUnc
trop fort eut eu vne vidoire à trop bon marché , ce qui
l'euft fortifié plus que le Roy nepretendoit, les dehaa-
ccspareiOantes defîa entre eux.
L'armée auoitprinsiour au 24.de Nouembre pour
rebroufler chemin. Aduintquele Baron de Dona le lo-
gea dedans le bourg d'Auneau près de Chartres auec
Icpt commettes de Reiftres. Le Duc de Guife cmpojgnâc
ceftc occafion marcha de nui<ft en diligence , & fans que
les Reiflress'cn apperceufl'entietta force harquebuiiers
dedans le charteau,où les payfans s'eftoyent retirez , qui
auoyent promis aux Reillres leur fournir des prouifions.
Au poind du iour , comme le bagage des Reiftres for-
toit,le Duc donne le fignal à les harquebuiiers au Cha-
fteau,lefquels entrent par la porte du bourg trouueeou-
ucrte,&: fans refiftance, pource que les Reiikes eftoyeac
en leurs logis, prefts à monter à cheuai. Ces harquebu-
iiers fe coulans par les rues donnent dedans les premiers
logis; fur quoy les Reiftres prcnans Talarmc montent i
cheual : mais ils trouuent la porte fai/îc, & les rues era-
pefchees de leurs chariots : de forte que pourxftrele
bourg clos,iIs ne peurent fe ioindrc , ni gaigner la cam-
pagne. Le Baron fuiui de quelques vus, ik ictrouuant
des premiers à la porte perça ceux qui y cniroyent:mais
aufli toft la porte fut ferrée. Les Keftrcs enclos cou-
royent i cheual autour des murailles , pour g;ouviei
^oS Hifioires admirahles
cjuelqucpafiagc , à fautcdcquoymontoyentfurlesf-i^'
les de leurs chcuaux, puis fur la muraille , dont il fe iet-
toyent dedans le foHe:6c ainfi aucuns elbhvippcrér. Leur
cornette générale, &vne autre furent fauuecs par ce
moyen: mais prcfques tous les Reilhes de ces deux C< -
n êtres & des cir q autres (entre ^efquels y auoit plL-
fieurs gcntils-honmies Alemans)furentprinsou rue/ a
uec leurs valets Jeurs armes, cheuaux & chariots dcmeu-
rans pour butin aux furprenans. Le Baron fît alted de-
mie lieuë de là,ralliant le'; efte defcsReiftresrles Lanf-
quenetsferangerentpresdelui , puis le fîeur de Cha-
itillon, lequel eftoit d'aduis qu'on appellaiHerefte de
l'armée, & qu'aucc l'artillerie on inucftift foudainlc
village , ou les foldats eftoyent après le butin. Mais il
n'y eut ordre de rien obtenir, ains fut refolu de fe met-
tre en chemin. Il y eut beaucoup d'afaire à contenter &
l'afl'curer le relie des Reilhes.Sur le commencement de
la retraite le Duc de Guife&les liens firent quelques
charges : mais ils furent fouftenus & icpouflcz parles
iîeur*s de ChaftiUon & Monluet.
L'armec eRant en chemin arriua le fîeur deCormont,
pnfonnier auparauant,enuoye de parle Roy,lequel pro-
mettoitfeure retraite aux Alemans & François, moyen-
nant qu'ils lui rendiffent leurs enfeignes & cornertes.
La plufpart des chefs ( tousafiemblez pour adiiifcr à la
rcfponfe) eitoyét d'aduis d'encliner à ce qu'on leur pre-
ientoit, alleguansTeffroy &lc dcfordrede l'armée: que
pluiîeurs gentils-hommes François s'eiloycnt ia retirez
&feretiroyent par chacun ioursenleurs maifonsrquc
l'oun'auoit point d'allcurance de plufîeurs parmi le(^
quels o\\ elloit.D'auantage de cent les dix n'auoyen t re-
folutioiiafleureepour le combat , les chemins eftoyenc
pleins de bagage, les cheuaux haraficz , il faloit faire de
longues traittes poureflongner l'enricmi , il ne fe trou-
uoit point de guide pour monftrer les chemins , & me-
ner aux villages, leslogis cûoyehtlongs i trouuer, les
vns s'arreltoyent dedans les bois , ou aux premières mai-
fons rencôtrecs , il ne fe trouuoit ni pain pour les hom-
mes,ni fourrage pour les cheuaux, beaucoup de montu^
re»
Cr memorahles, Co<^
' resfe perdoyeht faute d'eltre ferrées , il fJôit paffer qua-
tre iournee^ de bois 5 Jes harquebuziers & fantafTins ne-
ceflaires pour la tefte & queue de l'armée diminuoyent:
tout le régiment de V]lle-neufue, Hls de Cormont , s'e-
ftoit desbandéjri'y auoit que trois ioursjà caufe de la pri-
fbn de leur mailtre de camp , celui des fieurs de Chaftil-
lon & deMouy fefondoit^ laplufpart eltoyent fans pou-
dresj5c n'y auoit moyen d'en recouurer,Ies harquebouzes
de plufieurs eifoyent comme inutiles pour elhe rompues
ou defmontees ^ & ne reftoycnt pas deux cens bons har-
quebuziers : deux mille Lanlquenets rel^ans eftoyent
delarmcz. Tandis que l'on eitoit en ces difputes, le Duc
d'Eipernon s aduancoit pour le Roy auec huid cens cui-
raflesj& autant d'argoulets. Depuis la refolution dere-
broufl'er chemin luiques à ce confeil ;, il y eut d'interual-
le hui(fliours entiers : & des celte refolution iufques i
Lency en Mafconnois où l'armée Te desbanda on marcha
cinq iournees , à fjj^auoir iufques au fixiclire de De-
cembre.
Cormont retourné auec vn autre député du Duc
d'Efpernon , Ton fema vn bruit que larmee eltoitinue-
ilie, ceque le fieur Chaftillon réfuta, defcouurant les
artifices des ennemis qui elfoyent dedans l'armée mef^
me 3 & fit afiez entendre que la difïipation ne venoit que
dei trailtres. Puis voyant que d'heure à autre on chan-
geoit la capitulation , & qu'il n'y auoit point de ieure-
té, nommément pour luy , recherché plus que nul autre,
& que melines quelques Reiftres vouloyent l'arreller;
ilfedesfit de leurs mains, feioignit à fà petite troupe,
gaigna bien a fonaife le rendez- vous à laind Laurent,
d'où en ciptiq lours il paruint ( maugré les empeichemens
que ceux de Lyon & autres lui donnèrent , fe faifant che-
min par tout i coups de eouiielas ) iufques en Viuarais.
l^'iAc Décembre la capitulation du Duc d'Efpernoa
auec les chefs & conducteurs de l'armée fut conclue
contenant que les François rendroyent leurs cornettes
pour eilre portées au Roy : celles à^% Reiftres leur e-
rtoyent laiflces 3 condition de les plier, & pafie-port
donné iufques à la frontière plus prochaine. Le reftene
6jo Hijloires admirables
contenoit rien,cjui vaille le rccit. Quant aux Reiftres Ja
plufpart moururent par les chemins. Il en fut deiualjfc &
tue grand nombre en Sauoye 5 & ceux qui arriuerenten
Jieu de feurete j & chez eux , ne la firent gueres longue , k
cauiè de leurs mefailès.Le Duc de Bouillon aagé de if.ans
mourut à Geneucj où leBaron de Dona ièiourna quel-
ques iours^Sc a vefcu long temps depuis^ mais deièliimé i
caufe de Ton malheur. \^qs ibidats François moururent
aufîi pour la pluipart.Vne autre bonne troupe de Reiftres
ûyansprins la route de laFranchc-Comté fut pourfuiuie
par leDuc de Guife & autres, iufques en la Comté de
Montbelliard , & fe iàuua auec beaucoup de difîicultcz.
Ainfî print fin cefte grande armée desfaite & ruinée pro-
prement par foi-melrne. H//?, de France,fous Henri ^.jUr la,
finderml^^l'
ASSOPISSEMENT epange.
NOvs ne parlons point ici delà léthargie, hemiple-
xiejni apoplexie , mais de cefte ftupeur, ou de l'en-
dormillement que Us Médecins appellent Catochus , ou
Catalepfisjdont nous reciterons quelques exemples, lai(^
lans aux dodes la recerche èes caufes de ce mal merueii-
leux,& des remèdes à icelui.Ferncl dit auoir veu vn hom-
me atteint de celle maladie , qui durant l'accès d'icelle e-
ftoit tellement afl'opi qu'il ne diioit mot quand on lui
arrachoit le poil,ou qu'on le piquoit rudement à pointe»
d'elpingles & d'aiguilles : mais eftant eiueille & hors de
ceft accès il fpecifioit par ordre tous les maux qu'on lui a-
uoit taits durant ceit aiîopirrement.u/âf;< $.lin.defa Patholo-
^îeschaptl.
Il adiouftc encores en ce mcfine endroit deux hiftoi-
res. Certain perlonnage fort aftedionncà l'eftude, &
tres-atrentif à fueiHetter desliures, Ibudainement at-
teint de et mal demeura tellement aflbpi txroideeftcndu,
que làrs bouger de fà chaire , auec la plume entre Tes
doigts , les yeux fichez iur vn lii.re o-i'ert , on penfoit
qu'ileftudiaftà bon elotnt: mais quant on vint l'appel-
Icr &pouIîèr sfin de le mentr ailleurs , il fut tronué fans
œouue-
^ ffiemorabks. 6n
inouuçment & fenriment. 11 uit en auoir vifité vn autre>
couche comme iî c'eult eflé quelque mort, qui ne voyoit
& n'oyoit goûte , ni ne ièiitoir poiiicure quelconque que
onluiiîih Neantmoins il rcipiroïc ailcment , & aualoit
promptemenc tout ce qu'on lui mettoit en la bouche. Si
on le leuoit de Ion liit,il dtmeuroit debout tout feul ^ &
jmarchoit s'il eitoit poufleren quelque façon ou part qu'on
lui tournait la mam^lc bras,ou la cuifle,le mébre ne bou-
geoir , ains demeuroit ferme comme iî l'on Teufl cloue'.
Vous TeufTiez pris pour vn tantoiine , bu pour vne ftatue
cheminant par artifice.
Tay veu vn vieillard atteint de cefte maladie,qui les yeux
ouuertsj le corps droit & ferme mangeoit & beuuoit> e-
ftendant fà main au plat& au verrerlans autre mouuement
ni fèntimentjSc iî roide qu'impoiTible eltoit lui faire bran-
fier le col ni la t^ikçaacot.fitt le y.aihor, du z.uu. des Coa^ues
ASTROLOGFES ludiciaires.
ANtiochus Tibertus ailrologue , ayant prédit de iby-
raeime qu'il feroit maie lin, iè meila vn iour de dire i
vn grand leigneur Itahen , nommé Pandolfe Malatefiei
qu'il feroit banni. Ce ièigneur irrité de telle prédiction.
Fait empriibnnerrAilrologueiauiquel on fît le procès , &
fut exécuté à mort.Pjo«ee^/e5 f/o^^ei.Bartelemi Gocles a-
flrologue^ayant prédit qu'il ièroit'tué ^ & à certain nom-
mé Copon, qu'il commettroit vn meurtre, vn Seigneur
Italien fit tuer quelque temps après par Copon ceil ailro-
ïogue.P./o«ee»Jè5£/(?^f5.Muleaflei roi de Tunes , durant
fon feiour à Naples où il faifoit delpenlè deàiieiùrce &
nienoit vne vie eitrange^ellant adonné auffi à l'aitrologié
iudiciaire , prediiît que bien toilil léroit débouté de loii
royaume,& que quelque grand malheur le mena joit.Tolt
après Amida ion propre ^\\s le deietra de ion throine,&lui
fit creuer les yeux.H//?.f/e«(>/?refe;73/7j. £n la ieditio elmeuë
à Florence contre la maiibn de Medicis , l'archeuelque de
Piiè fut prias & pendu aux feneltres du Palais. Ce qui lui
CL4 *
6iz Hiflûires admirables
auoiteftc prédit Jong temps aupuiuiiaiu par certains a-
itrologuesadefqiieJs il s'eiloit enquis quelle deuoit eftre la
lin delà vie.s;'wo/> AïayûhEuefque de Volterrc, en [es iours cei^-
mculairesicolloq.l.
Pierre Louys ^ Duc de Parme & de Plaifance 3 fils du
Pape Paul troifiefmejayantpar fes cruels & vilains depor-»
lemens attire la haine de grands & petis contre foy , au*
cuns gentils-hommes con/pirerent enfemble de Je tuer.
Pour ceit efteâ; ils gaignercnt par argent quelques cou-
pe-iarrets ^ &là deflus feignans auoir querelles lesvns
contre les autres , ie promenoyent par \qs rué , de Plni<
fànce 3 dilànstantoil en vouloir à ceftui-cijt.intoft à ce-
lui-là. Chacun promettant s'employer , tous ten:ins
bonne mine auec les brauades acouilumees en paroles &
port d'armes , & le temps ièpallànt en mines & coniul-
tations y lePapeeicrita Ion fils qu'il fedonnaft fbigtieu-
liment garde du dixiefine iourde Septembre. On 'tient
pour certain que Paul III. eftoit fort entendu enl'a-
ihologie iudiciaire & en la magie. Le Duc Pierre
Louys 5 ayant receu c^s lettres fe trouua perplex & crain-
tif. Mais le iour remarqué venu (fbit qu'il le fuft r'.illeu-
ré 3 fbit par oubliance}il fortit du chafteau en vne Jidie-
re 3 bien acompagné 3 pour voir les fortifications qu'il a-
lioit deflèignees.Les coniurez le trouuerent autour* je lui:
mais pource qu'ils ne pouuoyent exécuter là ce qu'ils
auoyent proietté , qu'en fe perdant eux-mefmes, indif-
férèrent : & comme il retournoit au chafteau , fuiuirent là
lictiere^trente-fix de cefte ligue marchans deuantjC.omme
par honneur.Si toft qu'il fuli entré dedans le cliail(;au , ils
îeuent lepont leui s.dc peur de la fuitc.Quoy fait ils acou-
rent à lui les el'pees traites 3 & après lui auoir fait repro-
ches de fes melchancetez le tuent en fa lidiere , "auec Ion
preltre^fon efcuyer 3 & cinq Alemans de fa garde. Quoy
fiit ils fe mettent à courir & furetter par le chafteau^où ils
trouuerent de grandes finances amaflées pour fortifier la
ville.Incontinent les citadins acourcnt celle part , à caufe
du bruit & des cris qu'ils auoyent entendus , & deman-
dent que c'eft.On leur refpond que le Duc aueit efté tué,
& que la vijle eftoit deliurce de ce tyran. Pource que \ts
citadi^v»
dr mémorables, 61^
citadins n'en voulo) eut rien croire , apreç auoir eu cau-
tion d'eux, qu'il ne feroyent mal quelconques ceux qui
auoyent fait l'exécution, ils pendirent le corps mort a vne
châine,& l'ayans ainfi remué de defl'us la muraille , le iet-
terent dedans le fofléjou le peuple courut, lui donna force
coups de poignardsj& le foula aux pieds; puis les citadms
enuoyerenten pofteàFernand Gonzague,auquel il firent
entendre ce QUI s'efloit pafle : iè rendirent à l'Empereur,
demandansprompt fecours.Gonzague y enuoya inconti-
nent des troupes , (k s'effcant emparé de la ville , receut le
ferment de fidélité des citadins à l'Empeqcur.s/e/^d» an 19.
liure de fes commentaires.
ATTENTAT indigne'.fum.
LE s Turcs habitans en l'Europe & Afie (ont couftu-
miers de mutiler départies génitales les garçons qu'ils
peuuent prendre fur les terres des Chreftiensjpour les fai-
re feruir de valets de chambre,& leur commettre la garde
de leurs femmes. Cequife conoitpir l'iiiftoire que le
fieurde Villamont àlaiflé par efcritjliu.^. chap.5. comme
l'ayant veu en la ville de Damas en Syrielan i589.Vn Bafla
ayantmariélàfille voulut lui faire quelque beau prefent,
premier qu'elle s'eflongnafl de lui. Il auoit vn efclaue
JR,ufllen,beau,blanc,aagéd'en'jirondix-huidans , lequel
il délibéra mutiler comme deflus eft dit , puis le donner à
la fillejafin qu'il lui feruift d'homme de chambre. Cette
délibération paruenue à la notice d e l'efclauej'.l refolut de
preuenir tel accident & mourir , ou mefine tuerie Bafla
plurtoft que d'endurer vn fi grand opprobre.Ce qu'il exc-
cutarcar aylt trouuë fbn Maiftre, le fecôd iour des nopces
de fadide fillejlas d'auoir danfcavoltigé (on chenal ,ioufté,
ferci (à panfe de viandes, dormant fur (^->n licl, il entra de-
dans la chambre (ans (bnner mot, & d>n courage prompt
lui doa;i plulîeurs coups de coaftcau dedans la gorije.
<^i 4 Hishires admirahles
Le Ba/Ta $*erueillanc appeilc Tes geiii. au lècours : miîs l'rf-
claue paracheua fi dexirement les coups , que le Baflà fut
mort deuaiit que les domelbques rufl'ent près de lui pour
Je garantir.Le voyans eftendu mort iur le planché , ils mi-
rent le*? maini aux cimeterres , & taillèrent en pièces
J'e/claue généreux. Z^o^ji Gnyon an i.Uu.dcfes ditterfes Ufjniy
ih.ip.3'
t^FANTVRE notable.
PRorper Colonne vaillant chef de guerre , ayant au
mois deNouembredel'aa ^it.paflè la riuiere d'Adde
liiaugré 1^ François qu'il desfit , & contraignit le retirer
dedans Milân,prjnt logis à Marignan,8f mit i^s Suifles «n
l'abbaye de Cleruant, incertain sî'iï deuoit poufler à M'I^n,
renforcé de tant d'hommes , ou donner à Pauie delprou-
ueuë de gens de guerre. Sur ceilc incertitude voici apa-
roiftre aux gens du Marquis de Mantoue vn vieillard de
rencontrée d'habit populaire , qui prelenté deuant Co-
lonne & les autres capitaines 5 lesafleure d'eltre enuoyé
parlcsparoifliens de S. Cir de Mihn>pour leur faire en-
tendre qu'à la première approche de leur armée tout le
peuple de Milan elt délibère prendre les armes contre les
François au Ton âzs cloches de chacune p.aroiflèjqu'ils s'ad
uancentdoncques en diligence, Tins donner loifir aux
François de fereconoirtrc. Et là defl'us difparoit , fans
qu'on peuftfcauoirne qui, ne d'où , ileftoit. Les chefs
croyent ccfi auis5& le z^.de Nouembre le Marquis de Pef^
quaireaucc ces bandes Espagnoles le prefente à la porte,
ftrnommee de Rome , fur le foleil couchant , charge
d'arriuee les Vénitiens ordonnez à la garde 4" faux-
boutg&d'vn baftion qu'ils auoyent commencé , les met
€n fuite fans combattre , & par mzllTie boutée les Suifles
logez auprès d'eux : tue les vns , bielle ks autres , de-
uant que le» Français eu/lent ièuîemeiic auis de leur
arnueCi.
cf memàxahles. ^15
zrriuee.Theodore de Triuulce, qui tout malade & defar-
mc,monté ilirvn mulet , couroit au bruit^fut prins. h&s
Gibelins occupans la porte introduifent les Marquis de
Pefquaire & de Mantouë^le Cirdinal de MedicisjCoIon-
ne,& partie de Tarm^e : ne pouuans les vi^lîtorieux imagi-
ner par quel heur & moyen ils auoyent, auec telle 6c /î
[oudaine facilité , obtenu Ci notable victoire , couronnée
du ùc de la ville , qui dura quinze iours , & du deces du
PapiLeon dixiefme, lequel outré de ioye infolcnte de tel-
le pri(è & du ma'htur des François , fut faifi d'vne fîeurc
continue, qui le rauit & porta en Ton lieu le premier iour
de Décembre audit an i^zuHîfioire de France font Franco*»
premier.
AVARICE punie,
FRANÇOIS Boadilla Efpagnoî , cheualier de l'ordre
Je Calatriuejiyant eité enuoyé l'an 1500. en l'Ide EP
pagnole j poury commander, non content d'auoir fore
iniquement traité Chriiiofîe Colomb & fon frère ^ pre-^
miers defcouureurs de cqs pays -la , receut d'abondant
près de foy force voleurs , auec lefquels s'eftant accor-
dé Te print à tourmenter les pauures Infulaires , & à les
contraindre de trauailler exceffiuement aux mines. Ces
Efpagnols ne penfoyent qu'aux moyens dégorger leur
auarice infiitiable. En ces entrefaites le roy Ferdinand,
defireux de faire iuftice des excès aduenus en Tl/le E(^
pagnole^ & remettre tout en bon eftat ,y enuoya auec
tiltre & authorité de viceroy Nicolas d'Ouando , char-
gé de dcpofer Boadilla. Celhii-ci , faifant voile du porc
de San-Lucar de Barrameda auec vne flotte de trente
vaifleaux, arriua en riHe Elpagnole au bout de quarante
iours. Boadilla fe voyant ca^tc par l'arriuee d'vii plus
grand, fàt incontinent fès préparatifs pour retourner ea
Eipagne auec les nauires que le viceroy auoit ame-
née, ayant vn threibr qui vaîoit plus de deux cens mille
03 4
(d1 6 Hijloires admirables
cfcusô: pourtant outre tout cela particulièrement à la
Reine plufieurs pièces & grains d'or , entre le/quels y en
auoit vn pelant cnuiron 4500. efcus. Il fut acomp:ignc ue
RoldanXimcnes , deplufieurs autres capitaines, & rie
quatre ou cinq cens Efpagnols 3 qui s'eftoyent tous faits
richesj&fè mirent à la voile auec lui. Sur quoi faut rcjiiài -
querla iuilice de DicO, & combien elle permet adutnit
de chofes pour punir la meichanccte des hommes: consi-
dérer aufTi que toutes ces richefles periffables en qui nous
auons tant de confiance 5 ne Ibnt que fonges & ombres
vaines. Car comme ils elloyent en pleine mer 3 vojci
vne horrible tempefte qui fe leue fbudain , & donne C\
rudement contre la flotte de Boadilla qu'elle en brifa &
iit couler en fond vingt- quatre vaiflèaux. Ce fut M que
3e miferable Boadilla , Roldân auflî , & leurs Efpagnols
rendirent compte de leur auarice cruelle , periflàns en la
mer, auec tout ce grand threfor du Roi & de laRoine,
parmi lequel leur pillage fe perdit auffi. Par ce moyen
Jeurs querelles^ plaideries ^ & ce qui en pouuoit aduenir
prindrentfin. Les Indiens de Plile liJpagnole ayans ouy
ces nouuclîes , & entendu pour certain ce qui eltoit aue-
nu aux Elpagiiols , qui tant les-' auoyent tourmentez es
mines d'or 3 en menèrent vne merueiHeufe loye, & di-
foyent entre eux ; Ha^ ha, au moins eft ce autant de de(^
pefché ; ceux-ci ne nous feront plus iucr aux mines- 3 ni
languir en tant de miferes comme nous faifions. Jer.Ben-
Z_,o MilAiion aupremier litirt: de fon hifloireydu 7iouueau wetide
chap.Tt'Gonz.'iïe Oniedo dit ait ^.liu.ch.tp.J. ^ 9. que plus
de cinq cens Eipagnols périrent en ce "voyage , auec RoJ-
dan 5 Antoine de Torres Amiral , le commandeur Boa-
dilla 5 auec plufîeuis autres , qui auoyent pris grand
peine de derpouiller & apauurir la terre pour enrichir h
mer.
' Enuiron l'an 1^20. au temps que lapefche de-; perles
florilToit en l'I/le de Cubagua, y arriua d Efpagne vn
nommé Louys de Lampugnan , parent de celui qui tua
Galcas Sforce Duc de Milan , auec priuilege Impérial,
par lequel lui cftoit permis de pelcher telle quantité
<i€ perles.que bon lui kmbleroit fans contredit de perion-
ne,en
O" memoYAhles. ^17
iiejcn tous les confins 6c iiinites de Cubagua. Ceft hom-
me partit d'Efpagne auec quatre carauelies chargées de
toutes prouifions & munitions neceflàires à vne telle en-
trcpriie , leiquelles lui turent fournies par des marchands
Efpagnols, ibus elperance d'auoirpart au profit qui en
prouiendroit. Il a:ioit fait faire vn certain rafteau,
dételle façon qu'en quelque part de la mer qu'on vou-
Juftleietter, il n'en deuoit pas efchapper vnehuiftre de
celles qui portent les perles , qu'il ne les cufttoutes ra-
clées & tirées quand & loy , ou bien peu s'en eufl falur
Maisjde malheur, tous les Elpagnols qui eftoyent en Cu-
bagua, fe bandèrent contre lui quand ce vint i l'exécu-
tion de ibn priuilegc,^ n'y voulurent point obéir jdi fans,
que l'Empereur ciioit trop hbcral du bien d'autrui j &
que s'il auoitenuie de donner, cefulè du fien , s'il vou-
loit : quant à eux, qu'ils auoyent conquis & gardé ce pays
auec infinis trauauxSc au grand danger de leurs vies : *
qu'il eftoit trop plus raiibnnable qu'eux en iouyfl'ent
que non pas vn étranger. Le pauure Lampugnan vo-
yant que Tes patentes ne lui feruoyent pas dvn iç.^viy
n'ofatoutesfoix s'en retourner en Elpagne ; partie crai-
gnant d'ellre mocqué , partie d'eftre inquiété à caufe à^s
deniers qu'il deuoit. De forte qu'en brief les affaires &
Jesfoucis qu'il auoit dans ia tefte , le firent fortirhors
du fens , & eftoit expofé à la mocquerie de tour le mon-
de,comme vn fol. En fin ayant trainé cinq ans en ccmife-
rable eftatjil mourut en l'iilede Cubagua.Be/ji^f) au me/ms
\.Utt.chap,\6.
Bien peu de temps après que les Indes Occidentales
curent efté defcouuertes , & que le bruit des grandes ri-
chefiès qu'on y trouuoit le fut efpandu par tout le mon-
de, plufieurs couriàires François commencèrent en
temps de guerre à roder fur la mer Octane, & courir au
dcuant des nauire? qui reuenoyent des Inde?. Si en prin-
drent & pilleront beaucoup, lestrouuans àleurauan-
tage.Entre autres ils en acrocherent & pillèrent vne mer-
iieiîleufement riche, au temps que l'on amenoit en Efpa-
gne tant d'or du Pcru. Ils-y trouuerent tant de butin
qu'il n'y en eut pas vn de tons les valets & moindres
<^i8 Hisioires admirables
garçons du nauire F. an jois , qui n'eult à fa part plus de
huict cens ducats d or. La principale caulè au re(le,pour-
quoy les François firent tant de prilès , ne fut autre que
Tauarice & chichcte tropmechanique deiECpagnols.Car
au partir d'Elp^gnc les patrons des nauires eiloyent tant
erchaufteiàchargerniirchandjieî & paflagers,qu'ils ne fe
ibuucnoy^tninefôroucioyent de fe fournir d'artiUenc
autant qu'il faloit pour fe défendre: & fe commettoyent
de grandes fraudes entre les commis & ces patrons : dont
i'enfuiuirentjplufîeurs années durint,Ie5 pertes d'intimes
ticheffes priles fur eux en mer par les François , dcfquels
ils o)U bien fceu auoir depuis leur reuenche à diuerfes oc-
casions, mais fur tout en la longue durée de nos guerres
ciuiles. Celle leur auarice efl reprefentee par BeMi^o, at* z.
ch-dn z.lÙ4re de fin h -ftoire.
Il raconte & confelfe auoir efté lui-mefme fi tranfpor-
téàzceH^ famine d'or & d'argent , qu'à la folicitatioa
dVn capitaine Efpagnol nommé A'fonfe , il fit vn voyage
auec vingt-fept autres en certaines petites iHe^» , où ils
pen/oyentdeuenir tout d'or. M.iisy eLlans(dit-il) nous
eufmes \e% venrs fi contraires (le re^)refenre ces mots) e*
ilans au mois deluin 3 auquel i'hyaer commence en ces -
pays-là j que nous y demeurafmes attachez foixante &
douzeiours, fins po'.iuoir en de'loger : & cncorespen-r
dant cela nous ne vnmes pas quatre heures de Soleil en
toutiayans au demeurant le p}us fafcheux te.nps du mon-*
de, parce qu'il plouuoit inceflàmment, auec tourbil-
lons impétueux, tonnerres & cfclairs: de /brte qu'il
fembloit queleciel 5c laterre fc deuflènt méfier enfem-
ble. Il y eut vn rayon d'efclair qui le lança dedans le
brigantinoùnous efiions, où iltua vn Mare &deuxE{^
pagnols j dont tous les autres demeurèrent fort eftonnez.
En fin le capitaine fe defpeftra dj là , & Kt approcher le
brigantin près de terre Ferme , pour defcendre en quel-
que lieu où ilpeufi trouuerles Indiens, & auoir d'eux
quelques viures. Mais ayant mis pied à terre, & cheminé
l'efpâce de huicfl iours^ fims trouuer autre chofe que
bois, marefis,3c montagnes,fi efirangcs qu'elles faifoyent
horreur lèuienicat i les regarder^ il fut contraint de re-
tour-
cf* memorMes* 6i^
tourner en arrière , & reprendre fbn chemin par terre
au Jongdelacofte maritime. Entraueilant ce pays-là,
nous endurafiiies toutes les miferes que pauures ioldats
peuuent endurer. Car nous ne trouuions rien à manger
«]ue quelques limaces , & ie ne fcay quels fruits fauuages
que nous cueillions par les bois , dontiè nourriflent Jes
guenons & les marmotSjqui vont continuellement iâure-
Jant &'gambadant d'arbre en arbre parmi ces forefts. En
fin toutesfois ce chemin nous rendit au lieu où eftoitle
gouuerneur.^^< lo. chap.du z.Utu
D;ego Gutticreuz Eipagnol, gouuerneur en vne àts
prouincc de i'Inde Occidentalc^n'ayant le cœur qu'après
de l'or & de l'argent 3 ayant attirG- en Ion logis quelques
Caciques ou Seigneurs du pays ^ après leur auoir faid par
fon trucheman vn beau fermon touchant la créance des
Chreftiens, en attira deux le lendemain qu'il arrelta pri-
fonnJersjenchainez au pied de Ton lidJI tira de l'vn la va-
leur deux mille ducatsrde l'autre il prétendit en auoir d'a-
uantage.Car faifant apporter vn grand panier, il menaça
fbn pnfonnierqucfî dedans 4.iours il ne lui donnoit au-
tant d'or comme il en faloit pour cnjplir fix fois ce panier,
qu'il le feroit brufler tout vif. Mais le Cacique trouua
moyen de Ct fauuer , dont ceft auarc Efpagnol conceut tel
de/plaifîrj qu'il en tomba malade, & ne voyoit iamais fou
panier , qu'il ne criaft qu'en lieu d'or on i'cmpiift d'or-
dure. Les autres Caciques redoutans cefte belle cruelle
d'auarice , mirent le feu en leurs maifons , ab ^tirent tous
les arbres fruidiers , emportèrent le grain qui eftoit es
champs , gagèrent tout le pays , pui^ fè retirèrent aux
montagnes. Quant au Cacique refté prifonnier , quoi
qu'il cuft payé ueux miHe efcus , Diego le menaçoit de
mort s'il n'en fournifibit d'auantnge. Mais en fin le Caci-
que lui dit, tu es vn bauard & menteur , qui m'as tant de-
fois menacé de mortjfàns l'auoir faiât. l'aime mieux mou-
rir vne fois que de languir enchainé & traitté comme ie
fuis. Lui ayant reproché fà perHdic. il adioufta,Qu'il ne
pouuoit imaginer quelle manière de gens pouuoyent
éltre ces Clii»efti»n3 > qpi faifoyent tant de imux par
6io Htjloires admirables
loutoùils alloycnc , & qu'il s'clinerueilloit comme,
ferre auoit la patience de les fouitenir. Toft^apres k
afaires de Diet^o le portèrent mal. Le? Indiens lui en le
lièrent fubtilement plufîeurs armes & bagages necei-
iàires. Il fut fî mal aife de quitter la colle de mer , pour
entier en terre , ou lui & les gens après auoirenduïé
mille incommodité/. & difettes , receurent le loyer de
Jeurinfatiableauarice. Car Diego fut aflommé , puis
^cs Indiens lui coupèrent la telle ^ les piedi & \qs mains.
Trente quatre Elpagnols furent tiicz auec lui. Six eA
chappez du conriifîit rencontrèrent vn capitaine , neueu
<le ce Diego, luiui de vingt-quatre foldats , marchans au
iècours. Mais ils trouuerent plus de cent Indiens garnis
des armes conquifès fur Diego & les fiens, danfans & lau-
tans autour d'eux, & y en auoit de ceux qui Içauoycnt par-
ier Efpagnoljlefquels crioyenta pleine telle , tien de l'or,
Chreilienitien del'or. Benzo qui eiloit du nombre des
iîx elchappez^en conte Thiftoire es ch.ipitre w.^ii.de fun z.
Itttre.
Le mefine autheur dit confequemment , que l'expé-
rience monrtre qu'en toutes les guerres que les Eipa-
^nolsont faits es Indes , ce n'a efté que pouraflbuuir
Jeurauarice. Que cela Ibit vrai (dir-il) la diucrlîté des
capitaines & gouuerncurs qui y Ibnc allez h monftre:
ioint qu'en tous les lieux où ils n'ont point trouue' de
richefîes j ils n'ont daigné s'y habituer. Antoine Sede-
gno fit vn voyage es Indes , & entrant par la golfe de
paria auec plus de fept cens Efpagnols , defcendit en
terre , & fe mit à recercher de l'or par tout. Ayant tra-
cafîe l'efpace de trois ans , & couru de prouince en pro-
vince , parce qu'il n'y trouuoit pas aflcz d'or & de ri-
chefl'esa fafantafîe, il ne voulut pas peupler en ces pays
là. Sur ce vne maladie l'extermina du monde , & ainfî
finit fes iours le malheureux S^Jc:;no , pluftoft de re-
gret-& defefpoir quilefailit , pour n'eftre peu venir à
chefdefèsentreprifes , que de maladie naturelle. Et de
tant de foldats qu'il auoit menez quand & foi , il n'en
retourna lamais vers le golfe que cinquante c:nq.i>^^* ij.
éha^ÀH zMure.
Fer-
ér mémorables. 611
Ferrandde Sotto Erpagnoljfait gouuerneur de la Flo-
ridcjsy en alJaluiui de cinq censhenimes. A Ton arriuee
il fe mit a roder & tracafîer , s'imaginant qu'il trouueroit
degrands threlôrs.Rencontrant vn iour quelques Indiens
parez de colliers & ioyaux d'or pendus au col , s'enquzt
d'où venoit ceft or? Eux relpondircnt que c'eftojt de
fort loin. Mais lui peniànt que ce fuA vue desfaite , afin
dele chafîer horsdu pays , en Ht empoigner & gciner
quelques vns , pour leur faire conf^flcr ou ils trouuoyenc
celt or. Il perdit temps & peines apreç. Vu antre lour
ayant fâiCx prilbnniers quinze Caciques, & menacé de les
faire bru/ler vifs , s'ils ne lui enfeignoycnt le lieu ou ils
prenoyent leur or , ces pauures gens fi cttonnez de iî ter-
rible lèntence :, pour contenter ceft homme promirent de
Je mener dedans huid iours en certain lieu où en trou»
Leroit à fa volontèjïans fçauojr au demeurant ni ce qu'ils
difoyent , ni ce qu'ils promettoyent. Sotto les meinc
quant & foi pour trouuer ceftemine d'or. Ayans che-
miné bien douze iours entiers làns trouuer trace quel-
conque de raine 3 ni d'or 3 Sotto /envoyant pipé , fit en
cholere couper les poings â ces pauures Caciques , puis
les lai/I'a aller. Quelques temps après vn des principaux
feigneurs de celle prouince vintlàluer Sotto , auquel il fît
prêtent de deux perroquets & de quelques pennachcs:
puis le pria de lui dire qui il eftoit, d'où il venoit, ce qu'il
alloit cerchantjcn faifânt ta;it de maux. Sotto lui fit ref-
pondre par vn trucheman , qu'il eftoit Chreftien , fils de
Dieu Créateur du ciel & de la terre , venu là exprès pou"
lui enfeigner laloy de ce Dieu. Mais l'Indien lui rerpon-
dit lùr le champ:Si c'eft ton Dieu qui te commande , que
tu aille*; ainfi par pays eftranges,pillantjbru{lant, tuant:,^:
faifant tout le mal dont tupeuxt'auilei-j ilaches que nous
ne fomme« pas gens pour croire en lui, moins encore en
fa loy. Cela dir^il s'en alla. Sotto fut lî ibt, qu'il ne laillà
pourtant de pourfuiure comme deuant , fur le/perance
de trouuer quelque riche mine qui lerecompenlèroit de
toutes (qs peines. Mais au bout de quelque temps vn
flux de fang le faifit 3 qui lui ofta la vie & ceftelbif infa-
6 11 Hijloires âdmïrahles
tiable d'or qui le tournicntoit. Par ce moyen tout ce qu'il
auoit parauantgaigne auPeru àlapnied'Attabalipa , &
pille en djuers endroits , périt aucc tout ibn threlbr de
Conc|uelte.5É';;xi ah l^.chap.dtt z.liu»
Vn autre capitaine Elpagnol , nommé Pamphile de
Naruaez 3 fuiuid'vne troupe de fix cens Eipagnols , alla
versIariuieredePaImes,enlacofte de la Floride , vingt
cinq lieues plus près du Nord , que la riuiere de Panuco.
Approchant du riuage il delcend aucc la moitié de Tes
gens.en autre lieu toutesfois qu'il nepenfoit. Netrou-
iiantjoù il auoit prins terre aucune apparence ni monl^rc
d'or, ne fèfoucia point d'y pcupler,ne d'y bailir quelque
place : & fi enuoya les vailieaux auec le demeurant de lès
îbldats cercher quelque riuiere de Palmes où il auoit fail-
li d'arriuer. Mais cts gens furent afîiiiilis des vents im-
pétueux fur les eaux , qui les preflerenc de telle iorte>
qu'ils efchouërent , tous les vaiflbaux furent brilez , les
Eipagnols le noyèrent , exceptez quelques vns qui regai-
gnerent le bord , & après auoir long temps tracaflè par
ces pays barbares, en fin tombèrent en Ci grande pauureté
que douze d'entre eux à fautes de viures fe mangèrent
l'vn l'autre. Somme de Cxx cens Efpagnols que Pamphi-
le auoit menez en ce voyage il n'en retourna que dix,
au moins que Ton auoit veus.t>^« mcfne lt»re ^ chapitre.
LesElpagnols ayans en Mexico traiftreulementtué
plufieursdulieu pour auoir leurs bagues & ioyaux j eu-
rent leur tour : car les Mexicains le Ibuleuerent 6c tuè-
rent force Callillans. Ferdinand Cortcs y eihnt acouru
futchaflc delà ville auec grand meurtre de Tes gens. Fi-
Dalcntent Cortes ayant afîîegé la ville, s*en rendit maiftre
au bouc de quelques mois. Lui & Tes gens penlbyentlè
faire tout d or au fac d'vne ville grande comme Veni-
lè,& parauant pleine de richefles: mais peu auantla pri-
fe d'icelle les Mexicains ietterent tous leurs ioyaux &
autres biens dedans vn grand & fort profond lac , fiir le-
quel leur ville ert bail:ic» tellement que ces affamez d'or
trouuerent blanqtie. Ce qui les mit en telle foreur
qu'ils firent mourir grand nombre deMçxicams, & des
prin-
^ mémorables» 617^
principaux 3 voire le Roy melme pour leur faire confefîèr
où elloyent leurs threlors.Maisils n'en preuaJurent pour-
tant;car prefques tout demeura dedansJcs creux profonds
deceJac; & Ja plufpart des Elpagnols périt depuis mal'
heureufement.o/^.'f mefme (h.ipitre,
Barthelemi de ht Calas , Euelque Efpagtiol a publie vri
liuret irRprimé en diuerfts langues 5 elquellev il nionllre
par le menu que les Efpagnols ont , pour aflbuuir leur a-
iiarice3& cmplirrEuropçd'orjd'argent& de perles, fait
mourir cruellement es Indes Octidentales plus de vingt
millions de perionnes^e diuers aages , lèxe & qualité en
lefpace d'enuiron trente ans. Ce que nous referuonsà
de/crire par le menu es volumes fuiuans, afin qu'en la va-
riété de ces recueils le led-eiirvoyede fueiHetcn autre
toufiours quelques nouuelles remarques àes iugemens
de Dieu.Ne demeurons pas fur la mer, ni delà, mais voy-
ons aufTi quelques cenfures del'auarice en 1 Europe j où
depuis que Tordu Peru eft entré nous n'auons veu que
mallieurmon point que Tor foit créature autre que bonne
& d'excellent yfage aux «^ens de bien : mais par la furieulè
malice & ingratitude de ceux quiontabufé d'vnfibeau
don de DicUiCommettans pour a/lbuuir leur auarice tol^•
tes les mefchancetez qu'il elîpoflible de penfèr,comir»
les guerres ciuiles de la France le tefmoigneront à îa po-
fterité. Mais ramcnteuons quelques hifèoires particuliè-
res.M. André Honfdorf propofe diuerfès hiiloircs de gens
auares, dont nous marquerons hs plus récentes. Il fa^
mention entre autres d Vn Eue/que de Saltzbourg p fi for-
didement auare, qu'eftant vn iour acueilli de la pluye, al-
lant de certain lieu en autre , il tire Ion chapeau de de/lus
fa teftejle cache fous ion manteau, aimant mieux auoir la
cheueluee mouillée que laifler dcperir tant fbit peu fbri
chapeau : combien au refte que les reuenus de Tes bénéfi-
ces montaient à cent mil efcuspar an. Ceftoit punir de
façon eftrange ïbi-melrne 3c Ton auarice.£«yc»» Thcatre es
exjwples du huifîiefme commandtmeiU.
Il adiouflequ'à Vvormes fe trouuavn chanoine, de
noble race , fort riche à caulè 6çs reuenus de maints bé-
néfices qu'il poiredoit;^outteux au refte de fojon eArâgc^
(3Z4 HiHûires admirables
mais 11 mifcrablemcnt auarc (\[x\\ n'auoit pour toute ay Je
quVn ièruiteur , encor ne le garJoit-il point, crainte
de Jui faire quelque recognoiHauce extraordinaire , 6c
changcoit fouuenr. Quand les gouttes le (en oycnt de
près, il le fallait apporter quelques lacs pleins de pièces
d or , lefquelles on elpandoit deuant lui en vn grand bai-
iîn. Lors il remuoit lès mains dedans celte terre lau-
ne, autant qu'il lui elèoit poiTiole , prétendant par tel
exercice ridicule &deteftable trouuer quelque allége-
ment à lès douleurs. On trouua dedans les coffres après
fàmort lafomme de trente mille efcus^laquclle fut par-
tagée entre le Comte Palatin 3 & l'Archeuelque de Tre-
ues, qui firent prelèntde trois mil efcus diltribuez. à
quelque parens de ce miierable , puni par Ibi-melme de
fupplice plus redoutable que tout autre lupplice que
ripmme pourroit iouftrir au monde, t^it mefmc en-
droit,
Vn Dodeur en médecine, s'oublia fi mifcrablement
que de traiter alliance auec l'ennemi de noftre lalut, qu'il
auoit coniurè & enclos dedaus vn verre, d'où ce lèdu-
deur & familier elprit lui relpondoir. Le médecin elloit
heureux es guerifons ^ts malades & amafl'a force elcus en
(es pratiques: tellement qu'il laiflà i(&s enfans la lomme
de vingtfix mil efcus vaillant.Peu de temps auant la mort,
comme il commen joit à penfer 1 là confcience j il tombe
en telle fureur, que tout Ton propos eitoitd'inuoquer le
diable,& vomir des blalphemes horribles contre le S.EP
prit. Il rendit l'ame en ce mal-heureux citât. Ai* mefme
endroit.
L'an mil cinq cens quarante vn , vne certaine Dame det
Franconie, femme fort riche deuiiit fi chiche , qu'elle ne
daignoit recourir d'vne bouchée de pam les pauure* di-
(ètteux : qui pis elt elle fe comportoit i\ cruellement en-
uers ceux qui lui demandoyent l'aumofiie, qu'elle les
renuoyoitàlaficnte,&leur«iiiroit qu'ils s'en repeufîènt.
A caulè de là taquinerie extrême elle gaigna ce Ibbri-
quet que par tout le pays on la lurnommoit Ft^narice,
Mais lans fè loucier de cela, voire au melpns de tou-
tes remonflrances , eile continua ce œauuais train , iuP-
ques
é' me?mr Allés. ^iç
ques ï ce qu'elle fut arreftee coure par la fuftjce dcDicu.
ï:Ucfut atteinte dVne faim allouuie , fî violente que
plus on lui bailloit de viide, moinsla faouloit-on. Ayant
mangé en peu de téps tout ce qui peut feruir à la nour-
riture du corps , elle fe print à aualcr de l'argile & de la
terre :& hmalcmcnr fe print aux excrcmcns humains
dont ellepaifloit fa faim continuellement: & ncs^ofanfr
prefcntcr deuantperfonnca caiife de fa laideur &puajî-
teur , elle fe mit à tracaflcr ça & i:t par les champs ;, iuf*
queî> à ce qu'elle vint fe rendre au chemin palTantqut
meine a Drefde, ou elle mourut miicrablementn'ayanc
forme de vifage humain, mais lî desfigurec que rien plus.
Job.Fincel.AH z.Uttredes miracles.
Honfdorf raconte vne autre hiftoire qu'il dit eftre
ailuenuè à Leyden en HollandeTan 1557. Deux fxurs
germaines eifoyent en icclle villes Tvne fort riche, l'au-
tre vefiie fort panure , & chargée de iîx enfans , qu'elle
nourrilToit &cfleuoit auec grande difficuhe. Sontra-
uail n'y pouuanr plus fournir , elle fut contrainte men-
dier fon pain par lesportes. Mais plufieurs lui aiieguoy-
ent qu'ayant vn fœur (î riche , il n'y au oit ordre qu'elle
mendiaftainfî.La pauure dolente conoiffantbienla du-
reté des entrailles de fa fœur, preflee de difette extrême
alla vers elle , lui defcouurant fa mifere , telle que des
troisiours auparau.ît Ces enfans ni elle n'auoycnteu nain
ni paièe pour fe fubiLinter:puis auec larmes & profonds
foufpirs fuppha fa fœur d'auoir pitié de Ijur arfliclion.
Celle riche fuperbe , & elclaue d'auaricc, femocquanc
des geinrîlTemcns de fa pauure fœur, refpond'qu'clle n'a-
uoic point de pain à donner à perfonnc: qu'on l'eitimoit
plus riche qu'elle n'eftoit, & qu'en confcience elle n'a-
uoit point de pain ; puis fit celle imprécation, qu'elle
prioit Dieuquetous les pains qu'elle auoit en fa puif-
(ance deuinifent pierres & cailloux. La pauure vefue
Ibrt toute efpleuree, fiiifant plainte de fa mifcrc lie difet-
te à Dieu fon père , lequel entendit les cris del'afHigee,
& moniba combien l'auarice lui defplait. Car après le
départ de la pauure lœur, l autr^; jiche iic chiche vouianc
couper du pain pour foy,ti:ouua qu'il eiloit dur comme
Kr
ëi6 Hijloires dàMirAhles
vn caillou. Dont mcrueiUeufcmcnt cftonnce elle alfi
promptcnicnt vers fa pauarcfœur, lui demande pardon
<ic« rudcHes qu'elle lui auoit fuites, luy fournit libérale-
ment du bled S: de Targcnt pour la nourriture d'elle &
dcftsenfans. ^umefne endroit ou chapitre des exemples
dit i.coijmiMidement.
lerofme Oforius, Euefquc de Sylues es Algarue? en
Portugal , parlant de la viftoire d'Almcide contre
IcsMahumctiftesauport de Diu, adioufte, les Por-
tugais obtindrcnt alors vne trcsbelle vidoire , de la-
cruelle toutesfois Paul loucfEucfque de Noccre en Ita-
lie)n'adit mot en Tes hifloires,cncorcs qu'il ait difcouru
fur l'armée nauale du Sultan en Inde contre les Portu-
gais. Maisileftoit defpité de ce que s'cftant oiTcrtau
Roi Icantroifiefmed'efcrireriiiftoire de Portugal, en
bien payant, ce bon Prince ne lui enuoya point de pre-
fcns des Indes, pour l'induire .i coucher par efcrit les
conqucftes des Portugais. o^« 6,Uu.di. thtfi. de Pcrtu^aL
fechlo.
Philippe de Coininesdit ces mots du roy Louys XI.
& de Ton medecinill auoit Ton medecin,appellé maiftre
Jacques Cotier , à qui en cinq mois il donna cinquante
quatre mille efcus comptant (qui eftoit à raifon de iix
mille efcus par mois , & quatre mille par dcfTus ) & l'E-
uefché d'Amiens pour Ton ncueu , &autrcs offices &
terres, pour lui &: pour fcs amis. Ledit médecin lui c-
ftoit 11 tref-rudc , qucl'on ne diroit pcmt à vn valet les
ouu-ageuics& rudes paroles qu'il lui difoit : & file crai-
gnoittâtlcdicreigncur,qu'iln'euIl ofe l'éuoierhors d*a-
uec lui:& ^\ s'en plaignoit à ceux à qui il en parloit. Mais
i\ n*eurt ofé le changer , commcilfaifoit tous autres fcr-
uit:eurs,pourccque ledit médecin lui difoit audacieu-
fement. lefcaybien qu'vn matin vous m'enuoyercz,
comme vous faites d'autres: mais (par vn grand ferment >
qu'il iuroit) vous ne viurez point h ni(ftiours après. Ce
mot refpouuentoit fort, &:tant qu'après ne faifoit que
Je flatter & lui donner. Qui lui eitoit vn grand purga-
toire en ce monde, veuë la grade obeiflance qu'il auoit
«ue de tant de gens de bicn,& de grandi hommes. ^i$
éditf.'àefei Memoirei^^chAp. 1 1.
Paul loue fait mention dVn médecin Ttalienj,hbmmé
Zerbijlecjueldefireux de le faire riche , promettoit faire
nierueilles pourla guerifon des maladies iugcesincura-
blcs.Sa renommée paruint aux oreilles de Scender Bafîa
grand fcigneurTurcaffligé d'hydropifie. Ilenuoya de
fortlorn cjuerir Zerbi, ious promefl'e de cref-grâdes Tom-
mes de dcniersjs'il le giicrifioit. zerbi fut /î malauifé de
promettre gueiifon à ce Bafla,& encore plus fol de$'a-
chemincr vers lui ilir cefte vainc elperance. Mais ayant
elté quelque temps près de ce mi-lade , il y perdit (on eC-
crime , tellement que Scender mourut entre fcsm/îinç.
Pour payemenr de Tes peines & vacations, les feruiteurs
duBalfa iui coupcre^it la grrge. Es do^es de Paul loue,
Angelo FaoJunfconlUlLe Neapolitainjs'elhntdef-
couuert les efpaules^fit commandement fort exprès à fa
ièruante de le frapper i tour de bras & fa n^ feinte a ucc
vne pale de bois,mena^'antde battre rudement cède fcr-
uante fi elle differoJt:& ce pour a uoir elle fi indifcret dé
rcfulcr certaines pièces de monnoye à lui offertes par vn
plaideur duquel il manioirle procès > pource que telles
pièces n'cftoycnt pas de ha argent,item a cauie qu'ayanc
rabroué ce plaideur, & commandé rudement qu'il allaft
dianger fa monnoye i de l'argent fin , l'autre s'eftoit ac-
cordé auec fa partie,& n'eftoit pas retourné vers Ange-
lo. Quelle belèiié en vn homme de ietcreô?iowM/»f« Po,#-
tantcs ait 7. Uu.de la libéralité.
Le renommé lurifconfulte lafon vendait les confeils
au poids de ror,à condition toutesfois que Ç\ les conful-
tans perdoyentlsurcaure> il promettoit de leur rendre
incontinent ce qu'ils lui auoyent cojnpté. Paul loue au
fommàire de la vie d'icdui. On eilimc que laion faifoit cq-
ia pour la grande confiance qu'il auoit en la force & fcr-
ipeté de Tes confeils : & d'autre part il elïayoit par telle
cxaftioii de contenter fon auarice.
Vn capitaine Efpagnol, nommé Lifcan , gouuernelif
dcGran, ville forte en Hongrie, fe voyant alfiegé par
Solyman , fuitan de* Tura, U defireux de fauucr grau-
Kr z
€i8 Hijlôires âdmirablfs
defomme d*or & d'argent amaflcc de longue main ^fc
perdit roy-mcrme,& rendit lafchementla place. Mais li
fut fruftré de Ton cfperanccxar Haly Bafla lieutenant de
Solyman le dcfpouilladetous fcs moyens , fans lui en
laiflcr rien de relle.Digne loyer de fon auarice.Lff/»^///e-
■nient de Sabelllc au lé Mure*
Le meûiie eft aduenu denofttc temps à trefgrad nom-
bre degouuerncursde villes & Forterefresjqui cuidans fe
mettre à couuert, & abandonnant au befoin les places
tenablesjontcfté les premiers tuez ou dclualiroi, par If;
iugement de Dieu fur leur dëfloyauté.
Borgia, Cardinal de Valcncc,corrompit par promefl'es
.&prerensvn autre Cardinal Italien nomme Afcagne
Sforce , parles pratiques &. menées duquel il paruint au
fîcge Pontifical,& fut nommé Alexandre V 1. où eltaiit
eftabli , toirs malheureux artifices pottramaflcr deniers
furent par lui pratiquez , & ces deniers fournis à Cefar
Borgia, Duc de Valentinois , pour fourrager vne partie
de riralie par guerres cruelles:ce que Gurhnbert au ^.t^
é Mu.de la ■vie des Papei,^ Vr.Gttkhurdin anl. 'volume de fin
hijloiredes ;^Herres d'jtalieimoniÏTcntpaïlG. menu. La fin
de cefte auarice cruelle fut la mort d'Alexandre VI. par
poifonjla confufion horrible de Cefar fon fils, qui de-
gradé , chafie, emprifonné , puis efchappé, fur tué en
fîmple foldat en certaine rencontre. Ce que les volu-
mes fuiuans pourront reprefenter plus particulière-
ment.
louianusPontanusfemocque plaifamment d'vn cer-
tain Pape , fi chctiuemeutauare , qu'il prenoit la peine
d'entrer fecrctccmcnt & à cachettes dedans hi grande E-
glife de Romc,ou il eileignoit les cierges allumez en dî-
ners endroits d'icelle pour efclnirer de nuid , comme
c'eftlacouftume d'yen entretenir fort grand nombre
continuellement.t^w (//]fOMri deU lihcrditèichup.j.
Garimbcrt en la vie des Papes , raconte qu'va certain
Angelot Fufco , né de pauure famille , paruint 5 clhe
Cardinal,où il deuint Ç\ vilainement auare, qu'il prenoic
la peine de fe leuer de nui<ft,& fans chandelle entrer àc-
xlans Tcrtable., pour defroberPauoine.i les propres che-
uaux.
^mémorables. ^19
uaux. Le pricfrcnier ayant defcouuerth fraudcfe mi:
tellement enfentinellc, qu'il attrapavnc fois ce larron,
& lui donna tant de coups de fourche, feignant le pren-
dre pour quelque aune, que de longtemps après il ne
lui printenuie do continuer ce train d'auarice. t^tté.U-
ure de la ijte des Papes.
Il raconte vne autre hiftoire du Cardinal de Peroufe,
Hommé Fr.Armellin,homme cftrangementauare,qui c-
flant à Rome enclos dedans le chafteau S. Ange,auec le
Pape Clément Vll.lors que la ville fut prife par les Im-
perialiftes , voyant que les foldats pilloycnt& facca-
geoyentlesmaifons & palais, fans acception de perfon-
iie,conceut tdle doulcur,de la perte de Tes biens , qu'en
peu d'heures il mourut , cftoufFé de fa propre auarice,
f^/4u mefme liu.
Oger Ferrier;,niedecin fortfçauant, eftant a Thou-
louTcprintd louage vne maifon près de laBourfe, bie»
baftie,& en beau lieu, qu'on lui bailla quafî pour néant,
pource qu'il y auoit vn cfprit malin qui tourmcntoitles
locataires. Mais lui ne s'en fou ci oit non plus que le phi-
lofophe Athcnodorus , quiofaTcul demeurer en vne
maifon d'Arhencs-,deferte & inhabitée par le moyéd'vu
cfprit. Oyant ce qu'il n';uioit iamais penfé,& qiv'on ne
pouuoit feureiiient aller en la caue , ni repofer qucl-
quesfois , on l'auert/.tqu'ily auoit vnieune efcholier
Portugais eftudiant lors à Thoulouzc , lequel faifoit
voir fur l'ongle d'vnieunc enfant les choîcs cachées,
L'eicholier appelle vfa defon mcfticr,& vne petitc'lîllc
enquifedit qu'elle voyoit vne femme richement parec
dechaincs & dorures , &.quitcnoit vne torche en la
main près d'vn pilier. Le Portugais confeilla au méde-
cin de i'aire fouir en terre dedans la caue prés du piUier»
& lui dit qu'il trouueroit vn threfor. QÔii fut bien aife>
ce fut le médecin , lequel fit creufer. Mais lors qu'il e-
fpcroit trouuerle threfor, ilfclcua vn tourbillon de
ventjlcquelefteignitla lumière, fortit parvnfoufpirail
«le la caue,& rompit deux toifci de créneaux qui cltoy-
entcnla maifon voifîne , donc il tomba vne partie fur
loft-vent, ^l'auwe paiie cala caue par le Ibufpuailu
^5 0 Hijloirn admirables
& fur vne femme portant vnccruchc d'au qui fut rom^
pue.Depuisjl'cfprirnefutoui en forte quelconque. Lç
jour fuluantjce Porrugais,aucrci du fait, Ait c\\\ç refjrit
auoit emporte le thrcfor, & que c'cRcit mcrûcille qu'il
n auoit oft'enfë le médecin, lequel me conta l'hiftoirc
deux ioursapresjqui eftoitle15.de Décembre i558.cftant
lecielferain &ber.u , comme il eft d'ordinaire es iours
Alcyoniens, t-c fus^oir les créneaux de la maifon voifî-
ne abatusj&roft delà boutiquerompu. i.Bodm tw^.liu.
^eft Deynoncm.viiejch.^,
Philippe Mclanftiion recite vnehiftoire quafi fcmbla-
"ble , qu'il y eut dix hommes à Magdcbourg tue? delà
ruine d'vnctour lors quils fofloyovent pourtrouuer
les threfors que Satan leur aucicenler^nez. tt George
i^gricola au liure qu'il a fait desefpritsfouterrains efcrit
«lu'à Anebergen Saxe au fond d'vnc mine nommée
Couronne de Rofevn efprit en forme de cheual tua.
douze homn;cs : tellement qu'il fit quitter cel'Ireminç
pleine d'argenbquelesforciersauoyenttrouuceà l'aide
de Sat.in. l'ay apris auffi d'vn Lyonnois, qui depuis fut
çhapellain en l'Eglife noftre Dame de Paris, que lui a-,
uecfes compagnons auoyent defcouutrt par Magic vn
rhrcfor à Arcucilprcs de Paris. Mais voulant auoir le
coffre où il eiloit.qn'ilfut emporté par vn tourbillon . 8^
qu'il tombafurlui vn pan de muraille , dont il trt & fera
boiteux toute fa vie.Ht n'y a pïis long temps ou'vn pre^
iire de Nuremberg (dont a elle parlé au i. volume de
fes hiltoircs, au chapitre des threlprv) ayanttroiHié An
threfcr à l'aide de Sar2n,ê!"ff.^ le poind d'oui.rir le cof-
fre fut aeablcdes ruines de la m.tiion.ray fccu aufii d'^ n
]-.raricien de Lyon, eue ic ne nommcraypoint, combien
qu'il le contoit tout haut en bonne ccmpagnicqu'ayant
elle auec fes compagnons la nui<n-, pour coniurer les c-
rpr.ts , Sctrouucr vn threfor, comme ils auoyent com-
mencé de fouir en terre i ils ouyrent lavoix comme
d'vn hcmmç , qui clloit liir larouc presdu lieu oùils
Cfcufoytnt , criant cfpouuantablcmcnt , aux larrons;
ce qui les mit en fuite. Au mefme ir.ltant les malins e-
i^nis les pourfijiuircnt bitçiiiis iuft^ues en la maifori
^ memora Lies. ^51
d'où ils eftoycnt fortis , ëi enr; crenr detians faiTaiit vn
bruit (ï 'Jranti, que l'hofte peufoir qu'il tonnaft. Depuis
il fit ferment, qu'il n'iroic lamais ccrcher threfor. I. b««
di't en ce m^fne lii4re ^ chapitre.
Lesfoumcurs AlchymilWs, pour laplufpart, vovans
qu'ils ne peuuencvenir à bout de la pierrt Philofophale
demâdentconleilaux erprits, qu'ils appel] eu: fa:-ml:e:$.
Mais l'ay fccu de Conftantin, eltiiv.é entre le plus fça»
uan5enla pyrotechnie & urtmetaUiqucquifoitenFran-
ce, &c âflez conu eu ce Royaunc , que fcs compagnons
ayans long temps louifflc fans aucune aparencede profit,
demandereatconfeil au diable s'.-ls faifjyentbien , &
s'ils en viendroyent à bout. Il fit lerponfc en vn mer,
trMMUle\. Les fouffleurs bien ai^es continuèrent & fouf-
flerent fi fort qu'ils multiplièrent tout en rien, &foufRe-
royciit encore, n'cuil elle que Conftantinlcur dit , que
Satan rencîoittoufiours les oracles a doublefens, &que
ee mot, TramiUeX^ vouloit due qu'il falot quitter ia
Chviiiie, s'employer au trauôil , & à Ihonneile exercice
de quelque bonne fcicnce pourgaigner fa vie:& que
c'elloitpure folie de penfer contrefaire lor en d peu
cic temps, veu que Nature y employé mille ans. Par
mefmcs moyens il faut dire à Ceux qui veulcntauoir les
l<;icncvs par art diabolique , Trauaillcz : ou (comme
nos pcrcs) tres-veiUez, & prier Dieu qu'il donne heu-
reux fuccés à nojlrc labeur , qui eille point principal,
L4 m- frite.
l'ay conu planeurs de ces Chym.iucs S: fouffleurs,
fîeiifie/ dcTopinion deltur ff.fniance que quoy qu'ils;
n'culfent pas cinq fols en bourfc , Ci fc faifoyent ils forts,
& par vains difcouis tafchoycnt toufioursde perfuader
à inoy & a d'autres qu'en bricf temps ils em»)lirGvcne
d'orpur&plus fin que de 24. carats , noscoftres&: nos
maifons. Au bout ie lesay veudeilituez de fouffie, dç
vigueur, de moyens, fe tenir bien fiers de trouuerqui
leur donnais vn bon repas , les autres tout defchirtz. 6c
)a chemife noucc fur l'efpaule faire larmoyer ceux
i^ui fçauoyent leurs vanaries:les autres deuenir en*
chaiut;urs ou Uuk moaikoycuu ; dont fc fonc eniuiuis
Rr 4
^it Hifloires admirables
maints iiiftesTuprliccs. Encorcs aujourd'hui plufîeû»
pais l'ont infedez de tclsimpo{ltursc]ui prcnans des
prétextes faux, pourfatisfaircà leur ambitieule auaricc,
embrouillent maints efprits curieux & les perdent fina-
lement. Ceft la iultc vengeance de Dieu liii-l oifiuetc,
&rcxortation à toutes perfonnes vigoureufes de corps
& d'cfprit de s'employer franchement à Texcrcicedes
vocations légitimes approuuees de Dieu.
Durant les premières guerres ciuiles fous le règne
de Charles IX. auint à Bezicrs vn fait remarquable,
pour taxer Tanarice de quelques vus, & monftrer auec
leiugcment de Dieu le malheur àfis guerres ciuiles.
Antoine Sauin/cruiteur dVn "Bourgeois de Beziers, a-
yant eflé pnnsen vne cfcarmouche, ceux de dehors of-
frirent de k- rendre en efch ange d'vn cheualgaigné fur
vn de leurs capitaines en la mcfmc cfcarmouche. Ceux
de dedans aimèrent mieux laiil'er pendre & cftrangler
^auinque de rendre le chcual. Mais en vne autre fortie,
I^eu de iours après , ce cheual fort en bouche prenant le
frain aux dents emporta ce gentil-homme ( auquel il a-
uoi: efté donné) au milieu des ennemis , qui tuèrent le
cheuaîier & rcgaignerent le cheual. H///. de France j fous
Charles IX. Nous p?.rkrons encore ci apresde lamifc-
rc& punition dePauance en la defcription de diucrs
naufrages.
ADFERTISSEMFMS & cLumtcûureurs de
grandes ruines ér confufions.
MEs PR I s t R les 'i:\ç(^s confei!5.,r!eouter peu dcgcns
non encore allez expérimentez , ignorer fafoi-
bkire> vilipender fon ennemi , & faire plu/îeurs pertes
particulières, rontlcsauaiit-coureurs de la ruine d'vnc
îJrniec puiflante , & des confufio'ns qui s'en enfuiucnt.
ï'en alléguerai quelque^ hiftoires. La première fera la
piinfcdu Roy François I. dcuaiit Pauic , dont nafqui-
ruit iuHmcs pertes , & en. m^qucrayiçs d^ueifes cir-
confiances
^ memorMes» ^3?
conftnnccs dcrcntes bien au longes hiftoriens qui en
ont parlé.
1. La Trimouille, fes Mnrcfchaux de Foix, de Chabr?-
nes,& autres expérimentez Capitaines, conleilloyenc
ail Roy de retirer fon armée de deuant Pauie , & fe cam-
per en quelque logis fort , comme il s'en trouue beau-
coup en CCS pays ll,pour les canaux qui fe deriuent, afin'
d'abreuuer les prcz. Ils remonJiroyent que Tarmee
ennemie dcfprouueuë d'argent feroit dans peu deiours
contrainte rercrpandre& loger es villes. Qu^e les étran-
gers, à faute de payement, ne faudroyent de faire quel-
que dangereux tumulte. Que les ennemis nefe con-
ferueroyent enfemblc, lîînon en efperance de doiîner ba-
taille : & que s'ils voyoyent la guerre tirer en longueur,
plufieurs difficultez & confiifions eniieloperoyentleur
obilination. Qu'il eftoit extrêmement dangereux de
s'enfermer entre vn e ville défendue par cinq mille hom-
mes de pied & vnc armée qui lui venoit aufccours,puiP
faute en nombre d'hommes couraccux & guerriers. Ces
fagesconfeiU furent melprifez par le Roy, quinevou-
loic laifler fon (icge, & ptnfoit cmpefcher à Tes ennemis
l'entrée dedans Pauie.
2. II fe repofoit du gouucrncmcnt de l'armée fur
l'Admirai de ï3onniuet, n'cfcoutoit que fon confeil, 8t
preftoit l'oreille à deux «autres ieunes Seigneurs, pour-
ce qu'ils lui agréoyent, mais n'auoycnt encore grande
expérience au faid delà guerre.
3. Il n'auoit en Ion armée le nôbre d'hommes qu'on
lui faifoit à croire. Le Duc d'Albanie auoit emmené
parties des gens de cheual , partie eftoit demeurée à la
garde de iMilan : plufieurs eftoyent rcfpandus es villes
& bourgades circonuoiiines. Il n'auoit que huict cens
Lances au camp,& la négligence de fes O ! liciers. Tau a-
ricc des Capitaines (Italiens nommément) rabufoir,nc
fourniilans le nombre des gens de pied, dontils tou-
choyentlafoldc.
4- Le Roy vouloit febattrc , quoi que fes ennemis
défia forts cuiïcnt plullolt intêtion de retire'- leurs cinq
mille pictous fortincômodcz dedâi Pauie j ^ U rcfraii-
^54 HlJIoires admirables
chirdc nouuciux , que de combatne, s'ils n y cfto} enf
forcer, parle Roy, logé en lieu tres-aduantagcux, & ou
lapuiflancedertnipereurncpouiioitliii nuire.
5. Le5iarriegC7. dedans Pauiealfaillirentà l'iniprou-
ueu deux mille Valaifans logez près d'eux qu'ils difTi-
perentS: mirent en fuite. Deux cens chenaux &: hmà:
cans piétons cmpefchans les viurcs qu'on amcnoirdc
Xode,afllegcz dansle chafteau S.Angc,furent contrains
accepter honteufecompofirion de fortir fans armes &
fans chcuaux,& promettre de ne porter d'vn mois les ar-
mes conrrel'Empereur. Piufîeurs places que les î rr^n-
çois aaoyent à leurs efpnulcs vincfrcnt en fuite fous la
puilTancedcs Efpagnols. Deux mille Italiens de ceux
quiauoycnt fouftenu le fiegc de xMarfeille furent des-
faits,& forcez de fc rendre aucc à[\-Çi:^i enfeigne«.Iean
Louys Paluoifin , Çmui de quatre cens çlieuaux & deux
mil piétons, vit fesgens mis à vaude-VourcSc lui fait
pnfonnier des Imperialiftes.Survne alarme quelesGri-
fons fedonneient, fîx mil hommes qu'ils enuoyf^yenc
au Roy furent contremandez, &:s*cn retournèrent cinq
îoursdetiant la bataille, laquelle le Roy perdit &v fut
prins prifonnierauec grande fuite: perdant lors infini-
ment, comme l'HiJioiredc France enf.i -vie le monllre , cn-
fcmblc les fautes qu'il commit le iour de fa prife.
La dcuxiefmehiitoirc fera la desfaitc des Hongrois
Si de leur Roy Louys , en l'an 1516. d^i x ans après celle
*le Pauie : dont ie marqucray autant de circonftances
«qu'en la précédente hiltoire, pour la preuue du tiltre Se-
préface de cefte f e(fîion.
T. Le Ch^Micelicr de Hongrie, le Vayuodc de Tranf^
fvluanie , le Comte Chriftofie, confcilloycnt le ieune
Koy, voire le iupplioyehtde n'aller heurter contre vue
iî puilfance armée qu'eftoit celle de Sultan Solyman, &
qifilfaloit attendre que le fecours des voifinsfuil ve-
jiu. Que dcîaymt quelque peu, des auantages feprefen-
îi-Toyent au preiudice des ennemis, aufquels le grand
nombre r.uiroir, ôcrrouuant moyen de leur tronchcr les
riurcs , l'oncontraindroit Solyman de fe retirer, finon
f-'u'il vcuiuit ^ wirli diiTipauon de ion anuce ; «ont la
Cr ntemoYAhles: <^3 5
{noitié eftok compofee de bouches inutiles.
z. CeicunePrince,bcau-fierede l'Empereur Charles
V.dc ciand'efpcrancc pour Tauenir, mais encortort icu-
ne,à fçauoir en l'aage de vingt vn ans , par confequcnt
"peu expérimenté, fut tres-mal conduit enceilc puerrc.
Son principal conieiller fut F.Paul Tomory, moine Ar-
cheuefquedc Collôc,lequel maniant la plufpart des pé-
ris & grands au royaume voulut tout chaudement s'op-
pofer à la violence , fît affemblerJes Eftats,& ordonner
que tous les Princes,Scigneurs & gennls-hommcs, tant
Ecclefiartiques que fcculicrs , fc rrouueroyent en armes
auec certain nombre de gens de pied & de cheualpour
acompagner le Roy & aller au dcuant de l'ennemi. Cç
moine fut eltimé auoirintelligence auec pluficurs Chre-
ftiens reniez de ra^-mec des Turcs , nommémentauec
quelques canonnicrs & gouuerneurs de l'artillerie, Ale-
hcmans & Italiens por.r la plufpart, &que ceftc vaine
confiance l'enfioit ainii.
5. Du commencement l'armcedu Roy eftoitfort pc^
tite eftant feulement compofee de quatre m.illechc-.
uaux & de fcpt ou hui<a mille pietcns.Depuis clic fe ré*
força quelque peu : tellement que le lour de la bataille,
reucuëayantelté fai(î^^tepeu auparauant,furenttrouuez
enuiron vingt-cinq mil hommes de combat. Mais ce
n'ej^oit pas pour refpopdre aux troupes ennemies.
4. Combien que Tomory &fesadherans fcculTent
que le Turc auoit près de quatre vingt mil combatans,
tous d'eflite,& plus de trois cens pièces de canon, neant-
moins ils eftoyeat fi enyurez de vainc confiance ca
leurs forces »maginaires,&parJoyent fi audacieufcment
de leurs vaillanrifes futures , que nul n'clioit eltime en-
tre eux (:Liinefe cromettoit ruer demie douzaine de
Turcs à fa part.
5. Maisdeuant la bataille ils eurent diuersauât-çou-
reprsdelcurriiinc & confuf^on. Premièrement , lors
que Solyman entra dedans la Hongrie, le royaume fe
frouua dei"nuédegcps,d'argcnt,deconfeil, & d'cfperan-
ce defecours. Secondent nt, tandis que chacun cou-
|:oitaux rçmedcs diuers,|ioHrUut'r dcmeu & foWac^
^3^ Hijloires admirables
pouruoir aux places & garnifons, les Turcs gaignoyci.:
pays fans empc{'cheincnt,& emportèrent de force Vara-
dxn viUe aiî'ie fur IcDanubc.En troifiefme licu,lors qu'il
fbt qucft:on de leur aller au dcuaiit es paflTages où l'on
pouuojclcs incommoder,ou arrcllcr court , Von s'amufa
à afTemblcr les I:ftats,& à diiputcr de ce qui elloit à fai-
rcEa ciuatnefmc lieu , plusieurs de la nobleffc reculè-
rent quand il faloit i'auanccr , & fous couleur de leurs
priuilegcs& des couftumes du Royaume , dirent qu'ils
necorabactroyent poinc,(î ieRoy(lors aagé de vingt ans
leulemencjiie marciîoit en nerfonne. Finalement quoy
qu'ils fccuA en t combien clloit redoutable lapuilînncc
<iercnncmi, qu'ils eu Ifent moyen leiour de la bataille
«le faire retraite , & d'entrer puis après en traité commo-
«iepourla couferuation du royaume , Tomory&les
fiens perdirent rhonncur,leursvies,le Roi,fa noble(fc &
la Hongrie , parla perte d'vne bataille au milieu du
pays.
Adiou{lons vnetroifîefme hilloire de lacques I II I.
Royd'Efcolfe, tue en bataille contre les Angloisl'aa
mil cinq cens treize.Sa ruine fut précédée du mefpris de
tous les fagesconfcils qui lui furent donne? parlcsplu^
j;rands Seigneurs de fon Royaume,rurtoutpar Archain-
baud Duglas Comte d'Aagufe,ron principal Confcillcr-
*& extraordinaircment par vn vénérable vieillard inco-
nujlequel fe trouuant derrière fa chaire aux velpres qu'il
faifoic chanter à Limnuch quelques ioursdcuantlaba-
taiLlc,rexhorta de s'en dtportcr , &lui perdit fa mort s'il
y alloit, puis difparut. 2. Le deuxiefme auantcoureur
fut qu'il ne {:t eJtat que du cont cil de fa telle, & de quel-
quci gens apoftezpar LouysXII.Koi de France pour le
folliciccr à cefte guerre,atin de tirer Henri VIII. Roy
«l'Angleterre ;, qui pour lors taïUoit delà befongncaux
François , lefquels vouloycnt fc mettre;. i couuerten
pouifantlT-fcOiTois en câpagne.5. Le tioifîefme fut,que
i-'ias fe foucicrde h toibleffe.ains pcfant que rien ne lui
cMloit impoilibie , il menafoi-mefme ik fa noblefle à la
boucheriu:? fe f(.unant auec 15. ou 14. mille homn\cs i
tiauersciiiuroiiciciice mille combattaas , lc> chefs deU
quels
d^ mémorables. 6^f-
<}uel$ lui vouloyent mal de mort. Cefte hiftoire eft am-
plement efcrite en nesbeaux termes par BttehMUJioHi^.
lUitthifi. d' Efcoffe. Et qui voudra conférer enicmblc les
trois fufmentionneesjque noustouchôsfuccindementa
verra beaucoup de notables rapports, dignes de mémoi-
re à la pofterité.
BLASPHËMATEVRS funls.
L'An mil cinq cens trente-ïïxjcertain pvefcheur ayant
ofé en plein fermon dire que TApoRré S. Pauls^e-
ftoit abuie en quelques endroits , fut frappé fur Theurc
en fa chaire;& mourut foudainement. M. tendre Honf"
dorfenfon théâtre d^exentples.
Neuf ans auparauant comme TAlemagne fur affligée
d'vnc fueur peftilentieUc, qui emportcir grand nombre
deperfonnes, vn prefchcurarrribuoit la caufede touc
cela, non aux péchez & desbauches des grands & pecis,
mais à ce qui n'en eft nullement caufe : & fouftenât que
tout fe portoit bien au regard de la confcience & des fa-
çons de faire tant de lui que de Tes fembiables, ordonna
que le îcndemam on feroit vne grande folcnnité , pour
adoucir la rigueur de la pefte. iMais il fut trouué roide
mort en fonli^ft ce lendemain de grand matin , tellemét
que laYûlemnité futconucrtic cnfunerailles.z.^ wt/^'ne.
Vn payfan Aleman , contempteur de toute religion,
ayant en fureur de fon vin vomi beaucoup de blafphe-
ities en prefence d'vn homme de bien, qs^'il pretcndoic
derpitercnfe prenant à Dieu, ne porta pas loin cefte 2-
niquité. Car le lendemain il fut trouué en vn camp>
toutnoir, & comme brullc par le corps roidcmort. là
mejme.
L'an 1542. lé 14. iour de luin , Bude ville de Hongrie
fort rudement batue d'vne tcmpefte cftrnn^e. A quoy
vnpreftre voulant s'oppefer, fit couper latefteàvne
brebis , & la fuifant porter ainfi deuantfoi s'achcmma
versTEgluc : maisvn tourbiUun luriiinc quienleuala
(?38 Hiftoiresadmirâhtes
tefte ne brebis & le preftre , de telle forte , qu*on ne î«i
vit depuis.ZfjZ» Fhtcduu z.Uu.dci miracles.
En Tan i557.trois iours dcuant Parc|ues,vn prefchcur,
homme d'aage , & gouttcux,cn la ville de Forchcni eu
AllcmagnCjS cAans pris en Ta chaire à TApoftrc S. Paul,
iufqucs à ofer dire,que fi le dire de l'Apodrc eftoit veri--
table fur certain article donc ce prefcheur difputoit, ief
veux(adioul"ta-!])que le diable m'emporte. A l'inftant la
voûte & les parois de TEglife où il prerchoit commencè-
rent à croufler, Scfoudain Te prefente vn grand homme
noir dedans vn tourbillon remplifl'antrEglife,lcquel en
prcfcncc du peuple empoigne leprefcheur, ScTempor-
tejfansquc depuis on Tait vcu.Toft après ce grand hom-
me leuicnc&vadroit au icuelliiaire, où ilyauoit force
gens d'Eglile.Il s'attache à Tvn d'iccux, Uquel defgai-
nant vn poignard ou grand couftcau , pour le défendre^
fe blcfîa loi-mefme : & après grande contrafte , trouua
moyen par le fupport de Dieu j de fe tirer arrière de li,
fuiaid'vnc foule de peuple merucilleufementerperdu.
D'auantageàla mcfme heure apparut vne armée au-
tour delà ville>comme prefle à entrer dedansrdonts'en-
fuiuit alarme & frayeur inaoyable en grands & petits,
qui ne fçauoyent où courir Se fe iauucr. Le iour de Paf.
ue«.le bruitrecommcnça de telle violence, que les prc-
res furent contraints s'enfuyr hors dcTEghre. lob Ftacel
ï
l
Vn autre prefchcur ayant fouhaittc , fi les propos bh{l
hematoires qu'il auançoit n'elloycnt veritables,d'eilrG
budroyé , quelques iours après citant en l'Eglife fut at-
teint d'vn efclat de foudre qui le rcnucrlii par terre. Re-
leué & conduit dehors vcrsfamaifon , il fut frappe d'vn
autre coup qui lui oftala vie. AL x^ndrê HonjiotfenfotÈ
thcatre d^exanples.
Vn des principaux Rabbins & Do fleurs des ïuifs ett
Allemagne de noftre temps,nomme Michacl , fort cfti-»
méde fesdifcipJes, ayantconuié plufieursd'iceuxa vn
banquetfolennel y defgorgea force blafphemes contre
nolbe Seigneur lefus Chrill, Dieu-homme , & la biea-
hcureufc vierge fa mcre : fe glorifiant en fes impie tez
conH
^ mcmorahles. 6}^
tomitlc ayant gaignc quelque vidoire fur le Dieu des
Chreftiens. Mais au fortir de table, voulant defcendre
par certain efcali-er , il tombe du haut en bas , fe romps
le col,& meurt fur la place. Job Fincel att z. Ut*» des mira-
dps. Nous rcfcrucrcns plufieurs autres exemples àts
blafphcaiateurs , maugrceurs fcc inuocateursde Satan»
pour les volumes fuiuans, adiouftans à ce chapitre en-»
cores deux hiftoives.
Vn baltard, homme inrolent,& ennemi de toute reli-
gion,fe trouuant en vn village fur les frontières deSuau-
bc & de SuifTe, commence à dire dedans vnc tauerne en
prcfcncc de plu/îcurs,qu'il nefe foucioitnidclaReligi©
de Kome,ni de celle d'Alemagne, & vomit âcs blafphc-
mcs qui ne doi uent eftre recite?., fe prenant à la maiellc
dcDicu.Qu^èlqucspayranscommenccrétà crier, difans
qu'il faloit chafTerau loin ccpendard , &vouloyentàt
toute force fe rucrfur lui. D'autres plus retenus direm:
que c'cfloit peine perdue de côtefter a uec ce defefoeré.
Frcfqucs tous fe leuent de table , proteftans ne vouloir
plus auoir de communication aucc vn tel monftre, indi-
gne de viure fur terre. 11 auint iuftement vn an après,
que ceprophane eftant en la niefme tauerne , en la me(^
me table & place ,5c continuant en fesblafphcmes, vn
bon payfan ne pouuantfupportcr telles paroles,entreen
querelle , defgamc Tefpee , & en tranfpcrce le blafphe-
mateur, qui fur le champ expira , paye defesimpiecez.
I./c Gajl de Brtf/tc, at* i.'volumc de Je s propos de table.
L'an 1580. au mois d'Odobie le Comte de Renne-
berg ayant affiegé Stenuik en Frifc, furies Eftats, vnfol-
dat Alleman de fes troupes , s'cftant approché d'vn des
boulcuards commence à iniuricr les aliicgez, acompa-
gnant fes outrages de blafphemes horribles contre la
maiefté de Dieu. Vn de ceux qui cftoit lors en garde^
voulanpimpofcr /îlcnce à ce mcfchant dclibcra tirer vn
coup d'harquebufe à toutes auantures , la part où il en-
tendoitla voix. La balle fut fi bien adreifce qu'elle don-
na droit dedans la bouche ouuerre du criard, lui perça
îa langue & le col, tellement qu'il demeura roidc mort
fur la place , ix fut aiij/î rcconu par les .-îlfie^cz , cvd
^40 Hijloires admirMes
maugré IcsafîîCgcans cnlcucrcnt le corpsMe la place ou
4I gifoit morc,& rapportèrent dedans la ville. R.Aietenv.
en l'hijioirc des pays ba.fyUtt.lQ.
BLES SFR E k la tefte , fuime
d'efir anges accidens»
C>0 M M n Nç A N' T Tan 1^58. à'pratiqucr la Cliirurt'j' 7
^à Gaillacpres Albijlieudcma naifFance, entre nu
plusfafchcux commcncemcns ic rencontray vn noiij
mé Anroine Verdezijdu mefmelieu de Gaillac, niailltc
fcrruricr,ayant pere,merc, frcrejfœur, femme & cnfansy
aa«e de trente à trente-cinç] ans. Icelui s'en allant pro-
mener vn Dimanche après difner en vne iTene vigne , v
trouuavn troupeau de moutons & de brebis. Fafclie i;u
dommage qu'on lui faifoit, voulut s'eflaycr debatiic
celui qui les conduiloir. Maisà bon chacbon rat , carie
beraerlerciicnchant lui donna tclcoup debartonc]u*il
tcnoit en main, au lieu de houlette, que de la violence
& roideur du coup , fans faire folution de continuité ex-
.ternclui enfonça tout le hre^.na de la partie gauche, de-
puis la future fatignlc , iufques a la future lepidoide ou
fi^uammeule.DucommcnccmcnLquei'y fus appelle, i^'y
voyant rien paroiilre extérieurement , ie prellmioi.s la
bleflure moindre qu'elle n'eftoir,& me doutois de quel-
.que melchanceré &. feiutiie aublcllc, pour auoir la vi-
gne de celui qui l'auoit outrage l;îqucile touchoit àla
fîene. Mais les accidens qui augmentèrent de iour en
iour, & d'heure à autre , fçauoir ell , grande iiiquictudc,
frenefie, perte de raifon,deiugcment, conoiilance, me-
raoîre,& en fin de parole, m'alieurerêt bien toi-l du con-
traire, & fus contraint lui faire \nc grande incilîon en
croix au lieu de la blcliure. L'incifion faite ic trouuay
au deflous vn grand fracas des os lufdit.s ,. & après auoir
leuc toutes ces pièces, ic vi la dure mère , bien defcou-
uerte,fotc rouge & en£laiijiiîee,toutesrQis fans aucune
folu.
é^memorcihles. *^ 6^i
lîïîiJtion 4^ continuité. le le peniay tout aîniî que l'art me
commandoit. Au bout de quelque temps les accidens
commencèrent à diminuer, mais peu sl peu, & anec gran-
de diltance & interuale i'vn Je l'autre.La frenaifie le quit-
ta la premiere,rans toutesfoisqu'il recouurail ni lugemér,
ni cognoiiîànce, ni parolc^car il demeura lii.mois oc plus,
idiotjlàtis parler aucunement. Au bout de z. ans il com-
mença à recognoilire l'on perejle médecin & moy:Sc (qui
efl choie bien eflrange)talutluiaprendreàparler,conime
on fait aux petits enfans,le remettant à l'a b c : puis il re-
commença de npuueau i'aprentilîage de ion melher , tant
la mémoire des chofes pailees fut perdue, anéantie & e-
ftoufFee en lui par l'accident de celle bleflure.Bien ertvray
qu'il rapprint pluftoft à lire & à exercer fon eftat, que
n'eul} fait vn autre tout nouueau.Sur la fiji de la cure,fça-
chant que Monfîeur Rondelet eftoit pre> d'Albi à Reflac,
pour penfer le Seigneur du lisij, ie l'allay trouuer expreP-
fément pour le prier de venir voir l'eilrangeté de celle
blc/îure,& l'cftat de ce /tune homme ; ce qu'il m'accorda
très- volontiers. L'ayant veu,il me raconta en auoir penfe
vn iemblable , qui efloit pédagogue des enfans de mon-
fîeur de Curfbijdepuis duc d'Vzes,Iequel auoit efté bleflé
tirant des armes, d'vn coup d'efpee rabatue dedans Torbi-
te,penetrant en la fubflance du cerueau.On fut contraint
de le remettre à l'a b c , comme l'on fait les petis enfans,
& n'eut lamais depuis l'efprit lî bon,ni la mémoire lî heu-
reulè qu'il auoit eue auparauant. M.Barthdemt Cabrohen
fes ooferuations anatomi^uesyobfe.zj,
B L ES s FR Eperilleufe a U langue ^dextrc-
mentguerïe,
LA langue eft aucunesfois blefifee auec perdition de
fubrtance, & quelquesfois incilèe & fendue en
long, &autresfoisen trauers. S'il y a perdition defub-
ftancejiamaislapieccnepeut élire reprife: pource que
toute partie feparee du corps viuant , auec qui elle eftoïc '
Sf
(^4 ^ HiHoires admirables
coniointepar vie 3 perd lavie en rwtlineinftanr. Mais iî
elle n'eflqu'incilbe en long j facilement eltgucrie en Ja'
réunifiant auec coulhire. Et fi elle elt inciièe en trauers3&
c^u'il y ait encore quelque portion de la chair pour bailler
vie , il fe faut bien garder la paracheuer de couper 3 pour
l'excellence de fbn vfage : mais conuientia recoudre en
failànt lespoinéls d'elguille deflus & deflbus : & faut la
tenir fermement , pendant qu'on la coud 3 auec vn linge
blanc ,net& dcflic, pource qu'elle gliflei oit d'entre les
doigtSj à caule de fa lubricité 3 ainfi que fait vne aiguille.
Faut couper le fil plus près du noeud qu'il fera pofllble,
depeurqu'iceluy n'entre es dents j lors que la langue fe
meut en la bouche, qui pourroit eftre caulè de la defchi-
rure des poinds. Le blefit doit viure d'orge mondé , laid
d'amendesjgeleejcoulisjpreflisjoeufs molets, & nourritu-
turefemblable. Qu'il tienne fouuentenfa bouche lucre
rofàtjfiropdecoins^de cerifes, ius defeiilès confites, ou
autres telles confitures 5 pource que ces choies nourriP-
fènt & feruent de medicamens aglutinatifs. Vn ionr i€ fus
appelle en la maiibn de feu Monfieur Couct Aduocat en
Parlement , pour penfer vn fien fils aagé de trois ans ^ le-
quel tombant donna du menton fur vne pierre , & de kt
dents fe coupa bonne portion du bout delà langue, qui
ne tenoit qu'à bien peu de chair. Ayant peu d'cfperance
qu'elle peuft fe revnir , ie cuidai paracheuer de la lui cou-
per,toutesfois auec très-grand regret , veu que puis après
l'enfant n'euft peu parler. Cela me fit différer^ conoiflàn^
que quelquefois Nature fait à&s choies admirables, & que .
la langue eltd'vne chair fongueuie, laxe & jpongieuièi
îoinc^ qu'elle n'eft iiibieâe 3iU\ iniures extérieures de.
l'air.Adonc ie lui fis àcuy. poinch d'e/guille, l'vn deflus &
l'autre deflt>u s , commandant a la niere qu'elle euft à le
nourrir des alimens prédits. En peu de lours l'enfant fut
parfaitement guéri, & a très-bien parlé depuis. Cas iém-
biable aduint peu de temps après au fils de Monfieur Ma*
ripny Prefident aux Enqueftes , qui fut femblablement
gueri: comme auffi à lean Piet charpentier , qui auffi a c-
é* mémorables. 64)
CHARITE maternelle.
IL y à*quelc]ues années qu'vn grand Jyon nourri en la vil-
ie de Fiorencejfit tant qu'il rompit ies barrières & clo-
Itures de fa prifon^puis commence à courir par la ville a-
Lecrugiflemens» horribles, donnant vn terrible alarme i
grands & petis^chacun fe iauuant de viftefle 6i d'heure ar-^
nere du danger. Il trouuadauanture en chemin certain
ieune enfant fils vnique d'vne femme vefuejlequel n'ayant
jpeu gaignerafl'eztoft retraite dcmeuro't derrière les au-
tres:il Tabbat de fâ patte 5 puis l'empoigne comme pour le
defchirer & deuorer.La pauure mère voyant ce /pcctacle>
emportée de charité maternelle,ic>rt en ruc^ & fondant en
larmes court droit au lyon empoigne Ibn enfantée lui ar-
rachejpuis l'embraflant le porte fain & iàuf en fa mailbn;
'Extrak dtt chap. î$. dm. -volume des méditations hijloriqttei dt
fnoiijieur Camerarim.
En l'année prefente i5oj. au mois de îuin, dame Myc
Chotagne femme de Girard Troiliet de Rolle 3 bourgade
ious la condition des illuftres Seigneurs de Berne^au pays
de Vaut 3 voyant vnefîenne fille bien aimée griefuemetlt
malade^iii en qui Ton n'attendoit pliis de vie > toute deCo"
lee de ibn affljction/e retire à part en vn coin de la cham-
bre,& commence auec l'armes & foufpirs ardans^profter-
née à genoux^de fupplier Dieu trePinftamment , qu*il lui
pleuft faire efchange, & la tirer hors du monde elle mère
qui y auoit allez vefcUjredonnant la vie à la chère fîlleaafiii
de l'y feruir.Dieu appointa fur l'heure fa requeftc. Car fa
fille foudain commença à reprendre fès eiprits & Tes lèns:
Elle à l'oppofite fe met au lid , & en peu de temps rend
l'anieà Dieu , fort contente de la grâce qu'il lui auoit fai-
dc:&: fa fille lui fait honneur à fbn enterrement , ellant en
bonne fanté.Nous aUons cefte hifloir^par /<? rapport du fils
d'kelle dameiltqud lui entendit faire icelle priere^a veu la
maladie,& affilié au trefpas de fa mere^ & contemplé l'ad-
mirable conualefccnce delaiœur»
Sf 4
44 Hljloires admirables
COMBAT fjardiyé' nonfanglant.
ENere plufieurs notables fpedades à l'entrée du Roy
Henri Il.à Lyon l'an ;54â.en S«;ptembre,celui qui s'en-
fuit lemble remarquable. Douze gladiateurs ou côbattans
defarmez^fix vertus de latin blanc jfix de latin cramoifij en
.quatre rangs , de trois à trois 3 s'eftans prelentez deuant le
Ro/j commencèrent vn combat à l'antique , non quant
aux armes y mais quant à Tordre de fe fjauoir fecourir , &
entrer de rang les vnfs dedans les autres , lans fè rompre.
Ils combattirent premièrement auec armes difFerentes^à
fçauoir vne zagaye ou demi-pique contre vne elpee à
dQUx mains. Et combien que ce fufl'ent armes longues
qui requièrent lieu fpacieux pour s'en aider', fi e^oyent
ceux qui s'en efcrimoyent au milieu de leur rang , & en
rue non gueres ouuerte. hts autres combattoyent de
deux elpees contre vne efpee & vn pauois long d'vne
braflfee & d'vn pied de largeur,ployant en rond: \cs autres
de l'efpee & poignard Boulognois contre efpee & bou-
clier Barcclonois. Ainû ordonnez > le fécond rang /è
tourna contre le tiers , & après s'eftre entreregardez,
comme par dcsfi , commencèrent à s'entrccourir fus de
grande roideur auec let armes traiichantes,6c non feintes,
de forte qu'après s'ertre longuement entrechamaillezj
\ts féconds rembarrèrent leurs contraires iufques aux
quatriefmes , lefquels voyans leurs compagnons hors
dhaleine entrèrent dedans eux , & repouflèrent virile-
ment hs féconds ia laiîèz & trauaillez 3 qui fe défendirent
loutesfois Scfouflindrentcourageufement iufques a leurs
compagnons qui faifoyent le premier rang , lequel
pareillement entra au fecours par dedans eux , & tan-
dis que les deux rangs qui premiers auoyent combatii
ieprcnoyent air y fe vint ioindre à leurs ennemis. En
ccfterufe d'ordre le premier & dernier rang fetrouue-
çnt ::;u milieL,combatans de telle furie,qu*il n'y eut fi foi^
ezagayfequine fuft çoupecen deux en trois tronjonsj;
a plus-parc ^e leurs çî'^q^s , tant à dçu.x mains que autres
^ mémorables, ^45
f quelciues vieilles 6i bonnes lames que ce fuflent ) eftans
volées en pièces : ce qui efpoui>enta.de prime face les; re-
gardans,qui ignoroyent ceile adrefle : tellement que de
plufîeurs lieux on crioit qu'on les lecouruftj ou qu'on Its
departift.Sur ce IVn des premiers rangs laflez ayant prins
air frais^entra dedans le rang de Tes compagnxDns , & ainfî
en front de fix fe ruerét tous enicmble fur vn râg de trois^'
qui tint bon afl'ez longtemps., (combatans deux contre
vnjiulques à ce qu'eftant trop preflë de fi lourde charge^
fut contraint de fe retirer^fouftenant toutesfois virileniét,
iulques aux derniers j Itlquels peur leur fecours fc range*
rent parmi eux de ii grande adrefl'ejqu'ils fe trouuerent fix
contre fix. Lors ils le rencontrèrent auec armes pareilles,
zagaye contre zagaye, elpeeà deux mains contre eipeeâ
à^nx mainsjdcux elpees contre deux efpees , & ainfi àt^
autres. Là s'artaqneretit ils brulquenaent & de telle impe-
tuofité. qu'en fin les vns enfoncèrent les autres.Puis firent
vne recharge vchemente ^ tant les rompus que les autres,
tournant chacun vifagejfans fortir derang: tellement que
Jes premiers rompus enfoncèrent aufli les autresjauec au-
tant d'adre/îe & d'alegrefl'e fur la fin , qu'ils auoyent au
commencement donné d'efFroy & de crainte aux fpefta-
teurs.Ce pafietemps donna tant de plaifir & de contente-
ment au Roy^à cau/ê de la nouuelle façon de combattrcafi
dangereure3& làns danger toutesfois (par Tadrcife Aqs ef-
crimeurs)qu'il voulut encore le reuoir Cix iours après fba
arriuee.Le plafir de ce combat dura plus de demie heure,
ôceuftrecommencéjfi leurs armes ne fuïïènt iî tofl faillies,
au bon vouloir qu'ils auoyent de mieux faire , quelques
pleins defueur& hors d'haîaine qu'ils fufient.P^r^c/m ai* 5.
liure des mémoires de Lyon.chapitre ij.
COMBATS fur mer.
AV mois d'Aouft de l'an I554. y eut furieufe rencon-
tre fur mer entre Jes Holandois , Zeelandois , Se
François , non que ce fuflent tous vaifleaux de guerre:
miis nau es Hollandoifes marchandes , contre les naoi-
Sf 3
6^6 Hijloires admirables
îiauire^J guerrières Franyoifcs , en lamasiiere qjî s'en-
fuit , Vingt-deux hurques de Hollande, Zseljnde^Vveft-i
frile,chargeeç de vinsjhuiles, lucres, rigues, railins & au-
tres marchandilès , retournoyeiTtd'Eip;îgne es paysbas.
Les François aduertis de cela équipèrent dix-ncuf naui-
resj& fîx carauellcsjbien munies d'artillerie, de bons lol-
<îatS5deniatelots, & detout ce quieftoit requis à leur in-
tention , & vont attaquer \qs hurques fur la cofte d'An-
gleterre es enuirons de Douure. Mais à bien aâàilli bien
defFendu. hcs François , prefques tous hommes de com-
bat,ne demandoyent qu'à venir aux mains, & s'accrocher,
pour euiter le tonnerre du canon Aqs Hollandois & de
leurs compagnons, fort adroits à faire iouër leurs pièces,
fans tirer à faute. Mais les François n'auancerent gue-p
res par tel moyen : car quinze de leurs nauires ayans H-^
iialement accroche quinze heurques , fous efperance de
Jes forcer , les lèpt autres hurques qui auoyent prins le
Jarge tiroyentpar derrière , & donnoyent furieulement
àtrauers les nauiresFrançoifes. Làdoncques y eut m
effroyable & terrible combat : car les Hollandois &
leurs compagnons , quoy qu'infeneurs en nombre,pour
auoirleîirsvaiflcajx plus capables , plus haut eHeucz &
les canons mieux afFuftez auec l'adrefl'e de s'aider mieux
de leurs armes en tels combats que les François, tenoyent
f;rme , fans que leurs ennemis peuflentauoir aduanta-
ge durant le combat , depuis neuf-heures du matin luA
ques à trois heures après midi. Les François las & re-
creus demandèrent trefues , mais le bruit , les cris , Ja
tempeftedu canon & de la fcoppetteric fut caufe qu'ils ne
furent nullement entendus. Pourtant ils s'aduiferent
d'vn autre expédient, eftimans que les Hollandois les \zÇ-
cheroyent , de mettre le kix dedans leurs voiles propres.
Ce qui fucceda tout au rebours : car comme ces nauires
ainfî attachées l'vneî l'autre ne peurent fî toft fe defcro-
cher,&quele vent chiflbit le feu de plus en plus des voiles
aux nauircs,aduintqueplulîcur> vaifleaux de part & d'au-
tre furen: cmbraiez 5 àraifon dequoy force leur iutàc
«quitter le combat pour i^dLfi^er à «Peindre le feu. ^fais
comme
(^memoYAhles* ^47
^omme aucuns fufl'ent tellement embrafez, qu'il n'y a-
uoit moyen de les fecourir, Jes François plus preHez
beaucoup que les autresjpour cuiter le feu fe letterent en
mer , & ians Te foucier fi les vaifleaux où ils fe rendoyent
cftoyent amis ou ennemis ne cerchoyentqu'à fauuer leurs
yit^. Ce qui leur donna victoire contre toute efperance;
car il s'en fauua tant dedans les hucquev Hoîlandoifes,
auant qu on peuft %t\\ apperceuoirjqu'en fii fe voyans en
plus grand nombre dedans les bords , ils s\\\ rendirent
inaiftres. En ccrte furieufe mefleede fix grofles heures,
y eut fix nauiresFrançoifes confumees par le feu j & v-
ne mife à fond des Hollandoifes & autres,(îxbrunees3&
cinq prinfès auec beaucoup de prifonniers. Il y mourut
plus de mille François j, & àts autres enuiron trois cens.
\ej.n le Vêtit en fes grandes i^intalcs de Hollande j ^c. li^
ure 8.
La gijerre eftant efmeuë entre îesRoisdeDanemarc
& de Suéde 3 auint en l'an i6u ce qui s'enfuit. Tout
riiiuer précédant, quelques nauires de Danemarc &
de Lubec n'auoyent bougé d'auprès dii haurc de Sunde
en lam.^r B.ilthique, pour empefcher que les vaifieaux
de S'Jede n'y fiflènt prouifion (à leur acouftumec ) de
falpeftres;, poudres, boulets, & autres munitions de
guerre. Mais le 12.de Miy 15^). des le poind du iou r la
tîotte de S Jede , compofee de quarante-huid nauires , a-
parut à l'improuifte, qui donna la chafîe aux autres : tel-
lement q'ie la mer ouuerte par tel moyen, enuiron fbi-
xante nauires chargées de toutes fortes de munitions
fe remirent à la voile, & le premier de luin approchè-
rent du port de Lubcc , où o'ayans rien fait montèrent
vers Coppenhaucn en Danemarc , &y mouillèrent les
anchresjfans aucun deftourbicr,pource que les nauires de
guerre de Danemarc n'eftoyenr pas p-elics. Sur I.1 fin de
ïuin la flotte de Dinemarc & Lubec réduite enfemble,
comme on fe preparoit au combat , le feu fc print à l'AJ-
niiraîe de Lubec ,& la brufii toute. Le fixiefmc &fep-
tiefoie de lueillet fè donna la bataille fiir mer. L'Admiraîc
de Danemarc, portant onze cqws hommes de combat,s'e-
ftaiît defFendue courageulènicnt dwux iours entiers
Sf 4
^^48 Hisîoires admirAhles
contrerefFoir de (îx nauiits de Suéde , finalement fut
piinfe des Suèdes auec l'Admirai Othon Rud, & vingt-
îîx ioJdats entiersjtous les autres ayans elle tuez ou eftro-
piez. La nounellc Admirale deLubeceut toufiours au-»
tour d'elle cinq nauires de Suéde , maugré Tcftorc def-
cjuellesj & quoy qu'elle euft perdu grand nombre d'hom-
mes, & le virt pleine de trois cens bleflez, neantmoins a-
près le combat d vn iour entier j fe maintint & efchappa,-
Cinq nauircs de Suéde , furnommez Hedor j le Lyon, le
Grifon^IeCignedeFinnonie, & Hercules périrent. VnC'
autre , appellce faind George , fut prinfe par \es Danois,
Cenonobftant les Suèdes demeurèrent nuiftres delà mer
tout l'automne & l'hiuerfuiuant. En Octobre delame(^
me année ils fc battirent contre vn des Lieutenans du roy
de Dannemarcqui les de^fic, mais après auoir perdu cin-
quante gentils-hommes. Dumd Chytrxm ahil.Uure de ft
chronique de Saxe.
le reprefenteray quelques combats fur mer des Zeelan-t
dois &Hollandois contre lesEfpagnols a caufe deplu-
fîeurs circonftances mémorables , referuant les autres
braues exploits de guerre es volumes fuiuans. Le 22. iour
deMjy iç57. feptnauires deFlefl'inghearmcesà la guer-
re, allèrent au fecours du capitaine Vvorft, contre
quelques Ef ^agnols .S(: nauires de Middelbourg. Eftans
la nuidfuiuantc ioindsâ Vvorfl , ils combattirent fort
furieurementce": vaiHeauxde Middelbourg. En ce com-
bat Bjftian de Langhc Admirai de la Vere , ayant a faire
feul contre q"atreviifleaux ennemis efchoua auec (a na-
uire. où lesEfprignols l'abordèrent & le gaignerent. Va
defèsgens voyant qu'ils eftoyenttcus perdus , mit le
feu aux poudre; : ce qui les fit tous ( tant Zeelan-
dois, qu'E^agnols) voler en l'air , Se rendit cefte vi-
âcire E.pagnole funefte & miferable. Hifloire des pays b<tt
hure 2.
Au commencement de Mars 1^7-. les nauires de
Ziriczec & de la Vere, iointe'; à celles de Flefringhe,etT
K>utau nombre deccnt,equippeesau combat, firent voi-
le enuiron le 8. du mois, &prindrent la route d'Anuersen
intention de combattre la flotte qui y eftoit preparfç
pour le
dr mémorables. ^49
pour le rauiôuaillement de Middelbourg , au nombre
<ie cinquante nauires 3 à f^auoir quarante trois de guer-
res & kpt chargées de viures & munitions. Leving-
tieiine du mois Jes- nauircs Elpagnoîesayans paiîélede-
ftroicqueles FlclTinghois auoyent penfé boucher auec
des bafteaux chargez de pierresjquelques canonnades ki-
rent tirées de part & d'autre. Le lendenjain s'attaqua vne
forieufè elcdnnouchcjparce que l'Admiraie de Fleflînghe
Cichoueelurie iàble , par la faute du pilote , fut aflàillie
lie dix nauires Elpagnoles. Mais ce pilote , fecouru à
temp':, nommément par le capitaine Vvorft , fe dépen-
dit fi vaillamment que les ennemis furenr contraints le
retirer , non fans perte de leurs gens. Deux iours a-
pres les Efpagnols ayans vent à fouhait^firent leurs eftorts
de pafTer, & là y eut vn combat fort cruel , Si. nombre in-
fini de canonnades tirées de part & d'autre. Mais ks
Eipagnols voyanslesZeelandois du toutrefolusde s'ac-
crocher au combat , fe retirèrent au lieu d'où ils eftoyent
partis le matin. En ce combat la Vice-Admirale E.'pa-
gnole 3 s'eftant plus aduancee que les autres, fut tant bat-
rue, &y euttantd'hommes tuez, que le fangen ruifle-^
loit de tous coftez. Le fieur d'Ariette 3 Bilcain, colonnel
d'vn régiment de Vvallons, le /èrgent ma'or de l'armée
Efpagnole ( tant outrecuidëquepeu auparauant il s'e-
ftoit nommé publiquement en Anuers, El caJU^ador de
los 'veillacos Flamirtges ) & le chef de cefte Vice-Admirale
y furent tous trois tuez , auec quatre ou cinq cens ibl-
dats &: matelots. Les Zeelandois y perdirent le capi-
taine Cloot Flameua & cinq ou fix tant foldats que mari-
niers,LesEfpagnols perdirent en ce combat tant de gcns^
& leurs plus grands vaifleaux qui faifoyent la pointe fu-
rent tant endommagez, que force leur fut de retourner
en Anuers pour les radouber & prendre nouuelles for-
ces . Y eftans arriuez, ils defchargerent tant de bleflez &
de malades que les hoipitaux en furent pleins.fu ce imfne
7,»liHre.
Le24. iour d'Auril 1Ç74. des les quatre heures du ma-
tin Ton defcouurift de dt(^us le rempart de Fleflinghe
la flotte d'Anuers ; pftparce pour le rauiduaillement de
^5^ Hijloires aJmirahUs
Middelbourg, laquelle fut aufli loll^HailIie par les naui-
rcs ZeelanJoifes, aflemblees pour ia combattre. Mais
e'Ie le tint fi bien lènee, & marcha en tel ordre , que lai(^
fans les Z-'claniols efcartei , & defl'ous le vent, elle alla
fe mertre i rancluc (attendant le retour de la marée) en-
tre FJeflfîngne & Rimeken , fans auoir receu aucune per-
te: cequiellonna les habitans de Fleffitighe, qui elh-
moyent que la flotte Elpagnolc ne pourroit refiiterà la
Zeelandoifc. Ellans à Tanchre , & le vent donnant du co-
^é du Nord, qui leur eftoit du tout contraire , auant que
iamareecommen^-.iftà retourner, les Espagnols furent
afiaillispar les petites nauires Z:elanioiics , au Tecours
de/quelles iuruindrent quelques grandes , qui les canon-
nerent de telle forte, que finalement cinq grands vaif-
féaux des Efpagnols furent prins& menez à Fleffinghe.
Vue autre s'eftant ietté fur le iâble fut abandonné , quoy
■que chargé de bleds , que lespauuresgens deFlefifinghe
allèrent quérir. Ce qui donna commencement au fiicces
heureux pour It'i Zeelandois , fut la hardiefie d'vn de
Jeurs matelots, lequel entreprint d'aller couper Iç cable
dVne nauire Eipagno'e nommée l'Eléphant, où com-
mandoit le fieur de Blicquy auec autres gentils^hom-
ines: ce qu'ayant bien exécuté, celle nauire le vint mettre
entre les Zeelandois, où elle fut afi'aillie , & après grande
refillance prife & cmtn^nee. Outre ces cinq grand^ vaif-
féaux les Elpagnois en perdirent encore deux autres, a-
iiec tout l'attirail des fept , i fjauoir force viurcs & ar-»
tillerie eng'-and nombre. Le grand vaiiTeau chargi de
bleds fut bruilé , & l'autre fè perdit fur le fable auprès de
Ramelcen. D'j cofté des Efpagnols furent tuez Blicquy,
quelques capitaines & gentils-hommes , & enuiron
neuf cens loldats , que noyez, que mis au fil ^tV^C-
pee : & y eut peu de prifonniers. Le nombre des morts
futfceuparla reueuë que les Efpagnols firent, fi toft
qu'ils eurent pris terre en Tlfie de V valcheren.c/i» mcfme
Le 17. iour de May en la mefine année I57^ I2 flotte
Efpagnole hauffant les voiles s'auança iufques au bout
du tohle qui cft le long de U di^ue de Rajncken, Et
d'au?-
1
dr mémorables, 6^i
d'autant que les nauires de Fkfîinghe eftoyent au guet,
pour conibatre ^ les Eipagnols auoyent enuoyégens le
îoing de la dique pour fe làiiîr de la telte d'icelleA Ja mu-
nir d'artillerie : ce qu'cftant fait commencèrent à tirer fur
les Fleflinghois , de telle furie qu'ils furent contraints a-
bandonner ce lieu à leurs ennemis^qui y vindrentmouil-
IcrTanchre j iufques à ce que le vent fuft propre pour a-
cheuer leur voyage. Mais ce iour mefme les petites na-
uires de Fieffinghe , coftoyans \es B/pagnolsau de/lus
du vent^attaquerent refcarmouche à grands coups de ca-
non^cinq ou iix heures durant:de Ibrte que plufîeurs vaif^
féaux E/pagnols en furent percez Ôc brife/ en maints en-
droitS5& perdirent vn bafteau chargé de lèl. Leur grande
nauirejnommee la pucelle d'Anuers-eut fôn maiilre maft
fracafle : en icelle aufTi furent tuez par le canon , force fol-
datsjmatelotsjiutres hommesjauec des femmes & enfans,
qu'ils auoyent acueillis à Middeloourg pour les mener en
Anuers, Outre-plus le feu s'eltant mis aux poudres en
confuma plusieurs : & eutt cefte nauire elle bru/]ee>
hns quelques pièces d'artillerie que les Eipagnols firent
mener fur la digue j à Tendroit du lieu où cette nauire s'e-
ftoit efchouee : ce qui contraignit les Fleflinghois de fè
retirer. Le lendemain \ts Eipagnols voyans leurs naui-
res fort endommagées , U plufieurs de leurs gens blefiez,
fe retirèrent d'où ils eftoyent venus , à fçauoir fous & à la
faueur du challeau de Rameken: & les Zeelandois au lieu
mefme où leurs ennemis auoyent efté attaquez : parce
qu'ils auoyent quitté cefte telle j & retiré leur artillerie.
x^H mefme Hure.
Le lendemain, autres vaifl'eauxEfpagnols en nombre
de fbixante & trois , eftans fur la mer de Hii leni en Hol-
lande,chargerent impetuefement ceux du Prince d'Oran-
gCjles efcarterent , desfirent, & en prindrtnt vingt-vn:
pour laquelle vidtoire les Eipagnols firent feu de loye. La
mefme.
Le fixiefme iour de Tuin enfuiuant, la flotte d'Anu^rs
fe mit à la voile enuiron midi y quoy qu'elle euft en tefte
Its grandes nauires Zeelandoilès ,& \cs petites a la queue.
A h première rencontre de ces deux armées iV-
6^z H'tjloires admirables
tillerie donna de relie loi te départ & d'autre que la mer
paroiifoittout en feu , comme s'il y euft eu cent tonner-
ies& efclairs redoublez. L'Admirale Zeelandoife nom-
mée Je Lyon 5 fe trouua embaraflee (iàns eftrefecondee)
au milieu de la flotte E/pagiiole : carJereftede leur ar-
mée s'eitojt mis au deflus du vent. Et toutesfois l'Eipa-
gnol n'ayant autre but que de pafTer & parfaire Ton vo-
yage , ne fît oncques femblant de la vouloir attaquer.
Comme ellepenlbit le retirer du collé des fiens , & tous
enièmble pourluiuie les ennemis , elle vint s'acrocher
à vne grande naue de Bilcaye , laquelle pour auoir efté
mal abordée, au refte munie de force fbldats ^ fît longue
refiihnce. Mais elle fiit finalement gaignee. Les autres
vaiflèauxZeelandois fuiuoyent cependant les Espagnols,
qu'ils canonnerent toute la nuiôt. La naue deBifcaye
fut amenée à Flefllnghe auec vne hurque & quatre pe-
tisbalteaux chargez de Tel & d'autre marchandife. En
cciic naue & autres vaifTeaux furent tuez, trois cens hom-
mcsjla pluipart Espagnols & Italiens , oxitre ceux que le
canon tua le iour & lanuict es autres nauires. Trois
îours après ceux de Fleflinghe auertis que deux autres
grandes naues de Bi/caye eftoyent demeurées derrière,
enuoyerent après deux grandes nauires & cinq ou fix
petites 3 qui atteignirent bien tort ces naues , i'vnedef-
qnelles fut tellement battue & percée en tant d'endroits,
que force fut à cCux de dedans de la conduire lur le fable,
pour le fàinier. On y trouua vingt-cinq hommestuez,
fix pièces de fonte & quelques bagages ; ce qu'ayant tire
hors le feu fut mis dedans. II en fut autan» auenu à l'Ad-
mirale de Bifcaye , fans le (ècours qui lui vint d'Anucrs:
neâtmoins ce ne fuft pas fi toft,qu'elle ne perdirt plufîeurs
de Ces hommes , ayant efté outrcpercee en plufîeiirs enç
droits. t>^.'< mefmc lime.
Enuiron le 15. d'Aouft , y eut efcarmouche entre
les petites nauires Erpagnoles& les Zeelandoifes , en
laquelle après plufieurs canonnades de part & d'autre,
Ja'Vice-Admirale Efpagnole fut abordée & prifc. Elle
ef^oit chargée de bled , pour le rauiduaillement de Mid-
dclbourg,arraee de fix pièces de bronze 3 fans les pierre-
ries
^ mémorables, é'jj
ries & crochets. Quatre-vingts & quatre hommes y
furent taillez en piecei^Sc iettez hors Je bord, x^u mefmt
La ville d'Aicmar ayant efte deliuree des mains du Duc*"
d'Alue ÇyJi la fin de Septembre 1573. & Ghertrudenbeig
fiirpriiè fur lui par le capitaine Poyet pour le Prince d'O-
range, le Duc voulant auoir là reuenche fit aprefter vne
puiilànte flotte à Amfterdam,de laquelle il donna charge
au Comte de Bo/lu , monté furvnefort grande nauire,
nommct ItK^Ht fit ion :y Admiralede cefteilotte, auec la-
quelle lejComte ayant fait voile vn peu auant, rencontra
lesnauiresFrifbniies & Hollandoifes, Les deux armées
s'eftans abordées combattirent d vne furie incroyable,
tant de leur canon 3 qu'à coups! de moufquets & bat-
quebuzes. Quand ce vint au ioindrcj il fembla du com-
mencement que la vidoire enclinaft du cofté des E(p3-
gnols : mais les Frironseftans-fecourus des Hoilandois,
ies afairei fuccederent tout autrementrcar le Comte fe vit
ibudaiainuefti de tous collez , acroché &combatuàîa
main par fts ennemis^iettans du haut de leurs hunes force
grenades & pots de feu artificiel fur \qs Efpagnols. Le
Comte fut en peu d'heures abandonné de là flotte, ce no-
nobflant il comjDatit fortreibluement depuis le midi de
rvnzie/me iour d'Odobre , & toute la nuicl, iufquesau
lendemain midi : c'eil à dire refpacede vingtquatres
"heures. Mais ayant perdu la plufpart de Tes gens , il fot
contraint de iè rendre , ayant capitulé pour les Eipagnols
qui i'acompagnoyent. Les autres nauires Erpagnoles
^-oyans leur Admirale prife , fe (àuuerent à toutes voiles
vers Amfierdamjfors celle du capitameMefthen, laqueiJe
fut mi(è en fond à coups de canon. Le Comte de BoiTu
■aueclbn Inquifîtion , & tout le riche butin qui eftoit de-
dansjfut mené au port de Horne, ayant perdu force capi'
taines & Ibldats lifpagnols.Le Duc d'Albe & Frédéric Ion
fils eftoyent lors à Amfterdam , d'où ils deflogerent bien
^oftjSc fè retirèrent à Brulclles , craignans qu'on le ruait
fur eux , ayans peu aparauant tafché , mais failli.de fubiu-
guer ceux d'Amftcrdam par me garnilbn ElpagnoJe qu'aïs
(354 Hijl cires admirables
vouloyetit y loger. Deux mois après ce Duc & Tort
fils le retirèrent en Elpagne , lailîans tous Jes pays bas
tngiand troLible. i^uwefme z. Uitre de l hijloire des pays
biif.
Auant que partir , Je Duc vit encore au mois de No-
uembre vne nouuelie deiroutede Tes vaifleaux enuoyez
d'Anuers au rauiduaiJlement de Middelbourg , où il per-
dit trois de Ces nauires & force foldatscvn de les meilleurs
forts nomme Romerfvvael rendu aux gens du Prince ^ &
bruflé. Mais ce qui acreut Tes falèhcries fut la reddition
de Rameken principale forterefle de Zeelande- la perte de
Hollende , Zeelande & Frife pour la plu/partj,le peu d'ap-
parence de pouuoir lècourir Middelbourg , & les or-
dinaires routes & desfaictes de Tes forces fur la mer. Il
laifladonc ce meiiiage renuerfe au grand commandeur
deCaltille , nomme DomLouys deRequefens^lequel
peniànt faire mieux donna ordre que Ton armée nauaJe
partit d'Anuers le 24.iour de lanuier 1574. pour auiduail-
ier MiddeIbourg:ce qu'il s'aileuroit d'exécuter maugré
toutes forces contraires. Et délibéra meline s d'auoir le
paflè-tcmps du combat. Au delmarer de cefte ai madcj
l'vvi des principaux vaifleaux^apartenant à Gilles Hofiiian
d'Anuersjefchouafur le fiibleA' y fut perdu. Vne pièce
d'artillene s'eftant crcuec en vn autre vaiflèau , trente
hommes y furent tuez 5 & le bafteau périr. Tioisiours
après les Elpagnols voulans faire vne iàlucau comman-
deur arriue à Berghe pour élire fpedateur delà desfaite de
fon armée , le feu le mit aux poudres d'vnede les naui-
rcsjoù il y auoit /bixantc ibldats Elpagnols , lelquels(re-
feruez fîx)y furent fricaiîez. Le z9.du melir.e mois , fur
les deux heures après midi, Louys Boilbt , Admirai de
Hollande ik Zeelande vogua courageufement auec (à
flotte contre celle des Elpagnols dcuant Romefvvael. Le
Combat dura enuiron deux heures , auec telle furie de ca-
nonnades de part U d'autre^qu'il fembloit que le ciel «S: la i
terre deuflent le meller enlèmble , tant Tair & la terre e-
itoyent couuerrs de feux, de flammes Se de fumée. En ce
confli<^l furet priles l'Admiralefic la Vice- Admirale d'An-
uers, plus TAdmirale de Berghe , auec lèpt des principa- ^^
les
^mémorables, ^JJ
iesnauires &vnebruilee. £t turent tuez ou iettez en Ja
mer tous 3 tant ibldats tiue matelots j qui i'y trouucrentj
iulques au nombre de fîx ou Icpt cens. Lei Zeelandois y
gaignerenr trente beJies pièces de bronze, &. pluiîeurs
autres de fer. Durant le combat le grand Commandeur
eftojt furladiquedeBerghe, don il pouuoit voiraiic-
ment le tout. Mais iu lieu de la victoire qu'il s'elloit
promis , il vid Tes gens miièrablement traittez , que plu-
/îeui s furent remenez en Anuers , qui fans bras , qui fans
lambe^j & autrement defmembrez. Son plus grand rc
confort fut de maugréer &: deipiter, tantoft accufànt
J'vn^tantoft l'autre. Brief il y eut fi grande defolatioii
pour les EipagnoU au retour de leur flotte 3 qu'abordans
près d'Anuers , les capitaines extrêmement delpitez lai-
cherent l'artillerie au trauers de ceux qui (e prefenterent
iurle quay pour les voir retourner : dont M. G..brie! Ci-»
lé, procureur gênerai d'Artois, eut d'vn coup les deux
cuiflès emportées, & en mourut toll: après, c/i» l.lime de
rhijîotre des pays héU,
Les Eipagnols ayans au mois d'Auril l'an mil cinq
cens ieptantc quatre , desfait l'armée du Prince d'Oran-
ge, conduite par le Co4ïite Ludouic qui y fut tuéauecle
Comte Henri Ton frère, & le Duc Chriftofle fils de l'E-
ledeur Palatin,furent remenez en Anuers, où ils fe muti-
nèrent tellement que force fut aux bourgeois leur four-
nir la fbmme de quatre cens mille florins, h^s infolcnces
& desbauches furent extrêmes alors. Ayans chaflé le iîeur
de Champagny gouuerneur delà ville & tous les fbldats
Vvallons, ils firent retirer toutes \qs nauires de guerre
qui eftoyent en garde au port , & les enuoyerent deuant;
LillûOj^fin de n'auoir aucun ombrage. Les Zeelandois,
quieurent le vent de celte témérité, vindrent le iourde
Pentccofte fe ruer deflus ces nauires qui eftoyent à l'an-
chrejcn iaifirent quinze,cinq furet miles en fond, & trois
bruflccs.Les quinze furent emmenées en Zeelande , i la
>euc du Commandeur , tandis que ûs capitaines &
foldats plongez en toutes dcWcts & voluptez , maftinoy-
ent les habitans d'Anuers. Les Zeelandois gaignerent
«eut & deux pièces d'aiulkrie 4e bronze^ outre celles de
^y 6 Hijhins admirables
fer, & le chef de ce* nauiies nomme Hemfled fut auiïî
Ieurprilbnnu:r.,^<* mefme Uure,
Les Efpagnols ayans aiTiegc LeyJen ville de Hollande,
quelques barques de la ville eflans allées à h delcouue:
au mois-de luin K74. fencoi.trerentdeuxiwuires deco!
lioyde l'EipagnoI qu'ils attaquèrent, tuertnt tous lej;
hommes, enleuerent toutes hs munitions de guerre qui
y eftoyent , enlemble les viures, artillerie, draps de ibye,
paflcments d'or & d'argent , quinze benès , trois caques
de poudre, & grand nombre de boulets : puis bruflerent
l'vne de ces naujies , & mirent l'autre en {ond»Ai* mefme
Imre. j
Au mois de Septembre 15S0. le capitaine qui de li paît
des Elhts commandoit dedans BriellejHt marche auec hs
capitaines mal-contcns d'Artois & de Hainaut de leur U-
urer l'Iiîe & villç tie la Brieliermais c'eiloit a dcfl'ein de ks
y attraper. Eux peniànj» cfïèduer leur entreprise auec
quelques nauires accommodées à h Hollandoilè , ap-
prochèrent de Tlile , où ils furent inueftis & chargez iî
rudement par ]es Hoîlandois, que tous y demeurèrent
tuez ou noyez. o/€» ^.liure.
Sur la hn du mois de May 1^00. comme le vent s'e-
ftoit tourné proprepour faire voile versOllende, qua-
rante nauires de bagage de i'armee nauale àts Ellats,de-
meurees à la rade de Rameken partirent ious la con-
duite de trois nauires de guerre. Mais comme en tel cas
ilyatouGoursdepius aduancez, ou qui ne ibnt iamais
prefts,les galères de TEicluie s'cftans ruées lurles vaiP-
lèaux plus efcartez & qui nepouuoyentaduancer àeauic
du calme , en prindrcnt dixhunfl ou vingt , làns que \qs
nauires de guerre peuvent les empefcher, nipourlbiure
ces piratev pour reicourrele burin. L'EipagnoI ayant
defgraifré ces vailTeaux,prins les mailltes priionniers, a- •
uec tous les pall'agers &: gens de Ihuice, ne pouuant em-
mener ces loges de bois, il en brulla quatre & lailTa al-
ler le refte. En ceite rencontre le capitaine Blanckart,
chef dVne des trois nauires de guerre (iàns que les au-
tres deux, à cauic de la marée contraire & du calme»
fcculi'cnt ie féconder) futatuqué ièul parleidites galè-
res.
dr memorMes- ^57
rcs. Ayant fait vne braue refiftance , perdu près de la
moitié de Tes foldatsj les autres blefe, lui nommément,
après auoir chafTé par trois fois TElpagnol Je defTus Ion
tillac , fît en forte qu'il retourna dedans /à nauire à Fief-
finghe^où il mourut de {t% bleflures.^;* 8./«<.
Quelques femaines après 3 l'Admirai de Holande
cftant deiinaré de la rade de Rammeken par vn vent pro-
pre auec deux nauires de guerre , & quelques cent cin-
quante barteaux communs chargez de viures .^ muni-
tions de guêtre , elbns venus deuant rEfclufe en Flan-
dres, quatre galères voyans que le calme leur fauorifoit,
vindrent attaquer cefte flote , penfans butinerjcomme le
mois précèdent. Mais à l'approche le vent fe releua , qui
fit qu'elles fe virent tellement acueillies & canonnecs
par les nauires , que leur meilleur fut s'enfuir , après
grande perte de leurs gens^ principalement en l'vne 3 tel-
lement coufuë de coups de baies , que fans l'effort qu'oU
y lit de l'elpuifer elle couloit en fond : & y mourut beau-
coup d'hommes tuez fur le tillac 3 & dont le fang decou^»
Joit par les goulots en la va^r.x^» mcftm Uh,
Lqs Eftats auoyentfait baftir vne grande galère à Dor*
drecht en Hollande 3 pour rembarrer les courfès de cel-
les de l'Efclufe. Cefte galère, furnommee la Noire , gar-
nie de dix à douze pièces d'artillerie 3 ne fut pas fî toft a-
cheuee , & fournie de foldats & gens de rame, qu'elle fut
enuoyee à Fleffinghe 3 pour y attirer celles des ennemis.
Y cftant a l'anchre 3 le capitaine d'icelle entendit qup
trois galères de rEfclulè auoyent attrapé vn nauire
marchand Zeelandois : pourtant fe mit-iiàlapourfuitea
& d'abordec attaqua l'vne des trois fî furieufement>
■qu'après auoir beaucoup fbuffert elle fut forcée de fè
fauuer en Ton trou. Celle-là ainfl chafTce , le capitaine
victorieux courut fus aux deux autres galères 3 leur ar-
racha le nauire marchand, les battit de telle forte que
force leur fut fuyure bien virement 'la première, auec
non moindre perte. Quelque temps après , à fçauoir le
19. de Nouembrc , ce Gapit^yne auec fa galcre & quatre
chaloupes, garnies de foldats, alla attaquer la nauire A-
mirale d'Anuers', au milieu df la riuiere de i'£fcauI4
T t
658 Hijloires admirables
dcuant ladite ville. Ccftoit Tviic des plus belles nauire
qu'il y cuft au pays bas, chargée de fcize pièces d'artillC'.
rie de fonte, grofl'es & menues , dix de fer,dix à pierresjj
plufieursberles ou fauconneaux, pofez en trois eftagcsi
du port de quatre vingt tonneaux. Elle fut aflaillic viue^l
ment par la galère de Dordrecht, fi qu'aucuns de fes fol-
dats furent taillez en piecesjles autres fuiuâs outre bord
furent noyez durant robfcurité de la nuid. Cela fair,le
capitaine de la galère fe faifît des nefs marchandes de
Bru/Telles & de Malines, en chacune defquellesy auoit
quatre pièces d'artillerie, fan s fauconneaux,& encore au-
tres cinq nauires feruans de conuov aux viurcs & muni-
tions pour l'Efclufe , & autres forterefles que les Efpa-
gnols ticnent fur les eaux & viuieres , armées de mefmc
que les nefs marchandes. Le Capitaine ayant toutes ces
nauires , & les prifonniers qu'il en retint, les mena à
FlefTinghe , palTant à la merci du canon des Efpagnols
deuant Ordara,& autres forts fur la riuierc d'Anuers. Il
gaigna lors cinquante pièces d'artillerie ,, qui valoyent
plus que fa galère , laquelle on mettoit au rang des de-
niers perdus.t/î» mefme liure^
CONFIANCE ferilleufe.
LE fieur de Saluaifon,gentil-homme François , «ou- »
ucrneur pour le Roy dedans vue villctte de Pied-
mont,nommee Verrue , ayant de longue main eu aduis
comme les afaires eftoit difpofees dedans Cafal , ville
de grande importance , en laquelle commandoit pour
l'Empereur vn fcigHeur Efpagnol , nommé Fiçueroc,
lieutenant de Don Fernand de Gonzague, & que mef-
mcs on y faifoit quelques nopces entre perfonnes de
grande qualité , délibéra de s'y trou ucr fans femondrc,
pour faire autre chofe que courir la bague & dancer.
Car,le iour de Ces nopces , il fc mit au lid,& fur le foir fît
publier qu'il eftoit fort malade , iufques à enuoyer que-
tir deux médecins à CafaJ, auec vn bruit dcxtremcnt fe- i
mé \
drmemûrAhles. é'jy
[ toaé qu'il cftoft aux traits de la mort, pour tant mieux
endormir ceux qu'il vouloit furprendre. D'autrepartil
aducrtir le M^efchaldeBriffacLicutenantpourle Roy
en Piedmont, de toute la menée , afin d'eftrefccouru à
poind. Ayant fait demeurer les médecins en chambre,
Remettant à cibe veu d'eux au matin , il fe rend près àts
foflcz de Cafalfur vne heure après la minuid:, ceux de
dedans eftans pour la plufpart , nommément les gens de
guerre , bien trempez de vin des nopces , las d'auoir fo-
lartré tout le iour , & accablez dVn fommeil profond:c'c-
ftoitleio.iourdcMarscnran 1555. Les efchellesporees
fort coyement, les plus adroits gaigncrent incontinent
le dcflus de la muraillcfuiuis de leurs compagnonsjCoU-
perent la gorge aux premières fentinelles demi endor-
mics,& de ce pas defpefchercnt^lcs corps de garde. Ceux
; qui fe refueillerent auant que d'eftrc attrapez,coururcht
donner l'alarme par la vjlleimais c'eftoit bien tard , cir
les François auoyent ia gaignc la placc,eftans rangez en
bataille,tellement que les Efpagnols après auoit prefté
quelque combat , pour n'eftre afîez en gros , ains efparà,
. furent contraints fe fauuer de viftefle dedans le cha-
I fteau.Le Marefchal de Briflac ne faillit de fé trouuer aux
I portes fur les fept heures du matin,& par ainfi la ville
lui fut rendue.Il y auoit peu de viures, & grande troupe
de foldats dedans le chafteau, auprès duquel eftoit vile
groflc & forte tour gardée par les ÀUemahs, aUfquels fut
donné l'aflaut , qu'ils fouftindrcnt vaillamment auec
grand' perte des afliegeans: mais ils furent forcez finale-
ment,& tous mis au fil deTerpec. Les François perdi-
rent deux cens honimes tant en la prinfe de la ville que
1 de celle tour. Apres que le chafteau euft tenu bon dix
' ou douze iours, Figueroye fe repentant trop tard de fa
folle confiance^fut contraint fe rendre par compolltion,
& aller dehors déplorer fa faute irréparable. Hijloire de
nojlre temps.
Beaucoup de villes & fortes places ont depuis efté en
danger d'eftre perdu es,ou l'ont elfe defait,par ceftepc-
, /illeufe confiance. Il s'eft trouué aufrideshazardeux&
I téméraires affaillans , dont les vnsontveu fuccesheli-
Tt 2
é€o Hijloîres admirables
reiix à leurs entrcpriies , les autres ont eltë pris en peu-
faut prendre, & ont fait toute autre fin qu'ils ne penfoy-
ent : comme les diuerfcs hirtoircs de noftre temps le
monftrcntjdcfquelles nous propoferons plufieurs exem-
ples notables es volumes fuiuans.
Dieu fe referue des punitions fur les mefchans , leC-
quels pour vn peu de temps demeurent impunis
au monde , qu'il dcfployera vn iour. Par fois il donne
des traira de chorde à certains , dedans les prifons où il
les tient chez eux mefmes , & fe feruant de leurs con-
fciences feules leur fait dire PeTcaui, fans qu'ils penfent
ni à eux,ni à Dieu.Ceft pour rendre leur finale condam-
nation tantplus iulle.On a veu depuis quarante ansdes
perfonncs haut-efleuees en diuers endroits de rEurope>
faire des païs où ils auoyent crédit tout ainfî que Dio-
gènes de Ton tonneau , fe iouant àts fiances, des Eftats,
delà vie des hommes grands & petits à leur plaifir.Mais
on a veu auffi leurs délices eftre des fupphces , leurs qC-
bats conuertis en débats & combats, leurs armes alarmes
& larme? à eux mefmes & à leurs intimes. Quand ils ont
Voulu mordre les autres,la mort les a mordus. Ils n'ont
ofé fc fier à perfonne , & lors qu'ils ont monftré auoir
confiance en chacû, on a defcouuert qu'ils fe desfioyent
de tous,ialoux de leur propre grandeur,cPrrayèz de leur
ombre,infupportables à leurs propres penfccs , ennemis
de leurs amis & domeftiques , traiftres à leur repos ima-
ginaire, &. au plus fort dé leurs aduantages reculez & ef-
foi^nez de Coûte afl'curance & félicité. Le temps don-
nera moyen à noftre pofterité de les marquer nom par
nom,Gomme leur mémoire damnable le requiert.
En attendant , nous en marquerons en ce volume &
es fuiuans quelques vns 5 félon qu'ils nous viendront eft
laeiuoire par iç^ure ou aucremêt. Cçrç^ui) Lieutenant
quîp
dr mémorables, 66i
«jui par vn Pocte François fut honoré du tiltre de Rha-
damantus, & quimeritoit en dcuxTortesd'eftre nom-
mé Criminel, fut après vne in'îmhè de maux parlai
commis, faify de forte maladicpen dan t laquelle fa con-
fcience le mordit fi ferré, qu'il demoura longtemps
qu'on ne pouuoit lui ofter dcTapprehéfion qu'il ne fuft
condamné à eftre pendu & eftranglé. Helas (diroit-il)ie
conoi que i'ay bien gaigné la mort: car i'ay fait telle
cxtorfion,i'ay participé à telle & telle pillerie,ie me fuis
laiffé corrompre par les malfaiteurs , pour les laifler
efchapper , & ay traité trop rudement les innocens,
brief i'ay vendu ma confcienee en toutes fortes. Non
content de parler ainfien gcneVal , il venoit iufques à
fpeciher ceux delà mort defquels il fefentoitcoulpa-
ble, & leur demandoit pardon. En fin ils'aduifaquele
Roy donnoit bien quelquefois grâce à ceux qui auoyêt
mérité la mort, & depuis ne cefl'a d'en parler. Mais cô-
bien qu'on s'cfforçaft de le côfermer en ccfte efperance
de grâce, il en eftoit deftourné toutes les foi s qu'il con-
fîderoit l'enormité de fes maux , &difoit que quand le
Roy les auroit entendus iamaisilnelui pardonneroir.
Et fuft mort ce miferable en telle apprehen/îon , cui-
dant à tout coup qu'on vinft le prendre pour le mener
au gibet,fans vn de ï^q^ médecins qui trouua l'expédient
qui s'enfuit : de faire venir vn homme botté & efperon-
né tenant de grandes lettres, heurter à la porte aflez ru-
dement , lequel criaft grâce incontinent qu'il feroit en^
tré. Ce qui fut ainfi fait, non fans expofer le patient en
grand danger de fa vie: car ayant oui ainlî heurter à fa
porte,il fe perfuada quec'eltoit le bourreau : & combien
que c'eft homme botté &cfpcronné fceuft bien iouer
fon pcrfonnage,il euft grand'pcine à lui faire croire que
le Roy lui auoit o(flroyé fa grâce. Toure^fois on le fit
peu à peu s'a{reurer& prendre courage: tellement qu'il
efchappade ceftc maladie. Mai^ quelque temps après il
fut frappé de loups aux iambes, tellement qu'Uperdit
l'vfage d'icelles , finalement mourut aliéné de fon fcns,
après auoir par pluficurs iours renié & blafpheme le (â-
cré non^ de Dieu. Liit, l. de la conformité da menéeiUts
Tt î
êét Hijtoires admirables
anciennes ^ moderne s jchap.zô.
CONSEIL opportun mejprifi y
fuluyde terrible ruine.
VN bon confeil vaut mieux que pi ufieurs mains.
L'hiftoire prefentc en faitfoy. L'an 15^0. le grand*
maiftrc de Malte , ayant Tail par tout, & nomemcnt fur
la conquefte de Tripoly de Barbarie pofledee par les
Turcs, voyant la paix conclue & ferme entre les rois de
France & d'EfpagnCjfit entendre au duc deMcdina-Ccli
viceroy de Sicile , qu'il pourroit aifément rccouurer
Tripoly, où il n'yauoitque cinq cens hommes afl'ez
chetifs en garnifon : qu'vn roy More proche de là', con-
îuré ennemi de Dragut& des Turcs, s'allieroit volon-
tiers aux Efpagnols & leur aideroit promptement en
ccfle côqucftc ; pource que d'icelle depcndoit le rccou-
uremêt de fon pais, dont les Turcs l'auoyent dcpoffedé.
Leroy d'Efpagne entendant ceftauis, & tenant par ef-
pcrancc Tripoly entre ces mains, fait equipper vncpuif-
fante armée nriualc , fous la conduite du Duc. Toutes
chofesfcmbloycnt deuoir hcureufcment fucccdcr aux
E(pagnol<J, s'ils euffcnr fait voile en diliccce (comme le
Duc en cflioit exhorte) vers Tripoly. Mais le voyage e-
ftât différé de fcmainc en autre, finalement empcfché &
retardé par les vents contraires, Dragut defcouuranc
l'entreprife, acreut de deux mille Turcs la garnifon de
Tripoly. Le Duc fc voyant fruftré de ce qu'il efperoit,
&def^iafort auant en mer prend la route de l'Iflede
Zerby,& contraint fans difficulté lefcigneurde liurer
la fortereffe , promettre obciflancc au roy d'tfpagne, &
lui payer tous les ans autant de tribut qu'il faifoit a
Solyman. Incontinenrle Duc fait commencer vnc gran-
de citadelle, qui cflant acheuee & bien munie de gens,
de viurcs , & prouifîons de guerre crtoit inexpugnable
âu iugeraent de plufîcurs. Mais derechef il tint peu de
rompre du ccrifeil qu'on lui donnoit de diligentcr.
Cooimc
(^mémorables. ^6^
Comme la forterefle s'auancoit lentement , Solymaa
tout au contraire auerti de ce progrès fait armer en trcf-
grande diligence Tes galères , chargées des plus afleurez
Ibidats qu'il euft , Cous h charge de Pialy BaHà , lequel
auoitMuftapha pour Amiral. It:an André Dore Gene-
uois 5 Cage & renommé chef de guerre a nommément fur
mer , & autres feigneurs , ayans eu les nouuelles de ceft
appareil des Turcs, auertirent 5 conTeillerent , exhortè-
rent i Se prefl'c^rent par diuers moyens le Duc de Medine,
qu'il mift garnifon en la citadelle, & fè retirait auec le re-
fte de la fiotte^fàns attendre la venue des Turcs qui eftoy-
cnt beaucoup plus forts, ni hazarder vn combat , d'où il
lèroit imporfible de fè de/gager fans deshonneur & ruine
totale de l'armée. C'ertoit parler à vn fourd , incapable
deconfèil , & qui vouloir acheuer de tout perdre. Les
Turcs eurent le vent fî propre qu'en trois femaines ils fè
rendirent de Conftantinople près de l'armée Efpagnole,
laquelle ils attaquèrent courageufèment vn matin à l'au-
bsdu iour,tuerent la plufpartjen ietterent grand nombre
dedàt^ la merjemmenerent le reûe prifonniers.II demeu-
ra dixhuit mil hommes en cefle dcsfaide. Outre plus le
duc y laifTa vn fîen fils prifonnier , la citadelle fut perdue,
auec vingt-fept galères, & quatorze nauires de c harge. Le
duc tout confus, fuiui de lean André Dore,fè fauua de vi-
teÛe en quelques galères à Malte , où il eufl tout loifîr de
defplorer Ton imprudence cau/é de tant de maux, haii de
Lsoncla'w en fun fupplement des Annales de Turquie,
CONSERFATION merueilleufey
dr comme miraculeuje-
pLt
-L m
, .ufîeursdes amis du fîeur de Ciuille , gentil-hom-
me de Normandiejqui l'ont maintesfois ouy appel-
1er mort, enterré & refîUfcite , defîreux de fçauoir com-
ment cela eft auenu , & Tayans prié d'en vouloir mettre
Tt 4
6^4 Hijloires admirables
quelque chofe par cicrit , afin d'apprendre & entendre
les moyens d'vn cas fi rare , Ç\ eftrange , & fi incroyable:
fatisfaifànt à leur defir il en a drelFé & public ce qui s'en-
(ùir.
Lefieur de Ciuiife commandant à vne compagnie de
cent piétons dedans Rouan , lorsque Tan i56i.ellc fut
aflîegee> il fut ordonné par le Comte de Montgomraery
f qui Jors commandoit en la ville ) eftre auec là compa-
gnie le 15. iour d'Oétobre audit an 15^1. fur le haut du
rcmpar près la porte S. Hilaire en vn endroit où il y auoit
lors vne tour à prefènt ruinée 3 tirant vers \qs four-
ches que Ton appelle de Biliorel 3 afin d'y fouftenir hs
premiers efforts d'vn grand aflaut qui Te preparoil , &
qui fut donné ledit iour , & continue depuis le matin
iufques aptes fix heures du foir. Suiuant quoy Ciuille
ayant place fà compagnie fiir le haut du rcmpar , en eftat
de combattre , après auoir lui & fès compagnons long-
temps fbufîena &repoufie les grands efforts des aflàillans,
il fut finalement blefie d'vn coup de harquebuze en la
ioue & mafchpire droiâe 5 tirédedeflus la porte S. Hi-
laire f qui quelque temps auparauant auoir efté enleuee
à cQU'x, de la ville) refl'ortant la balle par derrière près &
îoigncnr la fofiette du col. Ce coup ( dont le haufie col
fut perci: ) le fit tresbucher du haut du rempar iufques
aupiedd'icelui , où Te trouuansplufieurs pionniers fai-
j&ns des fofTez , félon qu'il leur auoit efté commandé.
Ciuille ( fans autrement s'enquérir qui il eftoit ni s'il e-
floit mort ou non) fut par aucuns d'iceux, fans autres cé-
rémonie, après l'auoir delpouillé , mis &: ietté dars Tvne
d'icelles fofics au pied de ce rempar. Comme ils le ietto-
yent en cefte folTe fe prefenta le corps d vn autre homme
nômé Claude le Forcftier marchant droguiftcjdemeurant
deuant la Ronde en la mefme ville: Icqm:] (combien qu'il
nefuft qu'cftourdi d'vnfàult qu'il auoit fait en l'air pour
raifbn d'vn coup de canon qui l'ayant frappé deflbusles
pieds l'auoit e/leué hors de terre ) fut neantmoins lo-
gé en la mefme fofie , & mis de Ion long fur le corps de
Ciuiile,ayans ks pieds vers la tefte l'vn de l'autre, & ce a-
pres auoir efté pareillement dei'^ouiilé 3 & auftli toft tous
deux
(^mémorables. 66$
deux couucrts de terre. Or auoit Ouille efté frappé en-
uiron les onze heures de matin , ou vn peu deuant3& auf«
fi toft enterré : & demeurèrent les deux corps dedans la-
dite foflè iufques après fix heures & demie du fbir.j qu'e-
ilant Taflàut fini & les compagnies retirées chacune en
fbn quartierjpar commandement des chefs^ on commen-
çoit à afleoir gardes par tout. Lors comme le Comte de
Montgotnmery feretiroità cheual auec bonne troupe,
pour aller en l'Archcuefché où il logeoit , & qu'il paflbit
par Jâ croix de pierre , où les laquais eftoyent attendans
leurs maillres fur leurs cheuaux, fe prefenta à lui vn grand
laquay , nommé Nicolas de la Birre, natif du Virolet
près Vernonjquieftoitlaquay deCiuiile 3 monté fur (on
\ courfier. Ayant ouy dire que Ton maiftre eftoit mort il
s'approche du Comtc^Sc lui demande allez, brufquement,
s'il eftoit vrai que fondit maiftre fuft mort , comme vn
le lui auoit rapporté. Le Comte lui fit refponfe qu'ouy, &
que de hs onze heures du matin ou toft après ^ ill'a-
uoit fait enterrer au pied du rampar ^ au haut duquel il a-
uoit efté tué , entre la porte S. Hilaire & la porte Beau-
uoifîne , à l'endroit mefme où il auoit combatu , & que
s'il vouJoit en auoir le corps pour le faire enterrer au
fèpulchre de fèsanceftres (commece laquay difoit défi-
rer faire) il lui bailleroit Je capitaine Clere lieutenant
defès gardes, làprefent, auquel il commanda deftors de
le conduire , &c lui monftrer l'endroit où Ciuille auoit
efté enterré.Eftans venus làjce laquay defccndaht de che-
ual (qu'il commit à vn foldat de conoiflance ) fe mit à
gratter tellement auec les mains , & à leuer Sd ofter hors
de la fofle la terre qui n'eftoit au plus que de demi pied
de hauteur fur les deux corps , qu'il en defcouurit bien
toftl'vn; & ce d'autant pluftoft que la terre dont ils e-
ftoyent couuerts , eftoit tout fraifchement remuée. Il e-
ftendit ce premier corps (qui eftoit celui de Forefticr)fiir
1 herbe: mais après l'auoir bien regardé par tout , ne le
coneifTant point, il retourna vers la foflè, pour tirer l'au-
tie corps , lequel il traina auftî fur l'herbe arrière de Tau-
ire, & rayant contemplé foigneufemcnt nelcreconuî;
point, pourcc qu'il eftoit entièrement couucrt de fan^
666 Hijloires admirables
& de terre qui auoit défia comme fait vne croufte fur
tout ce corps. Derechef il vifita le premier , fert curieu/è-
fement : mais voyant que ce n'eftoit celui de Ton maiftre
il le reietta dans la fofle , puis à Taide du Capitaine Cle-
rc retrainant l'autre corps ( c'eftoit celui de Ciuille ) le
remit aufli dedans la mefme fofle & Teftendit de Ion
Jong fur celui de Foreftier, la face vers terre. Quoy fait
ils \qs recouurirent de terre,mais legeremcnticar la main
giuche de Ciuille fortoit hors de la tofle , toute defcou-
uerte. la cftoit le laquay remonte à cheuai pour s'en rc-
tourner, tout efploré de regret de n'auoir eu ce bon heur
derecouurerlecorps dcfon maiftre , lorsque le capi-
taine Clere apperceuantceftemainnoncouuerte, &nc
voulant ( difoit-il ) la laifler ainfî nue , de peur que les
chins vinflent la manger de nuid , ou bien la ronger, &
que par merme moyen ils tiraflent peut eftre tout le
corps pour en faire de mefiue : s'approchant il donna du
pied fur ccfte main pour la faire enfoncer dedans terre.
Mais ce coup il deftourna le chatton d'vn gros dia-
mant trianglé,que portoit ordinairement Ciuille, lequel
Jes fufdits pionniers qui s'eftoyent fort haftez de le del-
pouiller & mettre en terre , n'ayans eu loifir d'apperce-
uoir , auoyent laifle couucrt , caché & ferre entre \cs
doigts de fâ main gauchejîa lueur duquel diamant don-
nantauxyeux du capitaine Clere , auHi toit il s'en làifît,
& rappellant le laquay ( ia en chemin pour Ce retirer) lui
dit qu'il n'auoit pas perdu fa peine ayant trouuc vn bon
diamant en la main du corps dernier déterré. Le laquay
s'eftant fait monftrer ce diamant le reconut auflî toft , &
trefi'aillantdeioyeaflcura Clere que c'eltoit le diamant
defbnmaiftre. Al'inflant il remet pied à terre iH à l'ai-
de de Clere retira de la fofle. fans délai ni diflSculté , tout
Je corpSjqu'ils eftendirent de fon long fur l'herbe , lequel
après auoirefl'uyé foigneufement par tout auec vn mou-
choir y le laquay reconut fort bien eftre le corps de (on
maiftre combien qu'il fuft cftrangement desfigure , 6c
qu'il euft mefme la tefte tort enflée de coup de harque-
buze 5 & la face toute tournée. Mais ce pauure laquay
voyant que fondit maiftre ne fe remuoit non plus qu'vn
mortj
dr mémorables, 66 j
mort approcha fa bouche de la bouche d'icclui , comme
pouiLibaiTer, & dire le dernier adieu , le tenant pour
trcfpaffé, fur ce reflentant encore quelque refte de îbuf-
flcs'efcriant de ioye dit, qu'il n'cftoit pas mort : à raifoii
dequoy lui & le capitaine Clere mirent les mains fur Te-
ftomach ^fur le petit ventre , & fur plufîeurs autres par-
tics du corps de Ciuillejen chacune defquelles trouuans
de la chaleur, & pour ces caufes le laquay ne tenant foa
maiftre pour mort , defîrcux aufll de le porter en la mai-
fon du fieurde Coquereaumont, où il logeoit auec le
capitaine Ciuille fonicune frère , lors gifant malade
dVncoupde canon qui lui auoit emporté le bras gau-
che 3 affifté dudit Clere le printdeuantfoy fur l'arçon
de la fellc d'armes du cheual , mettant feulement la ca-
laque entre les reins & l'arçon. En ceft cftat ils s'ache-
mincrêt au Monaftere de SainfleClaire, où y auoit bon
nombre de chirurgiens ordonne?, pour medicamentcr
les blcflez.Ce corps leur ayant efté baillé a vifiter, aprc;
auoir fondé la playe, & paffé de part en part vne fpatuîe
entrant par le vifage & fortant par le col fut dit par les
chirurgiens au capitaine Clere, entre autres par vn nom-
mé M. Claude Faubuiffon , vieil, & expérimenté en (on
art,que ne voyant plus en lui aucune efperancedc vie,
comme amfî foit qu'il ne tirail ni pied ni main > le meil-
leur eftoit de le porter en tcrre:iointque ne leur reftanr
des medicamens que pour ceux dcfquels ils pouuoyent
efperer guerifon , ils n'eièoyent d'auis de les employer Ci
(mal à propos fur ce corps qu'ils iugcoyent more. De
inaniere que lepauure.laquay toutdefefperé & pleurant
fr derechef pkcer le corps de fondit maiftre (comme
au parauant) fur l'arçon de la felle de fon cheual , pour
de là le porter chez lefieur de Coquereaumont: auquel
lieu cfta ns arriuez ils porterét ce corps nud en fa cham-
bre, &le mirent en fon hd ordinaire, où il demeura
fans parler, ni fans remuer aucune partie de fon corps
plus de cinq iours & cinq nuits.
Durant ce temps plu/îcurs de fcs parens & amis \in-
drentlc voir,entrc autres les damoifelles du Verbois , de
Vclly,du Valj& autres : lefqucUcs voyans reliât pitoya-
^^8 Hiftoires admirables
blc où il eftoit , & qu'il fembloic à raifon de la grande
chaleur qu'on relTentoit en lui par tout Ton corps, qu'il
fuft hors de toute efperâce de pouuoir rccouurerfafan-
té (d'autant qu'il ne parloit, voyoït/entoit, ni remuoit
aucunement) fi ne laiflcrent-clles d'enuoyer quérir les
iîeurs Gueréte &le Gras, médecins fort renommez, qui
firent monter en la chambre vn ieune chirurgien nom-
mé M. laques Aueaux, pour le penferen leur prefencc,
s'ilfetrouuoità propos , & appliquer quelques medica-
més & emplaftres à Tes playcs. Montez qu'ils furent tous
en la chambre où gifoit Ciuille , après l'auoir par tout
loigneufement vifité & fait fonder les playcs par le chi-
rurgien , fans que le patient fit demonftration quelcon-
que d'en fentirricn (ce qui les faifoit fort douter de fa
guerifon) fi fut-il refolupar auis commun de la compa-
gnie, qlje tel perfonnage méritât biê vn appareil , on lui
apphqueroit (cômcilfut) vn fetton,lequel il arrefta 14.
heures \ remettâspour le furplusla partie au lédemain,
à telle heure qu'il eftoit,fur l'aiTeurance qu'ils donnerét
tous trois de le reuenir voir à l'heure dite , afin de iuger
plus certainement par l'opération de ce premier appa-
reil ce qu'on auroit à efperer & dire de fa blefl'ure &
maladie. Cependant ils ordonnèrent que pour le nour-
rir on lui dcficrreroit & entr'ouuriroit les dents & la
bouche aucc à^% couftenux, qu'on ne lui dôncroit autre
chofe qu'vn peu de coulis & prcflls , qu'on lui ietteroic
aucc vne cueillier en la bouche. Ce qui fut faicî: , & ce
corps laifi*é en telcftat iufquesau iourfuiuant , auquel
les fufnômez auec plufieurs autres amis de Ciuille , en-
trez en la châbre, auec intention de voir ce qu'on pour-
roit attendre & luger de la fanté de ce corps , le chirur-
gien ofiant les bandes & hnges qu'il auoit mis autour de
la tcfte & du col, defcouurant derrière & deuât la playc,
retira ce long fetton, & monftra aux médecins & à tou-
te la compagnie vne grande quantité de pus&defang
meurtri, d'ordure & de matière, que nature auoit pouf-
fé hois en ce peu de temps: ce qui auoit grandement al-
légé la tefte du p^dent, defcnfié fon col,fes mafchoires>
& les autres parties des cnuirons defditcs playes. Cela
don-
^memorahles. €^()
déna à toute Tafl (tance grande efperance qu'auec le
temps & l'aide de Dieu,Ciuille pourroit auoir allégean-
ce de Ton mal, & acouragea ledit chirurgien de ne lui
rien efpargner à Tauenir. Mais le pis eftoit que la fie-
urcfans diminution quelconque, eftoit continue & for-
te : aulïî qu'il ne remuoit aucun de Tes mébres non plus
qu'auparauant: à raifon de quoi les médecins n'ofoycnt
afTeurer rien au certain de fa fanté : car ils voyoyent peu
<i*apparence de lui faireperdre ccftegrofTe fieure,Iaquel-
le,quoi qu'on fift, ne l'abandonna qu'après la prinfe de
la ville de Rouan > qui fut le z6, iour du mefme mois
d'Oaobre.
Ciuille fut en ce miferable eftat depuis le iour de fa
blefiure, iufquesau cinquicfmeiour enfuioant & plus,
dedans fon liêtjfans parler,voir, remuer, ni fentir. Au
bout duquel temps Dieu lui ayant ouuert les yeux &
reuuoyéle maniement & remuement de Tes membres
(quoy que bien peu fur le commencement ) il fe mit à
ouurir la bo uche, tafchant & s'cfforçant de parler. Vrai
eft qu'il eftoit comme vn homme efperdu & fraifche-
ment refueillé d'vn profond fomne, ne (cachant <ce qu'il
faifoit,ni où il eftoit , ni d'où il venoit , comme s'il fuft
reuenu de mort à vie , & peu à peu commença à deftier
fa langue , tantoft palifTant , comme tout honteuiri n*o-
fant entreprendre de parler.Neantmoinsprefle degiian-
des douleurs, fa langue en fin fc deflia , & les premicres
paroles qu'il profera furent, ^.t», han^ han, lesbrasj à ciiu-
fe de la contradion & perclufion de fcs bras ^ procédant
de ce coup de harquebufcqui auoit coupé & fort oftcti-
fé la plufpart des nerfs de fon col , de fes bras & maini..
De là en auant peu à peu s'enhardiirant,denianda Ces ne*
ceftîtez : mais il ne recognut qu'auec le temps ferui-
teurs, parens & amis. Ne laifloit toutesfois à dire où il
fentoit du mal. Ce changement fut trouué cftrange de
toutes perfonnes, & tenu pour vn cas admîrablc,rare&
inaudit , de le reuoir ( après vn (i long filence de cinq
iours,decinq nuids, &plus,& après auoir efté plus de
fept heures & demie en terre,manger, boire, voir, fentir,
remuer , parler > & en fin faire toutes fcs fondions ordi-
670 Hijloires ndmirAhks
naires comme s'il cuft cite fain , & que tout ce que <îe(^
fusncfuft auenu.Cepcudantchacun fepromettoitjpuis
que Dieu lui auoit redonné la vie fi miraculcufcmcnt,
aucc la parole & le mouucment , de voir auec le temps,
encore quelque chofe de plus en lui, & qu'eftant foi-
gneufementpenfé on le pourroit mettre hors du dan-
ger de mort,pourueu, qu'on trouuaft moyen de lui faire
prendre mcûecine,alîn de le garcntir de cefte forte fie-
ure.Combien qu'à la vérité l'on iugeaft afl'ez qu'il eftoit
iinpofnble qu'en Ton corps ne reftaft d'vne telle playc v-
ne grande difformité pour toute fa vie, & que mefme
il feroit en danger de perdre vne partie de l'ouye & de
la veuèraulTi qu'il ne pourroit iamais auoir la bouche ne
l'haleine que forte & niauuaife (ce qui n'eft toutesfois
auenu^parla grâce de Dieu,combien qu'il foit à prcfent
aagé de foixante fix ans ) outre la contradion de Tes
membres en gênerai & en particulier^ à l'occafion de Tes
nerfs fort oftenfez , &: aucuns defquels ( comme il s'eft
depuis trouué)eftoyent & font entièrement coupez : au
moyen de quoy ilfe trouueroic fans doute court &pri-
ué de l'vfage defes membres.
Mais comme deiour en louril amendoit, & que fa te-
lle & fon col fc defenfloycnt a veuè d'otil, au grand con-
tentement de tous fesamis,la ville de Rouan futprinfe
par affautrla crainte & apprehenfîon de quoy lui aug-
mentèrent fort fa fieurc. Toutesfois Dieu le fauorifa tel-
lement^ qu'il entra en fon logis des foldats Gafconsde
la compagnie du capitaine Lago , pour la faifîr & piller,
comme il auient en telles prinfes de villes j lelqUcls fe
comportèrent en fon endroit, & pour fa perfonne,&
pourfesbiens,auec autant de douceur qu'on eull peu
fouhaiter.Ce qui le r'alTeura aucunement , & nereceut
à la vérité d'eux que toute courtoilîe,afl^ill:ance, & ami-
tiéjComme ilfe pourra ci après voir:ayant Ciuille grâd
legret que lefdits foldas n'arreflerent plus long temps
(qu'ils ne firent) en fa maifon. Car deux ou trois iours a-
près laprinfe de ladite ville , les fufdits foldats, ayanseu
commandement de fe retirer en leur quartier , côme ils
firent Iciour fuiuantilcs feruiteurs du ilcur de Moulins
lieu-
(jr mémorables. 6yi
lieutenant des gardes EfcofToifes , polir lequel ce logis
eftoit marqué, entrèrent audit logis , lefquels firent auH-
fi coft cnleuer Ciuille de fon lid & de fa chambre,
pour y mettre leur maiftre. Pourtant il fut à Tniftanc
porté par fa garde & Tes gens en vne petite chambre fur
le derrière de la maifon , au defl'ous de laquelle y auoic
vneefcuirie, où furent mis & eftablez les cheuaux du-
dit de Moulins : & eftoyent le fient & Tordure delà-
dite efcuirieiettees par vne feneftre, dedans vne petite
cour de derrière, fur laquelle auoit aufli veuë par deux
feneftresla chambrette où fut porté Ciuille , en laquel-
le n'y auoit pour tous meubles qu'vn mefchant chalic
plein de paille (dedans lequel Ciuille fut couché) auec
vn peu de butin que les foldats Gafcons , en partant de
la maifon, lui auoyent libéralement dclaiffc & redonné.
Mais le mefme iour qu'il y fut mis arriuerent dedans la-
dite maifon quelques gentils-hommes du pays , acom-
pagnez de cinq ou fix valets,en intention d'y trouuer &
tuerie capitaine Ciuille fon ieune frère , à caufe d'vne
querelle qu'ils difoyentauoir des long temps auec lui.
Entrez qu'ils furent tous en cefte chambre de Ciuille
malade , voyans qu'ils n'auoyenttrouué fondit frère , ils
commanderentaux fufdits valets ( afin de fe venger de
leur ennemi fur fon frère ) qu'aufli toft qu'ils feroyenc
fortis delà châbreilsle iettaffent du haut des feneftres:
Ce que les valets firent , en intention de lui rompre le
col : mais cela n'auint pas, pour eftre Ciuille tombé fur
ce fumier qui eftoit en la cour , vis à vis des feneftres de
ladite chambre. Aufsi toft que lefdits valets l'eurêt ainfif
ictté par ces feneftres, incontinent refermées, ils chaf-
ferent de faiâ & de force hors de la mailon la garde
&lesferuitcursde Ciuille : puis emportèrent fansrefi-
ftancele peu dehardes&dc meubles qui lui eftoit re-
fté. Ainfi cefte garde & CCS feruiteurs fc voyans (î mal à
roposchaftez & hors d'efpcrâce de rcuoirplusiamais
eur maiftre, chacun d'eux fe retira ou il peut. Car aufsi
penfoyent-ils que ces meurtriers fuîicnt defcendusen
ladite cour , & que là ils eulfent acheuc de le tuer, crai-
gnâs que leur cruauté & barbarie fuft conue,s'il refchap-
poic. Mais Diau^qui a foin desiîens, en auoic autretnenc
l
6-jL Hifl cires Admirables
ordonné. Car tant s'en falut que Ciuille fuft tué ni
bleflé d'vne (\ lourde cheute j qu'au contraire a raifbn du-
dit fumier il ne le fit aucû mal. Et tut plus de trois iours
& de trois nuiéts depuis là cheute trouué efèendu de Ion
Jong fur ledit fumier^fans auoir pendant ce temps là beu,
ni mangé^ni veu ame viuante qui euft parlé à lui^ou l'euft
aucunement lècouru , cftant icelui tout nud, fors la chc-
milc , auec vn bonnet de nuift en teftc,exposé au vent &
àlapluye. En ceft eftat letrouualelîeur de CroiiTet Ion
coufin germain : car venant exprès pour le voir au logis
dudit fieur de Coquereaumont, en elperance de l'y trou-
uer en meilleur eftat , demanda de les nouuelles à vne
bonne vieille feruante de ladite maifon , laquelle lui dit
<3U*il y auoic plus de trois ionrs qu'il ciloit mort en vne
petite cour de derrière fur vn fumier : où la bonne fem-
me le menant 3 Ciujlle y fut encore trouué en vie , mais
à demi mort, ou bien près de mourir , ne parlant que de
l'œil à caufe de la faim , & fur tout de la Ibif extrême
qu'il auoit endurée pendant lefdits trois iours. A raifon
de quoy il auoit la langue & les lèvres fi feiches , qu'il
ne pouuoit prononcer vne feule parole. Ce que voyant
ledit fieur de Croiflet , il enuoya la bonne femme qué-
rir vn morceau de Ibn pain bis , & plein vne coupe de
bierre:& vid bié, par \ts geftes de Ciuille,qu'il eftoit fort
altéré, & qu'il eurt volontiers beu deuant que prendre du
pain comme il fitrcar prenant le pain en fa bouche & cui-
dant l'aualer , fans autrement le mafcher , tant il fe trou-
uoit preflé de la faim il penfa s eftrangler , & fut (peut e-
ftre} ainfi auenu , iî le pain n'euft elle promptcment reti-
ré de Ion gofier , non toutesfois fans difficulté j & falut
meline aufll toft retourner à la bière pour la deuxiefme
fois , dedans laquelle après qu'on eut trempé & mollifié
ce pain, il l'auala aifément , mais fans le mafcher , tant il
cftoit affamé : & à l'occafion de ce ieulhc Ç\ long , (on vi-
fàge eftoitdeuenu fi hideux à regarder , qu'il fembloit
pluftoft vn corps mort qu'vne créature viuante. Mais
Dieu y qui veille toufiours pour le bien des ficns, & qui
peutSc veut en temps & lieu tirer du mal le bien j fit que
ce long défaut de boire & de manger , en lieu de trouuer
dr memorMes, ^jj
ii la ruine de Ciuillc,lui ofta la heure contînuë,&Iiii ap-
porta commencement de gucrifon. Car la lïevie fî vio-
lente reull apparemment emporté^qui elloit bien le re-
bours de Tintcntion de Tes ennemis.
Vn tel accident apporta grand eftonnement audit
iîcur de Croiflct, & lui donna iujet ( voyant cefte mer-
ueilledc Dieu en ce gcntil-homme/îen parent) de lui
oftVir retraite en là mairon& chafteau du Croiflet, di-
ftant de Rouan d'vne lieue,à la defcentc de la riuiere de
§einc;pourueu qu'ils')' peuiHaire porter par autr/.' mo-
yen que par le fîen.Car ledit fleur de Croiflct,ef?antCa-
tholique Romain , nonobilantreftroitte parenté & a-
mitié qui eftoit entre eux, n'ofa entreprendre de le faira
trar.fporteren fon nom, çraignaHt qu'il ne full: fceu ; car
s'il euft cfté delcouuertjfans doute on lui eui't reproché
^u'il auoit fecouru & afîlegë les huguenots , dont il euft
encouru da,ngcr. Là ùeilu?; Ciuillc pria ceiic \ ieille fer-
uante de la maifon défaire vemr parler à lui la femme
cjuii'auoir gardé auparauant. Ellcy alla volontiers, &
amenant quand &:foy ladite garde la fit parler à Ciuil-
lejquil'enuoye à Tinfiant A crslcsToldats Gafcons, pre-
çnier-cntre?. en fon logis afin de le prier , ii pofîîble e-
ftoit les trouuer, de le venir reuoir. La garde fit tout ce-
\a en diligence. Arriuez donc que furent ces ioldâ^,
Ciuilie fans vfer de long piopos , voyant que Tiicure
preffoit, Se cognoiifant d'autre part leur bonne volonté
rerslui , après leur auoir fait entendre l'offre du (leur
4e Croiflet, ne fit difficulté de les prier qu'ils lui alTi-
{lallent de leur prefence &faueur en ceiie fiene necefîi-
te,pour le mettre hors de la ville. Ce que les foldars lui
accordèrent fcrt volontiers , promettans de venir fur le
foirleretrouueren fon logis, pour l'enleuer delà , 8c
l'emporter eux mcfmes dedans le balleau hors la ville,
pourueu qu'on trouuaft vne chaire à bras , pour le por-
ter ded;ins iufques à la riuiere , dcaufede fafoiblcHc&
infirmité. Celle ficne bonne garde fit tel deuoir
<ia*elle en trouua & emprunta vne de certaine fienc
yoifine & parente. Dedans celle chaire fut inconti-»..
Açnc nv.s Ciuijle , qui rf auoit lors pour toute couucrtU'»
Vu
^74 Hijloires admirables
re fur tout Ton corps que fa chcmife & le gardcrobe 6z
ccfte garde entourlui.auec vn bonnet de nuift en fa te-
fte. A raifon dcquoy la pauute vieille feruantc ayantpi»
tié de le voir fi peu cowuert lui fut quérir àt% pantouncf
& vn vieil manteau fourré dont elle enuelopa & ac-
commoda fort bien Ciuille, lequel en ce braue équipa-
ge fut enleué par quatre Ibldars , & porté iufqucs à II
porte du Bac. La trouuans ia fermée, Tvn deux s'adref.
fant à certaine bourgeoife, femme dVn fuftaïUer, qui
cftoiten fa boutique proche de laditeporte,le pria vou-
loir pormetcre que ce pauurc foldat leur compagnon
bleffé & malade peuft pafTcrla nuiâ en leur boutique
auec vne honncfte femme de Rouan, qu'on lui bailloit
pour garde: à condition de le venir cnleucr le lende-
main de bon matin, & le faire pafTer par ladite porte du
Bac , afin de le remettre dans vn bafteau & l'enuoyér à
Louuiers : le tout auec promcfTe de la contenter à fon
plaifir. Ce que la bonne dame & Ion mari leur accordè-
rent volontiers, après auoir veu&reconu ladite garde,
qui eftoit aucunement leur parente. De fait ils fecouru-
rent charitablement toutela nui(5lCiuillc,dcfcu & d'au-
tres necefTitcz. Le lendemain les foldats, fuyuantleur
promcfTcvindrent de grand matin retfouuer Ciuille, &
enuoyerent l'vn d'entre eux pour voir la commodité
depaflerfeuremcntlaporteduBac, lors gardée par les !
Sui{res,& par mefnic moyen louer vn bafteau. Et n'eft à
obmettreen cefl endroit la grande courtoifie dont vfa
ladite fuftaiilere à l'endroit de Ciuille : car non conten*
te de ce que dclfus , elle lui donna encore vne chcmife
blanche auec vne couple de mouchoirs de fon mari , &
vn vieil linge pour efluyerfes playes, & pour en faire*
des tentes , charpie &emplaftres : outre -plus des fruits
fecspour luifcruir de refraichifiement fur le chemin.
Le foldat de retour , Ciuille après auoir remercié le fu-
flaïUcr & fa féme dcleurcourtoifie,& prms congé d'eux,
fut à rinftant porte par Icfdits foldats en fon bafteaujoù
citant iceux lui donnèrent vne couple de chemifes , &
voians qu'il n'auoit aucun argent pour payer fon hafte-
licr, lui donnèrent chacun vn tcftwn, dont deux furent
fut
fur Vhèure ddiurez au maiftre baftelier, fuîuàrit le mar-
ché parauant fait auec lui : les deux autres furent baillez
à fagarde pourfes neceffitez. D'auantage lesfoldats
craignansqu*eux partis de li,ou fur leehemin , ce bafte-
lier ne fift quelque tort à Ciuille & a là garde ( car tels
excès fciaifoyentaffe?. librement, voire impunémenc
pouy Iors)ils prindrent par cfcrit le nô & demeure dudic
bafliellierj& lui commandèrent de leur rapporter le len-
demain matir^ nouuelles en leur quartier dé TarriUee de
Ciuille au lieu de Croiflet à lauuecé. A quoi le baftelier
n'ayant fatisfait fuiuant fa promefTe , ils enuoyetent dés
le lédemain audit chafteau de Croiflet vn de leurs gou-
I'ars exprès, auec refrafchiffemens nouueaux pour Ciuil-.
e,& dffre d'argertc s'il en auoit afaire : à quoy refpondâc
que non, & qu'il remercioit bien humblement ces hon-
neftes foldats de tant de tefmoignage de leur amitié &
courtoifîe, le goujat s'en retourna trouuer Tes maiftre»
à Rouan, aufquels il fit ce rapport de la part de Ciuille»
dont ils furent ioyeux. Vray eft que par la malice d'vnc
feruante de ce chafteau Ciuille arrefta longt temps fur le
pont,auant que cefte mauuaife femme vouluft lui don-
ner entrée & l'y receuoir : ce qui lui caufa des extrêmes
douleurs aux nerfs, à caufe du grand froid qu'il y endu-
ra. Mais en fin y arriuant le laquay du fieur de Croiflet,
qui affeura cefte feruante de l'intention & volonté de
Ion maiftre, Ciuille entra au chafteau, & fur mis en vne
châbre,cn laquelle il fut aflfez mal accommodé en l*ab-
fence de fon coufin. Neantmoins il y arrefta près dVm
mois en grande jiufere,neceftité,& trefgrandesdouleursa
pour raifon du rctiremét de fts nerfs,caufé par le {roid 8C
autres incommoditez endurées là , tant par la malice d'i-
celle feruâte,qui gouuernoit toute cefte maifon eriTab-
fence de fon maiftre , que pource que fes playes n'eftoy-
cntpenfees comme il faloit. Car il n'auoit pour lorsque
ccHcpauure garde, qui appliquoit fur fes playes de U
iouè droite &du col,dosapreftsdepain blanc feulement
en forme de têtes trépees dedâs le moyeu d'à œuf crud>
Acle chaneeaiit •urcnouucUanc qu'vne foi*enviagt^
Vu ♦
éy6 Ht sî aires admirables
quatre hctires.Et continua ccfte bonne garde telle façon
«le le pcnfcr (à faute de mieux ) iufques à ce que le ficur
de Croiflet cftant auerti que ion coufîn empiroit de
îourcniour, craignanrque fi fafieureaugmentoit , &
qu'il decedail en fa maifon , les Catholiques Romains
lui en fiffent reproche , il mena de Rouan en fon cha-
fteauleficur de Bettancourt médecin, &le fufnomn^é
JM.IaquesAueaux chirurgien, qui premier rauGirpenfé
chez le fieur de Coqucrcaumont, lefquelss'arrefterenc
là deux iours, afin de lui donner remèdes conucnablcs
pour le garentir de fa fieure', pour lui fomenter fes ncrf^,
*& pour nettoyer fes playes: comme aufii powrlui lailfer
de l'onguent & des appareils cout-prelts,monllrans à fa
garde lemoyen qu'elle auroit à tenir pour le pcnfcr^net-
toyer & medicamenter à rauenir,atcendant quelque au-
tre commodité de rcucnir le voir , & qu'il y euft fcure:é
pour eux.Careftansreconus tous deux , pour eftre de la
religion, ils n'ofoyent fe hazarderde paflcr les porte-,
fans fe mettre en trefgrand danger d'eftrc tuez par le
peuple, finon quccefuften la compagnie du fîeur de
Croifl'etjfortrefpcéLt' à Rouan.
Orlcsremedes&rafhftanccdeccs gens de bien luy
firent toft perdre fa ficure,& les playes aufll commencè-
rent à fe porter mieux que deuant:de manière qu'il for-
tit toft après de fon lid & de fa chambre , & fe pourme-
na par tout le logis : vray cft que c'eftoit fans fe mon-
ftrer,ni eftre veu de genseftrangcs,& won domcftiqucs
defon couiîn, dcpcur qu'eftant reconu ledit fieur de
Croifict à fon occaîion ne tombaft en peine , & les dan-
gers y eftoyentgrands;car on faifoitrcccrche de ceux qui
auoyent eu charge dedans Rounn;Comme Ciuille auoit
eu. Voila comme il reprenoit fes forcer peu a peu. Mais
fa difformité eftoit telle qu'il auoit continuellement
i'aureille droite { à l'occafion de la fufdite conrra<ftion
de nerfs ) attachée à l'efpaulc , la bouche quafitouf-
iours ouuevte , fans la-pouuoir fermer qu'auec beau-
coup dcpeinc & de mal, ni mefme ferrer les dents qu'à
force : ayant le coude de fon bras droit ferré, comme
s'il eutt eftc collé à (es coftezila main droite telle mène
clofe
^ mémorables. 6*77
clofe^qu'il ne fe poiuioit en force du mon Je Si Jer de (es
^oi2Xs, ni mefmc les drcflcr,& falcir que tout Ton corps
tournaft ( tancil auoit le colroidc) quand l'œil fevou-
loittourncr.il continua en ce miferableeftatiufques aa
mois de luilletenfuiuant, qu'cftantfecouru par aucuns
de Tes cimis,& finguliercmentpar Ton grand laquay , qui
Tauoit déterré puisl'cftoit venu rctrouuer& feruir, il fut
par lui & par vn autre fcruiteur conduit; pendant le fie-
^e duHavie de grâce, iurquesenla maifon desfîeurs
de Ruftofle & de iainde Marie. Bailleul frères, gcntils-
homines demeurans en Caux^aflcz conus pour la gran-
de & rare expérience qu'ils ont naturellement , & par la
grâce de Dieu comme particulière & attachée à leurfa-
mille,auqucllieu eflans arriué & par cuNgracieufcment
receu.ils le penferentaucctant de foin , de diligence &
cl*affcdion mefmes àraifon de l'ancienne amitié qui
cil" entre leurs maifons, qu'en moins de fix fcmaines il a-
mendafort: combien que pendant qu'ils le manioyent
&:accommodoycnc ilcnduraftdes douleurs extrêmes.
Carapresauoir vfé de plufieurs réitérées fomentations,
afin de lui mollifier les nerfs , ils lui tiroycntà plu/îeurs
tepiinfes vnc fois par iour,& cchuid ou dix ioursdu-
rantjla tefce , les bras , &ies iaiiibes , pour par ce moyen
lui eftcndre lesnerfs, puis après lui lians le bras gauche
au dos,&lefaifans monter au haut d'vne cfchelle à de«
grilles de fer d'vne d<:;s feneftres de la maifon , qu'ils lui
faifoyent forcément prendre auec la main droite , lui o-
ftoyent l'efchelle de dcfious les pieds, & faifoyent que
tout fon corps pendant à la main , les nerfs s'cftendoy-
ent de plufe en plus. En forte qu'ayans auffi appliqué de
tref-exccllens ceromes,depuis le haut de fon coluifques
dcITusla main,&le long de fon bras droit pour touf-
ioursmolhf er fes nerfs, il fe trouua dedans fîx fcmaines
auoir recouuré la force, le remuement &rv(:ige de fes
membres , tournant fort à propos &dctouscoftez le
coljhauflant^baiil'ant&eftendantles bras à fa volonté,
& maniant fa main & ("es doigts , fclon qu'il vouloir,
Commeà prefent , quoy qu'aagéde foixante fix ans,
if a l'vfage de lefdits membres 3c de ion corps allez, d
Vu 3
^yi HiJ!oir es admirables
Taife^par la grâce ck Dieu : combjen CjU'il ait depuis Ta il
I5'62.cn Jure autant de mal, & porté autant de fatigue&
de coups,c]u'autTe irentil-hcmmt dt: fa qualité, lanstou-
tt^cï^ qu'il ait perdu à Toccafion de la fufdite bleflcurc
autre chofequ'vne pariiedc Touycà quoyn'a cftépof-^
^ble d'apporter aucun remède, non pjusqu'au nerf du
petit i'o:f,t cela niain droite, lequel fut entièrement
coupe parla baie, ne laiflant toutesfoisde s*en aider,
mais non auec telle force,vcrtu,ou adion, qu'ilfaifoit a-
iiant fa bkfTeurc. Bien eft vray qu'en confcquence à'\-
cclle,il a eu de grandes maladies à Tocca/îon de la def-
cente de plulîeurs os,lerqucls nature pouffant hors à di-
Ueriesfois & en diuers £enip5,& coulânslclong àts nerfs
entre la peau & la chair de fon col, il s'ett a eu de tempt
en temps tellement affligé de grolTes apollemes , qu'el-
les l'ont maintes fois conduit iufques furie fueildc la
jnort: & fontfortislefdits osa diuerfes faifons &par di-
fi ers endroits , procedans tous de lamafchoire droite,
fjui fut rompue en dcux,& de tous collez brilee : conti-.
îiuantce mal depuis le iour de fa ble(rure,iufqucsenraii
ïjSé.qu'ellant refi.giéauccfa famille en Angleterre dc-
<lan5, Londres,pourobc!r auxeditsdu Royi il fut par le
conleil dvr. excclleiit médecin de Prague, nommé M.
Xauinius , & d'vn autre dode médecin, natif d'Orléans,
nommé M. Maillard , contraint Àci^e. faire appliquer vn
cautère au bras gauche , afn de rompre j)ar celf e diucr-
lîon le cours des humeurs qui couh yenten abondance
fur ccfle partie oftt nfec , & lefqucUes lui occaiîonnoy-
cntde temps en temps cçs grofles apoilemes & mala-
liiei: Nature n'eftant feulè-afl'ez forte pour les rcpoufler
furies aunes parties plus capables de s'ew garantir. Ainit
Jesapoftcmcsceflérei.r, n'en ayant (depuis qu'ilaconti-
puc d'eiuretenir ce f en eauteve) efté en forte que ce loit
ni meracé ni trauaiUé. A\\ÇÇ\ ell:-il foigncux de le bien
entretenir : fc portr-nt à ccile occafion mieux , fanscom-
paraifon, qu'il r/auoitoncques fait aaparauant. Etcepar
la grâce de Dieu , auquel fcul en fou l'honneur & la
^Iduc ccerncllf ment^
l'ay \Ài%
C^ mémorables, 6j^
Tay bien voulu reprelenrer tout au long ceftc hiftoi-
re cres-memorablc , l'ayant reccue ciela main d'vn no-
table pcrfonnage, à qui le fieur Ciuille l'a enuoyce
l'année 1^03. pour me la communiquer. Elleeft outre-
plus lignée de la main propre duciit fieur , lequel en ce-
fte fîenc dcliurance me ramentoit ces quatre vers, pour
doliure du prefent difcours.
Dicft guérit ceux la qui dejfaiUent
Pour les g 4>ids tnauX qui les travaillent,
Ky^}>pliqi*an: icffm leu. s blfffeurts
Bjnnes medecmes ^feurei.
CON Sr ANC E endduerfitc.
LE grand Sforce monftra toufieurs vnemerueillcu-
fe conftance à fupporter toute aduerfîté. Ayant af-
i!egé Naples de toutes parts (comme c'eftoitle plusfa-
ge & hardi chef de eucrre de Ton temps ) fon fils Fran-
cif]ue Sforce & Fofchin fils de fa fœ ur furent bleffez à
mort. D'autre cofté Léonard de lamd Seuerin fou
gendre, ayant desfiévn feigneur Neapolitain à courir
lalancc à fer efmoulu , fut tué fur le ch;imp. D'auanta-
ge on lui apporta nouuelleque Polyxenc fa belle fille
femme de Francifque auoitefté tuée par poifon , en-
femble vne fiene petite fille de grade efperance,& eftoy-
ent mortesen grands tourmens , & ce par les artifices de
la propre tante. Pour le comble , \n de fcs capitaines,
peu féal , fit courir vn bruit par tout le camp que fecours
inuincible vcnoit aux alfiegez , Stque Icréfort des aflfie-
geanseftoitcalTé: cequi mit les ibldats de Sforce en
grand trouble. Mais lui fupportantdeconftance mer-
ueilleufe tout ce choc d'aduerfité , ne monftra figne
quelconque de dyeil, nclaifla fortir de fa bouche foui*
pir aucun, ni parole efféminée & indigne de fon grand
courage,ains, fafts fe cachet en fa tente ou en lien efcar-
té, comparut toufioursen plublic auecmefme vifage
^uc de eouilume.D'auancage il Ht de tres-belIesrcmou«
Vu 4
6^0 Hijioires admirablei
ftrancesàfcsfoldats, monlhantvn cœur afleuré&nvâ-»
yementafllscn bonlieu, tellement que la profpcnté
&ra.lucrlîté paioiÛoic tout vnc en lui. vaul loue cnld
On recite d'Alfonce roy d'Arragon , qu'ayant entre-
pris & commencé la guerre de Naples, de laquelle il
vintà fon honneur au bout de vingt-deuxsns, fous des
rcuolutions merueilleufcs , iufqucs à eflic pris & en la
main de fcs ennemis , ncantmoins il ne changea iamais
devifage, dcparolcde contenance, ni ne nionftra,pour
inefchef qui lui aduinft, qucfa magnanimité s'abaiflaft
en forte que ce fuft , ains parut toulîours contant &; pa-
reil à foy mefme. ^nt. de Pjerme ati ï. UuJo faits ^ dits
ttialuiich 9.
Ce mefmc Prince ayant vn vlcerefort dringcreux,
fouffnt que le Chirurgien y appliquaftle fer ardant,
fans froncer le front, ni crier,ni gémir, ni manftrcr au-
tre fîgne quelconque de couleur. VAlerwe au 4. Uu.
L'Empertur Sigifmond foufÎTit de mciine conftance
qu'on lui coupail vn des artueils : comme fît aufl'i le roy
de ?olongne, Sigifmond premier du nom. kenifoi Syl-^
ttiiii ç^ Croni:rM.
l'ay touché en gênerai quelque mot de la conftance
d'Alfonce; maisicla fpecificrai en celte fc6aon. Ayant
efté desfait en vnc bataille nauale près de Gayette^prins
prifonnicrparles pcnci]ois,& mise? mains île Philip-
pe Viconte Duc de iMilan, lequel clloit venu au fccours
des affiegc?, fc maintint lî conlîammenr, & retint fa Ma-
iefré de telle forte, qu'on euft dit qu'ileftoit \idorieux,
non pas vaincu. Pouitantquelques vns de fcs ennemis
ne pcurent fc contenir de dire , qu'Alfonfe paroiffoic
Koy entout temps. Mené puis après en Il/le ù'./€narie,
& importuné par TAmiral de Gencs de la rendre aux
Gcneuois>& ce fans aucun delay : l'aduoué refpondit-il,
r| uc \ oi:s me tenez en .vos mains : mais ie megarderay
bien de faire ce commandement à mes gens , & quand
Je leferoisjils ne m'obe'roycnt pas , artcnùu Teftat où ie
fuis. VouloiLqucrAmiiai crcaftqucfes {uittsC^ gar.
ueroyciit bicûsde donner vn pouicede terre (qui eft
peu de
^ mémorables. 6%i
peu ce chofc) ou vn quartier de pierre de for» royannie
aux Gcneuois. L'Admirai eftonné de telle conllancc,
s'cxcufa enuers Aifonfe, reicttnnt toute la faute de cefte
negotiation fur celui qui y auoit efte employé. Peu de
teuips après, entendant qu'on le lairr«it aller, il fit dire
au Duc de Milan , qu'il eftoit preft d'accorder ce qu'on
lui dcmanderoit , mais qu'on ne lui parlaft poiiu defe
déporter de la guerre de Naples; d'autant qu'il eOoit rc-
iolu de demeurer en prifon perpétuelle, auant que qui-
tericclle entreprife : voulant demeurer ferme en fa dé-
libération , & n'eftre accule de Icgeretc par les fcigne.urs
ccnans Ton parti , & qui eftoyent prifonniers auec lui-
tyint.cle Palerjie dt* ^.liu.
Le Pape Pie II. parauant nommé ^neas Syluius ^ le-
quel viuoit l'an 1460. fc monftroit fortconftaçt en «Ji-
ucrfîté. Ayant entendu les nouuelles de la dcsfaite d'v-
ije fiene armccfans autrement s'efmouuoiic Si mon en-
nemi (dit-il) gaignedixbataïUes, &cn perd feulement
vne , c'eftfaitdelui : comme il aduint auffi bien toil u-
pres.Ferdinandroy de Naples ayant eflé vaincu parles,
François auprès du Sarne , Pie ne dit autre chofc fînon:
Le hazarddc la guerre nous fuit,il nous a chéris premiè-
rement, & maintenant il nous rechigne. Outreplus fcs
partifansayansefté rompus auec grand perte en Aile-
magne : Et bien (dit-iî) déformais ce fera noO:re tour de
vaincre,ayans eilé vaincus. Finalement il vint à bout de
.fes ennemis en Italicau royaume de Naples , & en Al-
lemagne. Sa crjnftance apparut fur tout, en ce qu'ayant
entrepris la guerrc,& mis iés forces en campagne,iamais
il ne voulut entrer en pour parle de paix, qu'eftâc vido-
rieux , quoy qu'après les pertes précédentes les ennemis
lui offnffent comme la c.irrc blanche, & femblaflcnt
pluftoll demander que lui offrir paix &c reconciliation.
lean C ampnrjiif en la -vîe d'icelm.
L'armée des Vénitiens ayant cfté battue & mifeeu
route auec infîgne perte, Ik Carauagc , par Francifque
Sforce depuis Ductleii4Tian,peus'elî:ansfauue7 à la fui-
te., tant s'en falutque les vaincus s'esbranlalfcnt , qu'au
CôtiaArt Pragois Fofcarin leur DuC;autcur de cefte guei:
€%i HiJlûirfS admirables
refit incontmctafleinbler le Gonfcil.ou comparoifîarrt
veftu ci'vnc grande robe d'cfcarlarte, & dVn vifage plus
ouucrtc]uede couftume, après auoir fait prefenTau pu-
blic d'vnc tres-groflc femme de deniers, exhorta IcsSei-
rneursà le monftrer conftans & courageux, item a prc-
lier leur argent à la Republic]uc, lesalTeurant que de-
dans trois iours rarmeefcroitredrclTee, compîette, &
plus refolue que iamais. Cefte grandeur de courage fit
peur au victorieux, SiFinduifit à demander la paix aux
Vénitiens. B,ipt. ij^nace au :;.Uu.ch.6.
Apres que les Vénitiens curent eftc defpouillez de
toutcequ'ilstenoyenten terre ferme dedans l'Italie par
Louys XII. Roy de France, l'Empereur Maximilian I.
le Pape Iules XI. & Ferdmand I. Roy d'Efpagnc:lcTurc
leur offrit fecours , dont ils le remercièrent ^ &fe main-
tindrent courageufement , fortifiez par la conftance de
JLconnrdIuflinianleur Duc, par leconfcil duquel ils
reuindrent toft après au delTus. ^^u mcjme //w. ^ ch.tpi^
tre. Guichardin eicrit au 8. Uu. que les Vénitiens furent
lors fort esbranlez, &ieur attribue vne fort honteufe rc-
cerche de l'Empereur, Mais il confeffe ptjis après qu'en
ladefenfc de Padouè leurs afaires fe remirent au dcf-
fiis,& remarque beaucoup de conftanccs es gentils-hom-
mes Vénitiens.
Ferdinand d'Aragon , Roy de Naples, chafle parle»
François>ayant vcu la 3esfaite de fcs troupes à Scmina-
re,monftra mcfme vifage que s'il eull elle vainqueur.Se
cenlurantfoi-mefme il difoit auoirefté fruftre de ion
cfpcrance^&voyoit bien quel'inconftance&rcuolution
«iesatajres du mode lui monftroit en diuerfcs fortes que
rentrée en Ion Royaume lui eftoitclofe.Ce nonobftant,
après auoirefté dcliuré de mort, Ion chenal avât eftéab*
battu fous lui au côbat,& fon page tue pour le garentir,
après s'eftre retiré de viileffe i Palme , il rcprint plus de
courage que Qeuant,guidé du deilin, cotre toute aparen-
ce humaine , & fe perfuadant quclc ciel & la terre &la
, mer oui lui cftoyét cGtraires, Iclon Tapparêce & reiienc-
méthii fcrovent en iinfauorables.Pourtants'embarqua-
û -« ;,ij/]mc;aya.it vnc floue dcfcpuntc v*JuVcaux> où il
^ mémorables. 685
n'y auoit que des matelots & fort peu de gés de guerre.
Auccccft équipage il aprochade Naples, s'en rendit
iwai{lre,& enferma les François dedâs le Chafteau neuf»
dont il les chafla finalemét par le moyen de lafamine.P.
l<ii*eau^.li.defes hiji.Wr.GuUh.At* x.liu.des guerres d'italse.
Si homme de noftre temps s'eft monftré confiant &
roide en aduerfîté , ç'aeftélePapel I. fi Ton encroid
Guichardin, lequel defcriuant auecfînguliere adrefTc
les trauerfes qu'eut ce Pape , réduit à infinies difficulrez
parfes ennemis, nommémentpar le Roy Louys XII.
dit ces mors, entre autres : Oneuftditqu*ilauenoit du
Pape^deietté de tan t d'efperanccque les Poètes ont laif-»
fépar efcrit d'Anteus,que toutes les fois que dompte
des forces d'Hercule il touchoit la terre , autant de fois
s'en monflroyent plus grands en lui la vigueur & le cou-
rage.Le mefme eftoit du Pape en fon aduerfité : car lors
qu'il fcmbloit plus abaiffé & foulé, il fe releuoit d'vn c-
pritplus confiant &rerolu,& fepromettoit del'auenir
plus que lamais. Ncantmoins il n'auoitprefques autres
fondemens que dclui-mefme :& ce qu'il prefuppofoi;
(comme publiquement il difoit) ores qu'il fufldefnué
de vaillautes & loyales armes j n'ayant autres amis cer-
tains que les Vénitiens, lefquels par necefTité ccuroyenc
mefme rifquemeantmoins pource que Tes entreprifes ne
jprocedoyentd'intereil particulier :mais d'vn feul&pur
ciefîr de la liberté d'Italie, qu'auec l'aide de Dieu il en
auroitheureufeiflue. Voyez: Fr. Guichardin 4«y.^ lo.
liu.de fon bijl.des guerres d'ItuUc,
Le grand Gonfalue ayant eu beaucoup de difficultei
escftmmencemcns delà guerre qu'il fit aux François,le{^
quels finalement il chafia du Koyfiume de Naples^mon-»
ftia toufioursvn vifage aifeuré, failant (d'vncfîngulie-
re adiefîe)fon profit, poa moins de fes pertes que d«
fes auantagcs. Ayantafliegé Tarente,fcs troupes fcTou-
leuercnt& mutinèrent contre lui, faute de payement.
Quoy qu'il fevift en danger de perdre la vie entre les
mains des mutine7.,ce nonobflant il fc maintint en foo
giliette acouilum^Çt £( comme vn ioUac lui portaii i la
^ ^ 4 Hi (loir es admirables
poiilriiicla peinte de ia hallebarde , pourletranfpcrcef ~
iSi tL!cr,en deilouinnm le coup de lamam gauche ,de la-
cruelle lUoulcua la hallebartie, &tciburiaiu, il lui '^aZy
Malhabile homme que tu cs.haunclapoinde detahal-
I-lxirde.de peur qu'en te iouaiit tu ne ni€ perces de part
& d'autrcrcom me s'il cuftpnns pour rilec le grincement
àz dents de ce foldat furieux, vattl loi^ en U -vk d'udiu.
François Fofcarin Duc de Venife ayantpar longues
minces gouucrné l'eftat fort heureu(êmcnt,vid vn grâd
tiGubleenfa maifon , lequel il (upporta fort conftam-
menc. Vn /icn fils nommé Iaqucs,accule ( mais à tort)
d'anoir fait tuer Hermolas Donatchcf des Dix, retour-
nant vnfoir en famaifon, vid fondit fils, après auoirefté
i%deiTienc torturé , banni perpétuellement de Venife.
Mais il monftra lors & depuis touliours tel vifage que
"ç^rznam.Ktpt.Egnace au ^.liu.ch.t.
Charles VIII. Roy de France , ayant entendu que Ton
$ls rniquccftoiî mort, ne s'en monftra eitonné m trou-
blé^ni n'en changea d'habillcmcns, ni ne laifla certains
palfetemps qu'il auoit commencez , ni ne voulut que
î'entrcprifepourlaconquefte du Royaume de Naples
fuftdiftcrce : mais d'vn vifage ouuert & paifible rendit
grâces i Dicu,fc monftrantplus refolu qu'auparauant à
ion voyage d'Italie. Pw/(^o/f au ^.litt.cha.-io.
Léonard Lauredan,Duc de Venifcpriué contre toute
apparence, i: par mort foudaine, dupuifné de Tes hlç^
ieune Gentil-homme, de tres-grandc cfperancejporta (i
conftamment celle perte, qu'après auoir enuoye le corps
^u Tepulchre , il le trouua en confeil , où fa prefcnce e-
iloîcrcquife pour la relolution d'vn afaire d'importance.
Deux Seigneurs Vcniticns,procureurs de S.Marc, Tvn
îiommé Lucas z e'ie,pcrc d'vn fils vniquc, l'autre, Do-
minique de Treuife peie<le quatre hls , lupportercnt
coucemcntlctrefpasdeleursenfans,&nc remarqua-on
CM eux tefmoignagc aucun d'altération d'efprit. Jî<# mf/-
mz Uh-.'c ffçy chapurc.
Es volumes fuiuans nouspropofcrons diucrsexem-
plci; de la confiance en aduerfité de plu/îeurs autres
grands
d" mémorables, 6%^
grancls perfoniiages , depuis les rufinenfionne?- : afi-a
cju'encesdiuerfes reprifes nous 'donnions tant plus de
contentement au le(5teur.
CONT I2iENCE mémorable,
Î'Ay parle de Luchin Vivalde au premier volume. Ea
celui-ci ie reprefcnreray la continence de Francifquc
Sforce, lequel eilant chef de l'armec des Florentinsau
licge de Cafcnouè, fortercfle des Lucquois^ aduintque
ia ville avant cftép.rife, quelques foldatstrouuerentv-
ne ieune femme nouuelleracnt mariee,de beauté fingu-
liere, laquelle eftant riree par force hors de fa maifon>
leur dit en criant qu'elle le donnoit au Com.c FranciA
que,c-: non a autre. Ceux qui Tauoyent raiiie^craignans
ft cholerc du Ccm.te, ne faillirent delà lui amener tout
à rheure. Le Comte, ieune Seigneur, fortabandonné à
fcs plaifirs , quoy qu'efpris de i\ rare beauté , demanda
neantmoinsàlaieunefemme il eileaimoit mieux con-
fcntir ïfa volonté,que demeurer en lapuififance de ceux
qui la lui auoyent amenée, Sa refponfe fut;qu'cllecfi:oic
prefte à lui obeïr,pourueu qu'il lui pieuil la tirer d'entre
les mains des foldats qui l'auoyenc prife. Alors Sforcc
cômanda à fes gens cle la conduire en Çà tente. La nuid:
venue deuant que fe mettre au lid, il lui demanda dere-
chef fi elle eftoit de mefme cour:?oe,ou fi elle auoit chr^-
gédepropos ? Laquelle lui refpondit comme deuanr.
Sur ce il la fit defpouiUer (Se coucher auprès de foi. En-
trée qu'elle fut dans le licL,voyant vn tableau de la vier-
ge Marie que leComtetenoic par couftumc& deuotion
près de foi, pleine de honte & en grand' reuerence , cUc
dit au Côte auec larmes aux yeux , Monfcigneurie vous
prie par ceftc fiicree vierge,dôt voici l'image , qu'il voUs
plaifc preferuer ma pudicité,& prit voftre ciemence tare
renommée, vouloir mereftitucr entières nullcmeni:
pollue à mon mari , qui eft parmi les autres prifonniers.
Si ie vous ay promis obei^«âcc a voilre plaifir,ce n'a elle
èi^ Hi/lâires ddinirahles
<jue pour me dcliurer des mains de ceux qui m'atioyçnt
rauierpour raifon aufll de vos vertus qui m'ont fait e^
iperer que megaranterie?. de toute vilenie iic \iolenc<.
Le Comte fut tant efmeu decesp3roIes,que toute ar-
deur lubrique lors efteinre en lui, fans toucher ceftc
femme nueal Tort haftiuement hors du li<fL Et déslc
grand matin cnuoye quérir le mari, duquel il pava la ra-
çon,lui rendit fa femme,auec grands fermensquM ne l'a-
uoit touchée ni cognuc. Le mari fc mettant i genoux,
le remercia tres-humblement, comme Ion peutpenfcr,
priant Dieu pour la profperitc du Comte. Lequel vou-
lut donner à tous deux plufîeurs biens & meubles du
pillage de la^illc. Mais la femme n'en voulut accepter
pièce quelconque , difanc que Tes voifins voyanstels
dons eftimeroyent que ce feroitlc prix de fon honneur,
quoy qu'entière, & parainfi qu'elle tomberoit en faux
blafme & reproche,qu'clle defiroit fuyr plus que la mort»
Ayant eu licence de s'en aller, & prins congé du Com-
tCjils fe retirèrent en leur maifon. B^pnjie Fulgojk ah 4. U-
ure des eXempUs,ch.^.
C ON FF L s 1 0 N e/lra/fge..
"irvE noftrc temps avefcuen la ville de Florence vn
JL/Citadm nommé laques de René , de taille greOe,
îhumeurmelanchohque,lequclenuironlecinquantief-
me an de fon aage,parutafflicé d'vne conuuliîon eilran-
fe,au mufcle temporel du cofté droit : paroxyfmc dont
aflault eftoit tel. A chafcune heure du iour & de la
nuid , l'accesdela conuulfîonle prenoitpar dix foiç.
11 tordoit la bouche, les paupières , Toeil droit luy rouil-
loit & tournoit en lateftc, aucc beaucoup d'efcunle
& crachat fréquent parla bouche : il frappoitde toute
fa force auecfes pieds contre terre: L'accès durant enui-
ron autant qu'on mettroit à prononcer promptcracnc
&{ans arreft le Pfeaume. qui commence, Miferere mei
Vet4s fecmdum mugnam mijericordiant tium. Puis il
de«
tJ- memorableSé 6iy
4emeuroît coy quelque peu de tempj, parlante traies
comme s'il n'auoit rien fouffert. Soudain l'accès venoic
comme vnflus puifTant auec mefme effort & période;
puis fefaifoitlereflus, Ilauoit dcfîa vcfcu dix ans en
ceft eftrange eftac , fans auoir peu receuoir alle^eanc©
de medicamens quelconque , lemal ayant mclprifé &
rendu vaincs les confukations des plus cxcellcns méde-
cins de ritalie,ce dit /. Schotch.uitz, -uolume de fef rectteih»
M. François Emeri, médecin excellent à Vienne en
Autriche, & moy, vifitafmcs vn iour certain bourgeois
delà ville, homme continuellement catarreux, & fore
affligé des gouttes, qui par interuallcs l'auoyent telle-
ment torturé , qu'il en auoit des plufîeurs années les
doietstout noueux & retirçz. Auint qu'vn catarrelc
faifit & fut verfé par toutlc corps , dout il fut exiremc
ment malade. Le catarres'efpandoit iufques au cuirSc
aux parties proches de la peau , dontles m ufcles pro-
chains eftoyent remplis, toute lapeau tendoit finale-
ment d'vneconuulfion, comme 11 tous les ncï{;i(cfuC-'
fent retirez, & deuenoit afpre & rude comme vn efcor-
cc d'arbre, ou comme vn cuir efpais cloué fur vn table.
Le patient ne pouuoit remuer pieds ni mains tains tout
fcftoit roide & comme gelé. L'efpine du dos , le col , la
nuque, les mufcles du ventre ef^:oyent en mefme eflat:
neantuîoin»; c'eftoit fans douleur véhémente. Rien
nerelloit enfon naturel , au regard des partiesexter-
nés , que le mouuement & la rnoUefl'e des yeux & des
paupières. Cefle conuulfion de tous les nerfs , ayaac
duré trois iours& trois nui <5ts , fe fîcvne crife par vue
roufce ou vapeur efpandue par tout le cuir, qui le ra-
mollit foudaincment , p^is les membres recouurercnt
le mouuement. Ccftc conuul/îon defgaigna tous
mcdicamens , & ne fut moins lamentable que mémo-»
rablc. Mais ce qui cft le plus digne d'obferuatioû
fut, qu'il n'y eut conuulfion en aucune des parties wi-
ternes : au contraire le cerucau , la langue , Teftomach,
les boyaux, la veffie aidèrent toufîours le patient , qui
n'cftou cmpefché^iîiion quand il faloit prendre quelque
y
CÎsS Hijloîres admirables
bouillon, à caufc des mufclcs compartiifans à rœfopfi »^
gc. Aîutthictt Cortux enfonjnumtei de înedccine 3 liu. 1. cha"
pitre zb.
Le Do(fceur Schenckius fak mention,anres cjuclquesL
fameux meciecins, d'vn gétil-hommc Italien, qui l'eipa-
cc de (;x Icmaines continuelles futatHigé d'vnc /i vio-
lente côuulfîon, que fa telle ciloit renucrfee & couchée
furlcselpaules : finalement fut remis au deff us par m e-
dicamensconuenablcs. Item d'vn autre qui frappoic les
fviTes nueclcs talonsauffi aifement que des mains par
c;^nuulfion : cC d'vncnfa^it de trois ans qui par meiine.
maladie eiloit tellement agité par tout le corps que nul
membre ne reftoit D.ns tremblement & fecouëment, rc-
fcrue les pieds qui demcuroycnt immobiles. To?n. i.//«.
l.Olffcrti.z^J.z^i^. z$9' Fernelaiijit ,iu yUi*. chap.^. de fa Pa-
th. •love parle à'vn qui tous les ans duranrl'hyuer , ertoit
dcuxou troisfois tourmenté d'vneconuulnon, qui con -
mcnçoic par vn branfiemcnt de tefte à diucrles reprilc' ,
puis faifoit tourner tx baiiler la tcfle & le col fur les cf^
paules,rout le corps puis après le roidiiloic & eib;i-
V:noic:prir fois vn coiLe,vn bras,ou vne cuille, fans qu'on
ypeult rcmedier,iufques a ce qu e l'accès full pafie.
ÏE A N Guy,carileur de Montpellieisvint me trouuer va
iour, pourvoit li ie pourrois lui couper fans danger
vne corne qui lui cftoit nce fur le fronr,vn peu au dedâs
à\x poil du cofté gauche: laquelle me donna bien à pen-
fer , d'autant qu'elle eiloit i la baie du tout en tout ad-
hérante a l'os, &1Î eftoit longue de demi pied, &dela*
grofleur d'vn bon poulce. Sa figure eltoir inefgalcgroile
dfa ba(e,fe renJât en poinfteà Ion extrémité , recoquil-
lee comme ccik d'vn ieune mouton de fîx mois. En fin
voyant l'ennui & rcn^ptfchemenc qu'elle lui caufoir,
vaincu auflî de ia prieres,ie le ha7arday,fciant cefte cor-
ne Iç •
^ VMmoYAhles. 689
n^^lc plus bas qu'il mrîutponible, dont fortit grande a-
bondance de fani^,qui me contraignit de venir au cautère
aduel. Apres auoir fait cheoir reftharrcjinondifi-?, incar-
né & cicatrifé Tvlcere^il guérir. Bart.Cabrol ett fes obferua-*
tiens ^^itatonnqtteSiobfcru.U,
Chacun Jcait en France 5 ce qui s'eft trouué es forefts
de B^'auflc depuis quelques années , à Tçaucir vn ruftique
portant cornes au front,tirc des bois où il faifbit demeure
contniuelJe j produit en Ipedacle aux grands & petits,
dont les vns ont fait des rilèes, les autres y ont penle au-
trement. Ou en a imprimé des placarts. Mais ia n'eft be-
Ibin que nous parlions d*auantage de ce que tous Icauent.
CORR ECT I 0 N excejfiue & cruelle^
^aujè de îref-grandmaL
Pî E R R E deNauarrej Admirai d'E/pa^ne^eftantauec
vue puiflànte flotte fur la mer Méditerranée, :'.pres
quelques heureux exploits fe rendit près de Tlfie dç Zer-
bi ou àts Gerbesjpour y faire aiguade > & à cefte fin com-
mande à vn àts Colonnels de delcendre en vne autre pe-
tite Ifle nommée Cercima,aucc quatre cens loldatSipour
deJcouurir celle comniodité d'eau. Il n'y auoiyen ccfte
lile que des cabanes de bergers, & quelques Mores qui
cultiuoycntlaterre.Vianel (ainlis'appelloitcechef ) de-
fcendu, s'cftant vn peu aduancé en rifle j trouue trois
puis d eau douce , lefquels eftoycnt pleine de boue , pour
auoir efté abandonnez des Ivlores qui enauoyentcreufé
déplus commodes loin de la mer, & comme au fonds
de l'IfieJl les nettoyé en diligence, & prie l'Admirai lui
permettre de faire garde de ces puits iufques à ce que la
Hotte fut fournie. Gc-que lui ayant elle odroyé, non fans
doute & prelàge du mal-heur prochain, toft wpres à caufc
qr.e le Capitaine enfeigne re pouruoyoitpas à quelque
affaire aiTez toft. Vianeljhonime haut a la main j & choleie
Xx
a^o HiHûires admrabks
extrêmement, commence a l'outrager deparolesj & de^l
langue vient aux mains, frapejblefic ce capitaine, lui arra-
che" du poil de la bai bejpour plus le deipiter.Ceit homme
£[ exceffiucment & cruellement cenrure, pour l'heute
beut celle iniurej&la garda quelques lours en leltomach.
Mais en lieu de la digcrcr ou vuider , fans dommage de
ceux qui n'en eftoyent nullement coulpables , vn ioire-
Itant nuid clofe, il court vers les Mores , 6c leur dit eftre
venu à eux pour leur mettre es mains \ts Eip.ignolsqui
gardoyent les puitSjpour les exterminer lans aucune refi-
liance.Ayans coFeré eniemble des moyens, fur la minuidt
les Mores iettent deuant quelques elpions, leiquels rap-
portent que tous \ts Eipagnols eftoyent profondement
en dormis. Au fil ne fe doutoyent-ils nullement desMoteSj,
ni d'aucun des Iniùlaires. ifs vienent donc en diligence
conduits par ce capitaine enfèigne , lurprencnt & maflà-
crent Vianel auec tous les ibldats , excepté vn laiJlë pour
mort auec les autres , & deux prins en vie qu'ils enuoye-
rent en prelent au Roy deTunesa^ à vn Roitelet du pays,
\.QS Mores extrêmement ioyeux d vn tel exploit , où nul
des leurs n'auoit dié blelîë ni tue, chargez de butin, com-
mencèrent à faire vnefcoppetterie lur la pointe du iour,
dont l'Admirai entendant le bruit,fait Ibnner l'alarme > ôc
defcendre i^i troupes en terre. Au bruit de tât d'hommes
marchans en câpagne les Mores fê retirent de viftcfleeti
leurv forts efloignez de là. Celui qui auoit eftc laiflc pour
mort,re leue , & approche en la neccfÎKé du lècours venu
trop tardjdeicounre a l'Admirai la faute de Vianel i &Ia
perfidie du Capitaine enfèigne , r.diouilant que Vianel a-
iioit fait vne autre faurc , lettant ies icntinelles trop loin
des puitSjtellement que les Moiej. ayans furpris & oppri-
mé tour à coup [qs fèntinellcsjs'elluyent tout à l'aiiè ruez
fur ceux qM dormoyent , & hs auoyent miferablement
ixcagcz. L'A'im.'ral r e pouuant remédier à ce deiôrdre^.
iè retire tout ind;grécn ces vaificaux. Toftaprcsjla flotte;
ayant padn 1.- commodité de faire 3;guadc,pjr la faute de:
Vaneljperitjcon-îme nous Tauons du cideuât parlant des
armées ruinées par la ioif, ik autres incoDUcniens. L'hi-
ftoire iùlmentionnce cit delcripte par ^Ittarts Gême7ji*r
lafin
d" mémorables. €^t
Ufin du ^uatriefme Uttre desfaicls mémorables du Cardlnd Xi-^
meues.Cdà aduint enuiron l'an ; ^<dS,oa i 509.
C R F E L s punis.
LE dernier iour de Decembrearan i^oi.Liuerot de Fer-
me capitaine Italjeiijfiiiement attrappe auec quelques
autre$/ut par Je commendeinent de Ceiàr Borgia^Duc de
Valentinois,eilranglé dedans la Chambre où il elloit pri^
foiinier^jenfemble vn nommé le Vitcllozze. Perfbnnene
peut nier^ditlhiftoirej que Liucror n'ai fait vne fin telle
que i&s mcfcliancetez meritoycnt , eftant raifonnabîe que
periit malheureufement celui qui peu de temps aupara-
liant auoit dedans la ville de Ferme cruellement maflàcréi
pour ic faire grand 3 lean Frangiane Ton oncle > auec plu-
fîeurs dei prmcipaux de la ville, qu'il auoit priez de venir
b.m quetrer chez lui. Tr. GnUhurdin xu cinqmefme li.un déS
guerres d' Italie yfeâ. 10. Au marge de laquelle hilloire Ibnt
adiouftez ces mots notablesiDieu punit les meichans : 3c
qui a traiftreufement tue' les autres 3 efttué par d'autres
iraiftres plus fins que lui.
Ce Cefar Borgiajdont ie vien de parler, l'vn de plu* (î-
mulezSc cruels'ide mémoire d'homme,apresauoir commis
vne infinité de mefchancetez & cruautez, fe vid defpouil*
le en peu de temps de tous Tes biens & clhts , mocqué &
detcftc de toute l'Italie qui l'auoit adoré,conftitué prifon-
nier , & traité fans aucun relped de(èsdignitezpa/lle«»
c )mme vn Icelerat , mené finalement après plufieurs tra-
is en Efpagnej& ietté dedans vne prifbn , de laquelle a-
; ^.nt trouué moyen d'elchjper & s'enfuir, il alla cercher la
mort deuant vne bicoque alTiegee, où il fut tué d'vn coup
de traid , làns regret d'aucun. Nous rcferuons à par«
1er de lui plus amplement en l'vn des volumes fuiuan^i^
Xx &
^^L HiHoires admirables
VoyeTj^f. Gnîchardin att^.6, fjyj, Uure.
Lan mil cinq cens vingt , Je royaume de Suéde fut
réduit à piteux termes pa Chnluerne roy de Dane-
marc , comme nous le monlirerons ailleurs. Eftant
liir ibn retour par terre en ion royaume j il failbit dref^
fer par toutes les villes & bourgades où il paflbit , vne
potence ou gibet , pour le faire tant plus redouter. Vn
nommé Nicolas HoHiein 3 qui auoit brigue cefte cruel-
L^conimiffion , qu'il executoit fort foigneuièment, fut
lui mcfinc pendu &(. elhanglé à IVn d'iceux gibets en la
ville de Sudercop , ôccepar exprès commendement de
Cariftierne.Z?. Chytrxm anodin» de pn hifioire ou Chronique
de Saxe,
Deux ans après , Thomas gouuerneur de la forterefle
nommée Aboé,ayant receu vn trop feuere mandement de
Chriftierne 3 en fut encore plus> prompt & cruel execu-
tegr.'car il fit trancher les teftes à quelques fêigneurs Suè-
des. Gela auint au commencement de Tan mil cinq cens
vingt & deux.Au mois de Juillet en l'an fuiuant , ce Tho-
mas ayant équipé quelques nauires ^ fit voile vers Stock-
holm ville capitale de Suéde , & approchant des promon-
toires^enuoye vn vaifléau léger à la defcouucrte. L'Admi-
rai de Suéde citât au guet auec fa flotte derrière vne haute
montagne^attiape ce vaifieau^ diftribué tous les foldats &
matelots par Ces nauircs, emplit ce vaifieau d autre Ibldats
& matelots Suedesjpuis tourne voile ainfi feul versTho-
masjlequel defcendu en vn eiquifpour defcouurir les ri-
uages d'alétourjapproche de Ion vaifléau à force de rames, i
demindant de loin fî tout le portoit bien. OnluireP»/
pond acortementj qu'il eftime que ce fuflént Tes gens. Il
approche:,& de ibn efquif monte au vailTeaUj où entrant il^ !
le conoit pris, /ànsauoir loifir ni moyen de le garantir.
Cela fait lAdmiral de Suéde fait approcher fa flotte , 6i à
pleines voiles attaque les nauires de Thomas , en prend
plufieurs , &met lerelte en fuite. Thomas mené vers
Goliauc Roy de Suedcjau bout de quelques iours fut , à
caufe de fa cruauté liifmentiojinse ^ pendu & dUanglé
àvn
^ mémorables, 693
à vn chefiie.f» ce mej'mc liitre.
L'an mil cinq cens loixante huid , lean Ooncît,
nommé le PreuollSpelle , Je plus cruel inftrument que
Je Duc (i'Alue iceult mettre en o-nure , conuaincu tic
plufieuriconfufions , irem d'auon- fait mourir pluHeurs
perlbnnes innocentes , fous noms empruntez 3 reb/ché
des prif)nnicrs moyennant bonnes fomtncs ik qu«nti-
té de deniers , prins argent des païens de quelques vns,
le/quels neantmoins il failbit cruellement mourir
puis après , fans rien rendre & reiHtucr , fut pendu &
elh ai 'gîé aux halles delà cour de Èrullèllcs , par com-
mandement du Duc d'Alue Ion maiftr^ , exterminant
celui qui auoit fait mourir plulîeurs milliers de per-
fbnne>> du fceu delon-dit maiilre , lequel i'cd vanté
d'aroir fait pafler par les mains -des bourreaux plus de
dixlnii(!:t mil hommes de compte fait. l'/j/^o/re des pays bas,
'Volume T.b'we 1.
Il y auoit Tan mil cinq cens quatre vingts & vnzejau
pays de Brabant vn preuolt des Marcfchaux nommé Daii-
ckart , lequel elfant au ièruice de* Eftats fut prins par les
E/^agnols. Pour fe racheter &deliurer de leur violen-
ce j il promit faire merueilles innumerables pour le Roy
d'Efpagne. De fait ayant obtenu nouuelle commiflîoii
ilpouriuiuitfort rudement \qs aduahturiers des Eftats.
Non content dequoy , tous les gens-d'armes & piétons
d'ictux^qui alloyent à la guerre, ou ccrchoyent proye par
Ja rufe & adrefle des armes > tUoyent cruellement eftran-
glez ou bruflez vifs par (on commandement , fans refpeà
d'aucunjni acception de rançon. Tel comportement le
rendit fî odieux , que les folJats des Eftats iurerentû
mort, s'ils pouuoycnt vne fois le tenir en leur puiflance &
domination. Ils le cheualerent (î dextrement & diligem-
mentjqu'ils l'attrapèrent en vne embufcade dreflee hors la
ville de Liere en la proui ncc de Brabant , ronziefme iour
du mois de Dcceml3re5au mefine an mil cinq cens quatre
vingts & vnze, taillèrent & mirenten pièces trente de fès
archers, & gaignerent leurs cheuaux & armes. Quant à ce
Prcuoft tombé vif entre Jeurs mains , ils lui coupcrcht
Xx 5
6'94 Hijloir es admirables
Je nez & \cs deux oreille^.'puii l'ayant longuement trai né
deuant le yeux de ch<icun,à Ja qucLe d'vn chcual , finale-
ment le bruflerent vif à m petir feu de paille.
Le femblable aduint en Fiindres i vn autre Prcuofl
nommé Roederocdejc'clî à dire en latigùe Françoii'JjVe: -
ge lougejcquel ayant elle tué en combattant , Ton Lieu-
tenant fut prins & bru/li vif dedans vn arbre creux à petit
feu de paille. La mefme hijlokre , au deuxiefiue njolume > Hure
fixiepne.
Ce petit nombre d'exemples fera refch^intiJlon d'vn
trefgand nombre d'hifloires contenues es volumes lui-
uansjoù les terribles deportemens de plufieurs endiucis
cndroi«!is du monde, & les admirables lugemens de Dieu
fur eux ne fèrôt point oubliez. Il nous à lemblé Uon de rc-
prelènter â beaucoup de repriiès les merueilles denoOre
temps pour donner tant plus de contentement & d'arreli
i ia pcn/èc du Leûeur ami de pieté & de droicture.
CFRIOSITE mefchante & detc-
fiable chafiiee.
LE s ignorans penfent que tout ce qu'ils oyent racon-
ter des Sorciers & magiciens Toit imponlble. hcs a-*
theiftes & ceux qui contrefont les lçauan« ne veulent pas
confe/Ter ce qu'ils voyentjne fjachans dire la caulèjaiin de
nelemblerig'iorant.Les Sorciers (& Magiciens)s'en mo-»
'^uent pour deux raifbns principalement. L'vnejpour ofter
Topinion qu'ils foycnt du nonibre:L'autre , pour eftablir
TPiY ce moyen le règne de Satan. Les fols &. curieux en
veulent faire l'eflay : comme il auint en Italie en la ville
de Corne ^ n'a pas longtemps, ainfi que recite Sylueftre
Prieras j que i'Orficial & l'Inquifiteur delà foy, ayans
grand nombre de iorciereî qu'ils tenoyçnt en prilbn S &
ne
CJr memorahleS'. 6^95
ne pouuans crone Ils choies eliranges qu'elles difoy-
ent 3 en voulurent fiiie la preiiue, 5c le firent mènera
la/ynagoguc par Wnc des lorcieres ; ik le tenans vn p. u
ai'efcart, virenttoutes les abominations , hommages
au Diablcjdaniesjcopulations. En fin le Diable, qui rai-
iôit iemblant de ne les auoir pas veu , les baric tant qu'ils
en moururent qumze iours après. /.Bo^m en U préface de fa
Demonomanie.
Tay apris du fieur de Noyalles Abbé de l'Iile 3 depuis
ambafladeur à ConftanrinopIe,& d'vr, gentil-homme Po-
lonoisjt^ommé Pruiriski , qui a eflé ambafladeur en Fran-
ce,que Tvn des grands rois de la Chreftienté, voulant f^a-
uoir Tifllië de Ton eltatjfit venir vn lacopin nec.romarticn,
Jequel dit la Mefie^apres auoir conlàcrc l'oftie fie trancher
Ja teiie à vn ieune enfant de dix ans premier- né^qui eftoic
préparé pour ceft efFett , 8c fit mettre fa tefte fur Toftie:
puis difant certaines paroles & vlànt de characteres qu'il
n'eft belbin de T^auoir, demanda ce qu'il vouloir. La tefte
ne refpondit que ce> deux mots rimpatior. Et auilî roft
Je Roy entra en furicjcriant ians fin , Oilez moy cclie tc-
ihj'&c mourut amfi eiiragé. Celte hjiloire eil teni'e pour
certaine & indubitable en tout le ro)aume3où la cholè efl
aduenue^combien q'i'il n'y euit que cinqperlbnnes quand
Ja chofe fut faite. Ls mefme ai* iMare defu Dcmoii-omAnicy
chupitre ?.
On trouuevnehiftoire qui approche de c île ci , de
Theodoric Roy des Goths , lequel après aufoir fiit tran-
cher la tcfte à Symmachus, quand on lui feruit à t?''-'^ '^*
tefteded'vn gros poiflbn , illui femb'i voi' '*'* ^^^^- "^
Symmachus , & entrant en furie mou '^•'^ t)'^" ^"" ^■*
près. S'il eft ainfi qui peut douter q «e r)Je" i^'-^'f ""«^^ en
la bouche de ceft enfant occis f-iui ne fçauoit ni Grec ni
latin ) ces deux mots ? v.-u la ytn^tmcQ fou daine
qu'il a prife d'vne merdianceté fi exécrable ! Si ce n'c-
floit qu'on vouluft dire queTeiprit ou l'ange de 1 enfanc
parla , & tourmenta le Roy pour fe venger d'vn tel ou-
trage. Car plus le fana eft Innocent , plus la vengeance
eft grande "P" q"oy ^^ ?^^^ ^^^^ ^"^ impiété exé-
crable . ^»- prendre rn periènne innocentées^ mafle , , fc
Xx 4.
6^6 HîBoires admirables
premier ne (que Dieu voulojt en (à loy lui eflre fànftifié)
& le làcrificrau diable, pour fcujoir le*, chofes futures.
Qui n'eii pas vne impieté nouuclle , mais bien fort an-
cienne, comme a nette Elias Leuite*; , qui appelle cela en
fbn hcbrieu Tcraphim. Vray ell; qu'i 1 dit qu'on niettoit
Ja tefte fànglante fur '^ne lame d'or , aucc le nom du Dx-
mon3& quelques charadercs, puis on Tadoroit, en di/ànt
certains mots , qu'il ne faut reciter ni e/crire. Orefî-il
befoin qu'on fçache combien eil grande l'impiété de ces
hommes damnables pour s'en garder foigneufèmcntr ha
mefme. »
Il y a vn gentil-homme en Picardie auprès deVilliers-
ccfteretSjqtii auoit vn efprit familier en vn aneau , duquel
il'vouloit di/pofer à Ton plaifir ', & l'afleruir comme vn ef-
claue, l'ayant acheté bien cher d'vn Efpapnol : & d'autant
qu'illui ;nentoitIeplus fouuentjil iettal'aneau dedans le
feUjpeniànt y ietter l'c/prit aufîl^comme Ci cela fe pouuoit
enclorre. Depuis il deuint furieux & tourmenté du dia-
ble. L^ mefme.
Vn pauure homme demeurant à Loches, aperceuant
que la femme s'abièntoit la nuict parfois, & ncreue-
lioir que long temps après la minuid : & fur ce qu'elle
difoitalierà ies neccllitez , & tantofl chez Ta voifine
pour faire lalefTiue, & que fon mati l'euft conuaincue
de menrerie, ay^nt finiflre opinion qu'elle fe def^
bâuchaft, menaça ds la tuer, fi elle ne lui difoitoù
^^'-^ alloit. Si voyant en danger elle lui dit la vérité:
&, po«. çn faire preuuc , (i vous voulez , dit-elle,
vous y viei.i.ez: & lui bailla de l'onguent , duquel
ils fe graiilerent L-i,j5 deux: & après quelques parole"^.
Je diable les tranfpori». de Loche:» aux Landes de Bour^
deatix , qui font pour U moins k quinze iournees
de Loches. L'homme fe voyant en la compagnie de
grand nombre de forciers & forcieres , qu'il ne co-
noiflbit point , & de diable? hydeux à voir , en figure
humaine , fe print à dire , Mon Dieu , où fommes nous?
Aufîltoftlacompa-nie difparut, Ot r^ ttouuatout nud,
errant tout Icul par les champs , iufques au x«v-,tin , qu'il
tiouua quelques payfans qui l'adreflerent au cilcmin.
Eftanc
cf mémorables, <^97
Hlîantde retour a Loches, li s'en va droit au iuge ciim
nelj lequel ayant ouy l'Iiiftoire fit prendre la femme , qu
conteflade poincl en poinà tout ce que nous auons dit,
& fans contrainte reconut la taute. L; mefne , en ce r.liure
Il le trouua anfll de noftre temps à Lyon vne damoifel-
le^qui fe Icua la nuid,& allumant de la chandelle print v-
ne boite, Se s'oignit, puis auec quelques paroles fut tranl-
portee. Son paillard eftant couché auec eile^voyant iouër
cefte tragédie prend la chandelle & cerclie partout. Ne
Ja trouvant point, nins leulement la boite degraiflcjpar
curiofice de l^auoir h force de l'onguent , îît: comme ila-
uoit veu faire, & loudain fut aulîi traniporte , & le trouua
au pays de Lorraine r.uec la compagnie des lorciers, où
il eut frayeur. Mais fi toîl qu'il eut appelle Dieu a Ton
aide, toute la compagnie difparut, & lui ie trouua feul
tout nud, qui s'en retourna à LyoniOÙ il accu fa cef^e for-
ciere, laquelle confefla & fut condamnée à eftre bru/lee.
Lu mefme,
II en print autant n'a pas long temps à vn gentil-hom-
. me près de Melun, qui fut induit par fon mulnier, & auiïî
par curiofîté alla à la compagnie deforciers. Et d'autmt
qu'il trembloit de peur, encores qu'il n'appellaft point
Dieu , fi eft-ce que le diable dit alors à haute voix , Qui
a peur ici ? Le gentil-homme voulant fe retirer, tou-
te la compagnie difparut. Eftant de retour il voulut ac-
cuferle Ibrcier, lequel cnfut aduerti , & s'enfuit, ii
mefme,
Paul Grilland , lurifco'nfulte Italien , efcrit que l'an
I5z5. auprès de Rome y eutvnpayfan, lequel ayant veu
A femme fegraiffer toute nue lanuift, puis ne la trou-
uantplusen (àmaifon , le iour fuiuant il empoigne vii
bailon , &ne cefla de frapper , iulques a ce qu'elle eufl
confefîé vericc r ce qu'elle fit, requérant pardon. Le mari
lui pardonna, à la charge qu'elle le meneroitenl'aflcm-
blee qu'elle diibit. Leiour fyiuantla itu^mQÏe. fit oin-
dre delà graifle qu'elle auoit, &.Te trouuerent tous deux
allant à cefte afiemb'ee chacun fur vn bouc,-, qui alloit
bien légèrement. Mais la femme adueitit l'iioiame de (k.
L
^9^ Hijloires admirables
garder tîe nommer Dcii , fi ce n'clloit par mocquerie,ou
en lebla/phcmanr. Se voyant en J'aflemblee la femme le
fie tenir vn peniretcarr , pourvoir tout cequi feferoit,
iulqucsàce qu'elle euil faitla reuerencc auchef del'al-
femblcc, lequel elloit pompcuTement habillé en prince,
& acompagné dVnc grande multitude d'hommes & de
femmes, qui tous hent hommage à ce maillre. Puis
il apperceut après \q% reuerences qu'on Ht vne danfe en
rond , \zs faces tournées hors le rondeau , (ans fe voir.
La danfe finie , les tables furent couuertes de pluficurs
viandes. Alors la femme fit aprocher Ton mari , pour
faire la reuerence au Prince: puis il /ê mit i table auec
les autres , & voyant que les viandes n'eftoyent pomt Ta-
lées, & qu'il n'y auoit point de Tel fur les tables , il crii
tant qu'on lui apporta du felj comme il lui fèmbla à voir,
& deuant que lauoir goufté dit , Or loué foit DieUjpuis
que le fèl eft venu. A ces raots foudain tout difparut
éc perlbnnes, & viandes , & tables, & demeura feul t<fuc
îiud ayant grand froid , nef^achant où il eltoir. Le iour
venu il trouua des bergers , aufquels il en demanda nou-
velles, qui lui dirent qu*il eftoiten la comté de Bene-
uent, àcent mil loin de Rome. Ainfi il fut contramt
mendier pain & habits : arriuant au huicliefine iour en
ià mailbn j fort maigre & desfait. Il alla acculer fa fem-
ine, laquelle fut prife , & en accufa d'autres, qui furent
bruflees toutes viues , après auoir confeflé la vérité. Uk
tnef/ne.
Le mefme auteur recite encore q'j*il aduint en l'an i$5$.
«^uVneieune fille eîi la duché dcSpolettefe laiflà condui-
re par vne vieille f )rciere en raflemblee , où s'e ftonnant
de voir telle compagnie, elle s'efcria , Dieu bénit, qu'efi:-
ceciPElle n'eulipas C\ toft dit ces paroles, que tout s'efua**
•nouit. Au matin la pauure fille fut trouuce par vn pay/àn,
auquel elle conta route l'hifioire , qui depuis la renuoya
cnibnp-^ys,oùellea:cura la forciercqui fut bruflce tou-
te viue.£:» celiure ^ chupltrt,
Vn Eipagnol, homme de lettres, eut foupçon que cer-
tain fienvoifincftoit forcier. De grand dcfir qu'il eut
d*en /j^auoir la venté, il s*acointe de lui, procédant en
tt^Ue
^ mémorables, 6^^
tdie forte qu'il deicouurjtlinaicment Jcfccrct. Le lor-
cier de Ja en auant Je fohcita de prendre ce pgirti , à
qijoy l'autre , curieux , p>-efta loreille , & piindrent
iour pour lé trouuer en J'anèmblec. La nuid de ce iour
venue j ieforciermeine Ton compagnon par certaines
jnontagnes & vallées qu'il n'auoit onqucs \cu'és , & lui
fenibla qu'en peu de temps iJsauoyent fait beaucoup de
chemin. Puis enrrans en vn champ tour cnuironné de
montages ^ il vid erand nombre dliommes & de fem-
mes qui i'amalîoyenr là , & vindrcnt tous à lui, menans
grand fefts:, & Je remercians de ce qu'il auoit vouîu fe
mettre de leur bande , lui donnais à entendre qu'il (èroic
le plus heureux & le plus content du monde. Il y auoit
?u milieu de ce champ vn thi one fort iiaut & ibmptueux,
& au milieu d'iceluivn bouc forthideux & laid. Lorsà
certaine heure de la nuicl , tous ceux & celles de l'afiem-
bîee montoyent par les degrez de ce thronc , chacun al-
Jant baifèrce bouc au derrière. L'ElpagnoI curieux o-
yantcefte abomination il grande , qi;oi ou'auerti par le
lorcier de ce qu'il deuoit faire > ne peut patienter d'auan-
tage 3 ainsiemitâ crier & appelleràpleine voixDieu à
ion aide. A l'inftanr s'eOeue vn bruit & tonnerre il ter-
rible 3 qu'il fembloit que le c'itl & la terre deuJfenta-
byliner ; de manière que le curieux demeura comme
hebete' & infenie. Tant qu'il fut en cel^ eitat , il n'erten-
dit rien de ce qui fc fit. Bftant retourné en fbn fens il
eftoit defîa iour , & le trouua en certaines montagnes
fort afpres , tant rompu & moulu , qu'il lui fembloit n'a-
uoir os fur fà per/bnne , qui fuft lain & entier. Et vou-
lant fjauoir en quel endroit il eftoit , defcendit au plat
pays 3 où il trouua des gens tant dift'erens de ceuxd'El-
pagne,qu'il n'entendoit pas leur lang<îge , & ne fpuoit
que faire finon demander par (ignes,qu'ils lui fubuinHent.
Aiufî cheminant tout feul il tira vers l'OccfJent , &tra-
cafià trois ans auât que pouuoir regaigner l'Espagne, auec
vne ir.rinitéde peines & dangers, tftant en là maifon 3 il
deicouurit tout ce que fa curiofiré lui auoit fait conoi-
ftre & voir , dont iuftice s'enfuiuit à\i forcier & d'autres
700 Htjloires admirables
de la compagnie. Celui de c|Lii ic tien cerccir^maiurea-
uoir vc»<^ Jeu lepioces qui en auoit cft'é fait. ,^:Torque-
m.iiie en lu ^.ioitrnccilejon Hexurnerov.
DELA Tdxnzcretéx,
o
ARchias tyrnn de Thebes^perdit h\ vie/es amis3& vne
rresfortc place , pour auoir délayé d'ouurir eftant
ataoJcvnpacquet où il eftoitaucrti de Tentreprife faite
fur lui. Du temps de nos pères , moniîeur de Boutieres
fuida perdre Turin 5pour , eilant en bonne compagnie à
ioupper y auoirreniisà lire vn aduertifl'ement qu'on lui
donnoitdestrahilbnsquife drefloyent contre celle vil'e
où il comniandoir. Al. de MontAigne au i.lture defes Ejftis
(hipitre 4.
Vn grand feigneur en ce royaume, auerti de diucrs en-
droits près & Join qu'il ù retiraft de Paris , où il eftoit 011
trclgranddangerde (à pcrfonne , & pour auoir diffère de
croire iès amis , y laifla la vie aucc vn trelgrand nombres
d'autres, au mois d'Aouft 1572. Viijhirc de noflre temps.
Vn autre grand feigncur auerti de roas endroits & de-
dans'& dehors Je Royaume , que les Ellats où il elioit l'an
3586. fe fîniroyent par vne langlantc tragédie: le iour auant
la mortjcomme il ic mettoit à tab!e pour difiier^trouua vn
billet lous ia feru*iette , dedans lequel cftoit efcrit qu'il fe
donnafl gardejqu'on lui iouëroit vn mauuais tour. En ce
mefine billet il efcriuit de Ca main ces deux mots. On n'o-
feroir,&le ietta ibiis h table.H n'y auoit autre bruit par les
ElhtSjfînon qucrexecutiôfe feioir vn iour de S.Thomaf.
Xcs auis en venoyét de Rome &dErpagiie:les Allrologues
farcifî'oyétleuis almanachsde ces menaces. La veille mef-
me de Ton malheur, il fut affeurc par vn autre grâd fcigneur
ficn cou/în, qu'on cntreprendroit le lendemain de les faire
mourir.Tât s'en falut que cela le fit pêfer a là feuretéjqu'il
Taueugla du tout 3 & s'oublia foi-mefme : dont s'cnfuiuit
toft
^ w(nior allés. 701
^oft^pres^an:lcrl & in^teirc turtlle€lin ciiida ccnii mer
la France. £mre ^.de thijione des dermen tïoiibles de Vrance,
MVnfter raconte , & dit auoir npris de Demetrius
ambaflàdeur Molcouite à Rome , que l'an i S.^o. vu
ouiïiàuua la vie à certain payfan es gisndes & profondes
forelh de Mo/couie:ce qui aujnt comme s'enfuit. Vn vil-
lageois allant par les forefis pour tirer de la cire & du
miel 3 pource qu'en ces pays-là les abeill.es font leur miel
dedans des arbres creux qui fe trouuent en grand nombre
en icelles forelbjau profit du premier qui peut le trouueu
& emporter : fe tenant les iambes efquarquillces dedans
vn arbre creuxjpour en tirer hs rayons , le bois qui elîoit
fous Tes pieds fe rompit. Ainfî le villageois tomba de-
bout de Ton long dedans le creux de l'arbre > tellement
qu'il Ce trouua dedans le miel & la cire iufques à la gorge,
n'ayant moyen ni poiwoir aucun de s'en defpeftrer , ni
efpoir dcfecours quelconque 3 attendu que perfonne p^
pâfîbit parla 3 que fort rarement , qui peuft ouyrfès
doléances : y ayant trcmps deux jours , Dieu pitoy-.
able voulut qu'vn ours (entant qu^il y auoit du miel en
ceft arbre s'en approcha 3 puis grimpa au haut , & deA
cendit iufques où eftoit le villageois , de la veuë duquel il
eut peur & voulut remonter.Mais le pauure homme l'em-
poigne par vn pied de derrière auec les deux mains 3 & Je
tint fi fermementjque l'ours grauiffànt de toute fà force le
long du creuxjletraina & ietta hors del'arbrcdu haut du-
quel ils tombèrent à bas Tvn deflus l'autre , fans fè faire
mal.L'cftonnement fut telen tous deux que l'vn print ion
chemin d'vn colféjl'autre de l'autreafans que Tours offen-
01t le payfàn. Louys Gnyon att 5. Uure de fa diuerfci Ufjns^
chapitre 4.
i'An niij cinq cens trente deux , Solyraan, lù.tan dç
joi Hijlûires admirables
Turcs cftant venu en Hongrie aucc vne tres-puiflante ar-
iT>ec,& arreile au lîei^e d'vnc vjlictre nommée Gonze , en
Jaquellc commaiuloitvn gentil-homme Hun^: ois nom-
me Nicolas lurcliits , aucc cent hommes feuicmcnt i les
choies furent conduites tellement par la prouidence de
DieUjCiue comme hs afficgez fu/lenr recrcu;* & du tout a-
batus du trauaiJ , n'attcndans autre fin que d'eftre cruelle-
ment e/^orge7,lcs vieillards^les femmes , tk les enfans , fe
mirent ^ crier 6c e/leuer leur voix confu/es enlèmble 3 de
telle manière , que les Turcs eftimans que la place full
pleine de gens de girerre, fe retirèrent du fo/îe qu'ils auo-
yentdefiagaignc.Finalement on vintà parlementer 3 ou
D ieu donna telle adrcfle & grâce à Nicolas lurellits , que
Hebraim BaiTa lui commit le gouuei nemcnt & la garde de
la place au nom de Solyman : & ainfi le fiegc fut Icuc^à la
grande ioye des afllegez.H/jl.^e Hongrie.
Auinten laDuche de Rourgorgne l'an '^72. près
de Saulieu ce qui s'enTuit. Deux petites filles iœurs , gar- .
doyent les moutons es champs : l'ailnee aagee d'enniron
douze i treize ans , l'autre de fix. Vn loup luruient oui
fe rue lur vne brebis , & la charge fiir fon col pour l'em-
porter. Les filles courent après , & font tant qu'elles lui
arrachent Ta proye. Ce furieux animal Te voyant fru-
ftré , empoigne par le f:iut du corps la plus ieune de Tes
fœurs 3 & tache de gaigner chemin auec. L aifnee le fuit
de presjcrianttoufiours au loup Si. au fecours. Arriuant
près de certaine haye eipaifle , comme le loup efiayoit de
la franchir, cefle fille courageufe l'empoigne par vne iam-
bej& (comme Dieu voulut)s*auiiànt d'vn couileau qu'el-
le portoir^ainfi qu'ordinairement font les bergeresjle tirç,
le fourre en la gorge ouuerte du loup, lequel auoit quitté
la fillette , & le tranfperce tellement qu'il meurt de ce
coup fur la haye. Quelques payfans acourus au cri ef-
froyable de ces petites filles , emportèrent celle qui auoit
rfté fort oflenlèe des dents du loup auec la brebis bleflee,
& le loup mort , iiiiuis de la vaillante lœur , en certain
chafteau apartenant à la Dame de Sipiere, où la fillette &
la brebis furent pcnTces & guericSjauec rtmcrciemens de
chalcun à Dieu de celte dcliurance. Extra^ de mes me-
mêircs.
L'ail
^ mémorables. 703
L'an 1583. les foJdats de lagarniion de Bonne, ville affile
^urIeRh:n, appartenantes l'Archeiielque de Cologne,
corrompus par argentjliurerent leurs chefs & la place e'$
mains d'Erneft Duc de Bauiere nouuenu Eledeur, auquel
elle eft demeurée depuis , connue aufli Tarcheuelché , le
vieil Eledeur Gebhard Truchies en ayant efté depof^
/èdé par force, pource qu'il auoit eipouie feanmcde la
maiion dts Comtes de Mansfeld. La ville de Bonne ainfî
prinièjdeux des principaux de la ville furent exécutez par
iufticej& decapitez.il y auoit vn autre notable perfbnna-
fe,nommé lean de Northufe, homme paifible , mais fort
ay pour fa pieté & érudition, lequel ayant elle ccrché &
prinsjfut condamné a eilre noyé dans le Rhin:à quoi il fê
refblutde franc couragcvk aufli peu efmeu qu*en profpe-
rité,s'efiouyfl'ant en la bonne confcience. Eflant mené fur
vn bafteau & deipouillé de fes veflemens , excepté le haut
& le bas de chauffes & vn fîmple pourpoint, le bourreau
lui lie fermement \qs pieds & les mains de fortes cordes,
& le lette au courant de l'eau où il coule en fond, s'eflant
recommandé à Dieu, Seigneur de fà vie. Mais par vn mo-
yen du tout inconu à la ùg^iÏQ & puilfance humaine, fes
ennemis qui l'auoyent ainfî traité , & penfbyent qu'il fufl
demeuré pour palture aux poiffons,s'eftans retirez,il fèn-
tit ks liens desfaits & fbn corps efîre doucement poufle
à ra.utre riue du Rhin , qui ei^ fort large en ces endroits-
là,où fe trouuât fans cordages,ni aux mains ni aux pieds>
ilgaignalebord, & fè retira fans eftrepourfuiui, en lieu
fèurja elle veu de plufîeurs,vefcu quelques années depuis,
& ferui de tefmoin que la main de rÈtcrnel n'eil point
racourcie>qu'il ne puif]è fauuer, qui, quand, & comme il
lui phk.Hifioirede nojire tcfnps.
Les galères Eipagnoki ayans le 29. iour deluin 1600.
par la commodité du calme en mer , attaqué la fîotte des
Elhtspresdel'ElclufeenFJandies, lèvent s'eftantrele-
ué , furent fi rudement canonnees que force leur fut de
fe retirer plus vifle qu'elles n'efioyent defmarees , auec
grand* perte de gens, principalement en l'vnc, qui fut
tdlementcoufue de coups déballes, que fans Je grand
iieu*ir qui y fut fait à puifer l'eau elle couloit en tga^»
704 Hijlotres admtrabUi
Beaucoup dMiommcs y furtnt elcarbouillez.: car on voy-
oitJelàng delcouJcr par les gouJotb enia nitr ,de ceux
qui turent tuez îur le tillac. Ei qui tut cholè ellrange , vn
format Turc clKmt en Ja rame eut ià cadene emportée
d'vn.coupdecanonjluireibu.UcuLmcntJcs iartieresaux
iambevj, & quelque bout de la cliaiuc , tans tourestoi.s en
auoirclté oftenlc. Tellement que le voyant defchamé,
pourlè mettre en liberté, ou mourir dVn beau coup
Ccommc telles pauures gens ibuhuitent la mort mille fois
Jeiour,aimans mieux périr vne fois que languir ainli ) U
fè ietta dedans la mer , & lé mit à nager vers les nauires
de guerre des Elhts , de/quelles du commencement lui
fut tirée quelque harquebuzade. Mais comme il montra
lus iartieres & le bout de la chaine^ elhnt reconu pour vn
forçat efchappé , il fut iccouru , tiré de l'vne de c^s na-
uires, bien traité^ & depuis fit bon ièruice aux Eilats , de-
dans leur garlere de Dordrech». Hiftoire des i>ays bj,s,Ui{.8,
DELVGE dangereux.
LE famedi fécond iour de Décembre Tan \S7^- furies
onze heures auant la minuict, le peuple de la siW^
de Lyon eHant en ion repos , & ne le doutant de rien , le
Rholiie 3 i;euue rapide j s'enfla & de^borda tout a coup'
de telle impetuofité , qu'il couurit en vn inftant le plar.
pays , & vint a emplir les maifons de la ville au grand
tltonncment de tous.Or depuis les onze heures de nuiA
du famedi iufques à trois heures après midi le lundi lui-
liant le Rhoûie ne cella de s'eliendre , eflargir & croi-
ftre, faifant ^ts rauages incroyables. La calamité des
payfans, en la i uine de leurs mailbns , en la perte de leurs j
prouifioni & beftail, fut incÛimable. Quunt au domma- J
£c qu'en recïut la ville il fut indicible. Lors que l'eau *
Commença auec vn bruit merueill«ux à gaigner ^e bas.
^mémorables, 70 j
on voyoît le peuple courir efpcrduement deçà delà
pour fe fauuerjes vns vers la môcagne, les autres de rue
en rué, gaignant toufioursle haut, laiirans leurs bouti-
ques, inaifons, & châbrcs à la difcretion de Tindilcret e-
lemêt,qui creufoitles édifices ni2l-aflcurez,& les faifoic
tomber fur les pcrfonnes , ou eftoufïbit ceux & celles
quines'eiloyent pas elueillez d'heure pour fefauuer.
D'auantageia Saône, riuierc ordinairement coye, s'ef^
mouuant lors extraordinairement ( comme elle a fait
au mois de Septembre T602. de façon fort particulière)
fe vintioindre au Kholiie en vn endroit nommé la pla-
' ce de Confort. Alors le Rhofne fe rendit plus terrible>
telle rencontre en ceft endroit n*ayant iamais efté veuë.
Les rumes des baftimcns redoublèrent, comme aufïî les
fubmerfions des perfonncs , & le naufrage dVne infinité
de biens. Le pont du Rhofne, qu'on dit auoir deux cens
cinquante nx toifes de longueur , fut tellement fccoué
& csbranlé, que quelques arches d'icclui s'en allèrent à
val l'eau, hcs plus grandes ruines furent au bourg de
la Guillottiere , auquel > pour eftrele plus proche du
pont , ne fe trouua fondement fi ferme qui ne full: efio-
ché parce violcntrauage:& n'y eut maiibn enccfaux-
bourg fpacieux qui en fuft garantie : de manière que ce
faux-bourg , parauant beau & bien peuplé, & qu'on
pouuoitappeller le grand magazm de fréquent com-
merce , lembloit après ce déluge vn cadaure de viiie,
Tompu,ruiné,di{]:pé. Les belles maifo ns, lieux de plai-
fance,& baftimcns cxcellcns , qui cmbelifloycnt la plaî
ne, furent démolis & defolez : infinis metrliles empor-
tez par la fureur de rcau,à vne demie lieue loin. G- Pa-
rudin es mcwoires de Lyon, Uu. 5. chip. 42. Ce déluge feiil-
blaeftre le prefagc de fureurs FrancoifeSjCn l'an i57z.
^VTRES déluges-
SVr la fin de l'an mil cinq cens trente vn,les plus loin-
taines côtrecs des terres du pais bas afTifcs fur la mer,
durent merueilleurcmeiu endommagées par vn foudaiû
7 0 <? Hilloirês admirahtcs
cicsbord de la mer : laquelle ayant rompu des dique? &'
leuees ( anciennement faites, &: entretenues logrnelk-
nient pour arrcftcr & rcpouficr les flots d'icelle) s'efpan-
cha fi auant que quelques bourgs & villages de Hol-
lande & Zeelnnde en furentengloutis. Cela auint le fé-
cond lourde Décembre, & continua iufques au cin-
quiefme. Peu auparauant il auoit tonné & pieu cftran-
«ementjla terre auoit tréblé plufieurs fois , & y auoit eu
des horribles tourbillons de vents. Altmjïer,^ païUIiue.
Vn tépsaefté que rifle de ZuidbeuelandenZeelandc
auoit vingtlieuès de circuit: mais à prefent , à caufe des
tempeftes& inondations delà mer, item pour le flus Se
reflus continuel de l'Efcauld , flcuue renommé , qui en
ronge toujours quelque partie , elle ell diminuée pref-
ques de la moitié. En cefte Ifle y auoit iadis trois villes,la
principale defquelles fe nommoit Borrule,qui fut noyée
auec tout le pays voifin , Tan mil cinq cens trente deux.
Et ce quartier depays s'appelloit la feigneurie de Borfu-
le. En ce mefme temps Romerfual \ï\\c de cefte Ifle de
Zuidbeueland fut feparee de terre ferme & réduc coni-
uie Ifle,cftant à toutes heures contrainte de fe deftendre
auec grand trauail eftonncment,contre la mer ÔcTEl-
cauld. Louys Guichardin en ladtfcriptioyi da pays bus*
Le fécond iour de Nouembre l'an 1570. il y eut vn
grand & terrible déluge d'eaux en la Frife Orientale,
parle desbordcmentde la mer , ce qui fut caufe d'vn
grand degaft par toute la contrée , & d'vne perte inefli-
mablede beftail & de biens outre la mort d'vne infini-
té' deperfonnes.Surlefoir,leroleiire couchant en beau,
lans nuages , les vents impétueux s'efleuerent qui firent
vn merueilleux bruit enl'air , fur terre & par les forefts.
Le ciel fe chargea foudain de nuées efpaiifes & fi noi-
res, que le refl:c du iour difparut en vn moment. Sur-
uint en cefte foudaineobfcuritévne rauincdepluyes &:
orefles. Lamerefmeuë rompit toutes les diques , &
paiiant par dcflus couurit les campagnes de Ci grand
randon que les arbres des forefts & des champs en fu-
rent defracincr & renuerfez : dont plufieurs perdirent
la vie, lefquelx auoicnt graui au hauc des arbres,penfans
s'yfauuer.
^ mémorables, * yo-f
s*y fauÔfer.îl y en eutquifoufleucrcnt leurs femme;. 3c
!eur.senfaiis,ouilsles lioyent& atcachoyent , de peur
c^u'ils ne tombaflent: mais c'elloit vne mifere des pius e-
ilranges que l'on fçauroit imaginer, deles voir rrebuf-
cher dedans les eaux auec leurs arbres , que 1 on voyoit
flotter d'vn cofté, les cftables pleines de beftail d'autre,
&en mains endroits ks vaches, bœufs , tawreaux Sç che-
uaux,quinepouuanstrouucr .1 napc aucun bord eftoy-
cnt englotis des vagues de la mer. Les meftairies & vil-
lages en furc>nt du tout ruinez &dellruirs. Quant a I2
ville d'Embde , ^(\\Çt fur la mer, ayant Tvn des beaux
ponts de rEurope,elle eftoit toute pleine d'eau, & le flus-
d'icelle fut fi violent qu'il cnfonçoit les portes des mai-
fons , & fe faifoit ouuerturc partout. Il y eut beaucoup
demaifons ruinées de ioïiAtn comble, les plus balles
furent entièrement rcnuerfees^auec perte de grâd nonl-
tbre deperfonnes noyées. Ceux qui demeuroyent es mai-
fons haut-eflcuees furent garantis 3 en telle forte toutes-
fois, que tels édifices furent merueilleufement esbranlés.
On n'entendoic pres&loinquc cris piteux &lamenta-
|.l)lesdepauures gens qui periffoycnr : itenj d'hcmm.es>
■femmes & enfans inuoquansDieu, pour elhe preferuez
de naufrage. L'efpouurinte fut incroyable toute celle
nuid-là, iointe auec le péril 1 neui table , la defolarion
mcrucilleufe,&; outre la mort de tant de perfoimcs , il y
eut perte inellimable déroutes fortes de biens &debe-
ftai!. La tempère pouifa far les campagnes de Frift des
I • grands vaifleaux q\ii voguoven- p Jr d^^lTus les toicls des
iiiaifons & les arbres.Outrcpliis la terre fut tellement a-
breuuce de ces er;ux mannes, qu'elle demeura roraleméc
I fterile l'année fumante, &iescrbres deneurez debout
j produi/irent leurs fruifts làle7,£r; U mejhe difcn^tiotr.
DES I R tnfume chafiié.
l
Ay-conu vn perioni.age , lequel me defcouurit vn
fois tju'il cftoic fore en peine À caulè d'vn cfpric qu^
Yy a
7o8 Hifloires admirables
icruiuoitj&reprcfeiuoit ilui en pluficurs formes : c'.
nui(fl le droit par le ncz,l'crueilloit , le battoir fouuent;,
&quoy qu'il le priait de laifFcr rcpofcr, il n'en vouloir
rien faire : & le tourmentoit fans ccfFclui difant , Com-
mande moi quelque chofe:& qu'il eftoit venu à Paris,
pcniant qu'il le deuil abandonner,ou qu'il y peuft trou-
uer remède à Ton mal , fous ombre dVn procès qu'il e-
ftoit venu foUicitcr.I'apperceu bien qu'il n'ofoit pas me
defcouurirtout. Lui demandant, quel profit il auoiten
de s'affuiettir à tel maifhe , il me dit qu'il penfoit paruc-
nir aux biens & honneurs, & fçauoir les choies cachées:
mais que i'efprit Tauoit toulîours abufe : que pour vnc
vérité il difoit trois menfonges, & ne l'aucitiamaisfceu
enrichir dVn double,ni faire iouir de celle qu'il aimoit,
principale occafion qui l'auoit iuduitâ l'inuoquer. Et
c[u'ilne lui auoitaprins les vertus des plantes, ni des
pierres, ni desfcienccsfccrettes, comme il efperoit,&
qu'il neluiparloitque de fc venger de fes ennemis , ou
faire quelque tour de fincfle & de mcfchanceté.Ie lui di
qu'il eftoit aife de fe desfaire d'vn tel mailf re ; & C\ toft
qu'ilviendroit, qu'il appellaft le nom de Dieu à fon ai-
de,& qu'il s'adonnall à leruir Dieu de bon cœur.Depuis
ic n'ay veu le pcrfonnage, ni peu fcauoir s'il s'eftoit re-
^QUXX.l.Bodin en fa Dejnonomainejtu.z.ch.^,
DISSOLVTIO NSfmies.
L*An mil cinq cens fcptantc,csioursqu'on appelle
gras, peuauantQu^arefme, quelques Comtes Ale-
mans fe trouuerent au chaftcau de Vvaldenbcrg : chez
Eberhard Comte de Hohenlo , où il ne fut que-
ftion que de célébrer les bacchanales , fclon la diflolu-
tion trop vfitee & fupporcee entre ceux qui deuU
fcnt auoir defpieça banni tels tyicés d'entr'eux.
Et pour donner du paffe-temps aux Dames & damoi-
felles qui eftoycnt au chafteau , vnc après foupee, les
fcigneurs & gentils-hommes firent voe mafquerade
de Faunes
cJr mémorables. 709
o'e ' Faunes couuerts de chemifes de lin acommodees
d*eftoupes collces clefliis aucc poix refîne & autre ma-
tière propre,& en tel equippage entrentcn lafalle à&s
clames à la clarté des torches, & commencent à gamba-
der & faire rire la compagnie c]ui s'amafTe toutàTen-
tour. Quelqu'vn ayant laifle cheoir en terre quelque
faueur, vn page de la troupe àç.s maiquez fe baifl'anc
pour la releuer,met le feu inopinément à fon habit d'c-
ftoupes. Criant à raide,le Compte Eberard penfelefc-
courir,& eft attrappé du feu. Les autres aco»rent autour
de lui pour le garantir, & font enuahis de la flamme.
Toute la compagnie tioublee,on court à vne grande cu-
uje en la fale^auparauant pleine d'eau :maistrouuee vui-
de,les valets courent ailleurs. L'vn apportant vne grande
feillc d'eau tombe à la porte,& verfe tout par jesdegrez.
Vn autre pour s'eftre trop chargé d'vn grand vaifleau
fuccombc auff fous le fais. On ne trouuc meilleur ni
plus prompt remède que defteindre le feu. à force de ve-
ftemens lettez fur ces pauures corps miferablement gril-
lez. Quelques vns efchapperent,ayans efté viuemenr at-
teints.Les aurres^nommenientle Comte Eberard, & fon
frère Albert, & Grégoire Comte de Tubinge, mouru-
rent au bout de quelques heures après, ieunes feigneurs
en la fie ur de le ur asge. Th. z uinger a:* l.tome de fon théâtre
de la "vie humaine-, uolume %diure fchiiefme. Paul itraile au,-^
io.hu.de rhiftoire de France recite vne prefque pareille
hiftoire auenuedu temps du Roy Charles V I. quie'
ftoit de la partie.
T>FE L.
LEs fîcurs de larnac & de la Chaftcgneraye , gentils-
hommes de nom ,& sVftans dcffiez pour certaines
paroles dites au preiudicc de l'honneur de Tvn, lefquel-
Ics auoyent attiré vn dcmcnti:lc Roy , en heu de pren-
dre la caufe en main pour iugcr pai auis de fon confcU
7i<5 Hijloires admirables
d(. tour le fait , & conrraind; c le coulpablc de faire raifon
àl'offerie, leur accorda le duel & combat ù outrance,
Ainfî donc ils coiripaiurcnt a S. Germain en L'aye près
de Parislc 16. iour de luil'et, où en p'-elence du Roy,
des PrinccSifei^neurs &courrirans,ilsvindrétaux mains,
larnac qu'on cllimoitle plusfoible , denouueau relcue
de maladie, mcfprilé & desfauonré,mit bas l'autre , à qui
deuant le combat chacun adiugcoitla vi<ftoire, & Icblc-
ça tellement qu'il en mourut bien toft après : au grand
regret du Koy^lequel défendit a celte occa/îon tout duel
& combat iîngulîer.MaisTous le legne de Tes fiJs Charles
IX.& Henri Ill.ceftc manière de s'ennctuer fut en vo-.
gue/ur tout entre les gentils-hommes t'rançois. ^^/iniur
les ^ hift.de France en la w de Henrf z.
Nous ne touchons point aux hirtoircs particulières &
prefques innombrables des duels en France depuis jo.
ans. C'cRaflezdedeplorernos mileres , & dire en va
mot que les vaillans hommes tuez en tels conflicls pou-
uoycnt faire maints bons Icruiccs à leur Prince & à leur
patrie,s'ils y fuflent referucz. Les uutres nations ne ion:
pas fi promtes aux armes, &l'on Içait de quelles céré-
monies elles vfent, quand il eilqucftion de dcfmefler
fquerelle^par celi extrême remède. Plufieurs le fouuît-
îient delapiudcncs de (juclqueschcf^dc guerre, pour
rcrciiir îeurs foldùis, qu'p tout propos eltoyent prclts .î
faire & à fe dtsraire à coups J'elpee. Nousnefaifon •■
point de foui. ai:s , ni ne propolons des confeils &at!-
uertiflemens à ceux fur qi:i Thonneur, lcdeuoir,la con-
fcience, leiuge & prince fouuerain de toutes creatuiev
ont quelque crédit 6i commandement. Il nous fuihc
leur propofcr vne hiftoiie des Turcs , afn qu'il la digè-
rent à leur bon loilîr , li quelqucsfnis illeur auicnt de
îalircSc d'ypenfer. Nouslatenons du feigncurdc Buf-
bcquc, excellent perlbnnnge , &ambafl"adeurdeplu-
iîeun» Empereurs modernes en Turquie. Voici ce qu'il
en dit,
l'ay parlé ci deuant de quelques exploits furies fron-
tières de Turquie. Cela me donne occasion de vous
diçe ce ijue les Turcs cflimeiu des duds j que Von
tient
(^mémorables. 711
tient entre nous pour tefmoignagcs de vaillance ^
grandeur de courage. En noftrc frontière de Hongrie y
auoir vn Sangiac ouCapitaine nomméArflambeg, hom-
me robufte & vaillant à merueilles. Vn autre Capitaine
voifin,appellé Velibeg, portant enuic à la valeur de ce-
lui-la, par trait de temp^ideuint Ton ennemi iuré, lui
drefla emburches,& fut bleffé. Ce Velibeg appelle par
lettres à le trouuer à Conftanrinople , ou pour celle a*
faire, ou pour autres, s'eftantprelenté au Diuan, qui eft
la chambre ou fallc du Confeil d'Iiftat , les Baflas lui
ayans demandé raifon dediuerfes chofcs , finalement
voulurent fçauoir comme il alloitde fa querelle auec
Arflambeg. Il leur fit vn long difcoursdes caufes, corn-
mencemens & progrès de la querelle , & de ce qui en
cftoit aducnu : puis pour draper fur fon ennemi , adiou-
fta qu'Arflambeg Tauoit furprins & bleffé : cequinç
fuft pas aduenu (dit-il ) fî Arflambeg fc fuit monftré tel
par effed que fon nom ( qui lignifie vn hon) porte:
attendu que ie n'ay iamais retufe de me battre auecques
lui , aii-15 Tay prouoqué & appelle plufîeurs fois au
combat d'homme à homme. Les Baffas indignez lui
dirent par la bouche du Vezir ouprefident du confeil:
As-tu bien ofe desfier ton compagnon , pour vousen-
tre-tuer ? N'yauoit il plus de Chreftiens contre qui tu
pcuffes t'efprouuer ? Lui&toy ^iucz aux gages de no-
Ure Empereur, & vous entreprenez J'ollcr la vie l'vn
à Tautrc ! Quel droit quel exemple vous authorifoic
de cefaire ? Ignoriez-vous que fi \'\n de vous euft eilé
tué parTautre^c'eiloitau dommage & interefi; du grand
Seigneur ? Apres cela, par arreft &n Confeil , ce Rodo-
iiiont fut mené en prifon , où ayant trempé en grande
miferercfpacedeplufieursmois , il en fut tiré à toute
peincpar Tinterccffion de quelques amis, & depuis l'on
ne tinjgueres de compte de lui. Au côtraire entre nous
fc- trouuent des fpadaffms , qui n'ayans lamais defgainé
Tcfpee contre l'ennemi public , pour auoir mutile ou
afTaffiné quelqu'vn de leurs compagnons ou conci-^
toycns, fe feront cllimci & auanccr. Que deuiendronc
les Ellats, ©u les vices picncn: la place des vertus , §; ce
y y 4
•y 11 Hijloires admirables
ciuimcrite punition tourne à gloire & honneur ? Ce
font les mots du S.de Busueque en la ^.lettre toucha)itfes -voy^
a^es en T tinjuie.
Il y a eu de noftrc temps vn foldat Bcrgamafque nom-
mé Ican Pierre Sure, lequel prouoqué en duel par
autres foldats, y demeura vainqueur dixfept diuerfes
fois, tuant fur la place, oublcflant à mort, & contrai-
gnant fcn ennemi de fe confeflcr vaincu. P. loue au iz.
Iif4.de fes hijloires. La France a veu Buiry d'Amboifc, l'vn
des plus hazardeux combattans de ce fiecle , & qui par
toutes fortes de duels a hk preuue de fon adreffe.
Mais en fin il périt miferablement, tué par quelques
vns qui le furprindrcnt , lors qu'il y penfoit le moins.
Il y en a d'autres viuans , qui ne cèdent en rien à la va-
leur du Bergamafque, & qui contrains ont, a pied & à
cheual, tait des coups merueillcux. Le mala eJlé qu'ils
ont heurté contre leurs patriotes. Nos François entre
autres décident leurs querelles parle duel, fomenté par
la licence des guerres ciuiles. Entre les anciens Lom-
bards & François il y a eu de telles couftumes ou li-
cences que les fieclcsfuyuans ont corrigées, comme aufli
ileftoit befoin. Qu^ant aux fautes qui s'y commettent
auiourd'hui, c'efl: aux fouucrains à y penfer : & leurs
Confeillers d'eftat font obligez en leurs confciences
d'en donner libre auis, pourle bien public ficlaconfer-
uation de l'honneur des particuliers.
Du temps de la guerre au royaume de Naples entre
les François & les Hrpagnols,le capitaine Bavard enten-
dant qu'vn cauajier Hlpagnol nommé Sotomaiorl'^c-
cufoit griefuemcnt & rintercfioir en fon honneur , le
prouoquaau combar:cc que Taurre fut contraint acce-
pter. Mais Bayard emporta la vi<fî:oire, ayant d'vne ello-
caderenuerfé mort fon ennemi parterre, en prefence
de trefgrand nombre de gens : dont il fut beaucoup
c{limé d'amis Se d'ennemis, p. J.r.c en la "uieda ^mnd
Oonfalue.
Les hiftoricns Italiens font mention de plu/îeurs
duels, où le:, Italiens onr elle viflorieuxfur les E'pa-
gnols&fur les Françoii. Auiourd'hui l'on tient <]u'il
y a du
^ mémorables, yi$
yadu changement, dontielaiiïe la deciiîoii aux chefs
de guerre, me contentant de dire que les armes liono-.
rent celui qui les employé pour la mile defenfe de Ton
fouuerain & de (fa patrie contre les ennemis communs:
fans fpecificrleshiftoires de ces duels miferablcs & fu-
rieux.
EFFORT audacieux ) inutille
drperilleux.
L'Armée inuincible Efpagnoîc ayanteflé desfaite
en peu d'heures fur l'an mil cinq cens quatre vingts
huidjleduc de Parme, qui durant le combat àcs An*
glois & Efpagnols entre Calais & Douure, eftoit venu
à Donkerkc auecques vne armée de trente-cinq mil ho-
mes , pourrébarquer& faijeioindreà celle d'Éfpagne;
entendantpour certain que la flotte Efpagnole flottoic
fracaflceou enfondree es gouffres de la mer, pour ne
demeurer fans rien faire, tout defpité de fon malheur>
ayantramené fes forces en Brabant délibéra d'afTieger
la ville de Bergopzoom , où il cnuoya deuant quelques
rcgimcns : &lc dix-feptiefme de Septembre il s'y trou-
ualui-mcfmeen pcribnnc, oC commâda au Marquis de
Renty d'cnuahir Tille de Tcr-Tolc,à roppofîtc duBerg,
pourpar.ce moyen tenir la ville afTiegee autant par mer
que par terre. Le Marquis ncihnt y enner aucc le Com-
te Odauiode Mansfild. cchuid cens hommes, àlafa-
ueur de deux mille moufq unitaires reftezfur la dique
de r. erg, futfouftcnu par le Comte George Eberard de
Sclnrs, Colonel du rtgimcnt de Zeclande : tellement
qu'en deux charges furiculèsque firent les alTaillans, ne
pouuansaduancer,ilslc retirèrent aucc perte d'enuiron
quatre cens ]îômes,rous frapc?. à la teftc, laquelle feule
Icurpafibit hors de Tcau, ayans à toute peineretiré le
Comte Odauio hovsdes bourbes & fondrières. En tou-
te ceftc cfcarmouclieles Zeelandois ne perdirent qn'vn
homme & deuxbleilcz , cltans garantis d'vn bon para-
7 1 4 hijtûires admirables
per,dontlcurdiquceitoit bordée. Hifigire des pays h/u,
h». 6.
EMBRASEMENS de feu.
DV temps du roy Louys douzicfme , les Vénitiens,
outrclcurs aunes pertes, rouftnrent celles-ci. Le
feu fc print au milieu de leur \ ille , Tan mil cinq cens
quaror/e, l'onzieime iour de lanuier, de nuiâ; , lequel
brufla les boutiques de plulîeurs marchans, & augmenté
parvn vent impétueux fut porté aux maifons voifînes:iî
c}u'enmonisde rien les banques des changeurs turent
cnuahies &: confonmiecs : & dura telle flamme toute la
liuid, fans qu'on peuft y remédier lufquesau lour, que
parle commendementde la fcigncurie les maifons ioi-
gnantcs à celles qui biufloyent fuient démolies. Ce fut
I-i plus grand perte que les Vénitiens cuflcnt encore fai-
te. F .Gmchardln du dottT^epne lit*re de Ces hifioires.
L'an mil cinq cens trente trois, le feu fe prit (fans que
l'on ait fceu comment) à la grande Eglife d'Anuers , vn
jour du mois d'Odobre, dételle violence qu'en peu
de temps il biufla prcfqucs tous les autels, fomptueux à
lïierucîlles, iniques au nombre de cinquante-fept, em-
brafa &conruma tout le toicl Scia charpenterie , gaita
Liplufpart des piliers & colonnes , fit pluficurs autres
dommages, nuec des flammes f\ ardantes , qu'il icmbloit
\n Mongibel voinii]'ant les fureurs fulphurces. La vil-
le n'en reccuc autre dommage. Louys Gmihardin en la de-
Jcriptiondcs pA'^i b.i<.
La belle & tr^ndc ville de Delft en Hollande, à deux
]icuès de RctcrJ.nm, magnifiquement ballie, tomba en
crtrangc mifec Win mil cinq cens trente lîx : car le feu
s'y ellant pris^d en brulla la plufpartjau trcs-grand dom-
jnage des citoycn-j , leiqucls depuis l'ontrebalhe Se ren-
due plus belle qu'auparauanr. i.k mefme.
L'an nul cinq cens ioixantc trois , le feu fe print de
u-il j violence i Roterdam, plaiiante ville de Hollan^
de.
^ memorahles. 7 'S
de, qu'en peu d'heures , li brufla plus de neuf cens mai-
Tons, & grand nombre de vaiffeaux : item force gens , &
confuma vne infinité de bicns.Le me[ine.
Poperinghe petite ville de Flandres , à deux lieu es de
Hypre,fut aufîl fort endommagée A\\ ':(i\.\ en ceik i-wcl-
me année mil cinq ccnsfoixantc trois,rroisiours après la
PentecofteiayanteHéprefques toute bruflee en moins
de 2. heures :J auec perte de plu/îeurs perfonnes & dom-
mage merueiilcux des habitans. Pareil ertibraicment y
cftoitaduenu cinquante ans auparauant à pareil iour.
Le mcfrne.
Maisc'eftmerueilles que l'elcment du feu monftre
quelquesfois Ton effort contre la terre, comme s'il vou-
loit la confumer: comme il aduint Tan mil cinq cens foi-
xante fept au terroir d'Vtrecht,proche de Hollande, en-
tre Amersfort & Rhenen, Par l'inaduertance d'vn ber-
ger , lefeufe printen vne longue & large campagne>
pleine de terre dont fe font les Tourbes (qui font ga-
zons de terre marefcageufe, grafle , & pa4ftrie , dont les
Frifons,faute de bois, fe feruent à faire du feu^Sc en ven-
dent à leurs voi/îns)& en peu de temps s'aduançaforr au
grand dommage de tout le payslc.s habitans duquel voy-
oyentla terre & l'eau tout cntremeflé de fumée elpailfe
& efpouuan table. Gens y acoururent de toutes parts,qui
auec fo{lez:,diques,leuecs,& autres moyens arreiterent &
cfteignirent ce feu.L^ mipie
Le dernier /leclc a vcu infinis embrafemens de feu, de-
dans lefquels ont elle bruflez hommes , femmes, en fans,
fans pouuoir eftre aucunement relcous. Entre autres e-
xemples ie remarqueray celui qui s'enfuit. Il y a cin-
quante ans ou enuiron , que certains honnorables
marchands venus à Tv ne de^ foires de Lyon, & loge/ à
la telle d'argent, rue delà Grencrte, en vne chambre
haute, comme ils deuifoyent de leurs afaires & paf-
foyentioyeufement le temps, auint que le feu fcprint
a la cuifine du logis , où le trouuerent des huiles en
grande quantité, aucuns difent qu'il yauoit aufli de
U poudre à canon. Quoy que ce fuif ,1c feu s'alluma
7 1 <5 Hî (loir es admirables
f\ foudain, nuec telle violence & impetuo/îté , que pres-
que en vn moment tout ce bas logis fut bruflé. Ces mar-
chans, qui eftoyent en la chambre haute regardant fur U
rue^voyanscefeu commencèrent à cercher leurs valifes
&bougctes,enfermeesen vn coftrefous laclcf,laqucl]e
citoit à la ceinture de rhoftefî'c. Ils voulurent Taller
quérir , mais le feu brufla & mit bas la montée qui mc-
noit'en celle chambre, tandis qu'ils s'amufoyent à ou-
urir le coftVe>& choifir chacun ce qui lui apartenoit. Là
dpflus donc le feu ayant gaigné les greniers, & s'attachât
au planché de leur chambre , le haut du logis bruflé , ils
commencent de crier à l'aide par les feneftres qui refpo-
doyent fur la rue. Ils fe fulfent volontiers iettcz du haut
en basrmais les- feneftres fe trouuerent garnies de gros
treillis de fer qui leur defcndoyent le pafl'age. Ils ne
pouuoyent fefauuerjnipar enbasni par en haut,le logis
eftantembrafé de toutes parts. D'ailleurs les voifins en
la rue ayansplusde peur de leurs maifonsSc biens qu'ils
voyoyent en danger , que de pitié d'autrui , couroyent
pour fe défendre eux-mefmes contre celte violence &
foudaineté des flammes.Ainfi peu de gens fe mettoyenc
en deuoir de fecourir ces pauures eftrangers , qui de leur
part s'efi'ayoyent auec groflcs pièces de bois de rompre
les treillis : mais il n'y eut ordre de leseflocher, cftans
trop profondement plombez en la pierre. En cefte mife-
TCayansla mort deuant les yeux en vn fiege C\ Ibudain
d'vn ennemi mcxorablc, lequel s'eftoit défia fait maiihe
de la chambre/e prcnaas â leurs acouftremens , grillant
leurs barbes & cheueux , fc prindrent à crier fi eftroya-
blement,qu'il n'y auoit perfonne en la rue qui n'en euft
extrême compaflVm. Or quoy qu'ils icttairent leurs
bougettes& valizes pleines d'or & d'argent par les fe-
neftres, crians à gorge defployee, pour Dieu qu'on les
fecouruftjlefeueftoit tellement irrite & augmente par
vn vent, qui le rcndoitplus furieux , qu'auant que l'on
euft apporté des crchelles^ des marteaux pourbrifer
les pierres des treillis , on vid tout en feu,&les flammes
fortans à grofies ondes par les feneftres , & Icfeucra-
uqcttantcmpefchoit qu'on ouill les cris de ces hono-
rables
é* mémorables. yij
rables marchands cjui furent bruflez tout vifs, & finirent
ainfî douloureufement leurs iours, tout fecours leur
défaillant. Paradln ait 3. liure des mémoires de Lyon , chapi^
tre zz.
Il y a quelques années que la ville d'îflebe en Saxe,
apartenâte à ceux de la maifon de Mansfeldt, futeftran-
genicnt gaftee parle feu qui s'yprint par mefgarde &
nonchalance en quelque maifon , puis s'efpandit de tel-
le vifteflc & fureur, qu'en peu d'heuresla plufpart fut
defpefchee, nommément cequiy eftoitcommcleplus
beau : dont ie fcray vne briefue defcription. La grande
Eghfc nommée S.André , lagrciîe tour , deux autres
moyenes, &cinq clochers d'iccUe, l'horloge & le bef-
froy en furent ruinez: Item le collège bien bafti& cou-
uert d'ardoife:La maifon du fuperintendant:celle du Pa-
fteur, des deux Diacres , de TOrganifte & du Marguil-
lier: Lechafteaudu Comtejauecfes dépendances, &v-
ne autre fuperbe maifon du mefnie Comte: La maifon
des halles, le grand horloge de la ville, deux clochers,
la grande balance de fonte 5 & plufîeurs boutiquesau
delTus : deux cens cinquante trois autres maifons des
principales de la ville, qui furent réduites en cendre, a-
uecTancienne & nouuelle monnoye : huicl grands lo-
gis ou hofpitaux, pour toutes fortes de pauures, deux
grandes braderies de bière , deux boulangeries , quatre
vingts & quatre granges , fix mil charges de bled , grand
nombre de charetres de foin, foixante mefurcs de bled
apprcfté pour faire la bière, & quâtité fuffifante de hou-
bclon à mefme eflfed. On n'a fçeu bonnement dénom-
brer les autres degafts que ceft embrafement iît an re-
gard les autres édifices, bien meubles , charpenterie,
graine diuerfes, marchandifes de toutes fortes, gros &
menu beftail en merueilleux nombre. Ainfi le grand
iuge du monde fait grandes exécutions en vn inifant, &
dit à grands & petis , Ne faites ellat des biens corrupti-
blesrvos thrcfors & vos cœurs foycnt au ciel. Mémoire de
nojlre temps.
-7 1 8 HisîoîYes admirables
ENCHANT EVRS& CAiagi-
ciem punis.
VNforcicrdc Salt7bourg, fit dcuant tout le peuple
atVcmblcr en \ ne foflc tous les Icrpons à'wiQ lieue
à h ronde, & les fît tous mourir,hors mis le dernier qui e-
ftoir £,rand,lec]uel fautant furieufement contre le forcicr
le tua. 1. Vtodin 4» zAiurcJefn Dcmonomanie , chapitre dei*-
xicy.m.
lean François Picus Comte delà Mirande tefmoigne
auoir parle à plufieurs , leùiuclss'ertans abufcz après la
veine elperance des chofcs à venir,furentpar après telle-
ment tourmentez du diable aucckquelils auoyentfait
certain accord , qu'ils s'eftimeroyent bien-hcureux d'a-
uoir la vie faune. Di: d'auantage que de fon temps il y
eut vn certain Magicien Jequel promettoità vn trop
curieux & peu iage Prince de lui reprcfenter comme en
vn théâtre du liege de Tvoye,& lui faire voir AchiUes &
Hedor en la manière qu'ils combattoyent. Mais il ne
peut Texccnter fe trou u an t empefchë par vn autre fpe-
Ctade plus hideux de fa propre pcrfonne.Car il £ut em-
porte en corps &: en amc par vn diable, ians que depuis
il lolt comparu. l.Chajjunion en Jjn hiiioi,re des in^em^its de
V^eujUu.l.^h :p.z.
De noltve temps le Comte d'Afprcmont & fon frerd
le fieur d'Orne,ont fait parler deux par leurs faits eftrâ-
"es& horribles, cllans leurs mlolences Ç\ defrciglees^
que mefmesilleur aduenoit par fois de cafler , par ma-
nière de pafletemps , les a eiriercsde leur challcau d'Al-
prcmont en Lorraine , à deux lieues de S.Michel,& de
jttter dedans vn puits très-profond de leur vaifl elle pour
en ouyr le coup : prefage de la ruine & defolation ad-
uenue parleurs propres mesfaits , tant fur ce chafteau
(ouilshabitoyent) auiourd'hui defert & réduit en ma-
lures,que fur eux-mefmes , ayans hni leurs lours imfera-
blement. Quant au iieur d'Orne , c'tl^oit vn homme
vi'
(^ me m 07 Me s, ji^
vilain, cruel à merucillcs, & grand magicien. Il fit em-
{îoigner vnefoisvii boulenger Ton feruitcur domc<l:i-
quc (duquel ilentretenoula femmc)&renclorre dedi5S
vn tonneau, lequel roula du haut du cliaftcau par vu
précipice en bas, faifant par fois le tonneau à.Q.s bonds
de la hauteur d'vne picque, félon les endroits ou il don-
noit. Neantnioins Dieu eut pitié de rinnoccnt>S: le ga-
rantit qu'il n'en mourut point. \,Q^ gentils-hommes &
Teigneurs qui alloycnt voir ce fieur d'Orne eltoyenc
traitez, celeuricmbloit, fort honorablement, Scfcruis
de toutes viandes exquifes , comme fi Ton n'eu 11 rieneC-
pargné à leur faire la meilleure cherc du monde. .Mai-?
au partir de là, eux qui penfoyent auoir efté bien repeiîs
.fetrouuoycnt tout affamez & mal en poin<ft pour faire
longue traite , n'ayâs beu & mâgc que par imagination.
Il eftbicn àcroirç,quelescheuaux n'auoyent pas meil-
leur traitement que leurs maiftres. Aduint vniourque
quelque feigneur ayant p^^ifé parlà,vn de Tes gens ayant
oublié ie ne fçay quoy , retourna au chalfeau, où eiLint
entré àrimpourueué en la ialle ou l'on auoit difné, vid
vn guenon battant ce malheureux d'Qrncqui auoic 5
bien feftoyé la compagnie. Il y en a auffi qui difeiii:
qu'on le vid vne fois par quelque petite fente de porte
couché furie ventre tour de Ton long en (achambrefur
vne table, &vn guenon dcfTuslui, qui l'affligeoic d'vne
eftrangcfaçon , auquel cemiferablcdifoit, Laiflc-nioi,
laifle-moi ,me tourmcntcras-tu toufiour^ainli ? En Iko
cepauure malheureux, après auoir difTipé tout fon bien
fut réduit à telle extrémité, qu'ciiant dcfnué de moyens,
& abandonné detous, il ae peut crouuer retraite, qu'en
rhofpitalde Paris , ou il languit & mourut. Encemeftne
diure ^ ch.ipitre. Son frère aifné , ayant aufll gafpillé tout
fon vaillant, &faitvneinfinité d'excès, cftant vniour à
S.Michel, beut fi defordonnémentjqu'ilencreua. ^^w
1.lfH.chaf).-,o.
Il n'y a pas long temps qu'en Lorraine y eut vn qui-
dam furnommé de Couleur , lequel fe mcHoit fort de
la magie. Fntre autres chofes l'on s'efmeïueilloir>
qu'il fe faifoit tirer coups d'aK^uibuzc & de piflol::
7 20 Htjîoires admirables
contre foi , receuant toutes les baies en fa mam,fans en
ertrc aucunement endommage. Mais vn iour aduint que
l'on feruiteur irrité, lui donna tel coup de pjllolc qu'il
!e tua tout roide. l. Chafj'umon 3 en ce mefnte I. Uitre ^ chw
pitre zz.
ENFANT ejleué, parmi
les loups,
OVt R E ce qui en a efté dit au premier volume, i'ad-
iouftcray ce que nous en propofe le iîeur de la
Nauche, comme s'enfuir. Icvay defcrire vnehiiloire
<5ui fut récitée (moi prcfent) par monfîcur de Humicre
vn iour S. André , 1565. deuant Monfieur , frère du roy
Charles , qui depuis a efté nommé Henri troifiefme roy
de France. C'cll qu'es forefts d'Ardcnne aucuns gentils'
homes &payfansdc plufieurs parroiifcs s'aflemblercn:^
pourdrelfcrvne chaile de loups , qui leur donnoyenc
beaucoup de fafcherie : & comme ils eurent donne la
chaflc à vnc douzaine, qui furent pris aux rets, abatus à
coups de harquebuzes, & autrement , fuç tuée entre au-
resvnelouue, fuiuic d'vn petit enfant toutnud, aagé
tnuiron de fcpt ans, de couleur de fueiile morte , ayant
ces cheueux crefpus & blonds , lequel fe vouloir ietter
lur ceux qui auoyent tué la louue, Payant aperceuë mor-
fte.Mais îl futenuironnc de tJntd'hommesq^i'ilfut pris:'
auquel on trouua les ongles des pieds Se des mains cour-»
bées par dedans. Il ne pailoit nullement, mais ietroit v-
ne voix inarticulée, comme vn veau. Il fut mené dedans
vn grand village, en la maifon d'vn genril-homme , où
Ton lui mit les fers aux pieds, non fans grande dirr; culte.
Puis on le ht tant ieufncr qu'on le dompta , Se lui aprit-
on à bien parler en moins de fept mois : puis il fut pro-
mené par des villes, bourgs , villages , maifons nobles &
chafteaux : dont ceux qui leconduifoyent gaignerenc
beaucoup d'argent.
Pour
^ memorahlesl 72t
Pour faire entendre comme cell enfant eftoît tombé
«ntre \^^ pattes des loups , enuiron vne f'efte de TouP»
làints, que Je froid eftoitaflèz rude, aucunes fîIJes, jeu-
nes garions, & pauures femmes , non gueres plus loia
de demi lieuëdes foreftsjs'en allèrent a la plus prochai-
ne, pour y couper du bois. Ceftoit furie velpre, le
temps eltoit nébuleux : & comme ils elbyent après â
faire leurs fagots, ils furent iurpris par les gardes des
foreils, qui les effarouchèrent tellement, que crainte
d'eftre pris & menez en pnlon, ou autrement maltrai-
tez,ils s'enfuyrent ci & li , laiffans leurs coignees. Entre
autres vne des femmes y auoit porte Ton petit enfant d en-
uiron neuf mois , n'ayant perfonne en /à maiibn pour
\t. garder , éXt eliant abfente : car /on mari trauail-
Jpit à li iournee, lequel ne venoitenfâ cahuettequs
Jes dimanches & jours de hsits. Par ainfî elle laifîà fon
enfant, & s'enfuit parmi la foreft , comme talonnée &
iùyuie vn longtemps. Etlors qu'elle /è vid en feureté
quelques heures après , & que les foreftiers ie furent re-
tirez, & qu'il cftoitprefquesnuid, elle s*en reuint au
lieu où elle auoit coupé le bois, où netrouuant /àcoi-
gnee ( que \zs foreftiers auoyent prjlè) ni Ton enfant ; 6c
apresbeaucoup de regrets,Iaif]ànt toute crainte,penraque
fès foreftiers euflent emporté l'enfant , aulquels elle dé-
libéra s'adrefîer. Sur cefte pen/ee elle retourne en fon vjI-
Jage , fjauoir des autres venus auec elle , s'ils fjauoyenC
rien de l'enfant : autant en fit elle aux foreftiers beuuans
en certaine tauerne à vne lieue de là, qui la menacè-
rent & iniurierenr. Le lendemain la pauure retourne
en la foreft le recerchcr , mais en vain. Son mari de
retour de Ton trauail le iour de Tou/îàints , entendant
Ja trifte perte de Ton enfant &: \^s informations que la
iuftice prenoit contre eux, difànt que par leur défaut
l'enfant auoit efté expolë aux beftes fauuages , après
longue quefte par les forelts , ces cherifs craignans nou-
Belle peine abandonnèrent le pays, & depuis n'ouït-oa
parler d'eux.
Il eft » preDjpporer que la louue rurmentioonee4
il.
•jiL Hîjloires Admira hUs
Ci.fchant proye pom porter à les petits louLieteawx, frou-
uaccft entant abandonne de la mère, ii». l'emporta. (Qt
quicit vrai lemb'ablc:car leloi'p porre en ià gueule vnc
brebisjtant groiie & pelàntcloit tJle , uns rofitnier,\ oj-
re vnedemie liet'f , oc làns ièrcpodi , comme qiicloue
puiflàntleuiier teioit v:i conil. Chacun luit que .^'i' «c
tiouuevn cheual ou vnc vache dedans vn creux eu iofJc,
que le Joup les tirera hors à belles dents tant il a le col
robuite ) pour U niant;er : ce qu'vn theual bien aitclc
ne pourroit tiaire. La loiiue ayant porté Tenfant à fev lou-
uetcaux ( comme toutes louut s portent ain/ï en icurs le-»
paires tous les petits animaux qu'elles peuucnt attraper,
pour leuraprendre à courir en quefte} les loiiueteaux c*
Ihns parauanture {àouls, &: fe voulans loiier à cclt enfant»
auant que leman^tr 5 &laicuue eftant couchccauprts
~ de les petis j Tentant ièntaiit Us tetins de lalouue, lèiài-
iît dVn vS: le tetta , penîànt auoirtrouu:; là mcre,C>c y a ap-
parence qf e dcllors la louuc l'aima comme fîen : car its
femelles ont du plailir au bout du tetni , quand on les
tire. Et h elles donn>;nt a tetcer a quelque animal d'au-
tre e/pece, elles l'a meront comme il adulent aux chien-
nes tertces par des chus , aux cheures qui ont aJaitie
des chiens , des aigneaux, ^ç'^ poulams , voire des enfaus,
dont il y a des hilloires anciennes iSc modernes de ùiuçis
lieux.
•Ainfl peut-il eftrcdela louuc, de Tes louueteaux,
& de ceii entant. Qnandccs loui:«.reaux turents grands
& torts j s'ils trouuc yent cell entant, qui n'alloit lamais
fans cflre acompagne de )a louue , ils lui faifoyentfefte
& des gambades à la tai^on des chiens: 6; meline tous les.
autres loups d'i celle cor.tree ne Toticnierent onijues.
Ce qui con 'erua encore mieux ccic entant , fut que U
Jouue ^ les autres loups elloyent fort friands des. ex-
cremens d'icelui , voire mangeoyent la t^ rre fur la<iucl-
le ilauoit vrine. Ht tant que la louue Je conJuiiu, tU
ie lui fit toulîours part de là proye. L'enfant velquit de
chair ctuc, enuiron Iix aiis,i ce qu'il a raconte depuis,
ayant
rjyant bonne mcmoue de ce qui s'cAoît pafle en fon en-
droit 5 depuis qu'il eut atteint quatre ans , ayant pour
guide la nature : & pour garde vne finguliere protection
dé Dieu, qui It: gaiantiflbiten ce toibleacige, ôdàiou-
te^heuré en la mort, par le minillere des Anges. On eut
beaucoup d'afiire à le ranger ù manger de la chair cUi-
te. 11 difoit d'auantage que lalouue taifoit tousles ans
âts petis , lefquels:lgardoit pendant qu'elle alloitâ li.
qùelte 5 & qu'elle mordoit le maile j lors qu'il venoïc
la voir: tellement qu il approchoit rarement du re-
paire.
Apres qu'on lui eut aprins à parler , & qu'il (k fut apri-
lioilèa rà vie brutale chrmgee à celle Aqs autres enfans , il
fut reconupour fils delà femme fufmentionneej pour-
Ce qu'il auoit lîx doigts en chacune de Tes mains , & l'iJa-
ge qu'il lèrnbloic auoir lors conuenoit au temps qu'il
le trouua percfu, 'On le fit berger de moutons & brebis^
ce qu'il exerça l'eTpace de fept ans , pendant lequel
temps les loups n'atrcnterent iamais lûr les troupeaux
i lui commis 3 enco: es qu'il gardart du gros belrail^ com-
me veaux 5 vaches , iumens , poulains , ii:c. Ce qui fut
reconu des habitans du village gù il demeuroit : parquoy
afin que Izs autres troupeaux participaflènr au meline
priuilege, les laboureurs & bergers àts villages luia-
menoyent leur beftail , ou bien failbyent venir cegar»
Ion Jur les lieux, & lui tailoyent pafier par defius icir
bettail l'es mains; dedans leiquelles il auoit craché de /à
làliue. Qne's qu'ils fu/îent , meiines \ts ehienSjde quinze
iours après les loups n'y touchoyent. Par tel moyen il
gaigna beaucoup d'argenr:car il le failbit donner vn dou^-
ble tournois de chacune des belles , iUr lerquelîes il paf-
lôit la main;, comme nous auons dit, \k leur manioitauflî
les oreilles;
Mais ielon que toutes les chofes humaines ont leurs
reuolutions , l'enfant paruenu à l'aage de quatorze
îwis , la vertu qu'il auoit d'empeichcr que les loups ne
nUi(ifl"ent au>: troupeaux à lui commik ^ 6l à. ceux à qui
i\ pafiôit la main dclVus ïi^idi'm^ Se manioit Us
7^4 HiBoires admirables
oreiUeSjfs perdit.Ie peniè que cela adujnt, pource qu'i/^
uoit beaucoup chang» de complexion , naturel & tempe-
rament en cefl aage , & pour auoir par vn Jong-temps prit
autre nourriture que ^ loùuatique: ce qui le conojiîbit
parce que les loups ri^pprochoyent plus de lui tant que
de couftume,ains le cr"ili^"<3y^f5"'2y^"f plus aucune f)'m-
pathie ni fentiment qirèk'onque de la nourriture que ce
garlbn auoit eue petit enfant auec les animaux de leur eA
pecc.Pourtant ne gaignoit-il rien plus quVn autre fiinple
berger jdont fafche il quitta ce train , & s*en alla cercher
fon aducnture par les champs .-tellement qu*il femit es
compagnies de gens de guerre , feruant de goujar ;, puis il
deuint ibldat^ braue , hardi & vaillantjmais larron , fin &
caut au poflîble.Ii fut tué Tan ) 57i.par les troupes du àuc
d'Albe 5 eftant es compagnies Françoifes que le fîeur de
Genhs menoit en Haynaut contre les E!pagnols,au Cig^q
de Monts. On dit que ce foldat fit lori vaillamment , &
•qu'il vendit ià peau bien cher aux ennemis. Louys Guyon»
feur de la NaMche,au i.Uure dejes diuerfes Ufonsychapitre.^^^,
ENFANT vif y trejpeîit.
LE vingt-troifiefme iour de May , l'an mil cinq cens
cinquante &:vn3narquit en la ville de Bruxelles vn en- •
fant mailejn'ayant en longueur que de trois doigts de lar-
ge j comme la ligne fuiuante .
> Il fut baptizé en l'Eglife fàinâ: Gudulc ^ &
nommé lean. Combien qu'il n'cuil elté porté au ventre
de la mère que fix femainesjfi cftoit-il parfait en tous fe»
membres.Les deux roynes de France & dt Hongrie^ vou-
Jurent les voir. H ne veicut qu'vne heure &: demie. Icmi
le Petit en Ces <rr(indes x^nnales de Hollande .:»* Uu. 8.
l'ay veullya quelques années en la ville de Bruges
en Flandres jvnauortement de deux gémeaux, qui n'a-
izoyent chacun qu'vn poulce de longueur, largeur, &
grolïèur 5 tous hs membres cxadement formez & ela-
t»ourez^làos 4eiiiuc ^uçlcoaque. Oa kur Yoyoit ks
^ memorahles. yi^
yeux auec les prunelles , d'vn petit pointfl , les nai ines,
Its oreilles , les doigts diftincts , le nombril , ie membre
penital, les cuifles, le gras Aes iambes^les pieds & talons.
D'autant que IVn & l'autre palpitoit , mon(irant \ts in-
dubitables tefmoignages de vie, on les porta prompte-
ment au baptefme, après quoy ils expirèrent. Lemniu^ an
4. lin. des miracles de nature ^chap.z^,
l'ay veuvnauorton , lequel n'auoit qu'vn poulcede
longeur, raaisdonr les membres eftoyent diftinds fort
exactement , à fçauoir la tefte, les yeux , \qs narines , \ti
bras , les mains, les doigts , i'ellime qu'il eftoit de fix fep-
ma nés. l.Laleman enfesfchoUes fur Le liuret d^aippocrates^de
faAge de l homme,
Columbus maintient en Ion anatomie auoir veu des
embryons petits comme feues, où les membres paroifi.
/byent. Mais noQs faifons ici mention des fruits ou qo*-
fans qui ont vie.
^ ^ IFO^FE périlleux,
ANtoine de Leue , renommé chef de guerre, acoura*
gea fort Ton mailtre l'empereur Charles V. à afl'ajt*
lir le roy François du cofte de Prouence : offrant de mar-
cher des premiers, & de faire lapoinde, encores qu'il
fuft fort tourmenté des gouttes. Il afTeuroit l'empereur
de la vidoire , fondé fur vne malheureufe & deteftable
cfperance : à fcauoir que àts deuins Tauoyent alfeuré
qu'il feroit enterré à faintt Denis. Son interprétation e^
ftoit que l'empereur iroit auec les armes viftorieufes
iufques dedans Paris. Mais tout le contraire aduint : car
la dyfl'enterie ayant tué vne partie de l'armée Imperia-
l.e , Antoine de Leue acablé de veilles continuelles , &
d'autres maux, mouruten Prouence. Mais afin qu'jl apa-
rut que le maiftre qui l'auoit afiné , parle tcufiours k
deux ententes , & a Ton efchappacoirepreit pour fermer
laboucheà fcsdifciples , le corps porté à Milan fut en-
terré en l'Eglifê de faind Denis , qui eft en c^ï\.Q ville là.
Telle fut l'iiilie des conquêtes imaginaires de Leue auec
«jui furent çnreuelis les fong^s &: difcours. L^authenr
7^^ Hiflû'tres admirables
du fupfilement de Sd'ell.'CjUn.zo.recae ccjk hiflopre.
Adrjan Cardinal de Cornerte: attendoit la mort Ju Pj-
pe Léon X.non par nul-vueillance qij'il lui portail, mais
poufle d'vn vain de^r de i cgner. Car il auoit conceu cer-
taine ciperance df pariienir au Papat , parles rcfponfes
d'vne deuinereiTe , qui lui ayant prédit anez-exadement
beaucoup de chofesjtouchant Je? afaircs publiques &: par-
ticulières , dont il lui auoit demandé refblution , Taucit
çncorev afiture que Léon emporté de mort foudaine , au-
roitpour luccefieur vn vieillard nommé Adrian, né de
baslieUjhommedode , eileuéaux honneurs Ecclcfiaftir
ques par degrezjôc qu'il auoit acquis par fa vertu, fans au-
cun mérite de Tes prcdecelTeurs. Ce Cardinal cuidoit en-
tièrement que toutes ces marques i'ç trouueroyeht en nul
autre qu'en lu:: car il elloit i/ïu de famille inconue & fort
çhetiue à C9rnette,bo<jrgade de nulle cilime enTolcane,
&pource qu'il eftoit dodte Je degrez en degrez eltoit mo-.
te iul'ques au Cardinalat : mais Ion chapeau eftoit encore
trop léger : il defîroit la tiare & ce qui s'en eniuir. Tou-r
tesfois h deuinereire & lui firent vne cquiuoque fur le
Jiiot d'Adiian . par l'aftucc du maiftrc des Ibphiftes &
pienteurs. Car non Adrian de Cornertc , mais Adrian le
H<^>ll'indois3fi!s d'vn pauurc artilàoj dodte peribnnage , a-
pres la mos t de Léon iut cfleu Pape , par vne prodigieufe
Ichcitéjce dit Piiu! I ne an A.liii. de Li 'vie de L:on i o. où il
raconte ce cornu eqiiiuoquc de Cornette.Maés il oublie i
dire que l'autlionte de Charles V. duquel Adrian le Hol-
Jandois auoit efié prcccpreur, feruit plus à l'aduancemenj;
ç'icelui que nulle auti e chui'c. Ec ce hit vrayemcnt ia pio-
digieuièfthcité.
ESMEVTE de Flandres.
E
^ années mil cinq cens trente neuf & quarante,
"Empereur Ciiarles V. eut quelques afaircs cii
^ianiircs * à quoi si\ n'eu(l pbuic de l)ount heure , il s'en
fuHiiour
C^ mémorables, 72.,yr>
fuft troilUc bien empcJciié à la longue. Les Gv.no.i
elhns entrez, en quelque d flerçnd au*.^c les oflicierjs.
de l'Empereur, à eau le de rexcefiiue impo/ition Cnv \ç^
vin 5 & fafcheA que les ccclelî.dtiqueSi qui ioiiynoy-
cnt des plus clairs reuenus , fiiflent exempts de ce
tribut, voyan? que c'eitoit contre leurs priuilegcs, rc-
iblureiit de ne le plus louflïir , ains d'y prouuoir par
voye ordinaire , U dcmindcv iufticc à rCiripereur,
puis il elle leur eftoiit dclniee y procéder a;:treniert.
A cefte caufe ils s'adrcficrcnr à la roine de Hongrie,
lors gouuernante des pays b.îs pour l'Empereur Ion frère,
Jaquelie ne leur donna reiponTe qui fullà leur conten-
tement: au moyen dcquoy, après qie les corps des nie-
iiiers eurent efté a/îluiblez chacun en leurs chambres»
ils prindrent les arities^emprifonnerét quelques oiîiciers
del Empeicur^en Tircnr publiquement décapiter vnjdon-
lîcrent telle efpouuante aux autres , que nul ne s'olbit
nionitrer par hs rues , ains Ibrtirent pi efque tous hors de
Ji ville &cCt retirèrent vers la goiiucrnantc. Lts Gan-
tois Te doutans bien que l'Empereur ne le5 fnpporteioit
gueres en leur fouileuement , enuoycrent embafladeis
vers le Roy de France le prier quM vouluft lesp^endie
en fa piotcction : ce qu'il rçfulà taire, citant lors en
paix auccques l'Empereur : iomt qu'il ne voyoir rien
d'afleuré fedeclairant leur protecteur , à caulé qu'il re-
doutoitleur inconlhnce. Euxlc voyans efconduirs ne
iai/rerent de paÛ'er outre , & après auoir nettoyé leur
viiledetout ce qui pouuoitles trauerler, jibolnent les
ordonnances taidtes fu. les impoits du vm. Ces nouuel-
\es portées en Eipagne efmeurent TEmpercnr j y don-
jier ordre promprement. Et pour expédier chemm j d»
conlentement du Roy il paîratoui: à trauers la France 3 cv
en peu de iours arnua liir les Frontières des pays bas. A-
Jors les Gantois n'ayans ville quelconque qui 'es fiuon-
i<ii\ , ne Iceurent faire autre chofe que le foum.'ttre à
J Eiiipereur, qui les chaliia ru Jemcnt.Caril fit mourir les
principaux chefs de relmotion,(jannit plufîeurs de leurs
4dheran,s , condamna la ville à vne amende de huict
(tns mille ducata d'aryen: tonip-.ant:ordonnaqii'vrte ci-,
Zz 4
ji% Hifîoires admirables
tààeilz y fuft baftie pour les tenir en bride, & qu'il* paye-
royent tous \ts ans huid mille ducats pour l'entrenemenr
d'icelle : confîïqua \qs biens de fbixante fi:: maisons & fa-
milles de Gand ^elquellesfe faifoyentles aiîerablees des
jneiîiers : voulut qu'elles fufl'ent i afçes à fieur de terre, &
«-jue le reuenu de ces maiions lui fuft confifque'. Il fit
deimolir auffi deux maiibns & parquets de iuftice à^s Çéi-
^neursdelaviile, & abatre la cloche du Bcffroyqui c-
ïioit au temple fàmct lean^feruant pour aflembler le peu-
ple durant les eïmotions. Ordonna que \ts foflez & tran-
chées faites autour de la ville fufTent comblezjles portes
fortifiées defmolies , &: que \zs particuliers endommagea
çnl'œuure de ces rempars bc tranchées fuflènt recom-
penlez. Il les condamna outre plus à delengager, à leurs
propres eouils & deipens , tout ce queiul'ques alors \ts
Corntes de Flandres auoyent engagé, qui montoit i
plus de fîx mille efcus de rente, abolit & caflà leurs pri-
vilèges i dont il fe fit bailler \qs filtres , pour en difpofei-
à Ion plaifir ; \ts priua auffi de la feigneurie qu'ils auoyenï
iurles fept tours principales iuietres à leur iurildidtion
çlbns dedans la ville: comme encore leur fut oftee la
iôuueraineté qu'ils auoyentauparaujnt , qui eftoit telle^
<]u'ayant condamné vn homme à mort, le prince ne pou-
Uoit lui donner grâce. Confiiqua toutes leurs armes tant
offenfiues que dcfenfiues, dont y auoic lors telle abon-
dance à Gand^qu'elle pouuoit st^irxiV cent mille hommes:
détendit que les officiers des mciiiers ne portaient plus
aucune liuree, & n'cuncntpuiflanc-^' de niatquer leur li-
Uree d'autre marque que de celle que TCmpereurordon-
neroir. Aiiifi fut humiliée la ville de Gand, quoy qu'en
îctWc Charles le Quint euliprins naiflànce, & fut pré-
cipitée fi bas qu'elle nes'eilpcu rekuer depiiis en ftpre-
iTiierefnlendeur ( encore que l'Empereur relaichaquel-
5îue choie de ce que deiîus ) au moins pour en auoir les
moyens qu'elle a eus autresfois. Au contraire peu à
peu eWt a décline, & fur Je commencement du iîeclc
«niile lix cens , auquel nous lommes entrez dés quel-
<{ues anneesjs'eft veuë tor.i]cment fous le ioug Elpagnol,
l'aube dç k$ libertcf & fraûçlwfes^ 6ç enuelopce en vnc
guerre
cf mémorables. 7 2. 9
guerre dont lui naiflent impoftsjemprun^s^exaaions, qui
îaminentjainfi que plufieurs autres^ peu à peu. H;/to*re de
nofire temps^Chroni^tie de ï-Uitdres.
m
ES PREVFE notable.
THoMAs Bilnee Angîois condamné d'h^refie & adju-
gé au feu l'an ijji.le jour deuant Ton Tupplice, paflant
lanuiden prieîes, ainfîquela garde dormoit, mit fon
doigt en la Hamme de la chandeîiej pour eflayer s'il pour-
roit endurer la violence au kii. Mais aufli toft qu'il eu(t
auancé ion doigt, la chair refiftant , il le retira. Sur ce il
commence a reprendre foi-merme, & direj Comment?tu
ne peux endurer la bruflure d'vn de tes membres,& com-
ment pourras-tu fouffrir le mefine en tout ton corps?
Tout à l'inftant il eftend le doigt en la flamme de la chan-
^éhiSx. endura la douleur du feu. Apres telle efpreuue de
lbi-merme,comrae s'il euft dompté la chair, il s*accoura-
gea comme de nouueau pour /ùpporter la violence du
feuTurtout Ion corps,ainfi qu'il fit le lendemain auec vne
confiance merueilleufè./.Ftfx/i^- enthijïJ'K^ngUterre,
l'adioufteray vneautre hilloirequi a quelque rapport
auec la précédente, remarquée an ^. •volume des h.trangnes
faite s en V académie de y "vitteberg, hcs mots traduits du
Latin contienent ce qui s'enfuit. Vn maiftre d'erchole
Anglois accufé d'auoir efcrit quelque chofe contre la do-
<flrHie lors receuë au Royaume, fut accufé. deuant leroy
Henri V 1 1 1. & tellement pourfuiui, que condamnation
j'en enfuiuitjpor^ant qu'il iéroit bruflé. Vn iour deuant le
fupplice quelque ami vint le voir en la priron,& y appor-
ta vn pafté pour fouper enfemble. Eftans à tablc,le prifon-
jiier portant la main afi'ez promptement X la viande , fèn-
tit qu'elle eftoit trop chaude , & retira fbudainement les
4oigts : puis redarguant ià delicatefie fc print i (èurircj
73^ Hifioires admrahles
^ ^''"5 • y^'^yement le luis Kien douillet , puis que ie n«
puis ihujWir que ie bout 6c Tvn de me. doigts (bit efchau-
de'îque fcrai-jc dur.ainjquand on me bruflera tout entier?
Ayant puis après palfe vne partie de Januiclen di/cours
ferieuxjc lendemain aîncncdcuaut le Roy , on lui letta
aux pieds vil fagot de Arment , auec exhofrration de con-
damner ce qu'il ;!uoit ekrit , s'il ne voijioit élire bruilé.
Ayant fait vne inodelle & courageufe rclbonre, il embral-
h ce fagotjle bailc,diî dçs paroles qui ne lèntoyent point
la terre , ôc toit après mourut paifiblement au milieu des
flammes.
ESPRIT familier,
PIvTARQj'Ejau Hure qu'il a fait du Dsmon deSocra-
tes, tient comme chofètres-certaincrafîociation des
ci'prits auec les hommes , & dit qiie Socrates , eilimé le
plus homme de biui de la Grece,diloit fouuent àfes amis
^u'il lentojtafiîduellemtnt la prefence dVn elprit , qui le
deilournoit toulîours de mal fiire & de danger» Le dil-
cours de Plutarque d\ long, & chacun en croira ce qu'il
voudra. Mais ic puisafieurer auoir entendu d'vn peribnna-
^e^encores en vie l'an 1580.) qu'il y auoit vn elprit qui lui
a/îirtoit afîîduellement, & commença à le conoiftre ayant
cnuiron 57.ans:combien que ce perionnagemedilbit que
il auoit opinioque toute là vie rclprit l'auoit acompagnc,
par \qs fonges preccdens ii: vifîons qu'il auot eu ûcih
ijarder àts \ict% & inconuenijns. Toutesfoiî il ne 1 auoit
iamais apperceu fcniiblement , comme 1! fit depuis 1 aage
<ie 37.ans:ce qui lui auinr,comme il ditjayantvn an aupa-
rauant continue de prier Dieu de tour Ion cœurfoir &
matinjà ce qu'il lui pleutt enuoyer Covk bon Ange, pour le
guider en toutes i^Cf. adlions. Apres :>c deuant la prière il
cmployoit quelque temps k contempler les a-uuresde
Dieu, ie tenant qutiquesfois deuxou trois heures tout
leul ^(^^ ù medi:cr& conteinpleijîv: cercher en Ion e/pritj
^ à lire h. Bible, pour rruuuer laquelle de toutes hs reli-
gions dtbaïues de tous colkztlloit la vrayc. Et diibiç
ii^uueni: qch vers du P/eaumt Hj.
cf mémorables* 73?
Evflgne moi coinmc il funt faire.
Pour bien ta i.olonté parfaire:
Car tu es mon 'vrai Dieu entier,
F.ij que ton efprit débonnaire
Aîe^tiide ^ meine au droi tf entier.
Il blafmoit ceux qui puent Dieu qu'il les entretiene en
ieuropinioni& continuant ceiteprierej & li^ntles (àin-
t\es Elcritures ,^ il trouue en Philon Hebritu au hure des
Saci-ifices , que le plus grand ik le plu6 .igreabie lacrifîce,
que l'homme de bien & entier peut fiiire à Dieu , c'eil de
loi-mefine cibnt purifie par luidl fliiuit ce conleiljofïrant
àDiculbname. Depuii il commença comme il m'a dit,
d'auoir des ibnges6c viiîons pleines d'inftruâ;ions;tantoft
pour corriger vn vice, tantoAvn autrejtâtoiè pour le gar-
der d'vn danger , tantoft pour eftre relblu dVne difficulté',
puis d'vne autre , non feulement des choies diuines ,ains
encores des choies humaines. Entre autres il lui lembîa
auoir ouy la voix de Dieu en dormant, qui lui dit, le iàu-
ueray tô ame.'c'elt raoi qui te fuis apparu ci deuât.Depuis,
tous les matinsjlur les trois ou quatre heures,l eiprit frap-
poit à là porte : lui Ih leua quelquesfois ouurant la porte,
& ne voyoir per/bnne.Tous les matinsl'efprit continuoit:
ik s'il ne fe leuoitji! frappoit derechef,6d le relueilloit iuC-
ques a ce qu'il fuit leué. Alors il commença d'auoir crain-
te pcnfant que ce fuil quelque malin efjjrir, comme il di-
fbit:pour cdh caufe ii continuoit de prier Dieu, fans fail-
lir vn feul iour , que Dieu lui enuoyaft fbn bon Ange , &
chantoitfouuent les Pfahnes qu'il Içauoit quafi tous par
cœur. Et lors l'efprit fe Ht conoiflre en veillant , frapant
doucement. Le premier iour il apperceut fenfiblement
plulleurs coups lur vn bocal de verre , ce qui l'eftonnoit
picn fort : & deux iours après ayant vn fîen ami,(ècretaire
du Roy,qui eiè encore en vie,dilîiant auec lui^ oy:jnt que
J'elprit frapoit fur vne efcabelle ioignat de lui^ conÀmença
â rougir & craindre: mais il lui dit, N'ayez point de crain-
tejcc n'eft rien. Toutesfois pour l'a/lèurer il lui conta h
vérité du fait. Oriinfa aniurc que depuis celte/prit Ta
toufiours acompagné, lui donnant vn figne fenfîble,
fomme le touchant tantoft l'oreiUe dextre, s'ilfàilbit
73^ Hijloires admirables
^luelque choie qui ne tuft bonncji^c à l'orciJIe fèncftre , s'il
niilbic bjcn. Et s'il vcnoit quelqu'vn pour le tromper
&iurprendre, iiiêRtoit foudain le lignai i loreille dex-
tre:fî c'eftoit quelque homme de bien , & qui vinlè pour
/on bien, ilièntoitaulli lefignaià l'oreille feneftre. Ec
<9uand il vouloir boirs ou manger chofe qui full mauuai-
ièjilfentoitlefigual : s'ildoutoit aufîi défaire ou entre-
prendre quelque chofe, le mefme fîgnal lui auenoit. S'il
pcnlôit quelque chofe mauuaife , & qu'il s'y arreftafl:il
Icntoitaufll toit le lignai pour s'en deftourner. Etquel-
quesfuis quand il commencoit à louer Dieu par quelque
-P^loie, ou parler de lès merueilles , il le fentoit faifi de
quelque force fpirituelle , qui lui donnoit courage. Ec
afin qu'il difcernaftlefonge par infpiration d'auec les au»
très refueries , qui auienent quand on eft mal diipofé,
ou eue l'on elt troublé d'efprit, il cftoit efueillede
felprit fur les deux ou trois heures du matin i & vn peu
aprei. li s'cndormoit , alors il auoic les longes véritables
de ce qu'il deuoit foire , ou croire des doutes qu'il auoit,
ou de ce qui lui deuoit auenir. En forte qu'il dit,que de-
puis ce temps-iane lui elHduenu quaiî chofe , dont il
lî'aiteuaduertiiîement , m doute des chofes qu'on dojc
crûire,dontiln'aiteu refolution. Vrai ell qu'il deman-
<loit tous les iours à Dieu qu'il lui enfeignall là voIonte,l3
Ioy,(à veritérSc employoit vn iour de la lèpmaine , autre
<juc le Dimanche(pour Its dcsb:uchees qu'il difoit qu'on
fàilbfc ce iour-la) pour lire en la Bible , & puis meditoit,
& penfbit à ce qu'il auoit leu. Puis après il prenoit plailir
à louer Dieu d'vn Piàlme de louange,& ne Ibrtoit point
oeûmaiion le iour qu'il fel^oyoit ; neantmoins au fur-?
plus de toutes its actions il eiîoit aflcz ioyez , & d'vn el^
prit gay. Mais 11 en compagnie il lui aduesioit dédire
«quelque mauuaife parole, & delaifler pour quelques iours
à prier Dieu , il ei^oitauiritoîladuerci en dormant. S'il
liiôitvnhurequinefuft bon , l'elprir frapoit iUr leliure,.
pour le lui faire iaifi'er,& ciloit auHl toit deitourné s'il fai-
Voit quelque cholè contre là fantc , & en fa maladie gardé
loigneufenieDt. Brietil m'en a tant conic , que ce lèroit
cho-»
^ m emorahles» 7 j j
chofê infinie de vouJoir tout reciter. Mais fur tout il e-
ftoit aduérti de fe ieuer matin , & ordinairement àts
quatre heures, & dit qu'il ouytvne voix en dormant qui
difoit, Qu^ieft celui qui lepremierreJcuera pour prier*
AufTi dit-il qu'il eftoit fbuuent aduerti de donner Tau-
moine: & lors que plus il donnoitl'aumolhej plus il fèn-
loit cjue les afaires prolperoyent. Et comme ^qs ennemi»
auoyent délibéré de le tuerjayans iccu qu'il deuoit aller
par eau 3 il eut viiîon en Ibngc , que lôn père lui amenoic
deux cheuaux , l'vn rouge & l'autre blanc : qui fur eau*
fe qu il enuoya lou-i*r deux cheuaux , que (on homme
lui amena, l'vn rouge, l'autre blanc, iàns lui auoir
dit de quel poil il les vouloir. le lui demanday pourquoy
il ne parloit à Telprit? Il me iîc relponfe , qu'vne fois
il le pria de parler à lui: mais qu'auiH toft l'cfprit
frappa bien fort contre fà porte , comme 6,'\n marteau,
lui failànt entendre qu'il n'y prenoitpasplaiiîr ^ & fbu-
uent le deftournoit de s'arrefierà lire & ercnre, pour
repofer fon elprit , & à méditer tout leul , oyant lôuuen-
tesfoia^n veillant vne voix bien fort fubtile & inarti-
culée, le lui demanday s'il auoit iamais veuTerpriteii
forme? Il me dit qu'il n'auoit iamais rien veu en veil-
lant, hors-mis quelque lumière en forme d'vn rondeau,
bien fort claire- Mais vn iour elhnt en cxircme danger de
favie, ayant prié Dieu de tour Ion cœur, qu'il lui pieult
le pre/èruer, fur lepoinddu iour entre-fbmmeillanc
dit , qu'il apperceOt fur le lict, où il elioit couche, vn leu-
ne enfant veilud'vne robe blanche, changeant en cou-
leur de pourpre , d'vn vilàge de beauté elmerueillable:
ce qu'il afleuroit bien fort. Vne autre fois eftant auflî en
danger extrême, (é voulant coucher , l'eiprit l'en emnel-
cha,& ne cefla qu'il ne fuil leue , lors il pria Dieu topte
lanuidfàns dormir. Le iour luiuant Dieu le (àuuade
la main des meurtriers d'vuc f;ijon effrange & incroya-
ble. Apres eftreefchappé du danger, dit qu'il ouït en
dormant vne voix qui dilôit : Il faut bien dire , qui en la
garde du haut Dieu pour iamais f« retire. Pour le faire
court, en toutes les difficulté?., voyages, entreprifes
«iu'il auoit i iiixçj ii dtiaaodoic çonfeil à Dieu. £t coi^-
734 Hijlûires ndmirahles
me il priaftOicu qu'il iui donnai! la beneJicCÎon , vne
nuiàil luitatadiusen Jormantcju'il voyoit Ion père c*ul
le beniiibit.ray bien voulu reciter ce cjuc l'ay iceu JVn td
pcrlonnagc,pour faue entendre quelaUbciation des lui-
îins elpriti ne doit pas eilrc trouuee eltrangc, fi les Ant^e^
& bons clprits ont telle locictc fie intelligence auec les
homïrmsd.Bodi.i an l. Uitrc defu Ddinjnomafiicchap,!.
E SPR ITS diuers.
NO vs ellions trois compagnons, qui îuCmts en/êm-
ble eniioyez à refcolc, pour aprende le Latin. Uwi
J'aprint facilement, S: les autres ne peurent jamais com-
poJer vne harangue qui ïui\ congrue <Si élégante. Mais c-
ibns paflèz tous trois à l'eftude de Dialectique , l'vn de
ceuxqui nepeurent aprendre la Grammatique rttmer-
ueilleuiement excellent & aigu es arts , & \ts deux autres
n'en peurent,en toute leur vie,proferer vn /êul mot. Ei^âs
tous trois Venus à Tellude d'AlrrologiejCe îut choie digne
«le confideration , que celui qui n'auoit peu apprendre ni
JeLatinjniîaDialecliquejrceut en peu de temps plus que
ie maiftre qui nous enlèignoir,ne pouuant rien compren-
dre es autres Iciences. Dcquoi e'iantelmerueiîlcjiecom-
menjay incontinent à dilcourir là defîusj&à philofopher;
& troiiuay en fin de compte, que chacune fcicnce demain
de Ton elprit détermine 6: particulier, lequel tired'icelle,
pour cftre appliqué à autre de difterente iôrte, n'y fert au-
CUnement.I.//«.irf an Hure de Cexotnen de fa cjpriis^ch.i.
Tay conu familièrement deux frères gémeaux d'ho-
norable race , hommes de moyens , qui ont vefcu long
temps en fincere amiticiquoy qu'au reftc prompts à cour-
roux. Mais la pieté leur commandant ils fe comportoyent
vrayement comme frères: tous deux amis des lettres &
lettre?. , mais (î differens en ertude , que l'vn n aimoit que
rhiftoire^diuerlitcdedircoursj&la mulîquc: l'autre au
^ memorahlcs. 7^j
contraire defdaignant tout cela prenoit tout (on cor.ten-
teiîientenlarecerclieiles fecrets de nature , autant ami
lit- Tolitudc, que l'autre recercheur de compagnies & pei-
ibnnes honorab)es.£.v/r4<t7^e mes rpenwirei.
FAMINE S.
LEs Portugais eftans fort occupez en Tan 1507. com-
me es précédentes oc iùiuances a prendre pied en i*Io-
Uc Orientalcfurent alliegez dedansvne fortciefle par eux
bathepres de Cananor^les Indiens ne pouuans ibuffiirvn
iougeftranger. Il y auoit ioigriant ceite forrerefte plu-
lîeurs mailoiîs , que ies Ibldati clliegcz g'iararrtjfibyeac
<ies courlts oC aiiiiuts dts Indien':. L on auoir /erré en j-
celles force marchandiiès, meubles précieux Scdcs vjnres,
dont les Portugaii- eftoyent nourris dedans ce lîcge. Ad-
iiinta par ]i nonchalance d'v II goujat, qui s'en allant cou-
cher iaifi'a là chindeiie allumée, que cefle chandelle tôba
lur quelque matière cobuihh'c, laquelle prmr feu inconti-
nentjSi er.ibroià la nujion. Or pource qu'jcelle & toutes
les autres eftoyent de bois j couuertesdc lueilles dcpal-
iiîier , Si. pioches les vncs des autres , elles furent toute»
bruflcesrce qui fut caule d'vnt gran*le perte, dont toutes-
fois Liurét B.-.'ttio capitaine de ia fortercIfL: ne iè fafchoit
pas tant que de la difettcde vjurcv , iefquels le feu auoic
conlumez pour la plulparr, & o'y auoit pas eiperance que
durant 1 hiuer on peurt aniCtuailler la forterelle d'ailleurs.
Comme la faim preiloit les alTicgé/. , premièrement ils Ce,
ruèrent fur les chat4,puis lur ies rats U lai/ards.Le Capi-
taine eftimar-t qu'il faloit le bazarder ht faiie v'ne lortie,
d'où les (îçns rapportèrent des coups, non pas des viures.
Aditinr que les afficgcansleur drtlicrêt quLiquc reps après
vnecmbuicheou amorce pour ks actraperpar le moyen
de deux vaches. Maisles afUegezeniagez delauiuCbrirnet
tn Ibrte qu dsgaigntrCt ces i.vachcsjdot ils ie nournvenc
par bo uiunage 4ud4Ues iouis;aiaii la faim la a^cuciiiic
^3 ^ Hijl aires adwiruhles
comme dcuant , bien toit après. Comme ils efîoyent en'
J extrémité de fe rendre , ou de mourir de faim , Dieu hs
lecourut miraculeulèment; caria mer commenta a eftre
tourmentee,& poufl'a au riuage vn nombre mfini de petis
poifibns nommez fauterellcs de mer , dont les Portugais
ra/rafiercntleurt'aim,i)i hs malades entr'cux commencè-
rent à iè refaire. Par ce moyen ils (buftindrent Je fîege
tout au long de Thyuer. Ofonus au /^diu4e l'hijloire de Por-
£n l'an l' lo.î^s Portugais furent afliegez dedans la for-
tcrcfiè de Goa,où ils le trouuercnt trauaillez plu/îeurs fe-
niaincspar aflauts continuels des Indiens. Mais la faim
«& ia foif leur failôit beaucoup plus rudement la guerre:
caries viures eltoyent faill.'s. Q^clquesfojs neantmoms
ils appaiioyent aucunement la faim auec le poiflon qu'ils
pefchoyent. Qi^ant a la ibif, d'autant que les giofies pîuy-
€s enflèrent teliement le fleuuequiiè deigoîgeoit en la
mer , que les ondes dicelle fe fentjrent de cefte dou-
ceur 3 ils iè foulagerenc , puiiàns de l'eau du reflus , qui
Jeur vint bien à propos. Ce nonobftant la famine croiA
fbit de iour en iour , lâns elpoir de foulagement : le fe-
courseltantefloignéj Scies ennemis ayant ceint la pla-
ce par mer & par terre. Mais finalement, Albuquei-
quc Viceroy de Portugal es Indes , considérant de quel-
le importance eftoit la perte de cefte forterefle , vint au
lècours , & mettant tout au Hazard fit en forte qu'il de-
liura la forterefl'e 5 ibulagea les afliegez , dont la faim a-
uoiteftrangle quelques vns, & remit les affaires en meil-
leur eftat que deuant. Oforlus oh 7. Uu. de U ntefme hiji. de
Portugal.
Fernand Magellan Portugais , & quelques ÉrpagnoJsi
en cinq nauires 3 ayans iur la lin de Nouembre 1520. pal-'l
fêle deftroit des Patagones, depuis furnommé Magel-'
lanique entrèrent en la mer de Sud ou Midi, appellee
d'aucuns mer pacifique , fur laquelle ils branlèrent troi»;;
mois & vingt loursauantque voir aucune terre. Pen-
dant ce temps ils mangèrent tout lebif'cuitqui eftoit es
nauires , aucc les autres viures. Tout eftant failli , ils fc
mirent i baliier & curer la foute ^ où Ton tient le bifcuic
dans
O^ memoralïesl "yi^j
dans les nauircs,& en mangercm les raclures & îa pou
drc, nonobftant qu'il y cuit plus de vers cjue de micitc
de pain,& qu'elle Icniiltlc pilTat delouris à pleine gor-
g;;.Q^'anc à leur eau douce clleeftoii deuenuë iî puante
te Ç\ iaunc , que force leur eftoic de fe boucher le nez &
les yeux en la benuanc. Finalement la faim IcsprclTadc
telle fo te, qu'il n'y eut courrcyes,botines,fouliers , col-
lets de bufles & Je marroquin.couuerturcs de tôdaches
& d'eituits qu'ils ne mangcaircnr.-iufques à n'efpargner
mefmes c>;rtaines peaux , dont l'on enuelopoit \cs gros
cables de5 nauires. Car quoy qu'elles fuflent cxtreme-
mét dures, (îtrouuerêt-ih bien moyéde lesamolir,pour
les manger. II y eut à qui les genriues creurent tel-
lement, que quoy qu'aïs euffcnt les dents bien longues,
fi eft-cc qu'elles en cftoyent toutes couuertes, & nepou-
uoyeoîraafchcr: tellement qu'il en mourut dijfc- neuf.
Les autres furent fi malades, qu'ils ne fe pouuoyent ai-
dernc d-js pieds ne des niains. 'J^^fcours fur le i ^..ch.du i.
hitrc de Vhiftoire dunonueMt rjwnde de lerofme Ben'^o.
■Pierre Martyr Milannois raconte, queNiqacfa Ca-
pitaine Ei'pagnol eftani , comme plulîcurs autres , en U
conqueftc de l'InJe Occid';ncale, &: fort efchaufFé après
la dcfcouuerte des païs,où il peuft trouucr de l'or & au-
tres chofc? precicufes ; comme il rodoit autour de di-
uers riuages, fes compagnôs furent acueillis de fi afprc
famine,qu'ils commencartnt à manger leurs chiens, &
puis après les Indiens mclraes. Car \h fe trouuerent ea
vn quartier de pays totalement defert , près du deftroic
dcDarien : enfinquelquc foldats ne trouaans chofc
que ccfuft , bonne à manger, s'accordent d'acheter par
cnfemble vn pauur-e chien tout maigre & galleux , qui
ne pouuoit plus fe fouftenir , ne trouuant dequoy ron'-
gcr, & en payétvre bône îcme de ducats au maiftied'i-
celui.Ils l'efcorchét pour le manger, jettent fa peau gai-
leufe aucc qncloues os du tc(l fur quelques brofTailics
prochaines. Lé lendemain vn piéton, lequel n'cfloit pa«
de relie cambtade,pa(rant en ce chemin, fe faifu d'iceile
peau pleine devers, fortpuanrc, &: l'emporte en fon
taudis : l'ayant tellement qut:lleincnt ncrtoycc de Ja
AA
^^S Hisîoires ddmirahles
vermine , il la fait boiiiilir, puis la mangcPluficurs as-
1res Elpagnols accQurenc celle part > & quiconi^ue vou-
lue auoir vne efcuellce de ce potage, en paya aucnifî-
nier vn beau ducat , encore n'y en eui-il pas à demi. Vn
autre foldat ayant trouué deux crapaux les vendit à cer-
tain malade,qui en fie gorge chaude, & en paya la valeur
de neuf ducats. Coramc ces affamez auançoy et du min
pour trouuer proye, aucuns d'entre eux appcrceurcnt vn
Indien mort & tué par ceux du pais, dont le corps cftoic
demi pourri:ce nonobftant ils le defpecerent en Wcw cf-
carté , puis en firent bouilli & rofti.dont ils mangerenc
fort auidemenr,& comme nous ferions de viande dcli-
cieufe. Vn autre foldac s'eftant de nui£t lepait de fa
cambrade s'en alla cacher dedans des rolcauxcn vn roa-
refcage , prétendant trouuer quelque hazard mais ay-
ant efté contraint d'y manger de la terre molle , force
lui fut de s'en retourner à toute peine &dcmi mort
vers fes compagnons. D'enuiron huidl cens hommes
«qu'ils ettoyent la famine en faucha plus de lept cens
trente. Les refchappez de ce fléau furent ruez par les In-
diens près de Darien.ï.;W«rf.<i» lo.huredefa i. Décade
de l'Oceanytout à La fin.
Durant le tempv Se efpace de cinq ans entiers , com^
mençans l'an mil cinq cens vingthuid , vint le temps
en telle indilpofition &:defordre , que les quatre faifons,
laiflans Icurcours naturel , fcsinonltierent toutes con-
fufes entre elles:de forte que fans l'ciJeuation ou dclcen-
tedu foleil, qui apporte les longs ou petits iours , 6l Jà
maturiic des frui(fts de la terre , on ne pouuoii quafi bô-
nementconoiftre en quelle faifon de l'année on eftoitt
çant elles paroiflbyent defregiccs : le prin-temps fe mo-
ntrant eu automne , l'eftc en hiucr , l'automne au prin-
temps, & l'hiueren efté. Mais fur tout l'efté eut telle
puiffance qu'il gaigna le delTus , tellement qu'au coeur
«iel'hiuer, onvoyoit les arbres fleurir, & le fiuift s'eo
alla aucc la fleur. Durant ces cinq années n'auint froi-
dure ni gelec qui duraft plus d'vniour ou dcdeu\:enco-
rcs n'cftoit-ce froidure d'ôt l'eau pcuft fc côgeler. Pour-
tant voyoLC-on ks laboureurs & vigacros jpluficurs fois
durant
daràhiï'hiuer, trauailier es champs & vignes tout ea
chemire,& fucr,comm(; s'ils ci.flcnt clic en luin & îuil-'
Icc. La vermine futcnrrescniiè par tel extraordinaire
pour ronger Jes fr uidls de là rerrcics fcmailles rie pro-
duifoyencpreiqucs riea.Dc ceftccd/amité s'enfuiuit Sc
commença la famine qui cnuahit toute laFrance.oij el-
le dura cinq âïM> entiers. La cherté de biedconiiTiença;
i*augmcntanc de faifon en autre. CeuX qui parauani vi-
uoycnc aifément de leurs rcuenuS,l:urét concrains d*aN
1er demander i'aumofne de porte en porte. Le nombre
des pauures & mendians croifToiL de tcJlefortc > que
c'ei\oic horreur de les vojfen troupe , iriruppurraUlc à
leur rubueni!,& plusdangcreufc aies endurer : attendu
la puanteur extrême qui les enuironrioit , procédante
d'infcdtion d^air , & de ces pauuries corpsforcez par la
faim d'emplir leurs Ventres de toutes les chofcs dont ils
fc pouuoyent aduiler.bonnes & mauuaUls, faine- & vc-
lïimeufeirellemcnt qu'il n'y auoit herbes ni iardinsges
qui leur dcmcurairent dcuant, iufques aux tiocs & raci-
nes des choux, dont nes'en trouuoit pas à demi.Lcsiar-
dins raclez ils recoururent aux herbes fauuages & inu-
iîtees , cuifans des chauderonnecs de maulues & char-
dons,y méfiant quelque peu de Ton, dont iisfe rcmplif-
foient,autres y mefloient quelque auoine moulue. Oa
fît du pain de racines defcugere.dc gland, de fairie. Ce
quicngendra de grandes Sccontagieufes maladies. Oa
voyoiL des troupes d'hommes & femmes , de tous aa-
gesjtremblottans par les rues, les autres tous enflez, les
2Utres demi-morts couchez par rerrc , tirans les der-
niers foufpirs. Les eftables en eftoyeiitpleinejjlcs fu-
miers couucrts:autrcs fi foiblesqu'à peine pouuoyeoc-
ils defTerrcr les leures pour dire leur neccfliré , ni re-
prendre leur foufflcmais branfloyentfur leurs ïambes;
plus femblables à des morts qu 'ij des v; uanr. La gran-
le pitié cftoit de voir des bandes de pauures me-
'cs , maigres , desfaites, tranjTics.enuironnees & char^
>ccsdeforcepetisenfans dcmefme parure, lefquels dp
grande dcftrcfle de famine crioycnt , & felamentoy»
. îTità Icun œcrcs ,qtti 1« rcgardoyent piieufccicctâ %•
A A »
.^'
^4© Jitfioires admïrAUes
iju'il me fcmble qu'il n'y a puic comparable à ccIJc la*"
le TOC fouuics en auoir vcu vne à Louhans en liourgon-
gne-.laqucllepar grand pourchas auoic obtenu vn mor-
celée de pain, lequel lui tut ai raché foudainemct par vn
fîcn petit cnfauc qu'elle allaittoit & icnoïc entre /es
bras, qui n'auoitàgrand' peine encor voan entier, &. ne
l'aucicfa mereiamais veu manger pain, dont elle piinc
às'efmerueiller grandement, regardant ccft enfançoa
maogsrdu pain noir,dur & rec,de d giandappeiii , que
c'cftoit choie monftrueufe.'car il auinc que la mcre vou-
lant amalTer des miettes tombantes de la bouciicdc
Tenfançon ilfe print à ciier &fe b^itrc lî fort,qu'il Icm-
bloit extrêmement dcfpité de voir qu'on lui oftaft Ts
miettes, leiquelles mefmes auec fespctis doigts il arra-
choit de la bouche de fa mère. En vn village non fort
loin de Louhans y ;utdeux femmes , leiquelles ne
trouuans plus de quoy appaifer leur faim-Ic remplirent
d'vne herbe vcnimeufe nommée Squilla, relTembiant à
oignons ou pourreaux, & s'en erapoifonnercnt de tel-
le forte, que les extremiiez des pieds & des mains leur
dcuindrent verdes comme à des laizards, & leur Ibrcoic
le venin par defïous les ongles . dont «lies moururent
toft après. Cefte famine produifîi vne horrible maladie
nominceTrouflegaland , Liquelie emporta en peu de
temps vn tiers de perlonncs en diuers endroits du Ko*v .
yaumc. La cherrç exrreme prclqucs par tout, fat caulc^
au(îi de merueilleux changement csacheis & ventes àe,
polTclIîons &: voedelblafion prefques incroyable de la,
plufpart des payfans, comme G.Taradhi le monftrc au }.
liu.de [on hiftoire de nojhe tempStChup. } .
De noftre temp> quelques villes afliegees ont elle-
réduites à extrême difctre. l'en allegueray quelques c-
xépIes.L'an mil cinq ces quarâte quatre , le roy de Frace
ayîtgaigné la bataille deCenfolcs lur les ImpcrirJiiles,
fit afliegerja ville de Carignan en Piedmont, ouil y a-
uoic (î peu de viures qu'au bout de quinze iours lapluf-
part des afjflegez ne viuoit que d'herbes cuites fans iei ni
huile & valoit l'œuf en iceUe ville vn carlin, vne poule
trou franc5,la liurc d'huile vn cfcu. Deux iambons de
, pourceau
I
(^ memora lies. 741
pourceau y furent vendus cent trente efcus. Mais corn-
bienquela force corporelledefaillill aux afîicgez.û re"
tenoyent-ilstoufiouis leur fermeté Sr coniUnce t telle-
mét qu'après auoir beiuc.^up foutferttiufciues à n'auoir
plusdequoy fe nourrir, coir» me ils eftoyentfur le bord
de del'elpoir,& en crain de bruller Ja v\ lie , puis fe fau-
ucr coromeilspourtoycnt, on leur fît compofition hô-
nelte, tellement qu'ils fortircnt vies & bagues fauues.
Le mefme nu ^JiM.chaP. ç .
L'an mil cinqcens cinquante quatre, la viMe de Sie-
ne fut a(îîegeeau nom de rerapereur par le Marquis de
Matignâ.Elle tint bon phifieurs inois j mais en fin l'ex-
tremedirette& famine contraignit les afilegez de fc
rendre l'an luiuant. le repre'enteray quelques pârti-
eularitezdecefte mifere, félon qij'cUes font cojchees
par efcrit au trotjlef/ie Hure des commentaires dttS. de ^itont-^
lnCy lequel commandoii lois au nom du RoydeFran-
ce dedans icelle ville. Les Sicnois ayansdés le moisde
Septernb'efaic defcription des viures n'auoyenc trou-
ué proiiifion pour manger iufques auquinziefme de
Nouembre. Énuiron la mi-OÂobre Ton commença
àypouruoir plus eltroitremenr. Enlanuierlcs Alle-
mans de la garnifon cômençoyeni fort à patir de vin, 8c
\z pain bien périt: car de chair il ne s'en parloit plus, fi-
non de quelque cheual ou quelque arnequ'ômettoii en
Vrnte à la boucherie : pourtai^t falut-il trouuer moyen
de les mettre hors à faur.eîc,ce qui fut fait dextrement:
combien que depuis par leur fiace ils furent mis en
route par les chemins 5c loin de Siene. Il fat queftion
puis après de mettre hors lesboachci iouales, dont le
rooile le trouua moicr à quatre mil quatre ces ou plus,
le ne visonc(dit Monrluc ) pareille delbîadon ; car il
faloic que le maiftre ahandonnaft Ton feruiieur, «jui l'a-
uoitferui long temps, la raaiilrclTe fa chambrière, & vii
monde depauurcs gens qui ne viuoyenrque du trauail
de leur bras. Cefte defolation dura trois iours , & ces
pauures gens s'en alloyent àtrauersdes ennemis > lef-
quclsies rechairoyentvcrs lacité.Tout le camp enne-
mi demeuroit iour ôcnuift en armes pour ccftcffcd^j
A A $
I
74* IJijt9tres àdmiràUes
car il« les nous reicttoycnt iufques au pieddes morail^
lcs,afin que nous les rcceulTions & fiilîons rctrcr dcdâs»
pour piuftoft manger ce pc u de pain qui nous reftoit, &
voir fi la cité voudroit fc rcuoltcr , pour la piiié de leur
fêruitenrs & châbrieres:mais cela n'y fit rien , & fi dura
hui(5l jours. Ils nemageoyent quedes herbes, &cn mou-
rut plus de la moiticrtar les ennemis les luoycc , & peu
s'en rauua,fors quelques homes forts & vigoureux, qui
pafloyent & efchapoyenc la nui£l , & quelques femme?
èiftiics. Apres que les alTiegez eurent fouffert ce qui fc
pcut.Uplurpart n'ayans des quelques fcmaincs plus do \
pain, force fut d'encrer en capitula lô au mois d'Auril, j
laquelle fjc accordée affez aduaatageufcment par le
Marquis, le camp duquel louffrou beaucoup.
LcsafTiegez lortirent le zr.d^Aunl Ils chargerét les
femmes anciennes & quelques enfans fur les mulets
<5ue le Mjrqui»; leur prefta.En après marchoycnt à pie<i
plus de cent filles qui fuyuoyent leurs percs 6i mères ôc
des femmes qui por:cyétdes bcrecaux oùeftoyét kurf ,
péris enLni,& eufllez veu beaucoup d'hommes qui te- \
noyenr en vnc main leur fille, & en l'autre leur féme: & •
fuent nombrczplus de huiclcens hommes, fçmmes &ç.
cnfins,('u.uis de ce qui eOoitrelté de gés de guerre, ga-
rantis dci dents de la famine. Eflansarriuez à vn petit
village nômc Arbierroure,Hous y trouuifraes (dit Môt-
lii:)dixhuiit afnes chargez de pain. que le Ma qnis y a-
uoitenuoy z pour le nous dillribuer en palTant.ré bail
lay vnc p :rtie aux Sienuis.vne autre aux Italiens, & l'au-
tre aux F.âçois. Paflant parmi les Efpagnols les foidats
auoyent por.é des pain tout exp^cs,& en dônoyent aux ;
rolt'e.Ie veux dire, au tefmoignage de ceux qui cikoy- \
en' auec mov,quc ce pain duMaquis fanualavie à plu? !
de ieux ces pcrsônes,voiie à plur d- quatre ccs.Encorcs
lie fe peut il faire qu'ii n'en mouruft plus de cinquante
ce iou :nerme;c3r nous auions demeuré depuis le Me-
çtcdi lufquc^ i^ii Dimanche, ;ani manger que fix onces
^e bifcuif le lour pour h5;ne. Cela s'eméd desfoldats,8c
quant aux pauures .Sieiiois.la prr.uifion eftoit bien plus
m^igifjapineo mourui-ilvntfcigiapd oombrc dedans
h, ville.
I
^ niemcrAllesi 74^
ït villc.tc Icudi,<lc deux cheuaux,quc i*auois'( adioufte
le mcfmc Sieur ) i'en fis tuer vn , qui vaudroic à prcfenç
plus de deux cens efcus , & le départis par toutes les cô-
pagnies Frâçoifes & Italiennes:& fis prédre route l'hui-
le dcï lapes àzs Eglifes,&la diftribuay pareilleruent aux
foldcif» , qui auec des mauues & orties faifoycnt cuire
celle chair & huile : & ainfî fc fubftantcrent iufques au
Dimanche matin, qu'il n'y auoit hôme,quand nous for-
tifmesjqui euft mâgé vn morcean.Ce mefmç iour nous
arriuafmes tous delcharnez &prefques rcfiemblans des
mortsàMontalfin. Le fleur de Mont-luc n'oublie pas
de recommander la libéralité du Marquis enuers lui du*
rant ceftt famine,&au iour de la rortie,de laquelle nous
parlerons plus particulièrement en autre endroit.
Au contraire l'an iç 74. Lufignen ayant cftc aflic-
geeparvne armée puiiTantc , les aflîtgez prièrent le
chef d'icelle armée leur vouloir oftroyer ifTue libre
pour quelques damoifelles ♦ dont aucunes cftoyent en-
ceintes , qui dcfiroyent fe retirer en leurs maifons.
Mais la haine qu'il portoit aux adîegez , de religion
contraire à la fiene, fut plus forte alors en ini,que Thu-
manité & la courtoificfamiliere aux Princes, feigneurs
&gentils-hommes François , qui ne refufent lamais
telles faucurs , nommément aux damoifelles. llpen-
faaulîî queles laifiant là enfermées auec leurs enfans,
pour combattre la famine , leur maris fe rendroy-
cnt pluftoft que fi on leur permettoit de mettre de-
hors les perfonnes inutiles. Ce qui incommoda le
plus les adîegez fut la ruice d'vn moulin qui leur four-
niffoit de farines : car icelui ayant elle fouldroyé à
coups de canon les moulins à bras ne pouuoyent fuf-
fire : te Icmentqu'il y auoit difetre de pain. Les chats
& rats cftoyent vcnailon , &la partllferie de cheuaux
feruoit de délices. Ceux qui auoyent des cheuaux eftoy-
cnt eo peine de les garder, mefmemeni la nuift,& quand
c'eftoyent ieunes cheuaux : pource que la chair cq
e(toit plus tendre. La necefîitécontraignoit les foldacs
d'ofter ie pain d'entre les mains de ceux qui l'appor-
/A iiij
744 Hijlotres admirai le s
toycntdufour. Plul]curs ttiaifons cftoycnr percfesdt'
nui6t poury aaoir (Jcs viurcs ; & ainû ceux qui en a»î
uoyent quelque peu le troi'ooyent en peine de les g3r-j[
dcr;&: ceux qui n'en auoyent point , en pein^ den ccr-.*
cher.Outreccfte mi(erc, ils n'auoyent point de bois.
que des meubles & ruines des mailons , efioyenc mal-
velluSjdcfchaux, ia)al couchez, & raal blanchis. Les ca*»
noni\adcs pleuuoycnt fur eux,& les rues le troimoyenc
pleines de boulets. Sur terre ils combanoyent mam â^
m.'.in prefoues en lOi^s cndroits:& fous terre en comrc-".
minant. Apres auoir fouiieiiu le lîcge i'efpace de quatre»
mois ou enuiron,repou0^é pluficurs aflautSjfaïc mouriti
trois fois autant d'hommes qu'ils cftoyent, ôcfurmon-»
lé vne infinité d'autres maut , prefTc/, de famine extrc^J
me,ilsobtindrcnt honorable compoficion, & fe retire-!-
rent â la Rochelle aueclc baron deFronienay leurchcftj
depuis feisneur de Rohan en Bretagne. Hijt. deFranc9^
foui Hefiri III. ,
La ville de Leyden en Hollande , fur afTicgee de loia-
par la Espagnols, l'an i 5 74. Us firent plus de cinquan-'
teforts es enuirons, pour la priucr de viures , & la^
prendr.:, comme on du, par le bec. Le (ecours n'y pou-
uoit venir, à caiîfe de ces forts. Aduint donc que lesaf-
fiegez en grand nombre (car !a viJle eft gr3ndc)cu:ent
outre laguerrc la pcfte, & quclq'ies diuifions entre les'
citoyens, oficfiirmen:alî^ij?f zdedifcttc& de famine^
Les bourgeois fur lafin du firge fe montrèrent fort^
ma— :ontcns:aniri n'en pouuoycnt ils plus : car es mt^is
de luin & d* luillec , chafquc perfonnc n'auoir (juc de-'
mi liuredepain par iour.Sc fept femaincs après ils n'a-
uoyv-nt point de pain , & n'auoyent bea que de Tcau.
Es maiion<; d'^s plus aifez , lâchait des cheuaux eftoit
en telics délices que la pt-rdrix. Les chiens SE
chats roftis leur eltoyent friandife. Il fcroit im»
poiïible d'exprimer leurs diuerfcs forres dépotages.
Aucuns mangcoyent des fueilies de vignes auec du
Tel: autres faifoycnt diuersapreftsï auec des feuilles
de poirier , racines & troncs de choux. Le cuir ha-
ché menu leur eftoic viande ordioalrc Les damcifelles
man-
tr memorahles, 74S
I iPjMigcoyent les petits chiens dont elles fonloyenife
io.iièr. Si l'ot) tuoit quelque beftc , les panures garions
cltoyent Ijcrians comme chiens après 1^ curec , pour
voir s'il ne tomberoïc point queljbc petit moJccau,
qu'ils recueilloycnt & deuoroyent tout ciud. Le» peaux
de fcUes reiches,& les os parauani rongcz.dcs chiens e-
ftoyent recueillis des 1 ues &du fumier, Vi.e femme en
couche d'cnfuK auoir,par otdonnaHce demagiftrat- va
quart de hure de bifcuit de inarinicrs , par lour , noa
point d'auantage ,& telles femmes cftoycnt fi affàmecf
6i ie fruiifl de leur ventre tellcm.cnt extenue , qu*il n*d-
uoit pas la force des'aider pour venir aumonde.Amres
enfans crians après du pain mouroyent eatre les bras
de leurs rreres. Aucunshommes ne fc pouuans traîner
qu'à peine,en allant à la garde ,à leur retour chez eux,
trouuoyent leurs femmes £•: enfans morts de f.iiTiinc ou
de pefte.S'il en eniroit dix en g-^rde , il n'eu retourooic
X, que fix ou fept, en fin que trois les autres y demeurans
morts. Briefla mifere eftoit fi grande , qu'il n'cftoitpof-
fiblc de plus. Caril moururen la viiic.perîdant leficge
(qui dura rinq mois, depuis la défaite du Comte Ludo-
uic)tant de difetre, famine , peRe, que d'autres maladies
aiguës, enuiron fix mil perfonnes. Nonobllanc lefqucl-
les miferes lesaffiegés fe maintindrent courageufcmêr,
& furent finalement deliurezde l'imporiuniié des Ef-
pagnoli , qui perdirent vne partie d;; leur armec,toi;s
leurs forts & les munitions qui y eftoyent , cet bafteaux,
& forent contrains fe fauuer de villclîe.-car s'ils eurent
tardé demi iour à faire leur retraite , b mer les euren-
glouris. Cefte deliurancc fut le commencement de la
liberté en laquelle les HoUandois le font maintenus
depuis iufq.ues à piefenr. Quant à la refolution des a(-
ficgcz , vovcz ce que nous en aucns marqué ci après,
pariant des relaiiitionr; }^\<^n\^\ç.^.Htjl .despays biê>\.
La famine dont la viile de Paiis , capitale de Fiance,
iut battue l'an mil cinq cens nouante , futcxtrcine, a
caufe du grand peuple enclos en ce petit monde. Es 11-
iires imprimez il s'en trouue diuers auis , fur tout au rc-
gar4 du nombre àti pauurcs qui moururent de faim ea
L
74<? HifiotresdâmirAlfles
refpacc de trois mois. Lcsvnsdifcnc vingt mille, leS
aurres cent milL- pcrfonnes. Il ne demeura lorsdedanf
l*aris,cliic:n,ni ch cit,ni rac, m herbe & mangeaillc quel-
conque, fors chez jaelques particuliers. LcCcptierdc
bléluricforr de la famine fat vendu (îx vingts cfcus.
Pb ^n Ton n*en trouua point pour argent , & plufimirs
ruhcs moururent près de leur threfor , fans pouuoir
trouner dc-inoy viure.Nous lairrons aj Itfteur , nom-
mément à qui aijra efté lors à Paris>d'en reprefenter les
circonftanccs à la poOenié.
ledcfcriray fommairement , la terrible Famine. 4ont
M.Iear»de Lery & autres firent rudement battus fur la
mer , au retour de leur voyage du brefil , Tan mil cinq
cens cinquante huifl, fuiuant les termes d'icelui de Le-
ry en l*hiftoire qu'il a publiée. Eftans ( dit il)encorcs à
plus de cinij cens lieues loin de France, noftre ordinai-
re,tant de bifcuir, que d'autres viures &: bruuages ,n*e-,
ftant J3 que rrop petit, fnt neantmoîns tout à coup re-
tranché de la moitié. Outre encor le retaracment du
m.^uuaisremp'; & des venrs contraires , le Pilote , pour
lî'auoir pas bi<^n obferuéra route, fe trouua tellemcnr
dereu , qui pcnHint que nouf fnffions près de la coftc
d'F.rpagne, nousellions encore à la haureur des Ifles,
romniees Açorc $ , qui en font à plus detrois ces lieues.
Ccft errènrfut caufe que des la fin d'Auril.nous furmes
cnticrcmcni dcfp-ouueusde tous viures : tellement que
pour noftre dei liicr mets , ce fut à ballicr la foute ou
chambrcrtc blinchie & plaftree , en laq"elle on tient le
bîfcuJcdans les nnuire«;. y ayant trouué plusdev.rs3c
de crotrcs de rns qijede miettes de pain , paniitans
p-anrmoins cela auc-r drs ciilli-rs nous en faifions de
]a briiiîlir, laquelle eftoii anilî noire & amere que fiiyc.
Cc'jx qui â'ioyrtnt er»co.e des guennns & de^ perro-
quets le^ mangèrent. Brief des le commencement dti
mois de May, que tois viares ordinaires défaillirent
entre no j«:, deux mariniers mons de faim, furent ieitez
bor* le bord H enfencîis dedans la mer.
O jtre-pIus,dHranc ceilç famine , h tourmente con-
tmuanc
douant iour& nuidrcfpace de trois fcpmaincs , nous
ne fufmes pas feulement , à caafc de la mer,mcrucilleu-
fcmcnt haute & efmeuè", contrains de plier toures voi-
les,^ lier le gouuernail : mais aufTi ne pouuans plus au-
trement conduire le vaiiïeau , ToTmes contrains le bif-
fer aller au g- c des ondes & du vent : ce quiempcfcha
qu'en tout ce temps, & en noftre grande necefllté, nous
ne peufmes pcfcher vn feul poifibn. Somme, nous voila
derechef tout à coup en la famine iufqLi 'aux dents, af-
faillis de la mer dedans no{hevaifreau,& rudement bat-
tus de s vagues au dehors. Or cfvans fi maigres & affoi-
blis, qu'à peine nous pouuions-nous renir debout pour
faire les maneuures du nauirc , la famine fît aduiler au-
cuns de charpenrcr des rondelles de bois couuertcs de
cuir , lequel ils faifoyent roftir fur les charbons , &: ra-
clans le brusié , le m^ngeoyent comme carbonnades de
coines de lard. Tel elîay fait , ce fut à qui auoit des ron-
delles de les tenir fi de court , qu'cf^ansaufïî dures que
cuir debœuf fecapres les auoir découpées auec des fer-
pes &autres inftrumenspar menues pièces, ceux qui en
portoyenc les pièces & menus morceaux dedans leurs^
manches, ne les prifoyent pas moins que font par deçà
les gros vfuriers leur bourfcs pleines d'cfcus. Il y en
eut entre nous qui mangèrent leurs collets de marro-
quin, leurs fouliers : & les gsrfons du nauirc defpefche-
renttoutes les cornes de lanternes ,( dont va toufiours
g-'andnombe dans les v-iilTeaux de mer J & autant de
chandelles de faifqu'ils pcurent attraper. Mais nonob-
ftant noftre foiblcffcfur peine de couler en fond,& boi-
re plus que manger , il falloir qu'anec grand rrauail
nous fufïions iour & nuiû fans rclafclse aucune , à tirer
Teau à la pompe.
Le cinquicime lourde May eftant à la hauteur des
terres neufues & de Canada , relions où il fait vn froid
pxrreme ordinairem.ent , nous fufmes bactus d vnc
rude bize, qui nous caufa telle froidure , que durant
quinze iours nous n'cfchaufafmcs aucunement. Enuirô
Icdouzieffqe du mcimc iiîois.nollre canonnicr,au»iuel
I
745 ntîîo'tres ttdrhirdihs
parauanr, aprcs qu'il eut bivO lingui , i*auois vcu man-
ger ics trippcN ti'vn perr(»:juct tooics «rues , eftani en
Hn n)orcdcfaiai , fjtcoiume les précédons ic, té &
cnk'piilturé dedans ia me". NJois nous en foiiciaCmes
tant moins pour ie 'cga^d déficha ge , qu'au lieu de
nous dcf> ndre (î lors on nous cnlt alfjillis , nous eiif-
fions pluftv>ft deliic, lanr nous c-ftiODS atténuez, d'cllre
prifjs ^ ern.nenez pit qMc.'qie pirate > poutu^u qu'il
nous euTt donné à min?c( . Niais comme il p'euc à Dieu
de nous affliger coût le long de nortre voyage , à noiVc
retour nous ne vifmesq'j'vo ieul ^arirean. duquel cnco-
res(à canfc de noltre toiblclTc , ne pôaùans appareiller
ni leuer les vojlcs)quand nous )e dclccuurifmts , nous
n'enpenf.nes app^-cher.
Les rondelleslarn)cntionrces,& cous les cuirs , iiif-
qucsaux co'jucrcles des bThtjs,auectout ce qui le peut
trouuer pou/Cuttancer noftre njuircei'tans enneremcnt
faillis , nous pe.nfionseltre au bout de nortre voyage.
Mais la nece(litéreruetllaque!qiies-vns pour aller à la
chaifedes rats et des fouris , lelquels prelT^iz de faim
courovent en ^rand nombre parnni le vaifleau , où ils
furent (i bien g^ieticz , chaflez & pourfiiiais par diuers
artifices, qu'il y en demeura peu ou point. Celte cha/îe
eftoit de reqncfte & grand pris, l'en ay vcu qui ont cfté
venJus deur crois , 6: tufques^ quatrecfcus la pièce:
mais, qui plus eft,nortrebirbier en ayant vne fois prins
deux tout d'vn coap , l'vn d'entre nous lui (vr: ofïre , s'il
vouloii l'en accommoder d'vn , qu'au premier port ou
nou«; aborde ions il Thibilleroit depieden cap ; ce que
toatesfois le barbier ( préférant fa vie à des habits ) ne
voulut acCf-picrP, ief vous eufllez veu boullir les fou-
iis dans l'eau dr mer.a^jcc les tripes 6c boyaux, dont on
falloir plus de casq\ie nous ne faifons o-^dinairement
en tcre de membres de mouron. tt comme noftiecon-
trc-mailireeuiV vn iouraprefté vn gros lat pour le fi\-
re cuire , lui ayant coupé les quatre parties blanches,
lefquelleç il iccca fur le tillac , quciqu'vn les ayant fou-
ci :in aiT^aflecs, les fi: à l'heure grillcrfur les charbooj»
& les mangeant difoit n'auoir lamais mangt aifles de
pet'»
perdnsplus fauoureqfes.
Nous (ouhaur!ons lors les vieux os & autres telles
ordures que les chiens craincnc par delTus les fumiers:
& De fâuc douter que d nous euirioi:s eu de l'ht^rbe ver-
te,voire du toip,& des feuilles d'arbresjcoaime on peut
en recouurerlur lerre, noi.s les eullions bioucces ainfï
que font les bcftcs brutes. Ce n'eft pas tout ; car duranc
l'clpace de trois fc marnes que c efte alpre famine duia,
n'eilancnouuelieentre nous mde vin , ri d'eau douce
(faillie des long teirps ) nous eftanc relié pour touc
btuuagçvn peni: tonneau de citre,ilfut nicfnagé de
telle forte, uue nous n'en auions qu'vn petit verre par
iour. Tellement qu*eH3ntautr:nt ii: plus pîeiïlz de foif
que de faim, quaod il toinboii de I2 pluye nous eftcn-
dions des linceuls auec vne baie de f^r au milieu pour
lafaire diltilkr, nous la receuions ainli dans des vaif-
feaux.Nous rerenjonsaull] celle qui paj- peùs ruifleaur
dcgouttoit delfus le til.ac jquoyqu'à caufedu bray &
des fouillures des pieds elle fuit ^ lus croubie q4ie celle
qui court par les rues • mais nojs ne laillions pour cela
d'en boire. Ayans c{^.z fînalemëc réduits àcellie cxcrcmi-
réde n'auoir plusq du brefil, bois uc& (ans harnidité
fur tous autres, pluueurs neantmoins preifez iufoucs au
bout, par faute d'aune cho!c,en grignoroyéc entre Iciirs
den:s;tcllemcnt que le iicuf du l'ont nolt.'C tÔdufteur,
tenant certain ioui vnc pièce d- ce bois eni'aboDcke a-
uec vn granii fooipir medit.Hclas^de Lery mon nm? , il
m'e(t de;^ vnc partie de quatre rTiilIc rancsen France,
de laquelle pieuft à Oitu auoir fait bonne quittance , 3c
tn tenir maMUtrUAt vn pain de rol& vn verre de vin. Va
autre bon pcribnnagc . quia veica bonne pièce de téps
depuis -, eltant lors eltendu de tout fou long dediHS fa
petite Irgette, fans pouuoii leuer la lefte , ne bifîoic
ncanimoins, ainfi couché tout plat qu'il cfroir, d'in-
uoqucr ardemment Oieu tou t bon & tout puilïanc au
fecours de ceux qui ertoyentainiioppicirez.
Durant ccfte f^mlne nous eftions iî chagrins > qu*en*
corej que nous fjlîions retenus par la crainte de Dieu>
à peine pouuions-nous parier rvnàFautrcfans nous
7 ^ o Hlfloires admirdUes
Eafchcr : qui pis elloic nous nous ictcionsdes ceilIâJef
& regards de trauera , accompagnez de quelques mau-
uaifcs volotucz do nous entremanger. Le i s • & i "^.dc
May ,il y eut encore deux de nos m-annicrs qui niouru-
rcncdc Faim. l*auois toulîouis gardé vn perroqucrgros
comme vnc oye , proférant, jc^ mois auffi franchement
qu'vn homrac,& de plumage excellent, lequel de grâd
defir que i'auois de le Cauuer pour en faire prelciu à
monficur l'Admiràl , ie tins cinq ou fix lours cache,
fans pouuoir lui bailler chofc aucune à manger. Mais
lafaim me preflant, & la peur qu'il me fuit defrobé la
nuitl.ic le tuay , n'en iettant rien que les plumes. Le
corps, les cripes,picds, ongles & bec crochu, teruircnt à
quelques mien> arais & à moi de viuorcr ti ois ou oua-
treiours. Or à la parfin Dieu qui fouftenoit nos corps
d'autres chofesquede pain & de viandes communes, &
nous tédoit la main au porr, fir par fa grâce que levingc
quatriefmc icurdeMay i s 5 8. (loi s que tous elicndas
fur le tillacfans pouuoir prefqUcs remuer brasni lâbes,
nous n'en pouuions phis ) nous dcfcouurilmes la bafTc
Bretagne, & fecourus par argent dequclquc pain noitj
puis toll: après de meilleur pain, de vin & viandes , en-
trafmes le 1 6. de May au haurc de Rlauet, où nous fuî-
mes fccourus,r;îon que noltre miferc rcqueroit : & fur
la fin du mois allafmes à Hancbon ville à deux licuès
de là , pour y Iciourner vn peu pli)S,&; nous refaire a-
pres tant de mifcrcs. J.de Ltry en l'hijhire de l'Amérique
xhap. 2, 1 •CT' dernier.
Le Capitaine IcanRibaut ayant l*an iç^i.faitvn
voyage en la Floride, y baftii vn fort , où il iailfa feizc
foîdats fous la charge du Capjraine Aubert , puij» fe re-
mit à la voiie , en intention de reuenir à eux auec nou-
ueaux moycs pour s'y habituer. Ces foMats fe mutinc-
lent contre leurCapiraine,& le firent mourir , pour ce
qu'il auoit cltranglé l'vn de leurs comna^nôs , & confi-
né dedans vne Ille certain autre nomme Lacheré, lequel
ils allerentquerir,& le ramcncrcnten leur troupe, fur
Jjquellc ayans efleu vn nouucau Capitaine , voyas leurs
yiurcs s'accourcir,&^u'ilsii'auoyen[ noauciles de Frâ-
C9i
t?^fn€morahUs, 7^1
«, délibérèrent de baltir cux-mclmcs vnbrigaiin pour
s'en rccourrer,dôc ils vmdicnc tinalcment à bour, à l'ai-
de des Infulaircsjqui leur fournircntdcs cordages. Quic
aux voiles ils en firent de leurs chumifcs & linceuls. Au
premier bon vent qui fuiuinc ils fc icucrent en mer.
Mais ils fetrouuerenr courts de viurcs c>: d'eau douce,
parce que leur nauigaiion fut plus longue qu'ils ne pc-
foycnc. Car à gran^' peine auoyent-iis cncores isn la
tierce parc de leur rouie, qu'ils furenL Ijrpiis de calmes
& debonaces de mer ûcûnuyeufcs, qu'en tioisfcinaines
ils n'auancerenc pas vingt-cinq lu-'ues. Pendant ce reps
les viurcs acourcircnt, Cc en vindrcnt iufeju es là qu'ils
furent contrains II- pafll-r chacun à doi;ze grains de mil
par iour.Éucores n'en eurent-ils pas t()ulu;urs. De force
«jue tous viures ordinaires leur cftans dctailiiSjtorce tue
«ju'ils fc ieitaflent (ar leurs iouliers &i collets de cuir
iju'ils matigercni. Quanrau boire quelqucs-Vns cdnyc-
rcni de lalter de Tcau marine : mais outre ctqu'clJe
Jeur brufloit ia g^îge, clic leur caufoit vn efcorcheincc
de boyaux, qui(oucre eurs auties maux)lcs lourmctoic
cftrangemenî:. D'autres aiialo\ cm de leur propre Tri-
De. Oucie l'extrcnK tamine & la ibit qui les moieftoj:,
Jeur petit vailTcau s'ouurir de tous ccfttZjderorîc qu'ih
ne pouuoycnt foffire à cfpuifer l'eau quiy cutrcit, &:
commencèrent à perdre tout efpoir de ne vcuoir iainai»
la France. Pour comble de leur mifere, voici vn tiot de
nier &: vn vent impétueux qui les vont acuciilir, & î>ii-
fcnt levailleau d'vn coflc. Les vac>Me£ palTovéc par ceî-
riiS)Si eux ne ccnoycnc plus cépte de letfer l'eau qui les
fubmetgcoir. TouresFois l'vn d'enrr*ciiS reprenâi quel-
que peu les clpriîs, les alFeuraquc fi le vent continuoit,
dedans trois iours ils verroycnt terre. Ce propos \çs a-
ccuragea tellement, qu'après auoir clpuifc l'eau du bri-
gantm ils continuèrent leur rouie, en telle loric loutes-
fois qu'ils demeurèrent encore tiois lours fans boue ni
mafigeriAu bout defqucls ils le iugci ê: perdus, pciurau-
tant qu'ils ne defcouurirent aucune rerrc. Encefteex»
tr^mité quelqurs vns propo/eient qu'il elloii plus cx-
fcdieat, qu'vii ("cul œouruft j^uc tant de gens pctiflcta.
7^1 H'tji^Ares iàm irat Us
Ils arrcfterent donc cnfcailîlc que celui feroit mis a
morc& mangéjLirqin le fort tomberoit. Ce fui fur La-
chcrc, p.^r eux retire de Tlfle où il cftoit confine. Ils le
tueicmJonc, &cn partagereot lachair cTgalcmcnc en-
tre eux tous , lac^uclîe ils manc^ercnt crue , ap.es auoir
he!i Ion fang tout cliau<^. En fin Dieu eut piciéd'cux,
tellement qu'ils approcherencde lacoftc de Bretagne,
où ils rencontreréc vne robcrg • Angloife, laquelle ap-
prochant de leur valifeau les trouua fur le point de
lendie l'amc, les fecourut de viande & bruuagc , &: les
mi: en terre à Uuucté.'Difiours de la Floride.
L'an I 5 7 3 au mois de lanuicrja ville de Sancerrcaf-
fife furvn haucdc môcagne en la Duché de ôerry, ayatft
elte aflîegec par le lîcrur de la Chaftre gouucrneur dti
p^ïs.fe maintint courageufemct quelque tépsiLcllemcnt
que les sdiegeans ajerns cu'Hn'yauou guercsdevi-
urcs dv-'llltcrcnc de fc hazajder d'a-janrcge aux aflaui'*
où ils aiioycnt beaucoup perdu, & refwlurent d'afiame^
lesafTicgez, lefquEJs d^ptiis le mois de Mars iulqucsatll
mois d'Aojft lu,iportciéc vne fnTiiiiecxcreme , \zs cir-
conliances de laquelle font mcmorabL'S pourrinflru"-
diondcla poftcrné. k lesd'cfcriray dd'hiftoire qu'en
publia tort après M. lean de Lcry , tcfmoin oculaire>
& des prcmicrscn la ville durant ce liege,rerciint les
principaux poin(ns félon mon inicntiô en ces recueils*
Comme amfi fu!t donc , que des le commencemcrit
de Maisaudiian les viurcs commençalFcnt defiaàs'ac*
courcir dcdls Sancerres, & principalcm::nt les chairs de
bœuf 6i autres dont l'on vÇà 0'dinai:ement : le ip.du
mefmcmois , quifut le lourde TalTaut , vnchcualdc
charrette 4u gouuerneur delà ville, ayant efté tue du
canon,pre';drsr3mpars fur efcorcbé, découpé, empor-
té &: mange par le commun des vignerons & manou-
uriers, qui failoyent récit à cliacii n'auoir ijmais tiou-
ué chairde bœuf meilleure. Celaen fîtcnuic à plulîeurs
qui ne pouuoyent aifément recouurer d'autre chair:itl-
Icmentque des lequatricfme iour d'Auril fuiuant on
tua vn afne duquel le quartier fut vendu feulement
pour lorsquaire liures tournois: £cfus trouuébonde
tous
t^ memoraUes] «7^^
tous ceux qui en inangercnc , tant bouilli que rofti &
mis en pallc, mais fur tout, lefoye rorti aucc cïouxde
girofle fut croiuîc de mefmegouft qu'vn îoy<t de veau.
Il y auoit beaucoup d'aihcs & de mulets dedans San-
-ccrrc-à caule de la (îtuauon haute, & du lieu mal acceflî-
^ble pour les charrettes. Dans vn mois ils furent tous
/jiuez & mangez peur chair de bauf, &enfir-cnrrop
grand degaft , dont Ton fut marri puis après qu^nd
la famine acrcut. En May l'on (c printàtucr les che-
uaux & à vendre la chair en pleine boucherie, à com-
^mode prix du commencement. Mais fur la fin de luillec
, & en Aouit la iiure s'en vendoit i 8.io. & i i.fols. Le
moindre prix fut i o.&: 1 3,roIi les teftrs, tripes, foye & \t
relkjiufques aux pieds, encore plus excefliuement cher»
La langue en eftoittrouuee délicate, & le foyc encore
,plHS.
La famine s'augmentantjes chats curent leur tonr,&
furent mangez en peu de temps : tellement q'je l'en-
geance en faillit en moins de quinze iours. Plufîeurs fe
mirent à chaireringcnieurement aux rats, taupes & fou.
jis.Sur tout vous eulfiez vcu les panures enfars bien ai-
.fe$, quand ils pouuoycnt nuoir quelques fouris , qu'ils
/aifoycntf (lire fur les charbons, le plus fouuent fans ef-
Xorcher nivuider, & d vue grande auiditc les deuoroy-
•ent pluftoit qu'ils ne les msneeoyet :& n'y auoit queue*
.patte, ni peau de rat,qui ne fuit loudnincmenr recueillie,
pour (eruir de nour.-iiure à vue grade multitude de pau -
ures Ibuifrcceux.
Les chitn-î ne furent pas efpar^nez, ains fans horreutr
ni apprehenfion fureur, tuez, pour en manger auffî or-
dinal; ement que les moutons en autre faifonrôc en a-on
aflonmé &iucq»ii oncel^c vendus les vns cent lois, les
autres fixliL^res-tcurnois.Cch'- r'tftant nouucau d'ache-
lei lequi'-^tier de ciiien lo.^ iç.fols. La tcfte & le
refte fc vetîdoit de m-elmc. Muficurs afîcrmeyent en
irouucr la chair fort bonne , faifant auffi grand cas des
tcftes, pie(is,frcilVr es ?£. ventres de ces aniiiTaax, cuits a-
' Ucc çlpices oC hec'oes , que des tcftes ie veaux , de cl;e-
"Uicaux &<î'aigneauxi I-'-S cuiiTcs deleuriers roftîeSj
7^4 Utfloïres admirailes
cftoycnttrouuees iendres,&mangces comme rables lîc
licurcsrmais principalement les petits chiens de \â\tt t-
floyent tenus pour marcaflîns ou petis fans de biche.
Le fécond lour de luin fortirent enuiron fcptante vo-
lontaires de la ville, pour euiier plus grade famine : fut
ordonné que chafque perfonne î'c côtcntcroit de demie
liure de painpar iour;cc qui ne futpratiquéqu'cnuircn
huidiours. Gar ayantconuquec*eftoittrop,on le re-
duific à vn quart de liure,&: puis on vint à le reftraindrc
àvnelii.repar ftmainc. Mais fur lafîn du me:n:e mois
le bled &la farine au magazin public faillirent cniierc-
nient:fî que la plus parc des pcrfonnes dedans Sancerre
rien eutpius du tout.
Au commenccmétde luillet, reftasencores vingc chc-
uaux de Ivîruice, qu'on penfoit efpaigner pour Texire-
mité , la neccflîié fîr auilei auciini g (.fl'gyci files cuirs
de boeufs, de vaches, peaux de moutons & auiTcs(dont v-
ne partie fcichoic par les greniers ) pounoit point lup-
pleerau défaut de lâchait &des corps. De faid, après les
auoir bien pelées, raclees,lauect.,cfchaudees & cuites, ils
yprindrent telgouft^qu'aulTi loft que cela fut fceu, qui-
conque auoit des peaux , Icsaccouftroit de cefte façon
ou bien les faifoit roftir fur le gril. Ceux qui auoiéi de la
graiffe en faifoyét de la fricaflee & du paftè en pot. Cel-
les des veaux le trouuerét mcrucilleufemcnt tendres &
délicates , comme tripes de molluès. Les cuirs deche-
UaHX, de chiens & d'autres acimaux , inufirez pour
manger,furent mangezjcomme des autres. Les oreilles
d'afnes eltoycnclors a ufTi bonnes que celles dcpooi-
ceaux.
. La cherté fut fi grande en ces cuirs ainfî appareil'cz
(qui fe vendoyentlur les eftaux de boucherie , comme
Us tripes ) qu\n pied en quanc , ou vne liure de quel-
que peau que ce fuft,fe vcdoit douze &c quinze fols.Cc-
ite viandecoramençantà faillir , les plus fubtils com-
mencèrent à faire ('(Tay des parchemins : cequ'ayant
bien iucccdcja prefil y fur relie ,que non feulement les
peaux de parchemin bUnc furent mangées , maisaufîî
lesictcre:>> ulcrcs liiures imprimez & cicritsàla main,
uns
0* memoraèiesl yiè
fans Ce foncier s'ils cftoyêr vieux ou no.Les peaux (^è^râ'-
oour, les fonds de criblcs,croLiez & perctz , 1-s coletb de
buffles &ajtres(piincipaltm tnt ceux decim b anOfu-
icni dckonrûS,dcicIoucz,iau':z & batius :6mc lin£re de
lexiucbouiiliSjfricafTcz &.mar gez.Les foJdais es «.o.ps
de garde, qui n'auoyenc loifîr de fjtre tant de façcjn au
parchemin , fe ccntenroyeni de le graifTc. auecdu faif
de chandelle , puis faiioyent griller tel apreft fur les
charbons, & mangeoyent cela.
Les cornes de pied de cheual amaffecs fur hs fumier j,
les vieilles cornes de bœuf & de v Jche , les vieux os re-
cueillis par les ruci furent rongez & mangez de plu-
fieurs qui ne iaifTovcnt rien en arrière parmi les ordu-
res, non plus qi.e files canes & poules y ciffnt bec-
quette & gratté. Les cornes de lanternes ne furent non
plus oubhces,ains arrachees.roflie^ & nnangee^. Les li-
cols,pt>i£lra!s, croupières, &tous autrts harnois de che
Ual.fpecialement cequieftoit de cuir blanc) tant v.eur
& vfcz fL:(Ient-ils,eftoyent coupez par pièces, boiii iis,
gnliez & f/ icaflez : & Te vendoyent es bancs des bou-
chers bien chèrement & à g'and' pre(î-".Lcs enfanî. qui
auoycnc des ceir.tures de cuir les giilloyér fur les char-
bons , & s'en defieunoycnt comme d'vn lopin de tripe*.
Les vieux &: gras deuaniiers de peaux de fauetics , con-
J-oyeurs & autres artilans : les nerfs de bœuf & d*autte^
beftes ayans ferui quatre & cinq ans fur des balh d'af-
Des & de mulets, ou a autres Vlages: ceux où pcndoytnt
des lonotemps les bouteilles à vinaigre : les pied* de
cer fs, de biches & de cheureux,où les clefs eftcyent pê-
duef, des les grands pei es, furenr deliachez, cuits & f;i-
ca(rez,& feruirent de nourriture à phifieurs. Les poi-
ftrals faits de vieux cuirs & de vieilles fai^ates, dont les
vignerons de la ville felei ;nyent pour plier les vignes,
fjrér auITî cuifcs &mangez.Q^ât aux rognures dMgi,il,
lettes , !->ourrcs,e(carcetlcs icautres merceries de peaux:
c'cftoumatieieponr fiicaffecs d*app(tit. Les peaux de
moutos, chevreaux aigneaux, & autres pallees cq galle»
alun.ou autrerr:cni (quoy que teintes ") eituyent cou-
iumiU. fcfuoyeat àconucùi e fauliilcs e«c autres lell
j^C [Hisîoires admir4Ù!cs
aprcfts compofez d'herbes & de ces rongnures, dont on
les rcmplilfcit , & les vcndoit-on aicû parmi U ville
bienchercmenr.
Ceux qui auoyct des iardins leseftimoient plusqu'v-
ne bonnr meftairic : car oucre ce qu'ils s'en nourr ifloy-
cnc, aprcftanc lesheibts en toutes les façoiis dont ils
jjouuoyeni s'auifer, fi quelqu*vnenauoic à vendre il en
tiroic argent afin mot : &nefc donnoit la fueille de
choux à moins d' vn Iiard ou de quatre deniers : les au-
tres herbages cftoyent vendus de mefme. On fjrciiToic
les choux de grains d- verjus & de louit: fortes de me-
nues hctb^i:pLiis(,c pi as louucnifans graiire)on les fai-
foit cuire &.iboiijllir dans l'eau. Bncfics iardins eftoy-
cnt d.^ relie rcqi'erte , que pour emperdicr qu'on ne
dc:lrob./fi. les herbes •> on y faifoit de nuiû la garde auec
les arnies,* omme fur la muraille. Lci plus pauures mâ-
geoyent i: diffe emment de toutes fortes d'herbes &:
racinesfauuagcs, iufme» arrachoyentles racines ce ci-
gué" , dont pluficurs tie ceux uui en mançerenc
deuindrcnt enflez, s'empoifonnerent & miOururetu. Ec
qucy qu*in cueillant telle*, rscmeson leur monft/sftie
.danger,ilinedeûftoy*:nt,Ie ventre aitamc n'ayant point
-d'oreilJes.
Sur le commencement de luillet le bled fut fî court
à Sancerrcqiie plus des f ois pans du peuple ne man-
geoycncplus de pain : & y en auoit plufîcu's viuans
d'herbe qui rendoyent leuis cxcrcmens comme fîenie
de chcual: d'autres auoycnt toufiours le fins de ventre,
& eltoycni tîfoiblcs qu'ils ne pouuoyent fc fouftenir.
Ceux qui auoycnt ou pouuoyentjtcouurer de la graine
de lin, de faiiifoin ,& autres qu'on ne s'cftoitiamais a-
.uifé de manger , les faifoyent monldrejou le?; piloyent
dans les mortie-s , & en faifoyent du pain, comme au/li
il s'en faif)ir de routes fortes d'herbes méfiées auec va
peu de fou, qui en auoit. L'on fitaufll du p^in de paille
de f: ornent tiemnec , découpée menu , pilee ô^ broyée.
Le; coquilles denoixaurTi pilccs dans les mortiers de
fer, & réduites en pouldre,fcriioyent de farine dont on
fdifoicpalle <S: pain. Qui ^lus eft> les aidoifcs ont cfté ea
ccftc
ceftc façon pilees , & pallbic-on la farine qui en forroit,
aucc des fas, dont fji fait du pain,deftrcnipant la paftc
aucccaUjfcl & vinaigre. Lcfuif, les chmdeilesdc fuif,
l'oing & autres vieilles graiffes,leruoyent à faire potage
&fricurc.
Onauoitiufcjues lors referué quelques cheuauxde
fcruicepour rcxcrcmité , iefquels on commença de
tuerie huniliefme dï Juillet , & y auoir telle preflc
pojr en rccouurcr , que les pièces en eftoyent vendues
comme aupoids dci'orrde force que ;3 de niere femai-
ncdudicmois , la îiare de telle chaii fut vendue lo. &
11. fols : la tefte de quelques vos fcpi francs &demf,
voire hjiâ: francsria langue tr oit francs Scd^mi C^a*
que pied trente fols;lal:ure de foye & de poulmô vingt
huiÀfols. Et s'eft trouué foye pefant prcs-de dix liures,
qui eft I 4.f'^acs le foye entier. Le cœur fe rcndoit aufli
iS.foIs laliurerlapeau huitT:& dix fracs: les tripes feizc
fols IaIiure,dont pîufieurs faifoyent des andouilles qui
Irurcftoyentdelices'.îa liu'e degraifle de cheual trente
fols. Le (ang d'vn cheual fe véiii i 8 frâcs:car ayant faic
d'icelui des bojdins auec vn peu d'herbes , il y en eue
40 liures,venius 14. fols la Iiure. Mais r euxqui védoy-
cnt n cher telles denrées aux pauuresnifamez , furent
pillez & rançonnez fansmifericorde par les foldats en-
nemis,après 1.1 reddition de h ville.
Ce que di: lerem'ie en fes lamentations des habi-
cans delcrufalem , Iefquels ayans acouftuméde man-
ger les viandes delicaces périrent par les rucs-.Sc fe paif-
foyent duran: leur fie^.' delà fiente d.s hommes & des
bcfteSia eité veu & prariqué dedâs Sancerre. Car ie puis
affermer que les excrcmcns humamsy oncefté recueil-
lis poiK manger. Et y en a-on ycu qui ayans rempli
Jeurs efcuelles de fiente de cheual lam-'ngfoycntdc très
grande auidi;é) difant la iro'Uier 2ufllbi>nne eue da
pain de fon. Ai rcfte ils amafloyent toutes fortes d'or-
dures ^ vilenies pat les rues, grattant fur les fumiers, y
cerchant les vieux o<;.vieiUe!. corpcs , & autres ballicu-
res, dont la puanteur pouuoit cmpoifonner ceux qui
les manioyeni,& plus cntoi oui les mangeoyenr.
BB 3
7,S
Uiffoires aâtmrdUes
Pour le comble de ccfte mi r;rc extrême, le M.dcliîil-
letfut de/cou ucrc & auercqu'vn vigneron, nomme Si-
mon Pota'-J, Eugène fa femme , &L vne vieille femme
<3ui fe lenoit aucc ewxjfu'^nômce l'Emerif, auoyent mi-
gélatcfte,laceruelle, le foye & la frcfTurc d'vne leur
fille aag:cd'enniron trois ans , morte coutesfois de
faim 5c en langeiir. Ils furent furprins ellans prcfts à en
miger la laogaerlcs deux cuiffcs, Jambes & pieds furent
troauez dans vne chaudière aucc vinaigre , efpiccs &
fel,picft à cuire & mettre fur le feu : les deux efpaules,
tras 5c mains tenans enfemble , auec la poi6lrine fen-
due & ouuerte, appareillez, audî pour manger, Empri-
fonn:z tous trois confcflerent le fait fans te giuerlaiiô:
mais nicrent d'auoir tué niauancé lamorc de leur en-
fant. .\ t ird ayant tfté outre cela conuair.cu, mefme par
fa bouche , d'cfpcced'aaultete , de meurtre pourpenfé,
4c larcin, fut brufjcvifjlafcmme cftranglee & brulleeila
vieille morte en priion déterrée & fon corps réduit en
cendres.
Des le mois de luin , à caufe de la grand* difettc de
viutcs.on auoit mis beaucoup de pauures hors de la vil
lc:cc que l'ô côcinua depuis à plulîcurs fois. Mais ceux
quifortoyt:nt ne pouuans paieries tranchées & forts
des afliegeans (qui en lieu d'en auoir pitié, en tuoyenc
plufieursjbleflbyent & r'cnuoyoyent les autres à grands
coups de baft >n jdemeuils dehors, & ne pouuani ni ne
vouîans r'cntreren ia ville, viuoyent des bourgeons de
vignes, des racu-^es croifsâces fur les hayeç, d'cfcargotf,
de limaces rouges, d*herbs.'sr3UU3ges:& après auoir la-
gui la plufpart moururct entre leldiétcs tranchées & le
fofFé delà ville. Encre autres fpe(flacles pitoyables, on
trouua les corps d'vn vigneron & de fa temme morts
IVn auprès de l'autre dans les vignes, & deux de leurs
cnfans aupesqui crioycnt & pleuroyent : le plus ieiine
n'eftant aagéquede fîx femaines,qu'vne honorable vrf.
ue.nômec madame Portier , cnuoyj quérir & fi' nouf-
1,'u de ce qu'elle peur.lcelle,3uec U femme duCapirainc
Marrin.it l*ainc,Françoifed*0!iujl,vefuc de l'-aiiBour-
^oin;lâfçinmcdc le4QGuiçhard ^ ^ c^uçlques autres
hpno«
^memordlleT, 7^9
honorables dames de Sancerre, exercèrent grande cha-
ricc au milieu de cefte excreme famine.
Si plufiivjrs mouroyentcn grand nombre par les vi-
f nés, auprès de hcôcrefcarpe & dans le fofle delà ville,
caucoup plus en mouroit-il dedans les maifons & par
les rues , où ils tomboyencde forte que tel iour y aaoit
qu'on enierroic viogt-cinq o\\ trence morts de faim.
C'eft lit beaucoup pour vne place d'enuiron deux mil-
le cinq cens pas de cour. Mais fur tout les ieunes en-
fans au deffous de douze ans y mourutent prcfqnes
tous. On les voyoït fubfîller&rerpirer , iufqucs
à ceque les oslcur perçalTent la peau , criansdevoix
Jamentablc , auanc que rendre l'efprit ; Helas .' nous
mourons de faim, il y eut vn icune enfant aagéd'enui-
ron cinqans, Icquelayantlonguemeni langui, chemi-
nant & trottant toujours par les rues pour cerch r
quelque chofe à manger , enfin nature defaillanr>
tomba deuant les yeux de fes pcrc & mère , lefquels
aperceurcnt tout foudain les nerfs & vemcs de leur
pauurc enfant fe retirer , & l'enfant mourir , combien
qu'il eult franchement parlé demie heure aupsra-
U3nr.ll y eut vn a utreieune garçon de ma conoifFance,
aagédcdix ans, lequel eftant aux traits de la mort , o-
yant fes perc & mère pleurans aup'-es de lui , & qui lui
manioyent les bras & cuilFes aufTi fccs que du bois, leur
dit , Pourquoy pleurez-vous ainfi de me voir mourir
de faim? le ne vous demande point de pain , manière,
ic fçay que vous n'en auez point. Mais puisqueDieu
veut que ie meure aiufi , il le faut prendre en gré. Le
faindlperfonnage , Lazare n'a-il pas en taimrn'ay ie
pas leu cela en ma Bible f Ainfi faifant fondre ie coc- r,
& ouurirlcs entrailles aux po >respere & mcrc, qui le
regrettoyent tant plus qu'ils conoiHTtyent que D;eu lui
auoit donne vn gentil elprit,rendit l'ame à Dieu le trer?»
tiefmede luiilct.
VojseuHlcz oui lors & plus de quinze iou''saupa-
rauanc , tantdepoures pcrfonncs languilTantes 6c
couch»wS par les u.es, hideufes,qui refrcmbloycat plus
à des corps mortsdcterrcz ^utviuanSjTe lamenter dVcc
BB 4
7^0 H\(lolres adm'ir ailles
voix enrouée & pitcufe. Les vnss'cfcrioycnt, Hch^I fî
nous auiôs m.îgc vn morceau de pain de (on nous nous
porterions bien. Les ancres plus defoucz Jifoyenr, (He-
Ja^lquand nous auiions des balles reliantes du fon (car
on leur en donuoic auelcjues tois ) Û ne fçaurions nous
les piler ni dcflreniper , car nous femmes tropfoibics.
Les panures raeres conuoyans leurs cnFins ircrpaflcz
aucemiciere , tenans &•■ crainans par la main ceux qui
rcftoycnn en vie.difoyent, Helas mon enfant, tu ne tar-
deras gucres «l'aller après les autres. Qj-ieiqucs gers de
bien s'humiiioyenc alors à bon efcict dcnat Dieu. Mais
il y en auoit d'autres indomptables & vendus à leur mi-
quitc,qui n'eftoyenc flefchis à repentance ni charité, par
CCS fpcttacles lamentables .
Depuis le I 5.de luillet lufques au commencement
d' Aouft que la difeue fut plus gtSdc»onacheua de tuer
les cheuaux rertans de ceux qu'on auoit rcfcruez pour
rextremité.Cu la clameur du peuple, & prmcipaleméc
des Soldats(côbien que d'autres fufsct plus neceiîîtcux)
qui crioyenc à la faim , fur telle qu^a giand' peine ceux
à qui ilsapartenoyenc reulfent peu empefcher. Vray
eft qu'ils les vendoyent excelîïuemenr : car tel cheual à
efté tué pour m.ïger, duquel l'on n'cuft pas eu dix cfcus
en autre tcps-qui a efté védu 6^0 efcus autres 80.& 100.
aucuns ayans monte à i s o!e dernier fut tué le i 7.iour
d'Aouf^, Mais »1 ne faut oublier que hui(ft jours aupa-
rauant vnecheurc fut tuec , donc on vendit le quartier
dix liures toui nois: la tefte, les tripes , &lc relie mon-
tant fî haut, que le tout iCuinc à y 5. francs. D'au:res furéc
vendiies » tf.S: i7.efLUS,&: en achetay vn petit morceau
ne pefancguercs ou'vneliure, quimecoufta 10. fols
tournois. Six vaches qu'on auoit toujours gardées,
pour dulaidid'icellcs nounit les enfani ( qui autre-,
racnc fulienc morts,parcc quelcs mcres maigres n'ayas
que la peau ne pouuoycnc les aUiter , ni nourrir autre-
ment jccnonobft\nt f;ircnc tuées :& n'en demeura pas
vne en la ville, cftis à C^ haut prix qu'on les vendit v\ o.
francs pièce. Vne monta iufjues à joo francs, telleméc
^ue le meilleur marché «^u'ô en cm en détail fut ij.i4'
& i y .fols
je I S-^oIs la liure. Qmjnt aux tripes, i*en achetay le i£
d'Aouilvne demie liure qui ine coufta dix fols tour-
nois,ce qui ne vaudroic vn Iiard en temps libre. Le coq,
la po'jie, le poulet (c vcndoycnt trois francs piei;e;l'cEuf
cinq & fix fois tournois.
En Iiailîet & Aobil , pource qu'il y auoit quelques
champs de bled entre la ville & les tranchées des affic-
geans , ccuxqui eftcyent efpars par les vignes, & qu'on
auoitmis hors la ville , auecles goujats & autrts qui
fortoyencde iiui(ft,alloyent le plus coyenient qu'il leur
e(ioit pofsible, couper & giénet de ce bled. Mais c'cfloit
peu 5 parce que Us gardes des tranchcrs ayans les fcnti-
neiies pofecs prcs a près, les defcouuroyent inccntiner,
& les harqucbuiades ne leur manquoyenc, teîlcm^nc
qu'ii y en eutdecuez furie champ. Ce peu qu'on rap-
portoir fe vendoit excefsiucmcnt,5:iurques à é.&7. fracs
vne petite gerbe , oùiln'yanoii pas vn quart deboif-
feau. La poignée & petire glenne oii il n'y auoit pas v-
ne ioiactee de main, douze & quinze fols. Vn goujat re-
fufa cinq fols de cinc|uunte efpics de b!ed. La liure s'eti
Vif ndcit vingt-cinq fo's. Plufieurs femmes oftoyent la
vieille paille de leurslidls , & des berceaux de leurs en-
fans, pour recer cher quelques grains ou efpics. Ce qui
s'y trouuoic eftoic pilé dedans des mortiers pour faire
de la boiiillic auec du fel & de l'eau aux enfans de
inammelle , Si, dont les pauures mères n'auoyent point
de lait.
La faifon âes verjus, dont p!ufîeuT*s fe nourriffoyent,
vint bien à poin£^ ; aucuns les mangeans cruds , les au-
tres cuiis 3 11 four , ou bciiillis en l'eau, les antres fricaf-
fez auec fuif.mouftardt ScePpices-Les meures des hayes,
ks prunelles & autres fruits fauua^es qu'on pouuoic
cueillir par lés vignes & buifTons autour de là ville e-
fVoyent de requefte, &: fe vendoycnt au mot de ceux qui
les apportoycnt:item les graines deraifon verdis, qu'on
mangeoit auec do i\-l,Sc les tendres des vignes. Vn ttps
fut que fc trouuant quelques noix , chalque foldat le
pafToit bien à vne , pour le faire boire : mais cftans fail-
Zie$,il$ fc coiue£Coyept chacun d'vn pcrrcau.
y6l Htsioires âdmirdlles
Somme , on tua pour manger dedans Sancerreen
moins de trois mois, durant le lii;gc,eniiiron deux cens
que cheuauT, que iumcns,pouIaini,arucs & mulets, cjui
y cUoyent auant <que la ville fiil^ inutft»c,&: n'y demeu-
ra qu vn cheual , au iieu duquel fut encoretué vn afnc
des ennemis , lequel lut prins aux vignes par nos ^'JU-
jarsau commencement d'Aouft. La dilcue & famine
tua dedans Sancerrç,en moins de (îx iemaines , fix fois
plus de perfonnrs , quelcglaïue en fi:en fcpt mois &
demi que duralefîegc. l-'ar le catalogue queiefiôdc
tous les morts &tueziufques au lo d'Aouft,tât du ca-
non,harquebuiades , qu'autrement en guerre , n'y eut
que 84.perlonnes & l'ay opinion qu'il cft monde faim
dedans la ville & à l'encourjdc ceux qui s'y eftoyent en-
fermez,p!us de cinq ccnsperfonnes,&: plus de deux cç.m
réduits en langueur : tellement que ie puis bien dire a-
pres leremiecn fcs lamentations , qu'il en cftoit mieux
prins àceuxquiauoyentefté tuczpar glaiue,qu'à ceux
que la famine occit. jTW. leande Lery en fort hiîiotre dupe-
^cde ^ancerre^l'an I Ç 7^ chap.i o.
lladioulle pour conclulîon ces mots , Qui ne fera
maincenant elbaiu,& qui n^ tremblera oy5t celles cho-
ies ? Er certes comme tous les refchappez de celle tant
afpre guerre & famine ont grande matière de reconoi-
itre leurs fauEes paflees,&de loiicr Dieu toute leur vie,
qui les a tirez tant de fois du pas de la mort ; auffi tous
Chrefticns en doyuent faire leur profit, & ne penfer pas
que ceuxqui eftoyent dedans Sancerfeenfermt z en tel-
le mifere fulTent les plus mefchans du monde.Car com-
me difoit noftre Seigneur aux luifs de Ion tcps,ceux fur
Jefquels la tour de Siloé tomba, & ceux dôt Pilatc mclla
le fang auec les f^crifices, n'eftoyét pas plus g-ands pé-
cheurs que les autres.Mais que û ceux quifçauoyent ces
choies ne s'araendoyent& rcpenioyent, ils peiiroyent
tous mjlheureurçmét.radioufte ce mot, que \^i auteurs
de tant de maux ne doyuét eftregueresà leur aife, quel-
que parc où ils foyent. Et quan^ à ceux qui ne deman-
dent qjc rcajuuelluneut de iiûubic ,pour voir les pto-
uinces en coufuûon , comme fous le règne de Charles
1X.5Ç
I X. & Henri 1 1 1. de cjl-cI^ iugemens feront-ils acca-
blez,(î de bonne heure ils ne fc repentent & s'efiorcent
de viute en paix chez eux merrrA-s,& auec les auucs?
F ^ VE V 2^ partiatlure au Uf^otn.
DEnollre temps certain criminel condamne par iu-
ftice dedans Lyon à pcrdie la vie , ccnrane il ap!0-
ch.'it du fiipplice, refchelb fc trouua vn peu cnurie.
Tandis que le patiêt actcdoit paifibiemenr lur icclle l^c-
xecu:ear,qui en eftoir allé ccrchcj voe autre, quclqu'vn
tendit à ce patient vn coufteau, duquel il c<^upa les cor»-
des dont ilclloit lié.deuât que perlonne s'en apptrceur,
puis feiette en bas-,& fcudain vn autre lui ieite vn man-
teau fur les efpaules. Voyant que faueur fe prcrcntoi!,&
m^^^yéde fefauucr, auec ceque le peuple lui faifoit lar-
gue pour fuir, il empoigne rocca{îon,& fe fourre en la
foule. Mais parce que cela ne fe fait ordinairement lans
bruit, les officiers de la luftice , vn peu loin delà poten-
ce,entcndans le murmure fceurcnt incontinent que le
patient fe fauiioit.IIs approchent, & cooïencent à crier,
Arrefte,Arrefte. En apparence jI cftoit reprins fans vn
marchand Italien, qui pour diuerrir le peuple , & U gar-
der de faire telle pour luitte. tire fouHain de !a pcchctre
vn fachet plein de liards, qu'il ictte fur le peuple. Alors
ce fut àfe ruer les vns fur les aunes par teirc pour amaf
fer ces liards. Cependant ils donnerét loifir à l'autre de
fe retirer de la p^ elle, à quoi il regardoitplus qu'à cueil
lirmonnoye. L'Italien content de telle faueur, pour
donner encore plus de moyen à ce pendart delej^a-
rantir , s^'aduifa de faire pcnfer aux officiers de iuftice,
que le criminel s'eftoit lauué en traueiTant le Rholne à
rage.Pour leleur faire ctoiie , il pratiqL:e fur le champ
vn gaigne. denier , lequel pour vn cfcu fe ietta dedans
le Rhofne,où rcu dcplufieuis. l'on cominencc à crier
que c*clloit le criminel qui te lauuoir. Qiiifutcaufe
^u'onenuoya vers Tautrc bord duRhofne en cxtiç-
7<> 4- Htjîoïres ââmirnl^les
rae (<iligcacc,pour l'jtcrapcr & ramener. Mjis les fer*
gcnsaccourus !à ne troiiueréctiuc le gaigne-dcnicr (le-
quel n'eut Faure de langage pour iuft:fier Ion faid ) <Sc
^'cti rccourncrcnt auec vn pi jd de nez. En ces cncrctai-
teslccrioîinclainflfiuoriréfc fauucau pciic pas. L'e-
xccuccur de retour au^c foncfchelle ne crouueperfon-
nc à pend;s;&ainiî l'a/rcmbleefc départit auçc huccs &
rifces.r^tîlien s'cftant monftré fauorahle & anni au be-
{oit\^9aradin at*iJ:u.dt'S mémoires de Lyon, cha. x 5. Nous
ne produirons celle lnftoirc à autre fin que le rilcre por-
tcrcar & celui qui fournu Iccoufteau aupendari , l'autre
ciui bailla le manteau. ceux qui tirent voyc , l'I.alienSC
fon CfOfhcteur eiloyent coulpables î vioUns la iurtice
en diuerfe forte. Les haces &: rifces du peuple dcicou -
urent auHi l'ignorance miferable de ceux qu» ne içiucnt
que c'elt d'ordre au monde. Mais le luge louuerainvcut
parfois donner rclalcbe aux criminels, poui leur donner
occafion de penferde plus près à leur vie palîec & au
fupport de Dieu : veutaulil aduertir ceux ou» lugcnt en
terre,& qui aliiflentauxiLîgemensSc exécutions, de cnn-
fî'icrer depres ce qu'ils font 6c vo)'cac , aiin que le lout
vife à fin conuenablc.
F E ^ ^E ayant quatre tet'ins.
Ï-^ N l'année mi 3 , ie fus appelle pour voir vne fort
i honorable damoifelle, nommée iLibeJU, fille de lean
Mafel, du lieu de S.nuue, mariée en premières nopces à
feu M.Sabourin dottrur médecin à Narbonne. Elle a-
uoic quatre tetins, deux de chafque cofté nourriiïanr ds
cnfansaiîfiibien des vnsquedes autres. Et ce qui eft cô-
fiderablc, l'on reconoilfoit fort clairement les rameaux
des mammelles vînir des axilUires,Sc non point (com-
me quelques vns pcnfent)de la foufternique , laquelle
n'cft fafîîfante de dôncr la trctiefme partie de la matiè-
re de laquelle le laift ell crcc.Bien vrai eft que celle fou-
ftcruiqacn'eftanc Fabriquée que pauiia uourriture du
fîxiefme
^ memorahles. 7^^
fîïicfmc mufcle de la rcfpitaucn , & de la partie ixi^t-
Ticure des longitudinaux , en paliànt elJedorneaiiîdi-
tts mammellcs vn rameau capillaire.mais non ceJ «^u'il
Cuffife à la génération du laid. L'on tient au/îi c]uc la-
dite foufternique à communicat)ô auec la matrice, par
le moyen de l'hypogaftrique, à laquelle me feii/ble que
Narure le feroit cTtrangemcnt: i( iiee , fî eJieen auoit
autant donné à l'homme qu'à la fcmmc-.vcij que i'hom-
me n'a m matrice ni mammelles portans lai6t. 'Burtb.
Cabrai enfcs obferUiiUoni tinatomiauesychjer.y .
FILLE ejTimee ençe'inte^v.-ih yicrgs , q*
L'.AniÇ9î.iefus appelle à Montpellier pour vifîter
vneienne fille aagee de 17. ans tourmentée des mef-
mes accidés qui auienét à vnefemm^ enceinte, qui veut
faire l'enfant. La mère la voyant en ceileilat demeura
raerueiilcuremcnttroublee , penfant que fi Hlie Te fuft
oubliée en ion honneur. De fait. pour la reconoifirc &:
fccoLrii (î befoineftoic , appelle dame Gcriiairs fage
fciwmcde la ville , tics-renonjmee pour l'expérience
qu'elle aacquilc enlbn ait ,' laquîriic avant reconu le
fdi<ft, dit à la mère que ce n'eftcif pas m^iierc de rrco-
noi(rance,maisqu'ilfalcirappeller i:sailtre Noc-i Tour-
tel & moi.Efians a'^riucz nous vififalraes la panure fil-
le,trouuafmes l'orifice de la vuhie fermé-, auec arr as de
fang mcnlrual i'orti hois des vaiifeaux, &: retenu dedâs
la capacité de la matrice durât neuf mois, tout auifi que
fi ellecuftef^é grolîe. Aurint que d'y ricn-fairc,nous aui-
fafm.es de faire appelîer mor.fi-ur iaporrc , docteur ré-
gent en l'vniuerfiié , hommetrcs docte &rTes-txpcrr,
tant en théorique quepratiqi;e. Lui venu.le fntdcbatu
entre nous > la refolurion fut qc'cn lui fc'roic vue inci-
flon etî long, de la grandeur de quatre doigts ou eniii-
yf.G niflûïres admirai Uf
''on,comm€fa waturcaous rcprcrcnroit. Auflitoftl'o-
pcratioii lut fait- par M.Nocl, ciiiruigjcn bica dulic Sc
trcs exp:rt. L'ayant raiu, il en ibrcicdijc oudouzcli-
uresdciang groUîc; 3c boiiv^ux , rc{r>mblant pluiloft à
lie Je Vin ^u a du lang. Lap.iaart tiiic penla perdre la
viid'vne cuacuation lig;andc <5c loudainc : mais, Dieu
merci, &: le bon Iccoui;> tant ciuuit itcur Saportc ^uc de
nous, à: norammeni de la incrc , qui n'y Cipargna rien,
elle tue rellauree peu à p u,£f après auoir îargm vn lôg
temps rcmiiv en Ion pf-iimereltat ik en bon point»a rcC
eu depuis, !fc fc portoitrort bjen i\*y AgnacsS^'iJ^^irthe-
lcmy Cabroi enjes objet i»utions ^tiAtomiqutSy obfer. b 3 .
f l L L E yrinMit par le nombril.
EN Tannée iç Ç o. cftant à \i fuite dn lieutenant gê-
nerai pour le Roy en Langaedoc dedans Lcaucsirr,
fur [ts quatre heures du loir tut fau vn falué d'arqutbu-
zadcs pour la garde de la v «Ile au dcuanr de ia porte de
mad. de Varie , oùpourlors /eftoi^illis aucc pJutîcurs
dimoileileS-Cefte icoppcie-ie, outre TcfïiOy commun,
apportaencorevn dommage particulier : carie papier
de l'vnc des harquebuzadcs donnant fur le ùb.e «. rc-
iaillicfur levifagc & fur les mair s d:: trois ou quatre.
le fus appelle pour penfcr la plus blcfice. En ia pcn-
lant, ie fcnriJ vne puanicurd'vrmc i\ forte , q ^e ic i^i
prefque contraint de quitter celte damoiicilc fans a-
cheuerde la penfer: nefcichant toutcstoi» bonnement
îugerd'oùprocedoitcefte puanteur,ou de lablelice ,ou
d'vne autre qiu crc tenoit îachaiidelle. Mats bicn-ir ft
après que ie fustfclaircide ce doute par madamo)fei-
le le Varie , quim*aflcura quec'cftoit celii^qui m'cl-
cîairoit,qui puoirainû : &que \bn pcredonucroit vo-
Jonaersia mon i&cle Ion bien, & qu'elle fuit bien gué-
rie, le la pri ly dr me la faire voir, & m'ottris d'apporicr
iQUt ie reaicd» que ic pourrois àloû mai. Sur celte af-
fca -
C^ memeraùies. y^y
fcurance elle me fut prefentec le lendemain , &troui3aî
fon ncmbri] alorgédcquairc doigts, & leniblableàia
crcftc d'vn coq d'Inde , & qu'elle piflbit ordinairement
par l'outraque, tout a'nfi qu'elle taifoit dedans le vcn>
tre de fa mcre. Ayant reccnu fon mal , mon appareil e-
ftant prcft, fur le poindquc le voulois commencer l'o-
pération , le me reprclentay tout à coup le danger qui
en pouuoit adiKuir , & que la mort fetoit meuuabîc en
feimant le pertuis d'enhauti ii l'on ne donnoit ilTue à
Tvrinepar lecooduitd'cxiibas. Mais la pitié fut à i'cx-
hibition des picccstcar la paticnte,qui pouuoit elUeaa-
gee dedix-hui£tà vingtans , n'y vouloitaucunemenc
entendre. En fin vamcue des prières de Ani pcre & de la
merc , ccnfcntit d'en faire la morfiie. le tiouuav l'o-
rifice delà vefcie fermé d'vne membrane efpaifle d'vn
icAonbu plus, le rcfic bien forme. Q^ufut caufeque ic
commençay premièrement à cefte partie inférieure,
& ayant fait rouuertu'e lui mis vne canuiede plomb,
iufques au dedans du corps de la vefcie , pour tenir le
conduit libre, &: fai;e que l'vrinc eiifl Ion naturel paf-
lage parla. Le lencitmain ic proceday l'opération du
nombu!,& y fis vneligacure pareille à cell^ àcs opera-
teurs,lors qu'ih coupent vne cnterocele. Car iefis pif-
fer l'aigijille trois fois par vn mefme trou, cnembraf-
fant la leccndc lois par vn des coftcz tant fculeincnr, &
la tierce l'autre.auecvn iilct fon & bien cil c. Cela ùU
iccoupay près de la ligature, caurerilay le bout , & l'cf-
carrc tombé le iraitay anec dj:tcn;ons.& dcficcatifs,
comme es autres vlccn s. Lafilie tut entièrement gué-
rie dedans douze iours. Par ail li ic H.'acquitif y fidèle-
ment de la promefTe que i'auoii faite de la guérir. Mais
ie me VIS frwftré de celle de mad.de Vane , la moitié du
bien du p«re cOant conuenie en vn double ducat qu'il
me donna pour lalaircde ma peine. jTif/. "Banhelenu t4-
hrol en fis olfcr nations ^^ijfttomi<jues,obJèrH.xo,
768 Hijioires àdmlrAhlcs
P LVX defv>;r.
I'Ay vcu vnc Nonnain,cle petite complexicn,maTgre f:
phlegmatique,qui par le ucz , la bouche , & l'vrmanr,
rendit en vn jour plus de dix-hui(ft liurcs de faiîg. Par
la gr^ce àc Dieu , moyennant diuers rennedes externes,
& inrcrnes.elle en futg'Jcriccn peu A^htiMC^olatih. de
Çradis,au commentaire fttr le 5 Ç .chapitre du liure de A^'Jis.
Diane d'Ert rendit vn iourdass vn g'ar\£i baiim dix-
huid licucsde fang par le nez. le ie peiay moy-m^fmf,
non comprins celui que du commenccmenr elle auoic
recueilli en (on mou choir,cu qui eftoit tombé par ter-
re,*: fur les habillemc ns. L'eau itVoidc n'y ayant rie fcr-
uijOn fit roates fortes de diL!Crlîons,par 1= ignee,veniou-
fes en p'r.lîeu-s endroits» par fliedicamcns aftiingenç,
dc(Teichan?,ngiutinans & relerransrauec herbes propres
en Ton porage. Fin.-ilc'mencîe Kas s'arieila par vnem
plaftre fait de plaftre dcftrempc en vn blanc d'œuf*
SrafaHol. ai* 5. liure de fe s Comment mt es fur les yijfhûrtf-
rnes.
I*atreftcauoir von eu vn vîi/reau vingt Hures de fang
& plus , pefces en ma prcfonce, coulées du nez d'And é
cuifinier dcî F-edcic de G»<n:'.?o!jc , Cardinal de Man-
toiie,cu l'efpjce d'vn iour ôi d? àc^w nuits. Ncantmoins
il futgaranti, voire tcremenc roa!ag'j,rioM a lôg temps
vefcu dç^uis»y^arcell.T)onatia» liure delà Jjetite rairoUfClMt
Antoine Gorrea, gcntil-hommc Portugais, cranailJé
d'vne longue Heure quarte, qui lui eftoit mlupportable,
fe trâlpcrtade Milan à Rome. Le fti iJ.rJors trcs-alpre,
& la longueur du chemin redoiiblans Ion mal , fondain
vn flux de fang par le nez le faifit , en tejle abondance,
qu'en l'cfpace de cinq iours il en rendit deux liures , par
la mrinegauche:tt!lemenr que les feruitcurs penfoyenc
plusà fa fepuiture qu'à nulle autre chofe. Neantmoins
on luiariiftaroigneurcmcnt. Eotre les remèdes, on ap-
perccus
cjr mémorables. yè^
pcrceut qucics vcncoufcs appliquées fur l'endroir c[c
la ratvJic,& l'eauj froide aux icfticulcs fouacnt reitcrec,
luiaidcrenc beaucoup.Durant ccflax de lang, Ja Heure
ic laifïa mais ce fut pour reuenir au bout de quelques
iours , i'iniempcrance de ce corps plein d'humeur bi-
lieufc aduftenc pouuant permettre œieux. ^matusV^r-
tugan,enla i ,(jeiJttirie,Cure lOO.
Vn îeune homme nommé Bcrdauid, faifant voyage
en pays chaud fut afTailly d'vn tel flux de fang , par le
ce2,qu*enrcfpacede(îxiours tant furies chemins qu'é
fa maifon,il perdit cinquante liuies de fang. i^our J'ar-
jcfter on y fit mile remèdes. Nul n*y femit que la fai-
gnce de la vaincccpha'iqucjlailFant couler le fin g par
int ;raalics diuers en TeTpace d'vne heure, fclon la por-
tée du patient, duquel neus arreft^mesainfi le flux par
Je ncz.i-e mefme en U y. Centurie, cure 60.
F 0 yD I^EStora'reSyç:^' TowrbUions
ajtran^ei.
ENuiron l'an m>il cinq ces quarante trois aduint en
riile Eipagnolecequi s'enluit. Du coftcdaLeuanç
Se 'cua vne fi horrible te mpefte,que les habita* n'auoV)-
cn fouucnauce d'en auoiriamais veu vne tcJJc. 11
cojracdcs vents & tourbillons impétueux : entre au-
îrcs vn meruei'lcufemcnt vioî''nt , |Uî les Indiens ap-
pellent Huraca/iy^ucc vne telle furie , qu'il fembl- ir de-
uoir emporter ciel & terre. Iln'yauoit homme qui ne
penfaft eftrc au dernier iour de fa v.e , U que ies El-mcs
le deuflTenc mcilcr l'vn parmi l'autre , &. que la fin diï
inonde fart venue. Les elclairs reluifans de t©us ici co-
llez du CK- jtfpais , s'entiecoupoycnt 11 menu que i'vù.
n'atccndoit pa;. J'aucrc: les tonnerres grands & honi-
bles aucc vne obicunic de nuidl , &: des tcn.bics li cù
paiires en plein iour , qu» les peifonnes ne pcuiioycni
s'sntreaoïr ny reconoiftre: tant eftourdic»; au rcfte, ef-
§ouuantcef;& comme hors du Icns, que t'ciloita coii*
4» (a
77^ J^ifioires admirables
rir çà & là, fans fçnuoir où. D'autre cofré vous cuflïer
oiiy les vccts conibacns Vvn contre Tautic , & lîfflans
hornblerncnc parmi i'aird'j ctiie tune qu'ils arrachoy-
cnc les arbres tous entiers , al^bptoyciu lcspo)nics des
inonragQes,& aucc vn bris & tracas merueillcux les f^i-
foyent rouler contre bas5les icaant tnr les plaines , aca-
blanclcs mairons,& acrauanranc ceux qui y habitoyenc
Il y cucmefme des maifons eiîtieres, pcrlonncs & tour,
qui furent emportées en l'air par ces furieux rouibil-
lonsjéc toutes mifes «n pièces. Durant ces calaniiiez
vous n'eolîîez oiiy farmi ces pauures peuples autre
chofcquc cris lamcmablcs 6: douloureux. AulFi en peu
d'heure ces tourbillons firent des maux irréparables.
£t n'y eut pas iufciucsauinauires de l'Amiral , Icfqiicl'
les cûoyentleurcmenc à Tabry &à couaert en vn bon
port, quine fe lentiflcnt àbon efcient de ce cnaiiieur.
Car quoy qu'elles fifTcni amarccs auec bonnt s £tfories
auchres attachées à bons gros cables toit neufi,fi eftcc
que tout l'équipage fut rompu, les cordages coupez, les
vailleaux fracalicz &aiis àfondauec tous les mariniers
<\n\ cftoyct dedans. Quelques Indiens pjrmi cclt crfioy
fcrduuerét en dcsgro:tcs &: canains parles châps. Mais
au forcir ils eftoyent encore tant efpouuanicz d'vn fi c-
ftrange accident,qu'à peine pouuoyent-ils refpircr , &
auoyciu la voix fî fort rcferrce de frayeur,<ju'ils dcmcu-
rcrcnt long temps fans pouuoir dire pas vn feu! mo „ A-
pres tout l'orage paifc, les nacuiels habitans dcrilltr ic-
Uenus à eux, toutes les fois qu'ils deuifoyent de ceft ac-
cident , quiauoyent toute autre opinion que les Chre-
ftiens : car iisacrribuoyent la caul'e de tout ccll orage
aux vicieux &malhcureuxdtporrcmei)S des Elpagnols,
'&difoyent qucle ciel vouloit les ci^.nlier de leur pais. /.
Xcn7(o !Mtlannoii aui.liH.defon hijloire dtt nouuean monde,
(haf). lo.
Au bout de cinq ans dclàdcui autres tels orages
aduindrent en rifle Efpagdole , ¥cutaufli d'e-
ftrangcs , lorsque i'ettois en terre hrmc ; mais
le dernier entre autres fut mémorable , CJc ciïiaya mer-
ucilku-
s* memorahtes. jj %
ceillcufemfnt toute l'islcll g?>(taqua{î toutes lesfeme
CCS, ruyna la plus-part des mailons , & les engins a fai-
re le Cucrc , & tua prcf^ucs tout le bcftail. De forte cjuc
IcsErpagnois fureuc réduits à extrême diret!e|& fuffent
mens de faim, fi les nauirts d'Eipagne,chargces de fari-
nes,bifcuits 6c autres municionstneruilent airiuees.^a
tnefme Hure \y chapitre.
Huracan , en la Lîngue de l'Iile Efpagnole.vaut autac
à dire comme , vn fort raauuais temps , ouvnetem-
pcftceftrange : n'cftant en cfTcâ: autie chofc <ju'va
grand tourbillon de vents impétueux , cntremeslé de
pluye. Ouiedo fait mention de deux Huracans entre
a'Jtres , dont Je premier aduinc l'an mil cinq cen«
neuf, eftant gouucrneur de l'isle , le commandeur
dom Nicolas d'Ouaudo. Il commençapar vn vent de
Tramontane, fuiui de pliiye. Aufli toit <^ue les mari-
niers & matelots qui eftoyent à faintt Dominique le
feniirent venir, ils gaignerent viftemect les baftcaux, 8c
dcualercnt force ancnres dedans la trer pour a/Tcurer
les vai (féaux qui eftoyeut au port. Mais la tourmente fè
renforça de telle forte , qu'il n'y eut ni ancbrc ni cable
qui ne rompift : & fut force d'abandonner les vaif-
fcaux au gré du vent , qui les chalTa contre bas la
riuiereversla mer , & porta ks vns contre des ro-
chers qui font le long de la code , ocrait à fond les au-
tres, dont onn'ouyt iamais nouuelles depuiî. Puis
tout foudâin le vent va changer , oc comme celui de
.Nord les auoitchalTez vers l'eau , ccftui-ci,foufflant du
Sud.aulTî impétueux que l'autre , les rechaiTafuneufe-
Bienc vers le port & contrcraont la riuierc. De for-
te qu'il fe perdit par cefte tempcfte plus de vingt vaif-
feaui,grands , n oyens,&: pctis. Ceux qui virent cela di-
foycnti|uec'cftait le plus horrible &clpouuantab!c Ipe-
âacle > qui iamais Tçauroit eltre vcu par yeux d'iiom-
me : & fcmbloit que ce fulTint , non pas vents»
mais vrais cfprits malins, qui porc«(fll*nt & tournebou-
Jartcnt ces vailfeaux de part & d'autre. L'autre fembla-
ble orage aduint l'an iuiuant le vingi-ncufiefme ioujj
jyi Hiftoires admirables
de \\i\\\tt.Vrhatn ,Cb:iuuiton en fou dipoursfur ce îO.ch^u |,
liure de L'injioirt de "BenT^o.
En la prouince de CarthagcnC) quand le maJin efprk
veut clpouuanier ceux du pays,ll les raepacc da Hura-
cans. Défait quelcjucsfois il enfuiciic dcfieftrangcs,
qu'ils emporieni les maifons, dcûacinent les arbres ? âc
renucrfciu ( par manière de dire) ks momagncs un5
deflu:. deffous. Ouicdo raconic que vne fois en paflanc
far vne montagne de la terre ferme des Indes » il vid va
icrribk mcfnage. Cefto moncagc (du il) cfto.t toute
couuertc d'arbics grands ficpetis cncaftczelpais, l'yn
fur l'autre, rcTpace déplus de trois quarts de licuc :&y
en auoit beaucoup d'anachez hors de icrre auec toutes
ïeurs racines , quimonioycnt autant que tout le reilc.
Chofefîefpouuantable , que fcukmentà la voir elle
donnoitfraycuf àtous ceuxqailaregardoyent > com-
me iugcans que c'eftoit-là pluftolt vne CEuure diaboli-
que que naturelle. Somm. de V Inde Occideiuaie, Jja-^
pitre I I .
l'ay foaucïunce qu'eftant en la ville de Valence en
Dauphiné , après phiiîeurs grands & horribles tonner-
res,b foudre tomba en vne maifon de delà le Rholne à
l'endroit du bac Je feptiefrae lour d'Aouft.M.o.LXVi l
& entra par vne fcneltrcdu coftcde Scpientiion en la
chambre haute , cafTant le5 verrières & rompant les
verges de fer qui y citoyent. Vn icune homme cou-
ft uricr , citant dedans celte chambre , où il trauailloit,
fut attaint 6L tué foudain de la .^oudre , qui l'abatit
fur le planché , où il fat trouué roide mort,ayant 'e co *
fté droit en feu , far lequel on itita de l'eau pour l*c-.
itemdre. Sachemifcen fut toute bruilec, comme âufiî
'vn colct de cuir qu'il portoit. Au mcfme inftant irois'
hommes qui eftoyent dclTous ccfte chambre au bas c-
ftage afîîs à table , & beuuans eafemble, en furent tcUc-
méttouchcz,qu'vnd'iceuxiettépar terre, commedcmi
mort, fut trouué ayant vn de ks foulicrs tout fendu par
ic deflus.Mais ce fut hiè le pis de fcsefpaules.kfquciks
en dcmeurerét toutes meurtries. L'hoitc preknt & Uc- >
bout en fut frappe aux bras £c à i'vn des ul6s;fic rêuerfé^
pv i
&
mémorable s, 77 j
par terre corne les autres deux.jLe troifieme eftoit jncr-
ucillcufemcc cftoné:mais nô frappé cômc fes côpagnos,
qui furent fort malades l'efpace de quelques iours. Je
fus le lendemain fur le lieu & p^f-lay à eux, qui me dircr
<ïue los que celaaduint ils ne royoyent autre chofe que
fc J àz cous coftez. Celte maisô feruoit de tauernerPho-
(te citoit home faroufche & mil embouché. Celui qui
eut les tfpaules marquées & le coufturier, n'eftoyenc
gacrcs mieux inftruits, ce difoit la voix commune. Re-
gardant par quel endioit la foudre auoit paflé de la
chambre au bas eftagc , ie n'appercns autre chofe fors
vne petite marque , comme vne efgratignurcau bas de
la paroy de cefte chambre contre le p!ancbé , du coflé
de feptentrionrdonc ie fus eftonnc, voyant de<i cffcfts (î
admirables de la fouldre. I.ChaJJltnion snfon traité de Cire
de Tyicufur lespeche^despeu^leSyliH.x.chap.iO'
L'art M r>. xxi. La veille de S.Piere,enuironIes fix
heures du foir , la foudre tomba fur la groffe tour du
pb'-tail du chafteau de Milan, que les François tcnoy-
eut pour lors : dedans laquelle y auoic z5o<miliersd4
poudrejdouze cens pots à fen^fix cens lances à feu,& da
fel pour la prouifion de cinq ans. La tour fut emj»oriee
iufqucsaux fondemens aucceniîiron fixtoifes de cour-
tine de chafque coftc. Sotîs les ruy nés de cefte tour de-
meura le capitaine Richebourg commandant au cha-
ftcau,auccplufieurs gentils-hommes & foIdats> fe pro-
menansaulongd'iccile,au nombre de trois cens hom-
mes fans plufieurs autres qui fc promenoyent en la pla-
te hcrs du chafteau. Il y eut des quartiers de murailles
poufTcz par hfjrce de la poulre iufques à demi quart
de lieu de là,que cent boeufs n'cuffenc fceu rcmuct.M'dt*
^clLty ait 1 Jiu. de fes mémoires.
Par vne tempeftcquis'eneua foudainement auecfeii
& foudre du ciel , la ville de Cleruaux, alTez peuplée &
marchande, afTilefur leDou , en la Franche Comté
de Buurgongncfat en moins dctrois heures toute cm-
brafee &confumec par le feu le mardi vi i,iour d'Oflo-
b:c,ran MD.xxxirii. Oe forte qu*il n*y demeura rien
d*cûtier,ni Eglifcs, ni chafteau, nnnaifon s :tout fut rca-
ce 5
77# Hijloires admirables
Ucrfé fors vnc maifcn qui efioit hors le circuit de '^
ville. Le coup fut fi roudaiji,rctffoy fi grand, la delol^"
tion tant horrible» que le pauurc peuple etpcrdu ne fça*
Uoicde quel cofté fe tourner. Le vcnt,!a tcmpcft.-, I \ fu-
mée , le feu les aflîegcoyent de toutes parts, tellement
quepluficurshommcs>fcmmes &petifenfansy mou'U-.
rcnt. Ceux qui rcfchapptrent fi»:ent brusier a»\ b aS»^
aux iambes,& es autres endroits de leurs corps chacû fe
fauuant comme il pouuoit. Car tout cftoit en f.^mmcï
loue trembloit,touttoraboir, toutes chofes pcnlToycnti
& n'entcndoit-on que pleurs, cris, huecs , & gi icfues la-
mentations. Briefiln'y auoit là que des fpcctaclcs hor-,.
ribles,& maintcrs images de mort elpouuantable. Tel-^
le fut la deftruftion de cefte pauure ville , reilaarec de-,
puis peu à pcu.I.ChaJJainon au Hure CT" chap .^ufmenttonné.
Aucomaiencemcn: de I*an m.d.l v.les pays de Saxe,
MiCneà Bohême , fu-ent bacius defouîdres du ciel 8c
de tempcftcs eftranges,qiji ruinèrent infinis édifices , ôÇ{
beaucoup d'EglifcS ou temples , ce du SUtdanenfes Com^
mentaircs. .
Le capitaine Laudonniere raconte ce quis'enfuir. Le
19- lour d'Aouft I ^^4. li tombaademic lieue de noftre
fort , en la rloride, vn foudre du cicI , plus digne ( cç
croyic)d'e(lrc admiré &. couché par efcrit, que tous les
cftrangcs fignes que l'on ait veu par le pa/ré,& dont Icf
lîifio'iens ayent iamaisefcrit. Car nonobftant que Ic^
prairies fulTent en ce temps là to; t.s verdes & mi cou-«
Beries d'eaux , fi cft-cequc ce fouldreen vn inftanten
confomrrta plus de citiq ccn« acres ou arpenf, & brisl^
par fa chaleur ardante tous les oifeaux qui lors s'efga-
yoient par les prairies rchofe qui continua par l'efpac^
de trois iours , ^ui ne fut fans nous bien donner à peu*
fer,ne pouuans luger d'où proccdoit ce feu : car tantoft
aousauions opinion que les Indiens brusloyentleurç
jnaifons , & pour crainte de nous abandonnoyent leur*
places. Tantoft nous eftimions qu'il» auoyét defcouucrt
quelques vaifieaux en mer ,& que fuyuant leur couftu-
ineilsa'lumoyent çà 8: là force feux, pour faire enten-
<irc qu'il y auoit habitaiioa en leur cerrc.ToutCJ fois n'ç
cftanc
fjr memorahlesl yyf
cftjnt affeuré , ie refolusd'couoyer le'Prfrrffo»//, (cfci-
^x-\cvix)Urranay,^o\.n en fçauoir la vérité. Mais comme
i'cftois fur le poiiift de faire erabarf]uer qucl4u'vn pour
decouurir ce faii,lîx InJiés arriuerenc de la part du î'^-
ncoufi yilicamany ,\ qui de première entrée me fî-ent vn
grâd difcours(apres m'auoii- pieienîé quelques paniers
pleins de mil, de curoiiillesâc de taillas) de l'alliance a-
miabie qt* ^l;cantuny,â\ioit enuie d'étretenir aucc moy:
& quedciouren iour il ne faifoic qu'atcendru l'heure
qu'il me plairoit l'employer à mon feruice:Poarce,en-
tendu l'ûbeylPance qu'il me ponoi: , il trouuoir fct e-
Rrâ-gz h canônade que i'auois fait tirer vers fa demeu-
re,laquellt auoicfait brufler vne infinité de verdes prai
rics,& confumé iufqaes dedans l'eau , approché mefme
fi près de fa demeure, qu'il pcnfoit voir le feu en fa mai-
fon:pourcc ilfapplioit crcs-humbîement de dcfFendre a
mes gens de plus cirer vers fon logis raurrement il feroit
contraint pour l'aduenir abandonner fa terre. & fe reti-
rer en quelque lieu plus efcarta de nous. Ayant entendu
la folle opinion de celt homme, qui toutesfois ne nous
pouuoit eftre que beaucoup protitable, ie difllmulay ce
que i'en penfois pour !ors,&rcfpondis aux Indiens d'va
vifageafTez ioyeux , que le recic qu'ils mcfiifoyent de
l'obcyfranccdelear'?dr^coi*/i , m*eftbic fort agréable,
pource que par le palîé il ne s'eftoit monftrc '•el en mon
endroit, fpecialement quand ie i'auuis fommé de me rc*
uoyer certains prifonnierSjlont loutesfois iln'auoitte-
nugrand copte, qui eftoi.licaufe principale pourquoy
ieluiaiioisfait tirer la C3nonnidc : rion que i'eufTe eu
enuie de donner iurques à f^ maifon , commr: aifémcnt
ie pouuois faifc,fi bô m'euft séblc.mais que ie m'cftois
côtété de faire tirer iufques à mi chemin, pour luy faire
conoiftre ma puilTance. Au refte te r.jiïcurois,moyennât
qu'il pcrfeueraft en ù. bonne affeiSliô, qu'on fe déporte-
roic de plus faire tirer à l'auenir , que ie lui fcrois loyal
dcfenfeur,cô:re fes plus g ads ennemis. Les Indiês con-
tentez de marefpôfe retournèrent a(Teurer leur 'Paracou-
fif qui nonobftant l'affturance s'abfcnca de fa demeure
ibisn vingc-cinq lieues , &cc par l'efpace de plus
ce 4
77^ Hijloirâs admirables
de deux mois. Les trois iours expirez Tardeur s'eftci-
gnic du toirt. Mais les deux iours fuiuans furuint en l'air
vne chaleur fi excciïiue,qaela riuicre, ioignant 'aquel-
le nou< habicions > deuint tellement chaude , ^uc pref-
quss elle bouillit, comme ic rroy. Car i! mourui vnc (î
grande quantité de poilFoiis, & àc xli d'cfpeccSjCju'en la
lefule embouchcure de la riuicre, on en trouuadc morts
pour lutHlamment charger cinquante chariots , donc
furuint vne putréfaction en l'air qfui nous caufa force
ma'adies conta^i^ieufeSiiurques à voir la plus partdemcs
hommes malades, & comme prefts de finir leurs iours.
Toatesfois Die'i y prouHeutfi bien , que tousreuin-
drent en conualefcence.C'eft le récit du Capitaine Lau-
donnicre en i'hïjloire de [on fécond yoyage enla Floride.
Tay oiii raconter plufieurs fois à vn bon & àoQic per-
fonnige.de prefentaagé de foixanicfîxans ou enuiron,
qu'cftantieuncefcholier à ThcuIouCc, il fur pardeur
fo's voyager es môcs Pyrenees.Q_u'c ces deux vc yagesil
aduiiîtjSc vid ce qui s'enfuit. En vne croupe fort haute*
& fpacie jfc de ces monts , fe rrouue vne forme d'autel'
fdit antique, fur quelques pierres duquel font graucz'
certains characîlleresroe forme cftrange. Autour & noti
loin de ccllau-el-fc trouuerenc lors d'iceux voyages
des paft^ s &: rurtiques, 'erqncls exhortèrent &: prièrent
ce perlonoage & plufi.urs autres ^ tant dchohers que:
de diuerfc> conditions , de ne toucher aulîcmerir ceft
auteî. Enquis pourquoy ils failbycnt ccflc inftancc,rc-
fp ondi^cnc , qu'il n'importoit d'en approcher pour le*
Toii & regaf-der de près ranrqiie Ton voudroit : mais de
l'acouchcmenr s'cnfuiuoycnt mcrueiljcux change-
mens en i'air. il failoitfort beau en tous les deux voya-
ges.Miis au premier fetroiiua vnmoin;.* en lacÔpagnic,-
qui fe ri^nt de radaeirilifcment de ces paftres , dit qu'il
vouloit effayer que c'eftoii de ccft inchantcmcc:& tan-
dis que les autres amuioyent ces ruftiques , approche
de l'autel & le touche comme il voulut. Soudain le ciel
i^obfcurcii, les tonnerres grondent.'lc moine & tous les
autres ^aignctau pied;mais auant qu'ils cnfTent atteint
iç bas ic la moûtagQç,apres pluûfurs eftlals de foudre
éf fnehiorahles. ^ 777
ICcTorageseffroyablcSjii s furent moiiillcïiufqucs à la
{►cao,pourfuiuis au rcfte par K s paftrcs à coups d« cail-
oux&dc fondes. Au fécond voyage, lemcfmefut attc-'
té par vn cfcholJer,aucc rrjefmcs ■^itccls de foudres, ora-
g;e$,& raDÏnes d'eaux, les plus eftranges qu'il eft poflî-
olcdc penfcr.£:t^r.t;('ï de mes mémoires.
l.Bodiu dit en fa Demonomanie, que \^ couftumc de
trainer les images & crucifix en la nuiere ( dont nous
propofons vne hiftoircau chapitre des fapcrftitions
damnables,ence volumc)pour auoirdela pluyc, fe pra-
tique encore en Gafcongne , &i'ayveu (dit-il ) faireâ
Thoulouf^ en plein iour par les pecis enfars dcuanc
tout le peuple, qui appellent cela la tiremalTe. Et fc
trouua quelqu'vn qui icrta toutes les images dedans
les puits du Salia,i'an IÇ57. Lors la ployé tomba en
abondance.
C'cft vnefignalee mefchanccté qu'on paflepar fcif-
france,& vnedo6\rinc de quelques forciers Aqcc païs-
Ia,qui ont cnfei^né ccftc inopicté au pauute peuple. >Att
F T^A r E V?^ exn.-îordmaire.
L'An mil cinq cens vingr-deux l'EfcolTc eftant agi-
tée de troiiblfs ^ difrenfîons ciuiles en l'abfence du
viceroy,vn milord Angiois entra dedans auec dix mille
tommes, &y fit de grandi rauages , puis congédia la
plufparrdc Ton armée. Les EfcolTois demcurans fur la
îrontiere , voulans auoir leur rcuenchc commencèrent
âfe mettre aux champs Se emmenèrent force butin de
la comté de Northumbelland.Cc milord, qui les auoit
•parauant molefttz fnt cni'oyé contre eui, & print vne
>illctte nommée ledboiirg, mais auec beaucoup de dif-
ficultez& perte de gens. Toft après, fans qu'on ait peu
ï^auoir comment cclaaduint , certaine frayeur furprit
77«
HiHoires admirables
de niiift le camp des Angiois , nommém.'nt leurs e^xv
u«ux qiM comni.nçcront à fouiHe», rac:r,ronHer & ruer
de Façon eddn^^e.Il y en eur prcs de cinq cens qui ayans
rompu licols, ba-res 6c t"crmc(urcsl"ortircnc en cjmpa-
gne , &. comme enragez foulcrenc aux piïds cous ceux
qui s'cirayc^ycnt de les arrcfterrpuis commencent à cou-
rir impcrucufem^nt à crauers champs & fort loin du
cîmp:fioalement comb^renc es mains des EfcoflTois qui
fî''enr vn trclbeau buiin Le camp des Angloi* en tue ça
mcrucilleux alarme coûte la nuift , & ne fu' poffiblc
d'appailcr le tum'ilte,quc fur le jour. De là s'enfuiuic
Ja retraite de Taimec Angloife. ^BHchanan au i^.lmre de
Vhijlolre d'EfcojJe.
Les fedicieux qui en ErcofTeauoyenttuc le viceroy
Tan ï y 71. s'cftis depuis afTimblcz à Edimbourg , afin
de pro'juoir àlsu'S aFatres,vn (oirfurêc rousCqaoy qu'c
g'and nombre) frappez de telle fr.iyeur , que fans qu'il
apparut caufe externe de crainte, ils demeurerenr en ar-
mes toute la nuftjSc ceilcmsnc efpouuanu z,quedes Id
fin matin ils dedogerent tous en grand' hallj , & fans
ordrejiors de la vùic.Lemefme hijlorieiiA'A \o.imre.
Sebiftia"., premier de ce num.roy de Portuç»-»! , ayant
perdu vne bataille contre les Mores en lacotii \ç, Bar«-
barir au mois d'Aoart de l'an mil cinq cens fepiantc
liuiit:8cn'appa-o lîînt plus depiiis(les vnslecen.is pour
morf,\ç auçres prilotnicr inconu es mains à.<.'s Birba-
res , Se aucuns difcourans depuis iufques à prefent fort
diu^rlement d* l'eltic de ce Prince ) Ion oncle Henri
lors Gardini! fut app^:^é au gouucnic 'Tient & eile|i
Ruy .'dipuis la more duquel, y eut débat entre Don An»-
tonio.d: Philippe roy d'Erpagne,pour la ruccellioii à ce
Royaamc,finilemenc gaignù par Philippe, le plus fort.
En la guerre faite entr;; eux depuis lo. deces du Cardi-
nal mort Tani s So.rcpjflcrctdiuerfes chofes notables,
qui feront remarquées es endroits conuenables de cc
volume &■ des fuiuans. Eii'rc autres aduint que \ts Ca-
ftillans ayans prins fur Don Antonio la ville de Setu-
bal , non rropclongn :ede Lifoonne par le chemin de
la mer,pluiîeurs Portugais s'clUns embarquez pour y
cou*
& memorMeî, 77$
courir au fecou's, on leiu apporta nouuellc (îe !a pc: te
df ceft'; p'acc : au moven dccjuoy tous defconforctz ,ils
deicendert fur les ncuf-htru- es du loir d' leurs naiiires
en terre, & le icti'ctni en leurs maifbns dedans Lisbô-
ce. Su) la minuiâ: vn bnut Jont l'auteur fut iiiconn fe
Icuc par la ville , que les Caftiilans approchoycnt , voi-
re c|u'iis tftoyent aux portes, &. dedan' les places. Cha-
cun comméce à crier alarmer par Irs maifons <:s rues,
de forte qu'onccjue re fut riiiefi forte teinf efte de liur-
lemcns & de voix mesiccs de cris clfn y^b.'cs & piroya-
blcs.les vns courans comme forcenezaucc les armes au
pojn^, les autres eltor nez 6^ chauffez en ftatucs:ouI ne
fçachant que penfcr, qu'cfpercr,.;i e due. Le iour venu,
ce bruit s'efuanoiiic auecques l'obfcui iié , & fu't conu
que c'eftoit vnc frayeur exiraordinairc , les Caflillans
pour lors n'ayans bou^é de Sctubal./. Antoine yiperatt
en l'Wif\o%re de la conquefce de 'PortugaL
Durant les piemiercs guen es ciuiies de France feus
ie règne de Charles IX-la villede Môtauban en Quercy
foUil-"rit beaucoup. Entre autres chcfes mémorables , à
propos de frayeur extraordinaire ,y fuminc ce qui s'en-
fuit : Quelques chefs de guerre conducteurs de f ertsi-
nés troupes au nombre de deux mil hommes jcn inten-
tion de s'acheminer à Orléans , farenc receus dedins
Montauban , pour s'y refraifchir,€nuiron !e lo.iour de
May 1561. Sur ce on apporte aduis en la ville que les
lleurs de Monluc&de Ter: ides venoyent aflirger la
place. En lieu de fe refoucre à la defcnfe , on commence
à dclibcrer tout au contraire , les capitaines voulans
qu'on quittaft la vil!c,pour paifer outre. Ceft efîroy a-
creut ie lendemain de telles ncuuellcs? qui cftoit le a j.
de May, pourcc qu'en rapporta que le camp de Monluc
cftoit de dix mille piétons, de deux mille cheuaLx , tc
de fingt-dcux doubles canons. Là de (Tus prefjués tous
refolurcnt abandonner la viilc , d'où plufi^.nrs forci-
rent lanuidl, en vn dvfarroy lomeniableau polTible. Au
contraire le cœur de quelques-vns , mais en petit nom»
brcjf ut fî boA qu'ils fermera le guichet de la porte, a(<*
7?.
HiBoires çtimirMes
reftansauccgranJcs menaces ceux qui aftoyentrcftrr,
éSr incîuifans par leur hardicflc -îlufi urs à rccourncr de-
dans la ville. Neantmoins Tcffroy {wi ici, qu'aucuns fe
firent dcualcr parles murailîe. dedans les fjfrcz.Lc lé-
dcmain, noaobflanc ics rcmooftranccj de quelques hô»
incs d'autorité, la dclibrratinn de* q lirrer tout fut remi-
t^ (usauec telle precipitat)on,queletambour ayant fon-
né , les habitans&icseftfanj^crs fc p'cnent à fottiren
foule, dcmtturant la rillc prcf-incsde crte, les portes
ouucrtes & abandonnées , dont les c\tU F.irêt trouuecs
fur le pont du Tar par vn artifan-OjelcjUcs vn'; en fo'-t
prtirnombre refolurent de demeurer , &ayans arrcftc
i'vn des principaux , comme il eftoi: à contcftjr ajcc le
capitaine S.Michel-, pour le retenir, entetidanc la fenri-
nelle qui criofc que la caualleric ennemie acouroit à
bride abatue, fie en forte que ce capitaine & autres per-
fonness'arrefterent tout court. Mais cela ne feruoit de
rien , (î vne peur extraordinaire n'euft apporté remède
à!a p'-ecedenre. Vn aduocat nommé Arnauf Guibert,
fetrouuant feul & fans armes fur la muraille ,, près la
porte appellee du Monftier , voyan: approcher la ca*
oalieric f.- mit à crier tant qu'il lui fut po/Tible ( com-
bien qu'il n'y euft là ni canon ni canonnier ) Sus , ca-
Donni^r.ilefttépcde tirer. A ccftevoixla cauallericdc
Monluc tourn-- bride. Vne troupe qili acouroit par le
faux-bourg des Ccdcliers fe donna l'efpouuante : aa
moyen dcqnoy plufieurs qui auoycnt plaidé pour for-
tir r'entrerent dedans la ville ; notamment les capitai-
nes. Q^ianc auxaufes fuyards , à qat la frayeur auoit
chaufîé des aiflcs aux pieds . pour auancer chemin , ils
ne peurenc rcgaigner laville ni fe fauuer aifément : de
forte que les vn^ furent furprins & tuez, les autres d -te-
nus ptifonniers en rrefgrande miferc, & aucuns amenez
àThouIoufe , ou ils firent exécute?, à morr. Hrjtoire de
France. T^ecued des chofes mémorables fom le rcgnv de Charles
IX.
Au mcfmc temps, à fçauoir fut le c?)mmcnccmcnt de
luin , ceux de Beawcaire ayans proUueu à ieur fcurcté,
ne furent foigaeux de fc tenir fur leurs gardes, tcilcn^ét
é* mémorables» 784
que hui£l iours après ils fuicnc rurprins,pillez & cruel-
lement traitez par deux ou trois mille br igandcaux ra-
mallcz d.: «iiucrs endroits. Le refte s'eftanc fauué en vn
challeau , enuoy a lecretement demander fccours , «jui
Jcu: f;.ruinr inconiinenc , donc les pillards fe donnèrent
telle frayeur ( c]uoy tju'ils f^ffent nombre trcs-fuflî(ant
pour fc dcfF^ndiL ) que fans faire rcfiiVancc quclconqtc
lis fclailTcrent cailler prcfq Le tous en picccs;quclqucs-
vns fe vuulans lauuer par eau , àcaufc delcur nombie
C2cefrif,fir< uc couler leurs baltcaux en fond. Tellement
que la frayeur extraordinaire fut la cauie de leur cxter-
irjinatiOD.£» cemeJmerccueU.
Le iicur de Baudiné, gouuerneurde Montpellier du-
rant ces mçfmes gucjres , ayant entendu que les (îeurs
de Suze & de Sommeriue, chefs de rarmec,farnomxncc
iofs Triumuirale,envne partie du Languedoc, auoyenc
pa/Té le Rholne aucc cnuiron quatre mille piecons , vn
rcgimenx d'Efpagnois , quatre cens maiitrcs > deux ca-
lioiiS &: vnc couieurine , ramena fcs troupes dedans
Montpellier , & enuoya le capitaine Grille , pourif^tter
<juelques harqueb'JZiers dedans faincl Gilles , villcttc
fur le Rhofn:. Il auoit ia conduite de trois compagnies
d'argoulecs Prouençauxtauec 'ï cens piétons , lous la
charge: du capitaine ilapio. B^tullargues & Albcnasa-
Lcc leurs compagnies de gens i'armcs le loignirentà
ces trgupes,en intention de fec-^u'ir fainft Gijlts, 6^. le
trouuereni au nombre de fix cens chc .aux , &. dt huiéi
cens hommes de pied. Partis de Nilroes le vingtrepucf-
meiour de Scptcmbie , ils furpriudrent àdeniic iici.c
près de fainâ: Gilles trois caualicrs Proucnçauxdonc
ils ti'crenc les deux > '^fauiierent la vie au troiliefmcr
qoi leur déclara Icdcfordrc du camp de iiuzc & de Sô-
meriucau moyen dequoy ils aduanccr.c. Eftahs defcuu-
Ocrts, leurs ennemis, tant chefs, capiiaii»cs,qiîc foldats,
fans preftcr combat quelconque, le naircm d*eux-mc(-
jiiesà vau-de-route , aueclaplus horrible efpcuuanre
qu'on fçauroic imaginer. Boiiillargues en lieu de tuer
droit à làind Gilles , commence à charger à dos ces
fuyards, qui ne coulUicoi qu'à lucr , pas vn d'eux bc
78:
Hiîîoires admirai les
tournanr \ ifjgc. Grille clia'gei de l'autre part , telle-
mciK que plus de dmx miile de ces fuyards t'urér tuc2!,
outre grand nonil)rc de noyez , Si plufisurs attrapez çà
& Ij par les chemins. Les Efpagnoîs y i:\irent rudement:
chai pcnrez,pour apprendre a quelques vns quicCchap-
percc à le tenir en icius pays, ians venir ccrchcr nvalcn-
contrccn vn royaume où ils n'aiiovenc que voir, ni que
faire. Tour le bagage du camp fut gaigné , & dans les
coffres de S ijz: &: ^ômmerine furent truuu-es dc5 let-
tres & commiilionv bien eflranees. Le batinfuc 2''and»
pourcequc ces g*ns-là s'cftoyciu fournis d'équipage,
comme pour aile ' à nopces : &r s'y troliua entre autrei
harnois de leur guerre vne infinicc de vio'ons & de li-
lires inrames,ciii firent tous rompue , defchirc?. & bri-
fcz. Les deux canons furent prias auec vingt deux en-
feignes , ^ le guidou du Cclonne! , & ferrez à Nifmes;
Jacoleurine citant ci'blt-e au fond du Pvhofne , d'où il
ne fat pofTibîe la cirer- L n'y mourut aucun du coi^é des
viftorieux .-caries vaincus de lapein n'eurent que des
pieds, encores mal- habiles ce ion la. Deux feulement
furent tuez par ceux de ic'ir parti mcfme , ayans oublié
Je mor du guet: comme a-j côrraire qu'^'oucs Efpagnoîs
& Italiens l'ayans rcrcna W f^urrerenr psrmt les vifto-
ijcux : mais dcfronucrts à leu' langue & concpince ef-
pcrduriîs pairecnt le pas auec lis aur-f s Anlî la p-ur
perd tcefte arme;, infoknie. En (e mefmerecuei/ d'IvJJoires,
Quatre ou cinq loiir^ après cc^ftr cl pourarre &: des-
faitcle baion de S. Vidal, Tcilîans. & autrcs.ayans ra-
mafTé leurs forces , ai» nombre d»* deux m'I b- mme$.
pour aller feioiudre au (icur deloycuf campé près de
h^onipcllier, re^cu' éi le^ n -»uuclics de la uiine de leurs
compagnons a fainâ: Gilles : ce qui ieir fie changer de
clefr-'in<& copclu'-e d'aller 2 Florac , ao'ik afliegerenr,
bartircnt, elTaye'-enr d'aucir par efca'h.'e, pa'-lcmentc-
rie.fapc.afTauc- huift -ourî durant. Il n'y .?uoir dedans
que huict h' mme- de guerre coromandez par vn vail-
jant foldar nomm<r Boilly , de Mon'.pr lirr. LesafTîc-
pcans ne <»aign''rencqae des coup$}& fur vn bruit femé
encre eux <^uc Baudlûé vcnoïc aufccouriûcs afliegez,
prm-j
prihdrcot relie efpouuante , cjiie fans autre enqucftc ils
Icuerer.c le camp à leur grande honte & confufion , &
en mcrueillcux dcror<iîe.£» ce mefine remeil.
La ville de Grenoble , ficge du parlement de Dau-
phiné , afîicgcû en ce mefmc temps par troupes Fran-
çoi(es& Erpagnoles,au nombre de fix mil hommes, où
il y auoit force capitaines, fat dciiurec par vnc frayeur
cxtraordmairefuruenue entre les allîegcans , par vn.
mo^'en digne d'elUeramcniu.Vn capitaine, (urnoramé
Furmejer, homme degrand cœur, Se cies-afïedionné au
bien dcsallicgezdcd.ms Grenoble, auoit ramalTé près
de foienuirou trois cens piétons de Gap & des cnuirôs,
aucc lefcjUelsilfe rendit.à Komans. ta ayant alfcmblc
pareil nombrc,& q uelc|ue& quatre vingrs c heuaux,ieto*
iution fut prii'fe d'eiTaycr de fscourir Grenoble. Parue-
DUS en vn deftroit quiaiioit pour cloflurc vne haute
metagne,&Ies payfansau sûmct,à'où ils roulcyent des
pierresjaa pied la riuiere d'IlcrcS: vne tranchée au uc-
uanc d'eux auec vne muraille de pierre feiche^ils forcée
cefle rranchge,&ayans tué dix ou douze fblJars qui hur
debattoycnt le palijge, s'aduancent iiifques à vne licuc
de Grcnoblc,ay^ns deuanteux le Drac, riuiere à palîrr,
pour arriuor où ils prcicndoyenr.Lcs aiïiegsans îur ces
nouuelles font trancifcr le Drac à trois ou cju^trccens
ch- uaux auec la fleiK de leur infiteriç:puis bordët l'au-
tre coùé de iorce harqucbouziers. Le fei/.-.efmc iour de
Nouébre.defort ^râd m.aiin,Fiirme icr.dciiberé de paf-
lir,quoj qu'il vi(^ cât d'hiiqucbuîu-rs ,d'j(couure les au-
tres embufchez dedans vn bois, d'eu IK pretendoyent ic
cha'ger c«i >-jUeuë Sur ceite difficulté, Furm.ejer c6ni.in-
de à (es foldats de quitter la riuiere , & de tourner vifa-
ge,commc s'il eiift voulu reprendre le chemin par où il
cftoir venu. Ses ennemis . ptnlans que telle luit l'on in-
tention,paroiircnt & l'accueillent d'miuf es. Mais celle
audace fc fondit en vne terrible efpouuâte ; car lui cou-
rant droit a egy, les ch.iigc de telle furie-, qu'il les rôpr,
en tue la plufpart lur le champ, efcartc les demeura"; c f-
pcrdusdef'ayeur ,& fuyans à la voue de leurs compa-
gnons ^ui eftoyenc delà i'cau. Funiicjcr ayant fait p&u
784 Hifloins admimLlei
ou point de perte lies ficns , lans longue confulcacion
paflc auccks troupes le Drac , où les piccvini citoycnc
iuiquesaux aiilcJles : rcrolutionqaicltonnalcs harc|ue-
huziers paroilfans cn.telte > tjue lans aucun exploit, la
peur leur lie ks main5,6*: Ls induit à vnc iuice houicu-
Ic : tellement que Furmcjcrôc les liens n'eurent peine
<ju à marteler le dos lie ces fuyards , qu'ils allèrent bat-
tans &:tuans de tous coltcz. Ceux qui eurent mcillcu-
r.cs ïambes donnèrent ic\ aîiarme à leur trmce es enui-
roas cLc la viiic, qac fans autre delibcration la fiaytui:
ind«ifii grands & petis à quitcercn Lncroyablc delordrc
leurs loges U tranchées , ne cclPjnt de fuir lufqucs à ce
qu'i's fc fuflent rendus en bauoye. En la mrjme Iv^otre.
Quatre ou cinq mois après le mefme Furmcjcr cn-
treprmt de s'emparer de iv^oaieite , petite place à deux
licacs de Gap,iîc enuoya fon inraiictne a la iiic pour fe
iettcrdedans , marchant après aucc quatorze maiftrcs
feulement , i'vndefquels cftencores auiourd'hui Tvn
des grands, ùges & hcur^ ux guerriers de la France. La.
gar nifon d'nifanicne & de caualerie de Gap, en nombre
de quatre à cinq cens hommes , fortii pour aller au fe-
jcours dc^omettc. Mais Furmejcr & les quatorze mai-
itres furent il hardis d'encicprendic de faire cefte à ccltô
grolle* troupe marchant en bataille. Sur ce ayans con£-
«ieré qu'vae frayeur failîflou leurs ennemis, qui elloyct
trente contre vn, approchent pour charger. Alors touc
Cetecours trampcrccôc traniportédc lerrcur Panique,
fe met à vau-dc route,la fuite commençant par vn Ko-
domonc ou capitaine André, Piemontoisaeilement que
Furmejcr & Q;s compagnons n'eurent autre peine que
de frapper dclfiiSjôc tuer luf^ucs aux poites de Gap.llo-
xricttc f Jt prinfcincontinent, & les voleurs qui y auoy-.
cnt fait mille maux, portez àc peur au clocher, & poilc-
dezd'icclie, s'y laillcrcnt prendre &: précipiter du haut
en bas , r^ceuaos le falairc de leur fureur 6: c-otiardiic-
Là mefme.
Le iîxicfrae iour de luillct i 5 S^.lcs troilicfmes gucr-«
res ciuilej allunjces en France le iiieur de jan(ac,acom-
pagoé de fept mille picioas , CAicinblc de cinq oîi lis
CC119
ér mémorables.
7 H
cens chenaux, alfiege la Charité, chagc & rechâge trois
ou quatre fois fabaccric, n'efpaigne poudre ni boulets,
& après auoir fait brefche pour entier auecchcuaux &
charrctces, commande oHc les foidats donnafTcnt ?naf-
faut.Ces gens acouftumcz à piafcr fur le paué des rues,
'je à faire des fcopeceries deuancles dames , voyant que
Icsafficgez fe refoluoycntà vne couragcufe dcfcnfcj
prindrcnti'cfpouuance ieile,qu'ilfalutque leurs capi-
taines,enfeigncs/ergrns, caporaux & autres membres
de compagnie fiifent la pointte. Decenideceux la^ il
n'enreuint pas cinq au camp.ainstouj furent abatus \t$
rns après les autres à l'entrée des brefches. Dauantagc,
furvn faux bruit, femé partout le camp de Sanfac ,quc
l'armée des Princes marchoit au fecours de la Charité,
& que le capitaine BlofTec eftoitdcfîaenBerry auecdeux
cens chcuaux.pour marquer les logis & dôner vne pre-
mière charge, les afliegeans s'efFrayerét fiextraordinai-
ïement j que fans autre cnquefte ils mettent les enfci-'
gnes au vent,marchansiour &nuicl , pour le nicher à
Orléans, Bourges,Cha:tre$,Neuers,Gyan & autres vil-
les de leurs garnis6s.£;z Vhijlotrede Charles i x.i*d»i 5 69,
Nous reprefenterons grand nombre de pareilles hiftoi-
ics aduenues deuant & dcpuis,cs volumes fuyuans.
F 7^E NE tl QJ^E S merueiUeux,
A Fin que l'oa conoi ffe par expérience que Û. le ccr-
ueau eft tcraperé, félon que les fciences naturelles
le requièrent i il n'eft pas befoin de maiftre qui nous
cnlcignc; il faut auoir efgard à vne chofe , laquelle ad-
ftieni chafcuniour : qui eftque {î l'homme tombe en
cjuelque maladie, à raifon de laquelle lecerueau ciiangc
foudain fon temperamcnc(comm^ eit lamamc, mclaa-
cholieôf frenelie ) iin'aduient au prudent de pcrdrç
tout ce qu'il fçauoit , mais exirauaguecn Tes propos.
Si c'cft vn ignoranc,il acquiert plus grand efprit & ha-
biliîé,qu'il n'auoit auparauant.i'ayuuï vnpayfan,deuc-
a^l frcacciauc > difcourir iQcrawiUcuiement bicn^
yié Hilloires admirables
ZACommandant fon iVi ut aux aiH^ans, & les priant d'*-
uoit cfgaid à les encans &à fa tcmme,s'il piailoit à Dica
Tappcllcr du monde:, àuct iant ^'artifice de rhétorique,
auH^ granac cioqac ce & pureté de langage > que
Ciccron eut p -u trouuei , haranguant en plein Sé-
nat.Dequoy les aliil^ans cfmerueilkz me demandcrcnr,
d'où pouuoit procéder me fi grande éloquence de Tcic-
ce en VQ homme, lequel cflant en fanté ne fçauoit par-
ler? il roc fou uicnt que ie fis rcfponfc que l'art d'oratoi-
re eft me fciencc qui prouient de certain poindl & de-
gré de chaleur: &queccpayranyc{loitparuenu parle
moyen de fa maladie.
le pourroy bien parler dVn autre frénétique, lequel
hui«5tiours durante plus, ne dit onques parole qui ne
fuft à propos & bien rangcc. Le plus fouu^nt il tJaifoic
des vers aulÏÏ bien qu'vn irc^ dofte Poëtc , -V le* alfiftls
cftoycûteftonnez a'ouyr parler en veis vn hommv,qui
en pleine fancé n'en '"çcui lamais faire vn. Surquoy ie
dis qu'il n'aiucnoirgu.rcs que ccKiifuft poète ca fre-
Befie, qui l'citoiten lanté : pourcc que le tempérament
du cerueau,pioprc à l'homme la' n, pour la poëiîc, ordi-
nairement le douchante: en maladie , & taire choies
contraires.
Mais cela eft peu de chofe à comparairon des hasts
difcours que fit quelquefois le page d'vn g;andfci-
gncur £lpagool,cltant maniaque. En lanté 1 on ie tenoic
pour leuRc hom e de petit lens : mai» citant tombé
malade , ilauoit merueilieulement boancgacc enfcs
ropos jrelponfloit fidt xtrcmentaux queftions qu'on
uipropoDr, & fc moûftroii tant admirable es defcri-
prions qu'il fifoit des moyens de gouucrner certain
royaume Cdour il s'eftim it.Seigucur ) que chafcuo le
venoit voir & ouyr ; & fon propre maiftre ne bougeoic
d'auprès de lui , fouhaicantqu'icclui dcmeuraft touf-
iours fi^enetique : comme on le conui puis après.
Car le page eftart deliué de fa maladie, le médecin qui
Jcpcnioit , vint prendre con^é du l'cigiicur , cfperanf
grande recompenfe o'i bonucs parol'-s. Maisielei-
gneur lui du jic vous a(ïcurc;iQon{icur icdodcur ; que
[.
ér fnemoralftei
7H
le ne fin onc tantfafch^ d'accideac qui inclbii adueni%
<juc (ie voir mon page gucri:car il ne me fembloit con-
ucnable de voir changer vncfifage folie à vn efpric tac
lourd & endormi qui demeure à ce p^e eftant en fantét
écm'cft aduis quedefage& aduifé qu'ileftoii vousTa-
uez faic dcuenir vn foi & vne bcfte,commeauparauanr,
qui eft la plus grade nnifcie qui puifTe aducnir â vn ho-
me. Le pauu'e rhcdccin mal content de la petite reco.
noirtance qu'on lui faifoit de fes peines & vacations,ae-
coftele page, lequel après quelqueSdeuis lui dit, Mon*
(îeur,ie vous remercie humblement du grand bien que
vous m'auez porté, m'ayant fait recouurer Je iugement;
touiesfois ie vous iure,qu'il me faitaucuncmêt mal d*c-
ftrc guéri , pourcc qu'en ma folie ie viuois le plus con-
tent d u monde , & penfois efttc fi grand feigneur , qu'à
mon aduis, n*y auoit Roy fur la rcrrc,qui ne me fuft vaf-
fal.Et combien que ce fuft menfonge, que m'importoit-
il, puis que ieprcnois autant de plailîrà cela.quc fîc'euft
" cftc pure vérité ? Mais maintenant, le fuis en mauuais
poin£t,n*cftant qu'vn pauure page,qui dois commencer
demain matin à feruir celui que ie n'eufle daigné , eftâc
maiade,accepter pour mon laquay.
le pourroy* parler d'vne femme frénétique , laquelle
difoit à tous ceux qui Talloyêt voir leurs vertus & leur»
vices , rencontrant par fois de racfme adreflcquefonc
ceux qui parlent par indices & conieftures.A raifon de-
quoy nul ne l'ofoit aller voir : craignant la touche de
Vérité qu'elle defcoUuroit. Qui plus eft , comme cer-
tain iour le barbier la faignaft^le lui dit , Regarde que
tu fais:car tu n'as plus gucrcs de iours à viure,& ta fem-
me fe doit remarier auec vn foulorcequi feirouuavray
( quoy quedit ainfià la volée ) & fut accompli en de-
dans fix mois après. Il m'cft aduis que l'cntcn défia dire
àccux qui abhorrent les Iccrcts delà philofophie natu-
relle,que tout cela eft vne moquerie & menfonge. Que
fi d'auanture c*eft chofc aducnne,le diable, fc!ô qu'il eft
cauteleux & fttbtil , par la permifiion de Dieu entra aa
torps de cefte féme& des antres frénétiques fufmentiô-
ûci, & leur fit dire oiciueilks.Mais ils s'abufenttpourcf;
DD a
788
HiBoires Actmîrhhles
que le malin cfprit ne peut fç-uoir ni prédire I*aducnir^
i. hiturt. an 4. (.ha^. du Uure ut L'^nninje ou examen des Ef~
fnts.
Sans examiner ce que le dod.ur Huart vient de dire,
qucle malin efpiiincpeur predie 1 aduenir , attendu
qu il y a plufieurs exceptions av contraire, vérifiées par
lescxempiescontenus en Thiftoiredc Saulfur lafin du
premier liùie de Samuel > &: ailleurs , la permiffion de
,^iea s'eltendant beaucoup plus loin que Tentende-
ment humain ne peut comprendre i'acquiefce à celâi
les pcrfonncs dont le cetueau eft igité par les vapeurs
puilFantes du fang enflammé, Ôl aunes caufcs internes
& externes , difcnt des chofcs furpa/Tanccs toute appre-
hcnfionoidinaire. l'en ay veu vnc plufieurs fois en
inav;e , & aagee déplus de cinquante ans alors , qui
parauant cftoit modelîe , mais Tçachanc & parlant peu,
deucnue frénétique, à quiconque luiparlou oulcricu-
femeni ou en ioiiant, ellcre(]:ondoji primiptement , i
^propos,& amplement, en vers François bien rimez. Si
quelqu'vn la picquoic tant luit peu , clJe lui donnoir
des centre touches auflî poin£lue$,qu*euft (çcu fjiie de
fon cemps en latin vn Martial ou tel autre Pueie en fon
eftudc. C'cltoit en foui lant , &:.( ommc fans s'arreltcr:
car ûidinaiicmcnc elle alioii £c vcnoir par les rues. Ec
ne faluii pas que les ho.nmci manifcftemenr vicicuX &
desbauchez, ou des femmes ik fi» es impudiques , lui
vinlîent à la rcocontre ; s'i.s uc vouL \ eut reccuoir des !
pinçadcs lans lire. Car lots elle ranicr.tcujit tous les
pcciuz iuiannes, en vers accommodez à ce dont c-
ftoiL qucftion, roufiour^ auec quelque poinfte &:in-
ucntion pièvique , qui xaifûitelclaer de rire ceux qui
rclcouioycnr. l'eft- 1 f irtieone^v rnefuis fouuent es-
bahi qu'il ne fc crouua gens alo's pour marquer beau-
coup dr p opos meruciileux par elle prononcez, l'ef-
pace de tjiiclqucs années qi'eilc vc'.cut rn ccil ellat.
î'ay aprins d'vn tîcB fils mon fùmi'ur , qu'elle cftoit re-
uenuc a foy&deccdee fort paiiiblcme.11. Extrait demes
mémoires.
Vnc autre , femme honorable ? dcccdec plus icune, c-
itaat
^ mémorables. 7 8 9
ftaat fortfanguine , fat agitée en fon cerneau , par «quel-
ques repriles , durant vne delquelles illui aduintà«.ii-
oerfes fois de reprocher à fon mari ( comme elle m'4
confefTé) certaine grande fiUic par lui commifc: plus de
dlix ans aaant que Tauoir efpoui'ee , & dont Jamais il ne
lui auoic en forte que ce fuit fait declararion ni donné
adentiment quelconque. Neancinoins elle lui mar-
quoic la fauce en termes fi exprès, qu'il ne pouuoit pa»
rer au coup,ains feignant ne l'entendre , elTayolt feule-
ment de deftournttr le propos. Reuenuë en bonne con-
uaiefcencc , &fe fouucnant prefques de tout ce qu'elle
auoit dit & fait durant fon indifpofiti( n , cllefcmon-
Ûroit beaucoup plus honteufc que de couftume, eflayat
par toutes fortes de feruices honneftes , faire oublier à
foQ mari ce qu'elle lui auoit plufieurs fois ramentii , &
dont il me difoic auoir bien fait fon profit. Evfrrtlf de mes
mémoires.
Ceux qui ont fréquenté les malades , &qiîi les fré-
quentent ioarnellemcnt , trouueront vray femblable,
qu'on peut parler langage eftrange,comme Grçc,Latir,
Âleman , Hebrieu , ou autre , encore qu'on ne'l'ait â-
prins,& qu'on ne (oit polTedé d'aucun malin efp it. l'ay
veu vr>e femme d.- village en Lymofin,quien vnt fieure
ardante parla trois iours entiers bon & difert François;
& après qu'elle fut guérie nefefouuenoit d'aucune
chofc qa'elleeuft due ni fdi?e. Ncantmoins on n*a ia-
Hîâisfçeu qu'au parauint elle euft vfé de ce langage,
moins encores apris » & depuis n'a fçeu le parler. Fcrnçl
cfcrit qu'il à rcn vn page du Roy Henry lecond,qui ne
fçauoi: lire ni efcrirc , ie-juel cftant atteint d'vne frêne-
fie parloit bon Grec,«lic penfoit qu'irelui faft pofledé du
Hialmelprit. Or faut ]e 1 ^^jinent d'vn fi grand perfon-
nagt , ie penfe aucc plufieurs do£lcs hoa-imcSique cela
peut procéder des humeurs fi véhémentes j quefiroft
qu'elfes font enflammées ou co- rompuès,la fumée d'i-
jCçUc eftanc monter au c cru eau fait parler vn l3ng?ge c-
ftrange, comme nous voyons es y "rognes. Si cela fe fai-
foiî- par les malmt; cfprits,telles maladies ne fe gueriio-
yent par les médecines purgaciues , ou par mcdccinci
DD 3
790 Hifloires admirahles
«Jormitoircs.Car par iccllei &par pliifieurs autres rcm^"
des deuement appliquez , nous les voyons retourner c*^
Jeurbonfens. Mais parce que les humeurs boùiUen^
merucilleufcmenr,auffi font les efprits puifTamment cf-
meus, & rcntcndement fort trouble. Ge tremblcincnt
faic mettre hors certains mors non ouys auparauant, &
parler vn langage inconnu : tout ainfi que du tonnerre
& de la coIlKion d'vn caillou, nous voyons fonir àts ef-
clairs & des eftincellcs de feu. Loys Çuyon au 4. Uu. de fes
diuer^es leçons , çhap. 14.
I
FF\E VXdu malin ejprit limitée.
IL y a eu vne femme en vn village nommé le Mefnil
madame Ranccprcs Dammartin, laquelle commença
dcsl'aagede hui6l ansd'eftre lieedu malin Efprit, qui
l'attâcJiûitqucIquesfoisàvn arbre , lantoftau pied du
lift,iatoft à la crefche de rcftabIe,ou bié lui atiachoiiles
deux mains Tvne fur l'autre auec vne corde, ou auec vq
©zic-jou vn poil de la queue d'vn cheual,ou de lafilafTe,
&cela fe faifoit I! foudain,qu'il eftoit pluftoft fait,qu'oo
jî'auoit ietié lesycux pour voir comme il fe faifoit. La
fille fut menée à Paris Vnja i ^ s i-.Lc doé^cur Picard &au
très Thf;ologiens la virent & firent tout ce qu'ils fça-
Boycnt pour fa delinrancc : mais ils n'v profitèrent de
rien. Puis Houlier médecin le mocquânt des Théolo-
giens , difoit au commcncemcnr.que c'eftoir vne mala-
die mclancholique ; mais depuis ayant veu vne infinité
de peuple , le myftcrc^dcuant fes yeux , & que la fille e-
ft-nt entre deux ou trois femmes, foudain ils voyoyent
qu'elle s'cfcrioit , Scauflltoft fe trounoit liée par lc«
deux mains, en forte qu'il eftoit impoflibicdcdeflier sas
couper le lien , il confeffaqu'ily auoit vn malin efprit.
Pcrfonne ne voyoit rien, hors mis la fille, qui voyoit ytï
fantofme blancquandl'efprit malin venoit la lier. /.3«r
^W4ié x,tMjefa'Demonom40fe,ch4Pk Jt
érntemorahlesl 79 V
l'ay vcu plufiejr, fuis vne démoniaque, nommée
Gcorgc,qui par IVlpacc de trétc ans fut par intet uallcs
frequcns tourmente»' du malin ef'pric , telkroenr que
parfoisen maprefcncaelle s'cnfloit , & demcuroit (î
pcfantc , que hui£l hommes roburtes ne pouuoyent la
f"«uflcu-r de terre. Puis vn peu après, exhortée au nom
de Dieu de s'accoura^er , certain bon perfonnage lui
tendant la miin.ellc le releuoit en pieds>& s'en retour-
noitcourbee&gcmiflantechezfoy En tels accès onc-
ques elle ne fie mal \ pcrfonnc quelconque , fuft de
i3Ui<^,furtdciour , &^ demcuroit aucc vn {ien parent
qui auoit force pstis enfans , tellement accoutumez à
cefte vifitation.que foudiin qu'ils l'entcndoyent fe tor-
dre les braSïfraper des mains , & tout fon corps enflcï
d'eftrange forte, ils fe r angeoyent en certain endroit de
la maifon, pour recommander cefte patiente à Dieu.
Leurs prières n'eftoycnt iamais vaines. La trounant vn
iour en certaine autre maifon du village où elle de-
meuroit, ie l'exhortay à patience.raffeurant que Dieu
la deliureroic pluftoft qu'elle ne penfoit , & couron-
neroïc cefte efpreuue de quelque heureufe fin. Elle com-
mence à rugir de façon cftrâge,& de promptitude mer-
ueilleufe me lance fa main gauche, dont elle m'em-
poigne les deux poings , me ferrant auflî ferme que fi
i'eufleefté hé de fortes cordes. l'eflayc me defpetrcr,
mais en vain, quoy que ie fafteaufti robufte qu'vn au-
trc,& lorsea l'aage de vingt- fept ans. Elle ne me fit au-
tre nui fan ce, ni ne me toucha de la main droite. Ayant e»
fté retenu d'elle autant de temps que i'ay employé âdef-
circ fonhiftoireen ces lignes,ellc me lafchc foudain,
medemandantpardon. le la recommande à Dieu, puis
la cond'iilî paifiblemét en fon logis. l'adiouftc-ray quel-
le fut fa fin. Quelques iours deuant fon ireTp-^s , ayant c-
fté fort courmenceejclle s'allifta , faiiu: d'vnc fieure len-
te. Alors lafureur du malin efpritfut tellement bridcc
& limitée, que la patiente fortifiée extrao'dinairement
en fon ame , par l'efpace de dix ou douie iours ne eef-
fa de louer Dieu, qui l'auoii fouftenuè fi mifcricordicti-
fcmenc en fon aiHidion , confolant toutes perfonties
DD 4
f^L Bijioires admirai^ le s
quiia vifitoycnc.le lavis alors, & par diuerfes exhorta
lions & prières lui aidai de tout mon pouaoir. Eilc en
fut grandement rcfiouyc &. forcjfiec. le puis dire que Sa-
tan fut mis fous \ti pieds de ccfte patientclaqueileticce-
da fort paifibicment en l'iDUocation <ic fon Sauucur , 6c
parlad'efpricfort rallis lufqucs au dernier foufpir. Ex-
trait de mes mémoires.
Çt^^CltrSB Tj:,' héroïque.
LE roy Chriftierne fccond,regnantcn Danemark, a-
près auoir fait beaucoup de maux à Stcoon Scurc,'
Roy de iuede,&pour le comble l'ayâtadiegc l'aniug,.
en fa Ville capitale nommée Scocholm , pour lui oiter
le joyaume & la vie» s'il lui euft elté polîible ; Stenon
luy rendit bien pour mal, &d'vnegracieufeié héroïque
cflayade legaigner. Mais il ne lui fut pofliblc. Dieu,
refcruant Chriftierne à vn iufte fupplice , duquel
nous parlerons en l'vn des volumes luiuanï. Il aduint
donc que les vents eflans rcfpace de plufîeurs iour$
contraires aux vaifîeadx de Danemark qui apportoy-
eot les viures & munitions de guerre au camp, la fami-
ne faxfît inconiinpnt l'armec de Chriftierne , qui s'en
alioit perirrce qu'entendu par Stenon il fournit libéra-
lement des viures à fon ennemi , lercfpitant de mort
auec tous les ûcns.Io. S^a^nus au 13. liur.dei'hijhire d*
Suedz.
Goafaîuc, furnommc le grand Capitaine » fît de
grandes gracieufeiés à diucrfcs feis aux firigneurs, gen-
tils-hommes,& foldats Françoi5,quand après les auoir
furmontci au royaume de Ndplcs , il les voyoit réduits
à quelques extrcmirez. Vne foij entendant que le
(leur de Kaueftein.gcneral desgalercs de France , auoit
par naufrage ea la coHe de Calabre perdu tout fon ba-
gage & meuble, il lui en fournit gracieufement & en
abondance toutdu meilleur ^ du plus beauqu'il euft
teiiemcntqucKaueftcin &fe$gens fc virent en vne,
quipagc
é' memomhles, 793
qnipage prefque royal , par la courtoifîc de ce feigncur
^fpagnoU Ifcjucl remonta de bons chcuaux piulicur»
fcigneurs&: gv;titils hommes F^ariÇois le rçiirans de
^TJaplesen ï'iâncc.'P.loueenfa yie.
Lcducdcrinfanrafv^uejde la fami!lcdcs Mcndozzcs,
grand Icigncur en Elpgne,en[crd3rt que le roy Fran-
çois,prms prifonnicr à l auic , efloi' en chemin pour aU
1er à Madvir,& deuoit palier bicntcft fur fcs terres , do-
ua proiuptcmcnt ordre queleroy fut roya'ement rcceii
& traite par tous les logis , aux dcfpens du duc , lequel
outrcplus & à diucries fois fit dts ptf fens à ce Piincc
captif , tels & de fi grand ptis^qu'ij confclTaqu'à pcinç
en pourroit il prefenter de jlus exqi:is c)uand il fcroic
en paix au milieu de la France. Ceduc fit cncor vn au-
tre trait «Je gracieufeté heroi<]ue admirée du roy , dont
aulfi t©iue l'Efpagnefc: glorifia fortrcar il fie comparoir
à iour alTigncdouz^ mil hoii>mesde fes fuiets , gens de
pied & de cheual,brauerîîent equippcz,qni difpofcz par
bataillons firent preuuc qu'ils eftoyent bien exercez au
maniement des armesidôt le roy ermcruçiTé le duc lui
dit , qu'il y auoit plufieurs autres grands ieigneurs en
Efpagne,qui pouDoven: autant ou plus que cela. ^. loue
€H la -vie di* ^arjutf de TcJquatreMu.'j.
l'adiouderay vnautre exemple , qui fera voir com-
bien ks Efpagnols furucnus depuis ont dégénéré Je la
gracieufciéde leurs predec<'freurs.Loijy5 ce Gorde, fol-»
dar £ pagnol, & ff s compagnons, ayans fait vne belle
retraite après !a batailie de Pvaue nne l'an 151t. fusent
pourfaims par Gafton de Foix viflorirux , lequel fut
chaftic de 1:1 véhémence trop précipitée^ ayant cfic tué
par les ETpagnoIs , qui le ralliereni & cU-fenàircnt vs:I-
lamment. Odetd; Lautrech^dcpuisfage &braiiefhcf
ic ^ueire pour le paiti François , Scciui deflors cfloit
bien conu,fiP di's premiers chargez gricfuement blcifé
ic abatu de cheaal en ttrrc.De Gorde,tcfmoin de la va-
leur de Lauirech voyant que fes compagnons vouloyêc
le tuer tour à faii,s'i:ftcndii tout de fon long & couutit
de fon corps celui de Lautrcch.pour le garaiir,& le fau-
"Ua par telle courpoific.'i^/owt; en la ye du^ran^ Confalnr.
79 4 HiBoires sJmirai/es
Lacouftumc Jugrind Sforcc cf>oic d'admonocftcr
pi ancifquc Sforcc Ton fils, de ne battre ni bleHcr aucun
dcfcs fcrui.'curs & domcftiq'ies ; cjuc fi lacholcrc le
tranTparcoic G auanc , qu'il fuit foigneux de Us apaifer
tout a l'heure , de leur faire m prrfent honorable (ou-
tre Icars ^»ges)&: digne d'eux, & le« enuoycr arrière de
foi ( s*il ne pouuoit les garder en leur donnant vn gra-
cieux congé.yP.IoueenfaVie.
Alfon;eroy d'Arragon cnuoyant fon fi!s Ferdinand
auec vne armée contre les Florentins, l'cxho; ta fcrieu-
fcment de ne fouiller la victoire que Dieu lui auoit o-
C^royec par cruauté ni infolcncc quelconque, mais de
traiter gracicufcmeni les ennemis qui fe rendroyci fur
fa foy: que fi quelques vns s'obftinoycnr luy faire tefte,
après eneltre venu à bout.il les fupportaft benignemér,
fe louucnant de fa douceur, non pas de leur rébellion.
Antoine de Valerme enfon Commentaire des frits tj- dits
d'Mfinfe.
Le roy Louys XII. ayant prins Bologne l'an i y 1 1.
commanda à Ican laques de Trivulce , que laifTant Bo-
logne en la puifîance des Bt:ntii)oles, & s'il auoit occu-
pé quelque autre chofe du Pape, le rendant , ils'enre-
tou'-naft au[Tî lof^ en la duché àt Milan auec Tarmee. Il
adioufta .1 faits fi gracieux des paroles & dcmonOratiôs
tres-humaines. Car il défendit qu'on ne fiflen fon roy*
aume aucun figne de publique allegrefie. Fr. Çuichardiit
at* Commencement du loliu.
Ce me^me prince pouffe à vengeance contre Louys
de la Trimoiiille : qui du temps de Charles V I I I.l'a-
uoitdesfaic& prinspi ifoiinier en la lournee de fainft
Aubiirvn roy de F'ance(ditil ) n'efpoufc point les que-
relles d'vn duc d'OrIcans , s'il a fidèlement ferui le feu
roy fon maiftre contre moi, qui n'cllois alors que duc
d'OrIcans : il feradeformaiilefemblablc pourmoi,<|ui
fuis maintenant roy de France. Il retint à fon fcruice
tous les officiers de fon prcdeccfTwUr , voire inefmc
ceux qui l'auoyent gardé prifonnicr.Sur tout il fut gra-
cieux à fes fuicts,&: parmi tant de guerres importante!
«ju'il eut en Italie, ou fç firent inftaief grandes Icuees
. d'ifi*
ér ntemorahlesl 7 9 Ç
^'infanterie & de caualcrie dedans & dehors le royau-
JUe/agracienfetc héroïque apparut relJement jc^u'il na
foula ion peuple d'aucune nouucllc charge ; aimant
mieux rellreindrc la dcfpcnle de fa perlonne & de fa
mailon, que defpouiller Scdcfoler foc royaume. Aufli
ne vid-oniamais la France fi riche, fi abondante, fi peu-
plee,fi cuhiuecfi belle & bien baitic, que fous ce Prin-
ce»quicn chaiTa foigneulemcntla guerre dthors, pour
tenir les ficns en paix & profperité. L*on peut dire que
fous ceroy les François viuoyent ioyeux fous Icuri fi-
guiers & près de leurs raaifons & vendang-s , exempts
des outrages & rapines militaires laniais roy de Fran-
ce n'aima tant fon peuple , lamais le peuple de France
n'aima tant fon roy : oncques fuiets ne donnèrent aucc
plus d'aplaudiffemcntà leur fouuerain , que les Fran-
çois à celui-ci , le glorieux fumooi de T.Ur€ de fou peu-
Voyons deux ou trois autres hifboires defagracieu-
fetéheroique. S'eftant rendu maiftre de la ville & da
chafteau de Milan, Tan 1449. & faifanc fon entrée en la
ville, il accorda libéralement au peuple exemption de
pluficurs daccs, impunité à tous ceux qui aucyent fuiui
i-udouic Sforcefon aduerfaire, reftitution auxgentils'-
iioromes de leurs biens qui auoyent efié parauant con-
fifquez.Si ces biens n'eftoyent plus en nature, pour n'ai-
grir les poflefieurs de bonne foy , il donna de l'argent à
plufieurs pour les racheter , ou d'autres s'il s'en prefen-
toit à vendre. Rappella par €.ài^ les regens & profef-
feurs es bonnes lettres, donnantaux vns des terres de
valeur, aux autres augmentation de gages ; honora de fa
table les gentils hommes dupays;& icuts maifons , de
fa prefence. Et pour rendre le gouuemcmcnt plus po-
puîaire,eRablitgouuerneur de Milan Ican laques de Tii
vulcc Milannois , lui donnant en retonoiffance de
fes mérites & loyaux feruiccs Vigeuene & plufieurs au-
tres biens.
Les Mîlannois s'cftanttoft après remis en la puifTan-
ccdeLudouic Sforce , & forclos de l'aide qu'ils pen-
lo^enc tirer de lui » requircut aadi cofl pardoa > lequel
79^ Hifloires admirables
ils obcindrcnt de Theroique gracicufetc de ce bon roy*
lequel outre-plus leur quitta la plufpart de l'amende
de trois cens mille ducats pour chaftimcnt de leur rc-
bcilicn.
LcsGeneuois s*eftoyent rebellez contre iuiiauoycnt
cflcu pour Duc vn teinturier de foye , abatu Icsarmoi'
îles de France > redreilé ccIInSS de Maximilian Sforcc,
prins Caftellat place qui comandoit à leur ville, & cou-
pé la gorge à la garnifyn F. Jçoifejcn l'an i 5 0<î.l'an fui-
uani le Roy les contraignit de fc rendre à fa merci , les
defarma, le 19. iour d'Auril entra dedans Gencs armé
tout à blâc aucc vnc efpee d'armes nue en fa main, fous
vn poiflc,3compagné de toutes les compagnies d'hom-
mes d'arme s. & archers de fi garde. Mais ilpardôna aux
Gencunis teion fa gracieufeié acoultumce, le contentât
de faire exécuter vn des principaux auteurs de la rébel-
lion,& quelques fcmaincs après le teinturier de foyeXi
ville paya vne amende pécuniaire.
Ayant receu les nouuelles de la baraillede Rauennc,
de la mort de Gafton de Foix , du ^nc de Rauenne,& de
la reddition d'autres villes : Pleuft à Dieu(dit-il)quc ie
fufle chalTi de i'lialie,&que mon ncueu de Foix vefquift,
& les autres Seigneurs falTent pleins de vie. le fouhaiic
telles viftoiresauxennemis. Si nous vainquons encore
vn coup de ceftc façon, nous fommes vaincus. H-Jt.de
France,€n la vie de ce Prince.
Qjunt aux giacieufctez heroiques de Quelques au-
tres Kois de France, fucceiïcurs de Louys XH. nous en
parlerons fous les liltres de Clémence 6l Magnanimité
es v-/!amcs fuiuaiis.
Bannftc Fuîgofc raconte que lean Gualbert , cheua-
licr Fîorenc'.n tenant en fa p'-nlfance certain gentil- ho-
me icalié.iequL-l a'ioittué le frère vnioue d'icelui Gual-
bertjcomme il eftoit fur le poinft de fc poignarder, l'aii
tre fe mit à genoux , & ajuomde lefus lui demanda la
vie. Aceft-?"ie e Gualbert d'vnc gracieufeté vray£-
ment heroiquc pardonna à fon ennemi. Fitijofe au 4./*-
ure d^iexefnflesjch.ip.i . g?» Polydore Vtrg, M* "jdiure de la-
ihe;K,rer*
AU
& memorahlesl *79,7
Alfonfe d'Arragon ayant prins Napl^s à foicc d'ai"
mcs .empeTcha (ic tuer& f.iccager fauuant les citadins
efchappcz de la première bomeede cholere des vifto-
rieux-Ôutreplus tl pa- donna aux vaincus tous les torts
qu'ils lui auoyeni fai >, voire mcfmela mort de fon frc-
'rc Pierre, qu'ils auoycni i\it. Lomati,'Vont.au iM.cie fortit.
Le mefine ayant prins Ifcl-^ par force,pardonna à fes
ennemis cjui y elloy^nc , vuire mcrmc leur donna pour
femmes des ho.iorable» vcfaes 6c des filles de bon lieu,
P''cltimanc(ce quiadutnt)quc par le moyen de telles al-
liances & des enf-;ns qni en procedercycHt , Icscœurs*
p us enuenimez vicndfnycnt à s'adoucir. Combien que
Ibnconfcil fi:ft d'auis cju'ilfillmounr Antoine Caudo-
Je» grand guerrier , &. ;eplus redoutable ennemi qu'il
cuftal lui donna la vie & lui fie rendre rous fcs bics. Les
foldatsprifonnier'^.Fjrentr'lirchcZj&pInfieurs honorez
de riches prefens àcaufcde leur vaIeur.C< itegracieufe-
té heroioi.e lui côquit & conferua plus de pays que dir
batailles. Car depuis il poltcda paifiblenaët tout le roy-
aume de Naples. Le? capitaine?: ?c foidats de Ton armée
vouloyent à toute force qu'il -fift mourir Marin Bfffc,
qui leur auoit fait beaucoup de in2ux,fpeciaicmci à Al
fôilrraais il le garent de Irur mains, le reftablit cnfts
biés , lereceut au nôb cde fcs rô cillcr<5& les fils d'ice-
lui pour gécils homines-lc fa maiiô.Les chefs & loldats
de la garnisô de Stcph'tc kn auoyôrdit mille outrages.
Lcî. ayant aiîiegez & forcez de ferédre à Ca merci , il ics
traica fortgfacie'.ifen.ét.Cenfuré par quelques fiens cô-
fcillers deceftc douccar hcroiqui:rajrac micuv(dit-il)
acquérir loiiange de -ma douceur enuers mes ennemis»
que de ma vaillance & rigueur contre eux. AntM'^aUr-
me enfon Commenuire des piits cr dtts meniorubîes dtt Ti^ ^U
finfe.
Puis que i'aymisenauant ce Prince, ie ne puis me cô»
tenir de prefentcr encore quelques tableaux de fa gra-
cieufeté heroique.lls vaudront mieux(û ie ne me trom-
îpc)&agrcerôt plus au lefteur vertueux, qre Jesilatucs
mortes de relief, ou des veines parturcs de peinairc
7 9 8 Bi^oires admirahtei
pUftc A'infi doncques comme Alfonlc cuft mis IcCcgC
dcaanc Gd) ctic,!es illîcgez, lortercnc hors Its vieillards,
les temnjcsjics cntans, 5c autres bouches inutiics. Les
foldais d'Alfunie,conunenccrenc à grands an &^coups
de pierre a les rcchalfcr vers la ville , où ils uouuercnt
Vilage dcbois. Dont Aifonfe tut rcilcment clraeu qu'il
fc prima dire que mieux ilaniioit perdre tout & eftrc
challé defon royaume , qu'eftre caufc de la mort de ces
pauures perloiit-e^. Pourtant, après leur auoir fourni de-
quoy 5 entretenir & nourrir, il leur permit fe retirer où
bon leur Icmo'eroit. Le mefme autheur.
Il auoii cailé aux gages certain capitaine,nommé Ici
le Forr, qui pour fe venger courut par riraiie,la France,
rAkmagne, &; i'Elpagnt , où il dit tous les maux cju*il
peut du roy Aifonfe. Mais ne irouuart ptrfonncqui
voulult lui faire parti , fut contraint fe prcfenier dere-
chef à Aifonfe , Icquclayant eu auis de les courfcs indi-
gnes ,lui dit : le ne me fouuien point de tes mcfdifanccs»
mais des feraices que lu m'as fait5:& lui ayant donné v-
re bonne fomme de deniers l'cnuoya en paix, tul^ofc au
^.liurecb.tpure i. McCme iraitementfit-il à vn chtualicr
îfpagnoi.quirauoit diffamé & calomnie par louiiguc-
rillantcefte malac'ie pargracieufeté hcroiqueSc libéra-
lité digne d'vn grand Prince qu'il c^o'n. Le mefme.
Antoine de Palcrme recite, que ce melmc roy reprins
de ce qu'il auoir fait tant de biciisà Aluares de la Lunc>
qui fe monftroit du roue ingiat & mcfconoilîant d'i-
ceu.v , ne die autre choll' à les familieis , finonqu'vnc
grande ingratitude eltoit le conccpoids d'vne grande
bcnefi(:encc&.gracieulecé. Lture t.def ditscyfius d'^Al'
finfe.
Ildefcouuric qu'vn nommé Albert Orlando, par vn
long efpace de temps auoit ferui d'efpioo à quelque
Prince eftrangr» en a cour:mais en heu dclcchalTer, il
lui adîgna penfion annuelle.^i* ^.Uu.
Partant tout a^nie d dans CapOLC auec fes troupes,
vn gendarme tout cfchaufFc lui vint au dcuant en pkioc,
place^arrcflâc fou cheual par la bride , puiji lui dit beau-
é^ mémorables. 799
coup <3c paroles indignes & infolcntcsrJont Alfonfc ne
fit mine quclconqucainspalFa outre, fans mefmc faire
fcrablantde regarder ce vaitaut.^AMfrtniîtrUure.
Vn auircmocqueur&mal embouché lui aucic lan»
cétouc piein demotsdcrraucrs,doni quelque particu-
lier fefuftlènti picqoé.AJfonfen'cn tint conte & quand
ccmcfdifam lui en dcmanJa pardon , pour te Irnoig na-
ge qu'il ne lui en porioic tjncune , ni l'en vouloic re-
cercher, il luific prefent tout à Thcure de lafbrame d©
trois mil ci'cus^loHian.'Pottt.au 3 o.cbap, du difcours de la li-
heralité.
Sa couftumeeftoiclauantfes mains » de cirer les ^n,-
neauxprecicuxqu'il portoites doigts, & les cômettrc
au plus proche de lui pour les garder iufques à ce qu'il
fcfuft cfTuyi.Qmîlqucfîn cournfan les ayant receus,&:
Alfonfe ne les redemandant point , s*en accommoda:
Jont Alfonfc ne fit fembiant, mais en print d'autres ea
fon cabinet. l'eu de iours après continuant en fa coaflu-
me, Icconriifan s'approchant de lui pour receuoir hs
anneaux, Alfonfe l'empoignant & lui tirant la main lui
dit tout bas à Toreillc ; Je te baillcray ceux-ci en garde,
pourueu premièrement que ru me icndfs ceuxquc tu
me retins l'autre iour. Et ne l'en chaKia point autre-
ment, quoy qu'au rcfte ce fuft 'vn ftuere, fage &' iuftc
Prince,autant qu'autre qui ait efté depuis. Mais relie c-
fi;oit fa naifuc& héroïque graciculeic. Ful^ofe Lurc 4,
,■ L'Empereur Charles V. auoit vn horlcgc & refueiU
Ic-matin defingulier artifice & de fort grand pris. Vn
courtifan cnuieiix de ccftc: pièce, la crouuani àfon ad-
uantagcmct la main dedus , «Se la fourre en la pochet-
te defcs chauffes. CoRimc on cerchoit après , l'horloge
fonne 3e defcouure le larron, qui prias iur le fait fc ict-^
te aux pieds de fon Princc,dcroandant grâce en grande
confuûon & demi mort. L'Empereur le fouriant de tel
piège, lui pardonna gracieufemenc, & Ce contenta de lui
dire , qu'iile Ibuuinft que la peur clt vn;;pafliQn pKis
forte beaucoup que relperancc. ^utngsr au t.y»lmrie di
fia Theafre lnê. i .
8 o o Hijtoires admirahlei
Ce mcfmc auteur raconte aufiî que le roy Frâçois ï^
flyanc fidc-^iiucri & fait emyoïgrcr vn vendtrui de hap-
4>cloi)r<ics&: r^ullcs {»icrrcs,doni ilafinoir les dames de
la cour, pour lapplice le conrcr^adc faire rairc cclHiB-
policur, la coaHume d'alors tftanrque cous portoyent
grandes pcrruquesrpuis le fiv prc«mcnci en ccltcftac par
Jcs carrefours du lieu où il fut attrapé , non fans nfec
des cournraiis,& belles attres de l'innpoflcur , qui n'ac-
tcndoitqu'vne ercht.'l'e& vn licol.
Q_ui:K]ue courtifan incerccdoit vn iour cnuers le
nieimc Prince pour cerain calomniacear, lequel auoit
auancé des propos inTupporcables. Icfuis content ( dit
le roy)iui pardonner beaucoup j moyennant que ci a-
prK"S il pari? ^ç.i] .An mefme yolnme ^ linre.
il ces Princes ont cfté ir'ands &d'vn naturel héroï-
que, ;;ornmc ils ont elle , c'cllnu lc6teur àpcnfer ce qu'o
]f ourroicdire de plulieurs farccnus dcpi:is > qui cnfeue-
liinnc toute grarieuicté hcroiquc, ne 'ù- f'ontfai: rcnô-
nicr q le par atle< conrraircs. Mau: irr eiions-nous, âc
confîderons les hiiloircs fuiuantes, afin que adiuciiîté
Jîous efg.iycs.Sc infttuire ayfiî.
Léon X.de lafainillc des Mcdicis, venarr à Flo'ence,
rappclla de Rr^goufe Pierre Soderin , grand gonf-i non-
rier,& enncH.i iuîé des Mcdicis, le rccen en ^;andhô,
II" ur,& donna l'vne de fcs proches pa'cr.te^ pour fem-
me au neueu de Sodcrin. Il de.iura de prifon Vaicrius
l'vn dts complices de cercaioe trahifon braflce contre \
ï(]i,S4 Je reftablic en chai ^: publique.Il reccut en grâce» j
&rcibtaa en leurs anciennfîc tiig;\itcz deux cardinaux
JZrpagnoKsquc Iules ' I. lonpredecefïeur a-ioit délibéré
de faire b'Uller vifs, pou-ce ^jii'ils autyenc aflignc vn
Concile àPil'c contre lui. '^. loue au troijîcjme liure de ta
yie de Léon X.
Rome ryancefté prinfe par l'armée du Duc de Bour- *
. bon Pan i ' 17.0: »':* pane Clemenr V!I nitîfgé ucdâs le
chafteau 6\Ange,Ponipec Colonne, caïuinal grand en-
rcmi du Pape, vin; à FvOme , non pour fc venger, mais
pour ouurir Ton pillais aux affîcgez. Il eut tel crédit en-
ueis les capicaïues & loldais de PJtirpcrcur , que les fc-
C^ mémorable si 8 o Fl
mes & filles ne furent point violées, que les citadins
rcccureni doux traitement ,& qu'on traia courtoife-
jncnt les prironnicrs,au regard de leurs rançôs.Il remit
en équipage pluûrurs cardinaux dcfualife2,& les entre-
tint libéralement à fa table; payant pluiîcurs rar çons,
refpoBdit pour ceux qu'on vouloii ourragercn leats
corps , faute de fatisfaire à leurs promclfes : lellemenc
qu'on peui duc que Tacs ûîfte Colonne, Rome alloit
parterre. Il fit beaucoup de courtoifîes à ceux qui lui
auoyent cfté fort contraires : mefmcs il retira en toute
alleurance dedans fon palais vne grand* daac de la fa-
mille de fainâie Croix , aucuns de laquelle auoit tué le-
rome Colonne Ton pcre , &: paya la rançon de ccfte da-
me Scdc fa fillt.*PJo«ee« U yie atcdui.
l'ay fait mention ci deuant du grard Gonfalue , & ie
lui donncrayencores c^trait,pour faire voir fagracieu-
fecé héroïque, combien qu"*aurefle il ncfuft pas fans
plufieurs grands défauts. Eftan: entré dedans Aquino
delailTé de Tes ennemis , il y trouua force foldats Fran-
çois & SuyfleSjabatus de froid,ûc faim,& de maladie,cn
l'hofpital, Icfquels il y fie traiter bcnigncmenc : tout à
rebours de la cruauté quw peu auparauant Prejan gêne-
rai des galères de France aUoit exercée contre quel-
que^ panures Efpagnols malades &; brufltz, que l'on
portoitde Formian àNapIes en vne galère ; car \ti
ayant aitrapei il les fit fans merci iettcr tousenla mer
où ils furent miferablement noyez.?, lotte en la yie de
Çonfalue.
Selyman, fultan Turc, ayant afTiegé le chafleau de
Bude, vaillamment défendu par Thomas Nadaft gen-
til-homme Hongrois , aiùnc que les foldats dcja gar-
aifoû fc monftrerenc fi iatchcs ôc pcrfiàcs que d'empri-
fonncrNadafl , & renàr; ja place par ccmnolîtion de
vies & bagues fauues à Soliman. Les ianilTaires en rcz
auchafteau trouucnt Nauaft pnfonnier.&'enquierent dii
faicSc en font rapport à Solyrricin , lequel fait tuer tous
cesdtiloyau.ç, mais offyc à Nadaft vn riche enrrctcne-
ment , s'il veut le fcruir : 2v pourcc qu'il n'y voulut cn^
wndre Soliman le jiiiî çn iiberic fuit gracie ufe^'hcnt. Sa
86 i Hi/loires admirahUs
le rcnuoyaaiofî en fa maifon. 'P.Ioue ait ig. Hure dcfcj
hijfoirei.
L'£mp<Teur Charles V.ayant en Tan i Ç47.prins pri-
fonnizr ^^ condamné à mort lean Ftideric elcdlcur de
Sa\. ,itirec<ui en g ace : Se quand la ville de Vittcberg
lu. fuc rendue par cc.mpofition, Sibylle de Cic ucs fem-
me de rEl'.'ft.'ur citant venue aucc l'a fille & le frère de
fon maa vers .'Empereur , lui fit recjucfte pour le pri-
ibnnie-. l'Empereur la rcc'jcillir auec grand rcfpe<^ , Se
permit à Tclcdeiir d'aller hui6t iours entiers auec fa
femxne&fesenfâsenla ville, au bout defquelsil rcumt:
&en fin de quelques anûccs après l'Empereur le rccon-
<ilia à foy,lc renuoyant en fon pays, où il dcccda paili-
blcmsm.Sitidanau l^.CT* ^^dw.defes Commentaires.
Le grand Sforce auoii e lU rudement bkfleSf pr^f-
qu«$ tue en la bataille de Viîcrbe par le cemie Brando-
Jin. Depuis il afliegea Capiton, &: l'emporta d'affaiit, où
fe trouua Brandoim. Sforce ayanr moyen de le faire dcf-
pcfcher , commanda tres-cxpreliément au contraire
qu'on le fauuaft,&rayaï>t le traita auec toute herciqus
gracieufeté. Mefmesafin queccprifonnicr memoranf
du paift ne feforgeaft despcars imagmaircs, Sfoice le
Ioiicigrai)dcmfnten vn fcrftin , & deuant pluûcurs fc
glorifia d'auoir cfté blelfé par vn grand capitaine , tel
qu'ciloir Brandoim, nonpointpar quelque loldatmcr-
cenaire.'?./o«e en la yte d'tceiui.
Enrre les prifonniers Vcnitiens,en I.i bataille de Vin-
cence, gaignee pjr i'empereui Maximiiian premier, le
trouua Oihon \ icomte, lieutenant Je Sacrcmore , le-
quel l'an précèdent acoii-pagné de l'on fre:c Aftor a-
"uoitdenuidl afTailli lesdomcinques de Fcrnand d'A»
• ualos marquis de Pcfcairc, deuâc la maifon de Triuulce
à Milan. Le marquis acouru au bruit ponrl'apaifcr , fut
bleiîé à lateI1:e.&: Pomar capitain-td'vne compagnie de
gensd'aiines tué fur la place. Crmnip Mancioguidon
de celte compagnie couroitpour p'-ignarder le Vicon-
te,& air fi ven^c h mort de Pomar , k marquis l'arrc-
fta coi.M .,;'auu;i la vie au Vicon^e, & Ini fit beaucoup de
é" memorahlei' 8 o^
Les Efpagnols mutinez, à faute de payement , lor»
<ju*A.':unlc marquis dcl Guaft leur ccmmandouau ro-
yau nedc Naples , Salfcde foldat appoint' chargea le
maiftrc de camp , nommé lean Dorbin, auflî Erpagnol»
d'eflre autciir de ccftccfmeute. Dorbin irriiédeceftc
accufanon , fans rtfpcftcr le marquis Ton général, lors
prefenc, dcigaine l'cipee & bkfTeSalfcdeau bras» Le
marquisvoulant venger celt outrage fc chaltier Dor-
bin de fon infolence fe lance contre lui. Dorbin
le voyant accourir fe ictte à gcncux,& lui lédant le pô-
meau de fon efpee, commence àdire,Monfcigneur,tuez
moi decefteefpee.cjui vous a fi indignement offéféplu-
ftoft en colcrc que par malice. Le marquis s'arrcftac touc
court &picquc de cefte fubmi(Hon,lefupporra gracieu-
fement , & lui confirma fon eitat de maiftre de camp.*?*
loue en la. y'ie d*icelui.
Lcfieurde Laurrech fit fentir fa grac>eufetc heroi-*
que à M.Antoine Colonne fon enntrmi / blefleau (îcgc
de Vérone, lui alTiftanc de toutes commoditez propres
& de fon médecin pour fon foulagcmenr durant fa blef-
furcrce qui lui acquit grande loiiange entre les îtilienj.
'P.Ioite O' SabellU. Au volume fuiuani nous produirons*
parlant de la clémence, pluûeurs autres hilloires mé-
morables.
ÇKEXI ^ 0 'HSmopneeSi
IL adulent aucuncfois des chofes contre toute efpc-
rance aux maladies , comme à Nature. Qu^ilne
fûic ainfi, l'on a veu gt!erir(comme raconte Ambroife
Paré) de noftrc temps vn foliat, lequel auoit receu vnci
harquebufade au bias dtoic , fans fiad:are d'os , edant
à la gucr'f,fur le poinâidc fon accès, la perdit, fans rô-
ber m fieure continue , comme d'o! dinairc elle vient à
toutes grandes playcs. H recite dauantage d'vn au»
treJequcl fuc ittcc inopinément dcdâs lanuierede Sei-
lie tout habillé ; parynqui fcioaouaucclui ài'hcrur^
EH i
8o4
HiBoires admirables
que Taccés df la quarte le tcnoit , & Taucit tourmente
dixhuiâ: moisàutant,fans y auoiriamais troaué remè-
de. Mais 11 en fut guéri iors foudaineracnr> & reciré de
l'eau, ne fc icntit oncques depuis de fa ficure. Gunierius
médecin Aicman eicric, qu'vn homme qui auoit des ca-
taractes ou rayes es deux yeux , & n'auou vtu il y auoit
dix ans pafTcz , tomba d'vne fort haute montée y la terte
dcuant. Apres qu'il fut leleuc, tout meurtri de ccftc
cheuiejfe trouua voir aufli clair qu'il auoit oncques tait.
Il eft à prefumer, que les grandes conculTions prinles de
ceftecheute lui derplace.êt ces deuxtayes qui lui cftoy-
cnt la vcuë.Et y a apparence que cela peut aLCnir: d'au-
tant que Galien récite qu'vn Operateur de ion temps,
quife mefloit de gueriv les maladies des yeux , aucc
grands mouuemens &esbranlemcns de tcrte qu'iU^ai-
ibic à ceux qui auoicnt des cataractes, en gueriflbii plu-
ficurs. î^ouys Çuyon au 5 dïure défis dtuerfes leçtnSy cha^,
IS.
Vn homme du bourg de Pompadour, commettant a-
dultereauec la femme d'vn thuilier,&lurpi is fur le fait
le mari lui donra tel coup du laillanr d'vne hache fur le
front , qu'il pénétra lul'ques aux méninges du cerueau .
La playe eltanc conlolidee , ce couîpablc blcffé , &. ainfî
marqric,re trouua gucrid'». ne micraine,quile courmcn*
toitcrueilementdcuxiours de lafemaine. ^urnefme lï"
un C7 chapitre. 't
Les Ei'p.^gnùis habituez en l'Ifle de Cumanaen l'In-
de Octidcncaie, où ils baftirent quelques maifons & vn
Conuent de laco^'Uis , furent affligez l'an i 5 i ^. d vnc
maladie de cofté, donc h piufp.-îrt mouroyent , s'ils n'c-
ftoycc faignez.Ii yau.it vn feruncur de ces lacopîs , le-
quel fac atteint de celte maladie. Vn Chirurgien expert
s'efforça de lai ouurirla veine, mais il nepeutiamais la
trouucr.foitquele patient fuft gras & replcr, foi t qu'il
cuft les veines trcf-petites,ouque le fang s'enfuit au ce-)
trc du corps rour crainte & apprehenfiou delà faignee. ^
Il fut donc abandonné commcdrmj mort , faifî d'vné
grande fîeure& de rcfuerie. Les moines l'ayans recora»
mandé à Dicu,le laiPicrcnî: en garde à vn kruitcur , qui
f'
ér ntemorahlesl 8 o f
s'endormit en la chambre du malade.En ccfte nuift vint
Tncchauuefouris , laquelle mordit ce ma'ade près da
talon rrouué dcfcouaert , & en tira du fang tout fon
foul:Ia veine demeurce ouuerte , Nature poufia hors
du fang autant qu'il eftoîc befoin pour remettre le pa-
tient en fancé.Lc matin venu, quelques vus du Conucnc
vindrent voir leur malade, lequel ils trouucrent en bô-
ncdifpoficion. N'apperceuans fîgne de fueur ou autre
crife.ils admirèrent cefteguerifon. Surcevn d'eux def-
couurit qu'il y auoit du iang abondamment efpandu
dedans le lift dcuers les pieds, & reconu ent inconti-
nent la morlurc de ctftc chauuefout <s,dont il y a nom-
bre en riflc.Le fang fut incontinent reftraint auec de la
terre qu'ô prmt d'vnc ornière, vrai antidoe en c^s mor^
{[ir&s.Lditmefmeliureo' chapitre.
A
HyiX^NÇFE VXS muets,
L'entrtuenuëdu pape Clcment &duroy François
^ ^à Marlciileje chancelier Poyet , hommecoute fa
vie nourri au barreau, en grande réputation, ayant char-
ge de faire la harangue au Pape, le l'ayant de lorguc
main pourpcnree,voue (à ce qu'on dii)jpportee de Pa-
ris toute preftcje iour meime qu'elle deuoit cftre pro-
noncée , le Pape craignant qu'on lui tinlt propos qui
peuil ofrenfer les ambafTadeurs des autres Princes qui
éftoyent autour de îui,mMidaau roy i'argumeûcqui lui
fembloit eftre le plus propre au temps 3: î^u heu, mais
defortunc;out ancre que celui fur lequel monfieur Po-
yet s'eftoittrau3}I'é:de faço que {^i harâgae lui demeu-
roit inutile, & lui enfîloit promptcnicn^ refaire vne au-
tre.Mais s'en fcnrancmcapabiciifaluiqueM le Cardi-
nal du Bellay en prinfl lacha«gç.3î.<^e ynonta^e au i .
hure de [es ejjan,chap. i c.
Il y a eu de noftrc temps vn lurifconrulte,qui s'eflant
prépare dclongueniaiû pour faire fa prcmicic haraa-
EE 3
8o è Hifloires admirables
guc en l'académie de Bourges, en prefcncc de grade af.
ièmbicc de Douleurs & d'clcoliers qui Ce promectoyenc
beaucoup de l'éloquence de ce perlonn.-îge , monté en
chaire auecgrâd apparat, commençant par cesnnors, Lu-
cas Medicus, demeura touc conrr, fi confus ,cftôr.é, paf-
le & tremblant, qu'impoflible lui fut de paflcr «uitreael-
Icment qu'il defcendit de chaire laillant tout , &: depuis
par quelques vns là venus pour I'ouyr,fut furnômé Lu-
cas hXcàxcus .Extrait de mes mémoires.
Vn autre trcfdoite perlonnagc monté en chaire pour
faire fa première leçon publique en droit , fc donna
telle apptehsnfion de la prefcnce de plufieurs dodes
hommes en diuerfes profefllons,qui eftoyeni venus ho-
norer Ton auditoire , qu'après auoir prononcé quelques
périodes de fa harangue il demeura court,&auecexcufc
modefte& biêfeantcprint congé pour l'heure mais, ie$
autres iours fuyLians,s'eftant rafleuré.fic preuue fuflîfan-
te de fon fçauoir -, & ahcureufcment continuédcpuis.
extrait de mes mémoires.
Les cabinets & chambres des Rois & Princes où les
ambalfadeurs l'ont oiiis , où les confeillers d'ElKir ont à
opiner fur affaires iref-^importantes , où lej plus do£le$
des royaumes & principautez font appeliez pour ref-
pond eaux difticulttz qu'on lei'r propofe.-fournifTent
beaucoup d'eïc-mple< de l'eJociuence muette. Comme
font auflî les barreaux des Parlemcns de France , où les
plus afleurez aduocats fetrouuent fouuent cftôncz , en-
core plus ceux qui commencent à plaider ; cequei'ay
yeu quelques foi-, en celui de Pans.
le n'appe'lepoinr harangueurs ceux qui prefcheni
purement la pa-olc de Dieu, àplufi-.-ursdcfquels eftad*
uenuendiue'S lieuxd'cltre faifis de grand cHônement,
quand il aeftcqu ftiondefe prelVnter en l'Eglife pour
annoncer la vérité. Si ceftc apprehenfion procède de la
rcuerence que tels portent à la fainéle Miicfté de Dieu,
ie Icsen ptiledauantage : &pourrois en nommer , qui
ayans exttrcé cefteliaute chj'ge près de quarante ans, i
appréhendent pli s de monter en chaire pour exhorter, i
inftruiie & confolcr les autres,^u'xls ne faifoyct la prq- 1
& mémorable si 807
miere anncc de leur fer uice. Bien^hcureufe cft l'amc qui
fciuge foy-mcfmc.qui vuide d'impudence, d'ambition,
d'aaariccaimc vérité, modertie,firaplicité, deuantDieu
& les hommes.
laques Latomus,Doâ:eu' de Louuain , IVn des plus
jfTcurez parleurs de fon temps , ayancàiaire vnfermoii
dcuâc l'Empereur Charles V. demeura muet en la chai-
re,dont il fut brocardé par les courtilans , entre autres
parMaximilian Comrede Bure Retourné en la mai-
fon le deTpii le pouiTa en la couche, où il romba en de-
fcfpoir,& mourut miferablLmenc, auoiiant que ce fîlcn-
cc eftoit Ton iufte loyer , pour s'ertrc ladis oppofé à la.
rcritcdontileftoifconuaincuenfaconfcience. H^Jl, de
uoflre ternes.
H 0 ;M:ME merueiUeux.
ÏL y a cent ans que viùoit en EfcolTe vn merueilleux
homme ou môftre, lequel nafquitenuironran 14^0.
Depuis le nombril tn bas il eftoit totalement formé co-
rne vn raaflermais du nombril en haut il auoit le corps
double en Ton tronc & en tous fes membres, defquelsil
t'aidoit dexcreracnr. Le roy commanda qu'il fuft foi-
gneulement eileué &: inftruit : il profita es lettres , fur
tout en la mufique où il deuiar cicellent , aprint
diuers langages, & (qui fut plus merueillc:ux)par fois
oncntendoit cts deux corps difcordans,dirpL Uns, plai-
dans & conteftans l'vn contie l'autre , & de rolontcz
oppofecsJ'vn voulant cect,l'autre cela : puis après ils
confultoyent comme en commun. Si l'onle touchoit
aux cuiflcs & aux reins, l'vn & l'autre corps s*en fen-
toit &plaignoit en commun:mais quand on le picquoit
& bleftoitau deffusda nombriî, le corps du cofté du-
quel le coup eftoit donné le douloit : différence qui ap.
parut encore dauanrage , en la mort. Car l'vn de ces
corps cftant amorti plaficursiours !e premier, le furui-
«ftc perdit la vie peu àpeu,& àmefurequ^ fon compa-
£E 4
(^
8 o 8 Hiftoires adm irtihles
gnon pourriffoit.C'eÛ: homme vefciu a 8.ans,&mourut
au temps du viceroy lean.Nousefcriuons d'autant plus
hardiment ccftehiftoire admirable, que lors que nous
la rcprcfcntions ici, viuoyent encore pluficurs honnc-
ftes pcrfonncs dignes de foy,qui l'ont vcu. Buchanan ut*
I idiH.de l'hiJlcired'Efcojfe.
HO yxt Jisî£ rohusîe.
LEfeigneur Ogerde BurbeqacambafTadeur de Ma-
ximilian 1 1. vers fulian. Soliman , raconte qu'eftant
çn Hongrie il fut acompagné en certain endroit par
quelques caualiers Turcs , entre lefquels cltoit vn
Tarcare, ayant la cheuelure fort longue, & fi cfpaiflc,
qu'en hy lier, en cfté, parmi les grefles, pluycs &tcmpe-
lte5,es elcarmouches & combats, il ne portoit chapcau>
Jii cafque , ni turban , mais fe çontentoit de fa fimple
c\iZ[2c\\iTC,Enladcfcril/tton defonyoya^e en Turquie , c
leàn r.angius dofte médecin Aleman efcrit auoir a-
pris des gentils hommes du conte l^alatin, qu'ils auoy-
pnt veu en Auftriche ccrrain homme qui couroit aulTî
vifte qu'vn îeurier,alloit à la chaffe auec les chicns,con-
trefailoit leur voix, fe fourroit fans crainte dedans k§
bois,brofloit à trauers , couroit après la proye,puis re-
Uenoic aucc eiir. ^ ^l'^^auld^en la ^.Centurie deschojes
merueilleufesyclyap, 4 ^ .
HO ^Tit^ E ayant du laiH aux
nmmmelleS.
CArdan attcfte auoir veu en la ville de Gcncs vu
homme aagédc 34.3ns>nommc Antoine Benzc.dc
çouicur pafle, gras, portât barbe claire,des mamelles du-
j^uçliprtoitdulai^ Çn abondance pour nourrir ^
^nfant:
^ mémorables, 809
«^nfant:& adiouftequece lainfl necouloit pas goutte à
goiitte:m.iis iaillifoit impetucufcmenr. Ilefcritceîa en
fon amre de la fubtiiue\au Hure de la nature de l'homwe.
H Y'D Ji^Û^P IS I E guérie en phjtcurs
perfonites.
EN l'année lyti. ie fas appelle dans Montpellier
pour vifiterleanne fille de fcu Jean lanin , pelilTier
de la yille.Sa maladie fui aifee à conoiftre : c'eftoii in^
dubitab-ement vnafcitcs. Maisilyeut aucunement à
douter de la partie çn laquelle l'eau qui caulbit ceftc
hydropifiecroupiiroit : fic'eftoii la capacité du ventre,
ou bien le corps de l*vtcrus.EH fin ayant fceu par le rcr*
cit de lapatiete ce queie vj depuis moi-mcTmc , qu'elle
auoit ordinairement fes fleurs bien reiglees & coulou-
recs,ie fus induit à penfcr qu'elle eftouarrcftee dans la
capacité du ventre, le lui e^iHe volontiers confeillé la
paracentcze ; mais ie m'enabftinSjCraignant le hazard
de cefte opération; au lieu de îaqueilcie luiconfeillay
de faire tremper grand' quantité de racines de Rufcus
dans de l'eau, & boire foir & matin de celle eau, en tré-
per fon vin,en faire fes boiiiilons, & mc/mcen paiftrir
Je pain qu'elle mangeroit. Ce qu'elle fit i'efpace d'vn
mois ou cinq remaincs,au bout duqueltemps elle vint
à s'ouurir & derchatger,rendampar les parties honteu-
fes tout à coup impetueufemét enuirô Se. Hures d'eau,
fans iamais s'arrefter. La pauure femme languit vn fort
longtemps, après fi grande & foudaine vuidange, fe re-
priDt& vinttoutesfois à conualefcence, demeurant bien
faine enuiron rrois ans.Aubout de ce temps fon venrre
fe remplit comme dei]ant,& demeura ainfi hydropique
vnan entier. le fus encore appelle, pour vcir fi icirou-
ueroy bô qu'elle vfaft des remèdes que ie lui auois or-
donné la première fois.L'ayant vifitcc, ie vis le nombril
fort enflé , & vn peu d'efcorchcure au milieu, qui fcm-
bloit Ii:]içç9nuier(p2r manier g d^ dire ) à fccoader Na*
^
8i ô HiHdires admirai les
lurc opprclToe eu i'elFjrt qu'eilo faifoir. Aartî fis ie en-
tendre aux part i>i qu'il cftoit bcfoin de l'oiiQiir par là:
cctjj'ayjns trouiié bon , & mclmes pciluadé à ia pa-
tiente , f]ui d'elle melme y cftoitaiTex Jupores , ic mis
•Ja maiii a i'(ïiiure,& fisouuerture par le nombril. L'o-
pération faiccî^lie rendit vnc quantité d'eau prcfqo- in-
crwyàb!e,rcceuc d::Jans pluiicurs placs & balfinv,& gar-
dre pour ellrc iiion!l;ce à deux ucf-dotrcs médecins,
Jcfqucls s'cftonnercnrdc voir vn it\ gr^nd lauage d'eau
foriicout à coup d'vn corps, r;jn$ aucircanfé vnc mort
foLidaine. Aaredeiis rccoaiurcnt celte pauurc Femme
de remèdes conuenables & necen'iires,tant pour fe ga-
rennrdu mal pref^nt.q ue pour fe preierucr à i'auenir.
Après en auoir vie eIlegucrit,Dieu merci,& s'cft touf-
îoars bien portée àe^v.xs.y^.'BartheUmi Cabrol en fes ebfer^
uations uinatomiquesjobferu xj.
Semblable maladie & mclmesaccidensfont auenusà
Gileite Maurine. Eftant fille de chambre de madame
de Cafteinau de Montpellier , elle dcuint hydropique.
Faicheeds la longueur de Ton rail, & des remèdes
qu'elle auoir pnns inutilement , délibéra de fe retirer à
GigDac lieu de ûnaiflance. !>'y acheminant auinc que
ia mule fur qui cJ.ie eftoit montée* (e donna peur , &
commençant à ruer iettc rudement par terre la pauurc
fille. Mais ceftccheute lui fut h?ureuf« : carfoudaine-
ment elle fe dcfchargea d'vn grand rauage d'eau qu'el-
le rendit par les parties hontcufcs. Icnefçay fi ce fut
par laTcfcie ou par la matrice : maisiiefl bien ccrcam
qu'elle en guérit. Depuisclle c(l retombée en ia mci-
mz maladie par deux & trois fois : &: toufiours s'cft
euacuce par le mcfme endroit. En cefie rr.efme obferttA-
tion t y .
L'an mil cinq cens foixanie cinq , ie fus appelle a
Gaillac pics de Thouloufe , pour vne miene parente,
nommée Catherine Turle.femblablement hydropique.
Elle via par mon confeil de mefnies remèdes que lean-
ne lanine. Apres en auoir vlé quelque temps, elle fc
vuidipareillemcni par les parties d'cmbas ,& guérit fi
pa. fanaement qu'elle a yeicucnuiron vingt ans depuis
en
ér mémorables. Set
en bonne fanté , (ans rcchoir en hydropifie , comme
les prcccdeniCS.Xawfyj/.e.
Vc\ pcfchcur nommé Mcraon , demeurant en la du-
ché de M u)rouè,deucnu hydu pitjue , a torce denauail
finmonia & ouerit (on ri^al , lans iide d'autres medica-
mens. JïlATcel. Uonat.au A.lturc defes hifroire^medecina'
les admirables ihap. 1 1 .
Ch iltoflc Truiwein gçnril. homme dcHaguenavv
en Alface . affl'.gc de long temps û'vnc hydropiiie iugtc
incurable , ennuyé mci ucillcurcmtnt àc fc voir iniiii-
Je 6c xonfînc dedans fa maifon , voyant vnbeauipur
d'cfté , pria Tes domeftiques qu'on le menait prendre
Tairen vaiardin hors la ville. Yeftant, fort las à caufe
defafoibleflejilfe couche à terre fur le dos'e foleil lui
donnant fur le ventre. Tout foudain il s'endort pro-
fondement. En ces entrefaites vn laizard, de ceux qui
font Terds,fe gliffedans fon ftin defcouuei t > &: s'esbat
à ramper fur le gros ventre de ce dos meuV , quiferef-
ueillant au bout d'vne heure , voulant haufler la tcfte
pour fe leuer fcnt ce laizard hn fauteler entre la chnir
& la chtmile. Voyant que c'eftoit vn reptile ami de
J'homme,il le laifla aller. Depuis ce temps, & de iour en
autre, l'enflure de ccft hydropique diminua tout mani-
fcftement,& bien toll , fans autres remèdes quelcon-
ques , & difparut comme miracuieuîcmcnt. Sdunchus
doSlemedeCinraconte çej}e hijloireenfes ohfernalions , au i.
liureeùfer. i 3 I .où ildifpnte de l'occulte fympathie auec
le corpi humain , pour le foulager «n certaines ir.fîrmi-
tcz, nommément es cnHrures.
Vn payfan trauaillé d'hyd opifie enuieil'ie vint à
moi pour eftre fûubgd. le lui di que c't Ijoit trop t^i'd.
Aumoins ( rcpliqua-ii ) donnez-moi quelque conftil.-
Si tu veux (Ksi fay-ic ) eftre giieri , garde dr boire
guurte quelconque de liqueur aucune , tant que tu fcr^s
hydropique. II s'en va, puis au bout de l'an teuientmc
trouuer , demande fi ie le cv>gnoy. Er pou ce que ie ne
pouuoisle me rediiire en memoire:S) eft-ce (adioufta-
jl)qoe ?ODS m'auez gucri,6^ ie rciup vers vous^lçatoir
iîi'oferay jriea boire , atiendu ^u'xiy avnancniier
8 1 1 Biftoires admiraéles
<\\ic ie n'ay point bcii. le lui demande , qui hii auoit d5
néccconfeil?Vooi,dit iJ, & nie lacontc K- patfé. le !ui
prefcri la melu:c , & ^aa i'é de (on bruujge , dont il fc
tr©uua bien, puis coiic- eincnc gue-i mcreuin' voir, &
depuis m'a tcfmoigné beaucoup d'ammc. Bemuemtcs au
! 5 xhap .de ^bditu rerum (aujïs.
Vn leune garçon, prellc d*hydropi{ie & abandonné
des médecins , troiiuant de l*cau à (v\S commandement,
en beut tout Ton faoul. Comme on péfoit qu'il en deult
creuer,naturelui aida Ion nombril s*cl>antdeslic & ou-
uert de telle force, que l'eau commença à roificier de û
grande impctuofi: é qu'elle s'cflcuoit a trois pieds & de-
mi de hauteur, comme vn tnyau de fontaine icttât l'eau
contremont. Si l'on n'euft mis la main finalement fur
fon nombril, pour arrffter ce flux violent & du tout ex-
rraordinaircc'efloitfait du ^arç n mais à l'aide du mc-
dccm,qui peu à peu reltraignit ie cours, & prefcnui: les
remèdes conuenables , en peu de temps ce garçon fut
guéri. La rnefw€,at* i t.chap.
La femme dVn baibier de Nurembere,affiigee d'hy-
dropifie , mais plas fuietteà fcs defi'S qu'au vouloir de
fon mari , ni au confcil des médecins , ayant le ventre
tédu côme vn tabourin , ne fongeoit ni ne cerchoit que
de boire de l'eau à rire- larigot. Vn iour, s'eftât defrobce
de fon mari, elle fort de la ville , fe rend près d'vne fon-
taine , dp la fource de laquelle fortoir force fable quant
& l*cau. Elle commence à boire de ceftc eau fablonneu-
fe en abondance dans ie creux de fa main, s'en retoui ne
tout alaigre en fa maifon,& nous coBte ce qu'elle auoit
fait.Deux iours après elle defchargea fort par vn flus de
ventre , & les hemon ojdcs lui vindrent d'elles mefmcs
au fondement» dont vn fangnoir & féculent coula:de là
s'er.fuiuic la gucrifon de fon hydropi{îe./.Z.«ïw^/»< en /'^-
p'ifire l V.du tome %,
Vnhyd-^opique.n'ayât partie en fon corps qui nr fuft
cnfice , fe voyint abandonne des médecins ie rend aa
riuage de 'amer de Hollande , & fe fait mener dans vu
baftca j aflcz auant en mtti, où il vomit à force , puis ail •
foi tir & depuis fie tant d'exercice <k corps , que finale-
mçoH
& memoYdhleS' % i J
flïCDt il recouura pleine famé. 'i^. forîj^ cm i 5. liu.de fis
çbferuatious med.cLi^. i ^ .
François de Sauos.icunf homme Maniouan,trauail*
Jcd'hydropKîe, ayant le venrre rendu cottime vn tabou-
rin, fut tellement (ouiagé de naïuiep.ir deux vomifTe-
mens non forcez, mais venans d'eux-mefmesjCju'apres a
uoirvuidépar la.bouchevne me-ueillcufe qualité d'eau,
fon ventre dclcuHa 6t fui guéri. ^.arcel.dcnat,enfes h'tîi.
Vn aucie, François de nation, s'eftant fait rongncraC
fez près ïcs ongles des doigts des pieds, puis aidé de fri-
pions & de quelques exercices , i'eau commence à di-
ftilîerpeuapeu par telles cxtrcmicez , tellement qu'jl
recouura la première fanté. annotations f»r le 3^. cha-
pitre dt* I . Iture de Jean Houlier , touchant les maladies tntef
nés. \
Vn hydropique fur foulage par vne grande Tueur fur-
uenan:e de foy mcrmi: & pout'ee hors par narorertellc-
mcnt qae celte vniuerfelie diftiilaiion Je defchnrgea.
Là mep>^^-
lean Blanche march<snddc Paris , atteint d'hydropi-
fie,fic vu voyage en Anglererre. C'cftoic furPhyuer: fon
cnfieures'arrclta, s'cfcoula&depuis ne s'en feniit aucu-
nement : ou ponrce que le dedans n'eftcit pas encores
itotalemtnc faifi.ou uue l'eau ftir conOimec partie par la
chaleur nacu: elle rcfueilice par l'cxerciCe , & partie par
Tait de limer. Là mefmc.
Can"andre,Trone, dame Italienne. ayant le« deuxcuif-
fes fnerueilkufcnic:nrcnHees, ne voulut fouffrir qu'on
y appliquait le cautère. Sur ce aduint que nature form.^
des vdciesauboutdcdcfTus les doigts des picdi, par où
l'eau coula en telle abondance , que la patiente recou-
ura ^Wit\t(àmç .Mex.'BenediCl .çu <^.iw.chcif>./^Q,
l'ay veuvne femme , tellement hydiopi tie,qu*il n'y
auoit apparence qu'elconque de gucr :foi> Aduitu qu'el
IctombidVn lieu hautentci-re , & donnadefon ven»
treconcre vne pierre aiguë qui lui fit vn- grande tail*
l3Ue,par où toute l'eau de fon enfleure s'efuacua ,tellc-
iTient qu'on euft dit qu'elle s'eftoii dcliurce d'vo cnfaac
^
8i 4 Hïftoires admirables
dchuidmois. Elle fut rccouruc,& aidccâc quelque!
autres rcnieJes , ii hit nettement guérie. A. Senmenius
au I 09 .(■hiip.dejestbfei-uations.
Vn icLine homme lortaflligé d'hydropific, eftant aa
1161 & lencanc froid , commande à la garde de le foula-
gcr. Elle ayant empli le chauFcliol de charbons ardans»
par mcTgardc le touche à i*vnc descuillcs , où Te forme
incorcincnc vae groHe & grande vcfcie pleine d'eau,
jaquclici'eitantcreuee.en fortic àdiuerfesrois lat d'eau
ç^nt le ieune homme fut gutri. Laur. Scholfùtti enfes ob-
ftruattvns.
Aduintà vn autre hydropiqued'eftrcblefTc , par in-
adue'rtance,d'vn coup dicoultcau en la cuilT'c : dont for*
rie telle quan iicci').umi.ur, que par ccm^yen il f Ji de»
liur^ de ion im3\. GuJpJioffnian au ^.(m.conf.^o.
Vn hydropiquc a Kowic , rakhant fa femme pour U
longueur de fa maladie , &la dcfpenfc qui i*cn enlui-
uoir, clli traniportce d'aua ice & de de ("pu hor-ibie, de-
IibcrciVmpoilonner, l^oyr ci U cheft clic f^it cuire en
vn perde trrrc , ifc du tout rrdai e en po:,dre » vn cra-
paiic, ac lui donne abondâce de c: ite pi^adie en q' eique
ap.lt. Ceiaîvjfî viiner menicilleulem nt. Non con-
tente elle rtchi g- i^«lu>qu'd la picmicrcfols ; dontfur-
uié; vned 'fch-' gcd^ au elpaifFe, beaucoup plus qu'au-
paravant,cn.t- talc gucnfon du y3x\tin.iyyier att^Mu.des
fresiigesidiup, l s -àe iajtxiefme etitt.on.
Ceriaipe fcinnie 'tilicnnc , aagre de cinquante arf,
avant clic i^ft] gee u'hyd opifie efi>iien lix uns, tomba
ci\* anturc ô: fu- blclfe.- aa vcntrcfi udement , qu'elle
demeura pafniee fui la place. Mais il rortiMell". abon-
dance d't au par la playe, qu'elle hitdeliuie:-. de fj mala-
die par telle blclTure. I.^cluhei i^ajchaly en lu mtihode de ta
guenfon des maladies liu. i . i/;. 4 4 .
Il nie fouuicnt qu'eltant aux efcholcsdegrammati-
que^Orleans,ie vis vn gros portcfaix(furnommé, va fi
tu peux) hydopiiuf* def:rperéde«, longtemps , auquel
près S.Aignan, vu hchftic crafperça le ventre d'vn coup
de coullcau , ô'oà fubiccment Ibrtit eau pourrie à ruif-
fcaux : lequel lolt après cflaot gucri , fc remit au trauail
com-
é* memorahles, 815'
comme <l/qâr,fans rechcuic. Fr.li^uJJetidii traité de Tcn-
internent Cef.irien,feî l. j . chap^.
VnAIcrnan,Saxor, ce haure taille & maigir , forge-
ron de Ton e(tac, accable d'vne lôguz hydropifîe , & n'en
pouuaru piuseottnuiede n=ïangcr du pain bîs trempé
en laict clerc mé,& s'en fit aprcfter vn^rand plat,& dc-
pelchace j»oi.^gc dz grand ap^ cri:. Au bout de cjuel-
qucs hiures jI rt;charg^'>&: leJcndcm^in i;/îî. Ccrcme-
decftrangc lui prouocju^ l'vnne tn teilcabondancc,
qu'il Fut remis en pirds*^' traiia.liapiufiv'iKs années de-
puis tort gaillardrmeni.Vn autre h) dropique, mais fai-
lant profc/fi on de lettres , voulant pr-itii^ner relie rfce-
pte,mo'jrut tout toiâc. Laur.ScchZj^f enfts oùjlruatiofis,
Natiîre a foulage plofiears hydropiques far le nom-
bril,s'ouuraBt comme de foi-meî'me, ouyformant dçs
juftules , qui ouuertes l'eau s'cftvuidee en celle abon-
dance qu'ils ont efté guéris : dont infinis exemples fc
trouuenf es liurcs des médecins, &endiuers lieux du
monde, dont Ton pourroit faire vn liurecnticr. Ce font
foulagcmens mémorables , & quifoni voirdes Tpcci^-
Jes faueurs deladir.itie prouidence , tirantles pauurcs
hydropiqiies,rommeuU milieu des eaux & de; la mo't,
dedans laquelle iU tîottent , afinqu'ils bcniflent leur
gracieux libérateur.
Pour leprefent fadioufteray encore vne hiltbire, M.
Adolphe Ôccon.dofte médecin d'Aurpourg^defcriuanû
envneliene lettre latine les excellentes propretez ds
la rhîiibarbe, raconte auoir aprins de i.Hiptiflc Monta-
pus, l'vn des premiers médecins de nol'tre ten^ps. ce qui
s'cnfui-, L'hydrop:fie ùiiit tellement par tout le corps
certain perrQnnagc,&: lercduifita telle extrémité, qn'oa
le te noir pour autant que mort. Adi-erti (l'on ne Iciic
co:Timciit ni par qiii)il commence à vfcrd'vnpeu do
rheubarbe ,qui ledeich^rge vn peu (ans Fi chérie , £c
Comtiîence s fe bi':^n porter. De it)ura au:rc, il en p;e-
coit dauai^ag-, teliemeni que d'vne drachme il vint à
vnconce.fin-^ierncnr ilen mangeoitcn q-iantiré rcfi':-
nncnt que celle drog 'e le purgra de ronces T. 5 eaii; 'S:
humeurs malignes, fortifia Ici membres, & noufoalc-
C
g I 4 Hijloires udmir^lcs
ment Icgucrit de l'on hydiopilieau grand cfbahiff-mçc
de tous, mais aulii L rendit fort yigoarcux & vermeil,
voire dif^oft & adroit à toiKcs cliolcs. Se ponant tres-
b;en it dtucau fort riche ,' vn lî;ft teruitcur entrcprint
de le tuc:r,pour emporter ion UT-cfor : le bkllafortru-
dchient.Mais il fui iî robuft:^ c^uc d'rmpcigner au corps
ce meurtrier, 6c rarrcil'-r iuiqacs à ce c^u'on tuft venu
au Icco^rs.Naturr. f..!: û'puilTantccn lui qu'il efchappa
deceftc blcirurc,iugcc mnrtcll: parles chirurgiens, &
a vcfcu depuis lam 6c gailhrJ lakjues à la vieillcirc ex-
trême : dilantàious quela rheubarbcTauGit ainû dc-
liuré & mainten u. Latir.Sdiolt^, au recueildes e^i/tres çy
confultaiiûns médicinales.
HrTOC\lS lE punie.
ON parle 4e quelques anciens qui ayaas voulu fein-
dre d'cftre goutteux ou borgnes le fontdeucnus
en iz contrefaifant tris. A propos de telles feintes? ces
annics paHecs durant les troubles qu'on appclloit de
rVnion ,pres d'vn chaftcau , fetrouuerent qi:elquc$
honncftcs hommes , qui paffans nongucres loin de là
fuient volez & mis en chemilc. Dclcouuraus çecha-
ileau ils y allèrent îe rendre , prierrni le LigncUr de
Ican; leur vouloir aflîitcr, & faire en façon auec les vo-
leurs qu'il conoi^bi: , & lefqucls Icr.fpeétoycnt ( non
qu'il cuil part au butin ) de 1- ur faire rendre 1- urs ha-
billrmens feulera' nt. Ce peu charitable gétil homme
n'en voulut rien fjire, moins le voir, ains f.ignoit cftre
irauaillc d'vnt colique , & ne pouuoir bouger dulidV,
moins entendre à ncgoce quelcon^ac.' 11 raifoit lors
fort grand froid.Lcsiv ruitcursàrinrccii du raaiftrrjo-
gcrcBtpour celte nuift là dans vneftable.ccs gens de f-
ualifez , qui le lendemain s'en allèrent .ans pouuoir ti-
jcrdc lui aucune courtoiliejtant petite fuft elle. Or ie
ncf^jay fi ce fut par iuftc vengeance diurne, ous'ilfur-
liial
& wemorMef, 8i^
Uhtt quelque caufe na^urclie qui lui caufa ccftc colique:
mais l'ayant gsrdee vir g' iours , il en mourut. Lou-js
(juyon au l.lïu.dtjes diuerjès leçonsjchap.io.
Vn abbé de C uycnne éc archidiacre en certain cuef-
ché.fut cite par i'cuelque *i le chapitre, à comparoir en
ra-ifembitc q ii le fjifLic, pour courtiftr chafcun béné-
ficié du dioccl'e, lelon les facultez , pour fulDueniraux
p.auurfsdcs paroiiïcs , d'où ils liroyeni les dilmcs &:les
rcntes.L'abbés'excufejdiiant qu'il auoi. vne pleurcfîci
& qu'il ne pouuoits*y trouuer.ceqiii eftoitfaux. Mais
«laiij peu de ioars après , vnc û graadc douleur de cofté
le failic i qu'il en gaida le li£t vn an,& Inifaluc cauceri-
ïcr le cofté en deux endroits, & tant qu'il vcfq rat ne fut
oncqucs iâin.^u mefine Iture c?» coap.
l'ay conu vn icunr efchoiicr de bonne maifondcii
franche Comté , par trop facétieux & mocqueur, qui
chafquc moment de temps contrcfaifoit Its allcuresdc
fa belle fceurifcmme de Ion f.'ereaifné, quieltoit d'vne
tres-illuftrcramille,verruenre ,& quiauoit apporrédcs
fcllais 6l grands moyens a la mailon de fou frcre. Mais
elle cftoit boiteufe. le penfe que par vengeance diuioe
ilfc rompit certain iour l'vnedcs iambes , laquelle. ne
jjcuriamaiseftie bien reftauree ni rcmife cnioneftre:
donc il demeura boiteux iufqucs à ia morr. ^té mefmé,
iiu.ZP' chap.
Les mères tancent aucc beaucoup de raifon leurs en-
fans, quand ils contrefont les borgnes , bicics, boffus^
boiteux, bouches-tortcj, & autres imperfections dii
•corps. Car outr^ ce qu'vn corps ainfi tendre en peut re-
ccuoir mauUaisplijUfcrablt au/Tique Dieuiurtc iugf,
nouspreneaumot fur leconcrollequc nous faifons de
fa prouidcnce. Dcfait,icrp.cfuisaperccu plulieuis eftrc
dcuenus malades , ayans entrepris de le contrefaire, no-
tamment fi leur dcuoir citvit de le irouucr en quelque
bon affaire, ou eux on les cr.fans, qui Té mocquoycnc
d'aucuns qui anoycnt qnelqucs impcnfcilioas, par lapf
it temps y tomboywni.^i* mtfme iinre qt* chapitre.
FF
8 1 8 Hijioires admirahUs
I
IM AGinATlOn yehementc.
L n'y apaslongtfiups cjuc'ccrtjin perfonnagc s'i-
maginoicauoir vnc lonnecte dedans le cerneau. Vn
autre le croyou cihe roy des Gaulois : & vn cftrhoiicr à
Parisprioii les medecns n'empcrchcrfonamc de voler
du Purgatoire au cie!,fcdiiant cftre mcrr. Va autre di*
foir,quc poureuitcr d'cftre cocu il fc cueroit. De fait il
fc pénale n'y a pas long temps. En l'an i ^ 5 o. au mois
d*Aoul\,v.. homme de ^uaiiié 3c de moyens , adaocat
deprofclUon , tombîcn telle mciancholic & altéra-
tion de cerneau, qu'il difoit & croyoit eflre mort:
à caul'edequoy il ne vouloir plus parler , lire, man-
ger,chcmircr ; mais Te ccnoit couché. Sa femme fit
appcllerles médecins , qui ne fceurent le perfuader
de (icn prendre ) ni manger ou boire aucun aliment
pour entretenir là vie : difant pour toute railbn qu'il c-
îloitmortj&que'esmorts ne mangroyent rien. Fina-
lement il deuintiî débile qu'on n'actendoit dciour à au-
tre lînon l'heure de famort.Mais pari'adrelTcd'vn (îcn
parcnt,quifc fit porter pour mort en la chambre , il rc-
umr à foy,& fuL garanti dt fon imag» nation. Zo>*y#
Çuyon an xdin.de [es diuerfes leçons,cba^.t s .en dcfcrit l'hl-
Itoire par le menu.
Vn ieunc hon-ime,debonn? &noblcmaifon duhaut
Lymofin.aduertiqu'vnfangherpalToic près delà mai-
fon,fortit aucc quelques fcruiteurs de Ton père , porcaniC
rnc demie picque en fa main, & les autres prindrcnc ce
qui fc rencontra fur ce bruit, pour raertte à mort le fan*
giicr , qui fe voyant cnuironné court dioit au ieune
gentil- homme, lequel oe le fcc ut i^ider d^s armes qu'il
portoic. Mais il dduintqae le fanglicr palTa entre fcs
ïambes, & le fii tombcr,puis voulant le ruer dcflus & le
defchirtr defcs broches, vn ficn domel^chemmcrobii-
ile , boulanger, qui auoit vne pallc ferrée , en don-
refi droit à i'vnc des temples du fanglier, qu'il Tat-
tcrra mort. Le ieune gentil-homme eut telle apprehpn-
fion , que le fanglier luiauoitenleuc & mangé vne
ifàmbc ( combien qu'il ne i'euft oHenfé } qu'il 1«
cieur
& memùrahtes. ètf
fT€fltl*cfpaccdcdçuxans. Beaucoup <Jc médecins ap-
peliez pour rcmcdi«r à ccftc faafTc imagination ncga •*
gnereni rirn auec leurs r emco'es. £n toutes Tes autres a-
étions il cltoic bien de lain iugen;ent> finon eu cette ci.
Il cl\oitfo-taff,dionné aux moines entre autres à ccr-
cainsdc la rciglc de S.i^iançûîs,& afTczauftsrcs , qu'on
furnornmc les Recelez. Il eue enuicc'eftrc de leur
habii : mais eritcndai ttju'iîs ne vouioycnc le donner â
gcnsra^l-nczdc icurcwps , comme bollus , boi-.cix,
inuciitz,& dctcd^ucux de quelque membre, iidcfcfpcra
d'y parucnir , pourcecja'ii cuidoit n'auQirqu'yne iam-
be , encore^ qu'ilciieminaJitaufli bien que les autres
hommes, ayant toufiours celle imagination que le faa-
glierla lui aueit dcuoree. Aduin. en ces cùtret-tircs que
deux de ces Kecolcz,alians par pay$,vn iour qu'il d*oit
prefques lolcil couché, fcrcûdueni à laponedeîa mai-
îbn , demandans pAlîade & logis po jr celle nuid-la.
introduits & receu» i^siouppcirent auec ce icunç gcn-
lil-homme,ire$aiie de les voir. Apres loupé chacun (e
retirant, on lailTa les R.ccolcz (euls en vne chambre a-
uec vn bon feu. Ce gentil homme les y vint trou*
uer fecrettemeac , leut communiqua fon delfein , ad-
iouftant qu'il n'y voyoir aucun moyen , parce qu'il
u'auoit qu*vnc ïambe ^ & que l'autre auoit efté de-
uoree d'vn fanglicr. Les Recole% le regardent , & lui
demandent sM auoit vne iambe artificielle fous des baj?
defoye qu'ilportoir, & le prient la leur monftrer. Mais
ayant cognu que l'iœaginaiiue cftoit atteinte en lui,cô-
racncerentàl'afleurer du contraire. Apres l'auoir entre-
tenu de propos qu'ils eftimerent conuenablcs à leur in-
tention &: aduaDtagejl'cfpacc de deux heures , ce geniiN
homme,d'afFeftion qu'il auon d'cftjc receu de leur nô-
bre , & n'eftre teietté , perdit fa fan a lie mclancholiquci
tellement que le Icndemam il confçfloit à chafcun qu'il
auoit deux iainbes En fin maugré tous fes parens 6c a-
inis il fe rendit moine, & dedans l'an delà probatioii
mourut au conucnt, Lvn^s Guj/on an i. lin. de fis dmnfif
levons cha^,i y «
8 1 (? Hijlcires admirables
le marqucray ici ce que Lcuinus Lemnius dcc\e mé-
decin efcrii de li vchcmcnce & force àz l'imagination.
Nous voyonsCdii il)cs pays Seprentrionaux beaucoup
d'hommes qucl'on cftimeroit clhc nez ailleus, û l'on
s'a.rcite à la cor;(îàerarion de leur poil,pe!age , &. com-
pJexion du corps. On void encre les peuples du pays )r>2$
proches de la n>er,plu(îeurs qui ont le poil noir & cref-
pu,le vifagcbafané. Cela le peut rapporter à l'air & na-
turel du pays, ou à la nourriture ordinaire ,ou bien aux
imagmaiions fecrettes & cachées du fcxc femenio,dcf-
quelles imaginations l'efficace cflfi grande, que lui le
moment de la conception tout ce qui vient au dcuaot
de rimigination s'imprime en l'enfant conccu. La cou-
ftume des femmes eftd'auoir l'œil remuant, &qui Te fi-
che fur tout ce qui lui vient à la renconire:dont aduiéc
que lafaculcé naturelle ententiue à former &: parache-
Uer fon œuure , y porte & addreffe les penfecsÂ: conce-
ption» de l'arae) donnant à l'enfant vnc forme emprun-
tée & du cent eflongnce du naturel & de la condition
de fcspere& mère. Ainiî a Ton remarqué de noftrc
temps & de celui de nos predecefTeurs , lors que l'Em-
pereur Charles V.vint auccvnepuilTante flotte d'Elpa-
gnees pays bas rempliflant les villes d'vne grande fuite
de feigneurs, capitaines, gentils-homes gcnf-darmcs Ef- \
pagnolsjles femmes entcmtes acouchoientd'enfans qui '^
aucc le temps relîtmbloycnt à ccfte nation-la. le parle i
des femmes honnorables,pudiques,& hors de tout fou- <
pçonde vie deshonncfte. Aucas fcmblable , lorsque ft
Maximilian i.delamailon d'Aurtrithe,vintes pays bas, i
acompagné d'AlemansJcs Flamenôe» &: Hollandoifes, >
par vthemence d'imagination, eufcn. des enfans qu'on i
cufteftimé Alemans naturels. Et n'y auoit autre coniî- îj
dcration que celle-là : car nous ne fjifons ici mcniioii ;j
^ue des femmes d'honneur, & fur qui l'ignominie & le î
reproche n'ont que vcir.^M i.ltu.des comfîexions th. 7.
l'ay vcu ( dit le do6leur Fr. Vallcnola ) mon confia 1
Louys de Serres, médecin , couché en mcfmc chanv{>^;^ '.
aupresdemoy, en fon premier fomnc fe leucr, cm poi- i
gocr fcsarincsiouariria porte touc endormi qu'il elloïc, )
maripca* j
& memorahles, tt i
marmonnant entre resdents,& lurtir comme furieux. Il
c/loic furiienu le iour précèdent en la villt: de MonrpeU
lier vn cruel confliit entre les tlcholiers François &
ETpagnols , oùmon cou(în s'cftoittrouré condaifant
les aitrcs , & des prf^mier-. en la mcflee. Au moyen dc-
qaoy retenant en l'arae le Tpeclacle d,u tombât, la facul-
té imaginatrice , qui ne repofc iamais , voire qui iî?
defployc aiiec plus grand^ force durant le dormi*-, con-
feruant au dedans les apparences des choies veuè's.il ad-
uinc que telle faculté eut le crédit depouuoir impc-
rieufement esbranler tout le corps, & poifleràtels
mouncmens volontaires. ./4m i. /i«. defes objeruationsme^
dtcinalesjobfer.^.
i:m1^IETE ridicule cr detej}able,
LE peuple ùifoicen ma icuncfTe , qu*vn Roy de nos
voifins, ayant rcccu de Dieu vne baftonnade , iura de
i'cn venger,ordonnant que dedix ans on ne le pria(t,ni
' parlait de lui , ni ( autant qu'il cftoit en fon auftoricé)
qu'on ne creuft en lui. Par où l'on vouloir peindre, non
tant la fottifejqne la gloire naturelle à la natiô, dequoy
cftoit lecompte.Ce font vices toufîours ccnioints.mais
telles adions tienner:, à la vérité , vn peu plus encor
d'outrecuidance, que de beltife. jW.^ie Mcrntugne au i Mure
defesejjanychaj).^.
Les Migiftraîs d\ne prouince, fuietre à vn antre roy
de nos voilîns , voulans obuier aux difpuces en fait de
Religion, de noftre reraps firent vne déclaration publiée
cà & là, portant de f.n Tes exprelîcs àtoos de ne parler de
Dieu ni en bien ni en mal. C 'cftoit vne dcfenfe trop in-
définie.Parler de Dieu en mal fc def^ndafiez, par lacon-
fciencede tous hommes. Si l*on en fait par fois iodeuc
répétition à caufc des corruptions vniuerfel les ou par-
ticulières, cela requiert envn mot lafpecificaiion des
blafphemes fie aucies propos im^ies.pefcndre de parler
F F 3
8 1 1 Histoires admirables
de Dieu cnb'cn, cft vnc impicc ridiculr.fi ccfte dcfcnfê (
n'a fes cxpolicions crcs-cxprcfrcs,touchant les lieux, pcr- j
fonncs,remps ,& manières de parlcrdc Dicuconacna-
blcment.jWcOTwre de ntjïre temps.
JT^H yyilî ^m TE punie.
L'An mil cinq cens vingt-deux, la guerre cftant cf-
rhaufcc en Lombardic entre les hrançois & ETpa-*
gnoJÀjle fieurde Lelcut y fat cnuovc auec nouueau /e-
couts d'hommes & d'argent de France ; audcuanr def-
quclsfut le fieur de Montmorency , qui après quelques
cfcarmouches contre les Lanfqucncts & Italiens de Fr|«
çois 5fûrce,d!ia afîicgcr Novarc & la prmt dVifTaui, fai-
fant pendre & cftrâglcr les foldats de la garnifon,à caur
fcdcscrtiaut z par eux çommifes connc les François:
comme de leur t-ïndre le ventre tout- vif :?. dedans tiirc
manger i'auoitie à leurs ch-iiaiix :itfmd'auoir mang^
le ccsur à pluiieuis hommes, & commis relies autres in-
lî«manitcz.hr.Ç}*/c/?W«'.:Z.e v i . volume des Chromc^nn de
Canon.
Il aeOé parle au premier volume de l'horriSlcinhu-
maniié d'vn crrtain efclauc More contre la tVmme &
Jcs cnfjns d'vn Efpagnollbn maître , lous le tiirrcdè
vengeance horrible. l'aioultcray irivne parcilie hiftoi-r
re delcnce par M. André Honfdort, en ces termes cra-
duKfts du lat>n. L'a mi! cinq ccnscinqu^ntefixsvn gétil-
hôme Alemi,h)rt riche, habitué près de U ville d'Aug-
fpourg,3uoit cl^eué vn laquay More . jcs le bas aagc.Cc
gentilhomme eflongné pour qaeUjucs atfaires arrierç
defaMaifoo, e More deucnn home fa>r,ic leue de oui£t,
tue la fême,lcsenfans,&aiures domeftiqucs de fon mai-
flre,n^' laifTanc en vie qu'vne fort petite fille défendit
maiftr#, qui de retour Iç lendemain matintrouue toutes
les portes de fon logis fort foigneufcment clofes. Ain/Ï
au'ihûftrrroyQit àchcual , il apercoii fon more au plus
naui
é' memorahléf. 8 1 f
liauteftagCjCn contenance tort taroiiche,&' qui fe prend
««cricr tout haut. Te fouuient il point homme lejlus
cruel d'enti e tous les cruel?, des maux que tu m^as fait à
tortiufqucs à prefentj'ie lesay conicï,& m'enfuis ven-
gé finalemcnifur les tiens. Pvien-n'ell rcficenvie que t^
hllctte,que ie te rendray fai.ie &fauue,û(U promets
me fauucr la vie. Le gentil homme loiiteipcrdu lui tu-
rc qu'il le lairra aller. M^iis tour foU(iain le More preci-
jpite l'enfant des feneft; es fur le pauë , aur pieds de fon
pcre,adioiiftaot , le fçaybien qu^^tu ne m'efpargncrois
pas: mais ie ne veux plus ^iurerô: difant cela fc iette du
haut en bas & s'e'carbouilla la tefte.raourât fur le chap,
cruel vengeur de l'inhumanité de fon maiftre & de la
fiene propre. Damian Kncbel fecretaire du Comte de
Hanav fie le difcours de cefte inhumanité punie, au Co-
te t^hilippe de Naffau, ce dit Honfdorf en fon théâtre d'e^
xemples.page 4r^^>
En la mefmc anneepres de Munftre en Vveftphalie,
certaine payfanne fort enceinte s'achemina ve'S vn vil-
Jage prochain pour fe confcflcr & communier. En (k
confcfïîon fit entendre au prcftre qu'elle auoit troucé
vue bougette pleine d'argent, & le prioit de la procla-
mer en fon profne, afin de la rcndr» à qui elle apparte-
noit.Ceconftfleurjabayani après telle proyc,luy dit quo
telle proclamatioQ u'eftoit necellairc,&: qu'ayant eu ce-
fte bonneencontreellcladeuoit garder. La femme ayas
eu fonabfolution fc remet en chemin, & entre dedans vn
etitbois,oii les douleurs d'enfantement la faifi/Tent.EI-
e s'adîed à terre,& met la bougertc defTous sô do;. Ce-
lui quil'auoit perdue couroit à toute bride lacercher 5ç
approche de la gifaote, & lui demande nouuellet de
la bougette. le vous prie, dkellç, aller en diligence
quérir vne fagc femme au prochain village pour maf-
iîfter,& vous affeurcz de r^auoir vof rc bougette. Tan-
dis qu'il s'y achcminoit, le preftre Gi: nient, qui cfgorge
inhumainement cefte femme , &emporte la bougette,
L'hommeàquielleappartcnoit, de retour auec quel-
ques fcmracs,defcouurant ce meurtre fuit le meurtrier
furlapiftcqaicftoitça laaeigc, l'atrape, le mit e«
l
8 i 4 HiBoires admirables
. mains de iufticc, oui fit cftoulîcr ce œturticr en huile
bûuiiJance.HoM/uorJ,/»j^.4}tf. Voyez au liitrc dci ci util
&meur:ticrs.
l'HO'HlJ ^TlQ-K terni le.
L*An miîcinq cCi^strcntCjlecinquicfme iour de No-
ucmbre,> eut grande t^mpeliccn me:, d'vn vent ce
Kor.ivjfl, ^ tut la marce il hauic a midi, que les eaur
furpahoyep. en dijcurndrojts e- diques> combien que
Ictéps orà.nairc Je ia ma-tc un: 'jnroresde deux h.c\i'
rci j-our pjra.i.euer Ion flus Dv* celle ccmp^rtc & fur-
croillan'e '-nirec Furent inoodccb ranc en Hollâue,Zec-
landciFr-lcB-^baiu, qu'en FIana'^cs(coirime aucuns ont
annotée Uiilé far efcric ) qnit.c c-nsquatie parroif-
ùs. Mais Hollande & Zcelaii Je farcni les plus cndom-
inagez. Car en l'ilî- de Vvalchcren Irs diqucsturét em-
portées en diucrscndroirsrnocammcnt celle qui cftoit
entre le vieil habledeMidde;bourg &: Armtiyde : donc
s'cnfuyuii inondation de ce quartier 3. kmaiscs duiâ",
A FlcfTinghes yent vne tour emporice a'.ec vn pan de
muraille delà ville , qui donnoit entrée à l'eau de la
mer dedans le pais. Du collé ce Nord , es enuirons de
Verc.F.it laiiquc rompue en deux cnjToif..Lc quartier
ducoùc i'0:!cnten i'IUedc Zaïdhcvcl.ndt fut « ntic-
rcmr ni inondé aïKc 18 villages. La ville de Rcmcrf-
vvaeJ , laft)rrcrc{rede Lodycj&rerduîc de la Cretkc
toute emportée. Le quartier ducufté d'Occident , fcpar
rcd'vrediquc tirée au irai er$ dci'lijc . cùeltalulc la
fille de Goes , & pluficuis beaux vil! igcs , durent audl
noye7.,& la dique enfoncée en trois diuers endroits p es
icclle villede Goes:& y eut vnt pir^-ie de îa porte nom-
rnce aux oifonsjr'e ladite yiHe, eficuee & empo-tee aual
reau.L'cfclufedc BcnvleytCDtre Emelille & la ville de
Çpr{<;;een fut auiïî «emportée, tellement qu'en moins de
5 iouis tour le pays fut en eau.Cortgcen.Cats.EmelilTc
ftauttcs villages fuientgaignezdcknaer. On efpcroît
pouuoir
i
é* mémorables. 8 1 j
pouuoirlfsrecruuici i'cOé fuicant : mais on n*a /ç^tt
lurcjues à l'an i 5 97, que leComiedeHohcnlo mari de
madij me Marie de Nafïau,les a fait gaigfierôc accom-
moder au nô de Ta femme. Plufîeursauuesqaarcicts &
endfOKsdt pays en Zeclande (peciakment furent rui-
nez par celle )nor.danoa,prefage àcs hornblcs calami-
tez depuisfiiruciiuesespaïs bas.On ne lç3Uro,tdefcrirc
par it menu \cs iefolations d'alors, car il y eut vn nom-
bre mnombrable de bcftaiiCcomme chcuauï , bœufs,
vaches.brcbis, pourceaux) englouti de la mer: piulîcurs
belles maifonichampeftresi raeftairics,elt3pesde fro-
mcnc,rcigles& autres grains, abatus &: emportez par la
violence des eaux, pîufîeurs poiflcs i fcichcr la garan-
ce,&: maints millirri de balles de garance engloutis de
Ja mcr.M^is le plus grand mal fut en la perte d'vn très-
grand nombîe d'hommes, de fLmmes,&: d'cfans noyez,
fans que iamais il fut polTible de les fecourir. Piufieurs
honntftcs friches familles furent réduites àdifcitcSc
mendicité pat ces inondations. Ceux qui Te fauiierét de
la fiiicurdc'3 eaî:.x,eflans venns es qua-ciers circonuoi-
fins de ZccJande moururér pan ied'ennui, partie de pau-
urtié&: niifcre. L'ciiuir6vin^;'t bcai)x vilJagcs en Tiflc
de SuvtbcvtianJièiau paysdc Bo r [Telle , lapljiparc
font demeurez depuis au fond de la mer. Six furent rc-
gaigncz Tefrc eniuiuanr, inondez derechef l'an i 5 51.
reg;iignez poui la fccondc fois &rediguc:z l'an ly??^
Ainfî iaZeeUn.ic fe vid co.Timc toute couuenc de mer
J'an I 5 30. Ôi d. ^uis garamic miraculeufement a lenti
dcsdeitjg^S de guerres cftranges , qui ont cftédcftour-
nez pii movens merueillcux, & qui grondent autour
■4'c!Ic, de la Holiaifde,& autres psys vtifîns ; les dKjUfS
delà puiflance diuir.e cmpef( hans le rauige, autant de
temps qu'il pbiia à la bonté du louuerain Seigru;^ur du
monde. Ceft hiftoi^e ou inondation eft cfcii'c atti.Uu.
de M grande Cl>roiiirjue de HoIlaudeyCrc. rectéetllie p^r lean le
Tetn ^cf/ier de Betlmus. Vingt fcpt ou vingi-huidVans
auparauantjla Hollande & la Frife auoyentcf.é en dan-
ger d'eftre noyées par lemefmc venc de Nordreft , &
piufieurs diquesronipucf, aùecpcrtç <lc beaucoup de
gens&dcbcftaii.
il 6 Hi/f/?ires admirables
I y STi C E redoutable ^ tres-iujle du lu^e S»u-
uerauhfur Sjttan ejprtt meurtnerij^'fi^rfts
tnjirumtns CT* adherans,
ON tient qne files forciers gucrifienr ( c'cft à dire
defrorcelent)vn homme inaleficié , & par eux ou
autres leurs compagnons enforcellc , il Faut qu'ils don-
nent le fortà vn autre. Cela cftvnlguaire par leur con- .
fcnîon. De fait, i*ay vcu vn forcier d'Auucrgnc prifon-
nier à Paris, l'an mil cinq censfoixanre 6c neuf,quigue-
rilToit les bcftes , & les hommes quelquefois : & fut
irouué faifi dVn grand liure, plein de poils de cheuaux>
Taches & autres beftcs,de toutes coulei'rs. QLu.and il a-
Uoicietré le fort pour fiire mourirquclque cheual, oii
vcnoit à lui,& le gaeriifoir en apportant du poil: puis il
donnoit le fort à vn autre, & ne prenoit point d'argent:
carautremcnt(coinme il diroit)iln*cuft pas guéri. Aof-
(î cftoit-il habillé d'vn vieil fayc compofé de mille piè-
ces.Vn iour ayant donné le foi t au cheual d'vn gentil-
homme , on vint à lui. I! guérit le cheual & donna le
fort au palefrenier. On retourne afin qu'il guerift l'hô-
mc.ïl refpond qu'on demardailau gentil homme , le-
quel il aimoit mieux perdre fon homme ou fon chcuaU
Tandis q^e legétil-hommefait de l'cmpcfcbé ,& qu'il
délibère, fon homme mourut, &; le fof cier fut pris. U
fait anotcr que le dlabie veut toufioiirsgaigner au cha-
g-c , ti:llementquefî le forcier ofte Je fortà vn chcual,il
Icdonneraà vn autre cheual qui vaudra mieux. S'il gué-
rie vue femmcja maladie tombera fur vn homme, i'il
dcflbrcelîe vn vieillard, il enforccllera vn icune garçon.
Et (î le forcier ne donne le fort àvn autre, :! cft en dan-
ger de fa vic:brief û le didblc gucrit ( en apparence) I4
corps, il tue l'ame.
l'en recitcray quelques exemples. M. Fournicr Con»
fcillcr d'Orle'aus m'a raconté d'yn nomme Mulin Petite
' mu*
r,
^ mémorables' 817
marchand Je bois en ceftc ville-Ja, c)u*eftantcnforcelIé
à la mort il eniioyaqucnr vn qui fediloit guenr de tou
fcs maladies, ( fufpcft tootcsfois d'cftre grand forcier)
pour le guérir: lequel fie rtlponfe qu'il ne pouuoidc
g#Cfir,s'ii ne donnoit la mslariicà Ton fils, qui eftoicen-
cores àlamamclie. Lt(ma]|-)eurcia)pcrc ccnientitaii
ârricide de fon fils:qui fair bien à noter pour conoiftre
a malice de Satan , & la iufte fureur du Souuerain fur
lespcrfonnes qoi reconrert à ceft efprir homicide & à
ks inftruracns. La nourride entendant cela, s'enfuit a-
ucc fon fii$,penditque le forcier touchoit le percfiour
le guérir. Apres l'auoir toudié.ie père fe trouua guéri.
Mjis le forcier demandâtie fils, & ne le t?oi'U;inr point,
cômence à criej",lefuis morroù cit l'enfant j* Ne l'ayant
pointtrouué,il s'cnalla : mais il n'eut pas mis les pieds
nors la pprte,quc le diable îetua foudain.lldeuintaufTî
noir que fi on Teuft noirci de propos cTeliberc.
l'ay fceu aufîi qu'au ingemenc d'vne forciere accufec
d'auoir enforcellc fa voifîne -ïn la ville de Nanres , les
luges lui commandèrent de toucher celle qui eftoiten-
forcrllcerchofe ordinaire aux iuges d'Alem2gnt*,&mcf-
mcs en la chambre impériale cela fe f>it fouuen':. Elle
n'en vouloit rien faire:on la conrr^ignit:elle s^el'criaje
fuis mortr.Ayât touché la FemrtK enlorccllee , loudain
elle gucrit:&Ia forciere tomba roidc morte par terre. El-
le fut condamnée d'cltrc b'Uile toute mcrte. le tien
rhiftoire de l'vn dcslugts,qui aflifta au lugemmc.
l'ay aprins à ThonloujSr , qu'vn efcholicr du Parle-
ment de Bourdeaux, voyant fon ami trauaillé d'vne fic-
ure qtiarte à l'extrémité , lui confeillade donner fafie-
U'C à l'vn de fcs ennemis. Il fit refponfc qu'il n'auoit
point d'cncmis. Donnez 'a dôc , dit-il, à vo(ire fe^uitcur:
dequoy le malade ayant fait confcicnce, en fi.; le forcier
lui dir.dôf ez la moi. Le malade rcfpond.ie le veux bien.
La fieure empoigne le forcierqui en mourut , &: le ma-
lade refchappa. Ces trois hiftoires font tirccs de /. So-
f/w au 3 diu. de ft Demonomanie. dMp. t . C'cft aux i uges,
qui commandent, & à ceux qui permettent aux forciers
dctoncber les psrfonnes enfprccllees , de pcnfer à
IcQrs çoafçiençcs« Dieu fci)l guencSacan frappe par
8 1 8 Ktfloires nàmtffihles
^c$r(>rcicr$,Dieulep.-rmc:rantain{i. Miis «".atan ni Tes
loft.'umensnc g lerilfenrpoinr: ains par Je courroux rc-
«ioarabledi» iulieiug:, l.ueni lebAltôdc dcflus vu pout
charger lur i'àucrc , ioïc au corps, foit à l'am* , comme
ces cxv-mples le monltrenc. Ei ainlifontcoufiours mal.
Comme aulFiBodin adioufte proprement, que les for-
ciers à Taidede Satan , ( auquel ils feruent d'iiiftrumcns
▼olontai'cs, &.qui ont leur mouucmcnt p^^occdant d'v-
ne affcdlrjon depi aijee)pcuueiu nuire & ofFcnfer,nô pas
tous, mais rculcmeiu ceux que Dieu permet par (on iu,
gemeotfecret (foyentbons ou m.iuuais) pour châ(tier
Icrs vns &c(prouuer les autres :afin de multiplier en Tes
clleus fa bcned'<^ion, les pyantfojuez (c. rendus par fa
grâce tounpuiiTante) fermes &conltans. Néant moins
(dic-il)pour montrer que les force s, par leurs maiiJi-
ceî exécrations & facrifices (ieieftablis , font miniflres
de la vengeance de Dieu , preftans la m.iin & la volonié
àSatan , icrccitcray vne hiftoire efîrange publiée , &
dont ia msifioire elt rc:cnte. Au duché dcCIeaes près
du bourg d'£!ten,far le grand chemin le^ gens de p»ed
&dechcual cftoyen: fiappez iSc battus , & les charettes
verfccNiSc ne fc v.«yoit aucre choie qu'vne main , qu'oQ
appclîcit Kke ken. En fin l'on pnnt vnc forciere nom-
niee Sybille Dinfcops , qui iJcmeuroiics enuirons de ce
pays- la : & depuis qu'elle iut brullcc, onn'y a risu vcu*
Ce Fut Pan mû cinq cens trente cinq.
Iln'y agueresque près le village de Baron en Valois,
futietré vn bouquet au palîage d'vn clcallier pouren-
trer d'vn mauuais chemin en vn chainp:fi empoilonné,
inaisde lortileges > qu'vn chien ayant bondi par def-
/u. le premier en mourut fond lin. Le maiftrc palfa a-
pres:Sc encore que h première Furie & vigueur de l'en-
chantemenc , pour auoir opcré fur ccf> animal, Full au-
cunement rebouchée , l'homme ne laitTa pas pour ccU
d^•nt'e'^ en vn accelloire dont il cuida prefqae mourir;
&cn cftjit dcluen termes , lî i'antheur ayant efté
pris pirfo'Jpçon n*'eu{l dcstaitlc chjriWe. IlFuttofta-
pres exec'jtededans Paris , & confcfTa àla more, quefî
rauirccuftttucie bouquet, il fut expiré fur le champ.
é* mémorables, 819
yi^nvre^ en fort annotation fur laftatfted'AEfcuîapt att i,
yoiume de '?lnloJlrate.
- le raconteray encore cç que i'ay ouï n'y a pas long
tcrrps raconcer à Monfcignrur le Duc de Niucrnoi$,éc
à plus de v;ngt gccils horDmcs dignes de ft'y,^uoir vea
de leurs prop^ci yeuï,ce<^ui aduintàNeufuy fur Loire,
«ù le fienr &. la dame du lie» aynns depole leur procu-
reur fircal,to(t après vnc ieune fille qu'ils aucyenc , de
l'aage de quinze ifeize ans, le crouua coûta vn inftant
iaifie d'vne langueur vniuerfcllc en cous Tes mem-
bres,fi qu'elle fcchoit à veuëû'ctil , fans que les méde-
cins y p^ullcnt non feulement trouucr remède d'y do-
uer quelque al!ci;emenc , mais non pas niefme conce-
voir aacune occaiion apparenre d'oùpouaoit prouc-
mr ce mal. Eftansdcncques venus le père & la mcrc co-
rne au dernier defv^îpcir, il If:ur va tomber en la fan cafîe
t^uéce poiirtoic eftre parauancure quelque vengeance
de leur procureur , qui auoii vne forceitroitecomrnu-
nication & accointance auec vn betget d'auprès de Sa-
cerre , le plus t'raiid forcier de tout leBcrry r & fur ce
foupçon le firent fort bien mettre .'n cul de fofle ; là oà
menacé d'infinies tortures ,ii dcsbagoulaen fin que«ce-
ftc damoifclle anoir efté eni'orceliee par le berger , le-
quel auoic fair vor image de eue : & à mefu'c qu'il la
moleftoÏL , la fil;e fe trouuoit moleftce de mefme. En fia
ils dirét à la me e;Madame,il n'y aqu'vn fcul moyen de
la guérir , &fiuc neceilaircment que pour h l'auuer
vous vous refoluiezde perdre la plus cherc chofe que
vous ayez en ce monde. Excepté les créatures raifonna-
bles. En bonne foy, refpondic-eMG , ie vous en diray
la pure vérité : il n'y a rien que pour ce regard i'ain»e
tant que ma guenon. Mais pour garamir ma fille de la
Jangueuroù iela voy , ie vous l'abandonne. Onnefc
donna garde que peu de iours après on vid la fille s'ai-
der d'vn bras , & la guenon demeurer pcrclulc de mef-
me. Confcqucmment peu à peu dans la reuolution de
it Lunecefte icune damoifellefnt du tout guérie, forg
fafoibltfTe, & la gucnoo mourut en douleurs extrcmcs,
Lamefme,
850
HiBûires ^dmiràêtes
Hippocrates ,au liurcJ^rEpilcplic qu'il appelle ma*
Jadie lacrctr,ercrit qu'jl y auoit pluûeurs impoiicurs qui
fcvantoyenc de guérir du mal caduc, difant que c'cftoit
]a puilFanccdcs Dcmons en fouifTantcn terre, ou ietrât
en la mer ic fort d'cx^iaiion , & la plupart n'cftoyent
cjuc bcliftrfs. En fia il adioufte, il n'y a que Dieu qui
etfacelespecheZiqui foii noftrc Talut & delmrancc. i'ai
mis les mois de celai que n nis appelions Payen, pour
nous cnlcigner d'auoir en horreur telles impiciez.Et à
ce propos iaques Spranger,inqui{îteur des lorciers , ef-
cri- qu'il a veuvn Eueft^uc d'Alcmagnc» lequel cftant
cnforcelIé> Fut auerti par vne vieille forcierc.que fa ma-
ladie cftoit venue par malice, & qu*il n'y auoic moyé de
la guérir que par fort , en faifanc mourir la fv rciere qui
i'auoir enforcclé.Dequoy c!hït eftonnc il enuoye en po-
lie à Rome>piier le Pape Nicolas V.quM lui donnaftdi-
fpenfe de guérir en crrte forte : ce que le Pape lui accor-
da,aimant vniqueméc l'Euerque:&portoit la difpéfecc-
fteclaufe, pour fuir de deux maux le plus g» and. Ladi^
pcfe venue la forcierc dit, puis que le Fape Se l'Euef^ue
Je vouloyéi, qu'elle s'y errployeroir. Sur la minui6^ TE-
uefquc recouura fané : & au mel'me i^^ltant la forci'ifC
qui a-joit enforcelié l'Eucfque , fat f appce d.* mal ïdie,
dont elle mourut. Ainfi void-on que Sat;î fît que le Pa-
pe, TEuefque & la forriere furent homicides : & laidaà
tous trois vne imprelTlor de feruir *& obéir à (es com-
mandemens : & cependant la forciere quimourutnc
voulut oncques fe repenti: : au contraire el^ fe rccom-
mandoit à Satan , sfin qu'il la guet >ft. On void aulTi le
terrible iugcmcntde Dieuqui fc vcnoe de fcs eoncmis
par fcs ennemis. Car ordinairement les forciers dclcou-
urent le maléfice , &fe font mourir les vns les autres:
d'autant qu'il ne chaut à Satan par quel moyen. pouruco
qu'il vienne à bout du genre humain , en tuant le ccrpa
ou l'a me , ou lesdeuxenfemblc. le diray vn exemple
aucnuen PoidoQ , l'an M7i* Leroy Charles I X.
ayant difné commanda qu*©n lui amenaft le forcicr
Trois-efchclles , auquel il aaoit donné fa gac; i pouf
accufer fcs complices. Il confelTa deujuc le roy,cn pra-^
:
ér mémorables. 8 j tl
jTcncc de plufîcurs grands fcigneuts , lafaçondutranf-
porc des forciers,des dafes,des (acrificcs faits à Sata, des
paillardifes aucc les diables eu figures d^hommes & de
fcmmes:& que chacun prcnoit des pouldres , pour faire
mourir genî,bclks,& fruits. Et comme chacun s'cfton-
naît de ce quM difoic , Gafpar de CoUigni, lors Amiral
de France tjiii cftoitprefent , dit qu'on auoic prins ea
PoiTtou peu demois auparauant, vn ieune gaiçon ac-
cote d'auoir fait mourir deux gentils hommes. II con*-
fcfia qu'il cllou leur feruiicurj& qucks ayant vcuiei-
tcrdes pooidrcs aux maifonsjSc lur des bleds, difant cqs
inois,Maledi£îion,;sC. Ayant trouué de ces pouldres il
en prinr , 6i en ieua fu: le lidl oùcouchoycnc lus dcnx
gcntiL-hcmai:r<,qui fuient iro.uucz mous en leur lift,
tttut enflez, &- fort noirs. lifutabfouls par \ts iuges.
Trois- cichclles en raconta lors beaucoup defcmbla-
hïzi.l.Bodin au ^.Un.de la 'Demnornoanïe^chap. y .
LETH^Ii^GI Q^VE S zr antres tels malades
ajJopti.geleZ^fiitptdes ^ tranfis.
VN médecin Portugais^fepruagenairc , faifî dVnc
grofTcfieurc continue en la ville d'Auignon , fut
frappé de léthargie au quatorzicfme iour , tellement
qu'il demeura pluficurs iours viuant fans nourriture
aucune, deftitué de parole & de fes fcns, comme mort,a-
bandonré des autres medecinsjle le vis ,y cftant appel-
le.Finalcmcnt,la vigueur de Nature fut encore telle cji
lui, qu'après auoireftéenuiron deux mois malade, il
Tcuiot en pieds, &fe porta bien : combien que ce fut vn
vieillard de tempcratuie froide & humide, abondant en
pituite & ctcremens, charnu, grand mangeur , & defrei-
glé en fa manière de yiurc. tr.yalleriola en la t. OLferuA"
tiondu 6,liure.
l'ai conuvnperfonnagc, qui faifi da Gare, ( foranc
profond conioiQtâUccafoibhilemcnt du moauemcnr»
8 5 ? Hijlotres admirable^
du fcniiment, & fpecialemcnt da cerneau, en tr lîc Cortt
qu*cxccpTé Icfoutile , qui demeure coder , le* malade
lêmblc morc)Jc:mcuroit tciiemcnt afTopi , qu'il ne fc
rcmtjoic non plus qu'vne roche, quoy qu'on lui arra-
chaft le poil,<5c qu'on le picquaft de tous coftez.Mais c-
ftant elueillé oC rcutnii à foi i cortimetranfportcdjfu-
reur> il recuoit par le menu tous les maux qu'on iui a-
uoit ûits en fon afTopiircmcnt. FerneLai* ^Jiure de fa ^^a-
Vncerrainperfonnagc fortenrennf à fueillfttcr fes
liures & paj»iers fuc loudaincmcntfrappéde relie cara-
Icpfie, qu'il demeura touc roi.Jr,affis en ù chaire, tenant
Ja plurae tn Ces <ioigrs, ayant les yeux ouuerts & fichez
fur vn hure: reliement qu'on i'cuft prins pour quelque
bon &bien efaeiUécûuclianr; mais quâd on vint à i'âp'
peller 6c pouffer , il fut irouuépnué deientiment & de
inouucment.Z,4 mefme.
l'en vilîray vn autre couché tout de fon long, com-
JTîe s'il cuft cfté mort , qui n'oyoic & ne voyoitgouitc/
ni nefencoit ^oin: le«: pîcqutures. Ncantmoins il reP-
piroit fans peine èc auaioit ailement rout ce qu'on lui
mî^troit di viandf en la bçuche. Lcaé de fon lift il fe
tenoirdcbout tout fcuUmach'nt félon qu'on le pouf-
foit : df quelque par: qu'on lui cournaft la main , ou le
bras, ou lâi.imbe,il ne «a bougeoii.On Fcuftpiinspour
vnc ftatuc cheminant par arii^cc. Là mefme.
LeDodeut Vallenola , pedoi nagctrcs-fçauant 8t
très humain, &: moy ,auon5veuvn vieillard tout dcf-
charné &atienué,rauidece mal.ll lîcmenroit à table Jcs
^•eux ouuerts , le corps droit &cn ferme alfxertc ,cften-
dant la main an plat, tellement qu'on eull ditquccë
irort vouloir viure& di(ner:eftant au reftc fi roidc,quc
i*cus rouies les peines d a monde à luy ployer le coi. Im
Cot.Co^nment.ai aphor.7 .lib.'L.CoacMippocr. f
r-ay veu des hommes qui fc oonoycnt le mieux dfl
inonde etue foudain Caifc de ccfte maladie, dont cet»
quicftoyentalfis à tableaueceux ne fe doutoyrnt nul-
lement, & ne s'en appsrceuoyent, finon lorsqufi par-
lansàcuxonn'enciroitnon plusdc rcfponfcque s'ils
eut
& menjorablesl 83 J
cufl'cfitcftémorts»Au(îî en ai-je rcuàqui cemaliuruc-
noiter fieuie î oufur rncrcfuerie & foiblcffcdu cer-
ueau.Lesrns tombent en conuuifion)Oupainioiron,oa
demeurent roide eflenduî. Les autres geniiflcnt & fc
plaignent ; fi on commande aux autres ce tirer & mon-
ftrsr laiaugufji'ernblent aucunement entendre, & s'ef-
forcent de le faire.ll y en a qui le fouuienneni de tout et
qu'ordit , i'ans que lors ils puifîent relpondre vn îcul
mot. Leur oiiiecft moufle jquoyqu^ils recognoiflenc
ceux qui font autour d'eux :maisi:s ne f^auroyencpar-
Icr.nife remuer en forte que ce fou.-eikns tels que iVa
des condilciplcs de GaJien , lequel pour s'adJoiujer par-
trop a l\rtudc fut atteint de celte maladie. Il demcuroic
couché froid, &: roide comme vn ballon de bojs , icgai*.
dant d'yeux ouuertj fcs compagnons, fans ciller ranc
foitpeu : mais ilncfonnoumoc. Rcuenu à foy , racon-
loiicequeles autres ^uoyent dis,adiouftan[ auoiren-
tendu leurs propos comme prononcez fort bas ou de
loin,& Te fouucnoit de ceux qui auoyent el^é autour de
lui. En aucuns le mal tft Û grand, qu'ils demeurent roi-
des & immobiles, lans monltrer ligne quelconque de
mouucment, de fcnriment, d'intelligence ni de mémoi-
re. Hou lier au Commentaire fur ie i^. apborifme du 5 . U». des
Coa^ues prafd' Hip^ocrates.
Le melme authcur raconte auoir veu certain pcr-
fonnagccnquiparinicrualiesen mefme temps fe def-
couuroyent les fignes de quatre maladies diuerfcs &
cftrangcs de iâ teftc, à fçauoir d'a/Iopiiren ent piofond*
d'epilcpfîe,de cai.«lepfic,& de coBnuilion. ^n t. Cértf
mev-iatre fur L' aph.?>.du z.iiure des (oacjues.
Certc maladie ( catalepfic ) vient foudain , & maio-
tieiit fon patient au mefme eftat qu'elle le trouuc , vcil-
lanr,parlant,erci inanr,alîî.sdchout,&:c. comme s'il c-
ftcii glacé & gelé. De ceux qui tn !ont atteints, les vns
font priuczde fcnfimeni , les autres entendeur ce que
Ton dit, ouvoyenc'encores qu'ils ne remuent les yeuî
ni les paupières. non pins que les ftjtucs. H s'cntrouue
qui remuent (rjuclquc peu les mains. Les autres leu nus
àcuxpenfemauoif Ibmmeilic légèrement, ou fongjf*
L. G
8 3 4 Hiftoires admirables
Tous fcmblcnt eicmpts de douleur , rcipircnt aflcii
leur aifc , & n'y a pas grand changement en leur pouls.
Tay remarqué ccls accidcns , dcfcrits parles médecin»
anciens & modernes , en vn gentil homme atteint de
tclie maladic.2"/;.ffr<«/?«4 en U ^^urtie de fa dij^utes contre
Taracelfm.
lerolme Bentius retournant en fa maifon de l'cglifc
de faindt Laarcnr,où il auoicouy lefeimoq d'vnccrtain
prcfcheurltalien,apresau(jir ouuerc la poiiir, monta luf-
ques à la chambre où fa femme nouuellcmeni acouchce
cftoit malaise. Ec comme il s'auançoii pour entrer, de-
meura là tout planté fans fe bouger, ayant les yeux ou-"^
Uerts. Sa femme l'ayant contemplé quelque intcrualle
de temps en telle porturc , commence à lui demander
qu*ilfdiloi. làîLuine rcfpondant mot, on appelle fe;> fer-
uiteurs qui le portent au Uù. où à Taide des medicamés
il tft dégelé, & remis au dcfluscen tcllclorte que depuis
il deme ra fuiet au mal caduc *Seniuemns au ^6. chaj>. de
fon liure de auaith,^c.
Vnc f.mme, aagee d'cnuiron quarante cinq ans , ay-
ant fouppc ioyeufement en honncfte compagnie d'a-
inis,fat iâifie d*vn loudain elionnemen»: durant lequel
on curt di: qu'elle regardoit fore enicnrifuemcnt tous
ceux qui clioyent autour d'elle , mais elle n*en cognoiH
foit aucun , ni ne peut lamiis refpondre mot quelcon-
que à qaoy q/oa lui dit. Elle nefe rcmuoii non pluf
qu'vnepiciie , & comme on la temuoit elle dcmeu-»
roit : iufqucs à ce qu'elle fat garantie de tel accident,
ElleeOou replcte , picine d'humeurs , ayant le pouls
haut, fort Sccigal. le lui fis tirer du fai g en abondance i
delà veine du pied droit, proche du grand doigt. Voy- i
ant la maladie continuer , on lui donna par a on or-
donnance vn clillereancz aciC, qui l'ayant dcfchargec,
elle rcuiiii: à loy, ne fçachanr rien de ce qui lui cftoit a-
uenu. Lui ayant dit qu'elle s'cltoit dclcharg -e par deux
fois, elle en eftou fort tfbahie, enco c phjs devoir
fon pied einmailloitc , pourcc que lamai- vn nç lui a* i
uoii tiré f^ng du corps, ùl ne fçauoir que c' itott de mc-
dccms ni de mcdKâmeus.Tioi^ mois après ailailhe d'v-
é* fneinorahles, SjY
netibuuellcpcfanteur de tcftc &dc Léthargie, acompa-
gnce de ficure lence,nul remède ne Jui fcruât , elle mou-
rut. £e mefme "BemuemUfyat* Ç . chap.
Antoine de Colle ayatit voyage longue cfpacc de
temps durant Icsafpres froidures , puis audegclcs
longues &: fafcheufcs pluycs > confcquemmenr es gran-
des chaleurs & au ferein dts nuids d'eftc , tomba en
maladie Fort fafcheufe ,qui le trauaiiioit par frcquenies
reprifes. En icelie ilperdoit foudain la mémoire & le
fentimenc, &demeuroit en l'cftat que cefte maladie le
faidiroit, les yeux ouuerts & fans vaciller. Sx le mal l'é-
poignoit en fe pronienanc , il continuoit tel exercice : ff
aflis & ï requoyjil ne bougeoit ; fi failanr quelque affai-
re,il le coticuoit, mais fans rien cuir, ni dire,nc cognoi-
ftrejiufques à ce que laccésfut palîé. Lors reatnat à foy
il ne fe fouùenoit de chofe quelconque qui lui fuftauc-
nue parauani./-e^f/;;e au t9 x.ch.
l'ay veuvne fille , quien i'aagc de i S. ans fut après
foupéenla maifon de fon père faificde ce! afTopifTemct
après quelque efmotion extraordinaire precedenccp
qu'on craignoit l'apoplexie. Elle fut dil-gemment fe-
touruè',purgee par cliftere & faignee, &medicamentec
fans en rien fentir,ni ccgnoiftie perfonûe,fans parler ni
ouyr.encorc qu'elle euft les yeux ouncris. En vintg-
quatre heures tout cela auint:fut remife debout : depuis
mariée, a eu de beaux enfans, & viuoit en bonne fa'nté,
aagee d'enuiron trente ans, quand nous defcriuions ce-
ci, ii'actrrf/^ de mes mémoires,
LISE \yi L ItR mémorable.
QVànd les moyens que Dieu donne aux hommes
font rnagnifiqnemcnt employez & directement à
la gloire decc Seigneur fouucr.iin , ceux qui s'cllargif-
sccainfi.oupluftcft qui diftribuét fagemëtles biés que
Je bô & riche père de la famille, qui eft fon Eglifc , leur
a cômispour les faire vaioir,font digne» du no de iibs-
GG *
Sj 6 Hijlûtres Admirables
raux. Le grand roy Fiançuis i.pour auoir rerais fus Ic^
proiclfioiis de* bonnes le. très , u'es languci Hcbraïc^uc»
Grecque & Latine , ôc des icienccs, a acquis ( quoy que
telle d^lpenie fat tort petite a compara (on des richclils
de la Fiance) vn beau nom entre les fages & fçauans.
De tant de monceaux d'or que Phi.ippe ii. Koy
d'Efpagnea tirez du Pcra,ricn ne dorera la mémoire de-
uant les yeux dvne prudente pofteri:c , rien ne fera
Toiiablc ciapies , que la IbnuenancequeTonauradc
quelqu s milliers d'cl'cus prefrcz par les commis pouf
rimprclTion desgiandei Bibles en cinq langut» ôc leur
ornement cnli ville d'Anuers. Et ce à l'imuaLion du
CarJinal François Ximer.es , giand perlonnage en ion
temps , mais louable &: proprement libéral en l'ciitioa
des Bibks Je Compluce. Les largelTcs enuers les vrais
pauures, es édifices & pcnfîons pour les bons eitudians,
es lieux Icruaui a la Cinferuation de picié , de droiture,
d'humanité , à l'embciiiircmcot de. ville:; & pa>'ij dont
n'cftbefoin faire delcripcicn particulière , font dignes
de grande louange. 1 adioalleray pour le prêtent ceftc ,
hiiloi'e que Nuolas Ra.lziu 1 g and (cigneur en Po-
logne , & Palatin de Vilne , a tWé fi hbefal , qu'ayant en
Vàxi i s 61. employé pluUeurs homes doftes entretenus
h-i^s defpens pour loutner la Bible d'Hcbrieu & Grec
CD FoIonois,il la fit imprimer puisaprcs à fe$ delpens,
y employant du n,n , Uns i cpetuion ( attendu que les
exemplaires pour ia pluipar,, furent Iibcialemcnt di-.
ft. ibuczaux vus Si aux a.>trv Sjlans qu'il en reuinft aucun
profit en les cohres)ia lomme de dix mille efcus. C'clt
peu à com araiicn u'vn baftiment de Palais où plu-'
lîeurs dctpcndront vingt fois autant. Mais la prodigâlii ■'*
lé clt indien;: du lurnom de libérale , & delpcndrc h%
clcus à millions pour facrificr à rcîpiit d'erreur, de
meurtre , de fouilkure & de vanité j ne defcoiiurc que
des amc*; mifi;rabh s en toutes fortes : maisccquieit
employé pout la confcruation du principal & vray
bien de noftrc vie ne Içauroit eltrc trop recom-
mandé
roublioisvn notable perfonnagc de noitrc temps, &
de
& mémorables. ' ? 5 7
de fîruple qualité , mais de vf ncrable mémoire , I-ierrc
Buricr.marchapt Alcmanja'ifncen S<ixe , lequel cmp!o^
ja Iib ralcmenc ia plufpart de les moyens à dr^fTer vnc
Imprimerie en ^à ville , de laquelle onc efté communi-
quez au public pkifieurs beaux & dcftes li'.'rcs He-
brieux,dcpuiscinquance ans. Pour ceftcitcdt il n'efpar-
gna rien pour rentretenem-nt des doftcsen icelle lan-
fue. Oucreplus il cntretenoità G^s defpen' g^^ndnom-
re d'cfcho lers , aucuns delquels ont depuis heureufe-
jneatferuià l'Egîife & à la République . fa maifoneftac
ouaerteaux bons Ôcdf^^fs perfonu »ges & ai x panures
defqoels il fui le perc : fatVmnne l'ayant leconcé en tel-
les libéralité z fa ndt-s, à l'eUficacion & cenfolation de
plufieurs.H^y?.^/^ nojhe temps-
Les feîgneurs renommez de lafamillf des Fnggers(ou
Fouckres )d'Augsbouig , fefooc princpalcmcnt ren-
dus iliuftrcs,à caule de leur libcraliré pour l'auanceiT'CC
des bonnes lettresrtefmoin^ pî'jfienrs milliers de rallers
par eux promptemcnt fournis à Ican Ope; in diligent &c
fi'iclc Imprimeur à Baflcpour mettre en lumière Zona-
re,Nicctas,Gregoras, Odrcnus Grecs-Latins. Huldric
Fut^gera durant plufieurs années adonné libérale Yicn-
iîonà Henri Eftiennc doâ-e Imprimeur pour l'inci-
ter à l'imprefTiÔ de tant de beaux &c bons auteurs Giecs
& Latins par lui mis en lumière. ChriRotie Vueittno-
fer gentil-homme Aleman donna pour vn c^up Van
I V 5 8. à lean Operin, réduit à pauureté par les vfurcs de
certains auares , la fomme dt mille talers pour le rele-
Ucr & remettre en train. lean Chriitofie,& Ilayc ,fils de
ce gentil-hommc, ont en'uiui depuis en m;iintes fortes
la libéralité de leur père. le m Neu'us médecin d'Augu-
ftc Duc de Saxe , & Thomas Linacer médecin Ang'ois,
onttoufiours eniictenu durant leur vie nombre d'cC-
choliers es bonnes lettres, &c donné ordre qu'après leur
mort es bon oidrc futt liberalemêt entretenu Th. Zusn-
geratt iQ.yolttmedefon The.itre de la yie humame^lttè. I . pag,
louian Pontanus raconte de Cofme de Medecis duc
de Plorcncç, (ju'il fe monftroitfort prompt & libéral 4
GG j
8 3 s Hijtoires admirables
fecourir largement fes amis , fi loll qu'ils auoyêt bcfoiu
d'affiltancc. Mais il donnoic ordrequ'ils ne l'ceufTcnt
point que cela vinftdc lui, Icfaifant faire par perfonncs
prudentes & interpofees, pratiquant ce pioucrbe Chré-
tien , que la main gauche ne doit pasfçauoir ceque
fait ladroire. Ah difcoun de U libéralité chap.xf. Paul
loue efcrit du Pape Léon io.de la maifon de Medicis,
qu'il prenoit fingulier plaifir à donner aux payfans,
hommes, femmes, fiilcs, Vieillards, icunes garçons. Si al-
lant par pays,ils lui faifoyent prefens de la valeur 4'va
0£uf,ils en receuoyentde lui de la valeur d'vn bœuf. U
payoit les dcbtes des hypcihecqucz , fourniffoit argét à
fuffifaiice pour le douaire des pauurcs filles à marier, ^
prenoit lîngulier plaifir à foulagcr les pctis quici'toient
mal-aifez , ou malades , ou par inopinez & ineuitables
accidens réduits à quelque djfcue. Ah ^.Iturede la rie de
Leon.X.
le m*cftendrai ici fur le récit de quelque^ hiftoircs ou
cxêples de libéralité enuers les pauu' es. fans particula-
rizcr les hofpirauxen diueis cndroitsde l'Europe, où les
afiîftaces enuers les malad-'S-blefTez, pauurcs vieillards,
vieilards decicpits , femmes vcfues , enfansorfelms-ou
cxpofczjfont libérales pn beaucoup de forte*. le me i^y
auin de la (oigne jIc prudence de quelques Princes U
magiftrats pour ernpefcher Poifiuetc , la difettc extrê-
me Si. la m-nuiciré entre leurs fiiicts,fur lefquels ils ont
Tocil de» leHr bas aage » fupporcantSc efieuant les vn.,
contraignant les autres, & pai libéralité bien difpenf.e,
amenant iespcrfonnes à honneftc condition de vie. La
mémoire de tels bons percsdu public iratts en ces der-
niers temps ) foit bénite à iaraais. Pour le prefenc ie
propoleray vn Eucfquede Padpuè , nomme Pierre
Barocio , pcrfonnagc fort do£le » de fainélc rie , le-
quel employo;? tojs fes reuenuî au foulagement dei
pauurcs t &: continua çn cefte libéralité toute fa
vie. Tellement que lors qu'il mourut on ne lui trouua
ni argent en bourfe , ni aucuns meubles de pris , fors fa
bibliothccque. A caufe d'vne telle pieté libcrale,Ies fei-
gne urs de Vcnifc lui §renc cflcuçr yn fe|>ulcly:c de mar-
bre.
& memorahles^. 8 3 9
bre aux defpcns du public, l'.in iço^.jP Sembe au 7 .litt.
dei'Infi.de ^^ewfe.lt: pou rois rcprcfcntcr kscxemplcs de
quelques aurres grands pcif m âges de nort ctéps, qui
«yans couragaulcmeni & iloctr mmc fcruii'EgJifcjiét
morts pauutts des biens du mon e; mai* tres-riches en
leur maiitrc,qui les a recuillis en fon rcr os &: onr LiiFé
à ceux qui fonr vco js aprts eux les belles &richci mar-
quais de leu. s v^iltfiraiiaux, p'u;r l'trll:» dion & con-
folation dfs riches 6c des pauures. Mais il (ufE: f. futil-
Jer la mémoire du led^tur , pour p'.nfcr lans pafîicn à
ce qui en td.^unfr'^r^aié z.itu.defa Cofnographiey fait mê-
«ion d'Ame du^ de ^auc'ye , iequel cnquis par quelque
ambjlFadeur étranger , s'i) auoit point de chiens de
chal^Tf Oui, dit-il, & les meilleurs eu monde. Sur ce il
leur fait voir vns grande comp.ignie de pauurcsde di-
uers aages , qu'il nourri(f.)it & entrctcBoic d'ord'nairc
en faCour. Vous voye^Cadionfia il) 1*^5 chiens de ma
charte religicufr, par h s requeftes & prières odoreules
defquels ie cours tous lesiours iufques dedans les cam-
pagnes & forefts celcltes , d'où ic ne reuiens pas fanf
profit.
l'ay reprefcnté au premier volume, fous le tiltrc de
continence notable . lap^omptc libcraliié de Luchin.
Viualde Geneuois , que BaptiTie Fulgofe a marqué au 4c
Imre de fes exemple s. cb-^. l'yaciioufte la grande libc^rali"
tcd'Alphonfe J'Eftcfuc de Fefrare, lequel non content
en temps de famine extrême de fournir en pur don du
bled aux familles de fes fuiets, prenait la peine de vifî-
ter lui mefmcs les plus pauures , les conrolcr & acoura-
ger,dc telle grâce qu'il en acquit la bien-yueillance de
grands & de petits. Il auoit fait auparauani vne autre
deoionftration de libéralité de Prince , ayant diminué
les impofts& tributs eftablis par ^on père fur le pays»
&faic deb-aux prcfens à fcsamis & (eruiteurs d'vne in-
finité de riches meubles & vertrmer s cachezcs cabi-
nets & garderobcs de fes predecelTeurs : comme 'Paul
i»ue en lavic d'icelui le monftre plus amplement.
S'il faloic auiouid'hui que plufîeurs grands fiç
xiçhçs ài^ moudc Roumlfent ceux qu'ils pnt
G G 4
840 UiHoires admirables
iniuftementapauuris, leurs pays ncferoycat pas afTcz
fpacicur pcuu les HoCpitaox qu'il y faudroit baftir , &
cuxinclmcs mourroycnt de faim ii: de frr*id. Laurent
Falle a» troiju'frne Hure de fes hijïoircs ^ en raconte vne no-
lablc que le reprefenteray , quoy qn'vn peu vieille , &
d'cnuiroQ cent cinquante ans padcz. LcComted^Vr-
gclle, nommé laqucsi'ertantroullcuc en armes contre
Ferdinand îliiy d'Arragon, fut a (ficgé dedans Bcllagc-
rc,&; tellement preffé-que force lui fut de rcn Jre la pla-
ce,& fortir auec ks fiens, fans rien emporter de bagage
que leurs armes fimplement. Commeil pafloic la por-
te, l'vn de fci loldûcs, portaiu la tcrtc b^ndec icaufe d'v-
nc gricfue bleflure receuë au combat , marchant à
grand' peine , commence à le fupplier qu'il cuft pitié
idefa playî:,msladic,f;»im & nudité. Tu as raifonjui
refpondl Comte : mais il n'y a pas moins de pitic en
moy,qui n'ay moyen de rien donner, & qui ne luis pas
maillredcmoy-mefmes. Puis fc reprenant tout fou-
dain,adioufta,viença, compagnon , l'ay dequoy refaire
dubien. DiCanc cela il d'elpouille vue riche efcail-
Ic qu'il portoit pour la g'jerre , de fort grand pris, Sc
ùi\s deîay en fait vn prefent n Ton Ibldat : ce qui elmeut
loiis les autres l'accoranagnars , de pleurer à chaur
des larmes, voyncs vn fi noble perfonnage réduit à tel
parti.
Le grand Gcnfaluc , f^iifant la gncrre pour l'Efpa*
gns coiure les Franç^HS au lloyaumc d<f. Naplcr,rc mô-
llra magnifiquement libéral entiers Phi'tppe de Pv^uc-
ftcin chefdes gak'^cs de France > pouffé par vnc tour-
mente vers la Calabrc, defnuédetous moyens à caufe
que ia mer auoit englouti Ton equipag?, tellement qu«
Jui Si les fiens n'<Juoycnt armes ni bagage aucun. Mais
Gonfalue fournit fi abondamment & piompiemcnt ce
qui eftoit necefiaire & félon la dignité de Rautrtein,
que tous en demeurèrent rauisd'ertonnement ; car ou-"
tre 1rs habillem:n5 précieux à merueillcs & de rc*
changejtous vîenfile<; de chambre, de cuifincde fallct
tapiliericsjvaiflelie d'argent , nouucUe «fcuirie & grâd%
çhcuaoïfl
& memoYohleu 84 \
eheuaui furent donnez à Rauertein,qui eut à fuffifancc
pour lui & fcs gens: Gonfaluc le œonitrant plus digne
du nom de grâd en cefte libéralité, que par (es exploits
de guerre. 'P. io»e e»yÛTie. Qu^and les François furent
chaffcz de Naples,apres la prinfe de Gayettc, le mefmc
Gonfalve,furnommé le capitaine ,{îtprefcnt de grand
nombredecheuauxàdes reigneurs& capitaines quife
retiroycnr en France, Xe mt^me.
Lt^ monts de pieté inflitucs es villes d'Italie font vil-
les,honneftes, charitables, &foul3gent grandement les
pauures.liy enaenF]orëce,Lucques,Siene, & ailleurs»
oiicelui à qui naift vne fille met au iour de fa naifiance
cent efcus au mont de pieté , à la charge d'enreceuoir
mil pour la marier,quand elle aura dix-hujâ: ans. Si el-
le meurt âuparauant les cent efcus fontacquis au mot»
file père n'a d'autres filles après cellelàiaufquelles fuc-
ccfllucmentfera gaidé le marjage. S'il met au monc de
pièce deux cens eicus la fiile aura deux millccfcus : qui
n'efl à peu près que cinq pour cent que paye la Répu-
blique , fi la fille ne mcui r. L'aurre monc de pieté eft
pour preftcr argent aux pauures gens à cinq pour cent,
en baillart gage fiiflitant, &: înfques à ^^ elcus pour le
plus. Si le debteur ne rend i'argentau temps prefix,lc
g ige eft vendu au pltis offrant , & \è. plus value rendue
au dettcur. Ce qui fe fait pour obuier au x p'us grandes
vluresJefquelles les pauures gens font ruinez en ces
pays la , & pourenipefchcrla laifie & diftraftiondcs
meubles à vil ^w^.liodm an 6. lit*. de la T^^p.ch.i-.
Lqs Vénitiens hvz noiiriir les fiilcs dônces & expo-
fces, en vne difciplineeftroitte & fcuere , où elles font
aptinles à toutes ehofes loiiabîes, & façonnées pour di-
gnement leruir vu mari>& •ouuerner vnc famille. Les
plus belles & qui ont plus gentil cfprit , trouucnt par
fois de bons partis , qui les efpôulent pour leur plaifir.
Mais on r;e les donne pas aux premiers qiù les deman -
deot,ain£ fiutque l'on ait tcfmoignage cenain de pro-
bitéjdc bonne ad'efTc & de diligence en toute leur con-
duite. Au moins belles & adroites lafeigneurie fourflit
douaire conuenabie,i'<iM'£4(* iMuMU e.Eaneadc»
84 1 Hijloires nimirables
Lts cîradins de Milan contribuée plus de vingt-cinq
mille ducais par charcun an à leur grand Hofpical,pour
lcfoulagetnentd:s paaures & des malades. Cequieft
dcxtrcmcnt & fidcleqicntdefpcnle. ^rlwto.cnè i.chu{>.de
fon htfloire de TXt^Un.
louianus Pootanus efcritque les Neapolitains re-
^oiucBt tous les pauures pafTans, & les logenrcn rhof-
pitaldcIaS.ViC'ge , où ils les nourriffenc vne bonne
pièce de ^mps, puis lesrcueftent&equippcnt honnc-
fteracnt.Icem qu*c« ce mefme hofpital , on a veu efleuer
pour vnc fois neuf cens filles données , Icfquelles y e-
ftoyent ftm honnorablemenc entretenues ,padiqucmét
înftruitcs par f^mesgraucs5cvercueures;puis paaricej
à hommes hon-îftes , à qui la ville donnoic riche doiiai»
xc. ^tt ltu.de la liberahté^chap.19.
L'on dit que des long temps,& des près de cinq cent
ans accomplis , lavilledeBergamcs'cft ruonftrcc li li-
bérale énuersics pauures.qu'à peine y a-il auiourd'huî
lieu au mondequifurpafle celui là en telle chariré. l.de
'SergameUu.ii.VUo'LpnaX deBcaune>cclai d'Amfterdani
*c d'aures villes en HolIande,plulîe«rs ca France & ha-
iicjfontencor renommez pour le prefcnt.
Henri de Ficrre/enateur de Balle, à qui lean Opcrin
noble Imprimeur deuoii au iour de fa mort la /ôme de
cjuatre cens eicus, royant que le fils & héritier d'icelui
nomme Manuel, fcroit réduit à grandes difficultcz , fi
force lui eftoit de payer telle sômc, la lui donna libera-
Icmeat.Mais ce que fit vn bourgeois de Prague à l'Em-
pereur Charles iV.eft mémorable. Iliuiauoitprefté U
îbtiimedc cent mil efcus, dont l'Empereur lui auoic
fait dreflcr reconoiffance & obligation authentique.
Trois lours après le bourgeois fait vn fomptueux feftiii
a l'Empereur , & comme après la table leuee l'on apor-
loir, félon la couftumedu pays , le vin de collation 3C
des tranches de from3ge,en lieu de confi.u res j le bour-
geois fit mettredsdiDS vn platd'argenr doré Tobliga-
tiondei*Empercur,& feruir ce la fur table à paît. Cha-
cun le regardant làdelTuSiSireCdiC'il) adteflanc ia paro-
I
é* memcrahlesl 843"
je à l'Empereur ) les fcignenrs qui vous accompagnent
ont part a' x aui'cs plats : mais ccftui ci n'eft que poor
vous. Car le vous rens voftre obligé, vous tenant quit-
te des cent mil efcus que le vous ai prcftez fans préten-
dre vous en demander chofe quelconque. JEneOiSj/luiitt
au ^MféJefes Comment À' ^ifinfe.
LI3E T^TE ajjailliejejinàtief
çf^rtmee.
IEreprefciiterayetî ceftehiftoire plufîcurs mémora-
bles particuliaritezauenues es années i s ^ i i s î 3-^
es deux fuiuantcs,à rcfgard de Siene,qui plaida viueméc
pour fa liberté, laquelle fut finalement opprimée. Ceftc
yilie {ituce en ia Tokane «-'cltoit longuement main-
tenue libre. Finalement l'Empereur Charles V. alors
puifFantcn Italie, comme Ton fils le roy d'Efpagneae»
^é depuis , & eft de prefent en la perfonnc de Ion fuc-
çefreur,s'en faifit.Les -iienois ne pouuans porter le ioug
d'vnegrofTegarnifon d^ETpagnoIs logex en vne cita-
delle biiftic,par le commandement de rEmpereur,pour
les tenir en bride,euret recours au roy de France,&fccu-
lenc tellement minier leurs afaires , qu'ils logèrent de-
dans la ville & près d'icelle grand nombre de gens de
guerre,enintêciondeles employer au recouurcment d^
leur piemiere liberté. Ce que Don Francifoue d'Aibc
capitaine des Efpagnols defcouurit incontinent. Pour
obuier à la rempeïle prochaine , il fie publier inconti-
jicnt par toute la ville de la part de TEmpereur , que
chafcun euft à fe contenir dedans fa mailon , à peine
delà vie. Puis cftant alléau palan conl\iiuaprifonnier jç
capitaine du peuple & certains autres gentils-hommes»
(jonc fur lechampildonna'aduisauducdeFloreace^
^equelycauoya promptemcnt Oihoa 4e Moncagu»
g 4 4 Hijfoires admirahla
^uechui£lccns hommes dcpicd Iceuxentrercnten la
ville fur le foir,& s'emparèrent de touccs les places for-
tes. Quant aux Erpagnols(en nombre vie fix ccijs)ils fc
retireicac en la citadelle &. dedans (ainft Dominique.
La riuift fuiuantc fe donna vn fiiricux alarme à la perte
Camolia, laquelle tat forcée p ir les capitaines de ia vil-
le , qui commencèrent à app lier le peuple & crier li-
berté. Au mefme inltant toute la ville fut en armes, &
entre trois mil foldats cflrangcrs venus au fecours des
habicans;iccuxfe troaucrenten armes a i rôbredecinq
mille qui tous cnfcmble afriillircnt Othon de Monia-
ga. Lors y eue vn terrible carnage de part & d'autre:
mais Othon fc fencant foible, fe ictia dedans la citadel-
le. Le matin arriuerent à Sicne deux mille piétons en-
uoyez de la part de quelques cardinaux partisâs du roy.
Alors fut donné l'alTaut à S. Dominique, où cftoyen; les
£ipagn(ls ?& y en eut deux cens tueZjhuidlgrolTc s pie-
ces d'arcilletie & grand nombre de picques à harque»
buzcs gaignces.Cela fait le peuple fevînc caper autour
de Ja ci:adelle auec Ton re -fort : & comme ils vouloyéc
donner i'alTaut , leducde Floren-e enuoya prompte-^
ment fecours aux EfpagnoIs.Mais elHt aductii que Sie-
nîne dmandoit qu'à fç maintenir en !j liberté com-
me auTparauânc» oc demeure fidèle à l'Empereur, apref
Cjueique accord encre eux 'e duc fit tourner bride à Tes
gens qui alloyent à Siene : &pii le moyen decelif ca-
pitulation les Efpagnolsqui elloycnc en !a citadelle Bc
en la ville fjrent mis hors U. renuoy z, enlemble Oiho
de Montagu, leurs vies fauues Nonobft^nt qnoy il y en
eut de bien elhillez auant qu'eftrc gucrcs loin , pour Je
mauuais traitement qu'ils auoyent fut à te peuple ef-
meu , vers lequel le founenir de rpppreflion auoit plus
<^ecreditqucle commandementdes chefs. Cela aduinc
le cinquicfmeiour d'Aoult , l'an iç 5 i.!a reftitnùon de
cefte liberté eftant conduite à l'adueu & faiseur du roy,
] es a m ha (Fadeurs & agensduonel auoyent fi bien prou-,
reuàcefte entrep-ife que l'ilTue correfrondu au pre-
mier dcffein. Et afin que les Sienois s'afTcurafîcnt d'a-
uantagc de leur liberté , les princes Ôc feigneius parti*
{a m
ér nteworahlesl 8 4 ç'
fans au roy , fuiui de i^s agents , furent les premiers â
empoigner le maitcau pour ruiner Ja ciiadelic » acjuoy
ti-u> les Sienois , depuis le plus grand iufques aupius
pctir,mt:lmcs i.s uoi)nains& rcciulcs voulurent auoir
parc.
Mais rEmpercur mal contct de voir les Sicnois airfi
librri,{ii marchei nouuelles troupes au comorcccnicnc
dei'an I 5 s 3. )ous la conduite de Don Garlias de Tolè-
de, fiUdu viceroy de Napics , lequel iuiuidc t»oJS cens
hommes d'ai mes fc joignit aux croupes quieftoyentà
quinz.c lieues de Rome , en acteridaiit 4. iniJlc piétons
CDUoytz de don Fcruand de Gonz3*;uc lieutenant pour
l'Empereur en lalic, ^ lors ailicgeant lainéiDamiaa
ville de Fiedmont ,d.kncue par les François. D'aut.e
partefloyent a Libournedeux miilcEfpagnols naturels,
venus de Jans les galères dr Naples. Auprès de Peioulc
eftoit le fieur Alcagne delà Comcaucc trois millefan-
taflinsj empcfchdnc les Sicncis d'auoir fecoursde gcrs
& de viures. 1,'armee Impériale s'eftant d'autrepari ad-
uaticee print quelques places 5 \ts vues par force , les au-
tres par compolîiii n, cômc Montftlonic, AfinelQr!guc>
Ja Torrcttc, Lucignan. Il y eut plus de peine à prendre
Monticelle,quifut afliegc i'efpace de trois femaines,&
fouftint trois furieux slfauts, au dernier defqtels Icsaf-
liegezjas de combattre , farcnt emportez & tailleztn
pièces pour la piufpart , en b furie des Efpagnols & A-
lcman5,pour le vcger de huict cens hommes des leurs,
quiauoyent efté rompus & tuez par quelques compa-
gnies Fcançûifes, & ks furuiuans menez à Groflctto
pour leruir à la rortifîcrnion de la place, eu lis furet msl
traitez. Au partirde Monricelle les troupes Imptrialis
allèrent afîicger Monralcin, lequel fut défendu &. garde
par la vaillance des affiepez , nonobftant pkficurs af-
laut^ klquels ils repouflercntviucnient. Ce qui leur
furuint mal a propos f..t que le Comte de Gaiazze&
vn gentil hcmme nommé Montagne .allans à leurs Te-
cours auec cent hommci de pied , &portans cinq mil
cCcus outrequciquc; viurcs , turentcnuelopcz des El-
pagQols,& tuez pour la plulpart fur le thàinp, les autres
84^
HiBûires admirables
emmenez prifonnicri. Depuis ce iour les Impcrialiftêi
ne ccffercnt de courir & fourrager le territoire de Sic-
ne:à quoy le Pcipo deflrant rcmcdier.s'enrremit de paci-
fier CCS tempcftés. Conirrc il cftoii âpres, Don Garfias
ne gaignant rien fur les afficgez de LucignaO) & cnco-
res moins dedans Sienc , où il penfoit àuoir intelligen-
ce, craignant aufli que l'arniec Turque {que cftant lors
en même fift quelque defcente âU royaunae de Na-
ples,s'y retira aucc fes troupes, fans auoir guercs auan-
cé pour lors.Apresccfte retraite les Sicnois aduiferent
à fortifier leur ville , à quoy les femmes mefmes , par-
ties en trois bandes , s'employèrent fort coarageufc-
incnt.
L'Empereur craignant que ces rcmucmens ne fuflent
caufe de plus grand trouble en fc? autres cftars d'Italie,
rcfolut de neiaifler longuement les Sienois â réquoy;
ains les ramener à fon obefrancc par viue force, à quoy
Cofme de Medicis duc de Florence ( qui eut depuis la
pièce pour les rucceireurs)Iui fer O't» ayant l'œil à ce qui
cftoit requis pour la guerre, &fîrvne leuee de quatre
mil hommes fdu". la charge du marquis de Marignan,
lequel accompagré du comte de Sanfegond , de Lconi-
dcMalaiefte, & de Raoul Bâillon , capitaines Impc-^
rialittes , enuiron le mois de lanuier miî cinq cens le-
ptantc quatre, s'ar hemina vers Sienc fort feci crtcmenr,
& arriuade nuidlau fort , oui! n*y auoit aucune garni-
fon : pource que peu auparauant les foldats auoyent efté
leucz & emmenez en l'Ifl- de Corfe, pour faire la guer-
re aux Geneuois. De là le marquis fit marcher fcs trou-
pes droit à la ville', & ne pcurentles Sicnoii eftrefîtoft
en armes , qu'il n'euftgaigné le portail de la porte Ca-
molia. Pierre StrofTi qcieftoit pour le roy près de là, fur
les nouucllesdeceftc fuiprife acouruten diligence le
matin, & chaiTa ceux qui occupoyent ce po' taihmais lé
fort demeura au marquis & pour le ibultenir le (^uc de
Florence luicnuoya renfort de caualerie & d'infante-
rie. Tandis qu'ils s'acheminoyéc le marquis print quel-
ques villcttes, faccagcât tout ic plat pays autour de Sie-
nc auec fon camp volant : puis quand ce renfort luj fuE
ar-
& memorahlesl ^47
^rtiu«, iladîcgca Siene,faifantplufîeurs leuccs pour
iiîcccre Ton fort à couucrc , afin de n'cftrc endommage
par l'artillerie de la ville. Sur ce le roy donna charge â
Strofli àc prouuoir à la defenfc de Sicne , dont il s'ac-
«juitia , employant plufieurs capitaines Italiens , qui fc
iciterent dedâs Siene auec leurs compagnies, & r'afleu-
rcrent les habitans. En ces entrefaites, Afcagne de \z
Corne , (uiui de trois mil- hommes de pied & de cinq
cens chtuauxlegcrs,conduitspar Raoul Bâillon, femij
aux champs , pour furprendre par intelligence Chiuû
ville lituee es montagnes de Tolcanc: mais le capitaine
qui lui en aaoït fait pi omtfle dcfcouuritl'eDtreprifc aux
François, qui ne faillueni de marcher après Afcagne:
tellement qu'il fe trouua enueloppéentre ceux de la vil-
le & ceux de dehors au mois d'Aunl de l'an 1 5 ^4. & y
eut vnctres-crueile& fang!â'emf{lce,qui duravne par-
tic delà nuid.Mais Afcagnefut rompu, vne bonne par-
tie de fes foldais demeura fur la place pauee de corps
morrsjlcs autres prifonniers au nombre de huitl cens,
defqucls Afcagne eftoit le premier qui furent fur Th^u-
re menez tous à Siene.Raoul Bâillon fut eue en comba-
tant.
Le marquis de Marignan indigné d'vne iïgrandc
j)crte,fourragea tout le territoire de Sienc,& ne dcmcu-
laeniierque Lucignan qui tenoit bon pour les Sie-
noi»:puis il prini,laccagea & ruina pluficurs vilettesSc
chaftcaux de leur iunfdidion , tirant vers Florence
pouraflcurer IcpalTagcdçs viuresqui venoycnt de ce
quartier pour leur fort. Il print aullîBelcare & l'abbaye
de Monaftero/iaqucUe il emporta de force. Strolîi efli-
mant quele fortfutdefnué .icaufedc cefte entrepnfe
du marquis , reuint en diligence, & y donna vnafTaut.
mais il fut repouflë auec perte de foldats. Le marquis
plus alTeuré r'entra au Sienois , pour y faire Icgafl:
car il auoit eniendu que le roy faifoii delccndre (îr
mille Grifons qui cflojent ja près de Farme, où ils
dcuoyent s'alîcmbler pour faire la lecolte & aui£luail-
IcT Sienc. Il y auoit aufli grand nombre de piétons Ita-
liens en campagne pour le mefme effcâ. L'Empereur
848 Hijloires admirables
icaforça le camp du Marcjuis , y cnuoyac de Milan Icaà
dcli Luncc«puainc Elpagnol,auccfix mil hommes de
picd,trois ccni hwmmcs d'armes & trois cens cheuaux
légers. Quant aux Grifons & Italiens pour le roy ils
gaigncrcni le deaant. Du royaume de Naplcs partirent
cr core quatre mille t'antafRns, fous la conduite de Ca-
mille Colonne,& cent hommes d^armcs, dont le Com-
te de Pcpoli cltoic capitaine. Don leâ Manrito, fcigncut
Efpagnol, eftant gênerai de cefte armce. Le duc de Flo-
rence fit marcher vnnouacau renfort Tcrs le marqui»»
lequel reiblut d'cmpefckerle palTage de lariuierc d'Ar-
neau fecours de France : mais par la prcuoyancc & a-
drefle de Stroflfi , lequel print MontcarIe,Pontadcre, &
autres places an long de lariuierc d'Arnc, iufques aux
côfinsd^ Lucques,Ie fecours raflaïSc fc ioignit à Strof-
firpuis toascnfemble fuiiurcpt le marquis , quifereii-
rojt.n'eftant pas allez, fort. Mais ils rait:ignircnt & y
eut furieufe rencontre, en laquelle le marquis perdit
beaucoup de gens , au moyen dequoy il rira vers Scrra-
valic,&c ayant ramaflé fes rcftes print le chemin de Vol-
icrre,& toll après fc ioignit au fecours Impérial fufmcn-
tionné, au moyen dequoy tous enfemble retournèrent
au <icge de Siene,& prindrent Montcatin. En ce mcfmc
temps le*' galères de France vindrentfurgir à PortHcr*
cule,portans iix ou lept mille François & Lanfquenets^
<^ui iointsà StrofTifiicnt voirvnc armée d'enuiron fei-
ze mil-horamej> de picd,& de dii-hui6l cens chcuaui,aa
moyen dcqMoy iiene fut deliurcc du fiege, & le mar-
quis fe retira es forts qu'il tcnoit autour de la ville.
Peu de temps après, ceux de Sicnc afiîegerent Tab*
baye de Monaffcero , & l'euflentprinfe de force fans Je
niarquis>lL-qucl vintâulecours:& à fon arriaee fc drcffa
vnc fi furieufe clcarmouche, laquelle dura touc le iour,
qu'il y eut perte de fept à hui6l cens hommes , des plus
yailJariS de par; ^v d*autrc. Strufli confiderant que les
viurcs du pays n'cftoyent fuffifans pour nourrir la ville
& Parmecdciiberavpouriiier le marquis d'entour Sie-
ûc } d'entrer fur les terres du duc de Florcnce,& y fiirc
rauage
râuâgc,ce qu'il cxecura de faidt , forçant & (àccageanC
pluficurs petites places » fans oublier les plus beaux &
H) Jnifiqucs lieux qui y fulTent. Apres il print fon che-
min contre Marcianc ville apartenancaudac , laquelle
fuc f of cce autc grad mciircrc.Puis il alla aflîeger Foian,
gardce par mil ru douze cens hommes, fous la charge
ideCharies Vrfin , qui ap^es auoir foufi::nn pluiieurs
terribiçs aiî'aalcs , & elle b.-.tcusd'vne infinité de coups
<lc canon, farét cmpojrczau dernier aflaui, &. tuez pour
•Ja plulpart. Les pntonnicrs furent auflTi preiques tous
cigorgcz lanuidr iuyaance , puur vn dcfpit que conceuc
Strof!! de ce que le feu s'cTcoit mis en certains caques
de poudre à canonjqui auoit fricafTé grand r ôbre defeS
foldats. Au partir de Foian jicrolTi vint fur^rendrc le
marquis canopé deuaiit Marciane;mais il le trouua preft
à combattre, &. dinlîs'attaquerêtauec telle furie, q«/il y
eut grande perte de a^iH & d'autre. Lanuift les (epara,
fc recirant chafcun à fôn cntcigne. Le marquis dçfjogea
Je lendemain , à cauît: du dommage que lui faifoit l'ar-
tillerie Françoifej&c fuxluiui i'efpàccdecinq ioursauec
cfcarmouciies continuelles ; enfindcfqueis Srroffi fur-
print deux cens chcuaux du marquis quipalîoyent de
leur cimp en vn petit mont proche, de là , tous furent
<lefpeichez,fans qu'vn feui efchappaft pour enfiler por-
ter nouuelles aux autres. ■'•:
luique* lors les François aucyenteul'auantage: mais
il furuintincontiaentdetcriibles changemcns en leurs
afairesiàla confufion des Sicnois principalement , qui
pt-rdircnt finalement leur liberté. Carie lendem^iin de
la desfaire de ces deux cens bornes de cheuai,qui cftnic
le fécond iourd'Aouft 1554. Stroffi s*eftani mis en ca-
p3gne,pourtrouuer meilleures commoditez à fon ar-
mée,fut fuiui par le Marquis, délibéré de côbatre corn-
m: ilfit,& vinr donner fur i'arncre garde Je btroHi, le-
quel fut côtrainf receuQir bataille, fans le prinCipalnerf
de fc$ forces, à fçauoir l*ariillc^;c , qui m^rchoit fore
loin deuant. Ccfte meliee futieulemcnt commencée,
larrieic garde fie tel deuoir que les gens du marquis
brâfiOicni/i lui mcfinesiiefuit acouiu au fecours au^c
ri^ H H
^^6 tîifloires admirai/es
cinq mil Efpâgnols& Italiens, tout frais :&à naefme
heure la cduallcnc donna de pied , de tef e , & à coutd
bride à traucrs its bataillons des François, Griions, Sl
Lanlcjucneis , aucc telle furie quMs coram:ncercnt à
quitter leursrangs > fans faire leur dcuoir comme l'on
s*jf attcndoir, commençant la defrouie par les Grifons,
demeurant le faix de la bataille fur les bras des bandes
Françoiles , Icrquclles ne furent aucunement fecourucs
de leurs gens de chcual , qui ne voulurent lamais don-
ner coup d*elperon,fioÔ pour fuir,& fans occalionjpouj
n'auoir cfté chargez. StrolTi ayant eftc blciléfai garanti
par quelques capitaines i & le fauua comme il peut»
ayant perdu en celte bataille enuiron cinq mil hom-
mes tuez fur le champ, auec aucuns colonnels & capi-
taines.Le nombre des prifonniers fut fort grand. Cefttt
\i6toiredu marquis eifraya tellement le capitaine &
les foldats de la garnifon de Lucignan , qu'ils dtlloge-
rcpt de là,quittans la place aux Imperialiltes , lefquels
en eftoycnt proches ; au moyen dcquoy les habirani;
portèrent les clefs au marquisicc qui fut vne autre gran-
de perte pour l>:sSienois , Itfquels firent trancher la
tcftcàce capitaine nommé Alcoconte. Depuis ccfte dcf-
faitc Strofli roulant auittuaillcr Siene, ramaffa dedans
Montalcm toutcequ'il peut defes gens , iointjcfc-
cours que le fieur dcTcrracs luiauoit enuoyé de Cor-
fc: ma s ils furent rencontrez par le marquis qui les at-
icndoitenembiifcadeauec rnegrolTe troupe de Lanf-
quencis & d'Efpagnols , qui les chargcrcni Cl viuemeac
<)ue StrolR perdit cncores grand nombre de (oldats, SC
fut mis en route.
Apres ces exploits le Marquis fuiuâr fa pointe reuint
au fiege deSicne , alTcz loin de la ville pour Taifamer,
& cependant furprint par intelligence Cafoie & Mon-
teragioni , places de grande importance aux Sicnois»'
Icfquels fc dctlndoyenicouragcui'ement , faifansplii- ■>
fie ars belles lortics \ efcarmouchcs. Sur la fin de
Décembre le marquis fe voulut hazarder d'afïaillir
la rille, &prcfentarefcalade enuiron vne heure après
ininuic\ à lacuadcllejôi au fort de Caniolia}OÙ u y eut
afpre
é" memorahles- 8 5' tl
âfpre conflit , fpccialemcnt au fort: Mais finalement il
fo fut challc aucc perte de 600. hommes tant tuczcjuc
blcfTcz. Cela fur l'vnedcs principales caufesqui l'indui-
fit à vne icioluiion d'auoir Sieneparfamine , donnant
ordre par tr mchces & aucrcs moyens qu'aucuns viures
n'entraiîcnt dedans la ville : par ainifî les aiïîegtz fujenc
réduits à extrême difctrC) & languirent huit moisdu-
ranc , au bout defquels tous viurci & munitions eftans
défaillis , la plufpandes foldais morts de faim , le peu-
pie pei ilHantdt- iouràautre,(ans efpoir ni apparence de
iecoars,à caufe des g'-ands afaires du roy , qui ne pou-
Uoiccnuoycr armée à temps, ni StrofTi donner fecours
fanre d'argent , pour auoir gens refolus & en nombic
luffifaDt.pour fiirc vn conuoy leur,& coinbatie le mar-
quis j lis furent contrains de demander compofition,
&c-onderccndireni à terrains articles propofez parle
duc de Florence. Il y en âuoit vn entre autres 1 portant
que l'Empereur pourrôit réduire la cité & l'Ellat d'i-
Cclle en telle forme de république qiie bon lui femblc-
roit. En confequence duquel article , Siene perdit toft
après fa literré, & depuis eft demeurée fous le ioug du
duc de Florence , comme encore de prefent, ayant feruy
pour vri temps de théâtre à vne partie destragedies
louées entre CCI deux grands princes , rempereur&Ic
foy de F'-ance, pourenfineftrc en fpeftacle des reuolu-
tions admirables de la vie huwamc.HiJîoire d' ItaOe. Com-
mentaires de yHotiluc y imre i. Chroniques de Canon , liurt
6.
Antoine Peret.fecretàire d*eftac en Éfpagne,ayac efté
l'an 1 s 9 Lcmprifonné & rudement traité enCaftilIc, â
raifon de certains afaires fccrcts , dont il a publié qucf-
<jue partie , & autres après luijfc voyant en danger de fa
f ie , à caufe qu'on ne lui tcro r pas promeffe , ce difcnc
les écrits publiez, tronua rr-oyen d'cfch-îppcr dcprifon,
& fcfauuercn Anagon, où cafléqu'il cftoitde ^a tortu-
re& longue prifon m:lcrablc . il (e tint quelque tf mps
â Ccllatajud dedans vn mooaftere Sur ce , lercres parti-
culières furent enuoyecsà vn cheualicr de la ville;
fansadtc nicomi,nifrion fuffiramepuur la tirer delà, ôo
HH z
8 5 1 HiBûires admirables
que n*ayant peu exécuter , empefché par Ici religieux
du convenc , il lui donna vne chambre de moine pour
prilonjd'où Ferez clcriuit au Roy. Mais fur nouuclles
plaintes & accufitions il fut tiré de ce conucnt par
l'exprès command'-menc du Roy ( non toutesfjïs fans
cfmotion des ciiacins : aulli elloit-ce Icpicmicr coup
de pied donné contre la liberté d'Arragon ) & mené
àSaragouflc, d'où il efcriuit derechef au Roy , &toft
après publia & exhiba ics luftifications à la iuftîce de
Arragon. Ceux qui pourfuiuoicnc au nom du Roy
contre lui , voyans qu'ils n'auoyent nulles prifes fur
luipar deuantlc lugeîbuuerain , l'attirèrent au fiegc
des enqueftes d'Ar-agon : lùcùle roycft luge & par-
tie. Perez s'y défendit contre diuerfes accula>ions,
& offrit de fe luflificr plus que iamais par dcuant TE-
Ucfquc de Saragoude. On le rebuta , tellemcnrquc
pcr/bnne n'ofoit s'cmpefcher de fes afaires , non pas
fonaduocat propre , entendant les menaces d'vn cer-
tain marquis d'Almenares, lequel faifoitfaire vneen-
^juefte au preiudice de Ferez. Ce ncantmc.in': relie
lecerchene lui preiudicia nullement ; car il fnt ii;gé
par les dix-icpt d'Arragon ( qui font vn corps de lu-
nice reprcfentant tout ce royaume-la , fouucraine
par de (Tus toutes les autres, Se qui crée mcfme les rois)
que rçxiqueftc ni le roy n'auoient nulle aftion contre
Ferez. Les (oliiciteuis de ceft afairc , pour Tache- j
miner félon leur pretentc » pnnJrent vn nouueaiî I
coiilejl, qui fut de liurer Perez à l'Inqnifition , fur cer-
tains tcfmoignage'^ poitans qu'il auoic protefté vou-
tpir fe retirer en Hollande , &qu'il fe uiefloitd'en-
chanterie. Le marquis pouffoic ccfte roue, forquoy
Jaiuftice d'Arragon , qui ne voyoit pas le piege, ayant*
examiné l'afjire , irouua que Pv:roz ii'eltoitcn coulpc, I Ji
& fit empnfonncr le Salmedme ou premier M'gi
ftratde Saragoufle , pour auoir receu les depoficion* I
destefraoins fournis par ce marquis d'Almenares*
Ce bruit dexcrement elpandu , le peuple & 1rs cl"lats
d'Arragon confidcrans les chofes fclon qu'elles fe
prefen:oycnt , voulurent qu'on iugeaft definitiue-
incDt^
C^ meniorahleS' 85^
mène, fi Perczauoic tort ou droit , en difants que fa
caufc cftoic lufte , fi l'on rcfuroit d'en prendre conoil-
faace.pa'squ'ileftcic en Arragon. Là défias , les offi-
ciers de l'inquiiîtion ( contre l'cs priuileges de la mani-
fcfta-.ion & a utres droifts du royaume ) vind^ent le
iç. iour de May, i^^i- cnleuer lerezdu lieu ou il
cliroit , & le menercat à l'inquiluion. Quatre heu-
res après > les Inquifuciirs furent cortraints par vne
cfraotion populaire de le rendre & renuoycr en fa
prctnicreprifon de Kl manifeftation. Le tumulte fut
grand , aucceffufionde fang & cmbrafemcntdcmai-
lbns ; mefmes le marquis d'AirrKnares , pourauoir con-
treuenuàleurs priuilegcs futemprifonné , ayant efté
en chemin chargé de dixmiileiiîiures par lesf^tmmss &
cnfans, outragée: batu par lapopulace,dr foiteque i y.
iours après il mourut en prilon, ayant defchargc Ferez.
Les afaires ainficmbotiiees , lés folliciteurs perfiîle-
rent à vouloir rcmener Ferez à i'inquilition. Sur quoy
treize iurifconfulies du royaume turvnt ordonnez,
pour iugcrfila câufe de Ferez meritoit d'yeftrereri-
Uoyceounon. Ceux la prooo.icerenc que le liurer à
l'inquificion feroit contre le droit duroyaume. M=îîs
depuis par les follicications de Ican Louys Murano,
ils donnèrent vnt autre Icntcnce toute contraire à la
première , diredement répugnante aux priuiicges,
exemples, concordais, Scdeclararions du royaume , qui
annnlientles editsdc confifcation procédants de l'In-
quificion. D'vne autre pa-'t le roy auoic mandeau
gouuerneur d'Arragon qu'il gardift Ferez en prifon
perpétuelle , ou du mrins queinmais il ne forciflde
Arr3gon:àquoy s'accordoyent les députez. Où femoic
des bruus entre le peuple, qu'il n'y auoit ordre de fouC-
frir que rat de torts fulTcot f3it5 à Ferex,à fa fcme Sia (^s
enfans, qu'on anoir mis en chemifc, qui ne viuoytc que
d'aumofnes.&neâtmoinsefloiêc innoccs. Les tohcitcurs
dup'incipai afaire feignoiétauoiï grâd peur du peuple
affedioné à fes priuilegcs,&; d'autre part cocluoiet qu'il
faloit reraener Ferez à'i'Inquifi'.ion. Mais d'autant que
cela ns fc pouuoit cx«cutçr (^a'à main armee,ils cômé-
H H j
8 5 4 Bifiotres admirables
cent à fe dcfcouurir de ce coi é,6f afTcmblenr hcn nom-
bre de gens de gnçrredu Roy iUcc pluficus fc.gneurf
& chcudlicrs de ij maiion du vicC' oy, ce qui n'* s'eftoit
iainais r.-u aup^ra.ianr : dont la ville de SaragoufTc &
tout Arragonfut en trouble , parce que c'cftoit cooirc
leurs priuileges. Mais pour lors tout ceft aparcil lourn^
en furaee, fans que les entrepreneurs oraitent rien cfte-
ékucr. C'ercoitenuiron le lo.iourd'Aonfl. PvCprenans
puis après leurs efprics, ils fîient plus grande prouifion
à geiSjiuîliues à deux mtlle hommes, prcnans iour au
Tingtquati leme de Septembre, délibérez de liurer alors
Ferez es mains de l'inouiûrion , fius le fi-ppon des
officiers, feigneurs & chcualiers qui leur a(Tiftoyenr,
pour voir laconienancc di: peuple, & de quelque cofU
gncla chofe tournai fe faie wyc n l'abolition des pri-
uileges , de l'autorité &: de la liberté des Arragor»-
nois.
L'aflîgnation efcheuc., fe gouuern.nir fit afTcmblcr Tes
troupes auant iour , & les mu en ran^ debatailîe. Et
pour donner i'eipouuante aux citadins , fit faire me
fcoppetericdont vn enfan^futtué , & y eut quelques
hommes bleflcz de la main d'i gouuerneur mefme. A
l'heure du confeiKe prefenterent les Inquificeurs » 1' f-
quels requirent qu'on leur liuraft entre mains Antoine
Perezôc IcanFrancif^ue Majorinicequi leur fut accor-
dé,nonobftanrquelques oppoficions au cimtiaire, Par-
ainiî plcfieurs g'.«nds frigneurs & officiers alierent à la
prifon pour les receuoir.Y cftans.vn lieutenant ncmmé
Claueria auec les officiers de l'lnquifition,acompagnc«
de hàllebardiers &: foldais , menant deuK notaires pour
mieux qualifier l'exploit , entrèrent dedans ^firent ap*
peller &dcfcendre Percz puisayans obfcrué les cere-
hionies de Ton euocation , demandereot qu'on le leur
Iruraft pour refpondre de certains poinfls concernanf
la religion 5:1a foy.Perez propofc là defus quelques cx-
cepiioDS & les p'iuileses d'Arra^n,dequoi ces inqui-'
fîreurs nefe foucians,frrent enfermer par les pieds lui 8C
Major in , s'appreftans à les emmener. Or tandis que
le viceroy ou gouuerneur, Içiuge principal, Icsgrand^
-- ' ' (cigneurf
& memorahles] 8 f j^
Icigneurs.comtes & cheualicrs de cefte compagnie , c-
rtoyeni en armes es mailons vojûnes de la pnfon , voici
tout à i'inftant le peuple qui s'amafTc & acourut à gref-
fes croupes crxam, Liberta,iiberta : ce qui leur eft loiiiblc
en tel cas? à fçauoir quand il s'agit d'infraftion de leurs
priuilegcs. Du commcncemenc ce n'citoyert que ma*
nouuriers , gaigne deniers , & telle menue populace,
qui pour la plufpart ne portoycnt aucunes armes : & fc
ruèrent ncancmoins fur ceux qui cftoycnt en la place
Eliufiicia. Le refte du peuple fe voyant fans chef, 6ç
que ce n'eftoupai proprement à Pcrez, mais à leur 11-
bcrrc,qu*on en vouioit, prièrent Gilles de Mefa, gentil-
homme Arrangonnois,de vouloir cftrc leur chef. Il ac-
cepta promptement cefte charge , & auec ce qu'il auoic
^e gés,fuinis d'autres qui s'j ioignirent à la fiie,chargea
la caualerie & Ici troupes du gouucrneur , qu'il mie
en fuite. A cç^ fuyards s*araquercnr pareillement bien
deux cens enfaoj, armez felonlcur aage & ponce , &
vn pauure foc naturel, qui à coups de pierres fit granii
deuoir. La furie fut grande , qu'ils tuèrent les mu-
lets des coches, fur lefquels Perez & Majorin deuoycnt
cftrc menez en Caftille , bruflcreni; les coches, & mi-
rent le feu en la maifonoùlc viceroy& autres grands
feigneurs s'eftoyent fauuez. En c« tumulte fut tué leara
Louys Murrano , Vvti des ennemis de la liberté Arra-
gonnoi(e,& Pierre Icrofme de Baradix, l'vndes princi-
paux confcillcrs de Saragouflè. Ce combat , pour U%
priuileges du royaume, fut fait auec telle ardeur, qu'vn
bonviellard voulut que (îi ou feptc'efes cnfans i'y
cmployaficnt, leur commendant de s'armer & de mou-
rir pour la patrie. Vne noble & honorable dame y en-
uoya vn fîen neueu & vnique héritier, Cinquante
oufo^xante hommes y furenttuez , & y eut plus de
cent cinquante blelTcz. Incontinent le peuple alla
vers les prifons, voulant auoir Perez. Les officiers de
rinquifition, voyans le danger imminent , le dcsferre^
rcncSc par commiffion de leurs maiftres ( qui auoyenç
ïitteinc au bac dcleurs dclTcios, voyans le feu alluma»
85^ Hiftoires admirables
qui dcudft bien-toft bruflcr la liberté c'Arragon ) le
prièrent àz lorcir de la prifon , ctaignans d'y citrc fac-
cagcz. Perez en requit a£le : mais n'en pouuaiuauoir
àcanfe (klaconfufion , ilfortit au conrcntenicnt &
à l'efiouilTancedc toutiepeuple , le conduifanc en I4
mailon de dom Diego d'Erecia. Ce fait ils allercnc re-
tirer Majoria , & relalchcrenc autTi cous les autres pri-
ibnniers.Le msfrae foir Ferez fortit de Saragouflc auec
Gilles de Mefa, demeiiranc trois iours fur vne monta-
gne , durant lefquels il cncenditque le gouuerncur le
faifoit pourfuiurc.Pourtancil retourna en la ville, où il
demeura caché quarantetDurs durant, pour voir la ti^
de ccft afaire.
Ce fut que l'armée de Caftillc s'apprcftoit pour
Tenir vers SarngouÏÏe: au moyeu de quoy Perez &L
Mefa fe retirèrent d'Efpagne en Bearn , puis Perez
alla en Angleterre, & d^ làs'eft logé en France. Qjjant
à ceftearmee de Caftiile , premièrement le viccroy
d'Arragon fît courir vn bruit , qu'on compoferoic
lout ce trouble par quelque accord. En après,
que Farmee elloit leuce pour aller en France au fe-
coursdela ligue. D'icellc armée eftoit chctDom A-
loDZode Vargas , lequel entendant que Pcrez elloic
en Beirn , entra à main armée dedans le royaume
d'Arragon , pour chaftier ( difoit il ) ceux de Sara-
goufle. A rencontre de lui & de fon armce fut pre-
lenree req lelle par tout le corps du Royaume , afin
que f;:Ion leurs anciens priuileges celui qu'ils appel-
lent £/ ;.vy?iart vouluft prendre les armer, pour repouf-
fer dom Alonzo. Suiuant quoy parar-cft des dix-
f^pt , qui font la iudice fouueraine d'Arr.<gon , tout
le royaume print les armes , en diltribia les charges,
les capitainesfirent leuces , drelFcrent leurs compa-
gnies, on mit au vent l'eftendardik S. George , fcloti
la couftume, quand il cft queftion de la maintenue des
priuiiegeç. Mais quand ce vint au ioindre, & qu'il fut
queiHondefortir à bon efcient en campagne , les
capitaines abandonnèrent leurs troupes , &s*enfui-
icnt de l'ari^cc , les vns deçà, les autres delà,
fuiuis
é^ memorahUs. 8 5 ;y
^uiuistoft après de leurs principaux membres & fol-
dats : tellemenc qu'en pende lours toute l'aimce Ar-
ragonnoilV. s'eruanoiiic en fumée. Le roy promptc-
ment auerti de tout par Tes agents, auantquef<om A-
Jonzo entraft en Saragouflc , cfcriuit lettres à p!u-
iîeurs des principaux d'Arragon , comme Ht auflTi dom
Alonzo , difaiit que i'arrnee Cadillane s'acbeminoïc
en France. Sur ces lettres , ceux de Saragoufie ou-
urirent leurs portes , fans délai ni refiftance quelcon-
que.Alonz,o y ellancentré 5c logé auec (es gens , Ton
commence à emprifonncr tous ceux qu'il nommoii,
fcigneurs,chcualiers, gentils-hommes , aduocars, pro-
cureurs, imrchand^ & bourgeois de toutes qualités.
Les députez du royaume & les Ecclcliâftiques furent
moins efpargnez que les autres, l! y eut autïï pluficurs
dames, damoifelles , Se autres femmes confticMces
prironnicres;& des lieutenants de haute iuftice , com-
me Claueria & Spinofa , aufquels on faifoic renoncer
à leurs offices , y fubrogeant des antres, qui parauanf,
:à caufc de: lci:rs deKcts, aucycnttfté dcgradez de tcu-
-tes charges publiques. On y cor;fircapareillcillcnr,
contre les droits dVàrrrfgon , non feulement les biens
'des maris, mais aulfi des femmes de ceux qui s'trtoicnt
^blentez. Ourre-p'us leiuge fouuïrain d'Àrragoa fut
prins , & en moins de vmgc &; quatre heures après vid
fon procès clos, fut condamné à mort , & eut la tefte
tranchée, fuiuant le mandement exprès du Pvoy ,en vu
< billet contenant ces mots en fubdance ; Ayant vcuce-
fte,vous appréhenderez auflldom leande la Nuca,hsut
iufticirr d'Arragon, & faites que i'aye aufTi toi} r cuuel-
les de fa mon que de fon emprisonnement. Il fut oonc-
qucs décapité , nonobRanc fcs appellations & prorcfb-
tions.fans que pcrlonne en fçrull rien , lufqucs s tant
^u'ilfiii^ fur l*fcfchafaur poureflrc promptement cxfcu-
tc,coiime pluficurs autres l'auoycnt eftéparauant, &. le
fuient encore depuis.
Voila comme le royaume d'Arragon pcnfautcon-
feruer fa liberté & {es priuileges les perdit auec ià
•lincipale nobieflc > &. grand nombre d'hommes de
8^8 Hijlûires admira h le s
«jualiic. Mais pour le contenicmenriiu Ipflrur , nous
adioulterons vnbricFiifcours de l'cftat des atfjires cw
Arraoron,parauant l'abolition des priuilegcs des hibi-
taosd'iceltii. Apres que les Mores on sàrrafins fc fa-
renr emparez de l'Elpagnc, l'an de Chrift 7 i 8.R.oderic
dernier roy d s Gois ayant cft^ tue en buaillc , ils oc-
cupèrent l'Elpagiic près de fept cens ans , fous diucrs
gouuernementscju'ihyeftiblircnc. Enfin les peuples
d'Arragon s'af anr hirent de la violencedes Mores , &
fc firent feigncnrs du pays, fans rcconoiftrc aucun prin-
ce particulier , ni autre roaucraincé que la leur. Par
fucccfTion de temps cefte liberté leur ennuya, tellement
qu'ils délibérèrent d'auotrvn roy: d ^nr ils dcmanderct
auisau Pape, lequel les cenfura d;; certe dcliberation,
adiouftant puis qu'ils perfeueroyét en icc'ie , qu'il leur
conTcilloit de prefcrire à ce loy des loix & conditions,
puis eftablir par d-ffus lui vn iuçe fouucrain auec des
aflenreurs,poar refréner fon ambition. Les Arragonnôis
fuiuirent ceconleil , & premier que d'cflire vn roy éri-
gèrent la dignité iL preeminécedccc qu'ils appelloycc
BlltiJlicUd'yirragon y quieftleiuge fouuerain auec d)x
reptafTefT-'urs par defTus le roy : ruis firent vne loy, qui
s'appelle la loy de minifcrtarion, pour li conferuation
du droi6ldes vaiïaux, à l'encontre des foules & outra
gesdelamain haute, fuft roy , prince, oa autre iuge.
Laquelle loy, &. autres ftaturs S: ordonnances , enfcm-
ble 1rs ptiuilcges , fe trouncnt impnmez fous i'autho-
rite royale , & ont duré maintes centaines d'années, à
l'honneur & réputation de leurs roys , & fingulicre-
mentdedom Fernand d'A^ragon, premier , fjrnarmmé
Catholique, lequel ( paruenu à la couronne de Ca-
ftille , parle moyen de madame Ifabelle fa femme)
ne voulut luiure le confeil de CCI tains, tendant àl'abo-
Jition d'iceux priuileges , difans que le roy & la roy-
auté feroyent de durée & fleariroycnt par enfemble,
auîTi long trmps que 1-. s deux balances du roy & du
royaum^ feroyent en iufte contrepoids: mais que fi l*v-
Tit des balances vouloit emporter l'autre au poids , l'v
oc au l'auire tomberoïc en ruine , oupcut-cftrç toutcî
cjcux cnfemblcEn outre les Arragonnois ordonnèrent
laloy d'y^mon. contenant deux principaux poinds. L'va
que toutes & quantes foi» ejueleroy rompra leur»
Joix.ils pcuuenr en f. recr vn autre. Car ils nr failoyent
ferment Cl leurs rois que conditionnelltment > & en
tels termes : 'Hosc^ueyaUmostanto comme yos , y podemos
mas que -vos , oi ha'^omos nuojlro 7{ey a Sennor , Con ejia^y e-
jflas condicienes , que nos qu.irdtys Kojlros jîieros y liberta-
des:Ji no^ no. Entra yos y^ nos é -vn que mandu mas que ros,
C'ert à dire,N<iLis qui valons-autan que vous,& pou-
Dons par dcflui vous , vous faifons noftre Roy & Sei-
gneur,à telles & relies conditions, que nous garderez
nosdroiâ:s&: libertez : fii.on , non. Entre vous &
nous y a vn qui commande par de (Tus vous. 11 faloic
que le Roy s'humi!ial> & mift à genoux deuant ce ingc
fouuerain , nommé El luTiictay'^tdh nuç,& preAaft
ferment le premier , puis les Arragonnois après.
L'autre poinft de rvnion cltoic , que les princes &
feigneurs du royaume pouuoyent faire alliance &: con-
fédération con; re leur Roy en cas d'oppreflion ou d'in-
fraftiondc lei^rs droi£ls.£n veitu de ce droifl les Ar-
ragonnois prindrcni les armes l'an i ^ 5 1. comme nous
auons vcu : & procédèrent fi iuridiquement en leurs a-
fiir::s,que El lufiicia fîtinfînuer lafcntence à dom A-
lonzo de Vargas par deux notaires ^ huiiîicrs , \t(-
qufls lui ayans fait leur indnuation , furpcinc de con-
fifc^tion de corps & de biens $*il pafToit oatre,s'en re-
tournèrent franchement à SaragoufTe. De ceftc procé-
dure apparut aull^ par la commifTion donnée à dom
Jean de la Nuca,efleu gênerai de l'armée, ligné par El
lujlicia. par l'abbé de Picdra , Louys Nauarra > lean
LouysdcMarcuello , dom loan de Lun^î, leronymo
d'Oro & d'autres , & feeilec du fcau de El luftiçja , & de
celui du royaume. Toutes chofescftans ainfi ordon*
nées félon Je droit , & païïces par ordre de iufticc &
fouuerainetc , Ici prefcheursmcfmes en Icuts chaires,
& les preftrcs es confc(fions, eihortoycnt le peuple
à ce faire. Qui plus cft m fecretaire de J'inquifîtion
foufignala rel'oluciondttroyaume.cojDqDcbiea fondée.
8^0 HiBoires admirables
Tour ce-quc dcffus cfl extran du i 5 Aiure desTjrades An^
nales de leanie Petit-, greffier de "Bc thune , lequel a en t- ^
ceîlcs amplement delcricriuftoirc des Pais bas où il
môftre que l'Eftat ainfi changé en Arragon,confcrma les
ieigneurs des Ettats d'HoMandç & auces prouinccs v-
nies à fe maintenir tant plus couragculGmcm enladc-
fenfcS: confcruation de leurs pnuiîe^^es & liberccz.
l'ay auiïi ciré du liurettraicant du droit des Magilbacs
fur leurs fuicts, le furmu'aive du ferment en langue Ar-
ragôooife , y adiouOât ce que !. le Pcri: y amis de plus,
&ioigaant le tour envn. Les volumes fuyuans pour-
ront reprefenter d'autres hiftoires des libériez affail-
lies, défendues , opprimées ou garentics , depuis cent
cinquanteans. Leydeux précédentes fuffiront pouric
prcfcnt.
:mAL Al) lES effranges.
VNe damoifeîle de la Marche , près de Gueret en
Lymoiîn , iecne, vettueufe > &de palîablc beauté,
tomba en telle furie par vn rapport qu'on lui auoit
fait que Ton mari alloic au change , qu'à tout moment
<Jc temps elle vouloitfe précipiter , tanrolt dedans vn
feu» ores par vpe teneft'c , autres- fois dans vn cliang
près de famaifon, dont elle fut retirée deux fois : pour-
tant commis on gens pour la garder Les médecins
n'y pcurent ri :n apporter du leur : mais vn Capuflm
pafTaoi par là , & y demandant i'jumofne , ayant enten-
du l'eftrange cas adjenu à cefte damoiltlle , donna auis
quel'oncuftvn ioucur de luth , qjinebougeaft d^
long temps d'auprès d'efle , &quc fans doute cela lili
p3/leroii; & que la nuid on chantaft quelques chanfons '
auprcs de fon licl. Cequ' fut exécuté , & dedans
trois mois celte fjreur lui pafD, & a cfté depuis bien de
fon tf^nt.Louys (fuyonatt i.ltit. de fes diuerfes leçons, chAp.i^-
Tay vcu aufïi vne autre damoifcllc d'honneur à
Rouan,
é" memorahles'* ^G {
Rouan , qu'on appellou da l^arreau , qui en fa vie uc
voulut s'aider de l'arc de med-.cine , quelque grande
maladie qu'elle eoft tue : mais eniout'^s fcs irifirni*tcrz,
dou]cars,goi)ites, bkliurcs &.eni:ancemens,eJlc ne vou-
loit pour louiu- nvrdccine ,qu'vi) loueur de taboiuin a-
uec la ikute,& l'.ippelloic ion médecin. Comme vn iour
fur fa grande ^ieillc(fe, ayant vne grande douleur à vn
genouil,proce^iantc de la goutcc, eU-' euft commandé à
fon ioueur de ûmner vne couranc : kclui fe halla tant
de toachcM'oncabourin,& loufîla tanten latîuce , qtw
pcrdanc beaucoup d'ctprits & d^ l'es Forces il tomba
tout efuanouy fur les carreaux.Oi comme il relonnoic
plus ,& qu'on s'amufûit après luipoui ie faire reucnir
depalmoitoo , ayant dcmcurétn icll^'cnuirori trois
quarts d'hetuc, Dni poULoir recouurcr force niconoif-
fance)'.eftc damoifeîk- fe plaignoitjdifant qu'elle fentoic
des douleurs extrêmes , & pins grande* qu'elle n'auoic
foufFcrtes en iour d.. fa vie. Le labourineur ayant re-
conuré ra'^ce &iugcmeot, après auoir pris vn bon repas,
& beu Forc-^ bon vin, retourna à 'on pris fait;aiors lada-
moifelle le fentit allégée tou- à l'ifirtant. l'eltris dans le
logis îors que ces (ho!e'« aduindrent. El'e vefquit en ce-
tte forte ccnt& Ûx âns.Lemejme G»yontai4 lïtt.cr chap.fuf.
mentionne.
T^AL CAT)VC. 3>SIAL SACJt^Ë. :M A L
DE TEXXP-.
DiuerffS confidernt'tons O'ff'fioires
touchant l'epi'epjie ou mal taduc.
L
A pins part des dod&s médecins tiennent que le
^_veftigeou tournemcnt de lefte , & i'cpilet-fîc ou
inal caduc, ont beaucoup de rapport , &nedriferent
ouedu plus &du moins. Mclmes aucuns oncmainccnu
<]uc le vertige êftoi' vne p:titc epilei-fio. Ceux qui font
atteins du mal caduc ne tombent pas tous,ains en aucus
In'y a Queiatellcquibranllc ( ce qii« l'ay remarqué
8^ i Hijicires admirables
en deux darfloifcllcs )cn d'autres Jci pied, chanecllcnf,
fans que couccs tois ils lombencpar icnc. Montanus
dodle médecin dit auoir veu des vertiecs dont icsac-
cidcns fcrapporcoient de n presauxcpilv piiqti.s , qu'à
peine pouuoit-on les diicerncr , ôc ne Içiuojc on
comment les appeller. EraUw tn U ^.parité de fes dif-
putes comre'Varacelfe. Il adioufte auoir veu des cpiic-
pciquesqui bcguayans auec vnc bricfue conuuifiwn de
lcurcs,& Frappez Icuicmcnt celle parc, rcQcnoyent in-
continent a eux.
MonHeurHouIier , att i. liure dé fes maladies tnterneSf
chap. 16. dit que l'epilcplic le iaii par lois aucerucau>
laH^ qu'aucune aatre partie du corps en Ion atteintc>
telltmenc que rien n'eft efb arlé de ce mai que laïc-
ité : 8z. adioufte auoir remarqué ul accidcnc en vn prc-
ftre aagé de trente ans. F. roel cfcnt auoit veu vn c-
pileptique j à qui fon mal com<nLnçoit par le fom-
met delateftc , d'où a vapeur s'clpandoit en baf.
Quand elle ne couroit que par haut t il fentoit vn ver-
tioc:raais lî la vapeur penetroit au dedans du cerneau*
rcpileplîcs'en enfui uoit.^»> <) Mure deja Vathologietih.i,
Damoiicllc Catherine Martine , leunct^mmc , re-
plette , trapee de véhémente cpilc^he , pocedcc
loudain pardefrcgiemcnt de l'ertomacli , demeura tout
vn iour en eftat tel , qu'on n'aticndoïc qu'vne apople-
xie , â caulede la rcplecion de tout le corps , & par-
ticulièrement du cerueau. Le dofteur Vaileriola la
fccourut promtement & fi hcureutcment , qu'au bouc
de deux iours elle fut rcmiie en pieds , tellement que
depuis elle n'eut aucune attcinre d'epiirplîe, ayant fuiui
leregiraedeviurcqu'on luiauoit prcicipt.^» i.Umedt
fes Obferuatwns medecin<iies,ch(ip.-j .
Vn moine de Pans, nommé Chanteclcr,aagéde trente
ans ayant le cui; noir & velu, poi^r auoir cflé mal traité '
d'vne fiwUre quarte, qui lui lailiavne opilanô di raelle,
tomba en autre accident : à fçauoir qu'vne fois le mois
certaine vapeur lui môtoitauecgrâd bruit de la raie'.ic
co hauç,& parttenuc à la mamelle gauche , quelquefois
rlcont-
C^ mernorahUs, 8 6 j
il comboit fur lafac- , par fois a la renucrfe. priuc de
llcncimcnc&Uc niouucmcnc.On lui frottoit Ks ccmples
aucc iuvinaigr^:cc cju; i'.ii failoitouvirir les yeux , Se
lors il monilroit de a main Tcnclroïc qui lui douloic 1^
piujjiacs pou:.oir parler £ltant du tout hors de ccil ac-
cident,la»uiit/uiuanie il lui cftoic mipcffiblcdc clorrc
V(X\l'ti annotations fur le i 6.cljap au i Mu. des maladifs in-
Hrnes cIk iJlot*l.
A.Bcniucniuc,medrcin renommé, efcrit auoir traiié
▼ne icuiic fille cp.lcpt:cjue,dc la vnlc d'Arezze , Ja^u^l-
ie faille de ion niùi ne icraboit ni n'clcumoit puinc:
maii demeurant debout , b anlloit latci^cde coite «3c
d'aiatrc/ins fonncr mot > n'oyaot »ou.ie,ni ncfcntanc
rien ; puib reu nue aloy ne fe lomcnou de choie quel-
conque <^ui lui^ut auenué. Depuis, ..yanr eu les fieu:s>
€ilc fut garantie de <C mai. ^u ^7. (hap.de alfdit. rerum
iaufis. Uodontus, en i'obieruaiion fur le mcÙDe chap.
remarque auoir plufîcurs foispenlé vn- fille aagtc de
Vingt ans, laqu.lleattcinrcQ'.pilcpfî fciiuoit lesmains,
&duranJa conuuliîon drmeuron aifife. Ayanidefcou-
uert que le mal procedoicdu vcncrc , ilvl^ide remèdes
conuenabics , telieracnc qu'en peu de temps elle fut rc-
tnilV. au dcilus.
/e conoi vne femme laquelle fent Tacces de l'epilc-
pfic;icllcrm;nt qu~ fi til- laue d:s drapeaux,eik retour-
ne viftemeni ch'-zioy,ou fi eliecft en la mai'.onnebou-
gc de la placeoùcUe le liOuUe , ou fi ccfce place n^eft
commo. "e, en cejciievnc autre : l'accès commerçant à
\ la laifir elle vrinc tous luy, puis ayant les yeux oiiuerts
regarde ça& ,àcouimevncf mm ; cftonnce,& idiote, fe
icnart debout . elieempoigneraqucnouillc, oupons
quelque pièce de /ueinagc par la maifon, fans mot dire
ni fauoir qu'elle tait. Tombe peu fouucnc, & reuenuc à
foy demande ce q i'ellca faii.Iox/tfi/Mr /e 3.//», des para»
graphes de 'i^araceljc.
Vn Jeune homme de Chartres fentoit l'cpilcpfiç lai
monter du petit doigt de la main gauche cscnuirons
du cœur,qui trtmblo toit fouûain. Apres cefte palpi-
tai ion en mefiiicinltant il tomboit , ^quandcefte va-
pear monttiic > la main gauche cnciiTc foulfroic coa^
g.<4 Hîftoircs admirallei
uulfion. En vn Efcoffois aagé de vingt ans ï'epilcpfi*
commcnç )ic par rrcmbîement du bras dcxtrc s'auan"^
çaiu vers la mammellc ; en la conuullîon ilperdoic Je-
lcntiincnr,'ia mcmiiire& ia vou. On le taifou reuenir^i
lui donnanc à manger 6l à boire , tju'ilau^loit fans fa-;
iiourcr ni marcher. L'cpileplîc laiiit vnicune i^arloa
Picard, de i'aoge de quinze ans , commençant par fla-
pcur de la niaîu droiie , don: lepouicc, ledoig». du mi-
Iie'j,lc médecin, feretiroycnt , l'indice s'eft.-ndoît fort
roiderl'cntant lomboir ayant le bras droii louc torts, 5C'
le corps tout courbe, tn vh autre le mal commcnç jit
par la ininiure dj l'efpaulc , dont s'cnmiuoit trembic--
ment deiouc le bras , puis le craquetis de dénis &: la
cheute.li y auoit vn icune gentil homme trcoflois , de
poil roux, à qui Tepiieplie conimençou par le gras de là
ianibe droicte,comme vne goutte crampe, coufcquem-
mcnt il fencoit vne agitatioji de tout le corps , fecrcu-»
moitpar la bouche. Il le fcntoit foul-gc par vomifle-î
ment d'humeurs bilieufes , efbant aHaiili de ce mal ad
défaut de la Lxxr.zExir.des annotations fur le i 6. chap.du.l;
iture des maladies tnten/es de lean Houlier.
Les nfiedccins ont obleriié en certains cpilepiiquesi
que l'accé:. tommençoit par les cu!(res& hanches , ef
autres par les pieds, la vapeur montant aux genoux , &
ainlî confcquemmcnt à la tei+c : es autres , rncconuul-
fioadesbras, des mains, des ïambes & des efpaulcs,-
fans que le ccrucaucn foft atteint. Item on a veii des
cpifeptiques (c tourner en rond & faire des vireuou-
ftcs, puis courir roide & droit concre des parois , corai
me pour lecalTer le nez : s'arrefter court tout près d'i-
ccilcs , &fiiïc vn tour oppolite. V'nicune homme
tombe de lieu haur,s*cllant bleiïe à latemplc gauche/
deuint epileptique , «x en l'accès faifoic crois ou quatre
tourS)puis couroit impctucufcment droit à la paroy qui
fe pre(enioit,auâi que choir en lejre : par fois li ne tom-
boit point, mais à deux mains & tant qu'il pouuoit fe
torchoit & frottoir le vifagc.Reucnu a foi ne fauoit rien
de ce qui lui cftoit aucnu.£r.ï/?.Vn Alemâ, nommé lean
Hituiqucleftoit affligé d'cpilcpûe laouid , & li-
mait
& nfemof^hlesl %Gf^
Ciâis de iour.J"c/?e»;«/»<*. Beaucoup de femmes durant
leurs groflcflvS knt trauaiilcts d'cpilcpfic , les vnes
pl'js, les aunci moins. Schenhut tait mention d'vne
Alemandc, qui cnacoucha u ci^oit tellement faifîede
ce mal, qu'-he ne le louucnoi: nullement de ce qui lui
ciloit aucnu : Dns qu'anparàuanc ni depuis elle l'euiift
touche quelconque dcpilcpne , n' fes enfans non plus.
£r4//»«4 die auoir pcnlc vnc icuneiilic , qui par i'efpace
de vingcquatrc heures entières dtmcuraabaïue d'cfile-
plîciSv qu'iilamcdecina ii heure uiement , que cncquéS
d£pu:s elle ne s'en ieniir.£» U^l>artie de fes dijputes lon^
tre 'l^arct,.elfe.
loa.iumus Curseus en Tes Annales de Silefie.^ag^. 353.
remarque que durant it liegc r>£ Giogouie , la peftc s'e^
ftant giiifee parmi les alîi. g. z , àcauleque les {oidats
tu- ycntlcs cheu3ux<s.en aiangcoyentla chai-, commfc
l'on çftoitemi'efché à folToyer au cemitierc des laco-
binsipour y enterrer quelques vns de ces pcftifcrcz.a*
ttini qu'entre ceux qui aflîftoyent à leur Icpulture fc
trouua vn ieunc hommv . f: -retairc d'vn capitàirie Bo-
heme,nommc Nailou.lcqufirnrpris dVri foudam accès
d'epilepiîc tomba par te;re comme mort. Iticontinent
les l'old ars l'enleuenr. Si ietrent dedans vne fone,& com-
,l)ien qu'il ouurift les yeux & roufpiraft,voiie qu'aucuns
«riafleoc qu*il n'cftoit pns mort, neantmoins les autres
commencent &'pourruiuert à le couurir de terre , tel-
lement qu'il fut enterré tout vifr& toute l'excule de ces
cruels Ibldatsfut que ccft epile|iriquc ainii qu'ainfî ne
jpouuoit plusgueres viurc.
Onremarejueauflî quedes epileptiqucs, pour auoic
niefprifé les bons régimes au bouc, au manj^er, au dor_
ïnir,nu tranai!,àrair,?xc.font deuenus parai vtiqnej, Sc
. par Fois font morts fondaii-.eînent, Vne irunedamoi-
Iclle ayant reccu d'vn fol qiHiqucs coups de poing aux
léples deuinicpiîepriquc- . ma.snaitr.ee parle Dccltuc
Lan^tm fut ^\m:\'\c.jqï ontanu<> fj\r mention de deux \ c-
îîiticns,qui pai vchcmmies palUvOnsr de i'efprit deuin-
drcniepiî"pri....cs, ytmatta mrrdccin I-c ruinais racoi •
taenia z. Centurie, cnre ^o.i'joir veu Y'.uç nonra'n aa-^ce
a
Î66 Hiftoires admirables ,
de i^.à 10. ans au coDUcnc de i.Sixtc à Rome, laquelle |
ayant entendu cjuc fon frère cttoit mort foudain , tom- ï
ba tout à i'hcure par terre ôc y demeura efuanouiere- 3
fpace d'vne heure. Ayant crtc ailiike foigneufemcnr, |
clic reuinc aucucemeot à foi : mais rneepiiepfic lui de- i
xneura,quilateurmcn ou àdeux ou trois rcprifcs par \
chacun lour , fans iccter coucesfois efcume par la bou- %
che. Chrifiojlc de Fegue ^ médecin Efpagnoi marque 4»« i
1 1. chapitre dtt i.ln*rede fa medeciney^uoir tcu despecis \
garçons epilcpciqucs , à qui d'autres auoyent fait peur ;;
cnfeiouantcnfemble. £t iaic mention d>n autre gar- q
çonnet, qui voyant (on compignon affligé de tel mal h
en fut foudainemcnt frappé ÔC lôbapar terre. lean Mat- t
thieu de Grady,mcdccin Itahenycfcrit qu'vn ûcn fîls faiil
d'eilonnement au bruit d'vn fon erclactant&: foudain
de pluûcurs trompettes, tomba par terre tellement prcf-
fcd'epilepfîe,qu'en dedans dix heures après il mourut.
loignons aux hiftoires précédentes quelques autres i^
delagucrifondesepileptiques. Le fiis d'vn couftu- ^
lier Aleman eftant encore en bas aagc crioit prefqucs
toutes les nuids en dormant, & fort haut , comme û
quclquVn Tcuil battu. Son père & fa mère 1 ui deman-
dans, qu'as-tu? Rien , difoii-il ? où : ic ne fçay. En
Taage dedouicans , voici ce qui luiauint. Vu lour d
tomba par terre,comme abatu du haut maJ, & ayant le
petit ventre fort gros, perdit incon ioeht la parole >puif i
fc tenant la telle (c pnnt a tourner vn longtemps, fans i
qu'on peuft le faire celfcr. L'accès duroit vne dcmit ^
ncurcj&quelquesfoiid'auan agc, &par fois ieprenoic «
de nuift. H en fut cniiahidouzc fus pour vn iour. Aii 4
commencement de la mil-îdie ^ durant l'accès , ii Icn- '.
loit&entcndoit tout : mais par fucccffiondc ttmps ri
perdit Touye Si le fcntimenr,. Il fut en ceft eftat prcf^
ques vn an enter 7 durant lequel impofljbic lui fu; de '
marcher ni fe tenir debout. On ne lui voyoit point i
û*efcume autour de la boucheril mangeoit peu : nonob- H
flanc quoy il fe partoit bien. Qiund ilauoit rclaf- ;
chejonl'entendoic reciter afFcclueurcmcnt des Pfcau- I
mes & autres f^iodes prières qui! auoit aprile> ca >;
} l'cf- ;
& mémorables* %6j
rcfchole. Il fçauoic quelle heure il cftoit , cncorcs qu'il
n'ouift les horloges, & difoit , ie fuis en tel ou tel lieu,
fans que pcrfbnnc l'en informaft. Au bout de quelques
mois la maladie fut moins rigoureufc & moins fre-
quenccLors qu'elle fembla acoifecjtous les iours , en-
tre cinq & (îx heures du matin , ce ieune garçon fe fen-
toit accueilli d'vne langueur inconuë , qui le faifoit
plaindre comme feroic quelque perfonne prefTec au
corps ouen TeTprit : fans qu'il peu ft fc remuer ni quit-
ter fa couche. Si fon pere,ou fa racrc,ou autre le leuoy-
cnt debout, il fe tenoit en pieds , & reucnanc fou-
dainàfoy , marchoit çà & là tout le iour , ncfentanc
aucune douleur iufques au lendemain matin qucfa
langueur rcuenoir. Au bout de quelques femaines la
maladie le laill'a. le ne fçaurois bonnement dire que
c'eft,ni quelles en cftoyent les caufes : combien qu'elle
ait rapport auec repilcp{îe. Mais pour dire ce que i'en
penfe , i'ay quelques-fois eftimé qu'rn malin cfprit af-
fligeoitceft enfant : car en mefme temps & non trop
loin du lieu où cl\oitce malade , àfçauoir en quelques
endroits du marquifat de Brandebourg , il fe trouuoit
beaucoup de perfonnes démoniaques. Aucuns a;ffcr-
ment que telles maladies procèdent de l'impiété ma-
licieufe des forcieres. l'appliquay diucrs rcmcdes(cdm-
med'aucres firent au(n)à la maladie de ccft cnfani, com-
me à vne epileplîe , mais auec peu de fucccs , encore
qu'au reftc le mal s'adoucit. Au boutd'vn an &l dtmi,
l'enfant aagé de quatorze ans recouura pleine fjiiré , ce
que ie penledeuoir eftre pluftoft attribué à lamiferi-
ccrde de Dieu. 8c aux prières des gens de bien, qi,':: me-
dicamens quelcorqucslÔC depuis s'cft bien ^oxxé.Sihen'
kiut defcrii cefte hii>o.re, (ur le rapport de lean fran^
çots Htldes médecin Alem^n , qui auoit gouuerné ccft
enfant, & en a fait exprelFe mention en fesexemplts.
Chnltofle de Vegue attcfteauoir guéri trois fem-
mes cpilepiiques, faifant faigncr les deux aux veines de
la chenille du pied, pourccque les fiucurs el^oyent fup-
primees, mais cela fait elles coulèrent à i'accouftumcc.
La croifîcfme fut fcanfice auxcuilTcs , & les âu^ur$
^(j 8 HiHûires admirahUs
lui viiydrent:carcllc clloii. fotticune. Toutes trois foiîn
rcnt guecies par lellv; âiàc.yiu ^.bttre ih. i i .de fu médecin
.we.ValicriolaceiVnoigncauiri aaou gucri non lan». ira-
-uai.jVDcdamoilcUc 4UI dcliurce du m^l d ci fane aiioit
. cfté toutmcntec de pluficurs accès d'epi!cj.fîc par vnc
t op grande vuidangc de fange n fa couche, ^u^.lture
Obfirttiît. 6. La raciDC Je Paconia rrailc , Iciusdcruc
laujfjgcaucc miel, ou l'odcut de l'herbe , Tongi de
l'JElcnd 011 Alcé,bœi.f faciiage, attachée au doigt nicdi-»
cali ou à i'orcilic, font remèdes afllz communs contre
Tepitepiic ; iicm les cautei es aéluels appliquez félon U
dilpoiîtion des maladies : es enfuns au dcj-rieie de la
tefte.es vieux aux bras. Montanus cfcrii auoir veu vn
geniii-homtne aagé de 5 i.ans , lequel fut ainlî gueri de
ion cpileplic enuieillie. Q^'antaax mcdicamcndiuers
au dehors & au dedans des corps , Its liarcs dcj méde-
cins en traitent arapleraeiit , éc nous n'entreprenons
d\'n parler. Carc'eftàeux de cor.fiderer les caul'es des
maladies, les perlonnes affligées, les temp ,&: autres cir-
conftanccSjpoury remev<itr conuenabxcment.
ïM^m^J^B^^^^iMMi^
7n A \1 ^ 9 E s cLndefins,
muihjHreHX.
I
AVxhiftoires rçprefrnrccs dednns le premier vp-
■umelarceft arfcle, noL's .idi*ufterof^i Jts CiOjis
luiLiuntcs. En la ville de Vérone, rcnomm' écrire cçl-
lesdîiialic , vnc fille nommée lulic' fe, de la noble fa-'o
mille des Montelcrçs , fon père ne l'ayant voularaa-
ricr,lorsqucles partis iepiefcntoyenfcr\ (a plus gran-
de ficur,(fpoufa à Tinfceu de fcs pJicns lefilsd'vne au-
tre f.ani lie noble des ^.^opelets , ennemie cap'tîleces
Klontclchcs, nommé RtUTico. Ce mari/ge nepiodui-
iîc que la mort ignomin:eufe des deux miferables a-
IR2QS, Ils s'cftoyeni mariez cîiindcitiiiefncnt parles
maiûS
é* wemcrahles. 8^^*
mains d'vD cordclier , homme d'aage&bienvtrfé en
iaphilorophie naturelle. Of auint certain lourcju'vn
dts ondes de lulietie , continuant la querelle entre les
deux familles, attaqua Romeo pour le dcrpelchcr:mais
Romeo Te detcndâc tua ccftoncic , àl'occsfîon dequoy
fur contraint de s'abfcnter de Vérone d'où il fut banni,
luJiette ayant , fous ombre de confcfTion fait fes plain-
tes au cordeJierdcrabfeoce & pet te de sô mari, ce. cor-
délier lui confeiila de prendre vnbrcuuage , lequel au-
loit vertu de l'afTopir plus de trente heures durant , fî
bien qu'on latiendroitpour mcrtc". Ellearala hatdi-r
ment ce breuuage: & tes parenScuidas qu'elle fut morr
te , ia firent cnfeuelir dedans U grotte de fcs predecef-
feursjd'où le ccdelicr deuoit la venir tirer à certaine
heure de lanuidl , & la conduire en habitdecordelier
nouice a Romeo banni, lequel demeuroit en terre d'au-
tre iurifdidfon, non gueres loin de Vérone, Ce quie-
ftoirfaifable ; attendu que communément on n'encerre
point les corps des decedcz en des fv-fles comme par-
dcça, mais en des caueaux voûtez. En ces entrefaites te
fcruiteur de Romeo allant & venant à Vérone popj:
porter melTages àluliette, fît raportà Ton maiftre qu'i-
•cellceftoit morte ,'&qu'il auoit alTifté à ia fepultuic^.
Romeo tran (porté de ttiftefTe , trouue iDoyen c'enî-er
4ledans Vérone a porte fermanr,en habitdiilimulé , & à
raidedefon fcruii.ur fit tant que celle nui^ilouuri:
la grotte , dedans laquelle il entre auec vn fiambeau,
puis ayâtfait retirer Dn fetuiteur, après auoir plulieurs
fois bâiic Iuliecte,qu'il cuidoit cflre morte , hnma d'vn
poifon tref-mortel acheté d'vn necelTitcux «pochicai-
•re.Ce poifon ellouffa bien toft Romeo. Mais le breuaa-
*ge de lu liette ayant fait fon opération , elle fe refgcil-
la , & vid par le moyen du flambeau que Rome© eftoit
mort. Sur ce, de deCplaifir qu'elle eut, ieuanc i'œil fur
le poignard que Romeo porroit à fa ceinrurc,elle l'em»
poigne & s'en tue. Cependant le cordclier marchoit,
rheiue de la fin de fon breuuage eftani expirée : mais il
l?rouuefes gens morts tout à fait. Le lendemain c fte
•tfâgedie fut defcouuertc , & le cordclier en fit vn recic
îj 0 Kijloires admirables
°c tout par le menu , au grand eflonncmcnt de chacun.'
Ceci eft dcfcrit par quelques hiftoricns Italiens , & trâ-
fcric de leurs liures par Louy Guyonau 4. Unre defes di"
uerfes hçonsychap.^.
Damoifcllc Geneuiefue, fille de monfieur Mcgrelin,
gentil- homme ordinaire de la maifon du roy François
fécond, efpoufa de paroles feulement ,à l'infceude tous
ceux de fa maifon, le précepteur defes frères v nommé
Meda^d, natifdcLaon en Picardie , aflcz beau jeune
hôme,& de médiocre fçauoir , pour fon aage de vingt-
trois ans. Se trouuanc enceinte, & craignant fpeciale-
ment le courroux de fa mère , femme aulterc,abandon-
na la maifon dc-fon père & la bonne ville de Paris , puis
en la compagnie da ce pédant fon ami & mari gaignc
pays par lieux efcartez.lls s'arrcftcnt en vn gros bourg
de Champagne , où lui fe met maiftre d'efchole , & au
bout dequelqucs mois meurt , ayant eu beaucoup de
peines & neceflitez. Cinq iours après la mort de Me-
dard , vn foir après foupc.cefte femme paroilTant câ
place publique raconta à tous ceux qui voulurent Tef-
comer , fes foies amours, fon mariage, fa race, fon mau-
uais gouuernement,& le tort qu'elle auoir fait à fes pa-
rcnsj demandant pardon â Dieu & a eux. Cela dir , fei-
gnant s*en aller coucher près de fon petit enfant aagé
de iîx feraaines , ellcfe pendit & cftrangla cefte nuift
mcfme, à vne poultrede lachetiue maifon qu'ils auo-
yent prife de louage , dont les gens du bourg aduerti.
rent le<? parens. De ma part,ie l'ay ouy raconter , amfî
uc ie l'ay efcrit audit (leur Megrelin , qui faifoit eftat
e mon amitié, lequel en eft mon de regret , difant ce
mal lui eftre auenu pour auoir refufé fadite fille à vn
ieune aduocar,afrez riche , qui l'auoic fait demander en
niariagc.ee qu'il ne trouua bon, la voulant marier à vn
gcrDtil-homme.Z-em<f/mff G«yow,c» ce 4.//«.C7' ch.de fes di*
uerfes leçons.
Vnc fille Romaine nommée Lucrèce, efpoufa clan-
deftinement cnuiron l'an 1 5 5 7. vn ieune homme nomé
Paul. Les deux pcrcs de ces ieunes gens cftoycnt de
mefme condiiion^fâifans trafic de craio mcrcantil , mais
ennemis
l
& memorahles.
%ft
^nncmis iurez , & cnuieux de rauanccment Vyn de
l'autrcLepercdcPaulfc fcntantviçil & cafle , voulut
marier fon fils,lui cercha & trouuaparci, voulant qu'il
l'approuuaft , afin que dans peu de i ours les nopces fc
fîflcnc.Lefils tcrgiuerfoit : finalement pour obéir à fon
pcrcil print terme d'y penfer. Cependant le bruit
court par tout Rome, que Paul fe marioit:dont Lucre-
ce ayant eu le vont diïlimula fon defplaifîr , cuidant le
marijge défia confommé. Mais Paul continuant à la
venir trouuer & coucher aucc elle, après en auoir ioui,
comme de là femme, s'codormit profondement. Lu-
crèce le fencant en tel eitat , lui donna tant de coups
d'vn grand coofteau dedans le ventre & à la poiftrinc
qu'elle le tua. Puis après elle en fit autant de loy-mcf-
me.C'cft horrible afte fut rapporté au Pape Paul qua-
triefme , lequel ne voulut qu*on leur donnaft fepulture.
Mais certain lacopin ayant fait vnc belle harangue au
Pape pour les parens du defunâ: , il permit que l'on en
fift les obfèques,& q^*:ls fuifcnt enterrez. Vne 'ieillc
feruantc de Lucrèce, qui aooit aflîfté à leur mariage fut
bruflec viu(r,pararrcft de luftice, pour n'en auoir aueiti
les parens.£» ce mefme Hure <y chapitre.
A C€S trois , l'adioufteray vne quatriefmc hiftoire.
Calhraachus,ieunc homme Italien , auoit fait promcf-
fe de mariage clandeftineraent à vne honncfte damoi-
fellc nommée Hippolyte , laquelle s'oublia en ccfte lé-
gèreté , feduite parjc s belles paroles de celui qui d'ail-
leurs lui agreoit. Le père deCallimachus ne fçachant
rien de ces promcffcs contraignit fon fils, par paroles
graues , & rudes menaces, d'efpoufer vne autre ëamoi-
felle nommée i£mylie. Ce ncantmoins Callimachu*.
polTedé de Tamour qu'il portoità Hippolyte, la follici*
toit , proteftantquece deuxiefme maiiage auoit efté
Fait contre fa volonté, qu'il fetenoit au premier , &:
tomproic ce fécond, à quelque pris que ce fuft. Hippo-
lyte feignant croire quelque chofe de telle protefta-
tioQ, &fe môftrant plus efrâeue d'amour enuersCalli-
niachu$qu'ôcquesauparauât,cn vint iufques la,dc lui
promcurc raccomplifTemeoc de leurs promelTes , lui
%ji
Hijloires admirahles
afîîgnant lieu & heure qu'il iugea proprcponr ceftcP-
(càSç. rroLiuan*; enfcmble,Hippolyte fit en forte qu*cl-
le cfiïpcCcha Callimachus d'approcher d'elle, l'encreie-
nant de paroles iniques à ce qu'il fut à demi allopi. Lors
faifî/rant vn poignard caché a cdte fin , elle en donne
vncoupmofCelàCallimachus , puis en fa prefence le
tranîperça du mcfme poignard de telle violence c]u'cl-
le expira tout à j'heiîre, CaJiimachus lui furucfquic
quelque peu de temps aprcs, & a) anrcr^nfcfie à baffe
voixtout lefaifjfuiuii HippoJyte : dont vn do(flc Pcc::e
de noftre temps nomnjé Herc">;cj Strozze , a fait vn bel
cpigramme Latin , tiré de i1rtt(>jre de ces deux. mifcra-
bles amans,&cnrcgifttc4M ^.Luredu 9. -volume du t'nea-
tre de la yie bumaïnede tlKZuinger.tottt a, la fin.
MELAli CHO Ll Q^È merueiUeux.
L'An I r ^î.nousfufmesafTemblez pour confuIter,M.
Hurchc-,M.Va'andal,M.Gab:icl, &: moy, pf/ur vit
jeune homm-- nommé Moyic, dodeur en loix, fi!s de
M.Pierre de Marnas, docteur ^aduocat au fiege Prcfi-
dial de \'il!eneuf ic de Be'g,diocefe de Viuicrs, aticirc
de mrlrncholic hypochondriaque, auec des plus gran-
des &f.iu(r^s imaa^'.n:ition'; du monile : vne defquelles^
çftoir, que pour aller à fes afaircs il mcitoi: vn raioir,
manche & tont.dedansfon fondement : & après il ra-
çloitieans , viioit & toi rioir le rafoir par pliifî'.tU'S
toursjiirques à ce que le fangforcirt ca .':botidance &:
<Ju murc!ci/'/;i-*;(f?er , & de Tinccftin nommé T^fctum,
Qui pis fut , il faifoit ceft eftrange opération drnx
fois lciour,qai'l(]ues-foi«: troi*; , fans qu'il y euft moyen
que tous enfemblc pc-iffions luy perfuadcr du contrai-
re,ayant fait ce quediteft en noftre ptefence, &augrS4
cflonncmêt de tous. Mais outrcplus il nous priainftara-
ment de lui applitjuer vn cautère aduel dedaas ledit
fpndenien{,alin^difoit-iI) que la perdUion de fubftance
dcmeu-
& memoYi^lles] S - j'
dcmfuraft.Pource faireil rcjjs monftra l'endroit anec
Je^/^fCM/t/wm^mosJequei i fourra il profond , & ic di-
lata cane , que nous pouuions aifcment voir fort auanc
dedans Jedic intelhn, tout fracafl^é , efcorché & vlceré.
Pour lui ottcr cefte vi.'aine & corrompue imagir.aticn,
nous prinfmesvn cxpcdicntj.Tvans préparé deux cautè-
re?,l'vn tout rouge, l'autre vn prtir p usçvet'cde , fiC
auecg' and* habilité , fcignans app!iqi:cr &. fourrer le
rouge dedans /*rt«»j, y milmcs l'autre. Lui crojant que
ccfuft le rouge , fe print à hurler fi clhangcmenr que
merueille, & par ce moven changea fa fauffc imagina-
tion , demeura guéri refpace de cinq ou fîxîours :auec
rcmerciemens. Mais vn ieune efcholier lai reuela î©
tout , & que nous n'auions appliqué le cautère a^^^anr,
ains vn froid:qui fut caule qut le mal lui rcuint. BArth.
Çabrjûl en fus obferuations ^?tatotKiqtieS^cbferi*.ç.
Vn ieuneelcholicrdc MontpeIlier,attcinrd'vne me-
lancholic hypochond'iaque , ûuecfaufle opinion i'em-
poifonnemcnr,ie retira vers monlîeur R ôdelct , le pref-
fanr fort de h i afîîftcr.Ice'ui n'oublia moyen aucûpour
orterau malade ceftefaufTe opinio & im ^^inatiô d*cm'
poiionnemécMii . il lai rcrTerertoitrorfîoL'rs le mor-
•;ccau, difant U fcntir à l'endicii: du larynx près i'annu-
"'laî'e.criant coufiours ordinaire rntnr, le le Te' s, il m'e-
ftrangle. Doncques ledit (icur B.onJeîrt s'aduifa de lui
■faire prendre vnc pilule d'efporge bien préparée cue,c
quclquepeu de ciré qc:?chce à vne petite cordelette, la-
quelle le patiericauâld,& .-'yanc demeuré vn peodc ttps
en foneftomàchjles vcnniflem^ns eftranges arrivèrent,
"'^fgiuis de grande ahondancc de f^^ng. La pilifle qui s'e-
ftoirenflce& g omecommc vre benne noix, fut arra-
chée comme pa' f rce .-ôclem^bdc c'bnccrc opinion
que le morceau auoit ei^c arraché; don: s'ersfuiuit la
■gucrifi-în entière: ayan-- depuis bien fait fcs afains fans
recheutdni aucun foùp^on de ^;c mal.ie mefiv.e tnl* obfer-
Uation II.
Il s't ft veu pîuiîeurs me!ancholiq'jes , qui pcnfoycflt
cftre morts &: nrvouloyent point manger. Les méde-
cins vroycnt de ceft artifice pour les faire manger. Ils
874
HUfoires admit Mes
faifoyent coacher quelque ralct tout auprès du maîa-
dc,& i*ayantiiiftruit de feindre le mort, & nelaifTer pas
d'aualcr, lors qu'on lui mcttroit de la viaedc en la bou-
che,periuadoycnt par ceftc rufc au mclancholiquc, que
les morts mangeoyent aufTi bien que \cs viuans. Il s'crt
veu n'y a pas longtemps vn melaacholique quiledi-
foic le plus miferable du monde , pource qu'il n*eftoic
rien. N'aguercsy a eu vn grand fcigneur quipenfoite-
ftre de verre , & n*auoit fon imagination trouble qu'en
cefenl obied. Car de toute autre chofe il cndifcouroit
mcrucilleufement bien:il cftoic ordinairemcntaflis » &
prenoit grand plaifir que fes amis le vifitaflent ; mais il
les prioïc qu'ils n'approchaffent de luiJl y a encore vn
1res- honneftc homme, & des meilleurs pocces François
de ce royaume> lequel depuis quelques années cft tom-
bé en vnc bigearrcapprehenfion. Èftant trauailjéd'vrc
figure continuc,acGmpagnrc de grandes vcillci, les mé-
decins lui ordonnèrent vn vnguent narcotique , qu'on
nomme 'Populeum,dont on lui frottoit le nex, le front &:
les temples. Il eut Je$ l'heure le popiileum en telle hai-
iie,que depuis il s'eft imaginéque tous ceux qui appro-
chent de lui le fenrent. On ne peut parlera lui que de
Join:fi on touche à fcs acouilremens.il les icttc & ne Ic-s
porte plus. Au rtfte, il difcourt trcfbien & ne laiflc p?s
de compofer.Onatafchc.par tous les artifices du mon-
dc,de lui oftercefte folle imprclTion : on lui a fait voir
la dcfcription derrnguentjpour l'afleuier qu'il n'y en-
tre rien de dangereux. Il le fçaitjl l'accorde: mais ceft
obieâ: eft t llcmcnt graué, qu'on n'a fçcu encore l'etfa-
Ccr.M'^-duLnurens t dofle mcâtcin , en /on difcours des
maladies melanchoUques,cJ)ap.7 .
En ce mefme chapitre il raconte plufîeurs cxemplet
des melancholiques mentionnez par les anciens , auf-
quels noftre intention n'cft de toucher. Mais i'adiou-
iVerai encore de lui mefme cinq ou fix autres hilloires
partie de ce chapitre, partie d'vn autre fuiuant , pour le
contentement du lefteur. Il fait donques mention
d'vû mclancholique qui peufoit cftrc de brique, &
ac
tir mémorable si 87c'
De vouloir point boirç^ craigna ne d'cftrcdeftrcmpé. Et
«i'vn autre cjui s'imaginoïc auoir les pieds de verre , Se
n'ofoic cheminer de peur de les caiïcr. Item d'vn bou-
langer,lcqucl s'eftoii imprime qu'il eftoit de beurre, &
ne le pouuoic-oa faire approcher du feu ni de Ton four,
tant il auoii peur de fe fondre. La plus plaifantc rcfue-
riecjuei'ayeiamaisleuc (dit-il) eft d'vn gentil-homme
Sienois, quis'cftoitrefolu de nepilTcr pou t,& de mou-
rir pluftoft , pource qu'il s'cftoit imaginé qu'aufTi toft
qu'il pifl'croit toute fa ville fcroir inondée. Les mede-
cins lui rcprefentansquciout fbn corps &ccnt mille
comme le fien n'eftoyent capables de noyer la moindre
maifonde la ville, ne pouuoycnt Icdinertir de cefte foie
imagination. En fin, voyans fon opiniaftreté & le dan-
ger de fa vie,trouuerentvneplaifante inuertion. Ils
Font mettre le feu à la plus proche malien , font fonner
toutes les cloches de la ville , atriltrent plufîeurs valets
qui crient au feu, au feu,& enuoycnt les plusapparens
de la ville, quidcmandent fecours , & remonftrcnt au
entil-homme qu'il n'y a qu'vn moyen dtlauuer fa vil
c;c'c(l qu'il faut qu'il pific piomptement poureftein-
drc le f^u.Lors ce pauure melanchoHque.qui fe retenoit
de pifler,dc peur de perdre fa ville , la croyant en ce pé-
ril,pilTa & vuidatout ce qu'il auoit dans fa vefcic,&. fut
deliuré par ce moyen.
II n'y a pas à rire es deux hiftoires fuiuantes extraites
du I 4. chapitre de ce mefme difcours de M.du Laurens.
Voici fes mots. II y a ( dit il ) à Montpellier vn hon*
hcfte citoyen , d'habitude melancholique , fitdVn
tempcramenc atrabilaire : lequel ayant eftc trauaillé
par rcfpace de deux ou trois années d'vne légère hypo-
chondriaque , laiffa tellement acroiftre le mal, qu'il fe
▼id enfin réduit à ccfte extrémité. Il fertoit deux ou
trois fois le iour vn Icger mouucment par tout le ven-
tre,& principalement fur le cofté de la ratre.Le bruit s'e
cCnouuoit fi grand , que non feulement le malade, mais
tous les atnftansl'oyoyent. Ce tintamarre duroit enui^
ron vn demi quart d'heure , & après tout foudain la va»
peur ouïe vccgaignadc diaphragme^ Iapoi£lriac,lui
fc
8 7^ Histoires ndtnrfaiies
caufoit vne opprciïîonfî grande , auec vnc toux feiche,
que tous l'eulTcnc penfé aflhmaiicjuc. Ccft accident va
peuremistoutlerclU ducorps cftoit -.Cilcment csbran-
Jé,qu'on J'cLilliiigc fcmblabicàvn nauirc agiré de la
plus furieuCciépcfte.il s'auançoit,)! rcculoit, on veyoit:'
les deux bras fc mouuoir., comme s'ils cuflent enduré
àçs conuulfions. Ea fin ces vents ayans couru par rour
le corps , & faii vn raiiage yniiic-rd , fortoyert auec (i
grande impttunfîcé paria bouche , que tous les aiïiftans
eneftcyentLfFiaycz. Lors l'accès finifTt-it, & le m^iiadc
fe sécou allégé. Cen^elîpas encore tout.Deux ou fois
mois auant c]a*il mouruft , il auoit tous les iours deux
ou trois petites fyncopes; le cœur lui defaillôit , auec v-
neenuieextrcmede piirer:&: comme ilauoit pifTéil re-
uenoiràroi.Lavioiencedu mal fat C, grande, que i'amc
fut en fin contrainced'abandonrcr Ion !ogis. Appelle à
l'ouucrture du corps ie trouuày la poidtrinc à demi
pleine d'vne eau noiraftre & puaiuc ; le fencftre veniri-'
cuic du cœur en eftoit tout rempli , & dans le tronc de
la grofTe artère on y voyoic la raefme couleur. leremo-
ftrayà lacomp3gnie,ouela caufe de ces fyrcopes, & de
l'enuicfrecjuentcds pifTer, venoitde ccftt humeur ma-
ligne.laquelle traiicrfoit le cœur:s*cn alloic par les anc-
res,& de là dans la vefcie.
L'autre hiltoi^e cft bien aijfH eftrange. IcTay reraar-
<îuce(dit M.du Lau'-cns)aToùrs , où ic fus appelle en
conr.:il auccmtiïîeursd'Anrclineau, FalefeaUjôc VcrcuJ
nian, médecins trer-d<\£les & fort expérimentez. Vn ieu-,
«e feigncur des quelcjues années cft trauail'é de ccftc
tiypochondriaque. Il oit tous les iours cnuiron les neuf
heures du mirin vu pctir bruit du colté de la ratre. A-
pres il fent eflcuer vn? vapeur , qui rougit toute la poi-
<ftriiie,toutè la £ice,&giignel': plui haut de la tefte:Ies'
artères des temples battent bien fort : les veines du vifa-
ge font ennecSiS: au bout du Front ( où les veines fînif-
i'enr);ir:nt vnc douleur extrême, qui n'a que la largcu^
d'vn fol. la rougeur court par tout le bras gauche iuH.,
ques au bout des doigts, & r<: prcfente vn feu volage, o'il
vaerifîpelc:le coftc droit en ellduioût cxempt.Duran^
Tac»
& memorahlesl
87.7
l'iiçccseftfi abaiu qu'il ne peut Tonner mot, les larmes
lui découlent en abondance, & lui fonde la bouche v-
ne, incioyabk tjuantiié d'eau. Le dehors bruflc & le de-
dans cft coiumc glacé. La jâiribe gauche eft toute pleine
4c vanccs : & ( ce que ic crouue dcplu;. eftrangc ) à l'os
.fauche de la ttlV/^u'c-a appelle parie. al , il y a vne pic-
^cc-d'os eniporcee ,' fansqu'ilau prccfrdé aucune caufe
apparence,conïnie coup ou cheuie » & ne peut cncîurer
qu'on le touche en ccli endroit. La maladie a ^ftc fî rc-
, belle, que tous les rcmtdcs que /es pjji dw.dlcs méde-
cins lui int ordôné ne rôtiamais Ic^U abatre. V tutrc-
folu en nollre conicii qu'on la combatroir par rcmcdes
extraordinaires, &: par a eripharmaques. Voila corne ces
g'oHe. buiiicuis bruflee.v 6c melanchoiiquci,Te tournas
dans les veines du fc;yr,de la râtt<.-,&.du m'Tentere.peu-
uent exciter vne infioitéd'accidcns eftranges » & fonc
caufc d'vnc fcdidca bien grande entoure l'cccononiic
du corps.
L'An mil cinqcens trente quure, Sultan Solymaa
lyant defp.r» hé Ludouico Gritti Vcnicié pour don-
ner ordre auxafa-resde VVa'achie Moîdauie, Tranfîil-
iianie & Hcngrie , Gritti partit de Conftannn«#plc &:
vint en VValachie , fuiuid'cnuiron ft-pi: mille hormcs
de guerre,3c at OiTi^pagi édj deux capitaines H-..ngrcis,
l'vn derqucis le nomnioit Docia. Âpres auoir expédié
ce qu'il prttcndoit , il entre en la T ranfîiiuanie de la-
quelle eftoit vayaodc iic lieutenant gênerai pourjcroy
de Hongje AmericCibac cuefqucdc VaraJinjfeicrneur
vertueux Êc fage , lequel ne monltra pas fembianc de fe
foucier beaucoup de Grjtti,ni de Solyman,..o(-nme ajffj
il detcftoit la.tyratinic Turquclque, ôc tafchoic par iou$
moyeDsd'empefchcr TausncciTient d'iceilccs pays de
la Chrcltiçoié . Touiesfois Amenc,fuiui de boues ij ou.
g7 8 Hifloires admirahUs
pcs.fe mit en chemin vers Gricii, pour conférer enfem-
blc dcsafaiies.fclon que l'cftat d'iccllcs le rcqueroit. Ce
^ut Gntti Içachani monftra de contenâces & par beau-
coup Je pai oies qu'il n'cntcndoit point auoir de com-
pagnon ni de concurrent en Traafliluanie.Docia (mor-
tel ennemi d'Americ, à caufe de quelques querelles que
ilsauoyent d:$ longtemps enfemblc)interprctant le
mcfconieniemenc de Gritii félon fa mauuaife afFcdion,
demanda s'ii vouloitqu'il challiaft l'arrogance d' Amc-
riclequcl mcrprifoit aulFi le grand Empereur des Turcf
& fon député. Grittincdifantpasqucnon ,Docia re-
fould d'exécuter fa commiflion à toute rigueur & vio-
lence ; fait reconoiflrc le lieu où eftoit campe Americ,
marche toute nuidt auec vne troupe de Turcs, furprend
Americdormant dedans fa tente en lieu efcarié^fcs com-
pagnies eftans logées en diucrs villages, lui coupe la tc-
fle,& reuientauflî foudainement qu'il cftoit parti, puis
tout ioyeux ♦ &penfant auoir exécuté quelque grand
exploit fit prefent de ceftetelteàGriiti , ion acompa-
oné d'vn Icigncur Polonais nomme lerofme Laski , i-
gnorantde telle entrcprife, & qui condamna ce meur-
tre. Gritti qui penfoii eflre plus redouté par telle exé-
cution te trouuadeceu : caries Tranfîîluains extrême-
ment irritez d'vn fi mefchant a£le, iurerent de venger U
mort du v3yuode,& en peu de iours$*aduancent fccrct-
tcment au r ombre de quarante mil homes, pourfuiuent
tout à coup & de (i près Gritti qu'il tombeen leurs
mains, on lui tranche la tefte en p^efencede toute Tar-
mec , les chefs de laquelle & les parens d'Amcric trem-
pèrent leurs cazaques dedans le fang du décapité , auec
grandes ceremoiîii s & lolcnnitez fclon U couftume de
cefle nation , <fin de fc fouuenir long temps aprcs de la
vengeancw- du fang innocent efpandu. Ainfi fiu chaitié
J'oigoeil de Gritii. Quant au capiramc Docia.il fut auflî
attrapée, tourmen-e dediuers fupplices, auant qu'e-
ftrc clcartcléi Laski demeura longuement prifonnier,
& fut torturé 'udcmcnt , afin dr dcfcouurir les dcllcins
deGrnti. Finalement par linirrccfliondc Sigifmond
loy de Pologne > il fut cflargi, & fe retira de Hongrie,
& mémorables. Sy^
HiTîoire de Hongrie.
L'an mil cinq cens quarante , le valet d'Tnmufnicr
de VVitebcrg en Saxe,[e rua de nuidl contre fon maiftrc
& fa mairtrcfFc enceinte, Icfqucls il cfgorgca comme ils
rcpofoyent en leur couchc.outre plus il hacha ces pan-
ures corps en plufieurs pièces. Mais peu d'heures après
il fut attrapé, mené hors Iaville,&iailJctout vifen qua-
tre quartiers par rcxecureur de iufticc. ya.^ndré Honf-
dorfenfon théâtre d'exemfles,pag.^iJ .
£n la mcfmc année vn payfan de Prauuenftain villa-
ge appartenant il' Archeuefque de Maycnce , ayant vn
iour de Dimanche,iandis que les autres payfâns s/rfba-
toyent après difné fous vn til , mené par belles paroles
vne fort petite fîileaagec de cinq ans en vnceftablc près
de i'Eglife.fe mit en effort de la forcer. Ne pouuani en
vcnirà boutjilefgorgcacepauure enfant, & commet
des caseftranges & cxecrablement furieux & enragez
en ce petit corps, qu'il hache puis après en quinze pie-
ces. Surpris en vn meurtre fi detcftablc par certain pay-
fan , que la iuftice diuinc amena en cefteeftable fans y
penfcr.rudemcnt battu & bleiïe en la cholere &douIeur
de rautre,il fut liurc au raagiftrat,mené à Maycncc , te-
naillé par toutes les parties de fon corps auecfcrs tous
ardan$,& attaché vifcn vnerouc,bras,cuifres, &iam-
bcs rompues>où il finit fes io\xn,Iou,Fincl.AU ijifijesmer^
ueïUes de nojire temps.
Le valet d'vn boulanger à Vienne en Auftnche,ayant
fcniî que fon maiftreauoit de grands moyens , feignit
vouloir aller demeurer ailleurs, & print congé. Heu de
iours après il entra furtiuement de nuift en la maifon
du boulanger, où il commence à faire quelque bruit.
Vn feruiteuracourant celle part eftarreftépar celui-ci,
& tuéfoudain,commeauflî toft après la fcruantc. Gc
meurtrier tout fanglir entre en la chambre du maiftre,
lequel il maflacre & la maiftrcflc pareillemêc.Nô côtec ç
de ces quatre mcurcrcsjilfe rue fur vne petite fille de la
maisô,aagce de quatre à cinq as,& quoi qu'elle lui criait
incrci,luidifant, Paul, Paul, pard»<nti, m M.ic tcdôneray
mci belles poupecs^il la tua âu(Ii»Pui« apt bàféics cof-
8 8o tJifcoires admirables
ffes,cmportarargcnt,&;i^fi)iià Kcintpourg. Mais il
fuc ii prumpc^m^nc pouifuiui le icn-kmaiin'ik Icsiouis
fuîfiantJî^ii'on rutn-^pi& ramenai Vierc,..ù iirut cm-
pléiouc \ il\ En ce tourm^nc il couFcfTacjue. rien ne le
pfciCoK tant en ion aine ^as ccfte voix de la fîLtic, la--
«quelle lui rcionnoit fjns ccff au dedans, LauJ)Fau', par-
donne moi.ie le donnera^ mes belles poupées. iio;j>ytic;r/'
(4w ilieutre des txemp,es^p.i^e 4 3';.
Vb autre dcleJperé usdlepei^Ja merc, les trifans eii,
certaine maïUn de Colgartcn» vnlàge proche de Lipûc
en Saxc,puis ayant piiic ce qu'il trouua d'argent , b'cn-
fjit. Mais afcrapéj^ mené a Lipficoù i' fat puni '.eloa
l'unOMniiédcJon c ime, il conRii'j a'i^-irdeaicuîc ca-
ché trois iours &. tiois i. nids feus vn éfcaliei oblcuf
d'icei'emair.n,fans boire ni man gcr, en ii tentio i de
perpétrer ceft hcjrrible mcunre. ft coir.m- cnccflin-
lerual.e de temps fa confciencc le modift icllemér, -.uç
defoîs àautreilauoit horreur de Ion entreprifejtoutes-
fois iU'y refolut.aidéd'vne voix, cjui lui difui routbasi
f,îy,f ^y.Mais il ?diouftoit qu^ .ip.es le coup , li iui auoiç
clté'iiiip^ ITibLde marchci ni faire bea.,.coup de che-
min.Xiîmfp.'f.
En lavihe w'ifepac en Turingue, vn h5mc fc^t pau-
Ure , dwlî.ant ei'po' 1er que'quc fiilc pour fc metc.e cd
mefnag: itiia de nuiâ: (on hoilc homme v- f k,& ayant
caché le co;ps,emi'o;ta tout l'argent, qu'i peut cioii-
Ucr en la maifon.Maisen lieu de s'enfuir, lia li .e ca-
cher en vncchao' I:e , ouicitau bout du ponc de la vi^a
le, fans pouuoir fiiro vn pas plus auanr.Il fjt pris <Si.fanS
tcrcureaiicua fon ciiine,& cnouruc forr repcrtanr. Li
mefme pj^.^lf. H en auint autant à certain pa^-lan, qui
ayant tué fon voiùn, fc trouua arrcltc tout coure par (fL
conicienci ,ayàni f^it quatre ou cinq cens pas ; 6i faiû
confcUafrancliemcnr , nedemandaïuque amorc tans
il f ficc^'iiprclie. Quelle force de la conlcicnce.' /.i
mefwe.
L'an mi! cinq ccrs cinquante,aiT mo!S de Mar:>, en U *
yille d'AntcîS fut commis vn honiblc &. clbâ^j mtMi>
ireiSmioaTurc,Lucquois,aa<^é d'cnuifon t^uaiairc ac
>nan^
& meinorahleSo §8i^
irii»n$,]e 1 s. Mars monte à cheual , accotnpagné d'và
ficn fer uiteur nomnié Bernard, &s'en alla trouuer vn
autre rîotabic marchai^c Lucqu0is> nommé leronymo
Diodaci,eni'a niaifon:&le tirantà parc lui ditàroreii-
Ic , cju'iivxnft en Ton i^'uin parier à certain marchant
de Lyonc|ui l'aitendoit : Il remonte , &î'.n va touf-
iours deuani iufqucs à i'eglife de S-Iaqucs,cù i' ccken-
dit , & rcnuoyantfonferuiteur lui commanda de reC
pondre à ceux qui le dern?.nderc)vnt qu'on le trou-
ueroit en vne maifon qu'il lui defigna auprès de ceftc
cglire:ccqu'ilfaifoitàdeireJn,ne fc fiant à ce fercireur,
ains ayant vn autre au iardin , ton: apofté. Ce Turc
s'achcmiae toft après vers (on iardm , & deuani la por-
te attendit leronymo, lequel arriuc & conduit amia»
blcment dedans, !)imons'aif:t le premier en vne-xhairc
Farniede blanc, penfantqueleronymos'a/rerroii en
autre chaire auprès. Niais comme ille promenoîr,
▼n nommé lulio entre, lequel poufTe Ieror;\mo dedans
tcûcf'^condc chaire, faire t^e tel artif^e, qu'elle fc ferra
de foy mefmc, ainliqu'iU'afrcoir,le tenant fi ferré par
le corps, les bras & les iambcs qu'il ne pouuojt bouger»
Simon voyant fon horr-rae pris enuoya quérir par la-
liodu papier & de Tancrc , & contraignit leronymo
d'efcrire & figncr comme paffé fîx ans au parauanc
lui & Francifco Fiancifciauoyent donné audid Simon
Ja couftillade qu'il portoit auvifage » en certain de-^
bât euparenfemble , outre quelque autre différent à
raifon de certains affaires &debfes à Lucques , à rai-
fon dequoy leronymo auoit fouffert de grands dom-
mages. Cela fait Simon fort, & lulio rentre ayant Iq •
mot de fon maiftrc , s'cftantfaifi d'vn large poignartj
caché fous la couuerte d\n lift de campcn h ciiam- .
bre proche de cciardin de plaifjnre ,& accourant a le-
ronymo , quinepouuoit fc défendre , k meurtrie
cruelkmc-nt. Lois Simon crtrc , & eux deux em-
poignent le corps lequel ils portèrent en la caue , oi
ils l'enterrèrent en vne foffe peu au p^rauant cftufcc
par Iiilio pour t?l cfFwft.Simon retourn;: inconunencert
fon iogiSiCllongné de ce iardin.À-'hofttfirc de leronymo
8 s 1 Hijloires Admirables
▼©yant qu'il ne reucnoit à Ton heure accouftumec, le fit
ccrcher par tout. Ne le trouuant plus , le lendemain clic
prouiieut àcequ'ilùift crié par toute la ville , auec pro-
mcffc de grande recompenle àqui en diroit nouuclJes
aiTeurees.kien n*cn v^tnant à conoiflànce.lemagiftrat fie
termer les portes , ordonnant qu'on vifitcroïc tous les
lieux ou leronymo fouloit hanter. Simon entendant ce-
fte ordonnance eut peur qu'on aliaft fouiller en la cauc
defoniardin: pourtant il commanda à Tes deux ferui-»
tcurs, Bernard & Iulio, d'aller la uuiâ:fuyuante déterrer
ce corps,& le ietter dedans quelque puits. Ce qu'eux pc-
ûns faire > Dieu voulut que Bernard effrayé de certain
bruit furucnu,fe print à fuir, luiui de Iulio. En courant
il cheut,& fon compagnon retourna vers le maiftrc par
autre chemm , rauertilTantde ce quicftoit aiienu. Le
corps fut trou ué fur le poinft du iour parles premiers
pafTans en ruè'.& indiqué à iuftice. D'autre colté Simon
bailla deux petites chaines d'or qu*il foulon porter , va-
lants enuiron foixSnte ou fcpiante efcus , & quclqu-^y
pièces d'or à ce lulio,!c priant de (ortir tout à rhcu/e,&
fefa'îuer ; adiouftant quant àluiqu'il fçauroic bien le
iuftifîer. Iulio s'enfuit , & Simon va troauer le Mar.k-
graue d'Anuers , lui déclarant que fon fcruireur lu.'io
s'ertoit retire , Ini ayant fait entendre après fon départ,
qu'au dsfcea de fondit maiftre ilauoittué leronymo.
LcMarckgraue f^ douta tout foudain qu'il y auoitdu
mal : pourtant rcimt-il Simon piifonnier, comme au
mefmc inftanc Bernard le fut aufli, lequel ayant déclaré
ce qu'il fçauoitdsce meurtre', Simon fjt chaudement
pourfjiui , &ayantconfciréfes crimes , condamne i
mourir. On i'euferra dedans la mcfmc chaire en la-
quelle leronymo auoit eitcmcurtn, &d'vnfeu huiét
pieds arriéreront au tour delui , furtfihauté, haui &
roftitoutvif: pais (on corps attaché au haut d'vn maft
de nauire hors la porte de l'Empereur, lean Françon le
'Petit f en fa grande Chromijue dt . Hollande , liure hmèht"
me.
L'an mil cinqcens foixâtc cinq, le capitaine lean Ri-
baut,pâr commanderaeiit du roy Charles i x. dicHd vne
âwtte
& memorMîi %%y
fl-otredefept nauircs pour aller en la Floride, oùeftoic "
le capitaine Lau^onniere,des vn an auparauant,afîn d'^
faire peuplade , fansricn cncrcprendre fur cequc les
ETprigaoU y pouuoyentrcnir. leaa RiLaut acompa-
gné de trois cens hommes, compris aucuns anifans a-
uec leurs familhs/e mit à la voile fur la fin de May , &
après grandes d.fficnhez arriua près de la Fioridc le
l4.iour d' Aouft:&: ayant quelques leurs coftoyë & rc-
çonu la ccrrt fc rendit au tort de la Caroline bafti par
Laudonniere , mais non encore totalement parachené.
Il fut l'uiui delà rîorie d'ECpagne, compofee decinq^
grands vildw-aux & de trois pacachcs, fous la charge de
Tedro Mclandcs.Ccfte flotte arriuee le 3. de Septembre
& fauorilce des fauuageSjfe déclara de plein abord en-
nemie àiÇ.^ Frsnçoisjltur dénonçant laguerrc, & cfTay-
ant de s'emparer Je leurî nauircs, quieftoyentvn peu
cfiongncts du fort. IcanRibaut auerti du danger , fit
reucuë , & auec les mcnicurs des troupesdufort & de
fa flotte>rriôtees en trois nauires , q'ji cftoycnt venues à
Jui,deliberâ d'aller au dcuant des Efpagnoiî , pour em-
pcfcher qu'ils n'acrochafcnr les autres nauircs: laîlTanc
LaudoHnicrcau fort aueclejartifans, leurs familles , &
quelques foidatî au nombre de 140. perfonnes ou cn-
l]iron:& au delfous en mer deux nauires fous la char-
ge des capitaines laques Pvibaut & Maillard fon lieu-
tenanr. Les Efpagnols trouucrent moyen d'entrer au
forr durant vn temps fort fafchcux le io.de Septembre
de grand marin, où ilsefgorgerct hommes, femmes, pe-
iiscnfans, fains &: malaies. Laudonnicre & quelques
autres des plus habiles fefaijuercnt plulloft par miracle
qu'autrcmenr, au nombre d'enuiron vingt iix,&rcuin-
dtenc en France es nauircs de laques Ribaut ôc
Maillard. Le Capitaine îean Ribaut cerchanc îa flot-
rcd'Efpagr.c > pour la combattre , fit naufrage par vne
tcmp.fte qui l'accuiellit , brifa les vaificaux , donc lej
munitions furent perdues. Ses hommes & lui fc fauuc-'
fent en terre, où ils furent affaillis de la faim , & finale-
tc\zi cotrains fe rendre aux ElpagnoIsiVies fauues. Mais
Pedro Melandcs les tenant ca Ta puilTir.'ce, ayant mis à
KK *
884 HiHotres admirables
parccnuiron trente , qui eftoycnt matelots » char-
pentiers , canounijrs , fit poignarder dcuant Tes y^-ux
ïean Ribaut, & haclier en piccej. le lieutenant & les Ibi-
dats a'icclui , contre la foy protiife , &. aitachcr quel-
ques vns à des arbres , auec infcripiicns diffamatoires.
L'on en fit grand' ioyecn Efpagne, où labaibc dcUaa
Kibaut fatenuoyec pourjîgnaidc ^exécution.
Le capiiaine Dominique Gourgucs gcntil-hommc
Eourdclois, poulie d'vn dcfîr de rcleucr l'honneur d«
la mailon , li cruellement trairec contre la foy pro-
mifc, emprunta de fes amis & vendit partie de fes biens
pour equipperirois moyens nauircs, portans i 5 o. fol-
cJats ajec 80. mariniers choiiîs , fous le capitaine Ca--
zenoue ion lieutenant , & François Bourdclois maiftrc
fur les ma(.elots.['uis parti le u .d'Aouft i s fiy.aprcs a-
noir quelque temps combatu les vents & tempeftes
contraires , en fiaprint terre à l'iflc de Cuba , d'où il
fut au cap de S. Antoine au bout d'icellcllle, cfloignce
delà Floricieenuiron loo.litucs. Ce fut là qu'il fit en-
tends e à fes f-^ldats le dcificin qu'il leur auoit touP
ioLirs cclc. Mais il les trouua très prompts à le ftiurc,
pour exterminée les meurtriers , defquels il approcha
finalement , & prenant terre de nuift à quinze lieues
du fort, communiqua par trucheman auec les Saunages
qui lui promirent ôc donnèrent fecours. Beaucoup
de temps fc palfacn la nauigation iufques au cap. de S,
Antoine, & d'icclle en la Floride , puis en ce qui s*en-
fuiuit:tel:cmenti^uc les Efpignols^au nombre de cinq 3
fix cens hommes de combat , mbitié au fort de la Caro-
line, & les autres en quatre plus petits foitb;en acora-
inodez, eurent loilirdefe fui tifier & difpofcr au com-
bat. Ce noticbOant,larefo!ution f*c Gourgues&del'
fien3,(uiiiis de (quelques Saunages , fut telle, \]u'ils atta» i
queren' &f(<rctient tous ces furts les vns après les au
très maugîé les canonnades Efpagnoles , firent paffcrl
aacranch<^nt de i'tî(pec tous ccsmeurineri , refcruez
quelques- vns en vie, amenez deuant Gourgues , lequel
leur ayant rcmonibé i'iniurc qu'ils ruoycntfaitc fp^g
occahoik
(^ mémorables.
%î^
:caâon, à toute la nation Françoife, If s fît pendre &
ritranaJer aux branches des mc(a)cs arbres qu'nuoyenc
cftc les François , cin^dclqucls auoyenc cftéclbangkz
par vn Eipagnol, qui lors attrapé confvrfTâ fa faute èi. la
iL'fte punition que Dieu lui fjifoiL fouffiir. Au lieu de
Tefcriteau de Pedro Meiandcs , qui appelloit Jcb Fran-
çois Lutcranos , Gourgcesfit grauer fur vne rabjedc
fapin auec vn fer chaud ces mots : lenefiiy ceci comme à
Ejhagnols^nt comme k vunmers'.maii comme a traijhesyvvieurs
C^ meurtriers. CeOe exécution notable futf-i£te au mois
à'Au il I ç tf S.Gourgnes ayant rafé les cinqforrs.char-
gé en fes nauircs cinq doubles couleuiines , quatre mo-
yencs,plufieurs petites pièces de toutes forces, force ar-
mes &vi!ircs Je remit à la vo Ie,& ferrndii à la Rochel-
le lefixiefmeicurdeluin.ayant perd" peud'homines en
ce haut cxploir. Les Ei'pagnols eflayercnt d'attraper
Gourgnes,quientîors bcfom de fes amis , à l'aide des-
quels s^aprtftant à faire plus forte guerre aux F.fpagnols
il mourut de maladie l'an i ] S zJhjIotre de U Floride.
:m IN E mermllcufe.
B OlognclâCrafle ayant efté aHegec furies Fran-
çoispar les Efpagnols Tan i^ 1 1. défia cent biaf-
fes de muraille près la porte S.Eftienne eftoyent par ter
re, défia la tour de la porte eftoit abindonnce , 6c dcfia
les Efpagnols auoyent planté fur la iuuraillc, vneenfci-
gne : comme les affiegez ayant braqué leur canon co
contrebaterie , & tue partie de ceux qui eftoyent mon-
tez,repouffcrent les autres auffi precipuammcnr com-
me ils s'cftoycntprefcîntcz. Ces premiers efforts auoy-
cnt tfbranJé le peuple , fi la vilh*. n'cuft elle foudaia
renforcée de mille hommes de pied , &: de cent quatre-
vingts lances. Lesafiîegcz ainiîioudcnus , voici va
merueilleui fucces qui redoubicleurs cfpcranccs. Pier-
re de Nau^rrc i'vu des «hcfs de i'arme: Efpagnole , a-
88^ Hifioires admirabtei
yant fait mettre le feu à la mine qu'il auoit crcufcef
vers la porte de Clî:(flillon , cù y auoit vnc chapelle
par dedans, & le mur & la chapelle lautcicnt tel-
lement en l*air , que les adlc^eans dcfcouurircnt à
clajr aile dedans de la ville , & les foldats préparez
pour défendre l'aflaut. Mais au mcfme infant h- mur
& la chapelle fondans en bas (e remirent & loigni-
rent droit en la meime place d'où la violence du fcu
Jcs auoit chalfcz. Les Bolognois firent de ccfte auan-
turevn miracle , & crcurent que telle recheutc fur fcs
prop.esfundemenseftoit vn maniferte- lefmoignage de
Partiftance diuine. Hiji. de France en layiede Louys X I 7.
Depuis l'an rail cinq cens huirante , celte manière de
miner les places afTîegecs a efté remife au deffus, nora-
mement es payshas , comme l'hiftoiredu Ducde Par-
me & du Prince Maurice de Nâflau , grands ailîcgeurs
& preneu'-s de villes &forterclîrs de noftre tempf,eii
Font foy. Cela contenant diuerfcs hiftoires foitrefeiué
pour vn des volumes fuiuan% qui reprcfentera miinies
mémorables rufes de guerre, non feulement en ces payf
là,mais ailleurs au/Ti.
MOCi^J'E r\ infime cbaïHé.
L'An 1594. certain perfonnage demeurât à Cologne
fnr le Khm, qui quelques années auparau^nt auoic
monftré dc5 tcfmoignages de (inceriié & droiture,
vint à Ce corrompre tellement qu'en peu de itpmai»
nés les marques d^cfprit profane & reorouué parurent
en lui. Surtout en ce qu'il ne pouuou fupporter rc-
raorftrance quelconque pour fon bien, tant gracieule
pcuft eilcefVre , ni endurer qu'aucun de (es amis lui
parl-iftdeDieu nidc fa iultjce 3c mifericorde. Au con-
traire , fi toft qu'on lui fiiïoic mention de vérité , des
féaux , &: des annonciateurs d'icelle, il vomidoic mil-
(einiaresçon^rc^iurques à blafphçmcrcontfela table
facrec
ér mémorables. 887
Âcrce du fauu>;ur de TEglifie & la comparer à des puan"
tifcs. Mais il n'alla pas loin Car le i S.iour d'Auril aa
niefme an , ayant peu au parauant du quelque iniui e à
certain leunccoHîpagnon , icelui vint par derrière , 5c
fur le midi en rue publique > lui donne vn coup de ba-
ftonfur la nuque du co!,puis fe fauuedc vil^elle. Cn
iheineceftui Cl par dtllous les bras en fa maifon , où il
mourut la nuiâ; de ce iou» là. Mais ce qui cft le plus
rcnnarqiiable en fon fait eft,qu'incontinent qu'il fut en
fa maifon, telle puanteur fortit de fon corps , fans qu'il
y eull apparence quelconque d'icellc, queperfonne no
pouuoit demeurer aup esdclui. Eftant morc,il ne fut
îamais poffible aux moines, appeliez & ordonnez pour
cofcuclir&enceiifer les corps , de manier & ferrer ce-»
lui-ci dedans fa bière, moins encor le mettre hors de
Ja chambre à l'entrée de fa maifon : mais fut-on con-
\ triintde cercher & faire venir les cureurs de retraifls
dclaville , pour i'empacquetter &porcci hors de la
maifon. Ces hommts,quoy que coufita en ordure,
curent fort à faire à fouftcnir la puanteur horrible de
ce corps : mais la groflc Tomme .^'argent qui leur
fut promife &payee pour ce feruic'e , leurferuic de
parfan,& lesacouragea. ^irt. Guillaume Fabn de Hyl-
den , dodlc chirurgien , lors eftant à Cologne , &
maïutenani habitué au pays des iliuftres feigneurs de
Berne, m'a affcuré par Tes lettres de la vérité de ccfte
hiftoire. Adiouftant ces mots : Où trouuerons nous
ici vnecaufe naturelle de ccftc puanteur ? Le fang caf,
fé ne pouuoit pas encore eftre co/rompu. Qut: par
la violence du coup le fuft creué quelque apoltcmc
intérieurement amaiîé de longue main , ilelt ccrtaia
que non: car il s'en fuft mooftré quelque chofc ou
par vomiffcment , ou par bas. Mais oune ce>. confi-
derations ,c*cftoic vn homme trefrobuttej de bonus
compieiion, qui nefçauoitquc c'ciloicde maladie , &
viuoic delicieufemcnt. i'oubliois à dire que le mcfme
Fabri rac declaire aooir cffayé pluliç,ur$ fois ( mais
en vain)de ramener ce mocqueur, auiresfois fon fami^
lUr ami) à quelque recoAoiifaQce de fon 4cuuir.
KK 4
888^ Hijloires adwrahles
C'cltoit chîntcr aux morts , car ce maiheuTCUX faifoie
gloire de la pt ofanitc , n: prenant plaifir qu'à vomir pa-
ra es pourries »i puantes : tcllemei tqne auant fa more
il tutaban<!()pnr de tous .es anciens amis. Ec tels font
\^s iu;^eincns redo. cables d ' rout-puillant fur tous ceux
qii*ûb.irc;ic de f< giacc &: paricnce.
Ce'lc il itorem'cr ramentoit deux autres , auenucs
ilyac^ud j )•: ans : &i'ay ccii' les deuxpcrfonnaoes,
L'vo clloïc i yf. iode,eloqacnt,8i de noble famille, qui
pour vncemps le; ut grandement à pluficurs, pour leur
faire co'Joiltc l'-fiaieschofes necclTaires , qu'ils igno-
royei.t io<a*^mrnt. En fin il dcumt fi profane & raoc-
queur.qu' I ne prenouplaifir qu'.i brocarder ce qu'il a-
ïiOètg''aucm'nc& l'j'idement di^queKiues années aii-
paraua-iK. L4 patience diurne -'ayant aitenduquelques
annces,{ccunucr'ittn lulte indignation , Icfrapani dç
maladie vehemcnte,en laquelle i. biufloitau dedans du
corps,raifi rt\itonnemeni:,& àt ftupidiié telle en Tarnî,
qu'il mourut comme v ne befte;8: ouucrc après Ton tref-
pas,toates fcs enn ailles & le dedanf du corps depuis U
poidline iu.qi'ts au f...nd dupent v^^nirt fat irouué
bruilé >5C noir tomme fuye de cheminée. L'autre home,
ignorât, rçais richc,en grâd crédit, hardi parleur à caufe
d«:lvSriche(res,icnant tcufiours bonne table,& bien ve-
nt^ eo toutes côpagnies, for: fuict àfts piai{irs,dcuir t ^
mocqucur , qu'il ne pouuoit rire ni faire rire les autres,
qu'en donnant des coups de bec, fur tour aux gens fim-
p'es , & fi.'îalem::ntfe p-^int à la Maiefté diuine, non
point par bjjfpheintrs & propos manirl:ftement ou^ra-
geux,mdij pai gau(r.Mcs& traits de rifc. contre la fain-
&LZ^z-\ é,! 1 d -îtournât à chofcsin.ligncs. Ayant conti-
nué ce malheureux meftier long temps, laos reprchen-
iî.in.dcs hommes, il tombj malade. Mail ta u s'en falut
qu'ildefiftat , qu'au contraire il continua de gaufTer: fie
poMrle comble, rftantdeuenu fort gros depuis le ventrç-
en bas, & rpeciaknicrjtcspariies hontculcs , fe fit ame-
ner vne de f-s concubines Cn^ayanriamais tlié marié,
jwaisûbufantnlîes & femmes, autant qu'il cntrouuoir,
^ui vouioyenti'oufFf if qu'il i« approchaft) & ia conut
' ' ■ . çharnc/"
ér memoYahles. 889
charnellement peu de temps auant que mourir, conti-
nuant cnfesrifscs contre foi mclmc,fans recognoilian-
fc ni dcploration de fa vie paiTte.iExrr'^V de mes mémoires.
^ O'BJt preueuë^ZT" prédite, fins pouuoir ejlreeuiteft
par yn terrible lugemeutde 'Dieu.
ON a vcu que les enchanteurs àforciers ontprcdic
feaffeuré ie loui de leur mori,& la façô. Sans tou-
cher aux exemples de l'hiftoire ancience, comme du
magicien de Tibère , d'Afcletarionfous Domitian , 5c
d'infinis autres, de noftre temps vn forcier de Noyon, fa-
milier de FEuelque de la maifon de Hangeft, ptnfanr c-
Uirer la mort , alla le iour que Satan lui auoit dénoncé
qu'il feroit tue, en la maifou de l'Euclque , auquel il die
qu'il deuoiteftrc tue ce iour-la. Apres auoir difnc à Ist
table del'Eucf]ue, far la fin furuint quelqu'vn deman-
der entrée pour parler ài'Hucfque, qui commandaqu'Ô
Je fit entier. Ceiui-la parlant à rEuefque,tua le forcier
entre deux portes. le tien Thiftoire de M.Louys Chape-
lain lieutenant de Noyon , & de plaCeurs autres qui me
l'ont afleuré. Bodtnat* ^Jiure de fa "Demonomnme -, chapitre
T. il yagrande apparence que ce m gicîen ou forcier
cuidoiteftre en plus grande alfeurance auprès de TEut^f-
qu^jquc d'aucun antrc:'^: craignoit demeurant fculj'd'c-
firc tué par s6 maiftre,lequ(:l j'ccut l'attraper encre deux
fortes, fans que laprefcncecpifcopalc pend \ç garantir,
heure de l'exécution redoutable àt& iugemcns de Dieu
cltanc venue.
Antiochus Tiberrus de Celenc, renom 'ïic Chiioml-
iien,Pyromanttcn> Phyfiognomc,& grand magicien, n-
Uoit prédit à Gui Balcon, furnommé Ciuene , qu'il fe-
roit tué par vn iîen intime ami , le fôupçonnantdc ti.î-
hifon. Item à Pandolfe MaTatcfte, Icigoeur de Rimini,
qu'il feroit chalTé de fon eftacS: mourroiten extrême
paaurecé. Pea de temps »prc&Pandoifcenuicuxde la
Spo
HiHoires (idmir.^bles
verta de Gui.lc niafl'acrc , & eraprilonnc Aiuiochus, 3N
tendant l'illuc de fes predidttons. Aniiochus faiî cane
cauersJa fille da geôlier , qu'elle lui baille vrcio4)guc
cordepourfe deualcr dedans le tollé: mais en remuant
fcs chaînes vo peu crop fore , on le reprintauant qu'il
pcuftgaigner le haut.dont s'enluiuic l'execunoa à mort
de lui 5c de lâfillc:cous deuxayans eftc dccapicc/. Pan- .
dolfcfutchafîé deRimmi , icmourui vieil dcdatij vn
hofpical.Ainfi Tihertus quidifoit la maie auan.ure aux
aucrcs,fut accablé aulfi de la fienc.Qu^-.lle efficace d'er-
reur , &quel iugcmentdc Dieu furies fappofts de l'e-
fpric de menfonge!>'./oM(? enfts hommes illupr es.
Fierrc Leonius de Spolctcc, médecin renommé pour
fafuffifanccjau reftc adonné du tout à l'allrologie îudi-
ciaire&àiaraagie,fucaucrri par Ton maiftre, elpnt im-
poitcur & cruel, qu'il mou-^rou foudainemeoi,&dcdan$
l'eau.Penfanry donner quelque ordre, quitta PadoiiéâC
Vcnife.afin d'euiter les fréquentes nauigations , le reti-
rant à Spoletic en terre ferme. Toft ap.esil fut appelle
pour vilîcer Laurent de Mcdicis , lequel tftoit malade.
5c confiant en Ton aflrologie iudiciaire iloladirc que
Laurent i elcueroit de fa maladie, & lailTa en arrière les
remèdes coniienablcsSc requis pour lui aider, tellement
<]ucie malade commença idf clincr fort. Sur ce Lazare
de Haifance, illultrems^decin, enuoyédc Pauicen dili-
gence par Ludouic Sforce,& qui arriua trop tard,voyât
la faute commife par Leonius, l'en reprint aigrem^ntr
au moyen dequoy chalcun le rebuta , &ainfichaflédc
Florence, après que Lauréc fut décelé, foit de dcfefpoir,
ou que Pierre de Medicis fi!s Je Laurent cuftenuoyé
gens après pour ccftetFe£t, Leonius fut trouué au pro-
fond d'vn puirs au village dcCaregc, proche de Floren*
ce, ce dit V.loue en fes l)onnnes illufires.
Barthclcmi Codes ( c'eit a dire le Borgne ) natif de-
Boulogne, difcipled^Antiochus Tibertns, le plus grand
deuin de Doftrc temp>,con(l;illa vn aairc maiftrecn ce-
lle impiété, &rvn desprcnîitrs Aftrologuci Judiciaires,
qui ait cflé>depuis deux cens ans, de fe donner bien gar-
de d'cllrccaufc foi-mefme de fc faire rudement tour-
mca-»
(^ memorahleS' 8 9 f
meiircr.Ce mcfrac Aftrologuejnommé Lucas Gauricust
£ucf':)uc,(&. duquel \ç.s osLiures ionien iumicre)mcrpii-
fanti'auis Je Coclcslc mit à ({rtfler &côporcr les naii-
uités (deplufieuv$ grâds , oubliant la fienc.Il ofa fc pren-
dre à Tn leigneur Italien, nommé lean Bcniiuc^e , l'va
des plds cruels hommes qu'on euft fceu rencontrer , fiC
qui pour vn iour coupa la gorge à oix-huicl icunes ^z-
tils hommes , d'vne race lacjucllc il voulait exte; miner»
Gauricusfîc rhorofcopc de ce tyran , lui predilanc qu'il
feroit chalFc de la ville de Fclfine où il dominoit ai^ec
trois liens fîis,8t feroir pauure fin. Qi!C le remède cft( c
d'aller demander pardon ^ confèil au pape, pour adoi -
cir la condition mifcrable , donc il eftoic menacé par \^s
cftoilvis.Bêtiuolc dcfpitéd'vn tel piefage, pour recom-
penfcfic donner cinq fois l'crtrapane trcs rude à G lU-
ricus.quicn demeura tout triUcilé.Qj^iant à Beniiuolc.il
futchalTcde ion eftat par Iules II. fou chafteauiafé , Se
mourut miferable, Rcftcdc voir la fin du Borgne. Il a-
uoit prédit à vn Italien nôûié Coupoo > que bien toft il
aflalîineroir qu'elqu'vn : outreplus <.nqi:is par Hcrmts
iVn desfîls de lean Beniiuole , touchant (a bonne aurin»
turc.il lui rel'pondit, vous fjrcz banni & tué en vne rr r-
con:re dcgncrre. Hermès picqiiédc ce ceup>f5mard' a
Coupon de tuer ce Borgne, mcfcî^antdc.uin & difeur uc
malauanture. Codes aueiti par Ton maifticdefe tcnic
-"lur fes gardes ,& qu'il efloir en grar.d danger de fa ve»
portoic vn bonnet de ferdtlfcus Ion thapcau,& n'alj< ic
iamais fans vne grade efoee à deux mains , de laquelle il
s'aidoir dcxtrcment. Mais Coupon lui iouad'vn icf ri-
bletour:car s'eftanc defguifcen portefaix, \] rfpie le re-
tour de Codes en fa chibre,ôc met dedans la fenure/c
la porte vn petii caillou. Codes voulâi ouorirdc fa c'- f
la porte , cômence à regarder quel eftoit ceO c-rnpefr! c-
ment,& cômcil s'yamufoir,CouponIe furp: êd,&.d'vi,'c
hache qu'il ponoic caduc , lui dst?erre vn lî rude coup
fur la nuque du col , qu'il i'eltend roidc mort fur la pla-
ce : n'alléguant pui$ après autre raifoa de Ion fait ,iî-
jion que c'elfoit pour accomplir , la prediâiion de Co-
des. Telfut lefalaireque le difciple rendit à fonmai-
O^e ^ & le ffuiâ; des prtdi(fiion$ diaboliques. î*. /awe
9 9^ Hi/loir^s admirables
en fis hommes iUuJlres raconte ccfte hifloire.
C'cft pitié que de la vanité ds reniendemct humain,
qui refufe d'aprcndre à fe rcpofer en la prouidencc&
fige conduite du tout puilFant , pourfcrouurnir que la
main d'icelui tient le cours de nos vies , que le nombre
de nos iours cft riere lui, que nous viuons & mourons
à lui fousl'efperancede fagrace , pour obtenir finnle-
went vne vie meilleure. On aime mieux doncques re-
courir à refprit de menfonga» & i'cnqucrir desdifciples
d'icelui de la fin dts iours , donc la conoifTance ( quand
clic fcroit clairement propofse , cequVn tel mairtre ne
peut refoudre ; &c quant à rcfprit de rcrité , d'ordmairc
il nous cnfeigne autrement , & ne veut pas que nous
prefumions de fonder les fecrets,dont la rcccrche nous
tft inutile , & que Dieu a refcruez en fa puiffance) n'en-
gendre que peurs, horreurs&perpleAitez eftranges ea
ramecuricufc. Mais fans defcouurir plus auant ccftc
vanité profane &malhcureufc> dont trop de pcrfonncs,
dehautejmoyenne, & baffe qualité , font cnlorcellczcn
ces derniers temps par vn terrible iugear.ent de Dico,
duquel ils mcfprifent la voix &Iamam, marquons en
quelques exemples , qui en puifTcut ramenreuoir pla-
ceurs autres au lefleur.Les aftroîogucs iijdiciaireç,cm-
befongnez àdrcffer la natiuité de ce grand Capitaine
du temps de nos pères, nommé le grand Sforcc , [ui pre-
fagerent vn mcrueillcux crédit , vne gloire immor lelJe,
& lueur en fescnfans : mais ils adiouftcrent vne claufe
(auffi toufiours à la queue gift le venin ) qu'il mourroit
de mortfoudaine en la fleur defonaage. Sforce pour-
fuyuat vn ioui fes ennemis , eut à trauerfer vneriuierc
nommée Pefcaire , l'ayant paflee le premier pour fon-
der le gué, il retourne , & commande à fon page qui
portoic fon cafqucde lefuiure. Le page cftant au mi-
lieu de l'eau fentic fon cheual fondre » & comment à
crier à l'aide, Sforce tourne bride & lui aide. Mais le
fil de i'eau legaignc, & fart trébucher auec fon cheual
tellement qu'ayâc hauffé par trois fois la main couuene
de sô gStelet, pour implorer fecours,fcs gens ne pcurenc
le gaientir , ains il coul^ii fond, & ne fut onq polTibîc
de
ér mémorables» ^9V
de rctrouucr Ton corps. *?. hus en la yie d'iceîtti. FoLucT'^
ait 2. ^.Uu.Sabellic an ht*. de U I o.Enneade.
Braccio de Moncone , vailUnc capitaine, ayant reccu
Ijouuellcs quefoncnnemi le grand St'orce auoit ctté
noyé dedans la ielcaire , en lieu de s'enefiouir femon-
ftra plus trille & penfif uu'il n'auoit oncqiies fait en fa
vie:pourcequ'ayani voulu fçauoir des deuins fa bonne
auanture,ils lui auoyent rcfpondu que Sforce mourroit
Je premier, & de mort violente : mais que Braccio le fui-
uroic de près, bL de mort qui ne fëroit guei es douce. Ea
ces aJieres eftranges,aubout de cirq mois côme ilcon-
linuoit le licge dcuant Aquilc , où il auoit campé dclîa
plus d\n an , les altîcgez lecourus firent vnebraue for-
tic , en laquelle les tioupcs de Brsccio furent desfaites,
& lui tué fur le camp par vn gendarnic des ennemis.'?.
loue en la. yie dt^ grand Sfvrce.
Sophie roine de l'ologne, acouchec de Ladiflas & ds
Cafimir,on s'enquit de l'erpric d'erreur par vn Aftrolo-
gue mag(cié nômé Hén de Bohême, lequel demeurât à
Crocovie,des audcu^-es de ces enfas.Iî rcfpondit que Ca»
fimir viuroic lôguemei, mais que la Pologne fouffrirois
beaucoup fous lui. Qoe Ladiflas feroit grand feigncurj
mais qu'il eftoit à craindre qu'icelui ne viuroic gucre^
Le roy de Pologne fut aufli efleu Roy de Hongrie , ÔC
en Taagede lo.ans fut tué parles Turcs en laiournec
de Varne.Cafimir lui fucceda & fut roy de Pologne l'e-
fpace de 4 5 .ans, ne s'adonnanc qu'à la chafle.j^àf. Crow^r
4» I 9.C7' I9.lttt.del'hij}. de 'Pologne,
Vn aitrolegue iudiciaire, nomméB3{îIe,auertit A?e-
xandrcdc Medicis qu'il feroit tué. Mais vn deuin ou
magicien Grec adioufta de renfort, qu'il Icroit poignar-
dé par va de fes plus familiers, homme greflc , bazané,
tacicurne,&quines'acoinioit de perfonne, Cesmef-
Hjes deuins alieurerent CoTmede Medicis,ayan$confî-
deré fon horofcope , qu'il feroit grand feigneur & fcs
dcfccndans après lui. Cela fc difoit en prefenccd'Alc-
jandrc.Sc de Cofmc aulH , lequel en hochoit la teftc à
cayfs du peu d'apparence qu'il y anoit en telles predi-
itioas. Quant à Akxindre , quelques iourj ayan^ qua
8 94 HiHotresaimirÀhles
Laurent de Medicis Ton coufin le tuaft.fon efcuvcr trân*
cliaiu nomme Horace de l'eroulc,malade"de fieurc,lon-
gca par trois io\'> vnenuift que Laurcrde Mcdicis cou-
poit la gorge au Duc. Ces vidons l'induifircnt à en Tai-
re rapport à î^jlchni médecin du Prince, pour l'en aucr-
lir. Palchal n'y fit fjate:mais il trouua le Duc tort mat
dilpofe àefcoucer , dilantque tous fcs domcftiques en
vouioyenc à Lauren": , lequel roiï après fous prétexte de
feiuir au Duc en quelque p-^ariquc honteufe, l'attira en
vnechîmbre,où il le tua à coups depojgnard.'i^./o«w, o'
le Supplément de SabelliCya» t x.l'.it.
Ledixicfme iour de Septembreiç47. Pierre Louys
Farnefc, fils à\i Pape Paul troihcfme, futcuécn fon pa-
lais à Plairance;ccqui auint ajnfi, A caule de its violen-
ces, & infôlcnccs horribles; ileltoitfort mal voulu des
Parmeijns & l'Jaifantins dciqoels il s'crtoit rendu mai-
gre.Somme il Te ceniportoit li mal, que quelques gen-
tils-hommes confpirerent dcle tuer. Pour exécuter
Jeur dcirein,ilsa'tilcrerent des Ppadaffins & couppe iar-
rcts qui les fuiuoycnt par les rues , lur vn bruit que les
viii le donroyent garde dt-s autres , à cauie de quelques
qurreilesenparriculie.-pCharcuns'enqueroit de Tes gens
s'ils voudroyent lenr aider à aui)ir railon d'vn outra^^e à
eux fait parle maiftred'hofteldu Duc ? Ouy.rcfpondenc
les fpadall^ns, & fuft-ilqueltion d'attaquer le Duc mef-
m-. En ces enrrcfaites, &' comme la menée croifl'oit. le
Pape efcruiift à Ton fils qu'il fè donnait garde duditief-
mc iour de Swpeembre j dautant que les altrcslemc-
HrKoyent de quelque mal-heur. Louys eftonné de tel a-
licirilTetncnt , ce iour venu iV. fie porter en vne liâieic
hors de fon thaftcau , engrofle compagnie, pourvoir
quelques fortifications pa Iji ordonne c$. Les coniurc?.
jpjelens ne pouuanr bo-.nemert fane leur coup pour
îors.attendirentqu'ilrerournaft au chaft.au, où ils l'a-
compagnerent, ircme fix d'cntt'cux marchans deuanc
comme par honneur. Si toll qu'il fut entré dedans ils
kuerent le pont leuis. pour arreder la rui(e,& les ePpccS
traictes i'cnuironnerent, lui reprochent Tes tyrannies tt
vucnie4,puis le ruent en falidicrcàucc Ton preftrc , l'on
el'cuyor
é" wemcrablesl 8^ j'
«fcuycr &cinq Allemans de 'a garde. Puis ils fe mettent
à fouiller & piller iechafteau.où ilstrouuerentgrandcs
finances amafîees pvoui fortifier la ville. Sar ces entre-
faites les citadins acourent vers le chafteau , (lemandcnt
<\Mt fignifie ce grand bruit que l'on y entendoit. Ceux
^ui s'en eftoycnt rendus maiftres rcl'foocenc d'enhaut,
«u'ilsauoyentdclpefché le tyran & recouuré l'anciene
liberté de ia viile. Et pource ^u'on ne lespouuoii croi-
re > après auoir eftc alTeurcz qu'on ne les recercheroit
nulicment.iisattache^rent leco'ps mort àvne chaîne, &
l'ayans fait bransle-- quelques tours, le laiche''ent dedans
Jefcllc, où le peuplcarourant le poignardade plufieurs
coup^, foulant ce corps aux pieds, à caufe de la hame ex-
ircme qu on lui portoit. Puis ayart conlulté en com-
mun de ce qui cftoit a faire j enuoyerent demander fe-
cours à l'Empereur. Fc» nand Gonzagae Ton lie utenanc
en Italie, y enuoya fo'iidain garnifon : qui s'eftant empa-
ré de Plâifancejcs citadins turent receus en proteflion,
& firent le Crment à l'Empereur. S/«<^4»,<î» i ^MttMfes
Commen titres.
:fKt ytlL^TlOn indigne ^
furieufe.
ENuironl'an içTjvVn vieil payfand'vn vilage près
de Segur, ville du haut Lymofin,& veufue,ft't foup-
çonné,mais fîuflVment, d'habiter auec fa brîi,ou femme
de fon fils. Là dciTus aucuns fiens ennemis le défère,
rent auSc'g'iiîur iufticier , qui commanda d'en infor-
mer & faire iulticc. l.c pay(an venu en ville pour fc;
défendre du crime à lui impofe , & difnancaaec lo
clerc de fon procureur en vne hoftellerie , s'y trouua
nombre de gaudifî'eurs , qui commencèrent à larder cq
pauure vieillard , lequel picqué de leurs atteintes fe le-
iia de table, feignant vouloir fc chauffer, & ayant affilé
fon coultcau contre vne pierre de lice au manteau
de ia cheminée , le coupa la vtrgc virile à la racine.
I
8^^ Hijloires admirahtes
L'hoftc voyant cefic exécution foudainc s'cfcric, donne
rcfpouuantc à toute la compaga'c(jui cftoic en celle
chambrc,& chafcan demeure cftonné de ce fait.Le pay-
fan s'enfuit & tire droit à fa maifbn demie grand' Ijcuc
loin de la ville, toufîours faignant , fans vouloir qu'au-
cun chirurgien miftlamain à fa playe, de laquelle tou-
tesfois ilgucritrdifapt au refteauoir commis ceft ade,
afind'cuiterà i'auenir le foupçon qo*on auoic fur lui
touchant la femme de fon fils : ou parauanture par dcf-
cfpoir &i defpit,fc voyant mocquc.Si fut-il iuftific.Xo«ji
ifUjon au I Jiu.de fes diuerfes Ic^ons^chap. 3 .
Vn Cadet OU puifnc , de noble maifon en Limofin,
dcfpiié de n'auoir peu conoiftre charnellement certai-
ne damoifcllc vefue,queparauantil auoitcheualcepour
vn long tempsiicclle en fin s'ellant foumife à fa dcshon-
nette volonié, ne fçachani à qui s'en prendre, & mocqué
de ceftc lafchc femme, fe trancha tout net fesparties hô-
teufes,& ne fe voulut laitier traiter de long temps , afia
de mourir par l'efFiificn de fon fang. 11 fuc finalement
•perfuadé de le faire : pa? ce qu'on lui donna à entendre
qu'indubitablement il feroit damné , & qu'il n'auroic
nullclepuiture s'il venoicà mourir en ce defefpoir.
Quelque temps après que fa playe fut guérie, il s'en al-
Ja rendre Capuchmô: vit encores à prçfent. Le mtfme
Cu^on aHltti.^ chap.fufmentioniie.
Nous auons fait mention au premier volome trait-
tam des paffions véhémentes, du baftard de la roailoa
dz Compois près de Romorantin, lequel fe chapitra de
mefitieque k Capuchin lufmeniionné. Que le Icéleur
les confire enfemble s'il lui plait.
Eftant encore grammairien à Orléans , vn mairtrc
il'hollelde l'Euelque de Nantes, lors efcholier en la
Itiefme ville,s'eftat par tune d'amour iettc en vn profôd
priué» & là dedans coupe toute la caufe inftrumentale
de fon amoureufc maladie ,auec telle hemorrhagie SC
perte de fang qu'on peut penter auoir conriaué tant
qu'on l'cuft peu tirer de tel Iieu.toutesfois n'en mouiut
pas. Ce qui mefmcs s'elt faitàpiufieursfort aagez, mr-
priscaaduhure, fans qu'on leur appliquaft prompte-
ment ;
hlcnt aucun fccours. ^.Fran^oU %ot*JJetau difcours de
ten^ntement Cefartettyfecl.J^,
2i ^ TVIi^E efctraordmairementfoulagee.
IE fus appelle auccgrande prière & follicitation de
monficur Philippe Preûdenc en la Cour des Aidcs^
pour aller penier vn nommé M. Philippe de Monia-
gnac,qui a joit cftc blcffc à la Garrigue, prés de Mont-
pellier,au grandcht min de Sommiercs. llfuc porté en
la mailon de monfieur le Baron de Csftres, où ie le pcn-
{ày d'vne grande haraucbuzade , qui lui prenoic au def-
fous de l'os Ilion,prés des coftesfaufles, aucofléftne-
ftre , fortant à i*os pubis, & r'cntroit à la cuifTe du coftc
droit. A l'entrée de ladifte playc, :e irouuay le Coloft
coupé a traucrs,de tout en tout. l'y fis toutes les efpeces
de coufture qu'on pourroit imaginer , fans que rien fcr-
uift,à caulc de la longue diftancc des labiés, & fus con-
traint de le laifler fiituler.D'où Iui<"ft demeuré vn trou
tomme d'vn cul de poule, par où il fait fes affaires or-
dinairement. Les yents au{ïî fortenc par là comme du
fondement, & auec au ffi grand bruit: & pourcc qu'il cft
contraint porter des drapeaux à force , pour recueillir
lefdits cxcremens,qui fortent inuolontaireraent , com-
ine font les yentSjCelaeft eau fe qu'il n*ofe fe trouuer en
compagnie. Pourtant ne lailTe-iid'eJftre en aufTî bonne
difpoûtion que iamais.La matière fécale touicsfois , ni
tnelme les ventofitez,ne fortent par en bas aucunement^
ains par ladite playe. Barth. Cahrol infesobfer$ê.anatomê'
qnes^obferu.l 3.
A Touiierture du corps de monfieur Feynes , iadij
profcfTeur public en rvniuerlîté de Montpellier l'an
IÇ7Î. ne Ictrouuaqu'vnroignon bien formé auec fes
veines & atteresemulgentes. Les vrciercs furent irou-
ucz yn peu plus amples en largeur que de l'acouftu-
mee. La raifon de cela cft qu'il faloit que ledit rein flc
^rretereferuilTent de deux. De l'autre cofté nefuttrou-
uce marque quclconque,ni trace de rein , moins d'vrc-
tcres. Vnfîenferuiteur fut tue, vn mois parauant que
luidecedaft. Nousrouuiilh)es& ne lui trouuafnK^''
8^8 HiHoires admirables
pareillement qu'vn rein. Vray cft qu'il cftoit dcgratt-
dcur incroyable , cftant couché fur les vcrcebrcs def
lombes, & à cliafcjaccofté, tant droit que fencftrc.eftoy-
entplantccsles veines & artères cmuig'-ntes ,enferablc
les vreteresrce rein faifant office de deux. Lemejme en
i'obferuation 1 4.
N^KFT^^i G E S.
L*An mil cinq cens &vn, Pierre Aluares Capral,ca-
pitaine Portugais , partitdu Brcfil le cinquiclmc
iourdeMay. Leringcqnatriefroedu mefme mois les
matelots virent vn brouillas feleuer foudainemcnt &
le ciel le couurir d'vn nnage efpais de tous coftcz. Co-
noilFans que la mers'cfmouuoir,& les vagues s'cnfioy-
cnr,ils commencèrent às'eftonner& à baiffcr les voi-
les. Mais labourafque futfî foadaine,qu'auant que la
plufpart d'eux le fulPent apreftez pour euiter ce naufra*
fc , quatre nauires furent tellement battues & prellees
es tourbillons impétueux , qu'elles allèrent (ous les
vagues,& coulèrent tellement en fond, qu'âme viunn-
te de tous ceux qui y cftoyent n'efchappa. Ce fpedacle
contrifta merueilleufcment ceux qui cftoycnt es au-
tres nauires ,voyan$ leurs corr.pagnons,compatriotte$,
parens & amis, engloutis par ce «oulfre horrible , fans
pouuoir fecourir en telle calamité ceux qui perifîbyent
d'vncmortlî eftrange. Ces nauires relUns au nombre
de fepc, après plufîturs regrets & lamentations , prin-
drent vnc autre route, & par vne frconnc tourmenta
furent d^recheFcha[r;es &cfcartec-s. Finalement le 17.
iour dt luillet , fix nauires le recrouueient enfemblc,
qui reprindrent leur route. L'autre feule fut chalfec
des vents (1 roidementqu'elle alla lufquis au gouifc
d'Arabie, puis reuinr en Portugal auec Gx hommes feu-
lemenr:carles maladies, la faim, la foif, infinis dangerf
& tempcftcs auoycnt fait mourir tous les autres en grad
nomhr c.Oforius uu t.Uu.del'hiîé.de'Portu^raLfecl.rs .
L'An 1 5 08. le capitaine Aquilairc peritauec fa naui-
rc, fie fut englouti des vagues prés de Mozambique.
Ofjruti
é* mèmorahlef. 8^9
Ofàritti au ^Jiti.Jèctu.Van i ^ i o.vn ambafTadcurdu roy
de Cambaie en la coite de mer d'Arabie apporta icctres
de cinquarie Portugais au viceroy de Porcugal es In-
des OricnraKs, ptilonnicrs deceroyjef^ucls efcriuoy-
cnt qu'à leur départ de Zacotora Tous la conduite d* Al-
fonfe Norogr.e , ils auoyent cité trouflcz d'vnc! bouraf-
cjueen la cofte de Cambaic , tellement que leur vaif-
fcau s'citoiC brifé. No. ogne& autres qui s'eftoyenc
iettczlur des ais à la merci de la mer, furent engloutis
des vagues. Mais ceux qui ne bougèrent du Vailieaii , a-
pres que le lias fc fut retiré , le fauuerenten terre ferme
•où ils furent prins des gens du pays & menez au Roy,
Ofori«4 au 7 AiH.de ui meftne hiJJoireyJeÙ. i i .
Quelques années auparaiiant , Vincent Sodrecapi-
taine Portugais > s'eftant arrefté aucc cinq nauires ea
certain endroit peu leur de la mer d' Arabie, fut eïhor-
ré par les gens du pays de ne demeurer pas d*auantage
en ce lieu : pource qu'au commencement du mois de
May fe leuoit vnventde Nord, lequel briibit& enfoQ-
droit tous vaillcaux qui fe trouuoyenten ce haurc ; 6C
qu'ils ne pourroyent le gai antir , s'ils attendoyent ce
temps. Vincent Sodre ne tint conte de tel auertifle-
lïient:& combien qu'iceux le fuppliaffent , & hs autres
capitaines le prelTaiTent , difans qu'il ne fafoit pa$me(^
prifer vn tel confeil , qui fe pouuoit aifément exécuter:
que Ton pouuoit mener les nauires en voerade plus
feure vers le Sa : que le changement fe pouuoit faire
fans danger : & que tous ceux du pays iuroycntque c'- «
ftoitcercher lamoitdô demeurer là plus long-temps:
neantmoins Sodre demeura fiché en Ton opinion. Les
capitaines des trois autres namres>inc!ignez de telle ob-
ftination , quirterent Sodre le dernier lour d'Auril , &
fe retirèrent en vn autre endroit de l'Ille. Vincent Sodre
s'amufoit à fjire bonne chère en fa nauire , fans fe lou-
cierderien. Mais tout foudain s'elleua du Nord vncré-
pefte , laquelle ietta &froiila les naui'cs contre le riua-
ge:& les vay;U6S furent (i hautes, que pi elqucs tous ceux
«juicftoyéc es nauires furent no>«:z:entre3utrcs ce Vin-
ÇGUiUion frçic furcac cnglounis des ondes, fleurs
k
5 0 o HiBoires admirahUs
corps morts ictte 2 abord aucc les autres. On cftimc
que par vo icgcmentde Dieu Vinctnt fu' ainfi ch«ftic:
dcfaif o • ne trouua depuis pièce quelconque de l.n bu-
tin. Car ap es que les naairescurcuc eltéb'ilces, iamer
ieita au nuage ic. cables, requ:pa^e,lcs malli, les ton-
jica x,lcs aix;rnais en iictrouua um.is l'or butiné, ni
ch .^Icaucuiiedepns , ni coftre qui qu'il fuft ue ceux où
cftoiciul'errezies meubles de valeur, Oforiutau iMurt
L'an 1 5 1 1. Alphonfe Albuquerquc, viccroyde Por-
rugal en l'Inde Orientale faifanc voiic du fort de Mala-
ca vefj Cochiin , auec quatrenauircs , cinglant au long
de Sumarta » yoc tourmente ioudaine le côiralgnit iet-
tcTÏes anchresau premier portque les nauircs peurent
gajgacr. Mais ks vagues iaillilToycnt d. telle roideur
& Il haut , que l'on ne poUL'ou alFcurer la nauire capi-
laineifc , quelques anch^es que l'on ieitalt : fi que don-
nant contre vn roc caché fous les ondes eles'ouurir, &c
lap'ouècoiomcnça tbudain à puiler. Lapouppc arre-
ftce iur le 'OC ie moiiitruit au dclTus, mais en telle for-
te que la fent ne eftoir pleine d'eau , & tout ce qui y c-
hou fut ertgl -uti de Ja mer. Quant aux hommes, ils
gaignercni le h.iuc de la pouppe;ccux de la proue, fca-
tans qu'elle cnfonçoic , em.poignercnt des aix& ton-
neaux , a l'aide dcqiioy vn^ partie fe fauuaau riuagedc
Paccm,les autres pe.ircnt. Il eltoir nui£t, &rob:curiic.
fcmbloJt plusefpaiffc qucdccouUume.Les t urbiUons,
tonnerres , tSc fouiaroyans ciclairs citonnoycnt tous
Ceux delà Rotie , qui ne penllycni à autre chofe qu'à la
mort , &. auec vœjx , prières, Cl is croyables en l'air,
fanglûts 6l larmes ^ dcmâdoycni milvricoide pour leur»
pauuics âmes. Le vjccioy Albttquerque, cmmi ce nau-
frage , voyant vn fort icune garçon près de foy , preft
d'eftre noyé par les vsgu s qtii tmroycnt dedans fa ca-
pitainefle , le chargea ùc tint fur fcs clpaules , iufques à
ce que d'vne autre uauiie l'on fullvcnu au Iccours , ai*
fant que l'innocence de ce garçon l'afleuroit d'efchop*
perde ce naufrage .parla grâce de Dieu. Sur ce on de-.
îtache yn el^uif de la nauirc d'Alpocoie * & à force de
rames
C^ memcrahlesl 901'
rames îcs matelots approchent, (iefgagent Albuqucr-
qucjlc chargêt auec le gai (^ô & les g ns , puis les met-
tent çnc^ftc nauire. Grégoire N< gnez de Léon, capi-
taine d'vne autre uauiie , fut emporté au loin pa'^ la
tourmente. Ceux 4111 cftoytnt en la nauire de Simon
Martin, où il n'y auoit que treize Portugais ( ie> autres
cftans de laue ek. de Ma'aca ) voyans ces treize dcfruez
de tout fecoiirs fe ruèrent lur eux , ti fur leur capitaine
griefuement malade alo- s , & 1<îs tuèrent. CViat«e matc-
Jots ayans geigne «/n cfquif le fauuerent au riuage de
Pacem ; & quâc à la nauire elle fut poulTee vers vn porc
loin de là, où les vagues i'engloutirét. Toutes \ç% richef-
iès conqnifes parles Portugais en Malaca périrent lors
<n la mer. Ofouui au l l'm.feCl .9 .
Soares, gênerai de la flotte i^ortugaife^voulant en Tan
IÇ I 7. entrer au goulfe d'Arabie,vne toui mente fondai
nele repoufPafi funeufement , que peu s'en falut que
toute fa flotte ne cQulall en fond.Aluarcs de Caftre com-
niandoij en vnc grande nauiie fort chargée , entre tou-
tes celles de la flotte(car il auoit prins trois barques, &
fourre dans cefte nauire tout le butin d'iceiles ) qui fut
engloutie des vagues. Ceux qui eftoyent dedans péri-
rent tous. Quelques iours après vne autre tempeftc tref-
impetueufc pouîîa la flotte hors de route & à cofté op-
pofire:tellcmencqu'vnc autre nauirç auec tout ce qu'elle
portoit coula en fond > cftant furmontce des flots delà
mer eltrangemenc ermcuc.^» lii*. i i ,fetl. 3 .
Au mois d'Odlobredc TanMii- tiois nauiresen-
uoyees par Menefcz viccroy de Porcngal en l'Inde
Orientale,pour aller d'Ormus en Goa , s'eftans arrc-
ftees ptesde Mazcate pour puifer de l*eau douce, fe le-
uade nuift vnvcnt de irauerfc fi furieux & violent,
qu'il chafla longue efpacc de temps quelques naujres
de Mores de colÇé & d'autre , ronuerfa fur terre beau-
coup de maifons , & en Tefteodue de douze lieues de
pays fît dommage de la valeur de cinquante mille du-
cats. Outreplus il pouffa fi rudement contre quelques
cfcueilsdemervoede ces trois nauires , qui n'auoit
plus <iu'vQc anchre , qu'elle fe bïifa ôc périrent aucuns
LL 5
jjb¥ Hifioires admirables
^c dedans , entre autres Edouard Ataidc , qnî en cftoll
•Capitaine, vn(îenfils,& autres de* principaux./iw.i 3. d^
l'htj} .de'9ortugal-,feCi. I t.
Pierre de C.iftre ayant pîifTé à Mozambique l'hyuer
de cefte année i ç 1 1. fur le printemps de la fumante
partit auec le capitaine Galuan, & tint la route Je Goa,
oùil« furgircnt cnuironlecjuinziefmc iour d'Aoult:
comme ils prenoycnt terre la mer cômence à s'elmou-
uoir & tourmenter de telle furie,quc ceuïdc Goa com-
feflerent lî'auoir iamais veu vne li cruelle bourafquc,
tellement que le vailTeau de Caftre cuida périr plarieurs
fois, & quelque fecours qu'on lui donnaft ne fccut ia-
mais gaigner ie bord Tans faire icâ: .-tellement que tout
ce qu'il auoic butine çà &: là fur rcrre retourna dedans
]a mer. Il fauua à toute peine quelques bardes & mar-
chandiks aparccnantcs au roy de Portugal. Qu^ant à lui
& Tes gens.iisprindrent terre, après grand trauail,ayans
ainfifait naufrage à la dcÇccTMc.yimvefmcliu.fefi. 19.
Peu de temps auparauant , les lortugais conduits
par ce mcfmc capitaine , firent vn butin valant plus
de deux cens mille ducats , furquciqaes Mores qui
lesauoyent alld'Uis. Mais il auint que les vaifTcaux
furicfque's ce butin fut chirgé s'crtans^icfVachcz, cou-
lèrent en fond auec tout ce qui eftoit dedans , telle-
meot que ce capitaine & fes gens s'en retournèrent 4
▼ uide,n'cmmenansrien à Mozambique que force Llcf-
ÎQT.^u mefvie Hure.
Antoine Tauarc, capitaine Portugais , ayant inique-
ment endommagé à coups d'artillerie les inluîairesdc
Bandan , fat au me'.me temps acueilli en leur port d'v-
ne bourafnne qui le poufTa de telle roidcur en la coftc».
que fon vaillcaufc rompit , tellement que lui&les
iicps gaignereot le bord à toute peine. Les infulaucs
clefpitez contre ce capitaine & les gens àcaufe de leurs
brauades,lej voyant lorslî malaccommodezjlciu cour
furent fus, taiilans en pièces le capitaine i$c tous fcs foi-
datS.^M ynefwe I114.
Ledivhuifticfmeiourd'Aurilderao i çi 8.1a flotte
de Portugal, çompofee d'onze oauires , quiportoy-
c»|
éf tnemorahleS' 90}^
cnt trois mille foldats ,& grand nombre de gentils-
hommes & capuam'-s , partie de Lifbonne pour alle^
aux Indes , auec Niignez de Cugne ordonne viceroy
Deuantqiie ccftc floue aprochafc des Canaries > lana*
uirc du capitaine lean Frcire coule en fond, par l*acci-
dentjquis'cnluit. Elleeftoit fuiuiedc la nauirc de Si-
mon de Cngne, dcfigné airiiral , laquelle poulTee d'vn
vent aflezforr, heurta par deux fois fi rudement Pautrc
(fans que le pilote la dcftournaftjcomme il cL.ltpeu ai-
fement fairc)quelaprouës*entroi!uric , & en moins"
d'vne heurcfuc fî pleine d'eau qu'impolîible fut met-
tre hors le bafteau , & eut-on à fane à ieitcr i'ef-
quif,dedâs lequel entrèrent le capitaine auec quelques
vns des principaux 5r plus habiles. Quant aux autres,re-
ftans en grand nombre, il fat queftion d'auifer aux mo-
yens de fe fauuer. L'vn laifilToit vn cofre, l'autre vne
quaiffe , & à coups d'efpee charpcntoyentdelTus pour
s en accommoder.Dôt plufieur s furent blcffez moriel-
Iemcnt,tant ils fc preiFoyenr, chacun s'eltimaot heureux
depouuoir tenir vne planche pour fe meure dcfl'us à
l'extrémité qui eftoit proche. Car finalement les vaguer
vindrent à couurir tellement la pauire, qu'elle coula du
tout en fond auec des cris horribles de cet cinquâte per-
fonaes,qui deualercnt en la mer auec ce grand raifleau.
Entre autres ne font à oublier vn mari & fa femme , qui
menoycnt quâd & eux trois ieunes cnfans. Le pcre & la
mcre voyanslamort prefente mirent leurs enfans au"
jnilieUj&s'embrafTanseftroittemétces cinq cnfembic,
auec des clameurs qui perçoyent les nuets , périrent
quand &le refte,fans que les autres nau^res peuffent en'
approchera teps»pource qu'elles en eftoyét à vne lieue
loin.Mais voyant la marée baiffee, chafcû acoùrut prô-
ptcmeot en des efquifs.&fauua-on cinquante perfon-
nes qui fe tenoyent à des aix & autres pièces, attendans
la volonté deDieupaimi les vague*:. Le pilote , caufc
de tout le maljfe fauua à nage , 5: ne fut chaftic d'vne fî
mal- hcureufe faute , pource qu'on ne fçnuoit bonne-
ment comme ce naufrage ei^oitauenu , &n'cndefcou-
Urit-OD rie q^uc fort lôg ci^ps aprcs.Vn autre vaiffcau du
LL 4
'$0 4 Hifioires admirables
Capitaine Sylacirc , cinglant d'autre vent que la flottCjT
alla furgir au long de Sofala, eu il crouua de la vafc qui
l'arrcfta,& lesfoldats voulans prendre terre furent tail-
lez en pièces par certains Mores, qui les attcndoyentà
ladefcente. Le capitaine Saldagne fc rendit au port de
Batiicala, ayant perdu foixantc hommes , morts de di-
fctte & de maladies. Azambugc fit naufrage au bord
4'vneinette,pres de Mozambique, mais les pcrfonnes fç
fauuerent,ayas perdu le nauire,fon équipage, leurs bar-
des & viures. Quant au viccroy.comme il f-nl^oitaigua-
dcau portde S.Iaques,presde riflede S.Laurenc , fur-
uint vne tourmente qui fitefchoiier fa nauire,tellemene
qu*ellepcrit,cxcepcez les gens, qui fuyent recueillis e4
deux autres nauir es. ^u 1 8./*»<>j'tft7.i ^.
Enuiron le vingticfrae de Septembre du mcrme ai|
ICI X.trrize moyens vaiiTeaux & me galUote partie de
Cochim furent pouffez d'rn vent de traaerfe contre la
coftcde Calecut, àl'emboucheured'vne riuiere nom-
mée Chatua,où tous ces vailîeaux febriferent , les fol-
dats noyez, ou tuez, ou menez prifonnicrs à Caiccnt,
En ce mefnielmre.fecl. 1 1 . j[^'annec fuyuante, la nauire du
capitaine Gat fias Henriqtiez,ayantefc happe le naufra-
ge par deux ou trois Fois, arriuee près de Cochim , ne
pcut(a caufc qu'elle cftoit trop grande ) entrer dedans
Je canal , tellement qu*on fut contraint la laiffer à Tan-
chre. Mais tandis que Garfias fe refrai fch-fibit en terre,
Je vent le rcnforça,clont la mer fut fi furicufement agi-
tee rcfpace de trois iours & de trois nui£ts, que lanauire
périt , ou Garfias perdit à fa part la valeur de cinquante
mille ducats, & ne lui rcfta que la cappc & IVfpce. ^<i
Piefme liure,fccl,ig.
lean de Riue,EfpagnoI , homme adroit aux armes,
vaillant ô:hazardcux , ayant trouué moyen d'équiper
vne bonne galere.fe raitdu meftierdc courfaire , & fit
beaucoup de maux aux marchans Geneuois fur la mer
Mediteriânee.On employa diuers moyens pour i*atrra«»
pcr.maisrren'y feruit, pource qu'il eftoitapuyé fur I4
faueur de certains feigneurs quiauoyct grâd crédit au-
teur 4c i*cc3percai; Charles Y-to^s en f Udfcs,r£(pagnc
* cftani
^ meworahles. 905"
çftaot gouuernce parle cardinal Ximencs. Sur ce auin^
vncobâcnaua] enac l.sgalerts de Gènes & celles d'hf-
pagne,parmilrrc|uelles elloitce leande Riue. fn iccl-
îe hs Gencuois bnl'ercnr dsux galères Efgagno'eSïI'vnc
«Jefquelles cou'a au forid,& firent autres dôraages en fç
«îcfendantde i'iiiLafio.T de Bcrengnelie amiral Efpa-
gnol. S'enfuiuirdelàvn edid da Cardin2l,of>anc le
trafic aux Geneuois> lefcjueJs curent recours à TEmpe-
rcur.pour faire leur 3ppoincemcnt;ce qu'ils obtindrent
en confideration notamment de la perte qu'ils auoyenc
faite. Car leurs galères, qui auoycnt ainfî combatu, n'o*
fans reuenir à Gencs s'cftoyent venu refraifchir au porc
deVillefranchc près de Nice , où elles auoycnt efté a*
cueillies d'vne fi furieufe tourmente , que la plufparc
ayans eftéfracafTees , il y eftoit mort plus de trois cens
hommes engloutis des vagues, fans pôuuoir les fauuer,
tant la mer eftoit agitée, ^luares G orne ci U4 au éJiu, des
fiits CT* dits mémorables du cardinal Ximenss.
Enuiron l'an i ^ y i .efiânt(ce dit Bcnzo)en la cofte de
lanouuclle Efpagne , ie trouue vn nauirc preft à faire
voile,&. me mets dedans. Ayans défia nauigué quelques
iours, comme nous n'eftions pasloin de l'ifle de Cuba,
voici vne groiTe tcmpeftc qui nous prend, & poufTe no*
ftre nauire contre la cofte, là où il alla en pièces. Prcf-
quc tout l'argent & la marchandile qui eftoit dedans fc
perdic.'touiesfais les hommes fc fauucient dedâs la bar-
que. Auec ce petit vaiffeau qui nous eftoit reftc, & que
nous racouftrafiTies au mieux que nous peurmcs , nous
trauerfaftîies legouife auec tous les trauaux & dangers
que l'on fçauroit imaginer, & au bout de trente-quatre
iours gngnafmes le portd'Auana; là où nous péfiôs biê
trouuer encore la flotte d'Efpagne. Mais il y auoit défît
kuiâ: iours qu'elle eftoit partie ie ceftc rade , pour j'en
retourner en Efpagne , & en eftoit gênerai vn nommé
Diego Gcrirano. Or à grand' peine auoit elle encore
fait la moitié 4e fa route , quVne tourmente lui furuinc
C terrible, que de dix-huift vaifTeaux qu'elle auoit s'en
perdit treize dedans legouife , dont iamais on n'oiiii:
Qoaudlc9 depuis.U y auoic dedans l'ynde ces yaiiTcaur
90^ Hifloires admirables
VM gouuerncur de Panama , nommé Claul/To , &-tî<:uX
Auditeurs du nouucauroyaiimede Grenade , que l'on
cmmenoit prifonniers en Efpagnc , par le commande-
ment duroy,à caufe desconcalfions 5c pillerics qu'ils
auoyent commifes en ces pays-latmais tout cela pccit.
Ily en eut deux que la tcmpefte emporta par l'Inde, &
les ietta prefques toutes bi ifees à la rade de S. Domini-
^le.Les autre* trois furent chaflVcî en Efpagnc, & y en
eut vne qui alla fraper contre la cofte de Portugal : tou-
lesfois vne partie des hommes qui eftoyent dedans fc
fauuaâ terre. L'autre gaigna le port de Caliz.&y entra
fans dommage. Larroihefme qui eftoitl'Amiralc de
ceftequipage,fe perdit tout auprès de S. Lucar de Bar-
rameda , &y eut près de deux cens pcrfonncs qui s'y
noyèrent. Lcgeneral Diego fe fauua auec petite fuite:
mais defcendant en terre il fut ferre en prifon, ôc dégra-
dé de fes eftats.^<* l.Uu.chap.%^.
L'an iç<î^. les Danois & Suèdes continuans la guerre
nauale qu'ils auoyent les vns contre les autres , fe don-
nèrent bacaille , comme ils auoyent fait au mois de
luilletderanpreccdent.&apres s'eftrc rudement bJt-
tusenmcr vers Gotlande&ledsftroitde Suéde, fe re-
tirèrent auecpcrte prefques efgaic. Les Danois yayans
erdu l'vn de leurs principaux chsfs , l'amiral délibéra
efaire enterrer à VVifbo, ville de Gotlande. Pourtant
femit-il àla voile auec les nauiresde Dsnemarc & de
Labec vers ceIieu-Ia,quoy que legouuerneur de i'ille
l'auertiftSc le priaft de ne mouiller l'anchre en ce port
qui cftoit très -dangereux, à caufode fcs fablons mou-
u-ans.Là Jcflruss'cflcuc vne tourmente eftrange aucc vn
horrible tOLubilion de véts>qui engloutit prefque tou-
te ceftcflotte,&perircnt lors les amiraux de Danemarc
& de Lubec auec neuf mil hommes, d'vn naufrage mi-
ferable,& merucilieux entre cous ceux de noftre temps.
"Dauiil (^IvjtreM au i.i,l:u.deft Chronique de Saxe.
Les AmbafTadeurs du roy ds Suçde ayans traite de
quelquetrtfueauccceuxduducdeMofcouic, fur le re«^
tour, voulans paiTcrvne large riuiere nommée Ncruâ,
Iccinquiefflaeiourde Nouembreiî Sj. montèrent a-'
ucc
l
é* memorahles. 907
uc« leur fuite en vn vieil bafteau , & chargèrent encore
quelques pièces de camppgncEftansau milieu du rieu-
ue, par pafletemps on delchargc ces pièces. Sur le ba-
fteau,ou entrouuert par le bruit d'icelies pièces, on par
autre accicent, vient à fe rompre foudain,tellcment que
dix-huidt. de ceux cjui eitoyent dedans furent noyez:
entie autres Pc nius delà Go.; de, excellent feigncur , &
lieutenant du loy de^uede en diuerfes guerres, où il s'c-
ftoit poric vâilianniment , auec hcureni fucccs & vidtoi-
ics notables. Quelques gentils-hommes y périrent auf-
fî, nommément le conful de Reuel en Liuonie , perfon-»
nage de tres-grandeautoticé en ces pays-là.*/4» xjMu.de
la mefme Cbroiique-
Chriftierneroy de Danemarc, beau-frerc de l'Empe-
reur Charles V. ayant entreprins guerre à toute ou-
trance contre Gaflaue rcy de ^ucde , à câufe de les pré-
tentions fur le Royaume , au commencement dei'an
1 511. fit vne ordonnance, portant exprès commande-
ment à tous gouaerneurs & capitaines de places fous
fon obeifî'ance, de faire mourir fans remifllon quelcon-
quc,& prcmpicment, tous les Suèdes qu'ils pourroyent
attraper, notamment lesgentils-hommes. En vertu de
ceft edit fe commença vne terrible boucherie en diuers
endroits , donts'enfuiuit vne rres-cruelle guerre des
vn$ contre les autres , àlaconfufion finalement de
Cbriftierne, qui fut chalTé de Suéde & de Danemarc,
puis mourut en prifon. Or entre ceux qui effayerent de
ffe garancii de reilc violenre, Aruidus eiief:que d'Aboen,
conuoquaplufi-urs gentils-hommesde Finlande, vaf-
faux du royde Suéde , aueclefquels ayant communi-
qué , Itur lefolution fut de fe retirer en Suéde , lans at-
tendre qu'on allaft les prendre & exécuter à mort les
vns après les antres , n^eftans pas en lieu feur pour pou-
uoir refifter. Pourtant l'Euefque leur ayant donné le ré-
dez vous.eux s'y trouuerent auec leurs ft:mn'cs,erfan<-,
&tout ce qu'ils peurcnt emporter de biens meubles,
puis s'embarquèrent , faifans voile en Suéde. Maisa*
cueillis d'vne horrible tourmente , lis firent naufrage
|»rcs d'Qrcgrondc , en l'Ifle de Vigge, & périrent tous,
9 o s Hifloires admirables
fors quelques matelots , qui fe rauuerent à toute petn«»
& par moyens extraordinaires , pour publier les nou-
Uelle$ de ce pitoyable accident. Damd Chjtrett4 a» ^Mu,
de fa Chronique de Saxe.
le reprefenteray tout de fuitediucrs autres naufrages
qui me ramcncoyuentdVneparccequc ditlt Pfalmiltc
«u Pf. 1 o 7.ain{î exprimé par Des portes,
Ceux qtùpourveya^erfur la merfe reduifent
Tkaiis desfresles -paiJfeanXf
Et qutfint les manceuures, CT* leurs routes conduifent
Sur l'abyfme de eaux-.
•/f ceux-là du Seigneuries oftêures merueiUeufes
Tout à clair fejvnt -voir:
£t tant d'e/fran<res cas fur les eauxperilleufes
T>efcouurentfon pouuotr.
Mais auflî «d'autant que Tambition & l'auaricc orït
haufféics voiles à plufieurs de tels voyagers & irafi«
qucursïie n'oubjie pas ce qui a cité bien dit,quc
L'auare marchant
Les mers y a cerchant»
Qu'tfouHent lui font
"Defonauarice
Tres'-bonne iuJJice
L^abyfmant aufind.
Que Dieu dôcqucs foit reconu & magnifié en fes œu-
urcs merueiUeufes , &rimbecillitéprefomptueuft de
rhomme,aprene à trembLler,à (c contenter de médiocri-
té, & à fe confier en légitime vocation du Toui-puif-
sit. Au mois de May de l'a i ç 8tf.!e ificeroy de Portugal
es Indes Orientales, & i'archeuefque de Goa , receurenc
par le moyen du capitaine de Sofala & de Mozambique
auis du naufrage de l'Amirale, nommée S. laques , le-
quel auint comme s'enfuir. Ce grand ?ai fléau ayant au
Hioisd'AouO de l'an i 5 8 Ç. doublé le cap dcbôneefpe-
rancc , le pilote fe fit acroire que tous périls & danger!
cftoyentfranchis , attendu mefme que fon vaiflcau a- •
uoir vn vent propre en fa nauigation entre l'iilede S.
Laurent & la terre ferme. Où font neantmoins quel-
ques fifchcux ^zïïâg&s , qu'oa appelle Sdntt delmfs . à
cia«
& memorahlesl '9 09»
cinquante mille d'Italie de ccftc Ifle , à fcptante de terre
ferme, afFcz prcs de Sofala.mais fort loin de Mozambi-
que. L'Amiralcfailanc voile vcrscellepart , le pilote fc
mcfconta,& cuidant eftre hors de ces Bancs, fit comma-
dementaux matelots de dcfployer toutes les voiles pre-
nant laroutc droit au Mozambique. Quelques mate"
lots & foumaiftres.cxperts en la nauigation , n'cf>oyenc
pas de ceft auis , dilant qu'il y auoic encore des efciicilj
& dcftroits périlleux à palTcr, & que la nuift approchât,
dangcreufe à caui'e des tourmentes qui Ce renforcent
foudain, defrndoit d'aileràpleinesvoilcs. Mais le pilo-
te poulie de fon ambition li maihcur,lui dit , qu'ils n'y
cntendoyent rien, & abufant de fa puiHancc commanda
«uxfcruiteurs défaire ce qu'il leur auoit commandé.
Ge qu'ayant eftéfair , & le vaifîeau porté en pleine noi-
re nuid de roideur donna dedans cz% efcueils,où lefond
fut incontinent fendu & arrefté aucc les deux tillacs , le
defTus poulTé vn peu plusauant fut brifé contre \^% ro-
ches.Les mafts réuerfcz , s'efleue va elFr oyabie cri d'ho-
mes &defcmmes:Car il y auoit plus de cinq cens hom-
mes en celle nauire.outre trente femmes, force moines
& lefuites.rien n'apparoiflant là que ténèbres de mort,
tous commencent à crier mifericorde.Fernand de Men-
dofe amiral, le pilote, lemaiftre,fuiuis dedix ou douze
autres, fe ieitent prompiement dedans vn elquif,& pour
cmpcfcher qu'on ne les fuiuift & filt abyfmer, defgainc-
renc leurs efpeeSjmenaçans de mettre en pièces quicon-
ques'en aprocheroit. Ils adioufterent que leur inten-
tion eftoit de cercher les principales pièces duvaifTcau
rompu , pour en faire vn vaifieau commode à recueillir
les perfonnes , pour les tranfporter peu à peu en terre
ferme. Us en firent quelque deuoir : mais ayans trauaillé
en vain , & n'ofans retourner vers le grand vaiflcau,
crainte que plufleurs autres fc icttajOTent parmi eux,donf
s'enfuiuroit fubmerûon, ils voguèrent sti\^ cet re ferme
& ayans diftribué par entr'cox quelques viurcs iette
confufément & en petite quantité d*idan« Telquif , n*
tammcnt de bilcuii & de vin , après auoir flotte dixfrf
îours c(>mbacaa$ k$ vagueS;lafaim;& lafoif,gaigQcvÇ
f> I 0 Hijloires admimhles
à toutes peines vnc col\c d'Af kjoc ,oii nous les \i\Tr6i
pour dire ce cjoi auinc aux matelots & pallagcrs mal af-
,îij en ces bancs & lur vn vaiircau briîé. Le grand clquif
de con'.crur auoit elle ci mmc tout bnfé, ne plus ne
moins que l'Arairalc , pei lonne nclçachani moyen de
le racoultrcr pourt'cn olcr Icruir , vn Italien nomme
C) prian Gnmaidi , donnant courage à quelques fiens
compagnons le ietca tout premier dedans ccft cfquif
auec l'on eTpccSc commence à trauailler. H cft luiui de
huidtante neufaatres qui racouftrent en quelque foire
cclkbaïquc , enuironnee de toutes parts d'vn trcf grid
rombre d'hemtres & de femmes , qui empoignans à
deux mains ieJ bords fupplioyent à grands cris qu'on
les tiraft à mont. Mais les oonante voyans que leur no-
brc eltoit excefiif , & que la barque iroit en fond Tous
ce fardeau, empoignèrent les defaimi^z & plus inutiles
d'entre eux mclmcs , qa^ilsieitercnt hors le bord , &
quantaux aurres leur coupèrent à coups de tranchans
couftelats les bras & les mains , afin de s'en dellraper*
hnpollible ferou leprcfentcr les cris lameniables de
Ces mutilez & de tant d'autres , qui tcnans des c-^ix^
montez fur des fardeaux du grand vailPeau voguoycnt
fur les vagues qui CRglouiifloyenc les vns uprts aurres:
tcllemenf ou'ils périrent tous , ex:epté deux qui acom-
modez de pièces plus coin m'>dc> gnignercrtlc riuage.
Quanf aux rritez en ce bafteau de cor feruc , n'ayans
gueits d^adtelîc ni de moycr. de le conduire , & nuls vi-
ureS) leur vaifican mal caifeutrr &: tiiiant eau de main-
tes parts, lis .-'auifeienr o'elliTcvn chef, auquel l's lurc-
rent de s'âffuietti; iufque<; à la mort inclufiuement. Lui
pratiquant le ^ouuon oftroyé, ncfauoiïvjuc monltrcr
lu doigt ceux qu'il vouloir qu'on milt hors du bafteau:
artotjt foudam iiseitoycnt cnlenez&ians r^fillancc
itezen Li mer pour Icruirde pagure aux poilfons. On
*mmcnça par les malades : en re Icl'quc'S citoii vu
Arpenticr, lequel auoit ddé à racouilrei le bafteau. I*
«11 pri.î que premieriment «jn lui donnait vn mor-
CC\^c viande ^ vn verre de vin : quoy pnns li le lailf»
W\r dc4ans *cs \ .igucs. Ccruia aucic empoigné pouB
auoiif
&
memorahleS' ^li
auoir tout à l'heure mcfmc fcpuiturc , auoit m ficn tVc-
re puifné prcs ce lui, lequel fc leuant lupplia ce chef 6c
fcs officiers cjuc Ton ailné euft la vie fauuc , & que lui
puifné tinft fa place: alléguant que fonaifnécftoit plus
lage,plusinduftrieux, pour prouuoir à leurs foeurs &;
maintenir la famille. On accepte Ton offre, & eft ietté
hors le bord:mais Dieu le fortifia tellement que l'cfpa-
ce de fix heures entières il fuiuit à nage le bafteau , du-
«juel s'il approchoit trop prcs on liiiiendoit des coups
d'cfpec pour le tuer. Enfin il empoigne vneefpee nue;
& quoy qu'en s'approchant on lui euft coupé la main,
{î fit-il tant que les pafTagcrs vaincus par la grandeur
d'vn tel courageje tirèrent à mont dedans leur vailfcau.
l'ay veu & hantédepuis familiereraêcces ceuxfrcres en
Ja ville de Goa.Eux &îcs autres ayans vigntiours duiac
foutfert tous les m efaifes qu'il eft poflible depenfer &
redouter, trouuercnt le ur Amiral en terre ferme, & ceux
qui s'cftoyent fauucz auec lui dedans le petit efquif.Ces
miferablcs refchappez de la mer,furët roft après acueil-
ris derouucauxmalheurs : car ils tombèrent entre les
xnaias des Morcs,qui l:s defpouillerettout nuds, & for-
ce leur fut de marcher quelques iours defnuez de tous
moycs iufques àce qu'ils gai^nerent certain endroit,où
le fadeur du Prince de Mozabique & de Sofala demeu-
roit , lequel les ayant vn peu racômodez les fit conduire
en Mozâbique,pour gaigncr de là quelque port en l'in-
dc Orientale. Ou depuis i'ay conuerfé familièrement a-
Oec quelques vns d'entre eux , qui m'ont raconté fort
amplement ce qui eft comprins cideffusen peu de pa-
roles. Il n'cfc Imppa dedans les deux efquifsjpour g.ii-
gner terre, que foixante hommes , encore en mourut-il
de faim puis après vne partie. Tellement que lafolic
dVn pilote fie perdre la vie à cinq cens perfonnes. Ce
malheureux outrecuidéreuenu en Portugal fut empri-
fonné,pui$ rclafché ; pourfuiui finalement par les mau-
diflbns des vefjes & orphelins de tant de maris & pè-
res perdus, il fie voilecn vn nauire dont on lui commit
la conduite Pan 15 8 8.&:peu s'en falur qu'il neperiftau-
prcs de l'iile de S.Thomas. Retournant des Indes en
$ 1 1 Hijloires adtnirahles
Portugaijil fie vn fccond naufrage es cnuirons de ce cap
<Jc bonne efperancejoii ia muirc & lui & cous ceux qui
cftoyenc dedans fu. cm noyfz par vn redoutable iugc-
ment de Dieu , & inftrudtion aux pilotes de ne fc con-
fier pat crop à leurs feus , 6c aux particuliers de ne cofl-
Uoiccr vngain pcnlla'Dlcains iCCDotcaierdc mcdiocri^
té.Iean Hugues de LinJcûtjHoUandon.de Harlem , qui a' de-
meuré piL.lîours années er i'indc Orientale nous adef-
crit c. fte hiftuire es beaux recueils qu'il en a publiez^
comme aulfi les hiftoircs fuiuances.
L'an mil cinq cens huif^antefîx, au mois d'Aouftj
v-nt de Mozambique à Goa certain Portugais qui auoic
efté porté dedans le gallion de Malaca. Celui là por-
tOK quelques paquets au viceroy, auquel il raconta le
naufrage d'vngrand nauire nommé Bon voyage, l'ax»
prccedent>furlonretour des Indes en Portugal. Nous
cltimafmes ce malauenues enuirousdu cap de bonne
cfp-rance,pourcequcle vailîea j eftoit delm.furémenc
chargé. Defai a'^dcrmarcrdu poirde Cochim il re-
çoit neuf '"oude^s d'eau. Pîufîeurs g: ntils-hommes qui
ï'ccournoyent en Porci.'galauec leurs te'moignages 8C
*Ous fi'poir de grandes recompenfes , àracouftumee fu-
^■cnteD'JcIopczen cenauf agc, & aiiec eux l'ambafla-
deur de Perle , qui al'oii en t fpigne confirmer a'iiance
entre les deux rois. llyai;onvn noinb.e ineftimablc
de richcfTcs en ce nauirc,q ji iic mauuais voyage, citant
péri auec les pilotes &:paliagçis. Le moindre vailFeau
retournâtdeCochim enPortugalportcIa valeur d'vn
million d'or. Que peut donquesmoiter iepris du con-
tenu en ces grands nauitcs ? £'. coutesfoisil » elcpalTc
année que la mer n'engioutilTe quelqu'vn d'iccux à
Talier ou au reio'ir.
L'an I s 8 T.l'archeuerq'.je de Goa Ce mit à la voile aa
portdeCochimpourvcai'en Portug.1-. Or la courtu-'
me cft en ce poTr,afin que les t-ibutsdu R-^y ncfov.nt
nullement faudez, que hs nauires font côtraintes d'atj
tendre leur ordre & tous , pour cl\rc chargées. Auinc
doncques après que l'Archeuefquefut parri an mois de
ïanuicr,quc la dernière rcitaai a charger, nommée Arc^
iikias^ .
ér mémorables» 9 1 y
IrkiaSj fut encore arrettee quelques iours après les au-
tr^s.pouicequ'cllant prcfte d defmarcr, les officiers &
condufteurs ù'icel)e,aueiiglcz par grands prcfens, tire
rcnc hois vnc partie de la laburre ( c'eft dugrauier au
f joi des vailTcaux de mcr,pour les tenir en contrepoids
centre \zs vents & les vagues,dont s*enfuit qu- le braa-
(îe cit moins viulcnt ) ti en placed'iccllc mirent tbrcc
pacquets ^ qaaiiliS d- canellc , alors fort chère à Lif»
bonnc.Q^and il cft ccmps de partir, on le fignifîe à Toii
de croni^)c par toute la ville. Soudain tous ceux qui veu-
lent s'em rare) lier le rendent en foule vers le port &vaif-
fcau qui s'dp;efte au départ. Les amis & domeftiques s'y
trouueni: pour faire les accolladcs 6; fouuent les der-
niers aiiicî-x. Cea pa{]r?gers poit:-'/. cudesefquifs, auec
fourniture de quelques viures & couceurs.fe rendent et\
grolfes bâdcs autour du viifleau, lequel les pilotes aua-
rts chargent tant quM peut côtcnir, tellement que t»uc
yeftpleiade perlonnes,baies,balois,quaifrcs , bahus,
coffres du* toiucs fortes-.aufquclles voiiSlures de bagages
& marchandifes entalVces s'employe & pafTefouuenc
vn mO'S entier, fans que les nautonnicrs puiffent fedef-
fâifc- boniiement dcrimporiunitédespallagers & mar-
chansaaares.Le vaifî'eau pleinàregorgtr, vricommif-
falre & infptdteur ordonné de par le Koy, vient & en-
tre dedans, fjifvne protcfte , &dcmande,fîle vaiiïcaU
cft fort &. capable pour porter tous ceux qui y font 5c
leurs hardes ôcmarchandifes. Le pilote & fes gens lu-
rent qu'oui, dont i'infpcdteur prenda£lefigné de leurs
mains. Quelques-fois il fe trouue des matelots fans
veritéimais ii a commilTaîreeftgaîg,né , l'on pafTe ou-
tre.L'â(fte (igné & mis en forme, rinrpc(fTeur comman-
de à hâute voix qu'on leutlcs SiTchrcs , qu'on coi?peles
cordages qui arrcfteut le vaiflèau , & fouhàitani bon
voyage aux marinirrs & pafTagcrsfe retire chez foy.
Cefte nauire dont nous payons mjintenit , ayant hauD
fé les voiles fu: ùiiuie iufquesà demie lieue du portdei
Cochim par force petis baftcaux , à caule que la mer c-
ftoit fort calme, Auirt là dcfljs qiie quelques poules
caciules dedans des cages eu la nuuirC;(rouuans pa/lagft
■ * MM
914 Hifloires admit filles
commencèrent à voler fur le tilIac.PIuficurs y accurenc
& commencent à difputcr de ces poules. Les autres fur-
uienent au bruit , comme la curiclîté porte les perfon-
rcs pour tout ("çiuoir:teilcrnët que les pafTagers & ma-
telot» eltas prtlques tous fur i'vn des coftczdcla nauirc
defgarnic de Ton contrepoids, & n'ayant ae l'autre co-
ftcqucde la canelle légère, coula tout belleracc en fond
par celle part cù y auojt tant de pcifonues , fi qu'elle fc
vid incontinent conuerte d'eau.Tous les homnces irou-
uerenc bien à poinâ: les pctis bafte-ux où ils furent re-
cueillis , & n'y eut de pcrfonocs noyées que les cfclaucS
qui enchaînez par les pieds & mains ne peiircnt efchap-
pcr,& leurs mailhcs n'eu rcn: pas loilîrJcies desleirtr.
On ne fc^curoit dire combien fut grande la perte des
maichandifes & grandes richeflcs de ce grand va-llcau:
les Portugais ayans beaucoup trauaillé pour dclpouii-
ler la terre , afin d'enrichir la mer. Quelques qnaiiïcs
fiircncrepelchtes par la diligence de cei tains Indiens:
mai» outre le coult, ce qui eiloit enclos dedans fc trou-
uagafté pour la plus-part. L'on fit quelque cnqneftc
louchant les cacheurs de caneilc : niais les coulpablts
cfchapperent,& ks petis larrons furent chafticz pat la
bourfe.
Fn l'an 15 Sp.fc le lo.iour delannicr iem'embarquay
en la nauiredefainfte Croix où nous cfiiocs deux cens
pafTagcrs pour venir en Portugal 3c d;: là en Hollande.
Dix iours après nous paffafrats U ligne equinc 6tialr,
& jelêdemaindefcouurifmes lanauirc, ncuiimte fitrfl
Thi mas , qui s'cftoit rrilc à la voile cinq leurs dcu^nc
non£,eftant la plus grande, forte & ridi/ des lii qui en
ce moiS dcimarcrent du p'rtdc Cochim -. pour ter ir
-laroufede letcuren Portugal. Le iroifieîPK iour de
Fcuricr nous approchaiines plus presdeccitc nauirc,
&. defirions parler aux cundu(ftcurs : mais eux nous rc-
conoiflans , &r defpifezquenous îescullîons ratteints,
avansvn meilleur ^'plus vide vaifl'cau fans compa-
r lion, que le noftre.ia vieil , s'cfïorcerent de gai^ner
lî deuanf(a la couftumc ces pilotes Portugais, qui font
oloirc de telles vanitez ) afin d'cllrelcs premiers eu
é* tnemorahles) 5/15
iMllcde fainfte Helaine pour s'y refraifchir&gaïKJir
dcnoui. Mats ceft. nauirede S.Thoraasapprochanc du
«apdc bonoeefperaDcej&repouflced'vn vcntcontrairci
voulut fc bandci cootie , & defployant les voiles fc
mit en plrine mer. La noltre fut contrainte reculer , à
caufedc ia violence des vagues. En celt endroit de l'O-
céan Id lojrmenrceft par fo;s fi furieule , qu'à peine vn
rocher pourtoic il foultcnir (ans bris lechoc des vagues
crcum.^urcs.taut s'en faut quVnchafteandebois , agité
incciraminent , & canonné fans rcia^chc par les fiots
impétueux, puifT:: longuement durer. La prefomptioti
des Portugais jcftimaus leur nauirede S. Thomas allez
robufie p'. ur rabarrerant de coups, les ruina. Car après
auoir citcrudcmrnt battus queicjues iours , leur naui-
rc Fut b. liée & mifeen pièces , &: icdoi de la mer cour-
roucée couuert de pièces du bris, de coffres , ^luaifTes ÔC
corps mores , oue nous vifmcs iictter en pafTant autour
de ce cap redoucsblo non fins extrême horreur & fra-
yeur. Carilyaiioit vue infinité de biens & richefles
dedans cefte nauire , prefques neufue , la plus fo^te ^
grande qui f jft lors pour les Portugais & Efpagnols
îuri'Ocean. l^ourcei^e confîdcration plufîeurs s'y e*"
Hoyent embarquez , entre aut; e? le colonel Pau! de Lc-
me Pcrcire, fort renommé pour auoirferui le roy l'ef-
pace de trente ans entiers es Indes auec grand hc^ncur,
&>. peu de temps aupa'auantdeliuré Malaca fort eftroit-
tement aflîegcc par des ennemis puilFans , qu'il auoic
desfaits. Icciui ne refpirant que plus grands honneurs,
& tant plein qu'il ne fçauoit où mettre Tes richclks , les
cacha dedâs les abvTmcs de la mer, où j1 petit lors auec
tout fou amas:i:em auccfafemme.fcs enfans, 6: grande
fuite d'Indiens & de Portugais qu'il auoit emmenez
quand &rov , pour paroiitrc d'auantage. Au para-
i ant , plufîcurs de nos palfagers fe graitoy-ntla le-
flc , bienfalchcz dcnel'auoir fuiuiau defmarcrdu
pori c!e Cochininnais ^ oyans ce naufrage, & paruenus
à fauu-té , changere;i.d'auis , auoiians que Dieu
fage gouuerueur du monde , les auoic g'andcmcnc
fupportez. Arriuez eu Tlûedc lauide Hrlaine , aprc*
MM »
9jé HiHoires admirables
auuir branflc trois mois & demi far mer , & prcfcjuW
touîk itf iours en danger de naufrage , nous trouualiiics
le* cjuaire aucics nauiresqui nous confcrincîent la pcric
totale Je la fufmcni.onntc.
Ayansfait voile de là pour v^nirvcrs Lisbonne, &
aprochans .-les Canaries, il nous fat cOiiimandé dcprcn-
dicporcen ia Tcrcere , f our nous garanur dcicou- tes
i^uc faifovent lors autour de nous les vaifflaux An-
glois. N'olanscntreprindre au contraire le vingt qua-
triclme iourde laiHcc , nos c nq nauircs & vnc fixitf-
me.qui venou de Malaca>vinfmcs mouiller i'anchrc dc-
Uâc Angra vilJe de la Terccre , au couucri du chaftcau:
d'où nous cnuoyafmrs qaclques poftcs ou vaillciut
légers, pourauertiric rf) de ncft'ediriuee , & at.cn-
drc la volonté. Ni us i^jdoutions fuit ccftc ftaiion,
pourcs qu'au comm'-.nccmentdu mois d'Aoult, ce poic
d'Angraeft ordinairement battu d'horribles touimcn-
ics.Ôc n'cft pointa coijuert quand le vent racrid.o-
ral tire. Alors les graads vaifi'caux , tels que font ceux
qui reuiencntdts iiidcs , mal allez à gouucrner près
des rades, ibnt en grand pcnl. Maii ce que nous redou-
tions le plus nousauinc. Car la nai£t du quatriefmâ
iour d'Aouft ce vent d'aual commence à iouffler de tel-
le véhémence , que lesnauircs furtnr rcuitesà tout
péril. Ouireplds, piclqucs tous ceux qui en auoycnt
charge cftovciu dclcendas en te rc,par vneniaauJifc
couitumc qu'ont les Portugais , & n'eftoycnt icfté que
c^u.elques 7a.et:i auec les efciaues , lerqueU laichercnt
qaciqu-s co.-ps dartil c.ie pour appdier leurs mai-
ftrcs au fecours. Lors on commence a ibnncr toutes les
cloches de !a vi'le , où le peuple menoïc vn honiblc
brait & chacun le lameofoic d'clttangc forte , n'cftanc
pjiribleà ccuxqui rcùoyvrnt es nauiics de prendre ter-
re, ni avîxde.'cci.dus de venir au fcco'. r de leurs gtns:
tant la-mer eftoitagiicvr. Nollre nauire ik fjindte Croix
approchuic de terre à tous coups ; où fi elle euft don-
r.c'ju'en cftoit fait fans rclTourcc , & s'en ail >it rompre -
en dix m:iie pièces ,àcaufccles bancs &elcueil$. Dieu
deflourna le bris d'icelie. Les cordages de celle de Ma-
. iâca
& mémorables. ^ij
lacafracaiTcz , & n'y eflanc relJé fuffifant nombre
d'homracs pour les relier, nipour lettcr l'autre anchre,
après cjuc fon maft fi-t rompu » commence à puiler, tel-
Jem;;nc que l'caa \à couunt mconrincnr. Alors la mer
comme apaifec de ctftctfort , le vent fc tourna , & la
tourmente des vagues !e conucrtit en bonnafTe. Sans
ce changement, c'cftoitfjii des autres naaircs , & ceux
<JU! y eftoycni ne pcnfoyeni plus qu'à quitter touc
pour fe fauuer. Ce naufragi d- la nauire de Maj,aca
fur de perte incftimable , cftanr chargée de richeilcs
àt^ Molucqucs , de la Chine. &de piulicurs îflrs. On
voyoit flotter fur les vaoLtes les quaifles de draps de
foye, de merceries precicufes^d'efpiceries de routes for-
tes. Onfauua quelques baies de poyure, de girofles, de
macis:mais fort interclTccs & g-^lbcs. EnctTcs les pca-
gers firent-ils tout ferrer en h dbuanne, le! lementq"C
I les pauures marchands tombcfcn; ( comme on dit ) de
ficurecn mal chaud, St d'vn gcfuff. e tn l'autre : & qotl-
que pourfuitc qu'ils fceulTcnt faire , aprcs auoir langui
quelques mois pour auoir vn peudercile, maudiUin^
la mer & la terre , ils fc fauuereni panures & chetifs a
Lifbonne Nous ne racontons point lesmifcrescltranges
des autres nauires:d'autantqu6 nous ne parlons iti^uc
des naufiages.
Le dixncuficfmeiourd'OÛobre 1 5 S^.arriuerenren^
la Tcrccre qua'orze nauires Efpagnolcs ,oui teuenoy-
cnt de rindc Occidentale , chatgees de cocheni! jr , de
cuirs de bœufs, d'or , d'argent, de perlef ,& d'anires mar-
chmdifes. Elles eftoyent au nombre de cinquante, p.-îr-
tantdei'Iilc Haujna. Mais au lortir du canal vue fu-
rieufc rempeftccncngloiicit onze > efcarta \ti autres
qui coururent diaerfe fortune, comme relies gens par-
lent. Le lendemain de ccftc arriuec des quatorze, vnc
autre de la flotte de C!i;quantc approthantde l'ifiefuc
attaquée , c3nonnee& mife à fond par vne Angloife,
ayant tué à coups de canon cinquante hommes, ôcfau-
uéenl'efquif cnuiron vingtcinq ou trente aucclcca*
pirainc.Mais toute la marchandifcefttmee plus de deux
cens mille ducats périt $c c»ula en fond auec ic vaiffcau:
9 1 8 Hijloires admirfihlc-s
Ccsquator^e s*cftans mifes à la voile le vingfeptie*'
me du mcime mois pour gaigner Scuillc , furent atira-
peesp ('s la co{i:e d'Èlpagiic paries Anglois ,&cmmc»
nces tn Anglcicrre.
Aa moiidc ijnuier de l'an i ç 90. y-inten la Terccrc
delà nouuelle Elpagne vn vaifieau , dont les pilotes
ôcpalFagcri rapportèrent qu'vne llo:tc de cent nauites
Efpagooies bien chargées auovcc fair naufrage.&elhy-
CDt perles coures , cciic-li feule cxcepteccn la coite de
laFlo'ide. Nous fîfaies les le compte , cjuelamcren
l'an I ç 8 9 ■;i)oit englouti plus à'^ deux cens nauires.pat
ties de ia nûuueile t;'p3gne,dc l'Iile S. Dominique : Ha-
uana,C3pvcrd.icBr.:{î ,1a Guinee,&:c.
£ncc mcime an i^ ^o.la flotte d'Efpagnc ne bougeoit
de Tifle du Corbeau, oùclle aitendoit les reftcs. Sur la
fin de Septembre Te trouiiant complette de fqpi vingts
jiauires, hauflant les voiles pour al'cr vers la Tcrcerei
fut accueillie d'vne tourmente la plus cftrangc &fu-
ricufe qu'on euft ouye de mémoire d'homme , parla
confcffion des Infulaires , lamcr eOant fi couiroucee,
que fcs vagues iurmontoyent le faiftc des hauts 3c
horriblcseftucilsde la Tercere. Les poifTors eftoycnt
iettez vifs fur les rocher & images : les tourbillons a-
yans duré toute vneff maint fans relafchequciconui.e,
auec vn bruit efpouuantabic des fiots s'entrccafLns,
donc tous ceux de la Tercere trannifToyent de peur , &
i*crtois de ce nombre. On ne voyoït que planches,
grortes pièces d:; bcis.&coips moi s floicans fur le^ va-
gues , chacun en Plfls criant milericorde. Nous mar-
quafmes que plus de douze nauires auoyent cfté bri-
fces autour d~ la Tercere, par cefleccmpcite ; & trois
femaines après qu'eUe fut appaifee, les In» ulaires ne fi-
rentautre chofe q'ic tirer à bord les corps morts. Les
tfpagnois auoyent parauant gaigné vn grand vaificau
d'Angleterre ncmm'îe ia Reuengc ; mau elle fut fracaf-
lèelors , & perirenc fcptanie h aimes qui y cftoycnt,
du nombre defquels cnoyïnt .; uniques A::oJois pnfon-
nicrs. ^^ta.irrr<; efToyencdc Gallic«& deB'fcaye. Va
4e ce nombie ^ Aiuaç coipme par miraclç^l^c le iccic de
;out
& mentor ahUs^ ^i ef
tout ce naufrage , & mourut incontinent après. Entr*^
CCS nauiics brifees dVn t.iac terrible orage fut aufîî v
nc Hollandoilè , nommée îa blanche Colombe, de la-
quelle cltoit pilote Corii.illo Martin de Schiedam. En
fanauire efloyent vn capitaine & cent foldacs Ifpa»
gno!s>qui aprjs auoir cfté agitez riidemenr, Sc neant-
moins co.iferucz par l'adrcfTe fînguliere de ce pilote,
fe voyans près de la Tcrcere le coniraignircnr par me-
naces & battures d'approcher du riuagc, eftimans pou-
uoirdeiccndre feurcment. Le pilote c^ui fçauoit le pé-
ril , àcanfedesefcueils & rochers leur refifta longue-
mcc:mais ce furent paroles & prières perdues. Voyant
donc ce fagc vieillard la mort imminente , s'il appro-
choit de terre, il cmbrafle fon fih qui cftoit près de lui
dedans ccftenauire, ôcTexhortede Te laaucr s'il eftoit
potfible , lans fe foucier de Ton perc rairafié de ioars.
Sur ce lanauireeft pouffec à trauerj les bacs & efcueiis
périlleux dont toute ccftecofte abonde , &: fe brifc en
piece%Ic pilote, fon fils, le capitaine , les fnidats & ma-
telots tombans tous en la mer. Les Infuiaires iettoyenc
des cordeaux garnis de liège au bout , pour tirer quel-
quesvns en rerretmaisaucc peu de fucces , pourccquc
la mer eftoit par trop efmeiic : tellement que de tant de
perfonnes n'en efchapa que quinze , encore auoyenr-ils
les cuilles froiffees.iSc les bras rompus. De ce nombrç
furent le fils du pilote &quatre leunes garçons Hollan-
dois. La mer engloutit ie capitaine, le pilote, & tous
les Efpagnols. Quatorze autres nauires périrent es cn-
uironsdes autres Ifles. Les nauires rcftante* s'eflargi-
rent en pleine mer,aprc3 que leurs maft'' furent brifez,
& périrent la plufpart. Somme des cent quarante
fufmcntionneesncs'ea fauua que trente
deux ou trente trois, qui ap/cs infi-
nis maux & périls Ce rendi-
|i:htàScuille& à
Jiifbonne.
fi n
MM 4
'j^ i o Hiflcires admirai le s
TiOTlCHAL ^nC B punie,
A Près la iournccde la Bicoque, où les SuifTc? pcrdi-
'éc beaucoup, l'a lyi t.lefieur de Lautrech enuo\a
^uc:L|ues compagnies d'homme^; d'armes , & fiffirant
n mbre de gens de pied , pour fe iciicr dedans la ville
dr Lodi ,laqoellependanc toute la guerre auoitefté te-
nue pqr le R«>y.Mais la nonchalance du capitaine 6on-
neual,qui eftant de feiour en ce heu- là peu auparauant
ji'a'jou point prouucu au guet,& les Frâçois las du che»
min de la nui6l fc rcpofsns , l*armce Impériale cjut vc-
noir au nicfi-ne inftanr de l'autre cofté ( ayant ciU retar-
dée de marcher pluftoft.à caufe d'vne mutinerie de Lâf-
quenets ) & deuant tous le Ma.quis de Pefquairc auec
Jes piétons Efpagnols , & Pauantgarde le fuiuat de près,
il fc drefTa voeeTcarmoucheaux fauxbourg^.où le Mar-
quis trouua fi peu de rcfî^ance, qu'il entra pede meflç
auec les François dedans la ville, ( ù furent troiiuex la
plufpart des fo:dats au lid,5: fi eftoic enuiron mid'. Vn
autre malheur leur aumr. Le pont de bafteaux quMs a-
uoyent fur l'Adde tiranr à Grcmone fut rompu , à caufe
dequoy il y eut grand nombre de prifonnicrs ,& s'en
fauua fart peu encore qu'il y eut là trois cens hommes
d'armes & troi^ mil hommes de pied. La vilk fut facca-
gce , & au partir de Is Pif.iueron le rendit au Marquis.
Et» confequrnce la Duché de Milan & tout ce que les
François y lenoyent fut perdu pour eux pcn de temps
après. H//?o;r# des guerres d Italie. Le 6Mu.des Chroniques de
Carton.
Depuis cent ans infinies bonnes places grandes &
pentes ont el\é furpnfcs par la nonchalance de ceux
qui deuoyent les garder foigneufement : beaucoup de
batailles ont t P.é r^Tgnees > fur les nonchalans gucr-
ricrs:on a efgorgc infinis hommes , qui au lieu de veil-
ler dorn^'cnc. Les exemples s'en verront es volumes
fuioans^
QCCA-
é" mémorables^, 911
oc CAS I OV. mejjnifeejûit perdre la i^âoire
CT* ia yie,
PAal Vittlly , gf neral de l'arrree des Florentins l'jn
mil qijat:c cens noname neuf, ayant dix imile pit^
tons&îïrand nombre de gens de cheual princ C^Jcinc
^toutes les autres places qui faifoyenteipaulcà la vil-
le de Pile , deuant laquelle il fe campa le dernier jour
de luillet. L'entrepril'c ciloit d^f^cilc , tant pour la
fortcreffede la ville , q'ie pour la valciîr & refolurjoti
des citadins, qui abhorroycntenticrement la domina-
tion de Florence. Auec vingt pièces d'.irtillerie Vi-
telly foudroya la forterclfe , n< mmec Siampace , & la
niuraille tantà main droicle qu*à gaathe. Puis il
donne raflant &gaigne la brelchc , auectel cHor^^
nementdes aflicgez, cu%ibandonn3nt Icsiempars cha-
cun cerchoit à le fauuer à la fuite. Si Vircl'y lors cuit
viuemenrpouifuiai la pointe , ccfte matinée le com-
bloit d'honneur , en lieu que ce fut le commcnccmerç
de fes milV res. Car pcfifânt que les foldaf s, f'^us efp^r-
rancc de pillage acou' royeni a la foule : il arrtlta k nr
ardeur,fairant retirer-Ia plufpart ..les tioupcs : £^ c> ftc
occafîon de victoire eniicre perd! c , donna lojlir aux
afllegez , voyans la première boiicec rsîlcntie , de le-
prerdre courage, &. remonter à la garde <^cs rempars ^
desbrefchcs. De taçonque tranaillant àrcprcndre la
viâioirepar autre bout qu'il irnaginoir plus ailé , l'ar-
mée logée en pays plein d*efl:angs & de marais , qui
font entre la marine proche & la vil!e , &laraircnlu-
ietre aux vents pclblcnticux,vne commune ccncagii a
lui rendit en peu de iours tant d'hommes inutiks, que
le nombre des fains fc trouuant trop foible pour vn af-
fault gcnera],il leua le fiege contre la volonté drs Flo-
rcnrins.qui prometroycnt remplir de nouucaux foldars
les places vacantes. Ainfi la mauuaifc opinion que le
peuple de FloU^cc auoic dcûa conccuc roucre lui, s'âu-
'•N
5 1 i HiftoiYes admir^ihUs
gmcnta tellement , que fous couleur d'auifcr aui <Σ-
partemens des compa«^nics, ayant eflé parles comniif-
faircs de l'armec appelle dedans Cakinc, il y fut arrclté
prifonnier,& delà mené par le commandement du Ma-
giftracà Florence, puis publiquement décapité. tr.Gu!-
Chardin au ^Mu.des'^uerres d'Italie , fe^. I I . où il dcfcriC
far le menutoutes lestaucesdc Vitelly en ce me p'js
de Toccafion qui fc prefcntoii à lui pour le faire grand.
5a ruine procéda d'vn ambitieux defpit conceu contre
les Florentins.
illetrouuerapar leshiftoires de noftre temps que
pluficurs fortes places ont efté prifes, & beaucoup de
batailles perdues par la faute des chefs vaincus qui ont
nicfpriré de belles occalîons de fe garantir & dcrain-
crc.Ce mefprisacouftéla vie à plufieurs , a couuert d'i-
gnominie & de dueil les autres ; comme les exemples
que nous p'etendons produire fous diuerj liltrcs es vo-
lumes iuiuans le monftreront au Icfteur.
0 7^^ G E s.
Î^Npail.int ci deffns des fondées &tempeftes en l'air,
^onù eftc proiaites des hiftoiresqui (e rapportent
auiiître prefenc, nous y adiouftons encore de rcnfott
l'hiftoirc quis'culuTt. Comme ceux de Vitry le Fran-
çois & leurs circonuoifîns fa/Tent venus à Bar le Duc
vn dimanche feptielmeiour de luillet l'an i s 8 3.10 cal-
col ancien, & que ceui de Bar Se des enuirons le prepa-
raflent pour aller le lendemain tous enfemble à fainft
Nicolas en Lorrairte, pour quelque grande folennité , il
(c Icua vn orage en Pair auec tant de tonnerres & d'cf-
clairs fur tout le territoire de Bar, que tous eftimoyent
le monde eftre venu à fa fin. C'A: orage du tout extraor-
dinaire fut inconiincnt fuiui d'vne terrible grcfle,en
telle quantité , que la terre en fut toute couuertç , à la
hiuteur des genoux d'vn hommc.Les bleds qui n'atten-
deycnt que la faucille farcnc ciuicrcment fiacalfcE : les
vi*
f
& TnemorableS' 9 2. j
vignes & les ai bres auHl f n furent tellement battue, que
non feulemenc les fruits en tombèrent par terre , mais
aulfi les fucille$,& n'y demeura aucune cuei!Iette:tclle-
mentque moiflons &: vendanges furent faidles àdcux
licucsautour de Bar. Jlycut auflî telle rauinc d'eaux,
que les fcps des vignes en furent arraciiez & tranfportez
au loin. leati Chajjaiùon , ai fon traité de l' ire àe 'Dieu [urlqi
fethe'i^des peuples Jiu. i .ihap. l i .
"? yL%XiClT>ES puntf.
IL auint à Paris, n'y a pas Iôgtemps,qu'i! y eut vn gen-
lil-homme conuaincu par faux tefruoins non repio-
chez,d'auoir tué celui qu'il n'auoit iamais veu. Se voyâc
condamné par arreftde la Cour, &: fur le pciu<^ c'eitrc
exécuté, i! confefla qu'il auoic empoifonn^ fon père. Le
cas cft- notoire à plufîcurs. /. S. au i Mu.de ft'Demouoma'
nieychap,i .
i'ay veu vn ieunc homme prifonnitr l'an i s <f 5. qui
auoittuér<> fem.meen chcie:e, & auoiteu fa ©race qui
Jui fut intennte , lequel neanîmoinsfe plai^noic qu'il
n'auoit aucun rcpos^eftam roues les nuifts b.-:tto par i-
C-'lli, comme il dilbit. Les anciens teiicyent eue les a-
mes des Gccis fouurnt pourchafîept la vengeance des
meurtriers. NoLsIirocs en Pli t irquc , quePaufonias
roy de Lacedemonr, cfrant à Cor.rtanrinoplc , en lui fie
prcf--nc d'vncieune damoirelle:& d'auiani qu'elle eftoit
filles elle auoii honte d'aller à lui que cliacun ne rcit re-
tiré. Lors entrant dcnui6"ten la chambre elle fii tom-
ber l.i lumicre , ce qui efneilla Paufanias en fui îa'ir , &
penfant qu'on voulult le tucT en tenc bres , toit eiTrcjé
il print fa d3giie,& lua U damoifeiie , fans conoifirc qui
clleeftr-ir.DellorsPauraRias fut inceffamment toMrn.eu
téd'vn efpùc lufqncs àla mort, qui rcirt:mb!o:c(tomme
il difoit ) s la à.âTno\kQ\\c.L€ mefme.at* i .iiu.chup.i.
Alfoofe Diazc E'pagnol, lurifconfulte &: altciïî'ur de
la Rote à Rome, aynnten haine de larc'igion taictucy
IçanDiaic» fonproptwfie.ç , ^arvn alTiiuriapoU
914 Hifloirrs admirahles
acheté àbeaux deniers compranr , cfchappé cîcs maiiij
de /a iullice du monde , l'an mil cinej ccosquaranrc liif,
que ce parricide tut pcrpttré, fjt pourfuiui dclavcn-
gcaacediuine en facoilcicnce.tellementqueran i r s i.
cftanrcn la ville de Trente il fu; trouué mort Ratta-
ché dVne corde au col de fa mule. !^. ^ndré lUnJiorfm
fon théâtre W exemples, pa^r. 453.
Vn marchant Aicman du marqnifat de B adcboorg,
s acheminant pour diuers afaircs en quelque liru , pria
ccrcain fien frère de lui tenir compagoîe pour paflcr v-
ne fordt prochaine de fa demeure, duani que ceOe tra-
uerfede hoislui eftoit fort ennuyeufe. L'autre fc mec
en chemin aucc, &eflans en latorcftp-ie le marchant
dt luiprcfter d^Ti. rallcrs; ce que le marchant dit ne pou-
uoir lors commodément ùire, pourcequc l'argent qu'il
pDrtoit efloit promis à quelques créanciers qu'il slloic
trouuer. Ce frer- erconduir,5i defpitc.fc recnlc,& d'vnc
piftoleradc tue le marchant fon frc'c , puis Vâyùxi: dcf-
pouillés'cn retourne enla iTiaifon. Le lendemain on
vient auercir le m.igiftrat , qu'il y auoic vncorp< en la
foreft. II i'y cranlporte,& riirquclqi!e<: conieclures fait
failîr au corps le parricide, lequel à rinftant confclTafon
crime , lupplianc qu'on rcxt:cutartpromptcraenr,i cau-
fe qu'il ne poutoit plus (upporterles t()urmen5 que fa
conlciencc iui donnoit. Il mourut fort repentant , dé-
clara qae (â VIT trauaillee d'impiété l'auoic mené là.
Sur tout il declc'ra qu'au fornr de la forrft, auis lui fut
q ne fon frère tué l'nppciloit à haute voix. Encemefmt
thatre.^ig.^^^. CeU appel cft la prcuuc-de ce que Dieu
dis:àC^in,apresqu'iîeuctué Ion f erc,ÇXu'as tu fait ? la
voix du fïng de ton frère Ci ie de la terre à moi. Genef,
4- ï o.Er la pourfuicc de la confcicncc de ce parricic'e A-
le-:nan eft enclofeen ces mors, C^as tu faitf comme
au/Ti toute Ihiftoire de Gain cft le procès perpétuel dcf
meurtriers & parricides.
En ce melme qua'^ ;er de l'Alcmaj^ne,vn pciic garçon
tenant en la maii: vn coui^cau , fe laiifa tomber fur la
poiii£le,de telle i oideur quM mourut incontinent après
de celle blclTurc.Le pcTc de retour ^cq U maifoD,fe laifTc
IcU
& memorablesl '9 1 {
tellement tranfportcr de fa cholcre.qu'il tue fa femme,
puis pourfuiui de fa confcicncc dsfcfpcrce fc tue foi*
Vue femme vcfucdela ville de Siranbinguc enSuau-
be.cngrcirv-e par vncfchclur.j: uis sccouchee , fir percer
rcnfjnta i^E^life pour y cftre baptifé.Lc Curé prcteila
^u'ilne bap ifcroii pomt i'enfantj fi on nt lui dcdaroïc
qui en eD oit le perc. Et pource que ce pcrc neparcilloit
point ni n'cftoit nomméj'crif.ini fut reporté à la mcre,
Lquclle en;endant qu'il n'auoii point cfié Lapti.'é, pof-
fedee d^e deftfpoir tua ce petit eiifuu , pUiS s'cftraijf/la
fûi-mefmcd'vn cordeau : l'e^cliolier crucndâr ctHefan-
glante tragédie, en voulut tÛrcà; fc lua d'vn poignard.
Q^'antau Curé, s'àccafanr foi- mcfmc, comii.eoccofioa
de tant de maux, (8c englouti de dc(cfpoir,fe pendit & e-
i\i^ng]a.Làmefme.
In l'a I ^4 7.vneieuncfcmmevefueau pays de Saxe,
■C-hargcedcdcux fii'oledesfîant de Dieu, & ne s'adonnât
âutrauail de fcs mains > comme il conucnoit , femit à
demander raumooe. Voyant que ce meftier ne l'ccom-
modoit pasalfjZjSc que mefmc on lui reprcchoit ,qu'e*
flan: ieune & vigoureufc cbe dcroit efpcrtr plus de bé-
nédiction en Ton trauail qu'en la mendicité , irritée de
telles parolcsjtoraba en tel defeipoirjOu'eftant de retour
en fa maifcn elle dit à fesdruxfils , encore en bas aaee,
Mesenfins,allors à la riuicre,S:nous y noyons de com-
pagnie ,mou(ans enfcmblc , puis que nous n'auons de-
quoy ViUr-.Les enfms s'accordèrent à ce parricide cen-
feil de leur mère, laquelle chargeant le plus petic fuf Tes
elpaoles,&:rcnaiu l'autre par la main s'en va bos la vil-
le où elle demeuf oie , & venue lur le pont de l'Elbe, ri-
L'icre renommée, large & profonde, icrte Tes fils l'vn a-
pres l'autre, &: fe précipite après, tellement que tous trois
furent eftoufFez en l'eau. Làmefre.
Durant les premiers troubles de France, Tan i 5 ^?. la
ville de Bar lur Seine en Champagr.e faifie par les trou-
pes forties delà ville de Troyc , vn leunc homme nom-
mé N.Ralct.aduocat,& fils du procureur du roy,furpen-
dui lafolliciiation de fo:i propre pcrc, encorcs qua
9 2. (> Hijloires admirables
ouclques vns voululVent le deliurcr. Quelques mois a^
PICS ceux de iagarnilon d'Ancrain , de paru concraire,
au nombre de guaranrc oa cinquante chcjaux. fur prin-
drc»^t lameime ville à l'aube du iour,&Ld'abordcca)'an$
aurapé ce Ralec procureur du Roy,qui auoit fait moui ir
iow fits.l'attachcrent au toidldcla niaifon^où il fut tué à
coups de Tp\[\oic&.}iiîi.Eccl.deFrnnceyln4.7.
Lts fureurs ont eftc ù deibordces en la miferable
France durant les gucnesciuiles couuerrcs de pre'cxtc
de reli<»ioo j qu'il fe troijuc es hiftoires lous les Rois
Charles I X. & Henri 1 1 1.diuers exemples de pariKi-
dcs, &: d'hommes totalement defnaturcz ,qui n'ont eu
honte nicôpafTionquelconqucde leur fang. Ces parri-
cides pour lapluipartfont péris de mort violente, ou a-
pics aucir langui en maladie» incurables ont faii maî-
heureufctin. Quelques vns font defiogez du raonde,-
liius punition vifiblc:mais on a toufiours remarqué fur
eux quelque vengeance particulière de Dieu , les tenant
ferrez es prifons de leur mallicurcufe confcience, atien-
djTîti'hcure par lui déterminée , pour les faire compa-
Toir en la mort devant l'on fi^'ge iudicial , afin de les y
condamner tant plus iuftement,& par la pcfanicurd'vn
très redoutable lupplicc leur faire payer la tardiueiédc
fa fentcncc. Les volumes luiuanscnpioduiiôtquel«jucJ
hilloircs.
'? ^S S ION yehemente:
L*An mil cinq cens huitante vu , les Eftats généraux
desprouU'Ces vniesdes pays ba.sayans d. clair é pu
biiqucm^nt l hihppe I i.roy d'iilpagnc dechcu de la f. i-
cneuried'iceliesjbiiféfes {e:^ux,abious les fuicts de lear
fernicnt , arrcftercnt que tous les orftcicrs & autres AqÇ-
ditef proumces prerteroycnc vn nouueau feimentàla
confcruation de la pairie &; obeiflance aufdits Ellats : i
quoy grands & petîs obéirent alaigrcment , ne de-
maaàaniiicn plu$ aifcaueulemeot <iuc d'cUrc afraa-
ér memoYahles. ^17
chis du îoiig £{pagool. Aux Officiers qui prcfterciu ce
fçrmcnc facdcfpcfchéade de continuanô de leurs char-
ges ôccom mi iTions. Il s'en trouuacn diucrs lieux qui
fircnr gr5d' difficulté dV.biurer le roy & de faire ce nou-
ucau (crmeni. Entre aunes, vn conieillcr de Frilc nom-
mé Raaida, hoinmede grand iugemnt & expérience;
oyanc piopofcr en plein confeila Leuvvarden ceftcab-
iuratîon &: renouueilcment de (emicnt, foit de frayeur
qu'il en conccuc ,foit pour l'aft^ction c^u'il porioïc au
roy d'Efpagne, fi.it tellemeni clmeiJ ô^ troublé, qu'il en
tomba pciclus de lèi f ns , &: Je cous Tes membres, &
mourut fur le c h.'jmp,//'y?o;re dapays b.tf,liit. 5 .feO. i. ygl,
1 .de l'édition de l'u-t i (îo 3 .
L'hiltolicquc nous dL'fcriuofismaintenanrja'jinr ea
Pciigoid.prouir.cedc Francci'an i 5 5>4.Cer!3în notai-
re &c lugeu'vne baronaie,rici\c&optilcnr,3yantcfrou-
fé en fccondeji liopces vne dam'.)ireilc exrraiite de <> ns
nobles, mais pauurcs,prounc ue de paflable beauté, mai^
de bonne gf ace, & hon^eftelr.entgaIlla^de, en cinq a;is
qu'elle deinearaauecluicutqu2tre( nfans : finalement
il en deuini ialoux , pource qu'elle le monftr oit fami-
lière à quelques ieur.es hommes, fe difans alliez & cou-
fins,qui venoycntenfamaifon: quoy qu'il n'appcrrceuft
enelle(y prenant de fort près gaide)auciin àùt deshcn-
■ ntfte. Maiseftanc homme lafchf, de foible complexion
ne i'ciift ofé mal traiter à caufc des parens d'olle, nrinc
vne eftrange lefoluiion de s'en vci)gcr,6<: pour cont iftre
fi elle lui faii'oit toit, fc faire arracher les deux te f^iru-
IcsFort fccreiteiï^étisfiQ que s'il^auenoit que ladite fem-
me eull par après des cnfans.il peuri la répudier ou tuer
comme adultcre. Ainfifanirailon &par defcfcoir il s'a-
chenuna lentement a Ion malheur. Pour c ôuurir Ton
fait)faignant aiioir à achttci quelqucbcHai! à vne foire
en Aiiucigne, il le deîguile en paylan.à caufc des dari-
geri de lagucrre ciuiie iorsaii Koyjume,&au lieu d'al-
ler à la foire le rend en la ville de Murât le \'icontc
aufll enAuuetgnc , oti cîemeuroit quelque opeiatcur'
auquel ayant ccncé des bourdes , & l'autre conicnc
^ i 8 HiHoires admirMes !
d'attraper dcnicrj, ce mifcrable fc fie couper lc$ parties
fcuita.cs , & fat pins d. fix femaines au \\(k en g^audc^s
ouleuis.tvoti l"anslcre;>cnur(niaistrop caid) delà fu-
liculc ïlelibcracion. De retour chez foi où la ftmniL .^-
lîoueftc eng'an.i*pc:nK'>:'dyanttait cerchcr parcour-
Jui i'.tyaDcabruueedcmcnlorgcs.clIelccarefToit quti
<]U'-ifois,mai$cn vain, f fbahic de tel changcmeni, au
hout d'vnaiî.comme il donnoicclle defcouuru Ja four-
be. Neancmoiiis,fansfai:e bruit,quelc|ucicmps après
dcuint malade dhydropific. Vifuec par quelcjucsma-
rrooes,elJes l'afl- urerçnt, alïerniarit le côtraire,quc c'e-
Hoirgiolîeiî'c d'enfant. Le ciaiftre mari encendât ce rap-
port , publia par tout que fa f:^inrr«e n'cltoit pas encein-
te de iOn faujanenduqu'il titoïc chaftré plusdc quin-
2e mois auparauant , contraint de ce faisc par maladie.
D'à janiagc il faiîoit à ies plus fanulicn prcuuceuiJen-
le delbn dire,£cne ponuoic cacher (on mai'alent. Q^eU
ciues viis auertiienide tout la pauure damo, Telle , & de
la (inifirc opinion que fon inari en auoiî , item de l'cx-
peiicnr fjricux qu'il nuoic fuiui pour s'en v.-nger. Elle
nyo.iit lani^ui dixncuf mois mourut, lars auoirefté airi-
ftee ciei médecins , & ne ic touuagrolTe d'enfant. Le
deflo)al,pour eftre tani mieux acerrené,ia fit fendre a-
prcs la mort, par vn bar bier de village. Ces deportemcnj
patLicnusaux parensd';;l!e,dunt aucuns tcno)ct le pai>
li du Roy, 'es autres de la Ligue, lous conlpircreni con-
tre lu!,i'attrapercni vn maim pat l'cnLreiïiilc de dixliuiél
fo'dats à lui inconus , 5f K' firent mener au chaileau de
i'L'c.oùpour prifon il tu: vn retrait , pourccquMrefu-
foit de fe rançonner j deux mille cfcus. Conduit de là
Cil vnc autre place forte, il y fut rudement gciné , tant
qu'il accorda de payer onze cens cici?z contez par vn
(îenfrereauxdcfpensdab'.en decc mifcriiblc, lequel (ï
mal acouftiéfc retira dedans Beigcrat , où toft ap;es il
loruba en maladie qui fut longue. pendant laquelle iuf-
quesà laiiiorril necellade foufprer & .clamcntcri &
mefpriré, mocquéde tous, n'ayant Icruique de fable ea
lom le pays^mourui mifcrablemcnt. Vcc femme < n î.i*
niofin,
^ memcrahles] 9 i^
mofîn , tomb.-e en laloufic de fcn mari fc pendit en I^
ville de S.Gern.ain les Chanoines. £tvn homme de let-
tres,eftiiré fort ptudenr,fe pendic aufli,par imagination
que fa femme s'clloK abiJonnteà vn meufoicr aulnanc
quelque drap cju'il lui rapportoic, Louys Guy on an ^.Im^
de fes diuerfes lettons ychapA I .
'/* £ J Te, fiean tref- redoutable.
IL vaut mieux tomber es mains de Dieu , duquclles
ce nipalfions foiît grande?, qu'es mains des hommes,
Po'.ircaiK Dauid choifît plulioft eftre ch.-.ftié de pefte
que de guerre ou famine. Ht ntancmoins la pefte eft vn
fltautKl-redoutabJejfur tout rn cts derniers temps, que
la crainte de la m->^rt cft terrible en la pcnfee de tous»
oude lapiufparr, à caufe de l'amour du monde qui les
polfc de, ^ des opiniOLS qu'ils s'impriment , que tous
droits 8c deuoirs doiaen-. ctlTer en ceux qui n'aiment
qu'aux mclmcs 5 à pr<'p^ement parler. Pourtant void-
on, fiioll quela perte s'attache à quelque prouincc,
que tout commerce &tiiifîc de marchandife , dont les
hommes ont befoin de s'cncrerenir par aide réciproque
à&s vas & des autres , vient à cftre interrompu & de-
laifTé. Car nul ne veut fc bazarder de venir rien appor-
; ter au iieu où eft la pefte, craignant perdre la vie. Delà
' s'enfuit bien-ioft cherté de viures , finalement difctte,
■ fur tout es villes peupIces,oùles artifans, manouurierS
&aiitrtsont accouftumé de viure au iour la iournce,
' fans faire prouilion. Les viuandicrs qui parauantal-
loycnt çà & là pour les prouifîons , n'oient entrer cs
autres lieux pour rel etrctt, ains en font chafïe/ à coups
de pierres, d'cfpccs , de harquebufes , & s'ils aprochenc
trop prcs/ont tu(fz & meui tris fans merci , fans trou-
Usr {'Cours ni fiippori pour le foula^emenr des affli-
gez. -De là vient que les autres n'y veulent aller, & eux
quifouioyent prouaoir aux ncccfîîtczde li^i.rs c<;^i-
toyens.ionr contrains de lentir langueur delafaminc
aucccux.DauanrageJcs plos riches, mcfmcs let Magi-
ftrats & gouue: ntursdu publir, s'<;bfcntent ordinaire-
mci.t des premiers, &:fc rciircat ailleurs : H:;forie que
NN
9 5 o Hîftoires admirables
Ja iufticen'cftplusadminiftrcc , pcrfonne n'y cHantl
qui l'on puifTe h demander. Lors tout eft en confulîon;
mal lepliis giand «|uilçauroitauenir à vn cftat , lorS
dcfnucdc lufticcAdonc vue autre pelle enuahic lecorps
public , en ce que les mefchans le fourrent es inail'ons
<\\i ils pillent impuncmcnt , & iouucntestois elgorgenc
les malades, voire les domeftiques cncores debout , afin
de n'cltreaccufcz &: punis. Comme eft aucnu noiam-
ment en la villede Lyon , en ia grand' peftc après les
premiers troubles , où en quatre mois moururent plus
de fepcanic raille perfonnes.
En ia ville de Paris fe font trouu^z gens (ditM.Am-
hroilc Vaié en fon traidc de Lî'PeJleydhtp.^ o. qui à l'aide
de tels garnemens onrimpolé aleur ennemi qu'il a-
uoitla^pcfte, fans toutesfois qu'il fuft acte ini d'aucua
jnal:&: le iour qu'il dc'joic follicitcr la yuidange d'va
procès ou faire quelque afte requérant fa prelcncc,
l'ont fait enleuer& emporter dedans l'hoftel Dieu,
par viuc force de tels mcfciians, quelque refiftancc qu'il
peuft faire, mais inutilement, n'eltant qu'vn contre
plufieurs. Et fi d'auaacure il imploroit l'aide du peu-
ple acourant au bruit , ks meurtriers i'empefchoyenr,
crians beaucoup plus haut que lui : tellement qu'il
c'eftoit entendu : ou bien ilsdifnyent à chafcun, que
Je mal auoit rendu ce pauure patient furieux & démo-
niaque , afin que l'on s'enfuiÎT arrière , & ce pendant
auoir moyen de le poulfcrr où ils pretendoyent , pour
je fjirclier & coucher auec les peftii'erez ,& toft après
finir fes icMirs,rani àcaufedc la faveur, f-:fchene & dcf-
pit ce tt-laiTront, qu'aiM-noyen.^e l'air infcdc, ayant
eue favie jarauanc vendue & achetée argent com-
pranr.
le n'ay quefairf, adioufteil, demarquerau long,
<jue les villes ainfi dciailH-es deuieocni champtftres,
i\irquesà y voir i'heibe croiûre par les rues, les la-
boureurs abandonoans leurs maifons , & les fruits fur
Ja:crre,laquehe demeure en friche: les troupeaux Un-
guincutefpcrdus & efgarcz par les champs : les hom-
fiicàfi rtucoutraus fuytac arrière Jes vns des autres,
fi»nc
^memorahteil ^}i
\
(îgiic 6c grande punition de Dieu. le me contcntc-
ray de dire que ceftc maladie rend par tout ( nommé-
incnc entre les peuples qui craignent trop la mort)
l'homme ù mifciabU.que iî coft qu'il eft foupçonné , fa
mailon , parauantlieu icu^ôc libre, lui deuicnt prifoii
horrible, d^oùil nepcat ibrtir , &: perfonne n^en apro-
che pour le fecoutir : & qui euaproche lonuentcsfois
cil plus reJoutiibL que la mort , comme cft a paru en
beaucoup de lorciers & d'empoifonneurs. Si quel-
qu\n de ceux oui (ont ainfi cnleirez vient à mourir, il
faurque les (uruiuans voycnt quclquestois par longue
cfpacc de temps l'horrible Ipc^tacle d'vn pauui e corps
plein de vermine & pourriture, auec puanteur cÛrangej
qui renforce l'mtedion virulente de l'air ; ce qui tait
puis après redoubler la pelle, & eft louuent caufc delà
mort de tous ceux qui font en la mailbn. Si l'on le
retire aux champs la melme crainte & horreur y cft,
voire plus ehcorc , d'autant qu'un y tronue moins de
conoii'iitnce Sc*d*amitié. Tout eft clos & fermé par les
villes, bourgades &z villages , voire les maifons propies
font clofes à leurs maiftres : fi que maintefois on à efté
contraint de baftir à la légère des logettes aux champs
arrière de touie conucrfation & conoiflance , comme
ilfepratiquoità Lyon , d'où les malades fe rctirans ,1c
chaud du iour les eftouffoit en leurs cabanes , & le
froiddc la nuift les morfondoit , ce qui leur caufoit
d'autres maladies mortelles. Qiù plus eft n'a-on pas
veu eldnes loges , que le pcre&laraerecftars gricfue-
m-nt malades, & ne pouuans fecourir leur enfant, l'ont
Veu fufFoquer & manger aux mouches guefpes,&.la mè-
re i'ctfbi ça q.c defe traincr au fccours en fefouleuanc
tomber morte enae le pcre & l'cnFan:?
L'home n'cft lors reconu ce va/faux , fuiets ou ferui-
leurs qu'il ait:persône ii'y oleroit aller. Le père abâdon-
ne renfanr,& rcnF.^.nt lepcre,le mari la femmf,£c la fé-
me le mari, le freie la (œ^jr , Ôi. la fœiir fon frère : voire
ceux que vous pélti les plus intimes & féaux amis, vous
abandonnét alors pour l'horreur & danger de ccftc ma-
NN %
9 5 £ Hijlûires admît ahles
Jadie. Et s'il yaquciqu'vn qui meu de p tié & charitt
Chrcftiv;nne,ou à caufc de parcniagc , vucilJc s'auanccr
pour viûcer &: recourir vn malade , il n'aura puis après
parent ni ami qui vueiilc le fréquenter ni approcher.
Q^i'ainli foit.onaveu à Lyon, lorsqu'on appcrccuoit
feulement es rues les médecins, chirurgiens &: barbiers,
cllcus pour penfer les malades , châfcun couroic après
€ux a coups de picrres,pour les tuer , comme chiens en-
ragez,criani qu'iis ne deuoyent aller que de nuid. M.
Ambrodc Paré touche cti tout cedifcours les peuples
& perlbnncs , qui comme inli.iclcs ont peu ou pomc
ë'efperance de refurrcdtion, dilcnt que c'cft grand' pitié
de cant louhrir , puis mourir, & ne fçaiioir où l'un va:
qui n'ont iamais goufté les douceurs de la vie éternel-
le,qui ne redoutent rien tant que la mort , n'jyans in-
ftru<ftion,conlolation, paix ni tranquillité quelconque
en leurs conlciences. Mais quant aux pcrlonnes bien
cnfeigaees en la doct' inc <^u fils de Dieu , qui croyenc
afTcurémsnila vie ererncllc , quife conftlent & tref-
failientde ioye , entcndans parler du fécond aduene-
Hivint de leur Sauueur, la pefte ni la mort ne les eftonnc
pomt : telmoins ceux de Lyon durantla grand' pcfte
fuùnentionntc : car ils aflifterent courageulcmcnt les
vns aux autres , furent conl'olez & aideiiufqucs au der-
nier foufpn. Tandisque les lafches & efpcrdusfDyans
çà& là,s'abandonnan$ , le deipouiilans 'c tome huma-
nité , n'cfchappoycnt pourtant, ains pcniloycnt le plos
m l'crablemcnt qu'il eft pofllblc de penfer. Retournons
aui paroles de M.Amb oifc Pac, difcourant loulîours
àa p-niplcs inh'jmains &: incrédules.
Co:-;ibien de pauiTcs femmes grolfes ( dit-il)lanj
cîtrc aucunement m-îlad-S de pefte,ains fculc^mét pour-
ce qu'eu ici temps rouies maladies lont .fulpcftes à
gcnsq'Ji redourenr la mort,Qnt crté pov'' 1- fculfoupçcn
deiaiilees à: ^b^.n.^onnces à leur cnfancemcnt , dont eft
pfo jcouc la mort iks mercs &: des cntans. le puis vcri-»^ i
tablenicnt dire *uoir trouuc aux mammeîJes d'vne
femn:e morte oc pcitcr , fo'i enfant tct;ant encore le ve-
nin morcci , (^ui dcuoii le tuer bicn-ioit après. Si la
Atturri-
é* mémorables. ^ j 5
r<surrice d'vn enfant vienc à dcccder , encore que ce nc
foicdelapefte , il ne s'en trouuera point d'autre , pour
^le foupçon qu'on a qu'elle Ion motte de peftc , tant cil
ccfte maladie effroy <^ble , que fi toil que quclqu'vn ea
cftfurpris, il ne trouuc fecours depcrfonne , ains at-
tend feulement vue nvifcrable mort. Qi^il iLitainiî,
entre infinis exemples que Ton envoid crdinïîremcnt,
vneieu ne femme , Ton mari ^rtant mort & deux de fes
cnfans,fe Tentant fiapj)ee , commence à i'enlèuelir &
couldrcellemefmewo vn Imceul , & fut trouuee à de-
mi enfeuelic, ayant encore le fil & i'aiguilie entre fes
mains.
Outre plus vn homme fort & robufte a}antl3pefte,
alla au cemniere, &: en faprcfcnce fit faire (r foiïc > &
auant qu'elle fuft paracheuce mourut fur le bord i'i-
eelle. Au con^ raire,»l s'en eft trouuéjUifis dételle apre-
hènûon de la morr,eftans frappez de ccfte maladie, que
pour {è 'ecourir eux-mefmcs ils fc font appliquez des
fers ardanslur la boire,fe brullans tout vifs-Autrcs l'ont
arrachée auec des tenaïUeî , penfans fe garantir. Il y
en a eu d'autres qui par l'ardeur de celte contagion fc
font iettez dedans le feu , les autres dedans les puits,
aucuns es riuieres : on ea a veu fe précipiter par les fc-
neftrcs de leurs chambres fur lepaué, îc heurter la leftc
contre les murailles> iufques à enfairefoitir laccruel,
le : ce que i'ay veu : autres aufiî fe font tuez à coups de
dagucoii de coulteau. On raconte qailya enuiron
quatre vingts ans , que la peftc auoit couru de telle ra-
ge par la Gaule Lyonnoifc , qweles femmes pi inci paie-
ment,fans apparence d'aucun mal en leurs corps, le ict-
toyencdcdans leurs puits, turmoncees de la fureur de tel-
le maladie.
A ce propos m'acftéafleurcqu'vn preftrcde la paroi-
roiflTe de S.Euftachc à Paris» malade de peftc en l'hoftel
Dieu, feleua du lj<ft en furie > £i prir.t vne dague de la-
quelle ilfrappa plufieurs des jjauuresmalaJejrouchcz
dedans leurs lids, & en tua trois. Et n'cuft eftc qu'il fut
iiciouueit par le cbitureicu dudk hoftel(Iequcl le vou-
NN 3
9 5 4 Hifloires admirables
lancarrefterrecciuvn coup de dague dedans le rentre,
dontilcnida m^-urir) iJ en cuft occis autanc qu'il cncull:
trouuc. Ma's {? roft qu'il fut reucnu &: que la fur'c di-
minua il rcndic l'clprit. Vn autre cas , non moins
horrible , auint en rue mrrcierc à Lyon , où la fem-
me d'vn Chirurgien nommé Ami Bafton , parauant
mortdepcfle , efprifc foft après delà mcfmc conta-
gion , tomba en refuerie > puis en frcnefie , & fc
mie à la fcneitre de fa chambre , tenant U tourmen-
tant vnfien enfançon enrrc fcsbras. Cequcvcupar
fcs voifins iJs l'admonneftcrenc doucement de ne
Juipomc faire de mal. Mais » fans auoir efgard
à leur r.uerriircment , elle ietta foudain l'enFant
fur îe paué , puis en fuite s'y précipita, tellement
q'o'cllc & l'enfant expirèrent air.fr mifcrable-
mctnt.
Adiouftons encore quelques hiftoires aux precr-
dctues- '?olyciore ytr^ile iefmoi<»ne au Vtngtfixiefme
hure de fin htjloire cC Angleterre -, que l'an mille Cinq cents
mouaircnt de perte en ja viiiede Londr*.s plus de
trente mille pcrionnes. On eltimc qu'il y en foie
more beaucoup plus grand nTmb'e en l'annee mil-
Jefix cens crois. Du temps de Cleoic^nt fcpt'tfme pa-
pe deKome , l'Italie fut î'cfpacede trois anseniicrs
tellement affligée de ceOe contagion de pefte , que
de mille perfonnes à peine en rcila-il dix en vie, le
mal ayant commence par vn innombrable amns de
gens courons au lubi'c de R.ome , où ils engendrè-
rent la pefte , laquelle s'efpandit puis après par
tout ; "Put'me en la yie de Clément fepttefme. Paul
loue rapporte que de cefte contagion qui moilTon-
na aiofi l'iialie s'cnAnuic vnet'.llc diTcite & fami-
ne , quepluiîeurs efchappez delà pefte en furent
fauchez , tellement que les prouinces demeurc-
renr prcfques defertcs. ^ttyingtfixiejme liure de fa ht-
Jloircs. QiTelques années au parauant, alors qu'Adrian
fcptiefinc "eftoit Pape , il y euft vne fi rudepe/ïc
» Rome qu'elle eftoit dcfnpec d'habicans. Vn ma-
gicien
& mémorables.. 9 5 y
g'cicn Grec , nommé Dcmetrius, y vinr, lequel du
Conlentement des furuiuans , & par la conniuenca
des rnagiftiars , fitccrtiitaes cérémonies autour d'vn
bœuf.au^uel il fendii i'vnedes ccnes, fouffla quelques
charmes en l'oreille droite, & lui actnchant vn filet à la
corne entière le pourmena comme tour apriuoifé çà &
là par la ville, puis le facrifia dedans l'amphithéâtre. La
miferable populace-- creut qu'elle auoit efté fou.'agec
pai telles cérémonies payennes & du tout eiecrables.
'Paul loue (an mention de ce damnable deflein Sr. effort,
comme le rapporte 77;ewc/o>-e Zuin^er aufej}tiefme Ituredi*
fécond volume de fon tbeutre de la yie humaine.
L'an millecinqceni vingneuf l'Alemagne fut eiî-
Uâhied'vne fueur peftilentielle , quicaoitles perfon-
res en moins de vingt quatre heures. Auant que
l'on pcult y remédier , plus d'vn tiers des peuples y
laiiïa la vie , en bien peu de temps. Cefte maladie
auoit grand rapport auec la fuetc d'Angleterre Ions
Henri feptierme Ta-n mille quatre cens hui<ftanre (îv,
laquelle emporta près de la moitié des habitans du
royaume. Sienlan an/ixieffftelture. l'an mille cinq cent
foixante quatre, la pcfte fe ralluma en Allemagne & en
SuiiTe, d'où en fuite elle s'auança en France , & fit
par tout des rauageseftranges , emportant en peu de-
temps plufieurs millions de perfonnes , & contir-^a
en quelques lieuxjiufques à fept ou hui£taas apr<'»^*-
flsire de nojlre temps.
"P IL L AXTi S cruels
*An I çoS. les Port u<y3iscontinuans leurs courfc3
_^en l'Inde Orientale , "approchèrent aucc leur flotte
▼ers vne ville nommée Briua, non loiade Melinde, cii
la cofte d'£chiopi<h lt$ habitans d'icellc fc fians en
'^ NN 4 '
L
9}^ TJifloir es admirables
quelque garrifon rcfurcrentde traiter auec les Portu^
giis, 4111 îcs afliillirent, forcèrent , & tuèrent cCùx qui
le trouuerent deuant eux. Mais non coïKcns de s'cltrc
ainfi rendus mailbes, defpicez a'auoirperdu cinquan-
te hommes des leurs, pillcreni li ville, coupcrcnc les
doigrs& les mains à pluficurs femmes , afind'auoir
tant plus toillcu'^s anneaux & b.alTe'ets. Outrepiusilî
icduiiireni la ville en cendres deuant les yeux de les
Jiabitani qui s'en elèoycntfv'is , & de loin regardoyent
ce mifcrab c l"pc£taclc. Or rommc quelques vnsde ces
criicls pitUfd:;, au vjonibrededix rcuf, aueugicz d'a-
• uarice,pen;oyenc tfte riches pour long temps , Dieu
les arrefta court par Idur propre defir : car ils portcrert
tant de pillage dedans rncrquîf, que voiilans puis a-
pres le mer\' r aux nauires 5 ccft cfquifenfonça dedans
Ja mcr,où tous es pillard* fore nr noyez: qnoy irait , &
l'efquif defchagé de laiu de mel'chans fardeaux, reuint
au àxziXMî.OforiUi au ^.liu.de l'Hijl. de 'Portugal , feùl.^.T,
^ajfeeau ^Mu.dt i Hiji.àes Indts.
'P L ^ TE merueilleufe,
ON trouuera merueillcnx & mem" rable ce que
•^atthi'-u Cornai ,"■ excellent médecin de l'Empc-
rcor Mdkioiilian i i . cQ:nz en fa rerponfi adrcHl-.: a vn
ft.-ncompigïon qui luidcmandoit juis fur tcMoii?e
difticulic-VnpayUndcBohei-ne,dit-Tl,Lftantàla chaf.
fc tut blciî- d'vn roapdVrpieu fort large au dcifus de la
panlL'.CtfVc playc dô- il deuoit mo -rir , febn i'apaf en-
ce.ne peu: cft c fou^tite pav remède ni confeil queicon
que,ams demeura cmcrte , & par luccefTion de tempi
JesIeuresd'ii.cllcs'en(iu'cirêrrL''liemci,quelepayia(qui
vefcut plufieurs annec-aprcs ) emphlloit i'ouuertnrc
d'icellcauccdu charpis ^' ^ Peftaupoit de telle adreflV,
qnctoiiccs&quantesfois '-vue bô Kiisébloitil ncttoyoit
i^,^:)n<Vc pur celle ouuerturf,^ en tiroir hors les fucs &
nandcs qui Iç çha?g.o||i.Co«iax adiouftc que l'Eropc-
rçur
é" memoYahles. 9 3 7
rcur Maximi'ian cftoit refmoin de ceftemerueilleufc
pbye.l'ayapt vcuë, (oigneufemenrconfifleree, & difroii-
rud'iccllcaucc ToadiC Médecin ^nt ysti^auUatt ï.cl?ajp*
de la y.Ce/itunedes chofes mémorables.
'P 0 IS OTiSi yenins,0' ^eurs efftcîs.
IL mefouuisntcjur. Tan 1 5 6 9 'i 7 eu; vn chanoine de
Laual qnifuc accufé d'auoir vcrfé de la poiTon au ca-
lice du doyen de Lanalilecjucl après i'auoir prife, en di-
fant JaMelFe de mmuiftjtomba par terre, èc neâtmoins
il reietta la poifon.L'accuré cot;fcr[fa volontairemenr &
fans rorcurc:&: depuis fe voyant condamne il appella au
Parlement de Paris.cepsrndan' on lui fit la bouche, & tfe'
départie de l'a confcllion. Neantrnoins il tut condamné
d'eftrc brode par atreft, & le VIS mener au (uppîice : ce
<5u: la Cour n^Mift pas fait, fi la conf. (îïoncuft ef>é ar»
rachee à la (\\XÇ.^\oï\.L.2odin ait ^.Iti*. deja 'Lemonomamey
Vn abhc d« moyen aagceftant à Paris, pou r foiicirer
certain pf.icts , (oilîcita pareiileinenc vne coutrifane,
poi:r dcLiifcr vne nui'âarec elle. Marché f lir.i! fe rend
en la m.iifbn d'iceile, cu.icft g^^cit•^^emenr recueilli.
Le voulant gratifier elle iui donnapour la coliatioa
quelque confi;uic,t:n laquellcy ciuroit des caniharides>
pourmicuxTincitcr à ce que tous d:;'jx preteniovent.
Le lendemain, ceft aobé commence à iecrer le fang roue
pur par le fondement &. pa» la ver^c. 1 es mcdcrcins ap*-
pejl^z contirent par tels fymptoi-nts,& par Pcrcdlioii de
]arer^o,q'a'il' a voit pris dc> canchandes. Ils lu appli-
querencdcdans &d-hor$,par vomitoirejjclyrte es , in-
ieclioi'Spotag^Sïbruuagc;, potion*:, hnins, Vautres an-
tidotes, touicc dort j1 . peurent s'aiîifrr pour Ton fou-
lagemeni.-mais en viin: car le chctif Abbé, liifTant pro-
cès,courtifanc i^ ▼ie,mourui aucc ^^an^rcnc en la v-^r-
ge.JT^. Ambr-taré^au litt.des yenmsiih.ip. j 6.
François Guichardin parlant de la mort foudainc dti
pape LconX. le premier iour de Décembre Mxi. dit
qu'on foupçonnacju'ilauoiccftccmpoifoonc par Bat-
5>3 8 Hijloh es admirables
nabc M.ilerpine Ton chambricr, qu'on auoic dcpntc pour
lui donner a boxrz.yi» i ^.liu.de i'hjloira des guerres d'I-
talie Paul loue adiourted'aurrcscirconltanccs. La com-
mune opinion efl que ce Pr.pe mourut de ioye, royant
les François forclos d'Italie.
Le pape Alexandre VI, & le duc de Valentinois (< n
fiU,a) ansfair acommoder du vin pour cmpojfonner eu
vnfcftin certains cardinaux, bcurentpar raefgarde de
ce vin.dont Alexandre mourut tout roide, & le duc en
cfchana pour eftre refcrué à d'autres iugemens. Fr. Çut-
chardin ai* fi" Mu.de fuit hijloire.
François, dauphin de Viennois, fils aifnédu roy Fran-
çois!, ayant efté maladequatre iours mourut àTour-
i30n,i'aa i ^ jfT. aagé d'cnuiron vingt ans, nourri par le
pereenfinguliereexpe£lation de tout le monde, de par-
uenir vn iour à Teftat dVn grand &tres-excc!lcnt l'rm-
cc. Vnfeigneur Italien > nommé Sebaftîan, comte de
Moncecucullo, conuaincude Tauoir cmpoifonnc , fut
tire dedans Lyon à quatre chcuzux.HiT^.de France.
Durant les tioijfiefmes troubles &: guerres ciuiles de
France ,& depuis. des Princes, Princeflcs , Seigneurs 8c
gentils hommcs,onc être tuez de poifon. dont nous par-
ler-ons plus particulièrement en qnelqn'vn des volumes
fuiuans.TouchcTns encore qtielqucs hiftoires. l'ay conu
(ce dit Louys Gnyon,fieurdc la Nauchc) vn nommé le
Gros, picard de narion , chirutgien de feu Louy? de
Bourbon, i^rince de Condé , qui ayant manié & porté
cinq ou fix heures durant vne pomme de fcnteur (de la-
quelle certain parfumeur Italicnauoit faitprefent au-
dit fvigneur Prince,lcqucl foudain la commit en garde à
fon chirurgien ) tomba en des (yucopeStVomiIÎ.-mcns»
toarncmenb de tefl:e,côuul(îons,puis en vne tref griefue
langueur , de laquelle au bout de deux mois il fut fou-
lage par vn mcdcciii Piernontois qui eftoitau maref-
chal d'Anville. Vn fcruitcur le N.Couicr, apothicaire
de Paris, mcrpvifant i'aducrtiCTement que lui auoit don-
né le fufdit chirurgien , pour ?uoir porté ccfte pomme
refpacc d'4fn iour dedans fa pocheitr, en mourut hui£b
iours apres.^i;* iMn.de fis dîner/es leçonSyÇhafi.i i.
11 n'y
& mémorables: 959
Il n'y a pas long temps cjue certain Lombard dôna à
fentir vnœtllct ernpoifonné à vn pcrlbnnage, auc^uel il
vouloic ircs-grandmal , dilTinr^uiani ne.inrmoins ccftc
cruelle volonré. Si toftquci'aucreeut fcncif'oEilicr,il
tomba mort.I'ay veii mourir vn ieune home, aagé d^n-
uiron vingt ans , qui fe laiiïa appliquer vn afTés grand
emplaftre de moufches canrhanùes fur vnciouë, en 1j-
qiieileil auoit vne grande tache rouge , apportée i^c
nailFancc, quilui caufoit vnc grande dcformiié ; n'sy.int
à peine gardé ledit craplaftrc quatre lieurcs , le lendc
mnn il mouiud'ay vcu mourir vn iardinier, lequel ef-
niondant des arbres , lui eftoyent tombez fur le vifa ge
des œufs de chenilles. ^k mefme Itu.^ chap.
VnfoIJatTurc derpitécontic. vn VVaiaque, qui ne
Jai auoit voulu feruir de faux tefmoin , di/Iimulant fa
haitîCjlui fît prefcnt de certains brodequins rouges, Ici-
quels le VVaiaque ayant chaudez & porté feulement
l'cfpace de deux heures, lui luruinr vne gr^mde chsîeur
& rongeur auxiauibe^ Ayant defchaoile les brode-
quins , icellcs rougeurs fe tournerentr n puftules ,dont
tout fon corps futaulfi cofr Cîifi, &. moiîrac dedans dou-
^7e heures , fe plaignant fore du foldat Turc, lequel gai-
gna au pied. Lu mvfme.
L'an I 5 5tf vn chantre de la chapelle du roy Charles
" I X. defirant mettre vn fîen patent en la place d'*- r au-
tre chantre bien vcu du Roy , lui donna de cerraine
poudre, dont lui furuint vn viccre au poulmon, & fur la
Voix totalemeuLgaftce, Ayant craché par la roux gran-
de abond-ance d'apoftcme, il mourut. Lefait fut delcoii-
ue-t : tellement que leprcuoft del'hoftcl ayant attrapé
Tempoifonneur lui fît fon procès , & par fente nce fut
pendu & elbang'é.puis fpn corps hxuùi.^umtf.tw Im.ch.
Certain mal-auiré cadet , bcauf^cre tl*/ncdamc de
Guyenne, s'eftant amouraché de la fiilc de chatT>bre de
fa belle foeur, t ouua m«ycn de faireaualcr à ccftc fi'iç
le poids detroisdrachmcs de certaine poudre parmi des
herbes , pour l'induire à lui obéir en fes roluptcz»
le ce parle confeil d'v|^ mefchaat ignorant ik
'l'4o
Hi!f cires ddmirMes
nccclTiccux apothicaire , cjui lui vendic troiscfcus ces
trois drachmes de pouiJre. T^ ois heures aprcs la pii:e,
Jafiilc tomba en grandsaccidcns, comme en chaleur c-
ftraoge , en exa.'cerationde rems ôcdevcTcie , ayani à
tous inomens volonté d'vrinrr , aujc grandes cciiï-.^n;.
En fincllcmourutdc ccft cmpoiloiinemcnt-, & ouuerte
aprcs iou trcfpasfuccroujceauûif Jes reins , laa^atrice
4>C la veTcie coût gaftez.^i« meftr.e hure cr cua^'ure.
Vnc courtifan.; de l^ai i ,re fafchant d'cl"lre brune ttc,
s'adrclTa à certain charlatan, lui d.roanJant quelque rc-
cepte pour deuenir blanche. Il lui appliqua furie vifa-
ge&Airlecol vu cacaplalme , danskquely auoit des
ingreuiens venimeux. Ayant porté ce mafqoe enuiron
douze heures, la fieure l'cAipoignî:. & meure tro^s lours
aprcs. Onu. rte, les reins , lamitrice,& la vefcie, furent
irouuez gangrenez & trei-puants.L4me/r/if.
Deux marchans , eftins à vneàifneepres de Thcu-
loufe , s'en allèrent au iardm de leur hviftc cneillir dts
fucillts de fauge . is.rquelics ils mirenr en leur vin , (ai)S
crtre lauees. Mais dcuancquMsecflcnt acheté de dif-
nerjis. perdirent la veuë.ayans premièrement efté frap-
pez de tel eftoufdifTcnicnt de teftc , qu'il leur Icmb'oit
Qije la maifon tou'-nalt fatu deflai dcHous Ils tombtrét
en rpifme & défaillance decccar , ayans les lenr^i & la
langue noire : beguayans , aucc vn regard hideux & de
iraaerSjtrauaillez de Tueur froj b, aucc grands vomiifc-
itiens. Ils enflèrent bien fort. &: peu Jprcs mo'jrurcnr»
dont k'hoftc& tous ceux delà maifon furent «randc-
menccftonncz. Toftaprjs failîs, cmprifonnczcha gez
d'aunir empoifonnc ces deux m.orchans,&.interrrgue7,
refpondirent auoir m^ngé & bî^u de mefmes viandes &C
bruuages, excepté da 1;» rai}o;s,que les marchans auoyct:
mifeenleur vin. Adjnc Icu^e fie appell^r va méde-
cin , pour fçauoir H l'on pouuoicempoifonner la faugc»
Le médecin dit qu'ouï , «Cqu'il faloit aller au iardin,
pour fçauoir fi l'on pcirroit defcouurir qi'elque beftc
venimcufe, qui peuft auoir letré fon venin delîus. Ce
que véritablement on trouaa,c'cft a fçauoir grand nom-
bre de gros ficpetis crapauxjcn rn tioa profond fous la
faogc,
& memorahlesl 941'
fauge, & les fit- on fortircn foiiillant &icttant de l'eau
chaude auiour dclcur lalnicrc. Dont fur conclu que la
fauge cftoitcmpojfonneo, tanr de labauc que de IVrinc
des crapaux:& l'iiolte suer fa famille ab^ous.>r.^^^Z»r«*-
fe 'Puré.iut iture des yeutni fchap.j, i .
Rondelet en rhiftoire des poilTons dit auoirvcuv-
ne femme, qui mourut pour auoir mangé des herbes
fur Icfquellcs vn ciapaut aiioit halcnc &: icttc fon vc-
^iin.Lesconircpoifons font, boire du ius de betoine , de
planriin , & du. moifc.parcilJcmcnt du fang de rortoc a-
ucc farjie,&: réduit eu pilules, puis dcttrcmpé aiicc vin.
Làmcft/>e,
La v\:fuc de Bragelonne , lieurenant particulier au
chaftcietde l'aris , pour auuit eAc picquee à l'vndcs
'doig.s de la main d'vn poidon de m-^ir nommé Viuc , &:
ne tenant couipicde remède , fut afiailiie d'vne gangre-
né & mortification totale du bras. & en fi»! mourut mifc-
rabltmcnt.^M nifjrnehurtchiip.^o.
Mathiol raconte que deux charlatans Te rrouucicnt
vn iour en la ville de Florence , Tvn deiauels habloit &
haranguoit mieux que l'autre, pourf^irc valoir fecdtn-
rees.dont l'autre conrcur vne ennic mortelle contre foa
ccunpagnon.Parquoytrouua moyen de lui changer fon
afpic , qui auoit perduXa virulenceparlonguc nourri-
ture : & r.iyant olté de fa cafTolle y en mit vu p.ntre re-
ccmement pris & tout affamé Dont auini quelemifc-
rable Hablndor, penfanrquc ce fuft le lien , fe fift mor-
dre d'icclui au tetin, félon qu'il auoit de couflume , &:
print après tie fon theriaquc, lequel nclui fcruou<.;u'à
donner couîeur,pour abuTer le peuplc,qui voymt ccftc
bcftc le mordre, fins curefTcntir aucune ofFenle.coiiroiç
après lui , eitimant fcm theriaquc vn coatrcpoifon fou^
uerain.Mais le pauure chai laran , ti ompé par fon çomT
pagnon.cn moms de quatre hvurcs redit la vie. Les
accidms quj lui furuindrcnt furent perte de la veuc gç
de tous fcs autres îcns. Sa f.irç dcuint plombée, lalan,
guefort ncire.vn grand trcmb'cmcnt de touSffes mctr-
b:es \r faifit auec fiieur fioi.lc &. défaillance drcceur
puis la m6it,cn pi clc.ncc des alfiftânsrtout a Tli^rc j'au.
9 4 2^ Hifloires admirables
wre chailatancnuieux & meurtrier gaigna au pied. Ma-
thiol adioultc, (jue tels charlatans j pour mieux vendre
jcur (hcria-)Uw, prenent alpici <Sc vipères, long temps a-
p.cs le prin- t'::aips , lors qu'ils om leccé le plus d2nL;e-
reuT de leur vcnni , pais .es aprujoiliircnt par vund. 3
I on acouftumces,&. leurtonc changer en partie la natu-
re veuimcule : en apr-s ils les font mordre dedans de
gros morceauxde chair , afin de cirer leur venm enclos
en vue petite membrane qui eit encre leurs dents &gcn-
cwi^s : puis ils leur tonc rcmofdre fur l'heure qucloue
compofîtion,qui leur elrou^c I -S conduits, par lerqucls
Je venin a coultumc de forcir : tellement que vunans à
ferrer quelque choie de leurs dénis celle morfure n'ap-
porteaucun danger. Par tel moyen ctî pipeursfc font
admirer au peuple , auquel ilb vendenc chèrement îcur
iheriaque ii{h[\t.yiiime]meliii.chap. 30.
Lacourcftanc vne f.^is à Moulins en Bourbonncis,
M. le Feure niedecm ordinaire du roy , M.lacques !c
Roy Ton chirurgK-n , &: moi, mîmes appeliez pour me-
dicdmenter le cuifinier de «nadame Calte'pers , Ic.;nel
cuetilancen vne hsyedu houbio pour Ï2,ï\z vncfalaJe,
fa: mordu d'vne coiciuHe fur la main. Ayant fuccé le
fang de la playe, tci1: après la langue s'enfla fi fort , qu'il
ne pouuoit qu'à bien giand' peine parler ni cftrc enté
du. D'auantagctout 11 brav lufques à l'cfpaulc s'enfla,
dw façon que l'on cuit dit qu'on Taucit roufflé.& difoic
le patient y Icniir vne exLiemedouleur;tcllemcnt qu'en
n^spre(ence>il tomba par deux fois en défaillance de
Ci;ur,comme eftancmorc, & auoit la couleur du vifage
&L le touf le corps iaunaftrc & plombine. Voyant tcis
accidens , noui djfions la moi c citre prochaine. Neant-
moins il fut fecoura , lui lauant la bouche de theriaquc
deftrcmpéen vjn blanc , puis lui en fat donné à boire a-
uec eau de vi'-. Surlbnbfas bourioufflé iefis plulîeurs ,
fcarifications afl^ez profonde:. , mcfraementrur la mor-
furc,(3c laillay fudiiammcnc couler le fang , qui n'eftfcir
queicfofité. Puis ajv.eshic laué Ce bras d'eau de vie, en
laquelle l'aucisfaicdiiTondrc du theriaque & mithr i-
^at. Le patient fut poié dedans vn \i€t bien chaudcmrr.
& mcmorMes- 5 4 î i
ficlcfiionfucr , le gardant de dormir , de peur que le
venin ne le retiraft aucc la chaleur naturelle au cœur.
Le leDderasin tous les accidcns furenr ccfr^z» & fuc loft
après guc-.ri des l'carifications.Toutesfoisrvicere delà
inori'urc tJt [cnu longuement ouuert , y appliquanc
toufîours du iheriacjuc auec les autres mcdicamens.
Ainfi leparirntreceuc eniicre&paifaidtcgucnlon. Rn
ce mejme iiu.chup. 3 1.
On peut alFcuiément dire qu'en !a petite vérole &
Toogcollc, maladies ordinaires aux pciisenfans ,y a v-
■nequalué tclKmcnt vcnimcule & contagicule , que
mclmcs auec les humeurs .Scpattics charucukseiles lo-
gent & gaftcnr les os , comme Fait la giollc vérole; ce
quei'.iy vcucn Paiince 15 6 8.&plulJcursautres fois. V-
nc pciiie fillw de Cluudc 1 ique , relieur de liuies du
Roy , demeurant eij la lue S. lacqucs à Pans,aagcede
quatre à cinq ars, ayant clié malade de petite ^'erole
cnuiron vn mois , & natur;: n'ayant peu farinoncer la
poifcmjui furuindrent apoftc mes fur le fternon & aux
iointuies ccscff aules : dont la miatiere virulente ron-
gea &: fepar.i entièrement lous les os du iternonSc les
cpiphyles des os adiuioires , auec bonne pprtionde la
telte de l'omoplate. Ces Heaux affligent auiîi par fois
grandement les parties au dedans, comme le foye,la ra-
lelie , k$ inteftins, dont s'enfuit à plubeuis hydropifie>
phci{îe,enroueure de voix courte haleine , flux de ven-
tre,auec les vlccres acx intcltir s,par côfequenc la morr>
félon que ces pullules ont rauagé par celles parties înte-
rieuresde mefmc furie qu'ô ksvoidefpadri* Tur la peau.
Quiant aux pani';s externes -, elles laillcnt nô feulement
deformiic principalement au vifagCjà caufe des pulluh s
& vlceics quipalfans la fupcrficicdn cuir ont profondé
en la chair, dont lont reliées des laides cicatiices ; mais
aufliquelqueifois elles gaftent & font perdre le mou-
ucmcntdes loimurcs , 3i puncipalemcnt <li:s couldes,
poignets,genoux&: piedsrfont pourrir \ts mafchoire',
dents i!c genciues. PlulTeurs en ont du tout perdu la
veuc.ies autres i'oi)ie,le Hair. le puis dire que tous les
apoitcmcsqui auicncac auxpeiii cnfans quiont eu U
944 Hi Boires admirables
▼croie ou rougeole, donc ils n'ont cité purgez à fuffi- i
lance pour la d fchargr de Nature , tieuenc dclamali- ^
gnuc :5c vcncnoliiéde /humear dcTJiccs maladies: par* \
tanilbnc malaifcz àg;ieiir. Pour le dire en vn mot , la {
petite vérole ou rou<;eolc n'cltans p.is bun purgées, j
cau.eiu aulFi uiuets ÔctâTcht ux accidcns quC fait la grol-
l"c ver oie ytt.^mbroife 'j^aré au nu. de la petite nettoie CT* ^e
fre,chjp.l.
'J^XES AG EScr rijl^ns notables.
IAqucs Londin EfcofToiî, ci'hourcfte maifon , ayant
-Ite iongieinps trauaillé (i'vnc figure , leiourdeuanc
<jac laques V roy d'Ekolle Fut tué , fc hauiriot vn ^eu
dedans Ton lidlcnuirv n inidi , Jii comme tout cltonnci
commence à dire tout haut à ceux quieftoycnt autour
de ]ui,Sus,lu»,rccourf z ic roy;les parricides l'enuiron-
iKMu poiT l'w tuer. Vn peu après li fe met à pleurer Sc
crier piteufemcnijil n'tll plus temps de lui aidcr,lc ) au-
UiP pi mec trt morf.Inct ntinent -Tprcs ce raalacie cXj)!-
ta.'BMchunan au il .Im.del'hift.d'Efcofje.
Vn autre preuve dunicuftrcde ce prince fut com-
me conioiiit aucc le meurtre mcfme. Trois domtfti*
ijucsdu comie d* Aholie, gcntils-hi^mmcs bien conus,
éc vcrti^eux, logez non g'îcrcs loin de la maifon du roy,
endormis cnuno la mini:i6-,il fcnrbla àl'vn d'tux cou-
ché contre la paioy, nommé Dugal Sruart» que certain
pcrfonr agç s'aprochoit dv^ lui » qui p-illant iamam Jou-
Ccmêt par di (lUS la ioue & la barbe de Stuait, luidi'oir,
dwboui,on veut vous tuer.li s'e'ueille,& pciani à ce lon-
ge, l'vn de les compagnons s'efcric d'vn autre iidl , qui
çilr-ce q ii me foule aux pieds ? Stuarc lui rcfpond.c'cil à
l'au.ir lurr quelque char qui rode ici la nui6l. Alors le
troiiîcln.e.quidornioit cncor , s'tluei liane en furTauc le
icttedu liét en bas& dcmand: ,qui m*a donné bifn fer-
ré fur la iciie ^ Sur ce il lui rcmblcqucquelqu'vnfor-
loitauec grand bruifc'par la porte hors de la chambre,
Çoaimc t«J cioisgenuls-hoinmcsdcuilbycnc de leurs
Yifions,
\
é' mémorables. 9 4 5^
vitïons , voici la maifon au roy renucrfee auec grand
bruit par violence de pouldrc à canon , donc s'cnluic la
mon du IPi mec. Vuchanan aumefmeliure»
Conioignonj. quelques autro hiiloircsaui deux pré-
cédentes. L'empereur iVlaximilirn I.& Philippe I, fon
fils, roy d'Elpagnc, eftaDS en leur cabinet au palais
de BruHclicS.pour refoudrc de quelque afauc d'nnpor-
tancc ,vnvent fc Icue J-quel a rachc &■ iecte hois de la
paroy entre ces deux princts , vne allez grolTe picrre,!a-
quellt Philippe leue de terre : &. comrnc il continuoic
de parler a Ion pcre , vn tourbillon furuint qui lui fie
tomber cefte pierie des mains > iaoueUe le biifa fur U
planche. C'elt vn prclage.ditalcrs Philippe à Maximi-
lian,quc vous ferez bicn-toft pcre de mes cnfans. PeU
de femaines après, rhi!ippe,ieunc Prince, mourut, laif*
fant fcs pupilles à Pempe'rcur Maximilianfort pcre. He-
4ion en fi Chronicjue.
Le pape Adrian VI. s'acheminent d'EfpAgnc à Ro-s
me, pour fen premier exploit voulut voir à Saragoullc
les os & reliques d'vn f^indt : ce qui fît dire à pliilîeurs
qu'Adrianmourroitbien-toil. Il auintaiors auffiqu'v-
r.c riche lampe décrirai, en Pegliie dece fainft, febrifa
foudainement , dont toute l'huile fut verfee fur Adrian
& fur quelques preftres autour de lui, dont leurs habil-
lemcLS furent gaftez. Arriué àRome le palais où il de-
meuroit fut embraie & confommé en vn inftant. Il ca-
noniza Benno euelque Aleman ,& Antonio archcuef-
que de Florence : mais il les fuiuit bien-toft, & mourut
aptes icelles canoniz^rions , que l'on tient pour prefa»
ges de mort prochaine aux papes qui les font. 'Paul lo-
ue en la -vie d' adrian K /.
Philcbert de Chaion , prince d'Aurange, ayant alTie.
gc Florence , entendit que fecours venoit aux Floten-
tiot. Suf ce il rerould^i'allet au deuant : & comme il
vouloit moxïter à cheual fdit aflcmbler autour Jr lui
les Capitaines , Se commande qu'on apporte des fiac-
cons &i dcstaircs,lesfailaric emplir de vin, afin quctous
beulîtptpar erff'mble. Comme les vns &: les antres e-
ftoyenc prefts à boire , voici vnc piuyc impecucufc fe
O Q
94^ Hifioires ^admirables
ruudaine,le ciel eftant fort fcrein auparauant, laquelle
arrouicabondimmcncle prince & les capitaines, cjui
beutîoyctu en platne campagne. lncc>ntincni chacun
dit Ton auis de celte auanturc. Le piince riant à gorge
^cfploycc: à ce qne ie voy (dit lî) compagnons, nous ne
pailcronscjuebien attrciv.pcz à nos cnncnais, puis que
£)icua voulu fi benig Kincnt verler Je l'eau en noftrc
▼in. Ce fartât les derniers propos : car toft après ayant
chargé S)L rompu ce fccours, il Irut au combat tranlper-
cé d'vn boulet,. !ont il mourut. Lefu^^iement de SubtUtCt
Henry I I.roy de France.ayant e(>é ucfconfeillc &pric
BÔméiDcni par la roinefn femme, de ne point courir la
jancele io.ir au'il fut bielle à mort , ayant eu la nui£t
précédente vilîon exprelTe & pielage du coup, ne vou uc
p jurûi dtlitter,m;:fmcs il côtraignit le conte de Mout-
gommery de venir à la iourte.Commc ils s'appreitoycc
à rompe la dernière lance, vn icunc g tfon ^ui rcgar-
doit d'vnc feneftre ce palll'temps, cômence à crier tout
haut, regardant & monlbant le côte de Monrgomm :ry,
heias; ceft homme^'en vatuer IcRoy.T"/;. iTM^/z^pr 4w j.
yoiumf de fort Yhcatrede la ytchunume liu.^,
La perte crtant fort alpre es cnuironsdu Rhinl'aa
15 tf4.p'ufi:u:s mourans à Balle- auoyétccfte coultumc,
par ptcfige merueilleux,au forrdc leur maladie, &. qucrl-
c^ues heures deiûi que rendi'e l'amcd'appeiler par nom
Îk furnom que Iqu'vn de leurs pa'cns , allez, voiûns ou
amis. Ce nomme roruboiv tell après malade, & faifoic
je melme, ainfi ceft appel cotitinuoit du troificlme au
<]fi-iC! iefiic , & confce^ucrnment: en tel'e fonc qu'on
cuildit que cf smalii.vs eftoyeiu les buiflîers de Dieu,
pour adhOurnrrceiJA: qitefa prouidmce dclîgnoit à com-
paroir en perfoone d-i;aiu l'di.Làtnerwe.
Es volumes fi'i' .•••t; nous propoierons plufieurs au-
tres hiftoirrs de pr""a:rs & vîlîons notables ; & ci aprcs
eu celui Cl nou^ rc >relênterons des fongcs extra-
ordinaires,qji onc conucnancc aucc
ces préfixes & vivons.
ér memorahlesl 94/
'i"I{,ES0yiîtTJ02ipeu
heuyeufe,
L Es François ayansprinsd'aiïaut fur îcs Efpagnols
'a ville deNoLaie tn Lomhar«i)e j'an nyil . inq ccas
Viûgc dcnx , clV.iîians trop leur V «floiic la!irt;r(int ren-
forcer Milan : & voulans attaquer Pawc furein rcpouf-
fcz. QL)cl«^ues tours apies ils p.'indrcnt lechcmJn de
Nonce , ce i^ui fil penler à l'année 'mperialequcc'e-
ftoit pour aller à Milan. Pouttanrs'cn alla-elle loger
en vn iicii nommé la Bicoque, fur le chemin de Lode à
Milan. C'tiloit la mailcn d'vD gcnn'-ln mme du p^ys,
ceinte de giands foirc:2,&' de circuii 11 grsud, qu'on pou*
uoit ringer dedans la b Jf e cour vingc mil hommes ert
biraille. Les François approchans de là>ics cap caines
SujIT.-s lors en trri-giand nombre, vindrent importuner
& côcraindre lefieurde L^îiurcch d'aller aflaillir ks Im-
perialiftcs en leur forr.L'iiTaefutà la confufiondts Si-if*
fes.'car il en mourut autour du ft>(Té ertuircn crois mil,&
▼jngt deux capitaines , <k" fans lefivurde Ponrduimi le
reftc eutl du tout efté mis en route. Mémoire dtt "BtUty, le
6.iitire des Chroniques de (Carton.
Les F.ipagnols prera.napç VsLni^%7. s'emparer de
rAng!ctcrrcf,&: con^eq^emment de la France &des pro-
UiDces vnies dçs pays bi«, mirent en mer vne armce na-
Q.ile de i30.vaifleaL'x charj:îex de trente mil hôirc^jdÔE
yen auoit vingt mille decô'^ar, aucc toutes munitions.
Mais prefque tous leurs vaiffeaux & hommes périrent,
coiïimc nous auoas monllrc ci deuanc , au chauitrc des
armées nauales. "
Le dîjcde Parme prefumsnt Çv'>p.quefter h France en
ces m<:!ines temps.i i'nide des forces qn'i' nncnoit , 5c
■ dont il ei\nit rupponéptr je moyen de l*or du Pcru , fie
deux voyages. hi.irdîs, (nais derananc-igeux pour lui &fes
troupes. (Xanr s'apprefter pour y rcucnir la troificrlmc
"fois, il mourut fout à roicit:car ilapprowhojtdu comble
<: die l'a honte &: confulwn.
h oo t
948 Hifteires admirables
'^H^OS'? EXltE mondaine renuerfee
d'ejirattge^çon.
IEan de Satisberi, ancien eaelque de Chartres , diToft
de bonne grâce, que iap'^ofpcrité mondaine , niara-
ftre de vertu > aplaudit à Tes mignons pour les fupplan-
ter,&par vu heur malheureux s'acommode tellement
à eux durant leur courfe tant prifee , qu'en fin ciie les
crauerfe & renucrfe : abruuanc à l'entrée du banquet fc$
conuiczdemiel&de vindoux : pu)S quand ils font y-
urcs eilemefleàladeflertedupoifon , & piscncore,dc-
dans le gobelet. Plus elle pnroit illuftrc& magnifique,
pluscfpand elle au bout des broiiees cfpaifles qui a-
ucuglent les efclaucs- Voyons en vne hiftoire ( cotre
plulieut s autres de noftre temps)du tout pitoyablc,pki-
ne d'cftonneraent pour toutes perfonnes qui font trop
d^cftar de rinconftance delà vie tranfitoire,d'cfcnte par»
I.Maffeeen Tes hirtoiresdes Inde? , fur la fin du feizief-
iric iiure , & que nous auons traduite du Laiia comme
s'enfuit.
Manuel de Soufe , furnommé Sepuluedc, autres-fo'S
goiiuerneur de la citadelle de Diu en i'inde Orientale
pour le roy de Portugal, feignciir opulent & magnifi-
que,qui auoiterpoufcEleoRorfiliedc C.irgias Saii,lor$
viceroy, defireuxde reuenir en Portugal, chargea de ri.
chedts v-n fort grand nauirc & s'y cm marqua au porc
lie C^cchim, fuiui de fa fc-ûimc,d:: leurs petis cnfans, de
Pantaleon Sala , de quelques gentils hommes , puis de
fes domeftiques !<: elclaues : touic ccrtc troupe corn-
priijs les pafTagers&c les matelots, cftant d'enuiron lîx
cens perfonnes. Le commencenivnt de lanuiereftle
tcmp; alTij^nc pour faire voile à ceux qui pretendenc
venirde Calccutcn Poriiigal : ce que les changemens
des vents , & la n-îuigacion plnfieurs fois efprouuccen-
fe'gnenr. MaisSoufc, & ceux de fi fuite ayans cftc oc-
cupez à faire diuers achepcs en la ville de Coulan , ne
partirenrqu'au moisde Feurier, &au commcncc^enc
d'Auril de l'an rail ciuq cens cinquante trois , lenr^uire'
defmafa
ér mémorables. 94^
âcrmara du riuage de Caf'. aire , àl*iided*vn vent pro-
pre & doux. IViais approchant du Cap de bonne clpe-
Tance vn vent d'Occident conimciicc a leur faire teftc»
fuiuid^efclairs tde tonnerres, de nuages noirs ,elpais &
redoutables.Alors la mer commence à s'enter, fecour-
rouccr & amonceler, grofilirant fc-s values urirees de
moment en autre. Les matelots dcfgarnis de gafches&
d'aiiirons , n'ayans moyen quelconcjuede voguer au
contraire, commencèrent à difputerjs'il ieroit point bon
de bailîervn peu les antennes , & attendre au milieu
des flots que la tourmente s'acoifafl. Mais la mer fc
monftrâtplus furieufe d'heure en autre les cftraya ttel-
Jement que voyans lafaifon leur tranchtr toute elpe-
rancc de doubler la pointe & pafFer ce Cap de defefpoir,
tous d'vn confentcmenc refolurent de retourner en
Inde. MaiscedefTcin ne leur fucceda pas tant les vcnxs
impétueux qui s'cfleuerenc foudain du col\é d'Orient
& d'autres quariiers,tant de coRé que ù'aun c , fembioy-
entaooir confpiré la ruine de ce fuperbe & riche vaif-
'feau. Leur premier effort fut de defchircr les voiles , i-
tem de briferle maft,puisle gotsucrnaii, & rendre vai-
ne la fuffifance du pilote > qui faifoit tout fon porfible
de parer dextremcnt aux vaguts. Les coficsdu vairtcau
fendues de tant de heurts jfaifoyentiant d'eaujque tons
ceux qui eftoyenr dedans auoyent aflez d'aFaires à Tcf-
puifcr. Pour leur foulapemcnr ils alkgerent le vailfcau,
iettant bon gré maugre euxrne bonne pairie de leurs
hardes au fcm de la mer irruee , qui s'en monfti oit tant
plus farouche. Ainfi dcfpouillez de leur équipage naual
n'ayans rien deuanc Us yeux que l'image de la mort,
après auoir efté quelques iours le louet des me nragnes
& des creux de l'Océan, finalement voici des vents de
midi q-ii les poufTcnW^ers le riuagc > c'elt à dite à vn
naufrage tour euidenr. C'eftoit le re^-nedc à leurs mifc-
Tt^, s*iis n'aimoyeot mieux cftre engloutis tour vits de-
dans [tî> vagues , ou cftre poulFci à crauers de quelque*
efcucils & bancs de fable.
Ainfî donc on iettc les anchrcs à vn trait d'arc près
du bord , dccofté ô;d'AUCrc du7âiffcau,pour fcfauucr
00 î
9\o Hliloires aim irahleî
par le moyen des cfquifs, Icui feule rciroUTC, en terre
ferme. Soaic le premier , aiicc fa femme, fcs enfans &
quelques vns des principaux , ayans cnlciic à lalialtc
leur arg.nt& leurs bagues , entrent en vnef^uif & a-
Uce extrême péril gaign;:nt le hord , tant les vagues c-
ft' ycni hautes & violentes. Les autres rcftez au nauuc
n\n eutent pas fi bo.-imarclié;cai lesefquifs ayans faïc
deui o'i trois palfid^s dtjmvjrent en des bnncs & de-
Itroits, où il» furent fracall'cz. En mc'me inliant le ca-
ble de i'aiiChre lettec vers le midi , («coué des vents im-
pétueux,i:\jc arraché ; cellementque ceux qui el>0)'cnc
reiicz au niuire , voyans les coi'tcz eflochez, & la mer
comme ouL'er e pour les ci g]outii,re faililfent.qui d'vn
tonnciu , qui d vnc balle, qui d'vnequailîe , que l'eau
pouir«Ui du fond de ce nauiiecn haut, &: iwx ceftcmon-
tu c peu afîirurce entrent fur le dos des vogues pour
gaîgatt le bord Celle monftre pitoyable fevoyc.it cn-
t'-tmcile'"dec(^fF'es3cbahji liotians Wur reaU;& des di-
Ucrs inftrumcns du vaiiîcau portez haut &: bas. Lors pé-
rirent quarante Portugais lurmontez de la fureur des
flors,& fcpr.4nce d'autres nationsilcs furjiuans couueris
à diuc.f^ifois des vaguer, if. tracaffez tantofto tanioft
là par la mer tfcumecfe , lim-neufc & ronflame , lOuc
moulus & fi oilî.-zdu heurt des coffres , oublefT- z iiT-
qufs au fangen d'uers endroits p^r le choc des aix gar-
nis de cloiix, qui rcinbloyeni cr^mme courir la lance,ea
fin arriuercct a bord demi mor'S.
A p'îinecftoycnt ils en terre , que le fond du baflcm,
lo^s lout vuiJcd'hommess'arrtltadeuant le »rsyeLx,&
porté fu' des bancs «ie fable fefndit premicitmvn cti
deux, puis eu quarre pièces , fiialvfmcnctf.iara par me-
pus morceaijx.Tc'fe perre irréparable leJuiliit les p^u-
ures Portug-iis prcfquesau deltfpoir. Car ilsauoyenc
delsberé , ù'efquipper des rcft^s de leur naifrage quel-
que vaifieau léger, pour enuoyer g^ns àSofaia ou Nîo-
zambique demander fccours : ils fe vôyoycnt fi uftr^ i,
de rel moyen par le bris de leur nauire , dont nerelfoic
pas vne pièce q:Ti fufî de la longueur d'vn pied. Toit
«prcsû heure à autre la raçr poaiTalcs corps noyez à
bord
é" memoYahles. 951
bordaucc les anchres,picques&q»jelqucs fauconneau^
qui furent laiilez, toutes les poulJrcs ayant elîé galtccS
&. ncreftdnt falpclhe ni autre mactc e pour en refaîre.
D'auancagcrauiomne s'eftoit eCcouié doiani ces mi-
fcrcs : & p(>u.ceque le pay^ où ils fc tiouucyent eftoic
vers le midi à trente & vn dcg'cz de l'cqiiatcur , Seule
fie faire forte frux , & diftiib :?er i chacun quelque peu
de ryz & de poiifon faié , îc tout demi ponrri , pour a-
uoir cflé mouillé, puis refcousdela tempeilc lis el>oy«
ent lois (ur le labic , auprès de certains pauurcs ba-ba-,
reç,g^ns farouches & inacointablcs » delquvîsîîs n'en-
tendoycnc non plus le Imgage que celui des bcftes
fauuages. Toute Icar comiiîoducconfiltoit en quel-
ques fourccs d'eau douce proches de là. Des balots 5C
coifrcs qui leur eftoyent reliez ils firent vnpccitclos,
& roulèrent qjelques pierres en forme demuraiilir,
pour pcilfer les n'Jïdsvn peu phu. feuit ment , iertani
dehors quelques feiKineiicS) âcfaifant diucrlès rondes,
où foule le trouuoit l^ plus da temps , n'oubliant rien
dudeuoir d'vn bon ch f&: pjtiior. lli demiurcréc prcs
de treize iours en ce rjquoy foucicux , poor fe repren-
dre &rcnfocer au moins mal que polnblc fut, puis oa
entra en deliberatior de ceqii eftoit àfairc pour l'a-
ucnir,& la route qu'ils deuoytnt prendre. Toiis en vin-
drent là,que coftoyans le riuage , ils trooucroycnt vne
l'iuicrc que Laurent Marchelc aaoït ladis futncmmcc
du S.Efpric, où les Portugais venoyenc de Sctala & de
Mozjmbiquepourtiaficqucr autc ceux du piys. C^fte
riuiere eftoit à près de deux cens lieues de 1? vers O-
ricnt. Q^oyqiie Sjulefoft le pins in trcflé de cous
en ccfteaduerfiié .ncantmoins décontenance ^ de pa-
roles ilacouragea tous ks autres afnyure c.i^e rclo-
lution , les exhortant de ne dcrcffcrcr en temps de ca-
lamité , que ceux qui fecommt ttoycst à lamcrdeuoy-
ent fnrc leur compte d'cndurer f^.imjfoif, pêne de biês
&d'cftre redutti àtoutes foaei d'jnconmricdiiez: qr.oy
aucnant. il n'eftoit pourtant quelbô de fe iu;:er perdus,
kL faire côme ceux qui péfcnt qu'aucun mal ne leur peut
tucuir. D'aua otage qu'ayant ckacun d'c^x merùc dam-
OO 4
J
9 S 2/ IftHoires aimirahles
nation éternelle à caufc de it urs forfaits , il leur cftoit
feantdc fupportcr franchement ces chaftirocns tempo-
rels de courre durée. Qi'M conucnoit pcnfcr non pas à
ce qu'ils auoyenc perdu par ce naufrage, mais qu'ils en
cftoycn. eCchapptz. ÇKievoneaentils auoycnt beau-
coup perdu.'mais qu'ils ponuoycnc périr aufTi bieoique
Icrci'r.Outre pins il leur remonftra , qu*eftans cepcnc
norab.c parmi des peuples fauuagcs, ils pcnftflcnr que
le liioyendt fubiîfter dcform-iis eltoii de demeurer d'.ic-
cora è«> bien vnis erfemUeique nul nefifl dcliberation
à parr,quâ tous apportafi'ent leurs suis en commun : at-
tendu que ceux qui fe dcft^indcroycnt deuoyent faire
eftat d'eftre perdus, au contraire rien ne leur pourroit
nuire s'ils dcmeuroyent ioinis comme en vn corps. Fi-
nalement il les pria tons , defucporrer en ce chemin fa
f;Tnme& fes enfans , ayanrel'eard àlctn fcxe & aage:
brief qu'ils fe monftrafTwnt robutUs pour le foulagemct
des foibles .Tous s'efcrierent la deifus, qa'il les mennft
où & comme il lui p liiroii;qu'ils lui obeyroycnt entiè-
rement.
S'eftans ainfi quelque peu renforcez & arourage/Mls
fe mirent en chemin félon l'ordre qui s'enfuir. Manuel
de Soufc marthoit le pemier arec fa funme Elconor,
dame rcfolue à merueillcs,&:lcnrs enfars.qui pour leur
bas aage n'apprehendoyent rien , fuims d'André Valee,
ma'ftreds nauire, lequel portcit pour en feigne vne !ô-
guc croix,de quaire vingts Portugais > & dt cent efcla-
Ues,le!queh rour"à tour c'iargccycnt fur leuis efpau'es
les pe:is enfans, & portoyent nleonôr en vne mcfchanre
Jiâr.ere à bras , (uiu;e de quelques feruante$.& ^t% fer-
uiteuîs du rauire. Aprrs cefte miferabic iroi^pe mar-
choir Pantalvion S.iîa acÔ['3gnc de quelques autres auec
les efcbncs Portugais Ils marchoyét à petites iournees
par chemins p£;riile:T..i caofedesbeftes fauuages & cru
•lies, qui à tons coups leu: icuioyent l'alarme: auoyenr à
rraucricr Citî, rochers fan; chemin , grauir par des mon-
tagnes d'ei-cefllue hautr-ur , puisdeualer en desbairi-
caues elVroyables à regarder, oii ils trouucycni des fon-
^licrcs profoadcs Ôc dc$ toricmj impétueux, C'cftoiE
à cc$
tr memorahlesl ^55
aces pauur es voyager s de cerchcr & fonderies guais,
les montces& dcfccnres moins malaifecs.Mais faur:^ de
fçauoir les chemins ils alôgtréc le leur de plus de leptâ-
le lieues. Vn mois fe pnfla durant ce voyage:&lè pi> fut
<ju'cftans au bout de leurs viures: la famine vint les af-
failiir. Ils i'en defcndoyea: psemieremeni à T.^ide des
moules & auTcs menues co(^u>i!fs , item dequelques
poiflbns pourris & au'.rcs tels rcbiusde mer. S'ils. s'ef-
longnoyentde'a riue , quelques pommes fauu^ges &
menus nu!t-i d'arb'CS inconus leur feiuoycnt, auecdes
brouts d'arbresen fin ils mangèrent Ici charognes des
bcftes trouuecs en chemin , qu'ils faifoyent roflir, f.:
bouillir les peaux, dont ils npaifoyent Iturfaim. Lafoif
ne les tourmentoit pas moins. Q^iand quciques-vns fc
defbandoyent pour en aller achcrtr bi>in loin fort chè-
rement , c'cftoit en extrême crainte de^ voleurs Eihio-
piens,&dcs lions & tigres, dont !ç^. rep-'ircs leur eP^cyct
inconus. D'auantagt; le prix de l'eau douce eftoit c^f cef-
fîf, &quclquesfois vnechopine d'icel'e couita huKflef-
cus. Ccftc recharge fur caule que de fois à aurre quel-
ques-vn$ de cefle iHJierablecarauanneabatus de difcf-
te.cfpaifc: 2 de toute vigueur, 5: ncpouuans pins fc icyi»
ftenir,demeu»oycnt en chemin ponr biuin ai x barba-
re? cruels, & pour pr<^ye aux bc{t;'5 & ai;xoiicuix c? -
nafl[îers. Cti.x à qti rcfiOit quelque force po"r parfcr
putre recueilloyct lesdcrniers mots& f^ufpi'S de leu'S
compagnons piteufement cspirans, fi i ftonn^z aure^^e
de leurs propres iTj3t'x& pcrrils qui les agaçoyéc à toi -
tes heures, qu'ils cftoyciit comme ftupi.ics & dn roue a-
hrufi» en regardant les aritresda tout abatus. Qnant à
Souf, quelque ficns amis qui lui rcUoyent , l'angoif.
foycncdeluicfj'^émenr. M-^is les trausu.v & mc.!]icrr$
iournaliers de fa f-rminc le rendryent prefque'v lufcnlf :
combien que ceftc. damefc monftrall inuinvîhle cora-
pafîne decp-ps &: d'efprit à ion mari,& que u'ayat p:u$
de valcrs allez forts peur la porter , elle fut deîia aciu-
flumee de marcher à fes pieds. Car lors elle acour;:-
g*oit les autres, & à fontour portoit IVn de fcsenfans.
Qujicremois après leur naafrage,ils paruindrenc à ccite
9 s 4 Hijtûires admirables
riuicrefurnommecdu fainft Efprit, fans fçauoir qu'ils
y tufit-nr. Pource uu'ils sVftoyeiu iraagu.cz qin:K|ac
grandfieuue& là ne leur paroilfoit qu'vne ptcitc ri-
iiiercparciccn trois bras , qui au bout ic rendent en vn.
D'auantagc,ils n'auoyent point de ir'jch^maos propies
pour entendre où ils cftoycrt , 6l leurs eTclaucs Mores
ne comprencyent mocaucun du langcigc des habitans
au longd'icelicriuiere.ll aiiini de bon hcur,cjucle Ici-
gneur du pays elloit homme pailîble , à comparaifon
des autres Ethiopiens , & port oirafF:^^ ion particuiicc
aux Portugais, ayant trafiqué peu de ten^ps auparauanc
en paix abonne corrçfpôndance auec Laurent Mar-
chcre& Antoine Caldeire. Icelui recueillit gracicufe-
nient chez foi Soufe,& fa fuitcvoulant qu'ils n'en bou-
geaifent , iufques à ce que quelque facteur Portugais
vinfl de Sofala, Ce feigncur n'oublia raifon nircmon-
ftrancc aucune pourles tenir, partie poulîé d'vnc dou-
ceur & benigni.c qui lui edoit naturelle , parue aulTi
induit par la comaiodité qu'il pretendoit rccuci'lir de
ces hom lies, lerqaelsil etbraoït luiauoi.reltc coitime
cnuoyez du ciel , pour vn fecours alTeuré contre cer-
tains puifFans ennemis qui lui failoyent la guerre.
Pourtant aptes leur auoir monft-é tout bon vifagc à
luipofllble, il leur fit encciidrc par gelées & lignes dt-
uers , que non loin de Jà rej^noit vn puillant fei-
gneur, mais acouftumé à brigandages & faccagem- ns:
qui les ruincroittousjs'ils ettoyentfi malauiTcz de paf-
fer outre.
Ses prières & remontrances furent inutiles. Plus on
trairoit liberalementSoofe , moinsiU'alîcurou.fi»: cui-
dant que ce faft vne fincfic & machination contre lui
& les fîens, rcfolut des*', n allci delà : bricf il fit tant
que ce fcign-ur luio6l:''ova quelques petis balteaux
pourentrer en cefte riau-re. Au cinquieimciour iis i*a-
uancerent iu(l]ues au milieu d'vn des bras d'icellcayant
tair trois censl'euè'i dfpui» leur nauffage,&. ne (c iiou-
uans plus que fir vings pcrfonnes au luu defix cens.
En fin lis rrauerfcnc ccbras&couoiircnt par Icjrs ttu-
chemaas qui entenduyeut œicux le laug«gc du quartier
où.
ér mémorables] p 5 5
où ils fc: trouuoycnt , cjuc c'cftoJt lariuierede LaurcnC
Marchciepar euxcerchec aucc tant de crauail , &cjuc
des homme*; blancs , vertus comme eux, venoycnt par
bafteaux trafiquer U.L'cndroM ou ils fe irouucrent n'e-
ftoit i<t loin de la mer . & ne trcuuoyent poinr d'eau
douce ; ;a rené cftoit rteiilc à: déserte : pourtant fo ce
leur fut, cftans tout rompus de tauaux , ùe palier la
nuidl comme ils peiirenf.Lelendc'main ma in deux ccr$
Mores paroifTent : Souft 3c les fiens penlans qu'il t-i<-lt
fe battre , quoy que foibies & abatus de langueur, en.-
poignent lents armes, refolus de donner Ja ciialTe à cti
brigands. Le chef de leur troupe les deuance,&; mon-
ilrant vn vif^ge paifible s'enquicrt douccJiîtni qui ils
cftoyent &d\iù ils venoyent en tel pays. Soiifefcjsf-
fcurant fait entendre par les truchcmars touK Ton a-
umturc : demande des viures en payant , &preftntc
quelques couftcaax& autres pièces de narchandifc-î-
<^reables à ces peuples. Les Morts voyans que le m-jen
de faire leurs befongncs fcprefcntoir, nais qu'il faluic
y procéder feuremenr , dilfimulans 1< ur fcù n courage,
rcfpondirenr qu'ils u'.ii<»ycnt point deviurej auec
eux : mais que leur ville n'citoit paslomde lirquelcur
p:incc •v'cei.roic «roui toiû ment les l^oittignis, qui y !e- '
royert bien traitez , s'ils y v . ncyenc. S« elc 6c les Éc us
e^oyent ext'emement las ilî :e voyc vent au bout de U
riuiwre tant deûiecj'a faim & l.i foif .es fourm- ntcyci t.
Pouaant ils s'achemincrent vers la vil e i»j»rcs lrî:.r-s
guioey. Compte .Is en ^prochoycnr, îc prince l-nrcn-
uuyed f ndrc rcni'te, 3c leur ma.quc la auprès des ar-
b-(-sfiieiIius pour s'y repofcf. Ils ccmeurcrcnr en tels
K:g s fix icurs entiers, oiîiis vcfcurent de chairs & au-
tres viures Tueles hab tans leur fourni? cnr en cfcÎTnn-
ge de doux da fc:r a rache'i des a x de leur nauire. Là
aup'es cftoit vnc foniaine d'eau douce pour Icurb ca-
uagc.
Ayansprins quelle ccnoi/Tance 2uec ces bjibvcs
Soûle emb.iboou.é d'vne opinion(quoy que pernu i<.u-
kt comme il apa'-tu puis aprcs)Que ce lieroit facommo-
^ s ^ ^tftoires admirables
dite d'attendre illec quclt^ue fadeur ou marchand de
Sofala, rcfolut d'y faire fuioar. L«.s Mores l'en (olliri-
toycnt aufTi bien fort, & quel'^ues-vns d'entre. eux allè-
rent vcts leur roy ou fe gneui demander quelque logis
commode;OÙ Soufc , fa femme & leur fuite pcull^nr cô-
modement hibicer àrintcntion fufmeniionnce.Ce lei-
gneur,auflî rufé &: melchant que fts fuiets, cnur.ycdirc
à Soufe , qu'il eftoit bien afyedtionné vers les étrangers
&afiîigez,m3is que deux railonsrauoyentempefclicde
les rcccuoiren fa ville iafques alors. L'vne , que la di^
f»;ttcde viurey eftoitfi grande , que l'on ne pourroit pas
Jes nourrir & loger cous en mefmc maisôrrautrequ'e-
ftans équipez de poignards, d'cfpees & aii*rcs traits nui-
sibles 5 ils feroyent trop de peur aux habitans du iieu,
fcns nudsjdefarmez, &acoiiilumez à ne porter que des
aftôs.QM^e û pour prcuue de demeure paifîble les Por-
tugais veulent de bonne foy lui bailler eo garde leurs
armes, il logera chez foi leur capitaine & lei, principaux
de fa fuite , & les autres en mailons afleurecs de la ville.
Soufc ayant afTemblé fcs gens ces demandes fui et trou-
ueesrigoureufcs, & le refus périlleux, â caufe qu'on leur
ofieroules viurcs. Nuldonques n'ofa manifeftement
s'oppofer à telle inflace âcct fcigncur,t"ors Eleonorqui
defconreilliviuemcni &L dcuant tous , fon mari, d'acce-
pter telle condition. Soulcqui n'auoit point voulu croi-
re rau:rcfeigneur,hoinmcfîdcle,qui lui difoit amiable
ment la venté, ni fa femme bien-3imee,qui le fupplioit
&admonnefloit fcurement au befoin , pouffé e'vne cré-
dulité vaine & pcrnicieufe , fcliura foi- mefmc & les
fitns es mains à'vf\. trompeur. Ainfî tous enuoyent leurs
armes à ce ftJgneur , chez qui Soufe, fa femme & vingt
autres leurs familiers furent logez. Quant aux autres,
les officiers de ce fcigneur les Icparent cinq à cinq- en
niaifonsefcartees.
A peine ef\oyent-i!s entrez en leurs logis ou plufloft
b igaudagwS, que ces barbares leur oflcnt tout ce qu'ils
auoycnc , & les defpouillcnt de tous leurs veftemens»
<^uoyqucfrippcz & rompus : leur baillent la nuift fui-
uanccfortpcuàraaogcr, ôc Icmatiavenuleschafrenc
des
é* memorahleS' 957
4cs maifons & de la ville à grands cris & â coupî de ba-
ftoo.Le tyran rauiifurieufementàSoiifc, à fa femme &
à leur fuitcjtout l'or, l'argcnt,&' les bagues (qu'ils auoyér,
leur laiiïant leurs hâbiilcm'ens, & s'abltcrât de les frap-
pcr:puis les fit ictti.r hors comme les autrcSjdifantquc
tels cour faireç &cômÛ3 ci nemis du gère humain aaoy-
cncefté par lui plus gracieufement traite? qu'ils ncmc-
ritoyent. Alors Soufe & Icsfiens fcntirentcombien ils
auoycntef^é maUuifczdc fedefarmer &Êcr endcs bar-
barcsinconus & peifides. Mais ce net t p3s le bout de
leurs mifcrcs. Car dcfnuez de confeil, tous desbandez,
fans conduéleur, a; s guide, ils con mer-ccut à marcher
àrauanturcrSc làdeiïus voici foudain vne grolTe trou-
pe de Mcres , cquip-cz de biftons fort poin(fîus, c|ui cn-
uelopenc Soufe&ifa faite, puis fans accep:ion d'aucune
pcrfonnedefpouilknr hommes, fcrramcs S: enfans, qui
Ledifoyentpas vn mct,t3ni ilseftoyertefperdus : excft-
ptce Eîeonor, qui Çz fouuer.ant de fa race , U foigucufe
de fonhonneur,Fait toute rcûftance à elîc pofîîbic , dct
ferrant force coups de poing & de foufflt tsfur les faces
de ces barbares, pour les irriter , à ce qu'ils la luafîenr.
Mais n'en pouuant pi as, &: Ton mari l'exhortant, clic dé-
bita. Ces pauurcs gens touteftonnez( après la retraite
des voleurs) tournoyeat les yeux pour nes'cntre-voir,
nommémentporr ne contempler cefte honnorable da-
me , qui plus etFrayec de la lumière du iour qxx-'. de Ja
mort mcfme , fe fit faire vne foifc dedans le fablon où
elle feeouurit d'iccUii . &: quant à ce^jui pnroiiToit de-
hors le cacha de l'es cheuenxefparpi Ile/ , pli» appfHanc
André Vafcc & qneK^ues autres reftcz eo périt nombre,
leur dn,Cf ns de bien & d'honneur, vqjs aueztfté tres-
fidtles à voftre capitaine. Il fuffit , allez & prouuoyez \
voftre fauuerc. Si quelqu'vndc vous peutfinalemcnt
arriuer en Portugal, faires fçauoir en oijt lie raifere mes
péchez ontreduit mou mari ôcmoi. Cc'adit , eMe c^e-
meura en fon eftai fsn^ bouger , ni dire plu? pas vn feul
moi.SiqueJquesfois elle regardoic fesrhcrs enfans , les
iarmcs luiruiflcloyent des yeux aijcc hauts foufpirs &
lànolots. Qiiant à Manuel de i'oule pcre & mari , vnç
9^8 Hijloires aâmtrahlcs
tiifteire& doHlcur profonde lui auoit ferré le ccrur £*:
Jà bouche. A) aiii tenu quelque rcmps les yeux fiche?, en
terre , comme fijppé d'vn dclat dcfou-dre.ou tout he-
hzit : finaloment le foin ce fcs petis s'cfnci liant roue "
cojp , il s'achemine vers vue lorcfl: prochaine pour \
troaucr qucicj je tiourricurc. De retour , iltroutclc
plus pccJt de les fils décodé» &. fa fcmrr.e, qui auoitefté
irois lours fans mang-t , accablée de triftcHe & dr bf-
iTies. 11 enterre de fi.s mains Ton cnfant:& "'e ien^emaia
retourne à la quelte:mais au rcccir il void fa femme &
fon autre fils expiiez , .autour defquels edoyent quel-
ques fer uamcs qui fe lamcncoyentd grands crjs , près
de ces pauures corps. Ayant fait retirer les feruantcs, il
feieite par terre , apuyani quelque peu de temps îa re-
flc (ur la main droi:e eftcadue uefa femme trefpslfee:
puis à l'aide Azs (emcnres cache dedans le fabîela fem-
ji,e & Tenfant, fans proférer parole quelconque. Cela
pa. achcuc , il s'en retourne par la fo'-eft.'où l'on prelu-
me qu'il fut dcuo.épar les b ftcs fauua^^cs : car on n'en
Oiit depuis ni Vent ni voix. Les a^jiFcs fumiuan aa
no.nbrc de cent.trotTpe honteufe comme l'on peut pcn-
fcripiCiTez de neccfTî é extrême •, aptes vn long tracas,
re^Jitsau noiîibic d^ VHigc-fiifurêc prins prifonniers,
& fînalcmenc rachetez par vn bafteher Portugais, le-
<ju^! de bonne encontre pour eux vint de Mozauibi-
qucjju port où ils e(loyer.c,achtter de l'iunircà: les ra-
cheta tous pour peu d'argent , & les ramena en Por-
t )gal, oiiils racontèrent: par le menu toutes leurs auan-
i j.c$,lommaircment reprcfcntees en ce dilcours, bi ivf-
Lemeo' d^fcritpar le 'DoClcnr Camerariuf .tu ■•..ydlutne de
ftsn.edttMionih:jtoriques-> lune ^.cha(>itre I 7. Ou il adiou^
Ite tout a la fin ce notable trait de Valer es Maximus,
que la grandeur &: richefTc humaine n'eft que fragilité
Il miCrc.comi^arableà d..s riffiqueis 6: bagicLlIes de pe-
tis crnfaus Elles affluent cri vn inftanr ( dit-il )& s'<f^
coulent foudaincraent , Innss'arrcfttr cnci;droit quel-
conque > ni en pcrfonneaucuoe, tant elles font mal af-
feurces. Lprs qu'elles (cmblent prendre racine, vn vent
iûCcrtaiQdcrci^oIutioD incomprcher.lible les poufT'- çà
delà)
ér mémorables. 9 5 ^
U là,iellement que ctux qui fonc montez au plus haut,
de/'itacx l'oudaui de leur apuy qui ne fan que rouler,
Ibnt milerabicni' ne plongez ôc noyez envnabyfmede
contufions. Pounanr ne d-yucnt cftrc eftimcz niap-
pcikz bi^ns ces aïg- es douceurs , qui par ramertume
des maux doni elici nous bacccnt, recoubîcnc ia peur
qu'on a de 1 s pcidie.
Aircltecefteprorperi'é rcnnerfee & cnfeuciie du
p.iuurc Sepuluede &:d'Ekonorfa femme , publiée par
Icf^yaumc ie Portugal , elmcuc cliacun à en pleurer à
chaudes liirmes : na'fc ellit n'clic^gnir pas pourtant Ta-
Marjcc & folie vanné Je plalieurs. Car l'année fuiuan-
lie.cifîq capiramesde nauirc firent voile de Cothim eu
Portugal. Ils auoycnt pour ciief Fernand Aîuares Ca-
pra'. Apres diuers pvrils vne feule g^i^na le pn-i (fg
Lifbonne. On ne fçait que deuiudreni ics autres, exce-
ptcei'Amirale,nominv.e S B^^nedidt. Elle cfioirf:char
gec de marchandifes & de richcfles,que les matelocs ne
p jU'joyent s'y remuer qu'a peine. Mais au milieu de
U route , battue furieufem -n: des vents & des vnoueç,
& faifant eau de coures parts , tellement qu'on ne pou-
uourefpuifer , finalement elle fc brifa près d'vnriua-
gv.- duc p de bonne efpcranicc. Deux cens hommes pé-
rirent en mer, ne pouuans gai^ncr le bord : les autres
fortfjiblvS & demi mon*: demeurcrent quelque temps
cft.ndus lur le riuag'.-. Vn d'iceuxclchappé de ce tt r-
rib!e naufrage , nommé Mcfquire PerertrcI , qui eu a
cxiclemenc fleftric le-s panicularitez. l'adiouftc des
chofesdu tout prodigiei.f s , mais vr.iyes fi i\til]"(j_
les de l'auariccmfaci.vblt des pauures incrédules, qui
s'exto.c.Jt à tant de hazards & malheurs pour des
biens pc- ilfdblcs : c''-lt qu'au fort de la tourmente on
vid en Tair des bandes &danfrs de malins efprirj.
Les refchappez le aictunt au chemin par terre en-
te nJoyent la niiid à<s cris effroyable» de mariniers
&; palîhgers. Du c^mn»cnccment i'seftoyent plus de
t;oiscciis efchappcz. Mais aprcsauoir fait t'ois cens
Jieués de chemin par terre, où ils endurèrent tous les
mauxduaiofldc, Uwuaut qu'aairer en Mozaoïlijio.ie
11
$6o Histoires admirables
èc Sofah.leur nombre fe trouua réduit à vingt & troifi
acabicz de faim S>id'amicitn\ikicS'I yi^iijfeeaHmeffncliu.
I 6, des hiftutrei Indiennes.
T\OTECrLO-H excellente.
T Gates nos dcliurances, en ces périls infinis de la
vie prel>nte.!ontdc Dieu, lequel le tertdu miniflc-
re de r<^srainc\$ Angci pour nous garantir , luiuant le
cefraoignagcda i*iopheieau Pfeaumc ^ i.ainû exprimé
par Delportcs:
Aux Anges qui fntfes mejjages
Ilhra ce couimcindement^
Qu'eu ouelqucpnrtquetu yoyages
Jls te gardent foigneujement:
yoire CT de peur que d\iuanturei
Ton pied ne ytene a fe greuer^
Chûpant contre lu pierre dure.
Leurs niants viendrait tefouleuer,
Comlnicnquc le Pronhcrt applique cclapropremcJiC
aux pcifonncs qui onc droite coooillànce ue Dieu.poar
l'honorer fcion la f.nnde volonté : (2 crt-ceque la lain-
6te Philofophie nefo.clot pas de c^itc benediftion lej
petis entans, & les perlonnes m:lmes qui paruenus en
aagc , ycnfent aafli peu à la protcftion des faiucls An-
ges que ies petisenfans, les panures affligez &mefpri-
icz au monde, qu< fcmblcnc eiVe tellement accablez de
miiere,qu'il n'y a refToarce quelconque en eux. Nous
adiouftons aux exemples propoiez au premier Tolumc
quelques -vnscncor, qui nous ont eflé donnez.
Catherine AufFdcr farnbach jdc Hilden en la duché
de Cieuc^îfemsnc d'honneftccondiiion , ayant à cou-
cher vn ficn orfanî aa^é d'enuiron deux ans , dedans va,
pciit ÎJ6t , luichaufFj quelques linges pour lui mettra
aucour-it. corps ;en i'vn defquels le fsu Te print , fans
«^u'clley prinftgnrde. Mais ayant couuert &acommo-
ctfti'cnianf,lcii»iirccndoimi, lort delà chambre & m^i-
(bn, ,
& mémorable 5^ if et
Ton, & fer me les portes après clie , cftant allcc à quel-
ques pas de là pour les afaires domefticjucs. Reuenant
vne heure après , elle void Ictfiir de la fumec en abon-
dance hors des feneftres.Cc qui lui faift changer le pas
en coufr>-î atcompagnec c'c frayeur &grard cremble-
mcnc. Entrée en la chanabie , elle trouue le petit liél
embraie &: tout en feu:ma;s l'entant fain & tant au mi-
lieu des fiam(nes,î?ins brullure ni dommage quclcoo-
q ue. Tai ce récit de ^. ÇuiUaume Fabri de hilden, doftc
chirurgien,ncueu d'icclic Catherine, lequel m'adiouftc
trois autres exemples en fi lettre du dernier iou^ dà
Fcuricr i <5^o 5 qui orc doiucnt pas eitre oubliez.
£ftani(dic il)petit garçonnet de /aage de quatre ans
ie voulus courir aprcs mon père, kquel eftoit allé voir
quelque fienc polTcffion près de la ville. Couché par ter-
re,vne forte charrette de paylan chargeede quelques!
hardes me pafla par defl 'S le vtn[re,mais Dieu mepre-
fcrua teilcmenr,qi:e ic n'en eus aucun mal.
l'ai traité(adioufte-ii) auec Cofrac Slotanus chiruf-
' giendudjc deCleues vn enfant de deux ans,d'vnpay-
l'an nommé Ado fc: tmHolsz auprès de Duireldorpje-
quelenf^ni.eftoittomiȎd\ne lucarne en bas fur le pa-
uc de pierre, de la hauteur de deux picques,&ne s'eftoit
1 point cafTéanais feulement ellourdi vn peu la tefte,donf
j s'enfuiuic quelque voroilfemcnt : mais il fut gueti de
I tout cela en moins de deux ou trois iours.
j Depuis peu d'années en çà vne grolTt pierre de la pe-
! fanceur dedouzeliures lombadu haut du clocher de
Lutry,bourgadeau bord du lac, entre Laufanne 3c Ve-
Uay > au pays de V'autJur ia teftedu fils du (îcu> Bandc-
, ret de ce lieu, lui enfonça le crâne dedans le cerueaUè
I Neanimoins par la grâce de Dieu, ceftcnfantpenfé pat
M.G.Fabri,aefté guéri de ce coup.
Coniiderons cncoro quelques autres cxejnpîeS de
ccfte prottftion Angélique. Il y acnuironquatorze om
quinze ani, qu'vn bv<n pcrfonr.agL Dauphinois, ertartt
lors à Nonnay en Viuarais , logé près de la grande E-
glitc de ceftt ville la , comme li dormoit paifîblcment
en fon U€t. au haut eftagc de la n>aiioa , fur la minuiét«.
PP
9^2/
HiBoires admirailes
\c ciel s*eftantrfiTicu>lafouIdre tomba fur vn haut clo-
cher d-- pierre fair à pointe, d'icelle Eghfe , abatit ia
croix , cjuj tomba prcmicremcnt fur vn des coftczdu
toicldi hij»is fufincnti ■:noc, pais en vn iardin. Sur l'au-
tre co'lé du loicl , lornb^-rent deux quartiers de pierre,
i'vn de la groHeiir & longueur d'vn pied en quarré > le-
quel donnant defîus ce loiSt , iuftement à l'endroit du
Ji6ldtfceperfonnjge>tVacalla cctoi£l , cheut fur des air
tout poariis &: les bf ifa tellement qu'vn des bouts de
Ja pierre parut iuit;:men: par le percuisfaïc àccs aixfur
latcfccde ce pet Tonnage repoDnten ion iifl,& s'auan-
^a par vn bout, l'aurre demeurant arrefté âccpafîage
tju'ii auoir fut , au grand elLahilTjment d'vn trcfgrand
nombre d.- perfonncs qui .'irt^nt ce quartier de pierre, &
dont piuficurs recognurcnt vne proccclion fpccialc des
5 S. Anges. Les autres en ingèrent félon leur picLne
Ignorance.
Q^uant à lui, qui m'en a fait le difcours , il y rcconoic
vae fort particulière faucur de Dieu en cell endroit, &
d'':puisccs guerres de France , çu il acfté cmplcyé au
fcrnice du roy cndiuerj lieux, cftefchappé de trcfgrands
dangers. L'autre quartier de pierre,beaucoup plus pecJt,
cftanc tombé v n peu plus arricie, ayant frjcafle le :oiift,
6 tombé en vn endroit où il y auoit quelques che-
Uron> fichez en dcnx murailles pour faire vn planché,
rompit vn aix neuf qu'ellcrcncontra , puis vnc quarte
feruant à mcfurer le bled , à cinq pas loin du lia; de ce
peifo inage.ce qui fcruii àplus cxprcffc manifcftatioa
de la faueur de Dieu en l'on endroit.
L'auriehiftoire m'a erté efcrite par M. Gnillaumc
Fab:i thiîurgien fufmentiunné, touchant M. Galcnus
y Vieriis,cclebre médecin du Duc de Cleaes. IccJui ap-
p°I'c n'y a pas long temps fur vn foir, pour aller en di-
Jigence voir vn malade pre^Ié , l-^qucl auoit befoindc
fonaide , & cftoit alfcz loin du lieu ou fe ictrouuoic
lors icclui VVierus , monfe à chenal fuiui de fon fcrui-
tcur,& muchani de nuKfl ne fe donne pas garde d*va
danger mctucilleui.il y auoit en chemin ceaaine mine
en la-
•
énlaqnellc les folToyenrs defcendoyent parvncou»
tieiturc ronde en forme de puits , profond deplufîeurf
loilcs. Sans y pcnler ce bon & dode pci fonn-àge pic-
qu.incafTcz foîclenc fon chenal (autcr & s'enfoncer
coût à coup dedans ce puits? qui elbiii(comme on peut
cftimcr plus eltroit lur le nni'cu) le cheuaJ demeure
arrefté de la teflc £: du derrière , où il fc tourmente &
bat des pieds tant qu'il peut , mais en vainine pouuanc
deualer , mons encore remontei. Le maiftre eftoit
dcflusen la fclle , tandis que fon feruiteur plus retenu*
& entendant fa veix en ce puits , &lebtuit du cheua!,
couroit en porte par les vilIs^.'S donnant l'alarme par
tout. Ufit de forte que plulîcurs payfans acoururent
auec lumières , cordages & engins, pour aider audo-
ôeui VVJe US , lequel ih tiifrcntdcxirement hors de
ccfepulchre, letrouuereni fain &iàuf, fans qu'il euft
blefl'are niefgracignure qjelconque. Mais fon cheual
s'cftoit tant tourmenté & enfoncé peu à peu fe dcbatâe
àcs pieds , qu'il fut retiré mort. Tout le contraire ertoit
aucnu le iour précèdent de certc cheute au chaftcau
d' Arcnberg, où VVisrns cftoit. Paul Langen fccretaire
du duc de Clcues,fortlt après diCné hors de ce charteau,
tomba auec fon cheual du pont en bas dedans le foifé rô
gueres profond. Le cheual ne fut point endommagé?
mais le fecrctaite fjtacrauanté de cette cheute,& mou-
rut au melmc inftanr. M.Guil. Fabri m*a donné ces hi-
ftoircsde VVierus&de Langen, qui mr ram, ntoyuet,
afin que ie ferme ccfte fedlion comme ie l'ay comenccc»
vn autre trait du Prophète aupfeaumc 35. félon (juC
D^fportes l'exprime:
HiiiSeigneurja grâce acompUsf
Les hi*mains fauue (j" fe dr/fiie
Sur tant d^ animaux ft diuers !
0 'DicUiCombienfe multiplie
Ttt Lontép.xr tout l\tuners!
Siledefteur VVierus noi^s fait voir fa deliurânce
plus au long no'is en ferons pa'i aux François.
Micé Beruard 3cGuilIauine Haircau, natifs de la villa
9^4 Htfîoircs admirai les
de Craon , es frontières de Bretagne , retirez durant le»
premiers troubles de Franccen Normandie, & depuis
Japrifc de Rouan rctouruans en leur quartier , fuicr.t
arrclt;:^ prifonnicrs au chaltcau de Maine la luhâis:
dont ceux de Craon aucrtis firent en forte que le
c-''pitaiuede cechafteau , homme crutl,dilibcra d'cQ
donner le paiietemps au peuple va lourde Dimanche,
& faire harquebouzcf ces dt-ux hommes par Tes leiui-
ceurs.Mûis Ibr Fheurc de l'exécution, cecapitaineayant
rcceu lettres de ceri.:in$ geniils-hommcs voifins , &
nommément du lîeur de Nermonticr , non feulea.enc
changea d'auis , mais aulfi fit plus gracieux traitcmenc
aux piifonniers que {/atauant , fans toutc.'fois les dcli-
urer. Cequevoyans k$ ieditieux obtindrent de celui
«juigouuernoK lors le pays , queles prilonniers leicy-
cnt menez en la vilic d'Ang.rs , pour y faire & parfaire
iturproccs. Suyuan: iceil.^.slcttrcs , ces piIbnnicisa-
xrjeE z iufqucs en ia mailon du PlclTîs de Colmcs , la
rcfoiution fut prife de ne les mener plus outre que
Chauagnes,àdemje lieue deCiaor,cù le deuoycnt re-
centrer ceux qui en pourfayuoyem fi viuemtni la dtf-
perche. Mais Dieu, qui en auoit autrement ordonné,
permH,qu'à l'aide de iinu^dl.quiles auoit furpris, Hai-
rcau s'clchapp^jcoiîpant les cordes dont il tftoii lie , a*
uee vn petit coufteau , qu'il auoit parauant caché fubti-
Icmen: dcdai s fcs chauffes. Ceux entre \cs mains def-
qucls relioit Macé Bernard , extrêmement irritez que
Hajrcaufuft hors de leur puiflànce , cftreignirent de
rouLv.;aules"mainsdc Macé dcruere ledos, le n.cncreuc
auct lanternes lur le bord d'vne riul^re p'ofundt qui a
foB cours [ re\ ccUe maifon de Chauogncïjoù l'vn d'en-
trcux nomme Magsfferic , lui ayant dcir.:rré de toute fa
force vn coup d'cipte deliui le col & d'flus les efpau-
Jes,doDt 11 p.- nfoiiluiabarrcla leftc , le icttcrcni tn la
riuie*, lui tirant ouf - plus plufieurs coups de piltoles
&: Krfrquebuzes. Mais Dieu ne laifla pour tout cela de
fp.ircion Œuurc , ayant prcmicremcnt modère la plus
parc de la violence du coup d'efpec, par le moyen d'v-
4ic branche d'arbre qui fe i^uuua entre dcux> & coudui-
fauc
& memcrahlesl $^<^
fanttellcmentcc pauurc homme, roue lie & naurc qu'il
cflo4t,au traiiersde la ri liere , qa'il fc trouua ie Taucre
coftc , lors que ces boarrcaui icpenfoycnt au fond de
reau:& depuis fut ^ntx'x.HtJi de France fow Charles IX.
HeJaine Moluaur vefasde G'iîlîa'ime Doucher re-
ccueurdeCraon, femme caduque & aagc^ede cinquan-
te l'ept ans ou plus.s'clH. cachée en vne maisô au bourg
^e fainfl Clcmeut» quelques feuiieurs desmoincsda
]ieu,a(Tîfl:ezdela commune, la rirerent dehors auecvnc
corde au col, lui demandans fon rhrefoT,& après i'anoir
tourmentée en mille fartes, pour csbranier fa conftâcc,
mais en vain, la ictterenc en la riuiere de Dûm,pour lors
forcgro/re,à caufed'vne creue d'eaux furuenue. Mais
Dieu voulutque cefte femme aagcc *: caduque, lut por-
tée droit à l'autre bord de la riuiere, oùcliearriua faine
& fauuedcuantles yeux de c^.s bour(eaux, ne ia pouuâs
cmpefcher,pnur eftic la riuiere trop enfler. Leiour foy-
Uânc, ceftc fémc trtant tombée entre les mainsd'autrt*s,
au(Tî cruels que les premiers , en fur rachciee par ccj-
tains ficns amis , moyennant promelTe dcU fommâ de
vingt efcus.Lrt mefme.
J^A TE L L E dt* corps humaiihC^ dii*ers
acctdens U'f celle,
AL*ouucrtu/c du corps de monfieur le Com'c d' Au-
fumont,rraporié fubitemenrde la maladie nom-
mée Choiera moT bus, nous trouuaùnes laratte de gra-
deur incroyable , & depoids cftrangercar elle pafia cinq
liures de bô poids. Outre plus elle eftoit fepares entière,
mentdc tous fcs ligamens qui i*actachenr:parquoy elle
aagioic par toute la capicitédu venrte,tant en la partie
anterieurcquc latérale. 24«/;. Cabrol enfts oùfentationsa-
natomiques^obfeTt^6 .
En l'année i 5^0. me vint trouuer en la boutique de
maiftrc Gilbert Cafcncuve à Montp .lier , où ie demea-
oi$ pour compagnon, va raiuuâisgamimcniaoniiû^
^6^ Hijldir es admirables
leanfîls de Pierre d'Aurias, cardeur de laioc. Il fjiToîi
vn des grands froids que i'jyc fenti depuis. Lors il me
demanda lout haut,fi le temps cftoit beau pour faire des
anaiomies.le lui reipon 4u'oui,& que l'etlois marri que
la luftice ncfaifoic pendre tant de larrons qu'il y auoir.
Lors il me réplique, laillcz moitjire:ic vousrefpon que
vous en aurez vn demain marin. Tout à l'inftant il dcf-
gaina lonefpeecn intenrion d'aller faire quelque mcf-
chantcoup.il ertoiaiui^ : mais à la fortie decefte bou-
tique il rencontra vn ficn ennemi , regardant par à tra-
uers les vitres d'iccllc boutique de guet à pens l'attcn-
doit, &lnimitfonefpee àtrausrsdu corps.dôt ce d'Au-
rias tomba tout roide mort fur h place. Il fut porté le
lendemain matin en la maifon dt ville pour cftre rcco-
jiurdelà au théâtre pour eftrcanaromi.é. Il auoitdeui
belles rattes &en toutes deux leurs veines & artères, à
rvnedefquelics la veine homo-'riiidale cftoit fort am-
ple &enHt, forçant du beau milieu du corps de ladite rat-
le-ce quicftoiccaufe que fon humeur melanchohque e-
ftoit bien pufgé. Auffi ne fut- il en fa vie gue'-es chargé
de chagrin, eftant louial & non Saturnien. Le tnefme en
VObferuatton I S-
i'ay fait plufieurs anatomies de ceps humains , en
chafcun def jucîs l'ay troujjé deur râtelle?:. Corn, Gemme
mtdecin de Louuaïa^Au I Jiu.dejon Cofnocritidchap.ô.
Anatomifant vn cerrain corps puhliquemét à Padoue,
i*y trouuay crois râtelles, l'vnc ayant D g aJcnr &g of-
feur acouftumee, la féconde m:.iindrede moitié. la aoi-
fiefme grolTecomme vaœjf de pigfon. Chafcune d'i-
cellcs auoit fes veines, a.itcrcs & nevfs,& toutes an l'ene-
ilre hypochond-e, d:r mefme fiibftance,&: chafcune ea
fa tay.- f^Mopftenfesebferuations AniJtomicjues.
Ledoilea ■'>per,en Tes obferuationscnooyeesde Pa-
doue à Schenckius , ema que auoir veuanatomifer va
corps humain, auquel f^ troucerét deut râtelles. La pre,
miereauoit fa g.âdt-ur& forme conuenabls.mais cftoiç
deftifuee de ce conduit qui d'elle fe rend au ventricule.
Au dclTpiis d'icelle fe voyoit vne autre petite râtelle,
locdc 6i. grolTç comme vue orange , moliafle,Qoiraftrc,
4/anc
ér memorabks, 9^7
,;! ayant vn rameau propre procédant de la veine porte, &
enié en la lub'ijnce de cefte râtelle
Ledoûeur Pdfthius dii anoir vca anaiomifcr va
corps à Montpellier d*vn loidat de Jagarnifon, lequel a-
uoit efté tué. M. Rondelet tjui prcfidoii Ids montera ^vx
aflïftans deux râtelles trcuuecs en ce corps la. SchcmkiM
att i.de fes obferttat.medcitnales,tom.l .ohf(r.)i^.
Anaiomifanî le corps mon d'vne feaime es erchoies
de médecine à Paris, ic trouuay vne pierre au ventre , v-
ne autre au crâne antcrieu ,5; n'y trobua)» point de raieL
le.Houlier enfcs ohjeruat .rares ^nombre y.
Vne fois l'ay veudàs vn corj:* humain le foye aucoftc
gauche,& la râtelle au cofié droir. Corn.Çemtne au i .lin. de
fa. Cyclognomonio^ne.pag.i 5 .^ au, 6.ch.dtt I .Iiu.de fott Cofmo'
cntic.t'ay veii vne laic.'le aîacheeau pe itcrtne. (llowb.at*
I y liM.de fin Anatomte. Le periti ine la layc qui conure
Je petit vtnx.rt.ytdta k'tdnti au i . liu.ih. 10. de fa medeaue,
efcricauoir rcmartji c en i'anatoiTtie ducorps de laques
Anconclii Picmôtois, homme mil habitue, lequel mou-
rut de paTmoifon loudaine , que la raidie n'eftoit pas
plus grofTe qu'vn Œiif de pigeon , mais {trama{ree&: fi
dure.qu'oneuftditquec'efloit vne picrrr.Vn gtntilhom
me en Alface ouuert après fon trcfpas , ayaiit efté long
temps affligé des goûtes, îa raielîs fat irouuce toute lè-
che & flcftrie,commeTK vieil cuir de bourfe vuide, atta-
chée aux feneftres hypochondres.i't/jcncA/î**.
Vn icune homme de complçxion gaillarde & de hcl-
Je raille, fut pour fci maléfices pendu & cftranglé à Pa-
doiie.Son corps ouuert es cfclioles où l'on anatc^mii>,oa
trouua la râtelle auffi grande & grol'c que le foye,s'cflé-
dant fur le (îege antcrieur du ventricule, & aboanflant a
la partie antérieure au (oyc.Fcfa'itn au 5. Ht*. de fon .Attn-
tonncichap.^.
Eîifabct femme de Charles Luzzaiie gcntiihomraç
Mancouanjanatomifee après l'on titfpas, fit truniicca-
tioir la râtelle li grande qu'elle occupoit toute l'tlpafc
de lapâfe:& ce nonobftac elleauoit faitd'cnfjns beaux
êdbieû formez, ^arc. 1)onat au S.ltU'.de fei htfl. admira-
llestch.}. l'ay veu des râtelles û grandes , ar^e chafcunc
PP 4
9^8 Hijhires admirahlei
d'icclles pcfoit plus de vingt liurcs , & cftoyent enudo-
pecs d'vn cariilage.Co/ow.aM i ^. ltu.de fon^natomie.
Faifant Tanatomie da corps de Dominique Pcnfo
gentilhomme Icalien, mort d'hydiopiûe, commerça
çrtimoit,ic troQuay la raue fi grande & pefanic , qu'a-
près l'auoir defueiopee & pol'ce fui vne table, ic la mis
tnvnc grande balance,& trouuay, qu'elle pcfoit vingr-
trois liures à bon poids. L'ayant découpée en quatre
parts,ic latrouuayde fubftance conucnable & naiurel-
Ic,exccp'é que lef^ng n'y efto't pas du tout fi noir qu'es
autres. mais rercux,blanchaftre,*c fort efpais. Sa fubftan-
Ccrcffimbloitfort à celle du foye , lequel cftoit trefdur,
grand,&peloit onze liurcs. L'eftomach ne paroiiTcit
prefque rien, & comme vne fort petite vefcie. G. Çarnier
fnfes obferuationj .
letrouuay au corps d*vn Padouan mon de triftefle,
après auoir efté prifonnier trois ans , la râtelle merucil-
Icufement petite , & au gros bout d'icelle quantité de
graille amalTee, fort blanche , & dlje comme vn cail-
lou. La fubftance de ccfte râtelle efîoit toute Icchc &
eftrangemencdure.rd/ù/iw au t^.ltu.chap.^.
Chrcftieni'ieVe in, d^moifelie vertueufe , deccdee,
puis anstomifcc, ie trouu.ty en la râtelle vnc pitrrc de
la g andeur d'vne chaftaigne , pefant deux onc^s & dc-
irie& rnedrachme, côpofee de pellicules enuelopv-cs
& -ncrnuftees les vnts furies autres. Ccftc damoi'ellc
Ciloiiicunc^ fort belle. Au temps de la pleine lune, elle
fentoit des douleur, elbanges au coftc gauche l'cfpacc
de trois iours,enfîn defquels elle auoit fniilagi ment
jufques à i'aui'.e pleine lune (hyuànic.Turneiferenrexit-
mer. des Frtnes. Vâilo^c & Houiier ont remarqué qu'eo
plufîeurs ratf.llcs fe font et ouuces des pierres.
Découpant lecorps d'vncriminel exécuté àmort par
la corde, je irouuay fous la râtelle vne veffic de la grof-
feurdes deux poins, toute pleine d'eau, ro/r?r^»yèj o6/èr-
uattons ^natcmiques.
Vne damoileile aagec de quarante ans endurcit
des douleurs extrêmes au petit ventre , à l'endroit de
|a râtelle , comme Ô c'cuft cfté quelque rude colique,
Diuerj
é^ mémorables» 9 ^9
Diucrsrcmcdcs y ay.irisefté appliquez en vain , finale-
ment rhumeur noue s'efpâdit &.vcr(apar tout le corps.
Par ce moyen cllefnt fouljgec, & finaicmerr gucrit^ a-
yanc v(é de remcJcs propres àl'cuacuation de celte hu-
me ur./.t',«/werciri«5 en fesohftriiations.
L'an I s yo.NiccJâs Gjbcrhard trausillé d'vne enflu-
rcdc râtelle , isiia par bas & par haur plus de dy iiures
de rangnoir.dpais&caillérceoui dçlbitîa Fort ù raiel-
le.Mais eftanc homme fort difloli» & exceliif auboirc &
au manger, fa racelle s'enfla comme deuant, tellement
qu'au bout d'vn an il deoinc hydropicjne, dontilroou-
rur.Patrice Cizyol, Mantoiian , affligé de mefmc mala-
die que Nicolas Gibcrhard,& foulage par telle vnidan-
gc de fang,au bout de trois ans comme ilfe purgroii i ar
cefteeuacuarion.la more Remporta hors in monde. Au-
tant en aduint à l'eucfqac de Mantoue,decedé !'ap 15 85.
Vn certain carme, aptes aroir langui quelque icmns dV-
De douleur de ratcl!e,tomba foudainemenr en vn vomif-
fcmentdefangcrpais,fcculrnt,& en abondance. L? meC
mciour lî en rendir par bas grande quantité, -& le le^.de-
main piiia mt fme fang. Comme on lui demandoi'. s'il
fcntcit point de douleur, 5^ il rerpondoir que non, en va
inftant ii cx^ir a.S'^larcel.'Dunat.ai* ^.ùiu.desh'ft.aUmiiv.ùliSy
cha.9.
V2y remarqué deux rr.erueillenx fl::s de fang, en denx
perfonnages combatus du mal de râtelle. L'vn fe nom-*
moit iciofme Lydio,Padcaan,à quiie lan^ ror'oit par le
Dumbrii. L'autre, Bernard P.onliU, vuidou le fang par la
bource des gcniroiresrlans qu'eni'vn nien Paiar;.* apa-
rut permis niouucnurequekonque. Hercules Suxonîa en
Jes ohjl'Tuatïom,
le conois vn moine, lequel le hante familiercmenr»
àqui la ratcilcenHc trois ou quattr fois i'an , lur louc
au printemps & en i'.iacomnc. Q_u.ind l'tnPicurc com-
mence à s'eileuer. il eft tourmenté de douleur en i'iiv-
pochondre, tout Ton corps deuitnt noiraftre. Ton mal fe
rengregc , jufques à cequefes vrines fonent & paroif-
fcnt noires comme de Tancre i'efpacc de cinq ou fcpt
iours>cnj5ndcr'^uels celle«pefanîcur &cnfleurc de latel-
97 o Hfjloires admirables
les'efiiaroiiit, & ("e rctrouuc gaillard commr aupara-
Uanr,K«/er.*» U ^.txertit.fur leiture de Houlter,des maladies
internes.
LOuys àz Bnurbon, prince Je Condé eflantcn armes
''«Jn M <f i.aprts diiict s efcrits publiez pour la iulti-
ncation de fon fji- , délibéra de combatre Rs ennemis.
Pour cefteffcdl i! auança on camp bicauant,où il auinc
vn cas très maanais. C'eft que le baron de Counenay,
eftanc à la fuite da princcfot ça vne paume fille de villa-
ge ou il cftoit logé. Ce qu'elbnt par perfonnes notables
rapporte au prince, ce baron fut loudam arrc ftc prifoo-
nie & conuaincu par la confrontation de la fille oc d'au-
t-es tefmoins. Mats en iicu d'en faire ludice, il trouna
tintd'aduocats, que quelque chofccjue les gens de bien
^l'e^DalFcncnotamment i'amiral, ennemi de tout vice,
1- fut dit que le baron feroit mis entre les mains du capi-
taine àts gardes du prince, Icouelen fit lî mauuaife gar-
oe >qu'an(H tofl irouuant la porte ouueitcil fcretira où
non lui feftibia. Ce qa'eftant rapporté, tout ce qu'on fit
rut qu'on bailla q'jaranieefciTS à lapauurefilb pour ai-
dera !a marier: &: fut arreftc que le procès feroit en uo) é
àlacour de parletnientde Pans. Ce qui fur fait, & quel-
que temps apref ,îe baron chargé d'autres foffaits,.ntra-
pé & mené prifonnier, ren«^it compte Je ccft article ci,
qui lui fut (o'gneufemeni ramentu. Dieu donc le rattci-
gnit,& l'arrefiaen laplaccde S.Ican en Greueà Paris.où
ilein la reftc tranchée. Hip.de France foui CharUi *^Mu.6.
Monfieur le marcfchaldc Montmorenci depuis con-
n;ftable,fc trouuant l'an i ç <4.en la ville de MÔcpellier,
va foldat des fie ns fut rrout é par Iv^dit {^-ignftur en elïort
de forcer vne fille Ce foldat fui de chaud, en chaud, par
commandement dadit feigneur pendu aux feneftres de
la maifon ou il vouLoit commettre tel cruont.B.irtheUmt
Cairol e:i fes ob fer nations .yinatomiqueiyobjcru. J.
Taridisque i'armeedc François de Valois duc d'An-
jou.eftoit l'an 15 78. fur les frontières d'Artois,pour en-
trer en Hàinaut,auinf que le capitaine Pont fui loge au
vil-
é* mémorables, 971
villagf deBeronrc chez vn riche laboureur nome !c:aQ
Millet, lequel auoit cJetix belles ieunes filles. Ce capirai-
ne s'arrouracha de Tainiee nommée Marie , angee a'cn-
uiron f izf uns. Tous ceux de la inaifon ne talch< yr ut
qu'à le bien leruir & traicrr, pour ne point femir les ri-
gueurs.eue icllcs gens fonr O'dinairemcnr aux p.iUiircs
payfjns.clian vnefois ce capitaine au djlner ^pec le pe-
re,la mcre & les enbns, il d^ madaau pcre la fille Marie
en mariage. Le bô home ^syant refponduquece n'eituic
pas mariage efgal &lortable pour iuiCcaig-'ât qu'après
en auoir abufé il la chaflcroit ou latiédroit pour la gir
fe)îa refufa tout à plat. Ce capitaine imré de tel refijs>
iuranr & reniant , ch dfa le pcre & !a mère Sa tous ccnx
de la famille hors de la mailon, rctenât cefte pauure fil-
Jeleule qu'il força , puis lui en fîc faire autant pat trois
ou quatre de fcsioldats. Ce f.^it alla fc remettre à t^blr,
afTeanc cefte pauure fille à fon cofié , Te mocquant d'elle
à tous propos,auec paroles vilair.es Ôcinfam s. F.Heqni
ne difoit motjpenfanr comme elle pournir s'en venger,
& faire vn ftup de fa m :'iti,quoi qui lui deultauenir, ai-
mant mieux mounr que de vijre plus long tcinps en tel
oprobre : pnnr garde qu'vn tambour vint parler en l'o-
reiliea ce capi.tair.c.Icclui ti umant la tcfte p^ur efcou-
Terceque l'autre vou'ut diie , la fille magnania.c em-
poigne de vifteffc vn couftau , qu'elle enfonce infoups
au manche dedans la po;â:iinede ceff infime rauiff ur,
lequel tombe roidc mort de ce coup. E le,pcfant fe Tau-
lier à la fuite, fut attrapeer'i'- les foîdas du meui f^ijoui
la lierct à vn a:brc,oùel]e tû''. harv|u:b! zee. Le père cn-
tendacccs pireufes nouueliesde fafille.fema et bi uir, &
alla nire Tes plaintes par tous les villages ci conuoi-
Cns , tellementque le payfdnvdonnâs Talarmf par ront
à renuiron,au fon de leu' s cloches, acoururt-nr arme? 8c
cmb.Trtonne2,fcruerenrfur ce.'.foldatsd'- Bec.'urt,& fur
tous If s aunes proches de là,q;j'ils fU',;'ét tons , lufoues
aux pages, goujati , garles & chicns,de quaire cotTipa-
gnics qu'il y auoit en ce quartier la , fans qu'ils lailfàf-
fentrien en vie que les ch^uanx, tant furent les payfanS
acharnez à venger Tiniure faifte à ccftc fille & fa mort.
fli/i. des pays bas f en l'an 1^78.
^ji Hiffoires admirables
7\,E ysi El) E troHué inopinément à yn mal
contagieux xj^ extrême.
*
RErournantde Conftanrinople à Vienne , icrame-
nois à ma fuite quelques gens qui m'auoyencefté
recommandez, & ne pouu'>yenc plus fubfiller en Tur-
quie. Ayans ia fait deux ioarnees.i'apperçoy le princi-
pal d'entre eux fur vn chariot , en fort pi:eux eftat . vn
pied nud où paroifToic vn charbon peftilentici. Il fup-
plioit qu'on le fecouruft. Nous commen çafn^es rous à
changer de couleur, crai^nanc que cefte maladie ne s'c-
fpandift à la manière acouftumce. Le pa jure corps por-
ta fon mal iufques à Andrinople alTcz près de là, où fur-
uintpij. Caricehii eftantmortles autres Hongioi< de
fa fuite fc ruent fur fes hardes:l'vn fc làilît &s chaufTes,
l'autre du pourpoint: d'actrts plus ha-^dis iyi enleucnt
chemife & Iinceuls:fans qu'il fut polTibie delcs reteni-,
ni faire appréhender le péril où ils nousiiroyenc auec
eux. Mon médecin couroi: ores vers les vns , ores vers
les autres , les fippliant au nom de Di»u de ne roncher
point à telles hordes, pource qu'ils s'en repentuoyent
trop tard.Mais il parloit à des fourds. Le lendemain de
noftre fortie hors d'Andrinople, voici mes Hongrois fc
ranger autour de mon médecin, fe plaignans à lui & de-
mandans fccours contre des maux de cœur , pefantenrs
de tefte & de tout le corps , lointes aucc grande trifteirc
& lalîîtudc,figne$ & commencemcns de pcftc, difoyenc
ils.Le médecin leur ramentoir qu'il ne les auoit paj a-
uertis en vain, qu'ils cftoyent fa^iîs de ce qu'ils auoyent
(îauideracpt cerché:que nonobflat il leur a/Tîfteroïc de
tout fon poflible. Mais il n'auoit remèdes en mains ni
moyens quelconques de leur ayder en pays deftituc de
toutes commoditjz. Auint Tur cela comme ma cou<^u-
meeftoit d'aller prendrcl'air & mcpromcner.fi toftquc
i'eftoisariiué au logis, pour dcfcouurirauelquc lîngu-
laricé^que l'eatrç dedans vne prairie , ou ic rencontre
Vue
vnc plante d'kerbc à a. oi inconuc ,de laquelle i arrache
quclcjucs fiicillcs, &: cômencc au flair à conoittre qu'el-
les (cntoycnt l'ail. le la prefenre a mon médecin, pour
fçauoi/que c'cltoit, lequel l'ayant coiifideree di- près dit
que c'tltoudu bcordion -, & icuanties mains au ciel re-
mercia Dicu , qui nous auou donné remède fi prcft&
p Ôptconnc la pcftc. Qu^oydiî,il amolTa cane qu'il peut
de celle herbe, laquelle ii mit dedans vn grand chaude-
îoa l"ur le feu pour en faire de la decodlicn , laqi#ellc a-
cheucc il diftnbua aux malades , leur ordonnant d'en
prcn.ire certaine dufc la plus chaude qu'ils pourroyent
auec de latcne Lemméne ou ligiUcc, félon It poids prc
fcrit, & vnclcftuaiicDiaicordu'n , h s admonellant de
fie dormir qu'ils u'cufient bien (ué. Eux obferuans fci-
g iCuLmeni ce qui leur auoit cfté prcfcripi reuicncnt le
iendemain ifouuer leur médecin, Un racontent auoir c-
iU grandement ioulagcz , demandans encore de ce bru-
Uage du foirprecedcnt, dontayant vfc ih fuient entière-
ment guéris. Voila comme par la bonté de Dieu nous
f aimes garantis de tou.e aprehcnfion fi: violence de ce-
ftc pdtc au commencement de l'efté.X^y/fwrt^eSwii^f^M*,
ambajjadeur des Empereurs Ferdinand CT* JUfixmdianyau dif-
tours defon yoja^e de Tun^vie.
'H^ES ISTA'HCE yaleureufe'
SVr lecômenccmét du mois d'Oftobre dei'ani^<S'î.
le baron de ùind Vidal, la Fare , TreiUans & autres,
ayans aifemblé quelques gens de pied & de cheual en
Giuaudan & lieux circonaoifîns , en intentiô de fc ioin-
dre auec le (ieur de loycufc au camp de Lattes en Lan-
guedoc, entendirent que les affaires s'y portoyent mal,
nommément que les l^rouen^a'-'x auoycpt cfté desfaits
à faind Gilles . Cela fut caufe qu'ils changèrent d'auis,
^conclurect d'aflleger Pleuiac, lanu parqueiqucsvns
de parti contraire; l^ach^ns ( comme c'cftoit la vcriié)
qu'il y auoit fort pejdr gens pour la défendre. Défait
il n'y auoit que huittioidats > qui Iccuffeot que c'cftoit
dclagutne , conduits &. commandez par ?n Taillant
hvmmcJe Montpellier, n^jnirncBoiiTy. Mais plus foi-
974 Hijtoires admirables
biescftoycnt les afTicgcz , plusaparuc lapUîfTaoce dîui-
ne eu leur dv-hiirancc vraycmcnt rniraculculc. Car la
viilc syant cité l'clp:.ce Je huift lours aflîcgcc , baciiic,
âdaiiliepar ctcaladcsjtcnfcc paria Tappc, ics alT^cg. ans,
n'y ayans g^igi é^ue ue^> coups, furent fi ralciiicnt con-
ti.iiji5 d'abandonner ic fuge à !cjr grand' honte & con-
fiilion , aux prcmietes nouucllcs cju'ils ounentquc le
fîiur J^ Baudiné vcnoïc au (ecouiides afllcgczrLes tcrm-
iiiis ( vneeruic auues ) fc portèrent valcutcalciricnï en
et. fic:gf,fciirans elles mel'mjs les rô 'es & tiiani haïque-
buzudes, ourrc la diligence iijCroyablc à letccr pierres &
bois l'ur les allailian.. Boill) y acquit grand honneur,
dont il neioiiit pas îog tcmp^^^ftant aucnu fur le pcirft
qiic le licg fe leaoit,qa'il tue bl lié à'v^t. harqucbuza-
dc:ce qu'il diilimala tcl'.em.n:,dc peur d'effrayer les (ul-
dats.que par faute d'auoir de bonne heure prouueu à la
playe,qui de ci n'cltoit mortelle , il en mourut certain
crmps après, au grand r-'gret deceuxqui après Dieu lui
cil* jv;nt tenus de leur conkriiation. HijLde France f»$ts
C'nunes iX.im.lQ.
XES UL rTlO NS mar Haies,
L'An mi! cinq censtrcize, l'Amiral d'Angleterre cou-
roitlamer de Ponant aul')ng des c ftes de Nor-
mandie & de Breiagnc.Pourb'ukr fescourfes leroy fît
auancer 4. galères ious la charge du capitaine Pregéf. A
la jjr emiere rencontre l'amiral chada Prc gcnt iufques à
Btcfts,OLi i^rcg n: tourne la proie, combat l'a mi r al, 5<: le
blcfTc.dôcil mourut peu de iours après. Au bout duquel
que temps, 80 nanires Angloifcs côbati:cnt vingt na-
uires Normard-i ii. Bretori.es , qui auoycnt le vent fa-
uorable, & forces cigales aux enn.mis.Mais er fin Pri-
niauguet,B.e;on,capuaine de la Cordelière jtrefg'ar.d
vaiflèau que la roine de France auo:t fait conftiuire&
«juipper.inuelti de douze naaifbs Ang'.ûires& délibè-
re de rend, c la mort bien chèrement , acrocha la Rege-
te, principale nef de i'enncmi,5c y iena le feu qui brullâc
H Régente & la Cordelière , conlunùa les hommes &
cou;
é* memorMes] 97c
tout ce que l'une & Tautre contenoit. Hiîloire de France
fx)Ht Louys X l I.
Les Portuj<ais,a|ans dclibcré l'an i ç i i . de baftir v-
neciradcile a Diu , viilcienommcecn iamer Perfîque,
n^ peurcnteffcdlacr !cur ddrcin.pour diuerscmpe(che-
Oïcnis qui les rrauerfcTei.f.doiu celui qui^'enfait ne fuc
des moindres,. Vn granJvaifleau qui portoit les mate»
haujcpourle baft.mentde cefte citadcllc> fur braflé par
les priConniers Turcs qui eltoyenc dedans , où. ils cnrre-
prindrent vn terrible aftc. Car aimans mieux mourir
que viufc cfclaues , ils ti ent tant auec dcscîoiixdc fer
frottez l'vn contre l'-aïuc, que les tftincel!e$ en volercc
de-:ans cerrams caqucS de poudre à canon. hquelic bruf-
la vairie.iUjPoriuga s,prironniers,&: tout. Ljorim au i i.
litt.dc l'Iuîi.de Tortii^^al/edl. i 3.
Caîign.in vilic de làlcs monts > eftant cftroirement
alTiegee yar les François, l'an i 544. les aliî gez redui.s
à vne famine cxtr aie.tindrcnt confeil , &. rt lo'urcnt de
faire comme 1. s Sagontins,à fçauoit vn grad feu au mi-
lieu delà vi Ie,&:.Jv.'tier tous leurs biens, loyaux, hahjts,
or.arg.nt , bïief tout ce qu'ils poifcdoyent en meuble^,
là dcdctns,8c attendre jiifquei à ce que tout fut consom-
mé 3c réduit en cendres : puis mettre le feu aux quatre
co ns de la ville à l'heure plus obfcure de la nuid- en a-
pr-ïs donner vnecamUade , & faire vne fortie à la defef'
perade fur les FrariÇois.& qui pourroii fc fauuer fc fau-
Ueroit,peodant que le f^u fcroiten fa plus grande fu-
reur:finon ils mourroycnt honorablement, pluftoft que
d*endurcr lafaimcornrne panures beftes. Comme ils e-
ftoyent fur le poinfl de r«;xccuiion , auint que l'vn des
chefs aflleg-ans demanda de parlementer auec le colo-
neldes Alemans afTicgez donts'enluiuit capitulation &
• reddition de la place aux François. 'Parudmatt ^. Itu.de
rimioire de noftre ternes.
Le feigneur Philppc Camcrarius , doâ:e lurifcon-
fuUe,& digne Sénateur au confeil de la republique de
Nuremberg.raconterhntoire qui s'enfuit. De noftrc
temps quelques comp;'gnii'S d'Efpagnols , ayans com-
nus foifaits puniffables , furent fous autrci prcicxtes
Sj 6 mjloires admirables
chargez en drs galères par le commandement du vice.
roy de Sîciic , i^uii traniporiez& dcfcbargczcn vnc lllc
deterte tL du tout dcshabiiec: quoy fau le> galères s'ci-
loigncrcncj ^jardans de K-in le^ dclcenies & aucnucs de
l'lllc,pour einpdthvr qu'on vinil (ccounr de yiurci ccs
ioldais & les tirer delà. Emx voyant que c*. (toit Ici a-
uoir condamnez à mourirdc faun.où às'cntremangcr,
priudrent autre rcfohuion. Car d'vn commun conlen-
lerticnt ils k p?rtirenten dz\i\ iroupcs , comme d'enne-
nii ,& aatc Ksarnîcs aux poingî coinmcncciem à cou-
rir dw' fune.rcftcs baiircrs.Ics v..i contre ics autres, i'cn-
treiuans fans ref !e(fl quelconque , eftimans plus hono-
labie de racuàr par les armes 6l mams les rns àti au-
tres,que périr de maie faim. Enfes mcditatioi^s hiTlori^
<^î*e-^,/»f#.i.c/;^/'.4 5.Cc(+e rcfoLiinn Ef^'agnoic conuicnc
awcunemcuca ce que firent ancie;u»cmcnt quelques au-
tres troupes d'Elp-ignols, qui v. yans leur gênerai Ser-
torjustué ne voulurent p'us luifuruiure, ainss'entrc-
tùer^.Dr, comme les infcriptionî d'Elp<îgne en funt foy.
On fcaitauffi ce que fiienc lubaôt Petreus, qui s'entie-
titeréi degayctc de ccrur, pour ne tomber viis es main«
de leurs ennemis. Ce font rcfoiuciorjsquc le defelpoir
fait ^rrndrcen r:ecc(T-ié, dont l'entendement humain
ne vûid nulle ifîuc, quelque part qu'il fe tourne. Autres
fc Ton: errtrcmargez , ou iont morts de langueurs c-
ftranges , dont ailleurs ncuî auons marque quelques
hidoires.
Il y eut Tan m (^4 vncoir.bat naual fur la mer Bahhi-
qne.de la fiorte de Sucde cotre celicdc Danemarc & de
Lnbec.L'Amiialc de Suedcnômr e Makc.os, c':ft à dire
ia Nornpareille, portant drux tcns pièces d/ canon , de
oro-, calibre poui lapiulparc , fut lors brullec & aacc
tour (on attirail coula au ^ond de li mer. Il y auoir vn
autie fort grand vaiilcau dcSucde, d- dans lequel com-
mandoit André de Bcron , lequel cl'ranr demeuré qui^l-
qucs mois à Tanchre dedans le port de Rolloch près de
VVarnemonde , fut aucrti par Ls leigncurs de Ro-
ftoch de Ce mettre à couuert ,& aproch..r plus près de
leur ville ;poi» ne tomber en la puiiTauccde ceux de
Dane*
& mentor ahle s o 977
Dâncmarc.qui Taguertoyent , ou demandoyent , qu*on
le chaffaft loin du port. Mais André rcipondant , que
cefcroii vnc honte à Ton Prince &: à lui , de inonllrer
le moindre ligne de peur , ou le defirdc recraitc , ne
bougea de i'cndîoit où il eftoit à l'anchre. Sur ce là
flo.ic de Danemarcrinuelht & commence à le canon-
nerde telle furie , que nonoMtaot ia cou^ageure refî-
ftance.qui \i^s cndommigea grandement . elle lui bri-
fa de tL utcs parts fon vaiifcau. Voyant qu'il n'y atcit
nulle çlp' rance d'efc happer qu'en le rendant, n'en vou-
lutiJ-'n fa re : ?ins luimchnc mil le feu aux pouldres
de ton vaiireau,aimant mieux mourir dcduus les hzva-
mes/jilws eaiTX aucc ibndir vaille*: uqje de voir n* IVn
ni i'aucrc , m chofeaucunequ) y fuft , en la p'.Mlîance
de fes ennem S.'hXhytmw ai* z i Mit.de fon htjioire Septen-
trtonaieipagc 6zz. -
L'an I ) é^.i. pt nauiircs de FI lîînghe 'cllans ioinrs
lexx.icur d'Auril au capuame VVorft coiijbattiicnt
fort furieufcmcnt la floite Elpagno e partie -le Middcl-
bourg.En ce combat BalUcn de Langhe , am;ral de là
Vere,ayanrafaire ieal à quatre nauires ennemis , ef-
fchoiiaauec (on nauire , où ies E:p guoi» l'abordèrent ÔC
legaign-rcnt. Vn de fcs gens voyant qu'ils ertoient tous
perdus, mit le feu en la poi>dre,qui les fit tous, tant Efpa-
gnos que Zeelandoir., voler en i'air,&. rendit la vi£^oi-
rc Hfpagriole funsfte& mifcrable. Bijtoire des pays bat,
bu.i.pag.^O'i.40 6.
En la mvlme année l'armeè de fepr mille Françoisj
conduite par le ûeuf de leniis au Ictouis de Moms en
Hainaut alTiegé par le oucd'A!ue* ayant efté desfaidie
par i'Efpagnoi ,lcsfayars pcnfans élire bies efciiap^ cz
de la tUwrie de leurs enn.rais,Sc d'eftre fcUaez , tombè-
rent la plufpart entre les mains des payl'ans , ^eus
ians pitié m merci , qui les delpouilieieni premier;
puis les mafTacrcrfrnt milcrablemeuc ,&: en firent mou-
rir plus de douze cents. Le Baron de Renty fe défen-
dit long temps contre cefte canaille , fe confiant fur
labonccde fou chcuâl : mais^en ft>i (comme les paf-
fages eiloyenc tous^fctrez. ,&qu'iifaloit pailler de tous
97^ Hijloircs admirables
coftcxao trauersdc ceft efTain de guefpcs initccs , en-
tre IcIqucUcs y auoit quelques gcuiili-horamas pcl 2)
il)' fudaccagé Le lîcar d*01ha!n eftant tombé entic
les mains de ces payfani coriduits pai vn chciif gentil-
homme , quifc vanroitd'ea faire prcfenc au duc d' Ai-
ne, requit j our marcher à pied d'elhc délai mé , quoy
failani il empoigna vncfpieu de chaflc de l'vn d'eux, a-
Uec lequel il tkarrr>oucha tellement l'es condudeurs,
qu'j)ant rué tiois ou quatre c'iceux par terre, il le ialut
tuer, & mouruiainfîcn combaitan:. ^unufme iMuM
(ejte hift.des^Ays boépag.^ 11. '
Celte année mehne Herman de Ruyrcr , homme
hardi & auacturcuT , trouwa moyen aucc peu de gei.s
de l'urprerdre le fort chafteau de Louueitcin,cnire Bra-
bant & HolJande.oùilrelolut tenir bon pour le Pnncc
d'Orange, attendant Je fecours que le comte de Berghc
Jui dcuoit amener. Le duc d'Alue le fit foramer de (e
rendre, iont n'ayant voulu rien faire, il y fut alhcgc.ba-
tu & emporté d''afi'aut. Mais s'ertant rctnéen vnc lalic il
combattu longtemps auec vneefpee à deux mains, fpu-
chantgrand nombiede fts ennemis. En fin ilfut ibata
& tue, le dtfcndant valeureufcmcnt , chalcun s'clmcr-
bei liant de fa grande ^Touiiiï^.^unjefmelture,
Comme les afiicgezdedani Harltm ville de Hel- h
lande commencement après vn long ficgc à parler de jj
capiUâlation , pour fe rendre à la merci des Efpagnols,
Je capicamt Bordet, François , entendant telle dclibc-
rarior.,aprel!a t^vn de Tes loldats,& lui dit, mon ami tu
m'as fau beaucoup d^^bons feruices : fiy m'en mainie-
nai.t vn pour le dernier, metirant vnc harqucbuzadcau
traucrs du corps. Le foldat le lui refufs: mais parpricrc
. & impoftunité il le fir.Airfi mourut Bordet , lans fentir
la cruauté de (es er. nemis,nc voulant élire desfait par Icf
mains du bourrcau,commc ii en auoit efté menacé par
les Efpagnols. Cela auintic i x.iourde luilitt,i5 73.^1*
ntefme Hure,
La btlîe ville de Lcyden , au cœur de la Hol-
lande , cftantaflîcgrepar les Efpagnols Tan I 5 74.1c
pnnccd'Aurangcrtmonftta auxfcltats du pays , que
la por.
ér memorahlesl p 7 ^
-à perte de ccfte place eftoïc de mcriieîllcufe confe-
t^ucnce , & qu'ij voyoïc bien (^ue de la perce plulieurs
aiic.'Ca bonnes Villes leroycnrfo.t cibranflces : brief
que cela piûdui oit de grandej reuoiutions en leurs
afîjires. Pcu.tanr i^u'jIs aduiliiflcnc d'y prouuoir
promptemeni ; i.'y vt.yani aune m- yen que de cou-
per les .^iqucs &: J'ir-onder le pays. Tcmest-ois a-
uanc cjdc ce taiie qu'ils le remiiient au deuant des
yeux la ruine du plat pays &. autres pertes qui s'en
cnluiuroyeni , afin que puis après rien ne luiFuftre-
proché.s'il en .luenoic mal. Mais eux meus de charité
&d'oL«lig^>.ion muiuelle qu'auoyent toutes les villes
les vncs auec ics autres , par ieimcns & contrats auten-
tiques, ayans proinisdc s'en relccourir iul'qu'au der-
nier ioulpir de /a vie , fansy rien elpargner , ni auoir
cfgard à cônîoJuc *.ii\ jncommodité quelconque publi-
que & particulière , fiicnt rcfponle au Prince qu'il a-
Uifad a tout cequicftoii taifable pour le lecours de
Leyden , & qu'eux ne lairroyent rien en arrière pour
tcleffeft : difans qu'ils aimoycnt mieux pays gafté que
pays perdu : que plultort ib iaiireroyeni rcnuc:rier
leurs maifons ks vncs (ur if s autres, que d'en lailler la
iouylPanccaux Efpagools. Que quand cela neferuiroit
qu'àchaffer les Elpagpols hors du pays ils leferoyent.
Ils ettc<îiacrect tefte refolution plus alaigrement en-
core qu'ils ne i'auoyent prinfe de parole , &: fans fé
fouc:er de perre quelconque,inonderent le pays.
L-' s Eipagnols qui tenoyent que l'eau ne psruiendroic
iamaisàvnc licLë de Ley.len continuoyenc leur fîegt
aucc beaucoup de pelomption , &; par diuers meliagcs
follicitoyent ceox de Leyden à demardei bonne cein-
pofition. Lesafficgcz ne voulurent oncquts rien ref-
pondre , fors qu; par vue Ictfrcoù n'y auou aufe ciiofâ
cicrit que ce vers Laiin , fiJIuU dulce canit ,volmrern dum
iiectpit auceps. Toit aptes tailans reueut r'e leurs viurej
ils Ce reiranchcrent àvnedcmi liurede^am pour chaf-
que homme par lour, &; fircn: des lonics met ueilleufej
ur les Efpagnols,auec tei'e rcl.:luiion , qu'où fut con-
rauit icat dcfcndteiccUes fonies.
CLQ. »
9 8 o HiBoires admirables
Auint en ces entrefaites , que Je prince d'Aurangc
tomba malade & fut àl'cxtremiié : dont les Espagnols
prindrcnt fujct d'cfctire plulieurs lettres pleines de i
bciic» promc{rcs&: de cruciles mtnaffcs aux allicgez, .
qu'ils allcuroyent toiilîouis de la rîiort du prince. Cela \
ne leur fit venir l'cnuie d'entrer en capiiubiion, j
quoy que la famine les pr cfTirt. Vnc autrefois prcilez
parles lettre s de Francif4ue Valdes & d*4iuircs , ils de-
mandèrent fauf conduit pour leurs députez afin d'ctrcr
en communication : mais ce qu'ils cnfaifo)cnt n'cftoit
que pour plus facilement , fous ce prétexte , faire
palfer leurs melPagcrs vers le prince. Values cefcouuiâc
ccftc inucntion.&uefpité qu'vn HoUandois cuftafinc
vn Efpagnol , les (btnmc & menace. Eux icfpon<icnr,
que tant qu'ils auroycnt vne main à manger ,& l'au.re
pourcombairciisnelercndroycnt pas. Or d'autant que
j'eau ii'auençou guerc,&: que Valdesrcnforçoiiles me-
naces , ne pariant que de gibets & fupplices , s'ib ne fe
lerwloyenc à fa difcrction » Jes bien afTcftionnez
à la patrie ne furent pourtant esbranlez : cncorcs
qu'ils en viflcnt aucuns de trelmauuaife volonté. Ccli
Jà di.'oyent tout haut > qu'il faloit fe rendre , &
i'afFcmbians au nombre de pjus de trois cens deuanc
l'hoftcl de ville , crioyent après Jes magiltrars,
qu'ils vouloyent ruiner Lcyden , &: que c'cftoit obus
d'aitendre fecoursrbricf qu'eux ncpouuoyeni ri ne vou
Joycnt plus ciiduicr la famine, lis cltuytnt poulFez, ou
du moins fauonfczà cela,' e plus des trois pans du Ma-
giftrar : ce nonobltant la a»eillcure pai tie de la bour-
gs oilîe, clbnt li plus fojcc, Tom^ott toalîours ces mo-
nopoles, refolus d'attendre toute txtrcJPKc, & aimans
mieux le fier en lamifciicorde de Dieu qu'es promciics
£fpagnoîes.
Vne .;utref'^is quelques habitan» vmJrent fe prefen^
ter à i'vn des Bour^maiflres nommé Pierre A--
d'-japs , & lui rcmonihcrent l'extiemc milcrc à la-
quelle iiseftoyent teduits, adioullaui de grandes plain-
tct & menaces. I! Jtur rcipondit.en peu de paroles:Voy- ■
cz,aics frcies & compagnons,i'ay faid vu ferment , que.
i'clpcrç
(^ memorahles. ^^ 8 r
refpcrcconftamment obfcruer , moyennant la grâce
de Dieu. Si ma more vous pejt aider (car aufTi oien
me faut- il rnc fois Qiourir , & ne me ch^at lî ie meurs
parvosraains, ou ^ar celles d s ennemis ; carmoa
cas va drcidl *) prenez mon corps , mctrex !e par piè-
ces , & le parufTez entre vous , tant qu'il ie pourra
eftcndre : i*cn luis content. Ces bourgeois furent
tellement abatus de cœur par fa refponfe , qu'ils
fe. retirèrent fans plus rien dire. Le iour de la de-
Jiurance de la ville, le fccours eftant près , fans
touresfois qu'aucun des afîit-gez le vift encor , &
ics Elpagnols elLins entre la ville & icelui fccours , vn
des Bourgmaiftres monté fur le rempart , dit au peuple
qui eftoit autour de lui : Voyex vous, mes amis:derriere
ce forc-!à(cuerroyent les ennemis ) elt mainicnant no.
ftrepain, qne vous en fcmble .«' le denors nous la laif-
fer .<* nous irons plaftoft arracher ce for tauec nos on-
gles,que de l'y laifler. Ils n'en furent pas en peinctcar
Ic5 Efpagnois dellogerent toft aprcs , laifi'int le païTige
libre au fecours Sl rauidtiai.lemeac , abandonnant tous
leurs forts , & la ville pleinement dcliuree. Hijt. des pays
L'an m;l cinq cens nonantc , les Eftars généraux des
prouinces vaics , pour rendre libre leur nauigation en
France & Anglcrerre,drefrerenr bon nor^bre de nauires
de guerre,pour côjoyer leurs nefs marc^iâdes, afin que
ceux de Dunkcîkc &d'aucrfs haures , que rF.fpagnol
tenoi: fur la cofto de Flandrc.ne peufTcnt plus les ofen-
fer. Sur ce auint, que le capitaine lacques Antoine, vic*-
amiral des aanires pofcz cocarde àcvi'ii Dunkerkcfuc
aiaqué de quelques pirates Diïkerkoisaumoisd'Aourt:
II combattit fi long temps contre eux aucc fon fcul
nauire,qu'cn fin s'cftancacrochez deuant Calais, Si cô-
batans à l3-raain,ceuxdc la vic'amirale revoyâs les plus
foibles, & forcez, mirent le fc^u en leur ponldre qui fît
voler en Tair les vidorieux & les vaincus , & brufla ht;
aauires actochez.^<* e.liit.deUmefynehiJl.
Au mois de Septembre i î 9 i . fîx nauircs Angloifcs
s'cftaus mifes à la voile pour rencontrer la flotte d'£fpa-
98;
Histoires admirai/es
gnc venant des Indes , &: en arracher quclc^ue pie-
ce» fous la conduite de m: loi d Hauvvard & Kichard
Çrene^cl: .cft.ins à l'anchre pour faire aiguade es Illcs
A(jore3 , faccnc attaquez a l'tmprouifte par dom Alfvnfç
dcBjza , freredu maïquisde faii fteC'Oix . aoniral du
conjoy de la flotte. Milord Mauward voyant l.ipa'tie
trop m^l faidte, gaigna le vcni hir !cs Efcagnols en Ion
aoiirale nommée /j DeJianccS-ii^ïi de quatre aut es nat:i-
rts, Gieneuelr au£c i? lîeneapelee/d XeM^/^e, quieftoïc
pins p es dt l'ide de la Fleur , ne Irs pouuant l'ovure,
pour,ihe e re mé entre la flotte Efpagnole &Plll«,
rclolijcdc palTe. a trajets les ennemis. Msis il fut tel-
lement •;nuironné& canonnc détectes parts, qu'ap'cs
auoit nré Jk fait couler cudqueî vaiffaui Elpagnols
en foijd,r:oiiib.-itii q.iinze heures durant, fes dcfcn Tes re-
pues,'•o'S fcs aoafls abaïus , que- ne voyant en fin nul
moycnw'tfchâppe! , .lysni tirétoute fa pooldre à vn ca-
que près , &que lui (eu! auoi: àf (ire à cinquante gran-
des nauires , qui porioyent pi j% de quinze mille hom-
mes , il commanda à fon mail'tre can<'nnier , pluftoll
«juetomber entre les mains c'cs Efpagnoîs , & que la
nauire royale fort rendue , delapc'cer&: faire enfon-
cer. Le contre mjiftre s'y oppofant, di6t qu'il valoïc
mieux fauuer la Vic aux maladt-s, hic(Tcz,& à ceux qui
cftoyenrcncores fann , vcuqu'ils auoveni \ufHrammcnt
fatisfait à leur honnenr , éc que les Efpagiols enclino-
yent à les rrccioir à me'ci , s'ils vouloymt fe rcrdrc.
Mais c mm* Grcneuslt refafoit d'y entendre , ce con-
tre maiftr le iccta dedans l'cfquif, & voguant vers l'a-
mi aie Eipagnole p;»r!a au gênerai A.'fonfe , lequel
rcfca:!ta volonturs ; & parce qu^ll voyoit que fes j:ens
n'auf yenr pas gran.-i* einrÂQ d'acc*^ -chc h Reucnge,
craigiiaos que les Ang'oii réduits à Ccxrrcmité ne niif-
fcni le fcd en leur rcfle de pouldrcs qui eut fait voler
les vos èc les autres en l'air : il accorda auec le contre-
maiftre,quc les matciots s'en retourncoyent en Angle-
tcrrcjà: que les aunes feroycnt lalch z en payant ran-
i^o% Il fecontentoitde l'honneur d'auoir gaiî^né vnc
^çllenauirc royale , qui lui fut rendue, & dont fut drc;
le
é" memorahles, 9?J
le chcrGrcncuclt,fo; t foible à&s playes qu'il y auoit re~
çeues.dôc il mourui x.ou 5. jours aprcs On a efciic qu^c
ccftccicarmouchc mourijrenc ecui^ô mille Eipagnois,
tant tuez que noyv;z. Q^oclques iouis après arriua la
flotte des Indes , laquelle le voulant refrailchir aux
Açores, fat agitée de telles lempcltcs , que quatorze
nauires en périrent : entre iefqiîelles fui celte vie' admi.
ra!c d'Angleterre auec 1 00. Efpignols qu'on y auoit
mis. Les nauires Angloifes qui s'clVoyeni faucces auec
Milord Hauvvard, firent en leur retour de grands butins
fur [ts Efpagnols, où ils rega-gnerent p! us d'vne dou-
ble Reuenge. Depuis, le corrjcc de Comberlant rencon-
tra^nuiron la Tercerc deux grands nauires venans des
Inics Orientales, l'vnappellé 'a Sanda Crucé, lequel
fut brusIéiTautre Madré de DiOj;,ii<^e àc plus d'vn mil-
lion de ducats, du port de quinze cens tonneaux, qui fut
prins&mené en Angleterre en fon entier. Hijïoirc des
pays bai lia. 6.
L'an 1 (îoo.peu auant la haaille de Nieuporc entre
Tarmee de l'Ai chcduc Alljerr 8: celle des Ertats. comme
à faute de vent propre quelques nauires de giicne djs
ErtatsfufTent demeurées derrière «elles furent .ifTail-
lies par les galcres Efpagnolcs, qui cuient quelque
auantdge , & bruslerenc quatre d'icelles nauiies. En
ceftc rencontre Rlanckari capi.ainc d'vn de ces na-
uires de guerre ( fans que les autres peulTentie fécon-
der , à caufeda calrrie&de la marce contraire ) fac
attacqud feu! par lefdi^tcsgaleves- I' auoit cinquante
bons hommes en ton bord , qui fc dtfendircnt coura-
g?ulcmrnr,& par trois tois repourtlrent les Epagnols
de leur tillac, qu'i';- auoycni afranchi & gaigoc. B'-ief
ils fr défendirent tellement qu'après auoir perdu
ving: & deux hommes, 8c tout le refte bltlPc faut hui(ft»
mefmes le capitaine tellement accpaftic que peu de
iours après il en mourutravant leur nauirecfté percé de
part en part, perdu le maiftre maft , & Panienne.fc tel-
Jcmcnt dclchu é qu'il n'eftoitpofTiblc de plus; ceux qui
reftcrent encore fains ne voulans fe rendre, nonob-
Aam qu'ils faffcnt accrochç2,menaccrent les Efpagnols
QQ_4
984 Hî flottes a^dmirahl es \
Mont lec3pi'ain Bl^nckari niclme , tout blefle qu'i
citoic , à nn.T chaig.'à vn de resgcnts)pluftottq'ic fc s
l*cndic,di. rrivrcrelc leu en îeurpculdrc propre ,& qu'ils 1
Icsfrrùycn. fiue" c r l*air q'i.ind & cux.par ainfi lc$vns
fcroycnc aulîî riches c^ue .es autre s. Donc les Efpagnols
inrimidez !e i|iJurercor bien viftcmcnc , tout rompu 6C
delchiicq'i'U cltoitacoups à<- canon ,& en tel eftatfut
ramcDt a Fi-jlfinghe où .c caoïtainc Blînck.irr deccda,
& fat \\OïiOiahitin^x\\. ttiizi ic.tifjt.dei guerres des ^ays buf ■
3^£ TT^A l TE remarquable,
ENTani^^i. le i7.iour d'AooftJe Sieur de Sotn-
meriue,fuiui de i o i.enfeignes d'infanterie & de bon
nombre de cornettes de cauaîerie , aiïîcgaCifteron,
Ville en Proucncc& après quelque rcnftâccfic en forte
que la ville , dcrnuee de (on fecours , dc^fait le t. de
Septembre fuyuanr , fat ferrée de tous coOez , de forte
que les aflîcgez , en petit nonbre au regard des gens de
gucfre,n'auoyen: aucun chemin de retraite, qu'vn fcul,
fort raboteux & naalnifé , tirant vers des hautes monta-
gnes toutes defcrtesp^r vn fcncier (t cftroit.que deux hô-
iiîes de thcual n'y euAc.-^t Iceu palTer de front : ioint
q'j'jl eft'iit expofcàla venë du camp, n'en eftarj cflon-
gné Ojue de la largeur d'voe riuiere . nômce là Durarce,
qui fepafî'oît à gué en rlulîe-'rs endroits : à raifon de-
quoy Somineri'ie n'auoit ordonné perfonnc pour gar-
der ce chcanm , tenant au rcftc JtsalTîegcz cnc'os côme
dedans vnc pifun. Par ainlîle 4. de Seprembrc ayant
f 'if brefchs G^cr^vi>on i 40 pa$,ii fi' clonner l'afiaut par
3 3 enfeigncs d'ir^faurerie , ayauc à dos vne cornette de
caaaicrie , où il fat combatu rep: enan: haleine par cinq
fois , depuis dix heutes au matin iiifrjucs à fepi heures
du frir, auect;lfc furie. que la pouldre cftant faillie aux
Vns&a'jxautres,i]s vind^encaux pierres, aux cfpees èc
aux m<iins.£o i^n Us afTâiIlans furet cucraiiu fe retirer.
La
é* mémorables. 9^ 5
Lanuid venue,Senas,Mouuans,&lesautrcs capitaines
aflfiegcz , fe troiiucrem en mcrucilleufc pefplcxitc»
voyans a'vncofté la perte de leurs gens auec le défaut
de miinitionSîfansefpoir dcfecours ni renfort v & à'au-
tre parc confidcrans les grandes forces & 'a cruelle o-
piniallretc de leurs ennemis. Mais ce qui les cftcnnoit
encores plus , eftoit l'eltacdu pauure peuple , qu'ils
ne pouuoycni nigarantir pjr forces humaines, nircti-
rcràfanueté , ertancla retraite parce feul petit che-
min farmcntionné pluftoft impofiîble que difficile.
• Ceneanrmoins après s'cftre recommandez à Dieu , ils
refolurenc de prendre cefte route-la , quoy qu'il
cndeuftaiienir. Mais à grand' peine aunit cfté prife
çefte refo.'ution en chambre clofe qu'vn mefchaot &
malheureux homme, qui s'y cftoic trouué , & qu'il
iufquei alors suoiffté en fort boK ne réputation, deua-
lanr par la brefche fc rendit à Sommeriue, lui declaranc
icellerefolution.îl rcfblut inccniinenc d'er\ crapcfcher
l'cxecuttor : chofc trefaifee menant fenlement vingt-
cinq ou trente cheuaux auec quelque infanterie en ce
deftroit. Ce qu'eftant exécuté tous czi pauurcs gens
infailliblement cftoycni perdus. Mais Dieu y prou-
ucut mirsculcurement : car e(iant l'opinion que dt (Tus
dvfii comme conclue auconfeil de Sommeriue , lefieur
de CMiial ( nonqa'il euH: en peniec de fauucr ce*
pauurcs gens , mais Dieu le t'aif'ant ainfi parler ) allé-
gua qu'il ne faioit adiouftcrfoy à ce rapporteur , que
telle retraite cftoit incroyable , 3c que c'eftoit vne rufe
des afliegcï , pour efmouuoir les l'oldats a courir vers
ce chemin , pour cepenJant faire vne fortie fur le
camp, &:cncloiicr rartillerie. Cental fe fit tellement
croire , qu'il fut arrertc que nui nebcugcvoit dii camp
cefte nuiâ:- là , encor'que quelques vns fifTcnt minede
fc retirer parla : mais qu'au poin;ît du icur il fc'oit
tout à temps de regnider ce qu'il cor.niendrou faire,
f De l'autre part îa .'eria;re cftanf déclarée d' dans ia
ville , combien que ks fuidats & le peuple f. (lent
raerueilleufcmcnt im-alTez d^s in^uaiix txctflifs du
iourprecedcat , neanunoins chacun s'aprcita de fortir.
9 s ^ H'tfioïres admirables
Cclanc fe pouuoit faire fans grande confnd^n , clnf-
cun croullinc ce qu'il pcnfoit le plus aifé à purtcr :
Jes vns qui auoyenc 1; moyen chargeants fur afnes,
niuîets & cheuau.t , Jes peiirs enfjns,lcs bUfTcz , les
malades & les vieilles g'ns. qui ne pouuoycnt maiche :
les autres , tant pères que mercîjportauis leurscnfar s
fur leur col,entrcI.'urs bras ,& aux tnammelles , ai.cc
grands pleurs & lamenca.ions. Tout cela (c faifoit à la
veiie des alfiegcants , qui pouu«iyent dcfcounnr de
deux endroits, pour la lumière qui cftoit aux fencftres
des maifonspar toute la ville. Ce ncantraoins enuiron
les onze heures de nuift , toute ceftj troupe commença
de fortir par vne fauflfe porte de la ville pour aller au
ponc,& d? là à vne petite porte du bourg, par laquelle on
ibrtoit au chemin:& marchant aiiifî à la filejpouTfuiui-
renc leur chemin toute la nuiâ: d'entre le 4. & S • de
Septembre,(ans que pas vn du camp ennemi fe rcmuaft,
non plus que fi ce pauure peuple eulleu lauf conduir,
iafques au poinfldu iour, que Sommeiiuefit palier la
riuicrcjà quelque caualejie 6i infanterie ,qui donna fur
laqueuc.où ferrouuerentdej paunres femmes demeu-
rées derricre,dôt les vnes furent tuec5, les autres emme-
nées prironnieres:& ne fut Iapourruirep!u5grande,ranc
à caufede la difficulté du chemin , que pour la fiiandilc
du butin dont ces pourfuiuans ne vouloyent perdre
Jcur part. Ces pauurcs gcnts fortis de Cilteron , par che-
mins détournez , reprcnans halemceomme ils pou-
l]oyenr,ayans cheminé le rtftc de la nui6l,& le iour U\y -
uant cinquicfme du mois , fc trouucrent àquarrc heu-
rcs après midi fcpt bonnes lieues loirg de Ciltcron , où
l'armée dj: Sommeriue n'cftoit entrée que fur les d x
heures du matm,& non pliiftoft, craignant encorcs Som-
meriuequ'iiyeulK]utlque ruf.,&: nefc pouuant pcrfua-
der l'cntreprife d\ine retraite tant eftrangc. Quant aux
excès commis dedans Cift-ron , irs alTicgeants y tuè-
rent de troifàquarre cents , que femme», qu'enfans,
fans aucun refpccl ni d'aage ni de religion. Ils n'y
ca trouucrent pas d'iuaniagc , les autres j'cftans fau-
C^ memorahks. 987
Uez.cominc nous auons dir, & paruenuf en vn petit vil-
lage appelle Bar!cs , y atcmdircnt leur fuicc , iur4ij'a la
nuid, notamment les bklTcz & malades, auec cjuejques
pauurcs femmes , donc les vnes mefmes eftoyenc accou-
chées en chemin,
llsferariembiercnt donc en ce village cnuiron 4000.
peifonnes, entre lerqnellcs y atioir au plus mil hommes
de refîlUncf. De là , les harcjucbuziersayansef^c mis
en tefte &enc|ueae , &lerc(tc: cheminant au milieu,
lis tirèrent au village de Salonnct,où ils repoferêt quel-
ques heures de la nuit. Le lendemain matin , fixiefmc
du mois , lis prindrent le chemin de Gap , où ils pen-
foyent fe retirer , &qui n'cft v^u'à 8 lieues de Cifteron,
par le droit chemin > en lieu qu'il leur en faloit près de
deux fois aut-înt p.ir le deftour qu'ils ai^oyrnt pris.
Mais arriuez au village du Baye pour palier la Dmâte,
ils tiouucrrnt vne embufcade ennemie , qui auoit gai-
gné deux montagnes , entre lelquclles ils cftoyeni con-
trains necefljiremcnr de pafler en pourfuiuant re che-
mm , auquel vne i'rune damoifcllc acoucha d'elîtoy
fur Ir grau 1er. Cela fuc caufe que reculants en arrière,
& non toutcsfois par le chf-mm qu'ils awoyenifai:,
d'autant que tous les villageois s'y cftoyerc mis en
armes , ils prindrent k chemiti à'vn lieu nommé Le pas
de Lozec , jui eft vne grolfc roche fendue , par laquelle
il fintpaîTer comme par vnr porte , en vnc vallée dire
Terre neuue , par la lUcHe on vade Pronence en Pied-
monr,?.partenant le pays au Duc de San^ye. Le<; har-
qu.bi zierscraignaîis qnece partage ne leut fuft fermé,
coururent le failir : tcqa'cniendu par reux du vilh'gc
de Lo7et,ih cuidtrrent s-'efinouMoir à bon efcienc. M;iis
Senas & Mouuans arrincz accordcjcnc auec et^x , que
i'?ulement les femmes & péris enfans y enrreroycni,
potury eftre iuftjuts à larcfponfr de lem- prince , la-
quelle fe'oit attendue par eux au de^àdu paflTage.
Mais les femme$& enfans y cftans entrez , & voyans
ccuxdu villjge que l'on ne prenoit rien fans bien
piyer , ioinifl que la force n'cftoit de leur cofté
ils accordèrent (encor) que le rcftey enireroic au(E:
.9^8 Hiffcires ^d'/rirahles
de forrc<^uctonsy pa(fi-reiulanui(!.t. . Le inu: venu,
fcpricfmciudii moi<;, e»>apc arrcfté qu'on prcndroïc
le chemin 'k Grenoble , toute ccfte troi.-pedefloaca,
ayant fur!: dos vnc t çigrolfe pluye continuanr laï-
ques à midi. Ce nonohftant , auec vn infini t-a-
uail , ils vindrenccoucherau village de rain(rt Paula.
Le lendemain hnidjefm- , comme ilstiroyent en Daa-
phiné , aucrtis d'vne grc^Ilc cmbafche quel'eucfque
d'Ambrun leur auoit drelTcc , & contrains de pren-
dre le chemin de Pragela , pjr vn pays fort defei^c , ils
arriuerent an village de la Ghana j qu'ils trouiicrent
tout vuidc d'hibirans & de tous meubles , de forte que
force fut à toute leur troupe d'y palTer la nuifl,auec des
choux pommez. Le neufi-fmc , ayans pad'c le col
de IaGucl(jrnonr.agnedes plus fafcheuits & roidcs) ils
vindrerfriufquesau village dt:Mou'ieres,oàils necrou-
uercntrien qu'vne embûche que leur auoit drefTce la
Cazettegouuerncur de Briançon du Dauphinc. 11$
furent donc contrains de marcher iufques à vn antre
village pics eflongné , oùils couchcrentauecquelquc
commodité de pain & de laiclaga. Lcdixiefme, ayans
pa/Fe Iccolde l'Argeoriere , ils logèrent à vnc lienc
près de Pragcla,ati village de Sauze, auquel lieu, pour la
commodité desviures , ils fciourner^ncquatrc iours,
frangèrent leur infanterie fous huifteofcignes- Le
quiazierme , arriuez à Prngeli, où ils furc nt rresbien
receus & accommodez de viures hui£l iours du'anr,
par ceux du lieu leurs bons amis, les capitaines voyans
^ue lapauurerédu pays ne poju'^it pas porter qu'ils
y peuiïent laifTer îes femmes &enfans , ouyfciourncr
plus longuement , eftânsguilcz par trois cens hom-
incs , tant Ju lica que de Ip v illec d'Angrongne , d'où
ils recouurerent aaiT: quelques pouldres, ils reuindrent
coucher au village de Saize le vir.gt vniefme du
mois , en intention do fc rendre à Grenoble où à Va-
lence » & lclcnd°main vingt deuxielme au pied delà
montagne au vilhge de Sezanne.Les cap taine, fc dou-
lans bien qucla Gazeric leur oprelloitquelqacchofe,
fîicntbacrc aux chamj>s enuiron la minuiâ; > &
jnircnt
^ Memcrahlesl 9 85^
mirent tout en tel ordre , que toute la troupe ayant
pafTc la montagne le irouaadenanriour auprès des mu-
rajlics de Bnaii^on liiâs ( pour paflcr la Durante ) vers
vnpont, qui citàvnquaiide heuëdelà. Mais leur
ettai.tdiciicc V ne ckur.iouchc, force leur fui en la fou-
fteoancdc faire louirer vila^càla troupe pour tirer
vers vn aune poni à vn quart de licuè de là , lequel s'e-
ftiint crouué rompu, ccj pjuurcs gens demeurerr ni tout
crtonnez &:e/pe;dus , ialbncs a ce que benas ^. ?'iou-
uans femettansen baiail.'e entre leurs ennemis & leurs
gens qui les acitndoycnt a lC pcnt ronifu , y c-
Itans finalement an iuez , & les cnLCinis reniez iir^'it
fi bien qu'ayans iau pallci à giîé,Éi nus en bâta Ik Ict^r
cauûlerjc de là le3o , ils d-eiTereo: des plancher auec
qu-lqiics perches qu'ils îroiîucrér en vne praiiie,!] hcu-
rcuic.iicni , qu'en iaoins de trois heures celle tioupc
paifa fans aucun domrage, à la veuè de ceux de B. lan-
çon , qui failoyeni bien quelque mine de vouloir Jes
cmperchcr,niais \\i n'ofereni iûmajs ï:s .iilaillir.Lç vm-
diétdonc.ufqtiesau village de Fieffiniercj., entrcihau-
ies montagnes &: du tout i^eiiles,d'cù ils paitirent ami-
nuidt, &aîriueient enuiron midi virgiaicifiermedu
mois à vnpauure village nômé Orfiere, où ils netroa-
Uercnt perfouac , ni pajn,ni vin ; mai* Iculctnent quel-
ques moutons qv}e les pay fans, fe retirans de viiteire
aux montagnes , n'auoycnt peu emmener , dont ils
difnerent lans pain , n'ayans repeu depuis ie villa-
ge de Sezj»ine,Ôc ayans combaru en cherrin. De là, ce
rnefme iour , defcendus au village de fainû Bonnet , à
tioii lieues de la v^Uede Gap,fe trouuerent par ce moy-
en n'eftrc qu'a onze lieuçs dt Ciftcron , èc qu'àtrois
licuës de leur enncmi.quis'eftoit faifide Gap. Il y auoic
c ncore outre cela vn àuirc tresgraod danger bien pro-
chain d'eux, & donc ils ne fçauoyent rien. C'ell que
jeficurde Vinay , lequel auoir allîegé Grenoble en ce;
mtfme temps , fauu'cment auerti que Senas & Mou-
uans auoyent afTii-gé B- i3nçon,quitaiu Grenoble, elloit
venu à Corp auec uuicl cnfeignes.à deux lieues près de
iain^ £oacet. Senas cependant Hi Mouuacs , qui pen-
9 9 o Bifloires admirAblès
loycni que Grenoble fut toufiours aili(^gc , ayans pris
rc(o!urii»n de iTiarcher iulqucs à deux iicucs prcsdé
Grenoble , d'où ils clpcroycnt faire prendre le che-
min dt Valence aux fc aunes &: aux enfans , puis con-
duire le reftc au fecuurs de Grenoble , iturcncde
grand matin , le viogdfjatriclcne dcdic mois , droic
a Corp, comme par vn chemin bien afTcuré , & fans au-
cun ordrc,iurt]ues a vn c^uarc de lieuë du village , en vn
chemin cft'Oicconcre vne, moniagne , au pieddc ia-
tjucllc paifc vnc peticc nu crc. En ce lieu deux gentils-
hommes de la croupe, à fçiuoir le lîcur de S. Mariin>
gendre de Senas , &: le Heur d'ElpinalTc , s'cftans vn
pcuauanccz deuAnc la file qui les luiuoit le iouans l>n
à rauirt>&: ne penfans à autre chofe , irouucrcnt vn vil-
lageois que Vmay y auoit mis en f-ntinelle , lequel n^
les conoillàiic point , &. mefme penlant qu ilsfulfcnc de
ce quartier là, ieur dit ce qu'ils trouueroycnt à Corp,
où on leur feroic bonne chère. Cela prompicmcnt rap-
porré à Senas & Mouuans , ilsfirent mettre à part ics
femmr.s &enfans auec quelques harquebuziers » leur
fiifins palfer li nuiere ; le relie rangé en ba:aille mar»
che drcjJt à Corp. Mais paruenusà l'endroit où ce vil-
1 igcois âiioic elle trouuc en fentinellc , & lequel cftoi:
elchappé aux deux lurnommcz gentils- hommes , irou-
licrcnc que Vinay ayerti, tandis qu'ils rangeoyent leur;
gens, auoit faifi lepal]:.ge & fait monter quelques fol-
dits au h?ut de la muntâjj;ne ) pour rouler des pierres
fur eux:cela les contraignit détourner viiagc»&L de paf-
fer fur l^ mclme pont outre lequel cftuit icur troupe,
& ainli tous cnfcmble à la vcuè de leur ennemi fecam-
pcent vis à vis de Corp , aitendans quelque iecoars de
teuxdupays deT* icfucs, leurs amis,&qui n'eftoyecqu'à
deux lieues de (à. Mais ayans en vam attendu quelque
peu de téps, & voyans L beloin qu'ils auuyen dcrcpai-
ftre> ils firent mai cher les femmes & enfant deuant , le
tcn5s en bataille fur la queue, & ainfi arnucz en la ville
de Ttiefucs» ils y receureni tout bon traiteiïient tout le
iout luiuant.De là fans aucun cmpefchtment , le vingt-
fepticlinc iour dudit mois «ic ^cpicçnbrc ils fc rendirent
fams
ér memor ailes, $^ï
ftins&faufs à Grenoble , bc milans Dieu en canuqucs
ci'a^iions d g;acci , tic fa fi Dgulicrc afii (tance qu'ils
auoycnt txpciiincineccntanc de lortcs ciuiant ce voya-
geix ne iç uhans CRcore rien de ce que Ditufaifoit ail-
leurs pour lors, a (çîuoir à »a uCi Gilics , auquel lieu ce
vingt iLpticfmc de Septembre leurs enncmii forent des-
faits ^ qiiali tous tuez , commccft dit amplement ail-
leurs. Ceite croupe donques arriuee à Grenoble fut lo-
gera demi lieue de la ville en vn viliagc appelle Giery,/
ii c ù nyans feiournc ciois iours , & lailTé à Grenoble
queiqu^ peu de leurs gens naaiad.s & du tocc haralîcz,
piiudrent Icchr lïiiii de Lyon, oùils aniuerent feutc-
nienr,lc:s gens de guene y C' ans employezJcs femmes
&c entans louiag i,d pui:> ic mci». d'Odtobrc lufqucj k
celui d. May eivfuy Liant , que par le bénéfice de la paix
CCS pauurcs gens le rttiiercnt en leurs mailons , oùde-
rcchef 'es ennemis de paix leur donnèrent de terribles a-
Jarmes auant que pouuoir pofrr le pied ferme en leurs
demeures. Hï/y.We France fout Charles $.ltu. i J.
XE rO L F TI 0 2^ S notables.
MAtihias,fils de lean Huniade Coruin,MoIdaue»fei-
gneureicellét en toutes fortes de venus, & qii'on
appelloit la fouldrc & i'efpouuante de la nation Tiir-
qucrqueraprcs la mort de fon [-'cre , Ladillas Ion fiere a-
yanteUé dtcapitc à caufc du meurtre coiDiiiis m la per-
fonne d'Vlriccumte de Cil>e, par Iccommandcmcnt de
Ladifb^R<)y de Hoirie & de Kvheme. (coulîn de cecô-
te)fut fcrréen eftroittc pnfon a Budc, puis emmené de là
en Bohême, poury eftie mis à tnortanieie de fon pays.
£n cefl: c(tu,dernué deioutc e p:;rancc , &n'atrfndanc
que le coup de l'excciucu»^, Ladillas fut emporté de mort
violente & loudaine à Prague. Icelui dccedé , les grands
fcigncurs de Hongne , rnemoratifs des biens , que
jcaa Haoiade auui( faits au royaume > ayaut à diuerles
55)^ Hijlûires admirables
fois hcureufemcnc rcpoufle les courfes & grands ef-
forts des Turcs : induuesauffi par le crédit qu'auoic cn-
tr'cux Michci Ziiagc,onclcmatcrnel de Matthias , Se
meus d. s prières d'Blizabct la merc , dame ircf-ver-
tiieL'fe,ioiuc les prefcns qu'elle fie à aucuns , rcfoJurcnc
(JMl.'uer en dignité ce icunc Seign-eur , pouflé iul-
^n'auborcdu tappiicc ; & tout abfcnt & prifonnicr
qu'il elloii l'cflcurcnt roy. Long temps au parauant
leaiiCapiftran , lors en icparationdc l'aiodl hotnme,
auoitprcdiià lean Huniadc, que Ton fils puilnay ( du-
quel il admiroit l'rrprii & nacurcl héroïque ) fcroic
grand & heureux q'^eiquc iour. Matthias Coruin ayant
eiléâinfi efleu roy en lonabfcnce par iesfcigneurs Hô-
grots, lettres U amb-ilTadcs en vindi ent à George Poge-
binc roy de Bohême , lequel tcnoit Matthias en feurc
garde/'ara:.ânt George cnauoit fenti quelque veni:mais
ioiS 4U*i] reçeut le> lettres de l'ckdlion, eftant à table , il
fit incoïKineot alloircnla plus honorable place Mat-
thias,qui cftoit a j dcfl'ous de lui.
O: d'autant que Matthias paroiïîoit eftonné de ce-
ilc cérémonie , & f-inbloit la prendre à quelque mau-
Uiiii. prcfagc , Georf^e 1 exhorta de raire grand'chere,6c
«J'aiicndre aprcs foiippé, quM lui diroitde bonnes nou-
ucIlcs.Ce qu'il fit:car ofcrec- qu'il luy quitta cncKrc-
m:;nt fa rançon^dont ilk auoyenc accordé j au contente-
nicni de Mat:hias)ils traitèrent alliance perpétuelle én-
femble,& lors Gcorj;e le falua roy d-; Hongrie , & lui
Jonna pour femme la piinccflc Catherine fa fille.
Matthias loycux de fe voir rcueltude tant grands biens
en vn inftant remercia Dieu , & le roy de Bohc-
iiîe : puis promit de garder inuiolabiement louc
ce qu'il auoit promis. Au rerte , non feulement au nt
que d'eftreelleuroy , mais depuis aufli ^ Matthias fut
irauerfé en mille fortes : car rout le tt mpsde fon règne
ilnc fut prcfques onque^ fans guerre cor.tre l'enneini
cftranger, & fans cmbufches & dangc:rs en fon Royau
me mcimc.Ii ne faifoit que d'entrer Ofc s'^lfoir en la chai-
re royale , que 3. rudes guerres contre des ennemis
fort puiirans i'acueiilircnc louc à coup. La 1. fut contré
é* m€fnornhlesl 9 9 j ■
TEmpcrcur, lequtl refiifoii lui rendre la couronne dcJ
anciens rois de Hongrie : A: ccur cjoi portoycnc cnuie
au bon heur de Macthids incitoycm l'eir.percur à chaT-
fcr et ic!îne roy. Q^uani a la fccondt-, ce fur cuntre leS
Boherr.ci. La troiiiemc contre les Tnrts dura loutc fa
Vie. Il vinràboutde ces jdurrrcs à. 'on grand honneur:
tellement qu'après fa morcle fukan dcsTurcs n'ciu pas
honte dz confcfrer , que iamais il n'auoic làut redouté
ennemi que Matihias.
Or peu s'en tx\m qu'il ne fouiilaftle luftrcdc tant
devôrcijs par vne pcrpeiucile tschc d'efpru ingrat &:
tropimp-tueui, lors que fijr Jcr^pponde certains rn-
uicuxic calomniateurs i! fît cmprifonner & comn.an-
da que l'on exterminait Mil hel Zij.igc Ion oncJe & ii-
bcratcur : lî par la fingulierc i:drcfle & fii'-lité de foii
cuiiînicr, ce Icigncar ne lefull faui é contre elperancej
hors defaprifon. Puis i! cnuoya dire àMat^has , q-. 'il
c.ftoir beaucoup plus obligé à Ion cuifinier,qu'à icn nc-
ucu: c'aucanc que l'vn rauoit iniqueroc-ntcnr^prifonné»
raurrcTen auoic fidelemcut deliuré, comme àii l'hiftoi-
re. Zilagefeniirdefcn codé ,que c::lldçla reuoîution
des afaircsd:i monde, eft^nt précipité lèudain du faifte
de grande dignité en mifcre extrême. Il gouuerhoic le
roy & le royaume: puis en vn inftanc fut ferré dedans
vne prifon.& fur le pointde perdre la teftc: carfes enne-
mis auoyen: obtenu de Matthias lettres & fcaiix,por-
tans commandement exprès aux capitaines qui le gar-
doyent, de le faire mourir. Iccux n'ignorans pas que
ccltoit des remuemcns de Cour , driîreuxdc ^çauoir
déplus près l'intention du roy en sfàue fî impv>rranCj
prîr leur dchy donnèrent moyen à Michel de fe fau-
uerdclcurs mains. Etpcuaprrs il r'entra es bonnes
grâces de Matthias , & fcvidca piu' grard crédit
que parauant. Q^e'que temps après ayan, cRépiiseQ
vne iîataillepar Aiibeg Turc, il fut mené i Conftan-
tinoplc Scdecapi'é par le commandement <^u fu tan , fî-
niflant honorablement fa courfc. Hïftoire de tUngrie o*
'Bohême.
le ne coucherai point pour le prefenc aux reuoluci«s
j^ 4 Hijloires admirai/es
des grands Ju monde , qui en noftre temps & du tcmpï
de nos pères Ce font précipitez , du faifte dcicurs gran-
deurs en des abylmes profonds où ils fontpcris. Cela
fou rciciuc aux volurncs fuyuans. le ramenicuray en-
core & lotndray à i'hittoirc de Matthias trois ou qua-
tre autres non moins mémorables. Aifonfe d'Arragon,
roy de Naples , entendant que Charles VIII. roy de
France approchoit aucc ibn armée , quitta Naples &
s'enfuit en Sicile, Iaiir<intJa charge des afaires à fon fils
F^:rdinand)!equel abandonné des iîcns propres , voirc
en danger d'elle liuré aux François, après auoir fait ce
qui luicftoit poflible,luiuide bien peu desfiehs .mon-
ta lur les galère» légères quil'attendcyent au port , &
fit voile en i'iilc d'ifchie, à quinze Iieiies de Naples>
oùforcc lui fut de faiieefpreuuede fa venu. Car le
gouaerncurde laforcsrcITe ne voulant le receur ii fi-
nonauccvn fcul compagnon, eftanc dedans il fc ietta
fur lui de tclicimpetuoli'é.qu'auec la fjrie & auec !a
mémoire de la maieltc royale, il eftonnales autres en
force,qu'il redmlîi incontinent en fa piiiirance & le gou»
uerneur& laforterclfe. Quoyqueles François euf-
fcnt en main tout le^ royaume de Naples : Ferdinand
ainii defnué ne voulut touccsfois accepter les cftats &
grands rsuenus que Charles VIII. lui ofFroit en Fran-
ce,3ins patientant vn peu vid incontinent vnc ligue da
pape, des Vénitiens , & des princes d'Italie drefec
contre les François > qui pour la plufpart fc retirc-
rcni inconcinenc en France , après la bataille de For-
nive. Si toit que Ferdinand entendit que Charles e-
ftoitparii , il fc remit en pieds : & quoy que le fieir
d'Aubigni lui euft donné bataille, l'cuft mis < n route, 3t
rcduita rtl poindl que lans !c fecours d'vn lien gentil- ^
homme 11 cltoic mort ou pris, d'où cfchappé il s'enfuie
à Mcflinc : neantmoins reprenant courage , il partit de
là auec quelques vailTeanx où n'y auoit prcfques point
degens deguerre,& arriuéen la plagede Salcme , ia-
conrinenc ^alerne.la coftede Melfe,& la Caue, mirent
fes bannières au vent. Approchant de Naples les Fran-
çois u'eurcntrcfpritde lui courir lus, «juoy auenani ils
Iculicuc
& mewùratles^ 9^5
l^cufient desfait. CcOc fauce fui caufe que fcs partiiani
àccoaragez le rappellcrent, comihcilfc retirou : te!-
IcmeniquM reuinc pour prendre terre à deiTiie lieue
delaville. Les Fr.;r.çois allcren: à la rencontre peut
lecombûtre : itîais lortis de la ville on leur ferma le?
portes auxclpaulcs , oùu'autre ccltéFcrdinand acou-
rut ôchurecti) dctous. Alors fâlut-ii cooibacre dans
la viiic contre les François rentrez parla porte d'vn,
des Chiitcaux: mais cjucjcjue cfFort qu'ils fîfTcnt, Ferdi-
nand commença de s'ert^iblir , 5c ayant mis icft après
en route leur armée nauale s'cntuiuii le pourparlé de
la reddition des Chafteaux de Naples , qu'on efTaya de
fecûurir , mais en vain , [elkmcnt qu'eftans rendus
Ferdinand demeura maiftre. Etquoy que puis après
Charlci V I II. remiit fus vne armte pour ie recou-
Urement du royaume de Naples , cela ne let uit de rien,
ams finalement les François furent coniiains de quit-
ter tout pour renenir en Fi ance , & Ferdinand après a-
uoir reconquis tout Ton royaume , excepté cinq ou fix
places , comme ii eftou en voye d'efgaler la grandeur
de fes pîcdeccflenrs tomba malade à Somme, où eftoit
la toine lafcmme , d'où il fe fit portera Naples , &y
mourut peu de lours après , dcuant Le bout de l'an du
trefpas de fon pcrc Alphonfe : laiffarit en tout fon roy-
aume &: par toute l'Italie vne trefgrande réputation de
vertu , tant pour fes exploits que pour fon noble efpric
& plufieurstrcsbclies parties d'vngrand princejlefquel-
les reluiloycnc en lui. Il mourut fans enfans ; au moyen
dequoy dom F/^dericfon oncle lui fucceda , quifutic
cinquietoc roy qu'on vid au royaume de Maples en l'cf-
pace de trois àt\s.fr.Çutchardin es i .i.c?' l.ltH.dei'hiJ},<Us
^t^erres d'Italie.
Edouard V I.Toy d'Angleterre , ayant régné (îx ans,
mourut le {ixiclm- lourde luillet i^Si- i^on fanS
Ibupç^^nd'auoir efté empoiionné. Incontinent après
fa iocur Maricfut laiute ri>yne , & fit des eftranges pcr-
fecution* de fesftîicts ,pour le faidlde la religion. Au
mois de Feuricr fgiuant die fit décapiter lanc Gra-*
yc fiilc du duc dt SuffuiC , ôc Gilbert Dudley fon
5>9«
HiBoires admit ailes
mari puis ayant cfpoufé Philippe fils de Charles V. au
mois d'Aouftde l'an iç s 4. fit ferrer en prifonlaprinccf
fc Elizabet fa fœur de par perc , où elL demeura quatre
ans accomplis , durant icIcjUcls Marie fie exécuter à
more pluficurs milhers de pcifonnes innocentes. Or
Comme il n'y auoic apparence que de toute conful^cn,
Marie tomba malade , &. fut oltcedu monde le i 7. lour
de Nouembre 155 S.fcize heures après àeflogca le car-
dinal l olcaagé de cinc^uante neuf ans. Alors vid-^n ac-
compiy ce que dit lefageen l'cccleiiaflc , qu'on void
fortir de prifon les peifonnes cjuc Dieu vcttfairc ré-
gner. Car la prince flc Eiizabct tuC tirée de captiuré
incontinent aprrs la mort dt fa fœur , commençant à
régner le Kî.du mefme mois &:an;ce qu'elle a hcurcu-
fcmcnr continué ( PhiUppc <ic les Elpagnols chalTcz
d'Angletcrrc)iufqucs au commencement de l'an i 605.
Jaiffant pour fuccelFeur lacunes VI. roy ù'Elcoflcjauiour.
d'hui l'vn des puilfans roys de i'curop;:. Hijhirede nojln
temps.
Piiilebc t Eraanuel, prince de Piedmont fils de Cliar-
lesducde Sauoye , fut i'cfpace de plulicu; s années ré-
duit à ceKitat ( ibu pcre ayant efté defpouillc de Ia Sa-
lioye 5c du Piedmont ) ^u'il fjt contraint demeurer à ia
foldedeCHarîe» V. & de Philippe roy d'Elpagne fon
filsrcombien o^uc ce fuft en charges honnorabîes. Tant
y a que c'eftoit a'iec hazard &: peu d'auancemcnt. Mais
ayant gaigné la bataille nommée de S. Laurent, & pris
le Connertable prironnier,vnc paix s'enfuiuit fort auan-
tagcule aux Efpagnols. Car par le moyen d'icelle ils
eurent plus qu'ils n'euflent fceu conqucftcr en trente
ans. D'auaniage Philebert Emanucleuc àf^rmme Ma.--
guérite d France ,Sc en faueur de ce mariage tut remis
en paifible polTcirion de sauoye & de Piedmont l'an
1559. oùreco^ov^iirantfesaaintures il fc covnporta de-
puis air:z paifiblcmenciufquesauiour delà mon. Hi/?.^e
nofire temps.
Louys de Bourbon, prince de Condé, ayant efté em
prifonnc à Orléans, pour raifondcs cntrcprifcs préten-
dues
é" memoTAhleS' 9 97
iues auoir efté par luifaircs contre la maiefté royale»
& l'Eftat, outre la franche pfofjilîon de Ja religion ,fuc
iugé par a^rc{^po^tant condamnation de mort.Ccftc cô-
danatioafutiîgnec de cous Cf vx dupriué Cotift il, exce-
pté ie châcelier de THofj iul &. le ûcur du Morner, qui
rccuioyéc toufiours ,en dônanc tou:esfois honnecfperâ-
ce. Eliefutaufli fignec dt pluficurs «rand: r<jign(.urs,
de dix'nuidl cheualiers de l'ordie ijouuellcmeni faits, &
de plufieiirs autres qui fe trouuejent à Orléans ) pr>ur
s'cfîrir auferuicc des ennemie du piince , Icfqiieis pof-
fcdoyent cntieremenr le ir-une Fvoy François 1 1. com-
me auflî les prefidensmailtres des requeft-.s, &: confciU
1ers du Parlement, pour ce m-indcz , s'y foulluincrenr.
Jourfur affigné au lundi dixiefme de Noucrrore pour
rcxecution. Mais le dimanche nenfiefmc, le roy tftant
âvefpresaux lacopins fut faili d'vn grand efuanouifl'e-
mène, qui fut caufe qu'on l'cmpo ta hiftiuemcqi ec fa
chambre , où reuennde palmoifon commença à fc
.plaindre de la tcfte en la partie Je l'oreiliegauciie , en
anuelle il auoit eu de tout temps vne fiftule , en forte
qu^dc la douleur la fîeure ie prinr, & lerauir du monde
i Je ç.iour de Décembre i 5 lîo.fuinant.Le prince & plu^
fieurs autres grands ftigneurs d'cAinez àreîpee furent
garâtis par le moyen de ccfte mort:l'innocence du prin-
ce fat vérifiée & publiée par arreft lolemnel du parle-
ment de Paris, le prince mis en pleine liberté. De ce qui
s'enfuiuit puis après iufqucs au iour de (a mort l'an
I s «"P-côtenant infinies hiftoires memorablcsjautres vo
lûmes pourront en reprefenrerqyelques principales par-
ticuliaritC2;.H//?.<^e Frav^ois IL
Lesreuolutions merueilic':rcs en la vie de tref-
illuftre Prince Henri II II. àprefcnr Roy de Frsn-
ce & de Nauarre, depuis l'an m 7 0- iuîquesà ce lour,
font telles & fi grandes, que mieux vaut s'en taire qu'en
parler peu, C'eft vn difcours hiftorique,pour pUifieurs
iiures , quircquicrtnt les diferies plumps de quel-
ques doftes en fe$ royaumes, la foftc'ité l'apren-
dra,poury voir Dieu tout puilïant es voyes de (esiu-
'^^%
Uiïîoires garnir Mes
gcmens & mifencordcs , ^uc nous reucrons en humble
iîKnce.
Quant au fercniflirac roy d'Angleterre nu! n'ignore
que Tan précèdent de fon auancemcnt en ccfte haute
dignité , n'cftant que Roy d'EfcolTe, il fjilht d'cftre mis
à mort en vn cabinet , par les mr necs de deux feigne urs
de fon royaume , Dieu le prcleruant pour i'cflcuc&le
donner aux Angloisifucccircurde leur prudente & htu-
reufe royne Elizabct. Et les antres renolutions de la vie
de ce prince, marquées en rhift.-iire d'Efcoffe feruent de
commentaire à celte fcntence de Dauid , au Pfeau. i 44.
V. I o.Ceft Dieu qui enuoye dcliarance aux Rois.
TtJ/'S ES de l'ejprit d'erreur,
IEan VVier recite qu'il a vcu vne fille démoniaque
en Alemagne , laquelle interrogée par vn exoicifte,
Satan refpondir qu'il fdloit que la fille allait en pèleri-
nage à Mircodur ville cflongnee de quelques licrè's,-
que de trois pajl'vn elle s'agenouilbft , &: fift dire mef-
fefur l'autel faillite Ann" , & qu'elle fcroit deliu.ec
predifant le iîgnalde fa dcliurance à la fin de la mclfe.
Ce qui fut fait, & fur la fin de la melTe, clie & le prertrc
virent vn fantofme blanc, &fucaintî deliuree.L'an M-
D.L I x.le XVI I. lourde decemb'P,au village de Loen n
la comté de luiliiers , le curé ofa bif'n interroguc le
dnble, quitenoitvnerfilleaflîegec , C la mcflc , eiloit
bonne, &: pour.]Uoy il poulToit & contraignoir la fille
d'aller foudain à la mefT-, quand on fonnoit la clocha?
Satan refpondit qia'il vouloit y auifer. C'cltoit leuo-
quer en doute le fondement de la religion & ei> faire
iugeSa'ran. Orleande Sari:>bi.'ri en fon Policratic , li-
Ure 1 chapitre i (5^. parlant de ces beaux inierrogitoircs,
dir. litecefi fratid'.de itia mah^norum SpiriLuum ^ -vt <juoi
yltrajhdunt , CT* dUlant Jyamiyi'tbui faàendum « operose
àiJiimulenCf -vt hoc facere yideantur mttiù. Simulant fe ioa-»
^os^ ^ (-m^i KXQrcifmorum yirtmc extraclosfin^unt ; CT* ^«<»
Uiinm
& memorahles» 999
mm«4 catteanttir exorcifmos quajî in nomine "Domini , aut in
jide trïmtatutaut mcarnationn , CT" (afionti yïrtute conceptos
tomponunt ^ eifdemqHehormnihw tradunt , exertent^m eos
obtempérant, donec eos fecum crimine fatrilegi^ , çj- pœn£ ddm-
nationu mmUiant . C'clt à dire en noltrc vulgaire , Les
tnnims ejhrtis font fi f»Je\ , au ils fiigneni auec beaucoup
de fi)tltcitude qtt'iU ne font que par fvrce ce qu'ils fint de leur
fleingré. On dirait qu ils font contraints , i^^ ils font qu on
les tire des lieux où> tls font , en yertu des exorcifmes : CT*
afin que l'on n'y prenne garde de fi près ils drejftnt des cxonifi
mes comme au nom dujeigueurtou en lafiy de la Jumelé Trinttéf
ou en la yertu de l'incarnation Cf de lapaf^ion-i punlesfugge-
rent aux hommes y çp' obeifjent aux exorcifies y tufques à tant
qu'ils lesayent enuelope'^ auec eux en mejrtie crime de fAcrilege
Zp' peine de damnation. Nous auons vn autre exemple do
Philippe VVofelich, religieux de Cologneeu l'abbaye
de Kuedlcn, lequel fat aiïicgéd'vn dcmon l'an mil cinq
cens cinquante. Le malin cfpric inierrogué, dir à l'excr^
cifte, qu'il cfloit Tanae du feu abbé, nommé Matthias de
©urc : pource qu'il n'auoit payé le peintre, lequel auoit
fi bien peint l'image delà vierge Marie, &qucle reli-
gieux ne pouuoit cftre deliuié , s'il n'alloit en voyage à
Treues,& Aix la chapelle, ce qui fui fait:& le religieux
ayant obey fut deliuré . L'hiftoire eft imprimée à Colo-
gne, lean Badin ai* dernier chapitre du liu. 3 . .d«fa T^emono.
manie.
Maiftrc Barthelcmide Fay , prefident des Enque-
ftes en parlement , efcrit que Nicole Aubcry aati-
uedcVcruin , priant fur la folTe dclonsycul , il
fe leua , comme fortant de terre , vn homme cn-
ueiopé de fon drap , difant à la ieune femme qu'il e-
ftoitTonayeul : & que pour fortir des peines de pur.
gatoire il faloit direplufieurs raelTes , & aller en voy-
age à noftrc damcde li(.(Fe. Apres auoir ùiô. cela
il fedefcouuric , & fembla eftrel'ayeuid'icelle , qui
continua défaire dire force meiïes , & quand on
(ciToic de dire mclTes , la ieune femme ' fe croa*
KR 4
lOQo Hiftoires admirables
uoit tourmentée. En fi-» Satan ajt q..M cftoit Beizebub
D'autant qi!e;'lultoi.C(;'t r.otoi.e t loutc la France >&
iTiife en limier par ic fulnommé prcfideni,ic nien diray
autre choic.Lamejrne.
Il y en a v.t au '■c. pIu": récente ? notoire aux Pari-
fens,iiJi:nuccn iavill;- dcPc'r:,,cn !a rue (aindl Hono-
ré, au cheua. r:.M gc Vn tdlt'.fuentifii voyant vnefi;:nne
nupt-o phd liw l'..uojt "ui'^ee ch' z lui. Vniourla
fiik- priant (or la tofTcdcfoo pcf à fainéV Gernais , Sa-
tan le prellnta à elle feule en form<; d'homme gr.ind
& noir, lui prenant la main,& difant , noamie, ne crain
point . tonpcre&i ta mcre font bien. Mais il faut dire
quelques mefles , & allercn voya^ft à nolbc dame ihs
vertus, & ils ironr droit en Paradis : pource que Satan
crtfort Ibigneux d;i faluc éçs ho.r.nriCs. La fille s'enque-
rantquiiUftoit , lui refpondit qa'ii eftoïc Sacan , &
qu'elle ne s'eftoonaft pojnr. LafîHcfi-ce qui lui cftoit
Commandé. Quoy fait, ce çonfeiller adioufta qu'il fa-
loit aller en voyagea fajn£l laques. L.i fille dit qu'el-
le ne fçauroit aller (i loin. Depuis il lu? fit beaucoup
de maux, iufquei à vouloir la forcer & conoiftie char-
nellement,labaitrecrucllc-ment, 5t fon oncle a'jfiî oui
vouloir la r?iianrh' r.Enrrc piiifieursqui virent cftc fil-
Je Choiinin fccrcraircde l'eutrfque de Valence , lui à:t
queie plus beau moyen de chifi'ci le malin efprit e-
{loit de ne lui obcir en rien d«* ce qu'ii diroit , cncorcs
qu'il commant^Tft dr* prier Dicu rcaril ne fa't lamais
çclaqt.e pou. d^.:pit£rPieu,ou par mocquerie le mcf-
1er auec les creatcres. De fait Satan voyant qucla
fiîlenc lui rcfpondci: , ninc f^ifoit choie quelcon-
que po'.f lui, l'cmpcignanr il !j icttacootie terre : &
depm<: elle ne vid ritn. M. Amior tucfque d'Auxcrrc
& le eu. é .le la fille n'y riuoycntlccu remédier. Là
mef.rie. Bodin adiouftt* tout .-u bout de ceiiure & cha-
pi:re v ne .1 r. cic»*' e hiftoirc tirée d'vn liure compolé il y
après de (ept vingr ans par Pin rc Mamor, oùilefcrit
que Satan fedfa^-i; ''anic d'vnàefunét à Confolani fut
Vienne enla ir iif»i» d'vn nomi>é C?planr , Tan m.
ççcc.tvijjagciiiilloitçomcaclpuftranterand douleur,
é* mémorables, loox
admonneftant qu'on fift dire g-and nombre de meiTei,
qu'on fiftdrs pckrinngis , rcuelant beauconp déchu es
occultes & vci Jt.ibîcs.Mais on lui dii.Si tu vct x qu'on rc
a oyç^<\u!MifeTere wei, 'Dttu ,fiCundàmm.igr?am vnfencor-
diamtuam. Ce qu'il ne vou!i-t t lirc, ains s'cntui^hecnir-
fanp de dcfpit qu'il auoud'tiUe mocqué.
s yiL C^q E-M^iiT horrible.
AV commencement du mois de Nouembre i?7/î
iesEfpagnoIs , qui pottoycnt les armes es pays
ba. pour le roy rhilippc 1 1. ay^ns entendu que les
Eftars des prouincts voies , ne pouuans plus foufF ir ni
porter la domination C^ihilane, s'ctioycnt accordez a-
uecie Prince d'Aursn^^c,sfîa àc le mamtenir, auiferenc
par rétremife oe jcuis clic: de k faifir delà viiieci'ftn-
ucrs,& dehfaccagir. Lrs Efta^s ayans eu le vent de ce-
fte entreprie, pour la preuenir , fi; entamas d'enciron
trois mille picro?K 6i huict ces cheu3ux,qu*j!s eoDoyc-
rent àceux d'Anucrs fous la conduire du comcd'Lg-
mondjie m'»n,'jîs de Haiirer, le ficur de Cap; es , Brelei,
& autres gcntsl.-horrmei.ils y airiu^reni le deuxiefmc
iour de Nouéb: f,pi es 'a Kibberpcorte. Le^ Eipa^^ncls,
qui cftoyencen la citaHcllc, commencèrent à lafciier le
canon contre la viiîe. Le 2cuf de Cham^agny ^ouuer-
f)eurd'Anuers,& le comte û'Oucrftcin cher des gçns de
gucire, enuoyfTcnt mconrincnt demar^der au comte
d'figmond &auxfic;"s, quiles mouuoit d'approcher li
près, i^.\^x font rcrpoï>le ou'ils venoycntccmme amis,
pour détendre & fortifier !a vt iiccontre Jcs Ei'pcîgi oîr,
auec proteltation folennelli de ne vouloir faire foi ce à
aucun des citoyens,ni cr leurs biens, ni en leurs pcrfon-
nf s.Surce Chan.ipatîny &d'Ouerftwîn (."orient de la Vil-
le,parlementent & s'accorc'cDr,puis retournent, laidcst
l'armecd.s EiUtscnvn village proche de là ville tiom-
jpee Burgcrhout. • -.,..-. .■ •*
JLe lendemain cioiicfjfnc de Nouembreîls firent en-
I 0 o t Hijfoires admirables
trcr dedans Anucrs vzngt&vn cnlcigncs d'infanterie
d'iccllc anncc, & C\il cornctccs de caualcric. Alors cctx
de la ville commencèrent à percer torce balles , lacs de
laine , & telle autre matière pour boufcher l'entrée des
cinq ruesqiiirefpondentàla cicadciie , & firent fi 'oon-
ne diligence qu'en moins de cinq heures iceiles rues
furent bien remparccs pour Icgarant'.r d'vn fouJain if-
fauc:quoy que cependant le» Efpagnols ne ccirailent de
canonner funeull-m-rfic de la cicadei'e contre eux. Mais
pource que ce iour là fftoit fort trouble U nubiicux , ils
ne pouuoyent vifcr droit ni conoiftre comment Iss rues
crtoyent rcn:parees. Tellement que les coups de canon
des Elpagnols n'empcfcherent point ceux delà viUe
de trauailler fi diligemment , que cieuant la rainuidt la
platte-For me qu'ils fjiloycnt Fa: ellcuee d'vne picque:
& auoyent ia commencé vn autre rempart au dcuant de
ladiâic platte forme , lequel ils confinucrent depuis le
mi-chemin du cemitiçréfainft George iufqucs à la ri-
uiere du cloiftre de faift Michel , auec délibération de
le parachcuer le lendemain. Ce quieurtefté vn grand a-
uaatage pour eux, s'ils eulTent peu en venir a bout.
lero medc Rhoda & Sancho d'Auila , quicomman-
doyenten lacitaJeile d'Anuers à grand nombre d'£-
fpagnols , qui ne dormoycnt pas » ains ayans enten-
du qi'e le Iccours député par les Eftats eltoic )a parti
de Bruxelles pour venir dedans Anuers, cnucyerenc
aucuns d'entre eux à MaftnchjLiere&Aliolt» pour de-
mander fecours, & plier les colonels de vcniraucc tou-
tes leurs forcesen la citadelle d'Anuers. Ilss'y achcmi-
ne.ent promptement , & s'y rendirent tous ie quatrief-
jne lOur de Noucmbre, dedans les dix heures du matin,
àlçauoir mille cheuauxde Maltrich , fous la conduite
d'Alphonfc Va'gaz : cinq cens hommes de pied, fous
Francifque de Valdcs. De Lierc cinq ou (îx cens pic-
tons, aufquels Iulian de Romero commandoit. D'AU
loitjdeux mil hommes de pied , mutincï & qui fc rc-
uolterenc des premiers après ia piirc de Ziriczee en
Zeeiande.Ccs mutinez a'auoyent point de certain chef
Ûnoa
^ memcrahles, i o o 5
fînonleurEIefto, lequel depuis hur foulcuemenc ilsa-
uoycnteflcu pour gcnerai : la plufpart gens raniall< z
des autres r, gia^cns. Us cftoyent en tout cnuiron qua-
tre mil hommes lans les inil Alemans , venus de Ma-
ftrich , de L ère & d'^iilcurs,! anialîc2 des re^inncnsde
Fuckcr , Poluuillcr.&: Foniperg , fous la conduite de
Fucker. Paraiofi couicccjue Jci Hlpiignols auojcnt
attiré de dehors aïontoit àcuiq mil homnits ou cnui-
ron.
Ceux de Ja ville cntendnns cela furent d'auis d'cn-
uoyer quelques gens de pied & de cheual pour cmpr*
cher l'entrée de la citadel'c à ce renfort. Mais ils ne pci-
ferenrpas outre, ayans fceu que ceux de Mjftrich5c de
Liereauoycr.t ja palTé Ba'gerhourt^&feghlioytnidelîa
le long des murai] es pour cniicr en Ja ville parvnc
porte qui refpondà )a place delà citadelle , nommer U
porte des moulins à vent;&: que les Alemans , vtniisa-
uec ces Ffpagnols , eftoyent ia autour de li citad;.llc,
ayans défia palTc par vn vi!!a<>e nomme le Kicl,tiajnanî
Jcurs pi:qncs , & encrani pnr vne petite porte piei ia li-
uiere de r£icau'd,tiiant vers Occident. LcsFfpagnoîs
venus d'AlIoftcntroycnt par derrière la^iradcilc , pour
pafll-r en la vilk, cùiU Trounturit Its autres Erpagncis
& A'emans,iû ietic/ par les deux aufrcs cndroiis.t ilat^s
ainfî ifTcmbicz , fin;, auoi» eu deftouibier ni einpcLht-
ment quelconque , ilî-fient feim^nt les vt^s a x autres
de ne boire , ni mange't , ni rcpofcr , finon api es s'eftre
faicls maift^es de !a ville , tonihu-n qtiMs cubent mar-
ché armez tout le jour ^: h nni(ft auparaiianr.Ils exécu-
tèrent leur p. om-^lfc contre i'opfnion de ch-sfcuit.
l'romptemcnt donc ils fe langtren: en bataille. Ceur
d'A'lofl &.de la Citadelle firent fiuaaeefqnadrons : c;,ux
deMallrich& Lierc deux : les Alemans i'z rar gèrent à
cofléde i'Efcauld. Ainlidifpofcz en la place de la cita-
delle , après auoir ehoifi i'endroit i.ix ih voulcyenc
commencer , ils fitcnt desbander quelques foldats de
chafque bataillon, pour attaquer Pefcarmouchc, & voir
de plus près la comcnanccdcs bouigeois, quiauoyenç
lo 0 4 Ht Hoir es admirables
barrique Sctcllcmcncrcrranché tojics I*:? ancnnê'",
qu'ils cjtimovcnr c|U*on n;; les poauo.r fotccr. P^r le
comcnamijm.'nc de iancho d'Auila , le capitaine Or;is
foriit de la citadelle aiiecquf iques harquebozieis pour
rcconoiftrc.lcs deffenlcs , & trouua les bourgeois fi l.a-
radez de crauai!,que non feulement il Força les barrici-
des, mais au(K coupa la gorge à tojc vn corps de garde,
d'enuiron cinq-jaace homiTics. On dit que ctde [ortie
fut faite auant que tout le fecours fut entré dedans ja ci-
tadelle, & que fi ce capitaine euft eu gens à commande-
ment il tfb'anloic dcllors tonte la villa. ayant outre ce
mal bruilé vn moulin & quelques maifons qui eiilîenc
peu nuire,puis fe retira d.-ins la citadelle, d'où ( le temps
s'ertantefclairci) l'on neccffoii dv tirer Tans relaCcJie
contre les barricades , qui n'erapcfVhoit pis pourtant la
bcfongne, encore que le canon emportait iambcs , bras
& celtes d'hommeî. & de femme';, qui ne laidbycnt de
trauaiUer de tout h ur pouuoir, quoy que la mort fuft
comme d:u:3nt leurs yeux.
Sdnchod'Auilavpenfani qu'il y auoit plus de befon-
gneà faire qu'il n'y eut, vouloicque les chefs & foldars
Venus de deborsauec beaucoup d; fatigtic fercfraifchif
fcnr & rcpolafi'ent quelque peu, pour aller tant plus fu-
ricufement à \a ch<^rgc. Mais tous , & les fiens aufïî i e-
Itoyent tellement cnilammtz de rage de tu°r , facc^ger
& mettre Anucrs à l'ëuers^qu'ils ne voulurent point ;ar-
der , & prièrent Sancho leur permettre de palPer outre
en leur expîoitrce qu'ils obîindvcnt fans contcfle , lui
mefmc elt.ufort efchanfé au meurtre & à la proye. Ain-
li donc marchans coa5me fo!. sic couuert de ranillcrie
ouidonnoitauxharriqiiade;> , & à lafaueur de la fumée
o^CL'lIcils forteni par la grard' porte de la citadelle, fui-
uis de leurs goujacs,qui ponoyen' des flambeaux , des
fagots & bottes de pai le pour mettre le feu où il leur
fcroic commande, attaquent tout à la fois les barriqua-
dcs des cinq auenu ts de ces rues de la ville qui regardée
laciradcllc , lefquelles ores que fortes & bien munies
d'hommes ils forcèrent , ruant tout ce qu'ils rencontre-
rent,& raectaat les ibIdacsV Vallons (cncorcs bien nou-
ucauz.
(jr memorahlesl i oo ç'
ucaux , & tout cftonncz de fi furieufes charges) en dc(l
rouie.fans faire granderefirtanccncs'ofans bonncmcnc
prcfeater aux ircnchecs,à caufc ducanon de Jacitadel-
Jcqui dcdroK fil tionnoicpar dclFus les Efpagnols.es a-
ucjuies,3f au i!)i!icu des ruts. Le^ bourgeois fe voyans
forcez 6l leurs foldats en fuite, chafcun ulchant fè fau-
ucr ,11- retirèrent vers Icui hoftel de villcjoù efloycnt les
conf/airics fcrinentees , qai fe mirent vukurenltmenc
en dcfcnfe.fjifaiu beaucoup de ma! aux Eippgnuls. LeC
quels voyons qu'ils ne pou ;oycnt les forcer & tirer de
là,mifcni: lefen dedans » où pi. liîciiis furent confumez,
&aucuni à demi ! ''{lis pour le lauuer,Ie icttant du haut
e.îbas par les f.:i.eUrc<,'r{toyeni mallacez. Ce fut vne
chofed'plorûble,Gc roir tanrdc g^ns de bien mourir fî
pauurenKiupa;mi ce .flammes, ôi ce magnifique bafti-
nicnr toaten feu , oui peu de temps auparauart auoic
coufté plus de deux cens mille ducats, fans encore autie
plus grand dommage quoccfl: embi^afcrnent fit es mai-
fonsd'àrenuiron Uir le marché ,& derrière l'hoftel de
ville, pleines de riches marchandifes. La cruauté des Ef-
pagnolsnou aflbuuicilsponrfuiuirent les bourgeois
iulques en la ville ncufue , où y auoii encores quclçues
compagnicsdu comrc d'Oucrftein Se d'autres , Alemans
&: V VaiiQS,qui firent rcfiftance,raais à peu de profit. Car
la furie des Élpagnols d'vn ccfté, l'efpouusnte entre les
gens de guerre &. bourgeois d'autre eftoic ii grande, que
les vaincus ne rcgardoycnt k]a'aux moyens de fe fauner.
L'infanfede des Ellats ertou prefiiue toute raillée en
pièces çà & là. Leurs gens de cheuol,qu't3nt leurs mon-
tures,fe iauuoyeni du hnut en bas des rcmpars es folfez
dclaviile, donr^iucuns pallercnc la riuicre en des bar-
ques, autres fe laiiue-^en!; à nage es nauiics anch'ces au
inilieu.Chanipagry,Haurec,Ie Marcgraue, fefauuerenc
csvaiflcaax du prince d'i\urange près d'Anftruuel,& fe
firent porter en Zcel.Tiide. Le compte d'Oruefteio pen-
fantaufii fc fauucr à i^autrecofté de la riuiere , faifjnc
faute de faillir en vncbafque,tomba dedans reau,& par
la pesâtcurde (ç.^ armei fut noyé.Le ûcur de Bieurceflac
en yoe barque poiirprendi e la mefme routc,ianc de gens
Joo6 Hîjtoircs admirables
ycntierciîr,qne ne pouu<int porter vn fi pefant fardeatt
elle CMfiUiç3)c'c r'uieiu noyez Lan ficur & laplarpart de
C'.-tix i|Uic:to)Cin dcians.
iMlans les Elpagnols & Alemans fai: abfolucmenc
iTi3ift:cs de la ville , il$ U mirent à ptlicr , louru^^cr ^
laccagcr pliificii! s loiirs durant , malTacranspar mili> :s
pci lunnes dv cous aage. , Ux s,eftats & qualitcz , tai c
bourgeois & habuans , qu'eiirangers de diueries coii-
treis, y Icioiirrians lors ( co.rme de couftume en icclle
vi|!c)poU! Lur comaTj;C'. ,&. trafiqu.: .-bruricîent toutes
les mailons à l'civour de la pi tcir oùaucresfois auou c-
Ité Tancicnne maiiond" la v.ilc,ceJiedcs crois rues preS
de la riuierc,ccl.ts de la ruc des orfcueSjde larotiflcrie»
de Silucrcpandî , d'va des colKzdela Kooch-ftrare , da
FU'.marck,c|u<lqaes maiions en la Dornckllrace, autres
prcs de la vieille bourfej&c à la porte de l' Empereur: ou-
tre o^.jel-|ucs vncs près de S. Michel, de la rue de Cou-
vvcnb-rlc Ce de Lepeifcrate. C'ertoycnc presdefept à
huttt cens maifons.ilsen brullercnt plus de mille en la
v;'K neufuc.î ncorc Fui ce peu de tant J'cdifices ^aftc?,
fie iiicubies lie toutes forces confumez , de richefles pei-
duci & t'on.iues a-j prix des cruauttz horribles, violen-
ces enragées, dillolucions ;ni:amcs &: brutales. mefc'ian-
cctez inenarrablcme^nt énormes qu'ils y commirent,
iutques à s'elUe rantrz que les trois premiers iours de
ce lac ils n'cftoyenc point hommes , mais diables en-
charnez. Le conif'ce d*Hgiîioud fut prins auec quelques
autres leigncurs.cnrabbayede S. Michel, où peu s'en fa-
luîl: qu'on ne les eCgorg^all. Depuis, ce pauure comte,
i^eftant rangé dtrechci: auec les Hfpagnois , a efté tué ea
la ba'ailic'VYuiy.
Pour reuci.ir au fac d'Anuers , autant de foldats
Wallons que les Efpagnols §:. Alemans peinent dcf-
CQUurir , cachez quelque parc qiie ce fuft , cinq Ôc lîx
iours apies la ville i>iifc,eftoycnt cruellement tuez de
farg froid. On niaflacroit les prifonnicrs & rançonnez:
& fi quelques vus auoyentpayé grofics fommes pour
lâauer leurs vies , n'elbnt pas au gré des pillards > ils
.prcnoycnc neanimoins l'aigcni , puis eftrangloyent ou
poi-
érmemorahles^ 1007
poignardoyent ceux qu'ils tcnoyent en leur puiflance:
voue mclme alloycni par delpic tuer traiftreulemenc
1 s pri'onniers l'vn de l'autre. Le premier iour il y eut
plus de fcpt mille hommes tuez parles places &rï]cs
cl'Anucis.i.s luiuans le noa^breen fut trcf-grand par \ts
majfoiis, tant foldats tjuc bourgeois , de diucrsaagcs,
f\;n]œcs>filç ^ filles. OnacftiiTié que les EfpignoJs 6c
-Aîcmans tailans leur reuci'ë , trouucrent que Id nuidt
pi acharne de laprile ( car ils ne demeurèrent maiftrèï
que fort tard . & clloyenr eltrangcmeni luralfcz ) on en
auûic clgo^gc trcf-grand Pcml reparles m;îirons , ou
ayans beu&i mange, il., dcmcuroyent accablez de fom-
ne,qui fut le dernici à piulîrur'- u'cHirc eux , leirez par
les fencltres fur le paiié, & traînez es monceaux des au-
tres. Cela raluma leur fureur L s lours foiuans.où l'aua-
riceôt la cruauté fe lindrent comp.-gnie. Pour reucnir
aanombrcdcs tuez, aucuns ont cllrit qu'ilycutdir-
fept mille perfonncs & plus miTsàmort par glaiue,
f<«ns ceux qui furent biuilez & noyez en diuers endroits:
iccm les eltianglcz & poignardez pour n'auoir eu
moyen de payer rançon, ou racheter leurs marchandi-
fcs , que le difcours traduit de Flamen en François dit
monter à plus de cinq mil. Les fcfpagncis violèrent
plufîcurs femmes & filles, en rouirent nombre, & en ont
emmené depuis par troupes auec leur butin en Italie
& ailleu;s>quand ils peurent efchappcr.
Voila comme cci^c tant f^orillante ville , IVnedes
plus riches & plus marchandes de toute r£uropc(com-
me pcr vn i«gement & punition dmine, pour Çts. excès,
diflblutions &. desborderncrs) receuc ctrte fois le plus
giandcoupde bafton que vjîlefçauroit reccuoir. Plu-
iieiirs des plus riches marchans furent apauuns, & les
plus grands bcliftrcs& bribeurs Efpagnois enrichis en
peu d'hturc:dont aucuns tou:esfois ne louircnt pas long
tcps.Car il y eut tel fimple foldat qui pour vn iour pcr-
dicdix milk efcus au ieu dcdcz fur la place de la Ecur-
ie,ou ilo tcnoyétleur breland. Autres ne fçachans oùlcr
xer leur argent, faifc\ eut fairi: des garnitures d'efpees &
dagues de fin oi, voue des ccirfdciî» tout- entiers. Les
1 0 o 8 Hifloires aimirfibles
oifcurcs le'ùr ioùcrciu diucrs traits , & changèrent leur
or en mdinces forces. 11 y en eut qui iVcliplcTcot auecia
maciere & lailKrenc leN voleurs en pourpoint. On a ef-
CMc Ljue la villcd'/Vni^e'S fil pcrrc en faccagcmenr de 'a
valeur de foixante millions d'or & dauanraoc. à'vnc.'^
le m.ii{onfar<:nt emportez pics de cin^oantc mille .
eus comptant. Le capiraire Ortis Espagnol , fechoi^r
vn buun.donc nuls aurrcs ne s'adiiifcicnt , àfçauou l.i
priTon-d'où ileil.Kgii fous go (Tes rançons tous les pri-
lonnicrs qui y ^-l>ov'coi>cant pour le ci'jjJ,C'iraine], '^uc
ceux de la religion , entre Icfquels y aucir quelques n»i->
ni(lrcs,6c piuiituis anabapiiltc? .• aont il fît vn merucil-
Jeux butin.T'oiFlernainrs darancapies la prife fut con-
tinué le maflacrc de tous les foidats VValioHs qu*on
pouiioitaciiappT . fans merci quclcùn*^uc:&: piufieurs
*ftrangers,ac<:ur. z fauflemcnt par leurs ennemis d'eftrc
de ce nombre,furent cruellomcnt meurtris > auant oiic
pouLiuireflre receus à venficr le contraire. Hijloire des
pays bASjCu l'an t ^ j fi .
S yi VVE ij A ^ D £ o- uO^'Ce notable.
CFs années pafTecs vn balTa ou fangiac Turc , lequel
commandoit fur Ici f entières de Hongrie , regar-
oaur f.'S troupes de pied ôc de chcual , qui pafToyenc le
rcmps à des exercices miliLaircs,.iuec prix propolcz aux
plus indurtrjeux & agiles, à leur tiçon accouftumetf, cer-
tain charlatan furui^t, lequel menouvn fort grand lion
priué,qai lui obeilfràu comme a fon maiftie. En ces en-
trefaites,voici venir vne troupe de coureurs Turcs, Icf-
quels en vne caualcade auoycnt prins prifonniers qucl-
queschreltîéi Hongrois, menez les mims ignomiiii -u-
fement liées derrière le dos vers ce bafla , pour ertre ex-
pofez aux rifees des cnnetnis du nom chrcftien.Le baiïa
ou fangiacdefcouurant ccfte prife , commande que le
plus robufte de ces prifonniers, icune h omme fansbar-
bc,foit auachc à vn pal,&, le lion lafché dcffus , pour !e
dcichi-
é* ntemorahles] i o o ^
derdiircrcnpieces.Mais quoi qu'on fift , &que le char-
latan irritaft & haralîaft te iion,iamai$ il ne voulut en-
dommager Jc chrcftien.ains iccgardant d'vn œil doux
le fl<?ctoit. Dont le charlatan dcfpiié commence de plus
bcllcàicpoufrer auccvnc aigre & forte voix, à ce car-
nage : & voyant le lion faire du reftif,'!e prend à le ba-
ftonner pour j'y contraindre. Ccft effort citant inuti-
le,Ie mal heureux lionnicr, pour contenter les Turcs»
altérez du fang chrtftien , fe rcme. à picquer & pouf-
fer fon lion vers le Hongrois attaché au pal : tellement
<juc labcfteauec les ongles arracha l'vnc des bottes de
ccft innoccnt:puis,fans lui toucher d'auantage , fe tour-
nant defuric vers fon raaiftre , feiettede vifteHe im*
petueule fur iui)&: le dcfpece cruelleiticnt , f^ns vouloir
toucher à autre qu'à celui la. Les Turcs , enrayez & ef-
perdus de tel fapplice, s'abftindrent d'offtnfer ^[ccs pri-
fonniersjcfquels (ayans dellic du pal le ieune homme)
ils gardèrent tous enfemble , iufques à ce qu'on les euft
rachetez par cfchange ou par rançon. Eux retournez
lains&faufs en leurs mailons raconrerentà Kurspa-
rens&amis cefte miraculcufedeiiorance , laquelle a
cfté peinte & publiée en diuers langages par TÈurcpe.
*^.Camerarittt an t.yolume de fes medttations htjioriquesy liur»
5^^%^^
S AFyEG^ 2^1) E mémorable.
QVi cft en la garde de Dieu eft bien gardé. Vn bon
pcrfonnage de la val <1' Angrongne , pris & amené
l'an I ç < 7. aux p'-ifon^ de Turin en Piedmonr,lors apar-
tenantau roy de France, fous le gouuerncmrnt du ma-
réchal de Briflac.fui fi rigoureufement rraiftéi que fans
rartîliancedVn armurier nommé N. Argcncourt ,ily
fuft mort de maie faim. Au bourde quclq;ie temps ce
pcffonnagcfut condamné à perdre la vie , quoy qu'il
meritaft routaurrc rraiftement. La veille du iour de
l'exécution , Arçcncourt va irouuer le bourreau, &: fie
tant qu'il lui promit de contrefaire le malade le len-
demain. Il tint promeffe : cequ'cftant rapporrc au
Parlcmencpar vnhuilTier , l'arrcft fuit bien prononcé
I o I o HiHoires admirables
au prifonnier.niais l'execufon en fut delaycc iufques \
deux loursrdurant kfqaels Aigencourt via de tcliejpcr-
fualiôs enucrs ccft cxccutv ur Uc luftice, qui clloit icune
ho(nme, n'ayant femme m cnfans,que iui ayant rcmon-
Iti é l'iniquiié da i jgemcnt dcnné contre ce prifoLnicr,
& ^u'ii eltoit bien pour gaigner (a vie à quelque autre
melticr, moyennant aullî vue pièce d'argct qu'il lui don-
na,ce icune homme s'en aila, (ans iamais auoir cfté veu
depuis à Turin ni au pays , qu'on ait fccu. Cela clbnt
venu à la cognoiflance de la Cour il f jt commandé au
preuoftdes marelchaax , de trouuer p:omptemcnt vn
exécuteur. A la requifition de ce prcuoft l'exécuteur
de GrenobiC Te mit en chemin : mais rencontré fur le
mont Gcneure par certa ns foldars rctournans de Pied-
xnonc en France, qui eurent enuie d'vne bonne manche
de maille qu'il ^îortoit , fuc tué & defval.lc par eux fur
le champ, ii fut donqucs quellion d'enuoyer jufqu^s à
Ghamberi:mais i'executeur dulieu , entendant ce qui
cftoit auenu a l'autrcn'c voulut iama.s dcllogcr.On i'a-
uifa dcs'aàrtifer au colonel d"S Keiftrcs cftâc pour lors
en Hedmontvle priant de prelter fon exécuteur. F nten-
danc la quaii;e eu perlonnage , prifonnier pourfaitce
religion, fie rerponfe qu'il ne le preftcroit point pour ce-
Ja,mâii bien pour toute auire exécution. Auint dôc que
quatre brigans furent condamnez &. liurez audit cxecu-
teurj'equel deuoit puis après chancr leurs charongncs
au heu du dclid : citant an toutefois que l'vn des quatre
ayan.L alîifté à celte exccu-ion de !es complices, auroit U ,
vie lauucpourueu que dclormajs il fi; l'orHce d'cxecu- ,
teur,erpciant le parlement lui faire faire fon premier eC.
lay en la perfonne du condamne, dot auons f jic mction.
L'exccunon fjiie,& les trois corps chargez suet ccqua-
triel.me b;igand,& deux archers du preuoft, rcxccuicur
ayant eÛé pratiqué en la ville, moyenât quelque fommc
de deniers, fit li bien auec ce quairielnie , dontil failbic îo
défia fon valet, qu'cltans les archers en vnc tauerne,il fe
fouua; de forte que le parlement demeura tout confus,
& le perfonnaqe dont clt qucition toufiours prifonnier.
Ce peodant voici venir la paix,par laquelle lcpays,hors
mis
ér memorahks. loii
mis certaines villes , deuoiceftrerenduauDucdeSa-
uoye ; ce qui apporta vn grand mefcontentement &: re-
muement à Turin. Sur cefte nouuelle leprcfidcntBi-
rague fut tellement foUicité de deliurercepauure pri-
fonnier , qu'il voyoit lui mcfme auoirefté tant de rois
prefcruédc lamortmiraculeuiemenc , qu'il enioignic
au geôlier de lui laifler vn iour la porte de la prifon ou-
uertc&luidireen l'oreille qu'il fe fauuaft. Aquoyne
faillit le prifonnier , fe retirant au pays d'Angoulmois
d'où il tlloit.H«|^<^e France^fùtii Charles iXMu. i 4.
En ce mcfme temps & lieu , Alexandre Guyotin , do-
â;eperfonnage ayant tcfuté bien amplement les blaf-
phcmes d'vn malheureux hérétique, nommé lean Paul
Alciat, ennemi de la faindle Trinité, des perfonnesea
vne feule eflcnce diuinc , quelques elprits légers irri-
tez décela firent en forte qu'à la defpourucuele fieut
d*Au(fun ( lequeldepui5 àla iournee de Dreux^fe don-
na fi cruelle efpouuante , qu'il i'enfuic iufques à Paris
fans regarder derrière foy , puis mourut de dueil fe re-
conoifl'ant ) acompagné d.s lyndiques & fe^gess auec
quelques foldats, eftant entré au logis d'Alexandre , le
fâifit. Mais auint que l'ayant mis à la porte entre les
miins des fergens & lyndiques , & eftant remonté auec
le reftedela compagnie pour viûter la maifon, iltrou-
ua au grenier d'icelie les liuics d'Alexandre , & furce
criaauxfyndiqucs qu'ils montaflent.L'vnd'iceux mon-
te au licu,& voyant ces liures,s'efcria fort haut(de ioyc
comme il ert à prefumer , ) à ceux d'embas qu'ils mon-
tafl'cnt.Dontauint que ceux qui eftoyent à la porte , te-
nans Alexandre , & cnidans quclà haut on fift quel-
que effort aux fyiidiques y coururent aufîi : donnans
parce moyen franrhife au prilonnier , quinefailhc
de fe fauuer , & ayant de bonheur rencontré quelques
amis fe fie mener evA vne hoftellerie hors la ville , fei-
gnant venir de delu»rs, où il fr mit a fouper auec les au-
tres,à eau fc qu'il cfiou de fia tard Et côbien que bien toft
après d'Auflunen pcrsôneauec les foIdat$(roit qu'alors
à caufe du changement , il cuft acouftumé de vifîierlcs
holklkrics, fou qu'il cuUdcfcQUuert quelque chofcdc
55 %
jpî i Hilîoi res admirables
ce qui cftoit auenn) vinft au logU mefine où cftoit Ale-
xaiiLire à table comme les aucri^s , iaifam bonne conic-
ninc'oilnc tue lamais rccoiiu : air^lc lendemain fe ren-
dit dedans Moi:tcalier,& a vefcu fort long temps depuis,
el^anc mon en Champagne, l'an ijSi. EnUmefmeHijl,
//«. 14.
s ED LTl OnS en EJ}ague CT- en Stcile.
CHarles cinquicfme eftant fur le point de partir
d'Efpagncpour venir en Alemagne , toit aprc ion
cicition fil alfembler les cftats du pays ,& par l'auis du
fîeut de Cheuresfon goauerneur demanda de gran-
des femmes d^ deniers aux Eipngnols , la plufpartdef-
qucls , fupport^'z par la nobLlfc, refuferent ce qu'on re-
qucroic d'eux:& comme il auient ordinairement en tels
afaires, plulîeurs villes de Caftilic ne ponuant porter
fi violente exadion , fefoufleoerent en aimes , incon-
tinent après le départ de l'Empereur. Les villes e-
ftuyentdcfchirees de fûdtions ,& bandées iesvnes con-
tre les autres : car vne partie delà nobleffe lenoit le
parti de l'ciDpercur , l'autre Ibuftcnoit le- peuple. Les
coniurez auoyent délibéré (à ce qu'on dit ) de ne laiffer
l'entrer l'empereur en Efpagne? à caufe de ion mauuais
confeil, duquel ils fc plaignoyent fort , &d'enchafrer
tous les Princes , afin de le cantonner & mettre en ré-
publique. De là s'cnfuiuircnt de terribles rauages Se
laccagcmens en diuers lieux. Antoine de Fonfcque s'e-
ftant rendu roaiftre de Mcdme dcl Camp , laquelle s'e^
Itoit reuoltee de ^obe^fl^^cede l'cmptreur , y mit le
feu.dont s'enl.iiai' vn merucill.ux dcgaft , àcai.le des
grandes richclTcs de celle vi,le-la. Siquelqu'vn entre-
prenoit dci'oppofer, cant peu que ce furt,à la fureur du
peuple, ileltoit incontinent exterminé : bref perfonnc
n'ofoit dire mot. Les princes & grands feigncurs ayanf
Communiqué auec les villes , qui ne s'c:ftoient point
fouikuecS) voyons ^us la douceur enâammcroic la pU-
yc
e^ tnetnorMesl r or 5
jrcdc ce mal public ci>-UeudeJ\'ipaircr , rcfolurenc de
prendre les arme s> ^ cnuoyercin demander fecours aa
roy de Portugal , comme aufii firent \t% peuples reuoU
tcz,aperceuani bien cju^onvouloicleurcoqrir fus. Ce
roy retufa de (ccourir le peuple, &enuoya argent aucc-
que de l'artiiJcne aux princes. Finalement ily eut ba-
taille donnée en laquelle les prirjces demeurèrent vi-
éiorie/UX,& furent prins les auteurs de i'efmoiion, d ne
les principaux furent lean de Padille , Antoine cuefquc
deZamore, Pierre Pimintellc, Francifquc Moldonad,
quelques gentilshommes, &. mtfmes des roturiers que
le peuple auoit efltuez aux honneurs. lis fuient tous
decapitcziSc k rtlUdu peuple reuenant à fonde' oît ob
tint pardon. H/r/(?;r£'f de Charles le Quint ^ CT* de nojire temps.
Quant aux feJitions de iiciîe ,il en va ainli. Apres
la mort de Ferdinand d'Arragon , roy d'tfpagnc, & de
Sicile, ces deux royaumes cfcheuicnt à Charles , petit
fils de Maximilian prcmier;&quelque temps après efleii
empereur. Alors elloit viceroy de Sici'e dcm Hugues de
Mor)icade,reigneurErpagnol , lequel taifant la mort
de Ferdinandide peur que les feigneurs & le peuplc(qui
ne'raimoyent gucres a cauledc fon gouuernement
pafle)nc machinaflent contre lui, tafcha de fe faire con-
tinuer en fa charge par le nouueau roy. Mai' ccftc pra-
tique ne peut eftre tellement manicc , que fes aduerfai-
res n'en fentiflcnc le vent. Dcflors le peuple de Paler-
me,où dom Huguej faifoit fa refidcince , commença à
dire que le gouuernement du vicercy eftoit amorti.
hts chefs,qui fouftenoyeni le peuple cltoyét dom Pier-
re de Cardonnc comte de Colifane , Frédéric d'AbatcI-
Ic comte de Camerate , leronyme Filingcr comte de
Saindt Marc, Simon Vintcmille marquis de Grace,Mat-
thieude fainifle paix marquis de Licodie , au perc du-
quel dom Hugu s auoit faid\: trancher la te fie : & plu-
fieurs autres feigneurs «Si gcmils-hommes du royaume.
Iceux fortis dePalerme firent vne ligue, & s'en allèrent
la confermer à Termiui, fous couleur de faire les obfe-
qucsdu roy defund. Le viceroy ne I cachant de quel co-
ftctourncr,&eftant fur le point dequincr la Sicile, fut
65 3
10 T 4 Hifloires admirables
admoncfté par Anthoine de Moncadc comte d'Adcrno*
& par les trercs & autres feigneurs, de ne bouger, & lui
lindrenc main forte , après l'auoir fai6l proclamer vice-
Toy. Sur cela luruincvne (édition à Palcrmc , cfmeuë
contre les Iuifs,parles fermons d'vn certain cordclier.
tellement que le peuple > s'eflani acreuè la licence par
tclmauaais moyen, recommença à délibérer de don-
ner congé au viccroy , lequel pour contenter chafcun
abolit vn tribut noaaellemcnt impofé far les firines.
Mais cela ayant peu profité , l'on eftimoit que les let-
tres de C ha' les, par lefquellcs ildeclaroit dom H igues
viceroy,apaifcroyent tout : au contraire , le peuple a-
yant oui la letlure d'icelies Te mutina d'auanragc , di-
lant tout haut que ce n'cftoit point vn ambafladcur da
roy , qui auoit apporté ces lettres , ains que dom Hu-
gues les auuit drellees , &apofl:c quelque valet pour les
prefenier. Quipisell , comme onreuenoit du palaif
Vu quidam de la troupe demanda audacieufement au
gouuerneur de la ville , qu'illui monftraft vn peu les
Jettres du roy. Le gouuerneur voulant reprimer l'info-
lencc de ce matin, lequel demeurant impuni, c'eftoit
vnc oauerture à vne licence plus defbordec , lui mit la
main fur le collet po'jr le mener en prifon:mais l'auttc
commence inconrin;.-nt à crier à l'aide, & lors fes c>im-
pagnons fc ruent fur le gouuerneur , qui eut beaucoup
à faire à fefauasr auec (es gens, & leur laifTa Ion prifon-
iiier, Vn peu après que ce bruit fut comme efuanouy,
lurlc fuir, vne troupe i'cnfans , fumis décent hommes
acoull: ez à la viliageoife,vindrent au palais, crians que
dom H igu;s euft à defloger de Palerme, autrement on
le tueroit.II demanda deux iours de terme, mais en lieu
de les lui accoder, furies deux heures de nuicl ils !c
vicnent alPii-lir , en g-ande troupcà pied , & à chcual,
tellement que lui voyant toutes chofes dcfelperees , fe
def^uifa en valcr,fortit par derrière , & fe fauua au port.
Ceux qui eftoyent au palais auec lui firent de mefme.
Les foldats quiy efioyent en garnifon , cntendans que
le viceroy s'efloic retiré pillent tous les meubles , & a-
yans
& memcrahles] i o i y
(yans ouuert les portes chafcan d'eux fc retire en Ton
iogis auec ce butin. Le peuple entre dans le palais & ra-
clele refte. Puis ielédemain au marin ils ch^fTent Mel-
chiorCeruicr inquiiîc-ur de laf y. S: !e contraignent
des'embartjcicr. Le viceroy ayant demeure deux jours
au port monta fur mer, & alla à Meffinc cù il fut b:cn
rcceu& honore comme viceroy , & de là eRriuitaux
villes pour les exhorte: à leur deuoir. Mai<i la plufparc
C cireprees cjuelques villettes autour de McfTme ) fe
ioignirent à ceux de lalcrme, entreautres ceuxdt Ca-
tanejSyracufe.Tcrmini, D^epane , & des aurres villes,
refufcrcnt les gabelles, 8c aboirent tout , perfecuterent
les partifansdu viccroy ,& eflejrent des gouuerneurs.
Les feditions continuoycnt à Talerme , auec pillages &:
faccagemcns.Les principaux de la ville fupplicnt là def-
fus \&s confédérés qui eftoycnr à Tr rmini,de ne permet-
tre toutes chofes aller aiufi en confufion. Apres quel-
ques délibérations, par Taduis du cote de Coiifane , qui
auoit fort grande authorité,pour les belles & excellen-
tes parties qui eftoyent en lui, ces feigneurs fe ttanfpor-
tent en diligence à Palerme,où ils apaifent toutes cho-
fes. Cela aduint en Pan mil cinq cens feize.
Apre sauoirainfî ,ipoinréles afFaires,eux & route
la ville enuoyent vn ambafTadcur vers leroy d'Efpa-
gneiCommeauiTi fit dom Hugues , pour l'aduertir de
ceqoieftoir palTé. Cependanr afin de retenir le psys en
bride » les marquis de Licodie & de Grâce furenr efta-
blis gouuerneurs de rifle,donv ils s'acquittèrent fidèle-
ment.Leroy Charles. qui eftoit lors en Flandre^, ovinc
ces nouuelles defpefcha incontine»t vn feigneur de fa
cour, nommé Didaco Aquila , pour aller fçauoir par le
menu comme les chofcspalloyenr. Iceluyarriné à Pa-
Iérme,fii entendre le tout particulièrement au roy , le-
quel en.ioya Tertres par lefquelles dom LLigues cftoit
déclaré viceroy. Alors Didaco appella le comte de
Coiifane , & les autres feigneurs à Palerme , Scieur
ayant fignifîé l'intention du roy ils déclarèrent eftrc
prefts d'obéir : mais qu'il eftoit beîoin que le roy
entendit le mal quipourroit furuenir li dom Hugues
SS 4
I o I ^ HiHoires admirables
dcmcuroit en cpftc thaigc , afin d'y pouruoir par quel-
que bon moyen. Doni Ch-irlcî cftantaducrii,fi: venir
vrr$;oy Ici -cintcsdcCoiilane & de Camjtafc auec
Icviceroy, Icfquc . plaidèrent fort & ferme en fa prc-
fence.car Dom Fougues charg:*oii les comtes d'eftreau-
thcufi de la (édition de Palerme , euxau contraire di-
foycni que fa tyrannie» fon auaricc.fes cruauiez& pail-
lar.ijrcbcneft'.>yent la leulccaufe, & défendirent à boa
clcicnt ia ville. LàdefTus, le roy ordonna que ce qui
auojrcltcolté du rcuenu public en ces tumultes feroit
remhou/ le pa- ceux de Païenne , & que les ainhcur$ de
Jai.dirion inourroyent par la main dubourieau. Pour
J'exccationdecefta'nrft, Hcft.«r Pignatclle comte de
Mont Léon en .aiabrc fur efleu chtf des armées, te
gDUuerneur de. Sicile, dom Hugues & les côtes demcu-
jansauxanefts. H (flor arrii;a a Palcrmc le premier
lourds May l'an milcinq cens dixlept , empnfonna
vingt bou'j'^eois pour les inrcrroguer , & faire mourir
puis après , caffa les gouucrncurs que le peuple auoit e-
(IrLis, remit les gabelles, &:fi( payer ceoui elK>it dcu, re-
legaàNaples es marquis de Grâce , &dcLicodier&
ayanv fndt '.{feiiibler le peuple à fonde trompe, leur fît
publier le pardon du roy. Combien que le peuple fut
joyeux de ce qu'on l'efpargnoit, toutesfois plufîeurs
commencercni à fc mefcontenrer de l'emprifonncmenc
des v.ng bou.gcois,&du trai(flcmenifai6t aux comtes
& aux xMarqiiis.
De ce mcicontentement s'enfuiuit vnc nouucllc
con'piranon v-onrre lesadhcrans de dom Hugu s , de
laqiiel'c cftoi' r hcf l'an Luc Squarzalopcqui l'an pré-
cèdent ai.y»it cf^é con(ul ou lurat de Palerme. QueltpieS
geacils-honimcs , aflauoir Francirquedes Barres, Bal-
ihafar Septirfme , Chnftoflc Bcnoilt , Altonfe Rofe,
Pierre Sparafore, & autres : item certains ariifans , no-
tamment faqiifs d'Agrigente, Vincent Rizc ferrurier,8C
Vinccr Zazare, fe trouuerenten certain lieu , où aprej
s'eftfe plaints de i'ertat du royaume, rcfolurcntde tuer
en vamcrmciour lesconfcillersduroy , <jui font les
iugcs
é* mémorables- i oiy
iugcs en parlement, & îc maif\rc des comptes da royau-
me,enferable /a uocat du roy , & tous les parriiar.s de
dom HugUfs.Ccla ;'c deuoic exécuter vo iour '^e fcftefo
lcnnclle,ic yingt dtaxiefnnedc luiJct ,au g and lemplc
de Palcrme,duran: vcTpe^ , ou les defîir.cz a la mort fc
trouucroysnt pour acorrip^gn rie gouu- 'neur.luiaant
la couftumc. Mais les coniurcz nciceurcnt trllcmenc fc
contenir en idxîzni leurs aprefts.cjuequci -ue biuict de
leur entfcprifc recouruft ça&là. toutesrois pour cela
l'on nr defcou'Jrift nen,&: le comte ae Mont Lcon gou-
ncrnear de i'Ifle n'y p.enoit pas autrement garde. Mais
il aduirtau matindu mur ajfigr.é, qu'vn cordeiier àqui
Vincér frère >'c Chrîftr^fle Bencilt enauoit dit quelque
chofe en confeffiô,vint defccuurir le complot au com-
te,lequel en lieu de ft rendre maift.'c deflorSjCoromeDça
â$'eÂFfaycr,&fcrentr enfermé dis !e chafttau aoec tous
les confeillî-rsï Le capitaine de ia viiles'er.t. ir d'vn au-
tre coitcJailTan: Ton luge ponr lieutenant Cela donna
Joiûr aur cô'urez d'entrer en ia ville , fc pourmener par
les rues , aller au g. and temple, ou i!s tuèrent vu des fc-
crerairesde la villf.-puij continuent aie pourmener, cn-
cores qu'ils ne rufsétqueiringt deuiOr foit que Squar-
zalopecaft appréhendé le danger ou il s'eftoit mis , ou
pour autres raiions, il tomba de Ton chcuaiea terre cf-
uanoiiy,& demeura comme mort fur le paué l'eTpacc
d'vne heure. Finaicraenc ayant repris fes e;prit5 remon-
ta,& aucc fes compagnons vint a la doaanc, appellant à
hau^e voix le comte de Mcni-Lcon , le plaignant que
l'on auoitf'-i: mourireo Flandres les comtes de Colr^
fane ficde Camera:e,defqueh ils voukyent faire la ven-
geance , & d^^mandoyent qu'on leur iiuraft les " oâBciers
du roy,q ji rtoyw-nt aurhcurs de ce ma!. Le comte de
More Léon fir Muelqui:* eicurcs,& cn heu de defcendrc
en bas poarefcarrer cefte petite troupe , parioit dVne
haute fcncf'lre. An moyen dequoy le peuple voyant que
perfonne n'auoit faiâ; teftc aux coriurcz, commença à
s'esleuer auffijôd i' ûrâi faire quelque nouueau rauagc,
eftit défia noi:, court aux armes, alT'auît le lieu ou eftoic
Iscomicde Moni-Lcoo, l'en lire horS;ôcrcQUoyccaTn
I o I 8 Hifiotres admirables
autre palais du roy, p-jis ils comincnccnt à fouiller li
dedans , ma^acrcnt Nicola«Cannarelle& Ican Tho-
mas Pâcernion confeillers du Roy.iettent les corps tous
Buds par lesfeneftres en lagraod'cour,qui furent reccus
fur les pointes des Kalebifdes& piccjues de la popula-
ce la amafree. Apres cela ilsfc ruèrent fur Giiard Bona,
«laiftre des comptes, lequel le fauuoit, cftant dcrguifé
ca villagcoii) , lui coupent premièrement les parties
Jionteurcs,& le mafTacrcnt , cela faidt butincat & facca-
gent tout ce palais. Le lendemain & (quelques iours fui-
uanscefte fangîante tragédie continua. Ayans cerché
deux lours durant Priam C^pozc aduocac du roy , fina-
lement ils le irouucrent caché en la maifon dVnc pau-
urc femme, ie crainent par toute la ville , & lui donncnc
vnc infinité de coups de dague deuant & après fa mon.
11$ coururentîSc ccrchercnt aulTi fort foigneufemenc vn
iurifconfulte de Catane, nommé Blafque de Lanze , qui
auoit plaidé pour dom Hugues contre eux deuât le roy,
& ne le trouuantpas au cloirtre & conuétde faincl Do-
miniqucoùl'on penfoit qu'il ft-ft caché , pillèrent les
meubles plus précieux dedom Hugues,quele prieur de
ce conueni auoitcn garde,mcttcnt le feu en l'hoftel &en
Ja bibliothèque de Vafquc. Les partifans de dom Hu-
gues fefauuerentàgrandedifficuîté.
Si toft que les autres villes de Sicile oiiyrcnt le bruit
de cefte tempcfte, les faiî^ions commencèrent- à s'y rcf-
lieiller,&: y eut de terribles remuemcns à Catane , Drc-
pane,Agrigence,&Terminifpecialement , lefquelles fc
Jiercnt auec \cs coniurez, & commenceront à machiner
Vn nouucau mefnjge. Ceux de Mefiîne ic contindrent
fagcmenc Mais quant àPalermetouty eftoi: renucrfc>
pour le dire en vn mot , n'eftant loifibleà homme d'y
conuerfer fcurement , s'il n'cftoit meurtricr& pillard.
Les coniurez auec leur fuite commcnçoyent à regarder
au moyen de fc maintenir, preuoyans qoe lescKolcs ne
pourroyct pas toufiours demeurer en tel eftat. Pour dôc
arcircr le peuple à leur laiffer quelques places f.)rtcs de
la ville, ils adîgnct vne aiïC-blee de ville ôc côleil qui fe
dcuoittenir dutcplederAniiouciadc,le X.ioiir de No-
uera-
^ memorahl&i' lo 1 9
Uembre. Or quelques gentils- honimcj, a fçauoir Pôpi-
le Impériale , Frinçifqiie ■& Nicolas de Bologne frercs,
Pierre Affli£t,Alfoniè Saladin,& leroTme imbonnesir-
ritczde telles confufions,deiibercrentenrcmble detucr
Jcs aucheursd'icelles , & aprcsauoir fan troauer bonne
Jeur encrcprifeau comce de Moni-Leon , & au capitai-
ne de la ville , concluent, de faire leur coup en ccfteaf-
femblec du hiiiftiefme de JNouembre. Mais le comte
cuidaderechcf elbe caufe d'vn nouueau mal, car la peur
aaoit re'lement occupé tous fes fens, que crai^nât quel-
que (in ftre accident pire que le premier , il quiua Pa-
lcrme,& s'enfuit à M<:lïinc. Toutes fois Squarzalopc,Al-
fonfe Rofe , & Chriftot^c B^noift courans à leur ruine,
fe trouuerent au iour affigi.é au temple , & cnniron ITx
cens hommes de la ville auec eux. Les autres s'y trouuét
aufli auec ceux de leur entrepri(e,& côme le prcltre cô-
méçoic à chanter fa mcflfe, Nicolas de Bologne defgaine
rcfpee,couri Çus à Chriftolle Benoift, & le tue. Pompi-
Jcs'adreire à Squarzalope,& le fentancarmé d'vn corps
de cuiralFcmet la main au poignard, Sciai coupe la gor-
ge. Pierre AfHiifl delpefche auffi AlfonfeRofejGui c*
ftoit vis à vis de lui. Les autres gentils-hommes Sccon-
fédérez ayans les efpees aux poings, donnèrent telle
fr.iyeur à»out le peuplelà aircmblé , queperfonne ne
fie effort pour venger Squarzalope & les liens. Au for-
iir de là lis rencontrèrent VincentRize l'vn des prin-
cipaux feditieux , lequel fut incontinent mis en pièces
furlepaué. Francifque de Barres fut mené prifonnier
au chafteau. Pierre Spatafore fe fauua hors la v iîîe,&:le
rfftede cefte bande le fuiuit incontinent. Lecapita?nc
ayant donne aducrtillement au comte de Mont-Lcon
comme les chofcs eftoyent palTces , icelui amalTaà
N.iples mille cheuaux , &: cinq mil hommes de pied,
puis vint de Mertine à Kandats , où il fie mourir grand
nombre de feditieux. De là il tira veis Catane , fit fer-
mer la porte , puis donna trois coups d'eCpee contre,
pour fignifier qu'il y entroit de force. Trois gentils-
hômcsy furë: décapite z.vingt-deux bourgeois & arti-
fans pêdus.pluficurs exécutez en cffigie,& quelques au-
tres banni*. Ceux de Tcrmini ne reccurent pas racillcu r
toio Uijloires admirables
traitement. A. Paîerme, on trancha les icftcs de {trancif-
^uc de Barres. de Bar chelerni Squarzalopc lunfconlul-
le frère d- Icaii Lijc,& de lacque» Squa zalopc ; & leurs
maifonsfurencrafces.Ily cneuc trenteaafes de pédas.
"Lts foldats Efpâgnois demeure ce quelques mois à Tcr-
miny & Maifal.d'où, qpres auoir mangé le pays , ils fu-
rent retirez par l'empereur , qui voyant les fcdicions c-
fteinftesjdeliiir.i & T'eouoya les comtes de Colifane &
de Camerate, cftablifTant le comte de Mont- Léon vicc-
royde Sicile, & donnant riches recompenîes àPompilc
& a fescompa^nons.Ces tumultes durèrent trois ansSc
demi.Toftapres dom Hugues de Moncadc fut ordonné
•mirai deSicileJ'an mil cinq cens dix neuf, & au mois
de Décembre alla â Marfalaucc douze mille Efpagnols,
ou il tint bonfix mois, & ayan: perdu la piufpartde fon
armee,Ia refit de quelques bandes d'Italiens, & en l'efté
fuiuanr aflaillit l'Ille de Gerbes, & contraignit les Inlu-
làiresdc venir à compoâtion de douze mille efcus de
tribut annuol cnuers l'Empereur. Peu de temps après il
eut le gouuernement de Naples , & durant le (îegc des
François, fous lachargedu fieurde Lautrec, eftant allé
aucc fa flotte pour desfaire Us galères de Philippin Do-
re, qui eftoitàlafoldeduroydeFrance, il fut vaincu &
tué au combat.l'an mil cinq cens viogt-hui6t. Dô Pier-
re de Cardonne comte deColifane fut tué en la iournec
dePauie.
Quant à dom Frédéric de Patelle, comte de Camera-
tCjfafîn fut plus lamentable:&pourcc que lesaccidens
en furent notables & diuers , nous en dirons quelque
chofe amplement, & fuiuros crqu'en a defcrit Thomas
Fazel en ks décades de Sicile:duquel, comme d'vn fidè-
le & oculaire tefmai a , les choies fuf mentionnées ont
cfté recueillies. Quelque temps après la pacification
des troubles furmtntioanez , on defcouunt en Pan mil
cinq cens vingt trois vue autre conjuration contre
l'Empereur, roy de Sicile , de laquelle les commence-
inens,la pourfuite.Sc la fin fureni tels qu'il s'en{uit.Vift-
çeat,Fredcric,& François Imperiile frères geiils-hom-
icc£ de Palcrme, auoyenc elU bannis de Sicile à fçauoir
Via-
& metnorablesl i o i i
Vincent à Frédéric, à caufc de la fcdition de Squarzalo*
pe,& François , pour quelques coups d'erpec donnez a
vn auirt gentil-hcmmc. Ils pouLoyent obtenir grâce
aflezailément, & pour y parvenir ils le retirèrent a Ro-
me vcis Cefar ImperiaJc leur ficrcgentil homrr.e delà
mailon du Caidinal Colonne , cipcrans s'aider de fon
confcil m lecourj , pour auoir dcUbcré de leiourner au
pays. Mais ce moyen ne fucceda pas>&. luf ce iii ie del'pi-
tcrent contre l'Empereur , lufqucs à complottcrde met-
tre la Sicile es main- du i oy de F-anct-, a l'aide de Marc
Aiuoinc Colonne, quiportoii \i:s arnues pour les Fran-
çois en Italie, au mclu c temps vindrcn. de )a coi.7r de
TEmpcreurà Kome, Nicolas Vincent Leofante, ihrefo-
rier de Sici e,ii Lan de S. Philippe ambc-fTadcur de Pa-
ïenne » iefquejs Vincent Jmptri<-ileauiraaifémerit à fa
cordeJe. 1 ous eniemble vont trouuer Marc Antoine,
qui lors eftoii à Rome,& refoJuentdi. faidtaueclui. Or
pource qu'ils auoyent faute d'argent pour ieuergens
pur mer 6l parterre, Vincentimperiale& Leofante foc
voile en Sicile, où ayans entendu la mort de Squarzalo-
pe & des autres l'edicieux ils perdirent le cœur, & fur
tout quand ils entendirent que le Pape Lcon dixiefmc
auoit quiitc le parti du roy de France pour fe ranger à
celui de l'Empereur, à rajfon dequoy Marc Antoine Co-
lonne s*eftoit retiré de Kome en vne fiene maiibn aux
champs. Mais quelques lours après, laques Spataforc
de Me(îine,l'vn des plus grands feigneurs de Sicile,eltâc
venu àRomCjCefar & François Impériale le defcouuréc
à lui,& le gaignerent allez aiicraent. Lors ils cotnmen-
cent à folhciter Marc Antoine , lui offrant Palerme 3c
Mefline villes principales de l'ifle. à i'occalîon dequoy
icelui efcriuit au roy Fraiîçois, qui auoit de nouutau re-
conquis Milan , toi promet d'alier en ccite entreprife de
Sicile pour lui, s'il l"i piaifoit. Cependant l'Empereur
pardonnai Vincent & Frédéric Impériale, qui retour-
nèrent à Palerme , où Ccfar leur frère les alla trouuer,
ayant compof^ auec Marc Antoine , & fit entendre à
Fredcriclbnfrcrc, authreforier , & àfonfrere lerofmc
Leofante, & à Gafpar Pipy ,cc qu'il auoit négocie. Le
J o l't Hijloires admirables
comte de Camcratc en oiiyi aulfi parler aa thrcforicr»
&y donna con!entemcnt,cc dit-on, clperant auoir par ce
changement la comté de Moiyce.quc ic roy Ferdmand
lui auoit prinfe & Jc.cnue.
Les choies aduancecs > par Taduis commun d'eux
tous, fat relolu que quand l'a; mer de. mtr du loy Fran-
çais aparoirtrou deuant Palci me, on mutineroic le peu-
pie, & lui feroit-on couper la gorge aux Efpagnols qui
y eltoyenten garnifon. Mais les afaires prindrent vue
autre rouit:c3r Mate Antoin:: viit à mou.ir fur ces cn-
iretai£les,ce qui iccula toiu , fi^ furent à recommencer.
Sur cela Cefai Impériale ellant de retour à Rome , y
trouua vn braue leune fcigneur Sicilien nommé Pyr-
ihus lu^nc , qui plaidoit pour le marquifat de Curtel-
ion. llluidefcouure l'entreprife aaec François Impé-
riale & laques Sparafore. l'atrirerenta leur l'gue,& en-
uoyent François vers le roy de France , lui orfnrPaler-
me,Meffine 6c Caianc. Françoisp'ruc ie duieune lour
de May, Tan mil cinq cens vmgr-dcux,acompagné d'vn
fccretaire du roy , d'vn feruiteur domeftique du Cardi-
nal de Volterre, duquel outre plus il portoit Icitrts ex-
prelfes. S'cftantprelcnréau roy il lui clf e la Sicii^'^de-
mande vnearmce de mer , fou' la conduite de quelque
fcigneur d'Italie , 5: crois mil el'ciis pour leucr quelques
fol ats. Le roy , lors emp^tché à cautc de 1j guerre
de Milan , rerpondit qu'il faloïc ditf.'rer l'exccunon de
ccfteen repnlea vnaucre temps , ôc fit bailler deux cens
elcus à Françcis pour Tes defpcns. Durant tes menées,
le viceroy de Sicile faifoit parer le palais de Palcrme,
poury tenir l'ulfembiee des feigf.curs, afind'anifci au
faidl des finances. Cclacfmeut le comtede CsmeraiCi
pjur gaigncr le cœur des Siciliens , de mettre en auâuc
qu'il taioit foulager le peuple de tant de gabelles , & c •
xigerqu,"lque chofe de ia noblelle. Le threforier Leo-
fante&':plu(îeurs fcigneurs luiaoheroyeot. Le viceroy
ayant de fcopuert celte menace afîîgna Paflcmblce à
Melîîne , où le comte de Caraeratr citant venu fut con-
fliiué prifcnnier auec Leofante , iv tous deux enucyez
à NaplcSjOÙ iU furent cftroidemenc refcrrcs. Comme
cela
& mémorables] i o i j"
^ela paflbit en Sicile , François Impériale cft envoyé de
Xome par Tes alî^^ciez vers le roy de France. Mais auanc
que partir il defcouure i'cntrcprife à vngcniil.hom-
me iien parent &. grand ami , ccftui-là à vn autre ami,
<jui tous deux fous efpoir ce grande recompenfe , vonc
dccla.cr le tout au duc de Selle amballadeur de l'Empe-
reur à Rome, François Impériale qui s'eftoit mis ea
chemin auec les lettivS des coniuiez, eftanc deCaàvnc
iournec lom de Rome, fut atteint par ceux que l'ambafi
fadeur enuoya apres»& lui citant amené confcfla incon-
tinent tout ce que dellus. Son ficreCefar ouïle vent de
cefteprinfefe lauua de vifteire. L'ambafl'adeur enuoya
Françi'is lous feuregarde à Naples , puis le fit mener au
viceroy en Sicile. Vu baftard de Vincent Impcriak ,s'e-
itant defguiié en payran,(ortit de Rome auani que Fran-
çois fuA emmené, &. alla percer les nouuelies aux con-
iurez à l'alcrme de ce qui citoic aduenu : lefquels s'en-
fuirent cinq lours auant que le viceroy eult receu les
lettres du Duc de S-: (Te : icel les vcuès il fe fit ame-
ner à Me/lîne Icihreforier Lcofante & François Impé-
riale , Iciquels confeflerent volontairement la confpira-
tioii , & nommeien: les complices , qui furent tous
stcrappcz , excepté Pyrrhus iucne& lerolme Lcofan-
te,& confclfercnt en la torture la coniuration. Par ain-
fi le d'Xleptiefme iour de May, Tan mil cinq cens vjngt-
irois , Fredenc &. Vmcent lu perial'- , Ican de fainft
Philippe ,&. laques Spatafove furent eftrangicz , puis
cfcarcellez en la grande place du marché de laind: lean
à MelTine. Quelques femaines après le comte de Came-
rate ayant cfté emmené de Naples » confefla àlatorturc
qu'il auoit confenii à la confpiration , & tait tuer vn des
threforicrs cie l'Empereur fur le chemin de Rome: mais
comme on le menoit au fupplice il déclara à Ton con-
fclfeur , que Ce qu'il auoit confeflé de la confpiratioti
n'eftoit point, & qu'il le cntoit innocent de ce fair. Ce
nonobftant,encoreque le confcfleur declairaft cela au
viceroy , & au peuple > le comte euft la tefte tranchée en
ia place de Millazo : le threforier Leofanie & François
Impériale furent citranglcz Se cfcarcellez le lo. iour
foi 4 Hiftokes admirables
de luillet , & peu de ccmps après vn autre fcigncur parce
du Comce di Ciaicraie fui auflî dccapirc : 'es certes de
tous mites en vue 1 interne au lairte du palaisdu roy à
Palcrme,& leurs biens confilqu'Z. Pyrrhus luene fut
prins fîualem'. nr,à: torcuré en toutes fortes , mais pour
auoireubonne bouciic il efchappa. Telles furent les
tcmpeftes uduc TEmpetcur vid fou royï:imc de Sicile
rudement a^i'c.des l'entrée de Ton gouucrnement.
Quelques acmees auparauant,à fçauoir enuiron l'aa
1 f o 6.y CUL vnr, feduion cftrange el'mcue àLifbonnc,par
lafolie Se fofcenerie de là pupjlace ; qui fur vn déluge
lequel emporta prelc|i)es tous les iuifs qui s'eftoyct faits
chreftics. La chofeauinr comme s'eufuit. Vne bônc par^
tie de ceux de lavillceftoyenrablen";, àcaufedc lapcfte.
Auinten ce* iours-b.que pliificars François, Fiâmes &
Alcman.ç,arriuerécau ponde Lifbonneauec leurs mar-
chandifes. Le d xneufiefmc iour d'Auril, pluficur» de
ceux quieftoyentreltez dedans la ville fe irouuercnt ea
l'Eglife de laind Dominique,poury ouyr mefle. Au co-
fté gauche de lEgiife au regard Je l*cntree,y a vnecha-
p£l!e furnommeede Ii;rus sfortreaeiee des Porcugaif.
Sur Taut'-l de ccfte rhaprliey a vn cruccfix , la pliyc du
cofté duquel eftoitcouuerte dVne verrière. (Caciques
vns,pardeJOtion , iett^ns les yeux fur cc/te verrière, fe
firent croire que quelque clairtéen fottoir. Alorscefuc
à crier miracle , & dire que Dif.-j monltroit des tefmoi-
gnages de faprclence. Vn Iu!f,n^aguerefaic chreltien»
fctrouuant lâjOiatoui haut qu'il y euft aucun miracle,
&qu*iî n'eftoi: pas vrailemblableque dVn bois fec for-
tift telle fplendeur. Or combien que pliilîcurs àc% alli-
ilans doutafTcnt d; la vérité de ce miracle , toutesfois
iln'^ftoit pas tcmpsoi ne conuenoit à vne cclleperfon-
ne de tenir cf lang.ge , pour perdre fa peine à vouloir
arracher de i'; nrendem ^nt de tant de gens vn erreur qui
ycftoitdu tout &t'-cs fermement pointé : la populace
donc» qui eft d'vn naturel impétueux ik farouche, & ra-
llie hor=: de foi Ions 'e be.iu p etexce d.* religion , oyanc
VB luif ni:r lemraclc :ro.'>ainé.c.'»mmêcea mumurer,
appcUantcclt homme craillre, raerchant,apolUt7enne-
ffii de
C^ memorahlesl
ioiç^.
mi dcleftablc de lefus Chnft , & digne de cruel fuppli*
ce. Apres que plulîcurs rearcnt aiiifi deichiré de leurs
langues , la multitude efcumant decholere fciettcfur
lui, lui arrache la barbe & les cheucux , lefaboule > Is
iraine tn la place dcuact TEglifc, rafïomme , le defchi-
re, & allume vn grand feu , ou le corps morieftietté*
Tour le rcfte du peuple acourc à celte mutinerie. Là va
certain morne) quiauoiclaparoleenmiin , firvnf^r-»-
mon , où ilenflammayiuement les auditeurs à faire U
Vengeance de Tmiure qui auoiceflé faifteànoftrc >ei-
f ncur. La popuiacc , la <ie (bi-mcfme aflVz t sbranlcc,
fut letcee dutout hors d. sgondi par vnc telle haran-
gue. Outre plus deux aucics moines empoignèrent 66
clL^uerencen hautvne croix, crianstout haut rengcan-
ce, exhorcans le peuple à cifLliop.de lang, & à Tcxter-
mination totale des luifs, qu'ils appeiioycnrmefchan*
te nation. Les François & Alemans fautent de leurs na-
ui^s en terre, & le ioignent aux Portugais , qui auoyenc
ja commencé le malTacre. Us eftoyenc cinq cens en Tc-
xecution des cruacez fuyuantes. D'vne fureur & cruau-
té dcfefperee ils le ruent comme dogues afîamez fur \ts
miferablcs luifs, coupent la gorge à vngrand nombre,
& les traînent mj. morts dedaiu le feu. Pour beforigner
pluscommodémcnr on auoic ailuiné diucrsfcux en la
place oùleluif mefdilant dumitacie eltoit en cendres.
Ï^QS valets, crochetteurs Scmarmicrs apporroyenralaî-
gre^>cut lebois de toutes parts , afiii qu'il y euft des
flammes à fufHfance pour rexecunon de leur rage. Les
huées des femmes,Iesfupplicationsdes hommes, & les
cris de tous eltoyent fi pitoyables , qu'ils eufTcnt peu
flefchiràcompallion la cruauic mefme. Toutesfois les
maflacrcurs cftoyent tellement àcin^vC'Tf-z &defpouiI*
lez d'humanité, que fans aucun ci'gardd'aagc ni de fexe,
ils meurtrifibyeni hommes. femmes, & enfaos.icllemct
queceiour lails tueront &bruflv;ient plusdecinq certf
pcf fonnes luifucs. Le lendemain , pourcc que le bruit
de cette fanglante brucheric vola de tous collez , plus
de mille payfans accourent comme enr.igci dedans
Lisbonoe, Se leioiguent aucc les meurt i ici s daiour
TT
toi 6 Hifloires ^dmirMi
rreccdcnt.Lors ce fut à recommencer. £c d'autant que
les loif$,clperdus de frayeur , s'eftoyent enfermez ca
leurs miifonSjCes mutins enfoncent \c^ portes , elgor-
gent cruellement hommei,fcmraes.&: filles,efcar bouil-
lent contre les parois les telles des petits enfjns , tiai-
ncnt ks corps morts, ou encore rclpirans , pour le» ict-
tcraufcu. l*lufieurs bleffcz de diucrfcs playes , & ne-
antmoins cncorevmaok , cftovenrainfi bruflez. Ce
iour , la miferable nation luifue auoic rcceu fî grand
coup de marteau lui la telle « qa*ils ne pou aoy en t fe la-
menter d'vn tel raaage, m déplorer leur miferc. Quant
à ceux qui demeuTO) eut cacheZ)ils n'ofoycnt foufpircr,
encore qu'ils YllTenctranur ao feu 1-urs pères ou Icurf
cnfans :& la peur leur trahlilfoit tellement les cœurs,
«jue les viuans relTembloy- nt à d.s morts. Cepcnaant
on laccageoit les maifons , d'où \zi meurtriers em-
portoyenc ror,l'argent , & les meablcs plus précieux.
Lç% François chargèrent leurs nauires de force m ar-
thandifes : & ces pillages furent caufc que plulicur»
luifs efchâppcrentce iour-la. Au rertc, la fureur tranf-
porta lellement ces cruels feditieux , qu'ils olcrent en- .
trerintolcmmenr é; eglifcs , pour arracher & tirer
hors d'icellcs Us pc is cnfans , ks vieillaids,*: k-5 ieu-
nés filks , quitmpo^nc yen- les. lurels, les croix, &
Je$ images ti'*«î fi in£lb , en ciant mifeucordc: puis les
malTacroventtoocà l'h-u'c, ou les icitoycnt dedans le
fsu. l^luiîeurs qui auoycnt pou & a^^parcnce de luifs
fc trottuercntlo s en eXtrcmt danger : mcfmes quel-
ques vns furent tuez , autres blclkz en diucrs endroits
de leurs corps, auant que pouuoir vcnfic.' qu'ils n'a-
Uuycnc aucune acointanceauecques les luifs. Ai'Cunj
qui portoyent inimitié à d'atjtres * en ic» rsncv^niranc
iiefai(bycntquccricr,au luif , & lors ils cftoycni fac-
mentez , fans qu^'on leur donnaft ioifi* de rclp» nd:t à
la calomnie. Les M-îgiftrais n'au jycnt pa> la har-
diclTe de s'oppofcr à la fureur de cefte populace. Ne-
antmoins beaucoup de gens de bien faaucrentla vie
aux luifs qui ferccircreni cher, eux , & les gardèrent
coaimc cwx mcfmcs « leur donaans moyen d'cfchap'
é* memoralles. i o i 7
fer& te retirer ailleurs en lieu plus afîcuré. Toutesfoii
£c deuxïefme iour le nombre des tuez monta à plus de
mille. Autroificfmeiour les maflacreurs , altérez de
fang humain, forciient es places & rues pour continuer!
mais ûs ne trouuoyent plus de befongnc , \ts luifs fur-
uiuaos & ceux qui les atiouchovêcs'eûansfauuci hors
dé Lisbonne, ou demeurans cachez es ma^fons de qucl-
«juesperfonnes paifiblcSi Toutclfois il y eut encoiQ
•quelques meurtres. En ces trois iours les meurtriers
tiialiacrcrentenuiron deux mille perfonnes luifues.Sut
le foir du iroilieGmc lour Arius de Sylues & Aluares de
Caftrcjgentils-hommesj&chefa dclaiufticcj vmdrenÉ
à main armée dedans Lisbonne , & arrefterent le courU
de la fedition. A l^heure mcfrae h^ François & Alemâs
fe retirent en leurs nauire? aiiec force pillage , & hauf»
ikns les voiles prenent viftemertt la route de leurs payf«
le roy ayant receu les nouuclles de cefte horrible fc-
i ditioH^en fur extrêmement indigné, & tout foudaiti en*
uoya deux des principaux de fa cour à Lisbonne > à fçi-
i Hoir Jacques Almeidc & laques Lopes > auec plein pou^
i Uoir de faire iuftice de tant de forfaits.lceux fîrét mourir
\ publiquement vn grad notnbre des feditieux, qui furéc
\ punis de leurs fureurs & cruautez.Les moinesqui auoy?
enteflcué la croix & ethortc la populace à maflacrcr,
furent dégradez, puis cltranglcz & brusIci.Les luges &
Magiftratj, qui s'eftoyent monftrcï trop craintifs & pa-
refleux à reprimer celte rage populairc,furêc partie pri*
uez de leurs eftats, partie condânez à groflcs amêder.la
ville mefme fut defpouilloe de plufi-urs priuiicgci fifi
honneurs. Oferitu m ^.Im.de l* hifi.de "PoTt^^aljfeCl.^.
Enuironl'an 1509. auint vne horrible fcdiiionetl
Turquie,par le moyen qui s'enfuit. V n nomirié Scacho-
cuif.ifT'jde perequieftoit homme li'aparence » fe ca-
cKa l'efpace de iîx ou feptans en vn hermitagc,y viuanC
en relie renommée qu*il acquit le nom de faint hôme«
te fultan Baiazet.qui ne fçauoit pas à quoy tendoit ceft
hermitc , lui faifoit Tn prefent deuotieux & annuel de
inille afpres. Lorsqu'on eftoit fort occupé à rc*
bailir Condantinofle « fort eodommagce du feu;
TX »
i^\ 9 Hiffoires admirables
rhcrmite fort êc fa folitudc , amaflc force gens par
intelligences & menées de loDgnc main , furprend en
iour de foire vne vwlc non.uice Antalis , faic tailler
en quatre pièces le Cady ou iugc d'icelle , pille & facta-
ge Te lieu , 6i en diligence appelle à ioy grand nombre
de mutins, te.lem n: qu'en peu de loursil fe vidcnui-
ronné de dix mil hommes de guen e , aucc Icfqucis il
cntrtf en la Natolic,donne bataille au gouuerneur nom-
mé Carâgofc, le ciesfait& prend prifonnicr , lemeinc
deuant les portes de la principale place , dont l'entrée
luieftant refufecil fait empaler vif ceprifonnier , Tm
des principaux baffas de Turquie. Puis après il attend
hardiment Corcuc fîb de Baiazct fuiui de grandes for.
ces , Icfquellcs il rompt, & contraint Corcutfe fauuer
de vitclTe. Alors toute )a Natolie fut fourragee d'eftran-
ge forte par ces fediiieux , courre lefquels Alis balTa
futenuoyéparBaiazetauecvne puiflante armée. Ce-
pendant i'hcrmitc eut d'autres vidloircs, & dcsfît en di-
uerfes rencontres plufieurs fangiacs. En fin bataille fe
donne entre les deux armées , en laquelle après grand
meurtre d'hommes, Alis pours'cftre trop hazardc , fut
tuéfurle champ, &: la vidoire demeura à l'hermitc, le-
quel ayant perdu beaucoup d'hommcs,s'cflongnade la
Natolie,titant vers Tauris en Perfc. Eftantfur les fron-
tières il rencontre vne fort liche Carauane, laquelle il
pille,&cnfait tuer tous les hommes, fans s'enquérira
quieftoyentles richcfTcsqui y turent trouuees.lefquel-
les apartcnoycnt à Ifmael roy de Perle. Les capitaines
& principaux des troupes de l'hermite ayans ofé s'auâ-
cer icfques en la ville de Tauris , & fe prelènter au roy
pour lui faire la rcuefcncc,farent reconus, arrcftcz pri-
îbnniers, comme auflî toft après tous leurs foldais: tel-
lement que ces fediticux furent exécutez àmort , fans
qu'aucun d'eux en efchappaft. Quant à Thermitcon ne
fçait qu'il deu\ï\z. I.Leonclauiuf es Annales de Turquie.
Enuironl'aniç 1 5. lorsque Sclym.lultan des Turcs,
cmpefchéàlaguerre de Perfc , eitoit fur le point de fai-
re palier toutes les forces qu'il auoit en l'Europe , pour
cmrar ea Aiic , la guerre cAant aulfi âlluœcc en Croa-
tie
ê-
memora^hlesl ibl^
•îe , Thomas cardinal de Hongrie , & Icgat du pape,fic
tantcnuersle roy Ladiflas , qu'on drciïavne armée de
croifez , volontaires , pour garder fans folde les frontiè-
res elu royaume. Là dcfTus fc firent des leuees d'vn
nombre prefque-s infini de payfans , fous la charge d'vn
certain George de Tranflllaanie , lequel aiioit pour
compagnons & confeillers vn moine & va prèiirc.
Gcorjje commit l'auantgardc de cefte grand' armée
ruftique à fonj frère Lucatius , & lui marcha auec le
refte vers la ville de Varadin , portant pour bannière
vnecroir. En chemin ces payfans firent des maux
infinis & incroyables. Ils empalèrent vifs tous lés
gentils-hommes qui tombèrent en leurs mains, violè-
rent dames, damoifelles , femmes & filles honneftes:
refolus d'exterminer toute la nobleffe, 5c de quatorze
«uefchezqu'il yauoit au royaume n'en laiffer qu'vne
debout. Surce vn vaillant feigneur nommé Ican Bornc-
miffe fuiui àts troupes de Bude, met en route Lucatius:
d'autre part le vayaodede Tranflikianie taille en pie-
ces l'armée de George. Ces deux fcres font attrapez.
George eft orné d'vne couronne ardante , quiluibruf-
leiatefte: & lui tire on du fangdes veines que l'on fait
boire à Lucatius. Outre plus il eft tenaillé'&defchiré
en pièces, que l'on faiâ: bouillir & roftir. On fait ieul-
ner Lucatius &: les capitaines de cesfeditieux au nom-
bre de vingt , l'efpace de trois iourf ; puis les fait-oix
faouler de ccft horrible appteft. Quoy fait ils furent
tenaillez , & exterminez àcs plus cruels fupplices dont
il fut pofîîble à leurs ennemis de s'auifcr. Cefte fcdition
cmportacn Hongrie feptante mille perfonnes,cntre au-
tres quatre cens gentilshommes malTacrez par ces mu-
tins : l'hiftoircdefqucls nous auons prefenteeaO i.vô-
lume,au chapitre des cruels exterminez : & la rameote-
^lons ici , poureftre mémorable , &à caufe Je quelques
circonftanccs omifes. lean CuJ^mtan er 'Panl loue la defcri-
uent au long.
L'an I ç 1 7.1es valets des citoyens de Londres en An-
gleterre cfmeurent de la fedition , qui eut apporté des
conftfûoQS eftraoges )fi de boMue heure l'on n'y euft r^-
TT 3
Soyo Bljloires admirables
fiscdié. La couftamc de telles gens cftdeqncrcllcr
tout propos contre les artifans & marchans cftrangcrs,
à la profperité defquels ils portent manifefte enuie.
Pour attifer ce feu d'auantage , deux preCcheurs en leurs
fermons mutinèrent fort cef>e racaille , difans qu'ils a-
uoyent grandecompanîon des maux & outrages qu'en-
durcit le paurire peuple Anglois , parles pratiques de
ces artifans & marchans eflrangers , venus de loin pour
ofter la nourri'.ure & le gain à ceux du royaume. La def-
fus fepresëtc vn chef , pour mettre la populace en train.
Icelui fe nommoit lean de Lincolne , auquel fe ioigni-
rcnt quelques vns des principaux delà fediiion , pour
coniurer contre les artifans & marchans étrangers. Ils
refolurent cnfcmble de prendre occafion de feruer
delTus, par la couftume du pays > q ui cft que le premier
iour de May le peuple fort delà ville , & va s'efbatre
aux champ$,d'où il ne retourne quVn peu deuant l'heu-
re de fouper,poriant des branches verdes es mains en
iîgne de paffetemps. Lors donc ils deuoyent affaillir &
cxterminerceuxàqûi ils cnvouloyent. Mais Dieu vou-
lut que la conjuration fut dcfcouuertc , tellement que
lean de Lincolne & quatre autres furent exécutez à
mort, ]e*r$ corps efquartellcz & les quartiers attachez
aux portes de la ville. Dix autres furent pendus & eftran-
glez en diuerfcs places. Les furuiuans coulpables,ayans
tous la hart au col furent menez à VVeftmonfter , ou
Icroyeftoit aflîs en fon ihrofne. Ils fe profternercnc
tous àgenoux deuant lui,crian$à mains iointes mifcri.
corde, laquelle il leur oftroya , 8i en efchappercnt à cc
^rix/Pûlydsre yiroiUaté z 7. liu.de l*hi/}oire d* Angleterre,
Le roy François i .ayant efté pris prifonnier en la ba-
taille de Pauie , l*an 1 5 t4.au mois de Feuricr , & tenu
fous grofTe garde quelque tf mps en Italie par les Impe-
rialiftes, finalement ils refolurent (de peur qu'il leur ef-
chappaft) le mener en Efpagne. Ayans efpic le temps
propre, Charles de L?noy viceroy de Naples fit equip-
per force gaferes,&auec vn vent commode. & vaifieaur
hka foQrnis de foidâc» , pour voguer fcuremeoc auec (!
richo
.II.
& mémorables] \q j i
riche thrcfor fe mit à la yoilt vers Barcclonnc.où le roy
fiic magnifiquement rcccucpuisapi-es les gaicrcs cingle*
rcnc aflez près de terre iulqoes à Al cantcra , port du
royaume de Valence, pour «.M!eceftre mené par terre
iorqtiesàToIedc,où lor» cftoit l'empereur Charles V.
Leroy defcindu en ce pofî , les foldais qui l'auoyent
gardécn ce voyagr hazardsuT , & en Itali. depuis f*
prifccomiTirnceo: à demander payement , 5c pourcc
que La noj faifoi la fuurc'c oreille, ils le mutinent , &
prenan* leurs armes coureni après lui pour le defjcf*
cher. Bien lui pnnt qu'il auoii bonnes ïambes pour fe
ictterendes iardiDs piochams , d'où il fe fauua plus
loin.fe tenant cache , infqoes à ce que les fcditieux fu-
rent contcrtez-Durant leur cimcuic , quelques coup»
furent lafchez, lurtoui vnç moufqiietadejde laquelle le
boukt donna drcift à certaine croifee de marbre con-
tre laquelle le roy cftou adolîé en vne chambre haute,
oùileftoit montéà la defcente de fa galère: tellement
que peu s'en faiut qu'il ne laillaft ilicc la vie. Mais autre
rccerche ne iuftice ne fût lors ni depuis fai6le de tels ic >•
dirieuxrauconti aire ils furent payez de leurs gages , iL
remerciez de la bonne garde & conduitede Ie«r prifoQ-
Hïtr/Paul Lotte defçrït cejie fedttion att 7 Mur.de la yie dté mar-
quis de Te/quaire.
L'an mil cinq cens vingt-neuf,le roy ayant fai£l com-
mandement ; queToncuft à conduire à finquclques
fortifications en la ville dv- Lyon , il fut queftiondc
trouuer argent , pource que le reucnu de la maifon de
ville & les deniers communs n'y pouuoyent fatisfaire.
En l'affemblee du Confulat fut relolu de mettre vn im-
poft fur le vin. Quelques taverniers & petits arcifans
tfouucrent cclafi mauuiis,qu'ils firent fouleuer &' mu-
tiner la populace. Tellement que le Jour S. Marc ces
c5pagnons,aa nobrede plus de deux mille, fuiuis d'cui-
ron deux c€s femmes, fc trouueret en la place des corde-
lierç.tous armez de battons tels que la furie leur auoit
mis entre les mains, & aucc grad bruit monterct au clo-
cher de rcglilc,& eômécerct à iôner le iocfin,cômc û It
TT#4
1031 Hijloires admirables
feu eufteftc aux quatre coins €ic ia ville , quifutcaufc
que toute la )ie du peuple y acouruc fans ordre > fanl
bride, fans chef.De pleine arriueeilsfe rucrcntan pil-
lage des mailons prochaines , Icfqucllcs furent entière-
ment îaccagces, nommément ce lies, de deux des princi-
paux confeiliers de la ville & d'vn fore riche marchant.
Durant ces rauag( s le Baron d'Yoin , deiamaifondc
FougiereSjfetrouuant d'auanture en la ville, & ne pou-
uanc fuporctr telle indignité , fe rua fur ccfle fourmil-
liere de pillards, fuiui feulement de trois valets,auec lef-
quels il les combatif plusd'vne heure, & en ayant blefîé
plufieurs les mit en faite,fans que lui ni fes gens fuflcnt
endommagez. Le lendemain par 1 1 prudence du lieute-
nant de Lyon,&dufieurTribulcegouuerncur, la fcdi-
tion ceffa & las principaux chefs d'icelle,qu'on peut at-
rrapper,furent exécutez à mort. Ç.'Paradin.at* iMu.de l'hi^
ftoire de Lyon^ch, i 7. Quant à plufieurs autres feditions
cfmcucs auant & depuis ce temps-là, nous en referuons
Icrecites volunaes'fuiuans » pourn'arrcfter trop le Ic-
£lcur furvn mefme luiet.
s E 11 y I T E yj^ courageux.
ES années i ç 1 î, i y i tf. & fuyuantes rEfceflc firt a-
gitee miferablement par \ts faftions des grands,
qui vouloyent enpDfTedantlaperfonne du roy , manier
les afaires à leur volonté. Ils fe battirent cruellcmenc
quelquesfois. En Tvne entre autres fut tué vn no-
ble fcigneur nommé lean Stuart , neueuducomrc
d'/Vran,p»ar vnbaftard delà maifon des Hamiltons. Ce
fcigneur auoit en fon efcuirie vn palcfrenier> lequel en-
tendant l'auanture de fon maiftre , ayant erre çà &■
là , fans pouuoir ferefouldre vers qui il fe pourroit
ranger , finalement délibéra de faire vn coup de fa
main pour vrnger la mort de fon maiftre. Pour ccft
effcâ: il print le chemin d' Edinbourg,où arriué,il trou-'
ne vn de fe$ compagoôs en h mcimc cfcuxrie,& lui dc-
man«
& mémorable S' i o 5 j
Aildcs'il auôit point veu en ville le baftard Hamihon?
Ouï,dit Tautre. Ec commenc,repart celui ci, malheu-
reux & ingrat que tu es, as-tu pm voir ce melch^ncfans
te ruer fur- lui pour luiofter la vie, lui qui a malTacré
BoftrebonmaiftrcfPuifTes-tu faire maie fin. Sans dire
d'auantageil palTeoultre , éc vadroicauchafteau. De-
uanclagrand* place d'icclui y anoit deux mille homes
armez, vafTaux des Duglas & Hamiltons,prefts pour al-
ler courir fus à quelques voleurs qui tenoyent la cam-
pagne. Lui fans s'aroufcr à aucun d'eux,ayant les yeux
fichez fur ce baftard, nommé laques Hamilton , lequel
fortoit lors sas armes & en faye de cefte place , pour en-
trer au challeaujle fuit , & le voyant fous vn porche lon-
guet vn peu fombre fous la porte, fe rue defTus lui,& lui
donne fix coups de poignard, dont tontesfois ii irc le
tuapasjle baftard ayant gauchi aux coups, &rabatule$
plus dangereux auec fon fayc.Incontinent le palefrenicf
retourne & fe fourre en laprcfTe. Vn grand tumulte
s'efleuc ,& peu s'en faluc que les Doglas &Htmiltoné
ne s'entrebattifTent lors cruellement. Finalemét la peuir
cftant vn peu adoucie)On fit ranger contre les murailles
de la place tous ceux qui eftoyeni-là. Le palefrenier fut
incontinent prins auec le poignard fanglantcn la main.
Enqnis d'oùil eftoit , & qui i'auoic amené là , pource
qu'il refpondoit ambiguement , on le meinc en prifon,
La torture lui cftant prcfeniee il confclTa auoir entre •
prins tuer le bafta'd , pour venger la mon de fon mai-
ftrerqu'il n'eftoit dolent qued'vnechofe, de n'auoir pas
entièrement execcté fa haute cntreprife. Avant cftc fort
rudement torturé, il ne chargea perfonne. Condamné,
proumcné nud par la ville, & renaHlé par rouies les par*,
lies de (on corps, il ne i^ift parole , ni ne fit contenance
aucune d'homme fe plaignant ou tourmentant en forte
que ce fuft. Quand on lui coupa la main droiélc Elle a
bicflmcrité(dit«il)plus grir.f fupplice, n'ayant pas exe -
CUtetc quele cour.ige lui commandoit. 3uchananam
quator:^iefme Hure de Clnjloire d'EfcoJfe. Enuironquâ*
torze ou quinze ans après, ce bafcard atteint & conuain-
cu de f lu^curs crimc$»aommçmcc de celui de leze ma-
î o 5 4 Hijloires admit tables
icfté au premier chef , eut la tcfterranchccpuisfon
corps fut efcarceilé > âc les <}tiartiers pen({ us es places
principales de Sccon,€C die le mcfine hillorien.
EN la bataille de Seminarc.donnee l*an i4i^<. entre
Tarmce des François Ôc celle de Ferdinand roy de
Napics, encores que les Italiens & Siciliens que Ferdi-
nand auoit amaffcz à la ha(\e,& les Efpagnols conduits
par Gonfalue,depais furoommé le grand Capitaine, fuf-
icnt gens nouueaox & peu expcnraentez à la guerre;
neantmoins il fnt par quelque efpace de temps braue-
mcntcombattu , parce que l'autorité couragcufe des
capitaines , qui ne failloy ent aucunement à leur deuoir,
fouftenoit ceux qui pour autre regard cftoyeniinfe-
riears.Sur tous autres Ferdmands*/ porta comme il a-
partenoità fa ve» tu. Mais Ton cheual ayant cfté tué fous
liiï.il flic fans doute demeuré mort ou pris , fi lean de
Capoiie.f. ère du duc de Terniiny ( lequel auoit eftë fon
page des l'enfjnce , & qui l'auoitfort aiméen la Heur
de fon aage)defccndant de fon chcual ne Teuft fait mon-
ter defTos ,& auec exemple fort mémorable de très fin-
guliere foy& amour, expofé fa propre vie pour fauuer
celle de fon fetgneur ; attendu qu'il fut tue fur le
champ. fr-CwicW^/w 41» iMwe del'htîiotre des guerrtt d'I-
faite.
L'an mil cinq cens quarante deux, l'armée Impériale
en Hongricapresauoiraffaillien vain la ville de Pcft»
fc rompit d'elle mefme par la contagion qui en empor-
tala p'ufpart. Mauriccdacdc Ssxe , aagé lorsd'enui-
ron vingt ^ n ans , fetrouua en cefte guerre. Vn iour
cftant fortiducamp,accompagné d'vn page , rencon-
tra quelques Turcs, Icfqucls il fouftint : mais finale-
ment fon cheualefltanr tué fous lui, il tombe par terre.
Soudain le page fc iertc dcffus, & parant aux coups em-
pcfcha les çnQcmis,iuf<iucs à ce que fccours acourut qui
dcf-
ér memorahles, 1055
^efgagca le duc. Le page fut blefle ♦ & rapporté au
f amp,mouruc loft après. Sletdan au commencement dtt i^»
Le cardinal lulian redoutant la mai- vueillancc du
Pape AlcxanfJrc fîxielme , Tonucya faluer par vn ficn
fccrctairc nommé Françojs Alidolc. Alexandre par me-
naces,puis pat prefens, s'tffoica de corrompre ce fecrc-
iaire,à cequ'ilempoifonnalt Ton maiftre. François re-
doutant la furie d'Alexandre , au cas qu*il n'accordaft à
fa follicitation , promit l'exécuter , & ayant receu de la
poifon pour tel eft"c6l»s'âchemina vers Florence, où fei-
gnant eitre tombé malade, il aucrtit le cardinal fon
maiftre de Pembulche qui !ui eftoit dreflee. Sur ces en-
trefaitcslc pape Alexandre fut lui mcimetué parbreu-
uage de certain vin empoiionné , dont il vouloir faire
mourir quelques cardinaux , & eut pour Tuccefleur ce
cardinal Iulian , lequel fe furnomma Iules I i. Garanti
par la fidelirc de fon Iccretaire Jequel pour ce bon ferui«
ce gaigna vn chapeau ronge, & fut fait cardinal de Pamc*
(fartmbert au c^natrie/me hure de la yie des 'jPa^es*
S E\ylt VT) E injàme CT* crueReyeuiue
par moyens merueiUenx,
L Es Turcs s'cftans icttcx dedans Tlflede Goiel'aii
mil cinq cens cinquante vn , afTiegerent lechaftcau,
place très- foi te d'affiette. Vn capitaine Efpagnol qui le
gardoiijdcfcfpcrât du fecours , perdu aufli le coeur pour
le défendre. Les allïcgezaucc lui rcnfuiuircnr,& furent
fl lafchci quede fercndreà la difcrction du bada , qui
nevoulut les rcceuoiràautre appointement , & vfoic
de terribles menaces contre eux, dont ils furent tantcf-
frayez qu'eux mefmes cofnmenccrétàdefgarnit &dcf-
coiparer les portes pour dôncr entrée au x crnemis. Sur
ce auint qu'vn Sicilien , de long temps habitué e^. ccftc
iilc OÙ il auoic prins feminç , U eu d'icellc deux belles
ib 5 s Hilfoîres admirables
& honncftcs filles prcftes à marier , fc fcntant réduit ^
▼ne calamité du tout CTtrcmc , pour ne voir fcs cherCS
fiUescomber en la puiflance de vilains exécrables , qui
lestrai'.eroyentdu tout indignenaent , ne peut fe tenir
d'auantagcains courant vers la maifon das ce chalteau,
appelle à haute voir fes filles , & les tue toutes deux de
fa propre main. Autant en fit-il à la mère , acourante i
la mort de les filles. Quoyfaift il chargea vne harquc-
buz-,& banda vne arbalefte : pais lailTant approcher les
Turcs près de fa maifon,en tua deux. Et facquat la maiû
àPefpee, fe iette à trauers leur troupe, frappant d'cftoc
& de taille auec vne braue rcfolution ; iufques à ce qu'ê-
fcrmé & enuelopé déroutes parts d'ennemis , il fut par
eux haché en pièces. Par tel moyen, il tira foi, fa femme,
& fes filles de la feroitude infâme & cruelle des Turcs,
lefquels ayans pillé & faccagé le chafteau, attachèrent le
capitaine Eipagnol & fes foldats en la cadcne,& chargè-
rent leurs galères de fîx mil trois cens perfonccs emme-
nées tCchucs» H tjl.de s guerres de nojlretem^s.
S 0 LT) A t courageux»
EN l'année i y So.lefieur de Montmorenci.àprefent
Conncftable,tenant a{fiegé Villemigne , petite vil-
le à quatre lieues de Montpellier , ie vis vne chofc pref-
que miracaleufeen vn foldat, nommé Pierre Guy , Au-
uergnac , de la compagnie du ficur de Rofines , blcflc
dVnc harquebuzade fut la leure fupericnre à l'endroit
âufeptum » & venant fortir direftemcnt au -veriex par le
milieu de la future fagittale , auec grand fracas de deux
os d[!i bregma -, & grand' perte de h fubftance du cerceau.
Tout bleflé qu'il eftoit , il vint de Villemagne me trou-
Uer à Montpellier fans aucune difficulté , ayant fa har-
quebuze Tur le col, les fournimens à la ceinture , & Tef-
pee au cuilé. Au premier apareil ie lui oftay trois ou
quar*c grandes pièces des os du bregma, & dellors ie dc-
libcrjy,voyâa;*vn ifiidt Û cftianee, i'homme û gaillard.
- - nxar-
cJ- memorahlesl ^ o 5 7
uaarch^ottoufîours> & allant à la guerre auec tout foa
mal , de ne le penfcr^u'en prefence dcgcns J'hionneur,
pour voircholcfî monftracufe. l'appcllay les capitai-
nes Carlingues & Flory, fort eftiraez au fait de la guer-
re , iefquels me le virent penfer par pluficurs fois aa
defcauuertjSc en la h^iXz cour de mon logis, & après c-
ftre penfé reprendre fon pas, fournimens & harquebu-
2c , & s'en retourner à pied à S. kan de Vcdas que l'on
hactoit alors. le concir uay de le penfer l'cTpacc de 15.
iours & plusjfe portant de bien en mieux. le ne fuis paç
affeurédc lafin ; carau dcfiogement du camp il fuiuit
ÇiCom^^gn'xc.^i.SarthelemiCabrolenfes ob/ernations atfa*
iomi^ueS}obfer.i i.
S OLT> ^ T famé m'vrathleufement,
LE huiûicfme iour de luilîet i 5 ^ t.Ie fîcur de Mom-
brun affiegea Mornas,rvnc des clefs du contât d*A-
uignon,oùeftoit le capitaine la Combe auec nobre (uf-
fifant de foldats pour défendre la place. Ce nonobftanc
la ville fut forcée & pareillement le chafteau , quoy que
le rocher où il eftaffis foit fort haut & difficile à mon-
ter. Car le forametd'iceluigaigné par les foldats auec
▼ne extrême difficulté, la Combe demanda compofî-
tion:mais il n'ertoit plus temps. Par ainfi tout ce qui e-
ftoit dedans fut tuéjles foldats de Mombrun ayans touf-
iours le fac & meurtre d'Orange en la bouche, tuans les
vns, precipitans les autrcsjcs corps dclqucls ils enuoyc-
rentpuis aprefen Auignon par le Rbofne,leur attachas
dcsefcriieaux, par inlolence militaire , qui portoycnc
qu'on les laiflaft paffcr, comme ayans payé le péage à
M©rnas,fansquciamai$Mombiuny pcuft donner or-
drc , tant eftoyent les foldats d'Orange acharnez à la
vengeance de leur patrie. Mais vn cas remarquable y a-
uint à vn des foldats précipité comme les autres , le-
quel clUnt demeuré faufà pendu de fes mains à mi-
chcmin du rochyr^lui ayam cité tue ca ydio grand nô-
10^8 HiBûires aJmirai/es
bred'harquebuzades , facfinalemenc fauuc pir Mom*
brun,au feruice duquel il fc raag^.HiJïotre de France Jhui
Charles lX.lm.ix^
SONGES extroùrditudres,
S Ans (îirputer pour le piefent des fongcs,dc Icurj dif-
férences & caufcs.ie diray (cuicmcnc , qu'cnrrc lc«
fonges naturels ) il y en a qu'on peut appellcr ordioai-
res,qui ne fîgnificntricn,&c'clt fongercn veillant , de
vouloir en faire ertac & s'y arrcfter : voire c^cii impieic
dccercher des incerprctatiorts d'iccux, corne les pay-ns
^incrédules ont faiiftvncipfi itédcfois. Tcii longes
fontcfmeus par quelque atf^hon du corps ou des fa-
cultcz naturelles, foit qu'elle foitprifc dedans , ou im-
primée de dehors , àlaquei'e rrfpondcntlcs imagina-
tion«duccrucau. Ceux qui boiuent ou mangent trop,
les choleres , les amo.re jx,Ijs triftes, malades, fcbrici-
tans , nommément ceux qui font en danger d'eftre frap-
pez d'epilepfîcoud'apopltxie, Tç^uent quec'eit de tels
fonges. Qaant aux extraordinaics , difccrnantlcs di-
uins.diaboliquei .allégoriques ûi public<.,tels qu'ont c-
fté ceux de Pharao & N.'bucadnezar,d'aucc ceux de qui
ie veux produire des exemples maintenant , i'entens ici
parler de quelques longes , oùil y a outre la diipolîtion
du corps & l'imaginatije précédente quelque choie de
particulier dont il clt malaifé de rendre raifon exaftc»
Outre les exemples propofez au chapitre penultiefmc
du premier volume , fous \f. tiîac des \'iIîon$ eftran-
gcs , i'adiouftc le% fuiuans.du fieclc prcccdcnc , & du
noftrc.
Le grand Sforce> renommé chef de guerre en Italie,
▼niour deuant que pa'tir d'O'tbone, pour aller con-
tre les ennemis qtii allîcgcoyent Aq aie, fongeavn peii
deuant iour qu'il el\oit tombe au for.d d'vnc riiiicrejOÙ
il Te trouuoit en extrême danger , & ^i'il v->yoit va
grand h»inme,commc on peint fam^ Ch"ftoflç,auqucl
■ il
(^ memoYahlesl ï^ J 5
Il crioit àl'ai<lc,fan$ cfFcft touiesfois. Ilfcrefueillc,3c
montantàchcual, aupaflagcdc laPcfquairc , huicrc
iadis nommcc Alterne , voulanr rcfcourrclcpage qui
portoit fon cafque , & cftoii tombé dans l'eau , en lui
Cendant la main > fonchcual enfondra dans la rafe
& le rcnuerfa tout armé dedans lariuierc , où il fut
noyé, fans pouuolr iamais eflrc rcfcous. ÇJoueenla yiê
d'iceliti.
Galeaz Sfurcc duc de Milan awoit entre autres fer-,
uiteurs drmcftiques vn nomme Malpaga y lequel il ai-
itioitfort. Ce feruiicur dormant p'otondement la nuit
précédente le iour que fon raailt'-c fut tué , fongca qu'il
voyoit Gakaz iranfpe' ce de plufi-ur^ piayes , lequel on
meuoit en mcàue crrcwcil aucc Ion pcre tltant cfueiN
Je il riiconte en frayeur ce fonge à pl'jiîcurs de fe» com-
pagnons,qui n'en firent point d'Eiiat Toft après il vid
par efFe6t i'âccompiiflem:nt entier de ce fonge. Fulgoft
ait I .Im.des exemple.' chap. \ .
Marc Antoine Taurelle comta de Guaftalle, coramS-
dant en vne ville du royaume de Naplei,vn marin à foQ
leuer falué par quelques capitaines & foldats , leur dit
auôir Congé la nuift proche paflce qu'ilfe noyoit : cfr
qui l'induiiic à s'abftcnir déformais de fe baigner, com-
me il faifoit d'ordinaire. Aptes dilnc,ayant dormi quel-
que peu, il fe couure d'vn manteau fui la chcmife,eftant
du rcfte habilié légèrement , &c fore pour aller s'csbatrc
kpromener au longd'vn lac proche de là. Ilytrouue
qHelquesvnsde fes amisquifebaignoyent : lors fans
penfei à ce qu'il auoii dift le matin , fcdefpouilic auec
d'autres,& entre dedans le lac , ou toCt après il fe noya,
fans que pcrfonne l'en pcuft tirer vif. Ful^ofe attmefme li-
tre e?* chapitre,
Horace dcPcroufc cfcuycrtrenchant d'Alexandre
k Medicis doc de Florence , malade de fieurc , fon>
gca par trois fois en vne mefinc nuid , que Laurent
ic Medicis coupoit la gorge au duc ; & ce peu de iours
parauant que cela auinft par effedV. Telles vifioni reitc-
'ces l'inJu'fifent à en faire le conte àPafchal mcdccia
du duc>afin qu'il l'en aducrcïA.Pafchal n'y fit faute: mais
^i 0 4^0 Hiftoins admirables
Alexandre n'en tint conte , sinf refponditquc c'cftoiÇ;
vne inucntiondc les dûmcrii<qLe& contre Laurent , au-;
quel ils en vouloyent. Toft aprei Laurent tua Alexan-
dre.'?.io»e enfes bifioires.Lg Supplément de Sabellic au x i .
Imre.
Catherine de Mcdicisjroinc de France, lanuift pré-
cédente le lourque le roy Henri fécond fon mari receuc
le coup de lance en la telle , donril fut figricfuement
blcflequela mort s'en enfuiuit puis après, fongeaqu'ô
auoit tiré vn œil de la cefte de Ion mari. Le matin te-
iiu,aprcs auoir rompu plufieurs lances •. comme la roinç
le fift prier de fe retirer, & que le duc de Sauoye s'y em-,
pioyaft , il lui enuoya dire par le marefchal de Motmo-
renci,qu*ilnecourioitplusqu'vne fois, & ce pour l'a-
mour d'elle. Sur ce ayant enuoycvnc lance au comte de
Monigommeri, lui commandant de courir contre lui>
& le comte s'en cxcufant bien fort, ou pour iarcueren-
ce qu'il portoit à fon prince, ou pour craïute de faillir,
comme il auoit fan plufieurs fuis le premier iour , fans
pouuoir donner atteinte contre aucun des tenans.le roy
lui enuoya cnioindre bien exprès de ne plus refifter: Le
comte cour;'t,& lompant fa lance fur la cuiraiTeduroy,
vnefciat -ionnaoedans lavificre de l'armetdu loy , la-
quelle n'eltant bien fermee^celt efcla; entra dedas l'œil
liauantque le ttft enfijlt fclîé jdoiK s'i^nfuluit la mort
peu de ionrs apris. (j. t^eucer au i O'iiu.defon Commentaire
de diuerjes fortes de demnaitons-,chap. I . %^iui:iL des chofes me»
mornbles de Franiejota henrt 1 1.
Lcmaicfcha! de Moniuc raconte vr fien longe enfes
commentaires (ur le melmc accidenr. le reprefcnteray
les paroles Ld nui£t propre veoanr au iour du tournoy,
cftanten ma maifon en Gafcoi gne,à mon premier iom-
meil ie îongeay qne ic Vttyoïs le roy ,Hen. i II. ) affis fur
vnc chaire, ayant le yjfagi tout couuert de gouttes de
fang. le regardois, re me fcmhloit, [a race. & ne pou-
Voisdefcouurir fon mal, ni voir autre chofe que fang
au vifagc. Toyoïs. comme il me fembioit,le$ Ynsdirc,il
cft raort,les autres, il ne l'eft pas encorcs. le voyois les
medecius & chirurgicos entrer U forcir dedans la cham-
bre*
fyt'iL cuide que mon longe me dura longuement : caf
iiTion rciucii letrouuay vt e chofccjue ic n'auois la-
ipais penfec ; àfçauoirc^u'vn homme puifTc picuicr ea
fongeanc. Car ic nie cr(>uuay la face toute en lai mrs, &
IDcsycux qui en rer.doyent icufiourf» & falut que le le^
laiff lie faire : car ic oe me peux garder de pleurer !on«
guemcrjC après. Ma feu femme penfoit me rcconforterî
mais iaraais ic ne peux prendre autre lefolution , fînon
«jclamorr. Pluli' ursquifonr viuans içauent que ce ne
Ibnt pas dcs contes : car ie le du des que le fus cTueilIé*
Qjare iours après m courrier arriua à Neraccjui por»
t4 lettres au roy de Nauane de monfiur le Connéta-
ble , par lefquelks i! radueruffv^u de la biefTurc , & du
peu d'cfperance de la vie. ^n ^.ituredefes commentaires
Louys de Bourbon Prince de Condé , cftanc couchi
laveille delà bataille de Dreux, & ceu faut auec quel-
ques gentils- hommes reftcz en fa chambre, die au mi*
niftrc qui auoitfait la prière , le fçay qu'il ne fcfauC
point arrefter aux forges : mais fi faut il que ie vous
die ce qae i*ay fongé la nuid paflcc. Il me fembloit
que i'auois donné trois batailles l'vne après i*autrc>
obtenant finalement la vi£toi:e , if voyanrnos troif
ennemis morrsrmais que l'cftoisauflîbLflcàmorr. tel-
lement routesfois que les ayant tous trois fait cnettrô
morts les vns fui les autres, ècmey pardefTus , i'auoit
ainlî rendu l'efprit à Dieu. Sui-la 'cfponfe qui îui fut
faiétc , que les penfces qui occupoytnt lor$ fonefprit
pjouuoycnt auoir caufécc fonge, qu*au refte,viuart ou
aourant , il ne pouuoit failli» de demeurer vié^oncuxî
il dit ces motjijAinfi loit-il. 1 anty a quel^efFeft fembid
auoir vérifié celk vifion : car (es trois ennemis fujcnc
cntalTez Tirnfur rai]tre,àfçauoir le marefchal de lainél
André le lendemain , le d'jc de GuMe deuant Orléans, le
Conneftablc à la bataille faind Denis , &: luy lur eux
trois tué de fang froid à la iouroe* de B^flac. titjioire d/
France joftf Charles I X.
Caclius Rhodiginus , trcfdoftc pcrlbnn^ge , raconte
defoy , qu'eu l'aage de vio^c- deux ans il compriotcii
VV
ï 041 Hifloins admirables
fonec rinielIigcnccforccia6tc d'vn pffage de Pline»
qu'il n'auoic iamau peu entendre en Tciilanumcfœcs il
lui fcmbla que qucl<^u'Tn lui monllroit le pail'agc que
parauancilnclçauoutrouutr, iiero vn morceau d: par»
chcinia,dans lequel eftottcrctitc i'expcii ion «iccepaf-
fagc par vn autre : ce qu'l trouua cedansfon Pliocin-
contincnt qu'il tutcfueiiié. ^1» 17. linre àe fes le^tnt mntf^
Alexandre d'Alexandre , iurifconfultc Neapoliraio»
raconte qu'ayant faitcoucherauec foi certain û^n ami»
il le (cntit fort a^ré in dormant , car il loulpiroit & fc
complaignciit pucaicmciu. Il le rclualle , & ertcnd
qucce peilonnage auoitfon^c ^ue la merc cftou decc»
dce,& qu'on lapoitoitentEnc. Toft après on lui ap- '
porte nouutlics,que fa mc^ecftojr morte alors, & auoir
cite mife en ccrrc.^» i.Uuredejls tours gemaux^c. 1 1.
Bapcift. parenc de I^ioloïc Ca d^n, iamtox mcvccio
Milannois, cftudian. à l'auics'clacilla de naiâ: , & dc-
libra prendre ion fuiii pou: ailjm.r la ciiandellc Eu
ces cptretaidcs ixcmcnd vne vox difan ♦ A.ii.u ni«n
fî!s,iem*en v^y àRome , ôciuif^'iibia q.i'ii vo^oit vnc
trelgrande .u niere , comme d'vn figot de paille touc
en feu. Toutcft.)nné il ic c.iche foiislacouit'e de fon
lid,5c y demeure le refte de la nuift & la maiiner , luf-
qucs à ce qvie Ces compagnons teu^urnenr Je I3 l(Çnn.
Us frapcnt a la'por.e de la chamb'e, dont Icu-- ayaor lait
o liicriUrc , & ra^onic l'on toi g;, il adiojfte en pici-rant
• jcç'cftoyét nouu-liesdcla m .'tdc (a mc'c. Eux n'en
fatwQt quefecoiitr les Ofci'.hs. Mais Icieodtmaio il rc-
ceut nouucllesque fa me c crto:t decedccv n la m cime
heure qu'il auoitTcu celte gT«ndc lumière , en rn lica
cfloigi cd'enuiron vn-.^ i )>jrncc a '^xtà loin de Pauie. l,
Cardan r ^ Ainre de U variété des (hofes^ch. 84.
Muftafafilsde fùUan Soiymin,t ois ioursauant qu*.
cftre cftranglc dedans le pdUil.loD & eo prcfencc de Iba 1'
perc , par les menées de fa belle mcrc , fongea de nuift J
qu'vn certain perfonnagc d'aparencc le mcnoit en m ,
lieu, rit à vis duquel à maia droidtc cftoycnt deux ^
riivcrcs ao,:^ics c&mme poic j ic romiHanccs va Ku
conii- '*
eotitinuel , dedans lerquclles cftoyent tourtncntees Ict
dnics à.i rrclchans princc>* ji[camti^ Centoritéfatt 6Mi»s
dti Commentuirei àe la guerre Àe TranJJyiuantet
Auguflm Curion > rref dodtc leune homme encre
ceux de noftrc temps , touimtnté d'vnegrandc deflu-
xion en la poitrine > il fut auis à Olius Sccundus fou
pcre, comme il dorcnoii,cju'Auguftin eftoit porté par fel
difciples en vnc chaire hors de fa chambre en certaine
chambrcctc au iardin de .a mail'on, cù ce icune homme
auoit acouftumé d'cftudyrr : ak que toft aprcs pîu*
fieurs autres qui les fuiuoyenc porti;)'cnc les liures dcf*
fous leurs braSi Ce fongc fut^xpuTé en hucrfes fortes»
mais la mort (uruenant i, (t après s'ci'ibia en aucir do-
nc le vray lens. Car il fut hoiincfttmcnr porte en terre
par certains icunescrtudians qui ailcycnt cuir Tes le-
vons, &pource qucleperc n'auott point de fîls auquel
il peut iailfer fa bibliodiecque , fournie de tresbons li-
ures ,illa vendit publique m :nt , enlemblc celle de fba
fils , après lequel les efcholierf emportèrent les liuret
qu'ils auoyent achetez. Le pcre eut rn autre fonge du-
rantlamefme maladie. Auis lui fut qu'il auoit trouué
Tne nacre ou coquille de perles emr'ouucrtejen laquel-
le apparoiffoit vnc perle belle en perfeétion. L'ayant ri*
rcc de la nacre & foigneufemcnt contempIeC) il la trou-
ué entière & (ans aucua pertuis t pour pouuoir cftre
mife en œuure. Tel fongc le concrifta ♦ crtimaat que fa
ferle rcprefentoit Pâme de fon fils > 8c la nacre le corps,
rouuerturedc laquelle vouloir dire que la perle n'y
dcmeureroitplusgucre. Comme aufTi ccquc la perle
cftoit entière , fcmbloitprefagcr qu'elle n'auoii plus
de commerce au monde. D'auantageau mefmc temps»
la mcrcduieune homme fongea que fon fils eiloit pa«
pourriture deuenu tel que tous les membres paroifloy.»
cnt de'faits & comme en pouldrc : puis qu'ils auoy*
enteftércioints , & que fon fils cftoit deuenu fcm»
blable à vn beau petit enfant , lequel cftoit difparu de
fa p cfencc. Ceftevifion l'auertit de la mort de Ton fils,
& I afleuradcrheureufe tcfjrrcdion d'icelui. Il mou-
luc à Bade au mois d'O^obrc de i'an 1^67. Th, £mn*
w »
1© 4 4 Hiliofres admirables
ger au 5 .trolume de fort théâtre de la rie humaine litê.4'
Coarad Gcfncr mcdccin de Zurich , ircf-rcnommé
par les cfcr its, ayant fongé qu'vn fcrpcnt le mordoir,prc-
dicqu'il n Ourroicbien.toi^dc pcfte : cequiauin(> ainû
quercfmoigne I0Û44 Simler en la ytcd'iceluy.
llfatauli àlca.i vpoiin , ctJcbre imprimeur à Baflc
peu de iours auant fa mort de peftc l'an i 5 68. le 7. lour
deluiilcc , qu'vu ho-logc formant dcfcendoit auec va
Ton agréable au pofTible en (a poi<ftriue , dont il s'cf-
ueilla , oyâc vne harmonie la plus douce cju'it euft onc-
qucscnicnduc , & dontilaff^^rmoit que le feulfouuc-
nir lui caufoit vn âuguher cootentement. Il adiouf^oic
qu'ens'efutillant il luifcmbla que ccft horloge rcmô-
toit. Et cemccant à fourircjs'cfcria , Qui pouna racon-
ter les bornez du Seigneur^Lcquei a voulu clorre tes pa-
ternelles ccfares par vn fi gracieux refucille-maiin. Cer-
tainement,6 Dieu,noftre vie & noftrc mort font en ics
mains. Ayes pitié de noMS.Zuïnger au yolitme C7 Uu/m al-
légué, {
Ican Hubcr dcfte médecin en la mrfme vilk de Baf-
lc,eftant en l'article de la mort, acis fn lanuidl à lean
Lucas Ifcl.honnorable citoyen de Baflr, demeurant lois ,
à Bcliançon , lequel ne fçauoitdu tout rien de ccfte ma-» 1
ladie > qu'il voynit fon lidt couuert de terre frailche- '
mcrt fofloyce, laquelle voulant fecouer, après auoir Jet-
te bas lacojuerte ,ilvid (celui fembloit ) Hubcr cou-
ché tout de Iol long fous les linceux , en vnclin d'œil
transforme en petit enfant. Lanuifldu lendemam , il
eut vne autre viûon : car il lui fembla qu'il oycit diuers
piteux cris de perfonncs qui pleurcycnt le trefpas de
Hubcr » lequel vrayement eftoit mort en ces entrefai-
tes. Ifel efucillc receut au bout de quelquesiours non-
uellc«:de|3 mort de Huber , fort regretté à caufc de 1^
piC'c & fi ffifance.Berançon ville impériale en la comté
deBoUrgongne & forteflongnce dcBafle. Zmnger y U |
mefme.
Nousauons parlé au premier yolurae de la mort
de Guillaume Nefenus dofte Alcman , & des notables
ciicoaitânces d'iccUc. Le loux meTine qu'il le noya fur
le
é* mémorable. id 4 ^
le foir,fommcillant fur raprcfdirnee,il fongca qu'il en-
troicen vne barque de perchcur,& qu'il tôboit en l*eâur
doncclucillé il ne fii que fc fourire. mais auart la nuift
clole il périt en iariuicrc d'Elue , cftant monte feul en
vne barquette pour fc donner le pUifir de lapefchc.à
facouftume.Or comme là mefme l'ay adioufté i'hifto'-
re mémorable du fongc & de la mort d'Ambroife Grv-
mani G*ncoois,i'en aHioulteray ici deui autres. La pre-
mière eft récitée par Fulgofe att i Mu.ch.f.
Thomas Payen, banni de Peroufe à lapourfuite da
capitaine Braccio de Montonc , fongea par tr ois reprifes
en mefme nui£t,que Braccio, qui auoit aiïîegc certaine
place,metioit fes aduerfaires en faite , & en tuoit q«el-
quesvns. Et comme il vouloir apocher de Thomas
four le tuer auflî , Thomas fc défendant blefla ( ce
lui fembloit) Braccio d'vne eltocade à h gorge , & le
tua. Le lendemain comme Braccio vuuloit empef-
cherl'entree au fecours enuoyé vers ccfte place afiîc-
gee,il chargea rudement les troupes ennemies , efqucl-
Ics Thomas eftoit , & contraignit la plufpartde tour-
ner les efpaules. Thomas fouftenanr l'effort auec quel-
ques autres blcffe Braccio à la gorge , qui receut enco-
re vn coup d'efpee en la icfte : tellement que la mort
l'en enfuiuit , le coup de Thomas ayantefté mortel. La
féconde eft de ï'^Mr^Mf , lequel efcrit auoir aprins de
gens dignes de foyqn'vn Italien fongraqu'vn lion de
marbre le mord'oit tellement qu'il en mouroit, & que
le lion eftoit vn de ceux qu'on void endiuers l'cux à
l'entrée des egliles. Le lendcmainKommc il pafibit d'à»
uanturedeuantvn temple de Padoue , qu'on nomme
fainâ:c luftine , en fouriant il cont*? à fes compagnons
le fonge de la niiiâ: pa(ïce,& fourrant la main dedans la
gorge d'vn lion de marbre,qui cftoic là,dit, c'eft ici mon
ennemi de la nui£l paiTee. Mais voici fortir foudain vn
fcorpion caché dedans ccfte gorge, lequel picqua de tel-
le vigueur l'Italien, qu'il en m&Uïm.Zuinger au yoittme o»
, litt.fufmentionné.
Le roy Henri troificfme , trois iours auant qu'cftrc
tué à faiu^ Cload» par laques Clément lacopin^lepre-
VV }
ro 4 < HiBoifis admirai/es
mier ioiird'Aouft 1 5 t^.auoit veueo fongc^nttous lef
orncmcns royaux, comme caraifoics , fandalcs , tuni-
ques , dalmatiques,manceau de laun azuré, )a grande 8C
petite couroonclc fcepcre 5c la main de iuftice , rcfpce
& les efperofîs dorez , tout enfanglantcz & feulez aux
pieds par des moines & du mena peuple , & qu'il s'en
cftoit afpremenr courrouce contre le fecreram de l*ab«
baye de S. Denis. Combien qu'on lui cuft donné aui«
far cefongede fc tenir fur fc$ gardes , fi cft ce que com-
me chofc forcée <hi Ciel, ce fembloit , ncpeuteuJter
qu'il nefuft tué, quel(^ue bonne garde qu'on fift autour
^e lui Ce ifont les propres mots de Lonys Çuyonenfes du
mrfes Levons Mu. i.ch.i,^. M-îii laiullicc de Dieu Oonda-
nc tant pi us le forfait horrible de ceft exécrable parrici-
Àt iaclemct,& <ie tous les mcrchans (^ui Tinciicrcnt à ce
SOFL^g EMBKT notable.
L'Araigneeftvninfe£leconu , FhoftefTe fréquente
des maifons de» pauures. Elle cft ennemie irrecoii'»
ciîiable des fcrpcns : tellement quelî quelques-fois clic
defcouure quelque ferpent s'çrgayant& efchaufani aa
folvil fous vn arbre , tWt fe darde du long de fon fii fur
lU',& lui dône fî rude coup d'aiguiilô ad milieu du f ôt
que le fcrpcntfc tortillant en fin demeure cfteinc des
coups qu'elle continué , en lui martcllant la icfte,
l'ay aprins de tcfmoins oculaires , que l'araignc cft en
nierme inimitié contre les crapaux , qui blcllez d'icel-
Ic fc m.dccinent en appliquant du plantain fur la pic-
queurc, La coutume des Angloi» eft de tapifTcr de ion-
chee en efté e planché de leurs chambres , pour auoi»
plusdefraifcheur. Cerrain moine en auoit amalfé
quelque? faifreaux en la fienc , pour Vy efpan Jrc quand
befoin feroit.S'cftant endormi l'aprcfdioec àc fon long
à la rrnuerfejvn grand capayt foi t de ct^\t icnchec, 8C
cattî^^ fur U buutbc de ccft hmnmc,acrochani fcs deux
patcs
&
wemorMes» '047
j pattes (îc deaant à la leure de dclïus, & les d«!Uï de àtr-
riercala Icurcde dcffous. Le nioine l'tlutiîic biceliô-
né. car arracher de fo:ce le crûpai)caitathé,c'eitoii s'c»-
{>>3fera la mort.lc îaiflcr.s'appci oie cr.ndiruji. pue iji^e
amort mL-fme. l)V,nire ccm qui acou. iirert ià pour
foulagcr le nioinc Dieu voulut ^^'aocunv f» cnt t'^juif
<jii*on Jccouchali '-Itcfidu au longd'vnt f n^tiecù ly
auoit vncgrofic araignccr- fa loilc. Ce qi/cOant faïc,
J*ara<gnc n'c-ft pas p!uO« ft d.fcouueu Ion trncmi,
qu'elle defccnd au lo g le 'ovlii ,ron me fe g' ffînt de
roideur au longd'vnc thu de, & donne »n coup d'c-
ftocauciapaui, puis rcrnoncc aûflî viftc qu'elle eftoit
defccnduc. Lerrapaut commence à -«'enfler^ & néant-
moins ne lafchc pa. l'a p île. Sur ce Taraignc lui fait v-
ne féconde charge , dont le crapaat sVnfla pins que dé-
liant,fans boug-r encore. A la uoifiefnfc, plus ferme que
les prccedenies.il retire frs pieds & lombc mort en ter»
re.Ce £iu la reconoiflancc que l'araignc fîr à (on hoftc,&
le notable foijlagemcnt qu'elle lui donna. Erafme «n yn
dtaiogtée du la fym^athte çy anttpath$e des chofes.
s Vf F 0 C At 1 0 -H de matrk;
LFdoftcurSyluius efcrit qu'aucunes femmes ont e-
ft« rois lours continuels & fuiuan^ efuanouyes
fiï fuifocation de matrice , 6t pcnfoit-on qu'ell s fuf-
(cni mortes, parce qu'elles ne refpircycnt nullemtni ,&
auoyeac tous autres lignes de mon » eftans princes de
rcntiment,dc mouuement, &: de chaleur, lourtant ea
telle difpofition ne faut le haft r de les enfeuelir , &
jwoinï ouurir leurs coi ps,de peur d'cncoiirit calomnie.
Ainfiquede noftre tempselt arriué à vn grand anato-
miftc ,ic di grand &ceicbre duquel les liurcs rcpa cnt
amourd'huilcieftudcs des hommes doftes.îccliji tftant
p«ur lors rcfîdent en Efpagne, fui appelle pour ouurir
le co'-psd'vncdîmc qu'en eltimoit morte parfufloca«
ti«n de matrice. Au 4cuiicfmc coui) de rafoii qo'illui
VV 4
to/^9 Hijf aires admirsè/es
âonna,ceftc femme commence à fc nlouuoh^,8c<îcmon*
ftrer par autres fignes qu'elle viuoic encore , dont tout
les aflîrtqns furent grandement cftonn- 2.1e lailFc à pen-
fcraulcdcrur , en quelle perplexité fc rrouaaccbott
feigocurfaifanr telle difTeaion » & commt^oncria au
mcurtrs lu: .ui. Tout cc qu'il peut faire fut de s'abfen-
t«r.iu pays.-car ceux qui deuoyentrcxcufer lui couioyêc
fus. Eftant ^ xilc,t<.it ap es il mourut de defplaifn , non
fans perte pour le f ubiic. Jfl.^mhroife "Paré au lm.de lagc
neratton^ch. ^4.
Eitudianc en médecine à Padoiië , l'y vis vne femme
Vêtue de moyen iage,{î rudcmcm afflige de rufForation
de matrice, qu'on i'euftcftjm-re démoniaque ou epile-
ptiquc Vncauccv fuc;iche payfanncia d'aige , v'nt
me crouuer vn iour,rae racôtant chofes ertranges,& quô
le oc veux recif.r,Jc ceftc m ila'iie , qu'elle fouff-oir pat
rcteniion de femencc, thad.'Duatu enfes mesL'angts de re-
medesjch.^.
Vne femme à Paris s*cftant par cheute & mefgarde
tellement percée delà poinéle de fon coufteau tombé
dans le repli de fa robe la veine du pied, qu'il en décou-
la vnc cxtrao'dmaire abondance de fang.en tomba en
fuftocat'onde mitricç^&c fut tenue pour morte pluficurs
hejre.s.miispar bons ^prompts remèdes fuiremifefus,
^.Cordetti en fon comnicntutre x.furle i ,U.d' titppocrates tow
chant les maladies des femmes.
Lz p »fîîon 4- ialoufie aide fort à ce mal. Vty veu dei
femmes reUemcntrranfporices deccfte paflion.que tout
foudain elles romboycnten luffocanon de matrice , oa
elles cndcroyenr des maux eft anges. J.3aptijte jHonta*
tiut es conÇetls touchant lafujfocation de matrice.
Druxfiileid'v!» Pr< fident en l'vn des parlcmens de
France, luiettes àccfte maladié,deux heures dcuant Tac-
ces fe pr: noyent à rire de telle lortc , qu'impoffîble c-
fto't les faire arret^er,ni g^refFroy , ni par menaces S:
paroles afprcs , ni par aufre<moyen quelconque. Let
Scbol.furlg ^f.ch dté iMt-de^. HoulieY touchant les maU^
dïes internes.
Es fu^ocatioàs de râatricc pluâcOrs dccidcns furuie'^
oeac
ér memorxbUsl ' o 4 9
iienr,qui font pcnfer aux médecins peu expérimentez
<ju'i; yadel'cnckantement ,ouautrechofe du tout ex-
traordinaire &.fupernaturclle .quand les artcics enfices
d'vn cfp; ic vencneux,&: cflargies plus que de couflunt.c,
fiiru'.enc laf^fForarionrdonts'cnfaiuentdes bruits mer*
ueillf Lix que l'on entend an dcdans',comme de grenoui 1-
les croiialîantcs.dcs ferpcns fifflins , des co; beaux crail-
lans ,d-s coqs cloquer tans, des chiens abbayans,&c. Ce
ne font que bruits caufezen l'inTeruallc desconduit? Je-
lon la proportion de l'elprii fortan- de la rrarrice fi.fto-
t\yi't.Corn,(jemme au premier hure de [on Cofmocrn. chapf'
tre 7.
Faifant la médecine en Franc'^,i'ay traité & remis au
defTus me femme le'Icment rffiigee S(t lufFocation de
matrice par rétention de fcmcnce,qu'elle fut tenue pour
mo- te i'elpacc de vingt quatre heures , r'ayam aucua
fen'iment ni mouuement. ^P.Foreflaj* 10. lit*, de fesn-
iueiUtohferttation 75» es annotations.
AKiandrc Bcnedi^ , a icUe quf de fon t€ps plufiears
ftmmrs ont cfté enterrée i l'am' eftant encore en leur
corpsjàcaufe que par fufFocation denr.at^icc, après les
auoir gardées plus d*rn iour, Ton eftimoit qu'elles n'a-
lioycnt point de v:e. Mais au bouc de quelque temps.
Venant à foiiîller en des fofTes proches , l'on trouuoit
qu'elles s'cftoyent eO'ang'^ment agitées & tourmentées
enterre. Au moyen dequoy il confcrillc qu'en telsacci»
de ns on garde les corps iroi- fois vingt quatre heures,
aiîntque les enfeuchr yiu i oUu.de fa pratique, chap. î o.
Pline au 7. liu. ch. ç t fait mention d*vnc qui au bout
de fept tours reprit!' fcs cfprits ; &Galienau liure de
pra?cogn.ch.8.dVne autre de mefmc.
Vnc damoilelle la fie de ce mal fut tellement ab2tue
& priuce de mouucment & de fcntimêt, que tous la iu-
gcoyent mo'te. Eftantappellc pour lavoir , & l'ayant
foign-^ufcraent confideree , l'approchc de la bouche 5c
de fon nez vn miroir bien poli, & regardant quelque lé-
ger traif de rcfDiration,ie commence à aider Nature a-
batue,auec tel lucres , que peu à peu la pauure damoi-
fellcrepriixtie$efjprits,&fattemifeau detîus au ^rand
lo 5 • Histoires sdmir^ilfs
conccnicm^nt ic fcs parcns & amis qui m'en fî'ent toog
aplaudinfcm^ns &remercicmës po^TiblesiaufTi ians moi
J'c iiflent ils portée en terre. Alexandre 3ott»n an hure des
mctiadies desfimmes,cbap.4^.
s y? £ A^S ti T I O 7i s.
TL faut bien prendre garde à la diftinflion des fortile-
Igcspour iugcr l'cnormiié d*cntrcle$ forciers, qui ont
conucntion ciprefTe auec le diable,& ceux qui vfcnt ét_^
ligatures & autres arts de fortilcges- Car il y en a qui
ne fe peuuent citerai punir par les magiftrats , comme
Ja fuperftitiondepKifieursperfonncsde nefiler par lef
champs, la crainte de iaigncr de U narine (cncftrc , ou de
rencontrer me femme enceinte deuani difné. Mais la
lupcrftitJon cft bien plus grande de porter des rouleaux
de papier pendus au col ou Thoftic confactee en la po-
chetic ; comme faifoit le prelîdcQt Gentil , lequel tut
irouuéfaifi d>ne hoftiepar le bourreau qui le pendit à
Montfaucon;& autres fuperftitions femblablcs quel'E-
fcriturcfainftc appelle abominarions & train d'Amor,
rheens. Cela ne fe peut corriger que par la parole de
Dieu ; mais bien le magiftratdoif chaftier les char-
latans & porteurs de billets.qui rendent ces fumecs-la^
& les bannir du pays. Car s'il eft ainfi que les Empe-
reurs payens lyenc banni ceux qULi faifoyent chofes qui
donnent refpouuantc aux âmes fupcrftiricufes , qu«
doyuent faire les chreftiens ennerç ceux la , ou qui
contrefont les efprits.comme on fit à OrleaJ & à Bernel
Il n'y a doute que ceux la ne m-rirafTent la mort, com-
me au(Ti ceux de Berne forent wxccurtx à mort : & tn
csf pareil de fd'rç pleurer les Cl urcfix, ainfi qu*»n fit à
Muret près Thoaloule , & en Picardie , &enlavillc
d'Orleansà Cain£l Pierre des Puiliers. Miis. quelque
pourfuit; qu'on ait fait ,cela cft demeutc impuni. Or
c'cft double impiété en la perfonncdes prcftres.Ei ceftc
impiété clk beaucoup plus graûdc,quand le prcfttc a pa-
I
à
mémorables, 1051
Hion auccSatan,&qu'il faitd'vn facrifîcc vnc forcellc-
riedeic'table. Car tous les Théologiens dcmeurcm
d*accord,:)Uc le prcft.c ncconracie point, s'il n'a inten-
tion de conlacrcr , encore qu'il prononce les nnors Ta-
cramcntaui.Dcfaitiil y eut vn curé de S.Iean le petit \
Lyon , lequel fut bruflc v.'f l'an 1^5 % pourauoir dit ce
que depuis il conFclTa en iugcment > qu'il ne confacroic
point l'hoftie, quand il chantojtMcfle, pour faire dam-
\|jer les patoifTicns , comme il difoit,à caufe d'vn proccs
iju'il auoit contre eux.FtoifTird fait mention de certain
curé de Soiflons, lequel baptiza vn crapaut,& lui bailla
rhoftic côfacree.Il fut bruflé tout vjf.fans s'arretter aux
eanonsquieicommunieni feulement les prcftrcs for-
ciers. Vrai eft qu'on peut dire qu'ils ne touchent que la
peine Eccle(iaftiqùc,qui ne fait aucû preiudice anx pei-
nes ordonnées par les Magiftrats fcculieis. Ils'cftiroo-
ué en infinis procès, que les forcicrs bien fouu nt fout
preftrcs , ou qu'ils ont intelligence ^uec les préfères : éc
Î>ar argct, ou par faueurs,il$ font induits à dire des Mcf-
es pour les fonciers, & les acômodent d*hofties, « u bien
ils confacrent du parchemin vierge,ou bien ils meitent
«lexaneauxjlamescharadcrirec». ou autres chofes fem-
blables fur Tautcl, ou dcffous leslingesrcomme il $*tft
trouuéfouuent.Etn'a pas long temps qu'on y a furprint
vn curé, lequel aeaadé , ayant bon garant, q'ji loi auoit
bâille vn ancau , pour mettre fous les lirge» de l'auicl»
quand il diroit MelTe. Ldodin,au 4MHre de fa Demonoma'
nie,chap.4,
louianus Pontanus parlant des fuperftitions dan no-
bles de quelques Nv.apoliiains . quiadiuufloy: nr foy
aux forciers,di(fl ces moti.Aucuns des habirans & aflle-
gczdàns la ville de Sucffe.rortirenide nuift , & trompè-
rent les corps de garde , pu's trauerfercnr les plus rudes
montagnes, Sf gaiguercnt finalement lè4^ord delà mer,
lis portoycnt quand &: eux vncrnccfix , centre lequel
ils prononcèrent vn certain charme exécrable , puis fe
ictterent dedans la mcr,prian$ que la tempcfte troublaft
ciel & terre. A u m? fme temps , quelques preftres de la
mcfmc ville, dcûi eux des'acotnmodcraux forcclicrics
10^2. Uijloires ndmirMes
des fol Jars, en inuenterent vne antre , cfpcrans attirer la
J)luyc par tel moyen. Ils apportèrent vb afnc aux portes
de leur Eg'ife, & luichanrcrent vn reijuien , commcà
quelque pcrfontîc qui cuft rendu l'amr. Apres cela, ils
lui fourrèrent en lagueule vne hoftie côfacrce ,& après
auoirfaiél maint feruice autour de ceft afne,finalement
l'enterrèrent tout vif aux portes de leur dire F.glift. A
peineauoycnt-ils achcué leur iorccheiie que l'air com-
mença à le troubler, la mer à eftre agitée, le pifin iour
à s'obfcurcir, le ciel às'eiclairerjeton. erre àcsbranler
toutrle tourbillon des rents arrachoit les arbres,& rtm-
plilToit Pair de cailloux & d'cfclats volâns àts rochers;
Vne telle rauine d'eaux furuint, & de la pluye en (î grl-
de abondance, que non feulement les cifternes de Suef-
fe furent remplies , mais aufTi les monts & rochers fen-
dus de chaleur feruoyent lors de canal aux torrens. Le
toydeNaples , qui n'efperoit prendre la ville que par
faute d'eau, fc voyant ainfi fruftrclcua lefîege ,& s'en
reuint trouuer Ton armeeà Sauonne. Ai* ^.liuJes InTi.de
fon temps.
Lti procès des forciers &forcicfcs,faifansermouuoir
par leurs forcelleries diuers orages ÔC tempcftes,propo-
fcnt infinis eftranges exemples de ceci. Ce feroyent dis-
cours pour faire pluficurs liures àpa-t, chafcund'iceux
plus grandsquelc prcfcnt volume. Mais ie m'abftien dp
toucher d'auantage à ces horribles efforts de Satan &
de fes inftrumcns. l'ai oiii aneureràperfonnaoc digne
de foi , que quelques forciers de Dancmarc fi-cnt vn
charme terribfeilyaquelques années, pour empcfcher
que la prjnceflede Danemarc ne fuft menée par mer au
roy d'EfcofTe.àquielleeftoit fiancée, tous deux à pre-
fertroy & roine d'Angleterre : tellement que la flotte
qui la conduifoit fut pluûeors fois en danger de nau-
frage,& poulTee loin defaroutcoùforce lui fur d'atten»
dre commodité dVoe autre nauigation. Que cefte con-
iuration finalement defcouucrte l'on fie iuftice des for-
ciers , lefqucls declairerent les malins efprits leur auoir
confclTé que la pieté de la princcfle & de quelques bons
perfonuages qui l'accompagnoycnt; par i'inuocation ar-
dcn-
é* memor ailes» tc>^^
dente & continuel le du nom de Dieu, auoic rendu vains
Cuus leurs efForis.
S rjsl ^^iTh lE mémorable.
L'An mil cinq cens feptante fîx vn beau icune gcmil-
liomme du royaume de Naolcs , ayant efié chargç
<Jc coiipi d'cipec par quelques maN vucillans , entre au.
trcsdifgracrscut U nez coupé. Se voyant des figuré mi-
ferabli raent , par Tauis d'vn chirurgien expert qui lui
promcttoit fecoursî &nepouuant fouffrir en fa propre
perfonne le lemede trouué âtelie perte , qui requière
que celui qui délire rccouurer vn nouueau boutàfoa
ticzcoupc.foufFre qu'on lu' face incifiô au bras gauche»
dedans laquelle il tiene fon nc2 coupé l'efpace de fix fc-
majnes , durant leau-1 efpace le nez rccouure du braf
chair nouuelie à faffifance,qui fe ioint, prend & confo-
lidc au cartilage ; tellement qu'au bout d'vn temps , à
coups derafoir , on coupe de ce b(#sla portion de chair
viue , aaachce au nez coupé , & le tout eft puis après a-
commodcdextrecnent, tellement qu'il n'y paroit que la
cicatiice,& l'homme fe fert de ce nez , les narines eftans
pcrtuifees 6i conuenableméc formecs:ccmme depuis ce
temps là,i'ai veu vn Albanois, qui portoit vn tel nez âc
monftroit Ion bras où auoir efté faide l'incificnrCegc-
til-hommes'adreiTe à vn comité de galères, lui déclare
fonde(reir:,& acheté de lui vn efclaue,bcl homme -.fort
& robufte, auquel il promet recompcnfc,& liberté ,s'il
vouloir fouffrir Tmcilion eftrc faidie en l'vn de Ces bras.
Le comité condcfccnd à cela, & touche argent:refclauc
s'expofe au hazard fous la coiidition propofee. Le chi-
rurgien fait l'incifion , & acommode ces deux patiens.
Veillez & pcnfez fi foigncufemcnt qu'au bout de fîx fe-
maines fe trouue que le nez du gentil-homme eltoit in-
carné dedans le moignon d'vn des bras de l'efdaue du*
quel fut incifec comptante portion de chair pour ac-
commodex ce bout de ncï,& l'cfçlaue çn cc$ nouudict
r ô 5 4 Hifloires admiraèlef
doijcurs traiflcfi dcxtrcmmt qu'il en gucritr&Icgê*
lil homme bcai.fils commr deuant fc trouuccs compâ^
gnics.chcri i>c admiré de chalcun^L'clcIaue afranchi,ie-
compcnré& rc-nuovc h ^rînotablcrncni par le gcnril-
hoinnie , Ce r. ti.e lv>in de là vers l'Aquilc au territoire
de Rome, d'cùile<tou r.atif,t ùil fc porte tort bien ;lc
|;entil-ht«iimc lcmblabl:mciu co.-itinuc gaillard &io-
yeux à don tej du piiretcmps à loi &à fcs amis. Au bouc
de trois ans acoraplis après ccftc cure , Tefclauc tombe
malade & meurt. En ce mcime inftaiu de maladie , le
geniil honime commence a fc crouuer mal de fon nez*
te le mal s'augmente Iclun le mal de Pefclauc , lequel
mort le ner du gentil-homme s'amorticiiellcmcni qu'il
IVmbla quel'efclaue repetoii ce qu'il auoit baillé du
ûcn. Cefte htjïotre m'^ efté donatc par vo perfonnagc, le-
quel aveu beaucoup de pays , & remarqué infinie»
choies notables.-nommcment cclle-ci:car il cftoit à Na*
pics en ce temps là.vid le gentil-homme accommodé de
ce nez, & fur tour lors qu'il i'amortit en la mort de l'cf'
clauf ,1e lour d'iccUe : comme le tout fut viiiigemmcnc
aoeié.
TO yS^M ENTE montagneufc.
EN l'an I 5 4 i.comme l'amiral d'Anncbauifu^con*
:ranid par l'huer aprochant de quitter Ir mcftief
de jaguerre en i^edmont,llceotlanc Ibo armée, il pi. ne
parle moQt Ccni, Ton ch min en F ance. «..cinont, qui
Jcpa-^ele Piedmontd'autclaS iUoye, a Ces tourmtnces
aulTi bien que la mer : le chemm crt eftroit, enfermé de
deux monLagnes:& quand les rourbiilons fe leucni , ks
vents amalFcnt au faille pluficurs boules de nCigc, qui
grolîillansaup'ix qu'elles rouleni coiure bas enterrent
fous leurs malFes & aualanches tout ce qu'elles rtncon-
xrt^x. : & ceux aulqucls le dcltroii eft inconu ( les guides
n^e'»n« s'y per<^cnt bien fouuent ) le precipuent en des
canains profonds remplis de ncipe. Anncbaut courut
ccftcfotiaaç. Ufluipartd*; ccuxi^uii'acompagnoyent
é* memorahUs) lo j 5'
trouaerrat leurs Icpulchrcs Tous rcnucIope&- blanche
couucrturc di-s neiges. Aucuns y perdir. ne Ja vcuc, l6«
aucrcs trannriicnc de fioid > aucuns reuindrcnc perclus
des pieds : autres des bras & des mains. Peu de toure iz
troupe joiiy rem depuis d'vncfern e famé. Lui-mofoicj
eftoicprcft de périt, fi cjucicjues hommes attcndans la
fin dci'orage csraucrnciies , <jai font en la pleine au
deçà, oc^reulTcni garanti des iniërcs de la tourment»»
HfJLde fraiHefim tranfon /.
TK^AIST-B^ES punii.
BEnaduxcra grand fcigncur en lacoftede Bftrbarie,
ne voulanc le tendre vaffalduroy de Fez, après lui
auoirfai^l teftcquelque temps , fut cont aint quitter la
campagoe , & fe recira vers le gouucrncur d'Azamor,
d'où il cnuoya Feres fon frère en Poriugaljtraiftcr aucc
le roy Manuel, lequelles rcceut en fa protcdlion. De-
puis ils portèrent ks armes aucc les troupes de Manuel
en Barbarie & endommagèrent fort le roy de Fez. En
fin Bcnaôuxera,homme inconftant , &fàfchéde pcidrc
^ fes commoditez qu'il auoit entre les Mores, obtint fe-
crettemcni ) à la foUicitatioa de fcs amis « fa grâce
du roy de Fez , à condition de lui mener tous \zs chrc-
fticns qu'il pourroit y attirer finement. Il efTaye d'.xc-
cutercela.ic.lcnien; qu'vn iour > par coi>gé du gouucr-
ncur d'Azamor, il cmmcinc quel<jucs caudlicrs & pié-
tons Portugais. Ayant fa £1 cnuiron ti oii iourners de
chemin , comme pour furprendre quelques ennemis ea
campagne, où ils ont acouituriié de logcren despauil-
lon-i, li dcfcouuiefon intention à Fcres fon frère , le-
quel s*oppofc tant qu'il peut àcedcfTein, ;tllemcntquc
après groltc*. paroles t nue eux ils furent fur le pomt de
s'cntrebartrc. Feres fir tant que les Portugal» furent
lenuoyez fains&:fauf> vers Azamor.Q^^antàBenaduie-
ra & Ion f ère s'eltans rendus en la cour du roy de F 2,
taac t'en la^ut qu'ils fullcnt les bicnreccus, qu*au coa-
X o 5^ Hijloires admirables
traire 1« roy leur fit incontinent trenchcr ks tcftcs, crai-
gnancpourcc qu'ils eftoycnt riches & grandsfcjgoeursi
VQC féconde reuohe ,qiii l'eult mis en oouuclic peine.
Il allégua pour couleur de celle exécution, que Benadu-
xeraauoit laifle les Portugais auec leur bannicrc& cer-
tain pauillon de riche vaJeui,& qu<: Feres Ton hcre l'a-
uoitinduit àce faire.Opr/»J «M i x. Uu.eitChijl.de V ortie-
g.iLfeB. I i.Cela auint lur la fin du rcgne de Manuel> co-
uironl'an 15x1.
Solyman fulcan Turc partant de Conftanrinople a-
ucc vnepuifTantc armée au mois dAuril dt l'a rail cinq
cens vingt neuf, quinze lou'S aptes arriua à Belgrade,
paflale Oraue &.Ic 'jabc.puis aprochade Buaieen Hon-
grie,ou \z rayuode lui fit hommage. Le chaftcau de Bu-
de Te rendit puis après par compofi lô. Mais ce fur raau-
gic celui qui commandoic en 'a pIace,nommé Thomas
Nad.tft,do6te s, vaiilanr gentil hommi' Hongrois. Les
Aîemans quiy cftoytnc en gainrlon l'enfeihicrcnt en
vue prilonjiC capitule t cm «pendant pour lortir vies 6C
bagues fauues. Mus en leur Toaic So yman auerti da
mcfchant &: U'che tour qu'ils auo>enr loùéàleur capi-
ca.ne , les fii rous ha* her en pieccs(iuftc falaire de leur
d^lloyauté ) &. fi. ofF'ir penfion à Madaft pour demeu-
rer en i*.:rmtc , ce que Nadall n'ayanr voulu accepter,
fut ncancmoins renui yé 6i cooduiten lieu leur. Hijt.de
Hongrie.
L'aa mil ci'^q cens quarante trois, par ie commande-
ment de Solyman, Amurat& Vlam^nîbafTa' r TC^Jaf•
liccr^'ent le fo^t chaftcaudc V-j|pon lui les froniercf
de Bolne. Croatie &. Hongrie ils furent trois mois dc-
uani»en findclqutis,pa* la l^liheté des fuldais ( qui fc
ruèrent fur leur capr aine & le liu erent *»arT >rté aux
Turcs)laplacf fut icndue.Mais ccstrai'res fi.ren-- loas
taillez en pièces , & It Câpita.nc renuoyc ian & lauf.
hiji.de Hongrie.
Durant 1 sg'erresdc Hongrie du temps de Ferdi-
nand ayeu. de Rodolphe,à prcfcnt Empereu*- , la fi ni-
ces'cftant mi'cau ranip des Chtdicns, les capiiainet
rcfolurent d'aller afl'aiiiir vn chaftcau, nounni^ Hcimâ-
de.
& memorahlefi 1^5/
dcjoccupé des Turcs, où Is s'affcuroyct de frouutr for-
ce viurcs.mai': ayans prins la pUce par compc fition ils
n'yirouuercnc que cîcux muirf de faiine & de millet.
5ur la rerraitcpour aller en endroit ir ci) It ut , ils furent
iî long» à cauù de l'artillerie & du temps fdfcheuXjCju'c
moins de rien il eu. et les Turcs fu' les b:ôf C^iciques
capitaines Hongrois , qui rça.i>ycni les chcaviiis, le re»»
tirèrent trop lolt , entre aui" » ■■ axianerch f des trou-
pes. Lcsa'Jtrcs,B(.hemiens 6«. Al.emans, tanrre;hrts,
que fantaflinsjs'cftansrefolis au combat .fourtindrcnt
le choc des Turcs qui les aucyét encios de tou es parts.
Mais ih furent desfaici &p<.idircnt toute la fleur de
leurs homes occis exi grâd nombre , fans que le^ Turcs
y pejdilletît gcos de marque ni foldats , que bien peu.
Leur chef fit de grands prefens à fes capitaines & en-
uoya les teftes drs tro's principaux chefs de l'armée de
Fcidinandaufultan Turc , autc force tfterdars & au-
tres delpouiilev de guenc. Gazi^ner fut accufédcpu.s
de trahifon &. confticué prifonnier. MjIs de nuift il
trouua moyen de fane vn trou au planche de fa cham-
brcpauéde brique, & 'ît deuala auec le. linceuls de foa
licl-rpui*; eftant en terre trouua vn cheual preft,&re fau-
ua vers les Tu!cs,qui l'^i fi enc de grandes promefTes.II
ne porta pasloi" telle deiloyauié : car voulant attirer
Yn autre gentil- homme à faie comme lui , celui-la fei-
gnit d'y entendre, & ayant fous ce prétexte at iré Cazia-
ner à banquetter en fon logis, lui coupa la go ge, puis
cnuoya latefte à Ferdinand, lequel pour rccumpenle ad-
jugea tous ies biens de l'cxccuté à l'exccureu' .Tel fut le
chaftiment de ce perfide. Htjloire de nojtre tenp.s Lii*.y 1 1,
des Chromtjttes de Car ion.
En la guerre que les Mofconitcs firent l'an i \- 5o. con-
tre la Liuonie, aprcs auolrdesfait quelques trc-uMe*^ de
geni de cheual , ils afiit gercot cenamc vu le nonimec
\cJlin, où ily avn rrcsfort chafteau , dedans lequel
GuiMaume de Puiftrnberg , grand mailtrc de Tordre
Tcutonique , vieil geniil-honunc , failou la d-meurc,
Tcftimant imprennble. La ville fut foudroyce de l'arril»
Icric , 6c les maiftjns d'iceUc mifcs en cendre par les
"i o 5 8 Hiftoires admirables
baies enflammées des Mofcouiics. Quant au chaftcaui
les foldai» de la garnifon, gens iraiftrcs & infolcns, dc-
claircrcnt au grand mai'hc qu'ils ne combatroyent
point, ains rcaaro)'cnt ( comme de fait ils rendirent) la
place aux ennemis, par compotition de vies & baguej
faunes, alleguans qu'on leur dcuoic plusieurs payes. Sur
cefie capiculation,ils pillent toutes les richelTes dugrâd
inaiftre,des gentils-hommes & citoyens, qui peu auanc
le ûcgc auoycntfait porter en des coffres dedans ce
chaiUau ) le plus beau & le meilleur de leur vaillant*
Les traiflres ainfi chargez quittent la place , en laquelle
\ts Mofcouites cnrrcni , & emmènent le gr jnd maiftrc
prifonnier en Mofcouie. Sur ce ayans entendu la trahi-
îbn de ces roldats,arrclUnt ces perfides piUardiJcs ren-
uoyent nuds, chargez au rcfte de moc':)iierie , de home,
ConfufionScdefcfpoir. T> .Ch;)trxHi au lo. ùure de fon i?t •
Jïoire Septentrionale.
Les Turcs ayans alîiegé Belgrade, quelques foldats
de h garnifbri complotèrent de la rcndic,(bus promef-
fe de grande lecompenfc. Paul K.enis gouuemcur delà
balle Hongrie rroaua moyen de mettre la main fur ces
traifties , Jc:rqucl> il contraignit de manger les vns les
autres, fiiLnt roftir par chacun lour vn d'entre eux qui
c.'toit dcuo épar fes compagnons. Celui quircfta le
dernier fut réduit àtelle famine que pnur fc fi.bltantcr
il fedefchira foy-'relme de fcs propres dents : ce dit ^.
"Bonfin att litH.ÎJecad. 5 .
En !a guerre des Tuicsl'an 15 74. cotre luonie vayuo-
dede V Valachie,Ieremic Zarnuuickayâc eu cha'ge de
luonic d'aller au dcuât des Tuics,aucc is.m.l VValuqs
pour oftcr le palFagc du Danube aux Turc ;fit bôdcuoir
au cômencemcni,6: arrcfta court L*ur armée. '>ur ce les
Ballas bien empeTchez f entrât que lé malheureux fauf-
fant la foy au ^ayucde laiffa pafTcf les Turcs librement»
puis cntairant vnedcuriefme trahifon fur la première,
vinttrouuer Icvayuode , s'exculanc deccqu*il nVuois
peuempcfchcr cepafTa^e , ncantmoins il attire le vay-
uodcen campagne,où il l'abandonne, &auec les i 3 mil
Moldaucs fc rage auec les Tmcs.Lors cftâc <jueftjon de
cbmtjatrc ,lcs Turcs contraignirent Zarnicuick & Tes
Iroupcs de taire la poindc ; ou ils furent prcfques tous
dcfpcrchc'i & fouldf oyez par rartillcric du vayuodc , le-
quel en fin pour cftrc trop foibh fat desfait : mais les
traiftres rcceureni premièrement le loyer de leur defloy-
auté ; & n'en efchappa prefque pomt > pourcc que Ws
Turcs luoyeni tous ceux qui ï^QXxloytniiHtïi.de la guerre
de l^yaUhie,
Nous auons vnehiftoirc de noftre temps aucnue de-
J)uis peu d'années, & digne de mcmoirc , lors que Phi-
lippe II. roy d*Elpagnc (aptes la mort de Henri roy de
Portugal , lequel auoit (wccedé à fon neueu Scbaftian,
An. orne ayant eAé desfait & chafTé ) fc faifii du royau-
me de Poaugal par i'cntremile du ducd'Aluefon lieu-
tenant, le rcprelcntctay ce qu'en dit Pr.Iofcph Texeire»
•'moine & docteur Portugais, afin qu'on ne m'accufe d*a-
lioir voulu dite mon auii d'vnc fuccclTion de telle im-
portance. Car c*eft autre chofe d'alléguer ce que dit vd
auteur,^ autre cliofe de l'aprouuer. Il ne fera que boQ
( dit Tcxeire , au liure intitule ^rhor Çentilit'ta Henrici
JFrancu cr 'KauarrA %tgn ) de raconter quelle procé-
dure t. m le fcrenilTîme roy Philippe aucc ceux qui fu-
rent caufe qu*il fc rendit maiftre de Portugal , prcfqucs
fansrefift ncc Dom Antoine,vrai & naturel roi de Por-
tugal, ayant efté forclos & chaffé hors de tout le Roy=
aumCjCeUx ci pfcfcntcni vne requcfte à Philippe , expo*
lans en icclle les feruices qu'ils lui auoytnc faids , a-
fin que plus aiîcment il S'cmparaft delà couronne , &
le fupplicnt de vouloir accomplir ce qui leurauoitc-
fté promis de fa part par le duc d'Offuna & Chriftofle
de Moura l'es agents : par mefme moyen ils exhi-
bent les mémoires & inftrudions d'ictux agent$,com-
hie lerofme Conncftage de Gcnes , qui en a tTcrit l'hi-
ftoire en Italien , ledcclaire. Leroy Philippe fit rcf-
ponfe par apoftilc , que les fupplians baillcroycnt Icut
j-cqucftc & les mémoires des agents à certaine com-
pagnie de commilTaires ou iugcs déléguez pour rel-
ies caufe^, laquelle compagnie clt nommée en Portugal,
JLa table de corifoence, Ayans obcijs'cnfuiuit vn arrcltdç
lo 6' o Hilioires admirables
telle tenenr : Atrcndu que le n) Philipjjc cftvrai lic-
ricicr du royaume de Portugal , il na cité loifibJcaur
fupplians de ic vendre ai gcm ccmpcanc , ou fous pro-
irclFes.aj contraire ils onc encouru punition capitale,
dcce qu'ils ont diffère, (^ns attendre qu'on icurfilt pro-
mcHc aHcune,de /iurer le royaume au roy ['hilippc. Et
fi Je royaume pppartenoit à Antoine, ils n'ont peu le vé-
Jre au roy i hilippe. A ccfte caufc le roy Philippe n'cft
en forre quelconque lié par les promcllcs que Tes a-
g nts ou ambalîadeurs ont faidcs aux i'upphans. Mais
vfant de fa bénignité & cicrocnce il abioult lcldi£l$
fupplians du fuppiicc de mort qu'ils ont mcr.tce.à cau-
fc de ce faid. Voila vn iref-digne Ioy:r, tel aufll que Ici
traiftres rcçoyucnt bien (ouue m. "P h. Carr,erariuf ait ..ro-
lume d« fes méditations hiJ}ori<jueSfltii» 5 .ch, 10 .qui ejè le 6c.de
tcdition Lutine.
Les Turcs ne fe fient pasmefmes à leurs mufulmans
ou Turcs n3curels,qu'ils ont induits de fois à autre par
prome(i"«:s,à commettre quelques trahifons & autres fi-
gnaleci mefchancctcz.tcrmoin le médecin luif.qui cor-
rompu par las promeHes de Selym empoil'onna Baia- .
zet peie d'icelui,puis eut latcfte tranchée, Selym dilant j
qu'il craignoic cltre traité de melmcpar ce irailbe , fî \
quelqu'vn lui coiHoit argent. Seiym paya de mcfme I
monnoye quinze efp.ons qui auoyent attrappc Ton frè-
re Corcut : cai il leur fit couper les certes 6». letrer Icj
corps en la Mer. Son p'-ctexre tut ,que fi quelque oclfa-
ucur le contraignoit clvfuir , ilauroit à fcdonnefigar-
de de tels UdMïxcLàmtfme,
Duiaiu îc$ pu-micri troubles de Fr::ncecnran i^ii.
Je ficur du Marefts avûnt défendu d'vne rcfolution rrer-
ucilleufe&cxcraordinairemeni heorcufejle chafteau de
Rochefortc» Aniou.contrc diucrfes troupes , efcalades
& aHaiilts. où il tît mourir tref'T^nd nombre de Tes en-
nemis,finalement fur trchi mcrchammcnt par trois de
fa compagnie^norrim^ z Pcuuert,la Guette > & Pciteuin,
qui donnèrent entiee aux alUegcans. Mais en entrant,
Poideuin , qui ouuroit la po:crnc fut tue le premier.
Toit après Pouucrc ^la Gucuepour leur rccompenle
furcnç
& mémorables] i o ^ r
furent pendus &eftrang'ez à A-.igcrs , en prcfencedc
ceux aiif^4els ils auoy-jic trahi kur viiilant capitaine
& le chafteauH//?.(/e Franceitu.j.
Durant ces mclmo troubles de l'an i ç^t. la ville
d*Orange ayant efté trahie au fieur de Sufc,&: aux trou-
p -s du comtat, par a^uckjues rraiftres conci.oycns.don-
naiis entrée à I*ennemi»lc:s blafphemes.criiatî'tz » facca-
gcmcn-.nufTjcres Se brulîemcns y faréc hor; ibies.Mais
parmi telles côfufions exécrables, Dieu cxerçi vn nota-
ble lug.'mcnt fur les au. heurs de roue ce mal, cjui auoy-
ent fau ouutrture à l'ennemi , nVftans nonplus efpar-
Îpcz Hommes & femmesque les autres :combicn qu'ils
cfufTcnt retirez en armes en la place , penfansy rcce-
Doir & remercier ceux qu'eux mefoies auoyenr fait vc-
nir.Mais lese'nnrmis pcnfans qu'ils fulLnt là pour faire
relîftanc-ifc ruèrent deffu, oc mirer, t to;jt au kl de l'ef-
En ia me(mc année , le 6. iour d'0(Cb'^brclc fort de
faindlc Carhrrrine qui commande à la ville de Rouen,
ayant efté vendu aux ailîcgeans par le capitaine Loys,
lequel y commidoit fut emporté par yn foudain afTiut,
auquel firent tuez plulîeors vaillans hommes , ajec
force pionniers & '-S. femtnes. Qu^anr à ce capitaine
Loys»comme il aidoic aux adiegcaos à enti er , il receuc
le iufte falaire de fa rrahifon , eftaat tué par l'vn de fes
propres foldats.^t* %. liu.de l.< mefme Hifi.
le monterayvers tes années pfecedenres. Le pape
Clément vit. vojloit mal demort à Alfonfe d'Eft Duc
de Ferrare.ll fcduit legouuernea'' de R"g;,Mominé Ic-
rofm; Pie, lequel lui promet tuer Alphonfe iSc rendre
Rege. Mais ce traiftre ayant elle deltouucrt , &: p: ins,
coBfeflc le Cl i me & fut décapite .'P. /o«e enli yie d'^îlfvnce
d'Efi.
Le grand Sforce ayant commis à vn nommé Arma-
Icrc d'Afco'i quelques compagnies de gens d.- pied &
de cheual.en fut C\ mal ferui,que ce traiftre s'ellant faiû
dugouu^'neur d'Oruictie , place tftimec imprenable,
& icelui enuoyé prifonnier à Naples , vendit Oruiettc
aôracciode Moacone:rargeac qu'il en reccut en grof*
XX 5
1 0 ^ V Hlflpires admirables
fp fomme ne lui fcruit gneres : car Vitelli Archeucfqup
fde Cornetre ayant tiouué moyen d'acraper ce iraiftre,
le fît pendre & eftrangler. 'i^aul loue en la yie du grand
Jffirce.
L'empereur Sigifraond, auquel Maximilian premier
du nom lucceda , s'cftant fié de la conduite d'vne fiene
armée de dix mille cheuaux à Pipo capitaine Floren-
tin, renomme chefdegacrre en ces temps-la, lui com-
manda d'entrer au Friul, ce qu'il fie auec heureux fuc-
ces à l'entrée, ayant fàidlcjuelqnes conquêtes. Com-
me il pourfaiuoit fa pointe, il la biffa reboucher , cor-
rompu par grolTe fomme d'or que 1 s ennemis de l'em-
pereur lui compicrçnt:tclIcmenc que contre rcfpcrance
de tous qui efperoyent voir de beaux cxploitsil rcmena
Tarmec en Hongrie , le perdiaoant qu'il feroit g and'
chère & fe mctti oit à couuert Tous tant de richciTes a.
mafTecs en vci inftan-. Mais l'empereur , prince
fage,& qui n'enduroit point tels peiillcux affronts , fît
empoigner & amener à Coy ce pipeU"- , auquel ayant re-
P oché fcslafchetez-.& fou rcconoiftie fonforfaiâ: pour
puniriond'icclui, commanda qu'on le baaillonnaft, &
que dedans la bouche & gorge ouuerte l'on V' rfaft de
l'or fondu , iufqu. « à ce qu'il en ceuaft & rerdift 1'^-
mc:I'execureur adioultant ces mots par deux foii, Pipo,
faoule & ralTalte toy de l'or dont eu as eu tantdefaim
&dc foif.SuppIice pratiqué par les Pa'-thes contre Craf-
fus mort,mais contre celui ci des fon viaan^.Sabellicau f.
liu.des anti(jt*tte^d'yî^ttileeicr Bonfin au yUu.de l'htjloire de
Hongr'ie^decad. \ .
Sur la fin de l'année i 498. Ludouic î^force,Duc de
Milan(duquel nous parlerons es volumes fuyuansj tra-
hi par fcs principaux fernitcut s . & fort hay d*t fon peu-
ple,fut contraint quitter fon eftaïaux Françoi$,& fe re-
tirer auecques les enfans en Alemagne. Toute l'hiftoi-
rcdecep ince ambitieux eft des plus tragiques & mé-
morables entre celle? qui font auenues depuis cent cin-
quanteans. Sesfîls eftans en chemin, il depnta (nonob-
ftant que tou^ \ts iîens l'en dctournafïent ) pour la ^ar-
^e du chaAeau de Milaa> Bcraardin de Coi(e naiif de
Fauic
ér mémorables^ xo6 ^
?aiiîc qu'il auoit nourri d'ancienBCié» lequel pour lors
rn cftou capitaine , prtfcrant la confiance qu'il auoit
en ce B.rnardin â la fidélité de fon herc Afcagne , le-
quel s'eltoi' ofF^rtàlui d'en prendre la charge. Il y laif-
fâ trois mil honunes de pied , fous capitaines delqucls
il fè fioir,auecprouifion de viures , de munitions ik de
deniers, fuffif'nre pcnir le défendre par pluficurs inois.
Douze jours apresc]uM fui parti,cc Bernardin liura au
roy de France, f s mains de fcs iicutenans , ce chaftcau,
qu'on eftimoit imprenable , teccuant en rccompenfc
de fi grande defloyautc, grofle fomme de deniers , vnc
compagnie de cent lances, penfion perpétuelle , & plu-
sieurs autres grares & pnuiiCgcs : miis auecielle infa-
mie 6i telle haine, mermcs à l'endroitdes Frâçois, qu'e-
ftantreietté & fuy d'vn chafcun , mocquc partout où i!
mettoir le pied , auec paroles pleines d'opprobre, tour»
mente de la honte, &de la confcience ( trcfpuifiant &
trefcertain fléau de celui qui fait mal ) il mourut de re-
gret peu de lours après. Les capitaines laifTez auec lui
au chafteau furent participas de telle infamie, entre au-
tres Philippin de Fiefque, lequel nouni &efleué parle
duc,confcilla Corte de rendre la place, & traifta de la
reddition auec Antoine Marie Haluoifin, lequel y entre*
ucnoicaunom duRoy. Fr.Guichardinau 4. liu.feO. il.
Tous CCS marchans,vendeurs & acheteurs , curent leur
tour puis après : & Ton ne l^auroii bonnement dire qui
gaigna ou perdit le plus en tels trafics.
Tyjit Ey-j^ merueiUeufe»
VNedamoifelleenla villedeBourdeaux . aagee de
quarante an? ou cnuiron: malade d'vne tumeur de
IagrofTeurd*Tn petit poiç , au dclFous delaiointurc de
la hanche reneltre,& en dehors, fcnroit par interualc dç
temps fur la dite tumeur & parties voifines vnc extrême
douleur. Pour l'appailer on auoit cerchc toui moyens,
appellat pour ce faire plufieurs médecins & chirurgics,
Toire meihacs des forcicrs & forcicrcs : tous lefguels
XX 4
10^4 H'tjioires admirables
ne fccurcnt lui donner aucun allegemeiudc fadoulcar,
Ella: à Botirdeaux.a iafuît. du Roy» appelle aucc autres,
je m-irou'iay au logi^ u'icclledamoifeile > oùtoft après
fa douleur lui pi lot. Lois clic commença à crier , fc iet-
tan: cà & làjfaifancdci mouu^mcni incroyables. Car cl-
ic mctcak ia cci\c entre les iambes , &: les pieds fur les
efpaiiics.aucc piuneius autres mouuemés merueillcui.
Ccft accès lui dura pre* d'vn qu'art d'heure,pendant le-
quel lepnns Ibigncufement garde, s'il lui luruenoit tu-
meur , ou ciael^iJCinriammacion au lieu de la douleur:
mais il n'yen auoitaucune , m ai voir, ni au toucher.
Vray cltque lors que ie touchois la tumeur fus men-
tionnecla patiente crioit li'auantagc. L'accès palTe elle
detneuroit en g'ande chaleur &(ueur vniuerlcllc &
la(îîti:dc de tous 'es membres, ne pouuanr aucunement
fc remuer, le demandai à vn iredecin de Bourdeanx,
lequel i'acofnpagngisjce qui lui fcmbloit de telle mei-
ucillc:il me fit refponre<^ucc*eftoit(à Ton auis ) qnelqt.'c
malin efprit qui lourmentoit ccftcpauure créature. le
ce voulus Iwi Contredire pour l'heure , attendu que ia-
maisien'auoy'vcu ni ouy parler de tel accident. C^rfî
c'euft elté epjleptie , perdition de tou.« les fensi'en fuit
cnfuiuie,aucc c-'nuulfion. Mais ceftc damoifclle ratio-
cinoit bien,& parloir cncoie mieux. Ay^ins faicl rapport
de ce fpedacle a meirKuis Chapelain & Caûellan mé-
decins duroy.ils firent graodemét eftonnez:& fut con-
clu entre oou< tous ( attendu qu'on aiioit procède au»
parau.intpar pluficui s moyens , lefquels ne lui anoycrnt
aucunement olte fa d'uleur)qu*on lui appliqueroit (ur
lad''Uleur «'n ca uere potentiel, lequel i'appIiquay.L'cf-
care cheure tomba vnr- fanie virulente de couleur fort
notre :i fut vei'cd.^puis ceftcdamoilelle n'auoir aucu-
ne douleur. yttaiHre ^mbroife Paré auliure des ^outtesi
Vn femblable faiâ: auint à la femme du cocher de la
roinc, demout ant à Amboife , au milieu du bras droit,
ayant par certains iours femblabics douleurs que la fuf-
<iiie damoirellcCeitc féme vint crouucr meneurs Cha-
pelain
^ mémorables, io6 ^
pclain, CaftcIIan&moi,à Orleans.fuppliantcjuc noûs
voulufTion. donner fecours à fa douleur-, fî vehtmenrc
qu'elle vouloic fc icttcr par les fencftrcs ,ayanc pvuir ce-
ft<i occafion gardes auec elle. N^us rciolulmes qu'on
luiappliqucioic vn cautère potentiel fur la parrie mcf-
mc , ainfi qu*auions faic à i.i damoifclle de Bourdcaujc:
ce Quc ic fis:& l'ounerrorcf )idtc, fa douleur cclîa , & i*a
depuis du io\ii^cïà\àC.Au> mtjme liu.ZT' chap.
TP^:M rLTES eftr anges des 'Payfaus en
dtuers endroits d'^Lema<me.
Oi
D
^s Tan mil quatre cens nonnrîce& vn,ceriain$ pay-
ùnsd'Almongûvv fe mutinèrent contre vn abhc
leur fcigaeur.&L leirouueren: acompagnezce cinq rniU
qui furent desfaits par les chefs de la ligue de Suaubc.
Dix ou onze ans après , quelques autres sVftoycnt fouC-
leucz contre l'Euefque & le chapitre de Spiie:& le com-
mun langage qu'ils tenoyent entre eux eftoii , que tan-
dis que If-S. ccieflaftiqucs domineroyent, eux ne pour-
royc:nt fub(îfter,fe plaignant des aûions du cleroé.de la
rapacité des reccueur$,S<: des pratiques dot ils s'aidoyét
pour efcorcher le pauure peuple. Il y eut du tumuîre à
E:f)rd,Cologne,VVormes , & à Spire encore, pour la
mefme occifion.es années i ^05>'i 5»-.& i S iJ.Dcpuis
les choks demeurèrent en farfeancc iufquf.sài'an i^ »4.
au mois de Nouêbre,que ies payTans fui-MS de .SigifniéJ
comte de Loupphen en Suaubc fe foulleuerent contic
leur feigneu, à caufc de Tes allions. Mclmcs ils décla-
rèrent tout ouuc-tement à vn gentil-homme, enuoyé
cxprcs vers eux , pourfça»io:r la caufc de leur tumulte,
<ja*ils n'aMoyeni point prin*; les arme; pour la tcligion,
ains adheroyt nt àl'eglifc Romaine.Deux de Kemptcn,
qui les fécondèrent ne fc plaignoy^Dt d^autrc thofe que
de la ty-anniedeTabbc leur fcigneur, & fc foulleuerent
au commencement de l'an mil cinq cens vingt ci nq^,
fàifaasdes rauageseûrâoges aucc (^uel(|uc$ autres pay-
ïo66 Hi Boires admirables
^ans affcmblct de diucrs lieux , qui leur rindrent tenir
compagnic,& fe trouuerent plus de doi^ze mille en vrc
troupe. Au mcfme temps Viric duc de Virtcmberg, ayat
Tceil par tout pour rccouurer Ton pays > don: il auoii e-
ftc forclos par ceux de la Iigu de Sjaube , pour s'eftrc
faifi de R^odingr ville impériale , s'empara de ccriames
places à l'aide de quelques amis afil-mblcz Mais les fei-
gne^rs de la ligue lui coururent fus promp-emQr,& par
ie moyen de George baron de Valpou'g , reconquirenc
Jes places prinfes par Vlric, & le chafTerent de fa duché.
Qa^oy execaïc, ils donnèrent charge au baron de faire
la guerre aux payfans, lefquels auoyent refufé toutes c-
quitables conditions de paix,& dcuenoy^nt plus furieux
de lour à autre. Apres quelques délais, finalement le ba-
ron rencôtre fîx mille d*cntre eux, & auec petite troupe
de câualerie les chargea, tua fur la place vne partie, mie
le rcfte en route, dont plufieurs fuyards fc noyèrent de-
dans le Danube, & y eut grand nôbre de prifonniers.Lc
mefmeiourvncautretroupedeces miferablcs fut rom^-
pue par cent cinquante cheuaux, & y en mouiut plus de
trois cens. Telles pertes amcnerét à raifon quelques vns
de ces payfans-.mais les autres ne voulas encêdre à aucîï
accord cômcncerét à fc desborder plus impctucufemenc
qu'ils n'auoyent encores fait. En fin, chaudement pour-
fuiuis par le baron ilsdonncrent lieu aux rcmonftran-
ce$ de certains gentils-hommes,qui auoyent pidé d'eux,
pofercnt les armer, & fe retirèrent en leurs maifonf .
Au mefme temps ily auoit vn doéieur Anabaptiftc
nomé Thomas Munccr,d2mcurantàMulhoufe enTu-
ringe, lequel feruoit de confeil aux payfans mutinez en
diucrs endroits , dreffoit leurs plaintifs , articles , & re-
monftranceSjqui eurent telle cÀScace, que nonobftic les
exhortations fcrieufcs de plufieurs excellens perfonna-
ges,&les paifibles mandemens des p incc Scmagiftrats,
ces payfans qui nedemandoycnt que troubles , fe mi-
rent en campagne Vn de leurs chefs fc nommait Geor*
ge Mctzler,rauernier à Ballembcrg , au diocefe de Ma-
yence.U amalTa premièrement deux mil hommes , anf-
^ucls fcyiadrent rcadre de tous coftcz plufieurs autres
eu
& memorMes. 10^7
en Fort grand nombre. Aprciauoir difpofé leurs iroa-
pes.ilscomoîenccnc àmarctc ,3rnaflcnt nouueaux cô-
pagnons, pillent, faccsgcnt , hruflcni &reruerftni tcur.
Renforcez, jIs atnrcnt quelques gé.ilr Honimcs à leur
parri.furprencnt des villes & chafteaux.Ia viJJe de VVin-
rpej^,cn laqu lie cflans entrez par trahifon ils firenc paf»
fer par les picques le comte de H.lflenftein auec quel-
ques t^cnnJs hommes, & tou^ les prilonricrs , voulant
par ce les cruauicz fe crdrc redoutables. Aupanirdc
Js ils continuent leurs lauages & faccagcmcns : tont
que neuf villes de rarchcaelché de Mayence fcioi-
gnentàcuï : puis, ils nHiegcnt & prenant AfchafFeni.
bourg, contraignent l'eucfque de ^trafboui g , Uiifra»
gan de l'archeueiquc de M.iyêce,de capituler au€"c eux,
& accepter dçs conduions fort inique*:. C'eftoit en Fran-
coniequc ce déluge couroites mois de Mars &d'AutiJ>
cftrns les troupes compofees de vingt mille pay fans,
lefquclscn peu de fcmaincs eurent pil'c faccagé & bruf-
lé près decinquante plsces,tant villes & bourgades que
chaftcaux & abbayes. Ilsauoyentiurc de n'< fpargnerau-^
cunprincc , comte, baron, chevalier , pi eftre m moine,
pour venger la mort de fix ou fept mille de leurs adhe-
rans que le baron de Vvalpourg auoit desfaits & taillez
en pièces.
Tandis que ceux là fe desbordoyeni ainfî , il y en
eut d'autres, qui commencèrent à faire de mefme au
diocefe de Spire.Du commencsmentils n'cftoyent que
foixante , puis en moins de rien ils fe trouucreu' plu-
fieurs milliers, &s'efta(-s ioinrs auec d'autres foulleue?;
es terres du marquis de Bade,fourragerent fon pays , &
le contraignirent d'accorder auec eux ; quoy fait ils re-
tournèrent vers Spire,afin de l'aflleger. Mais rtuerque
a!Iaaudeuant,& pacifij.lcur dônanc force viures,&: ain-
fi les efcarta.^ur ce il auintque quelques charii>tschar-
gezde marchandifesentrerét d^-'dans Brette , petite vi!!ç
lous la proicfc ô de l'eledeur i^alatin, & furent cô^rains
feiourncrlà,pour ne tôber es mains des pay fans, qui ro-
doyei es*? nui' os pour attraper ceftc proye,& farêt inflâ-
f ç pour rauoir,mcua^âs ceux de BrcLte>Ier<^ucls fe volas
10 6 8 Hijloires admirables
en danger a caiifc de telle garde eurent recours à PEfç-
ftcur, lequel y rnuoya deux compagnies , l'vne de gens
de pied, l'aurrede chenal. Les paylans firentdiuers ef-
forts pour auofr ce butin , mais finalement ils en furent
fruftrcz. li y en auoit d'autres mutin 2 & amaliez en
Suaube , aucc Icfqucls ceux de Franconic vindrent fe
ioindre » & vnis enfemblc pillèrent prcfques toutes les
villes , challeaux & vilJjges de laduchéde Virtem-
berg,bruflerent quelques abbayes, & firent de terribles
rauagcs.
Ceux dein hiute Alfacc fetrouuerent premièrement
au nombre de quinze cens.& commencèrent àfaire cô-
mc les autres. Q^lques iours après ceu x de la balTc AI-
face les ruiuirent,& après auoir faccagé plufîeurs villa-
ge; & coniients au bailliage de Hagucnavir , fe ioigni-
rent enfcmbl;: , failans vne armée d'cnuironvingr mil
hommps , & finalement après vne infinité de maux par
eux commis le trouuerent près de trente mille , & vin-
drentfe camper auprès de Sauerne. Ce feuenuahitaulîî
les confins de Lorraine ; & quelques autres mutins a-
pres auoir faccagé l'abbaye de Herb.:ft:ein s'arrefterent
là, puis allcrenttrouuer leurs compagnons à Sauerne.
Le duc Antoine, voulantefteindrec-sll embrafement dî
bonne heure , drefia vne armée de deux mille cheuaiii,
& de fix mil hommes de pied , auP^ucls fe ioignir fon
fi ère Claude duc de Guife , auec quelques bandes de
François efchappez de la iournee de Pauic. Ils marcher
tous enferable, & vont affieger cts payfans logez à Sa-
uern".D ai anr le fie^e, comme on cftoit en termrs d'ac-
cord,le^ troupes du duc, entédans qut- fix mille payfans
venoyent au Tecours è.z& aiïîeg. z,l7Ur vont au deuant le
dixhjifliefmc iour de May , les fnrprenenten vh villa-
ge nommé Lupfftcin , mectcn le f^u dedans , buflenc
vne parci>ide ces mutins & tuent les autres,qui ne fe de-
fcndoyent non plas que befus qu'ontraine à la bou-
cheie. Quelques iours après ceux qui eftoycnr en la
ville & au chafteau de Sauerne fe rendirent , efpcrans
quelque doux traitement, enjuoyon ne leur tint pas
ptoineffc.Car après qu'on leur euftfaitpofcr les armes,
àcun*
ér mémorables. 106^
à condition qu'ils auroyencla vie fauuc , ils paflcrcnC
dcfarrncz par ic milieu des coupes du duc. Aloispour
quelque Icgereoccafion s'cfnu-ut vn bruit , iclJcmcnc
«Jiîc pfclcjucs toui CCS mil. rabici fuient taiiltz i n piè-
ces lur le champ : incontinent la ville 6c k chafteau ru»
rcnt pijlez,au:c grand meurtre des habitanSjlans efpar-
gner pcrionnc. Vn peu auparauant quelques autres
roulicutzaJIeuri , nommez la bande de Clcber g,fe mi-
rencaulîwuxch^nipi , & après beaucoup de pil agcSt
j'eltans loinc^ à la bande de Colben , qui le comporroit
de ii.Llm:.,s achemincrcLicnrcmb;e au iccours de leurs
compagnons a ^auerne : mais ayans fcnrilc v^nt de la
dcsfaitte i s b'cicarterLnt rcgaignans leurs maifonS,
Comme le duc Antoine fe recir oi». , il cnundii que près
de lu s'efroycnt campez deux bataillons de pa\ fans au
nomb e de Icize mil.il les fit icccnoiihe, pul^ les ayant
cha.gcz ei. lua cinq mil iui la plarc , rcmcn.'<nt Ton ar-
mée riche de bucsn &l de pi ifooijic^ri, notamment de fil-
Ici ^ de f: mmcsque ks foldats traiteren. t'>"s-indignc-
mcni. On eltime qu'en cefte guerre du duc furent tuez
dix-i)uict miiie payfans ; ies auircs en conteiit vingt -fix
mil : & y eut croi» cens prifonuicrs exécutez publique-
ment.
Durant cc^ temptftes d'AHare les fuiets de l'ci^ftcut
Palatin fe muiînerri ^ilouflcuerentcn diuers endroits,
cornmtttans diS aétes ce;i q.î«- la faieur&Ia fdirion
ont acoultumé de conTcillcr. P;>r pîufieuis fois ce prii-
cc talchad'amoUir les coeu s, 6c lui mefmej alL vers les
fcdicicux , failani diuerfcs ouuertures de pacification.
Mais fa berigni;é lesenfl.>riimoit d'au a mage. Se de iôur
à autre leurs troup s le renforçoyent : tellement qu'il
fut cjnrramt ai-nalTcr quelques forces d'enuiron mille
f^ntaffins, aufquels icinignircnt quinze cens piétons,
& troiscens chenaux Icuczcs pays bas , &. amen z pat
rarcheuefqucdc Trcues. Le Landgrauey ai;oitcnu"yé
quelques gens de chcual , & penloii faire plusgiandc
Icucc > mais L.î propri s luîcis s'tfians ajff mbiez en ar-
mes,il fut coiitiaint employer les forces eu fon pays. Ce
qui fucceda ii bien que ùai câu£oa de fang il eu i4me.
I o 7 0> Hijloires admirahlei
fia bon nombre à reconoiflancc de kur dcuoir,& les fît
rctircrpailîblement en leurs maifons.
LVn des principaux auccurs de ccftc fcdition cftoit
vn Anabapufte nummé Thomas Munccr, homme du-
tout profane Sr fnnemi de la rel.gion d'Ale/nagne & dd
Romc.IccIiii s'elUt acquis f ucu: enue s quelques par-
ticuliers de Ma houfe en Turingc, pays dud jcde baxc#
dcfcouurittoftap es fon yenin : carilfaifoit du pref-
cheur. Il incrodaiCic doocencie aucres erreurs exécra-
bles la communion des biens du mondrjitrcr^anté dei
dignicez ôcertats. Voyant ceuïde Suaubcôc de Fianco-
nicen armes , au nombre de quarante mille payfaas ; il
fe met aux champs, fiic fondicde/ar liierie, amalTc gés
de tous coftez , alFocié d'vii morne renié nommé 1 hi*
fer,eliourdi & cruel au podibir. La première courfedd
Phiferfut enlacom-.é d'i^fcld qu'il iaccagea pillint ab-
bayes & chafteaux , tuant les gcncils hommes , &l dctc-
nanc les autres prifonniers.Munccr acompagné de rrois
mil hommes fe ioint à ceux dcFranculr. Icinelc6leu<
&duc de Saxe, Philippe landgrauedc HclT- ,auec quel-
ques autres princes & fcigncurs leurs voilîns , lugean^
qu'il ne faloit plus différer, amalfeient des troupes , ôC
Yindrcnt aflieger cts feditieux campez en vne monta-
gne,& ayans compaffion de la mulrtudc de tant d'h"m-
mcs ieduits , les folhciceretn par d ucrs mefîagtsde !î-
nrerlcs chefs de la mutinerie, poT-r les armes, û». le reti-
rer en leurs maifoosranec promclT^- qu'on ne es r cer^
cheroif nullement de ce fair al'a'.îcni., ain^. qacdt.flo'S
lout leur fcroic pardorne. Munccr feoranr b n qu'on le
regardoitjpenfapt ic garaniir parmi cts abuU z , leur fie
vne fediticufc hara-guc , en laqullc il lesalLuioit du
fecours àts Anges, àc mefdifuir desprmces> faifant va
long difcours de Ï3i melctiancccé des tyrans , & confon-
dant leî bons & melciiai s gouuerneur.s. ii aninnooic
ceftc pop'jlaceà rrnir bon , &: pour rompre coui traie
de paix tua vnj^éùl hommecnuoyc cîe la parc de» prin-
ces,afin d'amener les afaires à quelque compofiiion.Par
ainfi les princes furent contrains procéder par armes
contre ces rcduieux,lclqucls furent forccx Ôttucz à mo-
CCâUlf
ér mémo rabtésl ioy ï
cCftux,Ia plufpart d'eux fi abrutis qu'en lieu de fe dcfcn**
d^c ou de s'enfuir, ilschamoycnt vne chanfonpour in-
lioqucr lefainftEfprit, & Iciioycm les yeux aux nuecf
aucndic le fccours que ce fjux prophète leur auoit pro-
inis. Il eu demeura (ur le champ &enla pourfuite iuf-
ques au nombre de cinq mil. La ville de Francufc fjt
prinlc incontinent aprcs, & trois cens pnîojiniers y fu-
rcntciecuicz à mort. Muncer,irouué en vne chambre
où il contretailoit le malade, amené aux princes , geinc
rudement , paila par les mains du bourreau auecques
Phifer fon compagnon.
Voila comme les pays d'Alface ♦ Suaube , Franconie,
Ht(Ic,Thufingc ÔcauLies lieux eftoyent agitez. Mais le
g.andcff»>rt des paylars fe faifoit encore fentir en la
duché de Virtcmbcrg au diocefe de Virtzbourg aucca-
parcnce que la populace gaigneroit le dclTus, li l'on ne
s*y oppofoic piôptemcni. 5urce,par Tauis des feigncurs
confcderez en Suaube le baron de Vvalpourg fe mit en
campagne auec queques gaillardes troupes, & après a-
Uoir longucmentchruaic ces mutins, en furprint qua-
tre ou cinq mille qu'il desfit & tua prefquestous , î'ans
aucune pcrie de fon cofté. Les troubles de Virtembcrg
appaifez, il tira vers la ville de VVinfberg , laquelle il
print , & fie mourir cruellement ceux qui auoyent tué
ic comte (içHelftenfteîn. Entre autres en fut brullé vif
Vn lié d'vnc chame àvn poftcau » tellement qu'il cou-
roii autour du feu , pour lequel allumer lui mefme a-
uoit porté le bois. En après il fit mettre le feu dedans
VVmfpergjdc fendant de larcbartir,& en quelques villa-
ges prochains, condamnant à mort les habitans d'iceux,
qui furent exécutez publiquement pour la plufpart, cô-
ITie ils l'auoyent bien mérité. Vne autre troupe de muti-
nez coniinuoit fon furieux mefnageen Fraconic où ils
J-uinerent plus de deux cens places, prindrent la ville de
Virrzbourg & alTicgcreni le chaftcau. Mais le baron de
Vualpourg courut apres,les desfit & mit en routc,cftanc
fccourupar Louyseleti^-ur Palatin, lequel s'y tiouua ca
pcrfonne. Lors fui bfullé laques Becu^ingien capitaine
des mutinez, & vn preftre d'Eilénhout (l'vu des princi-
paux chefs dcia{cduiû;fuircrerucauccpluficur& autres.
toyt Hi/loires admirables
pour cftrctous chafticz cxcmplaircment.L'elefteur Pa-
latin prouueuc d'cjutrc pari aux delordics Turumuica
ior. pay . Mais eu telle loric ^u'ii Falit pDurfuiurt ceux
qui dcmcuroycnc lointswclcj-jcl-» finalcn cm tV.i; m - es-
fiits audjoccfe de Virczbourjj, :yjos pciLU icpi mil ho-
mes , tout leur bagjgcô: quaian(e fzpt piec«'S d'^m'lt:-
ric. Aprcscjue l'on ciill pourluiui en diucrs endroits ks
ïcftcs de CC6 irouf es , è. deslait en pluficurs tcncr.nties
tout ce qui fetrouuoic en g os; le. firuiuans, nuiâmcnc
ceuxc^UJ tcnoyent VVirtzboug , demanderem pa-don
& ouunrent les portes. Les v!£loricux ayan;, f.iii pendre
les principaux & plus cou'pabies de la ledinon, donne-
rentordre a. x afare^dc la Vilie &. du payv. Cela fait l'c-
Ic£lcur Palatin Fut contraint rctouinei en Ion pay , afia
de remédier au tumulte qui eftoir nouucilcmcn> jl rue-
nu. Les conTedcrezde î>Laubc p^urfuiiiirent lesicOcs
des liiuiincz , qu'ils cfcarterent finaltmcnr,& les con-
iraignîrint (c retirer chez eux. Ces fciiitions pcncr e-
rcut luiqucs aux Alpes : mais on clouta par loui b«n
moyen d'y re(nedicr. Geifmeier , l'vn des chet-- de cefte
confulîouii'crtatn retiré fur les terres d.s Venitiv n$ tue
tué a l-ad. de. Ceux qui par faute de bon auis b'efioyent
laiirzfeduirc furent chiftiez par lab<^urfe.mais les au-
teurs & premiers boutcfeux ne ti ouucrent point de mi-
fericorde. On olta les clochts à pluiieurs villages, & a-
uifa-on aux moyens d'eaipefcher tels malheurs pour
l'auenir.iant es villes qu'es champs E-i la dcniere rt^n-
côiredes paylanspourfuiuis par i'clcdeiir i aiatin.cmq
mil d'en-rc eux dcmeu'crent mofts i'.r la place : huift
cens farent tuez le lendemain, quelques vps de la mam
propred-ra.cheucfqucde Treues , & rrt-nt.- dtrs chefs
curent les teftes tranchées. 11 y eut quelques aurr s tel-
les exécutions faicfles puis après, pour teni! les lun.ii âs
cndcuci':ôc iV rrouua qu'en beaucoup de ville; !c peu-
ple eftoit int-cctédeccftc contagion , laquelle en peu de
mois s'efpandu par 1* Alemagne,& fi' tant de maux qu'il
cftirapoûible les exprimer , lediabl- ay-nt iei cceftc^
pomme-dc dilcorflc pour rtnuerler tout , fi iJîcn pa- fa
eracc n*euft donné force & fageflc à aueiqucs princes,'
^ poor
& memcrahles. 10.7 i,
pour remédier aux drfordrcs. Sur tous autres IMedtcu'
l'alatin y ac<]mt giandt; louange, ayant monft.c par ef-
fe6t,qu'ilvoulou procurer par tous moyens que lei fu-
iets raimaifcnt. ût encore que quelques-vns fenriffenc
la rigueur de iuftice , le nombre en fut petit au prix de
ceuï qui obiindrent mifcricorde , de laquelle ils s'eftoy-
cnc rendus du tcut indignes. Au demeurant , ccfte guer-
re fie fentir à grands & à pctits,quel'auaricc, l'orgueil ^
Ja rébellion n'enfantent lamais chofc qui vaille, & n'ai-
lircntquedcfordres horribles accompagnez de la ven«
geance de Dieu , laquelle fembk marcher fî lentement
qu'elle ne doitiamais arriuer. Mais en fin elle paroit (î
force»qu'il n'y a moyen de lui faire tefte , que par chan-
gement & amendement de vie : tous autres moyens c-
Itans trop foiblcs pour refifter. Celte guene fut com-
mencée & acheuec en Vx^i de l'an mil cinq cens vingc
cinq,& y moururent près décent mille paylans , qui
pour efchangesuinercni infinic-s places*^: firec de mcr-
ueilleux dcgafts, & tucrent grand nombre de perfonnes
de toutes qualitez. 'ï^ierre Gnodal en fan hifloire dn tumulte
des payfans d' Alemagne.l.Sletdan au> ^-iiu.de/es Commentai-
reSyfur ta fin.
TV :M y L TES des ^nabapti(^es.
L Es tumultes des Anabaptiftes , refpace de plufîeurs
années, à fçauoir depuis l'an i çitf.iufquesà i 540.
& après en VVcfphale, Hollande,Suiire , Silefie , Polo-
gne.Morauic & autres pays,dont font procedces des cô-
fufions eftrangjs; contienenc infinies particularitez mé-
morables & de grande inftrudtion pour toutes fortes de
perfonnes. Mais pour ce que ce volume aprcche de fa
iuftegroffeur , & que ces tumultes requièrent vn liurs
entier , à caufe a infimes paiticuiaritez remarquables,
nous enrcferuerons l'ample difcours , comme aufli
d'autres tumultes , pour l'vn des volumes fuiuans , lî
Dieu permet que nous pourluiuions telle entreprifc,
en la diuerfi:é de laquelle nous eflayonsde mçfler en-
fcmblclcplaifir & le p.'ofit de la Icdturc de tant de
roerueilk» de la nasmoiic de nos pères & de la aoftic^
¥ï
fo 7 + HiBoires admiralfles
LAurcnt Almeide , fils du viccroy de Portugal es In-
desjayanc pat deux diucrs iours en Tan i 5 oS hcu-
rcufcment corabacu la flotte des Mahumctiftcs en la
rncrdePerfe , fat finalement tué J'vn coup de canon.
Les Capitaines & foldatsdcfonamirale, occis ou grie-
uemcnt bleffez , ou las de frapper , reftoyent en vie en-
core dixhi.id ou vingt,fi reci eus dttrauail & de com-
batrc,cjuc Icsennemis montans enfouie ne irouuereac
rclîftancefïnon delà part de deux Portugais. L'vn fc
nommoit Laurent Frerio Cato leiuiteur domeftiquc
d*Almeide.Ice.ui ayant perdu vn œil ai' combat, par vn
coup de flefchc qui le lui crcua,couu;;rt de fang en celle
part , ôc de larmes en l'autre œil, à ciufe du corps de
îbn mailt; e près duquel il eftoit , le voyaat enuironné
<ie Mahumetiftes ,cnlKude pcidre courage fe roidic
au dangsr,& d'vn'. force nouueiie auec l'elpeeau poing
commence à chamailler fur eux, en abatplufieurs aa-
tour du corps defon raaiftre, fur le corps duquel il tom-
be finalement, terralTé de coups, & expire glorieufe-
mcnt, après auoir vaillamment vengé l'a mort & celle
de Ibndit maiftre. L'autre Portugais, nomme André,qui
gardoitlahune,y rcccut vne harqu. buzad; er TeCpaule
gauche, tellement qu'il en perdu l'^Tage de tout le bras.
Nonobftantquoy,rcfpacede deux iours entiers il com-
batit du bras droit , repouflant de tel courage les enne-
mis qui vouioyervr y monter , qu'admirans la Taleur,il$
promirent lui fauucr la vic,s'il vouloitferen4re;ce qu'il
acccpta.Euxlai tiadrentpromefrc,& lerenuoyerêt Icu-
rement vers les aurres Portugais,quicftoyentcn la flotte
fur icelie mer , lefquels le recueillirent honnorable-
inenr,& par les chefs fut mis en gardej& receuc de là en
auant double paye. Ccftc vidloire coufta cher aux Ma-
humer.ift-.s . qui y perdirent fix fois autant a'hommes
QUe les ! ortag^is.? yitajj-ee at* ^.lïu.dei'h'tdes Indes.
L'an 15 c 3.Andrét)o centra p^ur l'empereur en l'if-
JedeCorf;, & s'eita»i. rendu maiftre de quelques pla-
ces airie«ca5.Fiorc:,où les alficgez dcftuucz de viures,
&fans
é* memorfiihtesl toj^
6c fans efpoir de (ecours , forcez finalement de faminci
capiculercDtaucc Dore, de rendre Ja place armes & ba-
gues fauuesMais ils ne pcurenc cane faire qucles adie-
geans voululicnt prendre à merci vn capitaine Corfc*
nommé Bernardin , ains le demandoient à dilcrecion a-
ucc fa compagnie, lernardin n*ignorani pas cju'iis a-
uoycntenuie de le faire mourir hontcufcmcnc, délibé-
ra auec quelques- vns de Tes plus féaux & côfîdcns mou-
rir pluftvjfl 1 cipce au poiogcjuclacordcau col. £t pour
ce que le temps eftoit bref) & qu'on auoit conuenu de
rtndie la viile le lendemain matin , il pratiqua enuiron
trente foldats dts liens, les plus braues de fa troupe , qui
n'cftoycntenmoirdredat ger queiui, aucc lefquels il
V refolut de fortir hors la ville de nuidt,& pafler à traueri
le camp des ennemis l'cfpee au poing : & fîcasauenoic
qu'ilsfuflenctuczjla mort leur feroit plus glorieufe,quc
d'eitre produits au fupplice , & mis en monftre plems
d'opprobre à leurs ennemis. O. elloit le danger où ils al-
loycnt fc fourrer fi apparcnt,que la mort n*efloit moins
certaine d'rne part que d'autre. Carilfaloit fduflcf fiC
rompre trois corps de garde < auant qu'eftre à fauuetc«
Mais l'apparence du danger & la grandeur du defefpoir
leur haulToit le courage , &fdifoit croiftrelarefolutioa
de ne felaiffer tuer fans auoir premièrement fait bou-
cherie des ennemis. Ainfidoncqucs fuyuant leurdcli-
bcrationjils lortirent delà ville enuiron minuiâ: , &
donnèrent dedans le premier corps de garde auec fi gra-
de prudence Scfîlence , qu'ils eurent twé les fentinelles^
auant que le deuxiefme corps à': ga 4^ en fccuft les nou-
uelles.D'vn raefme courage ils courent charger & rom-
pre le fécond, oùilsextcrmincrenr grand nombre d'en-
Hemis.frapans à droidU & à gauche,bleirant,tuant , & fd
iettant dedans à telles baiffees comme lions rugilFans
â irauers vn rroupeau de brebis. Par ainfî fe faifans che-
min auec refpee, fe ruèrent fur le dernier corps de gar-
de , où le bruit ciloit plus grand , à caufc de l'efmcuttf
des prccedcns. Toutefois leur croifTani la vertu aube-
foin & à mefure qu'ils auoycnt plus d'afaires fur
ksbras] (hamaïUcrenc tant ceux qui fe trouucren»
YY 4
107 ^ HiHoires admirMes
deuaot eux, que finalement après grand meurtre d'enne-
mis ils crchappcicnihors du câp,tous couuertsde fang,
&:vindrenc (e rendre la part vu tltoitlcficur de Ther-
mes. A£le héroïque & admirab je, qu'vnc fî petite com-
pagnie au paflé maugi é toute rcfiltancc à trauers va câp
impérial, 'i'aradtn en fu continuation de l'hijioire de noïire
temps. '
Deux ans après , le duc d'A'ur aflîegeaau mois
d'Aouft aucc l'armée impériale v:>c place en Picdraonc
nommée Samdt lac , & y fit vnc rucc battrie l'cfpace de
cjuinzeiours. Dedans la place cftoj-ni entrez le fieur
dcBoniuet colonel de rinfanierie iTiDÇoiic 5 & Ludo-
uic deBirague ,acompagne2 dedeux mil homes choi-
fis,dc deux enfeignes d'Akmans , de deux d'Italiens , &
d\nc compagnie de cent ch:uaux légers Albanais. Ces
aflicgcz fiicnc detrefbcllcs forcies lui les aflficgcans,
lefqueis n'eurent onccjues le crédit de pouuoir reco-
noiltre le folle, la contr'elcarpe duquel ne fut iàmais a-
bandonnee des François:& en dcfpit du duc &dc toute
fes forces j troii cens harqucbuziers François ne vcu-
lureac lamais bouger du ijiouhn qui ci\ ho. s la vjlle:
& ne reçurent cmpefchcr les ennemis que quarante fa*
lade» de la compagnie du fieur d'Anuille n'yentraficnc
chargez de pouldres & d'autres munitions, à la barbe
de tout leur camp. Pendant ce ficge,!e fieur de Boniuec
entreprit , d'vn courage inuincible, de montet lur cer-
tain haut baflion.couuert à\a bouclierBarcelonois en
main, fous lequel il fut longue efpacc , confiderani la
grcsie de leurs harqut.buzades fur fon bouclier : & ne
voulut bouger de là , iulqoes àceque fesgens vindrcnc
l'en tirer par force. t'w U mefme continuation.
Andréa: Michel de Vafconceificres , gentils-hom-
mes Portug,is,cnuoyez l'an i y i o. chacun en vn brigâ--
lin àpart,pa'- leur pere,gouuerncur de Scpte en Barba-
rie,pour côb.itrcvne frégate dedeuxfreres courfaircs,
M. chcl bouillant d'ardeur fii voile le premier , Jaifiant
fort loin fon frerc aifné , qui ne hafioit pas tant fcs
^oiçais. Aiafi donc Michel afiâilUc couragculement la
£re-
é* memorahlesl ï o 7 7
frégate des courfaires qui eftans beaucoup plus en n5-
bre.ea vn grand vjilTcau contre vn petit , & cous gens
de guerre commandez par m chef t^tpeiimenié , hardi
& adroit > le mocquoycntdc Trftortdu briganrip, &
meimes faurercntdcdiiis , où il ) eue vue rcrnbîc ef-
crim;-. En fin les folda^s de Michel perdans courage, fe
vont cacher en la fi-nine. Le gouucrncur qui voJci-
geoit aucc quelques cheuaux au long delà mer , pour
voir ce combac , apeccsuant les ennemis dedans le bi i-
gancin,crie après André , & lui fait fîgne qu'il aille vi-
rement Iccourir Ton frère. Mais auantqu'André apro-
chaft, Michel à force d'armes fît dclïoger les eontmis
dcfon brigantin,coupa les ntaches qui le icnoyent lie
à la frcgaterpuis ayant appelle ceux qui s'eftoyét cachez
en la fentine les arouragea iclîement , qu'il courut fus
aux ennemis, tellement que les vaiflcaDx acrothez , la
meflee recommença de plus grande fui ie qu*aupaia-
uant. Le maiftrcdu brigan in, fon fils.vn autre,fu:ert,
tuez à coups de picques, & Pierre Vicirc bleffé à mort:
qui fut caufe que quatre des ennemis fauîerent en la
prouè du brigantin : mais Michel qui tenoit vne pic-
que au poing en donna te! coup dedans la gorge de
l'aiftiédes deux courfaires qu'il le recuerfa mort. Sur-
ce il empoigne vne autre picque , & donne de telle fu-
rie à trauers les trois autres : qu-'il les contraint rcfauU
ter en leur frégate, &trouue moyen dedefgagerlon bri-
gantin.Puis il court vers lapouppc, criant après le biai-
ftre, que c'elt qu'il faloit faire : car il ne içauoit pas que
ce maiftre eull elté tué. Puis tournant les yeux aperccut
Vicirc ayant les boyaux hors du vcnirc ,qui lui dit» jfai-
tes fortir ceux qui le font cachez:&: puis qu'il n'y a plus
que vous , gaignez le bord à force de rames. Michel a-
pelle incontinent ces cagnirdiers : cequeveu par \c%
ennemis, & que les plus aiFeurcz foldats de Michol e-
ftoycnt morts ou bien blell'cz . ils iHaillirent derechef
lebiigancin. Sur ces entrefaides André Vafconccl fc
monftra : lors les ennemis lailczdu combat , affoiblis
de la perte d'vn de leurs chefs , voyans vn fecours tout
frais aprocher^fc retirent. Mithcl, félonie confcil de
YY 5
joy^ H^olres aJmiyali/es
Vicirc, vogue couragcufemenc à eux, & les cftonne tel*
Icmenr, qu'auec toutes leurs rames ils commencèrent à
voguer vcis le riuage bppofite, & fc icttans en mer pour
gaigner le bord.la plufpart furent noyezthuid (c fauuc-
rent en terre, où ils tombèrent es mains du gouuerneur
quicouroit çi& là.Par-ainfideuant qu'André Vafcon-
cel aprochaft,(on frère puifné auoit fini la mellec. Ofo-
rtus en l'on^iefme ltu.de Ihiîi.de Tortt*gal,fefl. 5 t
Vingt hommes de cheual , Portugais, de lagarnifon
4*Ar2ile en la coftc de Barbarie > fortis par congé du
gouuerneur , pour aller pefcher des tortues de riuiere,
afin de gratifier d'icelles vn citadin malade , lequel a-
uoit befoin de telle nourriture : eftans paruenus à cer-
tain fleuuc diftant aflez loin d'ArxiJcils dcfiellent leurs
chcuaux , les attachent par les licols à quelques arbrif-
feaux , & fichent leurs lances en terre. Puis fans appre-
henfion d'aucun danger fedefarmcnt , fe dcfpouillent
|iudr,& le plongent en Tcau.ll faifoit fort chaud,& eux
quiaimoycntà ferefraifchir, s'tfbatoyentà nager , &
pefcher auec les mains force tortues pour Uur malade.
Eftans defcouuerts par quelques efpiôj ,toft après deux
cens caualiers Mores du roy de FezparoilTcnt pour les
attraper. Eux qui parauant ne faifoyent que huer & ri-
re à gorge dcfployee>fortent virement de l'c^u , tirept
leurs lances de terre , & fe Jettent tout nuds fur leurs
f heuaux defrellez,& desbridez, picquans des talions , le
licol pour adrelTe , droit vers Arzile , où l'alarme eftoit
bien chaude,à caufe qu*on auoit defcouuerr ce gros de
c^ualerie.Les Mores courent apres:mai$ les Portugais»
quoy que nuds, ^ n'ayars que le fer de leurs laces pour
fauuegarde ^parente, tournent l'aillamment vifagc , &
arreftrnt les plus efchaufFcz , au moins mal qu'il leur
fut poffible. Auint que l'vn de ces nud* glilîa & tomba
Je fon cheual par terrermais vn fien compagnon nom-
mé Antoine Coutin ( quidc Mahumetiftes*cftoitfait
Chrcftien)foigneux de le garaniirjbailTe fa lance.Sc do-
ue fi rude coup à vn More , courant deuant les autres,
qu'il le ^efirçonnç.puis tcn4 14 waia a Ton compagnô,,
4^1ç
& mémorables. i <5 7 5'
& le charge derrière foy fur vn mcfmp cheual.Tous ar-
riucrcnt tains & faufs dedans Arzi.i;,/)'ai)S eu pour rê-
concrelc fccours dj gouucrncur & de loute la caualc-
lie, qui les acommodi de manteaux pour couurir leur
nudué.Les Mores n'eurent peur butin qu'vn chcua, &
les fciles.bridcs, boucliers 6^tikz de ces raillans hômcs.
En la mefme htJ}oirc au commencement du l t Uu.
Quelques annefs auparauant vn cheualier Portugais
furnomméBar'gue,fc trouuani en vn rude confliô con-
tre les Mores, & royanc bas vn fien cuinpagnon que Be-
tagogin grand fcigncu • More auoit renue Icpai terre,
& tafchoit le eue'» courue lus vaiîlament à ce rvigneur>
lequel il cranfperça dVn coup de lance. Le fils de Benta-
gogin acouraucla dtflus pour fecoufir (on pcte.'ft per-
cé à lour de la melme lâcc &main de B^ngiie.lequel en
vn mefme eadro.t & inftant tua deux principaux enne-
mi;,& fauua la rie à Tvn de fes compacriocces. ^u i «./j.
de la mefine Jnjl.fefi.j.
L'kiftoiic d'Angleterre fait mention d'vn roy Henri
1 1 I.qui Pan 140 i .en vne bataille tua de fa main trente
fix hommes de les ennemis. 'î'oltd. yirgtUiu.i i . On lit
que Scandcrberg prince d'Albanie , a tué de fa main à
coups de cimeterre en diuerfes batailles & rencontres
trois mille Turcs; ayant acouftumc de ne donner qu*vn
coup à ceux qu'il attrigiîoit. Et outre ce que fon cime-
terre eftoit grand & fort pcfant , il le manioit de telle
force & adrelTe qu'il n'en frappoic iamais à faute. Il
dcsfit en bataille rangée fept ba(ras,mit auiantd'armce»
Turquefques en route , & pilla autant de fois leur
camp,fan«auoir iamais refufé bataille , n'y monftrc
oncques le dos à l'ennemi, ni de fa vie eu peur en qutl«
que danger qu'il fe tiouuart:r»c fut iamais blclTc > fors
vne fois & bien légèrement en lacuifle. Quand il en-
troit au combat,& au plus fort de la racflce, la leure de
JelToui fc fendoit , dont fortoii du lang en abondance,
C'a cftél'vn des plus vaillans 1 rinces , qui au efté de-
puis pluficurs centaines d'ans. H mourut l'an mille
quatre cens foixante lix. ^ann darlet ct* "^Joue en la yie
YY 4
""l o 8 o Hîjloires admirables
lean Fulgofe charte de Gènes , auec fit autres ficns
frères fçJchmt bien que Bernard Adorne, chef du par-
ti conir.iire,&: pour lors duc de Gcnts , ef^oir enuiron-
lîc de fÎK cens kommeî qu'Alfonfe d'Arra^on fuiaaoic
fournis pour la ga- de.oultre rn trcfgrand nombre d'au-
tres roidits,fe mu à la voile l'an i 447. vers Gdoes , &
cnt'é fur la miiiaift dedans la viiie auec quatre vingti;
hommes,mafcha droit au palc'is,& alTaillant la raailon
ducale , quoy qu'il futtbltfTé en l'vne des cuiffes & au
vifagc , & prcfques tous Tes gers couuerts de playes,
neantmoinsla vaillance fut relie c.u'à fonrrelgrand hô-
neur il chafTa les Adornes, fercni u rnaiftre de larille,
& recouura la dignité ducalc.f^i^yj'è^j» 3. Itu. defesexem-
fles.chap.t .
Du temps de Ladiflas roy de Hongrie, il y a enuiron
«o ans, Paul Kinis,chefdts troupes royales > délibéra
d'efcaler de nuid vn chafte^u te-nu par les Turcs , pour
auoir vn trefgrand butin qui y eftoir. Il auoit à fa fui-
te vn Croate,vaillant homme, lequel monta le premier,
&quoy qu'il futblertéen X ç. endroits de fon corps , il
combatii fi vaillamment qu'il mit en route ceux de de-
dans, qui vouloyent l'empefcher de franchir le rcmpar,
donna moyen & loifir à fes compagnons delefuiurc,
tellement qu'ils demeurèrent maiftrec. Il obtint du
Roy, pour loyer de fa vaillance , vnc couronae murale,
de ux cens ducats, & vne robe d'cfcarlacc. Bonfin. Hure 5 .
'Decad. 1 .
Vn folda^ de Raucnne,r5ommé Hoftaiïe,3 la foldc des
François, fa : le premier qui monta & entra de viue for-
ce tf cl" viill^^mment dedans' le chafteau de Pauie , mau-
gréla r.fîftancedes aflîegezraa moyen dequoy il obtint
dufi^urde L*autrec,pour loyer de fa valeur, vneftatuc
de brozefort andque de l'empeieur Marcus Antonius,
de trefgrand pnx, reprcfcntant ceft empereur à ckeual.
'P. loue au t \ .litt.de fes hijr.
En la guerre qu'Albert marquis de Brandebourg fit
I ceux de Nuremberg^! afïïcgca & força Grauenbourg,
ville ayant bôs folfez & hautes murailles,aucc me gaf-
ùiioa de ciaq cens homaic$,ouIirc les habitans. L'cfi
^ caU<Ie
& mémorables, i o 8 1
caladcfut prcfcnrcecn quatre crif^roirs. Albert cho; fît
Celui où le folTé eftoit plus profondj," & la muraille: plus
hante : & faifant le plus d*tfF(»rrd'r ce cofté , moniale
dcîixicrmc , & tut le premier qui lauta d-rdcffus la rviu-
raillc en la ville , où eftanc enuironné de plafieurs cita-
dins,il ies fouflint & r-pi^ufî'a vaillamment luifcnî, iuf-
ques à ce que les gens fall.nt à fon fccours. La ville fut
piinre,pillcc& faccagcc:ciais il nepermitquc violente
quelconque tuft taifte au:ît:rmmcs ni aux filles. Zw/w^'^r»
au théâtre delà fie humaine, -roi. 8.//». 4.
Tadioufterai pouf clolturc de ces exemples de vail-
lance ( referuant ailleurs vn ftcf^rand nombre d'au*
très ) cequel''hiftoiredc noftre temps nons f^it voir
des vaillances des capitaines Piles & la Riuiere , en l'an
I ï ^t. Piles, (impie gcncil-hôme d'auprès de Bergerac,
Tenu à Orléans auec les compagnies amenées de Gaf-
congnepar Grammont , entendant que Curie &Mon-
luc faifoyent des ranages eftrangcs en Guyenne , le len-
tit tellement efa eu du df fîr de kcourir fa p.itrie , qu'a-
ucc quel rje nombre de foldats il partit d'Oileans, &
fauoriféde Dieu en fon voyage bien long & bi n dan-
gereux^arriua deda Xainftes,au meimc temps que Va
ras après fa desfaiflf , là cù s'eftât en vain effayé de per-
fuader qu'on ne laifTaft point le pays dutour defnué de:
forces, profita fi birn qu'il ne lui relta que fix folda:s.Cc
nonobftat il fè refolut de mourir en la peine , on de fou-
lager Tes amis comme il pourroit. Chacun donc prenîc
ic chemin d'Orléans, lui feptiefme le renditen fa mai-
foa prochaine de d-. mi iicuede la ville de Bergerac, ou
il y auoir garnifon d'ennemis , & d'où le duc de Moiit-
penfier cft^oit forti peu auparauanr. Eftant là, fon pre-
mier delHin fa: de s'enquérir le pluscoyemeu! . & ce-
pendant le plus diligemment qu'il lui eftoir poflible»
oùil y auoit defcsamis , ne doura>npoinr qu'il n'y en
cuft plufiturs de cachez çà & là:ce qui lui fucceda fi bié,
qu'en peu d: trmps quvlques-vns d'iceux fe rendirent
vers lui,aufquclsil afiigna leurs rctraires , fc tenant ea
vn lieu le moin*: qu'il pouuois & retournant quelques»
£oii cnfamaifon; aucc bonne imelligece pour j'afiTcm-
*! o 8 L Hijloires admirables
bJcrau bcfoin. Son fait tinfi commcncé,âyant entendu
que ceux de Bergerac dclibc>oyci de faire mourir quel-
ques hommes mnocens qu'ils tenoyeoc prifonnicrs , il
fil vn aile vrayementheroique , ayant atTemblô trente
foldats d'eflitc , auec lelquelss'eftant ietic foudainemélf
dedans la ville, ileftonna reilement lagarde & toute U
gunifon , à laquelle commandoit le fieur de Lauziin,
voire route la vilie, ayant marché hardiment parle mi-
lieu d'iceilciufqaes à vnelicne maiion ^u'il y auoir,
qu'en lieu de l'aiTaiilirjls l'enuoyercnt fupplier de for-
iir.luiofï'raos tout plaifîr & feruicc. Mais fa rerponfc
fut qu'en licudefortirilleurcoupcroitàrous la gorge,
s'ils ne lui rendoyent prefentsment tous \cs prifonniers
dont il eftoit queftion,lefquels ils lui rcnuoyerent auHi
toft auec viures pour fondifner: & ainil fe retira chez
foi. Le bruit de ce vaillant a6le,& de ce qu'il auoit fou-
went furpris,&defmontc quelques vns de Bergerac,fan$
toutcsfois les auoir endommagez en leurs perTonnes,cf-
meut tellement tout le pays, qu'il fut pourfuiui de tou-
tes parts. Cela rempcfcha grandemct de faire fon amas»
pour eftre contraint de fe retirer pour quelque temps.
Mais il laifTa autour de Bergerac , vn ieune & trcs-vail-
lant gentil-homme nommé la Riuiere , queDieu luia-
uoit adioint par vnc finguliere prouidence , comme les
effets vrayemcnc admirables, le mo^ftterent toft après.
Son premier exploit & coup d'aprétilTage aux ar mes,
comme de celui qui eftoit forti des efcholes de Thou-
loofc , pour fuiure Grammont à Orléans au commen-
cement de la guerre ciaile,fut tel que s'enfuit. Enire les
capitaines de Monluc il y en auoit vn nommé Rezat,de$
plus mefchans & ex crables hommes du monde. Icclui
courant le pays pour piller & rauagcr tous ceux qu'il
fçauoif eftre de la rclig ô,lors rudement pourfuiuis par
toute la Fr.îce,trouna moyen le ly de Décembre de fur-
pi cdre la ville de fainfte Poy fur Dordongne.y ayât fait
gljffer I io.de fes foldats en habit de payfans vn iour de
marché, lefquels n'oublièrent tour quelconque de leur
nieftier.c'eft à dire de piller tout ce qui leur eftoit bon.
SurceftcffroyUplufpartdeccoxdcU ville reftans de
U
é* memorahUs. 1085'
U religio fe fauuercm pardcflus les murailletjlcs autres
furent far pris ,& noiamméi leur miniftra nommé Ciu-
fcau , qui farencrous mis entre les mains d'vn certaia
prcuolt à la haftc,c)iie Rczat auoii toiî{îv>urscn fa fuite,
fe vantant de lui aiioir fait pendre 700. hommes depuis
ces guerres, & faifant bié Ton copte de traiter de mefmes
Jelédemaintous les prilonnicrs, notamment Crufcau, le-
quel 3)'ant molcfté d'infinies niées &: blafphemes il tc^
noit enferré & attaché au pied d'vn lift. Ceux qui s*e-
ftoycntfauucz deJa ville, 'étirez dedans vnc grange, de-
Uiîoycnt cnfemble des moyens de rétrer: mais c'efto) ce
vains propos , fans la venue du capitaine la Riuierc , le-
quel ayatoiii Icbfuitdecefte furprifedc Sainfle Foy,&
defcouuertque quelqnes vns parloyct d*y rertrer,fe ren-
dit aofTi loft en cefte grange, où il irouua petit nombre
d'hommes, & la plufpart ayant pcn de coufage,quelque
chofcqu'il leurdift & promift.Ce neantmoinsrefolu de
mourir ou d'y entrer, acôpagné de trois harquebuzicrs
feulement, de i 4. arbaldticrs à la mode du pays, & de
quelq ues'payfaDs aoec des fourches, il fit fi bien que po-
fant (ti efchcUes en lieu propre, lui & fes gens entrercc
fans eftre defcouuerts, iufques àce qo'cftâs affez près de
la place où eftoitalTî' le corps de garde de Rczat , vn de
fafuiccpar mefgarde dclafchafahatquebuze.La Riuie-
rc ne perdant pour cela fens ni courage, commerce de
crier par la rue,come s'il cuft eu grand' fuite, qu'on ine-
naft foixante harqucbuziers d'vn colté , & cinquante de
J'autrepuis donna de telle furie dedans ce corps de gar-
de,que tâtoft il fut mis par terre,fans qu'vn feul elchap-
paft.Les foldats de Rezat, logez çà & là,ayâs ciii ce pre-
mier cri, & penfans que la ville fuft pleine d'ennemis, fe
Contcnoyent dedans les maifons, ayant cômandé la Ri-
uiere à fes gens, après la de faite de ce corps de garde en
la place ,dc fe tenir quoi£,5i sas due vn fculmot:en quoi
il fut tellement obcy, qu'on eufl dit que ce qui eftoit a-
Uenu n'cOoit qu'vnc farce. Rezat & ^cz gês prnfcrét que
il y auoit en c^^Ia quelque ruzc pour les atirappcr au lor-
fir des mai<;ôs,ce qui les retint encore plus d'vnc heure,
iof^iie; à ce que quelques vns cpmencercc àfoicir ,urâ$
1084 Hiftoires admirables
droiflàlaplacçjpour fçauoirqncc'cftoit: lâou(au pris
qu'ils arriuoyét)il5cftoyent taillez en pièces ,iijlqut:s à
vn grid nôbrr. AÎôc la Riuiere & Tes gens prindrét har-
dielPe d'étrer es mairons,!k de les fouiller , sas elpa'gncr
aucû des ennemis. Rczar,en ctt^ etfroy, n'ayant conieil,
force ni courage, nô plus qu'vn brigâd qui le: void entre
Ils mains de laïufticcayîc ofté les fers a Crufeau,cômc
ça de l'appeilcr Monfieur, & de fnpplierceîui auquel le
iour de deuant il auoi: tât di»; &fait d'outrages, & mii la
chorde au coI;lcqucl lui ayant faiâ: vne crneuîe cenfu-
re de Tes cruautcz , & ramentu vre refponfe qu'il iuia-
uoit faiâ:e le foir preccdét, lors qu'on le menaçoit qu'il
feroir p6du le lendemain, Qvje peut eftre la mort de Re-
zat&des fiés leur eftoit plus proche qu'à Crufcaujpro-
mit de s'employer fîdelemét à lui fauuer la vie.cômcdc
fait il en pria bien fort la Riuiere , lequel eftoit entré
dedans la chambre l'efpee au poing.de forte que Rezac
fut baillé en gardc.pourauifer puis aptes ce que l'on en
feroir. Mais fur le miJi il ne fut poflîble de retenir les
foldars qu'ils ne le cuafTent & trainaflènr par la rue, com-
me anfÎ! fon enfeigne & fon preuoft : quatre-vingts de
{ts foldats ayans efté tuez auparauant.,
Buric & Monluc indignez de tels exploits enuoyeict
quelques enfeignes de gens de pied en cei quartiers la,
Ic(quels rauagcrenr d'eftrange façon tout le pays d'en-
tre Bergerac & Saindle Foy,d*où la Riuiere s'cftoit reti-
ré incontinent après l'rxecuriô de Re/.at.Icelui ne pou-
uant endurer lesexrorfîons des gens de Monluc , alloit
de nuiâ: de village en village ccrchant des hommes de
bonne volonté , defquels ayant recueilli quelque nom-
bre , & auerti que le capitaine la Sale eftoit logé aucc
trois cens foldars au village dt Certain , délibéra de \ts
alfaillir, menant fix vingts payfans bien refolusauec
douze bons foldars. Eftlt'arriué p'es du vilbge en plei-
re nui(ft,il départ fa troupe en derx.,afîn qu'exploitant
en deux endroits puis après tous les fiens fe rencôtraf-
fent,&fit fi bien qu'ayant furprins les ennemis , il y ea
demeura fur la place iufques au nombre de fept vingts,
faas que la Riuiere perdit vn feul des fîens.Mais il y eue
& memorahles» 1085
dudcfordrc , qui empelcha que la Sale ne faft entière
mène desfait aucc le rtftr de fci gens. Car ics roidais, en
lieu de le ranger à leur chef, comme il leur auoit com-
raandé,s'amulcrentaubi)(m,qui fut caufe que la Riuie-
re.pour les retirer de ii,&: pourcc qu*iiscftcycnt las, fuc
côiraint de fe retirer dcuantiour en deltoutc , au Jraux-
bourg de la Magdtlaine , qui cftl'vn ie ceux de Berge-
rac. Ccpendanr,oUtrcs cinq compagnies , logccs à i'cn-
iour,ayans oiii l'alarme de Caftain i^aHcmblercni &râ-
gercni en bataille , & le tindient amû lufques au iour»
qu'il Icurarriuade rcnfoit vnecorneiie de caualcrit.La
Riuicre d'autre part , pour eftunnci ctux de ia ville fie
fonner le cocfain des l'aube du lour , en fonfauxbourg
delà Magdclainc ( où acouiurcnt fans Içauoir quelles
gens c'cÛoytni)plulîcurs j^ayfans & deux hommes d'ar-
me» de la compagnie du comte du Lude , lelcjuels y fu-
rentarreftcz. Adonc laRiaierc, monte fur l'vnde leuis
cheuaux,& arnné de leurs armes s'en vint droit rcconoi-
ftie au vrai les ennemis lufqucs au bout de Gardccs.
En chemin il tiouuadcux loidats , venanj du pillage,
Tvndcfqueis il tua, S^i'autrc ayant baillé l'alarme à Gar-
deres fut caufe que tous fe mirent fondain en bataille.
La Riuieiefaifant lois fcmblant d'ertre des leurs, en le-
uaut la main , & demandant iecapitaine Pcyrelongue,
les amula tciK:mtnr,s'approchant &lcrcculanr,encore$
qu'en fin ov lui tirafl force harqucbuzades.ôc qu'il fufb
pourfiiiuidc 4. argouitts, que la nuift approchant ils
dcmcurerêten merueilleufe refuerie.df lui s'c» letour-
na ver* fes gens en ce fauxbourg de la Magddame, re-
foIud'afTaillir ceux de Gai-ieres fur la minuidt.Mais a-
yât trouué iii corps de garde il £\r d'auis de fe rctircrrce
que il fie tout coyeraét attendit 'ciour, lequel paroifTanr
& les ennemis le monflrans tous ensébleen bataille au
milieu d'vne plaine, à fçauoir cinq compagnies de gens
de pied,vnc cornette de caualerie, ^ grâd nombre d'ar-
goulet$,la Kiwicre fe voyant comme perdu, monllra bic
qu'il eftoit homme de cœur & d'entendement, commâ-
dani foudâin àfcs foldac^ qucmaicbans en bataille , ô(
Ï0Î6 Hiflûires admirahles
pall'ans à couucrt par derrière vu certain village, qui A:
trouua fore à propos, ils pafTafl'tnr la Dordongnc com-
me ils pourroyen(,làoù Dieu voulurque quelque» ba-
ftcaux fvîtrouucrcni: comme à poindt nommé. Mais le
principal article de ce rtraiagemc fut que la Riuierea-»-
poftanc vn trompcttc('equel il menoit exprelTement a-
Uec loi,poiir fajre pcnLr de nui6t qu'il auoit de la caua-
lcric)le fit tenir derrière îe ?i!lagc , fonnant inccffam-
«icnt , iufques à ce que les gens fulTcnc pafTei. Lui ce-
pcndaat, bien monté , s'approchantàla portée d'vnc
harquebuzade à la veaè des ennemis, qui s'cftoyent ar-
reftcz au Ton delà trompccte,eftimâsqu'ily auoit quel-
que caualericembufquee en ce village , & 'leceus par
qut'lques vns de leurs argoulcts , quiauoycnc rapporté
auoir vcu trois cens chcuaux , làoù il n'yen auoit pas
vn,Ies amufa iî long temps, tirant la piftcle à coup per-
du , Jeur difanc outrages, & roltig- ant puis çâ , pui« là^
comme s'il euft voulu les attireren i'embufcadc , que
fcs gens eurent tout loifî de paffcr. Quoi fait, n'cfpar-
gnancpaslesrfperons a fon chcual,il p.jfTa le Jet nier a-
uec Ton trompette , lailfanr les ennemisextrememenC
dclpitcz & delefpercz -^ceftatfronr. La Kiuiere ayant
puisaprcs fa tefcarter [çs j;en^, félon qu'il fçi'ioitlcurs
retraites, le lendemain fe rciira -, Boefl .poui aile trou-
uer le capitaine l'iles , auquel il fiK en trci-grand dan-
ger.ayant efté amufé à Rironjdont il fc ûuua par dclfus
les murailles auecvn f...ldat.
En ces entrefaites , Piles rodant çà & là auec quel-
ques loldats par le pavs d' Agenois & de Pengord , auer-»
ti qu'en v iicu nommé Aiô.agnac,dîftani:dc Biron d'v-
nelieuè,il y auoic vnc corr»crtc de fix-ving-^s chenaux lé-
gers , que le capitaine Montcalfin conduifoit en F'^ancc
pour le duc de Guifc, délibéra de ralfailâir la nuift, s*e-
llant acheminé auec quinze cheuani 6c quinze harque-
buziers de pied feulement , & pcr Ont trouuer les enne-
mis endormis. Mais defcouaerc par vne sé:inelle.le trÔ-
pctte de cefte compagnie fonna l'alarme: ce qui eftonna
lelicmentlcs quinze harquebuzicrs a pied , qu'ils s'en-
fairenc auHicoi^* Ce neantmoins Piles conâderanc c6-
bica
ér memorMeu i o à 7
''icd importe latiftciïecntcls affaires, donna dedans le
^illage de telle roideur qu'il enfonça les premiers ren-
'ontrcz.tntrelefquclss'eftant trouucleur chef Mont-
calIin,conïbatani*à cheual auec deux efpces,& aufll toft
rcnucrfé mort par terre d'vn coup de piftolc , les autres
perdirent incôtmcnt courage, rournans bride, & en de-
meura quinze fur la place , dcfqutls Plies emmena \z%
cheuauxjqui lui feruirent bien depuis:car auparauanc li
n'auoit cheual qui valuft. Quelque temps après Piles c-
ftât allé à Eymet.ville d'Agenois, où il y auoit pluiîeurs
qui le dcûroyéc, laRiuierc s'cftani mis en chemin pour
oiiir nouueiles de Pilcs,mai$ mal monte, & feulement
couuert d'vncolctdebufle , fut rencontré de vingt ar-
mcz.qui le chargcrentjverfereni par tcrre,& faifircnt , a-
pres auoir reccu vn coup de piftole aux reins le perçanc
tout outre. En ceft cftat iJ fat mené par eux deffus vn pc
lit pont fur la riuiere du Drot , pour gaigncr vn village
prochain. Mai? padant fur le pont il reprint tel courage
que fc dcpcftranc de ceux qui le fouftenoycnt fous les
hras.ilfe lança ccdâs la riuiere,nageant entre deux eaux,
infques à ce que n'en pouuani plus il apparut,arrefté fur
l'vndes bords delà riuiere, pourfuiui par ces armezaifez
long téps à coupi perdus de Icnrs piftoles,dcnt il ne fut
nuilemcn atteint. Ces armez craignans d*eftre d'efcou-
ucrs par Piles & ceux d'Eyme(,fc ret;rercnt,eftimans la
RiuKrt fi blclfé que c'eftoit vn homme mon. Mais forti
de Teau, quoi qu'extrêmement foibie , à caufc da fang
perdu &du garid trauailfoufFcrt,il s'achemine vers Ey-
met,où il tombacn nouueiles diiHculcez , trouuant les
portes fermées, & n'ofant fe nommer à la fcntincUe,
d'autant qu'il ne fçauoitpas pour certain que Piles fuft
Jeans. Mais Hnalcment ayant pi ié qu'on euft pitié de lui
blefle, fc rendant prifonnier, on fortit &. le mena on à
Piles, lequel le fecourut de loutfon pouuoir, mais non
pas félon fon deiîr,& comme la necelTité le requeroit.e-
ftant contraint de partir d'Eymet ceftc nui6l-la met-
me, pour ne tomber es noains de fcscnncmis.Ainfi donc
fa playe fut accommodée le mieux qu'on peut,& ayant
mangé quelque peu , Pilc$ le porta en croupe lul.
I o 8 8 Hiftoires admirables
^UcsaulicuUeleur rctrûiie,cl ntil irouua moyendc le '
icndre à Pardaillan , où ii tat fi bien penlé ? tjuc dedans
Icdiifcpiie me joui il fut ho s de di*nger,& en cftat de
porter ks anncs : ayanr ché cepcndam porté vu fantol-
inccntcirc, & le bruit Icnic que la iliuicrccitoit mort
&cntcné.
Munlac rcfueillé par les nouuelles des cftranges tX'
ploies fufjaentiLni.ez , relolut de Icuer gens de toutes
parts, & de taire tous effonj,, pour auoir i-'ilcs & les fiens,
ou pour le moins les chaHcr cbticicmét detouc le pays.
Piles enterdau: cela , voyant aulli i|ue tans forces llirtî-
fantcrs pour fure telte,il faioit tai e » etraide ailleurs, ou
bien auoir quelque place tenabJc pour loger lui & fcs
g:-ns,choilit pour tel cffeét Mucidan vile de Pengord,
alfci force & malaifee a gdigner. Il pratiqua Quelques ji
intelligences dedans, ôcluiuant fa de]ibcraij«^n, & enui- ilj|
ron la mi lanuier mil cinq cens foixante :roi$ , auerti
par fcs amis que ni ceux de la vilic ni de la garoilon du
chaftcau ne failoyent g^rde ni fentmelle do nuit comme
ne fe doutans de rien,;! y entra lui ticncieime leu.en^ét,
auec des cfchelles qui lui furent tendues. Entré, l'on af-
icurequcccux de la garnifon du challeauqui aucyent
peid'j le temps lufques à mmuiâ: àdanfer 3cyurongner,
clloyent endormis comme pourceaux , en heu de le Te-
nir cache. & d'attendre , comme il auoit parauantdeli-
beré, que leiour venu les ioldats du chafteau defcendif-
fcnt en la ville à leur manière acouftumee .refolut de
pourfuiare fa poinfte.Sur le champ dôques ayant atta-
ché deux longues elchelies enlemble, allez grades pour
atteindre tn vn endroit , où il y auoit vn feul créneau
plus bas que !e rcfte des murailles du chaftcau extrême-
ment hautes, quoy que la montée fut trcs-hautc &.cf»
froyabic,& que les erchelics fulTent dreffccs fi droiftcs,
pour atteindre iniques au lieu , qu'il n'euft falu qu'vn
feul p-tit enfant pour les renuerfer , rriôta toutesfois lui
quinzielme feulement , s'cftant rompue rcfchellc fous
celui qui monta le dernier. Ceftecntreprinfe lui fucce-
da 11 hcureufcmcnc, que fans rclîftance aucune il fe fît
f njaiftre ,
fj- mémo rahlcs. î o 8 9
jnaiftreducIiaiteaU)&clctoucccquief\oit dedans, &
par conl! qucnt <ic la ville , à laquelle Soudain acouru-
rciu um de gens pour y eitrc en fcurcté , qu'il tut coo-
tramt d'en rciiuoyer,n*cn ayint retenu que fîx cens ,à
cauiequclciicu i/cn requeroit pas û'^uantagc pour fc
gard.-r.Piles n'oublia pùs de ie fournir de viurcs , poui-
tireS)& aud es munitions neceiraiies > coûtant tout le
pays circor.uoilîn.
. Celle lurpnnlc eftonna Monluc,qui puis après amaf-
£a gcoi de tous cofkz, commandant au fcncfchal de Pc-»
rigurd de faire ie fcaiblable , ce qu'il exe cuca proiriptc-
incnt:& cuicant bien emponer l'honneur d'auoir rega-
gne Macidan fans en rien mander à Monluc, vint fe lo-
ger aucc{ix viogrs cheuaux &: aatantde piétons au pri-
euré de Sourzacjà vn qua;t uk iiciicde Mucidan, place
ircsfortc fans canon. S'aiFcurant ce fencfchal , que Pilct
citant rouble de caualctic n'oi'croit ionir de Ion fon,ni
jjiettic perfonnc aux ch.împs , il fi. monccr fes gens i
cheual ocs le matin,pour tirer vers la ville. Piles d'adU
trc coliéaueriide l'aiiiuce du fepefchai à Sourzac, c-
ftoitce mcfme matin forti de Mucidan aueciicntedcux
cheuaux 6c quatre vingcv hommes de pied » feu. cmenc
CQinccntion de luifaue vnebrauade : & ne fçauoycnc
n'en lesvns des autres. i'clTans donques defcouuerics
ces deux troupes de Piles ■> la caualerie d-i fenefchal
(ayant mis les gens de pied en embufcade dedans va
moulin par deuant lequel Piles deuoit palier ) s'auança.
Piles d'autre part ayant rangé fcs gen;, & marchant peu
àpeu,cnuoya quatre cheuaux pour rcconoirtfcleiennc-
misjlclquels n'eurent pluftolt apeiceu ces quatre, clu-
mans auoir de fia Piles fur les bras , qu'ils prindrcnt
Ja fuite droit àSourzic. Ccftc couardifc accouragca les
quatre caualicrs de PjUsde les pourfuiurcik Piles d'al-
ler après au grand galop , pour attrappcr ki plus mal
montez , le relie Itlàuuant dedans Sou.zac, fans Te fou-
cier qtjc liemciidioit leur en bulcadc. L'infanterie de
piles arnuce au moulin, d'où quelques hr rqutbuzades
furent tirtes ( de l'vnc delqucJles i'vn des meilleurs
£oldats de Piles fut lué ) oc fut f ai fans danger , &ie
io 9 o HiftoiresndmirMs
mit à couucrt. Piles cflanc venu recueillir Tes foIdatSi
louscnfcmble tirèrent droit au moulin» duquel, pas va
ne fortoii qu*il ne fuft auflî toft frappe , & finalement le
feu y cftant mis tout lercftey bruila-S.ourzac fut aban-
donné par le fcncfchal beaucoup plus vifte encore qu'il
n'y eftoit v£nu,& ne comparut depuis perfonne pour af-
iîegcr Mucidan.
Cela donna courage à Piles d'entreprendre fur Bcr-
gcrac,à quatre grandes lieues de Mucidan, cfperant fur-
prendredenuiftceuxdelagarnifon , & entrer dedans
îa rille , ayant trouué moyen de faire forger vne clef
propre àouurir i'vne des portes. De fait il y arriua à
point fans eflre aucunement defcouuert. Ilauoit choifi
deux cens hommcs.nombre qu'il iugeoit fuffifant pour
exécuter cefteentreprife. Mais cftant auenuquela clef
fe rompit en la ferrure,ainfî qu'on vouloit la tourner,
il s'en retourna fans rien faire, fauorifc toutefois par r-
nefinguliere prouidencedc Dicujellant vray fcmblablc
que fans ceft empefckemcnt lui & i^ts gens cftoycnc
perdus. Car outre ce qu'vne partie des liens cftoic de-
meurée par les chemins, ne pouuant plus marcher , \ç%
autres au nombre de foixante & dix rcuIemeHt,arriuans
à la portc,citoyent fi mouillez, qu'ils eulTent eu grand'
peine à faire prendre feu à leurs harquebuzes:& ils cuf-
fent rencontré dedans la ville trois corps de garde plus
forts qu'eux , & compofL'z de gens qui ncfe fulFcnt pas
laifTé bairtc,fans parer aux coups & le reuencher, com-
me depuis ;ls le raonfticrent bien. Piles donc s'en re-
tourna pour ce coup fans rien faire. Mais fc voyant ren-
forcé de nombre de foldats , quilui vcnoyent àia file,
comme au contraire ceux de Bergerac , eltans en gar-
nifon au commencement lufqucs au nombre de trois
cens hommes, fe diminuoycnr,pour auoir eflc quel-
ques vns eftonncz après l'encreprilc defcouuerte,
ayant efté trouuee la clef rompue dedans la ferrure:
ilarreftadercdrciïer ibncntreprife par vn autre moy-
cn,ayant nouuellc intelligence auccvn delà ville, qui
auoitfa raailonfur les murailles , en laquelle il dc-
uoit faire vue ouucr turc capable pour y faire entrer
va hom-
& mémorables. lo ^ r
vnhomroe au coup. Suyuatdoncce dcflcin, le douzief.
me iour de Mars il ne faillie de s* y trouucr auec bonnes
troupes, &: d'y entrer luiui des liens , nonobftanc qu'ils
cufTontcrté incon inenc dcTcoauerts par la lentincllc,
quidunna l'alarme fî chauJe , <jue les coip^ de garde fc
trouuercnt prcùs. Ce ncan:moins Piles donna dcfîus»
&L voyant d'aucrcs gens qui luruenoycnt à la file au
co: ps de garde quil auou trouué le premier , mu quel-
ques vos de (es loJdats au d-lFus & encre deuxjqui tuoy-
cnt les faruenansjians grande reliltanccid autant qu'ils
ne venoyent pas en iroupe , loint qu'il auoic donné or-
dre(deuani que d'eatre')afin d'empcfcherquc les corps
de garde ne s'cntrerccouru(îenr,quc les gouiats 3c che-
uaux auec vn tromperie courullent & fîlientgrâdbruic
par dehors tout a. iLour de la ville. • Par tel moyen ce
corps de garde fut fînalerrcnt desfair, & conlequemméc
les deux autres , combien que ce ne fuc pas fans le bien
détendre. En cts encrcfa:tles le capitaine, qui comman-
doiten la ville,ayant raliié fepiantc foidars,ga;gna ha-
ftiuement le chaileaii:& d'vn autre colic le curé de Ber-
gerac, lequel faifoit aiiflî dj lapicaine ,f. ietta , fuiui de
ircntcfoldats, dedans vnc forte tour de la ville. Ainff
fe pada la nui<ft , ayans efté mis au fil d- i'cfpee tous \qs
foldatsqui nepeurenc gaigner la tour ou le chafteau.
Le iour venu, Piles vo^anc que m ceux de la tour , ni
ceux du chaftcau ne vouloycnt fe rendre , allaîllic les
Tns & les autres:dont l'ilTue fut telle,qb'cn peu de temps
la tour ertant rappce,accabla tous ceux qui cftoyent de*
dans , excepiélecuré.lcquel trou.é vit ôc peu blcfiéfut
loft après pendu & cftrang.é. comme il le mcricoir , ayac
efté de tout temps (ce diioyent piulîcurs ) vn trcfincf-
chant homme. Qu^ant au charteau,ia baftc court ayant
cftcptife, le capitaine &. fcs Tcptanie foidits , contrains
de le fauuer dedans vne tour , oli il n'y auoit ri viurc
nimuncions, le rerdircnc à mcici, qui fut tciie , que
tous furent extcrmmiz. Apres cefte fxecunon Piles fe
retira en fa place de Mucidan,la fortifiant tous ics i«^urs
de gens & de viures. Monluc entcndanr ces uouucilcs,
22 *
10 9 1 HiHoîres admirMes
non attendues de lui, ^ui penfoic qae pcrfonnc n'ofc-
roit rien entreprendre où il feroitjdcfpcfcha prompic-
incn t le capitaine Pey rot Ion fili pour afli ger Mucidan,
aucc trois pièces de canon que l'on falloir amener de
Bourdeaui.Mais dcusntquelc tout faft prcft, ayant rc-
ccunouucllcsezpreircs de la paix , il les fit entendre à
Pilesjlcqucl, après la publication de l'edidl à Bourdcaux
le retira eu fa raaifon.ii{/?o»re de Charles iXMu,^,
^1
yE I L L ES di* tout extraordinaires
CT* prodtgteiéfes,
IL s'cft trouuc des perfonnesquiont cftc neuf iours
entiers, fans ciller ui cl gner les yeux, tantpcuquc
ccfuft.Ferntl faidt mention d'vn frcnMique, lequel fut
yn an & deux mois entiers fans dormir m Jojr ni nuiét.
^u ^ .hu.de fa pathologie ch.z . Lc doélcur Hcurni.'S la-
conte que tandis qu'ii eftudioit à Padoue, on i'afï'cnra
que ce pedonnage nommé Marius Nizolius,quia f..id
vn grand recueil des mots de Ciceron, fut dix ans en-
tiers fans dormir, ^u i é.ch.di* H. des maladies de la ttffe.
Nousauons conu.cedic Montuus,vne damoifclic , qui
par i'cfpacc de trcme cinq .îns demeura lans dormir , ôC
ne lui en auinr pourtant mal ci incommodité quelcon-
que,au relmoignage de fon mari & de loiis Ca domc-
ftiques Mnfoit i Jiu.des n}aladies,chap. 1 7 . Çajj^ar yh'olpta
Médecin, raconte auoir apnns de fon hoftc, personnage
notable, à Pauie, que certaine femme fat quinze iours
enciers & autant de nui£ls (ans dormir, fans qu'on peuft
laiprouoqtier Icfommeil, à ciufcdc lafoibleiîede foa
cftomach 5i faute de vapeurs. Car elle ne faifoit qu'vn
re as le iour,à dvfné,& ne miangcoit rien qi;c ce fuft aa
foir. Finalement on lui fît vfcr d'vncroftic trempée
en mâluoiiic,vn peuauanitjue fecouchcr, ce qui la re-
snicencraiode àaitau*
yE\S
é* memorahlesl i o 9 j
VET^S ait nombril.
MOnficiirAllo)Svicil& confumé aux cipcrienrcs
dcl'arr, icpais vingt-quacfcanv en ça q. 'il a fnift
lamccJccineen Fr.inct,.n Italicà Malthc,& antres lïeux
de laGrcccm'adiâ: , auoir autrcsfois vifi-é vnc fille à
Tarafcou, laqnrllc aagcc de douze ans cm duiantqua-
tTç annee< vrc fîcure Icntc.aiicc vnctumeur 3>i ventre &
exténuation démembres , de façon cjuechafcun la iu-
gcoit hydropiqiie.au bout de ces'quatre années aparuc
vne tuincur à Tcndroit du nombril , que nature ouuri|
d'elle mefme, cerchant à fe defchargcr de fou contraire.
De ccftc ouacrture fortii grand' quantité de matière
purulcnte.i'efpace de dix mois entiers. A la parfin forri-
icnt trois grands vers,charcun d'vn pan de longueur SC
d'auantage,de la grollcur du petit doigr, & lors fe trou-
ua entiercmcc deliuree,& s'eft ponce merucilleulement
bir-nd'îpuisj^yant efté marier, Se mère de beauxcnfans.
Vn garçon en mefme temps & lieu , aagé de huidlou
neuf ans ) de pauure maifon , après auoir enduré de
grand/^s douleurs &colique$,feprcfentavn petit troua
trois doigts près du nombril au coflédt oit, auquel vne
petite pointe noire paroiiTant le chirurgien fe douta que
ce fuft vn ver, qu'il tira aifément auec Tes pincettes. Il
eftoit de la longueur d'vn pan:les douleurs rcuenoyent
par interuane,& ne pouucyent eftre apaifees que par la-
dire extra£tion,& en fc-toyt^nc deux ou trois a la fois, &
non plus, tirez l'vn après l'amre. puis le tro u fe fermoir.
Qi.iclquesfois il n'aparoifroic d'vn mois ou de fix fcmai-
nes.iulques à ce que les douleurs reuinfTrnt. Lors one-
ftoiïen mcime peine que dcuant.Ce «garçon à vefcuplu-
fieurs années en tel cfizx.yvt. "Barthélémy £abrol,en[cs objer-
uuùons ^natomi^uesjobfevpt. l 9 .
yicTo I7{,ES.
FErdinand de Sottomaior, gentilhomme Portugais,
ayant cfté desfait cû rue rencontre par les IndicnSf
■ ZZ 5
10 94 Ht Boires admirables
es eruirons de GoaJ'an i ç it.puis refraifchi cîe quel-
que fecours,rcroIut d'auoir Ça reuéchc, & d'alicr retrou-
uer ccuxqui l'aucyent b.iitu , quôy qu'ils fiifTcnc au
nombre de cinq mil hommes, tant de pied qi^c de che-
uai. Ceux qu'on auoic enuoyé à la defcouucrte r.ippor-
tcrenr que les ennemis efto) enc paHcz à vue licuë &: de-
mie de là , fans que perfonne peuft dire où ils e^oycnc
allez. Fernand f*. fit inconnnenc croire quelapcurc-
ftoitcauTe dece chemin , & qo'il faudroit pcude geng
pour cnetcrc cei'te armée en rouce. Fourrant il courut a-
pres.fuuiide i ^. cheuaux , de fix vingts pictons Portu-
gais,& de trois cens Indiens confcdercz. Le lendemain
l'nr le roir,apre- auoir palTé vne riuiere à gué, trois lieu-
es ^u dcffbus du lieu duquel il efloit parti , il dcfcoii-
urii les tnnr mis à vntrait d'harquebuze loin de lui fc
rcpofans au pied d'^ n coftau,bornant vnc belle & gran-
de pleine. Eut aperceiians les PortugaiSjfcle'uent incon-
tinent en pieds, & fe rangeant en files, encore qu'ils re
fufienr que cinq miljparoifToyent beaucoup plus, ce qui
eftonna les Portugais. Fe^nand qui voyoit fcs gens ef-
branflcz , les arrefta & encouragea de telle forte , enco-
re que les fois cens Indiens s'en fuHTent fuis,que les iç.
homes dé chual fuiuis des i lo.pieios dôneret de pied
& de tefte à trauer»; cef^e armée d'enncmis,auec tel ef-
fort & fuccez qu'après grard m-urtie de plus de 800.
des principaux,nctammcnt du chef, ils mi ent tout le
refte à vau d? route, n'ayans pe-du homme quelconque,
mais feulcmér ç. cheuaux tuez fous leurs maiftres.Tou-
tesfois d'aftanr qu'ils cftoyentprefq lies tous blefiez , &
Fcrnand entrt- les autres, il< ne poDrfuyuirentgucres les
fuyards, ains apr^s auoir ram' fié les dcfpouillcs trouuc".
rent moyen de retourner à Goa, cù pIufieursdcsblcfTez
moururent Htft.de 'Portugal liu.i i.j'efl.i6.
L'an I ^u.îes Turcs cftas venus faire quelques cour-
fcscr Hongrie,!'eIeâ:eur Palatin marcha auec festrou-
pes fur les f entières , pour arrefter les ennemis , s'ils
vouloyentpalTer outre. Peu de temps après le comte de
Heuxi'alla trouuer de Ja part de i'empereur,pour com-
rauniqucr enfcmbic des afaires de ia guerre. loachim
mariais
é' mémorable si i ® 9 î
marquis de Brandebourg , qui cftoit afTez loin, leur r.f-
criuit auoir defcouucrt par les clpions, que les ennemis
ccrchoyent de k'aileuier de quelque paflaigc propre
pour leur tuice , & pour empelcher par mermc mc) ea
qu'on ne peuil les fuyureicar ils xnarchoyenîà petites
iournces,e{tans chargez de butin. Apres auoir defcou-
ucrt au vray le lieu où ils ciloyent , Philippe d'Ober-
ftein,Scban:ian Schertelin& Ican Sailer,&: Keitmaiftres
des regimcns du Rhin, de Suaube,& du Palatinar.furéc
cnuoyez deuanc auec-vne compagnie de vieux loldats.
Ayans iurprins vn Turc ili entendirent l'eftat auquel
cftoyent les autres , lefquels ils allèrent charger à l'im-
prouiftc,& en cefte première charge faille fur le foir, y
eue enuiron mille Turcs tuez, qui eftoyet lors au nom-
bre de quinze rail. L'eledlcur Palatin ne voulant pas Ic$
quittera fi bon marché, fit tenir fcs troupes preftes &de-
bouc toute la nuid , & les ayâc rangées en bataille deuat
iour.vint charger les ennemis de telle impetuofitc.qu'é
peu d'heure ils furent rompus , & chaflez plus de trois
îieues Françoifcs cntic les mains du marquis de Bran-
debonrg,afin que tous cullent part à cefte vj£loire excel-
lente. Car de ces quinze mille Turcs n'en retourna pa»
vn fcul pour porter les nouuelles à fcs compagnons:ains
furent tous tuez,ou noyez, ou fufFoquez dedans les ma-
t&^i-.èc n'en print-on aucun à rançon ni à merci. L'em-
pereur n'y perdit qu'rn homme en tout:& fit de grandi
honneurs &prefens aux principaux de l'armecpour s'c-
ftrcportez fî vailIammeBt,lui cftant lors à Viénc en Au-
fixichc. Hifi.de Hongrie.
lean Coruin Huniade auec vnc armée de quinze mil
hommes donna bataille à quatre vingt mil Turcs en
câpagnc rare,les desfit , en tua près de la moitié, & mit
lereiteà vau de route : gaigna deux cens cnfeignes,
& eut cinq mille prifonniers. Quelque temps après
il gaigna vne féconde bataille près d'vne riuicrc : & cô-
bien qu'il n'euft que dix mille hommes auec foy il tua.
trente mille Turcs, & print 4. mille prifonniersni'ayanc
en c^s deux batailles perdu que bien peu des fiensxula
ZZ 4
10^6 Hijfoires aâmirahUs
dernicre in«ururcncenuiron cinq ci:ni.'BonJtn,en l^JjiJï.de
Hongrie, lii*. S MeCAcL. 3 .
L'an r 4^ ^.enuiron mille Suifles eftansallez îivç v-
necourr,poar molcîierles Imperîaliftcs,retr(Miuerrnt
pref ie Bafle enuiiontiei tl'vnc; auiice d^iceux , compo-
îec de huift mille Iiommcs condairs par Frcdeiic Ca-
pe . An lieu He reculer ils vindrcnc aux main^r-c'cnc
lui lechamp fix cens imp^ 1 iali(>es , Se mirent, les aof^cs
en rourco'âyans perdu qu'vn des Unr^.StHvi^jiwenl'hifl.
de Smjjs. Vingç qiiacrc .tns aopârauanc ils d» sfirent lé
coiiue de Romon près d'E'icnur,5c It^i tuèrent 18, cens
foId;»cs fur le champ, mirent f^^n armée de rrcntc mille
hommes en Toute,fans auor pcrclu pas vn des leurs. Là
mefme.
Lescheualie^sdlc l'ordre Teutonique gaigne^ent v-
nc excellente vitftoire conrre les Mofcouitcs o^ Tarta-
xesen Liuonic l'ani5oo.Céî mille Morcouiics& Tar-
tarcî furent tuez fur le champ, & le relte de Leur armée
d'enuiron trente mil hommes mis du tout à vau de rou-
te.LfS chi-ualiers eft< yenr en petit nombre, & ne pcrtii-
Tcntju*vn àzs leurs>avans quelques blfffcz. mais qui fu-
rcnrgîieris.Leg and" duc de Mofc* uie.eftonnéque neuf
OUI dix milhômcsau p'us eufTent nié tant des fiés , fia^
aucune pcrt^ , demanda trefucs pour cinquante ars au^
gr^nd rommandcnr de L!uonie,& Vohimi.Alex.Guagtùn
enl.t dffcriptiott du Lmuure.
L'an 1 ç 74 les Moldauesnyans efleu vn v;ïyuode,r6-
mé I ionie.GiK I ques fi ns cnn..mjs, nommément vn pa-
larin delà Valachie d la les monts, dcfi Cijx d'auancer
vn Gen frer<",proc';ra enuers ie^ bjffas à Conf>Itinople,
qucStlym lenrf^lran enuoya demander double tribut
à foonic , ou (ju'il qnit,il> la pi^cc ce que le vayuode r^
fufa. Pui<^ pr-^ucyant qu'on luy courrnit fus, demanda
fecours â Henri de Valois lors roy de r'oIo^'.e,& y refî-
dcnr. Mais li rut efconduit , le roy & Ton conleil s'cxcu-
fanf fur les alliances entre les 1 urcs 5. Polonois.ll y 2
prcf'ques ordinairement (ur le-, frontières de Lithuanic
&dc Mofcouicdes coureurs &gen$ de cheualPolonois,
qwi ne ioi que Voltiger de lieu en autre, tant pour buti-
ner^
(^ memorahles* ïo 9 7
lïer,qiic pour brider en cjuelquc forre les Tarrarcs,iU$V
peUéL Ju lâg^Jgedu pays de Cofakcs. luonie les appelle
à fon fccoui s.leiir monltrât l'cijiîi'é de la catik , & pro-
mcviani grandes recompends. Eux, le (Vuicjans peu de
leur nouùeau roy , quutercnt les laig; s c^mp^ig^es de
Podo!ic,& HiifTicpour aile; fecoHru le v.Tyuode. Us e-
ftoycntau nombre de douze c'ns hommes de cheiial»
ayans pour co'oucl vn gen'.ii-hommc nonomé Sujerce-
ue,rage & vaillant capiramc. Ces Cofakcs paruencis en
Valachie deçà les monts, au camp dB v;.yuod' , turent
magnifiquement receus,&: au leuer d'vn banq^:ec qu'on
Jeur fît , le vayuode fit prefent an colonel èi à Tes capi-
taines de qpelques bafilns. d'argent pîeits deducars,sfio
de les acourager d'auancage, 6l mi. ordre que tous leurs
hommes fulicvit anoplemcnt laiaricz. Puis Ayant com-
muniqué des afaires aueceux, ils fc préparèrent to-us à
la guerre.C'eltoit au mois de May de l'an mil cinq cens
fcpiante quatre.
ielym,extrememcnt indigné de larcfponfe fa;£^e par
Iuonie,cnuoye incontinenc trente mille Turcs S? troi«
mille Hongrois au palaan de Valachie, lui commâdanc
d'attraper le vayuo^c , i'etiuoyer en Ccnftantinople,
s'emparer de la McldAuie,& en bailler le'gouuemcment
à Ton frerc lequel offroit double tiibuc Ce palatin
amaiîe encore d'au;rc.< forces , lei'ementquc fon ar-
mée eiloit compofee de cent mille hommes > qui pou-
uoycnt(ertans bien cor.dai:s)non feulement conqueftcr
Ja Molda.ric,mai<. encore vne grand' pan du monde. A-
pres aaoir pa(ïé le flrunc Moiâai:e , haralTez du ch' min
, qu'ils aut.yenr fait,&; n'efttmans pas que perforu»" pcul^
approcher d'eux , ils commencent à ;>'eftcndre en cam-
pagne,& (e repofer comme en temps de paix. Le vayuo-
de entendant ces nouuclles. dcTocrche incontinent Su-
jerccueaucc les troupes & C\x miUf Moidauesqni entc-
doyent le lanj^agc Turc, pour marcher dcnanth-i & les
fîens armez plus pcfjmment les fuiuent.Sojerccuc,defi-
reux de faire vn bon feruice au vayuodc,conduit â dex-
trement fonaoaateardc , qu'il enuelopc& attrape qua-
tre ccûs coureurs (Ui palatin > fans qu'vn feulpcuft Gif-
^i o 9 8 tJiJloires admirahles
chapper,& entend d'aucuns d'eux Tcftat de l'armée , en
laqucllcy auoit ( à leur rapport ) fcptante miilc Vala-
qucs , trente raille Turcs,& trois mille Hongrois. Les
Cofakcs,ayans dcrpelché tous ces coureurs.enuoyent a-
uenir luonic de ces cbofcs , le prient de fe ioindrc
prompîementàeux, & fc repofentenuiron deux heures
affcz près du camp des ennemi I. Le vayuode fe rendic
incontinent là,& ayant difpofc (zs troupes qui cftoycnt
en bon nombre , les Cofakcs commencèrent la cha'-gc
<le telle furie , qu'ils tfbranlereac toute Tarmee du pa-
latin , faifans vn meurtre inc oynble àcs ennemis , auf-
queij le vayuodc fit foudain vne fcconde charge, & fia
propos, qu'il leur eftoit impofllblede fuir:car les MoL
daues auoyent efcarté iacaualerie Turquefque & Va-
Jaque : tellement que rouxe ceftc grande armée fut fac-
cagec,fouIce aux pieds des cheuaux,& hachée en pièces,
ne reftant prefques pcrfonne pour porter les nouucl-
les d'vne fi grande desfjite , que le palatin , fon frè-
re , & quelque petit nombre d'autres, qui trouuans
moyen d'eftreà cheual de bonne heure , fe fauuerent
de viOeHe. Ainfi doncques fur le champ de bataille
&enh pourfuite des fuyards moururent près de cent
mil hommes , fans que k vayuode eull: perdu nom-
bre des fiens. Car ils n'eurent autre chofe à faire qu'à ef-
gorger ceux à qui la trop grande aflcurance , puis la
peur , auoitoftc les armes. Les Cofakes & Moldaues
s'enrichirent tous au butin dVne fi grande armée , &
feiournerent là quatre iours , pour fe repofer & refraif-
chir.
Cefte grande vi£loirc fut fuiuie de quelques autres,
que i'adioufteray tout d'vn train. D'autant que les
corps du palatin & de fon frère ne fe trouuoyent point,
luonieeftimant ( ce qui eftoit vrai) qu'ils s'eftoyent
fauuez , entre dedans la Valachie delà les monts , met le
feu en toutes les places apartenantes au palatin , fai£l
tacr cruellement hommes, femmes & enfans. Delà il
entre en vn quartier de Tranfiiluanie où il fceut en
quel lieu le palatin & fon frère s'eftoyent retirez. In-
continent il approche de ccftc clacc , nommcc BrafTo-
é* mémorables» 1099
uic, ou BrailîovT , ville aiïîfe fur le Danube , ayant vq
t<.rt cha{tcau,au capitaine duquel le vayuodeenucye v-
nc lettre , le priant de rtrdie promptenient le ya.'aria
S>c lonf.cie. Ce capitaine ne relpondit que menuets:
niaiu auoir ceux qu'on demandoit. Dont le vayuodc
extrêmement irrite, fit foudain aflaillir la ville , lacjutl-
leayait prinfc de force fut entièrement faccagec,raice
iuloues auxfondemcns,&: tous les habitans tuez, ian$
que nul crchapaft,ni qu'vne feule maiibn demeurait de-
bout. Air fi que le vayuodc b'apprefToit pouraiïieger le
ch.ilteau.il entend qu'vne ai mec dequir.ze nulle îurcs
aprochoit pour l'en cmpeTcher. Il derpefche inconti-
nent Sujerccl^e auecles Colakes , & luiift millccKc-
Daux Moic^auesJefQuels fiient telle diligence qu'iU fur-
prindrcntiSc taillèrent en pièces tout ce ftcours. exce-
ptez mille chenaux qui le retirèrent de la prefle. Et
neantmoins Sujerceuc leur chauffa les efptrons de d
pfcs,que prefques tous furent attrapez & tuez en fuyât.
Quelques furuivans fc lauuerent dedans vn cbafteau
nommé Tcinen,ap?irterant a Selym. l^res de là eftoit v-
ne autre armée de Turcs & de Tanares, contre laquel-
le le vayuode marcha par Tauis de Sujerceue, laiflant le
iîege du chafteau de Brailovv > & anec les Cofakes des-
fic & faccagcaceftearmee.CcIa exécuté, il priotTeime»
ville prochaine,tua tous les habitans,hommes , femmes
& enfans. autant en firent les Cofakes d'vne aune viilc
ncramee Bialogrcde,apartenante aux Turcs, où ils fi-
rentvn grand butin.
Comme les troupes du vayuode fc repofoyénten ce
quartier, les nouuelles d\nc autre armée de Turc &
dcTartaresy eftans apportées , foudain les Cofakes
demandèrent congé de les combatre. luonic leur
donne de renfort trois mille Moldaues , aueclefqucls
les Moldaues chargent fi refoluement les ennemis,
qu'ils les miren: à vau-dc-rouie , vnc partie ayjnt
efté luec fur le champ. Ils amenèrent deux cens
prifonniersque le vayuode fit hacher en pièces auec
des faals donc on fauche l'herbe. Le gênerai de ceite
r r 0 o Hifloires admirables
«rmccprinsparlcsGofakcs cftoit fi riche , qu'iloffric
de leur payer lîx fois Ton perantdv^ finances , a fçauoir
deux fois d'or , trois d'aigcnr,& vnc de perles, moycn-
nât (ju'ilv ne le liurafient point cotte les mains du vay-
uodc. Mais eux eftinians plus la foy qu'ils au.^ycnt lu-
rce que tout Tor du nionde,l'amcncrcut ai» V3yuode,qui
l'ayam girdé quelques iours , & entendu par iuibcau-
coup de ciiofcs de l'cftat des Turc; Jefic dcicivrer mem-
brc après membre par Tes [\->Uix.<-.Leo>tArd Goreciuf en i'hi-
Jiotre d*Iuûnie. Le feptiefme linre des Chroniques de (>-
rion.
L'an mil cinq cens foixante deux, le ficur de loyeufe
ayant afllegc la vile d'Agde en Languedoc , cniendic
que recours de i\)L vingts harqucboiizie.s y el^oir entié,
& d'abondant que le fîeur de Baudiné y amenoit nou-
velles forces. Pouriant leua-illon camp lur la minuid
du quatricfme iour lîe Nouembre, enuoyani fes troupes
àPezenas,Gignac& Agienne. Baudiné , qui eftoii à
Montpcllier,aucrti de tourne ou cy a le capiiaine Bouil-
Jargucs pour fçauoir leurs brift-cs, lequel ayant enten-
du par vn payfan,qne deux compagnies, à (çauoir celle
du baron de Combas condui6le par le.cadct Tonuillon,
& celle de faincftFclix , eftoyent à faiiiâ: Patagone, le-
râns la route de Gignac,& fuiuit & chargea fi à propos,
qu il en tua fur le cham.p deux cens feptantc quarrc de
comtefair.enrrelcfquelsfiit le capitaine , cnIctEble le
cadet de Balfonds,& Morgue chanoine de Montpellier:
fans perdre vn fcul homme , que le pauure payfan qui
futtuc pourn'auoirfçeudircle mot:& rapporta Bouil-
largues les er' feignes & armes, &amena foicc cheuaux
a Montpcllicr.Toft après auerti que trois cens hommes
mis en garnifon dedans Aramon, couroyent ordinaire-
ment iufques aux portes de BjgnoIs,y donnai! bon or-
dre, que lesayât attirez en vne embufche il les tailla ea
pièces, 5^: mken fond vne fregace qu'ils auoycnt ame-
ncc.Hifioire de Fr^mce^foui Charles IX.liu. I O.
Au mois de Feurier n ^3. le capitaine Honorât acÔ-
p^ghédcdeux frères nommez, Lombats,&de 38. hom-
«>fc;s, cDtrepi it d'entrer dedaisTarafcoû en Fwijt , pays
de
é' meworahles] 1 1 oi',
de fa naiffancc. Mais le ficomtc de Sercs & fon ftcrc a-
ucttis de leur v£iiuc,ayans alTcmblé trois ces hommes,
contraiif nircnc Honorac & Icii lien» de ic retirer es mô-
tagnes , cfq'jeîles les pourfuiaans fe trouuerent cux-
rnclincs enclos: de forte que non feulemcm le vicomte
y fuî tué de la main propre d'Hcnorat , cjuelque rançon
cju'il lui oftrift,mais aufli Ton frcre y demeura mort fur
la place ,auec la plufparr de ces^trois cens homes. Ce fuc
vn grand iugwHient de Dieu , ayanr le vicomte commis
infinies cruauczôc pillcries au comte de FoiT,& fe pré-
parant iy en f^irc encore d'auantagc.^i» mefne dixiefme
hure,
lepenfcauoirrcprefenté ailleurs les deux viftoires
notables, fans aucune perte des fié>,c|u'obtint le capital-
ncFurmrjer g^rniil homme Dauphinois fur fe$ ennc-
inis,eni'ân i 561. Car cOant s routes les deux f. is.fpc-
cialement la llcondcjfuiui de fort pej de gens, il ruades
ennemis à ccnraines,mit les furuiuans à viu de route, 5c
couuiit plulieurs places C( ntre l'inuafion àcs pillards Se
voleurs, qui parauant cômectoyent vnc infinité de maux
en Dauphii'é, notamment il fut caiife après Dieu de la
dchurance de Grçnoble,que les alTicgeans , eftonncz de
la première vidoire dudi6l Furmejcr, abandoniîertnt
en grande fayeur, pour fc fauucr en Sauoye. En la fé-
conde,auec quatorze gcnfd'arn es, il mit en roiue la ca-
uaîeric &l'infaiucric de Gap,qui vouloyent TempeTchcr
en fonchem:n,Sc en rua vn rref-grind nombre, fans que
lui ni les fîcns fufTcnt tant foit peu cffcnf 2 , pourfut-
nan', les fuyards iufqucs aux portes de Gap.^w 1 3./m.<^
la me fine hifi.
Nou» rcferuons à l'vn àcs volumes fuiuans la defcri-
ption de très-grand nombre de viéloires mémorables
données au petit nombre contre le plus grand, par celui
<]ui s'appelle le dominateur des armtcs.aqui cfila fagcf-
ic,la foi ce, & l'ilFuedr toutes entreprilcs : qui donncôC
ofte le courage,>]Ui a àts moyens meru':illeiir pour exé-
cuter les iuftiSC<MirciK;5cqui par conrinuelle cxpericn-
ceaprend à grands ai à petits de fentir &c recunoiltrc
qu'ils ae font rien ai az pcuucoc licii fans là faucui /pe«
cialc.
I r o 2* Hijloires admirables
VILLES bruslees.
LES. iour de May 1^05. Hiadcloopen villcttcea
Irïiit & Ton eglife fac toute bruOcc par Feu de
mcfchef. Comme aulFilc vingtncufîelmede Zuin fdi-
uant, les veines terres ou mines defquelles fe tirent Ic$
tourbes (qui font gazons ôc mottes de terre que les ha-
bitans bruflée en lieu de bois)vcincs qui d'elles mefmcs
font ordinairement aquatiques & de matière terrcftrc,
cfchaufFeesdu Soleil s'allumèrent en plufieurs villagcf
de la Frifc,ce qui endommagea grandement les bois &
les terres d'auprès. Sur la fin du mois de luillct toute la
ville de Haderuuic au pays de Gueldres futbrulleea-
Uecfes egliles & monafteres, n'y citant rien reftc que
cinq ou lix maifons/ôc fot le f^^u fî foudain.quc tout fuc
conlbméen moins de trois heures > quelque rcfiftancc
& deuoir que l'on fçcut faire, [amais ne fut veuc relie
defolaiion.-ily mourut que bruftezqu'eftoutF^z de la fu-
mee>plus de quinze cens perfonncs.tant ho'Times , fem-
iiiesv^n'enfans. Si l'on penfoitrc fauuer d'vn coftc , le
teueftoit el'pris d'vnauirequi coupoit le paiTagç ^ tel-
Jement que les piuures gens demeuroycntou arrêtez
par îefeu , ou aflommez des combles & fomaiicrs des
mailons qui tomboyent parmi les rues. Beaucoup de
meubles des paylans d'alentour qui s'y eftoyent réfugiez
à caufe des guerres fjrenr bruflcz dedans les eglifes &
monaftcr^s"^. Ceux qui (après que le feu eit tout deuo;é)
vindrenten la ville,ne virent onrquesteilc pitié, & ne
pouuovent aller par les rues , à cauie des murailles &
pignons des raaifoos.îous lelqueis y auoit g<and nom-
bre degensaciauantcz,ûiffoquez & brusiez. Extr. de U
qrande Chronique de HoilMde, O'^- recueillie par leunle Petite
^çrefjierde'Bethuneitu 6. .. . ^ l
Aumermeteraps bruslcrent en la ville de Gomchot»
plus de deux cens maifons, &au bourg de Bailicul ea
Flaadrcs plus de ciû^ cens. Lcconucntdes Cordchers
* en
& memorahles] r lo V
en Bolfwacrt fut aoffi cnticremcût brusléfauf Tcglifc.
ha mefme.
Le croificfmc iour de May i ç 3 <f.cnuiron trois hcurcf
aprcs midj.s'erprit vn grand & cfpouuantabJe feu dcdâs
la vile de DcUicn Hollande, icc^uclcnpcu de temps
confuraa prcfques toute la ville. En fommc il y eut neuf
mille irois cens & neuf mailons bruslces , deuieglifcs
paro;flîales,& beaucoup de beaux doiftres , rclicmenc
qu'il n'y refta qu'en uiron trois cens raailons. On nefça-
uoii nuilemcnccftcindre lefeu, pource quclaplufpart
des cloiftres & logis tftoycntcouuercs de roleaux, auec
ce que des long icmps il n'anoit point pieu , dont s'c-
ftoitcr-fuiuie grande l'echercile. Outre-plus leventc-
ftoit impétueux qui chafl'oii lefeu delieu en autre. Il y
eut beaucoup de g;ns bi usiez, entre autres des femme*
acouchees,& vne nfinitc de biens meubles conlumeàt*
par le îcu. La mef ne Chronique lut. J.
l'ay ailleurs parlé de ce que Hadrianus lunius racem"
te en Ton hiftoirc de Hollâde, qui auint lors de ccft cm-
brafcmcniau regard d'vne cigongne,qui voyancfes ci-
gongncauxTur le point d'cftrebruûez , & nepouuant
les fauucf ^n lieu de les quictcr & s*cnuoler ailleurs ton-
dit à aitli:s eftenduts dedans Ton nid,couurant fes petis
auec qui elle fut conlumee & réduite en cendres. A la
mémoire de cefte chariié,qui fait le proccj à infinis pè-
res &mercs,futercritpar Icmcfmc lunius i'cpigraramc
fuiuant.que i'eftimc digne de ledturc.
Caiidtda ct* ohjlnfens inuifa Ciconia ramny
'Ptvnoraab ardentt yiderat igneprenn:
Ertpidtne fitoi c^ aperta perkuU tentetf
Htnc fuadet ptetaSifed antor tnde y état.
Hanc luitam pietai generofa diremityçp' yrna.
Ejje eadem CfJoOolti yult Libitinafute.
lam mmor Ajfyr'mm Vbirnicem pima loquatup^
Fiuere qutbtijlo quAnt\at ïîta mori.
Voyez ce que nous auons remarque au premier ▼<>-
lume,& encore en c«deuxicfrae, parlant des cmbrafc-
iQcas di; fca .
1/ 0 4 Hijloires admirahles
Vl-R gndé.
Longuement fc conferue le vin en fon entier , (î c-
rtan: bien qualifié il clt logéainfi & aulicu qu'ila-
purtieo:. Pline du qu'vn baoLjuec fait au prjnceCaiuf
Cefar fils de ^empereur Germanicus , par L" poc ePom-
ponius Secundus ,auqU(;:l autic vin ne fut: beu , que de
deux cens ans, quipourla rarcrécoulroit cent deniers
l'once .Theuec en la Coimographic afferme auoir veu
en l'ille de Lemnos vn vafe de terre ccntcnât demi mui,
trouaé dans des vieilles mazjres, rempli de bon vin, qui
y auoit demeuré plus de fixcés ans, comme apparoi/Toit
par certains mo s elcnts au vaze.L'an i 5 3 7, en fouilllr
ies ruincj du vieux challeau de Louden en Languedoc,
pour en tirer c .s pienes à baftir ailleurs, fc delCi uuric
vn caiieau , dans lequel fut trouuc vn tonnaau entier,
dont le bois ayant fenti Tair tombacn pouldre , laifT^nt
la lie afFcrmie en !a Forme du tonneau , laquelle eftani
pc-icee fut trouuie remplie de trcs-excellent vin, au iu-
Pv-ment des honnorabi'cs voiûns , aufcjueîs le baron du
hwti en enuoya pour mcru.eille. La viciJlefle de la de-
mojition du chaftau monllr oit euidemmcntce rin là
y auoirdemcuré grand nombre d'années. 01. de Serres^
en fon théâtre d^yi^rnuUureJiu. 3 .
ylOLE'KC^ i^fitrne CT* critel-
le chuiiite.
SVrîafinde l'an i ^ 84. arriuaen Conf>aniinopIc ru
Tu'C,rtppoiiant nouucl'tsd'vnc hoinblc tMgedir,
qui cuida produire vne fanglanreguei rc, pour telle oc-
calipn.La vefu€ de Pvamandan, ballàou gou jeroeur de
Tri'po'y » voulant le reiirer i Conftaoaanpie aucc foa
fils,lâ fimilk &. fcf clclaues , fii equippcr eu U colle de
Bar*
& memorahUs, 1 1 o ç
Barbarliroc gallerc chargée de fcs inenbîcs ,cftiinc*
?aloir huiâ: cens mil cfcus oucnuiron. D ux audvsga-
Icroj-^u'ori appelle de confèruc , fc ioignircnt a cc-.ic W
pour raitc ic vityageen plu> grande alicurancc. fftaui
près de Carfou , v. c tourmcr^icicltLc, qui rcchafle ces ^
trois gilcrcs au goulfede kmcr Hadriaii^a^, gardé lorj
par certain nombre de galerts Vénitiens s fous !a char-
ged'vn gentil homme nommé Pierre Eme , ordonné
prouifcur & gOLiuernciirdu goultc par la feigne une, &
auancé par la pluralné des ro x de la ieiincflc au confeil
deVenifc. IcciuienrendanKjue ia prcye tftoit comme
en fe$mains,s*auance,cnuei'op; c les trois gacrci. Scs'ea
rend maiftre.Pji'. commence > fairebo.chrrie des pri-
fonniers. Car deux cens cinquante hummes pilotes,
matelots , fcruiteurs &: efdauesjy furent eigo gcz , no-
tamment le fil^ de Raman an , enrre les b-'a^ de la mère.
Les Vénitiens vioifc' quarante femme , puis Irur cou-
pèrent les marr.mclles ,& finalement h- hercnr en pic-
ces ces pauures ceatu-es , & en ietic r; nt les morceaux
aux poiffbns. Onditque le feieda prouiiVur î>'cftanc
faifi de la plus belle de toute la tronpc, clic lui remon-
tra fa condiuon , proLiuanc 6uVlle tftoit Chreftienne>
née en Cypre d'une noble fàmille.iir.c 'e Venife, quel-
le auoit cité p'i ^fc priConniere il y auoi douze ans,rnp-
pliant puis qu'clie eftoir n mbce es mains àt% Venit ;és,
on la remena(iau lie» de l'ongtne de Icn predecefTurs.
Mais le vilain cruel l'ayant forcée , l'eftrnngla , & iecta
dcrians la mer. Ces nounel.es mutinetcnt tellcmct ceux
de Conilant'nople , que peu s'en falut qu'on ne malTa-
craft tous les Vénitiens qui y eftoy-nt.Lcurconfql nom-
mé lean Francifquc Morcf n s'employa fort h adoucir le
courroux du fulran Amur3t:& fircn forte qu'auanr que
dénoncer guerre aux Vénitiens, homme ctprcs leur
fui enuoyé de la part du fuhan , pour dcmaiMer iufticc
de cefte violente infâme & cruelle , autc r-Ùuution ùc
quatre cens efclaues . & des bien^'prins à la vtufucdc
RaraanJan , enfembje les nommage» & mrereits. Les
fcigueursdeVenifcrcmonftrcrcn.au depu;édu Turc,
oue les trois galcrcs de ccitc veufuc contre tout droiic
AAa
110^ Hifiotres admit ah les
aaoyent pilJé & fjccagé iVnc de Icu s ifles,& ^ue pour«
fuiais par lear Hoite , elles n*a oycnt voulu caler voilc>
ains s'eitoycnt mifcs en dcRnic : doms'clioic tnfuiui
ce nul, duquel lis promcttoycnt iairc luiiicc. Lcproui-
Icur Efmc fucprins & décapité, bô nere& les plus coul-
pables le fauucrent u'heuic, La gakrc dcRamandan
rendue auec pareil nombic d'ciciaucs qu'on y auoit
trouuez , & le dommage reparé en quelque forte au c5-
tentcraentd'Amurar,lorsfort cmpeichécn lagncrre de
Pcrfe , fans laquelle infai liblcineni \\ eull contraint \ci
Vénitiens de réparer ccftefaucede toute autrefaçon.
Mais Id necelTiié d:s afaircs le gcinoit merucilleufc-
menr. Car d n'auoit peu faire lullicc d':s lanilTaires qui
peu auparauanr auoyent tué Ramandan & vn autre baf-
fa en Cyprc, paii faccagé tous les lo'dais de du ga'ercs
y cnuoyees pour faire iuftice de s coulpables. Celle in-
fam te cruelle donc duprouif^ur & uesfîns fut punie
en quelque fortermais non exadli-ment, comme la qua-
lité & es circonttancesdufo fau lembloycnt le requé-
rir. Nous auons tiré celte iiiftuire du /»p/><eW/î^ des ^n^
nales deTurqttieidreJJépar leande Leonciayy , & imprime
l'an I ^ 8 (5. Voyez ce que nous auons marqué peu aupara-
Uant des KauiiTc .,rs pnnis.
r 0 L E ^^ Ti^S chaftie:^.
ILyacentansoueouiron , que trois frères , Gafpar,
Bruno &i Ch irtoticgcntils homiTies de grande mai-
lon,&dc i'ancicnnefa.iillcdcs 5abc!lcsau pays de Si-
lefîi, fcigncursu'vne vilctte ncminicc VVarti'mberg,5c
dupaysvo'fin , où i- y ;iuoic vn bon chalteau nommé
Contup.ks î lus rie hes de cefte cona^ e U , & l'vn d'eux,
c'-ft afç?;^o<r Galpar , cftant l'vn des. principaux en la
cojr (iu pnnce lean , fcjgneur fonu'^rain du pays : noa
contcns de l°urs gr^nd irs i'^' ciîgnuez rançotinoycnc
leurs fujets, & br:gandovent crUT qui paUoy ne defîus
leurs ^errcs.AyafjS con. in jé cf mefchrtni train quelque
temps, Matthias ro)'^c Hongrie, aucrti de tels deporrc-
mcnscommanja qi 'on t ouualt moy^n de ies faiiir.iîa
CCS entrefaites auint que Gafpar & Brur.o fc irouucret à
Giogouic,gù ne péfaQsqu'àfâiiegraad'cherC) la iuftice
Tim ies
ér ntèmorAhtes] _^ > i o 7
vint les empoigner à table , menant l'vn en la tour.l'au-
cre en la maifoa de rille. Soudain les portes furent clo<
fes , n'cdant permis à aucun particulier de forcir. Le
Prince Ican acompagnc de quelques vns de fes plus
feaux,monte à cheuai au mefme iuftaoc, galope en dili-
gence iufques àrn autre ville nommée Frciftad ^ où il
arme loo. hommes, & le rendant enuiron deux heures
de nuiétdedans VVartembeTg,furprendChriftoAe, qui
futcnuoyé pieds & poings liez à Freiftad. En lamelmc
BUid il s'empara du chafteaude Contup. On fii incon-
tinent reccrche des larcins de ces roieurs , & trou ua-oa
des toiles d'or, des draps de foyc de toutes façons, for-
ce drogues, & efp^ceries , des perles, des merceries , vn
grand tonneau tout plein de rafoirs , des martres & au-
tres peaux. Deuxiours après leur prife Gafpar & Bruno
fur les huit heures du foir dVn iour du mois d'Ofto-
bre,eurent les teftes tranchées es prifons. Chriftoflc
mourut de faim dedans la tour de Freiftad. lis confef-
ferent outre plus auoi?confpirc contre i'eftat & la rie
du prince, auquel lesfuiets de ces gentils-hommei pre-
fièrent ferment de fidélité. Voila l'ifTuè & fin miferablc
d'vneillMfire famille , acableepar leiufteiugemcntde
Dïcu.loachin Cur^tut en fes annales de Stlefie.pa. } 3 ^.
Le duc George de Saxe , ayant refigné le droit qu'il
pretcndoit au pays de Frife à Charles d' Auftriche.cora-
te de Hollande,prince des pays bas,ran lyiS.paya & li-
cencia fa gendarmerie, parmi laquelle ilyauoit quel-
<]ues quatre mil homes qui fe faifoyent appeller la trou-
pe noire. qui n'cftoyent qae voleurs. Ayans efté caflcz ils
furent recueillis par vn colonel François,: mais pource
qu'il n'auoit point d'argent , ni commifHon pour les
employer en aucune part,ils demeurèrent pillans,man-
geans & tongeans le bon homme au haut dioccfe d'V*
trecht,<senuiron$ deDcuenier. Ils entrèrent puis a-
près en GucIdrcs,pouT vcir fi leduc » princr remuant,
voudroitles employer. Au contraire il les fir retirer
hors de fes terres, & paficr le long de Nieumc ghe,d'oi
iisfe fouricrent en la duché de Cleues , où ils fourra-
gcrcm cruellement k$ villageois* Ce qu'entendant I«
AAa %
1 1 0 8 Hijloires aàmtrahtes
duc de Cleaes, il s'en plaignit à celui cie Gueldres, corn*
me s'il les lui cuit enuoyez. Le duc de Gueldres s'en ei-
cufa bien fore , lui lailFant cc^ voleurs à l'abandon. Eux
fans fc (o acier de perlonue ne bougerenc,fe confians
en leurs forcrs, voire cnuoyerent des mcflages auec let-
tres remplies de paroles infoientes & pleines d*outrc-
cuidaBcc.Surcekduc de iuiilicrs Te mit en armes, maa-
danc à tous les vafTaux de fc tenir prtlts , pour le luyurc
contre fes ennemis , & ayant amuli'é toutes fe$ foi ces,
tant à pied qu'à cheual^l'c mit en campagne. L'euci<juc
de Cologne lui fintau fecours» auec hutâ; ces cheuauz
fuiui du Comte de NafTau lequel en conduiioit autant:
^fiqu'enpeu detemps fc trouuerent trois mille che-
uauz & grand nombre d'infanterie, hzi foldats de la
croupe noire encendans que cef^epuilfante armée leur
vcnoit fur ks bra$,fe trouuerent bien eftonnc2,& leurs
capitaines aulTiyredoucans fur tout la caualcrie , pour>
ce qu'ils n'en auoyent point ; parquoy ne trouuerent
expédient plus propre , que de fe mettre en la bonne
grâce du comte de NalTau, auec lequel ayans pari: men-
te,ils capitulèrent de pofcr bas & rendre leurs armes,
pour feretircrauec le bafton blanc hors du pays , au
trauers duquri ils demandoycntpaflage pour faue leur
retraite. Ce que le comte leur accorda. Mais eftans
au nombre d'enuiton douze cens , qui vouloyent pafl
fer des premiers , &: en foule , dont quatre s'cttoycnt a-
Uanccz qui contcftoyent auec les pavUns , Icfqucls
inlîftoyent à cc qu'ils rcndilfcni les armes : les Rciftres
du comte & la c^ualcne Vvalonne voyas cela , chargè-
rent la troupe qui vcnoit dcrrieie ôc la mirent en rou-
te.Les payfans, qui ne dcmandoyent que reuenchc , a-
pres auor lalchéquelqoci coups d'arulierie àcraucrs,
acheuerent de les dcifaire , ôc maflacrerent ces douze
cent. Lesaucfs, qui eftoyentencore en leurs retran-
chement, furent tellement cfpouuantez , quequittans
tout, chacun auilà de fe fauuer , autant qu'ily auoit
d^hommes prenans autant de chemin, l^ar air^fi ceftc
grande troupe fnc toute romptie &: difllpec : ce qu'on
difoit auoir elle fait par les Vvailons , pourauoir la .
prc-
& memoYahlesl 1109
première part au butin , deuanc que les Reiftrcs y arri-
tiafTcDC. Toftaprcsyeut beaucoup de ces foldaci de
la croupe noire décapitez , fc pendut > principalcmenc
tous ceux qu'on defcouurits'eftre trouuez au fie de la
ville d'Arpcren,oii ils auoyent commis des cruautez dc-
tcllables , le fang innocét ayat crié & attiré la Tcirgean-
ce du Ciel fur eux lean le 'Pettt att yMtire de Ugrande Chro
nique de Hollande.
L'^n mil cinq cens foixante deux , toute la France c-
fiant en armes ciuiles.vne troupe de voleurs en Langoe-
doc,courans autour d'vn lieu nommé le Bourg,parauât
pris par le fieur de Bsudinc.ayans pris & tué vn honno-
rable perfonnage, nommé le fîcùr de Sauzct, de Nifmes,
auertis qu'il n'y auoit point de garnilon audit lieu de
Bourgjs'en faifirent fans re{îftance,& y tuèrent le baron
de faind Kcmefy aucc vnlîcn fiU de l'aage de douze
ans, qui s'y trouua d'auancure pafT-nt par là, & y ayant
couché:dôtaduertis leurs aduerfaircs atlîegerent la pla-
ce,l'ouurirent& forcèrent le douziwfmeiour de Nouê-
bre,ou furent tuez enuiron quatre vingts voleurs , qui
s'eftoyenclàramafTezde tout le pays,oultre vne baftelcc
qui fc noya fe fauuant par la porte du Rhofne.H;y?o/re de
France, fota ClMrles ix.lm. 10.
Le capitaine Rapm , gouucrneur de Montpellier,ad-
liertiqu'vne troupe de voleurs & brigands qui tenoyent
Je lieu d* Agnane & faifoyent mille maux es lieux circo-
uoifins ncs'amiufoyentqu'à faire grand*chere,acompa-
gné de cinq cens harquebuziers & de la caualerie du ca-
pitaine GremiaojVint les refueillcr cnuiro le io.de De-
ccmbre,qu'ils auoyent faift vne infinité d'infolences a-
uec gens de leur forte.ramalTez des lieux voifins. Il fur-
prit les vns endormis, les autres en chemifc, dot la pluf-
part furent mis à mort > les autres amenez prifonnicrs à
MontpeIlier.I.d mefme.
En celle mefme annce, le fîcur de Sommcriue faifant
la guerre en Proucnce , enuoya certain capitaine nom-
me Bouquenegre, vaillant , mais infigne voleur , faire
quelque dcfcoaucrte,ce qu'ayant exécuté, comme il fc
rcftaiichilToit en vn petit village appelle Cbafteau
AAa $
X 1 1 o Uiftûires admira h les
jicuf,fac prit prifonnicr aucc deux foldats Corfcs,& ^^
ficn valet duquelil cntretcnoit la femme y & peaapreS
conuaincn d'infinies voleries , meurtres & violemcns»
fut pendu & cftranglé en la place publique de Cifteron
par les propre^ mains de fon du ralci.E» U mefme hijltvre
T y%,E s s E. yurongnes,caufe de grands
maux f punti.
LE vingifixiefrae iour de Septembre içi 7- vnfamc-
di,fur les quatre heures du foir, certain valet , cftant
yurc, mit lefeoen vnemai^ondeGlogouic,TillcdeSi-
lefîe,où il s'embrafa tellement , à l^aide des vents qui fe
renforcèrent foudain , qu'en vn inftant le feu gaigna
routes les rues de la ville, au grand eftonncmenr des ha-
bitans,{î efpcrdJSjqu'ils n'y peurentremedier;iellcment
que p'efqae toute la ville fut bruflce. La flamme & la
fumée eftouiferenr 8o.perfonnes & des plus notables
du lieu» qui par faute de bon auis s'cftoyent allé cacher
en des cauesjoù l'efr-ufTsur, véhémence & continuation
de la fumée leur ©(hlavie. Rien ne demeura debout
que la grand' co|iie,le collège » quelque peu de maifons
prochaines & le conuent des lacopins. Les preftres fi-
rent toutes les folennitez qu'ils peurent pour remédier
àl'embrafement ; mais en,vain. C'cftoit la veille d'vnc
fcfte qu'on célèbre à l'honneur de S.Staniflaus, Tvd des
patrons de Pologne , & particulièrement de Glogouie,
qui entre autres deuotions chantoyent tous les ans vn
hymne contenant entre autres chofes la prière fuyuan-
te:0 bon pafteur Staniflaus, maintien ton peuple par ta
prore£\-Jon, gouuerne le fous ta protcftion , vueillcs le
guérir & fauiiT par ton i n ter ce ITi on. /o4c/?»m (Cureta, doSic
Vttdecm c p^iilojol'hey^n fis annales de Silejie.
Il n'y a pas long temps que la Linonie eft tombée en
lapuifTancedesMcfcouitcs , lefqucls y ont commis des
llf,à^z çftranget, parauâat clic çfloit gardée par dqs
gentils^
(^ rnemorahlesl iiit
gcntiîs-hommcs & foldats Alcmans ,de I*ordre Tcuto-
niqucqui a commencé aucc celui des commandeurs &
cheuahcrs de Malte. Iccux eftoyent desbotdcz & con-
fits en tous vicci, nommémcn» en yurongncrie , à la-
quelle ils s'adonnoyeiufi funeufement i]u*cftans à ta-
ble ils plantoycnt leurs poignards auprès ce leurs grâds
verres, auec menaces de tuer celui de leurs compagnons
qui refuleroit de boite cxcefliucment a la première fc-
rapncC) cncorcs cju'auparauant il euftdr fia bien beu.
Vn iour on leur aporLa nouuclles , que les Mofcouitcs
approchoycnr,dont ils fc mocquerent , & en leurs beU'-
ucttes commencèrent à dire les vni^ux autres , le te
portctoutd'vn traifl vingt cinq Mofcoaites.Mais com.-
meles enncmisfuflcnc venus vniour df d)manchc iuf-
qucs aux portes de Rigc, ( capitale du pay> ) &. que Ta-
larmc fonnaft de louces pa ts,ces aualleurs de Mofcoui-
tcs furent fîcfperdus & tranlFis , que leurs femmes &
autres de la ville les accompagnèrent iufqucs aux por-
tes , les accourageant le plus qu'il eftoit pofllble,leur
mettant de la canelle,des doux de girofle ,& des confi-
tures en la bouche,pour leur faire reuenir le cœur,à fia
qu'ils ne tombafTenr de leurs cheuaux en terre, enco-
resque l'ennemi n'aparuft. Peu de temps après partie
de CCS yurongncs fut taillée en pièces, le reltc périt mal-
heureufcment en priron,& d'autres mifcTCS : quelque»
vns fe fauuerent ajoute peine, abandonnanslafchemcnt
le pays , que l'ennemi fourragea a fon plaifîr. Vrfmut e»
/on commentaire fitr lfaye,chap. 5 .pag. I Ç 4.
Démon temps eft aduenu es confins de Turinge &
de Franconie vn pareil banquet que celui des Centau-
res & des Lapirhes. Car certains gentils-hommes Alc-
mans, conuiez àdesnopces , après auoir longuement
combatu à coups de yerres vindrent aux erpees> & y eut
tel de(ordre,qu'ils tuèrent Tefponfe auec fcs principaux
parens & alliez. GeorgeSabmenfes ob^eruations fur les me^
tumorphofes cCOuUe.
Au mois de Iuin,l'an i ^^i.comme vn Aleman delà
ville de Mifne en Saxe fc f t ft trop chargé de vin, palfant
fur levPOûtdcrElbe,adiouftantTnc faute à l'autre, il fc
* ~ AAa 4
1 1 1 1 HiHoires admit ahles
printà iniurier & r.iaadirctoUSi^cux qu'il rcncontroit-
Mais tojv. une champ il fjt chaltiti car en gliffanc i!
tomba decians ;a nuicre Fort imnetucufe en ccft en-,
droit,oùlcfcacle fon vin àc de fa cholcrefut crteintpar
Tabondance d'eau qiiî i'rltouffa fans qu'on peuft le fc-
courir à ccaips. 0. le Feme ait lutre des annales de
PSlifne
vn certain bas-Alleman j accouftumcà fe remplir
de vui outre mefare,iuf^uc$ à en rendre gorge , quel-
qucsfiis aufli tomboit en tel eftat qu'il en perdcic la
paroie:mai$ après auoircuué fon vin il reucnoit à fo^
&pei2 à pcucommençoK à parler. Qjclquc iours'eftac
remis eu cemefchani tram , 5c <:iCieinemcntcny'jré,il
prini querelkauecvndelacompag le, fi auanc qu'a-
près beaucoup de paroles outragcufcs lis empoigne-
rem [es coufteaiix & fe ruèrent au coUc" l'vn de l'autre»
tellement que l'y ai ongne receut vn coup en i'œil > qui
nedonnoit gueres auanr. Ce neantmoms il en forcic
quantité de Ung à cauie queccftoit vn homme fan-
guio & robutte. Soudain il pert la parole, & meurt Ac
dans vingt-quatîc heures après. Les chirurgiens appel-
iez , encore que ie mainuBireque lecoiip de coufteau
nVftoit point mortel » ain.< que la mort eftoii procedec
de l'yorongneric & de l'excès du defFunft , furent d'ad-
Uis contraire , tellement que contre tout droit & équité
Celui qui auoitdonné le coup de coufteau fut exécuté à
njort. l'eitois fondé fus vn aphorifme d'HippocraieSi
lequel di •• >i qa^lqu'vn perd foudain la parole, il meure
deconuuifion ,{înonque lafiure furuienc,ou qu'ayant
atteint l'heure en laquelle k vin efl fufHfamrtient cuué,
il recouurelaparolc. Et Galien au deuxiefme liure des
caufesdes maiadies.Combien ( dit il) que le vineftant
beu par mefu'c puifTc augmenter la chaleur interne,
d'autantquec'eftvn aliment fort conucnablc : toutes-
fois û l'on en prend dcfmefurcment il engtnJredes
maladies froides : car les alTopifTemens dccerueau,les
apoplexies & conuu fions , accompagnent ordinaire^
mencryurongneric. BMdottynde 7{on^ey , doflemedectu
Jioll4t*doh} en pu i %* e^tîirc mediimaU* A quoy l'adiouftc
ér memorfihles. ' 1 1 5
que nousauons ici vnc notable hiftoirc des iugcmens
de Dieu fur les yurongnes , 8c mcfmcs fur ceux qui fc
trouuent en la rompagnic de telles bettes furicufes.
L'an I v; X I .Beuedidl Biug, capitaine & chef de guerre
en Suéde pour rafcheiKf4Uc d'Vpfalc, entendant que
certaines troupe? du prince Goftaue aprochoyent, en-
uoya quelques detcoaureurs Içiuoir que; ce pouuoic e-
ftre. Les gé$ de Gortau<- faililVcm ces coureurs:ce qu'en-^
tendu par le confcil & le chapitre d'Vplale ils tnuoyent
lettres aux capitaines de Goftaue, priant qu'on ne les
troublaft point en certaine proceffiô qu'ils preicndoyêt
faircàdemielicuëloindclaviUe. Les Suèdes ayans fait
refiis pour quelques confîJcrations,B ■r'cdi£t,i'en moc-
qua , & pour les dcfpitcr fir vn ftdin foîenncl à grandi
nombre de gens au iardin de l'archcuefque. Mais le len-
demain douant jour les Suèdes furprindreni Bencdift ^
fc$ gens aflopis de vin,tuecc le corps de garde, fc rcr.dcc
maiftres dclamailon archiepifcopalf , & empefchent
leurs ennemis de mettre le feu en la ville. Le maudit Bc-
nedi6l,cfLTC-iilé à toute peine, & fe fauuant comme il lui
futpoUIblcjfut enf yanc blefled'vn coup de flefcheaa
bras fi rudement , que toft après la flefchc tirée hors de
la •(♦layeil mourut âStoKhoIm Ce fut Icfalaircde foa
audacieufcyurongncrie.T). Chytrew au $ Jlu.de fa Chroni-
que,
L*an I4<îy. les Polonois afïiftcz de quelques rciftres
furprindrcnt la ville 6c le port de Parnov ea Liuonic , de.
laquelle le rny de Suéde s'eftoit rendu maiftre trois ans
auparauant»lly tenoic vnegarnifon de reiftres, dôtayat
caffe la plufp^rc.ccuxqui eftoyentreftcz accordèrent a»
Uecleurs compagnons (qui auoycnt pris parti aucc le
Polonois & le nouucau duc de Curjartdjdc leur donner
entrée en la ville le dimanche de Quafimodo. Le lour
venu, CCS marchans,fcignan$ vouloir fc retirer le lende-
main après les autres font aprefter vn fcftin fur le foir,
& y conuicnr force gens leurs amis, pour dire adieu, fé-
lon leurcouftumc. Le banquet fut aprefté au logis d'vn
des confeillcrs delà ville, lequel gardoit les clefs de U
porccdc/îgnee^Scprcs d'icclle. £ncc fc(\in l'^oo bcuc à
II 1 4 HiBoîres admïrMes
outrance : leconfeiller & les autres conuiez furent aba"
tus fous les tables à coups de verres. Lors les coniurrz
fefaifîflcntdcs clefs & donnent entrée a leurs gens , qui
tuent les Suèdes, lefquelss'ingcrercnt de faire icfte ,&
fauuercnc lavietantaux Alcmans qu'aux autres qui de-
mcUTcrcïii({\lo\s.Le mefme au ii.lw.
L'an I 5 7o.lechafteaudeReuflçn Liuonic fut fur-
pris par Nicolas Kurfel &autres,rou$ le prétexte qui s'c-
fuir. Se plaignans de n'auoir touche paye quelconque
tout le temps qu'ils auoyêt porté les armes pour le roy
de Suéde en Liuonie,ils déclarèrent leur intention eftrc
de garder icelle place iufques à ce qu'ils eulT'cnt eftc fa-
tisfaits.Gabriel Chreftien, baron de Morbuy, lieutenant
du roy de Suede,fe voyant furpns , confent qu'ils gar-
dét la place iufques à deux mois après: mais ponrcequc
Kurfel fe fortifioit là dedans » les Sncdcs irouucrent
moyen de s'en rendre maiftres derechef.huiâ: iours de-
Uâot Pafques , ayans deux hommes de leur intelligence
en icelle,entendâ$ que le capitaine & Tes foldats eftoyét
yures & profondementendormis , ils entrent par vn fe-
cret conduit anec efchelles de cordes en la ville, au nom-
bre de trois cens, & coupant la gorge à quelques fenti-
iîellc»,prenent les autres endormis & dcfarmez. Kurfel
& quelques vns des principaux furent décapitez. Ce fut
le loyer de leur yurongnerie.Z,e me/me rfi# iii/w.
Le fort chaftcau d'Obfbourg en Suéde, plufîeurs an-
nées auparauant fut furpris la veille de NoeJ fur la gar-
nifon , pourccquetous les foldats & capitaines d'iccllc
s'cftoyent tellement enyurez, qu'ils furent attrapez fans
refîflance.Ie vin les ayant tellement afTopis , que la pla-
ce ef^oit es mainsde raflTailIant , auantque ccsyuron-
gnes ronfîans en fentiffent rien. Les vns furent efgor-
gcz.Les autres honteufcment defpouillez & chafTez à
leur rcÇucil. ChytrteHS ^nfa Chronique Septentrionale.
L*an iç 47. vn Lyoonois nommé N.Chanourryayant
commis en fa vie beaucoup de crimes, eftoit couftumicr
défaire côtinoelledeibauche, &dc retourner yure tous
les foirsen famaifon , ouiltraitoit fort rudement fa
fcmme.BUe irritce de tant d'yurongner ics& fureurs or-
dl-
iîr métfJorMesl 1115
dioaircs Ufciaa fînalemeac la bride au defîr de vengean-
ce. Vn loir Toyant ce miferable enfeneli en fon yureflc»
& ronflant fur vn banc , aprefte vn vafe propre , empoi-
gne vn grand coufteau, coupe la gorge au malheureux.
Puisdcfîrant couurircefte horrible & furieufe exécu-
tion , dchberc de mettre ce corps en pieces9 & les ietter
de nui6l en la riuiere.Lors elle commence vnc cftrangc
boucherie , defpeçant ce corps en tant de pieccs.qu'elie
pouuoic \qs portera dinerfesTois au Rhofne. Elle mie
coûtes ces pièces dedans vn raC)fairant cefl cxpioidl aacc
tel foin , qu'on ne pouuoic remarquer aucune goutte de
fang en lamaifon , tant elle auoic proietté de longue
xnam ce forfaiél. La nuift fort obfcure cftant auancee,
clic porta CCS pièces àdiuerfes fois au Rhofne , & les y
ayant amafTecs les micdedans le fac,y adioui^ant pour
contrepoids vne grolTe picrre,afin que tout allaft prom-
pte mcHt à fond. Toutes fois fc haftartpouf n'cftre veuë,
oufurprinfede quelqu'vn,ncpeuftiî bien faire que le
fac ne vinft au dcflus de Tcauide façon que les voilîns ne
voyans point Chanourry commencèrent à murmurer,
fçachans la noife qui parauant eftoit en ce mefnage- Fi-
nalement prinfe fur quelques coniefturcs , & dcfcou-
uraot à fa face le trauail de fon efprit , confeffa ion par-
ricidc,dont elle fut punie meritoirement. Chanourry a-
yant trouuécn fa maifonje gibet, le fupplice, & le bour-
reau de fon yurongQefic.'Pdre«/i»<3» ^.UuJes mémoires de
Lyon^chap.io.
C'cft s'eïpofcr à manifefte péril d'aprocher trop près
des yurongnes , en pcnfant leur complaire: tefmoin
ceft exemple. L'an i 5 35. quatre gcncils-hommes déli-
bérez défaire vn magnifique feftin en certain village de
Suiflcjaiïez proche de Bade, auquel plulîcursdamoifel-
Jes fe trouuercnt,pour palier le icps encore plus loyeu*
femenr,appellerent vn rrienclhiet afin de faire danfer la
compagnie . L'entrée en fut tres-malhcurcufe : car d.^
Je premier iour.ces gentils- hommes, oublims leur bô,
f'enyurcrenc tellement , que d'hommrs quMs eftoyenc
onlçf vid foudainemcnt transformez en beftes cruel-
les* l^ç jriifçrâblc mcQcflf içr en |>ori4 lors la paf^e
1 IJ 6 Uiflotres admirables
au four.N'iyant pas afiTez toft au gré àt ces y arcs Tonné
dcfcsinftrumens, ils fe ruent fur luilcs r-lpccs iraiics,
&Ic découpent fi menu , fur la place du fcfhn .^u'il fut
rupoflîble en trouuervn fcul membre en fon cntier.Les
damoifcllcs conuiees fe recirercnt en grande f. aycur &
con tufion././e Gaft au i .i^olume de fes propos de table.
L'an I WS>deuxciioyésdeBril1acprcsdeB;illc,grads
a(nis,aprcsauoirdifnéenfcmbles*acbemincrencic)ycu-
Ic.iienr vr s . n vijlaîjc, cuayan^ expedit quelques afai-
res entrèrent r n vne tanti ne & y be urcnii outrancc-Re-
lournans en la viJ!c,, fur le chemin ils commencèrent à
contefter & fc contredire. Des langjrs ils vindrcnt aux
cfpccs. L'vneurla main gauche coupée & incontinent
rechargé tomba mort fur U place,ab2tu par fon compa-
gn..n,.c4uel:.'erfuità Ton auanture.laifTaat femme, cn-
jau$,& mefnag<-.Ze»je/we.
Vn gcnti 1-fjomme d'auprès de BrilTac s'eftantcnyorc
auecquelquer liens compagnons,au fortir detable,vou
lutaprcsbon vinboncheual, & commence à picquer le
»en fî rudement que le cheual Te prend à courir, bondir
& ruer de telle forte qu'il icite fon maiftre hors désar-
mons. Le miferable ayant perdu l'vn des eftriers demcu-
TC prins par le pied à l'autre , fc cft entraîné du cheual
cfmcu qui lui cafTc la lefte.Si lui crcue le cœur & le ven-
tre, partie à coups de pied, patrie le trainant à trauers
champs, fansqueles autres yuiongnes euflcntefprit,
force ni moyen de le (ccoxxùr.La mefme.
Entre autres fautes commifes parla garnifon de Ca-
fal villede Piedmôt , prife par efcalade de nuiâiau mois
de Mars de l'a i 5 5 ^.cefte-cicft remirquec;que fur Toc
cafion de cert--»ines nopces entre perfonnages de grande
qualité, les capitaines & bonne pari-ie des foldats-fe trc-
perent tellement du vin de ces nopces , qu'ils furent la
nuiifl mefme d'icclles lurprins dormans & tellement af-
fopis.qu'apref grand meurtre.les fnruiuans,s'cftan$ fau-
tif z.iu charteau mal muni & point iccouru, furent con-
trains demander compofition a'j marefchal deBTi(rac.&
fortir honicufement hors d'vne fort, place , qu'ils per-
mirent par leur iutcmpcrauce & diifoluiion. HïJlcWede
Henri II, L*an
à* mémorable S' ^ iiij
L'an I y ^1. ceux d'Agen, fort incommodez par Jagar-i
nifon d'vn heu nommé le Bourg du palTag , firent tant
qu'ils la dcfnichcicnt de là où ils mirencicfeu , qui fut
incontincntcftcint. Il s'y trouua grande quantité de vi-
urcs aucc force bon vin , lequel rafté par les foldats , ce
fut âqui boÏToitlc plus ,tout Icrcfte à.itcç. icur-là , puis
Ja nuift faiuante,au heu qu'il auoit cfté arrefté que touc
Jes viurcs feroyent apportez au magazin de la ville d' A-
gen auec k cuyure & le bronze qu'on crouueroit en ce
bourg.pou. aider à la fonte de Tarcillf rie. Le lêdcmaia
fur le raidi , la garniibn defaichee , qu'on pcnfoii eftrc
deiîa bien lo .i,encendanc celte defb uche , vicncde vi-
flclfcaub -urg , le rue fur !v.s dill 3jus,qu'eiic eut à bon
marché.troiiujnries vnsdelîj yutes , les autresforc en-
dormis,de of rc cju'il en fut tué fo'xancc dedâs le bourg»
outre ceux qui mirent de i'rau en leur vin, fc noyans au
rcpalFcr d'vne riu-e equi co-iJcentre ce bourg & Agen.
Jiijl de France.foH6 Cbarlts JX.iiu.^.
En cefte mcfrne ann.c , le capitaine Piles ayantfaic
cntreprifefar Muci.^an.vilU de Perigo'd, au commen-
cement de l'an i ç ô^afTcuré par quelques ^ns auec qui
il auoit intelligence , que m ceux do la vuic, ni ceux à\x
chaft^au ne faifoycc garde m ientinellela nuirt,C'vmmc
ncfedoutans de rien , y cntralui trtniiclme leulemenC
auec desefchclles qui lui fjient tendues lit ayant fceii
que ceux de h garniion du chafteau , qui auoycnc veillé
iulquesà minuiifl à dan fer & yurongne', tlloyentcnfc-
uelis en leurvin , il y planta iVs efchclles toutài'aifc,
quoi que le lieu fufl: comme inacccHTible, & y ef^ant en-
tré lui quinziefme feulement, lans qu'aucun lui fit rcfi-
ftance, s'empara du chaitcau,&de tout ce qui cftoic
dedans, par la faute hontcufc de ces yurongncs
&di(irolus . qui rccenrent le iufte loyer
de leur forfait. HiftM Fira»ce,fom
Charles iX.LtH.^.
FIN DV DEVXIESME
VOL VMS.
Z'
INDICE DES MA-
TIERES ET CHOSES PRIN-
cipales & plus remarquables traitcees Sc
contenues au I. & i. volume des Hilloires
admirables & mémorables félon l'ordre
Alphabétique.
lensmùremonjre la page.
Jane
^ge yteil page
^bbé empo't-
fonné far
y ne Courti-
9i7
^bbé feignant auo'tryne plett-
rejle en fia tellement atteint
qt*tl en penfa mourir 817
^bbé mu en ynjiur chaud
fans brusler 4 i 9
m/iboy ^grondement de chien
Contrejàtt fubttlement 39
^bfces memeiUeti^ement gttert
^bfies merueilleux treuué
dans le corps d'y ne petite
fille après fa mort 561.
G'C.
n/ibfces pefant qttator'i^e littres
Ç tf I .troMué dans le corps
d'yn yteillard la mcfme.
^hJiinentefHrnaturellt ^ mi'
raculeufe 3 op. j T l . 5 <?4
^bfï'mences de boire zy man^
gerfirt grandes 4 1 1 . ^ tf ç
^bjfinencefiincie an boire C7*
manger pari^efpacedeplw-
ficx^rs mois 1 (î j
jiccident merueilleux en yne
fille I.l.CT'C.
Recouchée abondante enlai^
16
accouchement Cefarien 114
accouchement en deux fvn de
xx.enjkns, I 90 . de trente"
fix.i^O. de 3 (J ç . enjhnsy
1 90.de LXX. CT* yneau-
tre de cent Cinquante enjhns
\9^
^ccujateur mefchant^ extermU
né ^ i%
^ccufateurs quelles qualité^
doiuent auotr i j". contre
quelles perfonncsnefont re^
HuabUs i s
â:-
y
IN D
^CCufationsfiujfet fuyuies de
i^gemens à mort i 6
^uufution frujj'e grauement
repriii.ee 6
^Cies berotijues 491.4^1.
49 3-494-C7f.
L'^mirul d' u4.unebault ajfdil
il d' horrible tourmente fur
le mont Ccnu 1 O ^ 4
Jidoifduc de Çueldres traiéU
Cruellement fort père t iy fa
fin mijerable x l 5 . 1 1 ^
^dorn<:s ^enttls-hommes (je-
nettohfi-eres quittent yolo'
tairewent le gouuernement
de la yiUe pour le falut des
Citoyens 5 77
^drian Qirdtnal de (Cornette
deictipar lar?j^cnfe a y ne
magicienne 7 . 6
^duerttjfeurs meruetUeux
17.18
adultère caché dans m cof-
ff efi emporté inj au tom-
beau,^ fa àetturunce mer-
ueiUeufe XS S ^ S ^
adultère caufe de plujîeurs
meurtres xt.tl.iJT'^9
adultère chajhét 19. dagué
30
adultère defcouttert par vn
conjvffeur CordeLier 14.
IS
adultère emprifonné mange
les tnoir ans de fes dtux
braf CT* 'fieurt de pitm 3 I
^dvlttre (^jgorgé par le mart
uidt*ltere eftouffec par la pw
anteur dti cadaunr de Jott
adultère 1 0
^tiiéltere mort de jârw là
metme.
adultère trottué nud aux
Uaim y ejlrttleji rudeoienti
cjh'ù enm>'Urt t^
^duiiCres chajrte'^ 19.10.
Z^cfitpl-Uiit^ ditterf'weni
xiparrcides il. il
^fjîuence dhpeup'e ai* lubilê
a, J\ome caufe yne extrême
Contagion 9^4
^gtlitéa courir O" mahhr
cheuiixix 3^. 3 7-.» 8
agilité ^ fur ce 33. iul\jui
41
uilarmes Jkuffcs ZP* yainet
4( li4« 141 3
Albert duc de Bawere rejîffe
la courbne de Bohême ^ 7 4
Albert m.aquti de Brinde-
bourg prend vaillamment la
y/ lie de Qrauëburg 1 0& I
^Uhyr.tfïes bellâtres cr or-
gueitleux <? 3 I
^Uhym'fes dece»i parjubti-
te refponfe du di-ible ^ i l
^ichymijtes peur la pihjpart
de*nundent confml a*x ef-
prit s la me^ me.
^leman afji.ré Aepilep e la
nuict CT'iamutf le tjj*r 8-4
^le -ande ej-t e^tii^-e lorS
quelle aCou.hoit %6 ^
^l-'nAr.s robujtes 14I
^icxu.fdre vi. Pape m^- rt
e>npoifnné 618
^iexaadre Ouyormdelture ues
inai.iî d^ ci^ux (jui ^ 'ne-
noyent prifonnier ' o î I
^Ifufe
INDICE
"^îfèafi Poy d'Arragon e;>cl)or-
te fort jUs à yfr de cle^
mence enuers [es enuemis
yeincui 7 9^. ft clemevce
enuers ceux q'*'il auoU fur-
monte\ 7??. 7 9 8.799
^Ifinferoy d' ^rragon , ma-
gnanime %y conjhînt en fèt
aUuerJite:^ 6So.ne dfan-
^u lamau de rifa^e -, para-
it ni (onteaance ejhnt pris
frifonmer. Endura C Appli-
cation d'yn Jèr urdent en
■vne Jtenne pi ye , fam ia-
mati foncer le font , «>
jnire aucune autre démon-
flratton de douleur 6%0.
Mfinfe d'Efy duc de Ferrare
libéral entiers f s fibiecls e-
fiants pauures 8 } 9
^Ifonfe DtaT^e Ejpagnolayant^
fut tuer fonf ère eji trouyJ
tfranglé attaché au col de
famnie 913- 9^4
,Ambaffade d'm'm O" merucil-
ieux 17.1^
ambition ridicule 4 1
nAmour du monde rend la mort
redoutable 9^9
Amoureux pafme\ zy morts
deioye çp' de plaifir 3 9 ^
Amoureux deuenu infenfé)9o
mangé dts poux ^9 9 • J^
chafïrat de dejpit 4 0 1 . 4 O *
Epileptique 40 Ç
Amours tournées en fureur
1^4. 15 S' îi8.40<Ç
Angtlo I{ao lurifcouff'UeHea-
jtolitumfe fin fnttter pour
fonauarice (tf
Anges deffenfeurs des hommes
contre lafkreur des ejprtts
malins 1 3 S 1 9 i
Anges apparus à diucrfs per-
fonnes en ferme d'hommet
ï îo. 151. ijç. 1 i^.
m- 119-
Anguilles abhorrées de plu*
(leurs per fonnes 3 8 I
A'TgloH efgurgé par fon com-
pagnon 9 S
Animaux fub'teCis à la rage
3 49- J^O.G-c.
Amé duc de Sauoye libéral en*
uers les pauures 83?
Antoine de Leue deceupar la
rejfonfe des devins 71 Ç
Antoine de Collsifatfi d'ejtra-
ge maladie 835*
Antoine "Pere^ Secrétaire d'e-
fat enEfpagnerudemêt trai
te en Qiftlle,ffauue en Ar
ragô 851 ,ou fon procès luy
efifrici.z^feiuftfie ^l-ft
retire en France 854»
Anuers faccagee par les E/pa»
guols 100 {.0'(^»
Apoplexie firte ç^ yehemen»
tetnyjàut point appliquer
de remède $7 1. (yc.
Appareil de guerre nauale cf-
mcrueillible 550
Apparitions merueiUeufes 4*
Apptntiot'S dtutrfcs en l*aif
4<^.& fuiuancs.
App.iritton d'yn Aigle yolat
en l'air -, ^ ^. de troufoleilt
imbrajJeZ d'm arc en itel»
Bbb
jr
INDÏG É.
Ç 4 .d\H hœnf l-mhla, t pif- ^quUaire ct^UAu%» 'Partuj^4i$
fertile fitt, ^5. <C armées iit- t,y<jloHtt des yagues de le»
mer auecjon yatjjatui^^
^raifrne eonemtc des f^penfs
^ antres bejies imntmeufcs
^r.tWne deUitre >» motne de
la m rt ï047
^ir'urt for hier fym^atïfuut eu
fo 'i bo n at*e c la rage j ^ 2,
ty (i cheual ccnbatt^ns ^nhers de in ^arde du roy d*
6 l.d'yne mcmtagie parne UCI)!<:e , de prvdtj^ieitje
en deux ^ u gr mdeur 2. 5 o
apparition merueiUeyft en ^rchei4tf.n*e deTife pedu co-
^fyrie 5 i me lut .tuoit eflé pr^du 611
tachées au combat là mcf-
me. du Soleil fort hydeux
Ja mcl". de trops Soleils de
ioury.ie %. lunes de nuicly
S %.\ 9. de la figure de le-
fm Cbrift ajih dej]}iô yn
mrc en Ctel-, € I * d'o^uerture
du c/eiy 6 ^ .d'armées à pied
apparitions Sataniques 4 ^
^yippetit de boire (^ de manirer
perdu 6 4
t/ippettt de femme enceinte y
retenu ou d:nié , en donne
Vtmpre(?tona Cenftnt 67
./irnieeTurqHej-jue d<:sfaitepar
à eu Cormn ciHiniade 583
^rrt-Jlj contraires des Parle-
ments de t*art6 C7* l^ijon
fur mefi/iejàtcl 8.1 I . I 4
-^ficii-iàes f I 5. w tf"
appétits lie femmes enceintes -^JutUj'tt tc/neruire puny 69
Jàrt efrrâges , 6^ • de mordre
-pnieuiàe home fur le ihtnno
ducoly de manger efcreuij]es
crues la. mtlmc. démordre
Ia ïambe nue ayn joulonj
6 6 de manger de l'tjpaule
d'ynboul.iiigery là me me.
de la chair de leurs marny
là me r. aes grojjes poignées
de iith, ou d ejroiippe 57
mang-:r anguilles vicei, du
godran^de la. croye a mef-
me.
0^pprehenfion.yQyç.z irsagi-
jacion.
^pprehenfîon yehemcnte eau-
/Uni la mott fondante 5 8 1
'JJaJs'mats deftjuucrts 9 4 • 9f
-^Jjaf?in.its commis par adul-
tères 1 I •CT'fi.
./ifjlifins defcoiiuerts p.ir no-
tuoles r,}oy<.s c^ puni6 319
3 6o.c?'<".
^jjommeurs 9 Ç
^irroiogne exécuté à mort çj*
ponri-inoy f> \ l
^ualeitrs 7©. 71
iiifn'.res merueiUeufes de cer-
tains qm ont anaié pur l<$
gorge chofes eftrAu<res ^ ce
tjtii s en est enfu.uy 7 i .7 J
Clfofrs aualees par imprinlence,
Cr forties par aiuers en-
dr»ifs dn kvrjpr.74.7 $ -o^^»
\
t N D I C Ê.
JiUalant yin fam mouuement
qutlconque 70
iAuartce de 'Paul loue Chroni-
queur-, cr Euef^ue de "No-
Cere en halte € i.6
^itarue d'yn Vape 61 S
^ueuglet de nature deuenui
trejdoÛes 449
^ueugle grand l'kilofophe là.
mclme.
tAuett^le depofant contre yn
criminel auufe de meurtre
iAulx par leur yfige chajjeni
Us yers qui s'attachent até
cœur 1 1 I
i/iutel touché excite les foudres
CT* tempejles 11^
B^ia^etfils de Soliman e-
Prangléd'yne corde d^urc-,
far le commandement du
père i I 7
iBalde lurifconffiUe mortjùrê-
eux c^ enragé 3^0
Sarbar es prudemment adoucis
78
Saron de Courtenay àxecutéetè
Çreueà'Parti 97 O
Baron de 7{entyfaccagé par
Us payjans en Haynam
977
ÉajUic des anciens rapporté
à noflre coq 3 Ç I
bataille de S. Tionat remar-
quable j»r toutes Ç 00
dandiné yailluHt capi(am«
I 100
Seaucaire pillé cy les pittatài
extermtae^ -7 g t
3ernardin (^orte yend le cha^
Jleau de ^SliUn au rcy de
France O' ej} puni defon m-
fidélité c^ trahifon 106^
2 lafphemateùr tué de la ptt-
dre qui l»i eviport^U ian^
gut i4y
jBiajphemes o* paroles de/pi-^
teu^cs xi%
Slejptres guéries 80. & fui-
UAOS
3leffu^es légères , neantmoins
mortelles 7 ^
:BlefJt*res du ceeuT quand fnt
mourir foudam i 1 1. IZ3.
Sluetîes defiufortant du poil
de la tcjle d'yn Carme ^ 3 tf
Soire mefprifé 4 i I . CT'C
Bordet capitaine François fè
fiât tuer par yn de fies foU
dacsyÇ^ pourquoy 578
Souquet émpoifonné par forte-
l^ges St%
Sourdelois Comment punn de
leur fiedition *3 4-
'Brabançon , infitgne impofieur
"Braccio de Jl^ontone yaillanà
capitaine tué deuaut ^quilt
Braptuole excellent medrcmi
ae quelle rufe rfiu pour gué-
rir yne d.ime tnetaniholi-
que O' folle j^j
Breton luittcur excellent z ^ j,
Breuit of* efioit efcrite y^e re*
Biib »
gepte de médecine jhit la
mefme opération ijue la mé-
decine en la marnant J 8 1.
Sri^atts (rr meurtriers 9 o
jBrt^ands defcouueris par y ne
yolee de (^ornelies $ i
Brigand tiermïte 9 S '9^
Brigandage fou'i^CQuleitr d'yn
breslan de leux de cartes o*
de
\
PT
Brigand Contrcjkifant le muet
CT" demadât l'aumofne 9 1
Brigand pendu non dtt tout e-
Jîranglcy ojîé au ^het o*
guery 109
Brigand torturé de fa confct-
ence defcouure a, la iuflice
foiifirjhit pour eflre puny
X XO.l X I
Srigands prudemment adoucà
19
Brodequins empoifonne"^ 9 3p
3rmtjàux,^ dommage enfui-
ui 4I3-4I4-4IÎ
Bruit de gens arme^ entendu
en Vair 5 O- S I
Bruslement de yiUefufiUé par
le dta'ole I 8 I
Butin pillé caufe la mort aux
pillards 7^1
G
CAdetde noble maifcnfe
chajire de de/pit Z96
CafarSorgia tuépar yn /im-
pie fAd-tt 6t2
Cap de banne ejjierance dange-
reux en temps de tourmente
panards en bon nombre s^en*
INDICE.
tretuants en comlàt 457
Capitaine Bayard fe bat en
duel cotre yn tjpagnolj 1 1»
Cardinal libéral en l'editiondes
Bibles de Complute 8 3 S
Cardinaux extrêmement aua-
res 6z^.(i9
Cas e/ranveSiO' extrêmement
pitoyable 100. & fuy-
uans
Cajfe yenimeufe ^ mortelle à
certaines perfonnes } J o
383
Catalepjîe maintient fon pa'
tient au mefme eïtat quelie
le prend 8 |J
Cataleptique priué de tout
Mûtiuement ^ fentiment
demeure toutroide aj?us en
fa chaire la plume en U
maintes les yeux ouuertsfi~
(he^fur yn Hure 831.
^utre couché tout defon longy
comme s'il euft eïié mort
là mefme.
CataraCÎes ou tayes merueiL
leufcruent guerres 804
Catherine de Jitedicu 7{pyne
de France, foHge la mort di*
'^y Henry fécond 1040
Catlierine Turle guérie d'hy-
dropi/îe 8 I O
Cenfures fupportees modefe-
ment 375
Cenfure de ^u fur ta contre U
traduClton de 'Platon par
Ficin Jà mefme
Cérémonies des Arragonois a
(recr l(ur ^^y 8 s 9
INDICE.
CfTtain criminel eflant mala-
de bourrelé de fa propre
ionfcience fe crotd ejhe con-
damné à mort par tuft'ce^ejl
delmré de telle imagination
p^r moyen txtraordmaire
Ceruelle d'Oiérs efmeut desî-
magtnationsbeftialcs 3j8
Chaleur extraordinaire en
temps d'hyuer 7 3 8.
7i9
Chanoine extrêmement auare
6z 3.i'2,4
Chantecler moine de Tarny
atteint d^ejlrange mala-
die 681.685
£Jntntre du roy Charles i x .
empoifonné 919
Charlatan tué far la morfure
d'vn ajjjic 941
Charles y. Empereur pajjé par
la France , CT* par 'Parts
717
Charrette pajjant par dejftu
yn enjnnt y fans le bleffer
911
Chaffe où leyeneur ejl pris
Çhafliemens diuers des ^-
duheres I 9. to.i 3.1 f.
t6. 17. i8. 30. }i
Chafiransde défait eux mef-
mes 401.405
Chajlrétout àfiiiSl, feignant le
youloir efire,jfïn de paillar-
der plfU librement 374
Chati opnfenf ^plufieHTS pet-
fonnes de leur regard %^ 8 •
fonfangenfrit pv'^ndre fort
naturel 5^7
Chemmer fur la cord*
35
Cheual préfère {par auatice)
à la yie d^ vn homme 531
Cheualiers Teutoniques yich-
rieux fur les ^ofcouitei
1096
C"euaucheur d'efcurie noyé
irtiuflement O" ^^ yengeance
diuine qui s\n enjuittit 9^,
100
Cheuaux effraye"^ fe rendent
aux ennemis 778
CheuauXyChicns^mulets j afnes^
Zy foHTii mange^ dedaiéS
Sancerre 7 5 4.C7'C.
Cheutf fans bleffure x O 8
Cheute de fn haut fans bUf-
fure 1 I 4
Cheute heureufe a, ynefide hy -
dropicjue 8 I O
Chien noir de grandeur exce^
fine s 'upparoiJJ'ant au Car'
dmal Crefcence 171
Chiens enra^e^yde leur morfu-
re yenimeufc 3 4<5^- C/'f-
Cholere C4ufe de çaa pitoya-
bles , CT* morts estranges,
I oo.ioi.I04-Ci7'f.
Chrijhjïe Trutyrin guéri
a'hydropi/ie par le moyeu
d'yn lai fard 8 l I
Cicogne bruslec s* efforçant d e
garder Ces petits des flam-
mes 1 84
Cifitron af?iegé par Sommer*'
IN'DI
n^^auft la retraite mémora-
ble des habttam d'icelle
Çtuille enterré deux fou com-
me mort ) rcuient e;i (onua--
lefcence 66 1. 66^, 6 6^.
CljiJ} ère frt fente a >» malade
opérant fans tRteClion aucU'
ne x^$
Codes AJlrologue ittdiciaire ej}
tt*é comme lut mefme auoit
prédit 890.891
Coq enragé tuant fan maijfre
Coeur humain y élu çy ce que
dénote jq^
Coeur humain zy Ça t^ye. di •
uerfes htfotrcs d'uelut 108
Cœur ùie/jjé, Vho.nme ne meurt
pxf tuujiours foudain \ i 5
fierres trouuees au cœur
l I z.
Coloquinte efmeut par l'atou-
chement o- odeur jSt
Combat tnefgid en nombre
491- 4 9 5.C7C.
C«nibat pour U conferuation
des prititlegcs du royaume
(C^rragen g ç ç
Combat 'Naud d* André cf
yniuhel yufconfd feres
10-J6
Combat riflorieux d'yn contre
trou Cheuahers ^^6
Combats à'homcs ^rme7 yeu4
en l'atr gi
Ç<fmet? afiarue à la nai/Jauce
4e Çhar(ts r, Em^er^uf
C E.
114
Cornette des plus redoutable^
de r.ofîre tëps en l'an 1^17,
Çp'fa defcription i i ç
Comètes auant- coureurs desfe-
tteres cha[iimens de 'Diem
I 16
Comètes y eues enV Europe de-
puis cent ans II). çyfuj»
uans. \
Compafiou yehemente 1 i 7
'Comte de ^ontecucuUo tiré à
quatre çheuaux c^ pour- '
q"oy. 5 5* I
Comtejfe de Hollande enBn-
tant pour ynefvti } tf V • ^»-
Jàns tnasles 790
ComtcJJe de "j^tbcs guérie d'A-
pr>plexie ^-jf
Conceptions CT* enjàntemens a-
uant aage i iS
Condamnations à mort preci ■
p'iteeSyKy intujles 193.194.
Co/ifrJ^ion extorquée cauteleu- M
fement J O tf fi
Coniurationsne doyuent ejhe
différées 391.
Co"fcience,c?' de fa force-, 119
ConfOences torturées dufouue^
nir des fvijnièls, 1 i o. 1 1 1
lit
Confetder du pays de Frife,
faijï d*yne paJ?ion yehe-
me/ite,meurt 917
Conjïance de Ferdinand d'Af'
ragon ^81.^85
Confiance de Charles rlU.
koy de France , en l<* "»«>*•
4^fm
V
IK D
êU fi)nfih vnique 6% 4
Cotijtartxnefile ruinée par jïtt
Cr' pur p.ujiev.rs trenihie-
mcnts àetcrr" y l if 4 485
Continente mémorable c^ «c-
tai)U \ i i.6% s
Conuulfion es parties internes
fans cjue les extcr'-es s'en
rejj entent 6%j
Corbeaux prefigeans la mort
de WcjtnHi ^76
Cornet ly s yengcrejjes a*rn
meurtre ^ i
Corps agtles t j.J 4. 3 S.CT-c
Corps andtomattfé ayant trou
râtelles y 66
Corps humain pétrifié 114
Corps meurtry J.itgnant , en
prefence du meurtrier : ^
comment cela fe peut filtre
370-57i.37i
Corps mortel demy pourry
mangé parles Ejpagnolsen
temps defiimine 73 f
Corps de tnjjntjje'^ fortans
hors de terre a certain loury
4t. 4 3-44.
Corruptettr de frm;nes cr fil-
les puity diuiuement 3 J} 8 .
^urrtiption de It*gfS 303.
304
Copne de ^edtcn 1>t*ç de Flo
rence libéral a fecourir fis
amtf 8,7.858
Coup de eanon emporte l'^s
chaînes d\n firçat fans
Vojjenfert te ijuiluy donne
moyen de fefamçr 704
ICE.
Courir fur la corde r tx^
ce'dens en cefie anlné i ^>
Courfatres en nobre r'^deinent
battua par trou hon,mes
491. 49i
C^urfi açie z^ ^fi^ 3 4
Courte de chenaux admirable
35. » 7
Coiirnfanne de 'Paru ff^ niant
d-^t'.enir blanche efi empoi-
j'onnee ?4 0
(joufiuriere fans bras 448
Couiturier tué defiuldre , çy
Comment 77*»
Craiite. Vcyeï le mot
ycur. Crainte profiitue foié^
Kent les perfonnes a chofes
■y: les } 96
Crapaut tué par -pne araigne
104^
Crapaux e.t nombre de deux
yendu/s e.» temps dejnmine
7ieuf ducats 738
Crtmittelfef*uH'e du gibet-, CT
comment 7 9}
Cru ij" yotx de g^nts comba-
tuis en i'atr^outi J }
Croifi^ desfic.ts en Hongrie
Cruauté 'trande d*vn Jitore
<s
entiers fon maifire 5 07.
Ç08
Cruels extermine^ 1 1 j| ,^$ i
<^P3
T>
DyimoifcUe demeurant 3 f
ansftns dormtr 109 t
DamoifeUe Laihcrtne ^im-»
BBi) 4
Ind
ttne guérie de Vepilepfi*
%6x.
lùamoifelle guer'te d'yne mer-
ueilleufe tumeur 10^3.
*DamoifelIe frénétique guérit
au fon d\nluth %6q
Damoifelle de 'Rouan fe guérit
de toutes maladies en ente-
dant m ioueur de tab«urin
auec lafiujle %6l
'DamoifeUe forciere bruslîe à
Lyon é^y '
"Dangers efiranges o- la de--
iiurance 130. l 31 iyc.de
baf}eaux fubmerge:( au
fort 134. d'yn nauire
porté par les bancs o*
efcue'ùs au port , 13c.
de tempejie atraiharit
le comble de pierre de
taille d yne matfen futts
«jfenfer perfonne ï iJ.de
iheute fans hlefjure 141.
de matfon tranfportee par
déluge ^ i4t
'dangers où fe font trou-
ue"^ plufieurs ayans aralé
des chofes qui leur font de-
meurées en la <rorie ou a'il-
leursy cr leurs acddens 7 3
T>anferfur la corde 33. } g.
1)elïurances notables CT par
moyens extraordinaires 1 19
Iteluge d'raiix 4. ^6. de terre
48(^.487 crc
1>em«n»A^ées i^V. parlons
ICE.
grec cr latin 143 yonùf-
(ans des lonzs 'doux de
fir cr des aiguilles , l 4 4*
Jâifans predUhons 14^.
yomiffans des catU»ux,
yers 5 (y ynejhujfe perru-
que 147 .grimpaus aujaijic
des arbres i 4 R
"Deiit d'or en la bouche
d'yn'teune enfant de Si-
hfie I tfO
"Dent meulière d'yn homme
plus grojfe que le poing
150.
Tyepoftton d'yn aueugle
contre yn crtminel , reieue
T)ef€fpfre:^0' leurs ejh anges
piitpos i6t.Ç7C,
Defefpoir o* diuers exemples
à ce propos 3^3
Xefefpûir notable de ÇroACÏf-^
que Spiera 16A d'yn do-
iïeur ^leman , n§mmé
Kratis 171 de yvt.I, Lato
mui i6i du Cardinal Cref-
cence I 7 I . de 'J^onfenai
^duocat du rey au 'Parle-
n.ent de 'Dauphiné ij t de
Codrui 3 9 3- 3 ? i
7) emoniaque s' enfle, y deulet
fipefante que 8. hommes ne
iapouuoyent leuer de terrg
79 0
T)ej]-Mte des Hongroii c^ de
leur roy Loujs < 3 4»
Vcpofl denU vUpttmttm rf»-
mne. 301
Deuotion^
I N D rc B.'
7)euotion j prétexte prit pour
Corrompre les fèmrncs i^.
32.
'Diable , s*tl peut changer U
yf^«re (Cyn corps en autre
4 7 t en jirn}e de Cheua-
Iter yfidutt yne Damoifel-
le , CT* couche aueC elle-,
47 S enjtrme de ytiorefe-
dutt U y'terge ^agdele'u
ne de la Croix ^ 46$ .enfer -
me d'homme , difparoijfant
laijje yne puante odeur
4M ^•
Diamant caufe defauiêer la y te
4f/»/tfe 666
Dieu punit les r.-iefihans par
les mefihans , c* '/«^ ^
traijlreufcment tué les au-
tres efl tué par autres trai-
Jlres pltti fins que lui
691
1)ofleurs muets %c^. io6,
807.
'DofleMT luif hlafphemateur
puM <? 3 8 . 6 < 9-.
'Doéleur yy'<eru,f garanti rr.i-
raculeufeuieia f6t 96^.
"Docteur leg'JJe nommé Jdoy-
fe^faifi tic melancholie mer-
ueiHeuje 871
"Dorniiiitjue Courgues chaîlie
les Efpagnols % j 8
"Dormeur merueitleux 173
"Dormeurs fe Icuans de nuici
I73.i74.i7j. defccndus
dedans dcrpu.ts l 7 6.s^J-
lans hitiraer en la riuiere
'177> nllansti4çr iettx ^«e
ils auoyent querellé de iour
178
Douleur mefpriÇee 3^8
Doyen de Laual empoifonné
dedans fon calice 557
Dragon couronné en l'air 4^7
Duc de 'Parme (ijiiege en y^.in
la ytlle de 3-rgop:(eo 715
Duc de 'Parme C7 dePlaifan •
ce afjaptné , puis ignominie
eufement traite en fon Corps
611.
Duc de yUtdJne caufe de gra-
des pertes, pour auoir mefpri'
fé des conseils oportuns66i,
66%.
'Dite de l' înfr itafque , £//?<«•
gr.oly na^namme^ courtêis
O- l'berai eiiuers le roy de
France prifonnier 7^3
Duché de Jiulan perdue par
les Frurçoti à caufe de leur
nonchalance 9~0
Di*chejfe énamourée de fon
maijtre d'hcjhl 315. leur
malheureufèfin 3 1 1
Duels quand , pourquoy (O*
par qui pr^tique^ 709
710 a-C'
E
E.Au de mer rend la terre
jïerile 707
MieéJet^r 'Palatin yiftcriemz
fur les 7 ur es 109 S
EW^abct tirée de prifoo çp»
couronnée rvmt a Angles
terre 996
£mbrafem§lit defètt 185.184
IN DICE
Emhrafemeni ejframge de
ÇXtofcoyy yille capitale de
Pïîofcome 45ff.C?'f.
Embryons firt ^ts > tnats
bien forme^ 714.717
Enjhns merueiUeux auant CT*
toj} après leur naijjance
£,; fins cri ans at* yentre de
leurs mères 187
Enjhns epileptiqnes %66,%6J
Enjhns garantu de plnfieurs
accidens 9 60, 96 1
Enjhns ingrats z^peruers r 1 5
Enjhns mtiracttleuftment con-
fertteT^ leS.crC Jij
Enfhns morts au yentre de
''leurs mères , ZJ* mii hors
par mtrueiHcux moyens
l9^.î99'Crc.
Enjhns nourra parmi les
ioftps t L 1 . 1 1 1
Enjhns pratique"^ t ï 9. î, 2 o
Enftns produits a diuerfes
fin de mefme grojjejje par
fuperfœtatian i 9 y
Enjhns receuans timprepion
d'ejlranges appetu de la
mère enceinte ^7
Enjhnt ^leman fapê d*ej}ra-
gc epiîepJie^Cy' gi*^^i Z6 6
Enjhnt de deux ans garanti
miraculeufement du feu
9^0. 961.
En^nt de deux moU pariant
en homme d'aage 5 t
Enjhnt dettiontaaue predif:nt
l'aucnir l j 7. 178
Enfint de neuf ans cn^rojfe
y ne nourri^ IÇ )
Enjhnt d'yn an en temps de
Jhmïne arrache a fa mère
ynr creujle de pain , quiL
mange de grand appétit
740
Enjhnt efgorgé par autres
enjhns fes compagnons 1 o 1
Enjhnt Jirmé comme on peint le
diable %%%
Enfiint ingrat piiji à lajhcepar
ynferpent 1 1 tf"
Enfin t maudit de fa mère
emporté par les diables 315
Enjhnt mefconoijfant [on père À
foujfreteux dément cnrairé '
tI7
^>^jhnt muet par imprécation
de fa mère X%6
Enjhnt naijjant auec barbe au
menton ^ S $
Enjhnt né auec yne dfntd'of
Enfant non baptije occafon
de grands maux 91 ^
E'''fint pétrifié au yentn 113
2.Î.4
Enjhnt ytftrcfj>ettt 7 L 4
Pnfrntement auant ange i i %
enfantement C<^firien 114
cfhntement de plufteurs en
fus à il fvu 187. CT'f • en-
Jnntement monfrueuBÊ t 88^
Enrage^ de deux fr tes 341. ^
^^h.c^C. ^ M
E:i!epfe arriue à diuerfes *
ccCifons CT* en plufeurs
manières 8 <f I. 8 ^ t . CfC.
di(4€rs exemples $6 y c^c.
-*^-\
IK D
fipilept'rque tntefrê tout yif
^iilcpi-iquef deuirmnt para-
lyticjues.oi* meurent foudAt-
nement % 6 ^
Efclaue tue/on maijlre , çy
pourquoy 6\ 3
Efclaites Turcs courageux ^ys
Efcolier à Orléans fc chajïre
Efcdier Contrefit fant le hoi-
teux chaftïé 8 I J
Efcolter de ^ontpesl'ter s'i»
marinant ernpeifonnéf com-
ment guéri 8 7 J
EfcojJ'oti epileptKjue 853
^fermant des pieds jirt droit
(y élégamment 4 47
Efgifille longue de quatre
doigts aualiee par la gorge
C rendue par i'i^nne 7 S
Efnieute feditieufe à caufe
d\'xaé}ions x 3 1,
Bjpagnol engloutit à y>ne
couriifanne fes perles ct*
chaînes 7 i
Bfpagnols cruels enuers les
Indies6l9 f*\l .^xt.6xi
Efpagnols mtj'erahles tn leurs
recerches 6 l 6.6 IJ . il%
6i S.6V0.6X i.4xx
Ef-wu[ee emportée des dia^
i>les 1 9 t
Efprit fimilier dans y ne ba.
gue (y ^6
^■prus ^miliers abufent les
homnuts 7 O 8
^rprits prodigieux i 3 f « x 3 ^
fjprits des trefpajje:^ appa-
IC E.
roijjans à Ittfrs amU ^ 5 <>
Eflincelles de fin fortans des
cheueux z ^ g
EJïotUe nouuelle apparoijjanf
au ciel des ejloilles fixes
I i^.
ïfiropte^ fe manians dextrc^
ment 44^. 447. C^C.
Eueftjue malade gueripur la
mort d*vne forctere 830
Euefijue fujfoqué d'yn rude
embrajjemcnt i * t
Euphorbas mort iette fon
f<ing en prefence de J?Wff-
nela^ qutVauoittué. 367
Eurycles infgne engafirymi*
the i6 i
Exa fiions engendrent fedi-
tioiis 13 t. r 3 j
Expions des Capuatnes Toiles
Cr la T^iuiere l O 8 ï
F
Î'^yîits héroïques 491. 45» t
fafchcrie d*efpnt caujant
Conuulfions 40Ç
I-antafitques * J 7
tuntofnc effroyable x 1 8
XI 9
Funtofmes horribles Ç 3 o. fjl.
iulqotsà 5 45».
Fécondité 3 î 6' 5 W
Femme auare meurt mijera-
biement 6X4.6XJ
Feiuhie ayant quatre tetms
764
Fêmrm (îematrant quinze
IN D
tours fatu dormir i op t
Femme en Saxe fe noyé auec
fes enjàm 9 i ç
Femme accouchée abondante
en lai ci i 6
Femme accouchée d'yn Loir
Femme accouchée de neuf en-
Jâw cjut firent tout marie^
187.189
Femme accojichee tranjhortee
en yn puits ^ çyremifeen
fon lie} fans fçauoir com-
ment 104. 10 ç
Femme démoniaque parlant
grec cr Uttn 145
Femme emportée du diable
l'appellant fouuent en fes
iuremens 1 g j
Femme enceinte tue fon mari
ayant enute de manger de
fa chair ^g
Femme en Vaage de trente -
fept ans decedecyef trouuee
auoir le -ventre de pierre
114
Femme frappée depeffe iettcfon
etijhnt par les fineîlres i o*
fe lance après 9 } 4
Femme qui enfante plufieurs
enjhm à diuerfes fin d\ne
mefmegrojfejfe. 19^.1^6.
197
Femme faijîe de grand esion.
nement regarde ceux qui
font autour d'elle , mais ne
far le ni ne remue aucune-
ment 8 J 4
Femme fans bras , titillant,
rcB.
coufant") O'faifant autre i
allions 448
Femme tourmentée Cf liée par
le diable 7 9 O
Femmes deuenues hommes
137138
Femmes enceintes , auecappe-
tueJlrangeSy C7f. 6€, 6?»
6^
Femmes epilcptiques % <j
Femmes frénétiques merueil"
leufes 787.788.78p
Femmes guéries d'hydropifit
par merueillcux moyens
810.8 I 1.81 3-814'
Femmes fe précipitent en des
puits prejpes de la yiolence
depefte 933
Femmes fer de s maUuifees
119
Femmesfuffoquees du mal de
matrice comment guéries
1047-1048
Femmes fur pri fes degrad* ioyê
meurent 417
Femmes trauàiUantesafe de--
liurer,incifees par le y entre
pourauoir leurs enfrns iif»
Fer chaud mis en la bouche
fans l'ojfen/er 419
Ferdinand de Sotto ^Uvcr
'Portugais yichrieux fur les
Indiens I O 9 3 . 1 O 9 4
Feux allume^ pardiuers moyësy
Cf leur rauage en diuers
lieux i8}j84-'8J'
Fiance':^ accrauante^ d'yne
Tuintd* édifice ^ ^ 4îÇ
Ftemes
■■^^y
I N D I C I,
fleures quartes perdues par
Jiayenrs z:;' peurs inopinées
fille àbufee tue cruellement
l'abufeur 3 1 8
FiUe de chambre empoifon-
neeyi:p' Commet 9 19-940
fille de l'aage de i 8 .ans fort
ajjopie ZiS
Fille demeurant longues an-
nées fam boire m mander
Fille de mefme forte Ç 6 8
Fille de jlatttre gtgantale 147
Fille enjhntant a neuf ans
118
fille eïiimee enceinte , mais
yierge^comment guerte j 6^
Fille rau'te CT* -violée , pups ef-
poufee afon rapteur 3 OO
Fille renient a foy de pafmoi-
fon , ayant demeuré troii
tours comme morte Ç 8 O
Fille yiolee tue le maljhitcur
911
Filles au nombre de feptante
démènent démoniaques en
y ne nvift 14^
■ Filles epileptiques merueiUeu-
fes 863
Fille ^garfon tourmente':::^ des
y ers '05>3
FiUts garfons 157.158
Filles fe rejjemblans parjiiite-
ment 4j"4
Flammes de fiu fortans de la
tejle d'ynprefcheur 1 jC
fleuue couuert de corps morts
après yn combat naual
600
Fontaine defang 437
Force agile 3 5.î4.3ro-<^l
Force corporelle admirable x j^
140.141
Force comme incroyable d'yn€
démoniaque 791
Forgeron guéri d'hydropijîe et»
aualant quantité de lai^
«M
Fouldre auec ejfroyable effort
t4t.i43.t44
Fouldre horrible çh Huracat»
771.171
Fouldre qui brusle les yejie»
mens fam offenfr lesperfon»
nés 5j
Fouldre ruinant à fleur de ter''
re yn yillage 14c
Fouldre tombé fur yn ejhteié
en find la pointe fans en-
dommager le fvurreait
Fra caTlor.preferuemiraculeu-'
fement de lafiuldre 1 4 tf
Francifque SJvrce confiant en
adutrjue^ 6y^ humain en-
tiers fes feruiteurs 794 ct»
enuersfes ennemti %0X
FrantjOts premier roy de Fran-
ce , ej} pris deuant "Pauie
6 i t. prince gracieux CT*
promet a, pardonner ÎCQ
garanti de mort I O 3 1 .fot»
fils , Dauphin deViennoMy
empoifvnuiéymeurt a Tour-
non ^ 5 g
Françou pillent les Ej^agnols
reitenans des Indes, char^
INDICE.
ge\debuttn 6 17 -6 1%
Fr.uriade defcovuert par fa,
prêtre bouche III
Frayeurs fM^es 4 I O.4. , i
^I 1.4-1 J.CT'C.
•Frenejie caufee par yne blf-
fureàUteJie 6^0. 641
frenetujues^Htrn 3 3 ^ * 3 5*»
frénétique de nutli ■> *'» oon
fem de tour 3 3^
Frère putfné àefirant d'ejtre
ktt'e en la mer au Lieu dejon
atfné 911
Frère rejjemhlantà [es fceurs
farti d'Jjerence apparête 4y J-
Frères fe rejj'embium en tout
4ç 1.451.4» 3
Frères s' entretu^m fur >» fu-
tetrtdhtfle ^ O Ç
Frtdertc , eicfleur de Saxe,
traité beiit^nemtt par Char-
les K 80*
Fridenc EleCieurrefife l'em-
pire S 7 4
Froidure tt*e pltti de quarante
nul i)ommcS 5 *^ 5
Froidure munie plufieurs mil-
liers de JoUats jam°l.
Froidure CT* f "*.)'* ^^^ <"'* '^'^^
nuifl plui de binq ctn» mo-
res 584
Fureur ix^nble i •*■ ^
Furieux guerp! ptf dmers
moyens 5 t S. 3 îO-H ''CT-c
Furmejer gentiuwmme 'l)au-
phtnoh braue chef de ^•.^wt'"*
re-,t^fnotni fes expivits 783.
G^iiitoii s'efmeuuent coii-^
tre Q)arLes K c^ font
J)aj}4el^ 7 17-7^ '
Oauritm ajlrologue a cmqJiH
Vefirapade pour au»ir pré-
dit la mferable fin de "Ben-
tiuole 89 1
Çeansdtuers 147.14t.145>'
ISO
Gcmeaux nayans quyn poul~
ce de largeur , longueur O*
^ojfeur , bien jirme\ en
tu Mi leurs membres 7 2-4
Cens Jri ruants d'efre borgnes
er boiteux le font deuenttf
tout à fait 8 T 7
Gentilhomme eptleptique mer-
uet lieux S 4 4
Gentilhôme ûignaut auo r la
colique, en meurt "àl 6.817.
Gentilhomme s'imaznant a-
unr perdu y ne lamijc, com-
ment gitcii Sï 9
Gëtilsbommes rançonnant leuri
fuicts chaiir.-^ 1 1 07
Çiliete Jslaurme guérie a'hy-
drofifie 8 i o
Gladiateurs plaifant 644.
^4 5
Goa isle \:y tille reitonimee piU
iee par l'audace d y i adul^
tere ^ ('9S 7 O-O'C.
GonfaUe U grand, Co 'fi.int en
fes pertes 6 8 ^ libéral en-
uers le gênerai des if^aleres
de trame 84O G?* enuers
le s j Udati necejsiteux 79^
Soi
Çordê
INDICE.
Corde foldat E/pi^gnol nùferi-
cordieux enntn Lantrech
trai'fnis 793
Çoutettx 'garanti l Ç v
irraijfe prt dure trouuee att-
pres de lu rr.telle ^6%
ÇrenouiUei t»nibtes de l'air par
pluyes 4 54
Cresle à la hauteur des genoux
h' vn homme 911
CresUs de grojjeur c^ firme
frodigieufe 4 34.4 3 y
Crynee > excellent perfonnage
deliuré diumement 130
Gnerifon extraordinaire 1 y i
Guerre des payfans d'Allema-
gne, l t6. 106 ^
H.
HEUine jKlohtaut fe fauue
d'ynern*iere , où elle
auoit ejlé iettee 96^
Hemiplet tiques î 7 8 . Ç 7 9
Hemorrhoides (aufees par -vn
noyeau depcfche 74
Henry Ill.roy de France, fan-
ge fa mort 104 î
Henri de Pierre , Sénateur de
B as ie, libéral 8 .4
Hermtte brigand terrible 9 ^
Hcrmite turc,guerrier 1017.
I 01 S
Hollandais Courageux mainte-
neurs de leur liberté 979.
Homicides d^eux mefmes i oi
I o v.crf.
Homme auant Caage 155
Homme ayant du laicl aux
maKimekes 808
Hûïnme courant aujii yijte
tjuynîeur'ier fo8
Homme prefcjHes fn^^oqué de»
daju du miel 7 O I
Homme marchant à quatre
pieds O' yeluprii en la fi-
rej} de Coinptegne x t z.
Homme robufrc à merueilles
3f. 140. 808
Homme s'expofant en butefam
pouuoir ejire touche' 3^
Homme s^ imaginant auoir y ne
fonnette dedani le cerueaiâ
81&
Homme mcjrttei lieux 807
Homme qui fc pend ,depet*r
d'ejlre cocu 818
Homme ayant yne cheuelure
qui lui fert de cafque cr dt
chapeau 80 j
Hommes au nombre de trente
mil morts dep^jle en peu dt
temps 9 3 4
Hommes trans^rme^ en ioups
338
Hûrnrat tue le ricomte de Se.
res I I O I
Hojjntal de Tiaples 814
Ho'siajje y aillant foldat Italie»
1080
Hojhelains brigands 91.92,
Hoyeda Capitaine Ejhafnol,
miferable 17.18
Humanité royale 794.79c,
Humeur melancholique, O'fes
effranges ejfei}s 317 3 2 î>.
3»9-3 3®-c;^f.872..875.
Humeurs du corps altèrent
INDICE,
wflre compîex'ton 31^.541
Hu. ra(Mt des 1 ndi eus 769
IlydropUebie 341. 34 3-crc.
Hydropiqttes gucrt6 par ttuers
moyens notalAes U O 5 . 8 1 o
Hypocondriaques 87 t. 873.
Hypothèque na lieu en de-
iids 3 6 5
1
I^copht necromantien 69 S
lacopin ne pouuant fouffrir
Podenr des rofes 383
Jacques roy d' Efcojfe tué en
bataille contre les yin^lou
616
lacques Comte d^Vrgelle libé-
ral en fa necejitté extrême
840
lacques Latomuf youlani prej-
cher demeure muet li o 7
laques Londin Efcojjou ay fa
■vifion 5 44
lulohfe efirange, extraordinai-
re c^ horrible 1J3.154.
391-399
Jambons de poHrceauXy enno-
brededeux , yeràta cent
trente efm *: 40 7 4- 1
larnac cr ^hafegneraye fe
buttent en duii 70 9
lafon lurifconJiJie mémorable
617
Jbtcus cj' fes o'ifea'AX 5»o
Jean 'Pierre Sure Ltauefc.dat
lit-
Jean Çualbert cheualier Flo-
rentin fujmonte extellem-
mentfoy mefme 79^
lean de Lery aJJaiUi de famine
extrême 74 6.CJ-C»
Jean gentiuole Seigneur cruely
payé 8 J I
lia Paul viciât, profane 16 il
Icrofme "Bentua cataleptique
Sî4
Jeunet hommes guérie d'hydra-
pffie 8 11.8 13.8 14
leune garfon fait mourir deux
gentilshommes par fortile^e
831
lUufîons ejtranges de Satan
defcouuertes 143.144.
C7'C.4^9.47i
Imagination pr te 157. O" fi
yehemente quelle caufe la
mort en quelques yns x^y.
ly 8. 1 tfo. plai Junte en
quelques autres 1 5 7 . i î *
ejfrâge en yn Sienois 8 7 T
Imagination de grand j^<^
en jimme enceinte c;r en
fonfuicl ^ ^9
ImaguMtion des fimmes ye-
hemeate, caufe aujîi diucrs
efMs 810
Impiété réprimée t6i.i6%
Impojl l'ur le y in excitett-mui-
te à Lyon 1031.1031
Impojt ares ejhanges 1 É J
Jmpcjt lires defcouuertes 4^4
ae diite r; csjiUes 16 \.z66.
C^c. de certaim iufneurs
16$ de Mugdele'ine de U
Croix. 4,69. d'^rnauld du
Tilfe nomniattt ^Martin
Cucrrç
IND ICE.
ÇiM^r* 17 1.17t. O-c- de
lean ^Uard Touran^eaté
Imprécations notables effe-
ctuées iS6.2.t7. X.8 8.
X 8p,ij>o
*fiprecations CP* paroles de-
J}nctifes cr bUfphematoires
^%^
imprécations pleines d*efficace
de pères CT* rneres contre
leurs enjhns 188185
Imprimeur ayant imprimé des
pounraits exécrables dé-
ment enragé %6i
Impudicité delà Duché jje de
SMalfi Bi^.Jio.CT'C.
Incifion deyentre comment fe
Jntt aux femmes qui ne peu -
. tient enjhnter xtj. X\%
indiens efitment que la fiuldre
fgit fortie des yaijjeaux
Cr canons des franSott
11%
In^atïtude d^ enjhns 2, 1 y .
116.1 17. 11 8
Innocens exécutera mort pat
iujhce z^4.x9^.X96
Innoce lit mené au fitppltce c?*
mu en la place du criminel
Inondation de la mer en Hol-
lande, zy^'^fit^fe demandes
ruines 814
Inquifiteur de la fiy puni de
facuriojtté tf 5 j
Inuottttion de diables, ^ Jon
efed eJJ)ouuanS4tlc %^o
loueurs accraitate^ des rtétrtet
d\n logK I 8 tf
loye extrême ^ poifon caufc
U mort au pape Léon x,
400.938
Italien parlant ^leman fans
l'auoir apTH , om , m leti
no
luge mourant dans le traijîe-
fine tour d'yne executioa
tmujle^feloa la predUlion
du patient 308
Si le luge doit après Vexecu^
tion ejlre xeceua iu/tijjep
par preuues , fon iugement
rendre ex of/jcio 3 O 7
lugemens précipite^ 193 .^d
remarquabLs 198.199
luges iniques en leur corru^
ptton^o L.lOl.jOy^o^^
Iules fécond , pape , extrême-
ment conjtant en aduer[ité
luliette CT* T^pmeo marieT
cland jVinemeut meurent
par accident ejlrange 869
lureurs emporte"^ du diable
par eux appelle 1 84. 1 8 ^ ,
i5>t
Inrifcon^ulte , fwnommé Lu-
cas jmediCM } ^ poitrquoy
io6
Ihs de betoine CT" de platitaim
contraire a iyrtne ^ ba*
ue des crapaux ^4 f
Itffnes admirables 3 09 . 4 & x ,
4Ï.A.419.430
Thfne dt ^oyfe ^ Relit 4 J t
iafneuts impcfteurs
ifjlict promptement rendue
contre yn noble CT* /«'J-
fant 311 in/lice remarqua-
L.
LsAchtréfoldat tuéo' tn^tn-
ge' parfes compagnons
JLai^i rendu en <^uantité in-
croyable par yne aaoHihet
16. 17
Lampe de (^odrtti 3^4
Laquay more ttte lafimme^ les
en fi m defon mai/he , o*
foy mejme Jinalcment 8 x 1 <
«1)
Largejfede Louys 1 1. enuers
Jon médecin 616
Èarron mertteiU^ux çy en-
chantant ceux <ju'il deÇro-
èoit, enterré v*/ 3 i t . 3 I J
314
£.atomtis tombe en defe^poir
1^3. !6^. 807
d-autrech humain c^ gracieux
enuers (on ennemt 8 O J
I.eon X. pardonne à deux Car-
dinaux 860 ej} libéral aux
payfa-My cy U autres 8 3 8
meurt de toye 400
Léonard Lauredan 'î'riice
confiant ^84
Lethar^qne reuenu a foy réci-
te tow les maux <juon lui
a jhits durant fa maladie
831
liberdiH Jif .3 « ^
INDIC ÉI
1^8
Libéralité du ^ani roy tr^^
çoh 1^6 d'yn bour^eoit
de Prague. 842,
Lieutenant de Treuofi brusU
fif à petit Jeu de paille
<f94
Liuerot de Ferme exterminé
félon fes démérites 69 t
Lombard empoifonne fon en-
nemi par la fenteur d'-vt»
œillet 53^
Loups enrage':<^ 345 loups ga-
roux défont s 3 3 tf . 3 3 S
loups qui ont nourri z^ esle-
ué yn enfiint 1 1 1 . z t 2.
Louys de Bourbon prince de
Condé deliuré de prifon
997
Louys de Lampugnan fu^ri
de fon auare dejïr meurt
infenje 6iy
Loy zp» priuileges du royaume
d'yirrjgon 8 ^ 8.8(9
Lucas Zene confiant en aduer-
ftté 6%\.
LuitteuT de force prodigieufé
141.141
Lunes ai* nombre de trot*
yeuesauciel 47
Lupon Ejpagnol ièrb agile ^
la Courfe 3 ^
Lycinthropes defcrits 3 3 tf.
338
Lyonefpargne -Irn [Irrejîieny^
deuore fon maifire 109
Tit.
MAgdelatne de la Croisi
par fes impoîiures fe
IND
jii{trepitter faMe 45^.
crc.
^agicien emporté par fon
muijtre 718 battu cruelle-
ment 719 tué jxo !Magi-
€teit ùreià J{otne 5|î
^agijhat 'J{pmain ^riuiiegiz
^agijirats defindans de par-
ler de 'Die té ui en bien en
mal 8 i. I
yslagnanimité mémorable 317
^almmetiîie deJpoujUé d' am-
bition 5 7 J
^ain enchantée dommagea-
ble 818
ynîainfeche d\n meurtrt dé-
gonflant lefangen pirefence
dt* meurtrier 367
J^aijire d'efihole ^ngiot6,brH
. fié 72-9.730
Malade fe cuidant eshe roy
de France ilt
Malade tourmentede -perds
farte Aleman , fam ïauoxr
tamaù aprts S ^ Ô
Malades plit/ieurs années fans
boire ni manger 4^1. CT'C.
Malades gtteru par dttters cr
ejlranges moyens 7 i.ç^Ci
Malades mourant phfagent la
mort à d* autres ^^6
Maladie de la râtelle 96%
969
^^alad'ie eflrange d\ne "Da-
moifelli de Lïmofin , com-
ment guérie %60
\
igr:
baillée à yne guemn 81^
^aladii pediculaire j i %
Maladies de toutes fortes guf
ries de la feule parole d'y ni
forciere 4^4
;Mal,ns e/prits yeuS danfer et$
Ca\r durant yn nauf-ag*
7^ a gé des poulx 5 r f
CMame.y'oye'^^fenetiques, fiti^
rieux.^eiancholiques,
^archans briijle^ y ifs en leur
hcjlellerie ji^
^Mariages clandesîins malheU'
reux 317.868.
^arimocqueur moqué j74.
Si^taric^ femme adultères aé
defceu l'yn de l'autre X 4
yvîari defcotturant l'adultère
de fa fimme par le moyen
d*yn moine % ç
^ar^ tuant fa femme adulterei
ab fouis % %
7(!tarm> JU^olius demeure dix
ans entiers fans dormir
!^arquif du Cuafl pardonne ^
fonmaifre decàmp 80 J
^arfUeFicin cenjuré par foit
ami ^ 375
^ajjon tombé dani y.i puitt
cr couuert de terre en eTt
tiréyif aufe^tiefmè tour
SMatthitu CorUih , eslcii roy dt
Hongrie 5)91 ^^x
^audijjons detefîabUs jij^
ÎNDICÏ.
^auuaU gArfon ayant double
râtelle 966
pédales d'or de Lyjîmachut
47(5
Médecin traite auec le diable
pour dtueinrriciie 614
^tdecin firtfçauant auare à
toute rejie ôij- 619
^edecin traitant indignement
yn roy de France 6x6
ygtedfcin purgé par l'odeur des
bruuAges ^81
Médecin léthargique 8 3 I
Médecin fe huant dertm^ta*
prenant fes armes en dormât
811
Médecines en horreur O" def-
dain 405
^edine del Camp p mutine
t7* efl ramenée a [on deuoir
loi 2.
^elancholiqttes merueilleuxy
lZ;y guerti par diuers moyês
314.317. }i8.}jl. 334.
87i.875.c7f.
yift mo,re excellente de dtuers
5S3.Î54
yttemoire perdue O" reCoiiuree
3Ç4
ysîer desbordee es pays
bas 814
diffère defire mourir afin que
fa fille y tue 6" 4 3
^ere fertile eh lignée ijfue
d'elle ^ is6
'^^i re ojle fon fils à yn Lion
(J43 ^
ptftere pfeferuee de mort auec
fesenjhns 557. 358.
^ere yoyant fes defcenJanf
tufijues au Jîxiefme degré
357
^eres tançans leurs enfiins
quificontrefiint 817
^teres ytgoureufes 357
^efprti de douleur 3 5 «
^eurtre merueilleuxà caufe
d*yn mariage clandefim
871.871.
Meurtre cfirange en entiers
88i.cr<:.
Meurtre miferable en la Flo-
ride ^ Cr ce qui en adumt
88 5.884.8I5V.
^curtri lettant fa»g defeS
playes en la prefeuce dtt
meurtrier ^66. 37O
Jïleurtriex.s defcouuerts par
moyens mer uci lieux C7*
pHnh 3^9. CyC.
Meurtriers rudement iy iu-
fiement extermine"^ 877*
878.879.crf.
^icraine gueriepar yn efira*
gecoUp 803
yi'iilan perdu par yne auaty-
ture notable 614. <J 1 y
yitodejliefinguliere d^yn dofhe
pii-fonnage 373
^oine fiignaiit lufnery mangé
yif de la yermme x 6^.
170
yiUntagne de pierre ponce
48c
yHontagne yomïffant le fii»
^ontaubanen efirange efiat
77>.78o.
^ont'
IND
^ontliu pHtarefchal de Fran-
ce fonge U mort de Heurt
feiand I 04 0. 10 41
^dts de piete\ytdeiyho>itieJ}cSy
charitables. 84 1
^loqueur moqué 3 7 J. 37 4
^Taijuiurs chajlit^ rtiiractt-
leujement %%7- 8 88
^ore cruel z^y'mdicatsj ç o 7
Ç08.
^ortbond empefché à, U cé-
rémonie de fon enterre''
ment 4 1
^orfttre de chien enragé^
meriéeiUeufe 3 4 <^ yeni'
meufe i *t7
^orfure de loups,firt dange-
reufe 3 4 P
^Morfure deferpent 9 4 1 .51 4 2.
S^orfure de chauuefouris
80Ç
^ort foudaine caufee de'ioye
^OOAl6.^l7'depeur 4,0^
défrayent yehemente X Ç 7
de grande compajîion I l 7.
391.597 dedueil 3 ^•.397
917
yiStorts précédées de yifons di-
«er/cM30 5 5i-S32"nî.
^orts prefagees en fonge 376
Jsîorts remarquables d'yn iw^e
inique ^0%. i09.de Nefe-
nw 375 de Grimant
^Ijrts e/franges d'adultères
I^.iO.CT'f' 3 1 de toute y-
nejhmille lO. lOt-CTf.
JWoM gUïititfes ) ^3.3^7 •
I CE.
400.4 iT.45>r497-
499. fOO
^ofcovv -ville capitule débité
Jcouie hruf.ee 45-7. 4 5 8,
S^oulm fur l'eat* ' enleué CT
tettéfur le fecpar tremble^
ment de terre 4 8 S
J^uet merueiUeufement tndu'
Jtrietix 18^
^uets c?" fourds de nature
fachans Ure^efcrire^ chifrer,
crc. 44*
yïluete recouurant la parole
rniracuLttfement 4*4
^uet deuenu telpar impreca-
lions l%6
^uleaJJ'es roy chajfe' par fan
fis comme lut mefme auoit
prédit 6 1 I
S^urailles enleuees retombent
fur leur pied %%6
^yrrachie 40%
N.
NAin tueyn homme de
fort grande fature^
comment , c^ ponrquoy
601
Tiature foulage quelquefiis
les afflvge\ % l %
"Hatitrel changé 377
T^uturels merueiUeux defrff
par dtuerfcs hiîioires 17%.
'Haure'X^gUi rit 8 o . 8 l . 8 t ,
2iaufages dincrs CT mémo-
rablts 89 8.8 99. exclut-
QUCS Si 919-
CCc 3
ÏNDI
fifurlens Ce transfirment en
ioHps ^ ^ 3 39
Tie^coitpé j s' en peut faire yn
autre cf conrment ion
2iicolas T^adXji^U , 'î'aUtin de
Ktlnie , Sei^eur Libéral
Si 6.
"Honnain ajjailîie d'yn extrç^
me flu4 de fan^ 7^8 epi-
leptiqtée % 6 6.'% 6-7. guérie
d'apople^xïe par application
de-vitiCoufes J 80
Tionnams démoniaques 147.
14 8. ce.
Tiopces danloureufes 3 8 J
0.
OCciipareuxmefmes 3^3
35C.397.358.400.
Odeur de medicamens fait opé-
ration ^%i
Odeur de pommes cr de rofes
abhorré d'aucuns 375.380
Î8..383
Oeufs chèrement yendtu 7 tf I
Gr e-. argent mefprifé 4 ^ y
Outrecuidance d'yn pilote
taufe de grand mal 90$.
911.
0«««r/»rff au ciel S I
Çuuerture de terre 485
P-^^? qui ne fçait ni lire, ni
efcrtre.efiant frénétique
parle bon (jrcc 7S9 vn au-
tre fe cuide roy cy difceurt
pertinemment des moyens
de maintemr fon royaume
7^6,
C 1.
"Paillard hypocrite puni }73Î
374.
Taillardife fottt prétexte de
religion 3 %
'Paillards punis 38^.387.
Pain abhorré cr 4 contrecoeur.
382,
Pam conuerti en pierre 6tj,
6x6
Payfan ^lema,execrable mau-
greeur puni ^19
Payfan fappé de merueiUeufe
pitye 9 j tf
Pajfanfarieux Contrefoy mef»
me 89 c
Payfan meurtrier deteJlable[/Ui
'Payfanfienetique , orateur C7»
poète 'j%6
Payjans de Hongrie croife^f
cruellement de s fait s I z 5 .
I xô-mutine"^ en Alema-
gne I Otf î .c^C.
^Palpitation de cœur I re. 1 1 S
Pare ltes,que c'ejl,(:^leur cau-
fi 49
Paroles hlafpLematoires 181.
O'C.
Parricide 101. ioz.10 3.
Parricide accufe foy mefme
1 ïj efi dtutnement puni
%J ^.117.914
Parricides commu par adulte*
res il.ii.
PaJJetemps Turquefques 3 ^-
37.38.
PaJ^ionf yshementçs de due>k
IN D
de ioye.de tcdoufit i de peur^
J'aufimofrsy tourmenté d'y u
efpnt «?15.
*^ dHur et é fe Courue diu'inement
Ml
*Pelcrm TurÇitnerueilleux 418
Tere cruellement traité par
fon propre fis XI 6.%\y,
^ere ct- mère mangent leur
enfant 7 S 8
^ere meurt foudain yoyantfo»
fils mort }9l- i9i' 5 97
*Pere tue fes plies I O Ç
Perfidie punie de Dieu ^69.
}70.
*Pericarde non trouué en queî^
ques cœurs hurnains 109.
VfC.
l'eriureputii 410
yejle caufe de diuers maîJjeurs
"pejie ejlrange m ^ofcouie
4î7.
^gurcT'fes effeSls merueiJleux
40t. 40 ^.40 6.C^C.chan
gee en rifee 4 1 1.4 I 1. CT'C.
*feureux oultre mefure 4 O l ,
'^hilebert Emar.ucl , prince de
'Viedmont , reJlaUtenfts e-
(lais 99^
ffnlippe I I. roy d'Efpagne
comment recompenfe quel-
ques traijires It'ortug^ii
19^9
J
ice;
yhtiriufe O'fa caufe ç i f
'Ihcqueure de -ptuc ^ cjl mor-r
^ telle 94 1
ifiedipiifans dextrmient totn
les ojfiçes de* tnams 447
'Pie 1 i.r>ape , conjiant en ^d-
Uirjïte 65 1
Pierre ^luares fait nauf-age
898
Pierre Barocio , eucpjue de
Gadoue , libéral enuers les
fituures 838
Pierre Bu fier marchant ^/e-
man magnifiquement libé-
ral 8j7
Pierre Louys Farnefe taé en so
palan 894
Pierres tombées dt* ciel 4 i^
trouuccs dans le cœur hu-
main lit,
Pilon branslant fans cejje^ dont
yn enfant tua fon pcre
117
Pipe de y in fousîeuee çtuedet
dents 3 )
Pipo capitaine auare , mu 4
rrort en lui iettant de l'or
findu- dedans U gorge
Playe bouillonnant C" degou-
fiant dufang en la prejencg
du meurtrier X66. 370
Playe r}ieruçilleufe guérie
9i(^
Plomb findu manié fins fe .
bmsler 4 1 •
Pluycs diucrfso'prodtgieu-
fis 4 3 5;4 5 4.c7'f.
'Poignard ne reJpeCtaut pcin$
€Cc 4
lîîDICE,
Toil deuenu bUnc en -vn mo-
ment 40^. 409
Tômme de feiiteur iaufe la
mort à rn apothicaire 958-
odeur de pommes vifuppor-
'table à d'aucunes perjonnes
119
pompée Colonne carJtnal clé-
ment enuersfes ennemnaf-
fligel 801
Torturais affaVlii de famine
«n l'Inde orientale 7 J 5 .
ÊT-c. courageux cr braues
Combatans 49 1.491.494.
49^ perijjent en diiters
nauf-a;rts 8 9 8.8 9 9. ce
'Poyet clfanielier de France
poi*rquoy ne^eut haranguer
8of
^Prédicateurs muits Z06
*Predfclions 458
^rediél.ons d\n aflrolo<^ue
fur la natjfance de LadtAas
^ Cafimtr 89 J
"Predichons de la mort d^ Ale-
xandre de !Medicn 895
^^redicli ans fitauiûues'fFoyel^
T^emoniaqties
Trefages de mort par le yoldes
corbeaux 375 par fanges
577
Trefages de la mort d'yn roy
Csrd'vnpape ^44.945.
■^refcheur s^esleuant Contre S.
T^aul -fi emporté par le dia-
ble 5 } 8 -vn autre meurt
foiid^iin en (haire C^j, yn
aut re prefcheur blafphemM'
teur ejlfiuldroyé 6\%
Trefiheur Ejpa'^nol fatfant
fortrrdefa tejle des efiin-
ceîles dejrié 15^
"Prcjens prt riches mejprife^
_ 4VÇ
^rejîdent Çentil pendu ^ por^
toii Phojhe en fa pochette
io\o
Tnfoinptïon Efbagnole , mal-
heureufe 94 7
Trefomption du Duc de Par-
me^fans effifi 547
•pre/? libéral } l tf
"Prejlre enleué par la fiuldre
qu'il youlutt Comurer 144
'Prelire efoujfé cer chant t«
threfor 479
TrcTire fapc de pejle dcuient
farieuXiC^ tue ccuxtjuil
rencontre 934 preflre pu-
ni de fan auarice cr cruau~
té 8 t}. 8 i4prefre 7{omain
yit quarante ans de la feule
tnJJ)irat$on de l'air 4 $ O
prejlre tue yailUmment ce-
lui c^ui abufoit de fa fxuT
.2.7
Treuojl des marefchatix aua-
re , iniufle^exeirahle é^t
autre preuoft horriblement
cvH^ payé par foH matflre
C^i autre cruel cruellement
exterminé ^94.
'P/ifcnnier deliuré 439 autre
far lepoinSl de fanfupplice
garati 440 prtfonmer fau-,
tié ayat tué fef gardes i x 8.
PrifoT^
IN D
prifonnler tranjporté en en-
Jir,puis raporte' en la prifon
d'ot* il AHo'tt ejlé enieué
'^rifonmers dettentd blancs de
cheueux CT" de barbe en yrtt
nuiH 406.409
'Procès yuidé par moyen ex-
traordinaire 440
*Prodigualité indigne du nom
dt libéralité %i6
'^rodiTue g'Sfitdhomme ne pou-
uant rendre compte ejl ton-
duçjT' frit ^bbé 31 ç
'î'ronofii cations dangereufes
441
'^rojperité mondaine fupplan-
te les humains y c~r eïi ren-
uerfee d*ejl range forte ^^JJ
Tunition de meurtriers defcoté-
uerts p.ir notables moyens
359?^ i.363.C7'c.
"Punition de periure 410.411
QVereUe fiirieufe efmeue
d'jfutet -vain o* ri-
dicule 504.505
R Age de deux fortes , c^*
les remèdes 34I.}4<
Rançon merueiUcup offerte^
Zp' payée 441,441
l^^^t malheureux 443.444
T^utclle s'enfznt a tiuelques
ferfonnes 96^ rat. Ile trou-
vée au coj'lé droit 9 47 râ-
telle pefant^ ytngt Hures
$6%
icb!
Ji^telles doubles tTouuees em
ptufieurs corps 9 66.9 6 J
7{ats yendfh quatre efcm pie-
ce 74«
T^auiffeurs exécrables ckafiie^
de raillante CT* heroujue
main 44S
T^ecompenfes de "Rature 4 4 <^
%^.jliii merueiUeux 4 { O
^ijlres deffaits a Aunean
607 fe retirent de France
609 610
Hemede contre les yers au
corps humain 508. 50^'.
510.5 11.5 l^.CP'C.
7{efolution genereufe-, memora-
ble,merueilleufe 451
7{efolution notable de Fr. Fof-
f car in duc de Venife 684
Tijfpoitfe ingenieufe du roy fur
yne contrariété d^arreft de
deux parlemens 14
T^Jponfe magnanime d'Alfin~
Je prifonnier defon ennerhy
680
'î^ejjemblance 4 5Ï-4 5 2'
J^pjuerte aiguë de trou fort t^
UT
7{efurreélion des corps trefpaf-
fe:{au Caire 41.43.44
7^)eubarbe guérit yn hydropi-.
que 815.8 1<»,
T^chejfes d'er O* d*argent
mefprifees 454
T;J4 dejmefuré caufe la mort
7{l}ofne desbordé 704
T^jofne CT* Saône fs teignent
enfembU à Lyon 705
^
r N D I e «;
^mt defitutê tthabitans à
caufe de la contagion
5>34
Tijiterdam yille d(t Holande
brttilee j i 4
7{py défendant de parler de
'Dieu 8 2, r
2{py d'Efcofe O' d^ Hongrie
aduerttf extraordinairement
17.18.
t^ines ejhanges 4J7.4J8.
S
S lignée faijant perdre peur
yn an entier toute fouue-
nance de lettres cr fcien-
ces 4tf3
Saignée merueilleufi ^61
SotnCi été feinte l, tf 7 . 1 6 8 .
^aluaifonfurprend Cafal 6 J 8
Samogmens deftrt haute tail-
le 148
Sang de meurtri bouillonnant
enprefenK du meurtrier
Sang de chat heu fait prendre
Jon naturel 377
Sanglante fueur 477
Sattg noir cr efpaii dans la râ-
telle » ^6^
Sanfac malheureux gue&ier
78î.
Satan c^fon efficace eîhrange
1791 8®.T 81
Sauge yanimeufe 9\0
Scordion herbe fouueraine con-
trelapefie 57}
Séditieux effiaye\ , O'puat*
imi9,lof
Sédition à 'Palerme r C 1 J .çV
à Lisbonne contre les luifs
1014
Séditions pour exaŒons
Seigneur Indien epprimî par
calomnie Ç 7 S
Seigneur melancholicjue 874
Seigneurs de la fitmiUe des
jucKKers comment fefont
renduf lUuflres 837
Sentences de mort précipitées
Sepulchre magnifique à yn li-
béral 85g
Sépulture de/îree 463
Serpent à la face d*un ingrat
116
Serpent tue fùrieufement yi^
magicien 717
Seruet athée brmlé yif
x6x
Seruiteur mal ConfetUé defetf
matjtre honmt fa couche
374.37s
Seruiteur courageux 1 0 3 1
Sermteurs fidèles a leurs mai"
fires 1034
Sfirce le grand , Seigneur gra^
deux %9x. fa pitoyable fin
891.
Sigifmond roj de 'Pologne,
prince mcaeïle î 7 4
Signes dmers au ciel 47. 48
Simon. ybye^ Grynee.
Sœur auare reprtrnec 6x^.
Sotf
^
INDICE,
ioifcttufe U perte d*yne armée
Soldat fin blejjene Lïjje d*al-
ler au combat I 3 tf
Soldat pendu pour auair you-
lufircer yne fille 9 70
Soldat fe faune miraculeuje-
ment ^ o 3 7
Soldats efchappe^ des mains
de leurs enntmu 91^
Soldats ejfagnoUrelequcT^ s* en
tretuent 967
Soldats horriblement inbu^-
mams 8 2, 1
Soleils au nombre de troH
Solyman-, Sultan Turc-, gra-
cieux enuers 'Kadaji 8 O I
!&/> tuer plufieurs Chre-
Jliens priftnniers , parles
gouiats de fon armet
600. comment traite le
petit roy de Hongrie 60 l
Songe de Cœliuf l^liodiginui
104t. du grince de [onde
1041.
Songes ont prefagé la mort à
plujteurs 1038. lOip
Sorbier arbre a qui dangereux
Sorcelleries defcouttertes 4.64.
Sorcier ayant prédit qu'on
le tuer oit efi tue %%$.
meurt ayant guéri yt^ hom-
me g 1 7
Sorcière a coppulatton char-
nelle auec le diable 469
guenfjant de fa feule paro-
(« toutei fortes de maUàies
46 A' tmpapihieà lage*^
ne 467. meurt) ayant toW^
ché celle à qui elle uuvit batl
lé le mal 8 1 7
Sorcières tranjporteer deja^oi»
merueilleufe 17 9.1 8 o
Sorciers fe graijfent de cer-
tains onguents peur efire
tranjporte^ en leurs a/Jem-
blees69 6. y yont fur ytt
bouc 697. y danfent en
rond les jhces tournées hors
le rondeau 69%. y adorent
le Tiiable en firme dû
bouc 699 leur jUpplice
<^97. ^98.817.818
Sorciers ne giierijjent les viala-
dies^ains les<flentaux yns
pour les bailler aux autres
8 t6 gaignent tou/iours ai»
change la mcfme.
Soufflet mortel 7 9
Soupplejfe cT* diuers tours ad~
mirables ^^.crc.
Sourds cr muets de nature,
firt ingénieux 448
Spedres ou fhntofmeseflran^
ges cr effroyables 4 69- 47 x»
47 5
Statue de bron'!<^e baillée peur
reiompenfe à yn y aillant
foldat 1080
Stenon roy de Suéde rend bien
pour mal au roy de iJane-
marc 79^
Sueur pejiilentielle tf 3 7« p«-
glante 4 7 Ç
Suijfe ignorant y hermite > pref^
éhf O' mmt yne yiepri
^
INDICE.
Oufiere 5^4
Suijfefitrtnant Salnfleté de -pte
ej} appréhendé CT* /"<«»
fnr iujhce ç ^ ç
Siiijjes yailUns 4 f ^ . ^ O o
Su'ijjes desfh'tts à la ^Bico-
que^^j.SuijJ'es yidorieux
fur les Imperiultftes lO$6
^"perfoetation de mefme grof-
fif^ 19 S
Superfiition damnahle^appellee
tiremaffe j-jj
Supplice notable d'yn brigand
Italien
9^
TAboué^procureur du roy
à Chambery, ^uxuc-
cufateur,pum ii.'i i.i 5
Tîrtares guerriers CT robttfles
ne yiuans que de racinesy
O- ne buuans que de Veau
AS 9- fini grandes courfes à
cheual en peu d'heures
Témérité miferable 4 7 y
Tempeîie terrible en terre fir-
me 'p69.7'jQ.^c.
Tempejles horribles cr l-eurs
degafts 137.158
Terupfjles orageufes excitées
par tes forcieres lOy l.I OJi
Terre bruslee 7 i f
Tj^rre tremble JOS
Tejle d'yn enfant coupée , ^7*
intcrrogute pur ynfcrcier,
T'jpmd 69 S
Tejteioupee , toute fanglan te
mifi par Us forcierj fur y -
•e Urne d'or çp' pchfq:to^
696
Tefiesde yeaux paroi/ftns e-
flre d'hommes 5^2
Theodoricroy des Çoths "c«i-
deqnyne tefe de potfjon
fott la tefte d'yn homme
Tjjomas exécuteur des paf^lons
d'yn 'Prince exécuté çr e^
flranglé 69^
Thomas Linacer médecin ^n-
zlon libéral enuers les cîlu-
dians 8 j 7
Thomoi "Bilné ^ngloif pour-
quoybruslé "7x9
Threfor caché en yne grotte
yoifine de Bafe 478
Threfor du roy à' Ef^agne per-
du par naufiage 48 1
Threfors trouue^ , butine^y
perdu* , recerche'^enyain
Cr pertlleufement 47^
Tourbillon de yent > étrange-
ment yiolent 590
Tourbillon de yent efîeue en
l'air yn preTlre blajphemn-
teur quinefiplfn y eu tf 3 7
Traiftre décapité 10 ^O. e/-
corché yifzp" nm fur -vn
licl defelpourfa recompen'
fe 485
Traiîlrcs punis 481- contrains
de s'entremauz^r 116
Trauerfef ef ranges c?" mi fer a^
blés d'yn Seigneur 'PortU"
gaii 5>48.94p.C7t
Trembk/Hem de terrt 485»
484.
k
**^
ÎNDTCB.
TrtTiejJ'e yehemente Cditfant
mort foudaine 3 9 0 . 3 9 I •
Trou'efihelles forcter infignt
830.8 ;i
Tueurs d'eux mefmes 39}.
3yî-3 97C7'C.
TwrCf punifj'ent les tratfires
I Oôojànattques 137
T<*rc meruedleux 41 8.41 ;;
TyrAnnm fcelerut hy^ocrtU
y.
VAche cberenKnt yencUte
760
yaillance 49 l railUnce ad-
mirable de quelques ^?cr-
tugan 1071 -p alliance ex-
traordinaire d'rn SuiJJè
4<î9 'vaillance mémorable
d'y» Capitaine Corfe 1 07.Ç
cr du Sieur de Bomuet
I07<f
yatjjeaux de mer en grand no-
bre t engloutis par la tour-
mente < 87
yaiuode de yisîoldau'te yifio^
rieux en dtuerjes entrepn-
fes I0 97'C^C.
yaltur 49 1 . 4.5 LCrf.
yamté ÇOX yantté du mon-
de magnifiquement reprejèn'
tee 5 O 3
yanité fitrieufe ^04
ydne iugulaire coupée CT gut"
ne 81.81
yen^eance horrible y O 7 . ^ o 8
fa firrnne adultère 30.3!
yenife embrOj^ee du feu y 1 4
yenitiens ci)..J}tent leurs capi^
taints qui atfoyent crueUe»
ment yiolenté desTttrcs lOf
106. dcsjaitsfefou/ntttene
trop au yemqueur 35$
itur prudence politique et»
la co'^duite zp" prouuoyance
dis filles g4f
yentre d'i^mt fimme pétrifie
XL4
yerolepethe gafle ir;* pourrit
les os an/il bien que lagrof-
^' r -J ^^^
yers afcar/des € je
yers itt corps humain yo 8 cau-
fentdes coftuu.Gons ^ fint
parier langage i frange 5 lo
fartent par le nçmb.nl d'yn
e»Jh>n S ^ O O" par les ai^
nés VII de longueur def^
mefuree V ix.ç i i.defir-
me monTirucufe 5 i^.^ i y,
cyc.pToduns en diuers fl»- '
droits du corps ^ 1 51. j x o»
yers s' attachai au cœur,chaf-
fe\ par l'y fige des aulx
III
yiceroy tombe es mains des
brtgtnds , c?- en efchappe
yie propre mejj,rifee pour la
fiuuer a fn compagnon
<ri
f^etiard lethitrgtque 831
'' leiiUras raieunn S ^7
ymgeancf dit mur t contre ^tUet defeUei par fiu en diuers
^
INDICE.
yille libérale enuers les pau-
Ures 8 4 1.8 4 r
Villes ajfatllies , prejpes , fub-
tugttees 84î.8î7.9tO.
rin garde' dnr4nt rne firt
lon2;i*e ejpace d*annecs
II04
rtnunt Sodre Capitaine Tor-
tu-^an noyé par fon auaricc
ri/ion prefageant la mortpro-
prochaine $7 S
yjfions ejlranges i effroyables^
horribles S ^o yifions mer-
ueilleufes en l'air 54 9-
no
rtjions. Foyel ^ppart-
ùon**
YitelU gênerai de l'armée
florentine n'ayant fçeu fe
feruitde l*eccaJîon perd la
-vie 9^l-9t%
yiuans Ung temps fans boirè
mmanger 411.41. $.41^-
433
l^oix de toutes fortes repre^
fentees natfnement i, 3 Ç
yoix poujfees comme du
frofind du rentre x ^ 5 .
Vol d'oifeau prit pour pyefage
de mort 3 7 tf
Fol O" balancement fur la cor»
de 5 3-34.Crf.
Foûeurs horribles l lo ^.
I loi-crc.
Vomiffem ens effranges 3.4.
Vrines merueiUemfes j ç x;
'■^ Erby médecin Italien tué
g j par fa yanterie fais
F I N.
J
«3
^
^
J
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^ 1^ ■ •■<o ■%^-