HISTOIRE GÉNÉRALE DE PARIS
COLLECTION DE DOCUMENTS
PUBLIER
SOUS LES AUSPICES DE L'ÉDILITÉ PARISIENNE
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE
DU
VIEUX PARIS
L'Administration municipale laisse à chaque auteur la responsabilité
des opinions développées dans les ouvrages publiés sous les auspices de la Ville
de Paris.
TOUS DROITS RESERVES.
HISTOIRE GÉNÉRALE DE PARIS
TOPOGRAPHIE
HISTORIQUE
DU VIEUX PARIS
PAR
ADOLPHE BERTY
UISTOHIOGRIPHE DE LA VILLE
DEUXIÈME ÉDITION
RÉGION DU LOUVRE ET DES TUILERIES
Sceau de la Prévôté des Marchands en i4ti
PARIS
IMPRIMERIE NATIONALE
M DCCG LXXXV
DC
101
J985-
PRÉFACE
DE LA PREMIERE EDITION
(i)
Au moment où la Ville de Paris commence la publication de cet ouvrage,
fruit de longues et laborieuses recherches, la première pensée de l'auteur
est d'exprimer toute sa gratitude envers le Magistrat éminent qui, en lui ac-
cordant un patronage si honorable , l'a mis en situation de poursuivre jusqu'à
son entier achèvement l'œuvre à laquelle il a consacré sa vie. Il remplit
également un devoir en adressant ses remercîments à MM. les Membres du
Conseil municipal, qui ont accueilli avec empressement la proposition de
M. le Préfet de la Seine, et n'ont rien épargné pour que l'exécution maté-
rielle du livre répondît à l'importance du sujet. Héritière de l'antique Pré-
voté des Marchands et de ses généreuses traditions, l'Edilité contemporaine
s'en inspire heureusement aujourd'hui. Sous ses auspices, de nouvelles
études, ayant pour objet ['Histoire générale de Paris, viennent d'être entre-
prises; une grande Collection de documents se fonde, et la Topographie histo-
rique du Vieux Paris est appelée à l'inaugurer : honneur insigne dont l'au-
teur sent tout le prix, et qui lui impose en même temps l'obligation de
contribuer, pour sa part et dans la mesure de ses forces, à doter la Ville
d'une histoire définitive.
Ceux qui écrivent les premiers sur une cité d'antique origine n'ont guère Histoire
en vue que leur propre satisfaction. Légende, récit, éloge, description,
"> 1866.
H
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
tout se produit alors librement et sans examen. Avec le temps, auteurs et
lecteurs deviennent difficiles; la curiosité s'éveille; on veut des informations
plus précises. Il faut alors entrer dans les détails, et regarder les choses
de plus près avant d'en parler. Bientôt, au désir d'apprendre les faits, vient
se joindre le besoin de voir figurées aux yeux les cités qui en ont été le
théâtre. De là des dessins, des plans, et autres accessoires, qui sont sou-
mis eux-mêmes à la loi commune du perfectionnement.
Premiers
essais
.le
restitution
topograpliique.
L'histoire de la Ville de Paris a passé par ces diverses phases. Bien avant
qu'on sentit la nécessité de discuter les questions relatives à son origine et à
sa configuration ancienne, plusieurs érudits du moyen âge avaient loué ou
décrit cette vieille cité à leur manière (1). Corrozet est le premier qui en ait
parlé avec un certain discernement'"2'. L'idée d'éclairer le sujet par une re-
présentation figurée appartient à l'Allemand Sébastien Munster : au chapitre
Lutetia, de sa Cosmographie universelle, il ajouta un plan de Paris, l'un des
plus anciens que l'on connaisse (3); et cet exemple fut imité par Georges Braun,
dans son ouvrage intitulé Civitates orbis terrarum^K Vers i65o, époque où
aucun historien français n'était encore entré clans la voie ouverte par Munster
et Braun, une nouvelle édition du recueil publié parce dernier écrivain parut
avec un plan contemporain mis en regard de celui de 1572. Il y avait,
dans ce seul rapprochement, une intention archéologique qui pouvait être
(l) Le plus ancien ouvrage de ce genre est Y Éloge
de la Ville de Paris, par l'anonyme de Sentis, qui a
été rédigé vers i3a9. MM. Taranne et Le Roux de
Lincy en ont publié le texte en 1 856 , dans le Bulle-
tin des Comités historiques.
<s) La Fleur des antiquités , singularités et excel-
lences de la plus que noble et triomphante Ville et Cité
de Paris. La première édition date de 153a, et
celle où il est sérieusement question de l'histoire
de la Ville, de i55o.
(5) Sébastien Munster, né à Ingelheim en 1 &8p,,
mort en 1 55 a, théologien, hébraïsant, mathémati-
cien et géographe , publia, entre autres ouvrages,
une Cosmographie universelle qui parut d'abord en
langue allemande (Bâle, 1 55o), fut traduite en latin
par l'auteur lui-même (Bâle, i55o), puis en italien
(Baie, i558), et enfin en français (Bâle, i55a).
Une nouvelle édition française fut donnée à Paris,
en 1 575 , avec diverses additions par Belleforest,
qui enrichit son livre des rrplantz et portraietz des
isles et des villes. »
(4) Georges Braun ou Bruin, savant Allemand,
publia à Cologne, de 1 57a à 1618, un grand ou-
vrage de géographie écrit en latin et ayant pour
titre : Civitates orbis terrarum inœs incisœet excusœ ,
et descriptione topographica , morali et politica il-
lustratœ. Les gravures sont de Fr. Hogenberg et de
Simon Van den Noevel; plusieurs plans ont été, en
outre , fournis à l'auteur par Georges Hoefnagel et
Cornélius Chaymon.
PRÉFACE. v
féconde, mais qui ne paraît pas avoir été comprise avant la fin du xvnc siècle.
Jusque-là , en effet, les plans de Paris, soit gravés, soit manuscrits, repré-
sentent la Ville dans l'état où le dessinateur l'a vue; mais ils ne comportent
absolument rien de rétrospectif.
En 1692 , Nicolas de Fer(1), publiant ou plutôt rééditant le Plan de Jouvin Nicolas De Fer.
de Rochefort(2), dressé en 1676, crut devoir y faire figurer les enceintes
antérieures, qu'il traça grossièrement en ponctué, dans le dessein bien évi-
dent d'établir un parallèle entre l'état ancien et l'état contemporain (3). Ce
premier essai de restitution topographique est sans doute bien informe ; mais
l'idée de Braun, reprise par De Fer, ne fut pas perdue pour la science.
Peu de temps après, De Lamare conçut un projet beaucoup plus vaste. De Lamare.
Donnant dans le premier volume de son Traité de la Police, imprimé en
1 7o5, une description topographique de la Ville et un exposé de ses accrois-
sements, il voulut y joindre des figures qui parlassent aux yeux. Il composa, en
conséquence, huit plans de Paris à diverses époques, en commençant par
la période gallo-romaine. Dans ce qu'elle avait de réalisable, la pensée était
excellente; l'exécution fut, au contraire, singulièrement défectueuse. Les
conditions adoptées par De Lamare la rendaient, du reste, partiellement
impraticable : comment, par exemple, se figurer d'une façon plausible la
Cité aux temps mérovingiens?
Les planches du Traite' de la Police, toutes défectueuses qu'elles sont, pro-
duisirent pourtant une grande impression sur le public; on alla jusqu'à leur
prêter assez d'autorité pour les invoquer dans des contestations judiciaires.
(l) Nicolas De Fer, géographe français, né en qui eut ensuite plusieurs tirages et servit de base
1 646 , mort en 1720, a publié ou édité un assez aux travaux de Nicolas De Fer. Il en existe une édi-
grand nombre de plans ; il se lwrnait souvent à ré- lion datée de 1714.
duire ou a corriger les travaux de ses devanciers. (s) Plan de la Ville de Paris. . . avec ses nouvelles
' La plupart de ces plans , dit M. Bonnardot , avaient rues , places , enceintes et cazernes , levé sur les lieux
rpour base les Mémoires ou dessins originaux de par M. Jouvin de Rocliefort, et augmenté des tables
■ Jouvin de Rochefort. * des cazernes et des vieilles et nouvelles enceintes,
m Jouvin deRochefort, trésorier de France et par Nicolas De Fer, géographe de Monseigneur
dessinateur-géographe, publia, en 1676, un plan (1699).
vi TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Mais il y eut nécessairement un retour d'opinion, et dès 1775, en parlant
de ces informes essais, Jaillot(l) s'exprimait ainsi: tfll est étonnant que cet
rr objet ait été si mal traité ; ce n'est point assez de dire qu'il a été négligé :
«on peut se convaincre, en voyant ces plans, que leur auteur n'a consulté
crque son imagination pour les tracer; que les rues et les monuments y
rrsont déplacés, etc.(2)w On ne le conteste plus aujourd'hui: les plans de
De Lamare échappent à la critique par l'excès même de leur imperfection.
Jaillot.
Séduit à son tour par le vif intérêt du sujet, Jaillot, historien et géographe
tout à la fois, avait résolu de reprendre l'œuvre infructueusement tentée par
De Lamare. crje m'étois proposé, dit-il, de donner une notice abrégée des
rr différents accroissements de Paris, avec les plans successifs, sur lesquels
crj'aurois tracé les rues avec les noms qu'elles ont portés, et les différents
rr monuments, sacrés ou profanes, qui existoient alors et qui ne subsistent
crplus(3). n II est regrettable que le dessein de Jaillot n'ait point eu de suite,
car cet écrivain, aussi sagace qu'érudit, eût assurément produit un travail
fort utile, si l'on en juge par son livre, le meilleur qui existe sur la topo-
graphie de Paris ((|). En effet, il disposait, entre autres renseignements, de
plans <nanuscrits qui sont actuellement perdus pour nous, et qui auraient
éclairci bien des questions restées obscures. Néanmoins il y a lieu de douter
que ces planches eussent été entièrement satisfaisantes, parce qu'il paraît
avoir été inhabile à tracer des plans exacts à une échelle minime, comme
l'exige une œuvre de ce genre(5).
<!> Fils et petit-fils de géographes du Roi et de
la Ville, archéologue et topographe du plus grand
mérite. (Voir X Introduction à V Histoire générale de
Paris, p. 5o et 90.)
(2) Recherches critiques, historiques et topogra-
phiques sur la Ville de Paris, t. I. Discours préli-
minaire, p. XVIII.
(S) lbid. p. xix.
(4) C'est justement parce que nous tenons en
haute estime les travaux de Jaillot que l'on nous
verra si souvent le prendre à partie et discuter ses
affirmations.
(5) Le plan en vingt-quatre feuilles qui a paru
avec son ouvrage justifie amplement cette asser-
tion. En dépit des éloges qu'on lui prodigue en-
core, il décèle beaucoup de faiblesse sous le rap-
port de la précision géométrale : la largeur des rues
s'y trouve singulièrement exagérée, les angles y
sont faux, les proportions des édifices inexactes,
les emplacements, en bien des cas, simplement ap-
proximatifs, etc. Ce qui en constitue la valeur, c'est
la fidélité avec laquelle il indique tous les établis-
sements qui existaient dans la Ville au moment où
il a été exécuté. Quant à la rigueur mathématique,
il est non-seulement à une énorme distance du
plan de Verniquet (1774-1796), mais encore fort
PRÉFACE. vu
Les plans de De Lamare ont été servilement copiés et recopiés ; mais il s'est Duiaure.
écoulé cent seize ans avant que l'on se mît à l'œuvre , avec la prétention de
mieux faire. En 1821, Duiaure arrangea, pour son Histoire de Paris, quatre
petits plans qui, selon lui, représentaient la Ville pendant la domination ro-
maine et sous les règnes de Philippe-Auguste, de François Ier et de Louis XIII.
En matière de restitution topographique, Duiaure, avec sa science de seconde
main, n'a rien fait qui puisse soutenir un examen sérieux(1). Ses plans, un
peu moins défectueux que ceux du Traité de la Police, n'ont pourtant pas
reçu le même accueil: ils ont, au contraire, passé presque inaperçus.
La dernière tentative ayant pour but de dresser un plan de restitution m. ail. Lenoir.
du Vieux Paris date de 1 83 7. Il s'agissait d'interpréter les détails topogra-
phiques que renferme le Rôle de la Taille de 1292, édité par Géraud(2).
M. Albert Lenoir se chargea de cette difficile besogne; mais les données
qu'il avait à traduire étaient souvent fort inexactes, et il lui aurait fallu, pour
les redresser, consacrer à de longues et difficiles recherches un temps que
réclamaient des travaux d'un autre ordre.
Nous devons reconnaître qu'à cette époque régnaient encore les idées les Opinions
plus fausses sur la topographie du Vieux Paris ; il semblait que ce fût un de er™"rees
ces sujets limités que chacun peut posséder à fond après avoir consulté ia t0P0srilPhle
quelques volumes. Depuis longtemps la compilation s'exerçait sans critique vieux Paris.
sur les livres d'une demi-douzaine d'auteurs plus ou moins accrédités, et l'on
allait jusqu'à réimprimer les fautes matérielles qui fourmillent dans l'ouvrage
posthume de Sauvai (3). Quant à élargir le cercle des connaissances acquises ou
à combattre les erreurs invétérées , il en était à peine question : on ne se ren-
dait pas compte des longues investigations qu'il y avait à faire pour y réussir.
au-dessous des plans de quartiers par De Lagrive (,) Dans Paris sous Philippe le Bel, in-4". Paris
(1734-1755), excellents travaux qu'on n'apprécie 1887.
pas assez. (3) Henri Sauvai, avocat au Parlement de Paris,
(1) Rien de moins raisonnable que le tracé de auteur et compilateur des plus laborieux. (Voir 17n-
l'enceinte carolingienne, qu'il suppose à tort avoir troduction ù ï 'Histoire générale de Paris, p. 4 a
existé sur la rive gauche. et 87.)
nu TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Difficultés Les érudits cependant ne pouvaient ignorer que les registres du Tre'sor
du sujet. jeg Qjmrtegj (ju parlement, de l'Hôtel de Ville et des paroisses, qui avaient
été fréquemment cités, renfermaient des matériaux précieux (1); mais per-
sonne ne se souciait d'entreprendre le dépouillement d'une telle quantité de
pièces manuscrites, aussi difficiles à lire qu'à comprendre, et qu'il eût en-
suite fallu traduire graphiquement. Les diverses aptitudes nécessaires pour
une pareille œuvre ne sont, en effet, que très exceptionnellement réunies
chez le même travailleur. L'étude de la diplomatique ne prépare guère à re-
lever des plans, et lorsqu'on a passé de longues années à manier le compas
et le crayon, on est généralement assez peu disposé à déchiffrer les par-
chemins. Le paléographe le plus habile peut, en outre, être absolument dé-
pourvu du sentiment topographique; un fragment de maçonnerie, l'épais-
seur anomale d'une muraille, la flexion d'un alignement, un agencement
particulier de corps de bâtiment, sont pour lui de muettes indications. De
tels indices, au contraire, font naître de fécondes réflexions chez l'homme
du métier, que la pratique a rendu familier avec les lois latentes suivant
lesquelles les habitations se groupent et les voies se dirigent, qui sait déter-
miner l'âge réel des constructions et deviner la cause de l'enchevêtrement
des propriétés; mais, en revanche, les anciens documents écrits lui sont
presque entièrement inutiles, parce qu'il les lit d'une manière beaucoup trop
incomplète. Joindre, dans une certaine mesure, l'expérience du paléographe
à celle de l'architecte -archéologue, était donc une condition indispensable
pour jeter un nouveau jour sur la topographie du Vieux Paris.
L'exposé de ces difficultés était nécessaire pour faire connaître les phases
par lesquelles a passé le présent ouvrage, commencé il y a dix-sept ans.
Origine Au mois de janvier 1 84g , M. Albert Lenoir, qui dirigeait alors la Statistique
du travail.
monumentale de Paris, nous chargea de dresser un plan archéologique destiné
à en devenir le complément. Ce plan devait comprendre les anciennes voies
des diverses périodes, le tracé des enceintes, l'ichnographie des édifices
'1 Parmi les savants du siècle dernier qui ont puisé à ces sources, il faut citer Bonamy, Bouquet et
Terrasson. (Voir l'Introduction à Y Histoire générale de Paris, p. 54.)
PREFACE. ix
détruits, résumer, en un mot, tout ce que l'on croyait savoir, et y ajouter,
autant que cela se pourrait. Les espérances à ce sujet étaient alors fort res-
treintes, et il était permis de douter que les précédents essais fussent ja-
mais notablement dépassés.
tentatives.
Après avoir réuni l'ensemble des renseignements qu'on possédait alors sur première»
le quartier Sainte-Geneviève et cherché à les mettre en œuvre, nous fûmes
obligé de reconnaître qu'il en était résulté un plan tout à fait inacceptable.
En effet, les détails fournis par les historiens sont généralement trop vagues
pour être traduits graphiquement; ils laissent d'ailleurs subsister de telles
lacunes que les restitutions deviennent impossibles sans de nouvelles indi-
cations plus précises et plus suivies. D'autre part, on n'a pas le moyen de
signaler sur un plan les problèmes topographiques que les écrivains sou-
lèvent sans y apporter, le plus souvent, autre chose qu'un commencement
de solution. Ainsi Jaillot nous apprend qu'un hôtel des évêques de Nevers
s'élevait jadis dans la rue des Amandiers ; or, comme les plans ne marquent
point la situation de cette maison, il n'est pas même possible d'en rappeler
l'existence sur une carte, parce qu'on ne sait où disposer avec précision la
légende indicatrice. Fallait-il donc se bornera replacer, d'après Gomboust,
ou De Lagrive, quelques établissements disparus? C'eût été un travail aisé,
mais sans grand mérite ; nous pressentions qu'il y avait quelque chose de
mieux â faire.
L'insuffisance des notions contenues dans les livres et dans les plans gra- Nécessité
de nouvelles
vés étant bien constatée, il devenait urgent de recourir à des sources plus recherches.
abondantes, c'est-à-dire d'aborder les dépôts d'archives; à l'aide des innom-
brables documents inédits qui y sont contenus, on devait, en effet, pouvoir
reconstituer d'une manière authentique cette topographie du Vieux Paris,
restée si vague et dénaturée par tant d'erreurs. En peu de temps, malgré
les difficultés du début, nous commençâmes à entrevoir la possibilité d'ac-
complir une œuvre entièrement nouvelle, la restitution de chacune des pro-
priétés composant les îlots de maisons; notre courage s'en accrut, et, à la
t TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
suite d'efforts opiniâtres, nous eûmes enfin la satisfaction de constater qu'un
groupe de maisons était re'tabli avec exactitude. Une feuille de plan fut alors
entreprise, puis soumise, dans une séance de l'un des Comités historiques, aux
savants les plus aptes à en juger, et accueillie par eux avec autant de faveur
que de surprise. La voie était ouverte ; il n'y avait plus qu'à y persévérer.
Tranformatkm Bientôt se révéla la nécessité de ne point se borner à un simple travail de
de restitution dessin. Des planches où n'aurait figuré aucune indication de dates étaient
en
histoire insuffisantes, et il eût été déplorable de rejeter dans l'ombre une quantité
topographique.
de renseignements curieux, recueillis en cherchant les éléments de l'exécution
graphique. De plus, nous nous trouvions en fréquente opposition avec nos
devanciers, et il importait beaucoup de prouver que la contradiction était
motivée , ce qui entraînait à des discussions. Le travail s'est donc transformé
en un livre où les plans ne sont plus que l'accessoire inséparable du texte,
et qui constitue une véritable Histoire topographique du Vieux Paris.
Sources Le sol de Paris tout entier était jadis divisé en seigneuries, appartenant
Archives presque exclusivement à des communautés, fort jalouses de leurs biens ter-
lEmpire ritoriaux, et produisant à leurs possesseurs des trémolumens», redevances
îAssisunce et avantages de diverses natures. Pendant la Révolution, les titres de ces
publique , °
BuSTue108 ProPrie'tés féodales furent mis sous le séquestre, puis réunis dans le grand
dépôt central de l'hôtel de Soubise, où ils se trouvent aujourd'hui, à peu près
dans le même état qu'en 1789. Or, à l'époque où s'écroula l'ancien régime,
il y avait déjà d'innombrables lacunes dans les archives de ces fiefs pari-
siens, bien que les propriétaires eussent le plus grand intérêt à conserver
leurs archives pour pouvoir justifier de leurs droits. Les années, en s'accu-
mulant, avaient multiplié les causes de destruction; et, tandis que telle
seigneurie conservait des dossiers complets remontant jusqu'au xmc siècle,
beaucoup d'autres, souvent supérieures en importance, ne possédaient plus
qu'une petite quantité de pièces et de date peu ancienne. Les titres de la
censive du Roi avaient même été complètement anéantis par l'incendie de
la Chambre des comptes, survenu dans l'année 1737.
PRÉFACE. xi
Par suite de ces diverses circonstances, on comprend que les documents
sur Paris, re'unis aux Archives de l'Empire, quoique nombreux et dune
grande valeur, laissent beaucoup à désirer; ils sont, en réalité', très inéga-
lement re'partis et ne remontent pas assez haut dans l'histoire. On peut à
peine citer quelques chartes du xne siècle ayant trait à des maisons, et les
actes de cette espèce sont peu explicites avant la fin du siècle suivant. Jl faut
descendre jusqu'au milieu du xve pour rencontrer des titres de cette nature
nombreux et facilement intelligibles. On de'couvre les mêmes lacunes dans
les archives des hôpitaux, centralisées à la Direction de l'Assistance publique,
et qui n'avaient été jusqu'ici explorées par aucun historien de Paris ; nous
avons mis largement à profit ces archives, ainsi que les fonds manuscrits des
bibliothèques publiques, où l'on ne trouve guère, il est vrai, que des registres
sans suite et des pièces isolées. L'ensemble de ces circonstances explique les
trop fréquents desiderata auxquels il nous a été impossible de remédier.
Quoique les matériaux de cet ouvrage proviennent, en très grande par- Autres sources:
tie, des archives domaniales de toute origine, nous avons dû fréquemment monographies.
puiser à d'autres sources, parce que les recherches topographiques propre-
ment dites nous ont, par une conséquence naturelle, amené à parler de
l'histoire des édifices considérés au point de vue de leur construction. Sous ce
rapport, les travaux de nos prédécesseurs nous ont été beaucoup plus utiles,
et parfois même nous avons dû nous borner à les copier. Ainsi, en dehors des
appréciations archéologiques, il reste bien peu à dire des églises parisiennes,
après Lebeuf (l) et Jaillot. L'histoire des établissements religieux a pareillement
été assez étudiée (2) pour qu'on ne puisse guère compter sur des découvertes
bien considérables; et si, récemment, une science profonde, unie à un re-
marquable esprit de critique, est parvenue à composer, de toutes pièces, la
monographie d'un ancien collège (3), c'est, à notre avis, un résultat tout à
(1) Lebeuf, chanoine et sous-chantre delà cathé- dom Bouillart, dom Manier, les auteurs du Gallia
drale d'Auxerre, liturgiste distingué, chercheur christiana, et beaucoup d'autres auteurs, ont tra-
infatigable, auteur de Y Histoire du Diocèse de Paris. vaille sur ce sujet.
(1754.) (s) Hist. de Sainte-Barbe, collège, communauté et
m Du Breul, Félibien, Sauvai, l'abbé Dubois, institution, par J. Quicherat.(3 vol. in-8°, i86o-64.)
xn TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
fait exceptionnel. L'histoire des grands édifices civils, qui dans le passé n'ex-
citait qu'un assez faible intérêt, a été jusqu'ici traitée d'une manière bien
plus imparfaite. Quant aux hôtels seigneuriaux, leur histoire est pleine d'er-
reurs, et les historiens de Paris n'ont point mentionné le quart de ceux qui
méritaient de l'être. Il a été encore moins question des maisons de bour-
geois ou d'artisans, que distinguaient de si pittoresques dénominations;
elles étaient demeurées inconnues pour la plupart, de telle sorte que l'on ne
pouvait juger de la physionomie intime des quartiers du Vieux Paris, et
qu'on ne savait presque jamais retrouver la demeure d'un personnage cé-
lèbre. Cette étude des maisons, qui n'avait pas encore été abordée, nous a
semblé indispensable : plus d'une fois elle nous a valu des données biogra-
phiques extrêmement curieuses.
pians Quant aux plans manuscrits dont nous avons fait usage, c'est également
innnuscnts
relatifs aux Archives de l'Empire et de l'Assistance publique qu'ils sont conservés
au
vieux Paris, pour la plupart ; les autres appartiennent aux collections de la Bibliothèque
impériale. Un petit nombre seulement remonte jusqu'à la seconde moitié
du xvne siècle; au delà ils deviennent très rares, et nous n'en avons vu
que deux ou trois du xve siècle. Cette pénurie n'est pas seulement l'effet
des ravages du temps: jadis on dressait, comme aujourd'hui, les plans des
constructions particulières à élever, mais on ne sentait pas plus qu'on ne
l'éprouve de nos jours en Orient le besoin de plans généraux, soit pour
satisfaire la curiosité des étrangers, soit pour diriger les travaux de voirie
dans les villes. On ne faisait guère que des images, telles que le Plan de la
Tapisserie, l'un des plus anciens «pourtraicts de Paris» qui nous soient par-
venus, et qui n'est en réalité qu'une sorte de vue à vol d'oiseau. A l'époque
où ce travail fut fait, l'art géodésique était dans l'enfance, et ne visait nul-
lement à la précision. Quoiqu'il ait rapidement progressé depuis, par suite
de la révolution opérée dans le système de défense des places fortes, il ne
semble pas qu'on ait relevé des plans de Paris géométralement rigoureux
avant ceux de l'abbé De Lagrive. Pour les architectes contemporains de ce
géographe, l'exactitude mathématique était une perfection superflue, et, lors-
PRÉFACE. xiii
qu'on examine attentivement leurs plans, surtout ceux qui comprennent des
îlots détaillés, on est souvent étonné des énormes et inconcevables erreurs
qu'on y découvre. Les plans manuscrits que nous avons utilisés sont tous
partiels ; ils renferment une rue, un îlot, un quartier au plus. En fait d'an-
ciens plans généraux, nous ne connaissons que ceux qui ont été gravés, et
sont ainsi du domaine public. Il faut s'abstenir d'y porter le compas, et ne
leur demander que des renseignements approximatifs. Toutefois on arrive à
des conclusions très voisines de la vérité en combinant les indications qu'ils
fournissent avec les données plus précises qui se déduisent de la lecture des
textes, et notamment des pièces constituant les archives domaniales.
Ces archives se composent de baux, d'ensaisinements, d'amortissements, Archives
! , , , . . rv . . , . domaniales.
de déclarations aux terriers, etc. Dans ces divers actes, les maisons sont
habituellement décrites avec leurs tenants et aboutissants ; il semble donc
possible d'en déduire la situation relative, et, si les titres sont en quantité
suffisante , de reconstituer la disposition des propriétés de tout un îlot. Pour
atteindre ce but, on a d'ailleurs assez souvent à sa disposition les registres
de cens, où les maisons sont mentionnées dans leur ordre de contiguïté,
de façon qu'en les parcourant on apprend immédiatement combien il y
avait de maisons entre deux points donnés, et quelles en étaient les ensei-
gnes à la date du cueilleret(1). Déterminé à faire plus, nous nous sommes
imposé l'obligation de retrouver l'emplacement même des propriétés dont
les documents ne donnaient que l'énumération.
Mais sur quelle base établirons-nous sûrement nos restitutions? Quel Données
. , • i • i •îiii** i • i\ positives fournies
point de repère nous guiderait dans ce travail de localisation pousse jusqu a par les
. , TT . . . /> • murs mitoyens
ses dernières limites? Heureusement il en existait un, facile à reconnaître latéraux.
même aujourd'hui, là où l'ancien état de choses n'a pas été sensiblement
modifié; et c'est ce point de repère assuré qui nous a aidé à dresser notre
plan parcellaire: il consiste en ce que les murs mitoyens latéraux n'étaient au-
trefois presque jamais déplacés. Ce fait provoque, tout d'abord, une certaine
(,) Livre de recettes des cens et rentes payés à un seigneur par ses tenanciers.
ht TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
surprise ; mais, après quelques instants de réflexion, on ne tarde pas à s'en
rendre compte. Quand on reconstruisait une maison, on ne pouvait l'élargir
qu'en entamant les bâtiments contigus; or une pareille opération n'était
réalisable que par voie d'héritage ou d'acquisition, circonstances fort rares
au moyen âge, où les acensements de terrains étaient réputés perpétuels.
Sauf le cas de morcellement, il est donc infiniment probable que la plu-
part des maisons ont eu leurs murs latéraux établis sur des fondations
antérieures. Le déplacement des murs mitoyens a dû, par conséquent, ne
se produire que très exceptionnellement. Les modifications apportées aux
propriétés, dans le sens de la profondeur, ont été beaucoup moins rares,
parce qu'il y avait là des cours et des jardins, où les retranchements s'effec-
tuaient avec facilité ; mais les changements que les maisons ont subis sous
ce rapport n'empêchent nullement d'en constater l'identité.
conséquences De ce que les murs mitoyens latéraux se sont généralement maintenus à
de ces données, leur place primitive, il ne s'ensuit point cependant que les rues aient con-
tenu, dans les temps modernes, la même quantité de maisons qu'aux époques
antérieures. La différence de nombre est, au contraire, très grande, et en
voici le motif: au xme siècle, Paris ayant encore peu d'habitants, le terrain
y était d'une médiocre valeur, et rien n'empêchait d'y donner aux maisons
des dimensions assez vastes; mais dans les siècles suivants, la population
augmentant sans cesse, le terrain devint précieux, et l'on voulut naturel-
lement en tirer tout le parti possible ; les propriétés furent donc subdivisées,
ce qui amena la construction de maisons étroites et très élevées. Dès le règne
de Louis XII, on avait poussé le morcellement si loin, qu'on voyait dans la
Cité des façades larges de sept pieds seulement ; une centaine d'années plus
tard, on commença à réagir contre cet abus, et de plusieurs maisons on en
fit parfois une seule : circonstances qui ajoutèrent ou supprimèrent quelques
murs mitoyens, mais ne déplacèrent point les autres. Le progrès, au reste,
ne fut pas général, et pendant que, çà et là, on reliait entre elles diverses
propriétés dans le centre de la Ville, le système de fractionnement se con-
tinuait dans les faubourgs , où les constructions étaient moins resserrées.
PREFACE. xv
Le nombre des maisons figurées sur les rares plans que l'on possède, Procédés
, , . _ . 1 , pour discerner
comparé a ce qu il était aux époques ou nous avons a nous reporter, diffère les anciens
lotissements.
plus ou moins, en raison du temps et des quartiers. L'écart est presque
toujours considérable, et il suffit qu'il y en ait un, même minime, pour que
l'identité de toutes les propriétés d'un groupe devienne douteuse. Les pro-
cédés à l'aide desquels nous parvenons à nous reconnaître dans ce dédale
sont complexes et peu aisés à spécifier. En général, notre méthode, pour
aller du connu à l'inconnu, consiste à remonter l'échelle des temps; et nos
moyens d'appréciation détaillée sont la coïncidence des maisons par leurs
aboutissants, la manière dont elles s'agencent latéralement entre elles, une
particularité de leur plan, révélée par les titres, comme la disposition en
hache, une enclave, certaines dimensions, etc.; malheureusement ce der-
nier genre de renseignement ne se rencontre guère. Des données extrême-
ment utiles se dégagent aussi de l'indication des superficies, lorsqu'on peut
en faire le relevé. Nous mettons également à profit les listes de propriétaires,
le fait de la conservation des vieilles enseignes ou la mention de celles qui
y ont été substituées, les repères offerts par les édifices qui ont traversé les
âges, les plans que renferment quelquefois les dossiers, et une multitude
d'autres détails dont l'étude nous a enseigné à saisir la portée. Cependant
le plus souvent tout cela serait insuffisant sans l'espèce d'intuition qu'une
longue expérience finit par développer, et qui permet de discerner les rema-
niements opérés dans le lotissement des ilôts (1). Rien, au surplus, n'a été omis
afin d'obtenir des résultats aussi certains que possible, et il n'est aucun
genre de vérification auquel nous ayons négligé d'avoir recours. Nous ne
prétendons certes pas à l'infaillibilité; mais ce que nous pouvons dire, c'est
que nos restitutions, dont l'exactitude a été si souvent confirmée, sont éta-
blies avec une probabilité tout à fait scientifique. Lorsqu'il nous est resté des
doutes, nous avons considéré comme un devoir de conscience d'en avertir le
lecteur, soit sur les plans, soit dans le texte.
(l) Il a existé jusqu'à nos jours dans le lotisse- muraille gallo-romaine de la Cité a pu être signalé
ment des îlots diverses traces d'états extrêmement par nous à M. Th. Vacquer, longtemps avant que
anciens. C'est ainsi qu'un point du passage de la cet archéologue en retrouvât les assises inférieures .
xvi TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Difficulté Exposer les procédés d'exécution de ce travail, c'est en faire comprendre
d'appliquer . i«ji» »'# «■• n> *l • •
les documents les prodigieuses difficultés. Pixer en effet, avec une entière précision, le point
•m sol.
du sol parisien auquel se rapporte un ancien titre, est aujourd'hui, dans
l'immense majorité des cas, un problème extrêmement pénible à résoudre.
Ceux-là seuls qui en ont tenté l'épreuve savent ce que coûte un tel crrom-
trpement de teste,» pour employer une expression de l'illustre architecte
Philibert De l'Orme. S'il est un résultat qui puisse faire attribuer à nos tra-
vaux une valeur particulière , c'est assurément d'avoir réussi dans l'applica-
tion des documents au terrain ; le reste de la tâche , c'est-à-dire l'élaboration
du plan et la rédaction du texte, quelque considérable que soit un pareil
travail, doit être tenu pour peu de chose en comparaison.
Divisions L'ouvrage étant avant tout topographique, les divisions en étaient indi-
naturelles
de l'ouvrage ; quées par la configuration même de Paris :
marche suivie
, P°ur . La Cité et ses dépendances ;
la publication. l
L'Université, comprenant les quartiers de la rive gauche de la Seine
renfermés dans l'enceinte de Philippe-Auguste ;
La Ville, c'est-à-dire les régions de la rive droite qu'entourait l'enceinte
bastionnée ;
Les Faubourgs, ou les parties du territoire parisien situées au delà des
enceintes.
Si l'on était complètement maître d'un tel sujet, il serait logique de
commencer la publication de l'ouvrage par la Cité, cet antique berceau de
l'histoire parisienne; mais un travail de restitution aussi étendu, aussi com-
pliqué, est soumis à des nécessités de toute nature qui amènent forcément
des interversions dans l'ordre de succession des parties qui le composent.
Les titres écrits ont leurs lacunes et présentent de nombreuses difficultés
d'interprétation; les documents lapidaires ne peuvent être utilement consultés
dans une fouille récente. Guidé par des indices ana- très preuves du fait que nous signalons, lorsque
logues , nous sommes parvenu également à retracer nous expliquerons un très curieux document , réputé
plus des trois cinquièmes du parcours , si mal d'une obscurité impénétrable : le relevé des places
connu, de l'enceinte dont dépendaient la porte Bau- que l'abbaye Saint-Pierre-des-Fossés possédait à
doyer et l'archet Saint-Merry. On aura encore d'au- Paris, vers la fin du ix° siècle.
PRÉFACE. xvii
qu'au moment où la pioche ouvre les profondeurs du sol qui les renferme.
Il faut donc, pour mettre sûrement la dernière main à un volume de texte
et à une feuille de plan , attendre tantôt la de'couverte de pièces manuscrites
nouvelles ou le dépouillement d'anciens fonds qui n'avaient pas encore été
livrés au public, tantôt l'exécution de grands travaux de construction ou
d'édilité, d'où résultent soit un utile complément d'indications, soit une con-
firmation matérielle des renseignements fournis par les archives. Ces dévia-
tions, que ne connaissent ni les littérateurs, ni les hommes de science pure,
un historien-topographe est obligé de les subir; il va où l'appellent les maté-
riaux qui doivent entrer dans la composition de son œuvre, il suspend mo-
mentanément certaines parties de son travail, quand il a l'espoir de faire
quelques bonnes trouvailles, et il ne se décide à les livrer au public que
lorsqu'il croit avoir épuisé les sources: l'estime du monde savant est à ce prix.
La vérité nous oblige donc à reconnaître que la Cité, dont les vieilles maisons
tombent en ce moment, n'a pas encore été assez fouillée; que l'Université,
où de nombreuses voies nouvelles vont s'ouvrir, a encore bien des secrets
à nous révéler; mais en revanche, dans la Ville proprement dite, la Région
du Louvre et des Tuileries est complètement explorée, et c'est par elle que
commence la publication du présent ouvrage.
Il n'est pas moins difficile de fixer l'ordre dans lequel les rues doivent Énumération
A , , , . , . . des rues.
être enumérees; on ne saurait songer a les grouper par paroisses et paryte/s,
à cause de l'irrégularité et de l'enchevêtrement de ces sortes de circonscrip-
tions. La division par quartiers eût beaucoup mieux valu; mais, quand même
elle serait exempte de ces inconvénients, elle n'aurait pu être adoptée, puis-
qu'on ne connaît point les limites précises des anciens quartiers. Force nous
a donc été de recourir, comme Jaillot, à l'ordre alphabétique, qui offre des
avantages certains, et est exempt de défauts graves. En tête de l'article con-
sacré à chaque rue est une notice mentionnant l'époque où elle apparaît dans
les documents, les noms qu'elle a portés, avec leur signification, et généra-
lement tout ce qui tend à en éclaircir l'histoire au point de vue topographique.
Viennent ensuite l'indication de la paroisse et de la seigneurie, détails qu'on
xviii TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
chercherait inutilement dans les livres, et enfin la nomenclature complète
des édifices élevés ou débouchant sur la voie. Une telle forme, manifestement
incompatible avec l'intérêt littéraire, permet, en revanche, de ne rien omettre;
il y avait d'ailleurs impossibilité de fondre en un récit continu les ren-
seignements à donner sur de longues séries de maisons. Nous devons, en
outre, prévenir le lecteur que l'anecdote a été bannie de cet ouvrage; ce
serait, du reste, un souhait stérile que celui d'une histoire anecdotique
et récréative des habitations du Vieux Paris : il n'y a presque rien à re-
cueillir sur cette matière. Des maisons de Paris pendant le moyen âge, on
ne peut guère arriver à connaître que l'emplacement, la désignation habi-
tuelle, et le nom de quelques propriétaires.
Dates et limites Les investigations archéologiques s arrêtant d'ordinaire au commence-
extrêmes ;
développements ment du xvne siècle, la date de 1610 est celle que nous nous proposons de
accessoires ;
^graphies ne pas dépasser dans cet ouvrage. Cependant ce n'est point une limite que
nous nous croyions rigoureusement interdit de franchir : nous donnerons
fréquemment, pour les sauver de l'oubli, des renseignements recueillis dans
le cours de notre travail et se rapportant à des époques plus rapprochées;
mais il n'y faudra voir que des accessoires. C'est surtout dans le cadre
d'une histoire topographique de la Ville avant Louis XIII que l'auteur de
ce livre a voulu réaliser un travail complet. Pour y parvenir, il n'a reculé
devant aucune étude d'où pouvait sortir l'éclaircissement de quelque ques-
tion, et c'est ainsi qu'il a entrepris d'élucider la biographie de tous les ar-
chitectes qui ont travaillé au Louvre. Ce qu'on relatait de leur personne et
de leur vie était tellement entaché d'erreurs, que les traditions les plus con-
tradictoires s'étaient peu à peu accréditées sur la construction de ce palais.
Si les développements donnés au récit de toutes ces vies d'artistes paraissent
un peu longs, il faudra se rappeler que telle date, tel fait, peu importants
en apparence, permettent de nier ou d'affirmer la participation d'un archi-
tecte, d'un sculpteur ou d'un peintre, à des travaux qu'on leur avait attribués
jusqu'ici.
PREFACE. xix
On connaît l'exactitude du plan de Verniquet(l); c'est celui qui a été adopté Base géométrie
1_ / r Tl • • e* divisions
pour base geometrale du nôtre. Il est encore très intelligible pour la généra- du pian
de restitution.
tion actuelle, et l'aspect général du Vieux Paris s'y reconnaît assez pour
qu'on y reporte sans trop de difficulté l'ancien état de choses. Nous l'avons,
pour notre usage, réparti en seize feuilles; mais l'échelle (une demi-ligne
pour toise, ou omm,58 pour mètre) s'est trouvée un peu restreinte, et il
nous a fallu employer d'assez petits caractères, afin de consigner sur chaque
planche le plus grand nombre possible de renseignements. Il s'en est suivi ,
sur quelques points, une confusion apparente, à laquelle semblent ajouter
les signes marquant les limites des censives et des paroisses. Toutefois,
dans une carte faite exclusivement en vue d'études sérieuses, des entre-croi-
sements répétés de légendes ne sont-ils pas encore préférables à l'omission
de particularités importantes?
L'exposé du système graphique adopté pour donner tous les éclaircisse-
ments nécessaires a été reproduit sur toutes les feuilles; on y trouvera éga-
lement un numéro d'ordre, propre à en faciliter la juxtaposition, c'est-à-dire
la réunion en un grand tableau composé de seize planches principales, ré-
parties sur quatre rangs. Quelques feuilles supplémentaires seront, en outre,
consacrées aux faubourgs, et disposées de manière qu'on puisse les rap-
procher des feuilles principales dont elles présenteront le numéro, avec ad-
jonction du mot bis.
Le plan de restitution, étant le résultat d'un travail analytique destiné à pians d'époques.
faciliter l'intelligence du texte par la détermination des emplacements et
des contours, ne comporte pas de renseignements chronologiques, sauf la
distinction entre la période ancienne et la période moderne. Quant à la repré-
sentation en plan de la Ville, prise à diverses époques, elle sera l'objet de
planches spéciales, où figureront, en même temps que le réseau des rues,
les monuments et les enceintes qui existaient à un moment donné. Ces plans
l,) Verniquet, architecte et commissaire-voyer grand atlas, travail excellent, qui a servi de base
à Paris, dressa, de 177& à 1791, un plan géo- aux plans publiés depuis cette époque,
métrai de la capitale, en soixante et douze feuilles
xx TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
d'époques, réalisation sérieuse des projets de nos devanciers, atteindront un
haut degré d'exactitude, parce qu'ils procéderont du travail d'analyse dont
nous venons de parler et d'une recomposition synthétique. Ainsi , par exemple,
ce n'est qu'après avoir compulsé soigneusement, un à un, les dossiers de
toutes les maisons de la Cité, que nous avons pu deviner la situation des
ruelles Portebûche et de la Licorne; et, si nous n'avions pas dépouillé minu-
tieusement tous les titres relatifs à la rue de Beauvais, ce qui nous a pro-
curé une cote importante (,), il nous eût été impossible de retracer avec
précision la clôture septentrionale du Louvre.
Les plans d'époques seront au nombre de quatre; le premier montrera ce
qu'était Paris à la fin du xme siècle, le dernier en figurera l'aspect vers 1610.
Ces deux limites se justifient d'elles-mêmes : avant le règne de Philippe le
Bel, la topographie de la capitale se dessine d'une manière imparfaite et
présente de très nombreuses lacunes; l'année de la mort de Henri IV est,
d'autre part, le terme naturel auquel il convient de s'arrêter, car moins d'un
demi-siècle après commence, par le plan de Gomboust, la série des travaux
graphiques vraiment dignes de confiance.
illustrations On regrettera peut-être que nous n'ayons pas représenté Paris à vol d'oi-
l'ouvrage, seau, comme l'a fait Bretez(2) sur le plan dit de Turgot; mais rien n'est
moins facile quand on veut opérer avec précision, car les titres ne contiennent
aucune donnée sur la disposition architectonique des maisons. Nous avons
restitué un panorama des quais du Louvre et des Tuileries sous Louis XIII (voir
page 317), parce qu'un concours exceptionnel de circonstances en a fourni
les éléments; mais il est bien peu probable que l'on ait plus tard les moyens
de faire quelque autre tentative de ce genre. Comme compensation, l'ou-
vrage sera illustré de toutes les vues du Vieux Paris qui ont quelque valeur.
La plupart seront reproduites en fac-similé , procédé qui est généralement
le meilleur, puisqu'il préserve des interprétations douteuses; néanmoins,
"> Voir page 157. Paris, qui fut gravé par Claude Lucas et écrit
m Bretez, dessinateur-géographe, lit, en 1734, par Aubin. Ce plan parut en 1787; il comprend
marché avec le Bureau de la Ville pour «lever et vingt planches. (Voir Y Introduction à Y Histoire gé-
~ dessiner en proportion et élévations un plan de nérale de Paris, p. j 53.)
PRÉFACE. xxi
quand nous avons été certain de corriger avantageusement les défauts des
modèles, nous n'avons pas hésité à le faire, en ayant soin d'indiquer les
parties restées à l'état d'hypothèse. La monographie du Louvre, par exemple,
contiendra tous les documents graphiques sur lesquels reposent les thèses
soutenues dans le texte, ou qui donnent une idée de Y état ancien de l'édi-
fice ; mais les constructions qui sont demeurées intactes n'y figureront point.
Ce système sera suivi dans tout l'ouvrage, car il s'agit d'exhumer le passé
et non de reproduire ce qu'on peut facilement constater. Parmi les sujets
auxquels se rapportent les vingt-deux gravures de ce premier volume, seize
étaient ou ignores ou entièrement inédits, et quelques-uns, comme le dessin
de i5y4(1), constituent des curiosités rarissimes. La proportion sera à peu
près la même pour les volumes suivants. On nous permettra, pour rendre
un juste hommage aux artistes qui exécutent nos planches, de faire observer
qu'elles n'ont rien de commun avec les images dont on illustre ordinaire-
ment les livres publiés sur Paris; plusieurs d'entre elles sont de véritables
chefs-d'œuvre de précision et de gravure.
En histoire, plus qu'en toute autre science, il est impérieusement néces- Méthode suivie
1 • ai i • • par l'auteur
saire de ne rien accepter sans contrôle, et cest pour avoir méconnu ce pnn- et
esprit de cri tique
cipe que les auteurs des livres sur Paris ont perpétué tant de méprises. appliqué
Vérifier les assertions de nos devanciers, en recourant aux documents ori-
ginaux, a donc été constamment notre règle de conduite. Sachant aussi
combien il est imprudent de conclure d'après des apparences, quelque spé-
cieuses qu'elles soient, nous poussons, jusqu'à l'exagération peut-être,
l'emploi des formules dubitatives. Nous faisons plus encore : nous trans-
crivons, chaque fois qu'il n'y a pas d'inconvénient, les textes mêmes sur
lesquels reposent nos assertions, et nous citons avec soin nos autorités,
particulièrement s'il s'agit de combattre des opinions contraires aux nôtres.
Quant à indiquer par le menu la totalité des sources où nous avons puisé
pour dresser la nomenclature des maisons, c'eût été un travail stérile et re-
(l) Voir page 168.
à l'ouvrage.
\xu TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
butant. Il est en effet de nombreuses propriétés sur lesquelles assez de titres
existent pour que chacune motive plusieurs lignes de notes. Or, pour être
conséquent, il eût fallu tout rapporter, et alors la moitié de chaque page
aurait été composée de renvois, où les numéros de certains registres se se-
raient répétés avec une fatigante monotonie.
Un livre de science n'a de raison d'être que s'il réalise un progrès incon-
testable sur ceux qui l'ont précédé. Pénétré de cette pensée, nous nous
sommes voué exclusivement à l'œuvre de restitution qu'il fallait accomplir
pour faire un livre qui pût être regardé comme définitif. Nous nous sommes
donc imposé la loi d'épuiser toutes les sources et de ne nous arrêter que
lorsque les indications faisaient absolument défaut. Favorisés par le hasard,
des chercheurs découvriront sans doute après nous quelques pièces nou-
velles; toutefois le nombre en sera peu considérable comparativement à la
multitude des documents que nous avons consultés et dont le chiffre est
déjà incalculable.
Maintenant nous a-t-il été donné d'accomplir réellement ce que nous
avons voulu faire? Avons-nous réussi dans la tâche que nous nous étions
imposée? C'est au lecteur d'en juger. Nous lui demandons simplement de
ne se prononcer qu'en connaissance de cause, c'est-à-dire après avoir atten-
tivement examiné notre travail et l'avoir comparé aux travaux du même
genre.
Conclusion. Nous ne terminerons pas cette longue préface sans témoigner notre recon-
naissance pour les précieux encouragements qui nous ont soutenu dans la
carrière laborieuse où nous sommes entré. Nous dirons donc, et en premier
lieu, que nous avons les plus vives obligations à M. le comte de Laborde, di-
recteur général des Archives de l'Empire: il a bien voulu, en effet, prendre
l'initiative des recommandations qui ont attiré sur nos efforts l'attention de
M. le Préfet de la Seine. Parmi les autres savants dont nous nous faisons hon-
neur d'avoir obtenu les suffrages et reçu les conseils, nous citerons: feu Ben-
jamin Guérard , MM. le marquis de La Grange , Natalis de Wailly , Paulin Paris ,
Prosper Mérimée, Léopold Delisle, Jules Quicherat, E. Viollet-Leduc, qui
PRÉFACE. xxm
nous ont libéralement accordé leur appui et leurs conseils. Ne pouvant men-
tionner ici chacune des personnes dont les bons offices ont favorisé nos tra-
vaux, nous leur adresserons du moins à toutes les remercîments les plus sin-
cères. Nous en devons de tout particuliers à MM. Douët-d'Arcq , Boutaric et
Boisserand, archivistes aux Archives de l'Empire, ainsi qu'à M. Richard, con-
servateur adjoint à la Bibliothèque impériale, pour laide assidue qu'ils nous
ont donnée. Nous nous empressons de reconnaître aussi que M. L. M. Tisse-
rand, Secrétaire archiviste du Service historique de la Ville de Paris, appelé
à nous prêter son concours pour la revision littéraire du texte de cet ouvrage,
nous a, dans cette tâche aussi longue que minutieuse, fait amicalement pro-
fiter du secours d'une plume habile et exercée. Enfin nous ne saurions oublier
que M. Albert Lenoir accueillit autrefois l'idée première de ce travail, et
nous mit à même d'en commencer l'exécution, sous les auspices du Minis-
tère de l'instruction publique. Les sympathies que nous avons rencontrées
dès ce moment, les encouragements des Comités historiques, la haute appro-
bation de l'Institut, nous ont plus tard ouvert les portes de l'Hôtel de Ville
et assuré le patronage de l'Administration municipale : c'est dire que l'ou-
vrage avait enfin trouvé son plus solide appui, et l'auteur, la meilleure ré-
compense de ses longs et persévérants efforts.
RÉGION
DU LOUVRE ET DES TUILERIES.
I.
SOMMAIRES.
CHAPITRE PREMIER.
Paroisses, fiefs, quartiers, aspect général. — Circonscription des paroisses de la région. — Ses
divers fiefs. — Quartiers qui en ont fait partie. — Ses transformations 1
Pages.
CHAPITRE IL
Espace compris entre la rie des Poulies et la place du Carrousel. — Rue d'Autriche ou de l'Ora-
toire. Maison de la maréchale d'Ancre. Jeux de paume et guichet du Louvre. Grands hôtels de la
Rocheguyon et de Racqueville; d'Etampes ou d'Aumale; de Saint-Pol, d'Etampes. de Clermont et
Créquy ; d'Oslrevant; de Retz et de Conty. — Rue de Beauvais. Hôtel de Rostaing. — Rue du Petit-
Bourbon. — Rue Champ-Fleuri ou de la Bibliothèque. — Rue du Chantre. — Rue du Coq. Hôtel
du Bouchage. — Rue du Doyenné. — Quai de l'Ecole. Hôtel de Bourbon. — Rue Fromenteau.
Hôtels de la Roze et de Pontchartrain ; de Vendôme, de Chevreuse et de la Marche; de la Petite-
Marche; de Schomberg. — Rue Saint-Honoré, de la Croix-du-Tiroir ou du Château-Fétu. Mai-
son de l'Oratoire. Hôtel de Laval, de Vignolles et de Sillery. Hospice des Quinze- Vingts. — Rue
Jean-Saint-Denis ou Pierre-Lescot. — Quai du Louvre. — Rue Saint-Nicaise. Hôtel de Beringhen.
Chapelle Saint-Nicaise. Hôtel de Créquy et d'Elbeuf. Hôtel d'Uzès. — Rue des Orties. Hôtel de
la Petite-Bretagne, de Coupeau et de Matignon. — Rues de Matignon et Neuve-Saint-Thomas;
cul-de-sac du Doyenné. — Rue des Poulies. Hôtels de Combault; du Petit-Alençon , de Castellan
et de Retz ; du Grand-Alençon , de Villeroy , d'Anjou et de Longueville ; de Villequier et de Provence ;
de Garancières, de Nevers, de Villequier et d'Aumont; d'Alluye, de Cipières, de Conty et d'An-
givilliers. — Rue Saint-Thomas-du-Louvre. Eglise collégiale de Saint-Thomas. Hôtels de Torcy ;
d'O, de la Vieuville, de Chevreuse, d'Epernon et de Longueville; de Pisany et de Rambouillet.
Hospice, collège ou chapitre Saint-Nicolas-du-Louvre 7
CHAPITRE HI.
Origine du château du Louvre. — Opinions erronées des historiens à ce sujet. — Preuves que le
château du Louvre a été fondé par Philippe-Auguste, et s'appelait d'abord la Tour-Neuve. — Le
nom actuel de l'édifice provient du territoire sur lequel il a été construit. — Signification dou-
teuse du mot Louvre n3
xxviu TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
CHAPITRE IV.
Pages.
Histoire du vieux Louvre (1202-1527). — Impossibilité de faire une histoire monumentale du châ-
teau. — H renfermait un arsenal , et la Grosse-Tour servait parfois de prison. — On y établit la
bibliothèque du Roi. — Châtelains ou capitaines 1 a3
CHAPITRE V.
Description ou vieux Louvre et des fortifications voisines. — Grosse-Tour. — Quadrangle. Il était
d'un tiers moins grand qu'on ne le croit. Démonstration de ses dimensions. — Fossés, tours et
portes; identité des tours de la Taillerie, de la Fauconnerie, de la Librairie, etc. — Le grand
escalier. Renseignements biographiques sur Raymond du Temple. — Intérieur des bâtiments. —
Grand jardin et ménagerie. Petit jardin. — Basses-cours et Artillerie. — Maison de l'Engin. —
Enceinte de Philippe-Auguste; son emplacement exact. — Première porte Saint-Honoré. —
Porte du Louvre. — Tour du Coin ou Jehan-de-Lestang. — Courtine du bord de l'eau. Guichet
et port du Louvre. — La Porte-Neuve et la tour de Bois. — Quai du Louvre. — Rue des Orties.
— Enceinte de Charles V. Contrescarpe élevée en i58i. — Deuxième porte Saint-Honoré. —
Comptes des dépenses faites au Louvre par Charles V, de 1 36a à 1 37 1 199
CHAPITRE VI.
Le Louvre sous François I" (1627-1547). — François I" ne songe d'abord qu'à restaurer le vieux
Louvre. — En 1597, il demande qu'on construise un nouveau quai pour remplacer celui qu'il
réunit à la basse-cour du château. — Il démolit la Grosse-Tour, fait bâtir des jeux de paume et
disposer la cour des cuisines. — Travaux pour la réception de Charles-Quint en i53o,. — Réso-
lution de réédifier complètement le château. — Sébastien Serlio et Pierre Lescot. — Notice bio-
graphique sur ce dernier. — Il est nommé officiellement architecte des constructions nouvelles
en i546, et c'est vers cette année seulement qu'on commence les travaux 901
CHAPITRE VII.
Le Louvre sous Henri II ( 1 5/17-1 55g ). — Plans adoptés par Henri IL — Pierre Lescot est confirmé
dans ses fonctions. — Aile occidentale; ses inscriptions: salle des Caryatides. — Lescot auto-
risé à modifier ses projets et à procéder aux démolitions nécessaires pour les effectuer. — On lui
alloue 1,200 livres de gages. — Chiffres de Henri II et de Catherine de Médicis ffl. — Distribution
intérieure du nouveau bâtiment. — Le pavillon du Roi. — Entrepreneurs des travaux du palais ;
artistes qui les exécutent. Notice biographique sur Jean Goujon. — Paul-Ponce Trebatti a-t-il pris
part aux sculptures de la cour ? — Comptables des travaux. — Comptes des dépenses faites sous
le règne de Henri II, de i555 à i556 219
CHAPITRE VIII.
Le Louvre sous François II, Charles IX et Henri III (1559-1589). — Détermination des parties
construites sous Charles IX. — Les sculpteurs Pierre L'Heureux, François L'Heureux, Martin Le
Fort, Pierre Nanyn, Jean Tacet ou Tacquet et Etienne Cramoy. — Distribution intérieure de la
nouvelle aile méridionale. — Lacune dans les comptes. — Résumé de ceux qui s'étendent de
1 56o a i568. — Origine delà Petite et de la Grande-Galerie du Louvre. — Elles ont été bâties à
SOMMAIRES. xxix
Pages.
deux reprises. , — Ce qui motive l'aspect actuel de la Petite-Galerie. Balcon dit de Charles IX. —
Renseignements biographiques sur Pierre Chambiges, premier architecte de la Petite-Galerie. —
Salle des Antiques. — Renseignements biographiques sur Thibaut Métezeau. — Travaux qu'on doit
attribuer à Henri III. — Il prend pour architecte Baptiste Androuet Du Cerceau. Notice sur cet
artiste. — Le grand jardin bouleversé 269
CHAPITRE IX.
Espace compris entre l'enceinte de Charles V, la rde Saint-Honoré , l'enceinte bastionnée et la
Seine. — Rue de l'Échelle. — Terrain de la place du Carrousel. Hôtels de La Vallière; d'Ar-
magnac ou de Brionne. — Rue Saint-Honoré (partie s'étendant de la rue Saint-Nicaise à la rue
Royale). — Rue Saint-Louis. — Marché des Quinze-Vingts. — Clos des Quinze- Vingts ; ses limites
restituées. — Rue du Dauphin ou Saint- Vincent. — Rue Saint-Honoré (continuation). Hôtels de
Foix, Pussort, d'Armenon ville et de Noailles. — Couvent des Feuillants; passage de ce nom. —
Couvent des Capucins. Hôtel de la Trémouille, de Joyeuse ou du Bouchage. Couvent de l'As-
somption. — Rues de l'Orangerie et Saint-Florentin 377
CHAPITRE X.
Qcai des Tuileries. Enceinte bastionnée. Emplacement du château et du jardin des Tuileries. —
Quai des Tuileries. Pêcheries. — Fondation de l'enceinte bastionnée ; sa situation ; son tracé. —
Porte de la Conférence. — Troisième porte Saint-Honoré. — La Garenne ; le jardin de Regnard.
— Les vieilles Tuileries. Le clos de Moucy ; le clos Maudole. Les terres de Jean Le Gendre et de
Simon de Neufville. — François I" acquiert la maison des Tuileries. — Elle est donnée viagère-
ment à Jean Tiercelin. — Acquisition de toutes les [propriétés de la famille de Neufville par Ca-
therine de Médicis 3 17
APPENDICES.
I. Tableau de Saint-Germain-des-Prés et retable du Palais de Justice i»
H. Hôtel de Bourbon ««'
III. Hôtel d'Alluye m
IV. Hôtel de Chevreuse vit
V. Fragment de l'enceinte entre la Tour de Bois et la porte Saint-Honoré vii
VI. Emplacement de la seconde porte Saint-Honoré ix
VIL Statue de Vulcain au Louvre xi
VIII. Travaux de Pierre Lescot et de Jean Goujon au Louvre xi
IX. Epoque de la mort de Jean Goujon xi
X. Appartements du Louvre , sous Louis XIII xi
XI. Petite Galerie du Louvre ■ xii
XXX
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
PLANCHES.
Pages.
I. La région dd Louvre et des Tuileries en 1609, d'après le Plan de François Quesnel 7
II. Vue de l' arche d'Autriche. — Plan des restes de l'hôtel de Bourbon 3 a
III. Plan de l'hospice des Quinze-Vingts, avant la reconstruction de 17 48, à la fin du
xvii' siècle 67
IV. Vue intérieure de l'hospice des Quinze- Vingts (Fac-similé d'une gravure d'Israël Sylvestre).
— Plan de l'église et de la chapelle Saint-Nicaise. — Sceau de la communauté 68
V. Vues de l'église Saint-Nicolas-du-Louvre pendant sa démolition. — Sceaux et contre-sceaux
du collège Saint-Nicolas et du chapitre Saint-Thomas 111
VI. Plan restitué du vieux Louvre 129
VII. Vue du Louvre dans la seconde moitié du xvi° siècle (Fac-similé réduit d'un dessin de Jacques
Cellier). — Plan d'un des jeux de paume du Louvre en i555 i34
VIII. Les environs du Louvre vers l'orient, d'après un plan manuscrit de la seconde moitié du
xvi* siècle, provenant des Archives de Saint-Germain-l'Auxerrois 1 34
IX. Vues du Louvre, d'après les plans de la Tapisserie, de Du Cerceau, de Mérian et de Gom-
boust i38
X. Vue du Louvre et de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, au commencement du xvi* siècle,
d'après un tableau provenant du monastère et conservé aujourd'hui au Musée 166
XI. Vue du Louvre et de la porte de Nesle, au milieu du xv* siècle, d'après le retable du Palais
de Justice 1 4g
XII. Vue des quais de la rive droite, depuis la Porte-Neuve jusqu'au pont aux Meuniers (Fac-
similé d'un dessin portant la date de i57&) 169
XIII. Vue de la Porte-Neuve, d'après Israël Sylvestre 171
XIV. Plan des substructions aux environs de la Porte-Neuve 173
XV. Signatures de divers architectes du Louvre et des Tuileries (Pierre Lescot, Philibert Dé-
forme, Pierre Chambiges, Thibaut et Louis Métezeau) 208
XVI. Plan restitué du Louvre de la Renaissance, étage inférieur 228
XVII. Plan restitué du Louvre de la Renaissance, étage supérieur 229
XVIII. Plans comparatifs de la Petite-Galerie du Louvre, dans son état primitif et à la fin du
XVII* SIÈCLE 261
XIX. Vue de la Petite-Galerie du Louvre vers i65o (Fac-similé d'une gravure d'Israël Sylvestre) 262
XX. Elévation panoramique (restituée) des quais du Louvre et des Tuileries, sous le règne de
Louis XIII 317
XXI. Vue de la porte de la Conférence, d'après Israël Sylvestre et Pérelle 32i
XXII. Vue de la porte Saint-Honoré , au milieu du xvii' siècle (Fac-similé d'une gravure d'Israël
Sylvestre) 3a4
SOMMAIRES.
BOIS GRAVÉS.
Pages.
I. Sceau de la Prévôté des Marchands, en i 4 1 a Frontispice.
II. Profil d'une moulure de l'ancienne muraille du Louvre i3i
III. Scbau de Raymond du Temple i5i
IV. Disposition des Pavillons des Jardins du Louvre i58
V. Chiffres de Henri II et de Catherine de Médicis 227 et 228
VI. Chiffre de Charles IX a5o
VII. Armes de la famille Chambiges 265
VIII. Chiffre de Henri IV 269
IX. Marque de tâcheron sut un moellon trouvé dans les fondations du mur méridional de la
Galerie du Louvre. ( Appendices. ) viii
X. Substructions de la seconde porte Saint-Honoré. (Appendices.) ix
PLAN DE RESTITUTION.
Au présent volume se rattachent deux feuilles du Plan de restitution , portant les numéros V et V bis.
(Voir la Préface, page xix.)
TOPOGRAPHIE
*
HISTORIQUE
DU VIEUX PARIS.
RÉGION
DU LOUVRE ET DES TUILERIES
COMPRISE
ENTRE LA RUE DES POULIES (DU LOUVRE), LA RUE SAINT-HONORÉ,
L'EMPLACEMENT DES CHAMPS-ELYSÉES ET LA SEINE.
CHAPITRE PREMIER.
PAROISSES, FIEFS, QUARTIERS, ASPECT GÉNÉRAL.
A l'époque où la topographie du vieux Paris commence à se dessiner, c'est-à-
dire vers le milieu du xne siècle, la région suburbaine presque tout entière se
dérobe encore à nos regards; toutefois la partie de cette région où fut construit le
château du Louvre ne tarde pas à sortir de l'obscurité. Elle apparaît en effet vers
l'avènement de Philippe-Auguste, et il est possible d'entrevoir l'aspect qu'elle
offrait alors. Soumise, comme tout le reste de la Ville, à une juridiction d'abord
religieuse et féodale, puis municipale, elle eut ainsi ses paroisses, ses fiefs, et plus
tard ses quartiers. 11 convient de dire ce que nous savons de ces diverses cir-
conscriptions, et d'esquisser la physionomie générale du territoire, avant d'en
aborder la description détaillée.
En ce qui concerne la division paroissiale, tout l'espace situé entre la Seine
et la rue Saint-Honoré dépendait originairement de l'église Saint-Germain-
l'Auxerrois. Cet état de choses a subsisté jusqu'au 3o juin 1 633 , où une sentence
archiépiscopale assigna définitivement à la paroisse Saint-Roch le terrain situé
2 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
au nord du jardin des Tuileries, depuis le mur de Charles V jusqu'à la fortifi-
cation de Charles IX : il y avait déjà une cinquantaine d'années que l'église Saint-
Roch servait de succursale à l'église Saint-Germain-l'Auxerrois , pour les habitants
du faubourg Saint-Honoré. Naguère la répartition paroissiale était la même
qu'en 1 633; mais elle a subi récemment quelques modifications.
Au point de vue des circonscriptions féodales, sur le terrain que nous nous
proposons de décrire on comptait d'abord quatre fiefs principaux, et bien carac-
térisés. Le premier, en procédant de l'est à l'ouest, était celui de l'église Saint-
Germain-l'Auxerrois. Le second appartenait au prieuré Saint-Denis de la Chartre;
il était contigu au premier, et avait en quelque sorte pour axe la rue d'Autriche.
Le troisième, dit le fief de Fromentel, traversé par la rue de ce nom et mouvant
du Roi, constituait une enclave dans le quatrième. Ce dernier était beaucoup plus
vaste et s'étendait jusque sur l'emplacement des Champs-Elysées; il avait été, de
temps immémorial, possédé par l'évêque de Paris, lorsque, le 28 août 1687,
Louis XIV en fit acquisition à titre d'échange. H comportait la voirie et la haute
justice, à l'exception du rapt et du meurtre, dont la connaissance était réservée
aux officiers du Roi.
Le fief de Saint-Germain-l'Auxerrois, aussi ancien peut-être que la fondation
de cette église, en entourait le cloître et comportait aussi le droit de haute jus-
tice. Limité au nord par la rue Saint-Honoré, il s'étendait, vers l'ouest, jusqu'au
milieu de l'îlot compris entre la rue d'Autriche et la rue des Poulies. La portion
située au delà de cette dernière rue est sans doute restée en culture fort tard ;
mais, au commencement du règne de Saint-Louis (et il n'en est pas question au-
paravant), elle se montre déjà presque complètement bâtie.
Le fief de Saint-Denis de la Chartre, dont l'origine n'est pas relatée dans les
archives de ce prieuré (l), a subi des modifications importantes par la création du
château du Louvre, qui en a absorbé un fragment, ainsi que par la construction
de l'enceinte de Philippe-Auguste. Ce fief était vraisemblablement borné d'abord
par la rue du Coq. Il est à supposer que la rue, à l'état de chemin, se pro-
longeait jusqu'à la rivière , et que la construction du Louvre et des murailles de
la Ville en supprima l'extrémité méridionale. La même circonstance donna lieu
au percement d'une voie nouvelle, la rue d'Autriche, qui coupa en deux la
pièce de terre de Saint-Denis de la Chartre, et fut rigoureusement alignée sur
la fortification.
Le fief de Fromentel était, au commencement du xme siècle, une propriété
particulière. Au mois de novembre 1 2 2 3 , Perrette la Jardinière , voulant fonder
(1> Lebeuf dit que ce fief était min délachement cèse de Paris, tome I, page lu); cela est bien
rrdu fonds de l'Evêché, cédé autrefois au chapitre probable ; néanmoins Lebeuf n'émet là qu'une
ftde Saint-Denis de la Chartre» (Histoire du dio- hypothèse.
PAROISSES, FIEFS, ETC. 3
une prébende dans l'église Saint-Honoré , en gratifia cette collégiale , à la manse
commune de laquelle il fut uni, le 1 1 janvier 1670, par suite d'une transaction
entre les chanoines du lieu et le titulaire de la prébende, Guillaume Jacquet W.
Le fief de Fromentel relevait du Roi, et ne comportait que la censive, la saisine,
les lods et amendes ; il avait pour axe , nous le répétons , la rue à laquelle il em-
prunta ou donna son nom. Ainsi qu'on le reconnaît par des procès-verbaux
d'experts, dressés en 1 578 et 1626, il occupait la moitié de la largeur de chacun
des îlots que la rue séparait ; les murs mitoyens entre les maisons des rues Pierre-
Lescot et Fromenteau ont fourni jusqu'à nos jours la preuve de ce fait. L'îlot
compris entre les rues Fromenteau et Saint- Thomas-du-Louvre présentait aussi
beaucoup de traces de l'ancien lotissement, commandé par les limites du fief;
mais, de ce dernier côté, l'agencement originaire s'était déjà modifié à une époque
assez reculée.
Le fief de l'Evêque, dans lequel les trois autres étaient en quelque sorte en-
clavés, avait une étendue considérable et remontait pour le moins au temps de
Louis le Débonnaire'2'. Au delà du Louvre, il consistait en une réunion de terres
cultivées qui furent peut-être appelées la Culture-? Évéque, mais dont on ne ren-
contre pas, comme pour la culture qui était voisine du territoire de Ghampeaux,
d'indications antérieures au xme siècle. En revanche, on peut citer une habitation
seigneuriale qui s'y trouvait sous le règne de Louis le Jeune : le manoir de la
Petite-Bretagne, sur les dépendances duquel fut fondée l'église Saint-Thomas-
du-Louvre, vers 1 180. Si ce manoir n'était point isolé alors, suivant toute appa-
rence il n'était accompagné d'aucune autre maison de quelque importance , et le
terrain n'avait pas encore perdu son aspect champêtre.
Aux quatre fiefs dont nous venons de parler sont venus se joindre, avec le
temps, trois autres fiefs moins importants et assez mal définis. Le premier se
composait de la zone de terrain occupée par l'enceinte de Charles V. Implanté au
xivc siècle sur le fonds de terre de l'Evêque, il s'effaça lorsque disparut la fortifi-
cation <3), dont l'emplacement fit ensuite partie de la censive du Roi ou plutôt du
(11 Arch. de Saint-Honoré. Le fief de Fromentel
est le même que la censive Damiani Canetarii, qui
renfermait certaine maison contiguë au mur du
Louvre et située entre les rues de Richebourg (du
Coq) et de Fromenteau; il en est parlé dans une
charte du a3 septembre 1 2 96. ( Cartulaire de Notre-
Dame, t. III, p. a 2 5.) Damiens Canetarius doit
être le chanoine à la prél«nde duquel le fief était
attaché.
(ï) Conf. la charte du 19 oct. 820. (Cart. de N.
D., t. I, p. 260.)
m La Ville avait la propriété de ses fortifications ,
par suite d'un don royal. Au commencement du
■m* siècle, elle rétrocéda au Roi la portion de l'en-
ceinte de Charles V qui s'étendait de la Porte-Neuve
à la Porte Saiut-Honoré, et qu'on se proposait d'a-
battre pour les travaux du Louvre. Nous lisons,
dans un jugement rendu par le Bureau de la Ville.
à la date du 6 avril 1 (>i6, la phrase suivante, re-
lative à cette même partie de l'enceinte : * Attendu
frla remise que nous en avons faicte au Boy pour
«fl'effect du grand dessaing du Louvre.»
à TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
domaine royal des Tuileries. Les deux autres consistaient dans le crpourprisu de
chacune des collégiales Saint-Nicolas et Saint-Thomas-du-Louvre ; les terrains, qui
provenaient d'un morcellement du fief épiscopal, formèrent à la longue, et par
suite de leur amortissement, deux petits fiefs, de telle sorte que les chapitres de
Saint-Nicolas et de Saint-Thomas comptèrent parmi les seigneurs censiers de
Paris W.
H nous reste à parler des quartiers, circonscription beaucoup moins ancienne
que les paroisses et les fiefs'2'.
Des chartes de 122a et 12 5g mentionnent un vieux bourg Saint-Germain'3'; on
en distinguait donc un nouveau, sans doute le faubourg Saint-Germain-l'Auxerrois ,
qui fut créé sous Philippe-Auguste, et a fait partie du quartier Saint-Germain-
l'Auxerrois, dont la limite devait être l'enceinte de Charles V. Immédiatement en
dehors de l'enceinte, commençait le territoire de la Ville-l'Évêque , dont la partie
la moins distante de Paris fut plus tard une annexe du quartier Saint-Honoré ou
du quartier Saint-Germain. Ce dernier étant devenu trop considérable, l'édit
du 12 décembre 1702, relatif à une nouvelle circonscription des quartiers, le
divisa en deux parties , dont la première conserva le nom de quartier Saint-Germain-
l'Auxerrois, autrement du Louvre, et la seconde, séparée de l'autre par la rue
Fromenteau, fut appelée quartier du Palais-Royal. Par les lois des 27 juin 1790,
1 1 novembre 1795, et en vertu d'un arrêté préfectoral du 10 mai 1811, Paris
ayant été divisé en municipalités ou arrondissements composés chacun de quatre
sections ou quartiers, le fragment du quartier du Palais-Royal situé au midi de
la rue Saint-Honoré a été nommé quartier des Tuileries, et attribué au premier
arrondissement. La partie du quartier du Louvre, pareillement située au midi
de la rue Saint-Honoré, et classée dans le quatrième arrondissement, a été frac-
tionnée en deux quartiers, dont le premier a gardé l'ancienne désignation, à la-
quelle on substitua celle de quartier du Muséum, de 1793 à 1812; le second,
compris entre l'ancienne place de l'Oratoire et la rue Saint-Honoré, a été appelé
(l' Conf. Du Breul [Théâtre des Antiquitez de
Paris, p. 1081), et Sauvai (Hist. et recherches des
antiquités de la ville de Paris, t. II, p. 4a 2 et 699).
(2) La question de l'origine des quartiers de
Paris est fort mal connue , et les historiens qui en
admettent l'existence au x" siècle se sont assuré-
ment trompés. Nous croyons que les paroisses ont
très longtemps tenu lieu de quartiers ; ainsi , au
commencement du xiv' siècle, la perception de la
taille, opération qui n'avait rien de commun avec
l'autorité ecclésiastique, se faisait non par quartiers,
mais par paroisses et subdivisions de paroisses. De
fait, on ne constate l'existence avérée des quartiers
qu'an milieu du xiv* siècle, et les quarteniers ne
figurent point auparavant. La division en quartiers
était une organisation militaire , à laquelle les Pari-
siens songeaient peu, puisque, même au temps de
Henri IV, lorsqu'on voulait aider à retrouver une
rue, c'était toujours la paroisse qu'on indiquait.
Enfin les titres de propriété mentionnent fréquem-
ment la paroisse, et jamais le quartier. Nous traite-
rons ailleurs avec plus de détails cette question des
quartiers, qui est tout entière à éclaircir.
(3> Cartulaire de N. D., 1. 1 , p. 1 2 h , et t. III , p. h.
PAROISSES, FIEFS, ETC. 5
quartier Saint-Honoré , après avoir été nommé, de 1790 à 1792, quartier de
l'Oratoire, et de 1792 à 1816, quartier des Gardes-Françaises. Depuis le décret
impérial du ier novembre 185g et l'arrêté préfectoral du 3 de ce mois, le même
territoire dépend du premier arrondissement et forme le quartier Saint-Ger-
main-1'Auxerrois , plus une partie des trois quartiers des Halles, du Palais-Royal
et de la place Vendôme.
Nous avons énuméré les différentes circonscriptions entre lesquelles étaient
répartis les environs du Louvre; l'aspect général que cette région a successivement
présenté est plus difficile à préciser. Et d'abord les éléments nécessaires pour res-
tituer la disposition du terrain manquent absolument avant le règne de Philippe-
Auguste. On est à peu près certain qu'il n'y avait alors aucun chemin entre la
rue Saint-Thomas et le lieu où est aujourd'hui la place de la Concorde, car il en
était encore ainsi au xive siècle ; mais on ne saurait dire si les rues Saint-Thomas
et Fromenteau existaient antérieurement à 1 180. La première pourrait n'avoir été
ouverte que vers l'an 1210, afin de séparer Saint-Nicolas de Saint-Thomas-du-
Louvre; la seconde semble beaucoup plus ancienne, sans qu'il soit possible de
rien affirmer à cet égard. Au contraire, il nous paraît hors de doute que l'ouver-
ture des rues Jean-Saint-Denis, du Chantre, Champ-Fleuri et de Beauvais, fut
la conséquence de l'établissement du Louvre. Ces rues étaient trop rapprochées
les unes des autres pour qu'on les fasse( dater du temps où la charrue sillonnait le
terrain ; la rectitude de leur alignement démontre d'ailleurs qu'elles furent percées
à une époque relativement récente W, Aussi bien est-il évident que ce percement
avait eu lieu dès les premières années du xmc siècle, car on rencontre en 1221
une mention de la rue du Chantre, l'une des moins importantes, et l'on observe
même que des maisons y étaient déjà bâties. Philippe-Auguste , n'étant mort qu'en
i2a3, a donc pu, du haut des tours de son Louvre, contempler, au pied du
château, tout un quartier nouveau dont les constructions, moins denses et moins
élevées qu'on ne les a vues depuis, étaient cependant assez nombreuses pour ne
laisser apparaître l'ancien sol en labour que par de rares solutions de continuité.
Sous Philippe le Bel, les environs du Louvre, ou faubourg Saint-Germain-
l'Auxerrois <2>, étaient peuplés et florissants jusqu'à la hauteur de l'hospice des
Quinze- Vingts, près duquel se trouvaient plusieurs clos et tuileries. Bientôt toute
la région fut assez habitée pour qu'on dût la renfermer dans la nouvelle enceinte
de Charles V, événement qui eut pour résultat de changer la physionomie du
quartier et d'en augmenter la prospérité. Une fois enclos dans la Ville, les jardins
(l) Nous avons développé plus longuement cette m II s'appelait toujours ainsi vers l'an 1 4oo, et
dernière idée dans un article sur les rues de l'an- l'on disait encore le château du Louvre-lez-Paris
cien Paris, publié par la Revue archéologique (août en 1871, quoique l'enceinte de la Ville, qui devait
1857). renfermer le Louvre, fût déjà commencée.
6 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
et les nombreuses granges des îlots compris entre les rues d'Autriche et Saint-
Thomas cédèrent peu à peu la place à des bâtiments d'habitation. En i53o, par
exemple, une suite de maisons occupait l'emplacement du jardin de Saint-Ni-
colas, qui n'était point encore détruit en 1/189. Au ^e^ ^e 'a rue Saint-Thomas
et en deçà de la rue d'Autriche, la multiplicité des demeures seigneuriales empê-
cha la végétation de disparaître aussi vite; mais elle devint chaque jour plus clair-
semée, et, au xviie siècle, on n'apercevait plus que les jardins de quelques grands
hôtels, dont les uns ont été démolis pour l'agrandissement du Louvre sous
Louis XIV ou Louis XV, tandis que les autres, comme les hôtels de Ghevreuse et
de Rambouillet, ont subsisté jusqu'à ces derniers temps. Le long de la rue Saint-
Honoré, particulièrement, les maisons augmentaient rapidement en nombre, se
serrant les unes les autres de façon à n'occuper que le plus petit espace pos-
sible : ainsi, entre les rues du Coq et Champ-Fleuri, l'îlot n'ayant guère que
quarante-cinq mètres de largeur, n'offrait pas moins de neuf ou dix maisons en
bordure sur la rue Saint-Honoré, dès le milieu du xvc siècle. Quant aux environs
des Tuileries, sous le règne de saint Louis, il y avait déjà des fabriques de po-
teries sur l'emplacement du palais actuel ; mais tout le reste du terrain demeura
en culture jusqu'en i3q2, époque à laquelle le clos des Quinze-Vingts, longeant
la grande rue du faubourg, fut acensé à divers particuliers. On y bâtit alors des
maisons qui donnèrent la vie à ce quartier rustique. Il ne fut néanmoins bien
peuplé que dans la seconde moitié du xvie siècle, où il était réputé faubourg de
Paris. Le lieu où l'on a planté le jardin des Tuileries n'a jamais été qu'en nature
de terre labourable et de verger.
TOPOGRAPHIE HISTORIOJ/E DV VIEVX PARIS.
A. Berty dir,
E. Lebel se
LA REGION DV LOVVRE ET DES TVILERIES
EN 160g .
D'après le Plan de Fr. Quesnel .
RUE D'AUTRICHE.
CHAPITRE IL
ESPACE COMPRIS ENTRE LA RUE DES POULIES
ET LA PLACE DU CARROUSEL.
(Voir le Plan de restitution, feuille V.)
RUE D'AUTRICHE.
La rue d'Autriche commençait au quai de l'École et finissait à la rue Saint-
Honoré.
Le premier nom qu'elle ait porté paraît provenir d'un individu , qui , possédant
une maison en cet endroit, aurait été originaire du duché d'Autriche (1). Elle est énon-
cée, dans diverses chartes, vicus qui vocatur Oteriche en 12 5a, Oterriche en 12 56,
Hoteriche en 1255, Hoste-^riche en 1260, et encore en i3Ù2 et 1873. Mais, comme
pour nombre d'autres rues, le sens de l'appellation primitive a fini par s'obscurcir,
et, à la place d'un mot qu'on ne comprenait plus, on en a employé deux autres
dont la signification, très différente, était du moins claire pour tout le monde. On
a ainsi écrit successivement rue d'Osteriche ( 1 364), d Autheriche (1378), d'Auteriche
(1390), d'Autruche (1/121), d'Autriche (1619), d'Aultruche ( 1 5g6), de l'Autruche
(1 58o , 1 627), et enfin rue d'Autruche, dicte du Louvre, en 1 568 , puis rue du Louvre
en 1600. On a continué à dire rue du Louvre jusque vers 1 664, époque où une
moitié de la rue fut supprimée pour l'agrandissement du palais, et l'autre moitié,
celle du nord, prit le nom de rue de l'Oratoire, à cause de la congrégation qui s'y
établit en 1616. Au xvni6 siècle, la rue d'Autriche, que nous trouvons encore
appelée rue de l'Autruche en 1732 , devint une impasse, car elle fut fermée, à l'ex-
t milité voisine du Louvre, par une clôture qui disparut lorsqu'on commença à
aligner les abords du château de ce côté , en vertu de lettres patentes du 2 6 dé-
cembre 1758. La rue de l'Oratoire, de nouveau raccourcie par le percement de la
rue de Rivoli, a été élargie jusqu'à douze mètres par un décret du 3 mai 1 854 :
elle n'avait anciennement qu'environ deux toises et demie de largeur.
Au commencement du x\f siècle, la rue d'Autriche, dans la partie la plus rap-
(1) Nous avions d'abord pensé que cette appellation pouvait venir d'un individu qui aurait été connu
sous le nom de l'Hâte riche (Hospes dives) ; mais nous avons écarté cette première hypothèse.
8 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
prochée de la rue Saint-Honoré , renfermait plusieurs mauvais lieux, auxquels il
est fait allusion dans des rr lettres royaux t> dont il sera question plus loin. Ra-
belais cite, entre autres, les «lupanares de Bourbon (1).fl
CÔTÉ OCCIDENTAL (2).
PAROISSE SAINTGERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE DE L'ÉVÊCHÉ1".
CENSIVE DE SAINT-DENIS DE LA CHARTRE.
Chantier faisant le coin du quai (i&23-i54o) et aboutissant, comme toutes
les maisons du même côté de la rue, au mur d'enceinte de Philippe-Auguste W.
Au mois de janvier 1612, le roi Louis XIII donna à la maréchale d'Ancre
une place de cent quatre-vingt-dix toises de superficie, pour y bâtir une maison,
à la charge de l'abattre lorsqu'on entreprendrait de continuer le Louvre de ce
côté. Dans l'acte de donation, la place concédée est dite, «tenant \l'un costé au
(r jardin neuf de nostre dict chasteau, qui est près de la gallerie (le jardin qu'on
cra depuis appelé de l'Infante), d'autre costé à la descente de l'abreuvoir (situé
«en face de la rue d'Autriche), depuis la petite porte de la Cour des Marbres,
ftjusques et y compris la muraille regardant le quay; aboutissant d'un bout sur
rrledict quay, et d'autre à ladicte cour des Marbres avec une cour y attenant,
« de l'antienne muraille desdicts jardins (5). r> Cet emplacement faisait partie de celui
qu'avaient occupé l'ancienne porte du Louvre et le chantier formant le coin du
quai; dès la fin de l'année 1612, une maison y était construite, puisque le Roi
en délivra un brevet de jouissance, à la date du 29 décembre. La maison de la
maréchale d'Ancre se distingue sur une vue de la Petite- Galerie par Israël Sylvestre ,
et Tallemant des Réaux en fait mention dans son historiette de Concini : a H n'a
ff jamais logé dans le Louvre, dit-il; mais il couchoit souvent dans un petit logis
cr qu'on vient d'abattre, qui estoit au bout du jardin, vers l'abbreuvoir. A la vérité,
ce il y avoit un petit pont pour entrer dans le jardin , qu'on appeloit vulgairement le
«pont d' Amour ^.-n On sait que Concini passait pour l'amant de Marie de Médicis.
(1) Pantagruel, liv. II, ch. vi.
(,) Le système que nous avons adopté pour la
description des rues consiste, 1° à en considérer
comme ie commencement l'extrémité ia plus rap-
prochée, à vol d'oiseau, du portail de Notre-Dame;
3° à prendre pour point de départ la première
maison, à gauche, de façon à revenir à la première
maison de droite.
(3) Personne n'ignore que ce qui restait encore
des justices seigneuriales fut supprimé en 1676, et
que le Roi y substitua celle du Châtelet.
<4) Voir, pour l'emplacement de ce mur, la Des-
cription du vieux Louvre, ch. v, p. 1 34.
(5) Arch. de l'Emp. Cart. Q 1 171-1 172.
(6) Historiettes, 1. 1, p. 199 de l'excellente édition
de MM. P. Paris et de Montmerqué.
RUE D'AUTRICHE. 9
Suivant Sauvai, le pont d'Aumour aurait relié les appartements de la Reine au
jardin, sur lequel l'hôtel avait une porte de derrière.
Maison du Croissant ( 1 Zia3), à deux pignons.
Masure (162 5) appartenant au Roi, et apparemment contiguë à la porte ou
guichet du Louvre, car elle est dite, en un titre de 1626, située «près du pont
ff du Louvre. r>
Ainsi que l'indique un censier de i5io, c'est sur l'emplacement des deux mai-
sons précédentes que fut établi, en 1 53o , un des deux jeux de paume du Louvre,
celui dont l'emplacement, au commencement du xvnc siècle, se nommait h Cour
des Marbres, parce qu'il servait de lieu de dépôt pour les marbres destinés à la
décoration du château. Cette transformation du jeu de paume daterait du temps
de Charles IX , au dire de Sauvai ; cependant on trouve encore quelques mentions
des deux jeux de paume sous Henri III, et, en 1617, on désignait par le nom de
petit jeu de paume, celui qui était le plus près de la Seine, ou du moins l'empla-
cement qu'il avait occupé W.
Quant à la garde des marbres du Louvre, après avoir été confiée au nommé
.Nicolas Roulanger, elle fut donnée par le Roi, le 17 avril 1597, à son sculpteur,
Louis Lerambert, qui, le 3i juillet 1602, obtint aussi la garde des marbres des
Tuileries et de Saint-Germain-en-Laye , « ensemble la jouissance du petit jardin sur
ir l'eau, tenant à l'abreuvoir du Louvre, où estoit l'ancienne marbrière dont
ffjouissoit ledit Boulanger <2). n
Les jeux de paume, dont les dimensions seront indiquées dans la description
du vieux Louvre , étaient construits « en forme de baraque d et assez étroits par
rapport à leur longueur, comme on peut en juger par le plan que nous don-
nons de l'un de ces bâtiments. Ils semblent avoir été d'un aspect peu brillant à
l'extérieur; mais, à l'intérieur, ils étaient certainement décorés de sculptures;
parmi les acquits au comptant, se trouve un article du 17 janvier 1 533 , ainsi
conçu : «A Barthélémy Quétry (alias Getty), trois cens escus sol. (au soleil) pour
«deux patrons par luy faiz, où sont signées et painctz plusieurs histoires de presne
« (sic), satires et nimphes, que le Roy a fait demourer en la salle du jeu de paulme
«du Louvre'3'. n
Porte ou Guichet du Louvre. Ce guichet était à l'alignement des maisons voi-
sines; Lestoile l'appelle , en 1 57 h , a la grande porte qui est entre les jeux de paulme ,
«regardant vers l'hostel de Bourbon. n II en sera de nouveau question ailleurs.
(1) On lit dans les Mémoires de Fontenay-Ma- (i) Conf. un article de M. Lacordaire, ap. Arch.
reuil : "Le mareschal d'Ancre étant sorli de son lo- de l'art français , t. IV, p. 229. Dans des brevets de
"gis, il vint à pied le long des murailles du petitjeu 1612 et 1687, la demeure de Lerambert est dite,
rde paulme du Louvre. . . .La grande porte lui fut au contraire, rrau bout du grand jeu de paume.»
^ouverte, etc.» <3) Arch. de l'Emp. reg. J 960, fol. \k v*.
10 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Deux maisons sans désignation W (1/196), appartenant à l'Hôtel-Dieu, et sur
l'emplacement desquelles fut construit le second jeu de paume, qui ne disparut
entièrement qu'en i6g3.
Maison ou Masure (1^96) qui n'avait que a treize pieds de plafond -n dans
œuvre, sur sept toises cinq pieds «de long ou environ. n Cette seconde dimension,
quoique indiquée comme une longueur, doit s'entendre d'une profondeur, et con-
firme rigoureusement ce que nous dirons de celle des jeux de paume. La masure,
qui était «sans édiffice," fut donnée à bail à Antoine Hesselin le 5 mai 1 A96.
Maison sans désignation (i54o), appartenant à un nommé Geoffroy Bordier.
Maison sans désignation (i54o), appartenant à Florent Bataille, qui possédait
aussi, dans la rue du Coq, une maison dont pouvait dépendre celle de la rue
d'Autriche. L'absence de renseignements laisse un peu dans le vague ce point de
la rue d'Autriche, où était d'ailleurs certainement situé
L'HÔTEL DE LA BOCHEGUYON, depuis DE BACQEEVILLE, que Guy, seigneur
de la Bocheguyon, chambellan de Charles VI, vendit, vers la fin du xive siècle, à
Guillaume Martel, seigneur de Bacqueville, aussi chambellan de ce Boi. A cet
hôtel était annexé un jardin dont Charles VI se défit au profit de ce seigneur,
le 8 mars 1608, moyennant une rente de huit sous parisis. Dans l'acte de ces-
sion, l'hôtel est énoncé : «Un hostel assis en la rue d'Autriche lequel hostel
a avec un jardin contenant xxv toises de long et dix toises de lé ou environ, te-
«nant d'une part au long des vielz murs de nostre ville de Paris, et d'autre part
ce à la chaussée; aboutissant d'un bout devers l'ostel de nostre lingière, et de l'autre
rtbout à un petit jardin appartenant audit hostel, etc. <2'. Attenant au jardin s'éle-
vait «une tour ou millieu desdiz murs de Paris. -n L'hôtel de Bacqueville
figure dans les comptes de confiscation pour l'année 1&21, et est mentionné
comme tenant d'une part et aboutissant aux jardins du Louvre.
HÔTEL D'ÉTAMPES ou D'AUMALE. Le censier de l'Évêché, de 187,3, énonce cet
hôtel sous le nom de «la maison Charles d'Evreux, qui fu mons. d'Etampes. r>
Dans le legs fait en 1 399 à l'Hôtel-Dieu, par Louis, comte d'Etampes, de sa maison
de la rue d'Autriche, maison dont nous reparlerons plus bas, fut comprise une
«granche devant yceluy hostel, d'autre part la rue (du côté occidental), avecques
«les estables et autres édifices t> qui y étaient; «tenant d'une part à l'ostel de
« mons. le comte de Saint-Pol , et d'autre part à l'ostel de monsieur de la Boche-
«guyon.n Cette grange est la maison que désigne le censier de 1873, et, comme
l'hôtel situé du côté oriental de la rue, elle fut vendue, le 1" juin i6o5, à Jean Ier
de Bourbon, comte de Clermont. En 1/121, l'hôtel d'Etampes semble avoir été
!' Gela ne veut pas dire que ces maisons n'ont d'enseignes, circonstance qui fort souvent était le
jamais eu d'enseignes, cela signifie seulement que résultat d'une omission,
les titres relatifs aux maisons ne mentionnent point (,) Arch. de l'Emp. reg. J 1 63 , n" 829.
RUE D'AUTRICHE. 11
réuni à l'hôtel de Bacqueville, puisque, dans les comptes de la Prévôté pour cette
année, l'hôtel de Bacqueville est dit tenir à l'hôtel Saint-Pol. Cependant l'on
voit toujours, depuis, l'hôtel d'Etampes distinct de celui de Bacqueville, et il est
désigné ordinairement par son ancien nom.
Réuni à l'hôtel de la Bataille, situé rue du Coq, l'hôtel d'Etampes appartenait
an duc d'Aumale en i5y5; on lit dans le censier de l'Evêché pour cette année :
«Monsieur le duc d'Aumalle pour sa maison qui fut Charles d'Evreux et fut mous.
« d'Estampes, n En 1 60 3 , l'hôtel est dit appartenir à Charles de Balzac, seigneur de
Clermont d'Entragues. En 1616 et même en i65o, on l'appelait l'hôtel de Clèves,
parce qu'il avait été possédé aussi par Catherine de Clèves, duchesse douairière de
Guise, qui le fit rebâtir vers 161 3 et orner d'une galerie où figuraient les por-
traits de tous les princes, tant de la maison de Guise que de celle de Clèves et de
Nevers. «C'est cet hôtel, dit Sauvai, si renommé dans l'histoire du grand Al-
«candre, où cette princesse, nommée Dorinde, s'étoit retirée après le meurtre de
«son mari, et où la beauté ravissante de sa fille, appelée Milagarde, attiroit tous
«les grands de cette faction, et, de plus, tant d'autres personnes considérables,
«qu'on pouvoit dire avec raison que c'étoit là que la Ligue tenoit sa courW.n
Sauvai pourrait se tromper ici, car, nous le répétons, l'hôtel est dit au seigneur de
Clermont d'Entragues en i6o3, et nous n'avons pas vu qu'à la fin du xvie siècle
il appartint à la duchesse de Clèves. H est au contraire certain qu'elle le possédait
en 161 1 ; puisque, le 17 novembre de cette année, elle acheta, pour l'y réunir, la
moitié d'une maison sise rue d'Autriche et tenant à l'hôtel du Bouchage, ainsi
qu'il est rapporté dans un registre d'ensaisinement de l'Evêché. On lit dans le
Siij>i)lémenl aux antiquités de Paris <2' : « En la rue qui va du Louvre en la rue Saint-
« Honoré, madame la duchesse douayrière de Guise (Catherine de Clèves) fit bas-
rr tir ces 2 hostels de Clèves et d'Eu, tenans l'un à l'autre, environ l'an 161 3.»
On distinguait donc entre l'hôtel de Clèves et celui d'Eu ou d'Aumale; mais nous
ne savons pas ce qui motivait la distinction. Peut-être l'hôtel de Clèves propre-
ment dit occupait-il l'emplacement de l'hôtel de Bacqueville dont nous n'avons
pu suivre l'histoire, et qui aurait été réuni à celui d'Etampes. Ce dernier, dans
tous les cas, était au nord de l'autre.
Lu 1637, l'hôtel de Clèves appartenait à Claude de Lorraine, duc de Chevreuse,
auquel la duchesse l'avait donné, et il était habité par le surintendant des finances,
Bouthillier, qui y fit faire « un horloge sonnant; r> il fut ensuite acheté 90,000 livres
par le maréchal Antoine III de Gramont, qui le céda au Boi, le 1 7 mai 1 667, pour
la somme de 1 20,000 livres. L'hôtel d'Etampes ou de Gramont a subsisté, pour la
plus grande partie, jusqu'à l'époque où a été alignée la place de l'Oratoire.
(,) Sauvai, Antiquités de Paris, t. III, p. ag4. — (,)Mss.delaBibl.imp.fondsdeLancelot,n°7(jo5.
12 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation, qui, en i54o, appartenait à Madeleine de Fizes, et,
en i568, à Simon de Fizes, seigneur du Saulne. Elle existait encore dans la
seconde moitié du xvne siècle. Le 7 juillet 1610, elle avait été adjugée pour moi-
tié à la duchesse de Guise, qui en fut ensaisinée le 6 novembre 1612.
Des lettres royaux, du mois de février 1 5 1 9 , portent que Nicolas de Neuf-
ville, seigneur de Villeroy, a remontré au Roi qu'il a, depuis peu de temps,
fait bâtir, rue des Poulies, un a beau et somptueux logis et maison, court, jardin,
trestables, et autres aisances et appartenances; le derrière de laquelle maison et
«jardin répond en une petite rue nommée la rue d'Autriche, assise derrière la
a maison de Bourbon, où y a plusieurs petits porches et méchantes maisons où par
crcy-devant se tenoient femmes de méchante et dissolue vie, tenant bourdeau. Et
a pour autant que ladicte rue est à l'écart et le lieu peu fréquenté et habitué de
trgens, s'y retiroient rufïïens, paillards, larrons et aultres méchantes gens; entre
a lesquelles maisons il y a une maison et jardin de petite valeur, où pend pour en-
frseigne le Coq, que l'on dict appartenir au Roy ladicte maison tenant d'une
trpart audict de Villeroy, à cause de l'acquisition qu'il a faicte de Me Le Grand, pro-
cureur au Ghastelet, et d'aultre part à la basse-court et aultres maisons voisines
« acquises par ledict de Villeroy, lesquelles maisons il a l'intention de faire bastir
«et édifier, une partie pour la commodité de sa dicte maison et l'autre partie
«pour y faire loger gens de bienW.ii La maison du seigneur de Saulne était une
de celles qui avaient été acquises par Villeroy. Il l'avait donnée à son barbier
et à un autre de ses serviteurs; elle avait ensuite passé en la possession du père
du contrôleur Odeau, qui l'avait, à son tour, cédée à la dame de Fizes. Quant
aux autres maisons de Villeroy, ce doit être celles que nous avons indiquées avant
la grange de Charles d'Évreux. En 1627, un membre de la famille de Villeroy fut
condamné à payer vingt-neuf années d'arrérages du cens qu'il devait sur la mai-
son du Coq, énoncée dans la sentence comme tenant à la basse-cour du Louvre.
Nous n'avons rien découvert qui permette de déterminer l'emplacement exact de
cette maison; elle avait été donnée parle Roi à Nicole de Neuville, vers 1626.
HÔTEL SAINT-POL. Il eut pour origine une maison que le censier de 1873
nomme tria maison à la comtesse de Sancerre'2', qui fu au prévost de Bruges, et
<rà présent messire de Clermont ;n mais nous n'avons point recueilli, pour cette
période, d'autre document relatif à cette maison, si ce n'est qu'elle appartenait,
en 1 388 , à Marguerite de Clermont, dame de Montgobert, qui changea en une
rente de vingt-quatre francs parisis celle de six muids de blé, due au couvent
''' Sauvai, t. III, p. 61a, et Arch. de l'Emp. son erreur au censier de 1899, où on lit: rrLa
cart. Q 1172. frmaison au conle de Saint-Pol, qui fu Robert de
(,) Et non de Saintonge, comme il a été dit par- rSeniiz, et fu messire Clermont, et fuà la contesse
tout d'après Sauvai, qui avait lui-même emprunté 1» de Saintonge, et, avant, au prévost de Bruges. »
RUE D'AUTRICHE. 13
de Saint-Martin-des-Champs. La maison de la dame de Clermont en avait été grevée
l'an i32o, le jour de la fête de Saint-Denis, par Pierre de Chambly et Isabelle
de Rosny , sa femme M. Le 1 1 octobre 1878, Jean , seigneur de Menou et de Mont-
gobert, propriétaire de l'hôtel de Marguerite de Clermont, le vendit à Robert de
Senlis, bourgeois de Paris, et à Agnès sa femme, avec des masures et places vides;
le tout, faisant front sur la rue d'Autriche, tenait d'une part à la porte Saint-
Honoré, de l'autre au comte d'Etampes, et aboutissait vers l'ouest aux anciens
murs de la ville. Derrière ces murs s'étendaient des jardins dépendants de la
maison; ils étaient bornés au midi par la maison du Coq, à l'ouest par la rue de
ce nom jusqu'au coin de la rue Saint-Honoré inclusivement, et au nord par des
maisons en bordure sur cette dernière voie. Après avoir distrait de son terrain
une «r place t> de cinq toises et un pied de profondeur, sur laquelle fut construite
une maison donnant sur la rue du Coq, et tenant à une allée qui communiquait
de cette rue à la maison de la rue d'Autriche, Robert de Senlis vendit le reste,
le 19 février 189 5, au prix de i,5oo livres tournois, à Waleran de Luxembourg,
comte de Ligny et de Saint-Pol , et connétable de France <2>. La maison prit alors
le nom d'hôtel Saint-Pol, qu'elle a toujours conservé, même lorsque d'autres
appellations lui ont été également appliquées.
L'hôtel Saint-Pol appartenait, en 1629, à Guillemette de Besançon, veuve de
Pierre Pellieu, conseiller au Parlement. Le 8 juin, elle le céda à Louis Martine,
avocat du roi au bailliage du Palais, lequel en fut ensaisiné le 12 juillet. Après
la mort de celui-ci, ses héritiers divisèrent l'hôtel en deux parcelles. La partie
située sur la rue d'Autriche fut vendue, le dernier jour de février 1 537, à Charles
Le Comte, maître charpentier du Roi. Par une déclaration foncière qu'en fit son
(ils Jean, quartenier de la Ville, on voit qu'en i5g6 ce n'était plus qu'une simple
maison avec a place à faire chantier, 1? qui aboutissait au vieux mur d'enceinte ,
avait sept toises de profondeur, trente-sept de façade depuis le coin de la rue
Saint-Honoré, et était limitée, vers le Louvre, par une cr allée commune servant à
a aller de la maison de M. du Bouchage en ladicte rue d'Aultruche. » La maison
de M. du Bouchage était située au delà du mur d'enceinte, sur la rue du Coq, et
comprenait, sur la rue d'Autriche, un corps de logis dont la position demeure
douteuse. La seconde partie de l'ancien hôtel Saint-Pol, celle qui aboutissait à
la rue du Coq, fut vendue par Pierre, fils de Louis Martine, à Hélye Odeau, con-
trôleur de la maison du roi; suivant transaction passée avec la Ville le h mars
1 546, et renouvelée en 1 554 et 1 555 , Odeau obtint la propriété du mur d'en-
ceinte sur une longueur de treize à quatorze toises, avec une tour en dépendant.
Aux termes du contrat, l'acquéreur devait laisser au mur une épaisseur d'au moins
m Arch. de Saint-Marlin-des-Champs. — (,) Arch. de PEmp. cart. S io56.
l/i TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
un pied et demi, de manière à conserver une clôture entre sa propriété et celle
de Charles Le Comte. Cette dernière fut acquise, le 27 février 1619, par la com-
munauté de l'Oratoire. (\ oir Rue Saint-Honoré.) A l'encoignure de la maison, s'éle-
vait une tourelle en saillie.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'ATIXERROIS.
HAUTE JUSTICE DE I/ÉVÊCHÉ.
CENSIVE DE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS,
Deux Maisons, sans désignation, élevées sur une partie de la maison de la
Licorne faisant le coin de la rue Saint-Honoré ; confondues avec cette maison en
1 53 1 , elles en étaient déjà distinctes en 1639.
HÔTEL D'ÉTAMPES, puis DE CLERMONT et DE CREQUY. Cet hôtel est sans doute
celui que Sauvai dit avoir été bâti , rue d'Autriche , par Louis , troisième fds de Phi-
lippe le Hardi, chef de la maison d'Evreux, et qui aurait été habité par son fds
Charles, comte d'Étampes. La maison du côté oriental de la rue d'Autriche était en
effet plus importante que celle du côté occidental , qu'on qualifiait simplement de
«granchen à la fin du xivc siècle. Le 28 juin 1899, Louis, comte de Gien et
d'Étampes , les légua toutes deux à l'Hôtel-Dieu de Paris. Dans le vidimus de son
testament, daté du 12 mars 1&00, la maison dont il s'agit ici est énoncée «son
tthostel de Paris... assis en la rue d'Auteriche, et aiant yssue et entrée en la rue
«des Poulies; tenant d'une part àl'osteldu duc Aubert (hôtel d'Ostrevant) , et par
rr derrière (aussi vers le sud), à l'ostel de Mons. le maréchal de Bouciquaut, qui fu
« maistre Pierre Varoquel, avecques la grancbe joignant audit hostel^. n La déli-
vrance du legs eut lieu le 2 1 avril 1U0I1 ; mais les maîtres de l'Hôtel-Dieu, n'es-
pérant pas que leur nouvelle propriété pût être amortie <2>, comme ils le désiraient,
et n'ayant point les moyens d'y faire les réparations nécessaires pour la mettre en
bon état, la vendirent au comte de Clermont, au prix de i,5oo livres tournois,
le icr juin i4o5, en comprenant dans le marché la grange située vis-à-vis (3), et
dont il a déjà été parlé. L'hôtel d'Etampes prit ainsi le nom d'hôtel de Clermont.
En 1 5 3 1 , c'était une simple maison qui contenait un pressoir du côté de la rue
d'Autriche, et appartenait à la famille Le Clerc. En i5yi, Jacques Le Clerc, con-
seiller, et Jean Le Prévost, président au Parlement, en étaient propriétaires, ce
(l) Arch. de l'Emp. P 1 163', cote 1161. — (î) C'est-à-dire tenue en mainmorte, et conséquemment dé-
chargée des droits de mutation. — (3) Arch. de l'Emp. P. 1369.
RUE D'AUTRICHE. 15
dernier du chef de sa femme Anne, fille de l'auditeur des comptes Jean Le Clerc,
seigneur d'Armenonville, laquelle en passa «titre nouvel n au terrier de Saint-
Germain-l'Auxerrois, le 21 mars 1 588. On entreprit la reconstruction de la
maison en 1611, et comme elle fut achetée en 1622 par le maréchal Charles
de Créquy, comte de Saulx, qui la fit achever, elle fut appelée successivement
hôtel de Saulx et hôtel de Créquy. Après avoir appartenu à Marie-Anne de Bourbon ,
fille naturelle de Louis XIV, elle fut vendue, au commencement du xvuie siècle, et
sur son emplacement l'on bâtît plusieurs maisons particulières, en réservant un
passage de la rue des Poulies à la rue (alors cul-de-sac) de l'Oratoire. Ce passage
lut 'ensuite remplacé par une rue en biais, qui fut percée en vertu de lettres
patentes du 12 mai 1780, et qu'on nomma la rue d'Anpvilliers, parce qu'elle
était voisine de l'hôtel ainsi appelé. (Voir Rue des Poulies.) La rue d'Angivilliers a
disparu en 1 856 , pour faire place à la rue de Rivoli.
Du côté du nord, les limites de l'hôtel d'Etampes ne nous laissent aucune hési-
tation ; ce sont certainement les mêmes que celles de l'hôtel de Créquy. Des titres
de 1606, 1609 et 1 53 1 mentionnent l'hôtel d'Etampes ou de Clermont comme
celui auquel aboutissaient les maisons du Chariot, du Papegaut et de la Li-
corne, situées sur la rue Saint-Honoré*'). Mais, du côté du midi, les limites de
l'hôtel sont bien plus difficiles à fixer. De certains renseignements, épars dans di-
mms fonds, nous croyons pouvoir conclure que, sur la rue des Poulies, le mur
séparant l'hôtel de Créquy de l'hôtel de Conty était le même que le mur mitoyen
situé entre la maison de l'Image Saint-Eustache et cette «allée du comte d'Es-
fftampes,n indiquée par un acte de îûfti, comme y étant contiguë. Sur la rue
d'Autriche il y a apparence que, primitivement, le mur mitoyen de l'hôtel
d'Etampes occupait l'emplacement de celui qui a séparé plus tard l'hôtel de Lar-
chant de l'hôtel de Cipières; car on ne voit point que l'hôtel deCipières ait jamais
fait partie de l'hôtel d'Alençon, et nous savons, d'autre part, que l'hôtel de Lar-
cliant occupait l'emplacement de la portion la plus septentrionale de l'hôtel
d'Alençon, celle qui provenait de la réunion à ce dernier de l'hôtel d'Ostrevant.
lequel, suivant plusieurs chartes, était contigu à l'hôtel d'Etampes. Le cor])- de
logis de l'hôtel de Cipières, en bordure sur la rue d'Autriche, a vraisemblable-
ment remplacé la « grandie -n joignant l'hôtel d'Etampes, dont il est question
dans le vidimus de 1600, et qu'il faut se garder de confondre avec celle qui était
située de l'autre côté de la rue.
HÔTEL D'OSTREVANT (1609). Le censier de 1373 l'énonce «la maison au duc
sAubert (Albert de Bavière), qui fu au conte de Hénaut, et, paravant, mes-
!l) Ces détails monlrenl combien Sauvai s'est mépris en affirmant (|iie la maison vendue par l'Hôtel-
Dieu, en i')o5, avait été englobée dans l'hôtel de Bourbon.
16 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
rrsire Audart Champenois, et au conte d'Arminac (d'Armagnac). v Le 26 no-
vembre 1&09, Guillaume de Bavière, comte palatin du Rhin, de Hainaut et
d'Ostrevant, s'en dessaisit en faveur des seigneurs de Ligny, d'Anderquiez , de
Moutheaulx, du sire Beaudoin de Frémont et de l'écuyer Helmich de Dornich,
ses familiers. Ceux-ci paraissent l'avoir immédiatement aliéné, car nous trouvons
que , à la date du h décembre 1 h 1 0 , le duc d'Alençon est dit en avoir fait acqui-
sition depuis un an environ. H en fut ensaisiné le 2 3 avril 1611, et le réunit à
son grand hôtel qui y était contigu, et qu'on en distingua jusque vers le milieu
du xve siècle. Le compte des confiscations de 1/121 M le signale comme étant en
ruines, et inhabitable pour la plus grande partie.
Dans la dépendance de l'hôtel d'Anjou, et sur une partie de l'emplacement
jadis occupé par l'hôtel d'Ostrevant, il existait, sous Henri III, une maison appar-
tenant au valet de chambre ordinaire de ce prince, Etienne des Hayes, qui la
tenait du roi de Navarre. Cette maison, large de seize toises un pied, et profonde
de seize toises deux pieds et demi, fut vendue, le i4 décembre 1 577, par Des
Hayes à messire de Grimon ville, seigneur de Larchant, ce qui lui valut le nom
d'hôtel de Larchant. Acquise dans la suite par Jacques-Nompar de Caumont, duc de
La Force , maréchal de France , et augmentée d'une portion des jardins de l'ancien
hôtel d'Anjou, elle fut connue sous la dénomination d'hôtel de La Force, qu'elle
portait encore lorsque le 2 5 novembre 1667, le Roi l'acheta en vue de l'agrandis-
sement du Louvre. On ne la démolit du reste que partiellement; les bâtiments qui
subsistèrent, ayant été habités par Séguin, capitaine du Louvre, furent nommés
la Capitainerie, et, dans le xvmc siècle, le Gouvernement; ils ont été renversés, vers
1806, pour le prolongement de la place de l'Oratoire. (Voir Rue de Béarnais.)
D'après un accord de i58o, l'hôtel d'Ostrevant aurait été dans la censive de
Saint-Denis de la Chartre ; mais il n'est pas prouvé que telle fut vraiment sa mou-
vance, attendu que l'hôtel est mentionné dans les censiers de l'Évêché.
CENSIVE DE SAINT-DENIS DE LA CHARTRE.
Partie postérieure de I'hôtel d'Alençon ou d'Anjou. (Voir Rue des Poulies.)
HÔTEL DE RETZ et DE Cû.NTY. En 1573, quand le duc d'Anjou fit don à sa
sœur Marguerite de l'hôtel d'Alençon, il en retrancha un pavillon où avait de-
meuré son chambellan Villequier, et qui était voisin de l'hôtel de Bourbon , puis
il en gratifia Jeanne de Vinon de Dampierre, dame d'honneur de la Reine. Albert
de Gondi, duc de Retz, ayant acheté la maison de Castellan, située derrière ce
pavillon et donnant sur la rue des Poulies, fut, après la dame de Dampierre, sapa-
rente par alliance, propriétaire du pavillon, et le réunit à son hôtel; mais le 2 oc-
Ap. Sauvai. — Les confiscations dont il s'agit pvaient été effectuées contre les partisans du Dauphin.
RUE DE BEAUVAIS. 17
tobre 1617, Henri de Gondi l'en détacha de nouveau et le vendit 75,000 li-
vres'1) à Louise de Lorraine, princesse de Conty, deuxième femme de François de
Bourbon. Le pavillon, qui fut peut-être reconstruit, devint aussi I'hôtel du Petit-
Conty, dit également le petit hôtel de Retz. En 1 63g il faisait le coin de la rue du
Petit-Bourbon et était habité par le duc de Mortemart. Il paraît ensuite avoir été
confondu de nouveau avec le grand hôtel de Retz , autrement de Choisy, dont on le
distinguait pourtant encore en 1662. Quelques années après, le Roi, qui l'avait
acquis du duc de Guise , le fit démolir.
L'hôtel de Retz était séparé par la rue du Petit-Bourbon, de l'hôtel de Bourbon,
qui s'étendait jusqu'au quai. (Voir Quai de l'Ecole.)
RUE DE BEAUVAIS.
La rue de Beauvais commençait à la rue du Coq, qui la continuait en retour
d'équerre; elle finissait à la rue Fromenteau.
On peut admettre que le voisinage des jardins du Louvre a motivé le nom pri-
mitif de la rue de Beauvais, d'abord dite de Beauvoir®. Bordée vers le midi par des
maisons qui s'appuyaient aux murailles du Louvre, elle est appelée vicus contiguus
castello de Lupara, dans un titre de 1269. Un autre titre, de la même année,
l'énonce vicus qui dicitur Biauvoir. En 1292 et i3i6 on a dit «rue de Biauvoir-n ou
Beauvoir, ce qui a conduit à dire aussi crue de Biauvésn (1 3 1 6) et enfin a de Beau-
vaiz-n (i455), dénomination sans raison d'être, laquelle s'est substituée entière-
ment à la première, bien qu'elle comportât une idée fort différente.
La rue de Beauvais était encore intacte au commencement du xvne siècle. Le
prolongement de l'aile occidentale du Louvre, sous Louis XIII, nécessita la démo-
lition de la plupart des maisons qui bordaient la rue, du côté du midi; les der-
nières furent jetées bas vers 166&, à l'exception d'un petit groupe formant le
coin de la rue Fromenteau. Ce groupe n'a disparu que sous le premier Empire,
avec les maisons du côté septentrional, dont plusieurs, situées entre les rues du
Coq et de l'Oratoire, avaient déjà été rasées en vertu des lettres patentes du
26 décembre 1768, qui prescrivirent l'établissement d'une place de dix toises de
profondeur au devant du Louvre. Cette place, continuée par ordonnance du
26 février 180 8, jusqu'à la rue des Poulies, et, dans la direction opposée, jusqu'à la
rue de la Bibliothèque (Champ-Fleuri), a été appelée place de Marengo, puis, pen-
(1) Sauvai dit 70,000. Nous parlons d'après les question d'un lieu dit Bellum Videre, à l'année 13 44;
titres. mais ce lieu, dont les historiens ne parlent point,
(,) Dans le Cart. de N. D. (t. II, p. 471) il est était situé sur la rive gauche de la Seine.
1. 3
18 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
dant la Restauration, place de l'Oratoire. Elle a été absorbée dans les dépendances
du Louvre et dans la partie de la rue de Rivoli entreprise en vertu du décret
du 2 3 décembre i85a.
CÔTÉ MÉRIDIONAL.
PAROISSE SAINTGERMAINLAUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÊCHÉ W.
Maison de ctl'Imaige Nostre-Damea (1689-1670), depuis HÔTEL DE ROSTAING,
faisant l'angle rentrant de la rue du Coq. Vers 1 587, elle fut rebâtie par son pro-
priétaire, Tristan de Rostaing, qui la légua à son fds, et elle commença à être
appelée Hôtel de Rostaing. Elle aboutissait aux murs du Louvre et à ceux de
la Ville. Le Roi en fit l'acquisition le dernier jour de février 1 666 , au prix de
80,000 livres.
Maison sans désignation en i53o, puis des Rons-Hommes (i6o3-i6a6).
Deux maisons sans désignation (i53o); ainsi que la précédente elles semblent
n'avoir point encore été distinctes de la suivante en 1689, et n'en formaient plus
qu'une vers 1600.
Maison sans désignation en 1 689, puis de ccTImaige Saincte-Katherine t> (1573).
Maison de «l'Ymaige Saint- Jeu an n (1636-1626).
Maison de «l'Ymaige Saincte-Marguerite -n (1/136-1619), Puis DE l'Image Saint-
André (1603-1626), située devant la rue Champ-Fleuri.
Maison de «lYmaige Saint-Kristofle , t> puis du Saint-Esprit (1529-1626), ap-
partenant à l'abbaye Saint- Victor.
Maison des kImaiges Saint-Cosme et Saint-Damian n (i53o), qui paraît avoir été
une dépendance de la maison précédente , dont elle n'aurait pas encore été sépa-
rée en 1689.
Maison sans désignation en 1689, puis de kl'Imaige Sainct-Michielu (i53o), et
de l'Image Saint-Roch (i563-iÔ26).
Maison sans désignation en 1689, puis de la « Teste-Noire d (1582-1626); elle
appartenait à l'abbaye Saint-Antoine.
Maison sans désignation (1689), appartenant à la fabrique de l'église Saint-
Eustache, et comprenant trois corps d'hôtel.
Maison sans désignation en 1689, puis du Gobelet-d'Argent (1 5 1 6) et duCheval-
Rlanc (1613-1626).
(1) Nous rappellerons que , dans cette région , la censive de l'Evêché est devenue celle du Roi en 1 687.
RUE DE BEAUVAIS. 19
Maison sans désignation en i/i55, et paraissant avoir fait partie de la précé-
dente; elle a été dite également du Gobelet-d'Argent (167 5- 1625) et peut-être de
l'Image Saint-Louis en i654. A l'époque de sa destruction elle avait, comme au
milieu du xvc siècle, quatre toises trois pieds de profondeur dans œuvre, deux
toises de largeur sur rue et six pouces de moins par derrière ; elle était située devant
la rue Jean-Saint-Denis (rue Pierre-Lescot).
Masure (1/189), puis Maison des Boules (161 3- 162/1), contiguë à la maison fai-
sant le coin de la rue Fromenteau; elle aboutissait aux murs du Louvre, ainsi
que toutes les maisons précédentes.
CÔTÉ SEPTENTRIONAL.
PAROISSE SAINTGE RMA W-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE DE L'ÉVÈCHÉ.
CENSIVE DU FIEF DE FROMENTEAU.
Maison sans désignation en 167/1, puis du Cheval-Blanc (1 633), faisant le coin BamiM
septentrional de la rue Fromenteau; elle appartenait au Boi en 1681.
Maison dépendant de la maison du Pied-de-Biche , sise rue Fromenteau; il y
pendait pour enseigne l'Hôtel d'Allemagne en 172/1.
Maison du Petit-Je an-Saint-Denis (1610), ayant fait partie de la suivante; elle
paraît aussi avoir eu pour enseigne l'Image Saint-Pierre, au xve siècle.
CENSIVE DE L'ÉVÈCHÉ.
Maison des <r Images Sainct-Jehan et Sainct-Denis v (1 57 5-i63o), faisant le coin
occidental de la rue Jean-Saint-Denis; en 1/189, e^e ne formait avec la précédente
qu'une seule maison, et, en i6o3, elle avait pour enseigne le Petit-Saint-Denis.
rues
Fromenteau
et Jean-
Saint-Denis.
Maison sans désignation (1/189) ^ contenant deux corps d'hôtel , dont l'un faisait bm b m
le coin oriental de la rue Jean-Saint-Denis, et l'autre le coin occidental de la rue <hflri.
du Chantre ; à ce dernier corps de logis pendait pour enseigne la Bouteille en
l'an 1700.
Maison du Pied-de-Griffon (1397), puis de la Croix-Blanche (i53o), en deux btniwnm
corps d'hôtel, dont l'un formait le coin oriental de la rue du Chantre, et l'autre -ch„Bp.niqiJ
faisait front sur la rue de Beauvais.
Maison de la Fleur-de-Lis (i525), appartenant à la grande Confrérie aux
Bourgeois.
3.
•20 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation en 1&89, et du Pigeon en 1687, faisant le coin occi-
dental de la rue Champ-Fleuri.
Entre les mes Maison de a l'Imaige Saint-Jullian n (1&89), faisant le coin oriental de la rue
rtfaCaîr Champ-Fleuri ; elle se composait de deux corps d'hôtel , dont le second avait nom la
Maison du Coq (i 5io,-i62&).Eni53o, celle-ci est énoncée effectivement comme
constituant la moitié de la maison précédente.
Masure (i 689), puis Maison sans désignation (1 6o3), faisant le coin occidental
de la rue du Coq.
En 1 5 1 9 , il y avait dans la rue de Beauvais une maison de l'Image Saint-Michel ,
dont nous ne pouvons préciser l'emplacement.
RUE DU PETIT-BOURBON.
La rue du Petit-Bourbon commençait à la rue des Poulies et finissait à la rue
d'Autriche. Elle fut ouverte, en 1 583 , sur le terrain de l'hôtel de Bourbon ou
Petit-Bourbon, le long du mur de l'ancien hôtel d'Alençon, et, suivant une clause
stipulée dans l'adjudication, faite le 2 3 juin de cette année, d'une masure qui a
été remplacée par l'hôtel de Combaut. Cette voie nouvelle, qui devait être large
de seize pieds, était destinée à faciliter les communications entre le Louvre et les
environs de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois ; elle prit naturellement le nom de
me du Petit-Bourbon, qu'elle portait au milieu du xvne siècle. Nous l'avons trouvée
énoncée rue du Louvre, en 1621 ; rue du Louvre, qui conduit de la grande porte du
château du Louvre à la rue des Poulies, en 1 667 ; plus tard, elle fut qualifiée seule-
ment de passage. On voit, par les plans de Quesnel, de Mérian et de Gomboust,
que la rue du Petit-Bourbon, s'élargissant tout d'un coup, formait une sorte de
petite place du côté de la rue d'Autriche.
Aucune maison n'avait son entrée principale dans la rue du Petit-Bourbon; elle
était bordée , au midi , par l'hôtel de Bourbon , et au nord , par les deux hôtels de Betz.
RUE CHAMP-FLEURI.
La rue Champ-Fleuri commençait à la rue de Beauvais et finissait à la rue
Saint-Honoré.
C'est seulement au xvuc siècle qu'une enseigne du Champ-Fleuri a existé dans
RUE CHAMP-FLEURI. 21
cette rue; il ne faut donc pas chercher dans ce fait la raison d'être d'une telle déno-
mination. H semble qu'on doive l'attribuer à quelque jardin ou pièce de terre
en culture, dont la végétation était remarquable , circonstance qui pourrait aussi
avoir été l'origine du nom de Beauvoir, donnée à la rue voisine. Nous avons vu la rue
Champ-Fleuri énoncée viens qui dicitur Campus Jloridus, en 12 55 et 1282; viens
de Campo Jlorido, en 1262; «rue de Champjloury, » en 1292, puis «rue de Champ-
Jlori, et enfin , du Champ-Fleuri. Comme cette rue conduisait au Louvre , où , par-
décret du 21 mars 1801, devait être placée la grande bibliothèque nationale, on
lui a donné, en 1806, le nom de rue de la Bibliothèque. Ce changement de dé-
nomination fut provoqué par les propriétaires, qui se plaignaient de ce que la
déplorable notoriété attachée à l'ancien nom de la rue nuisait à leurs intérêts. La
rue Champ-Fleuri était, en effet, une de celles que Saint-Louis avait, en i2 5/i,
affectées aux filles de joie, et, au commencement de ce siècle, elle justifiait autant
que jamais son antique et fâcheuse réputation. Du reste, les titres ne nous ont
fourni aucune mention des mauvais lieux qui pouvaient s'y trouver, quoique
nous ayons recueilli plusieurs indications de ce genre pour d'autres rues, telles
que celles de Mâcon et de Glatigny.
La rue Champ-Fleuri, raccourcie par l'alignement donné à la place du Louvre,
vers 1812, l'a été de nouveau, en 1 8 5 3 , par le percement de la rue de Rivoli;
elle a été finalement supprimée par le décret du 3 mai 1 854.
CÔTÉ OCCIDENTAL,
PAROISSE SAWT-GERMAINL'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÊCHÉ.
Maison de la Croix-Blanche (1Û80), réunie, au xvie siècle, à la maison faisant
le coin de la rue de Beauvais, et néanmoins mentionnée encore en 162/1.
Maison du «r Saint-Esperit d (1/189-1675), puis de la Pantoufle (1682-162/1),
et de l'Image Saint-Jacques (1700).
Maison sans désignation en 1 565 ; en 1Û89, elle faisait partie de la précédente,
et, en 1700, elle avait pour enseigne le Buste du Roi.
Maison de «l'Image Saint-Niciiolast» (1/189-1680); elle appartenait à l'évêché
d'Embrun avant i53o, avait pour enseigne la Corne-de-Cerf, en 1676 et 162/1,
et a été de nouveau appelée la maison de Saint-Nicolas, vers 1687.
Maison de cl'Imaige Nostre-Dame n (1676-162/1), qui, au xve siècle, devait en-
core être comprise dans la précédente.
22 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation en 1689, qui avait l'enseigne du Champ-Fleuri en 1680,
et semble avoir eu celle de la Corne-de-Cerf en 1/122 et 1 566.
Maison sans désignation en 1/189, puis du Pied-de-Biche (1567-1624).
Maison de la « Fleur-de-Lys •» (1437-1624), puis du «Plat d'Estaingt» (i6o3).
H s'y trouvait, dès i588 et encore en 1700, un jeu de paume qui paraît avoir
eu, pendant quelque temps, l'Image Saint-Nicolas pour enseigne. La maison de
la Fleur-de-Lis fut achetée par le Roi, le 2 décembre 1667.
Maison sans désignation en 1 A89, puis de ctl'Ymage Sainct-Eustace n (i53o-
162/1), aboutissant à la précédente. Elle appartenait à la fabrique de l'église Saint-
Eustache.
Maison du «Gros-Tournoyst» (1373-1/172), puis du Cornet-d'Or (1672-1698),
qui était possédée, en 1/122 , par Guillaume Nonin, maître des œuvres de la Ville.
Au xve siècle elle s'étendait, derrière la maison précédente, jusque sur l'emplace-
ment de la maison de la Fleur-de-Lis, laquelle n'en était qu'un démembrement.
Maison de la Corne-de-Daim (1 575-1 63o), puis de la Croix-d'Or (1680), et de
la Montagne (1700). Elle faisait partie de la suivante au xve siècle.
Maison sans désignation en 1/189, Pu's DU Cheval-Blanc (1575-1717).
Maison sans désignation en 1/189, Pu^s DU PATIN (1573-162/1), du Cheval-Rouge
(1680), et de la Croix-Blanche (1705). Elle aboutissait à la maison suivante;
mais, au xve siècle, elle s'étendait jusqu'au jardin de la maison de l'Ecu-de-France ,
sise rue du Chantre.
Maison sans désignation en 1/189, puis de la Corne-de-Daim (1675-1657) ou
de Cerf (1689), faisant hache derrière la précédente.
Maison sans désignation (1 575), qui dépendait de celle de la Coupe faisant le coin
de la rue Saint-Honoré ; elle avait pour enseigne le Cygne-de-la-Croix, en 1687.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAW-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'EVÊCHE.
Maison de la Boule-d'Or (1700), ayantfait partie, jusqu'au milieu du xvue siècle,
de la maison formant le coin de la rue Saint-Honoré. Nous ne l'avons point fait
figurer sur le plan, pour éviter la confusion.
Petite maison sans désignation en 1/189, et ayant eu ensuite pour enseigne
l'Entonnoir (i59i-i63o), puis la Ville-de-Mantes (1680) ou de Munster (1687),
et la Ville-de-Bruxelles (1700).
RUE DU CHANTRE. 23
Petite maison de la Gloche-d' Argent (1680), puis du Grand-Alexandre (1705),
qui fit partie de ia suivante jusqu'au milieu du xvne siècle.
Maison sans désignation en 1689, puis du Cheval-Rouge (i6o3-i62i), du
Cheval-Blanc (1680), de l'Écu-de-Bretagne et du Croissant (1700).
Maison avec grange, qui, en 1395, appartenait à un plâtrier nommé Jean
Guéroult. En 1A89 c'était encore une plâtrière, et elle était possédée par les
Quinze-Vingts. En i6o3 elle formait deux maisons, et s'appelait en 1680 l'Hôtel
d'Anguin (d'Enghien?).
Maison sans désignation en 1689, puis de la Hure-de-Sanglier (1582). Elle a
été divisée ensuite en deux maisons, dont la première a eu pour enseigne la
Vertu-de-l'Assurance W en i6i3 et 162a, et la Petite-Vertu en 1680. La seconde,
qui faisait hache derrière l'autre, a eu pour enseigne le Roi Henri IV en 1687.
Maison de la Corne-de-Cerf (1^89). En 1675 elle avait une issue rue du Coq,
par le moyen d'une autre maison ayant la même enseigne, et qui alors en faisait
apparemment partie. En 1616 et 1733 elle avait pour enseigne le Lion-d' Argent.
Maison avec jardin, sans désignation en 1^89, laquelle eut pour enseigne les
Deux-Coignées (1 A5 î-i 53o), puis <r la Mouffle i) W, à cause de Guillaume Moufflet,
qui la possédait en 1 58g, et enfin la Pomme-de-Pin (1 6 1 3-i 6A0).
Maison sans désignation en 1&89, puis du Pot-d'Étain (i6o3-i62Û) et de la
Vierge (1705).
Maison de l'Image Saint-Louis (1687), jusque dans le xvne siècle, partie de la
suivante.
Maison de cl'Estrilleti (1 353), puis de l'Image Saint-Julien (1G2&), de l'Étoile-
d'Or (1637), et de l'Image Saint-Pierre (1700). Elle appartenait à l'Hôtel-Dieu,
avait une issue sur la rue du Coq en 1 575 , et était contiguë à la maison qui faisait
le coin de la rue de Beauvais.
RUE DU CHANTRE.
La rue du Chantre commençait à la rue de Beauvais et finissait à la rue Saint-
Honoré.
A l'office du chantre de l'église collégiale Saint-Honoré était attachée la posses-
sion d'une maison située dans cette rue, dont le nom, qui n'a jamais varié, s'ex-
plique ainsi sans peine. Les cartulaires de l'Hôtel-Dieu nous ont fourni une men-
tion de la rue du Chantre de Saint-Honoré, vicus Canloris Sancti-Honorali, remontant
(l) Cette enseigne devait être un rébus. — (,) Moufle, sorte de gros gant ou de mitaine.
24 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
à l'année 12 35, et une charte de 1221 où la rue est énoncée sans appellation par-
ticulière, mais comme conduisant aux maisons du chanoine Drocon. Un passage de
cette charte est en effet ainsi conçu : crDomum ante ecclesiam Sancti-Honorati ,
«in cuneo vici per quem itur ad domus Droconis, canonici dicti Sancti-Honorati,
« contiguam domui Scolarum. n
La rue du Chantre, comme la rue Champ-Fleuri, après avoir été tronquée vers
1812, a été supprimée en 1 854.
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAINL'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'EVÊCHE.
Maison sans désignation en 1 48g, puis de la ctRoze-Rougeh (1575-1620), con-
tiguë à la maison faisant le coin de la rue de Beauvais.
Maison sans désignation en 1689, puis du Croissant (1575-1720); elle était
divisée en deux portions au xvue siècle.
Maison des Trois-Croissants (1582-1626), où, en 1680, pendait pour en-
seigne l'Hôtel-d'Armagnac. Cette maison avait une issue sur la rue Jean-Saint-
Denis, et provenait d'un morcellement de la maison précédente, opéré postérieu-
rement à 1575.
Vers l'emplacement de la maison du Croissant il y avait, en 1 582 , une maison
de la Corne-de-Cerf, contiguë à une autre maison qui tenait à celle de l'Ecu-de-
France. Ce pourrait donc être la seconde partie de l'hôtel du Croissant.
Maison du Beautreillis (i54o-i6o3), puis du Cheval-Blanc (i6i3-i62o). 11 est
présumable qu'en 1687 elle était divisée en deux : la première ayant pour en-
seigne l'Image Sainte-Anne, et la seconde celle de la Fleur-de-Lis.
Partie postérieure de la Maison de l'Écu-de-France (1689), située rue Jean-
Saint-Denis. On y bâtit au xvie siècle une maison qui eut pour enseigne l'Image
Saint-Claude, puis le Grand-Godet (i54o-i64o). En 1687, la maison du Grand-
Godet était, suivant les apparences, subdivisée en quatre; la seconde avait pour
enseigne le Fer-À-Cheval, et la quatrième l'Image Saint-Claude, puis la Croix-
d'OrW.
Maison du Petit-Godet (i6o3-i64o). Sur l'emplacement qu'elle occupait pa-
raissent avoir été construites la Maison du Pèlerin-Saint-Jacques (1687), la Maison
(l> Nous n'avons trouvé nulle part de maisons plus en trop petit nombre pour être bien compris, les
difficiles à restituer que celles de la rue du Chantre; titres qui en restent sont presque ininterprétables.
RUE DU CHANTRE. 25
de l'Image-Saint-Claude (1687), qui, en 1700, était réunie à la maison des Bar-
reaux-Rouges de la rue Jean-Saint-Denis, et la Maison de la Croix-Blanche (1680),
qui fut divisée en deux. Cette dernière était contiguë à la maison du coin de la
rue Saint-Honoré.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÊCHÉ.
Maison sans désignation en i458, puis do Fer-À-Cheval (1 587-16/10), et du
Louis-d'Or?(i70o), contiguë à la maison qui formait le coin de la rue Saint-Honoré
et en ayant fait partie. Le a 6 septembre 1 463, la maison du Fer-à-Cheval fut déli-
vrée au chapitre Saint-Honoré, pour fondations d'obits, par les exécuteurs testa-
mentaires de Guillaume Levasseur, chanoine de ce chapitre.
Maison sans désignation en 1/189, puis de la Corne-de-Cerf ( 1 5/10-1620) et du
Bon-Bepos (1680), qui paraît avoir été une grange en i35o. Il se pourrait que
l'enseigne du Louis-d'Or eût été celle d'un corps d'hôtel de cette maison , laquelle
se distingue mal de la précédente à la fin du xvue siècle.
Maison trayant un Crucifix sur l'uisn (1/189-1 5/io), et qui a eu ensuite pour
enseigne tr la Fonteyneu (1581-162/1), puis la Cage (1669), et la Magdeleine
(1680). Sur son emplacement s'élevait, au xve siècle , une autre maison ayant pour
dépendances un jardin et deux masures, le tout appartenant à la grande Con-
frérie aux Bourgeois.
Maison sans désignation en 1/189, Vuls ffDE L'IMAIGE Nostre-Dame d (i5y5-
1 6/10). En 1 686 elle était divisée en deux maisons, dont la première faisait hache
derrière la seconde.
Maison sans désignation en 1689, puis de l'Image Sainte-Marguerite (i53o),
de la Fidélité (i6o3-i6/io), du Nom-de-Jésus (1687), et du Soleil-d'Or (1700).
Maison sans désignation en 1/189, Pms DE LA Croix-Blanche (1587), du Cha-
pelet (i6o3-i 660), et du Pied-de-Biche (1687). Cette dernière enseigne était
celle de la maison située sur la rue Champ-Fleuri , et dont la maison du Chapelet
dépendait.
Maison sans désignation en 1689, puis du Petit-Cerf (1575-1620), et du
Cheval-Noir ( 1 687). Cette maison et les trois précédentes furent bâties, sur l'em-
placement d'une maison unique, par Germain de Marie, qui fut prévôt des mar-
chands en 1/17/1.
1. 4
26 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison de la Pomme-Rouge (i56&-i66o), qui était divisée en deux en i5y5
et i64o.
Maison de la Rose (i56&), ou Rose-Rlanche (1624-1687).
Maison sans désignation en i46&, puis de l'Image Sainte-Rarbe (i5i5-i56o).
Vers la fin du xvie siècle, elle fut divisée en deux. La première portion prit pour
enseigne la Rose-Rouge (i6o3), puis la Croix-Rlanche (i62&-i65o), la seconde
fut la
Maison de l'Image Sainte-Geneviève (i6o3-i62o). Celle-ci paraît avoir été sub-
divisée à son tour en deux maisons, dont la première eut pour enseigne la
Croix-d'Argent (1680), et la seconde, l'Image Sainte-Rarbe (1687), puis le
Cheval-d'Or (1700).
Sur l'emplacement de toutes les maisons qui viennent d'être indiquées, à par-
tir de celle de la Pomme-Rouge inclusivement, il n'y avait qu'une maison avec
grange en 1^89.
Maison de l'Image Saint-Jacques (i63o-i64o), puis de la Montagne Saint-Jacques
(1680), contiguë à la maison qui faisait le coin de la rue de Reauvais.
RUE DU COQ.
La rue du Coq commençait à la rue de Reauvais et finissait à la rue Saint-Honoré.
Le nom de cette rue provient de ce qu'il s'y trouvait, vers 1 375, une maison
ayant pour enseigne un coq, armes parlantes de la famille des Le Coq, à laquelle
elle appartenait. Dès 1376 on trouve une mention de «la rue du Coq, autrement dite
«de Richebourg, n et les deux appellations étaient encore en usage simultanément au
xvie siècle, puisqu'on lit dans un titre de i564, «rue de Richebourg, dicte du Coq.-n
Mais la dénomination de Richebourg, qui apparaît en 12^5 et a fini par être en-
tièrement abandonnée, avait été employée la première; elle rappelait plutôt le
nom d'un individu que celui d'un territoire sur lequel la rue aurait été ouverte.
On trouve cette voie énoncée vicus qui vocatur Richebourc, en 1261, et vicus qui
vulgariter appellatur Richebourt, en 12 58.
Vers la fin du règne de Louis XV, la rue du Coq était encore tellement étroite
que, devant la maison de la Corne-de-Cerf, elle ne mesurait que quinze pieds de
largeur. La direction n'en était pas, comme aujourd'hui , perpendiculaire aux murs
du Louvre; mais elle biaisait, et la rue présentait une brisure sensible dans son
parcours. Enfin, à la suite de la suppression d'une partie de la rue de Reauvais,
elle avait été fermée à son extrémité méridionale, et ne constituait plus qu'une
impasse lorsque, par arrêt du Conseil, du 26 décembre 1758, il fut ordonné
RUE DU COQ. 27
quelle serait .élargie jusqu'à trente-trois pieds, et qu'on en changerait l'aligne-
ment de façon que son axe se confondit avec celui du pavillon central du Louvre.
L'arrêt de 1768, confirmé par lettres patentes du 12 mai 1767, n'a toutefois
reçu d'exécution qu'en 1780. Entièrement renouvelée par suite du décret du
3 mai i85£, la rue du Coq présente actuellement une largeur de vingt-quatre
mètres, et s'appelle me de Marengo.
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÊCHÉ.
Maison sans désignation en 1 48g , puis de la Pomme-de-Pin (i6o3-i634),
contiguë à la maison faisant le coin de la rue de Beauvais. Cette maison ou celle
de l'Image Saint-Martin mentionnée plus bas, avait pour enseigne la Chausse en
1601.
Maison du Chapeau-Rouge (1/101-1/189). Vers la fin du xvie siècle, elle a été
divisée en deux; la première a eu pour enseigne le Croissant (160 3- 162/1), et
peut-être l'Ecu en 1687 ; la seconde, qui faisait hache derrière la première, a eu
pour enseigne l'Etoile-d'Or en l'an 1700. Ce devait être l'ancienne issue de la
maison de ce nom, située rue Champ-Fleuri.
Maison sans désignation en 12^5, puis de l'Image Saint-Martin (16/10-162/1),
et de l'Ecu (1687), laquelle contenait, en i/i/|o, un jardin sur la rue Champ-
Fleuri. Au mois de janvier 12 55, elle fut achetée 2 3 livres parisis, de Guillaume
de Saint-Symphorien, par Drocon, chanoine de Saint-Honoré,qui, en mai 1258,
la vendit à ses collègues pour une somme de 10 livres, destinée à la fondation
de son anniversaire.
Maison du Plat-d'Etain (1/189), VUIS DE L'IMAGE Saint-François (1687), qui
semble avoir été pendant quelque temps réunie à la précédente, vers le milieu du
xvie siècle.
Maison de la Corne-de-Cerf et du Sarot en i45o, et depuis dite simplement
de la Corne-de-Cerf. Elle appartenait aux Célestins et se composait de trois pi-
gnons, c'est-à-dire de trois corps d'hôtel sur rue, dont l'un avait trois toises deux
pieds six pouces de largeur, et les deux autres ensemble trente-six pieds. Au mi-
lieu du XVe siècle, chacun des corps d'hôtel consistait en un rez-de-chaussée et trois
étages au-dessus, en tout douze ctlouaiges» occupés par autant de locataires. A la
fin du xvic siècle, le premier corps d'hôtel a commencé à former une maison à part,
i.
28 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
et les deux autres sont devenus une seconde maison à laquelle est restée l'enseigne
de la Corne-de-Cerf.
Maison de la Magdeleine (1A88), puis du Coq (i6i5-i634). En 1623, une
maison du Nom-de-Jésus, que nous supposons être une partie de la maison de la
Magdeleine, la séparait de celle de la Corne-de-Cerf.
Maison sans désignation en i53o, et qui, plus anciennement, a dû faire partie
de la précédente ou de la suivante.
Maison sans désignation en 1689, et appartenant aux Quinze-Vingts. Elle paraît
en avoir formé dans la suite deux ou peut-être même trois, dont la première a
eu pour enseigne l'Image Notre-Dame (1687), et la dernière la Croix-Verte
(1603-1626), et la Croix-Blanche en 1687.
Maison aux Balances (1373), puis de l'Ecu-de-France (1399). Elle se com-
posait de deux cr pignons n et semble avoir été divisée en deux. Au commencement
du xvf siècle, la partie septentrionale conservait l'enseigne de l'Ecu-de-France ou
duPETiT-Ecu (160 3- 1625); la partie méridionale paraît avoir été , à son tour, sub-
divisée en deux parcelles; mais, vers 1700, la maison a repris son unité.
Maison du aCyNEu ou Cygne (1 463) , contiguë à la maison faisant le coin de la
rue Saint-Honoré. En 1 53o , elle était déjà divisée en deux moitiés dont la première
a eu pour enseigne la Longue-Allée(i577), puis l'Image Saint-Jacques (1687),
et l'autre, l'Etrille-Fauveau W (1677-1626). C'étaient deux maisons distinctes à
la fin du xvne siècle.
H est impossible, faute de renseignements suffisants, de se rendre un compte
exact de la manière dont la partie méridionale de la maison du Cygne était pri-
mitivement agencée. Les maisons de la rue Saint-Honoré, jusques et y compris
celle du Grand-Godet, étant dites y aboutir en 1689, de même que la maison de
l'Ecu-de-France, il est à croire que la maison du Cygne faisait d'abord hache
derrière celle-ci, et qu'on agrandit plus tard, à ses dépens, la maison du Petit-
Ecu, de sorte qu'elle servit à son tour d'aboutissant aux maisons de la rue
Saint-Honoré. Cette conjecture est d'autant plus rationnelle que la maison si-
tuée entre celles de l'Etrille-Fauveau et de l'Ecu-de-France a eu pour enseigne la
Longue- Allée, expression qui implique l'existence d'un corridor ou galerie de com-
munication d'une certaine longueur.
(1) Cette enseigne, qui n'était pas rare au xvi* Marot dit, dans son épîlre du Coq-à-l'âne:
siècle, devait traduire graphiquement la locution Une estrille, une faux, un veau,
proverbiale Etriller Fauveau, qu'on trouve dans le C'est-à-dire Estrille-Fauveau,
roman populaire de Fauve! , et par laquelle on ex- En bon rébus de Picardie,
primait l'action de se livrer à des manœuvres ins- L'enseigne de l'Etrille-Fauveau était peut-être
pirées par la convoitise. représentée au moyen d'un rébus.
RUE DU COQ. 29
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÊCHE.
Masure (1686), puis Maison de la Croix-Blanche (1623) ou du Nom-de-Jésus
(1613-1700), contiguë à la maison formant le coin de la rue Saint-Honoré. En
1378, l'emplacement de cette maison et de celle qui suit dépendait du jardin de
l'hôtel Saint-Pol, situé rue d'Autriche.
Maison du Petit-Coq (i53o), puis du Gros-Chapelet (161 3), qui paraît avoir
existé dès iû5g , et fit sans doute, pendant un temps, partie de la maison du
Rabot, située rue Saint-Honoré. Vendue en 1 584 au comte du Bouchage, elle fut
réunie par lui à l'hôtel de ce nom. Elle avait appartenu au baron de Seine , qui
en fut judiciairement dépossédé, le 12 mars 1 583 , au profit de Michel de L'Isle.
Maison du kCocqt) (1378-1/189) ou du Grand-Coq (1 53o-i6i4), qui donna
son nom à la rue et devint L'HÔTEL DU BOUCHAGE.
Ainsi que la précédente, la maison du Grand-Coq appartenait au baron de
Seine; en i58i, il en céda une première partie au nommé Dupuy, et, en i582,
une seconde partie, formant le reste, à Sylvestre Picard W. En i584, le tout
fut acquis par Henri de Joyeuse, comte du Bouchage, qui, en la même année,
acheta la maison du Petit-Coq et une autre, sise rue d'Autriche. Sur l'emplace-
ment de ces propriétés, Henri de Joyeuse éleva un grand hôtel, où il reproduisit
partout ses armoiries. En 1608, son frère le Cardinal y annexa la maison du
Pot-d'Etain de la rue du Coq. Loué par Gabrielle d'Estrées, maîtresse de Henri IV,
l'hôtel du Bouchage <2) fut temporairement désigné sous le nom d'HÔTEL d'Estrées, et
on lui donna depuis celui d'HÔTEL de Montpensier, parce que Henriette-Catherine,
comtesse du Bouchage, fille de Henri de Joyeuse, y demeurait après son mariage
avec Henri de Bourbon, duc de Montpensier, qu'elle perdit en 1608. Remariée en
1 61 1 à Charles de Lorraine, duc de Guise, fils de celui qui avait été tué à Blois,
elle abandonna l'hôtel, le 20 janvier 1616, moyennant 90,000 écus, à Pierre de
Bérulle, lequel y établit la communauté de l'Oratoire. (Voir Rue Saint-Honoré.)
Maison du Pot-d'Étain (i53o-i62&). Elle semble avoir été comprise dans la
maison suivante vers 1 Ago , et toutes deux ont dépendu de l'hôtel de Montpensier.
Maison «r du Lïon-d'Or * (1 48 9-1603). Cette maison et les trois précédentes abou-
tissaient aux dépendances de l'hôtel Saint-Pol.
(,) Arch. de l'Emp. reg. MM 6a3. — m C'est à l'hôtel du Bouchage que Jean Châtel tenta de tuer
Henri IV, le 27 décembre i5o,4.
30 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation (1689), qui faisait anciennement hache derrière les
deux suivantes, et se composait de deux parties vers 1620.
Maison sans désignation en 1/189, e* ^ lacluelle on nen trouve pas depuis. Elle
appartenait aux Mathurins en 1626.
Maison sans désignation en 1/189, puis des Deux-Boules (1619). Elle appar-
tenait au vicomte d'Orbec en i56/i, et fut achetée par les pères de l'Oratoire
le 19 juillet 1619.
Maison des Trois-Poissons (1/189-15/10), aboutissant aux vieux murs de la
ville, et ayant dépendu de l'hôtel du Bouchage.
Maison sans désignation en 1Û89, qui appartint à une famille du nom de Ba-
taille, et fut dite en conséquence «hostel de la Bastaillea vers i53o. En i56/i,
elle était possédée par la duchesse de Valentinois; au lieu d'aboutir, comme en
i53o, aux murs de la ville, elle s'étendait alors jusqu'à la rue d'Autriche, par
suite de sa réunion à l'hôtel d'Etampes. (Voir Bue d'Autriche.)
Maison sans désignation en 1/189, Pu^s ffDU Vanu (vent) en i53o, et ayant eu
pour enseigne les Masures, en i6o3 et 162/1. Elle était contiguë à la maison fai-
sant le coin de la rue de Beau vais, aboutissait aux murs de la ville, et paraît avoir
dépendu de l'hôtel de la Bataille vers 157 5.
La rue du Coq a renfermé, en i38i, une maison du Dauphin, puis, en 1670,
deux maisons contiguës, celle de la Couronne-d'Epines et du Cheval-Blanc, et, en
1 632 , une maison de l'Hermitage , dont nous n'avons pu déterminer l'emplacement.
RUE DU DOYENNE.
(Voir Rue des Orties, p. 83.)
QUAI DE L'ÉCOLE.
Le quai de l'Ecole commençait à la hauteur du Pont-Neuf et finissait en face
de la rue d'Autriche.
On sait qu'il existait à Paris, depuis la plus haute antiquité, un commerce par
eau fort actif. Il y a donc lieu de supposer que les mariniers parisiens, incapables
de remonter le courant à la voile en toute saison, ont dû, à une époque recu-
lée, établir le long du fleuve des chemins servant au halage. Dans un accord passé
au mois de décembre 1222, entre le Boi et l'Évêque , il est parlé de la route royale
du bord de l'eau, depuis les environs du Louvre jusqu'à la hauteur de Chaillot,
QUAI DE L'ÉCOLE. 31
et il est indiqua que cette route était large de dix-huits pieds àpità main W. «Via-
aria que est in terra Episcopi, a domo quam Henricus, Remensis archiepiscopus ,
<r aedificavit apud Luparam usque ad poncellum de Chailloelo, scilicet in strata
a regali que est decem et octo pedum ad pedem manum W. n
Dans la région que nous décrivons, le chemin du bord septentrional de la ri-
vière, lequel était le chemin de Saint-Cloud, a été divisé en trois tronçons, l'un
formant le quai de l'Ecole, l'autre qui s'étendait du Louvre aux Tuileries, et le
troisième conduisant des Tuileries vers Chaillot. Nous nous occuperons d'abord
du premier; l'occasion de parler des deux autres s'offrira plus loin.
C'est à l'école dépendant de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois que le quai a
emprunté sa dénomination; nous l'avons trouvé désigné par les formules : Vicus
per quem itur a scola Sancti-Gennani ad portam de Lupera, en 1271. — Magnus vicus
Scole Sancti-Germani, en 1290. — Vicus qui dicitur Scola Sancti-Germani, en 1298
et 1 3o2 . — Sus la rivière, si comme l'en va au Louvre, en i 3 08. — Cay du cloistre
Saint-Germain, en 1 356. — Les caiz de la rivière, lez la porte du Louvre, en 1389.
— Chemin de dessuz la rivière, par lequel l'en va droit au chastel du Louvre, en 1395.
— A l'Escolle Saint-Germain, en 1^09. — Quai/ de l'Escolle Saint-Germain, devant
les Buttes, et quay des Buttes® de l'Escolle Saint-Germain, en i 558. La partie com-
prise entre la rue des Poulies et l'emplacement du vieux Louvre était appelée le
quai Bourbon au xvnic siècle, parce qu'elle était située devant les restes de l'hôtel
de Bourbon.
Le quai de l'Ecole, probablement revêtu en maçonnerie dès la fin du xive siècle,
était certainement muni, dès le milieu du xve, d'un mur de soutènement qui se
terminait alors à la grosse Tour du Coin, laquelle constituait une extrémité de
l'enceinte de Philippe-Auguste. Sous François Ier, il subit, aux environs de cette
tour, une modification que nous expliquerons ailleurs <4). H a été entièrement
refait et élargi par lettres patentes du 2 5 mars 1719. On l'a reconstruit de nos
jours.
A l'extrémité de chacune des rues d'Autriche et des Poulies, il y avait une des-
|1) Le sens de cette expression est fort obscur;
elle pourrait signifier un pied non rigoureusement
mesuré , mais simplement approximatif, tel qu'on
l'obtient en étendant les mains après avoir joint les
pouces, ou par quelque autre procédé analogue.
(Voir le texte cité par M. Léopold Delisle dans ses
Études sur la condition des classes agricoles en Nor-
mandie, une des œuvres les plus intéressantes de
l'érudition moderne. )
m Trésor des Chartes, reg. JJ 978, et Cart. de
N.D.t.1, p. ia4.
<3) Ces buttes, servaient apparemment au tir des
arquebusiers, comme celles du fossé voisin de la
Tour de Nesle. On lit dans les registres de la Ville
que, le i5 avril 1567, le Prévôt des marchands et
les Echevins demandèrent au maréchal de Montmo-
rency la permission , pour les archers et les arque-
busiers, "de tirer de leurs pistolles et harquebuzes
<rau quay, 1 comme ils avaient ffacoustumé faire, le
tr premier jour du moys de may prochain.» (Arch.
de l'Emp. reg. H 1784, fol. 370 r°.)
m Voir p. 176.
32 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
cente ou abreuvoir que la voie du quai franchissait au moyen d'une arcade.
La première descente, située dans l'axe même de la rue des Poulies, s'appelait
l'abreuvoir des Fossés-Saint-Germain, en 1 385 , et, à cause de sa proximité de
l'hôtel de Bourbon, l' Arche-de-Bourbon, en i5o6, i6o3, etc. La seconde, située
un peu avant la rue d'Autriche, était sans doute d'une origine moins ancienne,
mais elle existait déjà au milieu du xve siècle, car elle est représentée sur le retable
du Palais de justice; on la nommait l'Arche-d'Aultruche (1 586 , i6o4, etc.), la
descente de l'Abrevoir (160Ù) ou simplement l'Abreuvoir du Louvre (i6o5), et la des-
cente du port au Foing (î 6i 5). Lors du redressement du quai, en 1719, les deux
abreuvoirs ont disparu ainsi que le petit escalier en pierre placé entre l'un et
l'autre, lequel figure sur le retable du Palais de justice, sur le tableau de Saint-
Germain-des-Prés et sur divers plans. Cet escalier semble avoir été ce qu'on
appelait la descente du Passeur, en 1602 W.
Par lettres patentes du 2 3 septembre i5oi(2), le Roi fit établir un bac devant
l'hôtel de Bourbon , pour faciliter aux charrettes le passage de la rivière , après la
chute du pont Notre-Dame. On peut croire que ce bac n'eut qu'une existence pro-
visoire, puisque, s'il n'avait pas été supprimé, Henri II n'aurait point eu à ordon-
ner, le 9 septembre i55o, qu'on en disposât un au même endroit, pour tenir
lieu du pont que les habitants l'avaient prié de faire bâtir. Au reste, l'ordon-
nance de Henri II ne fut point exécutée sur-le-champ, et, le 5 décembre i55i, le
Corps de Ville s'étant réuni pour délibérer sur le projet présenté au Roi par
Gilles des Froissiz, à l'effet d'établir le bac en attachant le câble à la Tour de Nesle
et à une des tours du Louvre, l'assemblée objecta que la concession du bac avait
déjà été faite à la Ville par le Roi lui-même, et qu'elle se chargerait d'y pourvoir
lorsqu'elle en aurait la commodité. H est question des ctmaistres passeurs d'eaue
«devant l'hostel de Bourbon a dans une ordonnance de 1 576 , et de la acommu-
ff naulté des passeurs d'eaue du port du Louvre n dans un autre document de 1571.
Jusqu'à la construction du pont des Arts, en 1802, un service de bateaux s'est
maintenu entre le faubourg Saint-Germain et le quai du Louvre.
Au devant de l'hôtel de Bourbon et du Louvre , il y avait un port qui a été
appelé le port de Bourbon, en 1 56A , «le port de l'Arche-de-l'Ault bruche, v en 1 586 ,
!1> On exécuta à l'arche d'Autriche, en 1606,
des travaux de pavage, et, le k mai 1602 , on pré-
senta à la Ville un devis prescrivant de » démolir
de mur d'appui, marches et descente dicte du
«•Passeur, pour être refaicte de neuf et pareille
* structure, » Le devis comprenait la reconstruction
du mur d'appui de l'arche de Bourbon. La descente
du Passeur devait être l'escalier placé entre les deux
abreuvoirs, puisque ces deux abreuvoirs étaienl
dépourvus de marches.
m Le bac semble être plus ancien, car un bail en
fut fait, h charge d'entretien, le 1" juillet de la même
année. Le tarif agréé était de 8 deniers parisis par
chariot et 3 deniers par charrette , avec retour gra-
tuit pour les voitures qui avaient passé chargées. Les
hommes et les chevaux payaient 2 deniers chacun.
TOPOGRAPHIE HISTORIQVE DV VIEVX PARIS.
r
Hè'.tl de Bourbon
Qui
de
I ■ Ecol e
h-— H 1 1 1 1-
VVE DE L'ARCHE D'AVTFUCHE.
s et D u ro n d
PIAN DES RESTES DE L'HOTEL DE BOVRBON ,
fin du XVII* Siicle.
QUAI DE L'ECOLE. 33
et le port aux Passeurs, devant l'hôtel de Bourbon, en 1616. Un port du Louvre est
mentionné dans le censier du Parloir aux Bourgeois pour Tan 1292.
Le quai de l'Ecole n'était bordé de maisons que du côté septentrional; on
n'y voyait, entre les rues des Poulies et d'Autriche, qu'un seul édifice, l'hôtel de
Bourbon, qui était en la paroisse de Saint-Germain-l'Auxerrois, en la haute jus-
tice de l'Évêché, et partie en censive de Saint-Denis de la Chartre, partie en cen-
sive de Saint-Germain-l'Auxerrois.
HÔTEL DE BOURBON. Jaiilot a prétendu que l'origine de l'hôtel de Bourbon
remontait presque à Philippe-Auguste; c'est faire erreur d'un siècle : les rensei-
gnements suivants, puisés dans les archives du Bourbonnais W, ne laissent aucun
doute à cet égard.
Les sires de Bourbon ne possédaient rien dans le voisinage du Louvre, lorsque,
le jeudi avant la Saint-Laurent, l'an i3o3, Louis, fds aîné du comte de Cler-
mont, acheta, pour 1600 livres parisis, une maison qui avait été à Oudart de Neuf-
ville, et que l'acte de vente énonce : tr Séant à Paris, ou fossé Saint-Germain-
<r l'Aucerrois en la censive du chapitre de l'église de Saint-Germain dessus
et dit; tenant d'une part à la meson du Noier, qui est au prieur de la Charité-sur-
<*Laire (sic), et, de l'autre part, à la meson qui fu Bobert Evrout''2); abboutissant
<rpar derrières au manoir dudit Bobert. i> Cette première acquisition fut suivie
de celle de la maison d'Evrout, qui fut vendue en trois fois; savoir : i° un quart
à une époque inconnue; 20 un second quart le samedi avant la mi-carême i3o8,
par Gérard dit Larde, et Jehanne Gudinne, qui l'avait eu par héritage de Marie,
femme de Bobert Evrout, lequel était bourgeois de Paris, mais habitait Com-
piègne. Ce second quart est dit : * Séant sus la rivière, si comme l'en va
<t au Louvre tenant d'une part à la meson Vivien le Portier, et d'autre part
ta Pierre le Boursier (qui possédait le reste), et, par les derrières, au manoir
fr monseigneur Enguerran de Marigny (hôtel d'Alençon).n H était de la censi\e
de Saint-Denis de la Chartre, et par conséquent compris dans une zone de vingt-
cinq toises de large à partir de la rue d'Autriche; il renfermait en outre rr la quarte
t partie de onze hostises séanz en la rue d'OstericheT» et la moitié d'une maison
que l'on disait «A la Cage, séant en Hosteriche, tenant à la meson Jehan du Droiz,
tr d'une part, et, d'autre part, à la meson Homart de la Marche. i> Le tout fut
vendu au prix de 3so livres de «bons parisis.-» La troisième et dernière partie de
la propriété d'Evrout, dont elle formait la moitié, et qui était aussi en censive de
Saint-Denis de la Chartre, fut vendue 900 livres le vendredi avant les Brandons
i3i2, par ce Pierre le Boursier dont il est question plus haut et Perrenelle la
(l) Arch. de l'Emp. P. 11 63 et P 1369, cotes Taille de 1299, comme payant i4 livres. Dans ce-
1 i4g à 1 17a et 1793 à i855. lui de 1996, il est question d'un tr Raoul Evroust.
m Robert Evrout est indique1, sur le Rôle de la -rvendéeurde merrien,* demeurant r^en Osteriche.i
1. 5
34 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Ramonnière. Le lot est énoncé dans l'acte de vente et moitié d'une grande meson . . .
«qui fu feu Robert Evrout sus la rivière de Sainne, près de la porte du
a Louvre tenant à la meson Jehan Gudin d'une part, et d'autre part à l'autre
«moitié de ladite meson, que noble homme et puissant monseigneur Loys de Cler-
<rmont, chamberier de France, sire de Rourbonnois, ainzné filz du conte de Cler-
ctrnont, tient à présent de rechef plusieurs mesons ou estages assis en la
crue de Hosteriche, ou renc pardevers ladite grant meson, tenant à icelle grant
«f meson, et à la court d'icelle, en la censive dessus dite. De rechef la moitié d'une
rr petite meson assise en ladite rue, à l'opposite des antiens mesons (de l'autre côté
« de la rue) et estages dessus diz , tenant à la meson Jehan du Pont, -n
On peut, au moyen des textes qui précèdent, se faire une idée assez nette de
ce que devait être l'hôtel de Louis de Bourbon. La forme, en plan, se rappro-
chait de celle d'une croix irrégulière, dont trois branches aboutissaient sur les
voies publiques (quai, rues des Poulies et d'Autriche) qui circonscrivaient l'îlot;
la quatrième aboutissait à l'hôtel de Marigny. On ne voit point que cette bizarre
disposition ait été sensiblement modifiée avant la fin du xive siècle. A cette époque,
l'hôtel fut rebâti après avoir été considérablement augmenté au moyen de nom-
breuses acquisitions, qui, malgré ce qu'on en a écrit, n'entamèrent en rien l'hôtel
d'Alençon. Elles consistèrent seulement dans une série de maisons que nous
allons indiquer en suivant, autant que possible, l'ordre topographique, assez con-
fus, qui résulte des titres.
Sur la rue des Poulies : la Maison du Noyer, qui appartenait au Prieur de la
Charité-sur-Loire, et était contiguë à cette première maison achetée en i3o3;
elle fut obtenue, le i 3 février i 385 , en échange de deux autres situées à la
porte Bordelle, et faisait hache derrière les deux suivantes; la Maison du Noyer,
autrement aaus Nois,n avait été amortie au prieur de la Charité, en 1290. Elle
tenait alors aux hoirs Jean Evroult; — la Maison de l'Image Notre-Dame, contiguë
à la précédente, acquise, pour 200 francs, le 26 mars i384, de Pierre de Beau-
vais, dit du Noyer; — autre Maison contiguë, qui paraît se confondre avec un
logis dont la moitié fut achetée le 29 mai 1389; — la Maison des «Cauches,
« Coches, Coichesd ou «Coqueletz,ti contiguë, achetée 900 francs de Robert Ridel,
le 16 septembre i388.
Sur le quai : Maison contiguë à une maison vide faisant le coin du quai , achetée
le 8 mai 1 353 ; — la Maison de l'Image Sainte-Catherine, achetée le 29 juin 1 3 9 5,
pour koo écus à la couronne; — la Maison de la Rarbe-d'Or, contiguë, achetée
avec la suivante pour la somme de 1000 francs, le 16 février 1389. — Le 26 mai
1 385 , il avait déjà été fait acquisition d'une place de quatre toises deux pieds de
long, sur deux toises deux pieds de large, située derrière la maison de la Rarbe-
d'Or; sur cette place, en 1399, se trouvait la cuisine de l'hôtel de Rourbon;
QUAI DE L'ÉCOLE. 35
— la Maison du Plat-d'Etain, contiguë, et appartenant à Robert Roussel; — la
Maison de l'Écu-de-France, contiguë, achetée le 10 avril i388. — Le 26 mai 1 3 6 5
il avait aussi été fait acquisition d'une place située derrière cette maison, et qui
tenait à la partie postérieure de l'hôtel du Noyer; il s'y trouvait alors des étables,
et elle mesurait quatre toises deux pieds de long, sur quatre toises quatre pieds
de large. La maison de l'Ecu-de-France et toutes celles qui précèdent étaient
de la censive du chapitre Saint-Germain-l'Auxerrois; toutes celles qui suivent
étaient de la censive du prieuré Saint-Denis de la Chartre; — la Maison de
l'Ecu-de-Rretagne, achetée 200 francs le 19 décembre i385; — la Maison du
Fer-À-Moulin, contiguë, achetée le 2 3 mai i386 ("?); — autre Maison contiguë,
acquise le 3i décembre i385; — deux autres Maisons contiguës, propriétés, l'une
de Jean Monet, l'autre de Jean Chaut; — autre Maison contiguë, achetée le 10 dé-
cembre i395; elle avait, hors œuvre, neuf toises de profondeur, seize pieds de
largeur au bout vers l'hôtel de Rourbon, et quinze et demi seulement sur le quai;
— deux Places vides, contiguës, ayant appartenu à Simon Vergal; la seconde,
où avait existé une maison appartenant à Jean de La Haute-Maison, faisait le coin
oriental du quai et de la rue d'Autriche; — Maison dite de la Nasse, sise rue d'Au-
triche, et à laquelle aboutissaient les places précédentes; — une Maison appar-
tenant à Thomas du Moret; — Maison contiguë, achetée le 22 novembre 1 38g.
Nous avons encore rencontré la mention de quelques autres propriétés, mais en
termes trop vagues pour que nous puissions mettre le renseignement à profit. Il est
sur toutefois que le nombre total des maisons acquises depuis le commencement
du siècle n'excéda point une trentaine; par conséquent, il est entièrement invrai-
semblable que le duc de Rourbon ait eu affaire à trois cents vendeurs, comme on
le lit dans l'ouvrage de Sauvai, lequel cite, parmi les maisons achetées, celle du
maréchal Mathieu de Trie(1), dont il ne nous est parvenu aucune indication, et
celle du comte d'Etampes, qui ne possédait réellement, dans cette région, que les
propriétés rapprochées de la rue Saint-Honoré et dont il sera parlé plus loin. En
fait de demeures seigneuriales, nous avons simplement vu qu'en 1 355 le seigneur
d'Attichi avait, sur le quai, une maison qui tenait à une autre contiguë à celle de
Michel Le Normand; cette dernière était attenante à une quatrième touchant à la
« maison vuide i> faisant le coin de la rue du Noyer ou des Poulies. Les unes et les
autres ont été certainement absorbées dans l'hôtel de Rourbon.
La reconstruction de l'hôtel de Rourbon ne semble pas avoir eu lieu avant 1 390,
car c'est le 2 3 avril de cette année qu'en fut donné l'alignement sur le quai(2l Cet
alignement ne suivit pas les anciens vestiges; mais, l'encoignure de la rue des
(1) Sauvai dit que Mathieu de Trie et sa femme bon, qui la réunit à son hôtel. Elle était située entre
Jeanne Daresne la vendirent le 7 mai i3oo (ou plu- cet hôtel et celui d'Alençon. (Voirp. 87.)
tôt i3ao), moyennant 5oo livres, à Louis de Bour- (,) Arch. de l'Emp. cart. S. 63.
36 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Poulies étant conservée, il déplaça de quinze pieds, vers le midi, l'angle de la rue
d'Autriche, en empiétant sur la chaussée du quai, ce qui valut à l'Evêque de Paris
une indemnité de 1 oo livres. L'alignement sur la rue des Poulies fut donné assez
longtemps après, le 1er mai 1897, et la prise de terrain qui en résulta fut évaluée
à 60 livres. A cette époque, l'hôtel de Bourhon devait être en grande partie re-
hâti, puisqu'il est appelé «le grand hostel neuf-n dans une charte de 1896. Au mois
de février 1897, le Roi permit d'y conduire et le gros d'un poys de l'eaue des fon-
crtainesn qui venaient au château du Louvre.
En i k 1 8 , au moment où les Bourguignons chassèrent de Paris les Armagnacs,
l'hôtel de Bourbon fut pillé, et le Duc ayant cessé pendant plusieurs années de
payer les cens dus au chapitre de Saint-Germain-l'Auxerrois, celui-ci, en vertu
du Privilège aux Bourgeois, obtint, le h novembre 162 5, que l'hôtel lui fût
adjugé. Cette circonstance décida le Duc à en faire don, le 20 décembre 1626,
au duc de Bedford, régent du royaume, à la charge d'acquitter les redevances
arriérées. Dans la suite, les Anglais ayant été expulsés de la capitale, le duc de
Bourbon rentra en possession de son manoir, et deux transactions eurent lieu en
\l\ 68 et i4&9, entre lui et le Chapitre, pour l'amortissement définitif des sommes
qui restaient à payer.
L'arrêt de confiscation rendu, le 27 juillet 1627, contre le connétable de Bour-
bon , fut le commencement de la ruine de l'hôtel. On le démolit en partie ; on dérasa ,
par exemple, la petite tourelle en encorbellement du coin de la rue des Poulies;
on brisa les écussons, on macula les portes de cette couleur jaune que le bourreau
appliquait aux maisons des coupables de haute trahison W. De nouvelles mutila-
tions s'effectuèrent à la fin du xvie siècle, lorsqu'on perça, à travers les dépen-
dances, une rue allant au Louvre; mais on respecta la chapelle et la grande salle,
où se tinrent les États généraux en 1 6 1 k , et qui servit de théâtre pour la cour, sous
Louis XIII et Louis XIV. L'hôtel avait été acheté, dit-on, 5oo,ooo livres, par
Marie de Médicis; nous ignorons le nom du vendeur et la date de la vente. Vers
166/i, on fut obligé, pour élever l'aile orientale du Louvre moderne, de dé-
truire la plus grande partie du Petit-Bourbon <2), ainsi qu'on disait alors; la
chapelle particulièrement disparut. Ce qui restait fut divisé en deux parties; on
établit, vers le nord, les écuries de la Reine, et, vers le midi, le garde-meuble
de la couronne, à l'usage duquel on fit servir plusieurs des anciens bâtiments.
Enfin le tout fut rasé en vertu des lettres patentes du mois de décembre 1768,
relatives au dégagement des abords du Louvre. Le commencement de la démolition
précéda même la publication des lettres, car elle fut entamée le 20 septembre.
(l) François I" y logea, assure-t-on, son premier m Dès 1667 on se proposait d'abattre l'édifice
écuyer; mais il doit y avoir là une confusion avec pour y faire un manège, et disposer une avant-
l'hôtel Bourbon du quartier Saint-Antoine. cour au-devant du Louvre.
QUAI DE L'ÉCOLE. 37
suivant un passage du Journal de Barbier. Le terrain est resté vague ensuite et a
été clos, jusqu'à ces dernières années, d'une grossière palissade. Aujourd'hui c'est
un jardin dépendant du Louvre, et fermé par une grille en fer doré.
L'hôtel de Bourbon devait être un des plus magnifiques du vieux Paris. On
n'en connaît point de plan complet; mais nous avons découvert deux plans partiels,
fort bien faits, et reproduisant ce qui fut conservé des anciens bâtiments après la
démolition de 1 664. H en existe, d'ailleurs, plusieurs vues qui concordent entre
elles et avec les plans. La meilleure de ces vues est celle qu'offre le tableau
de Saint-Germain-des-Prés, exécuté avant le saccagement de 1527, et que nous
reproduisons. La façade sur la rivière était formée d'abord par un corps d'hôtel
de neuf toises de largeur, qui faisait le coin de la rue des Poulies, était muni
d'une petite tourelle en saillie sur l'encoignure, et couvert d'un toit en pavillon,
surmonté de lucarnes. Venait ensuite un édifice rectangulaire de dix-sept toises de
longueur sur cinq toises de largeur, dirigé perpendiculairement au quai, sur le-
quel il faisait front. C'était le principal corps d'hôtel ; il s'ouvrait sur la cour, vers
le Louvre, par une suite d'arcades, et il était, en dernier lieu, divisé intérieu-
rement par deux rangs de piliers en bois. On remarquait au-dessus du pignon une
sorte de balcon fermé, dans le genre de ceux que les Anglais nomment orieh;
le petit toit en était revêtu de plomb et couronné des armes de Bourbon W. La
balustrade du balcon, découpée à jour, avait pour motif un agencement de fleurs
de lis et de lettres capitales dont la réunion formait le mot Espérance (devise de
l'ordre du Chardon, fondé par le duc d'Orléans). Ces fleurs ainsi que ces lettres
étaient a enchâssées dans des bâtons recroisés ou lozangés à double orle, ouvertes,
cet alternativement entières et à demi ®. n Attenant au corps de logis dont nous
parlons, s'étendait ensuite, jusqu'à la rue d'Autriche, un bâtiment large de quatre
toises environ, dont le toit, en appentis, était décoré de lucarnes à jour. Il ren-
fermait une longue galerie, promenoir ordinaire des ducs, qui était embellie de
peintures s exquises -n et resplendissante de dorures. On l'appelait, pour cette rai-
son , la Galerie dorée, a et de fait , dit Sauvai , alors il n'y en avait point en France qui
u l'égalât ni en grandeur, ni en assiette. t> C'est dans le bâtiment de la galerie et vers
son dernier tiers qu'était percée la grande porte de l'hôtel ; elle était très riche-
ment décorée et couverte de dorures, ce qui lui avait valu le nom de Porte dorée. Les
(1) «Ce corridor (l'oriel,) est couvert de plomb, ftcoslé droict et tymbrées au mézail tarré de front,
"sur le sommet duquel sont eslevées les armes de rrainsi qu'il appartient à haut et puissant seigneur, «
» Bourbon: de France, sans nombre, au baston de (André Favyn, Théâtre d'honneur, p. 781.) — Au
-gueules, brochant sur le tout, comme on le voit xvm* siècle on a cru à tort que ce balcon était celui
"plus clairement aux vitres de la chapelle deBour- où se serait placé Charles IX, le jour de la Saint-
*bon, portées et soutenues par des anges. Ces Barthélémy , pour tirer sur les protestants,
'•armes, sur ledit corridor, sont couchées sur le m Sauvai, t. II, p. 210, et Favyn, loco cit.
38 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
vantaux en étaient ferrés de gros clous de cuivre doré. En haut de la porte et dans
toute sa largeur, était sculptée «une ceinture — enlacée en rouleau, bordée de
«chaque côté et tout du long, de clous dorés, au lieu des perles qu'on voyoit à
a celle des chevaliers ; et enfin attachée avec un ardillon par un bout et par l'autre
«avec une boucle, l'un et l'autre émaillés de verd, ébarbillonnés et déchiquetés
« comme la tête d'un chardon, n Au milieu de chaque vantail apparaissait de même
la ceinture de l'ordre du Chardon, avec le mot Espérance, et, avant que le bois
des panneaux fût rompu comme il l'était au xvue siècle, il devait se trouver en
bas une ceinture sculptée, faisant pendant à celle du haut.
Quant à la disposition des bâtiments, un plan manuscrit du xvie siècle (voir
p. 1 35) nous en donne, seul, un aperçu, malheureusement peu précis, et médiocre-
ment éclairci par les indications que nous a fournies un inventaire fait en î k^ W.
Sauvai mentionne la grande salle, dont le comble était assez élevé pour paraître de
niveau avec celui de Saint-Germain-l'Auxerrois, et qui, assure-t-il, était plus
vaste qu'aucune autre du royaume , n'ayant pas moins de trente-cinq toises de lon-
gueur sur dix-huit pas de largeur. L'une de ces dimensions pourrait convenir à la
galerie du quai , mais l'autre ne saurait s'y appliquer, et les plans ne laissent pas
voir la place d'un édifice aussi considérable, en dehors de ce que nous con-
naissons*'2). Pour la chapelle, on sait qu'elle était orientée et voisine de l'hôtel
(1) Ces indications sont les suivantes : rr Chambre
rrde l'Ermeurerie. — Chambre haulte du paveilion
ffd'emprès l'orloge. — Chambre dudict paveilion.
t — Grand chambre apparez. — Petite allée juxle
"la galerie. — La garde-robe de Madame. — La
<t chambre Madame, joignant la chambre Monsei-
irgneur. — En la haulte chapelle. — Chambre joi-
ffgnant la chambre Monseigneur. — En l'oratoire.
" — La gallerie sur la rivière. — Chambre du bout
rrde ladite gallerie. — Ou (au) relraict de ladite
r chambre, sept panneaux de verre, telz quelz. —
frLa grant salle dudit hoslel de parement. —
rrL'eschansonnerie. — Grant cuisine. — Au garde-
<rnianger. — Petite chambre sur ladite cuisine. —
rrEn la librairie. — En la chambre basse, plancher
rrde boys, près le puys des estuves. — Dessus le
« four des estuves , près le puys fut trouvé une chau-
rdière , et une fontaine à biberon de cuivre. — Item ,
ren la chambre d'auprès les estuves , furent trouvés
t deux pourtraicl ures de morts avecques leurs lances.
rr — Es baignouères dudit hostel, furent trouvez
r-grans cuves à baigner, de bois d'Irlande. — Es-
rtuvesd'emprès les baignouères. — Chambres près
rrla gallerie, près le préau. — Une chambre appel-
rlée la chambre Monseigneur de Lyon, joignant la
« grant gallerie, devers le Louvre. — Chambre de
tria lapicerie. — Chambre au bout d'icelle. —
rr Chambre du portier. — Estable du four. — Chaîn-
er bre de dessus ledit four. — Deux estables joingnant
rrl'escuierie (les écuries étaient le long de la rue
«d'Autriche). — Estable joignant icelle. — Cham-
rebre de la penneterie, près la grant salle. — La
«chambre au-dessus de la fruiterie. — La haulte
tf chambre joignant la chambre Baudequin (tendue
rrde la riche étoffe appelée baudequin). — Grant cha-
rr pelle. — Oratoire. — Chambre basse du concierge.
rr — Chambre haulte dudit concierge. — Ou haull
tr paveilion. — Chambre de la trésorerie. » — On lit
dans un passage de l'inventaire : "hem, en la plti-
rrparl dudit hostel n'y a nulles fenestraiges assis en
rrfenestres, et aussi en la plus part où il y a fe-
rrnestres assis en chassiz, tant en galleries que ail-
rr leurs, n'y a nulles verrières." Ainsi, en 1/157, les
(races du pillage de 1 h 1 8 n'étaient point effacées.
m Le 2 mai 1 5 1 5 , la duchesse de Bourbon donna
à louage à M" Jehan Legranl : r-La grant salle basse
RUE FROMENTEAU. 39
d'Alençon ; elle avait trente-deux toises de longueur et huit de hauteur, non com-
pris le comble', habilement exécuté et dépourvu d'entraits, lequel était long de
neuf toises et élevé de sept et demie <1J. H formait vraisemblablement une voûte
ogivale en bardeaux, figurant une sorte de carène renversée. Comme dans le reste
du palais, on y avait prodigué les sculptures, la peinture et l'or, ainsi que les
écussons aux armes de Bourbon et les emblèmes de l'ordre du Chardon. Les fe-
nêtres, aux splendides vitraux coloriés, étaient terminées par des fleurs de lis*2),
et, auprès de l'autel, se trouvait «un oratoire de menuiserie à claire-voyen avec
quatre panonceaux : le premier aux armes de Charles VI , le second aux armes du
Dauphin, le troisième aux armes de Louis II, duc de Bourbon, qui fit bâtir l'édi-
fice (3!, et le quatrième aux armes d'Anne, dauphine d'Auvergne, sa femme. Le
clocher de la chapelle, qui s'élevait beaucoup au-dessus du toit, était, au dire
de Favyn , « enceint et entouré d'un cercle de plomb doré , chargé , en façon de
crchappeau ducal, de fleurs de lyz deschiquettées en teste de chardons. •»
La superficie totale de l'hôtel de Bourbon était d'environ deux mille huit cents
toises.
RUE FROMENTEAU.
La rue Fromenteau commençait à la rue des Orties et finissait à la rue Saint-
Honoré.
Pour désigner cette rue, en 1226, on disait in Fremantel^\ et, en 1282, in
Frifjfido Mantello ; nous avons lu viens qui dicitur de Frigido Mantello, versus Sanctum
Honoraturn, dans une charte de 1 289 ; puis, dans les documents postérieurs, «rue
«Froit-Mantel, Froit-Mantyau, Froid-Manteau, Frémenteau, v et enfin Fromenteau dès
1 563. Cette dernière orthographe est celle qu'on rencontre le plus ordinairement
-de l'oslel de Bourbon, à Paris, avec la galerie
-basse estant au bout de ladicte salle, auprès de la
^chapelle d'iceluy hoslel, qui, est-il ajouté dans
-l'acte, a servy de fourrière, durant que madicte
frDanie a este dernièrement par deçà.» Puisque la
galerie basse , située au bout de la grande salle , se
trouvait près de la chapelle de l'hôtel , il est certain
que la grande galerie du bord de l'eau n'est pas
celle qui renfermait la grande salle. Cette dernière
devait faire partie du corps d'hôtel à pignon sur le
quai.
W Mss.de Sauvai, appartenant à M. Le Roux
de Lincy.
(,) Nous interprétons ce passage en supposant
que les frontons couronnant les baies avaient un
amortissement en forme de fleur de lis, ou que le
réseau des fenêtres était disposé en forme de fleur
de lis , ainsi qu'on en voit , dans l'église Saint-Séverin ,
un spécimen , d'ailleurs plus moderne d'un siècle en-
viron que ne devait l'être la chapelle de Bourbon.
(5> Les lettres C et V rr pratiquées par l'architecte
"dans les pierres de la croisée. . . ouverte au-des-
rrsus du portail de la chapelle, -n ont fait croire
qu'elle avait été commencée sous Charles V. On
voyait les mêmes lettres dans un vitrail.
(4) Arch. de l'Emp. reg. LL 1 5 1 .
40 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
dans les titres peu anciens. Quant à l'appellation de Fromantel ou Froid-Mantel ,
dont la signification est obscure, elle doit provenir, directement ou indirectement,
d'un territoire; nous essayerons d'approfondir la question à propos de la rue
Froid-Mantel , du quartier d'Outre-Petit-Pont.
La rue Fromenteau a été appelée rue du Musée par une ordonnance du 1 6 fé-
vrier i83g, rendue sur la demande des propriétaires. Elle était encore à peu près
entière au commencement du dernier siècle. Les maisons qui, plus ancienne-
ment, étaient situées derrière le Louvre avaient alors été remplacées par une clô-
ture de bâtiments peu importants, laquelle fut ouverte sous Louis XVI, de façon
à permettre l'établissement de la place du Vieux-Louvre , et qu'on a entièrement
abattue sous le premier Empire, en laissant l'espace libre pour former la place
dite du Musée. La partie méridionale de la rue a disparu par suite du percement
de la rue du Carrousel et de la démolition de l'église Saint-Thomas ; le reste a
été définitivement supprimé en i85o, conformément à la loi du h août 1869,
relative à l'achèvement du Louvre.
En i35o, il existait un puits public dans la rue Fromenteau,
CÔTÉ OCCIDENTAL,
PAROISSE SAWT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'e'vÊCHE.
Maison du Dauphin (1/122), puis de la Croix-d'Or (i5oo,-i6o3), faisant le coin
de la rue des Orties. Dans un bail du 12 août 1Ù22, cette maison est dite abou^
tir aux écoles du collège Saint-Nicolas.
Petite Maison, de forme triangulaire, qui était en ruine lorsquelle fut vendue, le
5 janvier 1 62 3 , au propriétaire de la maison de la Croix-d'Or ; elle demeura annexée
au second corps d'hôtel de cette maison , dont l'entrée était située rue des Orties.
Maison sans désignation (1680), dépendant du cloître Saint-Nicolas.
Maison du Petit-Monde (1601), séparée, au rez-de-chaussée, de la maison sui-
vante, par
«L'Huisn (1 565) , ou «le Petit-Huis du Cloistreti (1 57 6) , aussi dit Arche
Saint-Nicolas (1582), et servant d'issue au cloître, sur la rue Fromenteau.
Maison sans désignation (1 565), au-dessous de laquelle était pratiqué le pas-
sage que nous venons de mentionner.
Maison sans désignation en i58i, puis «de la Serainet (1676) et de la Croix
de Lorraine (17 . .).
RUE FROMENTEAU. 41
CENSIVE DU FIEF DE FROMENTEAU.
Maison sans désignation (1 584), qui, de même que les trois suivantes, appar-
tenait au chapitre Saint-Nicolas.
Maison sans désignation en i58/j, puis de la Pomme-de-Pin (17 . .), qui semble
avoir eu aussi pour enseigne l'Image Saint-François en 1 663. Cette maison et
celle qui précède formaient apparemment les deux moitiés d'une maison dite de
la Follerie, en i5i6, et plus tard de l'Image Sainte-Geneviève.
Maison «de l'Escuh (i53a), ou Petit-Ecu-de-France (1 559). Ainsi que les
deux maisons qui viennent d'être énoncées, elle avait perdu une partie de sa
profondeur par l'agrandissement du petit cloître Saint-Nicolas.
Maison sans désignation en 1 584 , puis de l'Epée-de-Bois (1696), qui d'abord
a dû faire partie de la maison de l'Ecu.
Place vide en 1 578, et sur laquelle il y avait, en 1 586 , une Maison qui a eu
pour enseigne <r le B astoy d (i6i3) ou « Bastoir n (1622).
Maison de la Corne-de-Cerf (1623), dont une partie dépendait déjà, en 1765,
de la maison située derrière et donnant sur la rue Saint-Thomas. En 1677, elle
appartenait aux héritiers du président de la Cour des monnaies, Chauvry.
Maison «du Malassis d ( 1 5 6 8 ? ) , puis de l'Image Saint-Pierre (1721). En 1 53 1 ,
cette maison et la précédente n'en constituaient qu'une, formée de deux corps
de logis; en 1571, la séparation était effectuée.
Maison sans désignation en iû8p,,puisDEsTROis-FLEURs-DE-Lis-CouRONNÉEs(i638)
et de la Perdrix (1700), laquelle fut vendue, le 19 octobre 1 638 , par Charlotte
de Meslay (alias de Molet) de La Rochefoucauld, à Nicolas des Noyers, sieur de la
Brosse. En 1697, elle appartenait à Henri-Augustin le Pileur, depuis évêque de
Saintes, et avait probablement conservé sa largeur primitive; mais elle avait alors
perdu la moitié de son ancienne profondeur.
Maison sans désignation en 1^89, qui eut pour enseigne le Chat-Lie' en 1671,
et appartenait alors au sieur de Champdoré. Elle faisait hache derrière la précé-
dente et aboutissait à une maison de la rue Saint-Thomas dont l'emplacement,
uni à celui des maisons du Chat-Lié, des Trois-Fleurs-de-Lis et de l'hôtel de
Pontchartrain , n'était occupé que par une seule maison au xvie siècle. L'enseigne
du Chat-Lié était une allusion au nom de Robert Challier, dont il est question
dans l'article suivant.
Hôtel de la Roze, puis DE PONTCHARTRAIN. La partie postérieure de l'hôtel
de Pontchartrain, celle qui dépendait du fief de Fromenteau, avait été élevée
sur le terrain de deux ou plutôt de trois maisons qui , avec les deux précédentes ,
appartenaient à Charles d'Illiers en 1689, et, en 1627, avaient nom l'hôtel de la
Rose. Au milieu du siècle suivant, toutes ces maisons n'en formaient plus qu'une
6
42 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
seule, laquelle fut divisée en quatre portions, le 10 avril 1 63 1 : Thomasse Thi-
boust, veuve de Robert Challier, qui avait possédé la maison en totalité, eut le lot
situé sur la rue Saint-Thomas, vers le sud; à Charlotte de La Rochefoucauld,
échut le lot le plus rapproché de la rue des Orties, sur la rue Fromenteau, celui
où s'éleva la maison des Trois-Fleurs-de-Lis; à Pierre Maugis, sieur des Granges,
abbé de Saint-Ambroise , fut attribué le lot contigu, où s'éleva plus tard la
maison du Chat-Lié; Anne de Beauharnais, veuve de Paul Phélypeaux de Pont-
chartrain, devint propriétaire du quatrième lot sur la rue Fromenteau, et y
bâtit l'hôtel dit de Pontchartrain ou de Phélypeaux, qu'elle vendit au Roi, nous
ne savons au juste en quelle année. En 1707, l'hôtel de Pontchartrain, dont
la principale entrée était rue Saint-Thomas, s'appelait l'hôtel de Gramont, et, en
1760, l'hélel de Lesdiguières , parce que le «sieur de Lesdiguières n y habitait W-
mais il paraît qu'il n'en jouissait qu'en vertu d'une concession temporaire, car on
sait que Louis XV donna l'hôtel à sa première favorite en titre, la comtesse de
Mailly, et qu'elle en disposa jusqu'à sa mort, arrivée en 1 75 1 . Le 21 mars 1762,
Louis XV en fit une nouvelle libéralité au profit d'Abel-François Poisson de Van-
dières, directeur de ses bâtiments, frère de la duchesse de Pompadour, et connu
sous le nom de marquis de Marigny. L'hôtel de Lesdiguières, dit, en conséquence,
de Marigny, existait encore en 18/18, et il avait servi de caserne dans les der-
niers temps.
Maison sans désignation en 162/1, puis de l'Etoile en 1700. C'était un mor-
cellement de la maison suivante, dans laquelle elle paraît avoir été confondue en
t&84.
Hôtel de Vendôme, de Chevreuse et de la Marche. Il appartenait, en
1 309, à Jean V, comte de Vendôme; dans la seconde moitié du xiv6 siècle, à Pierre,
seigneur de Chevreuse, et, dès 1 399, à Jacques II de Bourbon, comte de la Marche,
d'où lui est venu le nom d'hôtel de la Marche, sous lequel il était encore connu au
temps de Louis XIV. En 1/189, ^ était la propriété d'un nommé Jean Guérard, après
avoir été celle du chapitre Saint-Thomas-du-Louvre. Sous le règne de Henri III,
la famille des Akakia en avait la possession, et elle la garda jusqu'en 1661. Le
ik mars de cette année, Charles Akakia en aliéna les trois quarts, et, le 3i oc-
tobre suivant, Robert Akakia vendit le reste à Etienne Jehannot de Bartillat.
L'hôtel de la Marche doit être cette maison que, au dire de Sauvai, Béatrix.
comtesse de Montfort, veuve de Robert IV, comte de Dreux, acheta cinq cents
livres en 1 287 <2' : la famille de Béatrix fut alliée à celle du comte de Vendôme. En
façade sur la rue Fromenteau , la maison dont il s'agit aboutissait sur celle de Saint-
Thomas, et il en dépendait un jardin placé de l'autre côté de cette dernière voie.
(i)
Piganiol dit aussi qu'il fut habité par une duchesse douairière de ce nom. — s) T. H, p. 1 28.
RUE FROMENTEAU. /i3
HÔTEL DR LA PETITE-MARCHE (tkh6), dépendance de la maison précédente
qu'on appelait autrefois la Grande-Marche, pour établir une distinction. Il abou-
tissait aussi sur la rue Saint-Tbomas, et le corps de logis qu'il contenait en bor-
dure sur cette dernière rue avait pour enseigne l'Image Saint-Martin, en i53o. Au
commencement du xvme siècle, cette maison et celle qui précède étaient connues
sous le nom de les Petites-Marches et les Grandes-Marches W,
Maison du Cheval-Rouge (1627-1 68g), laquelle, au commencement du xvc siècle,
appartenait à Jehan de Troyes, marchand de chevaux, et tombait en ruines. Abou-
tissant rue Saint-Tbomas, elle renfermait d'abord la maison suivante, dont elle
n'était point encore séparée en 1 584. En 161 3 et 1 635 , elle avait pour enseigne
le Petit-Soleil, tout en conservant celle du Cheval-Rouge. C'était, nous le suppo-
sons, parce qu'elle communiquait avec la maison du Soleil-d'Or, sise rue Saint-
Tbomas, et pour l'agrandissement de laquelle elle avait déjà été amoindrie en
1576. Au commencement du xvne siècle, elle formait deux maisons, dont la se-
conde avait pour enseigne les Images Saint-Simeon et Saint-Judes ; nous n'avons pu
comprendre l'agencement de cette dernière.
Maison de l'Image Saint-Higues (1582-1619), puis de l'Image Saint-François,
et enfin de l'Image Saint-Etienne (1700). Elle était anciennement comprise dans
une de celles qui lui furent contiguës.
Maison de klYmage Nostre-Dame n (1 /427-i584),puisDELAFLEUR-DE-Lis (1696),
qui aboutissait rue Saint-Tbomas. Elle était à l'état de masure en l'an 1 453.
Maison sans désignation en i5i4, puis de la Pomme-Rouge (i55o). En 1575,
elle avait pour enseigne la Rose-Rouge; en 1 588 , elle appartenait à Jacques de
Montmorin, et a été dite, en conséquence, l'hôtel de Montmorin; en 1673, elle
portait l'enseigne de la Serpette, et, vers 1700, on la nommait l'hôtel de Hol-
lande. A l'époque de sa démolition elle avait exactement les mêmes dimensions
qu'en i5i6.
Maison sans désignation en 1^92, puis de «l'Ymage Saint-Béal n (i55o-i597),
du Pot-de-Fer (1570-1 584) et de l'Image Saint-Leu (1668). En i584, elle appar-
tenait à (f Jean Dessoubz-le-Four, -n seigneur de Goujangre, et, en 1696, à Charles
Jaloux, seigneur d'Allainville. Elle n'a cessé d'aboutir rue Saint-Thomas que dans
la seconde moitié du dernier siècle.
Maison où était pour enseigne a la Figure-du-feu-Roy-Henry d (1576-1681), et
qui, vers 1700, avait l'enseigne de l'Ami-du-Coeur. Elle semble n'avoir formé
primitivement, avec la précédente, qu'une seule maison, dont l'enseigne était
l'Image Saint-Pierre, en i46i.
Maison «des Gracieulx <2' t> (1 Z17 1), qui s'appelait, vers 1700, l'hôtel d'Armagnac.
(1) Arch. de l'Emp. cart. S ia/i5 et 1873. mots (gras scievrs), que le changement de la pro-
m L'enseigne des Gracieux traduisait un jeu de nonciation rendrait impossible aujourd'hui.
6.
44 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison du Chef-Saint-Denis (1671-1586). En 1597, e^e était déjà réunie,
ainsi que les maisons suivantes, à l'hôtel de Vignolles, situé rue Saint-Honoré.
Trois Maisons sans désignation (1 584) , dont la dernière était contiguë à la
maison faisant le coin de la rue Saint-Honoré. Vers l'emplacement de ces mai-
sons, il y en avait une qui, en 1 4i 6 et 1 672 , avait pour enseigne cr l'Ymage Saint-
tfYvES.Ti La troisième paraît avoir été appelée, en i520, la Maison du Sabot, et,
au xive siècle, elle dépendait sans doute de l'hôtel de Laval, sis rue Saint-
Honoré. Il est également question, dans les titres, d'une maison contiguë, en
i434, à un hôtel de la Clef, et qui a dû être située dans cette région, car elle
aboutissait aux jardins de aMons. de Laval, n
CÔTÉ ORIENT\L.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'ALXERROIS.
HAUTE JUSTICE DE L'ÉVÊCHÉ.
CENSIVE DU FIEF DE FROMENTEAU,
Enu-eienrue. Maison sans désignation en i54o, puis du Petit-Treillis (i584), et des Trois-
et de Beauvais. Balcons ( i 697-1 7 2 i ) , contiguë aux dépendances de la maison qui formait le
coin de la rue Saint-Honoré, et dont elle avait sans doute fait d'abord partie.
Maison du Cheval-Blanc (i 584) dite l'hôtel Bourgeois en i6g3 et 1719, puis
ayant eu pour enseigne la Boule et l'Image Saint-Louis (1700).
Maison sans désignation en 1 54o, puis de la Galère-Boyale (1 678-1 7 1 3) ou du
Gaillon (1681). Cette maison et celle qui précède paraissent avoir été bâties sur
un terrain dépendant de la suivante. La maison du Gaillon aboutissait à la maison
du Cheval-Blanc en 1681.
Maison de la Croix-Blanche (i54o-i584), et de la Croix-Bouge en 1 633. Elle
était divisée en deux, et cela probablement dès 1 584.
Maison sans désignation en 1671, formant la seconde partie de la précédente,
et rebâtie également en 1661, à la suite d'un arrêt du 4 mai 1 656. Nous avons
trouvé une mention, au xve siècle, de certaines maisons ayant pour enseigne la
Cuiller et qui semblent se confondre avec celles de la Croix-Blanche.
Maison de la Couronne (i420-i55o) ou Couronne-d'Or (1693), et peut-être de
l'Image Notre-Dame en 1567. Les renseignements relatifs aux maisons de ce point
de la rue sont des plus confus.
Maison de ctla Cuillièreu (i524), puis de la Cuiller-de-Bois (1 57 i-i 584) et
du Dauphin (1697). ^e Paraît avoir anciennement fait partie de la précédente,
et portait aussi pour enseigne l'Image Notre-Dame en 1567.
RUE FROMENTEAU. 45
Maison sans désignation en 1 576 , et de d'Écu-d'Orléans en 1697. En 1681, elle
formait deux maisons , dont la seconde n'a point eu d'enseigne , à notre connaissance.
La maison de l'Ecu-d'Orléans dépendait encore de celle de la Cuiller, en 1 584.
Maison sans désignation en 1892 , puis de ccl'Imaige Saint-Loysh (1691-1559),
et de « l'Espée-Rompue v (1550-1619). On doit croire que cette maison fut un
moment réunie avec une de celles auxquelles elle touchait, puisque la maison de
la Cuiller était, suivant un titre de i5a4, contiguë à la maison suivante.
Maison de l'Image Saint-Se'bastien (1689), puis des Images Saint-Siméon et
Saint-Judes (i55o-i 584), qu'on appelait, en i68i4L'hôtel de Nantes et, en 1700,
la maison de la Rose-Blanche. Ce n'était sans doute qu'un morcellement de la
maison ci-après.
Maison du ^Panu (1625-1617), qui, en 1657, se composait de trois corps
d'hôtel , dont l'un , celui du milieu , était à pignon sur rue , et les autres en appen-
tis. De ces trois corps d'hôtel, l'un a été retranché à une époque assez ancienne;
les deux qui restaient, et qui conservèrent l'enseigne du Paon, formèrent, à la
fin du xvue siècle, deux maisons distinctes, dont la seconde avait pour enseigne
la Grande-Grenade, en 1687. L'exiguïté de l'emplacement rend cette circonstance
difficile à comprendre.
Maison sans désignation en i586, puis de la Ville-de-Tours (16. .), et qui
parait avoir eu pour enseigne l'Image Saint-Jacques vers 1 700. A la fin du xvie siècle ,
elle était réunie encore à la suivante.
Maison de la Souche (i 5 1 5) , puis de la Cuiller (1617), qui, dès la fin du
xvie siècle, dépendait de la maison de la Bergerie, sise rue Jean-Saint-Denis;
elle appartenait au Roi en 1681.
Maison de la Corne-de-Cerf (i532-i584), puis du Cheval-Noir (1671), ayant
fait d'abord partie de la maison du même nom , rue Jean-Saint-Denis.
Maison sans désignation vers 1570, puis de l'Ecu-de-France (1572-1 655)
et du Château-Royal (1697). Dite l'hôtel de Nevers en 1767, elle était alors, et
depuis 1750, réunie à la maison suivante, dont elle avait peut-être toujours été
une annexe.
Maison du Pied-de-Biche (1 578-1 635) , qui, en 1601, avait un petit corps
d'hôtel sur la rue de Beauvais, et était contiguë à la maison faisant le coin sep-
tentrional de cette rue.
rues
de Beauvais
Maison sans désignation en i584, puis du Mouton en 1620, faisant le coin bhia
„ _ .de Beau. «.a
méridional de la rue de Beauvais. En i53o, elle était encore contondue avec les etd«orti<s
suivantes; le Roi en fit l'acquisition les 7, 1 1 et 19 juin i6o5.
Maison où il y avait un échaudoir en i53o, et qui faisait partie de la sui-
vante; elle fut acquise par le Roi le 10 juin i6o5.
46 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation en i386, puis de kla Teste-de-Be'lierti (1576) ou
de Mouton (i58&). En 1676, elle s'étendait encore jusqu'au coin de la rue de
Beauvais et avait une issue dans cette rue; elle fut acquise par le Roi le 19 juillet
i6o5.
Une des trois maisons qui précèdent avait pour enseigne l'Image Saint-Martin
au commencement du xve siècle.
Jardin dépendant du Louvre (voir la Description du vieux Louvre, p. i58), puis
maison ayant pour enseigne la Corne-de-Cerf en 1 57 1 , et aussi les Lions en 1 58 1
et 1 585. Le h juin 1607, le sieur de La Varenne obtint du Roi cette maison, et,
sur l'emplacement qu'elle occupait avec les trois maisons qui précèdent, il bâtit
un grand hôtel, qu'il vendit, le 6 mai 161 3, à Gilles de Souvré, gouverneur de
Tours et depuis maréchal de France. L'hôtel de Souvré, dit l'auteur du Supplément
aux antiquités de Paris, c? est petit, a sa veuë sur le petit jardin du Louvre, et va, par
«une allée, sur le pont qui entre au Louvre, du costé de la rivière. i> Le 8 avril
1 658 , il fut cédé au Roi, moyennant la somme de 90,000 livres, par Jacques
Blanchet, agissant au nom de sa pupille Anne, fille mineure de Charles de Souvré,
marquis de Gourtanvaux. Dans le siècle passé , sur le terrain de l'hôtel de Souvré
s'élevaient des constructions habitées par quelques particuliers favorisés, et sur-
tout par des artistes et entrepreneurs chargés des travaux du Louvre. Au nombre
de ces artistes figurèrent un des Coustou et l'architecte de Cotte.
Maison du Cheval-Blanc (1578-1673), puis du Sarot (16..) et de l'Image
Saint-Louis (1657), dite, en 1573, aboutir aux offices du Louvre.
Maison de (tl'Ymage Saint-Jacques -n (1 606-1 65o), derrière laquelle était située
la fourrière du Louvre.
Maison de «l'Ymaige Saint-Niciiolash (1677), puis du Fer-X-Ciieval (i55o-
1669), qui appartenait au collège Saint-Nicolas et fut achetée 1 1,000 livres par
le Roi, le dernier jour d'octobre 1669.
Maison sans désignation en 1571, qui provenait sans doute d'un morcellement
de la précédente, et avait pour enseigne le Portrait de Louis XIII en 1657. Elle
appartenait alors à Gilles Baudouyn, contrôleur de la maison du Roi, lequel la
vendit à son maître, le i3 décembre 1669. En 1657, elle était séparée de la sui-
vante par une autre, qui n'était vraisemblablement qu'une portion de la maison
du Portrait de Louis XIII, et qui, le 7 novembre 1669, fut aussi vendue au Roi
par Anne Métezeau, veuve d'Etienne Baudouyn, frère de Gilles.
Maison des Trois-Pas-de-Degre' ? (1571), appartenant au comte de Schomberg
en i584, appelée pour cette raison Hôtel de Schomberg, et plus tard Hôtel ou Petit
hôtel de Vendôme, parce qu'à la date du 10 janvier 1609, elle fut achetée par le
comte de Vendôme, de François de Daillon, comte du Lude. L'hôtel de Vendôme,
dit encore de Schomberg en 1626, et acquis, le 9 mai 1 635 , par Thomas Scarron
RUE FROMENTEAU. h
de Vaure, oncle du célèbre cul-de-jatte, fut par lui cédé au Roi, le 1 9 avril 1 667,
pour la somme de 126,000 livres.
Piganiol dit que Catherine d'Estrées avait, dans la rue Fromenteau, un hôtel
où elle fit élection de domicile lors du contrat de mariage de son fils César de
Vendôme, le 5 avril 1698, et il ajoute que cet hôtel était vraisemblablement
le même que celui de PhélypeauxO. Piganiol se trompe : l'hôtel de Gabrielle
n'est autre que celui dont nous parlons, et qui, dans l'acte de vente de 1667,
est indiqué comme communiquant par un passage avec la cour du Louvre. D'ail-
leurs Cheverny, dans ses Mémoires, affirme que Gabrielle était «logée à l'hostel
«de Schomberg, derrière le Louvre ®;v mais Gabrielle n'y demeura que lorsque
Henri IV l'eut acheté pour elle de Gaspard de Schomberg, comte de Nanteuil,
c'est-à-dire vers la fin de l'année 1696. On en a la preuve par une lettre datée
du 2 8 octobre de cette année , et ainsi conçue : « Monsieur de Schomberg , j'ai
« sceu que vous vouliés vendre vostre maison de Paris; et pour ce qu'estant proche
«du Louvre, comme elle est, elle seroit fort propre à ma maistressse, qui en
« cherche une à achepter, j'ay pensé que vous seriez aussy ayse de la lui vendre
«qu'à un aultre. C'est pourquoy je vous prie de me mander si vous estes en ceste
«volonté, et combien vous la voulés vendre au dernier mot. C'est là le subjet de
«la mienne, laquelle je finiray par prier Dieu vous avoir, Monsieur de Schomberg,
«en sa garde. — Henri. — Ce xxviu octobre, à Rouen. ■»
Maison de l'Écu-de-France (1571), puis du Port-de-Salut (1610-1626), située
devant «le petit huis a de Saint-Nicolas.
Maison avec quatre «eschauldouersn (i53o), puis dite des Trois-Echaudoirs
(i563-i6io), des Trois-Masures (i586), et du Sauvage (1618-1626). Elle est
énoncée en i53o «faisant le coing sur le cay, n et, en i582, tenant, vers le
midi, «aux murs du Louvre, a Comme toutes les maisons précédentes, elle abou-
tissait aux murailles des basses-cours du château. Dans les comptes des bâtiments
royaux pour l'année 1670, on trouve la mention d'une somme de 65o livres
payées à Jean de Saint-Germain, vendeur de bétail, pour «une maison, court et
«appartenances, seize rue Frémantel, près et joignant la court de derrière du
«chasteau du Louvre ;n et il est question, en outre v d'une somme de 65o livres
donnée à Guillaume Donnet, marchand boucher, pour la cession par lui faite
au Roi d'un « eschaudouer couvert de tuille, court, puis, le lieu ainsy qu'il se com-
« porte, v situé aussi «rue de Frémentel.fl On ne voit point quelle est précisément
(1) Descript. de Paris , t. II , p. 3 1 1 . Lebeuf ( 1. 1 , blances , et les titres de l'abbaye Sainte-Geneviève en
p. Qo8)a soutenu, bien à tort, que la rue Fromen- démontrent d'ailleurs la fausseté,
teau ou Fromentel, dans laquelle babitait Gabrielle, (,) Il le dit à propos de l'attentat de Cbâtel,
était celle de la Montagne-Sainte-Geneviève. Une qu'il croit avoir eu lieu à l'hôtel Schomberg, et qui
pareille assertion est contraire à toutes les vraisem- fut commis à l'hôtel du Bouchage.
48 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
la première de ces maisons ; mais la seconde paraît être celle des Trois-Masures.
La maison des Trois-Echaudoirs est énoncée devant trie Gros-Caillou v dans un
titre de i582; nous n'avons trouvé aucun document qui nous renseignât sur ce
Gros-Caillou.
Les maisons de la rue Fromenteau, situées derrière le Louvre, et dont l'une
avait pour enseigne l'Image Saint-Jean en t hhh , ayant été successivement démolies,
il s'ensuivit une diminution importante dans les revenus du chapitre Saint-Honoré,
qui fut indemnisé par un arrêt du Conseil d'Etat, rendu le 2 5 janvier i6g5.
RUE SAINT-HONORE.
La rue Saint-Honoré commençait à l'extrémité occidentale de la rue de la Fer-
ronnerie, et, sous le règne de Henri IV, elle finissait encore à la seconde porte
Saint-Honoré, laquelle faisait partie de l'enceinte du xive siècle.
Telle qu'on la voit aujourd'hui, elle est formée de trois tronçons jadis fort dis-
tincts : le premier s'étendait de la rue de la Ferronnerie à la première porte
Saint-Honoré (située à quelques mètres de la rue de l'Oratoire); le second était
compris entre cette première porte Saint-Honoré, bâtie par Philippe-Auguste, et
la deuxième porte Saint-Honoré, située près de la rue Saint-Nicaise; le troisième
tronçon se prolongeait à travers l'ancien faubourg Saint-Honoré, lequel finissait un
peu avant la rue Royale. Primitivement, les trois parties n'avaient composé qu'une
seule et même voie. Tronc commun des chemins du Roule , de Neuilly, de Clichy, etc.
cette voie remontait certainement à une antiquité reculée; mais elle n'était vrai-
semblablement pas d'origine gallo-romaine , et nous n'avons pu en trouver aucune
mention antérieure au xiue siècle. Une charte de 1222 l'énonce simplement :
strata publica, ab ecclesia Sancti Honorati. . . usque ad poncellum de Rollo (le Roule).
La rue Saint-Honoré a emprunté son nom à la collégiale qui y fut fondée, en
1 2o4, entre les deux voies représentées aujourd'hui par les rues Croix-des-Petits-
Champs et des Rons-Enfants. Aussi le tronçon situé au delà de l'enceinte de Phi-
lippe-Auguste est-il celui qui, le premier, a été appelé rue Saint-Honoré, vicus
Sancti Honorait (12/11, 1260), ou, à cause de son importance «grant rue Saint-
Honoré, n magnus vicus Sancti Honorati (ia55), magnus vicus per quem itur ad
dotnum Cœcorum (i3o6), et quelquefois chaussée Saint-Honoré : l'expression de
chaussée s'appliquait autrefois à toutes les grandes routes partant de Paris, et
cessait d'être en usage lorsque ces routes s'étaient transformées en rues. Quant au
tronçon compris dans l'enceinte de Philippe-Auguste, il s'est confondu, sous le nom
de grand'rue Saint-Honoré, avec celui qui reçut d'abord cette dénomination, mais
«î
RUE SAINT-HONORÉ. 49
vers la fin dh xive siècle seulement, après que la construction de la clôture de
Charles V eut annexé à la Ville son premier faubourg occidental. Plus ancienne-
ment il n'existait pas dans l'intérieur de Paris de rue Saint-Honoré , et la voie qui
continuait la rue de la Ferronnerie était considérée comme constituant deux rues:
l'une, la plus rapprochée du Grand-Pont, qui avait nom la rue du Château-Fétu;
l'au tre qu'on appelai t la rue de la Croix-du- Tiroir W, « vicus crucis du Tiroir r> ( 1 2 9 h ) ,
et qu'on désigna antérieurement par la simple formule aà la Croix du Tiroir,»
juxta crucem Tyrouer (12/18), ante crucem dou Tirouer (1267), à cause d'une cer-
taine croix connue sous ce vocable et située devant la rue de l'Arbre-Sec. Du
reste , il n'y a pas un grand nombre de titres où il soit fait mention de la rue de
la Croix-du-Tiroir, et déjà, au commencement du xivc siècle, on ne la distinguait
pas de la rue du Château-Fêtu. On lit dans un titre de i3zli : in vico de Chesteau-
Feslu, juxta crucem de Tyrouel. Au contraire, il existe une foule d'indications de
la rue du Château-Fêtu, que nous avons vue énoncée apud Castellum Festuci
(1227), vicus qui vocatur Chastel-Festu ( 1 2 3 h ) , vicus Castri Festuci (i238, 1255),
vicus Castri-Festu (12/16), locus qui dicitur Castellum Festuci (12/17), v*au ?m' dicitur
Chastel-Festu, per quem itur ad ecclesiam Sancti Eustachii (1267), vicus de Castello
Festucœ (1275), «rue de Chastiau-Festu » (i3o5, 1387, etc.), et enfin «rue Sainct-
Honoré, dicte le Chasteau-Festu » (1662). Le château Fétu, qui donna son nom à
la rue, était voisin de la rue Tirechape.
Le mot Tiroir a été écrit de bien des façons: Tyroor (12 36), Trioer (i238),
Tyrouer (1 238, 12/18, 1253), Tirout (i253), Tirouer (12 56, 1267, i368,
1691, 1567, etc.), Tyruel(i259), Tyrouel (1282, 1286), Tiroer (1268, 1367),
Tyroir (i293),Tiréeur (12..), Turuol (i3o8), Trieur (i3/»/i), Tréour (i387),
Tiratorium (1/187), Traiouer (i52i), Trahouer (1 558), Tréhouer (1 56g), Trai-
houer, Traihoir, Trahoir, Tiroir, Tiroi, etc. mais toutes ces variantes tendent à
démontrer que le radical est le verbe tirer ou trier, trahere. H n'est donc pas
permis de supposer, comme Sauvai et Bonami, que la Croix-du-Tiroir devait son
nom au fief de Thérouenne, d'ailleurs fort éloigné de là; il serait encore moins
raisonnable de croire, comme du Breul, que la Croix-du-Tiroir perpétuait le sou-
venir du supplice infligé, en 61 3, à Brunehaut, qui ne fut pas même mise à mort
à Paris. Quant à la conjecture de Lebeuf sur certaines machines à tendre des étoffes
(tiratoria) qui auraient pu se trouver là, elle n'est fondée sur aucun document.
Ce qu'on tirait, ou plutôt ce qu'on triait à l'extrémité de la rue de l'Arbre-Sec,
c'étaient, suivant toute apparence, les animaux de boucherie qui y étaient
amenés. Baoul de Presles le dit formellement : rr A proprement parler est-elle
«appelée la Croix-du-Tirouer, pour les bestes que l'on y trioit^. -n Or, non-seule-
(1' La rue de l'Arbre-Sec a été aussi nommée rue (,) Cité de Dieu, liv. V, chap ixv, P i34 v° du
de la Croix-du-Tiroir, au xm" siècle. manuscrit de la bibliothèque Sainte-Geneviève.
'• 7
50 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
ment aucun texte n'a jamais été invoqué pour prouver que Raoul de Presles s'est
trompé, mais encore une charte de 1 357 démontre qu'il a dit vrai, et que, de
son temps, il existait de ces tiroirs ou traits près des marchés. Dans cette charte
est indiqué un terrain placé entre un certain hôtel et <r le trait de la Place aux
(t Pourceaux W. n
La signification du mot Château-Fétu n'a pas été mieux élucidée par les his-
toriens que celle du mot Tiroir. Lebeuf, que sa science incontestable n'empêchait
pas toujours de se livrer à des suppositions gratuites, a cru pouvoir mettre à profit
ses conjectures sur la Croix-du-Tiroir, en imaginant une hypothèse assez singu-
lière à propos du Château-Fêtu de la rue Saint-Honoré ; à son avis, c'était une
espèce de halle couverte de branchages*2', laquelle aurait servi à déposer les
étoffes préparées dans le tiratorium du voisinage. Ainsi que pour la Croix-du-
Tiroir, Lebeuf ne cite aucun fait à l'appui de son opinion. Avant nous, Jaillot a
fait observer qu'on ne comprenait guère le mot de château appliqué à un han-
gar; il a de plus objecté qu'il existait, en i368, un autre Château-Fètu près du
port Saint-Landry, et qu'on n'y vendait aucune marchandise. 11 faut ajouter que
nous connaissons un troisième Château-Fêtu (de 1/107) rue des Chiens, puis un
quatrième rue de Bièvre, et que les titres relatifs à ce dernier nous permettent
d'en interpréter le nom. Effectivement, après avoir été énoncé , en 1 358 , ce l'hostel
rr appelé Chasteau-Festu , v il a été, en i368, nommé et le chastel Malgarny;v en
1 388 , « l'hostel Maugamy,» et, en 1/128, ce n'était plus qu'une « grandie <3>.t> La
conséquence ne semble pas difficile à tirer : fétu est synonyme d'objet sans valeur;
«je n'en donnerais pas un fêtu,n dit-on pour exprimer le peu de cas qu'on fait
d'une chose. Château-Fêtu, Caslelhm Festucœ, et Château-Malgarni veulent donc
dire ironiquement une maison misérable, en mauvais état, n'ayant ni solidité, ni
prix, comme un fétu de paille '4'.
Suivant l'acte de donation daté de 120/1, la première pièce de terre destinée
à la fondation de l'église Saint-Honoré était située sur le chemin de Clichy, viam
que tendit ad Clichi. Correspondant à l'emplacement du cloître , elle se trouvait en
bordure à la fois sur les rues Croix-des-Petits-Champs, Saint-Honoré et des Bons-
Enfants, si toutefois cette dernière existait déjà, ce qui n'est nullement prouvé.
Malgré cette incertitude et l'absence de tout document confirmatif , Jaillot a avancé
que la rue des Bons-Enfants se confondait avec le chemin de Clichy énoncé dans
la donation de 120/1; l'erreur est manifeste. La rue des Bons-Enfants, dont la
(1) Arch. de l'Emp. reg. S io5a, fol. i45. constituer la cause d'une appellation particulière.
(,) Histoire du diocèse de Paris, t. I, p. 5g. — (3) Arch. de l'abbaye Sainte-Geneviève, passim.
Des branchages ne motiveraient point le mot fétu, (4) C'est évidemment une idée analogue quia fait
qui s'entend de la paille. Quant au chaume, il était donner à plusieurs maisons de la même époque le
beaucoup trop commun à Paris, au xm" siècle, pour nom caractéristique de, Château-Frileux.
RUE SAINT-HONORE. . 51
direction n'a jamais subi de changement depuis le xme siècle, tend vers Mont-
martre, et ne se dirige pas vers Clichy. Jusqu'à une époque assez rapprochée,
elle n'a constitué 'qu'une ruelle, et non une rue, circonstance très propre à dé-
montrer qu'elle n'est point une ancienne route. On n'aperçoit d'ailleurs, au delà
de son extrémité, aucune trace de nature à faire croire qu'elle se prolongeait jadis
dans la campagne. En outre, lorsqu'on désigne un terrain bordé par trois voies,
il est naturel de nommer la voie principale de préférence aux autres ; or il est
absolument inadmissible que la rue Saint-Honoré ne fût pas, à l'époque dont nous
parlons, beaucoup plus importante que la rue des Bons-Enfants, alors même que
cette dernière eût effectivement été le chemin menant à Clichy. Par conséquent ,
dans l'indication de la charte de 120&, on doit voir la rue Saint-Honoré plutôt
que la rue des Bons-Enfants, d'autant plus encore que l'arpent qui fut donné,
et dont le cloître reproduit exactement la forme, offrait sur la rue des Bons-
Enfants un développement deux fois moins grand que sur la rue Saint-Honoré.
Au surplus, il est évident que la rue Saint-Honoré eût toujours formé le tronc d'où
serait parti le chemin de Clichy, si celui-ci s'était véritablement identifié avec la rue
des Bons-Enfants, et il n'y aurait pas eu moins de motifs pour donner le nom de
chemin de Clichy à la rue Saint-Honoré qu'à la rue des Bons-Enfants. Nous croyons
qu'en réalité la rue Saint-Honoré était considérée comme conduisant à Clichy, parce
qu'elle avait pour embranchement le chemin d'Argenteuil , aujourd'hui rue d'Ar-
genteuil, lequel, avant d'atteindre ce village, passait par Clichy. H faut donc en
conclure que la rue Saint-Honoré est bien celle que désigne le nom de chemin
de Clichy dans la donation de 120&, premier document où il en soit fait mention.
CÔTÉ MÉRIDIONAL.
( Partie s'étendant de la rue des Poulies à la seconde porte Saint-Honoré. )
PAROISSE SALNT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE DE L'ÉVÉCHÉ.
CENS1VE DU CHAPITRE DE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
Maison du Cheval-Rouge (i35o-i63a), puis de L'Eci-DE-FRANCE(i6io), faisant Entre u»r
le coin occidental de la rue des Poulies. En 1 53 1, elle avait pour enseigne l'Ecu- ei. a-Autriche
de-Navarre, et se composait de sept corps d'hôtel, lesquels devinrent sept mai
sons différentes, dont quatre faisaient front sur la rue des Poulies, et trois sur la
rue Saint-Honoré. La maison du coin avait encore pour enseigne l'Ecu-de-France
en 1700.
7-
ou de l'Oratoire.
52 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison de l'Ecu-de-Navarre (i 54o-i63(j), ayant d'abord fait partie de la
grande maison de ce nom.
Maison du Flacon-d'Étain (i6o5), comprise anciennement, de même que la
précédente , dans la maison qui formait le coin de la rue.
Maison de la Longue-Allée (i 575-1 644), ainsi appelée parce qu'elle ne com-
muniquait avec la rue Saint-Honoré que par le moyen d'une allée. Elle avait pour
enseigne le Duc-de-Valois en 1750. C'était antérieurement à 1 538 une dépen-
dance de la suivante. Réunies en une seule, elles avaient pour enseigne la Rose
en ik'îh.
Maison de l'Image Saint-Jean-Baptiste (1 /189-1 58a ). Au xvne siècle, elle était
divisée en deux : la première a eu pour enseigne la Ville-de-Bruxelles en 1700;
la seconde, les enseignes de l'Image Notre-Dame en 1 63o, et du Mont-Saint-Michel
plus tard.
Maison de l'Ecu-de-France (i53i-i628), qui provenait d'un morcellement de
la maison suivante, et y aboutissait d'abord.
Maison de l'Ecu-de-Flandres , puis du Lion-Noir (1689-1640). La première
partie de cette maison avait formé la maison de l'Ecu-de-France ; au xvuie siècle ,
la seconde partie s'appelait l'hôtel des Américains, nom qu'elle a conservé jusqu'à
nos jours.
Maison du Chariot (1 364) ou Chariot-Rouge (1 5 3 9- 1 655) et du Chariot-Royal
(16. .). Elle aboutissait à l'hôtel d'Étampes en i4o6 et i43g. Un corps d'hôtel
qui en dépendait avait pour enseigne l'Autruche en 1637.
Maison du aPAPEGAULTn (1 426-1 633). En 1 364, elle était encore comprise dans
la maison du Chariot ou dans celle qui faisait le coin de la rue d'Autriche.
Maison de l'Ecu-de-Bourron (i439~i573),puisDE l'Image Saint-Claude (1637),
qui était probablement un morcellement de la précédente.
Maison sans désignation en i364, puis de la Licorne (i49i-i64o), faisant le
coin oriental de la rue d'Autriche ou de l'Oratoire. Au xvuc siècle, elle fut divisée
en deux parties: la première conserva l'ancienne enseigne, et la seconde, for-
mant le coin, eut en i63g et en 1700 celle de l'Hôtel-des-Parfums.
CENSIVE DE SAINT-DENIS DE LA CHARTRE.
Km.* ie» me» Partie de I'Hôtel Saint-Pol, faisant le coin occidental de la rue d'Autriche,
et d" coq. et séparée des maisons suivantes par le mur d'enceinte de Philippe-Auguste. Nous
avons vu un plan antérieur à 1745, où, sur cet emplacement, sont figurées deux
maisons séparées entre elles par une allée conduisant à l'église de l'Oratoire. Ces
deux maisons n'en constituaient d'abord qu'une, laquelle, ainsi que nous l'avons
dit, fut vendue par Pierre Legrand à la Congrégation le 2 7 février 1 6 1 9. Au même
lieu s'élève actuellement le portail de l'église de l'Oratoire.
RUE SAINT-HONORÉ. 53
MAISON DE L'ORATOIRE. La congrégation des prêtres de l'Oratoire se forma,
en France, sur le modèle de celle que Saint-Philippe de Néri avait établie à
Rome; mais elle en demeura toujours indépendante. Elle eut pour instituteur
Pierre de Bérulle, qui, dans le dessein de créer une pépinière de jeunes prêtres
recommandables par leurs lumières et leurs mœurs, s'associa cinq ecclésiastiques
de distinction , et s'installa avec eux , le 1 1 novembre 1611, dans la maison du
Petit-Bourbon, aujourd'hui le Val-de-Grâce. Tels ont été les modestes débuts de
la société célèbre qui a produit les Malebranche, les Massillon et nombre d'hommes
éminents.
La bulle d'institution canonique, sollicitée du pape par Marie de Médicis, dès
le 19 août 1611, ne fut délivrée que le 10 mai 161 3; toutefois, à cette seconde
date, la congrégation avait déjà une existence légale. En effet, sur la demande
de sa mère , Louis XIII fit expédier au mois de décembre 1611, des lettres pa-
tentes autorisant l'érection de la Communauté, qu'il reconnut de fondation royale,
et ces lettres furent enregistrées au parlement le h septembre 1 6 1 2 , à la charge
de représenter, dans le délai de trois mois, le consentement de l'Evêque, qui fut
accordé le 1 5 octobre. La Régente s'était en outre déclarée, le 2 janvier 1612,
fondatrice de la nouvelle congrégation, que la marquise de Maignelay avait gra-
tifiée, le 21 décembre précédent, d'une somme de 5o,ooo livres tournois, des-
tinée à l'achat de maisons et terrains.
Le succès ayant couronné les efforts du fondateur, et le nombre de ses dis-
ciples s'augmentant sans cesse, il résolut de leur procurer, dans la Ville même,
une habitation plus convenable que celle du faubourg Saint-Jacques. Il obtint
l'hôtel de la Monnaie, qui était situé rue de ce nom, et devait cesser de servir à la
fabrication des espèces; mais le projet ne se réalisa pas et Bérulle jeta ses vues
ailleurs. Ayant déjà acquis, le 1 5 janvier 161 3, l'hôtel de Matignon, qu'il ne
garda point, il conclut, le 20 janvier 1616, avec la duchesse de Guise le marché
qui le mit en possession de l'hôtel du Bouchage. (Voir Rue du Coq.) Huit jours plus
tard, la Congrégation s'y transporta, et trois mois après elle y avait une chapelle
provisoire.
Agrandie par l'annexion, effectuée en 1619 et 1621, de propriétés sises dans
les rues d'Autriche, du Coq et Saint-Honoré (voir à l'article de ces rues), la mai-
son de l'Oratoire ne renfermait point encore de chapelle proportionnée à son
importance, et il devint nécessaire d'en élever une. On commença, le 19 juillet
1621, à jeter les fondements de celle qui existe, et la première pierre, incrustée
de deux lames d'argent portant des inscriptions, fut posée, au nom du Roi, le
2 2 septembre 1621, par le duc de Montbazon , gouverneur de Paris. On y travaillait
depuis près de deux années, lorsque, le 16 août 1623, le marquis de LaVieuville,
surintendant des bâtiments, poussé par les ennemis de la Congrégation, se plaignit
54 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
au Roi, dans un conseil, de ce qu'elle bâtissait une vaste église, et représenta
que, si l'édifice s'achevait, il serait nécessaire de l'exproprier à grands frais quand il
s'agirait d'exécuter les grands projets conçus pour le Louvre; il ajouta qu'il avait
fait intimer par les trésoriers de France l'ordre de suspendre les travaux. La Com-
munauté se défendit; elle démontra que les projets adoptés n'atteignaient point
sa maison, et, le 17 septembre, elle obtint mainlevée des prohibitions qui lui
avaient été signifiées*1'. Bientôt une circonstance des plus heureuses vint com-
penser largement les ennuis qu'on lui avait suscités : le 23 décembre i6a3, dans
un conseil où l'on décida que la chapelle de l'ancien hôtel de Bourbon serait
rasée, Louis XIII manifesta sa volonté de la remplacer par l'église de l'Oratoire,
et chargea sur-le-champ son architecte , Clément Métezeau , de modifier les plans
de ce dernier édifice de façon qu'il pût entrer dans les bâtiments du Louvre. Le
même jour, le général de la Congrégation alla remercier le Roi, qui lui octroya
un brevet où l'église fut qualifiée à' Oratoire royal; puis, par un arrêt du Conseil
d'Etat, du 1 7 juillet 162/1, où il est exprimé que le Roi se proposait de comprendre
dans le Louvre une partie de la maison de l'Oratoire, il fut ordonné que l'église
serait orientée de telle sorte que son axe prolongé passât par le centre du palais,
ce qui eut lieu.
Vers la fin de septembre i6a5, les travaux de l'église furent interrompus,
parce qu'il n'avait point été possible d'acquérir deux maisons qu'il fallait démolir,
et que la Congrégation ne put les acheter qu'en 1627 et i65i. On dit cependant
que l'église fut terminée en i63o®; mais cela ne saurait s'entendre que du chœur
et de la croisée; quant à la nef, elle fut simplement commencée®, et resta fort
incomplète jusqu'en l'année 1 7 ^5. L'architecte Caqué entreprit alors la con-
struction du portail ainsi que des parties adjacentes, en conservant le style dans
lequel avait été construit le monument. Suivant Piganiol , celui qui en dressa les
premiers plans fut Clément Métezeau, auquel aurait succédé Lemercier, chargé
de réparer les fautes commises par son prédécesseur. On lit dans le journal de la
Société, probablement plus digne de confiance : crElle (l'église) est bâtie sur le
a dessein de M. Jacques Lemercier, fameux architecte, et l'ouvrage a été conduit
rrpar M. Métezeau, premier architecte du Roy. 11 L'église de l'Oratoire, affectée
(1> Journal historique, manuscrit, de la Maison de
l'Oratoire, p. 0,0. Arch. de l'Emp. reg. MM 623.
(î) A l'extérieur de ]a chapelle absidale est gravée
l'inscription suivante :
I DV bOIS bELLANGER IDVS
1638
(3) Les Annales manuscrites de l'Oratoire con-
tiennent ce passage dont la rédaction paraît appar-
tenir a deux époques : * A la fin du mois de sep-
tembre de l'année i6a5, nous avons cessé de faire
rr travailler à la construction de notre église, que
rtnous ne pouvons finir, aiant besoin pour cela de
rr l'emplacement de la maison du sieur Morel et des
« sieurs de Montreuil, qui entrent dans le dessein,
rret qu'il ne nous a pas encore été possible d'ac-
rr quérir. Il reste encore à faire trois travées de lon-
gueur depuis la voûte de la croisée , jusqu'au por-
rrtail inclusivement, de laquelle partie les fondations
RUE SAINT-HONORE.
55
aujourd'hui au culte protestant, renfermait le tombeau du cardinal de Bérulle,
œuvre remarquable de François Anguier. Les sculptures du portail ont été exécu-
tées par Adam Lecadet et Francin , statuaires du roi.
CENSIVE DE L'EVECHE.
Maison sans désignation en 1878, puis des Trois-Serpettes (1 568) , du Renard
(i 58 1) et de l'Éperon-d'Or (i6o3-i656), contiguë au mur de la Ville. Vers 1620,
elle appartenait à Pierre Morel l'aîné, éperonnier du roi, et, dès 1575, elle ren-
fermait deux corps d'hôtel qui, en 161 3, étaient devenus deux maisons distinctes.
La seconde fut acquise par la congrégation de l'Oratoire, le 20 février 1627, et
la première, le i5 août i656. Sur l'emplacement de celle-ci fut élevée une partie
du portail de l'église, et sur l'emplacement de l'autre il existait, en 1700, deux
maisons ayant pour enseigne le Lion-d'Or et l'Enfant-Jésus.
Maison du «Beuft> (1878), puis du Boeuf-Couronné (1689-1660), et du Louis -
d'Or (1700). Elle fut acquise par les pères de l'Oratoire le 28 juin 1627.
Maison des (tRatzti (1878), puis «de l'Escu-de-Polongne d (1 586- 1660), et de
LA PeRLE-DES-PlUMES (1700).
Maison du ctHeaulmeti (1878-1660), où, vers le milieu du xive siècle, on ven-
dait de la cervoise. Cette maison et les trois précédentes aboutissaient aux dépen-
dances de l'hôtel Saint-Pol W.
Maison sans désignation en 1575, puis du Volet-Blanc (160 3- 1660), et du
Boeuf-Couronné (1700), laquelle, en i53o, faisait encore partie de celle du
Heaume. Entre l'une et l'autre, vers 1660, on comptait deux maisons.
Maison de l'Image Saint-Martin (1878), puis du Babot (1572-1660), et du Roi-
de-Frvnce (1700).
Maison sans désignation en 1575, puis de la Pomme -Bouge (i6o5), et de la
B\\\ikhe-i>k-Fiunce (i 636-1 700). Elle était encore comprise, en i53o, dans une
des maisons qui, en 15^5, lui étaient contiguës, vraisemblablement dans celle du
-sont faites. Elle est bâtie sur le dessin de M. Jac-
-ques Lemercier, fameux architecte, et l'ouvrage
Ta été conduit par M. Mélezeau , premier architecte
"du Roy. Elle consiste à présent en une nef de
-treize toises et demie de longueur, sur trente un
'•pieds de largeur dans œuvre, et soixante-trois
-pieds de haut sous la voûte, qui est faite depuis le
" rond-point, vers le chœur, jusques et y compris les
fdeux côtés de la croisée; au droit de ladite croisée,
ril y a deux chapelles de chaque côté, avec un pas-
" sage de dégagement entre deux; c'est à cette der-
-uière chapelle que se termine la longueur de la
rr voûte de l'église. Il y a encore une chapelle de
* bâtie de chaque côté de la croisée, vers le por-
rrlail ; mais leur voûte est restée à faire : les quatre
it premières chapelles sont voûtées en plein-cintre
fret ont chacune douze à treize pieds de long, sur
ffdix de large et vingt pieds de haut, avec une
s croisée en vitraux. »
(1) Nous suivons l'ordre des censiers de ib'jb.
i6o3, etc. Dans ceux de i53o et 1 689 , au con-
traire, la maison des Hais est à la place de celle du
Heaume, et vice versa. H en est de même dans un
titre de 1878.
56 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Rabot. En 1689, cette dernière et la maison de la Pomme-Rouge n'étaient point
bâties, ou du moins ne constituaient qu'une dépendance de l'hôtel Saint-Pol.
Maison du Soleil (i56o-i66o) ou du Petit-Soleil (1582), faisant le coin orien-
tal de la rue du Coq. Le terrain qu'elle occupait provenait d'un morcellement de
l'hôtel Saint-Pol, et elle n'est point encore mentionnée dans le censier de i53o.
Euire iM me» Maison sans désignation (i6o3), faisant le coin occidental de la rue du Coq.
et ohamp-Fieun Jusqu'à la fin du xvie siècle, elle fit partie de la suivante.
Bihiioiheque. Maison de l'Image Saint-Jacques (1609-1620), puis du Cerf et de la Chasse-
Royale (1687).
Maison de tt l'Imaige Saint-Jehan n (1/108-1626) puis de la Vache (162 6) ou Vache-
Couronnée (i636), et de l'Arbalète (1687). La maison de l'image Saint-Jean étant
dite, en 1608, faire le coin de la rue de Richebourg, il est clair qu'elle com-
prenait les deux précédentes. Elle communiquait avec la rue du Coq en i63o.
Maison des te Troys-Roys v (1 5 60- 1660), puis de la Croix-Verte (1687), et de
la Croix-d'Or (1700).
C'est en face de cette maison que se trouvait l'espèce de corps de garde qu'on
appelait la Bamè-e-des-Sergents. Il avait été établi en vertu d'un arrêt du Parle-
ment, rendu le 12 décembre 1 55 1 , et, suivant le Journal de Barbier, il fut dé-
truit lors de l'entrée du Roi, le 7 septembre 1765; mais on le rebâtit ensuite.
Maison du Cerf (1689), puis de la Corne-de-Cerf (i53o-i66o), et de la Reine-
d'Angleterre (1687).
Maison de l'Image Notre-Dame (1689-16/10), puis de l'Image Saint-Jacques
(1687).
Maison sans désignation en 1689, puis du Grand-Godet (i53o-i66o), et de
l'Image Sainte-Barbe (1687).
Maison de la Nef-d'Argent (1/189), Pu^s DE LIMAGE Sainte-Barbe (i53o-i6/io),
de la Hotte (1626) ou Hotte-Fleurie (1687), et de la Chasse-Royale (1700).
Maison de l'Annonciation-Notre-Dame (i/i32), puis de la Hotte (i6o3-i6Zio),
et des Deux-Docteurs (1679). Elle paraît avoir dépendu de la suivante.
Maison de la Huchette (i/i32), puis des Trois-Docteurs (1 636 ) , et du Duc-
de-Bourgogne (1700).
Maison sans désignation (1689), faisant le coin oriental de la rue Champ-
Fleuri. Elle avait été divisée en deux parties au xve siècle, et eut pour enseigne
tt l'Arbalestre n en 1 563 et 1660, puis les Trois-Flelrs-de-Lis en 1687.
Entre les mes Maison sans désignation en 1689, puis de la Coupe-d'Or (i56o-i66o), faisant
et le coin occidental de la rue Champ-Fleuri.
Maison de r l'Ymage Saint-Michiel i> (1 639-1 66 0), qui appartenait au Roi en 1 687.
RUE SAINT-HONORÉ. 57
Maison sans désignation en 1689, puis du a Daulphin t>(i>>'] 3) et du Dauphin-Vert
(1626-1660).
Maison du Cerf (1626), puis de la Corne-de-Cerf (1689), du Petit-Cerf (i53o-
1660), et de la Couronne (1687). Elle paraît avoir eu aussi pour enseigne l'Ecu-
Vert (1626).
Maison de rl'Imaige Sainct-Loïs d (1673-1660), qui, en 1689, était une dé-
pendance de la suivante.
Maison de la et Teste-Noire n (1 665), depuis de a l'Estrille n (1 6o3), et du Cheval-
Blanc (1626-1660). En 1687, cette maison était réunie à la suivante, et avait
pour enseigne le Cheval-Blanc et la Ville-de-Cornouailles.
Maison de la Croix-d'Or (1615-1620). Ce doit être celle où, en 1221, étaient
placées les écoles de Saint-Honoré, et qui était contiguë à la maison du coin de
la rue du Chantre, suivant un titre cité page 26.
Maison de la Pelle (1610), puis du «Saulmont» (1689-1650). Dans la pre-
mière moitié du XVe siècle, elle semble n'avoir point été distincte des deux sui-
vantes.
Maison de la Bose (1689), puis de la Bose-Bouge (1675-1620), ayant d'abord
fait partie de la suivante.
Maison sans désignation en 1221, puis de tt l'Escu-de-Bretaigne t> (1610), et de
l'Écu-de-France (161 5-i 620), faisant le coin oriental de la rue du Chantre. Le
jardin de cette maison s'étendait derrière les trois précédentes; sur une partie
du terrain qu'il occupait il y avait, en 1687, deux maisons qui faisaient front
sur la rue du Chantre, et dont l'une eut pour enseigne le Louvre, vers 1700. Le
lundi avant la fête des Brandons, l'an i3ii, Simon de Franc-Caste! donna à
l'église Saint-Honoré une rente de 3 livres à prendre sur la maison de l'Ecu-de-
Bretagne, et, le 3o juillet 161 5. Pierre Foulon et sa femme lui donnèrent la
maison même pour fondation pieuse.
Maison sans désignation en i36i, puis de la Clef (1611), du Pot-d'Etain Em™ ie. rue,
(1627-1672), du Petit-Panier (i56o), du Panier-Vert (1666) et de la Ville- jean-s'-Deni*.
de-Lude (1687), faisant le coin occidental de la rue du Chantre. En 1689 elle
est indiquée, mais sans désignation particulière, sans doute parce que son en-
seigne appartenait exclusivement à la maison suivante. Au mois de mars 1 36 1 ,
la maison de l'Ecu-de-France fut délivrée au chapitre Saint-Honoré, pour fonda-
tion de service, par les exécuteurs testamentaires de Jeanne, femme du nommé
Delestre, dit Saint-Omer.
Maison du Plat ou du Pot-d'Etain (1689-1761), puis de l'Image Saint-Martin
et des Trois-Pilons (1687). Elle appartenait, dès le xme siècle (1 236), au chantre
et aux chanoines de Saint-Honoré ; elle aboutissait à la précédente et pouvait être
58 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
la même que celle de la Tête-Noire (1/107), (IU' semMe avoir été contiguë à la
maison de la Clef.
Maison sans désignation en 1689 et ayant alors remplacé une masure, puis du
Cheval-Blanc (i53o), de l'Image Sainte-Geneviève (i56o-i66o), et de la Botte-
Rouge (1687). Au xve siècle, elle faisait encore partie de la suivante.
Maison où, est-il dit en 1 68g , « souloient estre deux masures, n et qui a eu en-
suite pour enseigne le Dieu-d' Amour (i53o-i66o). Elle formait le coin oriental
de la rue Jean-Saint-Denis et appartenait aux Quinze-Vingts. Elle fut vendue en
1283 par le chapitre Saint-Honoré à Regnaut de Quinquempois et à Alix, sa
femme.
Entre les rues MAISON DE l'EtOILE (l 689-I 62 6) , puis DE LA FlEUR-DE-LiS et DE LA VlLLE-DE-
et Fromenteau. Lunel (1687), faisant le coin occidental de la rue Jean-Saint-Denis.
Maison sans désignation en 1 689, puis de l'Etoile (1626-1687), morcellement
de la précédente.
Maison des Quatre-Fils-Aymon (1689-16/10), ayant un corps d'hôtel sur la rue
Fromenteau.
Maison du Croissant (i585-i65o), puis dite de la Longue-Alle'e (i6o3), et
l'Hôtel de Picardie (1700). On y parvenait par un passage étroit, et une longue
allée n prise sur le terrain de la maison précédente , derrière laquelle elle était
située et dont elle a fait partie jusqu'à la fin du xvic siècle.
CENSIVE DU FIEF DE FROMENTEAU.
Maison du Chariot-d'Or (i353-i626), ayant issue rue Fromenteau. En 1628
elle était déjà divisée en deux maisons, la seconde faisant hache derrière la pre-
mière.
Maison du Lion-d'Or (1676-1626), faisant le coin oriental de la rue Fromen-
teau. En i6o3, elle formait déjà, sur la rue Saint-Honoré, deux maisons distinctes,
lesquelles, vers 1780, furent réunies et rebâties. Celle du coin avait eu pour
enseigne la Croix-Blanche en 1700, et l'autre, qui avait gardé l'ancienne enseigne
du Lion-d'Or, eut aussi l'enseigne de l'Image Saint-François en 1681. En 1657, on
voyait en outre, sur la rue Fromenteau, un corps d'hôtel qui a toujours existé de-
puis, et qui a eu pour enseigne l'Ami-du-Cœur en 1 696. La maison du Lion ou bien
la précédente est mentionnée, en 1286, comme appartenant à Simon Malegaigne.
Entre les rues Maison sans désignation en 1 5 3 o , puis de la Gerbe-d'Or (1612), faisant le coin
Fromenteau 111 t-i
h samt-Thomas occidental de la rue fromenteau.
Maison sans désignation en i53o, et réunie depuis à la précédente; plus an-
ciennement, elles ne formaient qu'une seule maison, à laquelle pendait pour
RUE SAINT-HONORE. 59
enseigne l'E<?u-de-France dès i388. Les deux logis ont dépendu du suivant au
xvic siècle.
HÔTEL DE LAVAL, DE VlGNOLLES et DE SlLLERY. Avant qu'on en retranchât
le terrain sur lequel fut élevée la maison du Sabot, cet hôtel avait de façade, sur
rue, quatorze toises cinq pieds deux pouces; il était partie en censive du fief de
Fromenteau et partie en
CENSIVE DE L'ÉVÊCHÉ*.
Il appartint d'abord à un évêque de Nantes, puis, dès la fin du règne de
Charles VI, à Guy, chevalier, seigneur de Laval, ce qui lui a fait donner le nom
(Y hôtel de Laval, encore en usage au xvie siècle, quoique l'hôtel, possédé en 1&72
par Guillaume Champion, ne fût plus depuis longtemps à la famille de Laval. En
i53o, c'était la propriété de Jean de Vignolles, notaire et secrétaire de la cour;
en 1570, celle d'Anne Guiard, sa veuve, et, en i5p,7, celle de leur fils Gabriel
Fournier, conseiller au Parlement. L'hôtel, agrandi alors de l'emplacement de
quatre petites maisons situées derrière celle de l'Ecu-de-France , le long de la
rue Fromenteau, s'étendait aussi le long de la rue Saint-Thomas. H passa ensuite
à Pierre de Galande [alias Lalande), secrétaire du roi, lequel, aux dates du
i3 septembre 1612 et du 29 février 1616, le vendit à Noël Bruslart de Sillery,
commandeur de Saint-Jean-du-Temple, et frère du chancelier'1'. Noël Bruslart fit
entièrement rebâtir l'hôtel «de belles pierres de taille et de briques, t> est-il dit
dans le Supplément aux antiquités de Paris, avec a un fort beau portail, et au-
dessus une galerie ornée de balustres et de petites colonnes de pierre, artistement
travaillées, v Le cardinal de Richelieu ayant résolu d'établir une place devant son
palais, projet entraînant la destruction de l'hôtel de Sillery, le fit achètera Brus-
lart, moyennant la somme de 5o,ooo écus, le 22 mars i64o, par Charles d'Es-
coubleau, marquis de Sourdis, qui, le même jour, en fit sa déclaration au profit
du cardinal ; mais celui-ci mourut avant d'avoir entièrement exécuté son dessein,
et c'est seulement lorsque la cour eut été installée au Palais-Royal, que fut ter-
minée la démolition de l'hôtel et des autres constructions qu'il fallut abattre pour
donner à la place les dimensions voulues. Entre les rues Fromenteau et Saint-
Thomas, on éleva alors huit petites maisons, au devant desquelles on plaça un
mur de clôture, fidèlement reproduit dans le plan de Gomboust. Ces maisons
occupaient la partie la plus méridionale de l'emplacement de l'hôtel de Sillery ;
celles des angles servaient de corps de garde , et les autres furent données à des
ouvriers du roi, pour en jouir leur vie durant'2'. Elles étaient du plus fâcheux
(1) Arch. de l'Emp. cari. S i8a4, et censiersde (,) Voir ie texte d'une de ces concessions, datée
IKwVlié, patsim. de 1 653 , ap. Archives de l'art français, t. V, p. 277.
8.
60 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
aspect, et la perspective qu'elles offraient aux habitants du Palais-Royal parut
si désagréable, que le Régent eut, en 1719, l'idée de les faire jeter bas et d'y
substituer un réservoir monumental. Robert de Cotte, architecte du roi, fut
chargé de bâtir l'édifice, qui est resté connu sous le nom de Chdteau-d'Eau, et
que Coustou jeune orna des statues d'une naïade et d'un fleuve, personnifi-
cations de la Seine et de l'eau d'Arcueil; le bâtiment contenait, en effet, des
réservoirs d'eau de ces deux provenances, destinés à alimenter les bassins des
Tuileries et celui du Palais-Royal. Il a disparu dans l'année 1 856 , en consé-
quence des décrets des i5 novembre 1 853 et 3 mai i856, qui, portant la lar-
geur de la place à 80 mètres, ordonnèrent l'expropriation des maisons riveraines,
et leur reconstruction sur un plan analogue à celui des maisons de la rue de
Rivoli. La place du Palais-Royal avait déjà été assez élargie par lettres patentes du
22 avril 1769. D'autres lettres, du 8 mai 1770, avaient prescrit l'uniformité de
toutes les façades des maisons qui la bordaient, et qu'on n'acheva de rebâtir
qu'en 1776.
Maison du Sabot (1527-1660), faisant le coin oriental de la rue Saint-Thomas.
En 1689, elle était comprise dans l'hôtel de Laval et existait encore avec son en-
seigne en 1612. Démolie à l'époque où l'on construisit l'hôtel de Sillery, elle
servit à l'agrandissement de cet hôtel. Elle avait appartenu à la dame Anne de
Vignolles.
Entre les mes Maison faisant le coin occidental de la rue Saint-Thomas. C'était une partie ou
Saint-Thomas _ f _ 1 1 • 1 n 11 • r i •
■t Mat-Mate, mie dépendance de la suivante, avec laquelle elle était conlondue au xve siècle,
et dont elle portait l'enseigne (la Crosse) en i6o3 et 1660.
Maison de la Crosse (1689-16/10), puis du Singe-Vert (1687).
Maison de la Croix-de-Fer (1689-1660), puis de l'Épée-de-Rois (1705). Sa
première enseigne comportait une allusion au nom de Jacques Croix, un de ses
propriétaires.
Maison de l'Homme-Sauvage (i5oo), ayant un corps d'hôtel en retour d'équerre
sur la rue Saint-Thomas.
Maison des Trois-Morts et des Trois- Vifs W (i336). En 1678, elle se compo-
sait de deux corps d'hôtel à pignon sur rue, dont l'un avait gardé l'ancienne
enseigne, tandis qu'à l'autre pendait celle de la Corne-de-Cerf (1 678-1660). Cette
dernière enseigne était la seule conservée en i53o. L'un des deux corps de logis
doit avoir eu pour enseigne la Devise-Royale en 1678, et l'Ile-d' Amour en 1696.
Maison du Roeuf et du Mouton (161 3), puis du Boeuf-Couronné (1616), de
l'Image Saint-Martin (1689-1660), et du Grand-Louis ou Grand-Monarque (1719).
m
Le sujet de cette enseigne était emprunté à un fabliau populaire.
RUE SAINT-HONORÉ. Cl
C'est dans l'arrière-corps de logis de cette maison qu'habitait, en 1 653 , le clergé
de l'Hospice des Quinze-Vingts. Comme les deux précédentes, elle aboutissait
anciennement à la cour de cet établissement.
Maison de l'Ecu-de-France (i6i3), puis de ctl'Ymaige Saint-Kristofle n (1 653-
1620), et aussi de «la Caigea (1 563) , aboutissant jadis au jardin de l'Hospice.
Maison de l'Image Saint-Vincent (1 563), démembrement de la précédente.
Maison du Godet (161 3), attenant à une porte qui conduisait dans l'inté-
rieur de l'Hospice. Elle paraît être la même que certaine maison qui avait pour
enseigne le Puits-sans-Vin en 1713, la Croix-d'Or en 1739, et était contiguë
à l'église.
Eglise des Quinze -Vingts, faisant le coin oriental de l'ancienne entrée de la
cour de l'hospice, dite la Cour-Pavée.
HOSPICE DES QUINZE-VINGTS. Dans des lettres patentes données par Fran-
çois Ier, au mois de mai 1 566, il est dit que Saint-Louis avait fondé, entre autres
établissements hospitaliers, «la maison et hospital des Quinze -Vingts, en mémoire
cret récordation de trois cens chevaliers qui, en son temps et règne, eurent les
ftyeulx crevez pour soutenir la foy catholique W. r> Cette tradition était donc ré-
pandue alors; elle ne l'est guère moins aujourd'hui, car, propagée par Corrozet,
Du Breul, Sauvai et Brice, elle se retrouve dans les ouvrages les plus modernes.
Depuis plus de deux siècles pourtant on n'ignore pas qu'elle est erronée, puisque
Guillaume Du Peyrat la rejetait déjà en i665 ®. Après lui Félibien et Jaillot ont
fait observer que, dans les anciens titres relatifs à la fondation des Quinze -Vingts,
dans les bulles qui la concernent et dans les historiens contemporains, on n'aper-
çoit aucune trace d'une origine semblable, bien faite, assurément, pour ne point
être passée sous silence si elle eût été vraie. Ils ont, en outre, objecté qu'il était
contraire à toute vraisemblance que le pieux saint Louis n'eût pas su mieux ré-
compenser de nobles chevaliers ayant perdu la vue au service d'une cause sainte
qu'en les assimilant à des pauvres vulgaires, réduits à aller mendier publique-
ment, comme le faisaient les Quinze-Vingts dès le temps de ce roi. Mais ces rai-
(,) Arch. de l'Emp. reg. X 86o4 , p. 267. Parmi Paris en vat trois paire,
« Histoire ecclésiastique de la Cour, in-fol. Paris, Toute ior" ne finentd de braire;
1 645 , p. Ix 1 a. Du Peyrat cite l'opinion du prési- Au troi9 cens 1ui ne v0>ent &°ute'
, . p , . -, -i Li uns sache", li autre boute .
dent rauchet, et aussi un poète contemporain de ' .
. r .„ , , .îiipi- j Si* se donnent mainte sacoute ,
saint Louis, Hutebeuf, qui parle de la fondation des „ , . . |,,.
n r Qu il n y a nul que lor' éclaire.
Quinze-Vingts en ces termes railleurs : gi fex, y prent) ce n,est pas doule
Li rois a mis en 1 repaire, L'ordre sera bruslée toute :
Mes* ne sai pas por quoi faire, S'aura1 li Rois plus à réfère.
Trois cens aveugles route à route1.
' Mais.— b En compagnie. — ■ Tout le jour. — ' Finissent. — ' Tiraillent. — ' Butent , trébuchent. — ' Ainsi. — * Secousse
— ' Leur. — ' Le feu. — l Ainsi aura.
62 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
sonnements, quelque concluants qu'ils soient, n'en resteront pas moins, bien des
années encore, nuls et non avenus pour une foule de gens, et l'on continuera à
imprimer que les premiers aveugles reçus dans l'Hospice furent des chevaliers
victimes de la cruauté des Sarrasins. On répétera de même cette autre fable,
que l'Hospice fut bâti au milieu d'un bois, quoiqu'on puisse constater sans grande
peine que, vers le milieu du xiue siècle, l'emplacement du Carrousel et de ses
environs était occupé par des habitations, des jardins, des tuileries; qu'il y avait
déjà là, en 12&7, un marché aux chevaux, et, en 1235, un marché aux porcs.
Selon une opinion plus justifiée, le lieu où furent établis les Quinze-Vingts se
serait appelé le Champ-Pourri. Dans le <r Dit des crieries de Paris, n les Aveugles
sont effectivement représentés comme criant dans les rues de la ville crdu pain à
« cels de Champ-Pourri, -n Mais les documents originaux ne nous ont fourni aucune
autre preuve à l'appui, et nous avons seulement vu que dans le voisinage, au
commencement du xive siècle , il y avait et une fosse à fiens. n
Saint Louis, dont la charité était aussi zélée que la foi, touché du sort misé-
rable des aveugles à Paris, leur acheta un terrain dépendant de la censive de
l'Evêché, et y fit bâtir une maison. Cet événement est ordinairement reporté à
l'année 12 56; mais on n'a plus les moyens de vérifier l'exactitude de cette date,
la charte d'acquisition étant disparue depuis très" longtemps : un inventaire des
titres de l'Hospice, rédigé en i63o, n'en fait aucune mention. Toutefois, il est sûr
qu'en 1260 l'Hospice était fondé, puisque, au mois de mars de cette année, saint
Louis assigna i5 livres de rentes à Jean Le Breton, qu'il avait nommé chapelain
de la Communauté, et, au mois de juin suivant, il céda à l'Evêque 100 sous de
rente annuelle à titre d'indemnité pour la redevance de quatre setiers de blé et de
deux setiers d'avoine, dont était chargée la terre où s'élevait la maison des Aveu-
gles, ubi ipsa (domus Cœcorum) conslructa erat^. Le 2 3 juillet 1260, le pape
Alexandre IV accorda une bulle portant indulgences pour ceux qui visiteraient, le
jour de la translation de saint Rémi, sous l'invocation duquel elle avait été con-
sacrée, la chapelle que le Roi avait fait récemment construire dans la maison
bâtie par lui, à l'usage des aveugles, rctu quandam domum ad opus cœcorum
tr parisiensium, et in ea ecclesia in honore sancti Remigii, de novo duxeris cons-
ff truendas. n La bulle d'Alexandre IV fut confirmée par Urbain IV; le 21 novem-
bre 1261, et par divers autres papes, depuis 12 65 jusque dans le dernier siècle.
Le 20 septembre de la même année 1265, le pape Clément IV manda à tous
les prélats de France de permettre, dans leurs diocèses, des quêtes au profit des
Quinze-Vingts, faveur approuvée en 1 354 par le Parlement, et renouvelée, à
diverses reprises par l'autorité pontificale. Une bulle du 7 mai 1 599 , entre au-
tres, porte confirmation de tous les privilèges précédemment concédés à l'Hospice,
"> C*rt.deN.D.t.m,v.5.
RUE SAINT-HONORE. 63
et spécialement du droit d'avoir, deux fois l'an, deux troncs placés dans toutes les
églises du royaume W.
Saint Louis ne borna pas ses bienfaits envers les aveugles de Paris à ceux que
nous venons d'indiquer; reconnaissant que les revenus de ces malheureux étaient
encore trop restreints, il leur fit don, par lettres du mois de mars 1269, c^e
3o livres parisis de rente annuelle, à prendre sur le trésor du Temple, afin qu'ils
pussent plus aisément se procurer du potage à leurs repas, ad opus potagii eorum-
dem. Dans les mêmes lettres, il fixa le nombre des hôtes de la maison à trois
cents t2', comme il l'avait déjà fait précédemment, prout alias ordinavimus, et il
décida que les places venant à vaquer seraient à la nomination du Grand Au-
mônier, auquel il avait confié la direction spirituelle de l'établissement. Cette
dernière circonstance exempta l'Hospice de la juridiction de l'Ordinaire, c'est-à-
dire de l'Evêque, en lui créant un privilège qui, maintes fois attaqué, fut toujours
maintenu, notamment par une bulle de Clément VII, datée du 2 5 octobre 1887,
confirmée par Jean XXIII le 10 janvier 1612, et toujours respectée depuis. Elle
attribuait la juridiction au Grand Aumônier, s'il était ecclésiastique, et, dans le
cas contraire, au chapelain perpétuel de la Communauté M.
La maison des Aveugles étant sur le territoire de la paroisse Saint-Germain-
l'Auxerrois, ils eurent à solliciter du Chapitre la permission d'avoir chez eux un
cimetière. Au mois d'octobre 1269, saint Louis ayant amorti une rente de 10 li-
vres i5 sous léguée à la Communauté par Guillaume Barbier, dit Pied-de-Fer,
laquelle rente se percevait sur deux maisons situées en face des étaux à bouchers
du Grand-Pont, les Aveugles abandonnèrent cette rente au Chapitre en échange
des avantages qu'ils réclamaient. La transaction définitive n'eut lieu cependant
que par un accord daté du samedi avant la Nativité de saint Jean-Baptiste 1282.
Il est stipulé dans cet accord que, moyennant l'abandon de la rente ci-dessus
mentionnée (4), les Aveugles auraient le droit de posséder, à l'intérieur de leur
maison, un cimetière où ils pourraient enterrer, non-seulement les individus qui
mourraient dans l'Hospice, mais encore tous ceux qui y choisiraient leur sépul-
ture; qu'ils auraient deux cloches, du poids de cent livres chacune; qu'il les
suspendraient, s'ils le voulaient, à deux toises au-dessus du toit de leur chapelle;
puis qu'ils seraient quittes du droit de décime que le Chapitre avait sur leur
(,) Un règlement du Parlement, fait en i535,au par un arrêt du Parlement, du 27 juillet suivant,
sujet des mendiants valides et invalides, défendit (,) D'où leur est venu le nom de Quinze-
aux quêteurs des Quinze- Vingts de quêter dans les Vingts. On disait anciennement sept-vingts, huit-
égliscs, et leur enjoignit de se borner à quêler aux vingts, etc. pour i/io, 160, etc. et l'on écrivait
portes. La même obligation leur fut imposée au mois même VII", VIII", et par conséquent XV".
d'avril i546; mais des lettres patentes du 2 mai (3) Arcb. des Quinze-Vingts.
1657 les en dégagèrent, et l'opposition que le grand '*> Félibien, Ilist. de Paris, Preuves, part. I".
Bureau des pauvres fit à ces lettres fut mise à néant p. 270 et 27 1 .
64 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
terre, ainsi que des 3o livres parisis que, de l'aveu du roi saint Louis, la Com-
munauté devait payer au Chapitre après la bénédiction du cimetière de l'Hospice.
Le Chapitre se réservait d'ailleurs les droits parochiaux de luminaire, oblations et
autres qui lui appartenaient sur la maison et ses dépendances. Ces dernières con-
ditions furent modifiées par une bulle du 5 août i3ao, portant mandement à
l'Évêque de Paris d'accorder au chapelain perpétuel des Quinze-Vingts la faculté
d'administrer les sacrements et de laisser consacrer aux besoins des Aveugles
les offrandes faites à leur chapelle, à charge de payer au curé de Saint-Germain^
l'Auxerrois des honoraires convenables. Nous avons eu entre les mains une pièce
du 19 juillet 1397, dans laquelle ce curé fait renonciation aux offrandes, avec
quelques réserves.
L'église des Quinze -Vingts fut rebâtie à la fin du xive siècle, et une bulle du
18 mars 1387 autorisa la consécration de la nouvelle chapelle, dont le clocher
devait contenir deux cloches de grosseur moyenne. H appert d'un acte du notaire
apostolique que la dédicace en eut lieu le 16 août i3g3, par les soins de
l'évêque de Bethléem, et, cette fois, sous le vocable de saint Louis'1'. Des lettres
épiscopales du 2 avril 1397 permirent de transporter en un lieu plus commode
les fonts baptismaux, primitivement placés au milieu de la nef '2). Il était d'usage
que les vieux ornements de la Sainte-Chapelle fussent donnés à celle des Aveugles ,
pour continuer à y servir au culte , ce qui fut confirmé par des lettres patentes
du i5 novembre 1 55 1 .
L'hospice des Quinze-Vingts n'était point, à Paris, le seul où l'on reçût des
aveugles; divers autres établissements hospitaliers en admettaient également.
Pour distinguer les Quinze-Vingts, au mois de juillet i3i2, Philippe le Bel
les autorisa à porter sur la poitrine une fleur de lis, marque de la fondation
royale de leur maison. Elle semble , à cause de cette origine , avoir joui du
droit d'asile : le 2 3 mars 1 5 1 7, un particulier ayant été arrêté dans l'en-
ceinte de l'Hospice, y fut réintégré par sentence du prévôt de Paris. Précédem-
ment, en mars i36o, des lettres patentes avaient attribué le droit de juridiction
intérieure aux Quinze -Vingts, et les avaient exemptés de toutes tailles et imposi-
tions, privilège qui, le h février 1 553 , fut étendu jusqu'à l'impôt perçu pour les
fortifications.
(1) Des confréries de saint Rémi et de saint Louis
existaient dans l'église des Quinze- Vingts, dès
1/119. Piganiol dit aussi (t. II, p. iii): trDans
« l'église de l'hôpital royal des Quinze- Vingts, est
irune confrérie royale de la sainte Vierge, de saint
p Sébastien et de saint Roch, qui fut érigée, dit-on,
"•il y a plus de deux cents ans. Ce qu'il y a de
" constant, c'est qu'en 1717 les confrères se sépar
trrèrent, qu'une partie resta aux Quinze- Vingts, et
trque l'autre se retira à Saint-Thomas-du-Louvre. »
Piganiol ajoute que, les statuts ayant été revisés, la
réunion des deux branches de la confrérie eut lieu
le jour de l'Annonciation 1728, que le Roi s'en dé-
clara protecteur, et que, à son exemple, la Reine et
beaucoup de seigneurs s'en firent recevoir membres.
m Arch. des Quinze- Vingts.
RUE SAINT-HONORE. 65
La communauté des Quinze- Vingts, nommée dans les plus anciens documents
la Congrégation ou l'Hôpital des pauvres aveugles de Paris, n'a pas toujours été com-
posée du nombre d'individus que son nom implique. Peu de temps après la mort
de saint Louis, les aveugles que contenait l'Hospice atteignaient le chiffre de
plus de trois cent cinquante, suivant Guillaume de Nangis, qui, parlant de ce
prince, dit: ttdomum vero magnam caecorum pauperum Parisius construi técit,
« ubi plusquam trecenti quinquagenta caeci commorantur, in capella ibi constructa
(t divinum servitium audientes. n Beaulieu répète mot pour mot les mêmes expres-
sions. D'après Piganiol, qui, ne précisant pas de date, se sert de la locution vague et
probablement inexacte et peu de temps après , n on dressa ensuite des statuts , aux
termes desquels il ne devait y avoir que cent quarante frères aveugles, avec
soixante frères voyants pour les conduire ainsi que pour faire les affaires de la
maison, et de plus quatre-vingt-dix-huit femmes tant aveugles que voyantes, ce
qui, en y comprenant le maître et le portier, constituait un total de trois cents
personnes, lesquelles devaient être regnicoles ou naturalisées. Mais ce nombre de
pensionnaires ne se maintint pas, et les lettres patentes de i5&6, que nous cite-
rons plus bas, montrent jusqu'à quel point il diminua sous le règne de François 1er.
Dans l'origine , la Communauté se gouvernait à la façon des collèges et des cha-
pitres, sous la direction du Grand Aumônier. Au commencement du xvc siècle, il
y avait un maître, des chapelains, des frères et des sœurs; une entière concorde
ne régnait pas ordinairement entre eux, et le \h juin i&o,3, sur leur requête,
le Grand. Aumônier fit, relativement à la gestion des revenus de l'Hospice, un rè-
glement dont les Aveugles n'acceptèrent qu'une partie. Ces tiraillements donnèrent
l'idée d'une réforme. En i5o8, le Parlement, afin d'y pourvoir, nomma le con-
seiller Jean Berthelot, auquel il fallut bientôt adjoindre trois de ses collègues pour
maîtriser l'opposition violente qui se manifesta au sein de la Communauté.
L'ordre ne fut rétabli que par l'observation des statuts donnés par le Grand Au-
mônier, le 29 juillet i52i, et enregistrés au Parlement le 7 septembre i522;
nous ne croyons pas devoir les transcrire, parce qu'ils figurent dans les Preuves
de FélibienW. Ces statuts, du reste, subirent des changements imposés par lettres
patentes données à Fontainebleau, au mois de mai i546. Il y est exprimé que
les règlements de 1 5 2 1 , en ce qui touchait la tenue du chapitre , avaient été observés
pendant un temps «pour ce que lors n'y avoit en ladicte maison que vingt-cinq,
* trente ou quarante frères, tant aveugles que voyants. . . et, comme ministres et
■ jurez, que huict, dix ou douze au plus;* mais que le nombre des pensionnaires
s'étant accru à ce point qu'il y en avait alors quatre-vingts et plus, ttsans en ce
tt comprendre autant de femmes, seurs, tant aveugles que voyans,» et que, d'un
<" T. V, p. 748.
66 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
autre côté, tous voulaient prendre part au chapitre, ce qui produisait plusieurs
abus, à l'avenir ceux-là seuls qui auraient le droit d'assister au chapitre, avec voix
délibérative seraient les six gouverneurs, le maître, le ministre, deux jurés aveu-
gles, deux jurés voyants, le portier, le greffier et huit frères, dont quatre aveu-
gles et quatre voyants. L'édit fut enregistré le 1 4 février suivant'1'; mais on cessa
de compter le portier parmi les membres du chapitre, où l'on fit entrer quatre
frères aveugles de plus. Les archives de l'Hospice contiennent une quantité d'autres
règlements touchant la police intérieure de la maison. Ainsi une ordonnance du
5 octobre 1578 défend les blasphèmes ou injures, et prohibe la vente, faite aux
frères, du vin « en assiette ^,v en même temps que la vente aux étrangers du vin
en pot II ressort de cette défense, souvent renouvelée, que le vice de l'ivrognerie
n'était pas rare dans l'Hospice. Une particularité plus surprenante , c'est qu'on fut
obligé d'y restreindre le luxe : un arrêté du chapitre, rendu le 5 avril i63i,
interdit l'usage des étoffes autres que le drap ou la serge brune, et celui des orne-
ments de velours. On peut encore voir une preuve de la vanité chatouilleuse des
Quinze-Vingts dans ce fait que, sur leur requête, en 1 53g , un cabaretier nommé
Guillaume Driart, demeurant près la Porte-Paris, qui avait pris pour enseigne
les Quinze-Vingts, fut condamné à faire disparaître cette enseigne, suivant une
sentence du prévôt de Paris, rendue le 22 mars.
L'hospice des Quinze-Vingts occupait le terrain acquis par saint Louis avant
1260, plus un arpent de terre où ils avaient placé leur cimetière, et qui, avec
plusieurs autres propriétés éparses dans la Ville, fut amorti par l'Evêque de Paris,
le tk novembre 1283 <3>. Les limites de l'établissement étaient : au midi, l'hôtel
de la Petite-Bretagne; à l'ouest, le chemin de ronde du rempart; à l'est, des
maisons de la rue Saint-Thomas, et au nord, la rue Saint-Honoré, le long de
laquelle avaient été bâties plusieurs maisons appartenant à la Communauté et abou-
tissant à une grande cour intérieure qu'on nommait la Coui -Pavée, dès i&63. Ces
maisons étaient louées à des particuliers, la plupart des pensionnaires demeu-
rant dans l'intérieur de l'Hospice. Toutefois quelques-unes des maisons qui se
«trouvaient hors le grant hostel dudict hospitaln servaient d'habitation à des
frères, auxquels, suivant un arrêt du Parlement du 12 octobre i523, la jouis-
sance en fut confirmée leur vie durant, à charge de faire toutes les réparations
nécessaires, Il leur fut défendu d'ailleurs, par un autre arrêt du 1 2 janvier 1 555 ,
d'y loger ou d'y nourrir des personnes étrangères à la Communauté, à peine de
100 sous d'amende. Un article des comptes de la recette pour l'année 1 383 ap-
prend que, parmi les bâtiments de l'Hospice employés au logement des aveugles,
(1) D'après l'inventaire de l'Hospice; mais nous recherches donnent trop souvent un résultat négatif,
n'avons rien vu sur ce sujet, à la date précitée, m Au détail,
dans les registres du Parlement, où de semblables (1) Cart. de N. D. t. III, p. l>o.
TOPOGRAPHIE HISTORIQVE DV VIEVX PARIS.
A. Berty dir.
J. Sulpis
HOSPICE DES QVINZE- VINGTS
PLAN
avant la reconstruction commencée en 174.8.
1 r>ip Cn Chardon, aîné , Parij .
RUE SAINT-HONORÉ. 67
on distinguait ceux de et la grant cour, -n ceux de n la petite court , t ceux de « la
ff Bretaigne*1', les chambres en hautu et «les chambres en bas. n De grands chan-
gements s'étaient sans doute introduits dans l'ancien état des lieux, en 17&7,
époque à laquelle fut exécuté l'excellent plan dont la réduction est ci-jointe, et
que nous avons découvert dans les archives de l'établissement ('2). On y distingue ,
outre l'église et la chapelle Saint-Nicaise , la maison de l'aumônier, qui avait tou-
jours été située au même endroit; le cimetière, qui n'avait point été déplacé non
plus, mais qu'on avait un peu amoindri au xvue siècle, et les boutiques des mar-
chands et artisans qui s'étaient établis dans l'enceinte des Quinze-Vingts, parce que
c'était un lieu de franchise, comme le Temple.
L'église des Quinze-Vingts, à l'époque de sa destruction, avait son sol en con-
tre-bas de plusieurs marches par rapport au pavé de la rue Saint-Honoré , qu'elle
a bordée de tout temps. En ia83, elle n'avait environ que huit toises et cinq
pieds de long sur quatre toises et un pied de large (3>. En dernier lieu , elle me-
surait dix-sept toises et demie de longueur par le milieu sur onze toises dans sa
moindre largeur, c'est-à-dire à son extrémité orientale , et treize toises et demie à
son extrémité occidentale. Elle était de forme trapézoïde , ce qui indique une suite
de remaniements, et se composait d'une nef de quatre toises de large terminée
par un chœur carré, d'un bas-côté septentrional se rétrécissant à l'une de ses
extrémités, et d'un bas-côté méridional, plus étroit que l'autre, qui se terminait
par une sacristie et était garni de cinq chapelles. Nous trouvons que l'édifice en
contenait six ou sept : celle de la Vierge ou de Notre-Dame-des-Aides, puis celles
de Saint-Thomas, de Saint-Boch, de Saint-Joseph, de Saint-Claude et de Saint-
Crespin. La cbapelle de Saint-Crespin était située «au bas de l'église; n c'était
donc la première de l'aile méridionale, et les autres vocables se rapportent évi-
demment aux quatre chapelles suivantes du même côté. Il est clair encore que
les cinq chapelles du midi ne différaient point de celles qui, consacrées par
Jean Ancel, évêque de Sébaste, en i53o, étaient alors récemment bâties. Les
parties les plus anciennes de l'église ne pouvaient remonter au delà de la fin du
xive siècle, puisque, comme nous l'avons rapporté, une reconstruction de l'ora-
toire primitif eut lieu vers i38o; Lebeuf assure même qu'au temps où il écri-
vait (175&) on n'y voyait rien de plus ancien que le collatéral du sud. Le même
(l) Apparemment le corps de logis le plus voisin f3) <rQuoddamoratoriumsilum in porprisio( Ten-
de l'hôtel de la Petite-Bretagne, auquel le cime- « ceinte) dicte domus Cœcorum seu hospitalis con-
tière était contigu, suivant les titres et les plans. n gregalionis predicte, juxta magnum cheminum
(,) Ce plan est unique, car il ne faut point tenir aSancti Honorati continens de longo octo
compte de celui qu'on a gravé pour l'Architecture rrtesias et quinque pedes, vel circiter, et in laloqua-
françoise de Blondel, et qui est aussi inexact que rrtuor tesias et umun pedem, vel circiter.» (Charte
peu habilement exécuté. d'amortissement de ia83.)
9-
68 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
savant nous.fait connaître aussi que les vitraux ne dataient guère que du xvic siècle,
et que, de la chapelle due aux libéralités de saint Louis, il ne subsistait plus
que trois statues replacées, au portail du nord, dans des niches relativement
modernes. Une de ces statues, dont l'exécution était grossière, passait pour être
un portrait fort ressemblant du saint fondateur de l'Hospice, tradition aussi
plausible que celle qui attribuait la première chapelle à l'illustre Eudes de Mon-
treuil, l'un des plus grands architectes du xmc siècle W.
Le sceau des Quinze- Vingts, que nous reproduisons, est attaché à une charte de
i3o6. 11 représente saint Louis accompagné d'un groupe d'aveugles, et montrant
de la main l'hospice qu'il avait fondé pour eux. Autour est la légende : (+ S. de)
LA MESON DES TRAS CENS AVEUGLES DE (Paris).
L'église renfermait un certain nombre d'épitaphes; nous ne transcrivons ici,
comme ailleurs, que celles qui sont antérieures au règne de Louis XIII.
A côté de la nef, vers la chaire :
Cy-gist honorable homme Méry Marchant, en son vivant maislre couvreur et bourgeois de
Paris ; lequel décéda le jour de février mil cinq cens.
Auprès de la porte :
Cy-gist honorable femme Germaine Rouvot, en son vivant femme de honorable homme
Martin Racquet (alias Rucquet), quand il vivoit, marchand de bestial au marché de Paris; la-
quelle décéda le 17e mars 1 565.
Priez Dieu pour elle.
Dans le chœur, devant l'autel :
Cy-gist révérend père en Dieu, Me Nicolas Violle, ssr de Noirzeau en Rrie, abbé de Noslre-
Dame-la-Grande de Poictiers, conseiller, aumosnier ordinaire du roy; lequel décéda le i5' fé-
vrier 1573.
Priez Dieu pour son âme.
Dans la nef :
Cy-gist honorable homme M* Jehan d'Yvoreau, en son vivant commissaire au Chàtelet de
Paris, qui décéda le dernier jour de mars 1576.
(l) Eudes de Montreuil semble avoir été le proche de JafTa. On le considérait comme le constructeur
parent de Pierre de Montreuil, qui bâtit la Sainte- des églises de Sainte^Calherine du Val des Ecoliers,
Chapelle. Au dire de Thévet, Eudes de Montreuil de Sainte-Croix de la Brelonnerie, de l'Hôtel-Dieu,
accompagna saint Louis en Orient et fortifia le port des Mathurins, des Blancs-Manteaux et des Cor-
TOPOGRAPHIE HISTORIQVE DV VIEVX PARIS.
E Lebel et J. Sulpis se,
HOSPICE DES QVINZE- VINGTS
;.ie'l Sylvestre) — Plan de I Eglise.
Plan de !a Chapell- • Sceau de la Communauté,
<
RUE SAINT-HONORE. 69
El honorable femme Jeanne Boulart, sa femme, laquelle décéda le.
Priez Dieu pour eux.
Dans la chapelle de saint
Cy-gist honorable homme Raolin , marguillier, en son vivant marchand et bourgeois de Paris ,
lequel décéda le 5e jour de juillet 1678.
Aussi gist honneste femme, Jeanne Fournier, sa femme, laquelle décéda le 5e jour de
i5
Priez Dieu pour eux.
Dans le chœur :
Cy-gist honorable homme maistre Gilles Bluet, Me ès-aris, en son vivant notaire du roy,
nostre sire, au Châtelet de Paris, et frère aveugle de l'hostel de céans; lequel trépassa le
17e jour de juillet i58i.
Dans la chapelle Saint-Joseph :
Cy-gist honorable homme Vincent Robin, en son vivant marchand, bourgeois de Paris,
lequel décéda le jour de t5
Dans la chapelle Notre-Dame-des-Aides :
Cy-gist pieuse et dévole personne Guillaume Guillot, en son vivant sœur voyante de la maison
des Quinze-Vingls, femme de Pierre Richard, frère aveugle de ladite maison, laquelle pour le
salut de son àme et de son mary, et de feu Pierre Guillot et Jeanne du Tellier, ses père et
mère, qui décédèrent, à sçavoir, ledit Guillot, l'an 1696 et lad. Du Tellier, l'an 1697. Comme
aussi de Nicolas Guillot, son frère, d'Estienne et Marguerite Richard, ses enfans, tousdeffunts,
elle a fondé tous les samedis de l'année, à perpétuité, une basse messe en lad. église.
Priez Dieu pour leurs âmes.
Au milieu du dernier siècle , l'état de vétusté des bâtiments de l'Hospice détermina
les administrateurs à le réédifier complètement. En 17/18, la reconstruction en
fut commencée d'après les plans de Labbe, inspecteur des bâtiments du roi. L'archi-
tecte Martin succéda à Labbe dans la conduite des travaux, que l'ouvrage de Blon-
del nous montre inachevés en 1756. Les nouveaux bâtiments, dont on possède des
plans et même un modèle en relief'1), n'étaient point destinés à durer longtemps;
car, dans le dessein d'augmenter les revenus de l'Hospice, des lettres patentes du
7 juillet 1779 ordonnèrent que l'établissement serait transféré dans l'hôtel des
deliers. D'après une épitaphe qui se lisait dans la avait suivi la reine Marguerite à la funeste croisade
nef de l'église des Cordelière avant l'incendie de de 12 48.
i58o, il mourut en 1289, et avait eu successive- (1) Il appartient à l'administration actuelle de
ment deux femmes, dont l'une, appelée Mâchant, l'Hospice , qui a conservé ses anciennes archives.
70 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Mousquetaires-Noirs, rue de Gharenton, où il est encore aujourd'hui, et que l'an-
cien emplacement serait aliéné, opération dont on attendait de grands bénéfices.
Le mois suivant, un projet ayant été adopté pour déblayer le terrain et y tracer de
nouvelles rues, l'édifice fut mis en vente et acquis, le 21 décembre, au prix de
six millions de livres, par les sieurs Hector-Hyacinthe Séguin, Fr. Bouillerot et
consorts. En 1781 eut lieu, à cette place, l'ouverture de cinq rues : la rue des
Quinze-Vingts, dont le nom s'explique de lui-même; la rue de Rohan, ainsi appelée
en l'honneur du cardinal, grand aumônier, et qui prit, pendant la Révolution, le
nom de Marceau, l'illustre général blessé mortellement au combat de Hochsteinbach,
le 21 septembre 1796; la rue de Chartres, ainsi appelée en l'honneur du fils aîné
du duc d'Orléans, et qu'on nomma ensuite rue de Malte, en souvenir de la conquête
de cette île par le général Bonaparte, au mois de juin 1798; h rue on passage de
Montpensier, ainsi appelée en l'honneur du second fils du duc d'Orléans, et plus
tard dite de Quiberon, en souvenir de la victoire remportée par Hoche sur les
Anglais et les émigrés, en juillet 1795 ; enfin la rue de Beaujolais, à laquelle on
donna le nom du troisième fils du duc d'Orléans, et qui reçut celui de rue d' Aréole,
après les combats d'Arcole, en novembre 1796. L'emplacement de l'hospice des
Quinze-Vingts a été de nouveau déblayé en 1 854, pour le prolongement de la rue
de Rivoli et les travaux du Louvre; mais on a conservé une partie de la rue de
Rohan, qui a été élargie, et dont on n'a point modifié l'appellation primitive.
Maison de la Fleur-de-Lis ( 1 5 1 3), puis de la Reine-de-France (1705), faisant
le coin occidental de l'entrée de la Cour-Pavée et le coin oriental du chemin sur
les remparts ou rue Saint-Nicaise. On voit, par un procès- verbal de visite du
16 juillet 1666, relatif à l'élargissement de la rue Saint-Nicaise, que la maison
de la Fleur-de-Lis avait quatre toises de façade sur la rue Saint-Honoré, et sept
toises un pied sur la rue Saint-Nicaise.
RUE JEAN-SAINT-DENIS.
La rue Jean-Saint-Denis commençait à la rue de Beauvais et finissait à la rue
Saint-Honoré.
Jaillot a conjecturé, avec grande apparence de raison, qu'un membre de la
famille de Jacques Saint-Denis, chanoine de Saint-Honoré en 12 58, a pu faire
donner à cette rue le nom qu'elle portait déjà en 1267, et qui n'a point éprouvé
de modification jusqu'au 23 mai 1807, date à laquelle un décret y a substitué
celui de Pierre-Lescot, l'architecte du Louvre. La rue Pierre-Lescot, raccourcie en
1812 et i853, a été supprimée par le décret du 3 mai i854.
RUE JEAN-SAINT-DENIS. 71
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÈCHE.
Maison sans désignation (1675), qui dépendait de la suivante, fut dite égale-
ment du Boeuf, vers 1620, et était contiguë à celle du coin de la rue de Beauvais.
Maison sans désignation en 1 ^89 , puis du Boeuf-Couronné (i53o-i626), et de
la Ville-de-Lyon (1668).
Maison sans désignation en 1689, puis des Deux-Visages (1618-1626), qui,
un peu plus tard, se confondit avec la précédente.
Maison sans désignation en 1689, puis de la Corne-de-Cerf (i5a5) et de la
Bergerie (1 585-1 620). En 1597 elle était annexée à la maison de la Souche,
rue Fromenteau.
Maison sans désignation en 1689, puis de kla Harcea (1575-1626) et du Nom-
de-Jésus ( 1 680). Vers la fin du xvne siècle, elle était séparée de la précédente par
une maison qui avait pour enseigne le Petit-Ecu (1680) et dépendait sans doute
de celle de la Herse.
Muson sans désignation en 1689, puis du Paradis ( 1 575) , ou Petit-Paradis'1'
(1588-1687) et de l'Image Saint-Jean (1700).
Maison sans désignation en 1689, puis de l'Image Notre-Dame (1568-1626).
Maison de l'Image Sainte-Geneviève (1628), bâtie sur une place qui, vide encore
en 1575, faisait partie de la maison précédente.
Grange dépendant de la maison des Quatre-Fils-Aymon de la rue Saint-Honoré
(1689), puis Maison du Croissant (i58o-i66o); elle paraît avoir eu, en 1700,
l'enseigne du Bois-de-Boulogne , par suite d'un emprunt à l'une des maisons suivantes.
Maison sans désignation en 1575, puis du Bois-de-Boulogne (1680), morcel-
lement de la précédente, dont on la trouve séparée, en 1626 et 1680, par une
petite maison que nous ne pouvons reconnaître et qui fut peut-être englobée dans
lliùtel de Picardie.
Maison du Cheval-Blanc (1582), puis du Coq (1628) et du Chapeau-Bouge
(1689), qui, au xvc siècle, faisait partie de la suivante.
Maison sans désignation en 1689, puis du Saint-Esprit (1575-1626), contiguë
à la maison faisant le coin de la rue Saint-Honoré. Au xvue siècle, elle a été di-
(l) On nommait anciennement petit paradis ce que nous appelons un reposoir.
72 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
visée en deux : le premier corps d'hôtel a eu pour enseigne la Raquette en 1687,
et le second, le Cheval-Noir vers 1700. Une maison qui semble se confondre avec
celle du Saint-Esprit est dite, en 1 586, avoir pour enseigne la Gage.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAIM-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉvÈCIlÉ.
Maison de la Souche (i6o3-i656), contiguë à celle qui faisait le coin de la
rue Saint-Honoré. Elle semble avoir été divisée en trois maisons, dont la seconde
avait pour enseigne le Bon-Pasteur en 1680, la troisième, l'Image Saint-Claude
en 1680, et les Barreaux-Rouges en 1700.
Maison de l'Image Saint-Louis (i6o3-i66o); elle a été également divisée en
deux moitiés, dont la première a eu pour enseigne le Pré-Fleury ( 1 680) à un de
ses corps d'hôtel, et la Croix-Verte (1625-1687) à l'autre. La seconde moitié de
la maison de l'Image Saint-Louis est devenue la maison de la Gerre-d'Or (1687),
puis du Petit-Saint-Jean (1700).
Toutes les maisons dont il vient d'être question paraissent avoir été élevées,
postérieurement à i53o, sur les dépendances de la maison de l'Ecu-de-France ,
située un peu plus loin dans la même rue.
Maison de l'Image Saint-Claude (i6o3), puis de la Croix-d'Or (1680), faisant
partie de la maison suivante et aboutissant de même sur la rue du Chantre.
Maison de l'Ecu-de-France (1/189-16/10) et aussi de l'Image Saint-Claude (1 6o3),
aboutissant rue du Chantre. Cette maison remontait sans doute au xme siècle;
mais on ne comprend pas les documents qui peuvent s'y rattacher. La rue Jean-
Saint-Denis tout entière offre d'ailleurs un chaos d'inextricables difficultés, que
la rareté des titres ne permet pas de débrouiller complètement.
Maison de l'Ecu-de-Berry (1 368) , puis de ctla Montjoyeti (i53o-i62o), qui
comprenait les deux suivantes avec leurs subdivisions, et aboutissait sur la rue
du Chantre. En i53o, elle se composait de trois grands corps d'hôtel; le pre-
mier conserva l'enseigne de I'Ecu-de-Berry, eut aussi celle de la Montjoye en 1 6 1 3,
et fut apparemment divisée en deux portions , dont la seconde avait pour enseigne
la Grimace en l'an i6o3. La maison de la Grimace, qui communiquait avec la
rue du Chantre, fut à son tour subdivisée en deux maisons; à la première pendait
encore pour enseigne la Grimace en i6a3; la seconde s'est appelée la Croix-
Verte de 1625 à 1660, et le Grand-Monarque en 1687.
RUE SAINT-NICAISE. 73
Le second grand corps d'hôtel de la maison de l'Écu-de-Berry forma la
Maison du Fer-À-Cheval (i582), depuis du Cheval-Royal (1687); le troisième
corps, la
Maison de la Montjoie-Saint-Denis (i58a), dite aussi, à la même époque, de
la Corne-de-Cerf, et, en 1687, du Cheval-Blanc.
Maison de l'Image Saint-François (1700), portion de celle qui faisait le coin de
la rue de Beauvais.
QUAI DU LOUVRE.
(Voir la Description do Vieux Louvre, p. 175.)
RUE SAINT-NICAISE.
La rue Saint-Nicaise commençait à la rue des Orties et finissait à la rue Saint-
Honoré.
H n'existe plus maintenant aucune trace propre à faire retrouver la situation pré-
cise du mur qui, avant la construction de l'enceinte de Charles V, séparait la
culture des Quinze- Vingts d'avec leur maison; mais nous avons réussi à déterminer
avec exactitude l'emplacement du mur servant, au xve siècle, de limite à l'Hos-
pice vers l'occident. On en obtient le tracé en faisant passer, à six toises vers l'est
de la rue Saint-Nicaise, une ligne parallèle à sa direction, puis en la prolongeant
jusqu'auprès de la chapelle consacrée sous ce vocable, au delà de laquelle il y a eu
une légère brisure. Ce que nous dirons plus loin des limites de la Petite-Bretagne
et de l'hôtel d'O établira surabondamment notre opinion sur ce point. Le mur
occidental des Quinze-Vingts bordait la voie qui longeait le rempart à l'intérieur,
et formait une sorte de chemin de ronde que nous avons trouvé énoncé cr Che-
min sur lesfossez de Paris n en 1687, quoique l'enceinte fût assurément bâtie alors;
puis, «Chemin sur les meurs des petitz champs, allant à la Tour-de-Bois (i5aa);
Chemin allant sur les murs de la Ville -n (i53o), et enfin <r Voyrie par laquelle on va
du Louvre au marché aux Moutons -n (i53o), locution en apparence mieux appro-
priée à la rue des Orties qu'au chemin dont nous parlons, mais qui se rapporte
bien pourtant à ce dernier. Il est à remarquer que le mur d'enceinte de la Ville
n'était pas parallèle au mur de clôture de la Petite-Bretagne et des Quinze-
Vingts, mais qu'il allait en s'éloignant, du côté de la Tour-de-Bois, de façon à
laisser dans le voisinage de cette tour un espace vide que l'on utilisa dès 1^90,
ainsi que l'extrémité de la rue des Orties, pour en faire un marché aux mou-
7/i TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
tons W. Il se pourrait même que cette portion de la rue des Orties eût été plus
spécialement considérée comme le lieu du marché aux moutons, puisque dans
une note ajoutée, en 1 586, au censier de l'Evêché pour 1676, on lit une men-
tion de tr maisons qui estoient assises à Paris, sur le marché des Moutons, près
rr ladicte église (Saint-Thomas-du-Louvre), l'une joignant le cymetière et lieu où
rrlesdicts chanoines et Chapitre sont demeurans, et l'autre ayant son entrée sur
tr ladicte rue et sur ledict marché aux Moutons, n Ce marché appartenait a à la
« confrairie des marchands vendeurs de bestail à pied fourchu , de Paris. t> En
i53o, on le désignait comme une «place contenant demy-arpent ou environ. t>
La rue Saint-Nicaise, dont le nom provenait de la chapelle Saint-Nicaise dé-
pendant de l'Hospice, était, ainsi qu'on le voit par les observations qui précèdent,
très-sensiblement distincte du chemin qu'elle avait remplacé. En réalité, c'était
une rue moderne, dont l'origine, restée fort obscure pour les auteurs, ne remon-
tait pas au delà du règne de Louis XIII; l'ouverture en avait été faite dans les
circonstances suivantes.
Par brevets du 26 janvier 161 3, du 7 mars 1 G 1/1, des g, 10 et 26 mai 161 5,
le Roi accorda à Hérouard, son médecin; à de Heurles, son maître d'hôtel; à Phi-
lippe, son chirurgien; à Berruyer, son secrétaire; à Pierre du Boys, et à Georges
Baudoyn, écuyer de la bouche, diverses places à prendre dans le rampart, rrl'in-
« tention de Sa Majesté n étant que l'on réservât rr une rue servant à aller de ladicte
rrgallerie (du Louvre) à la porte Saint-Honoré; ensemble une allée de longueur
rr compettante au derrière desdictes places et le long du mur estant au bas du
rt rempart dans le fossé <'2). n Hérouard et les autres concessionnaires ayant demandé
au bureau de la Ville qu'on leur fît bail de leurs places, le Prévôt des marchands,
à la date du 21 juillet 1616, envoya Augustin Guillain, son maître des œuvres,
pour visiter le terrain et dresser le plan de la rue à ouvrir, plan qui fut accepté
le 1er août. Quelques jours après, le 12 et le i3 du même mois, les baux furent
passés, et dans l'un de ces actes il est dit : rrVeu le plan dressé pour la disposi-
tion de la rue ordonnée estre faicte sur ledict rempart. . . . sera laissée, oultre
«la susdite profondeur (de la place baillée), une allée de seize pieds de large, corn-
er pris le mur d'appuy, commençant au devant du mur du fossé, en tirant dans le-
rr dict rempart, selon les allignemens et dispositions de simétrie pour les bastimens,
«qui seront baillés par ledict Guillain. Ensemble de la diminution et abbaissement
«du rempart, nyveau et pentes de la rue de devant. « II résulte d'un autre bail,
passé en 1 6ao (s), que la grande rue ou rr rue de devant, n non encore bâtie à celle
,1) H faut prendre garde de le confondre avec le fut faite à la requête du procureur général . pour
marché aux pourceaux de la batte Saint-Roeh. examiner s'il y avait des inconvénients h bâtir entre
lî) Arch. de l'Emp. cart. Q 1 1 '16-1 1 48. la galerie du Louvre et la porte Sainl-Honoré. Les
,3> Le dernier jour de juillet 1620, une enquête experts conclurent qu'on pouvait effectivement y
RUE SAINT-NICAISE. 75
dernière date, devait avoir quatre toises cinq pieds de large du côté de l'hôtel de
La \ieuville,et quatre toises seulement du côté de la rue Saint-Honoré, disposi-
tion qui n'a point été observée. Cette grande rue, c'est celle de Saint-Nicaise.
Quant à l'allée de seize pieds de largeur, il n'y a aucune apparence qu'elle ait
jamais existé. Elle devait passer entre tries murs de closture des courts et jardins
« deppendanz des logis » qui seraient « bastiz et le parapet des fossez le long
trdu mur estant au bas du rempart, dans le fossé, n Ce second membre de phrase
et la profondeur des terrains baillés donnent à penser que le mur d'enceinte de
la Ville aurait formé le côté oriental de l'allée, et déterminé son alignement.
Dans un cr titre nouvel t du 17 mai i652, la rue Saint-Nicaise est appelée la
nu du Fossé-Mad&noiseHe , à cause de la proximité du fossé des fortifications,
lequel servait de clôture au jardin de Mademoiselle, situé devant les Tuileries;
au xvne siècle, on l'appelait aussi fréquemment rue du Rempart, et c'est même le
premier nom qu'elle ait porté avant celui de Saint-Nicaise, dont on n'a fait exclu-
sivement usage que dans le siècle suivant. Les travaux entrepris, sous le Consulat
et le premier Empire, pour la réunion du Louvre aux Tuileries, ont fait dé-
truire tout le côté occidental de la rue Saint-Nicaise, dont les maisons avaient été
fortement ébranlées par l'explosion de la machine infernale du 26 décembre 1800.
Le dernier tronçon a disparu en i85û.
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAL\T-GERMAI!N-L'ALXERROIS.
HALTE JUSTICE DE LÉVÊCHÉ.
CEIN'SIVE DE L'ÉvÊCHÉ, PUIS DE LA VILLE.
Le côté occidental du chemin qu'a remplacé la rue Saint-Nicaise était formé
par le rempart de terre soutenant le mur d'enceinte de la Ville; mais, primitive-
ment, la muraille n'était point butée par un terrassement, ce qui laissait au chemin
de ronde une largeur considérable. Suivant un document des archives des Quinze-
Vingts, la Communauté le fit barrer, en 1 383, au moyen d'un mur remplaçant
une portion de celui qui avait été détruit lorsqu'on construisit les fortifications. En
1 385, le Roi permit qu'on perçât deux portes dans ce nouveau mur, à la condition
construire r en faisant oster les (erres massives du prétentions de Froger, l'entrepreneur des nouvelles
-rempart jusques au rez-de-chaussée de la grande fortifications, que la dame Hérouard, l'écuyer
• rgaflerie du Louvre ;» les terres butant le rempart Georges et le nommé Du Boys conserveraient la
étaient donc encore en place. Un arrêt du Parle- jouissance de leurs places, dont il paraît qu'on
ment, du 5 juillet 1 634, décida, contrairement aux rectifia les alignements en 16/19.
76 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
qu'il y aurait pour chacune deux clefs, dont l'une serait remise au capitaine du
Louvre. La charte écrite à cette occasion indique que l'enceinte de la Ville était
à environ vingt-cinq toises des murs de la Petite-Bretagne, ce qui confirme la
position que nous lui avons donnée sur notre plan de restitution, et que nous jus-
tifierons au surplus par d'autres preuves plus précises.
HÔTEL DE BERINGHEN, faisant le coin de la rue des Orties. Le 9 mai i6i5,
Pierre Du Boys et Georges Beaudouyn reçurent en don, de Louis XIII, une partie
du rempart, de vingt toises de largeur sur dix-huit de profondeur. Le i3 août
1616, la Ville bailla à Francisque Mitaelly PallagallyW une autre place de dix
toises de largeur sur dix-sept de profondeur, et, le même jour, elle céda à Nicolas
Huot une troisième place, aussi de dix toises de largeur, mais de seize toises et
demie seulement de profondeur. C'est apparemment sur ces terrains que fut
construit l'hôtel de Beringhen, dont les bâtiments avaient en effet dix-huit toises
de profondeur sur la rue des Orties , et seize et demie , une quarantaine de toises
plus haut. Sur le plan de Gomboust, l'hôtel de Beringhen figure déjà avec son
jardin pris sur le fossé, et avec cette indication, M. Varin, parce qu'il apparte-
nait en effet à Jean Warin , intendant des bâtiments , et graveur général des mon-
naies, qui y mourut le 26 août 1672 <2). Désigné plus tard, à ce qu'on assure,
sous le nom iï hôtel de Roquelaure, il reçut bientôt après la dénomination sous la-
quelle il a été connu jusqu'à la Bévolution, et qu'il devait à Henri de Beringhen,
premier écuyer de la petite écurie, depuis i645. Beringhen, dont la famille pos-
sédait encore l'hôtel à la fin du règne de Louis XV, l'avait déjà acquis en 1676,
car sur le plan de Bullet, publié en cette année, l'hôtel est désigné comme celui
de « Mr le Premier, n titre qui s'appliquait au premier écuyer, comme au premier
président. L'hôtel de Beringhen a été démoli sous le règne de Napoléon Ier.
A la suite de ce logis venait un espace vide formant l'entrée de la place du
Carrousel. Il avait été occupé par un jardin dépendant de l'hôtel de Chevreuse,
situé de l'autre côté de la rue. Ce jardin ne se voyait plus en 1662, et avait pro-
bablement été supprimé à l'occasion du grand carrousel qui eut lieu cette année ,
et dont la place située devant les Tuileries perpétue le souvenir. Au delà de
l'entrée de la place on rencontrait deux maisons qui en formaient l'angle sep-
tentrional. La première, bordée d'échoppes, appartenait en 1739 à M. de Bo-
linde, et passa dans le même siècle à M. de Chanteule et au comte de Feillens.
La seconde est marquée sur un plan dressé vers 1720 comme contenant les
écuries de madame de la Vallière. L'emplacement de ces deux maisons doit se con-
fondre avec celui de vingt toises de large sur quinze de profondeur, qui fut donné
à bail à Hérouard, au mois de juillet 1616. Contiguës aux écuries de madame de
(l) Nous donnons le nom tel que nous l'avons m Conf. son testament, ap. Archives de l'Art
trouvé écrit. français, t. I, p. 298.
RUE SAINT-NICAISE.
77
La Vallière, étaient celles du sieur Paumier, établies sur un chantier apparte-
nant au Roi (1) en 1 687. En 1 7 1 2 , on bâtit là un magasin qui fut donné à l'Opéra
en 1713, et servit, jusqu'en 1790, à loger les machines, les décors et les cos-
tumes de ce théâtre, lequel y tint aussi son école de danse. Le magasin de
l'Opéra, que certains plans indiquent par ces mots, Académie de musique, et qui
fut abattu en 1802 , devait s'élever sur la place, large de vingt toises et profonde
de quatorze, baillée le 12 août 1616 à de Heurles; il était suivi d'une place en
forme de T, qui s'étendait vers la rue du Carrousel, et qui, sur le plan de 1720 W,
est appelée Place du magasin des marbres. Cette parcelle , réunie à celle du magasin
de l'Opéra, avait été occupée par le Bureau des voitures ou coches de la cour,
dès 1676. Elle ne s'identifie avec aucun des anciens lots, non plus que les
constructions suivantes, sur une partie desquelles nous reviendrons ailleurs. Une
de ces constructions est indiquée, sur le plan de Gomboust, comme appartenant
à M. Petit, et, sur un plan de 1789, comme propriété de M. de Préval. Il en
dépendait un jardin formant l'angle rentrant de la rue du Carrousel.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAUN-L'AÏXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'É"vÊCHÉ.
Les murs de l'hôtel de la Petite-Bretagne et de l'hospice des Quinze-Vingts
bordaient, du côté oriental, le chemin auquel fut substituée la rue Saint-Nicaise.
Après l'ouverture de cette rue et antérieurement à l'année i65o, entre la rue
Saint-Honoré et l'hôtel de Longueville, on bâtit de petites maisons qui ca-
chaient le mur occidental de clôture de l'Hospice, et s'y appuyaient. Vers 1700.
ces maisons qui dépendaient des Quinze-Vingts, étaient au nombre de douze (3; :
la première, contiguë à la maison du coin, avait alors pour enseigne la Croix-
Rouge, la quatrième, le Pavillon-Royal, et la neuvième,. l'Epée Royale. La onzième,
qu'on a vue si longtemps se dresser isolée sur la place du Carrousel, et qu'on
(1> Ou plutôt aux nommés Charpentier et Clic-
quain , qui travaillaient pour le Roi , et firent là un
chantier de construction. Ils le cédèrent à Paumier,
et le tenaient de Gilles Baudouyn, parent de
récuyer Georges Baudouyn, donataire de 1 61 5 ,
lequel semble avoir possédé deux places diffé-
rentes.
(,) Ce plan paraît avoir été fait à l'occasion d'un
incendie qui consuma les écuries de Paumier et une
partie de celles de La Vallière.
<3) Le terrain de celles qui se trouvaient au nord
de la chapelle Saint-Nicaise avait fait partie de l'Hos-
pice; l'emplacement de celles qui étaient au sud de
la chapelle avait été pris sur le chemin de ronde,
quand on en modifia l'alignement pour le transfor-
mer en rue.
78 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
appelait l'hôtel de Nantes, n'a été abattue qu'en 1869; elle avait formé l'encoi-
gnure septentrionale de la rue des Chartres. Entre la sixième et la septième, on
avait réservé une entrée pour la chapelle Saint-Nicaise, que ces maisons mas-
quaient.
CHAPELLE SAINT-NICAISE. Il est singulier que l'histoire de cette petite chapelle
soit si peu connue. Les renseignements qui s'y rapportent sont tellement rares
que, dans l'inventaire des titres des Quinze-Vingts, il ne se trouve pas un seul
article s'y rattachant, et l'on doit le peu qu'on en sait à l'abbé Lebeuf. H en parle
dans des termes auxquels nous ne pouvons rien ajouter : cr C'est, dit-il, la cha-
rt pelle de l'infirmerie de cette maison (l'Hospice); elle passait en 1691 pour un
ff bénéfice, et elle fut permutée alors. L'édifice, qui est orienté au midi, est de ce
tr temps-là. Elle sert à présent (170^) d'école; l'on y expose les corps des frères
ff aveugles morts. Le culte de saint Nicaise, évêque de Reims et martyr, a été trans-
ffféré dans la grande chapelle de l'Hôpital, où l'on célèbre sa confrérie, non le
« 1 h décembre comme autrefois, mais le 2 1 juillet W. n La chapelle saint Nicaise'2',
contiguë à l'infirmerie de l'Hospice, avait, hors œuvre, huit toises de longueur
sur quatre toises quatre pieds et demi de largeur. Elle était de forme à peu près
rectangulaire, et dans son angle nord-est se trouvait la cage de l'escalier condui-
sant au petit clocher dont elle apparaît surmontée dans le plan de Mérian. Elle
a été abattue vers 1779W.
Partie postérieure de l'hôtel de Longueville. (Voir Rue Saint-Thomas.)
HÔTEL DE CrÉQUY et D'ELBELF. Il fut construit sur une parcelle vendue, le
6 mars 1626, par le sieur de Sauveterre à Louis Bretel , père de Me Claude Bretel,
seigneur de Lanquetot, et fut cédé le 3o mai 1 656, à Mc Charles Bernard et à
Suzanne de Brue. Ceux-ci le transmirent, le 20 mars 1657, à François de Cré-
quy, qui fut maréchal de France et mourut en 1687. L'hôtel passa ensuite aux
héritiers de sa femme, Catherine de Rougé, et, en 1789, il s'appelait hôtel de
Coëtanfao, parce qu'il appartenait à François-Toussaint de Kerhoent, marquis de
Coëtanfao. On l'a nommé ensuite hôtel de Vieux-Pont (1723), et enfin hôtel d'El-
heuf, parce qu'il fut à Emmanuel -Maurice de Lorraine, duc d'Elbeuf, dont la
femme le fit rebâtir vers 1755. L'édifice n'a été démoli que vers 1 838.
HÔTEL D'UzÈS. Sur un lot de terrain qui lui fut dévolu lors de la vente faite
en 1626, par le sieur de Sauveterre, d'une partie de l'hôtel de Matignon, Marie
(1) Hist. du Diocèse de Paris, t. I, p. 63. confrérie dans une salle du Palais, nommée ta salle
m Le corps des Merciers reconnaissait jadis pour Saint-Louis, Cette chapelle transformée semble avoir
patron le roi saint Louis. Sauvai dit qu'ils en so- quelque rapport avec la chapelle Saint-Nicaise.
lennisaient la fête aux Quinze- Vingts, le premier (3) Jaillot, en 1772, en parle comme d'un monu-
dimanche après la Saint-Louis; mais que, leur cha- ment existant encore. Le plan de reconstruction de
pelle ayant été convertie en infirmerie, Charles VI l'Hospice, dressé en 17^7, en impliquait la des-
leur permit, en 1 Ao3 , de tenir leurs assemblées de truction.
RUE DES ORTIES. 79
de Caumont, dame de Grécy, construisit une maison dont la principale entrée se
trouvait être rue de Matignon en 1 663 , époque où, depuis plus de dix ans, on y
avait placé les écuries de la Reine mèreW. Cette maison, possédée en 1757 par
Charles-Emmanuel, sire de Crussol, duc d'Uzès, a été dite en conséquence hôlel
ctUzès et de Crussol. Les petites écuries du Roi y étaient déjà établies en 1770, et
y sont restées jusqu'à la Révolution.
Trois Maisons, dont la seconde avait pour enseigne la Maison-Rouge en 1688;
à la dernière, qui faisait le coin de la rue des Orties, pendait pour enseigne
l'Epée-de-Bois vers 1700. Celle-ci, réunie à la maison du coin de la rue Mati-
gnon, avait pour enseigne le Compas en 1 688. Les maisons du Compas et la Maison-
Rouge appartenaient alors aux héritiers de Jean Baudouyn; il les avait construites
sur des terrains acquis par lui, le 26 septembre 1 6 1 3 et le 20 juillet 1616, des
nommés Nicolas Monnant et Samuel Cauche, auxquels le Roi les avait donnés.
RUE DES ORTIES.
La rue des Orties commençait à la rue Fromenteau, finissait d'abord au rem-
part de la Ville et s'est terminée plus tard à la place du Carrousel. (Pour la no-
tice, voir p. 177.)
CÔTÉ SEPTENTRIONAL.
PAROISSE SAINTGERMAINLAUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉvÊCHÉ.
HÔTEL DE LA PETITE-BRETAGNE, DE COLPEAU et DE MATIGNON, faisant le i;„„ebr„t!
coin oriental du chemin du Rempart. Cette maison était d'origine très ancienne, car Saml^1Ci'
ce fut dans son enceinte que le chapitre de Saint-Thomas-du-Louvre s'établit à la *"'"' -Thoma-;-
lin du xuc siècle. Jean VI, duc de Bretagne, dans des lettres du 2 février 1^128,
rappelle aux chanoines que leur église est située dans l'enclos de sa rt maison ou
tthostel, cy-devant appellée la Petite-Bretaigne. n Dans les mêmes lettres, dont
l'original est en latine, il dit, en outre, que la Petite-Bretagne était alors inha-
bitée et en ruines; puis que, le chapitre Saint-Thomas désirant y établir des jar-
dins et y bâtir des maisons, il la lui abandonna en toute propriété ainsi que
' \1rl1. de l'Einj). cart. S 1857. — ;,) I-e texte en est donné par Du Breul. p. 798.
80 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
libre de toute redevance. Il n'y avait pas longtemps que le duc Jean avait recouvré
la possession de l'antique manoir de sa famille, car, sous Charles VI, ce manoir
appartenait au Roi; un article du censier de 1'Evêché pour 1 399 énonce effecti-
vement «la maison de la Petite-Bretaigne et ses appartenances qui sont au Roy,
rmostre sire, a et la phrase se répète dans les censiers postérieurs.
Le chapitre Saint-Thomas ne garda que quelques années l'hôtel de la Petite-
Bretagne, après le don qui lui en avait été fait : le ier juillet 1&37, moyennant une
rente annuelle de 9 livres, il l'aliéna au profit d'un tailleur, Pierre Marchand, dit
de Nantes. Celui-ci s'en défit antérieurement à 1 A&9, en faveur de Jean de Valen-
ciennes, qui en jouit jusque vers i483. A Jean de Valenciennes succédèrent, dans
la possession de l'hôtel, Germain de Valenciennes, et, de i53o à 1 565 , son fils,
Jean de Valenciennes, essayeur des monnaies. Après la mort de ce dernier, le ma-
noir fut divisé en deux parties, l'une qui appartenait à Anne et à Claude de Valen-
ciennes, et l'autre, à leur frère Germain; toutefois, comme celui-ci était seigneur
d'Ormoy et de CoupeauW, le nom à'hétel de la Petite-Bretagne fut souvent rem-
placé, de son temps, par celui iï hôtel de Cou-peau. Ce logis cessa entièrement, à
partir de 1678, d'être une propriété de la famille de Valenciennes. Jaillot dit que
le sieur Pinard, secrétaire des commandements du roi, le vendit, en i5oo, à
Jacques de Matignon, comte de Thorigny; mais Jacques de Matignon ne naquit
qu'en 1 53 1 , et la transaction n'eut lieu qu'en 1 5y5. L'an 1691, en raison de
l'absence et incapacité de Matignon, qui suivait le parti du Boi, un arrêt du Conseil
d'État confirma la propriété de l'hôtel aux chanoines de Saint-Thomas, et leur
permit de passer bail du grand jardin. Ils le louèrent, le 17 septembre, à un
nommé Guillaume Ferry W, lequel y demeurait déjà à cette date , et l'habitait encore
en 1596. Mais cette année même, par un mandement du trésorier de l'Épargne,
à lui adressé le 2 août, Matignon, qui était de retour, fut invité à céder sa maison
au Boi, ce qu'il fit moyennant la somme de 10,000 écus sol, le h février 1597.
Henri IV l'avait achetée W parce qu'il était nécessaire d'en abattre une partie afin
de continuer la grande galerie du Louvre. Il en donna le reste au président Pierre
Jeannin, le 9 juillet 161 1. Ce reste consistait, d'après les lettres de donation, en
(1) Autrement Coupeaukc, Coippeau, Coypeaulx
et Coispeaulx.
m Ce jardin est énoncé dans le bail « Grand jar-
din de la Petite-Bretagne, clos de mur, avec son
ft habitation et la maison qui a été commencée à
rr démolir par les lansquenets, estant des apparte-
nances d'un plus grand lieu, assis rue des Orties,
"joignant le rempart, cy-devant appelé l'hostel de
-Matignon. » (Arch. de Saint-Thomas.)
"' En 1606, l'hôtel de Matignon, devenu pro-
priété du Roi, renfermait une pépinière de mûriers
blancs qu'y avait plantés Claude Mollet, jardinierdes
Tuileries. » En l'an mil six cent six , dit-il , j'estois logé
<rà l'hostel de Matignon , derrière Saint-Thomas-du-
tr Louvre, où il y avoit une belle grande place, la-
quelle est pour lejourd'huy toute pleine de basti-
ffmens. De cette place, j'en avois fait un très-beau
"jardin, auquel j'avois élevé une grande quantité
"de mûriers blancs. . . i> (Théâtre des plans et jardi-
nages , Paris, in-&°, i65a, p. 34o.)
RUE DES ORTIES. 81
«une place et^quelques restes de maisons y restans, appelle communément l'hostel
« de Matignon ladicte place et restes de maisons contenant environ cinquante
tr toises de long et quarante-quatre de large; joignant, du costé d'orient, à l'église
« Saint-Thomas et autres maisons et jardins près de ladicte église , qui ont leur
rr entrée par la rue Saint-Thomas; du costé d'occident, aux remparts de la Ville;
ff au midi, à une place devant la Grande Galerie; au nord, au jardin et hostel d'O,
c à présent au sieur de la Vieuxville. n Le chiffre de cinquante toises de pro-
fondeur montre que le terrain octroyé à Jeannin n'arrivait point à la hauteur de
l'alignement moderne, obtenu par la concession faite, vers cette époque, à plu-
sieurs particuliers, d'une partie de la place comprise entre la Grande Galerie et le
lot de Jeannin. Jeannin vendit son terrain 18,000 livres, le 1 5 juillet 161 3, à
Pierre de Bérulle, depuis cardinal, qui stipulait au nom des pères de l'Oratoire;
mais, la Congrégation ayant renoncé à s'établir sur l'emplacement de l'hôtel de
Matignon, Pierre de Bérulle, par contrat du i5 mai 1616, reconnu le 1 1 août
suivant, l'abandonna pour pareille somme de 18,000 livres au sieur de Sauve-
terre. Le 6 mars 1626, ce dernier revendit diverses parcelles de son terrain à
Charles de Beauclerc, à Claude Bretel, sieur de Lanquetot, à la dame de Crécy et
à Me Abraham Bouleau, conseiller secrétaire du roi. Au reste, dès 1617, il y avait
plusieurs maisons nouvellement bâties sur l'emplacement de l'hôtel de Matignon;
on y comptait treize propriétaires, parmi lesquels le duc de Chevreuse pour une
portion de son hôtel , et tous étaient solidaires des cens et autres redevances gre-
vant la Petite-Bretagne. Depuis, le nombre des propriétaires s'est augmenté par
suite du morcellement des anciens lots.
La limite méridionale de la Petite-Bretagne ne peut plus être déterminée exac-
tement à cause de la construction de la grande galerie du Louvre, mais nous
avons reconnu les trois autres; celle de l'orient, depuis la fondation de la collé-
giale Saint-Thomas, est le mur, figuré sur tous les plans, auquel s'appuyaient les
bâtiments du cloître et qu'il faut prolonger jusqu'à la rencontre de l'hôtel de Ram-
bouillet. Vers le nord, la Petite-Bretagne aboutissait à l'ancien mur de clôture des
Quinze-Vingts, dont nous reparlerons dans l'article sur l'hôtel de Chevreuse, et, à
l'ouest, depuis la fin du xivc siècle au moins, elle était bornée par un mur dont
la trace se dessine en faisant passer une ligne parallèle à la rue Saint-Nicaise , à
douze mètres en deçà de cette rue. Nous ne l'avons pas constaté sans peine, mais
en voici les preuves.
D'un arpentage du 18 mars 1622 (1>, il appert que ce qui subsistait alors de la
m Le texte de la partie intéressante de cet arpen- * Vingts de l'hostel de Chevreuse , antiennement ap-
lage est ainsi conçu : «• ... et ait trouvé le long du «pelle l'hostel de la Villeville (ne), se continuant
-costé dudit rampart. à prendre après ung antien « ladite longueur du costé dudit rampart, tant au
-mur de closture séparant le cimetière des Quinze- «derrière dudit hostel que au derrière des jardinï
82 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Petite-Bretagne était un quadrilatère de trois cent cinquante-cinq perches de su-
perficie; les deux côtés de l'est et de l'ouest avaient une même longueur de vingt-
trois perches et demie ou soixante et dix toises et demie, à partir de la muraille
des Quinze-Vingts (qui n'était point encore déplacée comme elle le fut deux ans
plus tard); le côté septentrional, au long de cette même muraille, mesurait quinze
perches et un tiers ou quarante-six toises, et le côté méridional, à partir du cloître
de Saint-Thomas, quatorze perches et deux tiers ou quarante-quatre toises; or, si
d'après ces données on restitue le mur occidental, il se trouve occuper préci-
sément la situation que nous avons indiquée. Notre conclusion est confirmée, du
reste, par les lettres du 9 juillet 1611, où il est exprimé que le terrain avait
quarante-quatre toises de largeur environ.
L'hôtel de la Petite-Bretagne est décrit en ces termes dans le hail fait, l'an îkS'j,
à Pierre Marchand : «C'est assavoir la grand maison couverte de tuille, estant en
«la grant cour dudit hostel avecques la cour de devant, tenant (la cour)
« d'une part à un grand mur faisant closture , au hout du chemin devers la rivière
a de Seine, faisant le coing du chemin devers les murs de ladicte rivière, qui va
« devant la cour du chasteau de Bois (faisant le coin de la rue des Orties et des
cr remparts), et ladite pièce de terre estant derrière ledit corps d'hostel couvert
«de thuille, contenant trois arpens et trois cartiez ou environ, tenant d'une part
(tau chemin et sur les fossez de Paris (le chemin sur les remparts); d'autre part,
«à plusieurs jardins estant sur la rue Saint-Thomas-du-Louvre (depuis le cloître
«jusqu'au jardin de l'hôtel de la Marche); aboutissant par derrière au cimetière
«des Quinze-Vingts de Paris et au jardin de la Marche (hôtel de Bambouillet) et
«d'une part (au midi) audict corps de maison et aux murs des estables abbatues,
« tenant à ladite maison couverte de tuille. -n Ainsi le grand corps de logis de la
Petite-Bretagne était placé entre une cour sur la rue des Orties et un jardin qui
s'étendait jusqu'aux Quinze-Vingts. Ce jardin ou clos, auquel le bail de îkS']
donne une superficie d'environ trois arpents trois quartiers, fut considérablement
ràe monsieur Lanquelot, Louis Noblet et celuy de
*ia maison voisine (côté de l'ouest), contenir ladite
it longueur vingt-trois perches deux thiers ; et , de pro-
•• fondeur par ledit bout, vers ladite dernière héri-
f-taige, joingnant ledit Noblet, à prendre sur le
"rampart jusques au dehors du mur du Doyenné.
it où estoit la salle de la Petite-Bretaigne (côlé du
•'midi), proche du cimetière de ladite église, et ce
-à l'allignement du gros mur où estoit le dehors de
-ladite grande salle dudit hostel de la Petile-Bre-
" taigne, quatorze perches deux thiers de large. Et
"par l'autre profondeur, du costé et le long dudit
»mur des Quinze- Vingts, dessus déclaré, tirant vers
rrla grande cour dudit hostel de Chevreuse, à i'ali-
trgnement du mur de madame Saint-Thouyn (côté
rrdu nord), a de profondeur quinze perches ung
rr thiers. Et partant d'icelles trois mesures, tant celle
«de long, du costé, que lesdittes deux largeurs
rrprinse et mesurée comme il appartient, se fer-
ff niant icelles héritaiges de l'autre long costé du
rr Doyenné et de madame Saint-Thouyn, de pareille
ir longueur que celle du rampart, c'est trouvé en
"•superficie la quantité de trois cent cinquante-cinq
rr perches de superficie , sans comprendre les espoissi a
r-des murs.* (Arch. de l'Emp. fonds de Saint-Tho-
mas, cart. S 1857.)
RUE DES ORTIES. 83
amoindri, dans le xvie siècle, par l'extension de l'hôtel d'O, et ne se couvrit de
constructions que dans le siècle suivant.
En disposant le lotissement des maisons à bâtir sur l'emplacement de l'hôtel
de Matignon, on réserva une rue ou plutôt un cul-de-sac perpendiculaire à la
rue des Orties, et qui atteignait presque l'hôtel de Chevreuse. Cette impasse pa-
raît s'être nommée d'abord rue de Matignon W (1627), a été ensuite appelée cul-de-
mc Saint-Thomas, puis cul-de-sac du Doyenné. En 1689, les propriétaires des
maisons eu bordure proposèrent au chapitre Saint-Thomas de percer une rue qui,
partant de l'impasse et passant le long de l'église à travers la cour du Doyenné,
irait déboucher rue Saint-Thomas. Cette offre ayant été acceptée avec l'approba-
tion de l'Archevêque de Paris, accordée le 2 septembre de cette année, des lettres
patentes du mois de janvier 1 64 1 , enregistrées le 7 février suivant, homologuèrent
le contrat passé entre les parties. Le Doyen y avait stipulé la conservation de
deux cabinets attenant à l'église, d'où résulta la nécessité de jeter deux arcades
au-dessus de la nouvelle rue, à laquelle on donna le nom de rue Neuve-Sainl-
Tkotnas et de rue du Doyenné, en la confondant souvent avec la partie du grand
cul-de-sac qui s'ouvrait sur la rue des Orties. On remarque sur le plan de Gom-
boust que, dès le milieu du xvnc siècle, il y avait aussi une petite rue coudée en
équerre, aboutissant, d'une extrémité, à la rue des Orties, et, de l'autre, au cul-de-
sac Saint-Thomas, en face d'une petite impasse séparant, d'avec les maisons de la
rue des Orties, certaines maisons sises rue du Doyenné. La petite impasse n'ap-
paraît plus sur les plans du temps de Louis XVI; quant à la rue en équerre,
qu'on appelait rue de Matignon, elle fut transformée en cul-de-sac par la sup-
pression de la partie donnant dans l'impasse Saint-Thomas. Cette partie, dite la
rue du Compas sur un plan des premières années du xviu6 siècle, à cause d'une
maison voisine (voir p. 79), fut donnée, par arrêt du Conseil du 18 juillet
1772, à Jacques Anisson du Péron, qui, possédant déjà la maison circonscrite
par les rues des Orties, de Matignon et le cul-de-sac Saint-Thomas, voulait la
joindre à une autre située plus au nord sur ce dernier cul-de-sac. Le tronçon
conservé de la rue de Matignon a été détruit lorsqu'on a commencé à déblayer la
place du Carrousel, sous le premier Empire; puis, en i85i, ont définitivement
disparu l'impasse Saint-Thomas et la rue du Doyenné, dont les maisons étaient
déjà en partie démolies.
Les titres relatifs aux maisons bâties sur l'emplacement de l'hôtel de Matignon
ne nous ont pas révélé d'autres constructions à signaler, si ce n'est celles dont il
est question ailleurs, et, de plus, la maison de l'Image Saint-Martin (1710),
(l» Le dernier juin 1627, Charles de Beauclerc, de largeur sur dix-sept de profondeur, contenant
conseiller du roi, et autres, acquirent de Michel Par- une masure, et qui est dite située <mie de Mati-
ticelly, sieur de Moin, une place de quinze toises rrgnon;» mais l'identité de la rue est douteuse.
8'i TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
faisant le coin occidental de la rue de Matignon et de la rue des Orties; la maison
dite du Contrôle, vers 1760, et qui était contiguë au cloître Saint-Thomas; enfin
l'hôtel situé au fond de l'impasse Saint-Thomas, et nommé l'hôtel de Quitry en
1676, parce qu'il avait appartenu à Guy de Chaumont, seigneur de Quitry,
maître de la garde-robe du Roi; on l'appelait en 1719 «le petit hôtel (TAnguin.n
Maison sans désignation en 1899, puis de l'Image Saint-Louis (1677), du
Grand-Monarque (1701), de l'Image Notre-Dame (1705), du Fils-du-Koi-de-France
(1 7 1 1) et de l'Hehmitage (1728), faisant le coin occidental de la rue Saint-Thomas.
Cette maison avait été élevée sur une partie du cloître Saint-Thomas; elle fut
entièrement rebâtie en 1759, ainsi que le mur du cloître sur la rue des Orties.
Entre les rues MAISON DE LA GrOIX-DE-FeR (?) [lSrjï)) , puis DE LA CrOIX-BlANCHE (l 7<>5), faisant
^FromenTau. le coin oriental de la rue Saint-Thomas.
Chapelle Saint-Nicolas-du-Lolvre. (Voir p. 109.)
Maison de la Treille (1 373-1 660) ou du Cep-de- Vigne (1619), puis de l'Image
Saint-Claude (1737).
Maison sans désignation en 1A80, puis de la Croix-de-Fer (1568-1737), la-
quelle a dû faire partie anciennement d'une des maisons qui lui ont été contiguës.
Maison du Lion-d'Or (1 655), formée, postérieurement à 1619, d'un corps d'hôtel
de la maison de la Croix-d'Or faisant le coin occidental de la rue Fromenteau.
CÔTÉ MÉRIDIONAL.
PAROISSE SAINTGERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVECIlÉ.
Il n'y avait point d'abord de côté méridional à la rue des Orties, puisque cette
rue était primitivement un quai. Plus tard elle a été bordée, du côté de la rivière,
par la muraille de Charles V, et enfin par la grande galerie du Louvre.
RUE DES POULIES.
La rue des Poulies commençait au quai de l'Ecole et finissait à la rue Saint-
Honoré.
H est parlé dans une charte de 12 65 des cens à percevoir sur une certaine
RUE DES POULIES. 85
maison de la rue des Poulies et sur les poulies qui s'y trouvaient, tr super quadam
ttdomo in vico de Pouliis, et super poliis et pertinentiis. n Qu'étaient-ce donc
que ces poulies dont la rue a pris le nom? Suivant M. Génin, le mot poulie serait
dérivé de pullus et voudrait dire une écurie*1); suivant Sauvai, dont tous les au-
teurs ont adopté l'opinion, les poulies étaient une sorte de jeu ou exercice de corps.
Ces explications sont complètement en dehors de la vérité : les poulies en question
constituaient un appareil à travailler les draps, et servaient à une opération du
genre de celle qu'on nomme actuellement le ramage. Dans divers titres relatifs au fief
d'Autonne'2', situé rue des Rosiers et des Ecouffes'3', nous avons, en effet,- trouvé
les passages suivants : rcOstel du Pot-d'Estain , aultrement dit les Poulies (i453);
ff — jardin ouquel avoit anciennement des poulies (1 55a ) ; — ung jardin appelé le
tr jardin des Poulies, à cause des poulies à draps que l'on tenoit illec (1 583) ; — grand
cr jardin nommé anciennement le jardin des Poulies, à cause des poulies à draps que
rr l'on y tenoit ( 1 583) ; — deux maisons et deux poulies à draps (î 583). n Rien n'est
plus concluant; mais ces textes ne sont pas les seuls que l'on puisse citer, et nous
indiquerons en outre un document du xve siècle dans lequel l'auteur, faisant allu-
sion à diverses enseignes de Paris, dit que : a Tous ceulx qui serviront les roys et
ff les roynes, seront vestus de draps q%d seront faits aux Polies, en la rue des Blancs-
r Manteaux W;ti puis un arrêt rendu par le Parlement en 1299, où il est exprimé
que les foulons ne voulaient point porter leurs étoffes aux nouvelles poulies,
novas polias, situées hors des murs de la Ville, mais seulement aux anciennes,
comprises dans l'enceinte <5). Le rapport entre les poulies et la fabrication du drap
ne saurait être plus manifeste, et, conséquemment , non-seulement Sauvai et
M. Génin se sont trompés dans leurs conjectures, mais Jaillot s'est également
abusé en imaginant que la rue devait son nom à un membre de la famille Des
Poulies, laquelle ne s'est ainsi appelée que parce qu'elle exerçait la profession
à\ampoliéeur,n indiquée dans les rôles de la Taille. Comme dernière preuve à
l'appui de notre assertion sur l'origine du nom de la rue, nous dirons que la
maison où étaient placées les poulies, cause de cette appellation, était habitée
par un tisserand, textor.
La rue des Poulies est énoncée vicus de Poliis dans une charte de 12 56, la
première où l'on en voit une mention'6'; — vicus qui dicitur des Polies en 1262;
(1) Récréations philologiques , l. \. (6> Jaillot cite une charte du Carlulaire de Saint-
"' Arch. de l'Hôtel-Dieu. Germain-l'Auxerrois (fol. 5s v°), dans laquelle la
(J) On voit dans ces mêmes titres que la rue des rue des Poulies serait mentionnée à l'année i2o5.
Ecouffes a été appelée aussi rue des Poulies. Cette charte, écrite en français, porte réellement la
(4) Biblioth. impér. Mss. Fonds latin, n" li&lii. date de tao5, mais par erreur évidente, puisqu'il
loi. 1 18. La pièce a été récemment publiée. y est parlé d'Oudart de La Neuville comme prévôt
S) (Htm, t. II, p. 436. de Paris, et Oudart ne l'a été que de 1980 à 1283.
86 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
— viens Poliarum et «rue des Pollies-n en 1286. Cette désignation s'est toujours
conservée avec d'insignifiantes variations d'orthographe; mais elle n'a point été la
seule employée, et la rue a été très-souvent confondue, dans sa partie méridio-
nale , avec la rue des Fossés-Saint-Germain ; par exemple , une maison qui y était
située est dite dans un censier de 1 53 1 , a faisant le coing du Fossé sur la ri-
avière,fl et l'hôtel de Bourbon y est présenté comme aboutissant «audict Fossé
rr Sainct-Germain. » Cette partie de la rue est appelée «rue Jehan] Evroutn dans
le livre de la Taille de 1292 M, où l'on trouve également la rubrique de « le Fossé
« Saint-Germain , le renc Robert-de-Villeneuve, jusques sus la rivière, n Elle est
de plus qualifiée de rue du Noyer ou xNouier-n en des actes de 1 353 et i36i, à
raison de certaine maison du Noyer qui fut réunie à l'hôtel de Bourbon en 1 385 ;
enfin, depuis le xve siècle, elle a été fréquemment appelée rue de Bourbon ou du
Petit-Bourbon à cause de cet hôtel. Un titre de 1 583 mentionne une maison faisant
le coin du quai et de la «rue de Bourbon, n et des baux de 17&6 et 1755 portent
que certaines maisons étaient situées «rue anciennement appelée des Poulies et
cr actuellement du Petit-Bourbon. -n Toutes les appellations autres que celle de rue
des Poulies n'ont guère été d'ailleurs qu'exceptionnelles, et le plus habituelle-
ment on a considéré la rue comme se prolongeant jusqu'au quai. On lit dans le
censier de l'Evêché de 1 3gg : «La rue des Poulies, qui commence en la grant rue
« de Saint-Honnoré et fenist sur le quay de la rivière , envers l'ostel de Bourbon, n
Sous Louis XIV, une variante sans précédent s'est introduite, et l'on a dit pendant
un temps rue de Villequier pour désigner le tronçon de la rue le plus éloigné de la
rivière, celui où était l'hôtel de Villequier.
Les lettres patentes du 26 décembre 1758, relatives au dégagement des
abords du Louvre, ayant prescrit d'abattre tous les bâtiments situés devant la
colonnade, ont fait disparaître les deux tiers du côté occidental de la rue des
Poulies; le côté oriental, entamé par l'établissement de la place Saint-Germain-
l'Auxerrois, ordonné par arrêt du Conseil, du i3 novembre 178/1, a été détruit
en très grande partie par suite du décret du 3 mai i856. La rue des Poulies,
dont la largeur a été portée à vingt mètres, se nomme actuellement rue du Louvre.
'" Nous l'avons constaté en comparant le rôle de n-des Poulies, « des individus qui, dans le rôle de la
la Taille de 129a avec les rôles de 1996 à 1299. Taille de 1292, sont dils habiter la «rue Jehan
Dans ces derniers figurent, sous les rubriques «la rrEvrout. » Deux membres de la famille Évrout ont
rrue des Poulies» et rrle commencement de la rue été nommés à l'article de l'hôtel de Bourbon, p. 33.
RUE DES POULIES. si
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAINT-GEBMAW-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICK DE L'ÉVÉCHÉ.
CENSIVE DU CHAPITRE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HÔTEL DE COMBAULT, contigu à l'hôtel de Bourbon faisant le coin du quai. Sur
le même emplacement, il y avait, dans la seconde moitié du xve siècle, une
maison sans désignation , faisant partie de l'hôtel de Bourbon et aboutissant à la
cour de cet hôtel , sur laquelle elle avait issue M. Après avoir été acquise par la
duchesse de Bourbon, elle passa en héritage à la duchesse d'Angoulême, mère de
François Ier. Cette princesse, par lettres du ier juillet i528, en fit don à Jean Le
Verrier, dit de Nismes, premier valet de chambre du roi, et à sa fille Jeanne; libé-
ralité confirmée par François Ier, le 21 mars i532, et par Henri II, le 1" juin
1 5^7. En 1571, la maison appartenait au seigneur de Houlles, mari de Jeanne
Le Verrier, et, le 2 3 juin 1 583 , elle fut adjugée au maçon Jacques Le Boy comme
dernier enchérisseur. C'était alors une « mazure » où il y avait quelques démoli-
tions; elle offrait une superficie de cinquante toises, et une largeur de dix, jusqu'à
« l'avant portail faict en cul de four et entrée de la grande porte de Bourbon. r>
L'adjudication eut lieu au prix de 600 écus sol, de 10 sous tournois de rente,
de 2 sous parisis de cens, et à charge de bâtir. A la masure devait être jointe une
cour de la grandeur qu'il plairait au Boi de désigner, et le preneur s'engageait à
laisser une ruelle de seize pieds de large entre son terrain et l'hôtel de Betz(2l
A Jacques Le Boy succéda bientôt Bobert de Combault, seigneur d'Arcis-sur-Aube,
premier maître d'hôtel du roi. H fit construire un hôtel qui prit son nom, forma le
coin méridional de la nouvelle rue, et fut, le 22 juillet 1602, cédé par sa veuve,
Louise de La Béraudière, à François de La Béraudière, abbé commendataire de
Noaillé, puis évêque de Périgueux. L'hôtel de Combault passa ensuite au duc
d'Orléans, frère de Louis XIII , après avoir été à Marie de Médicis, qui, en 1629,
se laissa vainement réclamer les droits de lods et ventes par le chapitre Saint-
Germaiii-rAuxerrois. Jean Du Buisson l'acquit du duc d'Orléans, le 1 1 avril 16/17,
et le revendit, le 3o juin 1666, moyennant la somme de 600,000 livres, au roi
Louis XIV, qui en avait besoin pour agrandir le Louvre.
W Ainsi que nous l'avons dit p. 35 , Sauvai rap- pait le même emplacement que l'hôtel de Combault .
porte (pie, sous le règne de Philippe le Long, le et se confond probablement avec le logis qui, au
maréchal de Trie avait une maison située entre les xv' siècle , aboutissait à la cour de l'hôtel de Bourbon.
Imlds de Bourbon et d'Alençon; cette maison occu- (,) Arch. de l'Emp. reg. Q 1099".
88 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
HÔTEL DU PetIT-ÂLENGON , DE CASTELIAN et DE RETZ , faisant le coin sep-
tentrional de la rue du Petit-Bourbon. 11 est rapporté dans un titre de 1578 que
cet hôtel s'était appelé a de tout temps et ancienneté le Petit- Alençon; n mais
on n'en voit pas clairement l'origine. Le Petit -Alençon était sans doute un
morcellement du grand, et la séparation eut lieu assez probablement vers 1670,
au temps où le duc René vendit le Grand- Alençon, car on lit dans les archives
de Saint-Germain-l'Auxerrois, qu'il vendit aussi le Petit- Alençon, acquis par
Me René de Cerceaux. Le 3i août i5o2, la veuve de ce dernier céda le Petit-
Alençon à Gervais de Fresnoy. Un parent de celui-ci, Gilles de Fresnoy, sieur Du
Plessis-Grandier, fut ensuite possesseur de l'hôtel , et s'en défit , le 2 o octobre 1 5 6 1 ,
au profit d'Honorat de Castellan, conseiller et médecin du roi. Le 18 février 1678,
les héritiers de Castellan vendirent le Petit- Alençon, devenu hôtel de Castellan,
2,333 écus d'or et un tiers, à Albert de Gondi, maréchal de France et duc de
Retz, qui y réunit la partie du Grand-Alençon à laquelle le Petit aboutissait,
c'est-à-dire cette partie que la dame de Dampierre avait habitée et dont la façade
donnait sur la rue d'Autriche. (Voir p. 16.) Le 5 septembre i6o4, Henri de
Gondi, évoque de Paris et fils du précédent, vendit l'hôtel de Retz 8,000 livres
à Claude de Bossut et à Gabrielle de Gondi, sa femme. Cependant on observe
que, en 1617, le lot de la dame de Dampierre fut séparé de nouveau de l'hôtel
de Retz par le petit-fils du maréchal, Henri de Gondi. Ce dernier aliéna égale-
ment la partie de l'hôtel de Retz faisant front sur la rue des Poulies; elle lui fut
achetée, le 12 mai 1621, au prix de 75,000 livres, par Jean de Vaugain, sieur
de Blainville, conseiller d'État, et passa plus tard au duc de Choisy, qui, après
l'avoir fait entièrement reconstruire, l'abandonna au Roi le 2 3 février 1657,
moyennant 200,000 livres. A cette époque, les corps d'hôtel en bordure sur la
rue d'Autriche étaient confondus, avec ceux de la rue des Poulies, sous la déno-
mination d'hôtel de Choisy. Les uns et les autres ont été abattus vers 1666.
Nous n'avons trouvé aucun plan de l'hôtel de Choisy. Suivant un arpentage de
1 627, il contenait quatre cent deux toises de superficie, dont cinquante-trois toises
et demie seulement en censive de Saint-Denis de la Chartre, et le reste en censive
de Saint-Germain-l'Auxerrois. 11 paraît avoir eu dix toises de largeur sur la rue
d'Autriche, et onze toises quatre pieds sur la rue des Poulies; mais la teneur de
la pièce où sont consignés ces détails est telle que nous n'en avons pu tirer aucun
parti sous le rapport graphique.
Grand hôtel d'Alençon, de Villeroy, d'Anjou et de Longueville. Au
milieu du xme siècle, Alphonse, frère de saint Louis, comte de Poitiers et de
Toulouse, avait dans la rue d'Autriche un hôtel peu considérable, qu'il résolut
d'agrandir. En conséquence il acheta, i° au mois de juin 12 5&, du chevalier
Jean de Maisons, deux logis qui avaient pour dépendances des places et des
RUE DES POULIES. 89
jardins, et qui traversaient tout l'îlot compris entre les rues des Poulies et
d'Autriche; 2° au mois de février de la même année, une maison située rue
d'Autriche, devant son hôtel; 3° au mois de septembre 1255, une grange située
dans cette dernière rue et contiguë à son ancienne demeure; k° enfin aux mois
de mars, juillet, août 1260 et janvier 1261, une suite de maisons donnant
toutes sur la rue des Poulies'1), à l'exception d'une seule. La dépense monta à
535 livres parisis; mais l'hôtel prit alors de vastes proportions et put s'étendre
sur la rue des Poulies, à laquelle il n'atteignait point auparavant. Au mois de juin
1262, Alphonse, moyennant 60 livres parisis et un denier de cens, acquit encore,
pour en faire un jardin, une place ou pièce de terre qui était sise derrière sa
maison'2*, et qui lui fut cédée par le chapitre de Saint-Germain-l'Auxerrois. Dans
l'acte de vente il est dit que cette place était contiguë à une maison ayant appar-
tenu à Hamon Le Breton, garde du sceau de l'archidiaconé de Paris, et qu'elle
tenait aussi à une autre maison dont avait été propriétaire un tisserand nommé
également Hamon Le Breton. Or, d'une autre charte, du 5 septembre 1265, il
appert que la maison contenant les poulies, d'où provient le nom de la rue, était
possédée par un individu appelé Drocon Le Breton W. Faut-il supposer que Drocon
a succédé à un des Hamon, et que sa maison a été annexée dans la suite à celle
du comte de Poitiers, ce qui aurait fait dire à Sauvai que la maison d'Alphonse
était la même que celle des Poulies? 11 est plus probable que Sauvai ne s'est pas
bien rendu compte de ce qu'il avançait. On verra plus loin que la maison des
Poulies n'a été réunie au manoir du comte de Poitiers que par Enguerrand de
Marigny, et qu'elle est seulement une des nombreuses propriétés sur l'emplace-
ment desquelles ce manoir s'est développé.
Après la mort du comte de Poitiers, son hôtel fut acheté par Archambaud II,
comte de Périgord, qui, au mois de septembre 1281, en vendit la moitié, moyen-
nant 750 livres, au neveu d'Alphonse, Pierre de France, cinquième fds de saint
Louis, comte de Blois et d'Alençon. L'hôtel, d'abord dit cthostel d'Hosteriche,^
appellation encore en usage en 1621, commença alors à se nommer hôtel d'Alen-
çon, désignation sous laquelle il a été connu jusque dans la seconde moitié du
xvic siècle. Le comte d'Alençon étant mort à son tour, sa veuve, Jeanne de
Châtillon, fit avec Philippe le Bel, en 1 286, un accord suivant lequel, en échange
de l'abandon d'une rente de 100 livres qu'elle percevait sur le trésor royal, Phi-
lippe lui cédait cette moitié de l'hôtel qu'avait possédée son mari, en la lui garan-
"' Trésor des chartes, cart. J i52. «Pictavensis, quem tenet nunc Comitissa de Alen-
(,) Cart. de Saint-Germain-l'Auxerrois, fol. 16 V. jrcone. *
Ce cartulaire a été écrit à la fin du xin* siècle; le "' Il était apparemment tisserand, comme son
sommaire de la charte est ainsi conçu: «Littera de parent Hamon, qui, pour son travail, employait des
-uno denario census super jardino domus Comitis rr poulies à draps."
90 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
tissant contre tous les embarras que pourraient lui susciter les exécuteurs testa-
mentaires du comte d'Alençon, ainsi que les ayants cause du comte de Poitou.
A Jeanne de Châtillon paraît avoir succédé rr madame Blanche d'Espaigne W t> dans
la jouissance de la partie méridionale de l'hôtel d'Alphonse.
Au mois de juin i3o6, Enguerrand de Marigny, ministre de Philippe le Bel,
acheta 5,5 oo livres tournois, du chanoine Guillaume de Chanac, exécuteur testa-
mentaire de Hélie de Maumont, clerc du roi, et un manoir ou unes mesons, assises
rr à Paris, en la rue que on dit le Fossé-Saint-Germain (des Poulies), en la terre
cr et en la censive des doyen et chapitre Saint-Germain-l'Auxerrois , joingnans de la
rr partie deseure (au nord) aus petites mesons et jardins feu Jehan Augier, ou chief
cr de la rue des Poulies, et, en la partie dessous, à la meson feu Jehan Evrout (une
ce de celles qui devinrent l'hôtel de Bourbon); si comme ils se pourtendent en lonc
ce et en lé jusques à la granche dudit Jehan Augier; n puis, le jour de Pâques
fleuries de la même année i3o6, la maison ou masure de Jean Bardel ce où il
cesoloit avoir plusieurs estages, assis en rue d'Osteriche, à l'opposite du Louvre,
retenant d'une part à l'ostel ou manoir de madame Blanche, et d'autre part à une
replace qui fu jadis Bobert Evrout. n Cette maison, prise à croît de cens en 1-298,
par Jean Bardel, de Jean de Saint-Benoît, bourgeois de Paris, s'étendait jusqu'à la
rue des Poulies, où elle avait issue. En i3o8, le vendredi après la fête de sainte
Madeleine, Enguerrand acheta, au prix de 100 livres de bons parisis petits, une
nouvelle maison, rue des Poulies; elle appartenait à Michel de Bourdenay, qui
l'avait acquise moyennant 10,000 livres, le lundi après la Saint-Martin d'été, de
Boger des Bous, auquel le chapitre Saint-Germain-l'Auxerrois l'avait cédée le lundi
avant la fête de saint Pierre et saint Paul de l'an i3oo. La maison de Michel de
Bourdenay était attenante, vers le midi, «à la maison feu Jehan Augier, et d'autre
repart à la maison de Viez Poulies, et par derrière haboutant à la maison de noble
ce dame madame Blanche d'Espaigne. n Là ne se bornèrent pas les acquisitions
d'Enguerrand , et il acheta encore, le mercredi après la Chandeleur i3io, de
cr Gieffroi Coquatrix, n une maison énoncée « rue des Poulies, qui s'estent jusques à
cria rue d'Osteriche, laquelle maison est appelée et a esté toujours la maison de
ce La Brichète;n ensemble rrune grange et maisonètes qui sont des appartenances
rcd'icelle maison; laquelle maison, grange et maisonète. . . tient à présent comme
cesiènes noble homme nions. Enguerran de Maregny. . . et lesquelles. . . a ad-
erjoinctes à sa maison de Paris ;■» puis, et à une époque que nous n'avons pu
fixer*2', une autre maison que Boger l'Émailleur avait cédée à Jean de Vaires, le
(1) Sans doule Blanche, fille de saint Louis et 2) Le cartulaire de Marigny, auquel nous em-
femme de Fernand, fils du roi de Gastille. Elle pruntons ces détails, ne contient pas les actes d'ac-
mourut le 7 juin i3ao, et fut enterrée aux Corde- quisition des trois dernières maisons, mais on ne
liers de Paris. peut douter qu'Enguerrand n'en ait été le proprié-
RUE DES POULIES. 91
dimanche après la Saint-Nicolas d'hiver i3op,; enfin la maison des Poulies elle-
même, qui était située entre les maisons de Jean de Vaires et de Roger des Bous,
et qui, moyennant 3 2 livres parisis, avait été vendue à Jean de Paris, marchand
de chevaux, par Alix des Poulies, le lundi après l'Epiphanie de l'an i3os M. Il
n'y a, au surplus, aucune apparence qu'Enguerrand se soit emparé par abus
d'autorité, comme l'a dit Jaillot, des maisons de la rue des Poulies; les transac-
tions semblent au contraire avoir été régulières.
En possession des diverses maisons qui viennent d'être indiquées, Enguerrand
les réunit à la partie septentrionale de l'hôtel d'Alphonse, dont il était probable-
ment alors propriétaire, nous ne savons à quel titre, et où il demeurait lors-
qu'il fut arrêté par ordre de Louis X. Aux termes du jugement qui, au mois
d'avril 1 3 1 5 , condamna Enguerrand à être pendu, son hôtel devait être démoli;
mais il était plus profitable de se borner à le confisquer, et Louis X le donna à
son frère Philippe, roi après lui sous le nom de Philippe le Long, de sorte que
l'hôtel retourna à la couronne. Il resta uni au domaine royal jusqu'en i3îï8,
année où Philippe de Valois en gratifia son frère Charles, chef de la maison
d'Alençon. A cette époque , les deux moitiés de l'hôtel du comte de Poitou et
les maisons achetées par Marigny ne formaient sans doute plus qu'une seule et
même habitation. Dans le compte des confiscations de Paris, pour 1621, l'hôtel,
alors rr vuide et ruineux, n où résidait un nommé Jean de Boumonville , en
qualité de concierge, est encore dit appartenir au duc d'Alençon. Les historiens
rapportent qu'en 1&70, le duc René le vendit; mais ils ne désignent point l'ac-
quéreur. Au commencement du xvic siècle, le propriétaire de l'hôtel était Nicolas
de Neufville, seigneur de Villeroy, qui le fit construire entièrement avant 1 5 1 9 ,
de sorte que le nom d'hôtel de Villeroy commença à se substituer à celui d'hôtel
d'Alençon ou de Grand- Alençon, comme on disait souvent afin de le distinguer
d'avec le petit. Le 3o mai 1 568 , Nicolas Le Gendre'2', seigneur de Villeroy, et Jean
de Neufville, seigneur de Chantelou, son frère, cédèrent l'hôtel, pour la somme de
5o,ooo livres, au duc d'Anjou, depuis roi de France sous le nom de Henri III,
qui chargea son favori Du Gast d'y établir un arsenal d'armes magnifiques, des-
tinées aux six mille Gascons dont Du Gast était colonel général. C'est à l'hôtel de
laire , car le cartulaire renferme plusieurs copies de
transactions antérieures qui y sont relatives.
(l) L'ordre des maisons semble avoir été celui-
ci, en descendant vers la rivière: la maison Jean
de Vaires, la maison des Poulies, la maison Michel
de Bourdenay, la maison de Jean Augier et la
maison Hélie de Maumonl, sous laquelle celle de
Daniel pouvait avoir son issue. La maison de La
Brichèle était sans doute située au-dessus de celle
de Jean de Vaires. En 1 26 1 , celle maison de Pétro-
nille La Brichèle était séparée de celle du comte de
Poitou par une maison qui avait appartenu à irHer-
ttchambaud,* sommelier du roi. C'est ce qui nous
fait penser qu'Enguerrand disposait de la partie
septentrionale de l'hôtel du comte de Poitou. On
comprend que l'absence de litres suffisants laisse
ces questions fort obscures.
5) Il portait le nom de son grand-oncle maternel.
92 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Villeroy, devenu hôtel d'Anjou, que le Duc reçut, au mois d'août 1673, les
ambassadeurs députés pour lui annoncer son élection au trône de Pologne.
Quelques semaines après, le 18 octobre, il fit don de l'hôtel à sa sœur Marguerite
de Navarre, en retranchant toutefois un pavillon dont il gratifia la dame de
Dampierre. (Voir Rue d'Autriche, p. 16.) Marguerite, après avoir laissé démem-
brer par son mari une autre partie de l'hôtel d'Anjou, qui est devenu celui de
Larchant, le vendit au prix de 10,000 livres, le 17 avril i58o w, à Guy Du Faur
de Pibrac, président au Parlement, auquel Marie de Bourbon, duchesse de Lon-
gueville, l'acheta 1,600 écus d'or, le 27 janvier 1 58 1 . En août 1 583 , la Ville
permit que la moitié des eaux alimentant la fontaine qui s'y trouvait fussent
détournées au profit d'une autre fontaine placée dans une maison de la rue des
Bourdonnais et appartenant au sieur de Villeroy.
L'hôtel d'Anjou, rebâti en partie par la duchesse de Longueville, dont il prit
le nom, fut abandonné au Boi, le i3 août i662<2>, par Henri de Longueville,
petit-fils de Marie de Bourbon, en échange de l'hôtel de Chevreuse, sis rue
Saint-Thomas-du-Louvre. Il avait été estimé 48g, 000 livres, et on le destinait à
être démoli pour l'agrandissement du Louvre ; mais la partie la plus proche de ce
palais fut seule abattue. En 1670, elle était occupée par les magasins du roi, et
quelques personnes, entre autres d'Orbay, architecte du Louvre, y avaient leurs
logements. En 1709, l'hôtel de Longueville fut réparé pour servir de demeure au
marquis d'Antin, surintendant des bâtiments, ce qui le fit appeler l'hôtel d'Antin
ou de la Surintendance. On y voyait encore des F et des salamandres, preuve que
les constructions contemporaines de François Ier n'étaient point toutes détruites.
Après une nouvelle restauration on y plaça, en 1738, l'administration des Postes.
Un peu auparavant, l'hôtel avait été mis à la disposition des fermiers des voitures
de la cour, connues sous le nom de coches de Versailles, et il n'a été définitive-
ment rasé, de même que les trois maisons suivantes, qu'à la suite des lettres
patentes de 1768 relatives au dégagement des abords du Louvre.
Maison de la Colombe, PETIT HÔTEL DE VlLLEQUIER et DE PROVENGE. Ce fut,
entre 1371 et i53i, la maison «au Coulons ou «Coulombe, v aboutissant à l'hôtel
d'Alençon. En 1 68 1 , la maison du Coulon était double , et il est présumable qu'elle
comprenait les deux petits corps d'hôtel abattus par Villeroy pour agrandir son
hôtel, suivant une déclaration du 12 octobre i52o; en 1681, la maison du
(l) En 1577, Etienne Douiller fit pour i,5oo ii- gère, on lit, à la date du 1" août 1657 : »fl nous
vres de maçonnerie tren la maison de la reyne de crdit que le Roy avoit acheté cinq cent mille livres
"Navarre, près l'hostel de Bourbon. n n-Thostel de Longueville, pour en faire sa petite
<s> La transaction paraît avoir été conclue plu- décurie. »(P. 20g.) Ce n'est point d'ailleurs chose
sieurs années auparavant, car dans le Journal d'un très-rare qu'une vente d'immeuble effectuée h deux
voyage à Paris, en i65y-58, publié par M. Fau- époques très-distinctes.
RUE DES POULIES. 93
Coulon, contiguë à l'hôtel d'Alençon, contenait en effet deux corps de logis, et
en i520, bien quelle fût toujours attenante à cet hôtel, elle ne se composait plus
que d'un seul corps d'hôtel. En 1578, on la trouve confondue avec la suivante ;
mais, dans la première moitié du xvne siècle, elle en fut de nouveau distinguée
sous le nom de petit hôtel de Villequier. En 1 655 , elle est dite constituer un tiers du
grand hôtel de Villequier et appartenir au prince de Harcourt. Un peu plus tard,
elle s'appelait hôtel de Provence, et, vers 1781, elle était au duc d'Elbeuf, qui la
vendit à un nommé Villemot.
HÔTEL DE GARANCIÈRES, DE NEVERS, DE VILLEQUIER et D'AUMONT. Propriété
des seigneurs de Garancières dès 1871, l'hôtel était, en 1621, confisqué sur l'un
d'eux, Guillaume de Montenay. En 1 5 3 1 , il appartenait à Sébastien de La Grange,
sieur de Trianon et avait pour enseigne, au-dessus de la porte, le Lion-Cou-
ronné. En 1567, possédé par le duc de Nevers, qui en paya les droits de lods
et ventes le 16 avril, il commença à se nommer hôtel de Nevers et compre-
nait, comme nous venons de le dire, la maison précédente. En 1577, il était
au baron René de Villequier, gouverneur de Paris. Dans le siècle suivant, il fut
transmis à César d'Aumont, marquis de La Guierche, qui en passa titre nouvel
le 12 juillet 1 655 ; c'est vers cette époque que Marot en grava les plans. Le
3 mars 1672, Charlotte d'Aumont, fille de César, le vendit au Roi 2 10, 5 ko livres;
mais, sur l'opposition d'Anne d'Aumont, sa sœur, femme de Gilles Fouquet, la
vente fut résiliée. Des trois cent trente-sept toises et vingt-cinq pieds de super-
ficie que l'hôtel présentait alors, le Roi acquit seulement cinquante-quatre toises,
payées 37,000 livres, avec une place de trente-trois toises carrées, dépendant
de l'hôtel de Longueville et située derrière l'hôtel de Provence. En 1782, l'hôtel
d'Aumont appartenait à M. de Rouillé, ministre de la marine, qui le fit restaurer
par l'architecte Rlondel(1); on y avait annexé la cour de l'hôtel de Conty, trans-
formée en jardin où l'on remarquait une statue d'Apollon, par Lemoine. En
1 7G0 et 1761, le Roi devint définitivement possesseur des hôtels d'Aumont et de
Provence, dont il ordonna la destruction partielle. Ce qu'on en laissa subsister,
réuni à une portion de l'hôtel de Conty, forma l'hôtel d'Angivilliers, dont il sera
parlé plus loin.
Maison sans désignation en 1399, qui appartenait alors àMe Gilles de Clamecy (2),
et aboutissait à l'hôtel d'Ostrevant. En i53i, elle était divisée en deux parties et
aboutissait à la maison suivante, qui s'augmenta probablement à ses dépens ; elle
fut ensuite réunie à l'hôtel de Villequier, et, dans la seconde moitié du xvne siècle,
c'était l'hôtel de M. de Rordeaux. Si nous ne nous trompons, elle se confond avec
la maison dont, le 19 mars 1571, fut passé titre nouvel par Charlotte de
(l) Architecture françoise , t. III. — La maison avait appartenu précédemment à mes-
(,) Gilles de Clamecy fut prévôt de Paris en 1 h 1 9. sire Jean Dainville et à Pierre des Jardins.
9i TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Bouteville , veuve de Benoît Le Grand, seigneur du Plessis. Celle-ci tenait la maison
de son père, Jean de Bouteville, et la vendit, avant 1 583 , à Antoine de Chaulnes,
trésorier général de l'extraordinaire des guerres.
HÔTEL d'AllUVE, DE ClPIÈRES, DE CONTY et D'ANGIVILLIERS. Indiquée sans
désignation particulière en 1/121, et ayant eu pour enseigne l'Image Notre-Dame
(1 645-1 5 62 ) ou la Belle-Image (1 570) W, cette maison appartenait, sous Charles IX,
au président Pierre de Banconnet, héritier de sa femme, Jeanne Aymery. Un parent
de cette dernière, Adam Aymery, avait possédé la maison en 1 53 1 ; elle fut depuis,
et avant i58o,à la dame d'Alluye, veuve de FlorimondBobertet, conseiller du Boi.
Vers ce dernier temps, il dépendait de l'hôtel de l'Image Notre-Dame, autrement
dit d'Alhiye, une terrasse qui, vraisemblablement prise sur le terrain de l'hôtel
de Garancières, s'étendait derrière cet hôtel jusqu'à celui d'Anjou. Dès i53i, la
maison de l'Image Notre-Dame, laquelle aboutissait primitivement à l'hôtel d'Os-
trevant ou d'Alençon, avait sur la rue d'Autriche un corps d'hôtel provenant,
nous le supposons, d'un morcellement de l'hôtel d'Etampes; elle était, en outre,
réunie à la maison suivante, et les deux maisons ont formé l'hôtel de Cipières,
appartenant à la famille de ce nom, en i5o,6 (2). En 1639, cet hôtel, propriété
de M. de La Fonds, était habité par M. d'Orval, premier écuyer de la Beine, et
l'on y entretenait des écuries, du côté de la rue d'Autriche. L'hôtel de Cipières,
a été dit ensuite hôtel d'Argenson, puis de Conty, à cause de la princesse de Conty,
à laquelle il était échu. Augmenté plus tard de l'hôtel de Créquy et d'une partie
de l'hôtel d'Aumont, après avoir été appelé hôtel de Tresmes, il a pris le nom du
marquis d'Angivilliers, ordonnateur des bâtiments royaux, qui l'avait acheté et y
demeurait. Enfin, entamé parle percement de la rue d'Angivilliers en 1780, ainsi
que par le prolongement de la place de l'Oratoire en 1808, l'hôtel ne se compo-
sait plus, dans ces derniers temps, que de quelques bâtiments situés sur la rue de
l'Oratoire et qui, sous Louis-Philippe, servirent de siège à l'administration de la
Maison du Boi ; ils ont été rasés en i854, pour le passage de la rue de Bivoli,
Maison de «l'Image Saint-Eustaceh (i&65). Nous venons de dire qu'au xvie siècle
elle avait été réunie à la maison précédente; il se pourrait qu'au xve elle n'eût
(1) On donnait indifféremment ces deux noms
aux enseignes de ia Vierge.
(î> M. Vallet de Viri ville a signalé (Moniteur uni-
versel du 1 " avril 1 855 ) certain exemplaire des An-
nales d'Aquitaine , de J. Bouchot, portant des notes
manuscrites, dont une concerne les armoiries de
Jeanne Darc, et une autre apprend que, ^en l'an
f 1 6 1 6 , telles armes furent trouvées sur une vitre
«•d'une vieille salle basse ou cuisine d'une maison de
f la rue des Poulies appartenant à M. de Laujon (?),
rr secrétaire du roy, appelée communément l'hostelde
rr Qjpierre, etjadis l'hostelde Vaueouleurs , à cause que
nc'estoit la maison et hostel de ladite Pucelle , qui es-
fr toit de Vaueouleurs. » M. de Viriville a fait observer
que, si Jeanne Darc n'est jamais entrée dans Paris,
il se peut du moins qu'un des Du Lis, membre de la
famille de la Pucelle , ait habité l'hôtel de Cipières et
lui ait valu le nom d'hôtel de Vaueouleurs ; toutefois
nous n'avons rencontré aucune trace de ce fait
dans les titres domaniaux que nous avons consultés.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 95
point été distincte de l'hôtel d'Etampes, à laquelle il est certain qu'elle fut sim-
plement contiguë pendant un temps. Dans ce cas, ce serait la maison de l'Image
Notre-Dame et non celle de l'image Saint-Eustache qui, ayant appartenu à «Jehan
«Le Meingre,? dit Bouciquault, maréchal de France, est indiquée sur un titre de
1600, comme tenant à l'hôtel d'Etampes. L'hôtel dont jouissait ce maréchal et
qu'il vendit, le 18 février 1899, à Guillaume Fouquart, garde des coffres du Roi,
lui avait été donné par le Dauphin , régent de France , pendant la captivité du roi
Jean. Il avait été confisqué sur Catherine d'Artois, comtesse d'Aumale, et sa fdle
Blanche, comtesse d'Harcourt, pour les punir d'avoir embrassé le parti du roi de
Navarre.
Maison sans désignation en 1 53 1 , qui eut pour enseigne le Boisseau en 1 636 ,
et aboutissait à la maison du Lion-d'Or de la rue Saint-Honoré. En 1 568 , elle
appartenait à Simon de Fizes, seigneur de Chaulnes, secrétaire des finances de
la Reine mère, et en 1 57 1 , à Jean Charron, valet de chambre du Roi, qui la louait
à Henri de Savoie, sieur de Châteauvieux. A la fin du xvnc siècle, elle était divisée
en deux parties, la seconde faisant hache derrière la première.
Maison faisant partie de celle du Cheval-Rouge en la rue Saint-Honoré. Elle
comprenait encore la maison suivante en i522, et, après en avoir été séparée,
elle a eu pour enseigne le Marteau-d'Or (1670) et le Grand-Dauphin (1700).
En i 568 , elle appartenait à Charles Le Comte, charpentier du Roi.
La maison du Cheval-Rouge s'étendait d'abord jusqu'à la rue Saint-Honoré,
dont elle faisait le coin, et, par conséquent, toutes les maisons suivantes avaient
été bâties sur son emplacement.
Maison de l'Ecu-de-Navarre (1 53 i-i 628), dite en 1 53 1 faire le coin de la rue
Saint-Honoré, et, en i55o, contiguë à la maison qui formait ce même coin, appa-
remment parce qu'elle était déjà divisée en deux maisons; celle du nord a eu
pour enseigne la Corne-de-Cerf (1570-1 65o).
Maison dite la Maison-Rouge (1639); ce n'était sans doute qu'un corps d'hôtel
de la maison qui faisait l'encoignure de la rue Saint-Honoré, et à laquelle elle
était contiguë. En 17^1, on l'y avait de nouveau réunie.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE.
La rue Saint-Thomas-du-Louvre commençait à la rue des Orties et finissait à
la rue Saint-Honoré.
Il est question, pour la première fois, de cette rue dans une charte de 1212, où
elle est énoncée strata Canonicorum, la rue des Chanoines; quant au nom de rue
96 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Saint-Thomas-du-Louvre, vicus Sancti Thome de Lupera, il ne se rencontre pas
avant 12 4a; mais il a été exclusivement en usage depuis.
A l'exception de la partie qui avait été retranchée pour la formation de la place
du Palais-Royal , la rue Saint-Thomas était encore entière au commencement de
ce siècle. Les travaux faits, sous le premier Empire, afin de réunir le Louvre aux
Tuileries l'entamèrent fortement, et ce qui en subsistait a disparu dans le cours
de l'année i85o, en même temps que la rue du Carrousel. Cette dernière, ainsi
appelée depuis 181 5, devait être nommée rue Impériale; on l'avait percée, par
arrêté du 26 février 1806, pour servir de communication entre le Louvre et les
Tuileries ; mais elle n'avait jamais été bordée que d'échoppes.
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVECHE.
EGLISE COLLÉGIALE DE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE, faisant le coin de la rue
des Orties. S'il était possible d'admettre l'authenticité d'une charte de l'an io3o,
portant donation d'un setier de blé aux maîtres et écoliers de Saint-Thomas et
de Saint-Nicolas-du-Louvre , l'origine de ces deux communautés remonterait pour
le moins au commencement du xie siècle; mais cette charte, dont on n'a du reste
jamais montré qu'un vidimus de i34o, est si évidemment supposée qu'il n'y a
point lieu d'en tenir compte.
L'acte de fondation de l'église Saint-Thomas-du-Louvre est perdu depuis long-
temps. Le premier document qui s'y rapporte et qu'on puisse citer est une bulle
d'Urbain III, datée du 2 juillet 1 187, et adressée au proviseur de la maison de
Saint-Thomas , martyr, « Wuilelmo , presbytero , provisori domus Thomae martyris. n
Cette bulle fait savoir que le comte de Dreux, Robert Ier, quatrième fils de
Louis VI, avait donné, pour l'usage de pauvres clercs, certaines maisons qu'il possé-
dait à Paris, et constitué des rentes pour l'entretien de quelques religieux qu'il y
avait établis, « quasdam domos quas habebat Parisius provisioni pauperum clerico-
ttrum cum quibusdam redditibus. . .deputavit, religiosis personis in eodem loco,
tcauctore Domino, constitutis, quse secum pariter in eodem laudabili opère de-
ce béant exerceri (1). d Elle prescrit la bénédiction par l'Évêque d'un cimetière des-
tiné à la Communauté ; mais elle n'indique pas en quelle année eut lieu la fonda-
(1) Gérard Dubois , Hist. ecclesiœ Par. t. II, p. 1 82 .
RUESAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 97
tion qu'elle approuve et que quelques auteurs ont assignée à l'an 1 173, époque
de la canonisation de Thomas Becket. Jaillot a conjecturé avec plus de raison,
ce nous semble, que la fondation n'est point antérieure au voyage que Louis le
Jeune fit, en 1 179, au tombeau de cet archevêque, pour lui demander la santé
de son fds, qui fut roi sous le nom de Philippe II, dit Auguste.
Robert Ier étant mort le 1 1 octobre 1 1 88 , sa femme Agnès, comtesse de Braine,
obtint du pape Clément III une bulle du 26 juillet 1 189, confirmant les donations
faites par son époux , tant en maisons qu'en rentes , dont une partie , à prendre sur
les dîmes de Torcy, Chilly et Brie (Comte-Robert), était destinée à l'entretien des
quatre chanoines qui déjà demeuraient dans le cloître, et possédaient une église
en face avec une portion d'un verger voisin. Les libéralités de Robert Ier, ratifiées
par l'autorité apostolique, le furent aussi par lettres de Philippe-Auguste, délivrées
en 1 192 à Fontainebleau, sur la demande de Robert II et de sa femme, Yolande.
En 1 1 99, les époux confirmèrent eux-mêmes toutes les concessions précédentes, en
-changeant seulement le don fait sur les dîmes de Torcy en rentes sur le domaine
de Brie , rentes dont les ehanoines n'ont jamais cessé de jouir. En 1 1 9 1 , dix arpents
de terre situés près de Chaillot, et offerts en aumône par Henri de Chaumont,
étaient venus augmenter les ressources de l'hôpital des pauvres clercs du Louvre,
rhospital pauperum clericorum de Lupara,n lequel avait été construit dans une
cour où il y avait eu des étables W. Cette cour, le verger et les maisons indiquées
dans la bulle de 1 187 dépendaient du manoir de la Petite-Bretagne.
L'an 1209, le nombre des chanoines n'était plus borné à quatre; mais il s'était
apparemment beaucoup accru, puisque, au mois de novembre, à la suite d'une con-
testation entre le comte Robert II, son frère Philippe, évêque de Beauvais, d'une
part, et l'Évèque de Paris, de l'autre, il fut fait entre eux un accord par lequel ils
convinrent que, durant sa vie, l'Evèque de Beauvais aurait le droit de nomination
à toutes les prébendes ou semi-prébendes, anciennes ou nouvelles, faites ou à faire;
que le comte de Brie et ses successeurs disposeraient, après la mort du prélat, des
quatre anciennes prébendes, et que toutes les autres seraient alternativement à la
collation de l'évêque de Paris et du comte de Dreux W.
Cette convention a été observée jusqu'en 17U0. Par son testament fait en no-
vembre 1217, l'Evèque de Beauvais légua au chapitre Saint-Thomas une somme
de i5 livres pour aider à bâtir l'église, ad fabricant ecclesiœ; plus, une somme de
5o livres pour contribuer à élever leur maison, ad domum œdificandam. Les deux
communautés, d'abord confondues, étaient alors entièrement distinctes. N'ayant
pu s'entendre au sujet d'un verger, d'une cour et d'un pré voisin de l'église, elles
M irScilicet curiam in qua erant stabula, ut ibi rgentis, a claustro, quod est ante januam ecclesia;,
rconstrueretur hospital : partem virgulti, vulgo du rrusque ad extremilatem mûri. * (Bulle de 1 189.)
«verger, inter (infra?) hospitale, canonicos attin- (,) Cart. de N. D. t. I, p. i3g.
>3
98 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
avaient été séparées en vertu d'une sentence rendue en novembre 1212 par
l'Evêque de Paris, laquelle spécifiait que la rue Saint-Thomas devait leur rester
commune et former la ligne de démarcation entre leurs propriétés W. Dès le
commencement du xiue siècle, le chœur de l'église Saint-Thomas, devenu insuf-
fisant pour contenir tous les chanoines ayant le droit d'y siéger, avait été agrandi
au moyen des sommes recueillies dans une quête, et par la concession de soixante
jours d'indulgences offertes, avec la sanction du Légat, par lettres du Doyen,
du i5 octobre 1200.
Le 2 février 1628, Jean VI, duc de Bretagne, céda, à titre d'aumône, son ma-
noir de la Petite-Bretagne au chapitre Saint-Thomas. Suivant l'abbé Lebeuf,
il augmenta le nombre des prébendes; cependant le pouillé de i65o ne men-
tionne qu'un doyen, quatre anciens chanoines, cinq autres et le clergé de l'église,
communitas ecclesiœ W. fl y eut ensuite onze prébendes, dont une était attachée au titre
de doyen. Cette dignité ayant été supprimée en 1728, la prébende qui en dépen-
dait fut affectée à un simple canonicat, de sorte que le chapitre se composa alors
de onze chanoines sans chef et présidés seulement par le doyen d'âge. Ce nombre
fut encore modifié par un décret de l'Archevêque, en date du 10 mars 1760.
confirmé par lettres patentes du 20 mai suivant. Aux termes de ce décret, le collège
de Saint-Nicolas, séparé de la Collégiale depuis 1212 et devenu aussi un chapitre,
y fut de nouveau réuni, les sept prébendes à nomination alternée étant suppri-
mées, et le nombre total des canonicats fixé à quatorze, tous à la collation du
métropolitain. Quelques années plus tard, le 23 avril 17^9, une nouvelle fusion eut
lieu, cette fois avec le chapitre Saint-Maur-des-Fossés, et, malgré l'opposition des
habitants de Saint-Maur, elle fut légalisée par lettres patentes du 5 novembre
1750. Le personnel du Chapitre se trouva ainsi composé d'un doyen, qui était
l'archevêque de Paris, d'un prévôt, fonctionnaire dont le titre avait été emprunté
au collège Saint-Nicolas, d'un grand chantre et de vingt-deux chanoines.
L'église Saint-Thomas-du-Louvre , dont nous n'avons découvert qu'un petit
plan périmétrique, formait un parallélogramme d'environ quatorze toises de lon-
gueur sur huit de largeur. Le chœur, qui se terminait carrément, aboutissait sur
la rue Saint-Thomas. L'édifice, dont l'orientation n'était pas fort exacte, mais
avait été adaptée à la direction de la rue, datait du xiue siècle, selon Lebeuf, et
paraît s'être composé d'une nef, accompagnée d'un collatéral vers le nord. H ren-
fermait une chapelle de Saint-Sébastien, qui est mentionnée dès 1^28, et existait
encore trois siècles après, plus une chapelle de Sainte-Marguerite et une de
(1) rrOmnia supradicta quœ sunt ultra stralam reportant, slrala quidem rémanente in cominuni. •>
rCanonicorum cèdent in partem canonicorum ipso- (2) Les registres capitulaires de Notre-Dame font
rrum : omnia autem quœ sunt citra viam, ex parte mention d'une chapellenie de Sainte-Marguerite en
f-hospitalis, erunt ipsius hospitalis, sicut in se corn- l'église Saint-Thomas-du-Louvre, l'an i5oo.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 99
Sainte-Catherine, dotée de 12 livres de rente'1); enfin l'église était le siège de
deux confréries, l'une de la Vierge et l'autre de Saint-Nicolas. On y remarquait
les tombeaux de Côme Guymier, jurisconsulte distingué, et du poète Mellin de
Saint-Gelais, surnommé Y Ovide français. En 1789, la voûte en plâtre menaçant
ruine et les murs surplombant d'une façon dangereuse, le Chapitre reconnut la
nécessité d'une entière reconstruction, et ohtint du Roi, sur la ferme des pou-
dres, une somme de i5o,ooo livres, qui permit de commencer les travaux. Déjà
on avait démoli la vieille nef ^ et jeté les fondements d'une autre, lorsque, le 1 5 oc-
tobre 1739, vers dix heures du matin, le vieux clocher s'écroula en écrasant la
voûte d'un des bas-côtés du chœur ainsi que la salle capitulaire, située au-dessus,
et en tuant six chanoines*3'. Cet événement fit accélérer la reconstruction, et la
nouvelle église, dont le chevet avait été tourné vers l'occident, fut consacrée sous
l'invocation de Saint-Louis, le 26 août i^hh, jour auquel les chanoines de Saint-
Thomas et de Saint-Nicolas, réunis sous le nom de chapitre Saint-Louis-du-Lonvre,
commencèrent à y officier. L'église Saint-Louis, supprimée à la Révolution, et
affectée au culte protestant après le concordat de 1801, a été démolie en 1811,
à l'exception d'un fragment de l'abside qu'on a vu debout jusqu'en i85o. Elle
avait été élevée sur les dessins de Thomas Germain, orfèvre du roi; Baptiste Pigale
(1) Il parait que les ducs de Bretagne, issus des
comtes de Dreux, avaient fondé en l'église Saint-
Tbomas quelques prébendes ou chapelles dans le
xiii' ou le xive siècle, car, sur un cartulaire écrit vers
la fête de Saint-André de l'an i34o et commençant
par ces mots: rfSequuntur omnes possessiones et
ères immobiles ecclesie Sancti Thome de Lupera,»
on lisait au fol. à : rrHabet communitas a duobus
rrcapellanis fundatis per dominum ducem Britan-
f-nie, et dotatis apud Sauciellum, quolibet anno in
-Nativitate Domini : xim' parisis;» puis, au fol. 5 :
rDe 11 chapelleries fondées en laditte église, par
rie. . .duc de Bretagne, dont la collation lui ap-
partient de plein droit, et doltéesde xxxntt parais
rde rente sur son hostel et toutte sa terre de Sau-
rciel, de l'aveu et consentement mons. l'Evesque
rde Paris;» et au fol. 1 a : rfJaçoit ce quelles soient
r fondées de grant ancienneté, louttefois n'en estoit
jrrien fait en nostre église. Or, sont tenues lettres de
r madame de Cassel, appelée madame Jehanne de
r Bretagne, qui est dame dudit Sauciel, qui est en
* possession de donner lesdites chapelles, et tient
rrles fondations, donations et octrois dépendans,
r par lesquelles lettres elle donne l'une a M. Le Four-
c nier, qui y vint et fut reçu en sa personne, 2 juin,
n-et l'autre à Jehan Le Goupil, qui y fut reçu par
ff procureur; et avons les lettres et la procuration
ff originalle retenues et mises au triangle (coffre pour
rrles papiers) pour mémoire, et fut tout à fait au
ff conseil mestre Grill. Chellay environ... Signé es
rf lettres est escript. .. l'an xlix; et par composition
fret bonnes lettres doivent les deux chapelains à la
rf communauté, chacun à Noël, xxhii' parisis. Or
rfest contenu en icelles que, fondées pour faire divin
rf service en l'église et au leu conseil, si eus nous
rfdeussent servir à faire nostre service en l'église."
(Invent. de Saint-Thomas. Arch. de l'Emp. LL 1 65.)
<!) Lors de la démolition , derrière le maîlre-au-
tel , sur un pan du gros mur de l'église , dans la par-
tie faisant front sur la rue Saint-Thomas, où s'éleva
depuis le portail de la nouvelle construction, on
aperçut un cintre de neuf à dix pieds de hauteur
sur cinq à six de largeur, avec des peintures représen-
tant , sur un fond semé de fleurs de lis avec manteaux
hermines, quatre chanoines en habit de chœur d'été,
les mains jointes, et agenouillés à la suite les uns
des autres. Ces peintures avaient été longtemps ca-
chées par le retable du maître-autel.
(3) On continuait à faire le service dans l'ancien
chœur, qui avait été fermé par une cloison.
i3.
100 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
y avait exécuté les têtes de chérubins de l'intérieur, et le Las-relief de la porte
d'entrée, entrepris suivant délibération capitulaire du 20 août 17/12. La sculpture
d'ornementation de la porte et de l'intérieur était l'œuvre de Robillon ; le maître-
autel, qui provenait de Saint-Maur, était de Frémin, premier sculpteur du roi
d'Espagne. Lemoine avait été chargé de la décoration de la chapelle de la Vierge et
de l'exécution du mausolée du cardinal Fleury W, situé en face.
Le cloître Saint-Thomas, rebâti en 1769, faisait le coin de la rue des Orties.
H était attenant à l'église, laquelle, au moyen de deux arcades jetées sur la rue
du Doyenné, communiquait avec l'hôtel du Doyenné, ou maison destinée au
doyen. Le chef de la Communauté n'y résidait pas toujours, à ce qu'il paraît,
puisqu'il existe plusieurs baux de sa maison, un entre autres qui fut fait le
29 septembre 1627, moyennant i,aoo livres de loyer, et où il est indiqué qu'elle
renfermait trois corps d'hôtel , un jardin et des écuries. L'hôtel du Doyenné
Saint-Thomas fut reconstruit en 1788, époque où on l'appelait ordinairement h
Petit-Doyenné. Au xvc siècle, le jardin qui en dépendait s'étendait le long de la rue
jusqu'à l'emplacement occupé depuis par l'hôtel de Chevreuse. Les six maisons
élevées à la suite du Doyenné ont donc été bâties sur l'emplacement de ce jardin,
qui, étant depuis longtemps amorti, devint une sorte d'arrière-fief, comportant
censive ou rente au profit de la communauté, laquelle y exerçait aussi les droits
curiaux.
Deux anciens sceaux du Chapitre, dont l'un remonte à 1879, présentent sur
leur face un évèque (saint Thomas de Cantorbéry) debout, mitre, nimbé, crosse
et bénissant. Il est accosté de deux fleurs de lis, et l'on observe à ses pieds un
écu chargé des trois léopards d'Angleterre. La légende est ainsi conçue : s. decani
[et capitulï\ eccë bî thome de lupera par. Sur le contre-sceau est figuré le martyre
de saint Thomas Becket, et de la légende mutilée on ne voit que les mots : fcm
anno do
kp1taphes.
Dans le chœur à droite :
Cy-gist feu Guillaume Rostiel, chevalier, jadis chambellan de monseigneur le duc de Rre-
taigne, qui décéda le mardy, jour de la feste Saint-Denis, Tan de grâce mcccxv.
Priez Dieu pour l'âme de ly.
(1) Blondel l'attribue à Bouchardon. — En 1762, l'architecte, posséda de même la chapelle Saint-
le Chapitre avait offert au cardinal Fleury les Thomas de Cantorbéry, dont il donna les dessins,
deux premières travées construites, l'une pour y La chapelle située à l'opposite de cette dernière, et
placer la chapelle de la Vierge, et l'autre pour ser- dédiée à saint Nicolas, appartenait à la famille
vir de sépulture à lui et à sa famille. Th. Germain, Surbeck.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE.
Près de la porte du chœur :
101
Icy gyst Pierre Bréant, barbier à hault homme et puissant prince le duc de Bretaigne; qui
décéda Fan mcccxl, ou mois de septembre.
Priez Dieu pour l'âme de ly.
Au bas de l'église :
Cy-gist vénérable et discrète personne M" Jacques de Rouvez, maistre ès-arts, curé de Clestot
et chanoine de cette église de Sainl-Thonias-du-Louvre, natif de Rouen; lequel trépassa l'an
de grâce mccccxxxix, le lundy xxe jour de septembre.
Dieu lui fasse mercy à l'âme.
Pater noster. Ave Maria.
Proche de la porte de l'église, du côté de la rue Saint-Thomas :
Cy-gist noble homme Germain de Valenciennes, en son vivant escuyer, (Sr) d'Ormoy, Cou-
peaulx et Villabé, et général essayeur du Roi, nostre sire, en sa chambre des monnoyes à Paris:
qui trespassa l'an i5ao, le mardi i5e mars.
Et aussy gist noble damoiselle Anthoinetle Budé, jadis sa première femme, laquelle décéda
le mardy 21e jour d'avril i5 , après Pasques.
Contre la porte du chœur, du côté gauche :
Par dure mort dont tout est succombé,
Cy-dessous gist par un mortel décret,
En son vivant Me Baoul Labbé,
Homme savant, M" es arts et décret.
Lequel fonda , par chacune semaine ,
Une messe, que cy après les chanoines
Feront; diront pour certaines raisons
De profundis avec trois oraisons :
C'est Inclina Deus , Qui non patrem ,
Et fidelium. Pour ce il a au Doyen
Rente assignée sur bon et loyal titre,
Semblablement à M" du chapitre,
Qu'ils prient pour lui, de ses biens amassez,
Ses père, mère, et amis trespassez.
Laquelle chose a esté arrêtée
Par Raoul et Pierre, ses neveux, augmentée
De vingt livres tournois expressément
Par un tel pac, que à chacun bout d'année,
La messe basse sera haute sur année.
Auquel deflunct mort fit son jour extrême.
Mil cinq cens quarante, de décembre le sep-
tième.
Prions Jésus et sa divine face
Qu'à leur âme miséricorde fasse.
Dans la porte du chœur
DIANA SANGELAS1
Mellino parenti
Bene merito, mœrens.
Obiit mu octobris
Anno Domini
MDLVIH.
102 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Dans la nef, devant la chapelle Notre-Dame :
Cy-gist noble homme Jean Noplet, natif de en son vivant secrétaire de illustrissime
prince Charles, cardinal de Lorraine; qui décéda la 33e année de son âge, le 16e jour de juin
i562. Et noble femme Cath. Charlet (alias Harlet), sa femme, laquelle décéda le
Près de la sacristie :
Cy-gist vénérable et docte personne Me Robert Rousseau, prestre, natif des isles Philippines,
en son vivant chanoine de céans, qui trespassa le iBr jour de septembre 1 562.
Priez Dieu pour lui.
Près de la porte du chœur :
Francisco Moyen, puero optimi : Animum imperio pater parit viro. xn annum agens, obiit
xii kal. septembris 1567. Parent, mœstiss., in spem vitœ resurrectionis, pos.
Devant l'autel :
Cy-gist noble homme M0 Nicolas Lavergnot (alias Lauvergnat), en son vivant chirurgien du
deflunt roy François premier, et premier chirurgien des feuz roys Henry et François second ,
et du roy Charles neufiesme de ce nom; lequel décéda le
Dans la nef, près de la chapelle Notre-Dame :
Cy-gist honorable personne Claude de La Croix, vivant marchand et bourgeois de Paris, et
vendeur de bestial aux marchez de Paris, lequel décéda le 4e oct. 1 579, de son âge le 75e. Et
Marie du Rois, sa femme, qui décéda le 94e janvier 1673, de son âge le 58e.
Priez Dieu pour eux.
Dans le chœur, près de la porte :
Cy-dessoubs gist noble homme Jacques de Romey, escuyer, seigneur de Roinainville, valet
de chambre et portemanteau ordinaire du Roy; lequel décéda le jour de febvrier 1590.
Maison sans désignation, contiguë au cloître Saint-Thomas, et mentionnée dès
i53o. Les écuries du duc d'Orléans s'y trouvaient vers 1705.
Maison sans désignation , contenant plusieurs corps d'hôtel et aussi mentionnée
dès i53o.
Maison sans désignation en i53o, faisant hache derrière les deux suivantes;
réunie à l'hôtel de Longueville, elle s'appelait le petit hôtel de Longueville à la
fin du xvne siècle.
Maison sans désignation, mentionnée dès i53o.
Maison sans désignation en 1 53 0 , qui, en 1 57 5 , appartenait à un avocat appelé
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 103
Favier, et, en i6o3, à Molan, trésorier de l'épargne, aussi possesseur de la mai-
son suivante.
HÔTEL DE TORGY (1 4a3), puis Maison du Mouton (i 584). L'hôtel de Torcy est
indiqué dans les comptes de confiscation de i/t23 à 1627; en 1699, il était pos-
sédé par Robert d'Estoute ville , seigneur de Torcy, etc.; vers 1 634 il appartenait
à François de Montigny, marquis de Congis.
HÔTEL D'O, DE LA VlEUVILLE, DE GlIEVREUSE, D'ÉPERNON et DE LONGUEVILLE.
Il existait déjà en 1873, et en 1399, après avoir été la propriété de la dame de
Meudon, de messire Garnier de Brou et de Richard des Ormes, c'était «l'ostel,
f grandie et jardin de messire Guillaume de Gaillonnel, chevalier et maistre d'os-
rr tel du Roy. n Vers 1620, il appartenait à Pierre de Thumery [alias Thomeret),
valet de chambre du duc de Bourbon, qui le vendit à Jean de Saint-Romain,
conseiller du Roi. Jean de Saint-Romain, probablement parent du sculpteur de
Charles V, ayant suivi le parti de Charles VII, sa maison fut confisquée sous la
domination anglaise. Elle passa ensuite à messire François d'Aubistout, puis à
Nicolas Hardoyn (1689), et, avant i53o, à la famille d'O, dont un membre,
la dame Hélène d'Illiers, veuve de Jean d'O, capitaine de la garde écossaise, la
possédait à la fin du xvic siècle. Dans les premières années du siècle suivant, rr le viel
trhostel d'0,n comme on disait, devint la propriété de M. de Maintenon, marié à
Françoise d'O; puis, le marquis Robert de La Vieuville, baron de Rugles, l'obtint
par décret du i5 septembre 1607. En 1620, il fut vendu 175,000 livres au con-
nétable Charles d'Albert de Luynes, qui y réunit, l'année suivante, une maison
du prix de 8,000 écus^. La veuve du connétable, Marie de Rohan, le revendit
1 80,000 livres, avant le mois de mars 1 622 , à Claude de Lorraine, duc de Che-
vreuse, qu'elle épousa en secondes noces, et qui demeurait auparavant à l'hôtel
d'Aumale, rue d'Autriche. Le duc de Chevreuse fit rebâtir l'hôtel par Clé-
ment Métezeau (2\ l'augmenta et l'embellit de telle sorte que sa veuve en obtint
600,000 livres, lorsque, l'an 1657, elle le céda au duc de Candale, qui stipulait
au nom de son père, Bernard de Nogaret, duc d'Épernon. Le 3o juillet 1662,
Marie-Claire de Bauffremont, veuve de Gaston de Foix , comte de Fleix , l'abandonna
au Roi, moyennant 688,722 livres 8 sous 9 deniers, et, le i3 août suivant,
Louis XIV le donna au duc Henri II de Longueville, en échange de l'hôtel que
celui-ci avait rue des Poulies. Le duc de Longueville décéda l'année d'après, et
Marie d'Orléans de Longueville , sa fille , ayant hérité de tous ses biens par suite
de la mort de ses frères, donna, dit-on, l'hôtel à son cousin Louis-Henri, légi-
W L'hôtel s'étendit alors jusqu'aux remparts, de l'hôtel, et situé au delà de cette rue, sur un ter-
dont le Roi avait donné une partie au duc, en réser- rain occupé par l'ancienne place du Carrousel.
vant quatre toises pour le passage de la rue Saint- ,s) Voir les renseignements que nous donnons
\ir;iise. Il a été parlé (p. 76) du jardin dépendant sur la famille des Métezeau, chap. xir.
104 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
timé de Bourbon-Soissons, connu sous le nom de prince de Neufchâtel, qui mou-
rut en 1703 (1). La fille de ce dernier, Louise de Bourbon, l'apporta en dot, le
3o juillet 1710, à Charles Philippe d'Albert, duc de Luynes, dans la famille du-
quel il retourna ainsi. Leur fils, Marie-Charles-Louis, après l'avoir loué aux car-
dinaux de Janson et de Polignac, le vendit au Boi en même temps que le petit
hôtel de Longueville, le 2 3 avril 17/16.
L'hôtel de Longueville, d'un aspect imposant, était enrichi de plafonds peints
par Mignard; mais il y manquait encore une aile vers 1750. La fin de cet édifice
a été peu digne de son ancienne splendeur; il fut acheté en 17^9 par les fermiers
généraux, qui y établirent le magasin général des tabacs, et firent élever dans le
jardin un vaste bâtiment de mauvais goût, dû à Contant, architecte du Boi. En
1802, on y avait placé les écuries du premier Consul, et, vers 1806, il a été
abattu pour le percement de la rue du Carrousel.
L'hôtel de Jean de Saint-Bomain était loin d'occuper une superficie aussi vaste
que l'hôtel de Longueville. Il n'avait environ que quarante et un mètres de largeur
sur trente-cinq de profondeur, car le mur qui le limitait vers l'ouest était celui du
clos de la Petite-Bretagne, bornant également le jardin du cloître Saint-Thomas.
En 1 53 0 , l'hôtel s'était étendu sur une portion du clos de la Petite-Bretagne, puis-
qu'il est dit, dans le censier de cette année, que les jardins du manoir aboutissaient
par derrière « aux Quinze- Vingts de Paris et à messire Jehan d'O , à cause de por-
cttion desdicts jardins. n En 1 585 , il traversait tout l'îlot, car il est énoncé alors
aboutissant et sur les remparts. t> En 1 6 1 5 , on y annexa une place de cent huit toises
a dans le rempart v même, c'est-à-dire au delà de l'ancien alignement de l'îlot, et
à ces cent huit toises la Ville, par bail fait à M. de La Vieuville, le 1 3 juillet 1616,
en ajouta quatre-vingt-dix-huit, circonstance qui nous a permis de comprendre ce
que nous n'aurions pu saisir autrement. En effet nous voyons, par le procès-verbal
de visite du i3 juillet 1616, que la place de deux cent six toises, formée par la
réunion des deux parcelles de cent huit et de quatre-vingt-dix-huit toises, était
destinée à avoir une profondeur de sept toises sur la même largeur que l'hôtel ; or,
pour qu'un terrain de sept toises de profondeur présente une superficie de deux
cent six toises, il faut qu'il ait vingt-neuf toises et demie de largeur. Telle devait
donc être la largeur de l'hôtel vers l'occident, et c'est ce qu'elle était en réalité. Les
raisons que nous allons en donner expliqueront comment, sur les plans modernes,
au lieu de vingt-neuf toises et demie, on en compte trente-trois et demie.
Le 1 1 juillet 1626, les Quinze-Vingts vendirent pour 6,000 livres au duc de
Chevreuse , qui voulait élargir son jardin , deux portions de leur cimetière , longeant
(1) Sur un plan de 169/1, l'hôtel de Longueville «Rins.* En i6o4, l'archevêque de Reims était
est intitulé rr maison de monsieur l'archevesque de Charles-Maurice Le Tellier, fils du chancelier.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 105
le mur septentrional de l'hôtel, mitoyen avec l'Hospice. La première de ces portions
avait trois toises de longueur de l'est à l'ouest, et quatre de largeur du nord au
sud, soit douze toises de superficie; la seconde, contiguë à la première, avait
quatre toises de largeur à son extrémité occidentale, qui touchait à la précédente;
douze pieds et demi à l'extrémité orientale , qui aboutissait à l'hôtel de Rambouil-
let, et cent treize toises cinq pieds et demi de superficie, soit environ trente-sept
toises de longueur W, Le mur mitoyen entre l'hôtel de Chevreuse et l'Hospice avait
donc trente-sept toises de longueur plus trois, soit quarante toises. Mais si l'on
restitue ce mur mitoyen, opération sans difficulté quand on possède les données
précédentes et quand on connaît la situation du mur moderne, reproduit sur une
foule de plans, on constate que le mur restitué ne laisse plus à l'hôtel de Che-
vreuse que cette largeur occidentale de vingt-neuf toises et demie que nous venons
de signaler. On constate , en outre , qu'il s'en faut de sept toises qu'il atteigne l'af-
fleurement du portail moderne de l'hôtel sur la rue Saint-Nicaise; conséquemment
l'alignement de ce portail se trouvait à sept toises au delà de l'ancien aligne-
ment, que les deux cent six toises acquises en 1616 permirent de reporter là où
il était avant la destruction de la rue. Ainsi rétablies, les dimensions primitives
de l'hôtel de Chevreuse concordent rigoureusement avec les limites de là Petite-
Bretagne, telles que nous les avons fixées. Nos renseignements donc se justifient
les uns les autres et portent avec eux un caractère de vérité mathématique.
HÔTEL DE PlSANY et DE RAMBOUILLET. Il fut formé de deux propriétés dis-
tinctes, dont la première était un
Jardin, énoncé en 1878 comme appartenant au comte de Vendôme, qui fut en-
suite à un seigneur de Chevreuse, et qui, en i3o,9, était au comte de La Marche,
comme la maison située en face, de laquelle il dépendait. Dans le siècle suivant il
fut possédé par a Jehan d'Oc, a d'où est venue l'erreur, partout répétée, que l'hôtel
de Rambouillet avait porté le nom iïhôtel d'O. En 1^89, il était devenu la pro-
priété du général des monnaies, Me Germain de Marie, de même que la maison
suivante, à laquelle le jardin se trouvait réuni dans la seconde moitié du xvic siècle.
L'autre partie de l'hôtel de Rambouillet provenait d'une
ctGrancheu qui, en 1 399 , appartenait également au comte de La Marche; elle
avait été auparavant à Robert Trichard, à Drouet d'Arcy et à Jean de La Fontaine,
mais elle n'eut jamais pour possesseurs les comtes de Vendôme ni les seigneurs de
(l) «Cent treize toises demy pied de terre, à rrpart, en tirant une ligne droite de l'un à l'autre
rr prendre dans le cimetière et petit jardin des * bout, d'une part; et une espace de terre de trois
ir Quinze-Vingts, et joignant le jardin dudit sei- « toises de long, avançant sur ledit rempart, sur la
trgneur(de Chevreuse), surdouze piedsetdemy de « largeur de quatre toises de superficie, d'autre
rlarge, et aboutissant à la maison du marquis de rrpart. En tout, cent vingt-cinq toises et demy.
"Rambouillet; et quatre toises de large vers le rem- rrdemy pied. » ( Arch. des Quinze- Vingts.)
106 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Chevreuse. En 1 689 , c'était une maison avec jardin , propriété de Germain de Marie,
qui fut ensuite celle de Claude de Marie, et, en 1 5y5 , celle de Pierre Du Halde.
Elle était, à cette dernière époque, augmentée du jardin dont il est question dans
l'article précédent, et bientôt après elle fut acquise par Jean de Vivonne, marquis
de Pisany, qui mourut le 7 octobre 1699. Julie Savelli, sa femme, ayant marié,
en 1600, leur fdle Catherine à Charles d'Angennes, marquis de Rambouillet, ce
dernier se trouva, du chef de son épouse, propriétaire de l'hôtel, qui perdit le nom
de Pisany et prit celui de Rambouillet'1). En i6i8(2), Charles d'Angennes le fit
rebâtir pour plaire à sa femme, si célèbre, sous le nom à'Arthénice, dans l'histoire
littéraire de ce temps. rrEHe fut elle-même, raconte Tallemant des Réaux, l'archi-
rrtecte de l'hostel de Rambouillet, qui estoit la maison de son père. Mal satisfaitte
rrde tous les dessins qu'on luy faisoit (c'estoit du temps du mareschal d'Ancre, car
ff alors on ne sçavoit que faire une salle à un costé, une chambre à l'autre, et un
rr escalier au milieu ; d'ailleurs la place estoit fort irrégulière et d'une assez petite
rr estendue), un soir après y avoir bien resvé, elle se mit à crier: et Viste! du papier!
tt J'ai trouvé le moyen de faire ce que je voulois. -n Sur l'heure, elle en fit le dessin ,
rfcar naturellement elle sçayt desseigner, et dez qu'elle a veu une maison, elle en
rr tire le plan aisément. . . On suivit le dessin de madame de Rambouillet de point
ren point. C'est d'elle qu'on a appris à mettre les escalliers à costé pour avoir
ffune grande suitte de chambres, à exhausser les planchers et à faire des fenêtres
f hautes et larges, et vis-à-vis les unes des autres. Et cela est si vray que la Reine-
nnère, quand elle fit bastir le Luxembourg, ordonna aux architectes d'aller voir
rr l'hostel de Rambouillet, et ce soing ne leur fut pas inutile. C'est la première qui
rr s'est avisée de faire peindre une chambre d'autre couleur que de rouge ou de
rrtané, et c'est ce qui a donné à sa grande chambre le nom de la chambre bleue®. -n
Parlant de cette chambre, Sauvai s'exprime ainsi : rtLa chambre bleue, si célèbre
rr dans les Œuvres de Voiture , estoit parée d'un ameublement de velours bleu , re-
r haussé d'or et d'argent. C'estoit le lieu où Catherine recevoit ses visites. Les fe-
"nestres sans appui, qui régnent du haut en bas, depuis son plafond jusqu'à son
^ parterre, la rendent très gaye, et laissent jouir sans obstacle de l'air, de la vue et
rr du plaisir du jardin, -n Sauvai ajoute ces détails, qui offrent quelque intérêt pour
l'histoire de l'art: a Si nous admirons ces sortes de croisées au palais Cardinal,
(l,SauvalditquerhôleldeRambouillels'estnommé et de pisanï, vidame dv mars,
aussi hôtel de Noirmoutiers ; si le fait est vrai, nous w»0" Dv chavdvlor et de tallemont,
nous étonnons de n'en avoir point eu la preuve. conseille!! dv boy en son conseil dwat, et »' de la
<2> La pierre de fondation de l'hôtel de Rambouil- "n— DE SA MA,ESTE- CE a3 JVI> l(il8-
let, qui est au musée de Cluny, porte cette inscrip- Les plans de l'hôtel de Rambouillet furent, sui-
lion : vant Des Réaux, dressés du temps du maréchal
d'Ancre, et par conséquent au plus lard en 1617.
FAICT PAR HA'VLT zt pvissant SE1CNEVR
M* CHARLES D'ANGENNES, MARQVIS DE RAMBOHLLET, (3) Historiettes , t. II, p. 486.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 107
a au petit Luxembourg et dans les maisons de la place Royale et de l'isle Notre-
rDame, elles ne sont que des images et des imitations de celles de la chambre
rr bleue. C'est à Cléomire^ que les architectes sont redevables de ce nouvel ém-
et bellissement; mais ce n'est pas le seul ornement qu'elle a ajouté à l'architecture :
r?la rampe de son escalier, arrondie en portion de cercle, et les portes en enfi-
rlade de son appartement, ont servi de modèle à ces escaliers circulaires qui ne
c conduisent que jusqu'au premier étage, et à ces longues suites de portes qui
r l'ont le principal ornement de nos châteaux et de nos palais. i> Il existe divers
dessins de l'hôtel de Rambouillet que Sauvai dit, non sans exagération, avoir été
<rle plus renommé du royaume, n Suivant la mode du temps, il était construit en
briques et en pierre. En i64i, les bâtiments de l'hôtel furent augmentés d'un
beau pavillon auquel on travailla en secret, et qui, un soir, fut ouvert brusque-
ment devant une nombreuse compagnie; la surprise fut grande, parce qu'on
savait que derrière la tapisserie il n'y avait que le jardin des Quinze-Vingts. Toute-
fois aucun plan connu de nous ne laisse voir ce cabinet, dont l'emplacement aurait
été pris sur le terrain de l'Hospice.
Le marquis de Rambouillet mourut en i65a, après avoir perdu ses deux fils;
il laissa pour principale héritière sa fille aînée, Julie-Lucine d'Angennes, qui
avait épousé, en i6&3, Charles de Sainte-Maure, duc de Montausier. Celui-ci
mourut en 1690, n'ayant eu de son mariage avec Julie d'Angennes qu'une fille
unique, Julie-Maure de Sainte-Maure, mariée en 166& à Emmanuel II, comte
de Crussol, qui était fils du duc d'Uzès, et qui en prit le nom ainsi que le titre en
1680. De là les appellations successives d'HÔTEL de Montausier, de Crussol et
d'Uzès, données à l'hôtel de Rambouillet. Vers 1778, le duc d'Orléans en fit ac-
quisition pour y placer ses écuries, que construisit l'architecte Poyet; en 1 786 .
on le transforma en un Vauxhall d'hiver, destiné à remplacer celui de la Foire
Saint-Germain, et, en 1792, on y établit le théâtre du Vaudeville, incendié le
18 juillet 1 836. L'hôtel a ensuite servi d'écuries pour les équipages du roi Louis-
Philippe. On l'a démoli en i85o.
Maison sans désignation, acquise en i3a/i par le chapitre Saint-Thomas. En
1369, elle appartenait à la veuve d'un nommé Drocon, alïineur, ce qui explique
comment des titres de 1&7&, 1 5 1 6 et d'autres plus récents l'appellent «hostel de
l'Affinouère.» Acquise, en i5i6, et au prix de ioo livres, de Me Pierre Henne-
quin, par Me Ant. Bachot, auditeur du Roi, elle fut possédée, en 1575 et i6o3,
par le grand historien Augustin de Thou; en 1623, par le secrétaire d'Etat Ant,
de Loménie, et, en 1705, par M. de La Barre; on la nommait en conséquence,
à cette dernière époque, hôtel de la Barre ou des Barres.
(,) Dans le roman du Grand Cyrus , l'hôtel de Rambouillet est décrit sous le nom de palais de Cléomire.
i4.
108 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation en i38o, qui, dès le commencement du xivc siècle,
appartenait aux Quinze-Vingts, et paraît avoir eu, en i&5o, l'enseigne de l'Image
Saint-Jacques; elle était alors divisée en deux. En i38o, elle était séparée, au rez-
de-chaussée, d'avec la maison suivante, par une allée conduisant dans l'intérieur
de l'Hospice.
Maison de l'Aumônier-du-Roi (i38o), aussi dite de la Rose (1691) ou de la
Rose-Rouge (1 563). Diane de Clermont, dame de Montlouis, en fut ensaisinée
en 1579. Cette maison était anciennement au moins aussi profonde que celle de
l'Affmoir, car la maison des Trois-Morts, sise rue Saint-Honoré , y aboutissait.
Maison sans désignation (1 563) , qui, en 1689, était encore confondue avec la
précédente. En 1755, cette maison, réunie en une seule avec les deux précé-
dentes, était alors connue sous le nom d'HÔTEL de Lanc astre, et fut vendue aux
Quinze-Vingts, dont les bâtiments s'étendirent sur son emplacement. En 1626
elle appartenait à M. de Marillac.
Deux maisons, dont l'une avait pour enseigne et l'Image Saint-Jehan, d et l'autre
ccHérodiasti (1689-1610).
Partie postérieure de la maison du Sauvage, de la rue Saint-Honoré.
Maison de la Croix-Rlanche (i6o5), dite, en 1608, le Petit-Moisset. Elle n'a
été séparée que vers i582 de la maison formant le coin de la rue Saint-Honoré,
et dont elle faisait d'abord partie.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAWL'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÊCIlÉ.
Maison de l'Image Sainte-Anne (1575), contiguë à l'hôtel de Vignolles, qui faisait
le coin de la rue Saint-Honoré; elle appartenait aussi, en 1O75 et i6o3, à la
dame de Vignolles, et provenait d'un morcellement de l'ancien hôtel de Laval.
Sur son emplacement, en 1680, il existait une petite maison ayant pour enseigne
la Galère, qui fut détruite lors de la construction du Château-d'Eau. C'était une
taverne très-connue.
Maison sans désignation (1575), qui paraît avoir dépendu de la suivante au
xvc siècle.
Jardin (i653), où s'élevaient deux corps d'hôtel en 15^5, et qui constituait
alors la partie postérieure de la maison du Pot-de-Fer de la rue Fromenteau.
Partie postérieure de la maison de I'Image Notre-Dame, sise rue Fromenteau.
RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 109
C'était, en 1689, une gran8e (Iui devait comprendre l'emplacement de la maison
suivante, puisqu'il n'y avait alors que deux propriétés entre les hôtels de Laval
et de la Marche.
Jardin (i453), puis Maison du Soleil-d'Or (1 575-1 64 0).
Partie postérieure de la Maison du Cheval-Rouge faisant front sur la rue Fro-
menteau.
Partie postérieure de I'Hôtel de la Petite-Marche, devenue, en i53o, la Maison
de l'Image Saint-Martin.
Partie postérieure de I'Hôtel de la Grande-Marche. (Voir p. 62.)
Maison sans désignation (i53o), qui forma la partie antérieure de l'hôlel de
Pontchartrain. Elle fut élevée, vers le commencement du xvic siècle, sur l'extré-
mité septentrionale du jardin du chapitre Saint-Nicolas du Louvre, et, pour cette
raison , elle a pu être considérée comme en censive de la Communauté. Il en a été
de même des maisons suivantes, auxquelles il est extrêmement difficile d'appliquer
les titres, et dont le nombre a doublé de i53o à i63o.
Grange (i53o), puis Maison sans désignation (1575), qui était divisée en deux
au xviiic siècle. C'est la première qui fut démembrée lors du partage, fait en 1 63 1 ,
de l'hôtel ayant appartenu à Robert Chaillier.
Maison sans désignation en i53o, indiquée ensuite comme une dépendance de
la maison à laquelle elle aboutissait.
Deux Maisons sans désignation (1575), qui n'en formaient plus qu'une en 1 696,
et n'étaient point distinctes de la suivante en i53o.
Maison sans désignation (i53o).
Grange (1695), puis Place et Jardin (1578), et enfin Maison sans désignation,
qui, en 170a, était possédée par Robin Rouillé, maître des requêtes.
Petite Maison sans désignation (1680), ayant probablement fait partie d'abord
de la précédente.
Maison sans désignation en i56g, puis du Pèlerin Saint-Jacques (1713), aussi
appelée la Grande-Maison en 1713, et la Maison-Neuve en 1755.
Deux Maisons sans désignation (1680), qui paraissent avoir été élevées sur
une place baillée le 1 3 septembre i53o à Thomas Le Jeune. Cette place avait
sept toises un pied de largeur sur rue. Le Chapitre en retint une toise un pied,
et c'est là sans doute l'origine de l'entrée du petit-cloître, entrée qui séparait les
deux maisons d'avec la suivante. L'une d'elles a eu pour enseigne le Lion-d'Argent
en 1766.
Deux Maisons sans désignation (i58o?). La seconde était contiguë à la maison
faisant le coin de la rue des Orties, et, au-dessous de la première, se trouvait
l'entrée de l'bôtel de la Prévôté et du grand cloître Saint-Nicolas.
Hospice, collège ou chapitre Saint-Nicolas-du-Louvre. On a vu plus
110 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
haut que cries pauvres clercs i> de l'hospice fondé par Rohert de Dreux, conjointe-
ment avec le chapitre de Saint-Thomas, se séparèrent de ce dernier en 1212,
et commencèrent alors à former une communauté à part. Pour mieux constater
leur indépendance, ils sollicitèrent bientôt après du pape Innocent III la permis-
sion d'avoir un cimetière et une chapelle qui leur fussent propres, et cette faveur
leur fut accordée en 1217 par un bref adressé à l'évêque de Paris. Dans leur re-
quête, le recteur et les frères de l'Hospice avaient expressément reconnu les droits
parochiaux du curé de Saint-Germain-l'Auxerrois; néanmoins les chanoines de
cette église firent opposition au bref, et il n'eut son plein effet qu'après avoir été
appuyé d'une sentence qui fut rendue l'année suivante par l'Évêque de Paris, et
confirmée par le pape Honorius.
La chapelle concédée en 1217 contenait des fonts baptismaux , et paraît avoir
été dédiée sous le vocable de Saint-Nicolas, entre les années 1228 et i23i, car,
à la première de ces dates, on trouve l'Hospice énoncé crdomus pauperum scola-
rtrium Sancti Thome de Lupera,» et à la seconde, crhospital pauperum scolarium
rrSancti Nicolai de Lupera,n appellation qui est restée longtemps en usage. Le
nom de pauvres écoliers, remplaçant celui de pauvres clercs, donne à penser que
l'institution se transformait alors en un vrai collège, ce qu'elle fut depuis, en pro-
duisant plusieurs hommes distingués W. Cependant les titres de maître et de frères
de l'hôpital continuèrent à être employés durant tout le xme siècle; mais, à partir
de 1371, année où ils reçurent une bulle confirmant tous leurs privilèges, les éco-
liers de Saint-Nicolas furent appelés boursiers, comme ceux de tous les autres
collèges.
Au mois de juillet 1228, l'évêque de Paris, Guillaume, s'étant rendu dans
l'Hospice pour réformer certains abus qui s'y étaient introduits, ordonna qu'à
l'avenir aucun écolier devant y demeurer plus d'un an , et qui s'en éloignerait au
bout de l'année, ne pourrait y être réintégré, sinon par permission spéciale (2). En
12^5, les clercs de Saint-Nicolas acquirent plusieurs maisons rue Fromenteau, et
en 1292, Philippe le Bel amortit tous les biens de l'établissement. Le 22 janvier
1 3 G 5 , Charles V lui accorda un don de 1,100 francs d'or, comme indemnité de
la violation de ses immunités par des sergents d'armes; pour ce délit, les sergents
furent obligés de venir demander pardon à genoux, en présence de plusieurs dé-
putés de l'Université.
Un accord de 128/1 apprend que la communauté de Saint-Nicolas se composait
alors d'un maître ou proviseur, d'un chapelain (3), d'un clerc et de quinze écoliers
nommés par l'Évêque de Paris. En i35o, Barthélémy de Bruges fit les fonds né-
(,) On a compté parmi eux saint Yves ; mais Le- (3> Ce chapelain est sans doute celui qu'on dit
beuf a réfuté cette opinion. (T. I, p. 91.) avoir été institué en vertu de la fondation de Jean
m Cart. de N. D. 1. 1, p. 35o. d'Annevilie, taillandier de Paris.
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RUE SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE. 111
cessaires à l'entretien de trois nouveaux boursiers; néanmoins il n'y en avait en-
core que quinze lorsque, le i5 janvier i56i, le cardinal Du Bellay, voyant que
le collège, naguère florissant, était chaque jour de plus en plus négligé pour
ceux de la rive gauche, le transforma en un chapitre comprenant une prévôté,
dignité unique, neuf prébendes, dont une était unie à la prévôté, et une semi-pré-
bende. Cette semi-prébende, qui remplaçait une chapellenie fondée en i53o
par Martial Gallicher, archidiacre de Brie, fut érigée en prébende entière l'an
1559. Par arrêt du Parlement en date du 3o avril 1622, le prévôt et les cha-
noines de Saint-Nicolas furent obligés à la résidence dans le cloître, et au service
de l'église. La réunion de leur chapitre à celui de Saint-Thomas eut lieu en 17/10.
La chapelle Saint-Nicolas avait, suivant Lebeuf, les caractères d'une cons-
truction du xiuc siècle. Elle était située sur la rue des Orties, et se composait d'une
nef de trois travées, avec bas-côtés, et d'un chœur, le tout offrant environ douze
toises et demie de longueur sur cinq et demie et six et demie de largeur. Au
xive siècle, il y existait une confrérie de Saint-Nicolas, qui comptait parmi ses
membres le roi Charles VI. En i684, on voyait encore les armes de ce monarque
ainsi que celles d'Isabeau de Bavière peintes sur un vitrail de la nef, à la gauche
d'un crucifix représenté sur la même verrière. Louis XIV y transféra, vers 1 670, la
chapelle Notre-Dame-des-Vertus, qu'il avait fondée en 1669 à Saint-Eustache ; et
Martial Gallicher, nous l'avons dit, y créa une chapellenie en i53o. La chapelle
Saint-Nicolas, abandonnée après la construction de l'église Saint-Louis du Louvre,
et louée avec sa sacristie à des particuliers, a été abattue vers la fin du dernier
siècle'1', quelques années avant la destruction des bâtiments claustraux qui en
dépendaient, et qui subsistaient à l'époque de la Révolution sous le nom de
dottn Soi ni- Louis. Ces bâtiments, dont le périmètre était devenu très-irrégulier,
communiquaient par trois allées avec les deux rues voisines. L'entrée donnant sur la
rue Fromenteau conduisait à une cour qui semble avoir été d'abord le a petit jardin , n
et qui s'appelait le petit cloître dès 161 3. Celui-ci, agrandi aux dépens d'une maison
de la rue Fromenteau, était séparé du grand cloître par une maison existant déjà
en 1 6 1 3. Elle était contiguë aux écuries du Chapitre, et au-dessous était pratiqué
un passage communiquant d'un cloître à l'autre. Le grand cloître, dit aussi la
Cour du Cadran (1757), avait son côté occidental formé par la maison de la Pré-
vôté, qui fut rebâtie du temps de Louis XV <2', et sous laquelle on passait pour se
(l) Baitard a publié deux vues de cette démoli- Jeanne Campan, épouse d'un changeur, morte en
tion. Nous ne possédons pas de plan exact de l'édifice. odeur de sainteté deux siècles auparavant. Ce corps
''' Au moment où l'on rebâtissait la Prévôté, on était si bien conservé que le scalpel du chirurgien le
découvrit, dans une cave, une suite de vases en trouva dans le même état que si le sujet eût été vivant,
grès, qui avaient servi démesures pour les pitances Le bruit de cet événement s'étant répandu, fit crier
des écoliers, et qui étaient marqués S. N. Les fouilles au miracle, et attira une foule considérable. (Mém.
fuites alors mirent au jour le corps d'une femme, mss. des arch. de Saint-Louis du Louvre.)
112 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
rendre du cloître en la rue Saint-Thomas. On enterrait anciennement dans la cour
de Saint-Nicolas; mais le pavé qu'on y posa en 1 655 fit disparaître les sépultures.
L'emplacement de la collégiale de Saint-Nicolas répondait à celui de la cour où il y
avait eu des étables, et qui est mentionnée dans la bulle de 1 189; il correspondait
également au lieu sur lequel s'élevait le cloître primitif de l'établissement fondé
par Robert de Dreux'1'. Comme à Saint-Thomas, le terrain forma une espèce de
fief, et le service paroissial, pour les individus habitant le cloître, se faisait dans
la chapelle de l'établissement.
Un sceau du collège Saint-Nicolas, datant de 1873, représente le saint patron
debout, de profil, mitre, crosse, et bénissant de la main droite un personnage à
genoux. Autour est la légende : (y s. d]cm[vs scho]hAR\[vm sti M']chol\[i de Lupara).
Le contre-sceau porte une mitre de face, accompagnée d'une crosse à sénestre;
la légende est détruite.
Sous le règne de Henri III, il y avait, rue Saint-Thomas, une maison avec
pressoir, que les titres ne mentionnent point, mais dont il est question dans ce
passage des comptes de la maison de la reine de Navarre : a A François Legendre,
r maistre du pressouer, en la rue Sainct-Thomas-du-Louvre,n pour aie louaige et
rr occupations d'une granche et pressouer où a esté mi à couvert les coches et cha-
rt riotz de ladicte Dame (la Reine) depuis le premier jour d'octobre mil cinq cent
ff soixante-seize jusques au dernier jour du mois de juin dernier.
Nous avons passé en revue chacune des rues environnant le Louvre et com-
prises dans notre cadre; nous nous occuperons, dans le chapitre suivant, de l'his-
toire du monument lui-même.
(1) Ce cloître était en effet devant la porte de l'église Saint-Thomas, ante januam ecclesiœ.
<
ORIGINE DU CHÂTEAU DU LOUVRE. 113
CHAPITRE III.
ORIGINE DU CHATEAU DU LOUVRE.
L'origine du château du Louvre est enveloppée d'obscurité , ce qui a naturel-
lement donné libre carrière aux hypothèses. Ainsi André Favyn, dans son Histoire
de Navarre ^ et dans son Théâtre d'honneur^, en attribue la fondation à Chil-
debert, sans même prendre la peine de chercher un prétexte à une supposition
si déraisonnable. «Ecouter Favyn, c'est une raillerie, i> dit Sauvai, puisque
Grégoire de Tours, Frédégaire et Aymoin, qui ont parlé des édifices élevés par
Childebert, ne font aucune mention du Louvre. Mais l'argument n'a pas semblé
péremptoire à D. Toussaint Duplessis, qui, dans ses Nouvelles Annales de Paris (3),
nie que le silence des historiens de Childebert puisse infirmer la haute antiquité
du Louvre, et cite à l'appui de son opinion certain diplôme de Dagobert daté
du 26 mai 633. Produite, il est vrai, avec quelque timidité, cette pièce est abso-
lument sans valeur, car non-seulement elle est fausse, et on l'avait reconnu depuis
longtemps à l'époque où écrivait Duplessis, mais, fût-elle authentique, on ne sau-
rait l'invoquer, puisqu'il y est question non du Louvre , mais de la petite ville de
Louvres en Parisis (*'.
Suivant Sauvai, André Du Chesne, dans une géographie manuscrite, aurait aussi
avancé que le Louvre était d'origine extrêmement ancienne, et que Louis le Gros
l'avait fortifié de murailles afin d'y recevoir les hommages de ses grands vassaux. Si
Du Chesne a jamais été de cet avis, il paraît en avoir changé avec le temps, car
dans ses Antiquités et recherches des villes de France W, après avoir dit que le Louvre
fut fondé en 1 2 1 k, il se borne à ajouter qu'au lieu où Philippe-Auguste le fit bâtir
(1> P. i5i. L'ouvrage a été publié en 1612. tient la cession d'un droit d'asile à l'abbaye de
(,) P. 565. L'ouvrage a été publié en i6ao. Saint-Denis, et le passage mis en avant est ainsi
Comme dans le premier, il n'y a qu'une ligne rela- conçu : (tQuisque fugitivorum. . . ex parte Parisius
live à l'origine du Louvre, lequel est dit: rrbasty à trveniens, Sanctum Marterum prœterierit , sive, de
run des bouts de la ville, par ledit Childebert et apalatio nostro egrediens, publicam viamqueeper-
rlltrogothe, sa femme." «git ad Luveram, transierit, etc.»
M In 4°; Paris, iy53, p. 90. (5) P. 10a de l'édition in-12 de 1668, qui a été
(,) Celle charte, si notoirement fabriquée, con- revue par François Du Chesne, fds d'André.
'5
114 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
il pourrait y avoir eu quelque place ou quelque vieil édifice appelé Lupara, parce
qu'il avait vu une charte bien antérieure où figurait ce mot Lupara. Le document
auquel Du Chesne fait allusion, et dont il rapporte les expressions, n'étant autre
que la prétendue charte de Dagobert, il n'y a pas lieu de le faire intervenir dans
la discussion.
De nos jours nul ne soutiendrait sérieusement que le Louvre est de fondation
mérovingienne; en revanche, il est encore permis de se demander s'il n'y avait point
un château de ce nom avant le temps de Philippe-Auguste. Jusqu'au commence-
ment du xvme siècle, l'opinion que ce roi fut le premier fondateur du Louvre semble
avoir été la plus répandue; mais depuis, et surtout à partir de la publication du
livre de Sauvai, l'idée contraire a généralement prévalu, et c'est celle des auteurs
modernes. Examinons sur quoi elle est basée.
Sauvai dit, en combattant l'assertion de Du Haillan, qui attribue à Philippe-
Auguste la construction du Louvre : « Il semble que Rigord et Jean de Saint-Victor
a nous ayent laissé des passages exprès pour la détruire W. n On imaginerait diffi-
cilement une proposition moins justifiée. Rigord, en réalité, ne parle pas du I^ouvre
dans sa Chronique, qui finit à l'année 1208; la continuation de sa Chronique,
qu'on croyait être aussi son œuvre, et qui est celle de Guillaume Le Breton,
énonce simplement que le comte Ferrand, fait prisonnier à la bataille de Bouvines,
en 1 2 1 h , fut renfermé dans la Tour-Neuve , située hors des murs de la ville : et Fer-
«randum vero, Parisius devectum, in Turri Nova, extra muros, inclusum arctœ
(tcustodiae mancipavit. n Guillaume Le Breton, dans sa Philippide, n'est pas plus
explicite sur ce sujet, car il s'exprime en ces termes :
At Ferrandus.
pansiams
Civibus offertur, Luparae claudendus in arce (2>.
Quant à Jean de Saint-Victor, il ne nous apprend rien de plus, si ce n'est l'exis-
tence d'une tradition suivant laquelle la Tour-Neuve aurait été bâtie pour servir
de prison à Ferrand : rtltaque Ferrandus, in Nova Turre, que dicitur Lupare, pro
«se, ut fertur, constructa, vinctus est et incarceratus^. r> Quelles conséquences
a-t-on le droit de tirer de ces textes touchant l'antiquité du château du Louvre?
Sauvai sentait si bien qu'ils n'étaient d'aucune portée , qu'il a eu recours à d'autres
arguments, et, de ce fait que le donjon du Louvre a d'abord reçu le nom de Tour-
Neuve, il s'est cru en droit d'inférer la préexistence, au même lieu, d'autres tours
plus anciennes. C'est une hypothèse ajoutée à l'erreur que nous venons de cons-
(1> Antiquités de Paris, t. II, p. 7. (3> Biblioth. impér. mss. de Saint- Victor, n"3o6,
(3) Guill. Armor. Philippid. lib. XII, vers i64. fol. 33a r\
ORIGINE DU CHÂTEAU DU LOUVRE. 115
tater : en effet, par cela même que le nom de Tour-Neuve a d'abord désigné la
plus haute tour du Louvre , on serait tout aussi fondé à soutenir qu'elle n'avait été
précédée d'aucune autre, absolument comme aucun pont, aucune porte, aucune
rue ne précéda le Pont-Neuf de Henri III, la Porte-Neuve de François Ier, la rue
Neuve-Notre-Dame , etc. Pour ce qui est d'un passage de la Philippide où il serait
relaté que Philippe-Auguste aurait, en 1222, obtenu de l'Évêque de Paris l'amor-
tissement des terrains renfermés dans le Louvre par lui ou ses devanciers, il
n'a existé que dans l'imagination de Sauvai. Guillaume Le Breton vante l'équité
du Roi, s'abstenant de toute exaction dans les grands travaux qu'il fit exécuter;
mais c'est tout, et l'amortissement dont il s'agit eut lieu en 1210, et non pas
en 1222. Nous montrerons plus loin que cet amortissement est justement la
meilleure arme avec laquelle on puisse attaquer la thèse de Sauvai.
Si Philippe-Auguste, fait encore observer Sauvai, était le créateur du Louvre,
et ne s'était pas borné à y ajouter la Tour-Neuve , comment ses historiens et spé-
cialement Rigord, son panégyriste, qui mentionnent la construction des Halles et
de l'enceinte de Paris, eussent-ils passé sous silence une œuvre aussi importante?
L'objection est spécieuse cette fois; mais elle n'ébranle pas notre conviction, parce
qu'il nous semble hors de doute que les contemporains de Philippe-Auguste
considérèrent le château du Louvre comme une simple annexe, comme un com-
plément des nouvelles murailles de la ville; de sorte que Rigord et Guillaume Le
Breton, ayant relaté la construction de ces murailles, n'eurent point l'idée de
mentionner d'une façon particulière le donjon qui en faisait partie intégrante W.
Les auteurs postérieurs à Sauvai n'ont allégué, que nous sachions, aucune
raison plausible afin d'établir qu'il y avait un château du Louvre avant Philippe-
Auguste. Jaillot, il est vrai, donne comme certain que la Tour-Neuve ne fit que
remplacer une autre tour du même nom (2) ; mais cet historien , ordinairement si
exact, commet ici une erreur telle qu'on en trouverait bien peu d'aussi graves
dans tout son excellent ouvrage. Les lettres d'août 1 2o4, seul document qu'il cite,
ne contiennent pas un seul mot dont on puisse induire qu'à une première tour en
ait succédé une seconde, il y est déclaré simplement que le Roi accorde 3o sols
parisis de rente annuelle aux moines de Saint-Denis de la Chartre , à titre d'indem-
nité pour la cession, par eux consentie, du terrain sur lequel la tour du Louvre
était située : «Pro excambio terre quam monachi Sancti Dionysii in Carcere
ahabebant, ubi turris nostra de Luvre sita est. n Dans le reste de l'acte il est spé-
cifié que la rente se percevra le jour de la Saint-Remi, sur la prévôté de Paris,
et que le Prévôt devra au Roi 5 sous d'amende par chaque jour de retard, s'il
(l) Cette idée est exprimée dans le texte du plan de Gomboust : rr Et le Louvre basty de même temps , /ai-
-tant partie de ladite enceinte » (de Philippe-Auguste). — (,) Quartier du Louvre, p. i4.
i5.
116 , TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
apporte quelque délai dans l'acquittement de cette obligation M. Quant aux deux
prétendues tours neuves, il n'y est fait allusion nulle part.
Nous constatons qu'à la fin du xue siècle le terrain du Louvre , c'est-à-dire l'espace
compris entre la rue d'Autriche (de l'Oratoire prolongée) et la rue Fromenteau
(récemment détruite), ne relevait que de deux fiefs, celui de Saint-Denis de la
Chartre, à l'orient, et celui de l'Évêque, à l'occident. La limite entre les deux
censives était sans doute primitivement la rue du Coq, alors simple chemin au
milieu de terres en culture , et qui devait se prolonger jusqu'à la rivière , en pas-
sant vers l'emplacement de la Grosse-Tour du Louvre , ainsi que l'implique son
ancien alignement, fort différent de l'alignement moderne, et à peu près parallèle
à la rue de l'Oratoire. Après la construction de l'enceinte, la limite entre les deux
censives était le mur même qui passait au centre de l'îlot compris entre les rues
de l'Oratoire et du Coq, et il est bien sûr d'ailleurs que le fief de Saint-Denis de
la Chartre s'étendait jusqu'au bord du fleuve, puisqu'en i4a5 un chantier qui
faisait le coin occidental de la rue d'Autriche et du quai est dit en censive du
Prieuré, de même qu'en 1^89 une maison placée au coin de la rue Fromenteau
et de la rue des Orties est dite en censive de l'Evêché. Ceci posé, il devient clair
que le Louvre, à son origine, s'est nécessairement trouvé, soit dans l'un des deux
fonds de terre que nous venons de désigner, soit dans tous les deux à la fois. H
relevait des deux censives.
En effet, nous voyons que les possesseurs des deux fiefs furent successivement
indemnisés par le Roi : Saint-Denis de la Chartre reçut, en août i2o4, une rente
de 3o sous parisis, et l'Évêque de Paris obtint, en janvier 1210 (n. s.), la conces-
sion de 1 1 deniers de cens, à prendre sur une maison en Champeaux (aux
environs des Halles) , laquelle somme formait la compensation de 1 1 autres
deniers de cens que l'Évêque avait perdus sur certaines masures depuis peu ren-
(1) Cette charte, confirmée par le roi Jean, a
toujours eu son effet; elle a été publiée plusieurs
fois. En voici le texte, copié sur le Cartulaire
du Prieuré, coté S io56, où il s'en trouve trois
transcriptions identiques: «Philippus, Dei gratia
* Francorum rex , omnibus ad quos liltere présentes
trpervenerint, salutem. Noveritis quod nos, pro ex-
ttcambio terre quam monachi Sancli Dionysii de
" Carcere habebant ubi Turris nostra de Luvre sita
«est, eisdem monachis assignamus trigenta solidos
rr Parisienses annui redditus capiendos ab ipsis, sin-
fgulis annis, in festo sancti Remigii, in preposi-
rrtura nostra Parisius, per manum preposili nostri
«Parisius; sub conditione quod post eumdem ter-
«minum, singulis diebus quibus Prepositus noster
«Parisius predictos denarios relinuerit, postquam a
rr monachis super hoc fuerit requisitus, idem Pre-
«positus nobis dabit quinque solidos pro emenda.
crActum Parisius, anno ab Incarnatione Domini
« m" cc° quarto, mense Auguslo. » Cette charte vi-
dimée en 1 3o8 , le vendredi après le dimanche où
l'on chante Reminiscere , l'a été de nouveau le
90 février 1 453, et il en existe une copie collation-
née du dernier jour de janvier 1357. Dans le Car-
tulaire de Saint-Denis de la Chartre, coté LL îiii,
est aussi l'indication d'une charte de Philippe-Au-
guste sur le même sujet, datée du h août 1200,
laquelle aurait été vidimée par l'Oflicial l'an i3oo;
mais cette charte n'est pas transcrite, et nous ne
savons s'il n'y a point confusion.
ORIGINE DU CHATEAU DU LOUVRE. 117
fermées dans l'enceinte de la Tour-Neuve : «In masuris que modo sunt infra
«ambitum novorum murorum Nove Turris'1'. •» Ainsi, non-seulement pour cons-
truire sa grosse tour du Louvre, mais encore pour en bâtir l'enceinte, Phi-
lippe-Auguste fut obligé d'acquérir le terrain : où était donc alors ce château du
Louvre que l'on dit avoir existé avant ce prince, et dont on ne trouve aucune
mention, si le centre même du sol sur lequel s'éleva la nouvelle forteresse dut
être acquis par le Roi?
On ne saurait d'ailleurs objecter que, par les transactions de 1206 et 1210,
Philippe-Auguste n'ait fait que renouveler des engagements contractés par quel-
qu'un de ses prédécesseurs. Quiconque est familier avec les formules ordinaires des
chartes sait combien on s'y montrait soigneux de rappeler les stipulations anté-
rieures, précaution indispensable, et qui ajoutait à l'authenticité des actes. Ici rien
de pareil, et la teneur des textes ne laisse pressentir aucun précédent. Tout est
récent, l'expropriation comme l'indemnité, et conséquemment il reste démontré
que Philippe-Auguste n'avait d'abord aucun droit sur les terrains du Louvre. Com-
ment concilier ce fait avec l'existence d'un vieux château qu'il aurait simplement
restauré et augmenté?
Antérieurement à Philippe-Auguste, nous en avons la conviction, il n'y a jamais
eu sur l'emplacement du Louvre ni manoir royal ni forteresse quelconque. Le fait
est difficile à prouver directement comme la plupart des faits négatifs, c'est-à-dire
qu'on n'a point la ressource de renvoyer à quelque diplôme énonçant en termes
formels que le terrain ne renfermait point de vastes constructions; mais il est
possible de suppléer à cette absence de documents. Au moyen de déductions
tellement rigoureuses qu'elles excluent toute incertitude, nous démontrerons que
Philippe-Auguste a jeté les premiers fondements de l'unique édifice qui ait porté
le nom de Louvre, et que sur son emplacement il n'y a eu, avant la fin du
xuc siècle, que des masures éparses et rustiques dont l'histoire n'a point à tenir
compte.
(1) Voici le texte de la charte: aPhilippus, Dei
t gracia Francorum rex, noverint universi présentes
trpariter et futuri, quod nos, de xv denariis quos
ffhabebamus de censu de fundo terre, in domo Ro-
trgeri Anglici, in Campellis sita, que contigua est
trdomui que fuit Odonis de Sancto Mederico, com-
irmutavimus undecim denarios cum dilecto et fideli
rrnostro P. (Pierre II de Nemours), Parisiensi epi-
irscopo, pro undecim denariis de censu de fundo
«•terre, quos domnus Episcopus habebat apud San-
tctum Thomam de Luvre , in masuris que modo sunt
-infra ambitum novorum murorum Nove Turris.
«Ut igitur bec permotatio perseveret et robur in
eposterum obtineat firmitatis, presens scriptum
rrfieri fecimus et sigilli nostri impressione muniri.
rrActum Parisius, anno Domini m.cc.ix, mense
rrjanuario. » (Cartulaire de Notre-Dame, tome I,
p. 68.) C'est parce que le château du Louvre avait
été construit sur ie fief de l'Evéque de Paris que
ce dernier eut d'abord sur ceux qui y habitaient
un droit de haute justice ( Cartulaire de Notre-
Dame , t. III, p. 34 1), lequel, suivant Sauvai (t. I.
p. 76), aurait été confirmé par arrêt du Parlement
en 1277.
118 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Du Breul et Du Haillau disent nettement que Philippe-Auguste a créé le Louvre;
des auteurs plus anciens, tels que Corrozet et Nicolles Gilles, disent simplement
qu'il fit bâtir la Tour-Neuve ou Grosse-Tour. Est-ce parce qu'ils pensaient que la
fondation de la Tour-Neuve comprenait celle du château tout entier, ou parce que
la Tour-Neuve constituait seulement, à leurs yeux, une addition à des constructions
antérieures? Dans ce dernier cas, il serait absolument singulier qu'ils ne se fussent
pas expliqués plus clairement. Ils ne l'ont pas fait parce que pour eux, comme pour
les chroniqueurs leurs aînés, la Tour-Neuve et le château du Louvre, c'était tout
un. Il est du reste bien avéré que, dans la langue du moyen âge, on disait sou-
vent une tour pour désigner un château ; et le Glossaire de Du Cange traduit une
des acceptions du mot turris par arx et castrum. A propos du Louvre, rien n'était
plus naturel que l'emploi d'une pareille synecdoche. Avant le règne de Charles V,
l'enceinte du château , moins haute de plusieurs toises que celle qui nous est connue ,
avait sensiblement moins d'importance. Ce qui attirait surtout l'attention dans l'en-
semble de l'édifice, c'était l'énorme tour dominant les courtines; par ses dimensions
et bientôt par sa destination lugubre, elle frappa les imaginations; on dut néces-
sairement la considérer comme la tour par excellence, la tour principale parmi
celles qui défendaient Paris, et cette circonstance, jointe à l'époque, relativement
fort récente, de sa construction, lui fit donner par les contemporains les noms de
Tour-Neuve, de Tour de Paris^ et même, par emphase, celui de la Tour seulement,
qu'on lui appliquait dans le premier siècle de son existence.
Au surplus, nous n'émettons pas ici une simple conjecture, et le fait ressort
des textes mêmes, qui ne peuvent s'interpréter autrement. Si, par la dénomi-
nation de Tour-Neuve, on n'avait pas entendu le château tout entier, il répugne
de croire que Guillaume Le Breton eût pu écrire « in Turri Nova, extra muros,Ti
au lieu de crin turri nova castelli Luparae, quod est extra muros,ï) ou toute autre
formule analogue. Il ne serait pas moins étonnant qu'on lût dans les Grandes Chro-
niques de Saint-Denis : a en une nove tor fort et haute, au defors des murs
rr de la Cité, si est appelée la tor du Lovre,ii au lieu d'une indication comportant
que cette tour était le donjon du château du Louvre. On ne concevrait pas
surtout que Louis VIII, dans son testament, eût dit : crin turri nostra Parisiensi,
trjuxta Sanctum Thomam,n et non ce in turri castelli Parisiensis, juxta San-
rectum Thomam,n seule rédaction rationnelle. D'un autre côté, l'identité de la
Tour-Neuve et du château du Louvre se déduit rigoureusement de la charte
de 1210, car personne, certes, n'admettra que cette expression d'enceinte des
nouveaux murs de la Tour-Neuve, ctambitum novorum murorumNove Turris,1» si-
(1) Nous pourrions citer nombre de faits analogues quabie , la fameuse Tour de Londres , forteresse qui
dont le souvenir n'est point effacé; nous nous bor- a été pour cette ville exactement ce que le Louvre
nons à rappeler, comme l'exemple le plus remar- fut pour Paris.
ORIGINE DU CHÂTEAU DU LOUVRE. 119
gnifie le périmètre du donjon , lequel n'avait que quinze mètres environ de diamètre ,
et semble avoir plutôt dépendu de Saint-Denis de la Chartre que de l'Évêché. Or,
si elle ne désigne pas les murs du donjon, il faut bien qu'elle désigne ceux du
château; c'est pour cela que, dans un compte de 1202, il a pu être écrit que le
donjon et la basse-cour du château de Dun-le-Roi (Cher) seraient faits d'après
les mêmes dimensions que la Tour de Paris : et pro facienda tarai et de ballio
« faciendo ad mensuram Turris Parisius W, n locution complètement inintelligible
pour qui prendrait à la lettre le mot turris. Enfin il est si vrai que l'enceinte
des murs de la Tour-Neuve , dont il est parlé dans la charte de 1 2 1 0 , se confond
avec celle du château , que , dans une autre charte , d'avril 1 2 2 2 , où il est question
du tort causé à l'Évêché par l'établissement de cette clôture, elle est cette fois
énoncée l'enceinte du château du Louvre, ctaccincta castelli Lupere'2). n Mais s'il est
démontré que la Tour-Neuve et le Louvre ne sont point distincts, comme tous
les historiens s'accordent à attribuer la construction de la Tour-Neuve à Philippe-
Auguste,' il s'ensuit que ce prince est le vrai et le seul fondateur du Louvre.
Les erreurs des historiens touchant l'origine du château du Louvre n'ont pas
uniquement pour cause l'obscurité des documents relatifs à la question; elles pro-
viennent aussi de ce que le terrain sur lequel a été élevé le château s'appelait le
Louvre, avant que Philippe-Auguste y fit bâtir sa tour. Cette circonstance explique
seule, et d'une manière suffisante, les locutions a in Nova Turre que dicitur Lu-
trpare,fl de la Chronique de Saint-Victor, trecclesia Sancti Thome de Louvre, n
d'une charte de 1 198; «hospitale pauperum clericorum de Lupera,1» d'une autre
de 1 191 ; et spécialement cette phrase : « Apud Sanctum Thomam de Luvre, in
<r masuris. . . infra ambitum novorum murorum Nove Turris. •» Avant de dire ellipti-
quement le Louvre pour indiquer le château ®, expression dont l'usage général
n'est pas fort ancien, on a dit le Château ou la Tour du Louvre, comme on a
dit les Halles de Champeaux, les Planches de Mibrai, le Pressoir de Gibart, etc.
désignations fournies par les noms des territoires. Au surplus, Sauvai cite une
charte du mois d'octobre i2i5, portant que Henri, archevêque de Reims, avait
fait construire une chapelle à Paris, dans un lieu appelé Loure ou Louvre W. Rien
n'est plus explicite qu'un pareil document.
Jaillot assure qu'il a vu des actes du temps de Louis le Jeune où il est fait men-
(l) Compte royal de îaoa, p. clhi du second ;t) Celle charle faisait partie des archives de
volume de l'Usage des fiefs, par Brussel. Saint-Thomas-du-'Louvre; mais elle n'y figure plus,
(,) Cart. de N. D. t. I, p. ia5. et elle n'est pas même indiquée dans les anciens
(,) Au xvi* siècle on disait encore habituellement inventaires du Chapitre. Toutefois Sauvai n'a évi-
te chnteau du Louvre; cependant on rencontre ex- demment point inventé le fait, qui a une grande
ceptionneHement le mot Lupara employé dès 1299 importance, et dont nous regrettons beaucoup de
pour désigner le château. ne pouvoir donner une preuve matérielle.
120 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
tion d'un Louvre, sans qu'on puisse discerner s'il s'agit du château ou du terri-
toire. Si ces actes ont existé réellement, il est bien certain pour nous qu'ils se
rapportaient à la localité; nous devons dire que nous les avons beaucoup cherchés
sans les découvrir, et l'article que Jaillot a consacré au Louvre contient de telles
erreurs, qu'il est nécessaire de se montrer circonspect à l'endroit de ses affirmations.
Nous avons bien rencontré, dans les cartulaires, de nombreuses indications d'un
Louvre au xue siècle; mais c'était toujours à la petite ville du Parisis, et non au
terrain voisin de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, qu'elles se rapportaient. De
l'ait, nous ne connaissons rien de plus ancien relativement à ce terrain qu'une
bulle de 1 189, où l'église Saint-Thomas est surnommée de Louvrea.
Il serait à souhaiter qu'on réussît à éclaircir la véritable signification du mot
Louvre, sur l'étymologie duquel on n'a guère émis que des conjectures gratuites.
Il faut lire ce que Sauvai rapporte du rapprochement qui a été fait entre le
Louvre et l'île de Lipara, pour avoir une idée des conceptions ridicules auxquelles
une fausse science peut conduire. Du Haillan n'a pas montré beaucoup plus de
sagacité lorsqu'il s'est imaginé que, le château du Louvre étant un des plus
beaux édifices de la France, Philippe-Auguste rt l'appela en langage du temps,
« le Louvre, qui est comme qui diroit l'œuvre quasi chef-d'œuvre, -n L'hypothèse de
Sauvai a eu plus de succès, car, adoptée par Lebeuf et par Jaillot, elle est assez
généralement accréditée. D'après cette hypothèse, le mot Louvre viendrait du
saxon Leouar, expression qui, dans un vieux glossaire, serait traduite par caslellum, et
aurait fini par se transformer en celle de Louvre. Pour que cette étymologie offrît
la moindre vraisemblance, il faudrait d'abord que le château eût donné son nom
au territoire, et c'est le contraire qui est vrai; il faudrait ensuite que la langue
saxonne eût été familière aux habitants de l'Ile-de-France pendant le xie ou le
xn0 siècle , et personne ne saurait l'admettre. Une hypothèse bien plus sérieuse est
celle qui place , sur le lieu où a été depuis bâti le château du Louvre , une maison
appartenant au seigneur de Louvres en Parisis; mais malheureusement il n'y a là
qu'une simple supposition , basée exclusivement sur la similitude des noms. Si l'on
pouvait invoquer quelque texte à l'appui, nous nous rallierions immédiatement
à cette dernière étymologie, parce que le territoire des bords de la Seine et le
bourg de la route de Senlis nous paraissent devoir leur nom à une circonstance
identique. A partir du commencement du xmc siècle, on les trouve toujours
énoncés Lupara, Lupera et quelquefois Luperiœ, ce qui a fait croire que le
radical était lupus, et que Louvre désignait un rendez-vous pour la chasse aux
loups ou bien un repaire de ces animaux; mais il suffit de remonter à une
époque plus éloignée pour que cette explication cesse d'être plausible. On a
vu que le territoire est appelé Louvre en 1 198 et Louvrea en 1 189; la ville est
énoncée Loveriœ en 1 172 et 1097, Luvrœ en 1 167, Luvra en 1 1 19 et 632 (?),Lu-
ORIGINE DU CHATEAU DU LOUVRE.
121
vriacus en 1 1 07, Luver en 1 098 , et Latvero au ixc siècle. Ces diverses dénominations
n'éclaircissent pas le sens du mot Louvre; mais elles établissent péremptoirement
que sa forme moderne est identiquement la même que la forme ancienne, et, par
suite, qu'il n'est ni une corruption du saxon kouar, ni une dérivation du latin
lupus. Si l'on veut trouver la véritable étymologie du mot Louvre, c'est dans la
langue celtique qu'il faut la chercher W.
Résumons la question de l'origine du château du Louvre.
On n'a jamais cité le moindre document digne de foi qui établisse l'existence
du château avant la fin du xnc siècle; au contraire, nous trouvons un certain
nombre de textes authentiques tendant à démontrer que l'édifice fut fondé par
Philippe-Auguste, et la réunion de ces textes, se corroborant les uns les autres,
équivaut à une démonstration matérielle, d'autant plus encore qu'on n'a absolu-
ment rien de sérieux à y opposer. Le château, d'abord nommé par synecdoche
la Tour ou la Tour-Neuve, doit son appellation définitive au territoire sur lequel
il fut bâti. Ce territoire, dont le nom a un sens obscur, n'est mentionné pour la
première fois d'une manière précise qu'en 1189.
;l) En parcourant les glossaires avec l'espoir d'y
découvrir quelque donnée confirmative de notre
opinion, nous avons lu dans le Dictionnaire celto-
breton de Legonidec que le mot louvre vient de fo-
ire; , léproserie. Cette étymologie séduisante n'est
qu'imparfaitement justifiée lorsqu'on l'étudié. Il y a
eu une léproserie à Louvres; mais Lebeuf pense que
l'origine n'en remontait pas au delà du xm' siècle.
il peut s'être trompé; mais comment admettre que
cette léproserie ait été fondée à une époque assez
ancienne pour avoir donné au bourg le nom qu'il
aurait porté dès 63a , à ce qu'on assure d'après une
cbarte, malheureusement suspecte? Il existait des
léproseries en Orient dès le vi" siècle; en était-il de
même en Occident? Une charte de Dagobert, datée
du 3o décembre 634, parle bien d'une basilique
de Verdun où habitaient les lépreux, rrbasiliea sancti
irdomni Pétri et domni Victoris oppidi Vii'dunensis,
rrubi leprosi résident;» nous ignorons s'il faut voir
là une véritable léproserie. Quoi qu'il en soit , l'exis-
tence d'un hôpital de lépreux à Louvres et le nom de
ce bourg offrent une coïncidence très-remarquable.
16
HISTOIRE DU VIEUX LOUVRE. \%:)
CHAPITRE IV.
HISTOIRE DU VIEUX LOUVRE.
(DE 1202 A 1527.)
La pénurie habituelle de documents spéciaux ne permet que très-rarement
d'écrire l'histoire architecturale des anciens monuments, et l'on y supplée le plus
souvent par la narration des événements dont ils ont été le théâtre. Déterminé
à ne pas nous engager dans une voie semblable , nous ne pouvons que reconnaître
l'impossibilité absolue de faire une histoire détaillée du vieux Louvre, telle que
nous l'eussions souhaité. Un sinistre des plus désastreux au point de vue de la
science en est la cause principale. En effet, sans l'incendie du 27 octobre 1787,
qui, en détruisant la Chambre des Comptes, a surtout ravagé les archives du
Domaine, il est probable qu'on posséderait encore ces registres si précieux des
QEuifres royaux, consultés par Sauvai et constituant à peu près l'unique source de
renseignements où il fût possible de puiser. Aujourd'hui que ces registres sont
détruits, on en est réduit à parler du Louvre d'après ce que Sauvai en dit lui-même
dans son récit, plein d'inexactitudes; il existe encore quelques fragments de comptes
fort intéressants mais peu étendus, que M. Le Roux de Lincy a empruntés à un ma-
nuscrit de la bibliothèque de l'Arsenal, et qu'il a publiés en i852 dans la Revue
archéologique C. Ce sont là des éléments extrêmement incomplets, auxquels nos re-
cherches n'ont presque rien ajouté, et qu'il n'y a aucune espérance de voir aug-
menter sensiblement un jour.
Nous avons dit que Philippe-Auguste fonda le Louvre avec l'intention d'en faire
l'ouvrage principal de la nouvelle fortification de Paris, comme le donjon était alors
la suprême défense des châteaux forts. H est donc à supposer que la construction
du château fut entreprise en même temps que l'enceinte, vers 1 190. Le premier
document où il soit question du château du Louvre est le compte de 1202, pré-
cédemment cité, où il est simplement énoncé Ttirris; on y parle des ferrures posées
(l> Voir à la fin du chapitre v, p. 181.
16.
124 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
aux fenêtres, du salaire des gardes et d'une somme de 8 livres i3 sous et h de-
niers pour le vin des bourgeois qui y avaient fait le service militaire W. Tout cela
implique bien que, en 1 202 , la Grosse-Tour était déjà élevée avec ses principales
dépendances.
Philippe-Auguste laissa vraisemblablement le Louvre achevé et compris dans
les limites qui nous sont connues pour le xvic siècle; l'agencement des rues voi-
sines paraît en être une preuve. Saint Louis passe pour avoir fait faire des travaux
au Louvre; mais l'importance et la nature de ceux qu'il ordonna ne sont point
déterminées par les auteurs contemporains. Nous avons trouvé, dans un compte
des baillis et prévôts pour l'année 12 A 8, un article de 20 livres t3 sous pour les
œuvres du Ghâtelet, du Louvre et autres, crpro operibus Gastelleti, Luparae et
rr aliis (2). s D'ailleurs il existait au Louvre, sous Charles V, une salle qui ne fut dé-
truite que sous François Ier et que l'on nommait salle de Saint-Louis, parce que,
apparemment, elle avait été faite ou décorée par ordre de ce prince W.
Durant les deux règnes qui suivirent celui de saint Louis, le Louvre dut s'aug-
menter de quelques constructions. Philippe le Bel qui fit tant pour le palais de
la Cité, fit aussi travailler au Louvre. Dans un compte du Trésor W, il est question,
à l'année 1296, de bois de charpente, acheté de Jean de Corbeil, pour les lices
du Louvre, et ad opus liciarum de Lupara,n et, à l'année 1299, de 1,000 livres
dépensées aux œuvres de Vincennes et du Louvre, crpro operibus Vicenarum et
crLupare. a En i333, Philippe de Valois acquit une grange vers la rue Fro-
menteau, pour y placer une ménagerie d'animaux féroces; mais c'est par Charles V
seulement que furent de nouveau exécutés au Louvre des travaux considérables.
Charles V avait un goût très-vif pour l'architecture et il en donna des preuves en
consacrant à la restauration de l'édifice la somme de 55,ooo livres, laquelle au-
rait équivalu, suivant Sauvai, au vingtième de son revenu annuel'5'. Cette restau-
(,) (tPro feneslris Turris ferrandis, et de residuo
icameree, xxv". — Simon et custodes Turris, xvu1
iret iiii\ de tertio anni. — . . Et pro vino burgen-
ffsium qiù custodierunt Turrim, vin' et xm' et nud. »
m Bibl. imp. fonds latin, suppl. n° 108.
<3) Elle était située dans l'aile occidentale. (Voir
au chapitre suivant.)
(4> Page 268 du tome XXI de la collection des
Historiens de Frame , par MM. Guigniaut et Na-
talis de Wailly.
<5) Christine de Pisan , parlant du Louvre dans
son Livre des fais et bonnes meurs du sage roy
Charles le Quint, dit qu'il le rrfist édifier de neuf,
r moult notable et bel édifice, comme il appert. *
Elle nous apprend aussi que Charles V était fami-
lier avec l'art de bâtir, et déclare qu'il rtfust sage
"• artiste 1 et irse démonstra vray architecteur, devi-
<r seur certain et prudent ordeneur. n (3e part. ch. xi.)
Ailleurs elle affirme qu'en * géométrie, qui est l'art
tret science des mesures et ecquerres, compas et
ff lignes, sans qui nulle œuvre est faicte,* Charles V
f s'entendoit souffisamment, et bien le monstroit en
rrdevisant (imagiuant) ses édifices. * Il paraît donc
que le Moi ne se bornait pas à faire beaucoup cons-
truire, mais qu'il prenait une part quelconque à la
confection des plans. Cela explique la faveur qu'il
accorda à Raymond du Temple, son architecte , et
aussi l'empressement avec lequel, lorsque l'em-
HISTOIRE DU VIEUX LOUVRE. 125
ration avait été commencée dès le règne du roi Jean , puisque les fragments de
comptes que nous possédons remontent à l'année 1 362 ; mais ce n'en fut pas moins
par la volonté de son fds, alors régent, qu'elle fut entreprise; elle eut pour résultat
de transformer l'édifice, de forteresse, en manoir d'habitation. C'est sans doute
dans ce dessein que Charles V, au dire de Sauvai, exhaussa les ailes de cinq ou
six toises sur plusieurs points, et les couronna de terrasses, remaniement qui en-
traîna la disparition des créneaux des courtines. La distribution intérieure fut aussi
considérablement modifiée : on fit les logements plus commodes, on en multiplia
le nombre, et l'on en rendit l'accès plus aisé par l'établissement, dans la cour,
d'un grand escalier hors d'œuvre; en un mot, la physionomie du château fut
totalement changée et perdit son aspect, exclusivement militaire, pour en prendre
un autre plus en harmonie avec sa nouvelle destination. Le Louvre alors tint le
milieu entre l'hôtel Saint-Paul, cet hôtel solennel des grands ébattements, et la
Bastille , qui allait surgir du sol. Il est digne de remarque que la Bastille fut fon-
dée en 1369, juste à l'époque où la transformation du Louvre dut être complète.
Au commencement du règne de Charles VI, en i38a, les Maillotins eurent
l'idée de démolir le Louvre, et ils l'eussent fait sans les observations d'un bour-
geois de Paris, appelé Le Flamand, qui conseilla d'attendre le dénoûment de la
guerre que le Boi faisait alors en Flandre. Cette guerre s'étant terminée favora-
blement pour Charles VI, ce prince revint à Paris, et ordonna immédiatement aux
Parisiens de porter toutes leurs armes au Louvre (janvier 1 383). Il y en fut déposé
d'immenses quantités , et jamais l'édifice n'en contint autant ; quoique , de tout temps
et jusque sous Charles IX, il ait été employé comme arsenal. Dans les comptes
des baillis de France, il est fait mention, dès 1268, des arbalètes qui se fabri-
quaient au Louvre'1', et dans d'autres comptes, de 1 2 3^, de l'artilleur du château
et des soufflets d'une forge sans doute destinée à la confection des machines de
guerre <2). En 1 358 , quand les habitants de Paris se saisirent du Louvre, ils y trou-
vèrent un grand nombre de canons et autres engins de guerre. En 1 ^60, la néces-
sité de restaurer le grand Châtelet, qui était le siège de la Prévôté de Paris, fit
transporter cette juridiction et sa geôle au château du Louvre. En i5o6, des
munitions étaient accumulées dans les caves, les salles basses et même dans une
des ailes, de telle sorte qu'il fut expressément interdit d'y allumer du feu dans
aucune ehemiuée, malgré la présence des officiers de la Prévôté. Us continuaient
pereur Charles IV vint à Paris, en 1877, iï lui (l) <rMagister Aubertus, qui facit balistas ferri
*mon9tra les beauix murs et maçonnages qu'il avoit trapud Luparam, pro expensis: vu' 11' imd. » (He-
rrfait au Louvre édifier. » Ce pouvait être, de sa cueil des historiens de France, t. XXI, p. 269.)
part, autant amour-propre d'artiste que vanité de (,) rQuinque balislae ernptœ de attilatore Lu-
propriétaire. Nous verrons que Catherine de Mé- rparœ: vui1.» — » Pro follibus in fabrica Luparœ. »
dicis s'occupait également d'architecture. (Ibid. p. a35 et a3<j.)
126 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
toutefois à y tenir leurs séances en attendant la lin des réparations du Cliâtelet,
où ils furent renvoyés par lettres patentes du 2 3 décembre. D'après le Journal
d'un bourgeois de Paris, on logea au Louvre, en i523, n vingt-cinq pièces d'artil-
trlerie grosses, sur roues et charroys,^ et «grands nombres de charroys garnis de
«pouldre et bouletz de fer, le tout pour mener en Picardie, contre les Anglois et
tt Bourguignons, -n Peu de temps après commença la décadence de l'arsenal du
Louvre, dont François Ier fit renverser les bâtiments. En 1 533 , ce prince avait
emprunté à la Ville, pour y fondre des canons, une des granges qu'elle avait près
des Célestins, au lieu que l'on appelle encore maintenant l'Arsenal, et qui finit par
devenir décidément l'arsenal royal, à la place de celui du Louvre; par ordonnance
du 18 décembre 1672, Cbarles IX y transféra le siège du bailli de l'artillerie.
En 1 2 1 U , la Grosse-Tour du Louvre servit de prison au comte Ferrand , et, pour
cela, on l'appela pendant un temps la Tour Ferrand. Le vaincu de Bouvines est le
premier d'une assez longue série de captifs grands seigneurs, dont le dernier fut
Jean II, duc d'Alençon, incarcéré par ordre de Louis XL Mais la Grosse-Tour n'eut
jamais, d'une façon permanente, cette sinistre destination; en temps ordinaire,
elle constituait surtout un lieu de sûreté pour le roi, ses chartes et ses richesses
de toutes sortes. Nous savons que, sous Charles V, il y existait une chambre où ce
monarque resserrait ses joyaux, sans doute à l'exemple de ses prédécesseurs, et
le testament de Louis VIII nous apprend que ce dernier prince y avait déposé ses
épargnes. On trouve des mentions d'un trésor du Louvre dès 1 2 97 ; ce trésor, qu'on
doit considérer comme celui de l'Etat, ne se confondait point alors avec le trésor
de la Maison du Boi'1', déposé au Temple, et qui fut définitivement réuni à l'autre
par une ordonnance de 1 3 1 7. H est difficile de dire combien de temps le trésor
royal resta au Louvre; il pourrait en avoir été retiré pendant la domination des
Anglais. François Ier, en i53i, le rétablit dans une des tours du château, où il
avait fait mettre des coffres fermant à plusieurs clefs. Le Trésor ou bureau de
l'épargne y fut maintenu par Henri II et ses successeurs.
On sait que Charles V fonda la Bibliothèque royale au château du Louvre, en
y transportant, vers 1367, les manuscrits et l'ameublement spécial de celle qui
existait alors au palais de la Cité. Avant lui plusieurs de nos rois avaient réuni des
livres; mais c'était généralement pour leur usage personnel et non en vue de créer
une bibliothèque de la couronne. Ainsi saint Louis , au lieu de léguer à son fils les
livres assez nombreux qu'il avait amassés, en fit don, par son testament, à quatre
communautés religieuses. Telle ne fut point la conduite de Charles V. Aimant pas-
sionnément les livres, se plaisant à en faire copier et traduire, il centupla la quan-
tité de ceux dont s'était contenté son père et ne recueillit pas moins de neuf cents
(1) E. Boutaric, La France sous Philippe le Bel, p. 229.
HISTOIRE DU VIEUX LOUVRE. 127
manuscrits, -quantité fort considérable pour cette époque, où l'achèvement d'un
seul volume exigeait un si long temps. La garde de ce trésor fut confiée à Giles
Malet, d'abord valet de chambre, puis maître d'hôtel du roi; il en dressa, l'an
1373, un inventaire qui est parvenu jusqu'à nous'1'. Il résulte de ce précieux do-
cument que les livres étaient renfermés en trois chambres situées l'une au-des-
sus de l'autre, la première contenant deux cent soixante-neuf volumes, la seconde
deux cent soixante , et la troisième trois cent quatre-vingt-un. Ces trois chambres
formaient trois étages de la tour dite de la Librairie, dont nous déterminerons plus
loin l'emplacement. A Giles Malet, mort en i/ji 0, succéda, dans la place de garde
de «la librairie, a Antoine des Essarts, garde des deniers de l'épargne, lequel en
fut mis en possession le 7 juillet; après lui vint Jean Maulin, clerc de la Chambre
des comptes; puis Garnier de Saint-Yon, échevin de Paris, qui y fut appointé le
1 1 mai 1612. H exerçait encore ses fonctions en 1629, lorsqu'il en fut déchargé
et reçut quittance de sa gestion par l'ordre du duc de Bedford, régent pour le roi
Henri VI. Bedford acheta, moyennant la somme de 1,200 livres, cette première
bibliothèque du Louvre, qui fut ainsi, en grande partie, perdue pour la France.
En 1/123, loin de s'être augmentée, elle ne se composait plus que de huit cent
cinquante volumes, et on l'estima 2,2 2 3 livres h sous.
A Louis XI appartient l'honneur d'avoir reconstitué la Bibliothèque royale.
Ayant fait rechercher les livres épars depuis Charles V en diverses maisons royales,
il y joignit les siens ainsi que ceux de Charles VII, et forma, vers 1 ^7 5 , une col-
lection d'ouvrages qui, grâce à l'invention de l'imprimerie, s'accrut rapidement.
Cette collection eut pour garde un nommé Laurent Palmier, et, selon Du Breul,
Robert Gaguin. Charles VIII suivit les traces de son prédécesseur, et ses guerres
en Italie lui fournirent l'occasion de faire une foule d'acquisitions précieuses. La
Bibliothèque royale était encore au Louvre sous son règne. Du temps de Louis XII,
elle en fut enlevée pour n'y plus revenir; on la transporta à Blois, où elle fut
réunie à celle que Charles d'Orléans avait fondée en cette ville, à son retour d'An-
gleterre <2). Néanmoins, sous Henri IV, il y avait au Louvre un « Cabinet des livres, n
dont parle Sully, et Catherine de Médicis y avait amassé beaucoup d'anciens ou-
vrages a hébreux, grecs et latins, traduits et à traduire, n dit le poëte Bonsard.
L'officier qui commandait le château du Louvre portait d'abord le titre de châ-
telain, castellams; au xivc siècle et depuis il a été constamment qualifié de capi-
(1) Il est conservé à la Bibliothèque impériale en « trois chambres l'une sus l'autre. L'an de grâce
registre et en rouleau. On lit sur la seconde page: rmil ccclxxiii. Enregistré de son commandement
<rCy-après eu ce papier sunt escrips les livres de *par moy, Giles Malet, son varlet de chambre. » On
ittres souverain et très excellent prince Charles, le possède un autre inventaire de 1&11.
r quint de son nom, par la grâce de Dieu, roy de m Leprince, Essai historique sur la Bibliothèque
r France, estans en son chastel du Louvre, en rot/aie.
128 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
taine; il exerçait certaines fonctions judiciaires, et le tribunal de la Capitainerie
siégeait encore dans le dernier siècle. Le premier châtelain du Louvre que nous
connaissions s'appelait Renaud; il fut un des porteurs de son homonyme , l'évêque
Régnaut de Corbeil , lors de l'installation solennelle de celui-ci sur le siège épis-
copal de Paris, le 10 juillet i2 5o. Le poste de châtelain ou capitaine du Louvre
était, on le comprend, un emploi d'importance; parmi ceux auxquels il fut confié,
nous trouvons Enguerrand de Marigny, ministre de Philippe le Bel , le connétable
de Saint-Pol, du temps de Louis XI, et le duc de Luynes, favori de Louis XIII.
De Charles VII à François Ier, le Louvre paraît avoir été négligé, les rois n'y
logeant que par intervalle et préférant le séjour de l'hôtel Saint-Paul ou des
Tournelles. On y fit cependant, à plusieurs reprises, quelques réparations; ainsi,
en 1 5 1 3 , on remit aux verrières de la chapelle quatre écussons aux armes du roi,
de la reine, de la dame de Genlis et de son mari qui était capitaine du château;
on y repeignit aussi à l'huile une image de saint Jean-Baptiste , et l'on y fit un bé-
nitier. On condamna, en outre, une porte qui communiquait d'un oratoire situé
en la chapelle avec la basse-cour voisine de l'hôtel de Bourbon M.
Pendant les dix premières années de son règne, François 1er ne résida pas plus
au Louvre que ses prédécesseurs; mais, vers i5^7, il résolut d'en faire sa de-
meure ordinaire, à Paris. Cette circonstance rendit au château l'importance qu'il
avait au temps de Charles V, et bientôt une reconstruction entreprise dans des
conditions splendides vint lui donner une célébrité fort supérieure à celle qu'il
avait eue jadis. A l'année ihar] finit l'histoire du Louvre du moyen âge et com-
mence celle du Louvre de la Renaissance.
(i; Comptes de l'ordinaire de Paris. (Sauvai, t. III, p. 56a.)
TOPOGRAPHIE HISTORIQVE DV V1EVX PARIS.
A. Berty rest «i de
PLAN RESTITVE DV VIEVX LOVVRE .
N' /-" font Vemfiù
'' '
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC.
129
CHAPITRE V.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE ET DES FORTIFICATIONS VOISINES.
Le vieux Louvre se composait d'une grosse tour ou donjon, placée vers le milieu
d'une cour circonscrite par quatre ailes qui formaient un parallélogramme rectangle.
Ce quadrangle, un peu plus profond que large, dont la plus grande dimension
s'étendait du sud au nord, avait sa principale entrée au midi, du côté de la rivière,
et était entouré de fossés qui le séparaient des basses-cours, jardins et bâtiments
secondaires constituant les dépendances du château W. Sous le règne de Henri II,
le tout occupait une superficie d'environ trente mille mètres carrés, et avait
pour limites, au nord et à l'ouest, des maisons en bordure sur les rues de Beau-
vais et Fromenteau ; au sud, le quai du bord de la Reine; à l'est, la rue d'Au-
triche. (Voir le plan restitué du vieux Louvre, qui est ci-joint.)
LA GROSSE-TOUR.
La Grosse-Tour, que Sauvai dit avoir été située exactement au centre de la cour
du Louvre, et qu'il faut placer plutôt un peu vers l'orienta, était cylindrique et
analogue à la tour de Montgommery, qu'on voyait encore, il y a un siècle, au
Palais de Justice. Elle avait des murs de treize pieds d'épaisseur à sa partie infé-
rieure, et de douze seulement au-dessus du talus, à partir duquel elle mesurait
vingt-quatre toises de circonférence ; les approches en étaient défendues par un
fossé particulier large et profond (3>, et elle s'élevait de seize toises depuis le <r rez-
(1) Guillaume de Lorris, poëte du temps de saint
Louis, a dépeint, dans son Roman de la Rose,
un château fantastique de la Jalousie, dont la des-
cription n'est autre, assure Sauvai, que celle du
vieux Louvre ; mais Sauvai n'aurait pas fait une
telle supposition s'il eût mieux connu ce dernier
édifice. Les vers de Guillaume de Lorris ne tra-
duisent qu'une création de son imagination,
et les quelques traits du château de la Jalousie
qui peuvent s'appliquer au Louvre devaient se
retrouver dans plus d'une autre forteresse du
xiii* siècle.
(S) Elle était probablement dans l'axe du portail.
( Consulter la vue du vieux Louvre qu'offre le tableau
de Saint-Germain-des-Prés, et que nous reprodui-
sons. Le retable du Palais confirme également cette
particularité. )
(3) Il devait être moins large que Sauvai ne le
donne à entendre. Nous doutons que ses parois aient
été éloignées l'une de l'autre de plus de trois toises.
]7
130 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
ff de-chaussée n (le sol de la cour?) jusqu'à la naissance du toît conique qui la sur-
montait. On ignore le nombre d'étages qu'elle avait, on sait seulement que chacun
de ces étages était éclairé par huit fenêtres de quatre pieds de haut sur trois de
large, grillées et garnies d'un réseau de fil d'archal contenant cent quatre-vingt-
deux mailles. La communication entre la cour et la Grosse-Tour avait lieu par un
pont de pierre, d'une arche, et un pont-levis, dont le ce pignon W« était orné d'une
statue de Charles V tenant son sceptre, haute de quatre pieds, et qui fut payée
six livres huit sols parisis à Jean de Saint-Romain, un des sculpteurs habituels de
ce roi. Sauvai ne dit point de quel côté était le pont ; mais on peut admettre qu'il
se trouvait au midi, du côté de la grande entrée, à l'opposé d'une galerie, aussi de
pierre , qui servait à aller directement des ailes du château en la Grosse-Tour, et
était certainement située du côté du nord, puisqu'elle ir aboutissait au grand escalier
et du corps de logis de derrière, i> c'est-à-dire à l'escalier de l'aile septentrionale <2).
La Grosse-Tour renfermait une chapelle, trois ccbouléesn (voultes, voûtes?), un
retrait, un puits, plusieurs chambres, et une pièce voûtée où le Roi resserrait ses
joyaux (3'. On y montait par un escalier héhcoïde, en pierre, fermé par le bas d'une
épaisse porte et de fer, n ou plutôt renforcée de nombreuses ferrures , indépendam-
ment d'une profusion de serrures et de verrous. Sur l'un des côtés du fossé on
avait construit un petit bâtiment couvert de tuiles, abritant une fontaine; il fut
abattu en même temps que la tour. De l'autre côté s'élevait un pavillon Carré qui
fut rasé en 1 377, parce qu'il encombrait la cour; on en porta les débris dans la
grange de l'hôtel de la Petite-Bretagne. La Grosse-Tour est la première partie du
vieux Louvre qui ait disparu; démolie en 1627, elle laissa au lieu qu'elle avait
occupé une dépression du sol dans laquelle les eaux pluviales séjournaient; ce
qui provoqua, de la part du vulgaire, d'interminables dissertations sur les ou-
bliettes et les cachots mystérieux des vieux châteaux.
Nous avons dit que la Grosse-Tour du Louvre, forteresse dans une forteresse,
avait été en quelque sorte le germe du château ; elle en exprimait la destination
première, à tel point que, prenant la partie pour le tout, on désigna d'abord l'en-
semble par le nom de la Tour-Neuve, la Tour du Louvre, la Tour de Paris. La capti-
vité que le comte de Flandres subit dans le donjon a fait également appeler cette
partie du château la Tour-Ferrand, dénomination que lui donne le continuateur
de Nangis. Depuis, le donjon a toujours porté le nom populaire et expressif de
Grosse-Tour du Louvre.
(1) Par ce mot pignon Sauvai comprend sans (S) La galerie devait être une addition au plan
doute le fronton couronnant la voussure de la porte primitif, car elle ne pouvait que nuire à la défense
d'entrée de la tour, voussure de chaque côté de la- de la Grosse-Tour.
quelle il y avait vraisemblablement des ouvertures (3) « La voile de la Grosse-Tour, où le Roy met ses
étroites destinées au jeu des flèches du pont-levis. r-joyaux.» (Compte de 1367.)
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC.
131
» LE QUADRANGLE.
Deux des ailes du Louvre de Charles V ont subsisté jusque dans le xvne siècle :
l'aile septentrionale, abattue par Lemercier postérieurement à 162 k , et l'aile
orientale abattue, par Levau vers 1660. Cependant il n'existe aucun plan de
l'une ni de l'autre ; du moins les recherches prolongées auxquelles nous nous
sommes livré ne nous en ont pas fait découvrir'1). Il n'en existe pas davantage
pour les deux autres ailes dans leur état ancien; mais, en revanche, on possède
des renseignements ne laissant aucun doute sur l'emplacement de ces construc-
tions, emplacement qui est la base de toute restitution du vieux Louvre et qu'il
convient donc d'étudier préalablement.
Sauvai dit que la grande salle de Saint-Louis, rebâtie par Charles V, avait douze
toises de long sur sept de large, d'où l'on peut conclure que cette largeur de sept
toises était celle de l'intérieur d'une des ailes. Sauvai nous apprend, en outre, que
François Ier démolit le corps de logis où se trouvait la salle Saint-Louis, circons-
tance impliquant qu'elle était dans l'aile occidentale, la seule qu'on ait entièrement
jetée bas avant le règne de Henri IL Or, en supprimant les colonnes qui la dé-
corent , la salle actuelle des Cariatides présente environ six toises quatre pieds dans
œuvre. Il y a donc les plus fortes raisons de croire qu'elle reproduit la largeur de
l'aile qu'a remplacée le bâtiment dont elle fait partie, et qu'elle en marque aujour-
d'hui l'emplacement exact. Ces présomptions se changent en certitude lorsqu'on se
rappelle que, suivant l'affirmation de Sauvai, la vieille muraille de ce côté, jugée
excellente, a été conservée lors de la reconstruction de Henri II; ce qui explique
comment le mur du côté des Tuileries est d'une épaisseur considérable qu'on ne
saurait comprendre autrement. Les architectes Percier et Fontaine '2) ont reconnu ,
(l) L'atlas de la censive du prieuré de Sainl-Denis
de la Charlre, exécuté en 1754 et 1755, contient
un plan de masse de l'ancien Louvre reporté sur
celui du Louvre moderne, d'ailleurs sans nulle in-
dication des documents d'après lesquels il a été fait.
Cette circonstance, qu'il figure dans les archives de
Saint-Denis de la Chartre, donnerait à penser qu'il
a une grande valeur: mais il n'en est rien, et nous
avons surabondamment constaté qu'il était faux.
On lit au bas que le Louvre contenait dix arpens
trente-huit perches huit toises, ce qui excède la
réalité, sans toutefois s'éloigner considérablement
du chiffre que nous trouvons. On remarque sur ce
plan un certain nombre d'indications qui pourraient
n'être point uniquement dues à l'imagination du
dessinateur. — Sauvai avait fait lever, des restes du
vieux Louvre, un plan qui n'est point parvenu jus-
qu'à nous.
l!) M. deClarac(p. a5i) dit qu'il en a reçu d'eux
l'assurance, et donne le profil que voici :
comme celui d'une moulure ayant fait partie de
l'ancienne muraille du Louvre, vers l'occident.
'7-
132 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
au surplus, que ce mur, bâti en pierres d'une espèce dont on ne se servait plus
au xvic siècle, est sûrement ancien, et l'on peut s'assurer, par une gravure de
Baltard, qu'il était encore, sous le Consulat, garni de deux larmiers gothiques.
Enfin, sur le plan de Du Cerceau'1) sont figurées, à côté de l'escalier de Henri II,
les amorces des murs mêmes de l'aile primitive, dont les parois, prolongées, se
confondent avec celles de l'aile moderne (2). (Voir, au chapitre vu, le plan du
Louvre de la Renaissance, étage inférieur.)
Du côté du midi, les données ne sont pas tout à fait aussi explicites que du côté de
l'ouest ; néanmoins il est impossible de se refuser à croire que l'aile méridionale ''2),
dont P. Lescot donna le dessin, fut élevée sur les anciens fondements. En mesurant
l'intérieur de cette aile, à laquelle Perrault a adossé une nouvelle façade, et qui est
devenue la galerie regardant sur la cour, où sont les salles de l'Aruspice et de la
Médée, on trouve qu'elle a, dans œuvre, quatre toises trois pieds et demi, lar-
geur attribuée par Sauvai à la salle neuve de la Reine, dont les appartements,
dit-il, étaient situés du côté de la principale entrée du château, en d'autres termes,
sur la rivière. Il serait, à coup sûr, bizarre que les architectes chargés de recons-
truire l'aile méridionale fussent tombés sur des dimensions pareilles, si l'idée ne
leur en avait pas été suggérée par des fondations préexistantes, dont ils voulaient
profiter. Ce système avait déjà été suivi vers l'ouest, parce qu'il utilisait des subs-
tructions d'une extrême solidité, comme toutes celles de l'époque ogivale, et pré-
venait un déplacement incommode des fossés, mesure inévitable dans le cas con-
traire. On verra de plus que des renseignements très-positifs sur la longueur de
l'aile occidentale, et sur la largeur du fossé vers la rivière, confirment de tout
point l'hypothèse de l'identité d'emplacement entre l'aile méridionale primitive
du château et celle du xvie siècle. Un pareil ensemble de présomptions ne saurait
être l'effet du hasard ; en semblable matière , de telles coïncidences sont aussi
probantes qu'on peut raisonnablement l'espérer.
Après avoir ainsi obtenu la base que nous cherchions, il devient possible de
poursuivre notre étude de restitution.
La cour du Louvre, affirme Sauvai, avait trente-deux toises cinq pieds de lon-
gueur, c'est-à-dire du nord au sud, et trente-quatre toises et demie de largeur,
c'est-à-dire de l'est à l'ouest. Il y a là une double et énorme erreur que personne
(1) Dans le premier volume des Plus excellais
bastimens de France, Du Cerceau donne les plans
des deux ailes reconstruites au xvi" siècle.
m Le mur extérieur de l'aile ancienne offrait la
même épaisseur que celui de l'aile nouvelle; quant
au mur intérieur, il avait une épaisseur de trois
pieds absolument comme le mur moderne , à l'étage
supérieur. A l'étage du rez-de-chaussée, le mur mo-
derne est garni de contre-forts reliés par des arcs , en
façon de portiques, ce qui lui donne une épaisseur
totale de six pieds. Il est extrêmement vraisemblable
que le mur ancien était pareillement muni de con-
tre-forts saillants de trois pieds environ, et, en
faisant nos calculs , nous supposerons le fait admis.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 133
n'a jamais, soupçonnée, mais que nous allons rendre palpable en rétablissant, au
moyen de documents authentiques, tout ce qui se trouvait entre la rue des Poulies
et l'aile occidentale du Louvre.
C'est en t3o,o, le 2 3 avril, que fut donné l'alignement de l'hôtel de Bourbon,
sur le quai, et, par un rapport d'experts relatif à cette opération, on voit qu'il y
avait et ou costé par devers la rivière, entre les deux coings des deux nies (des Poulies
ftet d'Autriche), au lonc dudit hostel, cinquante et quatre toises et deux piez de
(donc, ou environ, de coing à autre*1', v Si donc l'on peut retrouver le coin oriental
de l'hôtel de Bourbon et une portion de son alignement sur le quai, que les an-
ciennes vues montrent avoir été rectiligne, on replacera avec certitude l'autre
coin de la façade de l'hôtel , celui qu'elle formait avec la rue d'Autriche et la par-
tie méridionale de l'îlot sera reconstituée. Deux plans identiques de la Bibliothèque
impériale, levés à la fin du xvne siècle, et reproduisant ce qui restait alors des
bâtiments du Petit-Bourbon, satisfont à la condition; le résultat qu'ils nous ont
permis d'obtenir est tellement juste qu'en mesurant la distance entre le coin res-
titué de la rue d'Autriche et le mur de l'hôtel d'Alluye (voir le plan restitué), nous
avons trouvé la longueur de treent dix-neuf thoises et demye unze poulces, n indi-
quée par un toisé fait à propos des censives du Chapitre Saint-Gcrniain-I'Auxerrois
et du prieuré Saint-Denis de la Chartre, le 1 1 janvier 1 58o. Cette dimension ces-
serait d'être exacte si l'on admettait que la façade de l'hôtel de Bourbon , sur le
quai, était moins large que nous ne le disons; mais une telle supposition est abso-
lument inadmissible en présence du texte que nous venons de citer. Nos assertions
touchant la largeur de l'espace entre les deux rues sont confirmées, en outre,
par un plan manuscrit de Desgodets (1696), où est figurée, dans la cour du
Louvre moderne, une fontaine, jalon du parcours ancien de la rue d'Autriche;
elles le sont également par ce que nous apprennent divers plans anciens, tou-
chant la direction de cette voie, depuis la rue Saint-Honoré jusqu'à la hauteur de
la rue de Beauvais. Enfin une preuve mathématique ajoute à la rigueur de la
démonstration : les limites de l'hôtel de Bourbon, vers le nord, nous étant con-
nues par plusieurs documents graphiques, et sa superficie comprenant environ
deux mille huit cents toises, il est de nécessité absolue qu'il ait présenté, de l'est
à l'ouest, la profondeur spécifiée par la charte de 1 3g 0 ®.
"' Archives de l'Empire, cart. S 63. Une autre
copie du procès- verbal existe dans les liasses P,
précédemment citées et relatives à l'hôtel de Bour-
bon.
m Cette superficie d'environ deux mille huit cents
toises est indiquée par Jaillot (Quartier du Louvre,
p. la), qui ne parle point des dimensions de l'ancien
Louvre. La profondeur de l'hôtel do Bourbon, dé-
terminée par le mur de l'hôtel de Longueville, était
d'environ cinquante et une toises en moyenne, chiffre
qui, multiplié par la largeur de cinquante-quatre
toises, donne la superficie de deux mille sept cent
cinquante-quatre toises. En y ajoutant l'aire du petit
triangle engendré par la brisure de la rue des Pou-
lies, on atteint une surface de deux mille sept cent
quatre-vingts toises.
IS4 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Il a suffi d'établir la largeur de l'ilot compris entre les rues des Poulies et d'Au-
triche, et déjà la place manque pour un château dont les dimensions seraient
celles que rapporte Sauvai. Ce qui suit rendra plus manifeste encore l'erreur de
cet écrivain.
Rien ne nous renseigne directement sur la largeur de la rue d'Autriche dans la
partie qui nous occupe ; mais nous voyons, par les plans, qu'à la fin du xvnc siècle,
la rue, dans sa moitié septentrionale, ne mesurait encore que quinze à seize pieds
de largeur. H avait dît en être de même vers le quai, de sorte que les bâtiments de
l'hôtel de Bourbon n'étaient pas séparés par plus de deux toises et demie environ
de ceux du côté occidental de la rue. Ces dernières constructions qui, au xve siècle,
appartenaient à des particuliers, étaient, ainsi que le prouvent un grand nombre
de pièces, adossées au mur d'enceinte de la Ville, construit par Philippe-Auguste.
Nous citerons, entre autres, un document de 1 62 5 , provenant des archives de
Saint-Thomas- du -Louvre, où la maison ayant pour enseigne le Croissant est
énoncée « près du Louvre , tenant d'une part au Roy . . . d'autre part à un chan-
ce tier appartenant à Pierre Moriset, faisant le coing de dessus la rivière de Seine
ft (du quai) , aboutissant par deirière aux vielz murs de la ville de Paris. i> Au xvic siècle ,
le terrain de la maison du Croissant et des maisons voisines, du même côté, ap-
partenait au Roi; on y avait établi deux jeux de paume dont Sauvai nous fait
connaître les dimensions M, et qui avaient une profondeur de sept toises deux
pieds un quart (quarante-quatre pieds trois pouces). Un document très précieux
et entièrement inconnu vient justifier le dire de Sauvai , et montrer de plus que
les jeux de paume, comme les maisons qui les avaient précédés, s'appuyaient sur
l'ancienne enceinte de la Ville : c'est le plan d'un de ces jeux de paume, gravé
sur bois pour un petit livre italien publié en 1 555 (2). (Voir la planche ci-contre.)
Le mur sur la rue y est représenté avec une épaisseur de deux pieds, et les cotes
donnent quarante-quatre pieds huit pouces pour la largeur dans œuvre, cinq
pieds dans une place et sept pieds dans l'autre, entre les deux parements du mur
du fond, dont cette épaisseur considérable indique assez clairement l'origine.
Au delà du mur de la Ville était le fossé du Louvre. Était-il muni d'un chemin
de ronde, ou le rnur de la Ville en formait-il la contrescarpe? Nous l'ignorons;
(l) Antiquilez de Paris, t. II, p. i3.
m Ce plan nous a été obligeamment signalé par
M. J. Gailhabaud. Le livre dont il l'ait partie est
intitulé : Trattato del giuco délia palla di Messer An-
tonio Scaino de Salo , diviso in tre parti. Venise , Ga-
briel Giolito, petit in-8°, 1 555. L'auteur déclare
qu'il a reçu de France le dessin du plan, mesuré
au pied de roi , et qu'il n'a point voulu convertir
celte mesure en d'autres. La description de l'édifice
est d'ailleurs courte, confuse, et n'apprend guère
que ce que la vue de la planche fait deviner. Scaïno
dit que la galerie intérieure, qui était destinée aux
spectateurs et qui entourait l'aire du jeu , formait un
très-beau portique, uno bellissimo portico. Il en at-
tribue la construction à Henri II , et comme il appelle
muraille de gauche le mur de Philippe-Auguste, on
peut croire que le plan est celui du jeu de paume
du nord.
TOPOGRAPHIE H1STOFUQVE DV VIEVX PARIS.
VVE DV LOVVRE,
DANS LA SECONDE MOITIE DV XVIe SIECLE.
Fac-si Ju dessin de Jacques Cellier.
Rue d ' Autri
che
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L.
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Le Tambour
•^■i
Mur d ' enceinte de Philippe -Auguste
i ^345678 g io Toise».
Lebel et Tavernier se.
PLAN D'VN DES JEVX DE PAVME DV LOVVRE,
TOPOGRAPHIE HISTOFUQVE DV V1EVX PARIS.
/„ ùy^J. 1« S~# Lf"
A. Berty dtr
E. Lebel se
LES ENVIRONS DV LOWRE , VERS L'ORIENT.
d après un plan manuscrit de la seconde moitié du XVI'siècle.
provenant des archives de SL Germain l'Auxerrois.
A Guichet du Louvre , — B Fossé du Cliâteau . C Tour du Coin — D Arche d'Autriche — E Arche de Bourbon .
F F F Hôtel de Nevers ■ GG Maison de l'Image Notre -Dame._ H Maison de l'Image Saint Eustache
I ! Hôtel d'Etampes K Hôtel de Larchant L Dépendance de l'Hôtel de Villeroy.~M Tou relie de
l'Hôtel Saint Pol N Mur d'enceinte de Philippe Auguste . 0 0 Emplacement des Jeux de paume .
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 135
niais on ne saurait douter que, si un chemin de ronde a existé réellement, il ne
dût être fort étroit. En admettant, comme le donnent à penser la vue de Cellier*1)
et le plan manuscrit de Saint-Germain-l'Auxerrois (voir les planches ci-jointes),
qu'il n'y avait point de chemin de ronde, et en franchissant le fossé, qui, d'après
Sauvai, était en cet endroit large de cinq toises huit pieds (six toises deux pieds),
nous arrivons aux murailles mêmes du château.
Etonné de la différence considérable que nous constations entre les données
de Sauvai et celles qui résultent de nos recherches, nous nous sommes demandé
un instant si, vers l'orient, le Louvre n'aurait pas été fermé par une simple mu-
raille au lieu de l'être par une aile, comme sur les trois autres côtés. En y réflé-
chissant, nous sommes arrivés à la certitude du contraire, et nous avons même
réussi à obtenir une indication sur la largeur de cette aile, dont l'existence nous
avait un moment semblé problématique.
En effet, on lit dans l'ouvrage de Corrozet que la chapelle du Roi, au Louvre,
se trouvait du côté de la rue d'Autriche : «En ladicte rue, dit-il, est la chapelle
«de M. de Bourbon, contre le logis de Villeroy, près le chasteau du Louvre et
rla chapelle du Roy dedans ledict chasteau^.v D'un autre côté, nous voyons, dans
l'ouvrage de Sauvai, que cette chapelle avait quatre toises et demie de large*3'.
H y a donc toute raison de croire que l'aile orientale avait la même largeur que
l'aile méridionale'*1, environ quatre toises et demie dans œuvre, et hors œuvre,
sept toises ou un peu moins.
Réunissons maintenant, pour les additionner, les chiffres qui précèdent, et où
nous n'avons pu commettre que de bien légères erreurs.
Toises. Pieds. Pouces.
Largeur ancienne de la rue des Poulies (à l'entrée) h 2 h
Largeur de l'ilot entre la rue des Poulies et la rue d'Au-
triche bU o o'5'
Largeur de la rue d'Autriche 2 3 o
Épaisseur du mur extérieur du jeu de paume 0 2 o
Largeur du jeu de paume, dans œuvre 7 2 3(0>
A reporter 67 9 7
(1) Elle est intitulée: Portraict en perspeclirc du
Loutre, à prendre du costé du Pré-aux-Clercs , et
se trouve dans le manuscrit de laBibl. imp. (suppl.
franc. n° 1 53) intitulé: Recherches de plusieurs sin-
gularités par Françoys Merlin , porlraictes et escrites
par Jacques Cellier, demeurant à Reims; commencées
le 3' jour de mars 1 583 , et achevé le 10 septembre
mil cinq cent quatre-vingt-sept.
<•> Fol. an r" de l'édition de i586.
(3> T. II, p. 11.
(,) On verra qu'il en était de même de l'aile sep-
tentrionale, et que l'aile occidentale, seule, avait
plus de profondeur. Cette parité de dimensions,
que, par des voies différentes, nous sommes con-
duits à donner à trois des ailes du Louvre, confirme
pleinement ce que nous en disons.
(i) Une différence de deux pieds en moins sur la
longueur de l'alignement du côté du quai résulte
du biais de cet alignement.
(°' La profondeur de sept toises quatre pieds trois
136 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Toises. Pieds. Pouces.
Report 67 9 7
Épaisseur du mur de la Ville (dans sa partie amincie, au
moyen de laquelle le jeu de paume avait la largeur ci-
indiquée) o 5 o
Largeur du fossé 5 8 o
Largeur de l'aile méridionale du château, environ 7 o o
Total 82 k 7
Mais l'espace entre le mur intérieur de l'aile occidentale du Louvre et une
parallèle passant par le coin oriental de la rue des Poulies était, en chiffres
ronds, de deux cent quatre mètres cinquante centimètres, ou cent quatre toises
cinq pieds cinq pouces. Si l'on en retranche les quatre-vingt-deux toises quatre
pieds sept pouces que nous venons d'obtenir, il ne reste plus que vingt-deux
toises dix pouces. Donc la cour du Louvre n'a jamais pu avoir trente-deux toises
et cinq pieds de l'est à l'ouest; mais elle a dû infailliblement être d'une dizaine
de toises moins large en ce sens.
Il nous semble qu'une pareille démonstration suffit pour rendre manifeste l'er-
reur dans laquelle est tombé Sauvai ; mais comme cette erreur, révélée pour la
première fois, a rendu complètement fausses toutes les idées qu'on s'est faites
jusqu'à ce jour sur les dimensions du vieux Louvre, il n'est point inutile de la cons-
tater de nouveau, en recourant à des preuves d'un genre entièrement différent.
L'aile orientale de l'ancien Louvre n'a point été démolie avant 1660, et la tour
de l'angle du sud-est se trouve figurée sur plusieurs tableaux , gravures ou dessins.
Or, sur le plus grand nombre et sur les mieux faits, particulièrement sur la vue
de Cellier et sur le tableau de Rémi Zeeman (au musée du Louvre) , on compte dix
fenêtres entre le pavillon , relativement moderne , de l'angle sud-ouest de la tour,
celle-ci étant séparée de la dernière fenêtre par un espace qu'on peut estimer de
dix à quinze pieds W. On a le droit d'en conclure que l'on connaîtra la longueur
approximative de l'aile méridionale, du côté de la rivière et, par suite, du côté
de la cour, du moment où l'on aura réussi à replacer la dixième des baies indi-
quées sur les gravures; mais nous savons, par certains plans cotés, que cette
dixième baie était au droit de la fenêtre moderne correspondante ; si l'on restitue
à la suite la tour d'angle et l'aile orientale en retour, le résultat corrobore par-
faitement celui auquel nous sommes arrivé par une autre voie.
pouces, donnée ici au jeu de paume (y compris le très-finement exécutée, il y a dix fenêtres; une se-
mur extérieur), est encore justifiée par un docu- conde planche de Sylvestre n'offre que huit fenê-
ment que nous avons cité page 10. très, et une troisième, au contraire, en montre onze:
(l) Sur une vue de Perrelle, sur une autre vue ces deux dernières s'excluent l'une l'autre. Le nom-
de Sylvestre et sur la Joute de Callot, laquelle est bre de dix fenêtres n'est aucunement douteux.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 137
Nous avons assez vite reconnu l'erreur de Sauvai ; il nous a été beaucoup plus
difficile de rétablir la vérité, car le problème se présentait à nous avec deux solu-
tions différentes; l'une était certainement la vraie, mais, entre les deux, le choix
nous a paru fort embarrassant. La première solution consistait à considérer l'avant-
corps situé après celui qui est maintenant contigu au pavillon du pont des Arts
(A du plan restitué), comme ayant formé le centre de la cour dans le projet de
Lescot, de telle sorte que, pour restituer l'ancienne aile orientale sur laquelle
avait dû venir s'élever la nouvelle, il n'y eût qu'à compter, à l'est de cet avant-
corps (A), une distance égale à celle qui se trouve à l'ouest pour atteindre l'aile
occidentale; ce qui donnait une cour de près de vingt-sept toises. Une vue gravée
par Boisseau, et intitulée Face du derrière du Louvre comme il se voit à présent,
semblait justifier la supposition, en laissant croire que l'aile orientale ancienne
venait s'attacher à l'aile méridionale immédiatement après le troisième avant-
corps (B), aujourd'hui attenant au pavillon du pont des Arts. Mais il y avait à
cette hypothèse de très-puissantes objections. Le plan de Du Cerceau ne donne
nullement à penser que, dans le projet de Lescot, la partie orientale de l'aile du
bord de l'eau dût être identique avec la partie occidentale ;puis une cour de vingt-
sept toises reporte à environ cinq toises l'espace entre la dixième fenêtre et la tour de
l'angle sud-est, ce qui impliquerait l'inexactitude de toutes les représentations qu'on
en possède, car cette distance y est deux ou trois fois moindre. Les faits énoncés
plus haut et si manifestement inattaquables ne peuvent se concilier avec la pre-
mière hypothèse, qui n'avait guère pour base que la vue de Boisseau. En exami-
nant la gravure avec attention et surtout en considérant les deux copies W que
l'on en connaît, nous avons compris que nous l'avions mal interprétée d'abord, et
nous avons reconnu que, pour bâtir l'avant-corps (B) voisin de l'aile orientale,
il avait fallu entamer cette aile dans sa profondeur, de façon qu'elle formât une
forte retraite à l'encoignure, détail aussi clairement indiqué que possible sur les
copies de l'eau-forte de Boisseau. La cour de l'ancien Louvre, séparée par un
mur d'avec la cour moderne, se terminait à peu près au droit de l'angle saillant
occidental du troisième avant-corps (2). C'est ainsi que nous avons été amené à
donner à l'intérieur du quadrangle une longueur d'environ vingt-deux toises de
l'est à l'ouest, dimension qui concorde avec les documents graphiques et avec les
documents écrits, et qui 6era de nouveau confirmée par ce que nous dirons plus
loin de la longueur du fossé méridional.
La largeur de trente-quatre toises et demie attribuée par Sauvai à la cour du
(l> Elles sont toutes trois collées sur le même (,) Sauvai donne à la cour la largeur de trente-
feuillet du recueil intitulé : Topographie de Pans , à deux toises cinq pieds ; ne faut-il pas voir là une
la Bibliothèque impériale. faute de lecture: trente-deux pour vingt-deux?
i. 18
138 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
vieux Louvre, du nord au sud, n'est pas moins inexacte que celle qu'il lui prête de
l'est à l'ouest.
On a vu plus haut qu'en reconstruisant les ailes de l'ouest et du sud, Lescot
conserva les anciennes fondations et partie des anciens murs; ce n'est pas certes
se montrer trop téméraire que d'imaginer qu'il se proposait d'en faire tout autant
au nord, puisque l'on n'aperçoit aucune cause ayant pu motiver un déplacement
dans cette direction plutôt que dans les autres. Rien ne s'oppose donc à ce qu'on
admette que, si l'aile septentrionale avait été rebâtie en même temps que l'aile
méridionale, elle l'eût été dans des conditions semblables. Mais cette aile, qui n'a
existé qu'à l'état de projet, se restitue sans hésitation, car, le monument étant
symétrique, il ne s'agit, pour la retracer, que de répéter au nord la disposition
connue du midi. Le résultat est une cour de vingt-sept toises et non de trente-
quatre toises et demie de profondeur.
Jusqu'ici, malgré le degré de vraisemblance auquel nous sommes arrivé, nous
ne sortons pas de l'hypothèse; mais voici des faits qui fortifient nos conjectures et
nous donnent une certitude en quelque sorte mathématique.
i° Dans la vue de Boisseau et sur le plan de Gomboust, l'axe de l'aile septen-
trionale, dont un reste est figuré en coupe, correspond à peu près à l'axe du pavil-
lon de l'Horloge, comme dans notre restitution; 2° la vue de Cellier et les plans
de Quesnel et de Mérian indiquent très-nettement que la tour de l'encoignure du
nord-ouest (E du plan restitué), détruite par Lemercier, était fort proche du res-
saut formé par la cage de l'escalier de Henri II (L) , tandis que, si l'on s'en rappor-
tait à la cote donnée par Sauvai, elle en aurait été séparée par plus de vingt et
un mètres; 3° des documents que nous citerons ailleurs établissent que, entre les
tours des angles, vers l'occident, la courtine n'était flanquée que d'une tour unique .
dite enfer à cheval (N) , laquelle était située à quinze toises et cinq pieds de celle du
nord-ouest, et avait environ quatre toises deux pieds de diamètre. Or, si l'on replace
cette tour unique au centre du corps de logis de Lescot, et si l'on restitue une aile
septentrionale telle que nous la comprenons, avec les tours du nord-ouest et du
sud-ouest, dont l'agencement et les dimensions ne laissent guère de champ à
l'erreur, on constate que la tour en fer à cheval se trouve effectivement, et avec
la précision la plus surprenante, à quinze toises cinq pieds des deux tours d'encoi-
gnure W. Est-il possible de ne voir là qu'une coïncidence fortuite? C'est ce que
personne ne se décidera à admettre. Il paraît donc démontré que la cour du vieux
Louvre avait seulement vingt-sept toises du nord au sud, et que l'aile septen-
(I) Les comptes contiennent l'article suivant: porte à l'aile occidentale, dont l'entablement, ne
frPour trente-deux toises d'entablement pour les faisant point ressaut sur les tours, devait offrir un
irmurs des salies et chambres neuves du Roy et de développement de trente et une toises quatre pieds
(rla Reyne. ■» Il est probable que ce passage se rap- à trente-deux toises.
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DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 139
trionale offrait une largeur égale à celle de l'aile méridionale, c'est-à-dire envi-
ron sept toises hors œuvre.
Résumons ce qui semble désormais acquis sur les dimensions de l'ensemble du
Louvre.
Suivant Sauvai , ce château formait un carré long de soixante et une toises trois
quarts sur cinquante-huit toises et demie. Le second de ces chiffres, Rappliquant
à la dimension du nord au sud'1), diffère beaucoup de celui que nous obtenons, et
qui est d'environ quarante et une toises sans les fossés ou de cinquante-cinq toises
et demie avec les fossés W, De l'est à l'ouest nous obtenons trente-huit toises et
demie ou cinquante-deux toises quatre pieds avec les fossés (3). Compter les fossés,
c'est sans doute le parti que Sauvai avait pris dans ses calculs. En adoptant les
dimensions qu'il énonce et en ne comprenant point les fossés, au lieu d'un total de
soixante et une toises trois quarts, on obtient une dizaine de toises en moins. Les
fossés compris, on arriverait à un excédent de quelques pieds seulement; mais la
circonstance est sans aucune importance, puisque nous sommes parfaitement sûr
que la cour n'avait point la dimension que Sauvai lui prête. Peut-être Sauvai*
dans le chiffre de soixante et une toises trois quarts, comptait-il celui qui repré-
sentait la largeur des jeux de paume de la rue d'Autriche : en comprenant cette
largeur, nous atteignons un résultat semblable , à peu de chose près W. H est une
autre hypothèse que l'on peut aussi mettre en avant, afin d'expliquer les contra-
dictions de Sauvai, c'est qu'il a pris des chiffres de développement, «de pour-
« tour, D comme on disait jadis, pour des chiffres de longueur rectiligne, et qu'il est
arrivé de cette façon à des résultats aussi exagérés qu'inconciliables W,
(1) D'après ce qu'on lit à la page 1 9 du tome II ;
mais, a la page 10, Sauvai appelle longueur ou pro-
fondeur la dimension du sud au nord.
'' Ainsi:
Largeur du fossé méridional 61 op
Largeur de l'aile méridionale 7 o
Largeur de la cour, du sud au nord .... a 7 o
Largeur de l'aile septentrionale 7 o
Largeur du fossé septentrional 7 8
Total 55 a
"' Largeur du fossé oriental 5' 8P
Largeur de l'aile orientale 7 0
Largeur de la cour, de l'est à l'ouest.. . . as o
Largeur de l'aile occidentale 9 a
Largeur du fossé occidental 8 o
Total 5a U
t4) Largeur du château avec ses fossés 5 a' lxr
Largeur, hors œuvre , des jeux de paume . 8 3
Total 61 1
(5) Nous regrettons naturellement de nous trouver
en continuelle opposition avec Sauvai; mais la con-
fiance que nous inspirent nos calculs n'en est point
ébranlée. Sauvai, on le sait, manque très-souvent
de précision. Son livre, qu'il n'a malheureusement
point eu le temps de publier lui-même, renferme,
outre d'innombrables fautes d'impression, des
contradictions et des erreurs maintes fois signa-
lées. On ne saurait donc accorder aux Antiquités
de Paris cette foi aveugle que commandent les
travaux d'une exactitude irréprochable. Nous avons
démontré mathématiquement que Sauvai faisait
la cour du Louvre considérablement plus large
qu'elle ne l'était réellement; pourquoi ne se serait-il
140
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
LES FOSSES.
Les fossés du Louvre étaient à fond de cuve , c'est-à-dire à parois presque ver-
ticales. Us étaient revêtus en maçonnerie de petit appareil du côté de la contres-
carpe, munis d'un garde-fou à hauteur d'appui, et remplis par l'eau de la rivière'1'.
a Ceux des ailes, en dedans œuvre, dit Sauvai, avoient cinquante-sept toises; les
s autres des corps de logis, soixante, et tous néanmoins quant à la largeur si
■ différente que celui qui bordoit la première entrée (celui du sud) n'avoit que
«cinq toises et demie; l'autre, qui tenoit au grand jardin (celui du nord), sept
ce toises huit pieds; celui de l'aile droite (de l'ouest), sept toises; et le fossé de la
s gauche (de l'est) , cinq toises huit pieds. •» Il ajoute plus bas , dans un passage ap-
paremment écrit avant la démolition de l'aile orientale, que les anciens fossés cons-
tituaient ce qu'il y avait de mieux conservé dans le palais et qu'ils étaient presque
aussi entiers que jamais , à l'exception de celui rc du principal corps de logis du nou-
ée veau Louvre, v qu'on avait un peu gâté. Sauvai avait eu toute occasion de vérifier
la largeur des fossés , et il semble qu'on puisse se fier à ce qu'il en rapporte. Ce-
pendant, sur le plan de Du Cerceau, le fossé méridional n'a pas cinq toises et de-
mie , mais six et demie , ce qui fut la vraie dimension après la reconstruction du
XVIe siècle. On en a la preuve dans l'élévation de la Petite-Galerie par Marot, inti-
tulée : Eslévation de l'un des corps de logis du Louvre, etc. Cette planche , qu'on n'a
point comprise parce que, gravée à l'endroit, elle donne des épreuves renversées,
montre que la contrescarpe du fossé , qui avait trois pieds de fruit ou d'inclinaison,
venait s'attacher à la galerie, à dix-neuf mètres cinq centimètres de l'axe de sa
travée centrale. En prolongeant la contrescarpe d'après cette donnée, on obtient
effectivement un fossé d'environ <"2) six toises et quatre pieds; aussi adoptons-nous
pas trompé également sur d'autres questions? Si
toutes les dimensions qu'il donne sont justes, com-
ment se fait-il qu'on ne puisse les concilier les unes
avec les autres ? Il ne cite pas non plus le texte de
ses autorités, condition nécessaire pour forcer la
conviction, et la plupart de ses assertions ne sont
que des interprétations de passages empruntés à des
comptes, genre de document dont le sens est sou-
vent fort obscur. L'ouvrage de Sauvai est très-pré-
cieux; mais il faut bien se garder d'accepter sans
examen tout ce qu'il dit, ou tout ce que l'inintelli-
gente précipitation de ses éditeurs lui a fait dire.
Après tout, ce que nous osons affirmer, c'est simple-
ment que, des données nouvelles par nous recueillies
et de celles qu'on doit a Sauvai, nous avons réussi à
dégager des approximations beaucoup plus voisines
de la vérité que n'ont pu le faire nos devanciers.
Nous mettons, au surplus, toutes les pièces du
procès sous les yeux du lecteur, qui jugera en der-
nier ressort.
(1) S'ils étaient constamment remplis d'eau, c'est
qu'une vanne empêchait qu'ils se vidassent lorsque
la rivière baissait : les fossés, en effet , ne pouvaient
avoir assez de profondeur pour se maintenir tou-
jours pleins, sans l'aide d'une écluse.
m Nous répétons constamment le mot environ ,
parce que, en comparant des plans entre eux, on y
trouve presque infailliblement des variantes, quel-
quefois même des différences énormes quand les
plans sont anciens. D'autre part, deux cotes en ap-
parence contradictoires peuvent être vraies toutes
deux, si elles ont été prises à des hauteurs diverses;
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 141
cette dimension comme très-certaine'1'. Un grand plan du commencement du
xvme siècle donne au fossé occidental huit toises au fond et neuf toises au-dessus
des talus, au niveau du sol. Divers autres plans accusent huit toises seulement à
cette hauteur. Peut-être y a-t-il eu un élargissement qui aura motivé l'expression
de Sauvai. Dans tous les cas, la largeur de huit toises est confirmée par le fait que
la contrescarpe, suivant le plan de Du Cerceau, affleurait le mur de la Petite-
Galerie.
Les fossés du Louvre communiquaient avec la rivière par un canal que le compte
de i364 appelle aie conduit qui va à Saine, v Aucun renseignement précis n'en
fixe la situation; mais on observe sur la vue de Cellier une sorte de ressaut ou
tour carrée à créneaux et à archères, au devant de laquelle est un petit mur d'ap-
pui polygonal en plan , qui en cache le pied. Cette tour carrée , dont l'emplacement
est évidemment le même que celui de l'extrémité de la galerie de Charles IX W,
donne immédiatement l'idée d'une construction commandant l'entrée d'un canal.
Or il est fort probable qu'il y en avait un à cet endroit; sur le plan de Verniquet, par
exemple, on observe que la berge de la rivière présente là même une échancrure,
comme sur les autres points où des égouts viennent se décharger dans la Seine;
en outre, M. Duban, lorsqu'il a repris en sous-œuvre les fondations de la Petite-
Galerie, a reconnu là des substructions anciennement lavées par les eaux. C'est
pourquoi, sans décider par quel motif le fossé occidental, au lieu de se prolonger
en ligne droite jusqu'à la rivière, se brisait deux fois avant de l'atteindre, nous
n'hésitons pas à voir dans la galerie de Charles IX un édifice exactement bâti sur
l'emplacement du canal par lequel étaient alimentés les fossés du château W, Nous en
trouvons une nouvelle preuve dans le fait suivant, pleinement confirmatif de ce que
nous avons dit précédemment sur les dimensions du quadrangle : restitué de cette
façon, le fossé méridional présente, d'une extrémité à l'autre, à quelques pieds
près, ces soixante toises de longueur que lui prête Sauvai , et qu'il est absolument im-
enfin. dans le domaine des restitutions monumen-
tales, on ne saurait obtenir la même précision que
celle à laquelle on arrive en opérant sur des cons-
tructions existantes.
(l) Lors de la reconstruction qui eut lieu au
xvi* siècle, le mur extérieur de l'aile méridionale
fut réduit ù cinq pieds d'épaisseur (au rez-de-chaus-
sée), tandis qu'il en avait huit ou neuf auparavant.
Or, comme ce fut le parement extérieur et non le
parement intérieur de la muraille qu'on recula, le
fossé se trouva sans doute élargi de trois ou quatre
pieds. Le chiffre donné par Sauvai peut d'ailleurs
être exact si l'on a mesuré au fond du fossé.
m Elle avançait peut-être un peu davantage vers
la rivière, car elle paraît former une saillie très-
sensible sur le mur de la courtine, dont la position
nous est bien connue. Au surplus, l'identité de si-
tuation entre l'avant-corps crénelé et la galerie de
Charles IX est bien facile à reconnaître; car sur
le dessin de Cellier on voit, immédiatement après
l'avant-corps, vers l'ouest, une construction qui
correspond à celle au-dessus de laquelle se trouve
actuellement le Grand-Salon, et, tout auprès, le gui-
chet de la rue Fromenteau, dont l'origine est assez
ancienne.
(3> M. de Clarac l'avait compris, mais il n'a tiré
aucun parti de son observation , dans sa Description
du Louvre.
1/i2 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
possible de retrouver en acceptant comme exactes ses affirmations sur la longueur
des ailes du Louvre. S'il était vrai que le château formât un parallélogramme de
soixante et une toises trois quarts de l'est à l'ouest, comment les fossés du nord
et du midi pourraient-ils avoir été moins longs que les bâtiments le long desquels
ils s'étendaient, au lieu de les excéder de plusieurs toises sur chaque côté? On
n'écarte pas la difficulté en imaginant que, dans le chiffre de soixante toises attribué
aux fossés du nord et du sud, ne se trouve pas comprise la largeur des fossés de
l'est et de l'ouest; car, si l'on compte ainsi, il faudra ajouter aux fossés de l'est et
de l'ouest la largeur de ceux du nord et du sud, et alors la longueur des premiers
devra être d'environ soixante et douze toises et non de cinquante-sept, ce qui ne
fait qu'augmenter la confusion.
Notre restitution concorde d'une manière complètement satisfaisante avec la
longueur du fossé méridional indiquée par Sauvai W ; les cinquante-sept toises qu'il
indique pour la longueur des fossés perpendiculaires à la Seine n'excèdent celle
que nous trouvons que d'une toise quatre pieds, différence assez insignifiante. La
non-conformité des chiffres s'explique encore d'une manière, sinon incontestable, du
moins extrêmement plausible : les contrescarpes des fossés du Louvre ne s'assem-
blaient point partout à angle droit. Sur une gravure de Sylvestre intitulée : Veue du
Louvre par dedans le bâtiment neuf, les fossés paraissent arrondis à leur encoignure;
or, si la courbe qu'ils décrivaient était disposée comme elle l'est sur le plan de
Saint-Denis de la Chartre, de façon à présenter une saillie sur l'alignement des
contrescarpes, ainsi que cela avait lieu souvent, il devait en résulter un excédent de
longueur, lequel nous fournit les quelques pieds qui nous manquent. (Voir le plan
restitué.)
La première mention que nous ayons rencontrée des fossés du Louvre ne re-
monte pas au delà du règne de Charles V, et il est assez douteux qu'ils existassent
déjà du temps de Philippe-Auguste. Dans les comptes de la Ville pour l'année 162/1-
1625, il est question de a deux chantiers... devant le chaste! du Louvre, i> jadis
loués à un particulier et dont on ne tirait plus aucun produit «pour ce que, est-il
redit, les fossez dudit Louvre y furent faits ou temps de piéçà(2). -n II n'est pas pro-
bable que cette expropriation eût été rappelée en 162 5, si elle avait été faite deux
siècles auparavant.
LES TOURS.'
S'il y avait au Louvre cette quantité de tours probablement exagérée dont parle
Sauvai, c'est surtout dans les basses-cours qu'elles devaient s'élever; les tours qui
(l) Sauvai ne fait aucune distinction, quant à la ne peut être juste, comme on l'a vu, que pour les
longueur, entre le fossé du nord et le fossé du midi ; fossés de l'est et de l'ouest,
il a probablement conclu de l'un h l'autre, ce qui (!) Arch. de l'Emp. reg. KK àoa.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. H3
faisaient partie du corps même du château n'étaient point nombreuses, puisqu'elles
se bornaient à celles qui défendaient les portes et flanquaient les quatre encoignures.
Parmi les tours d'angle, celle du sud-est nous est connue par plusieurs vues qui sont
loin de la présenter sous le môme aspect, mais qui en donnent du moins une idée
assez juste, si l'observateur, familier avec les anciennes images, sait les interpréter
l'une par l'autre. On reconnaît ainsi que la tour dont nous parlons était cylin-
drique, qu'elle portait sur un empâtement en talus, dont la hauteur équivalait à
la profondeur du fossé, et qu'elle se divisait, à partir du niveau du sol, en trois
étages séparés par des larmiers, et éclairés par des fenêtres étroites, sans régu-
larité. Au-dessus de ces trois étages régnait une corniche très-saillante, garnie
de créneaux et de mâchicoulis; plus haut, et fortement en retraite, s'élevaient
deux autres étages, aussi séparés par un cordon. Le toit était conique, couvert
d'ardoises, percé de lucarnes, de souches de cheminée, et couronné par une
girouette très-élancée (1).
La hauteur de la tour du sud-est n'est point indiquée; mais on remarque sur
le dessin de Cellier, confirmé parle tableau de Zeeinan et les gravures de Sylvestre;
que la corniche à créneaux, très-mutilée au xvne siècle, se raccordait à peu près
avec l'appui des fenêtres de l'attique des bâtiments neufs, tels qu'ils étaient avant
les travaux de Perrault, ce qui donne pour cette corniche une élévation d'en-
viron vingt mètres à partir du sol actuel.
Suivant toute apparence , les quatre tours d'angle étaient semblables , de sorte que
l'on peut conclure des dispositions de l'une à celles de l'autre. Les vues de la tour
du sud-est nous ayant appris ce que pouvaient être les tours d'encoignure quant à
leur hauteur, deux documents écrits nous renseigneront sur leur largeur probable ('->.
En 1 365, la tour du nord-ouest dite « devers la Fauconnerie a avait «de pour-
trtour. .. par le milieu» onze toises. Si l'on entend par le mot pourtour la circonfé-
rence entière du cxlindre que formait la tour, on n'obtient qu'un diamètre de vingl
et un pieds, évidemment trop petit, puisqu'il serait à peine égal à celui des tours
de l'enceinte de Paris; mais si l'on considère que la tour de la Fauconnerie était
au moins d'un quart engagée dans les ailes adjacçntes, et que, par conséquent,
il n'y avait que les trois quarts de sa surface extérieure qui fussent en parement et,
par suite, mesurables, on admettra que, par pourtour, il ne faut pas comprendre la
circonférence entière, mais seulement la partie faisant saillie au delà des courtines
(ce dont nous fournirons une preuve péremptoire en parlant de la tour dite «du
«Milieu, devers les jardins ri). Raisonnant d'après cette donnée, nous concluons que
la tour de la Fauconnerie, ayant onze toises ou soixante-six pieds de développement
(l> Les girouettes du Louvre étaient peintes et <rRoy, pour avoir peint de fleurs de lys les (rois
dorées. On lit dans les comptes de i3G5 h 1367 : rrbannières qui sont sur les trois tours. 71
t Maistre Jehan Coste, peintre et sergent d'armes du (,) Nous citons les textes plus loin.
U4 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
extérieur et quatre-vingt-huit de développement complet, présentait un diamètre
de vingt-huit pieds, positivement le même que celui de deux des tours du Palais
de Justice, sur le quai de l'Horloge M, avec lesquelles il est tout naturel de croire
que les tours du Louvre offraient la plus grande analogie.
Le second document corrobore le premier. En i36A, on fit pour la même tour
de la Fauconnerie quarante et une marches de pierre de liais, de deux pieds et
demi de large et de six pieds et demi de long. Dans les escaliers hélicoïdes du moyen
âge, le noyau fait toujours partie de la marche, et, pour une marche de six pieds
et demi, le noyau devait être d'environ un pied. Cela suppose que la cage de l'es-
calier contenu dans la tour avait quatorze pieds de diamètre intérieur. Quelle pou-
vait être l'épaisseur des murs? Les tours de la Bastille, qui offraient cinq toises de
diamètre extérieur, avaient des murs épais de sept pieds; en adoptant ce chiffre
pour l'épaisseur des murs de la tour de la Fauconnerie, nous revenons au dia-
mètre de vingt-huit pieds précédemment obtenu.
Vers le centre de l'aile septentrionale , il existait une tour appelée « la tour du
«Milieu, devers les jardins, n parce qu'elle était placée entre les deux tours d'en-
coignure et regardait le grand jardin. Les plans de Quesnel et de Mérian, les seuls
où elle soit représentée , la montrent moins grosse et moins élevée que ses voisines.
Elle avait de pourtour six toises cinq pieds et demi W. On a ici la preuve que nous
interprétons le mot pourtour dans le sens où il doit être compris. Effectivement,
six toises cinq pieds et demi impliquent, soit treize pieds, soit vingt-six pieds de
diamètre, selon qu'on mesure la tour entière ou seulement la moitié en saillie.
Cette seconde dimension rend la tour du Milieu un peu moins différente des tours
des angles que les plans ne l'indiquent; mais le premier chiffre est évidemment
inadmissible , car les murailles des tours ne devaient pas avoir moins de six pieds
d'épaisseur; d'où il résulte que, si la tour et devers les jardins v n'avait eu que treize
pieds de diamètre extérieur, elle n'en eût eu qu'un de diamètre intérieur, hypo-
thèse déraisonnable. Il eût été, en outre, impossible d'y pratiquer un escalier ou
une poterne; or elle contenait apparemment l'un ou l'autre. Sauvai dit qu'il y
avait une porte à chacune des ailes du Louvre , et celle du nord était sans doute
percée dans la tour du Milieu.
La tour « devers les jardins » était à dix-huit toises cinq pieds de la tour du coin
nord-ouest, dite de la Fauconnerie®. H s'ensuit qu'elle était beaucoup plus rap-
prochée de la tour du coin nord-est, détail qui, fortuitement ou à dessein, est très-
(I) C'est aussi <r par le milieu n que nous pouvons rr a de pourtour six toises v pieds et demy . » ( Compte
mesurer ces tours, dont la partie inférieure a dis- de i 365.)
paru dans le terre-plein du quai. Les tours du Pa- <3> «Item, le pan de mur devers le jardin, entre
lais donnent une ide'e de ce que devaient être les rcicellelour(delaFauconnerie)et la tour du milieu,
tours du Louvre. ira de long dix^huit toises trois pieds. *
(!> « Item, ladite tour du milieu devers les jardins
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 145
fidèlement reproduit sur le plan de Quesnel. H s'ensuit encore qu'elle ne corres-
pondait pas au centre de la cour, ce qui étonne un peu d'abord, mais ce qui cesse
de surprendre quand on examine le tableau de Saint-Germain-des-Prés , où la
porte méridionale du château est figurée environ un tiers plus loin de la tour sud-
ouest que de la tour sud-est : on sait que le manque de symétrie n'a rien d'a-
normal dans les châteaux du moyen âge.
La tour de l'angle nord-est est manifestement celle qu'on appelait « de la Tail-
« lerie; i> celle de l'angle nord-ouest est non moins évidemment celle qu'on nommait
«tour de la Fauconnerie, -n ou plutôt «devers la Fauconnerie , n à cause de l'office
dont elle était proche : le texte que nous citons en renvoi '1J donne toute certitude
à cet égard. La tour de la Taillerie et une partie de l'aile septentrionale du vieux
château sont représentées sur la gravure de Sylvestre, déjà citée, et intitulée: Veue
du Louvre par dedans le bâtiment neuf.
Par cela même que nous connaissons l'identité de la tour dite devers la Faucon-
nerie avec celle du nord-ouest, nous pouvons déterminer enfin quelle était réelle-
ment la fameuse tour de la Librairie: les deux n'en faisaient qu'une, car, dans les
comptes de 1367-1 368, il est expressément dit que «la librairie du Roin était « or-
« donné t> dans cette même « tour devers la Fauconnerie^, n On ne saurait croire qu'il
y avait simultanément deux tours dites «devers la Fauconnerie; n mais il faut ad-
mettre que cette désignation a été la plus anciennement employée pour distinguer
la tour de l'angle nord-ouest, et qu'elle a été remplacée par celle de «tour de la
« Librairie, a lorsque Charles V y eut fait établir sa bibliothèque, d'abord installée
dans le palais delà Cité. Du logis qu'elle occupait dans ce dernier édifice, et par mar-
ché passé, le id mars 1367, avec Jacques Du Parvis et Jean Grosbois, huchiers,
le Roi fit transporter au Louvre , après qu'ils eurent été démontés , des bancs , des pu-
pitres et deux roues que l'on rétrécit d'un pied chacune. Le premier des deux étages (3)
supérieurs de la tour du nord-ouest, où furent déposés les livres, reçut, «tout au-
« tour par dedans , •» un lambris de bois d'Irlande , du prix de cinquante francs d'or W.
Puis, les anciens sièges ayant été trouvés mauvais, on en refit «de mérien neuf, n
ainsi que deux portes de sept pieds de hauteur sur trois de largeur et trois doigts
d'épaisseur, destinées à chacun des étages. Cette seconde dépense monta à 1 6 francs.
(1! irPour avoir abatu les créneaux depuis la
fftour de la Taillerie, tout au long du côté des jar-
ffdins jusqu'à la tour devers la Fauconnerie, et en
t retournant de l'autre costé de la salle Saint-
<r Louis, etc.«
(,) «Et tout rassemblé et pendu les lellrins (pu-
n pitres provenant de la bibliothèque du Palais) es
rdeux derrains estages de la tour devers la Faucon-
«nerie.r, — «Es deux derrains estages devers la
"Fauconnerie où est ordonné la Librairie du
tr Roi. *
(3) En 1373, trois des étages étaient occupés.
(i) Le bois d'Irlande employé en cette circons-
tance, et qu'on croit être du chêne de Hollande,
avait été donné au Roi par le sénéchal de Hainaut,
à l'occasion des travaux du Louvre; il y en avait
quatre cent quatre-vingls pièces. (Voiries comptes
n" 106, 108, 117.)
•9
146 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
On garnit aussi les fenêtres de châssis de fer treillages, pour empêcher le passage
des oiseaux. Sauvai ajoute que la voûte était revêtue de bois de cyprès, chargé
de sculptures ; mais il s'est trompé en assurant qu'il s'y trouvait trente chandeliers
et une lampe d'argent, car l'article des comptes où figure ce détail se rapporte à
la <r volte de la Grosse-Tour, n et non point à la tour de la Librairie.
La tour de la Fauconnerie ou de la Librairie était à quinze toises cinq pieds de
la tour la plus rapprochée, sur la face occidentale du château*1'. Celle-ci était dé-
signée par l'appellation de la ■ tour qui fait fer à cheval devers l'Artillerie, a parce
qu'elle offrait en plan la moitié d'un cercle ou un peu plus. Pour la même raison , on
donnait aussi le nom de « tour en fer à cheval r> à celle du milieu , sur les jardins.
La tour en fer à cheval, du côté occidental, renfermait peut-être une poterne (2),
comme celle du côté septentrional, et était également seule pour garnir la courtine.
Nous serions certain du fait par les plans de la Tapisserie et de Du Cerceau, alors
même que nous n'aurions pas constaté, par la précision avec laquelle elle vient se
placer dans l'axe de la cour de Lescot, à égale distance des tours d'angle, qu'elle
ne peut avoir été accouplée à une autre ®. Ainsi au nord et à l'ouest, c'est-à-dire
vers la campagne, où les attaques étaient le plus à redouter, le château n'avait
que des issues sans importance, faciles à fermer et à défendre. H en était autre-
ment sur les deux autres faces, bien moins accessibles à l'ennemi , protégées qu'elles
étaient, l'une par la rivière, l'autre par le voisinage de la Ville.
La tour du sud-ouest, dont le nom nous est inconnu, est représentée sur le
tableau de Saint-Germain-des-Prés comme ayant son parapet crénelé un peu plus
élevé que celui de la tour du sud-est. Le corps de logis qui la réunissait à la grande
porte avait aussi un étage de plus que la portion de l'aile située après. Il n'y avait
point de différence dans le niveau des faîtages; mais, dans le second corps de logis,
le toit plus aigu, par suite de la moindre hauteur de l'égout, était percé de lu-
carnes et de souches de cheminées comme on n'en voyait point de l'autre côté.
L'exhaussement du mur de la partie occidentale de l'aile faisant face à la Seine,
ainsi que celui des courtines de l'ouest et du nord, datait apparemment du règne de
Charles V : la mention de cette et neufve maçonnerie , i> haute de deux toises et demie
(I) « Pour avoir abatu les créneaux depuis la tour
«devers la Taillerie (à l'angle nord-esl), toutaulong
«du costé des jardins jusqu'à la tour devers la Fau-
«connerie, et en retournant de l'autre costé de la salle
« Saint-Louis (située dans l'aile occidentale), dont
«on a osté une assise pour l'encorbellement qui
« court tout au long des murs et tours : première-
rrment, le pan de mur entre la tour qui fait fer de
«cheval devers l'Artillerie et la tour devers la Fau-
« connerie a de long quinze toises et demy et deux
« pieds. . . Item, ladite tour devers la Fauconnerie a
rrde pourtour xi toises par le milieu, etc. d
;!) D'après un plan gravé sur bois au xvi" siècle ,
la poterne aurait été placée entre cette tour et celle
de la Fauconnerie. L'incertitude de la situation
exacte des poternes et le désir d'éviter la confusion
nous a empêché de les indiquer sur le plan restitué.
(3) Sauvai a dit lui-même, d'après un compte du
domaine : "Il y avoit au Louvre trois tours du côté
trde la rueFroid-Mantel.» (T. III, p. 4 4 9.)
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 147
«jusqu'à l'enchappement,fl s'applique très-bien au remaniement. Toutefois il faut
remarquer que, sur le retable du palais, c'est la partie orientale de l'aile du sud
qui semble la plus élevée, et non la partie occidentale ; mais peut-être n'y a-t-il là
qu'une faute de perspective.
L'entrée principale du château n'était pas placée, nous le répétons, au centre
même de l'aile méridionale , mais elle se rapprochait très-sensiblement de la tour
du sud-est. Elle était formée de deux tourelles crénelées , entre lesquelles était percée
la baie ogivale par laquelle on pénétrait dans la cour'1). Suivant Sauvai, «le por-
rr tail t> était surmonté d'une terrasse de neuf toises sur huit. La première de ces
dimensions se rapporte parfaitement à la largeur probable de l'ensemble ; mais
pour admettre la seconde , l'aile méridionale ayant tout au plus sept toises de pro-
fondeur, il faut supposer que la partie de la terrasse comprise entre les deux tours
était en saillie par rapport au nu des murs de la courtine. Elle s'avançait effective-
ment sur un encorbellement formé par la continuation de celui du parapet des
tourelles'2'; on le voit bien sur le tableau de Saint-Germain-des-Prés. Dès le milieu
du xve siècle, sur la terrasse s'élevait un étage coiffé d'un toit en pavillon, dont
les deux épis étaient reliés par une crête à jour'3'. La grande porte du Louvre
était ornée de statues placées dans des niches et représentant les rois Charles VI et
Charles VII; elles avaient été exécutées, sur les ordres de ce dernier souverain,
par les sculpteurs Philippe de Foncières et Guillaume Jasse.
Nous ignorons aussi le nom de la tour du sud-est. H y a beaucoup de présomp-
tions pour qu'elle ne soit autre que la tour dite de la Gi'ande-Chapelle, car cette
chapelle était dans l'aile qui faisait face au manoir de Bourbon.
Le portail oriental, détruit le dernier, existait encore vers 1660, et avait, dit
Sauvai, une entrée fort étroite W. Il était flanqué de deux tours rondes, décoré des
statues de Charles V et de Jeanne de Bourbon, et offrait aux regards un «chef1»
ou clef de voûte semée de fleurs de lis. On y accédait par le moyen d'un pont-levis
servant à franchir le fossé. Ce pont, représenté sur le plan manuscrit de Saint-
(1) Au-dessus d'une fenêtre a croisillon , surmon-
tant la baie, on voit sur le tableau de Saint-Ger-
main-des-Prés une forme circulaire, qui peut être
le cadran d'une horloge; la peinture, détériorée en
cet endroit, ne permet pas de le décider. Dès le
temps de Charles V, il y avait réellement une hor-
loge dans le château (voir p. 198, l'article des
comptes n° ia4). Une entrée du Louvre, qui paraît
être celle du sud, est représentée sur un jeton con-
temporain de François I", avec ces mots placés au-
dessous: LE LOVVRE, et cette légende autour : In
hoc œrarium Fraticiœ.
(,) En supposant cet encorbellement répété sur la
cour, on obtient, à très-peu de chose près, le chiffre
donné par Sauvai.
m Sauvai dit que les bâtiments du Louvre étaient
surmontés de terrasses sous Charles V, et que
François I" remplaçâtes terrasses par des combles;
le retable du Palais de Justice prouve que cette
substitution était déjà effectuée vers i45o.
(,) C'était la principale porte auxvu" siècle, et le
passage en était réellement peu large. En parlant
du meurtre du maréchal d'Ancre, Fontenay-Mareuil
dit dans ses Mémoires: rrOn avisa que i'arrest ne
<rse pourrait mieux faire qu'entre la grande porte
trde devant le Louvre et la cour, où le passage est
>9-
148 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Germain-l'Auxerrois comme dormant et à deux arches, devait être de système
mixte. Il était précédé d'un bâtiment carré, sorte de barbacane ou tête de pont, en
bordure sur la rue d'Autriche , et dont la profondeur égalait celle de l'espace compris
entre la rue et le fossé. Devant les trois autres portes du château il y avait pareille-
ment des ponts; mais ceux du nord et de l'ouest, peu importants, n'étaient guère
que des passerelles à bascule.
Indépendamment des tours que nous venons de décrire et des tours de Bois et
Jean de l'Estang, dont il sera parlé ultérieurement, Sauvai cite les suivantes, dont
il avait recueilli les noms dans les registres des œuvres royaux : la tour où se met-
tait le Roi quand on joutait; la tour de la grande chambre delà Tournelle, où était
la Chambre du Conseil; les tours de la Petite-Chapelle, de l'Horloge, de l'Armoirie
et d'Orgueil. Nous n'avons point de renseignements sur ces diverses tours, dont
plusieurs se confondent certainement avec celles dont il vient d'être question. Sau-
vai nomme aussi la tour du Windal (Vindas) et celle de l'Écluse (1) : la première était
située sur le bord de la rivière et accolée à la porte de l'une des basses-cours ; la
seconde servait à retenir l'eau des fossés. Les noms de ces deux tours éveillent une
même idée, et peut-être ne formaient-elles qu'une seule construction sous deux
désignations diverses. Dans tous les cas, nous y verrions très-volontiers cette cons-
truction crénelée que nous avons signalée , d'après la vue de Cellier, comme occupant
l'emplacement de l'extrémité de la Petite-Galerie. Quant aux tours énoncées a la
(f tour du coin devers Saint-Thomas, n et a la tour du coin de la Basse-Cour par
et devers Saint-Thomas, n elles s'identifient sans doute avec la tour de l'angle sud-
ouest. Dans les comptes de l'argenterie pour l'année 1 3 5a, il est fait mention d'une
tour de rc Bische-Mouche , v où l'on mettait les joyaux du Roi'2), et dont rien ne fixe
la place. Le nom de cette tour, si étrange au premier abord, provenait de ce
qu'elle avait été mise à la disposition de deux financiers italiens , Biccio et Muschiato ,
appelés en français Biche et Mouche, qui furent employés par Philippe le Bel'3).
Sauvai assure que les tours dépendant du château sans en faire partie avaient
toutes été construites à la hâte et après coup. La plupart étaient confiées à la garde
d'un capitaine ou concierge plus ou moins qualifié. Le 20 septembre 1A11, le
ff long et assez étroit quand on a nasse le pont-levis. 1
Le contraste entre cette porte et les nouveaux bâ-
timents du Louvre était fort choquant. Dans la
Journal d'un voyage à Paris en i65j-i658 , on
lit, a la date du a3 décembre 1657 : «En peu de
ir temps on n'entrera plus par cette vilaine porte,
<tqui (il dire un gros mot à un ambassadeur, lors-
irquestant entré dans la cour, et ayant admiré la
rf belle façade du grand corps de logis, il se tourna,
set voyant la déformité qui luy estoit opposée, il
rrs'en mocqua et dit: cr Zeste d'une telle entrée! elle
rrseroit meilleure pour une prison que pour la mai-
ffson d'un si grand prince.»
(I) Et non de rigfe, comme on l'a imprimé à tort.
(,) Gonf. les Comptes de l'argenterie, publiés par
M. Douët d'Arcq, p. 188. — La tour de Biche-
Moucbe ne serait-elle pas la même que la Grosse-
Tour, où Gbarles V Taisait garder aussi ses joyaux?
(,) E. Boutaric, La France sous Phillippe le Bel,
p. 297 et 3og.
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DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 149
comte de Nevers fut nommé concierge de celle du Windal , et pendant le mal-
heureux règne de Charles VI, les capitaines des tours de Bois et de l'Ecluse furent
plusieurs fois destitués. Les tours secondaires du Louvre eurent aussi leurs prison-
niers : en i3gi, celle de l'Ecluse servit de lieu de détention à Hugues de Saluées,
qu'on ne jugea sans doute point digne d'une incarcération dans la Grosse-Tour.
Il n'y a presque aucun document graphique sur la face orientale du Louvre , la
moins facilement visible des quatre W. Tout ce qu'on en aperçoit sur les gravures,
c'est la partie supérieure, qui se dessine au-dessus de l'hôtel du Petit-Bourbon;
elle répond peu à l'idée qu'on est disposé à s'en faire, car elle présente l'appa-
rence, non d'une aile de château fort, mais hien d'un groupe de maisons sans ca-
ractère, dont la plus élevée était au centre. Quelque bizarre que cela semble, il
est manifeste que tel était l'aspect de l'aile orientale du Louvre lorsqu'elle fut
abattue : la planche de Boisseau le prouve. H est à croire que les bâtiments en
furent bouleversés à la fin du xvic siècle, quand il fallut les entamer pour le pro-
longement des constructions nouvelles. Le retable du Palais de Justice offre une
vue fuyante, mais exacte, de la face orientale du Louvre à l'état ancien (voir la
planche ci-contre). On y observe que la tour de la Taillerie était semblable à
celle du sud-est, et qu'un grand comble se dressait au-dessus et en retraite du
portail, comme du côté de la Seine. La précieuse peinture montre en outre qu'il
y avait, attenant à la tour du sud-est, une sorte d'avant-corps dont on ne saurait
préciser les dimensions et dont l'agencement avec les parties voisines est même
assez problématique , puisqu'on peut le comprendre de deux façons différentes.
Cet avant-corps, adjonction évidente au plan primitif du château, était couronné
de créneaux; il ne s'aperçoit plus ou se distingue mal sur les vues du xvuc siècle,
et personne n'en a encore signalé l'existence.
LE GRAND ESCALIER.
Le grand escalier du Louvre, élevé en 1 365 , était une des parties les plus re-
marquables du château. Fondé sur huit quartiers de pierre qui provenaient des
carrières de Notre-Dame-des-Champs, et qui avaient chacun quatre pieds de long
sur deux pieds et demi de large, il était de système hélicoïde, comme presque tous
les escaliers de cette époque, qu'on appelait pour cela des vis ; il avait pour cage
une tour ronde'2) appliquée à la face méridionale de l'aile du nord, et enrichie de
(1) M. de Clarac parle (p. 353) d'un tableau qui temenls du Roi trpar une grande vis ronde, que
aurait représenté le portail de ce côté, et apparie- « Charles V avoit fait faire en i365, à trois toises
nait h un M. Bourdillon; mais personne n'a pu rrde la salle de la Reine, dans le corps opposé à celui
nous apprendre ce qu'était devenu ce tableau. «qu'ils occupoient* (et qui était au midi). Un esca-
(,) Sauvai désigne évidemment le grand escalier lier polygonal en plan, surtout a l'extérieur, eût été
dans ce passage où il dit qu'on montait aux appar- bien plus dans les habitudes de l'époque.
150 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
diverses sculptures ainsi que de dix statues placées dans des niches et abritées sous
des dais. De ces statues, deux exécutées par Jean de Saint-Romain, et n'ayant que
trois pieds de hauteur, représentaient des sergents d'armes; elles étaient placées de
chaque côté de la porte des appartements royaux ; les autres, disposées à l'intérieur
de la construction , sans ordre ni symétrie , étaient celles du Roi et de la Reine , ou-
vrage de Jean de Liège; puis celles du duc d'Orléans et du duc d'Anjou, par Jean
de Launay et Jean de Saint-Romain; enfin celles des ducs de Rerry et de Rour-
gogne, par Jacques de Chartres et Guy deDampmartin. Chacune de ces figures avait
été payée 20 francs d'or ou 16 livres parisis. Au haut de l'escalier se voyaient les
images de la Vierge et de Saint-Jean, dues aussi au ciseau de Jean de Saint-Romain,
lequel était encore l'auteur de deux tr reprinses n ou culs-de-lampes qui portaient le
pignon du dernier étage de la tour'1). A l'une des fenêtres il y avait un fronton
lambrequiné des armes de France, aux fleurs de lis sans nombre, ayant pour sup-
ports deux anges , et pour cimier un heaume couronné , pareillement soutenu par
deux anges. Aidé de Guy de Dampmartin, Jean de Saint-Romain avait de plus,
au prix de 4o francs d'or, décoré le sommet de la voûte de l'escalier de douze
branches cr d'orgues » (d'ogives) ou nervures, des armes royales sculptées en bas-
relief sur la clef, et de celles des princes du sang sur les ce panneaux, a c'est-à-dire,
nous le supposons, sur les reins ou lunettes comprises entre les nervures.
La grande vis du Louvre était munie à chaque étage d'un banc ou « reposoir t>
de six pieds et demi de long sur deux de large, de façon que le Roi pût se reposer
en montant. Elle se composait d'une première suite de quatre-vingt-trois marches,
mesurant chacune sept pieds de longueur, six pouces d'épaisseur et deux pieds et
demi de giron près des parois de la cage , qui devait donc avoir environ quinze pieds
de diamètre intérieur. Au-dessus de ces quatre-vingt-trois marches, commençait une
seconde cage de même forme que la première , mais plus étroite'2), car ses quarante
(1) tr Jean de Saint-Romain pour avoir taillé deux
et reprinses, l'une un beuf, et l'autre un esgle, cha-
ffeun tenant un rouleau, en manière des évangé-
<t listes; lesquels servent, sur le chanteauoù sont les
rr armes du Roy, pour porter le pignon du dernier
rr étage de ladite viz. » (Comptes de i36/i.) — Un
autre compte contient aussi , ayant quelque rapport
avec le grand escalier, l'article suivant, qui nous
révèle une singulière coutume: tr Thomas du Buis-
trson, peintre, pour avoir faict plusieurs croix de
rr peinture vermeille outre la grande viz neuve du
tr Louvre, l'uisserie des jardins et autres lieux en la
rrcour d'iceluy, pour la défense de ceux qui y fai-
rr soient leur retraict pour pisser; par marché faict,
rt xxvi s. p. » — Il paraît que Jean de Saint-Romain
réunissait les talents du sculpteur et du peintre. Une
pièce des archives de Joursanvault (n° 817) établit
qu'en i364 cet artiste, qualifié dVymagier, «reçut
deux escus d'or pour tr la peincture des chandeliers
rtde fust qui furent mis à Saint-ilnthoine , entour le
tr corps du Roy. n
m Un agencement semblable s'observe dans la
tour de l'hôtel de Bourgogne, dont la hauteur est la
même , et qui est presque contemporaine , car elle ne
fut bâtie que quarante-deux ans plus tard, au mois
de mars 1607 (v. s.), d'après Monstrelet. Ce monu-
ment, qu'on voit encore dans une maison de la rue
du Petit-Lion-Saint-Sauveur, a été relevé géométra-
lement et gravé pour la Statistique monumentale de
Paris, publiée par M. Albert Lenoir.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 151
et une marches n'avaient que trois pieds de long et un pied et demi de giron dans
leur partie la plus large. Ce second escalier conduisait à la plate-forme qui termi-
nait la tour, et s'élevait à dix toises six pouces du sol , hauteur en concordance avec
le nombre de marches indiqué. Le tout était en solide maçonnerie de pierre de
taille, et pour faire les paliers on avait employé dix dalles tumulaires'1' provenant
du cimetière des Innocents. Vendues le 2 5 septembre 1 365 , à raison de ik sous
parisis la pièce, par Thibaut de la Nasse, marguillier de l'église, ces dalles furent
mises en œuvre par les nommés Pierre Anguerrand et Jean Goulombel. La largeur
des marches du grand escalier prouve que la tour où il était contenu différait peu
des autres quant à son diamètre intérieur; mais vraisemblablement les murs en
étaient moins épais ; elle ne figure, du reste, sur aucun des anciens plans; toute-
fois il est évident qu'elle se trouvait dans l'axe de la Grosse-Tour.
Le grand escalier, détruit sous Louis XIII , lorsque Lermercier commença les tra-
vaux d'agrandissement du château , avait été élevé par Raymond du Temple, archi-
tecte ordinaire de Charles V. Une notice très-intéressante de M. Jules Quicherat
nous apprend que Raymond du Temple fut aussi maître des œuvres de maçonnerie
de Charles VI, et qu'il faisait partie de la troupe des sergents d'armes, sorte de garde
instituée par Philippe-Auguste pour la défense de la personne du Roi. Ce rensei-
gnement explique la présence des statues dont nous venons de parler et qui or-
naient la porte des appartements royaux. Raymond avait un fils nommé Chariot;
Charles V en fut le parrain, et, en cette qualité, lui fit don, l'an 1876, de
200 francs d'or, afin qu'il put s'acheter des livres, pendant qu'il étudiait à Orléans (2>.
L'achitecte du principal escalier du Louvre était aussi employé par les princes;
il travailla à la grande chapelle de l'église des Célestins et à l'hôtel de Rohême ,
pour le compte du duc d'Orléans. On possède les deux quittances d'une somme
de 200 francs qu'il reçut de ce prince, à titre de gratification. A l'une de ces quit-
tances pend encore un sceau où est figurée une tête barbue tournée à gauche,
avec ces mots pour légende : Seel Ramont du Temple.
H existe aux archives de l'Empire deux procès-verbaux de visite de terrains
vagues, dressés par Raymond du Temple, l'un le 26 avril, et l'autre le i3 dé-
(1) Et non vingt, comme le dit Sauvai. (Voir les !,) Bibliothèque de l'Ecole des Charles, 2' série,
comptes ci-après, n° a5.) t. III, p. 55.
152 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
cembre 1372W. Nous avons vu aussi, dans un acte de 1Û01, qu'il portait le titre
de maître maçon juré de l'église de Paris , et qu'il avait un parent nommé a Jehan
ff du Temple le Jeune , v avec lequel il assista alors à certains travaux du voyer
de l'Évêché'2'. H servit le Chapitre de Notre-Dame plus de trente ans, car il fut
chargé, par suite d'une résolution capitulaire du 2 septembre 1870, de visiter
la maison de Coquatrix qui menaçait ruine. En 1887, il avait fait exécuter cer-
tains travaux aux « aisances i> de la cour du Parlement (Boutaric, Recherches ar-
chéologiques sur le Palais de justice, p. h 5 . ) H vivaitencore au mois de décembre 1 h 0 3 (3l
INTÉRIEUR DES BÂTIMENTS.
Parmi toutes les questions topographiques relatives à l'ancien Louvre , il n'en est
point, on le conçoit, de si obscure que celle de la distribution intérieure. Là il y a
impossibilité de rien restituer avec quelque certitude; tout est plus ou moins dou-
teux et confus^. Ce qu'on peut dire seulement, c'est que les appartements royaux
étaient dans l'aile méridionale, la grande chapelle dans l'aile orientale, et la salle
Saint-Louis dans l'aile occidentale , avec une autre grande salle et deux petites cha-
pelles. On peut encore penser qu'une des salles dites de la Reine était dans l'aile
septentrionale , puisqu'elle n'était séparée du grand escalier que par une distance
de trois toises. Quant au reste, nous ne saurions mieux faire que de trans-
crire la description de Sauvai, malgré les inexactides qu'elle doit renfermer.
Sauvai s'exprime ainsi : «Les principaux appartements de nos rois et de nos
(1) Arch. de l'Emp. reg. J i5i, n° 78.
m Arch. del'Hôtel-Dieu, layette 9.
<3> Félibien, t. III, p. a45.
(1> M. de Clarac, pour sa Description du Louvre,
a néanmoins composé , de concert avec le dessinateur
Civeton,unplan qui passe pour représenter l'édifice
dans son état ancien, et particulièrement pour en
reproduire la configuration intérieure. Ce plan,
accepté par le public, auquel il eût été assez dif-
ficile d'en constater les nombreuses erreurs, a con-
servé une certaine réputation , cpii empêche de le
passer sous silence. Étranger, comme presque tous
les antiquaires de son époque, à l'archéologie du
moyen âge, M. de Clarac n'avait pas les connais-
sances indispensables pour reconstituer sur le pa-
pier, avec quelques chances de succès, un château
fort du xiv' siècle ; mais , lors même qu'il eût possédé
cette science spéciale , si rare de son temps , il n'aurait
jamais restitué sérieusement l'intérieur du Louvre
de Charles V, par la raison péremptoire que l'on ne
dispose pas de la dixième partie des données néces-
saires pour cela. M. de Clarac a sans doute pris
beaucoup de peine afin d'obtenir le résultat auquel
il est arrivé ; toutefois on ne saurait méconnaître qu'il
n'a pas profité de tous les renseignements qu'il avait
sous la main. Un fait plus regrettable encore, c'est
qu'il se soit mis en fréquente opposition avec des
documents graphiques qui font autorité. Ainsi,
contrairement au tableau si précis de Saint-Ger-
main-des-Prés , il a placé une tour supplémentaire
entre la porte du midi et la tour de l'angle sud-
ouest; sans tenir compte des plans de Du Cerceau,
de Quesnel et de Mérian, il a cru pouvoir accoler à
l'aile septentrionale du château deux tours au lieu
d'une, et à l'aile méridionale, trois autres tours au
lieu de la seule qu'on y vit jamais , etc. Quant au
texte de l'ouvrage, il est naturellement le reflet des
erreurs contenues dans le plan et ne révèle presque
aucun fait nouveau , à part ce qu'on y apprend sur
les travaux modernes , dont nous n'avons pas à nous
occuper. En affirmant donc que l'histoire monu-
mentale de l'ancien Louvre restait à faire après le
livre de M. de Clarac, nous croyons ne pas excéder
les bornes de la vérité.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 153
« reines, au Louvre, ont toujours été placés au lieu même où nous les voyons ; et,
«bien que la principale entrée fût à cet endroit (au midi), et que ce ne soit jamais
« dans la façade d'un palais que se retire le prince , à cause du grand bruit qui s'y
«fait d'ordinaire, la vue en est si belle, qu'en 1 365 on l'appeloit le Grand-Pavillon
ce du Louvre, et que nos rois, aussi bien que nos reines, y logeoient presque tou-
rr jours et le préféroient aux autres appartemens qu'ils avoient dans l'autre corps
« de logis parallèle, qui jouissoit de l'aspect du grand jardin.
« Tous les registres de la Chambre des comptes touchant les réparations des
ff œuvres royaux, depuis le roi Jean jusqu'à Charles IX, font voir que les portes des
cf principaux appartemens étoient ornées de pratiques de menuiserie ; que les appar-
ie temens tant du Roi et de la Reine que des Enfans de France étoient carrelés,
« planchées, nattés et lambrissés de bois de chêne, qui coûtoit à mettre en œuvre
ce huit sols parisis le millier; de plus, qu'ils avoient chacun leur chapelle et leur
ce galerie, et ne reçevoient le jour que par de petites fenêtres, étroites et obscurcies
ce d'un gros treillis en fer, d'un châssis de fil d'archal , et de vitres peintes de cou-
cr leurs hautes, et rehaussées des armoiries de la personne qui y demeuroit.
cf Les reines occupoient le premier étage (le rez-de-chaussée) ; les rois, le second;
ft et la conformité de leur logement étoit si grande , que l'un n'avoit pas plus d'é-
ff tendue que l'autre, ou même plus de membres, ni de commodités; celui de la
cf Reine étoit relevé de trois ou quatre marches au-dessus du rès-de-chaussée (du
et sol de la cour). Sous Charles V et ses successeurs, il fut toujours accompagné
ft d'une grande salle et de deux chapelles qui remplissoient entièrement le prê-
te mier étage du corps de logis parallèle à la rue Froimantel, et assorti, dans celui
«qui regardoit sur la rivière, d'une grande chambre de parade, d'une autre
er grande chambre et de quelques garderobes et cabinets. On montoit à celui du
ttRoi par une grande vis ronde que Charles V avoit fait faire en 1 365 , à trois
ft toises de la salle de la Reine, dans le corps de logis (du nord) opposé à celui
«qu'ils occupoient.
«On fit tant de logemens dans ce palais, que les Enfans de France, les princes
«du sang et les officiers de la couronne y avoient de si grands appartemens, qu'il
ce n'y en avoit pas un où il ne se trouvât une chambre, un cabinet, une garde-robe
et et une chapelle, et tous se dégagement dans des salles et des galeries; car on
et y comptoit jusqu'à six salles et quatre ou cinq galeries.
«Pour ce qui est des salles, la première se nommoit la Salle neuve du Roi , et la
« seconde, la Salle neuve de la Reine; toutes deux longues, chacune, de sept toises
«un pied et un quart, et larges de quatre toises trois pieds et demi. La troisième
«regardoit sur les jardins, et, à cause de cette situation, étoit appelée la Salle sur
«les jardins. La quatrième fut faite par saint Louis, et pour cela portoit le nom de
« son fondateur ; il lui avoit donné douze toises de long sur sept de large ; mais, comme
154 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
« elle toraboit en ruine sous Charles V, il la fit abattre et en fit faire une autre en
«cet endroit-là, de pareille grandeur, et lui conserva son ancien nom, qu'elle a
« toujours eu jusqu'à ce que François Ier ruina le corps de logis où elle étoit. La cin-
« quième se nommoit la Salle du Conseil , et consistoit en une chambre et une garde-
« robe qu'on appeloit la Garde-robe du Conseil de la Trappe. Mais la plus fréquen-
ce tée et la mieux ornée se nommoit tantôt la Salle basse, tantôt la Grande Salle,
« tantôt la Salle du Guet, et tantôt la Salle par terre. Sous Charles V, elle portoit huit
« toises cinq pieds et demi de long, sur cinq toises neuf pouces de large; et sous
« François Ier, sept toises un pied et un quart de long, sur quatre toises trois pieds
rr et demi de large. Charles V la fit peindre en 1 366 ; mais les peintures étant toutes
ff effacées du temps de François Ier, elles furent renouvelées en 1 5 1 4, rehaussées
<r d'oiseaux et d'animaux qui se jouoient dans de grandes campagnes, et accompa-
ft gnées de figures de cerfs. Dans cette salle, Charles V et ses successeurs reçevoient
«et régaloient les princes étrangers; c'étoit là qu'ils mangeoient en public et fai-
re soient leurs grandes fêtes. A un des bouts tenoit la chapelle basse du Louvre ; à
ff l'autre, Louis de France, duc de Guyenne, fils aîné de Charles VI, fit élever, en
« î h 1 3 , un avant-portail de pierre de taille, chargé de moulures, voûté et terminé
tf d'une chambre couverte d'une terrasse entourée d'un balustre de pierre à claire-
ff voie. Dans la chambre furent mises les orgues de ce prince, et la terrasse destinée
ff pour les joueurs d'instruments ou ménétriers du roi et du duc de Guyenne : car
tf c'est ainsi qu'ils sont appelles dans les registres de la Chambre des comptes. Dans
trie milieu de la face de cette salle, parallèle à cet avant-portail, étoit pratiquée la
tr principale porte de la chapelle du Louvre. Raymond du Temple la couronna d'un
tt grand fronton gothique de pierre de taille, et Jean de Saint-Romain, sculpteur,
«eut six francs d'or, ou quatre livres seize sols parisis, pour le remplir ou le lam-
rtbrequiner d'une image de Notre Dame, de deux anges tenant deux encensoirs,
rr et de cinq autres jouant des instrumens et portant les armes de Charles V et de
tt Jeanne de Bourbon; elle avoit quatre toises et demie de large sur huit et demie
ttde long. Sous Charles V, son autel étoit de marbre, et sous François Ier, il étoit
te paré de deux images de bois, peintes et dorées, l'une de Notre Dame, l'autre de
rt sainte Anne; mais ses murailles furent ornées, en 1 365, de treize figures de pierre
cr qui représentoient chacune un prophète ayant un rouleau en main, qui furent
ft exécutées à l'envi par les meilleurs sculpteurs du siècle. Et dans ce temps-là fut
tf dressé un oratoire ou prie-Dieu pour le roi, quand il se trouvoit au service; quoi-
tr qu'elle fut voûtée, au reste, et qu'elle ne portât que deux toises cinq pieds de
«haut, sur vingt toises quatre pieds de circonférence, on ne laissa pas d'y bâtir une
«cheminée. Enfin Jean Bernard, charpentier, y fit, en 1 366 , un petit clocher de
«menuiserie, terminé d'une tourelle et garni d'une petite cloche. Avec tout cela,
« Charles V n'en fut pas le fondateur, mais le restaurateur, ainsi que de tout le
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 155
ce reste du Louvre; car, sans doute, c'étoit Philippe-Auguste qui l'avoit bâtie, et,
«de plus, elle avoit été érigée en chapellenie par Philippe le Bel. Et de fait, après
«la mort de Jeanne de Navarre, ce prince ne se vit pas plutôt veuf, qu'il l'institua
« et même donna dans son Louvre un appartement au chapelain qui en avoit la
ce direction; de plus, chargea la prévôté de Paris de deux cent (?) vingt- cinq
cr livres W pour sa nourriture , et de quarante sols pour ses habits ; voulant encore
ce que, tant que lui et ses successeurs rois logeroient dans ce château, il eût la
ce moitié, tant de pain, du vin, de la viande que de la chandelle, et des autres
«nécessités qu'on fournissoit alors aux officiers commensaux de sa maison, et
ce simplement la moitié de cette portion quand il n'y auroit que ses enfants qui y
ce demeureroient.
«t Ce n'étoit pas la seule chapelle qui fût alors au Louvre ; il y en avoit dans
ce tous les appartemens principaux : le Roi , la Reine et les Enfans de France en
ceavoient chacun une attachée à leurs chambres, la plupart terminée d'un petit
ce clocher et placée dans les tours qui flanquoient et environnoient le château. Dans
ce celle du Roi , il y avoit une armoire garnie de tables et de reliques ; dans celle
cède la Reine, un autel, un oratoire et un jubé de menuiserie, travaillé et taillé
ce avec beaucoup d'art et de patience.
ce La chambre aux Oiseaux (joyaux?) avoit neuf toises de long sur quatre et
ce demie de large. En i63o, elle étoit mieux garnie et plus riche que celle du
ce Palais, de l'hôtel Saint-Pol, du château de Vincennes et de la Bastille. Des cabi-
cc nets ou armoires à trois étages paroient ses murs de haut en bas ; là étoit ren-
ée fermée et rangée l'argenterie du Roi, sa vaisselle d'or et d'argent, des draps
ce d'or, des échiquiers de jaspe et de cristal, des anneaux pontificaux, des croix,
cèdes crosses d'or, et toutes sortes d'ornemens de chapelle et paremens d'autel,
ce chargés de pierreries; ce qui fait dans les registres de la Chambre des comptes
ce plusieurs listes et chapitres non moins longs qu'ennuyeux.
ce On ne se servoit alors ni de chaises, ni de placets, ni de sièges plians; ces
ce sortes de meubles si commodes n'avoient point encore été inventés. Dans la
ce chambre du Roi et de la Reine, il n'y avoit que des tréteaux, des bancs, des
ce formes et des faudesteuils ou fauteuils; et, pour les rendre plus superbes, les
ce sculpteurs en bois les chargeoient d'une confusion de bas-reliefs et de rondes-
ce bosses; les menuisiers les entouroient de lambris, et les peintres les peignoient
ce de rouge et de rosettes d'étain blanc. La chambre de parade , où Charles V tenoit
ce ses requêtes, fut peinte de cette sorte, en i366, par Jean d'Orliens, et parée
(l) L'abbé Lebeuf dit qu'il y avait dès i3i5,au dansunacte de permutation du i3décembre i5aa.
Louvre, une chapelle dotée de a5 livres a prendre (Histoire du diocèse de Paris, t. I, p. 61.) Cette
sur la prévôté de Paris et jouissant d'autres droits, chapelle Saint-Jean parait être celle dont parle
laquelle chapelle est appelée la chapelle Saint-Jean Sauvai.
156 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
« de ces meubles et de ces ornemens par ses charpentiers et menuisiers. Au lieu
«de ces cabinets magnifiques d'Allemagne, qui parent les appartements des dames
«d'aujourd'hui, on ne voyoit alors que des buffets grands, gros, épais, et chargés
« de basses-tailles mal travaillées W. v
Dans une autre partie de son livre , Sauvai a encore consigné les détails suivants :
«Les salles, autres que celles de Saint-Louis, avoient huit toises de longueur sur
«cinq de large, ou un peu plus de sept toises de longueur sur quatre et demie
«de large environ. La grande chambre de parade, où le roi tenoit quelquefois ses
«requêtes, étoit longue de dix toises et large de six. Sa chambre avoit cinq toises
«et demie de longueur sur cinq de largeur. La chambre de la Trappe ou du
« Conseil en avoit six sur cinq. Son retrait, trois sur deux et demie ... Sa chapelle
«basse, quatre et demie sur deux et demie.
« Les pièces de l'appartement de la Reine étoient presque de même grandeur ;
« mais la chambre du dauphin portoit quatre toises de large sur quatre toises cinq
«pieds et demi de long. Sa grande chambre de parade avoit six toises quatre
«pieds ou environ de longueur, sur quatre toises de large. Son cabinet, trois de long
«et de large. Sa chapelle basse, trois toises deux pieds sur deux toises un pied.
«La chambre de madame Michelle, depuis duchesse de Bourgogne, et qui lui
«laissa son nom, étoit de six toises et demie de longueur, et de six pieds et demi
«en largeur. Son cabinet portoit trois toises en carré; le reste en proportion.
« Les chambres des princes du sang portoient cinq toises de long sur quatre et
«demi de large; leurs garde-robes avoient quatre toises de longueur et treize
« pieds de largeur, et ainsi du reste (2). r>
LE GRAND-JARDIN ET LA MÉNAGERIE.
Le terrain dépendant du Louvre , vers la rue Saint-Honoré , était occupé par un
assez vaste jardin qu'on appela, sous Charles V et depuis, le Parc ou le Grand-
Jardin, pour le distinguer d'autres jardins plus petits, comme ceux qui étaient
spécialement destinés au Roi et à la Reine , et qui furent convertis en basses-cours
par Charles VI. Le Grand-Jardin avait pour limites : à l'orient, le gros mur de la
Ville , auquel s'appuyaient les maisons de la rue d'Autriche ; à l'occident , la muraille
à laquelle s'adossaient les maisons de la rue Fromenteau, et dont nous connaissons
l'alignement; au midi, le fossé du château; au nord, un mur, auquel, suivant de
nombreux documents, aboutissaient les maisons du côté méridional de la rue de
Beauvais. Ce dernier mur fut abattu en partie sous Louis XIII; mais nous en avons
retrouvé un point au moyen d'une indication comme il est rare d'en rencontrer
(1) T. II, p. 20 et suiv.— (5> Ibid. p. 275.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 157
dans les anciens actes. Un extrait des registres de criées, portant la date du 5 no-
vembre i&55m, contient le passage suivant, confirmé par d'autres: «Une masure
«ou place, où jadiz ot maison, assise à Paris, en la rue de Beauvaiz. . . aboutissant
«par derrière aux jardins du Louvre et appartenances; et contient ladite masure,
«dedans euvre, quatre toises et demye de long, et deux toises sur rue; et par
«derrière deux toises demy pié moins. n Ayant recherché quelle était cette maison,
nous avons vu qu'elle s'élevait en face de la rue Jean-Saint-Denis (Pierre-Lescot) ,
et nous avons même découvert un plan dressé il y a environ un siècle et demi,
où elle est figurée avec ses anciennes dimensions. Nous avons ainsi constaté que
le mur de clôture du jardin passait à quinze mètres du coin oriental des rues Jean-
Saint-Denis et de Beauvais. Toutefois ce point n'aurait point suffi pour déterminer
la direction du mur, si nous n'avions pu y joindre cette indication, fournie par
les plans de Mérian et de Gomboust, que le mur se prolongeait parallèlement à
l'aile du château. Suivant ces données, nous avons reconnu que le mur du jardin
venait se souder à l'enceinte de Philippe-Auguste, près du lieu ou celle-ci se
brisait pour courir aussi parallèlement à la face orientale du Louvre. Vers le
même endroit, sur le plan manuscrit de Saint-Germain-l'Auxerrois, apparaît un
pavdlon carré, flanqué d'une tourelle à son angle sud-ouest.
D'après Sauvai, le jardin du Louvre était semé de poirées, de pourpiers, de
laitues et autres légumes; il était décoré de plants de rosiers, de haies, de pavil-
lons, de préaux et de tonnelles «comme étant tonte la science des jardiniers de ce
« temps-là, qui ne connoissoient point de plus magnifiques compartimens. « Sauvai
dit encore : «Quatre pavillons alternativement ronds et quarrés remplissoient les
« quatre coins; quant à leur grandeur, il falloit qu'elle fût bien considérable , chacun
«étant environné de sièges, de chaises et de marchepieds faits de gazon, avec un
«préau dans le milieu, n Sauvai s'est au moins trompé sur le nombre des pavillons,
qui montait à cinq; on lit dans les comptes de 1 368 : a Item, pour avoir planté
«d'un costé et d'autre ded. treilles et pavillons xvu c et demy de chez ^ceps) de
«vigne, vin francs d'or, et les treilles et pavillons et bayes mesurées comme il
«ensuit : premièrement, le pavillon rond contient vin toises; le pavillon devers la
«rue du Coq contient vu toises; item, le pavillon devers la rue de Beauvez contient
«v toises; celui de la rue Fromentel contient vin toises; le pavillon carré de la
«Fauconnerie xu toises; et pour le lozengié'2' d'icelui xvi toises. Item, les hayes
«dud. pavillon xv toises de longW; item, les haies du petit jardin vi toises. •»
111 Arch. des Quinze-Vingts. epréau èsdits jardins , et faict demerrien (bois) un
m On voit par un autre extrait des Comptes que rrlozengié tout autour, à fleur de Hz et à créneaux, »
ces bzengiés ou treillages étaient disposés de façon (3> Quinze toises de développement sans doute,
à former des créneaux et des fleurs de lis: «Jean ce qui impliquerait que ce pavillon avait un peu
"Baril, faiseur de treilles, pour avoir faict un grand moins de quatre toises de côté.
158 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
De ce texte il semble résulter que les pavillons étaient placés selon la disposition
suivante :
Quant à l'apparence du Grand-Jardin , entièrement gâté par Henri III , dit Sauvai ,
on ne peut que renvoyer au plan de Mérian, où ce jardin est représenté comme
un large préau entouré d'une suite de tonnelles.
Vers 1 368 , on refit les murs du jardin du Louvre et l'on y ouvrit une porte
conduisant à la rue Fromenteau ; un article des comptes est ainsi conçu : et Pour
a avoir faict es jardins, depuis le coin devers la rue Froidmantel, seize toises de
ttlong, abatu les cloisons et murs vielz, en droit de la rue de Champ-flori jusqu'à
tt la gauche de la fourière du Roi . . . Pour un portail à istre (sortir) desdits jardins
tten la rue Froidmantel Pour avoir taillé et faict l'appareil, aux maçons,
«d'un portail de pierre, qui est assis au mur neuf entre la rue Froidmantel et les
<rmurs dudict jardin, de dix pieds de haut et huict de lé, à voulsure, chanfrané
a par dehors; entre lesquels murs est le montoir du Roy et de la Royne. n Le portail
dont il est ici question devait communiquer avec ce petit jardin en bordure sur
la rue Fromenteau, mentionné plusieurs fois comme le tenant méridional de la
maison de la Tête-de-Rélier, et énoncé «jardin que l'on dit estre du Louvre n
en i53o, puis simplement «jardin du Louvre t> en îbylt et 1577. Ce petit jardin
semble aussi être le même que celui qui, d'après Sauvai, «portoit six toises de
«longueur sur six autres et cinq pieds de longueur, du côté de la rue Saint-
« Honoré, n On retrouve ces dimensions, si l'on admet que le portail avait une
quinzaine de pieds de profondeur
(1)
m M. Le Roux de Lincy possède un manuscrit
de Sauvai , qu'il se propose de publier, et dans le-
quel , indépendamment de plusieurs chapitres iné-
dits, on rencontre de nombreuses différences avec
le texte imprimé. Or, dans ce manuscrit, dont le
propriétaire a bien voulu nous donner communica-
tion, nous lisons (p. 20) que le grand jardin du
Louvre rrétoit renfermé entre les fossez du Louvre,
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 159
Conformément à un usage de l'époque, il y avait au Louvre, comme à l'hôtel
Saint-Paul, une ménagerie d'animaux féroces. La maison où on l'entretenait était,
en 1 333 , une n grandies que Philippe de Valois acheta, dans ce dessein, aux
nommés Geoffroy et Jacques Vauriel. Elle se trouvait à l'angle nord-ouest du
jardin; un acte de 1572 M énonce la maison ayant pour enseigne la Tête-de-Bélier
comme faisant le coin des rues Fromenteau et de Beauvais, tt tenant d'une part à
crladicte rue de Beauvays, d'aultre au jardin du Louvre (celui dont il vient d'être
reparlé), aboutissant d'un bout par derrière à la maison où sont les lions du Roy,
«estant des appartenances dudict Louvre, et d'aultre part, par devant, à la rue
et Fromenteau. ■» L'hôtel des Lions, ainsi qu'on disait, était lui-même contigu à tria
tt cuisine des communs du Louvre , v fait qui ressort de cet article du compte des
confiscations de 1627 à 1&36, tr Jardin scis en Froit-Mantel , tenant tout au long
trde la rue Froidmantel, et, d'autre part, tout au long, à une maison appelée la
r Cuisine du Louvre; ayant entrée à un bout répondant devers les murs de Paris,
et lequel lieu on souloit appeler l'hostel des Lions W. n Le passage qui précède
montre également que la maison des Lions se confondait avec le petit jardin de la
rue Fromentel. Le U mai 1375, Charles V avait donné cette maison à Jeannin
Hoguelet, garde des chambres et tapisseries du château de Vincennes, et à Guy
Natin ; ce dernier avait succédé à son père comme gardien des bêtes sauvages de
la ménagerie du Louvre (5), aux gages de 1 2 deniers par jour.
BASSES-COURS. — ARTILLERIE.
Avant le règne de François Ier, le Louvre n'avait de basses-cours qu'au midi et
au couchant. Le terrain dépendant du château, vers le nord, était occupé par le
Grand-Jardin; vers l'orient, le mur d'enceinte de la Ville, servant de contrescarpe
au fossé, formait une limite au delà de laquelle, à l'exception de la barbacane,
il n'y avait que des propriétés particulières dont l'annexion au château ne fut
point antérieure à i53o.
Quant aux basses-cours occidentales, Sauvai n'en mentionne qu'une, appelée
a la basse-cour du côté de Saint-Thomas-du-Louvre et de la rue Froitmantel. »
"•les rues de Froilmanteau, de Beauvais et d'Os-
■ triche. Le long de la rue Froidmantel , il portait
^soixante et une toises de longueur sur soixante et
rrune toises cinq pieds de largeur, du coslé de l'é-
irglise Saint-Honoré : et le long de ces deux costez,
fil était revêtu de treilles de pareille longueur, que
"l'on entretenoit avec beaucoup de soin et de cu-
frriosita.i Ce passage n'est évidemment qu'une va-
riante de celui que renferme le texte imprimé, mais
nous ignorons lequel des deux exprime la vérité.
Quoi qu'il en soit, si le Grand-Jardin pouvait avoir
soixante et une toises de l'est à l'ouest, il n'a certai-
nement offert cette dimension du nord au sud qu'en
formant hache du côté de la rue Fromenteau; cette
dernière disposition est peu vraisemblable.
(1) Arch. du Chap. Saint-Honoré.
« Sauvai, t. III, p. 365.
(,) Arch. de l'Emp. reg. J 108, n" 3ao.
160 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Elle était comprise entre le fossé et un mur auquel s'adossaient les maisons du
côté oriental de la rue Fromenteau. Nous avons vu une foule de titres où ces
maisons , détruites en partie avant le xvue siècle , sont effectivement indiquées
comme aboutissant au mur ou tr encloistrure i> du Louvre; mais nous n'en avons
pas trouvé un seul qui, par une indication de profondeur, nous fournît un jalon
certain pour rétablir le mur de clôture de la basse-cour. On peut heureusement
combler cette lacune; ainsi, sur une gravure de Sylvestre représentant la face
occidentale du Louvre , telle qu'elle était lorsque Lemercier abandonna ses travaux,
et intitulée : Veue du Louvre et de la grande galerie du costé des offices, on remarque
des fragments d'une muraille qui présente un retour d'équerre sur le premier plan,
et dont l'extrémité méridionale va s'attacher à la Grande-Galerie au lieu où elle
se réunit au corps de bâtiment qui contient aujourd'hui le Grand-Salon'1'. Ce mur,
dont une portion figure sur le plan de Quesnel, est évidemment celui qui limitait
la basse-cour. Ayant servi un peu plus tard à appuyer de nouvelles maisons, il ap-
paraît sur plusieurs plans manuscrits de la Bibliothèque impériale et des Archives,
et nous y avons constaté qu'il courait parallèlement à la rue Fromenteau, à environ
dix-huit mètres de cette rue , jusqu'à cinquante-trois mètres de la Grande-Galerie ,
point où il fléchissait légèrement, suivant la direction de la Petite-Galerie jusqu'à
ce qu'il atteignît la Grande <2). H y a une telle conformité entre toutes les données
graphiques, que l'authenticité de cette limite de la basse-cour ne saurait soulever
une objection.
La plus grande partie de la basse-cour occidentale était occupée par al'Artil-
crlerie,n c'est-à-dire par un arsenal que Philippe-Auguste y établit, s'il faut en
croire Sauvai; mais le fait aurait besoin d'être démontré, car s'il paraît certain
que, dès le principe, le Louvre dut servir de dépôt pour les munitions et les
engins de guerre, il ne s'ensuit pas que l'Artillerie ait été, lors de sa fondation,
placée dans la basse-cour où on l'a vue depuis, et d'où on ne l'a retirée entière-
ment qu'en 1672.
Les titres des maisons de la rue Fromenteau, que nous avons dépouillés avec
grand soin dans l'espoir d'y rencontrer quelque renseignement sur l'artillerie du
Louvre, ne la mentionnent même pas. Sauvai dit qu'elle était sous la direction d'un
maître ou garde , d'un artilleur ou canonnier et d'un maître de petits engins , qui
tous avaient des logements dans la basse-cour; celui du maître était si commode
(1) Par une licence qui lui était habituelle, et (,) Il est à remarquer que ce mur, prolongé suf-
qui a induit bien des gens en erreur, Sylvestre a fisamment, vient se confondre avec l'alignement du
supprimé le côté occidental de la rue Fromenteau, côté occidental de la rue Jean-Saint-Denis, ce qui
afin de faire voir un tronçon plus considérable de la pourrait faire croire que cette rue se continuait pri-
Grande-Galerie ; mais l'indication des fragments du mitivement j usqu'à la rivière , et qu'elle fut prise pour
mur n'est nullement imaginaire. limite lors de l'acquisition du terrain du Louvre.
<
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 161
qu'il renfermait un jardin et des étuves qu'on appelait le Jardin et les Etuves du
maître de l'artillerie. En i3gi, la maison où se fabriquait l'artillerie était proche
de la rue Fromenteau et avait quatorze toises de long sur quatre de large, dans
œuvre. En i4i2, on voyait au même lieu une grande halle pour la poudre et
l'artillerie, qui se travaillait à l'étage inférieur; il y avait aussi un pavillon dit de
la Fonderie, à cause de sa destination, couvert d'un comble en croupe, et grand
de sept toises «en quarré. u En iû3o, on démolit un corps d'hôtel d'un étage, qui
servait à l'artillerie et présentait sept travées de longueur. Un autre, qui s'appe-
lait « l'Ouvrouer de l'artillerie, i> subsistait encore en 1 687. Sauvai parle également
sans en préciser l'emplacement, d'une «chambre des empenneresses,n où l'on
garnissait les flèches de plumes, et d'un atelier où on les ébauchait W. Dans ce
dernier on avait construit «une armoire à trois pans ou équières, longue de cinq
«toises, haute de sept pieds, large de deux et demi, n que remplissait une quantité
d'armes offensives et défensives, pour l'usage de la garnison. D'après un compte
de 1367, qui énonce «la tour dessus l'armurie du Roy, ti il paraît qu'un magasin
d'armes existait dans l'intérieur même du château.
En 1 368, dans une cour voisine de la rue Fromenteau, était établi un jeu de
paume, où venaient s'exercer le Roi et les princes '2>. C'est de même, dans la basse-
cour occidentale, qu'était situé «l'Ostel de la Fourrière du Louvre, n dont il est
question dès 1 368 ; il y aboutissait, en iio6, une maison de la rue Fromen-
teau, qui avait pour enseigne l'Image Saint-Jacques, et était située à peu près
derrière l'emplacement aujourd'hui occupé par le pavillon de l'Horloge'3'. La
Fourrière, espèce de magasin ou dépense, faisait partie de ces nombreux offices
du château qui comprenaient une lingerie, une pelleterie, une lavanderie, une
taillerie W, un bûcher, un charbonnier, une fauconnerie, des poulaillers ou galli-
niers, des celliers, la conciergerie, la maréchaussée et, sans aucun doute, des
écuries. Pour le service de la bouche, il y avait, indépendamment des cuisines,
édifices toujours importants dans les manoirs du moyen âge, une paneterie, une
saucerie, une épicerie, un garde-manger, une fruiterie, une échansonnerie, une
bouteillerie et un lieu servant à la fabrication de l'hypocras. Mais Sauvai, qui nous
a transmis tous ces détails, n'y a pas joint le moindre renseignement topographique,
et l'on chercherait inutilement à imaginer quelle était la disposition des communs
du Louvre.
(1) Nous avons trouvé une mention, en 1269, de restuy à mettre les esteufs (balles). * — ,3> En
la rmeson à l'aubalestière du Louvre, 1 comprise 1571 et 1573, la maison de l'Image Saint-Jacques
parmi rrpluseurs mesons assises en Biauvoier. * n'est plus dite aboutissant à la Fourrière, mais
(,) irEt en la cour devers la rue Froidmantel, aux « offices du Louvre.» Les anciens communs
"scellé et assis en un auvent où le Roy et nos sei- du château avaient alors été bouleversés,
cgneurs jouent à la paulme, et au mur faict un (5) Ateliers pour les vêlements.
162 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Il est douteux que la basse-cour méridionale du Louvre existât avant la cons-
truction du mur d'enceinte que Charles V fit élever le long de la Seine W; peut-être
l'établissement de cette basse-cour a-t-il fait disparaître ces chantiers appartenant
à la Ville, et dont il a été parlé plus haut. H est clair aussi que la basse-cour,
avant la construction du quai en dehors de la courtine, ne s'étendait point jus-
qu'à ce dernier ouvrage, puisque, auparavant, le chemin public était au nord ou
en deçà de la courtine. On voit, par les lettres ordonnant la construction du quai
(1527), qu'il avait pour but d'empêcher que les chevaux de halage, entrant par
la fausse porte du mur de Philippe-Auguste, ne passassent dans la place qui se
trouvait au devant de la principale façade du château : « La faulse porte par où
«l'on a accoustumé passer les chevaulx tyrans les bateaulx qu'ilz (qui) portent la
a marchandise , affin que iceulx chevaulx puissent doresnavant par ledict chemyn
«(le quai à faire) avoir leur passage sans passer par ladicte place (devant le
tr Louvre) et faulse porte (2). -n Ce terrain situé devant le Louvre, et n'y étant pas in-
corporé, payait à l'Évêque certain cens à propos duquel il y eut contestation avec
la Ville. On lit dans le censier de 1873 : ^Item, la place entre la porte du Louvre
cr et la maison de l'Engin, dont descort fu entre le Prévost des marchans et Monsieur
«de Paris; qui est Vincent Lamiraut et à Robert Roussel <3). « La place dont il est
ici question touchait au chemin du bord de l'eau , lequel prolongeait celui du quai
de l'Ecole et se continuait avec la voie dont les restes ont formé la rue des Orties.
La jouissance de ce chemin, laissée au public, n'empêchait pas que la porte de
l'enceinte, dite porte du Louvre, ne fît partie, au xvc siècle, des dépendances du
château, comme l'apprend ce passage des comptes de la Ville, en l'année ikih-
ikih : «De la vielz porte de la basse-court du Louvre, devant l'arche de Rour-
«bon, pour (par) où l'on passe pardevant le chastel du Louvre, pour aller tout
« autour de la Ville. — Néant, pour ce que jà piéça le Roy, nostre sire, l'a appliqué
«pour servir à la basse-court dudit Louvre, n
Nous venons de nommer une « maison de l'Engin n dont l'indication ne se ren-
contre dans aucun auteur; ce sont les censiers de l'Evêché qui nous en ont révélé
l'existence. Dans celui de 1873 on énonce «l'Engin de la Tournelle du Louvre, n
et dans celui de i53o «la maison où estoit l'Engin du Louvre, n Le passage que
nous venons de citer établit que la maison de l'Engin était située sur le chemin
du bord de l'eau, au delà de la porte de Paris dite du Louvre, ce que tous les
censiers confirment. Ainsi celui de 1 399 la mentionne sous la rubrique «Oultre
«le Louvre, à comancier devers le chasteau de Roys, en venant à la vielle porte
(1> Le manuscrit de M. Le Roux de Lincy men- (,) Nous reviendrons plus loin sur la construction
tionne une basse-cour située du côté de l'hôtel de de ce quai.
Bourbon, et dont les dimensions étaient de quarante- <3) Fol. 34 v°. L'article se retrouve dans les cen-
trois toises et demie sur huit. siers postérieurs.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 163
tremprès le Louvre, « après le manoir de la Petite-Bretagne et l'église Saint-
Thomas; ceux de 1^89 et i53o la mentionnent dans le même ordre et après
la maison qui faisait le coin occidental des rues Fromentel et des Orties; elle se
trouvait donc entre ce coin et la place située devant le Louvre. Cette circonstance
et le mot d'engin, parfaitement applicable à une écluse ou vanne, portent naturel-
lement à croire que la tour de l'Engin était celle dont nous avons parlé à propos
des fossés, et qui commandait le canal; puis, que la maison de l'Engin était cette
construction contiguë à la tour, et qu'a remplacée la salle des Antiques.
ENCEINTE DE PHILIPPE-AUGUSTE. — ENCEINTE DE CHARLES V.
QUAI DU LOUVRE. — RUE DES ORTIES.
Le trajet du mur d'enceinte de Philippe-Auguste, de la rue Saint-Honoré jus-
qu'au quai, est fort difficile à retrouver, et, pour cette raison, il n'a jamais été
restitué exactement. Longtemps nous n'avons connu, comme tous ceux qui se
sont occupés de la question, que des documents graphiques insuffisants pour la
résoudre, ou plutôt faits pour en donner une fausse solution; tels sont le plan de
l'atlas de Saint-Denis de la Chartre, trés-erroné, et le plan de Caqué, gravé vers
1770, lequel est meilleur, quoiqu'il reste encore loin de la vérité. Sur ces deux plans ,
le mur traverse l'îlot compris entre les rues du Coq et de l'Oratoire ou d'Autriche,
en biaisant par rapport à cette dernière rue. Nous n'avons jamais admis que telle
pût être la direction du mur, parce que nous avions vu un titre de 1 5g6 , relatif
à une place ayant fait partie de l'hôtel Saint-Pol, où il est dit que cette
place, qui aboutissait par devant à la rue d'Autriche, par derrière aux anciens
murs de la Ville et faisait le coin de la rue Saint-Honoré, avait sept toises de
profondeur (1', ce qui nous paraissait indiquer que l'enceinte courait parallèlement
à la rue d'Autriche , à sept toises de son alignement occidental. La découverte suc-
cessive de trois plans anciens est venue justifier nos prévisions. Le premier de ces
plans'2', copié d'un autre que Bruant avait fait pour Colbert, fournit des traces
de mur faciles à discerner pour quiconque a l'habitude de pareilles recherches;
le second, conservé parmi les archives de l'Oratoire, est beaucoup plus explicite;
il reproduit une des tours de l'enceinte, en confirmant les indications du premier;
enfin le troisième , qui est fort habilement dessiné (3) et qui corrobore les précé-
dents, montre que la muraille, amincie par places de façon à n'avoir que six pieds
d'épaisseur, se trouvait à sept toises de la rue d'Autriche et lui était rigoureu-
sement parallèle. Ce parallélisme, qui produisait une brisure à environ quatre-
(1) Voir p. i3. " Archives de l'Empire, Atlas du département
"* Arch. de l'Emp. 3* classe, n° 61. de la Seine, n" 62.
164 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
vingt-trois toises de la rue Saint-Honoré, près du point où l'on rencontrait le mur
du grand jardin du Louvre, se continuait jusque dans le voisinage du quai,
où le mur s'infléchissait de nouveau pour atteindre la porte et la grosse tour dite
du Coin.
La première porte Saint-Honoré a dû être construite en même temps que
l'enceinte dont elle faisait partie, c'est-à-dire dans les dernières années du xne siècle ;
elle a donc précédé l'existence de l'église qui lui a donné le seul nom qu'on lui
connaisse. C'est en 1 533 qu'elle a disparu : «En ce temps (vers le mois de mars
« 1 533 ou i532 v. s.) fut abbattue la faulse porte Sainct-Honoré,^ rapporte la
chronique manuscrite de François Ier'1); dans un acte du i3 août i536, elle est
indiquée comme ayant été ccdesmolye et abatue par l'ordonnance du Roy. •» Con-
séquemment, la mention qu'on en rencontre dans un titre de 1 565 doit être
attribuée à un souvenir, de même que, par suite d'une habitude analogue, on a
nommé un point de la rue Saint- Antoine porte Baudoyer, plusieurs siècles après
la démolition de la porte elle-même. L'époque ancienne à laquelle la première
porte Saint-Honoré a été rasée ne laisse aucun espoir d'en retrouver des plans
géométraux; il n'y a aucune raison de supposer qu'elle différât des autres portes
contemporaines dont la rive gauche nous offre des spécimens. Il est donc pré-
sumable que le plan de Braun, qui la représente avec la physionomie d'une des
portes de l'enceinte de Charles V, n'est point fidèle quant à ce détail. On en a
trouvé quelques substructions en bâtissant le portail de l'Oratoire, l'an 1 7^5 ; mais
on n'a pas songé alors à tirer parti de cette découverte. Suivant Sauvai, la statue
de la Vierge qui décorait de son temps l'entrée de la maison de l'Oratoire pro-
venait de la porte Saint-Honoré, et cette tradition était confirmée par la ressem-
blance de la statue avec celle du cul-de-sac des Peintres, débris qu'on savait avoir
appartenu à l'ancienne porte Saint-Denis.
Sur le plan de la Tapisserie, il n'y a qu'une tour indiquée entre la rue Saint-
Honoré et le Louvre. Cette tour se confond évidemment avec celle qui est placée
par Quesnel à peu près à la hauteur de la rue de Beauvais, et par Caqué à environ
huit toises du mur extérieur de l'aile septentrionale du Louvre. Le troisième plan
cité plus haut fait voir que, en réalité, elle avait son centre situé sur une parallèle
passant à douze toises cinq pieds du nu de ce mur. Les plans de Braun et de Du
Cerceau la montrent précédée d'une autre tour, dont l'emplacement correspond à
celui qu'occupe le chevet de l'église de l'Oratoire Wé II est probable qu'une troisième
(1) Fol. 84 v". Cette chronique a été récemment m H résulte d'un litre cité dans le Mémoire his-
publiée par M. G. Guiffrey. — Au xvi' siècle, les torique et critique sur la topographie de Paris, ré-
portes de l'enceinte de Philippe-Auguste étaient ap- digé par Bouquet (in-4°, 1771), qu'en i546 (et
pelées fausses portes, pour éviter qu'on les confondît non 1608) la ville accorda à Hélye Odeau (et non
avec celles de l'enceinte du xiv" siècle. Derdeau , comme dit le Mémoire) la permission de
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 165
tour était située à la brisure de l'enceinte, près de la clôture septentrionale du
Grand-Jardin'1'. A en juger par le plan de Mérian, il y en aurait eu une quatrième
très-rapprochée de la troisième ; mais il n'est pas vraisemblable qu'il en ait existé
une devant le Louvre même, attendu que l'enceinte de Paris servait de contres-
carpe au fossé du château , dont les tours protégeaient suffisamment le mur de la
Ville dans cette région.
L'entrée principale du Louvre étant d'abord tournée du côté de la rivière, il
faut admettre qu'en construisant l'enceinte de Philippe-Auguste on y réserva une
porte ou poterne qui permettait de se rendre au château sans passer par la porte
Saint-Honoré. Toutefois, la première mention que nous connaissions de la porte
du Louvre, porta de Lupera, ne remonte qu'à l'an 1271. Elle était située devant
l'emplacement actuellement occupé par le pavillon qui fait face au pont des Arts.
On en connaît mal l'aspect à cause de l'époque ancienne de sa démolition, et, dans
le retable du Palais de justice, elle ne se dessine que confusément. Sur le plan de
Braun, elle est représentée flanquée de deux tourelles en encorbellement; les tou-
relles auraient, au contraire, porté de fond, suivant le plan de la Tapisserie. Celui
de Du Cerceau lui donne une tout autre apparence, et elle y semble composée
d'un pavillon à toit élevé, percé d'une grande arcade en plein cintre. Elle aura pu
être remaniée et, plus probablement encore, elle a été détruite par suite de la
construction du quai sous François Ier, car on ne la voit plus sur le plan de Belle-
forest (1 575). Dans l'origine, elle devait ressembler beaucoup à la porte de Nesle.
Au midi de la porte du Louvre , dont elle était séparée par une petite place de
trois toises deux pieds de long, et par une maison dont les dimensions ne sont pas
connues, s'élevait une haute tour qui faisait le pendant de la tour de Nesle, et
dont les historiens ont parlé en l'appelant la Tour qui fait le Coin, parce qu'elle est
ainsi qualifiée dans un titre de 1/120 (2). C'est là sa première désignation; elle en
a depuis reçu une autre, car elle est la même que la tour « Jehan de l'Es(ang,ri
dont l'identité n'a point encore été constatée. Nous en trouvons la première preuve
dans un bail qui fut fait par la Ville, le 29 juillet i486, à Jean Ferrant, et qui
contient ce passage : «La tour que l'en souloit appeller la tour Jehan de l'Estang,
<ret la moitié de l'alée des murs par hault, au long de la rivière de Seine, en
«desmolir pour la commodité de sa maison, scisc
«rue Richebourg, dite du Coq, certaine portion de
tf l'ancien mur de la Ville , contenant 1 3 ou 1 h thoises
«de long ou environ, passant le long de l'héritage
ird'icelie et de ses voisins, avec une vieille et an-
cienne tour, tous joignant ledit mur ou bien édif-
(tfiés sur iceluy.i Or la tour distante d'une dou-
zaine de toises du Louvre moderne qui est figurée
sur le plan de Turgot n'a jamais fait partie de la
maison d'Odeau, anciennement hôtel Saint-Pol, et
conséquemment il devait y avoir une autre tour
plus rapprochée de la rue Saint-Honoré que ne
l'était la tour reproduite sur le plan de Turgot.
(1) Ce doit être celle qui louchait au jardin de
l'hôtel de Bacqueville. (Voir p. 10.)
(,) Nous l'avons trouvée ainsi désignée dès 1 364 ;
mais il nous semble douteux que ce nom ait été
populaire.
166 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
«tyrant vers la tour ouprès de laquelle souloit avoir ung chastel de bois; avecques
«la maison édifiée joingnant de lad. tour dud. de Lestang, entre icelle et l'ancien
« portail ou porte à harsse de l'antienne muraille (porte du Louvre) et closture de
«lad. ville, qui estoultre l'ostel de Bourbon; tenant à la basse-court du chastel du
« Louvre et à lad. vieille muraille, a La seconde preuve résulte d'un autre bail,
daté du 7 avril i5o6, où on lit : «Petite place vuide et non valleur, assise au long
«des anciens murs de lad. ville, entre la maison et édifice contre la tour dite Jehan
«de l'Estang et la faulse porte d'iceux murs, par laquelle on va au Louvre; conte-
« nant icelle place trois toises deux pieds de large , le long desd. murs et de deux
«toises deux pieds de profond, pour illec édifier maison manable ensemble
«le dessus de lad. porte, aisance et allée des murs par hault, sur la longueur de
«lad. place w.n La tour Jean de l'Estang portait encore ce nom en 1673. L'indi-
vidu à qui elle l'avait emprunté jouissait, vers iklio, de la tour ainsi que de la
porte, en vertu d'un don royal; à un article des comptes de la Ville, commen-
çant par ces mots : «De la vieille porte de la basse-court du Louvre, que tient et
«occupe Jehan de l'Estang, « est ajouté en note : «Soit poursuivy led. de l'Estang,
«par le procureur de la Ville, nonobstant le don à lui fait par le Roy, attendu que
« c'est du domaine de la Ville. «
La tour du Coin formait l'extrémité occidentale de la fortification de Philippe-
Auguste, sur la rive droite, et, quoi qu'on en ait dit, elle n'a jamais été confondue
avec la tour de Bois. Elle offrait la plus grande ressemblance avec la tour de
Nesle, qui est bien connue, et elle était munie, comme celle-ci, d'une tourelle
cylindrique servant de cage d'escalier. Suivant Sauvai , elle aurait été démolie en
i53i. Nous admettons volontiers cette date, qui correspond à peu près à celle des
travaux du quai, quoique la tour du Coin soit reproduite sur le plan de Belle-
forest (1575). Ce dernier plan n'inspire en effet qu'une très-médiocre confiance;
il est d'ailleurs en contradiction avec un dessin daté de 1 5^6 et avec la vue de
Cellier, qui représente la tour dérasée comme elle l'est sur le plan de Gomboust,
dont le texte lui prête encore vingt pieds de hauteur.
La tour du Coin, que le tableau de Saint-Germain-des-Prés nous montre
dans son intégrité, n'a eu son étage inférieur entièrement détruit qu'en 1719,
lorsqu'on a refait le quai du Louvre. A cette époque, elle était depuis longtemps
dépourvue de sa cage d'escalier, qui ne s'aperçoit sur aucune des gravures du
xvuc siècle où la tour est reproduite, non plus que sur les quatre ou cinq plans
manuscrits au moyen desquels nous en avons rigoureusement déterminé l'emplace-
(1) Arch. del'Emp. cart. Q 11 46. — Sinouscon- sible de replacer exactement la porte, mais nous
naissions la longueur de la maison, comme nous n'avons point voulu tenterd'en restituer le plan, qui
possédons celle de la place contiguë , il serait pos- est par trop hypothétique.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 167
ment. Ces plans, circonstance rare, concordent entre eux; ils placent le côté occi-
dental de la tour à quarante-huit toises de la galerie de Charles IX, et le centre
à environ vingt-quatre toises (quarante-six mètres soixante et dix-sept centimètres)
de l'avant-corps du pavillon faisant face au pont des Arts; grandeurs justifiées par
un plan coté, très-intéressant, de la Bibliothèque impériale (1). On voit sur ce der-
nier plan qu'à environ quarante-huit toises de la galerie ('2), c'est-à-dire au point
où la tour s'attachait au mur qui la reliait à la galerie (3), ce mur était distant de
cinq toises (4) du parapet du quai nouveau, que donne le plan de Verniquet, et à
sept toises de la clôture du jardin de l'Infante, repères bien positifs. En opérant,
soit d'après ce dernier document, soit d'après les autres, on obtient un résultat
identique. Le seul embarras qu'on pourrait éprouver serait relatif au diamètre de
la tour, trop étroit sur la plupart des plans, où il atteint à peine quatre toises, quoi-
qu'il ne fût certainement point inférieur à celui de la tour de Nesle, qui mesurait
cinq toises. Cependant il n'y a qu'un seul plan (5) où la tour du Coin soit tracée
avec cette largeur.
Dans un travail du genre de celui-ci, la détermination d'un point précis est sou-
vent féconde en conséquences importantes; c'est ainsi que la certitude acquise de
l'emplacement de la tour Jean de l'Estang va nous conduire à reconnaître l'erreur
de tous ceux qui ont voulu restituer le mur d'enceinte ou courtine du bord de l'eau
dans le voisinage du Louvre. Cette courtine n'était point située sur un emplacement
intermédiaire entre ceux de la Grande-Galerie et du mur du quai actuel; mais elle
a servi de base à la Grande-Galerie même, dont la face méridionale en donne
l'alignement. Voici les observations qui nous l'ont fait comprendre.
La courtine est représentée sur les plans comme parfaitement droite, et s'atta-
chant à la tour du Coin dans la direction du centre de cette tour. Pour retracer
toute la courtine, il suffit donc d'en retrouver un fragment; or ce fragment, nous
l'avons dans le mur de quarante-huit toises de longueur dont il a été parlé tout
à l'heure. Ce mur a certainement le même point de départ que la courtine, et,
ainsi que la courtine figurée sur le dessin de Cellier, il va gagner la tour représentée
aujourd'hui par l'extrémité de la galerie de Charles IX, à l'alignement du bâtiment
qui vient à la suite et qui touche au guichet Saint-Nicolas. Comme dans le tableau
(1) Ce plan est gravé et rare; il est intitulé: Plan (>) La manière dont le mur s'attache à la galerie
des quays du Louvre et de l'Escole, à rebâtir de l'ordre n'est pas la même sur tous les plans, mais la diffè-
re M" le Prévôt des marchands et Eschevins , suivant rence est sans importance, du moins par rapport à
le devis du M' général des bâtiments de la Ville , présenté la question qui nous occupe.
au Bureau le 3 février 171Q. (4) La cote est indiquée.
m D'après un titre de 1 6 1 4 , que nous citerons m C'est un grand plan manuscrit de la paroisse
au chapitre xn, le véritable chiffre parait avoir été Saint-Germain-l'Auxerrois, conservé aux Archives
quarante-huit toises et deux pieds. de l'Empire.
168 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
de Saint-Germain et la vue de Cellier, il apparaît flanqué d'une tour intermé-
diaire sur le plan gravé, signé H. R. M. D. et sur une estampe de iGi3, œuvre
très-rare de Mathieu Mérian'11. Enfin il faut que l'alignement de la courtine et
celui du mur se confondent. Puisqu'ils avaient, nous le répétons, un point de
départ unique , le premier ne peut avoir différé du second qu'en formant un angle
avec ce dernier; or, si l'on suppose seulement cet angle de deux degrés, la cour-
tine, prolongée en ligne droite, passe au midi de la tour de Bois. Puis, concevrait-
on que, sans nécessité appréciable, avec un terrain complètement libre, on eût
changé la direction d'un mur de quatre-vingt-quatorze mètres de longueur, afin
de lui faire faire avec son ancien alignement un angle presque nul? Gela n'est pas
un instant admissible. Au surplus, dans un bail de 161 5, époque où l'état des
lieux nous est connu, le mur est appelé «gros mur de la Ville séparant le jardin
«du Louvre et le quai du port au Foing;n il ne saurait donc y avoir confusion.
L'identité d'alignement étant établie entre le mur de quarante-huit toises et une
portion de la courtine, le reste de cette courtine et la Grande-Galerie doivent être
considérés comme ayant un alignement commun, car le mur prolongé vient se con-
fondre avec celui de la galerie, sinon d'une manière rigoureuse, du moins en ne
présentant qu'une flexion à peine perceptible (2). Or, cette brisure ne doit pas être
attribuée à un changement de direction adoptée lors de la construction de la
Grande-Galerie , et cela par une raison analogue à celle que nous venons de donner.
On n'a pu songer en effet à se priver, sur une longueur de plus de cent vingt
toises, des fondations toutes faites qu'offraient les substructions de la grande cour-
tine de Charles V, dans le seul but d'obtenir une modification d'alignement abso-
lument insignifiante, puisqu'elle se serait traduite par une déviation de trois degrés
au plus avec l'ancienne direction (3). Rien d'ailleurs ne laisse soupçonner la né-
cessité d'un changement d'alignement, et l'on comprend, au contraire, qu'un
redressement vers le nord, si l'on en eût effectué un, aurait pu avoir pour résultat
l'étranglement de la rue des Orties ou l'obligation de pratiquer des retranche-
ments, procédé onéreux et encore peu en usage au xvie siècle. Enfin l'on observe
que, au-dessous du sol, le mur méridional de la Grande-Galerie n'a pas moins
de sept à huit pieds d'épaisseur, ce qui achève de nous faire croire qu'elle est
venue se planter sur les fondements de la courtine W. Cette circonstance explique
(,) Cette planche, dont M. Bonnardot, l'infati-
gable collectionneur, possède deux épreuves , repré-
sente un feu d'artifice; la pièce principale est placée
sur la tour intermédiaire, laquelle apparaît dérasée
à la hauteur de celle du Coin.
(!) Sur les grandes minutes deVerniquet, la bri-
sure ne forme pas même un angle d'un degré.
(S) La position de la tour de Bois, près de la-
quelle se terminait la courtine, nous est connue, et
la courtine ne pouvait se trouver plus au midi que
ne l'était la tour, qui, tout en commandant la ri-
vière, devait aussi servir à flanquer la courtine.
(4) Si la courtine eût eu la direction qu'on lui
prête, nous en aurions infailliblement aperçu quel-
ques fragments dans la grande tranchée pratiquée
pour l'égout des quais en 1861 .
["OPOCRAPHin KISTOMQVE 1)V VIHVX !•''
/ S 2*4-
l't.r le Nfuvc
VVE DES QVÀIS .
DEPVIS LA PORTE NEWE JVSOV'AV PONT AVX MEVNIERS, EN 1574.
imîle à un d emporain, appartenant à M. Destailleur.
[mp Ch Chardon- aîné.. Paru,
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 169
comment on ne voit nulle part la présence simultanée de la courtine et de la
galerie : l'apparition de l'une a coïncidé avec la disparition de l'autre.
La grande courtine de Charles V est désignée par le nom de et les murs de la
«rivière,!) dans un titre de 1687; dans un autre titre, de i58o, le fragment sub-
sistant devant le Louvre est appelé le rt gros mur qui faict closture du quay estant
«le long de la rivière de Seyne et du Louvre. ■» Un extrait de comptes, rapporté
par Sauvai, apprend qu'elle fut commencée en mars 1870 ('>. Sur les plans de
Belleforest et de Du Cerceau, elle est représentée munie de cinq demi-tourelles
en encorbellement, non du côté de la rivière, mais du côté de la Ville, disposition
extraordinaire, irrationnelle et, partant, très-douteuse. Sur la grande gouache de
l'Hôtel de ville, elle paraît relier une suite de sept tours rondes et complètes. Ce
second arrangement est bien plus vraisemblable, car la portion que nous connais-
sons, c'est-à-dire celle qui était située devant le Louvre, était flanquée effectivement
de tours rondes portant de fond, comme la courtine des Célestins, construite dans
le même temps et pour le même but'2'. Il est à remarquer que si, entre l'emplace-
ment de la galerie de Charles IX et la tour du Coin, on restitue la tour intermé-
diaire dont il a déjà été question, et si l'on reporte successivement la distance qui
le séparait de la tour du Coin, de façon que l'emplacement de l'extrémité de
la galerie de Charles IX devienne celui de la troisième tour, on trouve, entre les
tours du Coin et de Bois, la place des sept tours de la grande gouache. Des tours
flanquant la courtine, les quatre plus rapprochées de la Tour-Neuve subsistaient
encore en îb^U, fait attesté par le précieux dessin inédit qui porte cette date,
et dont le fac-similé est ci-joint. Comme sur le plan de la Tapisserie, les tours y
offrent la forme de cylindres saillants des deux côtés de la muraille; mais, à
l'exception d'une, elles y semblent reposer sur des espèces de culs-de-lampe , ou
plutôt être entamées par le bas, de telle manière que la section ressemble à une
trompe. La muraille est figurée crénelée, garnie de mâchicoulis et munie, au
centre de chacune de ses grandes divisions, de balcons de défense, qui sont
probablement les <rgarites doubles u auxquelles Guillebert de Metz fait allusion
en parlant de la courtine '3).
W "Les nouveaux murs du devant du Louvre,
(t 1370, commencés en mars. * ( Extrait des comptes
de Simon Gaucher, payeur de la Ville. Sauvai , t. III ,
p. iq4.) La chronique laline du Religieux de Saint-
Denis, publiée par M. Bellaguet, dit (t. I, p. 100)
que les fondements des courtines du bord de l'eau
furent jetés par le prévôt Hugues Aubriot: rrPrope
cportam Sancti Antonii ac Luparam prima jacieus
rfundamenta, u traque eciam latera Secane fluvii
t mûris lapideis in parte maxima claudit. 1
(,) Voir un dessin de Cellier dans le recueil déjà
cité.
11 (t Aux deux boutz de la basse partie de la Ville ,
irsur la rivière, son très-haulx et fors murs à grans
rr tours; c'est assavoir au Louvre où ils sont à garites
" doubles, les ungs dedens, devers la Ville, et les
r? autres du costé dehors de la Ville. Et aussi aux
ff Célestins, lesquelz eslora Hugues Ambriot, pré-
rrvost de Paris. n {Description de la ville de Paris,
publiée par M. Le Roux de Lincy, p. 75.)
170 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Le guichet (actuellement fermé) situé à une trentaine de mètres de la Petite-
Galerie existait bien avant la construction de la Grande; il avait nom le guichet du
Louvre dès i5oi, et le «guychet de la rivière de Seynenen 1 5 1 9. Un acte de îôW1'
mentionne une maison «assise au bout et faisant le coing de la rue Froitmantel,
«devant et à l' opposite du guichet du Louvre, sur la rivière de Seine, aboutissant
« par devant sur le pavé estant le long des murailles de la ville de Paris n (sur la rue
des Orties, qui longeait intérieurement la courtine). Entre la dernière et l'avant-
dernière tour de la courtine était aussi percée une porte en lïyjlx. Au-devant
du guichet du Louvre il y a eu , au xvie siècle , un port appelé « port du Guichet-
« du-Louvreu dans une ordonnance de la Ville qui fut rendue le 20 octobre 1 586
et qui prescrivait de prendre des pierres aux chantiers des fortifications des
Tuileries, pour exécuter des travaux de pavage sur ce port ainsi que sur celui
de l' Arche-d'Autriche. On lit également «port du Guichet-du-Louvren dans un
titre de i556, et ailleurs «port Sainct-Nicolas n (1 566), à cause du voisinage de
l'église Saint-Nicolas, et «port de l'Arche-Saint-Nicolas, dict le Guichet-du-
« Louvre n (1622). Le port situé devant le Louvre s'appelait le port au Foin dès
le commencement du xvne siècle (161 5); au xvme siècle, il se nommait, dans
sa partie orientale, le port au Blé, et aussi le port aux Huîtres.
Au bout de la courtine du bord de l'eau s'élevaient la tour de Bois et la Porte-
Neuve , que l'on n'a jamais tenté de restituer qu'au moyen des vues et des plans
à vol d'oiseau. Plus heureux que nos devanciers, nous avons découvert un plan
géométral manuscrit'2', qui, malgré ses inexactitudes, nous a beaucoup aidé à
comprendre et à restituer l'ensemble et surtout la situation de ces constructions.
D'après ce plan , l'axe de la tour aurait été à environ soixante-sept mètres de l'axe
du pavillon de Lesdiguières, et la porte qui la précédait, à quarante-trois ou qua-
rante-quatre mètres plus loin. Reportant ces distances sur le plan de Verniquet,
nous avons reconnu que la face extérieure de la porte se plaçait à environ sept mètres
du bas d'un escalier accolé au quai, en parfaite conformité avec les vues de Syl-
vestre et avec la situation du mur d'enceinte, du côté des Tuileries. Aussi bien avions-
nous un excellent moyen de contrôler notre restitution. La belle et grande vue de
Sylvestre, gravée en i65o, et donnant la meilleure représentation de la Porte-
Neuve, fait voir qu'en avant de cette porte il y avait deux baies en plein cintre
pratiquées dans le mur du quai, et que la plus rapprochée de la porte en était
éloignée d'une distance qu'un tracé perspectif montre avoir été le double de la
largeur de la baie. Or les deux baies existent encore; celle d'amont a deux mètres
"' Arch. de Saint-Thomas-du-Louvre. une note apprend qu'il a été copié d'après les an-
(S> Ce plan, dessiné sur parchemin et dressé à ciens plans des voyers. Il provient de l'abbaye
une échelle inférieure de près d'un quart à celle de Saint-Germain, et se trouve aujourd'hui dans le
Verniquet, porte la date du 1 5 octobre 1 665 ; mais carton des Archives de l'Empire coté S 2857.
TOPOGRAPHIE HISTOR1QJ/E DV V1EVX PARIS.
V
mot' del .
A, Berty dir.
Ate Guillaumot et ELebel se.
VVES DE LA PORTE NEVVE
d'après Israël Sylvestre.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 171
soixante-cinq centimètres de largeur, et conséquemment le parement de la Porte-
Neuve devait en être éloigné de près de six mètres. Là , en effet, apparaissent dans le
mur du quai les traces de la porte, dont la partie en saillie sur ce mur a fini par
se transformer en une sorte d'éperon. Les fouilles faites en 1 8 6 1 pour le grand égoul
nous ont fourni une preuve matérielle de l'exactitude du résultat que nous avions
obtenu au moyen des observations précédemment indiquées ; une ligne partant du
jambage occidental du premier guichet du Carrousel (le plus rapproché du Louvre) ,
et rejoignant un point du mur du quai placé à sept mètres de celui où commence
la courbure de la rampe, coïncide avec le parement extérieur de la Porte-Neuve.
Entre la Porte-Neuve et la Grande-Galerie il existait une maison de trois travées,
attenant à la porte, ayant pour dépendance une sorte de pavillon carré, voisin de
la tour de Bois, et plus ancien que la maison. (Voir le grand plan de restitution,
feuille V.) Celle-ci fut construite, vers l'année 1 635 , pour servir de logement au
Grand Prévôt, d'après le passage suivant du Supplément manuscrit aux antiquités de
Paris, qui fut rédigé en i638 ou i63c)W: '«Près la Porte-Neufve (ainsy appellée
et cy-devant) est l'hostel du Grand Prévost de France et de l'hostel du Roy, basti
«depuis quatre ans, avec tout le logement nécessaire à son train, qui a son com-
te mencement par la haute tour INeufve joignant à cet hostel. A présent le sieur de
tt Hoquincourt y fait sa demeure, fort commode pour estre proche du Louvre. »
La Porte-Neuve ne consistait qu'en une simple muraille épaisse de un mètre
soixante centimètres et ornée de deux ordres superposés, offrant chacun trois pi-
lastres. Au centre de l'étage inférieur était une grande baie en plein cintre formant
la principale entrée, et accompagnée d'une petite baie rectangulaire pour les pié-
tons. A la travée centrale de l'étage supérieur on remarquait un écusson aux armes
de France, encadré dans un chambranle à fronton. Un entablement couronnait le
bâtiment et se continuait sur un mur'2' ou plutôt sur une aile en retour, à l'extré-
mité de laquelle s'élevait le pavillon rectangulaire, proche de la tour de Bois. Les
lignes des deux constructions se raccordaient de façon à éloigner l'idée d'une sou-
dure, ce qui permet de croire qu'elles étaient contemporaines'3). H paraît certain
que le pavillon est le logis auquel il est fait allusion dans le passage suivant d'un
bail de i58G : «Corps de garde, naguères faict de neuf, et dressé contre le logis
(l) M. Le Roux de Lincy a récemment conslalé
que ce manuscrit ne diffère point du livre de môme
nom publié en 1 6 3 9 .
(,) Le plan n'indique qu'un mur; mais il est évi-
dent qu'il y avait une aile, laquelle est figurée sur
les vues de Sylvestre comme présentant un ressaut
au premier tiers de sa longueur. La tranchée faite
en 1861 a laissé voir un mur que nous croyons
être le mur extérieur de celte aile, dont rien ne
nous a révélé la profondeur. Des murs et des mas-
sifs de maçonnerie mis au jour par les fouilles
étaient sans doute les restes des divisions intérieures
de l'aile, qui ne s'attachait point d'équerre h la
Porte-Neuve.
(3> Le pavillon figure sur la vue de i57^et sur
le plan manuscrit de la Porte-Neuve, où n'est pas
reproduite la maison du Grand Prévôt, laquelle
n'était sans doute point bâtie lorsqu'on fit le plan.
172 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
«de la Porte-Neufve d'icelle Ville. Ensemble une place vague estant entre ledict
« corps de garde et la tour estant près ladicte Porte-Neufve appelée le Chasteau
« de Boys. . . estant icelle place sur la largeur de douze pieds pour y bastir maison, v
On lit aussi dans un procès-verbal de visite, dressé par Guillaume Guillain, le
39 août 1577 : et A costé de ladicte porte, y a ung logis couvert en pavillon applic-
«qué à une porte et entrée, avec une grande allée voultée, de cinq toises de long
«sur buict pieds de large, et à costé, une forme d'allée de quatre toises de long
«sur six pieds de large, avec autres aysances près lad. salle; et au-dessus du rez-
« de-chaussée , une chambre et une garde-robbe; et, au-dessus, les greniers selon
«le contenu dud. lieu. Une viz dans œuvre, qui sert à monter audict lieu et aux
rt terrasses et allée qui sont sur le pont-levis de lad. Porte-Neufve. Et entre ledict
«bastiment et la grande tour du Bois, y a ung petit bastiment qui est en partye
« ruyné , et n'y a aulcune couverture ; qui pouvoit servir à loger le portier ancien-
«nement. v Sur une vue de Sylvestre, de petites maisons sont effectivement repré-
sentées entre le pavillon et la tour de Bois. Le pavillon doit également être ce
ff logis du Boy, près la Porte-Neufve , r> dont il est fait mention dans les comptes des
bâtiments royaux de la fin du règne de Henri II. En 1 557, Eustache Ive y fit pour
3 livres 9 sous 9 deniers de travaux de maçonnerie; en 1 558, Léonard Fontaine
y fit pour 65 livres de travaux de charpente, et Jean Le Gay, pour 54 livres 1 2 sous
6 deniers d'ouvrages de couverture. Il en est aussi question dans un titre de 1577.
Suivant le plan des archives de l'Abbaye, le pavillon aurait été presque carré, et
d'après la vue de Sylvestre, il aurait, au contraire, été assez étroit par rapport à
sa profondeur. Les fouilles de 1861 nous ont montré qu'il n'avait que cinq mètres
vingt centimètres de largeur, et qu'il était précédé d'un mur biais, couronné d'une
corniche à chanfrein, destinée apparemment à recevoir une retombée quelconque.
Du parement intérieur de la Porte-Neuve au pavillon, la distance comprenait un
peu plus de trente-deux mètres.
La Porte-Neuve était munie d'un pont-levis placé devant la grande entrée, et
d'une planchette correspondant à la petite entrée. Sur les vues de Sylvestre, on
aperçoit les ouvertures destinées au jeu des flèches ; mais il n'y a plus de pont-levis,
et à la place apparaît une chaussée continue. Nous voyons, en effet, dans les re-
gistres du Corps municipal, que, le 6 juillet 1687, le Bureau de la Ville ordonna
au Maître des œuvres de charpenterie «d'abattre et desmolir le pont-levis de la
« Porte-Neufve , et, au lieu d'iceluy, y faire un pont dormant garny de plates-
rc formes, et disposer la charpenterie en telle sorte qu'il -n pût « estre pavé par-dessus
«au plustôt. r> Dans le devis fait à cette occasion, il est spécifié qu'il y avait à la
porte « ung pont-levis et une planchette garnis de barrières aux deux costez desd.
«pont et planchette ; n puis que «les flèches et tappecul tant dud. pont-levis que
«de la planchette n étaient de nulle valeur. Un pont-levis implique un fossé; il y
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«5
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 173
en avait donc un devant la Porte-Neuve ; les deux arcades qui existent encore , et
qui servaient au passage des eaux, en sont une preuve matérielle. Mais ces arcades
et la porte même étaient en saillie par rapport à la contrescarpe du fossé, dont
nous connaissons la position exacte, au nord de la Grande-Galerie. Il s'ensuit que
la contrescarpe présentait un décrochement ou ressaut au-devant de la Porte-
Neuve, du moins à la fin du xvie siècle et au commencement du xvne. Antérieu-
rement ce ressaut n'existait peut-être point, et l'on pourrait croire que la Porte-
Neuve a été élevée sur un dos d'âne séparant le fossé de l'arrière-fossé , c'est-à-dire
dans une position analogue à celle des barbacanes ou boulevards qui protégeaient les
portes Saint-Denis et Saint-Martin. L'arrière-fossé , qu'on aurait supprimé lors de la
construction en pierre de la contrescarpe, en exceptant toutefois la partie située au-
devant de la porte, aurait laissé celle-ci dans la situation singulière où nous la
trouvons. H est vrai que le plan de la Tapisserie n'indique point d'arrière-fossé dans
cet endroit, mais une charte du mois de juillet 1 385 , que nous citerons dans le
chapitre ix, donne à croire qu'il y en a réellement eu un, et il se pourrait qu'il eût
été conservé longtemps au-devant de la Porte-Neuve. A i'appui de cette hypothèse,
nous observions, sur le plan de Quesnel, que le fossé est représenté comme se con-
tinuant en ligne droite sous la Grande-Galerie, de façon à passer entre le mur de
Bois et le revers de la Porte-Neuve , et l'existence de cette disposition nous semblait
d'autant plus probable que, sur les vues de Sylvestre, on aperçoit, en amont de la
porte, deux arcades qui, pareilles aux arcades d'aval, servaient de même à la dé-
charge des eaux des fossés*1'. Nous avons constaté, en 1 865 , que le canal en ques-
tion était postérieur à la construction de la Grande-Galerie, et nous l'avons fait
effacer sur la planche. Les fouilles de 1 86 1 ont levé nos incertitudes sur l'agen-
cement du fossé devant la Porte-Neuve, car elles ont mis au jour un mur de con-
trescarpe courant en biais, et se coudant ensuite de façon à se relier avec le pied-
droit occidental de la seconde arcade d'aval. Ce pied-droit n'était autre chose que
la culée du pont dormant, lequel se composait de deux arches voûtées et était pré-
cédé d'un espace vide que le pont-levis servait à franchir. Cet état de choses est
rétabli sur notre plan, où nous n'avons eu qu'à compléter des fragments de forme
et de dimensions certaines <2'. En deçà de la porte , il est douteux que les arcades aient
(l) Les deux arcades en amont, figurées sur le
dessin de 1676, sont aujourd'hui cachées sous une
large rampe qui a remplacé ce petit escalier des
vues de Sylvestre qu'on retrouve sur le plan deVer-
niquel, en même temps que l'embouchure de l'é-
gout correspondant aux arcades d'amont. Les fouilles
de 1861 ont causé la destruction du canal biais et
coudé qui se déchargeait par les arcades d'amont,
et que nous avons tracé en ponctué.
(,) Les deux arches du pont existent, et nous
savons qu'elles devaient avoir cinq toises et demie
d'une tête à l'autre (on n'en voit plus aujourd'hui
que quatre toises environ). Les traces du remplis-
sage de la travée du pont-levis sont extrêmement
sensibles, et prouvent que la seconde pile était
épaisse de deux mètres soixante centimètres , comme
la première. Il n'y a donc rien de conjectural dans
notre restitution.
174 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
formé un véritable pont comme celles qui étaient au delà. Le 6 mai 1609, la Ville
les loua toutes au nommé Charles Doussier; le bail les énonce, tr quatre arcades en
tr forme d'allées voultées, dont deux en dedans de la Ville, chacunne de cinq thoises
cret demies de long, toutes pavées de pierre de liais, traversant la chaussée au
«derrière du pont-levis, et les deux autres au dehors, entre icellui pont-levis et
ce le tappe-cul de ladite Porte-Neufve. n
La tour de Bois terminait, sur la rivière, l'enceinte de Charles V, comme la tour
du Coin terminait celle de Philippe-Auguste. Ainsi que la tour du Coin, elle était
surmontée d'une plate-forme crénelée, à mâchicoulis, et avait son escalier hors
d'œuvre dans une cage en forme de tourelle , dont la hauteur excédait le niveau
de la plate-forme. Les gravures de Sylvestre lui donnent quatre étages. Suivant la
chronique latine du religieux de Saint-Denis, elle fut entreprise en i38a, immé-
diatement après le retour de Charles VI à Paris, d'après les ordres du Roi, et afin
de lui assurer le pouvoir de sortir de la Ville quand il lui plairait W. La tour ne
devait point son nom, comme on l'a imaginé, au voisinage d'un bois, mais bien à
la proximité d'une de ces fortifications, bastides ou bretêches en charpente, qu'on
nommait ieschâtemix de bois. Nous avons cité un titre de 1686 où elle est énoncée
« tour auprès de laquelle souloit avoir ung chaste! de bois.» Elle est appelée «tour
crdu chasteau de Boisn dans les comptes du Parloir aux Bourgeois pour l'année
1 hi h-i U25, et dans d'autres pièces aussi postérieures à la démolition de la bastide.
Cette démolition eut lieu en vertu d'une ordonnance de 1^20, dans laquelle
il est dit ce que le chastel de Bois lèz le Louvre estoit moult préjudiciable à la for-
et teresse de la Ville, parce que les habitants d'icelle n'eussent pu aller jusques à
tria tour de la dicte Ville, qui faict le coing, qui est sur la rivière, devant et à
tr l'opposite de Nesle'2l n Le château de Bois est mentionné dans le censier de l'Evêché
pour l'année 1 399.
La tour du château de Bois, appelée indifféremment tour de Bois ou du Bois,
était, au xve siècle, protégée par une enceinte palissadée. Il est parlé, dans un titre
de 1/181, «du druit (circuit) de la tour du chasteau de Boys, en tant que l'ancien
trpaleys et affiche autour de ladite tour, pour la deffense de laditte Ville, se com-
te porte, a Un autre, de i65g, contient le bail de la pêcherie et du pourpris (l'en-
rt ceinte) du boulevart de Boys , n lequel , ajoute-t-on , tt est près du bastardeau W qui
et retient l'eaue des grands fossés de lad. Ville, joignant de la tour du chasteau de
et Boys, n Le batardeau en question était en pierre et muni d'une terrasse; pour y
parvenir, il fallait passer par la chambre du premier étage au-dessus du rez-de-
(1) crPropter eamdem causam tnrrim validam, (3) Entre 1 5i6 et i5i8, on paya a François de
rquam an mis Sequane subtus ambiret, prope Lu- Caumont la somme de 65 livres parisis pour avoir
rparam conslruxit.» (T. I, p. a38.) fait un rr bastardeau au travers du bout du fossé...
(î) Mémoire de Bouquet, p. 170. rrprès la lourde Bois, de septàhuit toises de long, *
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 175
chaussée de la tour, ce qu'on voit par le bail qui en fut fait, en i6i3, au nommé
Perrin, et par les comptes de la Ville, où il est indiqué que le troisième étage
de la tour servait a à mettre l'artillerie et les habillemens de guerre W, fl Un
extrait de comptes, cité par Sauvai, établit qu'en îb^S la tour de Bois avait été
reprise par la Ville pour y déposer des poudres. Nous n'avons point vu que,
suivant l'assertion de M. Bonnardot, elle ait été nommée tour de l'Écluse, ce qui
est néanmoins fort possible, ou Tour-Neuve (excepté au xvne siècle), et encore
moins tour du Coin, confusion qui n'a été faite que par les historiens modernes.
La tour de Bois a été démolie vers 1670®, en même temps que la Porte-Neuve,
dont la partie en saillie sur le mur du quai a subsisté pendant quelque temps,
figurant une sorte d'éperon ou contre-fort. La construction de la Porte-Neuve
avait été la conséquence de la création du quai du Louvre, dont nous sommes
ainsi amené à parler.
Le i5 mars 1627, François Ier envoya au Prévôt des marchands et aux Éche-
vins une lettre dans laquelle il leur demandait de faire faire a ung chemin le long
ff de la tour respondant sur la rivière t> (la tour du Coin); la porte du Louvre allait
en effet être fermée aux voitures, ce qui rendait nécessaire un chemin pouvant
remplacer la voie supprimée. On ne mit pas un grand empressement à obéir au
Roi; car, trois ans après, les choses étaient encore à peu près dans le même état, et,
le 26 juin i53o, le Corps de la Ville délibéra à propos d'une lettre dans laquelle le
Gouverneur de Paris recommandait de commencer promptement a le quay et pontï)
rendus indispensables par <r la closture du guichet du Louvre n (la porte de Philippe-
Auguste) , ajoutant que, conformément à l'avis du Bureau de la Ville, le Roi souhai-
tait que le pont fut bâti en pierre et non en bois (3l Cette fois on se mit sérieusement
à l'œuvre, et le 1 5 juillet, le Bureau adopta le rapport qui lui fut présenté par les
maîtres des œuvres touchant le genre de pierre à employer; il fut convenu qu'on
ferait usage de (tbonban de Vergellé ferme, de vingt poulces de hault,n déclaré
préférable au cliquart et au haut liais de Vaugirard; les garde-fous devaient être en
liais de Notre-Dame-des-Champs. Le 10 mars i53o (v. s.) le Roi accorda à la Ville
une aide sur le poisson et le sel, dans le but de subvenir aux frais d'exécution.
(l) <rDe la tour du chasteau de Bois et du logis occupait alors la lour de Bois, Pierre Gorre, était
<r d'habitation d'icelle, et tout le lieu ainsy qu'il se obligé par son bail rrde faire ouverture» quand on
tr comporte , excepté la chambre du troisième estaige aurait rr à faire pour aller lever ou abaisser la bonde r
rrde ladite tour, qui sert h mettre l'artillerie et ha- qui était au balardeau.
ffbillemens de guerre pour la deffense d'icelle Ville, m Elle avait été baillée pour soixante et dix ans
iretaussy réservé l'allée pour où l'on va sur la terresse en 1612, et fui donc abattue avant l'expiration du
irdu bastardeau de pierre joignant de ladite tour, qui bail.
«relient l'eaue des fossez de ladite Ville; pour ce (5) Les lettres royaux commencent par ces mots:
ff que, pour y aller, fault passer parmy la chambre du «Pour ce que désirons que le quay que avez, par
<r premier estaige du rez-de-chaussée. » (Comptes du rr notre ordonnance, encommencé le long des murs
Parloir aux Bourgeois, année 1 444-1 445.) Celui qui rrdu chastel du Louvre, etc. »
176 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Les travaux néanmoins n'avancèrent qu'avec beaucoup de lenteur, puisque, le
1 5 décembre 1 536, le Roi, étant à Fontainebleau, envoya de nouvelles lettres où
il pressait cr la continuation du quay qui estoit encommancé devant le Louvre,
ffle long de la rivière, par le dehors de la muraille n (la courtine), et par lequel,
disait-il, et il nous sera beaucoup plus aisé de prandre le chemyn pour aller à
ttBouIIongne, où faisons compte d'aller souvent à l'esbat. t> H y avait urgence,
poursuivait-il, de «faire ung pont en porte au bout dudit quay, pour sortir par
«hors nostre dicte Ville, et aussi faire paver icelluy quai pour rendre le chemyn
«plus nect et plus biau, de sorte que nous trouvions le tout fait à nostre arrivée en
«ladicte Ville, n On ne satisfit point complètement à ce désir, car, le 8 septembre
i538, le Corps de Ville étant allé rendre visite au Roi, à Saint-Germain-en-Laye,
fut invité à a parachever le bastiment du quay pour passer du Louvre aux Tuile-
ct ries, n Le fait est consigné, comme tous ceux qui précèdent, dans les registres
de délibérations, où nous les avons recueillis. Un passage du mémoire de Bouquet
nous apprend que, en la même année 1 5 3 8 , on acheta des pierres destinées à
«la construction d'un pont entre la tour du Bois et les Thuilleries, pour la corn-
et modité et aisance du passage des marchandises. n En 1 537, ^ Sauvai, les tra-
vaux avaient déjà coûté 10,000 écus, et une somme égale était nécessaire pour
leur achèvement.
Ainsi la Porte-Neuve a été élevée vers 1 5 3 7 , le pont vers 1 5 3 8 , et le quai , com-
mencé vers i53o, n'a pu être terminé avant i53o,. Ce quai, dit au xvue siècle
quai des galeries du Louvre, présentait, entre le port Saint-Nicolas et la Porte-Neuve,
quatre descentes, l'une très-proche de la porte et parallèle au fleuve, et les trois
autres perpendiculaires à son cours. La plus voisine du port Saint-Nicolas a dis-
paru dans la seconde moitié du xvuc siècle, à cause de l'agrandissement du port; la
seconde a été supprimée plus tard, et la troisième semble avoir été élargie au
xviue siècle. Quant au quai même , il a subsisté jusqu'à nos jours dans la partie située
en aval du pont des Arts; en deçà, il a été reconstruit dans une nouvelle direction
en vertu de lettres patentes du 27 mars 1719. A cette époque, le mur du quai,
depuis la rue des Poulies jusqu'à une trentaine de mètres avant la tour du Coin,
point où il faisait une flexion , était le même qu'en l'année où fut exécuté le retable
du Palais de Justice; on retrouve en effet, sur ce retable, jusqu'à la descente située
vers le milieu de l'hôtel de Bourbon; mais la portion de mur qui commençait
à environ trente mètres de la tour du Coin avait pu être rebâtie pour faciliter
l'entrée du nouveau quai. Ce dernier empiétait probablement plus sur le lit de
la rivière que le quai primitif, lequel, au reste, s'étendait également devant la
tour du Coin et la courtine, si les tableaux du Palais de justice et de Saint-Ger-
main-des-Prés sont exacts.
Avant d'examiner l'emplacement du mur de l'enceinte de Charles V, vers les
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 177
Tuiieries, et pour en finir avec les environs du Louvre du côté de la Seine, nous
dirons quelques mots de la rue des Orties, qui longeait la face septentrionale de la
Grande-Galerie depuis la rue Fromenteau jusqu'à l'enceinte, et dont les derniers
restes ont disparu en i85o.
Dans la rue des Orties il n'y a jamais eu de maisons que du côté du nord, car,
avant la construction de la grande courtine du bord de l'eau, la rue n'était autre
que le chemin de halage. Les maisons qui la bordaient, ayant vue sur la rivière,
étaient dites super rippam Secane (1369). On se servait au reste de locutions analo-
gues longtemps après que la courtine eut été bâtie : ainsi, a maison sur Seine n en
1&80, crue seur Sène-n en i522, et «rue de Seyneu en 1 568 , 1 58A , etc. La
rue a été appelée également a chemin devers les murs de la rivièren (1^37),
trgrant rue du Louvre n (i455), a rue du Louvre •» (i53o), «chemin tendant du
s Louvre à la tour de Bois a (i53o), et ce le pavé estant au long des murailles n
(1 5 1 g) , parce qu'elle longeait la courtine. Le nom de rue des Orties, emprunté
aux plantes sauvages qui y croissaient, ne semble pas fort ancien, et nous ne
l'avons point trouvé avant 1 5g 1 . On a quelquefois dit simplement renie de l'Or-
"tyeî! (1608). Dans le censier de l'Evêché de i6o3, on lit : «rue des Orties, alias
rrSainct-Nicolas-du-Louvre;Ti dans un titre de i6a3, a rue des Galleries,Ti et dans
un autre de 1667, « rue des Galleryes du Louvre, autrement des Ortils. n A l'extré-
mité occidentale de cette rue il y avait, dès la fin du xve siècle, un marché aux
moutons (voir p. 73), et dans cette partie elle a été appelée, au commencement
du dernier siècle, rue de la Petile-Monnoye, parce qu'elle était voisine de la Mon-
naie, installée en la grande galerie du Louvre.
Toutes nos recherches pour découvrir un plan géométrique donnant une por-
tion quelconque de l'enceinte entre la tour de Bois et la porte Saint-Honoré ont
été sans succès; mais il est heureusement d'autres documents dont nous avons pu
nous aider.
On voit de la manière la plus nette sur les plans de Quesnel et de Mérian que,
au commencement du xvne siècle, le jardin devant les Tuileries avait pour limites,
vers l'orient, le fossé même de l'enceinte de Charles V, dont la contrescarpe for-
mait, pour ce jardin , un mur de soutènement buté par des éperons rectangulaires.
Sur le plan de Gomboust on retrouve la contrescarpe et ses éperons intacts; mais
la partie méridionale du fossé est comblée et sert de jardin à l'hôtel de la rue
Saiut-Nicaise dit plus tard hôtel de Beringhen. Sur plusieurs plans postérieurs,
particulièrement sur le grand plan manuscrit de Bullet, conservé aux Archives de
l'Empire, le jardin des Tuileries n'existe plus, mais celui de l'hôtel de Beringhen
i'este toujours borné par une portion du mur de la contrescarpe, encore muni de
ses éperons, lesquels, après avoir formé des saillies sur le fossé, figurent mainte-
nant des redans en creux par rapport à la place du Carrousel. En rapprochant le
1. • 28
178 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
plan de Bullet de celui de Verniquet, on reconnaît sur-le-champ et sans la moindre
hésitation que le même mur n'a point été déplacé, qu'il clôt toujours l'hôtel de
Beringhen , qu'il passait à environ soixante-sept mètres du coin occidental des rues
Saint-Nicaise et des Orties, et que, si on l'eût prolongé, il serait allé se confondre
avec l'alignement occidental de l'ancienne rue du Carrousel. On a d'ailleurs trouvé,
au commencement de ce siècle, un fragment de la contrescarpe entre la seizième
et la dix-septième arcade à partir du pavillon Marsan W, et la situation de ce frag-
ment justifie notre tracé, à l'appui duquel nous citerons encore deux preuves
concluantes. Les plans de Quesnel et de Gomboust montrent, accolé à la face
septentrionale de la Grande-Galerie, un pavillon qui contenait un escalier et s'ap-
puyait sur le mur de la contrescarpe; or ce pavillon, fort peu connu, dont nous
avons de très-bons plans, occupait un emplacement correspondant à celui des deux
premières colonnes après la grande travée de la galerie : c'est exactement à ce
point que passe le mur à éperons, restitué d'après les données ci-dessus indi-
quées. Une seconde preuve, incomprise jusqu'à ce jour, c'est l'existence même de
la grande travée à niches de la galerie , travée qui ne diffère des autres que parce
qu'elle constituait un pont au-dessus du fossé, dont elle indique conséquemment
la situation d'une manière permanente et incontestable.
On lit dans Bonfons : a Ce qui ensuit est gravé à une pierre estant autour des
fr fossés bastis depuis la porte Sainct-Honnoré jusques à la porte Neufve, qui sont
• faicts pour la closture de la maison et palais de la Boyne, mère du Boy : Du règne
rrdu très-chrestien Henry troisiesme, roy de France et de Polongne, et du gou-
vernement pour Sa Majesté en la ville de Paris et Isle de France, Béné, seigneur
rde Villequier, et de la prevosté et échevins de M. Augustin de Thou, Jean Ge-
crdouyn, M. Pierre Laisné, Anthoine Mémin et Nicolas Bourgeois, mdlxxxi W. i»
Du Breul dit également qu'en 1 58 1 on édifia les murs du fossé de la Porte-
ff Neufve ®.n A quoi se rapportent ces deux passages? Les auteurs ne se sont point
expliqués à ce sujet, et M. Bonnardot seul'4' a tenté de résoudre la question, en
affirmant que Du Breul a fait allusion à la porte dite depuis (le la Conférence; mais
il est au contraire certain que, là comme ailleurs, par le nom de Porte-Neuve
Du Breul désigne seulement la porte voisine de la tour de Bois. En effet cette
expression «les murs du fossé ti ne peut indiquer ni l'enceinte du xive siècle, ni le
bastion des Tuileries commencé en i566, et n'a trait qu'à une contrescarpe. Or,
(1) Ramond du Pouget, qui rapporte le fait Honoré ne peut avoir été située aussi loin vers
(Notice sur les anciennes enceintes, p. 27), a pris ce l'ouest.
fragment pour une portion du mur même de l'en- ;,) Édition de 1 586 , fol. 198 v\
ceinte, d'où il résulterait que la porte Saint-Honoré (,) P. io64.
était à la hauteur de la rue Traversière; il n'est (t) Dissertations archéologiques sur les anciennes
point difficile de reconnaître que la porte Saint- enceintes de Paris , p. a48.
DESCRIPTION DU VIEUX LOUVRE, ETC. 179
il n'y a jamais eu de contrescarpe en maçonnerie au bastion des Tuileries, tandis
qu'il en a existé une, d'origine évidemment peu ancienne, au fossé voisin de la
tour de Bois. Bonfons d'ailleurs, s'il avait eu en vue les fossés du bastion, n'aurait
point dit qu'ils avaient été ce bastis depuis la porte Sainct-Honoré jusqu'à la Porte-
(rNeuvfe, et faicts pour la closture de la maison et palais de la Royne mère,n
parce que non-seulement le jardin des Tuileries n'occupait que les deux tiers de
l'espace renfermé entre la rue du Faubourg-Saint-Honoré et la Seine, mais encore
et surtout parce que, au xvie siècle, le bastion ne servait point de clôture au jar-
din, car il en était séparé par un espace vide assez considérable. En revanche, les
expressions de Bonfons conviennent parfaitement à la contrescarpe à éperons, qui
constituait réellement la clôture du palais des Tuileries vers l'orient, et nous sa-
vons ainsi que cette contrescarpe, si manifestement élevée à une époque récente
et pour faciliter l'établissement du Petit-Jardin, a été bâtie en 1 58 1 .
Connaissant la situation précise du mur de la contrescarpe et celle de la tour
de Bois, on découvre sans peine l'emplacement du mur de l'enceinte, qui devait
être parallèle. Le plan de Gomboust démontre qu'il faut le chercher dans l'aligne-
ment de la façade occidentale de l'hôtel de Beringhen, à trente-deux ou trente-
trois mètres de la contrescarpe; plus loin le trajet du mur d'enceinte est identique
avec celui d'une muraille reproduite en perspective dans les vues du grand Car-
rousel de Sylvestre, et avec celui de murs mitoyens dont le dernier séparait l'entrée
du marché des Quinze-Vingts de la maison voisine vers l'ouest, à dix-huit mètres
de la petite rue Saint-Louis. L'enceinte ainsi retracée court en se rapprochant,
vers le nord, de la rue Saint-Nicaise : telle était sa position suivant les baux faits,
en 1616, des terrains du rempart, qui ont formé le côté occidental de la rue.
Ces baux énoncent diverses profondeurs de lots depuis neuf toises et demie, dix,
onze , douze toises, etc. jusqu'à dix-huit ; or les bâtiments de l'hôtel de Beringhen,
dans leur plus grande profondeur, c'est-à-dire sur la rue des Orties, présentaient
effectivement ces dix-huit toises entre la rue Saint-Nicaise et les jardins établis
sur l'emplacement même du fossé.
De la porte Saint-Honoré à la tour de Bois, le mur de la ville, bâti avant i3o,o ,
avait cent quatre-vingt-dix toises de longueur'1', dimension que nous retrouvons
fort exactement ; sur le plan de Braun, il est représenté flanqué d'une seule tour;
sur celui de Du Cerceau il y en a deux*'2'; sur ceux de Quesnel et de Mérian, on
n'en voit aucune. Nous pensons qu'il n'en existait réellement plus à l'époque où ces
deux derniers plans ont été dressés, et cela peut-être par suite d'un remaniement
(1) Sauva], t. I,p. 60. pavillon avait quatre toises quatre pieds six pouces
(,) C'est le nombre probable. Nous croyons avoir de profondeur, et quatre toises deux pieds de lar-
reconnu dans un pavillon attenant au mur de l'hô- geur; il était à quarante-six toises de la Grande-
tel de Beringben l'emplacement d'une des tours. Ce Galerie, et il figure sur le plan de Verniquet.
a3.
180 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
contemporain de la contrescarpe. Quant au fossé, que les prisonniers du Châtelet
creusèrent plus profondément de i523 à 1 533 , rien n'indique qu'il ait été sensi-
blement rétréci, puisque nous lui trouvons une largeur de près de dix-sept toises;
c'était celle des fossés creusés sous le règne du roi Jean, suivant Bouquet, et elle
s'éloigne peu des proportions des fossés voisins des tours de Nesle et Saint-Ber-
nard. Nous avons fait remarquer qu'il pouvait y avoir eu un arrière-fossé supprimé
à la fin du xvie siècle. Les fortifications de Charles V entre la tour de Bois et la
porte Saint-Denis ont été détruites sous Louis XIII. (Voir Place du Carrousel.) Alors
disparut aussi une butte de terre proche du marché aux moutons, laquelle fut,
le 8 juin i5qo, abandonnée par la Ville à un nommé François Imbert, pour
qu'il y construisît un moulin à vent, en remplacement de celui que les troupes
royales lui avaient brûlé le ih mai précédent, et qui existait déjà en îb^U.
En déterminant l'emplacement de l'enceinte, nous avons aussi fixé celui de la
seconde porte Saint-Honoré, qui en dépendait, mais dont nous ne saurions indi-
quer les dimensions, faute d'un plan de quelque valeur. Elle consistait en un
bâtiment rectangulaire flanqué à ses angles de tourelles en encorbellement ou
portant de fond, car les vues ne concordent pas sur ce point. Au devant étaient un
pont dormant sur lequel s'abattait le pont-Ievis , et un boulevard à herse , addition
relativement moderne, qui paraît dater de 1 5o,3. On lit, en effet, dans les registres
de la Ville, que, le 1 8 décembre de cette année, le duc de Mayenne accorda aux
maîtres des œuvres du Corps municipal la permission de prendre des pierres et
des moellons rten quelques fondemens cy-devant commencez et délaissez près le
rcbastiment neuf des Thuilleries, pour réparer et couvrir d'un ravelin-n la porte
Saint-Honoré, que les boulets avaient ruinée pendant le siège. Cette avant-porte
gênant la circulation, le Boi, par lettres adressées au Prévôt des marchands, le
17 juin i6o3, en ordonna la démolition en même temps que le comblement du
fossé à cette place w. Le pont-levis de la porte, étant pourri, fut remplacé par un
pont dormant en 1609 M.
La seconde porte Saint-Honoré, qui, assure-t-on, a été quelquefois nommée
(1) <r Très-chers et amez ( le Prévôt des marchands
fel les Echevins), ayant advisé pour la commodité
"du publicq de nostre bonne ville de Paris de faire
"•abbattre le boulievert et remplire le fossé qui est
"devant la porte Sainct-Honnoré de nostre bonne
" ville de Paris , et rendre , par ce moyen , l'entrée et
rryssue par ladite porte en droicte ligne, tirant de
fia grande rue Sainct-Honnoré en celle des faul-
» bourgs, comme elle estoit anciennement et aupa-
ravant les derniers troubles, nous vous mandons,
^ordonnons et très-expressément enjoingnons que,
r incontinent après la présente receue, vous ayez à
rr faire abattre ledit boulievert, remplire le fossé
rrd'icelluy, applanir le chemin droict, et icelluy faire
rr paver selon noz voulloir et intention, etc.n (Arcli.
de l'Emp. reg. H 1793, fol. i63 v°.) On trouve
néanmoins la mention du boulevard après cetle
date , mais il ne s'agit sans doute que de l'empla-
cement.
m rrEn la porte Sainct-Honnoré, faut faire ung
rrpont dormant au lieu du plancher du pont-levis,
rrqui est du tout pourry et en partie ruyné. » (Procès-
verbal de visite du 99 juin 1609, reg. H 1795,
fol. 7 li.)
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 181
porte des Aveugles, à cause du voisinage des Quinze -Vingts, fut abattue en i63k^\
et l'on bâtit une boucherie sur son emplacement. (Voir Rue Saint-Honwé, 2e partie.)
Par un traité conclu, le a3 novembre 1 633 , avec Charles Froger, pour la con-
struction de l'enceinte bastionnée du faubourg Saint-Honoré, traité enregistré au
Parlement le 5 juillet i63i, Froger avait été «tenu de faire abattre et desmolir
rr les anciennes portes, murailles et remparts; faire combler les anciens fossez,
<r depuis la grande galerie du Louvre jusques à la porte Saint-Denys
« renverser dans ledit fossé les terres du rempart, qui n étaient <x derrière l'ancienne
r muraille de la Ville, t»
COMPTES DES DEPENSES FAITES AU LOUVRE PAR CHARLES V.
DE 1362 À 1371 (»)
I. Compotut Pétri Culdoe clerici, etc. de réceptif et misiù per eumfacli» pro operibut cattri Luparœ, ab anno i36a
usque ad à marlii i363.
Compte Pierre Culdoë, lieutenant de noble homme messire Jean de Danville, chevalier, chastelain du chastel du
Louvre, des receptes et mises par luy faictes à cause de certaines besognes qui ont esté faictes es jardins dud. Louvre,
à la plaisance du Roy, nostre Seigneur, commençant ou mois de mars 36a et finissant ou mois de mars ccclxiii
après ensuivant.
DESPENSE. .
1. Périn Durant, jardinier, pour avoir quis plusieurs bonnes herbes et icelles plantées ausd.
jardins du Louvre, ou mois de mars i36a, en xvi francs xvm s. p. la pièce. . xim. 1. vm s. p.
'2. Jean Baril, faiseur de treilles, pour avoir faict un grand pre'au èsd. jardins, et faict de
merrien!3' un losengié tout autour à fleur de Hz et à créneaux; et faict deux chaières et couvert
par dessus de losenges, et arnioié des armes du Roy et de nosseigneurs de France; pour motte,
merrien, osier et peines de ce, par lettres de recognoissance données le 1 5 jour de juillet ccclxiiii ;
en francs xvm s. p. la pièce xxx 1. p.
3. Pierre Hubert, faiseur de treilles, pour avoir relie' les haies losengé"s d'entour lesd. jardins,
ou mois de février 1 363 , et drecié environ la moitié desd. hayes que le vent avoit abatues :
pour merrien, osier et peine de ce, par lettres de recognoissance données le i5 jour de juillet
1 366, en francs xvm s. p. la pièce ix 1. p.
/«. Jean Baril, pour avoir faict une motte de tère et de poulce, et dessus un paveillon de mer-
rien à treilles, losengié et armorié des armes du Roy.de la Boyne et de nos seigneurs de France;
(1> C'est effectivement en cette année que, sui- qu'il attribue à Menant, doyen de la Chambre des
vanl un censier contemporain de l'Évêché (Arch. de comptes. Cette copie, d'ailleurs fort précieuse, ren-
l'Enip. S isC3), elle fut rrabbastue et desmolie. » ferme évidemment plusieurs fautes de lecture; mais
'' Nous réimprimons le texte publié par M. Le on ne peut y remédier.
Houx de Lincy d'après une copie du xvn' siècle m Merrien, bois de charpente.
182 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
et y avoir faict un pont-levis, ou mois de mars ccclmii; pour merrien, osier el peines de tout
ce, par lettres de recognoissanee données le 1 5 jour de juillet 364 , en francs xyiii s. p. la
pièce xxxyi 1. p.
Charles, par la grâce de Dieu Roy de Franco, à Ions ceux qui ces présentes lettres verront,
salut. Sçavoir faisons que nous, pour le bon rapport qui faict nous a este de la personne de
Pierre Guldoc. iceluy avons faict et establi. et par ces lettres faisons et établissons don et
payeur de noi œuvres, aux gages, prolirt et émolumeus atvoustuiuos. tant comme il nous plaira.
Si donnons en mandement par ces présentes, à nos auiez et féaux les gens de nos comptes.
que. sur ce pris le serment dud. Pierre, iceluy laissent et fassent joir et user dud. ollice; et, à
tous nos autres justiciers et sujets, que à luy en faisant led. ollice en tout ce qui en dépend et
pourra dépendre, obéissent et entendent diligemment. Kn tesmoin de ce que nous avons laid
mettre à ces présentes le scel duquel nous usions paravanl que nous venissions au gouvernement
de nostro Royaume. Donné à Paris, le 19* jour d'avril, fan de grâce t'M\h.
ItWy **g»t : Par le Roy, B . Fraxç.ois.
II. Compte Pierre Culdoë . don- et payeur îles oeuvres itu Roy, nostre sire, des receptos et mises par li l'aides, i cause
du dict (met .pour les années et réparations du chasteaii du Louvre), depuis te ti* jour de juillet 1 364.
DESPESCE, NAÇ.ONXRRIE.
5. Guillaume de Moutier, carrier, pour une auge de pierre de cinq pieds de long et trois
pieds et detnye de lé, tenant une queue et demye d'eau, pour met Ire cm près le puis du I.oinro.
pour servir à la cuisine > vi 1. p.
6. Jean Dure, maçon, pour faire le pan de mur depuis la tour de la ehapelle avec la tour
vers la Fauconnerie; dessassoir et assoir vi ou vu onunois de pierre en lad. tour par dessous
en plusieurs lieux, oit mestier estoit: et au dessus, ebanger loules les pierres qui faisoienl à
changer jusqu'à l'entablement; par marché faict xuui IV. valent 3q 1. i a s. p.
7. Jean de Ghaumont et Jean de Neufmur. maçons, pour faire l'une des tours d'eniprès le
pont-levis, et devers le pan de mur ensuivant; el la tour qui fait le coin sur Saine, devers
Paris; dessassoir et rassoir v ou ti ornes'11 de pierre, partout où mestier estoit. changer toutes
les mauvaises pierres jusqu'à l'entablement etc.; et pour faire, en la dou\e des fosse*, environ
deux toises de mur etc. xxxïi fr. val xxxu 1. vin s. p.
CHARPEMERIE.
S. Maistre Jean Bernard, charpentier, pour faire un petit clocher en la grand chapelle, à
pendre la clochette à sonner la messe; pour mettre un pallel de fust en l'huis de la chambre
du Boy, et faire quatre marches de fust oudessus la terrasse plommée - '. par où le Boy monte
ou galetas, etc.
9. Jean Aubort. charpentier, pour faire deux forts huis >3), l'un enchassillé et lié, de vi pieds
« Atttmf— m Plombée. — « Vantail de porte.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 183
et demy de loqc et 5 pieds de le, pour la sale Saint-Louis, et l'autre claire, de vi pieds et
demy de long et de quatre pieds de lé, et de plaine pauliue d'espoisse, glué a double parement .
pour mettre iceluy huis en l'une des tours du viol/, pont devers Paris. Item, pour l'aire x huis
simples, joins à double roulure'", tous de chesne, pour mettre ez lieux plus nécessaires du
Louvre, etc xvi I. xvm s. p.
non,
10. Pour quatre solives et xv chevrons pour faire tréteaux pour asseoir les esteoux des cui-
sines ou garde-manger du Louvre, etc. Pour le merrien des x estaux a boucher, pour mettre
ez cuisine et ez garde-manger du Louvre, etc.
KKRRl RKS.
1 1. Andrieu du Vergier, pour faire en la salle du Louvre un grand serrure et une clef, en
l'huis de la grand chapelle une serrure à boce, un verrouil et une clef à l'huis de la chambre
M. d'Estampes, on montant à la tOOT une serrure plate à l'entrée de la salle au C.haslelain. Kl
pOW faire en la tour, dessous la chambre du Hoy, doux grandes serrures à boce et deux clef/.;
et, en la tour dessous la chapelle, aux huis de la tour deux serrures à boce et deux vorrouils.
Item, en l'huis de la chambre de la Fourrière, une serrure à boce, etc. Item, à l'huis des grands
degré/, d'empivs la terrasse, une serrure à boce. Item, pour faire en la salle où le lloy DMO
;;iesi, une serrure et un verrouil, etc. vi francs, val cvin s. p.
VOITIRKS M LABOURS.
\'2. Jean Alant. pionnier, pour curer les fossez d'enlour le cbaslel du Louvre jusqu'à vif fond
de terre, et le conduit qui \a à Saine, etc. vi"iin francs pièce xvm s. p. val. . c.xi I. xu s. p. W
13. Nichai' \uvel, voieturier, pour amener de Saint-Germain des Pie/, aux Tuilleries, sur la
rivière de Seine, m' quarieaux de pierre, et, de l'autre pari la rivière, rechargé lesdils carreaux
et mener au Louvre; par marché faict nu 1. p.
\h. Thomas du Maret, batelier, pour passer par l'eau de Saine les Tuilleries, de Saint-Ger-
main dos Prez, lesd. vi' carreaux de pierre, et iceux descendre aux degrez du Louvre, par marché
faiot .etc lx. 8. p.
Suinma vi"vi I. xmii d. p.
VOIRIERKS KT AUTRKS CHOSES.
15. Guillaume Brisetout, voilier, pour xx pièces de verre neuf, en la chambre du Chastelein
( m m' nuire endroit il y a : et de ses escuyers), en sa garde-robe, etc.
1 Feuillure, rainure? parisis. — Il y avait alors missi des francs d'or qui
1 Cet h dira t>4 francs, à 18 sous parisis ne valaient que 16 sous, et cela introduit de la con-
le firme; valant H autre monnaie m livres la sous fusion dans les comptes.
184 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
16. Item, led. Guillaume pour rapareiller les voirières de la grand chapelle du Louvre, celles
du galetas et celles des trois chambres du Roy, au Louvre; par marché faict xl s. p.
17. Jean le Grand, chasublier, pour faire deux custodes, froncier, docier et parement à une
nape, un autel de marbre, un estuy pour corporaux couvert de soye et semé de fleur de lis;
pour aneaux et tissu de soye à pendre lesd. custodes; par marché faict à li par led. maistre
Jacques, 8e jour juillet i36& vin 1. p.
Summa operum istius compoti vcli 1. xm s. vi d. p.
III. Louvre. — Le commencement de ce compte manque; il y a environ cinq ou six cahiers adirés. Ii est daté en un
endroit : Magnum compotum de operibus et reparationibus Luparœ a t8 octobris i36ù nsque ad primant maii 136j.
{Nota. H n'y a que la recepte et partie du premier chapitre de despense qui manquent.)
Pour achapt de pierre montant à 5,ooo 1. en fr. à 18 s. , et en francs à xvi s. 2,180; que
toute la despence n'y soit.
DESPENCE.
ier article du 1" chapitre de despense qui reste de ce compte :
18. Jean Le Mane, quartier, pour avoir livré aud. Louvre pour les œuvres dessus dattes, cent
batelées de quartier de pierre, de 3 et 2 piedz et demy de long, et de deux pieds de lé, à l'un
des bouts, de la pierre de Vitry ; chacun batel portant par eau le poids de 1 600 tonneaux de vin;
achetées de li par led. maistre Rémond, 2 3e jour de mars i364; chacun poids de tonne! xvi s. p.
vaut la batelée xn 1. p. par quittance etc. qui font en francs d'or xvm s. p xii'l 1. p.
(Les autres pierres venoient de Wiceslre (l), pierre de lyais de N. D. des Champs, pierre de Gentilly.
pierre de Saint-Leup de Serans m, du pont de Charenton, de Vitry, carrières de Valgirard (3).)
19. Pour les fondemens de la grand viz vin quartiers de pierre du feriont (sic) de N. D. des
Champs; chacun quartier de quatre pieds de long et de deux pieds et demy de lé; chacun
quartier acheté un franc d'or vi 1. vin s. p.
20. Pour 58 marches de lyais, de vi pieds et demy de long et de 2 pieds et demy de lé,
dont 17 ont esté mis à la grand viz neuve, et h\ employés en la tour vers la Fauconnerie;
chacune marche xm s. m d. p.
21. Pour 8 couvertures de lyais qui font reposoir pour le Roy ez quatre estages de lad. viz,
chacune couverture de vi pieds et demy de long et de 2 pieds de lé; achetée chacune pièce
xl s. p.
22. Pour 3 a toises d'entablement pour les murs des sales et chambres neuves du Roy et de
la Royne; chacune toise xx s. p.
Summa nmLvin 1. xvm s. p. de xvm s. pour franc, et viimnn"xvi 1. xvi s. p. de xvi s. pour franr.
o
Wicestre, aujourd'hui Bicêtre. — !) Sainl-Leu-d'Esserant. — '3> Valgirard, aujourd'hui Vaugirard.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 185
23. Pour quatre grans cartiers de iyais, pour quatre corbeaux qui sont au pignon de la
chambre du Roy où fut la sale Saint-Louis, à xx s. p. le quartier.
24. Pour deux grans couvertures de pierre de lyais, chacune de sept pieds de long, de 2 pieds
de lé et d'un pied et demy d'espoix; l'une pour l'huisserie de la sale neuve du Roy et l'autre
pour l'huisserie de la sale neuve de la Royne aud. Louvre ; chacune pièce achetée cinq francs
d'or, cy vm 1. p.
25. Thibaut de la Nasse, marguillier de Saint-Innocent, pour dix tumbes dont l'on a faict
marche en la grand viz neuve dud. Louvre; achetée de li chacune tumbe pris ou cimetière dud.
Saint-Innocent à xnn s. p. par quictance vu 1. p.
26. Pour deux couvertures de lyais, chacune de sept pieds de long, et de 2 pieds de lé;
pour 2 apuis ez fenestrages de la sale du Roy, chacune trois francs d'or im 1. xvi s. p.
27. Pour ali marches de lyais pour la grand viz neuve, chacune de 7 pieds de long et de
2 pieds et demy de lé.
28. Pour autres 2 ti marches semblables.
29. Pour i4 petites marches pour la petite tournelle de la grand viz, à monter sur la ter-
rasse.
30. Pour la maçonnerie des murs où fut la sale Saint-Louis.
Somme vncxx I. p. franco pro xvi s. et xviu'xun 1. xiui s. un d. p./r. pro xvi s.
31 . Pour vu" toises de grand parpin d'un pied et demy de lé, pour tuyaux de cheminées etc.
32. Pour 28 corbeaux de pierre de lyais de N. D. des Champs, pour les quatorze poutres
des sales et chambres de la Royne, à x s. par chacun xnn 1. p.
33. Pour la cheminée de la chambre à parer du Roy etc.
34. Pour voûte de la cave de l'eschançonnerie du Roy.
35. Pour marches pour l'entrée de la garde-robe emprès l'eschançonnerie, et pour la tour
qui fait fer à cheval devers l'Artillerie, etc.
S. xvn.xx I. pro prima expensa.
Summa vnmncLXi F. x s. p. franco pro xvm s. p. et iiiimiincXLVi I. xix s. vin d. p. franco pro xvi s. p.
AUTRE DESPENCE POUR CHAUX.
36. Pierre Engeran, marchand de chaux, pour avoir livré xvi muids de chauds, le 23 octo-
bre i364; chacun muid mi F. 1 s. x d. p. cy lxv 1. mi s. p. fr. 18 s. p.
37. Pour trois sextiers de chaux en pierre, pour blanchir la tuile des salles et chambres
neuves du Roy, etc.
Summa v'xlv F. xix s. p. franco pro xvin s. p. et nicnu"xiiu 1. vu s. p. franco pro xvi s. p.
1. 24
186 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
AUTRE DESPENCE POUR SABLON.
38. Michaut Roussel, ayde à maçon, pour avoir mis du mortier pour les œuvres de maçon-
nerie dud. Louvre, xvi muids de chaux, et livré le sablon au prix d'un franc d'or chacun muids,
cy xvi fr. d'or xim 1. vm s. p.
Summa im"xvi 1. xvui s. p. franco pro xvni s. p. et vnXI 1. xvm s. ]i. franco pro xvi s. p.
AUTRE DESPENCE POUR PLASTRE.
39. Le x" juin 1 365 , fut marché faict par led. maistre Rémond à Pierre Tournant et autres
plastriers, de livrer aud. Louvre, pour les œuvres d'iceluy lieu, certaine quantité de piastre cuit,
au prix de xxnn s. p. chacun muid.
Du a3 juin i365 jusqu'en juillet xxxv I. vm s. p.
juillet 1 365, somme imxxxvi I. xix s. p.
aoust 1 365 , somme . vi"vi 1. vu s. p.
septembre 1 365 , somme vn"v 1. v s. p.
octobre 1 365 , somme vm"x I. ix s. p.
novembre i365 , somme im"vm 1. xvm s. p.
40. Autre recepte de piastre, au prix de xxxn s. p. chacun muid, à cause que busche estoil
enchérie; du 22 novembre i365.
Du 22 novembre et mois de décembre i365, somme miIxvm 1. vm s. p.
janvier i365 lxix 1. mi s. p.
février 1 365 vn"im 1. xvi s. p.
mars 1 365 viixxn. I. xvi s. p.
avril i366 nn"vii I. mi s. p.
mai 1 366 im^xix 1. xu s. p.
juin 1 366 jusqu'au h juillet miXIxm 1. xu s. p.
41. Autre recepte de piastre, au prix de xxvm s. p. pour chacun muid.
Depuis le 4 juillet jusqu'au 20 xlviii I. vi s. p.
Autre recepte de piastre, au prix de xxx s. pour chacun muid.
Du 2 5 juillet jusqu'à la fln d'aoust cxv 1. xv s. p.
septembre i366 vi"x 1. xvn s. vi d. p.
octobre 1 366 cv 1. vu s. vi d. p.
novembre i366 mi"x 1. p.
décembre 1 366 lxx 1. x s. p.
janvier i366 xlvi I. xvn s. vi d.
février i366 vi 1. xv s. p.
mars jusqu'au 17 xv I. 11 s. vi d. p.
h" Expetisa. Samma ab alia nmxix 1. un s. p. franco pro xvi s. p.
42. Autre despence pour maçonnerie.
Jean de Ghaumont et Jean de Neufmur, tailleurs de pierre, pour avoir abatu sainement de
lhostel qui fu madame de Valence, à Saint-Germain des Prez'1', vi milliers et mc de quarreaux
(1) Cet hôtel fut abattu en i36o, comme il sera dit en son lieu.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 187
de pierre, pour* les œuvres dud. Louvre, au prix de ix s. p. chacun cent, montent xxvn I. vu s. p.
par marché faict par led. maistre Rémond du Temple xxvn 1. p.
43. Pour avoir abbatu les créneaux depuis ia tour devers la Taillerie, tout au long du costé
des jardins, jusqu'à la tour devers la Fauconnerie, et en retournant de l'autre costé de la salle
Saint-Louis, dont on a osté une assize pour l'encorbeillement qui court tout au long des murs
et des tours, etc. Le 1 5 janvier 1 365 fut mesuré la besogne en la manière qui ensuit: — Pre-
mièrement le pan de mur entre la tour qui faict le fer à cheval devers l'Artillerie, et la tour
devers la Fauconnerie, a de long quinze toises et demy et deux pieds, et de haut, depuis le
commancement de la neufve maçonnerie jusqu'à l'enchapement en droit les planchers '*', trois
toises deux pieds valant cinquante-deux toizes et demy, deux pieds. Item, pour les deux arcs
de pierre d'icelles aisances. Item, lad. tour devers la Fauconnerie a de pourtour xi toizes parmy
le milieu; et de haut, depuis la neufve maçonnerie jusqu'à l'enchapement, deux toises et demyes.
Item, pour le chauffedos (2' en droit la chambre de la Reine.
Item, le pan de mur devers les jardins, entre icelle tour et la tour du milieu, a de long dix
huit toizes trois pieds.
Item, lad. tour du milieu devers lesd. jardins a de pourtour six toizes cinq pieds et demy.
Item, pour la saillie des encorbeillemens d'icelle tour, pour le chauffedos de l'oratoire du
Roy, onze toizes douze pieds et demy.
Item, pour la voûte dud. oratoire, une toize et demy, etc.
Somme ixc xn toizes demyes demy quart c. s. chacun toise carrée , parmi quelz ont esté quis
eschaffaux, chables, engins, taillié et assis la pierre; fait le mortier; et l'en leur a livré la
matière sur le lieu.
Le mur de la salle Sainct-Louis , les fondements ont dix pieds de parfont, sur cinq toises et
un pied de long, etc.
44. Pour avoir abattu trois viez pignons, l'un où fut la terrasse plomée, et les deux autres
en la chambre où le Roy souloit gésir'3' aud. Louvre; par marchié faict xlviii s. p.
45. Colin le Charron, tailleur de pierre, pour avoir taillé une huisserie et la voussure em-
pointée'4', et un chanteau l5) ouquel a un archet; et dedans iceluy un escu de France adestré
de deux angelos ; icelle huisserie entre la salle neuve du Roy et sa chambre devers la rue
d'Otherice, aud. Louvre; par marché faict xim 1. p.
46. Jean de Sainct- Romain, ymager, pour avoir taillé deux reprinses (6', l'une un beuf et
l'autre un esgle, chacun tenant un rouleau en manière des Évangélistes, lesquelz servent, sur
le chanteau où sont les armes du Roy, pour porter le pignon <7' du dernier étage de lad. viz ;
par marché vil. vm s. p.
47. Drouet de Dampmartin, tailleur de pierre, pour avoir taillé une huisserie'8' à voulsure
(1> Au droit des planchers, à leur hauteur. (6) Chanteau, tympan d'arc?
''' Chauffe-doux , poêle ou étuve. (6) Réprimes , culs-de-lampe recevant une re-
(3) Coucher. tombée et enrichis de figurines.
(,) Voussure empointée, voussure en arc aigu, m Ce doit être le fronton surmontant un arc.
vulgairement une ogive. Les Anglais disent encore (Voir la note p. i3o.)
pointed arch. m Baie de porte.
94.
188 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
empointée et un chanteau auquel a un archet; et dedans iceluy archet un escu des armes de
la Royne, devers la rue d'Osteruche ; par marché xim I. p.
48. Jean Bairot, maçon, pour avoir faicte l'assiette de maçonnerie du gros mur de ix pieds
d'espois , lequel faict closture tout contremont entre les sales et chambres neuves du Roy et de
la Royne, aud. Louvre, devers la Taillerie; et y sont faictes trois grandes cheminées, chacune
de quinze piedz de lé pardevant, et de douze piedz ou font, endroit les contrecceurs, l'une
pour la sale du Roy, l'autre pour la sale de la Royne, et l'autre pour la sale de commun, l'un
en droit l'autre ; et sont faictes les languettes (1) et manteaux de pierre de taille et les jambes
et les huisseries où il appartient; et est fondé led. mur huit pieds et demy en terre, etc.
49. Jean de Sainct-Romain, pour avoir faict quatre images de pierre , assavoir une de N. D.
et une de sainct Jean, pour les deux pignons de la grand viz neuve; une de sainct Michel et
l'autre de sainct Georges, pour les deux costez du pignon de la grand chambre du Roy, où fut
la sale Sainct-Louis, etc xix 1. mi s. p.
50. Jean Bairot, maçon, pour avoir dessellé tous les bouts de viez poutres qui estoient èsd.
sales et chambres de la Royne, et assis les vingt-huit corbeaux de liaiz qui portent les quatorze
poutres de dessus ; pour piastre et peine xvi 1. xvi s. p.
51. Logemens neufs : la salle contient xxxix toises et demye xm pieds et demy; la chambre
à parer, devers la Fauconnerie, contient trente-deux toises, la chambre ensuivant, vingt-huit
toises et d. et six pieds; la grand chambre derrière, où fut la salle Sainct-Louis, 33 toises trois
quarts et deux pieds, et les autres deux chambres de la Reyne, devers la Taillerie, li toizes
demye et xii pieds, qui font ix"vi toizes six pieds et demy à v s. le pavement de piastre et
plâtras, la toize ix"xmi 1. ix d. p.
52. Pour avoir mis en piastre lxxii croisées et châssis, sçavoir :
En la salle neuve du Roy, 2 4 châssis.
En sa chapelle, 4 châssis et 2 fenestres.
En ses trois chambres devers la Fauconnerie, en l'allée des aisances et icelles aisances,
xvi châssis et 2 fenestres.
En la tour qui fait fer à cheval, i o châssis.
En la tour devers la Fauconnerie, 2 4 châssis.
En l'allée de la terrasse , 2 châssis.
Devant l'huis de la salle du Roy, î châssis.
En ses deux chambres devers la Taillerie, et en l'allée des aisances, 34 châssis.
En la tour emprès, 26 châssis.
Item, en la salle la Reyne et en sa chapelle, 19 châssis et 2 fenestres.
En ses trois chambres, devers la Fauconnerie, en l'allée des aisances et en icelles, 2 G châssis.
En ses deux chambres devers l'artillerie, et ez aisances, 3o châssis.
En la salle du commun et en la salle emprès, 10 châssis.
En l'Eschançonnerie et en la grand chambre emprès, vi châssis.
Qui font 247 châssis et vi fenestres, etc. pour iiiixii huis neufve.
Summa ab alla iiiimvfLvin 1. xv s. p. franco pro xvm s. p. et x^ii^xv 1. m s. 1 d. et pit. par.
franco pro xvi s. p.
'' Languettes, séparations placées entre des tuyaux de cheminées faisant partie d'une même souche.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 189
% AUTRE DESPENSE POUR FAVERIE.
53. Le i4 mars 1 364 , fut marchié faict par led. maistre Rémond à Andrieu Vergier,
fèvres^, de faire et livrer aud. Louvre, griffes, tirans, barreaux, gougeons et treillis de fer,
au prix de xim d. p. la livre.
54. Pour un huis de fer et deux manteaux avec un boulon de fer à le fermer, pour le
manteau de la cheminée en l'estude du Roy ; par marché faict x 1. p.
Summa ab alia xlvii 1. vi s. h d. p. franco pro 18 s. et vhcxlviii 1. vu s. x d. p. franco pro xvi. s.
AUTRE DESPENSE POUR VOICTURES ET LAROUREURS.
55. A Jean de Vaux, voicturier, pour avoir pris en l'hostel qui fut Madame de Valence, à
Sainct-Germain des Prez, et amené aud. Louvre vi.m.ccc carreaux de pierre, à xx s. p. chacun
cent lxiii 1. p.
56. Pour avoir amené xi. tumbes prinses à Sainct-Innocent, par marché, pour la grand
viz neuve xxmi s. p.
57. Pour avoir pris aux Rlancs Manteaux et en la grand rue Sainct-Denis, cinq images
de pierre qui y ont esté taillées, et iceux amenez sainement, pour la grand viz neuve,
cy un. 1. xvi. s. p.
Summa ihi"?iii 1. p. franco pro xvni. s. et iiii"ix 1. v s. x d. franco pro xvi. s. p.
AUTRE DESPENSE.
58. Yvert Doublet, charpentier, pour avoir livré xii. aiz de chesne ordonnez pour molles à
tailler pierres <"2> xxim. s. p.
Summa ab alia im"ix 1. un s. p. franco pro 18 s. p. et vi" 1. mi s. nu d. franco xvi s. p.
Autre despence de journées faictes aud. Louvre de pionniers et tumbereaux de taillerie de
pierre, de maçons et aides, à cause de plusieurs besognes faictes appartenant aux oeuvres
d'iceluy lieu, tant pour les fondemens de la grande viz neuve comme ailleurs aud. Louvre,
osté gravois des viez édifices qui ont esté abbatus et nouvelles besognes qui y ont esté faictes
depuis le mois d'avril 1 365 , en la manière que led. maistre Rémond du Temple les a ordonnées.
Les semaines et jours et les noms des ouvriers cy après ensuivent.
59. Pionniers chaque semaine, nom, surnom, et les tournées chaque semaine environ xxx.
Pionniers à n s. vi d. par jour.
Tailleurs de pierre v s. vi d. par jour.
Un homme et son tumbereau vm s. p. par jour, quelquefois vi s. vi d. p.
Somme des premières journées xxi 1. xvi s. p. francs xvm s. p.
Et des autres journées ix'iiii^xvi 1. xvii s. vi d. p. francs p. xvi s.
Autres journées depuis le a5 avril i365 jusqu'au 10 avril 1 366, etc.
Sommes des journées dernières vn'xvn 1. xvi s. x. d. franco pro xvi s. p.
(I) Fèvres, forgerons, serruriers. — (,) Il doit s'agir ici de planchettes de chêne destinées à être dé-
coupées sur les épures, pour servir de patrons aux tailleurs de pierre.
]90 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
AUTRE DESPENSE POUR MERRIEN.
60. Raudinet le Courtier, marchant de merrien, pour xvic i. pièces de merrien, première-
ment vingt-cinq poutres, les vingt chacune de vi. toizes de long, et d'un pied et demy de
fourneture, les quatre autres chacune sept toizes de long. Itetn, 366 solives chacune de deux
toizes et demye de long, etc.
Summa ab alia xviiicxh 1. xn s. p. franco pr. 18 s. p.
Et iiimiiiicXLiin 1. xvi s. vi d. ob p. franco pro xvi s. p.
AUTRE DESPENCE POUR VOIRIERES.
Bertaut Le Voirier pour avoir mis un percan (panneau?) de voirre, contenant vi pieds, en
l'estude du Roy, audit Louvre , au prix de mi s. p. chacun pied xxmi s. p.
AUTRE DESPENCE POUR PLOMMERIE.
Maistre Regnault de Bailleul, plommier du Roy, pour avoir reffaict et ressoudé la couverture
du plomb de dessus les degrés d'emprès la terrasse du Louvre ; pour soudure , suif et charbon
et peine xxxii s.
AUTRE DESPENCE POUR PEINTURES.
Maistre Jean Coste, peintre, et sergent d'armes du Roy, pour avoir peint de fleurs de lys
les trois bannières qui sont sur les trois tours, etc.
Thomas du Buisson, peintre, pour avoir faict plusieurs croix de peinture vermeille outre la
grand viz neuve du Louvre, l'uisserie des Jardins et autres lieux en la cour d'iceluy, pour la
défense de ceux qui y faisoient leur retrait pour pisser; par marché faict xxvi s. p.
AUTRE DESPENCE POUR XVI POUTRES ET IIe SOLIVES.
Le i3 juin i365 fut ordonné Raudinet le Cambier, marchand de merrien, par honorable
homme et sage Philippe Ogier, général maistre des dictes oeuvres, et par maistre Jacques de
Chartres, de faire venir par eau, de la forest de Cuise, xvi granz poutres et 200 solives pour
les édifices de la Reyne, audit Louvre; lequel Raudinet s'en chargea; et pour ce a receu, par
les mains dud. Pierre Culdoë, iicl francs d'or, si comme il appert par quittance et par le
compte faict par ledict Baudinet de la despence de ce. Et lequel compte a esté veu par Mes-
seigneurs des comptes, dont la teneur s'ensuit : rtLe compte de feu Baudinet le Cambier,
<r marchand de bois, comme, ou temps qu'il vivoit, a faict venir et amener des bois de la forest
trde Cuyse 11e granz poutres, et 11e solives esquarrées et ou tout prestes, au port de Saine,
(f devers le chastel de Louvre , » etc.
RECEPTE.
Des deniers dudit seigneur, par les mains dudict maistre Pierre.
Somme : iicl francs xvi s. pièce, valent iicl f. p.
Mise : Pour faire abattre xvi chesnes, etc. pour chacun abattre et coper vm s. p.; vi 1. vm s. p.
Pour esquarrir lesd. poutres vi 1. vm s. p.
Pour abattre, coper et esquarrir lesd. 11e solives, chacun cent x f . p xx f. p. etc.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 191
Pour les despens dud. Baudinet et de son cheval : par 2/1 jours allant, venant et séjournant
illec pour l'avancement de la besogne; pour chaque jour xvi s. p xix f. mi s. p.
Somme de toute la despence iicxxix f. mi s. p. valent ncim"vi francs et demy. Ainsi est deu
aud. Baudinet xxxvi francs et demy xxx f. mi s. p.
AUTRE DESPENCE POUR GAGES DES GENS DUDICT OFFICE.
A Jean Le Baut, sergent des dictes oeuvres : de par les gens de comptes du Roy, nostre dict
seigneur, à Paris. Pierre Culdoë, payeur des oeuvres royaux, accomplissez (le contenu en blanc)
en la manière que nostre dict seigneur le mande.
Jean Le Bault, pour ses gages de xn d. p. par jour, depuis le \" may i36ù jusqu'au 27 oct.
qui sont ix" jours ix f. p.
Pierre Culdoë, clerc et payeur des dictes oeuvres, pour ses gages de m s. p. par jour, du
22 décembre i36A jusqu'au 27 oct. (sic), qui sont ix" jours.
AUTRE DESPENSE EXTRAORDINAIRE.
6 1 . Martin Ville et autres , ses compagnons aydes aux maçons , pour leur vin que le Boy, nostre
seigneur, leur donna aud. Louvre; pour ce, par quictance, etc. en deux francs d'or xxxvi s. p.
62. Bichard Pitois et autres, maçons et tailleurs de pierre, pour leur vin que le Boy,nostred.
seigneur, leur donna par mandement sous le sel secret, donné 18e jour d'octobre i365, lors-
qu'il alla visiter les oeuvres de l'hostel M. d'Anjou, à Paris, en xx Irancs d'or xxvi 1. p.
Summa ab alia xxxvi s. p. franco pro xvm s. p. et xlv 1. xn s. p. franco pro xvi s. p.
IV. Autre despence extraordinaire pour chenetz de fer, coustes, coussins, tables, traiteaux, dreçoirs, bancs, fourmes
et autres ustensiles et choses notables achetées du commandement du Roy, pour la garnison de sond. chastel du
Louvre; lesd. parties contenues en un rôle, etc.
(Ce chapitre est escrit entièrement.)
63. Pour trois paires de chenetz, pesant ix"xm 1. de fer, xvi d. p. pour la livre, pour
ce xn 1. xvii s. m d. p.
64. Pour x paires de chenetz, pesant vc lxi 1. de fer xxxvn 1. vm s. p.
65. Pour quatre paires d'autres, etc. pesant vn"x 1 x 1. p.
66. Pour quatre paires de chenetz de fer, pour les chambres de la Boyne, une paire pesant
ix"xviii livres etc. qui font quatre cent cinquante-cinq livres de fer à 16 d. p.,xxvi 1. xm s. mid. p.
67. Pour une tenaille, unes pincettes et un tirtifeu; pour ce xvi s. p.
68. Pour trois tenailles, trois tirtifeux et deux pelles de fer xlvhi s. p.
69. Pour cinq soufflets neufs, les aucuns ouvrez de taille (1), 11 francs d'or. . . . xxxn s. p.
70. Bichard des Ourmes, courtepointier, pour quinze lits neufs ; sçavoir : deux lits pour le
corps du Boy, xl francs, un lict pour M. d'Estampes, xvi francs, et douze licts communs, trois
francs trois quarts la pièce; montent xlv francs, en cent francs d'or un" 1. xvi s. p.
(l) Ornés de sculptures.
192 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
71. Pour dix-huit coustes'1' viez, fournis de coussins, xix 1. xu s. p.; pour les rapareil-
ler nu 1. p. ; xxm 1. xu s.
72. Pour cent aulnes de toile à faire paillasse et autres choses, à h s. p. l'aune; pour
ce x 1. p.
73. Agnès La Cauche, cousturière pour le Roy, pour avoir taillé ix paillasses, icelles emplies
de foin et de feurre, et cousues xxxn s. p.
74. Giles Durant, espicier, pour xn aulnes de toile, pour les fenestres de la chamhre de
M. d'Estampes et de la chambre au grand maistre d'ostel, chacun aulne v s. p lx s. p.
75. Perrenelle de Crespon, pour deux sarges de Caen et quatre tapis vert pour l'estude
du Roy, trois francs et demy la pièce. Pour ce xvi I. xvi s. p.
76. Marie Lallemande, pour sept aulnes et un quartier de drap noir de Caen et vm pièces
de feutre blanc et pers, pour feustrer l'estude du Roy et les fenestres de sa chambre et de la
chambre de la Royne, devers la Fauconnerie, à xim s. p. l'aune, ci s. vi d. p. et pour chacune
pièce de feutre xn d. p. vallent vm s. p. Pour ce cix s. vi d. p.
77. Nicolas Yfore, blasonnier, pour avoir feustré ix châssis en la chambre du Roy, deux en
sa petite chapelle, quatre en son estude et une fenestre, huit en la chambre dessus iceluy
estude, et, en l'oratoire de sa chapelle neuve, deux, qui font vingt-cinq châssis vi s. p. la
pièce, valent vu 1. x s. p. Item, pour avoir feutré deux comptoirs, un banc, une chaière, une
fourme <2' et deux quartiers de planches oudit estude, et pour deux coussins nu 1. p.
78. Item, en la chambre de la Royne devers la Fauconnerie, feutré cinq châssis en la tour-
nelle, emprès, trois, et en sa chapelle m, qui font xi châssis; aud. prix valent.. . . lxvi s. p.
79. Item, et pour sa peine d'avoir mis de la toile cirée en neuf châssis, tant en la chambre
M. d'Estampes comme en la chambre au grand maistre d'hostel, lxiiii s. p. Et pour tout ce
faire led. Nicolas a quis ruban et cloud ; par quittance , etc xvm 1. p.
80. Thibaut Le Roulier, pour un banc de taille trois francs, et pour quatre fourmes, quatre
escrans à feus , quatre francs ; en sept francs d'or, valent cxn s. p.
81. Pour quatre bancs de taille xn 1. vi s. p.
82. Hannequin de la Chapelle, pour un banc de taille à osteaux et à bestes, deux pieds de
long, six francs ; pour un autre banc de taille, à deux paremens et à marchepied, de xn pieds
de long, vin francs; et pour un autre banc de taille à un parement, de xn pieds de long,
vi francs ; lesquels bancs sont ez chambres du Roy xv 1. mi s. p.
83. Et pour portage du banc à marchepied, lequel fut aporté à heure de minuict par huict
compagnons, pour la venue du Roy xvi s. p.
84. Pour un dréçoir en la salle du Roy, deux francs et demy, et pour six fournies, trois de
douze pieds et trois de sept pieds de long, trois francs; cy un 1. vm s. p.
(1) Lits de plume. njouer des orgues.» (Douët d'Arcq, Comptes de
(S) Forme, banc. C'est aussi un escabeau ou ta- l'Argenterie de France au xiv' siècle, table des mots
bouret de bois : rtPour une formète h seoir pour techniques, p. 377.)
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 193
85. Pour qitatre estaux à bouchier, mise en la cuisine de la basse-cour du Louvre, nu francs
d'or valant lxiih s. p.
86. Pour demy cent d'aiz de chesne, de six et sept pieds de long, pour faire des dréçoirs
et marchepieds en la grand Sale par terre. Pour ce mi 1. p.
87. Jean de Verdelay et Colin de La Baste, huchiers, pour un ban de chesne à coulombes'1',
de xx pieds de long, mis en la Sale par terre, pour la grand table du Roy, avec le dois'2'
d'icelle longueur, de trois pieds de lé, garny de traiteaux; lequel banc a esté allongié le siège
de deux personnes et haucié à doubles marches, et le dois pareillement. Pour ce... xmi francs.
88. Item, pour un dréçoir enfoncé et une marche tout autour en icelle sale, et enfonsé le
viez banc Sainct-Louis et une marche autour. Pour ce van francs.
89. Pour portage du premier banc , demy franc ; et pour deux eschelles à tendre les chambres
du Roy, un franc ; cy pour tout xvim 1. xvi s. p.
90. Pour deux dréçoirs mis ez chambres du Roy vi 1. viiii s. p.
91. Pour quarante-six tables fournies de tréteaux et quarante-deux fournies, nu" francs
d'or valant lxiiii 1. p.
92. Pour un banc où le Roy tient ses requestes lxiih s. p.
93. Marie Sirasse, huchière, pour un dois de xx pieds de long, en forme de peneaux gluez,
le dossier et le marchepied de devant de taille, et quatre bestes sur les piedz; et pour une
table de sapin d'icelle longueur et de quatre piedz de lé, fournie de trois tréteaux en la salle
de la Royne, aud. Louvre. Pour ce xxvm francs.
94. Item, pour six tables de noyer, une paire de tréteaux et vi fournies (3), les quatre de dix-
huit pieds de long, et les deux de xh pieds, pour les sales et chambres de la Royne, xvi francs.
95. Item, pour un dréçoir à deux fondz, de six pieds de long en lad. sale h francs.
96. Item, pour deux buffès et deux petites fournières pour l'aumosnier et pour l'huissier et
sergent d'armes, trois francs.
97. Item, pour avoir faict de peine establir au rond de la tour qui faict fer de cheval devers
l'Artillerie, à mettre les ornemens de la chapelle, avec deux dréçoirs qui sont ou galletas d'icelle
tour, et pour la façon de six fourmes m francs.
98. Item, pour deux chaières à dos carrées de bois d'IHande,qui sont ez galletas, mi francs.
99. Item, pour une marche à deux degrés esd. galletas et pour deux traiteaux, n francs d'or.
Pour tout xlvi 1. viii s. p.
Summa ab alia un* xxxv 1. v s. il d. p. franco pro 16 s. p.
Aulre despence.
100. Pour papier, parchemin, etc.
' A coulombes, à colonnes. — (,) Le dais. — ;l; Il faut peut-être lire formes.
194 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Pour le présent compte ordonner et minutter en papier, iceluy escrire en deux livres de
parchemin , etc u L p.
Summa istius experts® communia clxxi 1. vin s. p. franco pro xvi s. p.
Summa totalis expensœ hujus compoti xivn,ixcvn I. xvm d. p. par. videlicet x\™uii"xi i. xvn s.
viiii d. p. franco pro xvm s. p. valent xvimviicLxviii/ra;ic. auri cum tribus quartis unius et n d. p.
Et xxxrovnfxv I. m s. x d. pretii p. franco pro xvi s. p. valent xxxvmravrxix franc, auri.
Sic summa totius expensœ ad franc. Lvmncnir"vii franc, auri cum tribus quartis unius, débet dictus
solutor vifxxxvn franc, auri cum tribus quartis unius.
Item, débet pro quadam parte per eum tradita in debitis, videlicet pro Bandineto le Cambier, xxxix 1.
ni s. p. valentes xxxi franc, cum dimidio.
Item débet pro fine compoti sui de operibus hospilii Sancti Audoeni, incepti octava die maii i36i et
finiti ultima die martii i366 xlix 1. et lu. s. p.
Summa quam débet \ncxxm franc, auri cum quarto unius et n s. p.
Et debentur ei pro fine compoti sui de operibus hospitii Bosci Vicennensis , incepti duodecima diejuniii365
et finiti quindecima die maii i36j un' lxiiii franc, auri et à d. p.
Auditus et clausus ij diejulii anno m.ccc.lxviii ad Burell. présente magistro Philippo Ogier.
Sic débet dictus solutor iiclix franc, auri cum quarto unius et xx d. p. Bedduntur domino Begi in fine
alterius compoti ipsius Pétri Culdoë de dictis operibus, suti infra, infiniti prima diefebruarii i368 et ibi
corrigitur.
V. Compte Pierre Culdoë, clerc et payeur des œuvres de nostred. Seigneur, et des receptes et mises par luy faictes à
cause dud. faict, tant pour les œuvres des dréçoirs nuefs d'iceluy Seigneur et de la Royne, comme pour réparations
faictes en plusieurs lieux ou chastel du Louvre, du i"rjour de may 1367 jusqu'au 12 juillet 1 368.
RECEPTE DES GENERAUX, etc.
Summa vnm franc, auri.
Autre recepte des deniers des coffres du Roy, o francs.
Summa totalis receptœ presentis compoti \umcfr. auri valent vn>vicini11 i. p.
DESPENCE.
101. Colart du Pont, pour avoir livré, pour les œuvres des dréçoirs, xn toises et deniye de
parpins de pierre, etc.
102. Led. Colart, pour avoir livré, pour la maçonnerie des dréçoirs dessusd. et du pont-
levis de la Grosse-Tour, l toises et demy d'autres parpins.
103. Pour deux grands tables de lyais de vin pieds de long; plus, pour sept autres tables
de sept pieds de long, pour la couverture de la petite viz desd. dréçoirs, deux pour l'évier de
l'Eschançonnerie, une pour la couverture du retrait aux escuelles d'iceulx dréçoirs, une pour
l'allée du pont-levis de la Grosse-Tour.
104. Item, dix charretées de noyaux de pierre pour la cheminée des dréçoirs, etc.
105. Item, en la tour dessus l'armurie du Roy, etc.
lt)6. Jacques du Parvis et Jean Grosbois, huchiers, pour leur peine d'avoir dessemblé tous
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 195
les bancs et deux roës qui estoient en la librairie du Roy, au Palais, et iceux faict venir aud.
Louvre, avec les lettrins'1' et icelles roës estrécies chacune d'un pied tout autour; et tout ras-
semblé et pendu les lettrins es deux derraines estâmes de la (our devers la Fauconnerie, pour
mettre les livres du Roy; et lambroissié de bois d'Hlande le premier d'iceux deux estages fout
autour par dedans, au pris de l francs d'or, par marché faict à eux par led. niaistre Jacques,
ih' jour de mars 1867. Et depuis, pour ce que les sièges estoient trop viez, ont esté faiclz de
mérien nuef que lesd. huchiers ont quis, dont led. marché leur a esté creu de vin francs, tant
pour ce que pour courbe et siages de lx pièces de grans bois. Item, pour deux fors huis pour
iceux deux estages, de sept pieds de haut, de trois pieds de lé, et trois dois d'espoisse, vin francs
d'or. Pour ce, parmy quatre quictances, etc qui font pour le tout lxvi. francs d'or
valent lu 1. xvi s. p.
107. Jean Caillou et Geffroy le Febvre, jardiniers, pour leur peine d'avoir replanté sauge,
exope, lavende, fraisiers et plusieurs autres herbes ez jardins dud. Louvre; et iceux jardins
fouys '2) tout autour, et livré aucunnes herbes et semences, et renouvelle tous les sentiers des
préaux, et porté hors les mauvaises herbes et ordures desd. jardins; par marchié faict à eux
par led. niaistre Rémon, le 18e jour de mars 1 36y ; pour ce x 1. p.
108. Pierre Lescot, cagetier, pour avoir faict et treillissé de fil d'archas au devant de deux
croisiées de châssis et de deux fenestres llamengés, ez deux derrains estages de la tour devers
la Fauconnerie, aud. Louvre, où est ordonné la librairie du Roy, pour deffense des oyseaux et
autres hestes, à cause et pour la garde des livres qui y seront mis; pour fil d'archas, croche!
de fer et peine de ce, par marchié faict à luy par led. maistre Jacques, 4" jour de mai 1 368 .
et quictance 3 juin ensuivant, en xvni francs d'or xmi 1. vin s. p.
109. Pour la ferrure de quatre grans huis enchassillez et enfoncez de ciprès, pour la volte
de la Grosse-Tour, où le Roy met ses joyaux; chacun de quatre liens, trois paumelles à gon, à
queue d'aronde, trois gons et deux potences pardedans, de trois pieds de Ion et de deux tirons
à rosète.
110. Item, pour trente petits chandeliers pour lad. volte.
111. Item , pour une poulie de cuivre qui sert pour une lampe d'argent en lad. volte.
112. Pour cinq serrures de fust, etc.
AUTRE DESPENCE POUR DONS.
Au Roy, nostre sire, par cédule sous son séel de secret rendue à Court, dont la teneur s'en-
suict :
trDe par le Roy, les genz de nos comptes à Paris, nous vous mandons et enjoignons que la
somme de cinquante francs d'or que nous avons euz et receux comptant de Pierre Culdoë,
payeur de nos œuvres , et lesquels nous avons donné aux ouvriers qui font les fossez pour la
fortiffication de lad. ville de Paris, le jour de la datte de ces présentes, que nous visitasmes
lesd. fossez, présent le Prévost des marchans et les Eschevins, icelle somme cinquante francs
vous alloez es comptes dud. payeur et déduisiez de sa recepte sans difficulté ou contredit aucun ,
(,) Lettrins, pupitres. — (,) Creusés, bêchés.
196 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
et sans demander sur ce autre déclaration ou quitance que ces pre'sentes, car ainsi ie voulons
estre faict. Donné en nostre chastel du Louvre-lez-Paris, le i5ejourd'aoust, l'an de grâce 1367.
Par le Roy, Ogier. »
Pour ce icy en l francs d'or xl 1. p.
113. A Jacqueline, femme de feu Jean Colombel, maçon, pour don faict à elle par led.
Pierre pour aumosne, du commandement du Roy, présent led. maistre Philippe, au mois de
janvier 1367, pour ce qu'elle est pouvre et impotent de ses membres; et aussy que son dirt feu
mary fut mort en faisant les œuvres du Roy oud. Louvre, en six francs d'or. . . nu 1. xvi s. p.
114. Regnaut Laucon, natier, pour avoir livre' et assiz aud. Louvre en la Chambre à parer
du Roy, devers la Fauconnerie , et en la chambre à parer de la Royne , dix toises et demys de
nattes en réparation xlviii s. p.
115. Mathieu Congnée, Heur de livres, pour avoir relié et couvert de nuef le messe! de la
grand chapelle dud. Louvre xx s. p.
1 16. Led. pour avoir relié et couvert plusieurs comptes, tant ordinaires comme des aydes pour
la délivrance du Roy Jean dont Dieu ait l'âme, comme plusieurs autres besognes de son mestier
pour les nécessitez de lad. Chambre des comptes ; les parties en un roolle , etc. mi 1. xmi s. p.
Sutnma totius expensœ presentis compoti vmviicmi"xin I. v s. ix d. p.
Debentur ei cxim 1. v s. ix d. p.
Et débita per eum Curiœ tradita quœ adkuc debentur de dicto facto scripta. Item , in Mo fol. seq. et
quœ sunt solvenda per Regem ascendant ad nii"vm 1. v s. 11 d. p.
Item debentur ei xxv 1. vu d. p.
Audilus ad Burellum 18 die aprilis, anno i36g post Pascha, présente magistro Philippo Ogerii.
Redduntur eidem in alio compoto suo sequenti de dictis operibm jinitis , prima diefebruarii i368 , hic
infra sutum et ibi correctum ; et quitus hic dominus Rex.
Debtes que le Roy, nostre sire, dit, etc.
117. A Andrieu du Verger, febvre, pour x treillis de fer, deux cents petits gons et deux
cents crochets de fer, pour la librairie du Roy, et illec ferré deux forts huis et plusieurs autre
besognes de son mestier par lui faictes et livrées aud. chastel du Louvre, laquelle le Roy nostred.
seigneur luy doit xxmi 1. mi s. vi d.
Summa debitonim im"viii 1. v s. vin d. p.
VI. Compte Pierre Culdoë, payeur des œuvres du Roy, nostre Sire, des receptes et mises par luy faictes ou chastel
du Louvre, depuis le 12° jour de juillet i368 jusqu'au 11* jour de febvrier ensuivant; et sont comprises en ce
présent compte certaines mises et besognes faictes aud. Louvre depuis que led. Pierre fut institué clerc et payeur,
dont il n'a rendu aucun compte cy-devant.
RECEPTE.
De Jean Amiot, commis à payer les œuvres de l'hostel de Saint-Pol, pour convertir en vin
poutres neuves, par lettres données le 20 jour de septembre 1 368 . . . . vi"ii franc, et xv s. p.
Summa totius receptœ presentis compoti im'xxx franc, auri et xv s. p. qui valent... iifXLim 1. xv s. p.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 197
118. Estienne Michiel, marchand de nierrien, pour avoir faict abbattre vm chesnes en la
forest de Cuise, et iceux coper et esquarir pour vm grans poutres, et faict amener par eau et
faict descharger devers le Louvre, pour les planchers d'entre les chambres et sales neuves du
Roy et de la Royne, en lieu de vin autres poutres qui sont trop foibles; la despence de ce veue
et communiquée par maistre Philipe Ogier, etc. par quictance iiii"vin 1. vu s. p.
Summa totalis expensœ presentis compoti v'xxxim 1. un s. p.
Auditus ad Burellum 20 die aprilis anno i36g post Pacha.
Debentur ei cim"vm 1. vhii s. p.
Item debentur ei pro fine alterius compoti sui pro denariis de dictis operibus , Jiniti i' martii i368 ,
hic superfiniti immed. xxv 1. vu s. p.
Summa quœ sibi debetur iicxm 1. vm s. vu d. p.
Et débet dictus solutor pro fine magni compoti sui hic superius suti , de dictis operibus Luparœ , finiti
î" die maii i36y, ii'li.t franc, cum quarto unius, qui valent irvn 1. ix s. vm d. p.
Ita debentur ei cxvm s. xi d. p.
Redduntur eidem in fine ultimi compoti sui de dictis operibus Luparœ, finiti 3" martii i3jt; et sic-
quitus est dominus liex.
VII. Compte feu Pierre Culdoë , etc. a cause de certaines besognes et réparations qui ont esté faictes en ia grandie
dud. seigneur, séant à l'Escole Saint-Germain-l'Auxerrois, à Paris, sur la rivière de Seine, pour la réparation
d'icelie granche, commencée au mois de juillet 1.368, et finissant icellcs oeuvres le 1369.
RECEPTE : IICXXXVII 1. II S. un d. p.
DESPENCE.
119. Pour avoir, du costé' de la Place aux Marchands, coppé un demy pan de mur et taillé
meYien, latte, etc.
Summa totius expensœ presentis compoti ii'xxxvi 1. 11 s. mi d. p. et sic quitus.
VIII. Compte de feu Pierre Culdoë , etc. pour certaines besognes et réparations faictes ou chastel du Louvre, du i"jour
de febvrier 1 368 jusqu'au 3' jour de mars 1371, qu'il alla de vie à trespassement. Ce présent compte rendu à Cour
par Jean Ployart, procureur de la femme et exécuteur dud. Culdoë.
RECEPTE.
De Jean Amiot, commis à payer les œuvres du Palais royal et de l'hostel Saint-Pol, par
lettre, c francs.
De luy à six diverses fois OU francs.
Summa receptœ mv' francs.
DESPENCE.
1 20. Pour avoir faict ez jardins, depuis le coin devers la rue Froimantel seize toizes de long,
abatu les cloisons et murs viez, endroit la rue de Champflori, jusqu'à la granche de la Fourière
du Roi, etc.
198 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
121. Pour un portail à istre desd. jardins en la rue Froidmanlel.
1 22. Maistre Dreufavier, tailleur de pierre, pour avoir taillé et faict l'appareil M aux maçons
d'un portail de pierre qui est assis au mur neuf entre la rue Froidmantel et les murs desd.
jardins, de dix pieds de haut et huit de lé, à voulsure, chanfranc par dehors, entre lesquel/.
murs est le montoir du Roi et de la Reine.
123. Jean Gassot, maçon, pour avoir scellé de piastre un porche couvert et les membrures
d'un dossier à lict, en la chambre madame Marie de France, aud. Louvre, et aussy scellé un
autre porche à deux manteaux devers l'huis des jardins; et, en la cour devers la rue Froid-
mantel, scellé et assis en un auvent où le Roy et nos seigneurs jouent à la paulme; et, au mur,
faict une fenestre à mettre les esteufs.
124. Philippe Sirasse, huchier, pour avoir faict de bois d'Hlande un estuy pour hébergier
l'orloge M. le Dalphin, qui sonne les oeures aud Louvre.
AUTRE DESPE.NCE POUR LABOURS, JARDINS ET TREILLIS ENSEMBLE.
1 25. Jean Dudoy, jardinier, pour avoir faict et livré ez jardins dud. Louvre, ce que s'ensuit :
c'est à sçavoir vin hottées de fiens, et fouy une grande place de terre devers l'Artillerie, et pa-
reillement devers la Taillerie du Roy ; osté et porté hors les mauvaises herbes avec les pierres et
gravois; et, esd. jardins, faict plusieurs carreaux de sauge, exope ('2', lavende, cocq(3), fraisiers,
violiers ; et planté oignons de liz et rosiers vermeux (*) doubles , et plusieurs autres bonnes herbes
que il a quis. Par marché faict xxxmi 1. p.
126. Estienne de la Groye, jardinier, pour avoir faict esd. jardins certaines treilles, pavillons
et hayes, tout au long et au travers des murs par dedans.
127. Item, pour avoir planté d'un costé et d'autre desd. treilles et pavillons xvnc et demy de
chez (ceps) de vigne, vm fr. d'or; et les treilles, pavillons et hayes mesurées comme il ensuit :
premièrement le pavillon rond contient vm toises. Item, le pavillon devers la rue du Coq contient
vin toizes; Item, le pavillon devers la rue de Reauvez contient 5 toizes; celuy de rue Froidmantel
contient 8 toizes; le pavillon carré de la Fauconnerie xn toizes; et, pour le losengié d'iceluy,
xn toizes. Item, les bayes dud. pavillon, xv toizes de long. Item, les hayes du petit jardin,
6 toizes. Item, une demye yraigne qui soustienl les rosiers blancs.
Une place ou court au dehors des jardins, devers la rue de Froidmantel, auquel lieu est
ordonné à mettre les chevaux du Roy et de la Reyne, quand il leur plaira monter par illec.
128. Robin le Reuf, la peine de bras pour sa peine d'avoir apporté toutes les coustes et les
coissins de tous les édifices dud. Louvre, qui sont en la garnison du fort, et les a mis en la
Salle par terre et les avoir escoussés et estendues pour essorer; et aussy nettoyé et housse les
chambres haut et bas, et porté hors les ordures que les gens de M. le Delphin y avoient lais-
sées de l'espace d'un an ou environ. Par quictance du, etc mi 1. p.
129. Jean Dudoz, jardinier, pour avoir livré aud. Louvre quatre cens de fiens, et les enfouys
en terre; et planté trois gerbes de roziers vermeulx, et douze milliers de fraiziers avec plusieurs
fl) Tracé l'épure. (3) Balsamite ou Tanaisie.
(5) Hysope. (4) Vermeils , rouges.
COMPTES DU VIEUX LOUVRE. 199
autres bonnes herbes; et aussy aprovigné les saulges, iavendes et violiers, et i'ouy tous les
quarreaux desd. jardins et redrécié les sentiers. Pour ce xn 1. p.
130. Sevestre Vallerin, la peine de bras pour sa peine d'avoir sarcle les sentiers qui vont
panny les pre'aux, avec les carreaux où sont les roziers, fraiziers, violiers, sauge, exopes,
laveDde, coq, percin (1), sariette et autres bonnes herbes : et aussy avoir arrosé quatre pavillons
et une grande sale carrée pour faire venir les herbes. Pour ce, etc c s. p.
Summa totalis expensœ hujus compoti, xvcxxvm 1. xix s. m d. p.
Debentur ei iii'xxviii 1. xix s. m d. p.
Et débita per eum Curiœ tradita quœ surit in fine hujus compoti ascendunt ad xx 1. vi s. vin d. p.
Auditus ad Burellum xia die februarii anni i3ji, présente magistro Philippo Ogerii, consil. Régis
et generali visitatore operum Régis.
Sic debentur ei iiicviii 1. xii s. vu d. p.
Item debentur ei pro fine alterius compoti sui de dictis operibus Lupare hic supra suti , finiti ultima
die februarii i36S, cxvui s.'xi d. p.
Summa quœ sibi debelur incvni 1. xi s. vi d. p.
Uxor et hœredes dicti Pétri habuerunt cedulam Curiœ lestimotiiulem de dictis iiicxini 1. et diem au-
ditionis hujus compoti qua tradita fuit dicto Johanni Ployant , procuratore ut supra de prœcepto et ordine
Dominorum Camerœ. Habuerunt dictant summum per compotum Hugonis le Frepier, de subsidio deca-
nutus Pontis-Sanctœ-Maxentiœ. Facta 3 aug. i368. Et quittus Rex®.
m Persil. " les comptes de dépenses précédents ; ces différences
!) tOn a pu remarquer, dit M. Le Roux de rr proviennent de la copie faite par M. Menant, copie
-Lincy, certaines différences dans la manière d'ex- trque nous nous sommes astreint à reproduire avec
- primer les chiffres nombreux qui se trouvent dans - la plus grande exactitude. *
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 201
CHAPITRE VI.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS f
DE 1527 A 1547.
François Ier est considéré avec raison comme le fondateur du Louvre mo-
derne Wj le premier, en effet, il conçut le projet de substituer un édifice entiè-
rement nouveau à la forteresse de Philippe- Auguste , remaniée par Charles V, et
il commença même à réaliser ses desseins." On lui doit aussi d'avoir choisi Pierre
Lescot pour architecte; mais à cela se borne son action, car les travaux qui furent
exécutés par ses ordres, et dont il n'est rien resté d'appréciable pour nous, n'ont
eu aucune importance et ne sauraient être comparés à ceux de plusieurs de ses
successeurs, particulièrement à ceux de Henri IV. Il faut donc se garder de prêter
à François Ier, dans la création du Louvre moderne, une part hors de proportion
avec celle qui lui revient légitimement, et qu'on a l'habitude d'exagérer.
La première pensée de François Ier, aussitôt après son retour d'Espagne , paraît
avoir été, non de rebâtir complètement le Louvre, mais simplement de le res-
taurer et d'en rendre le séjour plus agréable. Dans ce dessein, il résolut d'abord
de s'emparer de la place ou chemin de halage qui se trouvait entre la courtine
de Charles V et la basse-cour méridionale du château, de manière à augmenter
la superficie de cette cour. La suppression du chemin de halage nécessitant l'éta-
blissement d'un autre chemin au delà de la courtine, le Roi, par lettres du 1 5 mars
1627, demanda à la Ville de construire un quai empiétant sur le lit de la rivière,
et propre à suppléer celui dont le public allait être privé. Les lettres dont la te-
neur suit montrent qu'il ne s'agissait encore que de « réparer et mettre en ordre n
le Louvre; elles font savoir en même temps que, par suite de l'annexion du
chemin du bord de l'eau à la basse-cour, la ce principalle entrée audict Louvre n
ne devait plus être, comme précédemment, la porte méridionale, mais celle qui
(1) Le souvenir de ce fait s'est toujours conservé *le premier desseing du nouveau bastiment de
très-vivace; ainsi, dans une déclaration royale du rrnostre chasleau du Louvre, orna la ville de grands
mois d'avril 1627, on lit : «Le roy François I" fit rrquaiz, etc.»
a6
202 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
s'ouvrait sur la rue d'Autriche, disposition conservée dans tous les projets dressés
depuis :
« A nos très chers et hien amez les Prévost des marchans et Eschevins de nostre
«bonne ville de Paris. — De par le Roy. — Très chers et hien amez, pour ce que
« nostre intention est de doresnavant faire la plus part de nostre demeure et sé-
« jour en nostre bonne ville et cité de Paris et alentour plus qu'en aultre lieu
«du royaulme; cognoissant nostre chastel du Louvre estre ce lieu plus commode
«et à propos pour nous loger; à ceste cause, avons délibéré faire réparer et mettre en
a ordre ledict chastel, et faire clorre la place estant devant icelluy pour nous en
«aider; dont nous avons bien voulu advertir ad ce que advisez de faire faire ung
trchemyn le long de la tour respondant sur la rivyère (la tour du Coin), près la
«faulse porte par où l'on a accoustumé passer les chevaulx tyrans les bateaulx
«qu'ilz portent la marchandise, afïin que iceulx chevaulx puissent doresnavant par
et ledict chemyn avoir leur passaige sans passer par ladicte place et faulse porte.
tr Et semblablement avons advisé faire nostre principalle entrée audict Louvre par la
«porte qui est en la rue d'Autruche, devant la maison de Bourbon. Et, pour ce qu'il y
cra une maison au coing de ladicte rue, près ladicte faulse porte, devant la ri-
te vyère, qui entre avant (fait saillie) en icelle rue, et la difforme grandement; de
«laquelle maison voulloir que ce qu'il [déjpasse et entre en ladicte rue soit ab-
« battu et retranché au nyveau et à la raison des murailles mesmes dudict Louvre ,
«nous vous pryons que recouvrez ladicte maison et en diligence faictes abbattre
«ladicte difformité, et icelle mettre à l'alignement de ladicte muraille, ad ce
«que la rue demeure belle, large et droicte, comme dict est ci-dessus. Et, en ce
«faisant, nous ferez plaisir et chose très agréable. Très chers et bien amez,
«Nostre Seigneur vous ait en sa garde. — Donné à Sainct-Germain-en-Laye , le
«quinziesme jour de mars mil cinq cens vingt-sept. — Signé FRANÇOIS, et au-
-dessous, ROBERTET M. T)
Nous avons dit que le quai demandé en 1 527 n'était point encore fait en 1 53o ;
mais alors avait eu lieu l'expropriation de la maison en saillie et même de
toutes les constructions qui formaient le côté occidental de la rue d'Autriche, en
face du Louvre. Très-peu de temps après, on les voit effectivement remplacées par
les deux jeux de paume situés de chaque côté du guichet, lesquels, on se le rap-
pelle, occupèrent l'emplacement de plusieurs logis ainsi que d'un chantier® for-
(l) Arch. de l'Emp. reg. H 1779, f° 12 v". <tet ung chantier, applicquez h l'usaige et closture
(S) Dans les acquits au comptant pour l'année tfdu Louvre; pour laquelle acquisition a esté paie,
i533 il y aune pièce (11° hh) où on lit: ttLe Roy rrpar son ordonnance, six cens cinquante-cinq livres
rrdescharge le seigneur de Villeroy, trésorier de « tournois. » Cette pièce semble bien se rapporter
(r France, de faire apparoir du povoir qu'il a eu aux constructions sur l'emplacement desquelles fu-
fverballement pour l'acquisition de deux maisons rent élevés les jeux de paume.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 203
mant l'encoignure de la rue et du quai. (Voir Bue d'Autriche, p. 8.) C'est apparem-
ment aussi vers i53o que François Ier substitua aux terrasses de Charles V des
combles élevés, où furent disposés un grand nombre d'appartements, circonstance
que Sauvai mentionne sans désigner d'époque, et qui nous confirme dans l'idée
qu'on ne songea primitivement qu'à rendre les bâtiments du château plus com-
modes. En i53o, et dans cette seule intention, on en avait fait disparaître, depuis
trois ans, le trait le plus saillant : on avait renversé le sinistre donjon, qui rap-
pelait trop, peut-être, au vaincu de Pavie la tour grillée de Madrid, où s'était
passée une partie de sa captivité. En vain la Grosse-Tour, dont relevaient tous
les grands fiefs de France, et qui était ainsi le symbole de la royauté, se recom-
mandait-elle par son ancienneté et surtout par les souvenirs qui lui donnaient
un si puissant prestige, elle n'en fut pas moins rasée du sol, comme une cons-
truction vieillie, encombrant la cour et interceptant la lumière. Suivant un
marché du 28 février 1627, conclu avec le couvreur ordinaire du Roi, Jean-aux-
Bœufs, auquel on alloua une somme de 2,5oo livres, la démolition fut immédia-
tement commencée; elle dura jusqu'au mois de juin : on transportait les matériaux
dans la basse-cour méridionale. La démolition de la Grosse-Tour, ce premier acte
de la transformation du Louvre, fit sensation dans Paris, de sorte qu'il en est
question dans plusieurs écrits des auteurs contemporains, généralement si avares
de pareils détails. Ainsi, et sans compter Corrozet ni la Chronique de Gaignières,
le Journal d'uti Bourgeois de Paris W relate l'événement en ces termes, qui confirment
ce que nous venons d'en dire : «Audict an 1627, en février, fut commencé à
«abattre la Grosse-Tour du Louvre, par commandement du Roy, pour applicquer
«le chasteau du Louvre à logis de plaisance, et pour soy y loger. Et maintenoit
«le Roy que ladicte tour empeschoit ledict chasteau et la cour d'iceluy. Toutesfois
«fut grand dommaige de la desmolir, car elle estoit très belle, haulte et forte, et
«estoit appropriée à mettre prisonniers de grand renom. On disoit qu'elle avoit
«onze pieds d'espaisseur, et fut du tout desmolie et abbattue un peu devant la
« Sainct-Jean-Baptiste ensuivant, n
Le règne de François 1er est pauvre en chroniques, et le petit nombre de celles
qui s'y rapportent, consacrées principalement au récit des guerres, n'apprennent
rien sur les travaux du Louvre. On trouve seulement dans le Journal d'un Bourgeois
de Paris, après la mention de la destruction de la Grosse-Tour et de la fondation
du château de Madrid, cette simple phrase : «En ce temps (le Roi) fist fort répa-
« rer le chasteau du Louvre, pour soy y loger, et y feist faire de grands bastiments,
«tant cuisines, estables que autres choses. n Le paragraphe a trait aux environs de
l'an 1527, et l'on observe qu'il n'est toujours question, pour cette période, que
(1' Consulter l'édition publiée par M. Lalanne en 1 854.
aG.
204 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
de réparations et de l'adjonction de quelques constructions secondaires. Au com-
mencement de 1529, on travaillait activement au Louvre, et le nombre des ou-
vriers qui y étaient occupés fut le prétexte dont se servit le Parlement pour em-
pêcher qu'on y transférât le malheureux Berquin, détenu à la Conciergerie. En
i53o, les basses-cours occidentales tombant en ruines, le Roi les fit raser et établit
à la place une cour avec des cuisines ; sous Louis XV, cette cour portait encore le nom
de Cour des cuisines; elle avait causé la disparition de tout ou partie de l'ancienne
Artillerie. Sauvai, qui nous l'apprend, et qui reporte à la même année la cons-
truction des deux jeux de paume, parle également de travaux divers faits à l'oc-
casion de fêtes solennelles, et dont il résulta quelques modifications dans l'état des
dépendances du château. Ainsi l'on fut obligé d'aplanir la basse-cour voisine de la
rivière, pour que des joutes pussent y avoir lieu, lorsqu'au mois de mars 1 53 1 (n. s.)
la reine Éléonore d'Autriche fit son entrée à Paris. En 1 533, à propos des tr prépa-
rt ratifs du festin et sollempnité des noces entre Mons. le duc de Longueville et
cria fille de Mons. le duc de Guise n on procéda à cria construction d'un tribunal
« et autres choses que le Roy n avait cr ordonné estre faictes tant en la grant court du
trchasteau du Louvre, à Paris, que autres endroits d'icelluy chasteau,» travaux qui
coûtèrent i,5oo livres'1). En 1 535, on fit des lices du côté de Saint-Thomas, et,
en i537, on en fit d'autres « en une grant court, -n dit la Chronique de Gaignières,
avec «plusieurs eschaffaulx pour mectre et asseoir les princes, princesses, dames
«et damoiselles n qui devaient assister au tournoi donné en l'honneur du roi
d'Ecosse ; mais on ne voit pas qu'aucun de ces travaux ait intéressé le corps même
du château. Il est donc bien clair que François Ier, ainsi que nous l'avons dit au
commencement de ce chapitre, n'eut d'abord d'autre intention que de restaurer
le Louvre. Ce qui reste à préciser, c'est l'époque à laquelle fut prise la résolution
de rebâtir totalement l'édifice. Commençons par établir le peu de fondement des
opinions émises sur ce sujet par les historiens de Paris.
La plupart des auteurs du dernier siècle fixent à l'année i5a8 le commence-
ment de la reconstruction du Louvre; selon eux, par conséquent, les projets re-
monteraient au moins à 1527. C'est une simple supposition, en contradiction avec
les documents contemporains que nous venons de citer, et elle est d'autant plus
inacceptable, qu'on ne saurait, en l'admettant, s'expliquer cette singularité : Fran-
çois Ier, qui fit tant à Fontainebleau, à Madrid, à Chambord et ailleurs, aurait,
durant un long espace de vingt ans, si peu avancé les bâtiments du nouveau
Louvre, qu'à sa mort il n'y aurait eu presque rien de bâti. Le même argument
peut être opposé, bien qu'avec moins de force, à la date de 1 53g, qui a été pro-
posée par quelques écrivains, et qui n'est pas, d'ailleurs, appuyée de preuves plus
0
Acquits au comptant.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 205
authentiques que la date de i5a8. H est facile de se convaincre, en réfléchissant
aux faits suivants que cette date est inexacte.
Au mois de janvier i53o,, quand Charles-Quint, après sa prétendue réconci-
liation avec François Ier, passa à Paris pour se rendre à Gand, c'est au Louvre
qu'il logea. Le château était alors, et malgré tout ce qu'on y avait fait depuis
i 527, dans un si triste état, qu'il fut nécessaire d'y exécuter quantités de répara-
tions et d'embellissements. « On dora toutes les girouettes. Les armes de France en
rr plusieurs endroits furent peintes et arborées. On attacha contre les murs, tant des
r escaliers que des salles et des antichambres, des chandeliers de laiton. La plupart
rdes croisées furent agrandies et les vitres peintes. On augmenta le nombre des
« appartenons. On fit des lices, et il y eut des joutes et des tournois. En un mot,
cron n'oublia ni n'épargna rien, afin de mieux recevoir l'Empereur et de le ré-
r galer magnifiquement. Et de fait on rendit ce château si logeable que Charles-
n Quint, le Roi, la Reine, le Dauphin, la Dauphine, le Roi et la Reine de Navarre,
s les Enfants de France , le cardinal de Tournon , le Connétable et même la duchesse
ttd'Etampes, maîtresse de François Ier, y eurent des appartenons proportionnés à
«leur qualité. Aussi alors y fit-on tant de dépenses qu'un registre entier des
« Œuvres royaux en est tout plein et ne contient autre chose'1', -n Certes, rien
n'est plus déplaisant ni plus incommode que la proximité d'un bâtiment en cons-
truction; si donc en i53o, on avait été occupé à rebâtir une aile du Louvre, il est
peu supposable qu'on eût choisi ce château pour y loger un souverain auquel le roi
de France désirait assurément donner une haute idée de sa cour. Aussi bien les
réparations indiquées par Sauvai ne semblent-elles pouvoir convenir qu'au vieil
édifice, à peine suffisant pour une si nombreuse compagnie, et qui aurait cessé
d'être assez vaste dans le cas où l'un des corps de logis aurait été, soit démoli, soit
à l'état de maçonnerie imparfaite. En i53g, le quadrangle du Louvre était donc
encore celui du XIVe siècle, et, par suite, en dépit des efforts faits pour le déco-
rer et lui communiquer quelque élégance, il était peu propre à éblouir un mo-
narque habitué aux splendeurs des palais de marbre de l'Italie.
Cette dernière circonstance fut vraisemblablement la cause qui détermina enfin
le Roi à réédifier le Louvre. Nous n'en avons aucune preuve formelle , et néanmoins
nous en doutons peu parce que cela concorde parfaitement avec les événements
postérieurs, et avec ce que l'on sait du caractère de François Ier. Vaniteux et jaloux
de son rival, il put lire sur le visage de celui-ci quelque expression de dédain à
l'aspect des sombres tourelles de Philippe- Auguste, et des beautés surannées de l'é-
poque de Charles V. C'en fut assez probablement pour froisser son amour-propre et
le décider à jeter bas ces gothiques murailles qui n'éveillaient, dans son esprit léger,
que l'idée d'une vieillerie de mauvais goût. Mais il ne suffisait point de renverser
<'> Sauva), t. II, p. 4g.
206 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
l'antique manoir; avant d'y porter ie pic, il fallait s'assurer que les ressources ne
manqueraient point pour le remplacer immédiatement par un palais somptueux,
propre à faire oublier la royale forteresse dont le nom avait si longtemps inspiré
le respect. Là surgissaient des difficultés de toutes sortes, dont la plus sérieuse
était cette pénurie d'argent qui constitua l'état normal des finances sous tous les
Valois d'Angoulême. Avec un peu plus d'économie et d'ordre dans l'emploi des
revenus de la couronne, François Ier eût sans doute joui de la satisfaction, réservée
à son fils, de voir entièrement élevée une des ailes du monument dont il ne fit
guère que concevoir le projet.
La résolution de bâtir le Louvre étant définitivement adoptée par le Roi , quelque
grands qu'aient été les embarras financiers qui traversèrent ses desseins, ils le
préoccupèrent peut-être moins que le choix d'un architecte capable de réaliser di-
gnement sa pensée. Son engouement pour les artistes italiens était tel, qu'on doit
s'étonner de la préférence qu'il donna à un Français. 11 est vrai que ce Français dressa
ses plans d'après les idées les plus avancées, et qu'il pourrait bien n'avoir fait que
succéder à un Bolonais, dont la médiocre capacité s'était trop clairement révélée. En
effet, «pour conduire ce bâtiment, dit Germain Brice, et pour le rendre plus ré-
tr gulier, il (François Ier) fit venir exprès d'Italie un des plus renommez architectes ,
net celui des quatre qui a le mieux écrit sur l'art de bâtir, nommé Sébastien
«Serlio, dont cependant les dessins, quoique très-beaux, ne furent pas suivis,
«ceux de Pierre Lescot, seigneur de Glagny ayant été trouvez infiniment
«plus réguliers et plus magnifiques. « Il n'entrait point dans les usages de Brice
de citer des autorités, de sorte qu'on en est réduit à se demander où il avait puisé
cette anecdote, qui ne paraît point avoir été connue de Sauvai, et dont nous ne
sachions pas qu'il soit fait mention antérieurement. Mais on a fort enchéri depuis
sur le récit de Germain Brice, en ajoutant que Serlio reconnut lui-même la su-
périorité des projets de son concurrent. L'historiette ressemble beaucoup à un de
ces enjolivements qu'il a été trop longtemps de mode de broder sur le fond des
choses vraies. Les artistes italiens appelés en France ne péchaient point par excès de
modestie; bien au contraire, ils étaient pleins de morgue, et le plus souvent ails
tftailloient des princes, n comme parle Antoine de Laval; aussi, pas plus du temps
de Serlio que du temps du Bernin, n'étaient-ils disposés à admettre la suprématie
d'un talent quelconque en dehors de leur pays. Quant à cette circonstance que
des dessins furent demandés à Serlio en même temps qu'à Lescot, elle peut avoir
été apprise à Brice par quelqu'un de ces « curieux n qu'il fréquentait, et n'est point
invraisemblable ; mais il reste à prouver qu'elle a pour fondement autre chose qu'une
tradition sans valeur. Ce dont nous avons la certitude morale, c'est que Serlio ne
fut pas appelé d'Italie en vue d'une reconstruction du Louvre. Au dire de Sarrazin,
son éditeur, son biographe et son contemporain, il vint en France amené par le
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 207
cardinal de Lorraine, qui, désireux de plaire à François Ier, crut être agréable
à ce monarque en lui présentant Serlio. La démarche eut du succès; Serlio,
parfaitement accueilli par François Ier, fut sur-le-champ nommé architecte du Roi
et envoyé à Fontainebleau, où s'offrait la plus belle occasion de déployer tout son
talent'1). Ces détails sont confirmés par les lettres patentes données à Fontaine-
bleau, le 27 décembre i56i, qui lui accordent 4 00 livres de gages par an, plus
une indemnité de 20 sous par chaque journée passée à visiter les bâtiments royaux.
Dans ces lettres, le Roi le nomme crnostre paintre et architecte ordinaire au faict de
trnosdicts ediffices et bastimens dudict Fontainebleau, auquel nous l'avons pour
«ce retenu <'2>, i> et il n'y est fait aucune mention de gages antérieurs; d'où il faut
conclure que Serlio était arrivé récemment et qu'il fut immédiatement commis à
la conduite des travaux de Fontainebleau , les seuls importants qu'il ait incontes-
tablement dirigés en France. Il n'y a, en somme, que d'assez faibles présomptions
en faveur de l'opinion suivant laquelle les plans du nouveau Louvre auraient d'a-
bord été demandés à l'architecte bolonais; tandis que Pierre Lescot est sûrement
l'auteur de ceux qui furent suivis.
Les nombreux biographes de Lescot ne nous apprennent rien de son père, et
tous se contentent de dire que le célèbre artiste appartenait à la famille d'Alissy,
laquelle occupait un rang élevé dans la noblesse de robe. Le renseignement n'est
point fort exact, car la famille de Lescot s'appelait de Lissy et non d'Alissy; il n'est
point non plus fort instructif, et nous nous sommes efforcé d'en découvrir d'autres
un peu plus satisfaisants. Nous avons recueilli ce qui suit :
Guillaume Dauvet, seigneur de Clagny, conseiller maître des requêtes de l'hôtel
du roi et second président de la Cour des Aides, qui vivait encore en septembre
i5i5, épousa Jeanne Lhuillier, dame de Francart, et de ce mariage naquit Anne
Dauvet, qui fut la femme de Pierre Lescot*3), seigneur de Lissy-en-Brie (4). Celui-ci,
<'» irEt Carolus insuper Lotharingiae cardinalis, (,) Comptes des bâtiments royaux, t. I, p. 172.
ffin eum summa usus Kberalitate memoratur: qui M. le comte de Laborde, qui va éditer ces curieux
<rex Ilalia in Galliam virum secum abducens, Re- documents, a bien voulu nous permettre d'en
rrgemque praeclaro aliquo munere sibi gratificari prendre connaissance avant la publication de son
rpercupiens, ante illum mox Serlium accersivit sta- ouvrage. Ce n'est pas le seul acte qui lui donne
rrtuitque. Cujus virtutem Rex admiratus et honori- des droits à notre reconnaissance,
«ficenlisîimis verbis prosecutus, regii architecti <3> Ce nom , en vieux langage , signifiait l'Écos-
■ nomine ac dignitate eum quamprimum condeco- sais. Lescot descendait probablement d'une ancienne
«ravit; liberalique slipendio ascripto , ad Fontem- famille parisienne ainsi appelée, dont plusieurs
»rBlecium,quemRexpulclierrimissumptuosijsimis- membres figurent dans les rôles de la Taille du
■ que sibi exornandum proposuerat, stalini illum ut temps de Philippe le Bel; l'un d'eux, aussi appelé
rvirtntis suœ ostendendae latissimum campum et Pierre, figureégalementdanslescomptesduLouvre,
"tnaleriam insignemhaberet,dimisit. * (Notice bio- en 1367. (Voir p. io,5, n° 108.)
graphique dans l'édition in-4° des Œuvres de Serlio , (4) Le P. Anselme ( Histoire généalogique , t. VIII ,
traduites de l'italien en latin par Jean-Charles Sar- p. 775, c), dit de Liiy-sur-Ourcq ; mais il se trompe,
razin. Venise, i568 et 1569.) car, dans tous les titres, le mot est écrit Lissy et
208 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
pourvu de l'office de procureur du roi en la Cour des Aides, par lettres du 29 oc-
tobre i5o&, reçu en sa charge le h novembre suivant, fut élu prévôt des mar-
chands en i5i8, et mourut en 1 533 M; Il posséda, du chef de sa femme, en la
rue du Port-Saint-Landry, un hôtel qu'il vendit à Pierre Filhol, archevêque
d'Aix^, et le fief de Clagny, paroisse de Montreuil, près de Versailles, à l'occasion
duquel, le 5 février i53i, il eut à donner aux Gélestins de Paris un reçu de
8 écus au soleil, reçu qui existe encore et qui porte sa signature'3*. C'est ce
Pierre Lescot, procureur général en la Cour des Aides, qui fut le père de Pierre
Lescot l'architecte.
Si ce dernier avait réellement, à l'époque de sa mort, l'âge qu'on lui prête, il
dut naître en 1 5 1 0. 11 était Parisien, au dire de Jean Goujon, qui, ayant longtemps
travaillé avec lui, le connaissait bien et qui vante son mérite W. Il ne fut point
seigneur de Lissy, comme son père; mais il fut, ainsi que lui, seigneur du fief de la
Grange-du-Martroy, en la justice de Montreuil, et, comme son grand-père ma-
ternel, seigneur de Clagny*5'. En cette qualité, au bas du reçu donné aux Cé-
lestins, l'an i53i, il ajouta, le k mai 1 536, un autre reçu qui nous a fourni la
signature autographe dont on trouvera un fac-similé sur la planche où sont réunies
les signatures de divers architectes du Louvre et des Tuileries.
On ne connaît guère de la vie de Lescot que les détails contenus dans une
épître qui lui fut adressée par Ronsard, et dont nous copierons textuellement les
parties intéressantes :
Toy, i'Escot, dont le nom jusques aux astres vole,
As pareil naturel : car estant à l'escole,
On ne peut le destin de ton esprit forcer,
Que toujours avec l'encre on ne te vist tracer
Quelque belle peinture, et jà, fait géomettre,
Angles, lignes et poincts sur une carte mettre.
Puis, arrivant ton âge au terme de vingts ans,
nous avons eu la preuve que le fief de Lescot était
celui de Lissy, canton de Brie-Comte-Robert, à
dix kilomètres de Melun.
(1) Suivant une note des registres secrets de la
Cour des Aides, qui nous a été communiquée par
M. E.Boularic. — Arch. de l'Emp. reg. Zy57,p. 3.
m Comptes de la Prévôté, ap. Sauvai, t. III,
p. 617. — Nous avons retrouvé les titres de pro-
priété de cette maison ; il y est seulement parlé des
Dauvet et non de Lescot. La maison n" 1 9 du quai
Napoléon en occupe l'emplacement.
<5) Arch. de l'Emp. cart. S 3796.
'*' Dans l'épître que nous citerons plus loin,
parlant de ceux qui ont écrit sur l'architecture,
J. Goujon assure en connaître * plusieurs autres
trqui sont capables de ce faire; neantmoins ilz ne
(ts'en sont encores mis en peine, et pourtant ne
«•sont dignes de petite louenge. Entre ceulx-là se
crpeut compter le seigneur de Clagny, Parisien; si
rrfaict aussi maistre Philibert Delorme, architecte.»
(5) Ayant le titre d'abbé, il était fréquemment
appelé l'abbé de Clagny, ce qui a fait dire et répéter
qu'il possédait en commende l'abbaye de Clagny : il
n'y a jamais eu d'abbaye de ce nom.
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00
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 209
Tes esprits courageux ne furent pas contans
Sans doctement conjoindre avecques la peinture,
L'art de mathématique et de l'architecture,
Où tu es tellement avec honneur monte'
Que le siècle ancien est par toy surmonté.
Car bien que tu sois noble et de mœurs et de race'1',
Rien que dès le berceau l'abondance te face,
Sans en chercher ailleurs, riche en bien temporel,
Si as-tu franchement suivi ton naturel ,
Et tes premiers régens n'ont jamais peu distraire
Ton cœur de ton instinct, pour suivre le contraire.
On a beau d'une perche appuyer les grans bras
D'un arbre qui se plie, il tend tousjours en bas;
La nature ne veut en rien estre forcée,
Mais suivre le destin duquel elle est poussée.
Jadis le roy François, des lettres amateur,
De ton divin esprit premier admirateur,
T'aima pardessus tout : ce ne fut, en son âge,
Peu d'honneur d'estre aymé d'un si grand personnage,
Qui soudain cognoissoit le vice et la vertu,
Quelque déguisement dont l'homme fust vestu.
Henry, qui, après lui, tint le sceptre de France,
Ayant de ta valeur parfaite cognoissance,
Honora ton sçavoir; si bien que ce grand roy
Ne vouloit escouter un autre homme que toy,
Soit disnant et soupant; et te donna la charge
De son Louvre enrichy d'édifice plus large,
Ouvrage somptueux , à fin d'estre monstre.
Il me souvint un jour que ce prince, à la table,
Parlant de ta vertu, comme chose admirable,
Disoit que tu avois de toy-même appris
Et que sur tous aussi tu remportois le pris :
«■ Gomme a faict mon Ronsard, qui, à la poésie,
wMaugré tous ses parens, a mis sa fantaisie.»
Et pour cela tu fis engraver sur le haut
Du Louvre une déesse, à qui jamais ne faut
Le vent à joue enflée, au creux d'une trompette;
Et la monstras au Roy, disant qu'elle estoit faite
Exprès pour figurer la force de mes vers,
Qui, comme vent, portoient son nom vers l'univers (2).
On sait que, pendant le xvic siècle, la collation des bénéfices fut une des libéra-
lités au moyen desquelles le Roi encourageait et récompensait les grands artistes.
1 On verra ailleurs que Ronsard ne faisait point M Œuvres de Ronsard, p. g85 de l'édition de
uu pareil éloge de Philibert de l'Orme. 1609. — Claude Binet, le biographe de Ronsard,
1. g7
210 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Pierre Lescot était trop bien en cour pour ne pas avoir sa part dans la distribution
des faveurs et des charges; il fut ainsi conseiller et aumônier ordinaire du Roi, et,
en outre, abbé commenda taire de Clennont, près Laval'1'; enfin il fut pourvu
d'un canonicat dans l'église de Paris, le 18 décembre i55&, et solennellement
installé dans le chœur de la cathédrale, du côté gauche, le lundi 3i du même
mois'2'. Son nom apparaît en effet sur la liste des chanoines du jour de Pâques
1 555 ; mais on ne le voit point, en cette année, au bas des résolutions du Chapitre.
La raison en est sans doute que la réception de Lescot n'avait point été définitive,
par suite d'une opposition qui nous est révélée dans une délibération du vendredi
7 août 1 556; on y lit que ce jour-là Pierre Lescot, par l'intermédiaire de Me Ma-
riau, demanda à être admis, in propria, à la jouissance de son canonicat et de sa
prébende, tout en conservant sa barbe. Il la gardait, assurait-il à cause de ses
fonctions journalières auprès du Roi, et faisait valoir subsidiairement que, pour un
service public, il devait être prochainement envoyé à Rome. Il protestait d'ailleurs
de son respect pour les statuts obligeant les chanoines à se raser au moins toutes
les trois semaines, et prenait l'engagement de ne point se présenter dans l'église,
pendant les offices, avant de s'être fait couper la barbe, et sans être vêtu d'habits
convenables, à la façon de ses collègues. Cette requête provoqua une discussion
assez vive; mais le résultat en fut favorable au postulant, car le Chapitre décida
que, pour cette fois seulement, sans tirer à conséquence, on dérogerait à la règle,
et que, le mercredi suivant, Lescot, après avoir prêté le serment accoutumé, serait
définitivement installé, ce qui eut lieu(3).
Lescot était peintre et même peintre habile, qualité qu'on ne lui connaît guère,
mais qui ressort des vers de Ronsard et surtout d'un passage où Jean Bodin, à
propos de tableaux, dit: «Nous en avons de Michel Ange, Raphaël Durbin, de
tt Durel (Durer), et, sans aller plus loin, un de M. de Clagny, en la galerie de Fon-
te taine-Beleau, qui est un chef-d'œuvre admirable, que plusieurs ont parangonné
raconte ainsi l'anecdote h laquelle le poëte fait allu-
sion: n-Il n'y a voit grand seigneur en France qui ne
ftinst à grande gloire d'estre en son amitié, et ses
rr œuvres en font assez de foy. Ce fut ainsi ce qui
n-esmeut le sieur de Clany, h qui le roy Henry avoit
n-commis la conduite de l'architecture de ses chas-
fteaux, de faire engraver en demy-bosse, sur le
ffhaut de la face du Louvre, une déesse qui em-
« bouche une trompette, et regarde de front une
rr autre déesse portant une couronne de laurier et
rrune palme en ses mains, avec cette inscription en
" table d'attente et en marbre noir :
rtVIRTUTI REGIS INVICTISSIMI.il
f Et comme un jour le Roy, estant à table , luy de-
rrmandoitee qu'il vouloit signifier par cela, il luy
tr répondit qu'il entendoit Ronsard par la première
<r figure, et, par la trompette, la force de ses vers,
fret principalement de La Franciadc, qui pousserait
irson nom et celuy de toute la France par tous les
rr quartiers de l'univers.» Les bas-reliefs dont il est
ici question sont au-dessus de la porte de l'aile
occidentale, qui est contiguë h l'encoignure sud-
ouest de la cour.
(1) Au moins dès 1 556. Il énonce tous ces titres
dans un hommage du i3 septembre i55q.
(S) Registres capilulaires de Notre-Dame. Arch.
de l'Emp. LL q5o, p. 91 3.
O Ibid. LL a52, p. 222 et 23o.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS I". 211
«aux tableaux d'AppellesW. -n On ne cite néanmoins aucun tableau de Lescot, et,
s'il est illustre, c'est uniquement comme architecte. H fut l'un des premiers qui,
en France, aient employé le style classique pur de tout mélange. Il paraît, du
reste, avoir très-peu construit et n'avoir pas beaucoup cherché les occasions de le
faire, soit parce que sa fortune l'en dispensait, soit parce que les fonctions qu'il
avait à remplir près du Roi lui eussent rendu impossible la conduite d'un grand
nombre d'édifices. Sa première œuvre connue est le jubé de Saint-Germain-
i'Auxerrois, exécuté de i54i à îhlili, dont la sculpture fut faite par Jean Gou-
jon*2'. En i55o il bâtit, avec le même artiste, la fontaine dite des Nymphes et
aujourd'hui des Innocents. On lui attribue également les plans de l'hôtel Car-
navalet'5'. Ce sont là les seuls édifices qu'on signale comme étant de lui*4', indé-
pendamment du Louvre, spécimen magnifique de son talent, et dont il ne cessa
de diriger la construction jusqu'à sa mort. Après en avoir dressé les projets et
les avoir fait agréer, il en fut nommé officiellement architecte, par lettres patentes
données à Fontainebleau, le 2 août i546, et dont voici la teneur, précédée de la
formule de vidimus qui est en tête dans les comptes où se trouve cet intéressant
document <5'.
« Transcript du pouvoir du sieur de Claigny, pour ordonner du fait des bas-
« timens et édiffices du chasteau du Louvre.
«A tous ceux qui ces présentes lettres verront, Anthoine Duprat, chevalier,
« baron de Thiers et de Viteaux, seigneur de Nantoulet et de Précy, conseiller du
«Roy, nostre sire, gentilhomme ordinaire de sa chambre et garde de la prévosté
«de Paris, salut. Sçavoir faisons que, l'an de grâce 1 556 , le 9e jour d'apvril après
« Pasques, par Philippe Boisselet et Germain Le Charron, notaires du Roy, nostre
« sire, au Chastellet de Paris, furent vues, leues, unes lettres dudit Sieur, escriptes
«en parchemin, données à Fontainebleau, saines et entières en seing, scel et es-
creriptures, desquelles la teneur ensuit :
«François, par la grâce de Dieu, roy de France, à nostre cher et bien amé
«Pierre Lescot, seigneur de Claigny, salut et dilection. Parce que nous avons
« délibéré de faire bastir et construire en nostre chastel du Louvre un grand corps
« d'hostel, au lieu où est de présent la Grande Salle, dont nous avons fait faire les
«dessins et ordonnances par vous, duquel nous avons advisé d'en bailler la totale
(1) Discours de Jean Bodin sur le rehaussement et et à Bullant. Nous sommes loin d'affirmer que Lescot
la diminution des monnoyes, in-8", Paris, 1578. Cité en ait été l'architecte.
par M. Éd. Fournier, Variétés historiques, t. VII, (t) Félibien (Hist. de Paris, p. 1021) dit que
p. i48. Lescot éleva des bâtiments à Fontainebleau; mais
m Voir, au chapitre suivant, la notice sur Jean le fait est peu vraisemblable.
Goujon. (6) L. de Laborde , Comptes des bâtiments royaux ,
(,) On attribue aussi cet hôtel à un Du Cerceau t. I, p. aig-
27.
212 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
« charge, conduicte et superintendance, à cette cause soit besoin de vous faire
«expédier vos lettres de pouvoir, en tel cas requises; pour ces causes, confians à
«plainde votre personne et de vos sens, suffisance, loyauté, prud'hommie et bonne
« expérience au fait d'architecture, et grande diligence, et aussy que vous avons
a amplement déclaré nostre vouloir et intention sur le fait desdits bastimens, au
ce moyen de quoy sçaurez, autant bien que nul autre, conduire et vous acquiter
«de ladite charge à nostre grez et contentement; vous avons commis et députté,
«commettons et députtons, et vous avons donné et donnons plain puissance, au-
rtthorité, charge et mandement spécial par ces patentes, de ordonner du fait des-
« dits bastimens et édiffices que avons ordonné être fait en nostre chastel du Louvre ,
« et autres que pourrons faire construire cy-après en nostre ville de Paris ; en faire
«conclure et arrester les pris et marchez avec les maistres maçons, charpentiers,
«tailleurs, menuisiers, victriers et tous autres artisans et gens de mestiers, que
« requis en sera , pour les ouvrages qu'il y conviendra faire ; iceux contraindre de
«faire leur devoir et à nous servir de leur mestier, selon ce que aurez convenu
«avec eux, èsquels y seront obligez; aussy de ordonner tant des frais desdits bas-
«timens, voictures nécessaires à iceulx, que de tous autres frais licites et conve-
«nables pour le fait et nécessité d'iceulx meublemens, ornemens et décorations
«qui y seront décentes et requises; iceux frais faire payer aux personnes, à me-
« sure qu'ils ont gaigné et desservy, par celuy ou ceux qui sont ou seront par nous
«commis à faire les payemens desdits édiffices; et généralement de faire et faire
«conduire, ordonner et pourveoir aux frais desdits bastimens et édiffices, leurs
«circonstances et dépendances, ensemble desdits frais nécessaires à iceux, tout
«ainsy que verrez estre à faire, et que nous mesme ferions et pourrions faire si
«estions en personne : jaçoit ce que le cas requit mandemant plus espécial. Les-
« quels pris et marchez qui seront par vous faits et arrestez , pour l'effet que dessus,
«ensemble les payemens qui, en vertu de vosdites ordonnances, seront faits, nous
«avons, dès à présent comme pour lors, vallidez et authorisez, vallidons et autho-
«risons, et déclarons avoir pour agréable; et voulons lesdits payemens et frais estre
«passez et allouez es comptes et rabatus de la recepte et assignation d'icelluy ou
«ceux qui les auront payez, par nos amez et féaulx les gens de nos comptes, et
«partout ailleurs où il appartiendra; leur mandant aussy le faire sans aucune dif-
«ficulté, en rapportant sur lesdits comptes le vidimus fait sous scel royal de ces
«dites présentes, que nous avons pour ce signées de nostre main, iceux pris et
« marchez , vosdites ordonnances , les roolles et cahiers de vos frais , signez et ar-
« restez de vous respectivement où besoin sera , avec les quittances des parties où
«elles escheront, sur ce suffisantes seulement; car tel est nostre plaisir. Mandons
«•et commandons à tous nos justiciers, officiers et subjets, que à vous, en ce fai-
re sant , obéissent et entendent diligemment, prestent et donnent conseil, confort,
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 213
trayde et prispns, si mestier est et requis en sont. Donné à Fontainebleau, le
« 2e jour d'aoust, l'an de grâce i546, et de nostre règne le 32e. — Ainsy signé :
«FRANÇOIS. De par le Roy : Bayard, et scellé à simple queue de cire jaulne. — En
ff témoin de ce, nous, à la rellation desdits notaires, avons fait mettre le scel de
(t ladite Prévosté de Paris à ces présentes lettres de vidimns, collationnées à l'ori-
ftginal de cesdites lettres, ledit an et jour dessus premiers dits. Signé Boisselet
ff et Le Charron, d
Pierre Lescot fut architecte du Louvre pendant la longue période de trente-deux
années, car il vécut jusqu'en 1 578. Les biographes n'ont pas fixé le jour même
de sa mort; elle arriva le mercredi 10 septembre, vers quatre heures de l'après-
midi. Lescot habitait alors une maison du cloître Notre-Dame, qu'il possédait en
vertu de son canonicat. Il fut enterré le 12 dans la cathédrale, et, comme récom-
pense d'une fondation pieuse qu'il avait faite, on permit à ses exécuteurs testa-
mentaires de l'inhumer dans la chapelle Saint-Ferréol , à la charge, toutefois, de
décorer cette chapelle d'une manière convenable M.
Pierre Lescot était propriétaire d'une grande maison située au faubourg Saint-
Jacques <2), et qu'on appelait l'hôtel de Clagny; il la donna à son neveu, Léon
Lescot'3', qui le remplaça au Chapitre Notre-Dame W, fut également conseiller et
aumônier du roi, ainsi qu'abbé de Clermont. Léon Lescot, reçu conseiller au
Parlement, le 12 avril 1 58 1 , possédait, avec un sien frère, Pierre Lescot, sei-
gneur de Lissy, aussi conseiller aux requêtes du Parlement (5), le fief, précédemment
mentionné, du Martroy, dont ils firent tous deux hommage le icr mars 1 58 1 . Ce
fief leur appartenait en qualité d'héritiers de leur frère Claude, à qui Pierre
Lescot, le conseiller, l'avait cédé, après l'avoir reçu lui-même de son oncle Pierre
Lescot, l'architecte*6'. Or il est dit, dans une transaction du 6 juin 1 576 *7', que
ce même Pierre Lescot était «le filz aisné et principal héritier de feu noble homme
«et saige Mc Léon Lescot, en son vivant aussi seigneur dudict Lissy, i> qui fut
pareillement conseiller au Parlement, eut pour femme «noble damoiselle Marie
« Chevrier, n et était déjà mort en t557, car, dans une reconnaissance du 17 sep-
tembre de la même année, Marie Chevrier est énoncée veuve et curatrice de ses
enfants <8). Ce premier Léon Lescot, père des neveux de l'abbé de Clagny, était
(1) Arch. de l'Emp. reg.LLa65,p. 171. — La cha-
pelle Saint-Ferréol et Saint-Férucion est la seconde
après la porte Rouge. — L'épitaphe de Pierre Lescot
ne se rencontre point dans les recueils.
(,) C'est celle où fu t établi le couvent de Port-Royal ,
transformé aujourd'hui en Hôpital de la Maternité.
(3) Arch. de l'Emp. cart. S 45 1 5.
(4) Son nom se voit au bas d'une délibération
de deux jours postérieure à la mort de son oncle.
M François Rlancbard, Catalogue des conseillers
au Parlement, p. 85 et 97. Sa réception eut lieu le
a5 octobre i568. Ce Pierre Lescot, qui fut mar-
guillier de Saint- Pierre-aux-Bœufs, en i583 et
i584, confondu avec son oncle, a fait croire que
celui-ci avait été conseiller au Parlement.
<•> Arch. de l'Emp. reg.S38io, P a3a et a33.
(7) Arch. de l'Emp. cart. S 34 1 a.
(,) Arch. de l'Emp. cart. S 34 1 a.
214 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
donc son frère. Il n'était point le seul, car un certain Jean Lescot, qualifié sei-
gneur de Lissy, reçu conseiller au Parlement en 1 5a 2, et mort l'an i5&5 W, paraît
ne pouvoir être qu'un autre frère de Pierre Lescot l'artiste W. Le grand hôtel
de la rue Saint-Honoré , qui a porté depuis le nom $ hôtel d'Aligre, fut possédé
successivement par l'un et par l'autre (3). Jean Lescot eut une sœur, Madeleine
Lescot, religieuse professe aux Filles-Dieu, et pour la nourriture et entretènement •»
de laquelle il donna au monastère onze arpens et demi quartier de terre « au ter-
tr rouer de la Villette Saint-Ladre (4).t>
Réserves faites en ce qui touche le degré de parenté de Jean Lescot, la généa-
logie de la famille se traduit ainsi :
Madeleine Lescol,
religieuse aux Fiiles-Dieu.
Pierre Lescot,
seigneur de Lissy ,
procureur du roi en la cour des Aides ,
mort en 1 533.
Femme : Anne Dautet ,
fille de Guill. Dauvet, seigneur de Lissy.
Jean Lescot,
seigneur de Lissy,
conseiller au parlement,
mort en i545.
Claude Lescot,
mort avant i55i.
Léon Lescot,
seigneur de Lissy,
conseiller au parlement ;
il était déjà mort en 1557.
Femme :
PIERRE LESCOT,
seigneur de Clagny,abbé
de Clermont,
chanoine de Notre-Dame,
architecte du Louvre,
Marie Chevrier de Pauldy. mort le 10 septembre 1578.
Pierre Lescot,
seigneur de Lissy ,
conseiller au parlement ,
mort entre 1606 et i6i3.
Femme : Marie de Foissy.
Léon Lescot,
abbé de Clermont,
chanoine de Notre-Dame,
conseiller au parlement.
m Catalogue des conseillers au Parlement, p. 53.
Ses armes étaient écartelées, aux premier et qua-
trième, de sable à une tête de chevreuil d'argent,
ramée d'or; aux deuxième et troisième, d'azur à
trois rocs d'or, à la bordure de gueules. Nous ne
savons au juste quelles étaient les armes de Pierre
Lescot.
m Sa qualité authentique de seigneur de Lissy
nous dispose beaucoup à le croire ; il aurait hérité
du fief paternel, et Pierre, du fief maternel. — D'a-
près le passage de Sauvai déjà cité, Pierre Lescot,
Charles Lescot,
seigneur de Lissy.
le procureur général de la cour des Aides, avait eu
effectivement un fils nommé Léon. Le fils de ce
dernier, le second Léon Lescot , était bien le neveu
de l'abbé de Clagny : nous en avons eu deux preuves
incontestables.
m Censier de Saint-Germain-l'Auxerrois pour
i53i, f° 18 r\ Inventaire des titres du Chapitre,
t. III, fol. ao3 r°. (Arch. de l'Emp. reg. LL55o et
S 585.)
1 ' (4) Déclaration des biens des Filles-Dieu, en 1 5 69.
Arch. de l'Emp. car t. L 6626.
<
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 215
La dernière et la plus importante des questions que comporte l'histoire du
Louvre au temps de François Ier est celle de l'époque exacte à laquelle fut com-
mencée la reconstruction de l'édifice. D'après Brice et quelques auteurs, elle aurait
été entreprise en i528; d'après d'autres, en 1 53g , et, suivant l'opinion aujour-
d'hui la plus répandue, en îbUi. On a vu que la première de ces dates n'est point
un moment acceptable, et que la seconde a été adoptée par confusion avec celle
des travaux faits pour la réception de Charles-Quint. Quant à la troisième, qui
s'éloigne moins de la vérité, et que personne ne semble révoquer en doute main-
tenant, il s'en faut de beaucoup qu'elle soit justifiée; car, ainsi que nous l'avons
constaté, non sans surprise, elle a pour unique base cette double remarque,
faite par d'Argenville, qu'en i5a8 Lescot était trop jeune pour qu'on lui confiât
une tâche aussi lourde que la réédification du Louvre'1', et que d'ailleurs Serlio,
le premier auquel on se serait adressé, ne fut appelé d'Italie qu'en i5ùi. L'ob-
servation de d'Argenville, quoique fondée, ne détermine pas la date qu'il s'agit de
fixer; elle établit bien que cette date ne peut remonter plus haut que »j>4i,
mais elle n'empêche nullement de croire qu'il faut descendre plus bas. Cette
dernière conclusion nous paraît clairement ressortir de l'examen des faits sui-
vants.
Dans les lettres du mois d'août i566, par lesquelles Lescot fut nommé ar-
chitecte des nouvelles constructions, on lit : «Parce que nous avons délibéré de
« faire bastir et construire en nostre chastel du Louvre un grand corps d'hostel
«au lieu où est de présent la Grande Salle, dont nous avons fait faire les dessins
fret ordonnances par vous, duquel nous avons advisé d'en (de vous en) bailler la
« totale charge, conduite et superintendance, etc. n Si cette phrase ne signifiait
point que, au moment de l'expédition des lettres patentes, la vieille Grande Salle,
et conséquemment l'aile dont elle faisait partie, existaient encore ou du moins
n'avaient point été remplacées par de récentes constructions , il semble , on l'avouera ,
fort singulier qu'on se soit servi de cette locution , « nous avons délibéré de faire
■ bastir. . . un grand corps d'hoslel au lieu où est de présent la Grande Salle, n surtout
en spécifiant que les dessins du corps d'hôtel futur avaient déjà été donnés par
Lescot. On chercherait d'ailleurs inutilement à arguer du peu de lucidité de ce
texte, et si, en soutenant qu'il est amphibologique, on affirmait qu'il faut appliquer
non au tr corps d'hostel, n mais à la a Grande Salle, a ces mots, «dont nous avons
«fait faire, etc. a on ne produirait qu'un argument sans portée. En effet, outre
que le membre de phrase «duquel nous avons advisé, etc. s qui ne peut avoir trait
qu'au «corps d'hostel, n rend le doute impossible, il est manifeste que, dans le
cas où la nouvelle Grande Salle, c'est-à-dire l'étage inférieur, aurait déjà été rebâtie,
(")
Vies des fameux architectes, p. 3oo.
216 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
il y aurait eu simplement un étage à superposer et non point un corps d'hôtel à
édifier au lieu où elle se trouvait, ainsi que l'expriment les lettres patentes. D'un
autre côté, lorsqu'on prend pour vraie la date de i54i, on se demande qui di-
rigea les travaux de ces bâtiments élevés dei54iài5£6,et dont on n'a aucune
idée. Si c'eût été Lescot, il n'y aurait point eu lieu de lui délivrer des lettres d'of-
fice en 1 566, et, dans celles qui lui furent accordées à cette époque, il eût été
fait allusion à ses précédents services, comme dans celles qui lui furent octroyées
plus tard. On ne voit pas, dans ces documents, que Lescot ait eu un prédéces-
seur au Louvre, et c'était l'usage, en son temps, de rappeler une pareille cir-
constance.
Au surplus, il est un fait qui démontre encore mieux la fausseté de l'opinion
générale. Dans son édition des Antiquitez de Paris, publiée en i5&3 W, date remar-
quable, Corrozet, témoin oculaire et en quelque sorte spécial, dit seulement,
en parlant du Louvre, que la Grosse-Tour a été renversée en 1627, «par le corn-
et mandement du roy Françoys, lequel a eslu, en Paris, celuy chasteau du Louvre
trpour commune résidence ;n mais, de ces prétendus travaux qui devaient être
alors en pleine activité, il n'est pas dit un seul mot. Au contraire, l'édition de
i55o porte que François Ier fit faire au Louvre «de grandes réparations et nou-
<r veaux édifices <2> ; .entre lesquelz, un peu devant son trespas, feit commencer une
trgrand'salle à la mode des antiques, la plus excellente, selon l'art d'architecture,
« qu'on veit jamais : laquelle le Roy nostre sire, Henry second du nom, à présent
tr régnant, a fait parachever^, -n N'est-il pas évident que si Corrozet, qui entre dans
de tels détails en i55o, n'en donne pas de semblables en i563, c'est qu'à cette
dernière date il n'avait rien de pareil à mentionner ?
Mais ce n'est pas tout, et le langage de Corrozet fournit un autre argument non
moins péremptoire contre la date de i54i. Suivant cet auteur, la Grande Salle
et à la mode des Antiques,-» première partie du Louvre qui ait été reconstruite, fut
commencée «un peu devant» le s trespas n de François Ier. Or François Ier mourut
le 3i mars 1 5Ù7, à l'âge de cinquante-trois ans. Comment croire qu'un con-
temporain ait pu considérer comme s'étant passé un peu devant le trépas de son
roi, un événement accompli six ans auparavant?
De ce qui précède, nous pensons être en droit de conclure rigoureusement que
les «projets informes d'un très grand dessein plantés n sur les fondations de
l'aile occidentale du vieux Louvre , lesquels constituent la part attribuée par Sauvai <4)
à François 1er, dans la reconstruction de l'édifice, et ne peuvent avoir réclamé cinq
(1) Cette édition est si rare qu'on n'en connaît m Les édifices auxquels Corrozet fait allusion
qu'un exemplaire; il appartient à M. le baron sont les cuisines, jeux de paume, etc.
J. Pichon, président de la Société des bibliophiles, (3) Fol. 162 v".
qui a bien voulu nous en donner communication. (4) T. II, p. a4.
<
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS K 217
années de travail, n'ont point été exécutés avant le jour où Lescot devint officiel-
lement architecte du palais. Ainsi il faut reporter la véritable fondation du nou-
veau Louvre à l'année 1 546. En admettant cette époque comme celle où les maçons
se mirent à l'œuvre, on trouve rationnelle la teneur des lettres patentes et l'on
s'explique le silence de Corrozet en i5/i3, ainsi que les expressions dont il s'est
servi en i55o. Enfin l'on comprend que les travaux dus à François Ier aient paru
si peu de chose que, sans en tenir aucun compte, certains écrivains duxvne siècle,
et même du xvic, ont pu regarder Henri II, et non son père, comme le fondateur
du Louvre moderne'1'. La date de i54i doit donc être définitivement écartée.
{1> Félibien des Avaux qui, en sa qualité d'in-
tendant des bâtiments, avait été à même d'étudier
les registres des'Œuvres royaux et qui en a extrait
beaucoup de renseignements , dit, dans ses Entre-
tiens sur les vies des peintres (p. 11): « Quand ie
Toy Henry second fit commencer ie Louvre »
Sous Henri III , Jérôme Lippomano , se faisant l'écbo
d'une opinion répandue, dit aussi que ie nouveau
Louvre avait été commencé par Henri II : «Il re
rEnrico lo principib.n (Relation des ambassadeurs
vénitiens , t. II, p. 5 9 3.) Ronsard s'exprime égale-
ment comme si les travaux du Louvre n'avaient
été confiés à Pierre Lescot que par Henri II. (Voir
p. 209.)
28
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 219
CHAPITRE VIL
LE LOUVRE SOUS HENRI IL
DE 1547 A 15">9.
Les bâtiments du quadrangle du Louvre qui ont été élevés au xvie siècle sont,
pour la plus grande partie, l'œuvre de Henri II. A son avènement au trône,
ce prince n'avait trouvé que quelques constructions à l'état rudimen taire , et en
juillet i55g, lorsqu'une mort accidentelle vint le surprendre, il avait totalement
achevé la réédification de l'aile occidentale, et terminé le premier avant-corps
de l'aile méridionale, ainsi que le gros pavillon d'angle situé à la jonction des
deux corps de logis. C'est donc sous son règne que le monument projeté par
François Ier se révéla dans sa magniflcence, et se dessina avec ces lignes majes-
tueuses qui lui restent encore, malgré les modifications imaginées depuis.
Les plans dressés par Lescot sont perdus, et, dès le temps de Sauvai, personne
n'en avait plus connaissance (1). Plusieurs fois, avant leur complète transformation
par Lemercier, on leur fit subir certains changements; mais la pensée première
fut respectée, et elle se manifeste assez clairement quand on consulte les planches
de Du Cerceau. Dans les projets originaires, la masse du nouveau Louvre devait
coïncider avec la masse de l'ancien, et être entourée des mêmes fossés; les tours
d'angle, vers la campagne, étaient remplacées par des pavillons rectangulaires ,
dont la plus grande dimension s'étendait de lest à l'ouest; l'aile occidentale offrait,
sur la cour, trois avant-corps, dont le premier et le troisième, contigus aux pa-
villons d'angle, faisaient également saillie à l'extérieur (2). Aux ailes méridionale et
(1> Ils existaient encore en i6a4, car, dans des (,) Primitivement l'avant-corps renfermant le
lettres patentes du 5 janvier de cette année, le grand escalier présentait une largeur extérieure de
Roi dit qu'il s'est fait ^représenter les plans et cinq toises, comme l'avant-corps attenant au gros
^desseins* du Louvre, tqui furent faictz et arres- pavillon du sud-ouest, et il était manifestement
<r tez après Iwnne et mure délibération , du raigne destiné à s'agencer de même avec un pavillon
*de Henry deuxième en la forme et figure d'angle.
fcy-attachée. »
38.
220 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
septentrionale, il devait y avoir aussi des avant-corps correspondant symétrique-
ment à ceux de l'aile occidentale, mais sans aucune saillie extérieure, et la cour
était sans doute destinée à former ainsi un carré parfait. Pour l'aile orientale, où
l'on était convenu de placer la grande entrée , nous ignorons comment elle eût été
disposée; mais il y a lieu de croire qu'elle aurait consisté en une galerie étroite,
plutôt qu'en une aile profonde , comme aux autres côtés. La décoration avait été
réservée, avec un parti pris très-évident, pour les faces intérieures de l'édifice,
et l'extérieur conservait un aspect sévère, rappelant quelque peu le château-fort,
non sans comporter de sérieuses garanties de sécurité. Les plans de Lescot réali-
saient l'idéal de l'époque en matière de résidence souveraine à élever dans une
capitale.
ce Tout le monde, dit Sauvai W, tient pour assuré que François Ier et Henri II
cr avoiet (auraient) renfermé les limites de cet édifice dans une cour de soixante-
rt quatre toises en quarré et dans un jardin derrière, d'une fort grande étendue, i>
lequel, ajoute-t-il plus loin, se serait prolongé jusqu'aux murailles de la Ville. H
nous paraît extrêmement douteux que le projet d'un pareil jardin , entraînant des
expropriations considérables, et n'ayant laissé aucune trace, ait été adopté par
l'un des Valois; Sauvai a probablement fait confusion avec les plans de Henri IV,
dont il sera parlé dans la suite. Il est en outre très-sûr que, au xvie siècle, nul
ne songeait à renfermer le Louvre dans une cour de soixante-quatre toises en
carré : on en a la preuve en portant le compas sur nos planches, où l'on peut voir
que la forme de l'édifice en exclut l'inscription dans un carré de soixante-quatre
toises de côté, sauf le cas d'une disposition anomale tout à fait contraire aux
vraisemblances. Mais l'affirmation de Sauvai , un passage amphibologique du récit
de J. Lippomano (2), et la certitude où nous sommes que l'extension donnée au qua-
drangle du Louvre par Lemercier a été conçue plus anciennement qu'on ne le
pense, nous ont fait rechercher si les dimensions de la cour actuelle ne seraient
point celles du plan primitif qu'on n'aurait eu le temps de développer dans aucun
sens. Deux faits démontrent le contraire : la coïncidence exacte de trois des ailes
du nouveau Louvre avec trois des ailes de l'ancien, et le passage où Du Cerceau,
en si bonne situation pour être informé , rapporte que Henri II , après avoir re-'
bâti l'aile occidentale et et se trouvant si grandement satisfait de la veue d'une
«œuvre si parfaite, délibéra la faire continuer es trois autres costez, pour rendre celte
«cour non pareille. r> Cette façon de s'exprimer implique que Du Cerceau considé-
rait l'aile occidentale comme complète.
A la mort de François Ier, et plusieurs années après , les fonctions d'architecte
du Louvre n'étaient point rétribuées; mais une grande considération s'attachait
(,) T. II, p. a5 et 27. — ;î) Nous le citerons quand nous serons arrivé au règne de Henri III.
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 221
sans doute à eelui qui les remplissait. Toujours est-il que Lescot demanda, à l'avé-
nement de Henri II, qu'elles lui fussent confirmées. Le 1/1 avril 15^7, il reçut
effectivement de nouvelles lettres d'offices, qu'un vidimus du 9 avril i556 donne
comme ainsi conçues : rr Henry, par la grâce de Dieu , roy de France , à nostre cher
«et bien amé Pierre Lescot, seigneur de Claigny, salut et dilection. Comme le feu
«Roy, nostre très honoré seigneur et père, que Dieu absolve, vous eust, par ces
rr lettres patentes y attachées contre le contre-scel de nostre chancellerie , commis
r et députté pour ordonner du fait des bastimens et édiffices qu'il avoit commancé
crde faire faire en nostre chaste! du Louvre, à Paris; en faire et arrester les pris et
«r marchez; semblablement ordonner des frais et voictures nécessaires à iceux frais;
rr faire payer aux personnes et ainsy qu'ils l'auront gaigné et desservy, et général-
(rlement de faire et ordonner en cet endroit tout ce que verrez estre requis
rret nécessaire, et comme il l'eust fait ou peu faire par luy-mesme, à la charge
rr et commission ; pour le désir et voulloir que nous avons à faire parachever le
rr logis qui est encommancé audit chastel du Louvre, nous, ayant advisé de vous
rr continuer, sçachans que nous n'y pourrions commettre personnage de meilleure
a expérience ni qui sceust mieux conduire cet œuvre selon le dessin et devis qui en
rr a esté fait du vivant de nostre dit feu seigneur et père ; pour ces causes et pour
cria bonne confiance que nous avons de vostre personne et de vos sens, suffisance,
rr loyauté, preud'hommie et bonne diligence, vous avons, en vous continuant la-
it dite charge et commission , commis et députté , commettons et députtons par ces
rr présentes pour parachever les bastimens, édiffices commancez audit chastel du
rr Louvre, seullement; voulions et nous plaist qu'en ce faisant vous puissiez faire
rret arrester avec les maçons, charpentiers, menuisiers et tous autres artisans, les
rr pris et marchez pour ce requis et nécessaires, et que les payemens qui, par vos
rr ordonnances , en seront faits, lesquels nous avons de nouvel, en tant que besoin
rrseroit, vallidez et authorisez, vallidons et authorisons, soyent passez et allouez es
rr comptes, et rabatus de la recepte et assignation d'icelluy qui est ou qui pourra
rr estre cy-après commis à ce faire, par nos amez et féaulx les gens de nos comptes;
rr auxquels mandons ainsi de faire sans difficulté, en rapportant sur cesdits comptes.
th vidimus de cesdites présentes que nous avons, pour ce, signées de nostre
rrmain, lesdits pris et marchez, vos dites ordonnances et les roolles et cahiers
rr desdits frais signez et arrestez où besoin sera, avec les quittances des parties
rroù elles escherront, sur ce suffisantes seulement, car tel est nostre bon plaisir de
«ce laire; vous avons donné et donnons plain pouvoir et authorité, commission
rret mandement espécial, mandons et commandons à tous nos justiciers, officiers
rret subjets que à vous en ce faisant, soit obéi. Donné à Saint-Germain-en-Laye ,
rrle i4e avril, l'an de grâce 1567, après Pasques, et de nostre règne le premier.
«Signé HENRY, et au-dessous: Par le Roy, le seigneur de Montmorency, connes-
222 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
tr table de France, et autres présens. — Clause et scellé sur simple queue de cire
rjaitlncW.n
Assuré dans sa position, Lescot put désormais consacrer son activité à la
reconstruction de l'aile occidentale. Le nouveau bâtiment occupait si exactement
l'assiette de l'ancien, que l'on conserva la vieille muraille extérieure, en y appli-
quant un revêtement. Comme le corps de logis primitif, il était principalement
destiné à contenir une vaste salle d'apparat. Celle qui fut imaginée par Lescot,
et que l'on connaît sous le nom de salle des Caryatides, occupait presque toute
l'aile et communiquait directement avec la cour par une porte percée dans l'avant-
corps central. Au-dessus de cette porte, et gravée sur une plaque de marbre noir,
était une inscription dont tous les auteurs, depuis Du Breul, ont donné ainsi les
termes: trHenricus II, rex christianissimus, vetustate collapsum, refici cœptum a
cr pâtre Francico I", rege christianissimo, mortui sanctissimi parentis memor, pien-
cttissimus filius, absolvit. Anno a salute Christi M. D. XXXXVIII t'2', n ce qui veut
dire que, l'édifice tombant en ruine et François Ier en ayant entrepris la recons-
truction, son fils, Henri II, l'avait achevé en 1 5^8. Mais cette leçon est erronée
et l'on peut la citer comme une des preuves les plus frappantes de l'incroyable
abandon avec lequel la plupart des historiens de Paris se sont copiés les uns les
autres. Non-seulement en effet les mots écrits sur la plaque de marbre n'étaient
pas tels qu'ils les rapportent; mais encore, au lieu d'une inscription, il s'en
trouvait deux, distinctes et présentant chacune un sens complet. La première
inscription, actuellement disparue, et qu'il serait bon de rétablir, était gravée
sur le marbre noir; Du Cerceau nous en a laissé un fac-similé très-fidèle. Elle
énonçait simplement que Henri II avait terminé l'œuvre commencée par Fran-
çois Ier, et elle était disposée de cette manière :
HENRICVS II REX CHRISTIANISS.
VETVSTATE COLLAPSVM REFICI
COEPT. A PAT. FRANCICO I
R. CHRISTIANISS. MORTVI
SANCTISS. PARENT. MEMOR
PIENTISS. FILIVS ABSOLVIT
La seconde inscription, qui donne la date, existe encore; elle est divisée en
deux parties, chacune étant inscrite dans un demi-cercle flanquant, en guise
d'ornement, la table rectangulaire en marbre, de la façon suivante :
(1> Comptes des bâtiments royaux, t. I, p. a 5 6.
f,) M. de Clarac est peut-être le seul qui l'ait
transcrite exactement; mais il l'a traduite avec un
contre-sens. (Description hist. p. 338, 33g et 649.)
LE LOUVRE SOUS HENRI II.
223
On n'a donc jamais vu sur les murs du Louvre la formule étrange A sainte
Christi, mais celle-ci, qui est fort correcte : Anno a sainte restituta M DXXXX VIII.
Il reste maintenant à déterminer le sens des deux inscriptions, ce qui est moins
simple que de les traduire. Dans toutes les éditions de Corrozet postérieures à
1 556 , on lit : « Au chef de la dite salle par dehors, tout au haut d'icelle, dans une
trauvale, en lettres d'or est escrit :
Sauvai rapporte de plus que les admirables caryatides M, qui font le plus bel
ornement de la salle, furent exécutées en vertu d'un marché passé avec Jean
Goujon, le 5 septembre i55o, et au prix de 787 livres tournois, crà raison de
et quarante-six livres pour un modelle de plâtre, et quatre-vingts escus sol pour
<r chaque figure, n Ces deux circonstances pourraient faire penser que la grande
salle fut commencée en 1 568 et achevée en 1 556; mais la conjecture ne saurait
être fondée, car la double inscription placée au-dessus de la porte est déjà donnée
par Corrozet dans son édition de i55o, où il énonce très-nettement que le Roi
sa fait parachever d la salle. La construction en était donc réellement finie en
i5A8, ou du moins considérée comme telle, parce que la maçonnerie et sans
doute la décoration extérieure étaient achevées. Quant à la décoration intérieure,
le marché conclu avec Jean Goujon prouve qu'elle ne l'était pas encore en 1 55o,
et elle n'a jamais été indiquée que partiellement jusqu'en 1806^. Mais comme
<l) Elles sont en pierre de Trossy, hameau de la
commune de Saint-Maximin , rive gauche de l'Oise.
(1) tII n'y avait alors (en 1806) de terminé, en
■ l'ait de sculpture , que les caryatides , une très-petite
■• partie de la trihune qu'elles soutiennent, quelques
■ pieds de l'entablement dans cette partie de la salle,
ctet deux chapiteaux; les autres, ainsi que les arcs-
adoubleaux, n'étaient encore qu'en pierre d'attente,
fret les cannelures des colonnes n'existaient point.»
(De Glarac, p. 455.)
224 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
les comptes que nous possédons ne remontent point au delà de 1 555 , nous
ignorons si, en i5u8, l'aile occidentale s'élevait jusqu'à son comble, ou si elle
n'atteignit cette hauteur que plus tard, lorsqu'on était occupé à bâtir le gros
pavillon d'angle. Dans les frontons de ce pavillon il y avait des cartouches ellipti-
ques, et l'un de ces cartouches était vraisemblablement «l'auvalen avec la date de
i556, dont parle Corrozet, mais dont on ne voit point la place sur la face inté-
rieure de l'aile occidentale'1'. La date de 1 556 se rapporte donc à l'achèvement
du pavillon, et nous en doutons d'autant moins que, deux ans après, on travail-
lait à la partie contiguë de l'aile méridionale, comme nous l'établirons plus loin.
En 1 55g , il parut nécessaire d'introduire des modifications dans les projets
précédemment arrêtés , et ces modifications nécessitèrent des démolitions auxquelles
Lescot fut autorisé à procéder par des lettres patentes du 10 juillet, vidimées le
9 avril 1 5 5 6 : en voici la copie : « Henry, par la grâce de Dieu , roy de de France , à
«nostre cher et bien aîné Pierre Lescot, seigneur de Claigny, salut et dilection.
et Gomme, dès le 2e du mois d'aoust, l'an i5&6, feu nostre très honoré seigneur et
«père, le Roy dernier décédé, que Dieu absolve , par ses lettres patentes y attachées,
«nous eust donné pouvoir, puissance et authorité, et chargé d'ordonner sur le fait
et des bastimens et édiffices qu'il avoit voulu estre faits en nostre chaste! du Louvre,
«en faire arrester et conclure les pris et marchez et ordonner des frais, et iceux
«frais faire payer par celluy ou ceux qui seroient par luy commis à faire lesdits
«payemens dudit office, ameublement, ornemens et décorations, ainsi qu'il est
«plus à plain contenu en sesdites lettres; suivant lequel pouvoir, voulloir et or-
« donnance de nostredit feu seigneur et père , vous eussiez fait commancer dès son
«vivant lesdits bastimens qu'il entendoit estre faits en nostre chastel du Louvre,
«et depuis son trespas, suivant nostre voulloir, ordonnance, commandement et
«lettres patentes que vous aurions pour ce adressées dès le i^c avril îbU'], après
«Pasques, y attachées, en auriez fait continuer l'ouvrage selon les desseins et devis
«faits par vous, entendus et commandez par feu nostredit seigneur et père et
«depuis par nous. En quoy vous avez fait tel et si bon devoir, que nous en avons
«bonne et juste occasion d'estre contens de vous, et néantmoins, ayant depuis trouvé
« que, pour grande commodité et aisance dudit bastiment, il estoit besoin de le pa-
re rachever autrement, et, pour cet effet, faire quelque démolition de ce qui estoit jà
« fait et enconnnancé , et ce , suivant un nouvel devis et dessin , que vous en avez
«fait dresser par nos commandemens, que voulons estre suivi, soit besoin pour
«mieux exécuter ce que vous avons commandé et ordonné, vous faire expédier sur
« ce nos lettres de pouvoir, en continuant les autres y attachées : sçavoir vous fai-
(1) D'après la planche de Du Cerceau, dans le cartouche du fronton de l'avant-corps centrai, il n'y avait
que des fleurs de lis.
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 225
«sons que, nous confians à plain de vostre personne et de vos sens, suffisance,
« loyauté et preud'hommie , grande expérience et diligence , en continuant lesdits
« pouvoirs à vous donnés par nostredit feu sieur et père, nous vous avons de re-
«chef et de nouvel commis et députté, commettons et députtons, et vous avons
« donné et donnons plain pouvoir et puissance , authorité et mandement espécial
«de faire faire lesdites démolitions es endroits que adviserez estre plus à propos;
a d'ordonner entièrement du fait desdits bastimens, circonstances et dépendances,
« jusque à l'entière perfection d'iceulx, ainsy que vous verrez estre bon à faire;
«conclure et arrester les pris et marchez avec les maistres maçons, charpentiers,
«tailleurs, menuisiers, victriers et autres artisans et gens de mestier, que verrez
«estre bons et utiles d'employer au fait desdits bastimens; aussy d'ordonner de
«tous frais licites et convenables, tant desdits bastimens que ameublement, orne-
«mens et décoration d'iceulx ; iceulx frais faire payer aux ouvriers et autres per-
« sonnes, à mesure qu'ils besongneront, et aussy par advances, selon que verrez
«estre à faire, et plus nécessaire pour le bien de nostre service, en vostre loyauté
«et conscience, par celluy ou ceux qui sont ou seront par nous commis et députtez
«à faire le payement desdits frais; et générallement de faire faire et conduire, et
«pourveoir au fait desdits bastimens et édiffices, leurs circonstances et dépen-
«dances, ensemble desdits frais nécessaires à iceux, tout ainsi que verrez estre à
«faire et que nous-mesme ferions et pourrions faire si estions en personne, jaçoit
«ce que le cas requiert mandement plus espécial; lesquels pris et marchez qui
«seront par vous faits et arrestez pour l'effet que dessus, ensemble les payemens
«qui, en vertu de vos ordonnances, seront faits, nous avons dès à présent comme
«pour lors, vallidez et authorisez, vallidons et authorisons, et déclarons avoir pour
« agréables ; et voulons lesdits payemens et frais estre passez et allouez es comptes
«et rabatus, de la recepte et assignation d'icelluy qui les auront payez, par nos
«amez et féaulx, les gens de nos comptes, et partout ailleurs où il appartiendra,
«leur mandant aussi le faire sans aucune difficulté, en rapportant sur leursdits
«comptes, le vidimus fait soubs le scel royal de cesdites présentes que nous avons
«pour ce signées de nostre main, iceux pris et marchez, lesdites ordonnances et
«les roolles et cahiers desdits frais, signez et arrestez de vous respectivement où
«besoin sera, avec les quittances des parties où elles écherront, sur ce suffisantes
«seulement, car tel est nostre plaisir. Mandons et commandons à tous nos justi-
«ciers, officiers et subjets, que à vous, en ce faisant, obéissent et entendent dili-
« gemment, prestement, et donnent conseil, confort, ayde et prisons, si mestier est
«et requis en sont. Donné à Paris, le i oe juillet i54g , et de nostre règne le 3U.
«Ainsi signé: HENRY, et plus bas est escript : par le Roy, MM. le cardinal de Guise,
«i.e duc d'Aumalle, le seigneur de Montmorency, connestable de France, et autres
« personnes. — Signé, clause et scellé de cire jaulne du grand scel sur simple queue. i>
i. 29
226 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Les changements dont il est question dans les lettres précédentes durent coûter
de nouveaux efforts à Lescot, et lui créèrent de nouveaux titres à la bienveillance
du Roi. Ce dernier le sentit apparemment, car quelques mois plus tard il se décida
enfin à lui allouer un traitement régulier. On peut s'étonner que , nommé archi-
tecte du Louvre dès i546, Lescot, quatre ans après, n'eût point encore reçu
d'honoraires à raison de cette charge; mais cela n'implique pas qu'il n'en eût tiré
aucun avantage, et diverses faveurs l'avaient peut-être indemnisé de ses peines.
Quoi qu'il en soit, les lettres patentes lui attribuant a pour son entretènementfl
la somme de 100 livres par mois, qu'il a toujours reçue depuis, ne lui furent
délivrées que le 7 février i55o (v. s.). En voici la transcription : ctHE\RY, par la
rr grâce de Dieu, roy de France, à nostre amé et féal conseiller et trésorier de nostre
rt épargne, maistre André Blondelet, salut et dilection. Savoir faisons que nous,
« considérans les grands peines, travaux et despences qu'il a convenu et convient
«à nostre amé et féal maistre Pierre Lescot, seigneur de Claigny, supporter en la
tt charge et commission que le feu Roy, nostre très honoré seigneur et père , que
rcDieu absolve, luy donna certain temps avant son trespas, de la superintendance,
ttadvis et ordonnance du bastiment commancé en nostre chastel du Louvre,
trà Paris, de nostredit seigneur et père ; laquelle charge nous luy avons, depuis
et nostre advènement à la couronne, continuée et confirmée, désirant icelluy bas-
tttiment estre du tout parachevé; pour laquelle charge et commission il n'a en
te jusqu'à présent, tant de feu nostre seigneur et père que de nous, aucun estât,
tt gages ou bienfaits; à icelluy maistre Pierre Lescot, pour ces causes et autres à
«ce nous mouvans, avons ordonné et ordonnons par ces patentes signées de nostre
tt main , la somme de 1 00 livres par chacun moys pour son estât et entretènement,
«et pour luy aider à supporter lesdites despences qu'il fait et peut faire à cause
«de saditte charge et commission, et superintendance de nosdits bastimens; à
ttles avoir et prendre, par ses simples quittances, sur les assignations par nous
tt ordonnées et que nous ordonnerons cy après pour les despences dudit bastiment
ttpar les mains du payeur et commis à tenir le compte desdites despences pre-
ssentes et advenir; et ce, à commancer du premier jour de janvier dernier passé,
tt et continuer doresnavant à l'advenir, sans que luy besoin soit obtenir chacun an
tt de nous autres lettres de mandement ou acquict que cesdites présentes, par
tt lesquelles vous mandons .que, par ledit payeur ou commis au payement desdits
tt frais et despences, vous faittes, souffrez et consentez bailler et délivrer comptant
tt audit Lescot, ladite somme de 100 livres par mois, à commancer et continuer
tt comme dessus est dit, laquelle en rapportant cesdites ou vidimus d'icelles, fait
ttsous le scel royal, pour une lois avec lesdites quittances d'icelluy Lescot, sur
ttee suffisante seulement. Nous voulons ce que baillez et payez en aura esté par
ttlesdits commis, estre passé et alloué en leurs comptes et rabatu de leurs re-
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 227
rtceptes pas nos amez et féaulx les gens de nos comptes, ausquels, par ces mesmes
«présentes, mandons ainsy de faire sans aucune difficulté, car tel est nostre plaisir,
« nonobstant quelquonques ordonnances, mandemens ou deffences à ce contraires.
«Donné à Bloys, le 7e W febvrier, l'an de grâce i55o, et de nostre règne le he.
« Ainsi signe : HENRY, et scellé sur simple queue de cire jaulne '2'. n
L'aile occidentale étant achevée ainsi que le gros pavillon d'angle , Henri II fit
entamer la reconstruction de l'aile méridionale, dont il ne devait bâtir que le pre-
mier avant-corps, et dans la réédification de laquelle on ne conserva point l'ancien
mur extérieur, comme on l'avait fait du côté de la rue Fromenteau. «A l'autre
«bout, du costé de la rivière, dit Du Cerceau, y a un fort grand pavillon mer-
«veilleusement beau et commode, pour le logement de Sa Majesté. Le tout com-
«mencé, ainsi que j'ay dit, du vivant du feu roy François, et parachevé par le
«roy Henry, son fils, sous l'ordonnance et conduite du seigneur de Clagny. Ce
«que le roy Henry, se trouvant grandement satisfait de la veiie d'une œuvre aussi
«parfaite, délibéra la faire continuer es trois autres costez, pour rendre cette cour
«non pareille. Et ainsi, par son commandement, fut commencé l 'autre corps de bas-
ntiment, depuis le susdit pavillon , tirant le long de la rivière, lequel a esté poursuivy
«par les roys Henry second et Charles neufiesme, etc. n II est donc avéré que la
« reconstruction de l'aile méridionale fut entreprise par Henry IL Le fait est confirmé
«par un passage du compte de 1 558-59, mentionnant des travaux de couverture
«au cabinet fait pour la Reyne, joignant le grand pavillon, » lequel cabinet, ré-
cemment fait pour la Reine et attenant au gros pavillon , ne pouvait évidemment
se trouver que dans l'aile du bord de l'eau, et doit se confondre avec la pièce ap-
pelée plus tard le petit cabinet du Roi. (Voir le plan du Louvre de la Renaissance,
étage supérieur, F.) Le premier avant-corps de l'aile méridionale est en outre le
seul, de ce côté, où l'on voit les H H, initiales du nom de Henri II, avec les crois-
sants, corps de sa devise, et le chiffre
qui est répété maintes fois sur l'aile occidentale, et nécessite un mot d'explication.
Rien n'est plus connu que la passion de Henri II pour sa vieille maîtresse, Diane
de Poitiers, duchesse de Valentinois. C'est elle, à ce que l'on assure, qui lui aurait
donné l'idée de prendre pour emblème le croissant mythologique de Diane-Phœbé ,
avec ces mots ambigus pour âme : Donec tolum impleal orbem. Cette devise est gravée
sur des tables de marbre noir encastrées dans la frise du second ordre de chaque
avant-corps. Dans cette même frise, ainsi qu'entre les colonnes du premier ordre,
(l) Sur un viditnus du 9 avril 1 556 , la date indiquée est le 1 7. — m Comptes des bâtiments royaux.
29-
2-28 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
sont aussi sculptés des croissants , et l'on en retrouve un sous le menton de cha-
cune des trois têtes de femme qui surmontent les chambranles de fenêtres. S'il
est permis de voir dans ces particularités une allusion assez transparente à l'amour
du Roi pour celle qui, sur une médaille, se fit représenter en Diane chasseresse,
et, sur une autre, avec la légende Omnium victorem vici, faut-il, comme on l'a dit
si souvent, interpréter pareillement le chiffre reproduit plus haut et le considérer
comme formé d'un H et de deux D ? M. Lenormant a démontré W, et il serait
facile d'en multiplier les preuves, que ce chiffre comportant un H et deux C
adossés et entrelacés, était officiellement celui de Henri II et de sa femme, Cathe-
rine de Médicis , qui le conserva pendant son veuvage , en prenant soin , il est
vrai , que les C , nettement accusés , ne pussent se lire comme des D W, Dans
les monuments élevés du vivant du Roi, au contraire, les C, ayant leurs hastes
confondues avec celles de l'H, présentent des contours qui les transforment en
véritables D. M. Lenormant a supposé que c'était le résultat d'un calcul à l'aide
duquel Henri II pouvait étaler partout les initiales de la Duchesse sans violer
trop ouvertement les convenances; nous adoptons pleinement cette opinion, en
observant que le chiffre est sculpté sur la fontaine d'Anet, dont la célèbre statue
passe pour l'effigie même de Diane de Poitiers, et qu'il figure aussi sur des livres
provenant de sa propre bibliothèque, où elle ne se proposait assurément pas de
mettre en évidence le nom de sa rivale.
En rapprochant le plan de Du Cerceau des plans postérieurs, on constate que,
vers 1660, les distributions intérieures des constructions de Lescot s'étaient main-
tenues sans changement important, et nous avons même reconnu que presque
toutes les pièces avaient conservé leur destination primitive, ce qui a permis de
déterminer l'usage de plusieurs d'entre elles. A la fin du règne de Henri II, l'aile
occidentale du Louvre était divisée en trois parties : la première (voir les plans ci-
joints, C), correspondant au premier avant-corps, actuellement contigu au pavillon
de l'Horloge, servait alors, comme aujourd'hui, de cage à un grand escalier à
rampes droites, qui subsiste encore intact. On l'appelait rr les Grands degrés -n en
1 593 ; Du Cerceau l'énonce «le grand escallier, servant de passage pour aller aux
cr offices de cuisine, hors le chasteau, n parce qu'au fond était percée une porte (p)
donnant accès à un pont-levis qui servait à traverser le fossé, et qu'on remarque
sur la vue de Cellier. Toutefois ce pont-levis et le pont dormant à piles de pierre,
(1) Revue numismatique, année i84i, p. k$h. lonne astronomique (aujourd'hui attenante à la
{,) Le spécimen que nous donnons, et où les G Halleau blé) qui fut élevée par Catherine vers 1575.
se dessinent si franchement, est emprunté h la co- Le chiffre El se rencontre souvent, au xvi" siècle.
TOPOGRAPHIE HISTORIQVE DV VI EVX PARIS,
Mur d'enceinte de Philippe Auau.ste — -
a
_
V
.- ■
A . ' '
PLAN RESTITVÉ DV LOVVRE DE LA RENAISSANCE
TOPOGRAPHIE HISTOFUQVE DV V1EVX PARIS.
A.Berty rest. Ch. Laffqrgue del . "*
I . Suif:)
PLAN RESTITVE DV LOVVRE DE LA RENAISSANCE
ETAGE SVPER1EVR.
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 229
sur lequel iL s'abattait, ne furent construits que vers 1 568. Quant à la porte,
elle fut transformée en fenêtre sous Louis XIII, parce qu'elle était devenue inutile
après la construction du pavillon de l'Horloge W ; mais on ne toucha jamais ni à
celle qui menait à la salle des Caryatides, ni à celle qui donne sur la cour, et au-
dessus de laquelle se lit l'inscription : Virtuti régis invictissimi. Cette inscription ,
répétée à l'avant-corps correspondant, est rapportée par Corrozet dans son édition
de i55o. La seconde partie de l'aile se composait de deux grandes salles situées
l'une au-dessus de l'autre; on les distinguait par les épithètes de et haute n et de
tt basse. s Dans le compte de 1 558 , il est fait mention de la tt grande salle de bal a
et des tt corbeaux soustenant les poultresn qui s'y trouvaient, d'où l'on aurait tort
d'inférer que cette salle de bal était la salle supérieure et non celle du rez-de-
chaussée, car il est en même temps parlé, dans le compte, du tt tribunal dudit
tt lieu, r> et cette indication ne peut se rapporter qu'à la salle basset. Cette der-
nière, que nous appelons la salle des Caryatides (A), servait aux fêtes; la tribune
qui fut élevée à l'extrémité, et que les splendides figures de Jean Goujon ont
rendue si célèbre , semble avoir été imaginée dans le dessein d'y placer des musi-
ciens (3>; elle communiquait avec le grand escalier par une petite baie qui a été
rétrécie et a subi quelques remaniements. La troisième division de l'aile , répon-
dant au troisième avant-corps (B), ne comprenait, au rez-de-chaussée, qu'une
pièce allongée terminée en hémicycle, qu'on appelait le Tribunal; elle était munie
d'une cheminée et exhaussée de cinq ou six marches sur la grande salle basse,
dont rien ne la séparait'4. Au-dessus du Tribunal, il y avait deux pièces formant
les antichambres du Roi, lesquelles, en 1G60, ne composaient plus qu'une seule
pièce, le mur de refend ayant été supprimé. Le compte de 1 557 énonce ^es tra-
vaux de sculpture, et celui de 1 558, les travaux de peinture qui y furent faits,
ainsi qu'à ttla chambre du Roy, a renfermée dans le gros pavillon d'angle <5).
(l) Cette fenêtre a ensuite été supprimée et rem- on ne voit point quelle poutre de celte dernière au-
placée par deux autres. — A propos des fenêtres rait pu servir à une pareille exécution , si , à la place
du Louvre, il convient de faire observer qu'elles d'un plafond de bois, il y avait une voûte de pierre,
étaient toutes divisées en six jours ou comparti- Au reste la planche de Du Cerceau représentant
ments par trois meneaux en pierre, un vertical et le Tribunal implique un plafond plat, et exclut la
deux horizontaux. Les meneaux de plusieurs fe- possibilité d'une voûte comme celle que nous voyons,
nôtres du gros pavillon de Henri II subsistaient en- (,1) Des tribunes analogues existaient dans d'au-
core au commencement de ce siècle. très châteaux de la même époque.
(,) Le texte du compte de 1 558 et la manière (4) rrLa salle du Conseil , joignant ladite grande
peu heureuse dont la voûte de la salle des Carya- « salle du bal , « et dont il est question dans le compte
tides est disposée, nous font croire que la salle n'était de 1 558, doit se confondre soit avec celle du Tri-
point destinée d'abord à être voûtée en pierre. On hunal, soit plutôt avec la plus grande pièce de l'étage
lit dans le Journal de Lestoile, que Louschart et inférieur du gros pavillon.
ses complices furent pendus (le h décembre i5qi) (5) Nous n'avons rien trouvé sur la destination de
ta une poutre de la salle basse, i laquelle salle basse l'étage en attique; il devait servir de logement à di-
a toujours été prise pour celle des Caryatides. Or vers officiers de la maison du Roi.
230 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Le gros ou « grand pavillon t> était spécialement consacré au logement de Henri II ;
aussi le nommait-on le pavillon du Roi. Au rez-de-chaussée, il contenait deux pièces
d'inégale grandeur ; la plus petite , dans l'encoignure de laquelle se trouvait un
escalier, était séparée de l'autre par un mur de refend se dirigeant du nord au
sud. A l'étage supérieur, l'agencement se répétait, et des deux pièces, la moins
vaste (E), plus rapprochée des appartements de la Reine, servait de chambre à
coucher. Sous Henri IV, l'alcôve, fermée par une balustrade, se trouvait au fond,
en face de la fenêtre , à l'endroit où , sur le plan de Du Cerceau , est indiqué un
escalier. L'autre pièce (D), qui avait vue à la fois sur la Seine et sur la basse-cour
occidentale, était dite « la chambre du Roy. n Elle était décorée de riches sculptures
sur bois, et Sauvai, qui l'appelle la Chambre de parade, rapporte que quelques-
uns de ses contemporaiens en attribuaient les dessins au Primatice , opinion pro-
bablement fausse; car il ne semble point que, du vivant de Lescot, rien ait été fait
au Louvre en dehors de sa direction, « Rolland Maillart, ajoute-t-il, Riart grand-
«père, les Hardouyns, Francisque (Serbecq) et maître Ponce, ont contribué à la
«perfection de cette chambre. Ils se sont efforcés à l'envi de bien dessiner et finir
«tous les ornemens qu'ils ont sculptés sur les plafonds, les lambris, les portes et
(des embrasemens des croisées; et de plus rien n'est oublié pour garantir ces belles
a choses de la corruption, afin de se rendre immortels par la durée d'un si mer-
«veilleux ouvrage. Le bois en est si bien préparé que, depuis un siècle, il est en-
«core aussi sain que s'il venoit d'être mis en œuvre. Il est joint et enclavé avec
« tant d'industrie qu'on le démonte et nettoyé quand il est terni par la poussière W.
«Le plafond n'est point offusqué d'une confusion de ces peintures, de ces stucs, ni
« de ces renfoncemens mal placés , dont nos modernes gâtent les plus belles cham-
«bres, et dont ils fascinent les yeux du peuple et des simples. On n'y a point fait
«entrer d'autre matière que du tillau et du noyer peints avec du vernis et de la
«colle, et rehaussés avec de l'or moulu; et cette colle et cet or ont été couchés
« et disposés d'une façon si ingénieuse et si extraordinaire , qu'il semble de prime
«abord que ce plafond soit une grande pièce de bronze, où l'on ait épargné tous
«les enrichissemens que chacun admire. H consiste en plusieurs compartimens
«ronds, quarrés-longs, ordonnés avec beaucoup d'esprit et de symmétrie; mais
«surtout si bien proportionnés au lieu et à la vue, qu'il ne se peut rien voir en
«ce genre, ni de plus savant ni de mieux conçu et exécuté. Du centre sortent les
«armoiries de France, foulant un grand monceau de casques, d'épées, de lances,
«de masses, de coutelas, de piques embarrassées les unes dans les autres, avec
«autant d'ordre que de confusion. De toutes parts ce ne sont que boucliers, cui-
«rasses, épieux, corselets, hallebardes, trophées, qui semblent rendre hommage
(1) Ce renseignement est controuvé.
LE LOUVRE SOUS HENRI IL 231
te à ces fleurs de lys victorieuses. Ces armes sont de tous les siècles, de toute taille,
«de tout âge, de toutes formes : délicates, grossières, belles, extravagantes et
« chargées de basses-tailles pincées et bien finies. Les portes, les lambris et les
tt embrasemens des croisées sont de la même force , de la même manière , et enrichis
«des mêmes ornemens. A la vérité, les gens du métier disent que les basses-tailles
r qu'on voit aux embrasemens des croisées qui regardent la rivière ne sont pas si
miettes que les autres; mais, en revanche, ils admirent aux portes le dessin et la
« tendresse des demi-reliefs : les uns y considèrent avec étonnement deux vipères;
«rieurs écailles sont si délicates et si serrées, leur corps si grêle et si naturel, que
et les savans prétendent que, pour rendre un ouvrage aussi achevé, il ne faut pas
« avoir vu seulement quantité de vipères, mais les avoir tournées et maniées bien
«des fois. D'autres ne sauroient se lasser de contempler deux centaures qui ga-
«loppent, aussi bien que deux Neptunes qui domptent des chevaux marins. Ils y
r admirent le caprice et l'invention du sculpteur, qui leur fait voir d'un seul en-
ft droit toutes les mêmes choses qu'on ne peut découvrir sur les rondes-bosses
r; qu'après avoir changé plusieurs fois de jour, de place et de vue. En effet, il a
replanté et taillé si industrieusement ces deux centaures vis-à-vis l'un de l'autre,
«et tout de même ces deux Neptunes qui domptent des chevaux marins, que d'une
ttseule vue on en aperçoit le devant, les côtés et les épaules; joint que les parties
ce de leurs corps qui semblent cachées dans l'épaisseur d'un des battans de la porte
«se voient clairement dans l'autre. Enfin tous les ornemens en sont recherchés
«avec tant d'amour et de peine que les yeux et l'esprit s'égarent et se croyent
« enchantés d'y rencontrer tant de merveilles. Si bien qu'une chambre si accomplie
«ne sauroit être comparée qu'à elle-même. Elle possède tout ce que les sculpteurs
«et les menuisiers ont jamais fait de plus admirable : et c'est sans flatterie qu'on
« la peut appeler le chef-d'œuvre de l'art et de l'adresse des hommes, n Sauvai
termine cette élogieuse description en vantant les qualités acoustiques de la pièce,
et affirmant qu'au dire des musiciens il n'y avait point dans tout Paris «de lieu
« plus propre à la musique douce W. n Avec les débris des boiseries de la chambre
(1) T. II, p. 35. Dans une autre partie de son
ouvrage (t. III, p. 19), Sauvai revient sur la valeur
des boiseries de la chambre du Roi , et dit : ir J'ai vu
rret parcouru tous les beaux lieux d'Angleterre, des
it dix-sept provinces et de toute la France; mais je
it puis assurer qu'il n'y a point de plafonds dans tous
trees pays-là qui approchent de la beauté de celui-
-ci. Barcelonne, où sont les plus magnifiques que
t j'ai vus , n'a rien qui ne soit bien au-dessous. Les
tintelligens, qui ont été curieux de voir en Italie
"tout ce qu'il y a de heau, qu'un illustre de notre
-temps appelle le pays des belles choses, avouent
^qu'ils n'en ont vu aucun qui ne soit fort inférieur
rrà celui-ci, et pour la beauté et pour l'ordonnance. »
Il dit encore: ffLa corniche et la frise sont très-
" riches et très-bien entendues. La corniche estsou-
f tenue de consoles liées les unes avec les autres par
rrdes festons admirables... et toutes ces merveilles
nsont renfermées dans un espace de quatre toises
iren carré. Ji Ce dernier détail n'est point fort exact:
des plans cotés établissent que la Chambre du Roi
avait cinq toises un pied sept pouees de largeur dans
le sens du nord au sud, et environ un pied de plus
dans l'autre direction.
232 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
de parade, on a décoré, de nos jours, une pièce du Musée des souverains. On y
reconnaît le trophée du plafond, les fameuses vipères et plusieurs détails exaltés
par Sauvai.
Les travaux de maçonnerie du nouveau Louvre furent exécutés avec un soin
extrême. On les confia, sans doute dès l'origine, et sûrement depuis 1 555 jus-
qu'en 1 568 au moins, à deux entrepreneurs ou maîtres maçons, Guillaume Guillain
et Pierre de Saint-Quentin. D'après certains comptes de Saint-Germain-l'Auxerrois,
Pierre de Saint-Quentin fut aussi l'entrepreneur du jubé de cette église, vers 1 562,
sous la direction de Lescot. Il possédait, rue Saint-Pierre-Montmartre , un chantier
dont hérita Marguerite de Saint-Quentin, sa fille, laquelle, on le verra plus loin,
épousa l'architecte de la Petite-Galerie. Guillaume Guillain, qui vivait encore
en i582, était maître des œuvres de maçonnerie et de pavement de la Ville de
Paris, et, de plus, juré du Roi en l'office de maçonnerie, ce qui fait que son nom
est fréquemment mêlé aux travaux de construction des bâtiments royaux M. Quant
aux autres artistes qui, du temps de Henri II, aidèrent Lescot dans sa grande
œuvre, et ne nous sont point restés inconnus, ce sont les peintres Louis LeBrueil,
Jean Du Brueil, Jean Testart, Thomas, Le Plastrier et Jean Le Jeune; le mouleur
Roger de Simonieulx; les menuisiers ou sculpteurs sur bois Raoullant Maillard,
Riolle Richard ou Richault, ainsi que le Florentin Francisque Scibecqou Serbecq,
dit de Carpy ou Scarphy; puis, si Sauvai dit vrai, les Hardouin, Biart grand-père'2'
et un Me Ponce, que nous croirions être Ponce Jacquiau^ plutôt que Paul-Ponce
Trebatti; enfin le sculpteur Etienne Cramoy, et, au-dessus de tous ces artistes,
Jean Goujon.
Jean Goujon, regardé à juste titre comme le plus célèbre sculpteur français,
n'est guère connu, malgré la popularité de son nom, que par un petit nombre
de ses œuvres. Sa vie demeure enveloppée d'un nuage impénétrable, et tous les
efforts faits de nos jours pour dégager de l'obscurité les principaux événements de
sa laborieuse existence ont à peine abouti à en révéler quelques détails. Comme
c'est en Normandie qu'il nous apparaît d'abord, on a cru longtemps qu'il était
originaire de ce pays; on l'a fait naître à Rouen, à Alençon et, en dernier lieu, à
(1) Guillaume Guillain fut enlerré h Saint-Ger-
vais. Il avail un parent, Simon Guillain, qui était
trésorier des bâtiments du roi en 1 55g , et dont le
nom réapparaît encore en i58i.
{,) C'est-à-dire le père de Pierre Biart, dont le
fils était contemporain de Sauvai, et dont nous au-
rons occasion de reparler. Biart grand-père doit être
le même que Noël Biart, qui figure dans un compte
de i5G8. Il pourrait descendre de Colin Byart,
maître maçon à Blois , qui fut employé au château
de Gaillon dans les premières années du xvi' siècle,
et travailla, dit-on, au pont Notre-Dame de Paris.
Nous avons vu qu'en i55o le connétable de Mont-
morency avait pour rr maçon s un certain rt Charles
rrBillart,» aussi probablement membre de cette fa-
mille.
(3) Alias Jacquineo, Jacquinot et Jacquio. Jac-
quiau fut employé comme sculpteur au tombeau
de Henri II, et au monument destiné à contenir le
cœur de ce prince.
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 233
Saint-Laurent-de-Condéel , près de Falaise. Mais ces hypothèses ne reposent abso-
lument que sur des rapprochements de noms ou sur certains travaux qu'on s'est
plu gratuitement à lui attribuer, sans produire à l'appui aucun document sérieux.
En outre, une découverte récente semble trancher définitivement la question. Dans
un recueil de portraits sans date, mais qui doit être à peu près contemporain de
Jean Goujon W, celui-ci serait qualifié de a Parisien; a on peut donc le regarder
comme tel, jusqu'à démonstration du contraire.
Qui fut le maître de Jean Goujon? Rien ne le laisse soupçonner. On a supposé
qu'il avait dû aller en Italie pour étudier l'art antique; mais cela est médiocre-
ment présumable, car, s'il eût entrepris un pareil voyage, il n'aurait sans doute
pas manqué de nous en informer dans cette sorte d'épître qu'il nous a laissée ®,
et où il eût été naturel de faire allusion à ses pérégrinations ultramontaines. Cette
épître réfute d'ailleurs une erreur qu'on a tenté d'accréditer sur son compte, à
savoir qu'il n'était pas lettré, parce qu'il existe une quittance faite en son nom,
mais qui n'est point signée de lui'3'. Bien loin de là, tout porte à croire que
l'éducation de Jean Goujon ne fut point négligée et qu'elle le mit en état d'uti-
liser les recherches faites de son temps sur l'antiquité et ses monuments, dont la
connaissance lui était évidemment familière.
On n'a encore signalé aucune mention authentique de Jean Goujon antérieure
à celle que fournissent les archives de la fabrique de Saint-Maclou de Rouen ; nous
y apprenons qu'il exécuta pour cette église, l'an ihko-lii, le dessin des colonnes
qui soutiennent les orgues, et d'autres travaux. Dans les archives de la cathédrale
de Rouen, on trouve un compte de i5ii-42, où il est appelé tr tailleur de pierres
a et masson, n et indiqué comme ayant fait la statue de l'archevêque Georges d'Am-
boise-Bussy, au tombeau du cardinal, oncle de ce dernier W. On le retrouve en-
suite (5), et dès l'année suivante, travaillant au jubé de Saint-Germain-l'Auxerrois ,
à Paris, comme <r tailleur d'ymages,n sous la direction de Pierre Lescot, qui était
sans doute son ami et auquel il devait rester longtemps associé. Vers i544, il
ornait de ses sculptures le château que Bullant élevait à Écouen, pour le con-
(1) Il est intitulé : Briefs éloges des hommes illus-
tres desquels les pourtraits sont icy représentés , par
Gabr. Michel Angevin , advocat au parlement ; sans
lieu ni date. Ce recueil a été indiqué par M. Fer-
dinand Denis à MM. Haag (voir art. /. Goujon, de
la France protestante) ; mais on ne peut le retrouver,
et conséquemment nous ne l'avons point vu, de
sorte que nous devons laisser à qui de droit toute
la responsabilité de assertion.
m Elle commence ainsi, juan govion, stvdievx
tfD'ARCHITECTVRE, AVX LECTEVRS, SALVT, » et Se trouve
à la suite de la traduction de Vitruve, par Jean
Martin, petit in-folio, imprimé h Paris en thij, et
orné de dessins sur bois, dont la plupart sont de
la main de J. Goujon lui-même. L'épltre en question
est le seul écrit de lui qui nous soit parvenu.
m Nous en donnons le texte p. ai a.
(4> A. Deville, Tombeaux de la cathédrale de
Rouen, p. ia6.
(S) Grâce à une heureuse découverte de M. le
comte de Laborde. (Conf. Mémoires et dissertations
du même auteur, p. 3oa et suiv.)
3o
234 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
nétable Aune de Montmorency, et, en 1 5 ù 7 , il comptait déjà parmi les architectes
de Henri II, puisque Jean Martin, dans la dédicace de la traduction de Vitruve
qu'il publia alors, s'adressant au Roi, lui dit que cette traduction est ttenrichye
«de figures nouvelles concernantes l'art de la massonnerie, par maistre Jehan Gou-
ctjon, n'aguères architecte de monseigneur le Connestable et maintenant l'un des
rr vostres. t> Ce titre d'architecte du roi , qui ne figure pas dans les comptes du Louvre ,
et que Jean Goujon mérita probablement plus encore par des travaux d'ornemen-
tation et de statuaire monumentale que par des travaux de construction propre
ment dite, il put le devoir au Connétable, rentré en grâce; il le dut peut-être
davantage à Lescot, qui, ayant eu précédemment l'occasion de reconnaître le
talent de Jean Goujon, devait être désireux de s'assurer de nouveau son concours
et l'obtint effectivement.
Cependant les magnifiques bas-reliefs, les statues, et les autres sujets de déco-
ration dont Jean Goujon enrichit le nouveau Louvre, ne l'absorbèrent pas telle-
ment qu'il ne fît simultanément, et pour divers édifices, quantité d'ouvrages ana-
logues, y compris plusieurs figures en ronde-bosse. Il illustra ainsi de son ciseau
la fontaine des Nymphes (des Innocents), l'an i55o, le château d'Anet, vers
1 553, et un grand nombre d'autres édifices dont aucun, malheureusement, n'est
indiqué par des documents de l'époque, Quelques-uns de ses travaux, il est vrai,
ont été signalés, un siècle plus tard, par des écrivains dont la véracité est sou-
vent justifiée; mais aussi combien d'œuvres douteuses, et même indignes du grand
artiste, lui ont été inconsidérément attribuées! Quoi qu'il en soit, si l'on songe
à la foule de celles qui doivent être disparues, il faut admettre que Jean Goujon
possédait la plus heureuse fécondité d'imagination, et que sa vie a été admirable-
ment remplie. Du reste il est certain que son talent a été apprécié par ses con-
temporains et récompensé par une réputation brillante : dans YEpitome de Vitruve ,
publié à Toulouse en 1 556, Jean Goujon est qualifié de a sculpteur et architecte
«de grand bruit W.»
Jean Goujon passe pour avoir professé la religion réformée, comme les Du Cer-
ceau, Jean Cousin, Bernard Palissy et d'autres artistes célèbres de la même
période. Le fait est vraisemblable; mais il n'est point formellement établi. Il est
encore bien moins sûr que Jean Goujon ait été tué, comme huguenot, le jour
de la Saint-Barthélémy, ainsi qu'on l'admet généralement, d'après une tradi-
tion dont personne n'a réussi à trouver l'origine. De cette mort violente de Jean
Goujon, il n'existe aucune preuve et il n'y a même point de présomptions en
(1) Epitome ou extrait abrégé des dix livres d'ar- aux lecteurs de la traduction de Vitruve, nomme
chitecture de Marc Vitruve Pollion, par Jan Gardel, Jean Goujon en même temps que plusieurs autres
Bourbonnois, et Dominique Berlin, Parisien; in-8°, maîtres, qu'il qualifie de rrexcellens personnages
Toulouse, i556. Jean Martin, dans l'avertissement rrdijjnes de l'immortalité. »
LE LOUVRE SOUS HENRI IL 235
dehors de l'opinion commune, si souvent en défaut. On a fait observer avec raison
que, si Jean Goujon avait réellement été une des victimes du massacre de 1672,
il serait presque inconcevable que son nom ne fût pas inscrit dans les martyrologes
protestants, où abondent les noms obscurs. Répondre à cela que Jean Goujon
n'ayant point encore, de son temps, l'immense célébrité que la postérité lui a faite,
il a pu disparaître sans que sa mort causât une bien vive impression parmi ses
coreligionnaires frappés de stupeur, c'est s'appuyer sur un argument dont la base
manque de solidité; car, ainsi que nous l'avons dit, Jean Goujon jouissait, de son
vivant, d'une réputation considérable. Ceux qui soutiennent que Jean Goujon
périt à la Saint-Barthélémy devraient, avant tout, démontrer qu'il a vécu jusqu'au
jour de ce triste événement, circonstance fort hypothétique. Ce qui est hors de
contestation , c'est que , remplacé par d'autres artistes , il cesse d'apparaître dans les
comptes du Louvre immédiatement après l'année i56i-i562, où il est fait mention
de lui pour la dernière fois. Pourquoi ce silence? Jean Goujon, qui ne pouvait
alors être âgé de moins de cinquante ans , mourut-il naturellement à cette époque?
aurait-il été disgracié? Pour le moment il n'y a, sur cette matière, que des con-
jectures à présenter; nous nous bornerons à attirer l'attention sur un fait très-
singulier et fort peu connu : on perd toute trace irrécusable de Jean Goujon, le
sculpteur, l'année même où son homonyme Jean Goujon, de Troyes, ouvrier en
laine, subit le dernier supplice pour cause d'hérésie W,
G. Brice, après avoir dit que les sculptures de la cour du Louvre sont dues à
Jean Goujon, ajoute : «Cependant on voit qu'il y a dans l'attique quelque chose
« de Paul-Ponce, a Telle est l'origine de l'assertion, tant répétée depuis, que Paul-
Ponce Trebatti avait été le collaborateur de Jean Goujon au Louvre; mais cette
assertion est d'une exactitude contestable, et jusqu'à production d'un document
affirmatif, que nous avons cherché sans succès, il y aura impossibilité de trancher
la question. Rien ne s'oppose toutefois à ce qu'on examine de quel côté sont les
probabilités.
Ni avant ni après la disparition de Jean Goujon, il n'est parlé de Paul-Ponce
dans les comptes que nous possédons, et il en était apparemment de même dans
ceux que nous n'avons plus, puisque Sauvai , qui avait vu ces derniers et qui nomme
si souvent Paul-Ponce à propos d'autres édifices, n'en dit, au contraire , pas un mot
à l'occasion des sculptures de la cour du Louvre W, sur lesquelles il s'étend assez
longuement et qu'il attribue uniquement à Jean Goujon. Convient-il d'admettre
(l) Le 5 décembre 1 56a, d'après le Martyrologe maître Ponce dont il parle soit autre que Ponce
de Grespin, cité par MM. Haag. Jacquiau. Nous ne serions nullement surpris qu'il
(,) Il ne lui prête qu'une part dans l'exécution y eût confusion de noms à propos des sculpteurs
des boiseries de la Chambre de parade, et encore, de l'attique; le rôle des artistes italiens en France,
nous l'avons dit, n'est-on point certain que le au xvi' siècle, a été singulièrement surfait.
3o.
236 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
que si Paul-Ponce ne figure point dans les comptes, c'est parce qu'il était sous
les ordres de Jean Goujon, entrepreneur de la sculpture du château, et le seul,
par conséquent, que le payeur eût à mentionner sur ses états? Gela n'est pas vrai-
semblable, car, dans le compte de 1 557, outre l'article consacré à Jean Goujon, on
en rencontre un autre consacré à Cramoy et également relatif à des œuvres de
sculpture. Il n'y a point non plus de raison pour croire que Trebatti avait moins
de vanité que les autres Italiens ses collègues, et qu'il consentait à subir une di-
rection.
Ordinairement, dans les problèmes du genre de celui que nous soulevons ici, on
dispose d'une grande ressource, la comparaison entre les manières des différents
maîtres; mais avec les sculptures du Louvre, monument dont l'histoire est cons-
tamment d'une difficulté tout exceptionnelle, la comparaison est impossible : les
œuvres de Paul-Ponce ne sont pas connues, et celles de Jean Goujon le sont, en
réalité, fort mal.
On peut toutefois y discerner deux styles assez distincts pour rendre très-cir-
conspect à l'endroit des déductions à en tirer : par exemple, les figures en bas-
relief de la porte du grand escalier ne donnent guère à prévoir les Caryatides. Il
est manifeste que, entre les premières, si élégantes, si finement dessinées, si mé-
plates, et les figures maniérées, lourdes et très-saillantes de l'attique, il existe une
dissemblance de caractère extrêmement sensible au premier abord; mais cette
dissemblance, lorsqu'on l'étudié, perd en partie son importance, car on observe
que la rondeur des bas-reliefs de l'attique décèle plutôt un système adopté en vue
de la perspective, que le faire d'une main étrangère. Quant aux poses affectées
des figures et à leurs disproportions avec les parties voisines, ce sont des défauts
qu'on retrouve dans d'autres compositions de Jean Goujon, telles que les dessins
du Vitruve de Jean Martin, les statues d'apôtres d'Écouen, etc. Enfin l'ampleur
de formes, qui étonne dans les figures de l'attique, ne semble être qu'une exagé-
ration de celle qu'on constate dans les Caryatides.
11 est donc excessivement douteux que Paul-Ponce ait travaillé au Louvre avec
Jean Goujon; mais il est moins contraire aux vraisemblances que, après l'année
1 56a , époque où la décoration était déjà confiée à plusieurs sculpteurs, Paul-Ponce
ait pris part aux travaux, puisqu'on assure que, vers 1 566, il était occupé aux
Tuileries, sous les yeux de la Reine mère, à qui sa qualité d'Italien devait le recom-
mander. Dans ce cas, l'attique à la décoration duquel aurait contribué Paul-Ponce
ne serait pas celui de l'aile occidentale achevée en i556, mais celui de l'aile mé-
ridionale, détruit aujourd'hui. Les fragments de sculptures qui en proviennent (1)
(1) Les uns ont été encastrés au-dessus des portes d'entrée des musées d'antiquités égyptiennes et as-
syriennes, sous le vestibule de la colonnade; les autres sont à l'École des Beaux-Arts.
LE LOUVRE SOUS HENRI II. 237
n'aident aucunement à éclairer la question que nous voudrions résoudre, car ils
présentent la plus grande analogie avec les bas-reliefs de l'attique occidental. Nous
ne pensons point, au surplus, que cette circonstance ait une grande portée : la
décoration du Louvre a dû, en effet, être poursuivie, après la mort de Jean Goujon,
sur des dessins qu'il avait composés W, et si Paul-Ponce a été mêlé aux artistes qui
les traduisirent avec le ciseau, on n'a laissé ni à lui, ni à un autre, la faculté de
s'en éloigner pour suivre ses propres inspirations.
Avant de donner les quelques comptes qui nous restent touchant les travaux du
Louvre sous le règne de Henri II, il est bon de prévenir que, pendant le xvie siècle,
«le bastiment neuffi et le « vieil bastimentn furent toujours considérés comme des
édifices absolument distincts, ayant chacun ses ouvriers, son architecte et même
son comptable. Les travaux du nouveau Louvre, depuis la nomination de Lescot,
furent constamment ordonnés et conduits par lui; mais ils furent soldés par divers
individus, dont les uns furent payeurs spéciaux, et les autres payeurs des deux
constructions à la fois. Parmi les comptables spéciaux du nouveau Louvre, nous
trouvons Alain Veau, receveur général des finances à Paris, nommé le icr février
1567, et avant lui Etienne Grand-Remy <2), nommé le 19 septembre 1662, eu
remplacement de Jean Durant, condamné par arrêt du parlement du 6 août pré-
cédent. Jean Durant avait été appointé le 7 avril 1 556 et administrait encore les
dépenses des deux Louvres en i56i ; mais, après cette année, il n'eut plus à s'oc-
cuper que du nouveau, dont il était toujours payeur en 1 568, et dans les comptes
duquel il paraît être remplacé en 1 56g par Pierre Regnaut. Avant Jean Durant,
le payeur général était Mc Jacques Michel, nommé, le 1 3 février 1 555, au lieu et
place de feu Jean Gelée. Plus anciennement, c'était Pierre Des Hôtels qui, le 22 no-
vembre i539, reçut 1,200 livres de gages à cause de sa charge de contrôleur et
conducteur des bâtiments du Louvre, de Fontainebleau, etc. et fut conservé dans
ses fonctions à l'avènement de Henri IL En 1 53 1 , le 11 juin, la mission de passer
les marchés pour les différents bâtiments royaux, y compris le Louvre, avait été
confiée au prévôt de Paris, Jean de La Barre, et au trésorier de France, Nicolas
de Neufville. Les trésoriers de France continuèrent à ordonner les travaux du
vieux Louvre, qui étaient conduits par les surintendants des bâtiments, au nombre
desquels nous trouvons Philibert de L'Orme.
m A l'occasion des bas-reliefs sculptés au-dessus m Etienne Grand-Remy était architecte ou ma-
des portes du grand escalier et de la salle des Carya- çon de son état. En i55o, on lui donnait, dans
tides, Sauvai dit qu'ils sont rr du dessin de Goujon, les comptes, le titre de « clerc de l'escriptoire des
rret aussi même de sa main» (t. H, p. 3i ); cela im- trmaistres des œuvres et jurez es offices de maçon-
plique qu'il ne croyait point que tous les bas-reliefs « nerie ; 1 dans un document de 1 5 7 2 , qui est revêtu
du Louvre des Valois offrissent à la fois ces deux de sa signature, il est qualifié de rrmaistre général
conditions. trdes œuvres de maçonnerye» du Roi.
238 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
COMPTES DES TRAVAUX DU LOUVRE SOUS HENRI II.
ANNÉE 1555-1556.
DENIERS PAÏEZ PAR LEDIT (JACQUES) MICHEL.
MAÇONNERIE.
A Guillaume Guillain et Pierre de Saint-Quentin, maistres maçons, ayant la charge du
chasteau du Louvre, par l'ordonnance du seigneur de Claigny (P. Lescot), sur les ouvrages de
maçonnerie par eux faits, la somme de 19,100 livres'1'.
CHARPENTER1E.
A Claude Girard et Jean Le Peuple, maistres charpentiers, pour ouvrages de charpenterie
par eux faits, à eux ordonne'e par ledit seigneur de Claigny, la somme de 3,5oo livres.
MENUISERIE.
A Francisque Seibeq (alias Serbecq), dit de Carpy, maistre menuisier, à lui ordonnée par
ledit seigneur de Claigny, pour ouvrages de menuiserie par luy faits, la somme de 3, 100 livres.
SERRURERIE.
A Guillaume Cyard, maistre serrurier, à lui ordonnée, pour ouvrages de serrurerie, la somme
de 5 00 livres.
PLOMBERIE.
A Guillaume Laurent, marchand plombier et autres, à eux ordonnée par ledit seigneur de
Claigny, pour les ouvrages de plomberie, la somme de 2,800 livres.
SCULPTURE.
A maistre Jean Goujon, sculpteur en pierres pour le Roy, à luy ordonnée par ledit seigneur
de Claigny, pour ouvrages de sculpture par luy faits, la somme de 56o livres.
PEINTURE.
A Louis Le Rrueil, maistre peintre, à luy ordonnée pour ouvrages de peinture et dorures, la
somme de 33o livres.
AC1IAPTS DE MARBRE.
A Dominique Rerthin, contrerolleur et superintendant des deniers, édiffices et réparations du
palais, à Thôle (sic), à luy ordonnée par ledit seigneur de Claigny, sur la fourniture de quantité
de marbre mixte de toutes sortes de coulleurs, qu'il pourra recouvrer et amener en cette ville de
Paris, au port du Guichet du Louvre, la somme de 2,233 livres.
(1) Ce sont des livres tournois.
COMPTES DU LOUVRE SOUS HENRI II. 239
ACHAPTS ET OUVRAGES DE NATTES.
A Estienne Guignebeuf, maistre nattier, à luy ordonnée par ledit seigneur de Claigny, la
somme de 97 livres 7 sous 2 deniers.
Journées d'ouvriers, la somme de 5o livres.
Achapts d'outils et autres menus frais.
Estât et entretènenient du sieur de Claigny, pour sa charge et commission, la somme de
i,4oo livres, pour quatorze mois, qui est à raison de 1,200 livres par an.
Gages et sallaires à M" Jacques Michel, trésorier, pour ses peines et vaccations, la somme de
220 livres 16 sous 8 deniers, pour treize mois.
Somme toute de la despence de ce compte, 33,86g livres 10 sols 10 deniers.
VIEUX LOUVRE.
Autres parties payées par les ordonnances dudit (Philibert) de L'Orme, pour quelques menues
réparations du chasteau du Louvre.
MAÇONNERIE.
A Anthoine Perrault, maistre maçon, la somme de 36 livres, pour ouvrages de maçonnerie
faits audit chasteau du Louvre.
ouvrages de nattes.
A Nicolas des Loges, nattier, la somme de 106 livres 10 sols 8 deniers, pour ouvrages de
nattes par luy faits audit chasteau du Louvre.
Tous les autres comptes étant calqués sur le modèle qui précède, nous en don-
nerons simplement le résumé, sauf à transcrire intégralement les passages offrant
un intérêt particulier.
ANNÉE 1556-57. — NOUVEAU LOUVRE.
Le compte du 7 avril 1 556 avant Pâques (i557 n. s.), au dernier décembre 1 557, indique
une dépense totale de 20,732 livres 2 sols 6 deniers, dont 10,800 livres payées à Guill. Guil-
lain et Pierre de Saint-Quentin, pour travaux de maçonnerie; — 63 1 livres à Jean Goujon,
pour travaux de sculpture; — 3,i5o livres, à Jean Le Peuple et à Rarbe Le Peuple, veuve de
Claude Gérard, pour travaux de charpente; — 620 livres à Guillaume Evrard (ou plutôt Érard),
pour travaux de serrurerie; — i5o livres à Louis Le Rrueil, pour travaux de peinture; —
2,1 36 livres à Raoullant Maillard, Riolle Richault et Francisque Serbeq, pour ouvrages de me-
nuiserie; — 5oo livres à Nicolas Reaurain, pour travaux de vitrerie; — 1,000 livres à Pierre
Lescot, pour dix mois d'appointements; — et 5oo livres à Jean Durant, le comptable, pour
dix mois de gages.
A la suite du compte de 1 5 56-57, on u* •
- \ utre despence l'aille par ledit Durant, tant pour le payement des gages et entretènemens,
2'jO TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
«nourriture et despence de bouche d'un maistre menuisier, six compagnons dudit mestier, un
tt compagnon serrurier et un truchement, tous Suisses, qui ont besoigné pour le Roy, en l'hostel
rt de Reims, à Paris, et pour achapt de bois pour lesdits ouvrages à eux ordonnes par ledit Roy,
tria somme de 3,1/19 livres 2 sols 10 deniers.?)
Ces ouvriers furent sans doute occupés à fabriquer des boiseries destinées au
nouveau Louvre.
VIEUX LOUVRE.
« A Jean de La Hamée M, vitrier, pour ouvrages de vitrerie par luy faits en la chambre du Roy,
ftoù est logé M. le cardinal de Lorraine, quatre armoiries et une armoirie de monseigneur le
tr Dauphin, et plusieurs pièces de voires, peintes en façon d'antique , au cabinet; à luy ordonnée
ff par MM. les trésoriers de France, la somme de 3i 1 livres 2 deniers. — A Eustache Ive, maistre
tt maçon, la somme de 1 33 livres 10 sols 2 deniers, pour ouvrages de maçonnerie par luy faits
ttau vieil bastiment du chasteau du Louvre. — Somme de la despence dudit chasteau du Louvre,
tt khh livres 3 sols.»
ANNÉE 1557-58. — VIEUX LOUVRE.
Le compte du 1 557 (v. s.) au 1 558, indique un total de 22,891 li-
vres i4 sols 6 deniers, dont n,5oo livres payées à G. Guillain et P. de Saint-Quentin, pour
travaux de maçonnerie; — 663 livres à Jean Goujon, pour travaux de sculpture et 17 livres
1 0 sols à Etienne Cramoy, tt pour avoir fait plusieurs enrichissemens de figures et autres orne-
rrmens de sculptures par plusieurs et diverses fois, es modèles des planchers et plafonds des
tt antichambres et chambre du Roy, audit chasteau du Louvre;» — 1,800 livres à Jean Le Peuple,
pour travaux de charpenterie faits au Louvre , tt pour servir au mariage et festin de monseigneur
trie Dauphin;» — 800 livres à Guillaume Evrard, pour travaux de serrurerie; — ùoo livres à
Guillaume Laurens, pour ouvrages de plomberie; — 200 livres à Louis LeRrueil, pour travaux
de peinture, plus tt audit Louis Du Rrueil, Jean Du Rrueil, Jean Testart, Thomas le Plastrier et
ttJean Le Jeune, maistres paintres, la somme de 260 livres à eux ordonnée pour leur payement
«des ouvrages et enrichissemens cy-après déclarez, dedans la grande salle de bal audit Louvre:
tt premièrement, pour avoir peinct de couleur de bois tout le tour de ladite salle, joignant les
trpoultres et de même largeur que icelles, et au-dessous environ six pieds de large tout autour
er de ladite salle , avoir peint de blanc avec les corbeaux soustenant lesdites poultres et embrase-
ttmens des huis et fenestres, et applicqué sur chacun desdits corbeaux une grande feuille dorée
tr et au-dessous un masque d'un faune mouslé de papier'2), doré d'or bel en certains endroits; et
tf avoir, sur lesdits lieux peints de blanc, faits et assis des compartimens de festons de lierre avec
tt liens d'or clinquant, et avoir, en certains endroits, escript les devises et nom du Roy, avec deux
tt ordres de guillochis tant au pourtour de ladite salle, et en quelques ovalles faittes desdits fes-
t tons, avoir mis des H H et croissans couronnez. Item , pour avoir peint de blanc l'eschalfault des
tt joueurs d'instrumens, et enrichy de festons de liarre aussi avec liens dudit or cliquant, et au
tt milieu, sur le front, applicqué un masque doré d'or bel. Item, pour avoir tout peint aussy de
(1) Jean de La Hamée, travaillait encore pour ia position analogue, était connu au xvi* siècle: Phi-
Reine mère vers 1577. Il mourut peu après. libert de L'Orme en fait mention dans son Traité
f!) L'usage du carton-pierre, ou pâte d'une corn- d'architecture.
COMPTES DU LOUVRE SOUS HENRI II. 241
» blanc , le fond de dessous le Tribunal et le tour dudit lieu , et dessus avoir appliqué festons de
■ liarre liez d'or, et en certains endroits des H H et croi'ssans couronnez. Item, pour avoir enrichi
if de festons de liarre tout le tour de la salle du Conseil , joignant ladite grande salle du bal ,
if environ de hauteur de trois pieds , et avoir, en certains endroits , applicqué des H H et crois-
rsans couronnez, et au-dessus avoir peint, de la largeur des poultres, ledit tour, de cou-
nleur de bois, et en quelques endroits aussy de la chambre et antichambre du Roy. » —
£,774 livres 19 sols à Raoullant Maillart et Francisque Serbecq, pour travaux de menuiserie;
— 4oo livres à Nicolas Reaurain , pour ouvrage de vitrerie; — 425 livres3 sols à Jean Mignaut,
pour ouvrages de nattes; — 1,200 livres à P. Lescot, pour ses honoraires d'un an, et 600 à
Me Jean Durant, le comptable.
VIEUX LOUVRE.
La somme totale est de 1,106 livres 19 sols 11 deniers, ainsi répartie: i5 1 livres 6 sols
8 deniers à Eustache Ive, pour travaux de maçonnerie; — 6i3 livres 2 sols à Léonard Fontaine,
pour travaux de charpenterie ; — 3oi livres 8 sols 9 deniers à Jean Le Gay, pour travaux de
couverture; — et 45 livres 2 sols 6 deniers à Michel Rourdin, pour travaux de menuiserie.
ANNÉE 1558-59.— NOUVEAU LOUVRE.
Le compte du 1" janvier 1 558 (v. s.) au dernier décembre 1 55g indique une dépense to-
tale de 27,717 livres 1 sol 3 deniers, dont i3,ooo livres tournois payées à Guill. Guillain et
P. de Saint-Quentin, rmaistres maçons, demeurant à Paris, ayant la charge du bastiment du
if Louvre, pour travaux de maçonnerie; — 53 livres à Armand Collectet, tr tourneur de pierres
if et de bois, demeurant à Paris pour avoir vendu et livré et fait conduire dans le magasin
ndes marbres du Roy, huict blots de marbre, tant blancs que noirs ;» — 484 livres à Jean
Goujon, pour travaux de sculpture; — 2,000 livres à Jean Le Peuple, pour travaux de char-
pente;— 964 livres 5 sols 4 deniers à Claude Penelle et autres maîtres couvreurs, pour n plu-
sieurs ouvrages de couverture d'ardoises et de thuilles, tant au comble de dessus la vieille
rchapelle que au cabinet naguères fait pour la Reyne, joignant le Grand-Pavillon;» — 4,g24 li-
vres 9 sols à Francisque Scibecq et autres, pour travaux de menuiserie; 2,84g livres 2 sols
4 deniers à Guill. Evrard, pour ouvrages de serrurerie; — 358 livres 6 sols 6 deniers à Nicolas
Reaurain, pour travaux de vitrerie; — 2 Go livres à Jean et Louis Du Rrueil, pour travaux de
peinture; — 482 livres 3 sols 4 deniers à Etienne Guignebeuf, pour ouvrages de nattes; — 417
livres 3 sols tant à Roger de Simonieulx, * ayant la charge et conduite des autres mosleursqui
iront travaillé avec luy, » qu'à ces autres ouvriers mouleurs et pour n payement de grand nombre
n de matériaux et drogues qui ont esté employées à faire plusieurs ouvrages de mouslerie ; » —
42 livres 12 sols à Gilbert Drouin, maistre ferronnier, à Paris, pourquatre paires de chenets,
if mis en la salle du chasteau du Louvre, pour servir aux nopces du duc de Lorraine ;s plus,
200 livres à Nicolas Clerget, ir marchand, demeurant à Saint-Dizier, et maistre des forges, »à-
compte sur le prix t de certain nombre de contre-cœurs» qu'il devait livrer npour servir èsche-
ir minées dudit bastiment; — 4a livres 1 sol 6 deniers à Marguerite Le Duc, marchande de
toiles, pour n 187 aunes de toille neufve pour employer au haut du dez de la salle du bal, pour
« les nopces de Madame, sœur du Roy; qui est à raison de 4 sols G deniers pour chaculne aulne
i de toille;» — 3o livres à Lucas le Vacher, n pour ses peines, journées, sallaires etvaccations;»
— et 1,200 livres à Lescot, pour une année de ses appointements.
1. 3i
2'i2
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
ANNEE 1559-60"».— NOUVEAU LOUVRE
Le compte du 1" janvier i55o,(v. s.) au dernier décembre i56o indique une dépense totale
de 24, 48q livres 1 U sols ît deniers, dont 20,000 livres à Guill. GuillainetP.de Saint-Quentin,
pour travaux de maçonnerie; — too livres à Guillaume Vuespin, dit Tabaguet, «pour trois
« grandes pièces de marbre conduittes jusques au magasin des marbres du Louvre ;» —
4,o85 livres à Jean Goujon, pour travaux de sculpture; — i,543 livres i3 sols 11 deniers à
Jean Le Peuple et Claude Girard, pour travaux de charpenterie ; — 200 livres à RieulleRichault,
pour ouvrages de menuiserie; — 200 livres à Claude Penelle, pour ouvrages de couverture
d'ardoises; — 60 livres à Louis Du Rrueil, pour travaux de peinture; — 82 livres à Laurens
Testu, «pour neuf tuyaux de bronze. . . . pour servir à esgouter les eauesdes dales, au-dessus
« du premier étage du bastiment neuf, du costé de la rivière , n et 11 livres à Louis du Rrueil ,
«pour avoir doré d'or fin à huille lesdits neuf tuyaux.»
Les comptes dont nous venons de donner des extraits n'existent plus qu'à l'état
de copie; mais nous avons découvert, il y a quelques mois, un état original de
dépenses faites pour le Louvre en i557,i558eti55g W. Cet état, qui concorde,
à quelque différence près, avec les comptes ci-dessus mentionnés, est rédigé dans
cette forme:
BASTIMENT DU LOUVRE.
MASSONNERIE.
Inventorié.
Un.
Une ordonnance du xxvi' mars m.vc.lvii, signée Lescot, soubz les noms de Guillaume
Guilain et Pierre de Sainct-Quentin, massons, avec leurquictance, montant xvc li-
vres tournois.
Deux. Une autre du xm" may ensuivant dernier passé, et quictance soubz le nom des dicts
massons, montant xvc livres tournois.
m. Une autre du vi" juillet ensuivant, et quictance, montant xvc livres tournois.
iv. Une autre du xxve aoust dernier, et quictance, montant xvc livres tournois.
(1) Celle année, commencée le 1" janvier i55t),
vieux style, ou i56o, nouveau style, comprend
cinq mois et demi du règne de François II. Le reçu
de Jean Goujon, dont nous avons parlé p. a33, s'y
rattache ; en voici la teneur : « Honorable homme
f Jehan Goujon, sculpteur du Roy, demeurant à
« Paris , confesse avoir eu et reçu contant de Me Jehan
« Durant, trésorier et payeur des œuvres, édifiices
«et bastimens du Roy, la somme de quinze livres
"tournois, à lui ordonnée par révérend père en
«Dieu messire Pierre Lescot, seigneur de Clagny,
-abhé de Clermont, conseiller et aulmosnier ordi-
«rnaire dudict seigneur, ayant la charge etsuperin-
« tendance des bastimens que ledict sieur Roy fait
«de présent faire et construire en son chasteau du
« Louvre, à Paris ; sur et tant moins des ouvrages
« de sculpture par lui faicts et qu'il fera cy-après pour
« ledict sieur Roy, audict chasteau du Louvre; de
«laquelle somme de quinze livres ledict Jehan
"Goujon s'est tenu et tient content, en requitte et
«quitte ledict trésorier et tous autres, promettant,
«obligeant et renonçant. Fait et passé l'an 1 55g
«(i56o), le lundi, premier jour d'avril avant Pas-
«ques. Signé, Pajonat-Patu. »
{J) M. le Préfet l'a fait immédiatement acheter
pour la bibliothèque de la Ville.
COMPTES DU LOUVRE SOUS HENRI II. 2/i3
Inventorié.
v. Une autre du vi" octobre dernier, et quictance, montant xvc livres tournois,
vi. Une autre du xxvi" de novembre ensuivant, et quictance, montant xvc livres tournois.
vu. Une autre du 1111e janvier ensuivant, et quictance, montant xvc livres tournois,
vin. Une autre du xvn' février ensuivant, et quictance, montant m. livres tournois.
SCULPTURE.
ix. Une autre ordonnance du xxvii" de mars vclvii, signée du dict Lescot, soubz le nom
de Jehan Goujon, sculpteur, avec quictance, montant xn livres tournois.
x. Une autre ordonnance du 11e avril ensuivant, ou dict an, et quictance, montant xn li-
vres tournois.
xi. Une autre ordonnance du vu" avril ensuivant, ou dict an, et quictance, xn liv. tourn.
xn. Une autre ordonnance du xvi" avril vclvih, après Pasques, et quictance, xn liv. tourn.
xiii. Une autre ordonnance du xxni* du dict moys, et quictance, montant xn livres tournois.
xiv. Une autre ordonnance du dernier du dict moys, et quictance, montant xn liv. tourn.
xv. Une autre ordonnance du vue may ensuivant, et quictance, montant xn liv. tourn.
xvi. Une autre ordonnance du xim" du dict moys, et quictance, montant xn liv. tourn.
xvn. Une autre ordonnance du xxi" dudict moys, et quictance, montant xn liv. tourn.
xviii. Une autre ordonnance du xxviii* du dict moys, montant xn livres tournois.
xix. Une autre ordonnance du ime de juing ensuivant, et quictance, montant xn liv. tourn.
xx. Une autre ordonnance du xie du dict moys de juing, et quictance, montant xn liv. tourn.
xxi. Une autre du xxviii" du dict moys, et quictance, montant xn livres tournois.
xxn. Une autre du xxve du dict moys, et quictance, montant xn livres tournois.
xxiii. Une autre du n" juillet ensuivant dernier, et quictance, montant xv livres tournois.
xxiiii. Une autre du ixe du dict moys, et quictance, montant xv livres tournois.
xxv. Une autre du xvie ensuivant, et quictance, montant xv livres tournois.
xxvi. Une autre du xxn" ensuivant, et quictance, montant xv livres tournois.
xxvh. Une autre du pénultième du dict moys, et quictance, montant xv livres tournois.
xxviii. Une autre du m' d'aoust ensuivant dernier passé, et quictance, montant xx liv. tourn.
xxix. Une autre du vie du dict moy, et quictance, montant xv livres tournois.
xxx. Une autre du xm" du dict moys, et quictance, montant xv livres tournois.
xxxi. Une autre du xx" jour du dict mois, et quictance, montant xv livres tournois.
xxxn. Une autre du xxvii", et quictance, montant xv livres tournois.
xxviii. Une autre du m" septembre ensuivant dernier passé, et quictance, montant xv liv. tourn.
xxxiiii. Une autre du xe ensuivant, et quictance, montant xv livres tournois.
xxxv. Une autre du xvn" jour dudict moys, et quictance, montant xu livres tournois.
xxxvi. Une autre du xxmi" jour du dict moys, et quictance, montant xn livres tournois.
xxxvn. Une autre du premier octobre dernier, et quictance, montant xn livres tournois.
xxxvm. Une autre du vin" jour du dict moys, et quictance, montant xv livres tournois.
xxxix. Une autre du xv" jour du dict moys, et quictance, montant xv livres tournois.
xl. Une autre du xxn" du dict moys, et quictance, montant xvm livres tournois.
xli. Une autre du xxv" jour du dict moys, signée du dict Lescot, soubz le nom de Estienne
Cramoy, autre sculpteur, et quictance, montant xvn livres x sols tournois.
xlii. Une autre du xxix6 jour du dict moys, soubz le nom du dict Jehan Goujon, quictance,
montant xvm livres tournois.
xliii. Une autre duv" novembre ensuivant aussy dernier, et quictance, montant xvm liv. tourn.
3i .
244
Inventorie.
M.I1II.
XLV.
\LVI.
uni.
XI.VIII.
XLIX.
L.
LI.
lu.
un.
i,im.
LV.
LYI.
LVII.
LVIII.
LIX.
LX.
LXI.
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Une autre du xn" du dict uioys, et quictance, montant xv livres tournois.
Une autre du xix" du dict moys, et quictance, montant xu livres tournois.
Une autre du xxvie du dict moys, et quictance, montant xx livres tournois.
Une autre du 111e décembre aussy dernier, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du x" du dict moys, montant x livres tournois.
Une autre du xvne du dict moys, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du xxmi° du dict moys, montant x livres tournois.
Une autre du dernier du dict moys, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du vu" janvier ensuivant aussy dernier, montant x livres tournois.
Une autre du xime du dict moys, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du xxie du dict moys, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du xxvni' du dict, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du mi" février ensuivant dernier passé, et quictance, montant x livr. tourn.
Une autre du xi" du dict moys, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du xvni" du dict moys, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du xxve ensuivant, et quictance, montant x livres tournois.
Une autre du quatre mars ensuivant aussy dernier passé, montant x livres tournois.
Une autre du premier jour d'avril vclix, par Pierre Jognaux, x livres tournois.
CIIARPENTERIE.
un.
LXIII.
LXIIII.
LXV.
Une autre ordonnance du ve de mars v'lvii, signée du dict Lescot, soubz le nom de
Jehan Lepeuple, maistre charpentier, avec sa quictance, montant mi' livres tournois.
Une du xixe du dict moys, et quictance du dict moys, montant 1111e livres tournois.
Une autre du xxe avril vclviii dernier, et quictance, montant vc livres tournois.
Une autre du xvie décembre ensuivant aussi dernier, et quictance, vc livres tournois.
i,xvi.
SERRURERYE.
Une autre ordonnance du xe septembre dernier, signée du dict Lescot, soubz le nom de
Guillaume Érard, serruryer, avec sa quictance, montant mc livres tournois.
Une autre du xnie décembre ensuivant aussi dernier, montant vc livres tournois.
I.XVIII.
PLOMBERIE.
Une autre ordonnance duxvme aoust vclviii , soubz le nom de Guillaume Laurens, mar-
chand plombier'1', avec sa quictance, montant un* livres tournois.
PEINCTURE.
LX1X.
I.XX.
LXXI.
Une autre ordonnance du xie aoust v'lviii dernier passé, signé du dict Lescot, soubz le
nom de Loys Le Brueil, peintre, et sa quictance, montant c livres tournois.
Une autre du xime octobre ensuivant dernier, montant c livres tournois.
Une autre du me février ensuivant dernier, soubz le nom du dict Loys Dubrueil, Jehan
(1) Guill. Laurans, bourgeois de Paris, maistre
plombier et fontainier de la Ville , mourut le 1 a mars
1572. Il fut enterré à Saint-Gervais, près de sa
femme, Barbe Boutemotte, morte elle-même le
q septembre 1569.
COMPTES DU LOUVRE SOUS HENRI II. 245
Inventorié.
Dubrueil, Jehan Testart, Thomas Lepiastrier et Jehan Lejeune, maistres peintres,
avec leur quictance, montant ncxx livres tournois.
MENUISERIE.
i.wii. Une autre ordonnance du ve avril vclvii avant Pasques, signée du dict Lescot, soubz le
nom de Raouland Maillard, menuisier, avec sa quictance, montant nc livres tournois.
lxxiii. Une autre du vme avril ensuivant ou dict an vclvii, soubz le nom de messire Francisque
Serbecq, autre menuisier, avec sa quictance, montant nc livres tournois.
lxxiiii. Une autre du xxiii" du dict moys vclviii après Pasques, soubz le nom du dict Serbec,
et quictance, montant nc livres tournois.
lxxv. Une autre du xx" ensuivant dernier, soubz le nom du dict Maillart,avec sa quictance,
montant nc livres tournois.
lxxvi. Une autre du x" juing dernier, soubz le nom du dict Serbec, avec sa quictance, mon-
tant iiiic livres tournois.
lxxvii. Une autre du xvi° juillet aussi dernier, soubz le nom du dict Serbec, avec quictance,
montant mic livres tournois.
i.x\viii. Une autre du xxvu" juillet ensuivant dernier, soubz le nom de Riolle Richault, aussi
menuisier, avec sa quictance, montant nc livres tournois.
l\\i\. Une autre du xiiii" aoust aussi dernier, soubz le nom du dict Maillart, et quictance,
montant nc livres tournois.
mi". Une autre du xxvie du dict mois d'aoust, soubz le nom du dict Serbec, et quictance,
montant un* livres tournois.
iih"i. Une autre du xix* septembre ensuivant, soubz le nom du dict Serbec, et quictance,
montant nc livres tournois.
mi"ii. Une autre ordonnance du xxime septembre dernier, soubz le nom du dict Richault, et
quictance, montant iin"xii livres xim sols tournois.
iiii"iii. Une autre du xne octobre ensuivant, soubz le nom dudit Serbecq, et quictance, mon-
tant nc livres tournois.
iiii"iiii. Une autre du xxix'du dict moys d'octobre , soubz le nom du dict Maillart, et quictance,
montant l livres tournois.
imXIv. Une autre du xxx" du dict mois d'octobre, soubz le nom du dict Serbecq, et quictance,
montant c livres tournois.
iiii"vi. Une autre du xvu* novembre ensuivant aussi dernier, soubz le nom du dit Serbecq, et
quictance, montant mc livres tournois.
iiii"vii. Une autre du xxvu" du dict moys, soubz le nom du dict Maillart, et quictance, mon-
tant iicii livres v sols.
iiii"viii. Une autre du xvi' décembre ensuivant, soubz le nom du dict Serbec, avec sa quictance,
montant imc livres tournois.
mi"ix. Une autre du xx" du dict moys de de'cembre dernier, soubz le nom du dict Richault,
et quictance, montant mic livres tournois.
nn"x. Une autre du xiu" janvier ensuivant ou dict an, soubz le nom du dict Serbecq, et quic-
tance, montant 11e livres tournois.
iiii"xi. Une autre du premier fe'vrier ou dict an vclviii dernier, soubz le nom du dict Serbec,
et quictance, montant 11e livres tournois.
(Biffé.)
246 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
(Article biffé) Une autre du. . jour du dict moys de février, soubz le nom du dict Seerbec, et sa
dans > .
roriginai.) I quictance, montant nE livres tournois.
. VICTRERIE.
Inventorié.
inixxxn. Une autre ordonnance du xi juing dernier passé, signée du dict Lescot, soubz le nom
de Nicolas Raurain, victrier, avec sa quictance, montant nc livres tournois.
hiixxxiii. Une autre du xxvm" décembre ensuivant, et sa quictance, montant nc livres tournois.
ANMEUBLEMENS.
Une autre ordonnance du xxiiii6 may v'lvui dernier passé, signée Lescot, soubz le nom
de Gilbert Denis, maistre ferronnier en grosserie, avec sa quictance, montant lv li-
vres tournois.
Une autre du 1111e juing ensuivant aussi dernier, soubz le nom de Marie de Lacroix,
veuve de feu Philippe Lejay, marchant de draps de soye, avec sa quictance, montant
xl livres xn sols vi deniers tournois.
OUVRA1GES DE NATTE.
iiiixxxim. Une autre ordonnance du xxme moy dernier passé, soubz le nom de Jehan Mignaut,
nattier, avec sa quictance, montant ncin livres vu sols m deniers.
mixxxv. Une autre du xxvn'juillet ensuivant aussi dernier passé, soubz le nom de Estienne Qui-
quebeuf , aussy nattier, avec sa quictance , montant xxi livres xv sol ix deniers obole
tournois.
iiiixxxvi. Une autre du 11e janvier aussi dernier, soubz le nom dudict Quiquebeuf, et quictance,
montant 11e livres tournois.
ORFAVERIE.
iihxxxvii. Une autre ordonnance du xvih" juillet aussi dernier passé, soubz le nom de Richard
Toutain, orfèvre, signée du dict Lescot, avec sa quictance, montant xim livres x sols.
MEN'UZ FRAIZ.
S Une ordonnance du 1111e janvier dernier passé, signée Lescot, soubz le nom de Pierre
Daguet, menuisier, et sa quictance, montant xi livres tournois.
AMEUBLEMENS.
iihxxxviii. Une autre ordonnance du xxmie jour de mai mil v'lviii dernier passé, signée Lescot,
soubz le nom de Gilbert Denis, maistre ferronnyer engrosserye, avec sa quictance,
montant lv livres tournois.
mrxxix. Une autre du 1111e de juing ensuivant aussy dernier passé, soubz le nom de Marie de La-
croix, veuve de Philippes Le Jay, marchand de draps de soye, avec sa quictance,
montant xl livres xn sols vi deniers.
MEXUZ FRAIZ.
<:. Une ordonnance du 1111e janvyer dernier passé, signée du dict Lescot, soubz le nom de
Pierre Duguet, menuisier, et sa quictance, montant xi livres tournois.
COMPTES DU LOUVRE SOUS HENRI II. 247
Inveutui-it'.
ci. Une autre ordonnance du 11e avril vclvii avant Pasques, signée du dict Lescot, soubz le
nom de Lucas Le Vacher, et récépissé, montant vi"x livres tournois.
eu. Une autre du iiii" octobre ensuivant vclviii, montant c livres tournois,
cm. Une autre du xe décembre ensuivant, et récépissé montant xxx livres tournois.
SALLAIRES ET VACCATIONS.
chu. Une autre ordonnance du xvne février aussi dernier passé, signée du dict Lescot, soubz
le nom du dict Le Vacher, et sa quictance, montant mi" livres tournois.
GAIGES ET ESTATZ POUR L'ANNEE FYNIE LE DERNIER JOUR DE DECEMBRE VCLVIII DERNIER.
cv. Unze quictances du seigneur de Claigny, signées Lescot, des derniers passez (sic), mon-
tans xn livres tournois.
cvi. Trois autres quictances de Lescot, des xv" janvier, iue febvrier, et nne mars vclviii , pour la
somme de troys cens livres pour ses gages de janvier, février et mars vclviii.
i
menuyserie.
cvn. Une ordonnance du second jour d'avril vclix après Pasques, à Raoulland Maillard,
menuysier, avec sa quictance de la somme de iiii"ix livres vu sols.
ACHAPT DE MARBRE.
cviii. Une autre ordonnance du dernier jour de mars vclix après Pasques, à Amand Colletet
tourneur de pierres et de bois, avec sa quictance de la somme de lui livres tournois.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 249
CHAPITRE VIII.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III.
DE 1559 A 1589.
Le règne de François II a été trop court pour qu'on le considère comme une
phase dans l'histoire du Louvre. Nous n'avons à y signaler que des lettres patentes
confirmant Pierre Lescot dans sa charge, «en laquelle, dit le jeune Roi, vous
«r vous êtes acquité si soigneusement, diligemment, et bien et tant à leur contente-
crment (il s'agit de François Ier et de Henri II), qu'à présent nous sommes déli-
rrbéré de faire continuer une si belle et louable entreprise, nous avons grande
«occasion de vous continuer aussy en ladite charge, pour l'assurance que nous
« avons du bon et louable service que nous recevons de vous en cet endroit W. d
Ces lettres furent délivrées à Paris, le 26 juillet i55o,, c'est-à-dire quatorze jours
seulement après la mort de Henri II. Lescot, on le voit, n'avait pas perdu plus
de temps, cette fois, qu'à la mort de François Ier, afin d'assurer sa position qui fut
toujours fort respectée.
Aujourd'hui on ne peut plus distinguer au Louvre les parties élevées sous Fran-
çois II : elles se confondent avec celles qui sont voisines. Il en est autrement des
constructions de Charles IX.
L'aile ou corps de logis méridional « a esté poursuivy , dit Du Cerceau , par les
«roys Françoys second et Charles neufiesme, dernier décédé, ou plustost par la
« Royne, leur mère, jusques à l'endroit où sera assis un autre escalier, pour servir
«audit corps de logis. n Le lieu où devait être placé l'escalier auquel Du Cerceau
fait allusion n'est indiqué nulle part; mais il est probable qu'on l'aurait disposé
dans le troisième avant-corps, à l'orient du gros pavillon d'angle, dans une situa-
tion correspondante à celle de l'escalier de Henri II. Sur le plan qui a été pu-
blié par Du Cerceau, en 1676, et qui donne assurément l'état de l'édifice à cette
(1) Comptes des bâtiments, 1. 1, p. 38i. Nous n'avons pas transcrit entièrement ces lettres, parce que la
teneur en est copiée sur celles que nous donnons in extenso.
1. 3a
250 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
date, la nouvelle aile méridionale ne semble achevée que jusqu'au second avant-
corps inclusivement, car au delà, à l'étage inférieur, est seulement figurée une
portion de salle incomplète (r, du plan). Ainsi il est à croire qu'en 1 57G , c'est-à-
dire peu de temps après la mort de Charles IX, l'aile s'arrêtait entre le second et le
troisième avant-corps. Au surplus, le monument même offre une excellente preuve
de la vérité des affirmations et des dessins de Du Cerceau : au premier avant-corps,
qui fut édifié par Henri II, sont sculptés les H H initiales de son nom; sur le se-
cond avant-corps et sur les trois travées qui le séparent du premier, on remarque,
au contraire, des K affrontés, initiales du nom latin (Karolus) de Charles IX. Les
parties construites sous le règne de ce prince sont donc en quelque sorte signées
par lui, et l'espace qu'elles occupent confirment ce que nous apprendDu Cerceau;
les comptes achèvent d'en démontrer l'exactitude. En effet, l'article sculpture du
compte de 1 562-63 est ainsi conçu: ce A Pierre L'Heureux, François L'Heureux,
a Martin Le Fort et Pierre Nanyn, sculpteurs, la somme de 1A0 livres à euxordon-
cc née par ledit seigneur de Claigny, pour avoir taillé et enrichy une frise de festons
ce composée de plusieurs fruictages aux petits enfans et oiseaux y entremeslez, et
ce pour avoir posé et assis ladite frise sur l'architecture , collonnes et pilastres du
a second estage que l'on édifioit pour les antichambres et cabinets de la Royne,
crdu costé de la cour du Louvre, et pour avoir taillé quarante-trois petits masques
«pour ornement d'une corniche servant d'entablement èsdits logis de la Royne. v
On n'aperçoit plus aucun de ces quarante-trois petits masques, l'ancien attique
ayant été détruit pour faire place à un troisième ordre; mais la frise couronnant
le second ordre , et décrite dans le compte , existe intacte , et l'on y retrouve , depuis
le premier avant-corps jusqu'au second inclusivement, des K enguirlandés, preuve
matérielle que cette partie de l'aile a été bâtie à l'époque que nous indiquons.
L'article sculpture, du compte de 1 564-65 , également fort précieux, ajoute
encore à l'authenticité et au nombre des renseignements que le précédent comporte :
«A Estienne Cramoy et Martin Le Fort, sculpteurs, la somme de3a6 livres à eux
cr ordonnée par ledit seigneur de Clagny, pour avoir par eux taillé en pierre de
rtSaint-Leu, autour de quatre ovalles de marbre mixte, à chacune un meufle de
cr lion , et deux festons de chesne pendans dudit meufle , lesdites ovalles estans entre
et les colonnes du second estage; plus, pour avoir esté taillé au-dessus de trois
eefenestres du dernier estage, à chacun un trophée de morions, areqs, carquoys.
ce flamberies et autres armes antiques. Plus, pour avoir par eux esté taillez sur le
ce tas en ladite pierre, aux costez de chascune desdites feiiestres, deux trophées
ce d'armes antiques, comme corcelets, toraces, tarques, pavois, espées, dagues,
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 251
rtarcqs, carquoys et autres sortes d'armes antiques. Plus, pour avoir taillé sur le
<rtas, en ladite pierre de Saint-Leu, sur quatre tablettes de marbre mixte, lesquels
trsont posées entre lescollonnes del'estage du rez-de-chaussée, sur chascune un K
rr couronné à l'impériale, enrichy de branches de lauriers. Plus, pour avoir taillé
crsur le tas, en ladite pierre de Saint-Leu, en trois clefs qui sontcy trois arcades
r du premier estage, à chascune un K environné d'une couronne de lauriers. Plus,
crpour avoir par eux achevé et mis en perfection deux petits enfans nuds de la
c corniche du second estage ; tous lesdits ouvrages susdits ont esté faits pour orner
a et enrichir la fassade de cette partie du corps d'hostel que l'on bastit à présent
«pour le logis de la Reyne, audit chasteau du Louvre, du costé de la rivière. •»
Les trophées dont il est ici question ont disparu lors de la démolition de l'attique
qu'ils ornaient; mais les mufles à festons et les K couronnés se reconnaissent au
premier coup d'œil. Quant aux K des clefs d'arcs de l'étage inférieur, on ne les voit
plus, de même que les H qui, suivant les planches de Du Cerceau, décoraient les
clefs analogues de l'autre aile; les couronnes de laurier seules subsistent.
Nous n'avons pas besoin de faire observer quelle importance ont les deux pas-
sages que nous venons de citer, et combien on doit s'estimer heureux de ce qu'ils
nous sont parvenus : non-seulement ils nous révèlent les auteurs de sculptures qu'on
attribuait à Jean Goujon, mais ils datent, de la manière la plus incontestable, toute
une partie de l'édifice, et, par suite même, les parties contiguës; enfin ils éta-
blissent que les chiffres sculptés sur les murs du Louvre ne sont point des données
a conséquences douteuses, mais des indications dans lesquelles il convient d'avoir
la plus grande confiance'1'.
Charles IX ne se borna vraisemblablement pas à pousser l'aile méridionale un
peu au-delà de son second avant-corps; nous supposons qu'il en éleva d'une manière
plus ou moins complète le mur extérieur, jusqu'à la tour sud-est de l'ancien Louvre;
car, sur la vue de Cellier, qui représente l'état antérieur à la construction des gale-
ries, c'est-à-dire à l'année 1 566 , la muraille de l'aile méridionale apparaît achevée
du côté de la rivière, absolument comme sur les gravures de Sylvestre. Il n'y au-
rait, nous le savons bien, rien d'extraordinaire à ce que ce fût là une fantaisie
d'artiste anticipant sur l'avenir; mais il serait encore moins surprenant que ce fût
l'expression de la vérité. Le recueil de Cellier porte, il est vrai, la date de 1 583 ;
toutefois cette date n'empêche pas de croire que certains dessins du recueil ne
donnent point des aspects plus anciens''2', et il y a une preuve que la vue du Louvre
dont nous parlons a été faite avant 15^6, puisqu'elle ne reproduit point la
Petite-Galerie, dont on trouve le plan dans l'ouvrage de Du Cerceau. H estassuré-
(l> De tout (emps, au Louvre, les constructions (,) Jacques Cellier demeurait h Reims, et ses vues
ont été décorées des initiales du souverain régnant. de Paris peuvent n'être que des reproductions.
3s.
252 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
ment fort difficile d'admettre que, pendant un grand nombre d'années, et à une
époque de troubles, le château ait pu constamment présenter une brèche dans ses
murs; or c'est précisément ce qui aurait eu lieu si l'aile ancienne avait été démolie
toise par toise , à mesure que le nouveau bâtiment progressait.
Les comptes du nouveau Louvre ne descendent pas plus bas que l'année i568;
il devient impossible de suivre exactement la marche des travaux qui furent faits
depuis. Divers articles des comptes les plus récents donnent à penser que, vers
1570, on s'occupait surtout d'aménagement et de décoration intérieure. Ainsi il
est question, en 1567, d'achats de contre-cœurs de cheminées, et, dès 1 565, des
sculptures du plafond de a la chambre du rez-de-chaussée, au-dessous de celle de
cria Reyne,Ti passage qui démontre que la chambre de la Reine était au premier
étage (G). Nous savons qu'elle était séparée de la chambre du Roi par le cabinet M
dont nous avons parlé précédemment (p. 227). Elle était éclairée par deux fe-
nêtres donnant sur la rivière, et formant la deuxième et la troisième baie après
le gros pavillon. Elle correspondait en partie au premier avant-corps de l'aile
méridionale '2>. Dans le compte de 1 5 68, il y a une indication de l'antichambre de
la Reine; la pièce qu'on désignait ainsi en 1661 était celle (J) qu'éclairaient les sep-
tième et huitième fenêtres ^ après le gros pavillon. Elle était séparée de la grande
chambre par deux pièces : le grand cabinet de la Reine (I) et sa chambre à cou-
cher (H), contiguë à sa grande chambre. En 1661, la dernière pièce de l'aile était
la salle des gardes de la Reine.
La conduite des travaux du nouveau Louvre, ainsi que nous l'avons dit, resta
entre les mains de Lescot jusqu'à sa mort, et, par conséquent, durant tout le règne
de Charles IX et le commencement de celui de Henri III. On en a la preuve dans
les lettres d'office de son successeur aux fonctions d'architecte du château, et dans
un mémoire de marbrerie de 1 5y3 , où Lescot est qualifié de surintendant des
travaux'*'. Les artistes nommés dans les comptes sont Jean Goujon, le tailleur de
marbre François Du Han, les sculpteurs Etienne Cramoy, Martin Le Fort, Pierre
Nanyn, Jean Tacet ou Tacquet et les deux frères Pierre et François L'Heureux.
Ces derniers, auxquels on doit la délicieuse frise d'une partie de la grande galerie
du bord de l'eau, le plus gracieux morceau de sculpture qu'il y ait au Louvre,
(1) On parvenait directement à ce cabinet par
un escalier tournant en une cage carrée que l'on
voit encore, mais qui ne figure pas sur le plan
de Du Cerceau, où il paraît y avoir l'indication
d'un petit escalier dérobé pris dans l'épaisseur du
mur.
(,) Au xvne sièle, un oratoire était disposé dans
l'embrasure de la fendtre donnant sur la cour.
(3) Sur la face méridionale du Louvre de Lescot,
l'espacement des fenêtres, ce qu'on ne sait guère,
était fort inégal. U y a d'ailleurs des indications de
cette irrégularité dans les planches de Du Cerceau
et dans une vue de Sylvestre. Au moyen de vieux
plans cotés, qui existent aux Archives, nous avons
pu restituer l'ancienne disposition avec une exacli-
tude complète.
<*' Ce mémoire est indiqué sous le numéro 1112
dans le catalogue de la bibliothèque Leber.
COMPTES DU LOUVRE SOUS CHARLES IX. 253
étaient probablement élèves de Jean Goujon. Vers 1678, ils ornèrent de deux
figures de ffeuves la fontaine de Marie, située en la rue Salle-au-Comte. François
L'Heureux , auquel Sauvai attribue un lion , d'exécution remarquable , qui ornait le
portail de l'hôtel d'O, rue Vieille-du-Temple , sculptait aussi le bois, et fit des
travaux de cette espèce dans les appartements de la Reine, avec Jean Tacquet.
En fait de peintres, les comptes nomment encore Louis Du Breuil et un certain
Jacques Patin. Les menuisiers sont toujours Raoullant Maillart, Rieulle Richart et
aussi Michel Bourdin et Noël Biart, apparemment le père de Pierre Biart. Enfin
il est fait mention, en 1 568 , de n l'orlogeur n Nicolas Le Constançois.
L'aile méridionale, à partir de l'année 1 568 , où nous cessons d'en suivre régu-
lièrement les progrès, et jusqu'à la mort de Charles IX, ne semble pas avoir été
poussée avec activité ; la construction en fut peut-être ralentie par d'autres travaux
beaucoup plus importants, qu'on entreprit au dehors du château. Avant de les
décrire, et pour n'avoir point à scinder notre récit, nous donnons ici le résumé des
comptes qui nous restent à partir de i56o.
ANNÉE 1560-61. — NOUVEAU LOUVRE.
Le compte du 1" janvier i56o(v. s.) au dernier décembre 1 56 1, rendu par M'Jean Durant,
indique un total de 26,682 livres 16 sols 1 1 deniers, dont 20,000 livres payées à G. Guiliain
et P. de Saint-Quentin, pour travaux de maçonnerie ; — 100 livres à Guillaume Vuespin, pour
trois grandes pièces de marbre, par lui amenées dans le magasin des marbres du Louvre; —
4,8o5 livres à Jean Goujon, pour travaux de sculpture; — i,543 livres 1 3 sols 1 1 deniers à Jean
Le Peuple et à Claude Girard, pour travaux de charpenterie; — 200 livres à Rieulle Richault,
pour travaux de menuiserie; 200 livres à Claude Penelle, pour travaux de couverture en ar-
doise;— 60 livres à Louis du Rrueil, pour travaux de peinture; — 82 livres à Laurent Testu,
pour neuf tuyaux de bronze servant à l'écoulement des eaux du bâtiment neuf ; — 11 livres à Louis
du Rrueil, pour avoir doré ces tuyaux; et 1,200 livres à Lescot, pour ses honoraires d'une
année.
ANNÉE 1561-62.— NOUVEAU LOUVRE.
Le compte du î" janvier i56i (v. s.) au dernier décembre 1 56a indique un total de
10,699 livres 6 deniers, dont 8,5oo livres payées à G. Guiliain et P. de Saint-Quentin, pour
travaux de maçonnerie; — 716 livres à Jean Goujon, pour travaux de sculpture; — 4oo livres à
Guillaume Laurens, pour travaux de plomberie; — 53 livres 1 5 sols 6 deniers à Etienne Guigne-
beuf , pour ouvrages de nattes ; — 29 livres 5 sols à Rernard Symon , pour ouvrages de pavés faits
» de neuf en la cour dudit chasteau;* — et 1,000 livres à Lescot, pour dix mois de ses honoraires.
ANNÉE 1562-63.— NOUVEAU LOUVRE.
Un compte du 6 octobre i5G2 au dernier novembre 1 563 , rendu par Etienne Grand-Remy,
indique un total de 1,918 livres 6 sols 3 deniers, dont i,/ioo payées à G. Guiliain et P. de
Saint-Quentin, pour travaux de ma çonnerie;-i 4 0 livres à Pierre L'Heureux, François L'Heureux,
Martin Le Fort et Pierre Nanyn, pour les travaux de sculpture dont on a vu le détail plus haut;
254 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
— 45 livres à Louis Du Brueil, pour travaux de peinture; — 1 33 livres fi sols 3 deniers à Nicolas
Beaurain, pour travaux de vitrerie; — et 1,200 livres à Lescot, pour ses honoraires d'une année.
VIEUX LOUVRE.
Le compte correspondant indique un total de a63 livres 3 sols 8 deniers, dont 1 2 livres 9 sols
payés à Jean Aubert, pour travaux de maçonnerie; — 64 livres 12 sols à Michel Bourdin,pour
des travaux de menuiserie, dont une partie avaient été faits dans le palais de la Cité; — 1 4 1 liwes
i3 sols 6 deniers à Mathurin Bon(l), pour travaux de serrurerie; — et 44 livres 10 sols 10 de-
niers à Jean de La Hamée , pour travaux de vitrerie. Quelques autres travaux de maçonnerie , mon-
tant à la somme de 600 livres, furent en outre exécutés, tant au Palais qu'au Louvre, par
Eustache Ive.
ANNÉE 1563-64. — NOUVEAU LOUVRE.
Le compte du 1" janvier 1 563 (v. s.) au dernier décembre i564 indique un total de
8,774 livres 12 sols 6 deniers, dont 6,5oo livres payées à G. Guillain et P. de Saint-Quentin,
pour travaux de maçonnerie; — 642 livres 2 sols 2 deniers à Guillaume Laurens, pour travaux
de plomberie; — 200 livres à Claude Penelle, pour travaux de couverture; — 200 livres à
Raoullant Maillart, pour travaux de menuiserie ; — 12 livres à Etienne Guignebeuf, pour ouvrages
de nattes; — et 1,200 livres à Lescot, pour un an de ses honoraires.
ANNÉE 1564-65.— NOUVEAU LOUVRE.
Le compte du 1" janvier 1 564 (v. s.) au dernier décembre 1 565 indique un total de
19,568 livres 8 sols 3 deniers, dont 7,000 livres payées à G. Guillain etP.de Saint-Quentin,
pour travaux de maçonnerie ; — 326 livres à Etienne Cramoy et Martin Le Fort , pour les travaux
de sculpture sur pierre, énoncés précédemment; — 100 livres à François L'Heureux, rr pour avoir
tr taillé en bois une grande armoirie de la Reyne, enrichie de masques, festons et autres orne-
trmens, pour estre appliqué au cul et plat-fons de la chambre de la Reyne, et aussy avoir taillé
tten bois, dans un grand panneau, un grand chappeau de triumphe de feuilles de chesne, et
ff dans icelluy un bassin antique enrichy de plusieurs ouvrages ; pour estre ledit panneau applicqué
ttau milieu d'un ciel et plat-fonds de la chambre du rez-de-chaussée au-dessous de celle de la
rt Reyne, du costé de la rivière;» — 3, 100 livres àJean Le Peuple, pour travaux de charpenterie ;
— i,3oo livres à Michel Suron, pour travaux de serrurerie; — 63 1 livres 18 sols fideniersà
Claude Penelle, pour travaux de couverture; — 600 livres à Guillaume Laurens, pour travaux
de plomberie; — 4,g5o livres à Raoullant Maillart, Noël Biart et Bieulle Richault, pour tra-
vaux de menuiserie; — 35o livres à Nicolas Beaurain, pour travaux de vitrerie; — et 1,200 livres
à Lescot, pour un an de ses honoraires.
ANNÉE 1566. — NOUVEAU LOUVRE.
Le compte des mois de janvier, février et mars de cette année 1 566 indique un total de
2,858 livres, dont 800 livres payées à G. Guillain et P. de Saint-Quentin, pour travaux de ma-
çonnerie;— 100 livres à Etienne Cramoy et Martin LeFort, plus 60 livres à Pierre et François
L'Heureux, pour travaux de sculpture ; — 200 livres à Michel Suron, pour travaux de serrurerie ;
(1) Malhurin Bon , qui travailla pour les bâtiments du nouvel hôtel de Catherine de Médicis vers 1677,
vivait encore en i585.
COMPTES DU LOUVRE SOUS CHARLES IX. 255
— 95o livres à Noël Biart et Raouiland Maillart , pour travaux de menuiserie ; — 60 livres à Jean
Tacquet, pour avoir taille' tr en bois , des feuillages et autres ornemens, huict pommeaux pourestre
rrappliequcz au cul et plat-fond de l'antichambre de la Reyne, au corps d'hostel du costé de
tria rivière, pour loger Sa Majesté;» — et 200 livres à Lescot, pourdeux moisde ses honoraires.
ANNÉES 1567 ET 1568. — NOUVEAU LOUVRE.
Le compte rendu par Alain Veau, et s'étendant du 1" février 1567 au dernier décembre
i568, indique pour cette période un total de 21, 253 livres 7 sols 7 deniers, dont 12,700 li-
vres payées à G. Guillain et P. de Saint-Quentin, pour travaux de maçonnerie; — 2,1^2 livres
12 sols à Jean Le Peuple, pour travaux de charpente; — 1,219 'ivres à NoélBiard, RieulIeRi-
chault et Rolland Maillart, pour travaux de menuiserie; — 377 livres 8 sols 10 deniers à Claude
Penelle, pour travaux de couverture; — 1,072 livres 1 sol 6 deniers à Michel Suron, pour tra-
vaux de serrurerie; — 26 livres i5 solsà Claude Vasse, marchand ferronnier, «■ pour deux grands
-contre-cœurs de fonte,» destinés aux cheminées du château; — 236 livres 2 sols 6 deniers à
Antoine Le Clerc et Jean de La Hamée, pour travaux de vitrerie; — 1 97 livres 2 sols à Etienne
Guignebeuf, pour ouvrages de nattes; — 226 livres 7 sols 5 deniers à Armand Bouquet, voitu-
rier, s pour avoir charrié plusieurs marbres jusques dans l'un des magazins du Louvre;» —
5o livres à Jean Tacet, tailleur en bois; « pour avoir vendu quatre chandelliers de bois de noyer,
rayant chacun cinq branches, tout enrichis de vazes avec gaudcrons , feuillages, masques, guil-
rrlochis et autres ornemens antiques, pour estre pendus à l'antichambre et celle de la Reyne,
tr audit bastiment neuf du Louvre; — 371 livres 2 sols à Jacques Patin, pour travaux de pein-
ture;— 5oo livres à Eslienne Cramoy, pour travaux de sculpture; — 3,563 livres 8 sols 6 de-
niers à François du Han, pour taille de marbres; — 2,808 livres 9 sols 2 deniers à Guillaume
de Vrespin, ditTabaquet, pour fournitures depiècesde marbre * livrez près le port du Louvre;»
- 2, '100 livres à Leseot, pour ses honoraires de deux années; — &00 livres à Alain Veau, le
comptable; et 87 livres de dépense commune.
Ici s'arrêtent les comptes relatifs au nouveau Louvre. Pour le
VIEUX LOUVRE.
Le compte de 1 568 mentionne, comme ayant été payée : rtà Etienne Grand-Remy, maislre
"maçon, la somme de 160 livres pour la construction et esreclion de deux corps de garde que
- le Rov voullut et commanda lors estre bastis de nouveau et en diligence, près son chasteau du
"Louvre, pour la seurelé de sa personne.» — »A Jean Le Peuple la somme de 570 livres
- pour ouvrages de charpenterie par luy faits ausdits corps de garde. » — r A Claude Penelle
tr . . . .la somme de i3o livres, pour ouvrage de couverture de tuille faits ausdits corps
« de garde. » — «A Pierre de Saint-Jorre la somme de 60 livres pour ouvrages de pavés faits
tren la court du chasteau du Louvre;» le tout donnant un total de 860 livres pour les deux
corps de garde. En outre, on paya 100 livres à André Soye, pour travaux de maçonnerie faits
tant à l'hôtel de Bourbon qu'au Louvre; — 34 livres isolsàJeariBoileau, s maislre chaudronnier,
rpour ou\rages de cuivre laits de neuf, [jour servir au pont-levis du Louvre;» — 200 livres à Eus-
tache Ive, pour travaux de maçonnerie faits au palais de la Cité, aux rr deux Chastelets et au bas-
- liment des grosses pilles et pilliers de pierre de taille, soustenant le pont-levis fait de neuf entre
-le grand corps d'hostel du chasteau du Louvre (l'aile occidentale) et la court des officiers et
-autres lieux; » — 6 livres 10 sols à Nicolas Le Constançois,tmiaistreorlogeur pour ouvrages
256 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
ffde son meslier faits en l'orloge du chasteau du Louvre ; i> — îio livres à André Soye, pour
Iravaux de maçonnerie, exécutés tant à l'hôtel de Rourbon qu'au Louvre; — i5o livres à Michel
Suron, pour travaux de serrurerie dans ces deux édifices; — 5o livres à Pierre de Saint-
Georges, (rpour ouvrages de pavé par iuy faits en la court du logis de Bourbon, et en la court
» et offices du chasteau du Louvre. •»
Le compte du 16 mai au dernier décembre 1669 comprend 1,705 livres, payées à Eustache
Ive, pour travaux de maçonnerie <rau bastiment et maison des Lions, pallais royal (de la Cité),
«grand et petit Chastellet, bastiment des pilles et pilliers soustenant les nouveaux ponts-levis
ttdu Louvre.»
Le compte de 1 5 7 0 énonce l'acquisition , faite par 1 e Roi , de deux maisons , situées en la rue
Fromenteau et attenant à « la cour de derrière du chasteau. 15
Le compte de 1571 indique 2,1 84 livres 16 sols k deniers, payés à Eustache Ive, pour ou-
vrages de maçonnerie faits en divers lieux , entre autres « auxbastimens de l'appuy des nouveaux
«ponts-levis du Louvre; 100 livres payées au même, à cause de travaux faits au Louvre, pour
la construction «d'un corps de logis servant à loger les lions et autres bestes sauvages, n et
encore 687 livres k sols 6 deniers, pour travaux analogues dans le vieux Louvre. On trouve éga-
lement dans le compte de 1571 une somme de i3i livres, délivrée à Etienne Grand-Remy,
pour des travaux de maçonnerie faits aux deux nouveaux corps de garde, ainsi que quelques dé-
penses concernant la serrurerie, la couverture et la charpente de ces bâtiments.
L'histoire du Louvre proprement dit, sous le règne de Charles IX, ne nous
offre aucun autre détail , si ce n'est que , par lettres patentes du 1 8 décembre 15^2,
enregistrées le h mars 1673, l'auditoire du bailli de l'artillerie de France, qui y
avait son siège , fut transféré à l'autre extrémité de Paris , au lieu connu depuis
sous le nom d'Arsenal^. Mais il nous reste à éclaircir l'origine des constructions
dépendant du château et s'étendant le long de la rivière , qui furent commencées
vers la même époque, et ont acquis depuis une importance si grande. Ces cons-
tructions se composaient de la Petite-Galerie, de la Salle des Antiques et de la
Grande-Galerie. Quoiqu'elles aient été entreprises un peu avant l'année où finissent
les comptes du nouveau Louvre, elles n'y sont pas mentionnées, peut-être parce
qu'elles étaient comprises dans les bâtiments de la Reine mère, dont l'influence
et le goût présidèrent aux travaux.
L'âge de ces édifices, bien que fort discuté, n'a point encore été fixé d'une
manière positive. Comme le Louvre même, la Grande et la Petite-Galerie ont été
l'objet d'innombrables assertions hypothétiques et contradictoires. La raison de ce
fait est que la plupart des auteurs se sont bornés à se copier les uns les autres,
tandis que ceux qui auraient voulu procéder plus sérieusement ont été arrêtés, dès
leurs premiers pas, par les difficultés du sujet. Ces difficultés sont effectivement
très-grandes, et, comme elles tiennent surtout à l'extrême pénurie des documents,
elles ont défié jusqu'ici les efforts les plus persistants. Cependant si, par suite de
(1> Félibien, Hist. de Paris, t. IV, p. 835.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 257
la destruction des comptes relatifs à la Grande et à la Petite-Galerie, les rensei-
gnements qui s'y rattachent sont aussi rares que disséminés, il en existe du moins
assez pour donner une idée satisfaisante de l'origine ainsi que du développement
des deux constructions. La réunion, laborieusement obtenue, de ces renseigne-
ments nous permettra d'être, sur ce point, plus explicite et plus vrai que nos
devanciers.
La fondation de la Grande-Galerie implique celle de la Petite, qui la relie au
Louvre. On s'explique mal, en effet, comment la première aurait pu être cons-
truite pour demeurer isolée, et on le comprend d'autant moins qu'on sait mieux
qu'elle fut surtout conçue dans le dessein de réunir les deux palais du Louvre
et des Tuileries. Recherchons donc préalablement à quelle époque fut commencée
la Grande-Galerie.
Plusieurs opinions ont été émises. Selon la première, la Grande-Galerie aurait
été entièrement élevée par Henri IV. Cette opinion, complètement insoutenable
en présence des textes que nous citerons, ne l'est pas moins au point de vue ar-
chéologique. Entre la portion de l'édifice située au delà du pavillon dit de Les-
dtgvièret et la portion située en deçà, il y a une si énorme différence de style
et de disposition, qu'il est impossible de les regarder comme contemporaines,
même en supposant un changement d'architecte. La disparité est telle que
M. Vitet, sans disposer de preuves écrites, a pu très-bien démontrer que les deux
parties de la Galerie ne sauraient avoir été édifiées simultanément, et, en outre,
que l'étage inférieur de la première partie n'avait point été ordonné en vue de
supporter un étage supérieur. Cette double vérité découle, i° de l'impossibilité
d'interpréter autrement la dissemblance radicale qu'on observe entre les deux
moitiés de la Grande-Galerie; 2° de ce que la première moitié est fondée à deux
mètres en contre-bas de l'autre, et, par conséquent, sur un sol plus ancien; 3° de
la présence du mezzanino ou étage intermédiaire, qui détermine la hauteur du
plancher de l'étage supérieur (Musée de peinture), dont on aurait atteint bien
plus simplement le niveau en exhaussant l'ordre inférieur, sans établir de
mezzanino; h" de la saillie de la sculpture, plus grasse en bas qu'en haut; 5° de
ce fait que l'ordre toscan de l'étage inférieur est, contrairement à toutes les
règles, d'un module plus élevé que l'ordre corinthien de l'étage supérieur, sin-
gularité dont l'existence semble impossible dans le cas où les deux étages auraient
été conçus d'un seul et même jet'1'.
L'étage inférieur de la première moitié de la Grande-Galerie étant reconnu
pour la portion la plus ancienne de l'édifice , à quelle époque du xvie siècle faut-il
en reporter la construction? Au règne de Henri II, comme le croyait M. de Cla-
'' Revue contemporaine , numéro du i5 septembre 1 852.
i. 33
358 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
rac, ou bien à celui de son troisième fils, comme d'autres écrivains l'ont soutenu?
Elle commença très-certainement à s'effectuer du temps de Charles IX.
Que la Grande-Galerie ait été entreprise sous ce dernier roi, c'est ce qui
résulte d'abord du passage où Germain Brice, ordinairement bien informé, dit:
rr II paroît que cet ouvrage (dans sa partie orientale) a été commencé sous
tr Charles L\W;d vient ensuite l'affirmation de Palma Cayet, témoin oculaire,
irai déclare que «les superbes galleries, pour aller du Louvre aux Tuilleries,
«furent commencées seulement par Charles IX, qui n'y fit que mettre la première
« pierre , de l'advis de la Reyne , sa mère f'2^; n enfin l'inscription qui y fut placée par
Henri IV contenait ces mots : «Porticum banc a Carolo IX, alta olim pace cœp-
trtam*3). . . Ti Subsidiairement, nous ajouterons que l'historien de Thou, person-
nage contemporain, en relatant la fondation du palais des Tuileries, dit que
Catherine de Médecis fit élever des bâtiments magnifiques, qui devaient être
réunis au Louvre par une galerie, «sedes sumptuosissimas, quse média porticu
« cum Lupara conjungerentur, cœpit exstruere W. fl De son côté Jacques Androuet
Du Cerceau, dont le témoignage a la plus haute valeur, puisqu'il était à la fois
architecte et protégé de Catherine , s'exprime ainsi dans sa notice sur le Louvre :
«Davantage ont esté par ladicte Dame encommencez quelques accroissemens
«cf galleries et tcrraces, du costé du pavillon (du sud-ouest), pour aller de là au
« palais quelle a fait construire et édifier au lieu appelle les Tuilleries W. n II est certes
absolument impossible de se refuser à voir dans ces galeries allant du Louvre vers
les Tuileries, la Grande-Galerie et ses dépendances. Or on sait que Catherine,
effrayée de certaine prédiction, renonça aux travaux des Tuileries vers 1672, et.
à coup sûr, personne ne supposera qu'elle ait pu ordonner de bâtir une galerie pour
conduire au château des Tuileries, postérieurement à l'époque où elle en abandonna
la construction. Donc la Grande-Galerie a dû être entreprise entre les années
i564 et 1572. En i566, il n'y avait point encore de château des Tuileries; en
1.572, on ne s'occupait déjà plus des travaux commencés, et, depuis la Saint-
Barthélémy jusqu'à la mort de Charles IX, il régna une terrible agitation, fort éloi-
gnée de cette paix profonde, altapax, à laquelle il est fait allusion dans l'inscription
conservée par Morisot. Cette inscription disait vrai : c'est pendant la paix qui
dura du mois de mars 1 563 au mois de septembre 1567 que la Grande-Gale-
'' Descript. de Paris, t. I, p. 161, de l'édition lionne cette inscription et attiré l'attention sur le
de 1752. passage de Palma Cayet que nous venons de citer.
i; Chronologie sept. liv. VII, p. 283. Coll. Mi- (,) Thuanillist. t. II, p. 290 de l'édition publiée
chaud. — Palma Cayet vécut de i525 à 1610. en 1620.
(3> Morisot, Heuricus magnus , cap. XLvi,p. 1&8. l5) Dans le premier volume de son grand ouvrage
M. Poirson (Histoire du règne d'Henri IV) est le sur Les plus excellais bastimens de France. Ce pre-
premier, parmi les auteurs modernes, qui aitmen- mier volume porte la date de 1576. -*•.■
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. '259
rie fut fondée. En voici une preuve tellement formelle qu'elle pourrait au besoin
suppléer à toutes les autres.
Dans l'ancien registre du Bureau de la Ville, où se trouve le récit de la pose de
la première pierre du bastion des Tuileries en juillet 1 566 , nous avons décou-
vert la note suivante, placée immédiatement après ce récit: «Du xxie dudict mois.
rr — Ce jour, le Roy a mandé messieurs les Prévost des marchans et Eschevins,
(r et leur a ordonné de faire clorre de grosse maçonnerye la seconde descente ap-
prochante du port Sainct-Nicolas, devant les clostures du Louvre, à l'endroict
rr d'une gallerie que sa Majesté a ordonné estre faicte en ce Ueu^.i) Le texte est décisif.
Ainsi il est avéré que la Grande-Galerie a été commencée dans le même temps que
le bastion des Tuileries, et élevée, comme ce bastion, pour satisfaire la Reine mère,
alors toute-puissante à cause de la jeunesse de Charles IX.
Si l'origine de la Grande-Galerie remonte à i566, il en doit être à peu près
de même de la Petite-Galerie, sans laquelle la première n'eût point communiqué
avec le Louvre. Au reste, Sauvai déclare bien positivement que la Petite-Galerie
date du règne de Charles IX, pour l'étage inférieur, et l'on en a une preuve, pour
ainsi dire matérielle, dans une planche de l'ouvrage de Du Cerceau, où elle est
représentée en plan, avec la même longueur et la même largeur que de nos
jours.
Suivant le projet primitif, le château des Tuileries devait consister en un vaste
quadrangle, dont l'aile orientale aurait été fort rapprochée du fossé de la Ville, de
sorte que la Grande-Galerie n'était point destinée d'abord à se prolonger aussi loin
qu'aujourd'hui. Il est clair que l'idée en fut suggérée par la courtine de Charles V,
qui longeait le bord de l'eau, et dont le sommet constituait une terrasse très-
agréable par la vue dont on jouissait, mais peu commode à cause de son étroi-
tesse. Pour lui donner plus de largeur, on fut amené à transformer la courtine
en une galerie surmontée aussi d'une plate-forme à ciel ouvert. Sauvai assure que
telle était pareillement la Petite-Galerie avant Henri IV, et il connaissait bien des
gens qui avaient vu l'une et l'autre avant qu'on les surélevât.
On ignore le degré d'avancement auquel Catherine fit conduire la Grande-Ga-
lerie; mais il est fort douteux qu'elle l'ait poussée loin, car il n'en apparaît rien
sur la vue de i57&(2>, et il ne semble point qu'on ait dû y travailler beau-
coup postérieurement à cette date. Toutefois nous ne pensons point qu'il faille
prendre à la lettre cette assertion de Palma Cayet, que Charles IX se borna à
poser la première pierre du monument; Catherine, en tout cas, en fit sûrement
davantage et même assez pour que, dans la continuation de l'édifice, sous Henri IV,
"' Arch. de l'Emp. reg. H 178/i, P 370 r°. — (!) On n'y aperçoit pas non plus la Pelite-Galerie;
mais, sur ce point, le dessin est trop confus pour qu'on en tire des conséquences.
33.
260 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
on se soit décidé à répéter l'agencement de la partie bâtie auparavant. Aussi
bien, dans cette partie, la décoration fut nécessairement épannelée, et peut-être
même terminée par places, à titre d'essai. En effet, quoiqu'elle n'ait très-certai-
nement pas été acbevée, même à l'étage inférieur, avant les dernières années du
xvie siècle, comme l'attestent les chiffres HG, on ne peut croire qu'elle différe-
rait autant d'un ordre à l'autre, si elle eût été entièrement composée et adoptée
à l'époque où l'on construisit l'étage supérieur, et si l'on n'avait point eu alors
à tenir compte de dispositions antérieures. Pour la Petite-Galerie, il est manifeste
qu'elle fut élevée jusqu'à la plate-forme qui la couvrait, et l'on distingue parfai-
tement encore que le joint entre la frise et la corniche de l'ordre inférieur est
le point de suture du bâtiment primitif avec l'étage dont Henri IV le couronna.
Quant à la longueur de l'édifice vers le temps dont nous parlons, c'est une
question d'un intérêt tout particulier, puisqu'elle est étroitement liée à une autre
question, aussi populaire que controversée : il s'agit de la part que Charles IX
aurait prise personnellement au massacre de la Saint-Barthélémy, en tirant du bal-
con de la galerie sur les Huguenots. On n'a point à entrer ici dans l'examen de ce
problème historique, naguère encore très-obscur et aujourd'hui à peu près défini-
tivement résolu dans le sens de l'affirmative W; en revanche, on s'efforcera d'élu-
cider les difficultés archéologiques qui en ont compliqué la solution.
Après avoir établi par des documents positifs que les galeries avaient été com-
mencées vers 1 5 6 6 , nous avons dit que la construction en fut probablement aban-
donnée vers le commencement de 1672 ; mais, en cette année, la Petite-Galerie se
prolongeait-elle jusqu'à l'affleurement de la Grande, ou, ainsi qu'on s'est plu à le
supposer, ne consistait-elle que dans les travées centrales, les parties où sont per-
cées des fenêtres à arc bombé n'ayant été, dans ce cas, élevées que du temps de
Henri IV? Il y a, nous le répétons, une preuve que la Petite-Galerie, lors de la
Saint-Barthélémy, avait la même longueur que maintenant; c'est le plan de Du
Cerceau, qui, publié en 1576 et dressé en 1575 au moins, représente les bâti-
ments du nouveau Louvre positivement dans l'état incomplet où ils se trouvaient
à cette époque. Sur ce plan la Petite-Galerie est figurée comme atteignant et dé-
passant même la salle des Antiques, absolument comme de nos jours, et la baie
du balcon, avec ses doubles pilastres, est indiquée de la manière la plus nette.
Ainsi il est certain que la baie existait déjà en 1 5y5 ; mais, puisque les travaux
des galeries furent très-vraisemblablement interrompus vers 1672, on doit donc
supposer qu'elle existait déjà en 1571.
Nous n'ignorons point que plusieurs personnes, dont on ne peut nier l'expérience
;1) Gonf. le Bulletin de lasociétéde l'histoire du protestantisme français , t. V, p. 33a; VI, p. 118; VII,
p. 182; X, p. 5, io5 et 199; XII, p. a4i
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LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 261
en semblable matière, ont cru que la façade méridionale de la Petite-Galerie
n'était point d'origine antérieure au règne de Henri IV. La raison de leur erreur
est un remaniement qui a été très-soigneusement fait dans la maçonnerie de cette
partie, et en a changé le caractère. Cependant un examen attentif amènera toujours
à reconnaître que la baie du balcon et ses pilastres jusqu'à la corniche ont été
construits dans le même temps que les sept arcades à bossages faisant front sur
le jardin de l'Infante. Voici ce qui a eu lieu et ce qui a produit l'aspect actuel :
comme on l'observe sur le plan de Du Cerceau, la galerie présentait d'abord
un avant-corps central avec porte, A (voir la planche ci-jointe, fig. 1); puis, d'un
côté de cet avant-corps, il y avait cinq, et, de l'autre côté, six arcades sembla-
bles, aaaa'da'W; l'avant-corps central A est resté intact, ainsi que les trois arcades
de chaque côté, aaa, qui en sont le plus rapprochées; mais les autres, ddd,
ont été supprimées et remplacées par des fenêtres bombées, bbb (fig. 2), imitées
de celles du Louvre, et dépourvues de pilastres. Simultanément on a repris les
encoignures de la face sur le quai, et on les a garnies de bossages vermiculés, c,
sans pour cela toucher à la baie B de l'avant-corps donnant sur la rivière; de là vient
que cette baie a conservé son ancienne ordonnance, si peu en harmonie avec les
parties, relativement modernes, dans lesquelles elle est encadrée. Il est manifeste
que si l'extrémité méridionale de la Petite-Galerie avait été commencée, et non
point simplement remaniée, quand on fit les fenêtres bombées, bbb, on ne se fût
pas efforcé, en élevant l'arcade B sur le quai, de pasticher très-minutieusement
les anciennes arcades du côté oriental, aaa, lorsqu'on cherchait si peu à raccor-
der avec celles-ci, sous le rapport des lignes et de l'ornementation, les nouvelles
fenêtres, bbb, qui sont situées tout auprès et qu'on embrasse d'un même coup
d'œil. Nous ne craignons pas d'affirmer que quiconque voudra suivre avec atten-
tion notre raisonnement finira infailliblement par en accepter les conclusions.
Primitivement la Petite-Galerie était, ainsi que l'implique son nom, un pas-
sage, un endroit où l'on pouvait se réunir ou se promener; mais ce n'était
point un lieu destiné à être habité; aussi, et le plan de Du Cerceau en fait foi,
il n'y avait été pratiqué aucune division intérieure. Pour s'y loger, il fallut
y bâtir des murs de refend, la couper en plusieurs pièces, et substituer aux
grandes arcades de véritables fenêtres. Telles sont les causes qui ont produit le
manque d'uniformité de l'édifice. Quant à l'époque du remaniement, elle coïncide
avec celle ou Anne d'Autriche fit disposer dans la Petite-Galerie (i) un appartement
(l) La dernière diflërail un peu des autres, car (t. IV, p. Q07) un brevet du 2 juillet i654, accor-
elle encadrait une porte. dant au nommé Valdor un logement en échange
(,) La transformation de la Petite-Galerie, dont de celui qu'il avait «en dessous du bout de la petite
les auteurs ne se sont point rendu compte, eut lieu irgallerie des peintres, 1 là où le Roi avait « résolu de
vers i655. Les Archives de l'art fiançais ont publié irfaire un appartement d'esté... pour la commodité
262 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
d'été, dont l'établissement, dit Sauvai, obligea de détruire certaines statues de cap-
tifs, ouvrage de Biart, qui décoraient l'édifice. Au reste, nous pouvons signaler un
document graphique qui prouve de la façon la plus explicite que la Petite-Galerie ,
vers le milieu du xvnc siècle, n'avait point encore été modifiée dans son ordon-
nance : une vue d'Israël Sylvestre M, ayant précisément pour but d'illustrer la
Petite- Galerie (voir le fac-similé ci-contre), la représente avec toutes ses arcades
semblables, à l'exception de la dernière du côté de la rivière, où l'on aperçoit la
partie supérieure d'une porte, laquelle se distingue sur le plan de Du Cerceau et
était précédée d'un perron <2). Le détail de la porte, fidèlement copié, et le soin
apporté à l'exécution de la planche ne permettent point d'en contester l'exactitude,
corroborée d'ailleurs par tant d'autres renseignements. H est donc rigoureusement
démontré que les fenêtres bombées de la galerie ont été faites par ordre d'Anne
d'Autriche, et non par ordre de Henri IV; que ce prince n'a point eu à continuer
l'étage inférieur de la galerie, mais qu'il l'a trouvé entièrement bâti, comme il
l'était déjà vers 1 675, quand Du Cerceau en grava le plan; que le manque d'unité
dans l'ordonnance de l'édifice ne signifie rien par rapport à l'âge de la baie du
balcon (3>, et que ceux qui voudront s'obstiner à nier l'existence de cette baie en
rrde la Royne, sa mère,» projet qui exigeait que
ledit Valdor délogeât et laissât la place vide. Les
Archives ont pareillement publié (t. VI, p. 201 et
208) le texte des marchés passés avec le stuca-
teur Pietro Sasso et le sculpteur Michel Auguier,
aux dates des h et i5 décembre i655, pour la dé-
coration, sous la conduite de Roinanelli, du « nouvel
« appartement de la Reyne. . . au dessoubs de la gal-
rrlerie des peintures du Louvre ; rror plusieurs des
figures mentionnées dans le devis existent encore et
excluent toute incertitude. Les travaux durèrent, au
reste, plusieurs années, car on lit dans le Journal
d'un voyage à Paris en i65j-i658 : rrLe i3° (de
'-juillet 1667)... nous l'usmes voir l'appartement
rrd'hyver de la Reyne (dans l'aile méridionale du
ir Louvre)... La Reyne en faict faire un d'esté, auquel
«•nous vismes travailler.* (P. sot.) — « 1 " octobre.
rrNous nousallasmes pourmener pour voir le nouvel
r- appartement d'esté qu'on faict pour la Reyne,
t consistant en cinq ou six chambres de plain-pied.
i-Les lambris y sont en voûte, parsemés d'or et en-
richis de quantité de beaux tableaux. Il respond
«sur le parterre, qui a un beauject d'eau au milieu,
«•et quantité d'orangers tout autour.» (P. 285.)
Des lettres patentes de i65q mentionnent aussi
rie grand appartement d'esté 1 que Louis XIV avait
« faict faire pour la Royne, sa mère, soubs la pe-
<rtite gallerie des pintures de son chasteau du
r Louvre. » A partir de 1 655 ou i65G, les diverses
vues montrent toujours la Petite-Galerie modifiée
dans son ordonnance.
(1) Elle est intitulée : Veùe et perspective de la ga-
lerie du Louvre dans laquelle sont les pourtraus (sic)
des lloijs , des Reynes , et des plus illustres du royaume ;
elle a donc été faite avant l'incendie de 1661 . L'uni-
formité des arcades s'entrevoit aussi, mais d'une
manière vague, sur la Joute de Callot et la grande
vue de Délia Relia.
m D'anciens plans indiquent ce perron, qu'on
aperçoit aussi sur une gravure de Sylvestre, dont le
premier plan a été , il est vrai , un peu arrangé par
l'artiste. La planche dont nous donnons un fac-si-
milé ôXanl le seul document graphique où soit repré-
sentée la porte percée dans la dernière travée de la
galerie, la restitution de celte porte est impossible,
et nous l'avons, en conséquence, dissimulée dans
notre dessin.
(3) En admettant même que la baie du balcon ne
fût pas encore construite lors de la Saint-Rarthé-
lemy, la participation de Charles IX à ce massacre
n'en serait pas moins possible parce que, et nos
lecteurs se le rappellent, sur l'emplacement du bout
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. LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 263
1572 seront désormais réduits à soutenir gratuitement cette invraisemblance,
qu'elle a été "construite de 1573 à 1576.
On a supposé que la Grande et la Petite-Galerie avaient été commencées par
Jean Bullant ou par Philibert de L'Orme; mais ce sont là des hypothèses tout
arbitraires, contraires même aux probabilités, car la partie de la Grande-Gale-
rie antérieure à la mort de ces deux maîtres ne rappelle nullement leur manière,
et révèle plutôt un grand architecte ignoré, aux conceptions originales et bril-
lantes. Pour la Petite-Galerie, elle est attribuée par Sauvai à un certain Cham-
biche, et l'obscurité, naguère si profonde, de ce nom est la seule cause pour
laquelle on a voulu faire honneur de l'édifice à un autre artiste. Jusqu'à présent
on s'est contenté de reproduire, avec une certaine défiance, l'assertion de Sauvai;
mais jamais on n'a donné l'ombre d'un renseignement ni sur l'individualité ni sur
la vie du personnage qu'il indique. L'une et l'autre sont restées si inconnues que
récemment encore un écrivain distingué a conjecturé, d'ailleurs fort ingénieuse-
ment, que Chambiche devait être quelque compatriote de Catherine de Médi-
cis. Lorsqu'on songe à l'aspect tout italien de la Petite-Galerie, et lorsqu'on se rap-
pelle que le nom du Primaticcio s'est traduit Primaliche en français, rien ne semble
plus spécieux; rien n'est moins vrai cependant : les documents que nous avons
fini par découvrir établiront que Chambiche était bien Français, et qu'on n'a
pas à s'étonner de ce qu'il ait été chargé de conduire un édifice important.
L'architecte qui a élevé l'étage inférieur de la Petite-Galerie appartenait à une
famille de constructeurs dont le nom a été définitivement orthographié Chambiges,
mais qu'on a appelés aussi Su m biche, Cliambicke et Cambiche. Cinq membres de
cette famille nous sont plus ou moins connus. Le premier, « Martin Cambiche, v alias
tr Cainbriche , » le seul dont il ait encore été parlé avec détail, habitait Paris
en 1^89, et en fut mandé vers cette époque par les chanoines de Sens, qui lui
confièrent l'achèvement de leur cathédrale W. Il était de retour à Paris en
juillet 1 6q5, et, en 1 697 et 1 699 , il reparaît à Sens avec le titre de rrmaistre de
- 1 entreprise et conducteur de la croisée (transsept).ï> Il revint ensuite à Paris,
sans toutefois renoncer à diriger l'oeuvre entreprise à Sens. Les 8 et 2 5 avril 1 5oo.
on le retrouve au nombre des maçons appelés à donner leur avis sur le système
de la galerie il y avait, avant qu'elle fût Italie, une
tourelle à meurtrières, tout aussi commode que la
fenêtre du balcon pour tirer sur des gens traver-
sant la Seine. D'un autre côté, Brantôme et Simon
Goolart disent que le Roi tira par la fenêtre de sa
chambre, et la chambre du Roi se trouvait dans
le gros pavillon d'angle, achevé en i556. Quant
au balcon lui-môme, il ne parait pas d'une origine
antérieure au remaniement commandé par Anne
d'Autriche.
(1) Nous empruntons presque tous nos renseigne-
ments sur Martin Chambiges à une intéressante
notice qui a été publiée dans le Magasin pittoresque
(année 1 856 , p. 339), et que nous savons due à la
plume érudite de M. Vallet de Viriville, proless
à l'École des chartes.
264 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
à adopter pour la fondation des piles du nouveau pont Notre-Dame (1). En la même
année, avec Jean Waast, il entreprit la construction du transsept de la cathédrale de
Beauvais ®, qu'il conduisait toujours en i5o6. Moyennant ko sous par semaine, un
pain de prébende par jour et le payement du loyer de sa chambre, il consentit
également, en 1 5o6, à mener les travaux de la façade de la cathédrale de Troyes <3),
et il en demeura l'architecte jusqu'au 8 juin 1 5 1 9. H avait été appelé à Troyes pour
venir en aide à Jean de Soissons, et à cause de la grande réputation qu'il s'était
acquise à Sens et à Beauvais. Cette réputation était fort légitime : Martin Gam-
biche doit être considéré comme un des architectes les plus éminents que la
France ait produits.
Le second des Chambiges, dont le prénom était Pierre, avait le titre de maître
des œuvres et du pavé de la ville de Paris. Nous lisons dans les registres du Corps
municipal que, le 27 juin 1 536, avec un autre maçon, Pierre Moreau, il visita
les fortifications en compagnie du Prévôt des marchands et des Echevins W. Sauvai
rapporte qu'il gagnait 2 5 sous par jour à conduire les ouvriers sous la direction
de Dominique de Cortone, lors de la reconstruction de l'Hôtel de Ville, et cite
ce fragment de compte du domaine pour l'année 1 538-39 • K^e Pierre Chaîn-
er biges, maistre des œuvres du Boy, au bailliage de Senlis, pour les formes et por-
crtraicts (plans) que le Boy a commandés lui faire de certains bastimens que ledit
tr seigneur entend et délibère édifier en son hostel et environs de Nesles, à Paris,
«pour la fondation du collège des Trois langues'5), t En i53g, il passa un marché
pour des travaux de maçonnerie à faire au château de Saint-Germain-en-Laye; le
22 septembre 1 56 1 , il en passa un autre pour de semblables travaux à exécuter
dans le château de la Muette (6), et, l'année précédente, il était un des entrepreneurs
du château de Fontainebleau (7). Sa femme avait nom Jacqueline Laurens, et une de
ses parentes, Perrette Chambiges, qui mourut en îSftg, avait épousé Guillaume
Guillain, collègue de Chambiges à la Ville, et entrepreneur des travaux du Louvre.
Pierre Chambiges mourut le 19 juin i5&&, ainsi qu'on l'apprend par les épita-
phes suivantes, qui étaient placées dans la nef de l'église Saint-Gervais, près d'une
tombe située devant le crucifix (8) :
(1) Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, 2' série,
t. II , p. 3 2 , article de M. Le Roux de Lincy.
(2) Simon, Supplément à l'histoire du Beauvoisis,
9' part. Nobiliaire de Beauvais, p. 191.
t3) Arnaud, Voyage archéologique dans l'Aube,
p. 126 et 127.
<"' Arch. de l'Enip. reg. H 1779, fol. 166 v".
(5' T. II, p. 483, et t. III, p. 621.
(6> Bibl. imper. Man. Fonds Sainte-Marthe,
n' o,436, fol 5 r° et fol. 36 r\
m
222.
Comptes des bâtiments royaux, p. 1 54 et
(8) Épitaphier de la Bibliothèque impériale (Ca-
binet des titres , t. III). Nous devons la connaissance
de ce curieux document à M. Jules Quicherat, le
savant et judicieux éditeur du procès de Jeanne Darc.
Nous avons depuis trouvé d'autres copies des mêmes
inscriptions dans l'épitaphier des Archives de l'Em-
pire (LL 961, f° 906) et dans celui de l'Arsenal;
elles ont , en outre , été publiées par M. Paul Lacroix.
«S
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 265
A LA MÉMOIRE DES AMES DE PIERRE CHAMBIGES, MAISTRE DES OEUVRES DE MAÇONNERIE ET PAVEMENT
DE*CESTE VILLE DE PARIS, QUI DECEDA LE XIXe (OU XVe) JOUR DE JUIN l5&4.
JACQUELINE LAURENS, femme dudit Pierre Chamriges, qui décéda le 3e de juin i5. .
GUILLAUME GUILLAIN,
Me DES OEUVRES
de maçonnerie et
pavement de ceste
ville de Paris, qui décéda le. . . .
PERRETTE CHAMBIGES, femme dudit Guillain, qui décéda au mois de septembre i 54g.
Les armes des Chambiges W, jointes aux épitaphes, auraient été, suivant l'épi—
taphier de la Bibliothèque impériale, d'azur, à un compas et deux croissants d'ar-
gent; une chèvre accroupie, d'or, mise en pointe; mais , d'après l'épitaphier de l'Arsenal ,
manifestement plus exact, elles étaient d'azur, au compas d'argent, accompagné en
chef, à dextre, dune étoile d'or; à sénestre, d'un croissant d argent, et en pointe, d'un cerf
dor, couché sur une terrasse de sinople. Nous croyons qu'au lieu d'une chèvre ou
d'un cerf il y avait en réalité une biche placée sur une sorte de champ, ce qui
formait des armes parlantes.
Le troisième Chambiges, en comptant d'après les dates, est «Robert Sambi-
« che. v II fut choisi comme expert dans une contestation qui donna lieu à un accord
du 6 décembre 1 564, où il est simplement qualifié de bourgeois de Paris'2).
Le quatrième Chambiges avait le prénom de Pierre, comme le second, dont il
était apparemment le fils. Sa femme, Marguerite de Saint-Quentin, fille de l'en-
trepreneur du Louvre , lui avait apporté en dot deux propriétés sises rue Penescher
(Saint-Pierre-Montmartre), propriétés dont le censier de l'Evêché, pour l'année
1575, fait mention en ces termes : «Pierre Sambiche, charpentier, pour une place
«et grandie après ensuivant, tenant d'une part, etc. — Sur ledict chemyn Herbu,
«allant vers les ramparts neufs. . . Pierre Sambiche, à cause de Margueritte de
« Sainct-Quentin , sa femme , pour leur jardin ensuivant , qui fut Me Pierre de Sainct-
« Quentin; tenant d'une part, etc. <3'» Le Pierre Chambiges, mari de Marguerite,
(,) Au xvi* siècle, les bourgeois de Paris avaient (,) Arch. de l'Emp. cart. S 6a.
pour la plupart un blason. (3) Ibid. reg. S 1957, fol. 3o3 v°et 3o5 v°.
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•266 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
bien qu'il soit ici qualifié de charpentier, n'en était pas moins un maçon. Le
16 mars i58a, il soumissionna des travaux de cette profession à faire en la cha-
pelle des Valois, à Saint-Denis. La pièce originale est revêtue de sa signature W ,
ainsi que de celle de ses compétiteurs Thibaut Métezeau, Fleurent Fournier, Jean
Lebreton, François Petit et Charles Bullant, tous architectes dont les noms nous
sont familiers, et dont plusieurs ont été employés au Louvre, comme on le verra
dans la suite. Pierre Chambiges nous apparaît aussi dans une visite de travaux
faite à Saint-Denis, le 17 août 1 583 <2'. Nous le retrouvons après, dans un des
registres de la Ville, énoncé ttjuré du Roy en l'office de maçonnerie'3^ le 2 5 fé-
vrier 1602 et en mai 1 5gg. A cette dernière date, il fut chargé avec François
Petit, également juré du roi, d'examiner des travaux de maçonnerie récemment
achevés à la porte Saint-Germain. Sur d'autres registres de la même provenance,
il figure avec son titre de juré du roi, ayant mission de visiter des maisons du
Petit-Pont en décembre 1602, puis comme arbitre choisi par les maîtres de l'hô-
pital du Saint-Esprit en juillet 1 607, et nous y rencontrons son nom une dernière
fois en mars 1608, époque à laquelle il devait être fort âgé, ce qui ne l'empê-
cha pas de donner, le 18 décembre de la même année, l'alignement du portail
de Saint-Etienne-du-Mont, opération dans laquelle il fut assisté par Claude Gué-
rin (Arch. de l'Emp. cart. S 3327). Nous voyons, en outre, dans un dossier de
titres particuliers, que, le 12 juillet 1602, il rendit une sentence arbitrale à pro-
pos d'une maison de la rue des Blancs-Manteaux W, Enfin ses propriétés sont en-
core indiquées comme lui appartenant dans un censier de 1 6 1 3 , où une note
ajoutée antérieurement à 1621 indique qu'elles étaient alors passées à un autre,
d'où l'on doit conclure qu'il mourut vers 161 5. Le 27 mai 1 568 , il avait été
parrain, à Ecouen, d'un enfant de Jean Bullant, de sorte que l'ensemble des no-
tions biographiques sur son compte embrasse un demi-siècle.
Le cinquième Chambiges est aussi le dernier dont nous avons reconnu l'existence.
En feuilletant les vieux registres de l'église paroissiale Saint-Pierre-des-Arcis, nous
avons trouvé que, le 2 3 février 161 5, les marguilliers résolurent de prier tfmes-
ct sieurs Sambiche et Desnots, ou deux autres jurés maçons, n de visiter certaines
parties de l'église (5). Le Sambiche dont il est ici question faisait partie du conseil
de fabrique en qualité d'ancien paroissien , et sa signature est apposée au bas de
divers procès-verbaux des séances du conseil depuis ce jour même, du 2 3 février
161 5 jusqu'au 3i mars 1618. Il mourut l'année suivante, car sur une liste des
marguilliers et paroissiens notables qui est placée en tête du registre, on lit : trLois
(1> Arch. de l'Emp. cart. K 102, n° 2 ".La signa- <4) Arch. de l'Emp. reg. H 1792, foi. 1 48 v° et
ture est celle que nous avons reproduite. 79/i r°; H 1793, fol. 75 r°; H 179&, fol. 23g r°
<*> Ibid. n° 218. et 3i7 v°; H i795, fol. 12 r\
(3) 11 a le même litre dans un censier de i6o3. (5) Arch. de l'Emp. reg. LL 912, p. 3.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 267
ff Chambiges, défunct 1 619. n L7 initiale de son prénom, liée à la première lettre
de son nom» se distingue sur ses signatures, et rend impossible la confusion entre
lui et son parent Pierre, dont l'écriture est au surplus fort dissemblable.
Par tout ce qui précède, on voit que si les Chambiges sont maintenant bien
oubliés, au xvi° siècle ils avaient assez de réputation pour que, vers i566, l'un
d'eux ait été tout naturellement chargé d'élever la petite galerie du Louvre. On
voit de plus que cet édifice ne saurait être l'œuvre ni de Martin, ni du premier
Pierre Chambiges, et qu'on ne peut raisonnablement l'attribuer à Robert; il y a
donc certitude morale que la construction en est due au second Pierre M Cham-
biges. Celui-ci fut d'ailleurs, et très-authentiquement, l'un des entrepreneurs qui
bâtissaient la Grande-Galerie en 1600.
La salle des Antiques, qui, unissant la Petite-Galerie à la Grande, s'éleva sur
l'emplacement d'un bâtiment que nous pensons être l'ancienne maison de l'Engin ,
fut, suivant Sauvai, et commencée du temps de Catherine de Médicis, achevée sous
«Henri IV, conduite par Thibault Méthezeau et peinte par Bunel''2'; mais cette
phrase ambiguë contient une erreur résultant d'une transposition de mots, car
elle donne à croire que Thibaut Métezeau aurait conduit les travaux de la salle
des Antiques au temps de Henri IV. Thibaut Métezeau , malgré le rôle important
qu'il a joué, est un de ces nombreux artistes dont la renommée s'est effacée, et
sur lesquels les biographes n'ont absolument rien trouvé à dire. Sa réputation a été
injustement éclipsée par celle de son fils Clément, qui imagina la digue de la Ro-
chelle. Voici ce que nous sommes parvenus à savoir sur Thibaut et sa famille <3'.
Au commencement du xvie siècle, vivait à Dreux un maître maçon appelé
CJrinmt Métezeau. En i5i6, avec un de ses collègues, Jean des Moulins, il en-
treprit de continuer la construction de l'hôtel de ville que ses concitoyens fai-
saient élever, et dont les fondements avaient été jetés par Pierre Caron, en 1 5 1 2.
Un compte de 1 533 mentionne Clément Métezeau comme ayant reçu 7 sous
G deniers pour une journée et demie de travail, employée à percer un trou des-
tiné au passage du contre-poids de l'horloge. On présume que ce Clément, le pre-
mier de la famille dont le nom soit venu jusqu'à nousW, est l'auteur ou l'un des
auteurs du riche portail de l'église paroissiale, bâti vers i52&. H mourut entre
i537 et 1 556. De ses deux femmes, Catherine, qui vivait encore le 19 janvier
m M. de Clarac (p. 65o) donne à Chambiges le
prénom de Jean ; il pouvait lui prêter n'importe
lequel , car il déclare lui-même ne connaître Cham-
biges que par le témoignage de Sauvai , et Sauvai ne
rapporte aucun prénom.
PI T. II, p. ha.
(s> La plus grande partie des renseignements que
nous donnons sur les Métezeau sont tirés d'un ma-
nuscrit possédé par un habitant de Dreux, et écrit
vers la fin du dernier siècle, on ne sait au juste par
qui. Il se compose de notes généalogiques extraites
des archives de la paroisse , et offre toutes les garan-
ties souhaitables d'authenticité.
'*> Nous ne savons quel lien de parenté unissait
Clément à un certain Guillaume Métezeau qui , en
mai i536, épousa Toinette Guillou.
34.
268 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
1 536 , et Etienne, qui l'avait déjà remplacée en mai 1 537, ^ eu*; plusieurs
filles (1) et au moins deux garçons : Thibaut ou Théobald et Jean. Ce dernier,
qui est maintes fois qualifié de « architecteur, t> et qui fut k maistre de la conduite
a de son estât pour l'église Saint-Pierre i> de Dreux, ne paraît pas avoir, comme
son frère, quitté sa ville natale; il y fut inhumé le 27 avril 1600, précédant au
tombeau, de cinq jours seulement, sa femme Marie Geffroy ou Godefroy^.
Thibaut Métezeau naquit le 2 1 octobre 1 533 , et sa descendance comme fils
de Clément et de Catherine est surabondamment établie. Le i3 novembre 1 557,
on publia son mariage avec Jeauffrang Mussard, fille de Régnaut Mussard; tou-
tefois, en i56o, l'épouse de Thibaut était Jeanne Bardia, qui vivait encore en
avril i6o4. H y a apparence que Thibaut ne cessa de demeurer à Dreux que
postérieurement à i56o,, car à partir de cette année seulement il n'est plus fré-
quemment nommé dans les registres de la paroisse. Du reste il n'oublia point le
lieu de sa naissance, et, en 1 58 1, sa femme y vint faire ses couches.
Thibaut passa à Paris la seconde et la plus brillante moitié de sa vie, et c'est là
uniquement que nous pouvons signaler quelques-unes de ses œuvres. Il fut archi-
tecte du duc d'Alençon, et dans un état de la maison de ce prince, pour l'an 1576,
il figure avec le titre d'architecte parmi les et gens de mestier (3>. n II fut aussi archi-
tecte du Roi : la Bibliothèque impériale possède un mandat adressé au trésorier
des parties casuelles, portant ordre de payer sur les «deniers provenans de la taxe
rr et composition de l'office de me juré masson, à Paris, vaccant par le trespas de
«feu M° Berthrand de Dreux... à Me Thibault Méteseau, architecte dudict Sei-
rtgneur (le Boi), le somme de deux cens escus soleil, de laquelle Sa Majesté luy
a a faict don. A Ce mandat est daté du 2 5 mars 1578, et, au revers, est le reçu
signé de la main de Métezeau. Suivant Brice, il fut un des entrepreneurs du Pont-
Neuf, commencé en 1 578 , et Sauvai lui attribue l'avant-portail de la porte Saint-
Antoine W, sur lequel était le millésime de 1 585. Nous avons dit que, le ih mars
i582, Thibaut soumissionna avec Pierre Chambiges des travaux à faire à Saint-
Denis et que, sur la pièce originale, on voit aussi sa signature. Dès 1572, il tra-
vaillait au tombeau des Valois, en compagnie de Claude Guérin, et, cette année,
ils reçurent 6,989 livres 17 sols pour des œuvres de maçonnerie W. Ainsi Thibaut
florissait sous Charles IX et Henri III; mais il semble impossible qu'il ait encore
(1) Toinette, néele3 mars i53o; Catherine, qui therine, qui naquit le 10 novembre 1570, et fut
fut marraine le 12 avril 1 534 ; Nathalie, qui na- marraine le 20 mars i58a; Claude, né le 7 oc-
quit le 19 janvier 1 536 , et enfin Jeanne; celle-ci tobrei57&; Clément, né le 7 septembre 1 583, et
fut marraine nombre de fois depuis 1 538 jusqu'en enterré le 28 mars 1592; enfin Elisabeth, née le
i5g3. (Consulter le tableau généalogique, p. 4 19.) 22 janvier 1587.
(,) Les enfants de Jean Métezeau à nous connus (3) Mémoires du duc de Nevers, p. 587.
sont: Denis, qui naquit le i5 novembre i564, et (1) T. III, p. 1.
eut pour marraine sa tante, Jeanne Bardia; Ca- '*' Arch. del'Emp. cart. K 102,11° 2".
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 269
exercé ses talents au Louvre après la reddition de Paris, car, si nous n'avons point
découvert l'époque de sa mort, nous sommes sûr au moins qu'elle est antérieure
au mois de septembre 1576, puisqu'à cette date sa femme est dite veuve. Pour
accepter la version de Sauvai, il faudrait admettre qu'en septembre i5o,6 la mort
de Thibaut était trés-récente ; or ce serait un grand hasard , et l'on doit d'autant
moins accueillir l'hypothèse qu'en 1 5g6 Thibaut eût été âgé de soixante-trois ans;
en outre, le Métezeau alors architecte du roi avait pour prénom Louis, ainsi que
nous le prouverons en son lieu. C'est donc, suivant toutes les présomptions, du
temps de Catherine que Thibaut Métezeau commença la salle des Antiques, dont
nous ne connaissons point la physionomie pendant cette période. Il y a bien des
raisons pour supposer qu'il a pareillement donné les premiers dessins de la Grande-
Galerie, et ce qui peut encore faire incliner vers cette opinion, c'est que son fils
paraît avoir été chargé, sous Henri IV, d'exhausser la galerie d'un étage intermé-
diaire surmonté d'un second ordre. Nous reviendrons ailleurs sur la question.
Henri III, dit Sauvai, conduisit l'aile méridionale du nouveau Louvre «jusqu'où
tr finit le reste du vieux Louvre'1', v c'est-à-dire jusqu'à la tour de l'angle sud-est,
qui ne fut abattue que sous Louis XIV. Telle est l'unique donnée historique que
les auteurs nous fournissent sur les travaux faits au Louvre par Henri III. Elle
serait bien vague si nous n'avions aucune idée du point où en étaient arrivées les
constructions lorsque mourut Charles IX; mais nous avons reconnu que, vers
1576, le gros mur extérieur de l'aile était vraisemblablement élevé, et que le
mur intérieur avait dépassé le second avant-corps. L'œuvre de Henri III est donc
comprise entre le second et le troisième avant-corps inclusivement. Aussi bien
sur ce dernier on retrouve, à la hauteur des chapiteaux de l'ordre inférieur, les
chiffres ffl, qui indiquent le règne d'un Valois, et à l'ordre supérieur la lettre H
couronnée; mais est-ce réellement à Henri III que se rapporte ici cette initiale?
On n'aurait point lieu d'en douter sans une circonstance dont on ne parle jamais ,
malgré son importance : dans la frise du second ordre, entre le second et le troi-
sième avant-corps, au-dessus du trumeau séparant la seconde fenêtre de la troi-
sième, se fait remarquer, en compagnie de quatre autres H ce chiffre,
qui est très-évidemment formé des lettres H D B , et dont on n'imagine pas que
la traduction puisse être autre chose que Henri de Bourbon. Il est donc fort pro-
bable, sinon certain, que l'ordre supérieur, à partir du second avant-corps, n'a été
"> T. II, p. 2 5.
270 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
bâti ou plutôt terminé que sous Henri IV, l'étage inférieur remontant seul au règne
de Henri III. Rien n'autorise à se prononcer là-dessus d'une façon catégorique;
nous nous bornerons à rappeler que l'aile ne dépassait guère le second avant-corps
en 1576, suivant le plan de Du Cerceau, et qu'elle était encore assez peu avan-
cée en 1577 pour avoir donné sujet à Jérôme Lippomano de dire, dans la relation
de son voyage : tt Le palais ou château royal qui est la demeure de la cour a un
et commencement de construction dont la majestueuse architecture, si jamais elle
et était achevée, en ferait un des plus beaux édifices du monde. Henri II l'a com-
ttmencé, mais il n'y en a qu'un quart de construit M. n Lippomano ajoute : a J'ai vu
et commodément logés au Louvre le Roi et ses frères (stc) , trois reines , deux car-
ttdinaux, deux ducs avec leurs femmes, trois princesses du sang, maints favoris
a et dames, enfin une partie du Conseil, n Pour loger tant de monde, il fallait de
nombreux appartements, et Henri III s'occupa peut-être surtout d'emménagements
intérieurs. Nous ne pensons point, en tout cas, qu'il ait rien construit en dehors
du château , malgré certaine phrase de Sauvai que nous allons éclaircir.
Cette phrase est ainsi rédigée : ttLe long de la rivière, Henri III y fit bâtir un
tt portique, qu'on a ruiné depuis peu, et où on a fait un jardin nommé le petit
«jardin du Louvre®.-» Nous ne voyons pas quel portique a pu être bâti par
Henri III au lieu indiqué par Sauvai, et être détruit à l'époque où il écrivait. En
effet ces mots, aie long de la rivière, •» et ceux-ci, ttoù on a fait un jardin nommé
«le petit jardin du Louvre, 1? déterminent bien l'emplacement dont il s'agit : c'est
la basse-cour méridionale, que la Petite-Galerie limitait vers l'ouest, et qui s'éten-
dait, au devant du château, entre cette galerie et l'ancien mur de la Ville; aussi
M. Vitet a-t-il cru que le portique de Henri III était cette construction percée de
nombreuses baies et formant terrasse, qui reliait l'extrémité de la Petite-Galerie
à la tour du Coin; mais, de même que le petit jardin du Louvre, situé derrière,
cette construction, qui servait d'orangerie , ne remontait qu'au temps de Louis XIII.
Nous donnerons plus loin les preuves écrites de la vérité du fait; il nous suffit
maintenant de faire remarquer qu'une gravure de Mathieu Mérian démontre qu'en
1 6 1 5 la courtine de Charles V, au-devant du Louvre , n'avait point encore fait
place à l'orangerie, et offrait toujours l'aspect qu'elle présente sur la vue de Cel-
lier. Enfin si le mur de l'orangerie était le prétendu portique de Henri III, Sauvai
n'aurait point dit qu'on l'avait ruiné récemment, car il écrivait vers 1660, et
l'orangerie figure sur les plans de N. de Fer, et même sur celui de l'ouvrage de
Piganiol, publié en 1718. Nous supposons qu'il y a dans le singulier passage de
Sauvai une faute de lecture, doublée d'une intercalation des éditeurs*3). Si l'on
(1) Relation des ambassadeurs vénitiens, ap. Do- T. II, p. i3.
cuments inédits, t. II, p. 5g3. (3) Les interpolations évidentes ne sont pas rares
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 271
consent à admettre cette intercalation , et à lire Louis XIII au lieu de Henri III ,
la phrase s'explique : Louis XIII bâtit la galerie de l'orangerie, fit planter le petit
jardin, et en 1726, année de la publication des Antiquités de Paris, le mur de
l'orangerie venait d'être abattu, puisqu'il le fut en 1719.
Dans la description du vieux Louvre, nous avons fait remarquer qu'il fallut
entamer l'aile orientale de l'ancien château pour élever le troisième avant-corps
de l'aile méridionale du nouveau palais. La faculté d'effectuer les démolitions dans
le vieil édifice, et même, en cas de nécessité, dans le nouveau, est spécifiée dans
les lettres d'office qui, après la mort de Pierre Lescot, nommèrent pour son suc-
cesseur Baptiste Àndrouet Du Cerceau. La teneur de ces lettres est celle-ci :
«Henry, etc. A nostre cher et bien amé architecte ordinaire maistre Baptiste
a Androuet Du Cerceau, salut. Comme estant puis naguères décédé le sieur de
rrClaigny, qui avoit la charge et superintendance de nostre bastiment neuf, soit
ff besoin commettre en son lieu quelque personnage duquel l'expérience en l'art
ff d'architecture nous soit cogneuë, et qui puisse bien et fidellement poursuivre et
et continuer l'entreprinse d'un tel et si magnifique bastiment, pour le désir que
et nous avons d'en voir l'entière perfection , d'autant qu'il est le premier et le plus
a célèbre de tous nos bastimens, mesmes l'un des principaux ornemens de nostre
avilie de Paris, capitale de nostre royaume. Sçavoir faisons que, nous confians en-
(rtièrement de vostre personne et de vos sens, suffisance, loyauté, preud'hommie,
cr diligence et grande expérience audit art d'architecture , pour ces causes et autres
rrà ce nous mouvans, vous avons commis, ordonné et député, commettons, ordon-
nions et députons par ces présentes, avec plein pouvoir, puissance, authorité et
«r mandement spécial, d'ordonner entièrement de la charge, conduitte et superin-
<t tendance d'iceluy nostredit bastiment neuf de nostre chasteau du Louvre, à Paris;
«pour, suivant cette charge, vacquer et entendre à dessigner, conduire et or-
rr donner tous et uns chacuns les ouvrages qui seront nécessaires pour le faict
net continuation dudit bastiment, circonstances et dépendances d'iceluy, et jus-
ff ques à l'entière perfection d'iceux, ainsi que vous verrez estre bon de faire; con-
crclurre et arrester tous les pris et marchez qu'il conviendra pour ce faire avec
«les maistres entrepreneurs, maçons, charpentiers, marchands fournissans les
1 marbres, pierres mixtes, et autres matériaux et denrées pour nosdits bastimens,
cr sculpteurs, fondeurs, tailleurs, plombiers, couvreurs et toutes autres personnes
rr généralement de quelque vaccation qu'ils soient, que verrez estre bons et utiles
«pour estre employez au faict et parachèvement dudit bastiment; faire desmolir
rr aussi, soit tant du nouveau que du vieil bastiment du Louvre, tout ce que verrez
dans le livre de Sauvai: ainsi il y est parlé (t. 1", la place Vendôme en 1O99, or Sauvai était mort
p. 628) de l'érection de la statue de Louis XIV sur depuis long-temps lors de cet événement.
272 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
«et cognoistrez estre nécessaire pour poursuivre la continuation d'iceluy basti-
rrment; voir et vérifier, visiter, toiser et faire toiser par telles personnes capables
tr qu'ad viserez tous et chacuns lesdits ouvrages, pour sçavoir s'ils avoient esté bien
«et deuëment faicts selon les devis, prix et marchez qui en ont esté cy-devant
«faicts par ledit feu sieur de Claigny, et ceux que vous pourrez faire cy-après;
« ordonner de tous et chacuns les frais et despences licites et convenables pour
« ledit bastiment; iceux frais faire payer aux ouvriers et autres personnes à me-
crsure qu'ils besongneront et fourniront de matériaux et autres choses, soit par
«advance, parfaict payement ou autrement, ainsi que verrez estre requis et né-
cessaire en vostre loyauté et conscience, au meilleur mesnage que faire ce pourra;
«et ce, par le thrésorier de nos œuvres, édifices et bastimens, présent et adve-
«nir, des deniers que pour ce luy ferons assigner et délivrer, et de ce en signer
«et expédier vos ordonnances, rescriptions , mandemens, roolles, certifications et
«tous autres acquits qui pour ce seront nécessaires audit thrésorier. Lesquels, en-
rr semble lesdits prix et marchez, nous avons dès à présent comme pour lors, et
« dès lors comme à présent, validez et authorisez, validons et authorisons, et
rc voulons estre de tel effect et valeur que si par nous avoient esté faicts et arrestez.
« Voulons et nous plaist qu'en rapportant par ledit thrésorier de nos bastimens
« présent et advenir le vidimus de cesdites présentes, que nous avons pour ce
« signées de nostre main, avec lesdits prix et marchez, devis, toisez où besoin
rtsera, ensemble lesdites ordonnances, rescriptions, roolles, cahiers de frais, et
tr autres acquits par vous signez , certifiez et expédiez , avec les quittances des parties
reprenantes, où elles escherront; nous voulons tout ce à quoy monteront lesdits
«frais et despences estre passé et alloué en la despence des comptes, et rabattu
rtde la recepte dudit thrésorier de nosdits bastimens présent et advenir, par nos
tramés et féaux les gens de nos Comptes, à Paris, ausquels nous mandons ainsi le
tr faire sans difficulté et tout ainsi comme si lesdits frais et despences avoient esté
« ordonnez et arrestez, et les acquits d'iceux signez et expédiez par nous et de
tr nostre propre main ; et générallement vous donnons pouvoir, puissance et au-
rr thorité de faire et ordonner en ceste présente charge et commission de nostredit
tr bastiment neuf du Louvre , circonstances et dépendances d'iceluy, tout ainsi et en
tria propre forme et manière que faisoit et pouvoit faire en icelle ledit feu sieur
rtde Claigny, jaçoit qu'il y eust chose qui requist mandement plus spécial qu'il
rt n'est contenu en cesdites présentes. Par lesquelles nous vous ordonnons pour
rr vostre estât et entretènement en ladite charge , ladite somme de quatre cents escus
rrsol par chacun an, qui sont trente-trois escus sols tournois par mois, à les avoir
«et prendre tout ainsi que souloit faire ledit sieur de Claigny, en vertu de vos
«simples quittances, à commencer du jour et datte de cesdites présentes, par les
« mains dudit thrésorier de nosdits bastimens présent et advenir, auquel nous en-
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 273
«joingnons de les vous payer des deniers qui luy seront ordonnez, baillez et assi-
«gnez, pour convertir et employer au faict de sondit office. Lequel, rapportant
«vosdites quittances, demeurera quitte et deschargé de tout ce qu'il vous aura
ft payé, à ceste occasion, par lesdits gens de nos comptes, ausquels aussi nous man-
« dons ainsi le faire sans aucune difficulté. Et afin aussi que puissiez estre en cest
« endroict mieux informé de ce qui est requis pour l'entière construction et accom-
« plissement de nostredit bastiment du Louvre, selon les desseins, plans, ordon-
nances et modelles qui ont esté arrestez du vivant dudit feu sieur de Glaigny,
crpar le feu roy Henry, nostre très-honnoré seigneur et père, nous voulons et
«entendons que tous et chascuns lesdits desseins, plans, ordonnances, modelles,
fret autres choses qui en ont esté faictes, soient expressément et promptement
«mises en vos mains et en vostre possession, par les héritiers dudit feu sieur de
« Claigny, et tous autres qui les peuvent de présent ou pourront cy-après avoir et
«posséder. Tous lesquels nous voulons à ceste fin estre contraints sans aucune
«remise, excuse ne dilation. Car tel, etc. Donné... (sic).r>
L'auteur du livre, fort rare'1), où nous avons copié les lettres précédentes n'a
pas jugé utile d'y joindre leur date; c'est une lacune regrettable, et nos tentatives
pour la combler ont seulement abouti à nous apprendre que, commis en 1 579
à la surintendance des bâtiments royaux, Baptiste Androuet, en i58a, obtint
celle du «bâtiment neuf du Louvre, n et qu'au mois de juillet 1 585 il fut de
nouveau investi de cette charge, avec quatre cents écus de gages par an'2). Le
document que nous venons de transcrire portait sans doute la date de i58a. Il
est curieux à plus d'un titre, car, en montrant quelle était la célébrité du nouveau
Louvre, et combien on désirait le voir achevé, il prouve aussi le respect qu'on
avait conservé pour le projet de Lescot, et établit en même temps qu'il n'y a point
eu d'autre architecte de l'édifice entre l'abbé de Clagny et Baptiste Androuet.
Henri III témoignait beaucoup de sympathie à ce dernier artiste, que nous de-
vons maintenant faire connaître à nos lecteurs.
Baptiste Androuet Du Cerceau a été longtemps confondu avec son père, l'il-
lustre Jacques Androuet, et aujourd'hui môme on est loin de l'en distinguer tou-
jours; on l'identifiait aussi constamment avec son fils Jean ou son frère Jacques,
avant que nous eussions constaté l'existence de ces deux membres de la famille.
(1) H est intitulé : Le Thrésor ou stile et protocole * Adroiet (sic), dit De Cerceau, commis à ia surin-
de la chancellerie de France (1 vol. in-ia. Paris, <r tendance des baslimens. — Baptiste Androuet du
i6i4). Les lettres se trouvent liv. II, fol. q3 v°. trCerveau (sic), architecte ordinaire du Roy, coni-
(,> Inventaire des mémoriaux de la Chambre des rrmis à la surintendance du basliment neuf du
Comptes. Arch. de l'Emp. reg. PP iai, p. a3 ^Louvre. — Baptiste Androuet du Cerceau, commis
et 93, et PP 129, p. 93. — Les articles de l'in- *à la surintendance des bastimens du Louvre, à
ventaire ne contiennent que ces mots: rr Baptiste 1 4oo escus de gages par an».
1. 35
274 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
C'était encore «un jeune garçons en 1675, époque où il nous apparaît pour la
première fois, où il gagna la faveur de Henri III, ainsi que le prouve le récit
contemporain suivant: «Finalement, il (Henri III) institua une garde nouvelle,
«que l'on appelloit les quarante-cinq gentilshommes ordinaires, parce qu'ils le sui-
« voient toute l'année, en tous lieux où Sa Majesté alloit, desquels il n'en prit un
«seul qui fut huguenot, tesmoignage très suffisant de l'intérieur de ce prince; le-
«quel on ne sçauroit contredire, sinon que pour un certain petit architecte nommé
«Du Cerceau, que, par faute d'autre, il prit à son service en l'année 1675 ,
« lorsque Sa Majesté estoit en si grande affection de faire bastir une maison de plai-
«sance autour de Paris, pour ce que ce petit homme pourtrait fort bien et mieux
«qu'homme qui soit en France, et estoit diligent, actif et soigneux auxcommande-
«mens qui luy estoient faits; et aussi que Sa Majesté estoit contrainte de se servir
«d'un peintre qui souloit faire des inventions pour les masquarades et tournois,
«nommé de Magny, résidant à Paris, lequel, tant pour son âge qu'aussi pour ne se
« connoistre guères au fait de l'architecture , et avoir la main rude pour en dresser les
«pourtraits, ne pouvoit satisfaire au gré de Sa Majesté, et estoit contraint de faire
«travailler sous luy ledit Du Cerceau, qui estoit un jeune garçon, fds de Du Cer-
«ceau, bourgeois de Montargis, lequel a esté des plus grands architectes de nostre
«France. Et par ce moyen il fut introduit au service de Sa Majesté, sans qu'elle
«le reconneust pour huguenot Ledict Du Cerceau a bien fait pénitence en sa
« charge , ayant fait plus de pourtraits de monastères, églises, chapelles, oratoires
«et autels pour dire la messe, que jamais architecte en France en ait fait en cin-
«quante ans'1), n
Dès 1578, Baptiste Androuet fut chargé d'un travail considérable, la cons
truction du Pont-Neuf. «En ce mesme mois de may (1578), dit Lestoile, futcom-
«mencé le Pont-Neuf sous l'ordonnance du jeune Du Cerceau, architecte
«du Roy. t> On vient de voir qu'en 1679 il fut nommé surintendant des bâtiments
royaux, et que, dès i582, il dirigea l'œuvre du nouveau Louvre. H est à ob-
server que si, dans ses lettres d'office, il est simplement qualifié d'architecte
ordinaire du Roi, dans les documents plus récents il figure avec d'autres titres,
ceux de «valet de chambre dudict Sire, et ordonnateur général des bastimens
«de Sa Majesté, n qui lui sont donnés simultanément dans l'acte d'acquisition
de la maison où furent établis les Feuillants (2). Sur une pièce de 1 586, inté-
ressante à un double point de vue, il est nommé avec deux nouvelles qualités:
«Noble homme Baptiste Androuet, sieur du Serseau, conseiller du Roy, son
«architecte ordinaire, et commis par Sa Majesté pour ordonner de tous les ou-
(1) Traité des causes et des raisons de la prise des armes faite en janvier i58g , dans les Mémoires du duc
de Nevers, éàil. in-fol.de i665, l. II, p. 98-29. — (2) Arch. de l'Emp. cart. S4i65-66.
LE LOUVRE SOUS FRANÇOIS II, CHARLES IX ET HENRI III. 275
«vrages des bastimens et édifices de Sa Majesté, et despence que y convient
«faire'1'. a Sa charge de surintendant des bâtiments, au dire de Brice, lui valait
6,000 livres par an'2). Elle impliquait la direction de presque toutes les cons-
tructions faites pour la couronne , et comprenait celle des travaux de la chapelle
des Valois, à Saint-Denis. D'après les comptes de cette chapelle, il en devint l'ar-
chitecte après J. Bullant,et, comme te ordonnateur de ladicte sépulture , n dès i58a
au moins et jusqu'en 1 586 , il eut, « pour ses gaiges et appointemens,nla somme
de 200 livres par an'*).
Le 1 1 novembre i58/i, Baptiste acheta d'un de ses collègues de Saint-Denis,
le maçon Christophe Lemercier, un terrain qui était situé au Petit-Pré-aux-Clercs,
et dont l'emplacement est représenté maintenant par celui qu'occupent la maison
faisant l'angle des rues Bonaparte et des Marais, et la maison contiguë formant le
coin de la rue Jacob. Sur ce terrain Baptiste éleva une habitation fort élégante,
dont il ne jouit point longtemps. En effet, au mois de décembre 1 585 , suivant
ce que raconte Lestoile, qui l'appelle un «homme excellent et singulier en son
«art'*', -n Baptiste, que les catholiques exaltés reprochaient au Boi d'employer, fut
contraint de prendre congé de son maître, aimant mieux «quitter ses biens
«que de retourner à la messe, i> et abandonnant «sa maison qu'il avoit nouvelle-
«ment bastie avec grand artifice et plaisir, au commencement du Pré-aux-Clercs,
« et qui fust toute ruinée sur lui. t> Cette disgrâce, que l'on croyait faussement avoir
frappé Jacques Androuet, le graveur, ne semble pas avoir eu pour son fils les con-
séquences fâcheuses qu'on pourrait supposer, puisque, dans les comptes de la cha-
pelle des Valois, nous trouvons un toisé du 2 1 avril 1 586 fait par l'ordre de celui-ci;
les états de dépense mentionnent en outre ses appointements pour cette année'5).
C'est là d'ailleurs le dernier document que nous ayons rencontré où il soit directe-
ment question de lui. Nous sommes sûr toutefois qu'il fut architecte de Henri IV;
car, dans les lettres d'office délivrées en 1617 à son fils Jean, il est parlé des ser-
vices rendus par le père au « feuz roys. n Au mois de mars 1602, Baptiste n'existait
plus, et sa veuve, Marie Baguidier, vendit alors à son beau-frère, Jacques An-
drouet, la maison du Petit-Pré-aux-Clers, qui, ravagée lors du siège de Paris,
avait dû subir une restauration complète après la reddition de cette ville W.
Le grand jardin du Louvre, où, suivant Sauvai, Henri III se plaisait à faire
(1> Arch. de l'Emp. cart. K 10a, n° 2". mencement de i588, s'il est vrai, comme on le lit
(,) T. IV, p. i5o de l'édition de 1753. dans \es Mémoires du duc de Nevers , qu'il lit des cons-
<S) Cart. K 102, déjà cité. tractions pour les Feuillants, puisque ces religieux
'*' Coll. Michaud, t. XIV, p. 193. n'arrivèrent h Paris qu'au mois de septembre 1 587.
(5) Baptiste Androuet remplissait encore ses fonc- (,) Nous parlerons, au chapitre su, des autres
lions d'architecte du Roi à la fin de 1 587 ou au com- membres de la famille de Baptiste.
35.
276 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
battre ses lions , fut entièrement gâté à l'occasion des fêtes du mariage de Mar-
guerite de Lorraine avec le duc de Joyeuse, aux mois de septembre et d'oc-
tobre 1 58 1 M; mais peut-être le jardin fut-il remis en bon état par Henri IV, car
il ne semble point bouleversé sur le plan de Quesnel. Quant à la ménagerie, elle
fut détruite en 1 583. te Le vingt-uniesme janvier, dit Lestoile, le Roy, après avoir
rrfait ses pasques, et ses prières et dévotions au couvent des Bons-Hommes de
ffNigeon, ausquels il donna cent escus, s'en revint au Louvre, où, arrivé, il fit
<r tirer, à coups d'arquebusades, les lions, ours, taureaux et autres semblables qu'il
ffsouloit nourrir pour combattre avec les dogues, et ce, à l'occasion d'un songe
crqui luy estoit advenu, par lequel luy sembla que les lions, dogues et ours le
cr mangeoient et dévoroient. ■»
Sous le règne de Henri IV, le Louvre ayant été joint aux Tuileries, leur his-
toire commence à se confondre; nous ne la reprendrons donc qu'après avoir ra-
conté l'origine du second de ces édifices, et décrit l'état ancien de la région où il
fut élevé.
(1) uLe lundy seiziesme (octobre i58i), en la * du Louvre, exécuta le Roy un combat de quatorze
«belle et grande lice, à grands frais et peines et en «blancs contre quatorze jaunes, à huit heures du
«pompeuse magnificence dressée etbastie au jardin «soir, aux flambeaux. »(Lesloi\e, Joum.de Henri III.)
RUE DE L'ECHELLE. 277
CHAPITRE IX.
ESPACE COMPRIS ENTRE L'ENCEINTE DE CHARLES V,
LA RUE SAINT-HONORÉ, L'ENCEINTE BASTIONNÉE ET LA SEINE.
(Voir le Plan de restitution, feuille V bis.)
L'espace compris aujourd'hui entre la rue Saint-Honoré, les Champs-Elysées,
la Seine et l'emplacement de l'enceinte de Charles V était autrefois occupé par des
terrains que ne coupait aucune grande voie publique, et qui dépendaient, pour la
plus grande partie, du territoire de la ViHe-1'Evêque, dont les limites vers Paris,
sans avoir jamais été bien précises, ont rétrogradé à mesure que le faubourg Saint-
Honoré a pris de l'importance. Sur ces terrains, relevant en entier du fief de
l'Evêché de Paris, on distinguait trois cantons: celui des Gourdes, qui est très-sou-
vent mentionné à partir de la fin du xive siècle, et s'étendait au loin sur l'empla-
cement des Champs-Elysées*1'; celui des Tuileries, dont le palais marque encore la
situation, et celui du clos des Quinze-Vingts, que longeait la grande rue du fau-
bourg. Nous commencerons par l'étude de ce clos et des deux chemins ou rues
par lesquelles il a été borné au nord et à l'est; nous parlerons ensuite du ter-
rain qui a servi à l'établissement de la place du Carrousel.
RUE DE L'ECHELLE.
La rue de l'Echelle, qui commençait à la rue du Carrousel et part actuelle-
ment de la rue de Rivoli, a toujours fini à la rue Saint-Honoré.
Nous n'avons point éclairci l'origine du nom de cette rue et nous doutons
qu'il soit dû, comme on le dit, à une échelle de justice; car non-seulement on
ne cite aucune preuve à l'appui de cette opinion, mais en outre il est peu vraisem-
'' En 16 9 5, un clos dit Les Gourdes existait encore près du Cours-la-Reine.
278 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
blable qu'un instrument de supplice ait été placé si près d'une demeure royale,
à une époque aussi avancée que le xvne siècle. Or, avant ce temps, l'appellation
de rue de l'Echelle n'était point en usage; nous n'en avons même rencontré d'in-
dication que sous le règne de Louis XIV, et, en 1687, on disait encore «rue qui
« conduit aux grandes écuries du Roy. n
Les historiens de Paris considèrent généralement la rue de l'Echelle comme
une rue moderne; ils ont tous ignoré que c'était simplement un reste de l'an-
cien chemin bordant les fossés de la Ville. On acquiert la certitude du fait par
l'examen des titres relatifs à la maison dite de la Poterie, qui faisait le coin de là
rue, et qui n'a jamais subi de reculement. Dans ces titres la rue est énoncée:
«Chemin par lequel on va de lad. porte Saint-Honoré à la rivière de Seine, le-
« quel chemin est entre les fossez de la Ville et lad. couture des Quinze-Vins n ( 1 h 0 2 ) ;
— <r chemin près les fossez de Paris n (1/121); — «rue des Fossez « (i&3q); —
<r chemin des fossez, qui va de la bastide Saint-Honoré aux Tuilleries et à Saine n
(16Ù0); — « chemin au lonc des fossez n (i443); — «chaussée et chemyn ten-
«dant — à la rivière de Seyne et aux Thuilleriesn(i558); — rrvoyrie sur les
« fossez t> (1 556) ; — rrrue. .. allant à la rivière de Seyne n (t 597); — «chemin
«tendant de la porte Saint-Honoré au pallais des Thuilleries a (1609). Dans un
acte de i544, elle est improprement nommée «rue du Marché-aux- Pourceaux, »
à cause du voisinage de ce marché, situé de l'autre côté de la rue Saint-Honoré.
11 est à remarquer que l'alignement de la rue de l'Échelle , dans sa partie sep-
tentrionale, était parfaitement parallèle aux anciens murs de clôture des Quinze-
Vingts et de la Petite-Bretagne, et non point à l'enceinte de la Ville; d'où nous
supposons que cet alignement avait été donné par le mur mitoyen d'une propriété
qui disparut lorsqu'on creusa les fossés. La largeur de la rue de l'Echelle a été
récemment portée à vingt-deux mètres.
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE SAINT-GERMAINL'AUXERROIS.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉVÈCHE, PUIS DU ROI.
Depuis le quai jusqu'à la moitié de sa longueur environ , le « chemin au lonc
«des fossez n longeait la maison dite des Tuileries et ses dépendances, dont il sera
parlé dans le chapitre x. Venaient ensuite les maisons suivantes, qui toutes avaient
été construites sur le terrain du clos des Quinze-Vingts.
Maison sans désignation (1 kkz ) , qui avait été élevée Sur un emplacement faisant
RUE DE L'ECHELLE. 279
le coin sud-est du clos des Quinze-Vingts. En 1 556 , elle contenait deux corps
d'hôtel et un jardin.
Deux maisons sans désignation (t 556), à la place desquelles il n'y avait encore
qu'un jardin en îliUi.
Jardin (i63s), puis maison sans désignation (1662).
Jardin, puis maison sans désignation (1662). Suivant un censier de l'Evêché,
elle aurait eu pour enseigne l'Image Notre-Dame, en i53o.
Maison et jardin sans désignation (1661).
Maison et jardin sans désignation en i46i, et de l'Image Notre-Dame en î 553. A la
place de cette maison et des deux précédentes , certains comptes de î h h 2 mentionnent
«r la maison, jardin et lieu de noble homme nions, messire Anthoine Des Essarts; le-
rtquel (lieu) fut Thomas Le Sueur et sa femme. 1111 semble ainsi que les trois maisons
dépendaient l'une de l'autre , ce qui expliquerait la transposition apparente de l'en-
seigne. La maison d'Antoine Des Essarts, dite peut-être cr Hostel des Tuileries n en
1 3 h 2 , paraît avoir été aussi à Pierre Des Essarts et avoir contenu un arpent et demi.
Maison et Jardin sans désignation en 1662, et ayant eu pour enseigne kl'Arba-
tr leste n dès i556.
Jardin sans désignation (1662), à la place duquel se trouvaient, en 1507, trois
maisons avec un colombier.
Jardin sans désignation en 1/162, puis maison des ccTroys-Roysti (1507). En
1 5 1 7, elle avait été récemment édifiée de neuf.
Toutes les maisons dont rénumération précède avaient été construites sur une
pièce de trois arpents qui futaccensée, en i3o,8, à Richard Du Buisson, et qui
s'étendait jusqu'à la rue Saint-Honoré (voir page 5g3). Elles furent vraisembla-
blement bâties entre les années i632 et 1662, car on les trouve mentionnées à
cette dernière date, et elles ne le sont point encore à la première. En 1 565, elles
subsistaient encore; mais en 1 567, elles étaient toutes abattues et cr applicquées au
rrpallais de laRoyne mère, t> qui dut les acheter en 1 566. Il n'en existe pas de plans.
Jardin (i5i3), à la place duquel furent ensuite deux maisons sans désignation,
qui dépendaient, comme les suivantes, de la grande maison de la Poterie, et qui
furent achetées par Catherine de Médicis, le 16 décembre 1567. L'estimation de
leur valeur donne à penser qu'elles constituaient à peu près le quart du grand hô-
tel de la Poterie , réduit comme il l'était alors.
Maison sans désignation (1609), quia fait un coin de la rue du Carrousel.
Maison sans désignation en 1609, et de l'Image Sainte- Anne en 1700.
Maison qui paraît avoir eu l'enseigne du Nom-de-Jésus en 1 5y5 , et qui,
au xvmc siècle, était comprise dans la précédente.
Maison sans désignation en 1609, puis du Pied-de-Biciie (1680), du Coeur-
Navré, et enfin des Plongeons (1700).
280 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison ou masure (1609) qui, unie à la suivante, avait pour enseigne le Fau-
con en 1680, et semble être la même que celle de la Salamandre, mentionnée
en i555 et i588.
Maison sans désignation en 1609, mais que nous croyons se confondre avec
celle te de l'Estoille t) (1587), laquelle était contiguë à la maison de la Sala-
mandre et aboutissait à celle du Dauphin.
Maison du Lion-d'Or (1609), contiguë à la maison du coin de la rue Saint-
Honoré ; elle en avait fait partie au xvie siècle.
TERRAIN DE LA PLACE DU CARROUSEL.
Depuis Sauvai, on a bien souvent répété que Pierre Des Essarts possédait, au
commencement du xive siècle, un certain hôtel des Tuileries dans lequel il fallait
voir en quelque sorte l'embryon du palais de ce nom. L'hôtel des Tuileries appar-
tenant à Des Essarts n'a jamais rien eu de commun avec la maison qui, en se
développant, est devenue la résidence des rois. Celle-ci était située derrière le clos
des Quinze-Vingts, tandis que l'hôtel des Tuileries était placé, soit dans le clos
même'1), soit derrière un jardin de cinq arpents qui séparait ce clos d'avec l'Hospice,
et dont l'emplacement correspond à celui qu'occupaient les îlots en bordure sur
la rue Saint-Honoré, entre les rues Saint-Nicaise et de l'Echelle. En effet, l'hôtel de
Des Essarts, s'il n'était pas renfermé dans le clos, doit nécessairement se confondre
avec le jardin qui , après avoir été à Ernoul de La Haute-Maison , était, en 1 3 1 5 , à
Pierre Des Essarts et touchait au <r chantier à merrin , t> avec jardin derrière , que , le
mardi devant «les grands Pasquesn de la même année (v. s.), Des Essarts prit à bail
des Aveugles, au prix de 16 livres parisis de rente annuelle, et à la condition que
ces derniers pourraient y poser des conduits pour faire venir l'eau de la rivière
dans leurs «aisemens et chambres'2). » Or le jardin d'Ernoul de La Haute-Maison
doit se confondre à son tour avec la propriété qu'Ernoul habitait un peu aupara-
vant, et qui est dite, dans une charte du 2 h mai 1809, «meson ou menoir. .. as-
«sis oultre le Louvre, près des Tuileries. . . tenant d'un cousté à la meson et au
cr jardin de Bretaigne, et d'autre à la meson de Pierre de Bonoil et au jardin de Jehan
(1) Les textes qui mentionnent cet hôtel sont très- rtgles , qui sont entre ladite meson ou manoir des-
obscurs ; il est énoncé , en 1 3 1 6 : r Meson ou manoir n-diz mariés et leurdite couture. *
rrque lesd. mariés (le changeur Pierre Des Essarts et m Arch. des Quinze- Vingts, liasse 3o6. — Les
«■sa femme Thomasse) ont, assis... vers les Tuile- Aveugles l'avaient eux-mêmes acquis de Jean, fils
"■ries... en la couture d'iceux mariés, qui siet au d'Ernoul, au prix de 160 livres parisis, le mardi
ff costé et derrières le manoir desdiz Aveugles , parmi avant la Pentecôte 1 3 1 5 , c'est-à-dire quelques mois
rtle coign du mur des jardins ou courtiz desdiz Aveu- seulement avant le bail fait à Des Essarts.
TERRAIN DE LA PLACE DU CARROUSEL. 281
a de Courbeul, aboutissant à lameson et au jardin des Aveugles, n La situation du
manoir d'Ernoui, identique avec celle qu'une charte de i385, dont nous rap-
porterons un extrait (p. 288), donne à une maison appartenant à Des Essarts,
est d'ailleurs très-claire : il tenait, vers l'orient, à l'hôtel de la Petite-Bretagne;
vers le nord, au jardin de cinq arpents que les Aveugles avaient sur la rue Saint-
Honoré, et, vers l'occident, à la maison du et merrenier n Pierre de Bonneuil et
au jardin de Jean de Courbeul. Mais cette dernière maison et ce dernier jardin
étaient très-certainement au-dessous du clos des Quinze-Vingts, près de la rivière;
la place du Carrousel, telle qu'elle se dessinait à l'époque de la Révolution, oc-
cupait donc en partie le terrain du manoir d'Ernoui.
La construction de l'enceinte de Charles V fit bouleverser tout le terrain dont
nous parlons, et il n'y eut plus là qu'un rempart avec fossé et chemin le long
du fossé jusqu'au commencement du règne de Louis XIII , époque où l'on adopta
le projet d'ouvrir deux rues nouvelles à travers les fortifications (voir p. 76), ce
qui en impliquait l'entière destruction. Du reste, on ne respectait guère alors
la muraille d'enceinte de Paris; car, le 27 septembre 1626, le Corps municipal
alla s'en plaindre au Roi, faisant observer qu'on démolissait aies murailles et pa-
■ rapets de lad. Ville , qui soustenoient les terres du rempart depuis la porte Sainct-
tt Honoré jusques à la gallerie du Louvre, ■« et <rque les pierres provenans de
<r lad. desmolition avoient servy à la construction d'un canal voultén que l'on
bâtissait dans le fossé (1). Le lendemain parut une ordonnance du Prévôt des
marchands défendant de continuer à démolir la muraille et à en emporter les
matériaux. Nous ne savons si cette prohibition fut respectée; mais, dix ans plus
tard, en i634, Cbarles Froger ayant conclu un marché pour l'exécution de la
nouvelle enceinte bastionnée, malgré l'opposition du Bureau de la Ville la vieille
muraille fut démolie à partir de la Porte-Neuve, et de telle sorte qu'il est devenu
difficile depuis d'en retrouver des fragments.
Le plan de Gomboust montre qu'en i652 la place du Carrousel n'existait point
encore, et que, au lieu où elle a été établie, le fossé était seulement en partie
comblé pour l'agrandissement du jardin d'un hôtel de la rue Saint-Nicaise ; mais
la place était dessinée et nivelée lors du grand carrousel qui lui a valu son nom W,
et qui eut lieu au mois de juin 1662. Peu après on bâtit dans les environs, si
bien qu'en 1 665 , ainsi qu'on le voit par un plan portant cette date, la place et
les îlots voisins avaient acquis la configuration qu'ils ont gardée jusqu'aux dé-
molitions effectuées sous le premier Empire. Pour servir de second débouché à la
place on avait eu soin de réserver, sur l'emplacement du fossé et dans l'alignement
(1) Arch. del'Emp. rcg. H 1801, fol. 34o v°. — (,) La place du Carrousel a été quelquefois nommée
place (les Tuileries vers le commencement du dernier siècle.
1. 36
282 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
de la contrescarpe, une rue qui s'appela rue du Carrousel, et quelquefois nie de
l'Echelle, parce que, communiquant par un retour d'équerre W avec la rue ainsi
nommée, elle pouvait en être considérée comme la continuation. Nous avons donné
quelques renseignements sur les constructions de la rue du Carrousel du côté de
la rue Saint-Nicaise (voir p. 76). Du côté opposé, la première maison, celle qui
faisait le coin devant l'entrée de la cour des Suisses, fut, au xvme siècle, un magasin
de fers pour les bâtiments royaux. La maison suivante, qui formait l'encoignure
saillante de la rue au point où elle se coudait, appartenait, en 17 34, à Mollet,
contrôleur des bâtiments; celle qui venait ensuite était
L'HÔTEL DE LA ValliÈRE. Henri IV, voulant récompenser son premier jardi-
nier, Claude Mollet, lui fit don d'une place et d'un jardin, sur lesquels celui-ci
bâtit une maison; elle passa, après lui, à son fils, qui en augmenta les bâtiments.
La maison fut louée plus tard à Amat, fermier général des gabelles, et dès le
mois d'avril 1666 elle était occupée par le père de la maîtresse de Louis XIV,
Jean-François de La Baume Le Blanc, marquis de La Vallière; dite ainsi l'hôtel
de La Vallière, elle fut rebâtie en partie par le fils du précédent, Charles-François,
fait duc en 1723. Il n'en jouissait pourtant qu'à titre de concession viagère,
puisque, par une déclaration du 8 mai 1734, le duc d'Antin, directeur des bâ-
timents de la couronne, fit savoir que le Boi donnait l'hôtel au duc et à la du-
chesse de Vaujour, en survivance du duc et de la duchesse de La Vallière M.
Contigu à l'hôtel de La Vallière, se trouvait
L'HÔTEL D'ARMAGNAC ou DE BRIONNE. Il fut bâti, peu de temps avant l'an-
née 1676, pour servir de demeure au grand écuyer de France, qui était alors
Louis de Lorraine, comte d' Armagnac, de Charny et de Brioime, dont le septième
fils, Charles, comte d'Armagnac, obtint la même charge en survivance de son
père, l'an 1712. Ainsi s'expliquent les deux noms donnés simultanément à l'hôtel,
qui finit néanmoins par ne plus être appelé que l'hôtel de Brionne. Il paraît avoir
encore été distinct de l'hôtel de La Vallière en 1772; mais il y était réuni sous
Louis XVI. H a été abattu vers 1806, de même que les autres maisons de la rue
du Carrousel, qui a ainsi disparu. La place s'est alors étendue depuis la grille
des Tuileries jusqu'à la hauteur de la rue de Bohan, et depuis la grande galerie
du bord de l'eau jusqu'à celle qui longe la rue de Bivoli; toutefois, le déblayement
complet n'a eu lieu qu'en 18^9.
(1) Ce retour d'équerre, conduisant a la grande (,) L'hôtel est énoncé dans la déclaration : n-une
écurie des Tuileries, est appelé rue de l'Ecurie sur «• place avec grand bâtiment dont partie a été faite
un plan de 1698. faux dépens dudit Duc» (de La Vallière).
RUE SAINT-HONORE. 283
RUE SAINT-HONORÉ.
(Partie s'étendant de la rue Saint-Nicaise à la rue Royale.)
La section de la rue Saint-Honoré qui commençait à la hauteur de la rue
Saint-Louis et finissait à la rue Royale était une partie de l'ancien chemin con-
duisant au village du Roule et la grande voie du premier faubourg Saint-Honoré.
Elle n'a pu commencer à prendre l'aspect d'une rue que postérieurement à l'ac-
censement du clos des Quinze-Vingts, en 1892, et elle n'est devenue très-fré-
quentée que vers la fin du xvic siècle, après la construction de la fausse porte
Saint-Honoré. Nous l'avons vue énoncée : cr Magnum cheminum Sancti Honoratin
(1288); — rrchaucée de la rue Saint-Honoré -n (1870); — «chaucée et voyerie
«par laquelle l'en va de ladite rue Saint-Honoré au Roole-lèz-Paris -n (1870); —
rr chemin roialn (1892); — rcgrant chemin de la porte Saint-Honoré -n (1892);
— «chaucée du Roy, devant les Quinze-Vins» (1609); puis, en souvenir du
fondateur de l'hospice des Aveugles, «vicus novus Sancti Ludovicin (1Û07); —
«grant rue Saint-Loysn (1621); — «rue neufve Saint-Loys -o (i63o); et enfin,
* chaussée des faulxhourgs (Saint-Honoré), tendant de cette ville de Paris au
«port de Nullyn (Neuilly) (1 563); — «grande rue du faulxbourg Sainct-Honoré n
(1600); — «chaussée Saint-Honoré, cy-devant faulbourgsn (1 636); — «rue
«neufve Saint-Honoré, naguère appelle le faulxbourg Saint-Honoré n (t 638); —
et «rue neufve Saint-Honoré, cy-devant faulxhourgs, ej à présent clos et annexé
«à la Villes (1660). L'incorporation du faubourg Saint-Honoré à la Ville avait
été consommée définitivement par la destruction de l'enceinte de Charles V et
par la substitution, effectuée vers i632, de la porte monumentale de Pidoux à
la fausse porte du xvic siècle. La partie de la grande rue située en deçà s'est alors
confondue, sous le même nom de rue Saint-Honoré, avec la partie la plus rap-
prochée du centre de la Ville.
Le i3 mai 1 585 , une ordonnance du Bureau de la Ville prescrivit aux habi-
tants du faubourg Saint-Honoré «de faire paver devant leurs maisons, cha-
«cun endroict soy, depuis le commencement de la chaussée pavée et rehaulsée
«de neuf ès-dicts faulxhourgs, jusques à la fin d'icelle. -n Dans une lettre du
3o juillet 1571, le Roi s'était déjà plaint de la mauvaise odeur provenant, disait-
il, de la «retenue des eaues croupies et boues qui sont ordinairement le long du
«faulxbourg Sainct-Honnoré, par faulte que ledict faulxbourg n'est pas entière-
«ment pavé le long des maisons, et que la pante d'esgout n'est pas comme il
«appartient, d
36.
284 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
CÔTÉ MÉRIDIONAL.
PAROISSE SAINT-GERMAIN-L'AUXERROIS,
PUIS DE SAINT-ROCH1".
Emre ieS rues Les maisons de la rue Saint-Honoré comprises entre les rues Saint-Nicaise
et<i.r£«MJo. et de l'Échelle occupaient, nous l'avons dit, l'emplacement d'un jardin de cinq
arpents, qui appartenait aux Quinze-Vingts et dépendait, comme tous les envi-
rons, du fief de l'Evêché. La construction de l'enceinte de Charles V mit le ter-
rain sous la juridiction du Roi et de la Ville, et il resta en censive royale après
que les fortifications furent abattues.
Près de la porte Saint-Honoré il y avait quelques petites maisons qui furent
rasées, pour les besoins de la défense, au temps de la Ligue. On en rebâtit d'au-
tres, au commencement du règne de Louis XIII, en traçant une petite rue qui a
été nommée rue Saint-Louis.
Rue Saint-Louis. Elle existait déjà en 1629, car nous l'avons trouvée énoncée
en cette année : et Une autre rue allant ausdites escuriesn (du Roi), la première
des rues auxquelles il est fait allusion dans l'acte étant celle de l'Echelle. Sur les
plans de Gomboust et de Rullet, la rue Saint-Louis est nommée rue de l'Echaudé,
appellation provenant de la disposition triangulaire du pâté de maisons qui formait
un de ses côtés'2'. Vers le même temps, elle était dite aussi rue Saint-Louis, nom
évidemment inspiré par celui qu'avait porté la rue du faubourg; un censier de
1 663 la désigne sous la dénomination derue des Tuileries. Elle a disparu en i85i.
Après la maison qui formait le coin occidental de la rue Saint-Nicaise , il s'en
trouvait, sur la rue Saint-Honoré, une seconde aboutissant à une cour en équerre.
Cette cour était celle du marché des Quinze-Vingts, dont la boucherie occupait la
troisième maison en bordure sur la rue Saint-Honoré. Nous n'avons rien à signaler
dans la quatrième, qui était très-étroite , ni dans la cinquième, qui faisait le coin
oriental de la rue Saint-Louis. Le côté méridional de cette dernière rue offrait
trois maisons : l'une, au coin de la rue de l'Echelle, ayant eu pour enseigne le
Gaillard-Bois en 1G87, et deux autres qui, attenantes d'un côté à la maison du
coin de la rue Saint-Honoré, étaient séparées, au rez-de-chaussée, de la maison
du Gaillard-Rois par une ruelle servant d'entrée au marché des Quinze-Vingts.
(1) Le territoire de la paroisse Saint-Rocli ne paroisse, est un jalon méconnu, mais bien précis,
commençait qu'à la troisième maison après la rue de l'enceinte de Charles V.
Saint-Nicaise. Le mur qui séparait cette troisième <!) On donnait autrefois la forme triangulaire
maison de la seconde, et qui formait la limite de la aux échaudés.
RUE SAINT-HONORE. 285
Le marché des Quinze- Vingts W fut établi en vertu d'une permission que le Roi
accorda à Ursule Motta, naine de mademoiselle de Montpensier, et qui fut modifiée
par un arrêt du Conseil du 22 février 1 645. D'après la teneur de l'arrêt, le marché
devait être placé derrière la boucherie Saint-Honoré. Cette boucherie avait été
bâtie sur l'emplacement d'une partie de la porte Saint-Honoré, immédiatement
après la démolition qui en fut faite en 1 634. On lit, à cet égard, dans le supplé-
ment manuscrit aux Antiquités de Paris : «L'an 1 633 et 2 ans après, on rompit
tria vieille porte dite de Saint-Honoré, au delà des Quinze-Vingts, de sorte qu'à
« présent il n'y a plus marque aucune de porte , et au lieu de laquelle du costé des
crTuilleries, a esté faite une belle boucherie. 11 La boucherie Saint-Honoré renfer-
mait dix étaux , dont cinq appartenaient au domaine royal et cinq à des particu-
liers. Auprès de cette boucherie, dit Piganiol, il y a deux autres étaux, qui appar-
tiennent aussi à des particuliers.
En 1629, l'îlot circonscrit par les rues Saint-Honoré, Saint-Louis et de l'Échelle
consistait en une seule maison ayant pour enseigne l'Image Saint-Martin, et com-
posée de trois corps d'hôtel. L'un de ces corps d'hôtel, qui s'étendait le long de la
rue de l'Échelle, et formait l'angle oriental de la rue Saint-Honoré, ainsi que le
coin septentrional de la rue Saint-Louis, est demeuré intact; l'autre, qui faisait
le coin occidental de la rue Saint-Honoré et de la rue Saint-Louis, a été subdivisé
en deux, et la seconde partie, située sur la rue Saint-Louis, a eu pour enseigne
la Vache-Noire vers 1700. Le troisième corps d'hôtel a été morcelé en trois logis :
l'un en bordure sur la rue Saint-Honoré, et les deux autres sur la rue Saint-
Louis. De ces deux derniers le plus rapproché de la rue Saint-Honoré avait pour
enseigne via Belle-Ovale, n en 1687. A la pointe sud-ouest de l'îlot était placée
une fontaine qui est appelée fontaine du Diable sur le plan de Delisle (1716); elle
existait déjà en 1 652 , et n'a été détruite que dans ce siècle.
Au delà de la rue de l'Échelle, le côté méridional de la rue Saint-Honoré était
formé par les maisons du clos des Quinze-Vingts. Jusqu'en 1687, il demeura en
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉvÊCHE.
Clos des Quinze-Vingts. Le long et au midi du chemin du Roule, il y avait, bmk»
au xiue siècle, un vaste terrain qu'on appelait la Culture-ïEvêque, Cultura Episcopi, ^'il^Voylie
parce qu'elle appartenait à l'évêché de Paris. Antérieurement à 1283, cinq ar-
pents de cette culture, qui servirent à faire un jardin, furent cédés aux Quinze-
Vingts, à la maison desquels la parcelle était contiguë. Le reste, composé de
quarante-deux arpents et de trois quartiers, fut accensé, le ik mai i3oq, à
(1) Sur le plan de Gomboust, ce marché est appelé «cour de Miracle.*
286 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Ernoul de La Haute-Maison et à Isabelle, sa femme, à la charge, pour les pre-
neurs, de dépenser une somme de 3oo livres en trois ans, soit pour améliorer la
terre, soit pour y élever des constructions W, et, en outre, moyennant un cens
annuel de 38H 9* 6d, qu'ils hypothéquèrent sur le manoir voisin dont nous avons
déjà parlé (p. 280).
Quelques années plus tard, Ernoul vendit la Culture-l'Evêque au changeur
Pierre Des Essarts et à Thomasse, sa femme, lesquels, le 7 juillet 1 3 1 6, cédèrent
à l'évêque Guillaume IV une rente de 35tt 189 parisis, qu'ils percevaient sur
diverses maisons à Paris, en diminution du cens de 38tt o,s 6d, dont la Culture était
grevée (2). La veille de la Trinité îdki, le même Pierre Des Essarts, cette fois
qualifié de bourgeois de Paris et de conseiller du roi, fit don aux Aveugles, avec
le consentement de sa femme Jeanne, de la Culture-l'Evêque, alors entourée de
murs, et d'une seconde pièce de terre qui, contenant aune fosse à fiens,n était
située de l'autre côté du chemin, devant la porte de l'enclos; toutefois, est-il ex-
primé dans l'acte, « n'est point l'entention desdiz donneeurs que, pour cause de ce
«présent don, ils soient tenuz de faire estouper l'uisserie de l'alée de leur hostel
«des Tuileries, qui ist (a issue), en ladite coulture, mais demourra ou point que
a elle est à présent (3>. n Les propriétés dues à la libéralité de Des Essarts furent
amorties le h septembre i343, à la condition que le cens annuel qu'elles devaient
à l'Evêché serait porté au double, c'est-à-dire à io3 sous parisis W.
En possession de la Culture-l'Evêque, dont le nom se changea bientôt en celui
de clos des Aveugles ou des Quinze-Vingts, l'Hospice n'en jouit point sans encombre,
car, à raison d'une rente de 8tt parisis, vendue par Des Essarts à la dame Giles
de Greil, dont les droits passèrent à un nommé Andry Giffart, les Quinze-Vingts
furent un moment obligés d'en « déguerpir; n mais, par un décret d'adjudication
du h février 1371, et en payant une somme de 1 iott, ils rentrèrent en possession
de leur clos, qu'ils aliénèrent par parcelles en i3g2 W, On commença pour lors à
y bâtir, et, en i3o,o,, il s'y trouvait déjà nombre de «maisons neufves,ï> comme
l'indique un censier de l'Evêché. Avant de parler de ces maisons, il est nécessaire
de déterminer les limites du clos, question qu'on n'a point encore abordée et
qui présente d'excessives difficultés, attendu qu'une seule de ces limites, formée
(1) Cartulaire de Notre-Dame , t. III, p. 84.
m Ibid. p. a 3s.
(S) Arch. des- Quinze- Vingts, liasse 3o6.
<•» Ibid. et Cari, de N. D. t. III, p. 338.
m En i4a5, le clos était divisé en vingt-six par-
celles; c'est à peu près le nombre des lots de l'ac-
censement fait en i3ga; mais déjà ces lots avaient
subi des additions et des retranchements, car, dans
les premiers baux, les superficies sont énoncées en
nombres ronds d'un , de deux ou de trois arpents ,
tandis que le compte de i/ia5-a6 mentionne des
propriétés d'un demi-arpent et d'un arpent et demi.
Après avoir passé un temps fort long en cherchant
à reconstituer les parcelles de 1392 , nous avons été
contraint, par l'obscurité et les contradictions des
titres, de renoncer à ce fastidieux travail, qui, sans
être absolument inexécutable , réclamerait des efforts
hors de toute proportion avec le résultat à obtenir.
RUE SAINT-HONORE. 287
par la rue Saint-Honoré, est connue, et que les autres ne peuvent s'obtenir que
par déduction.*
Depuis la construction de l'enceinte du xive siècle, le clos des Quinze-Vingts
a constamment été borné, vers l'orient, par le chemin qui régnait le long des fos-
sés s'étendant de la tour de Bois à la porte Saint-Honoré. Cela est surabondam-
ment démontré par le décret d'adjudication du h février 1871, où il est dit que
le clos aboutissait aaus grans fossez et forteresse de la ville de Paris, t> et par ces
titres de la maison de la Poterie au moyen desquels nous avons reconnu l'identité
du chemin sur les fossés avec la rue de l'Échelle. Les difficultés réelles surgissent
lorsqu'il s'agit de fixer le point où le mur oriental du clos se soudait à son mur
méridional.
La maison de la Poterie renfermait d'abord trois arpents; or sa largeur sur la
rue Saint-Honoré et la direction de ses murs latéraux nous étant connues, il suf-
fit de prolonger ces murs jusqu'à ce qu'ils contiennent une superficie de trois mille
toises, pour restituer le périmètre de la maison. Nous obtenons ainsi, comme li-
mite vers la Seine, le mur méridional du bâtiment qui, sur les plans du xvme siècle ,
sépare la cour des Suisses d'avec la cour Royale, et commence à cent une toises
du coin de la rue Saint-Honoré. Cette coïncidence est déjà une présomption; mais
elle donne presque une certitude lorsqu'on observe que l'ancienne muraille de
séparation entre les Quinze-Vingts et la Petite-Bretagne, suffisamment prolongée,
vient tomber avec précision sur le point que nous croyons marquer l'encoignure
du clos.
Primitivement la Culture-l'Evêque s'étendait jusqu'à l'hospice des Aveugles;
elle en fut séparée ensuite par le lot de cinq arpents qu'on en détacha, et dont nous
avons déjà parlé. w. De ce lot les Quinze-Vingts firent un jardin, qui disparut
pour faire place à l'enceinte et aux fossés de la Ville; le fait est rapporté dans le
passage suivant de Lettres royaux du mois de juillet i385<'2) : trAffermans (les
«Aveugles) que, dès le commencement de leur fondation, et depuis continuel-
frment jusques après la bataille de Poitiers, qui fu l'an de grâce m ccc lvi, ou
s temps que l'en fist les fossés de la forteresse de Paris , ilz avoient esté tousjours
<r propriétaires, joy et usé paisiblement de un jardin peuplé d'arbres fruis por-
trtans, et pour leur gouvernement de fruis et potages; séant en quarteure (carré),
« entre les quatre quarres (côtés) et désignations, dont la première, faisant le der-
(l) Voir p. a8t et a84. — On lit dans l'amor- <rpra viam publicani(Sancti-Honorati),delongoin
tissement de ia83: *Ac eis (Gœcis) Iradiderat rrlongum, secus murum dormis eorum et murum
ff(Episcopus) et concesserat in perpetuum, de cul- rrdomus Gomitis Britannie, usque ad metam posi-
rtura ipsius Domini Episcopi, sita juxla domum irtam jiixla muros terre Tegulariorum. n (Cart. de
irGecorum, quiwrae arpenta terre in uno tenente, Notre-Dame , t. III, p. 43.)
rex parte domus eorumdem, a fossato scilicet su- (,) Arch. des Quinze-Vingts, liasse 3oG.
288 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
(trière, qui est joignant leurdit hostel, depuis le coing d'icelui, qui est joignant
« à la voierie et chaucée de la rue Saint-Honoré, tant comme icelui hostel et appar-
tenances se comportent par darrière jusques au mur et cloisons de l'ostel de la
rePetite-Bretaigne, et oultre, en continuant tout droit de ce mesmes costé, depuis
«yceulz niur et cloisons, par derrière les autres murs et cloisons d'iceuls jardins
«de Petite-Bretaigne. La seconde quareure cloant ledit jardin des Quinze-Vins
«estoit un mur qui pour lors duroit depuis ledit coing ou recoude, tout droit
«jusques au coing du mur faisant le clos des terres appelle le Clos des XVXX, qui
«jadis fu feu Pierre Des Essarts; laquelle seconde quarreure de mur de ce costé, faisoit
« clôture entre icelui jardin des XV xx et un jardin et hostel que ledit Des Essars avoit
« entre et oultre ledit coing ou recoude du mur des jardins de la Petite-Bretaigne W. La
«tierce quarreure faisant clôture et le coing dudit coing, du costé devers les jar-
«dins des Quinze-Vins, estoit un mur depuis ledit coing dudit clos d'emprès lé
«Tieuleries (sic), et duroit entre yceulz clos et jardin, jusques à la chaucée et
« voyerie par laquelle l'en va de ladite rue Saint-Honoré au Boule-lès-Paris. La
«quarte quarreure d'iceulz jardins des Quinze-Vins estoit un grant haut mur de
«piastre et de moilon, lors joignant tant comme icelui jardin duroit de ce costé,
«au long de icelle chaucée et voyerie, durant depuis ledit coing desdis clos de
«XV" (sic), tout droit jusques au coing de leurdit hostel. Et disoient lesdis sup-
«plians que, pour le temps dessus déclairé, en leurdit jardin estoit l'habitation
«d'un jardinier gouvernant et labourant icelui jardin, ouquel l'en povoit dudit
«hostel des XV" aler et venir partout le jardin jusques dedens ledit clos des
«Quinze-Vins, sans empeschement et sans ce que pour lors feussent aucuns fos-
«sés, arrière-fossés, murs, chemins ne aucun signe de forteresse dedens ledit
«jardin; qui, depuis, y ont esté fais en leur propre héritage dessus déclairé, avec
«le degré de la bastide de ladite rue Saint-Honoré et d'icelle bastide, tant comme
« la largeur d'icelui degré se comporte , pour la forteresse et fermeté de nostredite
«Ville, comme elle y est de présent, sans ce que lesdits supplians se soient aucu-
«nement aidés de aucune partie de leurdit jardin et héritage depuis ledit an
« mil ccc cinquante-six ou environ. •»
Le texte qui précède, en déterminant la situation du jardin, n'en donne point
la superficie; mais nous savons, par un arpentage de 1^28, dont nous transcri-
rons le résumé, que cette superficie était de quatre arpents et demi, soit quatre
mille cinq cents toises, car il s'agit d'arpents à vingt pieds la perche. Nous trou-
vons, dans les limites que nous restituons en unissant le mur ancien des Quinze-
Vingts à l'angle sud-est du clos, une surface d'un peu moins de quatre mille cinq
(1) Ce passage confirme la silutalion que nous ^seconde quarreure» de'signe le mur méridional
avons attribuée au manoir possédé par Ernoul de du jardin , lequel mur, comme on voit, séparait le
La Haute-Maison , puis par Des Essarts : l'expression jardin de l'Hospice d'avec la maison de Des Essarts.
RUE SAINT-HONORE. 289
cents toises, soit quatre arpents et demi, comme dans l'arpentage de 1 628, à vingt
pieds la perche, ou cinq arpents à dix-huit pieds la perche, comme dans l'amor-
tissement de 12 83. Nous en concluons que, dès la fin du xme siècle, la Gulture-
l'Evêque avait, du côté de l'orient, les mêmes limites que nous connaissons avec
certitude pour les temps postérieurs à la construction de l'enceinte.
Avec les données que nous ont fournies les archives des Quinze-Vingts, il nous
serait aisé de rétablir immédiatement l'emplacement de la muraille méridionale
de leur clos, si l'on pouvait se fier à l'exactitude des énonciations de surface con-
tenues dans les titres; mais ces énonciations sont trop rarement précises pour
qu'on les prenne rigoureusement à la lettre, et diverses autres circonstances
ajoutent aux difficultés du problème à résoudre.
Tous les lots des différentes parcelles du clos expriment que ces parcelles
aboutissaient d'un bout à la rue Saint-Honoré, et, de l'autre, au mur méridional
du clos, mur qui devint leur clôture. Restituer quelques-unes de ces maisons
dans leurs dimensions premières est donc le moyen indiqué de retrouver ce mur
méridional que nous cherchons, et dont il n'existe plus la moindre trace. Pour
y parvenir, nous disposons de deux ressources : l'une, excellente, c'est la largeur
de plusieurs des anciens lots, qui s'est conservée intacte; l'autre, vague et féconde
en erreurs, c'est la superficie attribuée à ces lots, dont la portion septentrionale
subsiste seule, et se trouve représentée par de6 maisons en façade sur la rue
Saiut-Honoré. Utilisant ces éléments, nous calculons ainsi :
La maison de l'Image Notre-Dame fut élevée sur un terrain contenant un ar-
pent à vingt pieds la perche, autrement dit mille toises'1'; or cette maison, que
nous avons pu reconnaître, avait, d'après les plans, neuf toises et un quart de
largeur; mais, pour qu'elle ait offert une superficie de mille toises, il faut qu'elle
ait eu environ ^ cent dix-sept toises de profondeur par son milieu. Lui suppo-
sant cette profondeur, nous tombons sur un point éloigné de cinquante-huit toises
du mur méridional du Manège, lequel est aujourd'hui remplacé par la clôture du
jardin des Tuileries sur la rue de Rivoli.
La maison de la Corne-de-Cerf, voisine de la rue du Dauphin, est dite, dans
un acte de 1A12, renfermer un arpent; or elle avait de largeur, vers son milieu,
environ huit toises trois quarts. Pour que le chiffre de sa superficie ait été de
mille toises, il fallait une profondeur moyenne de cent quinze toises; en ad-
mettant cette profondeur, nous tombons de nouveau à cinquante-huit toises du
mur du Manège.
(1) Les litres indiquent que les arpents dont il une foule de raisons, il est impossible de présenter
est question à propos du clos des Quinze- Vingts des chiffres rigoureux ; nous ne faisons d'ailleurs
étaient bien des arpents à vingt pieds la perche. que répéter la formule des anciens actes dont nous
m Nous disons toujours environ parce que, pour nous servons.
37
'290 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
La maison de la Corne-de-Cerf, située en face des Jacobins, fut également bâtie
sur un arpent de terre, et elle présentait une largeur d'environ sept toises trois
quarts; elle devait donc avoir une profondeur moyenne de cent trente toises; cette
profondeur nous conduit encore à cinquante-huit toises du Manège.
La maison de l'Image Saint-Louis, qui venait immédiatement après la précé-
dente, occupait aussi un arpent. Pour qu'elle atteignît la même limite vers le
midi, tout en commençant un peu plus loin vers le nord, par suite de l'aligne-
ment biais de la rue Saint-Honoré, il fallait que sa largeur fût un peu moindre en
moyenne que celle de la maison de la Corne-de-Cerf. Nous constatons en effet
sur le plan de Verniquet que, les deux largeurs étant égales vers le milieu, celle
de la maison de l'Image Saint-Louis allait en diminuant du côté de la rue Saint-
Honoré.
Réunissons maintenant les quatre points que nous venons d'obtenir; le résultat
est une ligne droite parallèle à l'axe du Manège, et distante de soixante et onze
toises de son mur septentrional, mitoyen avec les maisons de la rue Saint-Honoré.
Nous disons, en conséquence, que la zone du clos des Quinze-Vingts qui a été
comprise dans le jardin des Tuileries avait soixante et onze toises de largeur.
Telle est la conclusion à laquelle nous sommes arrivé, mais non, certes, sans
avoir longtemps cherché, et fait fausse route d'abord. Ce qui surtout nous indui-
sait en erreur, c'est l'absence, fort étonnante, de renseignements sur les transac-
tions au moyen desquelles une portion aussi considérable du clos a pu être dis-
traite du reste. Au surplus, il n'est pas possible de douter qu'une vaste partie
du clos ait été englobée dans le jardin des Tuileries, car cela résulte forcément
des détails que nous trouvons dans l'arpentage de 1628. Les registres d'ensaisi-
nement de l'Ëvèché nous ont fourni deux autres preuves du fait : la pre-
mière est un acte du k février 1 5G8 , où il est dit que la maison de l'Image
Sainte-Geneviève aboutit et d'un bout, par derrière, aux tenues de la Roy ne-mère,
qu'elle a eues des appartenances de ladicle maison, -n et, à cette époque, les limites des
Tuileries étaient, vers le nord, les mêmes que deux siècles plus tard; la seconde
preuve ressort d'une pièce du 22 février 1 564 , où une propriété est énoncée
te aboutissant par derrière à demy arpent dix-sept perches et deux tiers de terre
« ausdicts vendeurs appartenant, et qu'ilz dient la Royne-mère avoir faict mesurer pour
«comprendre avec les bastimenz quelle faict à présent faire, et faisant partie ledict lieu
tt du clos des Quinze-Vingts W. -n Ce dernier texte comporte la démonstration mathéma-
tique de l'exactitude de nos affirmations touchant la limite méridionale du clos.
Effectivement, le jardin dont il est question dans la pièce de i566 occupait le ter-
rain sur lequel furent bâties les maisons du côté occidental de la rue du Dauphin,
o
Arch. de l'Emp. registre S I2i4, fol. j 86 r°et fol. 56 v"
RUE SAINT-HONORE. 291
et qui était d'une largeur de neuf toises et demie. Si l'on multiplie par ces neuf
toises et demie les soixante et onze toises que nous soutenons avoir constitué la
profondeur de la zone retranchée, on obtient un total de six cent soixante et qua-
torze toises, équivalant, sauf une insignifiante fraction, à celui que présentent
un demi-arpent et dix-sept perches deux tiers.
La limite occidentale du clos des Quinze-Vingts était le mur qui séparait la
maison du seigneur de Coupeuray, dernière habitation comprise dans le clos, de
la maison voisine, située en dehors. La maison du seigneur de Coupeuray, absor-
bée dans le couvent des Capucins, a été détruite depuis plus de deux siècles et
demi sans laisser de traces, et nous avons seulement pu retrouver l'emplace-
ment du mur mitoyen, vers l'orient, de la maison qui la précédait et appartenait
à la dame Du Perron. Or nous savons que la maison de la dame Du Perron avait
été bâtie sur un arpent de terre, ce qui, dans notre système, implique une lar-
geur d'environ six toises cinq pieds, exactement celle que, pour d'autres raisons,
cette maison semble avoir réellement eue. Quant à la maison du seigneur de
Coupeuray, elle est pareillement indiquée comme ayant été élevée sur un arpent
baillé en 1892; néanmoins dans les actes les plus modernes, et spécialement
dans un compte de 1 568 , elle est dite avoir contenu cinq quartiers, ce qui nous
donne une largeur de huit toises et demie. Juxtaposant les plans des deux maisons
restituées, nous constatons que le mur occidental du clos devait se trouver à
environ huit toises et demie au delà de la ruelle située entre les couvents des
Capucins et des Feuillants, au point même où se terminait le manège des Tuile-
ries, suivant le plan de Du Cerceau.
Nous venons de citer à plusieurs reprises certain arpentage du clos, fait en
1628; le résumé qu'en donne un inventaire des Quinze-Vingts, datant de i&3o,
permet de contrôler fort rigoureusement notre restitution. Ce résumé est ainsi
conçu : «L'an mil cccc xxvm, le xxvic jour de juillet, le clox des Quinze-Vins
«fu arpenté par Nicolas Olivier, arpenteur juré. Et fu mesuré à xvm piez la
«perche, en commençant à la bourne qui joint audit Hostel, jusques à l'autre
«bourne, en alant au Roole, qui fait le bout, et d'ilec, en traversant jusques an
«bout dudit clox, devers la rivière, et venant tout du long desdiz murs jusques
«aux murs de la petite Bretaigne, traversant les murs et fossez de Paris; et y fu
«trouvé la somme de xlv arpens 1 quartier vi perches; de quoy il fault rabatre,
«pour la maison feu messire Pierre Des Essarts, arpent et demy. Ainsi demeure
« xliii arpens et demi 1 quartier vi perches.
« Vault, à xx piez la perche, xxxvui arpens et demi.
«Le clox contient, à xvm piez la perche, xxxviu arpens xvi perches, et à xx piez,
« xxxiiii arpens.
«Et les murs et fossez et place dedens la Ville, entre lesd. murs et lesd. XV",
37.
292 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
s avecques le chemin qui va entre ledit clox et lesd. fossez , à la rivière de Seine ,
«par dehors la Ville, mi arpens et demi W. 11
Ainsi le clos, borné par le chemin sur les fossés et mesuré à dix-huit pieds la
perche, contenait trente-huit arpents et seize perches, ou trente quatre mille
trois cent quarante-quatre toises; notre restitutiou en produit trente quatre mille
trois cent trente-huit; la différence est donc de six toises, c'est-à-dire nulle, et
nous avons le droit de nous dire dans le vrai, car il serait bien plus extraordinaire
d'être arrivé à un tel résultat en prenant une mauvaise voie , que de l'avoir obtenu
avec les seules données dont nous disposions W .
Le clos des Quinze-Vingts a été quelquefois appelé clos Saunt-Louis : il est ainsi
désigné dans un titre de 1 569. La première maison qui en dépendait sur la rue
Saint-Honoré était un
Petit corps d'hôtel sans désignation en 1 5 1 3 , puis dit la maison du Cornet-
d'Or (1575), du Grand-Cornet (i6o3) et de Notre-Dame-de-Paix (1680), le-
quel faisait le coin occidental de la rue de l'Echelle. Cette maison , énoncée ctma-
asuren en i&53 et i^5c>, n'était point encore distincte de la suivante en 1/178,
et y était de nouveau réunie au xvme siècle. D'après un document de 1609, elle
aurait été, malgré sa petitesse, divisée précédemment en deux parties ayant pour
enseigne le Grand et le Petit-Cornet; mais peut-être est-ce seulement la maison
suivante qui a eu cette dernière enseigne; il est difficile de le décider à cause des
contradictions offertes par les titres.
Petite Maison sans désignation en 1 5 1 3, ayant eu pour enseigne les Quatre -
Vents en 1 555 et 1 6o3 , puis le Mortier-d' Argent en 1700.
Maison sans désignation en 1^07, puis dite du Cheval-Blanc (iia&-i68o); les
deux précédentes en avaient dépendu.
Maison sans désignation en 1 586, puis de l'Écu-de-France (1609) et du Coq
(1680). C'était un morcellement de la maison du Cheval-Blanc, avec laquelle elle
se confondit encore au xvme siècle. Au xvc et jusqu'à la fin du xvic, cette maison,
les trois que nous venons d'énoncer et celles qui en dépendaient sur la rue de
l'Echelle étaient nommées la maison ou le clos de la Poterie, plus spécialement
que les maisons suivantes, où il y eut pourtant une fabrique de tuiles, vraisem-
blablement le seul établissement de ce genre auquel l'ensemble de la propriété
ait dû l'appellation de maison de la Poterie.
(1) Inventaire coté 1 8 1 6 , folio 7 9 r". de Verniquet autre que celle dont nous nous sommes
(S) Nous ne chercherons point, en dissimulant la servi, ou de faire jouer quelque peu les lignes de
part du hasard dans le résultat sur lequel nous triangulation, pour produire un total de cent à
sommes tombé, à exagérer le succès de nos efforts. deux cents toises, soit supérieur, soit inférieur au
Nous disons aussi le chiffre que nous avons obtenu nôtre; mais une telle différence, quoique sensible
sans prétendre que chacun obtiendrait exactement le en apparence , n'aurait aucune importance en sem-
même. Il suffirait d'opérer sur une épreuve du plan blable matière.
RUE SAINT-HONORE. 293
Maison du «Daulphint» (i 555), puis des Serpettes (i 588), et encore du Dauphin
en 1680. Une portion de cette maison, du côté de l'ouest, s'appelait la maison
des Deux-Suisses dès i63o. La maison du Dauphin était un morcellement de la
suivante, avec laquelle elle se confondait dans la première moitié du xvie siècle.
Maison sans désignation en 1&07, où il existait alors une tuilerie; en îlilxS,
elle était dite la maison du Pavillon et renfermait encore une poterie. Considérée
comme unie à la précédente, elle avait pour enseigne l'Image Saint-Fiacre en
1 565. Envisagée comme maison distincte en 1 588 , elle avait repris l'enseigne
de kl'Ymage Sainct-Anthoine , » que nous lui avons trouvée en 1 A8 1 . En 1680,
c'était le logis du Pont-Saint-Pierre. Elle avait appartenu, en 1 55y, à Pierre
Legrant, rccappitaine des mullets du Roy, n puis, un peu plus tard, à Antoine
Hénault, qui remplissait des fonctions analogues pour le duc de Bourbon. En
1639, elle était possédée par l'écuyer de la Grande-Écurie, laquelle avait été
construite tout auprès, du temps de Catherine de Médicis.
En 1898, les Quinze-Vingts baillèrent à Richard Du Buisson une pièce de
terre de trois arpents, qui formait l'extrémité orientale de leur clos. C'est sur cette
terre qu'ont été successivement bâties toutes les maisons que nous venons d'énu-
mérer et toutes celles dont nous avons parlé à l'article de la rue de l'Échelle.
Pour en résumer l'histoire fort complexe, nous dirons qu'en 1/102 la propriété
où était déjà établie une tuilerie n'était point encore morcelée, mais que, en
1607, elle formait déjà deux maisons, dont la principale était celle du Cheval-
Blanc; vers i/i35, sur les jardins de ces deux maisons furent construites les
habitations bordant le chemin des fossés. Ce qui restait de la maison du coin,
dite encore de la Poterie, était subdivisé en une douzaine de parcelles dès le
milieu du xvic siècle. Catherine de Médicis ayant acquis les deux dernières vers
le midi, de nouvelles subdivisions eurent lieu, de telle sorte qu'en 1609, les
parcelles de la maison de la Poterie étaient au nombre de douze. Quant à la
maison du Pavillon, elle finit également par être divisée en deux, mais nous
n'en avons vu aucune preuve bien certaine avant 1 588. Au xve siècle, elle avait
abouti au jardin de la maison de la Poterie.
Maison de «l'Ymaige Nostre-Dame r> (1653-1700), bâtie sur un arpent de terre
baillé à Raoullet Joye, le 22 septembre i3g2. Il y existait une hôtellerie en 1 636,
et c'est sur son emplacement que le passage Delorme a été percé en 1808.
Maison sans désignation en i63A, puis du Mortier-d' Argent (1680), prove-
nant d'un morcellement de la précédente ou de la suivante.
Maison sans désignation en i53o, puis dite l'hôtel de Gallïe ( 1 5 8 3 ) ou du
Val-de-Gallye'1' (1587-1610), et de la Croix-Verte (1 634); elle fut bâtie sur un
arpent de terre baillé à Robin Sorin, le 22 septembre 1392.
(,) Le Val-de-Gally est une localité de la commune de Versailles.
294 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation en i448, puis de cr l'Imaige Sainct-Michel i> (i 5 19-1 610).
En i5io,, elle contenait un pressoir avec une foulerie, et sa superficie était de
deux arpents et demi, parce qu'elle était alors réunie à la suivante. Les écuries
de a Monseigneur, a c'est-à-dire du Dauphin, s'y trouvaient en 1680.
Maison sans désignation en 1661, et contenant alors un arpent. Elle a eu pour
enseigne le Cygne de 1 554 à 1700, et a été comprise ensuite dans les écuries du
Dauphin, qui sont devenues les grandes écuries du Roi. La rue des Pyramides,
dont le nom rappelle la campagne d'Egypte, a été ouverte sur l'emplacement de
la maison du Cygne, par arrêté consulaire du 17 vendémiaire an x.
Maison sans désignation en 1 555, énoncée jardin en 1 565, puis dite maison des
Trois-Croissants ou du Croissant en 1 62 5. On l'appelait l'Académie royale à la fin
du xvue siècle, parce qu'elle dépendait alors de la maison suivante. Elle a été
annexée aux grandes écuries du Roi sous le règne de Louis XV.
Maison sans désignation en i53o, qui, après avoir été au prévôt des mar-
chands Pierre Le Gendre, appartenait, en 1 55y, à Nicolas de Neufville, seigneur
de Villeroy, et, en 1 565, peut-être même en 1 5 1 9, avait pour enseigne la Corne-
de-Cerf. Dans le siècle suivant, elle s'appelait l'hôtel de Pluvinel, parce que le
célèbre écuyer de Louis XIII y avait établi son manège ou académie.
Maison sans désignation en i6o3, et renfermant alors la suivante,
Maison dite de la Réale W (1680).
Maison des Pigeons (1575), ou des Trois-Pigeons (1610), et aussi du Lion-d'Or
(1587), faisant le coin oriental de la rue Saint-Vincent ou du Dauphin. En 1610,
cette maison servait d'hôtellerie, et il en est question dans le procès de Ravaillac.
RUE DU DAUPHIN.
Cette rue ou plutôt cette impasse commençait au Manège des Tuileries, que
la rue de Rivoli représente, et elle finissait à la rue Saint-Honoré.
Sur l'emplacement des trois dernières maisons précédemment mentionnées il
ne s'en trouvait, en i4o6, qu'une seule, dont le terrain présentait une superficie
d'environ un arpent et demi. La rue du Daupbin occupe une partie de ce ter-
rain, et y fut ouverte à une époque qui n'est indiquée dans aucun ouvrage, mais
qui doit correspondre à l'année i56o ou environ. En effet, dans les comptes des
Quinze-Vingts pour l'année 1559-60 et dans les comptes antérieurs, il n'en est
aucunement question, tandis que, au contraire, dans le compte de 1 5 60-61 il
(1) La Réale étail le nom qu'on donnait à ia grande galère du Roi.
RUE DU DAUPHIN. 295
est dit, à propos de la maison des Pigeons, «à présent y a une rue appelée la
«rue Sainct-Vincent,ii formule répétée dans plusieurs comptes postérieurs. En
15^6, on y faisait déjà des ventes de terrains correspondant au lotissement des
plans modernes, et la rue était totalement bâtie en ihyb.
Nous n'avons point vu qu'il y ait jamais eu une enseigne de Saint-Vincent dans
la rue, et d'ailleurs elle a été dite rue Saint-Vincent dès son origine, avant qu'il
y existât des maisons; aussi supposons-nous que ce nom lui fut donné par Vin-
cent Macyot, propriétaire d'un logis voisin. Au xvme siècle, une porte, qui se
fermait chaque soir, était placée à l'extrémité méridionale de la rue, qu'on n'en
considérait pas moins comme une impasse; de là l'inscription de Cul-de-Sac-
Saint- Vincent qu'on y remarquait, et à laquelle on substitua celle de rue du
Dauphin au mois de novembre f]kk, un jour que le Dauphin avait passé dans
la rue pour se rendre à Saint-Roch. Théâtre d'un de ces combats du i3 ven-
démiaire an iv où le général Bonaparte défendit énergiquement la Convention
contre les sections insurgées, elle a été appelée pendant un temps rue de la
Convention; elle a été aussi dénommée rue du Trocadéro, suivant une ordonnance
du 22 juin 1820, qui en prescrivait l'élargissement, opération effectuée un peu
plus tard. En i83o, elle a repris le nom de rue du Dauphin, qu'elle a perdu de
nouveau en 1868, mais qui lui a été rendu depuis.
La rue du Dauphin, jadis large de trois toises, l'est aujourd'hui de près de
douze mètres.
CÔTÉ ORIENTAL.
PAROISSE DE SAIlNT-GERMAIi\-L'AUXERROIS, PUIS DE SAINT-ROCH.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉvÊCHE.
Maison sans désignation en 1 575, et du Lion-d'Or en i6o3, contiguë à la mai-
son faisant le coin de la rue Saint-Honoré. Elle en dépendait encore en 1687.
Trois maisons sans désignation (1675).
Maison sans désignation en 1675, et ayant eu pour enseigne le Nom-de-Jésus
en 1687.
Deux maisons sans désignation (1 575).
Petite maison sans désignation en 1 575, et dite couverte de chaume en 1 6 1 3.
Elle tenait à la porte du Manège des Tuileries, n'avait que deux toises et deux
pieds de largeur, et fut réunie à la précédente en 1687. Elle appartenait alors à
la dame de Poitrincourt.
296 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
CÔTÉ OCCIDENTAL.
PAROISSE DE SAINT-GERMAINLAUXERROIS, PUIS DE SAINTROCH.
HAUTE JUSTICE
ET CENSIVE DE L'ÉvÊCIlÉ.
Maison sans désignation (1675), contiguë à la porte du Manège.
Deux maisons sans désignation (1 5^5 ).
Maison sans désignation en 1675, et de la Corne-de-Cerf en i6o3.
Maison sans désignation en 1675, et de l'Ecu-de-France en i6o3. H semble
y avoir eu alors, entre cette maison et la suivante, une autre maison sans désigna-
tion , dont il n'est fait mention ni antérieurement ni plus tard.
Maison sans désignation en 1675, puis de l'Image Notre-Dame (1608-1687).
Maison sans désignation en 1675, et du Compas en 1687.
Maison sans désignation (1675).
Maison sans désignation en 1675, et dite de la Trinité en 1687.
Deux maisons sans désignation en 1675; la seconde, contiguë à la maison
faisant le coin de la rue Saint-Honoré , avait pour enseigne le Cerf-Volant
en 1700.
RUE SAINT-HONORE.
(Continuation.)
Maison «des Trois-Saulcyères •» (160 3-i 63 0), puis de la Grâce-de-Dieu (1687),
faisant le coin occidental de la rue Saint- Vincent.
Maison sans désignation en i6o3, puis de la Truie-qui-File (1607-1687).
Maison de l'Ecu-de-France (1608), puiscrDE l'Espée-Royaleti (1635-1687). Elle
appartint à André Le Nôtre, contrôleur des bâtiments de Louis XIV, et parait
avoir été réunie à la maison du Cerf-Volant de la rue Saint-Vincent, vers 1700.
Jardin clos de murs avec «ung petit édifficert (i564), qui fut possédé par ce
Vincent Macyot dont nous avons parlé. En 1675, la propriété était énoncée
«maison, n et, en i6o3, il y pendait pour enseigne «l'Escryptoire.t! C'est du
jardin de Macyot que faisaient partie ces soixante-sept perches deux tiers de ter-
rain dont il a été question page 290.
RUE SAINT-HONORE. 297
Maison sans désignation (i6o3), laquelle semble n'avoir été qu'une portion de
la précédente!
Maison sans désignation en i&55, puis «des Carnaulxti (i5o2-i5i5) et «de
«l'Eschiquieru (1520-1672). Elle fut construite sur deux arpents baillés à Raoul
Forges le 22 septembre i3g2.En ikho, elle était déjà divisée en deux parties,
dont l'une n'avait que le tiers de la superficie de l'autre. En 1687, elle appar-
tenait en totalité à Louis de Valentiné, marquis d'Ussé, et était morcelée en cinq
louages. En i632, distincte de la maison de l'Echiquier, qui était la seconde,
elle appartenait au président de Lozon.
Maison sans désignation en i6o3; plus anciennement elle se confondait avec
une des maisons qui lui ont été contiguës.
Maison de la Trinité (i588-i6i3), qui paraît être la partie de la maison des
Carneaux où pendit d'abord pour enseigne l'Échiquier. On confondait souvent le
logis de la Trinité avec la maison des Carneaux, à laquelle il aboutissait.
Maison sans désignation en 1&26, qui était à l'état de ruine en 1&80, et que
remplacèrent deux maisons toujours mentionnées ensemble, dont l'une avait pour
enseigne l'Image Saint-Jacques (1 563-1 612).
Maison de l'Autruche? (1569), puis du Lion-d'Or (1620), des Trois-Maures et
des Trois-Saints-Jean (i665), faisant anciennement partie des deux suivantes.
Maison de l'Autruche (1620-1672). La mention de la maison de l'Autruche se
rencontre dès 1&69; mais il semble que cette enseigne appartenait alors à la
maison précédente , et que la maison objet de cet article n'était qu'un des deux
corps d'hôtel de la suivante.
Maison de la Corne-de-Cerf (1669-1672), et aussi du Lion-d'Or (1 638). Elle
était énoncée «petite maison n en 1 h 1 0, et fut bâtie sur un arpent de terre baillé
à Bernard Roux le 22 septembre i3g2. Les trois corps d'hôtel dont elle se com-
posait aboutissaient tous au parc des Tuileries en 1589.
Sur l'emplacement de la maison de la Corne-de-Cerf, et par ordonnance du
16 mai 1826, a été percée une rue destinée à porter le nom du duc de Bor-
deaux; mais, par décision du 19 août i83o, elle a été appelée rue du 29 Juillet,
en souvenir du dernier jour de combat de la révolution de i83o.
Maison de «la Serpente, n donnée, le dernier février i368, par Jean Lebret et
sa femme aux Aveugles, qui la possédaient encore à la fin du xvne siècle. En
1596, elle avait pour enseigne «l'Image Saint-Loys,t> et, en 1676, le Petit-Saint-
Louis. Vers cette dernière époque, une partie de son jardin ayant été annexée
à la maison précédente, elle cessa d'aboutir, comme auparavant, au jardin des
Tuileries. Elle paraît se confondre avec celle qui fut construite sur un arpent baillé,
le 22 septembre i3g2, à Pierre Pébier ou Vébier, et nous comprenons mal com-
ment cela se concilie avec la donation de 1 368.
1. 38
298 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Maison sans désignation (i&53), élevée sur un arpent de terre baillé à J. Dau-
noy Périer le 22 septembre 1892. En 1 533 , elle avait pour enseigne la Liberté,
et contenait un jeu de paume, qui n'existait plus en 1 63 1 W. En 1 672, elle appar-
tenait à la comtesse de Foix et s'appelait en conséquence l'hôtel de Foix. Pos-
sédée, en 1687, par Henri Pussort, oncle du ministre Colbert, qui la fit rebâtir
par de Lassurance(2), elle fut appelée l'hôtel Pussort, puis l'hôtel d'Armenonville,
à cause de Vincent Bertin, seigneur d'Armenonville, directeur général des finances ,
qui l'acheta de Pussort en 1691; elle prit enfin le nom d'uÔTEL de No ailles , lorsque
la mère du duc de Noailles en eut fait acquisition, le 1 1 mars 171 1 ; elle était
alors réunie, depuis un certain temps, à la maison suivante. En 1 7 1 5 , on y fit des
embellissements considérables : le jardin en fut dessiné de nouveau par Charpen-
tier et orné de statues par Falconnet. Charpentier dirigea aussi les grisailles que
Parocel le neveu exécuta dans la chapelle; le plafond et le retable de cet édifice
étaient l'œuvre, l'un de Brunetti, et l'autre de Philippe de Champagne. A la
suite de ces travaux, le duc de Noailles fit poser une barrière devant sa porte,
hardiesse dont on parla beaucoup : le droit d'avoir une barrière ainsi placée était
un privilège réservé aux princes du sang et à un nombre très-restreint de hauts
dignitaires.
Sous le premier Empire, l'architrésorier Lebrun habitait l'hôtel de Noailles,
dont les plans ont été publiés par lord Francis-Henry Egerton , qui l'acheta en
1816. Sur l'emplacement de l'hôtel, et suivant une autorisation du 20 septembre
i83o, on a percé une rue qui, d'abord nommée rue Lolis-Philippe Ier, a été appe-
lée rue d'Alger depuis i832.
Maison sans désignation en i556, puis de la Queue-de-Benard en 1627. Elle
semble avoir été bâtie sur un arpent de terre baillé à Jehan de Pissy le 2 3 jan-
vier i3g3, et le jardin en fut incorporé à la maison précédente par acquisition
du 29 avril 1 628.
Maison sans désignation en i5o8, puis de l'Image Sainte-Geneviève en i564
et 1 6 1 3 , qui paraît avoir été élevée sur deux arpents de terre baillés à Jean
Béroust, plâtrier, le 22 septembre 1392. Il n'est point aisé d'en fixer les limites.
En 1672, elle appartenait en partie aux Feuillants, mais nous ne savons dans
quelles proportions ils l'annexèrent à leur enclos; nous supposons qu'ils n'en
acquirent qu'une faible parcelle, qui aura produit le décrochement du mur mi-
toyen de leur couvent, près la rue Saint-Honoré. A la fin du xvne siècle, la maison
de l'Image Sainte-Geneviève était réunie à l'hôtel de Pussort.
Maison sans désignation (i5o8), et très-probablement construite sur l'arpent
(1) Ce jeu de paume est appelé « Jeu de paulme (S) La façade sur les jardins est attribuée a Marot
fde Cléol,r dans le sommaire d'un titre de i58g, père, par Florent-Le-Comte , dans ses Singularités
et partout ailleurs , Jeu de paume de la Liberté. d'architecture.
RUE SAINT-HOIVORE. 299
baillé à Denis Auveau le 22 septembre i3g2. Elle appartenait aux Feuillants dès
1 658 , et était déjà réunie à leur clos en 1672. Si nous ne nous trompons, la
partie voisine de la rue Saint-Honoré fut conservée, et c'est la même que la mai-
son de la Croix-de-Lorraine (i 635) , la première de ces neuf maisons en bordure
sur la rue qui constituaient la limite septentrionale du couvent. Rien ne recom-
mande à l'attention ces neuf maisons, dont la huitième faisait le côté oriental de
la grande porte du monastère, et la neuvième, le côté occidental.
Maison sans désignation en i 48 o, et de l'Image Saint-Jean avant 1602. Ce n'était
encore en 1/102 qu'un jardin avec vignes, planté sur l'arpent de terrain baillé à
Michelet Milon le 22 septembre 1892. La maison de l'Image Saint-Jean fut acquise
par les Feuillants entre les années i63i et 1 658 ; elle était jointe à leur enclos
en 1672.
Jardin (i53o) où, en 1 588 , il existait depuis peu une petite maison; le tout
occupait un arpent baillé, le 22 septembre i3g2, à Sainctin Lainsot. D'après
un titre de 1587, le terrain n'aurait été que de trois quartiers; il appartenait aux
Feuillants en 1 63 1 , et était incorporé à leur couvent en 1 658.
Maison et grange (1 435) élevées sur un arpent baillé à Jean Benoist le 22 sep-
tembre 1 392. Cette maison doit être la même que celle qu'un nommé Bélot ven-
dit aux Feuillants le 12 mars 1601, et qui, alors contiguëà leur monastère, avait
sept toises de largeur n entre les deux meurs, -n Nous avons lu dans les archives
du couvent que sur l'emplacement de cette maison on construisit le crrond,n
c'est-à-dire le chevet de l'église, renseignement qui confirme notre restitution.
Deux petites maisons sans désignation, avec terres annexées (i44o). En 1507,
c'était «l'Ostel des Carnallx,h derrière lequel s'étendaient quatre arpents. Le
7 novembre 1 585, Jeanne Maufex, veuve de La Leu, à qui appartenait l'hôtel
des Carneaux, alors en ruine, le vendit au roi Henri III pour la somme de trois
mille trois cent trente-trois écus sol et un tiers. Ce manoir était large de vingt-huit
toises quatre pieds et demi, et profond de soixante et quatorze toises; il contenait
donc plus de deux arpents. H avait été bâti sur un premier arpent baillé à Re-
gnault Hasard le h janvier 1892, sur un second baillé à Colin de La Ruelle
le 12 novembre 1892, et sur un troisième baillé le même jour à Thierry Wil-
lèmes.
COUVENT DES FEUILLANTS. Un des effets de cet extrême relâchement de la
discipline ecclésiastique qui signala le commencement du xvie siècle et contribua
tant aux progrès de la Réforme fut de pousser quelques catholiques ardents à
faire profession d'une austérité exagérée. C'est ainsi que Jean de La Barrière, né
le 29 avril i546, à Saint-Céré en Quercy, nommé en i563 abbé commencla-
taire, et en 1577 abbé régulier de Notre-Dame de Feuillans, au diocèse de
Rieux, près de Toulouse, se proposa non-seulement de faire revivre dans son inté-
38.
300 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
grité la règle de saint Benoît, telle que l'avaient d'abord observée les Cisterciens,
mais encore d'en augmenter la sévérité par les pratiques d'un ascétisme rigoureux.
Donnant lui-même l'exemple des mortifications, il réunit un grand nombre de
disciples et s'acquit rapidement une réputation considérable, qui émut Henri III.
Ce prince, désireux de voir le pieux abbé, lui écrivit, le 20 mai i58o, pour l'en-
gager à se rendre à Paris; Jean de La Barrière accéda à cette demande au mois
d'août suivant, et il obtint par son éloquence et par sa vie édifiante un tel succès
près du Boi, que celui-ci, après avoir voulu le retenir, ne le laissa partir que sur
l'assurance qu'il reviendrait à Paris, où on lui bâtirait un couvent. Néanmoins
sept années se passèrent avant que le projet se réalisât, et il paraît même que, au
moment où Jean de La Barrière arriva à Charenton avec soixante-deux religieux ,
le 1 1 juillet 1587, le lieu où ils devaient être établis n'était pas encore fixé.
Nous lisons, en effet, dans une chronique manuscrite de l'abbaye de Long-
champ W, que le jour de sainte Marguerite, c'est-à-dire le 20 juillet, Henri III
alla brusquement trouver la supérieure de cette communauté, pour lui signifier
qu'elle eût à se transporter avec ses sœurs à l'abbaye du Val , celle de Longchamp
étant destinée par lui à loger les Feuillants. En vain l'abbesse lui fit-elle des
représentations et le pria-t-elle de ne point persister dans sa résolution; en la
quittant, il lui répéta que sa décision était irrévocable. Elle ne le fut point toute-
fois, car, quelques jours après, sur les remontrances de plusieurs personnages et
particulièrement de l'abbé de Feuillans lui-même, le Boi renonça à son projet,
et donna à Jean de La Barrière ainsi qu'à ses moines la maison des Carneaux, où
il avait d'abord voulu placer les Hiéronimites I2'. Les Feuillants en prirent pos-
session le 8 septembre <3), venant de Vincennes, où ils avaient demeuré depuis leur
arrivée, et deux mois après, le 1 3 novembre, une bulle de Sixte-Quint érigea
en titre leur communauté, sous le nom de Congrégation de Notre-Dame de Feuillans.
Jean de La Barrière repartit le ier août de l'année suivante.
D'après ce qui précède, et quoi qu'on en ait dit, il e&t vraisemblable que, lors
de l'installation des Feuillants dans la maison des Carneaux, rien n'avait été pré-
paré à l'avance pour les y recevoir, et le Boi dut y pourvoir en faisant construire
ou réparer des bâtiments^. La journée des Barricades et les événements qui la
(l) Arch. de l'Emp. reg. LL 160&, fol. 97 r°. preuve. Peut-être les Feuillants, arrivés à Charenton
(,) Arch. de l'Emp. cart. S 3705. le 9, ne s'installèrent-iis à Vincennes que le 11 ; il
m Suivant Du Breul (p. 93a), qui spécifie que n'y a rien à ce sujet dans leurs archives,
c'était le jour de la Nalivité de Notre-Dame. Une (4) Ces constructions durent être faites sous la
inscription des vitraux du cloître donnait la date conduite de Baptiste Androuet Du Cerceau, à propos
du 7, adoptée par Jaillot. Ce dernier auteur dit duquel le duc de Neversdil: rrEtde fait, il ne bou-
aussi que les Feuillants arrivèrent à Vincennes le «geoit ordinairement d'avec les Capucins, Minimes,
9 juillet, et non le 1 1 ; mais il n'en fournit point de c Feuillans, Jésuites et autres religieux et prestres.
RUE SAINT-HONORE. 301
suivirent interrompirent les travaux. Pendant les troubles, les Feuillants s'empa-
rèrent de pavillons que Henri III avait fait bâtir sur le terrain d'une maison voi-
sine, dépendant du couvent des Capucins; mais cette usurpation n'empêcha point
leur position de devenir si précaire, au milieu des orages de la Ligue, qu'ils aban-
donnèrent presque tous leur maison. Le i 1 mars 1 5 9 5 , une ordonnance royale,
où il est dit qu'ils n'étaient plus que quatre et qu'ils se trouvaient ainsi dans
l'impossibilité de desservir l'Eglise, les autorisa à se retirer en Languedoc, et
leur alloua à chacun vingt écus pour les frais du voyage; cette ordonnance leur
fut signifiée le 1 7 mars. Loin de montrer de l'empressement à en profiter, ils répon-
dirent que le Roi avait été trompé sur l'état réel de leurs affaires, qu'ils n'étaient
pas moins de neuf, fort pauvres, à la vérité , et que, si le Roi voulait bien leur accor-
der son appui, ils décideraient à revenir ceux de leurs frères qui avaient quitté la
ville, et qui étaient au nombre de soixante profès^. Henri IV leur permit alors de
rester à Paris, et il approuva leur institution par lettres du 28 mars i5g5, qui
furent confirmées par d'autres lettres, de mars 1 597 et du 2 5 août 1 598 , où leur
furent concédés tous les privilèges dont jouissaient les maisons religieuses de fon-
dation royale. Dans le dessein d'assurer l'existence de la communauté des Feuil-
lants, Henri III, par brevet du 8 février 1 588 , leur avait donné en commende
l'abbaye du Val ; les circonstances s'opposèrent à ce qu'ils en profitassent avant
le règne de Louis XIII, et l'arrêt qui mit à leur disposition les revenus de cette
abbaye porte la date du h mars 1616. L'union de la mense abbatfale aux reve-
nus des Feuillants avait été ordonnée dès le mois de juillet 1 6 1 1 ; celle de la
mense conventuelle le fut le ik décembre 162 &W. Le monastère des Feuillants
de Paris était le plus considérable de toute la Congrégation; l'abbé, élu tous les
trois ans par un chapitre général, ne pouvait être maintenu plus de six ans en sa
charge; il devait résider alternativement six mois à Paris et six mois à Feuil-
lans. La règle sévère de Jean de La Barrière, adoucie, en 1 5g5 , par le pape
Clément VIII, le fut encore, dans la suite, par le pape Clément XI, qui supprima
l'obligation de marcher pieds nus, imposée par le fondateur.
On reconstruisit l'église des Feuillants au commencement du xvuc siècle. Les
frais furent en grande partie couverts par les aumônes que les Religieux recueilli-
rent lorsque l'Évêque de Paris établit une station chez eux, à l'occasion du grand
jubilé ouvert en 1600 par Clément VIII. La station avait lieu dans une chapelle
provisoire, décorée des armoiries du Pape, du Roi, de la Reine et du cardinal de
Gondi; elle était située dans l'enceinte même de celle qu'on était occupé à COUS-
fr avec lesquels Sa Majesté" (Henri III) luy avoit (1) Arch. de l'Emp. fonds des Feuillants, cart. S
- commandé de conférer, pour dresser les baslimens h 1 65-4 1 66.
iret églises à leur commodité.» (,) Félibien, p. 1 160.
302 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
truire W. Les fondements du nouvel édifice comptaient huit pieds en terre le 1 3 juin
1600, et furent bénits par l'archevêque d'Auch le 19 août suivant, jour auquel
le Prévôt des marchands posa la première pierre de l'édifice ("2>. Cette première
pierre était destinée à supporter le maître-autel; elle fut déplacée par suite
d'un changement dans les projets adoptés, et posée derechef le 26 mars 1601,
«le Roy et la Royne ayant esté suppliés de le faire. t> Pour donner plus d'ampleur
au monument, on abattit alors la muraille d'une maison voisine, qu'on avait ache-
tée, le 12 mars, au nommé Rélot. Les travaux durèrent longtemps. Le h dé-
cembre 1606, on fit marché avec les nommés Pierre et Gabriel pour l'érection
d'un clocher, et la consécration de l'église eut lieu par les soins du cardinal de
Sourdis, le 5 août 1608, sous le vocable de Saint-Bernard. L'église n'était d'ail-
leurs pas achevée, car le portail, commencé au mois de février 1623, à l'aide des
libéralités de Louis XIII, ne fut terminé qu'en 1 626. Il se composait de deux ordres,
ionique et corinthien , superposés ; dans les entre-colonnements de l'ordre infé-
rieur étaient placées deux figures du sculpteur Guillain. Le portail était une des
premières œuvres de François Mansard. Quant aux autres travaux, ils paraissent
avoir été dirigés d'abord par un architecte du nom de Jean Crespin , auquel suc-
céda, de 1602 à i6o5, Mc Achille Le Télier^, que les comptes qualifient de
tr conducteur de la fabricque n ou a de la besoigne , n et qui recevait six livres par
chaque semaine réputée de cinq jours. Le registre où nous trouvons ces détails
contient un ctroole de ceux à quin étaient crdeues les cappelles de l'esglise neufve ,
a pour en avoir paie la massonnerie ; 11 il y est indiqué que M. Poncher eut per-
mission du chapitre général de 1601 de poser ses armoiries en l'une des cha-
pelles; que Louis de Bellegarde donna, le 27 juin 1601, trois cents écus pour
l'œuvre; que le duc d'Épernon en donna cent cinquante le 9 juillet, etc. En 1 62 1 ,
Gaston de France, frère du Roi, posa la première pierre d'une chapelle dont il fit
partiellement les frais, et qu'on appelait la Grotte.
L'église était remarquable par la quantité d'œuvres d'art qu'elle contenait. Le
grand autel, à colonnes torses, avait pour retable un tableau donné par Marie de
Médicis, et représentant l'Assomption de la Vierge. Ce tableau avait été peint
par Jacob Bunel, à l'exception de la tête delà Vierge, que Lafosse avait exécutée,
Bunel s'étant refusé par scrupule religieux à la faire lui-même. Bunel avait
également peint pour la chapelle du chœur un Christ au jardin des Oliviers. De
(1) Le peintre qui peignit ces armoiries et fit passe ie 1" septembre, avec M' Remy Coliin, en-
rrung pourtrait de la nouvelle églises reçut vingt- trepreneur des bâtiments du château de Fontaine-
trois écus. (Voir aux Arch. de l'Emp. le registre bleau.
coté LL i5/io, lequel contient les comptes de la (3) rrM* Archilles Le Télier, conducteur de la fa-
construction de l'édifice. ) cr bricque , pour trois journées qu'il s'est emploie des-
(,) Le contrat pour l'exécution des travaux fut rrpuis le despart de M' Jean Crespin, 3 1. ta s.»
RUE SAINT-HONORE. 303
chaque côté de l'édifice il y avait sept chapelles latérales. Dans la première du rang
septentrional,' laquelle répondait à la travée du chœur, on voyait la figure sculptée
en marbre blanc de Raimond Phélypeaux, seigneur d'Herbaut, conseiller et
secrétaire d'Etat sous Louis XIII, mort le 2 mai 1629. La seconde chapelle du
même côté, qui était la première de la nef, appartenait à la famille Pelletier; la
troisième, qui avait été celle de M. de Vendôme, renfermait une statue de la
Vierge, de Jacques Sarrazin; dans la quatrième était un tombeau de marbre noir,
avec des figures en marbre blanc représentant des Vertus, et le buste, aussi en
marbre, de Guillaume de Montholon, conseiller d'État, mort le 1 1 mai 1722.
Le mausolée du maréchal de Marillac, décapité en Grève le 10 mai i632, et de
sa femme, qui mourut de douleur un peu avant le supplice de son époux,
garnissait la cinquième chapelle. Au pied-droit qui la séparait de la quatrième
était adossé le cénotaphe de Henri de Lorraine, comte d'Harcourt, et d'Alphonse
de Lorraine, son fils, chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Ce céno-
taphe , en marbre noir, exhaussé sur un soubassement de marbres variés et dominé
par un groupe de figures allégoriques, avait été érigé en 1695, et était dû au
ciseau de Nicolas Renard, de Nancy. On admirait dans la sixième chapelle plu-
sieurs peintures de Simon Vouet, entre autres le saint Michel, qui passait pour
son chef-d'œuvre. Du côté méridional, trois chapelles attiraient principalement les
regards : la première, dépendant de la travée du chœur, contenait le tombeau
en marbre blanc et en forme d'urne de Jeanne-Armande de Schomberg, prin-
cesse de Guéméné, morte le 10 juillet 1706; dans la seconde, qui appartenait à
la famille de Beringhen, fut inhumé le maréchal d'Uxelles, mort le 10 avril 1780.
La cinquième était la célèbre chapelle des Rostaing, et se distinguait par un
grand luxe de marbres; on y remarquait une colonne de marbre porlor, sur-
montée d'une urne où avait été déposé le cœur d'Anne Hurault, femme de Charles
de Rostaing, morte le 16 avril 1 635 ; un sarcophage en marbre noir, supportant
les deux figures agenouillées de Tristan de Rostaing, mort le 7 mars 1C91, et
de Charles de Rostaing, mort le k janvier 1 660; les quatre bustes, portés sur des
colonnes de brèche à chapiteaux dorés, de Louis, Jean, Antoine et Gaston de Ros-
taing, tous enterrés dans la chapelle. La sixième chapelle contenait la statue
agenouillée de Claude de L'Aubépine, femme de Médéric de Barbezières, morte
le 21 juin 161 3. Dans la septième chapelle on lisait l'épitaphe suivante, la seule
que nous ayons à transcrire'1' :
Cy-gist damoiselle Marie Foucault, en son vivant femme de Marc de Ri ion, sieur de Guy-
trancourt, conseiller du Roy et trésorier général de France, en Rerry; qui fut fille de noble
(1> On trouvera une liste complète des épitaphes du couvent dans la nouvelle et excellente édition de l'ou-
vrage de Lebeufque publie M. H. Cocheris (t. I, p. 3o2).
304 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
homme Jehan Foucault, sieur de Rosay, et de damoiselle Marie Le Lièvre, sa femme; ayant
este' ledict Foucault aussi trésorier ge'ne'ral de France audict pays de Rerry, et auparavant con-
seiller et secrétaire du Roy Henry III, et recevant ses coniniandemens en l'absence de Messieurs
les Ministres d'Estat. Laquelle damoiselle Foucault ayant durant le cours de sa vie rendu tesmoi-
gnage, en toutes ses actions, de grande vertu et principalement en la piété et dévotion, a voulu
en laisser ici une particulière marque en ceste chapelle, quelle a fait continuer en Ihonneur
de Dieu et de sainte Geneviève, et en laquelle elle a esleu sa sépulture, qui se trouve la pre-
mière faite en ceste église. Elle trespassa le xv" jour de novembre M VIe IX , qui estoit le xxme
de son aage.
Ses héritiers ont fait apposer cette épitaphe à sa mémoire. Priez Dieu pour son âme.
Dans le chœur de l'église était en outre la tombe en marbre noir de D. Goulu,
général de l'ordre, mort en 1627, et dans le chapitre on voyait plusieurs pierres
tuinulaires de généraux ou de prédicateurs célèbres.
La grande entrée du couvent, décorée de quatre colonnes corinthiennes avec
entablement et fronton , donnait sur la rue Saint-Honoré ; elle avait été élevée par
Mansard en 1677W. Au-dessus de la baie était sculpté un bas-relief représentant
la réception de Jean de La Barrière par Henri III. Après avoir franchi la porte,
on pénétrait dans une cour où s'ouvrait la porte particulière des bâtiments claus-
traux ainsi que celle de l'église; cette cour servait de passage public pour parvenir
à la ruelle dite des Feuillants, conduisant aux Tuileries. Le cloître offrait des baies
fermées de vitraux sur lesquels avaient été peints en apprêt par Sempi, d'après
les cartons d'Élie, divers épisodes de la vie du fondateur, et l'on y apercevait
quelques tableaux médiocres d'Aubin Vouet, frère de Simon Vouet. Dans la salle
dite du Roi on conservait une suite de portraits des rois et reines de France. La
bibliothèque, peu vaste, mais curieuse, était ornée d'une ordonnance de pilastres
corinthiens en menuiserie, et au-dessus des armoires on avait placé les portraits
de tous les généraux de la Congrégration. L'apothicairerie, située dans le cloître et
donnant sur le jardin , était renommée pour son élégance. Elle avait été commencée ,
en 1637, par le frère Christophe de Saint-François, religieux de l'ordre. « Elle
(t porte, dit Sauvai^, trois toises de long sur quatorze pieds de large, et est en-
te vironnée de tablettes, d'armoires et de tiroirs. Les armoires se ferment avec des
ff volets, et les tablettes avec des châssis de verre, afin d'en varier l'ordonnance et
rrde l'égayer. Des caryatides séparent ces tablettes et ces armoires, le tout cou-
rt ronné d'un entablement qui règne au pourtour de la chambre, et qu'avec le
fîtems onrehaus.se de vases et de livres de médecine. Tous ces divers enrichisse-
« mens, au reste, sont distribués dans ce petit espace avec tant d'ordre et d'agré-
ttment que rien ne paroît confus ni embarassé; tout y rit, tout y contente la vue
« et l'esprit; il n'y a point d'endroit où l'on ne voye quelque chose qui divertisse.
m La permission de bâtir ce porlail est du 1 A juin 1677. — (!) T. I, p. 385.
RUE SAINT-HONORE. 305
« Après avoir considéré ces termes caryatides , les yeux se délassent agréablement à
cr regarder les bas-reliefs taillés sur les volets de chaque armoire, qui représentent
«plusieurs guérisons miraculeuses opérées par Jésus-Christ et par saint Pierre. v
La menuiserie de l'infirmerie avait été exécutée par Pierre Dionyse; la sculpture
en avait été faite par lui et par Sarrazin le jeune.
Les bâtiments du couvent des Feuillants ont été détruits en 1S0U; pendant la
Révolution, ils avaient servi aux séances d'un club qui fut fondé en juin 1790,
et qui, sous le nom de club des Feuillants, joua un rôle important.
Maison sans désignation (1&37). Le 22 septembre 1892, les Quinze-Vingts
baillèrent un terrain de deux arpents, faisant l'extrémité de leur clos, à Bernard
Cavetet et à Mathé Rondot; le même jour, ce dernier céda l'arpent qui constituait
sa part à Colin Bigaudet. Telle est l'origine de l'avant-dernière maison du clos.
Elle appartenait, en 1 56 1, à la dame Du Perron, mère du cardinal de Retz, qui,
le h septembre 1 568 , la vendit 3,5 00 livres à Catherine de Médicis; donnée en-
suite par celle-ci aux Capucins, elle fut démolie par eux. Les plans n'offrent aucune
trace de ses limites; nous croyons pouvoir néanmoins restituer l'emplacement
de son mur oriental, dont la situation se déduit des faits suivants :
D'après le témoignage de plusieurs habitants du faubourg Saint-Honoré , témoi-
gnage recueilli dans une enquête qui eut lieu le 19 mai 1 589 (1), peu de temps
après être entrés en possession de l'hôtel Du Perron les Capucins l'abattirent, et
en vendirent les bois à un nommé Tenlaisne ; en sorte que , de cette maison , « en
tf laquelle, dit l'acte, estoit une allée par laquelle le duc de Retz alloit de sa
ff maison, sise èsdictz faulxbourgs, au pallais des Thuileries,i) il ne resta plus que
le sol, dont le Roi reprit bientôt une parcelle longue de soixante et quatorze
toises et large de six toises cinq pieds. Mais le Roi ne revint pas pour cela sur
la donation faite par sa mère; car, par acte passé devant notaire le ig mai 1589,
il prit l'engagement de rendre un jour aux Capucins le terrain dont il s'était
emparé, et de leur abandonner les constructions qu'il y avait fait élever, et qui
consistaient en <r quelques pavillons t> avec crune grande muraille depuis le faulx-
«r bourg Sainct-Honoré jusqu'à la susdite carrière (manège) des Tuilleries. 11 Dans
cette muraille avaient été percées deux portes; elles servaient au Roi, l'une pour se
rendre à l'église du couvent, et l'autre pour accéder à une seconde chapelle bâtie
par ses ordres plus avant encore sur le fonds des Religieux, auxquels il laissait,
en son absence, les clefs tant de la chapelle que des portes et des pavillons. Mais,
les Feuillants ayant été établis par lui dans la maison contiguë, il permit ou
toléra qu'ils s'emparassent des pavillons, en étendant ainsi leur pourpris sur la
terre des Capucins.
(1) Arch. de l'Emp. fonds des Capucins, cart. S 3705.
1. 39
306 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Les choses étaient dans cet état quand, le 1 5 septembre 1601, intervint un
arrêt du Conseil ordonnant que, sans avoir égard à certains prétendus jugements
des 7 et i3 juin 1 58g, le mur alors mitoyen entre les deux monastères demeu-
rerait la propriété des Capucins; qu'en deçà, c'est-à-dire sur le fonds des Feuil-
lants, on réserverait une rue de douze pieds de large, destinée au passage du Roi
se rendant du jardin des Tuileries au faubourg; que cette rue constituerait doré-
navant la séparation entre les enclos des deux communautés, et qu'elle serait fer-
mée, à ses extrémités, de portes dont chaque supérieur posséderait les clefs; que
les bâtiments des Feuillants empiétant sur la rue projetée seraient préalablement
démolis, et que le mur de leur côté serait élevé à leurs frais. Cet arrêt toutefois
ne reçut pas son exécution, et les parties conclurent à l'amiable un arrangement
que le Roi ratifia le 16 juin i6o3. Il y est dit que, au lieu d'ouvrir la rue de douze
pieds dont il avait été question , on laisserait tt la largeur et espace de quatorze
«piedz et demy dans œuvres, depuis la rue Sainct-Honoré jusques au troisiesme
«et dernier corps de logis, proche du jardin desdictz religieux Feuillans sur ladicte
« longueur, et, au devant du pignon dudict dernier corps de logis, dix piedz et
«demy de large; laquelle longueur et espace, contenant en tout trente-huict
«tfioises et un pied de long, demeurera au couvent desdictz religieux Capucins;
« et que par delà ladicte espace , lesdietz religieux Feuillans bastiront une mu-
et raille... au plus tard dans deux ans... laquelle muraille passera par dessoubz
«le grand corps de logis proche de la rue du faubourg. . . à. . . pareil alignement que
et ladicte muraille de ladicte place de quatorze piedz et demy de large... Et quant
«au surplus de ladicte rue en long, depuis ledict dernier corps proche dudict jar-
rtdin jusques au bout dudict jardin, abboutissant sur la lisse à picquem les «che-
crvaulx, contenant trente-neuf thoises et quatre piedz de long, et sur la largeur
«jusques contre la muraille et séparation qui est desdictz religieux Capucins avec
« lesdietz religieux Feuillans, demeurera aussy en propre au couvent desdictz
tt religieux Feuillans W, •»
Les limites posées en 1 6o3 produisirent le décrochement que présentait le mur
de clôture des Capucins, vers l'orient, et elles n'ont point varié depuis; mais, sous
la minorité de Louis XIV'2', les Feuillants établirent, îe long de ce même mur et
sur leur propre fonds, un passage qui, aboutissant à la grande cour devant leur
église, a servi de communication entre les Tuileries et la rue Saint-Honoré jus-
qu'à l'ouverture de la rue Castiglione. Or il résulte de ce que nous venons de
rapporter que le mur de trente-neuf toises au pied duquel était le passage se
confond avec le mur dont il est parlé dans l'arrêt de i6o3, lequel avait été cons-
truit par Henri III avant 1589, en empiétant de six toises cinq pieds sur la terre
''' Arch. de l'Emp. cart. S Ai 65-66. — {2) Et non de Louis XV, comme on le dit partout: le passage
est indiqué sur divers plans de la fin du xvn° siècle et môme sur celui de Gomboust.
RUE SAINT-HONORÉ. 307
des Capucins. Conséquemment c'est à six toises cinq pieds de la clôture moderne
de ces religieux que se trouvait l'emplacement de leur clôture ancienne, c'est-à-dire
celui du mur mitoyen oriental de l'hôtel Dû Perron. Le fait confirme ce que nous
avons avancé relativement à la maison vendue aux Feuillants par Bélot, et justifie
la largeur attribuée par les titres à la maison des Carneaux.
Maison sans désignation (1 A58), provenant de la cession faite, le 20 février
1392, à Gieffroy Bruyant, par Bernard Cavetet, de sa part des deux arpents
baillés à lui et à Mathé Bondot le 22 septembre précédent. Cette maison, la
dernière du clos des Quinze-Vingts, est dite contenir cinq quartiers en 1 568 ; en
1696, elle appartenait à Pierre Bureau, et en i53o, à Jean Teste, seigneur de
Coupeuray. En 1 5Ai , elle avait été acquise par Nicolas de Neufville, seigneur de
Villeroy, auquel succéda son troisième fils, Jean, seigneur de Chanteloup, qui la
vendit à Catherine de Médicis. Celle-ci, en 1 566 , racheta la rente dont la mai-
son était grevée au profit des Quinze-Vingts.
Jardin sans désignation (1689), qui contenait environ un arpent, et qui, dans
le siècle suivant, a été réuni à la maison de la Coquille.
Maison de la Coquille (1609-1 676), avec jardinet cerisaie. A la fin du XVe siècle,
elle renfermait deux arpents et demi, et en i53o, quoiqu'elle fût alors augmentée
de la propriété précédente, elle ne contenait que trois arpents, par le motif que,
en i52Ô, une partie du jardin avait été achetée par un nommé Augrain, posses-
seur de la maison contiguë à l'occident. Cependant un titre de 1607 indique
qu'il en dépendait alors quatre arpents. L'hôtel de la Coquille fut adjugé, en
1529, à Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy; il passa ensuite à son fils Jean,
et enfin à la reine Catherine, qui, y joignant les maisons de J. Teste et de la dame
Du Perron, y établit les Capucins.
COUVENT DES CAPUCINS. L'an i5a5, Mathieu de Baschi, moine du couvent
de Montefalcone , voulant rendre à la règle de Saint-François son austérité primi-
tive, se retira dans la solitude avec quelques compagnons, auxquels il fit adopter
un costume uniforme, imité, disait-on, de celui qu'avait porté le fondateur de
l'ordre. Le nombre des adeptes s'étant rapidement accru, ils sollicitèrent du pape
Clément VII, et en obtinrent, le i3 juillet i528, une bulle qui les autorisa à
porter la barbe longue, à mener la vie érémitique et à continuer de chercher des
prosélytes sous le nom de Frères mineurs Capucins, cette dernière expression pro-
venant du capuchon dont ils s'abritaient la tête. Formés ainsi en communauté ré-
gulière, ils assemblèrent, en i52g, un chapitre général, où furent rédigées leurs
constitutions, que Paul III approuva par une bulle du 25 août 1 536. Le même
pontife mit à leur tête un vicaire général, dont, l'an 1619, Paul V changea le
titre en celui de Général, et qui fut par lui soustrait à l'autorité du général des
Frères mineurs.
39.
308 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Le Cardinal de Lorraine, qui avait connu les Capucins au concile de Trente,
en fit venir quatre en France, et les logea dans son parc de Meudon. Ces quatre
religieux étaient Italiens, mais ils ne tardèrent pas à trouver des prosélytes fran-
çais, qui, aidés surtout par les aumônes de l'évêque de Sisteron, s'installèrent au
village de Picpus (faubourg Saint-Antoine), où Charles IX, au mois d'avril 1572 (1),
les autorisa à s'établir, en leur permettant de quêter, et en les prenant sous sa
protection particulière, comme de ce véritables Frères mineurs et légitimes enfans
« de Sainct-François. •»
Le pape Grégoire XIII, voyant que les Capucins prospéraient en France, ap-
prouva leur établissement par une bulle du 6 mai 1676. Au mois de juillet
de la même année, Catherine de Médicis, sympathique à tout ce qui venait d'Ita-
lie, leur fit don de l'hôtel des Coquilles, au faubourg Saint-Honoré , et de deux
maisons contiguës, concession ratifiée par lettres patentes du 25 septembre îb^k
et par d'autres lettres de juillet 1 576, qui furent confirmées le 19 octobre 1600
avec tous les privilèges y relatés.
La permission de bâtir avait été accordée aux Capucins par les lettres du
i5 septembre 1 57^; ils en profitèrent pour faire construire leur chapelle, s'il
est exact, comme l'assure Jaillot d'après un mémoire manuscrit, qu'elle ait été
consacrée le 28 novembre 1575. Lebeuf indique une autre dédicace, qui eut
lieu avec le concours de l'évêque de Sisteron, en 1 583. Peut-être cette dernière se
rapporte-t-elle à la «petite église -n qui fut élevée par Henri IIR2), et où ce prince
se rendait par une porte percée dans le mur objet de la contestation dont il a été
question plus haut. Quoi qu'il en soit, en 160 3, temps où le couvent avait atteint
à peu près les mêmes dimensions que celles qu'il offrit à l'époque de sa des-
truction, on commença l'érection, sur une plus vaste échelle, d'une nouvelle
église, qui fut achevée en 1610 et dédiée le 18 novembre de cette année par
le cardinal de Joyeuse. Cette église, dont le chœur fut rebâti en 1735, était simple,
et fort différente en cela de celle des Feuillants. On n'y admirait guère que le retable
du maître-autel, tableau de Lebrun, représentant l'Assomption de la Vierge. Parmi
les personnages qui y furent enterrés , on cite le frère du chancelier Brulart; Atha-
uase Mole, frère du président Matthieu Mole; le père Séraphin, un des prédicateurs
ordinaires de Louis XIV; le père Joseph Le Clerc Du Tremblay, connu par la part
qu'il prit au gouvernement, sous le ministère du cardinal de Richelieu, et le fa-
meux frère Ange de Joyeuse, inhumé près du père Joseph, devant le grand autel,
sous une simple plaque de marbre noir où était gravée l'inscription suivante :
ce Hoc tumulo condita sunt ossa Reverendi Patris Angeli de Joyosa, olini ducis,
«paris, marescalli Francise, et in provincia Occitana proregis. Qui, in ipso aetatis
(l) Jaillot a eu tort de révoquer en doute cette date. (Voir aux Arch. de l'Emp. le carton S 37 o5.)
<S) Cette petite église fut sans doute aussi l'œuvre de Baptiste Audrouet.
RUE SAINT-HONORÉ. 309
et flore, ut totum se Christo addiceret, tôt honores et opes abjecit, et ordinem Ca-
ctpucinorum ingressus, in eo reliquum vitae transegit, singulari pietatis et humi-
trlitatis exemplo; qui tandem obiit cum pro secunda vice esset provincialis pro-
«vinciae Franciae et definitor capituli generalis, anno Christi 1609. Henrica
rr Gatharina , Henrici Montispenserii ducis vidua , patri charissimo mœrens posuit. n
C'est également en i6o3 que furent reconstruits le mur séparant le jardin
potager d'avec le jardin W destiné à la promenade, celui qui longeait le parc des
Tuileries et les bâtiments de la Communauté, pour l'usage de laquelle le Roi
accorda un quart de pouce d'eau le 10 février 1 633. En 1731, on refit le mur
en bordure sur la rue Saint-Honoré, et le portail de ce côté, qui fut décoré avec
un peu plus de luxe qu'on n'avait l'habitude d'en étaler aux portes des couvents.
La maison des Capucins du faubourg Saint-Honoré était une des plus impor-
tantes de cet ordre en France; elle compta jusqu'à cent trente religieux. Comme
les autres établissements monastiques, elle fut supprimée en 1790 par l'Assem-
blée nationale, qui, après avoir, le 6 juillet, chargé la Municipalité de disposer
les bâtiments, y installa ses bureaux le 3o. Un arrêté consulaire du ier floréal anx,
ordonnant la vente de toutes les propriétés nationales comprises entre les Tuileries
et la rue Saint-Honoré, a causé la destruction complète des deux couvents des
Capucins et des Feuillants, sur l'emplacement desquels, par un autre arrêté du
17 vendémiaire an x, on perça, en continuation de la rue qui conduisait à la
place Vendôme, une voie nouvelle, qu'un décret du 1 1 juin 181 i nomma rue de
Castiglione. Les rues du Mont-Thabor, de Mondovi et celle qui forme le prolonge-
ment de la rue de Luxembourg furent ouvertes bientôt après suivant les plans
de l'architecte Percier, acceptés le 2 frimaire an xi. Entre le couvent des Capucins
et celui des dames de l'Assomption, mais sur le fonds de celles-ci, il y avait, dès la
lin du xvne siècle, un passage conduisant de la rue Saint-Honoré aux Tuileries;
ce passage existait encore en 1772, et paraît avoir été supprimé peu de temps
après.
Maison sans désignation en 1&89, et comprenant deux arpents et demi ou trois;
dite ensuite l'hôtel de la Trémouille (1576), puis de Joyeuse ou Du Bouchage,
parce qu'elle appartint au comte Du Bouchage, Henri de Joyeuse, maréchal de
France, qui se fit Capucin en 1587, et la légua aux Minimes de la province de
France (2>. Ceux-ci la vendirent au duc de La Rochefoucauld, évêque de Clermont,
lequel, forcé de s'en défaire par un arrêt du Parlement rendu le 1" mars i6o5,
la céda, le 2 août i6o5, à Lucas Gédouyn, agissant au nom des Jésuites. Le 3 fé-
vrier 1623, elle fut acquise de ces religieux par Marguerite de Gondi, marquise de
Maignelay, qui, le 1 2 mai suivant, en fit don aux Capucins, mais en s'en réservant
(l) Sauvai vante l'excellente culture et les belles allées de ces jardins. — m Au mois de mars 1598, on
y logea le chef de l'ambassade anglaise.
310 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
l'usufruit sa vie durant. Cette restriction ne nous explique pas d'ailleurs comment
la marquise put, le 12 juillet i63g, en aliéner un corps d'hôtel au profit des dames
de l'Assomption. L'aliénation, il est vrai, eut lieu dans le dessein de mettre fin
à un différend survenu entre les dames de l'Assomption et les Capucins, au sujet
d'un mur mitoyen entre les deux établissements, et d'une ruelle qui longeait ce
mur du côté du couchant. La ruelle, dépendant du corps d'hôtel abandonné par
la dame de Maignelay, avait deux toises de largeur et conduisait aux Tuileries;
elle occupait sans doute le même emplacement que le passage dont nous venons
de parler, et avec lequel elle se confondit peut-être; le terrain en fut incorporé
au jardin des dames de l'Assomption. Celles-ci avaient acquis le droit d'y faire
des plantations, en laissant aux Capucins la propriété du mur, qui doit être celui
qu'on voit sur les plans modernes.
Le corps d'hôtel, vendu en i63g aux dames de l'Assomption, a formé une
maison étroite qui, dans leurs archives, est nommée la Petite-Maison, et qui fut
possédée par François Fouquet et son frère Nicolas, le surintendant des finances,
connu par son faste et ses malheurs. Pour le reste de l'hôtel Du Bouchage, il
fut joint à l'enclos des Capucins; dès i6o3, ces moines en occupaient le jardin,
de sorte que l'hôtel n'aboutissait plus alors aux Tuileries comme anciennement. Il
y a de fortes présomptions pour croire que le terrain qu'il couvrait est le même
que celui d'un certain Clos-Pigeon, dont nous avons rencontré l'indication dans
un document de 1689.
Maison sans désignation (1^89), qui contenait deux arpents, et dont, en 1 5 1 6,
fut ensaisiné Me Gérard Le Coq, général des Monnaies. En 1600, elle appartenait
à l'évêque de Clermont, de même que la précédente, avec laquelle elle était en
quelque sorte confondue, et elle fut pareillement vendue aux Jésuites en i6o5.
Ils l'abandonnèrent au couvent de l'Assomption , le jour même où ils cédèrent l'hôtel
de la Trémouille à la marquise de Maignelay, c'est-à-dire le 3 février 1623.
Cette circonstance, et la confusion qu'on paraît avoir faite alors entre la maison
de Gérard Le Coq et celle de La Trémouille, ont rnotivé cette affirmation, souvent
répétée, que le couvent de l'Assomption avait d'abord été établi dans l'hôtel de
La Trémouille; mais, en réalité, les Religieuses n'ont jamais possédé que la faible
portion de cet hôtel cédée par la transaction du 12 juillet 1 63g.
Couvent des Dames de l'Assomption. L'institution charitable fondée, au
commencement du xive siècle, par Etienne Haudry, panetier de Philippe le Bel,
dans une maison de la rue de la Mortellerie, pour venir en aide à quelques
cr bonnes femmes veuves, n avait fini, sous l'influence des aumôniers du Roi, par se
transformer en une sorte de couvent, dont la maîtresse avait le titre de supérieure,
et les hospitalières, celui de sœurs. Le cardinal François de La Rochefoucauld,
désireux d'achever cette transformation, entreprit de substituer définitivement à
RUE SAINT-HONORE. 311
l'ancienne maison de refuge une communauté régulière suivant la règle de Saint-
Augustin. S'étant donc entouré de quelques ecclésiastiques et laïques notables,
il rédigea de nouvelles institutions, auxquelles les Haudriettes se soumirent, et
qu'elles jurèrent solennellement d'observer, le 27 novembre 1620 W. Ces cons-
titutions furent approuvées par le pape Grégoire XV le 5 décembre 1622; mais
elles ne furent enregistrées au Parlement que le 9 juin 1657, en raison des
causes que voici.
Le cardinal de La Rochefoucauld, en effectuant des projets flatteurs pour son
amour-propre, avait entièrement dénaturé l'institution d'Etienne Haudry. 11 avait
métamorphosé en un établissement complètement religieux une maison dont la
destination primitive était exclusivement charitable, et il avait ajouté à ce tort
celui de supprimer le nom du bienfaisant fondateur; enfin il avait outre-passé
fort évidemment ses droits. Aussi, sur l'appel de quelques veuves se refusant à
accepter la nouvelle position qui leur était faite, et sur l'intervention du Corps
de ville, le Grand Conseil rendit, le 1 3 décembre 162 k, un arrêt par lequel il
fut ordonné que les veuves seraient réintégrées dans leur hospice, qu'elles rentre-
raient en possession de leurs biens, et que les anciens statuts seraient remis en
vigueur. Une pareille décision ne pouvait convenir au Cardinal, qui fit évoquer
l'affaire devant le Conseil privé, et y obtint gain de cause par arrêt du 11 juil-
let 1625. Comprenant toutefois qu'on lui reprocherait avec raison d'avoir abusé
de son influence, et voulant atténuer le mauvais effet de son procédé, le 10 mars
i632 il prescrivit aux dames de l'Assomption de recueillir dans leur maison six
femmes veuves, dont deux seulement devaient être reçues immédiatement, l'ad-
mission d'un plus grand nombre étant réputée impossible, par suite des dettes que
la Communauté avait contractées en faisant bâtir. Cette réparation tardive et si
insuffisante ne satisfit pas les Haudriettes évincées, et les procédures durèrent
longtemps, comme le raconte Sauvai <'2'. Les dames de l'Assomption réussirent à sur-
monter tous les obstacles, et elles triomphèrent même à l'occasion de la requête
présentée, le i5 juin 1659, parles administrateurs de l'Hôpital-Général , comme
ayant droit à tous les biens destinés aux pauvres, et usurpés ou employés à des
usages autres que ceux prescrits par les fondateurs; mais le succès des Religieuses
fut incontestablement dû à leurs hautes protections et à la faiblesse de leurs
adversaires.
Le 20 juillet 1622, les Haudriettes adressèrent au cardinal de La Rochefou-
cauld une requête dans laquelle, représentant les inconvénients très-réels du
logis qu'elles habitaient en la rue de la Mortellerie, au milieu d'un quartier qui,
(1) Sauvai, t. I, p. 6o5. — [,) Sauvai s'était peu à peu mêlé de cette affaire en qualité d'avocat, car il
en parle avec des détails prouvant qu'il l'avait particulièrement étudiée.
312 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
souvent inondé, retentissait sans cesse du bruit produit par les querelles des
bateliers et des crocheteurs, elles sollicitèrent leur translatiou dans un lieu plus
commode et plus convenable. Le jour suivant le Cardinal se rendit dans leur
hospice, reconnut la justesse de leurs plaintes, en dressa un procès-verbal et
ordonna la translation réclamée. Quelques jours après, Berger, conseiller au Par-
lement, et Hinselin, correcteur des Comptes, qui s'étaient chargés de trouver un
lieu favorable pour y placer les Haudriettes, déclarèrent qu'ils n'en avaient point
rencontré de préférable à la maison du Cardinal , située dans le faubourg Saint-
Honoré, et, le k septembre, il leur fut enjoint de veiller à ce que les Hospitalières
s'y installassent le plus tôt possible. Elles y furent conduites le surlendemain, au
nombre de quinze, accompagnées par les dames de Lamoignon, de Lozeau, de
Montmor et de Lauzun. Le 20 novembre de la même année, une sentence du
Cardinal ratifia la translation, en consommant la suppression de l'hospice d'Etienne
Haudry au profit du monastère des dames de l'Assomption.
Les registres capitulaires du Couvent nous ont fourni quelques renseignements
sur la construction des bâtiments claustraux. Au mois de juillet i632, la Supérieure
proposa au chapitre de faire élever une des ailes du cloître, en y consacrant la
somme de 5o,ooo livres, et l'on commença à y travailler le 16 août, d'après les
plans du «• sieur Méthezeau W, « lesquels avaient été préférés à ceux que l'on avait
demandés à deux autres architectes. La deuxième aile du cloître fut entreprise
le 27 septembre 1 638 , et dut être continuée au printemps suivant. La résolution
de bâtir la troisième aile , comprenant le chœur et l'avant-choeur de l'église , fut
adoptée le \h juin 1660; les travaux en furent commencés le 17 septembre,
et la première pierre en fut posée, le 29 novembre, par Louis de Bourbon, pre-
mier prince du sang. Le 2 1 avril 1670, on proposa de bâtir l'église même, desti-
née à remplacer la chapelle; les fouilles furent commencées le 28, et le 19 août,
après avoir passé trois semaines à abattre d'anciens bâtiments, on posa la pre-
mière pierre sous le maître-autel, en l'absence de la Reine, qui avait promis de
le faire, mais qui ne put assister à la cérémonie. Le 27, une autre pierre bénite
fut posée sous le mur séparant le chœur des Religieuses d'avec l'église, laquelle
fut achevée en 1676 et consacrée le ih août de cette année par l'archevêque de
Bourges. Elle avait été élevée sur les dessins et sous la conduite de Charles Errard ,
qui fut directeur de l'Académie française à Rome.
Le couvent de l'Assomption dont la principale porte fut refaite en 1726, est
en grande partie démoli; toutefois le plus important de ses édifices, l'église cir-
culaire, est intact. On y voit encore l'Assomption peinte par Charles de Lafosse
dans la coupole; mais l'autel en menuiserie, ouvrage de Bailly, qui était décoré
(l) Ce doit être le second Clément Métezeau, celui qui proposa de bâtir la digue de la Rochelle.
RUE SAINT-HONORE. 313
d'un retable représentant la Nativité, peint par R. Ant. Houasse, est disparu W.
Quant aux bâtiments claustraux, d'un style très-simple, il en subsiste deux ailes
employées comme dépôt d'archives. Ils avaient dû être vendus d'après l'arrêté con-
sulaire du icr floréal an x, et ils furent partiellement renversés pour le percement
de rues nouvelles. L'église, retranchée avec ses dépendances, le 2 5 germinal an xi,
des propriétés nationales à aliéner, fut alors transformée en un atelier de décora-
tion pour les théâtres des Arts et de la République. Rendue au culte sous l'Empire,
elle devint la paroisse du premier arrondissement, sous le nom de la Madeleine,
et c'est actuellement une succursale de la grande église ainsi appelée.
Maison sans désignation (1&89), avec jardin et terre, dite de cinq arpents à la
fin du xve siècle, de quatre et demi en i53o, et de quatre seulement en 161 3,
probablement parce qu'elle avait subi un retranchement lorsqu'on construisit le
rempart. En i53o, c'était la dernière du faubourg, et il n'y avait plus après que
des champs. En 1 602 , elle avait pour enseigne l'Image Notre-Dame , et, le ier avril,
elle fut cédée à titre d'échange par Philippe de Vérigny, conseiller du roi, au
sieur Louis de Rordeaux, contrôleur des Tuileries. Le 19 août 1609, Gabriel de
Montigny, seigneur de Congis, gouverneur des Tuileries, en acquit une portion
de Daniel Deslandes, et, le 21 août 1610, la totalité de la maison fut divisée
entre de Congis, qui prit pour lui la moitié orientale, et le sieur de La Luzerne,
qui se contenta de l'autre. Ce dernier étant mort, sa veuve, Gillette d'Épinay, ven-
dit, le 8 juin 1617, à François de Chabannes, comte de Saignes, la moitié qui
lui était échue, et à laquelle était restée l'enseigne de Notre-Dame; cette moitié
dont, en 1 63o, le marquis de Rarnée était possesseur, avait quatre-vingt-huit toises
et demie de profondeur sur seize toises et demie de largeur. Elle passa ensuite à
François Sublet de Noyers, surintendant des bâtiments royaux. Il la subdivisa en
deux parties, dont une fut habitée par le comte de Villiers, et, le 8 novembre
1667, il vendit la totalité, moyennant 11 3,5 00 livres, aux dames de l'Assomp-
tion, dans le couvent desquelles nous la trouvons englobée dès 1687. La partie
de la propriété de Sublet donnant sur la rue avait formé une grande maison qui,
en 1666, était à la comtesse de Fleix. Sublet de Noyers avait préalablement
agrandi son lot d'un terrain de dix toises de longueur sur huit ou neuf de largeur,
qui tenait à la porte de l'Orangerie des Tuileries, et qui lui avait été abandonné
le 1 5 avril 1666, moyennant 3oo livres tournois, par François Le Juge, jardinier
des Tuileries, auquel le Roi l'avait donné le 3 décembre 1 638. Quant à la moitié
possédée par de Congis à la suite du partage de 1610, elle fut achetée par
les dames de l'Assomption, le 1 3 septembre i63o, de Nicolas de Moy, veuf
(1) Au nombre des curiosités de l'église on comptait un Christ de Noël Coypel , une Conception d'Antoine
Coypel, un Saint Pierre de Lafosse, et une Présentation au temple de Bon Boulogne.
1. 4o
314 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
de Marie de Montigny et tuteur des enfants de Gillette d'Epinay, sa seconde
femme. C'est le lieu où s'élevèrent le dôme du couvent et une portion de son
cloître.
Maison dont l'origine n'était point antérieure au règne de Louis XIII ; elle avait
une issue sur la rue de l'Orangerie et en eut une, plus tard, sur la rue Saint-Flo-
rentin. Il s'y trouvait une citerne, et pour cette raison, dans les titres du couvent
de l'Assomption, à qui elle appartenait, elle est appelée la maison de la Citerne. On
l'a aussi appelée la maison de la Chartreuse. Elle fut donnée à bail, en i658, à
François Dupoix, a maréchal de bataille, -n et, en 1 685 , à l'évêque de Dax.
Maison sans désignation qui faisait le coin oriental de la rue de l'Orangerie,
et était divisée en trois parties. Elle paraît avoir été élevée peu de temps après le
percement de la rue de l'Orangerie, et, ayant été construite, comme la précé-
dente, sur un terrain dépendant des fortifications, elle était réputée en censive du
Roi, avant l'échange de 1687.
RUE DE L'ORANGERIE. Lorsqu'on commença à bâtir l'enceinte bastionnée, on
s'empara probablement, ainsi que nous venons de le dire, d'une partie de la mai-
son de l'Image Notre-Dame, de façon à laisser derrière le rempart un espace libre,
lequel est figuré sur les plans de Quesnel et de Mérian. Sur cet espace on ouvrit
ensuite une rue large de trois toises et parallèle au mur de la Courtine, qui
formait un de ses côtés. Cette rue, appelée dès 1661 rue de l'Orangerie, parce
qu'elle conduisait à l'orangerie des Tuileries, et dite aussi la petite rue des Tuile-
ries, a fréquemment été dénommée cul-de-sac, comme n'ayant point d'issue. Elle
fut percée vers 1 638 , car, dans un acte du 26 juin de cette année, relatif à un ter-
rain sur lequel elle fut ouverte, on lit que, sur cette rt grande place, a esté pris et
« faict alligner pour le Roy et le derrière des jardins des Tuilleries une rue de trois
«toises ou dix-huict pieds de large, dudict allignement, le long de la nouvelle cour-
trtine et muraille de closture de la Ville, entre les bastions des portes Saint-Honnoré
«et de la Conférence, nouvellement faictes W, n La pièce dont nous extrayons ce
passage est l'acte par lequel Paul Du Parent, sieur de Villemenon, propriétaire
de tout le terrain depuis la maison de Notre-Dame jusqu'à la porte du faubourg,
vendit à Jacques Coullart un lot de cinq cents toises, qui formait le côté oriental
de la nouvelle rue jusqu'à celle de Saint-Honoré. Ce lot, de disposition triangu-
laire , avait treize toises ^ de largeur en bordure sur la rue Saint-Honoré, et cinq
seulement du côté des Tuileries. Les 5 et i3 octobre 1660, le Roi en acquit une
parcelle de cent cinquante-quatre toises, dont il fit don aux religieuses de l'Assomp-
tion. Le lot cédé par de Villemenon, bordant la rue de l'Orangerie, tenait de tous
(1) Arch. de l'Emp. fonds de l'Assomption, (tde la rue. » Elle n'était donc point encore faite,
reg. S 6626. L'acte porte : « cession des démo- (!) Nous avons lu aussi vingt toises au lieu de
alitions d'un mur à jeter bas pour l'ouverture treize, mais ce dernier chiffre semble le meilleur.
RUE SAINT-HONORE. 315
les autres côtés à de Noyers, qui, en i63£, avait acheté lui-même de Villemenon
une parcelle de cent cinquante-quatre toises, et paraît en avoir obtenu une autre
de Coullard, quelques années après. Toutes ces transactions sont très-fatigantes à
suivre, et le peu d'intérêt qu'elles présentent nous a dispensé de les approfondir.
En 1739, une grande arcade de pierre coupait la rue de l'Orangerie en deux
tronçons d'inégale longueur.
Afin de régulariser les abords de la place Louis XV (de la Concorde), créée par
lettres patentes du 2 1 juin 1757, on abattit la courtine et partie du bastion, ce qui
entraîna la disparition de la rue de l'Orangerie. Elle fut remplacée par une nou-
velle rue, plus large, qui, partant du même point de la rue Saint-Honoré , suivit
un autre alignement, résultant de la situation donnée au Garde-Meuble. Cette
rue, qu'on devait appeler rue de Bourgogne, fut nommée rue Saint-Florentin par
arrêt du Conseil du 1 1 mars 1768, à cause que le duc de La Vrillière, comte de
Saint-Florentin, y avait son hôtel, construit par Chalgrin en 1767. Dans la rue
on remarquait aussi l'hôtel de Fitz-James, faisant le coin devant le Garde-Meuble
et renfermant des écuries circulaires d'un singulier goût, que l'architecte Cellerier
avait bâties en 1786. A la suite de l'hôtel de Fitz-James s'étendait un terrain de
deux cent quatre-vingt-quatre toises, que les dames de l'Assomption vendirent,
en 1785, à la duchesse de l'Infantado.
En 1575 et i6o3, l'espace compris depuis entre la rue de l'Orangerie et la
porte Saint-Honoré était occupé par une seule maison, contiguë à la porte. Elle
fut démolie plus tard, et on en morcela le terrain. Le 1 7 décembre 1 64i, J. Coul-
lard en acquit, de Nicolas de L'Aistre, un lot qui faisait le coin occidental de la
rue de l'Orangerie, et avait quatre toises un pied de face sur vingt-cinq toises de
profondeur'1'. Après la maison élevée sur ce lot, il s'en trouvait cinq autres en
1687, et la dernière, touchant à la porte, appartenait au baron de Neuville. En
1739, les deux premières réunies formaient l'hôtel du marquis de Resnel. Il
en dépendait un long jardin, qui était limité vers l'orient par la courtine des
fortifications, et qui se prolongeait jusqu'au droit de l'Orangerie. Le terrain de ce
jardin avait déjà été planté d'arbres du temps de Gomboust, et nous supposons
que c'est le même que cette partie du «fossé d'entre la porte Saint-Honoré et le
ft jardin des Tuileries n qui fut close de murs par le comte de Cheverny, suivant
une permission à lui accordée par la Ville le 9 mars 1702.
(1> La profondeur de ce lot, qui aboutissait au bien réellement à vingt-cinq toises de l'alignement
mur d'enceinte , prouve que le point où la courtine de la rue Saint-Honoré, ainsi que nous l'avons
s'infléchissait pour devenir le plan du bastion était restitué sur notre plan.
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QUAI DES TUILERIES, ENCEINTE BASTIONNÉE, ETC. 317
CHAPITRE X.
QUAI DES TUILERIES. — ENCEINTE BASTIONNÉE.
EMPLACEMENT DU CHATEAU ET DU JARDIN DES TUILERIES.
QUAI DES TUILERIES.
Le quai des Tuileries existe certainement depuis une époque fort reculée comme
chemin de halage et comme route de Saint-Cloud. En 1 3o8 , on lui donnait le nom
vague de « chemin de Seine, a Dans le même siècle , et parce qu'il conduisait à l'abreu-
voir l'Evêque, situé près de l'emplacement du Cours-la-Reine, on l'appelait aussi
rrVoie de l'abrevoer l'Evesque, au lonc de la rivière de Saine n (1873). On a dit
ensuite : «Chemin qui va selon la rivières (1620); — «chemin par où l'en va
« des Tuileries àl'abruvoer l'Evesque* (1689); — «chemin par lequel on va de
«Paris au ponceau de Challeaun (i5i5); — «chemin allant de la porte (Saint-
« Honoré) au bois de Boulongne et Sainct-Cloud n (i5i8); — «chemin de la
«rivière t) (i53o); — «chemin tendant de Paris à Sainct-Cloud n (i6o3); et enfin
quai des Tuileries sous Louis XIII. La voie ne fut, du reste, pourvue d'un mur de
soutènement en pierre que vers i665 : les entrepreneurs André Mazière et Antoine
Bergeron exécutèrent ce travail. La chaussée avait été relevée par un apport de
gravois, suivant une ordonnance du Bureau de la Ville, du ik septembre i5o,5,
prescrivant «à tous voicturiers par eaue, menans et voicturans terres, gravois et
«immundices par la rivière, de les mener et descharger avec hottes contre les
«murs du jardin des Thuilleries, tirant au logis de Monsieur de Congis, pour
« rendre le chemin de la rivière commode pour la navigation <1'. -n
Le quai des Tuileries était en partie dans le fief et la justice de l'abbaye Saint-
Germain-des-Prés comme la rivière môme, dont il était réputé dépendre; Du
Breul cite un arrêt du 12 août 160 h qui confirme le fait. En 1/189, ffau dessoubz
«et près des Tuilleries hors Paris, oultre la porte Saint-Honoré en la
0
Arch. de l'Emp. reg. H 1791, fol. 16a v"
318 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
«rivière de Saine, i> il y avait une place à pêcher contenant six perches de long
sur une en largeur, qu'on appelait «les Moites de la Saulmonière. n Cette même place,
mentionnée dès 1680, est énoncée en i52o : «La Saulmonière, commençant
<r depuis la porte des Vignes jusques au coing du vieil mur Jehan Legendre;ï> elle
est dite, dans un bail de 1^89, «commancer audesus seulement de la mote de la
«Chimynée (?) jusques à l'esseau de la Saulmonière, qui finit au front des motes
«de la Molenge.n La replace nommée la Molangen était, d'après un titre de i522,
«assise sur la rivière de Seine, à l'endroict des murailles du jardin qui fut à feu
«Jehan Legendre, assis audessoubz des Tuilleryes, à commancer à prendre depuis
et l'esseau de la Saulmonière jusques à l'entrée du bras de l'isle des Treilles, v Elle
s'étendait donc jusqu'à la hauteur de l'esplanade des Invalides. En amont de la
Saumonière était une troisième place, celle «de Fellifeux, près la tour de Boys,
« commençant à l'éseau de la Tuillecte , et finant devant la porte des Tuileries -n
(1 5 00). Cette place de Fellifeux, Fulcifeu, Fillefeu ou Felifeu (1601) occupait l'em-
placement de la berge comprise maintenant entre le pont Royal et la rampe voi-
sine du guichet du Carrousel.
ENCEINTE BASTIONNÉE.
On lit dans le Journal d'un bourgeois de Paris sous François Ier : « Le mercredy
«quatriesme de novembre, audict an i523, furent commencez à faire les rampars
«et grandz fossez es faulbourgs Sainct-Honoré, pour fortifier lesdietz faulxbourgs,
«et ceulx de Sainct Denis, par l'autorité de Monsieur de Vendosme; mais il n'y
«fut besongné que huict jours entiers, et demoura l'œuvre imparfaict, car aussi
«lesdietz rampars et fossez estoient inutilles et sans prouffit. -n Plus loin, la même
chronique offre ce passage : «L'an 1 536 , le lundy trente uniesme et dernier jour
« de juillet, furent par la Ville commencez les fossez hors Paris, et furent commen-
«cez au bout des faulxbourgs Sainct-Honoré; et fut ce faict par l'advis et opinions
« d'aucuns habitans et par Monsieur de Paris , cardinal , qui estoit pour lors gou-
« verneur de Paris. Et y furent une grande multitude d'archers et ledict Cardinal
« aussi, n L'importance des travaux qu'on fit alors pour défendre le faubourg Saint-
Honoré nous est inconnue, mais il est certain qu'en i563 il subsistait des fossés,
énoncés dans un titre dont nous donnerons ailleurs la copie : « Fossez cy-devant
«faietz pour la fortiffication de la Ville, -n C'est en i566 qu'on commença à y ajou-
ter une enceinte régulière en maçonnerie, sous l'influence de Catherine de Médi-
cis qui, mue évidemment par le désir d'assurer la sécurité du château dont elle
venait d'entreprendre la construction, fit poser par son fils Charles IX la première
pierre des fortifications nouvelles, à l'extrémité de son parc. La cérémonie est ainsi
relatée dans un des registres de la Ville : «Le vendredy xic jour de juillet, le Roy
ENCEINTE BASTIONNEE. 319
rr accompaigné de Messeigneurs ses frères, de Monseigneur de Lorraine, cardinal
■ de Bourbon, duc de Nyvernois, et de plusieurs chevaliers de son ordre et autres
«seigneurs et gentilzhommes, se trouva sur les quatre heures après mydi, au-
«dessoubz des jardins du palais de la Royne (les Tuileries), où avoit esté faicte
«la vuidange des terres, et les platte-formes assises pour commencer la maçonne-
« rye du grand boullevert assis audict lieu pour la deffense de la rivière. Et estoient
rraudict lieu Messieurs les Prévost des marchans et Eschevins, ayant auparavant
«faict forger plusieurs belles médalles dorées, èsquelles estoient imprimées et
«représentées au naturel les visaiges du Roy et de la Royne, et avoient faict incas-
«trer une pierre angulaire pour mectre lesdictes médalles; et sur ladicte pierre
«estoient engravez ces motz : D. Catharina regina, R. K. mater. Anno Ckristi i566.
« Et fut lors ladicte pierre assise par le Roy, lequel , avec une truelle d'argent, gecta
ce du mortier soubz ladicte pierre. Et ce pendant fut tirré plusieurs coups d'artille-
ff rye, les trompettes et tabourins sonnans. Lesdictes médalles qui furent mises sur
«ladicte grande pierre, dedans une boiste de plomb dorée, portoient ces motz,
«du costé du visaige du Roi : Carolus nonus, Galliarum rex christianissimus ; et, de
«l'aultre costé, où estoit eslevé le visaige de la Royne : Cathariiia, Henrici régis
«tixor, Francisa et Caroli regum mater W, n Bonfons confirme de tout point ce récit,
avec la seule différence qu'il donne la date du 12 et non du 1 1; le vendredi, jour
de la solennité, répond effectivement au 12 juillet.
Dans une lettre datée du mois de septembre 1667, la Reine mère dit : «Ayant
«estée advertie. . . comme les maçons travaillent fort aux murailles et forteresses
«des fossez de la ville de Paris, à l'endroit de mon jardin ;n on poursuivait donc
alors activement la construction du bastion et de ses dépendances. Une ordonnance
de la Ville , dont nous transcrirons le texte , prouve qu'on y travaillait encore en
1 583, et nous savons qu'en 1 586 les chantiers n'étaient point dépourvus de
matériaux, puisque, le 20 octobre de cette année, le Prévôt des marchands envoya
prendre sur ces «astelliers de la nouvelle fortiffication, es environs du boulvert
«des Tuilleries,fl des pierres pour paver les ports près du Louvre'2'. Des travaux
ayant duré aussi longtemps n'ont pu que donner un résultat important; s'ils
n'eussent point été fort avancés, il y aurait eu inutilité de fermer la grande rue du
faubourg avec la porte qui s'y trouvait déjà en 1 5 7 5 ^3' ; néanmoins ils n'étaient
pas encore terminés en 1612, au dire de Du Breul, et ne le furent complètement,
suivant les apparences, que vers 1 63 1 , lorsque Pidoux rebâtit la porte Saint-
Honoré, ou vers 1 634, lorsque Froger continua l'enceinte bastionnée, du côté du
(1) Arch. de l'Emp. reg. H 1786, fol. 370 r". La (3) Il est dit, dans le texte du pian de GombousL
pièce a déjà été imprimée dans les Preuves de que ces travaux «furent continuez par Henry III
Félibien. irjusqiies auprès de la nouvelle porte Saint-Honoré ,
2 lbid. roff. H 1789, fol. i4 r°. ret finalement recommencez sous Louis XIII. 1
320 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
faubourg Montmartre. Mais, pour les raisons que nous venons d'énoncer, nous ne
doutons point que les terrassements et la plus grande partie de la maçonnerie du
front protégeant le jardin des Tuileries n'aient été assez près de leur perfection
avant le règne de Henri IV; les plans de Quesnel et de Mérian (1609 et 1620)
représentent le bastion et ses dépendances comme achevés.
L'enceinte de Charles IX, à partir de la porte dite de la Conférence et située sur
le quai, se composait d'un bastion à orillon W, d'une courtine et d'un demi-bastion
sansorillon, qui s'attachait à la porte Saint-Honoré. Cette enceinte, qui s'est con-
servée presque intacte jusqu'à l'établissement de la place Louis XV, vers 1756,
est figurée sur un grand nombre de plans; mais nous n'en avons trouvé qu'un au
moyen duquel nous ayons pu la retracer avec une certitude complète '2). En le
comparant à celui de Verniquet, on constate sans peine que le mur de la terrasse
des Tuileries en face des Champs-Elysées, et le mur oblique qui allait rejoindre
celui du quai, dessinent les deux faces du bastion. Quant au demi-bastion, il n'en
est resté aucune trace après sa démolition; nous avons seulement trouvé deux
jalons précis pour la courtine. En effet, on voit, sur le plan auquel nous venons
de faire allusion, que la rue des Tuileries ou de l'Orangerie avait son côté occi-
dental formé par le mur même de la courtine, de sorte que le problème se ré-
duit à déterminer l'ancien alignement de la rue des Tuileries. Or on remarque
sur le plan de Jaillot que le coin oriental de la rue des Tuileries, vers la rue
Saint-Honoré, avait gardé sa direction primitive en 1772 , et l'on observe sur le
plan de Verniquet une disposition analogue, au coin occidental, ce qui donne
l'extrémité septentrionale de la rue ; l'extrémité méridionale se restitue facilement
à l'aide d'un bâtiment allongé qui se trouvait à droite du passage de l'Orangerie.
Nous l'avions ainsi compris lorsque nous avons rencontré, dans les archives des
dames de l'Assomption, deux autres plans fournissant la preuve matérielle de
cette disposition. La rue étant retracée, la courtine l'est de même, et la manière
dont le mur d'enceinte s'agençait avec la porte Saint-Honoré confirme tout ce que
nous en disons.
Le fossé au-devant du bastion des Tuileries était de forme irrégulière et n'a
(1) Sur les plans de Quesnel et de Mérian, le bas-
tion est représenté avec deux orillons. Il n'est point
impossible qu'un remaniement ait eu lieu en 1 63a.
'*' C'est un beau plan manuscrit des Archives de
l'Empire, qui, comme bien d'autres documents de
cette espèce, n'a jamais été étudié par personne. —
La première face du bastion avait soixante-huit toises
trois pieds de longueur, et formait un angle de cent
quarante et un degrés avec le mur de la terrasse du
bord de l'eau; la seconde face avait quatre-vingt-
huit toises trois pieds de longueur, y compris l'oril-
lon, et formait un angle de cent trente degrés avec
la première face. La largeur de l'orillon était de
douze toises, et le flanc qui le reliait à la courtine
offrait une pareille dimension. La courtine était
longue de cent douze toises; suffisamment prolon-
gée, elle eût atteint le point où le bastion s'attachait
à la porte de la Conférence; elle faisait un angle de
quatre-vingt-dix degrés avec le flanc du demi-bas-
tion. Ce flanc avait vingt et une toises de largeur
TOPOGRAPHIE HISTORIQVE DV VIEVX PARIS
Ale Guillaumot se .
VVE DE LA PORTE DE LA CONFERENCE
d'après Isr. Sylvestre et Pérelle.
Imp Ch OiartJr >? a!n
ENCEINTE BASTIONNEE.
321
jamais eu de contrescarpe revêtue en maçonnerie. Dans un titre de i634, il est
confondu avec les trfossez jaulnes,n situés au delà de la porte Saint-Honoré , vers
la porte Montmartre.
Porte de la Confe'rexce. Les auteurs ne sont point du même avis sur l'origine
du nom donné à cette porte. Ce qu'en dit DuchesneW est bien peu sensé, et ce qu'en
rapporte Lemaire est d'une inexactitude que les dates rendent manifeste. L'opi-
uion que la porte de la Conférence a été ainsi appelée en souvenir des pourpar-
lers qui, en i5o,3, eurent lieu à Suresne entre les députés du Roi et ceux de la
Ligue, est au contraire évidemment fondée, car c'est effectivement par cette
porte que les députés sortaient pour aller à la conférence, et c'est dans ses
environs que, au dire de LestohV2', la foule s'amassait en manifestant par des
cris son désir d'avoir enfin la paix. Un acte d'ensaisinement du 19 avril 1626 est
le premier document que nous ayons trouvé où la porte soit désignée par le nom
qu'on lui donnait encore lors de sa démolition.
Une grande incertitude a régné jusqu'ici sur l'époque où fut construite la pre-
mière porte dite de la Conférence. On constate , par le plan de Quesnel , qu'elle existait
déjà en 1 609 ; mais datait-elle du même temps que le bastion voisin? Cette ques-
tion nous a longuement embarrassé, attendu que tous les documents que nous
rencontrions où il était fait mention d'une porte neuve au bord de l'eau étaient
conçus en termes amphibologiques, de sorte qu'il était impossible de décider s'il
s'agissait, ou non, de cette entrée de la Ville attenant à la tour de bois, qui a
.toujours gardé le nom de Porte-Neuve jusqu'à sa destruction. Nous savons main-
tenant que la porte de la Conférence a dû être commencée peu après le bastion
dont elle dépendait, parce que, dans une pièce du 18 août 1 583, elle est énoncée
fort clairement: rr la porte nouvellement faicte près la rivière, du costé du boul-
(t levert de ladicte fortification'3', v
La porte de la Conférence, appelée d'abord la Pœie-Neufve , et comme toutes
et formait un angle de cent onze degrés avec la face
du demi-bastion , laquelle mesurait trente-cinq toises.
Nom garantissons ces chiffres à une toise ou un degré
près , le plan de Verniquet étant réputé exact.
(1) Antiquités des villes de France , p. o5.
<" Coll. Petitot, t. XLVI,p. 37a.
(s> Arch. de l'Emp. reg. H 1788, fol. Uh r°. Nous
donnons le texte entier de la pièce, afin qu'on se
convainque qu'il exclut toute hésitation: <rSur la
"requeste faicte par George Régnier, entrepreneur
fftant du fournissement des matériaux que des vui-
f danges de terre et ouvraiges de massonnerie pour
r la fortification de lad. Ville , derrière les jardins
■ du //allais de la lloyne , mère du Roy. Il est permis
f audict Régnier de faire faire et construire aus des-
ffpens de lad. Ville, contre le pan de la porte nou-
«vellement faicte près la rivière , du costé du boulleverl
«de lad. fortification , au deçà de lad. porte, une
irloge telle qu'il advisera, pour serrer et retirer les
(roustilz et aultres ustancilles servans à la besongne
trde lad. fortiflication. Et aussi pour mectre les tail-
tr leurs de pierre et aultres ouvriers emploiez à lad.
<t fortiflication à couvert; attendu que, depuis lad.
ft porte neufve jusques aud. boulevert, n'y a aucun
relieu couvert où l'on puisse retirer lesd. ouvriers,
ffoustilz et ustancilles. Faict au bureau de lad. Ville,
trie dix-huicliesmejour d'aoust, l'an mii-cinq-cens-
rr quatre-vingts-trois, »
Ai
322 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
les portes des faubourgs, la faulse porte^, fut rebâtie en i632 par P. Pidoux<2), sur
une largeur de dix toises et une profondeur de cinq. Elle a été démolie en vertu
d'un arrêt du Conseil du i5 avril i73o(3), peu de temps avant celle du faubourg
Saint-Honoré , avec laquelle elle offrait beaucoup de ressemblance : c'était l'œuvre
du même architecte. Elle était munie d'un pont-levis s'abaissant sur un pont
dormant qui conduisait à une levée de terre terminée par un autre pont dormant
jeté sur l'égout du fossé W. On en possède plusieurs vues, une entre autres très-
satisfaisante, gravée par Pérelle. On remarque que la porte de la Conférence,
représentée à sa vraie place sur le plan de Mérian, est dessinée, sur le plan de
Quesnel, comme si elle avait été percée dans la face sud-ouest du bastion; mais
il est peu probable que cette dernière disposition ait jamais existé.
Troisième porte Saint-Honoré. Quoi qu'on en ait dit, cette porte n'est point
d'origine postérieure à celle du bastion des Tuileries, puisque nous en trouvons
l'indication dans cette rubrique du censier de ibyb: rcL'aultre rencdesdicts faulx-
(t bourgs (Saint-Honoré), à commancer vers la porte nouvellement faicte au bout
xd'iceulx.n Elle est ûgurée sur le plan de Quesnel, et énoncée dans le texte, daté
de 1 6 1 5 , delà première édition du plan de Mérian: a Porte Saint-Honoré, rebaslie
«de nouveau. n Comme il paraît tout à fait invraisemblable que l'on eût employé
une semblable locution pour donner à entendre que la porte du faubourg avait
été construite près de cinquante ans auparavant, nous croyons qu'à cette porte
se rapportent les détails suivants, extraits des registres de la Ville.
Le 2 septembre 161 1, le Prévôt des marchands fit mettre en adjudication les
travaux de reconstruction d'une porte Saint-Honoré, que la teneur des documents
ne permet pas de distinguer entre les deux qui ont porté ce nom sous Louis XIII.
Plusieurs fois ajournée faute de soumissionnaires , l'adjudication , après avoir été
faite , le 2 o du même mois , au profit de Marin de La Vallée qui avait proposé le prix
de vingt-trois livres par toise, le fut de nouveau et définitivement le 28, en faveur
de Charles Du Ry, qui avait offert un rabais de trois livres sur celui de La Vallée.
Les travaux étaient commencés , et les pieds-droits des arcades sortaient de terre
lorsqu'on modifia le plan adopté afin de donner plus de largeur aux baies, et
(1) On lit «la faulce porte neufve qui est au bout
tr du jardin des Thuilleries » dans un document de
1623, où il est parlé d'une casemate qu'on devait
établir là.
(2) Elle ne fut probablement terminée qu'en 1 633.
(3) L'avocat Barbier rapporte , dans son Journal ,
que, le 2 septembre 1730, le Roi, revenant à Paris,
fut obligé de passer par la porte Saint-Honoré,
parce qu'on était occupé à abattre celle de la Confé-
rence.
(i) Le 10 novembre i5op,, il fut ordonné au
charpentier Gh. Marchant de réparer promptement
le rrsueul proche de la levée du pont de la porte
ff neufve,» qui était fort endommagé. 11 semble qu'il
s'agit bien ici de la porte dépendant du bastion,
puisqu'il n'y avait point de levée devant la porte
neuve ajoutée aux fortifications du xiv' siècle. Des
réparafions faites à la première, par ordonnance
du 20 novembre 1 64 1 , contraignirent à la fermer
pour un temps.
ENCEINTE BASTIONNÉE. 323
l'on décida que «les deulx portaulx, qui n'estoient que de dix piedz et demy d'ou-
«verture entre deulx tableaulx, seroient remis à quatorze. 11 Pour cela, il fallut dé-
molir le mur de refend du côté du nord, ce qui entraîna un surcroît de dépense
de trois cents livres, somme allouée, le 21 mars 1612, à Du Ry, auquel on
imposa certaines obligations, parmi lesquelles fut comprise celle de construire en
« bonne bricque rejoincte et mise en coulleur, t> les reins de la voûte. Elle devait être
«en arreste, en forme de lunette, n et avoir ses «quatre arcs... avec les arrestes
«et bernes v en pierre de Saint-Leu, de même que «ung 0 ou auvalle, garny
« d'une petitte mouslure, pour mettre une pierre aux armes du Roy ou de la
« Ville, a et «une clef pendante de trois pouices'1). n
La porte Saint-Honoré , au faubourg, fut entièrement reconstruite vers i632,
et alors on cessa de l'appeler habituellement fausse porte, comme c'était aupara-
vant l'usage, parce qu'elle ne faisait point encore partie de la Ville même. Dans un
arrêt du 5 juillet i63&, cité par Félibien<2), il est question de «la nouvelle porte
* que M. Pierre Pidoux a faict construire au bout du faulxbourg Saint-Honoré. -n
Le traité passé avec Pidoux, qui stipulait au nom de Barbier, l'entrepreneur du
reste des fortifications, ayant été conclu le 9 octobre 1 63 1 et révoqué le 3i dé-
cembre i632, la réédification des portes Saint-Honoré et de la Conférence se
place entre ces deux dates, ou, au plus tard, en i633. En effet, le bail de l'une
d'elles, fait le 6 avril 1 633 , à Philippe Gangneulx, l'énonce cria porte neufve qui
te se bastit et construict aux faulxbourgs Sainct-Honoré et qui sera l'une des portes
«de ceste Ville ; n en outre, dans un ensaisinement du 3 0 septembre 1 634, il est
fait mention de « la porte desdicts faulxbourgs (Saint-Honoré) , qui se construict de
«neuf au bout de la Grant rue'3). n L'auteur du Supplément aux Antiquités de Paris
dit: «L'an 1 633 , on commença à clorre le fauxbourg Saint-Honoré, et à y faire
«un fossé selon le jardin des Tuilleries, pour escouller les eaux dans la rivière; à
«quoy furent employez quantité d'ouvriers, hommes, femmes, garçons, filles, à
«porter la terre, et estoient journellement payez de leur travail; ce fossé fait, on
« commença à y construire une très-belle porte , en forme de grand pavillon de
;l> Reg. H 1795, fol. 4/i8 v0.— Lei3 août 1626
on annonça l'adjudication de travaux de charpen-
terie à faire à la porte Saint-Honoré, d'après un
devis où on lit : * Il y a ung pont-levis et une plan-
chette garnis de barrières aus deux costez dud.
rrpont et planchette, qui n'a point de flesches et
ttappecul. Les flesches et tappecul du pont-levis
"sont de nulle valeur. Et faut mettre présentement
" quatre poultres audessoubz dud. pont et quatre
r pièces de bois audessus desd. poultres pour sous-
« tenir led. pont. » Ce devis doit se rapporter à la
troisième porte Saint-Honoré, attendu que, à celte
époque, le fossé devant la seconde étant comblé, il
ne pouvait plus y avoir là de pont-levis. Celui de la
troisième porte Saint-Honoré fut refait sur un ordre
de la Ville du 22 février 16&1.
« T. V, p. 91.
(3) Arch. de l'Emp. reg. S 1221. On lit, au bas
d'une gravure de Perrelle , que la porte Saint-Honoré
fut faite en 1 635 ; mais cette date , si elle n'est point
entièrement fausse, ne doit se rapporter qu'à l'achè-
vement définitif.
il.
324 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
« pierre de taille et couvert d'ardoises, au lieu du méchant pont qui y estoit. . . .
<rEt depuis la closture de ce fauxbourg, on l'appelle la Rue neufve de Sainct-Honoré. i>
A en juger par le plan de Quesnel, les premières portes du faubourg auraient été
des pavillons rectangulaires fort simples, et percés d'une seule grande baie. Pidoux
donna à celles qu'il bâtit une physionomie toute différente , qui comportait l'idée
de monuments destinés plutôt à la décoration qu'à la défense de la Ville. Suivant
une jolie vue de Sylvestre'1', les armes de la Ville étaient sculptées au-dessus de
la baie servant de passage, et un poteau, qui semble être le poteau de justice de
l'Archevêché, était planté à l'entrée du pont dormant de la porte Saint-Honoré.
Cette porte, abattue en 1733 conformément à un arrêt du Conseil du i5 avril
1 73a <2), avait environ quatre toises trois pieds de profondeur sur neuf toises trois
pieds de largeur. Ainsi qu'à la porte de la Conférence, la partie centrale en était
flanquée de deux pavillons un peu en saillie du côté de la campagne, et en retraite
du côté -opposé. Nous avons constaté que la porte Saint-Honoré était située à
soixante-deux mètres au delà du coin de la rue Saint-Florentin. Sur le plan de
Verniquet, la place en est marquée avec précision par une retraite dans l'aligne-
ment méridional de la rue Saint-Honoré. Cette retraite, qui existe encore, pro-
vient de ce que la largeur de la porte excédait celle de la rue , disposition repro-
duite sur tous les vieux plans que nous avons vus. Le plan de Verniquet fournit
une autre donnée à l'appui de la première, relativement à l'emplacement de la
porte : c'est l'agencement biais du coin septentrional des rues Saint-Honoré et
Royale, motivé par une construction qui s'appuyait sur la face du bastion.
LA GARENNE.
L'espace compris entre le mur de clôture du parc des Tuileries et le rempart
avait été laissé vide pour les besoins de la défense; le plan de Quesnel le re-
présente dans cet état. On y établit ensuite une garenne à lapins et un chenil
pour les meutes du roi. Le 26 avril i63o, Louis XIII en fit don à un nommé
Regnard, à charge de transformer le terrain en un jardin de plantes rares, de re-
bâtir le chenil en un autre endroit, et d'indemniser un nommé Pascal, qui avait
là sa demeure. Dans l'acte de donation, lequel fut confirmé par un autre du
26 mai 1661, le lieu est énoncé: «Place contenant quatre arpens, où y avoit une
« garenne, sise au delà des Thuileries, estendue la largeur depuis la muraille du
«bout du jardin des Thuileries jusqu'au bastion qui est sur le fossé de la Porte-
ft Neuve, et en longueur depuis la muraille qui est sur le grand chemin, le long
(1> La planche donne des épreuves à l'envers, défaut que nous avons rectifié dans notre fac-similé.
!) Brice, préface de l'édition de 1762, p. 10.
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EMPLACEMENT DES TUILERIES.
325
« de la rivière , jusqu'à la muraille des bastimens servans lors à la retraite des bestes
s sauvages entretenues pour le plaisir de Sa Majesté. Ensemble la maison du sieur
> Pascal, bastie dans l'un des coins'1'. 1 La maison de Pascal, qu'on ne retrouve
point sur le plan de Mérian , paraît avoir été située au lieu où la terrasse du bord
de l'eau s'élargit en formant un retour d'équerre devant le grand bassin. Gomboust
représente le terrain donné par Louis XIII sous l'aspect d'un jardin^ divisé en
parterres d'un dessin compliqué, et il continue à l'appeler la Garenne (3>. On
remarque qu'à l'époque où le plan de Gomboust fut dressé , le rempart était devenu
une terrasse ombragée d'arbres. Sauvai vante la vue agréable dont on y jouissait
et qui contribuait à y attirer la foule. Le jardin de Regnard a été détruit et l'em-
placement renfermé dans l'enceinte des Tuileries, lorsque Le Nôtre bouleversa
le jardin du palais, c'est-à-dire vers 1 664.
EMPLACEMENT DU CHÂTEAU ET DU JARDIN DES TUILERIES.
trll paraît par plusieurs documents, dit Jaillot, que la tuile employée à Paris
ff ne se faisait qu'au bourg Saint-Germain-des-Prés dans l'endroit qui conserve
ff encore le nom de rue des Vieilles-Tuileries; on en établit ensuite de l'autre côté
ffde la Seine, à un endroit appelé, dans les anciens titres, la Sablonnière^ (c'est
crie jardin des Tuileries). Il y en avait trois en 1872, et elles s'y multiplièrent
ff considérablement, a Ces quelques mots renferment plusieurs erreurs. Les Tuile-
ries, terra Tegularionan , voisines du faubourg Saint-Honoré, sont mentionnées dans
deux chartes, l'une de 12 83, l'autre de xi^k®, et, par conséquent, de quel-
(,) Arch. de l'Emp. Papiers de la couronne, cart.
n' 9.
(,) itComme il est fort parlé de ce jardin (celui
«de Regnard) dans les Mémoires de la minorité de
«Louis XIV, il ne sera peut-être pas inutile de faire
« un peu connaître Renard , et l'on devinera aisément
«l'usage qu'on faisait de son jardin, et les raisons
«qui lui donnoient tant de réputation. Cet homme,
«qui avoit été valet de chambre du commandeur
«de Souvré, avoit de l'esprit, étoit souple, obli-
<• géant, et se connoissoit fort bien en meubles, et
«surtout en tapisseries. Il en faisoit apporter chez
«lui des plus belles, et en vendoit aux personnes de
«qualité, même au cardinal de Mazarin, qui se
■ plaisoit quelquefois à converser avec lui sur ce
«sujet. Dès que Louis XIII lui eut donné ce terrein,
«il y fit un jardin extrêmement propre, qui, par
«sa situation et par les manières commodes du
«maître, devint le rendez-vous ordinaire des sei-
«gneurs de la cour, et de tout ce qu'il y avoit de
«galant en ce tems là.» (Piganiol, Description de
Paris, quartier du Palais-Royal, p. 377.)
(3> Il désigne du nom de M. Regnard un espace
voisin de la porte de la Conférence , où Regnard avait
probablement sa maison.
(t) Aucun des nombreux titres que nous avons
vus ne mentionne ce lieu de la Sablonnière.
<s) Au mois d'août 1 276 , le dimanche avant l'As-
somption , le tuilier Aniaury s'engagea a payer an-
nuellement h l'Hôtel-Dieu, pour obéir aux volon-
tés dernières de Robert, dit Beau-Frère , un croît de
cens de dix sous parisis, sur une tuilerie que lui,
Aniaury, tenait des exécuteurs testamentaires de ce
dernier, et qui est énoncée dans la lettre de l'Oflicial :
« Tegulariam sitam Parisius , extra muros , versus ec-
«clesiam Sancti Thome de Lupera, super Secanam ,
« contiguam ex una parle legularie que fuit quondam
«defuucliJohannisHeudardi,civis parisiensis, et te-
326 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
ques années seulement postérieures aux premiers documents où il soit parlé des
tuileries du faubourg Saint-Germain; en réalité, rien n'apprend qu'elles étaient
les plus anciennes. A cette occasion, Jaillot a tort de rappeler le nom de la rue
des Vieilles-Tuileries, attendu que cette appellation remonte à peine à la fin du
xvc siècle W. Quant à la multiplicité des tuileries de la rive droite, elle n'est nulle-
ment confirmée par nos recherches : les actes et les inventaires de l'Évêché énoncent
à peine cinq tuileries, dont quatre seulement sont indiquées d'une manière posi-
tive. Nous avons parlé (p. 20,3) de l'une d'entre elles, qui faisait le coin de la
rue Saint-Honoré; voici ce que nous savons des autres, sur lesquelles on n'a point
encore donné de renseignements.
Dans le censier de l'Evêché, pour l'année 1873, on lit(2>: «Item, aus Tuille-
«ries, la tuillerie que tient Guillaume de Moucy, qui fu (sic). — Item, la
«tuillerie que tient Clément de Moucy, qui fu à la Marcelle, que l'en dit la Tour
«quatrée. — Item, la tuillerie (sic). — Item, Jehan Maudole pour vi arpens
« et demi de terre, qui fu Jehan de Bon-Œil, le Viel'3), et depuis, Gilles de Macy,
«tenant à Perrenelle de Crépon. — Item, Perrenelle de Crépon'4), pourvi arpens
«de terre, qui furent Jehan de Bon-Œil le jeune, tenant audit Jehan Maudole ;t>
auquel dernier article est ajoutée cette note en écriture du temps : «A présent
«Jehan Maudole. n Tel est le premier document jetant quelque jour sur la topo-
graphie du territoire appelé les Tuileries; on n'en saurait tirer grand parti, et
nous n'avons obtenu d'éclaircissements que sur deux des propriétés auxquelles il
v est fait allusion.
Les archives des Quinze-Vingts contiennent une sentence du 6 juillet iS'jo^,
condamnant ce Guillaume de Moucy dont il est question dans le censier de 1873 à
relever le mur mitoyen qui séparait son clos de celui des Aveugles, et qu'on avait
démoli lors de la construction de l'enceinte de Charles V. Le« Clos... ou cousturede
«terres arables n appartenant aux Quinze-Vingts, lequel, est-il dit dans la sentence,
« avoit esté pieça lessié et donné , estant et assis assez près de la bastide Saint-Hon-
«noré, et devant les murs et fossez faiz.et édifiez pour la fortification de la ville
«de Paris; et lequel clos, pièce de terre ou cousture soloitestre et estoit, ou temps
«que donné et lessié leur avoir esté, tout clos, fermé et environné de tous costez
rrgularie que fuit quondam defuncti Thome dicti le xri' siècle. {Revue archéologique, t. XIII, p. 43i.)
rrTacheut ex altéra, in censiva domini parisiensis m Arch. de l'Emp. reg. S 1253, fol. hi v°.
"Episcopi.» (Cart. de l'Hôtel-Dieu, coté 1260, (3) On se rappelle qu'un r Pierre de Bonoil t, pos-
fol. 9/1 r°.) Nous ne connaissons rien de plus ancien sédait des terrains aux Tuileries au commence-
sur les Tuileries de la rive droite. Celles du bourg ment du xiv' siècle.
Saint-Germain sont indiquées dès 1259. (i) Son nom s'est déjà rencontré dans les comptes
(1) Conf. nos Recherches sur les terrains de lapa- du Louvre de Charles V. (Voir p. 192, n° 75.)
roisse Saint-Sulpice qui étaient encore en culture au -5) Arch. des Quinze- Vingts , liasse 3o6.
EMPLACEMENT DES TUILERIES. 327
tr de bons, beaux et fors murs de pierre, de piastre et d'autre matière; dont lune
crdes parties dësdiz murs, qui estoit demourée en estât, estoit joignant delà chau-
(tcée, et au lonc d'icelle chaucée; en alant de ladite bastide au Roule (le long de
tria rue Saint-Honoré); et, de l'autre costé tenans et joignans aus murs dudit
« Guillaume de Moucy faisans closture, fermeure etdeffense, division et séparation
r entre ledit clos et terre de ladite Congrégation , et entre un clos ou pièce de terre ,
ttqui avoit esté et estoit audit Guillaume, estant et assis derrières une huilerie ou
tr maison que il avoit devers la rivière de Saine , oultre ladite bastide Saint Honnoré ,
rtet joignant ou assez près dudit clos; et lequel clos dudit Guillaume avoit esté
rret estoit des appartenances desdites maisons et tuilleries. Et desquelz clos certaine
tr quantité et grant partie avoient esté détrais (retranché) et pris, et les murs qui
« faisoient closture à yceulx , et faisoient front par devers ladite Ville et la forte-
ttresse d'icelle, démolis, arrasez et abatuz de par le Roy nostre sire, et aussi la
rrplus grande partie de tous les jardins et courtilz de ladite Congrégation, avecques
rr plusieurs habitations de leurdit hostel et avoit esté lessié le demourant des
rr autres murs qui faisoient closture et fermeure tant entour ledit clos de ladite
tr Congrégation, comme entre ycellui clos et le clos dudit Guillaume et autres voi-
rrsins, qui avoient murs tenans et joignans desdiz clos pour faire deffense et clos-
rr ture à leursdiz héritages, et eulx garder de dommages tant de personnes comme
trde bestes. n Ce qui ressort de ce texte, c'est d'abord que ce clos de Guillaume de
Moucy aboutissait, vers le nord, à la couture des Quinze-Vingts, et, vers le sud, à
la maison ou tuilerie qui, dépendant du clos, s'étendait jusqu'au bord delà rivière.
Les limites du côté de l'orient et de l'occident sont moins clairement indiquées;
mais il est sûr pour nous que le clos bordait le chemin des fossés, car il
est l'objet du premier article du censier de 1873, et formait, en 1&02, l'abou-
tissant de la maison du coin de la rue Saint-Honoré, connue sous le nom de
maison de la Poterie. Le clos de Guillaume de Moucy est pareillement énoncé
comme étant la première des propriétés auxquelles le clos des Quinze-Vingts atte-
nait vers le sud, et qui, suivant une sentence du U février 1871, étaient celles de
rtGuiot de Moucy, Estienne Muète, Jehan Maudole, Perrenelle de Crépon, et....
tr Jehan Périer. n Nous avons reconnu que ces noms sont placés dans le même
ordre que l'étaient les terrains, mais nous ne pouvons affirmer que la liste en soit
complète; elle ne correspond pas entièrement aux données des censiersW. Néan-
(1) Voici le texte du censier de 1899, un des rrpour une maison et vi arpens de terre ou vigne, qui
éléments du problème: rrltem, aux Tuilleries, la r furent Gile de Macy et Curent Jehan de Bon-œil,
rrtuillerieque tient Guiot de Moucy, qui fu <r tenant à Perrenelle de Creppon, n'viii'ob. — Item,
a — Item, la tuillerie que tient Clément de Moucy, et ledit Jehan Maudolle pour vi arpens de terre, qui
»rqui fu à la Marcelle , que l'en dit la Tour quarrée. rr furent Jehan de Bon-œil le jeune , et furent à ladite
ff — Item, la tuillerie... — Item, Jehan Maudolle, * Perrenelle de Creppon, x' ind ob. — Item, ledit
328 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
moins, en comparant attentivement les divers renseignements, nous arrivons à la
quasi-certitude que l'ordre des terrains, en allant de l'orient à l'occident, était
celui-ci: i° la tuilerie de Guillaume de Moucy, bordant le chemin sur les fossés;
2° la tuilerie de la Tour-Carrée, à Clément de Moucy (i3y3), qui avait appartenu
à la Marcelle, et se confond avec celle d'Etienne Muète; 3° les six arpents de Jean
Maudole (1873), qui avaient été à Gilles de Macy, auparavant à Jean de Bonneuil,
et qui , en 1399, contenaient une maison; h° les six arpents de Perrenelle de Cré-
pon, qu'avait possédés Jean de Bonneuil le jeune et qui étaient certainement con-
tigus aux précédents; 5°un arpent et demi (1399) dépendant de ceux dePerrenelle;
6° deux arpents appartenant en 1 399 à Robert Le Comte, chevalier; 70 deux
arpents à Jean Maudole, qui avaient été à Jean Le Seynier; 8° la terre de Jean
Périer. Il est inutile d'ajouter que ce lotissement, modifié dans le siècle suivant,
et finalement effacé du sol, n'a pas laissé la moindre trace appréciable de nos
jours.
Indépendamment de diverses autres pièces de terre, dont nous n'avons pas à
nous occuper, Jean Maudole acquit les six arpents de Perrenelle de Crépon et
trois arpents et demi situés à la suite. Ces neuf arpents et demi, réunis aux six
qu'il avait dès 1 373 , formèrent un clos d'environ quinze arpents, déjà appelé le
clos Maudole en 1 387, qui portait encore ce nom en iû63, et qui est indiqué,
dans une foule de titres, comme l'aboutissant des maisons de la culture des Quinze-
Vingts, depuis le logis de l'Image Notre-Dame jusqu'à celui de la Liberté. Cepen-
dant, après la mort de Jean Maudole, lequel ne vivait plus en i3g2(1), son clos fut
divisé en parcelles. D'après un censier de 1&19, «le principal hostel et le clos de
ff vignes, contenant deux arpens et demi,» étaient alors occupés par la veuve de
Me Régnard de Crémery, et le reste, renfermant deux maisons, par neuf individus.
Ici le fil de la succession Maudole se brise. Quant à celle de Guillaume de Moucy,
il n'est point possible d'en suivre la trace ; nous ne retrouvons de documents qu'à
la fin du xve siècle.
Pour une raison qui nous échappe et qui laisse un desideratum très-fâcheux, le
censier de l'Évêché pour 1689, l'un des plus beaux monuments topographiques
que l'on connaisse, ne contient aucun détail relatif au terrain sur lequel s'éten-
« Jehan Maudolle pour la terre qui fu Philipot de
rfL'Isle, contenant un arpent et demi, tenant aux
rrvi arpens dessusdiz, doit xvmd vacque pour
rr ce qu'elle dit que tout est compris en ladite somme
rde x' iidob. — Item, pour deux arpens qui furent
r Jehan Le Seynier, tenant à Jehan Périer d'une part ,
ret à messire Robert Le Conte, d'autre part,u\ ..
r — Item, Mons. Robert Le Conte, cheva-
llier, pour deux arpens de terre, tenant aux terres
«•du clos Jehan de Ron-œil d'une part, et h Perre-
rtnelle de Creppon, d'autre part... if.i (Arch. de
l'Emp. reg. S. ia54 , fol. 87 r°.)
(1) Quoiqu'il soit mentionné comme s'il était vi-
vant, dans le censier de i3gg. Les erreurs de cette
sorte abondent dans les titres domaniaux, lorsqu'ils
sont rédigés à l'aide de pièces antérieures.
EMPLACEMENT DES TUILERIES. 329
dent actuellement le château et la cour des Tuileries; en revanche, il énonce
toutes les pièces de terre de l'emplacement du jardin. Malheureusement il les dé-
signe par ordre de propriétaires et non pas suivant leur ordre naturel; cependant,
comme il les donne, sinon avec des cotes de longueur, du moins avec une indica-
tion de leur superficie ainsi que de leurs tenants et aboutissants, nous avons pu,
à force de temps, en comprendre la disposition relative, et même traduire nos
idées par un croquis. Mais, ce résultat obtenu, la contenance totale des pièces
de terre s'est trouvée considérablement moins grande qu'elle n'eût dû l'être pour
se rapporter avec les dimensions du terrain. Dans l'impossibilité de comprendre
cette circonstance singulière, nous avons pris le parti de renoncer à poursuivre
notre étude, et nous signalerons seulement une des particularités qu'elle nous a
permis d'observer.
Derrière la maison de la Corne-de-Cerf (hôtel de Pluvinel) , comprise dans
le clos des Quinze-Vingts (voir p. 296), s'étendait une pièce de terre arable dé-
pendant de cette maison et appartenant aux Aveugles; en 1^89, elle tenait, vers
l'occident, à trois autres ; vers l'orient, au champ de Jean Berthe M; vers le nord, au
clos des Quinze-Vingts, et, vers le sud, au chemin de la rivière et à J. Berthe. Or
cette pièce, qui présentait trois arpents et demi plus treize perches de superficie, et
faisait hache du côté de Paris, est dite, dans un acte de 1620, tenir (du côté de l'est)
au clos Maudole ; ainsi ce clos était bien situé derrière les maisons de l'Image Notre-
Dame et autres voisines, conformément à la teneur des titres. Mais, comme plu-
sieurs maisons placées au delà de celle de la Corne-de-Cerf, par exemple les
maisons de la Liberté, de l'Echiquier et de l'Image Saint-Louis, sont également
dites, en i653, 1660, iholi, etc. aboutir au clos Maudole, et comme la pièce des
Quinze-Vingts a certainement appartenu à l'Hospice dès les premières années du
xvc siècle, il s'ensuit que le clos Maudole était formé de deux portions séparées par
la pièce des Quinze-Vingts. Du reste, il en a pu être autrement d'abord, et il
n'est point impossible que, aux dates précitées, les maisons de la Liberté, etc.
n'aient été énoncées que par suite d'une habitude comme aboutissant au clos
Maudole, car on ne trouve pas l'indication confirmée dans le censier de 1689, et
le clos était déjà morcelé en 1 U 1 9. Il convient de remarquer que, dans tous les cas,
la portion du clos Maudole située au delà du champ des Quinze-Vingts, laquelle
est appelée «clos des jardins des maisons des Tuileries, n dans un acte de 1628,
redevint plus tard une dépendance de la portion du clos Maudole située en deçà
de ce champ, c'est-à-dire du côté de la Ville.
01 La pièce de J. Berthe, aboutissant de même vigne qui appartenaient aussi à Berthe, et sur les-
au clos des Quinze-Ving!s et au chemin de la ri- quelles nous n'avons point de renseignements. La
vière, contenait un arpent neuf perches et demie; pièce des Quinze-Vingts contiguë h celle de Berthe
elle tenait, vers l'orient, h une maison et à une pouvait provenir du démembrement du clos Mau-
1 A a
330 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
En effet, vers le commencement du xvie siècle, Jean Le Gendre, seigneur de
Villeroy et trésorier des guerres, qui, dès i5oi, était propriétaire de la partie
orientale de l'ancien clos Maudole W, ou plutôt son fds Pierre , seigneur d'Alincourt,
fit une suite d'acquisitions telles que leurs héritiers se trouvèrent en possession de
tout le terrain compris entre le chemin du hord de l'eau, celui qui longeait les
fossés de la Ville, le clos des Quinze-Vingts et le chemin de l'Abreuvoir-l'Evêque,
à l'exception d'un champ de dix arpents, en bordure sur cette dernière voie, et
de la pièce des Quinze-Vingts perpendiculaire à la Seine (2). Les preuves de ce fait
ressortent du censier de l'Ëvêché pour i53o, lequel contient l'article suivant'3',
relatif aux terrains dont le palais occupe aujourd'hui l'emplacement : «Lesdicts
«héritiers Messire Pierre Le Gendre, de présent noble homme Messire Le
« Viste, président en la court de Parlement, à cause de sa femme, paravant femme
«dudict Le Gendre; Messire Nicole de Neufville, loco de Messire Loys de Poncher;
«etMc Jehan de Tiercelin, conseiller en Parlement, pour leurs maisons, jardins,
«vignes et thuilleries, non comprins, quant à la part dudict Le Gendre, certaines
«terres cy-devant déclarées (celles qui étaient situées au delà de la pièce des
ce Quinze-Vingts), qu'il a encloz dedans sa part desdictes maisons et jardins
« qui furent (les maisons et jardins) sire Jehan Le Gendre et, avant, Pierre Drouart;
ccèsquelz lieux ledict deffunt Jehan Le Gendre a encloz ung arpent de terre qui
ce fut Jehan Berthe (contigu à la pièce des Quinze-Vingts) et Le Maçon, qui
eedoit chacun an xu deniers parisis de cens. — Tenant d'une part, tous lesdicts
ce lieux, au long et faisant le coing du chemin par lequel on va à Sainct-Cloud, et
ee passe l'on entre la thuillerie de Me Arnault L'Huillier, et d'autre part... aboutis-
cesant par derrière au clos des XV". Doivent les dessusdicts, par an, xxns parisis,
cei denier obole parisis. — Desquelz lieux Jehan Aux Beufz'4', couvreur de mai-
ce sons, a acheté partie de Mous, de Villeroy. C'est assavoir : une thuillerie et
«maison estant sur le chemin traversant entre les thuilleries de Aubin Poullart et
« ledict Jehan Aux Beufz. v
La portion de terrain que posséda le président Le Viste <5', et, après lui, Charles
dole; elle était éloignée d'une quarantaine de mètres
au plus de remplacement du palais actuel.
(1) En i5oi, la maison du Cygne est dite aboutir
à Jean Le Gendre , et, en i5a6, au clos Le Gendre.
En 1 5 1 5 , la pièce des Quinze-Vingts est dite te-
nir à Pierre Le Gendre, etc. — Jean Le Gendre,
père de Pierre , mourut le jour de Noël 1 5 1 1 , sui-
vant une inscription du cimetière des Innocents.
Il était apparemment le fds de ce Jean Le Gendre
qui, le k avril i44o, prit à bail une partie du
clos de la Poterie faisant le coin de la rue Samt-
Honoré.
(S) (tLes Quinze-Vingts de Paris, pour trois ar-
«pens et deniy seize perches , assis audict terrouer
«■de la Ville-l'Évesque, tenant d'une part aux héri-
« tiers Messire Pierre Le Gendre, d'aultre part à
rreulxmêmes (les héritiers) ; aboutissant par haull
c'a leur cloz, et par bas, en hache ausd. héritiers
rrLe Gendre, et sur le chemin de la rivière." (Cen-
sier de i53o.)
(3) Arch. de l'Emp. reg. S 1256, fol. 4io v°.
(4) Le même qui démolit la Grosse-Tour du
Louvre.
(i) D'après le père Anselme, son prénom était
EMPLACEMENT DES TUILERIES. 331
de Pierrevivej1', seigneur de Lézigny, leur échut, parce qu'ils furent, celui-ci, le
quatrième, celui-là, le troisième mari de Charlotte Briçonnet, fille de Pierre Bri-
çonnet, seigneur de Praville, laquelle avait épousé, en secondes noces, Pierre Le
Gendre, seigneur de Villeroy, le même qui avait si fort arrondi son héritage.
Le terrain du président Le Viste, qui renfermait une habitation dès 1 5Û7, est
indiqué dans les titres comme un clos de jardin auquel, en 1 556, aboutis-
sait la maison de l'Image Sainte-Geneviève, en i55o la maison contiguë, et en
i55i la maison qui précédait celle des Carneaux. Or la maison qui précédait
celle des Carneaux et les deux qui la suivaient sont énoncées, en 1 56 1 , aboutissant
au rr jardin des Cloches, d de même que la maison des Carneaux, suivant un acte
de i 556. Ce jardin des Cloches'2), qui, en 1 564, appartenait aux héritiers de
Marie Briçonnet, est donc le même que le clos du président Le Viste; il paraît
avoir commencé à peu près au droit de la maison de l'Image Sainte-Geneviève
et s'être étendu assez loin dans la campagne. On verra, par l'acte de la vente
faite à Catherine de Médicis, qu'il tenait, vers l'est, au clos de Villeroy ou Le
Gendre, vers l'ouest, à des terres labourables, et qu'il aboutissait, du côté du
midi, sur le quai'3). L'emplacement de sa partie orientale correspond aujourd'hui
à celui des quinconces, à la hauteur de l'îlot compris entre les rues d'Alger et de
Castiglione.
Quant aux tuileries de Jean Aux Bœufs et de Poullart, l'absence de titres ne per-
met pas de s'en faire une idée nette. Séparées par une ruelle qui était perpendi-
culaire à la Seine, et dont rien ne permet de déterminer la situation précise, elles
étaient voisines du coin du quai, comme il appert de ce passage du censier de 1 6o3 ,
copié sur de plus anciens, et reproduit pour mémoire : cr Sur lesquels lieux Jehan
a Aux Beufs avoit faict faire une thuillerie, et y soulloit avoir une ruelle entre
cla thuillerie dudict Aux Beufs, et celle de Aulbin Goullard (Poullart); et soul-
«loient tenir tous lesd. lieux d'une part à lad. ruelle, d'aultre au coing du che-
rtinin tendant de Paris à Sainct-Cloud; abboutissant au cloz des Quinze-Vingts. n
Sous le règne de Charles VIII, Simon de Neufville était possesseur de nom-
breuses terres au territoire de la Ville-l'Evèque. Un peu plus tard, un de ses des-
Aiitoine; cependant plusieurs titres le nomment
Pierre. Il était seigneur de Fresnes.
(1) Le censier de l'abbaye Saint-Germain pour
1567 mentionne: "La maison des Tuilleryes, que
t tient de présent maistre Charles de Pierre- Vive,
t Trésorier de France.»
(,) Le nom resta au terrain et à ses environs pen-
dant assez longtemps: dans un bail du 39 mai 1637,
un lieu dit les Cloches est indiqué comme voisin de
l'entrée du Cours-la-Reine. Dans un autre acte, de
i634, deux arpents tenant aux fossés d'entre les
portes Saint-Honoré et de la Conférence sont pareil-
lement énoncés comme se trouvant au territoire des
Cloches.
(3) Dans un titre de 1 5ao , il est parlé d'une place
à pêcher s'étendant cr depuis la porte des Tuilleryes
rrjusques h la porte neufve des Carneaulœ de l'hostel
«de Mons. de Villeroy.» Le jardin des Cloches au-
rait-il dépendu de l'hôtel des Carneaux , situé sur la
grande rue du faubourg?
4a.
333 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
cendanls, le trésorier de France Nicolas de Neufville acquit de Louis de PoncherW
et d'autres individus plusieurs maisons situées aux Tuileries^. Il avait peut-être
réuni ces maisons à celle qu'il devait à un don de son oncle , Pierre Le Gendre ,
lorsque la duchesse d'Angoulême eut l'idée de venir habiter, pour rétablir sa
santé, dans l'une des propriétés à lui appartenant. S'étant bien trouvée de l'air pur
qu'on y respirait, elle engagea le Roi, son fils, à faire acquisition de la maison dite
des Tuileries, en échange de laquelle François Ier abandonna à de Neufville la terre
de Chanteloup, près de Montlhéry. La commission donnée à la Chambre des
Comptes pour effectuer cette transaction est datée du 1 2 février 1 5 1 8 , et ainsi
conçue : «François, par la grâce de Dieu, roy de France. A nos amez et féaux les
irgens de nos comptes et trésoriers à Paris, salut et dilection. Comme, depuis deux
rrmois en çà, estant de séjour en nostre bonne ville et cité de Paris, ayans, avec
ff nostre très chère et très amée compagne la Royne et nostre très chère Dame et
«mère, faict continuelle résidence en nostre maison des Tournelles, assise près de
cria bastide Sainct-Anthoine; en laquelle nostredite Dame et mère s'est par aucuns
et jours trouvée indisposée de sa santé corporelle, tant à l'occasion de la situation du
trlieu, qui est humide, paludeux, et en basse assiète, voisin et près des immondices
cret esgoût de l'un des quartiers de nostredite Ville, que autrement; à ces causes,
«nous ayans par aucuns de nos principaux officiers et serviteurs fait voir et visiter
fr plusieurs lieux et places, maisons et édifices, à l'entour de cettedite Ville , et nous-
"ffiiiême en personne ayant veu et visité certaines maisons et édifices, cours et
fr jardins clos à murs, appartenais à nostre amé et féal conseiller, secrétaire de
mios finances et audiancier de France, Nicolas de Neufville, chevalier, scituez et
trassis es faubourgs de la porte Sainct-Honoré, près et joignant les fossez de cette-
rr dite nostre bonne ville et cité de Paris, et de la rivière de Seine, sur le chemin
« allant de ladite porte à nos bois de Boulongne et Saint-Cloud W, lesquels nous
(1) L'acquisition pourrait avoir été faite par le
père du Nicolas de Neufville dont nous parlons. Il
portait le même prénom que son fils, et ne mourut,
suivant le père Anselme, qu'en 1 54 9. Un Louis Pon-
cher, seigneur de Lézigny, épousa P»obine , sœur de
Pierre Le Gendre. Il y eut de nombreuses alliances
entre les membres des familles auxquelles apparte-
naient les terrains de la région des Tuileries; mais
la transmission de ces terrains et leur topographie
restent très-obscures par la rareté des titres.
m L'inventaire du Mémorial PP de la Chambre
des Comptes contient l'indication des pièces sui-
vantes, qui n'existent plus : rr Contrat de vente par
rrJean Bude et Marguerite Mesnard, sa femme, d'une
" maison, cour et jardin, etc. à Paris, au lieu dit
rdes Tuiileries, au proffit de Nicolas de La Neuville
* moyennant 780 1. — Autre contrat de vente par
t Geneviève Le Gendre des Mousseletz, au proflit
ffdud. Nicolas de Neuville de Villeroy, de la portion
fràelle appartenant en lad. maison des Thuilleries,
^moyennant 5oo 1. — Autre contrat de donation
rfpar Pierre Le Gendre, de Maigny et Hallaincourt ,
"trésorier de France, au proflit dud. de Neuville,
rrson nepveu, d'une maison et jardin joignant les
<t Tuiileries. 1 (Arch. de l'Emp. reg. PP 119.)
(S) La maison de Neufville occupait donc l'em-
placement de cette partie de la cour des Tuileries
comprise entre la grille et la Grande-Galerie, et elle
s'étendait le long du quai; mais rien ne nous ren-
seigne sur ses dimensions dans les deux sens.
EMPLACEMENT DES TUILERIES. 333
tr avons trouvé de nostre part, et aussi par le rapport que fait nous a esté par gens
« experts et eri ce connaissans, estre en bel air et en belle situation; principale-
«ment pour ce que nostredite Dame et mère, puis aucuns jours s'est continuelle-
«ment tenue ezdites maisons et tient encore à présent, et très-bien trouvée en
« disposition et santé de sa personne , au moyen de quoi elle a désir et affection de
«soi y tenir souvent, parce que l'air et situation du lieu sont propres et conve-
«nables pour la santé de sa personne, et nous, semblablement, pour y prendre
« nostre plaisir et récréation, et pour autres nos commoditez et aisances; et pour
ace avons fait entendre à nostredit conseiller Nicolas de Neufville, que nostre plai-
«sir et vouloir estoit qu'ils nous baillast et délaissast pour nous et nos successenrs
«à tousjours perpétuellement lesdites maisons, édifices, cours et jardins à luy
«appartenans, dont dessus est faite mention, en lui baillant et faisant bailler de
«par nous, par permutation et eschange, bonne récompense à luy commode et
« utile, en assiette de terre ou revenus sur nostre domaine, de la valeur desdites
-maisons, édifices et lieux déclarez, ce que ledit de Neufville nous a franchement
«et volontairement accordé. Nous, à ces causes, voulans ladite récompense estre
tr faite et baillée audit de Neufville par eschange et permutation, comme dit est,
«vous commandons et très expressément enjoignons que vous vous informiez ou
« faites informer bien et deûement de quel profit, revenu et esmolument est à nous
«et à nostre domaine, nostre hostel ou masure, parc, lieu et appartenances de
«Chanteloup, situez et assis près Chastres sous Montlehéry, que l'en dit estre de
«présent lieu vague en ruyne, décadence et de petite valeur et revenu; quels frais,
«mise et despens conviendra faire par nécessité audit lieu de Chanteloup, pour la
«réparation, édifice et construction d'icelui; aussi vous informez et faites voir et
«apprécier par gens et ouvriers experts à ce connoissans, lesdites maisons édi-
«fices, cours, jardins, dont dessus est faite mention, appartenans audit sieur de
« Neufville de son conquest, ayant par vous regart tant à l'achapt qu'il en a fait
«qu'aux bastimens, édifices et méliorations qu'il y a fait faire de neuf, et pareille-
«ment à la valeur dudit lieu de Chanteloup et appartenances, ayans toutefois
«égard et considération auxdits frais, mises et despences qu'il conviendra faire
«par nécessité audit lieu pour la réparation, édifice et construction d'iceluy; et si,
«par ladicte information ou autrement, deûement faite, il vous appert que lesdites
«maisons et lieux dessusdits appartenans audit de Neufville, que désirons singu-
« fièrement avoir de lui par eschange et permutation, pour les causes dessus décla-
re rées, soient d'aussi bonne ou meilleure valeur que ledit lieu de Chanteloup et
«appartenances, eu esgard, et comme dit est, à l'achapt, édifices et méliorations
«faites par ledit de Neufville, et à la ruyne et petit revenu dudit lieu de Chante-
«loup, appartenances, et frais qu'il conviendra faire pour la réparation et cons-
«truction d'iceluy; vous, audit cas, faites avec ledit de Neufville ledit eschange
33'i TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
«et permutation, à luy baillez et délivrez pour luy, sesdits hoirs et ayans cause,
«à tousjours perpétuellement nostredit hostel ou mazures, parc, lieu et apparte-
nances de Chanteloup, avec le droit de justice haute, moyenne et basse audit lieu,
«sur les hommes subjets et censiers qu'il pourrait avoir et accroistre à demie lieuë
«à l'entour d'iceluy, pour en faire et disposer comme de son propre héritage, sans
«en rien réserver, retenir ne excepter pour nous ne les nostres, fors seulement
«lesfoy et hommage, souveraineté et ressort immédiatement du bailly dudit Chan-
«teloup, par devant nostre prévost, à nostre Ghastellet de Paris; en nous baillant,
«cédant et transportant par ledit de Neufville pour nous et nosdits successeurs à
«tousjours perpétuellement sesdites maisons, jardins et appartenances dont cy-
« dessus est faite mention, et lettres sur ce requises et nécessaires, pour estre et
« demeurer unies à nostre domaine ; et lequel bail , qui ainsi sera par vous fait audit
«de Neufville, nous avons, dès à présent comme pour lors, validé et auctorizé, vah-
«dons et auctorizons, et voulons estre de tel effect et valeur comme s'il avoit par
«nous esté faict. Et au cas que, où par ladite information, eu esgart à tout ce que
«dit est, trouverez que ledit de Neufville nous deust faire aucune rescompense,
«le pourrez charger de nous payer et bailler en rente annuelle et perpétuelle, ou
«descharger nostredit domaine de telle autre somme que verrez, en vos loyautez
«et consciences, estre à faire. Et pareillement où trouverez que lesdites maisons,
«édifices et lieux dessus déclarez appartenais audit de Neufville, fussent de plus
«grande ou meilleure valeur que ledit lieu de Chanteloup et appartenances, vous
« en renvoyerez vos rapports et advis sur ce en vosdites consciences et loyautez ,
«pris après toutesfois ledit eschange fait par vous, comme dit est, pour estre par
«nous pourveû à la récompense dudit de Neufville selon que verrons estre à faire.
«De ce faire vous avons donné et donnons plain pouvoir et auctorité, nonobstant
«quelconques ordonnances, restrictions, mandemens oudeffenses faictesou à faire,
«à ce contraires. Donné à Paris, le xu febvrier, l'an de grâce M. D. XVIII, et de
«nostre règne le ve. Signé : par le Roy, Robertet ^\ n
Telles sont les circonstances dans lesquelles la maison des Tuileries devint pro-
priété royale. Depuis, elle ne cessa jamais de l'être, bien que, par lettres déli-
vrées à Lyon, le icr novembre i525, la Duchesse en eût gratifié Jean Tiercelin,
maître d'hôtel du Dauphin, et Julie Du Trot, sa femme, car ce ne fut que par
simple don viager, comportant le retour à la Couronne, lors de la mort du der-
nier survivant des deux époux. La clause est rappelée dans l'arrêt d'enregistre-
ment des lettres, qui est rédigé en ces termes : «Les gens des Comptes du Roy
«nostre sire, à Paris, au receveur ordinaire dudit lieu, salut. Veuës les lettres
«patentes de Madame, mère du Roy, régente en France, signées de sa main et
(1> Extrait des registres de la Chambre des Comptes, ap. Félibien , t. III, p. 5-] h, et Arch. de i'Emp.
reg P. a3o4.
EMPLACEMENT DES TUILERIES. 335
rd'un secrétaire signant en finance, données à Lyon, le ier jour de novembre
kM. D. XXV, ausquelles ces présentes sont attachées soubz l'un de nos signets,
n impétrées et à nous présentées de la part de Jean Tiercelin , maistre d'hostel
rcde monseigneur le Dauphin, par lesquelles et pour les causes y contenues ladite
ftDame, en vertu de son pouvoir de régence et auctorité à elle baillée par ledit
«seigneur, a donné, cédé, quitté, transporté et délaissé audit Tiercelin et demoi-
tc selle Julie Du Trot, sa femme et espouse, en faveur et contemplation de leur
(t mariage, le lieu et place des Thuilleries de Paris, avec les maisons, cours et jar-
rtdins, et tout le pourpris d'icelles, ainsi qu'elles se comportent et estendent; pour
ff desdits lieux, places et maisons, cours, jardin et autres choses des appartenances
et et dépendances desdites Thuilleries, fruits, proffits, revenus et esmolumens
rr d'icelles, jouir et user par lesdits Jean Tiercelin et Julie Du Trot futurs conjoints,
a à quelque valeur et estimation qu'ils soient et puissent estre et monter, leur vie
r durant tant seulement, et le survivant l'un de l'autre, en payant toutesfois les
k droits, debvoirs et charges ordinaires estant sur lesdites Thuilleries, s'aucunes
tten y a, où et ainsi qu'il appartiendra, comme plus à plain le contiennent lesdites
rr lettres. Veuë aussi la requeste sur ce à nous présentée par lesdits impétrans, cy
rr attachée comme dessus, ensemble les lettres missives à nous pour ce escriptes
rrpar le Roy, nostredit seigneur, ce jourd'hui apportées : consentons, de l'exprès
rr mandement d'icelui seigneur, l'expédition desdites lettres selon leur forme et
rr teneur, à la charge toutesfois des réparations nécessaires, et autres charges con-
r- tenues ez-dites lettres. Donné soubz nosdits signets, le xxme jour de septembre,
rrl'an M. D. XXVII. Signé : Chevallier (1>. n
Nous ne savons à quelle époque disparurent les tuileries de Poullart et de Jean
Aux Bœufs; nous avons seulement constaté que la maison cédée à la duchesse
d'Angoulême ne s'étendait point jusqu'au clos des Quinze- Vingts, car, dans aucun
document antérieur à la construction du palais, les maisons du clos ne sont dites
aboutir à Tiercelin ou au Roi; mais, au contraire, toutes, jusqu'à la hauteur de
celle de Sainte-Geneviève, sont énoncées aboutir au clos Le Gendre, puis aux hoirs
Le Gendre, et enfin (en i55o, i55&, etc.) au seigneur de Villeroy. En effet ,
Nicolas de Neufville, neveu de Pierre Le Gendre, institué par lui son légataire uni-
versel en 1 5 2 h , hérita en même temps de la seigneurie de Villeroy et des terres
situées près des Tuileries, dont nous avons parlé, et qu'il partagea avec ses cohé-
ritiers en mars 1 537. Nicolas de Neufville acquit aussi plusieurs maisons du clos
des Quinze-Vingts ('2); en 1 553 , il divisa ses biens entre ses enfants et mourut peu
après. Des trois enfants que lui donna sa femme Denise du Museau, le second,
"> Félibien, t. III, p. 5o,5. Nous n'avons pas retrouvé les lettres de donation, qui doivent être depuis
longtemps détruites. — (,) Voir p. 307.
336 TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Antoine de Neuiville, qui fut secrétaire du roi, ne se maria jamais, et ne parait
point avoir rien possédé aux environs des Tuileries; quant au troisième, Jean de
Neuiville, seigneur de Chanteloup, il obtint pour sa part la maison de la Coquille,
dans le clos des Quinze-Vingts, et une maison voisine. La jouissance du clos Le
Gendre, dont une partie semble s'être étendue entre celui des Quinze-Vingts et
lbôtel cédé à la duchesse d'Angoulême, échut au premier fils de Nicolas de Neuf-
ville; il portait le même prénom que son père, et prit les armes et le titre de
son grand-père, Pierre Le Gendre, seigneur de Villeroy. Toutes les propriétés de
la famille de Neuiville furent, dans la suite, acquises par la reine Catherine de
Médicis.
APPENDICES.
APPENDICES.
I. — TABLEAU DE SAINT-GERMAIN-DES-PRÈS
ET RETABLE DU PALAIS DE JUSTICE.
(Voir pages i46 et îig.)
En général, rien n'est moins commun que la représentation fidèle d'un édifice détruit
depuis assez longtemps; mais, lorsque l'image remonte au delà du milieu du xvi° siècle,
elle constitue un monument d'une extrême rareté ; aussi faut-il considérer comme le résultat
d'un hasard, plus extraordinaire encore qu'il n'est heureux, cette circonstance que l'on a
conservé du Vieux Louvre deux excellentes vues, dont l'une compte indubitablement quatre
siècles d'existence.
Le tableau de Saint-Germain-des-Prés, jadis propriété de l'abbaye, fut recueilli pen-
dant la Révolution par Alexandre Lenoir, et figura dans le musée, aujourd'hui si regrettable,
des Petits-Augustins ; il a été conservé ensuite dans l'église de Saint-Denis, et, en 1 8^5, il
est entré dans la collection du Louvre, où on le voit maintenant exposé. Il est ainsi très-
connu, et d'autant plus que la vue, qui en fait le principal intérêt, a été fort souvent
reproduite. Peint sur panneau, il mesure un mètre de hauteur sur deux mètres quatre
centimètres de largeur, et représente le sujet, fréquemment traité, du Christ descendu de
la croix. Autour du cadavre se groupent la Magdeleine , Joseph d'Arimathie, saint Jean
l'Evangéliste , la Vierge, une sainte femme, certain personnage en manteau rouge, que l'on
tient pour un abbé de Saint-Germain, et enfin une femme agenouillée, que nous croirions
volontiers être une parente du donateur. Dans le fond, à la droite du spectateur, apparaît
un calvaire, et à gauche se dessine un paysage comprenant l'hôtel de Bourbon, le Louvre,
Montmartre dans le lointain, et, sur un plan plus rapproché, le monastère de Saint-Ger-
main. Personne ne sait d'ailleurs de qui est au juste le tableau, que l'on suppose dû à un
artiste français ayant subi l'influence de l'école flamande (1). Si l'hypothèse ne manque point
(1) Sur la boite à parfums que tient la Magdeleine terpréler. Les uns lisent, h tort, les lettres lv cipio
est tracée une inscription très-embarrassante à in- af, et prétendent qu'elle fait allusion a Scipion l'Afri-
w TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
de vraisemblance, il en est fort différemment des dates qu'on a assignées jusqu'ici à l'exé-
cution de la peinture , et dont nous allons démontrer l'étonnante inexactitude.
Au dire d'Alexandre Lenoir, le tableau serait contemporain de Charles VII; selon M. de
Clarac, il daterait de la fin du xive siècle, et, d'après le catalogue du Musée, des premières
années du xv% au plus tard. Ces diverses conjectures, qu'on a maintes fois répétées, et qui
n'ont pas encore trouvé de contradicteur, sont absolument dépourvues de base; le seul
document d'apparence historique que l'on ait à citer sur l'origine du tableau est le passage
où D. Bouillart le mentionne en ces termes : « Enfin on voit dans la sacristie un ancien
«tableau qui a servi autrefois dans quelque chapelle, où l'abbé Guillaume (IIIe du nom,
«mort en i4i8) est représenté à genoux, soutenant avec respect, par-dessous les bras, un
«Christ détaché de la croix (1). » Il convient de remarquer que D. Bouillart n'invoque ici,
contrairement à ses habitudes, aucune autorité, et cela manifestement parce qu'il ne se
fondait que sur une tradition.
En matière d'antiquités, nul ne l'ignore, les caractères archéologiques d'un tableau doi-
vent passer avant les données de la tradition. C'est pourquoi, avant même d'être arrivé à
reconnaître la cause de l'erreur commise par D. Bouillart, nous avions la certitude qu'il se
trompait d'un siècle dans son appréciation : le style du tableau ne permet pas d'admettre
un moment qu'il remonte au temps de Charles VI. Le caractère des têtes, l'agencement des
draperies , la forme des lettres de l'inscription tracée sur le vase que tient la Magdeleine ,
et les vêtements du Joseph d'Arimathie, qui rappellent immédiatement ceux des calvaires
sculptés en ronde bosse de la Renaissance, nous ont toujours persuadé que l'œuvre ne pou-
vait être de beaucoup antérieure à cette dernière période. Mais ce qui est surtout décisif,
ce sont les costumes, bien qu'assez vagues, de petites figures dispersées dans le paysage,
et en particulier leur tournure éminemment caractéristique. Le commencement du xvi" siècle
se révèle là avec tant d'évidence qu'on ne saurait presque souhaiter une indication plus
explicite ; nous en prenons à témoin tous ceux qui ont étudié l'histoire du costume.
Si l'ancienneté du tableau de Saint-Germain-des-Prés n'excède pas le xvi° siècle , quelle
cause assigner à l'affirmation de D. Bouillart, écrivain consciencieux, qui était dans les
meilleures conditions pour se bien renseigner? La méprise de D. Bouillart s'explique de la
façon la plus naturelle : en effet, le détail qu'il rapporte, il ne le tenait, nous venons de le
dire, que d'une tradition, suivant laquelle le tableau offrait le portrait d'un abbé appelé
Guillaume. Incapable de discerner l'âge réel de la peinture, D. Bouillart a cru qu'il s'agis-
sait de Guillaume III, dont la libéralité était renommée parmi les moines à cause des
magnifiques objets par lui donnés à leur église; suffisamment familier avec la critique
cain, opinion tout à fait inacceptable; d'autres, rr On sait, dit-il, la façon dont, au xvi' siècle, sur
plus ingénieux , y voient le nom d'un peintre inconnu, « les vases qu'on a l'habitude d'appeler aiguières de
qui seserait appelé Nicolas Pion; mais M. de Mon- «pharmacie, le nom de ce qu'ils devaient renfer-
taiglon a établi la fausseté incontestable de cette et mer figure comme ornement ; notre peintre aura
traduction, et il a soutenu, avec toute apparence de «copié un vase de cette espèce et aura reproduit ce
raison, que, si les lettres de l'inscription formaient « qu'il voyait.» (Arch. de l'art français , i" série,
un sens, elles donnaient simplement le nom de t. II, p. 1 37.)
quelque drogue employée dans les embaumements: (l) Hist. de l'abb. Saint-Germain-des-Prés, p. 169.
APPENDICES. v
archéologique, il eût compris que la tradition se rattachait nécessairement à l'un des deux
prélats commendataires du nom de Briçonnet, soit à Guillaume IV, abbé det5o3ài5o7,
soit à Guillaume V, abbé de 1607 * * 533 ; la véritable difficulté consiste à déterminer
lequel fut réellement le donateur.
Nous ne voyons qu'un indice qui aide à résoudre le problème, et, s'il n'en assure pas
la solution définitive, du moins il le simplifie beaucoup. La physionomie du personnage
en manteau rouge est celle d'un homme touchant à son douzième lustre ; or Guillaume V
n'atteignit sa soixantième année qu'en 1 5 3 o (1), et le tableau a été peint avant 1697, puisque
l'on y distingue la Grosse-Tour du Louvre. Pour que le tableau eût été fait par ordre de
Guillaume V, A faudrait conséquemment qu'il eût été entrepris presque au moment où la
tour disparut, et que l'artiste, rompant avec les habitudes de ses confrères, eût vieilli
quelque peu les traits de son modèle. Il ne serait point sage d'imaginer un pareil concours
de circonstances , et l'on a de meilleures raisons pour croire que le tableau provient d'un
don de Guillaume IV, qui mourut le 1 k décembre 1 5 1 k (2', c'est-à-dire sept ans après avoir
résigné la commende de l'abbaye en faveur de son fils. Dans tous les cas, et en dépit des
assertions contraires, il est entièrement hors de doute que le tableau de Saint-Germain-
des-Prés appartient au premier quart du xvie siècle.
Le retable du Palais de Justice ornait jadis la grand'chambre du Parlement, et se trouve
aujourd'hui dans la salle consacrée aux audiences de la première chambre de la cour im-
périale. Il est aussi peint sur bois, et mesure trois mètres trente centimètres de largeur sur
deux mètres vingt-huit centimètres de hauteur. H représente un Christ en croix, ayant à sa
gauche saint Jean l'Evangéliste , saint Denis et Charlemagne, et, à sa droite, la Vierge,
deux saintes femmes, saint Jean-Baptiste et saint Louis. Derrière le Christ on aperçoit la
ville de Jérusalem, puis, d'un côté, certain monument dont nous nous occuperons un jour,
et de l'autre côté, le Louvre avec l'hôtel de Bourbon et une partie de l'hôtel de Nesle. La
peinture est généralement attribuée à Jean Van Eyck ; mais M. le comte de Laborde pense
que c'est un ouvrage de Ugo Van der Goes'3'; le docteur Waagen en fait honneur à Mem-
ling (4), et M. Wautens, à Boger Van der Weyden (5). Il est présumable que le problème ne
sera jamais résolu; en revanche, la question d'époque ne peut donner lieu à de sérieuses
contestations. M. de Guilhermy a fait observer avant nous (0) que le visage de saint Louis y
présente une ressemblance frappante avec celui de Charles VII, et en est très-clairement
(,) H mourut le a 5 février i433 (v. s.), âgé de
soixante-trois ans. (Gallia christ, t. VI, col. 563.)
(,) Nous n'avons pas trouvé l'année de sa nais-
sance; mais, puisqu'il eut un second fils vers 1670,
il ne pouvait être âgé de moins de soixante ans vers
i5o3. Il était revêtu de la dignité de cardinal et,
un instant, nous avons cru le reconnaître dans le
cavalier qui longe les murs de l'abbaye, sur un
cheval couvert d'une housse rouge. Dans l'une de
ses gravures, M. de Clarac a transformé ce cava-
lier en une femme , suivie d'un homme et d'un en-
fant en pantalons. Ce vêtement moderne a été prêté à
plusieurs figures de la même planche, où la vue du
monastère est arrangée et complétée avec une faute
choquante de perspective.
(5) Histoire des ducs de Bourgogne , introduction,
p. CXL.
(4) Manuel de l'hist. de la peinture, t. I, p. i45.
(5) Revue universelle des Beaux-Arts , t. II, p. a5.
m Itinéraire archéologique de Paris , p. 3o4,
VI
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
un portrait. Ce portrait a du être exécuté lorsque le roi était âgé d'une quarantaine d'an-
nées, circonstance qui nous reporte à 1 h A3, et le costume des ravissantes petites figures
appuyées sur le parapet du quai corrobore l'indication. Il est ainsi parfaitement sûr que le
retable date du milieu du xve siècle ; c'est là le point essentiel pour nous.
La vue du tableau de Saint-Germain-des-Prés a été traitée un peu conventionnellement,
puisqu'on y a prolongé l'étendue des premiers plans et supprimé la tour de Nesles avec ses
dépendances pour montrer l'hôtel de Bourbon. L'image du Louvre y comprend la tour du
sud-ouest et un grand fragment de la courtine de Charles V, détails qu'on chercherait vai-
nement ailleurs; mais la porte dite du Louvre, sur le quai de l'Ecole, n'y apparaît point
auprès de la tour du Coin. Le dessin, confus par place, est exact dans son ensemble; tou-
tefois, sous ce rapport, le retable du Palais offre une très grande supériorité'". On peut
avancer avec certitude que cette dernière peinture, jusqu'à présent inédite (2), est d'une
fidélité scrupuleuse et tout exceptionnelle. L'architecture spécialement y est d'une vérité
saisissante, non-seulement comme aspect, mais encore comme agencement de lignes; nous
en avons fait une curieuse et concluante expérience en mettant en perspective , dans des
conditions analogues, le plan restitué du Vieux Louvre dressé par nous avant que nous
eussions obtenu une copie du retable. Nous avons constaté, non sans une bien vive satis-
faction, que le résultat concordait d'une manière incroyable avec la vue peinte, ce qui
établit définitivement la précision du plan et de l'image. C'est avec l'aide du premier qu'il
nous a été possible de déterminer les diverses tours dont les noms sont signalés sur la
planche.
Œuvre d'art fort remarquable, le retable du Palais fournit la vue de Paris la plus an-
cienne qui existe, et l'une des plus intéressantes que l'on puisse imaginer; c'est donc un
monument d'une haute valeur, dont on ne prendra jamais trop de soin, et que, pour cette
raison, il faut souhaiter de voir transporter dans un bref délai au Musée du Louvre, seule
place qui lui convienne l3).
IL — HÔTEL DE BOURBON.
(Voir page 39, ligne 16.)
Dès le milieu du xve siècle, le manoir était séparé de la voie du quai par une muraille
crénelée , qui est très-nettement représentée sur le retable du Palais ; elle ne figure point ,
(1> Sur le retable, par exemple, la courtine du
bord de l'eau, placée en son plan, vient bien s'atta-
cher à la tour du Coin, tandis que, d'après le
tableau, elle aurait été assez en arrière de la tour
pour qu'on pût passer entre les deux ; ce qui n'a
jamais eu lieu.
(,) Nous ne parlons que de la vue du Louvre. Le
VII" volume, 2' série, des Mémoires de la Société
des antiquaires de France contient, du retable,
une gravure au trait, accompagnant un mémoire
de M. Taillandier; mais les dimensions de cette
gravure y réduisent à rien la vue du Louvre, et c'est
ce qui nous autorise à la dire inédite. — Nos deux
plancbes ont été exécutées d'après les dessins cal-
qués sur les originaux.
(3) En 181 5, le retable a été fortement endom-
magé par un incendie qui a failli l'anéantir; il est
du reste placé dans de fâcheuses conditions de
lumière , et le public à l'admiration duquel on le
propose ne s'en soucie guère.
APPENDICES. t*
au contraire, sur le tableau de Saint- Germain- des -Prés, ni sur le plan du xvie siècle
provenant des archives de Saint-Germain-l'Auxerrois; mais elle reparaît dans le plan de
Gomboust et le tableau de Zeeman.
III. — HÔTEL D'ALLUYE.
(Voir page 96.)
Cette maison, possédée par Jean Congnet, fut confisquée sous la domination anglaise,
et, au mois de janvier i4aa (v. s.), Henri VI la donna à son conseiller Jean, seigneur
de Gourcelles de Saint-Liébaut. (Arch. de l'Emp. reg. JJ 172, fol. 100 v°.) Elle tenait
alors d'un côté à l'hôtel de Gilles de Clamecy, de l'autre à l'hôtel de Clermont, et par
derrière à l'hôtel d'Ostrevant.
IV. — HÔTEL DE CHEVREUSE.
(Voir page io3, ligne 6.)
L'inventaire des titres du Bourbonnais contient deux articles relatifs à la maison dite
plus tard Yliôtel de Ckevreuse. Le premier, sans distinction de date, signale le don qui en
fut fait à Bertrand Vachette par le duc Jean, auquel la maison appartenait par suite du
décès de son cousin «François d'Ambricourt ; » le second article mentionne la vente de
la propriété, cédée à François d'Ambricourt, le k avril 1^99, moyennant 5oo livres tour-
nois, par Regnault et Bruant «Guillonel. » (Arch. de l'Emp. reg. PP 37, fol. 4qo r°et v°.)
Nous manquons des renseignements nécessaires pour concilier ces détails avec ceux que
nous avons recueillis dans les archives de l'Evêché.
V. — FRAGMENT DE L'ENCEINTE
ENTRE LA TOUR DE ROIS ET LA PORTE SAINT-HONORÉ.
(Voir page 179, ligne 39.)
Au mois de mars 186 5, lors des fouilles entreprises pour la démolition de la Grande-
Galerie du Louvre, nous avons retrouvé un grand fragment du mur qui reliait la tour de
Bois à la porte Saint-Honoré, et nous avons pu constater matériellement la rigoureuse
exactitude du tracé gravé sept ans auparavant sur la feuille V de notre Plan de restitution.
Ce que nous n'avions pas prévu, c'est l'énorme épaisseur de la maçonnerie, qui, à sa base,
atteignait 4m,io. Le noyau du massif consistait en un blocage d'assez gros matériaux,
revêtu, sur la face externe, de pierres soigneusement appareillées. La muraille, fondée
sur le sable à 1 im,98 du niveau dit de Rivoli^, présentait un soubassement haut de 3m,58,
dont la saUlie (om,36) était rachetée par deux chanfreins. (Voirie plan des substructions ,
p. 173.) Depuis le soubassement jusqu'à l'axe du pavillon de Lesdiguières, il y avait, à
fl> Le niveau de Rivoli, adopté sur les chantiers méridionale, et se trouve à 37™,38 au-dessus du
du Louvre, est un plan qui passe à o™,33 au-dessus niveau de la mer.
des piédestaux du pavillon de Lesdiguières, face
cm TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
distance égale des murs de la Galerie, un espace de 65°\io. Un peu plus loin était le pont
de deux arches, au moyen duquel la Galerie franchissait le fossé. L'axe de la pile se con-
fondait avec celui de la grande travée, et les centres des niches de cette travée étaient à
plomb de ceux des arches. La face septentrionale du pont, affleurant la Galerie, était
parementée et conséquemment faite pour être vue. Vers le midi, au contraire, toute la
construction était en arrachements, et les dernières assises d'une culée ainsi que de la pile
subsistaient encore, s'avançant sous le sol du quai. De ce dernier côté le pont devait donc
dépasser la Galerie, et l'état de la maçonnerie provenait apparemment d'une démolition;
mais il ne sera point aisé , tant que le terrain n'aura point été fouillé suffisamment , d'ima-
giner comment se comportaient les parties détruites.
Le mur de la contrescarpe, épais de 3m,o6 au-dessus de l'empâtement, rencontrait bien,
comme nous l'avons dit, la Galerie au droit de la cage d'escalier hors d'ceuvre; toutefois
c'était le résultat d'un remaniement. La contrescarpe primitive passait derrière l'escalier,
car, une quinzaine de mètres avant d'en atteindre l'emplacement, elle se brisait pour aller,
après une seconde flexion, rejoindre la culée du pont dormant de la porte Neuve. Au
temps de Henri IV, on rectifia le tracé de manière que la contrescarpe demeurât pa-
rallèle, jusqu'à la Galerie, au mur d'enceinte, dont elle était éloignée de 34m,&o dans
le fond du fossé. Il est probable que , en se proposant de transformer le fossé en vivier,
on avait aussi l'intention de le rétrécir. Nous avons remarqué, en effet, que, à 3ra,6o de
l'enceinte , il y avait , appuyé au pont , un commencement de muraille avec pierres
d'attente. (Voir la coupe des substructions, p. U02.) Cette muraille devait apparemment
former une nouvelle escarpe, puisque, au delà, la paroi de la Galerie était parementée,
c'est-à-dire destinée à être vue, tandis qu'en deçà la paroi était rugueuse, irrégulière,
et par conséquent destinée à être cachée sous les terres. L'ancienne contrescarpe était
d'une solidité excessive dans la partie qui avoisinait la porte Neuve, et là elle était sans
doute à peu près contemporaine de cette porte , au pont de laquelle elle se reliait. Sur ce
point elle demeurait encore intacte au milieu du xvne siècle et , à cette époque , près de la
Galerie, elle passait sous le mur de face de l'hôtel du Grand Prévôt, bâti dans l'alignement
de la porte Neuve.
Il n'est sorti des fouilles rien de concluant quant à l'opinion que nous avons émise sur
l'emplacement de la courtine du bord de l'eau. Dans le mur méridional de la Galerie, au-
dessous du niveau du sol, se trouvaient mêlées quelques pierres provenant d'une construc-
tion antérieure , entre autres un moellon portant cette marque de tâcheron :
■i-û7néS3-'
mais la maçonnerie, qui avait jusqu'à 3m,go d'épaisseur, paraissait tout entière du temps
de Henri IV, et elle ne portait point sur des fondations du moyen âge. On l'a déracinée
complètement pour la remplacer par une autre plus profondément engagée dans le sol,
et il se pourrait que pareille chose eût eu lieu quand on a bâti la Galerie. Quoi qu'il en
soit, voici ce que nous savons maintenant relativement à la situation de la courtine. Elle
APPENDICES.
tx
n'était assurément pas en retraite sur l'alignement de la Galerie; elle a peut-être coïncidé
avec cet alignement, comme nous l'avons dit; mais nous n'en avons obtenu aucune preuve,
circonstance qui nous inspire des doutes sur la vérité de l'hypothèse; enfin il n'est nulle-
ment impossible qu'elle ait été plus rapprochée de la rivière que la Galerie, ce qui reste
à vérifier. S'il en était ainsi, il faudrait croire qu'elle tendait, comme sur le plan de la
Tapisserie, droit au centre de la tour de Bois. Celle-ci s'élevait nécessairement sur un
terrain intermédiaire entre les tranchées de 1861 et de 1 865, puisqu'on ne l'a aperçue
ni dans l'une ni dans l'autre fouille, et elle devait avoir son axe distant de la Galerie de
huit à dix mètres. Nous avons renoncé à la chercher parce que la manière dont était coupé
le mur d'enceinte nous a ôté l'espoir de retrouver les restes de la tour, et fait croire qu'on
en avait enlevé jusqu'aux derniers libages.
VI. — EMPLACEMENT DE LA SECONDE PORTE SAINT-HONORÉ.
(Voir page 180, ligne i3.)
L'exactitude de notre opinion sur l'emplacement de la seconde porte Saint-Honoré vient
de se trouver confirmée, aussi bien que la justesse de notre tracé de l'enceinte auprès de
la rivière. En mars 1866 , des travaux d'égout ont mis au jour, là même où nous l'avions
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Coope sur m n.
A Contrescarpe. m n Ligne de section. b Remblai ancien. d Pavé actuel de la rue Saint-Honoré
B Mur du ravelin. a Niveau du sol naturel. c Niveau de l'ancienne chaussée. à l'altitude moyenne de 34", ko.
10
3o
40
5oM.
indiqué d'avance, une partie des substructions de la porte. On s'est ainsi assuré qu'elle
mesurait 8m,3/i de profondeur sur environ i8m,5o de largeur; cette dernière dimension
x TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS,
n'a pas été précisée, parce que la moitié méridionale de l'édifice était détruite, et que le
parement du mur septentrional, engagé dans des caves, avait été précédemment entamé.
La muraille du côté de la ville était épaisse de im,i8, et celle du côté du fossé, de 3m,6o.
Celle-ci, située à 5"',5o du coin de la rue Jeannisson, portait des marques nombreuses
de projectiles, qui remontaient au siège de 1590. Deux boulets en pierre, provenant de
l'attaque de Jeanne d'Arc , ont aussi été recueillis dans les remblais , et transportés à l'Hôtel
de Ville. L'un a Om,t75 de diamètre, l'autre n'en a que om,o83 ; tous deux ont été for-
tement ébréchés par leur choc contre les fortifications.
Au xv' et au xvie siècle, la porte Saint-Honoré était munie d'une barbacane ou avant-
porte, qu'on nommait habituellement la herse, et qui s'élevait sur la contrescarpe des
fossés. Elle fut probablement détruite en 1 5go pendant le siège , et on la remplaça par un
«ravelin,» construit en i5o,3. (Voir p. 180.) Ce ravelin ou sboullevert,» qui, par ordre
du Roi, avait dû être abattu en i6o3, était encore partiellement debout vers 1609, car
il est mentionné en 1608 et figure sur le plan de Quesnel. Il a laissé dans le lotissement
de l'îlot compris entre les rues Jeannisson et Fontaine-Molière des traces telles que nous
comptions bien en trouver des débris. Un fragment en a effectivement été découvert sous
le pavé de la rue Saint-Honoré , en parfaite conformité avec nos prévisions. Nous ne
saurions dire si le ravelin était fermé à la gorge ; mais là où cette clôture aurait pu exister,
on a rencontré une muraille de soutènement, épaisse de 2m,6o, qui servait de culée à
une arche en plein cintre, dont il ne subsistait plus que quelques voussoirs, suffisants
d'ailleurs pour montrer que l'arche entière devait avoir 5m,2 7 d'ouverture. H ne restait
rien de la pile centrale qui en avait porté la retombée, et sur laquelle s'appuyait le tablier
du pont-levis, avant qu'on y substituât une seconde travée de pont dormant. Cette autre
travée paraît n'avoir consisté qu'en deux arcs isolés, soutenant un plancher de madriers.
Entre la culée du pont dormant et la porte, la distance n'excédait pas i3m,77; le fossé
était donc fort resserré sur ce point. Au delà il s'élargissait considérablement ; M. Th. Vac-
quer, qui conduisait les fouilles, lui a reconnu une largeur d'à peu près 33 mètres, à
compter du pied du talus de l'arrière-fossé. Les eaux ayant envahi les tranchées à six mètres
en contre-bas du sol actuel, M. Vacquer n'est point parvenu à déterminer la profondeur
du grand fossé; en revanche, grâce à la rare expérience qu'il possède en ce genre d'études,
il a réussi à distinguer la situation du dos d'âne séparant le grand fossé de l'arrière-fossé.
La profondeur de celui-ci n'atteignait guère que cinq mètres et demi, ce qui explique com-
ment, lors de l'assaut de 1^29, il était à sec, tandis que le grand fossé était plein d'eau.
Le marché passé avec Ch. Froger, en i633, semble avoir été exécuté rigoureusement,
et de là sans doute la destruction presque complète de l'enceinte du xive siècle; on n'en a
aperçu aucun reste dans les diverses tranchées pratiquées entre les rues Saint-Honoré et
Montpensier. L'emplacement de la muraille n'en est pas moins connu, car, au lieu où nous
avions annoncé qu'il y avait espoir de la retrouver, le sol naturel, consistant en sable, ces-
sait brusquement pour faire place aux gravois de remblai. Nous avons récemment observé
le même fait dans les terrains sur lesquels s'élèvent en ce moment les nouvelles construc-
tions de la Banque de France. Le centre du dos d'âne était à 2i'",5o de l'enceinte.
APPENDICES. Xi
• VII. — STATUE DE VULCAIN AU LOUVRE.
(Voir page ao5.)
Dans l'Entrée de Charles-Quint à Paris, opuscule rarissime publié en italien, à Paris
même, l'an i54o, on trouve le curieux détail que voici : «Au milieu de ce château (le
«Louvre) est placée une statue de Vulcain, laquelle tient dans une main je ne sais quoi
«qui donne une très-grande lumière pendant la nuit, et dans l'autre main un marteau
«frappant sur une enclume.» (In mezzo di quel castello è posta una statua di Vulcano, quale
tiene in una mano non so che chefa grandissimo lume tutta la notte, et nell' altra un martello col
quale dà sopra una incudine. )
VIII. — TRAVAUX DE PIERRE LESCOT ET DE JEAN GOUJON AU LOUVRE.
(Voir page a34, S i".)
Au sujet de ces travaux, M. Paul Lacroix a rappelé (Revue universelle des Beaux-Arts, t. II,
p. UZk) les vers suivants du poème de La Galliade, publié en 1678 par Guy le Fèvre de
la Boderie :
Et toy, Goujou encores,
Qui de rares pourlraicts ce bel autheur (Vitruve) décores,
Et décores aussi, par ton nom décoré,
Nostre terroir du north en cest art honoré;
Tousjours tesmoignera du Louvre la fabrique
Et combien ton ciseau fut heureux en pratique,
Ensemble tesmoignant de quel esprit garny
Fut l'honneur de Paris , le docte De Clagny,
Celuy qui a conceu, au rond de sa cervelle,
L'idée et le dessin d'une fabrique telle.
IX. — ÉPOQUE DE LA MORT DE JEAN GOUJON.
(Voir page a35, ligne 16.)
En parcourant, un jour, certain registre du Parlement, notre attention a été frappée
par la mention de «Françoise de Salmon, veufve de feu Jehan Goujon,» dans un arrêt du
9 décembre 1670. (Arch. de l'Emp. reg. X 1 63 1, fol. 70 v°.) S'agissait-il ici du fameux
sculpteur? On ne saurait l'affirmer, car le nom de Goujon a été commun. Toutefois, comme
l'arrêt de 1670 faisait allusion à deux autres, nous avons quelque temps entretenu l'es-
poir d'éclaircir la question; mais nos recherches n'ont donné aucun résultat, et si nous
signalons le fait , c'est qu'il pourrait mettre sur la voie d'une découverte curieuse.
X. — APPARTEMENTS DU LOUVRE SOUS LOUIS XIII.
( Voir page 2 5 a , ligne 11.)
Vers le commencement du règne de Louis XIII, l'appartement de la reine régnante
B.
xii TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
était toujours à l'étage supérieur, dans la même aile; quant à l'appartement de la reine
mère, Marie de Médicis, il était au-dessous de l'autre, «aux salles basses et aux chambres
« d'entre-sol. » Le Grand Conseil tenait alors ses séances dans le vieux corps de logis orien-
tal, à droite en entrant dans la cour.
XI. — PETITE-GALERIE DU LOUVRE.
(Voir page a6i, ligne i4.)
La Galerie des Antiques était certainement ornée de bossages vermiculés dès le temps
de Henri IV; il n'est donc point impossible que l'on en ait également sculpté alors aux
encoignures de la Petite-Galerie, du côté du quai. La grande vue de Sylvestre tend à le
faire croire, car elle a été gravée en i65o, c'est-à-dire avant les remaniements ordonnés
par Anne d'Autriche; toutefois cette vue est trop vague pour trancher la question, que
l'on serait porté à résoudre d'une façon négative, quand on essaye de restituer l'agence-
ment des bossages avec l'ordonnance des travées primitives de l'édifice, problème d'une
singulière difficulté. Quant à la façade septentrionale de la Galerie, qui semble n'avoir été
décorée que sous Henri IV, elle comportait des bossages vermiculés , destinés à mettre
lesdites travées en harmonie avec les bâtiments du Louvre; mais nous demeurons convaincu
que, à l'origine, la face du midi était garnie de pilastres dans le goût de ceux de l'arcade
centrale. Tout cela est d'ailleurs sans importance pour la thèse que nous soutenons.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈBES.
Abreuvoir des fossés Saint-Germain, page 3q ; —
du Louvre, 3q; — l'Évêque, 317.
Akakia (Hôtel de la famille), 42.
Alençon (Hôtel de Charles de Valois, duc d'), 91.
Alençon (Hôtel de Pierre de France, comte deBlois
et d'), 89.
Alger (Rued'), 298.
Allainville (Hôtel de Charles Jaloux, seigneur d'),
43.
Alluye (Hôtel d'), 96.
Ancre (Maréchal d'), voir Concwi.
Anderquiez (Seigneur d'), 16.
Androcet do Cerceau, voir Du Cerceau.
Angennes (Charles d'), voir Rambouillet.
Angivilliers (Rue d'), i5.
Angivilliers (Hôtel du marquis d'), g4.
Anguier( François), sculpteur, 55.
Anguier (Michel), sculpteur, 362.
Angcin( Petit hôtel d'), 84.
Anjou (Hôtel de Henri de France, duc d'), 9t.
Antin (Hôtel du marquis d'), surintendant des bâ-
timents, 92.
Antiques (Salle des), au Louvre, 2G7.
Arche d'Autriche, 32 ; — de Bourbon, 32.
Arcole (Rue d'), 70.
Armagnac (Hôtel d'un comte d'), 16.
Armagnac (Hôtel de Louis de Lorraine, comte de
Brionne et 0'), 282.
Armenonville ( Hôtel de Vincent Bertin , seigneur
d'), 298.
Artillerie du Louvre, 125, 160.
Artois (Hôtel de Catherine d' ) , c"°d'Aumale, 95.
Assomption (Couvent des dames de 1'), 3 10.
Atticiii (Hôtel du seigneur d'), 35.
Aubépine (Tombeau de Claude de l'), 3o3.
Aumale (Comtesse d'), voir Artois.
Aumale (Hôtel du duc d'), 1 1.
Aumont ( Hôtel de César d' ) , marquis de la Guier-
che, 93.
Autriche (Rue d'), 7.
B
Bac devant le Louvre, 32.
Bacquet (Épitaphe de Martin), marchand, 68.
Bacqueville (Hôtel de Guillaume Martel, seigneur
de), 10.
Bailly , menuisier-sculpteur, 3 12.
Balzac (Charles de), voir E.ntragues.
Barnke (Hôtel du marquis de), 3i3.
Barre (Hôtel de M. de la), 107.
Barrière des Sergents, corps de garde, 56.
Barrière (Jean de la), abbé des Feuillants, 3oo.
Basses-cours du Louvre, i5g.
Bastaille (Hôtel de la famille de), 3o.
Baudovn (Georges), écuyerde la bouche, 74, 7G.
Bauffremont (Marie-Claire de), io3.
Bavière (Hôtel de Guillaume de), comte palatin du
Bhin, de Hainaut et d'Ostrevant, i5, 16.
Beauharnais (Hôtel d'Anne de), 42.
Beaujolais (Rue de), 70.
Beauvais ou Beauvoir (Rue de), 17.
Bedford (Hôte! de Bourbon , donné au duc de), 36
XXV
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Bkringhen (Hôtel de Henri de), premier écuyer, 76.
Berruyer, secrétaire du Roi, 74.
Bertin (Vincent), voir Armenonville.
Bérulle (Pierre de), cardinal, 99, 53, 55.
Biart (Noël), dit le grand-père, sculpteur, a3o,
a3a, s53.
Bibliothèque (Rue de la), ai.
Bibliothèque (La), au Louvre, ia6.
Blondel, architecte, 93.
Bordeau (Hôtel de M™ de), 93.
Bouchage (Hôtel de Henri de Joyeuse, comte du),
a9.
Boucicaut (Hôtel de Jean le Meingre, dit), maré-
chal, g5.
Boulanger (Nicolas), garde des marbres, 9.
Bourbon (Rue de ou du Petit-), ao, 86.
Bourbon (Hôtel de ou du Petit-), 33.
Bourbon (Hôtel du connétable de), 36.
Bourbon (Henri de), voir Montpensier.
Bourbon (Jacques II de), voir Marche.
Bourbon (Hôtel de Louis de), fils aîné du comte de
Glermont.
Bodrron (Marie de), voir Longueville.
Bourbon (Hôtel de Marie-Anne de), fille de Louis XIV,
i5.
Bourbon-Soissons, voir Neufchâtel.
Bourdillon, amateur cité par M. de Glarac comme
possédant un tableau qui représentait une vue
du Vieux Louvre, 169.
Bourgogne (Rue de), 3i5.
Bouteville (Hôtel de Jean de), 96.
Bouthillier (Hôtel de), surintendant des finances,
11.
Bréant (Pierre), barbier du duc de Bretagne; son
épitaphe, 101.
Bretagne (Hôtel de la Petite-), 79.
Briçonnet (Hôtel de Pierre), seigneur de Praville,
33i.
Brionne (Hôtel de), voir Armagnac.
Bruges (Hôtel du prévôt de), 12.
Brunetti, peintre, 398.
Buet (Epitaphe de Gilles), notaire, 69.
Bunel (Jacob), peintre, 367, 3os.
Buttes (Quai des), 3i.
Cadran (Cour du), dans le cloître Saint-Nicolas du
Louvre ,111.
Capucins (Couvent des), 307.
Caqué, architecte, 54.
Carneaux (Hôtel des), 399.
Carrousel (Bue du), 96.
Carrousel (Terrain de la place du), a8o.
Caryatides (Salle des), au Louvre, 239.
Castellan (Hôtel d'Honorat de), 88.
Caumont (Jacques Nompar de), voir Force.
Cellerier, architecte, 3i5.
Chabannes (François de), comte de Saigne, 3i3.
Chalgrin, architecte, 3i5.
Chambiges (Pierre), architecte du Louvre, a 6 3.
Chambre de parade, au Louvre, 2 3o.
Champagne (Philippe de), peintre, 398.
Champ-Fleuri (Rue du), ao.
Champ-Pourri (Le), 6s.
Chanoines (Rue des), 95.
Chanteule (Hôtel de M. de), 76.
Chantre (Rue du), s 3.
Charles-Quixt (Travaux pour la réception de) au
Louvre, so5.
Charpentier dessine un jardin , a 98.
Charron (Jean), valet de chambre du roi, g5.
Chartres (Rue de), 70.
Chartres (Jacques de), sculpteur, i5o.
Chàteau-d'Eau (Le), place du Palais-Royal, 60.
Château-Fétu (Rue du), 49. — Signification de
ce mot, 5o.
Ch aulnes (Hôtel d'Antoine de), trésorier des guer-
res, 94.
Chaumont (Hôtel de Guy de), seigneur de Quitry,
maître de la garde-robe, 84.
Cheverny (Hôtel du comte de), 3 1 5.
Chevreuse (Hôtel de Pierre, seigneur de), 4a.
Chevreuse (Hôtels de Claude de Lorraine , duc de),
11, io3.
Chiffres de Diane de Poitiers, au Louvre, 337;
— de Charles IX, ibid. a5o; — de Catherine
de Médicis à la colonne de la Halle au blé, a s 8.
Choisy (Hôtel du duc de), 88.
Christine de Pisan parle du Louvre, 126.
Cipières (Hôtel du comte de), i4.
Clamecy (Hôtel de Gilles de), prévôt de Paris,
93.
Clarac (De) ; appréciation de son ouvrage sur le
Louvre, i5a.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES.
Clermont (Hôtel du comte de), i4.
Glèves (Hôtel de Catherine de), duchesse de Guise ,
xv
Clichy (Le chemin de), 5i.
Clos des Gourdes, 277. — Pigeon, 3io; — des
Quinze- Vingts, a 85.
Coëtanfao (Hôtel de François-Toussaint de Ker-
hoent, marquis de), 78.
Coin (Tour du), i65.
Combault (Hôtel de Robert de), maître d'hôtel du
roi, 87.
Communs du Louvre, 161.
Compas (Rue du), 83.
Comptes des dépenses faites au Louvre par
Charles V, 181 à 199 ; — sous Henri II, a 38
à aia; — pendant les années iSSj, 1 558 et
i55g, p. a4a à 367; — sous Charles IX, a53
à a56.
Concini (Hôtel de), maréchal d'Ancre, 8.
Conférence (Porte de la), 3ai.
Contant , architecte du roi , 1 o4.
Conty (Hôtel de), rue des Poulies, 94.
Conty (Hôtel de Louise de Lorraine, princesse de),
rue d'Autriche, 17.
Convention (Rue de la) , ag5.
Coq (Rue du), a6.
Cotte (Robert de), architecte, 46, 60.
Coupeau (Hôtel de Germain de Valenciennes , sei-
gneur de), 80.
Couperay (Maison du seigneur de), agi, 307.
Courtanvaux (Marquis de), voir Souvhé.
Courtine du bord de l'eau, auprès du Louvre,
167, 16g.
Coustou (Les), sculpteurs, 46, 60.
Coypel (Noël et Antoine), peintres, 3i3.
Cramoy (Etienne), sculpteur, a36, a5o.
Crécy ( Hôtel de Marie de Caumont, dame de), 7g.
Créquy (Hôtel de Charles de), comte de Saulx, ma-
réchal, i5.
Créquy (Hôtel du maréchal François de), 78.
Croix-du-Tiroir (Rue de la), 4g.
Crussol (Charles-Emmanuel de), voir Uzès.
Cuisines (Cour des), au Louvre, 20 fi.
Culture-l'Évêque (La), a85.
D
D'Albert (Charles), voir Luynes.
Dampierre (Hôtel de Jeanne de Vinon de), dame
d'honneur, 16.
Dampmartin (Guy de), sculpteur, i5o.
Dauphin (Rue du), 294.
De la Croix (Épilaphe de Claude), bourgeois, 10a.
Descente-du-Passeur (La), 3a.
D'Escoubleau (Charles), voir Sourdis.
Des Hayes (Maison d'Etienne), valet de chambre
de Henri III , 1 6.
Des Noyers (Maison de Nicolas), seigneur de la
Rrosse, 4i.
Devise de Henri H, au Louvre, 337.
Dionyse (Pierre), sculpteur sur bois, 3o5.
D'Orbay (Demeure de), architecte du Louvre, 9a.
Doyenné (Rue du), 3o.
Doyenné (Cul-de-sac du), 83.
Dreux (Robert IV, comte de), voir Montfort.
Du Rrueil (Jean), alias Lb Rreuil, peintre, a3s,
a53.
Du Ruisson (Thomas), peintre, i5o.
Du Cerceau (Rapliste Androuet), architecte du
Louvre, 371.
Du Cerceau (Jacques Androuet), architecte et gra-
veur, 273.
Du Faur (Guy), voir Pibrac
Du Gast, colonel général des Gascons, gi.
Du Han (François), tailleur de marbre, 2 5a.
Du Lis (Famille), voir Vaucouleurs.
Du Parent, voir Villemenon.
Du Perron (Hôtel de la dame), mère du cardinal
de Retz, 3o5.
EciivLDÉ (Rnede 1'), 286.
Échelle (Rue de 1'), 377.
Ecole (Quai de 1'), 3o.
Ecole de Saint-Gerjuin-l'Alxerrois, 3l
E
Ecuries de la reine, 36. — Écurie de la reine
mère, 79. — Écuries (Petites) du roi, 7g. —
Écuries du Dauphin, 294.
Egerton (Hôtel de lord Francis-Henry), 298.
XVI
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Ki.beif (Hôtel d'Emmanuel-Maurice de Lorraine,
duc d), 78.
Élie , peintre , fait des cartons pour des vitraux , 3o4.
Enceinte de Philippe-Auguste, emplacement et
description, i83; — de Charles V, 177; —
bastionnée, 319.
Entragues (Hôtel de Charles de Balzac, seigneur
de Clermont d' ) , 11 .
Épernon ( Hôtel de Bernard de Nogaret , duc d'), 1 0 3 .
Errard (Charles), directeur de l'Académie fran-
çaise à Rome, 3 1 2.
Escalier (Grand) du Louvre, 1 4g ; — de l'hôtel
de Bourgogne, i5o.
Espagne (Hôtel de Blanche d'), fille de saint Louis,
90.
Estrées (Hôtel de Gabrielle d'), 29, 47.
Étampes (Hôtel d'), 10, i4.
En (Hôtel d'), voir Aumale.
Evreux (Hôtel de Louis, fils de Philippe le Hardi,
chef de la maison d'), comte de Gien et d'É-
tampes, i4.
Evrocx (Rue Jehan-), 86.
Falconnet, sculpteur, 298.
Feillens (Hôtel du comte de), 76.
Fellifeux (Place de), 3 18.
Fenêtres du Louvre, 229.
Fedillants (Passage des), 3o6. — Couvent des
Feuillants, 299; — son église, 3o2; — sa bi-
bliothèque, 3o4.
Fiefs, de Fromentel, 2; — de Saint-Denis de la
Chartre, 2; — de Saint-Germain-l'Auxerrois,
2 ; — de l'Évêque, 3; — formé par l'enceinte
de Charles V, 3 ; — du chapitre de Saint-Nico-
las, 4; — du chapitre de Saint- Thomas , 4.
Fitz-James (Hôtel de), 3i5.
Fizes ( Maison de Simon de ), seigneur du Saulne ,12.
Fleix (Hôtel de Gaston de Foix, comte de), io3.
Fleury (Tombeau du cardinal de), 100.
Foix (Gaston de) , voir Fleix.
Foix (Hôtel de la comtesse de), 298.
Foncières (Philippe de), sculpteur, 1 67.
FoNTAINE-DU-DlABLE (La), 285.
Force (Hôtel de Jacques Nompar de Caumont, duc
de la), 16.
Fossé-Mademoiselle(Ruc du), -j5.
Fossés (Les) du Louvre, i4o.
Foucault (Epitaphe de Marie), femme de Marc de
Brion, 3o3.
Fouqcart (Hôtel de Guillaume), garde des coffres
du roi, 95.
Fouquet (Hôtel de François), surintendant des
finances, 3io.
Fourrière (Hôtel de la) du Louvre, 161.
France (Henri de), voir Anjou.
France (Pierre de), voir Alençon.
Francin , statuaire du roi, 55.
Frémont (Sire Beaudoin de), 16.
Fremïn, sculpteur, 100.
Fresnoy (Hôtel de Gervais de), 88.
Froger, entrepreneur des fortifications, 75.
Froissiz (Gilles des), 32.
Fromenteau ou Froid-Manteaux (Rue), 39.
Gaillonel (Hôtel de Guillaume de), maître d'hôtel
du roi, io3.
Galande (Pierre de), secrétaire du roi, 5g.
Galerie Dorée (La), dans l'hôtel de Bourbon, 37.
Galeries (Rue des), 177.
Galeries du Louvre. — Fondation de la Grande et
de la Petite-Galerie, 257.
Garancières (Hôtel de Guillaume de Montenay,
sieur de), g3.
Garde-Meuble (Le) de la couronne, rue des Pou-
lies, 36.
Gardes-Françaises (Quartier des), 5.
Garenne (La), près des Tuileries, 334.
Germain (Thomas), orfèvre du roi et architecte, 99.
Girouettes du Louvre, i43.
Gondi (Hôtel d'Albert de), duc de Retz, maréchal
de France, 88.
Gondi (Marguerite de), voir Maignelay.
Goujangre (Jehan Dessoubz-le-Four, seigneur de),
43.
Goujon (Jean), sculpteur, 232; — ses ouvrages.
233; — ses travaux au Louvre, a36.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈBES.
xvtt
Gourdes (Territoire des), 277.
Gouvernement (Maison dite le), 16.
Gramont (Hôtel d'Antoine III, maréchal de), rue
d'Autriche ,11.
Gramont (Hôtel de), rue Saint-Thomas-du-Louvre,
à*.
Grimon ville (Seigneur de), voir Larchant.
Gdéméné (Princesse de), voir Scbomberg.
Guillain (Augustin), maître des œuvres de la Ville,
7*.
Gdillain (Guillaume), maître des œuvres de la
Ville et entrepreneur des travaux du Louvre,
a3a. — Son épitaphe, 2Ô5.
Guillot (Guillaume), sœur des Quinze-Vingts; son
épitaphe, 6g.
Guise (Hôtel de Charles de Lorraine, duc db),
29.
Guise (Maison du duc de), 17.
Guise (Duchesse de), voir Clèves.
Guymier (Côme), jurisconsulte; son tombeau, 99.
H
Hainaut (Hôtel du comte de), i5.
Harcocrt (Le comte d'), voir Lorraine.
Hardouin (Les), sculpteurs, 23o, 23a.
Hérouard, médecin du roi, 7 4.
Heurles (De), maître d'hôtel du roi, 76.
Honoré, voir Saint-Honoré.
Horloge du Louvre , îlfj.
Hosteriche (Hôtel d'),8g.
Hoteriche (Rue), 7.
Houasse, peintre, 3i3.
Hoclles (Hôtel du seigneur de), 87.
Illiers (Hélène d'), voir Hôtel d'O.
Illiers (Maison de Charles d'), lu.
Inscriptions en l'honneur de Henri II au Louvre, 222.
— De la contrescarpe, devant les Tuileries, 178.
Isabeau de Bavière; ses armes peintes sur un vitrail
de la chapelle Saint-Nicolas, 111.
Jardins du Louvre, voir Louvre.
Jasse (Guillaume), sculpteur, 1/17.
Jeanne Darc (Armoiries de), trouvées peintes sur
verre, dans une maison de la rue des Poulies,
9*-
Jeannin (Le président Pierre), 80.
Jean-Salnt-Denis (Rue), 70.
Jehan-Évrout (Rue), 86.
Jeux de Paume du Louvre, 9, i34, 161 , 202; —
de la Liberté, 298.
Joyeuse (Hôtel de Henri, alias frère Ange de), ma-
réchal de France et capucin, 3 09; — son tom-
beau, 3o8.
Joyeuse (Hôtel du cardinal de), 29.
Labre , inspecteur des bâtiments du roi , 69.
La Rrosse (Seigneur de), voir Des Noyers.
Lafosse, peintre, 3o2, 3i3, 4i2.
Lagrange (Hôtel de Sébastien de), sieur de Tria-
non, g3.
Lanquetot (Maison de Claude Bretel, seigneur de),
78.
Lanterne des Galeries du Louvre, voir Pavillon
Lesdiguières.
Larchant (Hôtel de messire de Grimonville, sei-
gneur de), 16, 92.
Launay (Jean de), sculpteur, i5o.
Laval (Hôlel de Guy, seigneur de), kk, 5g.
Lavergnot (Nicolas), chirurgien du roi, 102.
xvm
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Lebrun, archi trésorier; son hôtel, 298.
Lebrun, peintre, 3o8.
Lecadet (Adam), statuaire du roi, 55.
Le Clerc (Maison de Jacques), conseiller au par-
lement, i4.
Lb Comte (Charles), maître charpentier du roi,
i3.
Le Constançois (Nicolas), trorlogeur,» a53.
Le Fort (Martin), sculpteur, a5o, 25a.
Le Jeune (Jean), peintre, a3a.
Le Juge (François), jardinier des Tuileries; sa
maison, 3i3.
Lemercier (Jacques), architecte du Louvre, 54,
i5i.
Lemoine, sculpteur, 93, 100.
Le Nôtre ( André ) , contrôleur des bâtiments ,
996.
Le PiLEUR(Henrk'Vugustin), évoque de Saintes, lu.
Le Plastrier (Thomas), peintre, 23 a.
Le Prévost (Jean), président au parlement, i4.
Lerambert (Louis), sculpteur, 9.
Lescot (Pierre), seigneur de Clagny, architecte du
Louvre, 906, a46. — Sa famille, ai4.
Lescot (Rue Pierre-), 70.
Lesdiguières (Hôtel du sieur de), 4a.
Le Verrier ( Hôtel de Jean), dit de Nismes, valet
de chambre du roi, 87.
Le Viste (Enclos du président), 33 1 .
L'Heureux (Les frères Pierre et François), sculp-
teurs, a5o, a5a.
Ligny (Le seigneur de), 16.
LTsle (Maison de Michel de), 29.
Lomknie (Hôtel d'Antoine de), secrétaire d'État,
107.
Longueville (Hôtel de Henri II, duc de), io3.
Longueville (Hôtel de Marie de Bourbon, duchesse
de), 92.
Lorraine (Charles de), voir Guise.
Lorraine (Charles-Marie de), voir Elbeuf.
Lorraine (Claude de), voir Chevreuse.
Lorraine (Henri de), comte d'Harcourt; son tom-
beau, 3o3.
Lorraine (Louis de), comte de Brionne, voir Ar-
magnac
Lorraine (Louis de), voir Conty.
Louis, voir Saint-Louis.
Louis-Philippe I" (Rue), 298.
Louvre (Rue du), 7, ao, 86. — Quartier du Lou-
vre, 4. — Guichet du Louvre, 9.
Louvre. — Origine du château, 11 3. — Histoire
du Vieux Louvre, 12 3. — Arsenal, 12 5. —
Bibliothèque du roi, 126. — Capitainerie, 16,
127. — La Grosse-Tour ou tour Ferrand,
126, 129, 2o3. — Étendue du Quadrangle,
i3i. — Grande salle de Saint-Louis, i3i, i5a.
— Salle neuve de la Reine, i3a. — Étendue de
la cour, i3a. — Fossés, i34, i4o. — Jeux de
paume, 9, i34. — Chapelle du roi, i35. —
Tours, i4a; du Sud-Est; de la Fauconnerie',
i43; du Milieu, i44. — Girouettes, i43. —
Tours de la Taillerie; de la Librairie, 1 65 ;
devers l'Artillerie ; du Sud-Ouest , 1 46. — Portes ,
167. — Tours de la Grande-Chapelle, 147;
de Bische-Mouche ; des Joutes; de la grande
chambre de la Tournelle; de la Petite-Chapelle;
de l'Horloge; de l'Armoirie; d'Orgueil; du Win-
dal; de l'Écluse; devers Saint-Thomas, i48. —
Concierge, 149. — Façade orientale, i4g. —
Intérieur des bâtiments, 1 52. — Salle dite de la
Reine, i52. — Salles Neuve; du Roi; de la
Reine; sur les jardins, i53; du Conseil, i54.
— Grande salle, i54, 21 5. — Chapelles, i54,
i55. — Chambre aux Joyaux, i55. — Mobilier
des salles du Louvre, i55. — Appartement de
la Reine, i56. — Grand Jardin, i56. — Ména-
gerie, i5g. — Rasses-cours , 159. — Artillerie,
160. — Entrée, i65. — Tourdu CoinouJehan-
de-Lestang, 1 65. — Le Louvre sous François I",
201; sous Henri II, 219; sous François II,
Charles IX et Henri III, a4g. — Projet primitif
du nouveau Louvre, 220. — Escalier dit les
Grands Degrés , 228. — Salie dite le Tribunal,
229. — Salle des Caryatides, 223,229. — Pa-
villon du roi, a3o. — Chambre de parade, 23o.
— Appartement de la Reine sous Charles IX .
a5a. — Salle des Antiques, 256, 267. — Ap-
partements d'été et d'hiver de la reine Anne
d'Autriche, 26a. — Galeries du Louvre, voir
Galerie.
Lozon (Hôtel du président de), 397.
Lude (Hôtel de François de Daillon, comte du),
46.
Luxembourg (Waleran de), voir Saint-Pol.
Luynes (Hôtel des ducs de), io3, 10A.
TABLE ALPHABETIQUE DES MATIEBES.
xix
M
Magny (De), peintre, 374.
Maignelay (Hôtel de Marguerite de Gondi, mar-
quise de), 309.
Maillard ( Rolland ), sculpteur, a3o, a3a.
Mailly (Hôtel de la contesse de), 4a.
Maintenon (Hôtel de M. de), io3.
Malte (Rue de), p. 70.
Manège des Tuileries (Le), 289, 290, 295.
Mansabd, architecte, 3o4.
Marbres (Cour des), 9.
Marbres (Place du magasin des), 77.
Marceah (Rue), 70.
Marchant ( Méry ) , bourgeois de Paris ; son épitaphe ,
68.
Marché-aux-Pourceaux (Rue du), 278.
Marche (Hôtel de Jacques II de Bourbon, comte
delà), 26.
Marche (Hôtel de la Petite-), 43.
Marengo (Place de), p. 17. — Rue de Marengo,
27.
Marguerite de Navarre (Hôtel d'Anjou donné à),
99-
Marigny (Hôtel d'Abel-François Poisson de Van-
dières, marquis de), 42.
Marigny (Hôtel d'Enguerrand de), surintendant,
33, 90.
Marillac (Hôtel de M. de), 108.
Marillac (Mausolée du maréchal de), 3o3.
Marle (Maisons appartenant à Germain de), pré-
vôt des marchands, 25, io5.
Martin, architecte, 69.
Martine (Hôtel de Louis), avocat du roi, i3.
Matignon (Rue de), 83.
Matignon (Hôtel de Jacques de), comte de Thori-
gny, 80.
Mellin de Saint-Gelais , poêle; son tombeau, 99.
Ménagerie du Louvre, i5g.
Meslay (Charlotte de), voir La Rochefoucauld.
Métezeau (Clément), architecte, 54, io3, 3ia.
Métezeau (Thibaut), architecte du Louvre, 267.
Mignard, peintre, io4.
Molange (Place de la), 3 18.
Molet ou Mollet (Claude), jardinier des Tuileries,
80, 282.
Monnaie (Hôtel de la), 53.
Montausier (Hôtel de Charles de Sainte-Maure, duc
de), 107.
Montbazon (Le duc de), gouverneur de Paris,
pose la première pierre de l'église de l'Oratoire,
53.
Montfort (Hôtel de Béatrix de), veuve de Ro-
bert IV, comte de Dreux, 42.
Montgobert (Hôtel de Marguerite de Clermont,
dame de), 12, i3.
Montholon (Tombeau de Guillaume de), conseiller
d'État, 3o3.
Montigny (Maison de François de), marquis de
Congis, io3.
Montigny (Maison de Gabriel de), seigneur de
Congis, gouverneur des Tuileries, 3i3.
Montlouis (Maison de Diane de Clermont, dame
de), 108.
Montmorin (Hôtel de Jacques de), 43.
Montpensier (Hôtel d'Henri de Bourbon, duc de),
29.
Montpensier (Rue ou passage), 70.
Montreuil (Eudes de), architecte, 68, 69.
Mortemart (Hôtel du duc de), 17.
Moucy (Clos de Guillaume de), 326.
Moutons (Le Marché aux), 74.
Moy( Hôtel de Nicolas de), 3i3.
Moyen (François); son épitaphe, 102.
Musée (Rue du), 4o.
Musée des Souverains (Le), au Louvre; boiseries
qu'on y conserve, 2 32.
Muséum (Quartier du), 4.
N
Nantes (Maison dite l'hôtel de), place du Carrousel,
78.
Nanyn (Pierre), sculpteur, a5o, a5a.
Neufchâtel (Hôtel de Louis -Henri de Bourbon-
Soissons, prince de), io3.
Neufville (Simon de), 33i. — (Nicolas de), 33o,
33a. Voir Villeroy.
Neuve (Porte), 170.
Neuville (Hôtel du baron de), 3i5.
Nevers (Hôtel du duc de), 93.
c.
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Nicaise, voir Saint-Nicaise.
Nicolas, voir Saint-Nicolas.
Noailles (Hôtel du duc de), 998.
Nogaret (Bernard de), voir Épernon.
Nonin (Guillaume), maître des œuvres de la Ville, as.
Noplet (Jean); son épitaphe, 102.
Noyer (Bue du), 86.
Noyers (Hôtel de François Sublet de), surintendant
des bâtiments rovaux, 3i3.
0
0 ( Hôtel d'), io3.
Odead (Maison d'Hélye), contrôleur de la maison
du roi , 1 3.
Opéra (Magasin des décors de i'), 77.
Orangerie (Bue de I'), 3i4.
Oratoire (Bue de 1'), ou d'Autriche, 7. — Place
de l'Oratoire, 18. — Maison de l'Oratoire , 53,
81.
Oratoire de l'hôtel de Bourbon, 3g.
Orbec (Maison du vicomte d'), 3o.
Orléans (Hôtel appartenant à Gaston d'), frère de
Louis XIII, 87.
Orléans (Marie d'), voir Longueville.
Orties (Bue des), 79, i63, 177.
Osteriche , voir Autriche.
Ostrevant (Hôtel d'), i5, 94.
Palais-Boyal (Place du), 60.
Paroisses de Saint-Germain-l'Auxerrois et de Saint-
Boch, 1.
Parrocel, le neveu, peintre, 298.
Patin (Jacques), peintre, a53.
Pavillon du Boi, au Louvre, 23o.
Petite-Monnaie (Bue de la), 177.
Phélypeaux (Mausole'e de Baimond), seigneur
d'Herbaut, 3o3, voir Pontchartrain.
Pibrac (Hôtel de Guy du Faur de), conseiller au
Parlement, 92.
Pierrevive (Enclos de Pierre de), seigneur de Lé-
zigny, 33 1.
Pigeon (Clos), 3 10.
Pinard (Hôtel du sieur), secrétaire des comman-
dements, 80.
Pisany (Hôtel de Jean de Vivonne, marquis de),
106.
Pluvinel (Hôtel de), 29a.
Poitiers (Hôtel d'Alphonse, comte de Toulouse et
de), 88.
Ponce-Jacquiau (Maître), sculpteur, 23o, 232.
Ponce-Trebatti (Paul), sculpteur italien, a3g,
235 , 236, 246, 248.
Pontchartrain (Hôtel de Phélypeaux de), 4i.
Pont-levis du Louvre, i48.
Port du Louvre, 33; — de Bourbon, 32.
Porte-Dorée (La), à l'hôtel de Bourbon, 37.
Porte Saint-Honoré ( Première ) , 1 6 4 ; — deuxième ,
180; — troisième, 3 22; — porte du Louvre,
1 6 5 ; — portes du château du Louvre , 1 4 7 ; —
porte Neuve, 170; — porte de la Conférence,
321.
Poulies (Bue des), 84 ; — origine de ce nom, 85.
Poyet, architecte, 107.
Prévôt (Hôtel du grand), près de la porte Neuve,
171.
Primaticcio ou Le Primatice, peintre et inspecteur
des bâtiments royaux, 23o.
Provence (Hôtel de), 93.
Pussort (Hôtel de Henri), 298.
Pyramides (Bue des), 294.
Q
Quai de l'École, 3o; — des Buttes, 3i ; — du
Louvre, 73, 170, 175; — des Tuileries,
3,7.
Quartier de Saint-Germain-l'Auxerrois, 4 ; — du
Louvre , 4 ; — du Palais-Boyal , 4 ; — des Tui-
leries , 4 ; — de l'Oratoire , 5 ; — de Saint-Honoré ,
5 ; — des Gardes-Françaises , 4 ; — du Muséum, 4 .
— Origine des quartiers, 4.
TABLE ALPHABETIQUE DES MATIERES.
XXI
Quétry ou Getty (Barthélémy), peintre, 9.
Quiberon (Rue de), 70.
Quinze-Vingts (Rue des), 70.
Quinze-Vingts (Hospice des), 61 ; — son église , 67 ;
— son sceau, 68. — Marché et clos des Quinze-
Vingts, a85.
R
Rambouillet (Hôtel de Charles d'Angennes, mar-
quis de), 106.
Ranconnet (Hôtel du président Pierre de), gà.
Raolin, bourgeois de Paris; son épitaphe, 69.
Ravaillac; maison où il a logé, 29/i.
Raymond du Temple, architecte, 1 5 1 .
Regnard (Le jardin de), aux Tuileries, 3a5.
Rempart (Rue du), 75.
Renard (Nicolas), de Nancy, sculpteur, 3o3.
Resnel (Hôtel du marquis de), 3i5.
Retable du Palus de Justice, donnant une vue du
vieux Louvre, 167, îig, 176.
Retz (Hôtel d'Albert de Gondi, duc de), iG.
Retz (Hôtel de Henri de Gondi, duc de), 17.
Richebourg (Rue de), dite ensuite du Coq, 16.
Riolle Richard ou Riciiault, sculpteur, a3a,
a53.
Robert de Senlis, bourgeois de Paris, i3.
Robillon, sculpteur, 100.
Robin (Vincent), bourgeois de Paris; son épitaphe,
69.
Rochefoucauld (Maison de Charlotte de Meslay de
la), 4i, 42.
Rocheguyon (Hôtel de Guy, seigneur de la), 10.
Rohan (Marie de), voir Chevreuse.
Rolinde (Hôtel de M. de), 76.
Romanelli, peintre, 262.
Romey (Epitaphe de Jacques de), seigneur de Ro-
mainville, 102.
Ronsard; son épître à Pierre Lescot, 208.
Roquelaure (Hôtel de), 76.
Rostaing (Hôtel de Tristan de), 18. — Chapelle
funéraire de la famille de Rostaing dans l'église
des Feuillants, 3o3.
Rostiel (Épitaphe de Guillaume), chevalier, 100.
Rouillé ( Hôtel de M. de ), ministre de la marine ,93.
Rouillé (Maison de Robin), maitre des requêtes,
106.
Rousseau (Epitaphe de Pierre), prêtre, 102.
Rouvez (Epitaphe de Jacques de), maître es arts,
101.
Rugles (Raron de), voir Vieuville.
Saigne (Comte de), voir Chabannes.
Saint-Florentin (Rue), 3i5.
Saint-Florentin ( Hôtel du duc de la Vrillière , comte
de), 3 1 5.
Saint-Honoré (Rue), 48, a83, 296. — RueNeuve-
Saint-Honoré, 283. — Portes Saint-Honoré,
voir Porte.
Saint-Louis (Rue), 286. — Grande rue et rue
Neuve-Saint-Louis, 283.
Saint-Nicaisb (Rue), 73.
Saint-Nicaise (Chapelle), 78.
Saint-Nicolas-du-Louvre (Rue), 177. — Hospice,
collège ou chapitre Saint-Nicolas, 109. j
Saint-Pol (Hôtel de VValeran de Luxembourg,
comte de), 12, 5a.
Saint-Quentin (Pierre de), entrepreneur des travaux
du Louvre, 2 3a.
Saint-Roch ( Paroisse de ) , 1 . — Limite dans la rue
Saint-Honoré, a84.
Saint-Romain (Hôtel de Jean de), conseil"du Roi, io3.
Saint-Romain (Jean de), sculpteur, i3o, i5o.
Saint-Thomas (Rue), 95 ; — rue Neuve et cul-de-
sac de Saint-Thomas, 83. — Eglise collégiale de
Saint-Thomas, 96. — Sceau du Chapitre, 100.
Saint-Vincent (Rue), 295.
Sainte-Maure (Charles de), voir Montausier.
Sancerre (Hôtel de la comtesse de), 12.
Sarrazin (Jacques), sculpteur, 3o3, 3o5.
Sasso (Pietro), stucateur, 262.
Saulmonière (Place à pêcher, dite la), 3 18.
Saulx (Hôtel de), i5.
Sauval. Appréciation de son ouvrage sur les anti-
quités de Paris, i3g. — Manuscrit inédit sur le
même sujet ,171.
:r.r»i
TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU VIEUX PARIS.
Scarron de Vaurre (Maison de Thomas), oncle du
poëte, 46.
Schomberg (Hôtel du comte de), 46.
Schomberg (Tombeau de Jeanne-Armande de) , prin-
cesse de Guéméné, 3o3.
Seguin, capitaine du Louvre, 16.
Selne (Hôtel du baron de), 29. — Rue dite Sur-
Seine, 177.
Sempi, peintre verrier, 3o4.
Serbecq ou Seibecq (Francisque), dit de Carpy ou
Scarphy, sculpteur florentin , a3o, 232.
Serlio (Sébastien), architecte bolonais, 206, 2i5.
Sillery (Hôtel de Noël Bruslart de), 59.
Simonieux (Roger de), mouleur, 232.
Sourdis (Hôtel de Charles d'Escoubleau , marquis
de), 5g.
Sodvré (Hôtel de Gilles de), maréchal, 66.
Sublet (François), voir Noyers.
Tiblead provenant de Saint-Germain-des-Prés , et
offrant une vue du Vieux Louvre, 32 , 37, 129,
i45.
Tacet ou Tacquet (Jean), sculpteur, 2Ô2.
Testart, peintre, 2 3a.
Thomas , voir Saint-Thomas.
Thorigny (Comte de), voir Matignon.
Thou (Hôtel d'Augustin de), 107.
Thdmery (Hôtel de Pierre de), valet de chambre du
duc de Bourbon, 10 3.
Thcrin (Thomas), sculpteur et garde des marbres
du roi, 435.
Tiroir (Rue Croix-du-), 69.
Torcy (Hôtel de), io3.
Tour du Coin ou Jean-de-l'Estang , 1 65 ; — de Bois ,
170, fjlt. — Tours du Louvre, 162 et suiv.
Trebatti, voir Ponce.
Tremblay (Le Clerc du), dit le père Joseph; son
tombeau, 3o8.
Tresmes (Hôtel de), 94.
Tribunal (Salle dite le), au Louvre, 229.
Trie (Hôtel du maréchal de), 37, 87.
Trocadéro (Rue du), 2 9 5.
Tuileries (Rue des), 284. — Placedes Tuileries, 28 1 .
Tuileries (Château des), 3 18. — Emplacement du
château et du jardin, 325.
u
UssÉ (Maison de Louis de Valenliné, marquis d'), 297.
Uxelles (Tombeau du maréchal d'), 3o3.
Uzès ( Hôtel de Charles-Emmanuel , sire de Crussol ,
duc d'), 79, 107.
Valenciennes (Germain de), voir Coupeau.
Valenciennes (Épitaphe de Germain de), écuyer,
101.
Valenciennes (Hôtel de Jean de), essayeur des mon-
naies, 80.
Valentiné (Louise de), voir UssÉ.
Valentinois (Hôtel de la duchesse de), 3o.
Vallière (Ecuries de M"" de la), 76.
Vallière (Hôtel de Jean-François de la Baume le
Blanc, marquis delà), 282.
Valois (Charles de), voir Alençon.
Varenne (Hôtel du sieur de la), 46.
Vaucouleurs (Hôtel de), 94.
Vaudeville (Théâtre du), 107.
Vaugain (Hôtel de Jean de), sieur de Blain ville.
conseiller d'État, 88.
Vaujour (Hôtel du duc de), 282.
Vendôme (Hôtel des comtes de), 42, 46.
Vieuville (Hôtel de Robert de la), baron de Ru-
gles, 10S.
Vieuville (Le marquis de la), surintendant des
bâtiments, 53.
Vieux-Pont (Hôtel de), 78.
Vignolles (Hôtel de Jean de), secrétaire de la cour.
59.
Villemenon (Hôtel de Paul du Parent, sieur de),
3i4.
Villequier (Ruede), 85.
TABLE ALPHABETIQUE DES MATIERES. xxiii
Violle (Epilaphe de Nicolas), aumônier du roi.
68.
VivoNNE(Jean de), voir Pisany.
Voitures ou Coches de la Cocr (Bureau des),
77-
Vouet (Aubin), peintre, 3o4.
Vouet (Simon), peintre, 3o3.
Vbillièbe (Duc de m), voir Saint-Florentin.
Villbqdier, chambellan du duc d'Anjou, 16. —
Hôtel du baron René de Villequier, gouverneur
de Paris, a3.
Villeroy (Hôtels et terres de la famille de), 19,
91, 307, 33o, 335.
Villiers (Hôtel du comte de), 3i3.
Vincent (Rue Saint-), 295.
Vingt-Neuf-Juillet (Rue du), 297.
w
Warin (Hôtel de Jean), intendant des bâtiments, graveur des monnaies, 76.
Yvoreau (Épitaphe de Jean), commissaire au Châtelet, 68.
Zeeman (Rémi), peintre; un de ses tableaux représente le Louvre et l'hôtel de Bourbon, 1 36.
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DG
707
1885
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Berty, Adolph
Topographie historique du
vieux Paris 2. éd.
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