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Full text of "Traité général de photographie en noir et en couleurs"

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AITÉ  GÉNÉF 


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3*   ÉDITION 


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E  LA  G  RAVE  --  15,  rue  Soufflot,  PARIS 


TRAITÉ  GÉNÉRAL 


DE 


PHOTOGRAPHIE 


A  LA  MÊME  LIBRAIRIE 


Tout  ce  qu'il  faut  savoir  en  astronomie,  géologie,  géographie,  histoire, 
religions,  philosophie,  —  mathématiques,  physique  et  chijnie,  miné- 
ralogie,   cristallographie,   botanique,    zoologie,    sciences  médicales^ 
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Collection  de  la  Science  au  XX^  siècle. 


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TRAITE  GENERAL 

DE 


PHOTOGRAPHIE 


EN  NOIR  ET  EN  COULEURS 


PAR 


ERNEST  COUSTET 


OUVRAGE   ILLUSTRÉ    DE   195   GRAVURES 


SIXIEME     EDITION 


PARIS 
LIBRAIRIE    DELAGRAVE 

15,     RUE     SOUFFLOT,      15 
1921 


Tous  droits  de  reproduction,  de  traduction  et  d'adaptation 
réservés  pour  tous  pays. 


Copyright  by  Ch.  Delagrave,  i9tî. 


INTRODUCTION 


L'image  des  objets  extérieurs  qu'on  aperçoit  dans  une  chambre 
obscure  percée  d'une  petite  ouverture  a  dû  certainement  être 
observée  dans  l'antiquité.  Cependant  Aristote,  qui  a  résumé 
toutes  les  connaissances  acquises  à  son  époque,  s'étonne  que  les 
rayons  du  soleil  passant  à  travers  des  trous  carrés  forment  des 
cercles  et  non  pas  des  figures  rectilignes*.  Le  philosophe  de  Sta- 
gire  essaye,  sans  y  réussir,  d'expliquer  cette  apparente  anomalie, 
et  ce  n'est  que  dix-huit  siècles  plus  lard,  dans  les  manuscrits  d'un 
artiste  célèbre,  que  l'on  trouve  pour  la  première  fois  l'analyse 
exacte  du  phénomène  et  son  explication  rationnelle  fondée  sur  la 
propagation  en  ligne  droite  de  la  lumière. 

«  Si  la  face  d'un  édifice,  dit  Léonard  de  Vinci,  ou  une  place,  ou 
une  campagne,  est  éclairée  par  le  soleil,  et  que,  du  côté  opposé, 
dans  la  face  d'une  habitation  qui  ne  reçoit  pas  le  soleil,  on  prati- 
que un  petit  soupirail,  tous  les  objets  éclairés  enverront  leur  image 
par  ce  soupirail  et  paraîtront  renversés^.  » 

Et  ailleurs  il  s'exprime  ainsi  :  «  L'expérience  qui  montre  com- 
ment les  objets  envoient  leurs  images  ou  ressemblances  entre- 
coupées au  dedans  de  l'œil  dans  l'humeur  albugineuse  se  manifeste 
quand,  par  quelque  petit  soupirail  rond,  les  images  des  objets 
éclairés  pénètrent  dans  une  habitation  très  obscure.  Alors  tu  rece- 
vras ces  images  sur  du  papier  blanc  placé  dans  ladite  habitation, 
non  loin  du  soupirail,  et  tu  verras  tous  les  susdits  objets  sur  ce 
papier  avec  leurs  propres  figures  et  couleurs,  mais  ils  seront  plus 

1.  Problèmes,  section  XV,  6.  Cf.  la  Grande  Encyclopédie,  \.  X,  p.  3.21. 

2.  Cod.  Allanlique.  —  Charles  Ravaisson-Mollten,  manuscrit  D  de  la  biblio- 
thèque de  l'Institut,  fol.  8  a.  —  Manuscrit  I,  fol.  22. 


6  INTRODUCTION 

petits  et  sens  dessus  dessous,  à  cause  de  ladite  intersection.  Ces 
simulacres,  s'ils  naissent  d'un  endroit  éclairé  par  le  soleil,  paraî- 
tront proprement  peints  sur  le  papier;  celui-ci  doit  être  très  mince 
et  vu  par  le  revers  ;  le  soupirail  sera  fait  dans  une  petite  plaque 
très  mince  de  fer^  » 

Cardan,  vers  1550,  eut  l'idée  de  rendre  plus  brillantes  et  plus 
nettes  les  images  de  la  chambre  noire,  en  agrandissant  Forifice  et 
en  y  adaptant  un  orbis  e  vitro^^  c'est-à-dire  un  verre  sphérique  : 
ce  fut  le  premier  objectif. 

Quant  à  G.-B.  délia  Porta,  son  rôle  se  borna  à  donner  à  la 
chambre  noire  la  forme  qu'elle  a  longtemps  conservée  et  qui  a  fait 
communément  attribuer  au  physicien  napolitain  une  découverte 
réalisée  bien  avant  lui.  Le  nom  de  Porta  est  resté  indissolublement 
lié  à  l'histoire  de  la  chambre  noire,  parce  que  c'est  lui  qui  en  fit 
un  instrument  pratique  en  la  rendant  portative.  Son  appareil  se 
composait  d'un  tuyau  fermé  par  une  lentille  de  verre  au  foyer  de 
laquelle  l'image  des  objets  extérieurs  se  projetait  sur  un  écran  en 
papier.  Porta  le  destinait  aux  personnes  qui  ne  saA^ent  pas  dessi- 
ner :  suivant  lui,  pour  reproduire  des  vues  exactes  des  objets  les 
plus  compliqués,  il  devait  suffire  de  suivre,  avec  la  pointe  d'un 
crayon,  les  contours  de  l'image  focale  ^ 

En  fait,  les  décalques  rudimentaires  que  l'on  obtient  ainsi  ne 
rappellent  en  rien  la  perfection  du  tableau  qui  se  peint  sur  l'écran. 
Cette  image  est  une  copie  admirablement  fidèle  de  la  nature; 
malheureusement,  c'est  une  copie  fugitive  :  aussitôt  qu'on  ferme 
l'instrument,  elle  s'évanouit.  Les  observateurs  la  contemplaient 
donc  avec  une  curiosité  mêlée  du  regret  de  n'entrevoir  aucun 
moyen  de  la  fixer  jamais.  Comment  ces  reflets  impalpables  eus- 
sent-ils gravé  leur  empreinte  et  laissé  une  trace  durable  au  foyer 
de  la  lentille?  hh  photographie^  le  dessin  par  la  lumière,  dut  pa- 
raître aux  savants  et  aux  artistes  de  la  Renaissance,  non  pas  seu- 
lement comme  un  rêve  très  lointain,  mais  même  comme  une  pure 

i.  Charles  Ravaisson-Mollien,  les  Manuscrits  de  Léonard  de  Vinci,  ms.  I, 
fol.  22. 

2.  De  Subtilitate,  1.  IV,  p.  107,  éd.  de  Nuremberg,  1550. 

3.  Magia  naturalis,  1564. 

4.  Du  grec  cpwç,  cptotoç,  lumière,  et  ypâcssTv,  écrire,  tracer. 


INTRODUCTION  T 

utopie.  Sa  réalisation  ne  dépendait  cependant  que  des  progrès  de 
la  chimie. 

Les  changements  de  teinte,  la  décoloration  que  l'éclat  du  soleil 
fait  peu  à  peu  subir  à  certaines  substances,  n'avaient  pas  échappé 
aux  anciens  ;  mais  aucune  observation  antérieure  aux  temps  mo- 
dernes n'avait  permis  de  supposer  que  l'influence  de  la  lumière 
suffirait  pour  créer  un  tableau  en  quelques  instants.  Les  alchimis- 
tes avaient  étudié  le  chlorure  d'argent,  qu'ils  appelaient  argent 
corné;  seulement,  préoccupés  surtout  de  leurs  recherches  sur  la 
transmutation,  les  propriétés  photochimiques  de  ce  composé  n'a- 
vaient que  médiocrement  retenu  leur  attention.  C'est  à  tort  que 
Fabricius  est  cité  comme  ayant  signalé,  dans  un  ouvrage  publié 
en  1565,  le  noircissement  du  chlorure  d'argent  exposé  à  la  lumière. 
L'auteur  du  Livre  des  métaux  remarqua  bien  que  cette  substance 
présente  diverses  couleurs,  mais  il  n'a  écrit  nulle  part  que  le  soleil 
la  noircit. 

La  plus  ancienne  tentative  que  l'on  connaisse  de  l'utilisation 
des  sels  d'argent  à  l'impression  d'une  image  par  la  lumière  date 
de  17557.  A  cette  époque,  Ji-H.  SchUlze  enduisait  de  chaux  et  de 
nitrate  d'argent  une  feuille  de  papier  qu'il  exposait  au  soleil  sou& 
un  dessin  ou  sous  une  page  d'écriture.  Les  rayons  lumineux  tra- 
versant les  parties  blanches  de  l'original  réduisaient  le  sel  sensi- 
ble à  l'état  d'argent  métallique  très  divisé,  de  couleur  noirâtre, 
tandis  que,  sous  les  parties  noires  de  l'écriture  ou  du  dessin,  qui 
arrêtaient  les  radiations  solaires,  le  papier  restait  blanc.  On  avait 
ainsi  une  copie  négative,  c'est-à-dire  une  reproduction  sur  laquelle 
les  traits  noirs  du  modèle  étaient  traduits  par  des  traits  blancs, 
tandis  que  le  fond  blanc  de  l'original  était  représenté  par  un  fond 
noir.  Cette  image  était  d'ailleurs  fugace,  puisque  la  couche  sensi- 
ble n'était  pas  éliminée.  On  pouvait  bien  la  conserver  quelque 
temps  dans  l'obscurité,  mais,  si  On  l'exposait  au  jour,  les  parties 
primitivement  blanches  noircissaient  à  leur  tour,  et  la  lumière 
détruisait  elle-même  son  œuvre  éphémère 

En  1777,  Scheele,  étudiant  l'influence  des  différents  rayons  du 
spectre  solaire  sur  le  chlorure  d'argent,  reconnut  que  l'action  du 
violet  et  du  bleu  était  beaucoup  plus  énergique  et  beaucoup  plus 
rapide  que  celle  du  jaune  et  du  rouge. 


$  INTRODUCTION 

Le  physicien  français  Charles  réussit  le  premier,  en  1780,  à  re- 
produire à  l'aide  de  la  lumière,  non  pas  des  portraits  proprement 
dits,  mais  de  simples  silhouettes  de  personnes  placées  au  soleil 
devant  une  feuille  de  papier  sensible.  Aucun  texte  n'indique  la 
substance  dont  il  faisait  usage,  mais  il  y  a  tout  heu  de  croire  qu'il 
s'agissait  d'un  sel  d'argent.  Nous  savons,  en  tout  cas,  son  expé- 
rience ayant  été  répétée  en  public,  dans  ses  cours  au  Louvre,  que 
Charles  ne  fixait  pas  les  images  ainsi  imprimées  et  que  la  feuille 
de  papier  finissait  par  devenir  uniformément  bronzée,  sous  Fac- 
tion  de  la  lumière. 

Wedgwood,  en  1802,  exécutait  une  expérience  analogue  et  fai- 
sait connaître  le  composé  sensible  à  l'aide  duquel  il  opérait.  «  Si 
l'on  mouille  un  papier  au  moyen  d'une  dissolution  de  nitrate  d'ar- 
gent, écrit-il  dans  son  Mémoire,  il  ne  se  manifeste  aucun  change- 
ment dans  l'obscurité;  mais  à  la  lumière  du  jour  ce  papier  change 
rapidement  de  couleur  et  devient  noir  après  une  action  prolongée. 
La  rapidité  de  l'impression  est  proportionnelle  à  l'intensité  de  la 
lumière;  ainsi,  au  soleil,  il  ne  faut  que  deux  ou  trois  minutes, 
tandis  qu'il  faut  plusieurs  heures  à  la  lumière  diffuse.  La  lumière 
transmise  à  travers  un  verre  rouge  a  une  action  infiniment  moins 
active  que  celle  qui  a  traversé  un  verre  bleu  ou  violet.  »  Gomme 
Charles,  Wedgwood  copia  au  soleil  le  profil  d'une  personne  dont 
l'ombre  se  projetait  sur  son  papier  sensible. 

Humphry  Davy  appliqua  la  même  méthode  aux  images  ampli- 
fiées par  le  microscope  solaire.  Le  papier  imprégné  de  nitrate  d'ar- 
gent et  impressionné  au  foyer  de  l'objectif  était  lavé  dans  l'eau, 
qui  n'éliminait  que  partiellement  le  composé  sensible.  Le  fixage 
restait  donc  incomplet,  et  la  surface  entière  ne  tardait  pas  à  brunir. 

•Nicéphore  Niepce  cherchait,  depuis  1813,  à  fixer  les  images  de 
la  chambre  noire.  Il  y  réussit,  en  1827,  et,  malgré  l'extrême  len- 
teur de  son  procédé,  on  doit  le  considérer  comme  le  véritable 
inventeur  de  la  photographie.  Une  plaque  de  cuivre  argentée  était 
enduite  d'un  vernis  formé  de  bitume  de  Judée  dissous  dans  l'es- 
sence de  lavande.  Cette  plaque,  exposée  aux  rayons  transmis  par 
la  lentille  pendant  huit  heures^  était  ensuite  lavée  dans  un  mélange 
d'huile  de  pétrole  et  d'essence  de  lavande.  L'action  de  la  lumière 
ayant  eu  pour  effet  de  rendre  le  bitume  insoluble  dans  ces  liquides, 


INTRODUCTION  9 

le  métal  n'était  mis  à  nu  que  sur  les  parties  correspondant  aux 
ombres  du  modèle.  En  examinant  la  plaque  éclairée  sous  l'inci- 
dence convenable,  on  apercevait  les  blancs  du  modèle  représentés 
par  la  couche  grisâtre  de  bitume  oxydé,  tandis  que  l'argent  bruni 
mis  à  nu  par  le  dissolvant  représentait  les  noirs.  Les  contrastes 
étaient  peu  marqués,  le  modelé  bien  faible,  et  le  temps  de  pose 
démesurément  long.  Néanmoins,  les  propriétés  du  bitume  de  Judée, 
découvertes  par  Niepce,  sont  restées  utilisées  en  héliogravure. 

Si  imparfaites  qu'elles  fussent,  ces  premières  ébauches  de  la 
lumière  excitèrent  l'étonnement  de  ceux  qui  les  virent.  A  cette 
époque,  un  peintre  de  talent,  Louis-Jacques-Mandé  Daguerre,  Tau 
teur  du  Diorama,  faisait  un  fréquent  usage  de  la  chambre  noire 
pour  établir  les  maquettes  de  ses  vastes  compositions,  et  l'idée 
d'en  fixer  l'image  insaisissable  hantait  depuis  quelque  temps  son 
esprit,  quand  l'opticien  Chevalier  le  mit  en  rapport  avec  Niepce. 
Daguerre  n'avait  encore  obtenu  que  des  reproductions  extrême- 
ment fugaces  et  d'ailleurs  uniquement  visibles  dans  l'obscurité, 
en  impressionnant  des  substances  phosphorescentes.  Néanmoins, 
un  traité  fut  passé,  en  décembre  1829,  entre  les  deux  inventeurs, 
qui  se  communiquèrent  les  résultats  de  leurs  recherches  et  cour- 
suivirent  ensemble  leurs  travaux. 

Il  est  bien  difflcile  de  préciser  la  part  qui  revient  à  chacun  des 
collaborateurs  dans  le  succès  final.  On  s'accorde  cependant  à 
reconnaître  que  c'est  à  Daguerre  qu'est  due  la  découverte  du  déve- 
loppement de  l'image  latente  formée  par  la  lumière  sur  l'iodure 
d'argent.  Niepce  était  mort  le  5  juillet  1833,  et  Daguerre,  livré  seul 
à  l'achèvement  de  l'œuvre  commune,  n'y  parvint  que  quatre  années 
plus  tard.  Un  nouveau  traité  lia  alors  Daguerre  et  Isidore  Niepce, 
le  fils  de  Nicéphore,  pour  l'exploitation  du  nouveau  procédé.  Une 
souscription  publique,  ouverte  le  i5  mars  1838,  demeura  infruc- 
tueuse, et  il  fallut  que  François  Arago  intervînt  pour  qu'une  récom- 
pense nationale  indemnisât  les  inventeurs,  qui  abandonnaient  au 
public  leur  merveilleuse  découverte. 

Une  rente  viagère,  de  six  mille  francs  pour  Daguerre  et  de  qua- 
tre mille  pour  Isidore  Niepce,  avec  réversibilité  de  moitié  sur  les 
veuves,  fut  le  prix  du  secret  de  la  photographie.  Le  projet  de  loi 
présenté  par  le  ministre  de  l'intérieur  fut  voté  par  acclamation,  à 


10  INTRODUCTION 

la  Chambre  des  députés,  sur  le  rapport  d'Arago,  le  3  juillet  1839, 
et  à  la  Chambre  des  pairs,  sur  le  rapport  de  Gay-Lussac,  le  30  juil- 
let suivant. 

Le  10  août,  en  présence  de  l'Académie  des  sciences  et  de  l'Aca- 
démie des  beaux-arts  exceptionnellement  réunies,  Arago  fit  con- 
naître les  procédés  du  daguerréotype. 

Une  plaque  de  cuivre  argentée  et  polie  était  soumise,  dans  l'obs- 
curité, aux  vapeurs  de  l'iode.  Il  se  formait  ainsi  une^- couche  d'io- 
dure  d'argent,  très  sensible  à  la  lumière.  On  l'impressioanait  dans 
la  chambre  noire,  pendant  quelques  minutes,  puis  on  la  soumet- 
tait à  Faction  des  vapeurs  du  mercure,  qui  développaient  l'image 
latente.  Le  fixateur  primitivement  employé  était  le  chlorure  de 
sodium.  Ce  ne  fut  qu'en  1839  que  John  Herschel  eut  l'idée  de  le 
remplacer  par  l'hyposulfite  de  soude*. 

Avant  mêmeque  le  procédé  de  Daguerre  eût  été  divulgué.  Fox 
Talbot,  qui  avait  entrepris,  dès  1834,  des  recherches  orientées 
dans  une  voie  différente,  faisait  connaître,  en  Angleterre,  au  mois 
de  mars  1839,  un  procédé  photographique  qui  se  rapproche  davan- 
tage de  nos  méthodes  actuelles.  Un  papier  était  imprégné  de  sel 
marin,  puis  de  nitrate  d'argent,  de  manière  à  former  du  chlorure 
d'argent,  composé  qui  noircit  rapidement  à  la  lumière.  En  expo- 
sant ce  papier  sensible  sous  un  dessin,  on  en  obtenait  une  copie 
négative,  que  l'on  fixait  dans  une  solution  concentrée  de  sel  marin. 
Ce  cliché  négatif^  servait  ensuite  à  imprimer,  à  l'aide  d'un  second 
papier  préparé  de  la  même  manière,  une  image  positive,  reprodui- 
sant fidèlement  le  modèle. 

En  1841,  Talbot  préparait  un  autre  papier,  beaucoup  plus  sen- 
sible, utilisable  dans  la  chambre  noire.  Ce  papier  était  imprégné 
d'iodure  d'argent  et  développé  dans  l'acide  gallique.  Ce  nouveau 
procédé,  dénommé  calotype  et  popularisé  en  France  par  Blan- 

1.  Daguerre,  Historique  et  Descinption  des  procéde's  du  daguerréotype  et  du 
diorama,  Paris  (Alphonse  Giroux  et  Gie),  1839. 

R.  CoLSON,  Mémoires  originaux  des  créateurs  de  la  photographie,  Paris  (Carré 
etNaud),  1898. 

2.  Le  Congrès  international  de  photographie  de  1900  a  de'cidé  que  le  nom  tech- 
nique du  négatif  ou  cliché  serait  celui  de  phototype,  et  que  l'épreuve  ou  positif 
prendrait  le  nom  de  photogra^nme.  En  dépit  de  cette  décision,  l'usage,  qui  fait  loi 
«n  terme  de  langage,  continue  à  consacrai'  l'emploi  des  autres  dénominations. 


INTRODUCTION  11 

quart-Evrard,  est- en  quelque  sorte  le  prototype  de  tous  les  pro- 
cédés négatifs  imaginés  depuis  :  albumine,  collodion,  gélatino- 
bromure ^ 

En  1847,  Abel  Niepce  de  Saint-Victor,  fils  d'un  cousin  germain 
de  Nicéphore  Niepce,  crée  le  cliché  sur  verre,  qu'il  recouvre  d'une 
couche  d'albumine  imprégnée  d'iodure  d'argent.  Il  obtient  ainsi 
des  images  dont  la  délicatesse  n'a  jamais  été  dépassée,  mais  qui 
exigent  malheureusement  un  temps  de  pose  trop  long. 

En  1850,  Legray  signale  l'emploi  du  collodion,  mais  c'est  à 
Archer  et  à  Fry  qu'est  due  la  création  de  ce  procédé,  resté  long- 
temps le  plus  parfait  de  tous  et  même  encore  utilisé  de  nos  jours, 
dans  certaines  industries,  à  cause  de  la  finesse  des  reproductions 
qu'il  permet  d'exécuter^. 


Si  nous  nous  étions  proposé  de  retracer  ici  l'histoire  complète 
de  la  photographie,  il  ne  suffirait  pas  de  montrer  à  la  suite  de 
quelles  recherches  le  procédé  au  collodion  a  été  presque  complè- 
tement supplanté  par  le  gélatinobromure  d'argent.  Il  faudrait 
maintenant  revenir  quelques  années  en  arrière  et  subdiviser  cet 
exposé  chronologique,  afin  de  suivre  dans  leurs  développements 
progressifs  un  grand  nombre  de  procédés  et  d'applications.  C'est 
ainsi  que  viendraient  tour  à  tour  s'offrir  à  cette  analyse  rétrospec- 
tive la  découverte  et  le  perfectionnement  de  la  platinotypie,  des 
impressions  pigmentaires,  de  la  gravure  photographique,  de  la 
reproduction  des  couleurs.  Il  faudrait  encore  suivre,  depuis  leur 
naissance  jusqu'à  leur  état  actuel,  la  photographie  du  relief,  du 
mouvement,  de  l'invisible,  etc.  Une  telle  méthode  manquerait 
d'autant  plus  de  clarté,  qu'elle  ferait  nécessairement  appel  à  des 
connaissances  que  le  lecteur  ne  possède  peut-être  pas  encore.  II 
est  temps  de  passer  à  un  exposé  plus  rationnel,  qui  ne  nous  fera 

i.  Blânquart-Evrard,  la  Photographie,  ses  origines,  ses  progrès,  ses  transfor- 
mations, Lille  (Danel),  1869. 

2.  J.-M.  Eder,  Geschichte  der Photographie  (Histoire  delà  photographie),  Halle 
a/S  (Wilhelm  Knapp),  1905. 


12  INTRODUCTION 

d'ailleurs  pas  perdre  entièrement  de  vue  les  questions  d'ordre  his- 
torique :  le  début  de  la  plupart  de  nos  chapitres  sera  donc  réservé 
aux  origines  et  à  la  mise  au  point  de  chaque  procédé. 

Ce  que  nous  voudrions  seulement  souligner  dès  à  présent,  après 
avoir  rappelé  la  lente  gestation,  les  tâtonnements  pénibles  des 
précurseurs,  les  premiers  pas  timides  et  incertains  du  nouvel  art, 
c'est  Tessor  prodigieux  qu'il  a  pris,  au  cours  des  dernières  années. 
A  ses  débuts,  la  photographie  n'a  été  qu'un  moyer^  inespéré  de 
rendre  accessible  aux  bourses  les  plus  modestes  ces  souvenirs  des 
êtres  chers,  ces  portraits  de  famille  auparavant  réservés  aux  privi- 
légiés de  la  fortune.  Cette  première  application  est  restée,  à  juste 
titre,  la  plus  importante;  mais  combien  d'autres  s'imposent  actuel- 
lement à  notre  attention!  Qu'il  s'agisse  de  fournir  à  la  science  ou 
à  l'industrie  des  documents  précis,  d'une  indiscutable  fidélité  et 
d'une  incomparable  richesse  de  détails,  ou  de  créer,  au  contraire, 
dans  un  but  esthétique,  des  images  volontairement  simplifiées  ; 
que  son  objet  soit  d'instruire  le  public  o^  de  le  charmer,  la  photo- 
graphie a  définitivement  conquis  la  première  place,  et  souvent  la 
place  unique,  parmi  les  arts  de  reproduction.  Feuilletons  un  livre 
illustré,  parcourons  un  magazine,  jetons  les  yeux  sur  un  journal 
quotidien  ou  sur  une  affiche,  consultons  un  programme  ou  un 
catalogue,  partout  nous  retrouverons,  sinon  la  photocopie  aux 
sels  d'argent,  du  moins  la  photogravure  dont  le  cliché  a  été  créé 
par  la  lumière. 

La  photographie  instantanée,  dont  les  rares  produits  évoquaient 
jadis  l'idée  d'extraordinaires  prouesses,  est  désormais  l'opération 
la  plus  simple  du  monde,  à  la  portée  même  d'un  enfant.  Et  ce  n'est 
plus  seulement  la  représentation  d'une  attitude  isolée  que  la 
plaque  sensible  enregistre  :  le  mouvement,  dans  ses  phases  infi- 
niment variées,  est  maintenant  analysé,  disséqué,  si  l'on  peut  dire, 
et  reconstitué  si  bien  que  le  cinématographe  est  devenu  le  spec- 
tacle le  plus  en  vogue. 

Avec  le  stéréoscope,  les  monuments,  les  sites  du  monde  entier 
sont  connus  de  tous,  car  ce  n'est  plus  seulement  la  ligne,  la  forme, 
que  la  photographie  reproduit  scrupuleusement  :  à  la  vérité  du 
dessin,  voici  qu'elle  ajoute  encore  le  charme  de  la  couleur.  Aussi, 
lorsqu'on  soumet  à  l'observation   binoculaire  une  plaque  auto- 


INTRODUCTION  i^ 

chrome,  c'est  comme  si  Ton  avait  la  nature  même  sous  les  yeux, 
avec  son  relief,  avec  sa  perspective  et  jusqu'à  ses  moindres  nuances. 

L'invention  de  Niepce  et  de  Daguerre  est  allée  plus  loin  :  avec 
les  rayons  X,  elle  a  sondé  le  mystère  des  organismes  vivants;  com- 
binée avec  le  microscope  ou  avec  la  lunette  astronomique,  elle  a 
reculé  les  limites  de  nos  investigations  dans  l'étude  de  l'infiniment 
petit  et  de  l'infmiment  grand;  elle  a  révélé  l'existence  de  ce  que 
Fœil  humain  ne  pourra  jamais  voir. 

Encore  que  très  abrégée,  cette  énumération  peut  donner  une 
idée  de  la  complexité  de  la  tâche  que  nous  avons  entreprise  :  réu- 
nir, dans  un  exposé  pratique,  aussi  complet  que  possible  quoique 
relativement  court,  les  procédés  photographiques  et  leurs  appU- 

cations. 

Ces  procédés,  ces  applications,  sont  aujourd'hui  si  nombreux 
q,u'une  vaste  encyclopédie  serait  nécessaire  pour  en  noter  tous  les 
défails.  Aussi  la  bibliographie  photographique  comprend-elle  plu- 
sieurs centaines  de  volumes.  Il  est  vrai  qu'on  y  rencontre  fréquem- 
ment des  redites  et  des  superfétations  ;  c'est  justement  à  éviter  les 
unes  et  les  autres  que  ce  livre  s'est  attaché. 

Une  pratique  déjà  longue  de  la  photographie  nous  a  surtout 
servi  à  faire  œuvre  d'éclectisme,  parmi  la  foule  innombrable  des 
formules  et  recettes  si  souvent  rééditées  avec  d'insignifiantes  va- 
riantes. Cependant  notre  seule  expérience  n'aurait  pas  toujours 
suffi  à  nous  guider  :  il  a  fallu  puiser  dans  les  travaux  antérieurs, 
compulser  quantité  de  documents  épars.  Un  travail  de  revision  a 
suivi  :  il  ne  s'agissait  pas  de  résumer  rapidement  ce  que  nous 
avions  lu;  il  fallait  faire  un  choix,  éliminer  l'inutile,  rectifier  les 
erreurs,  remonter  aux  textes  originaux.  Nous  devions  d'ailleurs 
nous  borner  au  strict  essentiel.  Toutefois,  pour  que  le  lecteur  fût 
mis  à  même  de  bénéficier  entièrement  de  nos  études  préparatoires, 
il  n'y  avait  qu'à  lui  fournir  le  moven  de  diriger  ses  recherches 
vers  les  spécialités  qu'il  désirerait  approfondir.  C'est  pourquoi  cha- 
cun de  nos  chapitres  se  termine  par  une  notice  bibliographique. 

Ces  références  sont,  d'ailleurs,  elles-mêmes  le  résultat  d'une 
sélection.  Nous  avons  pris  soin  de  ne  citer  que  les  écrits  d'une 
réelle  valeur,  choisissant,  parmi  un  grand  nombre  d'ouvrages  simi- 
laires, les  mieux  informés,  les  plus  substantiels. 


14  INTRODUCTION 

A  ces  livres  venait  s'ajouter  une  autre  source  de  documenta- 
tion. Nous  voulons  parler  des  publications  périodiques,  de  ces 
revues  photographiques  qui  viennent,  chaque  mois  ou  chaque 
semaine,  contribuer  à  enrichir  la  science  ou  Tart  et  nous  tenir  au 
courant  des  progrès  accomplis.  Nous  y  avons  souvent  puisé  de 
précieux  enseignements,  et  il  resterait  une  lacune  à  nos  bibliogra- 
phies, si  nous  ne  nommions  pas,  en  commençant  ce  Traité  :  la 
Science  au  vingtième  siècle,  le  Bulletin  de  la  Société  française  de 
Photographie,  la  Photo-Revue,  la  Photographie  des  couleurs,  la 
Photo-Gazette,  les  Annales  de  la  photographie,  le  Moniteur  de  la 
photographie,  la  Revue  scientifique,  la  Revue  générale  des  sciences, 
le  Procédé,  la  Nature,  les  Comptes  rendus  de  U Académie  des  sciences. 

Les  constructeurs,  surtout  les  opticiens,  nous  ont  aussi  apporté 
un  concours  dont  il  nous  est  particulièrement  agréable  de  les 
remercier. 

En  espérant  n'avoir  rien  oublié  d'important  ni  avancé  des  faits 
inexacts,  nous  ne  saurions  affirmer  que  jamais  aucune  erreur  ni 
aucune  omission  ne  s'est  glissée  dans  notre  travail.  Nous  serions 
reconnaissant  aux  lecteurs  qui  voudraient  bien  nous  en  signaler 
les  imperfections. 


TRAITÉ  GÉNÉRAL 

DE 

PHOTOGRAPHIE 


LIVRE   PREMIER 
mATÉRIEL    PHOTOGRAPHIQUE 


CHAPITRE   PREMIER 

LA     CHAMBRE    NOIRE 

Organes  essentiels.  —  L'appareil  photographique  est  essentiel- 
lement constitué  par  une  chambre  noire,  c'est-à-dire  par  une  enceinte 
close  dans  laquelle  une  surface  sensible  à  la  lumière  reçoit  Fimage 
des  objets  extérieurs  qui  y  sont  dessinés  par  un  objectif. 

L'objectif  est  formé  d'une  combinaison  de  lentilles,  dont  l'étude 
fera  le  sujet  du  chapitre  suivant.  Nous  devons  seulement  retenir 
ici,  pour  la  description  de  la  chambre  noire,  que  la  distance  focale, 
l'intervalle  qui  sépare  l'objectif  de  la  plaque  sensible,  varie  sui- 
vant la  distance  du  sujet  à  reproduire  et  suivant  la  combinaison 
optique  utilisée.  En  deçà  comme  au  delà  de  cet  intervalle,  l'image 
projetée  par  l'objectif  cesse  d'être  nette.  C'est  pourquoi  il  est 
nécessaire,  avant  de  photographier  un  sujet,  de  régler  la  position 
que  doit  occuper  la  surface  sensible,  de  la  reculer  ou  de  l'avancer, 
en  un  mot,  de  mettre  au  'point. 

Néanmoins,  il  existe  de  petits  appareils  photographiques  où  la 
distance  entre  l'objectif  et  la  plaque  demeure  invariable.  Dans  ce 
cas,  l'image  des  objets  situés  au  delà  d'une  certaine  distance,  dix 
mètres  par  exemple,  offre  une  netteté  pratiquement  suffisante, 
mais  celle  des  objets  plus  rapprochés  est  floue. 


16  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

Primitivement,  la  chambre  noire  était  composée  de  deux  boîtes 
en  bois  coulissant  Fune  dans  l'autre  pour  le  réglage  de  la  distance 
focale.  Aujourd'hui,  elle  est  constituée  le  plus  souvent  par  un 
soufflet  en  cuir  ou  en  toile  opaque,  noirci  à  l'intérieur.  L'une  des 
extrémités  de  ce  soufflet  est  reliée  au  support  de  l'objectif,  l'autre 
aboutit  à  un  cadre  disposé  de  manière  à  recevoir  soit  un  cadre 
plus  petit  dans  lequel  est  serti  un  verre  déooli.  soit  un  châssis  con- 
tenant la  plaque  sensible. 

Pour  mettre  au  point,  l'opérateur  se  place  sous  un  voile  en  étoffe 
noire,  afin  de  n'être  pas  gêné  par  la  lumière  extérieure,  et,  obser- 
vant l'image  que  l'objectif  projette  sur  le  verre  dépoli,  il  avance 
ou  recule  l'écran,  jusqu'à  ce  que  l'objet  à  reproduire  s'y  montre 
avec  toute  la  netteté  voulue.  Le  verre  dépoli  est  alors  remplacé  par 
le  châssis  porte-plaque.  Il  est  indispensable  que  la  construction 
de  l'appareil  soit  assez  précise  pour  que  la  surface  sensible  occupe 
exactement  le  même  plan  que  le  côté  dépoli  de  l'écran  de  mise  au 
point. 

La  disposition  de  ces  organes  a  été  diversement  comprise  par  les 
constructeurs  d'appareils  photographiques.  Les  modèles  actuels 
en  sont  si  nombreux  qu'il  serait  impossible  de  les  passer  tous  en 
revue.  On  peut  cependant  les  ramener  à  quelques  types  principaux, 
qu'il  suffira  de  décrire  brièvement. 

Chambres  noires  d'atelier.  —  L'appareil  d'atelier  n'étant  pas 
destiné  au  transport,  on  n'a  pas  à  se  préoccuper  de  le  rendre  léger  : 
la  solidité  et  la  précision  doivent  être  ses  principales  qualités.  Ces 
conditions  se  trouvent  parfaitement  réalisées  dans  le  modèle  repré- 
senté fîg.  1.  Le  soufflet  se  compose  de  deux  parties  montées  sur 
trois  cadres  glissant  sur  le  socle  horizontal,  où  des  vis  de  serrage 
les  immobilisent.  L'objectif  est  monté,  suivant  les  conditions  de  la 
mise  au  point,  soit  sur  le  cadre  d'avant,  soit  sur  le  cadre  intermé- 
diaire. Le  cadre  arrière  porte  le  chariot  mobile,  sur  lequel  on 
aperçoit  le  verre  dépoli  de  mise  au  point,  à  côté  du  châssis  qui 
.contient  la  plaque  sensible.  Cette  disposition  est  particulièrement 
commode  pour  l'exécution  des  portraits,  car  elle  évite  la  perte  de 
temps  qu'occasionnerait  l'emploi  de  pièces  indépendantes. 

Le  support  du  chariot  avance  ou  recule,  pour  la  mise  au  point, 
à  l'aide  d'une  crémaillère  à  mouvement  très  doux.  En  outre,  une 


LA    CHAMBRE  NOIRE 


17 


bascule  permet  de  l'incliner,  dans  le  cas  où  la  partie  supérieure 
du  modèle  ne  se  trouverait  pas  dans  le  même  plan  que  la  partie 
inférieure. 

Une  fois  la  mise  au  point  bien  réglée,  des  vis  de  serrage  immo- 
bilisent le  cadre  et  sa 
bascule.  On  ferme 
alors  Vobturateur  (or- 
gane qui  sera  décrit 
chapitre  III),  et  Ton 
pousse  de  gauche  à 
droite  le  cadre  mo- 
bile; la  plaque  sen- 
sible occupe  alors  la 
place  qu'occupait  jus- 
que-là le  verre  dépoli, 
et  il  n'y  a  plus  qu'à 
ouvrir  le  châssis  et 
l'obturateur.  Notre 
gravure  montre  le 
châssis  à  moitié  ou- 
vert, ce  qui  permet 
de  voir  comment 
fonctionne  le  volet 
qui  masque  la  plaque. 
C'est  un  volet  à  ri- 
deau, formé  de  petites' 
lamelles  de  bois  col- 
lées sur  une  étoffe 
opaque. 

La  chambre  noire 
a  pour  support  une 
tablette  montée    sur 


Demarîa-Lapierre. 

Fig-.  1.  —  Chambre  noire  d'atelier. 


trois  galets.  Le  galet  d'arrière  est  soulevé  à  l'aide  d'un  levier, 
lorsqu'on  veut  immobiliser  l'appareil.  On  fait  monter  ou  descen- 
dre la  chambre,  pour  la  mettre  au  niveau  du  sujet,  en  manœuvrant 
une  manivelle  reliée  à  quatre  crémaillères.  Au-dessus  de  cette 
manivelle,  on  en  aperçoit  trois  autres,  plus  petites.  L'une  sert  À 


18 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Demaria-Lapierre. 


Chambre  à  queue  pliante 
(ouverte). 


la  mise  au  point,  la  seconde  permet  d'incliner  la  chambre  noire, 
la  troisième  fait  mouvoir  un  léger  cadre  (dont  on  ne  y»oit  qu'une 

partie,  le  reste  se  trouvant 


masqué  par  FaA^ant  de  la 
chambre)  portant  un  écran 
évidé  pour  les  portraits  en 
dégradé. 

Chambres  noires  portati- 
ves. —  Ces  appareils  doivent 
étrefégers,  quoique  robustes, 
et  se  réduire  à  un  faible  vo- 
lume pendant  le  transport. 
Les  fig.  2  et  3  en  représen- 
tent un  modèle  déjà  ancien, 
mais  encore  assez  répandu, 
en  raison  de  sa  solidité,  sur- 
tout dans  les  grands  formats.  L'objectif  est  fixé  à  une  planchette 
coulissant  horizontalement  sur  un  panneau  susceptible  de  se  dé- 
placer dans  le  sens  vertical,  suivant  la  disposition  du  sujet  et  les 
exigences  de  la  mise  en  plaqlie.  Ce  double 
déplacement  que  peut  subir  l'instrument 
d'optique  constitue  le  décentrement.  Le  pan- 
neau arrière  une  fois  ouvert  constitue  le  socle 
horizontal  le  long  duquel  se  déplacera  le 
chariot  mobile.  La  rigidité  en  est  assurée  par 
.une  planchette  à  glissières  formant  verrou. 
Le  chariot  mobile  se  déplace  pour  la  mise  au 
point  à  Taide  d'une  crémaillère  à  double  pi- 
gnon et  vis  de  serrage  ;  il  porte  deux  lames 
de  cuivre,  dites  bandes  d'accrochement ,  dans 
lesquelles  sont    évidés   trois   encastrements  .,,  ^       ... 

T  Ll.  Demaria-Lapierre. 

doubles  auxquels  viennent  s'adapter  des  tètes      ^.^  3  —  Ch     b 
de  vis  ou  des  crochets  qui  font  saillie  sur  le  à  queue  pliante  (fermée). 
corps  arrière  de  la  chambre.  Ce  triple  encas- 
trement permet  d'employer  des  objectifs  à  court  ou  à  long  foyer 
et  même  de  faire  des  reproductions.  Le  corps  d'arrière  est  muni 
de  vis  ou  de  crochets  d'encastrement  sur  deux  de  ses  côtés,  de 


LA    CHAMBRE   NOIRE 


13- 


manière  à  pouvoir  être  iixé  sur  le  chariot  soit  en  largeur,  soit  en 
hauteur.  A  cet  effet,  le  soufflet  n'est  pas  directement  collé  sur  le 
panneau  antérieur  :  il  est  fixé  à  une  petite  planchette  munie  d'une 
rondelle  métallique  tournant  à  frottement  doux  sur  une  large  et 
mince  poulie  vissée  sur  Tavant-corps. 

Le  verre  dépoli  est  porté  par  un  cadre  à  charnières,  maintenu 
contre  le  cadre  arrière  par  un  verrou,  et  s'ouvre  comme  une 
porte,  lorsqu'on  veut  y  substituer  les  châssis  porte-plaques. 

Ce  modèle  de  chambre  noire,  dit  à  queue  pliante,  est  construit 
en  divers  formats;  il  est  surtout  usité  pour  les  plaques  13x18  et 
18X^4  centimètres,  mais  on  le  fait  aussi  pour  des  grandeurs  bien 
supérieures,  30  X  40  et  même  50 x  60. 

Le  soufflet  tournant  est  souvent  remplacé,  surtout  dans  les 
chambres  anglaises,  par  une 
disposition  difl'érente,  dont  la 
fig.  4  montre  un  spécimen. 
Le  cadre  du  verre  dépoli  ainsi 
que  la  feuillure  destinée  à 
recevoir  le  châssis  sont  fixés 
à  un  panneau  carré  que  l'on 
peut  adapter  dans  les  deux 
sens  à  l'arrière-corps,  qui  est 
également  carré.  On  exécute 
ainsi  des  vues  soit  en  hauteur, 
soit  en  largeur,  sans  avoir  à 
faire  tourner  le  soufflet  ni 
décrocher  l'arrière-corps.  Les 
chambres  construites  de  cette 
manière  sont  très  solides, 
mais  un  peu  plus  volumineu- 
ses que  le  modèle  à  queue 
pliante. 

Pour  les  formats  9x12  et  au-dessous,  on  préfère  généralement 
aujourd'hui  des  modèles  plus  légers,  de  formes  pius  fines  et  de 
volume  beaucoup  plus  réduit. 

Dans  l'appareil  Folding  (fig.  3)  l'arrière-corps  se  fixe  directe- 
ment sur  le  trépied,  soit  dans  un  sens,  soit  dans  l'autre,  à  laide 


CI.  Thornton-Pickard. 

Fig.  4.  —  Chambre  carrée. 


20 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


d'un  des  deux  écrons  adaptés  à  deux  côtés  contigus.  Le  panneau 
opposé  au  verre  dépoli  s'ouvre  à  charnières  et  se  rabat  horizonta- 


Cl.  Lacour-Berlhiot. 


F'ig.  5.  —  Chambre  noire  Folding. 


lement  pour  former  la  base  à  chariot;  il  est  maintenu  dans  cette 
position  par  un  verrou.  L'objectif  et  son  support,  qui  se  trou- 
vaient enfermés  pendant  le  transport 
entre  le  chariot  et  le  verre  dépoli, 
sont  amenés  par  des  glissières  jus- 
qu'à la  place  exigée  par  la  mise  au 
point.  Le  support  de  Tobjectif  n'est 
plus  ici  un  assemblstge  assez  lourd 
de  bois  épais  et  de  planchettes  su- 
perposées. C'est  un  cadre  léger,  ou 
même  un  petit  socle  soutenant  deux 
colonnettes  métalliques  (fig.  6)  entre 
lesquelles  est  placé  l'objectif,  à  la 
hauteur  déterminée  par  la  posi- 
tion du  sujet. 
Dans  l'appareil  Clapps,  la 
Appareil Foldin^- lé"-er.        base  horizontale- et  le   chariot 

mobile  sont  supprimés.  La 
chambre  est  fixée  sur  son  support,  en  hauteur  ou  en  largeur,  par 
un  des  deux  écrous  disposés  sur  l'arrière-corps.  L'objectif  est  placé 


LA    CHAMBRE   NOIRE 


21 


Fiff.  7. 


Chambre  déleclive. 


à  la  distance  voulue  de  la  plaque  sensible  par  des  tringles  articu- 
lées. Le  soufflet  est  remplacé  par  une  sorte  de  sac  en  cuir.  La 
mise  au  point  s'effectue  en  réglant  Tobjectif,  dans  la  monture 
duquel  est  ménagée  une  rampe  hélicoï- 
dale. Dans  d'autres  modèles,  d'ailleurs 
peu  différents,  la  distance  entre  Tob- 
jectif  et  Tarrière-corps  est  modifiée  à 
l'aide  de  vis  agissant  sur  les  tringles 
articulées. 

Une  disposition  toute  différente  est 
adoptée  pour  les  plus  petits  formats. 
L'appareil  ne  se  replie  plus  pour  le 
transport.  C'est  une  boite,  en  métal  ou 
en  bois  recouvert  de  cuir,  dont  la  forme  reste  invariable  (fîg.  7). 
Le  volume  n'en  est  pas  trop  encombrant,  et  l'on  a  l'avantage  d'ê- 
tre toujours  prêt  à  opérer.  Il  n'y  a  point  de  verre  dépoli,  la  mise 
au  point  se  règle  au  juger,  d'après  la  distance  approximative  du 

sujet,  et  se  trouve  même  supprimée, 
dans  les  appareils  à  bon  marché. 
L'objectif  est  braqué  dans  la  direc- 
tion voulue  au  moyen  d'un  viseu7\ 
accessoire  qui  sera  décrit  plus  loin. 
Parfois  ces  chambres  noires,  de 
format  extrêmement  réduit,  affectent 
la  forme  d'un  tronc  de  pyramide  à 
base  rectangulaire  (fig.  8);  on  les 
désigne  d'ordinaire  sous  le  nom  ir.,- 
I  propre  de  jumelles.  Cette  dénomina- 
tion devrait,  ce  semble,  être  réservée 
aux  appareils  dont  la  forme  rappelle 
plus  exactement  celle  d'une  véritable 
jumelle  et  que  nous  aurons  à  exa- 
miner en  traitant  de  la  photographie  stéréoscopique  (chap.  XXI). 
La  plupart  des  chambres  portatives  sont  munies  d'un  ou  deux 
viseurs,  ainsi  que  de  niveaux  à  bulle  d'air,  permettant  d'assurer 
la  direction  horizontale  de  l'axe  optique,  sans  laquelle  il  n'est  pas 
possible  d'éviter  la  déformation  des  lignes  du  modèle. 


^■^■^^j^yxi^/f 


Cl.  Laour-Berthiot. 

Fig^.  8.  —  Jumelle. 


22 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE    PHOTOGRAPHIE 


Châssis.  —  La  plaque  ou  la  pellicule  sensible  à  la  lumière  doit 
être  conservée  dans  l'obscurité  la  plus  complète  jusqu'au  moment 
de  recevoir  l'image  que  l'objectif  projette  dans  la  chambre  noire. 
Le  châssis  qui  la  contient  est  une  boîte,  généralement  très  peu 
épaisse,  qui  s'ajuste  à  l'arrière  de  la  chambre,  à  la  place  qu'occu- 
pait le  verre  dépoli  pendant  la  mise  au  point.  Pour  démasquer  la 
plaque,  on  ouvre  le  volet ,  qui  forme  une  sorte  de  couvercle  à 
coulisse  sur  la  face  du  châssis  tournée  vers  l'objectit  Ce  volet  est 
à  brisures  ou  à  rideau.  Le  volet  à  brisures  est  une  planchette  que 
l'on  tire  à  Faide  d'une  languette  extérieure  pour  démasquer  la 
plaque.  Cette  planchette  est  divisée  et  collée^  5ur  une  bande  d'é- 

tofîe  opaque  formant  charnière,  de  manière 

à  pouvoir  se    rabattre 

sur  la  face   extérieure 

du  châssis  (fig.  9). 
Le  volet  à  rideau  (fig. 

10)  est  constitué  par  un 

grand   nombre    de    la- 
melles de  bois  étroites 

collées  sur  étoffe.  Cette 

disposition    lui    danae. 

une  souplesse  suffisante 

pour    contourner    une: 

traverse  de  bois  arrosa* 
die  placée  dans  l'épaisseur  du  châssis  et  glisser  dans  des  rai- 
nures ménagées  sur  ses  deux  faces.  Le  rideau  vient  ainsi  s'appli- 
quer sur  la  face  extérieure  du  châssis,  quand  on  démasque  la 
plaque.  Ce  volet  souple  préserve  plus  sûrement  la  préparation 
sensible  des  moindres  filets  de  lumière  qui  poiirraient  s'introduire 
dans  le  châssis  et  la  mettre  hors  d'usage.  On  peut  l'ouvrir  même 
quand  il  est  placé  sur  un  appareil  exposé  au  soleil,  tandis  qu'il 
serait  imprudent  d'ouvrir  un  châssis  à  volet  rigide  sans  prendre 
la  précaution  de  recouvrir  la  chambre  noire  d'un  voile  en  étoffe 
opaque. 

Le  châssis  d'atelier  (fig.  1)  ne  contient  qu'une  seule  plaque,  que 
l'on  introduit  par  l'arrière,  c'est-à-dire  du  côté  opposé  au  volet, 
après  avoir  ouvert  une  porte  maintenue  par  des  taquets.  Les  chàs- 


Cl.  Demaria-Lapierre. 

Fig.  9.  —  Châssis 
à  brisures. 


CI.  Demaria-Lapierre, 

Wï§.  10.  —  Chassas 
hriàesLUx, 


LA    CHAMBRE   NOIRE 


23 


Cl.  Demaria-Lapierre. 
Fig.  11.  —  Châssis  double. 


sis  des  appareils  portatifs  contiennent  ordinairement  deux  plaques 
disposées  dos  à  dos  et  séparées  par  une  cloison  opaque  à  laquelle 
sont  adaptées  des  lames  élastiques  destinées  £l  pousser  les  plaques 
contre  leurs  taquets  de  retenue ,  de  ma- 
nière à  assurer  la  concordance  qui  doit 
exister  entre  la  surface  sensible  et  le 
plan  déterminé  par  la  mise  au  point. 
Chaque  face  du  châssis  est  fermée  par 
un  volet,  à  brisures  ou  à  rideau  (fig.  il). 
Lorsqu'on  doit  exécuter  une  photogra- 
phie de  format  plus  petit  que  celui  du 
châssis,  il  faut  y  adapter  un  intermédiaire 
(fîg.  12).  Cette  pièe&  est.  ordinairement 
constituée  par  un  cadre,  en  bois  mince 
oaen  métal,  qui  prend  la  place  qu'occu- 
pent habituellement  les  plaqnes  sensibles  et  dont  le  centre  est 
évidé  de  manière  à  recevoir  une  plaque  plus  petite.  L'intermédiaire 
est  maintenu  pai*  les  taquets  du  châssis  et  porte  lui-même  des 

taquets  destinés  à  retenir  la  petite  plaque. 
Les  châssis  de  grandes  dimensions  sont 
presque  toujours  accompagnés  d'une  série 
d'intermédiaires  concentriques,  c'est-à-dire 
s'adaptant  les  uns  aux  autres ,  de  manière  à 
rendre  possible  l'utilisation  des  formats  de 
plaques  les  plus  usuels  :  6,5X9,  9x12, 
13X18,  18x24,  21X27,  24X30,30X40, 
etc. 

Aux  appareils  de  très  petit  format  s'adap- 
tent parfois  des  châssis  très  minces  en  métal, 

Ci.  Demana-Lapierre..  COntCUaut    ChaCUU    UUe     SCulc    plaqUC.    DaUS 

Fig-.  12.  —  Intermédiaire,   d'autres  modèles,  au  contraire,  les  plaques 

sont  toutes  réunies  dans  un  magasin. 
Magasin.  —  On  désigne  sous  ce  nom  un  châssis  disposé  de 
manière  à  contenir  plusieurs  plaques,  une  douzaine  par  exemple. 
Chaque  plaque  est  placée  dans  un  petit  cadre  et  vient,  à  tour  de 
rôle,  occuper  le  plan  focal.  Un  mécanisme  très  simple  assure  le 
fonctionnement  du  magasin. 


24 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


La  fig.  13  représente  Tintérieur  de  la  sténojumelle  Joux  et  de 
son  magasin.  Après  chaque  pose,  la  joue  supérieure  est  écartée  de 
la  paroi  opposée,  et  ce  mouve- 
ment suffît  pour  que  la  plaque 
impressionnée  soit  poussée  par 
un  ressort  à  Farrière  de  Fappa- 
reil.  Quand  on  replie  ensuite  la 
boîte,  la  plaque  passe  en  arrière 
<les  autres,  qu'elle  pousse  en 
avant  sous  Faction  du  ressort 
recourbé.  Cette  poussée  a  pour 
-effet  d'amener  la  seconde  pla- 
que au  foyer  de  l'objectif. 

La  fig.  14  montre  une  com- 
binaison différente.  Les  cadres 
portant  les  plaques  sont  placés 
à  l'arrière  de  la  chambre  et 
poussés,  quand  l'appareil  est 
fermé,  par  le  ressort  A.  La  ^^'  ^°"^* 
première  plaque  est  maintenue 
au  foyer  de  l'objectif  par  une 
gouttière  montée  sur  un  axe  qui  aboutit  extérieurement  au  levier 

D.  En  déplaçant  ce  der- 
nier vers  la  droite,  quand 
la  première  plaque  a  été 
impressionnée,  celle-ci 
se  trouve  dégagée  et 
tombe  au  fond  de  la 
boîte.  La  seconde  pla- 
que, sous  l'impulsion  du 
ressort  A,  vient  alors 
prendre  la  place  de  la 
première. 

Les  plaques   de  verre 
ont  l'inconvénient  d'être 


-j^^r 


Fig.  13.  —  Coupe  du  magasin 
de  la  slénojumelle. 


Fig.  14.  —  Coupe  de  la  chambre  détective. 


lourdes  et  fragiles  :  aussi  les  remplace-t-on  de  plus  en  plus  par 
le  celluloïd.  Dans  beaucoup  de  petits  appareils,  le  support  de  la 


LA   CHAMBRE  NOIRE 


25 


Fig.  15.  —  Kudak  plianx 
à  pellicules. 


surface  sensible  est  une  pellicule  souple  en  forme  de  longue  bande 
enTOule'e  sur  une  bobine  en  même  temps  qu'une  bande  de  papier 
noir.  Les  chambres  destinées  à  utiliser  ces  pellicules  portent  un 
magasin  spécial  dans  lequel  se  déroulera 
la  bande  (fîg.  lo).  La  bobine  y  est  intro- 
duite, en  pleine  lumière;  on  tire  la  bande 
de  papier  qui  l'entoure ,  on  la  fixe  à  un 
axe  disposé  à  l'une  des  extrémités  du 
magasin,  que  l'on  referme  ensuite,  et  on 
tourne  une  clef  extérieure  reliée  à  cet 
axe.  Le  commencement  de  la  bande  sen- 
sible se  trouve  ainsi  démasqué,  prêt  à 
recevoir  l'impression  lumineuse,  aussitôt 
que  l'objectif  aura  été  ouvert.  Après  la 
pose,  on  donne  quelques  tours  de  clef, 
la  surface  impressionnée  est  enroulée 
sur  l'axe  et  protégée  par  le  papier  noir 
dont  elle  est  doublée,  et  une  nouvelle 
surface  se  trouve  à  son  tour  en  position  pour  enregistrer  l'image 
transmise  par  l'objectif.  Quand  la  bande  a  été  impressionnée  dans 
toute  sa  longueur,  elle  se  trouve  enroulée  tout  entière  autour  de 
l'axe  terminé  par  la  clef  extérieure;  en  donnant  encore  quelques 
tours  de  clef,  on  achève  d'enrouler  la  bande  de  papier  noir,  dont 
le  but  est  de  préserver  la  couche  sensible  delà  lumière  extérieure. 
Rien  n'empêche  alors  de  retirer,  en  plein  jour,  la  bobine  impres- 
sionnée et  de  la  remplacer  par  une  nouvelle  bobine.  Le  touriste, 
l'explorateur,  peuvent  ainsi,  munis  d'une  provision  suffisante  de 
bobines,  faire  ample  moisson  de  documents  ou  de  souvenirs,  sans 
être  obligés  de  s'enfermer  dans  une  pièce  obscure  pour  y  mani- 
puler des  préparations  que  le  moindre  filet  de  lumière  suffirait  à 
mettre  hors  d'usage. 

On  construit,  enfin,  des  châssis-magasins  destinés  â  recevoir 
des  pelhcules  indépendantes  les  unes  des  autres,  et  non  plus 
en  longues  bandes.  Tels  sont  le  film-pack  Premo  et  le  bloc-film 
Lumière,  qui  permettent  également  d'exécuter  un  nombre  illimité 
de  clichés,  sans  recourir  au  chargement  des  châssis  dans  le  labo- 
ratoire. Douze  pellicules  sont  livrées  par  le  fabricant  empaquetées 


26 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


ensemble;  à  chacune  d'entre  elles  est  collée  une  feuille  de  papier 
noir  passée  sur  une  baguette  de  bois  arrondie,  repliée  sur  le  côté 
opposé  du  paquet  et  terminée  par  une  languette  qui  fait  saillie  à 
l'extérieur  (fi g.  16).  Le  paquet  étant  introduit  dans  le  châssis-ma- 
gasin, on  tire  d'abord  la  première  feuille  noire,  et  la  première 
pellicule,  ainsi  démasquée,  se  trouve  prête  à  recevoir  Timpres- 
sion.  La  pose  acliievée,  on  tire  la  feuille  de  papier  noir  à  laquelle 
est  collée  pa?  son  extrémité  inférieure  la  pellicule  qui  vient  d'être 
utilisée;  cette  pellicule,  suivant  la  feuille  noire,  passe  donc  sous 


Cl.  Kodak. 


Fig-.  16.  —  Film-pack. 


la  baguette  de  bois  arrondie  disposée  dans  le  bas  du  paquet,  et 
vient  ensuite  se  placer  derrière  les  autres  pellicules.  A  ce  moment, 
la  feuille  de  papier  noir  est  presque  complètement  sortie  du  pa- 
quet :  il  n'y  a  plus  qu'à  déchirer  toute  la  partie  qui  fait  saillie. 
En  même  temps  que  la  première  pellieule  passe  en  arrière  du 
paquet,  elle  démasque  la  seconde,  que  l'on  amènera  derrière  la 
première,  après  la  pose,  en  tirant  la  feuille  noire  après  laquelle  elle 
est  collée.  Quand  les  douze  pellicules  ont  été  ainsi  successivement 
utilisées,  la  première  se  trouve  de  nouveau  devant  toutes  les 
autres,  mais  elle  a  devant  elle  une  dernière  feuille  de  papier  noir 
qui  se  trouvait  derrière  la  douzième  pellicule  et  qui  maintenant 
protège  la  première  de  l'action  lumineuse.  On  peut  donc  retirer 
le  film-pack  du  châssis  et  y  placer  un  nouveau  paquet. 


LA    CHAMBRE  NOIRE 


27 


Fig.  17. 
Viseur  à  chambre  noire. 


Viseurs.  —  L'examen  de  l'image  projetée  sur  le  verre  dépoli  n'a 
pas  pour  seul  but  le  réglage  de  la  mise  au  point,  c'est-à-dire  de  la 
distance  qui  doit  séparer  l'objectif  de  la  surface  sensible  :  il  sert 
aussi  à  régler  la  mise  en  plaque^  c'est-à-dire  la  manière  dont  le 
sujet  se  présente  dans  le  champ  de  l'instrument. 

Les  chambres  noires  dépourvues  de  verre  dépoli  nécessitent  l'em- 
ploi d'un  viseur.  Cet  accessoire  accompagne  d'ailleurs  la  plupart 
des  appareils  portatifs,  même  ceux  qui  sont  munis  d'un  écran 
de  mise  au  point  :  dans  ce  cas,  le  viseur  est  encore  utile,  une  fois 

le  châssis  en  place  et  la  plaque  démasquée, 
pour  reproduire  les  ob- 
jets qui  se  déplacent  et 
dont  il  n'est  pas  pos- 
sible de  repérer  d'a- 
vance, sur  le  verre  dé- 
poli, la  position  exacte 
qu'ils  vont  occuper 'sur 
la  surface  sensible. 

Le  viseur  est  consti- 
tué soit  par  une  cham- 
bre noire  en  miniature  (fig.  17)  dont  Fimagé  est  ordinairement 
redressée  par  un  miroir  incliné  à  43°,  soit  par  mi  verre  concave 
où  sont  gravés  deux  traits  perpendiculaires  et  derrière  lequel  est 
un  œilleton  (fig.  18). 

Pour  viser   les  sujets 
éloignés,  on  emploie  une  ipi^^ÇB 
petite  lunette  d'approche 
(ûg.  19). 

Tous  ces  viseurs  per- 
mettent bien  de  braquer 
l'appareil  dans  la  direc- 
tion voulue  et  de  saisir 
le  sujet  à  lïnstant  pricis 
011  il  se  trouve  le  mieux 
placé,  mais  non  de  régler  la  mise  au  point.  Ce  réglage  ne  saurait 
être  effectué  à  l'avance,  pour  la  plupart  des  scènes  animées,  dont 
lés  sujets  vont  occuper  des  positions  impossibles  à  prévoir.  Or, 


Fig-,  18.  —  Viseur  clair. 


Viseur  à  lunette. 


28 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


les  objectifs  très  lumineux  que  l'on  utilise  en  pareil  cas  ne  donnent 
des  images  nettes  que  dans  un  plan  rigoureusement  délimité  et 
exigent,  par  suite,  que  la  mise  au  point  soit  réglée  avec  soin  au 
dernier  moment.  On  a  construit,  à  cet  effet,  des  chambres  à  deux 
corps,  munies  de  deux  objectifs  identiques,  dont  Fun  projette 
l'image  du  sujet  sur  la  plaque  sensible  et  l'autre  sur  le  verre 
dépoli.  L'opérateur  a  ainsi  la  faculté  d'observer  l'image  et  de  rec- 
tifier soit  la  mise  en  plaq'ue,  soit  la  mise  au  point,  jusqu'au  mo- 
ment de  la  pose. 

Cette  combinaison  conduit  à  des  résultats  parfaits,  mais  son 
application  n'est  pas  sans  inconvénients.  Dans  l'atelier,  elle  n'a 
que  le  défaut  de  nécessiter  l'achat  de  deux  objectifs,  généralement 
très  coûteux.  Pour  les  travaux  en  plein  air,  l'appareil  double  est, 
en  outre,  trop  lourd  et  trop  encombrant,  quand  on  ne  s'en  tient 
pas  aux  plus  petits  formats. 

C'est  pour  éviter  ces  inconvénients  qu'ont  été  imaginées  les 

chambres  reflex,  ou  à  miroir.  Ces 
appareils  se  répandent  de  plus  en 
plus,  aujourd'hui,  parce  qu'ils 
satisfont  à  des  nécessités  nou- 
velles. L'extension  croissante  de 
l'illustration  photographique,  le 
goût,  chaque  jour  plus  affirmé, 
du  public  pour  l'information 
rapide  et  le  document  précis,  ont 
créé  un  mode  de  reportage  in- 
connu de  la  génération  qui  nous 
a  précédés.  Les  appareils  ordi- 
naires ne  satisferaient  pas  aux 
conditions  requises. 

Il  faut  avoir  la  faculté  d'opérer 
sur-le-champ  et  supprimer  tout 
prépar'atif  d'installation.  On 
ignore  souvent,  une  minute  à 
l'avance,  à  quel  endroit  il  faudra 
se  placer  pour  photographier  le  ballon  qui  atterrit,  l'automobile 
qui  fait  panache,  l'aviateur  qui  prend  son  essor,  etc.  Il  ne  saurait 


Cl.  Ica. 


Fig.  20.  —  Appareil  reflex. 


LA   CHAMBRE   IVOIRE  29 

être  question  de  ûxer  la  chambre  noire  sur  un  pied  :  il  faut  la 
tenir  en  mains,  soutenue  par  une  courroie,  et  la  braquer,  en  un 
clin  d'œil,  vers  le  sujet.  Un  yiseur  ordinaire  ne  servirait  pas  à 
grand'chose,  car  il  ne  suffit  pas  que  le  sujet  se  trouve  dans  le 
champ  de  Tobjectif,  il  faut  aussi  qu'il  soit  net  sur  la  plaque.  Donc, 


Fig.  21.  —  Pieds  pliants  en  Lois. 

il  faut  mettre  au  point,  rectifier  le  plan  focal  jusqu'au  momen 
d'opérer,  puis,  sans  perdre  même  une  demi-seconde,  impression- 
ner la  plaque.  11  est  donc  nécessaire  qu'en  un  instant  la  surface 
sensible  soit  substituée  au  verre  dépoli ,  et  Tobturateur  prêt  à 
ouvrir  et  fermer  l'objectif.  Aucun  des  modèles  précédemment 
décrits  ne  permettrait  de  réaliser  ce  tour  d'adresse,  quelle  que 
Boit  d'ailleurs  l'habileté  de  l'opérateur. 


30 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Ces  conditions  toutes  particulières  ne  sont  réalisées  que  dans 
les  appareils  à  miroir,  dont  la  fig.  20  reproduit  un  excellent  spé- 
cimen. Un  miroir  incliné  de  45°  sur  Taxe  optique  renvoie  Timage 
fournie  par  Fobjectif  sur  le  verre  dépoli,  qui  occupe  la  paroi  supé- 
rieure. Un  cône  souple  remplace  le  voile  noir  pour  apercevoir 
l'image  et  mettre  au  point.  Le  châssis  est  déjà  mis  en  place,  du 
côté  qui  fait  face  à  Tobjectif,  et  la  plaque  démasquée  pendant 
la  mise  au  point;  seulement  le  rideau  de  l'obturateur  ainsi  que  le 
miroir  interposé  empêchent  la  lumière  transmise  par  l'objectif  de 
venir  impressionner  la  surface  sensible.  On  observe  donc  le  sujet, 
sur  le  verre  dépoli,  jusqu'au  moment  de  le  photographier.  Il  suffit 
alors  de  presser  la  détente  :  le  miroir  remonte  aussitôt  contre  le 
verre  dépoli,  qu'il  couvre  complètement,  en  même  temps  que  fonc- 
tionne l'obturateur  disposé  devant  la  plaque.  Cet  obturateur,  du 
type  focal  plane,  décrit  dans  le  chapitre  III,  per- 
met d'exécuter  des  instantanés  de  1/6  à  1/2.500 
de  seconde. 

Supports  des  appareils  légers.  —  Le  pied 
d'atelier  (fig.  1)  offre  une  solidité  qui  met  la 
chambre  noire  à  l'abri  des  trépidations,  mais 
il  est  très  lourd.  Le  touriste,  le  promeneur,  ont 
besoin  de  supports  légers  et  peu  encombrants. 
Pour  les  appareils  de  formats  assez  grands,  on 
construit  des  trépieds  en  bois,  dits  à  brisures 
(fig.  21),  dont  chaque  branche  est  formée  de  trois 
ou  quatre  parties  coulissant  ou  se  rabattant  les 
unes  sur  les  autres.  La  hauteur  totale  de  ces 
supports  atteint  environ  l'^jSO;  repliés,  ils  ne 
dépassent  guère  60  centimètres.  C'est  encore 
trop  pour  beaucoup  d'amateurs,  qui  préfèrent 
les  pieds  métalliques  (fig.  22)  formés  de  plusieurs 
tubes  concentriques  assemblés  comme  ceux  des 
lunettes  d'approche.  De  petits  ressorts  maintiennent  ces  éléments 
ajustés  bout  à  bout.  Pour  le  transport,  les  tubes  rentrent  les  uns 
dans  les  autres.  Cette  disposition  offre  l'avantage  de  la  légèreté 
et  réduit  le  bagage  au  minimum,  mais  elle  ne  convient  qu'aux 
chambres  très  légères  et  qui  n'offrent  au  vent  qu'une  faible  surface. 


Cl.  Bellieni. 

Fig.  22.  —  Pied  mé- 
tallique à  branches 
rentrantes. 


LA    CHAMBRE   NOIRE  31 

En  effet,  les  pieds  métalliques,  trop  flexibles,  sont  facilement 
ébranlés.  Chaque  fois  qu'il  est  possible  de  réduire  la  pose  à  une 
fraction  de  seconde,  il  vaut  mieux  renoncer  à  ces  supports  insta- 
bles et  tenir  l'appareil  à  la  main,  ou  le  suspendre  à  une  courroie 
passée  sur  les  épaules  et  autour  du  cou. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


J.-M.  Eder,  Die  photographische  Kamera  und  die  Momeniapparate,  2°  édition, 

Halle  a/ S  (W.  Knapp). 
G.  Ménétrat,  Etude  élémentaire  de  l'objectif,  des  chambres  et  des  obturateurs, 

Paris  (Ch.  Mendel),  1906. 
G.  Maurion,  le  Matériel  photographique,  Paris  (Gauthier- Villars),  1902. 
G.  PizziGHELLi,  Die photographischen  Apparate,  2«  édition,  Halle  a/S  (W.  Knapp). 
J.-F.  ScHMiDT,  Das  Photographieren,  2e  édition,  Vienne  (A.  Harlleben),  1909. 


32 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE   II 

l'objectif 


Propagation  de  la  lumière.  —  La  lumière  se  propage  en  ligne 
droite,  dans  un  milieu  homogène,  par  exemple  dans  une  atmos- 
phère calme  et  limpide.  Il  est  facile  de  s'en  assurer,  en  interpo- 
sant une  lame  opaque  sur  un  point  quelconque  de  la  ligne  droite 
qui  va  de  notre  œil  à  un  objet  :  celui-ci  cesse  d'être  visible.  C'est 
en  vertu  de  la  même  propriété  que  les  objets  extérieurs  projettent 
leur  image  renversée  au  fond  d'une  chambre  obscure  percée  d'une 

petite  ouverture  (fig. 
23).  Les  rayons  éma- 
nés de  l'objet  AB  se 
croisent  en  mn\  l'i- 
mage du  point  A  se 
forme  en  A',  sur  l'écran 
I  PQ,  et  celle  de  B  en  B'. 
Mais  la  lumière 
prend  une  direction 
différente  chaque  fois 
qu'elle  rencontre  un 
obstacle  ou  change  de 
milieu.  Si  elle  tombe  sur  une  surface  polie,  sur  un  miroir,  par 
exemple,  elle  s'y  réfléchit^  et  sa  nouvelle  direction  est  liée  à  sa 
direction  primitive  et  à  la  position  de  la  surface  réfléchissante  par 
une  loi  constante  :  l'angle  de  réflexion  est  égal  à  l'angle  d'inci- 
dence. Si  elle  rase  les  bords  d'une  lame  opaque,  elle  est  déviée 
par  diffraction.  Si  elle  passe  d'un  corps  transparent  dans  un 
autre  corps  transparent,  ou  si  le  milieu  primitif,  sans  changer 
de  nature,  change  de  densité,  une  partie  des  rayons  lumineux  se 
réfléchissent,  et  le  reste  est  dévié  par  réfraction.  De  là  vient  qu'un 


Fig'.  23.  —  Propagation  de  la  lumière. 


L'OBJECTIF  33 

bâton  plongé  obliquement  dans  l'eau  nous  semble  brisé.  Si  les 
étoiles  scintillent,  c'est  que  l'air  est  agité,  soit  à  proximité  du  sol, 
soit  dans  les  hautes  régions  de  l'atmosphère,  et  ne  conserve  pa«i 
constamment  la  même  densité.  La  déviation  augmente  avec  l'obli- 
quité des  rayons  et  n'est  pas  la  même  pour  toutes  les  substances. 
Vindice  de  réfraction  d'un  corps  est  le  rapport  entre  son  pouvoir 
réfringent  et  celui  de  l'air. 

L'indice  de  réfraction  n'est  d'ailleurs  pas  le  même  pour  toutes 
les  couleurs.  Si,  par  une  ouverture  étroite,  on  fait  pénétrer  dans 
une  chambre  obscure  un  faisceau  de  lumière  blanche,  comme  celle 
du  soleil  ou  de  l'arc  électrique,  on  vérifie  aisément  sa  direction 
rectiligne.  Mais,  si  Ion  interpose  sur  son  trajet  un  prisme  de  cris- 
tal à  base  triangulaire,  le  faisceau  n'est  pas  seulement  dévié,  il 
s'élargit  et  se  décompose  en  un  grand  nombre  de  couleurs  très 
délicatement  fondues  l'une  dans  l'autre,  par  nuances  insensibles, 
où  l'œil  peut  reconnaître,  comme  dans  l'arc-en-ciel,  les  sept  teintes 
suivantes  : 

Rouge,  orangé,  jaune,  vert,  bleu,  indigo,  violet. 

C'est  là  le  spectre  visible  de  la  lumière  blanche.  En  réalité,  notre 
œil  n'aperçoit  qu'une  faible  partie  du  spectre  réel;  en  deçà  du 
rouge  comime  au  delà  du  violet,  il  existe  d'autres  radiations  dont 
il  est  facile  de  mettre  les  propriétés  en  évidence.  Vinfra-rouge 
agit  sur  le  thermomètre,  et  Vultra-violet  impressionne  la  plaque 
photographique. 

Cette  décomposition  de  la  lumière  est  désignée  sous  le  nom  de 
dispersion  :  dans  le  spectre  visible,  le  rouge  est  peu  dévié,  c'est  la 
couleur  la  moins  réfrangible,  tandis  que  le  violet  subit  la  plus 
forte  réfraction. 

L'écart  entre  les  couleurs  varie  suivant  la  nature  du  prisme,  qui 
peut  être  plus  ou  moins  dispersif. 

Lentilles.  —  Les  lentilles  sont  des  rondelles  transparentes 
qui,  par  la  courbure  de  leurs  surfaces,  ont  la  propriété  de  faire 
converger  ou  diverger  les  rayons  lumineux  qui  les  traversent.  On 
peut  les  considérer  comme  formées  par  l'assemblage  d'une  infi- 
nité de  petits  prismes.  Les  lentilles  convergentes  sont  plus  épaisses 
au  centre  que  sur  les  bords,  et  les  lentilles  divergentes  plus  minces 
au  milieu  qu'à  la  périphérie.  Suivant  la  forme  de  leurs  surfaces, 


34 


TRAITÉ   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


elles  se  classent  en  six  ^espèces  différentes,  représentées  en  coupe 
fig.  24. 


Lentilles  convergentes. 
A  biconvexe. 
B  plan-convexe. 
G  ménisque  convergent. 


Lentilles  divergentes. 
D  biconcave. 
E  plan-concave. 
F  ménisque  divergent. 


Fie.  24.  —  Lentilles, 


On  appelle  axe  'principal  d'une  lentille  la  ligne  droite  qui  passe 
par  les  centres  de  courbure  de  ses  surfaces  sphériques.   Si  Tune 

des  faces  de  la  lentille  est 
plane,  Taxe  principal  est 
perpendiculaire  à  cette  sur- 
face et  passe  par  le  centre 
de  courbure  de  la  surface 
sphéri^ue. 

Le  foyer  principal  d'une 
lentille  est  le  point  où  se 
coupent  lea  rayons  réfractés  provenant  d'un  faisceau  incident 
parallèle  à  Taxe. 

La  distance  focale  est  la  distance  du  foyer  au  centre  de  la  len- 
tille. On  reconnaît  la  place  qu'occupe  le  foyer  principal  d'une  len- 
tille convergente  en  présentant  cette  lentille  aux  rayons  solaires  : 
la  lumière  se  concentre  au  foyer  en  une  image  plus  petite  et  plus 
éclatante  qu'en  tout  autre  lieu. 

L'image  qui  se  forme  sur  un  écran  placé  dans  une  chambre  obs- 
cure, derrière  un  volet  percé  d'un  petit  trou,  n'est  jamais  nette- 
Les  contours  des  objets  sont  mal  délimités.  La  raison  en  est  que 
l'ouverture,  si  étroite  qu'elle  soit,  offre  toujours  une  certaine  sur- 
face. Dès  lors,  le  faisceau  lumineux  issu  d'un  point  quelconque, 
par  exemple  A  (fig.  23),  est  un  cône  qui  va  dessiner  sur  l'écran, 
en  A',  non  pas  un  point,  mais  un  cercle  dont  la^largeur  dépend  de 
celle  de  l'ouverture  et  de  la  distance  de  l'écran.  Si  l'on  réduit  l'ou- 
verture, outre  que  l'image  s'assombrit,  une  autre  cause  de  confu- 
sion intervient  :  c'est  une  déviation  des  rayons  lumineux,  connue 
en  physique  sous  le  nom  de  diffraction. 

Pour  avoir  une  image  brillante,  il  faut  élargir  l'ouverture,  comme 
l'avait  fait  Cardan,  et  y  adapter  une  lentille  convergente.  La  net- 


L'OBJECTIF  35 

teté  de  Timage  exige  que  l'écran  se  trouve  placé  à  une  distance 
déterminée  de  la  lentille.  En  deçà  comme  au  delà  de  cette  dis- 
tance, rimage  est  confuse  et  cesse  même  d'être  visible. 

Cette  distance  varie  suivant  la  forme  de  la  lentille  et  suivant  Fé- 
loignement  de  Tobjet  dont  il  s'agit  de  reproduire  l'image. 

Quand  l'objet  est  si  éloigné  qu'on  puisse  le  considérer  pratique- 
ment comme  se  trouvant  situé  à  l'infini,  son  image  se  forme  au 
foyer  principal  et  extrêmement  rapetissée» 

Quand  l'objet  est  séparé  de  la  lentille  par  une  distance  égale  au 
double  de  sa  distance  focale  principale,  son  image  est  aussi  éloi- 
gnée du  double  de  cette  distance  focale  et  de  même  grandeur  que 
l'objet. 

Quand  la  distance  de  l'objet  à  la  lentille  est  inférieure  au  double 
de  la  distance  focale  principale,  son  image  est  amplifiée  et  se  forme 
au  delà  du  foyer  principal. 

Quand  la  distance  de  l'objet  est  supérieure  au  double  de  la  dis- 
tance focale,  son  image  est  diminuée.  Elle  diminue  d'autant  plus 
que  l'objet  est  plus  éloigné,  et  se  forme  de  plus  en  plus  près  du 
foyer  principal.  D'ailleurs,  au  delà  d'une  certaine  distance  les 
changements  de  position  d^  l'image  deviennent  imperceptibles 
et  pratiquement  négligeables.  Cette  limite  à  partir  de  laquelle  le 
foyer  reste  invariable  est  la  distance  hyper  focale.  Cette  distance 
est  d'autant  moindre  que  l'objectif  a  une  distance  focale  princi- 
pale plus  courte. 

La  lentille  adaptée  à  la  chambre  noire  porte  le  nom  à' objectifs 
parce  qu'elle  est  dirigée  vers  l'objet  dont  on  veut  reproduire 
l'image.  A  l'époque  de  la  découverte  du  daguerréotype,  cet  objec- 
tif était  encore  constitué,  comme  au  seizième  siècle,  par  un  simple 
verre  convexe.  Une  telle  lentille  ne  peut  pas  donner  des  images 
correctes;  elle  est  très  loin  surtout  de  satisfaire  aux  conditions 
de  la  photographie,  parx;e  qu'elle  présente  plusieurs  défauts  ou 
aberrations  que  nous  allons  analyser. 

Aberration  de  sphéricité.  —  Les  rayons  lumineux  qui  traver- 
sent une  lentille  convergente  simple  ne  concourent  pas  tous  au 
même  point.  Le  foyer  des  rayons  passant  par  le  centre  est  plus'^ 
éloigné  de  la  lentille  que  ceux  qui  passent  par  ses  bords  (fig.  25). 
îl  en  résulte  que  l'image  d'un  point  est  un  cercle  plus  ou  moins 


36 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


Fig-.  25,  —  Aberration  de  sphéricité. 


large  et  diffus,  et  que  les  contours  des  objets  se  montrent  cernés 
d'une  sorte  de  nébulosité. 
Ce  défaut,  qui  résulte  de  la  forme  sphérique  de  la  lentille,  est 

atténué  par  Tinter- 
position  d'un  dia- 
phragme,  lame  opa- 
que percée  d'une 
ouverture  ronde  qui 
ne  laisse  passer  que 
les  rayons  centraux 
et  arrête  les  rayons 
marginaux.  L'image 
gagne  alors  en  net- 
teté, mais  la  réduc- 
tion de  l'ouverture 
diminue  la  luminosité  de  l'objectif  et  nécessite  un  temps  de  pose 
plus  long. 

Le  diaphragme. réduit  l'aberration  sphérique,  mais  ne  la  sup- 
prime pas  entièrement.  Pour  que  l'objectif  en  soit  complètement 
exempt,  il  faut  le  composer  de  deux  lentilles,  l'une  convexe  et  l'au- 
tre concave.  En  choisissant  convenablement  les  deux  verres,  en 
combinant  leurs  courbures,  on  réalise  un  couple  convergent  sans 
aberration  sphérique.  Les  objectifs  ainsi  constitués  sont  appelés 
aplanéliques  (de  à,  sans,  et  'jrXàv-Tj'cc*;,  [rayon]  errant,  égaré).  Ils 
donnent  à  toute  ouverture  une  image  nette,  mais  seulement  au 
centre;  la  netteté  ne  s'étend  jusqu'aux  bords  qu'en  interposant 
un  diaphragme. 

Profondeur  de  foyer  et  profondeur  de  champ.  —  Une  large  len- 
tille convergente  ne  donne  une  image  nette  que  si  l'écran  de  mise 
au  point  est  placé  à  une  distance  rigoureusement  déterminée.  Si 
on  l'avance  ou  si  on  le  recule,  même  d'une  très  faible  quantité, 
l'image  devient  confuse  :  l'objectif  manque  de  profondeur  de  foyer. 
En  outre,  la  même  lentille,  dirigée  vers  des  objets  disposés  à  des 
distances  différentes,  n'en  reproduit  pas  correctement  l'ensemble. 
Si  on  règle  la  mise  au  point  sur  l'un  de  ces  objets,  sOn  image  sera 
netle,  mais  celle  des  objets  plus  rapprochés  ou  plus  éloignés  ne  le 
sera  pas  :  l'objectif  manque  à.Q  profondeur  de  champ.  Cependant, 


L'OBJECTIF 


3T 


A 

M 

'  D 

t\^^^ 

N 

a 

m—    ^^^^ 

^•^ 

( 

v//.               ~      - 

----- 

\^/^ 

.-— -- 

à 

P-— -"'"""" 

"'" 

\~ 

D' 

t^ 

- 

Tl 

Fig.  26.  —  Profondeur  de  foyer. 


ce  défaut  s'atténue  à  mesure  qu  augmente  Téloignement  des  ob- 
jets :  au  delà  d'une  certaine  limite  (distance  hyperlocale),  l'augmen- 
tation de  distance  ne  nécessite  plus  la  moditication  de  la  mise  au 
point. 

La  profondeur  est  augmentée  par  l'interposition  d'un  dia- 
phragme, comme  le  mon- 
tre la  fig.  26.  Les  rayons 
A  B,  émanés  d'un  point 
extérieur  traversent  une 
lentille  à  toute  ouverture 
et  viennent  converger  à 
son  foyer.  Si  le  verre  dé- 
poli est  exactement  en 
F,  l'image  du  point  est 
nette.  L'écran  est -il 
avancé  ou  reculé,  en  M 
ou  en  N,  l'image  du  point 
s'élargit  et  se  change  en 
une  tache  aux  bords  mal  définis,  que  l'on  désigne  sous  le  nom  de 
cercle  de  diffusion. 

Interposons  maintenant  un  diaphragme  DD',  de  manière  h. 
limiter  le  faisceau  lumineux  au  tracé  en  pointillé  ab.  On  voit 
que,  pour  le  même  déplacement  de  l'écran,  le  cercle  de  diffusion 
est  beaucoup  plus  étroit. 

La  profondeur  dépend  donc  de  l'ouverture  de  l'objectif,  mais- 
elle  dépend  aussi  de  la  longueur  du  foyer  et  du  degré  de  netteté 
qu'il  s'agit  de  réaliser.  Dans  la  photographie  ordinaire,  le  maxi- 
mum de  précision  est  obtenu  quand  l'image  montre  tous  les- 
détails  que  l'oeil  distingue  lui-même.  Un  œil  normalement  consti- 
tué sépare  encore  l'un  de  l'autre,  à  la  distance  de  30  centimètres, 
deux  points  écartés  de  1/10'  de  millimètre.  Cette  limite  de  visibi- 
lité indique  le  maximum  de  précision  qu'il  est  inutile  de  dépasser 
pour  des  photographies  destinées  à  être  vues  à  l'œil  nu.  11  est 
même  rarement  nécessaire  d'atteindre  à  cette  extrême  netteté,  et 
l'on  peut  dans  la  plupart  des  cas  se  contenter  d'une  définition 
moins  parfaite,  celle  par  exemple  qui  correspondrait  à  la  sépara- 
tion de  deux  points  écartés  l'un  de  l'autre  de  1/4  de  millimètre  et 

3 


38  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

placés  à  30  centimètres  de  l'œil.  Au  contraire,  pour  obtenir  des 
images  microscopiques  destinées  à  être  observées  à  Faide  d'un  ins- 
trument grossissant,  il  est  nécessaire  de  réaliser  une  définition 
beaucoup  plus  précise.  Dans  ce  cas,  il  faut  faire  usage  d'objectifs 
parfaitement  corrigés  de  toute  aberration  et  mettre  au  point  avec 
le  plus  grand  soin. 

Courbure  du  champ.  —  Même  lorsqu'on  a  à  reproduire  une 
surface  plane,  comme  une  carte  de  géographie,  on  remarque  que 
l'image  fournie  par  une  lentille  simple  à  toute  ouverture  n'est  pas 
nette  sur  les  bords  lorsqu'elle  l'est  au  centre,  et  réciproquement. 
Ce  défaut  est  indépendant  de  l'aberration  sphérique  :  il  résulte  de 
la  forme  de  l'écran  sur  lequel  est  reçue  l'image.  Cet  écran  est  une 
surface  plane,  tandis  que  le  champ  de  l'image  lenticulaire  est 
courbe.  Le  diaphragme,  en  augmentant  la  profondeur  de  foyer, 
obvie  à  cet  inconvénient,  mais  au  détriment  de  la  luminosité.  En 
combinant  convenablement  différentes  lentilles,  on  arrive  à  réa- 
liser des  objectifs  donnant  un  champ  sensiblement  plat  à  grande 
ouverture. 

Distorsion.  —  Un  diaphragme  placé  en  avant  de  l'objectif  occa- 
sionne une  déformation  de  l'image,  en  incurvant  ses  lignes.  Ainsi, 
deux  traits  verticaux  se  trouveront  représentés  de  la  façon  sui- 
vante (     )  :  c'est  la  distorsion  en  barillet. 

Si  le  diaphragme  est  disposé  en  arrière  de  l'objectif,  l'incurva- 
tion se  produit  encore,  mais  dans  le  sens  opposé,  de  telle  sorte 
que  les  deux  traits  verticaux  seront  ainsi  reproduits  )  (  :  c'est 
la  distorsion  en  croissant. 

On  évite  cette  déformation  en  intercalant  le  diaphragme  entre 
deux  lentilles  symétriques. 

Astigmatisme,  —  Les  corrections  apportées  aux  défauts  opti- 
ques précédents  ne  suffisent  encore  pas  à  donner  des  images  cor- 
rectes dans  toute  l'étendue  du  champ.  Ainsi,  l'image  d'un  petit 
objet  rond  (une  pièce  de  monnaie  par  exemple)  sera  bien  ronde  si 
elle  est  placée  d'aplomb  et  juste  en  face  du  centre  de  l'objectif. 
Mais,  si  on  la  déplace,  ou  si  l'on  tourne  la  chambre  noire  de  façon 
que  l'image  ronde  se  dessine  sur  les  bords  du  verre  dépoli,  il  sera 
impossible  d'en  obtenir  une  reproduction  correcte  :  elle  sera  allon- 
gée en  ovale,  dont  l'éclairement  inégal  donnera  parfois  à  la  tache 


L'OBJECTIF  39 

ainsi  formée  Taspect  d'une  queue  de  comète,  d'où  le  nom  de  coma 
donné  à  ce  défaut.  Comme  cette  aberration  empêche  d'obtenir 
rimage  exacte  d'un  point,  elle  a  reçu  le  nom  à^astigmatume  (de  à, 
sans,  et  <TT(Y(j.a,  point).  On  appelle  anastigmats  les  objectifs  qui  en 
sont  exempts. 

L'astigmatisme  a  la  même  originie  que  l'aberration  sphérique; 
seulement,  au  lieu  d'être  produite  par  les  rayons  parallèles  à  l'axe, 
l'aberration  provient  ici  des  faisceaux  obliques,  dont  les  rayons 
réfractés  n'ont  pas  tous  leurs  foyers  en  un  point  commun.  11  est 
donc  impossible,  avec  un  objectif  non  corrigé  de  l'astigmatisme, 
d'obtenir  une  image  nette  d'un  point  sensiblement  écarté  de  l'axe 
optique. 

Aberration  chromatique  ou  de  réfrangibilité.  —  Une  lentille 
simple  agit  comme  un  prisme  :  elle  dévie  les  rayons  lumineux, 
mais,  comme  elle  ne  les  dévie  pas  tous  également,  il  s'ensuit  une 
dispersion,  c'est-à-dire  une  décomposition  de  la  lumière  blanche 
en  s€s  radiations  élémentaires.  De  là  vient  que  les  contours  des 
objets  dessinés  par  une  telle  lentille  sont  irisés  et  que  la  distance 
focale  varie  suivant  la  couleur  du  sujet  sur  lequel  on  veut  régler 
la  mise  au  point.  Parmi  les  radiations  visibles,  les  rayons  rouges 
ont  la  plus  longue  distance  focale,  et  les  rayons  violets  la  plus 
courte.  Et,  comme  les  rayons  ultra-violets,  invisibles  à  nos  yeux, 
mais  très  photogéniques,  ne  forment  pas  leur  image  sur  le  même 
plan  que  les  rayons  jaunes,  qui  sont  pour  notre  rétine  les  plus 
lumineux,  une  lentille  unique  donnerait  une  image  confuse  là  oii 
l'écran  nous  aurait  montré  une  image  nette.  Un  tel  objectif  a  un 
foyer  chimique  et  ne  conrient  pas  à  la  photographie. 

Pour  corriger  l'aberration  chromatique,  on  accole  à  la  lentille 
convexe  une  lentille  concave  formée  d'un  verre  différent.  L'en- 
semble de  ces  deux  verres  forme  encore  un  système  convergent; 
mais,  comme  le  pouvoir  dispersif  n'est  pas  proportionnel  au  pou- 
voir réfringent,  on  arrive  à  compenser  la  dispersion.  L'objectif  est 
alors  achromatique  (de  à,  sans,  et  )(^pa)[jLa,  couleur). 

L'achromatisme  n'est  réalisé  le  plus  souvent  que  pour  deux  cou- 
leurs :  on  calcule  les  courbures  des  verses  de  manière  à  faire 
coïncider  le  foyer  des  rayons  jaunes  ave'c  celui  des  rayons  violets. 
Cette  correction  suffit  généralement  dans  la  pratique  de  la  photo- 


40  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

graphie  monochrome;  mais,  pour  la  photographie  des  couleurs,  il 
convient  de  faire  coïncider  également  avec  le  foyer  des  rayons 
précédents  celui  des  rayons  rouges.  Les  objectifs  corrigés  de  la 
sorte  portent  le  nom  à'apochromatique$  ou  celui  d'antispectrosco- 
piques. 

Dans  les  appareils  à  bon  marché,  l'aberration  de  réfrangibilité 
est  parfois  simplement  atténuée  par  l'interposition  d'un  dia- 
phragme qui,  en  augmentant  la  profondeur  de  foyer,  ^donne  une 
netteté  suffisante  aux  images  provenant  de  rayons  différents.  Si 
la  chambre  noire  est  à  foyer  fixe,  ou  si  la  mise  au  point  se  fait 
au  juger,  d'après  une  échelle  graduée,  le  constructeur  établit  le 
réglage  sur  le  foyer  chimique,  et  non  pas  sur  le  foyer  optique. 

Diffraction.  —  Le  diaphragme  offre  plusieurs  avantages  :  il 
remédie  à  la  courbure  du  champ  focal,  augmente  la  profondeur  de 
foyer  et  la  profondeur  de  champ,  atténue  l'aberration  sphérique, 
l'aberration  chromatique  et  l'astigmatisme.  Ces  avantages  sont 
d'autant  plus  marqués  que  l'ouverture  est  plus  réduite,  mais 
seulement  jusqu'à  une  certaine  limite.  En  effet,  une  ouverture  trop 
étroite  n'a  pas  pour  seuls  inconvénients  d'intercepter  trop  de 
lumière,  de  prolonger  outre  mesure  le  temps  de  pose  et  d'exagé- 
rer les  contrastes  de  l'image.  Elle  en  altère  aussi  la  netteté,  par 
un  phénomène  de  diffraction  (du  latin  diffringere ^  séparer  en 
rompant). 

Il  résulte  de  la  nature  même  de  la  lumière,  constituée  par  des 
ondulations  rapides,  que  l'image  d'un  point  fournie  par  un  instru- 
ment d'optique,  même  supposé  parfait,  n'est  pas  un  point,  mais 
bien  une  tache  plus  ou  moins  large  entourée  de  cercles  concen- 
triques. Cet  effet  de  diffraction,  invisible  quand  l'ouverture  est 
suffisamment  large,  devient  de  plus  en  plus  apparent  lorsqu'on  en 
réduit  progressivement  le  diamètre.  Ainsi,  si  l'on  place  une  len- 
tille devant  une  chambre  noire  percée  d'un  très  petit  trou  et  qu'on 
essaye  de  mettre  au  point,  on  n'obtiendra  pas  une  image  sensible- 
ment plus  nette  que  celle  que  donnait  la  petite  ouverture  avant 
l'interposition  du  verre  convergent. 

L'influence  de  la  diffraction  est  insignifiante,  dans  les  images 
fournies  parles  objectifs  à  bas  prix,  parce  que  les  aberrations  n'y 
sont  qu'imparfaitement  corrigées.  Dans  ce  cas,  l'emploi  du  dia- 


L'OBJECTIF  41 

phragme  améliore  l'image,  en  accroît  la  finesse  et  étend  le  champ 
de  netteté. 

Mais  il  n'en  est  pas  de  même  avec  un  objectif  très  soigneuse- 
ment construit.  L'image  offre  alors  son  maximum  de  finesse  à  la 
plus  grande  ouverture,  parce  qu'elle  n'est  troublée  par  aucune 
aberration.  Le  seul  inconvénient  de  la  grande  ouverture  est  le 
défaut  de  profondeur,  qui  rend  parfois  la  mise  au  point  difficile. 
Si  l'on  réduit  l'ouverture,  en  interposant  un  diaphragme,  on  aug- 
mente la  profondeur,  mais  au  détriment  de  la  netteté,  altérée  par 
la  diffraction.  Il  va  sans  dire  qu'en  pareil  cas  le  défaut  de  netteté 
n'est  que  relatif  :  l'image  obtenue  dans  ces  conditions  n'en  demeure 
pas  moins  aussi  fine  et  par  ailleurs  beaucoup  plus  parfaite  que 
celle  que  donnerait,  à  ouverture  égale,  un  objectif  mal  corrigé. 

Réflexion  de  la  lumière  sur  les  surfaces  des  lentilles.  —  Il  est 
facile  de  vérifier  que  chacune  des  deux  surfaces  d'une  lentille 
réfléchit  la  lumière,  en  moindre  quantité  qu'un  miroir,  mais  sui- 
vant les  mêmes  lois.  Il  s'ensuit  que,  lorsqu'un  objectif  est  com- 
posé de  plusieurs  lentilles  indépendantes,  les  réflexions  succes- 
sives qui  s'y  produisent  occasionnent  une  sorte  dévoile  blanchâtre 
sur  l'image.  Et,  comme  le  pouvoir  réflecteur  de  chaque  surface 
augmente  avec  l'obliquité  des  faisceaux  incidents,  ces  réflexions 
sont  de  plus  en  plus  fortes  à  mesure  que  les  rayons  s'écartent 
davantage  de  l'axe,  si  bien  que  l'image  est  beaucoup  plus  éclairée 
au  centre  que  sur  les  bords.  Cette  inégalité  est  parfois  si  appa- 
rente que,  lorsque  l'objectif  est  dirigé  vers  un  sujet  très  éclairé, 
un  cercle  blanc  se  dessine  au  milieu  de  la  plaque. 

On  évite  la  tache  centrale  en  combinant  convenablement  les 
courbures  des  lentilles,  mais  il  n'est  pas  possible  de  supprimer 
entièrement  la  diffusion.  De  là  vient  qu'un  objectif  formé  d'une 
lentille  unique  ou  de  lentilles  collées  ensemble  fournit  des  images 
plus  pures  et  plus  brillantes  qu'un  objectif  composé  de  plusieurs 
verres  indépendants. 

Carac  oristiques  d'un  objectif.  —  Les  dimensions  de  l'image 
que  l'objectif  donne  d'un  sujet  placé  à  une  distance  déterminée, 
l'étendue  qu'il  permet  d'embrasser  et  la  durée  du  temps  de  pose, 
ne  peuvent  être  déterminées  que  si  l'on  connaît  trois  éléments 
essentiels  :  la  longueur  focale,  ïangle  du  champ  de  netteté  et  Vou- 


42  TRAITÉ   GENERAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

verture  relative  utile.  Ces  éléments  sont  les  principales  caractéris- 
tiques de  Tobjectif,  et  les  constructeurs  ont  soin  de  les  indiquer 
dans  leurs  catalogues. 

Longueur  focale.  —  En  pratique,  on  appelle  longueur  focale, 
ou  simplement  foyer  d'un  objectif,  la  distance  qui  sépare  le  centre 
optique  du  verre  dépoli,  quand  la  mise  au  point  est  réglée  sur 
un  sujet  très  éloigné,  un  astr«  par  exemple.  Le  foyer  est  compté  à 
partir  du  point  nodal  d^  émergence  y  considéré  comme  point  de  croi- 
sement des  rayons  concourant  à  la  formation  de  l'image.  On 
admet,  pratiquement,  que  ce  point  se  confond  avec  le  plan  du 
diaphragme,  dont  il  est  généralement  très  voisin,  dans  les  objec- 
tifs bien  construits. 

Certains  catalogues  substituent  à  l'indication  de  la  longueur 
focale  celle  du  tirage.  Le  tirage  est  la  distance,  comptée  non  plus 
à  partir  du  diaphragme,  mais  à  partir  de  la  rondelle  qui  fixe 
l'objectif  à  la  chambre,  jusqu'au  plan  du  verre  dépoli  mis  au  point 
sur  l'infini. 

Il  est  évident  que,  plus  la  longueur  focale  est  grande,  plus 
grande  sera  l'image  d'un  objet  situé  à  une  distance  déterminée. 
Nous  avons  déjà  vu  que,  si  l'objet  se  rapproche,  le  foyer  s'éloigne 
de  l'objectif  :  le  tirage  augmente. 

Ouverture.  —  Cet  élément  est  très  important  dans  l'évaluation 
des  temps  de  pose.  La  rapidité  de  l'objectif  dépend,  évidemment, 
de  la  quantité  de  lumière  qu'il  transmet,  mais,  pour  mesurer  sa 
luminosité,  il  ne  suffit  pas  de  connaître  les  dimensions  absolues 
de  son  ouverture  :  il  faut  déterminer  le  rapport  existant  entre 
cette  ouverture  et  la  longueur  focale.  En  effet,  l'ensemble  des 
rayons  lumineux  transmis  par  l'objectif  forme  un  faisceau  coni- 
que :  ces  rayons  se  dispersent  donc,  à  mesure  que  le  faisceau 
s'élargit,  en  sorte  que  l'intensité  de  la  lumière  par  unité  de  sur- 
face diminue  à  mesure  que  cette  surface  s'agrandit,  en  proportion 
du  carré  de  la  distance  focale.  C'est  pourquoi  la  rapidité  d'un 
objectif  est  caractérisée  par  son  ouverture  relative,  calculée  en 
prenant  le  quotient  du  foyer  par  le  diamètre  d'ouverture  utile. 

On  appelle  ouverture  utile  le  diamètre,  mesuré  en  avant  de 
l'objectif,  du  faisceau  de  rayons  parallèle  à  l'axe  qui  eut  traver- 
ser le  diaphragme.  On  appelle  ouverture  réelle  le  di->-  être  même 


L'OBJECTIF  ~  43 

du  diaphragme ,  mesuré  directement.  Dans  les  objectifs  où  le 
diaphragme  est  placé  en  avant  des  lentilles,  l'ouverture  utile  est 
égale  à  l'ouverture  réelle  ;  dans  ceux  où  le  diaphragme  est  placé 
derrière  un  système  convergent,  elle  est  plus  grande. 

Cette  ouverture  est  indiquée  par  les  constructeurs,  non  pas  sui- 
vant son  diamètre  absolu,  mais  suivant  le  rapport  entre  ce  dia- 
mètre et  le  foyer,  désigné,  pour  abréger,  par  la  lettre  F.  Ainsi  les 
notations  F  :  10  ou  f/iO  désignent  un  objectif  admettant  la  lumière 
par  une  ouverture  dont  le  diamètre  utile  est  égal  à  la  dixième 
partie  de  la  distance  focale. 

Cette  manière  d'indiquer  l'ouverture  est  la  seule  qui  permette 
de  comparer  avec  exactitude  la  rapidité  de  plusieurs  objectifs  de 
constructions"  différentes.  Toutefois,  il  convient  de  tenir  compte 
de  légères  différences  pouvant  résulter  de  la  transparence  et  du 
polissage  des  verres,  ainsi  que. des  pertes  de  lumière  résultant  de 
la  réflexion  sur  les  surfaces  des  lentilles. 

Angie.  —  Si,  du  centre  optique  de  l'objectif  (supposé  coïncider 
avec  le  centre  du  diaphragme),  on  mène  deux  lignes  droites  vers 
les  bords  de  Timage  nette,  ces  deux  lignes  forment  un  angle  plus 
ou  moins  ouvert,  suivant  rétendue  du  champ  net  par  rapport  à 
la  longueur  focale.  Cet  angle  varie  évidemment,  suivant  le  dia- 
phragme employé,  puisque  en  réduisant  l'ouverture  on  augmente 
l'étendue  de  la  surface  nettement  couverte. 

Dans  la  plupart  des  cas,  pour  obtenir  une  photographie  don- 
nant la  sensation  dece  que  voit  notre  œil,  le  foyer  de  l'objectif 
doit  être  tel  que  le  format  de  l'épreuve  corresponde  à  un  angle 
voisin  de  50°  environ.  Néanmoins,  il  est  nécessaire  que  l'objectif 
ait  un  angle  de  netteté  plus  élevé,  afin  de  laisser  h  l'opérateur  la 
possibilité  de  décentrer,  si  le  sujet  est  placé  à  un  niveau  très  diffé- 
rent de  celui  qu'occupe  l'appareil. 

Si  l'angle  utilisé  est  très  inférieur  à  celui  de  l'angle  visuel, 
l'image  paraît  plate,  avec  peu  de  perspective.  Cependant,  quand 
il  est  nécessaire  de  reproduire  un  objet  très  éloigné,  on  est  obligé 
d'avoir  recours  à  un  objectif  à  long  foyer,  correspondant  à  un 
angle  très  faible  pour  le  format  adopté. 

Si,  au  contraire,  l'angle  utilisé  est  beaucoup  plus  ouvert  que 
celui  de  l'angle  visuel,  la  perspective  semble  exagérée,   et  l'œil, 


44  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

embrassant  sur  l'épreuve  plus  d'objets  qu'il  n'en  apercevrait  simul- 
tanément s'il  se  trouvait  en  face  du  modèle,  n'éprouve  plus  l'illu- 
sion de  la  réalité.  On  ne  doit  donc  se  servir  d'un  objectif  à  grand 
angle  (ou  grand  angulaWe)  que  lorsqu'on  est  obligé  de  reproduire 
un  sujet  très  étendu  devant  lequel  l'espace  manque  pour  reculer 
suffisamment  l'appareil.  Ce  cas  se  présente  souvent  dans  les 
reproductions  de  monuments  ou  d'intérieurs. 

Construction  de  l'objectif.  Monture.  —  Les  lentillfes  sont  for- 
mées de  verres  différents,  dont  les  indices  de  réfraction  sont 
exactement  connus,  ainsi  que  leurs  pouvoirs  dispersifs.  Chaque 
verre  est  taillé  mécaniquement,  suivant  les  courbures  que  le  cal- 
cul a  déterminées,  poli  avec  le  plus  grand  soin,  ajusté  et  serti  dans 
un  barillet.  Les  barillets  sont  des  bagues  métalliques  dont  la  sur- 
face extérieure  est  filetée  de  manière  à  se  visser  sur  la  monture 
proprement  dite.  La  monture  est  un  tube  de  cuivre  bien  dressé, 
sur  lequel  se  vissent,  à  l'intérieur,  les  barillets,  et,  à  l'extérieur, 
une  rondelle  en  cuivre  percée  de  trois  ou  quatre  trous  dans  lesquels 
sont  passées  les  vis  qui  fixent  l'objectif  à  la  chambre  noire.  La 
monture  porte  également  les  diaphragmes  et  le  parasoleil,  dont 
la  description  fera  l'objet  des  deux  paragraphes  suivants. 

Le  montage  des  lentilles  exige  un  outillage  de  haute  précision 
et  un  personnel  exercé,  car  si  elles  ne  sont  pas  parfaitement  cen- 
trées, elles  ne  donneront  que  des  images  défectueuses.  Aussi  l'op- 
ticien doit-il  vérifier  minutieusement  l'objectif,  avant  de  le' livrer. 

Diaphragmes.  —  Le  rôle  du  diaphragme  a  été  expliqué  précé- 
demment. Il  nous  reâte  à  faire  connaître  les  conditions  auxquelles 
il  doit  satisfaire  en  pratique.  Le  diaphragme  diminue  la  luminosité 
de  l'objectif;  il  a  donc  l'inconvénient  de  prolonger  la  pose  et  d'exa- 
gérer les  contrastes  de  l'image.  Par  contre,  il  offre  l'avantage 
d'augmenter  la  profondeur  de  foyer  et  la  profondeur  de  champ. 
Suivant  les  circonstances,  on  a  donc  intérêt  à  utiliser  la  plus 
grande  ouverture  de  l'objectif,  ou,  au  contraire,  à  en  réduire  le 
diamètre.  De  là  la  nécessité  d'un  dispositif  permettant  de  modi- 
fier à  volonté  la  largeur  de  l'ouverture. 

Autrefois,  la  plupart  des  objectifs  photographiques  n'étaient 
munis  que  de  diaphragmes  à  vannes.  Ces  diaphragmes  (ûg.  27) 
étaient  formés  de  lames  de  cuivre  noirci  que  l'on  glissait  dans  la 


L'OBJECTIF  45 

monture,  par  une  fente  pratiquée  au  niveau  du  centre  optique. 
Chaque  objectif  était  livré  avec  une  série  de  ces  lamelles  percées 
d'ouvertures  de  diamètres  différents  et  enfermées  dans  un  étui. 
Sur  chaque  diaphragme  était  gravée  l'indication 
de  son  ouverture.  Généralement,  cette  ouverture 
se  trouvait  exprimée  par  son  rapport  avec  le 
foyer  de  l'objectif:  //lO,  //16,  etc.  Certains  cons- 
tructeurs adoptaient  cependant  un  mode  diffé- 
rent de  numérotage,  rapporté  au  temps  de  pose 
relatif  correspondant  à  l'emploi  de  chaque  dia- 
phragme. Ainsi,  le  diaphragme  d'ouverture  utile 
//lO  portant  le  numéro  4,  les  diaphragmes  plus       ^^UBIB^   ' 
petits  portaient  les  numéros  2,  4,  8,  16...,  ce  Fig.  27. 

qui  signifiait  que ,  le  temps  de  pose  du  premier   Diaphragme-vanne, 
diaphragme  étant  pris  pour  unité ,  l'emploi  des 
diaphragmes  suivants  exigeait,  toutes  choses  égales  d'ailleurs,  un 
temps  de  pose  2,  4,  8,  16  fois  plus  long. 

Les  diaphragmes -vannes  ont  l'inconvénient  de  s'égarer   trop 
facilement,  surtout  en  excursion;  en  outre,  la  substitution  d'une 

lamelle  à  l'autre  fait  perdre 

trop  de   temps  à  Topéra- 

ifiSS^^^M^^I  teur,  dans  certains  cas  où 

a-^-^^^^^^^îajHFI  ^^  ®^^  indispensable  de  pro- 

^"^'""""^ ..«         1^     ^     céder  rapidement.  Aussi  a- 

'^WJPPiiiWBIIi^^ftw    ^"On'presque  complètement 
miâÉSd^^éMoÊUMU^^.   renoncé  à  leur  emploi. 

^^^^^^^^^i^g^^^^^  Le  diaphragme  rotatif 
„,^_.,,.,  ^^=^^^^^^^^^^^mÊ  (fîg.  28)  est  un  disque  en 
^^"'^^ssmm^m^^Sl^^^^^^¥  tôle  mince ,  percé  de  trois 

ou   quatre   ouvertures    de 
Fig.  28.  —  Moniure  à  diaphragme  rotatif.       diamètres     différents.      Ce 

disque  tourne  autour  d'un 
axe  fixé  sur  la  monture,  et  le  centre  de  chaque  ouverture  peut  être 
amené  devant  le  centre  optique.  Le  diaphragme  rotatif  ne  présente 
pas  les  inconvénients  des  diaphragmes -vannes;  en  revanche,  à 
moins  de  lui  donner  un  diamètre  encombrant,  il  n'offre  qu'un 
nombre  trop  restreint  d'ouvertures  différentes.   Néanmoins     la 


46 


TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Roussel 


¥ïg.  29.  —  Monture  à  diaphragme  iris. 


faible  épaisseur  du  disque  tournant  le  fait  adopter  dans  la  cons- 
truction de  certains  objectifs  à  grand  angle,  dont  les  lentilles  sont 
très  rapprochées. 

La  plupart  des  objectifs  actuels  sont  munis  d'un  diaphragme  à 
iris,  ainsi  nommé  par  analogie  avec  la  membrane  pupillaire.  Cet 
iris  est  formé  d'un  certain  nombre  de  lamelles  très  minces,  en 
ébonite  ou  eu  acier,  dont  la  forme  est  combinée  de  telle  sorte 

que,  suivait  la  posi- 
tion qu'on  leur  fait 
prendre,  elles  limitent 
plus  ou  moins  Fouver- 
ture  (fig.  29). 

Le  principe  de  cette 
disposition  est  connu 
depuis  le  dix-septième 
siècle  :  c'est  au  P.  Kir- 
cher  qu'est  due  Tinven- 
tion  du  «  diaphragme- 
pupille  »  ou  «  œil-de- 
chat  ».  Il  est  curieux  de  remarquer  que  Nicéphore  Niepce  l'appliqua 
à  l'objectif  qui  lui  servit  à  produire  les  premières  images  photo- 
graphiques. 

Les  lamelles  qui  constituent  l'iris  sont  toutes  reliées  entre  elles, 
de  manière  à  se  rapprocher  ou  à  s'écarter  simultanément,  par  le 
jeu  d'un  petit  levier  extérieur  ou  d'une  bague  moletée  entourant 
la  monture.  Un  index,  entraîné  par  l'organe  extérieur  mobile,  se 
déplace  en  regard  d'une  graduation  gravée  sur  la  monture  et  fait 
connaître  la  grandeur  relative  de  l'ouverture  intérieure. 

Parasoleil.  —  Il  ne  faut  pas  confondre  le  voile  de  diffusion  et  la 
tache  centrale  résultant  de  réflexion-s  successives  sur  les  surfaces 
des  lentilles  avec  les  effets  que  déterminent  parfois  les  rayons 
solaires,  même  quand  l'astre  est  en  dehors  du  champ  optique  uti- 
lisé. Le  voile  qui  en  résulte  est  accru  par  la  multiplicité  des  len- 
tilles, mais  sa  cause  initiale  est  la  pénétration  d'une  vive  lumière 
dans  la  lentille  frontale  (antérieure  au  diaphragme).  On  évite  faci- 
lement cet  accident,  en  prolongeant  la  monture  de  l'objectif  au 
delà  de  la  première  lentille.  Ce  prolongement  est  désigné  sous  le 


L'OBJECTIF  47 

nom  de  parasoleil.  Les  opticiens  ont  depuis  quelques  années  une 
fâcheuse  tendance  à  supprimer  cet  organe  si  utile,  dans  le  but  de 
diminuer  le  plus  possible  le  poids  et  les  dimensions  des  instru- 
ments destinés  aux  chambres  portatives.  Quand  on  se  sert  d'un 
objectif  ainsi  construit,  dans  des  conditions  telles  que  l'action 
perturbatrice  des  rayons  étrangers  au  sujet  soit  à  craindre,  il  est 
indispensable  d'improviser  un  écran  quelconque,  ne  fût-ce  qu'une 
carte  de  visite  ou  même  la  main,  que  l'on  tiendra  au-dessus  de 
l'objectif,  pendant  la  pose. 

Classification  des  objectifs.  —  Les  objectifs  photographiques 
sont  classés  tantôt  d'après  le  nombre  ou  la  disposition  de  leurs 
lentilles,  tantôt  d'après  la  manière  dont  ils  sont  corrigés  des 
diverses  aberrations  précédemment  analysées,  tantôt  d'après  leur 
luminosité.  Dans  le  premier  cas,  on  les  divise  en  objectifs  sim- 
ples, doubles  (symétriques  ou  asymétriques),  triples,  etc.  Dans  le 
second,  on  distingue  les  objectifs  non  aplanétiques,  les  aplanats, 
les  anastigmats,  ou  bien  on  établit  une  distinction  entre  les  ins- 
truments rectilinéaires  et  ceux  qui  ne  sont  pas  exempts  de  distor- 
sion. Dans  le  troisième  cas,  on  répartit  les  objectifs,  suivant  leurs 
ouvertures,  en  un  certain  nombre  de  groupes  comprenant,  par 
exemple,  l'un  les  instruments  dont  le  diamètre  utile  est  supérieur  à 
F  :  3  ;  le  second,  ceux  dont  le  diamètre  est  compris  entre  F  :  3  et 
F  :  6;  le  troisième,  ceux  dont  le  diamètre  est  compris  entre  F  :  6  et 
F  :  10;  le  quatrième,  ceux  dont  le  diamètre  erst  compris  entre  F  :  10 
et  F:  16;  le  dernier,  ceux  dont  le  diamètre  <est  inférieur  à  F  :16. 

Toutes  ces  classifications  sont  nécessairement  arbitraires  et 
incomplètes  :  l'essentiel  est  de  connaître  les  dispositions  et  les 
caractères  principaux  des  combinaisons  les  plus  usitées. 

Objectifs  simples.  —  Malgré  sa  dénomination,  l'objectif  simple 
est  presque  toujours  composé  d'au  moins  deux  lentilles,  quelque- 
fois de  trois  et  même  de  quatre.  Seulement  tous  ces  verres  sont 
collés  ensemble  (ordinairement  au  moyen  de  baume  du  Canada), 
de  manière  à  ne  former  qu'un  seul  système  convergent.  Il  ne  peut 
pas  être  utilisé  à  une  très  grande  ouverture,  mais,  suffisamment 
diaphragmé,  il  fournit  des  images  très  fines  et  très  brillantes,  la 
réflexion  sur  les  surfaces  des  lentilles  s'y  trouvant  réduite  au  mini- 
mum. Les  aberrations  sphérique  et  chromatique  peuvent  y  être 


48 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


parfaitement  corrigées,  et  le  champ  en  est  suffisamment  étendu; 
toutefois,  si  on  l'utilise  en  entier,  la  distorsion  est  assez  marquée. 
Aussi  cet  instrument  ne  convient-il  pas  à  la  reproduction  des 
sujets  qui  comprennent  des  lignes  droites  importantes,  comme 
les  édifices  photographiés  à  courte  distance.  En  revanche,  c'est 
Fobjectif  par  excellence  pour  le  paysage,  en  raison  de  la  pureté 
et  du  relief  des  images  qu'il  donne. 

L'objectif  simple  ordinaire,  composé  seulement  de  deux  lentilles, 
Tune  biconvexe  et  l'autre  plan-concave,  est  un  instrument  très  peu 
coûteux,  mais  qui  ne  peut  être  employé  avec  une  ouverture  supé- 
rieure à  F  :  20,  parce  qu'il  n'est  ni  aplanétique  ni  anastigmatique. 
Aussi  ne  convient-il  guère  à  la  reproduction  des  scènes  animées. 
Suffisamment  diaphragmé,  à  F  :  30  par  exemple,  il  couvre  avec 
une  parfaite  netteté  et  une  grande  profondeur  de  foyer  un  plan 
focal  circulaire  de  70°  à  90°. 

La  plupart  des  anastigmats  qui  seront  décrits  plus  loin  peuvent 
être  dédoublés  et  constituer  d'excellents  objectifs  simples  à  grande 

ouverture.  La  figure  30  repré- 
sente un  instrument  de  ce  genre 
constitué  par  une  lentille  Protar 
à  quatre  verres  collés.  Cet  ob- 
jectif donne  déjà  une  image  nette 
avec  une  ouverture  égale  à  F  : 
12,5.  Le  champ  utilisable  est 
alors  d'au  moins  50°;  il  atteint 
85°  avec  un  diaphragme  plus 
petit.  Sa  grande  luminosité  rend 
cet  objectif  applicable  aux  ins- 
tantanés en  plein  air,  ainsi  qu'aux  groupes  et  aux  portraits.  Il 
n'est  pas  complètement  exempt  de  distorsion;  mais  la  déformation 
des  lignes  n'est  sensible  que  sur  les  bords,  quand  le  sujet  contient 
des  éléments  rectilignes  très  longs. 

Objectif  double  à  portraits.  —  Inventé  en  1841  par  Petzval,  cet 
instrument  (fig.  31)  se  compose  :  1°  d'un  système  convergent  formé 
d'une  lentille  biconvexe  et  d'une  lentille  plan-concave  collées  en- 
semble ;  2°  d'un  ménisque  concave  et  d'une  lentille  biconvexe  sépa- 
rés par  un  faible  intervalle.  Ces  deux  couples  sont  montés  aux 


Fig.  30.  —  Objectif  simple. 


L'OBJECTIF 


49 


Fig.  31.  —  Objectif  à  portraits. 


extrémités  d'un  tube  au  milieu  duquel  est  placé  le  diaphragme. 
Cet  objectif  n'est  exempt  ni  de  distorsion 
ini  d'astigmatisme,  et  sa  profondeur  de 
foyer  est  très  faible;  mais  sa  luminosité 
est  remarquable,  car  il  peut  fonctionner 
à  F  :  3  et  même  avec  une  ouverture  plus 
grande,  F  :  2,3.  Cette  propriété  Ta  fait 
longtemps  préférer  à  tout  autre,  pour  le 
portrait  à  l'atelier.  On  l'utilise  d'ailleurs 
encore,  en  raison  des  qualités  toutes  par- 
ticulières de  douceur  et  d'enveloppement 
qu'il  donne  au  modelé. 

On  s'en  sert  aussi  pour  les  agrandisse- 
ments et  la  projection.  Il  faut  alors  le 
retourner,  car  il  n'est  pas  symétrique, 
de  façon  que  la  lentille  achromatique 
frontale  se  trouve  placée  du  côté  de  l'é- 
cran de  projection,  et  les  deux  lentilles  indépendantes  tournées 
vers  le  petit  cliché  ou  vers  le  diapositif. 

Aplanat.  —  Cet  objectif,  qui  porte  aussi  le  nom  de  rectilinéaire, 

a  été  inventé  en  1866  par  A.  Steinheil. 
Il  se  compose  (fig.  32)  de  deux  mé- 
nisques convergents  symétriques  entre 
lesquels  est  disposé  le  diaphragme. 
Chacun  de  ces  éléments  est  formé  de 
deux  verres,  ordinairement  un  flint  très 
lourd  collé  à  un  flint  léger  constituant 
un  ensemble  achromatique. 

Bien  construit,  l'aplanat  est  complète- 
ment exempt  de  distorsion,  et  la  lumière 
réfléchie  par  les  surfaces  de  ses  lentilles 
ne  détermine  qu'une  très  faible  diff'u- 
sion.  Il  est  corrigé  de  l'aberration  sphé- 
rique;  c'est  d'ailleurs  son  aplanétisme 
qui  lui  a  valu  son  nom.  Il  peut  donc 
fonctionner  à  une  as'^ez  grande  ouverture  (F  :  6  à  F  :  9 ,  suivant 
les  formats),  seulement  le  champ  de  netteté  est  alors  assez  res- 


Cl.  Suter. 

Fig.  32.  —  Aplanat. 


50  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

ireint,  et  Fimage  manque  d'homogénéité.  Si  des  objets  placés  à 
diverses  distances  se  trouvent  régulièrement  distribués  dans  le 
champ,  l'image  est,  au  centre,  nette  pour  les  plus  éloignés  et  con- 
fuse pour  les  plus  rapprochés,  tandis  que  sur  les  bords,  elle  se 
trouve  nette  pour  les  seconds  et  confuse  pour  les  premiers.  En 
diaphragmant,  rimage  devient  plus  homogène,  et  la  netteté  s'étend 
sur  une  surface  plus  grande. 

L'angle  normalement  embrassé  par  Taplanat  suffisaimment  dia- 
phragmé -est  d'environ  43°.  On  construit  cependant  des  aplanats 
grands  angulaires  ou  panoramiques,  dont  l'angle  atteint  90°  et 
même  100°.  Les  deux  ménisques  sont  alors  très  rapprochés  du 
diaphragme,  et  la -plus  grande  ouverture  utilisable  n'est  guère  que 
que  de  F  ::iic5.<Ges  instruments  sont  donc  très  lents. 

L'aplanat  étant  symétrique,  il  n'est  pas  nécessaire  de  le  retour- 
ner, pour  ragrandissement  ou  la  projection. 

Si  l'on  dévisse  le  ménisque  frontal,  on  a  un  objectif  simple  dont 
la  longueur  focale  est  deuxJois  plus  grande  que  celle  de  l'aplanat 
complet.  Les  dimensions  de  l'image  sont  donc  doublées,  seule- 
ment elle  n'est  plus  exempte  de  distorsion,  et  la  netteté  n'en  est 
suffisante,  même  au  centre,  qu'en  diaphragmant. 

L'aplanat  es,t  resté  pendant  longtemps  le  meilleur  de  tous  les 
objectifs.  Il  n'a  été  dépassé  que  par  les  anastigmats,  et,  comme 
ces  derniers  sont  beaucoup  plus  chers,  c'est  encore  la  combinai- 
son la  plus  répandue.  Les  opticiens  l'ont  d'ailleurs  amélioré,  au 
cours  des  dernières  années,  en  utilisant  dans  sa  construction  des 
verres  analogues  à  ceux  des  anastigmats,  plus  transparents  que 
les  matières  primitivement  employées. 

Anastigmats.  —  Aucun  des  objectifs  précédemment  décrits  ne 
peut  donner,  à  toute  ouverture,  une  image  nette  jusqu'aux  bords  : 
la  cause  en  est  due  à  l'astigmatisme,  et  le  seul  moyen  que  l'on 
connaissait  autrefois  de  le  combattre  était  de  diaphragmer.  La 
netteté  s'étendait  alors  sur  toute  l'étendue  de  l'image,  mais  au 
détriment  de  la  rapidité.  La  netteté  ainsi  réalisée  n'était  d'ailleurs 
que  relative,  puisqu'une  ouverture  trop  étroite  donne  naissance  à 
des  phénomènes  de  diffraction,  surtout  apparents  dans  les  petites 
images  destinées  à  l'agrandissement.  C'est  donc  un  très  important 
progrès  que  d'avoir  réussi  à  éviter  l'astigmatisme  à  toute  ouverture. 


L'OBJECTIF 


51 


Dès  1840,  Petzval  avait  établi  que,  si  l'on  parvenait  à  fabriquer 
certains  verres  spéciaux,  combinés  de  manière  à  pouvoir  faire 
varier  le  pouvoir  réfringent  indépendamment  du  pouvoir  disper- 
sif,  on  arriverait  à  corriger  l'astigmatisme  des  rayons  très  écar- 
tés de  Taxe  principal.  Les  formules  de  Petzval  étaient  restées 
considérées  comme  inapplicables,  jusqu'en  1889.  A  cette  époque,  la 
verrerie  Schott,  à  léna,  réussit  à  préparer  les  verres  nécessaires, 
et  Cari  Zeis.s,  exécutant  les  formules  calculées  par  Abbe  et 
Rudolph,  construisit  les  premiers  anastigmats. 

Ces  instruments  ont  donné  lieu  à  de  nombreux  travaux.  Chaque 
maison  d'optique  en  a  fabriqué  plusieurs  modèles,  dont  chacun 
répond  à  des  exigences  particulières.  Leur  principal  avantage  est 
de  donner,  à  grande  ouverture,  une  image  d'une  extrême  finesse, 
sur  un  champ  très  étendu.  L'anastigmat  serait  certainement  l'ob- 
jectif universel,  si  le  prix  n'en  demeurait  pas  très  élevé,  malgré  la 
concurrence  qui  s'est  établie  entre  les  fabriques  rivales. 

A  ces  indications  générales,  il  convient  d'ajouter  la  mention  de 
quelques  particularités  caractéristiques  des  anastigmats  les  plus 
remarquables. 

Le  Planar,  de  Zeiss,  construit  en  France  par  E.  Krauss,  est  formé 
(fîg.  33)  de  deux  couples 
composés  chacun  d'une 
lentille  convergente  simple 
et  d'une  lentille  achroma- 
tique séparées  par  une  lame 
d'air.  Son  ouverture  maxi- 
mum est  comprise,  suivant 
les  numéros,  entre  F  :  3,6 
et  F  :  7.  Le  champ  utile 
embrasse  62°.  C'est  un  ins- 
trument très  remarquable 
par  le  degré  de  perfection 
qu'y  atteint  la  correction 
des  aberrations.  convient  tout  particulièrement  aux  portraits, 
qu'il  exécute  avec  un  très  beau  modelé.  Sa  grande  luminosité  per- 
met d'obtenir  des  instantanés  rapides  dans  l'atelier.  Il  est  aussi 
tout  indiqué  dans  la  cinématographie  et  autres  applications  aux 


Planar, 


52 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


mouvements  les  plus  animés.  Son  excellente  correction  le  classe 
au  premier  rang  des  objectifs  pour  reproductions  et  pour  fortes 
réductions  ou  microphotographie. 

La  profondeur  de  champ  est  faible,  à  toute  ouverture.  On  Taug- 
menle,  comme  toujours,  en  diaphragmant,  mais  au  détriment  de 
la  rapidité  et  de  la  finesse^  contrairement  à  ce  qu'on  observe  dans 
les  objectifs  à  bon  marché,  où  le  diaphragme  accroît  la  netteté.  Il 
faut,  en  effet,  se  rappeler  que  deux  causes  limitent  la  finesse  de 
Fimage  :  les  aberrations  et  la  diffraction.  Quand  les  premières  ne 
sont  qu'imparfaitement  corrigées,  leur  influence  est  prépondé- 
rante, et  la  réduction  de  l'ouverture  améliore  la  définition.  Mais, 
quand  elles  sont  presque  complètement  éliminées,  comme  dans 
le  Planarj  on  ne  remarque  plus  que  l'influence  de  la  diffraction, 
qui  augmente  à  mesure  que  diminue  le  diamètre  du  diaphragme. 
On  ne  peut  reprocher  au  Planar  que  d'é  relativement  lourd 
et  d'un  prix  très  élevé. 

Le  Tessar,  calculé  par  le  D""  P.  Rudolph,  est  dissymétrique  (fig. 
34),  et,  comme  les  éléments  doubles  dont  il  est  formé  ne  sont  pas 

corrigés  isolément  d'une  façon 
complète,  il  ne  faut  pas  les  em- 
ployer seuls.  Les  deux  lentilles 
d'avant,  un  crown  lourd  plan-con- 
vexe et  un  flint  léger  biconcave, 
sont  séparées  par  une  lame  d'air. 
Les  lentilles  d'arrière,  un  flint  bi- 
concave et  un  crown  lourd  au 
baryum  biconvexe,  sont  collées 
ensemble.  L'image  est  très  fine  et  très  homogène,  dans  un  angle 
d'environ  55°. 

Le  constructeur  a  établi  quatre  séries  de  cet  instrument.  Leurs 
plus  grandes  ouvertures  sont  respectivement  de  F  :  10;  F  :  6,3; 
F  :  4,5  et  F  :  3,5. 

Le  Tessar  f  :  6,3  est  caractérisé  par  l'extrême  finesse  de  l'image 
et  la  régularité  de  la  netteté  et  de  l'éclairage  sur  toute  l'étendue  du 
champ.  Sa  luminosité  est  suffisante  dans  la  plupart  des  cas  et  le 
rend  applicable  à  la  reproduction  instantanée  des  scènes  de  genre. 
Les  images  obtenues  à  toute  ouverture  sont  assez  parfaites  pour 


Fig'.  34.  —  Tessar. 


L'OBJECTIF 


53 


subir  des  agrandissements  considérables.  Le  diaphragme  augmente 
un  peu  le  champ  de  netteté,  mais  n'accroît  pas  la  finesse,  et  son 
principal  rôle  est  de  donner  une  plus  grande  profondeur  de  champ. 
Le  Tessar  f  :  3,5  est  spécialement  étudié  pour  réaliser  une 
extrême  rapidité.  Sa  luminosité  égale  celles  des  meilleures  combi- 
naisons de  Petzval,  avec  cet 
avantage  que,  l'astigmatisme 
étant  corrigé  pour  un  champ  de 
35°,  Timage  se  trouve  plus  ho- 
mogène. Cet  objectif  convient 
au  portrait,  à  Texécution  des 
vues  cinématographiques,  au 
reportage,  à  la  documentation 
photographique  dans  les  cir- 
constances les  plus  variées. 

Le  Dagor,  de  Goerz  (fig.  35), 
est  un  anastigmat  symétrique  dont  chaque  couple  est  formé  de 
trois  lentilles  collées.  A  pleine  ouverture  (F  :  6,8),  l'image  est 
d'une  netteté  parfaite  dans  un  champ  d'environ  70°.  En  diaphrag- 
mant, le  champ  atteint  90°.  Les  aberrations  sont  bien  corrigées,  et 
toute  réflexion  nuisible  évitée.  On  obtient  ainsi,  sans  réduire  Tou- 

verture,  des  images  vigoureu- 
ses, nettes  et  brillantes.  La  lu- 
minosité de  Tinstrument  permet 
d'exécuter  des  instantanés  très 
rapides. 

Sa  -  construction  symétrique 
permet  de  le  dédoubler.  En  dé- 
vissant le  barillet  antérieur,  on 
utilise  les  lentilles  d'arrière,  qui 
constituent  un  excellent  objectif 
à  paysages ,  dont  la  distance 
focale  est  environ  le  double  de  celle  de  l'objectif  complet. 

Le  Syntor  (fig.  36)  est  symétrique,  comme  le  précédent,  et  sa 
plus  grande  ouverture  est  également  de  F  :  6,8.  Seulement,  il  ne 
contient  que  quatre  lentilles  non  collées.  Quoique  d'un  prix  moins 
élevé,  il  est  soigneusement  corrigé  et  donne  des  images  brillantes» 


Fig.  36.  —  Syntor. 


54 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DR  PHOTOGRAPHIE 


Ceior. 


très  nettes,  sans  distorsion  ni  astigmatisme.  Toutefois,  le  champ 
de  netteté  est  seulement  de   64°  à  toute  ouverture;  il  s'étend 

jusqu'à  70°  avec  un  petit  dia- 
phragme. 

Le  Celor  (fig.  37)  est  destiné 
aux  instantanés  rapides,  même 
dans  des  conditions  d'éclairage 
défavorables.  Son-  emploi  est 
tout  indiqué  pour  les  travaux  h 
Fatelier  et  dans  les  intérieurs^ 
Il  se  compose  de  deux  systèmes  symétriques,  formés  chacun  d'une 
lentille  biconvexe  et  d'une  lentille  biconcave  séparées  par  une 

couche  d'air.  Ces  lentilles  étant 
très  minces,  la  perte  de  lumière 
par  absorption  est  peu  sensible. 
La  plus  grande  ouverture  utili- 
sable est  F  :  4,5.  La  planéité 
anastigmatique  est  assurée  sous 
un  angle  d'environ  70°. 

On  peut  enlever  le  couple  an- 
térieur et   utiliser  les  lentilles 


Fig-.  38.  —  Eurygraplie. 


d'arrière  avec  un  petit  diaphragme. 

Les  Eurygraphes  (fîg.  38)  de  Lacour-Berthiot,  et  les  Collinéaires 

(fig.  39)  de  Voigtlànder  sont  des  anastigmats  S3^métriques  à  len- 
tilles collées.  La  plus  grande 
ouverture  de  ces  objectifs  varie, 
suivant  les  séries  établies  par 
les  constructeurs,  entre  F  :  4 
et  F  :  7.  Ce  sont  d'excellents 
instruments ,  très  soigneuse- 
ment construits  et  donnant, 
sans  diaphragme,  des  images 
très  fines,  nettes  jusqu'aux 
bords  et  d'une  homogénéité 
irréprochable. 


Fig-.  39.  —  Collinéaire. 


VHéliar  (fîg.  40),  construit  par  Voigtlànder  d'après  les  calculs 
du  D.'  Harting,  est  asymétrique  et  ne  peut  pas  être  dédoublé.  Il  est 


L'OBJECTIF' 


55 


Fie.  40.  —  Héiiar. 


composé  de  5  lentilles,  dont  4  collées  deux  à  deux.  A  sa  plus  grande 
ouverture  (F  :  4,5),    l'angle    de 
champ  est  de  45°. 

Quoique  d'une  construction 
beaucoup  plus  simple,  puisqu'ils 
ne  contiennent  que  trois  lentilles 
non  collées,  les  objectifs  Cooke 
(fîg.  4!)  ne  Te  cèdent  en  rien  aux 
instruments  plus  compliqués.  La 
lentille  du  milieu,  biconcave,  est 
en  flint;  les  deux  autres,  plan- 
convexes,  sont  en  crown.  Le  dia- 
phragme est  placé  entre  le  second 
et  le  troisième  ve  rre.  La  plus  grande  Bm^erture  est  F  :  6,5.  La 
surface  focale  est  remarquablement  plane.  En  réduisant  le  dia- 
phragme, rimage  gagne  rapidement  en. 
pureté,  en  finesse  et  en  étendue. 

La  plupart  des  anastigmats  ont  un 
champ  très  étendu,  lorsqu'ils  sont  suf- 
fisamment diaphragmes.  Ce  sont,  en 
fait,  des  objectifs,  grands  angulaires. 
iNéanmoins,  on  construit  des  instru- 
ments spéciaux  dont  le  foyer  est  excep- 
tionnellement court,  relativement  à 
l'étendue  du  champ. 

Tel  est  VHypergone,  de  Goerz  (fig. 
42  et  43),  construit  en  1900.  Cet  objectif,  symétrique,  se  compose 
de  deux  lentilles  simples  très  minces,  demi-sphériques.  Il  n'est 


Fig.  41.  —  Objectif  Gooke. 


Fig.  42.  —  tiypergone. 


donc  corrigé  ni  de  l'aberration  spbérique  ni  de  l'aberration  chro- 
matique. Cependant,  en  raison  de  son  ouverture  trîs  réduite  (F  : 


56 


TRAITE   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


Fig.  43.  —  Hypergone. 
(Vue  de  face.) 


22),  ces  aberrations  n'amoindrissent  pas  la  netteté  de  l'image.  Le 
but  du  constructeur  était  d'obtenir  une  planéité  anastigmatique 

suffisante  sous  un  angle 
maximum.  En  fait,  cet  ins- 
trument donne  une  image 
nette  dont  le  diamètre  est  5 
fois  plus  grand  que  sa  dis- 
tance focale, '•^e  qui  corres- 
pond à  un  angle  d'environ 
140°. 

Quand  cet  angle  est  entiè- 
rement utilisé,  l'image  est 
beaucoup  plus  brillante  au 
centre  que  sur  les  bords. 
Pour  remédier  à  cette  inéga- 
lité d'éclairement,  un  dia- 
phragme étoile  est  placé  de- 
vant la  lentille  frontale  (fîg. 
43).  Ce  diaphragme  eèt  mis 
en  rotation  pendant  la  po^ 
à  l'aide  d'une  petite  turbine 
à  air  actionnée  en  pressant 
une  poire  de  caoutchouc.  Si  l'on  exécute  un  travail  qui  n'exige  pas 
un  angle  supérieur  à  110°,  le  diaphragme  étoile  devient  inutile,  et 
on  peut  le  rabattre  en  avant  de  l'instrument  :  à  cet  effet,  le  méca- 
nisme rotatif  est  porté  par 
une  lame  m  reliée  à  la  mon- 
ture par  la  charnière  a.  L'ou- 
verture est  réglée  par  le  dia- 
phragme intercalé  entre  les 
deux  lentilles  et  dont  le  dé- 
placement est  commandé  par 
le  bouton  extérieur  b. 

Il  existe  d'autres  objectifs 
panoramiques  dont  l'angle  est  un  peu  moins  ouvert,  mais  qui  don- 
nent des  images  homogènes  sans  qu'il  soit  nécessaire  de  recourir 
à  des  dispositifs  compliqués.  Le  Périgraphe  de  Lacour-Berthiot 


Fig.  44.  —  Périgraphe. 


L'OBJECTIF  57 

(fig.  44)  embrasse  un  angle  de  90°  à  100°,  et  la  régularité  de  Té- 
clairage  est  parfaite  dans  toute  l'étendue  du  champ  utilisé. 

Objectifs  à  liquides.  —  Certains  liquides,  comme  Thuile  de  cè- 
dre et  le  monobromonaphtalène,  étant  très  réfringents,  mais  très 
peu  dispersifs,  il  était  naturel  de  songer  à  utiliser  ces  propriétés 
dans  la  construction  de  certains  instruments  d'optique.  Cette  idée 
est  d'ailleurs  très  ancienne,  car,  bien  avant  l'invention  de  la  pho- 
tographie, en  1745,  l'Académie  royale  des  sciences  faisait  fabri- 
quer une  lentille  formée  de  deux  verres  bombés  de  4  pieds  de 
diamètre  séparés  par  un  intervalle  de  6  pouces  rempli  d'alcool. 
Euler,  en  1762,  essayait  une  lentille  à  eau.  D'autres  employaient 
le  chlorure  d'antimoine,  le  sulfure  de  carbone,  etc. 

Les  premiers  objectifs  à  liquides  destinés  à  la  photographie  sont 
dus  à  Scott  Archer  (1858)  et  à  Th.  Sutton  (1860).  Divers  inconvé- 
nients pratiques  en  firent  rejeter  l'emploi. 

En  1901,  le  D''  Griin  imaginait  une  disposition  qui  permet  de 
donner  à  l'objectif  une  luminosité  exceptionnelle.  L'inventeur 
avait  trouvé  un  liquide  dont  la  composition  est  tenue  secrète  et 
qui  offre  cette  particularité  de  posséder  un  pouvoir  de  réfraction 
très  élevé  et  un  pouvoir  dispersif  pratiquement  nul.  En  remplis- 
sant de  ce  liquide  l'intervalle  existant  entre  deux  ménisques  achro- 
matiques, les  concavités  se  trouvent  de  fait  supprimées  en  ce  qui 
concerne  la  réfraction,  quoique  conservées  au  point  de  vue  de  la 
dispersion.  On  diminue  ainsi  la  longueur  focale,  en  conservant 
la  même  ouverture,  sans  trop  altérer  la  correction  d'achroma- 
tisme et  sans  augmenter  sensiblement  l'aberration  de  sphéricité. 
Griin  est  ainsi  parvenu  à  réaliser  un  objectif  dont  l'ouverture  attei- 
gnait F/0,5.  Toutefois,  cet  instrument  présentait  divers  défauts, 
notamment  une  courbure  de  champ  excessive.  Aussi  a-t-on  limité 
à  F/1,3  la  plus  grande  ouverture  des  objectifs  destinés  au  com- 
merce. La  disposition  primitive,  dans  laquelle  le  liquide  rem- 
plissait tout  l'objectif,  avait  le  double  inconvénient  d'alourdir 
l'instrument  et  d'empêcher  les  changements  de  diaphragmes. 
Un  nouveau  modèle,  construit  par  Dallmeyer,  forme  un  objectif 
symétrique  dont  chaque  extrémité  comporte  un  ménisque  diver- 
gent liquide,  compris  entre  un  crown  biconvexe  et  un  ménisque 
divergent  de  flint. 


58 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Elément  positif  de  téléobjectif. 


Téléobjectif  Se  —  L'image  qu'un  objectif  ordinaire  donne  des 
objets  éloignés  est  très  petite.  On  pourrait  l'obtenir  plus  grande 
en  se  servant  de  lentilles  à  très  long  foyer,  mais  l'appareil  aurait 
alors  des  dimensions  excessives.  Quand  on  a  à  photographier  un 

sujet  dont  il  n'est  pas  pos- 
sible de  s'approcher  pour 
en  avoir  une  reproduction  à 
l'échelle  voulue,  le  mieux 
est  d'amplifier  l'image  four- 
nie par  une  lentille  à  court 
foyer  ou  par  un  objectif  or- 
dinaire. 

Cette  amplification  s'ob- 
tient soit  en  plaçant  un  système  convergent  au  delà  du  foyer  de 
Tobjectif,  soit  en  plaçant  un  système  divergent  en  deçà  du  foyer. 
Dans  le  premier  cas,  l'image  renversée  par  l'objectif  est  redressée 
par  la  seconde  lentille;  dans  le  second,  elle  reste  renversée,  mais, 
comme  cette  combinaison  réduit  la  distance  focale,  c'est  celle 
qu'ont  adoptée  les  constructeurs  de 
téléobjectifs. 

On  appelle  élément  jjositif  la  len- 
tille convergente  (fig.  45),  et  élément 
négatif,  ou  amplificatrice,  la  lentille 
divergente  (fig.  46).  Chacune  de  ces 
lentilles  doit  être  achromatique  et  corrigée  des  diverses  aberra- 
tions. Les  barillets  qui  les  portent  se  vissent  aux  extrémités  d'une, 
monture  disposée  de  manière  à  permettre  le  rapprochement  des 
deux  éléments.  L'amplification  obtenue  varie^  en  effet,  suivant  la 
distance  qui  sépare  les  deux  lentilles. 

L'élément  positif  est  souvent  remplacé  par  un  objectif  ordinaire 
adapté  au  tube  qui  contient  la  lentille  négative. 

Objectifs  anachromatiques,  —  Pour  réaliser  certains  effets 
artistiques,  on  se  sert  quelquefois  d'objectifs  dans  lesquels  ont  été 
systématiquement  conservées  les  aberrations  de  sphéricité  et  de 
réfrangibilité.  On  obtient  ainsi  des  images  volontairement  impré- 
cises. Sur  le  portrait,  les  tares  de  la  peau,  les  rides  ou  les  petites 
taches  de  rousseur  s'atténuent  ou  même  disparaissent,  sans  qu'il 


Fig.  46.  —  Amplificatrice. 


V  OBJECTIF 


59 


soit  nécessaire  de  retoucher  la  photographie.  Dans  le  paysage,  les 
formes  s'estompent,  les  lointains  sont  noyés  dans  un  flou  vapo- 
reux qui  accentue  la  perspective  aérienne. 

Une  simple  lentille  convexe,  un  verre  de  besicle,  peut  être  em- 
ployé à  cet  effet.  Les  opticiens  ont  cependant  combiné  des  objec- 
tifs à  deux  ou  plusieurs  lentilles,  dont  les  aberrations  n'ont  été 
corrigées  que  dans  une  certaine  mesure.  VAdjustable  landscape 
lens  de  Pulligny  est  particulièrement  commode,  en  ce  qu'il  permet 
de  faire  varier  les  dimensions  de  l'image  suivant  l'écartement  des 
lentilles.  Il  est  composé,  comme  le  téléobjectif,  d'un  élément  con- 
vergent et  d'un  élément  divergent;  seulement,  l'un  et  l'autre  sont 
des  verres  simples,  en  crown,  de 
même  distance  focale  (10  millimè- 
tres pour  le  format  18x24).  La 
frontale  est  plan-convexe,  l'ampli- 
ficatrice est  plan-concave,  et  les 
deux  faces  planes  sont  tournées 
l'une  vers  l'autre.  En  faisant  varier 
leur  écartement  de  25  à  15  milli- 
mètres, la  distance  focale  passe  de 
40  à  65  centimètres.  Deux  dia- 
phragmes iris  placés  l'un  en  avant 
et  l'autre  en  arrière  servent  à  gra- 
duer la  netteté.  La  plus  grande 
ouverture  n'étant  que  de  2  centimètres,  l'instrument  n'est  pas  très 
rapide,  mais  permet  cependant  d'exécuter  les  instantanés  lents. 

Les  lentilles  n'étant  pas  achromatiques  ont  un  foyer  chimique, 
et  l'image,  nette  sur  le  verre  dépoli,  ne  l'est  plus  sur  le  cliché.  On 
y  remédie  en  rectifiant  la  mise  au  point,  d'après  un  index  gravé 
sur  la  monture  (fi g.  47). 

VEidoscojje  d'Hermagis  est  parfaitement  corrigé  de  l'aberration 
chromatique,  mais  conserve  un  résidu  d'aberration  sphérique  ;  de 
telle  sorte  que,  sans  calculs,  ni  repères,  ni  tâtonnements,  l'opéra- 
teur peut  apprécier,  sur  le  verre  dépoli,  le  degré  de  netteté  qu'aura 
le  cliché  et  réaliser,  par  une  mise  au  point  plus  ou  moins  exacte, 
le  degré  de  définition  qui  convient  à  l'eff'et  qu'il  s'agit  d'obtenir. 
Employé  à  sa  plus  grande  ouverture  (F  :  5),  c'est  un  instrument 


Fig.  47.  —  Adjustable  lansdcape  lens^ 


60  TRAITÉ    GENERAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

rapide  et  dont  les  résultats  sont  très  appréciés  des  artistes,  surtout 
quand  il  s'applique  aux  portraits  limités  à  la  figure  (études  de  tête). 

Choix  et  emploi  des  objectifs.  —  Malgré  tous  les  progrès  réali- 
sés dans  Toptique  pendant  ces  dernières  années,  il  a  été  impossible 
de  construire  un  objectif  susceptible  d'être  appliqué  à  tous  les  tra- 
vaux. Des  lois  physiques  s'y  opposent.  Ainsi,  une  grande  lumino- 
sité est  incompatible  avec  un  large  champ  et  une  grande  profon- 
deur de  netteté. 

Il  est  donc  nécessaire  de  choisir  l'objectif  suivant  Te  but  qu'on 
se  propose.  Pour  le  portrait  à  l'atelier,  la  luminosité  a  le  pas  sur 
l'étendue  du  champ  et  sur  la  profondeur.  On  donnera  donc  la  pré- 
férence aux  instruments  à  grande  ouverture,  comme  le  Planar  et 
autres  anastigmats  fonctionnant  à  environ  F/4  ou  Tobjectif  double 
de  Petzval. 

Pour  les  instantanés  rapides,  les  vues  cinématographiques  par 
exemple,  bien  que  la  profondeur  de  foyer  soit  un  avantage  pré- 
cieux, il  sera  quelquefois  nécessaire  de  la  sacrifier  aux  nécessités 
de  l'éclairage.  On  s'en  tiendra  donc  encore,  dans  ce  cas,  aux  ins- 
truments rapides,  et  les  anastigmats  seuls  donneront  ici  une 
image  nette  dans  toute  l'étendue  du  champ.  L'aplanat  serait  trop 
lent,  et  l'objectif  de  Petzval  insuffisamment  corrigé. 

Pour  les  instantanés  à  faible  vitesse,  pour  les  groupes  et  le  por- 
trait en  plein  air,  l'aplanat  suffît  parfaitement,  mais  l'anastigmat 
lui  est  préférable. 

Le  paysage  est  supérieurement  rendu  par  l'objectif  simple,  la 
distorsion  et  la  faible  luminosité  n'ayant  là  aucune  importance  et 
se  trouvant  plus  que  compensées  par  l'éclat  et  la  pureté  de  l'image 
exempte  de  diffusion  par  lumière  réfléchie  sur  les  surfaces  des 
lentilles.  Toutefois,  si  la  vue  est  très  étendue,  s'il  faut  reproduire 
un  panorama,  il  faudra  recourir  à  un  objectif  grand  angulaire, 
aplanétique  ou  anastigmatique. 

Dans  les  reproductions  de  tableaux,  l'aplanat  à  grand  angle 
rend  de  bons  services.  Mais,  lorsqu'il  est  nécessaire  de  rendre  les 
détails  les  plus  fins  d'une  gravure,  notamment  d'une  carte  de  géo- 
graphie, il  faut  recourir  à  un  instrument  de  haut  rendement,  où 
les  aberrations  soient  parfaitement  corrigées  jusqu'aux  bords, 
même  à  grande  ouverture,  afin  d'éviter  l'épaississement  des  traits 


L'OBJECTIF  61 

qu'occasionne  la  diffraction.  Dans  ce  cas,  l'emploi  de  l'anastigmat 
s'impose. 

Les  applications  des  téléobjectifs  et  des  instruments  anachroma- 
tiques  ont  déjà  été  indiquées.  Il  est  donc  inutile  d'y  revenir. 

Ce  qui  précède  montre  que  le  photographe  doit  posséder  au 
moins  deux  objectifs  et  même  davantage,  s'il  le  peut,  car  l'instru- 
ment à  tout  faire  n'existe  pas.  Même  l'amateur  qui  limite  ses  tra- 
vaux à  une  seule  application,  le  paysage  généralement,  se  trouve- 
rait souvent  dans  l'impossibilité  de  reproduire  dans  des  conditions 
satisfaisantes  un  sujet  dont  il  ne  pourrait  pas  s'approcher  ou  s'éloi- 
gner à  volonté,  s'il  ne  disposait  que  d'un  objectif  à  foyer  unique. 
Le  téléobjectif  et  VAdjus table  landscape  lens  offrent  déjà  plus  de 
ressources,  puisqu'ils  sont,  combinés  de  manière  à  donner  des 
images  de  dimensions  variables  ;  seulement  le  premier  ne  s'ap- 
plique qu'aux  sujets  éloignés,  et  le  second  présente  des  aberra- 
tions qui  en  restreignent  l'emploi. 

C'est  pour  obvier  à  ces  inconvénients  que  les  opticiens  combi- 
nent des  trousses  (fig.  48)  contenant  plusieurs  lentilles  de  foyers 
différents  s'adaptant  à  une  même  monture. 

Quel  que  soit  le  type  d'objectif  que  l'on  ait  à  choisir,  il  est  indis- 
pensable de  le  vérifier  attentivement,  avant  d'en  faire  l'acquisi- 
tion. En  s'adressant  directement  à  une  maison  réputée  ou  à  un 
intermédiaire  sûr,  on  n'aura  aucune  déconvenue,  et  c'est  surtout 
des  instruments  achetés  d'occasion  qu'il  faut  se  méfier,  ainsi  que 
des  contrefaçons  qui  ne  sont  pas  signées  ou  qui  portent  le  nom 
d'un  opticien  inconnu. 

On  devra  s'assurer  que  les  lentilles  sont  bien  serties  dans  leurs 
barillets  et  ceux-ci  normalement  vissés  dans  la  monture.  On  véri- 
fiera le  degré  de  poli  des  surfaces  et  la  transparence  des  verres. 
Certaines  lentilles  sont  légèrement  colorées  :  dans  la  photogra- 
phie monochrome,  il  n'en  résulte  qu'une  augmentation  du  temps 
de  pose;  mais,  pour  la  reproduction  des  couleurs,  de  tels  verres 
doivent  être  absolument  rejetés,  car  la  moindre  coloration  suffit 
à  fausser  entièrement  le  coloris. 

Reste  la  question  des  bulles  d'air  qui  subsistent  parfois  dans 
l'épaisseur  du  verre.  Ces  bulles  s'observent  rarement  dans  les 
objectifs  des  anciens  types  (simples,  aplanats,  doubles  de  Petzval), 

4 


62  TRAITÉl  GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

mais  on  en  voit  souvent  dans  les  anastigmats,  bien  que  ces  instru- 
ments soient  beaucoup  plus  coûteux,  et  les  fabricants  n'acceptent 
généralement  point  de  réclamation  de  ce  chef,  car  il  est  impossible 
d'éviter  ces  défauts  dans  Ja  préparation  des  verres  spéciaux  qu'exi- 
gent les  nouveaux  objectifs.  Ces  bulles  n'ont  d'ailleurs  aucune 


Fig.  48.  —  Trousse.  ~ 

influence  nuisible  sur  ia  perfection  des  images,  et  la  perte  de 
lumière  qui  en  résulte  (1/5000)  est  pratiquement  négligeable. 

On  se  figure  souvent  que  la  partie  optique  d'un  objectif  est  la 
seule  importante  :  c'est  une  erreur.  Les  lentilles  les  plus  parfaites 
ne  donnent  qu'un  mauvais  résultat  si  elles  ne  sont  pas  adaptées 
à  une  monture  soigneusement  établie.  La  partie  mécanique  d'un 


L'OBJECTIF  63 

objectif  est  aussi  capitale  que  sa  partie  optique,  et  il  faut  bien  se 
dire  que,  le  plus  souvent,  la  légèreté  d'une  monture  n'est  obtenue 
qu'aux  dépens  de  sa  solidité  et  de  sa  précision. 

De  même,  parallèlement  à  l'augmentation  de  la  luminosité  de 
l'objectif  doivent  croître  les  conditions  de  précision  indispensables 
aux  chambres  noires  destinées  à  le  recevoir.  Si  le  plan  du  verre 
dépoli  n'est  pas  rigoureusement  perpendiculaire  à  l'axe  optique, 
ou  si  la  surface  sensible  ne  coïncide  pas  exactement  avec  l'écran 
de  mise  au  point,  il  est  tout  à  fait  inutile  d'employer  un  objectif 
de  grande  valeur  :  l'image  ne  serait  pas  meilleure  que  celle  qu'au- 
rait donnée  un  instrument  à  bas  prix. 

Il  arrive  aussi,  fréquemment,  que  des  déboires  sont  occasionnés 
par  un  centrage  défectueux  des  lentilles  sur  un  obturateur  central 
(V.  chapitre  III). 

L'appareil  doit  donc  aller  de  pair  avec  l'objectif, et,  à  cet  égard 
un  instrument  de  la  valeur  du  Tessar  ou  du  Ce /or^  par  exemp-le, 
ne  saurait  trouver  sa  place  que  sur  un  appareil  permettant  d'en 
utiliser  toutes  les  qualités  optiques^ 

Les  objectifs  doivent  être  conservés  à  l'abri  de  la  lumière  et  de 
l'humidité.  Il  ne  faut  pas  les  laisser  dans  un  laboratoire  où  des 
vapeurs  acides  risqueraient  d'attaquer  non  seulement  la  monture 
en  métal,  mais  même  le  verre,  dont  le  poli  s'altérerait,  à  la  longue. 
L'action  de  la  chaleur  est  également  à  éviter,  car  le  baume  qui 
sert  à  coller  les  lentilles  se  ramollit  à  une  température  peu  élevée. 

Il  est  bon  de- nettoyer  de  temps  à  autre  les  surfaces  libres  des 
lentilles  et  d'en  enlever  les  poussières.  On  dévissera  les  barillets 
avec  précaution,  afin  de  ne  pas  fausser  la  monture,  puis  on  pas- 
sera un  blaireau  fin  sur  les  verres,  que  l'on  essuiera  ensuite  dou- 
cement avec  un  morceau  de  toile  très  fine,  sec  ou  très  légèrement 
imbibé  de  benzine  pure. 

Sténopé.  —  L'objectiftà  lentilles  est  parfois  remplacé  par  une 
simple  lame  opaque  percée  d'une  petite  ouverture  ou  sténopé  (de 
«TTsvoc;,  étroit,  et  ot.-/.^  trou).  En  1855,  Berry  avait  reproduit  un  pay- 
sage à  l'aide  de  ce  dispositif  simplifié,  et  plus  tard  Emerson  obte- 
nait par  le  même  moyen  des  épreuves  sur  collodion.  On  a  vu,  au 
début  de  ce  chapitre,  que  l'image  ainsi  réalisée  n'est  jamais  bien 
nette.  En  outre,  l'exiguïté  de  l'ouverture  nécessite  une  pose  très 


64 


TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


longue.  Néanmoins,  il  est  des  cas  où  le  sténopé  offre  de  réels  avan- 
tages. 

D'abord,  si  Tobjectif  ordinaire  vient  à  se  briser,  au  cours  d'une 
excursion,  l'opérateur  a  la  ressource  d'y  suppléer  en  fixant  sur  la 
monture  une  plaquette  métallique  ou  même  une  carte  de  visite 
percée  à  l'aide  d'une  épingle.  L'image  sera  floue,  mais  très  douce,. 
et  l'on  préférera  souvent  une  reproduction  légèrement  confuse  à 
l'absence  complète  de  tout  document.  \ 

En  second  lieu,  si  l'image  laisse  à  désirer  au  point  de  vue  de  la 
netteté,  elle  est  parfaite  sous  tous  les  autres  rapports;  elle  ne 
présente  ni  aberration  de  sphéricité,  ni  aberration  chromatique, 
ni  distorsion,  et  la  profondeur  de  foyer  est  illimitée. 

Enfin,  il  peut  arriver  que  les  objectifs  dont  on  dispose  n'embras- 
sent pas  un  angle  assez  ouvert.  Dans  ce  cas,  il  suffît  d'avancer  la 
plaque  très  près  de  la  petite  ouverture  pour  avoir  une  image  pano- 
ramique très  étendue  et  sans  déformation. 

Le  sténopé  permet,  en  efl'et,  d'avoir  une  image,  quel  que  soit  le 
tirage  de  la  chambre.  On  a  donc  la  faculté  de  régler  les  dimen- 
sions de  l'image,  en  faisant  varier  la  distance  focale.  Toutefois, 
Limage  n'offre  pas  dans  toutes  les  positions  le  même  degré  de 

netteté.  Pour  chaque  dimension 
de  l'ouverture,  il  existe  une  dis- 
tance focale  correspondant  au 
maximum  de  définition  et  au-delà 
comme  en  deçà  de  laquelle  la 
netteté  diminue. 

Le  tableau  ci-contre  offre  quel- 
ques exemples  de  cette  relation. 
Le  sténopé  représenté  fig.  49  se 
compose  d'une  plaque  en  métal 
derrière  laquelle  tourne  un  disque 
mû  par  un  bouton  qui  entraîne 
en  même  temps  un  index  sur  une  graduation.  Le  disque  mobile 
est  percé  de  cinq  ouvertures,  dont  l'une,  assez  large,  sert  de  viseur, 
et  les  quatre  autres,  de  3/10,  4/10,  5/10  et  6/10  de  millimètre  de 
diamètre,  sont  utilisées  suivant  le  tirage  que  l'on  veut  donner  à 
la  chambre  noire.  Chaque  ouverture  est  conique,  très  évasée,  et 


Cl,  Demaria-Lapiene 
Fig.  49. 


Slénopé  à  ouvertures 
variables. 


L'OBJECTIF 


65 


les  parois  en  sont  noircies  de  manière  à  éviter  les  réflexions  de 
lumière  qui  voileraient  Timage. 


DIAMÈTRE    DE   LOUVERTURE 

DISTANCE    DE   LA    SURFACE    SliNSIBLE 

A  l'ouverture 

0,2  millimètres. 

5  centimètres. 

0,3          — 

11          — 

0,4          — 

20          - 

0,5          - 

30         — 

0,6         — 

44         — 

0,7          - 

61          — 

0,8          - 

80          — 

0,9          — 

100         - 

1             — 

123          — 

OUVRAGES  A  CONSULTER 


R.  GoLSON,  la  Photographie  sans  objectif  au  moyen  d'une  petite  ouverture,  Pa- 
ris (Gaulhier-Villars),  1891. 

T.-R.  Dallmeyer,  le  Téléobjectif  et  la  Téléphotographie,  Paris  (Gauthier-Vil- 
lars),  1903. 

J.-M.  Eder,  Die  photo graphischen  Ohjektive,  ihre  Eigenschaften  und  Prïifung, 
Halle  a/ S  (W.  Knapp),  2^  édition. 

HouDAiLLE  (capitaine).  Sur  une  méthode  d'essai  scientifique  et  pratique  des  objec- 
tifs photographiques  et  des  instruments  d'optique,  Paris  (Gauthier- Yil- 
lars),  1894. 

Ad.  Martin,  Détermination  des  courbures  de  l'objectif  grand  angulaire  pour  vues, 
Paris  (Gauthier-Villars),  1892. 

Ad.  Martin,  Méthode  directe  pour  la  détermiyiation  des  courbures  des  objectifs 
de  photographie,  Paris  (Gauthier-Villars),  1894.    • 

G.  Ménétrat,  Etude  élémentaire  de  l'objectif  des  chambres  et  des  obturateurs^ 
Paris  (Ch.Mendel),  1906. 

Ad.  Mietiie,  Optique  photographique,  Paris  (Gauthier-Villars),  1896. 

P.  Moessard,  l'Optique  photographique,  Paris  (Gauthier-Villars),  1898. 

P.  Moessard,  l'Objectif  photographique,  Paris  (Gauthier-Villars),  1899. 

P.  Moessard,  Etude  des  lentilles  et  des  objectifs  photographiques,  Paris  (Gau- 
thier-Villars), 1889. 

L.HouYKR,  M atiuel  pratique  de  photographie  sans  objectif,  Pa^ris  (Gauthier-Vil- 
lars), 1904. 

A.  Soret,  Optique  photographique,  Paris  (Gauthier-Villars),  1891. 


66  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

E.  Wallon,   Traité  élémentaire  de  l'objectif  "photographique,  Paris  (Gauthier- 

Villars],  1891. 
E.  Wallon,  Choix  et  usage  des  objectifs  photographiques,  2«  édition,  Paris  fGau- 

thier-Villars),  1903. 
G. -H.  NiEWENGLOwsKi,  la  Photographie  artistique  par  les  objectifs  anachroma- 

tiques,  Paris  (Ch.  Mendelf,  1907. 
G.-H.  NiEWENGLOwsKi,  la  Photographie  artistique  par  la  s ténopé-photo graphie, 

Paris  (Cil.  Mendel),  1906. 
H.  Quentin,  Du  choix  d'un  objectif,  Paris  (Ch.  Mendel),  1906. 
H.  Quentin,  la  Téléphotographie,  Paris  (Ch.  Mendel),  1906. 
L.  DE  PuLLiGNY  et  C.  PuYO,  Ics  Objcctifs  d'artiste,  Paris  (édition  du  Photo-Club)^ 

1905. 


L'OBTURATEUR  6"» 


CHAPITRE   m 

l'obturateur 

Notions  générales.  —  Quand  le  sujet  à  photographier  est  immo- 
bile et  peu  éclairé,  la  lumière  qui  en  émane  est  admise  sur  la  pla- 
que sensible  pendant  plusieurs  secondes,  parfois  même  pendant 
des  minutes  et  des  heures  entières.  L'ouverture  et  la  fermeture 
de  l'objectif  s'effectuent  dans  ce  cas  comme  on  le  faisait  dans  les 
premiers  temps  de  la  photographie.  L'objectif  est  muni  d'un  cou- 
Terele  ou  bouchon,  généralement  en  carton  recouvert  de  cuir  et 
doublé  de  velours  à  l'intérieur,  de  manière  à  s'adapter  à  la  mon- 
ture pa,r  un  frottement  très  doux,  sans  ébranler  l'appareil.  Après 
la  mise  au  point,  on  ferme  l'objectif,  puis  on  met  le  châssis  en 
place,  et  Ton  tire  le  volet,  pour  démasquer  la  surface  sensible.  On 
ôte  alors  le  bouchon  avec  précaution  et  en  évitant  tout  mouve- 
ment brusque  qui  risquerait  d'occasionner  des  vibrations,  et  l'on 
compte  le  temps  que  l'on  a  jugé  convenable  pour  la  pose.  On 
remet  ensuite  le  bouchon  sur  l'objectif,  et  on  referme  le  châssis. 

Mais  il  n'est  pas  toujours  possible  d'opérer  de  la  sorte.  D'abord,, 
si  le  sujet  se  déplace,  même  très  lentement,  ou  si  son  éclairement 
est  assez  vif  pour  qu'il  soit  nécessaire  de  réduire  le  temps  de  pose 
à  une  fraction  de  seconde,  il  faut  s'y  prendre  autrement.  Un  opéra- 
teur adroit  arrive  à  exécuter  la  manœuvre  du  bouchon  en  1/4  de 
seconde,  mais  là  est  la  limite  extrême  de  rapidité  qu'il  soit  possible 
d'atteindre;  encore  faut-il  concentrer  toute  son  attention  sur  l'ob- 
jectif et  s'abstenir  de  regarder  le  modèle. 

Même  si  la  pose  est  de  plusieurs  secondes,  le  bouchon  ne  suffit 
plus  lorsqu'il  est  indispensable  d'observer  le  sujet.  11  en  est  ainsi, 
notamment,  pour  le  portrait  :  l'opérateur  doit  regarder  la  personne 
qui  pose,  épier  le  moment  favorable  et  découvrir  l'objectif,  sans 
perdre  un  seul  instant.  Si,  la  pose  une  fois  commencée,  le  modèle 


68 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


vient  à  bouger,  ou  si  son  expression  se  modifie,  il  innporte  de  re- 
fermer immédiatement  l'objectif,  alors  même  que  le  temps  de  pose 
ne  serait  pas  encore  entièrement  écoulé.  On  peut,  en  effet,  remé- 
dier à  une  légère  insuffisance  de  pose,  tandis  qu'en  laissant  l'ob- 
jectif ouvert  dans  les  circonstances  qui  viennent  d'être  définies, 
On  aboutirait  à  un  échec  certain. 

De  là  la  nécessité  d'instruments  combinés  de  manière  à  ouvrir 
et  à  fermer  l'objectif  plus  ou  moins  rapidement  suivant  les  cas, 
sans  que  l'attention  du  photographe  soit  détournée  ^du  sujet  à 
reproduire.  Tel  est  le  rôle  des  obtuj^teur s.  Il  en  existe  une  foule 
de  modèles,  dont  la  description  serait  trop  longue  et  d'ailleurs 
inutile,  car  tous  les  mécanismes  proposés  depuis  plus  de  trente 

ans  dérivent  d'un  nombre  très 
restreint  de  types  principaux, 
dont  il  nous  suffira  de  signa- 
ler les  dispositions  essentiel- 
les, les  menus  détails  de  leurs 
mécanismes  ne  présentant 
qu'un  intérêt  trop  limité. 

Obturateurs  à  volets.  — 
Pour  le  portrait  à  l'atelier,  un 
obturateur  assez  ancien  (son 
invention  remonte  à  1879), 
mais  d'un  fonctionnement  ir- 
réprochable, est  celui  de  Cl. 
Guerry  (fîg.  50).  On  le  fixe  sur 
l'objectif  au  moyen  d'une  vis 
de  serrage.  Un  volet  très  lé- 
ger, constitué  par  un  cadre 
recouvert  de  velours,  inter- 
cepte la  lumière.  Ce  volet  est 
monté  sur  un  axe  dont  la  ro- 
tation- est  commandée  par  un  soufflet  de  caoutchouc.  A  ce  soufflet 
est  adapté  un  tuyau  aboutissant  à  une  poire  élastique.  Quand  on 
presse  la  poire,  le  volet  s'ouvre,  sans  bruit  et  sans  secousse.  L'o- 
pérateur n'a  pas  besoin  de  regarder  l'appareil;  rien  ne  l'empêche 
de  s'en  éloigner  autant  qu'il  le  juge  nécessaire  :  le  tuyau  a  ordi- 


Obturaieur  à  volet  simple. 


L'OBTURATEUR 


69 


nairement  2  mètres  de  longueur,  mais  il  n'y  a  aucun  inconvénient 
à  y  ajouter  une  rallonge.  La  poire  est  munie  d'un  robinet  qui  per- 
met de  maintenir  l'obturateur  ouvert  pendant  la  mise  au  point. 
Dans  le  même  but,  Taxe  auquel  est  fixé  le  volet  se  termine  par 
une  tige  coudée  à  laquelle 
peut  s'adapter  un  crochet 
qui  l'immobilise. 

Cet  obturateur  est  quel- 
quefois placé  à  l'arrière 
de  l'objectif,  à  l'intérieur 
de  la  chambre  noire.  On 
peut  alors  l'ouvrir  sans 
éveiller  l'attention  du  mo- 
dèle. 

L'extrême  simplicité  de 
son  mécanisme  le  met  à 
l'abri  des  accidents.  Il  ne 
saurait  y  avoir  aucun  raté. 

L'obturateur  à  volet 
simple  ne  convient  pas 
aux  poses  dont  la  durée 
est  inférieure  à  1/5  de  se- 
conde. Pour  les  poses  plus 
courtes,  M.  Guerry  cons- 
truit un  obturateur  à  deux  volets  dont  l'un  ouvre  Tobjeclif  tandis 
que  l'autre  le  ferme  (fig.  51".  La  rapidité  de  l'obturation  dépend 
de  la  pression  que  l'on  donne  à  la  poire.  Si  la  pose  doit  être  très 
réduite,  la  simple  pression  ne  réaliserait  pas  une  vitesse  suffî- 
sahte.  Il  faut  alors  serrer  d'une  mam  le  tuyau  de  caoutchouc,  de 
manière  à  empêcher  l'air  d'y  passer,  et,  de  l'autre  main,  serrer 
fortement  la  poire.  En  desserrant  brusquement  le  tuyau,  l'air  qui 
s'y  trouvait  comprimé  se  détend  vivement  et  communique  une  ra- 
pide impulsion  aux  volets. 

Obturateur  à  guillotine.  ~  A  l'époque  des  débuts  de  la  pho- 
tographie instantanée,  on  ne  connaissait  qu'un  obturateur  très 
simple  :  une  planchette  percée  d'une  lucarne  glissait  dans  un  cadre 
à  coulisses  adapté  à  l'objectif.  En  laissant  tomber  en  chute  libre 


Obturateur  à  double  volet. 


70  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

cette  planchette,  ou  guillotine,  le  temps  de  pose  était  d'environ 
d/10  de  seconde,  mais  variait  sensiblement  selon  le  poids  et  les 
dimensions  de  Torgane  mobile  et  selon  les  frottements  qu'il  avait 
à  subir.  La  vitesse  d'obturation  pouvait  être  accrue,  soit  en  sus- 
pendant à  la  guillotine  un  poids  additionnel,  soit  en  y  attachant 
un  ressort.  Le  déclanchement  était  déterminé  en  poussant  un 
déclic  qui  retenait  la  planchette  au  sommet  de  sa  course  ou 
en  pressant  une  poire  élatstique  comprimant  l'air  dans  une  poche 
ou  tétine  de  caoutchouc  dont  le  gonflement  faisait  mouvoir  la 
détente. 

La  guillotine  en  bois  est  actuellement  abandonnée,  parce  qu'elle 
était  trop  encombrante,  mais  beaucoup  d'appareils  à  main  sont 
munis  d'un  obturateur  qui  n'est  pas  autre  chose  qu'une  petite 
guillotine  à  lamelles  de  métal.  Comme  l'instrument  est  appelé  à 
fonctionner  dans  diverses  positions-,  le  mouvement  de  l'organe 
mobile  n'est  jamais  déterminé  par  son  propre  poids,  mais  bien 
par  un  ressort  dont  on  modifie  à  volonté  la  tension  pour  régler 
la  vitesse  d'obturation. 

Les  obturateurs  à  nc?ettwaî  (obturateurs  d'objectifs  et  obturateurs 
de  plaques)  que  nous  allons  décrire  dérivent  d'ailleurs  de  la  guil- 
lotine. Ils  n'en  diffèrent  que  par  la  substitution  d'une  bande  d'é- 
toffe souple  à  la  planchette  rigide. 

Obturateurs  à  rideaux.  —  L'organe  essentiel  de  l'obturateur  à 
rideau  est  une  bande  d'étoffe  opaque,  percée,  vers  le  miUeu  de  sa 
longueur,  d'une  ouverture  dont  la  largeur  égale  celle  de  l'objectif. 
Cette  bande  est  fixée  par  chacune  de  ses  extrémités  à  des  rouleaux 
autour  desquels  elle  vient  s'enrouler.  L'un  de  ces  rouleaux  porte 
un  ressort  aualogue  à  celui  des  stores  de  voitures.  Quand  la  ban,de 
est  roulée  sur  l'autre  rouleau,  il  suffit  de  presser  un  déclic  pour 
que  le  rouleau  à  ressort  tourne  rapidement  :  la  bande  vient  s'y 
enrouler,  et,  au  moment  où  son  ouverture  passe  devant  l'objectif, 
la  lumière  y  pénètre.  L'enroulement  continuant,  la  seconde  partie 
opaque  du  rideau  referme  l'objectif. 

Le  modèle  représenté  fig.  52  est  construit  par  Thornton-Pickard. 
Une  toile  flexible,  imperméable  à  la  lumière,  s'enroule  autour  de 
deux  axes.  Au  milieu  du  rideau  est  pratiquée  une  ouverture  car- 
rée. Le  rouleau  inférieur  contient  un  ressort  en  fil  d'acier  dont  la 


L'OBTURATEUR 


71 


tension  peut  être  réglée  à  l'aide  du  bouton  extérieur  S  de  façon 
à  faire  varier  la  vitesse  d'obturation. 

Pour  armer  l'obturateur,  on  tire  un  cordon  enroulé  autour 
d'une  poulie  dont  l'axe  se  termine  par  un  pignon  qui  engrène 
avec  une  roue  dentée  maintenue  immobile  .par  le  levier  de  dé- 
tente. Quand  on  comprime 
la  boule  de  caoutchouc,  la 
tétine  placée  sous  le  levier 
se  gonfle  et  écarte  le  cro- 
chet qui  retenait  la  roue 
dentée.  Le  rideau  se  met 
alors  en  mouvement  et 
s'enroule  sur  le  rouleau  à 
ressort,  soit  en  totalité,  soit 
seulement  jusqu'à  la  moitié 
de  sa  course,  suivant  que 
l'aiguille  qui  termine  le 
levier  se  trouve  en  face  du 
mot  inst  ou  du  mot  time. 
Dans  le  premier  cas,  le 
fonctionnement  de  la  dé- 
tente dégage  complètement 
la  roue  dentée,  et  rien  n'ar- 
rête le  mouvement  du  ri- 
deau, jusqu'à  ce  que  l'ob- 
jectif, un  instant  découvert,  soit  de  nouveau  protégé  par  l'ex- 
trémité opaque.  Dans  le  second  cas,  au  moment  où  l'objectif  est 
ouvert,  un  ergot  qui  fait  saillie  sur  la  roue  dentée  vient  buter 
contre  le  crochet  que  porte  le  levier  de  déclanchement,  et  le  mou- 
vement se  trouve  arrêté  jusqu'à  ce  que  l'on  cesse  de  comprimer 
la  poire  :  l'enroulement  se  termine  alors  aussitôt,  et  l'objectif  est 
recouvert  après  le  temps  de  pose  qu'a  déterminé  l'opérateur.  Cet 
objectif  peut  être  fixé  soit  à  l'avant  de  l'objectif,  soit  à  l'arrière. 

Le  même  constructeur  a  imaginé  une  disposition  toute  diffé- 
rente, spécialement  destinée  à  l'atelier  (fig.  53).  Deux  rideaux 
s'enroulent  sur  des  axes  disposés  aux  deux  extrémités  de  la  boîte. 
Dans  leur  position  normale,  des  ressorts  les  maintiennent  tendus 


Fig".  52.  —  Obturateur  à  rideau. 


72 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


Fig.  53.  —  Obturateur  d'atelier 
à  double  rideau. 


devant  Touverture.  Quand  on  presse  la  poire  de  caoutchouc,  le 
gonflement  du  soufflet  placé  sur  la  boîte  déplace  un  levier  qui  en- 
traîne un  cordon  enroulé  sur  les  deux 
axes.  Ce  mouvement  a  pour  efl'et  de 
faire  enrouler  les  rideaux,  qui  s'é- 
cartent l'un  de  l'autre  et  démasquent 
l'ouverture.  Dès  qu'on  cesse  de  pres- 
ser, les  rideaux  se  referment,  sous 
l'action  des  ressorts.  La  durée  de  la 
pose  est  donc  variable,  au  gré  de 
l'opérateur,  de  sorte  que  si  le  sujet 
se  montre  sur  le  point  de  remuer,  il 
n'y  a  qu'à  lâcher  brusquement  la 
poire.  Le  fonctionnement  du  méca- 
nisme est  absolument  silencieux  et 
ne  peut  éveiller  l'attention  du  mo- 
dèle, avantage  très  important  quand 
il  s'agit  de  photographier  des  enfants 
ou  des  animaux. 
Pour  mettre  au  point,  on  presse  la  poire  et  Ton  ferme  le  robinet. 
Obturateurs  centraux.  —  Pour  réduire  au  minimum  le  volume 
et  le  poids  de  Fobturateur,  on  a  imaginé  de  le  placer  au  centre  de 
l'objectif,  tout  près  du  diaphragme.  Dans  ce  cas,  il  faut  changer 
la  monture  et  s'assurer,  en  ajustant  les  lentilles,  qu'elles  occu- 
pent bien  leurs  positions  respectives  et  qu'elles  sont  exactement 
centrées,  de  la  même  manière  que  sur  leur  monture  normale. 
Sans  cette  précaution,  le  meilleur  objectif  cesserait  de  donner  des 
images  correctes.  L'obturateur  central  est  le  complément  indis- 
pensable de  la  plupart  des  appareils  portatifs.  Il  en  existe  plu- 
sieurs modèles,  tous  composés  des  mêmes  organes  essentiels  et 
différenciés  seidement  par  quelq  ues  détails  de  construction.  Deux 
ou  plusieurs  lames  métalliques  montées  sur  pivots  ou  sur  glis- 
sières interceptent  la  lumière.  Sous  l'impulsion  d'un  ressort,  elles 
s'écartent,  de  manière  à  ouvrir  l'objectif,  puis  le  referment.  Le 
déclanchement  du  mécanisme  est  déterminé  soit  par  la  pression 
d'un  levier,  soit  par  le  gonflement  d'une  tétine  reliée  à  une  poire 
de  caoutchouc.  Pour  faire  varier  la  vitesse,  suivant  les  circons- 


L'OBTUrxATEUR 


7a 


—  Obturateur  central. 


tances,  on  tend  plus  ou  moins  le  ressort,  ou  bien  on  ralentit  le 
mouvement    en    réglant    un 
frein  mécanique  ou  pneuma- 
tique. 

L'obturateur  central  Uni- 
cum,  de  Bausch  et  Lomb,  est 
combiné  pour  la  pose  et  pour  h^ 
rinstantané,  suivant  la  posi- 
tion de  l'index  a  sur  le  cadran 
e  (fig.  54 j.  Pour  mettre  au 
point,  on  ouvre  robjectif  en 
déplaçant  le  levier  de  droite. 
Pour  déclancher,  on  pousse  le 
levier  6,  ou  bien  on  presse  une 
poire  de  caoutchouc  commu- 
niquant avec  le  piston  c.  Le 
réglage  du  diaphragme  iris 
est  commandé  par  l'aiguille  d. 
On  peut  armer  cet  obturateur, 
c'est-à-dire  placer  ses  lamelles  dans  leur  position  de  départ,  sans 
que  l'objectif  soit  ouvert.  Rien  n'empêche,  par  conséquent,  d'ef- 
fectuer cette  manœuvre  alors  que  la 
plaque  ou  la  pellicule  est  déjà  dé- 
masquée. 

L'obturateur  Koilos  (fig,  55)  s'ou- 
vre et  se  ferme  par  le  jeu  combiné 
de  trois  secteurs  métalliques  très 
légers.  Il  fait,  à  volonté,  la  pose  et 
l'instantané,  suivant  la  position  de 
l'indicateur  de  vitesse,  que  l'on  aper- 
çoit à  gauche.  La  vitesse  de  l'obtura- 
tion dite  instantanée  varie  de  1  se- 
conde jusqu'à  1/300  de  seconde.  Le 
Cl.  Lacour-Berthiot.  déclanchcment  s'effectue  soit  méca- 

Fig.  55.  —  Obturateur  à  secteurs,   niquement,  soit  par  la  pression  d'une 

poire  de  caoutchouc. 
Obturateurs  de  plaques.  —  Les  obturateurs  précédents  ne  suf- 

5 


14 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


fisent  plus  quand  la  pose  doit  être  inférieure  à  1/300  de  seconde. 
Dans  ce  cas,  il  y  a  avantage  à  remplacer  Fobturateur  d'objectif 
par  l'obturateur  de  plaque  ou  focal  plane.  C'est  un  rideau  fonc- 
tionnant de  la  même  manière  que  celui  que  nous  avons  déjà  décrit, 
mais  de  beaucoup  plus  grandes  dimensions,  puisqu'il  est  placé, 
non  plus  sur  l'objectif,  mais  devant  le  châssis,  tout  près  de  la 


Cl.  Thornton-Pickard. 
Fig.  56 


—  Obturateur  de  plaque. 


plaque.  De  plus,  son  ouverture  se  réduit  à  une  fente  très  étroite. 
La  largeur  de  cette  fente  est  d'ailleurs  réglable  dans  la  plupart 
des  modèles. 

La  fig.  56  représente  le  focal  plane  de  Thornton-Pickard.  Il  est 
facile  d'y  reconnaître  les  principales  dispositions  de  l'obturateur 
d'objectif  à  rideau  du  même  constructeur. 

L'avantage  de  l'obturateur  de  plaque  est  d'admettre  le  maxi- 
mum de  lumière  avec  le  minimum  de  pose.  Tandis  que  l'obtura- 
teur d'objectif  expose  en  même  temps  toute  la  surface  de  la  plaque, 


L'OBTURATEUR  75 

le  focal  plane  n'admet  la  lumière  que  peu  à  peu,  par  la  fente  qui 
balaye  successivement  tous  les  points  de  la  surface  sensible. 
En  rétrécissant  suffisamment  la  fente,  on  arrive  à  réduire  à 
d/lOOO  de  seconde,  et  même  à  moins  encore,  le  temps  d'expo- 
sition. 

Bien  entendu,  il  ne  s'agit  là  que  du  temps  pendant  lequel  chaque- 
point  de  rimage  est  impressionné.  En  réalité,  la  durée  totale  du 
fonctionnement  du  rideau  est  beaucoup  plus  longue.  La  partie 
inférieure  de  la  plaque  n'est  pas  impressionnée  en  même  temps 
que  sa  partie  supérieure,  et,  si  le  sujet  se  déplace  très  rapidement, 
il  peut  en  résulter  une  déformation  générale,  bien  que  chacun  de 
ses  points  soit  parfaitement  net.  Ainsi,  les  mâts,  supposés  parfai- 
tement verticaux,  d'un  navire  passant  par  le  travers  devant  l'ap- 
pareil, se  montreront  plus  ou  moins  obliques.  Néanmoins,  en 
pratique,  cette  déformation  est  presque  toujours  insignifiante;  on 
la  rend  d'ailleurs  facilement  insensible  en  disposant  l'obturateur 
de  telle  sorte  que  la  fente  se  déplace  en  sens  contraire  de  l'objet 
en  mouvement. 

Déclancheur  Bowden.  —  Le  déclanchement  pneumatique  des 
obturateurs  présente  un  inconvénient  :  le  caoutchouc  perd  peu  à 
peu  son  élasticité,  durcit  et  se  fendille,  surtout  quand  on  ne  s'en 
sert  que  de  loin  en  loin,  ce  qui  est  précisément  le  cas  pour  beau- 
coup d'amateurs.  La  poire,  le  tuyau  et  la  tétine  ne  tardent  donc 
pas  à  être  mis  hors  d'usage.  On  n'y  remédie  qu'imparfaitement 
par  des  immersions  dans  l'ammoniaque  additionnée  de  deux  fois 
son  poids  d'eau,  où  le  caoutchouc  reprend  en  partie  sa  souplesse. 
Quant  aux  déchirures,  on  les  répare  à  l'aide  d'une  solution  de 
caoutchouc  dans  la  benzine. 

C'est  pour  éviter  les  inconvénients  inhérents  à  l'emploi  du  caout- 
chouc qu'a  été  créé  le  déclancheur  Bowden.  L'opérateur  tient  en 
main  une  poussette  dont  le  mouvement  est  transmis  au  déclic  de 
l'obturateur  par  l'intermédiaire  d'un  fil  d'acier  glissant  à  l'inté- 
rieur d'un  cordon  souple  constitué  par  un  autre  fil  d'acier  enroulé 
en  spirale  et  recouvert  d'une  gaine  en  fil  de  coton  ou  de  soie 
tressée.  ^^ 

Détermination  de  la  vitesse  des  obturateurs.  —Il  est  nécessaire, 
dans  certains  cas,  de  connaître  exactement  le  temps  de  pose.  Les 


76 


TRAITE    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


vitesses  marquées  sur  les  obturateurs  sont  quelquefois  de  simples 
numéros  d'ordre;  le  plus  souvent,  cependant,  elles  sont  indiquées 
en  fractions  de  seconde;  mais,  à  supposer  que  cette  graduation  ait 
été  juste  au  moment  de  la  fabrication,  elle  cesse  inévitablement 
de  rêtre  tôt  ou  tard,  par  suite  de  Fusure  des  pièces  mobiles  et  dô 


Cl.  Guerry. 

Fig.  57.  —  Appareil  Giierry,  pour  la  cléLerminaLion 
de  la  vitesse  des  obturateurs. 


l'élasticité  imparfaite  des  ressorts,  qui  se  détendent  peu  à  peu.  Pour 
contrôler  ou  vérifier  ces  vitesses,  il  existe  divers  moyens.  Le  plus 
précis  est  celui  qui  consiste  à  photographier  un  objet  brillant  animé 
d'une  vitesse  connue,  en  même  temps  que  s'inscrit  sur  un  rouleau 
une  courbe  sinueuse  tracée  par  un  diapason  électrique  dont  le 
nombre  de  vibrations  par  seconde  est  constant  et  d'ailleurs  indiqué 
par  le  son  qu'il  émet.  Ce  dispositif  est  néanmoins  peu  usité,  parce 
qu'il  est  compliqué.  Une  méthode  plus  simple  et  suffisante  dans 


L'OBTURATEUR  11 

la  pratique  a  été  signalée  par  Léon  Vidal  dès  1880  et  se  trouve 
encore  employée  par  plusieurs  constructeurs  d'obturateurs. 

Un  fort  mécanisme  d'horlogerie  imprime  à  une  aiguille  ronde  et 
polie  (fig.  57;  un  mouvement  uniforme  de  1  tour  par  seconde.  Le 
cadran  devant  lequel  semeut  Taiguille  a  1  mètre  de  circonférence; 
il  est  noir  et  porte  en  blanc  les  divisions  décimales  du  mètre  :  déci- 
mètres, centimètres  et  millimètres.  Si  Ton  photographie  cet  appa- 
reil en  plein  soleil,  Taiguille,  malgré  sa  grande  vitesse,  laissera 
sur  la  plaque  sensible,  grâce  à  la  vive  lumière  qu'elle  réfléchit,  la 
trace  de  son  passage,  sous  la  forme  d'un  double  éventail,  en  face 
des  divisions.  Les  limites  de  cet  éventail  font  connaître  la  durée  de 
la  pose,  par  la  simple  lecture  des  graduations  qui  s'y  trouvent 
comprises  :  les  décimètres  du  cadran  correspondent  à  des  dixiè- 
mes de  seconde,  les  centimètres  à  des  centièmes,  et  les  millimètres 
à  des  millièmes  de  seconde.  Dans  la  gravure  ci-jointe,  l'aiguille 
indique  une  durée  d'exposition  de  9/100  de  seconde. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


Agle,  Manuel  pratique  de  photographie  instantanée,  2^  tirage,  Paris  (Gauthier- 

Villars),  1891. 
J.   Demarçay,    Théorie  mathématique  des  guillotines  et  obturateurs  centraux 

droits,  Paris  (Gauthier-Villars),  1892, 
Z.Ti^M.KK(^KY,  'Note  sur  la  théorie  des  obturateurs  photographiques,  Paris  (Gau- 

tiiier-Villars),  1906. 
A.  LoNDE,  la  Photographie  instantane'e ,  théorique  et  pratique,  3^  édition,  Paris 

(Gauthier- Viilars),  1897. 
G.  JMénétrat,  Etude  élémentaire  de  l'objectif,  des  chambres  et  des  obturateurs, 

Paris  (Cil.  Mendel),  1906. 
H.  WuRTz,  les  Obturateurs,  achat,  essai,  usage,  Paris  (H.  Desforges),  1906. 


78  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE   IV 

LE  LABORATOIRE  ET  l'aTELIER 

Dispositions  générales.  —  Les  manipulations  photographiques 
sont  bien  simplifiées,  depuis  quelques  années.  Autrefois,  le  photo- 
graphe était  obligé  de  préparer  soi-même  ses  plaquesil  de  les  net- 
toyer, les  polir,  les  recouvrir  du  substratum  (albumine  ou  collo- 
dion)  destiné  à  retenir  le  sel  d'argent,  et  enfin  de  les  sensibiliser; 
il  devait  également  sensibiliser  le  papier.  Aujourd'hui,  il  n'en  va 
plus  de  même,  et,  sauf  dans  certaines  industries  où  l'on  utilise 
le  coUodion,  on  se  sert  de  plaques  vendues  prêtes  à  l'emploi.  La 
plupart  des  papiers  sont  livrés  de  même.  Les  procédés  en  sont 
arrivés  à  ce  point  que  l'amateur  peut  réellement  se  passer  de  toute 
installation  et  travailler  comme  le  peintre,  en  plein  jour,  dans  un 
salon.  Néanmoins,  pour  le  photographe*  professionnel  et  même 
pour  l'amateur  désireux  d'utiliser  toutes  les  ressources  de  l'art 
photographique,  une  installation  spéciale  reste  encore  nécessaire. 

Bien  qu'une  seule  pièce  suffise,  à  la  rigueur,  il  vaut  mieux  dis- 
poser de  deux  pièces  contiguës,  l'une  pour  les'  travaux  qui  doivent 
être  exécutés  en  pleine  lumière,  et  l'autre  réservée  aux  opérations 
qui  exigent  l'obscurité.  La  première  peut  être  disposée  au  gré  de 
chacun,  mais  la  seconde  doit  satisfaire  à  certaines  conditions  que 
nous  allons  analyser. 

Cabinet  noir.  —  Les  plaques  photographiques  sont  actuellement 
si  sensibles  que  tout  accès  de  lumière  blanche  dans  le  laboratoire 
suffirait  à  les  mettre  en  un  instant  hors  d'usage.  Il  faut  donc  que 
toutes  les  ouvertures  soient  bouchées  avec  soin.  Les  moindres  fis- 
sures, aperçues  dans  les  encadrements  des  portes,  les  trous  des 
serrures  doivent  être  recouverts  de  papier  noir  ou,  ce  qui  est  pré- 
férable, d'étoffe  épaisse.  On  garnira  également  d'étoffe  les  bords 
du  battant  de  la  porte,  de  façon  que  le  jour  ne  puisse  s'introduire  ni 


LE  LABORATOIRE  ET  L'ATELIER  79 

par  les  côtés,  ni  par  les  reflets  venus  du  sol.  L'entrée  de  certains 
laboratoires  est  précédée  d'un  tambour  à  deux  portes  disposées  de 
telle  sorte  que  l'une  ne  puisse  s'ouvrir  sans  que  l'autre  soit  fermée. 
La  lumière  destinée  à  l'éclairage  du  laboratoire  sera  transmise 
par  des  écrans  en  verre  ou  en  papier  fortement  colorés.  La  nuance 
doit  en  être  choisie  avec  soin  parmi  celles  qui  impressionnent  le 
moins  le  bromure  d'argent.  C'est  le  rouge-rubis  qui  est  le  plus  fré- 
quemment utilisé.  Néanmoins,  comme  on  emploie  dans  certains  cas 
des  plaques  sensibles  aux  radiations  rouges,  le  verre  rubis  est  alors 
remplacé  par  un  verre  vert. 

Bien  que  les  verres  colorés  dans  la  masse  préservent  bien  les 
plaques  ordinaires  des  radiations  photochimiques,  on  les  remplace 
assez  souvent,  surtout  quand  il  s'agit  de  manipuler  des  plaques 
spéciales  très  sensibles,  par  des  verres  blancs  recouverts  d'une 
feuille  de  papier  ou  d'une  couche  de  gélatine  imprégnée  d'une 
solution  colorante.  La  préparation  de  ces  écrans  est  très  simple. 
Le  D'*  Luigi  Castellani  trempe  le  papier  dans  : 

Alcool  méthylique 1.000  ce. 

Auramine  OMP 5  gr. 

Solution  alcoolique  de  safranine  à  0,5  pour  100 * .         10  ce. 

La  feuille  colorée  dans  cette  solution  est  doublée  d'un  verre  dépoli 
ou  d'un  papier  blanc. 

MM.  A.  et  L.  Lumière  conseillent  d'imprégner  un  papier  pelure 
d'une  solution  aqueuse  de  tartrazine  à  6  pour  100. 

M.  Stein  recommande  de  débarrasser  de  leur  sel  d'argent  deux 
plaques  au  gélatinobromure  en  les  traitant  par  l'hyposulfîte  de 
^oude.  Après  lavages,  on  colore  les  couches  de  gélatine,  l'une  par 
une  solution  de  tartrazine  et  l'autre  par  une  solution  de  violet 
de  méthyle.  Après  dessiccation,  les  deux  plaques  sont  appliquées 
l'une  contre  l'autre,  les  deux  couches  de  gélatine  en  contact. 

L'écran  coloré  ne  laisse  passer  que  les  radiations  inactiniques 
fournies  par  la  source  de  lumière,  naturelle  ou  artificielle.  Autre- 
fois, on  utilisait  de  préférence  la  lumière  du  jour  :  la  fenêtre  du 
laboratoire  était  garnie  de  verres  colorés  et  recevait  ainsi  l'éclai- 
rage de  l'extérieur.  Cet  éclairage  étant  très  variable,  on  s'en  tient 
généralement  aujourd'hui  aux  sources  de  lumière  artificielle,  et  les 


80 


TRAITE    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


écrans  colorés  sont  ajustés  sur  des  lanternes  disposées  de  manière 
à  recevoir  soit  une  bougie,  soit  une  lampe  à  huile  ou  au  pétrole, 

soit  un  bec  de  gaz,  soit  une  ampoule  élec- 
trique. La  lampe  à  incandescence  brillant 
sans  combustion  peut  être  placée  dans  une 
lanterne  complètement  close;  on  fabrique 
même  des  ampoules  à  verre  rouge,  ce  qui 
dispense  de  la  lanterne,  seulement  elles 
sont  assez  chères,  et  il  y  a  avantage,  au 
point  de  vue  économique ,  à  se  servir  des 
ampoules  ordinaires  à  verre  blanc,  qui 
sont  très  peu  coûteuses  et  qu'il  suffit  d'en- 
fermer dans  une  lanterne  ou  dans  un  man- 
chon de  verre  rouge  (fîg.  58),  ou  même 
Fig.  58.  —  Lampe  eiecuique  ^^^^^  ^^  g^c  d'étofle  rouge  translucide, 
et  manchon  en  verre  rouge.  ^^^  lanternes  destinées  à  recevoir  des 
luminaires  à  combustion  (fig..  59)  sont  percées  d'orifices  destinés 
à  laisser  circuler  l'air  et  le  gaz  carbonique.  Mais,  pour  éviter  toute 
infiltration  de  lumière  blanche ,  ces  ou- 
vertures sont  à  chicanes,  c'est-à-dire  que 
l'air  et  les  gaz  ne  les  franchissent  qu'en 
faisant  un  détour  dans  des  conduits  cou- 
dés et  peints  en  noir,  de  façon  qu'il  n'en 
sorte  point  d'autre  lumière  que  celle  qui 
est  transmise  par  les  verres  colorés  (fig. 
60).  Les  lanternes  de  laboratoire  bien 
comprises  sont  combinées  de  manière  à 
donner,  à  volonté,  la  lumière  rouge, 
verte  ou  blanche,  et  l'intensité  en  est  ré- 
glable au  moyen  d'une  clef  extérieure. 

La  combustion  du  produit  éclairant, 
ainsi  que  le  calfeutrage  de  toutes   les 
issues,  exige  que  l'on  veille  à  la  ventila- 
tion du  cabinet  noir,  car,  si  cette  pièce  est  exiguë  et  si  l'opérateur 
doit  y  séjourner  assez  longtemps,  il  y  risque,   sinon  l'asphyxie 
complète,  du  moins  des  malaises  et  des  troubles  sérieux.  D'ail- 
leurs, pendant  l'été,  on  est  exposé  à  s'y  trouver  suffoqué  par  la 


Cl.  Poulenc. 

Fig.  59.  —  Lanterne 
de  laboratoire. 


LE  LABORATOIRE   ET  L'ATELIER 


81 


co 


chaleur,  qui  a  aussi  pour  inconvénient  de  ramollir  la  gélatine  et 
d'abîmer  les  plaques  et  les  papiers  sensibles.  S'il  n'y  a  pas  de 
cheminée  dans  le  Iciboratoire,  il  sera  bon  d'y  installer  une  ouver- 
ture à  chicanes,  laissant  circuler  Tair  tout 
en  interceptant  la  lumière  extérieure. 

On  doit  aussi  se  préoccuper  du  chauf- 
fage pendant  Thiver,  car  certains  réactifs, 
et  notamment  les  révélateurs,  agissent 
mal  à  basse  température.  Il  faut,  bien 
entendu,  un  mode  de  chauffage  excluant 
toute  flamme  visible  :  bouches  de  calori- 
*fère,  radiateur  à  vapeur,  eau  chaude  ou 
électricité. 

Un  élément  essentiel  de  l'installation 
du  photographe,  c'est  l'eau,  qu'il  doit 
toujours  avoir  en  abondance.  Il  y  faut 
donc  un  robinet  alimenté  par  une  caisse 
d'assez  grande  contenance,  ainsi  qu'un 
évier  (en  ardoise  de  préférence)  pour  la 
vidange  des  bains  et  des  eaux  de  lavage. 
Si  Ton  a  la  faculté  de  choisir  entre  plu- 
sieurs eaux  de  provenances  différentes,  ^^^'^^--^^^^P;^^^^^^^^^ 
on  choisira  la  moins  calcaire  et  la  plus 

limpide.  L'eau  trouble  sera  filtrée  ou  décantéel  L'eau  distillée  est 
presque  toujours  inutile,  Dien  que  son  emploi  figure  dans  un  grand 
nombre  de  formules  :  toute  eau  bonne  à  boire  convient  à  la  plu- 
part des  opérations  photographiques.  Le  robinet  sera  disposé  de 
façon  à  recevoir  une  pomme  d'arrosoir  pour  le  lavage  des  clichés. 

Une  ou  deux  tablettes,  des  étagères,  une  armoire  oii  seront  ran- 
gés l'outillage  et  les  produits  chimiques,  compléteront  l'aména- 
gement du  laboratoire  (ûg.  61). 

Outillage.  —  L'outillage  du  photographe  varie  suivant  les  tra- 
vaux qu'il  se  propose  d'exécuter  et  les  procédés  oi^i  il  veut  se  spé- 
cialiser. La  plupart  des  accessoires  nécessaires  seront  décrits  à 
mesure  que  nous  aurons  à  en  signaler  l'application  aux  procédés 
dans  lesquels  ils  sont  utilisés.  S'il  fallait  les  décrire  ici,  il  serait 
indispensable  de  donner  au  préalable  des  explications  qui  seront 


82 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


mieux  à  leur  place  dans  les  chapitres  suivants.  Nous  nous  borne- 
rons donc  à  énumérer  les  principaux  objets  dont  Temploi  est  com- 
mun à  la  plupart  des  procédés  usuels  : 

Balance,  thermomètre  avec  graduation  gravée  sur  la  tige,  aréo- 
mètres,(pèse-alcool  et  pèse-sirops),  éprouvettes  et  verres  gradués, 
agitateurs  en  verre,  cuiller  en  verre  ou  en  corne,  blaireau  à  épous- 
seter,  diamant  à  couper  le  verre,  bocaux,  flacons  bouchés  à  Fé- 
meri  ou  à  bouchon  de  liège  paraffiné,  pinces  en  bois,  pointes  à 


tête  de  verre,  etc.,  tqus  objets  trop  connus  de  tous  pour  qu'il  soit 
de  quelque  utilité  d'en  donner  une  description  même  très  abrégée. 
Il  convient  seulement  de  dire  un  mot  des  cuvettes,  dont  le  photo- 
graphe a  constamment  besoin. 

Cuvettes.  —  Les  cuvettes  sont  fabriquées  en  faïence,  en  carton 
laqué,  en  tôle  vernie  ou  émaillée,  en  aluminium,  en  celluloïd,  en 
gutta-percha,  en  porcelaine  et  en  verre.  Ces  deux  dernières  subs- 
tances donnent  seules  entièrement  satisfaction,  car  elles  sont 
absolument  inaltérables,  quels  que  soient  les  réactifs  que  l'on  y 
mette  (à  l'exception  de  Facide  fluorhydrique,  produit  d'ailleurs 
très  dangereux  à  manipuler  et  à  peu  près  sans  emploi  en  photogra- 
phie). On  ne  peut  que  leur  reprocher  d'être  pesantes  et  fragiles. 


LE   LABORATOIRE  ET  L'ATELIER 


83 


Il  est  vrai  que  ces  inconvénients  sont  dos  plus  sérieux,  et  même 
prohibitifs  quand  on  ,se  propose  d'opérer  en  voyage.  L'excursion- 
niste, l'explorateur,  feront  mieux  de  se  munir  de  cuvettes  en  cel- 
luloïd, substance  très  légère  et  susceptible  d'être  moulée  avec  la 
plus  grande  précision.  On  prendra  garde  seulement  de  ne  pas 
l'approcher  du  feu,  car  elle  est  extrêmement  inflammable,  et  de 
s'abstenir  d'y  verser  des  solutions  contenant  de  l'acétone,  qui  est 
un  dissolvant  du  celluloïd. 

La  faïence  est  à  rejeter,  parce  que,  dès  que  le  vernis  en  est  cra- 
quelé, la  terre  poreuse 
sous-jacente  absorbe  les 
liquides,  mélange  les  ré- 
actifs qui  devraient  être 
isolés  et  provoque  ainsi 
des  taches.  Il  faut  en  dire 
autant  du  carton  et  de  la 
tôle  dépouillés  de  leur 
enduit  protecteur  :  l'un 
boit  les  liquides,  l'autre  se 
rouille.  Quant  à  l'alumi- 
nium, il  ne  résiste  pas  aux 
solutions  alcalines  et  finit 
par  s'effriter.  La  gutta-percha  est  coûteuse  et  se  ramollit  trop 
facilement  à  la  chaleur  :  il  faut  en  réserver  l'application  aux  pro- 
cédés nécessitant  l'emploi  de  l'acide  fluorhydiique. 

Chaque  cuvette  sera,  autant  que  possible,  exclusivement  affectée 
à  un  emploi  particulier  :  de  là  l'utilité  des  inscriptions  gravées  ou 
peintes  sur  ces  récipients  (fig.  62). 

Laboratoire  simplifié  pour  amateurs.  —  Les  amateurs  qui  se 
bornent  à  utiliser  les  procédés  les  plus  faciles  peuvent  se  conten* 
ter  d'une  installation  très  rudimentaire.  Un  placard  suffît  à  ceux 
qui  n'ont  pas  un  grand  nombre  de  plaques  à  traiter  sans  inter- 
ruption. On  peut  même  opérer  dans  une  pièce  quelconque  dont 
on  aura  fermé  les  fenêtres  et  recouvert  de  rideaux  épais  toutes  les 
ouvertures.  Et  sans  même  s'astreindre  à  cette  précaution,  il  n'y 
a  qu'à  attendre  la  nuit,  ce  qui  permet  de  travailler  n'importe  où. 
Dans  ce  cas,  le  meuble  représenté  figure  63  sera  très  utile,  car  il 


Cl.  Demaria-Lapierre. 

Fig.  62.  —  Cuvettes. 


u 


TRAITE   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


contient  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour  le  travail  courant  :  c'est 
à  ce  petit  buffet  que  peut  se  réduire  aujourd'hui  l'installation  du 
photographe  dont  les  travaux  sont  limités  aux  procédés  usuels.  Il 

n'en  serait  évidemment 
pas  de  même  pour  celui 
qui  se  propose  d'exécu- 
ter des  travaux  spéciaux 
ou  de  se  livrer  à  des  re- 
cherches. 

On  construit  aussi  de 
petites  boîtes,  en  forme 
de  pupitres  ou  de  man- 
chons ,  à  l'aide  desquel- 
les le  photographe  peut 
charger  ses  châssis  ou 
développer  ses  plaques 
dans  une  pièce  éclairée 
comme  d'habitude  ou 
même  en  plein  air.  Une 
caissette  garnie  de  ver- 
res rouges  est  percée  de 
deux  ouvertures  munies 
de  manches  en  étoffe 
opaque.  Les  châssis  et  la 
boite  de  plaques  étant 
disposés  à  l'intérieur, 
l'opérateur  ferme  l'appa- 
'reil  et  passe  ses  bras 
dans  les  manches,  ser- 
rées aux  poignets  par  des« 
bracelets  de  caoutchouc.  Il  peut  ainsi,  en  regardant  à  travers  les 
verres  rouges,  ouvrir  la  boîte  de  plaques  et  garnir  ses  châssis.  Il 
procédera  de  même  pour  le  développement,  après  avoir  rangé,  à 
l'intérieur  de  la  caisse-laboratoire,  le  châssis  contenant  la  plaque 
à  développer,  la  cuvette,  le  bain  révélateur,  un  ou  deux  flacons 
pour  le  lavage,  le  fixateur,  etc.  Cette  combinaison  n'est  évidemment 
pas  très  commode,  mais  rend  d'incontestables  services  en  voyage. 


Cl.  Demaria-Lapierre. 

Fig.  63.  —  Meuble  à  développer. 


LE  LABORATOIRE  ET  L'ATELIER  85 

\Enfin,  les  procédés  modernes  permettent  à  l'amateur  d'exécuter 
en  pleine  lumière  toutes  les  opérations  de  la  photographie.  Nous 
avons  déjà  décrit  (chapitre  I")  le  mode  d'emmagasinage  des  pelli- 
cules de  celluloïd  :  une  fois  impressionnées,  elles  sont  introduites, 
en  pleine  lumière,  dans  des  cuves  à  fermeture  étanche,  où  elles 
soiit  automatiquement  développées  et  fixées.  Le  mode  d'emploi 
de  Ces  cuves  sera  indiqué  dans  le  chapitre  consacré  au  dévelop- 
pereient. 

Le  laboratoire  n'est  donc  plus  indispensable,  ni  pour  introduire 
dansi  les  châssis  les  plaques  ou  les  pellicules,  ni  pour  révéler 
l'image  latente.  Quant  au  tirage  des  épreuves  sur  papier,  nous 
verroïis  que  plusieurs  procédés,  et  des  plus  usuels  (citrate,  chlo- 
robromure),  s'accommodent  de  l'éclairage  normal  d'une  pièce 
Oî*dinaire,  lumière  du  jour  ou  lumière  d'une  lampe  à  pétrole. 

Le  laboratoire  n'est  pas  davantage  nécessaire  pour  la  prépara- 
tion des  bains  auxquels  doivent  être  soumis  les  plaques  et  les 
papiers.  Les  révélateurs,  fixateurs,  renforçateurs,  affaiblisseurs, 
virages,  etc.,  sont  vendus  tout  préparés,  soit  en  solutions  prêtes  à 
l'emploi  immédiat,  soit  sous  forme  de  comprimés  ou  de  mélanges 
en  poudre  (  photodoses)  qu'il  suffît  de  faire  dissoudre  dans  l'eau. 
Les  réactifs  k  employer,  réduits  d'ailleurs  à  trois  ou  quatre,  ne 
sont  donc  pas  plus  difficiles  à  préparer  qu'un  verre  d'eau  sucrée; 
un  enfant  sait  le  faire,  et  tout  le  matériel  nécessaire  à  la  photo- 
graphie simplifiée  peut  aisément  trouver  place  dans  le  tiroir  d'un 
bureau  ou  sur  une  petite  étagère,  comme  s'il  s'agissait  de  peindre 
à  l'huile,  à  l'aquarelle  ou  au  pastel. 

Contrôle  de  l'étanchéité  du  laboratoire.  —  Quel  que  soit  le 
dispositif  adopté  par  le  photographe,  il  est  prudent  de  s'assurer 
que  la  pièce  ou  l'appareil  dans  lesquels  doivent  être  découvertes 
les  préparations  sensibles  sont  absolument  à  l'abri  de  toute 
lumière  capable  d'impressionner  le  sel  d'argent.  On  a  proposé, 
dans  ce  but,  de  soumettre  les  verres  des  lanternes  à  l'examen 
spectroscopique  :  c'est  chercher  une  complication  bien  inutile  et 
qui  ne  donne  pas  de  résultats  plus  certains  que  l'essai  très  simple 
dont  il  va  être  question. 

Il  suffît  de  placer  dans  le  laboratoire  (ou  dans  la  boite  qui  en 
tient  lieu)  un  morceau  de  plaque  ou  de  pellicule  sensible  et  d'en 


86  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

recouvrir  la  moitié  à  l'aide  d'un  carton  noir  ou  de  tout  autre  objet 
opaque.  Au  bout  de  quelques  minutes,  il  est  facile  de  vérifier  si  la 
partie  restée  à  découvert  a  été  impressionnée,  en  plongeant  dans 
un  bain  de  développement  la  couche  sensible  soumise  à  l'expé- 
rience. 

Toutefois,  s'il  s'agit  de  plaques  très  rapides,  il  ne  faut  pas  sin- 
quiéter  de  la  légère  impression  qu'aurait  provoquée  une  exposi- 
tion prolongée  à  la  lumière  rouge  ou  verte,  car  en  prenant  quel- 
ques précautions,  en  couvrantla cuvette  pendant  le  développement, 
on  évitera  de  voiler  ces  plaques,  dont  l'extrême  sensibilité  s'atténue 
d'ailleurs  dès  qu'elles  sont  mouillées. 

Atelier  de  pose.  —  Pour  le  photographe  portraitiste,  l'atelier 
de  pose  est  l'élément  le  plus  important  de  son  industrie,  et  la 
perfection  de  ses  œuvres  dépend  en  grande  partie  de  l'installation 
et  de  l'organisation  de  cette  pièce.  L'habileté,  le  goût,  le  talent  de 
l'opérateur,  ne  suppléeraient  pas  entièrement  aux  défauts  d'un 
atelier  mal  compris. 

Bien  que  l'usage  de  l'éclairage  artificiel  prenne  une  extension 
croissante,  la  lumière  du  jour  est  encore  utilisée  par  le  plus  grand 
nombre  des  photographes  professionnels.  Aussi  convient-il  de 
rappeler  les  règles  qui  doivent  présider  à  l'édification  d'un  atelier 
vitré. 

Le  principe  d'où  découlent  ces  règles,  c'est  que  le  portrait  exige 
un  éclairage  qui  ne  soit  ni  trop  dur  ni  trop  diffus,  de  façon  que  le 
modelé  du  visage  ne  se  montre  ni  trop  plat  ni  trop  heurté.  Or, 
un  éclairage  vertical  produirait  des  ombres  trop  noires  sous  les 
sourcils,  sous  les  narines  et  sous  le  menton.  L'éclairage  horizontal, 
au  contraire,  supprimerait  complètement  ces  ombres  sur  tout  un 
côté  de  la  figure,  tandis  que  le  côté  opposé  resterait  entièrement 
dans  l'ombre.  C'est  pourquoi  la  lumière  doit  arriver  sur  le  modèle 
dans  une  direction  oblique,  faisant  avec  la  verticale  un  angle  voi- 
sin de  45°.  Plusieurs  dispositions  différentes  permettent  de  réa- 
liser cet  éclairage. 

Dans  la  plupart  des  ateliers,  la  partie  vitrée  se  compose  de  deux 
châssis,  l'un  ve.  tical  et  l'autre  en  forme  de  toiture  en  pente  douce. 
On  obtient  cependant  d'excellents  résultats  en  réduisant  le  vitrage 
à  un  seul  châssis  incliné,  presque  vertical. 


o 

(O 


88  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PROTOGRAPHIE 

L'orientation  de  Tatelier  est  très  importante,  car  il  est  néces* 
saire  d'y  éviter  l'accès  des  rayons  solaires.  Il  est  vrai  que  de  très 
habiles  amateurs  exécutent  de  très  beaux  portraits  dans  des  salles 
où  pénètre  le  soleil;  mais  ils  réalisent  ainsi  des  effets  spéciaux, 
que  le  public,  la  clientèle  d'un  professionnel,  n'accepterait  pas 
facilement.  Le  vitrage  de  l'atelier  doit  donc  faire  face  au  nord,  dans 
notre  hémisphère.  Dans  l'hémisphère  austral,  il  faut  l'orienter  au 
sud.  De  plus,  l'atelier  doit  dominer  les  édifices  voisins  :  s'il  en 
était  autrement,  la  lumière  ne  viendrait  en  réalité  que  d'en  haut; 
elle  serait  trop  veTticale,  et  l'éclairage  offrirait  les  mêmes  incon- 
vénients que  si  le  vitrage  était  réduit  h  un  seul  châssis  ménagé 
dans  la  toiture. 

Il  n'est  pas  nécessaire  que  le  vitrage  occupe  toute  la  longueur 
de  l'atelier.  Un  salon  de  pose  assez  spacieux  est  commode  pour 
l'exécution  des  groupes  et  l'emploi  d'objectifs  à  long  foyer  :  une 
longueur  de  7  ou  8  mètres  est  utile  pour  avoir  un  recul  suffisant, 
mais  il  vaut  mieux  que  le  vitrage  ne  s'étende  que  sur  un  espace 
de  3  ou  4  mètres.  Un  atelier  complètement  vitré  n'offrirait  aucun 
avantage  particulier;  par  contre,  il  aurait  l'inconvénient  d'être 
une  vraie  serre  en  été  et  une  glacière  pendant  l'hiver. 

Sous  la  partie  vitrée  sont  disposés  des  rideaux  de  coton  blanc 
soutenus  par  des  anneaux  glissant  sur  des  tringles  et  faciles  à 
déplacer,  de  manière  à  permettre  de  régler  rapidement  l'éclairage 
suivant  l'effet  à  obtenir.  Chaque  photographe  combine  ses  rideaux 
à  sa  guise,  et  ce  n'est  qu'à  la  suite  d'essais  réitérés  qu'il  finit  par 
se  rendre  maître  de  son  éclairage.  Il  y  a  plus  :  tel  opérateur  habi- 
tué à  son  atelier  y  produit  d'excellents  portraits,  puis,  s'il  vient  à 
changer  de  résidence,  se  trouve  embarrassé  dans  son  nouveau 
local  et  doit  recommencer  en  quelque  sorte  un  nouvel  apprentis- 
sage, avant  de  connaître  à  fond  toutes  les  ressources  de  l'éclai- 
rage dont  il  disposera  désormais. 

La  nécessité  de  dominer  les  édifices  voisins  oblige  souvent  le 
photographe  à  installer  son  salon  de  pose  au-dessus  des  toits.  Si 
ses  ressources  ne  lui  permettent  pas  d'avoir  un  ascenseur,  la  clien- 
tèle consent  de  moins  en  moins  à  gravir  six  ou  sept  étages.  En 
outre,  les  variations  de  la  lumière  diurne  occasionnent  souvent 
des  mécomptes,  et,  pendant  les  journées  d'hiver,  il  faut  renoncer  à 


LE  LABORATOIRE  ET  L'ATELIER 


89 


opérer  dès  4  heures 
du  soir.  Aussi  s'est- 
on  préoccupé  depuis 
longtemps  d'utiliser 
une  source    de   lu- 
mière artificielle 
qui  permette  d'opé- 
rer dans  une  -salle  quel- 
conque, même  au  rez-de- 
chaîissée  ou  dans  un  sous- 
sol,  par  n'importe  quel 
temps  et  à  toute  heure  du 
jour  et  de  la  nuit. 

Les  premiers  essais  tentés 
-dans  cette  voie  sont  dus  à 
Sillmann  et  Good,  qui  obte- 
naient, dès  1840,  des  daguer- 
réotypes, en^  se  servant  de 
l'arc  électrique.  En  1851,  Hill 
exécutait  des  portraits  à  l'aide 
de  la  lumière  Drummond  (bâ- 
ton de  chaux  ou  de  magnésie 
rendu  incandescent  par  le  jet 
d'un  chalumeau  oxhydrique). 
En  1857,  Law  de  Newcastle 
faisait,  à  Londres,  des  por- 
traits au  gaz.  Enfin,  Bunsen 
et  Roscoë  faisaient  connaître, 
en  1860,  la  lumière  du  magné- 
sium, qui  est  actuellement  la 
source  de  lumière  artificielle 
la  plus  fréquemment  appli- 
quée aux  opérations  photo- 
graphiques. 

L  arc     électrique    n'est     pas        ^^-  ^aciewig-  et  Lemonnler. 

cependant  entièrement  aban-         ^^»-  ^^'  ~  ^ampe  a  arc  d'atelier. 
donnépar  les  portraitistes,  parce  qu'il  fournit  assezéconomiquement 


90  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

un  éclairage  intense,  sans  bruit  et  sans  fumée.  La  fig.  65  repré- 
sente une  lampe  électrique  destinée  à  Texécutien  des  portraits. 
L'appareil  est  monté  sur  un  solide  pied  à  roulettes;  il  peut  mon- 
ter ou  descendre,  de  façon  à  donner  à  Téclairage  la  direction 

voulue. 

Mais  l'éclairage  artificiel  est  surtout  réalisé  actuellement  au 
moyen  du  magnésium  en  poudre,  brûlant  dans  l'air  ou  au  contact 
d'une  substance  susceptible  de  céder  facilement  'e  l'oxygène, 
comme  le  salpêtre  ou  le  chlorate  de  potasse.  Pour  l'usage  du  pho- 
tographe portraitiste,  les  constructeurs  ont  combiné  des  appareils 
au  moyen  desquels  l'éclairage  artificiel  se  rapproche  le  plus  pos- 
sible des  conditions  dans  lesquelles  la  lumière  diurne  est  ordinai- 
rement employée.  A  cet  effet,  des  lampes  à  poudre  de  magnésium 
sont  réparties  à  l'intérieur  d'un  meuble,  d'une  sorte  d'armoire 
garnie  d'un  vitrage  dont  la  forme  et  la  disposition  rappellent  celles 
des  châssis  par  lesquels  les  ateliers  de  pose  reçoivent  la  lumière 
iu  jour. 

Tel  est,  entre  autres,  le  Relampago  de  M.  Guimaraès  (fig.  66). 
La  poudre  magnésique  est  étalée  sur  une  rigole  qui  occupe  toute 
la  longueur  de  la  cage  vitrée,  au-dessus  d'une  bande  d'amiante 
imprégnée  d'alcool.  Sous  l'action  de  l'air  comprimé  par  une  poire 
de  caoutchouc,  la  rigole  tourne  autour  des  charnières  qui  la  sou- 
tiennent, et  la  poudre  tombe  brusquement  sur  l'alcool  enflammé. 
Un  vif  éclair  jaillit,  et,  aussitôt  après,  un  rideau  se  déroule  der- 
rière le  panneau  vitré  pour  le  protéger  contre  les  produits  de  la 
combustion.  La  fumée  s'échappe  par  un  tuyau  souple  constitué 
par  un  soufflet  en  toile  relié  à  la  cheminée. 

V Atelier  du  vingtième  siècle,  de  M.  Bouillaud,  est  constitué  par 
une  cabine  vitrée  mesurant  2°',o0  de  longueur  et  de  hauteur  va- 
riable selon  le  local  où  elle  doit  être  installée.  A  l'intérieur  sont 
réparties  plusieurs  lampes  à  magnésium,  que  l'on  charge,  avant 
la  pose,  au  moyen  de  cartouches  contenant  un  mélange  de  métal 
pulvérisé  et  d'une  substance  comburante.  Ce  mélange  est  enflammé 
par  une  étincelle  électrique  qui  jaillit  au  moment  même  où  s'ouvre 
l'obturateur.  L'opérateur  tient  en  main  une  poire  de  caoutchouc 
dont  la  pression  détermine  l'ouverture  de  l'obturateur  :  ce  dernier, 
en  s'ouvrant,  établit  un  contact  électrique  qui  ferme  le  circuit 


LE  LABORATOIRE   ET  L'ATEIER 


Cl.  Poulenc. 


Fig.  66.  —  Relampago. 


92 


TRAITÉ    GENERAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


d'allumage.  La  plaque  est  donc  démasquée  à  Tinstant  précis  où 
les  lampes  s'allument.  La  lumière  fournie  par  cet  appareil  est  très 
douce,  quoique  très  intense,  et  fournit  des  portraits  d'un  modelé 
remarquable;  elle  ne  dure  d'ailleurs  qu'une  faible   fraction  de 

seconde,  en  sorte  que, 
lorsque  le  modèle 
commence  à  cligner 
les  paupières ,  sous 
l'effet  de  l'éclair 
éblouissant  qui  vient 
de  briller  à  rimpro-' 
viste,  la  pose  est  déjà; 
terminée. 

Le  Mode7m-photo  de 
M.  Courrier  (fig.  67) 
est  un  appareil  beau- 
coup plus  léger  et  que 
l'on  peut  installer  ra- 
pidement, n'importe 
où.  Malgré  ses  dimen- 
sions restreintes,  il 
permet  d'exécuter  de 
grands  clichés,  jus- 
qu'au format  30  X  40. 
Il  se  compose  d'une 
monture  en  tubes  de 
cuivre  recouverte  d'é- 
toffe incombustible. 
Sur  l'une  des  faces  de 
cette  cage,  l'étoffe  est 
opaque  et  sert  de  réflecteur;  sur  le  côté  opposé,  tourné  vers  le 
modèle,  l'étoffe  est  transparente  et  transmet  la  lumière,  adoucie 
et  diffusée,  émise  par  deux  cartouches  de  poudre  à  base  de  magné- 
sium et  de  zircone.  La  cage  est  supportée  par  un  solide  pied  en 
fer.  Une  manche  en  étoffe  aboutissant  au  dehors,  soit  par  une 
fenêtre,  soit  par  une  cheminée,  assure  l'évacuation  rapide  de  la 
fumée  produite  par  la  combustion  de  la  poudre. 


Cl.  Mackeiïstein. 

Fig.  67.  —  Modern-photo. 


LE  LABORATOIRE   ET  L'ATELIER 


93 


Accessoires  de  pose.  —  L'ameublement  de  Fatelier  dépend  natu- 
rellement du  goût  de  celui  qui  l'installe,  et  le  choix  des  accessoires 
de  pose  est  subordonné  aux  travaux  que  l'on  se  propose  d'y  entre- 
prendre. Il  y  faudra  nécessairement  un  assortiment  de  sièges  de 
styles  variés,  au  moins  une  table,  des  tapis,  des  tentures. 

D'autres  objets  sont  également  indispensables  et  figurent  d'ail- 
leurs dans  tous  les  salons  de  pose.  C'est,  d'abord,  une  série  de 
fonds  qui  représenteront  l'un  un  intérieur,  l'autre  un  paysage.  Un 
fond  clair  où  quelques  nuages  seront  légèrement  indiqués  servira 
à  l'exécution  des  portraits  en  buste  dégradés  ou  vignettes;  un  fond 
noir  sera  nécessaire  si  l'on  a  l'intention  de  tirer  des  épreuves 
dites  à  «  fond  russe  ». 

Ces  fonds  sont  peints  sur  des  toiles  qui  s'enroulent  autour  de 
rouleaux  supportés  par  un  châssis.  On  appelle  fonds  continus  ceux 
qui  représentent,  sur  la  même  toile,  le  fond  proprement  dit  et  la 
surface  qui  doit  être  posée 
sur  le  parquet  (fig.  68).  Si 
la  partie  verticale  du  fond 
représente  un  apparte- 
ment, l'extrémité  qui  sera 
disposée  horizontalement 
représentera  un  tapis  ;  de 
même,  un  fond  reprodui- 
sant l'intérieur  d'une 
église  sera  accompagné 
d'un  parquet  en  mosaïque, 
tandis  qu'un  fond  figurant 
un  jardin  ou  le  bord  de  la 
mer  se  terminera  par  une 
peinture  représentant  du 
sable,  des  cailloux  ou 
bien  du  gazon,  un  sentier, 
etc.  La  partie  étalée  sur  le  plancher  doit  s'étendre  au  moins  à 
2°", 50,  afin  qu'on  n'en  aperçoive  pas  les  bords  sur  l'épreuve.  La 
toile  n'est  clouée,  au  rouleau  ou  au  châssis  porteur  de  fonds,  que 
par  son  extrémité  supérieure;  elle  doit  descendre  librement  et 
dans  une  direction  perpendiculaire,  jusqu'au  sol,  où  elle  affecte 


Cl.  Deraaria-Lapierre. 

Fig.  68.  —  Fond  continu. 


94'  TRAITÉ   GÈf^ÉRAL    DE  PHOTOGRAPHIE 

une  légère  courbe  continue  et  graduelle  qui,  à  la  photographie, 
estompe  le  raccord  entre  la  partie  verticale  et  la  partie  horizontale- 
Les  fonds  sont  peints  à  Thuile,  mais  la  surface  doit  en  être  mate, 
afin  d'éviter  les  reflets  qui  enlèveraient  toute  vraisemblance  à  TefFet 
et  rendraient  toute  illusion  impossible. 

V appui-tête  (fi g.  69)  a  été  pen- 
dant longtemps  un  accessoire  in- 
dispensable. Aujourd'hui,  la  rapi- 
dité de  la  pose  le  rgnd  presque 


Fig.  69.  —  Appui-tête. 


Fifcc.  'iO.  —  htilecieurs. 


toujours  inutile.  Il  y  a  cependant  des  cas  où  cet  instrument  est 
encore  susceptible  de  rendre  quelques  services,  notamment  quand 
on  se  trouve  obligé  d'opérer  avec  une  faible  lumière.  Aussi  n'était- 
il  pas  inutile  de  signaler  l'existence  d'un  outil  presque  oublié  depuis 
quelques  années. 

L'éclairage  transmis  par  le  vitrage  ou  émis  par  les  sources  de 
liimière  artificielle  n'est  pas  toujours  suffisamment  bien  distribué; 


LE  LABORATOIRE  ET  L'ATELIER 


95 


îl  est  parfois  trop  dur,  même  quand  il  est  réglé  au  moyen  des  ri- 
deaux d'atelier.  Aussi  le  photographe  portraitiste  a-t-il  soin  de 
compléter  le  réglage  de  la  lumière  à  l'aide  d'écrans  et  de  réflec- 
teurs. Ce  sont  de  petits  panneaux  formés  d'étoffe  blanche  tendue 
sur  des  cadres  légers.  Suivant  la  posi- 
tion qu'on  leur  donne  par  rapport  au 

modèle  et  à  la  source  de  lumière,  ces  i      '         /  y 

écrans  servent  à  tamiser  et  à  diffuser  ^^7  ,      /         / 

la  lumière,  ou  à  la  refléter  vers  le  côté 
du  sujet  placé  dans  l'ombre,  de  ma- 
nière à  adoucir  le  modelé.  La  fig.  70 
montre  un  de  ces  appareils  et  en  ex- 
plique suffisamment  le  fonctionnement. 
Le  dessin  suivant  représente  Vécran  de 
tête,  dont  l'invention  est  due  à  M.  G. 
Klary.  Certains  photographes  règlent 
complètement  leur  éclairage  à  l'aide 
de  cet  écran,  dont  la  manœuvre  est 
beaucoup  plus  rapide  et  plus  commode 
que  celle  des  rideaux.  11  suflit  de  faire 
varier  l'inclinaison  de  l'écran,  constitué 
par  une  étoffe  transparente,  et  de  l'ap- 
procher plus  ou  moins  du  modèle , 
pour  réaliser  les  divers  effets  d'éclai-  ci.  Caimeis. 
rage.  L'écran  de  tête  permet  d'ailleurs  Fig.  71.  — Ecran  de  tête. 
d'éclairer  convenablement  un  portrait 

dans  une  chambre  ordinaire  et  même  en  plein  air,  dans  une  cour 
ou  dans  un  jardin. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


A.  Baden-Pritchard,  les  Ateliers  photographiques  de  l'Europe,  2  vol.,  Paris  (Gaii» 

thier-Villars),  2^  édition,  1885. 
A.  Delamarre,  le  Laboratoire  de  l'amateur,  Paris  (Ch.  Mendel),  1902. 
J.-M.  Eder,  Das  Atelier  und  Laboraiorium  des  Phoiographen,  2«  édition,  Halle 

a/ S  (W.  Knapp), 


96  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

EssENHiGH-CoRKE,  les  Effets  d'éclairage  daîis  le  portrait,  Paris  (Gh.  Mendel), 

1911. 
G.  Klary,  l'Eclairage  des  portraits  "photographiques,  8^  édition,  Pans  (Gauthier- 

Villars),  1902. 
J.  Fleury-Hermagis,  l'Atelier  de  l'amateur,  2«  édition,  Paris  (G.  Rongier  et 

Gie),  1889. 


LIVRE   II 
PROCÉDÉS   NÉGATEFS 


CHAPITRE   V 

LE    GÉLATINOBROMURE 

Historique.  —  L'emploi  de  la  gélatine  dans  la  préparation  des 
plaques  photographiques  fut  proposé  pour  la  première  fois  par 
Gandin,  en  4861  S  mais  ce  fut  Maddox  qui  prépara,  en  1871,  la 
première  émulsion.  La  gélatine  était  fondue  dans  Feau  chaude 
avec  du  bromure  de  cadmium.  Après  y  avoir  ajouté  une  solution 
de  nitrate  d'argent,  le  mélange  était  coulé  sur  des  plaques  de 
verre.  La  couche  une  fois  sèche  était  prête  à  l'emploi,  mais  possé- 
dait une  faible  sensibilité  et  fournissait  des  images  presque  tou- 
jours voilées. 

En  1873,  King  et  Johnston  reconnurent  que  le  voile  était  dû  à  la 
présence  dés  sels  solubles  restés  dans  la  gélatine  et  les  éliminè- 
rent par  dialyse.  Vers  la  même  époque,  Kennett  mettait  dans  le 
commerce  une  émulsion  sèche  au  gélatinobromure  d'argent  pré- 
parée de  la  manière  suivante.  La  gélatine  est  d'abord  gonflée 
dans  l'eau  froide,  puis  fondue  à  chaud.  On  y  introduit  alors,  d'abord 
du  bromure  de  potassium,  puis  du  nitrate  d'argent.  Il  se  forme 
ainsi  du  bromure  d'argent  insoluble  et  du  nitrate  de  potasse.  On 
verse  ensuite  le  tout  dans  une  cuvette  en  porcelaine  et  on  laisse 
refroidir.  Quand  l'émulsion  est  figée,  on  la  lave,  afin  d'éliminer  les 
sels  solubles  dont  elle  est  imprégnée.  On  fait  alors  fondre  de 

1.  La  Lumière,  1861,  p.  21  et  25, 


98  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

nouveau  la  gelée,  et  on  la  coule  sur  des  plaques  de  verre.  Cette 
émulsion  fournit  des  images  très  pures  et  vigoureuses,  mais  elle 
manque  de  sensibilité. 

Le  7  mars  1878,  Bennett  fit  connaître  le  moyen  de  donner  au 
gélatinobromure  une  sensibilité  jusque-là  inusitée  et  qui  dépassait 
de  beaucoup  celle  du  collodion.  Ce  moyen  consiste  à  laisser  mûrir 
l'émulsion,  en  la  maintenant  à  la  température  de  30  degrés  pen- 
dant plusieurs  jours.  On  arrive  au  même  résultat  plus  rapidement 
en  la  soumettant  pendant  quelques  minutes  à  la  température  de 
100  degrés. 

Les  chiffres  suivants  donneront  une  idée  de  la  sensibilité  que 
Ton  est  parvenu  à  donner  aux  émulsions  *  : 

Collodion  huTnide 1 

Emulsion  lente  pour  projections 10 

—  rapide               —          120 

—  extra-rapide      — 220 

—  ultra-rapide      —          (environ) 600 

M.  Mercier  a  constaté  que  certaines  substances  ajoutées  à  l'é- 
mulsion modifient  considérablement  ses  propriétés  et  permettent 
de  très  grands  écarts  dans  la  durée  du  temps  de  pose.  On  peut 
employer  à  cet  effet,  pour  1  litre  d'eau,  soit  25  gr.  d'émétique,  soit 
20  gr.  de  morphine,  soit  10  gr.  de  codéine.  On  verra  plus  loin  que 
Taddition  de  matières  colorantes  en  très  faibles  quantités  commu- 
nique aux  émulsions  une  sensibilité  qu'elles  n'ont  pas  d'ordinaire 
pour  certaines  radiations,  telles  que  le  vert,  le  jaune  ou  le  rouge. 

Fabrication  des  plaques  au  gélatinobromure.  —  La  préparation 
des  plaques  photographiques  fait  actuellement  l'objet  d'exploita- 
tions très  importantes.  Certaines  usines  fabriquent  chaque  jour 
des  milliers  de  plaques  de  tous  formats,  et,  quoique  la  concurrence 
ait  fait  baisser  les  prix  dans  de  grandes  proportions,  les  produits 
livrés  sont  de  plus  en  plus  parfaits.  On  ne  trouve  plus  que  rare- 
ment des  plaques  piquées  de  trous  ou  inégalement  recouvertes 
d'émulsion.  La  sensibilité  a  été  accrue,  et  néanmoins  la  tendance 
au  voile  n'a  pas  notablement  augmenté.  Les  plaques  actuelles 

1.  D'après  Hough,  Journal  of  the  Photographie  Society,  1894,  à  l'exception  du 
dernier  chiffre,  relatif  aux  plaques  les  plus  récentes. 


LE  GÉLATINOBROMURE  99 

sont,  en  moyenne,  à  peu  près  vingt  fois  plus  sensibles  qu'au  dé?jut 
et  ne  coûtent  pas  la  moitié  de  ce  qu'elles  coûtaient  à  cette  époque. 
On  pourrait  seulement  critiquer  la  manière  dont  les  verres  sont 
coupés  :  il  arrive  trop  souvent  que  les  plaques  présentent  sur 
leurs  bords  des  arêtes  vives  et  tranchantes,  susceptibles  de  bles- 
ser les  doigts  de  l'opérateur  obligé  de  les  manipuler  dans  un  labo- 
/atoire  très  faiblement  éclairé  ou  même  dans  Tobscurité  complète. 
Les  procédés  de  fabrication  varient  suivant  les  usines.  Chaque 
usine,  d'ailleurs,  utilise  plusieurs  formules,  selon  la  nature  des 
plaques  à  préparer  :  plaques  lentes,  plaques  de  rapidité  moyenne, 
plaque  de  sensibilité  extrême,  plaques  orthochromatiques,  pla- 
ques anti-halo,  etc.  A  titre  d'exemple,  nous  reproduisons  la  for- 
mule indiquée  par  Eder  : 

A.  Bromure  de  potassium , 20  gr. 

lodure  de  potassium 0,6. 

Gélatine  tendre 20 

Eau 200  ce. 

B-  Nitrate  d'argent 30  gr. 

Acide  nitrique 1  à2  gouttes. 

Eau  distillée ' i 125  ce. 

C.  Gélatine  dure 30  gr. 

Eau. 500  ce. 

La  gélatine  est  mise  à  gonfler  à  froid  dans  la  quantité  d'eau 
indiquée  (solution  A).  On  y  ajoute  les  sels,  et  Ton  fait  fondre  au 
bain-marie.  On  ajoute  alors  la  solution  B,  en  agitant  le  mélange, 
et  l'on  obtient  la  maturation  par  une  coction  à  l'eau  bouillante 
d'environ  20  minutes.  On  refroidit  ensuite,  et,  quand  la  gelée  s'est 
figée,  on  la  lave  au  canevas.  On  ajoute  enfin  la  solution  C,  on  fait 
chauff'er,  et  on  coule  sur  les  plaques. 

L'élimination  des  sels  restés  dans  la  gélatine  nécessite  des  lava- 
ges prolongés,  qui  rendent  la  fabrication  onéreuse.  Aussi  a-t-on 
cherché  à  préparer  autrement  le  bromure  d'argent.  C'est  ainsi 
qu'au  lieu  de  faire  agir  le  nitrate  d'argent  sur  le  bromure  de 
potassium,  ce  qui  laisse  dans  la  couche  du  nitrate  de  potasse,  on 
met  en  présence,  soit  l'acide  bromhydrique  et  le  carbonate  d'ar- 
gent, soit  le  bromure  d'ammonium  et  l'oxyde  d'argent  dissous 
dans  l'ammoniaque.  Il  se  produit  alors,  en  même  temps  que  du 
bromure  d'argent,  un  composé  x,olatil  qui  s'élimine  de  lui-même. 


100  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

La  sensibilité  de  l'émulsion  dépend  de  sa  maturation,  mais 
cette  opération  n'est  pas  sans  difficulté.  Quand  Témulsion  est 
préparée  à  une  température  aussi  basse  que  peut  le  comporter 
la  fusion  de  la  gélatine  (environ  27  ou  28  degrés),  elle  est  absolu- 
ment transparente,  mais  très  peu  sensible.  Si,  pour  en  accroître 
la  sensibilité,  on  la  soumet  à  Faction  de  la  chaleur,  on  la  voit 
devenir  peu  à  peu  opaline,  et  Fexamen  au  microscope  montre  que 
le  bromure  d'argent  s'agglomère  en  grains  de  plus  en  plus  volu- 
mineux. La  rapidité  n'est  ainsi  acquise  qu'au  détriment  de  la 
finesse  des  images,  et  cet  inconvénient  a  longtemps  limité  la  sen- 
sibilité des  émulsions.  Aujourd'hui,  la  plupart  des  fabricants  arri- 
vent, à  l'aide  de  recettes  tenues  secrètes,  à  livrer  des  plaques  très 
rapides  à  grain  relativement  fin.  Néanmoins,  l'émulsion  n'en  est 
pas  aussi  fine  que  celle  des  plaques  lentes  et  ne  convient  pas  aux 
travaux  de  reproductions,  qui  exigent  une  grande  perfection  de 
détails. 

L'émulsion  est  coulée  automatiquement  sur  les  plaques  au  moyen 
dé  machines  spéciales  qui  assurent  à  cette  opération  toute  la  régu- 
larité nécessaire.  De  grandes  feuilles  de  verre  sont  mécaniquement 
entraînées  sur  un  long  support  horizontal.  Elles  passent,  d'un 
mouvement  uniforme,  sous  le  distributeur  relié  au  réservoir  d'où 
coule  l'émulsion  tiède.  Le  verre  recouvert  de  gélatinobromure 
continue  son  mouvement  de  progression,  et  l'émulsion  refroidie 
se  prend  en  gelée.  La  plaque  est  alors  portée  dans  le  séchoir,  vaste 
pièce  ventilée  à  température  constante.  Après  dessiccation,  les 
feuilles  de  verre  sont  découpées  au  diamant  suivant  les  différents 
formats  usuels,  puis  emballées  dans  ces  boîtes  de  carton  que  con- 
naissent tous  les  photographes  et  que  l'on  peut  se  procurer  même 
dans  les  bazars.  Rappelons  que  les  plaques  se  trouvent  séparées  les 
unes  des  autres  par  de  petites  bandes  de  carton  plissé  et  envelop- 
pées, par  paquets  de  six  ou  de  quatre,  dans  du  papier  rouge  ou  noir. 

Il  va  sans  dire  que  toutes  ces  opérations  sont  effectuées  à  l'abri 
de  la  lumière  blanche,  dans  des  locaux  éclairés  par  des  lanternes 
à  verres  rouges  ou  verts. 

Les  dimensions  normales  que  le  Congrès  international  de 
Bruxelles  avait  proposé,  en  1891,  de  donner  aux  plaques  sensibles 
sont  les  suivantes  : 


LE   GELATINOBROMURE 


101 


Série  3/4 

Série  carrée 

36-48 

48-48 

24-32 

36-36 

18-24 

24-24 

12-16 

12—12 

9-12 

8-8 

Série  2/3 
32-48 
24-36 
16-24 
12-18 
8—12 


Le  commerce  n'a  adopté  que  quelques-uns  de  ces  formats  et  a 
combiné  un  grand  nombre  de  dimensions,  dont  voici  les  plus 
usuelles  :    ^ 

MESURES    FRANÇAISES 


41/2 

X 

6  cent.           1 

6 

X 

8 

— 

61/2 

X 

9 

— 

8 

X 

8 

— 

8 

X 

9 

— 

8 

X 

10 

— 

8  1/2x10  cent. 

9  xi2   — 

12  Xl5   — 

13  Xi8  — 
15  x21  — 
18        X24   — 

MESURES   ANGLAISES 


21x27  cent. 
24x30  — 
27x33  — 
30x40  — 
40x50  — 
50x60    — 


31/4X  41/4p.  =  8  X101/2C. 
4x5  —  =  10  X 12 1/2  — 
43/4X  61/2  — =12  X  161/2  — 
5  X  71/2— =121/2x19  — 
5  X  8  —=121/2x20  - 
61/2X  81/2  — =  161/2x211/2  — 
8       xlO       —  =  20       x25       — 


10  xl2  p.  =25  X  30 1/2  c. 
121/2x151/5  — =  30 1/2  X  381/2- 
23  xl7  —  =  581/2x  43  — 
25  x21  —  =  63  X  53  — 
30       x25        —=76        X   63        — 


30       x40 


:76       X102        - 


Supports  souples.  —  Le  support  de  la  couche  sensible  a  donné 
lieu  à  d'innombrables  recherches.  Le  verre  a  l'avantage  d'être 
parfaitement  transparent,  mais  il  est  lourd  et  fragile.  On  a  tenté, 
à  plusieurs  reprises,  de  revenir  au  papier,  dont  l'emploi  remonte 
aux  premiers  temps  de  la  photographie,  mais  sa  transparence 
imparfaite  prolonge  le  tirage  des  épreuves,  et  les  défauts  de  sa 
texture  nuisent  à  la  pureté  des  images.  On  est  cependant  parvenu 
à  fabriquer  des  papiers  dont  l'homogénéité  est  très  suffisante 
dans  la  plupart  des  cas.  Néanmoins,  le  support  actuellement  le 
plus  usité,  après  le  verre,  c'est  le  celluloïd.  Dès  4881,  Stebbing 
avait  proposé  l'emploi  de  cette  substance,  mais  s'était  vu  obligé 
d'y  renoncer,  parce  qu'il  n'était  pas  possible,  à  cette  époque,  de 
l'obtenir  en  plaques  régulières  et  suffisamment  diaphanes.  Carbutt, 
en  1889,  réussit  à  fabriquer  des  pellicules  très  minces.  La  même 
année,  la  Compagnie   Eastman  mettait  en  vente  des  pellicules 


102  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PH 0  TO  GRAPHIE 

inextensibles,  inaltérables  et  aussi  transparentes  que  le  verre. 
Depuis  lors,  Feinploi  du  celluloïd  n'a  cessé  de  se  répandre  chaque 
jour  davantage,  et  la  vogue  dont  jouissent  auprès  des  amateurs 
les  vitroses  en  celluloïd  semi-rigide  aussi  bien  que  les  films  ou 
bandes  souples  est  amplement  justifiée  par  la  commodité  et  la 
facilité  de  leur  application.  Nous  avons  d'ailleurs  déjà  décrit  le 
mode  de  fonctionnement  du  film-pack  et  des  bobines  pelliculai- 
res.  Les  feuilles  de  celluloïd  qui  ne  sont  recouvertes  de  gélatine 
que  sur  Tune  de  leurs  faces  ont  le  défaut  de  se  rouler  et  de  rester 
tordues  lorsqu'on  les  fait  sécher,  après  les  avoir  passées  dans  les 
différents  liquides  que  comportent  les  procédés  photographiques. 
Les  fabricants  évitent  cet  inconvénient  en  coulant  sur  la  face  oppo- 
sée à  Fémulsion  une  couche  de  gélatine  ordinaire,  qui  se  gonfle 
dans  l'eau  de  la  même  manière  que  le  gélatinobromure  et  subit, 
en  séchant,  le  même  retrait.  La  pellicule  reste  ainsi  parfaitement 
plane. 

La  couche  sensible  est  quelquefois  étendue  sur  une  plaque  de 
verre  enduit  de  talc  ou  d'encaustique  et  doublée  d'une  pellicule  de 
collodion,  de  façon  à  pouvoir  être  facilement  séparée  de  son  sup- 
port et  reportée  sur  un  autre.  Ces  pellicules  détachables  sont  très 
utiles  dans  certains  procédés  de  gravure  ou  bien  dans  la  photo- 
graphie en  couleurs.  La  pellicule  n'adhère  à  son  support  que  par 
les  bords; pour  la  détacher, il  suffit  de  pratiquer  une  incision  tout 
autour,  ai  ou  2  millimètres  des  bords,  à  l'aide  d'un  canif. 

Plaques  orthochromatiques.  —  Si  l'on  expose  au  spectre  solaire 
une  plaque  sensible  ordinaire,  on  remarque,  en  la  traitant  par  les 
réactifs  habituels,  qu'elle  est  impressionnée  dans  la  région  bleue 
et  violette,  ainsi  que  dans  l'ultra-violet.  Mais,  si  l'exposition  n'est 
pas  trop  prolongée,  les  autres  régions  du  spectre,  même  le  jaune 
et  l'orangé,  qui  nous  paraissent  si  lumineux,  ne  déterminent 
qu'une  réduction  très  faible.  Enfin,  le  rouge  et  une  certaine  région 
du  vert  ne  laissent  à  peu  près  aucune  trace  d'impression. 

La  sensibilité  du,  bromure  d'argent  est  donc  très  diff'érente  de 
celle  de  notre  œil,  et  il  en  résulte  que  la  reproduction  de  certains 
sujets  est  très  infidèle.  Cette  différence  se  traduit  même  par  des 
effets  choquants.  La  peau  est  reproduite  plus  noire  qu'elle  n'est  en 
réalité;  des  taches  de  rousseur  à  peine  visibles  sont  très  exagé- 


.    LE    GELATINOBROMURE  '  103 

rées.  Dans  un  paysage  bien  éclairé,  Tazur  foncé  d'un  ciel  limpide 
est  traduit  par  une  surface  uniformément  blanche,  tandis  que  le 
vert  clair  des  prairies  est  figuré  par  une  teinte  sombre. 

Ces  anomalies  s'atténuent  dans  une  certaine  mesure,  en  pro- 
longeant le  temps  de  pose,  parce  que  la  réduction  du  sel  d'argent 
ne  demeure  pas  proportionnelle  à  la  durée  de  l'exposition,  mais 
ce  palliatif  est  souvent  insuffisant  et  n'est  du  reste  pas  toujours 
possible,  notamment  quand  il  s'agit  de  portraits  ou  de  sujets  en 
mouvement  exigeant  une  pose  très  courte. 

Il  était  donc  nécessaire  de  rendre  le  bromure  d'argent  sensible 
à  toutes  les  radiations  visibles. 

En  1873,  Vogel  découvrait  que  l'addition  au  bromure  d'argent 
sec  d'une  substance  absorbant  certains  rayons  colorés  le  rend 
sensible  à  ces  mêmes  rayons.  Ainsi,  l'addition  de  coralline  déter- 
mine la  sensibilisation  pour  le  jaune,  et  le  vert  d'aniline  qui  absorbe 
le  rouge  rend  la  couche  sensible  au  rouge.  Il  suffit  d'ajouter  une 
très  petite  quantité  de  ces  matières  colorantes,  pour  produire  l'ef- 
fet voulu.  Et  même,  si  l'on  en  ajoute  trop,  l'effet  produit  est  moin- 
dre. Il  s'agit  seulement  de  colorer  le  sel  d'argent;  si  le  coloran'^, 
se  trouve  en  excès,  il  colore  aussi  le  substratum  (collodion  ou 
gélatine)  du  sel  sensible,  et  alors  cette  couche  colorée  absorbe 
inutilement  les  radiations,  qu'elle  empêche  de  venir  impression- 
ner le  sel  d'argent. 

Vogel  assurait  que  toutes  les  solutions  colorantes  déterminaient 
un  effet  sensibilisateur.  Sa  théorie  ainsi  généralisée  a  été  contestée. 
n  convient  de  remarquer  que  beaucoup  de  couleurs  ne  présentent 
pas  la  même  teinte  à  l'état  solide  qu'en  solution.  C'est  le  pouvoir 
absorbant  à  l'état  solide  qu'il  faut  considérer  :  par  là  s'expliquent 
certaines  divergences  entre  les  expérimentateurs. 

Ce  qui  est  certain,  c'est  qu'un  grand  nombre  de  matières  colo- 
rantes usuelles  modifient  la  sensibilité  des  émulsions.  En  1874, 
Becquerel  signalait  la  chlorophylle  comme  sensibilisant  le  bro- 
mure d'argent  pour  le  rouge- orangé.  En  1876,  Waterhouse 
désignait  l'éosine  comme  sensibilisateur  pour  la  région  verte  du 
spectre.  On  a  également  employé,  avec  succès,  l'érythrosine,  la 
chrysaniline,  le  violet  de  méthyle,  la  cyanine,  le  vert  malachite, 
la  rhodamine,  la  nigrosine,  le  rose  Bengale,  etc. 


1C4  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

Plus  récemment,  les  chimistes  ont  réussi  à  préparer  des  ma- 
tières colorantes  spécialement  destinées  à  la  sensibilisation  des 
plaques  photographiques.  Ces  substances  ne  sont  pas  utilisées  en 
teinture,  comme  les  précédentes,  à  cause  de  leur  prix  élevé  et  de 
leur  trop  faible  résistance  à  la  lumière,  mais  leur  pouvoir  sensibi- 
lisateur est  extrêmement  remarquable.  Parmi  ces  matières  colo- 
rantes, nous  citerons  le  pinachrome,  le  pinacyanol,  le  pinaverdol 
elTorthochrome. 

On  trouve  dans  le  commerce  des  plaques  sensibilis^ées  soit  pour 
le  vert,  soit  pour  le  rouge,  et  désignées  sous  le  nom  de  plaques 
orthochromatiques  (de  6p6oç,  juste,  et  i9^\^^^  couleur).  Il  en  existe 
aussi  qui  sont  rendues  sensibles  à  la  fois  au  vert,  au  jaune  et  au 
rouge  :  on  les  nomme  panchromatiques  (de  irav,  tout,  xp^P-^»  cou- 
leur). Ces  plaques  portaient  autrefois  le  nom  <ï isochromatiques 
(fffoç,  égal,  xpw(xa,  couleur),  mais  il  y  a  actuellement  une  tendance 
à  renoncer  provisoirement  à  ce  qualificatif,  qui  n'est  pas  exact. 
En  effet,  une  émulsion  a  beau  être  rendue  sensible  à  la  région  du 
spectre  qui  s'étend  du  bleu-vert  au  rouge  extrême,  elle  n'en  con- 
serve pas  moins  un  excès  de  sensibilité  pour  le  bleu,  le  violet  et 
même  Fultra-violet  invisible. 

Pour  compenser  cette  inégalité,  il  est  nécessaire  d'interposer 
un  verre  jaune  en  avant  ou  en  arrière  de  l'objectif»  ou  bien  d'im- 
biber la  gélatine  d'une  solution  colorante  jaune  destinée  à  produire 
le  même  effet  et  facile  k  éliminer  soit  par  de  simples  lavages,  soit  à 
l'aide  d'un  réactif  décolorant.  Les  écrans  liquides  fournissent  des 
résultats  plus  constants,  l'absorption  dépendant  de  la  concentra- 
tion de  la  solution  et  de  l'épaisseur  de  la  couche  liquide.  Les  subs- 
tances proposées  à  cet  effet  sont  l'aurantia,  l'acide  picrique,  l'éo- 
sine,  le  jaune  naphtol,  le  bichromate  de  potasse,  etc.  Le  D'"  Eder 
et  M.  Edouard  Belin  leur  préfèrent  le  chromate  neutre  de  potasse 
à  4  p.  100.  Cette  solution  absorbe  totalement  les  bleus,  sans  em- 
piéter sur  les  régions  voisines  du  spectre,  et  le  retard  de  pose 
qu  elle  occasionne  est  moindre  qu'avec  le  bichromate.  Le  liquide 
€st  placé  dans  une  cuve  en  verre  à  faces  parallèles,  telle  que  celle 
<lont  le  dessin  est  représenté  (fig.  72).  Elle  est  constituée  par  deux 
disques  de  verre  maintenus  écartés  l'un  de  l'autre  par  un  anneau 
de  même  matière.  Deux  orifices  fermés  par  des  bouchons  de  liège 


LE   GÈLATINOBROMURE 


105 


servent  à  remplir  et  à  vider  la  cuve.  Une  monture  en  laiton  en- 
toure le  récipient  et  sert  à  le  fixer  sur  le  parasoleil  de  Tobjectif. 
Pour  que  l'interposition  de  la 
cuve  ne  nuise  pas  à  la  netteté  de 
l'image,  il  faut  que  les  deux  dis- 
ques de  verre  soient  travaillés 
avec  la  même  précision  que  les 
lentilles  de  l'objectif. 

Les  émulsions  orthochroma- 
tisées  au  cours  de  leur  fabrica- 
tion conservent  pendant  assez 
longtemps  leur  sensibilité  pour 
les  radiations  peu  actiniques. 
Néanmoins  cette  sensibilité  s'al- 
tère, à  la  longue,  dans  des  con- 
ditions encore  mal  définies  : 
aussi  est-il  préférable,   autant 


¥ig.  Iz.  —  Objectif  muni  d'un  écran 
liquide. 


que  possible,  d'utiliser  ces  plaques  dans  l'année  de  leur  fabrication. 

On  peut  également  orthochromatiser  une  plaque  ordinaire,  en 
l'imprégnant  d'une  solution  colorante  convenablement  préparée. 
Cette  sensibilisation,  dite  au  tremipé,  donne  d'excellents  résultats, 
mais  ne  persiste  que  peu  de  temps,  si  elle  n'est  pas  effectuée  avec 
tout  le  soin  voulu. 

Voici  quelques  formules  de  sensibilisation  orthochromatique  au 
trempé  : 

1.  Pour  sensibiliser  au  jaune  et  au  vert  : 

Solution  d'érythrosine  à  2  p.  100 6  ce. 

Ammoniaque  pure 2   — 

Eau  distillée 100  — 

La  plaque  y  est  laissée  deux  minutes  et  séchée  dans  l'obscurité. 

2.  Pour  sensibiliser  au  jaune,  au  jaune-orangé  et  au  rouge- 
orangé.  : 

Solution  alcoolique  de  rouge  de  quinoléine  1  p,  500 8  ce. 

—             —               cyanine  à  1  p.  500 1  — 

Eau -200  — 

Ammoniaque 2  — 


106  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE  . 

3.  Bain  pour  plaques  panchromatiques  : 

Eau  distillée 200  ce. 

Ammoniaque 2    — 

Solution  d'orthochrome  T  au  l.OOQe 3  à4     — 

La  solution  d'orthochrome  est  préparée  en  dissolvant  à  chaud 
1  gramme  de  cette  substance  dans  100  ce.  d'alcool  à  90°.  Après 
•dissolution,  on  ajoute  500  ce  d'alcool  et  400  ce  d'eau  distillée. 
Cette  liqueur  doit  être  conservée  dans  l'obscurité.  La  solution  d'or- 
thochrome  peut  être  remplacée  par  des  solutions  de  pinachrome 
ou  de  pinaverdol  préparées  de  la  même  manière.  Avec  ces  dernières 
matières  colorantes,  la  sensibilité  est  plus  accentuée  pour  le  rouge. 
Après  l'immersion  de  la  plaque  dans  l'un  quelconque  de  ces  trois 
bains,  il  est  essentiel  de  la  rincer  pour  éliminer  l'excès  de  colorant, 
«t  surtout  de  la  faire  sécher  le  plus  rapidement  possible  à  l'air 
libre,  ou  mieux  dans  une  étuve  ventilée.  Grâce  à  ces  précautions, 
M.  Ch.  Simmen  a  réussi  à  conserver  des  plaques  qui  possédaient 
encore  au  bout  de  deux  ans  toute  leur  sensibilité  chromatique. 

En  ajoutant  à  ces  bains  5  à  6  ce.  d'une  solution  alcoolique  au 
500*  de  rouge  de  quinoléine,  les  plaques  sont  moins  sujettes  au 
Toile  et  se  conservent  plus  longtemps.  En  supprimant  l'ammonia- 
que, la  sensibilité  pour  le  rouge  et  le  vert  est  légèrement  diminuée, 
mais  la  dessiccation  peut  être  moins  rapide  sans  inconvénient,  si 
les  plaques  doivent  être  employées  dans  un  délai  d'environ  un 
mois. 

Les  plaques  sensibilisées  pour  le  rouge  ne  sauraient  évidemment 
être  manipulées  à  la  lumière  d'une  lanterne  à  verre  rouge  :  elles  y 
seraient  certainement  voilées.  Le  laboratoire  sera  donc  éclairé  par 
une  lanterne  à  verre  vert.  Pour  les  plaques  sensibilisées  au  vert, 
on  se  servira  de  l'éclairage  rouge.  Enfin,  les  plaques  panchroma- 
tiques exigeront  des  précautions  toutes  particulières.  La  lumière, 
très  atténuée,  sera  transmise  par  un  verre  enduit  de  tartrazine  et 
de  violet  de  méthyle  (V.  p.  79).  Et  même,  si  l'émulsion  est  très 
sensible,  il  vaudra  mieux  s'exercer  à  charger  les  châssis  dans  l'obs- 
curité complète.  C'est  également  à  l'abri  de  toute  lumière  que  les 
plaques  seront  extraites  des  châssis  et  placées  dans  la  cuvette  con- 
tenant le  bain  de  développement.  Néanmoins,  une  fois  l'émulsion 
bien  imbibée,  il  n'y  aura  aucun  inconvénient  à  regarder  le  cliché 


/ 


LE    GÊLATINOBROMURE  101 

à  la  lumière  rouge  :  M.  E.  Valenta  a  reconnu*  que  la  sensibilité 
communiquée  aux  émulsions  pour  les  rayons  jaunes  et  rouges  est 
considérablement  diminuée  dès  leur  imrnersion  dans  le  révéla- 
teur. 

Plaques  anti-halo.  —  Les  plaques  ordinaires  se  prêtent  mal  à 
la  reproduction  des  sujets  qui  présentent  de  fortes  oppositions,  de 
vives  lumières  se  détachant  sur  des  surfaces  sombres.  Tels  sont 
les  paysages  éclairés  à  contre-jour  et  les  vues  d'intérieurs  dans 
lesquelles  sont  comprises  des  fenêtres  bien  éclairées  ou  des  sources 
lumineuses  (lampes  ou  foyers)  placées  devant  un  fond  obscur.  On 
remarque  alors  que  la  lumière  empiète  sur  les  parties  sombres 
et  se  trouve  entourée  d'une  sorte  d'auréole  ou  halo.  Ce  phéno- 
mène est  dû  à  la  lumière  qui  a  traversé  de  part  en  part  la  couche 
sensible  et  son  support,  et  s'est  ensuite  réfléchie  sur  la  seconde 
face  du  verre  ou  de  la  pellicule. 

Pour  éviter  le  halo,  il  suffit  donc  d'empêcher  cette  réflexion 
nuisible.  On  y  parvient  soit  en  enduisant  le  dos  de  la  plaque  d'une 
couleur  opaque  mêlée  à  un  agglutinant,  soit  en  interposant  entre 
l'émulsion  et  son  support  une  sous  couche  colorée  absorbante. 
Dans  le  premier  cas,  l'anti-halo  est  éliminé  par  les  bains  et  les 
eaux  de  lavage  qui  dissolvent  l'agglutinant;  dans  le  second,  il 
est  décoloré  ou  dissous  à  l'aide  de  réactifs  appropriés.  11  existe 
même  des  plaques  dont  l'anti-halo  est  constitué  par  une  substance 
soluble  dans  l'un  des  bains  nécessaires  aux  opérations  photo- 
^aphiques,  en  sorte  que  l'emploi  de  ces  plaques  n'entraîne 
aucune  espèce  de  complication.  C'est  ainsi  qu'on  a  formé  l'anti- 
halo  d'une  couche  de  gélatine  imprégnée  d'iodure  de  plomb.  Cette 
substance,  jaune  opaque,  absorbe  complèteoient  les  radiations 
actiniques  et  se  trouve  ensuite  éliminée  par  le  bain  de  fixage  à 
l'hyposuJflte  de  soude.  On  trouve  également  dans  le  commerce 
des  pla(|ues  dont  l'anti-halo  est  constitué  par  une  feuille  enduite 
d'un  adhésif  coloré  en  noir.  Après  la  pose,  ou  après  l'achèvement 
du  cliché,  cette  feuille  est  séparée  du  verre. 

Les  plaques  anti-halo  doivent  être  employées  chaque  fois  que 
l'on  a  à  reproduire  un  sujet  à  contrastes  violents  :  couchers  de 

1.  Photogr.  Coirespondenz,  1902,  p.  214. 


108  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

soleil,  sous-bois  où  les  branches  laissent  apercevoir  le  ciel,  por- 
traits à  contre-jour,  vues  prises  la  nuit  et  comportant  des  sources 
de  lumière  comprises  dans  le  champ  de  Finstrument.  A  défaut  de 
plaques  anti-halo,  on  utilisera  des  plaques  ordinaires  dont  on  aura 
eu  soin  d'enduire  le  verre  d'un  pigment  opaque.  L'anti-halo  le  plus 
simple  est  préparé  en  mélangeant  du  noir  de  fumée  ou  de  Tocre 
avec  de  la  colle  de  pâte  ou  de  la  dextrine.  Le  mélange  suivant, 
indiqué  par  Lévy,  a  l'avantage  de  sécher  en  5  minutes  : 

Solution  épaisse  de  g-omme  arabique ^50  gr. 

Caramel 50  — 

Terre  de  Sienne  brûlée  broyée  à  l'eau 100  — 

Alcool iOO  ce. 

Pour  enlever  cet  enduit  avant  le  développement,  de  manière  à 
pouvoir  examiner  le  cliché  par  transparence,  il  suffît  de  placer  au 
fond  d'une  cuvette  des  morceaux  de  drap  imbibés  d'eau.  La  gomme 
en  contact  avec  ce  drap  se  gonfle,  et,  si  l'on  passe  ensuite  un  linge 
sec,  le  pigment  y  adhère.  La  plaque  se  trouve  ainsi  débarrassée  de 
l'anti-halo  sans  que  la  couche  sensible  ait  été  mouillée. 

Conservation  des  plaques.  — Les  plaques  au  gélatinobromure, 
ainsi  que  les  pellicules  et  les  papiers  recouverts  d'émulsion,  doi- 
vent être  préservés  avec  soin  de  la  lumière  et  de  l'humidité.  Les 
voyageurs  qui  entreprennent  des  expéditions  lointaines  doivent 
emballer  leurs  provisions  de  plaques  dans  dfts  caisses  métalliques 
soudées.  Il  faut  également  éviter,  autant  que  possible,  l'action  pro- 
longée d'une  température  trop  élevée,  qui  risquerait  de  voiler  la 
plaque  :  la  couche  sensible  plongée  dans  le  bain  de  développement 
y  noircirait  comme  si  elle  avait  été  exposée  à  la  lumière. 

Si  toutes  les  précautions  voulues  sont  observées,  les  plaques 
conservent  longtemps  toutes  leurs  qualités.  On  en  trouve  bien 
quelques-unes  qui,  par  suite  de  quelque  défaut  de  fabrication, 
présentent,  au  bout  de  quelques  mois,  un  voile  marginal,  c'est-à- 
dire  se  couvrent,  au  développement,  de  taches  noires  généralement 
limitées  aux  bords;  mais,  par  contre,  on  cite  d'excellents  clichés 
obtenus  sur  des  plaques  datant  de  plus  de  vingt  ans. 

La  conservation  des  pellicules  et  des  papiers  est  très  incertaine, 
•à  cause  des  réactions  que  le  celluloïd  ou  l'encollage  sont  suscep- 
tibles de  provoquer  à  la  longue. 


LE    GÊLATINOBROMURE  409 

Sensitométrie.  —  Pour  connaître  la  sensibilité  dune  émulsion, 
il  est  nécessaire  d'avoir  un  moyen  de  la  comparer  à  un  étalon.  Il 
est  souvent  utile  d'évaluer  exactement  le  temps  de  pose,  et  alors 
il  faut  naturellement  mesurer  la  sensibilité  de  la  plaque,  lui  appli- 
quer un  chiffre,  un  coefficient  susceptible  d'entrer  dans  la  formule 
qui  indiquera  les  calculs  à  effectuer. 

Tel  est  le  but  de  la  sensitométrie.  Plusieurs  méthodes  ont  été 
proposées  pour  comparer  la  sensibilité  des  émulsions.  Nous  décri- 
rons d'abord  celle  de  Warnerke,  qui  est  encore  usitée  actuellement, 
quoiqu'il  en  existe  de  plus  précises.  Elle  est  basée  sur  l'emploi 
d'un  étalon  sensitomètre  éclairé  par  une  lumière  supposée  cons- 
tante, toujours  égale  à  elle-même.  * 

Cette  lumière  est  celle  que  fournit  la  phosphorescence  d'une 
plaque  enduite  de  sulfure  de  calcium  devant  laquelle  on  a  fait 
brûler  un  morceau  de  fil  de  magnésium.  Cette  phosphorescence 
ne  peut  pas  dépasser  une  certaine  intensité,  quel  que  soit  l'éclat 
de  la  source  lumineuse  à  laquelle  le  sulfure  a  été  soumis.  On 
aurait  beau  brûler  trois  ou  quatre  fois  plus  de  magnésium,  la 
lueur  émise  ensuite  par  la  plaque  phosphorescente  n'en  serait 
nullement  augmentée. 

Quant  au  sensitomètre,  c'est  un  cadre  dans  lequel  la  plaque  à 
essayer  est  appliquée  contre  une  glace  sur  laquelle  est  disposée 
une  échelle  à  teintes  graduées-  Chaque  teinte  ou  degré,  de  moins 
en  moins  translucide,  porte  à  son  centre  un  numéro  opaque.  Au 
numéro  1  correspond  la  teinte  la  plus  légère,  et  le  numéro  25  est 
celui  de  la  teinte  la  moins  transparente.  Cette  échelle  graduée 
étant  placée  devant  la  plaque  dont  on  veut  mesurer  la  sensibilité, 
on  l'approche  à  1  centimètre  de  la  plaque  phosphorescente  aussitôt 
après  que  celle-ci  a  reçu  l'impression  lumineuse  du  fil  de  magné- 
sium. Au  bout  de  30  secondes,  la  plaque  phosphorescente  est  éloi- 
gnée, et  l'on  développe  la  plaque  sensible.  Le  développement 
nécessite  quelques  précautions  :  produits  très  purs  exactement 
dosés,  température  constante,  durée  d'action  du  révélateur,  tous 
ces  éléments  doivent  être  vérifiés  avec  soin.  Le  cliché  ainsi  obtenu 
reproduit  une  partie  de  l'échelle  graduée  :  les  derniers  numéros 
ne  sont  pas  visibles,  les  teintes  correspondantes  qui  sont  les  plus 
opaques  n'ont  pas  transmis  assez  de  lumière  pour  déterminer  une 

7 


110 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


impression  nettement  apparente.  Le  dernier  numéro  visible  est 
celui  qui  indique  la  sensibilité  de  l'émulsion. 

Cette  méthode  ne  permet  que  des  appréciations  médiocres,  car 
elle  est  dépourvue  de  précision.  L'échelle  des  graduations  varie 
avec  chaque  écran,  et  d'ailleurs,  même  en  admettant  que  ces  diffé- 
rences n'existent  pas  au  début,  il  reste  évident  que  les  opacités 
relatives  se  modifient  à  la  longue.  D'autre  part,  la  source  lumi- 
neuse employée  ne  pouvant  être  elle-même  l'objet  d'aucune  mesure 
photométrique,  il  semble  paradoxal  d'en  faire  le  facteur  principal 
d'une  mesure  sensitométrique. 
Il  convient  d'ajouter  que,  parmi  les  autres  méthodes  proposées 

jusqu'ici,  il  n'en  existe  au- 
cune de  parfaite.  La  meil- 
leure, à  notre  avis,  serait 
la  méthode  de  Scheiner,  qui 
est  d'ailleurs  depuis  quel- 
ques années  la  plus  fré- 
quemment employée  par  les 
fabricants  de  plaques. 

Le  sensitomètre  Scheiner 
(fig.  73)  se  compose  : 
1°  D'une  lampe  à  benzine 
B,  dont  la  flamme  est  exactement  réglée; 

2°  D'un  disque  opaque  S  percé  d'une  ouverture  a  dont  la  largeur 
va  en  diminuant  du  centre  à  la  circonférence  ; 

3°  D'un  châssis  C  dans  lequel  la  plaque  à  essayer  est  placée  der- 
rière une  lamelle  0  où  sont  découpés  des  chiffres  et  des  raies  formant 
une  échelle  graduée. 

Le  disque,  disposé  entre  le  châssis  et  la  lampe,  à  \  mètre  de 
celle-ci,  reçoit  un  mouvement  de  rotation  rapide  (400  à  800  tours 
par  minute).  La  plaque  reste  exposée  dans  ces  conditions  pendant 
une  minute.  Il  est  évident  que  l'intensité  de  l'impression  décroit 
d'un  bout  à  l'autre  de  la  plaque  :  le  maximum  correspond  à  l'ex- 
trémité qui  fait  face  au  centre  du  disque,  le  minimum  à  l'extrémité 
opposée.  Après  développement,  fixage,  lavage  et  dessiccation,  la 
plaque  est  posée  sur  un  papier  blanc  :  le  dernier  chiffre  ou  degré 
visible  par  lumière  réfléchie  indique  le  degré  de  sensibilité. 


Cl.  Calmels. 

Fig.  73. 


Sensilomèlre  tSclieiner. 


LE   GÊLATINOBROMURE  m 

Pour  les  plaques  lentes,  la  source  lumineuse  est  rapprochée 
d'une  quantité  déterminée;  on  l'éloigné,  au  contraire,  pour  essayer 
les  émulsions  très  sensibles. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


BuRTON,  Fabrication  des  plaques  au  ge'latinobromure,  Paris  (Gauthier-Villars), 
1901. 

A.  Chardon.  Photographie  par  émulsion  sèche  au  bromure  d'argent  pur,  Paris 
(Gauthier-Viilars),  1877. 

J.-M.  Eder,  Système  de  sensitométrie  des  plaques  photographiques,  Paris  (Gau- 
thier-Viilars), 1903. 

R.  Namîas,  Theoretisch-praktisches  Eandbuch  der  photographischen  chemie.  h 
Band  :  Photographische  Negativprozesse  und  orthochromatische  Photogra- 
phie, Halle  a/ S.  (W.  Knapp). 

F.  QuÉNissET,  Les  Phototypes  sur  papier  au  gélatinobromure,  Paris  (Gauthier-Vii- 
lars), 1901. 

H.  Quentin,  Notes  pratiques  sur  l'orthochromatisme,  Paris  (Ch.  Mendel). 

E.  Trutat,  Traite'  pratique  de  photographie  sur  papier  négatif  par  l'emploi  de- 
couches  de  gélatinobromure  d'argent  étendues  sur  papier,  Paris  (Gauthier- 
Viilars),  1892. 

L.  Vidal,  Manuel  pratique  d'orthochi^omatisme ,  Paris  (Gauthier-Viilars),  1891. 

VoGEL,  la  Photographie  des  objets  colorés  avec  leurs  valeurs  réelles,  Paris  (Gau- 
thier-Viilars), 1887. 

À.  Delamarre,  les  Négatifs  sur  papier  au  gélatinobromure  d'argent,  Pari» 
(H.  Desforges),  1902. 


412  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE   VI 
l'exposition 

Chargement  des  châssis.  —  Les  plaques  ne  doivent  être  extrai- 
tes des  boîtes  qui  les  contiennent  qu'en  lumière  inactinique,  rouge 
€u  verte  suivant  la  nature  de  leur  émulsion.  Il  est  d'ailleurs  par- 
faitement possible  de  les  mettre  en  châssis  dans  Fobscurité  com- 
plète; il  est  même  nécessaire  de  procéder  de  la  sorte,  soit  quand 
il  s'agit  de  manipuler  des  plaques  extrêmement  sensibles  à  toutes 
les  radiations  visibles  (les  plaques  autochromes,  par  exemple),  soit 
lorsqu'on  a  des  doutes  sur  l'inactinisme  de  l'éclairage  dont  on 
dispose.  Avec  un  peu  d'habitude,  on  distingue  facilement  au  toucher 
le  côté  verre,  qui  est  lisse,  du  côté  gélatine,  dont  la  surface  est 
plus  mate.  On  évite  du  reste  toute  erreur  en  se  rappelant  que  les 
plaques  sont  toujours  emballées  couche  contre  couche.  La  pre- 
mière de  chaque  paquet  se  présente  donc  avec  le  côté  verre  en 
dessus;  la  seconde,  au  contraire,  a  Témulsion  sur  la  face  exté- 
rieure; la  troisième  et  la  cinquième  ont,  comme  la  première,  le 
verre  en  dessus,  tandis  que  la  quatrième  et  la  sixième  se  présen- 
tent le  verre  en  dessous,  de  même  que  la  seconde. 

Avant  d'introduire  une  plaque  dans  un  châssis,  il  convient  de 
passer  un  pinceau  en  blaireau  très  doux  sur  la  couche  de  gélatine, 
afin  d'en  enlever  les  poussières  qui  pourraient  s'y  trouver.  Sans 
cette  précaution,  chaque  grain  opaque  déterminerait  une  ombre 
qui  se  traduirait  par  une  petite  lacune  dans  l'impression  lumineuse  : 
il  en  résulterait  autant  de  points  transparents  sur  le  phototype 
négatif  et  autant  de  points  noirs  sur  l'épreuve  positive. 

La  plaque  sera  placée  dans  le  châssis  la  gélatine  en  avant  et  le 
verre  en  arrière,  excepté  dans  certains  cas  qui  seront  indiqués 
(impressions  photomécaniques  et  chromophotographie).  On  veillera 
à  ce  qu'elle  y  soit  solidement  assujettie  et  que  le  ressort  la  main- 


L'EXPOSITION 


113 


tienne  butée  contre  les  taquets  de  retenue,  sans  quoi  l'image  ris- 
querait de  manquer  de  netteté,  si  la  couche  sensible  n'occupait 
pas  exactement  le  plan  déterminé  par  la  mise  au  point.  On  s'assu- 
rera  également  que  les  taquets  sont  bien  vissés  et  ne  peuvent 
tourner  d'eux-mêmes. 

Quant  aux  pellicules  en  bandes,  elles  sont  enroulées,  comme  on 
l'a  vu,  sur  des  bobines  que  l'on  manipule  en  plein  jour,  et,  pour 
les  passer  dans  le  magasin,  il  n'y  a  qu'à  se  conformer  aux  instruc- 
tions du  constructeur.  La  manœuvre  varie  quelque  peu  suivant 
l'appareil,  mais  elle  est  toujours  d'une  extrême  simplicité,  à  la 
portée  même  d'un  enfant.  Il  en  est  de  même  pour  le  film-pack  et 
autres  combinaisons  similaires. 

Installation  de  l'appareil.—  Quand  le  temps  de  pose  n'est  pas- 
réduit  à  une  fraction  de  seconde,  il  est  nécessaire  de  veiller  à  la 
stabilité  de  laxhambre  noire  et  à  la  rigidité  de  son  support.  Toutes 
les  vis  de  serrage  seront  vérifiées,  et  l'on  s'assurera,  en  exerçant 
une  légère  poussée  sur  le  chariot  mobile,  qu'il  ne  bascule  pas  au 
moindre  effort. 

L'appareil  doit  être  placé  dans  une  position  exactement  hori- 
zontale (sauf  dans  ^^  , 
quelques  cas  très 
rares  et  à  la  condi- 
tion que  le  sujet 
ne  contienne  point 
de  lignes  droites). 
Si  le  modèle  se 
trouve  trop  haut 
ou  trop  bas,  s'il  y 
a  sur  le  verre  dé- 
poli trop  ou  pas 
assez  de  ciel,  il 
faudra  bien  se  gar- 
der d'incliner  l'ap- 
pareil :  la  mise  en 
plaque  sera  recti- 
fiée en  manœuvrant  le  décentrement  en  hauteur.  L'objectif  sera 
donc  monté  ou  descendu  (fig.  74),  jusqu'à  ce  que  l'image  s'encadre 


II' 


Cl.  Thomton-Pickard. 

Fig-.  74.  —  Décentrement  de  haut  en  bas. 


ii4 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


dans  le  verre  dépoli,  telle  qu'on  désire  la  reproduire.  Remarquons 
toutefois  que  certaines  chambres  noires  sont  munies  d'un  chariot 
à  bascule  :  dans  ce  cas,  le  décentrement  peut  s'obtenir  en  incli- 
nant la  base  de  l'appareil,  mais  en  maintenant  verticaux  le  châssis 
et  la  planchette  d'objectif. 

Ces  préceptes  sont  également  applicables  aux  instruments  à 
main.  Il  faut  veiller  à  leur  horizontalité  (c'est  pourquoi  tous  les 
appareils  portatifs  construits  avec  soin  sont  munis  d'un  ou  deux 
niveaux  à  bulles  d'air)  et  décentrer,  si  c'est  nécessaire.  Malheu- 
reusement, un  grand  nombre  de  ces  appareils  sont  dépourvus  de 
décentrement,  de  sorte  qu'on  en  est  réduit  à  les  incliner.  Delà  ces 
déformations  de  lignes,  si  désagréables  dans  les  reproductions  de 
monuments.  Le  photographe  en  accuse  à  tort  l'objectif;  l'instru- 
ment le  plus  parfait  ne  saurait  donner  des  lignes  correctes,  quand 
son  axe  n'est  pas  perpendiculaire  au  plan  du  modèle  à  reproduire, 
et  ces  images  défectueuses  sont  imputables,  non  pas  à  l'appareil, 
mais  à  celui  qui  l'emploie  dans  de  mauvaises  conditions. 

Mise  au  point.  —  Dans  l'atelier,  la  mise  au  point  s'effectue  tou- 
jours à  l'aide  du  verre  dépoli  ;  il  en  est  de  même  chaque  fois  que 
la  disposition  de  l'appareil  le  permet,  car  c'est  la  seule  manière 
d'assurer  la  netteté  des  images.  Pour  n'être  pas  gêné  par  la  lumière 
ambiante,  l'opérateur  se  place  sous  un  voile  noir  qui  couvre  la 

chambre  noire,  et,  observant 
l'image  que  l'objectif  projette 
sur  le  verre  dépoli,  il  ma- 
nœuvre la  crémaillère  qui 
fait  avancer  ou  reculer  le 
chariot  mobile,  jusqu'à  ce  que 
le  sujet  à  reproduire  se  mon- 
tre avec  le  maximum  de  net- 
teté. Le  voile  est  quelquefois 
remplacé  par  un  cône  souple 
(fîg.   75)   adapté   à  l'arrière- 

corps  et  terminé  par  un  œil- 
75.  —  Cône  de  mise  au  point.  ■•    ,         .    .  i  i  , 

leton  a  travers  lequel  on  ob- 
serve Limage.  Une  disposition  analogue  sert  à  régler  la  mise  au 
point  dans  les  appareils  portatifs  du  type  reflcx  (fig.  20). 


Vh 


LEXPOSITION 


115^ 


Pour  y  voir  plus  clair,  quand  l'éclairage  est  faible,  certains  pho- 
tographes mettent  au  point  avec  la  plus  grande  ouverture  de  l'ob- 
jectif, qu'ils  ne  diaphragment  qu'après.  Il  faut  éviter  de  procéder 
ainsi ,  car  la  distance  focale  est  plus  ou 
moins  modifiée  par  l'ouverture  :  le  dia- 
phragme, en  effet,  arrête  les  rayons  mar- 
ginaux dont  le  loyer  est  plus  court  qna 
les  rayons  centraux;  une  très  petite  ou 
verture  ne  laisse  passer  que  les  rayons 
dont  le  foyer  est  plus  éloigné  du  cenU-v^ 
optique.  On  devra  donc,  autant  que  pos- 
sible, mettre  au  point  avec  le  diaphragme 
qui  servira  pendant  la  pose,  ou  tout  au 
moins  avec  une  ouverture  peu  différente. 

La  mise  au  point,  quand  on  la  veut  très 
précise,  est  facilitée  par  l'emploi  d'une 
loupe.  La  fig.  76  en  montre  un  modèle  très 
soigneusement  construit  par  M.  Krauss. 
Les  lentilles  achromatiques  sont  serties 
dans  une  douille  à  mouvement  hélicoïdal  que  l'on  peut  immobi- 
liser en  tournant  une  bague  de  serrage.  Le  réglage  une  fois  effec- 
tué, suivant  la  vue  de  l'opérateur,  celui-ci  n'a  qu'à  appliquer  la 
base  de  la  monture  sur  le  verre  dépoli,  pour  observer  avec  le  maxi- 
mum de  netteté  et  de  grossissement  les  images  qui  s'y  forment. 

Certains  travaux  de  reproduction  exigent  une  netteté  parfaite. 
La  loupe  de  mise  au  point  est  alors  remplacée  par  un  microscope 


Fig.  76.  —  Luupe  ae  mise 
au  point. 


Fig.  77.  — Microscope  de  mise  au  point. 

composé,  dont  la  fig.  77  montre  la  forme  extérieure  et,  en  demî- 
coupe,  la  disposition  intérieure  du  système  optiquf'. 

Dans  certains  appareils  portatifs,  la  mise  au  po'nt  sj  fait  au 


'H6  TRAITÉ   GÉNÉRAL  ê.È  PHOTOGRAPHIE 

Juger.  Le  chariot  mobile  porte  un  index  qui  se  déplace  en  regard 
d'une  échelle  graduée  sur  laquell'  sont  inscrites  des  distances. 
L'opérateur  évalue  l'éloignement  de  Tobjet  qu'il  désire  reproduire 
avec  le  maximum  de  netteté  et  amène  l'index  devant  le  chiffre 
correspondant.  Il  va  sans  dire  que  cette  évaluation  ne  saurait  être 
qu'approximative.  Néanmoins,  en  se  bornant  aux  petits  formats, 
on  obtient  d'ordinaire  des  images  suffisamment  nettes. 

La  mise  au  point  achevée,  il  faut  avoir  soin  de  tourner  la  vis  Ou 
le  levier  qui  empêchent  le  chariot  mobile  de  se  déplacer. 

Temps  de  pose.  —  L'évaluation  du  temps  de  pose  est  certaine- 
ment la  partie  la  plus  délicate  des  opérations  photographiques.  La 
complexité  du  problème  à  résoudre  résulte  de  l'extrême  variabilité 
•des  éléments  dont  il  faut  tenir  compte  :  sensibilité  de  la  plaque,  ou- 
verture relative  de  l'objectif,  intensité  de  l'éclairage,  effet  à  réaliser. 

Chaque  marque  de  plaques  a  sa  sensibilité  propre.  On  trouve 
même  des  différences  pour  la  même  marque,  non  seulement  d'une 
boîte  à  une  autre,  mais  même  d'une  plaque  à  une  autre  enfermée 
dans  le  même  paquet.  Cependant  ces  différences  sont  peu  impor- 
tantes. Aujourd'hui,  la  fabrication  est  suffisamment  régulière  pour 
que  la  sensibilité  de  chaque  marque  puisse  être  considérée  comme 
pratiquement  constante.  Ce  n'est  pas  de  là  que  viennent  les  erreurs 
d'évaluation. 

L'erreur  peut  encore  moins  provenir  de  l'objectif,  puisque  sa 
luminosité  est  indiquée  par  l'ouverture  du  diaphragme.  Un  objectif 
dont  l'ouverture  est  de  F  :  10  possède  sensiblement  la  même  lumi- 
nosité qu'un  objectif  d'égale  ouverture  relative,  alors  même  que 
les  deux  instruments  seraient  de  constructions  toutes  différentes. 
Ceci  n'est  cependant  pas  rigoureusement  exact  :  si  l'un  des  deux 
objectifs  offre  un  plus  grand  nombre  de  surfaces  réfléchissantes  ou 
si  les  verres  en  sont  légèrement  colorés,  sa  rapidité  sera  diminuée 
par  l'absorption  de  lumière.  Toutefois,  comme  cette  absorption  est 
constante,  il  sera  facile  d'en  tenir  compte  en  prolongeant  légère- 
ment la  pose,  et  le  photographe  habitué  à  se  servir  d'un  objectif 
n'éprouvera  aucun  mécompte  de  ce  chef. 

Il  n'en  est  pas  de  même  pour  l'éclairage. 

L'éclat  de  la  lumière  varie  suivant  les  pays,  suivant  les  saisons, 
suivant  rheure  du  jour,  l'état  du  ciel  et  l'état  hygrométrique  de 


L'EXPOSITION 


m 


l'atmosphère.  Son  intensité  est  modifiée  par  les  milieux  plus  ou 
moins  transparents  qu'elle  doit  traverser,  par  l'éloignement  du 
sujet  à  photographier,  par  les  reflets  émanés  des  objets  environ- 
nants. De  là  Textrême  complexité  du  calcul  des  temps  de  pose  et 
la  difficulté  qu'éprouve  à  l'évaluer  exactement  même  le  praticien 
accoutumé  à  ces  incessantes  variations. 

Les  tableaux  suivants  indiquent  la  valeur  relative  de  ces  éléments 
variables. 

A,  —  Coefficients  de  clarté. 

^ 

{Le  temps  de  pose  pour  l'ouverture  relative  normale  f/iO  étant  pris  pour  unité, 
le  temps  de  pose  pour  une  ouverture  relative  quelconque^  toutes  choses  égales 
d'ailleurs,  sera  donné  par  ce  tableau.) 


DIAMETRE  d'OUVERTURE  UTILE 

TEMPS 

DIAMÈTRE  d'ouverture  UTILE 

TEMPS 

DU   DIAPHRAGME      ' 

DE  POSE 

DU  DIAPHRAGME 

DE  POSE 

r/2,5 

0,06 

r/8 

0,64 

/•/3 

0,09 

fllO 

1,00 

/■/3,5 

0,12 

//i5 

2.25 

m 

0,16 

fl20         - 

4,00 

fi^ 

0,25 

fISO 

9,00 

m 

0,36 

//40 

16,00 

rn 

0,49 

r/50 

25,00 

B.  —  Coefficients  d'époque. 


H 

cri 

(C     H 

H 

HEURES 

z 

3 

<-> 

1-5 

6    H 

<  < 

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H  ce: 
-a  o 

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a   ce 
P 

03 

S 

a 
u 

-a 

Q 

Midi. 

i 

1,5 

1,5 

1,5 

2,5 

4 

11  h. 

matin. 

1  h.  soir. 

1'. 

1,5 

1,5 

2 

3 

5 

10 

— 

2      — 

1 

1,5 

2 

2 

4 

6 

9 

— 

3      — 

1,5 

1,5 

2 

3 

6 

8 

— 

4      — 

1.5 

1,5 

2 

3 

6 

1 

— 

5      — 

2 

2,5 

3 

6 

6 

— 

6      — 

3 

3,5 

6 

5 

— 

7      — 

5 

6 

4 

^■~ 

8      — 

12 

<» 

i 

118 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 
C.  —  Coefficients  d'éclat  intrinsèque. 


SUJETS 


Nuages « 0,5 

Marines,  sujets  éloignés 1 

Effets  de  neige 3 

Marines,  sujets  rapprocliés 2 

Pavsages,  avant-plan  rapproché i 

Eau  et  feuillages [     4 

Monuments,  avant-plan  bien  éclairé... 
—  —  dans  l'ombre  . 

Feuillages  épais  à  l'avanl-plan 

Groupes,  sujets  de  genre  en  plein  air.. 
Portraits  à  l'intérieur,  au  moins 


8 
12 

20 


<  a  p 
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<  ?  o 

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12 

20 
40 


1,5 
4 
12 


16 

24 

40 

80 


^  ffi 


3 

6 
18 
12 

24 

36 

60 

120 


ta 

^  (ïî  S 

M    t,    ^ 


5 

10 

30 
20 

40 

80 
100 
200 


Si  l'on  fait  usage  de  plaques  rapides,  le  temps  de  pose  .est  donné 
directement,  en  centièmes  de  seconde,  par  le  produit  de  trois  fac- 
teurs pris  dans  les  tableaux  A,  B  et  G.  Soit,  par  exemple,  un  pay- 
sage, en  plein  soleil,  à  f)hotographier  en  septembre,  à  3  heures  du 
soir,  avec  un  objectif  dont  l'ouverture  est  de  /'/5.  Les  facteurs  cor- 
respondant à  ces  conditions  sont  :  4  (tableau  C),  2  (tableau  B)  et 
0,25  (tableau  A).  En  les  multipliant  l'un  par  l'autre,  nous  obte- 
nons : 

4 X 2x0,25  r=  2  centièmes  de  seconde. 

Si  nous  avions  à  employer  dans  les  mêmes  circonstances  une 
émulsion  3  fois  moins  sensible,  le  produit  devrait  évidemment 
être  multiplié  par  3.  En  réalité  donc,  le  calcul  du  temps  de  pose 
consistera  à  trouver  le  produit  de  quatre  facteurs,  et  quelques 
essais  préliminaires  seront  utiles  pour  déterminer  le  coefficient 
de  sensibilité  de  Témulsion  utilisée. 

Le  résultat  de  ce  calcul  n'est  d'ailleurs  qu'une  indication  approxi- 
mative, une  base  d'appréciation,  utile  sans  doute,  mais  qui  ne  dis- 
pense pas  le  photographe  d'une  étude  attentive.  Seule  une  longue 
pratique  le  mettra  en  garde  contre  les  sources  d'erreur,  sans 
cependant  l'en  préserver  entièrement,  car,  sur  ce  point  si  délicat 
des  opérations  photographiques,  les  plus  expérimentés  eux-mêmes 


L'EXPOSITION  119 

sont  exposés  à  se  tromper,  surtout  en  plein  air.  Dans  Tatelier,  le 
professionnel  journellement  habitué  à  son  éclairage  finit  par  s'en 
rendre  maître  et  par  connaître  toutes  les  particularités  météorolo- 
giques susceptibles  de  modifier  la  durée  normale  de  la  pose. 

Un  précepte  à  ne  pas  perdre  de  vue  dans  cette  évaluation,  c'est 
qu'il  vaut  mieux  posf^r  trop  que  pas  assez.  Il  est  toujours  difficile 
de  remédier  à  la  sous-exposition;  il  est  même  impossible  de  faire 
apparaître,  soit  au  développement,  soit  au  renforcement,  les 
détails  qui  manquent  complètement,  tandis  qu'on  peut  arriver  à 
tirer  parti  d'un  cliché  surexposé  même  très  fortement  :  d'après  von 
Hùbl,  un  développement  bien  conduit  permet  de  corriger  une  pose 
500  fois  trop  longue. 

Cependant,  ce  précepte  même  n'a  rien  d'absolu,  car  le  temps  de 
pose  normal  doit  être  modifié  suivant  l'efTet  à  réaliser  :  en  le  pro- 
longeant, on  atténue  les  duretés  d'un  sujet  à  contrastes  exagérés; 
en  l'abrégeant,  on  accentue,  au  contraire,  un  modelé  trop  plat. 

Photomètres.  —  La  détermination  du  temps  de  pose  à  l'aide  des 
tableaux  précédents  exige  un  calcul  bien  simple,  mais  qui  rebute 
néanmoins  la  plupart  des  photographes.  Par  ailleurs,  tous  les  élé- 
ments de  ce  calcul  n'offrent  pas  le  même  degré  de  certitude  :  l'ou- 
verture du  diaphragme,  la  saison,  l'heure  du  jour,  sont  connues 
avec  précision,  mais  il  n'en  est  pas  de  même  pour  l'éclat  intrinsè- 
que du  sujet,  qui  varie  suivant  l'état  du  ciel,  la  limpidité  de  l'at- 
mosphère, les  poussières  qui  peuvent  s'y  trouver  en  suspension, 
la  distance  des  divers  éléments  du  tableau,  l'intensité  et  surtout 
les  couleurs  des  reflets  qui  en  modifient  l'éclairage. 

Certains  amateurs  préfèrent  se  fier  à  leur  longue  pratique,  à 
leur  expérience,  et  consulter  un  carnet  de  notes  où  ils  retrouvent, 
parmi  leurs  précédents  essais,  des  exemples  en  apparence  iden- 
tiques à  l'opération  qu'ils  vont  exécuter.  Et  souvent  ils  se  trom- 
pent, parce  que,  si  le  carnet  de  poses  fournit  des  indices  certains 
sur  la  saison  et  l'heure,  il  ne  saurait  en  être  de  même  relativement 
à  la  situation  du  sujet  et  aux  circonstances  atmosphériques  Ce 
carnet,  d'ailleurs,  n'est  plus  d'aucune  utilité  au  photographe  qui 
voyage  et  commence  à  opérer  sous  un  climat  nouveau,  dont  les 
particularités  atmosphériques  ne  lui  sont  pas  encore  connues. 

De  là  l'utilité  des  instruments  qui  font  connaître  automatique- 


120  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

ment  le  temps  de  pose,  non  pas  d'une  manière  absolument  pré- 
cise, mais  avec  une  approximation  pratiquement  suffisante,  les 
erreurs  résultant  de  leurs  indications  restant  toujours  susceptibles 
d'être  compensées  par  un  développement  bien  conduit. 

On  en  distingue  deux  catégories  :  les  photornètres  optiques,  basés 
sur  l'action  physiologique  de  la  lumière,  et  les  acdnomètres,  basés 
sur  son  action  chimique.  On  a  imaginé  un  grand  nombre  de  pho- 
tomètres, de  l'une  et  l'autre  catégorie,  mais  la  plupart  ne  diffèrent 
les  uns  des  autres  que  par  des  détails  de  construction  peu  impor- 
tants, en  sorte  qu'il  suffira  de  décrire  seulement  les  plus  répandus. 
Les  photomètres  optiques,  fondés  sur  la  sensibilité  de  notre 
rétine,  comparent  l'éclairage  du  sujet  à  la  lumière  la  plus  faible 
que  notre  œil  soit  capable  de  percevoir.  Il  suffit,  à  cet  effet,  d'in- 
terposer entre  l'œil  et  le  sujet  un  écran  plus  ou  moins  diaphane 
et  dont  on  peut  évaluer  la  transparence. 

Tel  est,  par  exemple,  le  photomètre  normal  de  Degen  (fig.  78). 

Un  étui  percé  d'un  œille- 
ton contient  deux  ré- 
glettes dont  l'une  porte 
une  graduation  corres- 
pondant aux  diaphrag- 
Fig.  78.  —  Photomètre.  ^         ^       ,.  i  ? 

mes,  tandis  que  la  seconde 

sert  à  faire  glisser  l'un  sur  l'autre  deux  prismes  en  verre  violet 
dont  la  superposition  forme  un  écran  de  transparence  variable, 
suivant  l'épaisseur  du  verre  coloré  que  la  lumière  a  à  traverser. 

Pour  évaluer  le  temps  de  pose,  on  place  l'index  de  la  réglette  des 
diaphragmes  sur  le  chiffre  correspondant  à  l'ouverture  de  l'objec- 
tif, on  vise  dans  l'œilleton  l'objet  à  photographier,  et  l'on  tire  la 
réglette  des  prismes  jusqu'à  ce  que  l'objet  visé  disparaisse  pres- 
que complètement.  On  n'a  plus  alors  qu'à  lire,  sur  la  graduation 
extérieure,  le  temps  de  pose  exprimé  en  secondes  et  fractions  de 
seconde.  Cette  graduation  comprend  quatre  index  qui  correspon- 
dent aux  plaques  lentes,  rapides,  extra-rapides  et  ultra-rapides. 

Les  photomètres  optiques  font  connaître  en  un  instant  le  temps 
de  pose,  mais,  comme  les  indications  qu'ils  fournissent  dépen- 
dent d'une  sensation  physiologique,  elles  sont  parfois  entachées 
de  quelque  incertitude.  L'impression  que  produit  la  lumière  sur  la 


L'EXPOSITION  12t 

Crétine  est  variable  d'un  opérateur  à  l'autre  :  Fun  pourra  encore 
^apercevoir  une  lueur  dans  le  photomètre,  quand  un  autre  n'y  dis- 
\inguera  rien.  Cette  impression  n'est  même  pas  constante  pour  le 
liême  opérateur.  L'état  de  repos  ou  de  fatigue  de  l'œil  influencent 
plus  ou  moins  l'appréciation,  et  un  observateur  qui  est  resté  long- 
temps en  pleine  lumière  extérieure  ne  verra  pas  dans  le  photomè- 
tre le  même  degré  d'opacité  que  celui  qui  sort  à  peine  d'un  appar- 
tement peu  éclairé.  Toutefois,  il  est  assez  facile  de  tenir  compte 
de  cette  cause  d'erreur,  puisqu'on  est  prévenu  que  l'œil  ébloui  juge 
la  lumière  plus  faible  qu'elle  n'est  réellement  et  a  une  tendance  à 
prendre  un  temps  de  pose  trop  long.  Du  reste,  il  suffit  de  fermer 
les  yeux  pendant  quelques  instants,  avant  l'observation  photomé- 
trique, pour  que  la  vue  soit  notablement  reposée  de  l'éclat  de  la 
lumière  ambiante. 

Il  faut  aussi  tenir  compte  des  couleurs  du  sujet  et  de  la  diffé- 
rence qui  existe  entre  la  sensibilité  chromatique  de  notre  œil  et 
celle  des  émulsions,  même  orthochromatiques.  Notre  œil  est  sur- 
tout sensible  au  vert,  au  jaune  et  au  rouge-orangé,  tandis  que  le 
gélatinobromure  l'est  principalement  au  bleu,  au  violet  et  même  à 
l'ultra-violet  que  nous  ne  voyons  pas  du  tout.  C'est  pour  compen- 
ser cette  diflerence  que  les  prismes  du  photomètre  de  Degen  sont 
en  verre  violet. 

Les  actinomètres  (de  àxxtç,  rayon,  et  ]xzxoo^^  mesure)  font  connaître 
le  temps  de  pose  d'après  celui  qu'emploie  à  prendre  une  teinte 
déterminée  un  papier  sensible  à  la  lumière  dirigé  vers  le  sujet. 
Ils  sont  basés  sur  ce  fait  d'expérience  que,  si  notre  œil  ne  sait  pas 
apprécier  exactement  le  rapport  existant  entre  deux  tons  diffé- 
rents, il  juge  assez  bien  si  deux  tons  contigus  sont  ou  non  identi- 
ques. A  cet  effet,  une  bande  de  papier  sensible  est  enfermée  dans 
une  boîte  percée  d'une  ouverture  sur  les  côtés  de  laquelle  sont 
peintes  deux  teintes  peu  différentes  l'une  de  l'autre.  Le  papier 
exposé  au  jour  brunit  progressivement  et,  avant  de  noircir,  passe 
successivement  par  les  deux  teintes  servant  d'étalons  comparatifs. 
On  arrête  l'opération  quand  le  papier,  ayant  légèrement  dépassé  la 
teinte  la  plus  claire,  n'a  pas  encore  atteint  la  teinte  la  plus  foncée. 
Connaissant  le  temps  qui  s'est  écoulé  pour  passer  du  blanc  pur  à 
cette  teinte  moyenne,  il  est  très  facile  d'en  déduire  le  temps  de 


122 


•  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Ko.iH.. 
Fig.  79.  —  Actinomèlre 


pose  :  il  suffit  de  consulter  une  table  dans  laquelle  il  est  tenu 
compte  de  l'ouverture  de  l'objectif  et  de  la  sensibilité  des  princi- 
pales marques  de  plaques.  Celte  table  est  généralenient  gravée  slt 
le  boîtier  même  de  l'instrument. 

Le  pose-mètre,  de  Watkins  (fig.  79),  est  un  actinomètre.  Le  mode 
d'emploi  en  est  bien  facile  :  on  dirige  vers  le  sujet  à  reproduire 

l'ouverture  sous  laquelle  on  aperçoit  le 
papier  sensible;  on  tire  la  bande  de  papier, 
de  manière  à  découvrir  une  nouvelle  surface 
non  encore  impressionnée,  entièrement  blan- 
che, par  conséquent,  et  l'on  consulte  une 
montre,  afin  de  savoir  le  temps  qui  s'écoulera 
avant  que  le  papier  ait  pris  la  teinte  voulue. 
Ce  temps  une  fois  connu,  le  temps  de  pose 
est  donné  par  la  table  qui  accompagne  l'ins- 
trument. 

Les  indications  ainsi  recueillies  sont  assez 
sûres,  du  moins  dans  le  milieu  de  la  journée. 
A  l'aurore  et  au  crépuscule,  il  faut  se  méfier 
de  la  différence  que  présentent  pour  les  rayons  de  différentes 
couleurs  la  sensibilité  du  papier  et  celle  des  émulsions.  Il  existe 
cependant  des  actinomètres  où  cette  différence  a  été  prévue.  C'est 
ainsi  que  le  pose-mèlre  de  Watkins  est  construit  avec  un  cadran 
spécial  pour  les  plaques  autochromes. 

On  peut  reprocher  aux  actinomètres  la  lenteur  avec  laquelle 
le  papier  prend  la  coloration  voulue,  quand  il  est  dirigé  vers  un 
sujet  faiblement  éclairé.  Enfin,  il  est  parfois  incommode  de  tenir 
l'instrument  constamment  braqué  dans  la  même  direction,  pen- 
dant que  l'on  consulte  sa  montre,  surtout  s'il  faut  en  même  temps 
surveiller  et  maintenir  la  chambre  noire  ébranlée  par  le  vent. 

Temps  de  pose  des  sujets  en  mouvement.  —  On  désigne  sous 
la  dénomination  très  impropre  d'instantanés  les  phototypes  exé- 
cutés en  moins  d'une  seconde.  Quand  il  s'agit  de  reproduire  un 
sujet  en  mouvement,  le  temps  de  pose  déterminé  d'après  les  indi- 
cations précédentes  serait  presque  toujours  trop  long  pour  avoir 
une  imnge  nette.  Le  temps  de  pose  est  alors  déterminé  d'après  le 
déplacement  apparent  du  sujet.  Le  plus  souvent,  le  cliché  impres- 


^EXPOSITION  123 

sionné  dans  ces  conditions  sera  sous-exposé,  mais  on  pourra  y 
remédier,  dans  une  certaine  mesure,  à  l'aide  d'un  développement 
bien  conduit,  et  l'essentiel  est  d'obtenir  une  image  dont  les  con- 
tours ne  soient  pas  doublés  ou  déformés. 

Le  déplacement  apparent  du  sujet  dépend  non  seulement  de 
sa  vitesse  réelle,  mais  encore  de  sa  distance  et  de  la  direction 
dans  laquelle  il  se  déplace.  Un  objet  qui  s'avance  vers  l'objectif 
ou  qui  s'en  éloigne  se  déplace  apparemment  beaucoup  moins  vite 
qu'un  objet  qui  passe  perpendiculairement  à  l'axe  optique.  L'image 
d'un  objet  éloigné  étant  plus  petite  que  celle  d'un  objet  rapproché, 
il  est  clair  que  le  déplacement  du  premier  est  moins  apparent  que 
celui  du  second,  à  vitesses  réelles  égales. 

De  là  quelques  indications  des  vitesses  qu'il  convient  de  don- 
ner à  l'obturateur,  suivant  la  nature  du  sujet  et  les  circonstances 
de  la  pose. 

Une  vitesse  d'obturation  de  1/20  de  seconde  suffît  pour  les 
objets  qui  se  déplacent  très  lentement  et  se  trouvent  placés  à  une 
distance  150  fois  supérieure  à  la  distance  focale.  C'est  dans  ces 
conditions  que  peuvent  être  photographiés  les  navires  dans  le 
port,  les  vagues  lentes,  le  bétail  au  pâturage.  Pour  le  portrait,  le 
modèle  peut  être  approché  jusqu'à  20  fois  la  distance  focale. 

En  1/50  de  seconde,  on  peut  reproduire  des  scènes  dont  le  mou- 
vement est  lent,  un  homme  en  marche  à  une  distance  150  fois 
supérieure  au  foyer  de  l'objectif  (son  image  sur  le  verre  dépoli 
n'a  pas  plus  de  1  centimètre).  On  peut  reproduire  aussi  des  scènes 
plus  rapides,  si  l'objet  mobile  se  déplace  obliquement,  et,  à  plus 
forte  raison,  s'il  s'approche  ou  s'il  s'éloigne  de  l'appareil. 

L'instantané  à  i/100  de  seconde  permet  de  prendre  des  che- 
vaux au  galop,  à  la  distance  de  230  fois  le  foyer,  s'ils  viennent 
vers  l'opérateur.  La  même  vitesse  est  applicable  aux  vagues 
rapides. 

En  réduisant  l'exposition  à  1/300  de  seconde,  on  reproduit  des 
scènes  de  rue,  des  chevaux  galopant  obliquement  par  rapport  à 
l'axe  optique,  des  cyclistes  à  allure  modérée  et  à  une  distance 
100  fois  plus  grande  que  le  foyer  employé. 

Enfin,  les  obturateurs  fonctionnant  à  1/500  et  à  1/1000  de  se- 
conde sont  nécessaires  pour  aborder  la  photographie  des  chevaux 


J24  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

de  course,  des  automobiles  et  des  trains  en  marche,  des  oiseaux 
ou  des  aéroplanes  en  plein  vol. 

Prise  du  sujet.  —  La  mise  au  point  étant  réglée,  on  ferme  Tob- 
Jectif,  soit  en  plaçant  le  bouchon  sur  le  parasoleil,  soit  en  armant 
l'obturateur.  On  remplace  ensuite  le  verre  dépoli  par  le  châssis, 
et  Ton  ouvre  le  volet  pour  démasquer  la  plaque.  Cette  manœuvre 
a  généralement  pour  effet  d'ébranler  plus  ou  moins  la  chambre 
noire  montée  sur  un  pied  pliant,  dont  la  rigidité  laisse  presque 
toujours  à  désirer.  11  importe  donc  que  les  vibrations  ainsi  com- 
muniquées à  Fappareil  aient  cessé  avant  d'ouvrir  Tobjectif,  sans 
quoi  les  contours  des  images  seraient  doublés.  Il  en  serait  de 
même  si  l'on  retirait  trop  brusquement  le  bouchon-.  L'obturcftion 
pneumatique  est,  sous  ce  rapport,  bien  préférable,  car,  si  le 
mécanisme  en  est  bien  équilibré,  il  n'y  a  point  de  secousse  au 
moment  de  l'ouverture.  De  plus,  l'opérateur  n'est  plus  obligé 
de  regarder  l'objectif  et  peut  concentrer  toute  son  attention  sur  le 
sujet  à  reproduire. 

Si  l'on  se  sert  d'un  appareil  à  main,  on  veillera  à  son  horizon- 
talité, au  moment  de  la  pose,  en  jetant  un  coup  d'œil  sur  le  niveau 
d'eau,  avant  de  presser  la  détente. 

Artifices  divers.  —  Dans  les  reproductions  de  paysages,  une 
diffîcullé  résulte  souvent  de  la  grande  différence  de  luminosité 
entre  les  diverses  parties  du  tableau.  Il  arrive  que  les  lointains 
sont  surexposés,  tandis  que  les  premiers  plans  ont  reçu  une  pose 
■à  peine  suffisante  ou  même  manquent  de  détails  dans  les  ombres. 
Pour  le  même  motif,  les  détails  du  ciel  sont  masqués  par  la  surex- 
position, ou  bien,  si  l'on  abrège  l'exposition  de  manière  à  repro- 
•duire  fidèlement  le  modelé  des  nuages  ou  les  gradations  délicates 
■d'un  ciel  pur,  alors  c'est  le  terrain  qui  n'est  plus  détaillé  et  pré- 
•sente  des  contrastes  trop  durs,  sans  demi-teintes. 

Le  moyen  d'y  remédier  est  connu  depuis  longtemps.  Il  suffît 
•d'employer  un  obturateur  à  volet,  comme  celui  de  Guerry,  et  de 
le  faire  fonctionner  lentement  :  le  volet  s'ouvrant  de  bas  en  haut, 
il  est  facile  de  comprendre  que  les  premiers  plans  poseront  plus 
longuement  que  les  lointains,  et  que  le  ciel  ne  sera  démasqué  que 
pendant  un  instant  beaucoup  plus  court. 

Néanmoins,  l'obturateur  de  Guerry  est  actuellement  abandonné 


L'EXPOSITION 


125 


des  touristes,  parce  qu'il  est  relativement  volumineux.  On  arrive 
au  même  résultat  à  Taide  d'un  écran  bien  simple,  représenté 
fîg.  80„  C'est  une  lamelle  opaque  montée  sur  l'objectif  et  qui, 
suivant  sa  position,  arrête  plus  ou  moins  les  radiations  venues  du 
ciel;  le  bord  inférieur  en  est  dentelé,  de  manière  à  adoucir  les 
contrastes  à  proximité  de  la  ligne  de  démarcation.  Il  faut  éviter  de 
placer  cette  lamelle  trop  près  du  centre  optique.  En  effet,  si  elle 
se  trouvait  dans  une  position  voisine 
des  diaphragmes,  elle  n'aurait  d'au- 
tre effet  que  de  diminuer  la  quantité 
de  lumière  transmise  par  l'objectif; 
le  temps  de  pose  en  serait  prolongé, 
et  toutes  les  parties  de  l'image  s'en 
trouveraient  également  assombries. 
Plus  la  lamelle  est  éloignée  de  l'ob- 
jectif, plus  son  interposition  est  effi- 
cace pour  déterminer  une  différence 
d'impression  entre  le  haut  et  le  bas 
de  l'image.  Si  l'objectif  est  de  forme 
très  courte,  s'il  n'est  pas  muni  d'un 
parasoleil,  il  ne  faudra  pas  placer  la 
lamelle  directement  contre  la  lentille  frontale,  mais  bien  sur  une 
bague  additionnelle  qui  allongera  légèrement  la  monture.  Il  ne 
faut  d'ailleurs  pas  exagérer  l'écartement,  car  la  partie  supérieure 
du  tableau  finirait  par  ne  plus  être  du  tout  impressionnée. 

C'est  à  l'aide  d'une  disposition  analogue  que  sont  obtenus  ces 
portraits-bustes  en  dégradé  sur  fond  noir,  que  l'on  appelle  ordi- 
nairement fond  russe.  Le  modèle  pose  devant  un  panneau  noir,  et 
l'objectif  est  muni  d'un  tube  à  l'extrémité  duquel  est  disposé  un 
dégradateur.  On  désigne  sous  ce  nom  une  plaque  percée  d'une 
ouverture  dont  la  forme  se  rapproche  de  celle  du  buste  et  de  la 
tête.  Comme  elle  est  placée  assez  loin  du  plan  focal,  ses  contours 
se  dessinent  très  flous,  très  estompés,  sur  le  verre  dépoli. 

Les  vignettes  sur  fond  blanc  exigent  l'emploi  d'un  dégradateur 
pendant  le  tirage  positif,  mais  généralement  on  estompe  préala- 
blement la  partie  inférieure  au  moment  de  la  pose,  à  l'aide  d'un 
écran  partiel  interposé  en  avant  de  l'objectif.  L'appareil  d'atelier 


Fig-.  80.  —  Écran  de  ciel. 


i26  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

représenté  fig.  1  (V.  p.  17)  porte,  à  sa  partie  antérieure  (partiel- 
lement masquée  par  Tavant-corps),  un  cadre  destiné  à  recevoir  des 
planchettes  évidées  pour  les  portraits-vignettes. 

Pour  compenser  les  différences  d'actinisme,  les  plaques  ortho- 
chromatiques  dont  la  couche  n'est  pas  colorée  en  jaune  exigent 
presque  toujours  l'interposition  d'un  écran  de  même  couleur.  Le 
meilleur  moyen  de  réaliser  une  compensation  parfaite  est  d'em- 
ployer l'écran  liquide  qui  a  pté  décrit  au  chapitre  f>rpcédent;  mais 
cette  solution  n'est  pas  pratique  en  excursion,  et- la  plupart  des 
photographes  préfèrent  se  servir  d'un  écran  en  verre  coloré.  Un 
verre  quelconque  ne  suffit  pas,  car,  si  les  surfaces  n'en  sont  pas 
exactement  planes  et  parallèles,  le  meilleur  obj^-ctif  ne  donnera 
plus  que  des  images  déformées.  Il  faut  utiliser  des  verres  spéciaux, 
optiquement  dressés.  Ce  sont  généralement  des  verres  blancs  sur 
lesquels  a  été  coulée  une  couche  de  gélatine  colorée.  Les  colorants 
employés  à  cet  effet  (tartrazine,  jaune  naphtol,  etc.)  sont,  pour  la 
plupart,  assez  fugaces  à  la  lumière;  aussi  convient-il  de  conserver 
les  écrans  dans  une  boîte,  jusqu'au  moment  de  la  pose.  On  fabri- 
que cependant,  depuis  quelque  temps,  des  verres  colorés  dans  la 
masse  et  dont  la  teinte  offre  toutes  les  garanties  désirables  de 
stabilité. 

Les  écrans  jaunes  prolongent  naturellement  la  durée  de  l'expo- 
sition. Leur  coloration  est  plus  ou  moins  intense,  suivant  l'effet  à 
obtenir.  Aussi  les  constructeurs  y  inscrivent-ils  un  chiffre  indiquant 
dans  quelle  proportion  doit  être  prolongée  la  pose.  Le  temps  nor- 
mal d'exposition  étant  déterminé,  soit  à  l'aide  du  calcul  basé  sur 
les  indications  des  tables  A,  B  et  G  (p.  117  et  118),  soit  à  l'aide 
d'un  photomètre,  on  le  multipliera  par  le  facteur  numérique  ins- 
crit sur  l'écran  jaune. 

Lumière  artificielle.  —  Il  a  été  déjà  fait  une  brève  allusion  à 
la  lumière  artificielle  utilisée  dans  l'atelier.  Mais  là  ne  se  limitent 
pas  fes  appUcations  :  les  reproductions  d'intérieurs,  la  photogra- 
phie au  théâtre,  dans  les  grottes,  les  souterrains,  les  mines,  en 
exigent  l'emploi,  et  il  n'est  pas  jusqu'aux  fonds  sous-marins  qui 
n'aient  été  explorés  par  la  plaque  sensible,  grâce  à  son  concours. 

Dans  les  industries  photomécaniques,  les  reproductions  sont 
généralement  exécutées  à  la  lumière  électrique,  qui  possède  sur 


L'EXPOSITION  127 

le  magnésium  l'avantage  de  la  continuité  joint  au  silence  et  à  Tab- 
sence  de  fumée.  L'arc  voltaïque,  surtout  en  vase  clos,  donne  un 
éclairage  très  aclinique  et  économique.  Depuis  quelques  années, 
on  utilise  aussi  la  lampe  à  mercure,  de  Gooper-Hewitt,  dont  la 
lumière  blafarde,  assez  désagréable  à  la  vue,  est  pourtant  très 
riche  en  rayons  chimiques  et  se  prête  on  ne  peut  mieux  aux  opé- 
rations photographiques. 

Dans  les  applications  qui  exigent  des  appareils  portatifs,  on  n'a 
presque  jamais  recours  à  la  lumière  électrique,  et  c'est  le  magné- 
sium ou  l'aluminium  en  poudre  qui  sont  généralement  employés, 
seuls  ou  combinés  avec  des  substances  comburantes  (salpêtre, 
chlorate  de  potasse,  bioxyde  de  manganèse,  etc.). 

Les  métaux  pulvérisés  seuls  brûlent  moins  vite  dans  l'air  que 
lorsqu'ils  sont  mélangés  à  des  sels  qui  leur  cèdent  l'oxygène 
nécessaire  à  leur  combustion,  mais  ils  fournissent  plus  de  lumière, 
parce  qu'il  n'y  a  pas  de  solide  à  échauffer  et  qu'il  se  dégage  moins 
de  fumée.  Le  meilleur  rendement  est  obtenu  en  allumant  le  métal 
seul  dans  l'oxygène  pur  ou  dans  le  jet  oxhydrique;  mais  la  com- 
plication de  l'installation  fait  presque  toujours  renoncer  à  cette 
combinaison,  malgré  ses  avantages. 

Lorsqu'on  fait  brûlerie  magnésium  ou  l'aluminium  à  l'air  libre, 
la  poudre  métallique  est  projetée  sur  une  flamme  à  alcool  ou  sur 
un  petit  brasier,  soit  à  l'aide  d'une  longue  cuiller,  soit  à  l'aide 
d'un  dispositif  pneumatique  qui  permet  de  faire  jaillir  l'éclair  à 
distance.  Dans  ce  dernier  cas,  la  pression  d'une  poire  de  caout- 
chouc chasse  à  l'extérieur  une  certaine  quantité  de  poudre  métal- 
lique, qui  s'enflamme  au  contact  d'une  lampe  allumée. 

Quant  aux  mélanges  de  poudres  métalliques  et  de  substances 
comburantes,  ils  sont  généralement  enfermés  dans  de  petites  car- 
touches que  l'on  enflamme  à  distance,  soit  au  moyen  d'une  mèche 
nitrée,  soit  par  une  étincelle  électrique,  ou  encore  par  l'inLermé- 
diaire  d'un  déchc  mécanique  et  d'une  capsule  de  fulminate. 

Les  mélanges  qui  contiennent  du  salpêtre  ou  du  chlorate  de 
potasse  sont  des  explosifs,  qu'il  ne  faut  manipuler  qu'avec  les 
plus  grandes  précautions.  Le  permanganate  de  potasse  n'offre 
presque  aucun  danger.  Eder  indique  le  mélange  suivant  comme 
permettant  de  travailler  en  toute  sécurité  : 


128  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

Permanganate  de  potasse  pulvérisé 3  parties. 

Poudre  de  magnésium ; ,4      — 

MM.  Lumière  et  Seyewetz  ont  combiné,  en  1910,  une  poudre  à 
la  fois  très  photogénique  et  peu  dangereuse.  Le  comburant  em- 
ployé est  le  perchlorate  de  potasse,  qui,  malgré  son  pouvoir  oxy- 
dant très  énergique,  n'offre  pas  les  dangers  du  chlorate,  dont  les 
explosions  spontanées  ont  été  la  cause  de  fréquents  accidents. 
Les  mélanges  de  perchlorate  de  potasse  et  de  magnésium  ou 
d'aluminium  résistent  aux  chocs,  qui,  avec  le  chlorate,  détermi- 
nent de  violentes  détonations.  Cette  stabilité  peririet  d'utiliser  en 
toutes  circonstances  les  poudres  au  perchlorate.  On  obtient  une 
poudre  douée  d'un  très  grand  pouvoir  actinique  et  brûlant  très 
rapidement,  en  mélangeant  avec  soin  : 

Magnésium  en  poudre  tamisé  au  tamis  120 2  parties. 

Perchlorate  de  potasse  pulvérisé  et  tamisé  de  même.        1      — 

On  peut  remplacer  le  magnésium  par  Taluminium,  mais  ce  der- 
nier métal  ne  s'enflamme  facilement  que  s'il  est  réduit  en  poudre 
d'une  extrême  finesse  et  telle  que  le  métal  adhère  aux  vases  qui 
le  renferment,  en  formant  une  couche  brillante.  Ces  poudres  au 
perchlorate  conviennent  à  la  photographie  des  couleurs  instan- 
tanée sur  plaques  autochromes  :  nous  y  reviendrons  au  livre  IV. 

L'inconvénient  le  plus  grave  de  l'éclairage  par  combustion  de 
métaux  est  la  fumée  abondante  que  dégage  chaque  éclair.  Un 
grand  nombre  de  combinaisons  ont  été  essayées,  mais,  s'il  existe 
des  poudres  qui  produisent  moins  de  fumée  que  d'autres,  il  n'y 
a  point,  jusqu'à  présent,  pour  la  photographie,  de  poudre  sans 
fumée.  Le  mélange  qui  en  produirait  le  moins  semble  être  celui-ci: 

Bioxyde  de  manganèse 10  gr. 

Magnésium  en  poudre 10  — 

Le  magnésium  doit  être  réduit  en  poudre  très  fine,  et  le  bioxyde 
de  manganèse,  également  en  poudre  impalpable,  ne  garder  aucune 
trace  d'humidité.  Mais  si  ce  mélange  produit  moins  de  fumée  que 
les  précédents,  la  combustion  en  est  plus  lente,  et  l'éclat  moins 
brillant. 

Toutefois,  s'il  n'est  pas  possible  d'empêcher  la  fumée  de  se  pro- 
duire, on  peut  du  moins  l'empêcher  de  se  répandre.  On  y  parvient 


L'EXPOSITION  129 

àTaide  des  capteurs  de  fumée.  Dans  les  ateliers,  la  difficulté  a  été 
facilement  surmontée,  comme  on  l'a  vu  dans  le  chapitre  IV,  par 
l'emploi  d'une  cage  vitrée  communiquant  avec  l'extérieur  par 
un  tuyau  qui  laisse  échapper  la  fumée.  Dan  les  installations  por- 
tatives, il  est  souvent  impossible  de  canaliser  ainsi  la  fumée  jus- 
qu'au dehors.  On  fait  alors  jaillir  la  lumière  dans  des  boîtes  pliantes 
d'où  la  fumée  ne  peut  s'échapper.  Nous  citerons,  dans  cet  ordre 
d'idées,  l'appareil  Idéal,  de  M.  d'Osmond.  Le  capteur  de  fumée  se 
compose  d'une  enveloppe  maintenue  par  des  arceaux  et  rappelant 
la  forme  de  certaines  lanternes  vénitiennes,  connues  sous  le  nom 
de  ballons,  ou  encore  une  double  capote  de  cabriolet.  Repliée,  cette 
double  capote  laisse  parfaitement  dégagée  la  charge  de  magné- 
sium placée  en  dessous;  au  moment  où  jaillit  la  lumière,  aucun 
obstacle  n'en  diminue  l'éclat.  Mais,  aussitôt  que  s'est  produit  l'é- 
clair, la  capote  se  ferme  automatiquement  d'un  mouvement  brus- 
que et  emprisonne  la  fumée.  On  n'a  plus  alors  qu'à  décrocher  le 
ballon  de  son  support  et  à  l'emporter  au  dehors,  où  on  l'ouvre 
pour  laisser  échapper  la  fumée. 

Quel  que  soit  le  système  adopté,  il  est  rare  qu'on  n'éclaire  le 
sujet  que  par  un  seul  foyer  :  les  images  obtenues  dans  de  sem- 
blables conditions  se  montreraient  trop  dures,  les  contrastes  en 
seraient  exagérés,  et  les  demi-teintes  manqueraient.  Aussi  dispose- 
t-on  d'ordinaire  plusieurs  sources  de  lumière,  combinées  de  ma- 
nière à  produire  un  éclairage  plus  doux.  Si  toutes  les  sources  de 
lumière  se  trouvent  du  même  côté  du  modèle,  on  donnera  un 
léger  éclairage  au  côté  opposé,  à  l'aide  d'écrans  blancs  qui  réflé- 
chiront la  lumière  en  la  diffusant.  Si  l'on  répartit  les  sources 
lumineuses  de  chaque  côté  du  sujet,  il  faudra  éviter  qu'elles  s'y 
trouvent  en  nombre  égal  à  droite  et  à  gauche,  car  on  tomberait 
alors  dans  le  défaut  contraire,  et  réclairage  serait  trop  plat.  On 
disposera,  par  exemple,  trois  lampes  à  droite  et  une  seule  à  gau- 
che, ou  vice  versa. 

Le  nombre  des  foyers,  la  quantité  de  poudre  à  brûler,  dépen- 
dent évidemment  de  l'étendue  de  la  scène  à  reproduire  et,  s'il  s'a- 
git d'un  intérieur,  de  la  cotileur  des  parois.  Pour  un  portrait,  la 
j  lumière  bien  diffusée  d'une  seule  lampe  pourra  suffire,  tandis  que 
pour  une  vaste  nef,  un  hall,  un  jardin,  il  en  faudra  une  dizaine 


130  TRAITE   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

et  même  bien  davantage.  IL  est  impossible  de  préciser  la  quantité 
de  poudre  à  brûler,  car  elle  dépend  non  seulement  de  la  composi- 
tion du  mélange  employé,  mais  aussi  des  dimensions  de  la  pièce 
et  du  pouvoir  réfléchissant  des  murs,  du  plafond  et  des  objets 
environnants.  Cependant  nous  pouvons  indiquer,  à  titre  d'exem- 
ple, que  pour  un  portrait  sur  plaque  rapide  avec  un  objectif  dia- 
phragmé à //5,  il  faudra  environ  J/2  gramme  de  poudre  Lumière 
au  perchlorate.  Pour  un  groupe  de  4  ou  5  personnes,  il  en  fau- 
drait 1  à  2  grammes. 

Les  scènes  photographiées  la  nuit  (rues,  salles  de  spectacle  ou 
de  bal)  comportent  généralement  des  foyers  lumineux  (réverbères, 
candélabres,  girandoles,  lampions,  etc.)  qui  seront  visibles  sur  la 
photocopie  et  qui  détermineraient  un  halo,  si  l'on  faisait  usage 
de  plaques  ordinaires.  On  aura  donc  soin,  en  pareil  cas,  de  n'em- 
ployer que  des  plaques  anti-halo. 

Parfois,  la  lumière  artificielle  est  combinée  avec  la  lumière  du 
jour,  et  certains  artistes  ont  produit  de  la  sorte  des  œuvres  très 
remarquées.  C'est  ainsi  qu'il  est  possible  d'obtenir  de  beaux  por- 
traits dans  une  chambre  ordinaire.  Le  modèle  étant  éclairé  de  face 
par  la  fenêtre,  si  l'appareil  est  placé  entre  le  modèle  et  la  fenêtre, 
on  n'aura  qu'une  image  sans  relief.  Mais,  si  l'on  dispose,  à  droite 
ou  à  gauche  du  modèle,  un  peu  plus  haut  que  sa  tête,  une  lampe 
à  magnésium,  cet  éclairage  supplémentaire  convenablement  dosé 
donnera  au  modelé  tout  le  relief  nécessaire.  Les  contrastes  seront 
très  accusés  si  la  pose  est  très  réduite,  parce  que  l'éclairage  laté- 
ral sera  alors  prépondérant;  si,  au  contraire,  la  pose  est  prolongée 
et  la  charge  de  magnésium  réduite,  alors  c'est  l'éclairage  de  face 
qui  fournira  l'efl'et  prédominant,  et  les  contrastes  seront  adoucis. 

C'est  également  en  combinant  la  lumière  diurne  avec  l'éclair 
magnésique  que  l'on  réalise  les  efî'ets  de  lampe  ou  de  foyer.  La 
source  de  lumière  artificielle  est  dissimulée,  soit  sous  l'abat-jour 
d'une  lampe  à  pétrole,  soit  à  l'intérieur  d'une  cheminée,  à  la  place 
qu'y  occupe  d'ordinaire  le  combustible.  L'éclair  est  allumé  à  l'aide 
d'une  transmission  pneumatique  ou  électrique,  le  tube  de  caout- 
chouc ou  les  fils  conducteurs  étant  soigneusement  dissimulés,  de 
manière  à  demeurer  invisibles  sur  l'épreuve.  Le  sujet  semble  ainsi 
éclairé  par  la  lampe  ou  par  le  feu  que  l'on  suppose  allumé  dans  la 


L'EXPOSITION  131 

cheminée,  et,  en  même  temps,  réclairage  de  face  venu  de  la  fenêtre 
atténue  les  contrastes,  qui  seraient  trop  heurtés  si  la  scène  n'était 
éclairée  que  par  la  combustion  du  magnésium. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


Agle,  Manuel  pratique  de  photographie  instantanée,  £«  tirage,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1891. 

H.  BouRSAULT,  Calcul  du  temps  de  pose  en  photographie,  Paris  (Gauthier- Villars)^ 
1896. 

G.  DE  Chapel  d'Espinassous,  Traité  pratique  de  la  détermination  du  temps  de 
pose,  Paris  (Gauthier-Villars),  1890. 

A.  Clément,  Méthode  pratique  pour  déterminer  exactement  le  temps  de  pose, 
Paris  (Gaiilhier-Villars),  1889. 

F.  DiLLAYE,  Principes  et  Pratique  d'art  en  photographie.  Le  paysage,  Paris  (Gau- 
thier-Villars), 1899. 

Fleury-IIermagis  et  Rossignol,  Traité  des  excursions  photographiques ,  Paris 
(Rougieret  Gie),  1889. 

H.  FouRTiER,  le^s  Lumières  artificielles  en  photographie,  Paris  (Gauthier-Villars), 
1895. 

A.  de  la  Baume  Pluvinei.,  le  Temps  de  pose,  Paris  (Gauthier-Villars),  1890. 

A.  Londe,  la  Photographie  instantanée  théorique  et  pratique,  3**  édilion,  Pari» 
(Gauthier-Villars),  1897. 

A.  Londe,  la  Photographie  à  l'éclair  magnésique,  Paris  (Gauthier-Villars),  i905> 

A.  Londe,  la  Photographie  à  la  lumière  artificielle,  Paris  (0.  Doin  et  tilsj,  1914. 

Marco  Mknuoza,  la  Photographie  la  nuit,  Paris  (Gauthier-Villars),  1893. 

A.  Mazel,  la  Photographie  artistique  en  montagne,  Paris  (Gh.  Mendel),  1902. 

A.-PiERRE  Petlt,  la  Photographie  simplifiée  et  la  Lumière  artificielle,  Paris 
(Gauthier-Villars),  1903. 

C.  PuYO,  Sotes  sur  la  photographie  artistique,  Paris  (Gauthier-Villars),  1896. 

Ris-Paquot,  Manuel  pratique  de  photographie  à  la  lumière  artificielle,  Paris 
(Ch.  Mendel),  1904. 

H'.-P.  RoBiNSON,  la  Photographie  enplein  air,  2  vol.  (3«  édition),  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1899. 

H.-P.  RoBiNSON,  les  Eléments  d'une  photographie  artistique,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1898. 

L.  Vidal,  Calcul  des  temps  de  pose  et  Tables  photométriques,  2^  édition,  Paris 
(Gauthier-Villars),  1884. 

Vogel,  la  Photographie  des  objets  colorés  avec  leurs  valeurs  réelles,  Paris  (Gau- 
thier-Villars), 1887. 


132  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE   VU 

LE     DÉVELOPPEMENT 

Image  latente.  —  Les  sels  d'argent  qui  n'ont  été  exposés  à  la 
lumière  que  pendant  très  peu  de  temps  ne  se  distinguent  pas,  à 
première  vue,  de  ceux  qui  ont  été  conservés  dans  l'obscurité.  Ainsi, 
une  plaque  au  gélatinobromure  impressionnée  dans  la  chambre 
noire  ne  diffère  apparemment  en  rien  de  ce  qu'elle  était  aupara- 
vant. On  n'y  remarque  aucune  trace  d'image,  et  cependant  il  est 
facile  de  la  faire  apparaître,  à  l'aide  de  divers  réactifs. 

On  appelle  image  latente  l'impression  invisible  déterminée  par  la 
lumière;  révélateurs,  les  réactifs  employés  pour  la  rendre  visible; 
et  développement,  l'opération  par  laquelle  l'image  est  révélée.  Cette 
image  esi  négative  :  les  ombres  du  modèle  n'ayant  pas  impressionné 
Témutsion  lui  laissent  son  aspect  primitif,  tandis  que  les  parties 
correspondant  aux  blancs  se  trouvent  noircies  par  le  révélateur. 
Le  développement  achevé,  l'image  est  fixée  dans  une  solution  d'hy- 
posulfite  de  soude,  qui  dissout  le  bromure  d'argent  que  le  révéla- 
teur n'a  pas  décomposé.  Les  noirs  du  sujet  se  trouvent  ainsi  repré- 
sentés par  la  gélatine  transparente,  tandis  que  les  gris  et  les  blancs 
sont  traduits  par  l'argent  réduit  à  l'état  métallique,  d'autant  plus 
opaque  que  l'impression  lumineuse  a  été  plus  intense. 

,  La  nature  de  l'image  latente  a  soulevé  des  controverses  qui 
durent  encore  et  suggéré  des  hypothèses  qu'il  n'a  pas  été  possible, 
jusqu'ici,  d'étayer  sur  des  bases  inébranlables.  Quelle  est,  au  juste, 
la  modification  que  subit  le  bromure  d'argent  rapidement  exposé 
à  la  lumière?  Pour  les  uns,  c'est  une  action  chimique,  tandis  que 
les  autres  y  voient  une  action  physique. 

Les  partisans  de  la  théorie  chimique  supposent  que  l'action  lumi- 
neuse réduit  partiellement  le  bromure  d'argent  et  le  transforme  en 
un  sous-bromure  très  instable,  facilement  décomJ)Osé  par  les  rêvé* 


LE  DÉVELOPPEMENT  133 

lateurs,  qui  sont  des  substances  réductrices.  Ces  corps  se  combi. 
nent  avec  le  brome,  et  l'argent  est  précipité  à  l'état  métallique. 
Cette  hypothèse  est  fondée  sur  les  faits  suivants  : 

1°  L'action  prolongée  de  la  lumière  suffît  pour  réduire  complè- 
•  tement  les  sels  d'argent;  c'est  du  çeste  sur  cette  propriété  qu'est 
fondé  le  tirage  dfes  épreuves  sur  papier  à  noircissement  direct.  Il 
est  dès  lors  légitime  d'admettre  que  le  sel  d'argent  exposé  à  la 
lumière  pendant  un  temps  très  court  sera  légèrement  décomposé, 
trop  peu  sans  doute  pour  qu'il  nous  soit  possible  d'y  découvrir  un 
changement  d'aspect,  mais  assez  cependant  pour  que  cette  faible 
réaction  amorce  une  réaction  plus  complète. 

2°  Si  l'on  dissout  dans  l'hyposulfite  de  soude  le  bromure  d'ar- 
gent d'une  plaque  exposée  dans  la  chambre  noire  et  non  dévelop- 
pée, cette  plaque  devient  en4;ièrement  transparente  et  n'accuse  pas 
la  moindre  trace  d'image.  Cette  image  existe,  néanmoins,  et  Ton 
peut  la  faire  apparaître,  en  la  traitant  par  une  solution  d'acide 
gallique  additionnée  de  nitrate  d'argent.  On  en  conclut  que  la 
lumière  a  décomposé  une  petite  quantité  de  bromure  d'argent,  soit 
à  l'état  de  sous-bromure,  soit  même  à  l'état.d'argent  métallique.  Ce 
produit  delà  décomposition,  insoluble  dans  l'hyposulfite,  est  resté 
dans  la  couche  de  gélatine,  et,  quoiqu'il  y  soit  en  trop  faible  quan- 
tité  pour  y  être  aperçu,  il  constitue  des  points  d'attraction  pour 
les  molécules  d'argent  mises  en  liberté  par  l'action  réductrice  de 
l'acide  gallique  sur  le  nitrate  d'argent 

A  ces  arguments,  les  partisans  de  l'action  physique  objectent  : 

1**  Si  l'action  de  la  lumière  sur  le  bromure  d'argent  était  une 
action  chimique,  elle  serait  proportionnelle  à  sa  durée,  ou  du 
moins  serait  d'autant  plus  complète  qu'elle  se  serait  exercée  plus 
longtemps.  Or,  il  n'en  est  rien  :  en  prolongeant  la  pose  au  delà 
d'une  certaine  limite,  on  obtient  des  images  ternes,  grises,  voilées, 
solarisées,  et,  si  la  surexposition  est  excessive,  l'image  finit  par  se 
renverser,  les  noirs  se  substituant  aux  blancs,  et  réciproquement. 
On  arrive  même  à  tirer  parti  de  ce  phénomène  d'inversion  pour 
obtenir  des  contretypes  directs,  c'est-à-dire  pour  avoir  une  image 
positive  sans  passer  par  l'interme'diaire  d'un  cliché  négatif. 

2°  La  Lumière  n'est  pas  le  seul  agent  susceptible  de  provoquer 
une  impression  latente.  Les  corps  radio-actifs  et  les  émanations 

8 


134  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

qui  se  dégagent  de  certaines  substances  exercent  une  action  de 
même  nature.  C'est  ainsi  qu'une  plaque  peut  être  mise  hors  d'usage 
pour  avoir  séjourné  dans  un  châssis  fermé  par  un  volet  en  zinc  ou 
même  en  bois  fraîchement  enduit  d'un  vernis  à  base  de  térében- 
thine. Encore  ces  phénomènes  ne  seraient-ils  pas  absolument 
décisifs,  puisqu'ils  n'excluent  pas  toute  action  chimique,  mais  il 
y  a  plus.  Le  simple  contact  des  doigts  sur  une  émulsion  sensible 
et  même  la  pression  d'un  corps  absolument  inactif,  comme  une 
baguette  de  verre,  suffisent  pour  déterminer  des  réductions  locales, 
invisibles  avant  le  développement,  mais  révélées  de  la  même  façon 
que  l'impression  lumineuse.  Les  bandes  de  papier  plissé  qui  sépa- 
rent les  plaques  empaquetées  ensemble  laissent,  de  même,  des 
traces  assez  fréquentes  de  leur  contact  avec  l'émulsion.  C'est  pour- 
quoi il  est  recommandé  de  manipuler*avec  les  plus  grandes  pré- 
cautions les  papiers  au  gélatinobromure  :  la  moindre  éraillure,  le 
plus  léger  frottement,  se  trouvent  accusés,  au  développement,  par 
des  traits  noirs.  L'action  de  la  lumière  pourrait  donc  avoir  égale- 
ment pour  effet  de  provoquer  un  ébranlement  moléculaire  :  le 
bromure  ne  serait  pas  décomposé,  mais  se  trouverait  dans  un  état 
instable  qui  faciliterait  sa  décomposition  par  les  révélateurs. 

3°  M.  Dewar  et  les  frères  Lumière  ont  vérifié  que  la  plaque  pho- 
tographique reste  susceptible  de  s'impressionner  à  des  tempéra- 
tures extrêmement  basses  ( — 252°),  voisines  du  zéro  absolu,  tandis 
que  les  affinités  du  fluor,  considérées  comme  les  plus  puissantes,  ne 
se  manifestent  déjà  plus  à  — 180°.  On  est  ainsi  amené  à  admettre 
que  la  formation  de  l'image  latente  dérive  d'une  action  physique 
ou  intra-atomique,  comme  c'est  le  cas  de  la  radio-activité  ou  de  la 
fluorescence,  dont  les  manifestations  sont  indépendantes  des  con- 
ditions de  température. 

D'autres  expériences,  qu'il  serait  trop  long  d'énumérer,  sont 
encore  citées  h  l'appui  ou  à  rencontre  de  chacune  des  théories. 
Ce  qu'il  semble  logique  d'en  conclure,  c'est  que  l'action  exercée  par 
la  lumière  sur  les  sels  d'argent  est  complexe.  Les  nombreuses 
recherches  effectuées  dans  cette  voie  par  le  D""  Luppo  Cramer  ten- 
draient à  établir  qu'une  exposition  très  courte  aurait  surtout  pour 
effet  de  modifier  la  structure  moléculaire  du  composé  sensible, 
mais  que  si  l'action  lumineuse  est  suffisamment  prolongée,  il  se 


LE   DEVELOPPEMENT  135 

produit  des  modifications  chimiques,  d'ailleurs  variables  suivant 
la'  nature  de  Fémulsion  (gélatine  ou  coUodion)  et  suivant  son 
degré  de  maturalion. 

Destruction  de  l'image  latente.  —  L'impression  lumineuse  qu'a 
subie  le  bromure  d'argent  peut  être  détruite  à  l'aide  des  bains  oxy- 
dants. Cette  propriété  permet  d'utiliser  les  plaques  voilées,  c'est-à- 
dire  exposées  accidentellement  à  la  lumière,  et  qui  seraient  perdues 
s'il  n'était  pas  possible  d'en  effacer  la  réduction  latente. 

Les  plaques  revivifiées  à  l'aide  des  bains  suivants  sont  beaucoup 
plus  lentes  qu'auparavant  et  ne  se  conservent  pas  très  longtemps. 

A.  Eau 1.000  ce. 

Bichromate  de  potasse 30  gr. 

Bromure  de  potassium 15  — 

B.  Eau 1.000  ce. 

Ammoniaque 50  gr. 

Nitrate  d'ammoniaque 50  — 

Bromure  de  potassium 25  — 

La  plaque  est  d'abord  laissée  pendant  5  minutes  dans  la  solution 
A,  puis  lavée  abondamment  et  immergée  dans  la  solution  B,  d'où 
on  ne  la  retire  qu'au  bout  d'une  demi-heure.  On  lave  à  nouveau,  et 
on  fait  sécher  dans  l'obscurité. 

On  peut  aussi  utiliser  la  formule  suivante,  qui  est  plus  simple  et 
permet  d'obtenir  des  images  à  contrastes  brillants  : 

Acide  chromique 5  gr. 

Bromure  de  potassium 10  — 

Eau 1 .000  ce. 

La  plaque  est  immergée  dans  cette  solution  pendant  5  minutes, 
lavée  à  l'eau  courante  et  séchée  aussi  rapidement  que  possible,  à 
l'abri  de  la  lumière. 

M.  L.  Tranchant  est  arrivé  à  rendre  aux  émulsions  voilées  leur 
rapidité  primitive,  en  les  traitant  par  une  solution  d'urée.  La 
plaque  est  d  abord  plongée  dans  le  bain  régénérateur,  qui  détruit 
l'action  de  la  lumière  : 

Eau 100  ce. 

Bromure  de  potassium 3  gr. 

Acide  sulfurique i  — 

Après  3  minutes  d'immersion,  dans  l'obscurité,  on  la  lave  dans 
8  eaux  au  moins,  et  on  la  passe  dans  : 


136  TRAITE   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Eau 100  ce. 

Urée 1  gr. 

On  l'y  laisse  5  minutes,  on  Fégoutte  sans  la  laver,  et  on  la  fait 
sécher  lentement  dans  une  boîte  où  s'accomplira  la  maturation. 

Généralités  sur  le  développement.  —  Avant  de  décrire  les  mé- 
thodes proposées  pour  effectuer  Topération  du  développement,  il 
est  nécessaire  de  faire  connaître  les  principales  propriétés  des 
révélateurs.  Un  grand  nombre  de  substances  sont  susceptibles  de 
révéler  Timage  latente,  et  on  peut  les  doser  de  bien  des  manières. 
Aussi  les  formules  de  bains  de  développement  sont-elles  extrême- 
ment nombreuses.  Les  citer  toutes  serait  impossible  et  n'aurait 
d'ailleurs  d'autre  résultat  que  de  rendre  confuses  les  notions  qu'il 
s'agit  au  contraire  de  clarifier.  Nous  n'indiquerons  donc  que  les  for- 
mules les  mieux  étudiées  et  dont  les  résultats  sont  les  plus  sûrs. 

Quel  que  soit  le  révélateur  employé,  l'opérateur  devra  observer 
quelques  préceptes  essentiels.  La  plaque  ou  la  pellicule  extraite  du 
châssis  est  d'abord  époussetée  au  blaireau,  car  les  poussières  dépo- 
sées sur  l'émulsion,  même  après  la  pose,  pourraient  occasionner 
des  points  transparents.  11  faudra  la  préserver  soigneusement  de 
la  lumière,  même  de  celle  que  fournit  la  lanterne  à  verres  rouges 
ou  verts,  car  les  émulsions  actuelles  sont  extrêmement  sensibles 
tant  qu'elles  sont  sèches.  Une  fois  bien  imbibées  par  le  révélateur, 
leur  sensibilité  sera  très  diminuée.  Néanmoins  il  sera  prudent  de 
couvrir  la  cuvette  d'une  planchette  ou  d'un  carton. 

La  plaque  est  immergée  dans  le  révélateur,  la  gélatine  en  dessus. 
Pour  que  l'action  du  bain  soit  régulière,  il  est  nécessaire  d'agiter 
la  cuvette  pendant  le  développement.  Si  le  liquide  restait  immobile, 
on  remarquerait  sur  la  couche  soit  des  dépôts  pulvérulents,  soit 
des  stries  et  des  marbrures  qui  risqueraient  de  compromettre  le 
cliché.  Un  léger  mouvement  communiqué  à  la  cuvette  suffît  ample- 
ment pour  éviter  ces  précipités,  et,  comme  on  emploie  générale- 
ment des  bains  assez  concentrés,  à  l'aide  desquels  le  développe- 
ment est  achevé  au  bout  de  5  ou  6  minutes,  le  balancement  de  la 
cuvette  n'offre  aucun  inconvénient. 

Les  révélateurs  doivent  être  employés,  autant  que  possible,  à  la 
température  de  16°  à  18°  environ.  Plus  froid,  le  bain  n'est  pas  assez 
actif,  son  action  est  lente  et  conduit  à  des  images  ternes  et  dépour- 


LE   DÉVELOPPEMENT  \2^ 

vues  d'intensité.  Plus  chaud,  il  développe  rapidement,  mais  risque 
de  voiler  le  négatif  et  d'occasionner  le  décollement  de  la  gélatine. 
Cependant  le  décollement  sera  évité  si  Ton  prend  la  précaution  de 
paSî^er  tout  autour  de  la  plaque,  avant  de  Timmerger,  un  corps 
gras  quelconque,  un  morcau  de  chandelle  par  exemple,  appliqué 
sur  les  bords  de  la  couche  de  manière  à  y  dessiner  un  liséré  imper- 
méable à  l'eau. 

Sil  n'est  pas  possible,  pendant  Tété,  de  refroidir  le  révélateur 
au-dessous  de  25°,  on  pourra  durcir  au  préalable  la  couche  de 
gélatine  dans  une  solution  à  5  p.  100  d'alun  de  chrome. 

Certains  révélateurs  tachent  les  doigts,  d'autres  provoquent,  à 
la  longue,  un  eczéma  assez  douloureux.  Les  taches  s'enlèvent  faci- 
lement par  des  lavages  à  l'acide  chlorhydrique  dilué.  Quant  à 
l'eczéma,  on  le  guérit  par  l'application  d'une  des  trois  pommades 
suivantes  : 

I.    Tnrbilh  minéral  (sous-sulfate  de  mercure) 1   gr. 

Prcci,)ité  blanc  (prolocblorure  de  mercure) 1    — 

Bioxyde  jaune  mercurique 0,5  — 

Vaseline  pure 60    — 

II.     Lanoline 10  — 

Ichtyol 5  — 

Vaseline  blancbe 15  — 

Acide  borique 20  — 

III.     Lamline.... 40    — 

Acide  pbénique 1    — 

Oxyde  de  plomb 2,5  — 

Azotate  de  mercure 2    — 

On  chauffe  doucement  et  on  mélange  avec  une  spatule  en  boia. 
Les  doigts  enduits  de  l'une  de  ces  pommades  sont  recouverts  d'un 
gant  pendant  la  nuit. 

Ces  remèdes  sont  assez  efficaces,  mais  il  est  préférable  d'éviter 
d'en  avoir  besoin,  en  employant  des  moyens  préventifs  bien  sim- 
ples. On  n'a  qu'à  faire  usage  de  doigtiers  en  caoutchouc,  qui  per- 
mettent de  manipuler  les  plaques  sans  que  la  peau  soit  en  contact 
avec  le  révélateur.  Pour  soulever  plus  facilement  la  plaque,  on  se 
sert  de  crochets  en  corne  qui  s'adaptent  à  l'index.  On  peut  aussi 
teo^r  le  cliché  à  l'aide  de  pinces  (fig.  81)  qui  dispensent  d'employer 


138 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGR/PRIE 


Cl.  Demaria-Lapierre. 
Fig.  81. —  Pince  à  clichés 


le  doigtier  ou  le  gant  de  caoutchouc.  Enfin,  le  plus  simple  est  de 

s'en  tenir  aux  révélateurs  qui  n'occasion- 
nent ni  taches  ni  accidents  cutanés  :  le 
paramidophénol,  par  exemple. 

Les  pellicules  en  longues  bandes  peu- 
vent, à  la  rigueur,  être  plongées  dans  des 
cuvettes  ordinaires  contenant  une  quantité 
suffisante  de  bain  révélateur,  mais  il  est 
plus  commode  d'avoir  recours  à  un  réci- 
pient spécial  à  fond  demi-cylindrique  sur 
lequel  repose  un  rouleau  en  cristal.  Ce 
rouleau  est  d'abord  placé  sur  la  bande 
pelliculaire,  dont  on  tient  les  deux  extré- 
mités à  l'aide  de  pinces,  puis  le  tout  est 
plongé  dans  la  cuvette  à  demi  remplie  de 
révélateur.  En  faisant  monter  et  descendre 
alternativement  chacune  des  deux  extrémités  de  la  bande,  toute 
la  surface  impressionnée  se  trouve  successivement  soumise  à 
l'action  du  révélateur. 

Une  disposition  différente  est  adoptée  pour  le  développement  des 
films  de  cinématographe.  Comme  il  s'agit  dans  ce  cas  de  bandes 
de  très  grande  longueur,  on  les  enroule  en  spires  parallèles  juxta- 
posées sur  de  grands  cylindres  que  l'on  fait  tourner  au-dessus 
d'une  longue  cuvette  demi-cylindrique. 

Composition  et  caractères  des  principaux  révélateurs.  —  Les 
substances  révélatrices  n'agissent  pas  seules  :  le  révélateur  à  Thy- 
droquinone,  par  exemple^  ne  contient  pas  que  de  rh5^droquinone. 
Le  développement  exige  la  présence  de  certains'  adjuvants,  soit 
pour  accélérer  l'action  réductrice,  soit  pour  la  modérer,  soit  pour 
empêcher  la  coloration  de  la  gélatine.  De  là  la  complexité  de  la 
plupart  des  formules  de  révélateurs  et  la  nécessité  d'en  modifier 
la  composition  suivant  les  circonstances.  Les  paragraphes  suivants 
ont  pour  objet  de  faire  connaître  le  mode  de  préparation  des  prin- 
cipaux révélateurs,  ainsi  que  leurs  avantages  et  inconvénients 
respectifs. 

Révélateur  à  l'adurol.  —  La  formule  normale,  applicable  à  un 
phototype  exactement  posé,  est  : 


LE  DÉVELOPPEMENT  139 

Eau 1.000  ce. 

Adurol 10  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 30  — 

Carbonate  de  soude 80  — 

Bromure  de  potassium 1  — 

En  cas  de  sous-exposition,  on  augmentera  légèrement  la  quan- 
tité de  carbonate;  le  développement  sera  alors  accéléré,  et  le  cliché 
moins  heurté,  mais  il  faut  éviter  l'excès  de  sel  alcalin,  qui  risque- 
rait de  voiler  l'image.  Si  la  pose  a  été  trop  longue,  on  ajoutera  un 
peu  de  bromure.  Ce  sel  ralentit  le  développement,  augmente  les 
oppositions  et  permet  de  corriger  les  excès  de  pose  même  consi- 
dérables. 

Ce  révélateur  se  conserve  pendant  quelque  temps  en  flacon  bien 
bouché  et  se  colore  peu,  ne  dépassant  pas  la  teinte  jaune  pâle.  Il 
ne  tache  pas  les  doigts  et  ne  colore  pas  la  gélatine.  Il  fournit  des 
clichés  vigoureux,  dans  un  temps  assez  court,  avec  peu  de  ten- 
dance au  voile.  L'image  est  d'une  bonne  nuance  noire,  avec  une 
gamme  très  régulière»de  tons.  Il  convient  également  bien  au  por- 
trait, au  paysage  et  à  la  reproduction  du  trait.  Le  même  bain  peut 
servir  pour  plusieurs  plaques,  mais  alors  son  énergie  s'affaiblit, 
et  le  développement  s'effectue  plus  lentement. 

Révélateur  à  l'amidol  ou  diamidophénol.  —  Formule  normale  * 

Eau 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 30  gr. 

Diamidophénol  (chlorhydrate) 5  — 

Cette  solution  ne  se  conservant  que  peu  de  temps,  il  ne  faut  la  * 
préparer  qu'au  moment  de  l'emploi.  Si,  au  cours  du  développe- 
mentj,  on  s'aperçoit  que  le  cliché  manque  de  pose,  on  ajoute  au 
bain  normal  une  solution  concentrée  de  sulfite  de  soude,  sans 
cependant  dépasser  le  double  de  la  quantité  indiquée  ci-dessus. 
Si,  au  contraire,  on  reconnaît  qu'il  y  a  eu  excès  de  pose,  on  étend 
rapidement  le  bain  de  son  volume  d'eau  et  on  y  ajoute  du  diami- 
dophénol, sans  dépasser  le  triple  de  la  dose  normale  ^  11  convient 

1.  On  peut  également  corriger  l'excès  de  pose  par  addition  de  bromure  de 
potassium  ou  de  bisulfite  de  soude.  Cette  dernière  combinaison  constitue  le  révé- 
lateur au  diamidophénol  en  liqueuj-'  acide,  dont  les  avantages  ont  été  très  exagé- 
rés par  divers  auteurs,  mais  qui  fournit  néanmoins  des  clichés  brillants  et  bien 

mo  lek's. 


140  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

toutefois  de  remarquer  que  ce  révélateur  agit  trop  rapidement 
pour  permettre  la  correction  des  erreurs  de  pose  à  ceux  qui  ne 
sont  pas  très  familiarisés  avec  son  emploi.  Son  principal  avantage 
est  de  développer  sans  le  secours  d'aucune  substance  alcaline 
caustique  susceptible  d'abîmer  la  gélatine.  Il  est  d'une  préparation 
et  d'un  maniement  très  simples  et  fournit  des  clicliés  très  harmo- 
nieux, remarquablement  fouillés,  d'un  gris  noir  à  grain  très  fin, 
pur  et  brillant. 

La  solution  peut  être  conservée  pendant  quelques  jours,  dans 
des  flacons  pleins,  bien  bouchés  et  à  l'abri  de  l'humidité.  Malgré 
ces  précautions,  elle  ne  tarde  guère  à  s'altérer  :  le  bain  brunit  et 
perd  son  activité. 

Le  révélateur  au  diamidophénol  ne  colore  pas  la  gélatine,  mais 
les  doigts  et  surtout  les  ongles  de  l'opérateur  finissent,  à  la  suite 
d'une  longue  manipulation,  par  prendre  une  teinte  rose  ou,  par- 
fois, jaune-brun.  On  fera  facilement  disparaître  cette  coloration, 
en  plongeant,  le  plus  tôt  possible  après  l'emploi  du  révélateur, 
les  doigts  tachés  dans  une  solution  d'hypochlorite  de  chaux  ou  de 
potasse  (chlorure  de  chaux  ou  eau  de  Javel).  On  évitera  d'ailleurs 
ces  taches  si  l'on  prend  les  précautions  indiquées  p.  137  (doigtier 
de  caoutchouc,  crochet,  pinces,  etc.). 

Révélateur  au  crésophénol.  —  Faire  dissoudre,  dans  Tordre 
indiqué  : 

Eau  bouillie,  quantité  suffisante  pour  faire. ...  1  litre. 

Crésophénol 10  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 50   — 

Carbonate  de  soude  anhydre 50   — 

•    Solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100.  2  à  3  ce.    * 

Si  les  plaques  ont  une  tendance  à.  donner  des  images  dures, 
on  ajoutera  5  gr.  de  lithine  caustique,  et  l'on  doublera  la  quantité 
d'eau. 

Ce  révélateur,  indiqué  par  M.  Bouillaud,  convient  tout  particu- 
lièrement aux  portraits  exécutés  à  la  lumière  artificielle.  Il  donne 
des  négatifs  brillants,  bien  fouillés,  sans  empâtement  et  de  grain 
très  fin. 

La  correction  des  écarts  de  pose  s'obtient  facilement  en  modi- 
fiant la  formule  normale  :  en  cas  de  surexposition,  on  diminuera 


LE  DÉVELOPPEMENT  141 

la  dose  de  carbonate;  on  l'augmentera  dans  le  cas  contraire.  La 
sous-exposition  sera  également  corrigée  en  ajoutant  du  crésophé- 
nol  ou  en  diminuant  la  quantité  de  bromure. 
Révélateur  à  la  diamidorésorcine.  —  Formule  normale  : 

Eau 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 30  gr. 

Diamidorésorcine 10  — 

Cette  solution  ne  doit  être  préparée  qu'au  moment  de  l'emploi, 
car  elle  perd  assez  rapidement  son  énergie. 

Les  propriétés  de  ce  révélateur  sont  k  peu  près  les  mêmes  que 
celles  du  diamidophénol.  Cependant  la  diamidorésorcine  a  l'avan- 
tage d'être  sensible  à  l'action  du  bromure  de  potassium,  qui 
retcirde  la  venue  de  l'image  et  permet  ainsi  de  corriger  facilement 
la  surexposition.  Quand  le  phototype  apparaît  trop  rapidement  et 
se  montre  voilé,  on  n'a  qu'à  ajouter  au  bain  quelques  gouttes 
d'une  solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100.  Si,  au  con- 
traire, on  s'aperçoit  que  le  cliché  est  sous-exposé,  on'ajoutera  du 
sulfite  de  soude,  sans  toutefois  dépasser  le  double  de  la  dose  nor- 
male. 

Ce  révélateur  tache  les  mains,  mais  ne  colore  pas  la  gélatine. 
Les  taches  seront  enlevées  de  la  même  manière  que  celles  qu'oc- 
casionne le  diamidophénol. 

Révélateur  à  l'édinol.  —  Formule  normale  : 

Eau 1.000  ce. 

Edinol - 10  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre ■. .  40  — 

Phosphate  tribasique  de  soude 60  — 

Ces  proportions  peuvent  être  modifiées  dans  une  large  mesure, 
ce  qui  donne  une  grande  élasticité  à  ce  révélateur  et  le  rend  appli- 
cable, aussi  bien  aux  instantanés  qu'aux, phototypes  surexposés. 
Pour  accélérer  le  développement,  corriger  la  sous-exposition  ou 
atténuer  les  contrastes  du  sujet,  on  augmente  la  dose  de  phos- 
phate tribasique  fqui  peut  être  remplacé  par  un  carbonate  alcalin 
ou  par  la  soude  caustique).  Pour  ralentir  le  développement,  cor- 
riger un  excès  de  pose  ou  obtenir  une  image  très  vigoureuse,  on 
diminue  la  quantité  de  phosphate,  ou  de  l'alcali  qui  le  remplace, 
et  on  augmente  la  quantité  d'édinol. 


142  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Ce  révélateur  n'exerce  aucune  action  nuisible  sur  la  peau. 
Révélateur  à  la  glycine.  —  Préparer  séparément  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 15  gr. 

Glycine 10  — 

B.  Eau 500  ce. 

Carbonate  de  potasse 100  gr. 

Pour  un  développement  normal,  on  prendra  4  parties  de  A  et 
1  partie  deB.  Pour  corriger  un  excès  de  pose  ou  augmenter  les 
contrastes,  on  prendra  un  peu  plus  de  la  solution  A  et  un  peu 
moins  de  la  solution  B.  On  fera  l'inverse  pour  corriger  un  manque 
de  pose  ou  pour  adoucir  le  modelé.  Ces  modifications  permet- 
tent d'obtenir  à  volonté  des  clichés  très  vigoureux  ou,  au  contraire, 
d'une  extrême  douceur. 

Révélateur  à  l'hydramine.  —  Formule  normale  : 

Eau 1.000  ce. 

Hydramine 5  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 15  — 

Lithine  caustique 3  — 

On  fait  dissoudre  dans  l'eau,  d'abord  le  sulfite  et  la  lithine*, 
puis  l'hydramine.  Le  mélange  est  agité  jusqu'à  dissolution  com- 
plète, sans  s'inquiéter  des  flocons  légers  qui  subsistent  quand  on 
ne  se  sert  pas  d'eau  distillée  et  qui  n'ont  aucune  influence  nuisible 
sur  les  phototypes. 

La  surexposition  est  corrigée  en  ajoutant  un  peu  de  bromure 
de  potassium  en  solution  à  10  p.  100.  L'effet  modérateur  est  déjà 
sensible  lorsqu'on  verse  l  ce.  de  cette  solution  dans  100  ce.  de 
révélateur. 

La  sous-exposition  est  corrigée  en  ajoutant  quelques  gouttes 
d'une  solution  de  lithine  caustique  à  1  p.  100. 

Le  révélateur  à  l'hydramine  se  conserve  bien  en  solution;  son 
action  énergique  à  faible  dose  permet  de  n'employer  qu'une  petite 
quantité  des  substances  qui  le  constituent  pour  préparer  un  bain 
concentré  susceptible  de  développer  plusieurs  clichés ,  jusqu'à 
épuisement;  son  action  graduelle  le  rend  particulièrement  propre 

1.  Il  faut  conserver  en  flacon  bien  bouché  la  lithine  caustique,  qui  devient  ineffi- 
cace en  absorbant  l'acide  carbonique  contenu  dans  l'air. 


k 


LE  DÉVELOPPEMENT  143 

au  développement  des  clichés  posés  et  même  surexposés,  d'autant 
plus  que  sa  grande  sensibilité  aux  bromures  alcalins  permet  de 
corriger  facilement  les  excès  de  pose.  Il  ne  colore  pas  la  gélatine 
et  ne  lâche  pas  les  doigts. 

MM.  Lumière  préparent  le  révélateur  à  l'hydramine  en  rempla- 
çant le  sulfite  de  soude  et  la  lithine  par  un  produit  spécial  qu'ils 
nomment  formosidfite  (combinaison  de  formolène  et  de  sulfite  de 
soude).  La  formule  normale  devient  alors  : 

Eau 1.000  ce. 

Formosulfile 70  gr. 

Hydraiiiiiie 5  — 

Solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100 10  ce. 

Révélateur  à  rhydroquinone.  —  Formule  normale  : 

Eau 1.000  ce. 

Hvdroquinone 10  gr. 

Suifile  de  soude  anhydre 40  — 

Carbonate  de  soude  anhydre 55  — 

L'action  de  ce  bain  est  retartlée  par  le  bromure  de  potassium; 
elle  est  accélérée  soit  en  augmentant  la  dose  de  caibonate  alcalin, 
soit  en  y  ajoutant  quelques  goultes  d'essrnce  d<i  térébenthine. 

Le  révélateur  à  Thydroquinone  peut  servir  plusieurs  fois,  mais 
fonctionne  de  plus  en  plus  lentement.  L'image  est  pure,  avec  des 
blancs  bien  transparents;  sa  nuance  est  d'im  brun  noir;  son  grain 
manque  de  finesse,  et  les  contrastes  sont  facilement  exagérés  par 
la  sous-exposition,  qui  se  traduit  par  des  eUets  très  durs  et  des 
hoirs  opaques. 

La  solution  brunit  h  l'air,  mais  ne  tache  pas  les  doigts. 

Révélateur  à  l'iconogène.  —  Préparer  les  deux  solutions  : 

A.  Eau 1.0^0  ce. 

Sullite  de  soude 75  gr. 

Iconogène 15   — 

B.  Eau 1.000  ce. 

Carbonate  de  soude 150  gr. 

La  formule  normale  comprend  60  parties  de  A  et  5  parties  de  B. 
En  cas  de  surexposition,  on  diminuera  la  quantité  de  B.  On  l'aug- 
mentera, au  contraire,  en  »-as  de  sous-exposition,  sans  dépasser  le 
quadruple  de  la  dose  normale. 


144  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

Le  révélateur  à  l'iconogène  fournit  des  clichés  gris-bleu,  très 
doux,  brillants,  à  grain  fin.  La  solution  verdit,  à  Tair,  puis  brunit. 
Elle  tache  les  doigts  en  rose. 

Révélateur  à  l'hydroquinone  et  à  l'iconogène.  —  Les  deux  ré- 
vélateurs précédents  ont  des  propriétés  tout  opposées  :  l'hydroqui- 
none fournit  des  images  vigoureuses,  mais  dures,  tandis  que  l'ico- 
nogène  en  fournit  de  très  douces,  mais  dépourvues  de  vigueur.  Il 
était  donc  naturel  de  songer  à  combiner  à  l'aide  de  ces  deux  subs- 
tances un  révélateur  susceptible  de  donner  des  clichés  à  la  fois 
harmonieux  et  suffisamment  intenses.  Ce  révélateur  combiné  e$t 
généralement  préparé  à  l'aide  de  deux  solutions  : 

A.  Eau ■ 1;000  ce. 

Sulfite  de  soude. 150  gr. 

Iconogène 16  — 

Hydroquinoné 4  — 

B.  Eau 1.000  ce. 

Carbonate  de  potasse 40  gr. 

Pour  les  instantanés,  on  mélange  3  parties  de  A  avec  i  partie 
de  B  ;  on  ajoutera  un  peu  de  carbonate  pendant  le  développement,  si 
on  le  juge  nécessaire.  Pour  les  clichés  posés,  on  augmente  la  quan- 
tité d'eau  et  on  emploie  très  peu  de  carbonate. 

Révélateur  au  métol  ou  génol.  —  Préparer  les  deux  solutions  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Métol  ou  génol 10  gr. 

Sulfite  de  soude 100  —  '^ 

B.  Eau 1.000  ce. 

Carbonate  de  potasse 100  gr. 

Le  révélateur  normal  sera  composé  en  mélangeant  3  parties  de 
A  et  1  de  B.  La  dose  de  carbonate  sera  augmentée  si  le  cliché 
manque  de  pose,  et  diminuée  s'il  est  surexposé. 

Le  métol  donne  des  clichés  très  fouillés  dans  les  onibres.  L'i- 
mage apparaît  tout  à  coup  dans  son  entier,  et  non  pas  progressive- 
ment. Elle  est  d'abord  légère,  grise,  mais  gagne  en  vigueur  pro- 
gressivement, et  l'on  peut  développer  très  à  fond  sans  craindre  la 
dureté.  Le  phototype  est  noir  et  d'un  grain  fin.  La  solution  se 
conserve  bien  et  ne  s'oxyde  que  lentement.  Elle  ne  tache  pas,  mais 
provoque  des  accidents  cutanés  :  c'est  surtout  le  métol  qui  occa- 
sionne l'eczéma  dont  nous  avons  parlé,  ainsi  que  des  inflammations 


LE  DEVELOPPEMENT  145 

assez  douloureuses.  Ces  accidents  doivent  être  évités  en  touchant 
le  moins  possible  le  bain  révélateur  et  en  manipulant  les  plaques 
à  l'aide  de  pinces  ou  de  crochets.  Si  on  ne  peut  les  éviter,  on  ap- 
pliquera sur  les  doigts  une  des  pommades  indiquées  page  137. 

Le  principal  inconvénient  du  métol  est  d'agir  trop  rapidement  au 
début  et  de  produire  un  voile  superficiel,  qui  ne  nuit  pas  à  l'har- 
monie du  phototype,  mais  qui  rend  difficile  le  contrôle  du  dévelop- 
pement. 

Révélateur  à  l'hydroquinone  et  au  métol.  —  Les  propriétés  du 
métol  étant,  à  peu  près  comme  celles  de  l'iconogène,  opposées  aux 
propriétés  de  l'hydroquinone,  la  combinaison  de  ces  deux  jévéla- 
teurs  offre  des  avantages  analogues  à  ceux  du  révélateur  à  l'icono- 
gène et  à  l'hydroquinone.  On  aura  le  modelé  très  harmonieux  et 
les  ombres  remarquablement  fouillées  qui  caractérisent  le  dévelop- 
pement au  métol  joints  à  la  vigueur,  à  l'intensité  propres  à  l'hydro- 
quinone, en  mélangeant  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Sulfile  de  soud€ 34  gr. 

Métol 11  — 

Hydroquinone 14  — 

B.  Eau 1.000  ce. 

Carbonate  de  potasse 18  gr. 

Pour  une  pose  ordinaire,  on  prendra  1  partie  de  A  et  3  de  B; 
pour  clichés  surexposés,  1  partie  de  A,  2  de  B  et  quelques  gouttes 
d'une  solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100.  Pour  clichés 
sous-exposés,  on  augmentera  la  dose  de  carbonate  de  potasse. 

Révélateur  à  la  métoquinone,  —  La  métoquinone,  dont  la  pré- 
paration est  due  à  MM.  Lumière,  est  une  combinaison  définie  de  la 
base  du  métol  avec  l'hydroquinone,  et  non  pas  un  simple  mélange 
physique  de  ces  deux  substances.  Le  révélateur  à  la  métoquinone 
présente  des  avantages  bien  caractérisés.  Il  peut  être  utilisé,  comme 
le  diamidophénol,  sans  addition  d'alcali.  La  formule  normale  est 
alors  très  simple  : 

Eau 1.000  ec. 

Métoquinone 9  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 67  — 

Si  le  cliché  manque  de  pose,  l'énergie  du  révélateur  peut  être 

9       _ 


146 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


I 

II 

III 

IV 

1.000 

1.000 

1.000 

1.000 

9 

9 

9 

9 

60 

60 

60 

10 

30 

60 

5 

augmentée  par  addition  d'un  carbonate  alcalin,  ou  d'un  alcali 
caustique,  ou  encore  de  phosphate  tribasique  de  soude,  de  formo- 
sulfite,  d'acétone,  sans  que  l'image  risque  d'être  voilée.  Ainsi,  les 
instantanés  pourront  être  développés  dans  l'un  des  bains  suivants  : 


Eau 

Métoquinone 

Sulfite  de  soude  anhydre 

Phosphate  tribasique  de  soude. . 

Acétone  .  '. 

Formosulfite 

Lithine  caustique 

La  formule  IV  est  celle  qui  donne  le  révélateur  le  plus  énergique 

Le  révélateur  à  la  métoquinone  est  sensible  à  l'action  retarda- 
trice du  bromure  de  potassium.  En  cas  de  surexposition,  on  ajou- 
tera donc  au  bain  normal  quelques  gouttes  d'une  solution  de  bro- 
mure à  10  p.  100.  On  obtient  ainsi  des  noirs  très  vigoureux  et  des 
blancs  très  purs. 

La  solution  se  conserve  bien,  même  en  flacons  non  bouchés, 
sans  altération  appréciable,  et  ressert  plusieurs  fois,  jusqu'à  épui- 
sement. Elle  ne  colore  pas  la  gélatine  et  ne  tache  pas  les  doigts. 

Révélateur  à  l'ortol.  —  Préparer  les  deux  solutions  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Métabisulfite  de  potassium "7  gr. 

Ortol 15  — 

B.  Eau 1.000  ce. 

Carbonate  de  soude 120  gv. 

Bromure  de  potassium *  1  — 

Sulfite  de  soude 180  — 

Solution  d'hyposulfite  de  soude  à  5  p.  100  ...  10  ce. 

Pour  un  cliché  normalement  posé,  on  prend  des  parties  égales 
de  A  et  de  B.  4vec  2  parties  de  A  et  1  de  B,  les  clichés  sont  plus 
vigoureux;  avec  1  partie  de  A  et  2  de  B,  ils  sont  plus  doux.  On 
peut  employer  comme  accélérateur  une  solution  de  potasse  caus- 
tique à  10  p.  100,  et  comme  modérateur,  une  solution  de  bromure 
de  potassium  à  10  p.  100. 

La  facilité  avec  laquelle  ce  révélateur  se  prête  aux  modifications 
le  rend  très  élastique,  et,  sous  ce  rapport,  on  peut  le  comparer  au 


LE   DÉVELOPPEMENT  147 

pyrogallol,  sur  lequel  il  a  le  double  avantage  de  ne  pas  tacher  les 
doigts  et  de  n'être  pas  vénéneux.  Il  donne  des  phototypes  intenses, 
mais  sans  oppositions  heurtées,  d'un  grain  très  fin,  très  fouillés 
dans  les  ombres  et  d'un  noir  chaud  tirant  légèrement  sur  le  brun. 
La  solution  se  conserve  bien  en  flacons  bouchés.  On  ne  peut  lui 
reprocher  que  la  complexité  de  sa  composition,  qui  rend  son  ma- 
niement moins  commode  que  celui  du  pyrogallol. 

Révélateur  à  l'oxalate  ferreux.  —  Les  solutions  suivantes  se- 
ront préparées  avec  de  l'eau  distillée,  ou,  à  déf^-ut,  avec  une  eau 
peu  calcaire  :  . 

A.  Eau 1.000  ce. 

Oxalate  neutre  de  potasse 300  gr. 

B.  Eau 1.000  ce. 

Sulfate  de  protoxyde  de  fer 300  gr. 

Acide  tartrique  . .'. 10  — 

G.    Eau , 100  ce. 

Bromure  de  potassium 10  gr. 

Les  solutions  A  et  G  se  conservent  indéfiniment.  La  solution  B 
s'altère  rapidement  dans  l'obscurité,  par  l'oxydation  du  sulfate  fer- 
reux qui  se  transforme  en  sulfate  ferrique;  elle  se  conserve  mieux 
à  la  lumière,  surtout  si  le  flacon  contient  un  fil  de  fer  ou  quelques 
clous,  ainsi  que  quelques  gouttes  d'acide  sulfurique.  Le  mélange  des 
solutions  A  et  B  ne  doit  être  effectué  qu'au  dernier  moment,  et  la 
quantité  de  solution  B  ne  doit  pas  dépasser  le  tiers  de  la  quantité 
de  solution  A.  Ainsi,  pour  développer  une  plaque  13X18,  si  l'on 
prend  60  ce.  de  la  solution  d'oxalate,  il  ne  faudra,  sous  aucun  pré- 
texte, y  ajouter  plus  de  20  ce  de  la  solution  de  sulfate  ferreux.  Si 
l'on  dépassait  cette  dose,  on  provoquerait  la  formation  d'un  pré- 
cipité insoluble,  qui  tacherait  l'image.  Il  est  d'ailleurs  rarement 
nécessaire  d'employer  le  maximum  indiqué.  Pour  une  plaque  nor- 
malement posée,  on  prend  généralement  4  ou  5  parties  de  A  pour 
1  partie  de  B,  et  l'on  ralentit  même  l'action  du  révélateur,  en  y 
ajoutant  soit  quelques  gouttes  de  la  solution  G,  soit  une  certaine 
quantité  de  bain  déjà  utilisé  pour  une  précédente  opération.  Si  la 
plaque  est  surexposée,  on  augmentera  naturellement  la  propor- 
tion de  bain  vieux  ou  la  quantité  de  bromure.  Si,  au  contraire, 
elle  est  sous-exposée,  il  sera  parfois  nécessaire  d'employer  la  plus 


148  TRAITÉ    GÉNÉRAL    DE   PHOTOGRAPHIE 

-grande  quantité  possible  de  sulfate  de  fer.  On  prendra  donc  3  par- 
ties de  A,  1  de  B,  et  Ton  supprimera  la  solution  G.  Si  le  bain  ainsi 
composé  manque  encore  d'énergie,  on  y  ajoutera  quelques  gouttes 
d'une  solution  d'hyposulfite  de  soude  à  1  p.  1.000,  mais  avec  beau- 
coup de  précaution,  car  le  moindre  excès  de  cet  accélérateur,  par- 
ticulier au  révélateur  à  Foxalate,  provoque  un  voile  intense  et  des 
réductions  à  reflets  métalliques. 

Ce  révélateur,  universellement  employé  autrefois,  est  de  plus  en 
iplus  abandonné  depuis  quelques  années,  bien  qu'il  fournisse  des 
images  vigoureuses,  claires  et  d'une  tonalité  noire.  Il  ne  colore 
pas  la  gélatine,  mais  il  produit  sur  le  linge  des  taches  de  rouille. 

Révélateur  au  paramidophénol.  —  Le  paramidophénol  est  em- 
ployé soit  à  l'état  de  base  libre,  soit  à  l'état  de  chlorhydrate.  Dans 
le  premier  cas,  la  formule  type  est  : 

Eau : 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 150  gr. 

Lilhine  caustique 8  — 

Paramidophénûl  (base  libre) 20  — 

On  fait  dissoudre  dans  l'eau  d'abord  le  sulfite  de  soude,  puis  la 
lithine,  et  enfin  le  paramidophénol.  On  agite  jusqu'à  dissolution 
-complète.  Les  flocons  légers  qui  se  forment  quelques  instants 
après  n'ofl'rent  aucun  inconvénient. 

Dans  le  second  cas,  la  formule  normale  est  : 

Eau 1.000  ce. 

Chlorhydrate  de  paramidophénol 5  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 25  — 

Carbonate  de  potasse 25  — 

Cette  solution  est  un  peu  moins  active  que  la  première,  mais  con- 
vient néanmoins,  comme  elle,  aux  clichés  instantanés.  Le  parami- 
I  dophénol  possède  en  eff'et  une  grande  énergie  développatrice,  qu'il 
«st  d'ailleurs  facile  de  modérer,  si  c'est  nécessaire,  en  l'addition- 
nant d'eau.  Ce  révélateur  est  peu  sensible  aux  variations  de  tem- 
pérature. Il  donne  des  images  d'on  brun  jaune,  brillantes  et  d'un 
^rain  fin.  La  solution  se  conserve  bien  et  petit  servir  à  développer 
■successivement  plusieurs  plaques,  mais  en  perdant,  bien  entendu, 
de  son  activité.  Elle  ne  colore  pas  la  gélatine  et  ne  tache  pas  les 


LE  DÉVELOPPEMENT  14» 

Révélateur  à  la  paraphénylènediamine.  —  Formule  : 

Eau 1.000  gr. 

Paraphénylènediamine 10  — 

Sulflle  de  soude  anhydre    60  — 

Ce  révélateur  est  très  lent  :  une  demi-heure  est  généralement 
nécessaire  pour  que  le  cliché  atteigne  Tinlensité  voulue.  Il  ne  s'ap- 
plique qu'à  des  phototypes  notablement  surexposés  et  n'est  uti- 
lisé que  lorsqu'il  s'agit  d'obtenir  uneimage  à  grain  très  fin  à  l'aide 
d'une  émulsion  dont  le  grain  est  relativement  grossier.  Si  le  cliché 
n'a  pas  subi  un  excès  de  pose,  l'image  est  peu  intense  et  voilée. 
L'emploi  de  ce  révélateur  est  donc  très  limité;  il  est  surtout  indiqué 
dans  les  cas  où  le  cliché  est  destiné  à  être  agrandi  à  une  très  forte 
échelle.  En  prolongeant  suffisamment  l'exposition,  on  obtient  une 
image  de  tonalité  agréable,  d'un  gris  d'acier  très  doux  et  très  fine- 
ment détaillée. 

Révélateur  à  la  pyrocatéchine.  —  Préparer  les  deux  solutions  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude 100  gr. 

Pyrocatéchine 25  — 

B.  Eau 1.000  ce. 

Potasse  caustique 100  gr. 

Pour  un  cliché  normalement  posé,  on  prendra  1  partie  de  A  et  2 
de  B.  En  cas  de  sous-exposition,  on  augmentera  la  dose  de  solu- 
tion B;  on  la  diminuera  en  cas  d'excès  de  pose.  L'élasticité  de  ce 
bain  permet  de  corriger  de  notables  écarts  de  pose.  C'est  un  bon 
révélateur  surtout  pour  les  instantanés  :  il  développe  rapidement, 
sans  voile,  et  son  action  est  peu  influencée  par  les  variations  de  la 
température.  Il  donne  des  clichés  très  brillants  et  d'une  bonne 
nuance,  brun  foncé,  très  doux,  mais  à  grain  un  peu  fort.  La  solu- 
tion brunit  lentement  et  ne  tache  ni  les  mains  ni  les  plaques. 

Révélateur  au  pyrogallol.  —  Le  pyrogallol  ou  acide  pyrogal- 
lique  a  pu  être  surnommé  le  «  roi  des  révélateurs  »,  en  raison  de 
la  perfection  des  images  qu'il  donne  et  surtout  de  son  incompa- 
rable élasticité,  qui  le  rend  applicable  aux  clichés  dont  on  ignore 
totalement  le  temps  de  pose.  Son  inconvénient  unique  est  de  s'al- 
térer rapidement,  en  absorbant  l'oxygène  de  l'air  et  en  prenant 
'  une  coloration  d'un  brun  jaune  qui  se  communique  à  l'émulsion 


150  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

et  aux  doigts  de  l'opérateur.  Cependant,  on  évite  ce  défaut  en 
ajoutant  au  bain  une  quantité  suffisante  de  sulfite  de  soude  et  en 
l'utilisant  immédiatement. 

L'extrême  souplesse  de  ce  révélateur  le  fait  employer  suivant  un 
procédé  particulier,  qui  sera  décrit  plus  loin,  et  qui  consiste  essen- 
tiellement à  composer  le  bain  suivant  la  venue  de  l'image.  Les 
modifications  que  l'on  fait  subir  de  minute  en  minute  à  son  dosage 
rendent  difficile  l'indication  d'une  formule  normale.  Néanmoins, 
nous  donnons  celle  du  révélateur  concentré  de  MM.  Lumière  et 
Seyewetz  : 

Eau 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 20  gr. 

Pyrogallol 4  — 

Pour  l'usage,  on  prend  : 

Solution  ci-dessus 25  ce. 

Eau 75  — 

Acétone iO  — 

Si  l'on  craint  que  la  plaque  ne  soit  surexposée,  on  n'ajoutera  l'a- 
cétone que  goutte  h  goutte. 

Ce  révélateur,  s'oxydant  rapidement,  ne  sert  qu'une  seule  fois. 
Il  est  donc  relativement  coûteux. 

Révélateurs  physiques.  —  Les  réactifs  dont  les  formules  vien- 
nent d'être  données  sont  des  révélateurs  chimiques  :  ils  décompo- 
sent directement  le  bromure  d'argent  impressionné,  et  l'image 
est  constituée  par  l'argent  primitivement  contenu  dans  le  gélatino- 
bromure et  précipité  à  l'état  métallique  par  l'action  réductrice.  Le 
développement  physique  est  celui  qui  s'effectue  lorsqu'on  met  en 
présence  de  la  couche  sensible  un  réducteur  additionné  d'un  sel 
d'argent  soluble.  Le  révélateur  contiendra,  par  exemple,  du  pyro- 
gallol, de  l'acide  tartrique  et  du  nitrate  d'argent.  Le  pyrogallol 
décompose  le  nitrate  d'argent,  et  l'argent  ainsi  précipité  se  dépose 
sur  les  points  de  la  couche  sensible  qui  ont  reçu  l'impression 
lumineuse,  et  en  quantités  d'autant  plus  fortes  que  l'impression  a 
été  plus  intense.  Les  points  impressionnés  constituent  donc  autant 
de  centres  d'attraction  pour  le  dépôt  argentique,  et  ce  phéno- 
mène attractif,  d'ordre  physique,  se  poursuit  régulièrement,  car 


*  LE  DÉVELOPPEMENT  151 

les  particules  d'argsnt  précipité  forment  à  leur  tour  des  centres 
d'attraction,  qui  renforcent  de  plus  en  plus  l'image.  L'acide  tartri- 
que  sert  de  modérateur;  on  peut  le  remplacer  par  un  autre  acide 
organique,  l'acide  citrique  par  exemple. 

Le  développement  physique  était  autrefois  toujours  employé,- à 
l'exclusion  du  développement  chimique,  pour  révéler  les  image» 
au  collodion  humide,  dont  la  couche  conservait  un  excès  de  nitrate 
d'argent.  Aujourd'hui,  les  révélateurs  physiques  ne  sont  utilisés 
que  dans  quelques  cas  exceptionnels  :  développement  après  fixage, 
renforcement  à  l'argent,  développement  des  papiers  à  noircisse- 
ment direct. 

Le  D''  Liippo  Cramer  a  composé  un  développateur  physique  ap- 
plicable au  gélatinobromure  : 

Eau 1.000    ce. 

Acide  citrique 100    gr. 

Métol 20     — 

Chlorure  de  sodium .- 0,6  — 

Au  moment  de  s'en  servir,  80  ce.  de  cette  solution  sont  mélangés 
avec  10  ce.  d'une  solution  de  nitrate  d'argent  à  10  p.  100.  Ce  révé- 
lateur donne  de  meilleurs  résultats  avec  les  émulsions  très  lentes 
qu'avec  les  émulsions  rapides.  Il  convient,  en  particulier,  aux  tra- 
vaux photomicrographiques  qui  exigent  des  images  de  contexture 
très  fine. 

Méthodes  de  développement.  —  Quel  que  soit  le  révélateur 
adopté,  l'opération  du  développement  peut  être  conduite  de  diverses 
manières,  selon  le  résultat  à  atteindre,  selon  les  goûts  du  photo- 
graphe ou  les  nécessités  particulières  de  son  installation.  Nous 
analyserons  donc,  dans  les  derniers  paragraphes  de  ce  chapitre  : 
le  développement  contrôlé^  le  développement  rationnel  ou  méthodi- 
que (en  particulier  le  procédé  au  pyrogallol),  le  développement 
en  deux  cuvettes,  le  développement  lent,  le  développement  chrono- 
métré, le  développement  à  durée  fixe,  le  développement  en  machine, 
le  développement  en  pleine  lumière,  le  développemeyit- fixage  et  le 
développement  après  fixage.  Quant  aux  manipulations  à  effectuer 
après  le  développement,  pour  achever  le  phototype,  elles  feront 
l'objet  du  chapitre  suivant. 

Développement  contrôlé.  —  La  plaque  immergée  dans  le  rêvé- 


152 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


îaleur  est  examinée  à  la  lueur  de  l'éclairage  inactinique.  Au  bout 
de  quelques  secondes,  l'image  commence  généralement  à  se  dessi- 
ner. Si  elle  apparaît  avec  un  modelé  bien  gradué,  ni  trop  terne  ni 
trop  heurté,  il  n'y  a  qu'à  laisser  agir  le  révélateur  et  attendre  que 
le  négatif  ait  acquis  l'intensité  voulue.  Pour  bien  en  juger,  quand 
tous  les  détails  ont  paru,  on  sort  de  temps  à  autre  la  plaque  de  la 
cuvette  et  on  l'examine  par  transparence.  Le  cliché  doit  être  assez 
opaque,  car  il  faut  tenir  compte  de  la  transparence  qu'il  prendra 
pendant  le  fixage,  par  suite  de  la  dissolution  du  bromure  d'argent 
resté  inattaqué.  Quand  l'intensité  nécessaire  est  atteinte,  on  lave 
la  plaque  avec  soin  et  on  la  plonge  dans  le  fixateur,  constitué  par 
une  solution  d'hyposulfîte  de  soude  à  15  ou  20  p.  100.  Si  l'image 
tarde  trop  à  se  révéler,  ou  si  elle  apparaît  défectueuse,  dure,  insuf- 
fisamment détaillée,  ou,  au  contraire,  si  elle  se  montre  très  rapi- 
dement, avec  un  aspect  gris,  terne,  ou  noircie  uniformément  par 
un  roile  de  surexposition,  alors  il  convient  de  modifier  immédia- 
tement la  composition  du  révélateur. 

Les  photographes  qui  ont  à  développer  dans  une  seule  séance 
un  grand  nombre  de  clichés  font  souvent  usage  de  trois  cuvettes 
contenant  l'une  un  révélateur  très  énergique,  la  seconde  un  révé- 
lateur de  composition  normale,  et  la  troisième  un  révélateur  affaibli. 

La  plaque  est  d'abord  plongée  dans  le  bain  d'activité  moyenne  : 
si  elle  s'y  développe  bien,  on  laisse  le  phototype  s'intensifier;  si 
l'image  y  apparaît  trop  vite,  on  s'empresse  de  la  retirer  et  de  la 
plonger  dans  le  bain  faible;  si,  au  contraire,  elle  ne  se  développe 
pas,  ou  si  les  détails  dans  les  ombres  font  défaut,  on  la  transporte 
dans  le  bain  le  plus  actif.  C'est  ainsi,  par  exemple,  que  le  révélateur 
au  diamidophénol  pourra  être  préparé  en  trois  solutions  d'activités 
décroissantes  : 


Eau 

Sulfite  de  soude  anhydre. 
Diamidophénol 


I 

II 

III 

100 

100 

100 

6 

3 

1,5 

0,5 

0,5 

0,75 

Cette  combinaison  ne  convient  pas  à  l'amateur  qui  n'a  qu*un  ou 
deux  clichés  à  développer  dans  la  même  séance.  Il  vaut  mieux,  dans 
ce  cas,  modifier  le  bain  contenu  dans  la  cuvette.  Si  l'on  fait  usage 
d'un  révélateur  susceptible  de  se  conserver,  comme  l'hydroqui- 


LE  DÉVELOPPEMENT  153 

none  ou  le  métol,  on  aura  soin  de  garder  en  réserve  le  bain  qui  a 
servi  et  se  trouve  naturellement  affaibli.  Il  n'y  aura  dès  lors  qu'à 
mélanger  ce  bain  partiellement  épuisé  avec  un  bain  neuf,  en  pro- 
portions variables  suivant  les  circonstances  de  la  pose  et  l'effet  à 
obtenir. 

Mais,  si  l'on  n'a  pas  de  bain  vieux,  ou  si  l'on  emploie  un  révéla- 
teur qui  ne  se  conserve  pas,  comme  l'acide  pyrogallique,  il  faudra 
nécessairement  préparer  à  chaque  séance  un  bain  neuf  et  en  modi- 
fier la  composition  selon  les  circonstances.  A  cet  effet,  il  est  néces- 
saire de  connaître  le  rôle  que  jouent  dans  le  développement  les 
divers  éléments  constitutifs  du  révélateur  dont  on  fait  usage. 

Le  révélateur  au  diamidophénol  est  à  peu  près  insensible  à  Tac- 
tion  modératrice  des  bromures  et  s'oxyde  trop  rapidement  en  pré- 
sence des  accélérateurs  alcalins.  On  ne  peut  donc  en  modifier  l'ac- 
tivité qu'en  changeant  les  proportions  respectives  du  réducteur  et 
du  sulfite,  comme  l'indiquent  les  trois  formules  ci-dessus. 

Si  l'on  emploie  l'oxalate  ferreux,  la  surexposition  sera  corrigée 
à  l'aide  de  quelques  gouttes  d'une  solution  de  bromure  de  potas- 
sium ou  d'ammonium.  Les  bains  déjà  utilisés  ne  resserviront  que 
s'ils  sont  de  préparation  assez  récente.  L'excès  de  pose  est  égale- 
ment corrigé  en  n'ajoutant  que  très  peu  de  sulfate  ferreux  à  la  so- 
lution d'oxalate.  En  cas  de  sous-exposition,  on  augmentera  la  dose 
de  sulfate,  mais  en  aucun  cas  elle  ne  devra  dépasser  le  tiers  de  la 
quantité  d'oxalate.  C'est  là  un  maximum,  au  delà  duquel  l'oxalate 
ferreux  formé  par  la  combinaison  du  sulfate  ferreux  et  de  l'oxalate 
de  potasse  ne  se  dissout  plus  dans  l'excès  d'oxalate  de  potasse  et 
dépose  sur  la  plaque  un  précipité  pulvérulent  jaune-rouge.  Si  cette 
quantité  de  sulfate  ne  suffit  pas  à  révéler  tous  les  détails,  on  pourra 
suractiver  le  développateur  en  y  ajoutant  peu  à  peu  quelques  gouttes 
d'une  solution  d'hyposulfîte  de  soude  à  1  p.  1000.  Il  faut  être  très 
prudent  dans  l'emploi  de  cet  accélérateur,  dont  le  moindre  excès 
occasionne  un  voile  à  reflets  métalliques.  Cette  solution  d'hyposul- 
fite  au  millième  n'accélère  d'ailleurs  que  le  révélateur  à  l'oxalate 
ferreux.  Elle  est  sans  action  sur  les  autres 

Dans  les  autres  bains  de  développement,  l'accélérateur  est  cons- 
titué par  une  substance  alcaline  :  ammoniaque,  carbonate  de  soude 
ou  de  potasse,  lithine  caustique,  etc.  La  concentration  du  bain  per- 


154  TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

met  d'arriver  plus  vite  à  l'intensité  voulue,  mais  joue  un  rôle  tout 
difFérent,  car  elle  tend  à  produire  des  images  plus  dures  et  moins 
bien  détaillées,  contrairement  à  l'effet  de  l'accélérateur  propre- 
ment dit.  C'est  d'ailleurs  pour  ce  motif  que  les  instantanés  sont 
parfois  traités  par  des  bains  très  dilués,  comme  on  le  verra  à  pro- 
pos du  développement  lent. 

L'influence  de  ces  divers  facteurs  sera  d'ailleurs  mieux  précisée 
en  décrivant  les  particularités  pratiques  de  la  méthode  de  déve- 
loppement la  plus  rationnelle  à  l'aide  du  pyrogallol,  qui  passe,  à 
bon  droit,  pour  le  plus  souple,  sinon  le  plus  énergique  de  tous  les 
révélateurs  connus. 

Développement  rationnel  ou  méthodique  au  pyrogallol.  —  Le 
pyrogallol  ne  se  conserve  pas  en  solution  aqueuse;  même  addi- 
tionné de  sulfite,  il  ne  tarde  pas  à  se  colorer  en  jaune-brun,  en 
s'oxydant,  et  communique  alors  cette  coloration  aux  plaques.  Il 
vaut  mieux  ne  le  faire  dissoudre  qu'au  moment  de  l'emploi.  On 
procédera  de  même  pour  le  sulfite  de  soude,  dont  la  solution  s'al- 
tère également,  le  sel  se  transformant  peu  à  peu  en  sulfate  impro- 
pre au  développement.  La  dissolution  du  sulfite,  comme  celle  du 
pyrogallol,  s'opère  d'ailleurs  instantanément,  si  ces  substances  sont 
préalablement  pulvérisées,  et  la  préparation  du  révélateur  au  fur 
e.t  à  mesure  des  besoins  ne  nécessite  aucune  pesée.  Le  pyrogallol  et 
le  sulfite  de  soude  seront  donc  conservés  à  l'état  sec,  en  poudres 
fines,  dans  des  bocaux  où  l'on  pourra  puiser  à  l'aide  d'une  cuiller 
à  moutarde  en  bois  ou  en  verre.  On  aura,  d'autre  part,  une  solu- 
tion saturée  de  carbonate  de  soude  ou  de  potasse.  L'ammoniaque 
ou  l'acétone  pourraient  remplir  le  même  rôle,  mais  nous  ne  con- 
seillons pas  d'employer  ces  produits,  à  cause  de  l'odeur  qu'ils 
répandent  dans  le  laboratoire,  généralement  exigu.  Avec  certaines 
émulsions  facilement  sujettes  au  voile,  il  est  parfois  utile  d'ajouter 
au  révélateur  un  peu  de  bromure  de  potassium,  mais  ce  n'est  pas 
indispensable,  et,  personnellement,  nous  y  avons  complètement 
renoncé,  employant  uniquement  le  pyrogallol,  le  sulfite  en  poudre 
et  le  carbonate  de  soude  en  solution  saturée  dans  un  flacon  compte- 
gouttes. 

La  plaque  extraite  du  châssis  est  placée  dans  une  cuvette  en 
porcelaine  recouverte  d'un  carton  qui  préserye  la  couche  sensible 


LE   DEVELOPPEMENT  155 

de  la  lumière  émise  par  la  lanterne.  Dans  un  verre  à  bec,  nous  ver- 
sons la  quantité  d'eau  nécessaire  pour  bien  recouvrir  la  plaque, 
soit  environ  100  ce.  pour  le  format  13x18.  Nous  y  ajoutons 
2  cuillerées  de  sulfite,  I  cuillerée  de  pyrogallol,  etnous  agitons  vive- 
ment à  Faide  d'une  baguette  de  verre.  Dès  que  les  poudres  sont 
dissoutes,  nous  laissons  tomber  dans  le  mélange  2  ou  3  gouttes  de 
carbonate,  et  le  contenu  du  verre  est  versé  dans  la  cuvette,  que  l'on 
agite  aussitôt,  afin  que  la  plaque  soit  rapidement  mouillée  sur  toute 
sa  surface.  Si,  au  bout  d'une  demi-minute,  aucune  trace  d'image 
n'est  apparue,  on  verse  dans  le  verre  un  peu  de  carbonate  et  l'on 
y  ajoute  le  contenu  de  la  cuvette.  On  agite  un  peu  le  verre  pour 
faciliter  le  mélange,  que  l'on  reverse  aussitôt  dans  la  cuvette.  Il  est 
très  important  de  ne  pas  verser  directement  la  nouvelle  dose  de 
carbonate  dans  la  cuvette  :  il  en  résulterait  presque  toujours  des 
taches.  On  examinera  encore  la  plaque,  et  si,  malgré  cette  addition 
de  carbonate,  l'image  tarde  encore  à  se  montrer,  on  recommen- 
cera, en  procédant  de  même.  On  ajoutera  ainsi  du  carbonate,  non 
seulement  jusqu'à  l'apparition  de  Timage,  mais  même  jusqu'à  ce 
que  tous  les  détails  soient  venus,  même  dans  les  ombres. 

Jusqu'ici,  on  s'est  borné  à  regarder  la  plaque  par-dessus.  Quand 
tous  les  détails  se  sont  dessinés,  on  sort  la  plaque  de  la  cuvette  et, 
la  plaçant  devant  la  lanterne,  on  l'examine  par  transparence.  Si 
l'image  ne  parait  pas  assez  intense,  il  faut  alors  ajouter  du  pyro- 
gallol.  Bien  entendu,  la  nouvelle  dose  de  révélateur  sera  d'abord, 
introduite  dans  le  verre,  oix  on  la  mélangera  avec  le  contenu  de  la 
cuvette.  Si  cette  nouvelle  dose  ne  suffît  pas  pour  amener  l'image  à 
la  densité  voulue,  on  recommencera,  et  l'on  ajoutera  alors  non 
seulement  du  pyrogallol,  mais  aussi  du  sulfite  et  un  peu  de  car- 
bonate. 

Les  instantanés  seront  parfois  assez  longs  à  développer.  Il  fau- 
dra combattre  la  sous-exposition  par  des  additions  alternées  de 
pyrogallol  et  de  carbonate.  Si  le  développement  dure  trop  long- 
temps, on  remarquera  que  le  bain  se  colore  de  plus  en  plus;  la 
solution  d'abord  limpide  brunit  progressivement,  et  cette  teinte  se 
communique  à  la  gélatine  :  elle  ne  nuit  pas  à  la  qualité  des  épreu- 
ves, mais  elle  en  relarde  le  tirage.  Aussi  vaut-il  mieux  l'éviter,  en 
jetant  le  révélateur  dès  qu'il  se  colore  sensiblement  et  en  le  rem- 


Î56  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

plaçant  par  une  nouvelle  solution,  préparée  comme  la  précédente. 
Le  bain  neuf  a  d'ailleurs  l'avantage  de  ne  point  contenir  de  bro- 
mure, formé  parla  réduction  du  composé  sensible;  ce  bromure 
afTaiblit  de  plus  en  plus  le  révélateur,  empêche  les  faibles  détails 
de  se  développer  et  exagère  les  contrastes.  On  arrive  par  ce  moj'en 
à  tirer  parti  de  clichés  très  sous-exposés,  qui  auraient  été  inutili- 
sables s'ils  avaient  été  révélés  autrement.  Quand  l'image  se  montre' 
avec  tous  ses  détails  et  une  intensité  suffisante,  on  lave  la  plaque 
et  on  l'immerge  dans  le  fixateur. 

Ce  procédé  peut  sembler  long  et  compliqué,  parce  que  nous 
avons  tenu  à  bien  en  préciser  les  détails.  En  réalité,  il  ne  présente 
aucune  difficulté  sérieuse,  et  l'opérateur  attentif  ne  tarde  pas  à  s'en 
rendre  maître  et  à  en  apprécier  les  ressources.  Aucune  autre  mé- 
thode ne  se  prête  avec  une  pareille  souplesse  aux  divers  cas  qui  se 
présentent  dans  le  développement,  soit  que  la  pose  ait  été  trop  lon- 
gue ou  trop  courte,  soit  qu'il  s'agisse  d'atténuer  les  contrastes  d'un 
sujet  trop  heurté  ou,  au  contraire,  d'accentuer  un  modelé  trop  plat 
et  de  donner  plus  de  vigueur  à  un  sujet  terne.  Cette  méthode  n'est 
pas,  en  somme,  plus  difficile  à  apprendre  qu'une  autre,  les  élé- 
ments n'en  sont  pas  notablement  plus  coûteux,  et  les  résultats  ne 
sont  pas  comparables. 

Développement  en  deux  cuvettes.  —  Cette  méthode  est  parfois 
désignée  sous  le  nom  de  développement  automatique.  Ce  qualifi- 
catif prête  à  confusion  et  serait  d'ailleurs  plus  logiquement  appli- 
cable au  développement  à  durée  fixe  effectué  dans  certaines  ma- 
chines qui  seront  décrites  plus  loin.  Le  développement  en  deux 
cuvettes  est,  au  contraire,  un  mode  de  développement  contrôlé  et 
constitue,  en  réalité,  une  variante  du  développement  rationnel  et 
méthodique. 

Supposons,  par  exemple,  qu'il  s'agisse  de  développer  au  pyro- 
gallol  en  deux  cuvettes.  Nous  versons,  dans  l'un  des  récipients, 
une  solution  de  pyrogallol  et  de  sulfite  de  soude,  et  dans  l'autre 
une  solution  de  carbonate  de  soude.  La  plaque  est  d'abord  plongée 
dans  la  première  cuvette,  puis,  une  fois  bien  imbibée,  soit  au  bout 
de  30  à  40  secondes,  nous  la  portons  dans  la  seconde  cuvette.  Le 
carbonate  alcalin  se  mêle  alors  au  pyrogallol  dont  la  couche  est/ 
imprégnée,  et  le  développement  commence.  La  plaque  est  ensuit/ 


^  LE   DÉVELOPPEMENT  151 

reportée  dans  le  pyrogallol,  puis  dans  le  carbonate,  et  ainsi  de  suite 
jusqu'à  achèvement  du  phototype.  Pour  augmenter  Tintensité,  on 
prolonge  l'immersion  dans  le  pyrogallol,  tandis  que,  pour  détailler 
l'image,  atténuer  les  contrastes  ou  combattre  la  sous-exposition, 
on  prolonge  davantage  l'immersion  dans  le  carbonate. 

Il  est  facile  de  voir  ici  la  similitude  avec  l'opération  décrite  dans 
le  paragraphe  précédent.  C'est  pour  la  rendre  plus  évidente  que 
nous  avons  choisi  pour  exemple  le  révélateur  au  pyrogallol.  En 
réalité,  cette  méthode  s'applique  plus  généralement  à  d'autres 
révélateurs,  moins  rapidement  altérables. 

Au  lieu  de  séparer  complètement  les  constituants  du  développa- 
teur,  comme  nous  l'avons  d'abord  supposé,  on  prépare  d'ordinaire 
deux  bains  de  développement  complets,  mais  très  différents,  l'un 
contenant  une  plus  forte  dose  de  réducteur  (hydroquinone,  métol, 
iconogène,  etc.)  et  de  sulfite,  tandis  que  l'autre  est  beaucoup  plus 
riche  en  accélérateur  (carbonate  alcalin,  formol,  acétone,  lithine, 
etc.).  Cette  méthode  se  rapproche  alors  davantage  de  celle  qu'em- 
ploient les  professionnels,  à  l'aide  de  trois  cuvettes,  et  que  nous 
avons  exposée  p.  132. 

Développement  lent.  —  Les  instantanés  et,  d'une  façon  générale, 
les  clichés  sous- exposés  se  développent  mal  dans  les  révélateurs 
ordinaires.  Les  contrastes  en  sont  presque  toujours  exagérés,  les 
détails  manquent  dans  les  ombres  et  sont  empâtés  dans  les  parties 
claires.  On  y  obvie,  comme  nous  l'avons  vu,  par  addition  d'accélé- 
rateurs, mais,  quand  on  a  plusieurs  négatifs  à  développer,  l'opé- 
ration devient  absorbante  et  fastidieuse.  Une  autre  méthode  donne 
plus  facilement  les  meilleurs  résultats.  Les  négatifs  sont  très  fins, 
bien  détaillés,  sans  empâtement,  et  l'opération  n'exige  pas  une 
surveillance  continuelle,  mais  seulement  un  contrôle  intermit- 
tent. Cette  méthode  consiste  à  diluer  le  révélateur,  à  décupler,  par 
exemple,  la  quantité  d'eau  indiquée  dans  les  formules  précédentes. 
Le  développement  est  alors  considérablement  ralenti,  il  dure  plu- 
sieurs heures,  mais,  si  la  cuvette  est  munie  d'un  couvercle  étanche, 
rien  n'empêche  de  sortir  du  laboratoire  et  de  venir  seulement  de 
temps  à  autre  vérifier  la  marche  de  l'opération. 

Toutefois,  cette  durée  même  s'oppose  à  ce  que  cette  méthode  soit 
applicable  à  tous  les  révélateurs.  Ceux  qui  s'oxydent  trop  rapide- 


158  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

ment,  comme  Facide  pyrogallique,  ne  sauraient  être  utilisés  de 
cette  manière.  Le  métol  et  l'hydroquinone  se  conservent  suffisam- 
ment; seulement  le  premier  tend  à  donner  des  images  trop  grises, 
sans  vigueur,  tandis  que  le  second  produit  souvent  des  clichés  peu 
harmonieux,  durs  et  opaques.  Il  convient  donc  de  n'employer  seul 
ni  l'un  ni  l'autre  de  ces  réducteurs.  En  les  combinant,  on  obtient 
un  mélange  qui  fournit  de  bonnes  images.  Néanmoins,  comme 
certaines  gélatines  supportent  mal  l'action  prolongée  des  subs- 
tances alcalines,  il  vaut  mieux  avoir  recours  à  la  métoquinone, 
qui  permet  de  préparer  un  révélateur  très  peu  oxydable  et  d'où  est' 
exclu  tout  alcali.  En  le  préparant  selon  la  formule  de  MM.  Lumière  : 

Eau 800  ce. 

Métoquinone 1  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 10  — 

Bromure  de  potassium,  solution  à  10  p.  100 1  ce. 

la  durée  du  développement  sera  d'environ  une  heure. 

Le  développe- 
ment lent  s'effectue 
d'ordinaire  en  dis- 
posant les  plaques 
verticalement  dans 
une  cuve  à  rainu- 
res, telle  que  la 
cuve  Hemdé  (fig. 
82  et  83).  Ce  réci- 
pient est  en  kaoli- 


Fi°:.  82.  —  Cuve  à  rainures  Hemdé. 


the,  faïence  de  composition  spéciale,  blanche,  mais  complètement 
opaque.  Le  couver- 
cle   s'y    adapte  de 
manière    à    empê- 
cher l*accès  de  la 
lumière ,     ce     qui 
permet  d'ouvrir  la  ^ 
porte    du    labora- 
toire ou  de  1  eclai-  ^^  _  ^^^^  ]^q,,,^q  ^  porte-plaques  indépendants. 
rer   à    la    lumière 
blanche  pour  procéder  à  d'autres  travaux.  Suivant  les  mod^es, 


LE  DÉVELOPPEMENT  159 

les  rainures  tiennent  à  la  cuve  ou  à  un  porte-plaques  indépendant. 
Des  intermédiaires  permettent  de  placer  dans  le  récipient  des  pla- 
ques de  format  plus  petit. 

Il  est  utile,  pour  obtenir  une  intensification  régulière  sur  toute 
la  surface  des  plaques,  de  les  retourner  de  temps  à  autre,  sens  des- 
sus dessous.  Si  le  développement  doit  durer  une  heure,  on  les 
retournera  tous  les  quarts  d'heure.  Les  plaques  seront  ensuite 
lavées  abondamment  et  plongées  dans  un  bain  de  fixage  acide. 

Le  développement  lent  n'a  pas  seulement  pour  avantage  d'a- 
doucir les  contrastes  des  clichés  sous-exposés.  Il  présente  aussi 
plus  d'élasticité  que  les  bains  concentrés,  en  cas  d'erreur  dans  le 
calcul  des  temps  de  pose. 

Développement  chronométré.  —  Quand  la  composition  du  bain 
révélateur  n'est  pas  modifiée  pendant  le  développement,  il  existe 
une  relation  déterminée  entr-e  le  temps  que  l'image  met  à  appa- 
raître et  le  temps  qu'elle  mettra  à  acquérir  une  intensité  conve- 
nable. Ainsi,  supposons  qu'une  plaque  soit  développée  au  pyro- 
gallol  et  que  la  solution  contienne  0»%10  de  cette  substance  pour 
iOO  ce.  d'eau.  Si  l'image  commence  à  se  dessiner  après  une  immer- 
sion de  30  secondes,  nous  pourrons  cesser  de  surveiller  le  cliché 
et  nous  contenter  de  le  retirer  au  bout  de  o  minutes,  c'est-à-dire 
après  un  intervalle  égal  à  10  fois  celui  qui  s'est  écoulé  entre 
l'immersion  dans  le  révélateur  et  l'apparition  des  premiers  détails. 

Cette  méthode,  étudiée  principalement  par  Watkins,  est  utile 
surtout  quand  la  sensibilité  de  l'émulsion  ou  un  éclairage  impar- 
faitement inactinique  obligent  à  renoncer  à  l'examen  du  cliché  par 
transparence.  On  risque  moins  le  voile,  en  effet,  en  regardant  la 
surface  de  la  plaque  sans  la  sortir  du  révélateur.  D'autre  part, 
l'image  est  quelquefois  si  embrouillée  qu'il  est  difficile  de  juger,  en 
la  regardant  par  transparence,  de  ce  que  sera  son  intensité  défi- 
nitive, après  le  fixage.  Le  rapport  entre  le  temps  d'apparition  et 
l'achèvement  du  phototype  est  constant  pour  un  révélateur  de 
même  composition,  mais  varie  suivant  la  nature  du  révélateur 
employé  et  selon  le  degré  de  concentration  du  bain.  On  appelle 
coefficient  d'un  révélateur  le  chiffre  qui  exprime  ce  rapport  et  par 
lequel  on  doit  multiplierle  temps  qu'amis  l'image  à  se  montrer  pour 
connaître  le  temps  nécessaire  à  l'achèvement  du  développement. 


160  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Le  coefficient  est  légèrement  différent  suivant  la  sensibilité  de 
l'émulsion  et  la  qualité  de  la  gélatine;  il  est  également  modifié  par 
la  température,  mais,  en  pratique,  ces  différences  sont  si  faibles 
qu'on  peut  les  négliger.  Il  n'en  est  pas  de  même  pour  la  dilution 
du  révélateur,  comme  on  en  jugera  par  les  coefficients  qu'a  déter- 
minés Watkins  pour  le  pyrogallol  : 


Eau  de  dilution. 

Dose  de  pyrogallol. 

Coefficient 

100  ce. 

f                0  gr.  10 
\                 0  gr.  20 
)                 0  gr.  40 
(                  0  gr.  80 

10 
6 
4 
2,5 

Le  coefficient  du  diamidophénol  est  très  variable,  suivant  la 
quantité  de  sulfite  de  soude  que  contient  le  révélateur.  Il  est  de  18 
à  20  pour  une  solution  de  sulfite  à  4  pour  100.  Le  tableau  suivant 
fait  connaître  les  coefficients  des  autres  révélateurs  les  plus  répan- 
dus, composés  suivant  les  formules  normales  : 


Adurol 12 

Edinol 3 

Glycine 12 

Hydroquinone 5 

Iconogène 9 


Métol 30 

Métol-hydroquinone ....  14 

Ortol 10 

Paramidophénol 16 

Pyrocatéchine 6 


Développement  à  durée  fixe.  —  Le  développement  s'accomplit 
d'autant  plus  rapidement  que  la  température  est  plus  élevée.  A 
température  égale,  une  plaque  sous-exposée  met  beaucoup  plus  de 
temps  qu'une  plaque  surexposée  pour  arriver  à  la  mcrne  intensité. 
Néanmoins,  c'est  une  erreur  de  croire  qu'il  soit  utile  de  laisser 
une  plaque  sous-exposée  plus  longtemps  dans  le  révélateur  qu'une 
plaque  surexposée.  En  effet,  quand  l'image  commence  à  se  mon- 
trer, elle  est  très  faible,  mais  c'est  à  ce  moment  qu'elle  offre  son 
maximum  de  douceur.  Plus  elle  monte  ensuite,  et  plus  ses  con- 
trastes tendent  à  s'accentuer  et  à  s'exagérer. 

Or,  la  surexposition  produit  des  images  trop  douces,  ternes  et 
voilées,  tandis  que  la  sous-exposition  donne  des  images  dures, 
heurtées.  Il  y  a  donc  avantage  à  pousser  dans  le  premier  cas  le 
développement  au  delà  de  l'intensité  voulue,  tandis  que  dans  le 
second  il  vaut  mieux  ne  pas  atteindre  la  densité  normale. 


LE   DÉVELOPPEMENT  161 

On  arrivera  aisément  à  ce  résultat,  en  sounfiettant  la  plaque, 
quelles  que  soient  les  circonstances  de  la  pose,  à  un  révélateur  de 
composition  bien  déterminée  et  en  l'y  laissant  toujours  le  même 
nombre  de  minutes,  égal  au  temps  qu'il  faut  à  une  plaque  norma- 
lement posée  pour  acquérir  l'intensité  convenable. 

Il  est  évident  qu'en  cas  de  sous-exposition  l'image  sera  souvent 
trop  faible,  tandis  qu'en  cas  d'excès  de  pose  elle  sera  trop  opaque; 
mais  il  sera  facile  d'y  remédier,  après  fixage,  à  l'aide  des  correc- 
tifs habituels,  renforçateurs  ou  affaiblisseurs,  qui  seront  indiqués 
dans  le  chapitre  suivant.  Cette  rectification  sera  presque  aussi 
efficace  que  le  contrôle  exercé  pendant  le  développement,  avec 
cet  avantage  qu'il  sera  loisible  d'y  procéder  au  grand  jour,  après 
avoir  attentivement  examiné  le  cliché  débarrassé  du  bromure  d'ar- 
gent et  s'êlre  bien  rendu  compte  de  ce  qu'il  y  avait  lieu  de  faire 
pour  l'améliorer.  '  ' 

La  durée  du  développement  est  influencée  notablement  par  la 
température,  mais  dans  des  proportions  variables  suivant  la  nature 
du  révélateur  employé.  D'après  M.  Alves,  en  employant  le  pyro- 
gallol  à  la  dose  de  0,3  p.  100,  la  durée  du  développement  serait  de 
2  minutes  1/2  à  25°,  de  5  minutes  à  20°  et  de  7  minutes  1/2  à  15°.  Il 
faut  donc  tenir  compte  de  la  modification  que  nécessite  l'état  ther- 
mométrique ou,  ce  qui  est  préférable,  opérer  toujours,  autant  que 
possible,  à  peu  près  à  la  même  température,  par  exemple  entre 
18  et  22  degrés.  C'est  là,  du  reste,  une  condition  que  Ton  devrait 
observer  dans  toutes  les  méthodes  de  développement.  Trop  froid, 
le  bain  perd  la  plus  grande  partie  de  son  énergie,  et  les  détails 
dans  les  ombres  manquent  presque  toujours.  Trop  chaud,  il  ris- 
que de  provoquer  la  réticulation  et  même  la  fusion  de  la  gélatine. 

En  outre,  le  développement  à  durée  fixe  exige  que  le  révélateur 
soit  toujours  composé  de  la  même  manière  et  ne  serve  qu'une  seule 
fois,  car  un  bain  déjà  employé  agit  beaucoup  plus  lentement  qu'un 
bain  neuf.  De  plus,  s'il  s'agit  d'un  révélateur  qui  perd  assez  vite  ses 
propriétés,  comme  le  diamidophénol  et  surtout  l'acide  pyrogalli- 
que,  il  ne  faudra  faire  usage  que  de  solutions  fraîchement  prépa- 
rées. 

Avec  un  bain  neuf,  de  composition  connue,  employé  à  une  tem- 
pérature déterminée,  on  peut  donc  se  dispenser  de  regarder  le 


162 


TRAITE   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


cliché,  et  il  suffît  de  consulter  une  montre.  Cette  méthode  est  par- 
ticulièrement commode  quand  il  est  nécessaire  de  procéder  au 
développement  en  dehors  du  laboratoire.  Elle  est  susceptible  de 
rendre  les  plus  grands  services  aux  explorateurs  qui  tiennent  à 
s'assurer  sur  place  des  résultats  obtenus  et  à  ne  pas  risquer  de 
voiler  leurs  clichés  avant  de  pouvoir  les  achever.  D'autre  part,  les 
amateurs  peu  exercés  risquent  moins  d'échouer  dans  la  pratique 
du  développement,  en  suivant  une  méthode  en  quelque  sorte 
mécanique  qu'en  surveillant  l'action  du  révélateur  et  en  essayant 
de  le  conduire  à  leur  gré.  Enfin,  les  émulsions  orthochromatiques 
très  sensibles  se  prêtent  difficilement  au  développement  contrôlé; 
aussi  verrons-nous  que  les  plaques  destinées  à  la  photographie  en 
couleurs  sont  généralement  soumises  au  développement  à  durée 
fixe  :  on  trouvera,  dans  le  chapitre  XVIII,  le  mode  de  préparation 
et  le  mode  d'emploi  des  révélateurs  utilisés  en  pareil  cas. 

Développement  en  machine.  —  La  méthode  précédente  a  sug- 
géré à  divers  constructeurs  l'idée  de  combiner 
certaines  machines  à  développe?^  qui  dispensent 
l'amateur  de  tout  laboratoire.  Telle  est,  entre 
autres,  la  cuve  Kodak  pour  les  pellicules  en  rou- 
leaux, à  l'aide  de  laquelle  toutes  les  opérations 
se  font  en  plein  jour.  La  bobine  pelliculaire 
extraite  de  la  chambre  noire,  comme  on  l'a  vu 
au  chapitre  I,  est  d'abord  introduite  dans  la 
boîte  à  enrouler  (fig.  84).  La  pellicule  placée 
enB  est  enroulée,  en  même  temps  que  le  tablier 

opaque  A,  sur une 

bobine  métallique 

Y  dont  l'axe  est 

relié  à  la  mani- 
velle D.  La  bobine 

ainsi    recouverte 

de    cette    double 

bande  est  ensuite 


KODAK 

Fig.  84.  —  Boîte  à  enrouler. 


Fig.  85.  —  Cuve  à 
développement. 


plongée  dans  la  cuve  à  développement  (fig.  85).  Cette  cuve  contient 
le  révélateur,  que  l'on  a  préparé  en  faisant  dissoudre  un  mélange 
de  sels  convenablement  dosés.  La  composition  de  ce  bain  est  telle 


LE  DEVELOPPEMENT  163 

que  la  durée  du  développement  soit  de  20  minutes.  Pendant  ce 
laps  de  temps,  aucune  attention  n'est  nécessaire,  et  la  seule  pré- 
caution à  observer  est  de  renverser  deux  ou  trois  fois  la  cuve, 
afin  d'égaliser  l'action  révélatrice.  Un  couvercle  fermant  herméti- 
quement empêche  le  liquide  de  se  répandre  pendant  ce  mouve- 
ment. Le  développement  achevé,  soit  au  bout  de  20  minutes,  la 
cuve  est  vidée,  et  le  révélateur  est  remplacé  d'abord  par  de  Teau 
pure,  puis  par  le  fixateur.  On  peut  même  fixer  en  plein  jour,  dans 
un  récipient  quelconque.  La  Compagnie  Kodak  a  également  com- 
biné des  appareils  pour  le  développement  des  plaques  et  des 
pellicules  du  film-pack.  On  peut  opérer  de  même  à  l'aide  des 
laboratoires  portatifs  constitués  par  des  boîtes  munies  de  manches 
opaques.  Dans  ce  cas,  une  cuvette  ordinaire  suffit. 

Développement  en  pleine  lumière.  —  Pour  un  grand  nombre 
d'opérateurs,  le  développement  est  la  plus  intéressante  de  toutes 
les  manipulations  photographiques.  Aussi  a-t-on  cherché  depuis 
longtemps  le  moyen  d'y  procéder  au  grand  jour,  comme  dans  la 
méthode  précédente,  mais  en  conservant  la  possibilité  d'assister  à 
l'apparition  de  l'image  et  de  contrôler  l'action  du  révélateur.  La 
solution  la  plus  élégante  serait  un  procédé  qui  permît  de  suppri- 
mer la  sensibilité  du  bromure  d'argent,  après  l'exposition,  sans 
cependant  détruire  l'image  latente.  MM,  Lumière  et  Seyewetz  ont 
expérimenté  à  cet  effet  un  grand  nombre  de  corps,  notamment 
des  oxydants  et  des  réducteurs,  mais  n'en  ont  trouvé  aucun  qui 
fût  capable  de  produire  l'effet  voulu.  Des  observations  incomplètes, 
des  essais  mal  contrôlés,  avaient  auparavant,  à  diverses  reprises, 
donné  à  penser  que  certains  révélateurs  détruisent  la  sensibilité  de 
l'émulsion.  C'est  ainsi  que  divers  formulaires  indiquent  que  si  la 
plaque  est  développée  à  l'iconogène  ou  au  diamidophénol  acide, 
on  pourra  l'exposer  à  un  éclairage  qui  la  voilerait  si  l'on  employait 
un  autre  bain.  Il  n'en  est  rien.  La  vérité  est  que  tous  les  révélateurs 
diminuent  la  sensibilité  du  bromure  d'argent,  à  cause  de  l'eau  qui 
imbibe  l'émulsion,  mais  ils  n'empêchent  le  voile  que  s'ils  sont  suf- 
fisamment colorés  en  rouge  ou  en  jaune  foncés.  L'opérateur  peut 
alors  travailler  en  pleine  lumière,  mais  l'image  n'est  éclairée  que 
par  les  radiations  inactiniques. 
^  A  ce  poiqt  de  vue,  Foxalate  ferreux  serait  le  meilleur  révélateur, 


164  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

à  cause  de  sa  couleur  rouge  intense.  Il  est  connu  depuis  longtemps 
qu'une  plaque  plongée  dans  ce  bain  peut  être  développée  en  plein 
jour,  pourvu  que  la  couche  liquide  soit  suffisamment  épaisse  (2  ou 
3  centimètres).  Si  l'on  emploie  un  révélateur  incolore,  on  arrivera 
au  même  résultat  en  y  ajoutant  une  matière  colorante  facile  à  éli- 
miner. En  1891,  Higgins  proposait  à  cet  effet  le  rouge  cochenille. 
Peu  après,  Farmer  employait  un  caramel  préparé  en  faisant  chauf- 
fer, entre  140°  et  150°,  4  parties  de  sucre  de  canne  pulvérisé  et 
1  partie  d'eau  jusqu'à  ce  que  le  mélange  prenne  une  teinte  rouge. 
Le  29  janvier  1902,  Ludwig  faisait  breveter  un  procédé  de  déve- 
loppement en  plein  jour,  dit  à  la  coxine,  et  basé  sur  l'emploi  de 
Vécarlate  de  crocéine  SB.  En  4903,  H.  Schwarz  signalait  la  pro- 
priété dont  jouit  le  phénol-phtaléine  de  colorer  en  rouge  sombre 
les  révélateurs  alcalins.  Plus  récemment,  MM.  Lumière  et  Seyewetz 
ont  trouvé,  dans  le  picrate  de  magnésium  en  dissolution  avec  le 
sulfite  de  soude,  un  composé  coloré,  mais  non  tinctorial,  suscep- 
tible d'absorber  pratiquement  les  radiations  actiniques  et  de  s'éli- 
miner ensuite  par  simple  lavage,  sans  altérer  la  transparence  de 
la  gélatine. 

Ce  picrate  mélangé,  à  l'état  sec,  avec  le  sulfite  de  soude  anhydre, 
a  reçu  le  nom  de  chryso sulfite.  Il  en  existe  deux  sortes,  caracté- 
-isées  par  les  proportions  différentes  des  deux  constituants.  Le 
chrysosulfite  n°  1  contient  : 

Sulfite  de  soude  anhydre 100  parties. 

Picrate  de  magnésium 50      — 

C'est  le  mélange  qui  donne  les  meilleurs  résultats  avec  la  plu- 
part des  révélateurs.  Quant  au  chrysosulfite  n°  2,  moins  riche  en 
picrate,  il  renferme  : 

Sulfite  de  soude  anhydre 100  parties. 

Picrate  de  magnésium ,.  15      — 

II  est  réservé  aux  révélateurs  qui,  exigeant  une  plus  forte  dose 
de  sulfite,  se  trouvaient  trop  colorés  par  le  mélange  n°  1,  pour 
qu'il  soit  possible  de  surveiller  la  venue  de  l'image. 

Les  révélateurs  au  chrysosulfite  se  préparent  sans  faire  subir 
aucun  changement  aux  formules  habituelles;  il  suffit  d'y  employer 
le  chrysosulfîte  de  la  même  manière  que  le  sulfite  ordinaire.  A 


LE   DÉVELOPPEMENT  165 

titre  d'exemple,  nous  reproduirons  les  formules  normales  de  deux 
des  révélateurs  les  pliis  répandus  :  ■,■ 

MÉTOQUINONE 

Eau 1.000  ce. 

Métoquinone 9  gr. 

Chrysosulfite  n»  1 ' 60  — 

Aeélone 30  ce. 

DIAMIDOPHÉNOL 

Eau 1.000  ce.     ' 

Chrysosulfite  no  2 30  gr. 

Diamidophénol 5  — 

Le  révélateur  est  versé  dans  la  cuvette  en  quantité  suffisante 
pour  recouvrir  la  plaque  d'une  couche  d'environ  1*^™,5.  On  prendra' 
donc  approximativement  200  ce.  pour  une  plaque  9x12  ou  une 
surface  équivalente. 

La  plaque  est  retirée  du  châssis  et  plongée  dans  le  bain,  à  l'abri 
de  la  lumière  :  il  faudra,  par  conséquent,  ou  s'enfermer  un  ins- 
tant dans  une  pièce  obscure  ou  faire  usage  d'un  grand  voile  de 
drap  opaque  étalé  sur  une  table  et  sous  lequel  le  châssis  sera 
ouvert  et  la  plaque  glissée  dans  la  cuvette,  que  l'on  aura  soin  d'a- 
giter aussitôt.  Dès  que  la  gélatine  est  imbibée,  l'obscurité  complète 
n'est  plus  indispensable,  mais  il  reste  néanmoins  quelques  pré- 
cautions à  né  pas  négliger.  Si  Ton  se  sert  de  la  lumière  artifi- 
cielle, la  cuvette  ne  doit  pas  être  trop  rapprochée  de  la  source 
lumineuse.  La  distance  minimum  est  d'environ  50  cm.  pour  une 
bougie  ordinaire,  75  cm.  pour  une  lumpe  à  pétrole  de  14  lignes, 
1  mètre  pour  un  bec  de  gaz  à  papillon  et  1°',50  pour  une  lampe 
électrique  à  incandescence  de  16  bougies.  Ces  données  s'appli- 
quent aux  émulsions  rapides  ordinaires.  Quand  on  manipule  des 
plaques  très  sensibles,  il  est  préférable  de  tenir  la  cuvette  beau- 
coup plus  loin,  dans  un  coin  peu  éclairé,  et  de  ne  l'approcher  de 
la  source  lumineuse,  aux  distances  prescrites,  que  pour  conlrôler 
la  venue  de  l'image.  On  agite  lentement  la  cuvette,  en  ayant  soin, 
que  le  liquide  couvre  toujours  la  plaque.  A  partir  de  la  deuxième 
minute,  on  peut  retirer  trois  fois  le  cliché  du  bain,  pour  l'exami- 
ner par  transparence.  Cet  examen  doit  être  effectué  rapidement, 
en  3  secondes  enyirôji^  et  aux  distances  minima  suivantes  :  bougie. 


166  TRAITE   GENERAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

1  mètre;  lampe  à  pétrole  de  i4-  lignes,  l'^'jSO;  bec  papillon,  ^'^jSO; 
lampe  électrique  de  16  bougies,  3  mètres.  Quand  le  développement 
est  terminé,  soit  au  bout  de  3  minutes  environ  si  Ton  utilise  Tune 
des  deux  formules  indiquées,  on  tourne  le  dos  à  la  source  lumi- 
neuse, et  l'on  rince  le  cliché,  avant  de  le  fixer.  Le  fixage  n'exige 
aucune  précaution  particulière. 

On  peut  aussi  effectuer  le  développement  à  la  lumière  du  jour, 
pourvu  qu'elle  ne  soit  pas  trop  intense.  On  choisira  une  pièce  oii 
le  soleil  ne  pénètre  pas,  et  les  fenêtres  seront  garnies  de  rideaux 
ou  de  stores.  En  outre,  on  tournera  le  dos  à  la  fenêtre,  pendant 
toute  la  durée  de  l'opération,  en  restant  dans  le  coin  le  moins 
éclairé.  Même  en  se  conformant  à  ces  prescription^,  il  serait  im- 
prudent de  sortir  les  plaques  du  bain,  pour  les  examiner  par  trans- 
parence. L'éclairage  dont  on  dispose  permet  d'ailleurs  de  suivre 
parfaitement  le  développement  à  travers  le  liquide  coloré.  L'obs- 
curité est  nécessaire  pour  introduire  le  cliché  dans  le  bain,  comme 
dans  le  cas  de  l'éclairage  artificiel,  et,  de  plus,  elle  l'est  aussi  pour 
l'en  retirer.  Le  lavage  s'opérera  donc,  soit  dans  une  pièce  obscure 
ou  éclairée  par  une  petite  lampe,  soit  à  l'abri  d'un  voile  opaque. 

Développement  et  fixage  simultanés.  —  Le  développement  à 
durée  fixe  a  suggéré  une  notable  simplification  des  procédés  néga- 
tifs. En  effet,  une  fois  admise  la  possibilité  de  laisser  agir  le  révé- 
lateur pendant  un  laps  de  temps  déterminé,  toujours  le  même, 
quelles  que  soient  les  circonstances  de  la  pose,  il  devient  aisé  de 
combiner  les  deux  opérations,  d'ordinaire  distinctes  et  séparées 
par  de  copieux  lavages,  du  développement  et  du  fixage.  L'essen- 
tiel est  de  mélanger  le  révélateur  et  le  fixateur  dans  des  propor- 
tions telles  que  l'image  obtenue  dans  ces  conditions  ne  soit  ni 
trop  faible  ni  trop  noire.  Si  le  fixateur  agit  trop  vite,  le  bromure 
d'argent  impressionné  sera  dissous  avant  d'être  réduit  par  le  révé- 
lateur, et  l'on  n'aura  qu'une  image  incomplète;  si,  au  contraire, 
l'action  dissolvante  est  trop  lente,  le  révélateur  noircira  trop  de 
bromure,  et  l'intensité  du  phototype  sera  exagérée. 

La  rapidité  d'action  du  fixateur  est,  toutes  choses  égales  d'ail- 
leurs, à  peu  près  proportionnelle  à  sa  concentration,  à  sa  teneur 
en  hyposulfite  de  soude.  Quant  aux  autres  éléments  susceptibles 
d'accélérer  ou  de  ralentir  son  activité  (température,  épaisseur  de 


LE   DÉVELOPPEMENT  167 

l'émulsion,  dureté  de  la  gélatine),  comme  ils  influent  aussi,  et  dans 
des  proportions  pratiquement  peu  différentes,  siir  l'activité  du  ré- 
vélateur, il  suffît,  pour  obtenir  des  résultats  sensiblement  constants, 
de  doser  convenablement  .les  deux  réactifs. 

Il  y  a  plus  :  la  présence  du  fixateur  dans  le  révélateur  tend  à 
corriger,  dans  une  certaine  mesure,  les  erreurs  de  pose  et  à  dimi- 
nuer les  différences  d'intensité  qui  pourraient  en  résulter  pour  les 
phototypes  soumis  au  développement  à  durée  fixe.  En  effet,  lors- 
qu'il y  a  eu  excès  de  pose,  l'image  se  développe  trop  rapidement 
et  sera  trop  noire  si,  au  lieu  de  surveiller  le  cliché,  on  se  borne  à 
consulter  une  montre.  Mais  comme,  en  pareil  cas,  il  reste  peu  de 
bromure  à  dissoudre,  l'hyposulfite  peut  achever  plus  rapidement 
son  œuvre.  D'autre  part,  à  mesure  que  le  révélateur  décompose 
le  bromure  d'argent,  il  s'oxyde,  et  son  activité  se  ralentit.  Plus 
l'image  se  détaille  et  gagne  en  intensité,  plus  le  révélateur  s'affai- 
blit. 11  arrive  ainsi  que  l'action  dissolvante  de  l'hyposulfite  devient 
prépondérante  plus  tôt  qu'elle  n'aurait  pu  le  faire  si  la  pose  avait 
été  moins  longue. 

Au  contraire,  en  cas  de  sous-exposition,  l'image  est  longue  à  se 
montrer  et  à  acquérir  une  intensité  suffisante.  L'action  dissolvante 
de  l'hyposulfite  commence  aussitôt,  mais,  comme  il  reste  beaucoup 
de  bromure  non  décomposé,  le  pouvoir  dissolvant  s'épuise  peu  à 
peu,  et  le  fixage  se  ralentit  de  telle  sorte  que  le  révélateur  peut 
continuer  à  agir  plus  longtemps. 

Il  ne  faut  pas  conclure  de  là  que  la  compensation  soit  rigoureu- 
sement parfaite  :  nous  avons  seulement  voulu  expliquer  comment 
elle  peut  être  presque  toujours  suffisante.  En  fait,  les  clichés  surex- 
posés sont  un  peu  trop  noirs,  et  les  clichés  sous-exposés  un  peu 
trop  faibles,  mais  le  résultat  n'est  franchement  mauvais  que  dans 
les  cas  011  l'erreur  de  pos-e  est  telle  que  le  développement  contrôlé 
et  distinct  du  fixage  n'aurait  lui-même  abouti  qu'à  un  échec. 

Diverses  formules  de  développement-fixage  ont  été  proposées  : 
en  1898,  M.  Punnett  proposait  l'emploi  de  l'ortol;  trois  ans  plus 
tard,  P.  Hannecke  utilisait  le  métol  et  la  pyrocatéchine;  en  1904, 
Thorne  Backer  obtenait,  à  son  tour,  des  résultats  intéressants, 
avec  l'édinol  et  l'hydroquinone.  Les  solutions  combinées  par  ces 
expérimentateurs  présentaient  plusieurs  inconvénients  :  les  clichés 


168  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

étaient  durs,  heurtés,  et  l'opération  exigeait  parfois  une  heure  et 
plus.  La  formule  de  M.  Crémier  a  le  double  avantage  de  fournir 
des  images  douces  en  un  laps  de  temps  d'une  demi-heure  environ  : 

Eau 100  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 5  gr. 

Diamid(?phénol i  — 

Hyposulfite  de  soude 2  — 

Ce  mélange  ne  se  conserve  pas  et  ne  doit  être  préparé  qu'au 
moment  de  l'emploi.  La  durée  de  l'opération  étant  connue,  on  peut 
se  dispenser  de  la  surveiller.  La  plaque  une  fois  introduite  dans 
le  bain,  on  place  un  couvercle  sur  la  cuvette,  après  quoi  rien  n'em- 
pêche de  sortir  du  laboratoire,  pour  n'y  rentrer  qu'au  bout  d'une 
demi-heure.  On  trouvera  alors  le  cliché  développé  et  fixé.  On  peut 
d'ailleurs  le  laisser  davantage,  une  heure  par  exemple,  sans  incon- 
vénient. Cependant,  il  ne  faut  rien  exagérer  à  cet  égard  :  un  sé- 
jour trop  prolongé  dans  le  bain  combiné  aurait  pour  conséquences, 
d'abord  un  voile  dichroïque  ÇV.  chapitre  suivant),  puis  des  demi- 
teintes  rongées  par  rh3'posulfite  et  des  opacités  exagérées,  résul- 
tant d'une  sorte  de  renforcement  provoqué  par  l'action  du  révé- 
lateur qui  peut  encore  s'exercer  sur  un  cUché  fixé.  Le  mieux  est 
de  ne  pas  sortir  des  limites  comprises  entre  30  et  45  minutes. 

Si  la  cuvette  n'a  pas  été  agitée,  on  remarquera  une  sorte  de  voile, 
mais  il  ne  s'agit  là  que  d'un  dépôt  superficiel,  sans  adhérence,  et 
qu'on  enlève  très  facilement,  en  passant  sur  la  gélatine  une  touffe 
de  coton.  Les  lavages  doivent  être  ensuite  effectués  avec  soin,  afin 
d'assurer  l'élimination  du  révélateur  et  de  l'hyposulfite  dont  la 
couche  est  restée  imprégnée. 

Celte  méthode  n'est  pas  encore  suffisamment  au  point  pour  sup- 
planter les  procédés  ordinaires,  où  le  fixage  n'intervient  qu'après 
le  développement,  mais  elle  semble  appelée  néanmoins  à  rendre 
quelques  services,  ne  fût-ce  qu'à  l'amateur  momentanément  privé 
de  son  laboratoire  ou  dépourvu  de  luminaire  inactinique. 

Développement  après  fixage.  — Cette  méthode  résoudrait,  mieux 
que  toute  autre,  le  problème  du  développement  en  pleine  lumière, 
si  elle  ne  restait,  jusqu'à  présent,  limitée  aux  plaques  fortement 
surexposées.  Elle  réussit  mieux  avec  les  émulsions  lentes  qu'avec 
les  préparations  très  rapides.  La  plaque  est  d'abord  plongée,  à 


LE  DÉVELOPPEMENT  169 

l'abri  de  la  lumière  actinique,  dans  une  solution  d'hyposulûte  de 
soude  à  2  p.  100,  qui  dissout  très  lentement  le  bromure  d'argent. 
La  gélatine  paraît  alors  complètement  transparente,  et,  si  on  l'exa- 
mine au  grand  jour  (ce  qui  n'offre  plus  aucun  inconvénient),  on 
n'y  découvre  aucune  trace  d'image.  L'impression  latente  y  subsiste 
néanmoins,  et,  pour  la  révéler,  il  suffît  de  traiter  la  plaque  par  un 
révélateur  physique,  préparé  en  combinant  deux  solutions: 

A.  Solution  de  réserve  : 

Eau  distillée 100  ce. 

Nitrate  d'argent 4  gr. 

Sulfocyanure  d'ammonium 24  — 

Sulfite  de  soude  anhydre 12  — 

Hyposulfite  de  soude 5  — 

Solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100.        6  gouttes. 

B.  Révélateur  au  métol  : 

Eau  distillée 120  ce. 

Métol 2  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 10  — 

Au  moment  de  l'emploi,  on  mélange  : 

A 5  ce. 

B 120  — 

La  durée  du  développement  est  très  variable  et  dépend  non  seu- 
lement de  la  pose,  mais  aussi  de  la  nature  de  l'émulsion.  Parfois 
3  minutes  suffisent,  tandis  que  dans  certains  cas  il  faut  douze  heu- 
res. Ce  procédé  fournit  des  images  remarquablement  fines,  même 
quand  le  grain  de  l'émulsion  est  très  grossier.  Il  laisse  une  très 
grande  latitude  dans  l'appréciation  du  temps  de  pose,  car,  s'il  est 
nécessaire  d'éviter  la  sous-exposition,  il  n'arrive  presque  jamais 
.que  la  surexposition  soit  assez  forte  pour  aboutir  à  un  échec  Son 
principal  avantage  est  de  permettre  le  contrôle  du  développement 
au  grand  jour.  Le  fixage  préalable  doit  s'effectuer  dans  l'obscu- 
rité, mais  il  n'exige  aucune  surveillance  :  au  bout  de  trois  quarts 
d'heure,  la  plaque  est  lavée,  de  manière  à  éliminer  l'hyposulfîte, 
puis  développée  immédiatement  ou  mise  à  sécher,  si  l'on  préfère 
révéler  l'image  ultérieurement.  Cette  combinaison  serait  donc  très 
pratique  en  voyage,  puisqu'il  suffirait  d'emporter  un  peu  d'hypo- 
sulfite,  à  condition  de  surexposer  largement. 

10 


no  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


E.  CousTKT,  le  Développement  en  pleine  lumière,  Paris  ( Gauthier- Villars),  1905. 

F.  DiLLAYE,  le  Développement  en  photographie,  Paris  (J.  Tallandier). 

J.-M.  Eder,  Die  wissenschaftliche  Grund\age  der  Photographie  mit  Bromsilber- 
und  Chlorsilber gélatine,  5®  édition,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 

J.-M.  Eder,  Die  Praxis  der  Photographie  mit  Bromsilbei'-  und  Chlorsilber  géla- 
tine, 5e  édition,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 

H.  Emery,  le  Développement  du  cliché  photographique,  Paris  (Gh.  Mendel). 

A.  DE  LA  Baume-Pluvinel,  Ib  Développement  de  l'image  latente,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1889. 

A.  LoNDE,  Traité  pratique  du  développement,  4«  édition,  Paris  (Gauthier- Villars), 
1904. 

A.  ET  L.  Lumière,  les  Développements  organiques  en  photographie  et  leParami- 
dophénoX,  Paris  (Gauthier- Villars),  1898. 

L.  Mathet,  Etude  complète  sur  le  développement  et  les  de'veloppateurs,  Paris 
(Société  générale  d'éditions),  1891.    ■ 

M.  MoLiNiÉ,  Comment  on  obtient  un  cliché'  photographique.  Notions  de  chimie 
photographique.  Technique  et  Pratique  du  développement,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1902. 

H.  Reeb,  Etude  sur  Vhydroquinone,  Paris  (Gauthier- Villars),  1890. 

R.-A.  Reiss,  Die  Entwicklung  der  photographischen  Bromsilber-Trockenplatte 
und  die  Entwickler,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 

A.  Seyewetz,  le  Développement  de  l'image  latente,  Paris  (Gauthier- Villars),  1899. 

A.  Seyewetz,  le  Négatif  en  photographie,  Paris  (O.  Doin),  1911. 

E.  Trutat,  le  Cliché  photographique,  Paris  (Gh.  Mendel),  1902. 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  Ul 


CHAPITRE   VIII 

l'achèvement  du  phototype 

Fixage.  —  Le  cliché  développé  est  d'abord  lavé  sommairement, 
puis  immergé  dans  le  bain  de  fixage,  ordinairement  constitué  par 
une  solution  d'hyposulûte  de  soude  à  20  p.  100  environ.  Un  chan- 
gement de  concentration  n'a  pas  d'autre  conséquence  que  d'abré- 
ger ou  d'allonger  l'opération.  Ce  bain  dissout  le  bromure  d'argent 
qui  n'a  pas  été  décomposé  par  le  révélateur.  Il  est  facile  de  suivre 
la  marche  du  fixage,  en  examinant  de  temps  à  autre  le  dos  de  la 
plaque  :  la  couche,  primitivement  blanchâtre,  semble  noircir  à 
mesure  que  le  sel  d'argent  est  éliminé.  En  réalité,  elle  devient  plus 
transparente,  comme  on  peut  s'en  rendre  compte  en  la  plaçant 
devant  la  lanterne  et  en  l'observant  par  lumière  transmise.  Quand 
les  dernières  traces  d'opalescence  ont  disparu,  la  plaque  est  retirée 
du  fixateur  et  soumise  aux  lavages  qui  doivent  éliminer  l'hypo- 
sulfite. 

Quelques  opérateurs  pratiquent  le  fixage  en  pleine  lumière. 
Cependant,  s'il  reste  encore  dans  la  couche  quelques  traces  du 
révélateur,  le  cliché  risque  d'être  légèrement  voilé.  Il  est  donc  pré- 
férable de  laisser  la  plaque  soustraite  aux  radiations  actiniques,  au 
moins  pendant  les  premiers  instant^  du  fixage.  Le  fixateur  peut 
servir  pour  plusieurs  clichés,  jusqu'à  ce  qu'il  soit  trop  coloré.  Un 
bain  de  fixage  à  réaction  légèrement  acide  donne  des  images  plus 
pures  et  brunit  moins  rapidement.  La  formule  suivante  conduit  à 
de  bons  résultats  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 250  gr. 

B.  Eau 60  ce. 

Sulfite  de  soude 7  gr.  5 

^  Acide  sulfurique . . .? 5 


172  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

L'acide  ne  sera  ajouté  qu'après  la  dissolution  du  sulfite.  On  ver- 
sera ensuite  la  solution  B  dans  la  solution  A. 

Durcissement  de  la  couche.  —  Pour  durcir  la  gélatine,  l'empê- 
cher de  fondre  ou  de  se  craqueler  dans  des  eaux  de  lavage  trop 
chaudes,  ou  encore  pour  avoir  la  possibilité  de  sécher  rapidement 
le  cliché  à  chaud,  on  conseille  parfois  d'ajouter  de  l'alun  à  la  solu- 
tion d'hyposulfîte.  Cette  combinaison  est  à  éviter,  car  l'alun  décom- 
pose l'hyposulfîte,  détermine  un  précipité  de  soufre  et  provoque 
la  sulfuration  des  images,  ce  qui  en  compromet  la  conservation. 
Cet  inconvénient  sera  cependant  éludé,  en  ajoutant  du  bisulfite  de 
joude  au  fixateur,  qui  sera  alors  constitué  ainsi  : 

Eau 1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 200  gr. 

Bisulfite  de  soude  liquide 15  ce. 

Alun  de  chrome 5  gr. 

Il  est  préférable  de  séparer  le  fixage  et  le  durcissement. 

L'alun  de  potasse  détermine  une  insolubilisation  suffisante,  si 
l'on  doit  se  borner  à  laver  la  plaque  dans  de  l'eau  dont  la  tempé- 
rature ne  dépasse  pas  35°  à  38°.  Mais  si  l'on  veut  employer  de  l'eau 
plus  chaude  ou  accélérer  la  dessiccation  de  la  gélatine  en  la  faisant 
chauffer,  alors  il  faut  recourir  à  l'alun  de  chrome  ou  au  formol. 

La  concentration  du  bain  de  durcissement  à  l'alun  ordinaire 
sera  d'environ  20  p.  100.  La  plaque,  sommairement  lavée  après 
fixage,  y  sera  laissée  de  5  à  10  minutes.  Ce  passage  à  l'alun  n'a 
pas  pour  seul  avantage  de  rendre  la  gélatine  plus  résistante  :  il 
éclaircit  le  cliché,  surtout  après  le  développement  au  pyrogallol, 
et  décolore  sensiblement  la  gélatine  jaunie. 

L'alun  de  chrome  n'insolubilise  suffisamment  qu'en  présence 
d'un  excès  d'alcali.  La  solution  de  ce  sel  à  15  ou  20  p.  100  sera 
donc  additionnée  d'ammoniaque  jusqu'à  ce  qu'un  léger  trouble  se 
manifeste.  Le  cliché  y  sera  alors  immergé  pendant  4  ou  5  minutes. 

Le  tannage  de  la  couche  par  le  formol  s'effectuera  dans  : 

Eau 100  ce. 

Aldéhyde  formique  (formol  commercial) 15  — 

Le  négatif  préalablement  lavé  y  restera  pendant  3  minutes  et 
sera  ensuite  lavé  à  l'eau  chaude  pendanb»quelques  instants.  L'inso- 


/ 


L'ACHÈVEMENT   DU  PHOTOTYPE 


113 


lubilisation  de  la  gélatine  est  alors  assez  complète  pour  que  la  cou- 
che résiste  à  la  dessiccation  sur  le  feu.  Toutefois,  la  couche  ainsi 
durcie  subit  un  retrait  qui  en  occasionne  assez  souvent  le  décol- 
lement, au  bout  d'un  certain  temps. 

Elimination  de  l'hyposulfite.  —  Le  cliché  fixé  doit  être  abon- 
damment lavé,  jusqu'à  ce  que  la  gélatine  ne  contienne  plus  aucune 
trace  d'hyposulfite.  Un  lavage  de  deux  heures  dans  une  eau  fré- 
quemment renouvelée  est  nécessaire,  et  il  est  même  prudent  de  le 
prolonger  encore  davantage.  Si  l'on  a  plusieurs  clichés,  il  sera 
plus  commode  de  les  laver  tous  simultanément  dans  une  cuve  à 
rainures  en  zinc  ou  en  verre  (fig.  86).  Un 
robinet  ou  un  bouchon  permet  de  vider  de 
temps  à  autre  le  récipient,  sans  le  déplacer, 
et  de  renouveler  l'eau  périodiquement,  ou, 
au  contraire,  d'établir  un  courant  qui  la  re- 
nouvelle constamment  :  la  cuve,  dans  ce 
cas,  est  placée  sous  un  robinet  dont  on  règle 
le  débit  de  façon  que  l'eau  qui  s'échappe 
de  l'orifice  inférieur  soit  remplacée  par  celle 
qui  arrive  du  conduit  supérieur» 

Si  l'on  ne  dispose  que  d'une  faible  provision  d'eau,  on  procédera 
autrement.  Il  résulte  des  expériences  de  M.  P.  von  Janko  que  trois 
changements  d'eau  suffisent  à  l'élimination  de  l'hyposulfite,  si  l'on 
emploie  2  ce.  1/2  d'eau  par  centimètre  carré  de  la  plaque,  et  si  l'on 
change  cette  eau  toutes  les  deux  heures  seulement.  On  n'emploie 
donc  que  7  ce.  1/2  d'eau  pour  chaque  centimètre  carré,  mais  le 
lavage  dure  alors  6  heures.  Avec  10  centimètres  cubes  d'eau  par 
centimètre  carré,  c'est-à-dire  en  changeant  d'heure  en  heure 
quatre  fois  les  2  ce.  1/2  qui  recouvrent  chaque  centimètre  carré, 
quatre  heures  suffisent.  Et  on  peut  laver  complètement  une  plaque 
en  50  minutes,  si  l'on  change  l'eau  toutes  les  5  minutes.  C'est  la 
méthode  qui  demande  la  moindre  quantité  d'eau  et  abrège  le  plus 
les  lavages,  parce  que  dans  l'eau  courante  l'éhmination  ne  se  pro- 
duit pas  dans  les  mêmes  proportions. 

On  peut  aussi  abréger  les  lavages  en  décomposant  l'hyposul- 
fite à  l'aide  de  réactifs  donnant  naissance  à  des  produits  très 
solubles,  faciles  à  éliminer.  On  peut  employer  à  cet  eff'et  Feau 


Fig-.  86.  —  Cuve  à  lavages. 


iTI' 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


oxygénée  neutre,  l'iode,  le  percarbonate  de  potassium,  le  persul- 
îaXe  d'ammoniaque  exactement  neutralisé  ou  additionné  de  cer- 
taines substances  alcalines.  Cette  dernière  combinaison  constitue 
lé  Ihioxydant  Lumière.  Après  le  fixage,  la  plaque  est  lavée  environ 
2 'minutes  à  l'eau  courante.  On  la  laisse  ensuite  5  minutes  dans 
une  solution  de  thioxydant  à  10  p.  100,  et  l'on  termine  par  un 
lavage  de  2  minutes  à  l'eau  courante. 

Un  autre  procédé  consiste  à  rendre  la  gélatine  insoluble  et  à 
latverla  plaque  dans  l'eau  chaude.  L'hyposulfîte  est  alors  très  rapi- 
dement éliminé. 

Quelle  que  soit  la  méthode  adoptée,  on  pourra  s'assurer  que  la 
dernière  eau  de  lavage  ne  contient  plus  aucune  trace  d'hyposulfîte. 
Il  existe  à  cet  effet  plusieurs  réactifs  très  sensibles.  Nous  indique- 
rons seulement  les  deux  plus  simples. 

Le  premier  est  constitué  par  l'empois  d'amidon  additionné  d'eau 
iodée,  préparée  en  mettant  quelques  gouttes  de  teinture  d'iode 
dans  100  ce.  d'eau.  Il  se  forme  ainsi  de  l'iodure  d'amidon  bleu. 
Cet  iodure  bleu,  mis  en  présence  de  l'eau  de  lavage,  se  décolorera 
s'il  y  reste  de  l'hyposulfite. 

Le  second  réactif  est  constitué  par  : 

Eau 1.000  ce.     ■ 

Permanganate  de  potasse 1  gr. 

Carbonate  de  potasse 1  — 

Cette  solution  est  violette.  On  en  verse  quelques  gouttes  dans 
l'eau  de  lavage  :  si  le  mélange  se  décolore,  c'est  qu'il  contient 
encore  dsl'hyposulfite;  s'il  reste  coloré>  le  lavage  est  suffisant. 
Dessiccation.  —  Le  cliché  lavé  est  mis 

à  sécher  vertica- 
lement (fîg.  87)  : 
si  on  le  posait  à 
plat,  il  se  cou- 
vrirait de  pous- 
sières qui  reste- 
raient adhéren- 
Fig.  87.  —  Séchoir  a  fiches. 


CI.  Demaria-Lapierre. 
Fig-.  88.  —  Séchoir  pliant. 


tes  à  la  gélatine. 

On  construit  des  séchoirs  pliants  à  rainures  (fig.  88)  sur  lesquels 
peuvent  être  placées  une  douzaine  de  plaques.  Le  séchage  est  lent, 


L'ACEÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  175 

'Sur  ces  supports,  car  l'évaporalion  est  gênée  par  la  proximité  des 
plaques.  Si  l'on  dispose  d'un  local  suffisant,  il  sera  préférable  d'y 
faire  établir  une  longue  étagère  à  claire-voie  sur  laquelle  les  plaques 
«eront  rangées  les  unes  à  côté  des  autres,  debout  contre  le  mur. 

Pour  activer  la  dessiccation,  si  l'on  est  sûr  que  la  gélatine  est 
ibien  insolubilisée,  on  pourra  chauffer  la  plaque  avec  précaution 
pour  ne  pas  briser  le  verre.  Sinon,  on  la  placera  dans  une  boîte 
contenant  du  chlorure  de  calcium.  Cette  substance,  très  avide  d'eau, 
ne  doit  pas  être  mise  en  contact  avec  la  gélatine. 

Un  autre  moyen  d'abréger  le  séchage  est  de  plonger  la  plaque 
dans  l'alcool  à  90°,  qui  s'empare  rapidement  de  l'eau.  Au  bout  de  5 
minutes,  pendant  lesquelles  on  aura  agité  la  cuvette,  la  plaque  sera 
retirée,  et  la  couche  légèrement  tamponnée  avec  un  linge  très  doux. 
Le  mélange  d'alcool  et  d'eau  demeuré  dans  la  couche  s'évaporera 
rapidement.  Il  va  sans  dire  que  la  plaque  traitée  par  l'alcool  ne 
devra  pas  être  approchée  du  feu.  L'alcool  ainsi  employé  contient 
une  quantité  d'eau  qui  augmente  à  chaque  opération;  il  finit  donc 
par  ne  plus  agir  efficacement.  Pour  le  régénérer,  on  le  versera 
dans  un  flacon  contenant  du  plâtre,  qui  s'emparera  de  l'eau. 

Les  pellicules  ne  seront  traitées  ni  par  la  chaleur  ni  par  l'al- 
cool :  la  chaleur  ramollit  le  celluloïd,  substance  d'ailleurs  très 
inflammable,  et  l'alcool  le  dissout  partiellement.  La  dessiccation 
peut,  à  la  rigueur,  être  accélérée  par  le  chlorure  de  calcium,  mais 
le  mieux  est  de  laisser  sécher  les  pellicules  à  l'air  libre,  à  la  tem- 
pérature ordinaire,  après  les  avoir  piquées  sur  une  planchette.  On 
fabrique  à  cet  effet  des  pointes  spéciales  à  tête  de  verre. 

Correctifs  du  développement.  —  Quel  que  soit  le  mode  de  déve- 
loppement appliqué  au  phototype,  il  arrive  souvent  que  l'image 
ne  présente  pas  la  meilleure  intensité  qui  convienne  au  tirage.  Si 
le  négatif  est  trop  opaque,  le  positif  s'impressionnera  trop  lente- 
ment, et  les  détails  manqueront  dans  les  espaces  clairs;  s'il  est  trop 
faible,  le  positif  sera  dépourvu  de  vigueur,  et  les  détails  feront  dé- 
faut dans  les  ombres.  De  là  la  nécessité  de  corriger  l'image  obte- 
nue par  développement,  soit  en  la  renforçant,  soit  en  l'affaiblissant. 
Cette  opération  supplémentaire,  trop  souvent  négligée,  est  cepen- 
dant très  importante,  car  elle  permet  de  modifier  non  seulement 
la  densité  générale  du  cliché,  mais  aussi  le  rapport  de  ses  valeurs. 


176  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

qui  seront,  à  volonté,  accentuées  ou  adoucies,  suivant  la  nature  du 

renforçateur  ou  de  l'afTaiblisseur  dont  on  aura  fait  choix. 

Renforçateur  au  bichlorure  de  mercure.  —  Le  cliché,  dont 

rhyposulfite  aura  été  préalablement  éliminé,  est  d'abord  immergé 

dans  : 

Eau 100  ce. 

Bichlorure  de  mercure  (sublimé  corrosif) 5  gr. 

L'image  blanchit  peu  à  peu,  par  suite  de  la  transformation  de 
l'argent  qui  la  constituait  en  un  chlorure  double  d'argent  et  de 
mercure.  Si  la  plaque  est  placée  dans  une  cuvette  de  carton  noir, 
elle  montre  par  réflexion  un  positif  très  fin.  Quand  le  degré  de 
chloruration  que  comporte  l'état  du  cliché  se  trouve  atteint,  ce  dont 
la  pratique  seule  permet  déjuger,  on  lave  abondamment  la  plaque, 
pour  en  éliminer  l'excès  de  sel  mercuriel,  puis  on  la  plonge  dans 
le  bain  de  noircissement,  oii  elle  acquiert  toute  son  intensité.  Ce 
second  bain  peut  être  constitué  de  diverses  façons.  Le  plus  mau- 
vais et  pourtant  le  plus  fréquemment  employé  est  une  solution 
d'ammoniaque  ordinaire  à  10  p.  100.  Le  noircissament  y  est  immé- 
diat, mais  l'action  en  est  inégale,  et  l'image  ainsi  traitée  manque 
de  stabilité.  L'hyposulfîte,  les  sulfures,  les  alcalis  et  les  carbonates 
alcalins,  tour  à  tour  préconisés  par  divers  chimistes,  ne  sont  pas 
plus  recommandables.  Le  sulfite  de  soude  vaudrait  mieux,  mais 
ne  détermine  qu'une  intensification  souvent  insuffisante,  surtout 
dans  les  demi-teintes,  qui  se  trouvent  beaucoup  moins  renforcées 
que  les  opacités,  d'oi^i  résulte  une  notable  exagération  des  con- 
trastes primitifs.  Quant  à  l'iodure  de  potassium,  il  rend  l'image  si 
dure,  si  heurtée,  qu'il  convient  d'en  limiter  l'application  aux  re- 
productions de  dessins  au  trait. 

Le  noircissement  à  l'aide  d'un  second  développement  est  préf^v 
rable,  seulement  il  n'y  a  guère  que  l'oxalate  ferreux  qui  satisfasse 
aux  conditions  requises.  Les  autres  révélateurs,  en  effet,  contien» 
nent  du  sulfite  et  une  substance  alcaline,  et  c'est  alors  la  présencd 
de  ces  matières  qui  joue  le  principal  rôle  dans  le  noircissement, 
avec  les  inconvénients  que  l'on  cherchait  justement  à  éviter.  Un 
procédé  plus  simple,  basé  sur  l'emploi  du  chlorure  stanneux, 
fournit  un  bon  noircissement.  Dans  100  ce.  d'eau,  on  fait  dissoudre 
2  gr.  d'acide  tartrique,  puis,  la  dissolution  achevée,  on  y  ajoute 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  117 

2  gr.  de  protochlorure  d'étain.  Ce  mélange  est  très  altérable  à  Tair. 
lia,  d'ailleurs,  si  peu  de  valeur  et  la  préparation  en  est  si  rapide, 
qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  chercher  à  le  conserver.  Mais  il  sert,  sans 
inconvénient,  à  noircir  successivement  plusieurs  clichés  dans  la 
même  séance. 

Les  clichés  renforcés  au  bichlorure  de  mercure  jaunissent  par- 
fois. Cet  accident  est  dû,  selon  M.  Haddon,  au  sel  mercuriel  qui  se 
fixe  sur  la  gélatine  en  formant  un  composé  presque  insoluble,  très 
difficile  à  éliminer,  et  dont  la  présence  provoque  l'altération  de 
l'image.  On  peut  l'éviter  en  ajoutant  à  la  solution  de  bichlorure 
1  p.  100  d'acide  chlorhydrique  et  en  effectuant  le  premier  lavage 
dans  de  l'eau  également  additionnée  de  1  p.  100  du  même  acide. 
Suivant  la  Photographhche  Industrie^  on  éviterait  tout  risque  de 
jaunissement  si,  après  avoir  blanchi  l'image  au  bichlorure,  on  la 
noircissait  dans  : 

Eau 100  Gc. 

Formol  du  commerce 10  — 

Solution  de  potasse  caustique  à  10  p.  100 1   — 

Il  est  à  remarquer  que  lorsqu'un  cHché  renforcé  au  sublimé  est 
eTïs,\x\tQ  pellicule,  c'est-à-dire  séparé  du  verre  que  recouvrait  l'émul- 
sion,  comme  c'est  le  cas  dans  la  plupart  des  procédés  d'impressions 
photomécaniques,  où  l'image  doit  être  retournée,  cette  image  perd 
beaucoup  de  son  intensité  dans  les  bains  auxquels  on  la  soumet 
pour  détacher  la  couche  de  son  support.  M.  Namias  y  remédie  en 
procédant  au  pelliculage  avant  le  noircissement  :  le  cliché  est  donc 
blanchi  au  bichlorure  et  lavé  sur  son  support  de  verre,  puis  pelli- 
cule, et  n'est  noirci  que  lorsqu'il  est  reporté  sur  le  support  défini- 
tif. En  opérant  ainsi,  l'intensité  ne  se  trouve  nullement  altérée. 

La  solution  de  bichlorure  de  mercure  sert  au  blanchiment  d'un 
assez  grand  nombre  de  phototypes.  La  conservation  en  est  très 
différente  selon  la  qualité  de  l'eau  employée  à  sa  préparation. 
Sous  l'influence  de  l'air,  de  la  lumière  et  des  matières  organiques, 
le  sel  mercuriel  dissous  dans  l'eau  ordinaire  se  décompose  assez 
rapidement,  en  donnant  un  précipité  de  calomel  insoluble.  0 
retarde  cette  altération  en  conservant  le  flacon  dans  l'obscurité; 
une  légère  addition  d'acide  tartrique  ou  chlorhydrique  augmente 
encore  la  stabiUté,  mais  le  mieux  est  de  faire  usage  d'eau  distillée. 


178  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Renforçateur  à  l'iodure  de  mercure.  —  Le  cliché  fixé  et  lavé, 
au  besoin  très  sommairement  (l'élimination  complète  de  Thypo- 
sulûte  n'est  pas  indispensable),  est  plongé  dans  : 

Eau 100  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 10  gr. 

lodure  mercurique 1   — 

L'image  n'y  blanchit  pas,  comme  dans  le  bichlorure,  mais  s'y 
renforce  directement,  en  prenant  une  nuance  indigo.  La  marche 
de  l'intensification  est,  dès  lors,  facile  à  contrôler  et  à  interrompre, 
au  moyen  d'un  l^^age,  aussitôt  que  l'effet  désiré  est  atteint.  L'ac- 
tion de  l'iodure  mercurique  est  moins  brutale  que  celle  du  bichlo- 
rure, les  demi-teintes  sont  mieux  conservées,  et  il  ne  se  produit 
ni  les  stries  ni  les  irrégularités  de  coloration  qui  sont  toujours  à 
redouter  lors  du  noircissement  d'un  cliché  blanchi  dans  le  bichlo- 
rure. En  revanche,  la  solution  d'iodure  mercurique  ne  peut  pas 
être  conservée  pour  servir  à  une  opération  ultérieure  :  il  faut  la 
jeter,  tandis  que  le  bichlorure  sert  jusqu'à  épuisement. 

L'image  renforcée  à  l'iodure  a  une  certaine  fixité,  mais  risque, 
néanmoins,  de  jaunir  avec  le  temps,  surtout  sous  l'influence  de 
l'air  humide.  On  évite  cet  accident  en  développant,  après  lavage, 
dans  un  révélateur  quelconque. 

Si  le  renforcement  a  été  trop  intense,  on  peut  le  diminuer  dans 
une  solution  d'hyposulfite,  avant  le  second  développement.  Après 
ce  développement,  l'image  peut  encore  être  éclaircie,  mais  il  faut 
alors  employer  l'un  des  affaiblisseurs  qui  seront  analysés  plus  loin 
(persulfate,  acide  chromique,  etc.). 

Renforçateur  au  ferricyanure  d'urane.  —  Le  cliché,  soigneu- 
sement lavé,  de  manière  à  ne  plus  contenir  la  moindre  trace  d'hy- 
posulfite, est  plongé  dans  : 

Eau 100  ce 

Acide  citrique 2  gr.  5 

Nitrate  d'urane 1  — 

Ferricyanure  de  potassium 0  —  8 

Ce  mélange  doit  être  préparé  en  faisant  dissoudre  séparément 
chacune  des  substances  qui  le  constituent  dans  une  portion  de  l'eau 
préalablement  nîesurée.  On  mélange  ensuite  les  trois  solutions,  et 
Ton  y  ajoute  le  reste  de  l'eau.  Ce  bain  ne  se  conserve  pas  et  doit 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  119 

être  préparé  seulement  au  moment  de  l'emploi.  La  complication 
relative  de  cette  préparation  s'accorde  mal  avec  les  conditions  ac- 
tuelles de  la  photographie  d'amateur,  où  tout  est  simplifié  et  faci- 
lité, mais  le  commerce  fournit  le  renforçateur  à  l'urane  sous  forme 
de  mélange  en  poudre,  qu'il  suffît  de  faire  dissoudre  dans  de  l'eau 
ordinaire.  Il  n'est  même  pas  nécessaire  de  peser  exactement  cette 
poudre;  rien  n'empêche  de  s'en  tenir  à  un  simple  dosage  à  la  cuil- 
ler, en  sorte  que  le  bain  n'est  pas  plus  difficile  à  préparer  qu'un 
verre  d'eau  sucrée. 

Théoriquement,  la  méthode  à  l'urane  est  plutôt  un  virage  qu'un 
renforcement  proprement  dit,  mais,  en  fait,  elle  aboutit  à  un  ré- 
sultat équivalent.  Les  opacités  du  cliché  ne  sont  pas  accrues  par 
un  dépôt  métallique  supplémentaire  :  leur  ton  est  simplement 
changé  du  noir  à  un  nuance  brune  beaucoup  moins  actinique,  et 
cette  particularité  nous  fait  déjà  prévoir  que  les  valeurs  de  l'image 
ainsi  traitée  conserveront  leurs  valeurs  relatives. 

Cet  avantage  n'est  pas  le  seul  :  le  virage  à  l'urane  renforce,  en 
somme,  plus  énergiquement  que  les  renforçateurs  précédents  et 
permet  ainsi  d'arriver  à  des  intensités  très  fortes  en  partant  d'ima- 
ges très  faibles,  et  cela  sans  empâter  les  lumières,  en  sorte  qu'on 
en  obtient  des  clichés  très  harmonieux,  quoique  très  vigoureux. 

Si  le  cliché  est  sec,  il  faut  le  mouiller  pendant  quelques  instants, 
avant  de  commencer  le  renforcement  :  l'opération  marche  alors 
très  régulièrement.  L'examen  par  transparence  montre  l'intensifi- 
cation graduelle  de  l'image,  qui  prend  peu  à  peu  la  teinte  sépia. 
Cette  couleur  trompe  parfois  le  débutant;  il  faut  quelques  essais 
pour  apprendre  à  juger  de  l'intensité  réelle  du  phototype  d'après 
son  intensité  apparente.  Arrivé  au  point  voulu,  on  arrête  le  virage 
en  lavant  à  l'eau  courante,  jusqu'à  complète  disparition  de  la 
teinte  jaunâtre  qui  colore  les  parties  transparentes.  Toutefois,  il 
importe  de  ne  pas  prolonger  ce  lavage  outre  mesure  :  la  durée  n'en 
doit  pas  dépasser  un  quart  d'heure,  sous  peine  d'affaiblir  l'image, 
qui  s'altère  aussi  sous  l'influence  de  l'humidité. 

Les  plaques  traitées  à  i  urane  ne  aoivent  pas  être  lavées  dans 
des  cuves  à  rainures  de  zinc.  La  moindre  trace  d'un  sel  de  ce  métal 
décomposerait  le  ferrocyanure  d'urane  qui  constitue  l'image  et 
provoquerait  la  formation  de  ferrocyanure  de  zinc.  Cette  réaction 


180  TRAllÈ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

est  d'ailleurs  mise  à  profit  pour  affaiblir  les  phototypes  trop  renfor- 
cés par  le  bain  d'urane  :  on  n'a  qu'à  les  plonger  dans  une  solution 
très  étendue  de  chlorure  de  zinc.  Une  solution  peu  diluée  agirait 
trop  brutalement  et  attaquerait,  en  outre,  la  gélatine. 

Les  clichés  renforcés  à  l'urane  passent  quelquefois  au  brun  jau- 
nâtre, lorsqu'on  en  a  tiré  un  certain  nombre  d'épreuves  ;  c'est  là 
l'indice  d'un  lavage  insuffisant.  Il  faut  que  l'élimination  du  renfor- 
çateur soit  assez  parfaite  pour  qu'une  portion  de  la  dernière  eau 
de  lavage,  mêlée  à  une  petite  quantité  de  perchlorure  de  fer  ou 
d'oxalate  ferreux,  ne  donne  plus  de  coloration  bleue.  Quand  cette 
condition  est  réalisée,  l'image  est  beaucoup  plus  stable  que  si  elle 
avait  été  renforcée  aux  sels  de  mercure,  pourvu  qu'elle  soit  sous- 
traite à  l'influence  de  l'humidité  par  un  vernis  imperméable. 

Renforçateur  au  ferricyanure  de  cuivre.  —  C'est  encore  un 
virage,  qui  agit  d'une  manière  analogue  au  précédent,  mais  donne 
des  images  de  couleur  rougeâtre  et  parfaitement  stables,  même 
dans  l'air  humide.  On  fait  d'abord  dissoudre  ; 

Éau  distillée 100  ce. 

Sulfate  de  cuivre 5  gr. 

Cette  solution  est  additionnée  de  carbonate  d'ammoniaque  jus- 
qu'à ce  que  le  précipité  verdâtre  qui  se  forme  d'abord  se  redis- 
solve. On  ajoute  ensuite  : 

Eau  distillée 700  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 12  gr. 

On  ajoute,  enfm,  du  carbonate  d'ammoniaque,  en  quantité  suffi- 
sante pour  redissoudre  le  nouveau  précipité  qui  vient  de  se  former. 

L'amateur  aura  tout  avantage  à  se  dispenser  de  procéder  à  cette 
préparation  assez  compliquée,  quoique  sans  difficulté.  Il  évitera 
tout  risque  d'insuccès,  et  par  suite  toute  dépense  inutile,  en  em- 
ployant les  virages  au  cuivre,  vendus  sous  forme  de  mélanges  en 
poudre  très  solubles  dans  l'eau. 

Le  phototype  est  placé  sec  dans  le  bain  de  cuivre.  Au  bout  de 
quelques  instants,  l'image  prend  une  teinte  brune,  qui  passe  en- 
suite au  rouge-cerise  de  plus  en  plus  vif.  Arrivé  à  l'intensité  désirée, 
on  élimine  le  renforçateur,  à  l'aide  de  lavages  qui  peuvent  être 
prolongés  sans  inconvénient. 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  181 

Renforçateurs  à  l'argent.  —  Le  renforcement  à  l'argent  est  un 
procédé  identique  au  développement  physique,  dont  il  ne  diffère 
qu'en  ce  qu'il  s'applique  à  une  image  déjà  visible,  quoique  encore 
trop  faible.  Cette  méthode  a  donné  lieu  à  d'innombrables  formules, 
d'ailleurs  peu  difîérentes  les  unes  des  autres.  Nous  ne  donnons 
ici  que  celle  de  S.-B.  Wellington,  mais  on  pourra  également  uti- 
liser celles  qui  sont  indiquées  à  propos  des  révélateurs  physiques 
(p.  151),  ou  du  développement  après  fixage  (p.  169),  ou  du  ren- 
forcement des  plaques  autochromes  (p.  374). 

On  prépare  une  solution  de  réserve  ainsi  constituée  : 

Eau  distillée 1.000  ce. 

Nitrate  d'arg^ent 20  gr. 

Sulfocyanure  d'ammonium 40  — 

On  fait  d'abord  dissoudre  le  nitrate  d'argent  dans  oO  ce.  d'eau,. 
on  y  ajoute  le  sulfocyanure,  et,  après  dissolution  du  précipité  qut 
s'était  d'abord  formé,  on  ajoute  le  reste  de  l'eau.  Il  se  produit 
alors  un  nouveau  précipité,  que  l'on  fait  redissoudre  en  ajoutant 
au  mélange  une  solution  saturée  d'hyposullite,  en  quantité  suffi- 
sante pour  que  le  tout  redevienne  limpide. 

Pour  l'usage  on  prendra  : 

Solution  de  réserve 100  ce. 

Acide  pyrogallique 0  gr.  5 

Sulfite  de  soude 1  — 

Ammoniaque 15  goultes 

Bromure  d'ammonium 5  gr. 

Le  cliché,  sommairement  lavé  après  le  fixage,  est  laissé  dans  ce 
bain  jusqu'à  intensité  suffisante.  Généralement  10  minutes  suffi- 
sent. Il  faut  balancer  continuellement  la  cuvette  et,  si  l'action  du 
bain  se  ralentit,  y  ajouter  un  peu  d'ammoniaque.  Si  la  solution 
se  trouble,  il  vaut  mieux  la  jeter  et  en  préparer  une  nouvelle.  On 
terminera  par  un  lavage  à  l'eau  courante. 

Renforcement  par  chloruration  et  second  développement.  — 
Cette  méthode  consiste  à  transformer  l'argent  qui  constitue  l'image 
en  chlorure  d'argent  que  l'on  réduit  ensuite  dans  un  second  déve- 
loppement. La  couleur  noir  grisâtre  du  négatif  primitif  se  trouve 
alors  changée  en  une  couleur  brune,  très  inactinique,  qui  fournil 

11 


182  TRAITE   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

au  tirage  des  photocdpies  très  intenses.  Pour  chorurer  l'argent, 
les  moyens  ne  manquent  pas.  La  formule  suivante  est  due  à  M.  Tape  : 

Eau 30  ce. 

Bichromate  de  potasse 0  gr.  35 

Chlorure  de  potassium 0  —  60 

Acide  chlorhydrique 4  gouttes. 

Le  cliché,  préalablement  mouillé,  est  blanchi  dans  ce  bain  chlo- 
rurant,  puis  lavé  pendant  une  demi-heure  environ  et  enfin  soumis 
à  l'action  d'un  révélateur  au  métol  ou  à  l'hydroquinone,  à  l'adurol, 
à  l'acide  pyrogallique,  etc.,  avec  celte  remarque  que  l'intensifica- 
tion obtenue  varie  avec  chacun  d'eux.  En  tout  cas,  ce  nouveau 
développement  doit  être  suffisamment  prolongé  pour  que  tout 
le  chlorure  soit  réduit,  sans  quoi  l'opération  aboutirait,  en  fin  de 
compte,  non  pas  à  un  renforcement,  mais  bien  à  un  affaiblissement. 

Affaiblisseur  au  ferricyanure  de  potassium.  —  Ce  réactif, 
désigné  habituellement  sous  la  dénomination  de  réducteur  de  Far- 
mer  j  du  nom  de  son  inventeur,  sert  à  éclaircir  les  phototypes. trop 
opaques  ou  légèrement  voilés  dans  les  ombres.  Sa  formule  ordi- 
naire est  : 

Eau 1.000  ce. 

HyposulOte  de  soude 50  gr. 

Ferricyanure  de  potassium  (prussiate  rouge)  ....  5  — 

Celte  solution  s'altère  assez  rapidement  et  ne  doit  être  préparée 
qu'au  moment  de  l'emploi.  Le  phototype  s'y  éclaircit,  diminue  de 
densité  et  finit  même  par  s'effacer  complètement;  il  faut  le  retirer 
un  peu  avant  d'avoir  atteint  le  degré  de  réduction  voulu,  car  la  dis- 
solution de  l'argent  se  poursuit  encore  légèrement,  pendant  les 
premiers  instants  du  lavage. 

On  reproche  souvent  à  ce  réactif  de  travailler  irrégulièrement  et 
de  ronger  les  demi-teintes  de  l'image.  Le  D'"  Sturenberg  a  montré 
que  ces  griefs  ne  sont  pas  fondés  et  que  l'affaiblisseur  de  Farmer 
donne  des  résultats  sûrs  et  constants,  quand  il  est  convenablement 
préparé  et  judicieusement  employé. 

Plus  la  dose  d'hyposulûle  est  grande,  plus  la  réduction  est  géné- 
rale sur  toute  l'étendue  de  Timage  ;  plus  on  ajoute  de  ferricyanure, 
plus  les  demi-teintes  sont  rongées.  En  outre,  si  le  mélange  présente 
une  réaction  alcaline,  son  action  est  beaucoup  plus  modérée  et 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  183 

s'exerce  uniformément  sur  toute  la  surface.  Il  en  est  de  même,  si 
l'on  additionne  la  liqueur  de  10  p.  100  d'acide  acétique  ;  seulement, 
le  bain  acide  agit  beaucoup  plus  lentement  que  le  bain  alcalin. 
M.  Sturenberg  fait  usage,  suivant  le  cas,  d'un  bain  neutre  ou  d'un 
bain  alcalin,  qu'il  combine  à  l'aide  de  trois  solutions  : 

A.  Eau 100  ce. 

Hyposulfite  de  soude 5  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Hyposulfite  de  soude 5  gr. 

Carbonate  de  soude 10  — 

G.    Eau 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 5  gr. 

Pour  affaiblir  uniformément  un  cliché  trop  opaque,  on  prendra: 

Solution  B 100  ce. 

Solution  G 50  gr. 

Si,  au  contraire,  le  cliché  est  gris  ou  voilé  et  qu'on  désire  en 
augmenter  les  contrastes  ou  simplement  en  éclaircir  les  transpa- 
rences, il  vaudra  mieux  employer  : 

Solution  A 100  ce. 

Solution  G 10  ou  davantage. 

Affaiblisseur  aux  sels  de  cérium.  —  La  solution  : 

Eau 100  ce. 

Sulfate  de  peroxyde  de  cérium 10  gr. 

Acide  sulfurique 4  — 

se  conserve  sans  altération  et  peut  servir  jusqu'à  épuisement.  Elle 
agit  très  rapidement,  mais  avec  régularité.  Additionnée  d'une  plus 
grande  quantité  d'eau,  elle  travaille  lentement,  mais  aboutit  au 
même  résultat.  Elle  a  une  tendance  à  augmenter  les  constrastes 
de  l'image,  comme  le  réducteur  de  Farmer,  mais  elle  a  sur  ce 
dernier  l'avantage  de  se  conserver  en  solution  toujours  prête  à 
l'emploi. 

Affaiblisseur  au  persulfate  d'ammoniaque.  —  Le  persulfate 
d'ammoniaque  possède  la  remarquable  propriété  d'attaquer  les 
grandes  opacités  plus  que  les  demi-teintes  et  d'adoucir  ainsi  les 
contrastes  des  négatifs  trop  durs.  La  formule  normale  est  : 


184  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

Eau 100  ce. 

Persulfate  d'ammoniaque 3    gr. 

Il  vaut  mieux  diminuer  la  concentration  de  ce  bain  que  de  l'aug- 
menter. La  réaction  est,  il  est  vrai,  plus  lente,  mais  une  solution 
plus  concentrée  risquerait  de  désagréger  la  gélatine. 

L'affaiblissement  ne  commence  pas  immédiatement  après  l'im- 
mersion du  phototype,  mais  la  marche  en  est  ensuite  très  régulière. 
Quand  le  résultat  désiré  est  atteint,  il  faut  plonger  la  plaque  dans 
une  solution  de  sulfite  de  soude  à  10  pour  100,  afin  d'arrêter  net 
l'action  du  persulfate.  Cette  précaution  n'est  pas  indispensable  : 
on  peut  se  contenter  de  laver  à  Feau  courante,  en  s'y  prenant  un 
peu  à  l'avance,  l'affaiblissement  se  poursuivant  jusqu'à  l'élimina- 
tion totale  du  persulfate.  Cette  dernière  méthode  fait  même  gagner 
du  temps,  mais  conduit  à  des  résultats  moins  parfaits  et  surtout 
moins  exactement  contrôlés  que  la  première. 

Le  persulfate  s'altère  très  rapidement  en  solution.  Il  ne  faut 
donc  le  faire  dissoudre  qu'au  dernier  moment.  En  outre,  il  arrive 
parfois  qu'une  solution  fraîchement  préparée  ne  produit  aucun 
effet;  c'est  que  le  persulfate  n'affaiblit  pas,  lorsqu'il  présente  une 
réaction  alcaline.  Si  donc  la  provenance  de  ce  sel  permet  d'en  sus- 
pecter la  qualité,  il  sera  prudent,  en  le  dissolvant,  de  l'essayer  au 
papier  de  tournesol  bleu.  La  réaction  n'est-elle  pas  nettement 
acide,  on  ajoutera  quelques  gouttes  d'acide  sulfurique,  jusqu^à  ce 
que  le  papier  rougisse. 

L'affaiblisseur  au  persulfate  convient  surtout  aux  clichés  sous- 
exposés  qui  ont  été  trop  développés,  tandis  que  les  affaiblisseurs 
précédents  en  détruiraient  les  demi-teintes  et  exagéreraient  encore 
les  oppositions  d'une  image  déjà  trop  heurtée.  Il  faut  remarquer 
cependant  que  le  persulfate  ne  doit  pas  être  appliqué  aux  clichés 
développés  au  paramidophénol  :  dans  ce  cas,  en  effet,  les  demi- 
teintes  seraient  encore  plus  rongées  qu'avec  les  autres  affaiblisseurs. 

Affaihlisseur  à  la  quinone.  —  MM.  Lumière  et  Seyewetz  ont 
reconnu  que  les  quinones  et  leurs  dérivés  sulfoniques  en  solution 
aqueuse  acidulée  présentent  des  propriétés  analogues  au  persul- 
fate d'ammoniaque.  «  Pour  expliquer,  disent-ils*,  le  phénomène 

1.  Bulletin  de  la  Société  française  de  photographie,  1910,, 


L'ACHEVEMENT  DU  PHOTOTYPE  185 

que  la  quinone  agit  de  préférence  sur  les  parties  opaques  de  l'i- 
mage et  respecte  les  faibles  impressions,  c'est-à  dire  paraît  exercer 
son  action  depuis  le  fond  de  la  couche  jusqu'à  la  surface,  on  peut 
supposer  que  rtiydroquinone  et  le  sel  d'argent  soluble  qui  pren- 
nent naissance  dans  la  dissolution  de  l'argent  jouent  le  rôle  de 
renforçateur  physique  qui  tend  à  déposer  de  l'argent  à  la  surface 
de  l'image  et  à  paralyser  ainsi  la  dissolution  de  l'argent  à  partir  de 
la  surface  de  l'image.  » 
La  composition  qui  a  donné  les  meilleurs  résultats  est  : 

Eau 1.000  ce. 

Acide  sulfurique 20   — 

Benzoquinone 5  — 

Cette  solution  est  d'abord  jaune  clair,  mais  se  colore  à  la  longue 
en  brun,  même  à  l'abri  de  la  lumière,  et  laisse  déposer  un  préci- 
pité verdâtre.  Elle  n'agit  pas  immédiatement  sur  l'image  et  n'y 
exerce  son  action  dissolvante  qu'au  bout  de  quelques  minutes. 
Quand  l'image  est  suffisamment  affaiblie,  on  lave  le  phototype  et 
on  le  plonge  dans  une  solution  de  bisulfite  de  soude  à  20  p.  100. 
Ce  réactif  est  ensuite  éliminé  par  un  dernier  lavage. 

Affaiblisseur  à  l'acide  chromique.  —  La  formule  la  plus  sim- 
ple est  : 

Eau 1.000  ce. 

Acide  chromique  cristallisé 1  gr. 

Cependant,  quelques  gouttes  d'acide  sulfurique  facilitent  la  dis- 
solution de  l'argent  des  clichés  très  intenses.  Aussi  préfère-t-on 
généralement  préparer  cet  affaiblisseur  en  utilisant  la  réaction  de 
l'acide  sulfurique  sur  le  bichromate  de  potasse  : 

Eau 1.000  ce. 

Bichromate  de  potasse 1  gr. 

Acide  sulfurique 1  — 

Ces  proportions  donnent  déjà  un  mélange  fort  actif.  Il  vaudrait 
même  mieux  diluer  davantage;  en  tout  cas,  c'est  là  un  maximum 
de  concentration  à  ne  pas  dépasser.  Un  bain  trop  énergique  est 
difficile  à  surveiller,  produit  souvent  des  irrégularités  et  risque 
même  de  tout  effacer  avant  que  l'on  ait  eu  le  temps  d'en  retirer  le 
cliché. 


186  TRAITE   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

L'affaiblisseur  à  l'acide  chromique  se  conserve  indéfiniment 
intact;  il  est,  par  conséquent,  toujours  prêt  à  l'emploi.  Il  est  si. 
dilué,  il  nécessite  une  si  faible  quantité  de  substance  active,  que 
l'élimination  en  est  facile  et  rapide,  ce  qui  réduit  le  lavage  au  mi- 
nimum. 

Affaiblisseur  à  l'acide  permanganique.  —  La  solution  doit  être 
très  étendue  : 

Eau 1.000  ce. 

Permanganate  de  potasse 0  gr.  5 

Acide  sulfarique 1  ce. 

Ce  bain  s'emploie  de  la  même  manière  que  l'acide  chromique, 
mais  n'en  a  pas  la  stabilité.  Il  a,  de  plus,  l'inconvénient  de  pro- 
duire dans  la  gélatine  un  dépôt  de  bioxyde  de  manganèse,  qu'il 
faut  éliminer  dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Acide  oxalique 10  gr. 

Affaiblisssur  à  l'eau  céleste.  —  On  appelle  eau  céleste  la  solu- 
tion ammoniacale  de  l'oxyde  de  cuivre.  Pour  la  préparer,  on  fait 
dissoudre  1  gr.  de  sulfate  Je  cuivre  dans  un  litre  d'eau,  et  Ton  y 
ajoute  de  l'ammoniaque  jusqu'à  ce  que  le  précipité  qui  se  forme 
d'abord  soit  exactement  redissous.  On  a  alors  une  liqueur  bleue^ 
limpide.  Pour  l'employer  à  l'affaiblissement,  on  l'additionne  d'une 
quantité  égale  d'hyposulfite  de  soude  à  5  p.  100. 

Cet  affaiblisseur  passe  généralement  pour  adoucir  les  contrastes 
du  phototype.  Cependant  cet  adoucissement  est  très  contestable; 
en  tout  cas,  il  est  certainement  moins  marqué  que  celui  qu'on 
obtient  avec  le  persulfate,  avec  la  quinone  et  surtout  avec  la  mé- 
thode de  chloruration  et  de  second  développement  qui  va  être 
décrite. 

Affaiblissement  par  second  développement.  —  Les  affaiblis- 
seurs  précédents  ont  un  défaut  commun.  Leur  action  consiste  sim- 
plement dans  la  dissolution  progressive  de  l'argent  qui  constitue 
l'image.  On  conçoit,  dès  lors,  que,  si  cette  action  n'est  pas  arrêtée 
à  temps,  l'image  peut  se  trouver  trop  affaiblie,  sans  qu'il  soit  pos- 
sible de  faire  renaître  les  demi-teintes  complètement  disparues.  Il 
peut  même  arriver  qu'une  circonstance  imprévue  oblige  le  photo-^ 


L'ACHEVEMENT  DU  PHOTOTYPE  187 

graphe  à  abandonner  momentanément  la  surveillance  de  l'opéra- 
tion et  que  son  absence  se  prolonge,  tant  et  si  bien  qu'il  ne  retrouve 
plus,  à  son  retour,  qu'une  plaque  de  verre  ou  une  feuille  de  cellu- 
loïd uniquement  revêtue  de  gélatine  parfaitement  transparente.  On 
peut  quelquefois  y  remédier  à  Faide  du  renforçateur  physique  à 
l'argent,  mais  souvent  le  mal  est  sans  remède,  et  le  meilleur  moyen 
d'éviter  à  coup  sûr  cet  accident  est  de  procéder  de  la  façon  suivante. 

L'argent  qui  forme  l'image  est  d'abord  transformé  en  un  sel 
insoluble  dans  l'eau  :  chlorure,  bromure  ou  iodure  d'argent,  que 
l'on  réduit  ensuite  partiellement,  en  pleine  lumière,  à  l'aide  d'un 
révélateur. 

Pour  chlorurer  le  phototype,  on  a  conseillé  l'emploi  d'un^  solu- 
tion de  bichlorure  de  cuivre  à  5  p.  100.  Mais  la  réaction  de  cette 
substance  sur  l'argent  donne  lieu  à  la  formation  de  protochlorure 
de  cuivre,  insoluble  dans  l'eau  et  difficile  à  éliminer  complètement. 
Il  vaut  mieux  se  servir  de  perchlorure  de  fer  à  3  p.  100,  ou  bie# 
du  mélange  ci-après  : 

Eau 150  ce. 

Bichromate  de  potasse 1  gr. 

Acide  chloriiydrique 3  ce. 

En  employant  une  solution  de  bromure  de  cuivre,  l'argent  de 
l'image  serait  transformé  en  bromure  d'argent;  il  le  serait  en  iodure 
d'argent,  si  Ton  s'était  servi  d'iode  en  dissolution  avec  un  iodure 
alcalin,  par  exemple  : 

Eau 1.000  ce. 

Iodure  de  potassium 10  gr. 

Iode  en  paillettes 2  — 

Dans  l'un  et  l'autre  cas,  le  principe  de  la  méthode  resterait  iden- 
tique, et  la  suite  des  opérations  ne  serait  pas  changée. 

Quand  l'image  tout  entière  est  devenue  blanche,  même  à  l'envers, 
on  lave  abondamment  la  plaque,  puis  on  la  traite  par  un  révélateur 
dont  on  a  soin  d'arrêter  l'action  avant  qu'elle  se  soit  exercée  dans 
toute  l'épaisseur  de  la  couche.  On  fixe  alors,  et  l'hyposulfite  enlève 
définitivement  le  chlorure,  le  bromure  ou  l'iodure  resté  inattaqué. 
Il  est  clair  qu'en  faisant  usage  d'un  révélateur  riche  en  alcali  et  tra- 
vaillant surtout  à  la  surface,  comme  le  métol,  on  noircira  rapide- 


188  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

ment  les  demi-teintes,  qui  conserveront,  dès  lors,  toute  leur  vigueur 
primitive,  tandis  que  les  fortes  opacités  n'auront  pas  eu  le  temps 
d'être  développées  dans  toute  leur  profondeur.  Le  résultat  final 
sera,  par  conséquent,  un  adoucissement  encore  plus  parfait  que 
celui  qui  serait  résulté  de  l'emploi  du  persulfate  ou  de  la  quinone. 

Ce  second  développement  est  certainement  le  plus  précieux  des 
correctifs  dont  nous  disposions  actuellement.  L'opérateur  a  la 
faculté  d'en  varier  à  son  gré  les  éléments  constitutifs  et  la  concen- 
tration, avec  cet  avantage  sur  le  premier  développement  qu'il  y 
procède  au  grand  jour,  sans  courir  le  moindre  risque  de  voile,  et 
dans  les  meilleures  conditions  possible  pour  bien  juger  de  l'inten- 
sité du  phototype.  D'ailleurs^  si  l'on  se  trompe  dans  l'appréciation 
de  cette  intensité  ou  dans  le  rendu  des  valeurs,  il  n'y  a  qu'à  laver 
le  cliché  et  à  le  blanchir  de  nouveau,  pour  recommencer  le  déve- 
loppement. On  ne  fixera  que  lorsqu'on  aura  obtenu  le  résultat  voulu. 

Vernissage.  —  Les  clichés  destinés  au  tirage  d'un  petit  nombre 
d'épreuves  sont  rarement  vernis.  Cependant,  la  couche  de  géla- 
tine se  conservera  mieux  et  plus  longtemps,  si  elle  est  recouverte 
d'un  enduit  qui  la  préserve  des  frottements  et  de  l'humidité.  D'au- 
tre part,  certains  papiers  positifs  contiennent  du  nitrate  d'argent 
susceptible  d'occasionner  des  taches  sur  un  phototype  non  verni, 
quand  le  tirage  se  prolonge  par  temps  humide  ou  quand,  l'image 
n'étant  pas  suffisamment  venue  à  la  fin  de  la  journée,  on  laisse 
l'épreuve  en  contact  avec  le  cliché  pendant  la  nuit.  Enfin,  les  cli- 
chés soumis  à  un  fort  tirage  risquent  d'être  abîmés  par  les  frotte- 
ments réitérés  qu'ils  auront  à  subir  :  il  sera  donc  nécessaire  de  les 
vernir. 

Cette  opération  ne  devra  être  effectuée  qu'après  complète  des- 
siccation de  la  couche  de  gélatine.  Parmi  les  nombreuses  formules 
de  vernis  qui  ont  été  proposées,  nous  conseillons  les  suivantes  : 

1.    Alcool  méthylique 1.000  ce. 

Sandaraque 100  gr. 

Térébenthine  de  Venise 75  — 

Ce  vernis  se  prépare  à  froid,  mais  s'applique  à  chaud.  Le  cliché 
est  préalablement  chauffé  et  posé  horizontalement;  on  y  étend 
rapidement  le  vernis  et  on  le  redresse  de  manière  à  faire  couler 


L'ACHEVEMENT  DU  PHOTOTYPE  18» 

Texcédent  dans  un  flacon  surmonté  d'un  entonnoir.  Le  cliché  est 
ensuite  chauffé  de  nouveau,  avec  précaution,  pour  ne  pas  enflam- 
mer l'enduit.  La  couche  ainsi  obtenue  est  très  brillante. 

2.  Alcool 100  ce. 

Benjoin 15  gr. 

Ce  vernis,  peut  être  appliqué  à  froid,  mais  la  couche  est  alors 
moins  brillante  et  moins  résistante  que  si  on  l'applique  à  chaud. 
Par  contre,  elle  off"re  l'avantage  de  rendre  la  retouche  très  facile, 
sans  dépolissage  préalable. 

3.  Benzine  cristallisable 1.000  ce. 

Gomme  Dammar ; 10  gr. 

4.  Tétrachlorure  de  carbone 100  ce. 

Gomme  Dammar 5  gr. 

Ces  vernis  s'emploient  à  froid.  Le  tétrachlorure  de  carbone  a  sur 
la  benzine  l'avantage  de  n'être  pas  inflammable. 

5.  Acétone 50  ce. 

Acétate  d'amyle 50  — 

Celluloïd 1  gr. 

Pour  la  préparation  de  ce  dernier  enduit,  connu  sous  le  nom  de 
vernis  cristal,  on  peut  utiliser  des  pellicules  hors  d'usage,  dont  la 
couche  de  gélatine  aura  été  préalablement  enlevée  dans  l'eau 
chaude.  Le  celluloïd  se  dissout  à  froid  dans  les  liquides  indiqués 
et  s'étend  de  même.  Il  donne  une  couche  très  brillante  et  parfaite- 
ment transparente. 

6.  Eau 1.000  ce. 

Borax 25  gr. 

Gomme  laque  blanche 100  — 

Carbonate  de  soude 6  — 

Glycérine 5  ce. 

Le  mélange  est  chauffé  et  maintenu  en  ébullition  jusqu'à  com- 
plète dissolution,  en  agitant  continuellement.  On  filtre  ensuite,  on 
laisse  reposer  quelques  jours  et  on  décante.  Ce  vernis  est  appliqué 
à  froid. 

Retouche.  —  Les  clichés  à  retoucher  sont  placés  sur  un  pupitre 
spécial  (fig.  89),  essentiellement  constitué  par  un  verre  dépoli  incliné 
et  éclairé  au  moyen  d'un  miroir.  Une  règle  plate  que  l'on  déplace 


490  TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

à  volonté  au-dessus  de  l'image  sert  d'appui-main.  Une  planchette 

intercepte  les  rayons  passant 
par-dessus  le  pupitre;  certains 
retoucheurs  y  ajoutent  un  voile 
noir  dont  ils  s'enveloppent  la 
tête,  de  manière  à  n'être  pas 
gênés  dans  leur  travail  par  toute 
autre  lumière  que  celle  qui  est 
m\^^\\^^^*ÉS^  transmise  par  le  cliché. 

x\,  — =^^^^^^^^1      La  retouche  est  ordinairement 

exécutée  à  l'aide  de  crayons  dont 
la  pointe  est  rendue  très  effilée 
par  frottement  sur  une  lime  fine 
ou  sur  un  morceau  de  papier 
Cl.  Demarîa-Lapierre.  émcri.  Le  crayou  ne  prend  en 

Fig.  89.  -  Pupitre  à  retouche.  général  pas  suffisamment  sur  la 

couche  de  la  gélatine  ni  sur  les  vernis  très  brillants.  Dans  ce  cas, 
on  applique  sur  la  partie  à  retoucher,  au  moyen  d'un  pinceau  ou 
d'un  linge  fin,  une  très  petite  quantité  d'un  enduit  désigné  sous 
-le  nom  de  mattolin.  En  voici  deux  formules,  également  recom- 
mandables  : 

1.  Essence  de  térébenthine 66  ".e. 

Baume  du  Canada 3C. — 

2.  Essence, de  térébenthine 100  ec. 

Gomme  Dammar 5  gr. 

L'enduit  est  ensuite  tamponné  avec  un  linge  fin.  Le  crayon  prend 
alors  très  facilement.  La  retouche  s'effectue  par  petites  hachures, 
si  fines  que  la  loupe  est  parfois  nécessaire  pour  les  distinguer. 

Pour  boucher  les  trous,  ou  pour  couvrir  les  parties  trop  trans- 
parentes que  le  crayon  ne  parviendrait  pas  à  intensifier  suffisam- 
ment, on  emploie  l'encre  de  Chine  ou  la  laque  carminée  appliquées 
au  pinceau. 

Les  retouches  s'effectuent  parfois  au  dos  de  la  plaque,  par  grandes 
masses,  et  Ton  obtient  ainsi  de  seffets  très  doux.  Dans  ce  cas,  il  faut 
d'abord  étendre  sur  le  verre  un  vernis  mat,  tel  que  celui-ci  : 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  191 

Ether  sulfurique 250  ce. 

Benzine  cristallisable 125  à  150  — 

Sandaraque 15  gr. 

Mastic  en  larmes 15  — 

La  proportion  de  benzine  est  modifiée  suivant  le  degré  de  dépoli 
que  l'on  veut  obtenir  :  le  grain  est  d'autant  plus  gros  qu'il  y  a  plus 
de  benzine.  Ce  vernis  mat  s'emploie  à  froid  et  sèche  rapidement. 
La  retouche  s'y  exécute  soit  au  crayon,  soit  à  l'estompe. 

Quand  il  s'agit  de  diminuer  la  transparence  d'une  assez  grande 
partie  de  la  plaque,  par  exemple  le  ciel  d'un  paysage,  on  la  recou- 
vre de  ce  vernis,  au  besoin  coloré  en  rouge  par  un  peu  d'éosine, 
ou  en  jaune  par  de  l'aurantia  (environ  0,5  p.  100). 

Quant  aux  parties  très  opaques  qu'il  est  nécessaire  d'éclaircir, 
on  les  frotte  légèrement  à  l'aide  d'un  grattoir  ou  d'une  aiguille,  par 
petites  hachures.  Si  l'on  veut  rendre  plus  transparentes  des  parties 
d'une  certaine  étendue,  on  peut  les  traiter,  avant  le  vernissage,  par 
l'un  des  réducteurs  mécaniques  suivants. 

Le  phototype  étant  bien  sec,  on  le  frotte  du  bout  de  l'index  enve- 
loppé d'un  linge  très  fin  préalablement  imbibé  d'alcool  à  90°.  Ces 
frictions  ne  déchirent  pas  la  gélatine,  pourvu  que  le  linge  reste 
constamment  humecté.  On  diminue  ainsi  peu  à  peu  l'épaisseur  de 
la  couche  et  son  opacité.  Dans  le  cas  de  halo,  notamment,  ce  moyen 
est  assez  efficace  pour  faire  disparaître  l'auréole  qui  entoure  le 
point  lumineuxc 

Dans  le  même  but,  M.  Bartlett  mélange,  par  parties  égales,  de 
l'huile  d'olive  et  de  l'essence  de  térébenthine,  auxquelles  il  ajoute 
une  pincée  de  rouge  anglais.  Le  cliché,  après  complète  dessiccation, 
est  frotté  doucement  avec  une  touffue  d'ouate  imbibée  de  cette 
mixture.  Il  faut  avoir  soin  de  dégraisser  ensuite  les  opacités  ainsi 
traitées  à  l'aide  d'un  peu  de  benzine.  M.  Parlow  préconise  l'em- 
ploi d'une  pâte  analogue,  dans  laquelle  l'huile  est  remplacée  par 
un  soluté  de  savon  à  l'eau  ou  à  l'alcool.  La  mixture  savonneuse, 
additionnée  de  potée  d'étain,  de  tripoli  ou  de  toute  autre  poudre  à 
polir,  doit  avoir  la  consistance  d'une  crème  épaisse.  Elle  est  éten- 
due par  frottement  avec  le  doigt  ou  avec  un  tampon  de  coton.  Un 
lavage  copieux  est  ensuite  indispensable  pour  enlever  les  moin- 
dres traces  de  savon. 


192  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Pelliculage.  —  Il  est  parfois  nécessaire  de  séparer  de  son  sup- 
port la  couche  de  gélatine  dans  laquelle  est  formé  le  phototype,  et 
de  la  reporter  sur  un  nouveau  support,  à  moins  qu'on  ne  préfère 
la  conserver  à  l'état  de  simple  pellicule.  Cette  séparation,  désignée 
sous  le  nom  de  pelliculage,  est  pratiquée  notamment  dans  les  pro- 
cédés d'impression  photomécanique,  où  l'image  doit  être  inversée 
de  droite  à  gauche.  On  y  a  également  recours  quand  le  verre  con- 
tient des  bulles  ou  des  stries  qui  seraient  apparentes  sur  l'épreuve, 
ou  quand  il  est  brisé  sans  que  la  gélatine  soit  cependant  endom- 
magée. 

Les  manipulations  à  effectuer  et  les  produits  à  employer  diffè- 
rent suivant  que  le  phototype  doit  conserver  exactement  ses  di- 
mensions primitives  ou  qu'on. préfère  l'agrandir  légèrement. 

Dans  le  premier  cas,  le  cliché  à  pelliculer  est  d'abord  plongé 
dans  : 

Eau 100  ce. 

Formol  du  commerce 20  — 

Carbonate  de  soude 5  gr. 

On  le  retire  au  bout  de  15  à  20  minutes,  et  on  le  met  à  sécher 
après  l'avoir  épongé,  mais  non  lavé,  de  manière  que  la  gélatine 
reste  imprégnée  de  carbonate.  Une  fois  sèche,  la  couche  est  incisée 
au  canif,  à  2  ou  3  millimètres  des  bords  de  la  plaque,  que  Ton 
immerge  ensuite  dans  : 

Eau 100  ce. 

Acide  chlorhydrique 10  — 

La  réaction  de  cet  acide  sur  le  carbonate  de  soude  détermine  un 
dégagement  d'acide  carbonique,  qui  soulevé  la  pellicule  et  la  dé- 
tache du  verre.  On  passe  alors  sous  cette  pellicule  une  plaque  de 
verre  préalablement  frottée  de  talc  en  poudre  et  recouverte  d'une 
couche  de  collodion,  et  on  retire  le  tout  de  la  cuvette,  en  évitant 
les  bulles  d'air.  L'excès  d'eau  est  chassé  en  passant  sur  la  pellicule 
un  rouleau  en  gélatine,  et  on  laisse  sécher.  On  recouvre  enfin  la 
pellicule  d'une  couche  de  collodion  à  3  p.  100  additionné  d'une 
faible  quantité  d'huile  de  ricin.  Quand  cette  couche  est  sèche,  la 
pellicule  se  détache  facilement  du  verre  et  se  trouve  protégée  sur 
ses  deux  faces  par  du  collodion. 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  193 

Si  Ton  ne  tient  pas  à  conserver  à  l'image  ses  dimensions  primi- 
tives, si  l'on  désire  l'amplifier,  il  n'y  a  qu'à  supprimer  le  formol. 
La  pellicule  subit  alors,  en  se  détachant,  une  notable  extension, 
d'ailleurs  variable  suivant  la  nature  de  la  gélatine  et  la  tempéra- 
ture des  bains.  Il  va  sans  dire  que,  dans  ce  cas,  le  cliché  devra  être 
placé  dans  une  cuvette  assez  grande  et  que  la  pellicule  sera  reçue 
sur  une  plaque  d'un  format  suffisant,  soit  environ  le  double  du  for- 
mat primitif. 

Lepelliculage  avec  extension  de  la  couche  peut  également  s'ob- 
tenir à  l'aide  d'un  seul  bain.  Une  simple  immersion  dans  une  solu- 
tion d'acide  chlorhydrique  à  iO  p.  100  suffît  généralement.  Cepen- 
dant le  résultat  est  assez  aléatoire.  On  réussira  plus  sûrement  en 
plongeant  le  cliché  dans  une  solution  de  fluorure  d'ammonium  à 
10  p.  100.  Quand  la  gélatine  est  détachée  du  verre,  on  vide  la 
cuvette  avec  précaution,  pour  ne  pas  endommager  la  pellicule,  qui 
est  assez  fragile,  et  on  y  verse  de  l'eau  pure.  On  passe  ensuite  la 
nouvelle  plaque  de  verre  qui  doit  recevoir  la  pellicule.  Si  la  couche 
doit  rester  sur  cette  plaque,  il  est  nécessaire  qu'elle  soit  parfaite- 
ment nettoyée;  si,  au  contraire,  elle  doit  être  séparée,  la  plaque 
sera  talquée  et  collodionnée,  comme  dans  le  cas  du  pelliculage 
sans  extension.  La  pellicule  amplifiée  perd  naturellement  en  épais- 
seur ce  qu'elle  gagne  en  surface  :  celle-ci  se  trouvant  à  peu  près 
doublée,  il  en  résulte  que  l'intensité  de  l'image  est  baissée  de  moi- 
tié. Il  est  donc  nécessaire  de  pousser  plus  loin  que  d'ordinaire  les 
clichés  destinés  à  subir  le  pelliculage  avec  extension,  ou  de  ren- 
forcer l'image,  soit  avant  le  report,  soit  après,  mais,  dans  ce  dernier 
cas,  il  ne  faut  pas  collodionner. 

Insuccès  dans  les  procédés  négatifs.  —  Les  accidents  suscepti- 
bles d'empêcher  la  réussite  d'un  cliché  sont  très  nombreux,  mais  on  . 
peut  cependant  les  ramener,  en  définitive,  à  quelques  causes  qu'il 
suffira  d'indiquer  brièvement,  en  y  ajoutant  le  moyen  d'y  remé- 
dier, quand  ce  sera  possible. 

Limage  est  déformée.  —  La  chambre  noire  n'a  pas  été  placée 
horizontalement,  ou  bien  l'objectif  est  mal  corrigé  de  la  distorsion. 

L'image  manque  de  netteté.  —  Ce  défaut  provient  de  l'une  ou  de 
plusieurs  des  causes  suivantes  :  objectif  mal  construit  ou  mal  fixé 
sur  l'appareil,  barillets  mal  centrés  sur  la  monture,  lentilles  vis- 


194  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

sées  de  biais,  champ  de  netteté  trop  restreint,  diaphragme  trop 
grand,  poussière  ou  buée  sur  les  lentilles,  mise  au  point  impar- 
faite, défaut  de  coïncidence  entre  la  plaque  sensible  et  le  verre 
dépoli  (soit  que  le  châssis  soit  mal  construit,  soit  que  le  verre 
dépoli  ait  été  placé  à  l'envers,  c'est-à-dire  le  côté  dépoli  en 
dehors,  soit  que  la  plaque  ait  été  mise  en  châssis  verre  en  avant 
et  gélatine  en  arrière),  appareil  ébranlé  par  le  vent  ou  par  un  fonc- 
tionnement trop  brusque  de  Tobturateur,  vitesse  insuffisante  de 
l'obturateur. 

Aucune  image  n'apparaît  au  développement.  —  L'obturateur 
fonctionne  mal,  ou  bien  un  écran  opaque  (le  voile  noir  ou  le  bras 
de  l'opérateur)  s'est  interposé  entre  l'objectif  et  le  sujet,  au  mo- 
ment de  la  pose,  ou,  enfin,  le  révélateur  a  été  mal  préparé,  soit 
qu'on  ait  oublié  l'un  de  ses  éléments  constitutifs  essentiels,  soit 
qu'on  ait  fait  usage  de  produits  impurs  ou  altérés  par  un  séjour 
trop  prolongé  dans  des  flacons  mal  bouchés.  Vérifier  le  fonction- 
nement de  l'obturateur  et  recommencer,  s'il  est  possible,  le  déve- 
loppement avec  un  nouveau  révélateur. 

La  gélatine  se  décolle.  —  Cet  accident  se  produit  soit  quand  la 
température  des  bains  est  trop  élevée,  soit  quand  le  révélateur 
contient  un  excès  de  carbonate,  soit  quand  le  développement  est 
trop  prolongé,  soit  quand  le  fixateur  est  trop  concentré.  On  l'évite 
en  passant  un  corps  gras  sur  la  tranche  de  la  plaque,  avant  de  la 
mouiller,  en  durcissant  la  gélatine  dans  l'alun  et  en  faisant  usage 
de  solutions  et  d'eaux  de  lavage  dont  la  température  ne  dépasse 
guère  20°. 

Voile  général  très  intense.  —  Si  la  couche  devient  toute  noire 
dans  le  révélateur,  c'est  que  la  plaque  a  vu  le  jour.  Il  faudra  véri- 
fier l'éclairage  du  laboratoire  et  examiner  attentivement  l'appareil 
pour  voir  si  le  soufflet  n'est  pas  percé.  Cet  accident  provient  aussi 
d'une  très  forte  surexposition  :  on  peut  alors  y  remédier,  dans  une 
certaine  mesure,  en  ajîaibUssant  le  cliché  dans  le  réducteur  de 
Farmer. 

Voile  partiel.  —  Les  traînées  noires  qui  coupent  l'image  pro- 
viennent des  rayons  lumineux  qui  pénètrent  par  une  fente  du  châs- 
sis ou  de  la  chambre  noire.  Parfois  aussi  elles  sont  causées  par  le 
soleil,  dont  l'image  est  réfléchie  par  les  lentilles.  Les  taches  de 


VACHEVEMENT  DU   PHOTOTYPE  195 

forme  rectangulaire  sont  occasionnées  par  le  contact  de  feuilles  de 
papier  blanc  qui  ont  emmagasiné  la  lumière  et  impressionnent 
■ensuite  l'émulsion  dans  l'obscurité. 

Voile  dichroïque.  —  Le  cliché  est  jaune  quand  on  le  regarde  par 
réflexion  du  côté  verre,  et  rose  ou  violacé  quand  on  l'examine  par 
transparence.  Ce  double  aspect  est  dû,  soit  à  l'introduction  dans  le 
révélateur  de  substances  capables  de  dissoudre  le  bromure  d'ar- 
gent (hyposulfite  de  soude,  sulfocyanure  d'ammonium,  ammo- 
niaque en  excès),  soit  à  l'introduction  dans  le  fixateur  d'une  petite 
quantité  de  révélateur.  Cet  accident  risque  donc  de  se  produire  si 
l'on  manipule  le  cliché  pendant  le  développement  avec  les  doigts 
imprégnés  d'hyposulûte  ou  si  on  plonge  dans  le  fixateur  un  cliché 
mal  lavé  après  le  développement.  Il  est  surtout  fréquent  dans  le 
développement-fixage  et  dans  le  traitement  des  clichés  sous-expo- 
sés, qui  restent  très  longtemps  dans  le  révélateur  et  ne  se  fixent 
ensuite  que  très  lentement.  On  y  remédie  en  plongeant  bs  cliché 
dans  une  solution  de  permanganate  de  potasse  à  1  p.  1.000.  Quand 
la  coloration  jaune  a  complètement  disparu,  on  passe  la  plaque 
dans  un  bain  de  bisulfite  de  soude  commercial  liquide  étendu  de 
son  volume  d'eau  et  on  l'y  laisse  5  minutes.  On  termine  par  un 
lavage. 

Dépôt  blanchâtre.  —  Les  eaux  trop  calcaires  occasionnent  par- 
fois un  précipité  qui  reste  adhérent  à  la  couche,  mais  que  l'on 
dissout  facilement  en  passant  le  cliché  dans  une  solution  d'acide 
chlorhydrique  à  5  p.  1.000. 

Taches  transparentes.  —  Les  poussières  déposées  sur  la  plaque 
se  traduisent  au  développement  par  autant  de  points  blancs.  Les 
espaces  transparents  assez  larges  sont  dus  à  des  bulles  d'air  for- 
mées à  la  surface  de  la  gélatine  au  moment  de  son  immersion  dans 
le  révélateur.  Des  inégalités  d'intensité  se  produisent  aussi  quand 
la  plaque  n'est  pas  recouverte  d'un  seul  coup  par  le  bain  de  déve- 
loppement :  on  les  évitera  en  employant  une  quantité  de  révéla- 
teur suffisante  pour  que  la  plaque  soit  rapidement  mouillée  sur 
toute  son  étendue. 

Marbrures.  —  Ces  inégalités  se  produisent  quand  la  cuvette  n'est 
pas  agitée  pendant  le  développement,  ou  quand  le  révélateur  est 
modifié  par  addition  d'une  substance  directement  introduite  dans 


196  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

la  cuvelte.  Le  mélange  devra  toujours  s'effectuer  dans  un  récipient 
distinct  et  reversé  ensuite  dans  la  cuvette,  après  dissolution  com- 
plète de  ses  éléments  constitutifs. 

Méiallisalions.  —  Des  reflets  métalliques  se  montrent  sur  les 
plaques  développées  à  l'oxalate  ferreux,  quand  on  y  ajoute  un 
excès  d'accélérateur  à  l'hyposulfite.  On  les  rencontre  aussi  après 
un  développement  prolongé  avec  un  révélateur  épuisé,  surtout  avec 
l'hydroquinone. 

Fixage  trop  lent.  —  La  solution  d'hyposulfîte  est  trop  peu 
concentrée  ou  est  épuisée  après  avoir  servi  à  plusieurs  clichés. 
Le  même  inconvénient  se  manifeste  aussi  quand  le  phototype  est 
exposé  au  grand  jour  avant  d'être  complètement  fixé. 

Teinte  opaline  partielle.  —  Le  fixage  est  incomplet  :  il  faut 
l'achever  en  employant,  au  besoin,  une  solution  d'hyposulfîte  fraî- 
chement préparée. 

Le  cliché,  développé  au  pyrogallol,  a  une  couleur  brune  trop 
intense.  —  Cette  teinte  ne  nuit  pas  à  la  qualité  des  épreuves,  mais 
elle  en  retarde  le  tirage.  On  y  remédie  en  plongeant  le  négatif, 
fixé  et  lavé,  dans  un  mélange  de  3  parties  d'acide  chlorhydrique  et 
de  100  parties  d'une  solution  d'alun  saturée  à  froid,  ou  bien  dans 
un  mélange  de  5  à  10  parties  d'acide  citrique  et  de  100  parties  de 
solution  saturée  d'alun. 

Le  cliché  est  faible,  avec  des  contrastes  bien  équilibrés.  —  Le 
temps  de  pose  a  été  exactement  calculé,  mais  le  développement  n'a 
pas  été  suffisamment  prolongé.  Renforcer  au  ferricyanure  d'urane 
ou  de  cuivre,  ou  bien  à  l'argent  (renforçateur  physique). 

Le  cliché  est  sans  vigueur  et  voilé,  —  La  pose  a  été  trop  longue 
et  le  développement  arrêté  trop  tôt.  Effacer  le  voile  dans  l'affai- 
blisseur  de  Farmer  au  ferricyanure  de  potassium  et  à  l'hyposulfîte, 
laver  et  renforcer  au  bichlorure  ou  à  l'iodure  de  mercure. 

Le  cliché,  quoique  trop  faible,  est  heurté.  —  Pose  et  développe- 
ment insuffisants.  Renforcer  au  ferricyanure  d'urane. 

Le  cliché  est  harmonieux,  bien  détaillé,  mais  trop  vigoureux.  — 
Il  a  été  correctement  exposé,  mais  trop  poussé  au  développement. 
Affaiblir  à  l'acide  chromique. 

Le  cliché  présente  une  intensité  exagérée,  avec  des  contrastes 
insuffisants.  —  11  donnerait  une  épreuve  sans  vigueur,  quoique  très 


L'ACHÈVEMENT  DU  PHOTOTYPE  197 

lente  à  s'impressionner  au  tirage,  inconvénient  qui  résulte  d'une 
pose  et  d'un  développement  trop  prolongés.  Affaiblir  au  ferricya- 
nure  de  potassium  et  à  Thyposulfite  de  ?oude  (liqueur  de  Farmer 
modifiée  suivant  les  indications  de  M.  Sturenberg,  V.  p.  183). 

Le  cliché  est  trop  opaque,  avec  des  contrastes  excessifs.  —  La  pose 
a  été  trop  courte  et  le  développement  trop  prolongé.  Affaiblir  au 
persulfate  d'ammoniaque,  à  la  quinone,  ou  par  chloruralion  suivie 
d'un  second  développement  très  peu  poussé:  Si  le  cliché  a  été  pri- 
mitivement développé  au  paramidophénol,  ne  pas  employer  le 
persulfate. 

Le  cliché  offre  une  densité  convenable,  mais  manque  de  contrastes. 
—  C'est  là  un  indice  de  surexposition.  Affaiblir  Légèrement  à  l'acide 
chromique,  laver  et  renforcer  à  l'iodure  mercurique. 

Le  cliché,  suffisamment  intense,  est  voilé.  —  Ce  défaut  est  dû  soit 
à  une  faible  surexposition,  soit  à  l'inactinisme  imparfait  du  labo- 
ratoire. Affaiblir  très  légèrement  dans  le  réducteur  de  Farmer. 

Le  cliché  a  une  intensité  normale,  mais  il  est  dur,  heurté.  —  Ces 
contrastes  trop  accentués  sont  un  indice  de  sous-exposition.  Affai- 
blir légèrement  au  persulfate  ou  à  la  quinone,  laver  et  renforcer 
àFurane;  ou  bien  chlorurer  l'argent,  puis  développer  à  nouveau, 
mais  en  ayant  soin  d'arrêter  l'action  du  révélateur  avant  que  les 
grandes  opacités  soient  complètement  noircies.  Fixer  ensuite  dans 
l'hyposulfite,  afin  de  dissoudre  le  chlorure  non  décomposé,  laver 
et  renforcer,  si  on  le  juge  nécessaire. 

Les  grandes  lumières  du  sujet  sont  entourées  d'un  halo.  —  Cet 
accident  ne  se  produira  pas  si  l'on  emploie  des  plaques  anti-halo, 
ou  des  plaques  ordinaires  dont  on  a  soin  d'enduire  le  verre  d'une 
couche  opaque.  Nous  avons  indiqué,  p.  191,  un  moyen  de  faire  dis- 
paraître l'auréçle,  lorsqu'on  aura  été  obligé  d'utiliser  des  plaques 
sans  anti-halo. 

Altération  du  cliché.  —  Le  fixage  a  été  incomplet,  ou  bien  l'hy- 
posulfite  n'a  pas  été  entièrement  éliminé.  La  gélatine  se  détériore 
dans  les  locaux  humides  et  se  couvre  de  moisissures  :  on  évitera 
cette  cause  d'altération  en  vernissant  le  phototype. 


198  TRAITÉ  GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


A.  CouRRÈGES,  la  Retouche  du  cliché',  Paris  (Gauthier- Villars) ,  1898. 

E.  CousTET,  les  Correctifs  du  développement,  Paris  (Gauthier- Villars),  1908. 

Ganichot,  Retouche  des  épreuves  ne'gatives  et  positives,  3'  édition,  Paris  (Gh, 
Mendel). 

Klary,  l'Art  de  retoucher  les  négatifs  photographiques,  4«  tirage,  Paris  (Gau- 
thier-Villars),  1902. 

L.  Mathet,  les  Insuccès  dans  les  divers  procêde's  photographiques,  tome  I^',  Paris 
(Ch.  Mendel). 

P.  PiQUEPÉ,  Traité  pratique  de  la  retouche  des  cliche's  photographiques,  Paris 
(Gauthier- Villars),  1906. 

WuRTz,  la  Retouche,  Paris  (H.  Desforges),  1905. 


LES  PROCÉDÉS  AU  COLLODION  199 


CHAPITRE  IX 

LES    PROCÉDÉS    AU    COLLODION 

Généralités.  —  Le  collodion  est  un  liquide  sirupeux  que  l'on 
prépare  en  faisant  dissoudre  du  coton-poudre  ou  de  la  cellulose 
tétranitre'e  dans  un  mélange  d'éther  et  d'alcool.  En  photographie, 
ce  liquide  est  ordinairement  désigné  sous  les  noms  de  collodion 
simple  ou  de  collodion  normal ,  pour  le  distinguer  du  collodion 
ioduré  ou  bromure  qui,  mis  en  présence  d'une  solution  de  nitrate 
d'argent,  fournit  des  couches  sensibles  à  la  lumière»  Avant  la 
découverte  des  émulsions  au  gélatinobromure,  les  procédés  au 
collodion  étaient  les  plus  rapides.  Aujourd'hui,  ils  sont  entièrement 
abandonnés  par  les  photographes  portraitistes  et  par  les  amateurs, 
non  seulement  à  cause  de  leur  rapidité  insuffisante,  mais  encore 
et  surtout  en  raison  des  complications  qu'entraîne  la  préparation 
des  surfaces  sensibles,  que  l'opérateur  est  obligé  d'effectuer  lui- 
même. 

Cependant,  les  procédés  au  collodion  sont  encore  utilisés  dans 
l'industrie,  notamment  pour  les  impressions  photomécaniques, 
grâce  à  l'extrême  finesse  des  reproductions  qu'ils  permettent  d'ob- 
tenir. Nous  n'en  ferons  néanmoins  qu'un  exposé  succinct,  car  les 
plaques  au  gélatinobromure  à  émulsion  peu  mûrie  fournissent  des 
images  qui  peuvent  dès  à  présent  presque  rivaliser  de  finesse  avec 
celles  que  donne  le  collodion.  Il  est  donc  à  prévoir  que  l'industrie 
elle-même  finira  par  abandonner  des  procédés  qui  ont  rendu  pen- 
dant de  longues  années  d'incontestables  services,  mais  qui  sem- 
blent condamnés  fatalement  à  disparaître  tôt  ou  tard  et  se  trouver 
supplantés  par  un  procédé  infiniment  plus  commode  et  dont  les 
résultats  ne  le  cèdent  en  rien  à  aucun  de  ceux  que  fournissaient 
les  anciennes  méthodes,  pleines  de  difficultés  pratiques. 

Procédé  au  collodion  humide.  —  Un  grand  nombre  de  formules 


20&  TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

ont  été  proposées  pour  la  préparation  du  collodion  photographi- 
que. La  plupart  conduisent  à  de  bons  résultats,  mais  à  la  condi- 
tion expresse  que  les  produits  employés  soient  d'excellente  qualité 
et  très  exactement  dosés. 

La  formule  suivar^te  est  établie  pour  des  reproductions  de  sujets 
à  demi-teintes,  tels  que  tableaux  à  l'huile,  aquarelles,  lavis,  épreu- 
ves photographiques  : 

Ether  sulfarique 600  ce. 

Alcool  à  90" 400  — 

lodure  de  potassium 2  gr. 

—  d'ammonium 4  — 

—  de  cadmium 6  — 

Bromure  de  cadmium 3  — 

i  Coton-poudre 8  — 

On  fait  d'abord  dissoudre  les  iodures  et  le  bromure  dans  une 
l^ortion  de  l'alcool;  le  coton-poudre  est  mis  dans  le  reste  de  l'al- 
cool, et,  quand  il  en  est  bien  imbibé,  on  ajoute  l'éther;  on  secoue 
jusqu'à  parfaite  dissolution,  et  l'on  mélange  les  deux  solutions. 

Pour  les  reproductions  de  gravures  et  de  dessins  au  trait,  on 
préparera  : 

A.  Ether.. 700  ce. 

Alcool 490  — 

Pyroxyline 16  gr. 

B.  Chlorure  de  calcium 1  gr.  60 

lodure  d'ammonium 4  gt.  70 

lodure  de  cadmium 7  gr.  80 

Alcool  à  96° 123  ce. 

Après  parfaite  dissolution,  les  deux  liquides  seront  mélangés. 

Ces  collodions  iodurés  seront  conservés  en  flacons  bien  bouchés 
jusqu'au  moment  où  l'on  aura  à  les  étendre  sur  les  plaques  de 
verre.  Ils  ne  sont,  en  cet  état,  nullement  sensibles  à  la  lumière. 

Les  plaques  de  verre  sur  lesquelles  doit  être  étendue  la  couche 
de  collodion  sont  d'abord  nettoyées  avec  le  plus  grand  soin.  On 
emploie  de  préférence  des  glaces  bien  polies,  planes,  exemptes  de 
bulles  et  de  rayures.  On  les  dégraisse  soit  dans  la  potasse  caustique, 
soit  dans  l'acide  nitrique,  puis,  une  fois  sèches,  on  les  conserve, 
à  l'abri  des  poussières,  dans  des  boîtes  d'où  on  ne  les  sort  qu'au 
moment  de  l'emploi. 


LES  PROCÉDÉS  AU  COLLODION  20(\ 

L'étendage  du  collodion  nécessite  un  tour  de  main  que  l'opéra-» 
leur  ne  réussit  parfaitement  qu'après  quelques  essais.  La  glace  est 
prise  par  un  de  ses  angles  entre  le  pouce  et  l'index  gauches,  tan- 
dis que  les  trois  autres  doigts,  appliqués  dessous,  la  maintiennent 
horizontalement.  Le  flacon  de  collodion  est  saisi  dans  la  main 
droite;  on  verse  sur  la  plaque,  non  pas  juste  au  milieu,  mais  entre 
le  milieu  et  l'angle  opposé  à  celui  que  Ton  tient,  la  quantité  jugée 
nécessaire  pour  couvrir  toute  la  surface  ;  on  incline  la  glace,  et,  par 
un  mouvement  circulaire  lent,  mais  ininterrompu,  on  fait  étendre 
le  collodion,  en  évitant  de  le  faire  revenir  sur  lui-même,  ce  qui 
produirait  des  moutonnements.  On  relève  ensuite  lentement  la 
glace  et  Ton  fait  écouler,  par  l'angle  opposé  à  celui  que  l'on  tient, 
l'excès  de  collodion  dans  un  flacon  spécial,  surmonté  d'un  enton- 
noir garni  d'un  filtre  en  laine  de  verre.  Les  glaces  de  grandes 
dimensions  ne  sauraient  être  tenues  de  cette  manière.  On  les  pose 
sur  un  pivot  spécial,  qui  peut  être  constitué  par  un  ballon  de 
caoutchouc,  et  on  leur  imprime  tous  les  mouvements  d'oscillation 
nécessaires  à  l'aide  d'une  poignée  à  ventouse  appliquée  près  d'un 
des  coins  de  la  surface  inférieure. 

L'éther  et  l'alcool  s'évaporant  rapidement,  le  collodion  ne  tarde 
pas  à  faire  prise.  Aussitôt  que  sa  consistance  est  jugée  suffisante, 
on  immerge  la  plaque  dans  le  bain  de  sensibilisation  ; 

Eau  distillée 1.000  ce. 

Nitrate  d'argent  fondu  blanc !..  80  gr. 

lodure  de  potassium 0  gr.  5 

Acide  nitrique  pur 2  gouttes. 

Cette  opération  s'accomplit  dans  le  laboratoire  éclairé  par  la 
lumière  jaune.  La  couche  côllodionnée  blanchit  peu  à  peu.  Quand 
elle  a  pris  un  aspect  uniforme,  d'un  blanc  opalin  assez  transparent, 
elle  est  prête  à  servir.  11  faut  alors  l'égoutter  rapidement,  la  mettre 
en  châssis  et  l'exposer  sans  tarder  dans  la  chambre  noire,  de  telle 
sorte  que  le  développement  puisse  être  efTectué  avant  que  la  cou- 
che ait  eu  le  temps  de  se  dessécher.  Entre  le  moment  où  la  plaque 
est  retirée  du  bain  d'argent  et  celui  où  elle  est  développée,  il  ne 
doit  pas  s^écouler  plus  de  5  minutes.  Si  Ton  attend  10  minutes,  le 
nitrate  d'argent  se  concentre  par  l'évaporation  et  détermine  des 
taches  indélébiles. 


202  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Après  l'exposition  dans  la  chambre  noire,  la  plaque  ne  montre 
aucune  trace  d'impression  lumineuse.  L'image  latente  est  révélée 
en  versant  sur  la  couche  posée  horizontalement  l'une  des  solutions 
suivantes  : 

1.  Révélateur  pow  négatifs  à  demi-teintes  : 

Eau 1.000  ce. 

Acide  pyroligneux .  iOO  gr. 

Alcool  à  360 50  — 

Sulfate  double  de  fer  et  d'ammoniaque 50  — 

2.  Révélateur  four  reproduction  de  traits  (négatifs  très  durs): 

Eau \ 1.000  ce. 

Protosulfate  de  fer 36  gr. 

Sulfate  de  cuivre 12  — 

Acide  acétique  à  85  p.  100 80  — 

Alcool 40  — 

Ces  solutions,  en  contact  avec  l'excès  de  nitrate  d'argent  dont  la 
"couche  sensible  est  restée  imprégnée,  constituent  des  révélateurs 
physiques.  C'est  pour  éviter  une  dilution  excessive  du  sel  d'ar- 
gent que  la  plaque  est  seulement  recouverte  d'une  très  faible 
quantité  de  liquide,  au  lieu  d'être  plongée  dans  une  cuvette  con- 
tenant une  couche  de  2  ou  3  centimètres  d'épaisseur,  comme  on  le 
fait  pour  le  gélatinobromure.  Aussitôt  que  les  blancs  du  négatif 
tendent  à  se  griser,  la  plaque  est  lavée  pendant  une  minute  sous 
un  jet  d'eau  coulant  doucement. 

Le  fixage  est  effectué  en  immergeant  la  plaque  dans  une  solu- 
tion de  cyanure  de  potassium  à  3  pour  100.  La  plaque  est  ensuite 
lavée  pendant  2  ou  3  minutes  et  enfin  mise  à  sécher. 

Le  négatif  ainsi  obtenu  peut  être  modifié  à  l'aide  de  correctifs 
analogues  à  ceux  que  l'on  applique  au  gélatinobromure.  Ainsi,  le 
renforcement  est  généralement  effectué  à  l'aide  d'une  solution  de 
nitrate  d'argent  additionnée  d'une  substance  qui  la  décompose, 
comme  l'acide  pyrogallique  ou  le  métol  :  l'argent  précipité  à  l'état 
métallique  se  dépose  sur  les  noirs  de  l'image  proportionnelle- 
ment à  leur  opacité.  Quant  à  l'affaiblissement  des  négatifs  trop 
intenses,  on  le  réalise  soit  en  dissolvant  directement  l'argent  qui 
constitue  l'image  dans  une  solution  acide  de  permanganate  de 


LES  PROCÉDÉS  AU  COLLODION  203 

potasse,  soit  en  le  transformant  eniodure  que  Ton  dissout  ensuite 
partiellement  dans  une  solution  de  cyanure  de  potassium. 

Procédés  au  collodionsec. —  La  nécessité  de  développer  l'image 
latente  moins  de  10  minutes  après  la  sensibilisation  était  autrefois 
un  inconvénient  prohibitif  pour  le  photographe  obligé  de  travailler 
en  plein  air  :  il  lui  fallait  transporter  sur  place  un  véritable  labo- 
ratoire, et  chaque  plaque  qui  n'était  pas  utilisée  à  l'instant  voulu 
était  une  plaque  perdue.  Aussi  une  foule  de  chercheurs  se  sont- 
ils  évertués  à  éviter  cet  inconvénient,  soit  en  retardant  la  dessicca- 
tion des  liquides  dont  la  couche  est  imbibée,  soit  en  préparant  des 
couches  susceptibles  d'être  séchées  sans  provoquer  des  taches.  De 
là  les  procédés  dits  coWodions  prései^vés  et  coUodions  secs.  Aujour- 
d'hui, ces  procédés  n'offrent  presque  plus  aucun  intérêt,  l'emploi 
du  collodion  demeurant  limité  à  certaines  industries,  à  des  tra- 
vaux de  reproductions,  où.  rien  n'empêche  de  sensibiliser  la  plaque 
juste  au  moment  de  l'impressionner.  Les  collodions  secs  ont  d'ail- 
leurs l'inconvénient  d'exiger  une  pose  plus  longue  que  le  collodion 
humide.  Ils  sont  cependant  utilisés  dans  l'exécution  des  diaposi- 
tifs  à  l'aide  desquels  sont  préparées  les  planches  d'héliogravure. 
Ces  diapositifs  étant  impressionnés  souvent  par  contact  sous  un 
négatif,  et  non  pas  dans  la  chambre  noire,  on  conçoit  qu'il  est 
nécessaire  que  la  couche  soit  sèche,  le  défaut  de  sensibilité  n'ayant 
en  ce  cas  aucun  inconvénient  et  se  trouvant  d'ailleurs  compensé 
par  les  conditions  dans  lesquelles  s'effectue  l'impression. 

Le  meilleur  procédé  de  collodion  sec  est  celui  que  le  major  Rus- 
sel  a  fait  connaître  dès  1861  et  qui  est  basé  sur  l'emploi  du  tanin. 

La  plaque  collodionnée  et  sensibilisée  dans  le  bain  de  nitrate 
d'argent  est  ensuite  lavée  pendant  quelques  minutes  dans  l'eau 
distillée,  puis  plongée  dans  : 

Eau ■ 1.000  ce. 

Tanin 50  gr. 

Alcool 50  ce. 

Le  tanin  doit  d'abord  être  dissous  dang  l'eau  et  filtré.  On  y 
ajoute  ensuite  l'alcool,  qui  en  empêche  la  décomposition  et  permet 
au  liquide  de  pénétrer  plus  facilement  la  couche  de  collodion. 
Après  5  minutes  d'immersion,  la  plaque  est  mise  à  sécher.  Elle  se 


204  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

conserve  alors  plusieurs  jours,  et  même  pendant  des  mois  entiers, 
à  l'abri  de  la  lumière  et  de  l'humidité. 

L'impression  au  châssis-presse,  sous  un  cliché  négatif,  s'effectre 
comme  nous  l'expliquerons  en  traitant  des  diapositifs  (chap.  XIV). 
Sous  un  cliché  de  moyenne  intensité,  placé  à  1  mètre  d'une  puis- 
sante lampe  à  arc,  la  durée  de  pose  varie  de  15  secondes  à  i  minute 
environ.  Si  l'exposition  s'effectue  à  la  chambre  noire,  pour  une 
reproduction  amplifiée  ou  réduite,  le  temps  de  pose  sera  toujours 
très  long.  On  en  aura  une  idée  en  sachant  que  le  collodion  au  tanin 
est  de  3  à  8  fois  moins  sensible  que  le  collodion  humide,  et  que 
celui-ci  à  son  tour  exige  une  pose  200  fois  plus  longue  que  les 
plaques  au  gélatinobromure  rapides. 

Avant  de  développer  la  plaque  impressionnée,  il  faut  la  laver 
abondamment,  de  manière  à  en  éliminer  le  tanin.  L'image  est 
révélée  soit  par  la  méthode  chimique,  soit  par  la  méthode  physi- 
que. Le  révélateur  chimique  est  constitué  par  une  solution  d'acide 
pyrogallique  à  4  p.  100,  additionnée  au  besoin  de  quelques  gouttes 
d'une  solution  à  2  p.  100  de  carbonate  de  soude.  L'image  est  très 
faible  et  doit  être  renforcée  au  moyen  d'un  mélange  de  pyrogallol, 
d'acide  citrique  et  de  nitrate  d'argent,  constitué  en  somme  de  la 
même  manière  que  le  révélateur  physique,  ordinairement  préparé 
en  mélangeant  à  volumes  égaux  : 

A.    Eau  distillée 1.000  ce. 

Acide  citrique 5  gr. 

Acide  pyrogallique 5  gr. 

B,  Eau  distillée 1.000  ce. 

Nitrate  d'argent  cristallisé 20  gr. 

La  plaque  développée  est  lavée  à  grande  eau,  fixée  dans  une 
solution  d'hyposulfite  de  soude  à  10  p.  100  et  lavée  de  nouveau. 

Si  l'image  est  encore  trop  faible,  on  renforcera  par  la  méthode 
physique;  si  elle  est  trop  opaque,  on  l'éclaircira  dans  l'afTaiblis- 
seur  à  l'acide  permanganique. 

Emulsion  au  collodion-bromure.  —  Sayce  et  Bolton  préparaient 
pour  la  première  fois,  en  1865,  une  emulsion  au  bromure  d'argent 
dans  le  collodion  avant  d'en  enduire  les  glaces.  Peu  après,  Char- 
don perfectionnait  ce  procédé,  qui  aurait  supplanté  tous  les  autres 
si,  vers  la  même  époque,  le  gélatinobromure  n'était  venu  donner 


LES  PROCÈDES  AU  COLLODIO  N  205 

une  solution  encore  plus  parfaite  au  point  de  vue  de  la  rapidité. 
L'émulsion  est  préparée  en  faisant  dissoudre  12  grammes  de  pyro- 
xyle  dans  500  ce.  d'alcool  et  d'éther  mélangés  à  parties  égales.  On 
y  ajoute  12  grammes  de  bromure  de  zinc,  puis,  lentement  et  en 
agitant  sans  cesse,  21  grammes  de  nitrate  d'argent  préalablement 
dissous  dans  30  ce.  d'eau  et  70  ce.  d'alcool.  Il  se  produit  ainsi  da 
bromure  d'argent,  qui  donne  au  collodion  l'aspect  d'une  crème. 
Cette  émulsion,  préparée  à  l'abri  de  la  lumière  blanche,  est  aban- 
donnée pendant  plusieurs  jours,  dans  l'obscurité,  et  subit  alors  une 
modification  moléculaire  analogue  à  la  maturation  du  gélatino- 
bromure.  Au  bout  de  trois  ou  quatre  jours,  le  collodion  est  devenu 
beaucoup  plus  sensible  à  la  lumière.  On  y  ajoute  un  peu  d'eau 
régale,  on  agite  bien  et  on  lave  le  tout  dans  l'eau  distillée.  On 
recueille  ensuite  sur  un  filtre  en  mousseline  le  pyroxyle  bromure 
qui  s'est  séparé  du  collodion  à  l'état  spongieux,'  on  le  lave  à  l'al- 
cool et  on  le  fait  sécher. 

Cette  émulsion  sèche  se  conserve  pendant  plusieurs  semaines. 
Pour  en  enduire  les  plaques,  on  la  fait  dissoudre  dans  l'éther 
alcoolisé.  Les  plaques  ainsi  préparées  se  conservent  parfaitement 
et  fournissent  des  images  d'une  extrême  finesse,  mais  elles  sont 
50  à  60  fois  moins  rapides  que  les  plaques  au  gélatinobromure  de 
•  sensibilité  moyenne. 

OUVRAGES  A  CONSULTER 

F.  BoiviN,  Procédé  au  collodion  sec,  3«  édition,  Paris  (Gauthier-Villars),  1883. 

H.  Galmels,  les  Procédés  au  collodion  humide,  Paris  (édition  du  journal  le  Pro- 
cédé), 1905. 

J.-M.  Eder,  Das  Bromsilber-Kollodion,  2*  édition,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 

C  Fabre,  la  Photor/raphie  sur  plaque  sèche.  Emulsion  au  coton-poudre  avec 
bain  d'argent,  Paris  (Gauthier-Villars),  1880. 

J.  Ferret,  la  Photographie  par  le  collodion,  Paris  (Gauthier-Villars),  1880. 

A.-F.  VON  HiiBL,  Die  Kollodion-Emulsion  und  ihre  Anwendung,  Halle  a/S.  (W. 
Knapp). 

K.-O.  Klein,  Çollodionemulsion,  2°  éd[i[on,Londves{A.-VJ .Penvose  etCo.),  1910. 

A.  LiÉBERT,  la  Photographie  en  Amérique,  i^  édition,  Paris  (B.  Tignol),  1884. 

D.-V.  Mongkhoven,  Traité  général  da  photographie,  7®  édition,  Paris  (G,  Masson), 
1884. 

C.  Russel,  le  Procédé  au  tanin,  2^  édition,  Paris  (Gauthier-Villars),  1864. 

Ch.-W.  Gamble,  We^  Collodion  Photography,  Londres  {Da.v/ha.Tn  etWard),  1895. 

A.  Payne,  The  Wet  Collodion  Process,  Newcastle  on  Tyne  (Mawson),  1907. 

12 


LIVRE  III 
PROCÉDÉS  POSITIFS 


CHAPITRE    X 

LES    PHOTOCOPIES    PAR    NOIRCISSEMENT    DIRECT 

Procédés  au  chlorure  d'argent.  —  La  combinaison  du  chlore 
et  de  l'argent  se  décomposant  facilement  à  la  lumière,  le  moyen 
le  plus  simple  d'obtenir  une  image  positive  est  d'exposer  au  jour, 
sous  un  cliché  négatif,  un  papier  recouvert  de  chlorure  d'argent  : 
la  couche,  d'abord  blanche,  noircit  progressivement,  d'autant  plus 
rapidement  que  la  lumière  est  plus  vive  et  le  phototype  plus  trans- 
parent. Tantôt  la  substance  sensible  est  directement  incorporée 
au  papier  (c'est  le  procédé  au  papier  salé),  tantôt  elle  imprègne  un 
enduit  superficiel,  tel  que  l'albumine,  la  gélatine  ou  le  collodion. 
Si  l'on  se  bornait  à  fixer  dans  l'hyposulfite  de  soude  l'image  ainsi 
réalisée  par  noircissement  direct,  on  n'aurait  que  des  tonalités 
rouges  désagréables  et  d'ailleurs  peu  stables  :  on  y  remédie  par  le 
virage^ y  qui  consiste  à  substituer  plus  ou  moins  complètement  à 
l'image  primitive  un  précipité  d'or.  L'or  pulvérulent  étant  pourpre, 
la  nuance  définitive  sera  intermédiaire,  suivant  la  durée  du  virage, 
entre  la  couleur  de  l'or  et  celle  de  l'image  primitive. 

Les  papiers  sensibles  aux  sels  d'argent  étant  livrés  tout  pré- 
parés, nous  nous  bornerons  à  indiquer  très  sommairement  la  ma- 
nière dont  ils  sont  sensibilisés.  En  revanche,  nous  insisterons  sur 

1.  Imaginé  par  Blanquart-Evrard,  en  1845. 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT      201 

les  manipulations  auxquelles  il  y  a  lieu  de  les  soumettre,  afm  d'en 
tirer  le  meilleur  parti. 

Papier  salé.  —  On  emploie  généralement  le  papier  de  Rives  ou 
de  Steinbach.  Chaque  feuille  est  d'abord  mise  à  flotter,  pendant 
2  ou  3  minutes,  sur  : 

Eau  distillée , 100  ce. 

Chlorure  de  sodium 8  gr. 

Le  papier  doit  y  être  étendu  de  manière  à  ne  se  trouver  mouillé 
que  d'un  seul  côté.  Pour  cela,  après  avoir  marqué  d'une  croix  au 
crayon  l'envers  de  la  feuille,  on  la  saisit  des  deux  mains  par  ses 
extrémités  et,  la  pliant  légèrement,  on  la  fait  adhérer  au  liquide, 
d'abord  par  le  milieu,  puis  on  abaisse  lentement  les  bords.  Après 
quelques  secondes  de  flottage,  on  soulève  un  des  angles  en  s'ai- 
dant  d'une  lame  de  verre,  afin  de  chasser  les  bulles  d'air  inter- 
posées. On  abaisse  alors  cet  angle,  pour  procéder  de  même  avec 
l'extrémité  opposée.  Au  bout  de  2  ou  3  minutes,  on  soulève  de 
nouveau  l'un  des  angles  au  moyen  de  la  lame  de  verre,  et  l'on  fait 
sécher  la  feuille,  en  la  suspendant  par  des  pinces  en  bois  attachées 
à  une  corde. 

Pour  sensibiliser  le  papier  salé,  on  le  fait  flotter,  pendant  3  mi- 
nutes, sur  : 

Eau  distillée 660  ce. 

Azotate  d'argent 60  gr. 

Carbonate  de  soude 4  — 

Acide  citrique 10  — 

L'azotate  d'argent  en  contact  avec  le  chlorure  de  sodium  déter- 
mine la  formation  du  chlorure  d'argent.  Le  papier  se  trouve  en 
outre  imbibé  d'un  excès  d'azotate  d'argent,  qui  rend  le  papier  plus 
sensible.  On  fait  sécher  dans  l'obscurité. 

Le  papier  salé  donne,  bien  entendu,  des  images  mates.  Elles 
sont  un  peu  ternes,  étant  formées  dans  l'épaisseur  même  de  la 
pâte.  On  obtient  de  plus  beaux  eff'ets  avec  les  papiers  gélatines  ou 
collodionnés  à  surface  mate.  Les  images  brillantes  sont  obtenues 
sur  des  papiers  recouverts  d'albumine  ou  de  gélatine. 

Papier  albuminé.  —  Pour  procéder  à  l'albuminage,  on  fait  flot- 


208  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

ter  un  papier  de  bonne  qualité,  du  papier  de  Rives  particulière- 
ment, sur  :  1 

Blancs  d'œufs  battus  et  filtrés 100  gr. 

Chlorure  de  sodium 6  — 

* 

Le  flottage  régulier  et  sans  bulles  d'air  exige  les  mêmes  précau- 
tions que  pour  le  papier  salé.  Au  bout  de  5  minutes,  la  feuille  est 
retirée  et  mise  à  sécher.  Le  bain  de  sensibilisation  est  le  même  que 
celui  du  papier  salé.  Bien  entendu,  c'est  le  côté  albuminé  qui  doit 
se  trouver  en  contact  avec  le  liquide.  Le  nitrate  d'argent  coagule 
aussitôt  l'albumine  et  la  rend  insoluble  dans  les  bains  auxquels 
le  papier  sera  soumis  après  le  tirage.  Cette  albumine  contient  en 
suspension  le  chlorure  d'argent  résultant  de  la  réaction  du  nitrate 
'l'argent  sur  le  chlorure  de  sodium  ;  elle  contient,  de  plus,  un 
excès  de  nitrate  d'argent,  qui  rend  la  couche  plus  sensible  et  per- 
met de  développer  l'image  après  un  tirage  partiel,  mais  nuit  beau- 
coup à  sa  conservation. 

On  augmente  notablement  la  sensibilité  du  papier  albuminé, 
en  le  soumettant,  pendant  10  minutes,  à  des  fumigations  ammo- 
niacales. Les  feuilles  sont  suspendues  à  l'inlérleur  d'une  boîte  au 
fond  de  laquelle  est  placée  une  cuvette  contetiant  du  carbonate 
d'ammoniaque.  Ce  sel  s'effleurit,  en  se  transformant  en  sesquicar- 
bonate,  et  dégage  des  vapeurs  ammoniacales  sèches. 

Une  fois  sensibilisé,  le  papier  albuminé  ne  se  conserve  bien  que" 
dans  un  endroit  très  sec.  Le  mieux  est  de  le  tenir  dans  un  étui  en 
zinc  contenant  du  chlorure  de  calcium.. 

Papier  au  gélatinochlorure.  —  Ce  papier,  plus  connu  sous  les 
noms  de  papier  au  citrate  ou  de  papier  aristotype,  est  de  beaucoup 
le  plus  répandu,  malgré  l'imperfection  des  images  qu'il  fournit, 
parce  que  la  manipulation  en  est  extrêmement  simple,  à  la  portée 
même  d'un  enfant,  et  aussi  parce  que  c'est  le  moins  coûteux. 

Ce  papier  est  recouvert  d'une  émulsion  de  chlorure  d'argent 
incorporée  dans  de  la  gélatine,  avec  un  léger  excès  de  nitrate 
d'argent.  11  contient  aussi  de  l'acide  citrique  (d'oii  le  nom  de  papier 
au  citrate),  dont  le  rôle  est  de  conserver  le  chlorure  plus  longtemps 
inaltéré  et  de  modifier  la  teinte  de  l'image.  La  surface  en  est  bril- 
lante, lisse  ou  mate,  suivant  l'effet  à  réaliser. 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT      209 

L'idée  de  cette  préparation,  due  à  Humbert  de  Molard,  remonte 
à  1848,  mais  ce  procédé  ne  s'est  vulgarisé  que  beaucoup  plus  tard. 
Le  mode  de  fabrication  actuel  varie  naturellement  d'une  usine  à 
l'autre.  Les  formules  suivantes  sont  celles  qu'a  indiquées  Eder  : 

A.  Nitrate  d'argent 32  gr. 

Acide  cilrique 8  — 

Eau  chaude 160  eCc 

B.  Gélatine 96  gr. 

Chlorure  d'ammonium 2  gr.  8 

Eau. 700  ce. 

G.    Aciâe  tartrique -. . . .  / 2  gr.  8 

Bicarbonate  de  soude i  gr.  4 

Alun 1  gr.  8 

.     Eau 700  ce. 

On  fait  gonfler  à  froid,  puis  fondre  à  chaud  la  gélatine  dans  la 
quantité  d'eau  indiquée  en  B,  puis  on  y  ajoute  le  chlorure  d'am- 
monium. L'acide  tartrique  est  dissous  dans  l'eau  (C),  puis  on  y 
ajoute  le  bicarbonate  et  enfin  l'alun.  Les  solutions  B  et  G  sont  mé- 
langées à  une  température  d'environ  50°,  et  la  solution  A  est  ajou- 
tée, à  la  lumière  jaune,  en  maintenant  la  température  et  en  agitant 
continuellement  le  mélangé.  L'émulsion,  maintenue  pendant  quel- 
que temps  entre  40°  et  50°,  est  ensuite  filtrée  à  la  laine  de  verre,  et 
enfin  coulée  sur  le  papier*. 

Papier  au  collodiochlorure.  —  Le  papier  au  collodiochlorure, 
ou  à  la  celloidinej  est  un  papier  recouvert  d'une  couche  de  nitro- 
cellulose  à  laquelle  est  incorporé  du  chlorure  d'argent,  avec  un 
léger  excès  de  nitrate.  La  surface  sensible  en  est  brillante  ou  mate, 
suivant  le  mode  de  fabrication.  Il  est  plus  cher  que  les  papiers  au 
citrate,  mais  fournit  des  images  bien  supérieures,  au  point  de  vue 
artistique.  Le  papier  mat,  notamment,  est  d'un  très  bel  effet,  sur- 
tout quand  il  a  été  viré  au  platine.  On  peut  cependant  le  traiter  de 
la  même  manière  que  les  papiers  au  citrate,  mais  des  formules 
spéciales  lui  ont  été  appliquées,  et  nous  les  indiquerons,  en  trai- 
tant du  virage. 

Les  formules  de  préparation  du  papier  h  la  nitrocellulose  sont 
très  nombreuses.  Gelle  qui  suit  est  due  à  Valenta. 

1.  Eder,  Ausfûhrliches  Eandbuch  der  Photographie,  IV,  i,  1898,  p.  165. 


210  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

A.  Chlorure  de  strontium 10  gr. 

Chlorure  de  lithium 5  — 

Eau 30  ce. 

Alcool 55  — 

B.  Nitrate  d'argent  cristallisé 22  gr. 

Eau 30  ce. 

Alcool 60  — 

C.  Acide  citrique 5  gr» 

Alcool 40  ce. 

Glycérine 6  — 

A  350  ce.  de  collodion  normal  à  3  p.  100  on  ajoute,  peu  à  peu, 
15  ce.  de  la  solution  A.  On  y  ajoute  ensuite,  en  lumière  inactinique, 
60  ce.  de  B,  puis  50  ce.  de  G  et  enfin  50  ce.  d'éther.  Après  un  repos 
de  24  heures,  on  coule  sur  papier. 

Emploi  des  papiers  au  chlorure.  —  Les  papiers  au  chlorure 
d'argent  ne  se  conservent  pas  très  longtemps.  Même  renfermés 
dans  des  enveloppes  en  papier  paraffiné,  ils  s'altèrent  au  bout  de 
quelques  mois,  parfois  même  après  quelques  semaines.  Celte  alté- 
ration est  due  au  nitrate  d'argent,  qui  occasionne  peu  à  peu  le 
jaunissement  de  la  couche  et  des  réductions  du  composé  sensible. 
Le  mieux  est  donc  de  faire  usage  uniquement  de  papiers  récem- 
ment préparés.  La  présence  du  nitrate  d'argent  provoque  égale- 
ment des  taches  sous  l'influence  de  l'humidité  :  il  faut  donc  éviter 
d'appliquer  le  papier  sensible  contre  un  cliché  qui  ne  serait  pas 
parfaitement  sec,  car  ce  cliché  se  trouverait  ensuite  couvert  de 
taches  indélébiles.  Il  en  serait  de  même  si  le  papier  restait  trop' 
longtemps  en  contact  avec  un  cliché  non  verni,  par  un  temps 
humide  ou  pendant  toute  une  nuit. 

Cependant  MM.  Lumière  ont  réussi  à  préparer  un  papier  à  noir- 
cissement direct  ne  contenant  point  de  sels  d'argent  solubles. 
Ce  papier,  désigné  sous  le  nom  d'ActinoSj  se  conserve  indéfiniment 
et  ne  risque  pas  de  tacher  les  clichés. 

Tous  les  papiers  à  noircissement  direct  peuvent  être  manipulés 
soit  à  la  clarté  d'une  lampe,  soit  même  à  la  lumière  du  jour,  mais 
dans  un  recoin  peu  éclairé.  Il  n'est  donc  pas  nécessaire  de  s'enfer- 
mer dans  le  laboratoire  pour  ouvrir  les  pochettes  contenant  le 
papier,  pour  le  mettre  en  contact  avec  le  phototype  et  pour  sur- 
veiller l'apparition  de  l'image. 

Toutefois,  il  n'en  sera  pas  de  même  lorsqu'on  se. proposera  de 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT     211 

ne  pas  pousser  jusqu'au  bout  le  tirage  par  noircissement  direct  et 
d'achever  l'image  par  de'veloppement,  comme  nous  l'expliquerons 
dans  le  chapitre  suivant.  Dans  ce  cas,  il  ne  faudra  manipuler  le 
papier  qu'en  lumière  inactinique,  comme  s'il  était  très  sensible. 
Sans  cette  précaution,  l'exposition  du  papier  au  jour  détermine- 
rait une  impression  d'abord  invisible,  mais  qui  se  traduirait,  au 
développement,  par  des  taches  ou  par  un  voile  uniforme.  Il  est 
essentiel  de  ne  jamais  toucher  un  papier  sensible  avec  les  doigts 
imprégnés  d'hyposulfîte;  on  évitera  d'ailleurs  de  saisir  les  épreu- 
ves autrement  que  par  leurs  bords  extrêmes,  le  contact  des  doigts 
déterminant  presque  toujours  des  taches. 

Tirage.  —  La  surface  sensible  du  papier  est  appliquée  contre  le 
côté  gélatine  ou  collodionné  du  phototype,  et  les  deux  surfaces  en 
contact  sont  maintenues  serrées  l'une  contre  l'autre  au  moyen  d'ua 


Fig.  90.  —  Châssis-presse  à  glace. 


Fig.  91.  —  Châssis-presse  sans  gîace. 


châssis-presse  (fig.  90  et  91).  On  place  dans  le  cadre  de  ce  châssis 
d'abord  le  cliché  et  le  papier,  puis  un  blanchet  ou  coussin  constitué 
par  quelques  feuilles  de  papier  buvard  ou  par  une  pièce  de  feutre, 
et  enfin  une  planchette  brisée  à  charnières  maintenue  serrée  con- 
tre le  cadre  par  deux  barres  transversales  portant  sur  des  lames 
élastiques.  Le  tout  est  exposé  au  jour,  et  la  lumière,  passant  à  tra- 
vers les  parties  transparentes  du  négatif,  noircit  progressivement 
le  papier,  qui  reste  blanc  sous  les  parties  opaques  du  phototype. 
C'est  afin  de  permettre  de  surveiller  l'impression  que  la  planchette 
est  formée  de  deux  panneaux  réunis  par  des  charnières.  Quand  on 
veut  examiner  l'image,  on  porte  le  châssis  dans  un  endroit  modé- 
rément éclairé,  on  écarte  une  des  barres  et  l'on  soulève  la  moitié 
de  la  planchette,  comme  le  montre  la  fig.  91.  On  peut  ainsi  regarder 


212 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


une  partie  de  l'image  et  juger  s'il  y  a  lieu  d'arrêter  le  tirage  ou  de 
le  continuer.  Dans  ce  detnier  cas,  on  n'a  qu'à  remettre  en  place 
la  planchette  et  la  barre  qui  la  maintient  appliquée  sur  i'épreuve. 
Comme  l'autre  moitié  de  la  planchette  n'a  pas  cessé  de  maintenir 
le  papier  sensible  serré  contre  le  cliché,  le  côté  qui  a  été  soulevé 
reviendra  se  placer  exactement  dans  la  position  qu'il  occupait 
primitivement,  et  la  netteté  de  l'image  ne  sera  en  rien  altérée. 

Le  châssis  représenté  fig.  90  est  muni  d'une  glace  épaisse  sur 
laquelle  peuvent  être  placés  des  clichés  de  formats  différents.  Le 
dessin  suivant  reproduit  un  modèle  sans  glace;  il  est  plus  léger  et 
moins  coûteux,  mais  ne  peut  recevoir  que  les  clichés  dont  le  for- 
mat est  exactement  celui  du  cadre. 

Le  tirage  s'effectue  soit  au  soleil,  soit  à  l'ombre;  il  est  naturelle- 
ment beaucoup  plus  rapide  dans  le  premier  cas.  Généralement,  on 
expose  au  soleil  les  clichés  très  intenses,  à  contrastes  vigoureux. 
La  lumière  diffuse  est  préférable  pour  les  phototypes  faibles,  très 
transparents  ou  à  oppositions  insuffisantes.  Ces  mêmes  clichés  sont 
parfois  exposés  au  soleil,  mais  sous  un  verre  dépoli  ou  sous  un 
papier  dioptrique. 

Il  est  nécessaire  de  prolonger  le  tirage  un  peu  au  delà  de  Fioten- 
sité  que  devra  présenter  l'image,  une  fois  achevée,  car  elle  baisse 
toujours  au  fixage.  Cependant,  certains  papiers  baissent  moins  que 
d'autres,  et  l'intensité  à  laquelle  il  convient  d'arrêter  l'impression 
sera  déterminée  une  fois  pour  toutes  par  un 
tirage  d'essai. 

Lorsqu'on  doit  tirer  d'un  même  cliché  plu- 
sieurs épreuves  identiques,  il  est  utile  d'em- 
ployer un  contrôleur  de  tirage.  Le  contrôleur 
impressimètre  de  Wynne  (fig.  92)  est  une  boîte 
percée  de  32  ouvertures  de  transparences  dé- 
croissantes, avec  un  chiffre  opaque  au  centre. 
Le  cadre  s'ouvre  pour  recevoir  une  bande  de 
papier  sensible  de  même  provenance  que  celui 
qui  s'impressionne  dans  le  châssis-presse.  Cette 
bande  se  place  sous  l'échelle  transparente.  Le  tirage  de  la  première 
épreuve  s'effectue  comme  à  l'ordinaire,  en  ouvrant  de  temps  à  autre 
le  châssis-presse  pour  surveiller  la  venue  de  l'image.  Quand  elle  est 


Cl.  Calmels. 
Fig.  92.  —  Impressi- 
mètre. 


LES  PHOTOCOPIES  PAR  NOIRCISSEMENT  DIRECT      213; 

à  point,  on  regarde  le  contrôleur  :  le  dernier  numéro  visible  au 
moment  où  le  tirage  est  fini  est  celui  qui  servira  de  contrôle  aux 
tirages  suivants.  Dès  lors,  pour  avoir  une  série  d'épreuves  de 
même  intensité,  à  l'aide  du  même  cliché,  il  ne  sera  plus  néces- 
saire d'ouvrir  le  châssis-presse.  Il  suffira  de  regarder  le  contrôleur 
et  d'arrêter  le  tirage,  quand  la  nouvelle  bande  de  papier  sensible 
présentera  le  même  aspect  que  la  première. 

Marges  et  vignettes.  —  Pour  réserver  des  marges  autour  de 
l'épreuve  ou  n'imprimer  qu'une  partie  d'un  cliché,  on  se  sert  de 
caches.  On  désigne  sous  ce  terme  des  feuilles  de  papier  noir  dans 
lesquelles  ont  été  découpées  des  ouvertures  correspondant  aux 
limites  de  l'image  à  imprimer.  Ces  ouvertures  sont  de  forme  quel- 
conque, ovales,  rondes,  carrées,  etc.  Si  la  délimitation  doit  être 
nette,  on  place  le  papier  noir  évidé  entre  le  cliché  et  la  surface 
sensible;  si  l'on  préfère  adoucir  un  peu  la  ligne  de  séparation,  on 
le  place  en  avant  du  cliché,  que  l'on  expose  alors  en  lumière  dif- 
fuse (ou  au  soleil,  sous  un  écran  dioptriquej.  Enfin,  si  l'on  veut 
réaliser  un  effet  de  fondUj  où  la  délimitation  ne  s'opère  que  par 
gradations  insensibles,  on  dispose  sur  le  châssis-presse  un  dégra- 
dateur. 

Les  dégradateurs  sont  des  caches  dont  les  ouvertures  sont  cer- 
nées de  papiers  dioptriques  superposés  ou  de  dentelures  en  carton 
légèrement  recourbées.  Gomme  ces  dentelures  sont  assez  écartées 
du  cliché  exposé  en  lumière  diffuse,  elles  ne  projettent  pas  une 
ombre  nette  sur  l'épreuve,  mais  ne  font  qu'en  ralentir  l'impression 
du  centre  vers  les  bords.  C'est  ainsi  que  sont  exécutés  les  portraits 
vignettes.  Le  modèle  a  posé  devant  un  fond  clair.  Au  tirage,  on 
place  sur  le  cliché  un  dégradateur  dont  l'ouverture,  en  forme  de 
poire,  limite  l'impression  autour  de  la  tête  et  du  buste,  non  pas 
brusquement,  mais  par  gradations  rappelant  le  travail  de  l'estompe. 
Les  dégradateurs  à  dentelures  sont  parfois  remplacés  par  àes 
glaces  colorées  en  jaune  ou  en  rouge,  excepté  au  centre,  qui  est 
incolore.  La  teinte  Ta  d'ailleurs  de  la  transparence  à  l'opacité  sans 
brusque  démarcation,  de  sorte  que  le  tirage  peut  être  effectué  en 
plein  soleil. 

L'ouverture  des  dégradateurs  précédents  a  une  forme  invariable. 
Chacun  d'eux  ne  peut  donc  s'appliquer  qu'à  un  nombre  de  cas  très 


214 


TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


•Cl.  Demaria-Lapierre. 

Fig.  93.  —  Dégradateur 
iris. 


restreint.  Le  dégradateur  in's  (fig.  93)  permet  d'obtenir  à  volonté 
toutes  les  formes  d'ouvertures.  C'est  un  cadre  dans  lequel  sont 

disposées  des  lamelles  mobiles  pivotant  les 
unes  sur  les  autres  et  qu'il  est  facile  de  com- 
biner de  manière  à  laisser  un  évidement  de 
la  forme  voulue.  Un  verre  dépoli  s'y  adapte 
et  permet  de  réaliser  un  dégradé  aussi  régu- 
lier, aussi  délicatement  fondu  que  les  dégra- 
dateurs  ordinaires. 

Les  marges  laissées  blanches  par  les  ca- 
ches et  les  dégradateurs  produisent  quelque- 
fois un  effet  trop  cru.  Il  est  bon,  dans  ce 
cas,  de  les  teinter  légèrement,  en  exposant 
pendant  un  instant  au  jour  l'épreuve  dont  on 
a  eu  soin  de  protéger  la  partie  impressionnée 
à  l'aide  d'un  contre-cache  ou  d'un  contre- 
<iégradateur ,  c'est-à-dire  d'un  papier  noir  ou  d'un  écran  à  bords 
nuancés  ou  dentelés  constituant  la  contre-partie  de  l'écran  primitif. 
Virage.  —  Les  papiers  impressionnés  seront,  autant  que  possi- 
ble, virés  le  jour  même.  Si  l'on  est  obligé  d'attendre  jusqu'au  len- 
demain, il  sera  nécessaire  de  les  enfermer  dans  une  enveloppe 
paraffinée  ;  si  le  virage  est  différé  davantage,  il  faudra  les  placer 
dans  un  tube  desséché  par  le  chlorure  de  calcium.  L'opération  du 
virage  sera  effectuée,  de  préférence,  à  la  lumière  du  jour  faible, 
•qui  permettra,  mieux  qu'un  éclairage  artificiel,  de  juger  des  chan- 
gements de  couleur  que  subit  l'image  dans  le  bain  de  dorure. 

Le  sel  employé  pour  le  virage  est  le  chlorure  d'or,  mais  il  est 
indispensable  d'en  neutraliser  l'acidité  en  y  ajoutant  diverses  subs- 
tances, sans  lesquelles  l'image  serait  rongée  et  perdrait  ses  plus 
délicates  demi-teintes.  Un  grand  nombre  de  formules  ont  été  pro- 
posées, soit  pour  effectuer  le  virage  et  le  fixage  séparément,  soit 
pour  combiner  ensemble  ces  deux  opérations.  Les  papiers  salés, 
albuminés  et  collodionnés  sont  généralement  traités  par  virage 
séparé  du  fixage.  Le  papier  albuminé,  surtout,  ne  donne  de  belles 
épreuves  que  par  un  virage  distinct  du  fixage. 

Le  bain  de  virage  le  plus  ancien  et  aussi  le  plus  stable,  quand  il 
est  préparé  avec  soin,  est  le  virage  à  la  craie  : 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT      215 

Eau 1.000  ce. 

Chlorure  d'or 1  gr. 

Craie  lévigée 5  — 

On  agite  vivement,  on  laisse  reposer,  en  pleine  lumière,  au  moins 
pendant  24  heures,  puis  on  décante.  L'exposition  à  la  lumière  doit 
être  prolongée  jusqu'à  décoloration  complète  de  la  solution,  qui 
est  d'abord  jaune.  Quand  cette  teinte  a  disparu  et  que  le  liquide 
est  bien  limpide,  il  est  devenu  neutre  et  ne  ronge  plus  les  épreuves. 
Il  se  conserve  très  longtemps  en  bon  état  et  donne  des  tons  d'un 
beau  noir  violacé. 

Si  l'on  préfère  une  autre  nuance,  on  emploiera  l'une  des  for- 
mules suivantes  : 

I  II  III         IV  V  VI 


A.  Chlorure  d'or 

Eau 

B.  Eau 

Benzoate  de  soude... 

Potasse  caustique 

Phosphate  de  soude. . 
Bicarbonate  de  soude. 

Borax 

Tungstate  de  soude. . 
Acétate  de  soudée ... 

Proportions  A 

—         B 

Couleur  de  virage 

Auteur 


1 

150 
1000 
45 
0,5 


1 
1 

Noir. 
Archer. 


1 

500 
1000 


32 

8 


1 
1 

Tiolet  rouge. 
Phot.  franc. 


1 

250 
1000 


14 

28 

20 
3 

Tiolet  noir. 
AnttiODy. 


1 

1000 
1000 


25 


1 
1 

Sépia. 
Bain. 


1 

1000 
1000 


25 

15 
1 
1 

Tiolet  rose. 
Wilson. 


i 

1000 
1000 


20 
1 
1 

Chocolat 
Moncklioveo. 


Les  formules  précédentes  sont  établies  pour  le  papier  albuminé. 
Elles  peuvent  être  appliquées  au  papier  salé;  maîs  comme  le  virage 
en  est  plus  rapide,  il  est  préférable  de  diluer  davantage  les  solu- 
tions, en  doublant  les  quantités  d'eau  indiquées.  La  formule  sui- 
vante s'applique  aux  papiers  au  collodio-chlorure  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Acétate  de  soude  fondu 20  gr. 

B.  Eau 500  ce. 

Sulfoeyanure  d'ammonium  ^  gr. 

C.  Eau 100  ce. 

Chlorure  d'or 1  gr. 


1.  L'acétate  de  soude  fondu  donne  des  tons  plus  bleus  que  l'acétate  cristallisé, 
généralement  préféré. 


216  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Pour  l'usage,  on  prend  170  ce.  de  la  solution  A,  40  ce.  de  la  solu- 
tion B,  et  10  ce.  de  la  solution  G.  Ce  mélange  ne  se  conserve  pas 
longtemps. 

Les  papiers  au  citrate  sont  généralement  traités  par  virage-fixage. 
Néanmoins,  on  peut  aussi  les  soumettre  au  virage  distinct  du  fixage, 
à  l'aide  des  solutions  : 

A.  Eau 125  ce. 

Ph osphate  de  soude 6  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Chlorure  d'or 1  gr. 

Pour  Tusage,  on  verse,  dans  la  solution  A,  30  ce.  de  la  solution 
B.  Ce  virage  donne  des  tons  qui  passent  du  noir  velouté  au  gris- 
de-fer. 

On  peut,  enfin,  employer  le  virage  à  la  thiocarbamide  ou  sulfo- 
urée,  indiqué  par  Kessler.  A  25  ce.  d'une  solution  de  chlorure  d'or 
à  1  p.  100,  on  ajoute  la  quantité  nécessaire  d'une  solution  à  2 
p.  100  de  thiocarbamide  pour  que  le  précipité  qui  s'était  d'abord 
formé  se  redissolve,  soit  environ  15  ce.  On  y  ajoute  ensuite  : 

Acide  citrique 0  gr.  5 

Chlorure  de  sodium 10  — 

et  de  Peau  en  quantité  suffisante  pour  faire  un  litre. 

Ce  bain  se  conserve  bien  et  sert  jusqu'à  épuisement  total  de  l'or. 
Le  virage  s'effectue  très  rapidement. 

Tous  ces  bains  doivent  être  décolorés  avant  d'être  employés.  Au 
moment  de  procéder  au  virage,  la  solution  sera  versée  dans  une 
cuvette  en  porcelaine  ou  en  verre  réservée  exclusivement  à  cet 
usage. 

Les  épreuves  sont  d'abord  lavées  dans  deux  ou  trois  eaux,  de 
manière  à  éliminer  la  plus  grande  partie  des  sels  solubles,  puis 
on  les  immerge  une  à  une  dans  la  cuvette  à  virage,  que  l'on  agite 
continuellement.  On  vire  généralement  plusieurs  épreuves  à  la 
fois,  mais  il  faut  cependant  éviter  d'en  mettre  un  trop  grand  nom- 
bre dans  une  petite  cuvette  et  les  tenir  constamment  en  mouve- 
ment, en  évitant  qu'elles  adhèrent  les  unes  contre  les  autres.  Si  on 
remarque  des  bulles  d'air,  il  faut  les  chasser  aussitôt  à  l'aide  d'une 
tige  de  verre,  ou  sortir,  les  épreuves  que  l'on  replonge  ensuite. 


LES  PHOTOCOPIES  PAR  NOIRCISSEMENT  DIRECT      211 

Cette  manœuvre  suffit  presque  toujours  pour  crever  les  bulles.  On 
retourne  de  temps  à  autre  les  épreuves,  toujours  une  à  une,  l'image 
tantôt  en  dessus  et  tantôt  en  dessous.  Sans  ces  précautions,  le  virage 
s'effectuerait  d'une  manière  irrégulière,  et  les  épreuves  présente- 
raient des  inégalités  de  tons.  Il  importe,  en  outre,  d'éviter  abso- 
lument de  toucher  le  bain  de  virage  ou  les  épreuves  à  virer  avec 
les  doigts  imprégnés  d'hyposulfîte.  L'opérateur  qui  n'est  pas  aidé 
par  un  ouvrier  chargé  du  fixage  manipulera  avec  la  main  droite 
les  épreuves  immergées  dans  les  eaux  de  dégorgement  ou  dans  le 
bain  de  virage,  et  ne  touchera  qu'avec  la  main  gauche  celles  qui 
sont  plongées  dans  le  fixateur.  Si  l'on  n'observe  pas  rigoureuse- 
ment ces  prescriptions,  on  aura  sûrement  des  épreuves  tachées. 

La  nuance  de  l'image  change  peu  à  peu,  sous  l'action  du  virage  • 
elle  est  d'abord  rouge-brique,  puis  rouge  violacé,  pourpre  et  noir 
froid.  Ce  changement,  variable  suivant  la  composition  du  virage, 
est  plus  ou  moins  rapide,  suivant  que  le  bain  est  neuf  ou  a  déjà 
servi  à  virer  plusieurs  épreuves.  L'action  en  est  accélérée  par  la 
chaleur,  et  certains  bains  qui  paraissent  épuisés,  en  hiver,  virent 
encore  très  bien  quand  on  les  fait  tiédir. 

Aussitôt  que  le  ton  voulu  est  atteint,  et  même  un  peu  avant,  car 
le  virage  va  continuer  encore  quelques  instants,  on  sort  l'épreuve 
et  on  la  plonge  dans  l'eau.  On  la  retire  aussitôt,  sinon  elle  continue 
de  virer,  et  on  l'immerge  dans  le  fixateur. 

Fixage.  —  Les  épreuves  virées  sont  immergées  une  à  une  dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 150  gr. 

On  y  ajoutera  3  gr.  d'alun,  s'il  s'agit  de  papiers  gélatines.  Le  bain 
de  fixage  doit  être  fréquemment  renouvelé.  • 

A  mesure  que  le  sel  d'argent  non  impressionné  se  dissout,  l'image 
prend  un  ton  plus  rouge;  elle  semble  même  revenir  au  ton  qu'elle 
avait  avant  le  virage,  mais  cette  teinte  disparaîtra  au  séchage. 

Au  bout  de  10  minutes,  les  épreuves  sont  fixées.  On  les  met  alors 
dans  une  grande  cuvette,  oii  elles  sont  soumises  à  un  lavage  très 
abondant  et  très  soigné,  sur  lequel  nous  reviendrons  plus  loin. 

Virage-fixage. —  Les  papiers  au  citrate  sont  généralement  virés 
et  fixés  simultanément.  Les  bains  de  virage  et  fixage  combinés 

13 


218  TRAITÉ   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

ont,  sur  les  bains  séparés,  l'avantage  de  donner  plus  facilement 
des  images  fraîches  et  brillantes,  avec  des  demi-teintes  très  fines 
et  des  noirs  profonds,  quoique  bien  détaillés.  On  leur  a  reproché 
de  fournir  des  épreuves  moins  stables  que  les  bains  séparés.  En 
réalité,  si  l'on  fait  usage  de  solutions  préparées  avec  soin  et  non 
épuisées;  si,  surtout,  les  lavages  sont  bien  exécutés,  les  épreuves 
virées  et  fixées  en  un  seul  bain  se  conservent  aussi  longtemps  que 
celles  qui  ont  été  virées  et  fixées  séparément.  D'autre  part,  si  les 
bains  ou  les  lavages  laissent  à  désirer,  chacun  des  deux  procédés 
aboutit  à  des  épreuves  qui  s'altèrent,  jaunissent  et  s'effacent  en  peu 
de  temps. 

Les  pochettes  dans  lesquelles  sont  vendus  les  papiers  au  citrate 
cotitiennent  ordinairement  une  instruction  relative  à  leur  mode 
d'emploi.  On  se  conformera  à  ces  indications,  surtout  en  ce  qui 
concerne  la  composition  des  bains,  que  le  fabricant  n'a  déterminée 
qu'à  la  suite  de  nombreux  essais.  Telle  formule,  excellente  pour 
un  papier,  ne  vaudrait  rien  si  on  l'appliquait  à  un  papier  de  pro- 
venance différente.  A  titre  d'exemples,  nous  indiquerons  la  for- 
mule de  MM.  Lumière  et  celle  de  la  compagnie  Eastman  Kodak. 
Ces  formules  conduisent  à  d'excellents  résultats  quand  elles  sont 
appliquées  aux  papiers  pour  lesquels  elles  ont  été  combinées,  mais 
elles  ne  conviendraient  pas  également  à  d'autres. 

Le  virage-fixage  Lumière  a  pour  formule  : 

A.  Eau  bouillante 1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 250  gr. 

Alun  ordinaire 15  — 

Acétate  de  plomb 2  - — 

B.  Eau 100  ce. 

Chlorure  d'or 1  gr. 

La  solution  A  est  préparée  en  faisant  dissoudre  l'hyposulfite  et 
l'alun  dans  l'eau  bouillante.  On  filtre  ensuite,  et  l'on  n'ajoute  qu'a- 
près refroidissement  l'acétate  de  plomb,  préalablement  dissous 
dans  un  peu  d'eau  distillée. 

Le  bain  normal  est  préparé,  24  heures  avant  de  s'en  servir,  en 
ajoutant  6  ce.  de  la  solution  B  à  100  ce  de  la  solution  A.  Pour 
obtenir  plus  de  limpidité,  il  est  utile  d'y  ajouter  un  peu  de  kaolin 
et  de  filtrer.  La  température  du  bain,  pendant  le  virage-fixage,  doit 
être  comprise,  autant  que  possible,  entre  18°  et  20°, 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT      219 

Les  épreuves,  préalablement  dégorgées  dans  r<«eau,  sont  immer- 
gées une  à  une  dans  la  cuvette  (en  verre  ou  en  porcelaine)  conte- 
nant le  bain  de  virage-fixage  et  maintenues  constamment  en  mou" 
vemenf.  Dès  qu'elles  y  sont  plongées,  les  images  s'affaiblissent  et 
prennent  une  couleur  rouge-brique,  qui  ne  tarde  pas  à  se  modifier 
sous  l'action  du  sel  d'or.  Dès  que  les  demi-teintes  ont  atteint  le  ton 
voulu,  soit  au  bout  de  iO  minutes  environ,  les  épreuves  sont  reti- 
rées du  bain  et  lavées  à  grande  eau.  Si  on  les  laissait  davantage 
dans  la  cuvette  de  virage,  les  demi-teintes  seraient  rongées. 

On  obtient  de  beaux  tons  violacés  en  faisant  précéder  le  virage- 
fixage  d'un  virage  or-borax  : 

Eau 1.000  ce. 

Borax ', 10  gr. 

Solution  de  chlorure  d'or  à  1  p.  100 25  ce. 

La  solution  de  chlorure  d'or  n'est  ajoutée  à  la  solution  de  borax 
qu'au  moment  de  procéder  au  virage;  il  est  bon,  toutefois,  d'atten- 
dre un  quart  d'heure  avant  d'employer  le  mélange. 

Le  virage-fixage  Kodak  est  préparé  en  mélangeant  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 200  gv. 

Sulfocyanure  d'ammonium 4  — 

B.  Eau 500  ce. 

Acétate  de  plomb 10  gr. 

Chlorure  d'or 1  —                     ( 

Chacune  de  ces  deux  solutions  doit  être  préparée  au  mois  24  heu- 
res avant  d'être  employée.  Elles  se  conservent  d'ailleurs  très  bien, 
à  l'abri  de  la  lumière.  Les  deux  solutions  seront  mélangées  une 
demi-heure  avant  l'emploi.  On  prendra  1.000  ce.  de  A  et  seulement 
100  ce.  de  B.  Cette  quantité  est  exactement  suffisante  pour  virer  et 
fixer  en  8  ou  10  minutes  une  pochette  de  papier  Soîio  au  ton  brun- 
pourpre. 

Pendant  l'été,  les  épreuves,  rapidement  dégorgées  dans  de  l'eau 
fraîche,  seront  laissées,  pendant  5  minutes,  dans  ; 

Eau 1.000  ce. 

Alun 25  gr. 

La  couche  de  gélatine  sera  alors  assez  dure  pour  ne  pas  fondre  au 


220  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

cours  des  opérations  suivantes.  Les  épreuves  seront  ensuite  lavées 
avant  de  passer  dans  le  virage-fixage. 

Virage-fixage  sans  or.  —  Un  vieux  bain  d'hyposulfite,  dans 
lequel  ont  été  fixées  des  épreuves  virées,  devient  lui-même  suscep- 
tible de  virer  de  nouvelles  épreuves.  De  même,  un  bain  de  fixage 
acide,  quoique  ne  contenant  aucune  trace  de  chlorure  d'or,  peut 
donner  des  tons  agréables,  mais  peu  stables  et  d'ordinaire  rongés 
dans  les  demi-teintes. 

La  formule  suivante  donne  un  ton  noir  : 

Solution  de  penlathionate  de  plomb  à  21°  Baume 1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 250  gr. 

Pour  préparer  le  pentathionate  de  plomb,  on  sature  par  du  car- 
bonate de  plomb  une  solution  d'acide  pentathionique  à  10°  Baume. 

Virage  au  platine.  —  On  obtient  de  beaux  tons  noirs,  d'une 
remarquable  stabilité,  en  virant  au  platine  les  épreuves  préalable- 
ment virées  à  l'or,  mais  non  fixées.  La  formule  suivante  convient 
particulièrement  aux  papiers  à  la  celloïdine  mats  : 

Eau 800  ce. 

Ghloroplatinite  de  potassium i'gr. 

Acide  citrique 20  — 

Les  épreuves  virées  à  l'or  et  lavées  sont  laissées  dans  le  bain  de 
virage  au  platine  pendant  o  à  10  minutes,  suivant  que  la  solution 
est  neuve  ou  épuisée.  On  les  retire  aussitôt  que  le  ton  désiré  est 
obtenu.  On  les  lave  ensuite  à  grande  eau,  et  on  les  fixe  dans  un 
bain  d'h3^posulfite  de  soude  à  5  p.  100. 

Les  papiers  au  citrate  peuvent  également  être  virés  au  platine. 
On  obtient  des  tons  très  variés  avec  le  bain  suivant,  qui  devra  pré- 
céder le  virage-fixage.  Les  épreuves,  tirées  plus  foncées  que  d'or- 
dinaire, seront  lavées  dans  deux  ou  trois  eaux,  puis  immergées 
dans  : 

Eau 500  ce. 

Chlorure  de  sodium 2  gr. 

Ghloroplatinite  de  potassium 1  — 

On  les  y  laissera  jusqu'à  obtention  du  ton  noir,  et  on  les  lavera 
rapidement  avant  de  les  passer  dans  le  bain  de  virage-fixage. 
Virages  divers.  —  On  obtient  des  images  bleu  de  Prusse  sur 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT      22! 

papier  albuminé  en  faisant  flotter  Tépreuve,  fixée  et  lavée,  mais 
non  virée,  sur  un  bain  préparé  à  l'aide  des  deux  solutions  suivantes 
mélangées  en  parties  égales  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Citrate  de  fer  ammoniacal 175  gr. 

B.  Eau 1.000  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 200  gr. 

On  peut  traiter  de  même  les  papiers  au  citrate.  La  pureté  des 
blancs  est  mieux  conservée  en  divisant  le  virage  en  deux  phases. 
L'épreuve,  fixée  et  lavée,  est  d'abord  plongée  dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 2  gr. 

L'image  y  disparait  presque  complètement.  On  lave  avec  soin, 
et  l'jn  passe  l'épreuve  dans  une  solution  diluée  de  perchlorure  de 
fer,  où  l'image  reparaît  en  bleu.  On  termine  par  des  lavages  abon- 
dants. 

Le  virage  à  l'urane  donne  des  images  brun-rouge.  L'épreuve 
fixée  et  lavée  est  passée  dans  une  solution  saturée  de  chlorure  de 
sodium,  puis  dans  un  bain  d'alun  à  6  p.  100.  On  la  laisse  4  à5  mi- 
nutes dans  chacun  de  ces  deux  bains,  et  on  l'immerge  dans  : 

Solution  de  ferricyanure  de  potassium  à  2  p.  100 1  partie. 

Solution  de  nitrate  d'urane  à  6  p.  100 1    — 

Dans  ce  mélange,  l'image  passe  du  brun  au  rouge.  On  lave,  on 
fixe  de  nouveau  dans  une  solution  d'hyposulfite  de  soude  à  10 
p.  iOO,  et  on  lave  à  grande  eau. 

Lavages.  —  Les  papiers  aux  sels  d'argent  doivent  être  soumis, 
après  fixage,  à  des  lavages  abondants,  afin  d'assurer  l'élimination 
de  rhyposulfite,  dont  les  moindres  traces  restées  dans  la  couche 
compromettraient  la  stabilité  des  images.  Ces  résidus  du  fixage 
attaquent,  en  eff'et,  le  dépôt  d'argent,  en  provoquent  la  sulfuration 
et  déterminent  la  formation  d'un  composé  complexe  jaunâtre  qui 
pâlit  à  la  longue  et  finit  par  disparaître.  De  là  ces  épreuves 
rongées,  résultant  de  lavages  insuffisants,  que  tout  le  monde  con- 
naît. 

Cependant,  si  l'on  prolonge  les  lavages  au  delà  de  iO  ou  12 
heures,  on  risque  de  désagréger  la  pâte  du  papier.  Pour  éliminer 


222  TRAITÉ   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

l'hyposulfite  en  quelques  heures,  il  faut  que  les  épreuves  soient 
placées  dans  l'eau  courante  ou,  à  défaut,  dans  une  eau  fréquem- 
ment renouvelée.  On  les  met  habituellement  dans  une  cuve  en  bois 
garnie  de  zinc.  Si  on  les  abandonne  dans  ce  récipient,  elles  s'em- 
pilent au  fond,  et  l'eau  ne  circule  plus  suffisamment  entre  les 
feuilles.  Certaines  cuves  sont  munies  d'un  grillage  disposé  à  quel- 
ques centimètres  au-dessus  du  fond.  Les  épreuves  s'y  déposent, 
tandis  que  l'eau  contenant  l'hyposulfite  gagne  le  fond,  par  suite 
de  sa  plus  grande  densité.  Le  mieux  est  d'établir  un  système  de 
siphonnage  qui  entretient  le  liquide  et  les  épreuves  en  mouvement. 

Si  l'on  ne  dispose  pas  d'une  provision  d'eau  suffisante  pour  opé- 
rer ainsi,  on  obtiendra  néanmoins  une  élimination  suffisante  en 
procédant  comme  suit.  On  remplit  à  demi  deux  cuvettes  d'eau.  On 
met  dans  la  première  les  épreuves,  une  à  une.  Au  bout  d'un 
quart  d'heure,  on  retire  les  épreuves,  toujours  une  à  une,  et  on  les 
immerge  dans  la  seconde  cuvette.  On  vide  l'eau  de  la  première 
cuvette,  on  la  remplace  par  de  Teau  propre,  et,  au  bout  d'un 
quart  d'heure,  on  y  plonge  les  épreuves.  On  recommence  avec  la 
seconde  cuvette,  et  ainsi  de  suite,  en  changeant  l'eau  chaque  fois. 

On  peut  aussi  se  borner  à  employer  une  seule  cuvette.  Chaque 
fois  qu'on  change  l'eau,  il  faut  avoir  soin  de  vider  complètement 
le  récipient,  et  même  de  presser  un  peu  les  feuilles  empilées,  de 
manière  à  chasser  le  plus  d'eau  possible.  Enfin  on  abrège  les 
lavages,  en  décomposant  l'hyposulfite,  soit  au  moyen  du  thioxy- 
dant  Lumière  à  10  p.  100,  soit  en  immergeant  les  épreuves,  préa- 
lablement alunées,  dans  : 

Eau iOO  ce. 

Eau  de  Javeb 15—. 

On  peut  également  employer  l'acide  nitrique,  à  raison  de  2 
gouttes  pour  100  ce.  d'eau. 

Si  l'on  emploie  un  papier  gélatine  et  que  le  bain  de  virage  ne 
contienne  point  d'alun,  il  est  nécessaire  de  rendre  la  gélatine 
insoluble,  avant  de  procéder  aux  lavages.  Sans  cette  précaution,  le 
montage  des  épreuves  serait  très  délicat  et,  de  plus,  pendant  l'été, 
la  couche  risquerait  de  couler  pendant  le  lavage.  Pour  durcir  la 
gélatine,  il  suffit  de  laisser  les  épreuves,  pendant  5  minutes,  dans 


LES  PHOTOCOPIES  PAR  NOIRCISSEMENT  DIRECT      225 

une  solution  d'alun  ordinaire  à  3  p.  100,  ou  dans  une  solution  de 
formol  à  1  p.  100.  Le  papier  Actinos,  qui  ne  contient  point  de  sels 
solubles,  peut  même  être  durci  au  formol  avant  les  opérations  de 
virage  et  de  fixage. 

Séchage.  —  Les  épreuves  lavées  sont  suspendues  par  un  coin  à 
des  pinces  en  bois  fixées  à  une  corde  ou  déposées,  image  en  dessus, 
sur  des  feuilles  de  papier  buvard  blanc  très  propre.  On  peut  appli- 
quer un  morceau  de  buvard  sur  l'image,  pour  en  enlever  les  gout- 
telettes qui  rendraient  la  dessiccation  trop  lente,  mais  il  ne  faut 
pas  l'y  laisser,  car  Fépreuve,  en  séchant,  se  couvrirait  d'une  sorte 
de  duvet  formé  de  filaments  de  papier. 

'  Si  les  épreuves  doivent  être  conservées  non  montées,  on  évitera 
qu'elles  se  roulent  au  séchage  en  les  plongeant  dans  un  mélange 
d'eau  et  de  glycérine  ou  dans  : 

Eau l.OOOcc. 

Alcool 400  — 

Glycérine 300  — 

On  les  y  laisse  environ  5  minutes  et  on  les  fait  ensuite  sécher 
comme  d'habitude.  Pour  rendre  plus  brillante  la  surface  des  papiers 
gélatines,  on  les  fait  sécher  sur  une  surface  polîe  (plaque  de  tôle 
émaillée,  glace  cirée  ou  enduite  de  talc)  :  nous  reviendrons  sur  ce 
procédé,  en  traitant  du  montage  des  épreuves. 

Insuccès.  —  Les  procédés  par  noircissement  direct  sont  si  sim- 
ples et  si  sûrs,  que  les  insuccès  y  sont  très  rares  et  ne  sont  dus 
qu'à  un  manque  de  soins,  soit  dans  le  tirage,  soit  dans  la  prépara- 
tion des  bains  de  virage  et  de  fixage. 

Défaut  de  netteté.  —  Si  le  cliché  est  net  et  l'épreuve  floue,  c'est 
que  la  planchette  du  châssis-presse  est  mal  assujettie  ou  a  été  ou- 
verte trop  brusquement.  Garnir  le  châssis  de  coussins  en  feutre  et 
n'ouvrir  la  planchette,  pour  examiner  l'image,  qu'avec  précaution. 

Taches.  —  Papier  humide  ou  de  préparation  trop  ancienne, 
cliché  imparfaitement  sec,  condensation  de  l'humidité  (surtout 
pendant  la  nuit),  contact  des  doigts  gras  ou  humides,  cuvette  mal 
lavée , 

Image  grise.  —  Cliché  trop  faible  ou  lumière  trop  intense.  On 
y  remédie,  soit  en  renforçant  le  cliché,  soit  en  tirant  en  lumière 


224  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

faible,  soit  en  interposant  un  verre  dépoli,  un  verre  coloré  ou  du 
papier  dioptrique. 

Image  dure.  — Cliché  à  contrastes  exagérés,  tirage  à  une  lumière 
trop  douce.  Maquiller  l'envers  du  cliché,  sur  les  parties  transpa- 
rentes, à  l'aide  d'un  vernis  mat.  Tirer  au  soleil. 

Image  rougeâtre.  —  Virage  insuffisant,  bain  trop  vieux  ou  trop 
froid,  utilisé  pour  un  trop  grand  nombre  d'épreuves.  Chauffer  le 
bain,  ou  le  renforcer  avec  un  peu  de  bain  neuf,  prolonger  davan- 
tage le  virage. 

Image  noir  froid.  —  Yirage  trop  prolongé  dans  un  bain  neuf. 

Inégalités  de  tons.  —  Épreuves  insuffisamment  remuées  dans  le 
bain  de  virage.  Les  points  circulaires  rouges  correspondent  à  des 
parties  couvertes  de  bulles  d'air  que  l'on  n'aura  pas  crevées  assez 
rapidement  et  qui  auront  retardé  le  virage.  Deux  tons  différents 
séparés  par  une  ligne  de  démarcation  très  nette  sont  l'indice  d'une 
immersion  trop  lente  dans  le  bain  de  virage.  On  évite  ces  irrégu- 
larités en  employant  un  bain  assez  abondant,  en  y  plongeant  rapi- 
dement les  épreuves  une  à  une,  en  chassant  les  bulles  d'air  immé- 
diatement et  en  remuant  constamment  les  papiers,  soit  dans  le 
virage,  soit  dans  le  fixage. 

Ampoules.  —  Bain  de  virage  trop  acide,  température  des  bains 
trop  élevée  ou  trop  différente  d'un  bain  à  l'autre.  Ces  ampoules 
disparaissent  généralement  au  séchage.  Quelquefois  cependant 
elles  laissent  une  trace.  On  les  évite  à  l'aide  d'une  solution  d'alun 
à  3  p.  100. 

Gélatine  visqueuse.  —  Température  trop  élevée.  Durcir  la  géla- 
tine dans  l'alun  ou  dans  le  formol. 

Altération  de  l'image.  —  Lavage  imparfait,  humidité,  émanations 
sulfureuses,  mauvaise  qualité  de  l'encollage  du  papier  ou  du  carton 
sur  lequel  on  le  monte,  acidité  de  la  colle,  exposition  prolongée  au 
soleil. 

Photographie  sur  étoffes.  —  Les  tissus  peuvent  être  teints  par 
des  méthodes  photographiques,  comme  nous  le  verrons  en  traitant 
des  impressions  pigmentaires  (chap.  XII).  Mais  on  peut  aussi  tirer 
des  images  aux  sels  d'argent  sur  des  étoffes  recouvertes  d'une  sorte 
d'apprêt  sensibilisé. 

L'étoffe  est  d'abord  plongée,  pendant  30  à  40  secondes,  dans  : 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   NOIRCISSEMENT  DIRECT      225 

Alcool 1.000  ce. 

Benjoin 8  gr. 

Mastic  en  larmes 5  — 

Chlorure  de  cadmium 30  — 

On  îa  presse  ensuite  entre  deux  feuilles  de  papier  buvard  blanc 
parfaitement  propres  et  on  la  laisse  sécher  à  Tair.  Pour  la  sensi- 
biliser, on  la  tient  immergée,  pendant  une  minute,  dans  une  solu- 
tion de  nitrate  d'argent  à  10  p.  100,  et  on  la  presse  de  nouveau 
entre  deux  feuilles  de  buvard  avant  de  la  laisser  sécher  dans  l'obs- 
curité. 

Le  tirage  s'effectue  dans  le  châssis-presse,  comme  s'il  s*agissait 
d'exécuter  une  épreuve  sur  papier.  Il  faut  seulement  prolonger 
davantage  l'impression,  car  l'image  baisse  un  peu  plus  au  virage. 

Le  tissu  impressionné  est  lavé  dans  5  ou  6  eaux  différentes,  et 
viré  dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Bicarbonate  de  soude 1  gr. 

Chlorure  d'or 10  — 

Quand  le  ton  voulu  est  atteint,  on  rince,  et  on  fixe  dans  une  solu- 
tion d'hyposulfite  de  soude  à  10  p.  100. 

La  méthode  précédente  ne  s'applique  pas  à  la  soie.  Ce  tissu  doit 
d'abord  être  lavé  à  l'eau  tiède,  afin  d'en  éUminer  l'apprêt  ordinaire. 
On  fait  ensuite  sécher,  puis  la  pièce  de  soie  est  plongée  dans  : 

Eau ■ 100  ce. 

Arrow-root 4  gr. 

Chlorure  de  sodium 4  — 

Acide  acétique 15  ce. 

Cette  solution  est  préparée  en  délayant  d'abord  l'arrow-root 
dans  un  peu  d'eau  et  en  ajoutant  le  mélange  au  restant  de  l'eau 
dans  laquelle  on  aura  fait  dissoudre  le  chlorure  de  sodium.  On  fait 
bouillir  jusqu'à  épaississement  (l'arrow-root  est  une  fécule  et  forme 
par  conséquent  un  empois)  et  on  ajoute  l'acide  acétique. 

Au  sortir  de  ce  bain,  la  soie  est  mise  à  sécher.  Pour  la  sensibili- 
ser, on  l'immerge  dans  : 

Eau'distillée 100  ce. 

Nitrate  d'argent 10  gr. 

Acide  nitrique 20  gouttes. 


226  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

On  fait  sécher  dans  l'obscurité,  on  imprime  au  châssis-presse  et 
on  vire  comme  s'il  s'agissait  d'une  épreuve  sur  papier  albuminé. 
On  procède  de  même  pour  le  fixage  et  pour  les  lavages. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 

A.  GouRRÈGES,  Impression  des  épreuves  sur  papiers  divers  par  noircissement 

direct,  par  impy^ession  latente  et  développement,  Paris  (Gauthier- Villars), 

1898. 
F.  DiLLAYE,  le  Tirage  des  épreuves  en  photographie,  Paris  (J.  Tallandier),  1903. 
J.-M.  Eder,  Biç  photo graphischen  Kopierverfahren,  2e  édition,  Halle  a/S.  (W. 

Knapp). 
Klary,  Traite  pratique  d'impression  photographique  sur  papier  albuminé,  Paris 

(Gauthier-Villars),  1898. 
A.  LiÉBERT,  la  Photographie  en  Amérique,  4^  édition,  Paris  (B.  Tignol),  1884. 
L.  Mathet,  les  Insuccès  dans  les  divers  procédés  photographiques,  Paris  (Gh. 

Mendel). 
P.  Mercier,  Virages  et  Fixages,  2  vol.,  Paris  (Gauthier-Villars),  1892. 

D.  VAN  MoNCKHovEN,  Truité  général  de  photographie,  7^  édition,  Paris  (G.  Mas- 

son),  1884. 

E.  Trtjtat,  les  Positifs  en  photographie,  Paris  (0.  Doin  et  fils),  1910. 

E.  Valenta,  D/e  Behandlung  der  fur  den  Auskopierprozess  bestimmten  Emul- 
sionspapiere  {fihlorsilber gélatine-  und  Celloïdinpapiere)^  Halle  a/S.  (W. 
Knapp). 


LES  PHOTOCOPIES  PAR  DEVELOPPEMENT  227 


CHAPITRE    XI 

LES  PHOTOCOPIES  PAR  DÉVELOPPEMENT 

Développement  des  papiers  au  chlorure.  —  Les  papiers  a\*  ^ 
chlorure  d'argent  noircissent  directement  au  tirage,  comme  on 
l'a  vu  dans  le  chapitre  précédent.  Mais  on  peut  également  arrêter 
l'impression  bien  avant  que  l'image  ait  acquis  toute  son  intensité, 
et  la  renforcer  par  développement.  Cette  opération  sera  pratiquée 
à  l'aide  d'un  révélateur  physique  dont  le  nitrate  d'argent  aura  été 
remplacé  par  celui  que  contient  le  papier.  On  a  proposé  un  grand 
nombre  de  formules  pour  ces  révélateurs,  désignés  quelquefois 
sous  le  nom  de  continuateurs.  La  plupart  ne  donnent  que  des 
images  couvertes  de  taches  ou  de  tonalité  désagréable,  qu'il  est 
nécessaire  de  modifier  dans  un  bain  de  virage.  Ce  ton  varie  d'ail- 
leurs, non  seulement  suivant  la  composition  du  révélateur,  mais 
aussi  suivant  le  degré  d'impression  de  l'image.  En  effet,  une 
épreuve  directement  noircie  à  son  intensité  normale  devient  rouge 
dans  le  bain  de  fi'xage;  une  image  invisible,  au  contraire,  est  révé- 
lée en  noir  au  développement  et  reste  noire  dans  l'hyposulfîte. 
Ainsi  donc,  si  une  épreuve  incomplètement  noircie  à  la  lumière  est 
complétée  ensuite  dans  un  révélateur,  sa  teinte  définitive  sera 
intermédiaire  entre  le  rouge  et  le  noir,  et  d'autant  plus  rouge  que 
le  tirage  aura  été  prolongé  davantage.  L'avantage  de  cette  combi- 
naison, outre  la  rapidité  du  tirage,  c'est  la  stabilité  des  images, 
moins  altérables  que  celles  qu'on  obtient  par  noircissement  direct, 
et  les  beaux  tons  auxquels  on  arrive  sans  faire  usage  des  bains  d'or. 

Le  papier  est  exposé  à  la  lumière  ,  dans  le  châssis-presse  , 
comme  nOus  l'avons  précédemment  expliqué,  mais  seulement  jus- 
qu'à ce  que  l'image  commence  à  apparaître.  Cette  image,  à  peine 
visible,  est  ensuite  complétée  dans  le  révélateur.  Il  faut  bien  se 
garder  de  laver  le  papier,  avant  de  le  soumettre  au  développe- 


228  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

ment,  car  le  nitrate  d'argent  qu'il  contient  est  un  élément  essentiel 
du  révélateur.  Il  va  sans  dire  que  ce  procédé  n'est  pas  applicable 
au  papier  Aclinos. 

Le  continuateur  à  l'acide  gallique  est  le  plus  ancien.  On  le  pré- 
pare en  faisant  d'abord  une  solution  de  réserve  i 

Alcool  à  90° 100  ce. 

Acide  gallique iO  gr. 

Au  moment  de  développer  on  prend  : 

Eau 200  ce. 

Solution  de  réserve 5  — 

bolution  d'acétate  de  plomb  à  10  p.  100 1  — 

L'épreuve  y  est  immergée  rapidement,  et  la  cuvette  agitée  avec 
soin.  L'image  se  renforce  progressivement  et,  quand  elle  est  à 
point,  on  la  retire  aussitôt,  on  la  ]ave  sommairement  et  on  la  fixe 
à  l'hyposulfite.  On  obtient  ainsi  un  ton  sépia.  En  augmentant  la 
dose  d'acétate  de  plomb,  on  aurait  des  tons  noir  marron.  Si  l'i- 
mage est  bien  visible,  même  dans  les  ombres,  il  vaudra  mieux 
augmenter  la  quantité  d'eau  indiquée  :  en  la  doublant,  on  aurait 
des  tons  sépia  doré.  On  aura  de  beaux  tons  se  rapprochant  de  ceux 
du  papier  albuminé  viré  à  l'or,  en  prenant  : 

Eau 200  ce. 

Solution  de  réserve 10  — 

Solution  d'acétate  de  plomb 5  gouttes. 

Acide  acétique  cristallisable 15  à  25  — 

Liesegang  a  proposé  le  continuateur  suivant,  connu  sous  le  nom 

d'Aristogène  : 

A.  Eau  bouillie 750  ce. 

Acétate  de  soude  cristallisé 200  gr. 

Tarlrate  de  soude  et  de  potasse 30  — 

Acide  citrique 3  — 

B.  Alcool 200  ce. 

Glycérine 80  ce. 

Hydroquinone 45  gr. 

On  mélange  ces  deux  solutions,  que  l'on  conserve  en  flacons  de 
100  ce.  bien  bouchés.  Au  moment  de  développer,  on  prend  ; 

Eau 100  ce. 

Aristogène 10  — 


LES  PHOTOCOPIES   PAR  DÉVELOPPEMENT  22» 

Le  ton  obtenu  est  généralement  d'un  brun  orangé  qu'il  est  néces- 
saire de  modifier  en  passant  l'épreuve,  préalablement  lavée,  dans 
un  bain  de  virage-fîxage  ordinaire. 

Le  continuateur  au  mélol  donne  de  beaux  tons  pourprés  et  ne 
nécessite  pas  de  virage  complémentaire  ; 

Eau 200  ce. 

Métol 1  gr. 

Acide  tarlrique i  — 

Il  est  à  remarquer,  toutefois,  que  les  demi-teinles  jaunissent 
parfois,  dans  Thyposulfile,  ou  que  l'image  vire  en  deux  tons  difTé- 
rents,  suivant  l'intensité  des  ombres.  Cet  inconvénient  ne  se  pro- 
duit pas  quand  on  emploie  le  paramidophénol,  qui  donne  égale- 
ment de  belles  images,  sans  virage  : 

Eau.... 1.000  ce. 

Paramidophénol  (base) 5  gr. 

Acide  tarlrique 7  — 

Acétate  de  soude 11  — 

^        Acide  acétique 45  — 

Ce  bain  est  généralement  trop  énergique,  et  il  est  nécessaire  de 
le  diluer.  A  tous  ces  continuateurs  il  est  utile  d'ajouter  un  peu  de 
gomme  arabique,  dont  l'effet  est  de  retarder  la  précipitation  des 
composés  insolubles  qui  se  forment  par  la  réaction  du  nitrate  d'ar- 
gent sur  le  révélateur.  Il  faut  cependant  éviter  d'en  mettre  une 
./  trop  grande  quantité,  car  le  développement  serait  alors  trop  ra- 
lenti. Le  mieux  sera  de  préparer  d'avance  une  eau  gommée  con- 
centrée dont  on  ajoutera  10  ce.  à  100  ce.  de  révélateur. 

Les  papiers  au  chlorure  destinés  au  développement  seront  ma- 
nipulés en  lumière  très  faible  ou  même  dans  le  laboratoire.  Il  sera 
donc  prudent  d'effectuer  en  lumière  inactinique  l'ouverture  de  la 
pochette  contenant  le  papier  sensible,  la  mise  en  châssis,  l'examen 
de  l'image  et  le  développement.  Sans  ces  précautions,  un  voile 
général,  d'abord  invisible,  se  manifesterait  ensuite  dans  le  révéla- 
teur. 

Papiers  au  gélatinobromure  d'argent.  —  Les  papiers  recou- 
verts d'une  émulsion  analogue  à  celle  des  plaques  et  des  pellicules 
sont  traités,  de  même,  par  développement  et  fixage.  Les  avantages 
qu'ils  présentent  sur  les  papiers  à  noircissement  direct  sont  •  la 


230  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

rapidité  du  tirage,  la  régularité  de  l'impression  à  la  lumière  artifi- 
cielle et  la  stabilité  des  images.  La  tonalité  en  est  agréable  quand 
le  développement  est  bien  conduit,  mais  les  détails  sont  souvent 
perdus  dans  les  ombres.  Sans  être  réellement  difficile,  la  manipu- 
lation en  est  un  peu  plus  délicate  que  celle  des  papiers  au  citrate. 

Les  émulsions  sur  papier  sont  de  sensibilités  différentes,  suivant 
l'usage  auquel  elles  sont  destinées.  Les  plus  rapides,  quoique  plus 
lentes  que  les  plaques,  ne  doivent  être  manipulées  qu'en  lumière 
rouge.  Les  papiers  les  plus  lents,  recouverts  d'une  émulsion  spé- 
ciale au  chlorobromure,  peuvent  être  exposés  à  la  lumière  jaune 
sans  se  voiler.  Il  est  même  possible  d'opérer  dans  une  pièce  ordi- 
naire, éclairée  par  une  lampe  à  pétrole  devant  laquelle  sera  inter- 
posé un  écran  orangé  en  papier.  Dans  ce  cas,  Touverture  dès 
pochettes,  le  chargement  et  le  déchargement  du  châssis-presse, 
ainsi  que  le  développement  et  le  fixage,  seront  effectués  à  l'abri 
de  l'écran,  tandis  q[ué  le  tirage  se  fera  en  approchant  le  châssis- 
presse  de  la  lampe  pendant  quelques  instants. 

La  manipulation  de  tous  ces  papiers  nécessite  quelques  précau- 
tions. 11  faut  éviter  de  toucher  les  surfaces  sensibles  et  surtout  de 
les  rayer;  il  ne  faut  même  pas  que  le  bord  d'une  feuille  frotte  sur 
l'émulsion  d'une  autre  feuille.  Les  moindres  frottements  se  tradui- 
sent, au  développement,  par  des  raies  noires.  C'est  d'ailleurs  pour 
les  réduire  au  minimum  que  la  pose  doit  être  calculée  de  telle 
sorte  que  le  développement  s'accomplisse  en  moins  d'une  minute. 
La  durée  du  développement  influe  d'ailleurs  sur  le  ton  de  l'image; 
la  pureté  des  blancs  et  la  profondeur  des  noirs  en  dépendent 
aussi. 

Il  s'ensuit  que  la  valeur  du  cliché  influe  sur  l'aspect  de  l'é- 
preuve. Les  meilleures  photocopies  sont  celles  qui  sont  obtenues  à 
l'aide  de  phototypes  bien  détaillés,  vigoureux  sans  dureté,  et  dont 
le  temps  de  pose  n'a  été  ni  trop  court  ni  trop  long.  Toutefois,  on 
peut  compenser  dans  une  certaine  mesure  l'excès  ou  le  défaut  de 
vigueur  d'un  cliché,  en  modifiant  l'intensité  de  la  source  lumi- 
neuse. Comme  les  papiers  au  gélatinobromure  sont  impressionnés 
à  la  lumière  artificielle,  il  suffira  de  faire  varier  la  distance  entre 
la  lampe  et  le  châssis-presse.  On  éloignera  donc  les  clichés  doux, 
tandis  qu'on  rapprochera  les  clichés  durs.  Il  sera  même  possible 


LES  PHOTOCOPIES   PAR   DEVELOPPEMENT  23i 

de  faire  des  corrections  locales,  en  approchant  des  parties  trop 
opaques  la  flamme  d'une  allumette-bougie. 

Les  meilleurs  révélateurs  des  papiers   au  gélatinobromure  sont . 
ceux  au  diamidophénol  et  à  la  métoquinone.  Le  premier  sera  pré- 
paré, au  moment  de  l'emploi,  selon  la  formule  : 

Eau 1.000  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 20  gr. 

Diamidophénol 5  — 

Solution  de  bromure  de  potassium  à  2  p.  100. .  10  ce. 

Ce  révélateur  ne  se  conserve  pas,  mais  donne  de  très  beaux  noirs, 
en  même  temps  que  des  blancs  très  purs.  Le  bain  à  la  métoquinone 
se  conserve  longtemps,  préparé  de  la  façon  suivante  : 

Eau....* 1.000  ec. 

Métoquinone "    9  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 60  — 

Carbonate  de  soude 10  — 

Solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100.  10  ce. 

Ces  deux  formules  sont  établies  de  telle  sorte  qu'une  épreuve 
exposée  pendant  le  temps  voulu  soit  complètement  développée  en 
30  ou  40  secondes.  Toutefois,  si  l'on  veut  obtenir  une  image  vigou- 
reuse d'un  cliché  doux,  on  réduira  un  peu  le  temps  de  pose,  et  on 
augmentera  la  dose  de  bromure,  de  manière  que  le  développement 
dure  un  peu  plus  longtemps. 

Le  révélateur  est  d'abord  versé  dans  un  verre,  en  quantité  suffi- 
sante pour  recouvrir  facilement  le  papier,  soit  au  moins  100  ce. 
pour  une  feuille  13X18.  L'épreuve  est  trempée  dans  une  cuvette 
pleine  d'eau,  que  l'on  vide  auand  le  papier  est  suffisamment  assou- 
pli. On  aura  soin  que  le  côté  émulsionné  soit  en  dessus.  On  pro- 
jette alors  d'un  seul  coup  le  révélateur  sur  la  couche  sensible,  en 
évitant  les  bulles  d'air  par  une  rapide  agitation  de  la  cuvette.  Aus- 
sitôt que  l'image  est  sur  le  point  d'atteindre  à  l'intensité  voulue, 
on  reverse  dans  le  verre  le  révélateur  qui  servira  à  développer 
l'épreuve  suivante,  on  lave  l'épreuve  qui  vient  d'être  développée 
et  on  la  fixe  dans  : 

Eau '.. 1.000  c«. 

Hyposulfite  de  soude .* 200  gr. 

Bisulfite  de  soude  liquide .'         20  ce. 


232  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

Le  lavage  qui  précède  le  fixage  doit  être  rapide,  sans  quoi 
l'image  serait  trop  noire  et  les  blancs  n'en  seraient  pas  parfaitement 
purs.  Le  fixage  est  terminé  au  bout  de  5  minutes.  L'élimination  de 
l'hyposulfite  exige,  comme  toujours,  des  lavages  abondants  et  pro- 
longés. Pendant  l'été,  le  coulage  de  la  gélatine  et  la  formation  des 
ampoules  seront  évités  au  moyen  d'une  solution  d'alun  à  3  p.  100, 
comme  pour  les  papiers  au  citrate.  La  dessiccation  s'effectuera 
de  même,  comme  nous  l'avons  expliqué  au  chapitre  précédent. 

Au  début  d'un  tirage  au  gélatinobromure,  il  est  prudent  de  n'ex- 
poser sous  le  cliché  qu'un  petit  morceau  de  papier  que  l'on  trempe 
dans  le  révélateur,  afin  de  déterminer  le  temps  de  pose.  Après 
quelques  essais,  on  est  exactement  fixé  sur  la  valeur  du  chché  et 
de  l'éclairage,  et  le  tirage  s'effectue  dès  lors  très  rapidement,  avec 
une  régularité  parfaite.  En  employant  un  révélateur  de  composi- 
tion constante  et  peu  oxydable,  comme  la  métoquinone,  la  durée 
du  développement  est  invariable,  si  bien  qu'il  est  facile  d'obtenir 
un  grand  nombre  d'épreuves  identiques,  en  réduisant  au  minimum 
la  surveillance  des  opérations.  Dans  certaines  usines  même,  tout 
s'effectue  automatiquement,  à  l'aide  de  machines  :  c'est  ce  que 
Ton  a  appelé  la  photographie  au  kilomètre.  Le  papier  au  gélatino- 
bromure est  enroulé  en  longue  bande  sur  un  treuil.  Un  méca- 
nisme l'amène  d'abord  sous  le  cliché,  au-dessus  duquel  une  lampe 
électrique  détermine  l'impression  de  l'image  latente.  Le  papier 
avance  de  la  quantité  voulue,  et  une  nouvelle  surface  se  présente 
sous  le  cliché.  Pendant  que  l'impression  continue,  le  commencement 
de  la  bande  a  été  amené  par  la  machine  dans  une  cuve  contenant 
le  révélateur.  Chaque  photocopie  n'y  séjourne  que  juste  le  temps 
nécessaire  au  développement  et  passe  ensuite  dans  d'autres  réci- 
pients destinés  au  fixage  et  aux  lavages.  La  bande  est  enfin  séchée 
rapidement,  et  les  épreuves  automatiquement  coupées.  On  a  ainsi, 
en  quelques  instants,  de  très  belles  impressions,  stables,  à  des 
conditions  de  prix  inconnues  autrefois,  susceptibles  de  lutter  même 
avec  les  tirages  photomécaniques. 

Le  Thebugraph  (ûg.  94  et  95),  construit  par  Th.  Busam,  de  Stutt- 
gard,  est  une  réduction  simplifiée  des  usines  dont  nous  venons  de 
décrire  sommairement  la  disposition.  C'est  un  appareil  facilement 
transportable,  puisqu'il  pèse  moins  de  30  kilos,  et  qui  n'exige  de 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   DÉVELOPPEMENT  233 

l'opérateur  aucune  connaissance  spéciale.  On  le  charge  en  pleine 
lumière,  avec  un  rouleau  de  papier  ou  de  carte  au  bromure  d'une 
longueur  de  50  mètres,  ce  qui  représente  environ  320  cartes  pos- 
tales. On  tourne  la  maniveHe,  et  la 
bande  passe  successivement  sous  le 
cliché,  puis  dans  les  bacs  contenant 
le  révélateur,  le  fixateur  et  les  eaux 
de  lavage.  Les  épreuves  sortent  de 
l'appareil  à  moitié  sèches  :  quelques 
instants  d'exposition  à  l'air  suffisent 
pour  compléter  la  dessiccation.  La 
production  du  Thebugraph  est  d'en- 
viron 800  exemplaires  à  l'heure.  Les 
tirages  sont  remarquables  par  la  ré- 
gularité de  leur  impression,  et  la 
mise  en  train  est  assez  rapide  pour 
qu'on  puisse  commencer  la  livraison 
une  heure  à  peine  après  l'exécution 
du  cliché. 

Virage  des  photocopies  au  bromure.  —  Le  développement  des 
papiers  au  bromure  donne  des  tons  noirs  qu'il  est  facile  de  modi- 
fier par  un  virage.  Un  grand  nombre  de  formules  ont  été  proposées, 
mais  la  plupart  ne  donnent  que  des 
images  facilement  altérables.  Nous 
indiquerons  les  méthodes  les  plus 
sûres. 

Virage  en  brun  par  sulfuration.  — 
Bien  que  la  sulfuration  accidentelle 
des  épreuves  aux  sels  d'argent  soit 
la  cause  fréquente  de  leur  altération, 
le  traitement  suivant  donne  des  ima- 
ges très  stables.  Ce  traitement,  dû  à  - 

MM.  Lumière  et  Seyewetz,  consiste  ^I;.^-^'^'    n        ^   rpu  a, 

To  V  /  1  p       ,     Fig.  95.  —  Coupe  du  Thebugraph. 

a  sulfurer  1  argent  par  le  soufre  à 

l'état  naissant  à  l'état  colloïdal.  A  cet  effet,  on  mêle  à  une  solution 
d'hyposulfite  un  colloïde,  tel  que  la  gomme  arabique,  et,  après 
dissolution,  on  y  ajoute  de  l'acide  chlorhydrique,  qui  décompose 


Cl.  F.  Krebs. 

Fig-.  94.  —  Thebugraph 


234  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

rhyposulfite  et  libère  du  soufre.  Ce  soufre  ne  se  dépose  pas,  mais- 
reste  émulsionné  à  l'état  d'extrême  division,  si  les  proportions  de 
colloïde,  d'hyposulfite  et  d'acide  sont  convenablement  établies.  Le 
mélange  suivant  satisfait  à  cette  condition  : 

Eau 1.000  c'a. 

Hyposulfite  de  soude 125  gr. 

Solution  de  dexMne  à  50  p.  100. ......        250  ce. 

Au  moment  d'utiliser  cette  solution  pour  le  virage,  on  ajoute  : 
Acide  chlorhydrique  ordinaire 50  ce. 

Le  mélange,  qui,  au.  début,  était  jaunâtre  et  limpide,  devient  peu 
à  peu  lactescent,  mais  le  soufre  qu'il  contient  ne  se  dépose  pas^ 
même  après  plusieurs  heures.  Les  épreuves  ne  paraissent  y  subir 
aucun  changement;  mais  si,  après  20  à  25  minutes  d'immersion,, 
on  les  soumet  à  un  lavage  prolongé,  on  voit  leur  teinte  virer  peu 
à  peu  au  brun.  Après  une  heure  et  dernie  de  lavage,  le  ton  défi- 
nitif est  obtenu  :  c'est  un  brun  chaud,  avec  des  blancs  très  purs. 

Pour  remédier  à  la  longueur  du  lavage,  on  peut  le  confondre 
avec  celui  qu'exige  l'élimination  du  fixateur.  On  peut  même  sim- 
plifier la  méthode  précédente,  en  utilisant  l'hyposulfite  dont  le 
papier  est  imprégné  au  sortir  du  bain  de  fixage  :  l'épreuve  est 
alors  plongée  directement  dans  une  solution  d'acide  chlorhydri- 
que à  1  p.  100,  où  elle  séjourne  pendant  30  à  40  minutes,  après 
quoi  on  la  lave  pendant  une  heure  et  demie  au  moins. 

Virage  rouge-cuivre.  —  Dans  une  solution  à  l  pour  100  de  sul* 
fate  de  cuivre,  on  verse  peu  à  peu  une  solution  saturée  de  carbo- 
nate d'ammoniaque.  Quand  le  précipité  qui  s'est  d'abord  formé  se 
redissout,  on  ajoute  O^^S  de  ferricyanure  de  potassium  (prussiate 
rouge).  L'épreuve,  préalablement  fixée  et  lavée,  est  plongée  dans 
ce  bain  :  elle  passe  delà  couleur  lilas  au  rouge-violet  et  finalement 
au  -rouge  vif.  On  lave  ensuite  avec  soin. 

Virage  sépia.  —  L'épreuve,  bien  lavée  après  fixage,  est  plongée 

dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Ferricyajiure.  de  potassium 1  gr. 

Azotate  d'urane 1  — 

Acide  acétique  cristallisable 40  — 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   DEVELOPPEMENT  235 

Village  bleu  de  Prusse.  —  L'épreuve,  bien  lavée,  est  plongée  dans  : 

Eau 100  ce. 

Ferri cyanure  de  potassium 5  gr. 

Ammoniaque 5  gouttes. 

Quand  Timage  a  presque  complètement  disparu,  on  lave  la  feuille 
et  on  l'immerge  dans  : 

Eau 100  ce. 

Solution  concentrée  de  perchlorure  de  fer 2  gr. 

L'image  présente  alors  une  teinte  bleue  très  franche. 
Virage  vert.  —  L'épreuve,  d'abord  virée  en  bleu  comme  il  vient 
d'être  dit,  est  passée,  après  lavage,  dans  la  solution  : 

Eau 100  ce. 

Sulfure  de  sodium .  1  gi"* 

Acide  chlorhydrique 5  ce. 

Virage  jaune.  —  On  prépare  séparément  les  deux  solutions  : 

A.  Eau 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 8  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Nitrate  de  plomb 8  gr. 

Acide  acétique 5  ce. 

On  les  mélange  au  moment  de  l'emploi  et,  si  le  liquide  devient 
opalescent,  on  le  filtre  avant  de  s'en  servir.  L'épreuve  y  blanchit 
en  peu  de  temps.  On  lave  jusqu'à  disparition  complète  du  voile 
jaune  uniforme,  puis  on  passe  dans  une  solution  de  bichromate 
de  potasse  à  1  pour  100.  On  lave  de  nouveau,  et,  si  les  blancs  res- 
tent jaunâtres,  on  les  décolorera  dans  une  solution  d'acide  sulfu- 
rique  à  1/2  pour  100.  Si  l'on  neutralise  le  bichromate  avec  un  peu 
d'ammoniaque  et  qu'on  y  ajoute  de  l'iodure  de  potassium,  on  aura 
une  image  plus  intense. 

Si  l'on  ajoute  au  bichromate  (non  neutralisé)  une  faible  quantité 
d6  perchlorure  de  fer,  le  ton  obtenu  sera  vert  intense. 

Si  l'on  ajoute  au  bichromate  du  bichlorure  de  cuivre,  l'image 
sera  de  couleur  orangée.  En  modifiant  les  proportions  de  ces 
divers  éléments,  on  réalise  une  grande  variété  de  teintes. 

Insuccès.  —  Certaines  causes  d'insuccès  sont  communes  aux 
procédés  par  développement  et  aux  procédés  par  noircissement 


236  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

direct  :  il  en  est  ainsi,  notamment,  pour  le  défaut  de  netteté,  l'insuf- 
fisance ou  l'excès  d'intensité,  les  inégalités  de  tons,  les  ampoules 
et  la  viscosité  de  la  gélatine.  On  n'aura  donc  qu'à  se  reporter  à  ce 
qui  en  a  été  dit  au  chapitre  précédent.  Par  contre,  il  en  est  de  spé- 
ciales au  gélatinobromure. 

Absence  d'image  au  développement.  —  La  conservation  des  émul- 
sions  étant  presque  indéfinie,  l'absence  d'image  est  due  soit  à 
l'omission  d'un  produit  dans  le  révélateur,  soit  à  l'emploi  de  pro- 
duits impurs,  soit  à  une  sous-exposition  très  considérable,  occa- 
sionnée quelquefois  par  le  retournement  du  papier,  que  l'opéra- 
teur aura  appliqué  par  mégarde  à  l'envers  contre  le  cliciié. 

Blancs  sales.  —  Excès  de  développement  ou  dose  insuffisante  de 
bromure  de  potassium  dans  le  révélateur. 

Teinte  verdâtre.  —  Cliché  trop  doux,  excès  de  bromure  ou  excès 
d'exposition  compensé  par  un  développement  abrégé. 

Teinte  jaune.  —  Excès  de  développement,  révélateur  altéré, 
fixateur  trop  vieux. 

Points  hoirs.  —  Parcelles  de  révélateur  incomplètement  dis- 
soutes avant  l'immersion  du  papier. 

Traits  noirs.  —  Frottement  de  la  surface  sensible.  Ces  traces 
peuvent  être  effacées,  après  séchage,  en  les  frottant  fortement  avec 
une  peau  très  douce  imbibée  d'alcool.  Il  est  possible  de  les  éviter, 
quand  on  sait  que  l'émulsion  a  été  rayée,  en  ajoutant  au  révéla- 
teur 2  à  4  ce.  d'une  solution  d'iodure  de  potassium  à  1  p.  dOO.  Les 
blancs  restent  alors  parfaitement  blancs,  mais  le  fixage  de  l'épreuve 
est  un  peu  plus  lent,  parce  que  l'hyposulfite  dissout  difficilement 
l'iodure  d'argent  qui  s'est  substitué  au  bromure.  On  obtiendra,  si 
l'on  veut,  un  fixage  plus  rapide,  en  employant  300  gr.  d'hyposul- 
fite  par  litre  d'eau. 

Taches  jaune-brun.  —  Traces  d'hyposulfîte  dans  le  révélateur; 
doigts  ou.  cuvettes  mal  lavés. 

Platinotypie.  —  Le  platine  étant  inaltérable,  on  a  songé  depuis 
longtemps  à  l'utiliser  en  photographie.  La  platinotypie  a  été  inven- 
tée par  Willis,  en  1878.  Nous  avons  vu  qu'il  était  facile  de  virer 
au  platine  les  photocopies  au  chlorure  d'argent  préalablement 
virées  à  l'or.  On  a  ainsi  de  beaux  tons  noirs  très  stables.  Mais 
on  peut  aussi  tirer  directement  des  épreuves  au  platine,  en  uti- 


LES  PHOTOCOPIES  PAR   DÉVELOPPEMENT  237 

lisant,  comme  l'a  imaginé  Willis,  la  propriété  qu'ont  les  sels  de  ses- 
.  quioxyde  de  fer  d'être  réduits  par  la  lumière  en  sels  de  protoxyde, 
lesquels  sont  eux-mêmes  susceptibles  de  réduire  certains  sels  de 
platine.  Ce  procédé  est  simple  et  rapide.  Les  images  qu'il  donne 
sont  caractérisées  par  un  réel  cachet  artistique,  une  teinte  gris- 
noir  rappelant  l'aspect  d'une  gravure  ou  d'un  dessin  au  crayon. 
Les  teintes  extrêmes  du  sujet  sont  bien  rendues,  sans  que  les  dé- 
tails des  ombres  disparaissent.  L'épreuve  est  une  exacte  interpré- 
tation du  cliché,  et  sa  stabilité  est  certaine.  Le  seul  inconvénient 
du  papier  au  platine  est  son  prix  élevé. 

Il  importe  de  ne  pas  confondre  le  papier  au  platine  avec  certains 
papiers  au  gélatinobromure  mats,  dont  l'étiquette  porte  la  men- 
tion «  platine  »,  sous  prétexte  que  la  tonalité  qu'ils  donnent  offre 
quelque  ressemblance  avec  les  résultats  de  la  platinotypie  :  en  réa- 
lité, ces  papiers  ne  réalisent  ni  la  finesse  des  images  au  platine,  ni 
le  fouillé  de  leurs  noirs  profonds,  ni  leur  stabiHté. 

Bien  que  Ton  trouve  dans  le  commerce  le  papier  au  platine  prêt 
h  l'emploi,  nous  en  ferons  connaître  le  mode  de  préparation.  Cer- 
tains amateurs  préfèrent  d'ailleurs  sensibiliser  eux-mêmes  les 
papiers  spéciaux  qu'ils  se  proposent  d'utiliser  dans  leurs  tirages. 

Le  papier  doit  être  de  pur  chiffon  et  bien  encollé.  On  emploie 
de  préférence  les  papiers  de  Rives,  de  Zander  et  de  Steinbach,  et 
on  leur  fait  subir  un  encollage  supplémentaire  en  les  trempant 
5  minutes  dans  la  solution  suivante  maintenue  chaude  : 

Eau 1.000  ce. 

Arrow-root 15  gr. 

Alun 5  gr. 

Après  séchage,  on  recommencera  l'encollage,  en  procédant 
comme  la  première  fois.  Certains  papiers  doivent  même  être 
encollés  à  trois  ou  quatre  reprises. 

Les  formules  de  sensibilisation  sont  assez  nombreuses,  mais  peu 
différentes  les  unes  des  autres.  La  plus  simple  comprend  : 

Solution  saturée  de  chloroplatinite  de  potassium 4  ce. 

Solution  saturée  d'oxalate  ferrique 8  — 

L'oxalate  ferrique  (qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  l'oxalate 
ferreux)  est  préparé  en  mettant  en  présence  le  perchlorure  de  fer 


238  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

et  l'acide  oxalique.  Ce  composé  est  sensible  à  la  lumière  et  devra 
être  conservé  dans  l'obscurité. 

.  Le  mélange  sensibilisateur  est  étendu  sur  le  papier,  d'abord  avec 
un  pinceçLu  assez  dur,  puis  égalisé  au  blaireau.  Cette  opération 
ainsi  que  le  séchage  devront  s'effectuer  à  l'abri  de  la  lumière  acti- 
nique.  La  dessiccation  sera  activée  en  chauffant  le  papier  au  moj^en 
d'un  bec  de  gaz  ou  d'une  lampe  à  alcool,  sans  dépasser  cependant 
50°  à  60°.  Quelques  minutes  suffiront  dans  ces  conditions. 

Le  papier  au  platine  ne  se  conserve  bien  qu'à  la  condition  d'être 
parfaitement  sec.  Comme  la  couche  sensible  est  très  hygrométri- 
que, les  feuilles  doivent  être  enfermées  dans  des  étuis  spéciaux 
contenant  une  substance  desséchante,  telle  que  le  chlorure  de  cal- 
cium. Les  papiers  au  platine  que  l'on  trouve  dans  le  commerce 
exigent  les  mêmes  précautions  que  ceux  que  l'opérateur  a  préparés 
lui-même  :  ils  ne  doivent  être  exposés  ni  à  la  chaleur  ni  à  l'humi- 
dité. On  les  conservera  dans  un  endroit  frais  et  sec.  Quand  on 
ouvre  le  tube  pour  y  prendre  une  feuille  destinée  au  tirage,  il  faut 
renfermer  immédiatement  les  autres  feuilles,  sans  quoi  l'effet  de 
l'humidité  qu'elles  auraient  absorbée  se  traduirait  par  des  images 
grises,  dépourvues  de  vigueur  et  de  brillant. 

On  s'assurera  que  le  cliché  et  le  coussin  du  châssis-presse  sont 
parfaitement  secs.  Il  est  même  avantageux  de  remplacer  le  coussin 
de  feutre  ou  de  papier  par  une  feuille  de  caoutchouc. 

L'exposition  s'effectue  à  la  lumière  diffuse  du  jour.  Si  le  châssis 
est  placé  en  plein  soleil,  le  cliché  sera  protégé  par  un  verre  dépoli 
ou  par  une  feuille  de  papier  Joseph.  Le  chargement  du  châssis  et 
l'examen  de  l'image  s'effectueront  à  une  lumière  aussi  faible  que 
possible. 

L'image  est  légèrement  visible;  dès  qu'elle  apparaît  sous  les 
parties  opaques  du  cliché,  le  tirage  est  terminé  :  l'expérience  ap- 
prendra rapidement  le  degré  exact  auquel  il  est  nécessaire  de  s'ar- 
rêter. 

Si  l'épreuve  n'est  pas  développée  immédiatement  après  le  tirage, 
on  l'enfermera  dans  un  tube  contenant  des  substances  desséchantes. 

Le  développement  s'effectue  d'ordinaire  dans  : 

Eau 100  ce. 

Oxalate  neutre  de  potasse 25  gr. 


LES  PHOTOCOPIES   PAR   DÉVELOPPEMENT  239 

Cette  solution  doit  être  employée  chaude  (40°  à  50°)  si  l'on  se 
sert  du  papier  préparé  comme  nous  l'avons  indiqué.  Actuellement, 
la  plupart  des  papiers  au  platine  que  l'on  trouve  dans  le  commerce 
se  développent  à  froid,  soit  dans  la  solution  d'oxalate,  soit  dans 
un  bain  spécialement  préparé  par  les  fabricants.  Le  développement 
est  très  facile  et  très  rapide.  L'épreuve  est  immergée  d'un  seul 
coup  dans  le  révélateur  :  aussitôt,  l'image  que  l'on  distinguait  à 
peine  en  gris  pâle  sur  le  fond  jaune  de  la  couche  acquiert  toute 
son  intensité,  qui  dépend  uniquement  du  degré  d'impression  lumi- 
neuse et  n'est  pas  augmentée  par  un  séjour  prolongé  dans  le  révé- 
lateur. 

Le  fixage  s'effectue  en  passant  l'épreuve,  sans  lavage  préalable, 
dans  trois  bains  consécutifs  identiques,  ainsi  composés  : 

Eau l.OGOcc. 

Acide  chlorhydrique  pur 15  — 

La  qualité  de  l'acide  chlorhydrique  influe  sur  le  résultat.  L'esprit 
de  sel  du  commerce  donnerait  des  épreuves  jaunes.  Il  faut  em- 
ployer l'acide  chimiquement  pur.  L'épreuve  séjourne  3  minutes 
dans  chacun  des  bains  acides.  Après  un  lavage  de  15  à  20  minutes 
à  l'eau  courante,  on  la  laisse  sécher. 

Certains  photographes  additionnent  de  glj^cérine  la  solution 
d'oxalate,  afin  d'en  ralentir  l'action  et  de  développer  l'image  au 
pinceau,  en  insistant  plus  ou  moins  sur  les  diverses  parties  de  sa 
surface.  Ce  développement  local  constitue  une  véritable  retouche, 
qui  permet  de  corriger  les  défauts  du  négatif.  A  cet  effet,  Horsley- 
Hinton  a  proposé  d'employer  trois  solutions  différentes,  que  l'on 
applique  sur  telle  ou  telle  région  de  l'image,  selon  l'effet  que  l'on 
désire  réaliser. 

1.  Solution  d'oxalate  à  30  p.  100.  | 

2.  Glycérine .1 1  partie. 

Solution  d'oxalate 1      — 

3.  Glycérine ..,....,.,.,,.,,. 4      — 

Solution  d'oxalate * 1      — 

Il  va  sans  dire  que  les  zones  recouvertes  de  ces  mélanges  diffé- 
rents devront  être  raccordées  entre  elles  à  coups  de  pinceau,  de 
manière  à  graduer  le  modelé  de  l'image  sans  brusques  transitions. 


240  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

Pour  obtenir  des  épreuves  de  teinte  sépia,  il  faut  prolonger  Tex- 
position  un  peu  plus  que  pour  les  tons  noirs  habituels  et  dévelop- 
per dans  le  révélateur  suivant  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Oxaîate  neutre  de  potasse 120  gr. 

B.  Eau 1.000  ce. 

Citrate  de  potasse 20  gr. 

Bichlorure  de  mercure 12  — 

Acide  cilrique 32  — 

Le  fixage  s'opère,  comme  d'habitude,  dans  l'acide  chlorhydrique 
-dilué,  que  Ton  renouvelle  jusqu'à  ce  qu'il  ne  se  colore  plus  en 
jaune. 

On  trouve  actuellement  dans  le  commerce  des  papiers  au  pla- 
tine qui  se  traitent  par  simple  fixage.  Les  sels  sensibles  et  le  révé- 
lateur sont  réunis  dans  la  couche,  et  la  réaction  s'opère  par  la 
simple  humidité  de  l'atmosphère-  Aussi  faut-il  redoubler  de  pré- 
€aution  pour  conserver  ce  papier  à  l'état  sec.  Le  tirage  est  poussé 
jusqu'à  ce  que  l'image,  qui  se  développe  au  fur  et  à  mesure  de  sa 
formation,  ait  acquis  sa  vigueur  définitive.  On  fixe  dans  Peau  addi- 
tionnée d'acide  chlorhydrique. 

Papiers  aux  sels  de  fer.  —  Ces  papiers  rendent  mal  les  demi- 
teintes  et  ne  sont  appliqués  qu'à  la  reproduction  de  dessins  au 
trait.  Ils  servent  surtout  à  copier  les  plans  dressés  sur  papier 
^transparent.  On  en  distingue  trois  catégories. 

1.  Papier  au  ferro-prussiate  ou  ferrotype  négatif.  ~  Ce  papier 
^onne  une  image  positive  bleue  quand  on  l'impressionne  sous  un 
cliché  négatif.  Si  l'on  s'en  sert  pour  copier  un  plan  tracé  en  noir 
sur  papier  transparent,  ce  plan  se  trouvera  figuré  en  traits  blancs 
sur  fond  bleu.  Le  bain  de  sensibilisation  est  préparé  en  mélangeant 
par  parties  égales  : 

A.  Eau V 100  ce. 

Citrate  de  fer  ammoniacal 20  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Ferrieyanure  de  potassium 16  gr. 

Pour  sensibiliser  le  papier,  on  le  fait  flotter  sur  ce  mélange 
pendant  2  minutes.  On  peut  également  sensibiliser  le  carton  en 
le  badigeonnant  au  moyen  d'un  pinceau  ou  d'une  touffe  de  coton 
hydrophile  imbibé  de  la  même  liqueur.  On  sèche  dans  l'obscurité. 


LES    PHOTOCOPIES  PAR  DÉVELOPPEMENT  241 

L'impression  se  fait  dans  le  châssis-presse  exposé  à  la  lumière 
diffuse  ou  en  plein  soleil.  On  l'arrête  quand  le  papier,  d'abord 
jaune,  prend  une  teinte  lilas  clair  ou  gris  d'argent  dans  les  grands 
noirs  de  l'image,  qui  présentent  alors  une  sorte  d'aspect  métal- 
lique. Cette  image  est  faible,  mais  acquiert  rapidement  l'intensité 
voulue  par  simple  développement  dans  l'eau.  Des  lavages  abon- 
dants suffisent  pour  fixer  l'épreuve. 

2.  Papier  cyano fer,  cijanotype  ou  ferrotyjoe  positif.  —  Ce  papier 
donne  une  image  bleue  de  même  sens  que  le  cliché  •  l'épreuve 
tirée  sous  un  négatif  est  donc  négative,  et  la  copie  d'un  plan  des- 
siné sur  papier  transparent  le  reproduit  en  traits  bleus  sur  fond 
blanc.  Le  sensibilisateur  est  constitué  par  : 

A.  Eau 100  ce. 

Gomme  arabique 20  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Citrate  de  fer  ammoniacal 50  çr. 

G.    Eau ..,, 100  Cf. 

Perchlorure  de  fer  sublimé 50  gr. 

Au  moment  de  l'emploi,  on  mélange  : 

Solution  A 20  ce. 

—  B 8  — 

—  C 5  — 

Ce  mélange  est  étendu,  sur  un  papier  bien  encollé,  à  l'aide  d'un 
large  pinceau  ou  d'une  éponge  fine.  La  dessiccation  s'accomplit  dans 
l'obscurité,  et  le  tirage  est  surveillé  comme  pour  le  papier  précé- 
dent. On  développe  en  passant  à  la  surface  de  l'épreuve  un  pinceau 
imbibé  de  ferrocyanure  de  potassium  (prussiate  Jaune)  à  20  p.  100. 
On  peut  aussi  faire  flotter  la  feuille,  image  en  dessous,  sur  cette 
solution,  mais  en  évitant  que  le  liquide  vienne  mouiller  le  dos  du 
papier,  oià  il  produirait  des  taches  indélébiles. 

L'épreuve  développée  est  rincée  d'abord  à  l'eau  pure,  puis  dans 
de  l'eau  acidulée  par  addition  de  6  à  8  p.  100  d'acide  sulfurique  ou 
chlorhydrique,  où  le  ton  de  l'image  passe  du  violet  au  bleu  de 
Prusse.  On  lave  ensuite  de  nouveau,  et  on  fait  sécher. 

3.  Papier  au  gallate  de  fer.  —  Ce  papier  donne,  comme  le  précé- 
dent, un  contretype  du  cliché,  c'est-à-dire  une  image  négative  sous 

14  ■ 


242  TRAITÉ   GÊ:^ÉRAL    DE   PHOTOGRAPHIE 

un  négatif  et  positive  sous  un  positif;  seulement  cette  image  est 
noire.  Pour  le  sensibiliser,  on  prépare  : 

A.  Eau 500  ce. 

Gomme  arabique 50  gr. 

B.  Eau 200  cG. 

Acide  tartrique 50  gr. 

C.  Eau ' 200  ce. 

Sulfate  de  fer 30  gr. 

On  verse  G  dans  B  et  le  tout  dans  A,  puis  on  ajoute  : 

Perchlorure  de  fer  liquide  à  45°  Baume 100  ce. 

Après  filtrage,  on  enduit  de  cette  liqueur  le  papier,  qu'on  laisse 
sécher  dans  l'obscurité.  On  imprime  au  châssis-presse,  en  surveil- 
lant le  tirage  comme  pour  les  papiers  précédents,  et  on  développe 
dans  : 

Eau 1.000  ce.    ,: 

Acide  oxalique. 0  gr.  1 

Acide  gallique. 3 —    , 

On  lave  ensuite  avec  soin,  dans  l'eau  ordinaire,  sans  fixateur 
spécial. 

Callitypie.  —  Ce  procédé,  assez  ancien,  est  fondé  sur  la  pro- 
priété qu'ont  les  sels  ferriques-  réduits,  par  la  lumière  à  l'état  de 
sels  ferreux,  de  réduire  à  leur  tour  les  sels  d'argent.  11  offre  donc 
une  certaine  analogie  avec  la  platinotypie.  Il  donne  d'ailleurs  de 
belles  épreuves,  très  artistiques  et  peu  coûteuses,  aussi  stables  que 
celles  que  l'on  obtient  sur  les  papiers  au  bromure.  Les  formules  de 
callitypie  sont  assez  nombreuses,  mais  ne  diffèrent  guère  les  unes 
des  autres.  Les  suivantes,  dues  à  M.  Margaret  Walpole,  fournis- 
sent d'excellentes  images,  très  stables. 

Le  papier,  bien  encollé,  est  sensibilisé  au  moyen  de  la  solution  : 

Eau.-. ' 100  ce. 

Oxalate  ferrlque '• 17  gr. 

Azotate  d'argent 7  — 

L'eau  est  d'abord  chauffée  avec  Toxalate,  jusqu'à  dissolution 
complète  de  ce  sel.  Si  la  dissolution  est  trop  longue  à  se  faire,  on 
l'active  en  ajoutant  1  gr.  d'acide  oxalique.  On  filtre  ensuite  et  Ton 
ajoute  Fazotate  d'argent.  Le  mélange  se  conserve  assez  longtemps, 
à  l'abri  de  la  lumière.  « 


LES  PHOTOCOPIES  PAR  DÉVELOPPEMENT  .243 

La  sensibilisation  s'effectue  à  la  clarté  d'une  bougie.  Le  papier 
est  fiîcé  par  quatre  pointes  à  une  planchette,  et  la  liqueur  sensibi- 
lisatrice y  est  étendue  au  nioyen  d'un  tampon  de  coton.  On  active 
ensuite  la  dessiccation  en. chauffant  légèrement  les  feuilles,  que 
l'on  conserve  ensuite  à  l'abri  de  l'humidité  dans  des  étuis  conte- 
nant du  chlorure  de  calcium.  Il  vaut  mieux  cependant  l'employer 
le  plus  tôt  possible. 

L'impression  est  à  peine  visible  :  on  ne  distingue  qu'une  image 
bleuâtre  très  faible  sur  le  fond  jaune  de  la  couche  sensible.  Le 
mieux  est  de  contrôler  le  tirage  au  moyen  d'un  photomètre  ana- 
logue à  l'impressimètre  de  Wynne.  La  composition  du  révélateur 
varie  suivant  le  ton  que  Ton  désire  obtenir  : 

1.  Pour  tons  bruns  : 

Eau 250  ce. 

Borax 27  gr. 

Sel  de  seignette  (tartrate  double  de  potasse  et  de  soude) 20  — 

Solution  de  bichromate  de  potasse  à  1  p.  100 20  ce. 

2.  Four  tons  sépia  chauds  : 

Eau 250  ce. 

Sel  de  seignette 14  gr. 

Solution  de  bichromate  à  1  p.  100.; 15  ce. 

En  mélangeant  ces  deux  révélateurs  suivant  des  proportions  dif- 
férentes, on  obtient  une  grande  variété  de  teintes.  Le  bichromate 
augmente  la  vigueur  des  images  ;  on  en  ajoutera  donc  plus  ou  moins, 
suivant  le  caractère  du  phototype.  Une  dose  trop  élevée  empêche- 
rait cependant  les  demi-teintes  de  se  développer. 

Le  développement  dure  environ  15  à  20  minutes.  On  lave  ensuite, 
et  on  fixe  dans  : 


Eau 500  ce. 

Hyposulfite  de  soude 28  gr. 

Ammoniaque 6  ce. 

Les  épreuves  y  séjournent  10  minutes  et  sont  enfin  lavées  à  l'eau 
courante  pendant  une  denii-heure. 

Papier  sépia.  —  La  surface  sensible  de  ce  papier  contient  de 
l'azotate  d'argent  et  un  sel  ferrique,  comme  en  callitypie,  mais  le 
développement  s'effectue  dans  de  l'eau  ordinaire.  Le  sensibihsateur 
est  préparé  en  mélangeant  i 


244  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

A.  Eau 50  ce. 

Citrate  de  fer  ammoniacal  vert 20  gr. 

Acide  citrique 5  — 

B.  Eau 10  ce. 

Azotate  d'argent 5  gr. 

Au  moment  de  Temploi,  on  réunit  ces  deux  solutions  et  Ton  y 
ajoute  une  quantité  d'eau  suffisante  pour  arriver  au  volume  total 
de  100  ce.  On  a  ainsi  un  liquide  trouble  que  l'on  étend  tel  quel  sur 
le  papier.  Si  Ton  estime  qu'une  seule  application  ne  donnera  pas 
des  images  suffisamment  vigoureuses,  on  procédera,  après  dessic- 
cation, à  une  nouvelle  sensibilisation.  Le  papier  maintenu  sec  se 
conserve  plusieurs  mois  en  bon  état. 

La  durée  de  Texposition  à  la  lumière  est  plus  courte  qu'avec  le 
papier  albuminé  et  même  qu'avec  beaucoup  de  papiers  au  citrate. 
On  ne  distingue  qu'une  image  très  faible,  et  il  faut  d'ailleurs  arrê- 
ter le  tirage  avant  que  tous  les  détails  soient  visibles. 

Le  développement  s'effectue  dans  l'eau,  que  l'on  renouvelle  à 
deux  ou  trois  reprises.  L'image  acquiert  rapidement  toute  son 
intensité  ;  elle  est  d'un  ton  jaune  foncé  assez  désagréable,  qui  vire 
au  brun  dans  le  bain  de  fixage,  constitué  par  une  solution  d'hypo- 
sulfite  de  soude  dont  la  concentration  ne  doit  pas  dépasser  10  p.  100. 
Un  fixateur  plus  fort  affaiblirait  l'image.  On  lave  ensuite  à  l'eau 
courante  pendant  10  minutes.  En  séchant,  les  images  gagnent  en 
vigueur  et  prennent  un  beau  ton  sépia. 

L'image  ne  peut  pas  être  virée  avant  le  fixage,  mais  elle  peut 
l'être  après.  Elle  acquiert  un  beau  ton  pourpre  dans  : 

Eau. l.OOOcc. 

Sulfocyanure  d'ammonium 25  gr. 

Chlorure  d'or  brun 5  — 

Il  va  sans  dire  que  le  virage  doit  être  précédé  d'un  lavage  suffi- 
sant pour  assurer  l'élimination  de  Thyposulfite. 

Papier  aux  sels  de  cuivre.  —  Un  papier  bien  encollé  à  l'amidon 
est  mis  à  flotter  pendant  une  minute  sur  : 

Solution  saturée  de  bichromate  de  potasse  ...         20  ce. 
Solution  saturée  de  sulfate  de  cuivre 80  —: 

On  fait  sécher  dans  l'obscurité,  et  on  expose  sous  un  négatif, 


LES   PHOTOCOPIES  PAR   DÉVELOPPEMENT  245 

Jusqu'à  ce  que  l'image  soit  nettement  dessinée,  quoique  très  faible. 
On  développe  en  faisant  flotter  l'épreuve  sur  la  solution  : 

Eau 100  ce. 

Nitrate  d'argent 1  gr.  5 

L'image  se  renforce  rapidement  et  prend  une  tonalité  rouge.  On 
termine  par  des  lavages  abondants. 

Si  l'on  préfère  une  image  de. teinte  lilas,  le  papier  impressionné 
sous  le  négatif  est  d'abord  lavé  à  l'eau  pure,  dans  l'obscurité.  On 
le  plonge  ensuite  dans  une  solution  de  chlorure  de  sodium  très 
diluée,  on  lave  de  nouveau,  et  on  fait  sécher  dans  l'obscurité.  On 
soumet  alors  à  Faction  des  vapeurs  ammoniacales,  et  on  expose  à 
la  lumière  :  l'épreuve  prend  alors  un  ton  lilas.  On  obtient  une  image 
d'un  beau  rouge  en  la  plongeant,  après  exposition,  dans  un  bain  de 
ferricyanure  de  potassium  (Sassi). 

Papiers  aux  sels  d'uranium,  —  On  dissout  dans  une  petite  quan- 
tité d'eau  : 

Nitrate  d'urane 72  gr. 

Nitrate  de  cuivre 20  — 

et  on  neutralise  la  solution  en  y  ajoutant  quelques  gouttes  de  car- 
bonate de  soude,  jusqu'à  ce  que  le  papier  de  tournesol  bleu  n'y 
rougisse  plus.  On  ajoute  ensuite  la  quantité  d'eau  nécessaire  pour 
faire  un  litre. 

On  fait  flotter  sur  cette  solution,  pendant  une  ou  deux  minutes, 
un  papier  gélatine  ou  encollé  à  l'arrow-root,  que  l'on  fait  ensuite 
sécher  dans  l'obscurité.  Après  exposition  h  la  lumière  sons  le 
négatif,  on  développe  dans  : 

Eau 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 8  gr. 

On  termine  par  un  lavage  abondant. 

Ce  procédé  donne  des  images  rouge-sang.  Pour  obtenir  des  tons 
J3run-sépia,  le  sensibilisateur  sera  constitué  par  : 

Nitrate  d'urane 127  gr. 

Nitrate  de  cuivre 8  — 

Ces  sels  sont  d'abord  dissous  dans  une  faible  quantité  d'eau, 
comme  dans  la  méthode  précédente.  On  neutralise  avec  de  l'am 


24G  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

maniaque  pure,  jusqu'au  rougissement  du  papier  de  tournesol,  et 
l'on  ajoute  assez  d'eau  pour  porter  le  volume  de  la  solution  à 
1.000  ce. 

Le  papier  est  sensibilisé  par  flottage  sur  cette  solution  et  séché  à 
l'obscurité.  Le  tirage  à  la  lumière  diff'use,  sous  un  cliché  de  moyenne 
intensité,  s'effectue  en  8  ou  10  minutes.  On  développe  dans  : 

Eau 200  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 5  gr. 

Pour  fixer  l'épreuve,  il  suffit  de  la  laver  abondamment. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


A.  GouRRÈGES,  Impression  des  épreuves  sur  papiers  divers  par  noircissement  di- 
rect, par  impression  latente  et  développement,  Paris  (Gauthier-Villars),  1898. 

F.  DiLLAYE,  le  Tirage  des  épreuves  en  photographie,  Paris  (J.  Tallandier),  1903. 

J.-M.  Eder,  Die  photographischen  Kopiet^verfahren,  2^  édition,  Halle  a/S.  (W. 
Knapp). 

H.  Emery,  Manuel  pratique  de  platinotypie ,  Paris  (Gh.  Mendel),  1903. 

HoRSLEY-HiNTON,  la  Platinotypic ,  Paris  (Gauthier-Villars),  1898. 

A. -F.  VON  HiJBL,  Der  Platindruck,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 

R.-Ed,  Liesegang,  le  Développement  des  papiers  photographiques  à  noircisse' 
ment  direct,  Paris  (Gauthier-Villars),  1898. 

E.  Trutat,  les  Tirages  photographiques  aux  sels  de  fer,  Paris  (Gauthier-Villars), 
1904. 

E  Trutat,  les  Positifs  en  Photographie,  Paris  (0.  Doin  et  fils),  1910. 


LES  PROCÉDÉS   PIGMENTAIRES  247 


CHAPITRE    XII 

LES    PROCÉDÉS    PIGMENTAIRES 

Invention  du  procédé  au  charbon.  —  L'instabilité  des  épreuves 
aux  sels  d'argent  a  fait  chercher,  dès  les  premiers  temps  de  la 
photographie,  un  procédé  susceptible  de  fournir  des  images  inal- 
térables. Il  s'agissait  de  substituer  à  ces  sels  une  matière  ^analogue 
à  l'encre  d'impcimerie. 

Yauquelin,  en  1798,  avait  constaté  l'altérabilité  du  chromate 
d'argent  à  la  lumière.  Mungo^  Ponton,  en  1838,  découvrait  la  pro- 
priété que  possède  le  bichromate  de  potasse  de  rendre  certaines 
matières  organiques  insolubles  sous  l'influence  de  la  lumière. 

En  1855,  A.  Poitevin  faisait  breveter  un  procédé  de  tirage  fondé 
sur  l'insolubilisation  par  la  lumière  de  la  gélatine  bichromatée.  Un 
papier  était  recouvert  d'une  solution  de  gélatine  additionnée  de 
bichromate  de  potasse  et  de  noir  de  fumée  ou  de  toute  autre  cou- 
leur en  poudre.  On  faisait  sécher  dans  l'obscurité,  et  on  appliquait 
cette  couche  sensible  sous  un  cliché  négatif.  Après  exposition  à  la 
lumière,  le  papier  était  lavé  dans  l'eau  chaude,  qui  dissolvait  la 
gélatine  préservée  de  l'action  lumineuse  par  les  opacités  du  pho- 
totype, tandis  que  la  gélatine  insolubilisée  sous  les  transparences 
du  négatif  demeurait  adhérente  au  papier. 

Ce  procédé  ne  s'appliquait  qu'à  des  reproductions  de  gravures, 
à  des  dessins  au  trait.  Les  images  photographiques  exécutées  d'a- 
près nature,  composées  d'une  infinité  de  demi-teintes,  perdaient 
leurs  détails  les  plus  délicats  dans  l'opération  du  dépouillement  ou 
dissolution  du  pigment  dans  l'eau  chaude.  Et  il  est  facile  d'en 
comprendre  la  raison.  La  gélatine  bichromatée  est,  en  principe, 
soluble  dans  l'eau  chaude,  et  l'action  de  la  lumière  a  pour  effet  de 
la  rendre  insoluble.  Mais  cette  action  ne  s'opère  pas  uniformément 
dans  toute  l'épaisseur  de  la  couche.  Gomme  la  gélatine  colorée  est 


248  TRAITE   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

peu  transparente,  la  lumière  n'insolubilise  d'abord  que  la  surface, 
puis  gagne  de  proche  en  proche  et  finit  par  rendre  insoluble  la 
couche  sensible  dans  toute  son  épaisseur.  Il  en  résulte  que  les 
demi-teintes  ne  sont  insolubilisées  qu'à  la  surface  et  qu'il  reste, 
entre  cette  mince  pellicule  insoluble  et  le  papier,  une  sous-couche 
de  gélatine  encore  soluble.  Cette  dernière  est  donc  emportée,  lors 
du  dépouillement,  et  entraîne  avec  elle  la  pellicule  superficielle 
privée  de  tout  support. 

C'est  à  l'abbé  Laborde  qu'est  due  cette  explication  de  l'insuccès 
de  Poitevin,  et  c'est  à  Fargier  que  revient  le  mérite  d'avoir  su  y 
remédier  en  transportant  la  couche  gélatineuse  sur  un  autre  sup- 
port, ce  qui  permet  d'effectuer  le  dépouillement  par-dessous.  Far- 
gier coulait  la  mixtion  gélatineuse  sur  un  verre  collodionné.  Swan, 
en  1864,  supprime  la  pellicule  de  collodion  et  coule  la  couche  co- 
lorée sur  un  papier.  Après  l'insolation,  il  cimente  le  papier  mix- 
tionné  sur  un  autre  papier  recouvert  de  caoutchouc,  les  immerge 
dans  l'eau  chaude,  oii  le  premier  papier  se  détache  de  la  couche. 
L'image  est  alors  inversée,  comme  si  le  sujet  était  vu  dans  un 
miroir;  on  la  redresse  en  transportant,  après  le  dépouillement,  la 
couche  colorée  sur  un  troisième  papier. 

La  même  année,  Davies  remarquait  que  la  couche  de  gélatine 
adhérait  au  second  support  sans  qu'il  fût  nécessaire  d'employer  le 
collodion  ni  le  caoutchouc  :  il-  suffisait  que  le  papier  mixtionné  ne 
restât  préalablement  plongé  dans  l'eau  que  pendant  quelques  ins- 
tants. A  partir  de  cette  époque,  le  procédé  au  charbon  'par  trans- 
fert était  créé  de  toutes  pièces,  et  l'on  n'y  a  apporté  depuis  que  quel- 
ques perfectionnements  de  détail.  Ce  procédé  est  un  peu  délicat, 
mais  ne  présente  aucune  difficulté  sérieuse.  Il  fournit  des  images 
très  fines,  exactement  de  la  nuance  voulue  et  inaltérables. 

Fabrication  du  papier  au  charbon.  —  Le  papier  au  charbon  est 
vendu  nonsensibiUsé,  car  la  gélatine  une  fois  imprégnée  de  bichro- 
mate s'insolubilise  spontanément,  au  bout  de  quelques  jours,  même 
dans  l'obscurité.  La  fabrication  dont  il  est  ici  question  consiste 
donc  à  recouvrir  un  papier  du  mélange  de  gélatine  et  d'une  cou- 
leur en  poudre.  L'amateur  n'a  aucun  avantage  à  préparer  soi-même 
le-  papier  dont  il  a  besoin,  car,  sans  être  bien  compUquée,  cette 
fabrication  n'est  exécutée  avec  la  régularité  'nécessaire  que  dans 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  249 

les  usines  spécialement  outillées  à  cet  effet.  On  trouve  d'ailleurs 
dans  le  commerce  un  grand  choix  de  nuances,  suffisant  pour  tous 
les  besoins.  Il  nous  suffira  donc  de  décrire  en  peu  de  mots  le  prin- 
cipe de  cette  fabrication. 

Le  papier  brut  est  acheté  en  rouleaux,  satiné  et  peu  encollé.  Il 
est  entraîné,  d'un  mouvement  uniforme,  dans  une  cuvette  chauffée 
contenant  la  solution  de  gélatine  colorée.  On  se  sert  de  gélatines 
fines,  comme  celles  de  Nelson  ou  de  Goignet,  quelquefois  addition- 
nées de  colle  de  poisson.  On  y  ajoute  une  couleur  en  poudre,  autant 
que  possible  inaltérable,  comme  l'encre  de  Chine,  le  peroxyde  de 
fer,  l'alizarine,  la  purpurine,  etc.  Enfin,  pour  que  la  couche  ne  soit 
pas  trop  cassante,  la  mixtion  contient  un  peu  de  sucre  ou  de  savon. 
Voici,  à  titre  d'exemple,  les  produits  qui  entrent  dans  la  fabrica- 
tion d'un  rouleau  de  papier  au  charbon  (ton  brun-rouge  photo- 
graphique) de  3"°, 60  de  longueur  sur  O'^.TS  de  largeur  : 

Eau 675  ce. 

Gélatine  n"  1  de  Nelson 25  gr. 

Gélatine  de  poisson  ambrée 200  — 

Sucre  blanc 30  — 

Savon  sec 25  — 

Rouge  indien 10  — 

Encre  de  Chine 8  — 

Alizarine 6  — 

La  mixtion  est  maintenue  à  la  température  de  35°  par  un  bain- 
marie  abondant.  La  feuille  de  papier  effieure  la  surface  du  liquide, 
en  entraîne  par  capillarité  une  faible  épaisseur,  et  passe  de  là  sur 
un  grand  rouleau  de  fonte  creux,  dont  l'intérieur  est  parcouru  par 
un  courant  d'eau  fraîche  qui  fige  la  gélatine.  Le  papier  arrive  en- 
suite sur  une  table  horizontale,  où  on  le  coupe  en  feuilles  qui  sont 
portées  au  séchoir,  dans  lequel  un  ventilateur  amène  de  l'air  sec  et 
froid  en  grande  abondance. 

Le  papier  au  charbon  se  conserve  facilement,  tant  qu'il  n'est  pas 
sensibilisé.  Il  convient  cependant  de  le  préserver  de  l'humidité, 
qui  altérerait  la  gélatine,  diminuerait  la  sensibilité  et  donnerait  des 
images  sans  vigueur.  Dans  un  endroit  sec,  on  peut  le  garder  indé- 
finiment. 

Sensibilisation.  —  Le  bichromate  de  potasse  étant  peu  soluble, 


250  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

il  est  bon  de  le  pulvériser  avant  de  le  faire  dissoudre.  La  propor- 
tion à  employer  varie  suivant  la  température  et  l'opacité  des  cli- 
chés. Pour  des  phototypes  de  densité  moyenne,  on  emploiera,  en 
hiver,  3  grammes  de  bichromate  pour  100  ce.  d'eau  ;  en  été,  on 
ri^eri  prendra  que  2  gr.  Si  les  phototypes  sont  durs,  on  portera 
la  dose  de  bichromate  à  4  gr.  en  été  et  5  gr.  en  hiver,  tandis  que 
s'ils  sont  très  doux,  on  la  réduira  à  1  ou  1,5  pour  100. 

Bien  que  la  gélatine  bichromatée  ne  soit  sensible  qu'à  l'état  sec, 
ii  vaut  mieux  ne  procéder  à  la  sensibilisation  que  dans  une  pièce 
modérément  éclairée,  soit  par  la  lumière  diurne,  soit  au  moyen 
d^une  lampe  à  gaz  ou  au  pétrole.  Le  papier  est  généralement  sen- 
sibilisé la  veille  de  l'emploi. 

La  solution  de  bichromate  ne  doit  pas  servir  à  sensibiliser  un 
trop  grand  nombre  de  feuilles.  Comme  le  bichromate  a  bien  moins 
de  valeur  que  le  papier  au  charbon,  il  ne  faut  pas  compromettre 
le  succès  des  opérations  par  une  économie  insignifiante.  Même  si 
le  bain  sert  trè5  peu,  il  faut  le  renouveler  tous  les  8  jours,  sur- 
tout en  été.  Quand'  le  bain  n'est  pas  renouvelé  à  temps,  les  épreuves 
sont  grises,  sans  vigueur  dans  les  noirs.  De  plus,  le  papier  sensi- 
bilisé dans  un  bain  trop  vieux  s'insolubilise  parfois  spontanément, 
surtout  en  été,  ou  n'adhère  pas  au  transfert. 

Au  moment  de  la  sensibilisation,  la  température  du  bain  ne  doit 
pas  dépasser  15°.  En  été,  il  sera  donc  nécessaire  de  le  faire  refroidir 
ëti  ti:*etnpant  le  flacon  qui  le  contient  dans  de  l'eau  fraîche  ou  en  y 
ajoutant  un  peu  de  glace. 

La  solution  est  versée  dans  une  cuvette  en  verre  ou  en  porcelaine. 
Avant  d'y  plonger  le  papier  au  charbon,  il  faut  Fépousseter  avec 
éoin.  Si  la  gélatine  est  couverte  de  duvet  provenant  de  l'envers  de 
la  feuille  avec  laquelle  elle  se  trouvait  en  contact,  il  est  indispen- 
sable de  frotter  la  surface  avec  une  brosse.  Le  papier  est  ensuite 
mis  dans  la  cuvette,  la  gélatine  en  dessus.  Comme  il  a  une  tendance 
à  se  fouler  et  que  la  surface  gélatinée  repousse  d'abord  le  liquide, 
on  agitera  la  cuvette  et  on  forcera  le  papier  à  rester  immergé,  en 
y  appuyant  une  baguette  de  verre  ou  un  doigt  recouvert  de  caout- 
chouc. 

11  ne  faut  jamais  tremper  les  mains  nues  dans  la  dissolution  de 
bicïiromate  ;  on  doit  même  éviter  de  toucher  le  papier  lorsqu'il  en 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES 


251 


est  imprégné,  surtout  si  l'on  a  des  coupures  :  le  bichromate  enve- 
nimerait les  plaies  et  les  empêcherait  de  se  cicatriser.  Si  toutefois 
les  circonstances  font  qu'il  ne  soit  pas  possible  d'éviter  le  contact 
de  la  solution  bichromatée,  les  érosions  qui  pourraient  en  résulter 
seront  pansées  avec  la  pommade  suivante  : 


Chlorhydrate  de  morphine 
Pommade  iodurée 


0  gr.  10 
30  — 


Si  l'on  remarque  des  bulles  d'air  sur  la  gélatine,  on  les  chassera 
à  l'aide  d'une  éponge  douce  ou  d'un  large  pinceau,  car  ces  bulles, 
empêchant  le  liquide  de  mouiller  la  couche,  se  traduiraient  par 
autant  de  points  blancs  sur  l'image.  Au  bout  de  2  à  3  -minutes 
d'immersion,  le  papier  sorti  de  la  cuvette  est  placé,  gélatine  en 
dessous,  sur  une  glace  bien  propre,  et  l'on  enlève  l'excès  de  liquide 


Fig.  96.  —  Raclette. 

en  passant  légèrement,  dans  tous  le  sens,  une  raclette  de  caout- 
chouc. Cet  outil  (fîg.  96),  dont  on  se  sert  à  chaque  instant  dans  le 
procédé  au  charbon,  consiste  en  une  lame  de  caoutchouc  montée 
entre  deux  lames  de  bois. 

La  feuille  ainsi  essorée  est  alors  suspendue  par  une  pince  à  une 
corde  tendue  dans  une  pièce  obscure.  La  dessiccation  ne  doit  être 
ni  trop  rapide  ni  trop  lente.  Si  l'on  sensibilise  le  papier  le  soir,  il 
doit  être  sec  le  lendemain  matin.  Un  séchage  trop  lent  amène  le 
coulage  de  la  gélatine;  trop  rapide,  il  en  provoque  la  réticulatioriy 
c'est-à-dire  que  la  surface  de  la  gélatine  se  trouve  couverte,  après 
le  dépouillement,  d'un  réseau  de  petites  rides  enchevêtrées. 

Si  le  papier. est  laissé  dans  un  endroit  très  sec,  il  devient  dur  et 
cassant;  mais  il  Suffît  de  le  placer  pendant  quelques  minutes  dans 
un  endroit  humide,  pour  qu'il  redevienne  flexible. 


252  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Conservation  du  papier  sensibilisé.  —  La  gélatine  bichromatée 
devient  peu  à  peu  insoluble,  même  dans  l'obscurité,  si  bien  qu'au 
bout  de  6  à  8  jours  environ  le  papier  au  charbon  sensibilisé  est 
généralement  hors  de  service.  Néanmoins,  on  arrive  à  le  conser- 
ver pendant  3  mois  et  même  davantage,  en  le  plaçant  dans  des 
boîtes  en  fer-blanc  parfaitement  étanches  et  contenant  une  subs- 
tance desséchante,  telle  que  le  chlorure  de  calcium.  Mais  nous 
avons  vu  avec  quelle  précaution  il  faut  manier  le  papier  très  sec, 
qui  est  dur  et  cassant.  Le  mieux  est  d'employer  le  papier  fraîche- 
ment sensibilisé. 

La  transformation  que  subit  la  gélatine  bichromatée  est  d'ail- 
leurs utihsée  pour  tirer  parti  de  certains  clichés.  Les  clichés  fai- 
bles donneront  les  meilleurs  résultats  avec  un  papier  sensibilisé 
la  veille;  mais,  avec  les  clichés  très  durs,  il  vaut  mieux  employer 
un  papier  sensibilisé  depuis  deux  ou  trois  jours. 

Tirage.  —  Les  bords  du  phototype  doivent  être  masqués,  sur 
«ne  largeur  de  2  ou  3  millimètres  au  moins,  soit  en  y  collant  des 
bandes  de  papier  noir,  soit  en  y  appliquant  au  pinceau  une  cou- 
leur opaque,  afin  que  la  gélatine  bichromatée  reste  soluble  sur  le 
pourtour  de  l'épreuve  :  sans  cette  précaution,  elle  adhérerait  mal 
au  transfert. 

Le  papier  sensible  est  mis  en  contact  avec  le  phototype,  gélatine 
contre  gélatine,  et  exposé  à  la  lumière  dans  le  chlssis-presse,  de 
la' même  manière  que  les  papiers  aux  sels  d'argent.  La  coloration 
de  la  couche  ne  permet  pas  de  surveiller  la  venue  de  l'image.  La 
rapidité  du  papier  noir  est  à  peu  près  la  même  que  celle  des  pa- 
piers au  citrate  ;  les  papiers  bleus  s'impriment  plus  rapidement, 
les  papiers  rouges  plus  lentement.  La  durée  exacte  de  l'insolation 
est  ordinairement  déterminée  photométriquement,  par  exemple 
à  l'aide  de  l'impressimètre  de  Wynne  (fig.  92).  On  peut  d'ailleurs 
se  passer  de  tout  instrument  spécial,  en  procédant  de  la  façon  sui- 
vante. Un  papier  recouvert  de  gélatine  incolore,  tel  que  le  papier 
transfert  dont  nous  parlerons  plus  loin,  est  sensibilisé  en  même 
temps  que  le  papier  au  charbon  et  dans  le  même  bain.  Ce  papier 
est  exposé,  en  même  temps  que  l'autre,  sous  un  cliché  de  même 
râleur  que  celui  dont  on  tire  une  épreuve  au  charbon.  Dès  que 
l'image  qui  se  dessine  en  brun  sur  le  fond  jaune  du  papier  accuse 


LES  PROCEDES  PIGMENTAIRES  253 

très  légèrement  tous  les  détails  du  négatif,  on  peut  considérer 
domme  suffisante  l'impression  du  papier  mixtionné.  Il  faut  tenir 
compte  cependant  de  la  couleur  de  la  mixtion  et  abréger  le  tirage 
si  elle  est  bleue,  le  prolonger  au  contraire  si  elle  est  rouge.  Le 
tirage  doit  s'effectuer  autant  que  possible  à  l'ombre,  la  chaleur 
solaire  risquant  d'insc|lubiliser  la  gélatine  même  sous  les  parties 
opaques  du  phototype. 

Il  est  essentiel  de  tenir  compte  de  ce  fait  que  l'impression  du 
papier  au  charbon  continue  même  après  que  l'action  de  la  lumière 
a  cessé.  Cette  action  est  lente,  à  basse  température,  mais  la  chaleur 
l'accélère;  aussi  l'insolubilisation  dans  l'obscurité  est-elle  plus 
rapide  en  été  qu'en  hiver.  Cependant,  le  dépouillement  peut  être 
différé,  si  le  papier  imprimé  est  conservé  à  l'état  absolument  sec 
dans  des  étuis  à  chlorure  de  calcium.  L'insolubilisation  s'arrête 
également  quand  le  papier  est  plongé  dans  l'eau.  A  partir  de  ce 
moment,  les  manipulations  diffèrent,  suivant  que  l'on  procède 
par  simple  transfert  ou  par  double  transfert.  Dans  le  premier  cas, 
l'opération  est  beaucoup  plus  simple  que  dans  le  second,  mais 
l'image  est  inversée,  et  c'est  afin  de  la  replacer  dans  son  véritable 
sens  qu'il  est  souvent  nécessaire  de  recourir  au  procédé  le  plus  long. 
Toutefois,  même  dans  ce  cas,  les  manipulations,  qui  semblent 
compliquées  si  l'on  en  inçe  par  les  détails  qui  vont  suivre,  sont, 
dans  la  pratique,  assez  rapides  et  ne  consistent  qu'en  quelques 
tours  de  main  qu'il  faut  connaître,  mais  que  l'on  acquiert  très  faci- 
lement. 

Transfert  simple.—  Le  papier  dit  de  simple  transfert  est  vendu 
prêt  à  l'emploi,  soit  en  rouleaux,  soit  en  feuilles.  C'est  un  papier 
recouvert  d'une  couche  de  gélatine  incolore  insolubilisée  dans 
l'alun  de  chrome.  Quand  on  veut  effectuer  un  transfert,  on  en 
découpe  un  morceau  un  peu  plus  grand  que  le  papier  au  charbon 
auquel  il  va  être  accolé,  et  on  le  trempe  dans  l'eau  froide.  Il  faut 
l'y  laisser  au  moins  2  ou  3  minutes,  et  il  n'y  a  point  d'inconvénient 
à  prolonger  cette  immersion  beaucoup  plus  longtemps. 

Le  papier  au  charbon  qui  vient  de  recevoir  l'impression  lumi- 
neuse est  également  plongé  dans  l'eau  froide,  seulement  la  durée 
de  son  immersion  est  strictement  limitée.  De  plus,  il  faut  n'y  pro- 
céder qu'à  une  faible  lumière,  car  la  gélatine  bichromatée  conserve 

i5 


254  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

sa  sensibilité  tant  qu'elle  n'est  pas  entièrement  imprégnée  d'eau. 
La  température  de  l'eau  employée  est  également  très  importante 
et  ne  doit  pas  dépasser  15  degrés.  Si  elle  est  plus  chaude,  l'image 
sera  presque  à  coup  sûr  réticulée. 

Le  papier  au  charbon  doit  rester  dans  l'eau  de  30  à  60  secondes 
environ.  S'il  y  séjourne  trop  peu  de  temps,  une  foule  de  petites 
bulles  d'air  s'interposent,  pendant  le  transfert,  entre  les  deux 
papiers,  parce  que  la  gélatine,  continuant  à  se  gonfler,  aspire  l'air 
à  travers  les  pores  du  papier.  Ces  bulles  se  traduisent,  au  dépouil- 
lement, par  autant  de  points  blancs.  Si,  au  contraire,  le  papier 
mixtionné  est  laissé  trop  longtemps  dans  l'eau,  il  n'adhérera  plus 
au  transfert.  Comme  la  durée  d'immersion  la  plus  convenable  dé- 
pend de  l'état  de  la  couche  impressionnée  et  de  la  température,  le 
plus  sûr  est  d'observer  les  mouvements  du  papier  mixtionné. 

Ce  papier  étant  plongé  dans  une  cuvette  pleine  d'eau  fraîche, 
la  gélatine  d'abord  en  dessous,  puis  en  dessus,  on  le  remue  et  on 
presse  à  la  surface  une  éponge  ou  un  pinceau,  afin  de  chasser  les 
bulles  d'air.  Le  papier  se  recroqueville  d'abord  en  dedans,  puis  il 
devient  plan,  et  c'est  à  ce  moment  précis,  sans  attendre  qu'il  se 
recroqueville  en  dehors,  qu'il  faut  l'appliquer  sur  le  papier  trans- 
fert. Le  mieux  est  d'introduire  ce  papier  dans  la  cuvette  contenant 
le  papier  mixtionné  et  de  mettre  les  deux  couches  de  gélatine  en 
contact  sous  l'eau.  On  évite  ainsi  plus  facilement  l'interposition 
de  bulles  d'air. 

Les  deux  papiers  se  trouvant  ainsi  accolés,  on  les  sort  de  la 
cuvette,  on  les  pose  sur  une  glace,  le  papier  impressionné  en  des- 
sus, et,  les  maintenant  de  la  main  gauche,  on  saisit  de  la  main 
droite  la  raclette,  que  l'on  frotte  sur  le  papier  au  charbon,  d'abord 
légèrement,  puis  très  fortement,  en  allant  toujours  du  centre  vers 
les  bords,  jusqu'à  ce  que  les  deux  papiers  soient  devenus  bien 
plans.  On  passe  ensuite  une  éponge,  pour  enlever  l'excès  d'eau, 
surtout  sur  les  bords.  Sans  celte  précaution,  la  pellicule  mixtion- 
née  risquerait  de  se  détacher. 

Le  dépouillement  peut  être  effectué  10  minutes  après  le  transfert, 
mais  pas  avant,  sinon  la  pellicule  impressionnée  risquerait  de  se 
séparer  de  son  support.  Si  l'on  a  plusieurs  épreuves  à  dépouiller,  on 
les  mettra  à  plat  les  unes  sur  les  autres,  afin  d'éviter  qu'elles  sèchent. 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  255 

Dépouillement.  —  Celte  opération  s'effectue  en  pleine  lumière, 
car  la  gélatine  mouillée  a  perdu  sa  sensibilité,  et  il  s'agit  mainte- 
nant de  bien  surveiller  l'image. 

Dans  une  cuvette  en  tôle  émaillée,  on  verse  de  l'eau  tiède  (SO» 
environ)  en  quantité  suffisante  pour  qu'il  y  en  ait  une  couche  de- 
2  centimètres  d'épaisseur.  On  y  plonge  les  deux  papiers  accolés, 
le  transfert  en  dessous  et  le  papier  mixtionné  en  dessus.  On  agite 
la  cuvette,  et,  au  bout  de  quelques  instants,  on  voit  les  bords  de  la 
couche  pigmentée  se  gonfler,  puis  laisser  couler  des  veines  colo- 
rées. Quand  les  angles  commencent  à  se  soulever,  on  maintient  de 
la  main  gauche  les  papiers  au  fond  de  la  cuvette,  et,  saisissant 
par  un  de  ses  angles  le  papier  au  charbon  entre  le  pouce  et  l'index 
de  la  main  droite,  on  le  soulève  avec  précaution  et  on  le  détache 
lentement  du  papier  transfert.  Le  papier  au  charbon  ainsi  séparé 
niontre  généralement  une  vague  image  négative,  mais  il  n'est  plus 
d'aucun  usage,  et  il  n'y  a  qu'à  le  jeter. 

Le  papier  transfert  laisse  maintenant  apercevoir  l'image  posi- 
tive, mais  très  confusément,  car  il  reste  encore  un  excès  de  géla- 
tine mixtionnée  qu'il  faut  éliminer.  On  ajoute  donc  de  l'eau  plus 
chaude,  de  façon  à  porter  le  mélange  à  la  température  de  40°  envi- 
ron. On  voit  alors  l'image  s'éclaircir  et  devenir  de  plus  en  plus 
pure.  Si  le  dépouillement  est  trop  lent,  on  l'active  en  projetant 
l'eau  chaude  avec  la  main  sur  les  endroits  qui  tardent  à  se  mon- 
trer. On  reconnaît  que  le  dépouillement  est  terminé  quand,  soule- 
vant l'épreuve  hors  de  l'eau  et  la  laissant  un  instant  égoutter^ 
aucune  trace  de  matière  colorante  n'apparaît  plus  au  coin  inférieur 
du  papier. 

Quand  l'exposition  a  duré  juste  le  temps  voulu,  le  dépouillement 
s'accomplit  en  5  minutes  environ.  Quand  elle  a  été  trop  prolongée^ 
l'image  se  dépouille  très  difficilement  :  on  y  remédie  quelquefois 
en  élevant  la  température  de  l'eau  à  43°  et  même  à  50°,  mais  cet 
expédient  n'est  pas  sans  danger,  car  il  provoque  souvent  des  réti- 
culations.  Il  est  préférable  de  ne  pas  dépasser  42°  ou  43°  et  d'addi- 
tionner l'eau  d'un  carbonate  alcalin  ou  de  sulfite  de  soude,  à  rai- 
son de  1  ou  2  grammes  par  litre.  Quand  l'exposition  a  été  trop 
courte,  l'image  se  dépouille  rapidement,  mais  manque  de  vigueur 
et  d'éclat. 


256  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

Après  le  dépouillement,  il  est  utile  de  passer  l'épreuve  pendant 
10  minutes  dans  une  solution  d'alun  à  5  pour  100.  L'alun  durcit  la 
gélatine  dont  est  formée  l'image,  rend  la  couche  non  collante,  ce 
qui  rend  plus  facile  le  montage  à  la  colle  d'amidon,  et,  comme 
le  bichromate  est  très  soluble  dans  l'alun,  les  dernières  traces  en 
sont  très  rapidement  éliminées.  On  rince  ensuite  l'épreuve  dans 
de  l'eau  propre,  et  on  la  suspend  par  une  pince  pour  la  laisser 
sécher. 

Double  transfert.  —  Dans  ce  procédé,  l'image  est  dépouillée  sur 
un  support  provisoire,  constitué  par  une  feuille  de  papier  spécial, 
appelé  support  flexible,  ou  sur  une  plaque  de  verre  cirée. 

Le  support  flexible  est  préparé  à  l'aide  du  papier  à  simple  trans- 
fert, dont  la  couche  de  gélatine  est  recouverte  d'un  vernis  à  la  cire. 
Pour  préparer  ce  vernis,  on  fait  dissoudre  1  gr.  de  cire  jaune  dans 
100  ce.  de  benzine.  On  en  imbibe  un  tampon  de  flanelle  dont  on 
frotte  légèrement  le  papier. 

Au  moment  d'efl'ectuer  le  premier  transfert,  on  immerge  le  sup- 
port flexible  dans  l'eau,  et,  quand  il  s'y  est  bien  détendu,  on  le  pose 
sur  une  glace,  le  côté  ciré  en  dessus.  On  immerge,  d'autre  part,  le 
papier  au  charbon  impressionné,  en  prenant  les  précautions  indi- 
quées pour  le  simple  transfert,  c'est-à-dire  en  opérant  à  une  lu- 
mière peu  intense  et  en  arrêtant  l'immersion  au  bout  d'une  minute, 
au  moment  oii  le  papier  est  redevenu  plan.  On  le  pose  alors  sur  le 
support  flexible,  le  côté  gélatine  en  contact  avec  la  surface  cirée; 
on  met  par  dessus  une  toile  caoutchoutée',  et  on  passe  la  raclette 
dôî manière  à  chasser  les  bulles  d'air.  On  enlève  enfin  l'excès  d'eau 
avec  une  éponge,  surtout  près  des  bords. 

Le  dépouillement  ne  doit  pas  être  efl'ectué- moins  de  10  minutes 
après  cette  opération;  il  n'y  a  d'ailleurs  aucun  inconvénient  à  n'y 
procéder  qu'une  heure  plus  tard.  Il  y  a  même  avantage  à  le  faire  : 
les  demi-teintes  sont  mieux  conservées.  Le  dépouillement  s'exé- 
cute de  la  même  manière  que  s'il  s'agissait  d'un  simple  transfert. 
L'épreuve  une  fois  dépouillée  est  passée  au  bain  d'alun  et  lavée. 
On  peut  ensuite  procéder  au  second  transfert  ou  laisser  sécher,  si 
l'on  préfère  remettre  à  plus  tard  la  suite  des  opérations. 

Le  papier  dit  double  transfert  qui  va  servir  de  support  définitif 
à  l'image  est  livré  prêt  à  l'emploi.  C'est  un  papier  recouvert  d'une 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  257 

couche  de  gélatine  rendue  seulement  à  moitié  insoluble  par  l'alun 
de  chrome.  Quand  il  est  de  préparation  récente,  la  gélatine  qui  le 
recouvre  se  ramollit  dans  l'eau  tiède  (35°  environ).  Mais,  à  la  lon- 
gue, la  gélatine  s'insolubilise  de  plus  en  plus.  Il  faut  alors,  pour 
la  rendre  collante,  de  l'eau  de  plus  en  plus  chaude  et  même  y 
ajouter  quelques  gouttes  d'ammoniaque. 

Pour  procéder  au  second  transfert,  on  coupe  ce  papier  à  la 
dimension  voulue,  on  le  fait  détendre  dans  l'eau  froide,  puis  on  le 
plonge  dans  l'eau  chaude  (de  30°  à  60°,  selon  l'état  de  la  gélatine), 
jusqu'à  ce  qu'il  soit  complètement  ramolli.  11  ne  faut  pas  cependant 
que  l'eau  soit  trop  chaude,  car  la  gélatine  risquerait  de  couler.  En 
même  temps,  si  le  support  flexible  sur  lequel  est  l'image  avait  été 
mis  à  sécher  antérieurement,  il  faut  le  faire  détendre  un  instant 
dans  l'eau.  On  applique  alors  les  deux  papiers  l'un  sur  l'autre,  la 
gélatine  du  double  transfert  contre  l'image;  on  passe  la  raclette 
pour  assurer  l'adhérence  et  chasser  les  bulles  d'air,  on  éponge  et 
on  laisse  sécher. 

Quand  la  dessiccation  est  achevée,  on  introduit  entre  les  deux 
papiers,  à  l'un  des  angles,  la  lame  d'un  canif,  puis,  saisissant  cha- 
cune des  feuilles  par  leur  angle  ainsi  rendu  libre,  on  les  sépare  faci- 
lement :  l'image  a  abandonné  le  support  provisoire  et  se  trouve 
maintenant  sur  son  support  définitif. 

La  surface  de  l'épreuve  ainsi  obtenue  est  légèrement  hrillante, 
comme  celle  du  papier  albuminé  avant  le  satinage.  Pour  avoir  des 
images  tout  à  fait  mates  ou,  au  contraire,  très  brillantes,  il  faut 
effectuer  le  transfert  provisoire,  non  plus  sur  le  support  flexible^ 
mais  sur  une  plaque  de  verre  ou  de  métal.  Si  le  support  rigide  est 
dépoli  ou  rugueux,  l'épreuve  sera  mate;  s'il  est  poh,  elle  sera 
brillante. 

C'est  ordinairement  le  verre,  poli  ou  dépoli,  qui  sert  de  support 
temporaire.  On  commence  par  le  frotter  avec  un  tampon  de  fla- 
nelle imbibée  d'une  solution  de  cire  dans  la  benzine  ou  du  mélange 
suivant  : 

Essence  de  térébenthine 100  ce. 

Cire  jaune 2  gv. 

Golophatie 2  — 

Pour  effectuer  le  premier  transfert,  on  mouille  le  papier  au  char- 


258  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

bon  pendant  une  minute,  comme  nous  l'avons  expliqué,  on  l'ap- 
plique par  le  côté  gélatine  sur  le  verre  ciré,  on  passe  la  raclette  et 
on  éponge,  de  même  que  dans  les  procédés  précédents.  Au  bout 
de  10  minutes,  on  peut  commencer  le  dépouillement. 

Après  le  passage  dans  l'alun,  suivi  d'un  lavage  à  grande  eau, 
l'image  provisoirement  transférée  sur  verre  est  mise  à  sécher.  Si 
l'on  procédait  au  second  transfert  avant  dessiccation,  tous  les  re- 
liefs de  la  gélatine  seraient  écrasés,  et  l'image  manquerait  de  fînesse. 
Toutetois,  si  l'on  est  pressé,  on  n'a  qu'à  immerger  la  plaque  dans 
l'alcool,  qui  absorbe  l'eau  et  abaisse  les  reliefs. 

Le  second  transfert  s'exécute  ensuite  comme  avec  le  support 
flexible.  Le  papier  double  transfert,  d'abord  mouillé  dans  l'eau 
froide,  est  plongé  dans  l'eau  chaude,  qui  ramollit  la  gélatine  en 
quelques  secondes.  En  même  temps,  on  plonge  un  instant  la  plaque 
dans  l'eau  froide,  de  manière  que  la  gélatine  qui  contient  l'image 
soit  légèrement  mouillée.  On  met  ensuite  le  papier  gélatine  en 
contact  avec  l'image,  on  passe  la  raclette,  on  éponge  et  on  fait 
sécher. 

Pour  séparer  le  papier  du  verre,  après  dessiccation,  il  n'y  a 
qu'à  inciser  les  bords  :  si  la  surface  du  support  provisoire  a^€té 
bien  cirée,  l'épreuve  s'en  détachera  très  facilement. 

Le  repiquage  de  l'épreuve  doit  être  exécuté  avant  son  applica- 
tion sur  le  papier  à  double  transfert.  On  emploie  pour  cet  usage  le 
pinceau  ou  l'estompe.  Dans  le  premier  cas,  la  retouche  est  faite 
avec  des  couleurs  à  l'huile;  dans  le  second,  avec  des  couleurs 
sèches  réduites  en  poudre  impalpable.  L'immersion  dans  l'eau, 
pour  l'opération  du  second  transfert,  n'enlève  pas  le  repiquage 
ainsi  pratiqué.  De  plus,  l'épreuve  reste  parfaitement  brillante,  si 
on  l'a  voulue  telle.  Si  l'on  préfère  une  surface  mate,  le  repiquage 
pourra  être  exécuté  sur  l'épreuve  entièrement  finie. 

Insuccès.  —  Manque  d'adhérence  du  papier  au  charbon  avec  le 
simple  transfert.  —  L'immersion  dans  la  première  eau  a  été  trop 
prolongée,  ou  bien  le  dépouillement  dans  l'eau  chaude  a  eu  lieu 
trop  tôt  après  la  mise  en  contact  des  deux  papiers. 

Bulles  au  dépouillement.  —  La  raclette  n'a  pas  été  passée  avec  le 
soin  voulu,  et  des  bulles  d'air  ou  même  des  particules  solides  sont 
restées  interposées  entre  la  gélatine  mixtionnée  et  le  papier  trans- 


LES   PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  239' 

fert.  Cet  accident  est  encore  aggravé  par  l'emploi  d'une  eau  trop 
chaude. 

Taches  foncées  ou  empâtements.  —  Des  gouttes  d'eau  sont  tombées 
sur  le  papier  au  charbon,  après  Tapplication  sur  le  papier  transfert 
et  avant  le  dépouillement.  Cet  accident  se  produit  surtout  en  été. 
Taches  brillantes  sur  papier  rugueux.  —  Contact  imparfait  au 
transfert.  On  peut  y  remédier  en  immergeant  l'épreuve  dans  do 
l'eau  chaude  pendant  une  demi-heure,  ou  plutôt  jusqu'à  ce  quo 
toute  la  couche  gélatineuse  soit  bien  ramollie.  On  la  place  en- 
suite dans  Teau  froide  pour  procéder  au  montage  habituel.  Oh  peut 
aussi  supprimer  le  lustre  des  épreuves  sèches  et  montées,  en  les 
trempant  dans  l'eau  chaude  et  en  les  frottant  très  délicatement 
avec  un  morceau  de  flanelle  bien  humectée. 

Réticulation.  —  On  désigne  sous  ce  terme  une  sorte  de  filet  à 
mailles  noires  micrcscopiques  qui  semble  recouvrir  l'image  tout 
entière  et  qui  en  altère  complètement  la  finesse.  Ce  défaut  est  dii 
à  la  température  trop  élevée  de  l'eau  dans  laquelle  est  trempé  lo 
papier  mixtionné  avant  le  transfert.  On  l'évite  toujours,  si  l'on  se 
sert  d'une  eau  très  froide  et  très  abondante. 

Les  causes  d'insuccès  qui  précèdent  sont  communes  aux  procé- 
dés par  simple  et  par  double  transfert.  Les  suivantes  sont  spéciales 
au  double  transfert. 

Dissolution  de  la  pellicule  mixtionnée  au  dépouillement.  —  Le 
support  flexible  aura  été  employé  trop  tôt  après  avoir  été  enduit  de 
cire,  ou  bien  on  aura  exécuté  le  dépouillement  dans  de  l'eau  trop 
chaude.  Ne  pas  dépasser  40°. 

Pellicule  détachée  du  support.  —  Séchage  trop  rapide. 

Pellicule  déchirée  après  séchage.  —  Cirage  incomplet  du  support 
provisoire,  ou  dessiccation  incomplète. 

Procédé  au  charbon  sans  transfert.  —  En  réduisant  l'épaisseur 
du  pigment,  ou  en  déposant  la  matière  colorante  à  la  surface  de  la 
gélatine,  on  est  parvenu  à  fabriquer  des  papiers  au  charbon  sus- 
ceptibles d'être  dépouillés  directement,  sans  qu'il  soit  nécessaire 
de  reporter  la  couche  impressionnée  sur  un  autre  support.  Les 
images  ainsi  obtenues  ne  sont  pas  tout  à  fait  aussi  fines  que  celles 
auxquelles  on  arrive  à  l'aide  des  procédés  précédents,  mais  elles 
sont  d'un  très  bel  effet  artistique,  avec  l'aspect  d'une  eau-forte  ou 


26fO  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

d'un  -vigoureux  fusain.  De  plus,  elles  se  prêtent  à  rinterventioh 
de  l'opérateur,  qui  parvient,  en  dépouillant  localement  certaines 
parties  autrement  que  les  autres,  à  produire  des  œuvres  très  per- 
sonnelles, a  marquer  de  son  empreinte  les  épreuves  qu'il  tire  de 
ses  clichés,  à  ajouter,  en  un  mot,  son  propre  talent  au  travail  auto- 
matique de  l'objectif. 

La  surface  de  ces  papiers  est  mate.  Le  papier  Artigue  fournitdes 
images  veloutées  et  très  fines;  le  papier  Fresson  présente,  dans  les 
grandes  lumières,  un  reflet  satiné.  De  là  les  noms  de  charbon- 
velours  et  de  charbon-satin  donnés  à  ces  préparations.  Ces  papiers 
sont  livrés  non  sensibilisés  et  se  conservent  en  cet  état  indéfîni- 
^nent.  11  en  existe  de  toute  espèce  de  teintes. 

Sensibilisation.  —  Cette  opération  s'effectue  en  pleine  lumière. 
La  feuille  de  papier  est  d'abord  détendue  pendant  2  minutes  dans 
de  Feau  fraîche.  La  température  de  cette  eau,  ainsi  que  celle  du 
bain  de  sensibilisation,  ne  doit  pas  dépasser  18°.  On  sort  le  papier 
à  plusieurs  reprises  de  la  cuvette,  afin  de  chasser  les  bulles  d'air, 
et  on  l'immerge  ensuite,  pendant  2  minutes,  dans  une  solution  de 
bichromate  de  potasse  à  2  p.  100,  qui  ne  devra  servir  que  pour 
quelques  feuilles.  On  agite  légèrement  la  cuvette  pendant  la  sensi- 
bilisation; on  passe  ensuite  sous  un  coin  du  papier  une  baguette 
de  verre,  pour  le  soulever  et  le  saisir  par  une  pince  en  bois.  On  le 
laisse  sécher  dans  l'obscurité,  et,  lorsqu'il  est  sec,  le  mieux  est  de 
l'utihser  le  plus  tôt  possible.  On  facihte  beaucoup  la  dessiccation 
en  faisant  adhérer  au  dos  de  l'angle  inférieur  de  chaque  feuille  un 
petit  morceau  de  buvard  mince. 

Tirage.  —  Le  chargement  du  châssis-presse  sera  fait  rapidement 
et  dans  un  endroit  très  peu  éclairé,  car  le  papier  bichromate  est 
très  sensible.  Sous  un  cliché  de  moyenne  intensité,  le  temps  d'ex- 
position, à  l'ombre,  vers  le  milieu  d'une  belle  journée  d'été,  est 
approximativement  de  2  minutes  pour  le  papier  bleu,  de  3  minutes 
pour  le  papier  vert,  de  8  minutes  pour  le  papier  noir,  de  10  mi- 
nutes pour  les  papiers  brun  et  bistre,  de  12  minutes  pour  le  papier 
sanguine.  Le  tirage  est  généralement  poussé  jusqu'à  ce  que  les 
grandes  ombres  de  l'image  commencent  à  être  très  -légèrement 
visibles  par  transparence.  Cependant,  cet  état  de  la  couche  est  déjà 
l'indice  d'un  commencement  de  surexposition. 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENT  AIRES 


2ffl 


Dépouillement.  —  Le  papier  extrait  du  châssis-presse  est  d'abord 
passé  dans  l'eau  froide,  d'où  on  le  sort  à  plusieurs  reprises  pour 
l'immerger  ensuite  de  nouveau,  de  manière  à  bien  chasser  les 
bulles  d'air.  A  partir  de  ce  moment,  la  himière  n'a  plus  d'action 
sensible,  et  les  manipulations  peuvent  sans  inconvénient  se  pour- 
suivre au  grand  jour.  On  dispose,  d'autre  pari.,  pour  les  avoir  im- 
médiatement   sous     la 


mam  : 

1°  Un  thermomètre 
à  échelle  sur  tôle 
émaillée; 

2°  Une  feuille  de 
verre  un  peu  plus 
grande  que  l'épreuve 
à  dépouiller; 

3°  Une  cuvette  con- 
tenant de  l'eau  tiède  à 
26°  ou  28°  environ; 

4°  Une. large  terrine 
contenant  un  mélange 
d'eau  et  de  sciure  fine 
de  bois  blanc,  dans  la 
proportion  de  400  gr. 
de  sciure  pour  5  litres 
d'eau,  à  la  température 
moyenne  de  18°; 

5°  Une  casserole  à  bec  ou  une  cafetière. 

Après  quelques  instants  d'immersion  dans  l'eau  froide,  l'épreuve 
est  plongée  pendant  2  minutes  dans  l'eau  à  28°  et  placée  rapidement 
sur  la  feuille  de  verre,  la  gélatine  pigmentée  en  dessus,  puis,  tenant 
le  tout  dans  une  position  presque  verticale  au-dessus  de  la  terrine 
à  sciure,  ou  plonge,  la  casserole  dans  le  mélange  et  on  en  arrose 
l'épreuve  vers  le  haut,  en  promenant  le  jet  d'un  bord  à  l'autre. 
Après  quelques  casserolées  de  sciure,  on  projette  un  peu  d'eau 
sur  l'image,  afin  de  mieux  la  distinguer  et  se  rendre  ainsi  compte 
delà  manière  dont  il  convient  de  continuer  le  dépouillement.  Après 
une  exposition  de  durée  normale,  l'image  se  dépouille  également 


Fig.  97.  —  Dépouillement  à  la  sciure. 


262  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

dans  toutes  ses  parties.  Il  n'y  a  donc  qu'à  continuer  l'arrosage  avec 
le  mélange  d'eau  et  de  sciure,  après  avoir  repassé  le  papier  dans 
l'eau  tiède,  si  les  blancs  résistent.  En  dirigeant  convenablement 
l'action  mécanique  de  la  sciure,  il  est  facile  d'éclaircir  ou  de  négli- 
ger telle  ou  telle  partie  de  l'image.  Certains  opérateurs  proposent 
même,  pour  faciliter  le  traitement  local,  d'exercer  de  légères 
frictions,  à  l'aide  d'un  pinceau  très  souple  et  dont  on  peut  encore 
adoucir  l'efTet,  en  l'imbibant  de  glycérine.  Il  faut  toujours  dépouil- 
ler bien  au-dessous  de  la  valeur  voulue,  car  l'image  remonte  beau- 
coup en  séchant.  Cependant,  le  dépouillement  peut  être  repris 
après  séchage,  si  on  le  juge  nécessaire. 

Quand  l'exposition  a  été  trop  courte,  les  ombres  se  détaillent 
rapidement,  mais  les  parties  claires  tendent  à  rester  grises  et 
grenues.  Il  ne  faut  alors  continuer  le  dépouillement  qu'avec  du 
mélange  très  clair,  en  plongeant  la  casserole  près  de  la  surface, 
où  il  y  a  moins  de  sciure. 

Quand  l'exposition  a  été  exagérée,  le  dépouillement  est  difficile, 
surtout  dans  les  ombres.  On  versera  alors  de  plus  haut  le  mélange, 
puisé  au  fond  du  récipient,  où  il  y  a  plus  de  sciure.  Au  besoin, 
abandonner  l'épreuve  dans  l'eau  froide  pendant  quelques  heures, 
avant  de  continuer. 

Le  dépouillement  achevé,  on  plonge  l'épreuve  dans  une  solution 
de  bisulfite  de  soude  liquide  à  3  ou  4  p.  100.  Au  bout  de  4  ou  5 
minutes,  quand  la  coloration  jaune  due  au  bichromate  aura  dis- 
paru, on  remettra  la  feuille  dans  l'eau  froide,  pour  balayer  avec 
un  pinceau  doux  la  sciure  demeurée  adhérente.  Après  un  lavage 
de  quelques  minutes,  l'épreuve  est  suspendue  pour  sécher. 

Avant  de  monter  l'épreuve,  il  faut  la  laisser  tremper  dans  l'eau 
pendant  5  minutes,  l'égoutter  face  en  dessous  sur  une  feuille  de 
verre,  essorer  le  dos  avec  un  buvard  et  y  étendre  de  la  colle  fraî- 
che d'amidon. 

Procédé  à  la  gomme  bichromatée.  —  C'est  le  7  septembre  1858 
que  Pouncy  exposa,  à  The  London  Photographie  -Socze^?/^  less pre- 
mières épreuves  à  la  gomme  bichroinatée.  Ces  images  indélébiles 
étaient  obtenues  en  recouvrant  un  papier  de  gomme  arabique 
additionnée  de  noir  de  fumée  et  de  bichromate  de  potasse.  La 
couche  pigmentée,  une  fois  sèche,  était  impressionnée  à  la  lumière 


LES   PROCÉDÉS   PIGMENTAIRES  263 

SOUS  un  négatif  et  dépouillée  dans  de  l'eau  froide.  En  1859,  Heine- 
ken  proposait  la  sépia  comme  matière  colorante,  dans  un  procédé 
analogue.  En  Amérique,  à  peu  près  à  la  même  époque,  Charles 
Scely  employait,  comme  Pouncy,  la  gomme  bichromatée  avec  du 
charbon.  Ce  procédé  avait  été  abandonné,  parce  qu'on  lui  repro- 
chait de  ne  pas  reproduire  tous  les  détails  du  phototype. 

Plus  tard,  vers  1895,  après  les  essais  de  MM.  llouillé-Ladevèze, 
Demachy  et  Maskell,  la  gomme  bichromatée  fut  reprise,  justement 
pour  les  motifs  qui  l'avaient  fait  délaisser  auparavant.  Les  artistes 
y  avaient  su  voir  un  moyen  de  réaliser  ces  sacrifices,  ces  effets 
synthétiques  qui,  dans  beaucoup  de  cas,  sont  préférables  à  la  mi- 
nutie, à  la  sécheresse  des  images  aux  sels  d'argent.  Ils  y  avaient 
aussi  reconnu  un  procédé  très  souple,  se  prêtant  à  Tintervention 
de  l'opérateur,  un  moyen  d'interprétation  personnelle.  Et,  de  fait, 
c'est  à  ce  procédé  que  l'art  photographique  doit  surtout  son  essor, 
et  les  salons  qui  se  sont  succédé  dans  ces  dernières  années  ont 
bien  montré  les  ressources  de  la  gomme  bichromatée  par  les  belles 
œuvres  qu'elle  a  permis  de  produire. 

Aujourd'hui,  on  trouve  dans  le  commerce  des  papiers  recouverts 
de  gomme  et  de  pigment,  noir  ou  de  toute  autre  couleur.  Il  suffît, 
pour  les  sensibiliser,  de  les  plonger  dans  une  solution  de  bichro- 
mate de  potasse  additionnée  d'alcool  pour  en  activer  la  dessiccation 
et  empêcher  le  coulage  de  la  couche,  qui  est  très  fragile.  Mais  plu- 
sieurs artistes  préfèrent  encore  préparer  eux-mêmes  leurs  papiers. 
Cette  préparation  est  d'ailleurs  très  facile  et  n'exige  que  quelques 
ingrédients  et  outils  très  peu  coûteux. 

On  prépare  d'abord  une  solution  de  gomme  arabique  ordinaire 
à  50  p.  100,  et  on  la  laisse  aigrir.  La  gomme  vieillie  et  acide  est 
moins  visqueuse,  s'étend  plus  facilement  et  fournit  une  couche 
plus  sensible.  On  fait  ensuite  dissoudre  du  bichromate  de  potasse, 
à  raison  de  1  gr.  p.  10  ce.  d'eau. 

Quant  au  pigment,  comme  il  est  nécessaire  qu'il  soit  parfaite- 
ment homogène,  le  mieux  est  d'employer  des  couleurs  d'aquarelle 
en  tubes  :  noir  d'ivoire,  terre  de  Sienne,  brun  Van  Dyck,  sépia, 
ocre  rouge,  indigo,  etc. 

On  choisira  pour  support  du  pigment  un  papier  à  dessin  de 
bonne  qualité  et  bien  encollé.  Les  papiers  les  plus  faciles  à  recou- 


264  TRAITE    GENERAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

vrir  sont  ceux  des  marques  Canson-Montgolfîer  pour  lavis,  Rives, 
Allongé,  Michallet  et  Joynson. 

On  mêle  la  couleur  avec  la  gomme  et  la  solution  de  bichromate, 
de  manière  à  former  une  pâte  semi-liquide,  facile  à  étendre  au 
pinceau  et  assez  claire  pour  laisser  apercevoir  le  grain  du  papier, 
lorsque  la  feuille  en  est  couverte.  Il  est  impossible  de  préciser  les 
proportions  de  ces  éléments,  qui  varient  suivant  la  nature  et  la 
consistance  de  la  couleur. 

On  se  sert  d'une  brosse  en  soies  de  porc  et  d'un  blaireau  en 
forme  d'éventail.  La  brosse  sert  à  étendre  le  mélange,  et  le  blai- 
reau à  égaliser  la  couche.  Cette  préparation  s'effectue  en  pleine 
lumière,  car  la  couche  n'est  sensible  qu'à  l'état  sec. 

La  feuille  de  papier,  préalablement  détendue  dans  l'eau,  est 
placée  sur  une  planchette  ou  sur  une  glace  et  épongée.  On  la  badi- 
geonne avec  la  brosse  chargée  de  la  mixture,  en  donnant  un  mou- 
vement de  va-et-vient.  Quand  toute  la  surface  est  couverte,  on 
continue  encore  un  moment  la  manœuvre  du  pinceau,  mais  ea 
diminuant  progressivement  la  pression,  afin  d'avoir  une  couche 
aussi  régulière  que  possible.  On  s'arrête  dès  que  la  mixture  com- 
mence à  faire  prise,  et  Ton  achève  de  l'égaliser  en  l'effleurant  déli- 
catement avec  le  blaireau,  comme  si  l'on  voulait  Tépousseter.  On 
laisse  ensuite  sécher  dans  l'obscurité.  La  couche  sèche  est  plus 
foncée  qu'à  l'état  humide,  et  ne  laisse  plus  apercevoir  le  papier. 

L'exposition  sous  le  cliché  doit  se  faire,  de  préférence,  à  l'om- 
bre. La  chaleur  du  soleil  risquerait  de  provoquer  l'insolubilisation 
partielle  de  toute  la  couche  et  de  donner  des  images  voilées.  La 
durée  du  tirage  varie  naturellement  suivant  l'opacité  du  cliché, 
l'éclat  de  la  lumière,  l'épaisseur  de  la  couche,  la  couleur  du  pig- 
ment et  la  quantité  de  bichromate.  Certaines  épreuves  n'exigent 
que  20  minutes  d'exposition,  tandis  que  pour  d'autres  il  faut  4 
heures.  L'image  n'est  pas  visible;  cependant,  quand  la  pose  a  été 
assez  longue,  on  distingue  par  transparence  une  très  légère 
silhouette,  mais  c'est  là  un  indice  de  surexposition. 

Le  dépouillement  s'effectue  en  déposant  l'épreuve,  la  couche  en 
dessous,  sur  une  couche  d'eau  froide.  Si  l'exposition  a  duré  juste  le 
temps  voulu,  la  couche  se  dissout  régulièrement,  d'abord  dans  les 
grandes  lumières,  puis  dans  les  demi-teintes,  et  Timage  reproduit 


LES  PROCÈDES  PIGMENT  AIRES  265 

fidèlement  le  modelé  du  sujet.  Le  dépouillement  dure  parfois  plu- 
sieurs heures.  On  peut  l'activer  en  ajoutant  à  l'eau  de  la  sciure  très 
fine  et  en  agitant  le  tout,  mais,  dans  ce  cas,  il  vaut  mieux  immer- 
ger l'épreuve  en  laissant  la  couche  au-dessus,  afin  d'éviter  qu'elle 
ne  soit  abîmée  en  frottant  le  fond  de  la  cuvette. 

Si  l'opérateur  veut  modifier  le  motif  qu'il  interprète,  il  procède 
au  dépouillement  local.  A  cet  effet,  l'épreuve  mouillée  est  placée 
sur  une  plaque  de  verre,  et  la  couche  est  lavée  aux  endroits  que 
l'on  veut  éclaircir  par  des  affusions  d'eau  froide  ou  tiède.  Ce  tra- 
vail est  effectué  en  plein  jour,  la  couche  n'ayant  aucune  sensibilité 
une  fois  mouillée.  Le  dépouillement  local  s'exécute  aussi  en  frot- 
tant légèrement  la  surface  avec  un  pinceau  très  doux  ou  une  touffe 
de  coton  imbibé  d'eau.  Mais  il  faut  alors  que  l'exposition  ait  été 
suffisamment  prolongée.  Après  un  tirage  de  durée  normale,  la 
couche  est  si  fragile  que  même  une  goutte  d'eau  accidentellement 
tombée  sur  une  demi-teinte  suffît  à  la  faire  immédiatement  dispa- 
raître. 

La  retouche  en  blanc  se  fait  avec  un  pinceau  fin  que  l'on  appli- 
que sur  l'épreuve  placée  dans  l'eau,  au  fond  d'une  cuvette.  Pour 
la  retouche  en  noir,  il  est  préférable  d'attendre  que  la  couche  soit 
sèche  :  cette  retouche  s'exécute  avec  les  couleurs  qui  ont  servi  à 
préparer  la  mixtion. 

Quand  l'épreuve  a  séjourné  assez  longtemps  dans  l'eau,  il  n'y  a 
plus  qu'à  la  laisser  sécher.  Si  le  dépouillement  a  été  rapide  et  si 
l'on  craint  qu'un  peu  de  bichromate  ne  soit  resté  dans  le  pigment 
gommé  ou  dans  la  pâte  du  papier,  on  l'éhminera  en  plongeant 
l'épreuve,  pendant  quelques  instants,  dans  une  solution  de  bisul- 
fite de  soude  à  10  p.  100.  Après  un  lavage  fait  avec  précaution, 
de  manière  à  ne  pas  endommager  l'image,  qui  est  très  fragile, 
on  laisse  sécher  l'épreuve  sur  une  feuille  de  verre  légèrement 
inclinée. 

Procédé  ozotype.  —  Le  28  mars  1899,  M.  Manly  faisait  connaître 
à  la  Royal  Photographie  Society  un  procédé  pigmentaire  qui  sup- 
primait deux  inconvénients  du  procédé  au  charbon  :  impossibilité 
de  contrôler  directement  l'impression  de  l'image  et  nécessité  d'un 
double  transfert  pour  obtenir  d'un  phototype  ordinaire  une  image 
non  inversée. 


266  TRAITE    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

Une  feuille  de  papier  ordinaire  (du  papier  à  lettres,  par  exemple) 
est  sensibilisée  dans  : 

Eau 100  ce.  ■ 

Sulfate  de  manganèse 14  gr. 

Bichromate  de  potasse 7  — 

Si  le  papier  n'est  pas  suffisamment  encollé,  on  ajoutera  à  6  ce. 
de  cette  solution  i  à  2  ce.  d'une  solution  de  gélatine  à  2  p.  100. 
Le  mélange  e^i  étendu  sur  la  feuille  à  l'aide  d'im  pinceau  souple. 
L'opération  s'effectue  à  la  lumière  artificielle  et  à  la  température 
de  17"  environ.  On  fait  ensuite  sécher  dans  l'obscurité. 

Une  fois  sec,  le  papier  sensible  est  exposé  à  la  lumière,  sous  un 
phototype,  dans  un  châssis-presse.  L'impression  est  facile  à  con- 
trôler, car  l'image  positive,  quoique  faible,  est  nettement  visible  et 
se  détache  en  brun  sur  le  fond  jaune  du  papier  bichromate.  On 
arrête  le  tirage  avant  que  tous  les  détails  se  soient  montrés,  puis 
on  lave  le  papier  à  l'eau  froide,  afin  d'éliminer  le  bichromate  non 
impressionné.  Ce  lavage  ne  doit  pas  durer  plus  de  10  minutes;  un 
séjour  prolongé  dans  l'eau  aurait  pour  effet  d'affaiblir  l'épreuve. 

On  a  ainsi  l'image  primaire^  qui  va  servir  à  fixer  le  pigment.  On 
peut  la  pigmenter  dès  la  fin  du  lavage  ou  la  laisser  sécher  pour 
continuer  l'opération  un  autre  jour.  Elle  se  conserve  indéfiniment. 

Quand  le  moment  est  venu  de  pigmenter  l'image  primaire,  il  faut 
d'abord  la  faire  détendre  dans  l'eau  pendant  une  ou  deux  minutes, 
si  on  l'avait  laissée  sécher.  On  prend  alors  une  feuille  de  papier  au 
charbon  ordinaire  et  on  la  plonge  dans  un  bain  dont  la  composi- 
tion varie  suivant  l'effet  à  réaliser  : 


Eau 

CLICHÉ   DOUX 

CLICHÉ   NORMAL 

CLICHÉ   HEURTÉ 

1.000  ce. 
3gr. 
1  — 
1  — 

1.000  ce. 
4  gr. 
1  — 
1  — 

1.000  ce. 
5gr. 
1  — 
1  — 

Acide  acétique  cristallisable. . 
Hvdroquinone 

Sulfate  de  cuivre 

La  solution  est  versée  dans  une  cuvette  en  verre  ou  en  porce- 
laine légèrement  chauffée  au  bain-marie.  Si  l'épreuve  primaire  a  été 
tirée  sur  papier  lisse,  la  température  de  la  solution  sera  maintenue 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  '  267 

à  21®  ou  22°;  si  le  tirage  a  été  exécuté  sur  papier  rugueux,  on 
poussera  le  chauffage  jusqu'à  23°  ou  26°,  mais  jamais  davantage. 

La  durée  d'immersion  du  papier  pigmenté  varie  suivant  l'état  de 
l'image  primaire  :  si  le  tirage  a  été  prolongé  de  manière  que  tous 
les  détails  soient  visibles,  il  y  a  surexposition,  et  alors  l'immersion 
doit  être  réduite  à  30  ou  40  secondes.  Si,  au  contraire,  l'impres- 
sion paraît  faible,  on  prolongera  l'imbibition  jusqu'à  2  minutes. 
Pour  une  épreuve  normalement  tirée,  le  papier  séjournera  environ 
1  minute  dans  la  solution  acétique. 

Le  papier  mixtionné  est  plongé  dans  le  bain,  la  gélatine  d'abord 
en  dessous;  puis  on  le  retourne,  on  chasse  les  bulles  d'air  à  l'aide 
d'un  pinceau,  et  on  laisse  l'imbibition  continuer  le  temps  que  l'on  a 
jugé  nécessaire.  On  plonge  alors  dans  la  même  cuvette  l'épreuve 
primaire,  on  met  l'image  en  contact  avec  la  gélatine  colorée  et  on 
sort  les  deux  papiers  accolés,  que  l'on  pose  sur  une  glace.  On  passe 
la  raclette  pour  assurer  l'adhérence  et  chasser  les  bulles  d'air,  on 
éponge  avec  soin  l'excès  d'eau,  principalement  sur  les  bords,  et  on 
laisse  le  tout  entre  deux  feuilles  de  papier  buvard  sous  une  légère 
pression,  par  exemple  celle  d'un  gros  livre.  Si  l'on  a  plusieurs 
épreuves  à  traiter,  on  les  superposera,  et  on  laissera  le  contact  se 
prolonger  pendant  2  ou  3  heures,  avant  de  procéder  au  dépouil- 
lement. Si  cette  opération  (levait  être  différée  plus  longtemps,  il 
serait  nécessaire  de  laisser  sécher  les  papiers  librement,  en  suspen- 
dant les  épreuves,  après  3  heures  de  contact.  Quand  le  moment 
sera  venu  de  les  dépouiller,  il  faudra  alors  les  laisser  préalable- 
ment dans  l'eau  froide,  pendant  15  ou  20  minutes  en  été,  et  une 
demi-heure  en  hiver. 

Le  dépouillement  s'effectue  dans  l'eau  chaude,  à  40°  ou  42°^ 
de  la  même  manière  que  pour  le  procédé  au  charbon.  On  durcit 
ensuite  la  gélatine,  en  l'immergeant  pendant  5  minutes  dans  une 
solution  d'alun  à  7  p.  iOO,  et,  après  un  lavage  à  l'eau  froide,  il  n'y 
a  plus  qu'à  laisser  sécher.  On  a  ainsi  une  épreuve  au  charbon  non 
inversée,  sans  être  obligé  de  recourir  aux  manipulations  délicates 
et  fastidieuses  du  double  transfert.  Toutefois,  les  images  obtenues 
par  ozolypie  sont  moins  fines,  moins  exactement  détaillées  que 
celles  qu'on  obtient  par  l'impression  directe  du  papier  mixtionné. 

Il  nous  reste  à  expliquer  pourquoi  le  nom  d'ozolypie  a  été  donné 


268 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


au  procédé  de  M.  Manly.  L'inventeur  supposait  que,  sous  l'action 
de  la  lumière,  le  bichromate  de  potasse  perdait  une  partie  de  son 
oxygène,  qui  venait  alors  se  fixer  sur  le  protoxyde  de  manganèse 
du  sulfate,  pour  former  un  peroxyde.  Sous  l'action  de  l'acide  acé- 
tique imprégnant  la  mixtion  gélatineuse,  ce  peroxyde  reformait 
un  nouveau  sel  de  protoxyde,  et  l'oxygène  dégagé  se  fixait  sur  la 
gélatine,  en  l'insolubilisant.  L'oxygène  ainsi  mis  en  liberté  sous 
l'influence  de  l'acide  acétique  était  considéré  par  M.  Manly  comme 
se  trouvant  à  l'état  d'ozone.  De  là  le  nom  donné  au  procédé. 

La  théorie  qui  vient  d'être  résumée  a  d'ailleurs  été  contestée. 
M.  Haddon  a  montré  que  l'action  de  la  lumière  sur  le  mélange  de 
bichromate  de  potasse  et  de  sulfate  de  manganèse  n'a  pas  pour 
efi'et  de  produire  un  peroxyde,  mais  bien  de  former  un  chromate 
neutre  de  potasse  et  un  chromate  de  manganèse.  Sous  l'action  de 
l'acide  acétique,  ce  chromate  de  manganèse  perd  son  acide  chro- 
mique,  qui  agit  alors  sur  la  gélatine,  en  la  rendant  insoluble. 

En,  1904,  le  baron  von  Hùbl  a  découvert  de  nouvelles  réactions 
qui  ont  rendu  le  procédé  plus  rapide,  en  abrégeant  le  contact  des 
deux  papiers.  Le  bain  sensibilisateur  de  l'image  primaire  reste 
le  même,  mais  le  bain  à  l'acide  acétique  et  à  Fhydroquinone  dans 
lequel  devait  éti^  plongé  le  papier  mixtionné  est  remplacé  par 
l'une  des  combinaisons  suivantes,  d'après  la  nature  du  cliché  : 


Eau 

IMAGE  A  CONTRASTES 

IMAGE  NORMALE" 

IMAGE  DOUCE 

1.000  ce. 
2  gr. 

1.000  ce. 
2  gr. 

1.000  ce. 
2gr. 
4s%5 

Acide  chlorhydrique.. 
Sulfate  de  fer 

L'épreuve  primaire  étant  bien  détendue  dans  l'eau  pure,  le  papier 
mixtionné  est  plongé  dans  le  bain  acide,  mais  ne  doit  y  séjourner 
que  30  secondes.  Au  bout  de  25  secondes,  on  introduit  dans  ce 
même  bain  l'image  primaire  et  on  l'applique  contre  le  papier  géla- 
tine, en  opérant  rapidement,  puisqu'on  ne  dispose  plus  que  de 
5  secondes.  Les  deux  papiers  accolés  sont  mis  sous  presse  entre 
deux  buvards,  et  le  dépouillement  peut  commencer  une  demi-heure 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  269 

après.  En  ajoutant  aux  bains  une  petite  quantité  de  chlorure  d'am- 
monium, on  augmente  beaucoup  les  contrastes. 

Ozotypie  à  la  gomme.  — ^  Le  procédé  à  la  gomme  bichromatée 
présente,  comme  le  procédé  au  charbon,  l'inconvénient  de  laisser 
l'opérateur  dans  l'incertitude  sur  la  durée  exacte  qu'il  convient  de 
laisser  à  l'impression,  l'image  étant  souvent  invisible  à  travers  la 
couche  colorée.  Il  n'en  est  pas  de  même  avec  Fozotypie. 

L'image  primaire  est  préparée  de  lamême  manière  que  s'il  s'a- 
gissait d'une  ozotypie  au  charbon.  L'épreuve  primaire,  étant  exé- 
cutée comme  nous  l'avons  expliqué  dans  le  paragraphe  précédent, 
est  recouverte  du  pigment  gommé,  que  l'on  prépare  en  mélan- 
geant : 

A.  Eau iOO  gr. 

Gomme  arabique 40  gr. 

Couleur  d'aquarelle 1  à  2  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Sulfate  de  cuivre 20  gr. 

G.    Eau 100  ce. 

Alun  de  chrome 10  gr.    ■ 

A  30  ce.  de  la  solution  A,  on  ajoute  4  ce.  de  la  solution  B  et  1  ce. 
de  la  solution  G.  Ce  mélange  est  étendu  sur  l'épreuve  primaire 
comme  s'il  s'agissait  de  préparer  un  papier  à  la  gomme  bichro- 
matée, mais  le  plus  rapidement  possible,  d'abord  avec  la  brosse 
en  soies  de  porc,  puis  avec  le  blaireau  en  éventail  pour  achever 
d'égaliser  la  couche.  On  laisse  sécher  dans  l'obscurité  et  on  dé- 
pouille dans  l'eau  froide.  Les  retouches  locales,  s'il  y  a  lieu,  s'exé- 
cutent comme  dans  le  procédé  à  la  gomme  bichromatée.  Si  l'eau 
froide  ne  suffît  pas  pour  dépouiller  le  pigment,  on  en  élèvera  peu 
à  peu  la  température. 

Les  solutions  B  et  C  peuvent  être  remplacées  par  : 

D.    Eau 30  ce. 

Acide  acétique  cristallisable 2  — 

Hydroquinone   .' . .       1  gr. 

Sulfate  de  fer 0=r^5  à  5  gr. 

Dans  ce  cas,  on  ajoute  1  partie  de  la  solution  D  à  10  parties  de 
la  solution  de  gomme  pigmentée  A. 

Procédé  ozobrome.  —  Malgré  ses  avantages  indéniables,  l'ozo- 
typie  n'a  pas  obtenu  tout  le  succès  qui  lui  paraissait  d'abord  assuré. 


270  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRARIIIE 

11  est  vrai  que  ses  résultats  n'ont  p£^s  la  perfection  et  la  finesse  des 
épreuves  au  charbon  par  transfert,  car  il  se  produit  toujours  une 
certaine  diffusion,  qui  se  fait  surtout  remarquer  dans  les  menus 
détails.  11  est  vrai  aussi  que  Tozotypie  laissait  subsister  quelques 
inconvénients  communs,  jusqu'à  ces  derniers  temps,  à  tous  les 
procédés  pigmentaires  :  le  papier  ozotype,  de  même  que  le  papier 
à  la  gomme  bichromatée  et  les  papiers  au  charbon,  avec  ou  sans 
transfert,  doit  être  sensibilisé  la  veille  de  l'emploi  et  ne  se  con- 
serve plus  en  cet  état,  d'oià  l'obligation,  pour  l'amateur,  de  procé- 
der à  cette  préparation  au  fur  et  à  mesure  de  ses  besoins  et  de 
courir  le  risque  de  subir  une  perte  sèche  si  le  mauvais  temps 
ou  des  occupations  imprévues  viennent  à  l'empêcher  de  mettre  à 
exécution  ses  projets  de  tirage.  Enfin,  les  papiers  sensibilisés  au 
bichromate  sont  relativement  lents.  Quoique  plus  sensibles  que  le 
papier  au  chlorure  d'argent,  ils  ne  le  sont  pas  suffisamment  pour 
se  prêter  aux  tirages  à  la  lumière  artificielle  et  surtout  aux  agran- 
dissements qui  sont  d'un  si  bel  effet,  exécutés  par  des  procédés 
pigmentaires.  Ces  difficultés  ont  été  heureusement  résolues,  en 
substituant  à  l'action  réductrice  de  la  lumière  le  pouvoir  égale- 
ment réducteur  de  l'argent  très  divisé  qui  constitue  les  images  au 
gélatinobromure. 

En  1881,  M.  Louis  Warnecke  avait  fait  breveter  un  procédé  dans 
lequel  il  utilisait  l'insolubilisation  que  le  révélateur  à  l'acide  pyro- 
gallique  fait  subir  à  la  gélatine  en  contact  avec  l'argent  réduit.  Un 
pigment  coloré  était  incorporé  aune  émulsion  au  gélatinobromure, 
et  l'épreuve  impressionnée,  puis  développée  au  pyrogallol,  était 
dépouillée  dans  l'eau  chaude.  L'impossibilité  de  suivre  le  dévelop- 
pement de  la  couche  opaque  fît  abandonner  cette  combinaison,  ou 
quelques  auteurs  ont  voulu  voir,  à  tort  semble-t-il,  le  germe  de  la 
méthode  inventée,  en  1906,  par  M.  JManly,  qui  lui  donna  le  nom  de 
procédé  ozobrome. 

Le  positif  est  d'abord  tiré  sur  papier  au  gélatinobromure  ordi- 
naire et  développé  comme  d'habitude.  On  l'applique  ensuite  con- 
tre une  feuille  de  papier  au  charbon  imbibée  d'une  solution  spé- 
ciale; on  chasse  les  bulles  d'air  à  coups  de  raclette,  et,  au  bout 
de  30  ou  40  minutes  de  contact,  on  procède  au  dépouillement  dans 
l'eau  chaude.  Si  l'image  pigmentaire   est   dépouillée  lorsqu'elle 


LES   PROCÉDÉS   PIGME  NTAIRES  271 

adhère  encore  au  positif  primaire,  elle  se  superpose  à  ce  dernier, 
que  l'on  peut  effacer  -à  l'aide  du  persulfate  d'ammoniaque  ou  du 
réducteur  de  Farmer.  Mais  on  peut  aussi  détacher  la  couche  pig- 
mentée du  positif  au  bromure  et  l'appliquer  sur  une  feuille  de 
papier  gélatine  de  simple  transfert. 

Ce  procédé  est  basé  sur  une  réaction  dont  les  éléments  n'ont  pas 
été  divulgués  par  la  G'"  Ozotype,  mais  qu'il  est  cependant  facile  de 
deviner.  En  effet,  une  maison  allemande  faisait  breveter,  en  1904, 
un  procédé  analogue,  qui  d'ailleurs  n'a  pas  été  mis  dans  le  com- 
merce, et  dans  lequel  l'insolubilisation  de  la  mixtion  colorée  résul- 
tait de  Faction  produite  sur  la  gélatine  par  un  ferricyanure  double 
réduit  en  présence  de  l'argent  divisé  de  l'image  primaire  au  gélati- 
nobromure. Sur  ces  données,  M.  H.  Quentin  est  parvenu  à  recons- 
tituer, sinon  les  formules  mêmes  de  M.  Manly,  du  moins  une  mé- 
thode qui  conduit  à  des  résultats  équivalents. 

Le  papier  au  charbon  est  plongé,  pendant  2  minutes  environ,  dans: 

Solution  de  bichromate  de  potasse  à  10  pour  100 25  ce. 

—  de  ferricyanure  de  potassium  à  10  pour  100. .     50  — 

—  de  bromure  de  potassium  à  10  pour  100 10  — 

En  augmentant  la  dose  de  bichromate,  on  obtient  des  images 
plus  douces.  En  diluant  le  bain,  la  réaction  est  plus  lente,  mais  les 
résultats  n'en  sont  pas  modifiés.  Une  très  faible  quantité  d'alun 
ajoutée  à  la  solution  rend  le  dépouillement  moins  délicat. 

Le  papier  mixtionné  ainsi  imbibé  est  appliqué  sur  l'épreuve  au 
gélatinobromure  préalablement  développée,  fixée,  durcie  dans  une 
solution  de  formol  à  10  p.  100  et  lavée.  Les  deux  gélatines  une  fois 
en  contact,  on  passe  la  raclette  et  on  éponge,  avec  les  mêmes  pré- 
cautions que  dans  le  procédé  au  charbon. 

Après  une  demi-heure  de  contact,  on  sépare  les  deux  papiers  et 
on  les  lave  abondamment.  Le  papier  mixtionné  est  reporté  sur  une 
feuille  de  papier  pour  simple  transfert,  après  quoi  le  dépouille- 
ment s'effectue  absolument  comme  s'il  s'agissait  d'une  épreuve  au 
charbon  ordinaire. 

On  comprend  facilement  que  l'image  obtenue  dans  ces  condi- 
tions n'est  pas  inversée  :  elle  se  présente  dans  son  vrai  sens,  bien 
qu'elle  n'ait  subi  qu'un  seul  transfert,  parce  qu'elle  a  été  imprimée 
contre  le 'positif,  et  non  pas  sous  le  cliché. 


272  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

Au  premier  abord,  ce  transfert  semble  rendre  l'ozobromie  un 
peu  plus  compliquée  que  l'ozotypie,  qui  n'en  exige  aucun.  En  réa- 
lité, il  en  est  tout  autrement,  car  le  plus  précieux  avantage  de  la 
nouvelle  méthode  est  le  suivant. 

Quand  on  la  sépare  du  papier  pigmenté,  l'épreuve  primaire  au 
gélatinobromure  d'argent  n'est  presque  plus  visible  :  au  lieu  des 
noirs  les  plus  vigoureux^  on  n'y  remarque  plus  que  des  ombres 
d'un  brun  pâle.  Mais  il  suffit  de  la  soumettre  à  l'action  d'un  révé- 
lateur quelconque,  pour  qu'elle  reprenne,  en  même  temps  que  son 
aspect  primitif,  ses  propriétés  réductrices  et  insolubilisantes.  En 
sorte  que  cette  épreuve-type,  soigneusement  lavée  pour  qu'il  n'y 
reste  aucune  trace  du  révélateur  qui  vient  de  la  régénérer,  est  sus- 
ceptible de  créer  de  nouvelles  images  pigmentaires,  sans  qu'il  soit 
nécessaire  de  faire  intervenir  à  nouveau  l'action  de  la  lumière,  et  le 
cliché  négatif  ne  joue  plus  aucun  rôle  dans  la  suite  du  tirage,  qui 
peutêtre  continué  dans  les  mêmes  conditions,  autant  de  fois  qu'il 
le  faut. 

Si  l'on  en  excepte  le  premier  développement  dupositif  au  géla- 
tinobromure, toutes  les  opérations  qui  viennent  d'être  énumérées 
peuvent  s'effectuer,  sans  aucun  inconvénient,  soit  à  la  clarté  d'une 
lampe  ordinaire,  soit  à  la  lumière  diffuse  du  jour. 

Procédé  aux  encres  grasses.  —  iM.  Rawlins  a  fait  connaître,  en 
1904,  sous  le  nom  de  procédé  à  Vhuile,  une  méthode  particulière- 
ment avantageuse  pour  obtenir  des  images  photographiques  indé- 
lébiles, de  couleur  quelconque,  et  permettant  à  l'opérateur  de 
donner  à  ses  œuvres  un  cachet  tout  particulier  d'interprétation 
personnelle. 

Une  épreuve  à  l'huile  n'est  pas  autre  chose,  théoriquement, 
qu'une  image  photocollographique  (V.  chapitre  XVI);  seulement 
cette  image  est  obtenue,  non  plus  par  tirage  mécanique  à  la  presse, 
comme  on  le  fait  dans  l'industrie  phototypique,  mais  bien  en  expo- 
sant à  la  lumière  chacune  des  feuilles  de  papier  destinées  à  rece- 
voir l'impression  à  l'encre  grasse.  De  plus,  dans  le  procédé  Raw- 
lins, l'encrage  s'effectue  à  l'aide  de  pinceaux,  et  non  plus  au  moyen 
de  rouleaux  en  cuir  ou  en  gélatine. 

Tous  les  clichés  peuvent  être  utilisés  pour  le  tirage  à  l'huile; 
cependant  il  les  vaut  mieux  vigoureux  que  doux. 


LES  PROCEDES  PIGMENTAIRES  213 

Le  papier  destiné  aux  impressions  à  l'huile  est  facile  à  préparer. 
ïl  n'y  a  qu'à  couler  une  solution  tiède  de  gélatine  sur  la  feuille 
choisie,  préalablement  détendue  dans  l'eau  et  appliquée  sur  un 
support  bien  horizontal.  On  trouve,  d'ailleurs,  dans  le  commerce 
des  papiers  gélatines  qui  peuvent  parfaitement  servir.  Tels  sont 
les  papiers  de  double  transfert,  en  usage  dans  le  procédé  au  char- 
bon. Quant  au  papier  de  simple  transfert,  il  est  impropre  à  cet  em- 
ploi, parce  que  la  gélatine  dont  il  est  recouvert  a  été  insolubilisée. 

La  sensibilisation  du  papier  gélatine  s'effectue  en  l'immergeant, 
pendant  2  ou  3  minutes,  dans  une  solution  de  bichromate  de 
potasse  à  2  pour  100.  On  le  laisse  ensuite  sécher  dans  l'obscurité. 

Pour  l'impressionner,  lorsqu'il  est  sec,  on  le  met  en  contact  avec 
le  négatif,  dans  le  châssis-presse,  gélatine  contre  gélatine.  Sous 
l'action  de  la  lumière,  une  image  positive  se  dessine,  mais  elle  est 
très  faible  et  d'une  tonalité  qui  varie  suivant  l'encollage  du  papier. 
Aussitôt  que  tous  les  détails  ont  paru,  on  arrête  l'insolation  ;  sous 
un  cliché  normal,  il  faut  à  peu  près  une  minute  de  pose,  en  plein 
soleil,  pendant  l'été. 

L'épreuve  est  alors  plongée  dans  de  l'eau  ordinaire,  que  l'on 
renouvelle  à  plusieurs  reprises,  jusqu'à  ce  qu'elle  ne  se  colore  plus  ; 
on  sera  alors  certain  que  tout  le  bichromate  a  été  éliminé. 

La  feuille  étant  sortie  de  l'eau  et  légèrement  épongée,  si  Ton  exa- 
mine la  couche  impressionnée  sous  une  incidence  assez  inclinée, 
on  dislingue  une  image  en  relief  :  les  parties  correspondant  aux 
noirs  du  négatif  (et,  par  conséquent,  aux  blancs  du  modèle)  sont 
fortement  gonflées  par  l'eau  que  la  gélatine  a  absorbée;  les  zones 
correspondant  aux  transparences  du  négatif  sont,  au  contraire, 
déprimées,  parce  qu'elles  sont  devenues  imperméables  à  l'eau; 
enfin,  les  demi-teintes  sont  traduites  par  des  épaisseurs  variables, 
indices  d'une  imperméabilisation  plus  ou  moins  avancée.  La  sur- 
face étant  ainsi  mouillée  proportionnellement  à  l'éclat  des  parties 
claires  du  modèle,  il  est  facile  de  comprendre  ce  qui  se  produira 
lorsqu'on  appliquera  sur  cette  gélatine  un  pinceau  garni  d'encre 
d'imprimerie.  Le  pigment  gras^  repoussé  par  l'eau,  ne  sera  reten'u 
que  par  la  gélatine  rendue  imperméable  et  ne  s'attachera  qu'aux 
parties  correspondant  aux  noirs  du  positif.  Si  l'on  ne  doit  pas  pro- 
céder de  suite  à  l'encrage  (qui  peut,  sans  inconvénient,  être  indéfi- 


274  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

niment  différé),  il  n'y  a  qu'à  laisser  sécher.  Quand  on  voudra 
ensuite  encrer  l'épreuve,  il  faudra  commencer  par  la  faire  tremper 
dans  l'eau,  pendant  une  heure  ou  deux. 

L'encrage  est  la  phase  la  plus  délicate,  mais  aussi  la  plus  inté- 
ressante, du  procédé  à  l'huile.  Deux  sortes  d'encres  peuvent  être 
utilisées  :  les  encres  t3^pographiques  et  les  encres  lithographiques. 
Les  unes  et  les  autres  sont  composées  d'huile  cuite  et  de  noir  de 
fumée;  mais  les  première^s  sont  plus  fluides,  les  secondes  sont  plus 
dures.  Ni  les  unes  ni  les  autres  ne  doivent  d'ailleurs  être  employées 
telles  quelles,  dans  le  cas  actuel,  car  elles  sont  toutes  trop  épais- 
ses, et  il  convient  de  les  délayer  avec  un  peu  d'huile  cuite,  dans 
des  proportions  variables  selon  l'état  de  la  couche  impressionnée 
et  selon  l'effet  à  réaliser.  On  mêle  l'encre  et  l'huile,  à  l'aide  d'un 
couteau  à  palette,  sur  une  plaque  de  verre  ou  de  porcelaine,  puis 
on  achève  de  rendre  le  mélange  bien  homogène  en  le  travaillant 
au  rouleau  de  cuir  ou,  ce  qui  vaut  mieux,  au  rouleau  en  pâte  des 
graveurs. 

Pour  appliquer  l'encre  sur  l'épreuve,  M.  RawHns  a  imaginé  de 
remplacer  le  rouleau  dont  on  se  sert  en  photocoUographie  par 
des  pinceaux  de'formes  et  de  grosseurs  différentes,  suivant  les 
exigences  du  travail.  Ces  pinceaux,  ou  pochoirs^  sont  en  putois, 
les  uns  droits,  les  autres  coupés  en  biseau  ou  en  pied-de-biche. 

L'épreuve  sortie  de  la  cuvette  est  placée  sur  un  coussin  de  papier 
buvard  mouillé.  Les  gouttelettes  restées  sur  la  gélatine  sont  enle- 
vées doucement  avec  une  mousseline,  et  Ton  commence  l'encrage. 
A  cet  effet  on  prend  un  peu  d'encre  avec  un  pinceau  pied-de-biche. 
On  choisit  un  point  de  l'image  où  se  trouve  une  ombre  intense  et^ 
en  tapotant  légèrement,  on  s'assure  si  l'encre  prend  convenable- 
ment. Cet  essai  suffît  pour  reconnaître  si  la  composition  de  l'encre 
convient  bien  à  l'épreuve.  Si  l'encre  adhère  mal,  c'est  qu'elle  est 
trop  dure  ou  que  la  pose  a  été  trop  courte  :  on  y  remédie  en  ajou- 
tant de  Fhuile  ou  de  l'encre  taille-douce.  Si,  au  contraire,  l'encre 
est  fortement  happée  partout  et  tend  à  produire  une  image  voilée, 
ce  qui  est  l'effet  d'une  surexposition  ou  d'une  encre  trop  fluide,  il 
faut  durcir  celle-ci  par  de  petites  additions  d'encre  lithographique. 
Une  impression  défectueuse  est  d'ailleurs  facile  à  enlever  par  es- 
suyage, à  l'aide  de  chiffons  très  légèrement  glissés  sur  la  gélatine  ; 


LES  PROCEDES   PIGMENTAIRES  275 

après  quoi  on  recommence  avec  un  mélange  d'encres  et  d'huile 
mieux  en  rapport  avec  Tétat  de  la  couche  impressionnée. 

La  gélatine  sur  laquelle  repose  l'encre  grasse  ne  permet  pas 
de  donner  aux  blancs  une  matité  parfaite,  et  l'éclat  de  l'image  en 
est  amoindri;  d'autant  plus  que  les  noirs  ont  un  aspect  luisant, 
qui  nuit  à  leur  profondeur.  En  outre,  la  couche  gélatineuse  peut 
s'altérer,  à  la  longue,  sous  l'influence  de  l'humidité.  On  évite  ces 
inconvénients  au  moyen  du  report.  La  couche  encrée  est  appli- 
quée contre  une  feuille  de  papier  (non  gélatine)  sur  lequel  l'encre 
est  transportée  par  pression,  soit  à  l'aide  d'une  machine  pour 
impressions  en  taille-douce  (v.  fig.  116],  soit  en  frottant  le  papier 
avec  un  objet  dur  à  contours  arrondis,  tel  qu'une  pierre  à  brunir 
ou  un  ébauchoir.  Pour  obtenir  un  beau  report,  il  faut  assurer  uq 
gonflement  assez  considérable  de  la  gélatine  correspondant  aux 
blancs,  en  trempant  l'épreuve  primaire  dans  une  solution  d'am- 
moniaque à  10  p.  100,  à  la  température  de  16  à  20°.  Si  elle  se  gonfle 
mal,  on  l'immerge  dans  l'eau  tiède  pendant  quelques  secondes,  et 
on  la  replonge  aussitôt  après  dans  le  bain  ammoniacal. 

Pour  les  tirages  rapides,  au  jour  ou  à  la  lumière  artificielle,  et 
notamment  pour  l'exécution  des  agrandissements,  le  procédé  Raw- 
lins  peut  être  combiné  avec  l'ozobromie.  L'image  est  d'abord  exé- 
cutée sur  papier  au  gélatinobromure.  Après  développement,  fixage 
et  lavage,  l'épreuve  est  passée  dans  le  bain  au  bichromate  et  au 
ferricyanure  dont  on  se  sert  dans  le  procédé  ozobrome.  Les  noirs^ 
pâlissent  et  sont,  en  même  temps,  rendus  imperméables  à  l'eau, 
donc  susceptibles  de  retenir  l'encre  grasse.  Après  l'encrage,  il  est 
facile  de  faire  disparaître  dans  l'hyposulfite  de  soude  les  dernières- 
traces  de  l'image  primitive,  ou,  au  contraire,  de  la  faire  reparaître 
avec  toute  son  intensité  dans  un  révélateur  quelconque,  si  l'on, 
préfère  combiner  les  deux  effets  produits  par  le  pigment  gras  et 
par  l'image  à  l'argent. 

Procédés  aux  poudres.  —  Ces  procédés  sont  basés  sur  la  pro- 
priété que  possède  la  lumière  de  modifier  les  qualités  hygrométri- 
ques de  certaines  substances.  Si  l'on  frotte  la  surface  im  pressionnée 
avec  un  pinceau  chargé  d'une  couleur  en  poudre,  celle-ci  adhérera 
sur  les  points  qui  sont  hygrométriques  et  collants,  tandis  que  les- 
endroits  secs  ne  la  happeront  pas.  La  nature  du  phototype  à- 


276  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

employer  varie  suivant  que  la  surface  h  recouvrir  est  sensibilisée 
au  bichromate  de  potasse  ou  au  perchlorare  de  fer,  dont  le  mode 
d'action  est  tout  opposé.  Dans  le  premier  cas,  le  phototype  sera 
constitué  par  une  image  positive;  dans  le  second,  ce  sera  un  né- 
gatif ordinaire. 

1°  D'après  un  cliché  positif.  —  On  coule,  sur  une  plaque  de  verre 
opale  : 

Eau 100  ce. 

Glucose 5  gr. 

Dextrine 5  — 

Bichromate  d'ammoniaque 5  — 

Après  dessiccation,  on  expose  la  plaque  sous  un  positif  trans- 
parent. Si  l'on  saupoudre  ensuite  la  plaque  impressionnée  d'une 
couleur  très  finement  broyée,  cette  poudre  adhérera  à  la  couche 
sur  les  points  protégés  de  la  lumière  par  les  opacités  du  diapositif. 
Quant  aux  endroits  placés  sous  les  transparences  du  cliché,  comme 
la  couche  a  perdu  ses  propriétés  hygrométriques,  elle  ne  retiendra 
point  de  pigment.  Sur  les  demi-teintes,  la  poudre  adhérera  faible- 
ment, et,  si  l'exposition  à  la  lumière  a  exactement  duré  le  temps 
voulu,  le-modelé  du  cliché  sera  fidèlement  reproduit. 

Quand  l'image  est  complète,  on  plonge  la  plaque  dans  une 
cuvette  contenant  parties  égales  d'alcool  et  d'acide  chlorhydrique 
et  on  l'y  laisse  jusqu'à  ce  que  tout  le  bichromate  ait  disparu.  On 
fait  sécher,  puis  on  lave  afin  d'éliminer  l'acide.  L'image  est  enfin 
fixée  au  moyen  d'un  vernis  en  couche  mince. 

2°  D'après  un  cliché  négatif.  —  Poitevin  a  découvert  que  les 
propriétés  déliquescentes  du  perchlorure  de  fer  disparaissent  en 
présence  de  l'acide  tartrique,  pour  reparaître  ensuite  sous  l'action 
dé  la  lumière.  Le  sensibilisateur  est  préparé  en  faisant  dissoudre, 
d'une  part,  22  gr.  de  perchlorure  de  fer  dans  60  ce.  d'eau,  et, 
d'autre  part,  8  gr.  d'acide  tartrique  dans  60  ce.  d'eau.  Les  deux 
solutions,  filtrées  séparément,  sont  réunies,  puis  additionnées  de 
80  ce.  d'eau.  Ce  mélange  est  conservé  à  l'abri  de  la  lumière. 

Pour  s'en  servir,  on  en  recouvre  une  glace  dépolie  à  grain  fin, 
et  on  laisse  sécher  pendant  12  heures,  à  l'abri  de  la  lumière  et  de 
la  poussière. 

L'impression  s'effectue  sous  un  négatif  bien  verni;  elle  dure  à 


LES   PROCÈDES  PIGMENTAIRES  277 

peu  près  le  même  temps  qu'avec  un  papier  au  chlorure  d'argent. 
L'image,  très  peu  visible  au  sortir  du  châssis-presse,  se  dessine 
bientôt  nettement,  en  blanc  sur  fond  jaune,  à  mesure  que  les  par- 
ties impressionnées  absorbent  l'humidité  de  l'air. 

On  applique  alors  sur  la  surface  impressionnée  un  blaireau  très 
doux  préalablement  trempé  dans  la  poudre  colorante.  Cette  pou- 
dre ne  se  fixe  que  sur  les  parties  impressionnées,  et  en  quantités 
proportionnelles  à  la  lumière  qui  a  traversé  le  cliché. 

Quand  l'image  a  acquis*  toute  sa  valeur,  on  peut  la  transporter 
sur  papier.  A  cet  effet,  on  la  recouvre  d'une  couche  de  collodion 
normal,  on  la  plonge  dans  l'eau  jusqu'à  disparition  de  l'aspect  hui- 
leux de  la  surface,  puis  on  verse  une  solution  d'acide  chlorhy- 
drique  étendu  d'eau,  pour  détruire  l'adhérence  du  collodion  à  la 
glaqe.  On  lave  ensuite,  afin  d'éliminer  l'acide,  et  on  applique  une 
feuille  de  papier  non  collé  préalablement  humectée.  Cette  feuille 
doit  être  plus  petite  que  la  glace.  On  chasse  les  bulles  d'air  à  l'aide 
de  la  raclette,  on  ramène  tout  autour  de  la  feuille  les  bords  de  la 
pellicule  de  collodion  qui  la  dépassent,  et,  soulevant  le  papier 
avec  précaution,  d'abord  par  l'un  des  coins,  on  enlève  l'image  sans 
la  déchirer. 

La  pellicule  de  collodion  est  maintenant  appliquée  sur  une  feuille 
de  papier  gélatine  préalablement  mouillée.  Quand  le  contact  est 
bien  établi,  on  enlève  la  feuille  qui  a  servi  de  support  temporaire. 
L'image  se  trouve  alors  emprisonnée  entre  le  papier  gélatine  et 
la  couche  de  collodion  qui  la  préserve  extérieurement  et  sert  de 
vernis. 

3°  Images  métalliques  sw  fond  noir.  —  Les  procédés  par  sau- 
poudrage permettent  de  produire  des  effets  analogues  aux  laques 
décorées  du  Japon.  Comme  on  applique  dans  ce  cas  des  poudres 
argentées,  dorées  ou  bronzées  sur  un  fond  noir,  il  faut  effectuer 
le  tirage  sous  un  positif  si  la  couche  est  sensibilisée  au  perchlorure 
de  fer,  et  sous  un  négatif  si  eUe  est  sensibilisée  au  bichromate, 
contrairement  aux  procédés  précédents,  dans  lesquels  le  pigment 
saupoudré  constitue  les  ombres  de  l'image,  et  non  pas  ses  parties 
les  plus  claires. 

On  emploie  généralement  un  cliché  négatif,  et  on  prépare  le 
sensibilisateur  en  faisant  dissoudre  : 

16 


2T8  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

A.  Eau..... 180  ce. 

Sucre  blanc 10  gr. 

Dextrine 10  — 

B.  Eau ' 30  ce. 

Bichromate  de  potasse 3  gr. 

On  mélange  A  et  B,  puis  on  ajoute  10  à  30  gouttes  de  glycérine, 
suivant  que  l'atmosphère  est  humide  ou  sèche. 

Cette  liqueur  est  versée  sur  le  support  noir  placé  horizontale- 
ment. Les  artistes  japonais  se  servent  à  cet  effet  de  planchettes  de 
bois  dur  laqué  qu'il  est  assez  difficile  de  se  procurer  en  Europo^ 
On  y  supplée  soit  à  l'aide  d'une  plaque  de  verre  dont  on  enduit 
l'envers  d'une  couche  de  vernis  noir,  soit  à  l'aide  de  plaques  de 
tôle  émaillées  en  noir.  Le  liquide  étant  uniformément  étalé  à  la 
surface  de  la  plaque,  on  sèche  rapidemant  sur  une  brique  ou  une 
bouillotte  chauffée  à  60°.  La  dessiccation  doit  s'effectuer,  sinon  dans 
Fobscurité  complète,  du  moins  à  la  lumière  artificielle  très  faible, 
par  exemple  à  la  lueur  d'une  bougie.  Il  faut  ensuite  mettre  en 
châssis  et  exposer  à  la  lumière  sans  attendre  que  la  plaque  soit 
refroidie.  Le  tirage  s'effectue  en  8  ou  10  minutes,  à  l'ombre,  sous 
un  négatif  de  densité  moyenne.  Rentrant  alors  dans  le  laboratoire 
faiblement  éclairé,  on  passe  sur  la  couche  sensible  un  pinceau 
doux  chargé  d'une  poudt  e  métallique  très  fine  (poudre  d'alumi- 
nium ou  bronzes  pour  dorures).  L'image  se  dessine  peu  à  peu,  et, 
au  bout  de  10  minutes  environ,  elle  est  complètement  venue.  On 
époussette  alors  rapidement  l'excès  de  poudre,  et  on  fixe  en  por- 
tant la  plaque  en  pleine  lumière.  On  peut  ensuite  recouvrir  immé- 
diatement la  couche  d'un  vernis  blanc,  ou  collodionner  et  laver 
afin  d'éliminer  les  sels  restés  solubles, 

La  finesse  de  la  poudre  employée  a  une  grande  importance.  Une 
poudre  grossière  donne  des  images  dures,  sans  détails;  les  pou- 
dres les  plus  fines  sont  celles  qui  produisent  les  images  les  mieux 
modelées. 

Emaux.  —  Les  procédés  par  saupoudrage  ont  reçu  de  nom- 
breuses applications  dans  l'exécution  des  émaux  photographiques. 
Les  couleurs  employées  dans  ce  cas  sont  des  oxydes  métalliques 
ou  des  émaux  en  poudre.  Ce  pigment  une  fois  déposé  sur  la  cou- 
che impressionnée,  au  lieu  de  transporter  Timage  sur  papier,  on 
la  fixe  sur  une  plaque  de  verre  ou  d'émail.  On  soumet  le  tout  à  la 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  271 

cuisson  dans  un  moufle,  et  l'on  obtient  ainsi  des  images  vitrifiées 
inaltérables. 

Une  autre  méthode,  plus  commode,  consiste  à  faire  usage  de 
papiers  mixtionnés  spéciaux.  Les  papiers  pholocéramiques  que 
l'on  trouve  actuellement  dans  le  commerce  sont  préparés  à  peu 
près  comme  les  papiers  au  charbon  et  contiennent  des  couleurs 
vitriiîables  incorporées  dans  la  gélatine.  La  sensibilisation  et  le 
tirage  s'effectuent  comme  dans  le  procédé  au  charbon,  et  la  couche 
est  ensuite  transférée  sur  le  support  vitrifîable.  On  dépouille  dans 
l'eau  chaude,  et,  après  séchage,  on  soumet  le  tout  à  la  cuisson. 
On  exécute  ainsi  des  émaux  de  grand  feu  ou  des  décorations  sur 
verre  et  sur  porcelaine. 

Le  procédé  au  charbon  permet  aussi  d'exécuter  des  simili -émaux, 
sans  cuisson.  On  emploie,  dans  ce  cas,  du  papier  au  charbon  .ordi- 
naire et  on  effectue  le  transfert,  non  plus  sur  papier,  mais  sur 
verre  ou  sur  porcelaine.  Après  dépouillement  et  achèvement  de 
l'image,  on  la  recouvre  d'un  grand  nombre  de  couches  très  minces 
d'un  vernis  dur  et  transparent,  à  l'ambre  ou  au  copal,  en  ayant 
soin  de  ne  passer  une  nouvelle  couche  qu'après  dessiccation  com- 
plète et  durcissement  de  la  couche  précédente.  Quand  on  a  ainsi 
obtenu  une  couche  assez  épaisse  de  vernis,  on  fait  chauffer,  dans 
le  four  d'un  fourneau  de  cuisine  ou  dans  une  petite  étuve,  jusque 
vers  80°  ou  90°.  Cette  température  est  maintenue  pendant  5  ou 
6  heures.  On  laisse  ensuite  refroidir,  et  on  polit  la  couche  de  ver- 
nis, d'abord  à  la  pierre  ponce,  puis  à  la  potée  d'étain,  jusqu'à  cô 
que  la  surface  soit  devenue  parfaitement  brillante. 

Hydrotypie.  —  Ce  procédé,  inventé  par  Charles  Cros  en  1880, 
est  fondé  sur  la  propriété  que  possède  la  gélatine  bichromatée  de 
devenir  imperméable  à  l'eau  sous  l'influence  de  la  lumière.  Pour 
obtenir  une  image  positive  par  hydrotypie,  il  faut  se  servir  d'un 
cliché  positif.  Si  l'on  expose  sous  ce  phototype  une  plaque  de 
verre  recouverte  de  gélatine  bichromatée,  cette  couche  sera  ren- 
due imperméable  sur  les  points  correspondant  aux  parties  claires 
du  modèle,  tandis  qu'elle  conservera  sa  perméabilité  sur  les 
points  protégés  de  l'action  lumineuse  par  les  opacités  du  cliché 
positif. 

Le  tirage  achevé,  on  lave  la  plaque  afin  d'en  éliminer  les  sels 


280  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

restés  solubles,  et  on  l'immerge  dans  un  colorant  en  solution 
aqueuse,  par  exemple  dans  un  bain  de  fuchsine.  Le  liquide  péné- 
trera facilement  dans  la  gélatine  demeurée  perméable,  mais  il 
sera  repoussé  sur  les  points  qui  ont  reçu  l'impression  lumineuse. 
On  aura  donc  ainsi  une  image  positive,  de  la  couleur  que  l'on 
voudra.  Il  y  a  plus  :  une  fois  la  plaque  ainsi  colorée  par  imbibi- 
tion,  on  pourra  l'appliquer  sur  une  feuille  de  papier  et  en  tirer 
une  série  de  copies,  en  l'imbibant  de  nouveau  quand  l'impression 
sera  devenue  trop  pâle. 

^  Ce  procédé  a  récemment  fait  l'objet  de  diverses  applications  : 
M.  Sanger  Shepherd  l'a  utilisé  dans  des  tirages  en  couleurs,  ainsi 
que  M.  L.  Didier,  qui,  sous  la  dénomination  de  pinatypie,  a  com- 
biné une  série  de  couleurs  spécialement  préparées  dans  ce  but. 

Teinture  photographique.  —  Ce  procédé  d'impression  pig- 
mentaire  consiste  à  transformer  en  un  mordant  tinctorial  la 
substance  qui  constitue  l'image  photographique.  Smith,  en  1854, 
obtenait  des  tons  rouges,  jaunes,  pourpres,  bleus,  verts,  par 
les  solutions  ferriques,  des  tons  chamcris  par  le  bichromate  de 
potasse,  et,  en  combinant  les  deux  procédés  avec  le  campêche, 
il  variait  les  nuances.  La  double  propriété  que  possèdent  les  sels 
de  chrome  d'être  réduits  par  la  lumière  et  de  fixer  certaines 
matières  colorantes  avait  aussi  permis  d'obtenir  quelques  résul- 
tats intéressants.  Persoz,  en  1857,  dans  son  cours  au  Conserva- 
toire des  arts  et  métiers  ;  Kopp,  en  1863,  à  la  Société  industrielle 
de  Mulhouse,  faisaient  mention  de  cette  particularité  et  des  appli- 
cations dont  elle  est  susceptible. 

En  1866,  Endemann  perfectionnait  ce  mode  d'impression,  en 
ajoutant  au  sel  de  chrome  un  sel  de  vanadium,  qui  fournit  un 
mordant  plus  énergique  et  une  plus  grande  sensibilité.  Le  papier 
ou  le  tissu  à  im.primer  est  sensibilisé  dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Bichromate  d'ammoniaque 50  gr. 

Métavanadate  d'ammoniaque  ou  de  soude....  4  — 

Après  dessiccation  dans  l'obscurité  et  impression  à  la  lumière 
sous  un  cliché  négatif,  une  légère  image  positive  est  visible.  Un 
lavage  à  l'eau  froide  suffît  pour  éliminer  les  sels  qui  n'ont  pas  été 
impressionnés  et  ne  laisse  subsister  que  le  mordant,  rendu  inso- 


LES  PROCÈDES  PIGMENTAIRES  281 

lubie  et  fixé  par  Taction  lumineuse.  On  procède  alors  à  la  tein- 
ture, dans  une  solution  chaude  du  colorant  choisi,  qui  ne  se 
dépose  qu'aux  endroits  imprégnés  du  mordant.  M.  Villain,  en 
1892,  appliquait  à  ce  procédé  les  couleurs  d'alizarine  nouvelles, 
plus  économiques  que  celles  qu'avaient  employées  les  précédents 
expérimentateurs.  Il  recommandait,  notamment,  les  colorants 
suivants  :  alizarines  artificielles  pour  violet,  bleu  d'alizarine  S, 
noirs  d'alizarine  S  et  R,  galloflavine,  purpurine,  brun  d'anthra- 
cène,  orangé  d'alizarine,  jaune  d'alizarine,  marron  d'alizarine, 
vert  d'alizarine  S,  alizarine  bleu-indigo  S,  alizarine  Bordeaux, 
alizarines  cyanines,  galléine  et  céruléine.  Certains  de  ces  produits 
peuvent  d'ailleurs  se  mélanger  entre  eux  et  donner  une  gamme 
extrêmement  variée  de  nuances  très  solides. 

Les  procédés  aux  sels  de  fer  fournissent  également  des  mor- 
dants tinctoriaux.  Le  tissu  est  sensibilisé  par  immersion  dans  le 
mélange,  à  volumes  égaux,  des  deux  solutions  ci-après,  récena- 
ment  préparées  : 

A.  Eau 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 37  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Gilrate  de  fer  ammoniacal 37  gr. 

On  sèche  dans  l'obscurité,  on  imprime  sous  le  cliché  négatif  et 
on  fixe  dans  l'eau.  L'image  ainsi  obtenue  est  bleue,  comme  dans 
le  procédé  au  ferro-prussiate.  Le  tissu  est  alors  plongé  dans 
une  solution  au  millième  de  soude  caustique,  dans  laquelle  l'i- 
mage disparaît.  On  lave  d'abord  à  l'eau  chaude,  puis  dans  une 
solution  chaude  de  phosphate  ^de  soude,  et  l'on  rince  de  nouveau 
dans  l'eau  chaude.  Pour  redévelopper  l'image,  on  passe  le  tissu 
dans  une  solution  de  gélatine  à  5  pour  1.000  portée  à  la  tempé- 
rature de  70°.  Au  bout  de  2  ou  3  minutes,  en  enlèveje  tissu,  et 
on  ajoute  à  la  solution  de  gélatine  le  colorant  choisi.  Ainsi,  pour 
obtenir  une  image  en  noir  verdâtre,  on  fera  dissoudre  5  grammes 
de  nigroso-résorcine  dans  un  litre  de  solution  gélatineuse.  On 
élève  la  température  du  bain  à  80°  et,  quand  le  colorant  est  entiè- 
rement dissous,  on  replonge  le  tissu.  L'image  apparaît  rapide- 
ment. Quand  elle  est  à  point,  on  rince  à  l'eau  bouillante  et  on 
éclaircit  les  blancs  par  un  savonnage  à  70°.  Pour  obtenir  une 


282  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

image  bleue,  on  remplacera  la  nigroso-résorcine  par  la  gallocya- 
nine;  le  brun  d'anthracène  donne  des  tons  marrons;  Talizarine 
pour  rouge,  des  tons  violets.  Cette  méthode  est  due  à  M.  Stewart 
F.  Carter. 

D'autres  réactions  ont  été  utilisées.  Ainsi,  les  dérivés  diazoïques 
et  tétrazoïques  sont  susceptibles  de  donner  avec  le  sulfite  de 
soude  des  combinaisons  moléculaires 

R  — Azr=Az  — SO^Na 

qui  ne  possèdent  plus  la  propriété  de  se  copuler  en  formant  des 
matières  colorantes.  Ces  combinaisons  étant  détruites  par  l'action 
photo-chimique,  MM.  Lumière  et  Seyewetz  ont  appliqué  cette 
propriété  à  l'impression  des  dessins  sur  étoffes.  Le  tissu  est 
passé  d'abord  dans  la  solution  du  phénate  alcalin  ou  de  sel  de 
lamine ,  puis  dans  le  diazosulfite  alcalin ,  d'où  il  sort  coloré. 
On  l'expose  alors  à  la  lumière,  sous  un  phototype,  et  il  ne  reste 
ensuite  qu'à  le  laver  à  l'eau  bouillante,  qui  élimine  le  mélange 
non  impressionné,  tandis  que  le  colorant  reste  fixé  sur  les  autres 
parties  de  l'étoffe. 

On  peut  également  tirer  parti  de  ce  fait  que  la  lumière  décom- 
pose les  dérivés  diazoïques,  stables  dans  les  conditions  ordinai- 
res. Le  tissu  est  imprégné  de  la  solution  du  diazoïque,  puis  séché 
et  exposé  à  la  lumière,  sous  un  cliché.  Une  fois  impressionné,  il 
peut  être  soumis  à  deux  sortes  de  développement.  En  effet,  le 
résultat  de  l'action  lumineuse  est  la  formation  d'un  phénol  :  si 
on  passe  l'étoffe  dans  un  bain  de  diazoïque,  le  l^olorant  sera 
produit  sur  les  parties  réduites  par  la  lumière,  tandis  que,  si 
on  passe  en  bain  d'aminé  ou  de  phénate  alcalin,  le  colorant 
ne  se  formera  que  sur  les  parties  préservées  de  l'action  de  Ja 
lumière.   ^ 

M.  Frank  J.  Farrel  sensibihse  la  soie,  préalablement  lavée?  pour 
en  enlever  l'apprêt  et  les  corps  gras,  en  la  plongeant,  à  la  lumière 
jaune,  dans  :  t 

Eau •. 1.000  ce. 

Nilrite  de  soude 5  gr. 

Acide  chlorhydrique 10  ce. 

Le  tissu  y  séjourne  5  à  6  heures,  en  ayant  soin  d'agiter  fré- 


LES  PROCÉDÉS   PIGMENTAIRES  283 

queiïiment,  puis  on  le  met  à  sécher  sur  un  cadre,  dans  l'obscu- 
rité. On  expose  sous  un  cliché  positif.  Le  développement  s'opère 
à  chaud,  33°  environ,  dans  une  solution  contenant  0,3  pour  iOO 
de  soude  caustique  et  0,5  pour  iOO  d'un  hydroxyde  aromatique, 
qui  varie  suivant  la  couleur  à  obtenir.  Ainsi,  le  béta-naphtol 
donne  des  tons  rouge-pourpre,  qui,  après  rinçage  dans  l'eau  et 
lavage  dans  une  solution  diluée  d'acide  acétique,  tournent  à 
l'écarlate.  L'alpha-naphtol  donne  un  ton  bleu  rougeâtre;  le  résor- 
cinal,  un  rouge  brillant,  qui,  après  le  rinçage  à  l'acide  acétique, 
passe  à  l'orangé-or. 

Enfin,  on  a  cherché  à  transformer  en  mordants  tinctoriaux  les 
positifs  aux  sels  d'argent,  en  raison  de  la  facilité  d'emploi  de  ces 
composés,  et  plus  particulièrement  le  gélatinobromure,  en  raison 
de  son  extrême  sensibilité,  qui  rend  possible  l'exécution  des  agran- 
dissements et  les  tirages  rapides  qu'exige  l'industrie.  M.  Traube  a 
reconnu  que  le  chlorure  d'argent  n'a  presque  aucune  affinité  pour 
les  matières  colorantes  et  que  le  bromure  en  possède  fort  peu, 
mais  que  l'iodure  fixe  suffisamment  les  colorants  basiques,  tels 
que  le  bleu  méthylène  et  l'auramine.  Quant  aux  colorants  acides, 
il  n'est  guère  possible  de  les  fixer  de  la  sorte,  à  l'exception  de  Téo- 
sine,  de  ses  dérivés  et  de  quelques  autres  triphénylméthanilines. 
Le  procédé  diachrome  de  Traube  consiste  à  transformer  en  iodure 
d'argent  une  image  positive  au  gélatinobromure.  La  plaque  déve- 
loppée, fixée  et  lavée,  est  plongée  dans  : 

Eau 100  ce.      ■  ■ 

Iodure  de  potassium 5  gr. 

Iode  en  paillettes 2  — 

Elle  y  séjourne  jusqu'à  ce  que  les  noirs  soient  devenus  jaune 
pâle.  On  rince  alors  la  photocopie  et  on  l'immerge  dans  le  bain  de 
teinture,  qui  doit  être  très  dilué  si  l'on  tient  à  conserver  la  pureté 
des  blancs.  Dans  ces  conditions,  la  teinture  est  lente  :  elle  exige 
souvent  24  heures  et  même  davantage,  mais  comme  elle  ne  néces- 
site pas  une  surveillance  fréquente  et  qu'elle  s'accomplit  à  la  tem- 
pérature ordinaire,  cette  durée  n'offre  pas  de  grands  inconvé- 
nients. 

» 

M.  Namias  a  trouvé  dans  les  sels  de  plomb  des  mordants  éner- 
giques et  très  faciles  à  substituer  à  l'image  photographique.  Le 


284  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

positif  au  gélatinobromure  est  blanchi  après  développement,  fixage 
et  lavage,  dans  : 

Eau , 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 10  gr. 

Acétate  de  plomb 5  — 

Acide  acétique 1  ce. 

L'image  pâlit  progressivement.  Quand  elle  est  devenue  entière- 
ment jaune,  on  lave  abondamment,  pendant  une  demi-heure  au 
moins,  afin  d'éliminer  les  dernières  traces  de  sels  qui  risqueraient 
d'occasionner  des  taches  pendant  la  teinture.  Les  noirs  primitifs 
doivent  alors  paraître  parfaitement  blancs.  S'ils  restaient  encore 
jaunes,  il  serait  nécessaire  de  clarifier  l'image,  soit  dans  un  bain 
d'acide  nitrique  très  dilué  (2  ou  3  p.  100),  soit  dans  une  solution 
d'hyposulfite  de  soude  peu  concentrée  (10  p.  iOO  au  plus).  Ni  l'un 
ni  l'autre  de  ces  réactifs  ne  doit  agir  plus  de  10  minutes,  sans  quoi 
les  demi-teintes  de  l'image  seraient  rongées.  La  teinture  s'opère 
à  froid.  M.  Namias  cite  comme  donnant  les  meilleurs  résultats  :  la 
safranine,  le  bleu  méthylène  et  la  fuchsine,  la  combinaison  de  ces 
couleurs  étant  susceptible  de  produire  un  nombre  illimité  de  nuan- 
ces. Le  colorant  doit  être  très  dilué,  pour  ne  pas  ternir  les  blancs. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 

E.  Belin,  Manuel  de  photographie  au  charbon,  Paris  (Gautliier-Villars),  1900. 

E.  GousTET,  le  Procédé  ozobr orne,  Paris  (Gh.  Mendel),  1908. 

F.  DiLLAYE,  le  Tirage  des  épreuves  en  photographie,  Paris  (J.  Tallandier),  1903. 
Geymet,  Traité  pratique  des  émaux  photographiques,  3^  édition,  Paris  (Gautbier- 

Villars),  1885. 
Geymet,  Traité  pratique  de  céramique  photographique,  Paris  (Gauthier-Villars), 

1885. 
R.  d'Héliécourt,  la  Photographie  vitrifiée,  Paris  (Gb,  Mendel). 
A.-F.  VON  HiJBL,  Die  Ozotypie.  Ein  Verfahren  zur  Herstallung  von  Pigment  Ko- 

pieen  ohne  Uebertragung,  Halle  a/ S.  (W.  Knapp). 
W.  KôSTERS,  Der  Gummidruck,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 
J.-A.  LiÉBERT,  la  Photographie  par  les  procédés  pigmentaires.  La  Photographie 

au  charbon  par  transferts  et  ses  applications,  Paris  (Gauthier-Villars),  1908. 
Martin,  les  Procédés  pigmentaires,  édition  de  la  Revue  belge  de  photographie, 

1904. 
A.  Maskell  et  R.  Demachy,  le   Procédé  à  la  gomme  bichromates  ou  Photo- 

aquateinte,  2^  édition,  Paris  (Gauthier-Villars),  1905. 


LES  PROCÉDÉS  PIGMENTAIRES  285 

D.  VAN  MoNCKHOVEN,  Traite  pratique  de  photographie  au  charbon,  Paris  (Mas- 

son  et  Cie),  1886. 
C.  PuYO,  le  Proce'dé  à  l'huile,  nouvelle  édition,  Paris  (Ch.  Mendel),  1911. 
H.  Quentin,  les  Photo-bijoux  (simili-émaux),  Paris  (Ch.  Mendel). 
H.  Quentin,  le  Procédé  Ozotype,  Paris  (Ch.  Mendel),  1903. 
Rouillé-Ladevèze,  Sépia-Photo  et  Sanguine-Photo,  Paris  (Gauthier-Villars),  1894. 

E.  RouYER,  la  Gomme  bichromatée,  Paris  (Ch.  Mendel). 

De  Valicourt,  la  Photographie  sur-métal,  sur  papier  et  sur  verre,  tome  II,  Paris 

(Encyclopédie  Roret),  1851. 
R.  Demachy,  le  Report  des  épreuves  à  l'huile,  Paris  (Ch.  Mendel),  1912. 


288  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE  XIII 

LE    MONTAGE    DES    PHOTOCOPIES 

Calibrage.  —  Les  épreuves  destinées  à  être  montées  sur  des 
cartes  d'un  format  déterminé  doivent  d'abord  être  coupées  exac- 
tement aux  dimensions  voulues.  On  se  sert  pour  cela  d'un  calibre 
(fig.  98)  constitué  par  une  plaque  de  verre  ou  de  métal  ayant  à 


Ci.  Demaria-Lapierre. ,  Cl.  Demaria-Lapieire. 

Fig.  98.  —  Calibres. 

peu  près  le  même  format  que  la  carte,  moins  les  marges  qu'il  con- 
vient de  laisser.  De  plus,  en  cas  de  montage  à  la  colle  liquide,  il 
faut  tenir  compte  de  la  dilatation  que  subira  le  papier,  une  fois 
mouillé. 

On  place  l'épreuve  à  rogner  sur  une  glace  épaisse,  et  on  la 
recouvre  du  calibre,  exactement  repéré  sur  la  partie  à  conserver. 
Appuyant  alors  de  la  main  gauche  sur  le  calibre,  de  manière  à 
l'empêcher  de  glisser,  on  prend  de  la  main  droite  un  canif  bien 
aiguisé  ou  une  pointe  de  cartonnier,  et,  se  servant  des  bords  du 
calibre  comme  d'une  règle,  on  rogne  tout  autour  de  la  photocopie 
ce  qui  excède  le  format  voulu. 

Pour  les  grandes  épreuves,  le  calibre  est  remplacé  par  une 
équerre  en  verre  épais,  dont  l'un  des  côtés  porte  des  divisions  gra- 
vées en  centimètres  et  en  millimètres. 

Les  épreuves  une  fois  coupées,  si  l'on  doit  les  monter  à  la  colle 
liquide,  il  faut  au  préalable  les  faire  détendre  dans  l'eau.  En  outce, 
si  ce  sont  des  papiers  gélatines,  comme  il  est  commode  de  les 
empiler  pour  les  enduire  de  colle,  il  est  nécessaire  que  la  gélatine 


LE   MONTAGE   DES   PHOTOCOPIES 


287 


soit  durcie  à  l'alun  ou  au  formol,  sans  quoi  les  épreuves  risque- 
raient d'adhérer  les  unes  aux  autres  et  de  se  déchirer  quand  on 
voudrait  les  séparer.  Si  donc  les  épreuves  n'ont  pas  été  durcies 
avant  le  séchage,  comme  nous  l'avons  conseillé  (p.  222),  il  sera 
indispensable  de  le  faire  avant  de  les  coller. 


DÉNOMINATION 

DES     CARTES     EMPLOYÉ 

Carte  Mignonnette 3.5x6      c. 

—  Visite 6.3x10.5  — 

—  Malverne 8x16    — 

—  Victoria 8x12.6  — 

—  Album 11x16.5  — 

S    ET   FORMATS 

ES     EN     PHOTOGRAPHIE 

Carte  American 

19x33  c. 

23x29- 
22x34  — 
26x32- 
25x38  — 
28x38  — 
28x45  — 
38x48  — 
38x55  — 
48x58  — 
48x60  — 

—    Family 

—    Excelsior  , , , 

—  Promenade 10.2x21     — 

—  Paris-Portrait...       13x21     — 

—  Amateur 9x12    — 

—  —       13x18    — 

—  —       15x21    — 

—  —       18x24    - 

—  Artiste 20x26    — 

—    Panel 

—    Royal 

—    Portrait  nature 

Montage  à  la  colle  liquide.  —  La  meilleure  substance  à  em- 
ployer pour  cet  usage  est  l'amidon  de  blé,  qui  fournit  une  excellente 
colle  facile  à  préparer  et  qui  se  conserve  longtemps,  quand  on  a 
eu  soin  de  l'additionner  d'un  antiseptique.  On  met  dans  une  cas- 
serole 100  ce.  d'eau  froide  ou  à  peine  tiède  et  8  à  10  gr.  d'amidon, 
que  l'on  délaye  avec  une  cuiller  jusqu'à  ce  que  le  liquide  soit 
devenu  uniformément  laiteux.  On  place  alors  la  casserole  sur  le 
feu,  et  l'on  tourne  le  mélange  avec  la  cuiller,  sans  interruption, 
jusqu'à  ce  que  l'on  sente  s'épaissir  le  liquide,  qui  perd  alors  son 
aspect  laiteux  et  devient  à  demi  transparent.  On  retire  à  ce  mo- 
ment la  casserole  du  feu  et,  après  avoir  encore  un  peu  tourné  la 
pâte,  on  la  laisse  refroidir.  On  y  ajoute,  enfin,  quelques  gouttes  de 
formol,  afin  de  l'empêcher  de  se  putréfier.  Si  l'on  tient  à  avoir  une 
colle  parfaitement  homogène,  il  est  bon  de  la  passer  à  travers  une 
mousseline,  mais  l'essentiel  est  de  ne  pas  cesser  de  tourner  le  lait 
d'amidon,  pendant  la  cuisson. 

Les  épreuves,  bien  détendues  dans  l'eau  (une  immersion  de  5  à 


288  TRAITÉ   GENERAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

6  minutes  est  suffisante),  sont  sorties  une  à  une  de  la  cuvette  et 
empilées  sur  une  glace,  l'image  en  dessous.  Il  faut  les  poser  l'une 
sur  l'autre  en  éventail,  c'est-à-dire  sans  que  leurs  angles  coïnci- 
dent, de  telle  sorte  qu'un  coin  au  moins  de  chaque  épreuve  porte 
directement  sur  la  glace  :  si  tous  les  papiers  étaient  exactement 
superposés,  il  serait  difficile  d'en  soulever  un  sans  endommager 
ceux  qui  se  trouvent  dessous.  Les  épreuves  étant  ainsi  réunies,  on 
presse  légèrement  le  paquet,  de  manière  à  chasser  l'excès  d'eau 
qu'elles  ont  retenue,  et  l'on  enduit  de  colle,  avec  un  pinceau  large 
et  plat,  celle  qui  se  trouve  placée  au  dessus.  On  la  soulève  ensuite, 
en  glissant  l'ongle  ou  la  pointe  d'un  canif  sous  le  coin  en  contact 
direct  avec  le  verre.  Tenant  alors  l'épreuve  des  deux  mains  et 
rapprochant  légèrement  ses  deux  extrémités,  de  manière  qu'elle 
soit  un  peu  courbée,  on  la  dépose  sur  le  carton,  d'abord  par  le 
milieu,  après  quoi  on  laisse  retomber  lentement  les  deux  extré 
mités.  Ce  tour  de  main  a  pour  but  de  bien  placer  l'épreuve  sur 
le  carton.  Néanmoins,  si  elle  ne  se  trouve  pas  exactement  dans 
la  position  voulue,  on  la  fera  facilement  glisser,  en  appuyant  les 
doigts  dessus  et  en  exerçant  une  traction  régulière. 

Il  reste  presque  toujours  un  peu  d'air  emprisonné  entre  le  papier 
et  le  carton;  on  le  reconnaît  à  des  cloches  très  apparentes,  que 
l'on  fait  disparaître  en  appliquant  sur  l'épreuve  une  feuille  de 
buvard  blanc  bien  propre  que  Ton  frotte  en  tous  sens,  soit  avec  la 
paume  de  la  main,  soit  avec  un  coupe-papier,  soit  avec  un  rouleau 
de  caoutchouc.  On  laisse  ensuite  sécher. 

On  enduit  alors  de  colle  la  seconde  épreuve;  on  la  saisit,  comme 
la  première,  en  soulevant  l'angle  en  contact  avec  la  glace,  et  l'on 
recommence  les  manipulations  qui  viennent  d'être  décrites. 

Satinage. —  Les  photocopies  montées  à  la  colle  liquide  perdent 
généralement  une  partie  de  leur  brillant,  une  fois  sèches.  De  plus^ 
le  carton,  inégalement  dilaté  par  l'humidité,  reste  gondolé.  Autant 
pour  donner  le  lustre  aux  épreuves  que  pour  redresser  leur  sup- 
port, les  photographes  ont  l'habitude  de  les  satine?^,  à  l'aide  de 
presses  spéciales.  Le  satinage  s'opère  à  froid  ou  à  chaud. 

La  presse  à  satiner  à  froid  est  ordinairement  constituée  par  une 
plaque  de  fonte  polie  sur  laquelle  un  rouleau  de  même  métal  est 
serré  plus  ou  moins  fortement  au  moyen  de  vis  de  réglage.  On  fait 


LE  MONTAGE   DES  PHOTOCOPIES 


28^- 


passer  l'épreuve  entre  la  plaque  et  le  rouleau,  et  le  laminage  qu©  . 
subit  le  carton  le  redresse  complètement.  L'épreuve  satinée  à  froid 
présente  une  surface  lisse,  d'un  très  bel  effet  dans  les  grands  for- 
mats. Pour  les  petites  cartes,  le  public  préfère  le  plus  souvent  une- 
surface  brillante,  qui  s'obtient  par  le  satinage  à  chaud. 

La  fig.  99  représente  une  presse  combinée  de  manière  à  satiner 
soit  à  froid,  soit  à  chaud.  Elle  se  compose  de  deux  cylindres  métal- 


liques, l'un  poli  et  l'autre  cannelé,  formant  laminoir.  Une  vis  com- 
mandée par  un  volant  règle  la  pression.  Un  autre  volant,  muni 
d'une  manivelle,  sert  à  mettre  les  cylindres  en  mouvement.  L'é- 
preuve est  passée  entre  les  rouleaux  de  telle  sorte  que  l'image  soit- 
en  contact  avec  la  surface  polie,  tandis  que  le  dos  du  carton  porte 
sur  la  surface  cannelée,  dont  le  rôle  est  de  faciliter  l'entraînement- 
régulier.  En  chauffant  le  cylindre  poli,  au  moyen  d'une  rampe  à 
gaz  ou  de  lampes  à  alcool,  on  rend  l'épreuve  plus  brillante.  Il  faut 
éviter  cependant  que  le  rouleau  soit  chauffé  au  delà  de  60°  ou  70°. 
Une  température  trop  élevée  roussirait  le  papier  ou  le  détacherait 
du  carton.  C'est  pourquoi  un  thermomètre  est  adapté  au  socle  de- 
la  presse. 

Certaines  presses,  destinées  uniquement  au  satinage  à  chaud, 
se  composent  seulement  d'un  rouleau  cannelé  et  d'un  couteau  fixe 
poli  que  l'on  fait  chauffer  au  gaz  ou  à  l'alcool.  Dans  ce  cas,  il  est- 
nécessaire  de  faciliter  le  glissement  des  cartes,  car  le  moindre- 

17 


290  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

arrêt  se  traduirait  par  des  raies  luisantes  indélébiles.  On  enduit,  à 
cet  effet,  la  surface  de  l'image  de  cire  ou  de  savon.  Le  plus  simple 
est  de  frotter  un  morceau  de  savon  de  Marseille  sur  une  pièce  de 
drap  ou  de  flanelle,  jusqu'à  ce  que  l'étoffe  paraisse  bien  graissée. 
On  en  frotte  alors  la  surface  de  l'épreuve. 

Montage  à  sec.  —  Les  épreuves  mouillées  s'allongent  un  peu 
plus  dans  un  sens  que  dans  l'autre,  et  il  en  résulte  une  légère 
déformation  de  l'image,  sans  inconvénient  dans  la  plupart  des  cas, 
mais  qu'il  est  cependant  nécessaire  d'éviter  dans  les  reproductions 
de  haute  précision,  et  même  dans  les  grands  portraits,  le  visage 
se  trouvant  quelque  peu  aminci  ou  élargi,  suivant  le  sens  dans 
lequel  le  papier  a  été  mis  sous  le  cliché.  Le  montage  humide  pro- 
voque également  le  gondolage  du  carton,  et  le  seul  moyen  d'y 
remédier  est  le  satinage.  Encore  cette  opération  ne  convient-elle 
pas  aux  papiers  artistiques  dont  la  surface  est  veloutée.  En  outre, 
les  supports  souples,  tels  que  certains  papiers  feutrés,  ne  se  ^prê- 
tent pas  à  ce  mode  de  montage.  Du  reste,  les  papiers  à  la  gomme 
bichromatée  sont  difficiles  à  bien  coller  à  Fétat  humide,  en  raison 
de  l'extrême  fragilité  du  pigment.  Enfin,  la  colle  liquide  sert  quel- 
quefois de  véhicule  à  diverses  substances  solubles  restées  dans 
la  pâte  du  carton,  et  c'est  là  une  cause  fréquente  d'altération  des 
images. 

Tous  ces  motifs  font  préférer  dans  bien  des  cas  le  montage  à  sec, 
qui  consiste  à  remplacer  la  colle  liquide  par  un  adhésif  fusible  à 
une  température  peu  élevée.  L'idée  de  cette  combinaison  remonte 
au  moins  à  1867.  A  cette  époque,  Robinson  appliquait,  au  dos  de 
l'épreuve  ainsi  que  sur  le  carton,  une  colle  au  caoutchouc  dissous 
dans  la  benzine.  Après  la  mise  en  contact,  il  faisait  adhérer  en  pas- 
sant à  la  presse  à  satiner*.  Dobler,  en  1895,  vendait  de  la  gutta- 
percha  en  feuilles  très  minces  destinées  à  servir  d'adhésif  à  sec  : 
on  en  coupait  un  morceau  de  la  dimension  de  l'épreuve,  on  le 
plaçait  entre  le  papier  et  le  carton,  et  on  passait  sur  le  tout  un  fer 
à  repasser  modérément  chauffé.  Plus  récemment  MM.  Derepas  ont 
combiné  un  adhésif  à  la  gomme  laque,  ainsi  qu'une  presse  spé- 
ciale très  bien  comprise. 

1.  Britisk  Journal  of  Photography,  1S67,  p.  311. 


LE   MONTAGE   DES   PHOTOCOPIES  291 

M.  Briand  a  fait  connaître  le  mode  de  préparation  d'un  adhésif 
qui  donne  de  bons  résultats  : 

Gomme  laque  blanche ,  30  gr. 

Gomme  élémi ; 3  — 

Baume  du  Canada  sirupeux 5  — 

Glycérine 3  — 

Alcool  à  brûler,  1er  choix 100  ce. 

On  dissout  d'abord  dans  la  moitié  de  l'alcool  la  gomme  élémi  et  le 
baume  du  Canada,  et  dans  l'autre  moitié  la  gomme  laque.  On  mé- 
lange les  deux  solutions  et  l'on  ajoute  la  glycérine. 

Les  pellicules  adhésives  que  Ton  trouve  dans  le  commerce  sont 
constituées  par  des  feuilles  de  papier  très  mince,  comme  le  papier 
des  copie-lettres,  que  l'on  a  trempées  dans  une  solution  analogue 
à  la  précédente. 

Pour  procéder  au  montage,  on  réunit  d'abord  l'adhésif  et  l'é- 
preuve. On  prend  une  feuille  adhésive  un  peu  plus  grande  que 
l'épreuve  et  on  applique  celle-ci  face  en  dessous  sur  une  surface 
lisse,'  telle  qu'un  carton  bien  sec.  Avec  un  petit  fer  spécial,  préa- 
lablement chauffé  sur  une  lampe  à  alcool,  on  fait  adhérer  par  un 
point  l'épreuve  à  l'adhésif  :  une  légère  pression  du  fer  chaud  est 
suffisante.  L'épreuve  et  l'adhésif  ainsi  accouplés  sont  alors  calibrés 
simultanément  à  l'aide  d'un  calibre  en  verre  ou  en  zinc.  On  place 
ensuite  l'épreuve  sur  le  carton  support  que  l'on  a  choisi,  en  ayant 
soin  qu'elle  s'y  trouve  exactement  dans  la  position  voulue.  On  la 
maintient  d'une  main,  pendant  que  de  l'autre  on  la  fixe  provisoi- 
rement en  y  appliquant  le  petit  fer  chaud.  On  évite  ainsi  le  dépla- 
cement de  l'épreuve  au  moment  de  la.  placer  sur  le  plateau  de  la 
presse. 

La  presse  (fig.  100)  rappelle  un  peu,  par  son  aspect  général,  les 
appareils  à  copier  les  lettres;  seulement,  le  plateau  supérieur  est 
creux  et  contient  une  rampe  à  gaz  ou  un  réchaud  à  alcool.  On  y 
adapte  à  volonté,  soit  une  plaque  de  zinc  nickelé,  pour  les  épreuves 
brillantes,  soit  une  plaque  dépolie,  pour  les  épreuves  mates.  La 
presse  eff'ectue  ainsi  à  la  fois  le  montage  et  le  satinage.  Un  ther- 
momètre indique  la  température,  qui  doit  être  réglée  selon  la  nature 
des  épreuves  : 

Papiers  au  charbon 65° 


292  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

Papiers  au  citrate de  75°  à  80° 

—  à  Talbuinine 90° 

—  au  gélalinobromure 90*> 

—  mats  genre  platine 9ô° 

La  pression  doit  être  assez  forte,  sans  exagérer  cependant,  et 
dure  environ  5  secondes.  Cependant,  pour  coller  les  papiers  au 
gélatinobromure  de  forte  épaisseur,  11  faut  prolonger  la  pression 
de  15  à  20  secondes. 


Cl.  Demaria-Lapierre. 

Fig.  100.  —  Presse  pour  le  montage  à  sec. 


La  même  presse  sert  également  à  produire  des  gaufrages  ou 
estampages,  sur  des  carions  lisses  ou  graines,  en  intercalant  des 
plaques  de  formes  et  de  surfaces  diflerenles  limitant  la  pression  à 
une  partie  seulement  du  support. 

L'emploi  d'une  presse  particulière  n'est  pas  absolument  indis- 
pensable pour  monter  les  épreuves  à  chaud,  et  Ton  réussit  parfai- 
tement avec  un  simple  fer  à  repasser  modérément  chauffé,  en 
prenant  la  précaution  d'interposer  une  feuille  de  papier  entre  le  fer 


LE  MONTAGE   DES   PHOTOCOPIES  238 

chaud  et  l'épreuve.  On  peut  même  se  passer  de  feuilles  impre'gnées 
d'adhésif,  et  appliquer  au  pinceau  la  solution  alcoolique  de  gomme 
laque  et  de  baume  indiquée  par  M.  Briand.  Toutefois,  cette  mixture 
ne  doit  pas  être  passée  directement  au  dos  d'une  épreuve  ordinaire, 
car  elle  tacherait  l'image.  Il  faut,  au  préalable,  enduire  le  papier 
d'un  encollage  destiné  à  empêcher  la  pénétration  de  la  solution 
alcoolique.  On  appliquera  donc  au  verso  des  épreuves  la  solution 
suivante,  également  indiquée  par  M-  Briand  . 

Eau 1.000  ce. 

Gomme  arabique 200  gr. 

Formol 50  ce. 

Glycérine 15  — 

On  laisse  sécher  les  épreuves  ainsi  gommées,  et  l'on  y  étend  au 
pinceau  la  solution  adhésive.  On  fait  sécher  cette  première  couche 
et  on  en  passe  ensuite  une  seconde.  Pour  coller  l'épreuve,  il  suffît 
alors  de  l'appliquer  sur  le  support  qui  doit  la  recevoir  et  de  passer 
un  fer  chaud,  en  interposant  une  feuille  de  papier  blanc  On  soumet 
enfin  le  tout  à  une  forte  pression,  par  exemple  sous  une  presse  à 
copier. 

Pour  détacher  de  son  support  une  épreuve  miontée  à  chaud,  il 
suffit  de  la  faire  chauffer  modérément  :  le  papier  se  sépare  de  lui- 
même. 

Emaillage.  —  Les  épreuves  tirées  sur  papier  gélatine  sont  sus- 
ceptibles d'acquérir  un  aspect  très  brillant,  sans  passer  par  la  presse 
à  satiner.  11  suffît  à  cet  effet  de  les  appliquer  toutes  mouillées  sur 
une  surface  polie  et  de  les  y  laisser  sécher.  Cet  aspect  miroitant, 
quoique  fort  commun,  est  recherché  par  beaucoup  d'amateurs,  sur- 
tout pour  les  images  de  très  petit  format.  Aussi  convient-il  d'indi- 
quer la  manière  de  l'obtenir,  malgré  son  caractère  peu  artistique. 

On  trouve  dans  le  commerce  des  plaques  de  tôle  laquée  très  bril- 
lantes destinées  à  l'émaillage  des  épreuves,  mais  on  peut  se  servir 
aussi  d'une  glace  bien  polie,  à  la  condition  de  l'enduire  au  préalable 
d'une  substance  propre  à  empêcher  l'adhérence  du  papier  géla- 
tine. Il  suffit  pour  cela  de  frotter  la  glace  avec  un  tampon  de  coton 
couvert  de  talc  en  poudre,  puis  avec  un  second  tampon  bien  propre 
pour  enlever  toute  trace  visible  de  talc.  On  remplace  quelquefois 
le  talc  par  : 


294  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Benzine 500  ce. 

Cire  de  spermaceti 5  gr. 

Cette  solution  est  appliquée  sur  la  glace  au  moyen  d'un  tampon 
d'ouate.  Quand  toute  la  surface  en  est  couverte,  on  la  frotte  avec 
un  morceau  de  flanelle. 

L'épreuve  bien  imprégnée  d'eau  est  appliquée,  du  côté  gélatine, 
contre  la  surface  polie.  On  pose  sur  le  papier  un  morceau  de  toile 
cirée  ou  caoutchoutée,  que  l'on  presse  en  tous  sens  à  l'aide  d'une 
raclette  ou  d'un  rouleau  souple,  de  manière  à  chasser  toutes  les 
bulles  d'air  interposées  entre  la  gélatine  et  la  plaque.  On  enlève 
ensuite  la  toile  imperméable,  et  on  laisse  sécher  le  papier  à  l'air 
libre  sur  le  support  poli,  d'où  il  ne  doit  être  séparé  qu'après  par- 
faite dessiccation.  Il  faut  éviter  de  faire  sécher  au  soleil  ou  à  la 
chaleur,  car  l'épreuve  serait  gondolée.  Quand  le  papier  est  bien 
sec,  il  se  détache  de  lui-même. 

Une  fois  émaillée,  l'épreuve  ne  doit  plus  être  mouillée,  car  la 
gélatine  imbibée  d'eau  reprendrait  en  séchant  l'aspect  qu'elle  avait 
avant  l'émaillage,  qu'il  faudrait  recommencer.  On  peut  cependant 
monter  à  la  colle  liquide  une  épreuve  émaillée,  en  procédant  de  la 
façon  suivante.  On  fait  dissoudre  dans  l'eau  de  la  gomme  arabique 
additionnée  d'un  antiseptique,  tel  que  le  thymol  ou  l'acide  salicy- 
lique,  et  on  filtre  sur  du  coton.  Cette  colle  se  conserve  plusieurs 
mois.  On  en  enduit  le  dos  des  épreuves  placées  sur  la  plaque  d'é- 
maillage,  avant  qu'elles  soient  sèches.  La  dessiccation  achevée,  on 
enduit  le  papier  d'une  nouvelle  couche  de  gomme  et  on  l'applique 
aussitôt  sur  le  carton.  L'adhérence  est  facilitée  en  passant  un  rou- 
leau de  caoutchouc  sur  l'épreuve  recouverte  d'une  feuille  de  bu- 
vard blanc.  Le  brillant  de  la  surface  reste  ainsi  parfaitement  intact. 

Retouche  des  photocopies.  —  La  retouche  étant  exécutée  sur 
les  clichés,  il  est  rare  que  les  petites  épreuves  soient  chacune  Lob- 
jet  d'un  travail  long  et  minutieux.  On  se  borne,  le  plus  souvent,  à 
un  simple  repiquage,  qui  consiste  à  enlever  les  petits  points  noirs 
ou  blancs  provenant  soit  de  trous  dans  la  couche  du  négatif,  soit 
de  poussières  interposées  pendant  le  tirage  entre  le  phototype  et 
le  papier  sensible. 

Pour  faire  disparaître  les  points  noirs,  sur  les  papiers  mats,  on 
se  sert  du  grattoir;  sur  les  papiers  brillants,  il  vaut  mieux  appli- 


LE   MONTAGE   DES  PHOTOCOPIES 


295 


quer  du  blanc  gouache  additionné  de  gomme,  posé  par  petites 
touches  à  l'aide  de  pinceaux  très  fins.  Les  points  blancs  sont  bou- 
chés soit  au  crayon,  soit  au  pinceau  chargé  de  couleur  d'aquarelle 
gommée. 

Les  grandes  épreuves  exigent  souvent  une  retouche  plus  impor- 
tante. C'est  le  cas,  notamment,  pour  les  agrandissements,  comme 
on  le  verra  plus  loin  (chap.  XXIII).  Cette  retouche  est  effectuée, 


Cl.  Sté  Franco-Américaine. 


Fig-.  101.  —  Pinceau  à  air. 


suivant  l'effet  à  réahser,  au  moyen  de  crayons,  de  pinceaux  ou  de 
pulvérisateurs  spéciaux  dont  le  plus  parfait  est  le  pinceau  à  air.  Ce 
dernier  instrument  (fîg.  101)  projette  la  couleur  par  l'air  comprimé, 
qui  la  divise  en  minuscules  gouttelettes.  En  approchant  plus  ou 
moins  le  jet  du  papier,  on  obtient  des  traits  vigoureux  ou  des  effets 
d'estompé,  des  demi-teintes  fondues  très  délicates. 

La  retouche  doit  évidemment  être  de  même  teinte  que  l'image. 
Il  est  quelquefois  difficile  d'obtenir  exactement  le  même  ton  par 
des  mélanges  de  couleurs.  Du  reste,  la  retouche  étant  tantôt  plus, 
tantôt  moins  altérable  que  le  pigment  constitutif  de  l'image  pho- 
tographique, il  en  résulte,  à  la  longue,  des  différences  choquantes. 


29C  TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Le  mieux  est  donc  d'utiliser  dans  la  retouche  une  substance  iden- 
tique à  celle  dont  est  formée  la  photocopie.  Ainsi,  pour  retoucher 
une  épreuTC  au  gélatinobromure,  si  l'on  a  eu  soin  d'employer  un 
papier  plus  grand  que  le  cliché,  l'image  se  trouve  entourée  de 
marges  qui  ont  pris  au  développement  le  même  ton  que  les  grandes 
ombres  du  positif.  On  rogne  ces  marges,  et  on  les  met  dans  l'eau 
chaude,  qui  dissout  la  gélatine  colorée  :  il  n'y  a  qu'à  recueillir 
cette  gélatine  et  à  s'en  servir  en  guise  de  couleur. 

De  même,  dans  le  procédé  au  charbon,  la  retouche  devra  être 
exécutée  à  l'aide  de  la  mixtion  prélevée  sur  un  petit  morceau  de 
papier  identique  à  celui  qui  a  servi  au  tirage  de  l'épreuve. 

Coloriage.  —  On  emploie  tantôt  des  couleurs  solides,  tantôt  des 
colorants  en  solutions  aqueuses  ou  alcooliques. 

i.  Peinture  à  l'huile. —  Il  faut  d'abord  étendre  sur  l'épreuve, 
avec  un  blaireau  large  et  fin,  une  solutian  chaude  de  :gélatine  blan- 
che à  3  p.  100.  Quand  ce  médium  est  bien  sec,  on  y  applique  les 
couleurs.  On  se  sert  habituellement  dans  ce  but  de  couleurs  trans- 
parentes ou  laques,  sous  lesquelles  l'image  photographique  reste 
visible.  On  rehausse  seulement  les  grandes  lumières  par  quelques 
touches  de  blanc  d'argent,  pur  ou  additionné  de  jaune.  Quelques 
artistes  emploient  cependant  des  couleurs  opaques,  comme  les 
ocres,  le  jaune  de  chrome,  la  terre  de  Sienne,  etc.,  et  peignent  à 
pleine  pâte,  de  manière  à  faire  complètement  disparaître  la  pho- 
tographie. Il  faut  alors  une  grande  habileté  et  une  connaissance 
parfaite  du  dessin,  pour  éviter  ces  effets  lourds  qui  détruisent 
absolument  la  pureté  des  contours  et  les  délicates  demi-teintes 
caractéristiques  de  l'image  de  la  chambre  noire. 

2.  Peinture  à  Vaquarclle.  —  Les  couleurs  à  l'eau  ne  prennent  pas 
directement  sur  les  papiers  albuminés  et  gélatines.  Cependant,  on 
arrive  généralement  à  les  appliquer,  après  avoir  passé  à  la  surface 
de  l'épreuve  une  pomme  de  terre  fraîchement  coupée.  Néanmoins, 
il  est  préférable  de  recouvrir  l'image  à  colorier  d'un  vernis  tel  que  : 

Alcool ICO  ce.        • 

Gomme  laque  blanche \ 10  gr. 

Cette  solution,  reposée  pendant  24  heures  et  filtrée,  est  placée 
dans  un  vaporisateur  à  l'aide  duquel  on  en  recouvre  l'image,  jusqu'à 


LE  MONTAGE   DES  PHOTOCOPIES  297 

ce  que  sa  surface  paraisse  légèrement  humide.  Le  vernis  est  sec  au 
bout  de  10  minutes  environ,  et  retient  alors  facilement  les  couleurs 
à  l'aquarelle. 

Une  autre  méthode,  applicable  seulement  aux  papiers  gélatines, 
consiste  à  pousser  le  tirage  ou  le  développement  de  manière  à  ob- 
tenir une  image  beaucoup  trop  foncée.  Plongeant  alors  l'épreuve 
dans  l'eau  chaude,  on  en  fait  fondre  la  gélatine,  et  il  ne  reste  plus 
sur  le  papier  qu'une  très  faible  image,  insuffisante  pour  ne  rece- 
voir qu'une  légère  enluminure,  mais  sur  laquelle  l'artiste  pourra 
exécuter  une  peinture  avec  tout  son  modelé. 

Quant  au  papier  à  la  celloïdine,  il  ne  faut  y  appliquer  des  cou- 
leurs à  l'eau  qu'après  y  avoir  étendu  quelques  gouttes  d'essence 
de  térébenthine  dont  on  fait  ensuite  évaporer  l'excès  à  une  douce 
chaleur.  Pour  que  la  couleur  ne  devienne  pas  terne  en  séchant, 
mais  conserve  son  brillant,  il  est  bon  d'y  ajouter  un  peu  de  sirop 
de  gomme  ou  d'albumine. 

3.  Colorants  en  solutions.  —  Les  colorants  solubles,  tels  que  ceux 
désignés  sous  le  terme  générique  de  couleurs  d'aniline,  s'appliquent 
assez  facilement  sur  les  épreuves.  Les  couleurs  solubles  dans  l'al- 
cool prennent  bien  sur  les  surfaces  coUodionnées;  celles  que  l'on 
prépare  en  solutions  aqueuses  s'appliquent  facilement  sur  la  géla- 
tine et  sur  l'albumine.  C'est  d'ailleurs  à  l'aide  de  ces  substances 
que  sont  coloriés  les  diapositifs  destinés  à  la  projection  ou  à  la 
stéréoscopie.  Ces  colorants  font  un  très  bel  effet  sur  les  images  vues 
par  transparence,  mais  sur  les  papiers  destinés  à  être  examinés 
par  réflexion  l'effet  est  souvent  lourd  et  criard,  quand  la  couleur 
est  déposée  au-dessus  de  l'épreuve.  Il  est  préférable  de  colorier  les 
épreuves  par  le  dos.  On  se  sert  alors  de  colorants  solubles  dans 
l'alcool.  L'épreuve  est  placée,  avant  d'être  collée,  sur  un  pupitre  à 
retouche,  l'image  en  dessous,  visible  par  lumière  transmise  à  tra- 
vers le  papier.  La  couleur  est  appliquée  au  dos,  et  la  solution 
alcoolique  traverse  le  papier  de  part  en  part,  mais  ne  pénètre  pas 
la  gélatine.  Le  coloris  joue  ainsi  sous  l'image  photographique,  et 
l'effet  en  est  singulièrement  adouci,  les  petites  défectuosités  dispa- 
raissant sous  l'image,  qui  conserve  ses  moindres  détails,  sans  rien 
perdre  de  son  modelé. 


298  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  FBOTOGRAP^HIE 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


Ganichot,  Retouche  des  épreuves,  3«  édition,  Paris  (Gh.  Mendel). 

Van  Karl,  la  Minif,ture  photographique,  Pa.ris  (Gauthier-Villars) ,  1894. 

Klary,  l'Art  de  retoucher  en  noir  les  épreuves  positives  sur  papier,  Paris  (Gau- 
thier-Villars), 1898. 

Klary,  Traité  pratique  de  la  peinture  des  épreuves  photographiques,  Paris  (Gau- 
thier-Villars), 1899. 

■G.  Mergator,  Anleitung  zum  Kolorieren  photographischer  Bilder  jeder  Art  mit 
tels  Aquai^ell-,  Lasur-,  Oel-,  Pastell-,  und  anderen  Farben,  Halle  a/S.  (W. 
Knapp). 

A.  Schaeffner,  la  Fotominiatura,  Paxis  (Gauthier-Villars),  1991. 


LES  DIAPOSITIFS  299 


CHAPITRE  XIV 

LES    DIAPOSITIFS 

Notions  générales.  —  On  appelle  dîapositifs  ou  images  diaposi- 
tives  (du  grec  Sia,  à  travers)  les  photographies  destinées  à  être 
vues  par  transparence,  comme  les  vitraux.  On  peut  utiliser,  à  cet 
effet,  tous  les  procédés  qui  servent  à  exécuter  des  épreuves  sur 
papier.  Ainsi,  il  est  facile  de  sensibiliser  une  plaque  de  verre  en- 
duite de  gélatine  en  la  plongeant  dans  des  solutions  de  ferricyanure 
de  potassium  et  de  citrate  de  fer  :  on  obtient  ainsi  une  épreuve 
transparente  bleue.  Le  procédé  au  charbon  fournit  de  très  belles 
images  transparentes  inaltérables  :  le  papier  mixtionné  est  alors 
transféré  sur  une  plaque  de  verre.  Néanmoins,  ces  procédés  ne 
sont  utilisés  que  très  exceptionnellement,  et,  en  pratique,  on  s'en 
tient  presque  exclusivement  au  gélatinobromure.  Il  est  facile  d'ob- 
tenir un  positif  transparent  sur  une  plaque  sensible  ordinaire,  soit 
en  l'impressionnant  au  châssis-presse  sous  un  cliché  négatif,  soit  en 
l'exposant  dans  la  chambre  noire  si  l'on  veut  obtenir  une  repro- 
duction réduite  ou  amplifiée.  Dans  ce  cas,  le  cUché  est  placé  en 
avant  de  l'objectif,  derrière  un  verre  dépoli  qui  tamise  la  lumière 
et  l'éclairé  d'une  manière  uniforme.  Une  chambre  à  trois  corps 
(fig.  1)  est  très  commode  pour  cette  opération  :  l'objectif  est  placé 
sur  le  cadre  du  milieu,  et  le  cadre  antérieur  porte  une  série  d'in- 
termédiaires, de  façon  à,  recevoir  les  clichés  de  divers  formats.  Le 
soufflet  antérieur  empêche  la  lumière  d'arriver  à  l'objectif  ail- 
leurs que  par  le  cliché. 

Les  plaques  rapides  ne  sont  que  rarement  utilisées  à  cette  appli- 
cation. Leur  grain  ne  permet  pas  d'obtenir  des  images  très  fines, 
et  quelques-uns  des  détails  du  phototype  risquent  d'être  perdus. 
Aussi  fabrique-t-on  des  plaques  spécialement  préparées  pour  l'exé- 
cution des  diapositifs.  Leur  émulsion,  peu  mûrie,  est  relativement 


300  TRAITE    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

lente,  mais. ce  défaut  de  sensibilité  n'offre  aucun  inconvénient,  et 
les  images  qu'elles  fournissent  sont  d'une  remarquable  finesse.  Ces 
plaques  servent  à  obtenir  les  diapositifs  destinés  à  la  projection, 
au  stéréoscope  ou  au  montage  dans  des  verrières,  sous  forme  de 
vitraux.  Le  ton  de  ces  images  diffère  suivant  le  temps  de  pose  et 
la  composition  du  révélateur.  On  le  modifie,  du  reste,  à  l'aide  de 
divers  virages.  Nous  citerons,  à  titre  d'exemple,  le  mode  de  trai- 
tement des  plaques  Lumière.  La  société  Lumière  fabrique  deux 
sortes  de  plaques  pour  diapositifs  :  les  plaques  à  tons  noirs  et  les 
plaques  à  tons  chauds. 

Plaques  à  tons  noirs.  —  Ces  plaques  sont  plus  lentes  que  celles 
qui  servent  à  l'exécution  des  clichés,  mais  leur  sensibilité  est 
cependant  assez  grande  pour  qu'il  soit  nécessaire  de  ne  les  mani- 
puler qu'en  lumière  rouge  ou  verte.  Elles  sont  indifféremment 
applicables  aux  impressions  par  contact,  par  réduction  ou  par 
agrandissement.  Par  contact,  sous  un  cliché  de  densité  moyenne 
placé  à  50  centimètres  d'un  bec  de  gaz  papillon,  la  durée  du  tirage 
est  approximativement  de  5  secondes.  Le  temps  de  pose  est  natu- 
rellement beaucoup  plus  long,  quand  la  plaque  est  impressionnée 
dans  la  chambre  noire  :  il  varie,  comme  toujours,  suivant  l'inten- 
sité de  la  lumière  et  l'ouverture  de  l'objectif. 

Tous  les  révélateurs  conviennent  au  développement  de  ces  pla- 
ques, mais  le  diamidophénol  leur  est  particulièrement  favorable. 
Le  ton  obtenu  est  un  beau  noir  bleuté,  que  l'on  peut  modifier  par  les 
virages  qui  seront  indiqués  plus  loin.  Le  fixage  est  le  même  que 
dans  les  procédés  négatifs. 

Plaques  à  tons  chauds.  —  Ces  plaques  sont  assez  lentes  pour 
qu'on  puisse  les  manipuler  à  la  clarté  d'une  lampe  ordinaire, 
pourvu  qu'elles  en  soient  éloignées  d'au  moins  3  ou  4  mètres. 
Toutefois,  il  vaut  mieux  se  servir  d'une  lanterne  à  verre  jaune. 
L'émulsion  supporte  des  écarts  de  pose  très  considérables;  ainsi,  le 
tirage  par  contact  à  10  centimètres  d'un  bec  papillon  peut  varier 
de  15  secondes  à  15  minutes,  mais  la  tonalité  de  l'image  varie  sui- 
vant son  degré  d'impression.  Pour  obtenir  des  résultats  constants, 
le  mieux  est  d'employer  pour  source  de  lumière  un  ruban  de  ma- 
gnésium dont  on  fait  brûler  une  longueur  déterminée  à  une  cer- 
taine distance  du  châssis. 


LES  DIAPOSITIFS  301 

Si  Ton  fait  brûler  6  centimètres  de  ce  ruban  (dont  la  largeur  est 
de  2,5  millimètres)  devant  un  cliché  de  densité  moyenne,  on 
obtiendra  un  ton  sépia  chaud,  si  le  châssis  est  placé  à  30  centi- 
mètres du  foyer  lumineux.  Si  on  rapproche  le  châssis-presse,  les 
tons  deviendront  de  plus  en  plus  chauds,  jusqu'aux  tons  sanguine 
et  jaune-rouge.  Si,  au  contraire,  on  l'éloigné,  la  tonalité  de  l'image 
tendra  au  vert.  Ces  nuances  sont  celles  que  l'on  obtient  en  déve- 
loppant la  plaque  dans  le  révélateur  suivant,  dont  il  faut  éviter  de 
modifier  la  formule  : 

Eau 1.000  ce. 

•  Hydroquinone , 10  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 50  — 

Carbonate  de  polasse  pur  el  sec 2  — 

Solution  de  bromure  de  potassium  à  10  p.  100.  10  ce. 

Le  développement  s'accomplit  lentement.  L'image  commence  à 
se  montrer  au  bout  de  3  ou  4  minutes  et  passe  successivement  par 
les  tons  jaune,  rouge,  sanguine,  brun,  sépia,  vert-jaune  et  vert.  En 
même  temps,  son  intensité  s'accroît  graduellement  et  atteint  la 
valeur  voulue  après  un  laps  de  temps  qui  varie  de  4  à  10  minutes, 
suivant  la  durée  de  la  pose.  Le  fixage  s'effectue  comme  d'habi- 
tude. 

La  densité  du  cliché  influe  .sur  la  tonalité  du  diapositif.  A  temps 
de  pose  égal,  on  n'obtiendra  pas  avec  un  cliché  doux  le  même  ton 
qu'avec  un  cliché  vigoureux.  Le  fixage  modifie  légèrement  le  ton 
réalisé  au  développement.  Il  en  est  de  même  du  séchage. 

Si  le  ton  obtenu  n'est  pas  satisfaisant,  il  est  facile  de  le  modifier 
par  un  virage. 

Virages.  —  Après  l'élimination  complète  de  l'hyposulfite  par 
des  lavages  abondants,  la  couleur  de  l'image  diapositive  peut  être 
modifiée  par  l'un  des  procédés  suivants. 

Virage  à  l'or.  —  On  obtient  des  tons  violacés,  d'un  aspect  très 
agréable,  en  immergeant  la  plaque  dans  un  bain  de  virage-fixage 
semblable  à  celui  dont  on  se  sert  dans  le  traitement  des  papiers  au 
citrate. 

Virage  aux  sels  de  fer.  —  On  obtient  une  image  bleu  de  Prusse 
en  passant  le  diapositif  d'abord  dans  une  solution  de  ferricyanure 
de  potassium  à  5  pour  100,  dans  laquelle  les  noirs  deviennent 


302  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

blanc  jaunâtre,  pu^s  en  lavant  la  plaque  et  en  l'immergeant  dans 
une  solution  de  citrate  de  fer  ammoniacal  à  1  pour  100. 

Virages  à  l'urane.  —  On  peut  obtenir  des  tons  très  variés,  en 
cjmbinant  les  solutions  suivantes  : 

A.  Eau 100  ce. 

Ferricyaiiure  de  potassium 1  gr. 

B.  Eau 100  ce. 

Acide  azotique 0  ce.  5 

Azotate  d'urane 1  -gr. 

G.     Eau 100  ce. 

Citrate  <ie  fer  ammoniacal 1  gr. 

D.     Eau 100  ce. 

Molybdate  d'ammonium 1  gr. 

Acide  azotique 1  goutte. 

Les  teintes  réalisées  sont  indiquées  dans  le  tableau  ci-après  : 


TEINTE 

SQL..  A 

SOL.   B 

SOL.    G 

SOL.  D 

Sépia              

50  ce. 
50  - 
50  — 
50  — 
50  — 
50  — 
50  — 
50  — 
50  — 
40  — 

100  ce. 
70  — 
50  — 
40  — 

15  - 
30  — 
50  - 

75  ce. 
75  — 
50  — 
50  - 

50  ce. 
50  — 

Brun-rouge 

Rouge  vif    .    ..,,,...,. 

Vermillon 

Bleu  

Vert-bleu    

Vert-olive       

Vert  pur 

Brun-rouge 

Brun-  sépia 

Tous  ces  mélanges  sont  sensibles  à  la  lumière;  aussi  ne  faut-il 
procéder  au  virage  qu'à  un  jour  faible.  La  plaque  virée  est  lavée 
d'abord  dans  de  Teau  acidulée  par  quelques  gouttes  de  vinaigre, 
puis  dans  l'eau  ordinaire,  pendant  10  à  15  minutes.  Si  les  blancs 
de  l'image  sont  teintés,  on  les  éclaircira  en  passant  la  plaque  d'a- 
bord dans  de  l'eau  contenant  quelques  gouttes  d'une  solution  satu^» 
rée  de  carbonate  de  soude,  puis  dans  un  bain  d'hyposulfite  à  10 
pour  100.  On  lavera  alors  de  nouveau,  pendant  20  minutes- 

Vii^age  au  cuivre.  —  Pour  obtenir  des  tons  rouge-pourpre  très 
solides,  on  prépare  : 


LES  DIAPOSITIFS  303 

A.  Em 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 10  gr. 

B.  Eau lOOcc. 

Sulfate  de  cuivre 10  gr. 

C.  Eau 100  ce. 

Citrate  neutre  de  potassium 10  gr. 

Au  moment  de  l'emploi,  on  ajoute  à  la  solution  A  d'abord  7  ce. 
de  la  solution  B,  puis  6  ce.  de  la  solution  C.  L'image  passe  du 
noir  au  brun  et  au  rouge.  On  termine  par  un  court  lavage. 

Village  far  teinture.  —  L'argent  qui  constitue  l'image  diaposi- 
tive peut  être  transforme,  comme  on  Ta  vu  dans  le  chapitre  XII, 
soit  en  iodure  d'argent,  soit  en  ferricyanure  double  d'argent  et 
de  plomb.  Ces  composés  constituent  des  mordants  tinctoriaux  sus- 
ceptibles de  fixer  divers  colorants. 

Coloriage.  —  Le  coloriage  des  diapositifg  a  perdu  beaucoup  de 
son  intérêt  depuis  l'invention  des  plaques  à  filtres  trichromes,  qui 
permettent  de  réaliser,  directement  et  par  des  manipulations  peu 
compliquées,  la  reproduction  exacte  des  couleurs.  Néanmoins,  on 
recourt  encore  quelquefois  à  la  mise  en  couleurs  de  certains  dia- 
positifs  monochromes.  On  se  sert  dans  ce  but  de  couleurs  trans- 
parentes solubles  dans  l'eau,  comme  le  violet  de  méthyle,  le  bleu 
diamine,  le  vert  malachite,  l'acide  picrique,  l'orangé  d'aniline,  l'éc- 
sine,  la  fuchsine,  l'érythrosine,  etc. 

Ces  solutions  colorantes  sont  passées  sur  la  gélatine  en  teintes 
plates,  sans  se  préoccuper  du  modelé,  exclusivement  constitué  par 
les  demi-teintes  de  l'image  photographique.  On  se  sert  de  pin- 
ceaux d'aquarelle  de  bonne  qualité.  Il  faut  en  avoir  au  moins 
deux,  l'un  très  fin  et  l'autre  assez  gros,  mais  à  pointe  effilée. 

Avant  d'étaler  une  teinte  plate  assez  large,  il  convient  de  mouil- 
ler la  couche  gélatineuse  et  de  l'éponger  ensuite  doucement.  La 
couleur  prend  alors  d'une  manière  plus  uniforme  sur  cette  surface 
moite.  Au  contraire,  pour  colorier  des  détails  très  délicats,  il  vaut 
mieux  appliquer  le  pinceau  sur  la  couche  sèche. 

Montage.  —  Le  montage  des  diapositifs  consiste  à  appliquer  une 
plaque  de  verre  sur  la  couche  gélatineuse  parfaitement  sèche  et 
à  maintenir  les  deux  plaques  en  collant  tout  autour  une  bande  de 
papier  noir. 

Les  diapositifs  destinés  à  la  projection  sont  doublés  d'une  plaque 


304  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

de  verre  ordinaire,  dont  le  but  est  seulement  de  protéger  rimag& 
contre  tout  frottement.  On  intercale  généralement  entre  les  deux 
verres  une  feuille  de  papier  noir  découpée  de  manière  à  limiter 
le  tableau  par  un  encadrement.  Les  paysages  sont  généralement 
présentés  dans  un  cadre  carré;  les  reproductions  microscopi- 
ques sont,  au  contraire,  presque  toujours  limitées  par  un  cercle. 
Si  le  format  du  diapositif  est  plus  petit  que  celui  du  passe-cliché, 
on  peut  le  monter  sur  un  carton  évidé  ou  sur  une  plaque  de  verre 
du  format  voulu,  en  l'y  maintenant  à  l'aide  de  papier  gommé. 

Les  diapositifs  destinés  à  l'examen  stéréoscopique,  ainsi  que  ceux 
qui  doivent  être  encadrés  comme  des  vitraux,  sont  doublés  d'un 
verre  dépoli,  qui  donne  du  corps  aux  demi-teintes.  On  peut  cepen- 
dant employer  un  verre  ordinaire,  en  appliquant  un  vernis  dépoli 
sur  l'une  des  deux  plaques.  Enfin,  certaines  plaques  diapositives, 
telles  que  les  plaques  opalines,  de  Guilleminot,  dont  l'émulsion 
contient  une  résine,  dispensent  de  l'emploi  d'un  verre  dépoli  et  de 
l'application  d'un  vernis. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


H.  FouRTiER,  les  Positifs  sur  verre,  2°  édition,  Paris  (Gauthier- Villars) ,  1907. 
L.  Tranchant,  les  Positives  pour  projections^  Paris  (Gh.  Mendel). 


POSITIFS  DIRECTS  ET  CONTRETYPES  305 


CHAPITRE   XV 

POSITIFS    DIRECTS    ET    CONTRETYPES 

Positifs  directs  par  réflexion.  —  Le  daguerréotype  donnait 
directement  des  images  positives  par  réflexion,  mais  seulement 
sous  une  certaine  incidence.  Les  clichés  sur  collodion  donnent  une 
image  négative  par  transparence  et  positive  par  reflexion,  quand 
la  plaque  est  adossée  à  une  surface  noire.  C'est  sur  cette  propriété 
qu'est  basé  le  procédé  ferrotype,  encore  en  usage  chez  les  forains 
qui  livrent  en  quelques  minutes  des  portraits  sur  tôle.  Le  collodion 
est  coulé  sur  des  feuilles  de  tôle  enduites  d'un  vernis  noir,  et 
l'image  se  détache  en  blanc,  ou  plus  exactement  en  gris-perle, 
sur  le  fond  sombre.  Ces  images  sont  dépourvues  d'éclat,  mais  bien 
détaillées  et  très  fines.  Du  reste,  leur  principal  avant  :ige  est  leur 
extrême  bon  marché. 

Généralement,  ces  portraits  ferrotypes,  de  très  petit  format,  sont 
exécutés  à  l'aide  d'un  appareil  muni  de  plusieurs  objectifs.  Un  ob- 
turateur à  volets  ouvre  et  ferme  tous  ces  instruments  simultané- 
ment, et  la  plaque  de  tôle  collodionnée  contient  ainsi  plusieurs 
images,  qu'il  suffit  ensuite  de  découper  aux  ciseaux. 

Avec  le  gélaLinobromure,les  révélateurs  habituels  donnent  quel- 
quefois une  image  légèrement  visible  par  réflexion  :  dans  ce  cas, 
cette  image,  négative  par  transparence,  apparaît  en  positif  quand 
on  l'examine  par  réflexion,  devant  un  fond  noir,  mais  ce  positif  est 
très  faible.  Cependant,  certains  révélateurs  appliqués  au  gélati- 
nobromure fournissent  des  images  présentant  le  double  aspect 
des  clichés  au  collodion.  Ce  sont  la  paraphénylènediamine  et 
l'orthoamidophénol  employés  en  présence  du  sulfite  de  soude 
seul.  Le  premier  de  ces  révélateurs  a  pour  formule  : 

Eau 1 .000  ce. 

Paraphénylènediamine 10  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 60  — 


âoe  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Le  second  est  composé  suivant  les  mêmes  proportions,  c'est-à- 
dire  à  raison  de  10  gr.  d'orthoamidophénol  et  60  grammes  de  sul- 
fite anhydre  pour  1  litre  d'eau. 

Ces  révélateurs  ne  s'appliquent  qu'à  des  clichés  notablement 
surexposés  et  agissent  lentement.  L'image,  développée  en  20  ou  30 
minutes,  est  brunâtre  par  transparence  et  grise  par  réflexion. 

On  obtient  des  positifs  plus  brillants  sur  plaques  au  gélatino- 
bromure  en  transformant  l'argent  de  négatifs  vigoureux  en  un 
composé  blanc  opaque.  Ainsi,  dans  le  procédé  connu  sous  le  nom 
A'albâtrotypie^  le  négatif,  développé  au  moyen  d'un  révélateur 
quelconque,  fixé  et  lavé,  est  plongé  dans  : 

Eau 300  ce. 

Bichlorure  de  mercure' 10  gr. 

Acide  chlorhydrique 15  — 

Chlorure  de  sodium 5  — 

Sulfate  de  fer 5  — 

Quand  les  noirs  sont  entièrement  devenus  blancs,  on  lave  et  on 
fait  sécher.  On  "enduit  ensuite  la  couche  de  gélatine  d'un  vernis 
noir. 

Ces  positifs  sont  d'un  très  bel  effet,  bien  détaillés  dans  les  demi- 
teintes,  mais  un  peu  ternes,  car  les  blancs,  une  fois  secs,  ne  sont 
plus  que  gris  clair. 

On  obtient  des  blancs  plus  francs  en  transformant  les  opacités 
de  l'image  en  ferrocyanure  de  plomb.  Il  faut  pour  cela  un  négatif 
très  intense,  très  poussé  au  développement,  présentant  de  vigou- 
reux contrastes,  et  même  trop  dur  pour  les  tirages  habituels.  Ce 
négatif  est  blanchi  dans  : 

Eau 100  ce. 

Ferricyanure  de  potassium 6  gr. 

Azotate  de  plomb 4  — 

Acide  acétique 5  ou  6  gouttes. 

Quand  la  plaque  se  montre  entièrement  blanche,  ou  plutôt  jau- 
nâtre, des  deux  côtés,  on  la  lave  soigneusement.  Presque  toujours, 
l'image  positive  par  réflexion  sort  du  bain  précédent  empâtée  dans 
une  sorte  de  voile  jaune.  On  la  plonge  alors  dans  une  solution  de 
sulflte  de  soude  à  10  p.  100,  où  elle  devient  parfaitement  blanche. 
Il  arrive  même  souvent  qu'elle  est  trop  pâle.  Pour  bien  juger  de  la 
vigueur  du  positif,  il  faut  l'examiner  dans  une  cuvette  noire,  ou, 


POSITIFS  DIRECTS  ET  CONTRETYPES  307 

si  la  cuvette  est  blanche,  en  garnir  le  fond  d'un  morceau  de  papier 
noir  ou  de  toile  cirée.  Si  l'image  paraît,  dans  ces  conditions  d'exa- 
men, peu  vigoureuse,  avec  des  blancs  empâtés,  on  ajoute  à  l'eau  de 
la  cuvette  une  petite  quantité  d'hyposulfite  de  soude.  Ce  sel  dissout 
le  ferrocyanure  qui  constitue  les  blancs  opaques  de  l'image  :  il 
rend  plus  transparent  le  négatif  observé  par  lumière  transmise, 
et  plus  sombre  le  positif  examiné  sur  un  fond  noir.  11  faut  donc 
en  surveiller  attentivement  l'effet,  car,  si  on  le  laissait  agir  trop 
longtemps,  l'image  finirait  par  disparaître  complètement.  On  lave, 
ensuite,  on  fait  sécher,  et  on  enduit  d'un  vernis  noir. 

Les  positifs  obtenus  de  la  sorte  sont  très  beaux  tant  que  la  géla- 
tine est  mouillée  ;  l'éclat  des  blancs  est  extrêmement  remarquable, 
elles  moindres  demi-teintes  sont  rendues  avec  une  rare  finesse. 
Au  séchage,  l'image  est  un  peu  plus  terne,  et  on  ne  peut  lui  rendre 
son  éclat  primitif  qu'en  la  mouillant  de  nouveau. 

Il  va  sans  dire  que  cette  image,  positive  par  réflexion  sur  un 
fond  noir  ou  de  couleur  foncée,  se  montre  négative  quand  on  l'exa- 
mine par  transparence.  Nous  allons  maintenant  rencontrer  des 
méthodes  qui  permettent  d'obtenir  directement  des  images  posi- 
tives par  transparence.  On  a  ainsi  des  diapositifs  directs,  ou,  plus 
exactement,  des  contretypes,  cesi-k-dire  des  images  de  même  sens 
que  le  modèle  qui  a  servi  à  les  impressionner.  Un  cliché  négatif 
donnera  donc  une  image  négative,  et  un  original  positif  donnera 
un  diapositif. 

Contretypes  au  gélatinobromure  bichromate.  —  Une  plaque 
au  gélatinobromure  d'argent  quelconque  (même  voilée)  est  plon- 
gée pendant  2  ou  3  minutes  dans  une  solution  de  bichromate  de 
potasse  à  3  p.  100  et  mise  ensuite  à  sécher,  à  l'abri  de  la  lumière 
et  de  la  poussière.  Une  fois  sèche,  on  la  met  dans  un  châssis-presse, 
en  contact  avec  le  négatif  ou  le  diapositif  dont  on  désire  obtenir 
un  contretype,  gélatine  contre  gélatine,  et  on  expose  à  la  lumière 
jusqu'à  ce  qu'une  faible  image  soit  visible  au  dos. 

On  lave  la  plaque  pendant  10  à  15  minutes,  afin  d'en  éliminer 
le  bichromate,  on  la  plonge  dans  un  révélateur  et  on  porte  la 
cuvette  en  pleine  lumière.  La  gélatine  bichromatée  devient  imper- 
méable à  l'eau,  sous  l'action  de  la  lumière  11  en  résulte  que  les 
parties  de  la  plaque  qui  ont  été  protégées  de  l'action  lumineuse 


398  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

par  les  opacités  du  cliché  seront  noircies  par  le  révélateur,  puisque 
le  développement  est  effectué  en  pleine  lumière,  tandis  que  les 
parties  qui  ont  été  impressionnées  sous  les  transparences  du 
cliché  resteront  blanches,  puisqu'elles  n'absorbent  point  le  révé- 
lateur. Les  demi-teintes  n'étant  que  partiellement  imperméabili- 
jsées  absorbent  lentement  le  révélateur  et  ne  sont  que  faiblement 
noircies. 

Le  développement  dure  assez  longtemps.  La  couche  se  couvre 
fi^é<|ue'mment  de  marbrures,  mais,  comme  elles  restent  superfi- 
cielles, il  ne  faut  pas  s'en  préoccuper.  Quand  l'image  a  acquis 
l'intensité  voulue,  on  lave  et  on  procède  au  fixage  à  l'hyposulfite, 
qui  est  aussi  très  lent. 

L'image  obtenue  de  cette  manière  a  la  même  apparence  que  le 
cîiché  dont  elle  provient  :  elle  est  donc  négative  si  le  cliché  est  un 
négatif,  et  positive  si  c'est  un  positif.  Mais  elle  n'est  pas  identique  à 
là  première  :  elle  lui  est  symétrique,  c'est-à-dire  que  l'image  y  est 
vue  comme  dans  un  miroir.  Le  portrait  d'un  militaire,  par  exem- 
ple, montrerait  le  modèle  avec  l'épée  du  côté  droit.  Cette  particu- 
larité est  précisément  utilisée  dans  certains  procédés  qui  nécessi- 
tent le  retournement  du  cliché,  comme  le  procédé  au  charbon  par 
simple  transfert  et  les  tirages  photomécaniques. 

La  méthode  qui  vient  d'être  décrite  permet  d'utiliser  des  pla- 
ques au  gélatinobromure  accidentellement  mises  hors  d'usage  par 
l'action  de  la  lumière.  Elle  est  trop  lente  pour  être  appliquée  aux 
reproductions  réduites  ou  amplifiées,  et  ne  convient  qu'aux  repro- 
ductions à  taille  égale,  exécutées  par  contact  dans  le  châssis-presse. 
Les  procédés  suivants  s'appliquent  également  aux  reproductions 
par  contact  ou  dans  la  chambre  noire 

Contretypes  par  surexposition.  —  Lorsqu'une  plaque  au  géla- 
tinobromure est  très  fortement  surexposée,  l'image  que  fait  appa- 
raître le  révélateur  est  parfois  positive  et  non  plus  négative.  Tou- 
tefois, il  est  impossible  d'obtenir  par  cette  méthode  des  résultats 
constants,  du  moins  avec  les  émulsions  usuelles. 

Il  n'en  est  pas  de  même  si  l'on  emploie  une  plaque  Intensive, 
dont  l'émulsion  contient  diverses  substances  additionnelles,  telles 
que  l'ésérine,  la  morphine,  etc.  M.  Mercier  a  indiqué  le  moyen  d'ob- 
tenir à  coup  sûr  des  contretypes  en  employant  en  pleine  lumière 


POSITIFS  DIRECTS  ET   CONTRETYPES  309 

une  plaque  de  ce  genre.  Bien  que  Témulsion  de  V Intensive  soit  très 
sensible,  la  mise  en  châssis,  le  développement  et  le  fixage  s'effec- 
tuent au  grand  jour.  Il  est  même  nécessaire  que  la  plaque  soit  voilée 
des  deux  côtés,  car  c'est  ce  voile  qui  produira  les  noirs  du  contre- 
type, tandis  que  les  blancs  seront  déterminés  par  la  partie  de  ce 
voile  qui  sera  détruite  par  la  surexposition  des  parties  exposées 
sous  les  transparences  du  cliché. 

L'exposition  sous  un  cliché  de  densité  moyenne  pourra  varier 
de  1  à  5  minutes,  à  l'ombre.  Si  on  remplace  la  lumière  du  jour  par 
celle  du  magnésium,  on  brûlera  environ  1  mètre  à  1  m.  50  de 
ruban  de  magnésium  à  20  centimètres  du  châssis. 

Le  développement  s'efTectue  à  l'aide  d'un  révélateur  ralenti  par 
addition  de  bromure  de  potassium.  On  a  ainsi  un  contretype  sans 
voile  dans  les  blancs.  L'image  monte  d'autant  moins  vite  que  l'ex- 
position au  jour  a  été  plus  longue,  et  on  l'aperçoit  alors  d'autant 
moins  par  réflexion.  Il  faut  donc  l'examiner  par  transparence,  en 
plaçant  la  plaque  devant  une  lampe.  Quand  on  la  juge  assez  déve- 
loppée, on  lave  et  on  fixe  comme  d'habitude. 

On  obtient  aussi  des  contretypes  sur  des  plaques  ordinaires  nor- 
malement exposées,  en  laissant  pénétrer  la  lumière  dans  le  labora- 
toire pendant  le  développement.  Mais  ce  procédé  est  d'une  appli- 
cation délicate  et  réussit  rarement  au  gré  de  l'opérateur.  Il  arrive 
trop  souvent  que  l'inversion  n'est  que  partielle  et  que  l'image  est 
en  partie  négative  et  en  partie  positive. 

Contretypes  par  inversion.  —  Ce  procédé,  quoique  un  peu  plus 
compliqué  en  apparence  que  les  précédents,  leur  est  cependant 
préférable,  parce  qu'il  conduit  à  des  résultats  certains,  sans  pré- 
senter d'ailleurs  aucune  difficulté  d'application.  Une  plaque  au 
gélatinobromure,  impressionnée  comme  à  l'ordinaire,  soit  dans  la 
chambre  noire,  soit  dans  un  châssis-presse,  est  d'abord  dévelop- 
pée dans  un  révélateur  quelconque.  Quand  le  négatif  ainsi  révélé 
a  acquis  l'intensité  voulue,  on  lave  la  plaque,  puis,  au  lieu  de  la 
fixer  dans  l'hyposulfile,  on  la  plonge  dans  un  bain  susceptible  de 
dissoudre  l'argent  constituant  l'image,  sans  attaquer  le  bromure 
d'argent.  On  emploie  généralement,  à  cet  effet,  soit  l'acide  per- 
manganique,  soit  l'acide  chromique.  Ce  dernier  se  conserve  mieux. 
On  le  prépare  facilement,  en  prenant  :* 


310  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Eau 100  ce. 

Bichromate  de  potasse 0  gr.  5 

Acide  sulfurique  à  66» 10  gouttes. 

Cette  quantité  suffît  pour  une  plaque  13xlS;  Le  bain  ne  doit 
servir  qu'une  seule  fois.  L'argent  s'y  dissout  rapidement.  Quand 
l'image  a  disparu,  on  lave  la  plaque,  on  la  laisse  pendant  2  ou 
3  minutes  dans  une  solution  de  suliîte  de  soude  à  5  pour  100,  puis 
on  lave  de  nouveau,  en  pleine  lumière. 

Si  on  examine  alors  la  plaque  par  transparence,  on  reconnaît 
que  le  négatif  s'est  transformé  en  positif,  mais  ce  dernier  est  faible, 
car  ses  opacités  ne  sont  constituées  que  par  le  bromure  d'argent 
resté  inattaqué  dans  le  révélateur.  Quant  aux  parties  transpa- 
rentes, ce  sont  celles  qui  étaient  primitivement  noires  :  les  opacités 
qui  constituaient  le  négatif  ayant  été  dissoutes  il  n'est  plus  resté 
que  la  gélatine. 

Pour  donner  à  la  nouvelle  image,  inverse  de  la  première,  toute 
son  intensité,  il  suffît  de  plonger  la  plaque  dans  un  révélateur  quel- 
conque, qui  noircira  le  bromure  d'argent.  Si  Fémulsion  est  très 
épaisse,  il  est  nécessaire  de  surveiller  ce  second  développement 
et  de  l'arrêter  aussitôt  que  le  positif  a  acquis  la  vigueur  voulue. 
0.n  lave  alors  et  on  fixe  dans  l'byposulfite.  Cette  dernière  opé- 
ration est  inutile  quand  l'émulsion  est  très  mince.  Il  suffit,  dans 
ce  cas,  de  laisser  agir  le  révélateur  jusqu'à  ce  que  tout  le  bro- 
mure soit  noirci.  Nous  verrons  qu'il  en  est  ainsi  pour  les  plaques 
employées  dans  la  photographie  des  couleurs  (autochromes,  omni- 
nolores,  etc.). 

Quand  l'épaisseur  de  l'émulsion  n'est  pas  uniforme  sur  toute 
l'étendue  de  la  plaque,  la  méthode  qui  vient  d'être  décrite  fournit 
des  images  inégales,  plus  foncées  en  certains  points  de  la  plaque, 
plus  transparentes  ailleurs.  On  y  remédie  en  limitant  de  la  façon 
suivante  l'impression  lumineuse  qui  va  produire  l'image  positive. 
Le  premier  développement  est  effectué  comme  d'habitude.  On  lave 
ensuite  la  plaque,  et,  si  l'envers  n'est  pa^s  enduit  d'un  anti-halo,  on 
la  pose  sur  une  étoffe  noire  ou  sur  un  carton  noir.  Tenant  le  tout 
verticalement,  on  fait  brûler,, à  50  centimètres  de  distance  environ, 
de  5  à  10  centimètres  de  ruban  de  magnésium.  Pendant  cette  expo- 
sition, la  première  image'a  fait  écran,  et  le  bromure  d'argent  se 


POSITIFS  DIRECTS  ET  CONTRETYPES  311 

trouve  impressionné,  sur  chaque  point  de  sa  surface,  proportion- 
nellement aux  transparences  du  négatif,  quelle  que  soit  l'épais- 
seur de  la  couche.  On  continue  alors  les  opérations  à  l'abri  de  la 
lumière  actinique.  C'est  donc  à  la  lueur  de  la  lanterne  du  labora- 
toire que  la  plaque  est  passée  dans  le  bain  de  bichromate  acide, 
dans  le  sulfite  de  soude,  dans  le  second  révélateur  et  dans  le 
fixateur. 

Phototégie.  —  En  1897,  Liesegang  signalait  une  singulière  pro- 
priété du  persulfate  d'ammoniaque.  Si  l'on  immerge  un  phototype 
dans  une  solution  concentrée  dé  ce  sel  et  qu'on  l'y  laisse  jusqu'à 
blanchiment  complet,  on  remarque  que  la  gélatine  qui  contenait 
primitivement  l'argent  réduit  parle  révélateur  est  devenue  d'une 
fragilité  extrême.  En  effet,  si,  après  avoir  sommairement  rincé  la 
plaque,  on  la  plonge  dans  l'eau  tiède,  ou  même  si  on  l'échauffé 
légèrement  par  le  frottement  de  la  main,  on  enlève  facilement  des 
épaisseurs  de  gélatine  proportionnées  aux  opacités  de  l'image  pri- 
mitive. On  a  ainsi  une  image  en  relief,  et,  si  l'on  plonge  la  plaque 
dans  un  bain  colorant,  la  gélatine  absorbant  ce  dernier  proportion- 
nellement à  son  épaisseur,  on  aura  une  image  en  couleur.  Cette 
dernière  image  sera  positive,  si  l'image  primitive  était  négative. 
L'image  teinte  sera  donc  de  même  genre  que  le  modèle  :  si  c'est 
une  plaque  impressionnée  dans  la  chambre  noire,  on  aura  ainsi 
un  diapositif  direct;  si  c'est  une  plaque  tirée  par  contact  au 
châssis-presse  sous  une  autre  plaque,  on  en  aura  un  contretype 
symétrique. 

D'autres  oxydants  agissent  à  peu  près  comme  le  persulfate.  Tels 
sont  le  sulfate  et  quelques  autres  sels  titaniques,  d'après  MM.  Lu- 
mière et  Seyewetz.  En  1899,  M.  Andresen  obtenait  des  reliefs  très 
épais  en  employant  l'eau  oxygénée.  Cette  substance  agit  d'une  façon 
très  différente,  suivant  sa  composition.  Si  elle  est  suffisamment  con- 
centrée et  acide,  le  dépouillement  des  opacités  s'accomplit  en 
quelques  instants,  même  à  froid,  et  même  si  la  gélatine  est  durcie 
dans  l'alun.  Toutefois,  l'action  varie  suivant  les  émulsions. 

L'auteur  de  cet  ouvrage  a  étudié  cette  propriété  de  l'eau  oxy- 
génée et  l'a  appliquée  à  un  procédé  de  teinture  directe,  qui  a  reçu 
le  nom  de  phototégie  (de  cptoToç,  lumière,  et  téyyeiv,  teindre). 

Au  lieu  d'employer  au  dépouillement  l'eau  oxygénée  du  com- 


312  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

merce,  dont  la  composition  est  trop  variable,  il  vaut  mieux  pré- 
parer la  solution  suivante  : 

Eau 100  ce. 

Acide  chlorhydrique 10  ce. 

Bioxyde  de  baryum  pulvérisé 4  gr. 

Il  faut  éviter  réchauffement  de  la  solution,  pendant  qu'on  la  pré- 
pare. A  cet  effet,  il  est  bon  de  placer  dans  l'eau  froide  le  flacon  qui 
doit  la  contenir.  On  y  versera  l'eau  d'abord,  puis  l'acide,  et  enfin 
le  bioxyde,  par  petites  quantités  et  en  agitant  de  temps  à  autre. 
Ce  bain  peut  servir  plusieurs  fois,  mais  ne  se  conserve  que  quel- 
ques jours.  En  été  surtout,  il  perd  vite  ses  propriétés  dissolvan- 
tes. Comme  il  est  oxydant  et  acide,  il  ne  faudra  le  verser  que  dans 
des  cuvettes  en  verre  ou  en  porcelaine. 

Les  clichés  destinés  au  dépouillement  doivent  être  développés 
dans  un  révélateur  ne  tannant  pas  la  gélatine,  ce  qui  exclut  l'em- 
ploi du  pyrogallol  et  celui  des  bains  contenant  du  formol.  L*oxa- 
late  ferreux  est  celui  qui  donne  le  meilleur  résultat.  Après  le  déve- 
loppement, il  n'est  pas  nécessaire  de  fixer  dans  l'hyposulfîte.  La 
plaque,  sommairement  lavée,  est  mise  à  sécher  ou  plongée  de 
suite  dans  la  solution  oxygénée. 

Certaines  émulsions  ont  une  tendance  à  se  soulever  dans  le  bain 
acide  et  à  se  détacher  du  verre  en  se  dilatant  notablement.  On  évi- 
tera cet  inconvénient  en  passant  tout  autour  de  la  couche,  avant 
de  la  mouiller,  un  corps  gras,  ne  fût-ce  qu'un  morceau  de  Chan- 
delle que  l'on  appuiera  sur  la  tranche  de  la  plaque. 

Il  faut  agiter  la  cuvette  contenant  l'eau  oxygénée,  afin  que  le 
liquide  imprègne  uniformément  la  gélatine  Bientôt  cette  dernière 
se  plisse,  aux  endroits  correspondant  aux  noirs  du  négatif,  et  se 
soulève.  On  balance  la  cuvette  et,  dés  qu'on  voit  quelques  par- 
celles de  gélatine  abandonner  leur  support,  il  faut  se  hâter  de 
reverser  l'eau  oxygénée  dans  le  flacon  qui  lui  est  réservé  et  la  rem- 
placer par  de  l'eau  pure.  Sans  cette  précaution,  la  couche  tout 
entière  risquerait,  si  elle  était  formée  de  gélatine  très  tendre, 
d'être  complètement  arrachée  du  verre. 

Une  fois  la  plaque  dans  l'eau,  on  achève  le  dépouillement  en  agi- 
tant la  cuvette.  Si  quelques  lambeaux  de  gélatine  restent  encore 
adhérents,  le  meilleur  moyen  de  les  arracher  sans  abîmer  l'image 


POSITIFS  DIRECTS  ET  CONTRETYPES  313 

«st  de  les  frôler  très  légèrement  du  bout  du  doigt,  en  évitant,  bien 
entendu,  de  les  rayer  avec  l'ongle.  Éviter  l'emploi  des  pinceaux, 
car  même  les  plus  souples  occasionnent  des  stries. 

Le  dépouillement  du  négatif  achevé,  on  se  trouve  en  présence 
d'un  diapositif  constitué  par  des  épaisseurs  de  gélatine.  Si  l'on  n'a 
pa;s  fixé  le  négatif,  le  bromure  d'argent  resté  dans  la  couche  four- 
nira un  diapositif  noir  très  vigoureux  par  immersion  dans  un  révé- 
lateur quelconque.  Mais,  dans  la  plupart  des  cas,  il  sera  préfé- 
rable d'obtenir  un  diapositif  coloré,  en  immergeant  la  plaque  dans 
une  couleur  en  solution  aqueuse.  L'image  étant  constituée  par  des 
épaisseurs  variables  de  gélatine,  le  liquide  colorant  sera  absorbé 
proportionnellement  à  ces  épaisseurs.  On  aura  ainsi  une  image  de 
n'importe  quel  ton,  et  il  sera  très  facile  d'exécuter  des  diapositifs 
dans  des  nuances  auxquelles  il  ne  serait  pas  possible  d'arriver  par 
les  procédés  habituels  de  virage.  Toutes  les  matières  colorantes 
solubles  dans  l'eau  —  et  il  y  en  a  des  centaines  —  sont  applicables 
à  ce  procédé,  soit  isolément,  soit  mélangées.  C'est  dire  que  la 
gamme  des  tons  réalisables  est  illimitée. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 

E.  GousTET,  les  Positifs  directs  et  les  Contretypes,  Paris  (Gh.  Mendel),  1912. 

F.  Drouin,  la  Ferrotypie,  3^  édilion,  Paris  (Gh.  Mendel). 

H.  Gauthibr-Villars,  Manuel  de  ferrotypie,  Paris  (Gautliier-Villars),  1891. 
L.  Tranchant,  les  Clichés  pelliculaires,  contre-types  et  clichés  retournés,  Paris 
(Gh.  Mendel),  1911. 


18 


314  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE   XVI 

LES    IMPRESSIONS     PHOTOMÉCANIQUES 

Historique.  —  Les  premiers  essais  de  gravure  par  la  lumière 
sont  antérieurs  à  la  découverte  de  Daguerre.  C'est  de  1813  que 
datent  les  tentatives  de  Nicéphore  Niepce  pour  graver  des  planches 
métalliques  enduites  de  bitume  et  exposées  au  soleil  sous  le  dessin 
à  copier.  La  couche  sensible,  primitivement  soluble  dans  l'huile 
de  naphte,  était  insolubilisée  par  la  lumière  et  formait  une  réserve 
inattaquable  aux  acides.  Plusieurs  gravures  sur  étain  furent  exé- 
cutées à  l'aide  de  cette  méthode. 

La  rapidité  du  daguerréotype  lit  abandonner  ces  essais,  mais  on 
ne  renonça  pas  à  multiplier  les  images  fournies  par  la  lumière  en 
les  tranformant  en  planches  d'impression.  Il  semble,  d'ailleurs, 
que  ce  soit  là  le  but  auquel  doivent  tendre  les  procédés  photogra- 
phiques, car  il  n'est  pas  logique  de  faire  intervenir  la  lumière  pour 
l'exécution  de  chaque  épreuve,  et  il  serait  plus  rationnel  de  trans- 
former directement  le  phototype  en  cliché  d'imprimerie. 

Le  docteur  Donné  fut  le  premier  qui  réussit  à  transformer  la 
plaque  daguerrienne  en  planche  propre  à  la  gravure,  mais  seule- 
ment pour  des  reproductions  de  dessins  au  trait.  La  plaque  était 
soumise  à  la  morsure  dans  une  solution  étendue  d'acide  chlorhy- 
drique,  qui  attaquait  le  métal  sur  les  points  amalgamés  et  laissait 
intacte  la  couche  d'argent.  Le  relief  ainsi  obtenu  était  très  faible, 
et  la  dureté  insuffisante  de  l'argent  limitait  le  tirage  à  40  ou  50 
épreuves.  Fizeau* perfectionna  ce  procédé,  en  frottant  la  planche 
gravée  d'huile  grasse  qui  s'incrustait  dans  les  cavités  et  ne  s'atta- 
chait pas  aux  saillies.  On  dorait  alors  celles-ci  à  l'aide  de  la  galva- 
noplastie, puis,  nettoyant  la  plaque,  on  l'attaquait  par  l'eau-forte, 
qui  pénétrait  dans  les  creux  et  restait  sans  action  sur  les  saillies 
préservées  par  la  dorure.  On  recouvrait  enfm  la  planche,  par  la 


LBS  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  315 

galvanoplastie,  d'une  couche  de  cuivre  dont  la  dureté  permettait 
un  tirage  assez  prolongé.  C'était  bien  long  et  bien  compliqué,  pour 
n'obtenir,  en  somme,  que  des  reproductions  en  blanc  et  noir.  Cette 
méthode,  comme  la  précédente,  convenait  à  des  dessins  au  trait, 
non  à  des  images  à  teintes  continues,  comme  les  tableaux  ou  les 
photographies. 

Le  27  août  1855,  Alphonse  Poitevin  faisait  breveter  ses  procédés 
basés  sur  les  propriétés  de  la  gélatine  bichromatée,  dont  l'emploi 
avait  déjà  été  indiqué,  en  1853,  par  Fox  Talbot.  Antérieurement, 
d'ailleurs,  Mungo  Ponton  avait  reconnu  que  l'acide  chromique  du 
bichromate  de  potasse  est  facilement  réduit  par  la  lumière  en  pré- 
sence des  matières  organiques,  et  principalement  de  la  gélatine, 
Paul  Pretsch  avait  également  pris,  le  V  juin  1855,  un  brevet  rela- 
tif à  l'emploi  de  la  gélatine  bichromatée.  Le  mérite  de  Poitevin 
fut  de  prévoir  les  applications  multiples  des  modifications  que  la 
lumière  fait  subir  aux  matières  gommeuses,  gélatineuses,  albumi- 
neuses  et  mucilagineuses,  en  présence  des  bichromates  alcalins. 
Ces  substances  sont  rendues  insolubles  dans  Teau  et  la  repoussent 
à  la  façon  des  corps  gras.  De  là,  plusieurs  combinaisons  qui  ont 
donné  naissance  à  une  foule  de  procédés  de  tirage.  Si  on  lave,  par 
exemple,  dans  l'eau  chaude  une  couche  de  gélatine  bichromatée 
préalablement  exposée  au  jour  sous  un  négatif,  on  aura  une  image 
formée  de  reliefs  et  de  creux.  On  peut  donc  prendre  une  empreinte 
de  cette  surface,  soit  par  la  galvanoplastie,  soit  par  un  moulage 
au  plâtre  suivi  d'un  contre-moulage  à  l'aide  d'un  alliage  métalli- 
que. On  peut  aussi,  quand  la  couche  sensible  a  été  coulée  sur  une 
plaque  métallique,  attaquer  celle-ci  par  un  acide  qui  creusera  uni- 
quement les  parties  mises  à  nu  par  le  dépouillement.  On  peut,  enfin, 
mouiller  simplement  à  l'eau  froide  la  gélatine  impressionnée  L'eau 
sera  repoussée  par  la  couche  exposée  à  la  lumière,  tandis  que  la 
gélatine  protégée  par  les  opacités  du  négatif  aura  conservé  sa  per- 
méabilité. Si  l'on  passe  alors,  sur  cette  surface  plus  ou  moins 
humectée,  un  rouleau  garni  d'encre  typographique,  le  corps  gras 
sera  repoussé  sur  les  points  correspondant  aux  blancs  de  l'image, 
tandis  qu'il  adhérera  aux  points  représentant  les  noirs  du  sujet. 

Ces  phénomènes,  étudiés  par  Poitevin,  ont  été  le  point  de  départ 
des  perfectionnements  qui  ont  rapidement  conduit  les  procédés 


316  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

photomécaniques  au  degré  de  perfection  qu'ils  ont  atteint  aujour- 
d'hui. Les  divers  genres  de  gravure  autrefois  en  usage,  lithogra- 
phie, eau-forte,  planches  sur  acier  ou  sur  bois,  ont  actuellement 
leur  équivalent  dans  les  méthodes  photographiques  que  nous  allons 
analyser  :  fhotolithographie ,  à  laquelle  se  rattache  la  photocollo' 
graphie  ou  pholotypie ;  héliogravure  en  creux,  ou  gravure  en  taille- 
douce;  et  phototypogravure,  ou  gravure  en  relief,  que  l'on  désigne 
habituellement  sous  le  nom  de  photogravure  pour  les  reproduc- 
tions de  dessins  au  trait,  et  sous  celui  de  similigravure  pour  les 
images  à  modelé  continu. 

Phototypes.  —  Les  phototypes  à  l'aide  desquels  sont  préparées 
les  planches  d'impression  photomécanique  sont  généralement 
exécutés  par  le  procédé  au  coUodion.  Jusqu'à  ces  derniers  temps, 
ce  procédé  donnait  seul  des  négatifs  assez  fins  et  assez  brillants 
pour  obtenir  des  reproductions  irréprochables.  Les  plaques  ordi- 
naires au  gélatinobromure  offraient  des  surfaces  irrégulières  qui 
empêchaient  leur  contact  parfait  avec  la  planche  sensibilisée;  en' 
outre,  le  grain  de  leur  émulsion  était  trop  grossier  et  donnait  lieu 
à  des  effets  de  diffusion  qui  nuisaient  à  la  netteté  de  la  gravure. 
Ces  inconvénients  ont  pu  être  évités  en  coulant  des  émulsions  peu 
sensibles,  mais  très  fines,  sur  des  glaces  bien  dressées,  et  Ton 
trouve  actuellement  dans  le  commerce  des  plaques  spéciales  qui 
joignent  à  la  commodité  du  gélatinobromure  la  perfection  des  ré- 
sultats que  le  coUodion  seul  permettait  auparavant  d'obtenir.  Telle 
est,  entre  autres,  la  plaque  Process  de  MM.  Wratten  et  Wainwright. 

La  plupart  des  procédés  photomécaniques  exigent  un  négatif 
retourné,  ainsi  qu'il  est  facile  de  s'en  rendre  compte.  En  effet,  si  la 
planche  qui  va  servir  au  tirage  était  impressionnée  sous  un  photo- 
type ordinaire,  l'image  ainsi  produite  serait  vue  dans  son  vrai  sens 
sur  la  couche  sensible  de  la  planche,  comme  sur  une  épreuve  ordi- 
naire. Par  conséquent,  l'image  imprimée  sur  le  papier  à  l'aide  de 
cette  planche  serait  inversée,  comme  si  le  sujet  était  vu  dans  un 
miroir. 

Pour  avoir  une  image  redressée,  il  existe  divers  moyens.  Dans 
certains  procédés  d'amateurs,  la  planche  peut  être  constituée  par 
une  couche  de  gélatine  coulée  sur  une  feuille  de  celluloïd  suscep- 
tible d'être  impressionnée  parle  verso;  on  peut,  de  même,  exécuter 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  317 

le  cliché  sur  celluloïd  et  l'appliquer  par  l'envers  sur  la  planche. 
Mais,  dans  ces  deux  cas,  l'interposition  d'une  couche  de  celluloïd 
donne  à  l'image  un  certain  flou,  et  ces  combinaisons  ne  convien- 
nent pas  aux  reproductions  industrielles,  pour  lesquelles  on  s'en 
tient  à  l'une  des  solutions  ci-après  : 

1°  Pelliculer  le  cliché,  par  un  des  moyens  indiqués  au  chapi- 
tre VIII,  et  reporter  la  couche,  inversée,  sur  une  autre  glace; 


Objectif  monté  sur  miroir  inverseur. 


2**  Exécuter  un  contretype  par  contact  (V.  p.  309); 

3°  Exposer  la  plaque  par  le  verso,  en  la  mettant  dans  le  châssis 
verre  en  avant  et  gélatine  en  arrière.  Cette  disposition  nécessite 
l'emploi  de  glaces  sans  défaut,  ainsi  qu'une  légère  correction  de  la 
mise  au  point,  puisque  la  couche  sensible  se  trouve  reculée  d'une 
quantité  égale  à  l'épaisseur  du  verre; 

4**  Placer,  en  avant  ou  en  arrière  de  l'objectif,  un  miroir  opti- 
quement dressé  (fig.  102)  ou,  ce  qui  est  préférable,  un  prisme  à 


318 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


réflexion  totale  dont  la  face  hypoténuse  est  argentée  (fig.  103).  Ce 
dispositif  est  le  plus  généralement  adopté  dans  les  ateliers  de  pho- 
togravure, où  l'on  exécute  les  planches  d'impression  soit  d'après 
des  dessins,  soit  d'après  des  épreuves  photographiques  sur  papier. 
La  nécessité  d'un  parallélisme  absolu  entre  le  modèle  et  la  pla- 
que sensible  oblige  à 
disposer  le  porte-modèle 
et  la  chambre  noire  soit 
sur  un  pont  rigide  soit 
sur  une  voie  ferrée.  Pour 
les  formats  usuels,  le 
pont,  ou  pied-table  (fig. 
lOi),  est  ordinairement 
préféré.  Quand  le  sol  de 
l'atelier  n'est  pas  rigou-  < 
reusement  à  l'abri  des 
trépidations  provenant 
soit  du  fonctionnement 
des  outils  de  l'usine  soit 
de  la  circulation  des  vé- 
hicules sur  la  voie  pu- 
blique, il  est  indispen- 
sable d'y  remédier,  en 
installant  le  pont  sur  des 
ressorts  amortisseurs 
tîg.  105)  ou  même  en  le 
suspendant  à  des  corda- 
ges attachés  aux  poutres 
du  plafond  (fig.  106).  On 
Fig.  103.  -  Prisme  à  létlexiou  totale,  place  en  avant  remarquera  sur  les  deux 
de  1  objectif.  ^         ...  ,, 

gravures  ci-jomtes  1  o- 

rientation  de  la  chambre  par  rapport  au  porte-modèle  :  l'interpo- 
sition du  prisme  dévie  de  90°  l'axe  optique  principal.  La  chambre 
noire  se  déplace,  pour  la  mise  en  grandeur  de  la  reproduction,  stir 
une  petite  voie  ferrée,  avec  entraînement  par  pignon  sur  crémail- 
lère en  fonte  et  frein  d'arrêt. 

Photocollographie.  —  Déjà  très  répandue  autrefois  dans  l'illus- 


LES    IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  31» 

Iration  hors  texte,  la  photocollographie,  également  désignée  sous 
le  nom  de  phototypie,  doit  actuellement  un  regain  de  faveur  à  la 
vogue  des  cartes' postales.  C'est  la  seule  méthode  susceptible  de 
produire  à  très  bas  prix  des  images  rappelant,  par  la  finesse  des 
détails  et  la  délicatesse  du  modelé,  l'aspect  des  images  photogra- 
phiques. L'amateur  qui  se  borne  à  tirer  un  petit  nombre  d'épreuves 
peut  parfaitement  préparer,  sans  outillage  spécial,  une  planche 


Fig.  104.  — "Pied-table  à  reproductions. 

photolypique.  Il  suffit  de  sensibiliser  dans  une  solution  de  bichro- 
mate une  plaque  au  gélatinobromure  (même  voilée)  ou  une  pelli- 
cule, de  la  laisser  sécher  dans  l'obscurité  et  de  l'impressionner 
sous  un  négatif,  jusqu'à  ce  que  les  détails  se  montrent  en  brun  sur 
le  fond  jaune  de  la  couche  bichromatée.  Après  un  lavage  destiné 
à  éliminer  le  bichromate,  la  couche  mouillée  avec  un  mélange 
d'eau  et  de  glycérine  est  prête  au  tirage.  On  passe  sur  cette  sur- 
face moite  un  rouleau  souple  garni  d'encre  grasse,  on  y  applique 
une  feuille  de  papier,  et  Ton  soumet  le  tout  à  la  pression.  Une 
presse  très  rudimentaire  est  souvent  utilisée  :  certains  opérateurs 
se  contentent  d'une  presse  à  copier,  ou  même  d'un  châssis-presse. 


320 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


Mais,  pour  des  tirages  d'une  certaine  importance,  ces  moyens 
primitifs  ne  suffisent  plus.  Aussi,  dans  Tindustrie,  les  tirages  pho- 
totypiques, quoique  peu  compliqués,  nécessitent  quelques  mani- 
pulations complémentaires  et  un  outillage  perfectionné.  Chaque 
usine,  d'ailleurs,  chaque  atelier  pratique  certaines  variantes,  cer- 
tains tours  de  main  dont  quelques-uns  sont  tenus  secrets.  En  réa- 
lité, ces  détails  n'ont  pas  grande  importance,  et  le  procédé,  tel 
que  nous  allons  le  décrire,  conduit  à  d'excellentes  impressions. 


Fig.  105.  —  Pont  à  reproduction,  monté  sur  ressorts  amortisseurs. 

Le  support  de  la  couche  sensible  phototypique  était  constitué, 
dans  le  procédé  de  Poitevin,  par  une  pierre  lithographique.  Tessié 
du  Motay  y  substituait,  en  1867,  des  plaques  de  cuivre  plané  et 
poli.  Depuis  1868,  on  emploie  des  dalles  en  verre,  indiquées  par 
E.  Albert,  de  Munich. 

Ces  glaces  sont  épaisses  de  8  à  20  millimètres,  suivant  leur 
format.  La  surface  en  est  parfaitement  dressée  et  finement  dou- 
cie.  Avant  d'y  couler  la  couche  sensible,  on  recouvre  la  plaque, 


LES  IMPRESSIONS   PHOTOMECANIQUES  32! 

soigneusement  nettoyée,  d'une  sous-couche  ou  substratum,  géné- 
ralement composé  de  : 

Bière  légère 90  ce. 

Soluliqn  de  silicate  de  soude  à  36o  Baume 10  — 

En  séchant,  cet  enduit  subit  une  sorte  de  granulation  superfi- 
cielle qui,  s'ajoulant  aux  propriétés  adhésives  du  silicate,  assurera 
à  la  couche  sensible  une  adhérence  parfaite. 

Pour  la  préparation  de  la  mixtion  sensible,  un  grand  nombre  de 


Fig.  106.  —  Pont  à  suspension  par  cordages. 

formules  ont  été  proposées,  mais  elles  diffèrent  peu  les  unes  des 
autres,  et  il  suffira  d'en  citer  une  : 

Eau 200  ce. 

Gélatine  Nelson  dure 6  gr. 

Gélatine  Drescher  tendre 10  — 

Bichromate  de  potasse 3  — 

La  gélatine,  d'abord  gonflée  dans  l'eau  froiJe,  est  ensuite  fondue 
au  bain-marie,  puis  on  y  ajoute  le  bichromate. 

Les  dalles,  posées  de  niveau  sur  un  support  à  vis  calantes,  sont 
couvertes  de  cette  mixtion  chaude  et  iî^échces  à  l'étuve,  afin  d'éviter 
la  cristallisation^superficielle  du  bichromate  qu'occasionnerait  une 
dessiccation  trop  lente.  Les  glaces  sensibilisées  doivent  être  utili- 
sées au  plus  tôt  :  elles  ne  se  conservent  guère  que  deux  ou  trois 
jours. 


322 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


Fig,  107.  —  Ghâssis-prebse  pour 
photocollographie. 


L'impression  au  châssis-presse  (fîg.  107)  est  facile  à  contrôler, 
l'image  étant  légèrement  visible  à  travers  la  glace,  en  brun-cho- 
colat sur  fond  jaune-d'or.  Néanmoins,  le  contrôle  est  souvent  effec- 
tué au  photomètre. 

L'insolation  achevée,  on 
procède  à  une  seconde  expo- 
sition, à  la  lumière  diffuse,  à 
travers  l'épaisseur  du  verre, 
en  posant  la  dalle  sur  un  drap 
noir,  la  couche  sensible  en 
dessous;  on  l'expose  ainsi  de 
2  à  5  minutes,  suivant  l'éclat 
de  la  lumière  :  la  couleur 
brune  que  prend  le  bichro- 
mate indique  le  moment  où  il 
faut  s'arrêter.  Cette  impres- 
sion supplémentaire,  imagi- 
née par  Despaquis,  n'est  pas 
indispensable,  mais  elle  ne  peut  qu'augmenter  la  solidité  de  la 
couche  et  la  finesse  des  détails;  elle  accroît  l'adhérence  de  la 
gélatine  à  son  support  et  l'empêche  de  se  gonfler  outre  mesure  au 
mouillage. 

La  plaque  est  ensuite  lavée  dans  l'eau  plusieurs  fois  renouvelée, 
jusqu'à  complète  élimination  du  bichromate.  On  durcit  alors  la 
couche  en  l'immergeant,  pendant  5  à  40  minutes,  dans  une  solu- 
tion d'alun  à  2  pour  100.  Après  un  dernier  lavage,  on  peut  laisser 
sécher  ou  passer  directement  au  bain  de  mouillage  qui  doit  pré- 
céder l'encrage. 

Ce  bain  est  un  mélange  d'eau  et  de  glycérine,  dont  les  propor- 
tions varient  suivant  les  auteurs.  La  moyenne  généralement  ad- 
mise est  : 

Eau 400  ce. 

Glycérine  pure 600  — 

Le  mouillage  dure  plusieurs  heures.  On  éponge  ensuite  la  sur- 
face, et  l'on  cale  la  dalle  sur  la  presse. 

L'encrage,  dans  l'industrie,  s'opère  mécaniquement  et  permet  de 
tirer  avec  chaque  planche  plus  de  1.500  épreuves  par  jour.  Dans 


LES   IMPRESSIONS  PHOTOMECANIQUES  323 

les  procédés  d'amateur,  l'encrage  s'exécute  au  moyen  d'un  rou- 
leau à  main  (fig.  108).  L'encre  phototypique  est  une  pâte  épaisse, 
à  peu  prés  de  la  consistance  du  cirage.  On  en  prend  avec  une  spa- 
tule une  petite  quantité,  que  l'on  étend  sur  une  plaque  de  verre  ou 
de  métal.  On  passe  alors  sur  cette  encre  le  rouleau,  constitué  par 
une  pâte  souple  à  base  de  gélatine,  et  on  le 
pousse  devant  soi;  on  l'enlève  ensuite, 
pour  le  poser  de  nouveau  au  même  point 
de  départ  et  recommencer  le  même  mou- 
vement. On  continue  ainsi  jusqu'à  ce  que 
le  plateau  soit  uniformément  recouvert 
d'encre.  Le  rouleau  étant  alors  bien  encré, 
on  le  passe  sur  la  planche  phototypique  et  Fig-.  108.  —  Rouieauàmain. 
on  lui  imprime  un  mouvement  de  va-et- 
vient,  en  ayant  soin  de  recouvrir  chaque  fois  toute  la  surface  im- 
pressionnée. En  passant  le  rouleau  lentement,  la  planche  se  charge 
d'encre;  en  le  passant  ensuite  rapidement,  on  dégage  les  blancs  et 
les  demi-teintes.  Un  opérateur  habile  sai-t  tirer  le  meilleur  parti  du 
sujet,  en  maniant  adroitement  le  rouleau;  il  arrive  aussi  à  varier 

les  efTets,  en  se  ser- 
vant d'encres  plus  ou 
moins  dures. 

La  planche  une  fois 
encrée,  s'il  faut  mé- 
nager des  marges,  on 
y  place  une  frisquette, 
c'est-à-dire  une 
feuille  de  papier  dé- 
coupée formant  cache 
ou  encadrement;  on 
met  par- dessus  la 
feuille  de  papier  destinée  à  recevoir  l'image,  et  l'on  fait  agir  la  presse. 
Cette  première  épreuve  obtenue,  on  vérifie  si  les  blancs  restent 
purs  et  si  les  noirs  et  les  demi-teintes  sont  fidèlement  rendus.  Cet 
examen  est-il  satisfaisant,  il  n'y  a  qu'à  continuer  le  tirage,  en 
renouvelant  l'encrage  à  chaque  épreuve.  Sinon,  il  faut  rechercher 
d'où  vient  le  défaut. 


Cl.  Alauzet. 

Fig.  109.  —  Presse  photocollographique. 


324  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Un  mauvais  cliché  ne  donnera  jamais  de  bonnes  épreuves;  de 
même,  si  la  couche  bichromatée  a  reçu  une  impression  trop  courte 
ou  trop  prolongée,  il  serait  très  difficile  d'en  tirer  un  bon  parti,  et 
le  mieux  est  d'en  préparer  une  autre.  Mais  il  arrive  souvent  que  la 
planche,  étant  excellente,  prend  trop  d'encre  ou  n'en  retient  pas 
assez.  Dans  le  premier  cas,  elle  manque  simplement  d'humidité  : 
on  la  lave  alors  à  l'essence  de  térébenthine  et  on  la  mouille  de  nou- 
veau dans  l'eau  additionnée  de  glycérine.  Dans  le  second  cas,  elle 
a  absorbé  trop  d'eau  ;  on  y  remédie  en  la  laissant  un  peu  sécher, 
après  l'avoir  nettoyée  à  l'essence. 

Quand  l'encrage  est  bien  réglé,  on  peut  tirer  plus  de  30  épreuves 
sans  mouiller  de  nouveau.  Dès  que  les  images  commencent  à  deve- 
nir un  peu  grises,  on  nettoie  la  planche,  en  pressant  une  ou  deux 
feuilles  sans  encrer,  puis  on  y  verse  du  mouillage  à  la  glycérine, 
qu'on  laisse  séjourner  à  sa  surface  pendant  quelques  minutes,  après 
quoi  on  éponge  et  on  recommence  l'encrage. 

Le  tirage  achevé,  on  nettoie  la  planche,  qui  pourra  servir  à  de 
nouvelles  impressions.  On  la  frotte  doucement  avec  un  petit  tam- 
pon de  linge  fin  imbibé  d'essence  de  térébenthine,  jusqu'à  ce  qu'il 
n'y  reste  plus  aucune  trace  d'encre,  puis  on  enlève  l'essence  avec 
un  linge  sec.  On  plonge  enfin  la  plaque  dans  l'eau,  où  on  la  laisse 
séjourner  une  heure  ou  deux,  et  on  la  fait  sécher.  On  la  conservera 
à  l'abri  de  l'humidité  et,  lorsqu'on  voudra  l'utiliser  de  nouveau, 
on  n'aura  qu'à  la  soumettre  au  mouillage  glycérine,  pour  qu'elle 
soit  prête  à  l'encrage. 

Photolithographie.  —  Ce  procédé,  ordinairem.ent  limité  à  la 
reproduction  de  dessins  au  trait,  est  fondé  sur  le  même  principe 
que  la  photocollographie.  Un  papier  recouvert  de  gélatine  bichro- 
matée est  exposé  à  la  lumière  sous  un  négatif  ordinaire  (non  re- 
tourné). Après  lavage,  on  passe  sur  la  couche  impressionnée  un 
rouleau  garni  d'une  encre  dite  'pfiotolransfert,  spécialement  pré- 
parée pour  les  reports  lithographiques.  Cette  encre  est  vendue 
toute  prête,  mais  on  f)eut  facilement  la  préparer  soi-même,  suivant 
la  formule  de  M.  Londe  : 

Cire 1  gr. 

Suif 1  _ 

Savon  noir 1  — 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMECANIQUES  325 

Vernis  moyen 12 gr. 

Térébenthine  de  Venise , 6 

Noir  de  famée  :  quantité  suffisante  pour  obtenir  un  beau  noir. 

L'encre  grasse  adhère  aux  parties  rendues  imperméables  par  la 
réduction  du  bichromate,  tandis  qu'elle  est  repoussée  sur  les  points 
imbibés  d'eau  qui  correspondent  aux  blancs  de  l'image. 

Cette  impression  préliminaire  est  ensuite  reportée  sur  une  pierre 
lithographique  ou  sur  une  plaque  de  zinc  ou  d'aluminium,  qui  cons- 
tituent la  planche  définitive.  L'épreuve  encore  humide  et  souple 
est  posée  sur  la  pierre  ou  sur  le  métal;  on  la  recouvre  de  deux  ou 
trois  feuilles  de  papier,  et  Ton  met  le  tout  sous  presse.  Au  bout 
de  quelques  instants,  on  supprime  la  pression,  on  mouille  à  l'é- 
ponge l'envers  de  l'épreuve,  et,  quand  le  papier  est  bien  imprégné 
d'eau,  on  peut  la  détacher  :  l'encre  doit  être  passée  tout  entière 
sur  la  pierre  ou  sur  le  métal. 

On  recouvre  alors  la  pierre  ou  le  métal  d'une  solution  de  gomme 
arabique,  qui  s'attache  à  la  surface,  excepté  sur  les  parties  qui 
portent  le  décalque  à  l'encre  grasse.  Si  l'on  passe  ensuite  un  rou- 
leau chargé  d'encre  lithographique,  celle-ci  n'adhère  qu'aux  par- 
ties qui  ne  sont  pas  mouillées.    .  — 

Le  report  n'est  pas  indispensable.  On  peut  sensibiliser  directe- 
ment une  pierre  lithographique ,  en  la  recouvrant  d'albumine 
bichromatée.  Dans   ce  cas , 

l'impression  exige  un  néga-  f^r:rz^^^^^^^^^2I^ "^^"^^            - 
tif  retourné,  comme  en  pho-  ^^^^^J^^^^^^^^^B 
totypie.  Comme  le  support        ^^^^^T^^â^^^^^B 
de  la   couche   sensible    est  ri   faimrk^W  '    '   tfs^-^^^gsfc^^s^ 

rigide  et  Opaque,  le  contrôle     j^,.     ...       ^^     ;        ;        T^~: 
,      .  .       ,,  T    .  1,  ^^S'  11'-'*  —  Rouleau  et  mandrm  a  encrer. 

du  tirage  exige  1  emploi  d  un 
photomètre.  La  couche  impressionnée  est  légèrement  mouillée 
avec  une  éponge  douce,  et  l'on  y  passe  un  rouleau  garni  d'encre 
lithographique.  Le  corps  gras,  repoussé  pap  l'humidité,  n'adhère 
que  sur  les  parties  rendues  imperméables  par  l'action  de  la 
lumière,  tandis  que  les  blancs  du  dessin  restent  intacts  partout  oii 
la  lumière  n'a  pas  modifié  la  solubilité  de  l'albumine,  qui  joue  ici  le 
même  rôle  que  la  gomme  arabique  employée  dans  la  lithographie 
ordinaire. 

19 


326 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


Actuellement,  les  pierres  lithographiques  sont  presque  toujours 
remplacées  par  des  plaques  de  zinc  ou  d'aluminium,  plus  légères, 
moins  encombrantes,  meilleur  marché  et  susceptibles  d'être  uti- 


fcD 
O 


fcc 


lisées  sur  les  machines  rotatives.  La  plaque  efet  recouverte  d'albu- 
mine bichromatée  ou  de  bitume  de  Judée.  Après  impression, 
encrage  et  dépouillement,  le  métal  est  mouillé  à  la  gomme,  et  le 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  321 

tirage  s'effectue  suivant  les  procédés  habituels  de  la  lithogra- 
phie. 

La  solution  gommée  dont  on  recouvre  la  planche  pour  qu'elle 
repousse  l'encre  grasse  n'est  pas  la  même  pour  les  deux  métaux. 
Voici  les  deux  formules  ordinairement  adoptées  : 

Pour  le  zinc  : 

Eau 1.000  ce. 

Gomme  arabique 50  gr. 

Acide  gallique 20  — 

Acide  phosphorique  sirupeux 3  ce. 

Pour  l'aluminium  : 

Solution  de  gomme  à  10°  Baume 1.000  ce. 

Acide  phosphorique  sirupeux  . 15  à  30  — 

Nous  avons  dit  que  la  photolithographie  était  ordinairement  limi- 
tée à  la  reproduction  des  dessins  au  trait.  Elle  ne  donne,  en  effet» 
que  deux  tons  :  le  blanc  du  papier  et  la  couleur  de  l'encre.  Néan- 
moins, elle  est  susceptible  de  reproduire  les  sujets  à  modelés  con- 
tinus, à  l'aide  de  certains  artifices  qui  donnent  l'illusion  des  demi- 
teintes,  par  le  rapprochement  de  lignes  au  de  points  entièrement 
noirs.  A  cet  effet,  on  n'a  qu'à  exécuter  le  tirage  sur  pierre,  sur  mé- 
tal ou  sur  papier  à  report  d'après  un  cliché  tramé j  préparé  comme 
nous  l'expliquerons  en  analysant  la  similigravure.  Certains  atehers 
arrivent  à  un  résultat  analogue  à  l'aide  de  clichés  à  modelés  con- 
tinus, en  se  servant  de  planches  grainées  recouvertes  de  bitume 
que  la  lumière  insolubilise  plus  ou  moins  profondément.  11  résulte 
de  la  forme  ondulée  de  la  planche  que  la  largeur  des  points  mis 
à  découvert  par  le  dépouillement  varie  suivant  les  gradations  du 
modelé.  On  mouille  à  l'eau  gommée  ces  points  de  la  surface  mé- 
tallique, on  enlève  le  bitume  et  l'on  passe  l'encre  lithographique, 
qui  est  repoussée  par  les  points  humectés. 

Héliogravure.  —  On  désigne  sous  cette  dénomination  la  gravure 
en  creux,  analogue  à  la  taille-douce^  à  l'aide  de  planches  obtenues 
par  la  photographie.  Quand  il  s'agit  de  reproduire  de  simples  des- 
sins au  trait,  ce  procédé  est  d'une  réalisation  facile,  et  depuis  long- 
temps on  savait  obtenir  des  planches  gravées  par  la  lumière.  Re- 
couvrons, par  exemple,  une  plaque  de  cuivre  de  bitume  de  Judée, 


328 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


comme  le  faisait  Niepce,  et  exposons-la  sous  un  dispositif.  Si  nous 
lavons  ensuite  dans  Thuile  de  naphte  la  couche  impressionnée,  le 
vernis  au  bitume  sera  enlevé  sur  les  parties  correspondant  aux 
noirs.  La  plaque  étant  plongée  dans  un  bain  de  perchlorure  de 
fer,  le  cuivre  mis  à  nu  sera  rongé,  et  chaque  trait  du  modèle  sera 
représenté  par  une  rainure.  Le  bitume  resté  sur  la  plaque  est  alors 
complètement  enlevé,  on  recouvre  d'encre  toute  la  surface  métal- 
lique, puis  on  ressuie  avec  un  tampon  de  linge.  La  surface  est 
ainsi  nettoyée,  mais  l'encre  est  restée  dans  les  creux,  si  bieu  qu'en 
pressant  fortement  contre  la  planche  une  feuille  de  papier  préala- 
blement assouplie  dans  l'eau,  l'impression  s'effectuera  comme  dans 
les  procédés  chalcographiques  (gravure  au  burin,  gravure  à  Teau- 
forte,  mezzotinte,  aquatinte,  etc.). 

Mais  cette  méthode  si  simple  ne  convient  pas  k  la  reproduction 
photographique  des  demi-teintes.  Si  Ton  veut  reproduire  une 
image  à  modelé  continu,  il  est  nécessaire  de  produire  un  gi^ain  à  la 
surface  de  la  planche.  A  cet  effet,  un  grand  nombre  de  moyens  ont 

été  proposés.  Celui  que  nous  allons 
décrire  et  dont  on  se  sert  presque 
exclusivement  aujourd'hui  fournit 
de  magnifiques  impressions.  Il  est 
dû  à  Klic  et  remonte  à  1879  : 
depuis  cette  époque,  il  n'a  subi  que 
quelques  modifications  de  détail. 
La  plaque  métallique  destinée  à 
servir  de  planche  d'impression  est 
quelquefois  en  zinc  ou  en  acier, 
mais  on  préfère  ordinairement  le 
cuivre  rouge  bien  martelé  et  par- 
faitement plané.  La  surface  en  est 
d'abord  dégraissée  dans  la  potasse, 
puis  passée  au  blanc  d'Espagne  et 
soigneusement  lavée.  Après  dessic- 
cation, elle  est  prête  à  être  grainée. 
Cette  opération  est  effectuée  à  l'aide  d'une  boîte  à  grain  (fig.  112). 
C'est  une  caisse  cubique,  d'environ  un  mètre  de  côté,  montée  sur 
deux  tourillons.  Un  tiroir  s'ouvre  sur  l'un  des  côtés.  On  introduit 


Fig.  112.  —  Boîte  à  grainer  sur  pivots. 


LES  IMPRESSIOAS   PHOTOMÉCANIQUES  329 

par  cette  ouverture  une  certaine  quantité,  un  demi-kilo,  par  exem- 
ple, de  résine  en  poudre  très  fine,  ordinairement  constituée  par  un 
mélange  de  copal  et  de  colophane.  Après  avoir  fermé  l'orifice,  on 
imprime  à  la  boîte  un  mouvement  de  rotation  rapide,  qui  a  pour 
effet  de  la  remplir  d'un  nuage  de  poudre 
résineuse.  La  boite  à  grain  représentée 
fig.  113  est  fixe,  et  la  résine  y  est  mise  en 
suspension  par  des  palettes  à  balais,  mues 
de  l'extérieur  par  une  manivelle.  Dès  qu'on 
arrête  le  mouvement,  les  grains  de  résine 
commencent  à  tomber  au  fond  de  la  boîte, 
d'abord  les  plus  gros,  puis  les  grains 
moyens,  et  enfin  les  plus  fins.  Au  bout 
d'une  ou  deux  minutes  de  repos,  il  ne  reste 
plus  en  suspension  que  les  grains  d'une 
extrême  ténuité.  On  ouvre  alors  doucement 
le  tiroir,  on  place  sur  un  support  disposé 
à  cet  effet  la  plaque  à  grainereton  referme 
le  tiroir.    - 

Après  un  séjour  de  20  à  25  minutes  dans 
la  boîte,  la  plaque  se  trouve  recouvert^ 
d'une  poussière  de  résine  uniformément 
répandue  sur  toute  sa  surface.  11  est  bon, 
néanmoins,  de  l'examiner  à  la  loupe,  et. 
si  l'on  y  découvre  la  moindre  irrégularité 
(lacunes  ou  superpositions  de  grains),  il  ne 
faut  pas  hésiter  à  recommencer  la  manœu- 
vre précédente. 

Quand  le  grain  est  reconnu  parfait,  on 
le  fixe  en  chauffant  la  plaque  avec  précau- 
tion, de  façon  que  la  résine  soit  assez  molle 
pour  adhérer  au  métal,    mais  sans  aller 

jusqu'à  la  fusion  complète  qui  permettrait  aux  grains  de  se  souder 
et  de  former  une  couche  continue.  Aussi  ne  faut -il  pas  dépasser 
80°  ou  90^ 

La  plaque  grainée  est  alors  recouverte  de  la  solution  suivante,  à 
la  température  de  40°  environ  : 


Fig-.  113.  —  TBoîte  à  grai- 
ner,  modèle  à  palettes 
intérieures. 


330  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

Eau 1.000  ce. 

Gélatine 100  gr. 

Bichromate  de  potasse 20  — 

On  fait  sécher  dans  l'obscurité,  à  l'abri  de  la  poussière,  et  Ton 
expose  à  la  lumière,  sous  un  diapositif.  Le  contact  entre  la  couche 
du  cliché  et  celle  de  la  planche  doit  être  parfait  sur  toute  l'étendue 
de  la  surface,  afin  que  le  tirage  fournisse  des  images  nettes.  C'est 
pourquoi  on  fait  usage  d'un  châssis-presse  spécial  (fîg.  114)  muni  de 

vis  destinées  à  régler 
la  pression  et  à  la  ré- 
partir    uniformément 
l^^^^^^^a         sur   toute    la    plaque. 
1     ii^ii  -"fe^^^^^^^^         Ces  vis  portent  direc- 
?<ïi??ïïT[!iiifc  z-^^^^^^^mm^m^^^^rg^^^^Ê^  tement  sur  le  dos    de 

la  planche,  sans  inter- 
!/î      j^^>^  ^^^^^^^  position  de  volet  ni  de 

feutre. 

Fig.  114.  —  Châssis-presse  pour  héliogravure.  ^^  rigidité  de  la  pla- 

que de  cuivre  et  son 
opacité  empêchent  de  surveiller  directement  le  tirage.  La  durée  de 
l'exposition  est  donc  réglée  par  lès  indications  d'un  photomètre. 
Elle  est,  en  moyenne,  de  15  à  20  minutes,  sous  un  cliché  vigou- 
reux et  par  une  bonne  lumière. 

L'impression  achevée,  on  borde  la  plaque  avec  des  boudins  de 
cire  à  modeler,  de  manière  à  former  une  sorte  de  cuvette  destinée 
à  contenir  le  liquide  qui  va  servir  à  la  morsure.  On  peut  aussi 
recouvrir  le  dos  de  la  plaque  d'un  vernis  imperméable  et  la  pla- 
cer dans  une  cuvette  en  porcelaine  ou  en  ardoise  contenant  le 
mordant. 

Le  mordant  est  une  solution  de  perchlorure  de  fer  à  45°,  Baume. 
Ce  liquide  ne  pénètre  que  difficilement  la  gélatine  bichromatée 
rendue  imperméable  par  l'action  de  la  lumière.  La  plaque  de  cui- 
vre demeure  donc  inattaquée  aux  endroits  qui  correspondent  aux 
blancs  de  l'image  et  par  conséquent  aux  parties  les  plus  transpa.- 
rentes  du  cliché  positif.  Sur  les  parties  préservées  de  l'action  de  la 
lumière  par  les  opacités  du  diapositif,  la  gélatine  est  restée  per- 
méable :  le  perchlorure  traverse  donc  rapidement  cette  couche  et 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES 


331 


attaque  le  cuivre,  mais  seulement  dans  les  intervalles  séparant  les 
grains  de  résine.  Sous  les  grains  de  résine,  la  surface  métallique 
est  protégée  contre  l'action  du  mordant.  Il  en  résulte  que  les  noirs 
du  sujet,  ainsi  que  ses  demi-teintes,  seront  représentés  sur  la  plan- 
che par  une  multitude  de  petites  cavités  étroitement  juxtaposées. 


Fig.  115.  —  Presse  pour  l'impression  en  taille-douce. 

Ces  cavités  seront  à  peine  marquées  dans  les  faibles  demi-teintes; 
elles  seront  un  peu  plus  profondes  dans  les  demi-teintes  plus 
foncées  et  atteindront,  enfin,  leur  maximum  de  profondeur  dans 
les  grands  noirs. 

La  morsure  achevée,  on  nettoie  la  plaque  à  la  potasse,  à  l'eau 
chaude  et  à  l'essence  de  térébenthine,  de  manière  à  enlever  la  gé- 
latine et  le  grain  résineux.  En  examinant  la  planche  au  jour,  sous 


332 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


une  incidence  convenable,  on  aperçoit  très  bien  l'image  :  les  blancs 
du  sujet  sont  représentés  par  la  surface  métallique  parfaitement 
unie  et  miroitante,  tandis  que  les  ombres  sont  marquées  par  un 
aspect  grenu,  un  pointillé  microscopique. 

Au  lieu  de  couler  la  gélatine  bichromatée  sur  la  plaque  de 
cuivre,  certains  ateliers  utilisent  le  papier  au  charbon.  Après 
l'impression,  le  papier  mixtioané  est  mouillé,  puis  transféré  sur 
la  plaque  grainée.  On  procède  au  dépouillement  dans  l'eau  tiède, 
puis  à  la  morsure.  Le  perchlorure  pénètre  la  gélatine  et  atteint 
le  métal  d'autant  plus  rapidement  que  la  couche  insolubilisée  est 
moins  épaisse. 

Le  cuivre  ne  supporte  pas  un  long  tirage.  Si  la  planche  doit 

fournir  un  grand  nombre  d'é- 
preuves, il  faut  la  recouvrir 
d'une  mince  pellicule  de  fer  dé- 
posé par  galvanoplastie.  Cette 
opération  est  désignée  sous  le 
nom  d'aciérage. 

Le  tirage  s'effectue  sur  les 
presses  employées  dans  la  gra- 
vure en  taille-douce  (fig.  115  et 
116).  Il  exige  beaucoup  de  soins 
et  des  ouvriers  habiles.  On  en-* 
cre  la  planche  en  la  frottant 
avec  un  tampon  de  linge  trempé 
dans  l'encre  grasse.  Quand  la 
plaque  est  uniformément  noire,  il  faut  l'essuyer  en  y  passant  avec 
précaution  des  tampons  de  mousseline  humectés  de  potasse.  Cet 
essuyage  enlève  l'encre  déposée  à  la  surface  de  la  planche,  mais 
laisse  subsister  celle  qui  a  pénétré  dans  les  creux.  Ceux-ci  sont 
d'autant  plus  profonds  et  retiennent  par  conséquent  d'autant  plus 
d'encre  qu'ils  correspondent  à  des  parties  plus  sombres  de  l'image. 
La  planche  bien  essuyée  donne  une  idée  assez  exacte  de  ce  que 
sera  l'épreuve  ;  il  est  donc  facile  de  se  rendre  compte  si  l'encrage 
est  bon  ou  s'il  vaut  mieux  le  recommencer. 

Le  papier  destiné  à  l'impression  est  préalablement  imprégné 
d'eau,  afin  d'être  assez  souple  pour  pénétrer  dans  les  cavités  micros- 


Fig   116.  —  Presse  û'arLisie 
pour  héliogravure. 


LES  IMPRESSIONS'  PHOTOMECANIQUES  333 

copîques  qui  retiennent  l'encre.  Après  l'avoir  épongé,  on  le  met 
en  contact  avec  la  planche  encrée,  on  pose  par-dessus  des  pièces 
de  flanelle  afin  de  faciliter  la  pénétration  du  papier  dans  les  creux 
de  la  planche,  et  l'on  fait  passer  le  tout,  à  deux  reprises,  sous  le 
cylindre  compresseur.  Le  papier,  relevé  d'abord  par  l'un  de  ses 
coins,  doit  emporter  toute  l'encre  de  la  planche,  dont  le  métal 
apparaît  alors  brillant  jusqu'au  fond  des  creux.  S'il  en  était  autre- 
ment, il  y  aurait  quelque  chose  de  défectueux. 

Chaque  épreuve  exige  un  nouvel  encrage  suivi  d'un  essuyage, 
et,  si  ces  manipulations  ne  sont  pas  exécutées  avec  tout  le  soin 
voulu,  la  meilleure  planche  ne  donnera  rien  de  bon.  La  lenteur  du 
tirage  et  l'attention  qu'il  nécessite  expliquent  le  prix  élevé  des 
épreuves  tirées  en  héliogravure.  Mais,  si  ce  procédé  est  relative- 
ment coûteux,  les  résultats  splendides  qu'il  est  susceptible  de 
fournir  le  font  choisir  dans  tous  les  cas  où  la  question  de  prix  est 
secondaire.  Aucun  autre  mode  d'impression  photomécanique  n'é- 
gale celui-ci  pour  conserver  tous  les  détails  du  cliché  photographi- 
que et  en  rendre  fidèlement  les  plus  délicates  demi-teintes.  L'éclat 
des  blancs,  la  richesse  du  modelé,  les  noirs  profonds  dont  la  vigueur 
est  encore  accrue  par  le  velouté  du  grain,  tout  contribue  à  placer 
l'héliogravure  au  premier  rang  des  moyens  de  reproduction  pho- 
tographique. La  puissance  d'opposition  qu'elle  permet  d'atteindre 
n'a  de  comparable  que  celle  de  l'eau-forte,  et  les  publications  de 
grand  luxe  y  ont  eu  recours,  pour  faire  revivre  avec  toute  la  per- 
fection désirable  les  œuvres  des  grands  peintres. 

Le  coût  des  épreuves  exécutées  suivant  le  procédé  qui  vient  d'ê- 
tre décrit,  et  qui  est  le  plus  répandu,  a  suggéré  divers  perfection- 
nements dont  il  convient  de  connaître  au  moins  le  principe. 

Le  sectionnement  au  grain  de  résine  est  souvent  remplacé  par 
un  sectionnement  quadrillé,  obtenu  par  l'emploi  d'une  trame.  Le 
cliché  photographique  négatif  est  reproduit,  à  la  chambre  noire, 
sur  une  plaque  sensible  devant  laquelle  est  appliquée  une  trame 
à  lignes  opaques  très  fines  (fîg.  117)  contenant  100  à  150  lignes  au 
centimètre,  dans  chaque  sens.  On  a  ainsi  une  reproduction  posi- 
tive du  modèle,  divisée  en  cellules  limitées  par  un  quadrillage 
transparent.  Un  papier  au  charbon,  sensibilisé  au  bichromate,  est 
exposé  à  la  lumière,  sous  le  cliché  positif,  puis  mouillé,  transféré 


334 


TRAITE   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Calmels. 

Fig.  117.  —  Trame  pour 
héliogravure. 


sur  un  cylindre  en  cuivre  et  dépouillé  dans  l'eau  chaude.  Le  cylindre 
est  ensuite  soumis  à  la  morsure,  dans  la  solution  de  perchlorure 

de  fer,  qui  creuse  le  métal,  excepté  sur 
les  points  protégés  par  la  gélatine  inso- 
lubilisée sous  les  parties  transparentes 
de  la  trame  et  du  cliché.  Après  net- 
toyage, le  cylindre  est  monté  sur  une 
presse  rotative  où  Tencrage  est  auto- 
matiquement effectué  par  des  rouleaux» 
et  l'essuyage  par  une  lame  d'acier  ani- 
mée d'un  mouvement  de  va-et-vient. 

Photogravure.  —  Les  procédés  qui 
viennent  d'être  décrits  ont  un  défaut 
commun  :  ils  ne  sont  applicables 
qu'aux  tirages  hors  texte,  ce  qui  en  limite  singulièrement  l'emploi. 
Pour  tirer  une  gravure  en  même  temps  que  le  texte ,  il  faut  des 
clichés  formés  de  lignes  ou  de  points  en  relief  et  creusés  assez  pro- 
fondément pour  que  l'encrage  s'effectue  de  la  même  manière  que 
sur  les  caractères  typographiques.  Autrefois,  l'illustration  dans  le 
texte  utilisait  la  gravure  sur  bois,  qui  exigeait  des  artistes  habiles 
et  coûtait  très  cher.  Aujourd'hui,  le  travail  du  graveur  est  à  peu 
près  complètement  supprimé  par  la  gravure  photographique,  et 
l'intervention  du  dessinateur  lui-même  se  fait  de  plus  en  plus  rare. 
On  désigne  sous  le  nom  de  photogravure  l'exécution  par  les  pro- 
cédés photographiques  de  planches  reproduisant  en  relief  les  traits 
d'un  dessin.  Pour  la  reproduction  des  sujets  à  demi-teintes  (pho- 
tographies, tableaux  à  l'huile,  lavis,  etc.),  on  a  recours  à  la  simi' 
ligravure,  qui  sera  analysée  dans  le  paragraphe  suivant. 

La  phototypogravure  au  trait  est  due  à  Charles  Gillot,  dont  le 
père,  Firmin  Gillot,  avait  créé,  en  1850,  un  procédé  de  gravure 
sur  zinc,  appelé  paniconographie,  permettant  de  reproduire  typo- 
graphiquement  un  dessin  et  d'exécuter  des  chchés  analogues  à 
ceux  de  la  gravure  sur  bois  sans  l'intervention  du  graveur.  C'est  en 
combinant  la  paniconographie  avec  l'invention  de  Niepce,  que 
Charles  Gillot  réalisa  les  procédés  de  photogravure  au  trait,  tels, 
à  peu  près,  qu'on  les  pratique  encore  actuellement. 

Les  clichés  de  trait  sont  presque  toujours  exécutés  sur  zinc  On 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  335 

se  sert  de  plaques  d'environ  2  millimètres  d'épaisseur,  parfai- 
tement polies  et  dégraissées.  La  couche  sensible,  primitivement 
constituée  par  du  bitume  de  Judée,  est  maintenant  presque  toujours 
composée  d'albumine  bichromatée,  qui  permet  d'obtenir  les  mêmes 
résultats  beaucoup  plus  rapidement.  Voici,  à  titre  d'exemple,  une 
des  nombreuses  formules  de  sensibilisation  applicables  à  ce  pro- 
cédé : 

■  Eau 1.000  ce. 

Albumine  sèche 20  gr. 

Bichromate  d'ammoniaque 15  — 

La  solution,  préalablement  filtrée,  est  étendue  sur  la  plaque,  à 
la  façon  du  collodion,  égalisée  à  la  tournette  et  séchée  dans  l'obs- 
curité. 

Après  dessiccation,  la  planche  est  exposée  à  la  lumière,  dans  le 
châssis-presse,  sous  le  cliché  (négatif  retourné).  La  durée  de  l'in- 
solation est  déterminée  à  l'aide  du  photomètre  ;  elle  est  générale- 
ment courte,  le  cliché  ne  présentant  point  de  demi-teintes,  mais 
seulement  des  noirs  opaques  et  des  blancs  entièrement  transpa- 
rents. Au  soleil,  la  pose  ne  dépasse  guère  1  minute  ;  à  la  lumière 
diffuse,  elle  atteint  rarement  1  heure. 

La  couche  impressionnée  est  entièrement  recouverte,  au  rou- 
leau de  gélatine,  d'une  encre  grasse  spéciale,  puis  on  plonge  la 
plaque  dans  l'eau.  Après  une  ou  deux  minutes,  on  passe  doucement 
sur  la  surface  encrée  un  tampon  d'ouate  imbibé  d'eau  légèrement 
gommée.  L'albumine  non  impressionnée  se  dissout,  entraînant 
l'encre  qui  la  recouvrait,  et  l'image  apparaît,  en  traits  noirs,  sur  le 
fond  métallique.  Le  dépouillement  achevé,  on  rince  à  grande  eau, 
et  l'on  fait  rapidement  sécher  à  une  chaleur  modérée.  L'encre 
restée  sur  les  lignes  insolubilisées  ne  résistant  pas  suffisamment  à 
l'acide  qui  va  creuser  la  gravure,  il  faut  la  renforcer  par  addition 
de  substances  résineuses.  On  prépare,  dans  ce  but,  un  mélange  de 
résine  et  de  cire  que  l'on  réduit  en  poudre  très  fine.  Cette  poudre 
est  appliquée  sur  la  planche  à  l'aide  d'un  tampon  de  coton  ;  elle 
adhère  à  l'encre  grasse,  mais  non  au  métal  mis  à  nu.  On  épous- 
sette  au  blaireau,  et  l'on  fait  chauffer  jusqu'à  ce  que  l'image,  qui 
était  devenue  mate  par  le  dépôt  de  poudre,  redevienne  brillante. 
La  cire  et  la  résine  se  trouvent  alors  fondues  et  forment  sur  les 


336 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


traits  de  l'image  une  couche  compacte  qui  résistera  parfaitement 
au  mordant. 

La  morsure  du  zinc  s'effectue  dans  une  solution  étendue  d'acide 
nitrique.  Un  solution  trop  concentrée  déterminerait  un  échauffe- 
ment  capable  de  ramollir  les  substances  qui  constituent  les  réserves. 
Aussi  préfère-t-on  attaquer  le  métal  lentement  :  en  employant  une 
solution  à  5  pour  100  d'acide  du  commerce  (à  36°  Baume)  la  pro- 
fondeur des  creux  déterminés  par  la  morsure  n'est  que  de  1/3  de 


Fig.  118.  —  Cuves  à  morsure. 


millimètre  par  heure.  L'acide  est  placé  dans  des  cuvettes  (fig.  118) 
auxquelles  un  nriécanisme  communique  un  mouvement  continuel 
de  bascule,  de  manière  à  régulariser  la  morsure.  Dans  certains 
ateliers,  l'acide  est  projeté  sur  la  plaque  par  une  sorte  de  pulvéri- 
sateur. 

L'acide  ronge  le  métal,  le  creuse  partout  où  sa  surface  n'est  pas 
protégée  par  les  réserves.  Quand  il  en  a  enlevé  une  certaine  épais- 
seur, il  commence  à  attaquer  les  talus  sur  lesquels  se  trouvent  les 
réserves  :  la  surface  protégée  par  les  substances  grasses  reste  inat- 
taquée, mais  il  n'en  est  pas  de  même  des  parois  verticales  qui  sont 
mises  à  découvert  par  les  progrès  de  la  morsure.  Les  traits  de  la 
gravure  seraient  donc  minés  par-dessous  et  même  parfois  entiè- 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  337 

rement  rongés,  si  l'on  ne  prenait  certaines  précautions.  C'est  à 
Firmin  Gillot  qu'est  dû  le  tour  de  main  grâce  auquel  les  talus  des 
reliefs  sont  protégés  contre  l'action  du  mordant  :  de  là  le  nom  de 
gillotage  donné  à  l'opération  suivante. 

Dès  que  l'acide  a  légèrement  creusé  le  métal,  on  suspend  la 
morsure  et  on  passe  sur  la  planche  une  éponge  douce  imbibée  d'une 
solution  de  gomme  arabique  et  d'acide  gallique,  qui  adhère  au 
métal  à  nu,  mais  non  aux  réserves  grasses.  On  lave  ensuite  som- 


Fig.  119.  —  Presse  pour  photogravure. 

mairement,  de  manière  à  éliminer  l'excès  de  gomme.  Si  l'on  passe 
alors  sur  la  planche  un  rouleau  garni  d'encre  lithographique,  le 
corps  gras  adhère  aux  lignes  formant  réserve,  mais  il  est  repoussé 
par  la  gomme  dont  il  subsiste  encore  qnehjues  traces  contre  le 
métal;  on  fait  sécher,  on  saupoudre  de  colophane,  qui  ne  s'attache 
qu'à  l'encre,  et  l'on  chaufï'e  modérément.  L'encre  et  la  résine  se 
fluidifient,  débordent  légèrement  et  coulent  sur  les  talus  des  reliefs, 
qui  se  trouvent  ainsi  protégés. 

On  procède  alors  à  une    deuxième  morsure,    que  l'on  arrête 
comme  la  précédente,  aussitôt  qu'elle  a  déterminé  des  creux  appré- 


338  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

ciables.  On  passe  une  nouvelle  couche  d'encre,  on  la  saupoudre  de 
résine,  on  fait  chauffer  et  Ton  reprend  la  morsure. 

Ces  opérations  sont  recommencées  jusqu'à  sept  fois,  et  même 
davantage,  jusqu'à  ce  que  la  profondeur  des  creux  atteigne  environ 
1  millimètre.  Il  résulte  de  cette  méthode  que  les  reliefs  sont  sup- 
portés par  dès  bases  qui  vont  s'élargissant  de  la  surface  au  niveau 
inférieur  des  creux.  Par  suite  du  fractionnement  des  morsures,  le 
profil  des  talus  présente  une  série  de  gradins.  Pour  leur  donner 
une  forme  oblique  régulière,  on  procède  à  un  encrage  de  toute  la 
plaque.  L'encre  est  ensuite  saupoudrée  de  résine,  et  l'on  fait  chauf- 
fer. Le  mélange  fond  et  coule  :  les  saillies  que  présentent  les  talus 
sont  ainsi  mises  à  nu,  et  il  suffit  alors,  pour  les  faire  disparaître,  de 
soumettre  la  plaque  à  une  dernière  morsure. 

La  planche  est  enfin  montée  sur  un  bloc  de  bois,  de  manière  à 
se  trouver  au  même  niveau  que  les  caractères  d'imprimerie  au  mi- 
lieu desquels  elle  doit  être  placée. 

Cette  méthode  exige  un  négatif  retourné.  On  peut  utiliser  un 
cliché  ordinaire,  en  procédant  par  report.  On  impressionne  alors 
d'abord  sous  ce  cliché  un  papier  enduit  de  gomme  bichromatée,  on 
le  recouvre  d'encre  lithographique,  on  mouille,  afin  d'éliminer 
l'encre  des  parties  préservées  de  Faction  de  la  lumière  par  les  opa- 
cités du  négatif,  et  l'on  applique  le  papier  sur  une  plaque  de  zinc. 
La  pression  imprime  l'image  sur  le  métal,  et  si  l'on  soumet  la  sur- 
face encrée  à  l'action  de  l'acide  azotique,  le  métal  est  attaqué  sur 
les  points  laissés  à  nu,  mais  non  sur  ceux  qui  sont  protégés  par 
l'encre  grasse.  Bien  entendu,  on  renforce  les  réserves,  comme  dans 
le  procédé  direct,  par  un  saupoudrage  de  résine,  et  on  fractionne 
la  morsure  en  plusieurs  phases  alternant  avec  des  encrages  suivis 
d'un  léger  chauffage,  afin  de  protéger  les  parois  desrehefs. 

Similigravure. —  Les  tirages  typographiques  ne  donnent  que 
deux  tons  :  celui  de  l'encre  et  celui  du  papier.  Pour  reproduire  par 
ce  moyen  des  images  à  modelé  eontinu,  comme  les  photographies 
d'après  nature,  les  tableaux,  les  lavis,  il  est  nécessaire  de  trans- 
former ce  modelé  en  une  combinaison  de  points  ou  de  lignes  plus 
ou  moins  larges  et  plus  ou  moins  espacés.  Le  cliché  n'imprimera 
en  réalité  que  du  noir  pur  sur*  du  papier  blanc,  mais  les  teintes 
claires  seront  représentées  par  des  points  noirs  très  fins  et  très 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES 


33» 


espacés,  tandis  que  les  teintes  foncées  résulteront  du  rapprochement 
de  points  noirs  assez  larges  séparés  les  uns  des  autres  par  d'étroits 
lisérés  blancs.  C'est  d'ailleurs  ainsi  que  procède  le  dessinateur 
pour  donner  l'illusion  d'un  modelé,  en  couvrant  son  papier  de 
points  ou  de  hachures  au  crayon  ou  à  l'encre.  Il  s'agissait  d'arriver 
au  même  résultat  sans  l'intervention  du  dessinateur  et  par  des 
moyens  automatiques.  On  y  a  réussi,  en  sectionnant  l'image  pho- 
tographique au  moyen  d'un  écran  graine  ou  tramé. 

Dès  1853,  Talbot  interposait  entre  le  phototype  et  la  planche 
sensibilisée  un  tissu  à  trame  très  fine.  Berchtold,  en  1859,  impres- 
sionnait sous  le  négatif  une  plaque  enduite  de  bitume  qui  était 
ensuite  exposée  de  nouveau  à  la  lumière  derrière  un  réseau  à  fines 
lignes  parallèles  obtenues  en  photographiant  une  trame  lithogra- 
phique. E.  et  J.  BuUock,  en  1865,  disposaient  pour  la  première  fois 
la  trame  dans  l'appareil  photographique,  en  avant  et  à  faible  dis- 
tance de  la  plaque  sensible.  Cette  trame  était  simplement  formée  de 
lignes  parallèles,  ainsi  que  celles  de  Swan  (1879)  et  de  la  compagnie 
Meisenbach  (1882).  C'est  l'Américain  F.  Yves  qui  donnait,  en  1886, 
sa  forme  actuelle  à  la  similigravure,  en  créant  la  trame  quadrillée 
et  en  substituant  au  diaphragme  ordinaire  de  l'objectif  un  dia- 
phragme carré. 

Pour  expliquer  le  rôle  que  joue  une  trame  semblable  à  celle  dont 
la  fîg.  120  reproduit  un  fragment 
très  agrandi,  supposons  d'abord 
l'objectif  diaphragmé  dirigé  vers 
une  surface  toute  blanche,  et  exa- 
minons à  la  loupe  le  verre  dépoli. 
Si  la  trame  quadrillée  est  en  contact 
avec  l'écran  de  mise  au  point,  elle 
y  projettera  son  image  très  nette. 
Mais,  si  nous  éloignons  lentement 
la  trame,  nous  verrons  sa  silhouette 
s'estomper  peu  à  peu  et  perdre  progressivement  de  sa  netteté.  Cha- 
cune des  mailles  va  former  des  ombres  et  des  pénombres,  et,  en  ré- 
glant avec  soin  la  distance,  nous  arriverons  à  ce  résultat  que  chaque 
élément  de  la  trame  apparaîtra  comme  une  tache  lumineuse  au  centre 
et  s'obscurcissant  réguUèrement  jusqu'aux  bords,  qui  seront  noirs. 


►  ♦♦♦♦♦♦ 

♦     ♦:♦♦♦♦     ♦ 

►  ♦♦♦♦♦  ^   < 
>   #   <^  >   <^  ^  ^ 


Cl.  Calmels. 

Fig.  120.  —  Trame  de  similigravure. 


S40 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


Ce  réglage  effectué,  si  le  verre  dépoli  est  remplacé  par  une  pla- 
que sensible,  nous  obtiendrons  un  négatif  qui  paraîtra  uniformé- 
ment gris,  vu  d'une  certaine  distance,  mais  qui,  examiné  à  la  loupe, 
se  montrera  formé  d'une  multitude  de  points  noirs  au  centre  et 
régulièrement  dégradés  jusqu'aux  bords,  qui  seront  transparents. 

Plaçons  maintenant  devant  l'objectif,  non  plus  une  surface  toute 
blanche,  mais  une  épreuve  photographique  oii  se  trouvent  du 
blanc  pur,  du  gris  clair,  du  gris  foncé  et  du  noir.  Prenons  un  temps 


Cl.  Calmels. 

Fig.  121.  —  Similigravure. 
(Trame  de  20  lignes  au  centimètre.) 


Cl.  Calmels. 

Fig.  122.  —  Similigravure. 
(Trame  de  53  lignes  au  centimètre.) 


de  pose  juste  suffisant  pour  que  les  points  correspondant  aux 
blancs  viennent  bien  noirs  au  développement,  dans  toute  leur  lar- 
geur. Les  images  du  gris  clair  seront  évidemment  moins  intenses, 
sur  les  bords  extrêmes;  celles  du  gris  foncé  ne  seront  suffisam- 
ment impressionnées  qu'au  centre  de  chaque  maille;  enfin,  celles 
du  noir  seront,  sinon  entièrement  invisibles,  du  moins  pratiquement 
négligeables.  Ainsi  donc,  à  la  condition  de  calculer  exactement  la 
pose  et  de  développer  de  manière  à  obtenir  un  cliché  brillant  et 
plutôt  heurté  que  doux,  nous  verrons  le  blanc  du  modèle  repré- 
senté par  des  points  larges  et  se  touchant  presque,  les  gris  repré- 
sentés par  des  points  plus  étroits  et  dont  les  bords  seront  par 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES 


341 


conséquent  plus  espacés  les  uns  des  autres,  et  les  noirs  représen- 
tés par  des  points  imperceptibles. 

^  Ce  négatif  donnera  évidemment  un  positif  sur  lequel  le  blanc 
sera  représenté  par  de  très  petits  points  espacés,  les  gris  par  des 
points  plus  larges  et  moins  espacés,  et  le  noir  par  des  points  dont 
la  largeur  sera  presque  égale  à  celle  des  mailles  de  la  trame 
(fig.  121  et  122). 


Fig,  123.  —  Chambre  noire  à  porte-trames. 


Le  phototype  que  nous  venons  d'analyser  est  exécuté  à  l'aide 
d'une  chambre  noire  de  construction  spéciale  (fig.  123),  En  avant 
de  la  plaque  est  disposé  un  cadre  sur  lequel  est  montée  la  trame 
et  dont  on  fait  varier  la  distance  avec  le  plan  focal  à  l'aide  d'une 
crémaillère  et  d'une  vis  micrométrique.  L'intervalle  qui  sépare  la 
plaque  sensible  de  la  trame  est  généralement  compris  entre  2  et 
7  millimètres,  suivant  Ja  distance  focale,  la  plus  faible  distance 
correspondant  au  plus  court  foyer. 

Les  trames  dont  on  se  sert  actuellement  sont  ordinairement 
compcfsées  de  deux  glaces  sur  chacune  desquelles  ont  été  gravées 
des  lignes  parallèles  rendues  opaques  par  l'application  d'un  vernis. 


342  TRAITÉ   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Ces  deux  glaces  sont  superposées  de  manière  que  les  deux  lignés 
se  croisant  à  angle  droit  forment  un  quadrillage.  Depuis  quelques 
années  cependant  la  trame  quadrillée  est  souvent  remplacée  par  la 
trame  Schulze  (fîg..l24),  inventée  en  1902  et  dont  les  lignes  opaques 

se  croisent  sous  un  angle  de  60°. 

Cette  disposition  permet  plus  de 
précision  dans  la  reproduction  des 
détails  et,  sans  compliquer  ni  la 
gravure  ni  le  tirage,  donne  aux 
images  une  structure  moins  régu- 
lièrement apparente, 
p,  ^  ,    ,  -  La  finesse  de  la  trame  varie  sui- 

Li.  Calraels. 

Fiff.  124.  —  Trame  Schulze.  ^^^^  ^^  nature  des  travaux  à  exécu- 
ter. Pour  les  grandes  affiches,  elle 
contient  seulement  20  à  25  lignes  par  centimètre;  elle  en  contient 
25  à  30  pour  les  journaux  quotidiens  imprimés  sur  presses  rota- 
tives, 50  à  60  pour  les  travaux  courants  exécutés  sur  papiers  de 
qualité  moyenne,  70  à  80  pour  les  éditions  de  luxe,  90  à  100 pour 
les  catalogues  de  très  grand  luxe  et  pour  certains  travaux  scien- 
tifiques. Le  prix  d'une  trame  quadrillée  du  format  30  X  40  est  de 
400  francs,  si  elle  ne  contient  que  30  lignes  par  centimètre;  si  elle 
en  contient  80,  son  prix  s'élève  à  1.250  francs. 

La  structure  de  l'image,  son  modelé  et  ses  contrastes  sont  nota- 
blement modifiés  suivant  la  forme  et  les  dimensions  du  diaphragme. 
On  se  sert  généralement  de  diaphragmes  carrés,  mais  on  utilise 
aussi  d'autres  formes,  dont  la  fig.  125  reproduit  quelques  modèles. 
Le  plus  souvent,  on  fait  usage  de  deux  ou  trois  diaphragmes  de 
dimensions  différentes,  que  l'on  substitue  l'un  à  l'autre  pendant  la 
pose.  C'est  en  proportionnant  judicieusement  ces  poses  fraction- 
nées que  le  similigraveur  arrive  à  obtenir  un  modelé  correct. 

La  planche  d'impression  qui  doit  traduire  en  reliefs  et  en  creux 
les  JDlancs  et  les  noirs  du  négatif  est  une  plaque  de  zinc  ou  de  cui- 
vre. Le  zinc,  dont  le  coût  est  moins  élevé  et  la  morsure  plus  rapide, 
est  employé  aux  travaux  urgents  ou  peu  soignés.  Comme  il  se 
prête  à  une  profondeur  plus  grande  des  creux,  c'est  également 
sur  ce  métal  que  sont  gravés  les  clichés  à  grosse  trame,  comme 
ceux  des  journaux  quotidiens.  Le  cuivre,  plus  facile  à  retoucher, 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES 


343 


moins  altérable  et  plus  résistant  mécaniquement,  est  réservé  aux 
travaux  de  luxe  et  aux  longs  tirages. 

Le  procédé  à  l'albumine  décrit  dans  le  paragraphe  précédent  est 
également  applicable  à  la  similigravure.  Mais,  en  fait,  on  ne  l'utilise 


Fig.  125.  —  Diaphragmes  pour  similigravure. 

que  pour  les  clichés  à  grosse  trame  des  journaux  quotidiens,  et, 
dans  la  plupart  des  cas,  la  simili  est  gravée  au  moyen  du  procédé 
émail.  Le  colloïde  employé  dans  ce  procédé  est  une  gélatine  spé- 
ciale rendue  soluble  dans  l'eau  froide  par  une  cuisson  prolongée. 
Pour  préparer  la  couche  sensible,  on  mélange  : 

Eau • 200  ce. 

Colle  liquide  pour  émail 100  — 

Bichromate  d'ammoniaque 5  à  10  gr. 

L'étendage  de  la  plaque  et  la  dessiccation  s'effectuent  comme 
dans  les  procédés  précédents.  La  durée  de  l'exposition  sous  le  né- 
gatif est  de  2  à  3  minutes  en  plein  soleil  d'été,  de  1  heure  et  plus 
en  lumière  diffuse,  et  de  5  à  10  minutes  à  30  centimètres  d'une 
lampe  à  arc  de  20  ampères. 

Après  l'insolation,  on  lave  la  plaque  pendant  2  minutes,  afin  d'en 
éliminer  le  bichromate.  On  colore  ensuite  la  couche,  de  manière  à 
mieux  contrôler  le  dépouillement,  en  la  plongeant  pendant  quelques 
minutes  dans  une  solution  de  violet  de  méthyle  (5  gr.  par  litre). 
On  rince  pour  enlever  l'excès  de  colorant,  et  on  facilite  le  dépouil- 
lement par  des  frictions  modérées  au  tampon  d'ouate  ou  en  agitant 
la  plaque  dans  de  l'eau  additionnée  de  son,  de  sciure  de  bois  blanc 
ou  d'amidon  délayé  à  froid.  L'image  apparaît  en  violet  intense  sur 
fond  métallique. 

Le  dépouillement  achevé,  on  peut  durcir  la  gélatine  dans  une 
solution  à  10  p.  100  d'alun  de  chrome  rendue  alcaline  par  addition 


344  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

de  quelques  gouttes  d'ammoniaque;  mais  cette  opération  n'est  pas 
indispensable. 

La  plaque  lavée  et  séchée  est  ensuite  soumise  à  la  cuisson,  qui 
va  transformer  la  gélatine  en  un  corps  suffisamment  résistant  au 
bain  de  morsure.  A  cet  efifet,  on  la  place  sur  un  gril  métallique 
sous  lequel  on  déplace  un  brûleur  à  gaz.  Dès  le  début  de  la  chauffe, 
l'image  se  décolore,  par  suite  de  la  décomposition  du  violet  de 
méthyle,  puis  elle  réapparaît,  à  mesure  que  la  gélatine  subit  une 
sorte  de  caramélisation,  et  sa  couleur  permet  de  juger  de  son 
degré  de  cuisson.  Si  le  cliché  est  en  zinc,  on  s'arrêtera  à  la  nuance 
or  pâle  ;  s'il  est  en  cuivre,  on  poussera  jusqu'à  la  teinte  brun  rouge. 
On  passe  ensuite  à  la  morsure. 

Le  mordant  employé  est  l'acide  nitrique  dilué  pour  les  clichés 
sur  zinc,  et  le  perchlorure  de  fer  pour  les  clichés  sur  cuivre.  Par 
suite  du  rapprochement  des  points  dont  l'image  est  formée,  les 
creux  de  simili  sont  ordinairement  limités  à  une  faible  profondeur. 
La  morsure  de  simili  est  donc  plus  rapide  que  la  morsure  de  trait 
et  s'opère  généralement  en  une  seule  phase,  sans  qu'il  soit  néces- 
saire d'avoir  recours  aux  complications  de  gillotage.  Dans  certains 
cas,  cependant,  la  largeur  des  éléments  de  la  trame  et  la  profon- 
deur des  creux  obligent  à  fractionner  la  morsure  comme  il  a  été 
dit  au  paragraphe  précédent* 

Pour  que  l'impression  soit  bonne,  il  faut  que  chaque  maille  de  la 
trame  se  trouve  représentée  sur  la  planche  par  un  point  en  relief 
de  largeur  variable.  Les  teintes  claires  sont  reproduites  par  des 
points  très  petits  séparés  par  des  lisérés  blancs  assez  larges;  les 
teintes  moyennes  sont  représentées  par  un  quadrillage,  une  sorte 
de  damier  formé  de  carrés  blancs  et  noirs;  enfin  les  teintes  fon- 
cées sont  traduites  par  des  points  blancs  très  étroits  sur  fond  noir. 
Parfois  même,  ces  points  blancs  disparaissent  dans  les  ombres  les 
plus  intenses,  et  la  touche  est  alors  uniformément  noire.  De  même, 
aux  endroits  correspondant  aux  plus  vives  lumières  du  sujet,  le 
point  noir  en  relief  fait  quelquefois  défaut,  et  le  papier  ne  reçoit 
aucune  impression.  Mais  ces  deux  cas  extrêmes  sont  exceptionnels 
et  doivent  rester  limités  à  des  espaces  peu  étendus,  sans  quoi 
l'image  manquerait  d'harmonie.  Les  noirs  opaques  seraient  lourds, 
les  blancs  sembleraient  rongés,  et  d'ailleurs  il  arriverait  fréquem- 


LES  IMPRESSIONS  PHOTOMÉCANIQUES  345 

ment  que  le  rouleau  encreur,  n'étant  pas  soutenu  au-dessus  des 
cavités  trop  larges,  les  remplirait  d'encre,  d'où  impossibilité  d'im- 
primer des  images  propres. 

Ce  pointillé  répandu  sur  toute  la  surface,  même  sur  les  endroits 
que  l'on  voudrait  voir  entièrement  blancs,  offre  un  réel  inconvé- 
nient. La  simili  jette  ainsi  sur  l'image  une  sorte  de  voile  (le  voile  de 
sa  trame)  qui  diminue  l'éclat  et  la  précision  de  l'original.  Ce  voile 
€St  peu  sensible  quand  la  trame  est  d'une  extrême  finesse;  mais 
une  telle  trame  exige  un  matériel  de  premier  choix,  un  personnel 
habile,  un  très  beau  papier  et  des  encres  de  qualité  supérieure*  qui 
en  limitent  l'application  aux  publications  de  luxe. 

Une  trame  très  large  donne  des  points  gris,  faciles  à  graver  et  à 
tirer,  même  sur  des  papiers  grossiers,  mais  supprime  beaucoup  de 
détails.  Aussi  l'emploi  en  est-il  réservé  aux  journaux  quotidiens. 

Les  trames  de  finesse  moyenne  sont  les  plus  usitées,  car  elles 
permettent  de  concilier,  jusqu'à  un  certain  point,  les  exigences 
artistiques  avec  les  nécessités  économiques.  La  finesse  relative  de 
ces  trames  exige  déjà  que  la  morsure  soit  limitée  à  de  très  faibles 
creux,  pour  ne  pas  détruire  le  point  dans  les  blancs.  Il  est  donc 
nécessaire  de  régler  l'encrage  des  reliefs  avec  le  plus  grand  soin, 
afin  d'éviter  les  empâtements.  En  outre,  il  faut  employer  des 
papiers  à  surface  absolument  plane  et  lisse,  obtenue  en  recouvrant 
une  pâte  déjà  très  régulière  d'un  enduit  brillant  ou  couchage. 

Les  papiers  couchés  ont  souvent  fait  l'objet  de  justes  critiques/ 
bien  qu'ils  donnent  des  impressions  très  vigoureuses  et  d'une  net- 
teté parfaite.  Leur  surface  miroitante  fatigue  la  vue,  et  la  lecture 
des  textes  qui  y  sont  imprimés  est  pénible,  à  la  longue.  Ils  sont,  de 
plus,  facilement  salissants,  fragiles,  cassants,  et  la  conservation  des 
ouvrages  imprimés  sur  ces  pâtes  complexes  n'est  rien  moins  qu'as- 
surée. 

Cependant,  on  arrive  à  réaliser  d'excellentes  impressions  sur  des 
papiers  à  surface  mate,  quoique  très  régulière.  Ces  papiers  sont 
généralement  assouplis  dans  de  l'eau  additionnée  de  5  pour  100  de 
glycérine.  Les  images  tirées  de  la  sorte  sont  parfaites  de  netteté  et 
de  finesse;  elles  sont  même  plus  belles  et  d'un  aspect  plus  artis- 
tique que  les  épreuves  glacées,  et  le  texte  qui  les  accompagne  est 
beaucoup  plus  commode  à  lire,  sans  fatigue  pour  la  vue. 


346  TRAITE   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

La  simili  est  loin  d'égaler  l'héliogravure  et  même  la  photocollo- 
graphie  pour  la  beauté  des  résultats,  mais  elle  se  recommande  par 
la  rapidité  avec  laquelle  est  obtenue  la  planche  d'impression  et  la 
facilité  avec  laquelle  on  en  tire  économiquement  de  bonnes  épreu- 
ves. En  quelques  heures,  elle  permet  d'exécuter,  par  les  moyens 
ordinaires  de  l'imprimerie,  des  milliers  d'épreuves,  mêlées  au  texte 
et  d'une  exactitude  autrefois  inconnue.  On  conçoit  donc  la  vogue 
dont  ce  procédé  était  appelé  à  jouir,  à  notre  époque  d'information 
rapide  et  précise.  La  photographie  crée,  en  un  instant,  le  docu- 
ment irrécusable,  et  la  photogravure  permet  de  le  lancer  dans  le 
public  le  jour  même.  Aussi  les  revues  périodiques  l'utilisent-elles 
à  profusion,  de  même  que  les  livres,  et  les  grands  quotidiens  -eux- 
mêmes  y  ont  cçnstamment  recours.  La  similigravure  a  multiplié 
en  quelques  années  les  publications  illustrées  dans  des  proportions 
déconcertantes,  en  même  temps  qu'elle  les  rendait  accessibles  à 
tous. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


A.  Albert,  Der  Lichtdruck,  Halle  a/S.  (W.  Knapp),  1898. 

N.-S.  Amstutz,  Handbook  of  Photoengraving,  Chicago  (The  Inland  Printer  G»}, 

1907. 
J.  Bock,  Zincography,  Londres  (Dawbarn  etWard),  1895. 
G.  Bonnet,  Manuel  de  phototypie,  Paris  (Gauthier- Villars),  1889. 
G.  Bonnet,  Manuel  d'héliogravure,  Paris  (Gauthier- Villars),  1890^. 
G.  Blecher,  Die  verwendung  des  Zinks  fur  die  Lithographie,   Halle  a/S.  (W. 

Knapp),  1908. 

G.  Blecher,  Lehrbuch  der  Reproduktionstechnik,  Halle  a/S.  (W.  Knapp),  1908. 
A.  Broquelet  et  p.  Mauron,  Traité  de   l'art  lithographique,  Paris  (Garnier), 

1907.  .  ^ 

L.-P.  Clerc,  les  Reproductions  photomécaniques  monochromes ,  Paris  (0.  Doin  jl 

et  fils),  1910.  '  ' 

W.  Crqnenberg,  la  Pratique  de  la  phototypogravure  américaine,  Paris  (Gau- 

thier-Villars),  1898. 
J.-M.  Eder,  Die  Pigment  verfahren  und  die  Héliogravure,  Halle  a/S.  (W.  Knapp), 

1896. 
Gh.  Féry  et  a.  Burais,  Traité  de  photographie  industrielle,  Paris  (Gauthier- 

Villars),  1896. 
A.  FiscH,   Traité  pratique  des  impressions  photomécaniques,  Paris  (Gh.  Men- 

del),  1901. 


LES  IMPRESSIONS   PHOTOMÉCANIQUES  347 

W.  FiTHiAN,  Practical  Collotype,  Londres  (Dawbarn  et  Ward). 

E.  Forestier,  le  Procédé  Collo,  Paris  (H.  Galmels),  1909. 

Geymet,  Traité  pratique  de  photogravure  sur  zinc  et  sur  cuivre,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1886. 

A.-F.  VON  HuBL,  Die  Pkotographische  Reproduktions  Verfahren,  Halle  a/S.  (W. 
Knapp),  1898. 

J.  HusNiK,  Die  Zinkdtzung,  "Vienne  (Harlleben),  1908. 

L.  Laynaud,  la  Photo typie  pour  tous,  Paris  (Gauthier- Villars),  1900. 

ft.  Namias,  I  modelai  Processi  fotomeccanici.  Milan,  1899 

Sghilz,  Manuel  pratique  d'héliogravure  en  taille-douce ,  Paris  (Gauthier- Vil- 
lars), 1899. 

J.  Verfasser,  The  Half-Tone  Process,  4e  édition,  Londres  (Iliffe  and  sons),  1907, 

L.  Vidal,  Traité  pratique  de  photogravure  en  creux  et  en  relief,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1900. 

J.  VoiRiN,  Manuel  pratique  de  phototypie ,  2^  édition,  Paris  (Gh.  Mendel),  1909. 

J.  Adeline,  les  Arts  de  Reproductions  vulgarisés,  Paris  (May  et  Motteroz). 

J.  Puisard,  l'Illustration  du  livre  moderne  par  la  photographie,  Paris  (Gh.  Men- 
del), 1897. 


LIVRE    IV 
CHROIVIOPHOTO  GRAPHIE 


CHAPITRE   XVII 

LE    PROCÉDÉ     TRICHROME 

Historique.  —  L'idée  de  reproduire  les  couleurs  du  sujet  par  la 
superposition  de  plusieurs  images  photographiques  monochromes 
est  manifestement  inspirée  des  procédés  de  chromotypie  et  de  chro- 
molithographie. Cependant,  la  nécessité  de  préparer  autant  de  cli- 
chés que  l'épreuve  doit  contenir  de  teintes  aurait  fait  de  cette  com- 
binaison une  méthode  trop  complexe,  si  la  théorie  des  couleurs 
fondamentales  n'avait  permis  de  réduire  l'analyse  du  coloris  à  trois 
éléments. 

En  1859,  Clerk  Maxwell  exposait*  une  théorie  des  couleurs  com- 
posées qui  sera  résumée  dans  le  paragraphe  suivant  et  qui  peut 
être  considérée  comme  la  base  essentielle  des  méthodes  trichro- 
mes.  Aussi,  dès  1863,  Collen,  en  Angleterre,  décrivait-il  succincte- 
ment un  procédé  de  photochromie  fondé  sur  celte  théorie^.  Toute- 
fois, il  ne  faisait  qu'énoncer  le  problème,  sans  indiquer  le  moyen 
de  le  résoudre  pratiquement  et  sans  même  songer  à  une  sélection 
opérée  par  un  tamisage  des  radiations  élémentaires  à  travers  des 
écrans  ou  filtres  colorés  :  il  prétendait  que,  pour  opérer  cette  sélec- 
tion, il  faudrait  tout  d'abord  trouver  des  substances  photogj^aphi- 
ques  exclusivement  et  isolément  sensibles  aux  trois  couleurs  pri- 
maires. Yers  la  même  époque,  le  baron  Ransonnet,  en  Autriche, 
entreprenait  des  essais  dans  la  même  voie,  en  interposant  des  ver- 

1.  Proceedings  of  the  royal  Society  of  London,  t.  X,  p.  404-484. 

2,  British  Journal  of  Photography,  27  octobre  1865,  p.  547. 


LE  PROCEDE   TRICHROME  349 

res  colorés;  mais  il  ne  parvint  jamais  à  impressionner  une  plaque 
derrière  un  filtre  jaune-orangé. 

Le  2  décembre  1867,  Charles  Gros  déposait  à  l'Académie  des 
sciences  un  pli  cacheté  qui  ne  fut  ouvert,  sur  sa  demande,  que  le 
26  juin  1876.  Ce  pli  contenait  une  note  intitulée  :  Procédés  d'enre- 
gistrement et  de  reproduction  des  couleurs^  des  formes  et  des  mouve- 
ments. En  voici  un  extrait  : 

«  En  premier  lieu,  trois  épreuves  photographiques  sont  prises 
successivement  d'après  un  mêrfte  tableau.  Pour  la  première  de 
ces  épreuves,  on  interpose,  entre  le  tableau  et  l'objectif  de  l'appa- 
reil photographique  ordinaire,  un  verre  rouge,  pour  la  seconde, 
un  verre  jaune,  pour  la  troisième  un  verre  bleu.  Les  rayons  de 
lumière  rouge  contenus  dans  le  tableau  passeront  en  maximum  à 
travers  le  verre  rouge,  et  il  en  sera  de  même  pour  les  deux  autres 
sortes  de  rayons  et  les  deux  autres  verres. 

«  Si  maintenant,  après  avoir  obtenu  le  positif  des  trois  épreuves, 
on  superpose  les  projections  de  ces  positifs  traversés  respective- 
ment par  un  rayon  rouge,  jaune  et  bleu  sur  un  écran,  la  projection 
composée  représentera  le  tableau  donné  avec  ses  teintes  réelles... 

«  ...  La  superposition\des  trois  épreuves  positives  sur  une  sur- 
face blanche,  en  ayant  soin  de  constituer  chacune  des  épreuves 
dans  la  couleur  complémentaire  de  celle  qui  a  servi  à  l'obtenir, 
donnera  la  reproduction  définitivement  fixée  de  toutes  les  teintes 
du  tableau  à  reproduire,  avec  une  exactitude  que  limitent  seules  la 
pureté  et  la  transparence  des  couleurs  employées.  » 

M.  L.  Ducos  du  Hauron  ne  connaissait  évidemment  pas  le  con- 
tenu du  pli  cacheté  déposé  par  Charles  Cros,  lorsqu'il  prit,  le  23  no- 
vembre 1868,  un  brevet  dans  lequel  est  décrite  la  méthode  des  cli- 
chés analytiques  et  des  tirages  superposés,  à  peu  ^rès  telle  qu'on 
la  pratique  encore  actuellement  :  «  Si  l'on  décompose,  disait-il,' en 
trois  tableaux  distincts,  l'un  rouge,  l'autre  jaune,  l'autre  bleu,  le 
tableau,  en  apparence  unique,  qui  nous  est  off'ert  par  la  nature,  et 
si  de  chacun  de  ces  trois  tableaux  on  obtient  une  image  photogra- 
phique séparée  qui  en  reproduise  la  couleur  spéciale,  il  suffira  de 
confondre  ensuite  en  une  seule  image  les  trois  images  ainsi  obte- 
nues pour  jouir  de  la  représentation  exacte  de  la  nature,  couleur 
et  modelé  tout  ensemble.  > 

20 


350  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Dès  ses  premiers  essais,  efFectue's  avec  le  collodion  humide, 
M.  Ducos  du  Hauron  avait  reconnu  la  nécessité  d'orthochromatiser 
ses  plaques  et  indiqué  diverses  formules  de  collodion  sensible  au 
rouge.  Il  fut  le  premier  à  obtenir  des  épreuves  photographiques 
reproduisant  fidèlement  les  couleurs  du  sujet.  La  pratique  n'avait 
pas  tardé  à  lui  démontrer  que  ses  reproductions  gagnaient  en 
vérité,  à  mesure  qu'il  modifiait  la  couleur  des  écrans  primitivement 
employés.  C'est  ainsi  qu'il  arriva  à  réaliser  la  sélection  comme  on 
la  pratique  aujourd'hui,  à  l'aide  "de  filtres  respectivement  violet, 
vert  et  rouge-orangé. 

Principe  de  la  trichromie.  —  Bien  que  le  nombre  des  couleurs 
nous  semble  illimité,  elles  peuvent  toutes  se  ramener,  au  point  de 
vue  de  l'impression  qu'elles  déterminent  sur  notre  œil,  à  trois  cou- 
leurs fondamentales,  dont  les  combinaisons  infiniment  variées  sont 
susceptibles  de  produire  toutes  les  nuances  possibles.  Ce  n'est  pas 
là  une  simple  hypothèse.  Il  semble  bien  démontré  que  l'organe  de 
la  vision  humaine  contienne  trois  groupes  de  fibrilles  nerveuses 
affectés  chacun  à  la  perception  d'une  zone  du  spectre.  Il  y  a  plus  : 
l'analyse-  attentive  de  certaines  anomalies  constatées  chez  les  dal- 
toniens,  c'est-à-dire  chez  les  personnes  qui  sont  incapables  de  dis- 
tinguer telle  ou  telle  couleur,  a  permis  de  déterminer  exactement 
la  nuance  des  trois  couleurs  fondamentales. 

On  admettait  autrefois,  avec  David  Brewster,  que  ces  trois  cou- 
leurs sont  le  bleu,  le  jaune  et  le  rouge-carmin.  Il  est  acquis  main- 
tenant, conformément  aux  théories  de  Young,  de  Helmholtz  et  de 
Maxwell,  d'ailleurs  corroborées  par  les  résultats  de  la  photogra- 
phie trichrome,  que  les  couleurs  fondamentales  sont  le  violet,  le 
vert  et  le  rouge-orangé.  Nous  allons  voir  cependant  que,  dans  la 
photographie  trichrome  par  tirages  superposés,  l'image  colorée  est 
formée  de. bleu,  de  jaune  et  de  rouge-carmin.  C'est  qu'il  importe 
de  ne  pas  confondre  les  mélanges  de  lumières  colorées  avec  les 
superpositions  de  pigments  colorés.  Supposons,  en  effet,  trois  lan- 
ternes magiques  garnies  l'une  d'un  verre  violet,  la  seconde  d'un 
verre  vert  et  la  troisième  d'un  verre  rouge-orangé.  Dirigeons  sur 
un  écran  blanc  les  trois  projections  colorées,  de  façon  qu'elles 
empiètent  partiellement  les  unes  sur  les  autres.  Si  les  verres  sont 
bien  choisis  et  les  intensités  lumineuses  exactement  réglées,   la 


LE  PROCEDE    TRICHROME  351. 

zone  où  convergent  les  trois  faisceaux  paraît  blanche,  parce  qu'elle 
re'fléchit  simultanément  les  trois  couleurs  dont  la  résultante  pro- 
duit sur  notre  rétine  la  sensation  de  la  lumière  blanche. 

La  région  où  le  rouge-orangé  empiète  sur  le  vert  paraît  jaune, 
parce  que,  lorsque  nos  nerfs  sensibles  au  rouge-orangé  sont  im- 
pressionnés en  même  temps  que  les  nerfs  sensibles  au  vert,  la  sen- 
sation éprouvée  est  exactement  la  même  que  si  nous  avions  devant 
nous  le  jaune  pur,  tel  qu'il  existe  dans  le  spectre  solaire.  Cette 
particularité  s'explique,  depuis  que  l'on  sait  que  le  jaune  pur  im- 
pressionne également  les  fibrilles  du  rouge-orangé  et  celles  du  vert. 

De  même,  l'impression  simultanée  du  violet  et  du  rouge-orange' 
correspond  à  celle  du  rouge-carmin.  De  même,  enfin,  l'action  com- 
binée des  radiations  vertes  et  violettes  agit  exactement  comme 
celle  du  bleu  simple  du  spectre. 

Si,  maintenant,  nous  passons  à  l'effet  des  pigments  mélangés, 
les  résultats  sont  entièrement  différents,  et  il  est  facile  d'en  trou- 
ver la  raison.  Un  pigment-  est  une  substance,  en  poudre  ou  en 
pâte,  qui  n'est  pas  lumineuse  par  elle-même,  mais  qui  réfléchit  la 
lumière  ou  seulement  une  partie  de  la  lumière  qui  l'éclairé.  La 
craie,  par  exemple,  vue  au  grand  jour,  paraît  blanche,  parce 
qu'elle  n'absorbe  aucune  des  teintes  du  spectre  solaire  visible  et 
les  réfléchit  toutes  ;  vue  à  la  lueur  d'un  feu  de  bengale  bleu  ou 
jaune,  elle  paraîtrait  bleue  ou  jaune.  Un  bluet  paraît  bleu  à  la 
lumière  blanche,  parce  qu'il  ne  réfléchit  que  la  lumière  bleue  et 
absorbe  les  autres  radiations  dont  la  lumière  blanche  est  compo- 
sée. Une  prairie  paraît  verte,  parce  que  l'herbe  absorbe  toutes  les 
radiations,  sauf  le  vert.  Une  rose  paraît  rose,  parce  qu'elle  ne 
réfléchit  que  les  radiations  roses  et  absorbe  les  autres.  L'encre, 
enfin,  est  noire,  parce  qu'elle  absorbe  toutes  les  radiations  et  n'en 
réfléchit  aucune. 

Ainsi,  quand  nous  mélangeons  un  pigment  bleu  et  un  pigment 
jaune,  c'est-à-dire  une  substance  qui  absorbe  le  jaune  et  le  rouge, 
et  une  substance  qui  absorbe  le  bleu  et  le  rouge,  nous  réalisons 
une  combinaison  où  toutes  les  radiations  sauf  le  vert  se  trouvent 
absorbées.  Le  bleu  et  le  jaune  à  l'état  de  pigments  forment  donc  un 
mélange  vert.  De  même,  le  bleu  et  le  rouge-carmin  forment  un 
mélange  violet;  le  jaune  et  le  rouge  forment  un  mélange  orangé. 


352  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPEJE 

Enfin,  si  nous  mélangeons  des  pigments  bleus,  jaunes  et  rouges, 
nous  formons  un  mélange  où  toutes  les  radiations  se  trouvent 
absorbées,  et  la  résultante  en  est  noire,  tandis  que  le  mélange  des 
trois  lumières  colorées  formait  une  résultante  blanche.  On  exprime 
cette  différence  en  appelant  synthèse  additive  celle  que  l'on  obtient 
par  des  combinaisons  de  lumières  coloréqs,  et  synthèse  soustrac- 
tive  celle  qui  résulte  des  mélanges  de  pigments  absorbants. 

Il  convient  aussi  de  rappeler  en  quoi  consistent  les  couleurs 
complémentaires.  Un  objet  bleu  examiné  à  travers  un  verre  orangé 
paraît  noir;  il  en  est  de  même  pour  un  objet  jaune  examiné  à 
travers  un  verre  violet,  ainsi  que  pour  un  objet  rouge  examiné 
à  travers  un  verre  vert.  Sans  entrer  à  cet  égard  dans  des  détails 
superflus,  nous  retiendrons  que  Ton  exprime  ces  phénomènes  en 
disant  que  le  bleu  est  la  couleur. complémentaire  de  l'orangé,  et 
.réciproquement.  De  même,  le  jaune  est  complémentaire  du  violet 
-et  vice  versa;  de  même,  le  rouge  et  le  vert  sont  complémentaires 
l'un  de  l'autre. 

Il  nous  reste  à  montrer  l'application  de  ces  principes  à  la  repro- 
duction photographique  des  couleurs. 

Dans  le  procédé  au  charbon,  si  l'on  fait  usage  d'un  papier  enduit 
de  gélatine  colorée  en  bleu,  les  noirs  du  sujet,  c'est-à-dire  les  par- 
ties transparentes  du  cliché,  seront  représentés  par  du  bleu;  si,  au 
contraire,  le  pigment  que  contient  la  gélatine  est  rouge,  cette  cou- 
leur correspondra  aux  parties  non  impressionnées  du  cliché,  et  les 
noirs  du  modèle  seront  traduits  par  du  rouge. 

Or,  la  photographie  trichrome  est  l'art  de  reproduire  toutes  les 
couleurs  du  modèle  en  superposant  trois  images  partielles  colorées 
l'une  en  bleu,  *la  seconde  en  jaune  et  la  troisième  en  rouge.  Cha- 
cune de  ces  images  porte  le  nom  de  monochrome^ ,  parce  qu'elle  ne 
contient  qu'une  seule  couleur. 

Le  monochrome  bleu  devra  être  tiré  sous  un  cliché  exécuté  de 
telle  sorte  que  toutes  les  parties  du  modèle  bleues  ou  contenant  du 
bleu  soient  représentées  par  des  parties  transparentes,  afin  qu'elles 
puissent  figurer  en  bleu  sur  l'épreuve.  Dans  ce  but,  il  faut  éteindre 
toutes  les  radiations  bleues  venues  du  modèle,  de  façon  qu'elles 

1.  Du  grec  [xovoç,  seul,  et  j^pwjjia,  couleur» 


LE   PROCÉDÉ    TRICHROME  353 

n'agissent  pas  plus  que  le  noir  sur  la  plaque  au  gélatinobromure. 
Pour  cela,  il  suffit  de  placer  devant  l'objectif,  ou  entre  Tobjectif  et 
la  plaque  sensible,  un  verre  orange'.  On  a  vu,  en  effet,  que  l'orangé 
est  la  couleur  complémentaire  du  bleu,  et  qu'un  objet  bleu,  vu  à 
travers  un  verre  orangé,  paraît  noir.  Donc,  les  parties  bleues  du 
modèle  n'agiront  pas  plus  sur  la  plaque  sensible  que  si  elles  étaient 
noires;  l'émulsion  restera  inattaquée  sur  ces  points,  qui  se  tradui- 
ront, après  développement  et  fixage,  par  de  la  gélatine  entière- 
ment transparente.  Dès  lors,  le  papier  bichromate  bleu  sera  inso- 
lubilisé par  l'action  de  la  lumière  qui  aura  traversé  sans  obstacle 
la  gélatine  transparente  du  cliché,  et,  en  définitive,  toutes  les  par- 
ties bleues  du  sujet  seront  conservées  sur  le  monochrome  bleu. 

Un  raisonnement  analogue  nous  conduit  à  exécuter  le  mono- 
chrome jaune  Q.n  moyen  d'un  papier  enduit  de  gélatine  jaune  et  tiré 
sous  un  cliché  obtenu  en  interposant  un  verre  violet.  De  même, 
le  monochrome  rouge  sera  fait  d'après  un  phototype  impressionné 
derrière  un  verre  vert. 

Ces  trois  monochromes  transférés  sur  le  même  papier  et  repérés 
de  telle  sorte  que  les  trois  images  partielles  coïncident,  devront 
reconstituer  toutes  les  couleurs  du  modèle,  si  les  opérations  qui 
viennent  d'être  énumérées  ont  été  convenablement  conduites. 

Il  est  à  remarquer  que  les  nuances  les  plus  complexes,  comme 
celles  que  les  peintres  désignent  sous  le  nom  de  tons  rompus,  ne 
sont  pas  plus  difficiles  à  reproduire  que  les  couleurs  primaires. 
Ainsi,  le  vert,  par  exemple,  résultera  de  la  superposition  du  bleu 
et  du  jaune.  Le  vert,  en  efTet,  traversera  sans  absorption  le  verre 
vert;  le  cliché  correspondant  sera  donc  opaque  sur  les  points 
ainsi  impressionnés,  et  la  gélatine  bichromatée,  restée  soluble 
sous  ces  opacités  ,  disparaîtra  lors  du  dépouillement  du  mono- 
chrome rouge.  Quant  aux  verres  violet  et  orangé,  ils  absorberont 
une  partie  des  radiations  vertes  ;  les  clichés  correspondants  conser- 
veront une  certaine  transparence,  les  gélatines  bleue  et  jaune 
seront,  en  grande  partie ,  insolubilisées ,  et  leur  superposition 
reconstituera  le  vert.  La  nuance  de  ce  vert  pourra,  d'ailleurs, 
varier  à  l'infini,  splon  qu'il  contiendra  des  proportions  diverses 
de  bleu,  de  jaune  et  même  de  rouge,  cette  dernière  couleur  en  très 
faible  quantité,  pour  donner  un  ton  rompu. 


354  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

Quant  aux  parties  blanches  du  modèle,  elles  impressionneront 
les  trois  plaques  et  s'y  traduiront  par  des  opacités.  Par  conse'quent, 
les  trois  mixtions  gélatineuses  colorées,  soustraites  à  Faction  de  la 
lumière,  conserveront  leur  solubilité,  et,  les  trois  couleurs  étant 
enlevées  par  l'eau  chaude,  laisseront  le  papier  blanc  à  nu.  Au  con- 
traire, les  noirs  du  sujet  n'impressionneront  aucune  des  trois  pla- 
ques, qui  resteront  transparentes  :  les  trois  gélatines  mixtionnées 
seront  donc  insolubilisées  par  la  lumière,  et  les  trois  pigments 
superposés  formeront  une  résultante  noire. 

Pratique  de  la  trichromie.  —  Le  procédé  trichrome  par  élé- 
ments superposés  exige  trois  séries  d'opérations  : 

1°  La  sélection  ou  analyse  des  couleurs,  c'est-à-dire  l'exécution 
de  trois  négatifs  impressionnés  chacun  par  une  seule  des  couleurs 
fondamentales; 

2°  Le  tirage  de^trois  monochromes  colorés  respectivement  en 
bleu,  en  jaune  et  en  rouge; 

3°  La  superposition  des  monochromes,  réalisant  la  synthèse  des 
couleurs. 

Le  matériel  photographique  ordinaire  suffit  généralement  à 
l'exécution  des  images  trichromes.  Toutefois,  il  est  indispensable 
que  les  lentilles  de  l'objectif  soient  absolument  incolores,  sans 
quoi  le  coloris  serait  inévitablement  faussé.  En  outre,  dans  les 
travaux  de  précision,  on  emploie  des  objectifs  apockromatiqueSy 
ou  anlispectroscopîquesj  c'est-à-dire  corrigés  de  Taberration  chro- 
matique pour  toutes  les  radiations  visibles,  de  telle  sorte  qu'elles 
aient  toutes  le  même  foyer.  Tel  est  l'objectif  antispectroscopique 
de  Roussel  (fig.  126). 

Analyse  ou  sélection.  —  La  première  opération  du  procédé 
trichrome  consiste  à  décomposer  les  couleurs  du  sujet,  en  exécu- 
tant trois  négatifs  impressionnés  chacun  par  une  seule  des  cou- 
leurs fondamentales.  Chacune  des  trois  plaques  employées  dans 
ce  but  doit  être  spécialement  sensibilisée  pour  la  couleur  complé- 
mentaire de  celle  du  monochrome  correspondant.  Ainsi,  pour 
abtenir  le  négatif  qui  servira  à  obtenir  le  monochrome  bleu,  on 
emploiera  une  plaque  aussi  sensible  que  possible  à  l'orangé; 
la  plaque  destinée  au  monochrome  jaune  sera  surtout  sensible 
au  violet,  et  celle  du  monochrome  rouge  recevra  un  supplément 


LE   PROCÉDÉ    TRICHROME 


355 


•de  sensibilité  pour  le  vert.  En  outre,  comme  on  ne  connaît  aucun 
moyen  de  rendre  une  plaque  uniquement  sensible  à  un  groupe 
déterminé  de  radiations,  l'analyse  sera  complétée  en  interposant, 
pendant  la  pose,  devant  ou  derrière  Tubjectif,  un  écran  coloré.  La 
couleur  de  chaque  écran  doit  être  la  complémentaire  de  celle  du 
monochrome  correspondant,,  comme  on  Ta  vu  dans  le  paragraphe 
précédent.  Toutefois,  sa  nuance  exacte  et  l'intensité  de  sa  colora- 
tion sont  subordonnées  à  la  sensibilité  des  plaques  employées. 


Pig.  126.  —  Objectif  anlispeclroscopique. 

MM.  Lumière  ont  fait  connaître  le  mode  de  préparation  des 
'écrans  à  employer  avec  leurs  plaques  : 

Violet..     Eau 20  ce. 

Solution  de  bleu  méthylène  à  1/2  p.  100 20  — 

Vert...     Solution  de  bleu  méthylène  à  1/2  p.  100 5  ce. 

Solution  d'auramine  à  1/2  p.  100 30  — 

Orange'.     Solution  d'érythrosine  à  1/2  p.  100 18  ce. 

Solution  de  jaune  métanile  saturée  à  15° 20  — 

i 

Dans  chacune  de  ces  trois  solutions,  filtrées  et  amenées  à  la  tem- 
pérature de  20°,  on  immerge,  pendant  5  minutes,  deux  glaces  à 
faces  parallèles  recouvertes  d'une  couche  de  gélatine.  Les  bains 
doivent  être  constamment  agités  pendant  la  teinture.  Après  un 
lavage  sommaire,  on  fait  sécher  les  plaques  à  l'abri  des  poussières 


3o6 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


et  on  les  colle  deux  à  deux,  gélatine  contre  gélatine,  au  moyen 
d'une  solution  visqueuse  de  baume  du  Canada  dans  le  chloroforme. 
Derrière  Técran  violet,  on  emploie  une  plaque  Lumière  étiquette 
bleue;  derrière  Fécran  vert,  une  plaque  Lumière  orthochromati- 
que série  A;  enfin,  derrière  l'écran  orangé,  une  plaque  Lumière 
orthochromatique  série  B.  Le  temps  de  pose  est  environ  10  à  12 
fois  plus  long  avec  les  écrans  vert  et  orangé  qu'avec  l'écran  violet. 
Toutefois,  cette  indication  n'est  qu'approximative,  le  rapport  précis 
entre  les  durées  des  trois  poses  variant  pour  chaque  série  d'écrans. 
Dans  certains  cas,  il  est  utile  de  compléter  l'effet  des  trois  mono- 
chromes par  un  quatrième  tirage,  exécuté  en  noir.  Le  négatif  cor- 
respondant est  alors  impressionné  en  interposant  un  verre  jaune. 
Le  tableau  suivant  reproduit  les  formules  de  préparation  de  qua- 
tre écrans  combinés  par  M.  Ludwig  Englich*. 


ECRAN 
VIOLET 


SOLUTIONS    COLORÉES  DE  RÉSERVE 


Bleu-carmin  chimiquementpur.  2  gram. 

Violet  acide 1  gram. 

Acide  acétique  cristallisable . . .  V  gout. 

Eau  distillée  tiède. . . , ...... . .  50  ce. 


ECRAN 
VERT 


'Jaune  naphtol  S 3  gram. 

Bleu-carmin  chimiquement  pur.      2  gram. 

I  Vert  naphtol  Hœchst 0»%5 

j  Acide  acétique VI  gout. 

Eau  distillée  tiède 150  oc. 


Rouge  dianile  Hœchst 3  gram. 

ÉCRAN   Tartrazine  chimiquement  pure.      O^^S 
ORANGÉ  Acide  acétique VIII  gout, 

iEau  distillée  tiède 100  ce. 


ÉCRAN   "^^^"^  naphtol  S 4  gram. 

JAUNE    ^^^^®  acétique V  gout. 

Eau  distillée  tiède 150  ce. 


MIXTIONS   COLORÉES 


Solution  violette ....      6  ce. 
Solution  de  gélatine 

à  10  p.  100 lOOcc, 


Solution  verte 5  ce, 

Solution  de  gélatine.  lOOcc, 


Solution  orange, . ..      6 ce. 
Solution  de  gélatine.   100  ce. 


Solution  jaune 8cc. 

Solution  de  gélatine.   100  ce. 


1.  Le  Procéc?é Juillet  1907. 


LE   PROCÉDÉ    TRICHROME 


3o7 


-^^^ 


Fig.  127.  —  Cuves  pour  écrans  liquides. 


Chacune  de  ces  mixtions  colorées  est  coulée  sur  deux  glaces 
identiques,  à  raison  de  8  ce.  par  décimètre  carré.  Après  dessicca- 
tion, les  glaces  sont  collées  au  baume  du  Canada. 

Pour  réaliser  une  sélection  plus  parfaite,  on  remplace  parfois 
les  écrans  secs  par  des  écrans  liquides,  constitués  par  des  cuves 
en  verre  à  faces  paral- 
lèles remplies  de  li- 
quides colorants.  La 
fig.  127  représente  une 
série  de  trois  cuves 
adaptées  à  la  même 
monture,  ce  qui  permet 
d'exécuter  les  trois 
poses  successives  avec 
le  moins  de  perte  de 
temps  possible.  Les  formules  d'écrans  liquides  indiquées  dans  le 
tableau  suivant,  d'après  M.  Ludwig  Englich,  sont  prévues  pour 
l'emploi  de  cuves  dont  la  distance  entre  joues  soit  de  5  millimè- 
tres. Pour  des  cuves  de  10  millimètres,  les  liqueurs  devraient  être 
diluées  d'un  égal  volume  d'eau. 

Ecran  violet  {cliché  du  jaune). 

Solution  à  0,5/1000^  de  violet  de  méthyle  crist.  chimiquement  pur  ....        250  ce. 
Eau  distillée ',.......,..     Quantité  suffisante  pour  compléter  à    1.000  — 

Ecran  vert  {cliché  du  rouge). 

Solution  à  5/1000^  d'acide  picrique  chimiquement  pur 210  ce. 

Solution  à  1/1000«  de  bleu-carmin  chimiquement  pur  Hœchst 80  — 

Eau  distillée Quantité  suffisante  pour  compléter  à  1.000  — 

Ecran  orangé  {cliché  du  bleu). 

Solution  à  2/1000"  de  mandarine  G , -. .  260  ce. 

■  Solution  à  2/1000^  d'écarlate  de  Biebrich  R 210  — 

Eau  distillée  . . . . , Quantité  suffisante  pour  compléter  à  1.000  — 

Ecran  jaune  {cliché  du  noir). 

Solution  à  5/1000"  de  jaune  naphtol  S 165  ce. 

Eau  distillée Quantité  suffisante  pour  compléter  à    1.000  — 

Ces  solutions  doivent  être  soigneusement  filtrées  et  conservées 
dans  l'obscurité,  en  flacons  bien  bouchés.  Quand  le  cliché  du  jaune 
est  exécuté  sur  plaque  au  collodion  humide  (pour  tirages  photo- 


358  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

mécaniques),  le  liquide  violet  est  remplacé  par  de  l'eau  pure  ou, 
ce  qui  est  préférable,  par  une  solution  de  sulfate  de  quinine  ou 
d'esculine  qui  absorbe  l'ultra-violet. 

Les  plaques  impressionnées  derrière  les  filtres  sélecteurs  doivent 
être  développées  de  manière  à  obtenir  trois  (ou  quatre)  phototypes 
de  mêmes  densités.  On  conçoit,  en  effet,  que  si  le  cliché  corres- 
pondant, par  exemple,  au  bleu  était  doux  et  faible,  et  le  cliché  du 
rouge  très  intense  et  heurté,  il  ne  serait  pas  possible  de  réaliser 
un  coloris  exact  et  bien  équilibré. 

Synthèse  par  le  procédé  au  charbon.  —  Le  principe  des  tirages 
trichromes  au  charbon  a  déjà  été  brièvement  exposé  (p.  352).  En 
pratique,  quelques  précautions  spéciales  sont  nécessaires,  notam- 
ment pour  éviter  Tinégale  extension  des  trois  couches  qui  rendrait 
impossible  le  repérage  exact  des  images  monochromes  à  super- 
poser. Cette  difficulté  est  évitée  si  l'on  emploie  le  papier  mixtionné 
Vaucamps.  Ce  papier,  livré  en  bandes  de  76  centimètres  de  lar- 
geur, porte  côte  à  côte  trois  couches  mixtionnées  respectivement 
en  bleu,  jaune  et  rouge,  ayant  chacune  une  largeur  utihsable  de 
22  centimètres  environ.  Ces  trois  couches  sont,  à  la  nuance  près, 
de  constitution  identique  et,  étant  coulées  en  même  temps  par  la 
même  machine,  présentent  toujours  une  épaisseur  identique;  étant 
coulées  sur  le  même  papier,  trois  feuilles,  coupées  dans  le  même 
sens  à  un  même  rouleau,  subiront  nécessairement  des  exteusions 
identiques. 

La  sensibilisation,  le  tirage,  le  transfert  provisoire  sur  verre 
ciré,  s'effectuent  comme  à  l'ordinaire,  et  le  lecteur  n'a  qu'à  se  repor- 
ter à  Ce  qui  en  a  été  dit  au  chapitre  XIL  L'essentiel,  pour  assurer 
l'équilibre  entre  les  trois  impressions,  est  de  traiter  simultané- 
ment les  trois  papiers,  le  bleu,  le  jaune  et  le  rouge.  Ainsi,  on  les 
laissera  immergés  en  même  temps  dans  le  bain  de  bichromate, 
afin  qu'ils  possèdent  tous  trois  la  même  sensibilité;  la  dessicca- 
tion s'accompUra  à  la  même  température,  le  tirage  aura  lieu  dans 
des  conditions  identiques  d'éclairage  et  d'état  hygrométrique; 
le  dépouillement,  enfin,  ne  sera  pas  effectué  dans  une  eau  plus 
chaude  ou  plus  froide. 

Le  support  définitif  est  constitué  par  du  papier  de  Rives  recou- 
vert d'une  couche  de  gélatine.  On  y  applique  d'abord  le  mono- 


LE  PROCÉDÉ   TRICHROME  359 

chrome  jaune  :  la  plaque  cirée  qui  le  porte  est  mise  dans  l'eau, 
ainsi  que  le  papier  gélatine;  on  met  les  deux  couches  de  gélatine 
en  contact,  on  sort  le  tout,  on  éponge  le  papier  et  on  passe  la 
raclette  afin  de  chasser  Feau  et  les  bulles  d'air.  On  laisse  ensuite 
sécher,  en  ayant  soin  de  coller  sur  les  bords  des  bandes  de  papier 
qui  empêcheront  l'épreuve  d'abandonner  le  support  rigide  avant 
complète  dessiccation.  Quand  le  séchage  est  terminé,  on  incise  avec 
un  canif  bien  aiguisé  les  quatre  bords  du  papier,  on  le  soulève  par 
un  des  coins  et  on  le  détache  avec  précaution.  On  le  plonge  alors 
vivement  dans  une  solution  de  gélatine  à  4  p.  100  maintenue  tiède 
(25°  environ),  et  on  le  retire  aussitôt. 

On  procède  ensuite  au  transfert  du  monochrome  bleu,  qui  s'ef- 
fectue comme  le  précédent,  avec  cette  différence  qu'il  s'agit  de 
repérer  les  deux  images.  Après  avoir  passé  la  raclette,  on  fait  glis- 
ser les  deux  surfaces  gélatinées  l'une  contre  l'autre,  jusqu'à  ce 
que  l'image  bleue  et  l'image  jaune  coïncident  exactement.  On  passe 
alors  de  nouveau  la  raclette,  on  éponge  e^t  on  laisse  sécher.  On 
procède  de  même  pour  transférer  le  monochrome  rouge. 

Procédé  par  imbibition.  —  Une  variante  intéressante  de  la  mé- 
thode précédente  consiste  à  impressionner  trois  pellicules  bichro- 
matées  incolores  et  à  ne  les  colorer  qu'après  le  lavage  dans  l'eau 
chaude,  en  les  immergeant  dans  des  solutions  respectivement  bleue, 
jaune  et  rouge.  L'avantage  de  la  synthèse  par  imbibition,  c'est 
qu'elle  permet  de  rectifier  le  coloris,  quand  l'un  des  monoc^omes 
est  trop  faible  ou  trop  intense,  en  renforçant  sa  coloration  pcir  une 
nouvelle  teinture  ou  en  l'atténuant  au  moyen  d'un  lavage  plus  ou 
moins  prolongé. 

La  pellicule  impressionnée  sous  le  cUché  sélectionné  par  l'écran 
violet  est  colorée  en  jaune,  après  dépouillement  dans  l'eau  chaude, 
par  imbibition  au  moyen  de  la  solution  suivante  : 

Eau 1.000  ce. 

Ghrysophénine  G 4  gr. 

Faire  dissoudre  à  70°  et  ajouter  alcool 200  ce. 

LapelHcule  impressionnée  sous  le  cliché  sélectionné  par  l'écran 
vert  est  colorée  en  rouge  par  la  solution  : 

Eau 1.000  ce. 

Solution  à  3  p.  100  d'érythrosine  J r?5  — 


360  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

La  pellicule  impressionnée  sous  le  cliché  sélectionné  par  l'écran 
orangé  est  teinte  dans  : 

Eau 1.000  ce.      . 

Solution  de  bleu  pur  diamine  F  à  3  p.  100 50  — 

Solution  de  colle  forte  à  15  p.  100 70  — 

Les  images  primitivement  incolores,  constituées  par  des  épais- 
seurs variables  de  gélatine  insolubilisée,  se  colorent  progressive- 
ment, en  absorbant  le  liquide  colorant  proportionnellement  à  leurs 
reliefs.  La  coloration  n'est  complète  qu'après  environ  12  heures 
d'immersion.  On  lave  ensuite  sommairement,  et  on  fait  sécher. 

Avant  de  superposer  définitivement  les  trois  pellicules  colorées, 
on  les  applique  Tune  sur  l'autre,  sans  les  coller,  afin  de  vérifier  si 
la  synthèse  est  exacte.  Presque  toujours,  cette  superposition  pro- 
visoire révèle  quelque  inégalité  et  indique  quelles  sont  les  correc- 
tions à  faire  subir  aux  monochromes.  Par  exemple,  si  la  résultante 
des  trois  impressions  est  trop  verte,  on  renforcera  le  monochrome 
rouge  en  l'immergeant  de  nouveau  dans  la^  solution  d'érythrosine. 
On  peut  également  affaiblir  un  ou  deux  monochromes,  par  lavage 
à  l'eau  pure.  Toutefois,  si  l'on  emploie  les  colorants  indiqués  ci- 
dessus,  le  jaune  et  le  rouge  sont  seuls  susceptibles  d'être  affaiblis  de 
la  sorte.  Le  bleu  pur  diamine  fixé  sur  la  gélatine  bichromatée  résiste 
aux  dissolvants  ordinaires  et  ne  dégorge  que  dans  l'eau  contenant 
1  p.  100  de  colle  forte. 

Ces  corrections  achevées,  les  trois  pellicules  sont  transportées 
sur  verre,  si  l'on  veut  obtenir  un  diapositif  en  couleurs,  ou  sur 
papier,  s'il  s'agit  d'exécuter  une  épreuve  visible  par  réflexion.  Dans 
ce  dernier  cas,  les  monochromes  doivent  être  rnoins  fortement 
colorés.  Ces  transferts  s'efTectuenf  de  la  même  manière  que  dans 
le  procédé  au  charbon. 

Par  cette  combinaison,  MM.  A.  et  L.  Lumière  ont  exécuté  de 
splendides  diapositifs  stéréoscopiques  dont  le  rendu,  saisissant  de 
vérité,  a  gagné  l'admiration  de  tous  ceux  qui  ont  pu  les  examiner. 
Mais  ce  sont  là  des  résultats  exceptionnels,  et  la  complication  des 
opérations  qui  viennent  d'être  succinctement  résumées  est  trop 
souvent  la  cause  d'échecs  décourageants. 

Similigravure  tr^chrome.  —  Les  phototypes  destinés  à  la 
similigravure  en  couleurs  sont  impressionnés,  comme  d'habitude, 


LE  PROCÉDÉ   TRICHROME 


361 


derrière  une  trame.  Toutefois,  il  importe  d'éviter  la  superposition 
des  pointille's,  surtout  dans  les  demi-teintes  qui  présentent  de  déli- 
cates nuances,  sans  quoi  les  couleurs  mélangées  seraient  ternes 
et  lourdes  :  pour  réaliser  un  coloris  brillant  et  frais,  il  vaut  mieux 
que  les  pointillés  soient  simplement  juxtaposés,  sauf  dans  les  prin- 
cipales ombres  du  tableau,  où  la  superposition  des  trois  encres 
aura  l'avantage  de  se  traduire  par  un  noir  intense  et  profond. 

Dans  ce  but,  on  emploie  quelquefois  trois  trames  différentes. 
Dans  ce  cas,  la  trame  correspondant  au  monochrome  bleu  est 
quadrillée,  celle  du  jaune  est  formée  de  traits  parallèles  dirigés 
obliquement,  et  celle  du  rouge  par  des  traits  obliques  dirigés  à 
angle  droit  par  rapport  à  ceux  du  jaune.  Il  faut,  en  effet,  que  les 
traits  de  chaque  trame  présentent  une  inclinaison  différente. 
S'ils  étaient  tous  dirigés  dans  le  même  sens,  il  en  résulterait  un 
moirage. 

Cependant,  il  n'est  pas  indispensable  d'employer  une  trame 
spéciale  pour  chaque  monochrome.  On  construit  des  trames  mon- 
tées sur  châssis  tournant  (Û2-. 
128).  La  même  trame  sert  ain>i 
pour  les  trois  clichés  :  il  sufliL 
de  la  fixer  dans  des  positions 
différentes.  En  même  temps, 
on  change  aussi  le  diaphrag- 
me :  ainsi,  on  emploiera,  par 
exemple,  un  diaphragme  or- 
dinaire pour  le  bleu,  un  dia- 
phragme allongé  obliquement 
pour  le  jaune,  et  un  diaphrag- 
me également  allongé,  mais 
oblique  dans  le  sens  opposé, 
pour  le  rouge. 

Il  va  sans  dire  que  l'exposi- 
tion de  chacune  des  trois  plaques  s'effectue  en  plaçant  devant  l'ob- 
jectif un  écran  coloré,  solide  ou  liquide,  violet  pour  le  cliché  des- 
tiné à  l'impression  du  jaune,  vert  pour  le  cliché  du  rouge  et  orangé 
pour  le  cliché  du  bleu. 

Chacun  de  ces  clichés  tramés  sert  ensuite  à  exécuter  une  plan- 

21 


l'iK.  J.-CÙ.  —  PurLe-irame  rotatif. 


362  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

che  sur  cuivre,  traitée  par  le  procédé  émail  que  nous  avons  décrit 
au  chapitre  précédent. 

Le  procédé  trichrome  permet  ainsi  d'arriver,  h  l'aide  de  trois 
tirages  seulement,  à  des  résultats  qui  valent  au  moins  autant  que 
les  anciennes  chromolithographies,  qui  exigeaient  la  préparation 
de  sept  ou  huit  planches  et  même  d'un  plus  grand  nombre.  Le 
triage  des  couleurs  constitutives  de  ces  chromos  était  d'ailleurs 
très  long,  très  difficile,  et  exigeait  des  artistes  habiles,  tandis  que 
les  phototypes  analytiques  s'effectuent  automatiquement,  par  la 
simple  interposition  des  filtres  sélecteurs  violet,  vert  et  orangé. 

L'exposition  successive  des  trois  clichés,  dont  deux  exigent 
l'interposition  d'écrans  qui  décuplent  la  durée  du  temps  de  pose, 
excluait  jusqu'à  ces  dernières  années  la  reproduction  des  sujets 
animés.  L'invention  des  plaques  à  filtres  colorés  (autochromes  et 
autres),  que  nous  étudierons  dans  le  chapitre  suivant,  évite  désor- 
mais toute  difficulté.  Le  sujet  est  d'abord  reproduit  sur  une  plaque 
autochrome  ou  sur  une  plaque  similaire,  et  c'est  ensuite  ce  diapo- 
sitif  en  couleurs  qui  sert  à  obtenir  les  trois  clichés  analytiques  pai* 
interposition  d'écrans  sélecteurs  violet,  vert  et  orangé. 

Les  trois  planches  une  fois  gravées,  le  repérage  des  impressions 
monochromes,  ainsi  que  leur  mise  en  train  pour  bien  équilibrer 
le  coloris,  nécessitent  beaucoup  de  soin.  Mais,  une  fois  ce  réglage 
préliminaire  convenablement  effectué,  les  tirages  se  succèdent 
rapidement  et  avec  une  régularité  très  satisfaisante,  en  sorte  que 
le  prix  de  revient  de  chaque  épreuve  en  couleurs  finit  par  être 
extrêmement  modique. 

La  similigravure  trichrome  réalise  donc  un  progrès  appréciable 
sur  les  anciens  modes  d'impression  en  couleurs,  mais  il  ne  s'ensuit 
pas  qu'elle  échappe  à  toute  critique.  Trop  souvent,  le  rendu  des 
couleurs  laisse  k  désirer,  et  il  n'est  pas  rare  que  le  coloris  soit 
criard,  quand  il  n'est  pas  entièrement  faussé.  Ces  défauts  sont  dus 
tantôt  à  une  sélection  imparfaite  des  teintes  fondamentales,  tantôt 
à  un  orlhochromatisme  insuffisant  des  émulsions,  tantôt  à  la  com- 
plexité et  à  la  longueur  des  opérations  au  cours  desquelles  la 
moindre  erreur  est  susceptible  de  compromettre  le  résultat  final. 
Qu'une  couleur  soit,  même  très  légèrement,  ou  trop  forte  ou  trop 
faible,  et  l'équilibre  se  trouve  complètement  rompu. 


LE   PROCÉDÉ    TRICHROME  363 

C'est  pourquoi  les  ateliers  soucieux  de  ne  livrer  que  des  produits 
irréprochables  ont  l'habitude  de  faire  retoucher  leurs  clichés  par 
des  ouvriers  expérimentés  et  d'ajouter,  au  besoin,  une  quatrième 
planche  aux  trois  monochromes  ordinaires.  Ce  tirage  supplémen- 
taire, en  noir  ou  en  brun,  est  effectué  d'après  un  cliché  exposé 
derrière  un  écran  jaune.  Quelquefois,  cependant,  ce  monochrome 
additionnel  est  exécuté  dans  une  autre  nuance,  suivant  l'effet  à 
obtenir,  soit  pour  compléter  le  coloris,  soit  pour  en  corriger  les 
inexactitudes. 

On  pourrait  souhaiter  que  les  trames  utilisées  en  simili  trichrome 
fussent  notablement  plus  fines  que  celles  dont  on  se  sert  actuelle- 
ment, afin  que  les  éléments  colorés  révèlent  d'une  manière  moins 
apparente  leurs  formes  géométriques.  C'est  dans  ce  but  que  les 
trames  rayées  ou  quadrillées  sont  parfois  remplacées  par  des 
trames  à  grain  irrégulier.  Il  faudrait  aussi  trouver  le  moyen  de  se 
passer  de  ces  papiers  couchés  dont  le  satinage  excessif  blesse  la 
vue.  Ces  deux  inconvénients  ont  déjà  pu  être  atténués,  en  gaufrant 
le  papier  après  l'impression.  Le  grain  de  ce  gaufrage,  qui  imite 
l'aspect  du  papier  à  dessin,  détruit  partiellement  le  lustre  de  la 
surface,  en  même  temps  qu'il  dissimule  un  peu  la  trame  de  simili- 
gravure. Malheureusement,  cette  amélioration  est  limitée  aux 
images  destinées  à  être  encadrées  ou  montées  séparément;  elle 
ne  saurait  s'appliquer  aisément  à  l'illustration  du  livre. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


H.  Galmels  et  L.-P.  Clerc,   la  Reproduction  photographique  des  couleurs, 

Paris  (H.  Galmels),  1907. 
E.  GousTET,  la  Photographie  des  couleurs,  Paris  (Larousse),  1907. 
Gh,  Gros,  Solution  générale  du  problème  de  la  photographie  en  couleurs,  Paris 

(Gauthier- Villars),  1869. 
A.  Ducos  DU  Hauron,  la  Triplice  photographique  des  couleurs  et  l'Imprimerie, 

Paris  (Gauthier-Villars),  1897. 
A.  ET  L.  Ducos  DU  Hauron,  Traité  pratique  de  la  photographie  des  couleurs, 

Paris  (Gauthier-Yillars),  1878. 
L.  Ducos  DU  Hauron,   les  Couleurs   en  photographie  ;   solution   du  problème, 

Paris  (Marion),  1869. 
L.  Ducos  DU  Hauron,  les  Couleurs  en  photographie  et,  en  particulier,  rHéliO' 

chromie  au  charbon,  Paris  (Marion),  1870. 


364  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

F.  Drouin,  la  Photographie  des  couleurs,  Paris  (Ch.  Mendel),  1896. 

G.  Fritsch.  Beitrcic/ezur  Dreifarhen-Photographie,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 
Hesse,  La  Chromolithographie  et  la  Photochromolithographie ,  Paris  (Gautbier- 

Villars). 

A.-F.  VON  HiJBL,  Die  Dreifarhenphotographie  mît  besonderer  Berûcksichtigung 
des  Dreifarhendrukes  usw.,  2^  édition,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 

E.  KoNiG  ET  E.-J.  Wall,  Natural  Colour  Photography,  Londres  (Dawbarn  et 
Ward),  1906, 

L.  Tranchant,  la  Photographie  des  couleurs  simplifiée,  Paris  (H.  Desforges), 
1903. 

L.  Vidal  ,  la  Photographie  des  couleurs  par  impressions  pigmentaires  superpo- 
sées, Paris  (Gh.  Mendel),  1904. 

L.-P.  Clrrc,  les  Reproductions  photomécaniques  polychsomes,  Paris  (0.  Doin  et 
fils),  1919. 


LES  PLAQUES  A    FILTRES   COLORES    .  36!> 


CHAPITRE   XVIII 

LES     PLAQUES    A     FILTRES     COLORÉS 

Invention  de  la  trichromie  par  éléments  juxtaposés.  —  Ducos 
du  Hauron,  à  la  fin  de  son  brevet  du  23  novembre  1868  (déjà  cité 
p.  349),  signalait  une  importante  simplification  du  procédé  tri- 
chrome  :  «  Enfin,  disait-il,  il  existe  une  dernière  méthode  par 
laquelle  la  triple  opération  se  fait  sur  une  seule  surface.  Le  tami- 
sage des  trois  couleurs  simples  s'accomplit  non  plus  au  moyen  de 
verres  colorés,  mais  au  moyen  d'une  feuille  translucide  recouverte 
mécaniquement  d'un  grain  de  trois  couleurs.  » 

Supposons,  en  effet,  qu'une  plaque  sensible  à  toutes  les  couleurs 
soit  exposée,  dans  la  chambre  noire,  derrière  un  filtre  trichrome, 
c'est-à-dire  derrière  un  écran  transparent  composé  d'une  multitude 
d'éléments  colorés  les  uns  en  violet,  d'autres  en  vert  et  les  autres 
en  orangé.  Si  les  teintes  de  tous  ces  éléments  sont  bien  équilibrées, 
l'écran  observé  d'une  certaine  distance  paraîtra  incolore,  mais  la 
plaque  sensible  impressionnée  derrière  ce  filtre,  développée,  fixée 
et  replacée  en  contact  avec  le  même  écran,  exactement  dans  la 
même  position  qu'auparavant,  montrera  un  négatif  coloré  dont  les 
teintes  seront  les  complémentaires  de  celles  du  modèle  photogra- 
phié. En  effet,  les  rayons  lumineux  transmis  par  l'objectif  traver- 
sent les  particules  colorées,  avant  d'atteindre  le  gélatinobromure, 
et  subissent,  par  conséquent,  suivant  leur  couleur  propre  et  suivant 
la  couleur  des  éléments  qu'ils  rencontrent,  une  absorption  variable. 
Il  en  résulte  une  sélection  qui  aura  pour  effet  de  rendre  certains 
éléments  colorés  invisibles  et  de  ne  plus  laisser  paraître  que  telle 
ou  telle  nuance. 

Considérons,  par  exemple,  une  région  de  l'image  colorée  en  bleu: 
il  est  clair  que  les  radiations  bleues  seront  absorbées  par  les  élé- 
ments sélecteurs  orangés,  tandis  que  les  éléments  violets  et  verts 
les  laisseront  passer.  La  couche  sensible  sera  donc  impressionnée 


366  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

SOUS  les  éléments  violets  et  sous  les  éléments  verts,  tandis  qu'elle 
restera  inaltérée  sous  les  éléments  orangés.  Au  développement, 
le  révélateur  réduira  le  sel  d'argent  impressionné,  en  sorte  que, 
lorsqu'on  superposera  de  nouveau  le  cliché  et  le  filtre  coloré,  les 
éléments  violets  et  verts  seront  masqués  par  l'argent  réduit  à 
l'état  métallique  et  opaque,  tandis  que  les  éléments  orangés  res- 
teront visibles  à  travers  les  transparences  du  phototype. 

La  même  analyse  montrerait  que,  sous  la  lumière  verte,  les  élé- 
ments verts  seront  cachés  et  que  la  couche  apparaîtra  colorée  en 
rouge,  par  suite  de  la  visibihté  des  éléments  orangés  et  des  élé- 
ments violets.  Un  raisonnement  identique  s'appliquerait  à  n'im- 
porte quelle  nuance  et  expliquerait  comment  chaque  couleur, 
simple  ou  coïîïposée,  doit  se  trouver  représentée  par  sa  complé- 
mentaire. Quanta  la  lumière  blanche,  elle  impressionnera  l'émul- 
sion  derrière  tous  les  éléments  qui,  tous,  se  trouveront  ensuite 
masqués  par  les  opacités  de  l'argent  réduit.  Au  contraire,  un  objet 
noir  ne  déterminant  aucune  impression,  tous  les  éléments  colorés 
correspondant  à  cette  partie  de  l'image  demeureront  visibles,  et  la 
résultante  des  trois  couleurs  fondamentales  vues  simultanément 
sera  blanche.  Les  demi-teintes,  les  tons  rompus,  seront,  bien  en- 
tendu, représentés  par  la  disparition  partielle  des  éléments  "sélec- 
teurs correspondants. 

Le  négatif  ainsi  obtenu  pourrait  facilement  être  transformé  en 
diapositif  par  la  méthode  d'inversion  déjà  décrite  p.  309  (dissolution 
de  l'argent  dans  l'acide  chromique  et  second  développement).  Mais 
on  peut  aussi  conserver  le  négatif  tel  quel  et  le  photographier  à 
l'aide  d'une  plaque  également  exposée  derrière  un  filtre  trichrome  : 
on  obtient  alors  une  image  dont  les  couleurs  sont  les  complémen- 
taires de  celles  du  négatif,  c'est-à-dire  les  couleurs  mêmes  du  sujet 
à  reproduire. 

Tels  sont  les  résultats  auxquels  aurait  dû,  théoriquement,  abou- 
tir la  combinaison  suggérée  par  Ducos  du  Hauron.  En  fait,  elle  est 
restée  impraticable  pendant  près  de  quarante  ans.  L'application  en 
était  d'abord  impossible,  à  une  époque  où  l'orthochromatisme 
n'existait  pas  encore;  en  outre,  l'emploi  d'une  trame  séparée  de  la 
plaque  exigeait  un  repérage  dont  la  difficulté  croissait  avec  l'exi- 
guïté des  éléments  sélecteurs. 


LES  PLAQUES  A   FILTRES   COLORÉS  '    367 

En  1892,  Mac  Donough  proposait  de  rendre  la  trame  trichrome 
solidaire  de  l'émulsion.  Une  plaque  de  verre  enduite  d'un  vernis 
poisseux  était  saupoudrée  de  particules  gélatineuses  ou  résineuses 
colorées  en  violet,  en  vert  et  en  rouge-orangé.  On  obtenait  ainsi 
une  mosaïque  microscopique  sur  laquelle  était  coulée  une  émul- 
sipn  au  gélatinobromure  panchromatique.  Toutefois,  comme  cette 
émulsion  conservait  un  excès  de  sensibilité  pour  le  violet  et  le  bleu, 
l'inventeur  jugeait  nécessaire  d'interposer,  pendant  l'exposition,  un 
verre  jaune  compensateur.  Ce  perfectionnement  décisif  resta  néan- 
moins à  l'état  de  projet  et  passa  à  ce  point  inaperçu  que,  deux  ans 
plus  tard,  on  considérait  comme  une  innovation  la  combinaison  sui- 
vante. * 

Revenant  au  dispositif  décrit  26  ans  auparavant  par  Ducos  du 
Hauron,  M.  John  Joly,  de  Dublin,  faisait  breveter,  en  1894,  une 
trame  trichrome  distincte  et  indépendante  de  la  couche  sensible. 
Cette  trame  était  constituée  par  une  glace  sur  laquelle  étaient  tra- 
cées des  lignes  colorées  transparentes  et  parallèles,  alternativement 
violettes,  vertes  et  orangées.  Il  y  avait  environ  8  de  ces  lignes  par 
millimètre.  Le  repérage  ne  présentait  pas  de  grandes  difficultés, 
mais  l'interposition  de  la  trame,  d'une  finesse  insuffisante,  se  tra- 
duisait par  un  aspect  choquant  :  l'image  examinée  dans  ces  condi- 
tions paraissait  comme  entrevue  à  travers  les  barreaux  d'une  cage. 

Pour  atténuer  ce  défaut,  il  fallait  rendre  les  éléments  sélecteurs 
assez  exigus  pour  demeurer  invisibles  à  l'œil  nu.  Mais  le  repérage 
se  fait  de  plus  en  plus  délicat  à  mesure  qu'augmente  cette  exiguïté, 
et  finit  même  par  devenir  impossible,  si  bien  qu'on  se  trouve  amené 
à  rendre  le  filtre  sélecteur  solidaire  de  la  couche  sensible,  comme 
le  proposait  Mac  Donough.  L'image  reste  alors  constamment  visi- 
ble avec  ses  couleurs;  mais,  comme  chaque  plaque  doit  être  munie 
de  son  écran  trichrome,  il  est  indispensable  que  ce  dernier  puisse 
être  fabriqué  à  bas  prix. 

Le  premier  écran  réunissant  les  conditions  requises  a  été  réalisé 
par  MM.  A.  et  L.  Lumière,  dont  les  plaques  autochromes,  inventées 
en  1904  et  mises  dans  le  commerce  en  1907,  ont  fait  de  la  trichro- 
mie par  éléments  juxtaposés  le  plus  simple  et  le  plus  remarquable 
de  tous  les  procédés  de  photographie  en  couleurs. 

Fabrication  des  plaques  autochromes.  —  Les  éléments  colorés 


368  TRAITé'gÉNÊRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

du  filtre  sélecteur  imaginé  par  MM.  Lumière  sont  des  grains  de 
fécule  de  pomme  de  terre  choisis  (par  tamisage)  parmi  ceux  dont 
les  dimensions  sont  comprises  entre  10  et  12  millièmes  de  millimètre. 
Ces  granules,  ovales,  très  transparents  et  facilement  perméables 
aux  solutions  colorantes,  forment  une  poudre  blanche  très  fine  que 
l'on  divise  en  trois  lots,  respectivement  colorés  en  violet,  en  vert 
ou  en  rouge-orangé.  Après  dessiccation,  les  trois  poudres  colorées 
sont  mélangées,  en  proportions  telles  que  le  mélange  ne  présente 
point  de  teinte  dominante.  Ce  pigment,  gris  neutre  pour  qui  le 
voit  à  l'œil  nu,  est  étalé  sur  des  plaques  de  verre  préalablement 
recouvertes  d'un  enduit  poisseux.  Ce  saupoudrage  est  exécuté  de 
telle  sorte  que  la  surface  de  chaque  verre  se  trouve  uniformément 
couverte  de  grains  se  touchant  tous,  sans  aucune  superposition. 
Toutefois,  bien  que  les  grains  de  fécule  se  touchent,  il  reste  inévi- 
tablement entre  eux,  en  raison  de  leur  forme  ovale,  des  interstices 
qui  laisseraient  passer  la  lumière  et  qu'il  faut  boucher.  On  écrase 
donc  par  laminage  les  grains  sur  leur  support,  de  manière  à  les 
rendre  polygonaux  et  contigus  par  leurs  bords,  et  les  petites  lacunes 
qui  subsistent  après  cette  opération  sont  bouchées  par  un  saupou- 
drage de  noir  opaque. 

Le  filtre  trichrome  ainsi  préparé  contient  environ  huit  à  neuf 
mille  élàments  colorés  par  millimètre  carré.  C'est  dire  qu'il  est 
impossible  d'en  soupçonner,  sans  le  secours  d'une  loupe,  la  consti- 
tution granuleuse  et  tricolore  :  la  vue  la  plus  perçante  n'y  aper- 
çoit qu'une  surface  translucide,  blanche  par  transparence  et  gris 
neutre  par  lumière  réfléchie.  Naturellement,  il  n'en  est  plus  de  même 
si  l'examen  se  fait  au  microscope  ;  cette  surface,  en  apparence  inco- 
lore, se  montre  formée  de  particules  rondes  ou  polygonales  très 
richement  colorées  en  violet,  en  vert  et  en  orangé,  séparées  les 
unes  des  autres  par  d'étroits  lisérés  opaques. 

Cet  écran  est  ensuite  protégé  par  un  vernis  transparent,  sur  lequel 
est  enfin  coulée,  après  dessiccation,  une  émulsion  très  sensible  et 
de  grain  très  fin,  en  couche  extrêmement  mince. 

Les  plaques  autochromes  ainsi  préparées  ne  doivent  être  mani- 
pulées qu'avec  précaution,  autant  que  possible  dans  l'obscurité 
complète,  en  raison  de  leur  sensibilité  à  toutes  les  couleurs  visi- 
bles. En  outre,  elles  ne  conservent  pas  indéfiniment  leurs  propriétés 


LES  PLAQUES  A  FILTRES  COLORES  369 

et  présentent  parfois,  au  bout  de  quelques  mois,  des  traces  d'alté- 
ration qui  se  manifestent  même  plus  vite  quand  elles  n'ont  pas  été 
suffisamment  préservées  de  la  chaleur  et  de  l'humidité.  C'est  pour- 
quoi les  boîtes  contenant  ces  plaques  portent  une  date  indiquant 
l'époque  avant  laquelle  il  convient  de  les  utiliser.  Toutefois,  si  on 
les  laisse  dans  leur  emballage  d'origine,  où  l'émulsion  se  trouve 
en  contact  avec  un  carton  noir  spécial,  la  durée  de  conservation 
dépasse  de  4  à  5  mois  la  date  limite  d'utilisation  indiquée  sur  les 
boîtesc 

Exposition  des  plaques  autochromes.  —  Les  plaques  autochro- 
mes étant  très  sensibles  à  toutes  les  radiations  visibles,  l'ouver- 
ture des  boîtes  qui  les  contiennent  et  la  mise  en  châssis  ne  doivent 
être  exécutées  qu'en  lumière  rouge  extrêmement  faible  ou  à  la  lueur 
d'une  lanterne  garnie  de  papiers  Virida  spécialement  préparés  à 
cet  effet  par  MM.  Lumière. 

Chaque  plaque  est  mise  dans  le  châssis  verre  en  avant  et  géla- 
tine en  arrière,  contrairement  à  la  disposition  habituelle,  car  il  est 
nécessaire  que  la  lumière  n'impressionne  l'émulsion  qu'après  avoir 
traversé  les  granules  colorés.  Comme  la  couche  sensible  est  très 
fragile,  un  carton  noir  la  préserve  des  rayures  qu'occasionneraient 
les  ressorts  du  châssis. 

L'exposition  de  la  plaque  par  le  revers  modifie  évidemment  la 
mise  au  point.  Toutefois,  aucune  correction  n'est  nécessaire,  si  l'on 
place  en  arrière  de  l'objectif  le  verre  jaune  préparé  par  les  fabri- 
cants. L'interposition  d'un  verre  détermine,  en  effet,  une  élonga- 
tion  du  plan  focal,  et  l'épaisseur  du  verre  jaune  est  calculée  de 
manière  à  compenser  assez  exactement  le  recul  occasionné  par  le 
retournement  de  la  plaque  sensible. 

On  peut  aussi  effectuer  la  mise  au  point  en  retournant  le  verre 
dépoli  et  placer  le  verre  jaune  en  avant  de  l'objectif.  Mais,  de  toute 
façon,  l'interposition  de  ce  verre  est  indispensable  pour  compen- 
ser les  différences  d'actinisme.  Cet  écran  a  l'inconvénient  d'allon- 
ger notablement  le  temps  de  pose,  mais,  sans  cette  précaution,  on 
n'obtiendrait  qu'une  image  bleue  ou  violacée.  La  nuance  de  l'écran 
fabriqué  par  MM.  Lumière  a  été  choisie  avec  le  plus  grand  soin, 
de  manière  à  réaliser  une  compensation  chromatique  rigoureuse- 
ment exacte.  Avec  tout  autre  écran,  l'effet  serait  presque  à  coup 


370  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

sûr  imparfait;  une  couleur  dominerait  plus  ou  moins,  au  de'triment 
des  autres,  et  le  coloris  tout  entier  en  serait  inévitablement  faussé. 

Malgré  l'extrême  sensibilité  de  leur  émulsion,  les  plaques  auto- 
chromes nécessitent  une  exposition  environ  50  fois  plus  longue 
que  les  plaques  Lumière  étiquette  bleue.  La  raison  en  est  due  à  la 
double  absorption  que  subissent  les  rayons  lumineux  en  traver- 
sant d'abord  le  verre  jaune,  puis  les  grains  de  fécule  colorés. 

Vers  le  milieu  de  la  journée,  en  plein  soleil,  pendant  la  belle 
saison,  le  temps  de  pose  sera  approximativement  de  1  seconde  et 
demie,  si  l'ouverture  de  l'objectif  est  égale  à  F  :  10. 

Traitement  normal  des  autochromes.  —  La  plaque  impression- 
née sera  préservée  de  la  lumière  avec  les  mêmes  précautions  qu'au 
moment  de  la  mise  en  châssis.  On  la  placera  dans  une  cuvette  en 
porcelaine  recouverte  d'une  planchette  ou  d'un  carton,  à  moins 
qu'on  ne  fasse  usage  d'une  cuve  à  fermeture  étanche,  dont  il  sera 
question  plus  loin. 

Premier  développement.  —  On  prépare  d'abord  : 

A.  Eau 100  ce. 

Bisulfite  de  soude  liquide 2  gouttes 

Acide  pyrogallique 3  gr. 

Bromure  de  potassium 3  — 

B.  Eau 85  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 10  gr. 

Ammoniaque  à  22°  B 15  ce. 

Pour  une  plaque  13x18,  on  prendra  : 

Eau 100  ce. 

Solution  A 10  — 

Solution  B IQ  — 

Ce  mélange,  ne  se  conservant  pas,  ne  doit  être  préparé  qu'au  mo- 
ment de  l'emploi.  Il  ne  sert  qu'une  seule  fois  et  doit  être  jeté  après  ; 
il  est  d'ailleurs  déjà  coloré  avant  la  fin  du  développement. 

Au  moment  où  ce  révélateur  est  versé  dans  la  cuvette  contenant 
la  plaque,  on  consulte  une  montre,  en  même  temps  qu'on  remet  en 
place  le  couvercle  ou  la  planchette  qui  doit  préserver  l'émulsion 
de  la  moindre  lumière.  La  durée  du  développement  est  strictement 
limitée  :  elle  est  exactement  de  2  minutes  et  demie,  à  la  tempéra- 
ture de  15»  à  16°  qu'il  est  bon  de  ne  pas  dépasser. 


LES  PLAQUES  A  FILTRES    COLORÉS 


311 


Cuve  Marbach. 


Au  bout  de  ce  laps  de  temps,  la  plaque  est  retirée  du  révélateur 
et  lavée  dans  l'eau  pure  pendant  30  secondes  environ.  On  la  plonge 
ensuite  dans  le  bain  d'inversion. 

Le  développement  h  durée  fixe  peut  être  effectué  hors  du  labo- 
ratoire, si  l'on  emploie- certaines  cuvettes  spécialement  construites 
dans  ce  but,  par  exemple 
la  cuve  Marbach.  Cet  ap- 
pareil (fîg.  129  et  130)  se 
compose  de  deux  parties, 
la  cuvette  proprement  dite 
et  son  couvercle.  Une 
double  gorge  A  (fîg.  130) 
qui  entoure  le  récipient 
et  dans  laquelle  s'engage 
le  couvercle  empêche  toute  introduction  de  lumière.  Sur  le  cou- 
vercle est  ménagée  une  ouverture  C,  avec  des  chicanes  qui  per- 
mettent déverser  le  liquide  à  l'intérieur  sans  que  le  moindre  rayon 
lumineux  y  puisse  pénétrer.  Une  autre  ouverture  D,  percée  au  fond 
de  la  cuvette  et  munie  également  de  chicanes,  laisse  rapidement 
écouler  les  liquides,  dés  qu'on  retire  le  bouchon  qui  la  ferme,  sans 
laisser  entrer  la  lumière.  On  introduit  d'abord  la  plaque  âutochrome 
dans  la  cuvette,  soit  en  s'enfermant  un  instant  dans  le  cabinet  noir, 
soit  au  moyen  d'un  manchon  en  étoffe  opaque,  et  l'on  met  le  cou- 
vercle en  place.  Rien 
n'empêche  ensuite  de 
porter  l'appareil  en 
plein  jour  et  de  l'y  lais- 
ser aussi  longtemps 
qu'il  sera  nécessaire; 
,  On  a  pu  opérer  en  plein 
^  soleily  sans  remarquer 
le   moindre   voile.  Au 


Fig.  130.  —  Coupe  de  la  cuve  Marbach. 


moment  de  développer,  on  prépare  le  révélateur  comme  il  est  dit 
plus  haut,  et  on  le  verse  par  l'orifice  d'admission,  dont  la  surface 
est  très  large,  de  façon  que  l'action  du  bain  soit  immédiate  sur 
toute  l'étendue  de  la  plaque.  On  consulte  alors  une  montre  (ce  qui 
est  beaucoup  plus  facile  en  plein  jour  que  dans  le  laboratoire,  -sur- 


372  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

tout  avec  l'éclairage  très  atténué  qu'exige  l'émulsion  des  aulochro- 

mes),  on  balance  régulièrement  la  cuve,  et,  au  bout  de  2  minutes 

et  demie,  on  enlève  le  bouchon,  ce  qui  permet  au  révélateur  de 

s'écouler  instantanément.  On  verse  alors  de  l'eau  pure  par  l'orifice 

supérieur,  et  on  lave  jusqu'à  ce  que  le  liquide  qui  sort  par  le  fond 

,C  soit  parfaitement    clair.    On 

remet  ensuite  le  bouchon,  et 

■^  on   introduit    la   solution   de 

(T-     -^  permanganate   acide   qui -va 

-é,%.      servir  à  l'inversion.  Au  bout 

^^^^•^j^^^  de    quelques    secondes,     on 

\    'Wim^  ^;:^^^é^^^^^^W  peut,  sans  inconvénient,  en- 

^^^Sé^f^^^^^^   lever  le  couvercle  et  continuer 

^^""^^"^^--^^^s^s^w^^         en  plem  jour  les  opérations 

que  nous  allons  décrire. 

Une  autre  combinaison   a 

r^"  été  imaginée  par  M.  Macken- 

steln.  La  plaque  autochrome 

est  placée   dans   un    châssis 

Fig.  131. -Cuve  Mackenstein,  pour  le  déve- spécial,    qui    s'adapte    à    une 
loppement  des  plaques  autochromes.  -,        i  ^  .     , 

cuve  elanche   et  permet   de 

procéder  au  développement  sans  qu'il  soit  nécessaire  de  se  servir 

d'un  manchon  ni  de  passer  dans  le  laboratoire.  Le  châssis  une  fois 

engagé  dans  les  glissières  du  couvercle  G  (fig.  131),  on  démasque  la 

plaque  en  tirant  le  volet  A  et  on  la  fait  tomber  dans  le  récipient,  en 

faisant  fonctionner  le  levier  de  déclanchement  B.  Les  liquides  sont 

introduits  par  un  tube  de  caoutchouc  finissant  en   entonnoir  et 

fermé  par  une  bague-pince  E. 

Inversion.  —  Le  bain  de  dissolution  de  l'argent  réduit  constituant 

le  négatif  est  préparé  en  mélangeant  : 

G.    Eau 1.000  ce. 

Permanganate  de  potasse 2  gr. 

Acide  sulfurique  à  66°  B 10  ce. 

Gette  solution  se  conserve  un  certain  temps.  Il  faut  la  rejeter  dès 
qu'elle  devient  trouble  et  se  décolore. 
La  plaque  développée  et  lavée  est  plongée  dans  le  bain  de  per- 


LES  PLAQUES  A    FILTRES   COLORÉS  37a 

manganate  acide.  A  partir  de  ce  moment,  les  opérations  peuvent 
et  doivent  même  s'accomplir  en  pleine  lumière. 

L'argent  réduit  par  le  révélateur  est  rapidement  dissous  par  la 
solution  C,  et  la  plaque  examinée  par  transparence  montre  déjà 
un  positif  en  couleurs,  très  faible,  il  est  vrai,  et  d'un  aspect  assez 
désagréable,  car  ses  opacités  ne  sont  constituées  que  par  le  bro- 
mure d'argent  resté  inattaqué  par  le  révélateur.  C'est  justement 
afin  de  pouvoir  noircir  rapidement  ce  bromure  par  un  second 
développement  qu'il  est  nécessaire  d'opérer  en  pleine  lumière. 

Au  bout  de  2  à  3  minutes,  la  dissolution  de  l'argent  est  com- 
plète, et  on  jette  la  solution  G,  qui  ne  doit  servir  qu'une  fois.  On 
lave  alors  la  plaque  pendant  15  à  20  secondes  En  même  temps, 
on  prépare  le  second  révélateur.  Pendant  l'été,  il  est  utile  d'assu- 
rer à  la  gélatine  une  résistance  suffisante  en  la  plongeant  pendant 
2  minutes  environ,  au  sortir  du  bain  de  dissolution  du  négatif, 
dans  : 

Eau 1.000  ce. 

Alun  de  chrome 10  gr. 

On  rince  ensuite  la  plaque,  avant  de  la  passer  dans  le  second 
révélateur.  On  peut  aussi,  dans  le  même  but,  laisser  sécher  la  pla- 
que, avant  de  procéder  au  second  développement. 

Second  développement.  —  On  prépare,  au  moment  d'opérer  : 

D.    Eau 100  ce. 

Sulfite  de  soude  anhydre 1  gr.  5 

Diamidophénol 0  gr.  5 

La  plaque  est  laissée  dans  ce  bain,  en  pleine  lumière,  pendant 
2  à  3  minutes.  Dès  ce  moment  l'image  est  complète  et,  si  on  la 
juge  suffisamment  vigoureuse,  il  n'y  a  plus  qu'à  laisser  sécher  et 
à  vernir  ensuite  la  couche,  comme  nous  le  verrons  plus  loin.  Mais, 
le  plus  souvent,  elle  est  un  peu  pâle  et  gagne  beaucoup  à  subir  un 
renforcement,  qui  avive  l'éclat  des  couleurs.  Toutefois,  rien  n'em- 
pêche de  laisser  sécher  la  couche  et  de  remettre  à  un  autre  jour 
la  suite  des  opérations. 

Oxydation.  —  Avant  de  renforcer  l'image,  il  est  indispensable 
d'éliminer  la  moindre  trace  de  révélateur  contenu  dans  la  couche, 
en  plongeant  la  plaque,  préalablement  lavée  pendant  30  à  40  se- 
condes, dans  : 


374  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

E.  Eau 1.000  ce. 

Solution  de  permanganate  acide  G 20  — 

L'immersion  dans  ce  bain  ne  dure  que  10  secondes  environ.  On 
lave  ensuite  pendant  15  à  20  secondes,  et  on  procède  au  renfor- 
cement. 

Renforcement.  —  On  prépare  d'avance  : 

F.  Eau  distillée 1.000  ce. 

Acide  pyrogallique 3  gr. 

Acide  citrique 3  gr, 

G.  Eau  distillée 100  ce. 

Nitrate  d'argent 5  gr. 

Pour  renforcer,  on  prend  : 

Solution  F ,...     100  ce. 

Solution  G ' 10  — 

Il  faut  observer  l'accroissement  d'intensité  du  diapositif,  en 
l'examinant  de  temps  en  temps  par  transparence.  Comme  le  nitrate 
d'argent  salit  les  doigts,  il  est  bon  de  saisir  la  plaque  dans  une 
pince  spéciale  dont  les  mâchoires  doivent  être  en  corne,  en  ébo- 
nite  ou  en  celluloïd,  et  non  pas  en  métal. 

Le  mélange  ci-dessus  jaunit  peu  à  peu  et  finit  par  se  troubler. 
Il  doit  être  employé  au  plus  vite  et  rejeté  aussitôt  que  le  trouble 
commence  à  se  manifester.  Presque  toujours,  le  renforcement  est 
suffisant  avant  que  cette  limite  soit  atteinte.  Néanmoins,  si  l'on 
juge  nécessaire  de  pousser  plus  loin  l'intensification,  il  faudra  pré- 
parer un  nouveau  bain,  identique  au  premier,  et  procéder  à  un 
second  renforcement,  mais  seulement  après  avoir  passé  la  plaque 
dans  l'eau,  puis  dans  la  solution  E  (bain  d'oxydation),  puis  de  nou- 
veau dans  l'eau. 

Il  arrive  parfois  que  les  blancs  de  l'image  se  teintent  fortement 
en  jaune  et  présentent  le  voile  dichroïque.  Il  ne  faut  pas  s'en  préoc- 
cuper, car  le  voile  argentique  qui  en  est  la  cause  disparait  dans 
les  opérations  suivantes,  qui  sont  d'ailleurs  indispensables  après  le 
renforcement. 

Clarification.  —  La  plaque  renforcée  est  lavée  pendant  quelques 
secondes,  puis  immergée  dans  uije  solution  de  permanganate  sans 
acide  : 


LES  PLAQUES  A   FILTRES   COLORES  375 

H.    Éati 1.000  ce. 

Permang-anate  de  potasse 1  gr. 

On  laisse  agir  ce  bain  pendant  30  à  60  secondes. 
Fixage.  —  Après  un  lavage  sommaire,  la  plaque  est  fixée  dans  : 

I.    Eau •. .     1.000  ce. 

Hyposulfite  de  soude 150  gr. 

Bisulfite  de  soude  (solution  commerciale  ) 50  ce. 

Au  bout  de  deux  minutes,  on  procède  au  lavage  final,  dans  Teau 
courante.  Il  est  inutile  de  prolonger  ce  lavage  au  delà  de  4  à  5 
minutes. 

Si  les  blancs  de  l'image  conservaient  une  légère  teinte  jaunâtre, 
on  la  ferait  disparaître,  en  recommençant  le  traitement  au  perman- 
ganate neutre  (H)  et  à  Thyposulfite  acidifié  (I). 

Aussitôt  le  dernier  lavage  terminé,  la  plaque  est  mise  à  égoutter, 
dans  un  local  suffisamment  aéré  pour  que  la  dessiccation  s'accom- 
plisse aussi  rapidement  que  possible.  Mais  il  faut  bien  se  garder 
d'activer  le  séchage  par  l'alcool,  qui  aurait  pour  eff'et  immédiat  de 
faire  disparaître  les  couleurs.  Il  faut  également  éviter  d'exposer  la 
plaque  à  une  température  supérieure  à  25o. 

Vernissage.  —  Après  dessiccation  complète  de  la  couche,  il  est 
nécessaire  de  la  vernir,  non  seulement  pour  en  assurer  la  conser- 
vation, mais  aussi  pour  augmenter  la  transparence  et  l'éclat  de 
l'image.  Le  vernis  employé  ne  doit  point  contenir  d'alcool,  et  le 
meilleur  est  celui  qu'indiquent  MM.  Lumière  : 

J.     Benzine  cristallisable 100  ce. 

Gomme  dammar 20  gr. 

La  solution  sera  filtrée,  si  elle  n'est  pas  absolument  limpide,  et 
appliquée  à  froid  :  on  en  verse  une  quantité  suffisante  sur  la  pla- 
que soutenue  par  l'un  de  ses  angles;  on  incline  ensuite  la  plaque 
de  façon  à  faire  couler  le  liquide  sur  toute  sa  surface,  puis  on  reverse 
l'excès  de  vernis  dans  son  flacon  muni  d'un  entonnoir. 

Le  diapositif  en  couleurs  ainsi  obtenu  est  d'une  stabilité  très 
satisfaisante;  il  ne  s'altère  pas  sensiblement  à  la  lumière  diffuse, 
mais  il  faut  éviter  de  l'exposer  inutilement  au  soleil  ou  à  la  chaleur, 
qui  risqueraient  d'occasionner  des  craquelures. 

Développement  méthodique.  —  Le  développement  à  durée  fixe 


316  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

(2  minutes  i/2)  indiqué  dans  le  paragraphe  pre'cédent  n'est  prati- 
quement applicable  qu'aux  plaques  dont  le  temps  de  pose  ne  s'est 
pas  notablement  écarté  du  temps  de  pose  normal.  En  cas  de  surex- 
position, cette  méthode  conduit  à  des  images  dont  les  détails  sont 
rongés,  et  en  cas  de  sous- exposition,  elle  donne  des  diapositifs 
trop  opaques.  Le  moyen  de  remédier  à  ces  erreurs  de  pose  est  de 
substituer  au  développement  purement  automatique  une  méthode 
différente  permettant  de  reconnaître  immédiatement  .(d'après  la 
durée  d'apparition  des  premiers  contours  de  l'image  dans  un  révé- 
lateur dilué)  dans  quelles  proportions  doivent  être  modifiées  la 
durée  totale  du  développement  et  la  composition  du  révélateur. 

Le  laboratoire  doit  être  éclairé  par  une  lanterne  munie  de  papiers 
Virida,  qui  laisseront  apercevoir  l'image  sans  la  voiler.  Le  déve- 
loppement est  effectué  soit  au  pyrogallol,  soit  à  la  métoquinone. 

Développement  au  pyrogallol.  —  On  emploie  la  solution  A  telle 
qu'elle  est  indiquée  au  paragraphe  précédent,  mais  la  solution  B 
doit  être  diluée  au  quart,  soit  : 

Eau 3  parties. 

Solution  B 1     — 

Pour  développer  une  autochrome  13x18,  on  verse  dans  la 
cuvette  : 

Eau 80  ce. 

Solution  A 10  — 

Solution  B  diluée 10  — 

D'autre  part,  on  versera  dans  une  éprouvette  graduée  -45  ce.  de 
la  solution  B  diluée  prêts  à  être  ajoutés  en  totalité  ou  en  partie 
au  révélateur  pendant  le  développement,  si  on  le  juge  nécessaire. 
La  température  du  bain  doit  être  de  15°  à  16°. 

On  retire  la  plaque  du  châssis  en  s'éloignant  le  plus  possible  de 
la  lanterne,  et  on  la  plonge  rapidement  dans  le  bain.  On  commence 
aussitôt  à  compter  le  nombre  de  secondes  qui  vont  s'écouler  entre 
l'immersion  et  l'apparition  des  premiers  contours  de  l'image.  S'il 
s'agit  d'un  paysage,  il  ne  faut  pas  tenir  compte  du  ciel. 

Il  est  inutile  d'observer  l'image  avant  d'avoir  compté  au  moins 
20  secondes,  car,  quel  que  soit  le  degré  de  surexposition  d'une 
autochrome,  les  premiers  contours  ne  se  montrent  jamais  avant 
22  secondes.  Jusque-là,  il  vaut  donc  mieux  préserver  l'émulsion 


LES  PLAQUES  A  FILTRES   COLORÉS 


3-.7 


de  la  lumière,  en  recouvrant  la  cuvette  d'une  planchette.  Le  nom- 
bre de  secondes  compte'es  depuis  Timmersion  de  la  plaque  jusqu'à 
l'apparition  de  l'image  sert  à  déterminer,  d'après  le  tableau  sui- 
vant, la  quantité'  de  solution  B  diluée  qu'il  faut  ajouter  au  révéla- 
teur, ainsi  que  la  durée  du  développement. 


DURÉE   d'apparition 

QUANTITÉ 

DURÉE   TOTALE 

DES    PREMIERS 

DE  SOLUTION   AM~MONL\CALE 

DU    DÉVELOPPEMENT 

CONTOURS    DE    l'iMAGE 

A   AJOUTER    APRÈS 

A   PARTIR 

SANS   TENIR 

l'apparition  de  l'jmage 

DE    l'immersion 

COMPTE   DES    CIELS 

POUR  UNE  ÉPREUVE  13x18 

DE   LA   PLAQUE 

Secondes. 

Centimètres  cubes. 

Minutes. 

Secondes. 

22  à  24 

Néant. 

2 

» 

25  à  27 

2 

2 

15 

28  à  30 

8 

2 

30 

31  à  35 

15 

2 

30 

36  à  41 

20 

2 

30 

42  à  48 

25 

2 

30 

49  à  55 

30 

2 

45 

56  à  64 

35 

3 

» 

65  à  75 

40 

4 

» 

Au-dessus  de  75 

45 

5 

» 

On  trouve  dans  le  commerce  ce  tableau  imprimé  sur  papier 
transparent,  que  l'on  colle  sur  le  verre  de  la  lanterne,  de  manière 
à  pouvoir  le  consulter  plus  commodément.  C'est  au  moment  où  les 
contours  de  l'image  font  leur  apparition  que  l'on  doit  ajouter  le 
complément  nécessaire  de  la  solution  ammoniacale  B  diluée.  Sup- 
posons, par  exemple,  que  l'image  ait  commencé  à  se  montrer 
50  secondes  après  l'immersion  de  la  plaque  :  un  coup  d'œil  jeté 
sur  le  tableau  transparent  nous  indique  qu'il  faut  ajouter  30  ce. 
de  solution  B  diluée  et  continuer  le  développement  de  manière 
que  sa  durée  totale  soit  de  2  minutes  45  secondes. 

Ce  laps  de  temps  écoulé,  on  lave  la  plaque  et  on  la  passe  dans 
le  bain  d'inversion  G. 

Développement  à  la  métoquinone.  —  On  prépare  d'avance  une 
solution  concentrée  : 

Eau 1.000  ce. 


378  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

Métoquinone 15  gr. 

Sulfite  de  soude  anhydre 100  gr. 

Bromure  de  potassium 6  — 

Ammoniaque  à  22o  B 32  ce. 

Pour  développer  une  plaque  13x18,  on  verse  dans  la  cuvette  : 

Eau 80  ce. 

Révélateur  concentré  à  la  métoquinone 5  —  , 

D'autre  part,  on  verse  dans  une  éprouvette  15  ce.  du  révélateur 
concentré,  et  dans  une  autre  éprouvette  45  ce.  de  la  même  solu- 
tion. On  placera  ces  deux  éprouvettes  à  proximité  de  la  lanterne 
garnie  de  papiers  Virida,  de  manière  à  retrouver  immédiatement 
celle  dont  on  aura  besoin.  La  température  du  révélateur  doit 
s'écarter  aussi  peu  que  possible  de  15°. 

On  plonge  la  plaque  dans  la  cuvette,  et  on  compte  le  nombre  de 
secondes  qui  s'écoulent  jusqu'à  l'apparition  de  l'image  (toujours 
sans  tenir  compte  des  ciels).  Si  l'image  apparaît  avant  40  secondes, 
il  faut  ajouter  seulement  15  ce.  de  révélateur  concentré;  si,  au 
contraire,  elle  n'apparaît  qu'après  40  secondes,  il  faut  ajouter  45  ce. 
de  solution  concentrée.  Ces  indications,  ainsi  que  la  durée  totale 
du  développement,  sont  imprimées  sur  un  papier  transparent  que 
l'on  fixe  sur  le  verre  de  la  lanterne.  Cetabkiau,  fourni  gratuitement 
par  les  fabricants  des  plaques  autochromes,  est  ci-après  reproduit  : 


DURÉE   d'apparition 

DES   PREMIERS    CONTOURS 

DE    l'image 

SANS  TENIR  COMPTE   DES  CIELS 

QUANTITÉ   DE 
RÉVÉLATEUR    A   A^UTER 

DÈS    l'apparition 
DES   PREMIERS  CONTOURS 

durée  totale 

du  développement 

y  compris  la  durée 

d'apparition  de  l'image 

Secondes, 

12  à  14 
15  à  17 
18  à  21 

22  à  27 
28  à  33 

34  à  39 

- 

Cent,  cubes. 
15 
15 
15 
15 
15 
15 

Minutes. 

1 
1 
2 
8 
3 
4 

Secondes. 

15 
45 
15 

80 
30 

Forte  sous-  )      de    40  à  47 
exposition,  j  Au-dessus  de  47 



45 

45 

3 

4 

LES   PLAQUES   A   FILTRES    COLORÉS  379 

Traitement  simplifié  des  autochromes.  —  Les  manipulations 
énumérées  dans  les  paragraphes  précédents  fournissent  de  très 
beaux  diapositifs  en  couleurs,  mais  elles  sont  un  peu  compliquées. 
MM.  Lumière  ont  fait  connaître  une  méthode  beaucoup  plus  sim- 
ple et  qui  donne  des  résultats  presque  équivalents,  quand  le  temps 
de  pose  a  été  exactement  calculé.  Deux  solutions  seulement  sont 
nécessaires  :  l'une  sert  au  premier  et  au  second  développement, 
l'autre  à  l'inversion.  Il  n'est  pas  nécessaire  de  fixer,  quand  on  ne 
renforce  pas. 

Le  bain  de  développement  est  le  révélateur  à  la  métoquinone 
dont  nous  avons  indiqué  dans  le  paragraphe  précédent  la  formule 
en  solution  concentrée. 

Pour  une  plaque  13  X  18,  on  prendra  ; 

Révélateur  concentré  à  la  métoquinone 20  ce. 

.  Eau 80  — 

La  durée  du  développement  est  exactement  de  2  minutes  et 
demie,  si  le  temps  de  pose  est  correct  et  la  température  voisine  de 
15°.  Si  l'on  a  des  doutes  sur  l'exactitude  du  temps  de  pose,  on  pro- 
cédera comme  il  est  dit  au  paragraphe  précédent.  Le  développe- 
ment achevé,  on  laisse  dans  la  cuvette  le  révélateur  qui  va  servir 
une  seconde  fois,  pour  noircir  le  positif,  et  la  plaque  est  lavée  som* 
mairement.  On  la  passe  ensuite  dans  la  solution  de  permanganate 
acide  C,  oii  se  dissout  l'argent  réduit  par  le  révélateur.  A  partir  de 
ce  moment,  on  opère  en  plein  jour. 

Au  bout  de  3  ou  4  minutes,  la  plaque  est  retirée  du  bain  d'inver- 
sion, rincée  pendant  30  secondes  environ,  et  plongée  de  nouveau 
dans  le  révélateur  qui  avait  servi  au  premier  développement;  on 
la  laisse  dans  ce  bain  jusqu'à  ce  que  le  positif  ait  complètement 
noirci,  ce  qui  exige  environ  3  à  4  minutes.  Après  un  lavage  de  3  à 
4  minutes,  il  n'y  a  plus  qu'à  laisser  sécher,  et  à  vernir  ensuite,  si 
l'image  est  suffisamment  intense. 

Si  elle  était  trop  faible,  il  y  aurait  lieu  de  la  renforcer.  Il  serait 
alors  nécessaire  de  passer  la  plaque,  d'abord  dans  le  bain  d'oxyda- 
tion E,  puis  dans  le  renforçateur  (solutions  F  et  G),  puis  dans  le 
bain  de  clarification  H  et  enfin  dans  le  fixateur  I. 

Insuccès.  —  Le  seul  point  vraiment  délicat  de  l'autochromie, 


380  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

c'est  Tappréciation  du  temps  de  pose,  d'où  dépendent  non  seule- 
ment l'exactitude  du  modelé,  mais  aussi  l'harmonie  des  couleurs, 
et  c'est  de  là  surtout  que  viennent  les  déceptions.  Il  importe  donc 
de  savoir  à  quels  signes  on  reconnaîtra  que  l'exposition  a  été  ou 
trop  courte  ou  trop  longue.  Mais  il  convient  de  signaler  aussi  la 
conséquence  de  certaines  négligences,  assez  fréquentes  chez  les 
débutants. 

Défaut  de  netteté.  —  Si  les  contours  du  modèle  sont  seuls  dédou- 
blés, c'est  qu'il  a  bougé;  si  la  duplication  s'étend  à  toutes  les 
lignes  du  tableau,  elle  est  due  au  déplacement  ou  h  la  vibration 
de  l'appareil.  Si  le  flou  est  général  et  d'aspect  cotonneux,  la  cause 
en  est  imputable  à  une  mise  au  point  inexacte  :  on  aura  oublié  de 
retourner  le  verre  dépoli,  quoique  le  filtre  jaune  fût  placé  derrière 
l'objectif;  ou  bien,  le  verre  dépoli  étant  retourné,  on  n'aura  adapté 
l'écran  compensateur  qu'après  le  réglage  de  la  mise  au  point. 

Image  jaunâtre.  —  Coloration  des  lentilles  de  l'objectif. 

Image  rouge  ou  verte.  —  La  plaque  aura  subi,  par  le  verso,  Tac- 
lion  prolongée  de  la  lumière  rouge  ou  verte  émise  par  la  lanterne. 

Image  hl eue.  —  Verre  jaune  oublié  ou  mal  ajusté. 

Image  voilée  ou  très  intense  et  sans  aucune  trace  de  coloris.  — 
L'émulsion  aura  directement  reçu  les  radiations  émises  par  la  lan- 
terne; ou  bien  le  photographe,  habitué  à  mettre  ses  plaques  en 
châssis  l'émulsion  en  avant,  aura,  par  distraction,  procédé  comme 
il  le  faisait  autrefois.  Les  éléments  sélecteurs  se  trouvant  dès  lors 
placés  derrière  l'émulsion,  aucun  eff'et  de  coloration  n'est  plus  pos- 
sible. 

Image  terne,  quoique  intense,  avec  des  couleurs  lavées.  —  Pous- 
sière ou  buée  sur  l'objectif;  lumière  réfléchie  d'une  lentille  à 
l'autre. 

Image  faible,  couleurs  lavées.  —  Surexposition,  ou  révélateur 
trop  chaud,  ou  premier  développement  trop  prolongé.  Dans  cha- 
cun de  ces  cas,  le  négatif  étant  trop  noir,  il  ne  reste  plus  assez  de 
bromure  d'argent  pour  que  le  second  révélateur  fournisse  un  posi-  i 
tif  suffisamment  intense.  Il  peut  alors  arriver  que  les  opacités  ne 
soient  plus  assez  fortes  pour  masquer  les  grains  de  fécule  dont  la 
disparition  devrait  avoir  pour  efl'et  de  faire  ressortir  telle  ou  telle 
nuance. 


LES  PLAQUES  A  FILTRES    COLORÉS  381 

Défaut  de  transparence.  —  Sous-exposition,  révélateur  trop  froid 
ou  développement  arrêté  trop  tôt.  Le  négatif  n'ayant  pas  été  dé- 
veloppé à  fond,  il  reste  trop  de  bromure  d'argent,  en  sorte  que  le 
second  développement  détermine  un  assombrissement  général. 

Demi-leinies  rongées.  —  Le  bain  d'oxydation  E  était  trop  concen- 
tré, ou  bien  la  plaque  y  a  séjourné  trop  longtemps. 

Voile  dichroique.  —  Renforcement  trop  prolongé,  clarification 
(dans  la  solution  H]  insuffisante.  On  v  remédie  en  reprenant  lé  trai- 
tement par  le  permanganate  neutre,  comme  il  est  indiqué  p.  374. 

Couleurs  affaiblies  dans  le  fixateur.  —  Le  second  révélateur 
^  tait  trop  faible,  ou  son  action  n'a  pas  été  suffisamment  prolongée, 
ou,  enfin,  la  plaque  n'a  pas  été  exposée  à  une  lumière  assez  intense 
pour  assurer  la  décomposition  de  tout  le  bromure  d'argent.  On  est 
prévenu  de  cette  insuffisance  lorsque,  en  traitant  la  plaque  par  le 
bain  d'oxydation  E,  on  voit  l'image  blanchir.  On  devra  alors  sus- 
pendre l'opération  et  faire  subir  à  la  plaque  un  nouveau  dévelop- 
pement en  plein  jour. 

Traînées  noirâtres.  —  Si  le  traitement .  par  le  permanganate 
acide  (solution  G)  a  été  interrompu  trop  tôt,  ou  si  le  bain  est  trou- 
ble, il  reste  de  petites  quantités  d'argent  non  dissous,  résidus  de 
l'image  négative.  Au  renforcement,  ces  particules  s'intensifient  et 
apparaissent  sous  forme  de  traînées  noirâtres  irrégulières.  Les 
mêmes  traînées  se  montrent  également  quand  la  cuvette  n'a  pas 
été  suffisamment  agitée  pendant  le  premier  développement. 

Décollements.  —  La  température  des  bains  dans  lesquels  sont 
immergées  les  plaques  autochromes  ne  doit  pas  dépasser  15°.  Les 
eaux  de  lavage  doivent  également  avoir  une  température  voisine 
de  ce  point.  Si  la  température  est  trop  élevée,  et  surtout  s'il  y  a 
une  trop  grande  différence  entre  la  température  des  bains  et  celle 
des  eaux  de  lavages,  la  couche  gélatineuse  risque  de  se  décoller. 
On  évite  cet  accident  en  faisant  refroidir  les  solutions,  en  employant 
de  l'eau  fraîche  pour  les  lavages,  et  en  laissant  tremper  les  cuvettes 
dans  de  l'eau  froide  avant  d'en  faire  usage.  On  peut  aussi  durcir 
la  couche  dans  l'alun  de  chrome,  comme  il  a  été  dit  p.  373,  ou  lais- 
ser sécher  la  plaque  après  le  traitement  par  le  bain  G,  et  reprendre 
la  suite  des  opérations  avec  cette  plaque  sèche. 

Empreintes  des  doigts  sur  l'image,  —  Il  faut  éviter  de  toucher 


382  TUAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

l'émulsion  :  le  simple  contact  des  doigts  sur  la  couche  gélatineuse 
se  traduit  par  une  marque  foncée. 

Points  blancs.  —  Ces  lacunes  du  réseau  seront  bouchées  au  pin- 
ceau enduit,  suivant  le  cas,  d'encre  de  Chine  ou  d'une  couleur  d'a- 
quarelle :  laque  carminée,  gomme-gutte  ou  bleu  de  Prusse. 

Points  noirs.  —  On  peut  les  effacer  à  l'aide  d'un  pinceau  très  fin 
imbibé  de  la  solution  de  permanganate  acide  C  ou  de  la  solution 
suivante  : 

Eau 50  ce. 

lodure  de  potassium : 3  gr. 

Iode  en  paillettes 1  — 

Après  cette  retouche  chimique,  il  est  nécessaire  de  laver  la  pla- 
que et  de  la  passer  ensuite  dans  le  bain  de  fixage.  Après  un  nou- 
veau lavage,  on  laisse  sécher. 

Autochromie  instantanée.  — Bien  que  la  lenteur  relative  des 
plaques  autochromes  exclue,  en  principe,  la  reproduction  des 
sujets  animés,  on  arrive  à  exécuter  des  Instantanés  en  couleurs, 
soit  à  la  lumière  artificielle,  soit  à  la  lumière  diurne. 

Les  instantanés  en  lumière  artificielle  sont  relativement  faciles 
à  obtenir,  puisqu'il  suffit  d'augmenter  notablement  la  dose  de  pou- 
dre-éclair. Toutefois,  en  pratique,  cette  combinaison  n'est  pas  si 
simple  qu'elle  paraît.  D'abord,  le  verre  jaune  ordinaire  ne  suffît 
plus  pour  équilibrer  le  coloris.  Il  faut  préparer  un  écran  compen- 
sateur spécial  pour  chaque  espèce  de  poudre  utilisée,  le  spectre  de 
la  lumière  émise  variant  suivant  le  métal  et  suivant  l'oxydant  qui 
constituent  le  mélange  éclairant.  En  outre,  la  plupart  des  poudres 
photogènes  sont  de  dangereux  explosifs,  et  il  n'est  pas  prudent 
d'enflammer  une  quantité  exagérée  d'un  produit  contenant  du  chlo- 
rate de  potasse  ou  quelque  autre  substance  similaire. 

La  poudre  au  perchlorate  de  potasse,  dont  le  mode  de  prépara- 
tion a  été  indiqué  p.  128,  n'offre  pas  ces  inconvénients.  Elle  n'est 
pas  sujette  aux  explosions  spontanées,  elle  résiste  aux  chocs,  et 
cette  stabilité  permet  de  l'employer  en  toute  sécurité,  même  à  dose 
élevée.  Appliquée  aux  reproductions  en  couleurs  par  les  plaques 
autochromes,  elle  exige  l'interposition  d'un  écran  spécial,  de  cou- 
leur jaune  verdâtre,  fabriqué  par  la  société  Lumière. 

La  quantité  de  poudre  à  employer  varie  naturellement  suivant 


LES   PLAQUES   A   FILTRES    COLORÉS  383 

les  dimensions  du  local,  la  couleur  de  ses  parois,  la  distance  du 
sujet  principal,  etc.  On  peut  cependant  indiquer,  à  titre  de  donnée 
approximative,  qu'avec  un  objectif  ouvert  à  F  :  5,  il  faudra  envi- 
ron 8  grammes  de  poudre  au  perchlorate  pour  une  plaque  13  X 18, 
et  5  grammes  pour  une  plaque  9  X  12.  Il  va  sans  dire  que,  si  l'on 
utilise  une  ouverture  différente,  la  quantité  de  poudre  sera  modi- 
fiée, en  raison  inverse  du  carré  du  diamètre  utile  du  diapljragme. 
Ainsi,  les  doses  qui  viennent  d'être  indiquées  seront  doublées,  si 
l'objectif  fonctionne  à  F  :  7. 

L'exécution  des  instantanés  en  plein  air  n'est  possible  qu'à  la 
condition  de  modifier  la  sensibilité  de  l'émulsion  des  autochromes. 
M.  Ch.  Simmen  a  trouvé  le  moyen  de" rendre  ces  plaques  huit  fois 
plus  sensibles,  en  améliorant  leur  orthochromatisme  de  manière  à 
supprimer  le  verre  jaune,  dont  l'interposition  est  l'une  des  causes 
principales  de  la  longueur  du  temps  de  pose. 

Les  matières  employées  par  M.  Simmen  sont  le  pinaverdol,  le 
pinacyanol  et  le  pinachrome.  Les  deux  premiers  augmentent  la 
sensibilité  surtout  pour  le  vert-bleu  et  l'orangé,  le  troisième  la 
renforce  surtout  pour  le  jaune.  Il  s'agit  de  doser  convenablement 
ces  trois  sensibilisateurs,  de  manière  à  équilibrer  les  couleurs 
aussi  exactement  que  possible.  Ce  dosage  est  un  peu  délicat,  parce 
que  les  propriétés  sensibilisatrices  du  pinaverdol  et  du  pinacyanol 
varient  notablement  suivant  les  échantillons.  Il  faut  donc  procéder 
par  tâtonnements  et  modifier  la  proportion  des  trois  sensibilisa- 
teurs, en  solutions  à  1  p.  1000,  jusqu'à  ce  que  les  couleurs  soient 
exactement  rendues.  Le  mélange  une  fois  déterminé,  le  bain  sen- 
sibilisateur définitif  est  constitué  par  : 

Eau  distillée 66  ce. 

Alcool  éthylique 33  ce. 

Ammoniaque  à  22° 0  ce.  1 

Solution  sensibilisaLriee 2  ce 

Les  plaques,  époussetées  avec  soin,  sont  immergées  dans  ce  bain 
et  doivent  y  séjourner  exactement  o  minutes.  On  les  fait  ensuite 
sécher.  Il  va  sans  dire  que  ces  manipulations  s'accomplissent  dans 
l'obscurité  complète. 

L'émulsion  possédant,  dès  lors,  une  sensibilité  chromatique  iden- 
tique à  celle  de  notre  œil  pour  toutes  les  radiations  visibles,  il  n'y 


384  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

a  plus  à  compenser  de  différences  d'actinisme.  Toutefois,  comme 
le  traitement  qui  vient  d'être  décrit  n'a  pas  supprimé  lasensibilité 
que  le  gélatinobromure  d'argent  possède  pour  les  radiations  ultra- 
violettes, il  reste  à  absorber  ces  radiations  invisibles,  en  interpo- 
sant un  écran  préparé  à  l'aide  de  la  solution  suivante  : 

Eau  distillée 100  ce. 

Gélatine  tendre 10  gr. 

Ammoniaque 1  ce. 

Glycérine 0  ce.  2 

Esculine 0  gr.  2 

On  en  recouvre  deux  lames  de  verre  à  faces  parallèles,  h  raison 
de  1  ce.  de  liquide  pour  8  centimètres  carrés  de  surface  d'écran. 
Après  dessiccation,  les  deux  glaces  sont  appliquées  l'une  contre 
l'autre,  gélatine  sur  gélatine,  et  collées  au  baume  du  Canada. 

Les  plaques  sensibilisées  par  le  procédé  Simmen  et  impression- 
nées à  travers  l'écran  à  l'esculine  n'exigent,  toutes  choses  égales 
d'ailleurs,  qu'une  exposition  8  fois  plus  courte  que  les  autochro- 
mes employées  suivant  la  méthode  habituelle.  Ainsi,  avec  un 
objectif  diaphragmé  à  F  :  5,  il  devient  possible  de  photographier 
une  scène  animée  en  i/oO  de  seconde,  si  l'on  opère  par  une  belle 
lumière.  Si  le  temps  est  couvert,  on  peut  encore  réussir  en  ne 
posant  que  1/10  de  seconde.  La  plupart  des  sujets  intéressants 
se  trouvent  donc  désormais  accessibles  à  l'aulochromiste. 

La  méthode  précédente  est  assez  délicate  :  la  préparation  de 
l'écran  offre  surtout  quelques  difficultés  pour  l'amateur.  Afin  de 
diminuer  les  risques  d'insuccès,  M.  Thovert  a  indiqué  un  bain  hy- 
persensibilisateur  évitant  la  fabrication  d'un  écran  compensateur 
spécial  et  permettant  d'employer  un  écran  que  l'on  trouve  couram- 
ment dans  le  commerce  (c'est  l'écran  pour  reproductions  au  ma- 
gnésium, dont  il  va  être  question  dans  le  paragraphe  suivant).  Pour 
l'hypersensibilisation ,  on  prépare  d'abord  une  solution  de  réserve  : 

Alcool  à  900 1.000  ce. 

Pinachrome 1  gr. 

Au  moment  de  l'emploi,  on  prend  1  ce.  de  cette  solution,  que 
Ton  ajoute  à  1  litre  d'eau  contenant  2  ou  3  gouttes  d'ammoniaque. 
On  verse  le  tout  dans  une  cuvette  parfaitement  propre,  et  l'on  y 


LES   PLAQUES   A    FILTRES    COLORÉS  385 

plonge  les  plaques,  qui  doivent  y  séjourner  5  minutes.  On  peut 
opérer  sur  plusieurs  plaques  à  la  fois,  en  se  servant  d'une  cuve 
verticale  à  rainures,  mais  le  bain  doit  être  constamment  agité. 
Les  plaques  sont  ensuite  mises  à  égoutter  verticalement  par  un 
angle,  où  les  gouttelettes  qui  restent  sont  absorbées  par  un 
buvard  blanc.  Après  3  minutes,  on  essuie  le  dos  des  plaques,  et 
on  les  fait  sécher  le  plus  rapidement  possible.  On  trouve  dans  le 
commerce  des  boîtes  spécialement  destinées  à  cette  dessiccation*. 
Toutes  ces  opérations  doivent  être  effectuées  dans  Tobscurité; 
cependant,  on  peut  utiliser  une  lanterne  munie  de  papier  Virida, 
afin  de  se  rendre  compte  de  ce  que  l'on  fait,  mais  il  ne  faut  y 
avoir  recours  que  le  moins  possible. 

Si  les  plaques  ainsi  traitées  accusent  une  dominante  jaune,  c'est 
que  l'immersion  dans  le  bain  aura  été  trop  prolongée  ou  que  la 
température  était  trop  élevée.  Une  dominante  bleue  serait  l'indice 
des  défauts  contraires.  Si  la  dominante  est  rouge  ou  orangée, 
c'est  que  le  bain  était  trop  concentré;  elle  sera  verte,  dans  le  cas 
de  concentration  trop  faible.  Ces  observations  effectuées  sur  une 
plaque  d'essai  permettront  de  rectifier  le  traitement  des  autres 
autochromes  que  l'on  se  propose  d'hypersensibiliser. 

Les  plaques  hypersensibilisées  ne  se  conservent  pas  longtemps 
et  doivent  être  utilisées  avant  15  jours.  Aussi  ne  peuvent-elles  être 
préparées  industriellement.  Ajoutons  que,  pour  simplifier  la  beso- 
gne de  l'amateur,  MM.  Lumière  livrent  une  solution  qui  permet 
d'augmenter  quatre  fois  la  sensibilité  de  leurs  plaques  aulochromes. 

Reproduction  des  autochromes.  —  Les  plaques  autochromes 
peuvent  être  reproduites  comme  les  diapositifs  ordinaires,  à  l'aide 
d'une  chambre  noire.  L'objectif  doit  être  muni  d'un  verre  jaune. 
Cette  combinaison  est  la  seule  possible  lorsqu'il  s'agit  d'obtenir 
une  reproduction  réduite  ou  amplifiée.  Pour  les  reproductions  à 
taille  égale,  il  vaut  mieux  procéder  par  contact,  afin  d'éviter  la 
longue  pose  nécessitée  par  l'impression  à  la  chambre  noire.  Tou- 
tefois, on  rencontre  ici  une  difficulté  résultant  de  l'obligation  d'im- 
pressionner la  couche  derrière  le  filtre  sélecteur.  11  faut  appliquer 
contre  l'image  à  reproduire,  non  pas  l'émulsion  sensible,  mais  le 

1.  Essoreuse  et  dessiccaleur,  système  Adrien. 

,22 


386 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


côté  verre  de  l'autochrome  que  l'on  veut  impressionner  par  con- 
tact. Les  deux  couches  se  trouvent  ainsi  séparées  par  toute  l'é- 
paisseur du  verre  et,  pour  éviter  la  diffusion  de  lumière  qui  tend 
à  se  produire  dans  ces  conditions,  ainsi  que  les  effets  de  parallaxe 
que  déterminerait  l'emploi  d'une  source  lumineuse  étendue,  il  est 
nécessaire  d'employer  une  source  lumineuse  très  réduite  et  fixe. 

MM.  Lumière  ont  réalisé  un  dispositif  très  simple  et  qui  satisfait 
bien  aux  conditions  requises  (fig.  132).  Une  caisse  rectangulaire  en 
bois  ABCD,  de  0™,40  environ  de  longueur,  étanche  à  la  lumière  et 
noircie  intérieurement,  est  percée  en  E  d'une  ouverture  à  laquelle 
s'adapte  un  verre  coloré  de  manière  à  donner  un  effet  orthochro- 


Fig-.  132.  —  Appareil  Lumière  pour  la  reproduction  des  autochromes. 

matique  exact  avec  la  lumière  du  magnésium.  Cette  ouverture  peut 
être  à  volonté  masquée  ou  découverte  en  déplaçant  le  volet  V.  L'ex- 
trémité opposée  de  la  caisse  contient  un  châssis  HI,  dans  lequel 
on  place  d'abord  le  chromotype  à  reproduire  0,  le  côté  verre  en 
avant,  c'est-à-dire  regardant  l'ouverture  E,  puis  la  plaque  auto- 
chrome non  impressionnée  P,  le  côté  verre  en  contact  avec  le 
chromotype,  et  ensuite  le  carton  noir  habituel,  appliqué  contre 
Fémulsion.  On  ferme  enfin  le  châssis  à  l'aide  du  volet  R. 

En  face  de  l'ouverture  antérieure,  une  colonne  soutient  une  spi- 
rale en  fil  de  fer  horizontale  S,  dans  laquelle  on  introduit  un  ruban 
de  magnésium  coupé  à  la  longueur  convenable  (10  à  20  centimètres 
en  moyenne,  pour  un  ruban  de  2™°',5  de  largeur,  suivant  l'opacité 
du  chromotype  à  reproduire),  et  plié  en  deux  de  manière  à  n'oc- 
cuper dans  la  spirale  qu'une  longueur  deux  fois  moindre. 

Le  magnésium"  est  enflammé  de  préférence  avec  une  lampe  à 
alcool,  et  on  ouvre  immédiatement  le  volet  V,  que  l'on  referme 


LES  PLAQUES  A  FILTRES   COLORÉS  387 

aussitôt  la  combustion  achevée.  La  plaque  autochrome  ainsi  im- 
pressionnée est  traitée  comme  à  l'ordinaire. 

Reproductions  négatives.  —  Les  autochromes  reproduites  sui- 
vant la  méthode  habituelle,  c'est-à-dire  aboutissant  à  un  diapo- 
sitif,  présentent  souvent  une  couleur  dominante,  et  ce  défaut  s'ex- 
plique aisément.  L'écran  jaune  interposé  lors  de  l'exposition  de  la 
première  plaque  a  été  établi  avec  le  plus  grand  soin,  de  manière 
à  compenser  aussi  exactement  que  possible  les  défauts  d'isochro- 
matisme  de  l'émulsion;  cependant,  en  pratique,  la  compensation 
ne  saurait  être  absolument  rigoureuse,  et,  suivant  les  circons- 
tances de  la  pose  et  la  qualité  de  l'éclairage,  il  peut  y  avoir  sur  le 
diapositif  une  teinte  résiduelle. 

Cette  teinte  est  presque  toujours  trop  légère  pour  qu'on  puisse 
la  remarquer  sur  la  première  plaque;  mais,  si  l'on  veut  repro- 
duire cette  image  dans  les  mêmes  conditions,  avec  le  même  éclai- 
rage et  le  même  écran,  la  reproduction  se  trouvera  entachée 
d'une  dominante  sensiblement  plus  apparente. 

En  effet,  supposons  que  l'écran  employé  soit  tel  que  les  objets 
blancs  soient  reproduits  légèrement  jaunâtres.  Si  nous  reprodui- 
sons ensuite  cette  image  avec  le  même  écran,  qui  tend  à  traduire 
en  jaune  même  le  blanc  pur,  l'image  primitive  légèrement  jau- 
nâtre se  trouvera  traduite  par  un  jaune  plus  accentué.  Et,  si  cette 
seconde  image  devait  être  soumise  à  son  tour  à  la  reproduction, 
de  la  même  manière,  la  troisième  image  serait  encore  plus  jaune, 
le  défaut  initial  s'aggravant  de  plus  en  plus. 

M.  E.  Cousin  a  trouvé  le  moyen  d'éviter  toute  dominante,  quel 
que  soit  l'écran  employé,  et  même  en  supprimant  toute  espèce 
d'écran  compensateur.  Son  procédé  consiste  à  traiter  d*abord  une 
plaque  autochrome  de  manière  à  obtenir  un  négatif.  Pour  cela,  il 
suffit  d'opérer  comme  dans  la  photographie  en  noir  :  au  lieu  d'in- 
verser, après  le  développement,  on  se  borne  à  fixer  l'image  néga- 
tive dans  l'hyposulfite  de  soude;  on  a  ainsi  un  cliché  où  les  blancs 
du  sujet  sont  traduits  par  des  opacités  et  ses  noirs  par  des  trans 
parences,  et  où  chaque  couleur  se  trouve  représentée  par  sa  com- 
plémentaire. Ce  phototype  négatif  sert  ensuite  à  exécuter  des 
copies  positives  sur  autochromes,  en  procédant  de  la  même 
façon,  c'est-à-dire  par  simple  développement  et  fixage. 


388  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Si  la  première  plaque  a  été  exposée  sans  écran,  les  autres 
devront  être  exposées  de  même;  et,  si  Ton  fait  usage  d'un  écran 
dans  la  première  opération,  cet  écran  devra  encore  être  inter- 
posé lorsqu'il  s'agira  de  tirer  les  photocopies.  Autant  que  possi- 
ble, la  lumière  devra  être  la  même  dans  les  deux  cas. 

En  procédant  ainsi,  la  dominante  qui  tendrait  à  se  produire 
sur  les  positifs  se  trouve  neutralisée  par  la  dominante,  de  couleur 
complémentaire,  que  présente  le  négatif. 

M.  Cousin  juge  néanmoins  avantageux  d'emploj^er,  autant  que 
possible,  l'écran  autochrome  spécial  pour  la  lumière  utilisée,  car 
la  correction  laissée  à  la  charge  du  négatif  est  alors  moins  impor- 
tante et,  par  suite,  mieux  assurée.  Avec  ou  sans  écran,  du  reste,  le 
temps  de  pose  est  à  peu  près  le  mênie,  parce  qu'il  faut  laisser  aux 
radiations  jaunes  le  temps  d'agir,  et  Fécran  n'a  point  d'influence 
sur  elles. 

Il  est  utile  de  poser  un  peu  plus  longtemps  qu'on  ne  le  fait 
dans  la  méthode  ordinaire  et  de  pousser  le  développement,  afin 
d'avoir  un  négatif  assez  intense;  sans  quoi,  la  lumière  le  traver- 
sant trop  facilement,  il  ne  pourrait  pas  réaliser  complètement  la 
correction  nécessaire. 

On  peut  ainsi  multiplier  les  images  autochromes ,  soit  à  la 
même  échelle,  soit  en  les  amplifiant  ou  en  les  réduisant.  L'em- 
ploi de  la  lumière  artificielle  permet  d'opérer  rapidement  et  avec 
une  parfaite  régularité. 

Filtres  trichromes  à  éléments  réguliers.  —  Diverses  combinai- 
sons ont  été  proposées  pour  réaliser  des  réseaux  sélecteurs  cons- 
titués par  des  éléments  de  formes  géométriques  et  régulièrement 
répartis  sur  toute  la  surface.  Dans  les  deux  premières  éditions  de 
cet  ouvrage,  nous  décrivions  le  mode  de  préparation  et  le  mode 
d'emploi  des  plaques  om?2tco/ores  de  MM.  Ducos  du  Hauron  et  de  Ber- 
cegol  et  des  plaques  diopiichromes  de  M.  Dufay.  Les  unes  et  les  au- 
tres donnaient  de  belles  images  en  couleurs  ;  mais  la  préparation  en 
était  difïïcile,  et  les  éléments  sélecteurs  un  peu  trop  apparents.  La 
fabrication  de  ces  plaques  a  été  interrompue;  cependant,  le  prin- 
cipe du  réseau  à  éléments  réguliers  n'est  pas  abandonné,  comme 
on  le  verra  au  paragraphe  suivant,  et,  à  ce  titre,  il  n'est  pas  sans 
intérêt  de  savoir  comment  on  arrive  à  obtenir  une  surface  couverte 


LES   PLAQUES   A   FILTRES    COLORES  389 

de  carrés  colorés  presque  microscopiques,  étroitement  juxtaposés 
et  uniformément  distribués,  sans  lacunes  ni  empiétements. 

Voici,  entre  autres,  la  méthode  imaginée  par  M.  Dufay.  Sur  une 
plaque  de  verre  gélatinée,  on  imprime  à  Tencre  grasse  un  réseau 
de  lignes  parallèles  et  équidistantes,  très  fines  et  très  serrées. 
On  plonge  ensuite  la  plaque  dans  un  colorant  vert  en  solution 
aqueuse,  qui  ne  peut  pénétrer  dans  la  gélatine  qu'aux  endroits  non 
protégés  par  les  lignes  grasses.  On  fait  sécher,  on  recouvre  d'un 
vernis  résineux,  on  fait  de  nouveau  sécher,  et  l'on  enlève  l'encre 
grasse  à  l'aide  d'un  tampon  imbibé  d'un  dissolvant  qui  n'attaque 
pas  la  résine.  Celle-ci  reste  donc  adhérente  aux  lignes  teintées  en 
vert,  tandis  que,  sur  les  bandes  non  colorées,  elle  est  enlevée  en 
même  temps  que  l'encre  grasse  sous-jacente. 

On  imprime  alors  un  nouveau  réseau  ligné  à  l'encre  grasse,  per- 
pendiculaire au  premier,  et  l'on  immerge  dans  un  colorant  rouge- 
orangé.  Le  liquide  ne  peut  traverser  ni  les  lignes  vernies  ni  les 
lignes  encrées  :  il  n'imbibe  la  gélatine  que  dans  les  espaces  restés 
à  nu  et  qui  présentent  la  forme  de  petits  carrés  intercalés  entre  les 
deux  séries  de  lignes  croisées  à  angle  droit.  A  ce  moment  de  la 
fabrication ,  la  surface  est  donc  composée  de  lignes  vertes,  de 
carrés  rouge-orangé  et  de  carrés  incolores.  On  recouvre  le  tout  de 
vernis,  on  enlève  l'encre  grasse,  et  l'on  plonge  la  plaque  dans  une 
solution  violette  qui,  ne  pouvant  traverser  ni  les  bandes  vertes  ni 
les  carrés  rouges,  pénètre  uniquement  dans  les  carrés  incolores. 
Les  trois  couleurs  fondamentales  occupent  ainsi  les  compartiments 
qui  leur  étaient  assignés. 

Une  dernière  application  de  vernis  protège  le  filtre  trichrome. 

Procédé  Paget  Color.  —  La  Paget  Prize  Plate  Go.,  de  Watford, 
exploite  un  procédé  de  photographie  en  couleurs  qui  fournit  des 
résultats  analogues  à  ceux  des  plaques  autochromes,  mais  qui  s'en 
distingue  pourtant  par  de  notables  différences.  Dans  ce  procédé, 
dû  à  M.  G.  Whitfield,  le  réseau  sélecteur  et  la  couche  sensible  ne 
sont  point  solidaires  :  ils  sont  fixés  sur  des  plaques  de  verre  dis- 
tinctes, et  le  négatif  noir  une  fois  obtenu  sert  à  tirer  des  diaposi- 
tifs  noirs,  qui  reconstituent  le  coloris  du  modèle,  lorsqu'on  les 
met  en  contact  avec  le  réseau  coloré  sous  lequel  a  été  pris  le  négatif, 
ou  avec  un  autre  réseau  qui  lui  soit  exactement  superposable. 


390  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

Le  principe  de  cette  méthode  avait  été  prévu  par  Ducos  du 
Hauron,  dins  ce  passage  de  son  brevet  du  23  novembre  186S  : 
«  On  aura,  une  fois  pour  toutes,  une  pellicule  unique  ou  feuille 
de  mica  recouverte,  sur  un  côté,  de  raies  rouges,  jaunes  et 
bleues...  On  se  sert  alors  de  cette  pellicule  comme  tamis  pour 
obtenir,  sur  d'autres  surfaces  mises  en  contact  avec  elle  (papier, 
verre,  etc.),  des  clichés  négatifs  au  bromure  d'argent;  chacun  de 
ces  clichés  fournira  à  son  tour  des  positifs  de  couleur  noire  au 
charbon  sur  pellicule,  verre  ou  mica,  etc.  ;  il  ne  restera  plus  qu'à 
appliquer  chacun  de  ces  positifs  sur  une  surface  opaque  ou  trans- 
parente recouverte  mécaniquement  de  raies  rouges,  jaunes  et 
bleues  correspondant  une  à  une  par  leur  position  aux  raies  de  la 
pellicule  qui  a  servi  au  tamisage  des  rayons  de  couleurs  simples.  » 

On  a  vu  (p.  367)  que  John  Joly  avait  essayé  de  mettre  cette 
combinaison  en  pratique,  mais  qu'il  n'était  pas  arrivé  à  réaliser 
un  réseau  coloré  à  la  fois  assez  fin  et  facile  à  repérer.  Ces  diffi- 
cultés ont  été  heureusement  résolues  par  la  G'*  Paget,  qui  est 
parvenue  à  fabriquer  un  réseau  quadrillé  en  trois  couleurs,  d'une 
extrême  finesse  et  parfaitement  régulier. 

Les  éléments  sélecteurs  carrés  sont  juxtaposés  sur  une  mince 
plaque  de  verre  gélatinée.  Les  carrés  rouges  et  les  carrés  verts  me- 
surent 0'"'°,080  de  côté.  Les  carrés  violets  ne  mesurent  que  0°'™,064, 
mais  leur  nombre  est  égal  au  total  des  carrés  rouges  et  des  carrés 
verts.  A  l'œil  nu,  on  ne  distingue  pas  ces  couleurs;  à  peine  aper- 
çoit-on, quand  on  a  très  bonne  vue,  un  léger  quadrillage,  comme 
sur  les  plus  fines  trames  de  photogravure,  et  les  teintes  en  sont 
assez  bien  équilibrées  pour  que  l'ensemble  paraisse  incolore. 

Cet  écran  est  placé,  dans  le  châssis  négatif,  en  contact  avec 
une  plaque  sensible  spéciale.  Bien  que  Témulsion  employée  soit 
orthochromatique,  il  est  indispensable  d'interposer  un  écran 
jaune  compensateur.  Néanmoins,  la  pose  est  assez  rapide  :  pour 
en  donner  une  idée,  nous  dirons  qu'eii  plein  air,  par  un  très  beau 
temps,  elle  est  de  1/10^  de  seconde,  avec  un  objectif  diaphragmé 
à  F  :  6,5. 

Les  deux  plaques  accolées  sont  alors  séparées  :  l'écran  mosaï- 
que est  mis  de  côté,  pour  servir  à  prendre  d'autres  vues,  et  la 
plaque  sensible  est  plongée  dans  le  révélateur.  On  recommande 


LES  PLAQUES   A   FILTRES   COLORES  391 

particulièrement  à  cet  effet  le  Rodinal\  additionné  d'eau  de  façon 
à  amener  à  30  volumes  un  volume  de  la  solution  commerciale 
concentrée.  Dans  ce  bain,  à  la  température  de  16  à  18°,  Ja  durée 
normale  du  développement  est  de  2  minutes.  On  rince  ensuite  la 
plaque  à  l'eau  pure,  et  l'on  fixe  en  bain  acide,  soit,  par  exemple, 
dans  une  solution  d'hyposulfite  de  soude  à  25  p.  100  additionnée 
d'environ  25  ce  de  bisulfite  de  soude  par  litre  de  fixateur.  Après 
un  lavage  d'uiie  vingtaine  de  minutes,  on  met  à  sécher. 

L'image  ainsi  obtenue  est  un  négatif  monochrome,  finement 
quadrillé,  comme  une  héliogravure.  Si  on  l'appliquait  contre  le 
réseau  sélecteur  exactement  repéré,  on  y  verrait  les  couleurs  com- 
plémentaires de  celles  du  sujet  :  un  ciel  bleu  serait  orangé;  un 
bouquet  de  violettes,  jaune;  les  feuilles,  rouges,  etc.  Mais  ce 
réseau  n'est  plus  d'aucune  utilité  pour  les  opérations  suivantes. 

Les  diapositifs  sont  tirés  sur  des  plaques  à  émulsion  lente.  La 
couche  sensible  est  mise  en  contact  avec  le  négatif,  et  les  deux 
plaques,  serrées  dans  un  châssis-presse,  sont  exposées  à  la 
lumière.  A  30  centimètres  d'une  bougie,  la  durée  de  l'exposition 
est  d'environ  15  secondes;  à  1  mètre  d'une  lampe  électrique  à  fila- 
ment de  charbon  de  16  bougies,  elle  sera  de  5  secondes. 

Le  révélateur  doit  donner  des  images  très  pures  et  très  vigou- 
reuses, d'un  noir  neutre.  La  formule  suivante  satisfait  bien  à  ces 

conditions  : 

A.  Eau 1.000  ce. 

Hydroquinone 12  gr. 

Métabisulfite  de  potasse 12  gr. 

Bromure  de  potassium 12  gr. 

B.  Eau l.OOOcc. 

Potasse  caustique  pure 24  gr. 

Au  moment  de  l'emploi,  mélanger  volumes  égaux  des  solutions 
A  et  B,  agiter  vivement  et  commencer  aussitôt  le  développement, 
qui  doit  durer  à  peu  près  2  minutes  et  demie,  à  la  température  de 

1.  Le  rodinal  est  un  révélateur  concentré  au  paramidophénol.  En  voici  une  for- 
«nule  de  préparation  :. 

Eau  distillée 800  ce. 

Sulfite  de  potasse 300  crp. 

Cblorhydrale  de  paramidophénol 100  gr. 

On  ajoute  ensuite  de  la  soude  caustique,  jusqu'à  dissolution  du  précipité  qui  s'é- 
tait formé. 


392  TRAITE   GÉNÉRAL    DE  PHOTOGRAPHIE 

15  ou  16°.  Il  faut  que  les  grands  noirs  transparaissent  au  dos  de 
la  plaque  et  qu'il  ne  reste  nulle  part  de  blancs  purs  :  si  ce  résul- 
tat est  atteint  avant  2  minutes,  c'est  un  indice  de  surexposition; 
si,  au  contraire,  le  développement  exige  plus  de  3  minutes,  l'ex- 
position a  été  insuffisante.  Dans  un  cas  comme  dans  l'autre,  il 
vaut  mieux  recommencer  un  autre  diapositif,  en  rectifiant  la  durée 
de  l'impression  lumineuse. 

Le  fixage  s'effectue  en  bain  acide,  comme  celui  du  négatif. 

Après  lavage  et  séchage,  le  diapositif  monochrome  est  appliqué 
contre  un  écran  de  vision^  dont  la  structure  est  identique  à  celle  de 
l'écran  sélecteur,  mais  avec  des  couleurs,  plus  saturées.  Les  élé- 
ments colorés  étant  distribués  régulièrement,  on  peut  réaliser  un 
repérage  très  précis,  et  l'image  acquiert  alors  toutes  ses  couleurs. 

Le  repérage  est  assez  délicat;  il  est  cependant  facilité  par  les 
aspects  changeaiits  de  l'image,  où  l'on  voit  se  succéder  de  très 
curieux  effets  de  coloration.  Au  moment  où  les  deux  plaques  sont 
mises  en  contact,  gélatine  contre  gélatine,  on  remarque  un  quadril- 
lage coloré,  généralement  beaucoup  plus  gros  que  celui  du  réseau. 
En  faisant  tourner  lentement  l'une  des  surfaces  sur  l'autre,  les  car- 
rés de  couleurs  deviennent  ou  plus  grands  ou  plus  petits.  Contrai- 
rement à  ce  que  l'on  pourrait  supposer,  il  faut  tourner  dans  le  sens 
où  les  carrés  grandissent.  Un  moment  vient  où  ils  disparaissent  et 
sont  remplacés  par  des  moires,  qui  s'évanouissent  à  leur  tour.  Le 
quadrillage  du  diapositif  et  celui  de  l'écran  se  trouvent  alors  exac- 
tement parallèles,  et  il  suffit  d'un  déplacement  de  quelques  cen- 
tièmes de  millimètre  dans  le  sens  convenable  pour  substituer  les 
couleurs  exactes  aux  couleurs  fantaisistes  qui  apparaissent.  Le  sens 
dans  lequel  doit  s'effectuer  le  déplacement  est  recherché  en  incli- 
nant les  deux  plaques,  toujours  maintenues  au  contact,,  dans  diver- 
ses directions,  jusqu'à  ce  que  les  couleurs  se  montrent  exafctes  et 
vigoureuses.  Pour  arriver  h  la  position  normale,  on  fait  glisser 
très  doucement  la  plaque  supérieure  dans  la  direction  qui,  lors  de 
la  vision  correcte,  était  la  plus  éloignée  des  yeux.  Quand  l'image 
apparaît  avec  ses  couleurs  véritables  sous  l'incidence  normale,  on 
maintiennes  deux  plaques,  d'abord  provisoirement  en  les  serrant 
dans  deux  pinces  à  ressorts,  puis  on  procède  au  montage  définitif 
en  collant  autour  des  bords  une  bande  de  papier  noir. 


LES  PLAQUES  A   FILTRES   COLORÉS  393 

Ce  procédé  est  évidemment  trop  long  et  trop  compliqué,  lors- 
qu'il s'agit  d'obtenir  seulement  un  ou  deux  diapositifs  en  cou- 
leurs :  dans  ce  cas,  les  plaques  autochromes  donnent  le  même 
résultat  beaucoup  plus  simplement.  Mais  il  n'en  est  plus  de  même 
quand  il  est  nécessaire  de  reproduire  le  même  sujet  à  plusieurs 
exemplaires.  La  méthode  Paget  offre  alors  plusieurs  avantages. 
D'abord,  un  seul  réseau  suffit  pour  tous  les  négatifs,  et  les  pla- 
ques sensibles  utilisées  à  cet  effet  sont  beaucoup  moins  coûteu- 
ses que  les  plaques  à  filtre  coloré  solidaire  de  l'émulsion.  Cha- 
que cliché  noir  permet  ensuite  de  tirer  autant  de  diapositifs  qu'il 
en  faut.  Si,  parmi  ces  images,  il  en  est  qui  soient  mal  venues,  par 
suite  d'un  vice  de  fabrication  ou  d'une  erreur  de  manipulation,  la 
perte  qui  en  résulte  est  bien  minime.  Les  écrans  de  vision  sont 
relativement  chers,  mais  on  ne  les  applique  que  sur  les  diapositifs 
sans  défaut  :  aucun  n'est  gaspillé. 

Applications  des  plaques  à  filtres  colorés.  —  La  trichromie 
par  éléments  lecteurs  juxtaposés,  telle,  du  moins,  qu'on  la  con- 
naît et  qu'on  l'emploie  actuellement,  ne  fournit  pas  des  images 
visibles  par  réflexion  et  susceptibles  d'être  montées  sur  les  feuillets 
d'un  album  ou  encadrées  et  pendues  aux  murs  :  elle  ne  donne  que 
des  diapositifs^ .  Lu  effet,  les  blancs  y  sont  représentés  par  la  visi- 
bilité simultanée  de  particules  violettes,  vertes  et  orangées  :  cet 
ensemble,  examiné  par  transparence,  procure  bien  l'impression  du 
blanc,  mais  il  n'en  est  plus  de  même  si  l'on  examine  par  lumière 
réfléchie  la  plaque  posée  sur  une  feuille  de  carton  blanc.  La  résul- 

1.  Cependant,  le  procédé  Paget  Color  se  prête,  dans  une  certaine  mesure,  à 
l'examen  par  lumière  réfléchie.  A  cet  effet,  l'épreuve  positive  est  tirée  sur  un 
papier  sensible  à  sous-couche  argentée,  que  l'on  applique,  encore  humide,  contre 
un  écran  de  vision  spécial,  à  couche  détachable  et  beaucoup  plus  transparent  que 
ceux  destinés  aux  diapositifs.  Le  repérage  s'effectue  de  la  même  manière  qu'avec 
les  diapositifs,  et,  lorsqu'il  est  bien  réglé,  on  abandonne  le  papier  à  la  dessiccation. 
Une  fois  sec,  il  suffit  de  soulever  l'un  des  coins  avec  la  pointe  d'un  canif  et  d'exer- 
cer une  traction  légère  :  le  papier  entraîne  avec  lui  l'écran  de  vision,  qui  se  détache 
du  verre  et  demeure  adhérent  à  l'image. 

Cette  image  n'est  pas  également  brillante  sous  toutes  les  incidences;  mais,  lors- 
qu'elle est  éclairée  de  façon  à  se  montrer  sous  l'angle  de  la  réflexion  régulière,  elle 
est  réellement  très  belle  :  les  couleurs  en  sont  franches  et  vives  ;  l'éclat  en  est  même 
surprenant,  si  l'on  tient  compte  de  l'interposition  du  filtre  pelliculaire  trichrome 
qui  recouvre  le  positif  noir  et  absorbe  au  moins  un  tiers  de  la  lumière  incidente. 


394 


TRAITE   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


tante  des  trois  pigments  vus  dans  ces  conditions  est  gris  fonce',  ce 
qui  est  insuffisant  pour  constituer  une  image  vigoureuse,  puisque 
la  gamme  des  valeurs  est  comprise  dans  les  limites  trop  étroites 
qui  vont  de  cette  teinte  déjà  sombre  au  noir  pur. 

L'absorption  de  lumière  qu'occasionne  l'interposition  du  filtre 
sélecteur  restreint  même  l'utilisation  des  plaques  autochromes  et 
similaires  sous  forme  de  diapositifs.  C'est  ainsi  que  ces  plaques 
s'appliquent  mal  h  la  décoration  des  vitraux,  malgré  la  beauté  de 
leur  coloris,  à  cause  de  l'assombrissement  qui  en  résulte  dans  l'ap- 
partement où  la  lumière  n'arrive  qu'à  travers  ces  images.  En  effet, 
dans  un  vitrail  ordinaire  ou  même  dans  un  diapositif  trichrome 
obtenu  par  la  superposition  de  trois  pellicules  colorées,  les  blancs, 
les  grandes  lumières  du  sujet,  sont  représentés  par  du  verre  inco- 
lore et  parfaitement  transparent.  Un  jaune  éclatant  s'y  trouve 
figuré  par  un  verre  ou  une  couche  de  gélatine  jaune  pur,  et  il  en 
est  de  même  pour  toutes  les  couleurs  vives.  Au  contraire,  sur  un 
diapositif  à  éléments  juxtaposés,  la  sensation  du  blanc  nous  est 
procurée  par  lia  lumière  qui  a  traversé  des  particules  colorées. 
Chacune  de  ces  particules  absorbe  une  notable  partie  des  radia- 
tions qui  la  traversent  :  deux  tiers  au  moins  sont  absorbés  par  la 
sélection  du  coloris,  et,  de  plus,  les  éléments  du  filtre  ne  sont  pas 
eux-mêmes  parfaitement  diaphanes.  Ainsi,  dans  une  plaque  auto- 
chrome, il  y  a  lieu  de  tenir  compte  de  l'absorption  occasionnée 
par  l'interposition  de  la  fécule  et  par  les  interstices,  si  étroits 
soient-ils,  formés  de*  poudre  noire  et  opaque.  S'agit-il  d'une  cou- 
leur unique,  par  exemple  celle  d'un  bouquet  de  violettes,  elle  résul- 
tera, sur  la  plaque  autochrome,  de  l'opacité  complète  des  éléments 
orangés  et  verts  et  de  la  transparence  relative  des  éléments  vio>- 
lets,  qui  absorbent  plus  des  deux  tiers  des  radiations  qui  les  tra- 
versent. On  voit  donc  qu'une  plaque  de  ce  genre  laissera  passer 
tout  au  plus  un  tiers  de  la  lumière  qu'aurait  transmise  un  vitrail 
exécuté  dans  d'autres  conditions.  L'effet  artistique  n'en  est  pas 
amoindri,  si  l'on  a  soin  d'entourer  le  diapositif  d'une  large  bor- 
dure opaque  ou  sombre,  mais  on  conçoit  l'inconvénient  résultant 
d'écrans  si  peu  transparents  interposés  devant  une  fenêtre. 

Le  plus  souvent,  les  plaques  à  filtres  colorés  sont  examinées  une 
à  une,  et  dans  des  conditions  spécialement  déterminées  pour  en 


LES  PLAQUES   A   FILTRES   COLORÉS  395 

faire  valoir  tous  les  avantages.  On  ne  juge  bien  de  ces  plaques  que 
lorsqu'elles  sont  vivement  éclairées,  présentées  isolément,  entou- 
rées d'une  large  marge,  noire  ou  très  foncée,  de  telle  sorte  que 
l'observateur  ne  reçoive  presque  point  d'autre  lumière  que  celle 
qui  traverse  le  diaposilif. 

Ces  conditions  d'examen  sont  suffisamment  réalisées  par  le  sté- 
réoscope. Les  photographies  en  couleurs  gagnent  beaucoup  d'éclat 
à  la  vision  binoculaire  et  offrent  des  reproductions  saisissantes 
de  vérité,  car,  avec  le  relief  et  le  coloris,  c'est  la  nature  même  que 
l'on  a  sous  les  yeux. 

Les  images  simples  sont  également  bien  mises  en  valeur  par 
des  appareils  monoculaires  disposés 
à  peu  près  de  la  même  manière  que 
les  stéréoscopes  américains.  Tel  est, 
par  exemple,  le  chromodiascope  Lu- 
mière (fig.  133).  C'est  une  caisse 
dont  l'avant,  divisé  en  deux  compar- 
timents par  une  cloison,  est  percé 
d'une  ouverture  sur  laquelle  est  vissé 
un  système  de  lentilles  achromati- 
ques. A  l'arrière,  des  rainures  verti- 
cales reçoivent  les  cadres  contenant 
les  diapositifs.  Au  repos,  ces  cadres 
se  trouvent  dans  le  compartiment 
inférieur.  Pour  examiner  une  pla- 
que, on  n'a  qu'à  appuyer  sur  un 
levier  extérieur  qui  la  soulève  et 
l'amène  en  face  de  l'oculaire.  L'i- 
mage est  éclairée  par  derrière,  à 
l'aide  d'un  miroir  dont  on  règle  l'inclinaison  suivant  la  direction 
delà  lumière.  Un  écran  opaque  supprime  tout  éclairage,  quand  les 
cadres  sont  tous  abaissés  ;  il  remonte  lorsqu'on  soulève  un  des  ca- 
dres :  on  évite  ainsi  l'accès  de  la  lumière  directe  entre  les  observa- 
tions des  diverses  plaques,  et  l'œil  n'est  pas  ébloui  par  un  éclairage 
plus  intense  que  celui  que  transmettent  les  diapositifs  colorés. 

Un  autre  mode  d'examen  assez  avantageux  et  extrêmement 
simple  est  celui  où  l'image  apparaît  par  réflexion  dans  une  glace. 


CI.  Lumière. 

Fig.  133.  —  Chromodiascope. 


396 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Pouieiic. 


Fig".  134.  —  Pupitre  à  miroir,  pour  l'examen 
des  diapositifs  en  couleurs. 


I.a  plaque  est  placée  dans  un  cadre  incliné  sur  un  miroir,  comme 
1p  mutiUe  la  fig.  134,  elle  diapositif  se  montre  seul  éclairé  dans  un 

milieu  obscur  qui  en 
avive  l'éclat,  par  un 
effet  de  contraste. 
Mais  le  meilleur 
^^  moyen  de  mettre  en 
p  valeur  une  autochro- 
me ou  toute  autre  pla- 
que de  même  nature 
est  d'en  projeter  sur 
un  écran  blanc  l'image 
amplifiée.  L'assom- 
brissement  par  absor- 
ption, résultant  de  l'in- 
terposition du  filtre 
coloré,  subsiste  évi- 
demment quel  que  soit  le  mode  d'examen  des  diapositifs,  mais,  en 
réalité,  il  est  très  facile  d'y  remédier  quand  l'image  est  placée  au 
foyer  d'une  lanterne  de  projection.  En  effet,  le  diapositif  projeté 
aura  le  même  éclat  qu'une  image  trois  fois  plus  transparente,  si  l'on 
triple  la  puissance  lumineuse  du  projecteur.  Et  d'ailleurs,  dans  le 
cas  actuel,  il  n'est  même  pas  nécessaire  de  recourir  à  cet  artifice 
pour  réaliser  un  effet  suffisamment  brillant.  L'éclairage  normal  des 
lanternes  de  projection  suffit  presque  toujours,  d'abord  parce  que 
l'œil  s'adapte  avec  une  surprenante  souplesse  aux  changements 
d'intensité  lumineuse,  ensuite  et  surtout  parce  que  l'atténuation 
de  luminosité  qu'occasionne  le  réseau  sélecteur  est  amplement 
compensée  par  l'éclat  du  coloris  et  le  charme  irrésistible  qui  se 
dégage  des  tableaux  ainsi  présentés.  Néanmoins,  si  un  projecteur  de 
puissance  moyenne  est  généralement  suffisant,  il  est  certain  qu'un 
foyer  plus  éclatant  donnera  de^  meilleurs  résultats,  à  la  condition 
que  la  lumière  en  soit  parfaitement  blanche.  La  plupart  des  sources 
de  lumière  artificielle  dénaturent  les  couleurs  :  le  pétrole,  notam- 
ment, fournit  un  éclairage  trop  jaune,  qui»assombrit  les  violets  et 
les  bleus.  Avec  l'acétylène  et  le  chalumeau  oxhydrique,  ces  altéra- 
tions sont  plus  atténuées,  mais  rien  ne  vaut  l'arc  électrique,  qui 


LES  PLAQUES  A    FILTRES   COLORES  391 

joint  à, une  blancheur  parfaite  un  éclat  éblouissant,  avec  lequel 
aucun  autre  luminaire  artificiel  ne  saurait  rivaliser. 

Les  diapositifs  en  couleurs  servent  aussi  de  clichés  pour  les- 
tîrages  photomécaniques.  La  similigravure  trichrome  exige  tou- 
jours, il  est  vrai,  la  préparation  de  trois  planches  exécutées  cha- 
cune d'après  un  cliché  sélectionné.  Quand  il  s'agit  de  reproduire 
un  tableau  ou  tout  autre  sujet  complètement  immobile,  les  plaques 
autochromes  n'offrent  donc  aucune  utilité,  puisqu'il  n'en  faut  pas 
moins  exécuter  trois  clichés  analytiques.  Mais,  chaque  fois  que 
l'on  a  une  scène  animée  à  reproduire,  l'emploi  de  l'autochrome 
est  tout  indiqué,  pour  obtenir  d'abord  rapidement  une  image  fidèle 
du  modèle,  que  l'on  reproduira  ensuite  tout  à  loisir,  dans  l'atelier, 
à  l'aide  des  procédés  habituels.  La  plaque  autochrome  est,  en 
effet,  susceptible  d'être  photographiée,  comme  tout  autre  sujet, 
lorsqu'on  l'éclairé,  par  transparence,  d'une  lumière  bien  diffusée 
au  moyen  d'un  verre  dépoli.  Il  est  dès  lors  facile  d'exécuter  trois 
négatifs  sélectionnés  par  interposition  d'écrans  respectivement 
violet,  vert  et  orangé,  pour  réaliser  les  trois  phototypes  néces- 
saires à  la  préparation  des  trois  planches. 

Enfin,  les  plaques  autochromes  et  similaires  constituent  d'ex- 
cellents clichés  pour  tirer  des  épreuves  sur  papier  par  les  procé- 
dés qui  vont  être  décrits  dans  le  chapitre  suivant,  notamment  le 
procédé  par  décoloration. 

OUVRAGES  A  CONSULTER 

E.  GousTET,  la  Photographie  des  couleurs,  Paris  (Larousse),  1907. 

E.  CousTET,  la  Photographie  en  couleurs  sur  plaques  à  filtres  colore's,  Paris  (B. 

Tignol),  1908. 
V.  Crémier,  la  Photographie  des  couleurs  par  les  plaques  autochromes,  Paris 

(Gauthier-Villars),  1911. 
A.-P.  VON  HtJBL,  Die  Théorie  und  Praxis  der  Farbenphotographie  mit  Auto- 

chromplatten,  Halle  a/S.  (W.  Knapp). 
E.  Wallon,  la  Photographie  des  couleurs  et  Les  Plaques  autochromes,  Paris- 

(Gauthier-Villars),  1907. 
A.  ScHEFFER,  Manuel  pratique  de  photographie  des  couleurs  par  les  plaques 

autochromes,  Paris  (Gli.  Mendel). 
D'  Mebes,  Farbenphotographie  mit  Farlenrasterplatten,   Bunzlau  i/Schl.  (L. 

Fernbach),  1911. 


23 


a98  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE    XIX 

LES  PROCÉDÉS  PAR  ADAPTATION 

Coloration  du  chlorure  d'argent.  —  Avant  la  découverte  de  la 
photographie,  en  Ï810,  Seebeck  avait  remarqué  que  le  chlorure 
d'argent  noirci  devient  brun  dans  le  violet  du  spectre  solaire, 
bleuâtre  dans  le  bleu,  rouge  dans  le  rouge,  et  ne  subit  aucune 
altération  dans  le  jaune.  En  1840,  John  Herschel,  reprenant  l'ex- 
périence de  Seebeck,  vérifiait  qu'un  papier  recouvert  de  chlorure 
d'argent  et  noirci  à  la  lumière  prenait  ensuite,  sous  l'influence 
de  radiations  diversement  colorées,  des  teintes  variées,  mais  sans 
éclat.  Hunt,  en  1845,  faisait  des  constatations  analogues.  Edmond 
Becquerel,  en  1847,  obtendt  les  premières  épreuves  en  couleurs 
sur  plaques  métalliques.  Une  lame  de  cuivre  argenté  est  plongée 
dans  une  solution  d  acide  chlorhydrique  à  123  p.  1.000.  On  fait 
>communiquer  la  plaque  avec  le  pôle  positif  d'une  pile  formée  de 
deux  petits  éléments  Bunsen,  et  le  liquide  avec  le  pôle  négatif  au 
moyen  d'une  lame  de  platine  parallèle  à  la  plaque  argentée.  Sous 
l'action  de  l'électrolyse,  la  plaque  se  recouvre  d'une  couche  rose 
de  sous-chlorure  d'argent,  puis  prend  une  teinte  violet  rose.  On  la 
recuit  ensuite  dans  l'obscurité,  à  une  température  de  80°  à  100°, 
jusqu'à  ce  qu'elle  prenne  une  couleur  de  bois.  Après  refroidisse- 
ment, on  l'expose  aux  rayons  du  spectre  solaire,  et  les  teintes 
correspondantes  s'y  reproduisent  après  une  impression  assex  lon- 
gue (environ  deux  heures).  Les  couleurs  ainsi  obtenues  ne  sont 
pas  fixées  et  s'effacent,  sous  l'influence  de  la  lumière.  Becquerel 
réussit  également  à  reproduire  quelques  gravures  coloriées,  mais 
sans  parvenir  à  rendre  ces  épreuves  inaltérables  au  jour.  Il  con- 
vient d'ajouter  que  quelques-unes  de  ces  œuvres,  exécutées  vers 
1850  et  soigneusement  conservées  dans  l'obscurité,  existent  encore 
actuellement. 


LES  PROCEDES   PAR   ADAPTATION  399 

Niepce  de  Saint-Victor,  le  cousin  du  collaborateur  de  Daguerre, 
perfectionna  le  procédé  de  Becquerel  et  obtint  de  très  belles 
reproductions,  malheureusement  trop  instables. 

En  1864,  Poitevin  exécutait  des  épreuves  en  couleurs  sur  papier. 
Une  feuille  recouverte  de  chlorure  d'argent  violet  était  plongée 
dans  : 

Solution  de  bichromate  de  potasse  à  saturation 1  volume. 

Solution  de  sulfate  de  cuivre  à  saturation 1      — 

Solution  de  chlorure  de  potassium  à  5  p.  100 1      — 

Après  dessiccation,  le  papier  était  exposé  sous  l'image  à  reproduire. 
Au  soleil,  l'impression  n'exigeait  que  10  ou  15  minutes.  L'épreuve 
colorée  était  ensuite  lavée  à  l'acide  chromique,  puis  au  bichlorure 
de  mercure,  au  nitrate  de  plomb,  et  enfin  à  l'eau  pure.  Ce  traite- 
ment n'en  fixait  que  très  imparfaitement  le  coloris,  et  l'épreuve 
ne  se  conservait  que  dans  l'obscurité. 

En  1873,  M.  de  Saint-Florent  obtenait  également  des  images 
colorées  sur  papier  au  chlorure  d'argent  et  en  réalisait  le  fixage 
partiel  en  plongeant  l'épreuve  dans  un  mélange  d'alcool  et  d'am- 
moniaque,  puis  dans  une  solution  saturée  d'un  chlorure  alcalin, 

M.  R.  Colson,  en  1895,  utihsait  les  papiers  au  chlorure  d'ar- 
gent que  l'on  trouve  dans  le  commerce,  et  notamment  les  papiers 
au  collodidn.  On  fait  d'abord  brunir  au  soleil  la  couche  sensible, 
jusqu'à  ce  qu'elle  présente  la  teinte  chocolat,  puis  on  l'expose  de 
nouveau  à  la  lumière,  mais  cette  fois  dans  le  châssis-presse,  sous 
le  cliché  coloré  à  copier.  La  pose  ne  dépasse  pas  trois  quarts 
d'heure  en  plein  soleil.  L'épreuve  est  ensuite  lavée,  passée  dans 
une  dissolution  faible  de  chlorure  de  sodium,  qui  transforme  en 
chlorure  d'argent  l'excès  d'azotate  d'argent  retenu  dans  la  couche, 
soumise  à  un  nouveau  lavage  et  séchée.  M.  Colson  a  réussi  à  fixer, 
au  moins  temporairement,  ses  épreuves  en  les  mettant  en  contact, 
pendant  deux  jours,  avec  une  substance  capable  de  leur  fournir 
de  l'oxygène,  par  exemple  avec  une  feuille  de  papier  imprégnée 
d'encre  ordinaire.  Cette  substance,  après  s'être  oxydée  à  Tair, 
cède  facilement  son  oxygène  et  contre-balance  ainsi  l'action  réduc- 
trice de  la  lumière. 

Ces  procédés  n'ont  qu'un  intérêt  théorique  :  en  réalité,  ils  ne 
donnent  que  des  reproductions  très  imparfaites.  On  aperçoit  seu- 


430  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

lement  des  traces  de  couleurs  sur  le  fond  sombre  de  la  couche; 
les  blancs  du  diapositif  viennent  en  noir;  cependant  on  peut  les 
transformer  en  blancs  (très  relatifs)  en  exposant  l'image  au  soleil. 
De  Saint-Florent  est  parvenu  à  aviver  les  couleurs,  en  procédant 
de  la  façon  suivante. 

Un  papier  à  la  celloïdine  est  d'abord  exposé  à  la  lumière  jusqu'à 
ce  qu'il  ait  pris  une  nuance  violet  clair.  On  le  recouvre  alors  d'une 
couche  de  gomme  arabique  assez  épaisse  et  on  laisse  sécher  dans 
l'obscurité.  On  expose  ensuite  à  la  lumière,  sous  l'image  transpa- 
rente en  couleur  servant  de  phototype.  L'impression  exige  3  ou  4 
heures  au  soleil.  On  obtient  ainsi  une  image  à  couleurs  très  vives, 
que  l'on  expose  pendant  quelques  instants  à  la  lumière,  à  sa  sortie 
du  châssis-presse,  afin  de  faire  venir  les  noirs.  On  fixe  dans  un 
bain  contenant  30  ce.  d'ammoniaque  pour  1  litre  d'eau;  on  ravive 
les  couleurs  en  exposant  de  nouveau  à  la  lumière  ou  en  présen- 
tant l'épreuve  devant  un  feu  un  peu  vif.  On  peut  encore  passer 
un  fer  chaud  à  la  surface  de  l'image,  en  interposant  une  feuille  de 
papier  buvard.  L'épreuve  est  alors  fixée*. 

Adaptation  par  décoloration.  —  En  1881,  Charles  Gros  propo- 
sait de  recouvrir  une  feuille  de  papier  de  trois  couches  sensibles 
superposées,  Tune  de  collodion  coloré  en  rouge  par  la  carthamine, 
la  seconde  de  gélatine  colorée  en  bleu  par  la  phylloc}^anine,  et  la 
troisième  de  collodion  coloré  en  jaune  par  le  curcuma.  Cette  pré- 
paration était  fort  peu  sensible,  el  le  défaut  de  fixage  enlevait  toute 
utilité  pratique  à  cette  combinaison,  mais  les  résultats  obtenus 
n'en  vérifiaient  pas  moins  la  théorie  sur  laquelle  était  fondé  ce 
premier  essai,  c'est-à-dire  la  sélection  opérée  par  la  lumière  dans 
un  ensemble  de  colorants  facilement  altérables. 

Le  résultat  de  cette  sélection  est  une  épreuve  positive  directe, 
dont  les  couleurs  sont  celles  mêmes  de  l'original.  En  effet,  la  lumière 
bleue,  par  exemple,  traverse  sans  absorption  les  molécules  bleues, 
puisqu'un  colorant  bleu  est  une  substance  qui  laisse  passer  les  ra- 
diations bleues  sans  les  arrêter.  Il  est  donc  naturel  que  la  lumière 
bleue  n'exerce  aucune  action  sur  un  corps  de  cette  nature.  Mais  ces 
mêmes  radiations  bleues  ne  traversent  ni  les  molécules  jaunes  ni 

1.  B  ulletin  de  la  Société  française  de  photographie,  1904,  p.  352. 


LES  PROCÉDÉS   PAR   ADAPTATION  401 

les  molécules  rouges  :  elles  y  sont  absorbées,  et,  quoique  nous 
ignorions  le  mécanisme  intime  de  la  transformation  d'énergie  qui 
s'y  produit,  nous  comprenons  que  les  ondes  lumineuses  ainsi  arrê- 
tées déterminent  une  certaine  réaction,  qui,  dans  l'espèce,  est  une 
altération  ou  même  la  destruction  de  la  couleur. 

Un  raisonnement  semblable  explique  comment  la  lumière  jaune 
tend  à  décolorer  les  particules  bleues  et  rouges,  tandis  qu'elle  laisse 
intact  l'élément  jaune.  Pareillement,  la  lumière  rouge  décolore  le 
bleu  et  le  jaune,  sans  altérer  le  rouge.  Enfm,  la  lumière  blanche, 
agissant  sur  toutes  les  molécules,  les  décolore  toutes  et  restitue  au 
papier  sa  blancheur  primitive,  tandis  que  les  parties  noires,  opa- 
ques, du  cliché,  préservant  toutes  les  couleurs  de  l'action  lumineuse, 
laissent  subsister,  inattaqué,  le  mélange  des  trois  couleurs,  qui  est 
noir.  Il  va  sans  dire  que  si  le  traitement  de  l'épreuve  s'arrête  là,  la 
lumière  détruira  d'elle-même  son  œuvre  éphémère,  en  effaçant 
toutes  les  couleurs.  On  peut  évidemment  retarder  cette  altération, 
en  choisissant  des  colorants  moins  instables;  mais  alors  la  durée  du 
tirage  augmente  dans  des  proportions  pratiquement  inadmissibles. 

Ainsi,  en  1895,  M.  Vallot  opérait  en  mélangeant  trois  solutions 
colorées  : 

A.  Alcool 50  ce. 

Bleu  Victoria 0  gr.  2 

B.  Alcool 50  ce. 

Curcuma 10  gr. 

C.  Alcool 50  ce. 

Pourpre  d'aniline 0  gr.  2 

Une  feuille  de  papier  imprégnée  de  ce  mélange  était,  après  des- 
siccation, exposée  à  la  lumière,  sous  un  vitrail  peint.  L'impression 
exigeait  plusieurs  jours.  A  sa  sortie  du  châssis-presse,  l'épreuve 
se  trouvait  terminée,  sajis  autre  précaution,  en  sorte  qu'il  fallait  la 
conserver  dans  l'obscurité.  De  plus,  les  trois  couleurs  employées 
ne  possédaient  pas  la  même  sensibilité;  le  curcuma  était  décoloré 
beaucoup  plus  rapidement  que  le  bleu  Victoria  et  que  le  pourpre 
d'aniline,  et  le  coloris  en  était  naturellement  faussé. 

La  même  année,  M.  Utlo  Wiener*  suggérait  l'emploi  de  colorants 

1.  Farbenphotographie  durch  Korperfarben  und  mechanische  Farhenanpas- 
sung  in  der  Natur  [Wiedemann's  Annalen,  1895,  p.  225. 


402  TRAITE   GENERAL  DE,  PHOTOGRAPHIE 

stables  dans  les  conditions  habituelles,  auxquels  on  ajouterait^ 
avant  la  pose,  des  substances  accélératrices  et,  après  la  pose, 
d'autres  substances  protégeant  les  éléments  colorés  contre  l'action 
ultérieure  de  la  lumière.  Le  physicien  allemand  n'indiquait  pas 
quelles  devaient  être  ces  substances,  mais  les  recherches  entre- 
prises dans  la  voie  signalée  ne  tardaient  pas  à  fournir  quelques 
résultats  appréciables. 

Le  D""  Neuhauss  découvrait,  en  effet,  dès  1901,  les  propriétés 
accélératrices  de  l'eau  oxygénée.  Ce  composé,  ajouté  à  un  mélange 
de  gélatine,  de  bleu  méthylène,  d'auramine  et  d'érythrosine,  lui 
permit  d'obtenir  des  épreuves  colorées  en  5  minutes,  à  un  soleil 
intense  ^  Après  l'impression,  les  images  étaient  fixées  par  des- 
immersions successives  dans  des  solutions  de  tanin,  d'acétate  de 
soude,  d'émétique  et  d'acétate  de  plomb.  L'emploi  de  l'eau  oxy- 
génée n'est  pas  sans  inconvénient  :  l'opérateur  est  obligé  de  sensi- 
biliser l'épreuve  au  moment  même  du  tirage  et  de  l'impressionner  à 
l'état  humide  sous  le  cliché,  qui  doit  être  très  soigneusement  verni. 
En  outre,  si  l'opacité  du  phototype  prolonge  le  tirage,  le  sensibili- 
sateur, très  volatil,  est  décomposé  ou  évaporé  avant  que  l'image 
soit  achevée,  et  il  est  dès  lors  impossible  d'avoir  un  coloris  vigou- 
reux et  des  blancs  purs. 

Peu  après,  M.  Karl  Worel  remarquait  que  certaines  huiles  essen- 
tielles ont  la  propriété  d'accroître  considérablement  la  sensibilité 
à  la  lumière  des  matières  colorantes  organiques.  La  volatilité  de 
ees  huiles  et  aussi  leur  solubilité  au  sein  de  liquides  dans  lesquels 
les  couleurs  restent  insolubles  donnent  le  moyen  de  faire  dispa- 
raître cette  sensibilité  et  d'obtenir  des  images  relativement  stables. 
Le  meilleur  accélérateur  indiqué  par  M.  Worel  est  Fanéthol^.  Le 
mode  opératoire  est  très  simple.  Du  papier  exempt  de  fibre  de  bois 
est  plongé  dans  un  mélange  de  primerose,  de  bleu  Victoria,  de 
cyanine,  de  curcuma  et  d'auramine  en  solutions  alcooliques  addi- 
tionnées d'anéthol.  Le  papier,  séché  dans  l'obscurité,  est  impres- 
sionné au  châssis-presse,  sous  un  diapositif  en  couleurs.  Au  soleil, 
la  durée  du  tirage  peut  être  réduite  à  5  minutes.  Quand  l'image  est 
complète,  avec  toutes  ses  couleurs,  on  plonge  le  papier  dans  de  la 

1.  Allgemeine  Photographen  Zeitiing,  22  janvier  1902* 

2.  Photographisches  Correspondénz,  juin  1902. 


LES  PROCÈDES   PAR   ADAPTATION  40.1 

benzine  pure,  où  on  le  laisse  pendant  une  heure,  au  moins,  à  l'abri 
de  la  lumière.  Le  fixage  est  ensuite  complété  par  une  immersion, 
de  deux  à  trois  heures  dans  une  solution  saturée  de  sulfate  de 
cuivre.  Ce  dernier  sel  une  fois  éliminé  par  lavages,  l'épreuve  est 
terminée»  Les  nuances  sont  ainsi  distinctement  rendues,  mais 
les  couleurs  employées  sont  trop  fugaces  pour  qu'il  soit  possible 
de  considérer  l'image  comme  suffisamment  stable. 

En  1906,  M.  J.-H.  Smith  fabriquait,  à  Zurich,  un  papier  recou- 
vert d'une  couche  gélatineuse  imprégnée  de  trois  couleurs  et  d'a- 
néthol.  Cette  préparation,  mise  dans  le  commerce  sous  le  nom  de 
Papier  Uto,  avait  donné  des  résultats  peu  satisfaisants,  et  la  fabri- 
cation en  avait  été  bientôt  interrompue.  M.  Smith,  cependant,  pour- 
suivait ses  recherches  et  découvrait  les  propriétés  accélératrices 
de  la  thiosinnamine,  propriétés  qui  se  trouvent  notablement 
accrues  en  présence  de  la  glycérine.  En  1911 ,  il  fabriquait  en 
France,  à  la  Garenne-Colombes,  un  nouveau  papier,  VUtocolor, 
plus  sensible  que  le  précédent.  Néanmoins,  l'impression  exigeait 
encore  2  ou  3  heures  d'exposition  au  soleil,  sous  une  autochrome 
de  transparence  moyenne.  Le  fixage  s'effectuait  par  immersion 
dans  une  solution  alcoolique  de  tanin,  puis  dans  un  autre  bain 
vendu  tout  préparé  et  dont  la  composition  exacte  n'était  pas 
indiquée  par  les  fabricants,  mais  qui  contenait,  entre  autres, 
des  sels  de  plomb  et  de  cuivre. 

Outre  la  lenteur  du  tirage,  on  reprochait  au  papier  Utocolor  de 
ne  pas  reproduire  avec  tout  leur  éclat  les  couleurs  du  cliché.  La 
pureté  des  blancs  laissait  aussi  à  désirer.  Enfin,  le  fixage  était 
incomplet,  et  les  épreuves  pâhssaient  assez  rapidement,  lors- 
qu'elles restaient  exposées  à  la  lumière.  Néanmoins,  si  imparfait 
qu'il  fût  encore,  ce  papier  fournissait  des  résultats  intéressants, 
•et  il  est  regrettable  que  la  fabrication  en  ait  été  abandonnée. 

Les  accélérateurs  essayés  jusqu'ici  étant  encore  insuffisants,  on 
a  cherché  à  développer  les  images,  après  une  courte  exposition  h 
la  lumière,  comme  on  le  fait  dans  les  procédés  aux  sels  d'argent. 
Le  réactif  qui  a  fourni  les  meilleurs  résultats  est  le  permanganate 
de  potasse  en  solution  faible.  La  coloration  brune  que  ce  composé 
laisse  sur  le  papier  est  facilement  détruite  par  l'hydrosulfite  de 
soude.  Ce  mode  de  développement,  toutefois,  n'est  efficace  que  si 


404  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

l'impression  a  atteint  un  certain  degré  (la  moitié  environ  de  l'ex- 
position complète)  et  ne  s'applique  qu'à  un  petit  nombre  de  colo- 
rants. Cette  méthode  n'est  pas  encore  au  point. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 

H.  Calmels  et  L.-P.  Clerc,  la  Reproduction  photographique  des  couleurs, 
Paris  (H.  Calmels),  1907. 

E.  GousTET,  la  Photographie  des  couleurs,  Paris  (Larousse),  1907. 

P.  Drouin,  la  Photographie  des  couleurs,  Paris  (Gh.  Mendel),  1896. 

.Dumoulin,  les  Couleurs  reproduites  en  Photographie,  2e  édition,  Paris  (Gau- 
thier-Villars),  1894. 

E.  KoNiG  ET  E,-J.  Wall,  Natural  Colour  photography.  Londres  (Dawbarn  et 
Ward),  1906, 

Comte  E,  Ogonowski,  la  Photochromie,  Paris  (Gauthier- Villars),  1861. 

M.  DE  Valigourt,  la  Photographie  sur  métal,  sur  papier  et  sur  verre,  tome  I^f, 
Paris  (Encyclopédie  Roret),  1851. 


LA  MÉTHODE  INTERFÊRENTIE LLE  405 


CHAPITRE    XX 

LA    MÉTHODE    INTERFÉRENTIELLE 

Historique,  —  La  plupart  des  daguerréotypes  bien  conservés 
présentent  des  nuances  très  délicates,  surtout  dans  les  carnations. 
En  faisant  jouer  la  lumière  sous  diverses  incidences,  on  distingue, 
dans  les  étoffes,  d'exquises  teintes  !i»leu  pâle,  mauve,  crème,  etc., 
dont  la  stabilité  n'est  plus  contestable.  A  vrai  dire,  le  coloris  de 
ces  images  n'est  pas  toujours  exact,  et  certains  tons  font  généra- 
lement défaut,  mais  il  convient  de  remarquer  que  l'orthochroma- 
tisme  n'a  jamais  été  appliqué  au  daguerréotype. 

Les  couleurs  qui  prennent  ainsi  naissance  sur  la  surface  miroi- 
tante avaient  été  attribuées,  depuis  longtemps,  à  une  production  de 
lames  minces,  comme  celles  qui  déterminent  les  irisations  de  la 
nacre  et  des  bulles  de  savon,  sans  que  la  théorie,  toutefois,  en  eût 
été  nettement  élucidée  : 

«  M.  Ross,  lisons-nous  dans  la  Lumière  du  10  mars  1855,  pen- 
sait qu'il  se  produisait  dans  les  images  photochromatiques  des 
teintes  dues  aux  lames  minces  telles  que  les  montrent  les  bulles 
de  savon,  les  anneaux  colorés,  etc.,  et  que  les  couleurs  sont  dues  à 
une  épaisseur  variable  d'un  composé  qui  se  produirait  sous  l'action 
de  la  lumière.  » 

L'année  suivante,  une  communication  de  M.  Garrère,  publiée 
dans  le  même  journal,  mérite  d'être  citée  textuellement  : 

«  Si  les  différents  points  de  la  lame  sont  frappés  par  des  rayons 
simples  différents,  l'oxydation  variera  d'un  point  à  un  autre  de  la 
lame,  par  conséquent  l'épaisseur  de  la  lame  variera  aussi,  et  il 
pourra  se  faire  que  les  couleurs  produites  par  la  lame  mince  en 
ses  différents  points  soient  identiques  h  celles  des  rayons  qui  l'ont 
frappée  en  ces  points.  On  pourra  donc  obtenir  la  photochromie, 


-406  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

c'est-à-dire  la  formation  par  la  lumière  des  images  des  objets  avec 
leurs  couleurs ^  » 

En  4868,  Becquerel,  cherchant  à  expliquer  la  formation  des 
couleurs  dans  son  procédé  par  adaptation  (V.  p.  398),  écrivait:  «  Un 
faisceau  de  lumière  diffuse  qui  vient  frapper  une  image  colorée 
produite  par  la  lumière  renfermant  une  masse  de  vibrations  diffé- 
rentes, chaque  partie  de  l'image  vibrerait  de  préférence  sous  l'ac- 
tion des  rayons  de  même  longueur  d'onde  que  ceux  qui  ont  agi 
pour  la  produire,  et  alors  les  rayons  réfléchis  par  les  divers  points 
de  cette  image  se  trouveraient  identiques  à  ceux  qui  lui  ont 
donné  naissance.  » 

Vers  la  même  époque,  Zenker  donnait  une  théorie  plus  précise 
du  phénomène,  en  supposant  l'existence  de  lames  minces  de  chlo- 
rure d'argent,  produites  dans  l'épaisseur  de  la  couche  par  les  ondes 
stationnaires  (on  verra  plusloin  ce  qu'il  faut  entendre  par  là)  déter- 
minées par  la  réflexion  à  la  surface  du  métal.  Enfin,  M.  N.  Rood, 
faisant  allusion  aux  essais  de  Niepce  de  Saint-Victor,  écrivait,  en 
1881  :  «  L'étude  des  détails  des  Mémoires  relatifs  à  ces  expé- 
riences indique  que  les  couleurs  ainsi  obtenues  sont  dues  à  une 
réduction  plus  ou  moins  considérable  de  la  pellicule  de  chlorure 
d'argent,  et  ne  sont,  en  réalité,  produites  que  par  l'interférence  de 
la  lumière^.  »  ^ 

La  méthode  interférentielle  avait  donc  été  pressentie  avant  la 
découverte  de  M.  Lippmann,  mais  personne  avant  lui  n'en  avait 
donné  la  théorie  exacte  et  précisé  les  conditions  de  réalisation. 
M.  Lippmann  a  été  le  premier  à  obtenir  des  reproductions  photo- 
graphiques en  couleurs,  parfaites  de  vérité  et  d'éclat,  et  d'une  sta- 
bilité comparable  à  celle  des  images  ordinaires  aux  sels  d'argent. 
Le  procédé  qu'il  a  imaginé  est,  au  fond,  très  simple  et  peut  être 
réSLimé  en  peu  de  mots.  Une  couche  transparente  et  très  fine  de 
gélatinobromure  mise  en  contact  avec  une  surface  réfléchissante 
s'impressionne  dans  la  chambre  noire  de  telle  sorte  qu'après  déve- 
loppement et  fixage,  elle  reconstitue,  non  plus  seulement  les  con- 
tours du  modèle,  mais  aussi  la  variété  infinie  de  ses  couleurs.  Pour 
comprendre  comment  une  disposition  si  simple  est  susceptible  de 

1.  La  Lumière,  1856,  p.  90. 

2.  N.  Rood,  Théorie  scientifique  des  couleurs. 


LA   MÉTHODE   INTE  RFÉRENTIELLE  407 

produire  un  résultat  si  complexe,  il  est  indispensable  de  connaître 
quelques  principes  éle'mentaires  d'optique  physique. 

Principe  de  la  méthode  interférentielle.  —  La  lumière  est  un 
mouvement  vibratoire,  une  succession  très  rapide  d'ondulations 
propagées  à  travers  ïéther^.  Pour  concevoir  ce  mode  de  propaga- 
tion, il  suffit  de  se  rappeler  certains  faits  bien  connus.  Ainsi,  quand 
on  lance  une  pierre  dans  l'eau,  on  voit  aussitôt  se  fornier  une  série 
de  vagues  qui,  partant  du  point  où  la  surface  liquide  a  été  ébran- 
lée, se  transmettent  tout  autour,  en  cercles  qui  vont  s'élargissant 
à  mesure  qu'elles  s'éloignent  de  leur  centre.  L'eau  est  ainsi  le  siège 
d'un  mouvement  ondulatoire  qui  se  propage  avec  une  vitesse  uni- 
forme. De  même,  les  sons  qui  frappent  notre  oreille  consistent  en 
des  déplacements  alternatifs  de  l'air.  Ces  déplacements  se  trans- 
mettent, de  proche  en  proche,  en  ondulations  dispersées  à  l'entour 
du  corps  sonore.  La  vitesse  de  ce  mouvement  vibratoire  est  d'en- 
viron 340  mètres  par  seconde.  Suivant  que  les  vibrations  se  succè- 
dent avec  plus  ou  moins  de  fréquence,  l'oreille  perçoit  un  son  plus 
ou  moins  aigu  :  le  la  normal  du  diapason  correspond  à  870  vibra- 
tions simples  par  seconde,  tandis  que  la  même  note  de  l'octave 
suivante  correspond  à  1.740  vibrations  dans  le  même  laps  de  temps. 
Dans  un  cas  comme  dans  l'autre,  la  vitesse  de  propagation  est  la 
même  :  les  notes  les  plus  graves  ne  se  transmettent  ni  plus  rapi- 
dement ni  plus  lentement  que  les  notes  les  plus  aiguës.  De  même, 
l'éther,  ce  fluide  insaisissable  dont  les  physiciens  sont  obligés  d'ad- 
mettre l'existence  dans  l'univers  entier,  est  susceptible  d'entrer 
aussi  en  vibration.  Suivant  sa  fréquence,  le  mouvement  ondulatoire 
se  manifeste  en  des  formes  très  différentes  de  l'énergie.  Les  vibra- 
tions les  plus  lentes,  celles  qui  correspondent  aux  notes  les  plus- 
.graves  de  la  gamme  éthérée,  sont  invisibles  et  ne  se  manifestent  à. 
nous  que  sous  forme  de  chaleur  ou  d'électricité.  Plus  rapides,  elles 
se  révèlent  à  nos  yeux  :  ce  sont  les  ondes  lumineuses.  A  mesure  que 

1.  Substance  extrêmement  subtile,  invisible,  impondérable,  presque  immaté- 
rielle, mais  éminemment  élastique,  que  les  physiciens  supposent  répandue  dan» 
l'univers  entier.  Ce  fluide  pénètre  la  masse  de  tous  les  corps;  il  remplit  même  les 
espaces  célestes,  et  ses  vibrations  produisent  la  lumière,  la  chaleur,  les  radiations 
électriques,  etc.,  suivant  leur  fréquence.  L'existence  de  l'éther  n'est  qu'hypothé- 
tique, mais  elle  explique  un  grand  nombre  de  phénomènes  qui,  sans  elle,  demeu- 
reraient inexplicables. 


408 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


leur  fréquence  s'accroît,  notre  nerf  optique  nous  fait  apercevoir 
d'abord  le  rouge,  puis  l'orangé,  puis  successivement  le  jaune,  le 
vert,  le  bleu,  l'indigo  et  le  violet.  Parvenue  à  ce  degré,  si  la  fré- 
quence continue  à  augmenter,  nous  cessons  de  voir  vibrer  l'éther, 
mais  la  plaque  photographique  est  encore  impressionnée  par  les 
rayons  ultra-violets. 

Ces  vibrations  éthérées,  quelle  que  soit  leur  fréquence,  parcou- 
rent l'espace  avec  une  rapidité  égale.  Toutes  sont  animées  de  la 
formidable  vitesse  de  300.000  kilomètres  par  seconde.  Quand  leur 
fréquence  s'accroît,  les  vagues  sont  plus  courtes  et  plus  rappro- 
chées les  unes  des  autres,  mais  elles  courent  toujours  avec  la  même 
rapidité.  Ainsi,  la  longueur  d'onde,  c'est-à-dire  la  distance  qui  sé- 
pare deux  vagues  consécutives  de  l'éther,  est  d'autant  moindre  que 
ces  vagues  se  succèdent  en  plus  grand  nombre,  dans  un  laps  de 
temps  déterminé,  comme  le  montre  le  tableau  suivant  : 


COULEUR 

NOMBRE   DE   VIBRATIONS 
PAR   SECONDE 

LONGUEUR   d'onde 
EN    millionièmes 

DE   MILLIMÈTRE 

Rouge 

497  trillions. 

528  — 

529  — 
601       - 
648       - 
686       - 
728       - 

620 

583 
551 
512 
475 
449 
423 

Orangé 

Jaune 

Vert 

Bleu 

Indig'o 

Violet..: 

Lorsqu'un  rayon  de  lumière  vient  rencontrer  un  miroir,  il  se  ré- 
fléchit, c'est-à-dire  rebondit  comme  la  bille  qui  a  heurté  la  bande 
du  billard  et  suivant  la  même  loi  :  l'angle  de  réflexion  est  égal  à 
l'angle  d'incidence.  En  particulier,  quand  le  faisceau  lumineux 
frappe  le  miroir  perpendiculairement  à  sa  surface,  il  revient  nor- 
malement sur  lui-même  et  reprend,  en  sens  inverse,  le  chemin  qu'il 
suivait  auparavant.  Il  en  résulte  que  l'espace  situé  en  avant  du  mi- 
roir est  le  siège  de  deux  sortes  d'ondulations  :  celles  qui  vont  vers 
le  miroir  et  celles  qui  en  reviennent.  Entre  ces  deux  groupes  de 
mouvements  vibratoires,  il  y  a  conflit  ou,  pour  employer  l'exprès- 


LA  MÉTHODE   INTERF É RE N TIE LLE  409 

sion  des  physiciens,  interférence.  Là  où  l'onde  réfléchie  tend  à 
déplacer  l'éther  dans  le  même  sens  que  l'onde  incidente,  les  deux 
mouvements  s'ajoutent,  et  la  lumière  est  doublée;  là,  au  contraire, 
où  les  deux  forces  s'exercent  dans  des  directions  opposées,  elles 
se  détruisent  l'une  l'autre  et  aboutissent  à  cet  étrange  résultat  que 
la  lumière  ajoutée  à  la  lumière  produit  l'obscurité. 

Or,  comme  la  vitesse  de  propagation  des  ondes  lumineuses  reste 
constante,  les  interférences  ne  se  déplacent  pas,  et  l'on  re'alise  de 
la  sorte  des  ondes  stationnaires .  Dès  lors,  devant  le  miroir  se  suc- 
cèdent des  plans  parallèles,  alternativement  lumineux  et  obscurs, 
que  nous  appellerons  des  maxima  et  des  minima.  Entre  deux  maxima, 
comme  entre  deux  minima,  la  distance  sera  égale  à  la  longueur 
d'onde  de  la  couleur  du  rayon  lumineux  :  475  millionièmes  de 
millimètre  si  la  lumière  est  bleue,  551  si  elle  est  jaune,  etc.  Entre 
un  maximum  et  un  minimum,  la  distance  sera  naturellement  d'une 
demi-longueur  d'onde,  soit  310  millionièmes  de  millimètre  si  la 
lumière  est  rouge,  256  si  elle  est  verte,  et  ainsi  de  suite. 

Il  est  maintenant  facile  de  prévoir  ce  qui  se  produira  si  une 
couche  transparente  de  gélatinobromure  d'argent  se  trouve  en  con- 
tact avec  la  surface  réfléchissante.  Les  maxima  impressionneront 
le  sel  d'argent,  tandis  que  les  minima  le  laisseront  inattaqué.  Après 
développement  et  fixage,  la  gélatine  contiendra  un  certain  nombre 
de  lames  d'argent  extrêmement  minces  séparées  par  des  intervalles 
de  même  épaisseur.  Suivant  l'ingénieuse  comparaison  de  M.  Lipp- 
mann,  nous  n'aurons  plus  une  'pâte  grenue,  comme  dans  la  pho- 
tographie ordinaire,  mais  bien  une  pâte  feuilletée.  Il  nous  reste  à 
expliquer  comment  ce  feuilletage,  quoique  formé  de  substances 
incolores,  va  reconstituer  la  couleur  même  qui  lui  a  donné  nais- 
sance. 

Tout  le  monde  a  vu  les  brillantes  irisations  des  bulles  de  savon. 
Les  nuances  du  spectre  s'y  succèdent  très  rapidement  à  mesure 
que  les  parois  s'amincissent.  La  cause  de  ces  colorations  est  un 
phénomène  d'interférence.  Les  deux  faces  de  la  paroi  transparente 
réfléchissent  la  lumière  blanche  qui  les  éclaire,  mais  le  rayon  réflé- 
chi par  la  seconde  face  a  parcouru  un  chemin  plus  long  que  celui 
qui  s'est  réfléchi  sur  la  première.  Suivant  l'épaisseur  de  la  lame,  la 
différence  de  marche  sera  telle  que  certaines  couleurs  s'éteindront 


410  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

par  interférence,  tandis  que  celle  dont  la  longueur  d'onde  coïncide 
avec  cette  différence  de  marche  sera  vivement  réfléchie  et  exer- 
cera sur  notre  organe  visuel  une  impression  prépondérante. 

Tels  sont  les  principes,  qui  ont  conduit  M.  Gabriel  Lippmann  à  la 
mémorable  découverte  par  lui  annoncée  à  l'Académie  des  sciences, 
le  2  février  1891.  Une  couche  transparente  de  gélatine,  de  collo- 
dion  ou  d'albumine  sensibilisée  à  l'iodure  ou  au  bromure  d'argent- 
et  mise  en  contact  avec  une  surface  réfléch.îssante,  qu'il  est  com- 
mode de  constituer  par  une  couche  de  mercure,  suffit  pour  pro- 
duire une  image  stratifiée  en  lames  minces  entre  lesquelles  peu- 
vent seuls  se  réfléchir  les  rayons  de  même  longueur  d'onde  que 
ceux  qu'a  transmis  l'objectif. 

Préparation  des  plaques.  —  Les  émulsions  ordinaires  ne  con- 
viennent pas  à  la  photographie  interférentielle,  d'abord  parce 
qu'elles  manquent  de  transparence  et  sont  à  peine  translucides, 
comme  le  papier  huilé,  et  aussi  parce  que  la  maturation  y  a  agglo- 
méré le  bromure  d'argent  en  grains  de  dimensions  bien  supé- 
rieures à  celles  des  longueurs  d'onde  des  radiations  lumineuses. 
Le  collodion  et  l'albumine  fournissent  des  couches  très  fines  et  suf- 
fisamment diaphanes,  mais  dont  la  sensibilité  laisse  trop  à  désirer. 
M.  Lippmann  a  obtenu  une  émulsion  tranaparente  et  sans  grain^ 
en  opérant  de  la  façon  suivante. 

On  fait  d'abord  gonfler,  dans  100  ce.  d'eau,  4  grammes  de  géla- 
tine que  l'on  chauffe  ensuite  légèrement,  jusqu'à  complète  dissolu- 
tion. On  ajoute  0s%o3  de  bromure  de  potassium,  puis,  pour  rendre 
l'émulsion  orthochromatique,  6  ce.  d'une  solution  alcoolique  de 
cyanine  à  1  p.  500  et  3  ce.  d'une  solution  alcoolique  de  rouge  de 
quinoléine  à  1  p.  500.  On  porte  ensuite  le  tout,  dans  l'obscurité, 
à  une  température  ne  dépassant  pas  40°,  et  l'on  ajoute  0='",7o  de 
nitrate  d'argent  sec  en  poudre.  On  fait  dissoudre  par  agitation,  et 
on  filtre  à  la  laine  de  verre.  L'émulsion  ainsi  préparée  est  coulée 
sur  des  plaques  de  verre  tièdes  placées  sur  un  support  parfaitement 
horizontal.  Quand  la  gélatine  est  figée,  on  plonge  les  plaques  dans 
l'alcool,  on  les  lave  pendant  une  demi-heure  et  on  laisse  sécher. 
Ces  plaques  se  conservent  fort  longtemps,  à  l'abri  de  la  lumière  et 
de  l'humidité,  mais  elles  sont  très  lentes. 

La  maison  Richard  Jahr,  à  Dresde,  fabrique  des  plaquesr  à  émul- 


LA   MÉTHODE  INTERFÉRENTIELLE 


411 


sion  sans  grain,  spécialement  préparées  suivant  les  données  de 
M.  H.  Lehmann  pour  la  photographie  interférentielle.  Ces  plaques 
peuvent  être  manipulées  en  lumière  rouge  très  claire.  Comme  elles 
sont  très  transparentes,  on  ne  distingue  pas,  à  première  vue,  le 
côté  émulsionné  de  celui  qui  ne  l'est  pas.  Pour  savoir  quel  est  le 
côté  qu'il  faut  mettre  en  contact  avec  le  mercure,  on  projette  l'ha- 
leine contre  la  plaque  tenue  devant  la  lanterne  à  verre  rouge  :  la 
face  qui  se  couvre  de  buée  est  celle  qui  ne  porte  pas  la  couche  sen- 
sible. En  l'humectant  légèrement  et  en  la  frottant  avec  un  linge, 
on  la  débarrasse  des  taches  qui  pourraient  s'y  trouver  et  feraient 
ombre  sur  l'image.  Quant  au  côté  émulsionné,  il  faut  éviter  de  le 
toucher.  La  plaque  doit  être  exposée  verre  en  avant  et  gélatine  en 
arrière,  en  contact  avec  une  couche  de  mercure.  La 
méthode  interférentielle  exige  l'emploi  d'un  châs- 
sis spécial,  disposé  de  inanière  à  recevoir  une  cer- 
taine quantité  de  mercure  maintenu  derrière  la 
plaque  formant  paroi  étanche. 

Les  constructeurs  ont  combiné  divers  modèles 
de  châssis  à  mercure.  La  fîg.  135  représente  celui 
de  M.  Mackenstein.  Ce  châssis  s'ouvre  comme  un 
livre,  pour  recevoir  la  plaque,  et  la  maintient  ser- 
rée, une  fois  fermé,  contre  un  joint  élastique.  Le 
mercure,  d'abord  contenu  dans  une  poire  de  caout- 
chouc, est  introduit  derrière  la  plaque  au  moyen 
d'un  tuyau  de  caoutchouc  pénétrant  dans  le  châs- 
sis, et  reversé  après  la  pose  dans  la  poire,  où  on  le  Fig.135.  — Châssis 

,,,,,,.  .        ,  a  mercure. 

conserve  jusqu  a  1  opération  suivante. 

Il  est  indispensable  d'employer  du  mercure  chimiquement  pur. 
Le  mercure  qui  se  recouvre  d'une  pellicule  grise  est  absolument 
impropre  à  la  photographie  interférentielle.  Le  mercure  pur  doit, 
en  outre,  être  filtré  de  temps  en  temps  :  à  cet  effet,  il  faut  le  com- 
primer dans  un  nouet  de  peau  de  chamois  ou  de  mousseline  pliée 
en  quatre. 

Exposition.  —  La  reproduction  exacte  des  couleurs  exige  pres- 
que toujours  l'interposition  d'un  écran  compensateur.  M.  Lippmann 
a  exécuté  ses  premières  photographies  interférentielles  en  dispo- 
sant devant  l'objectif  une  cuve  en  verre  à  faces  parallèles  contenant 


412  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

des  solutions  de  bichromate  de  potasse  ou  d'hélianthine.  Les 
plaques  R.  Jahr,  de  Dresde,  sont  rendues  sensibles  à  toutes  les 
couleurs  visibles  suivant  une  méthode  spéciale*  qui  permet  de 
les  exposer  sans  écran,  mais  à  la  condition  d'observer  certaines 
précautions.  Ainsi,  il  faut  éviter  les  grands  contrastes  et  ne  i>as 
photographier  les  sujets  éclairés  directement  par  le  soleil.  Si  l'on 
aborde  ces  sujets,  le  temps  d'exposition  normal,  qui  seul  permet 
de  rendre  correctementtoutes  les  couleurs,  reste  compris  dans  des 
limites  si  étroites  qu'il  est  très  difficile  de  ne  pas  s'en  écarter. 

Ces  inconvénients  sont  évités  par  l'interposition  d'un  écran  cor- 
recteur spécial,  fabriqué  par  G.  Zeiss.  Les  couleurs  sont  alors 
exactement  reproduites,  même  en  cas  de  sous-exposition  et  de 
surexposition.  La  saturation  des  teintes  diminue  seulement  avec 
le  temps  de  pose. 

En  plein  soleil,  un  paysage  découvert  exige  une  exposition 
comprise  entre  1  et  2  minutes,  lorsqu'on  emploie  l'écran  correc- 
teur avec  un  objectif  ouvert  à  F  :  4,5.  Les  meilleurs  résultats  sont 
obtenus  avec  un  éclairage  très  vif  et  un  objectif  très  rapide. 

Développement.  —  La  plaque  impressionnée  est  retirée  du 
châssis  dans  le  laboratoire  éclairé  par  une  lanterne  à  verre  rouge 
clair.  Il  faut  d'abord  débarrasser  la  couche  sensible  des  goutte- 
lettes de  mercure  qui  y  adhèrent  encore.  Généralement,  il  suffit 
d'y  passer  un  blaireau  très  doux  et  de  recueillir  le  mercure  dans 
une  coupelle.  M.  Neuhauss  conseille  de  frotter  la  couche  avec  un 
tampon  de  peau  très  fine  exclusivement  réservé  à  cet  usage.  M.  H. 
Lehmann  y  ajoute  un  peu  de  poudre  à  polir  impalpable.  La  plaque 
est  alors  prête  à  l'immersion  dans  le  révélateur. 

Le  développement  s'effectue  dans  un  bain  très  dilué.  On  prépare 
d'abord  une  solution  de  réserve  : 

Eau  distillée ■ 25  ce. 

Sulfite  de  soude 5  gr. 

Diamidophénol 0  gr.  5 

Au  moment  de  développer,  on  en  prpnd  seulement  de  1  à  5  ce, 
que  l'on  dilue  dans  100  ce  d'eau.  Le  développement  ne  dure  que  de 
2  à  5  minutes  :  on  l'arrête  dès  que  le  négatif  parait  suffisamment 

1.  Jahrbuch  fiXr  Photographie,  1908,  p. ^157. 


LA  MÉTHODE   INTERF E RE NTIE LLE  413 

détaillé  par  réflexion.  Afin  de  juger  exactement  de  son  intensité, 
il  est  bon  de  se  servir  pour  cette  opération  d'une  cuvette  em  por- 
celaine blanche  sur  le  fond  de  laquelle  l'image  se  dessinera  nette- 
ment. Comme  l'émulsion  est  peu  sensible,  on  peut,  de  temps  en 
temps,  l'éclairer  au  moyen  d'une  lampe  ordinaire  suffisamment 
éloignée. 

La  plaque  développée  est  rincée  rapidement  et  fixée  dans  une 
solution  d'hyposulfite  à  25  p.  100,  oii  elle  n'est  laissée  que  pendant 
une  minute  et  demie  environ.  Après  un  lavage  de  trois  minutes,  on 
passe  au  renforcement,  presque  toujours  nécessaire  pour  accen- 
tuer les  contrastes  entre  les  maxima  et  les  minima  interférentiels. 
L'image  est  d'abord  blanchie  dans  une  solution  de  bichlorure  de 
mercure  à  1  p.  1.000,  lavée  et  renoircie  dans  le  révélateur  au  dia- 
midophénol  dilué  comme  précédemment. 

Ce  mode  de  traitement  est  celui  qui  permet  les  poses  les  plus 
courtes.  Il  convient  à  la  reproduction  des  couleurs  complexes  et 
des  sujets  à  contrastes,  mais  non  à  celle  des  spectres  dont  il  est 
nécessaire  de  copier  les  nuances  exactes.  Le  développement  à 
l'acide  pyrogallique  exige  une  exposition  plus  longue  et  ne  sup- 
porte pas  les  contrastes  exagérés,  mais  il  convient  parfaitement 
aux  photographies  spectrales,  parce  qu'il  ne  nécessite  point  de 
fixage.  La  dissolution  du  bromure  déplace,  en  effet,  légèrement 
les  couleurs  vers  le  bleu  :  il  faut  donc  supprimer  le  fixage,  dans 
les  reproductions  du  spectre,  si  l'on  tient  à  avoir  des  tons  absolu- 
ment exacts. 

Les  solutions  de  réserve,  paur  ce  mode  de  développement,  sont  : 

A.  Eau  distillée 100  ce. 

Métabisulfite  de  potasse 0  gr.  2 

Acide  pvrogallique 1  gr. 

B.  Eau  dislillée 150  ce. 

Bromure  de  potassium 15  gr. 

Ammoniaque  (densité  0,91) 30  ce. 

Pour  développer,  on  ajoutera,  à  100  ce.  d'eau,  3  ce.  de  la  solu- 
tion A  et  6  ce.  de  la  solution  B.  Si  l'on  veut  avoir  des  couleurs 
pures  et  très  légères,  on  prendra  un  peu  moins  de  la  solution  B, 
soit  environ  4  ce.  Une  plus  forte  dose  de  cette  solution  donne  des 
couleurs  plus  lumineuses,  mais  moins  saturées.  A  la  température 


414  TRAITÉ   GÉ'NÉKAÎ.  DE]  PHOTOGRA BHIE 

de  15°  à  18°,  le  développement  à  racide  pyrogallique  et  à  l'ammo- 
niaque ne  doit  durer  que  1  minute  ou  1  minute  et  demie.  On  lave 
ensuite  la  plaque  pendant  une  minute,  dans  l'eau  courante,  et,  si 
on  le  juge  nécessaire,  on  la  fixe  pendant  1  minute  au  plus  dans 
une  solution  à  20  p.  100  d'hyposulfite-d-ft  soude.  Après  un  lavage 
de  trois  minutes,  on  laisse  sécher. 

Certains  opérateurs  ne  procèdent  au  fixage,  s'il  y  a  lieu,  qu'après 
avoir  laissé  sécher  la  couche,  de  manière  à  pouvoir  en  examiner  le 
coloris,  qui  demeure  invisible  tant  qu'elle  est  mouillée.  Les  images 
qui  ne  présentent  pas  des  couleurs  très  brillantes  ne  doivent  pas 
être  fixées,  car  le  fixage  atténue  encore  leur  éclat.  M.  Lûppo-Cra- 
mer  a  vérifié  que  la  suppression  du  fixage  ne  compromet  en  rien 
la  stabilité  de  la  Reproduction.  Une  plaque  interférentielle  non  fixée 
fut  recouverte  à  moitié  d'un  papier  noir  et  exposée  pendant  un 
certain  temps  aux  rayons  solaires.  La  moitié  non  abritée  brunit 
sensiblement,  mais  cette  modification  arriva  bientôt  à  un  maxi- 
mum qui  n'altéra  en  rien  le  brillant  de  l'image  examinée  par 
réflexion,  à  tel  point  que  la  partie  de  la  plaque  exposée  au  soleil 
ne  difTérait  aucunement  de  la  partie  protégée  par  le  papier  opaque^ 

Examen  et  montage.  —  La  gélatine  imprégnée  d'eau  ne  montre 
aucune  trace  de  coloration  :  le  gonflement  de  la  couche  agrandit, 
en  effet,  la  distance  qui  sépare  les  maxima  et  les  minima  interfé- 
rentiels,  qui  ne  reprennent  leur  position  normale  qu'à  la  dessicca- 
tion. Si  l'on  examine  attentivement  la  surface  au  moment  où  les 
dernières  traces  d'humidité  s'évaporent,  on  assiste  au  spectacle 
admirable,  et  même  impressionnant  lorsqu'on  le  voit  pour  la  pre- 
mière fois,  de  l'apparition  des  couleurs,  qui  peu  à  peu  prennent  leur 
place,  et  acquièrent  un  très  vif  éclat  quand  les  opérations  ont  été 
bien  conduites. 

Ces  couleurs,  toutefois,  ne  se  montrent  que  dans  des  conditions 
toutes  particulières  d'éclairage  et  d'examen.  Par  transparence,  on 
n'aperçoit  qu'un  négatif  très  pâle  et  monochromatique,  de  teinte 
ordinairement  brune.  Il  faut  regarder  la  couche  par  lumière  réflé- 
chie, comme  on  le  fait  pour  les  images  daguerriennes.  Encore  les 
couleurs  examinées  directement  ne  sont- elles  pas  absolument 
exactes.  Il  résulte  des  recherches  de  M.  0.  Wiener  que  cette  alté- 
ration du  coloris  est  due  à  la  lumière  réfléchie  à  la  surface  exté- 


LA   MÉTHODE  INTE RFÉRENTIE LLE 


415 


rieure  de  la  couche,  tandis  que  les  couleurs  sont  produites  par  le 
jeu  de  la  lumière  dans  l'épaisseur  de  la  couche  contenant  les  lames 
minces  des  ondes  stationnaires. 

Il  est  donc  nécessaire  de  séparer  ces  deux  lumières,  en  mettant 
la  couche  gélatineuse  en  contact  optique  avec  une  couche  prisma- 
tique (c'est-à-dire  à  faces  non  parallèles)  d'une 
substance  transparente  possédant 
presque  le  même  indice  de  réfraction. 
La  fîg.  136  montre  quelle  est  dans  ce 
cas  la  marche  des  rayons  lumineux. 
La  couche  b  de  la  plaque  photogra- 
phique a  est  collée  au  prisme  c.  Une 
faible  partie  des  rayons  incidents  qui 
rencontrent  le  prisme  dans  la  direc- 
tion AB  est  réfléchie  dans  la  direction 
BF,  tandis  que  la  majeure  partie  est 
réfractée  vers  C.  Ces  rayons  pénètrent 
dans  la  couche  stratifiée,  se  colorent 
par  interférence  et,  renvoyés  vers  D, 
parviennent  à  l'œil  de  l'observateur 
dans  la  direction  DE. 

Le  milieu  prismatique  peut  être 
constitué  par  une  couche  liquide  limi- 
tée par  des  surfaces  non  parallèles.  Le  procédé  le  plus  simple 
pour  supprimer  la  réflexion  superficielle  est  celui  qu'a  indiqué 
M.  0.  Wiener.  Il  consiste  h  plonger  la  plaque  obliquement  dans 
Une  cuve  remplie  de  benzine,  et  à  regarder  l'image  à  travers  ce 
liquide.  La  fig.  137  représente  la  coupe  d'une  cuve  à  benzine  cons- 
truite par  la  maison  Zeiss.  Pour  assurer  à  la  plaque  une  position 
oblique,  le  fond  de  la  cuve  est  incliné.  A  l'exception  delà  face  anté- 
rieure, toutes  les  parois  de  ce  récipient  sont  recouvertes  d'un  ver- 
nis noir  mat. 

La  cuve  à  benzine  ne  sert  ordinairement  qu'à  l'appréciation  pro- 
visoire du  ton  des  vues,  que  l'on  peut  légèrement  modifier,  avant 
de  procéder  au  montage  définitif,  soit  en  chauff'ant  modérément 
la  plaque  de  manière  à  la  dessécher  plus  complètement,  soit  en  la 
rendant  un  peu  plus  humide  par  la  projection  de  l'haleine.  Dans  le 


Cl.  Zefeà 

Fig.  136.  —  Montage 
sur  prisme. 


Fig.  137. 

Cuve  à 

benzine. 


416 


TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


premier  cas,  les  couleurs  sont  décalées  vers  le  bleu  ;  dans  le  second, 
elles  le  sont  vers  le  rouge. 

Le  montage  définitif  consiste  à  coller  la  plaque  sur  un  prisme 
de  verre  avec  du  baume  de  Canada  liquide,  mais  assez  consistante 
Ce  prisme  doit  avoir  un  angle  assez  aigu,  comme  celui  de  la 
fig.  436.  C'est,  en  réalité,  une  plaque  de  verre  un  peu  plus  épaisse 
d'un  côté  que  de  l'autre.  Pour  éviter  la  fol'mation  de  bulles,  il  faut 
mettre  beaucoup  de  baume  et  exercer  une  forte  pression  :  l'excès 
de  baume  s'échappe  par  les  bords,  et  on  le  recueille  avec  une  spa- 
tule. On  nettoie  ensuite  les  bords  à  l'alcool  et  on  les  recouvre  de 

papier  noir.  Le  dos  de  la  plaque 
est  enfin  enduit  d'un  vernis  noir 
mat,  protégé  par  du  papier  noir 
collé  sur  les  bords. 

L'examen  d'une  vue  ainsi  pré- 
parée et  tenue  à  la-  main  exige 
une  certaine  habitude.  Les  pho- 
tographies interférentielles  ne 
font  bien  voir  leurs  couleurs 
que  dans  une  direction  déter- 
minée, qui  devra  se  rapprocher 
autant  que  possible  de  la  direc- 
tion perpendiculaire  à  la  surface 
de  l'image.  La  pièce  la  plus  fa- 
vorable pour  cet  examen  est  une 
chambre  à  une  seule  fenêtre 
laissant  apercevoir  une  assez 
grande  portion  du  ciel.  On  se 
place  dans  le  fond  de  la  pièce  et, 
tournant  le  dos  à  la  fenêtre,  on 
incline  la  vue  en  cherchant  à  y 
faire  miroiter  les  rayons  colorés. 


Cl.  Zeiss. 


Fig.  138.  —  Iconoscope  Zeiss. 


Il  n'est  pas  toujours  facile  de  trouver  un  point  de  vue  dans  lequel 
on  ne  soit  pas  gêné  par  la  lumière  diffuse,  qui  pâlit  notablement 
le  coloris.  Les  vues  interférentielles  sont  plus  avantageusement 
mises  en  valeur  quand  l'examen  en  est  effectué  à  l'aide  d'instru- 
ments spéciaux.  La  fîg.  138  représente  l'un  des  iconoscopes  combi- 


LA    MÉTHODE    INTE RFÉRE NTIE LLE 


4n 


nés  à  tel  effet  par  la  maison  Zeiss.  Dans  la  boîte  A  est  placée  la 
plaque  interférentielle  B,  dont  la  position  est  réglée  par  des  vis 
calantes.  L'imagf^  reçoit,  par  l'intermédiaire  du  miroir  concave  C, 
la  Lumière, émanée  du  verre  dépoli  D  éclairé  par  le  miroir  plan  E. 
La  couche  interterentielle  intercepte  le  cône  lumineux  dirigé  vers 
D'  et  le  renvoie,  par  réflexion,  vers  l'oculaire  F. 


Cl.  Zeiss. 


Fig.  139.  —  Projection  des  images  interférentielles 


La  maison  Zeiss  construit  aussi,  pour  la  projection  des  images 
interférentielles,  un  appareil  dont  la  fig.  139  montre  les  dispositions 
essentielles.  Les  rayons  émanés  d'une  lampe  à  arc  placée  en  A 
sont  concentrés  vers  A'  par  le  condensateur  B.  La  plaque  interfé- 
rentielle G  les  renvoie  vers  le  point  D,  qui  coïncide  avec  le  centre 
optique  d'un  objectif  à  projections.  L'image  amplifiée  de  l'épreuve 
en  couleurs  va  se  peindre  sur  l'écran  de  projection  E. 

Insuccès.  —  Sans  être  compliquée,  la  méthode  interférentielle 
est  assez  délicate,  et  l'incertitude  de  ses  résultats  décourage  sou- 
vent les  débutants.  Le  mercure  en  contact  avec  l'émulsion  occa- 
sionne fréquemment  des  taches  métalliques  brillantes,  de  formes 
et  de  dimensions  très  différentes.  Parfois  même  ces  taches  cou- 
vrent uniformément  l'image.  Les  taches  faibles  ne^'ont  que  dépla- 
cer les  couleurs,  mais  les  taches  brillantes  les  voilent  complète- 
ment. 

Si  le  mercure  est  pur,  ces  taches  ne  se  produisent  que  sur  les 
premières  plaques,  à  la  condition  que  le  châssis  soit  parfaitement 
propre.  Les  taches  métalliques  ne  se  formant  qu'au  développement 
et  apparaissant  un  peu  moins  rapidement  que  l'image,  il  y  a  avan- 
tage à  interrompre  le  développement  aussitôt  que  possible.  Un 
développement  prolongé  ne  fournit  jamais  de  bons  résultats. 


4!8  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

Un  autre  moyen  d'e'viter  les  taches  mercurielles  a  été  indiqué  par 
M.  H.  Lehmann.  Il  consibte  à  durcir  la  couche  sensible  dans  : 

Eau  distillée 100  ce. 

Formaline  à  40  p.  100. 5   — 

La  plaque  est  laissée  dans  ce  bain  pendant  une  minute,  lavée  à 
l'eau  courante  pendant  2  à  3  minutes,  épongée  avec  soin  et  mise  à 
sécher  rapidement,  de  préférence  dans  une  étuve.  Ce  traitement 
n'influe  nullement  sur  la  sensibilité  des  plaques  Jahr^ 

Les  plaques  sous-exposées  donnent  des  couleurs  trop  peu 
intenses.  Les  plaques  surexposées  avec  l'écran  de  correction  pré- 
sentent des  couleurs  blanchâtres.  Sans  écran,  les  couleurs  dispa- 
raissent complètement,  dès  que  l'exposition  est  un  peu  trop  longue. 

Même  lorsqu'on  emploie  l'écran  et  que  la  pose  a  été  normale, 
il  peut  arriver  exceptionnellement  que  les  couleurs  soient  plus 
ou  moins  déplacées  vers  l'une  ou  l'autre  extrémité  du  spectre.  Ce 
déplacement  est  parfois  occasionné  par  le  voile  mercuriel,  qui 
empêche  la  suppression  complète  de  la  réflexion  superficielle  au 
moyen  de  la  cuve  à  benzine  ou  du  prisme  en  verre.  Quand  ce  cas 
se  présente,  les  couleurs  sont  pâles  et  mates.  Nous  avons  déjà  indi- 
qué les  moyens  d'éviter  les  taches  mercurielles. 

Le  déplacement  des  couleurs  résulte  aussi  d'une  diff'érence  no- 
table entre  l'état  hygrométrique  de  la  couche  sensible  et  du  mer- 
cure au  moment  de  la  pose  et  après  le  séchage.  ISi  la  couche  était 
trop  humide  pendant  que  la  plaque  était  impressionnée,  le  séchage 
occasionne  un  déplacement  vers  le  bleu,  car  toutes  les  lames  d'in- 
terférence et  les  intervalles  qui  les  séparent  se  trouvent  resserrés. 
On  rectifie  alors  le  coloris,  soit  en  refroidissant  la  plaque,  soit  en 
l'humectant  très  légèrement  avec  l'haleine,  avant  de  l'immerger 
dans  la  cuve  à  benzine.  Si,  au  contraire,  la  plaque  était  primiti- 
vement trop  sèche,  l'image  est  trop  rouge,  parce  que  la  couche  est 
plus  épaisse  qu'au  moment  de  la  pose,  et  il  faut  un  peu  la  chauffer 
avant  de  la  coller  sur  le  prisme. 

Un  autre  moyen  de  ramener  au  ton  voulu  une  image  trop  rouge 
consiste  à  augmenter  l'angle  de  réflexion  lors  de  l'examen  ou  de 
la  projection.  Un  portrait  normalement  exposé  pâlira  donc  si  on  le 

1.  Photo graphische  Rundschau,  1909,  fascicule  11, 


I 


LA   MÉTHODE    INTE RFÊRE NTIELLE  419 

regarde  sous  une  incidence  trop  oblique.  Quand  le  déplacement 
des  couleurs  est  très  faible,  on  peut  le  corriger  pour  l'examen  et 
pour  la.  projection  dans  la  cuve  à  benzine,  en  modifiant  simplement 
l'indice  de  réfraction  du  liquide  contenu  dans  la  cuve.  Pour  ren- 
forcer le  rouge,  on  prend  de  l'éther  ou  de  l'alcool  absolu.  Au  con- 
traire, pour  rendre  le  bleu  plus  vigoureux,  on  choisira  le  sulfure 
de  carbone  ou,  si  Ton  veut  éviter  l'odeur  désagréable  de  cette 
substance,  la  naphtaline  chlorée  proposée  par  M.  E.  Kônig.  En 
mélangeant  la  benzine  avec  une  des  deux  dernières  substances,  on 
peut  réaliser  tous  les  effets  intermédiaires.  C'est  un  spectacle  extrê- 
mement curieux,  et  particulièrement  intéressant  au  point  de  vue 
théorique,  que  de  voir  ainsi  passer  un  paysage  des  tons  chauds 
aux  tons  froids  et  réciproquement. 

Applications  de  la  méthode  interférentielle,  —  La  lenteur  des 
émulsions  sans  grain,  la  complication  qu'entraîne  l'emploi  du  mer- 
cure, l'incertitude  des  résultats,  l'aspect  miroitant  des  couleurs 
et  leurs  conditions  très  limitées  de  visibilité  restreignent  singuliè- 
rement, en  pratique,  la  portée  de  la  méthode  interférentielle,  sur- 
tout depuis  que  l'on  trouve  dans  le  commerce  les  plaques  à  filtres 
colorés. 

Cependant,  la  méthode  interférentielle  conserve  d'incontestables 
avantages.  D'abord,  elle  offre  au  physicien  une  admirable  confir- 
mation de  la  théorie  moderne  de  la  lumière.  L'existence  des  ondu- 
lations éthérées  n'est  plus  une  hypothèse  :  le  microscope  permet 
d'analyser  la -structure  de  la  couche  sensible  dans  l'épaisseur  de 
laquelle  les  ondes  stationnaires  déterminées  par  interférence  ont 
réduit  l'argent  à  l'état  de  lames  minces.  En  outre,  cette  méthode 
produit  des  couleurs  chatoyantes,  d'une  pureté  et  d'un  éclat  très 
supérieurs  à  celles  que  l'on  obtient  à  l'aide  des  autres  procédés. 
Les  couleurs  interférentielles  ont  comme  des  reflets  métalliques  et 
scintillent,  pour  ainsi  dire,  quand  elles  sont  vivement  éclairées. 
Elles  sont  éminemment  aptes  à  reproduire  fidèlement  le  spectre, 
les  effets  de  polarisation  et  tous  les  autres  phénomènes  qui  font 
apparaître  des  couleurs  très  saturées. 

L'invention  de  M.  Lippmann  est  certainement  la  solution  la  plus 
élégante  du  problème  de  la  chromophotographie,  et  son  charme 
particulier  est  de  faire  sortir,  en  quelque  sorte,  du  néant  des  cou- 


420  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

leurs  splendides,  formées  par  le  rapprochement  de  substances  inco- 
lores. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


A.  Berget,  Photographie  des  couleurs  par  la  méthode  interférentîelle  de  M, 
Lippmann,  2^  édition,  Paris  (Gauthier- Villars),  1901. 

A.  Berthier,  Manuel  de  photochromie  interférentielle ,  Paris  (Gauthier- Vil- 
lars), 1895. 

L.-P.  Clerc,  la  Photographie  des  couleurs ,  avec  une  préface  de  M.  Gabriel 
Lippmann,  Paris  (Gauthier-Villars),  1896. 

E.  CousTET,  ta  Photographie  des  couleurs,  Paris  (Larousse),  1907. 

H.  Lehmann,  Beitrâge  zur  Théorie  und  Praxis  der  direkten  F arhenp hologra- 
phie mittels  stehender  Lichtquellen  nach  Lippmanns  Méthode^  Freiburg 
i.  Br.  (G.  Troemer),  1906. 

E.  KoNiG  ET  E.-J.  Wall,  Natural  Colour  Photography,  Londres  (Dawbarn  et 
Ward),  1906. 

R.  Neuhauss,  Die  F arbenp holographie  nach  Lippmann  Verfahren,  Halle  a/S. 
(W.  Knapp),  1898. 

N,  RooD,  The'orie  scientifique  des  couleurs,  Paris  (Germer-Baill ère),  1881, 

E.  Valenta,  Die  Photographie  in  natilrlichen  Farben,  mit  besonderer  Berûcksich" 
iigung  des  Lippmannschen  Verfahrens,  Halle  a/ S.  (W.  Knapp),  1894. 


LIVRE   V 
APPLICATIONS  DE  LA  PHOTOGRAPHIE 


\ 
CHAPITRE   XXI 

LA    STÉRÉOSCOPIE 

Vision  binoculaire.  Stéréoscope.  —  Le  principe  sur  lequel  repose 
la  sensation  du  relief  par  la  vision  simultanée  des  deux  yeux  est 
connu  depuis  l'antiquité.  Euclide  a  dit,  300  ans  avant  notre  ère  : 
«  Voir  le  relief  (axspeov  axoTisTv),  c'est  recevoir,  au  moyen  de  chaque 
œil,  l'impression  simultanée  de  deux  images  dissemblables  du 
même  objet.  »  La  théorie  en  était  exactement  élucidée  à  l'époque 
de  la  Renaissance,  ainsi  qu'en  témoignent  les  manuscrits  de  Léo- 
nard de  Yinci. 

Quand  un  objet  en  relief  est  placé  devant  nous,  l'image  qu'en 
voit  l'œil  gauche  n'est  pas  tout  à  fait  la  même  que  celle  qu'en  voit 
l'œil  droit.  Par  exemple,  si  un  dé  à  jouer  se  trouve  à  égale  distance 
entre  les  deux  yeux,  tous  deux  en  verront  bien  la  face  antérieure; 
mais,  en  outre,  Fœil  droit  en  apercevra  la  face  latérale  droite,  qui 
se  trouve  cachée  à  l'œil  gauche,  tandis  que  ce  dernier  apercevra  la 
face  latérale  gauche,  que  l'œil  droit  ne  peut  pas  voir.  Dessinons 
séparément  ces  deux  aspects  et  disposons  les  croquis  de  telle  sorte 
que  chaque  œil  aperçoive  uniquement  celui  qui  correspond  à  sa 
perspective  :  nous  distinguerons  alors,  non  pas  deux  images  diffé- 
rentes, maison  objet  unique,  qui  nous  paraîtra  en  relief,  comme 
si  c'était,  non  plus  une  figure  dessinée  sur  une  surface  plane,  mais 
bien  un  solide  [en  grec  axîpsoc;).  De  là  le  nom  de  stéréoscope  donné 

24 


422 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Zeiss 


Fig-.  140.  —  Stéréoscope  à  miroirs. 


à  rinstrument  qui  nous  donne  la  sensation  du  relief  par  la  vision 

binoculaire. 

La  réalisation  du  stéréoscope  est  à  peu  près  contemporaine  du 

daguerréotype.  C'est  Wheatstone  qui  construisit  le  premier,  en 

1838.  Deux  dessins  d'un  même  objet  le  représentaient  sous  les 

perspectives  légèrement 
différentes  qui  correspon- 
dent à  chacun  des  deux 
yeux.  Ces  deux  dessins 
étaient  disposés  l'un  en 
face  de  l'autre,  aux  deux 
extrémités  d'une  plan- 
chette (fîg.  140).  Deux  mi- 
roirs inclinés  renvoyaient 
les  deux  images  vers 
deux  œilletons,   à  travers 

lesquels  l'observateur  aporcevait  le  sujet  en  relief. 

En  1844,  Brewster  construisait  le  stéréoscope  à  prismes,  à  peu 

près  tel  qu'on  le  fabrique  encore  actuellement.  Néanmoins,  depuis 

quelques  années,,  les  prismes  sont  généralement  remplacés  par  des 

lentilles  achromatiques  au  foyer  desquelles  se  trouvent  placées, 

l'une  à  côté  de  l'autre,  les  deux 

images  dont  la  vision  simultanée 

procure  la  sensation  du  relief. 
Une    crémaillère    permet   de 

mettre  au  point,  suivant  la  vue 

de  chaque  observateur.  La  paroi 

opposée  aux  oculaires  est  ordi- 
nairement   constituée    par    un, 

verre  dépoli,  pour  l'observation 

des  diapositifs  stéréoscopiqups. 

Les   épreuves  sur   papier  sont 


Fig.  141.  —  Stéréoscope  à  lentilles. 


éclairées  par  devant  au  moyen  d'un  miroir  monté  à.  charnières  sur 
la  paroi  supérieure  (fig.  141).  Le  stéréoscope  à  colonne  (fig.  142) 
contient  une  série  de  vues  stéréoscopiques  que  l'observateur  amène 
successivement  devant  les  oculaires  en  tou  rnant  deux  boutons  exté- 
rieurs. 


LA   STÉRÉOS  COPIE 


423 


Le  stéréoscope  serait  demeuré 'u'rie  simple  curiosité  de  cabinet  de 
physique,  sans  la  photographie  qui  permet 
d'exécuter  très  facilement  les  images  desti- 
nées à  la  vision  binoculaire. 

Appareils   et  méthodes  stéréophotogra- 
phiques.  —  Pour  la  reproduction  des  objets 


Fig.  142.  —  Stéréoscope 
à  colonne. 


Cl.  Poulenc. 
Fig.  143.  —  Appareil  photôstéréographiqpie. 


immobiles,  une  chambre  photographique  ordinaire  suffit  parfaite- 
ment. On  la  fixe  à  un  support  sur  lequel  on  lui  fait  prendre  suc- 
cessivement deux  posi- 
tions différentes,  éloignées 
Tune  de  l'autre  d'une  quan- 
tité égale  à  l'écartement 
des  yeux,  ou  même  un 
peu  supérieure,  si  l'on 
tient  à  exagérer  le  relief. 


On  exécute  successive- 
ment les  deux  clichés,  et 
les  deux  épreuves  qu'on  q  Beiiieni 
en  obtient  sont  juxtapo- 
sées sur  le  même  carton 
(ou  sur  le  même  verre, 
si  ce  sont  des  diaposi- 
tifs). 

Dans  la  plupart  des  cas, 
il  faut   exécuter  les  deux 
clichés  simultanément,  à  l'aide  d'une  chambre  noire  divisée   en 
deux  compartiments  et  munie  de  deux  objectifs  (fîg.  143,  144  et 


Fig.  144.  —  Jumelle  pholostéréographique. 


424 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Fig.  145.  —  Vérascope. 


145).  Ces  deux  objectifs  doivent,  bien  entendu,  avoir  des  foyers 
rigoureusement  égaux. 

La  fig.  144  représente  la  jumelle  Bellieni.  Les  deux  objectifs  0,  0 
sont  munis  de  diaphragmes  iris  reliés  par  une  bielle  articulée  I  qui 
se  déplace  en  regard  d'une  division  indiquant  l'ouverture  utilisée. 
Une  pince  à  ressort  et  à  vis  L  évite  toute  modification  de  l'ouver- 
ture des  diaphragmes.  La  mise  au  point  s'effectue  à  Taide  du  bou- 
ton J  :  en  même  temps  que  les 
objectifs  se  déplacent,  un  index  D 
se  meut  sur  une  échelle  graduée 
E,  qui  sert  à  régler  au  juger  la 
distance  focale,  d'après  la  dis- 
tance du  sujet  à  photographier. 
Le  viseur  est  constitué  par  un 
œilleton  A  et  un  cadre  à  réticule 
B,  qui  peuvent  se  rabattre,  pen- 
dant le  transport,  sur  la  paroi 
supérieure  de  la  chambre.  L'ob- 
turateur est  armé,  c'est-à-dire  mis  à  sa  position  de  départ,  à  l'aide 
du  bouton  G.  La  vitesse  d'obturation  se  règle  par  le  bouton  F, 
chiffré  de  1  à  5,  et  le  déclanchement  est  obtenu  en  pressant  le 
bouton  K.  Pour  faire  la  pose,  on  tourne  l'index  H,  après  avoir  armé 
l'obturateur  jusqu'à  mi-course.  L'exposition  successive  des  pla- 
ques contenues  dans  le  magasin  est  commandée  par  la  tirette  C. 
Un  compteur  automatique  P  fait  connaître  le  nombre  de  plaques 
exposées.  Les  flèches  M  sont  des  repères  nécessaires  au  remontage 
exact  des  objectifs,  lorsqu'on  les  a  dévissés  pour  en  nettoyer  les 
lentilles. 

Les  deux  images  se  trouvent  ordinairement  juxtaposées  sur  la 
même  plaque.  Pour  en  tirer  une  épreuve  sur  papier,  on  met  dans 
le  châssis-presse,  en  contact  avec  le  double  négatif,  une  feuille 
sensible  de  même  format.  Les  deux  images  contiguës  sont  ainsi 
imprimées,  virées  et  fixées  simultanément.  Mais,  si  on  les  obser- 
vait dans  ces  conditions  à  travers  les  oculaires  du  stéréoscope,  on 
verrait  le  sujet,  non  pas  en  relief,  mais  bien  en  creux,  comme 
ei  on  en  regardait  un  moulage.  Cet  effet  pseudoscopique  résulte 
de  l'inversion  des  images  dans  chacun  des  compartiments  de  la 


LA   STÉRÉOSCOPIE 


425 


chambre  noire,  ainsi  qu'il  est  facile  de  s'en  rendre  compte  par  les 
diagrammes  suivants. 

Chacun  des  objectifs  donnant  une  image  renversée  : 


•ailonEt) 


•ajiojQ 


Si  nous  redressons  le  cliché  dans  sa  position  normale,  les  ima- 
ges se  trouveront  interverties  : 


Droite. 

Gauche. 

D'où  la  nécessité  de  sépàï''éï'  1'-^  àie^x  €pr^'uv€s  fet  àé  ïes  trans^ 
poser  dans  leur  véritable  sens  i 


Gauche. 

33î"ôi;tè.. 

Il  faut  donc  coller  sur  le  côté  droit  du  carton  l'image  qui  se 
trouvait  à  gauche  de  la  double  épreuve,  et  sur  le  côté  gauche  celle 
qui  se  trouvait  à  droite.  Ennel  a  fait  connaître  un  artifice  très  ingé- 
nieux, et  cependant  peu  usité,  pour  imprimer  directement  et  sans 
aucune  transposition  les  épreuves  stéréoscopiques  sur  papier  d'a- 
près un  négatif  exécuté  dans  la  chambre  binoculaire.  On  évite  une 
grande  perte  de  temps  en  procédant  comme  suit.  Supposons  que 
la  plaque  portant  les  deux  images  négatives  ait  une  longueur  totale 
de  18  centimètres.  On  prend  une  bande  de  papier  sensible  de  36  cen- 
timètres de  longueur  et  d'une  largeur  égale  à  la  hauteur  des  images 
négatives.  On  replie  chaque  bout  de  cette  bande  (9  centimètres  de 
chaque  côté),  la  surface  sensible  en  dehors,  de  telle  sorte  que  les 
bords  se  rencontrent  au  milieu.  Le  milieu  du  papier  ainsi  replié 
présente  une  surface  continue  de  18  centimètres  de  long,  et  les 
deux  bouts  repliés  ont  ensemble  également  une  longueur  de  18  cen- 
timètres. On  imprime  alors  sous  le  cliché  l'une  des  surfaces  sensi- 
bles, puis  on  retourne  le  papier  et  l'on  imprime  l'autre  (si  le  papier 
est  mince  et  très  sensible,  il  sera  prudent  d'interposer  une  bande 
de  papier  noir).  Ces  deux  impressions  terminées,  la  bande  est  virée, 
fixée,  lavée  et  séchée.  On  a  ainsi,  sur  cette  bande  de  36  centimètres 


Fig-.  146.  —  Châssis  transposenr. 


426  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

de  longueur,  deux  séries  d'épreuves  stéréoscopiques  complètes, 
c'est-à-dire  quatre  images  en  ligne  droite  qui  sont  dans  la  position 
voulue.  On  n'a  plus  qu'à  couper  le  papier  par  le  milieu  pour  avoir 
deux  couples  stéréoscopiques  que  Ton  pourra  coller  chacun  sur  un 
carton,  sans  avoir  à  en  transposer  les  images. 

Les  diapositifs  sur  verre  peuvent  être  séparés  au  diamant  et 
transposés  sur  une  glace  où  on  les  assujettit  par  des  bandes  de 
^  papier  noir  gommé.  Ce- 

plaque  positive  sous  le 
négatif  placé  à  gauche,, 
et  la  partie  gauche  bous  le  négatif  de  droite. 

Plaques  autostéréoscopiques.  —  En  1903,  l'Américain  E.  Ives 
faisait  connaître,  sous  le  nom  de  'parallax-stereograms ,  des  diapo- 
sitifs sur  lesquels  on  voyait  directement  les  objets  en  relief,  sans 
avoir  recours  à  aucun  instrument  d'optique.  Les  plaques  sur  les- 
quelles était  obtenu  cet  effet  pouvaient  être  de  dimensions  quelcon- 
ques et  observées  simultanément  par  plusieurs  personnes,  tandis 
que,  dans  le  stéréoscope,  le  format  est  limité  au  moins  dans  le  sens 
de  la  largeur  par  l'écartement  des  yeux,  et  l'image  n'est  visible 
que  par  un  seul  observateur  à  la  fois. 

Pour  obtenir  un  parallax-stéréogramme,  M.  Ives,  appliquant  un 
principe  indiqué  dès  1896  par  M.  Berthier,  exposait  une  plaque 
au  foyer  d'un  objectif  simple  de  grand  diamètre,  contre  la  lentille 
duquel  était  fixée  une  lame  opaque  percée  de  deux  ouvertures  en. 
regard  des  deux  extrémités  du  diamètre  horizontal  du  verre.  De 
plus,  un  gril  ou  réseau  à  lignes  verticales  était  interposé  en  avant 
de  la  surface  sensible,  plus  ou  moins  près  suivant  l'espacement  des 
traits  (il  y  en  avait  environ  100  à  150  par  pouce). 

Les  rayons  transmis  par  chacune  des  deux  ouvertures  sont  par- 


LA   STERÉOSCOPIE  427 

tiellement  interceptés  par  les  lignes  opaques  de  la  trame.  Après 
développement,  fixage  et  tirage  du  cliché  composite,  on  a  une 
image  confuse,  où  ne  se  montre  aucun  relief.  Mais  l'effet  sera  tout 
différent  si  l'on  observe  cette  image  derrière  le  gril  qui  avait  été 
interposé  devant  la  plaque  sensible,  en  ayant  soin  de  le  repérer 
exactement  dans  sa  position  primitive.  Alors,  les  traits  opaques  du 
réseau  cachent  à  l'œil  droit  l'image  fournie  par  l'ouverture  placée 
à  gauche,  et  vice  versa.  Chaque  œil  ne  voit  ainsi  que  l'image  qui  lui 
est  destinée,  comme  dans  le  stéréoscope,  mais  l'illusion  est  ici  plus 
complète,  parce  que  l'observateur  peut  se  déplacer  à  droite  et  à 
gauche  sans  cesser  de  percevoir  le  relief. 

M.  Estanave  a  supprimé  tout  repérage,  en  imprimant  un  réseau 
de  lignes  noires  parallèles  au  dos  d'une  plaque  au  gélatinobro- 
mure. Cette  plaque  est  impressionnée,  verre  en  avant  et  gélatine 
en  arrière,  dans  une  chambre  dont  l'objectif  est  muni  d'un  dia- 
phragme à  deux  ouvertures,  comme  dans  le  procédé  Ives.  Après 
développement  et  inversion,  on  a  un  diapositif  reproduisant  le 
modèle  avec  le  relief  stéréoscopique.  La  trame  n'ayant  environ 
que  40  lignes  par  centimètre,  le  diapositif  examiné  de  très  près  se 
montre  haché  de  rayures,  comme  si  on  le  regardait  à  travers  les 
barreaux  d'une  grille;  mais  si  l'on  s'en  éloigne  suffisamment,  cet 
inconvénient  disparaît,  l'illusion  est  complète,  et  le  relief  persiste 
même  si  l'observateur  change  de  place. 

Le  même  dispositif  a  permis  d'obtenir  des  épreuves  à  effet  chan- 
geant. Au  lieu  délaisser  pénétrer  la  lumière  simultanément  par  les 
deux  ouvertures  de  l'objectif,  on  exécute  deux  poses  successives 
sur  la  même  plaque.  Ainsi,  dans  le  cas  d'un  portrait,  le  sujet  aura 
les  yeux  ouverts  pendant  qu'on  laissera  pénétrer  la  lumière  par 
l'orifice  droit,  et  les  tiendra  fermés  pendant  la  pose  exécutée  par 
l'orifice  gauche.  Si  l'on  examine  le  diapositif  ainsi  obtenu,  on  verra 
le  modèle  avec  les  yeux  ouverts  ou  fermés,  suivant  qu'on  se  pla- 
cera à  droite  ou  h  gauche  du  centre  de  la  plaque.  Et,  si  l'on  se 
déplace  rapidement,  ou  si  l'on  imprime  au  diapositif  un  mouvement 
d'oscillation,  on  verra  le  modèle  fermer  les  yeux,  puis  les  ouvrir 
et  les  fermer  encore. 

Enfin,  en  remplaçant  le  réseau  primitif  par  une  trame  quadril- 
lée, c'est-à-dire  rayée  de  traits  verticaux  et  de  traits  horizontaux, 


428  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PROTOGRAPHIE 

et  en  perçant  le  diaphragme  de  quatre  otivertores  disposées  aux 
angles  d'un  carré  dont  les  côtés  sont  verticaux  et  horizontaux, 
M.  Estanave  a  réalisé  des  effets  plus  complexes.  Le  relief  est  donné 
par  les  raies  verticales,  tandis  que  les  raies  horizontales  donnent 
lieu  à  des  effets  changeants,  que  l'observateur  obtient  en  se  dépla- 
çant dans  le  sens  vertical  ou  en  inclinant  la  plaque  en  avant  on  en 
arrière. 

Photographie  intégrale. —  M.  Lipptnann  à  imaginé,  en  1<K^,  uït 
procédé  susceptible  de  donner  l'illusion  du  relief  beaucoup  plnS 
complètement  que  ne  peuvent  le  faire  lès  méthodes  stéréoscopi- 
ques  précédentes.  Ce  qui  ajoute  encore  à  l'originalité  de  cette  itiîiô^ 
vation,  c'est  qu'elle  supprime  la  chambre  noire  et  l'objectif.  L'ap- 
pareil se  réduit  à  un  châssis  contenant  la  plaque  sensible,  que  l'on 
démasque  au  moment  de  l'impressionner.  Après  développement  et 
inversion,  on. a  un  diapositif  à  travers  lequel  le  modèle  est  vu  en 
relief  et  présente  des  perspectives  changeantes  à  mesure  que  l'ob- 
-servateur  se  déplace,  absolument  comme  si  cette  plaque  était  une 
fenêtre  ouverte  sur  le  site  que  l'on  a  voulu  reproduire. 

A  vrai  dire,  la  réalisation  de  ce  procédé  singulier  offre  de  gran- 
des difficultés  techniques,  mais  la  théorie  en  est  si  ingénieuse  qu'il 
convient  d'en  connaître  au  moins  l'essentiel. 

La  plaque  sensible  est  formée  d'une  multitude  d'éléments  coti^ 
vexes  constituant  chacun  un  objectif  et  une  chambre  noire  micros- 
copiques. C'est  une  pellicule  de  celluloïd  dont  les  deux  surfaces  sont 
moulées  de  manière  à  présenter  des  convexités  disposées  en  regard 
les  unes  des  autres,  mais  avec  des  courbures  différentes.  Le  côté 
sur  lequel  est  coulée  l'émulsion  est  faiblement  ondulé,  tandis  que 
le  côté  opposé,  -qui  sera  dirigé  vers  le  sujet  à  photographier,  est 
formé  d'éléments  dont  la  convexité  est  beaucoup  plus  accusée.  Ces 
éléments  antérieurs,  de  courbure  à  très  faible  rayon,  constituent 
autant  d'objectifs  projetant  une  microscopique  image  du  modèle 
sur  la  face  opposée  de  la  pellicule,  ôii  se  trouve  l'émulsion  au 
gélatinobromure.  La  courbure  de  la  surface  sur  laquelle  se  forme 
l'image  est  calculée  de  manière  que  celle-ci  soit  bien  au  point. 
Comme  le  foyer  de  chaque  objectif  est  extrêmement  court,  tous  les 
objets,  même  situés  à  faible  distance,  se  dessineront  avec  une  net- 
teté pratiquement  suffisante.  Il  est  utile  qu'une  couche  de  pigment 


LA  STÉREOSCOPIK  429^^ 

noir  isole  optiquement  chaque  élément  de  ceux  qui  l'entourent. 
Pour  abréger,  nous  donnerons  le  nom  de  cellule  à  chacune  des 
petites  chambres  noires  ainsi  constituées. 

La  plaque  est  enfermée  dans  un  châssis,  que  l'on  ouvre  en  face 
du  sujet  à  reproduire  et  que  l'on  referme  après  la  pose.  On  déve- 
loppe et  l'on  inverse,  de  manière  à  obtenir  un  diapositif. 

Si  l'on  examine  alors  la  plaque  par  transparence,  en  la  regar- 
dant du  côté  de  la  gélatine,  on  ne  dislingue  aucune  image,  à  l'œil 
nu.  Au  microscope,  on  apercevrait  une  multitude  de  petites  images 
juxtaposées.  Mais,  si  l'observateur  se  place  du  côté  opposé  à  la 
gélatine,  c'est-à-dire  du  côté  des  objectifs,  alors  il  voit  le  sujet 
en  grandeur  naturelle,  en  relief,  et  sous  des  aspects  qui  changent 
à  mesure  qu'on  regarde  la  plaque  sous  des  incidences  différentes, 
comme  si  l'on  se  trouvait  en  présence  de  la  réalité,  d'oii  le  nom  de 
photographie  intégrale  donné  à  ce  procédé. 

Ce  résultat,  si  étrange  qu'il  semble  à  première  vue,  s'^explique 
cependant.  Chacun  des  petits  objectifs  fournit  une  image  virtuelle 
amplifiée  dont  le  champ  est  très  étendu,  par  suite  de  la  très  faible 
distance  focale.  L'œil  de  l'observateur  n'embrasse  à  la  fois  qu'une 
faible  partie  de  ce  champ;  mais,  s'il  se  déplace,  il  verra  une  nou- 
velle partie  du  champ,  et,  comme  les  deux  yeux  occupent  des  posi- 
tions différentes,  ils  aperçoivent  des  perspectives  correspondant 
à  la  vision  binoculaire  du  modèle.  Les  conditions  de  la  perception 
du  relief  se  trouvent  ainsi  remplies,  sans  l'emploi  d'un  stéréoscope. 

L'image  perçue  par  chaque  œil  du  spectateur  est  la  résultante 
des  microscopiques  images  formées  au  fond  des  cellules.  L'image 
perçue  paraîtra  continue  si  les  cellules  sont  suffisamment  rappro- 
chées :  il  faut  pour  cela  que  la  distance  linéaire  entre  deux  cellules 
soit  moindre  que  l'ouverture  pupillaire.  «  A  chaque  instant,  dit 
M.  Lippmann*,  l'image  observée  est  limitée  par  les  bords  de  Té- 
preuve,  comme  la  vue  des  objets  extérieurs  le  serait  par  les  bords 
d'une  lucarne  à  travers  laquelle  on  regarderait.  En  déplaçant  la 
tête,  on  voit  d'autres  objets  s'encadrer  entre  les  mêmes  bords,  et 
par  un  mouvement  suffisant,  on  fait,  s'il  s'agit  d'un  paysage,  le  tour 
de  l'horizon.  Il  pourrait  paraître  invraisemblable  à  priori  qu'une 

1.  Photo-Gazette,  25  avril  1908,  p.  110, 


430  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

seule  et  même  épreuve  photographique  puisse  nous  montrer  une 
succession  de  vues  différentes.  Mais  ce  résultat  s'explique  simple- 
ment: lorsqu'on  est  en  face  de  l'épreuve,  l'image  résultante  qui 
apparaît  projetée  dans  l'espace  est  la  sommation  d'éléments,  dont 
chacun  est  emprunté  à  la  partie  médiane  de  l'une  des  petites  images 
cellulaires,  qui  occupent  toute  l'étendue  de  l'épreuve.  Lorsqu'on 
regarde  celle-ci  obliquement,  la  sommation  se  fait  aux  dépens  d'élé- 
ments empruntés  respectivement  aux  parties  latérales  des  images 
cellulaires.  Si  celles-ci  ont  une  ouverture.de  120°,  par  exemplje, 
on  pourra  balayer  120o  du  paysage.  La  perception  est  ainsi  variée, 
parce  que  chaque  cellule  porte,  imprimée  dans  son  fond,  une  vue 
panoramique  du  monde  extérieur.  Tota  in  minimis  existit  natura. 

«  On  augmenterait  encore  l'angle  balayé,  on  le  porterait  à  360°, 
■en  employant  une  pellicule  convexe,  cylindrique  par  exemple,  au 
lieu  d'une  pellicule  plane.  Avec  une  pellicule  bombée,  comme  le 
serait  une  portion  de  sphère  ou  d'ellipsoïde,  on  embrasserait  le 
ciel  et  la  terre  en  même  temps  que  tout  l'horizon,  et  la  ressem- 
blance du  système  avec  certains  yeux  d'insectes  deviendrait  plus 
complète. 

«  Lorsque  le  sens  de  la  marche  de  la  lumière  est  changé  dans 
une  chambre  noire,  les  rayons  reprennent  à  la  sortie  lé  même 
chemin  qu'à  l'entrée.  Il  en  résulte  que  les  déformations  de  l'image, 
<iues  aux  imperfections  de  l'objectif,  sont  sans  effet;  elles  sont  éli- 
minées grâce  au  renversement,  et  l'objectif,  malgré  ses  défauts, 
fonctionne  comme  s'il  était  parfait.  » 

OUVRAGES  A  CONSULTER 

R.  CoLSON,  la  Photographie  sféréoscopigue,  Paris  (Gauthier- Villars),  1899. 

A.  Delamarre,  Pratique  de  la  photographie  ste'réoscopiqueyVduVis,  (H.  Desforges), 
1906. 

A.-L.  DoNNADiEU,  Traité  de  photographie  stêrêoscopique,  Paris  (Gauthier- Vil- 
lars), 1892. 

F.  Drouin,  le  Stéréoscope  et  la  Photographie  stêrêoscopique,  Paris  (Gh.  Mendel). 

G.  Fabre,  Traité  de  photographie  stêrêoscopique,  Paris  (Gauthier- Villars),  1906. 
L.  Mathet,  Traité  pratique  de  photographie  ste'réoscopique,  Paris  (Ch.  Mendel). 
Von  Rohr,  Die  binokulai^en  Instimmente,  Berlin  (Julius  Springer),  1907. 

"F.  Stolze,  Die  Stereoskopie  und  das  Stereoskop  in   Théorie  und  Praxis,  2^  édi- 
tion. Halle  a/S.  (W.  Knapp). 
L    Stockhammer,  la  Stéréoscopie  rationnelle,  2.  édition,  Paris  (Ch.  Mendel),  1913. 


LA  PHOTOGRAPHIE    DOCUMENTAIRE  431 


GHAPITRE    XXII 

LA  PHOTOGRAPHIE  DOCUMENTAIRE 

Généralités.  —  En  principe,  toutes  les  images  photographiques 
peuvent  être  considérées  comme  des  documents  d'une  indéniable 
exactitude.  Le  portrait  sans  retouche,  applicable  aux  cartes  d'iden- 
tité, le  paysage,  la  reproduction  des  monuments  ou  des  tableaux^ 
tout  cela,  au  fond,  c'est  de  la  photographie  documentaire,  aussi 
bien  que  les  microphotographies,  les  radiographies  et  les  chchés 
qu'exécutent  les  astronomes.  A  tous  ces  points  de  vue,  le  rôle  de 
la  photographie,  déjà  prépondérant,  grandit  chaque  jour  davan- 
tage. 

Les  procédés  modernes  permettent  d'atteindre  presque  à  la  per- 
fection avec  le  minimum  de  difficulté.  Les  objectifs  exempts  d'a- 
berration, les  anastigmats,  fournissent  des  images  d'une  extrême 
finesse  sur  toute  l'étendue  du  champ  utihsé;  leur  luminosité,  jointe 
à  la  sensibilité  des  plaques,  facilite  la  reproduction  fidèle  des  objets, 
même  animés  de  mouvements  rapides.  L'orthochromatisme  des 
émuisions,  la  souplesse  et  l'énergie  des  révélateurs,  permettent  de 
ne  rien  perdre  des  plus  délicates  nuances.  Les. couleurs  elles-mêmes, 
nous  l'avons  vu,  sont  actuellement  fixées  avec  toute  l'exactitude 
désirable. 

Aussi,  toutes  les  sciences  y  ont-elles  recours,  aussi  bien  l'ana- 
tomie  ou  la  physiologie  que  l'archéologie  et  la  géographie.  De  nos 
jours,  l'explorateur  ne  saurait  se  dispenser  de  rapporter  une  ample 
moisson  de  clichés  qui  ne  constituent  pas  seulement  pour  lui  des 
sujets  d'études,  mais  qui  sont  aussi  les  preuves  nécessaires  de  la. 
véracité  de  ses  récits.  Nous  sommes  ainsi  initiés  à  la  faune  et  à  la 
flore  de  toutes  les  contrées,  et,  grâce  à  la  photographie,  il  est  loi- 
sible à  tous  de  faire  le  tour  du  monde  sans  sortir  de  chez  soi. 

La  presse  illustrée  photographiquement  nous  a  habitués  au  docu- 


432  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

ment  précis,  et  les  œuvres  des  grands  peintres  sont  maintenant 
connues  partout,  depuis  que  les  impressions  photomécaniques  en 
ont  rendu  les  copies  accessibles  à  tous. 

Que  ce  soit  sous  forme  de  projections,  de  vues  stéréoscopiques, 
de  similigravures  ou  de  cartes  postales,  la  photographie  est  désor- 
mais le  plus  puissant  moyen  d'information  et  d'enseignement. 

Au  cours  de  ce  chapitre,  nous  allons  analyser  quelques-unes  des 
applications  de  la  photographie  considérée  comme  moyen  de  docu- 
mentation :  reproduction  des  tableaux  ou  des  images  monochromes, 
photographie  judiciaire,  topographie,  cartographie,  etc.  D'autres 
méthodes  documentaires,  en  raison  soit  de  leur  importance,  soit 
de  leur  caractère  spécial,  feront  l'objet  de  chapitres  séparés. 

Reproductions.  —  Avant  de  photographier  un  tableau,  une  gra- 
vure, une  page  manuscrite  ou  imprimée,  il  est  presque  toujours 
nécessaire  de  faire  subir  au  modèle  une  préparation.  Si  c'est  un 
tableau  à  l'huile,  il  est  essentiel  d'en  atténuer  l'aspect  miroitant. 
En  outre,  si  la  peinture  en  est  salie  ou  assombrie  par  le  temps,  il 
faut  au  préalable  l'éclaircir.  La  toile  sera  donc  minutieusement 
époussetée,  puis  légèrement  lavée  avec  un  linge  humide.  Si  les 
blancs,  ordinairement  constitués  par  de  la  céruse  (carbonate  de 
plomb),  ont  noirci  sous  l'influence  d'émanations  sulfureuses,  on 
pourra  les  revivifier  à  l'aide  de  l'eau  oxygénée,  qui  transforme  le 
sulfure  de  plomb  noir  en  sulfate  de  plomb  blanc.  Une  fois  les  cou- 
leurs éclaircies,  on  remédie  au  miroitement  du  vernis  en  le  recou- 
vrant d'une  couche  de  glycérine  pure  que  Ton  frotte  à  l'aide  d'une 
éponge  non  humide.  La  surface  devient  alors  mate,  et  les  couleurs 
s'avivent  encore.  Cet  enduit  s'enlève,  du  reste,  facilement,  après 
l'opération,  au  moyen  d'une  éponge  imbibée  d'eau.  La  glycérine 
est  quelquefois  remplacée  par  l'albumine,  qui  s'emploie  de  la 
même  manière. 

Si  le  modèle  à  reproduire  est  encadré  sous  verre  et  qu'il  soit 
nécessaire  de  le  laisser  ainsi,  il  faut  veiller  aux  moindres  pous 
sières  qui  risqueraient  de  compromettre  la  réussite.  Quand  le  mo- 
dèle n'est  pas  conservé  sous  verre,  certains  auteurs  conseillent  de 
le  plonger  dans  une  cuvette  pleine  d'eau  et  de  le  photographier  à 
l'aide  d'un  appareil  à  axe  optique  vertical.  Il  est  certain  que  l'im- 
mersion atténue  les  inégalités  des  surfaces,  et  que  le  grain  du 


LA   PHOTOGRAPHIE   DOCUMENTAIRE  433 

papier  y  disparaît.  Néanmoins,  ces  avantages  sont  surtout  théori- 
ques. Il  ne  faut  pas  songer  à  tremper  une  aquarelle  ou  un  pastel  : 
ce  serait  les  perdre  à  coup  sûr.  Les  gravures  elles-mêmes  s'abî- 
ment, dans  de  telles  conditions  :  le  papier,  en  séchant,  se  gondole, 
et  il  en  résulte  des  déformations  toujours  fâcheuses  et  parfois  très 
graves,  s'il  s'agit  d'un  plan  coté  ou  d'une  carte.  Cependant  l'immer- 
sion est  assez  avantageuse  dans  la  reproduction  des  épreuves  pho- 
tographiques non  montées. 

En  fait,  l'immersion  peut  être  remplacée  par  l'application  du 
modèle  sur  le  côté  dépoli  d'une  glace  finement  doucie.  Le  contact 
des  deux  surfaces  doit  être  assuré  par  une  certaine  pression, 
comme  celle  que  l'on  obtient  dans  un  châssis  à  épreuves.  Le  modèle 
est  photographié  à  travers  la  glace,  dont  on  a  soin  d'éviter  les 
reflets  en  procédant  comme  il  est  dit  plus  loin.  L'image  obtenue 
par  ce  moyen  est  exempte  de  grain,  mais  elle  manque  générale- 
ment de  vigueur,  si  l'on  n'a  soin  d'éviter  la  surexposition,  ainsi 
que  le  voile  au  développement. 

Mais  le  grain  du  papier,  comme  le  miroitement  du  verre,  seront 
plus  pratiquement  supprimés  par  un  éclairage  judicieusement  réglé. 

Une  excellente  méthode  consiste  à  disposer  le  modèle  au  fond 
d'un  cône  ou  d'un  tronc  de  pyramide  à  base  rectangulaire  dont 
les  surfaces  intérieures  sont  recouvertes  de  papier  blanc  ou  de 
feuilles  d'étain.  On  arrive  cependant  à  un  résultat  sensiblement 
équivalent  en  interposant  un  écran  de  mousseline  blanche  du 
côté  d'oij  vient  la  lumière,  et  des  écrans  blancs  opaques  formant 
réflecteurs  du  côté  opposé,  de  façon  à  entourer  le  sujet  d'une 
lumière  très  diffusée. 

Pour  obtenir  une  reproduction  exacte,  sans  aucune  altération 
des  formes,  il  est  indispensable  que  la  surface  à  photographier 
soit  rigoureusement  parallèle  au  plan  qu'occupera  la  surface  sen- 
sible. Dans  l'industrie,  cette  condition  est  réalisée  par  le  dispositif 
représenté  fîg.  147.  La  chambré  noire  repose  sur  quatre  galets 
roulant  sur  deux  rails  fixés  le  long  d'un  socle  horizontal,  à  l'ex- 
trémité duquel  un  châssis  vertical  reçoit  le  modèle  à  reproduire. 
Le  parallélisme  nécessaire  se  trouve  ainsi  automatiquement  assuré, 
quelle  que  soit  la  distance  qui  sépare  l'appareil  du  modèle.  Cette 
distance  une  fois  réglée,  d'après  les  dimensions  que  doit  avoir 

25 


431 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


îa  reproduction,  la  chambre  est  immobilisée  sur  les  rails  par  des 
vis  de  serrage.  La  tablette  repose  d'ordinaire  sur  quatre  pieds 
rigides.  Néanmoins,  dans  les  locaux  où  les  vibrations  du  sol  ris- 
<juent  d'altérer  la  netteté  des  images,  qui  exigent  une  grande  pré- 
cision, la  tablette  est  posée  sur  des  ressorts  amortisseurs,  ou 
même  suspendue  au  plafond  par  des  cordages,  ainsi  que  nous 
t'avons  déjà  vu  en  traitant  des  procédés  photomécaniques  (p.  318). 
L'objectif  sera,  bien  entendu,  rectilinéaire.  Une  lentille  simple, 


Fig.  147.  —  Appareil  à  reproductions. 


quoique  achromatique  et  même  anastigmatique,  ne  vaudrait  rien, 
puisqu'elle  ne  saurait  être  complètement  exempte  de  distqrsion. 
L'aplanat  est  suffisant  quand  on  veut  reproduire  un  tableau  ou 
un  fusain  dont  les  détails  ne  sont  pas  très  poussés.  Un  grand 
angulaire  offre  l'avantage  de  n'exiger  qu'une  planchette  de  sup- 
port assez  courte  et  de  réduire  par  conséquent  au  minimum  l'en- 
combrement du  matériel  de  reproduction. 

Mais,  quand  il  s'agit  de  ne  rien  perdre  dés  moindres  détails 
d'une  épreuve  au  citrate  ou  d'une  gravure  au  trait;  quand  on 
tient  à  rendre  toute  la  finesse  des  lignes  d'une  carte  ou  d'une 
«au-forte,  alors  il  est  nécessaire  de  recourir  à  l'anastigmat.  Seu- 


LA   PHOTOGRAPHIE   DOCUMENTAIRE  435 

îement,  pour  tirer  parti  de  toutes  ses  qualités,  il  faut  régler  la 
mise  au  point  avec  le  plus  grand  soin,  par  suite  du  défaut  de  pro- 
fondeur de  foyer  de  l'instrument  qui  doit  être  utilisé  à  sa  plus 
grande  ouverture,  ou  du  moins  très  peu  diaphragmé,  parce  qu'une 
ouverture  trop  étroite  épaissirait  les  traits  par  diffraction  (V. 
p.  40).  Il  importe  donc  que  la  construction  de  l'appareil  soit 
assez  précise  pour  que  la  surface  sensible  vienne  occuper  rigou- 
reusement le  même  plan  que  le  verre  dépoli  :  une  chambre  noire 
mal  construite  rendrait  complètement  illusoires  les  qualités  de 
l'objectif  le  plus  parfait. 

Les  plaques  ordinaires  conviennent  toutes  à  la  reproduction 
•des  fusains  et  des  lavis  qui  n'exigent  pas  une  extrême  définition. 
Les  sujets  en  couleurs  nécessitent,  bien  entendu,  l'emploi  de  pla- 
ques panchromatiques  et  l'interposition  d'un  verre  jaune.  On  fera 
également  usage  d'un  écran  jaune  pour  reproduire  des  caractères 
bleus  ou  violets  sur  papier  blanc,  tandis  qu'un  écran  bleu  fera 
parfaitement  ressortir  une  écriture  jaunie  par  le  temps  et  deve- 
nue presque  invisible.  Pour  les  dessins,  les  gravures  et  surtout 
les  cartes  dont  on  tient  à  reproduire  toute  la  finesse  de  trait,  ies 
émulsions  rapides  ne  vaudraient  rien.  Si  l'on  veut  utiliser  toutes 
les  qualités  d'un  objectif  de  haut  rendement,  il  faut  avoir  recours 
à  des  surfaces  sensibles  à  grain  très  fin  et  même  sans  grain. 
€'est  pourquoi  l'industrie  n'a  pas  entièrement  abandonné  le  pro- 
cédé au  coUodion.  On  obtiendra  cependant  des  clichés  très  fins 
en  employant  les  émulsions  au  gélatinobromure  lentes  ou,  ce  qui 
vaut  mieux,  les  plaques  destinées  à  l'exécution  des  diapositifs. 
Ces  plaques  exigeront  naturellement  une  pose  très  longue,  mais 
fourniront  des  images  d'une  extrême  finesse. 

La  durée  du  temps  de  pose  sera  d'ailleurs  déterminée,  non  seu- 
lement d'après  la  sensibilité  de  l'émulsion  et  l'intensité  de  l'é- 
<;lairage,  mais  aussi  d'après  l'aspect  du  modèle  et  l'effet  à  réaliser. 
Les  sujets  à  teintes  continues,  comme  les  tableaux  peints  à  l'huile, 
les  aquarelles,  les  photocopies,  s'accommodent  bien  d'une  légère 
surexposition,  qui  contribue  à  mettre  bien  en  valeur  la  délicatesse 
de  leur  modelé.  Par  contre,  la  sous-exposition  convient  aux  gra- 
vures au  trait,  aux  dessins  à  la  plume. 

La  même  distinction  doit  encore  se  poursuivre  dans  les  autres 


436  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

opérations.  Les  sujets  à  demi- teintes  seront  développés  plutôt 
lentement,  dans  un  révélateur  évitant  l'empâtement  des  opacités. 
Pour  les  reproductions  de  traits,  le  développement  sera,  au  con- 
traire, conduit  de  manière  à  former  un  cliché  dont  les  noirs  seront 
bien  opaques  et  les  blancs  bien  transparents.  Si  le  contraste  n'en 
est  pas  suffisant,  on  éclaircira  complètement  les  blancs  dans  le 
réducteur  de  Farmer,  on  lavera  la  plaque  avec  soin,  et  l'on  renfor- 
cera les  noirs  au  bichlorure  ou  à  l'iodure  de  mercure. 

Photographie  judiciaire.  —  Le  document  probablement  le  plus 
ancien  qui  mentionne  l'emploi  de  la  photographie  ^n  matière 
judiciaire  est  le  Journal  des  tribunaux  du  10  septembre  18o4. 
L'avocat  Pellis,  de  Lausanne,  y  raconte  comment  un  portrait  au 
daguerréotype  permit  seul  de  découvrir  l'identité  d'un  individu 
énigmatique,  inculpé  de  vol.  Depuis  cette  époque,  la  photogra- 
phie a  été  souvent  utilisée  par  la  police,  mais  les  services  qu'elle 
était  susceptible  de  rendre,  à  défaut  d'organisation  rationnelle, 
étaient  loin  d'égaler  ceux  que  l'an  doit  aux  portraits  signalétiques 
actuels. 

Il  est  difficile  de  fixer  la  date  du  premier  emploi  de  la  photo- 
graphie comme  moyen  de  reconnaître  les  faux  en  écriture  :  on 
trouve  des  reproductions  de  lettres  remontant  aux  premiers  jours 
de  la  photographie,  mais  ces  épreuves  sont  plutôt  exécutées  dans 
le  but  de  garder  le  duplicata  d'un  document  que  pour  fournir  un 
moyen  d'analyse. 

Ce  n'est  guère  que  depuis  1880  que  des  ateliers  photographiques 
sont  spécialement  affectés  à  l'usage  poMeier  et  judiciaire,  et  c'est 
de  1882  que  date  rorganisation,  par  M.  Alphonse  Bertillon,  du  ser- 
vice d'identification  connu  sous  le  nom  d'anthropo7nétrie  signalé- 
tique,  dans  lequel  une  large  place  est  réservée  à  la  photographie. 

Actuellement,  le  rôle  de  la  photographie  en  matière  judiciaire 
comprend  :  1°  la  reproduction  des  lieux  du  crime  ou  de  l'accident; 
2°  l'exécution  de  documents  comme  moyen  d'expertise  ;  3"  l'iden- 
tification des  criminels  ou  de  cadavres  inconnus. 

Photographie  prise  sur  le  lieu  du  crime  ou  de  la  catastrophe.  — 
L'image  reproduite  par  la  chambre  noire  est  un  document  indis- 
cutable, où  l'on  peut  constamment  reconnaître  les  moindres  détails 
qui  auraient  passé  inaperçus  au  cours  d'une  sommaire  constata- 


LA   PHOTOGRAPHIE   DOCUMENTAIRE  437 

tîon  visuelle.  Il  est  presque  toujours  nécessaire  d'exécuter  plusieurs 
clichés  différents,  de  façon  à  fixer  non  seulement  Tensemble  des 
lieux,  vus  sous  diverses  perspectives,  mais  aussi  tous  les  détails 
capables  d'intéresser  Tenquête  judiciaire,  comme  les  meubles 
montrant  des  traces  d'effraction ,  les  tapis  dont  les  plis  caracté- 
ristiques indiquent  une  lutte  ou  une  fuite.  La  reproduction  des 
empreintes  de  pas  ou  des  lignes  papillaires  de  la  peau  des  doigts, 
les  taches  de  sang,  etc.,  serviront  à  l'identification  de  Tinculpé 
ou  à  la  recherche  du  criminel  inconnu. 

A  cette  catégorie  documentaire  il  faut  aussi  ajouter  l'emploi 
occasionnel  de  la  photographie  pour  prendre  des  instantanés 
pendant  des  grèves  ou  des  incendies. 

Photographie  comme  moyen  d'expertise.  —  Cette  application  est 
basée  sur  ce  fait  que  la  plaque  photographique  est  sensible  à  des 
différences  de  nuances  qui  échappent  à  notre  organe  visuel.  C'est 
ainsi  qu'un  cliché  peut  montrer  sur  le  corps  d'un  cadavre  des 
traces  de  coups  ou  de  strangulation  absolument  invisibles  à  l'exa- 
men direct.  La  photographie  sert  également  à  découvrir  des 
taches  de  sang  sur  des  étoffes  lavées.  Elle  donne  aussi  le  moyen 
de  reconstituer  des  lettres  ou  des  billets  de  banque  brûlés.  Enfin, 
la  photographie  est  appliquée  à  l'examen  des  documents  écrits, 
soit  pour  rechercher  une  falsification  sur  l'original,  soit  pour 
comparer  entre  elles  deux  ou  plusieurs  écritures.  L'emploi  de 
plaques  ordinaires  et  orthochromatiques,  l'interposition  d'écrans 
diversement  colorés,  l'agrandissement,  la  superposition,  sont 
autant  de  moyens  de  reconnaître  si  tous  les  traits  d'un  document 
sont  de  la  même  main  ou  s'ils  ont  été  exécutés  par  deux  personnes 
différentes,  ou  s'ils  sont  tracés  avec  la  même  encre  et  à  la  même 
époque. 

Identification  d'inconnus.  —  Par  la  méthode  Bertillon,  il  est 
actuellement  facile  de  classer  des  centaines  de  mille  portraits  au 
moyen  des  fiches  signalétiques  et  de  retrouver,  en  quelques  minu- 
tes, le  portrait  d'un  individu  déterminé.  Chaque  fiche  indique  la 
taille,  l'envergure  des  bras,  le  buste  (hauteur  de  l'homme  assis), 
la  longueur  de  la  tête,  la  longueur  de  l'oreille  droite,  la  dislance 
qui  sépare  les  deux  zygomas,  la  longueur  du  pied  gauche,  la  lon- 
gueur du  doigt  médius  gauche,  la  longueur  de  l'auriculaire  gauche 


138 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


et  la  longueur  de  la  coudée  gauche.  A  ces  indications  numériques 
sont  joints  certains  signalements  descriptifs,  tels  que  la  couleur  de 


l'iris,  la  teinte  des  cheveux,   etc.,  et  l'énumération  des  marques 
particulières  :  cicatrices,  tatouages,  etc.  Enfin,  au  milieu  du  recto 


LA  PHOTOGRAPHIE  DOCUMENTAIRE  439 

de  la  fiche,  se  trouve  la  photographie  de  profil  et  de  face  (fig.  148), 
exécutée  à  l'aide  d'un  appareil  spécial. 

L'appareil  Bertillon  (fig.  149)  se  compose  d'une  chambre  à  foyer 
fixe  M,  réglée  d'avance  pour  la  réduction  à  1/7  surmontée  d'une 
autre  chambre  plus  petite  V  servant  de  viseur,  et  d'une  chaise  de 
pose  C  qui,  par  sa  forme  appropriée,  force  le  sujet  à  s'asseoir  de 
manière  que  la  colonne  vertébrale  soit  rigoureusement  appuyée  au 
dossier.  Le  socle  S  est  percé  de  huit  trous,  destinés  à  recevoir  la 
chaise  de  pose  et  à  repérer  exactement  les  positions  de  profil  et 
de  face.  La  distance  de  la  chaise  à  l'objectif  étant  réglée  une  fois 
pour  toutes,  la  position  du  siège  reste  toujours  la  même  pour  la 
photographie  de  face  ;  il  est  seulement  nécessaire  d'ajouter  des 
dossiers  supplémentaires  D,  suivant  les  sujets,  pour  compenser  les 
différences  d'écarts.  Pour  la  photographie  de  profil,  on  fait  pivoter 
la  chaise  de  90°,  en  prenant  comme  axe  de  rotation  la  verticale 
passant  par  l'angle  externe  de  l'œil  droit.  La  tête  du  sujet  est  ap- 
puyée contre  une  pièce  mobile  T.  Suivaint  la  taille  du  sujet,  on  élève 
ou  on  abaisse  la  chambre  noire,  de  manière  à  amener  au  centre  du 
verre  dépoli  (marqué  par  le  croisement  d'un  trait  vertical  et  d'un 
trait  incliné  de  15°  sur  l'horizontale)  l'image  de  l'angle  externe  de 
l'œil  droit  pour  la  pose  de  profil,  et  l'image  de  la  racine  du  nez  pour 
la  pose  de  face.  P  est  le  porte-mire,  muni  d'une  glace  verticale  avec 
lignes  inclinées  de  15°. 

Les  lignes  xxy  yy  tracées  sur  le  sol  servent  à  déterminer  exacte- 
ment les  positions  respectives  de  l'appareil,  du  socle  et  de  la  mire. 
Deux  règles  pliantes  A,  B,  donnent  la  distance  pour  les  deux  poses. 

Métrophotographie. —  Malgré  l'imperfection  des  premiers  objec- 
tifs, l'invention  de  Daguerre  avait  immédiatement  donné  à  prévoir 
que  les  images  si  détaillées  et  si  rapidement  obtenues  dans  la 
chambre  noire  seraient  susceptibles  de  singulièrement  faciliter  les 
relevés  des  architectes  et  des  topographes.  Arago  et  Gay-Lussac, 
en  communiquant  leur  rapport  sur  le  nouveau  procédé,  le  premier 
devant  la  Chambre  des  députés,  le  second  devant  la  Chambre  des 
pairs,  n'avaient  pas  manqué  d'appeler  l'attention  sur  l'importance 
de  cette  application. 

C'est  le  colonel  Laussedat  qui  a  définitivement  résolu  le  problème 
ébauché  au  dix-septième  siècle  par  Beautemps-B^aupré  :  d'images 


LA   PEOTOGRAPEIE  DOCUMENTAIRE 


4il 


dessinées  avec  précision,  déduire  les  dimensions  réelles  des  objets 
qui  s'y  trouvent  représentés;  puis,  avec  ces  données,  construire  la 
projection  des  objets  sur  un  plan  quelconque;  en  particulier,  dresser 
la  carte  d'un  pays,  le  plan  et  l'élévation  d'un  édifice,  en  se  servant 
uniquement  de  vues  perspec- 
tives, prises  dans  des  condi- 
tions exactement  détermi- 
nées. 

Les  premiers  essais  de 
Laussedat  remontent  à  1844. 
Les  images  dont  il  se  servait 
à  cette  époque  étaient  dessi- 
nées à  main  levée,  et  ce  n'est 
qu'en  1852  qu'il  commença  à 
utiliser  des  épreuves  photo- 
graphiques. Il  reconnut  alors 
que  le  matériel  photographi- 
que ordinaire  était  insuffisant 
pour  déterminer  avec  une 
précision  rigoureuse  les  élé- 
ments de  la  reconstitution 
géométrique,  et,  en  1859,  il 
fît  construire  par  Brunner  le 
premier  photothéodolite, 
c'est-à-dire  la  première 
chambre  noire  munie  des 
organes  essentiels  propres 
aux  instruments  topographi- 
ques de  précision. 

L'appareil  primitif  a  reçu 
divers  perfectionnements,  et 
la  fîg.  150  en  montre  le  mo- 


Fig.  150.  —  Photothéodolite  Laussedat. 


dèle  actuel,  construit  par  M.  Ducretet.  La  chambre  noire  C,  en  mé- 
tal et  de  forme  rigide,  reçoit  des  plaques  ou  des  pellicules.  L'ob- 
jectif 0,  un  anastigmat  grand  angulaire  de  Zeiss,  est  monté  sur 
une  planchette  H  mobile  dans  le  sens  vertical  et  coulissant  sur  le 
panneau  antérieur  fixe  E.  Le  viseur  est  constitué  par  la  lunette  V. 


442 


TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 


Cl.  Ducretet 


L'appareil  est  monté  sur  cercle  horizontal  et  vertical  (éclimètre) 
avec  lunettes  de  visée  LD  et  niveau  à  bulle  d'air  N.  La  fîg.  151 
représente  l'arrière  de  la  chambre,  où  quatre  lames  triangulaires 

V,  H  projettent  sur  la  surface  sensible 
des  ombres  qui  servent  à  repérer  les 
images.  G  est  le  verre  dépoli  de  mise 
au  point,  serti  dans  un  cadre  à  char- 
nières. 

Le  procédé  Laussedat  consiste  essen- 
tiellement à  mesurer  une  base  aux  deux 
extrémités  de  laquelle  on  photographie 
es  vues  d'un  même  terrain.  On  recon- 
naît alors,  on  identifie  les  mêmes  points 
sur  ces  vues  rabattues  et  convenable- 
ment orientées  sur  une  feuille  de  papier 
à  dessiner,  orientation  résultant  d'une 

Fi^.151- Arrière  de  la  chambre  seule  mesure   d'angle,   h  chacune  des 
photogrammetnque.  ...  ,  ,,  , , .         .        , 

stations,  et  1  on  détermine  la  position 

des  différents  points  sur  le  plan  à  l'intersection  des  rayons  visuels 

allant  des  deux  stations  aux  points  considérés,  tracés  sur  le  papier 

en  projection  horizontale.  Enfin,  la  ligne  d'horizon^  que  l'on  a  des 

moyens  très  simples  d'obtenir  sur  chacune  des   vues  (elle  peut 

même  apparaître  spontanément  sur  les  photographies),  permet,  en 

y  projetant  les  différents  points,  de  calculer  leurs  différences  de 

niveau  avec  l'une  ou  l'autre  des  stations,  ou  avec  toutes  les  deux, 

pour  avoir  une  vérification. 

La  fîg.  152  reproduit  une  des  premières  expériences  de  Laussedat, 
en  avant  de  l'un  des  fronts  du  fort  de  Vincennes.  Cette  expérience, 
devenue  classique,  donne  une  idée  très  nette  de  la  transformation 
des  vues  de  paysages  en  plans. 

La  méthode  imaginée  par  Laussedat  a  reçu  le  nom  de  métro- 
photographie;  cependant  en  Allemagne  elle  est  désignée  sous  le 
nom  de  photogrammétrie^  et  les  épreuves  obtenues  à  l'aide  des 
photothéodolites  sont  qualifiées  de  photo  grammes. 

La  métrophotographie  des  monuments  d'architecture  ou  des  tra- 
vaux d'art  ne  présente  aucune  difficulté.  Il  suffit  de  connaître  la 
distance  focale  de  l'objectif  qui  a  servi  à  photographier  l'édifice. 


LA   PHOTOGRAPHIE    DOCUMENTAIRE  445 

c  est-à-dire  la  distance  du  point  de  vue  au  tableau,  et  d'avoir  !a 
ligne  d'horizon  tracée  sur  ce  tableau.  Et  même  ces  deux  élémenta 
peuvent  souvent  être   trouvés   sur  des  épreuves    de   provenanco 


Cl.  Ducretet 


Fig.  152.  —  Lever  photogrammétrique  da  château  de  Vincennes. 

inconnue.  On  n'a  alors  qu'à  disposer  convenablement  l'image  sur 
une  feuille  de  dessin  sur  laquelle  on  rapporte  la  projection  hori- 
zontale du  peint  de  vue,  et  la  restitution  du  plan  et  des  élévations 
des  façades  apparentes  de  l'édifice  répond  au  problème  inverse 
de  la  perspective. 


444  TRAITÉ  GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

La  métrophotograpnie  des  paysages,  qui  a  pour  objet  la  cons- 
truction des  plans  topographiques  et  le  nivellement,  est  plus  com- 
pliquée. Quand  il  s'agit  de  monuments,  on  se  trouve  en  présence 
de  formes  géométriques  bien  définies,  terminées  le  plus  souvent 
par  des  lignes  droites  dont  les  perspectives  suivent  des  règles  très 
simples;  mais  les  accidents  du  sol  ont  des  formes  tout  à  fait  irré- 
gulières, et  ce  n'est  qu'exceptionnellement  qu'il  est  possible  de  s'en 
tenir  aux  règles  simples  de  la  perspective  linéaire.  Une  vue  isolée 
est  presque  toujours  insuffisante;  il  en  faut  ordinairement  deux, 
au  moins,  prises  de  deux  points  différents.  En  combinant  les  deux 
images,  on  parvient  alors  à  tracer  sur  un  plan,  d'abord  les  posi- 
tions relatives  de  points   remarquables   du  terrain  pris   comme 

repères,  puis  peu  à  peu  au- 
tour d'eux  les  maisons,  les 
routes,  les  cours  d'eau,  les 
divisions  de  culture,  etc.,  en 
un  mot  tous  les  détails  de 
la  planimétne.  La  mesure 
des  hauteurs  apparentes  des 
différents  points  permet 
ensuite  d'effectuer  le  nivel- 
lement. 

Lorsqu'il  s'agit  d'exécuter 
un  lever  d'une  assez  grande 
étendue  ou  de  poursuivre 
une  reconnaissance  d'itinéraire,  une  base  unique  avec  une  vue  à 
chaque  extrémité  ne  suffît  plus.  On  procède  alors  par  triangula- 
tions, comme  le  font  tous  les  topographes,  en  se  servant  du  théo- 
dolite ou  de  la  boussole.  La  précision  de  plus  en  plus  parfaite  des 
images  permet  actuellement  de  réduire  la  grandeur  des  bases  à  la 
distance  qui  sépare  les  deux  objectifs  d'un  appareil  stéréoscopique. 
L'emploi  de  stéréoscopes  de  précision  simplifie  singulièrement 
la  métrophotographie,  en  la  soulageant  de  la  plupart  des  opéra- 
tions géométriques.  Au  fond,  il  s'agit  toujours  d'intersection  de 
rayons  visuels,  mais  la  faible  base  sur  laquelle  on  opère  rapproche 
cette  nouvelle  méthode  de  celle  des  parallaxes,  dont  les  astronomes 
font  usage  pour  déterminer  la  distance  des  astres. 


Verant- stéréoscope  Zeiss. 


LA  PHOTOGRAPHIE  DOCUMENTAIRE 


445 


Le  stéréo- comparaleur  de  Pulfrich  est  combiné  de  manière  à  éta- 
blir les  plans  topographiques  à  l'aide  de  couples  exécutés  soit  au 
moyen  de  l'appareil  stéréoscopique,  soit  à  l'aide  du  photolhéodo- 
lite  placé  successivement  en  deux  stations  différentes  dont  la  dis- 
tance est  exactement  mesurée.  Cet  instrument,  de  haute  précision, 
est  assez  compliqué,  et  le  principe  en  sera  plus  facilement  compris 
en  supposant  le  stéréo-micromètre  de  Zeiss  (fig.  154)  placé  sur  des 
épreuves  stéréoscopiques.  La  pointe  m^  étant  amenée  en  regard  de 
l'objet  dont  on  veut  connaître  la  distance,  on  fait  mouvoir  la  vis 


Stéréo-micromètre. 


micrométrique  S,  jusqu'à  ce  que  la  pointe  ^2  se  trouve  exactement 
sur  le  même  objet,  dans  l'épreuve  de  droite.  Les  graduations  gra- 
vées sur  la  règle,  ainsi  que  sur  le  vernier  de  la  vis,  font  connaître 
la  distance  entre  les  deux  pointes,  d'où  se  déduit  la  distance  réelle 
de  l'objet.  Le  couple  stéréoscopique  reproduit  fîg.  155  fait  claire- 
ment comprendre  comment  l'écartement  des  points  homologues 
varie  en  fonction  de  l'éloignement  des  plans.  En  observant  ce  cou- 
ple dans  un  stéréoscope,  on  verra  l'échelle  des  distances  s'étendre 
en  profondeur,  planer  au-dessus  du  paysage,  dont  il  sera  dès  lors 
facile  d'établir  un  plan  coté.  Nous  n'indiquons,  bien  entendu,  que 
très  sommairement  le  principe  de  la  méthode,  dont  l'application 
est,  en  fait,  assez  délicate  et  d'un  caractère  trop  étroitement  tech- 
nique pour  être  exposée  dans  cet  ouvrage  avec  tous  les  développe- 
ments qu'exigerait  l'enseignement  de  sa  mise  en  pratique. 


446 


TRAITÉ    GÉNÉRAL    DE    PHOTOGRAPHIE 


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La  photographie  en  ballon  ou  en  aéroplane  permet  aussi  de 


LA   PHOTOGRAPHIE   DOCUMENTAIRE 


447 


prendre  des  vues  à  vol  d'oiseau  et  d'effectuer  des  relevés  de  la 
plus  grande  importance  au  point  de  vue  stratégique.  Cette  méthode 
sera  surtout  précieuse  dans  les  pa^^s  de  montagne,  pour  avoir  une 
idée  d'ensemble  d'une  contrée  inexplorée  ou  peu  connue. 

Le  commandant  Moëssard  a  appliqué  au  lever  des  plans  le  cylin- 
drographe  (fig.  156).  Cet  appareil  est  une  chambre  noire  en  forme 
de  demi-cylindre.  Une  pel-; 


îicule  placée  dans  un  châs- 
sis souple  en  occupe  toute 
la  surface  courbe.  L'objec- 
tif est  monté  au  centre,  sur 
un  axe  vertical,  de  manière 
à  impressionner  successi- 
vement toute  la  surface 
sensible,  utilisant  ainsi  un 
angle  d'environ  170°.  L'ins- 
trument est  réglé  de  telle 
^sorte  que,  malgré  la  rota- 
tion de  l'objectif,  l'image 
ne  change  ni  de  forme  ni 
de  position  et  reste  tou- 
jours nette.  Les  épreuves 
obtenues  dans  ces  conditions  dojvent  être  examinées  dans  un  cadre 
demi-circulaire,  à  l'aide  d'un  oculaire  fixé  au  centre  de  la  courbure, 
qui  permet  de  reconstituer  la  perspective  exacte. 

Le  cylindrographe  est  également  applitjué  à  l'exécution  d'épreu- 
ves panoramiques  pittoresques,  représentant  de  vastes  étendues-: 
vues  générales  de  villes,  rades,  champs  de  course,  etc.  Ces  épreuves, 
montées  sur  carton  et  examinées  à  plat,  ne  donnent  évidemment 
qu'une  reproduction  inexacte  de  la  réalité,  mais  l'aspect  n'en  est 
pas  choquant,  excepté  dans  le  cas  où  la  vue  comporte  de  longues 
lignes  dont  la  déformation  est  manifeste  :  c'est  ainsi  qu'une  jetée, 
un  grand  navire,  une  large  façade,  paraîtront  fortement  courbés. 


Fig.  15l).  —  CyJiiidrographe. 


448  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 


OUVJRAGES  A  CONSULTER 


Beatjtemps-Beatjpré,  Méthode  pour  la  levée  et  la  construction  des  cartes  et  plans 

hydrographiques,  Paris  (Imprimerie  impériale),  1811. 
A.  Bertillon,  la  Photographie  Judiciaire,  Paris  (Gauthier-Villars),  1890. 
L.  Gazes,  Stéréoscopie  de  précision  the'origue  et  pratique,  Paris  (Ph.  Pellin),  1895. 
A.  GouRRÈGES,  Reproduction  des  gravures,   dessins,  plans,   manuscrits,  Paris 

(Gauthier-Villars),  1900. 
E.  DoLEZAL,  Die  Anwendung  der  Photographie  in  der  praktischen  Messkunsf, 

Halle  a/S.  (W.  Knapp),  1896. 
A.-L.   DoNNADiEu,   la  Photographie  des  objets  immergés,  Paris  (Gh.  Mendel), 

1902. 
A.  Laussedat,  La  Métrophotographie,  Paris  (Gauthier-Villars),  1899. 

E.  Grouzet,  Etude  sur  l'emploi  des  perspectives  et  de  la  photographie  dans  l'art 

des  levers  de  terrain,  Paris  fBerg-er-Levrault  et  O^),  1902. 
G.  Le  Bon,  les  Levers  photographiques  et  la  Photographie  en  voyage,  2  vol., 

Paris  (Gauthier-Villars)',  1889.. 
P.  Moëssard,  le  Cylindrographe,  2  vol.,  Paris  (Gauthier-Villars),  1899. 
R.-R.  Reiss,  la  Photographie  judiciaire,  Paris  (Gh.  Mendel),  1911. 

F.  Schiffner,   Die  photographische  Messkunst   oder  Photo gr ammetrie ,   Halle 

a/S.  (W.  Knapp). 
H.  ET  J.  Vallot,  Application  de  la  photographie  aux  levés  topographiques  en 
haute  montagne,  Paris  (Gauthier-Villars),  1907. 


AGRANDISSEMENTS  ET  PROJECTIONS  44$ 


CHAPITRE    XXIII 

AGBJ^NDISSEMENTS    ET    PROJECTIONS 

Généralités.  —  Il  est  rare  que  Ton  exécute  directement  de  très 
grands  clichés.  Certaines  chambres  noires  d'atelier  permettent 
bien  d'aller  jusqu'au  format  de  1  mètre  carré,  et  même  au  delà,  et 
l'on  en  a  vu,  dans  certaines  expositions,  des  spécimens  d'une  rare 
perfection.  Cependant  ce  sont  là  des  résultats  exceptionnels.  Il  est 
trop  difficile  d'obtenir  à  la  chambre  noire  un  immense  cliché  sans 
défaut.  Aussi  préfère-t-on,  dans  la  plupart  des  cas,  ne  pas  dépasser 
le  format  30  x  40-  Au-dessus  de  cette  dimension,  on  commence 
presque  toujours  par  exécuter  un  petit  cliché,  9  X  12  par  exemple, 
dont  on  se  sert  pour  tirer  des  épreuves  amplifiées.  Toutefois,  lors- 
qu'il s'agit  d'exécuter  plusieurs  grandes  épreuves,  il  est  préférable 
d'obtenir  d'abord  un  grand  négatif,  soit  sur  verre,  soit  sur  papier, 
le  grain  du  support  n'ayant  généralement  aucun  inconvénient  dans 
les  grands  formats. 

Ce  négatif  peut  être  exécuté  à  la  chambre  noire;  mais,  si  l'am- 
plification est  très  forte,  il  faut  un  appareil  énorme,  le  plan  focal 
se  trouvant  reculé  très  loin  de  l'objectif.  On  préfère  alors  utiliser 
une  des  dispositions  décrites  plus  loin. 

S'il  s'agit  d'exécuter  une  reproduction  agrandie  d'une  épreuve 
montée  sur  carton  (le  cas  se  présente  souvent  pour  les  portraits), 
il  faut  d'abord  en  tirer,  à  la  chambre  noire,  un  petit  négatif  qui 
servira  ensuite  à  obtenir  la  grande  épreuve  positive.  * 

Agrandissements  à  la  lumière  diurne.  —  Pour  utiliser  la 
lumière  diffuse,  la  paroi  d'une  chambre  obscure  est  percée  d'une 
ouverture  contre  laquelle  est  placé  le  cliché  à  reproduire.  Un  objec- 
tif projette  l'image  amplifiée  du  cliché  sur  un  écran  porté  par  un 
chevalet  muni  de  galets  roulant  sur  rails.  La  mise  au  point  étant 
réglée,  on  place  sur  l'écran  une  feuille  de  papier  sensible.  Si  l'on 
veut  tirer  un  portrait  en  vignette,  on  interpose  un  dégradateur. 


4S0 


TRAITÉ   GÉNÉRAL    DE  PHOTOGRAPHIE 


Ce  dispositif  s'applique  aux  papiers  rapides,  au  gélatinobromure. 
Pour  les  procédés  plus  lents,  papier  albuminé  ou  papier  au  char- 
bon, on  utilisait  jadis  la  lumière  solaire,  que  l'on  dirigeait  dans  la 
chambre  noire  au  moyen  d'un  réflecteur. 

Aujourd'hui,  ces  combinaisons  sont  à  peu  près  complètement 
abandonnées.  Presque  toujours,  on  a  recours  à  la  lumière  artifi- 
cielle, dont  on  peut  disposer  tous  les  jours,  à  toute  heure,  et  dont 
on  règle  à  volonté  l'intensité. 

Agrandissements  à  la  lumière  artificielle.  —  Les  appareils 
d'agrandissements  à  la  lumière  artificielle  sont  construits  à  peu 
près  de  la  même  manière  que  les  lanternes  magiques,  ainsi  qu'on 

peut      s'en     rendre 


compte  en  jetant  un 
coup  d'œil  sur  la  fîg. 
157.  Une  caisse  en 
tôle  noircie  contient 
une  lampe  à  pétrole, 
dont  la  lumière  est 
concentrée,  par  un 
réflecteur  concave  et 
par  une  grande  len- 
tille ou  condensateur^ 
sur  le  cliché  placé 
derrière  l'objectif.  La  lanterne  est  construite  de  manière  à  ne  lais- 
ser filtrer  aucune  lumière  susceptible  de  voiler  le  papier  sensible 
exposé  au  foj^er  de  l'objectif.  L'air  nécessaire  à  la  combustion  de 
la  lampe  pénètre  dans  la  caisse  par  un  système  de  chicanes  et  en 
sort  par  la  cheminée,  également  h  chicanes.  L'espace  qui  sépare 
l'objectif  du  cliché  est  fermé  par  un  soufflet. 

L'écran  sur  lequel  est  projetée  l'image  amplifiée  est  monté  sur 
un  cadre  où  l'on  fixe  le  papier  sensible.  Un  volet  le  protège  de  la 
lumière  avant  et  après  la  pose. 

La  lampe  à  pétrole  suffit  généralement  pour  les  agrandissements 
au  gélatinobromure,  mais,  pour  les  papiers  lents,  il  faut  un  éclai- 
rage plus  intense,  lumière  électrique  ou  lumière  oxhydrique. 

Agrandisseurs.  —  On  désigne  sous  ce  nom  de  pelits  appareils 
d'agrandissement  très  simples,  particulièrement  commodes  pour 


Fig.  157.  —  Lanterne  d'agrandissement. 


AGRANDISSEMENTS   ET   PROJECTIONS 


451 


les  amateurs  qui  n'emportent  dans  leurs  excursioiis  que  des  cham- 
bres noires  de  format  très  exigu  et  tirent  ensuite  de  leurs  clichés 
des  épreuves  amplifiées  seulement  deux  ou  trois  fois. 

L'agrandisseur  représenté  ûg.  138  est  une  boîle  dont  l'un  des 
côtés  reçoit  le  petit  cliché,  et  le  côté  opposé  le  châssis  contenant 
le  papier  sensible.  L'objectif  est  fixé  à  demeure  entre  le  cliché  et 
répreuve,  et  à  une  distance  telle  des  deux  sur- 
faces que  l'image  du  premier  se  dessine  net- 
tement sur  la  seconde  avec  l'amplification 
voulue.  Devant  le  cliché  sont  disposés  un 
verre  dépoli  diffusant  l'éclairage  et  un  volet 
servant  d'obturateur. 

On  se  sert  de  cet  appareil  comme  d'un 
châssis-presse.  On  y  place  le  papier  sensible, 
dans  le  laboratoire,  puis  on  le  porte  au  jour 
ou  devant  une  lampe  électrique,  on  ouvre  le 
volet,  puis,  l'exposition  terminée,  on  le  re- 
porte dans  le  laboratoire,  pour  en  extraire  le 
papier  impressionné. 

Artifices  d'exécution. —  Lorsqu'on  exécute 
un  agrandissement  sur  papier  à  image  latente  (gélatinobromure  ou 
charbon),  il  est  prudent  de  faire  un  essai  préalable  en  impression- 
nant sur  l'écran  un  petit  morceau  de  papier  sensible  que  l'on  déve- 
loppe ensuite  ou  que  l'on  dépouille,  afin  de  vérifier  si  le  temps  de 
pose  a  été  bien  calculé.  Il  est  quelquefois  nécessaire  de  renouveler 
plusieurs  fois  cet  essai,  en  rectifiant  chaque  fois  la  durée  d'expo- 
sition. Ce  n'est  que  lorsqu'on  est  sûr  de  réussir  que  l'on  expose  la 
grande  feuille  de  papier  sensible. 

M.  José  a  proposé,  en  1894,  un  procédé  très  original,  qui  évite 
toute  incertitude  dans  l'évaluation  du  temps  de  pose  des  papiers 
au  gélatinobromure.  Avant  de  démasquer  l'objectif,  on  mouille  la 
couche  sensible  avec  un  révélateur  à  i'h3'droquinone  ou  à  l'icono- 
gène  additionné  de  glycérine.  On  voit  alors  venir  l'image,  absolu- 
ment comme  sur  un  papier  à  noircissement  direct,  et  on  arrête 
l'exposition  au  moment  opportun.  Comme  les  noirs  du  phototype, 
projetés  sur  les  parties  claires  de  l'épreuve,  empêchent  de  bien 
juger  de  son  intensité,  il  faut  de  temps  en  temps  placer  devant  Tob- 


Asrandisseur. 


4S2  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

jectif  un  verre  jaune  dépoli.  L'épreuve  se  trouve  alors  éclairée  par 
une  lumière  diffuse  inactinique,  et  l'on  reconnaît  facilement  si  Fim- 
pression  est  suffisante  ou  s'il  convient  de  la  continuer.  Un  dévelop- 
pement complémentaire  est  généralement  inutile,  mais  peut  quel- 
quefois servir  à  modifier  les  caractères  de  l'image  :  dans  ce  dernier 
cas,  il  faut  avoir  soin  d'interrompre  l'exposition  de  l'épreuve  avant 
qu'elle  ait  acquis  toute  son  intensité. 

L'amateur  possède  rarement  des  cuvettes  assez  grandes  pour 
développer  et  fixer  les  épreuves  fortement  amplifiées.  11  est  facile 
de  construire  une  grande  cuvette,  en  collant  des  bandes  de  carton 
autour  d'une  planchette  et  en  rendant  le  tout  imperméable  en  y 
passant  un  pinceau  enduit  d'un  vernis  gras  ou  de  paraffine  en 
fusion.  Mais  on  peut  aussi  opérer  sans  cuvette,  en  posant  l'épreuve 
sur  une  planche  bien  propre  ou  sur  une  vitre,  et  y  passant  le  révé- 
lateur à  l'aide  d'un  large  pinceau  ou  d'une  éponge  douce.  Le  déve- 
lappement  achevé,  on  lave  à  grande  eau  sous  un  robinet,  et  l'on 
passe  le  fixateur  également  au  pinceau  ou  à  l'éponge. 

Retouche  des  agrandissements.  —  Les  images  modérément 
amplifiées  n'exigent  pas,  en  général,  de  retouche  proprement  dite. 
Si  le  cliché  a  déjà  été  retouché,  ou  s'il  est  sans  défaut,  il  suffira 
de  repiquer  Vépreiive,  comme  après  un  tirage  par  contact.  Mais  les 
grandes  épreuves  exécutées  d'après  de  très  petits  clichés  nécessi- 
tent d'ordinaire  une  retouche  complète.  Le  moindre  défaut  imper- 
ceptible sur  le  phototype  s'exagère  à  l'agrandissement,  et,  même 
si  le  cliché  est  sans  défaut  apparent,  le  grain  du  gélatinobromure 
se  traduit  sur  l'épreuve  agrandie  par  des  lacunes  qu'il  est  presque 
toujours  nécessaire  de  combler  et  par  des  duretés  qu'il  convient 
d'adoucir.  Aussi  les  portraits  agrandis  exigent-ils  l'intervention  du 
retoucheur. 

La  retouche  s'exécute  soit  au  crayon,  soit  au  pinceau  ordinaire, 
soit  au  pinceau  à  air.  Le  coloriage,  s'il  y  a  lieu,  s'exécute  comme 
nous  l'avons  vu  à  propos  des  petites'  photocopies. 

Pour  les  agrandissements  qui  doivent  être  peints  à  l'huile,  on 
trouve  dans  le  commerce  des  toiles  au  gélatinobromure  d'argent, 
beaucoup  plus  résistantes  que  les  papiers  et  dont  le  mode  d'em- 
ploi est  exactement  le  même. 
Les  grandes  images  peuvent  également  être  mises  en  couleur  au 


AGRANDISSEMENTS   ET  PROJECTIONS 


453 


moyen  du  pastel.  L'épreuve,  clouée  sur  une  planche  à  dessin,  est 
d'abord  frottée  avec  un  tampon  de  laine  enduit  de  poudre  de 
pierre  ponce,  jusqu'à  complète  disparition  de  la  couche  gélati- 
neuse. Après  avoir  soigneusement  épousseté  la  surface,  on  étend 
les  couleurs  en  poudre,  soit  du  bout  du  doigt,  soit  à  l'estompe, 
soit  au  blaireau,  suivant  l'étendue  à  couvrir  et  suivant  l'effet  à  réa- 
liser. 

Projections.  —  L'art  des  projections  est  connu  et  pratiqué  de- 
puis longtemps  (la  lanterne  magique  est  décrite  par  le  P.  Kircher 
vers  46t)U)  mais  il  était 
resté  rudimentaire  et 
d'un  usage  très  restreint, 
jusqu'à  ce  que  la  photo- 
graphie lui  eût  donné  son 
véritable  essor. 

La  projection  est  le 
meilleur  moyen  de  met- 
tre en  valeur  les  dia po- 
sitifs tirés  de  petits  cli- 
chés. Ce  n'est,  en  somme, 
qu'un  agrandissement 
temporaire,  et  les  lanter- 
nes de  projection  sont 
construites  de  la  même 
manière  que  les  lanternes 
d'agrandissement. 

Pour  obtenir  de  belles 
projections,  il  faut  une 
source  de  lumière  à  la 
fois  très  intense   et  très 

blanche.  Les  lampes  à  manchons  incandescents  suffisent,  à  la  ri- 
gueur, dans  les  locaux  exigus  oi^i  Ton  se  contente  d'une  amplifi- 
cation très  restreinte;  la  lumière  oxhyélhérique  donne  des  effets 
plus  brillants,  mais  rien  ne  vaut  l'arc  électrique.  La  fîg.  160  repré- 
sente une  lampe  électrique  construite  par  M.  L.  Korsten.  Les  char- 
bons sont  disposés  obliquement,  de  manière  à  utiliser  le  maximum 
de  lumière.  Le  réglage  du  point  lumineux  est  effectué  à  l'aide  de 


Fig.  159.  —  Lanterne  à  projections. 


434  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

trois  boutons  qui  permettent  de  hausser  les  charbons  errsemble 

ou  séparément  et  de  les  dévier 
à  droite  ou  à  gauche.       ^ 

Les  diapositifs  destinés  à  la 
projection  sont  généralement 
passés  dans  un  cadre  ou  châssis 
à  mouvement  alternatif.  Pen- 
dant qu'une  plaque  est  en  face 
de  l'objectif  qui  en  projette  l'i- 
mage, on  en  introduit  une  autre 
dans  le  cadre  resté  à  l'exté- 
rieur. On  pousse  alors  le  châs- 
sis, la  nouvelle  image  passe  à 
la  projection,  pendant  qu'on 
retire  la  première  et  qu'on 
la    remplace    par   une    autre 

Fig.  160.  —  Lampe  à  arc  pour  projections,     v    o"  ^^  )■  ^      _ 

Les  projections  peuvent  être 

vues  par  transparence    ou    par  réflexion.   Dans  le    premier  cas, 

l'écran  est  placé  entre  le  projecteur   et  les  spectateurs.  L'écran 

transparent  est  généralement  constitué  par  une  pièce  de  toile  que 


Cl.  Radiouet. 


Fig.  161.  —  Châssis  passe-vues. 

l'on  mouille  immédiatement  avant  la  séance.  Il  existe  aussi  des 
écrans  à  la  gélatine,  spécialement  préparés  pour  la  projection  par 
transparence. 

Quand  le  projecteur  est  placé  derrière  les  spectateurs,  la  projec- 


AGRANDISSEMENTS  ET  PROJECTIONS  455 

tion  se  fait  par  réflexion  sur  un  écran  blanc,  ordinairement  en 
toile.  Il  faut,  autant  que  possible,  que  Técran  soit  opaque,  car  tout  ce 
qui  passe  à  travers  est  perdu  pour  le  spectateur.  Le  mieux  serait 
donc  de  projeter  les  images  sur  un  mur  blanchi.  A  défaut,  on  peut 
tendre  sur  un  châssis  une  toile  h  tissu  très  serré  que  l'on  enduit 
d'une  forte  couche  de  peinture  à  l'hujle  à  base  de  blanc  de  zinc  ou 
de  blanc  de  céruse. 
Ce  qui  est  encore  préfe'rable,  c'est  Técran  métallique  de  Zeiss, 


Fig.  162.  — Appareil  de  projeclion  pour  images  microscopiques. 

constitué  par  une  surface  bien  plane  recouverte  de  poudre  d'alu- 
minium. Avec  cet  écran,  la  projeclion  paraît  environ  dix  fois  plus 
brillante  que  sur  une  toile,  mais  seulement  pour  les  spectateurs 
placés  près  de  l'axe  du  faisceau  lumineux  ;  pour  ceux  qui  en  sont 
écartés  de  plus  de  30^,  la  lumière  est,  au  contraire,  très  diminuée. 
Ce  mode  de  projection  n'est  donc  réellement  avantageux  que  dans 
les  salles  longues  et  relativement  étroites. 

Pour  projeter  les  images  microscopiques,  on  se  sert  d'instru- 
ments spéciaux,  tels  que  celui  que  représente  la  fig.  162.  Le  dia- 
positif  est  fixé  au  porte-objet  par  deux  lames  élastiques.  L'objectif, 


436 


TRAITÉ    GENERAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


à  très  court  foyer,  est  monté  sur  un  chariot  à  crémaillère  et  vis 

micrométrique  pour  la 
mise  au  point.  Gomme 
le    condensateur   con- 


centre sur  l'image  une 
grande  quantité  de  ra- 
diations, il  est  néces- 
saire d'absorber  une 
partie  de  la  chaleur  en 
interposant  une  cuve 
en  verre  à  faces  paral- 
lèles (fig.163),  que  l'on 
remplit  d'eau  pure. 
Nous  ne  dirons  rien 

ici  des  projections  animées,  dont  l'étude  fera  l'objet  de  la  plus  grande 

partie  du  chapitre  suivant. 


Fig.  163.  —  Cuve  à  eau. 


OUVRAGES  A  CONSULI-ER 


J.  Bernard  et  L.  Touchebœuf,  Petits  Clichés  et  Grandes  Épreuves^  Paris  (Gau- 
thier-Villars),  1894. 

A.  CouRRÈGES,  les  Agrandissements  photographiques,  Paris  (Gauthier-Villars), 
1901. 

H.  FouRTiER,  les  Positifs  sur  verre,  2^  édition,  Paris  (Gauthier-Villars),  1907. 

H.  FouRTiER,  la  Pratique  des  projections,  2  vol.,  Paris  (Gauthier-Villars), 
1892-1893. 

H.  FouRTiER  ET  A.  MoLTENi ,  Ics  Projcctions  scientifiques,  Paris  (Gauthier- 
Villars),  1894. 

F.  GmiA^o^,  les  Agrandissements,  Paris  (Gauthier-Villars),  1901. 

Klary,  les  Portraits  au  crayon,  au  fusain  et  au  pastel  obtenus  au  moyen  des 
agrandissements  photographiques,  Paris  (Gauthier-Villars),  1904. 

E.  Trutat,  Traité  pratique  des  agrandissements  photographiques,  à  l'usage  des 
amateurs,  2^  édition,  2  vol.,  Paris  (Gauthier-Villars),  1897-1900. 

E.  Trutat,  les  Agrandissements  sur  papier  à  couches  pigmentaires ,  Paris  (G h. 
Mendel),  1909. 

E.  Trutat,  Traité  général  des  projections,  Paris  (Gh.  Mendel),  2  vol. 

E.  Wallon,  les  Agrandissements  y  Paris  (Gauthier-Villars),  1899. 


LA   CINÉMATOGRAPHIE  431 


CHAPITRE   XXIV 

LA     CINÉMATOGRAPHIE 

Analyse  du  mouvement,  — -  Les  premiers  essais  de  chronopho- 
tographie  (du  grec  x?'^^^'^?  temps,  période)  remontent  à  l'année  1878 
et  sont  dus  à  Muybridge,  de  San-Francisco,  Ces  débuts  furent  très 
remarqués,  malgré  l'extrême  complication  de  la  méthode  employée. 
Le  sujet  dont  on  voulait  analyser  les  attitudes  se  déplaçait  sur  une 
piste  le  long  de  laquelle  se  trouvaient  disposés,  d'un  côté  un  écran 
blanc  exposé  au  soleil,  et  de  l'autre  une  batterie  de  30  chambres 
noires  munies  chacune  d'un  objectif  à  grande  ouverture  et  d'un 
obturateur  électrique.  Chaque  obturateur  se  trouvait  déclanché  par 
l'ouverture  du  circuit  dont  faisait  partie  un  fil  tendu  en  travers  de 
la  piste.  A  mesure  que  le  sujet  avançait  en  face  des  objectifs,  les 
fils  se  brisaient  successivement  sur  son  passage,  les  obturateurs 
s'ouvraient  au  moment  voulu  et'  se  refermaient  aussitôt,  de  telle 
sorte  qu'on  obtenait  une  suite  de  clichés  représentant  les  phases 
successives  du  mouvement  à  analyser.  Sur  chaque  épreuve,  le  sujet 
se  détachait  en  noir  sur  le  fond  blanc  de  l'écran.  On  avait  donc,  en 
réalité,  non  pas  des  images  complètes,  mais  seulement  des  silhouet- 
tes figurant  les  différentes  attitudes  du  coureur  ou  de  l'animal  sou- 
mis à  l'expérience.  Le  matériel  nécessaire  à  ces  essais  était  encom- 
brant et  onéreux;  en  outre,  l'emploi  simultané  de  30  plaques  au 
collodion  exigeait  un  nombreux  personnel.  Aussi  les  expériences 
.  de  Muybridge  coûtèrent-elles  300.000  francs. 

Ces  expériences  furent  reprises  quelques  années  plus  tard,  avec 
le  gélatinobromure,  par  le  professeur  Marey,  dont  les  travaux  sur 
l'analyse  de  la  locomotion  chez  l'homme  et  chez  les  animaux  sont 
restés  célèbres. 

Au  début,  Marey  avait  employé  un  appareil  analogue  au  revol- 
ver asironomique  imaginé  par  Janssen  pour  étudier  le  passage  de 

26 


458  TRAITÉ   GENERAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

Vénus  sur  le  soleil  le  8  décembre  d874.  Ce  revolver  imprimait  sur 
plaque  daguerrienne  une  série  de  12  images  représentant  les  pha- 
ses successives  du  contact.  Comme  les  images  étaient  prises  à 
70  secondes  d'intervalle,  l'expérience  de  Janssen  n'a  qu'un  rapport 
lointain  avec  le  sujet  que  nous  traitons  ici,  et,  si  nous  en  faisons 
mention,  c'est  que  Marey  s'est  inspiré  de  la  disposition  adoptée  par 
.l'astronome  pour  construire  son  fusil  photographique.  Un  méca- 
nisme à  répétition  permettait  d'imprimer  successivement  12  ima- 
ges sur  une  plaque  sensible  au  gélatinobromure  accomplissant  un 
mouvement  de  rotation  en  1  seconde.  L'impression  de  chaque 
image  durait  1/720  de  seconde.  Pour  opérer  à  l'aide  de  cet  instru- 
ment, on  épaulait,  on  visait  comme  avec  un  fusil  ordinaire,  et  l'on 
pressait  la  détente.  L'inconvénient  de  cette  combinaison  était  de 
limiter  l'analyse  à  12  images,  d'ailleurs  trop  petites.  Aussi  fut-elle 
bientôt  abandonnée  et  remplacée  par  la  suivante. 

L'appareil  installé  par  Marey  à  la  station  physiologique  du  Parc 
aux  Princes  était  constitué  par  une  chambre  noire  montée  sur  un 
chariot  à  quatre  roues  pouvant  se  déplacer  le  long  d'une  petite  voie 
ferrée  perpendiculaire  à  la  piste.  L'obturateur  placé  devant  l'objec- 
tif consistait  en  un  grand  disque  percé  d'une  série  de  fenêtres  équi- 
distantes,  auquel  un  poids  assez  lourd  communiquait  un  mouve- 
ment de  rotation  rapide.  La  plaque  sensible  se  trouvait  ainsi  exposée 
un  grand  nombre  de  fois.  Pour  éviter  le  voile  général  qui  serait 
résulté  de  ce  mode  d'opérer,  un  fond  rigoureusement  noir  faisait 
face  à  l'instrument.  Ce  fond  était  formé  d'un  large  écran  de  velours 
noir  protégé  par  un  auvent  qui  le  laissait  complètement  dans  l'om- 
bre, tandis  que  la  piste  était  vivement  éclairée.  Le  sujet  se  déta- 
chait ainsi  en  blanc  sur  fond  noir.  Une  échelle  métrique,  alter- 
nativement blanche  et  noire,  fixée  au  sol,  indiquait  les  distances 
parcourues;  et  comme,  d'autre  part,  la  vitesse  du  disque  obtura- 
teur était  exactement  déterminée,  il  était  facile  de  connaître  le. 
temps  pendant  lequel  un  espace  donné  avait  été  franchi,  ainsi  que 
la  durée  de  tel  ou  tel  mouvement.  Le  sujet  qui  se  déplaçait  le  long 
de  la  piste  était  ainsi  photographié  un  grand  nombre  de  fois, 
sur  la  même  plaque,  en  ses  diverses  attitudes.  Pour  les*  mouve- 
ments lents,  dans  le  but  d'éviter  la  superposition  et  la  confusion 
des  images,  le  sujet  était  revêtu  de  noir,  à  l'exception  de  quelques 


LA    CINÊMATOGRAPIIIE  4o9 

lignes  blanches  ou  même  seulement  de  quelques  boutons  brillants 
correspondant  aux  principales  articulations  et  qui,  impressionnant 
seuls  la  plaque,  suffisaient  pour  marquer  l'aspect  géne'ral  de  chaque 
attitude. 

Cette  méthode  n'est  évidemment  applicable  qu'aux  sujets  qui  se 
déplacent  dans  une  direction  perpendiculaire  à  Taxe  optique.  Pour 
les  sujets  qui  s'approchent  de  l'objectif  ou  qui  s'en  éloignent,  la 
décomposition  de  leur  mouvement  doit  être  enregistrée  sur  des 
plaques  rapidement  substituées  lune  à  l'autre,  et  le  problème  n'a 
été  complètement  résolu  que  par  les  appareils  cinématographiques 
qui  seront  décrits  plus  loin. 

Synthèse  du  mouvement. — Des  jouets  d'enfants  avaient  déjà  per- 
mis de  donner  l'illusion  du  mouvement  à  l'aide  d'images  dessinées 
sans  le  secours  de  la  photographie.  Au  début  du  dix-neuvième  siècle, 
le  physicien  belge  Plateau  avait  imaginé  le  phénaklsticope,  composé 
de  deux  disques  de  carton  fixés  aux  extrémités  d'un  axe  horizontal. 
L'un  des  disques  était  noir  et  percé  d'un  certain  nombre  de  fentes 
étroites.  En  regard  de  chacune  de  ces  fentes,  le  second  disque  mon- 
trait une  image  représentant  l'une  des  phases  d'un  mouvement. 
Ce  couple  de  disques  tournant  rapidement,  l'œil  placé  devant  les 
fentes  avait  l'illusion  d'un  mouvement  réel. 

Le  zootrope  est  formé  d'un  cylindre  ouvert  à  sa  partie  supérieure 
et  posé  sur  un  pivot  vertical.  Une  bande  de  papier,  sur  laquelle  sont 
dessinées  12  altitudes  différentes  d'un  sujet,  est  placée  à  l'intérieur 
du  cylindre,  dont  elle  n'occupe  que  la  moitié  de  la  hauteur.  L'autre 
moitié  est  percée  de  12  fentes  verticales.  On  imprime  au  cylindre 
un  mouvement  de  rotation  rapide,  et  l'on  regarde  l'intérieur  à 
travers  les  fentes.  On  voit  alors  le  sujet  s'animer  et  exécuter  cer- 
tains gestes  ou  certains  mouvements  :  ce  sera,  par  exemple,  un 
acrobate  exécutant  des  sauts  périlleux,  un  enfant  jouant  au  ballon, 
des  valseurs  tournoyant,  etc. 

Le  praxiyioscope  consiste  également  en  un  cylindre  tournant, 
mais  sa  hauteur  est  réduite  à  celle  des  images.  Celles-ci  se  reflètent 
dans  des  miroirs  disposés  au  centre  de  l'appareil,  en  nombre  égal 
à  celui  des  images.  En  dirigeant  le  regard  vers  les  miroirs,  le 
spectateur  voit  s'animer  le  sujet  représenté  sur  la  bande  de  papier. 

Les  dimensions  de  ces  appareils  ne  permettent  pas  de  reproduire 


460  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE   PHOTOGRAPHIE 

des  scènes  bien  variées.  Les  images  représentent  un  mouvement 
décomposé  en  12  phases  au  plus,  qui  reviennent,  toujours  le» 
mêmes,  à  chaque  tour. 

Muybridge,  qui  avait  inauguré  la  chronophotographie,  fut  aussi 
l'initiateur  de  la  projection  animée.  En  1883,  il  réalisait  pour  la 
première  fois  la  reconstitution  du  mouvement  analysé  par  la  pho- 
tographie. Il  mettait  bout  à  bout  les  instantanés  d'une  course  de 
cheval  saisie  par  ses  30  appareils,  et  les  projetait  à  travers  une 
sorte  de  phénakisticope.  Dans  des  séances  pubUques  données  chez 
le  peintre  Meissonier  et  à  l'École  des  beaux-arts,  on  avait  ainsi  vu 
courir  sur  l'écran  des  silhouettes  d'hommes  et  d'animaux. 

Peu  après,  Anschutz,  de  Lissa,  construisait,  avec  l'aide  de  la  mai- 
son Siemens,  des  zootropes  photographiques  dans  lesquels  chaque 
image  était  éclairée  seulement  pendant  un  instant  extrêmement 
court,  lorsqu'elle  passait  dans  le  champ  visuel.  Cet  éclairage  inter- 
mittent était  produit  par  la  décharge  électrique  traversant  un  tube 
de  Geissler. 

M.  Demeny,  collaborateur  de  Marey,  disposait  autour  d'un  disque 
M  images  chronophotographiques  et  les  faisait  successivement 
passer  devant  un  objectif. 

En  1892,  Edison  construisait  le  kinétographe  (de  xivtitoc:,  mû). 
C'était  une  chambre  noire  à  l'intérieur  de  laquelle  une  longue  pel- 
licule sensible  se  déroulait  au  foyer  d'un  objectif  périodiquement 
démasqué  par  un  obturateur  très  rapide.  La  pellicule  développée 
et  fixée  servait  à  obtenir  une  suite  de  petits  diapositifs  également 
disposés  le  long  d'un  ruban  transparent.  Ces  photocopies  reconsti- 
tuaient la  scène  que  l'on  avait  photographiée,  lorsqu'on  les  faisait 
passer  derrière  un  oculaire  périodiquement  découvert  par  un  obtu- 
rateur. L'instrument  destiné  à  cette  reconstitution  du  mouvement 
portait  le  nom  de  kinétoscope.  La  pellicule  positive  s'y  déroulant 
d'un  mouvement  continu,  il  fallait,  pour  que  son  déplacement  ne  fût 
pas  sensible  à  l'observateur,  que  la  durée  de  visibilité  restât  extrê- 
mement courte,  environ  1/7000  de  seconde.  Dans  ces  conditions, 
pour  que  lès  images  parussent  se  succéder  sans  interruption,  il 
fallait  en  faire  passer  un  grand  nombre,  au  moins  30  par  seconde. 

Cet  inconvénient  a  été  évité  en  donnant  à  la  pellicule  un  mouve- 
ment saccadé  et  en  ne  la  démasquant  que  lorsqu'elle  est  immobi- 


LA    CINÉMATOGRAPHIE 


461 


lîsée.  Il  suffit  alors,  pour  procurer  une  sensation  lumineuse  con- 
tinue, grâce  à  la  persistance  des  impressions  rétiniennes,  de  faire 
passer  15  images  par  seconde.  Cette  combinaison  avait  été  utilisée 
d'abord  par  Marey  et  Demeny.  «  Je  me  servis,  écrit  le  premier*, 
des  bandes  ou  pellicules  transparentessur  lesquelles  j'avais  obtenu 
l'analyse  du  mouvement;  je  les  fis  passer  dans  un  chronophoto- 
graphe  projecteur  où  elles  étaient 
entraînées  par  des  rouleaux,  mais 
où  certains  organes  les  arrêtaient 
assez  longtemps  pour  qu'elles  reçus- 
sent, par  derrière,  un  éclairement 
suffisant.  »  En  1894,  M.  Gaumont 
construisait,  sous  les  noms  de  bio- 
graphe  et  de  bioscope,  l'un  pour  l'a- 
nalyse, l'autre  pour  la  synthèse  du 
mouvement,  les  appareils  imaginés 
par  M.  Demeny.  Le  biographe  exé- 
cutait une  suite  continue  de  80  images 
et  même  davantage,  avec  une  vitesse. 
de  8  à  20  images  par  seconde,  et  le 
bioscope  reconstituait  la  scène  pho- 
tographiée, en  montrant  successive- 
ment toutes  ces  images. 

L'année  suivante,  MM.  Lumière 
montraient  les  premières  projections 
animées,  obtenues  à  l'aide  de  leur  cine- 
matographe  (de  xivTj[j.a,  mouvement). 
Dans  cet  appareil,,  chaque  période,  ci.  Gaumom. 
correspondant  à  la  prise  ou  à  la  vue    Fig.  164.  — Chrono  négatif  Gaumont 

d'une  image,  a  une  durée  de  1/15  de      P""^,  ^}'  "^'''^  ^^'  '''''  cinémato- 
j      T  iT      1  *    •  u-1  graphiques. 

seconde.  La  pellicule  reste  immobile 

pendant  2/45  de  seconde  et  emploie  à  se  déplacer  le  dernier  l/4o. 
Pendant  sa  phase  d'immobilité,  l'objectif  est  ouvert;  pendant  sa 
phase  de  déplacement,  la  lumière  est  au  contraire  interceptée  par 
un  secteur  plein  qui  tourne  devant  l'objectif.' 


1.  Marey,  la  €hronophotographie,  p.  25. 


462  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

Le  cinématographe,  rapidement  perfectionné,  a  obtenu  dès  ses 
débuts  un  succès  qui  n'a  fait  que  s'accroître,  si  bien  qu'il  constitue 
actuellement  le  plus  en  vogue  de  tous  les  spectacles. 

Prise  des  vues  cinématographiques.  —  Les  fig.  164  et  165  re- 
présentent le  chrono  négatif  con^irmi  par  M.  Gaumont  pour  la  prise 
des  vues  cinématographiques.  La  pellicule  sensible  à  impression- 
ner est  enroulée  sur  une  bobine  enfermée  dans  une  boîte-magasin 

___ surmontant    la    chambre 

Magasin  s\fpénem  noire.  La  pellicule  est  une 
bande  dont  la  longueur 
atteint  jusqu'à  100  mètres  ; 
de  chaque  côté  de  ce  ru- 
ban, des  perforations  ré- 
gulièrementespacées  vien- 
nent s'adapter  à  des  cylin- 
Cyiindre  denté  drcs   dcntés  reliés  à  une 


ij  Magasin  inférteu^^ 


Perforateur 
Galet 


Boucle 


.Objectif 


Fig-.  165.  —  Schéma  du  chrono  négatif, 


manivelle,  de  manière  à 
assurer  l'entraînement  ré- 
gulier de  la  couche  sen- 
sible. L'objectif,  de  grande 
luminosité,  est  un  anas- 
tigmat  de  52  millimètres 
^,    ,  .^   ,.  de  foyer.  Un  obturateur, 

Cyàaare  dencsi  .''  - 

constitue  par  deux  sec- 
teurs opaques  se  recou- 
vrant, laisse  périodique- 
ment pénétrer  la  lumière, 
pendant  que  la  pellicule 
est  momentanément  arrê- 


Came 


Galet 


tée.  La  surface  impressionnée  passe  ensuite  sur  une  seconde  bobine, 
dans  la  boîte-magasin  qui  se  trouve  placée  à  la  partie  inférieure 
arrière  de  l'appareil.  Au-dessus  de  la  manivelle,  un  viseur,  consti- 
tué par  une  véritable  chambre  noire,  reproduit  exactement  et  très 
clairement  l'image  que  l'on  cinématographie. 

L'appareil  étant  placé  bien  de  niveau  sur  un  pied  à  trois  bran- 
ches, on  règle  la  mise  au  point,  suivant  la  distance  du  sujet  prin- 
cipal. Comme  le  foyer  de  l'objectif  est  très  court,  toutes  les  images 


LA    CINÈMATOGRAPHIE  463 

sont  nettes  à  partir  de  5  mètres.  On  règle  aussi  la  vitesse  de  1  ob- 
turateur, qui  peut  donner  des  poses  variant  de  1/64  à  1/512  de 
seconde,  suivant  la  rapidité  des  mouvements  à  enregistrer.  On 
saisit  alors  la  manivelle  de  la  main  droite,  et  Ton  tourne  avec  une 
vitesse  de  deux  tours  par  seconde  environ,  dans  le  sens  des  aiguilles 
d'une  montre  et  sans  jamais  revenir  en  arrière.  La  régularité  du 
mouvement  est  nécessaire,  mais  elle  s'acquiert  rapidement.  Le 
viseur  permet  de  s'assurer  constamment  que  le  sujet  à  prendre  est 
bien  dans  le  champ  de  l'objectif,  ce  champ  se  trouvant  reproduit 
en  vraie  grandeur  sur  la  glace  dépolie  du  viseur. 

Développement  et  tirage.  —  La  bande  impressionnée  est  en- 
roulée, couche  en  dessus,  autour  d'une  planchette  ou  d'un  cadre 
que  l'on  plonge  dans  une  cuve  assez  grande  contenant  la  quantité 
nécessaire  de  révélateur.  M.  J.  Ducom  indique  la  formule  suivante 
comme  la  plus  fréquemment  appliquée  au  développement  des 
bandes  cinématographiques  : 

Eau .. ..................  2.000  ce. 

Métol ............ ...  3  gr. 

Hydroquinone 5  — 

Sulfite  d€  soude  anhydre  .......................  60  — 

Carbonate  de  potasse 40  — 

Bromure  de  potassium 2  — 

Ce  bain  est  versé  dans  des  cuves  contenant  environ  150  à 
200  litres.  On  y  développe  successivement  plusieurs  séries  de  vues, 
en  y  ajoutant  de  temps  en  temps  un  peu  de  bain  neuf.  Quand  les 
négatifs  ont  acquis  l'intensité  voulue,  le  cadre  est  retiré  de  la  cuve, 
lavé  à  l'eau  courante  et  immergé  dans  un  grand  récipient  conte- 
nant une  solution  d'hyposulfite  additionnée  de  bisulfite  de  soude. 

La  méthode  adoptée  pour  le  développement  conduit  souvent  à 
des  négatifs  ou  trop  durs  ou  trop  faibles  :  on  y  remédie  en  affai- 
blissant la  pellicule  ou  en  la  renforçant  à  l'aide  des  correctifs 
habituels. 

Après  lavage,  la  pellicule  ne  doit  pas  être  mise  directement  à 
sécher,  car  elle  s'enroulerait  irrégulièrement  et  serait  trop  cas- 
sante. Il  faut,  au  préalable,  la  passer  dans  : 

Eau 15  litres. 

Alcool  à  'QSo 2      — 

Glycérine 0>5  — 


464 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Pour  ]a  dessiccation,  la  pellicule  est  enroulée  sur  un  barillet 
formé  de  baguettes  en  bois  arrondies,  la  gélatine  en  dehors. 


Fig.  166.  —  Appareil  Lu- 
mière, pour  le  tirage 
des  positifs  cinémato- 
graphiques. 


La  fig.  168  représente  le  cinématographe  Lumière  disposé  pour 
le  tirage  des  diapositifs.  La  boîte-châssis  PP'  contient  deux  bobines 


LA   CINEMATOGRAPHJE 


465 


sur  lesquelles  sont  enroulées  la  bande  négative  N  et  la  bande  non 
encore  impressionnée  P.  En  tournant  la  manivelle,  on  entraîne  les 


Cl.  Gaumopt. 


Fig.  167.  —  Poste  de  projection  double. 


deux  pellicules,  appliquées  l'une  contre  l'autre,  devant  une  ouver- 
ture par  laquelle  pénètre  la  lumière  qui  impressionne  la  pellicule 
positive  à  travers  la  pellicule  négative. 

Une  fois  imprimée,  la  pellicule  positive  est  développée  de  la 


406 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


même  manière  que  la  pellicale  négative,    dans  le  révélateur  au 
métol-hydroquinone.  On  procède  ensuite  au  fixage,  au  lavage  et 
au  gh'cérinage,  comme  il  est  dit  plus  haut. 
Projection  des  vues  cinématographiques.  —  Certains  appareils 

destinés  à  la  prise  des 
vues  cinématographi- 
ques peuvent  également 
servir  à  les  projeter  : 
dans  ce  cas,  la  chambre 
noire  est  placée  devant 
•4a  condensateur  d'une 
lanterne  à  projection; 
on  ouvre  le  panneau  qui 
empêchait  l'accès  de  la 
lumière  sur  la  pellicule 
sensible,  on  met  en  place 
la  pellicule  portant  les 
images  positives,  et  on 
règle  la  position  de  l'ob- 
jectif, de  manière  à  ob- 
tenir sur  l'écran  une 
projection  aussi  nette 
que  possible.  Une  reste 
plus  alors  qu'à  tour- 
ner la  manivelle,  pour 
reconstituer  la  scène 
cinématographiée.  La 
pellicule  positive  est 
perforée  de  la  même 
manière  que  la  pellicule 
négative;  ses  perfora- 
tions s'adaptent  donc 
exactement  aux  griffes 
des  galets  d'entraînement,  et  le  mouvement  de  progression  est  pé- 
riodiquement arrêté  pendant  les  instants  très  brefs  où  l'obturateur 
démasque  l'objectif. 

Cependant,  dans  la  plupart  des  cas,  la  projection  s'effectue  à 


Cl.  Gaumont. 

Fiff.  168 


Schéma  du  déroulement  d'un  film 
à  la  projection. 


LA    CINEMATOGRAPIIIE 


467 


l'aide  d'appareils  spécialement  disposés  dans  ce  but.  L'obturateur 
est  combiné  de  manière  à  fournir  le  maximum  (i'écJairement,  tout 
en  réduisant  au  mini- 
mum le  scintillement  ré- 
sultant de  la  succession 
des  images. 

Le  fîlnif  ou  bande  à 
projeter,  est  d'abord  en- 
roulé sur  un  rouet  (fig. 
167  et  168).  L'extrémité 
correspondant  au  com- 
mencement de  la  scène  à 
reproduire  est  engagée 
dans  les  galets  d'entraî- 
nement et  adaptée  à 
l'axe  d'un  second  rouet 
sur  lequel  la  bande  est 
enroulée  au  fur  et  à  me- 
sure de  la  projection  des 
images  qu'elle  contient. 

Les  bandes  de  très 
grande  longueur  sont  or- 
dinairement déroulées  à 
l'aide  du  défileur  Carpen- 
tier-Lumière  (ûg.  169), . 
dont  les  rouets  peuvent 
recevoir  plus  de  400  mè- 
tres de  pellicule. 

Les  risques  d'incendie 
résultant  de  l'emploi  du 
celluloïd  à  proximité  d'u- 
ne lampe  .de  projection 
ont  imposé  des  précau- 
tions assez  rigoureuses. 
La  préfecture  de  police  de 
Paris  et  un  grand  nombre 


Cl.  Lumière. 


Fig.  169.  —  Défileur  Carpentier-Lumière. 
de  villes  exigent  que  les  bobines  contenant  les  films  soient  non  point 


468  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE    PHOTOGRAPHIE 

placées  dans  les  rouets  évidés  représentés  sur  les  figures  précéden- 
tes, mais  bien  enfermées  dans  des  boîtes  métalliques.  La  Tig.  170 
représente  le  chrono  de  projection  Gaumont  muni  de  carters  pare- 


Fig.  170.  —  Chrono  Gaumont  avec  pare-feu. 

feu.  En  outre,  les  spectacles  cinématographiques  ne  sont  autorisés 
qu'à  la  condition  expresse  d'isoler  de  la  salle  l'appareil  de  projec- 
tion, qui  doit  être  enfermé  dans  une  cabine  à  parois  métalliques. 
Lafig.  171  représente  une  cabine  démontable,  formée  de  panneaux 


LA   CINÉMATOGRAPHIE 


469 


renforcés  en  tôle  de  fer  nervée.  Chaque  panneau  est  numéroté,  et 
l'assemblage  s'effectue  rapidement,  au  moyen  de  crochets  inté- 


Fig.  171.  —  Cabine  de  projections  cinématographiques. 

rieurs.  Quoique  très  exigu,  ce  local  est  suffisamment  aéré  pour  que 
l'opérateur  n'y  soit  pas  incommodé  par  la  chaleur  et  les  produits 
de  la  combustion  du  projecteur. 

27 


470  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


J.-L.  Breton,  la  Chronophotographie,  Paris  (L.  Geisler). 

R.-L.  DoNNADiEU,  la  Photographie  animée,  Paris  (Gli.  Mendel). 

J.  DucoM,  Iç  Cinématographe  scientifique'et  industriel,  Paris  (L.  Geisler),  1911, 

Marey,  la  Chronophotographie,  Paris  (Gaulhier-Villars),  1899. 

E.  Trutat,  la  Photographie  animée,  Paris  (Gauthier- Villars),  1899. 

K.-W.  WoLF  CzAPEK,  la  Cinématographie,  2^  édition,  Berlin  (Deutsche  Velags- 

gesellschaft),  1911. 
E.  Covs-rET,  Traité  pratique  de  Cinématographie,  2  vol.,  Paris  (Ch.  Mendel),  1914, 


LA   MICROPHOTOGRAPHIE  411 


CHAPITRE   XXV 

LA    MICROPHOTOGRAPHIE 

Premiers  essais.  —  Dès  la  découverte  du  daguerréotype,  le 
D'  Donné  et  Léon  Foucault  l'appliquèrent  à  la  reproduction  ampli- 
fiée des  objets  microscopiques.  La  photographie  fournit  ainsi  le 
moyen  de  fixer  ces  images  fugitives  que  l'on  aperçoit  dans  le 
microscope,  jusqu'aux  moindres  détails  qu'il  est  si  difficile  de  des- 
siner avec  exactitude.  La  plaque  sensible  n'est  pas  sujette  aux 
mêmes  illusions  et  aux  mêmes  défaillances  que  l'œil  de  l'obser- 
vateur; aussi  l'épreuve  microphotographique  constitue-t-elle  un 
témoignage  irrécusable  et  présente  un  degré  de  certitude  que  nul 
ne  saurait  suspe.cter.  Elle  a  d'ailleurs  permis,  ces  temp? derniers,  de 
pousser  l'analyse  plus  loin  que  notre  organe  visuel  n'est  capable 
de  le  faire,  de  révéler  ainsi  l'invisible  et  d'en  fixer  l'image. 

L'appareil  dont  on  se  servait  primitivement  pour  les  reproduc- 
tions microphotographiques  n'était  autre  que  le  microscope  solaire, 
appareil  de  projection  fondé  sur  le  même  principe  que  la  lanterne 
magique.  La  lumière  solaire  était  concentrée  par  deux  lentilles 
formant  condensateur  sur  l'objet  à  reproduire,  dont  un  objectif 
projetait  sur  un  écran  l'image  très  amplifiée.  L'objectif  était  formé 
de  lentilles  très  petites  et  de  très  court  foyer,  afin  de  réduire  le 
plus  possible  la  distance  qui  devait  le  séparer  de  l'écran.  Après 
avoir  mis  au  point,  la  plaque  sensible  était  substituée  à  l'écran. 

Actuellement,  cette  combinaison  est  rarement  employée,  et  l'on 
se  sert  presque  toujours  de  l'instrument  que  les  physiciens  dési- 
gnent sous  le  nom  de  microscope  composé. 

Emploi  du  microscope  composé.  —  Bien  que  cet  appareil  d'op- 
tique soit  universellement  connu,  rappelons  très  brièvement  qu'il 
est  constitué  par  la  combinaison  de  deux  groupes  de  lentilles  con- 
vergentes montés  aux  extrémités  d'un  tube  métallique.  Les  lentilles 


Fig.  172. 
Microscope  composé. 


LA  MICROPHOTOGRAPHIE 


473 


disposées  à  proximité  de  l'objet  à  observer  forment  Vobjectif, 
et  celles  qui  se  trouvent  placées  du  côté  opposé,  où  l'observateur 
applique  son  œil,  portent  le  nom  d'oculaire.  L'objet,  placé  entre 
deux  lames  de  verre,  est  éclairé  à  l'aide  d'un  miroir  adapté  à  ud 
support  articulé,  etla  mise  au  point  s'effectue  au  moyen  d'une  cre- 
maillère  et  d'une  vis  micrométrique  permettant 
de  faire  varier  la  distance  entre 
le  tube  et  l'objet  à  observer 
(fig.  172,  '173  et. 174). 

Si  l'on  dispose  une  glace  dé- 
polie à  quelque  distance  de  l'o- 
culaire, on  voit  s'y  projeter  une 
image  de  l'objet  placé.au  foyer 
de  l'objectif.  Si  l'on  enlève  l'o- 
culaire, on  observe  encore  une 

Cl.  Krauss.  image  réelle  sur  le  verre  dé- 

Fig.  173.  —  Oculaire  poli,  mais  elle  est  renversée.  Fig.  174.  —  Objectif 
du  microscope  corn-  ^jg^ns  l'un  et  l'autre  cas ^  en  sub-     du  microscope  com- 
pose. .  j'      1-  posé. 
stituant-au   verr&  dépoli    une     ^ 

plaque  sensible,  on  doit,  théoriquement,  obtenir  une  microphoto- 
graphie. En  pratique,  cependant,  l'opération  ne  réussit  complète- 
ment qu'en  obseryant  certaines  conditions. 

D'abord,  les  microscopes  dont  les  lentilles  ne  sont  achromatisées 
que  pour  l'observation  visuelle  ne  conviennent  pas  à  la  photogra- 
phie, à  moins  d'avoir  recours  à  un  mode  d'éclairage  spécial  (mono- 
chromatique)  :  l'image  mise  au  point  pour  l'œil  de  l'observateur  ne 
serait  plus  nette  sur  la  plaque,  le  foyer  des  rayons  ultra-violets  ne 
coïncidant  pas  avec  celui  des  radiations  visibles.  Il  faut  donc  que 
rinstrument  ait  été  achromatisé  de  la  même  manière  que  les  objec 
tifs  photographiques,  afin  qu'il  n'y  ait  point  de  foye?-  chimique.  Il 
convient  d'ajouter  que  la  plupart  des  microscopes  actuellement 
construits  par  les  grandes  maisons  d'optique  satisfont  parfaite- 
ment à  cette  condition. 

Le  tube  du  microscope  s'adapte,  au  moyen  d'un  raccord  très 
simple,  à  une  chambre  noire  spéciale,  ordinairement  de  petit  for- 
mat, mais  à  très  long  tirage  (fig.  175^e't;176.). 

Gn  utilise  l'objectif  du  microscope,  soit  seul,  soit  avec  l'oculaire, 


Dans  le  premier  cas,  le 
tirage  de  la  chambre  est 
plus  long,  pour  un  même 
grossissement.  Il  dépend, 
bien  entendu,  de  l'ampli- 
fîcation  qu'il  s'agit  d'obte- 
nir. Pour  avoir  une  image 
de  plus  en  plus  grande,  il 
suffit  de  rapprocher  l'ob- 
jectif de  l'objet  et  de  l'é- 
loigner de  la  plaque  ;  mais 
on  ne  gagne  en  amplifi- 
cation qu'aux  dépens  de 
la  netteté. 

Si  le  microscope  est 
muni  de  son  ocujaire,  l'i- 
mage sera  plus  grande, 
pour  le  même  éloigne- 
ment  de  la  plaque  sen- 
sible. Le  tirage  est  donc 
plus  court  que  dans  le 
cas  précédent,  à  grossis- 
sement égal.  Cette  combi- 
naison, qui  réduit  Tinstal- 
lalion  au  minimum  d'en- 
combrement, a  encore 
l'avantage  de  faciliter 
l'application  alternative 
de  l'observation  visuelle 
et  delà  reproduction  pho- 
tographique. Le  sujet  à 
étudier  est  d'abord  placé, 
comme  d'habitude,  entre 
deux  lames  de  verre,  sur 
le  porte-objet.  On  l'exa- 
mine, en  mettant  l'œil  à 
l'oculaire,  et,  lorsqu'on  y 


476  TRAITÉ  GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

découvre  quelque  détail  intéressant  dont  on  tient  à  conserver 
l'image,  on  n'a  qu'à  ajuster  la  petite  chambre  noire  au  micros- 
cope, sans  déplacer  l'objet.  On  met  au  point,  en  regardant  le  verre 
dépoli,  et  l'on  expose  la  plaque  sensible.  MM.  Thomas  et  Bellieni 
ont  même  imaginé  une  méthode  qui  supprime  la  modification  de 
la  mise  au  point  et  permet  de  laisser  le  microscope  réglé  pour 
ll'examen  visuel.  L'instrument  étant  mis  au  point  pour  l'observation 
oculaire,  on  n'a  qu'à  le  raccorder  à  une  chambre  photographique 
ordinaire  inunie  de  son  objectif  préalablement  mis  au  point  sur 
l'infini.  Il  est  ainsi  extrêmement  facile  de  passer  alternativement 
-de  l'étude  visuelle  à  l'opération  photographique,  et  vice  versa. 

L^inconvénient  de  l'oculaire  est  que  ses  lentilles  absorbent  «itïe 
grande  quantité  de  lumière.  Il  faut  alors  augmenter  considérable- 
ment le  temps  de  posre  ou  recourir  à  un  éclai- 
rage beaucoup  plus  intense.  En  ontre,  pour  éviter 
toute  réflexion  sur  les  parois. intérieures  du  mi- 
croscope,  réflexions    qui  "ne  ise  ;  produisent  pas 
lorsqu'on  se  sert  de  l'objectif  seul,  il  est  néces- 
saire  d'interposer  un  diaphragme  vers   l'extré- 
Fig.  177. —Micro-   mité  du  tube.  Un  autre  moyen  d'empêcher  ces 
planar.  réflexions,  déterminées  par  les  rayons  marginaux 

et  dont  refl"et  est  de  donner  une  image  confuse  et  une  tache  cen- 
trale, est  de  remplacer  le  tube  ordinaire  par  un  tube  plus  large. 
C'est  dans  ce  but  que  la  maison  Zeiss  construit  des  microscopes 
dont  le  tube  a  49  mm.  de  diamètre  intérieur.  Du  reste,  tous  les 
constructeurs  tendent,  depuis  quelques  années,  à  employer  des 
tubes  courts  et  de  gros  diamètre  ,  qui  seuls  permettent  d'utiliser 
tout  le  champ  des  objectifs  de  grande  longueur  focale,  tels  que 
les  microplanars  (fig.  177)  et  autres  anastigmats.  Ces  objectifs, 
spécialement  établis  pour  la  microphotographie,  admirablement 
corrigés  de  toute  trace  d'aberration,  fournissent  des  images  infini- 
ment plus  parfaites  que  celles  qu'on  obtenait  avec  les  systèmes 
optiques  primitifs. 

Éclairage.  —  La  lumière  diff'use,  généralement  suffisante  pour 
l'observation  directe,  est  rarement  appliquée  à  la  microphotogra- 
phie, parce  qu'elle  nécessite  une  pose  trop  longue.  Le  plus  sou- 
vent, on  utilise  une  source  de  lumière  artificielle,   d'autant    plus 


LA   MJCROPHO'TCyORAPHIE  411 

intense  qu'il  s'agit  d'obtenir  un  grossissement  plus  fort.  Jusqu'à 
500  diamètres,  les  lampes  électriques  à  incandescence  suffisent. 
Au  delà,  on  a  recours  à  Tare  électrique  ou  à  la  lumière  oxhydrique. 

L'objet  est  ordinairement  éclairé  par  transparence  :  la  lumière 
îs'y  trouve  concentrée  à  l'aide  d'un  miroir  concave  disposé  au- 
dessous  du  porte-objet.  Pour  les  fortes  amplifications,  on  y  ajoute 
un  condensateur,  lentille  supplémentaire  qui  s'adapte  au  porte- 
objet.  Les  préparations  destinées  à  la  micrographie  (coupes  de 
tissus  animaux  ou  végétaux,  microbes,  etc.)  sont  assez  souvent 
colorées,  de  manière  à  se  détacher  plus  nettement  sur  le  fond 
transparent.  Suivant  la  couleur  employée  à  cet  effet,  il  sera  par- 
fois nécessaire  d'avoir  recours  aux  plaques  orthochromatiques, 
combinées  avec  un  écran  coloré. 

Certaines  substances  sont  trop  opaques  pour  se  prêter  à  l'éclai- 
rage par  lumière  transmise.  Même  réduites  en  coupes  aussi  min- 
ces que  possible,  elles  ne  présenteraient  pas  encore  la  diaphanéité 
nécessaire.  C'est  le  cas,  notamment,  pour  les  métaux  et  pour 
certains  minéraux,  qui  exigent  l'emploi  d'objectifs  illuminât eurs. 
Le  faisceau  lumineux  pénètre  d'abord  dans  le  tube  du  microscope, 
par  une  ouverture  latérale.  Un  prisme  à  réflexion  totale  le  dirige 
vers  l'objectif,  qui  le  concentre  sur  l'objet.  ' 

Quel  que  soit  le  mode  d'éclairement,  il  faut  veiller  à  ce  que  la 
lumière  arrive  régulièrement  sur  toute  la  surface  à  impressionner. 
On  s'en  assurera  en  examinant  le  verre  dépoli,  sur  lequel  la  pro- 
jection devra  présenter  une  surface  circulaire  uniformément  bril- 
lante. La  mise  au  point  s'effectue  d'abord  approximativement,  en 
modifiant  le  tirage  de  la  chambre,  puis  d'une  façon  beaucoup  plus 
précise  en  manœuvrant  la  crémaillère  du  microscope  et  enfin  la 
vis  micrométrique. 

Si  le  foyer  optique  ne  coïncide  pas  avec  ïe  foyer  chimique,  on 
y  remédie  en  faisant  usage  de  lumière  monochromatique.  A  cet 
effet,  on  interpose  sur  le  trajet  des  rayons  lumineux  un  verre 
teinté,  ou,  ce  qui  est  préférable,  une  cuve  en  verre  à  faces  paral- 
lèles remplie  d'un  liquide  coloré,  tel  que  l'acide  picrique,  le 
bichromate  de  potasse,  le  sulfate  de  cuivre,  etc. 

Limites  du  grossissement.  —  Les  grossissements  réalisés  à 
l'aide  du  microscope  ordinaire  ne  dépassent  pas  600  à  800  diamè- 


478  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

très  quand  on  emploie  l'objectif  seul,  et  2.000  ou  2.500  quand  on 
y  ajoute  l'oculaire.  Pour  obtenir  des  grossissements  supérieurs, 
il  faut-  avoir  recours  à  des  dispositi(^ns  spéciales.  En  effet,  le  pou- 
voir du  microscope  a  des  bornes  strictement  limitées  par  la 
nature  même  de  la  lumière  :  si  l'on  essaye  de  les  franchir,  on  ne 
gagne  en  amplification  qu'au  détriment  de  la  netteté,  et,  loin  de 
faire  apparaître  des  détails  plus  fins,  on  n'obtient  que  des  images 
de  plus  en  plus  confuses. 

C'est  qu'en  réalité  l'image  de  chaque  point  lumineux  fournie 
par  un  instrument  d'optique  même  supposé  parfait  n'est  pas  un 
point,  mais  bien  une  tache  circulaire  entourée  d'anneaux  concen- 
triques, d'ailleurs  très  petits.  Si  l'on  pousse  l'amplification  jus- 
qu'à mettre  en  évidence  cette  structure  complexe,  les  images  des 
divers  points  contigus  s'enchevêtrent  et  cessent  d'être  distinctes. 
Toutefois,  la  photographie  a  ici  un  nouvel  avantage  sur  l'œil 
humain.  Ces  taches,  ces  anneaux  concentriques,  n'ont  pas  tous  les 
mêmes  dimensions  :  ceux  qui  proviennent  des  radiations  rouges 
sont  plus  larges  que  ceux  des  jaunes;  ceux-ci  à  leur  tour  sont 
moins  resserrés  que  les  verts  et  que  les  bleus,  proportionnelle- 
ment aux  longueurs  d'ondes  des  radiations  correspondantes  (V. 
le  tableau  de  la  page  408).  Les  plus  étroits,  pour  l'observation 
visuelle,  sont  ceux  qui  sont  formes  par  les  rayons  violets.  Il  suit 
de  là  que  la  limite  de  résolution  des  fines  structures  peut  être 
poussée  d'autant  plus  loin  qu'on  les  éclaire  par  des  rayons  de 
plus  petite  longueur  d'onde.  Ainsi  s'explique  l'utilisation  des  rayons 
ultra-viulets,  que  notre  œil  ne  voit  pas,  mais  qui  impressionnent 
la  plaque  photographique. 

La  réalisation  pratique  de  la  microphotographie  en  lumière  ultra- 
violette présentait  de  sérieuses  difficultés,  heureusement  résolues, 
en  1904,  par  le  D'"  A.  Kôhler,  d'Iéna.  Les  lentilles  du  microscope 
construit  par  Zeiss  (fig.  178)  sont  composées  de  cristal  et  de  quartz 
fondu  et  ne  sont  corrigées  que  de  l'aberration  sphérique,  l'appli- 
cation d'un  éclairage  monochromatiqùe  rendant  tout  à  fait  négli- 
geable l'aberration  de  réfrangibilité.  Les  rayons  ultra-violets  sont 
produits  par  une  étincelle  électrique  qui  jaillit  entre  des  électrodes 
de  cadmium.  La  mise  au  point  s'efï'ectue  sur  un  écran  fluorescent 
que  l'on  examine  à  l'aide  d'un  système  optique  en  cristal. 


Fig.  178.  —  Appareil  pour  la  microphotographia  eu  lumière  ultra- violette. 


&80 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Cette  méthode  permet  de  pousser  le  grossissement  jusqu'à 
3.600  diamètres.  Le  pouvoir  résolvant  atteint  le  double  de  celui 
que  donnerait,  sous  les  radiations  visibles:^  un  objectif  d'égale 
ouverture  numérique.  En  outre,  les-  radiations  ultra- violettes 
révèlent  l'existence  de  détails  que  la  lumière  ordinaire  ne  ferait 
pas  soupçonner,  même  si  le  grossissement  était  suffisant,  parce 
qu'un  grand  nombre  de  préparations  organiques  fraîches  ou  fixées 
accusent  des  différences  de~transparence  considérables  suivant  les 
radiations  qui  les  éclairent,  et  se  comportent,  en  lumière  ultra- 
violette, absolument  commedés  objets  différemment  colorés,  bien 
qu'elles  soient  incolores  en.  lumière  blanche. 

Un  autre  moyen  de  voir  l'inTisible   est  V ultramicroscope  créé, 
en  1903,  par  deux  Allemande,  Siedenlopf  et  Zsigmondy,  et  parti- 


179.  —  Ultramicroscope. 


culièrement  étudié  eniErance  par  MM.  Gottonet  Mouton.  Ce  mode 
d'investigation  est  fondé  sur  ce  fait  qu'un  objet  extrêmement 
petit  peut  devenir  visible,  sous  la  triple  condition  d'être  lumineux, 
de  se  détacher  sur  uir  fond  obscur  et  d'être  suffisamment  éloigné 
des  autres  points  lumineux. 

La  fig.  179  représenté  l'ultramicroscope  Siedentopf-Zsigmondy 
construit  par  la  mctison  Zeiss.  Une  lampe  à  arc  de  30  ampères 
éclaire  les  objets: microscopiques,  non  plus  parallèlement  à  l'axe 
optique,  mais  perpendiculairement  à  cette  direction,  ou  très  obli- 
quement. La  fig.  lS0.montrB_  de  quelle  manière  les:ïra^oji  s  lumineux 


LA   MICROPHOTOGRAPHIE 


481 


sont  dirigés  vers  le  porte-objet  par  un  condensateur  parabolique. 
Aucun  rayon  lumineux  direct  ne  pénètre  dans  le  tube  du  micros- 
cope, et  les  objets  les  plus  menus  apparaissent  nettement,  bril- 
lants sur  fond  obscur,  à  la  façon  des  poussières  en  suspension 
dans  l'air  au  milieu  d'une  chambre  où 
pénètre  un  rayon  de  soleil. 

Le  D*"  Comandon  a  utilisé  cette  com- 
binaison pour  cinématographier,  à  rai- 
son de  3:2  poses  par  seconde,  des  êtres 
prodigieusement  petits,  tels  que  ceux 
qui  vivent  dans  le  sang  des  animaux, 
organismes  que  l'on  n'avait  pu  jus- 
qu'ici étudier  qu'après  les  avoir  colorés 
et  par  conséquent  tués^  L'ultramicros- 
cope  rend  ainsi  des  services  inespérés 
aux  biologistes,  en  leur  permettant  d'ob- 
server vivants  divers  microbes  qui  échappaient  auparavant  à  leurs 
études.  Conjugué  avec  le  cinématographe,  qui  donne  l'illusion- par- 
faite de  la  réalité,  le  nouvel  instrument  a  révélé  au  public  un  nou- 
veau monde,  le  m  onde;  des  infiniment  petits. 


Fig.  180,  —  Condensateur 
parabolique. 


OUVRAGES  A  CON  S  ULTER 


A.  CoTTON  ET  Mouton,  les  Ultramicroscopes ,  Paris  (G.  Masson),  1906. 

L.  Mathet,  le  Microscope  et  son  Application  à  la  photographie  des  infiniment 

petits,  Paris  (Gh.  Mendel). 
MoNPiLLARD,  la  Microphotographie,  Paris  (Gauthier^ Villars),  1899. 
R.  Neuhauss,  Anleitung  zur   Mikrop holographie,  2®  édition,  Halle  a/S.  (W. 

Knapp). 
H.  Viallanes,  Microphotographie,  Paris  (Gauthier-Villars),  1886, 
R.  ZsiGMONDY,  Colloids  and  the  Ultramicroscope,  New-York  (John  Wiley  and 

Sons),  1909. 
M.  Langeron,  Précis  de Jdicroscopie,  Paris  (Masson  et  Qie),  1914. 


482  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


CHAPITRE   XXVI 

LA     RADIOGRAPHIE 

Découverte  des  rayons  X.  —  Lorsqu'une  décharge  électrique 
éclate  à  l'inlérieur  d'un  tube  de  verre  rempli  d'air  à  la  pression 
atmosphérique  ordinaire,  elle  s'y  manifeste  sous  la  forme  de  traits 
de  feu  rapides,  accompagnés  de  crépitements  caractéristiques.  Mais, 
si  l'on  y  fait  le  vide,  le  tube  s'illumine  dans  toute  son  étendue,  et 
l'étincelle  fait  place  à  une  lueur  continue.  Cet  effet  est  particulière- 
ment remarquable  dans  les  tubes  de  Geissler.  Deux  fils  de  platine 
ou  d'aluminium  traversent  le  verre  et  constituent  les  électrodes, 
c'est-à-dire  les  conducteurs  qui  amènent  la  charge  électrique  à 
l'intérieur.  On  appelle  anode  le  fil  relié  au  pôle  positif  de  la  ma- 
chine qui  fuurnit  l'électricité,  et  cathode  l'électrode  négative.  Après 
avoir  introduit  dans  le  tube  un  gaz  ou  une  vapeur,  on  y  produit  un 
vide  partiel,  après  quoi  l'ouverture  est  scellée  au  chalumeau. 

Le  passage  de  l'électricité  à  travers  le  tube  de  Geissler  produit 
une  lueur  dont  la  teinte  varie  suivant  la  nature  du  gaz  dont  il  reste 
encore  quelques  traces.  La  lumière  part  de  l'extrémité  de  l'anode 
et  s'arrête  à  une  faible  distance  de  la  cathode;  une  gaine  lumi- 
neuse entoure  la  cathode,  dont  elle  est  séparée  par  un  espace 
obscur.  Si  le  vide  a  été  fait  après  avoir  introduit  dans  le  tube  une 
vapeur  d'alcool,  d'essence  de  térébenthine  ou  de  sulfure  de  car- 
bone, la  lueur  n'apparaît  plus  uniforme  :  on  aperçoit,  dans  ce  cas, 
des  stratifications,  c'est-à-dire  des  raies  alternativement  brillantes 
et  obscures.  , 

Dès  1875,  deux  expérimentateurs,  Hittorff,  à  Munster,  et  Gold- 
stein,  à  Berlin,  avaient  reconnu  que  la  lueur  produite  dans  le  tube 
de  Geissler  était  due  à  un  vide  imparfait  et  qu'elle  disparaissait 
progressivement,  à  mesure  que  la  raréfaction  se  faisait  plus  com- 
plète. Ils  avaient  remarqué,  en  outre,  qu'après  la  disparition  de  la 


LA  RADIOGRAPHIE  483 

lueur  intérieure,  le  verre  du  tube  devenait  le  siège  d'une  pâle  fluo- 
rescence verte. 

Ces  premières  observations  étaient  restées  à  peu  près  inaper- 
çues. Elles  étaient  déjà  oubliées,  en  1879,  quand  Grookes  entreprit 
Tétude  méthodique  de  cet  ordre  de  phénomènes.  Il  constata  que, 
lorsque  le  vide  se  fait  d'une  façon  de  plus  en  plus  parfaite  dans  le 
tube,  la  gaine  lumineuse  qui  entoure  la  cathode  disparaît  tout  d'a- 
bord. La  zone  obscure  va  ensuite  s'élargissant  et  gagne  de  proche 
en  proche  jusqu'à  la  pointe  positive.  Une  à  une,  les  stratifications 
s'éteignent.  Dés  que  le  point  lumineux  qui  termine  l'anode  s'éva- 
nouit à  son  tour,  la  fluorescence  du  verre  commence  à  se  mani- 
fester. 

Pour  Crookes,  ce  sont  les  molécules  du  gaz  raréfié  à  l'extrême 
qui,  repoussées  par  l'électricité  négative  de  la  cathode,  bombar- 
dent le  fond  de  l'ampoule  et  font  jaillir,  par  leurs  chocs  inces- 
sants, ces  lueurs  phosphorescentes  dont  le  point  de  départ  semble 
bien  être  le  fil  négatif.  C'est  pourquoi  il  leur  donna  le  nom  de 
rayons  cathodiques.  En  arrêtant  ce  flux  de  projectiles  au  moyen 
d'une  lame  d'aluminium  enfermée  dans  le  tube,  l'ombre  de  cette 
lame  venait  se  peindre  sur  le  verre. 

En  1889,  le  physicien  allemand  Henri  Hertz  vérifia  que  lorsque 
la  lame  d'aluminium  est  suffisamment  mince,  elle  devient  impuis- 
sante à  arrêter  les  rayons  cathodiques,  et  que  d'autres  métaux 
présentent  les  mêmes  propriétés.  Cinq  ans  plus  tard,  M.  Philippe 
Lenard  mit  à  profit  cette  particularité  pour  faire  jaillir  les  rayons 
cathodiques  hors  de  l'ampoule  de  Crookes.  Celte  dernière  fut  percée 
d'une  petite  fenêtre  fermée  par  une  lame  d'aluminium.  Les  radia- 
tions n'étaient  ainsi  plus  arrêtées  par  les  parois  de  verre  et  fran- 
chissaient facilement  la  feuille  métallique.  Les  rayons  invisibles 
filtrés  de  la  sorte  à  travers  une  vitre  opaque  avaient  la  propriété 
d'impressionner  la  plaque  photographique  et  de  décharger  à  dis- 
tance les  corps  électrisés.  Projetés  sur  un  écran  enduit  d'une  subs- 
tance fluorescente,  telle  que  le  sulfure  de  zinc  ou  le  platino-cya- 
nure  de  baryum,  ils  le  rendaient  immédiatement  lumineux. 

Cet  historique  succinct  suffit  pour  montrer  que  les  principales 
propriétés  des  rayons  cathodiques  étaient  connues  plusieurs  années 
avant  que  le  D''  Flôntgen,  professeur  à  Wurzbourg,  se  fût  occupé 


484  TRAITE   GÉNÉRAL   DE  PHaTOGRAPHlE 

de  eétte  question.  C'est  è  lui  cependant  qu'est  généralement  attri- 
buée l'invention  de  la  radiographie.  Le  mérite  du  physicien  bava- 
rois fut  seulement  d^  mettre  en  évidence,  grâce  à  un  dispositif 
habilement  combiné,  tout  le  parti  qu'il  était  possible  de  tirer  d'un 
phénomène  considéré  jusque-là  comm«  foi?t  curieux,  mais  sans 
portée  pratique. 

Vers  la  fin  de  l'année  i89o,  Rôntgcn,  ayant  excité  la  décharge 
électrique  dans  un  tube  de  Crookes  enfermé  à  l'intérieur  d'une  boite 
de  carton  placée  elle^même=au  fond  d'un  laboratoire  obscur,  remar- 
qua qu'une  plaque  fluorescente,  laissée  par  hasard  à  proximité, 
s'illuminait.  Il  reconnut  que,  quoique  invisibles,  les  rayons  catho- 
diques pouvaient  traverser  le  verre  de  l'ampoule,  sans  qu'il  fût 
nécessaire  d'avoir  recours  a  un  diaphragme  d'aluminium,  et  qu'ils 
franchissaient  aussi  le  carton.  Il  eut  alors  l'idée  de  faire  quelques 
expériences  photographiques  à  l'aide  de  ces  radiations,  auxquelles 
il  donna  le  nom  de  rayons  X,  en  raison  de  leur  nature  mystérieuse, 
empruntant  ainsi  au  langage  algébrique  le  signe  qui  sert  à  dési- 
gner l'inconnu. 

L'une  de  ces  expériences  démontra  à  Rôntgen  que  les  os  de  la 
main  sont  à  peu  près  complètement  opaques  aux  rayons  X,  tandis 
que  les  chairs,  les  muscles,  les  tendons,  les  nerfs  et  les  artères  se 
laissent  facilement  traverser.  On  put  ainsi  obtenir,  pour  la  pre- 
mière fois,  la  photographie  du  squelette  d'un  individu  vivant. 

Les  ra3^ons  X  ne  se  réfractent  pas,  en  traversant  un  prisme  ou 
une  lentille.  Traversant  un  grand  nombre  de  corps  que  nous  appe- 
lons opaques,  parce  que  nos  yeux  ne  sont  pas  organisés  pour  voir 
à  travers  leurs  molécules,  comme  le  bois  ou  le  carton,  les  rayons  X 
sont  arrêtés  par  des  substances  qui  sont  transparentes  pour  notre 
nerf  optique.  Le  cristal  est  dans  ce  dernier  cas,  et  c'est  pourquoi 
la  photographie  par  les  rayons  X,  o\i  radiographie,  s'obtient  par 
simple  projection  de  silhouettes, -et  non  par  réfraction  à  travers 
un  objectif. 

Matériel  radiographique.  —  Les  organes  nécessaires  à  l'exécu- 
tion des  radiographies  sont  :  la  source  d'énergie  électrique,  le  tube 
dans  lequel  les  rayons  X  prennent  naissance,  et  le  châssis  conte- 
nant la  plaque  sensible. 

Générateur  d'électricité.  —  La  tension  électrique  qui  correspond 


LA   RADIOGRAPHIE  485 

à  une  longueur  d'étincelle  de  5  à  30  centimètres,  à  l'air  libre,  est 
la  mieux  appropriée  aux  opérations  radiographiques.  Néanmoins,  il 
est  préférable  de  choisir  un  générateur  d'énergie  électrique  capable 
de  fournir  des  étincelles  de  60  centimètres,  parce  qu'un  appareil 


Fig.  181.  —  Machine  de  Wimshurst. 

puissant  travaille  plus  sûrement  et  pins  régulièrement  qu'un  appa- 
reil poussé  h  son  maximum  de  rendement. 

Les  machines  statiques,  notamment  celles  de  Wimshurst  (fig.  181) 
et  de  Topler,  conviennent  très  bien  à  la  radiographie.  Leur  cons- 
truction a  fait  l'objet,  dans  ces  dernières  années,  de  divers  perfec- 


486 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 


tionnements  qui  assurent  au  flux  de  rayons  X  une  constance  et  une 
fixité  remarquables.  Malheureusement,  elles  craignent  la  poussière 
et  l'humidité,  qui  diminuent  l'isolement  et  arrêtent  parfois  la  pro- 
duction d'énergie  au  moment  le  plus  inopportun.  Aussi  la  machine 
statique  reste-t-elle  encore,  malgré  l'avanlage  de  sa  simplicité,  l'ou- 
til des  radiographes  qui  n'ont  pas  à  leur  portée  le  courant  électri- 
que fourni  à  bon  compte  par  les  usines. 

Dans  la  plupart  des  cas,  la  source  d'énergie  appliquée  à  la  ra- 
diographie est  la   machine  d'induction  ou  bobine  de  Ruhmkorfî 


Flg.  182.  —  Bobine  de  Ruhmkorff 


(fîg.  182),  qui  transforme  un  courant  à  basse  tension  en  un  courant 
à  haute  tension.  Le  courant  inducteur  ou  primaire  parcourt  un  fîl 
de  cuivre  gros  et  court  enroulé  autour  du  noyau  de  la  bobine.  Ce 
circuit  est  entouré  d'un  autre  enroulement,  formé  de  fil  très  lin  et 
très  long,  dans  lequel  prennent  naissance  les  courants  induits  ou 
secondaires  à  haute  tension.  Comme  chaque  courant  induit  ne  dure 
qu'un  instant,  il  est  indispensable  que  le  courant  inducteur  soit 
périodiquement  interrompu. 

Les  interrupteurs  mécaniques  des  petites  bobines  fonctionnent  de 
la  même  manière  que  le  trembleur  de*  sonneries  électriques.  Cette 


LA  RADIOGRAPHIE  48T 

combinaison  n'est  plus  suffisante  lorsqu'on  utilise  des  courants 
intenses,  parce  que  l'étincelle  de  rupture  qui  jaillit  entre  les  pièces 
mobiles  de  l'interrupteur  les  mat  rapidement  hors  d'usage  et  offre 
d'ailleurs  l'inconvénient  de  prolonger  la  durée  du  courant  pri- 
maire. Pour  obtenir  un  bon  rendement,  il  faut  une  interruptioa 

T 


Fig-,  183.  —  Interrupteur  à  moteur. 

très  brusque.  L'interrupteur  Ducretet  représenté  fig.  183  est  cons- 
titué par  une  tige  t  plongeant  dans  un  godet  HG  contenant  uno 
couche  de  mercure  recouverte  de  pétrole.  Un  moteur  électrique  M 
imprime  à  la  tige  t,  par  l'intermédiaire  de  la  bielle  B,  un  mouve- 
ment alternatif  vertical  très  rapide.  Le  C(jurant  primaire  est  amené 
à  la  tige  mobile  par  une  bande  métallique  souple  L  et  passe  dans 
la  masse  de  mercure.  Quand  la  tige  t  est  soulevée  hors  du  mercure, 
le  courant  est  brusquement  interrompu,  pour  passer  de  nouveau 
quand  le  contact  est  rétabU. 


488 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


On  emploie  aussi,  depuis  quelques  années,  des  interrupteurs  à  jet 
de  mercure  par  force  centrifuge.  Un  moteur  électrique  M  (fig.  184) 
actionne  une  petite  turbine  T  qui  projette  un  filet  de  mercure  A 
établissant  dans  sa  rotation  des  contacts  successifs  sur  des  lames 


a 


F,  JltrCRETET  &  Œ.ROGFRâ.  PABIS, 


HfBHKr 


Fig.  184.  —  Interrupteur  à  jet  de  mercure; 


métalliques  /.  Cette  combinaison  supprime  l'emploi  d'un  liquide 
isolant,  tel  que  l'alcool  ou  le  pétrole,  qui  forme  à  la  longue  avec 
le  mercure  une  sorte  d'émulsion  pâteuse. 

Enfin,  on  utilise,  surtout  avec  les  courants  très  intenses,  l'inter- 
rupteur électrolytique  de  Wehnelt.  La  cuve  R  (fig.  185)  contient, 
de  l'eau  acidulée.  La  borne  +  reliée  au  pôle  positif  du  générateur 
d'énergie  électrique  communique  avec  une  vis  B  qui  se  termine, 
à  l'intérieur  de  la  cuve,  par  une  pointe  de  platine  Ft.  Le  pôle  néga- 
tif est  relié  au  liquide  par  la  borne  —  et  la  lame  de  plomb  E.  Le 
passage  du  courant  a  pour  effet  de  déterminer  sur  la  pointe  de  pla- 
tine une  chaleur  intense  qui  vaporise  immédiatement  la  couche; 
liquide  qui  l'entoure.  Cette  gaine  de  vapeur  interrompt  aussitôt  le 
courant.  La  cause  de  réchauffement  cessant,  la  vapeur  se  condense, 


LA   BAD 10 GRAPHIE 


48!) 


le  couraTit  passe  de  nouveau,  et  le  phénomène  de  caléfaction  recom- 
mence. Les  interruptions  produites  dans  ces  conditions  sont  extrê- 
mement brusques  et  se  succèdent  à  raison  de  1.500  par  seconde 
environ.  L'interrupteur  électroly- 
tique  convient  principalement  aux 
grandes  bobines  ;  il  est  d'un  emploi 
plus  facile,  plus  commode  et  plus 
sûr  que  l'interrupteur  au  mercure. 
Tube.  —  L'appareil  dans  lequel 
les  rayons  X  prennent  naissance 
est  constitué  en  principe  par  une 
simple  ampoule  de  verre  d'où 
l'air  a  été  chassé  et  dans  laquelle 
pénètrent  deux  tiges  métalliques, 
servant  d'anode  et  de  cathode. 
En  réalité,  les  tubes  actuellement 
employés  sont  un  peu  plus  compli- 
qués. D'abord,  l'anode  est  géné- 
ralement double,  c'est-à-dire  com- 
posée de  deux  tiges  distinctes, 
que  l'on  relie  ensemble  quand  il 
s'agit  de  diminuer  la  résistance 

intérieure,  suivant  le  degré  de  vide  ^-^^  185.  -  Interrupteur  électrolytique. 
et   l'effet   à   obtenir.  La  plupart 

des  tubes  applicables  à  la  radiographie  sont  donc  bianodiques  (fîg. 
186).  Ils  sont,  en  outre,  munis  d'un  régulateur  du  vide.  Le  degré 
de  vide  réalisé  dans  le  tube  est,  en  effet,  d'une  très  grande  impor- 
tance. A  mesure  que  la  raréfaction  augmente,  le  passage  de  l'élec- 
tricité est  de  plus  en  plus  difficile,  et  il  faut  augmenter  la  tension  du 
courant  induit  pour  vaincre  la  résistance  intérieure.  Quand  le  vide 
est  poussé  très  loin,  on  dit  que  le  tube  est  dur  :  il  produit  alors  des 
rayons  d'une  force  de  pénétration  extrême,  mais  il  exige  une  ma- 
chine donnant  des  étincelles  plus  longues.  Les  tubes  très  durs  sont 
peu  employés  en  radiographie,  bien  qu'ils  permettent  des  poses 
très  courtes,  parce  que  les  rayons  principaux  qu'ils  produisent 
s'accompagnent  de  rayons  secondaires  d'où  résulte  la  formation 
"d'un  voile  dont  on  n'est  pas  encore  parvenu  à  se  débarrasser. 


490 


TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 


Les  tubes  doux  ou  mous  sont  ceux  où  le  vide  est  très  imparfait. 
Ils  offrent  peu  de  résistance  au  passage  de  l'électricité  et  n'exigent 
qu'une  tension  relativement  peu  élevée,  mais  n'ont  qu'un  faible 
pouvoir  de  pénétration.  Il  est  à  remarquer  que  le  degré  du  vide 
augmente  spontanément  par  le  seul  fonctionnement  du  tube  :  la 
décharge  électrique  y  détermine  l'absorption  des  molécules  gazeu- 
ses qu'il  contient  par  les  parois  de  verre  et  les  pièces  métalliques 
intérieures,  si  bien  qu'à  la  longue  un  tube  primitivement  mou  finit 
par  devenir  dur. 

Divers  moyens  ont  été  proposés  pour  amener  les  tubes  au  degré 
de  vide  convenable.  Quand  le  tube  est  bianodique,  on  augmente  la 
résistance  en  n'utilisant  qu'une  seule  anode;  on  la  diminue,  lorsque 
le  tube  est  devenu  trop  dur,  en  reliant  ensemble  les  deux  anodes. 
On  peut  régénérer  un  tube  devenu  trop  résistant  en  le  passant 
légèrement  sur  la  flamme  d'une  lampe  à  alcool.  Sous  l'influence 
de  la  chaleur,  une  partie  des  gaz  absorbés  par  occlusion  se  dégage 
et  diminue  le  vide.  Si,  au  contraire,  le  vide  est  insuffisant,  il  suffit 
d'inverser  pendant  quelques  instants  le  sens  du  courant  :  la  cathode 
sert  d'anode,  et  réciproquement,  et  l'excès  de  gaz  est  réabsorbé. 

Toutefois,  ces  modes  de 
régénération  ne  don- 
nent de  bons  résultats 
qu'un  certain  nombre 
de  fois.  Aussi  a-t-il  fallu 
chercher  autre  chose. 

Le  procédé  primiti- 
vement employé  consis- 
tait à  introduire  dans  le 
tube,  pendant  sa  fabri- 
cation, une  matière  ca- 
pable de  laisser  échap- 
per, sous  l'influence  d& 
la  chaleur,  une  très 
petite  quantité  de  gaz 
qui  compense  l'excès 
de  raréfaction  produit  par  les  décharges  électriques.  Tel  est,  par 
exemple,  le  tube  de  Zehnd.er,  auquel  est  soudée  une  ampoule 


Fig^.  186. 


Tube  à  régulateur  de  vide 
par  la  potasse. 


LA   RADIOGRAPHIE 


491 


contenant  du  charbon  absorbant,   qu'il   suffit  de  chauffer   pour 
libérer  une  petite  quantité  de  gaz. 

Croolies  a  utilisé  la  potasse  caustique  pour  la  régénérat-ion  des 
lubes.  Dans  le  modèle  représenté  fjg.  186,  la  potasse  est  placée  au 
fond  d'un  petit  réservoir  R.  Quand  le  tube  e^ttrop  vidé,  on  chauffe 
lentement  ce  réservoir  sur  une  lampe  à  alcool.  Lorsque,  au  con- 
traire, le  vide  est  insuffisant,  on  l'augmente  en  inversant  le  sens 
du  courant  pendant  quelques  instants. 

M.  Ch.-Ed.  Guillaume  modifie  la  raréfaction  au  moyen  d'une 
anode  supplémentaire  terminée  par  une  lame  de  palladium  :  en  la 
chauffant  ou  en  la  prenant  pour  anode,  on  restitue  ou  on  enlève 
à  l'atmosphère  intérieure  du  tube  une  minime  quantité  de  gaz,  de 
manière  à  obtenir  le  vide  le  plus  favorable. 

L' osmo -régulateur  de  M.  Viîlard  est  basé  sur  la  propriété  que 
possède  l'hydrogène  de  traverser  une  paroi  de  platine  chauffée  au 
rouge.  Quand  le  tube  est  trop  résistant,  on  chauffe  avec  un  bec  de 
Bunsen  le  tube  de  platine  soudé  à  l'ampoule  :  l'hydrogène  de  la 
flamme  passe  à  travers  le  tube  de  platine  par  osmose,  et  pénètre 
dans  le  tube,  qui  devient  ainsi  moins  résistant. 
Quand,  au  contraire,  le  tube  est  trop  mou  et  pos- 
sède, par  conséquent,  un  excès  de  gaz,  on  coiffe 
le  tube  de  platine  d'un  manchon  de  même  métal, 
de  plus  grand  diamètre,  qui  l'isole  du  contact  de 
la  flamme  tout  en  laissant  circuler  l'air  :  par  os- 
mose encore,  les  gaz  sortent  du  tube,  et  le  vide 
convenable  se  rétablit. 

Pour  les  grandes  intensités,  l'interrupteur  de 
Wehneltest  généralement  relié  à  un  tube  biano- 
dique  avec  anode  à  large  surface   refroidie  par 
l'eau.  On  verse  dans  le  récipient  B  ffig.  187)  de 
l'eau  jusqu'aux  deux  tiers  de  sa  hauteur.  Pendant 
le  fonctionnement  du  tube,  l'eau  est  portée  à  Té-  ci.  Ducretet, 
bullilion  ;  la  vapeur  se  condense  en  B'  et  retombe  Fig.  187.  —  Anode 
en  B.  L'anode  M',  en  contact  direct  avec  l'eau,  à  refroidissement, 
reste  à  100°,  et  cette  température   relativement 
basse  permet  de  soumettre  le  tube  à  de  fortes  décharges.  Signa- 
lons, enfin,  le  tube  double  du  D'  Guilloz  (fig.  188)  avec  deux  ca- 


.c^ 


492  TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

thodes  et  deux  anlicathodes  en  chrome  plaliaé,  pour  la  radiosté- 
réoscopie. 


Cl.  Ducretet 


Fig.  188.  —  Tube  radiostéréoscopique. 


Dans  les  tubes  précédents,  le  passage  de  la  décharge  s'opère 
par  l'intermédiaire  des  gaz  résiduels,  dont  la  conductibilité  varie 
suivant  leur  degré  de  raréfaction.  Le  tube  Coolidge  est  fondé  sur 
un  principe  tout  différent.  Le  vide  y  est  poussé  si  loin  que,  même 
à  des  tensions  supérieures  à  100.000  volts,  l'électricité  ne  pourrait 
pas  franchir  la  distance  qui  sépare  les  électrodes.  On  supplée  à 
l'absence  de  résidu  gazeux  par  une  émission  à'éiectrons^  corpus- 
cules qui  se  dégagent  de  la  cathode  quand  celle-ci  est  portée  à 
l'incandescence.  A  cet  effet,  la  cathode  est  formée  d'un  fil  de  métal 
peu  fusible,  relié  à  une  source  d'électricité  à  basse  tension,  par 
exemple  un  petit  accumulateur.  Le  pouvoir  de  pénétration  des 
rayons  X  ainsi  émis  ne  dépend  que  du  voltage  aux  bornes  de  l'am- 
poule; il  ne  varie  donc  pas,  tant  que  la  tension  reste  constante.  La 
figure  189  représente  un  tube  Guolidge  construit  en  France  par  les 


Fig.  189.  —  Tube  Coolidge. 

Etablissements  Gaiffe,  Gallot  et  Pilon.  La  cathode  est  creuse,  et 
dans  sa  cavité  se  loge  une  spirale  en  fil  de  tungstène,  soutenue 
par  deux  tiges  de  molybdène.  L'anode,   faite  d'un  gros  bloc  de 


LA    RADIOGRAPHIE  493 

tungstène,  se  prolonge  à  l'extérieur  du  tube  par  un  radiateur  à. 
ailettes,  dont  la  large  surface  assure  la  dissipation  de  la  chaleur 
produite  par  le  bombardement  cathodique. 

Ce  tube  peut  être  alimenté  par  les  courants  induits  de  la 
bobine  de  Ruhmkorff,  et  aussi  par  les  courants  alternatifs  que  dis- 
tribuent les  stations  centrales,  avec  un  transformateur  qui  en  élève 
la  tension.  Les  autres  tubes  laissant  passer  le  courant  dans  les  deux 
sens  exigent  l'emploi  de  redresseurs  (contacts  tournants)  ou  de 
soupapes  spéciales  supprimant  Tune  des  alternances.  Quant  au  tube 
Coolidge,  il  ne  laisse  passer  le  courant  que  dans  le  sens  voulu.  Un 
autre  avantage  de  ce  tube  est  son  extrême  souplesse  et  la  facilité 
avec  laquelle  on  en  obtient  à  volonté  des  rayons  X  plus  ou  moins 
pénétrants.  En  réduisant  le  voltage,  on  exécute  de  bonnes  radiogra- 
phies des  tissus  mous;  en  l'élevant,  au  contraire,  on  arrive  à  ana- 
lyser la  structure  des  corps  les  plus  opaques  (radiométallographie). 

Châssis  porte-plaque. — On  peut  employer  en  radiographie  un 
châssis  ordinaire,  dans  lequel  la  plaque  sensible  est  enfermée, 
comme  d'habitude  gélatine  en  dessus,  c'est-à-dire  tournée  vers 
le  volet.  On  y  ajoute  généralement  une  feuille  de  plomb,  en  con- 
tact avec  le  verre,  et  un  écran  fluorescent  destiné  à  abréger  la  pose, 
comme  on  le  verra  plus  loin.  Mais  l'emploi  du  châssis  n'est  pas 
indispensable,  et  il  suffît  d'enfermer  la  plaque  dans  une  feuille-  de 
papier  noir;  cette  enveloppe,  imperméable  à  la  lumière,  empêche 
l'émulsion  de  se  voiler,  et  se  laisse  facilement  traverser  par  les^ 
rayons  X.  Pour  éviter  que  ces  rayons  occasionnent  un  voilé  acci-- 
denteiipendant  l&  régtè^:  àfessapparBiIs^,  on  n'a^  qu'à;  protéger  la 
plaque^  àr  l'aide  d'une  feuille  dëemétal  ou  même  d'un  carton  épais. 
La-soçEpression  du  châssis  s'àm|>ose,  d'ailleurs,  da«s  certaines  opé- 
rations; :  ainsi,  les  dentistès>  ont  quelquefois  à  radiographier  une 
mâchoire,  afin  de  Yénïï&r  l'existence  d'une-  dent  encore  invisible 
ou  de  préciser  la  position  d'une  racine.  Dans  ces  cas,  on  se  borne  à. 
envelopper  de  papier  noir  une  très  petite  plaque  sensible,  que  Ton 
introduit  dans  la  bouche  à  étudier . 

Procédés  radiographiques.  —  On  peut  utiliser,  en  radiographie, 
des  plaques  ordinaires,  et  d'ailleurs  on  n'en  employait  pas  d'autres 
à  l'époque  où  les  rayons  X  venaient  à  peine  d'être  découverts.  Mais 
le  temps  de  pose  qu'elles  exigent  est  généralement  trop  long,  et  il 

28 


494 


TRAITÉ   GÉNÉRAL   DE   PHOfOGRAPHIE 


est  presque  toujours  plus  avantageux  d'avoir  recours  aux  émul- 
sions  spécialement  réservées  à  cette  application.  Ainsi,  les  plaques 


^^^ii;:ili;i^M^liiiii 


Fiy.  IQO.  —  Uisposilit.  radiographique 
radiograpbiqnes  Lumière  sont  remarquables  par  leur  sensibilité  et 
par  la  gradation  de  teintes  qu'elles  permettent  d'obtenir.  La  cou- 


LA  RADIOGRAPHIE  495 

che  sensible  en  est  très  épaisse.  La  plupart  des  fabricants  de  pla- 
ques radiographiques  les  livrent  dans  des  boîtes  où  elles  sont  em- 
paquetées séparément,  de  manière  à  en  faciliter  l'emploi,  au  besoin 
sans  châssis. 

La  plaque  est  disposée,  gélatine  en  avant,  aussi  près  que  possible 
de  l'objet  à  radiographier,  placé  entre  la  surface  sensi.l)le  et  le 
tube,  de  telle  sorte  que  les  rayons  X  en  projettent  la  silhouette 
sur  Témulsion.  Derrière  la  plaque,  en  contact  avec  le  verre,  on  met 
assez  souvent  une  feuille  de  plomb,  destinée  à  arrêter  les  rayons  X 
de  retour,  comme  l'a  indiqué  M.  A.  Buguet  en  1897.  L'emploi  de 
cet  écran  n'est  pas  indispensable  pour  1  is  poses  courtes  avec  des 
tubes  peu  pénétrants,  mais  il  est  nécessaire  dans  les  poses  avec 
tubes  à  grande  pénétration. 

Pour  utiliser  complètement 
l'activité  photochimique  des 
rayons  durs  et  semi-durs,  Heinz 
Bauer  conseille  d'ajouter  aux 
émulsions  destinées  à  la  radio- 
graphie du  verre  au  plomb  très 
finement  pulvérisé  ou  toute  autre 
substance  absorbant  les  rayons 

X,  ou  bien  encore  d'étendre  l'é-    ^^^"*^''^*«*-        ♦ 

,   .  .    ,         ,  ,  Fig.  191.  —  Radiographie  d  une  mam. 

mulsion  sur  des  plaques  de  verre 

au  plomb.  La  maison  Schleussner,  de  son  côté,  coule  ses  émulsions 
radiographiques  sur  verre  blanc  opale  spécial  :  ces  plaques  donnent 
des  images  très  claires  et  sont  très  sensibles. 

La  durée  du  temps  de  pose  dépend  non  seulement  de  la  sensibi- 
lité de  l'émulsion,  mais  aussi  du  degré  d'opacité  du  sujet  et  de  la 
force  de  pénétration  des  rayons  X.  Elle  est  généralement  comprise 
entre  quelques  secondes  et  plusieurs  minutes.  On  peut  toutefois  la 
réduire  à  une  fraction  de  seconde,  en  faisant  usage  d'un  écrati  i^en- 
forçateur.  Dès  1895,  Rôntgen  avait  observé  que  la  lame  de  verre  et 
la  gélatine  des  plaques  sensibles  devenaient  fluorescentes  sous 
Taction  des  rayons  X.  Ce  phénomène  a  été  utilisé  pour  réduire  les 
temps  de  pose,  en  appliquant  contre  l'émulsion  un  écran  fluores- 
cent aussi  plan  que  possible.  Le  D^  VanHeurk  a  fait  usage  d'écrans 
aux  sels  d'uranyle  et  de  plaques  en  verre  chargé  d'oxyde   d'ura- 


.496  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

.nium.  Les  D""^  Winkelmann  et  R.  Straubel  ont  employé  le  spath 
.fluor.  M.  Ducretet  a  indiqué  les  lames  en  feldspath  préparées  par 
MM.  F.  Bapterosses  et  le  verre  connu  sous  le  nom  d' agatine.  hes 
.écrans  au   tungstate  de  calcium  à  grains  très  fins  paraissent  les 
iplus  favorables.  Il  convient  d'ajouter  que  si  rinterposition  de  ces 
.écrans  réduit  considérablement  la  durée  de  la  pose,  elle  présente 
Tiriconvénient  d'altérer  la  netteté  de  l'image.  On  le  remarque  sur- 
tout quand  on  radiographie  des  os,  qui  donnent  habituellement 
beaucoup  de  détails  sur  leur  structure  intérieure  :  un  calcanéum, 
par  exemple,  est  beaucoup  moins  net  avec  écran  que  sans  écran. 
Cependant,  pour  les  régions  épaisses,  qui  offrent  toujours  des  radio- 
graphies un  peu  floues,  la  présence  de  l'écran  ne  rend  pas  l'épreuve 
moins  nette,  tout  en  permettant  de  poser  10  fois  moins. 

MM.  Hoffmann  et  Hossier,  de  Leipzig,  en  collaboration  avec  le 
ffàbricant  Otto  Gehler,  ont  inventé  un  nouvel  écran  renforçateur 
qui,  soijs  ;.L'aetion  des  rayons  X,  émet  une  lueur  bleue  violacée 
inripressioniiant  très  rapidement  le  bromure  d'argent.  Il  faut  épous- 
seter^soigneusement  la  surface  fluorescente  ainsi  que"  l'émulsion, 
avant  de  les  mettre  en  coiita-ct.  La  plaque  sensible  doit  être  expo- 
sée verre  en  avant  :  les  rayons  X  traversent  donc  successivement  le 
sujet  radiographié,  la  plaque  de  verre,  l'émulsion  et  enfm  l'écran 
renforçateur. 

Pour  développer  les  plaques  radiographiques,  le  D^  Hugo  Kulh 
préconise  l'emploi  du  révélateur  au  glycin  préparé  suivant  la  for- 
mule de  Pizzighelli  : 

A.  Eau  distillée 1.000  ce. 

Glycin , 30  gr. 

Sulfite  de  soude 100 

Carbonate  de  soude 20  

B.  Eau  distillée 1 .000  ce. 

Carbonate  de  potasse 100  gr. 

Au  moment  d'opérer,  on  mélange  parties  égales  des  solutions 
A  et  B, 

La  couche  sensible  étant  très  épaisse,  le  développement  doit  être 
poussé  jusqu'à  opacité  presque  complète  du  cliché.  Il  faut  ensuite 
laver  abondamment.  Le  fixage  est  effectué  dans  une  solution  con- 
centrée d'hyposulfite  de  soude  (300  gr.  pour  1  htre  d'eau)  et  doit 


498  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

être   suivi  de   lavages  encore  plus  longs  que  dans  les  procédés 
ordinaires,  en  raison  de  l'épaisseur  de  la  couche. 

On  active  ensuite  le  séchage,  en  trempant  la  plaque  dans  l'alcool 
pendant  5  minutes. 

Le  tirage  des  épreuves  radiographiques  est  effectué  suivant  les 
procédés  positifs  ordinaires,  ■«urrpapier  au  citrate  ou  sur  papier  au 
gélatinobromure,  .au  encore  esut  plaques  diapositives.  Si  l'épreuve 
est  exécutée  sur;papier,  il  y  a  lieu  de  faire  une  distinction  sur  le 
sens  de  la  reproduction.  Quand  le  cliché  a  été  exécuté  suivant  la 
méthode  indiquée  ;pour  remploi  de  l'écran  Hoffmann  et  Rossler, 
c'est-à-dire  verre  en  avant  (vers  le  sujet) -et  gélatine  en  arrière, 
l'épreuve  tirée  par  contact  offre  une  reproduction  exacte  du 
sujet.  Mais  quand  la  plaque  est  exposée  gélatine  en  avant,  alors 
l'image  est  inversée,  comme  si  le  sujet  était  observé  dans  un  miroir. 
Si  l'on  veut  avoir  une  reproduction  redressée ,  il  est  facile  d'y 
remédier  en  exécutant  un  contretype  du  chché  radiographique. 

La  radiographie  ne  donne,  en  principe,  que  ,des  silhouettes,  des 
projections  d'ombres  sur  lesquelles  on  ne  distingue  pas  la  succes- 
sion des  plans  différents  et  qui  ne  renseignent  par  conséquent  que 
très  imparfaitement  sur  la  forme  exacte  du  sujet,  sur  sa  structure 
intérieure  et  sur  la  position  précise  qu'occupe  tel  ou  tel  détail.  On 
arrive  pourtant  à  mettre  en  évidence  le  reUef  des  objets  radiogra- 
phiés et  à  localiser  l'objet  que  l'on  veut  rechercher,  en  appliquant 
la  méthode  stéréoscopique.  A  cet  effet,  on  peut  radiographier  le 
sujet  à  l'aide  d'un  tube  double  (fig.  189)  ou  exécuter  successivement 
deux  clichés  en  se  servant  d'un  seul  tube  placé  dans  des  positions 
différentes  pendant  les  deux  poses.  Les  deux  épreuves  constituant 
le  couple  .stéréoscopique  sont  observées,  soit  dans  un  stéréoscope 
ordinaire  si  elles  sont  d'un  format  suffisamment  réduit,  soit  dans 
le  stéréoscope  à  miroirs  du  D'  Krouchkoll  (fig.  193),  qui  permet 
d'examiner  les  radiographies  sur  verre  ou  sur  papier  de  toutes 
dimensions,  jusqu'au  format  40x50.  Les  deux  miroirs  plans  en 
verre  argenté  M,  M'  sont  disposés  à  90°  l'un  de  l'autre  et  mobiles 
dans  le  sens  vertical.  Leur  ensemble  est  commandé  par  la  vis  de 
rappel  Y  qui  les  fait  mouvoir  perpendiculairement  à  la  règle  RR'. 
Les  porte-plaques  P,  F  portent  des  tiges  mobiles  t,  t',  a,  a'  entre  les- 
quelles sont  maintenues  les  plaques  ou  épreuves  stéréoscopiques 


LA   RADIOGRAPHIE 


499 


En  déplaçant  P  et  P'  sur  la  règle  RR',  on  arrive  rapidement  à  obte- 
nir la  superposition  des  deux  images,  lorsqu'on  regarde  avec  un 
œil  dans  chaque  miroir.  Deux  e'crans  blancs  mobiles  E,  E'  servent 
à  refléLer  la  lumière  sur  les  images  N,  N'. 

Cette  combinaison  met  en  pleine  évidence  la  structure  réelle  des 


Fig.  193.  —  Stéréoscope  à  miroirs. 

corps  opaques.  On  aperçoit  ainsi,  dans  leurs  véritables  dispositions, 
les  organes  cachés  sous  les  tissus  les.  plus  épais  des  êtres  vivants, 
que  Ton  aurait  crus  à  jamais  inaccessibles  à  l'observation  directe 
sans  recourir  à  la  dissection.  La  science  moderne,  par  le  concours 
de  l'électricilé,  de  la  photographie  et  du  stéréoscope,  a  singulière- 
ment étendu  le  champ  de  nos  investigations,  et  nous  lui  devons  le 
don  de  voir  l'invisible. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


J.-L.  Breuoi^,  Rayons  cathodiques  et  rayons  X,  Paris  (L.  Geisler). 
G.  Brunel,  Manuel  pratique  de  radiographie,  Paris  (B.  Tignol). 
E.  CouSTET,  l'Electricité j  ses  lois  et  ses  applications  mises  à  la  portée  de  tous, 
Paris  (J.  Tallandier),  1907  (t.  1er). 


500  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

J.-M.  Eder  et  E.  Valenta,  Versuche  ûber  Photographie  mittelst  der  Rontgen- 

chen  Strahlen,  Paris  (Gauthier- Villars),  1896. 
G.-E.  Guillaume,  les  Rayons  X  et  la  Photographie  à  travers  les  corps  opaques, 

2c  édition,  Paris  (Gauthier- Villars),  1897. 
A.  Hébert,  la  Technique  des  rayons  X,  Paris  (Masson  et  Cie),  1897. 
A.  LoNDE,  Traité  pratique  de  radiographie  et  de  radioscopie,  Paris  (Gauthier- 

Villars),  1899. 
f  A.  LoNDE,  La  Radiographie  et  ses  diverses  applications,  Paris  (Gauthier-Villars), 

1899. 
A.  Parser-Muhlbacher,    Rbntgenphotographie,    2e   édition,  Berlin   (Gustav 

Schniidt),  1908. 
E.-N.  Santini,  la  Photographie  à  travers  les  corps  opaques,  4^  édition,  Paris 

(Gh.Mendel). 
M.  TisSANDiER,  Pratique  expérimentale  radiographique,  Paris  (Ch.  Mendel). 
E.  CouSTET,  les  Rayons  X  et  leurs  applications,  Paris  (Ch.  Delagrave),  1914, 


LA  PHOTOGRAPHIE  ASTRONOMIQUE  561 


CHAPITRE   XXVII 

LA    PHOTOGRAPHIE    AISTRONOMIQUE 

Généralités.  —  Le  rapport  que  François  Arago  lut  à  la  Chambre 
des  députés,  à  l'époque  où  l'invention  de  Niepce  et  de  Dagueire 
allait  devenir  l'objet  d'une  récompense  nationale,  faisait  déjà  pré- 
voir le  progrès  qui  allait  en  résulter  dans  l'étude  des  astres  :  «  La 
préparation  sur  laquelle  M.  Daguerre  opère  est  un  réactif  beaucoup 
plus  sensible  à  l'action  de  la  lumière  que  tous  ceux  dont  on  s'était 
servi  jusqu'ici.  Jamais  les  rayons  de  la  lune,  nous  ne  disons  pas  à 
l'état  naturel,  mais  condensés  au  foyer  de  la  plus  grande  lentille, 
au  foyer  du  plus  large  miroir  réfléchissant,  n'avaient  produit  d'ef- 
fet physique  perceptible.  Les  lames  de  plaqué  préparées  par 
M.  Daguerre  blanchissent  au  contraire  à  tel  point  sous  l'action  de 
ces  mêmes  rayons  et  des  opérations  qui  lui  succèdent,  qu'il  est 
permis  d'espérer  qu'on  pourra  faire  des  photographies  de  notre 
satellite.  C'est  dire  qu'en  quelques  minutes  on  exécutera  un  des 
travaux  les  plus  longs,  les  plus  minutieux,  les  plus  délicats  de 
l'astronomie.  » 

Ces  prévisions  sont  aujourd'hui  amplement  réalisées;  mais,  en 
1839,  l'enthousiasme  du  public  et  du  monde  savant  pour  la  nou- 
velle découverte  pouvait  seul  les  justifier.  La  lenteur  des  premiers 
procédés  s'aggravait,  en  effet,  de  l'impossibilité  de  différer  le  déve- 
loppement de  l'image  latente,  et  la  reproduction  de  la  plupart  des 
astres  était  à  peu  près  impossible  à  réaliser  d'une  manière  utile  à 
la  science. 

Il  est  vrai  que,  quelques  mois  à  peine  après  la  découverte  de  la 
photographie,  J.-W,  Draper,  en  Amérique,  réussissait  à  prendre 
un  daguerréotype  de  la  lune  ;  mais  ce  n'était  là  qu'une  image  bien 
petite  et  fort  peu  détaillée,  sans  aucune  valeur  documentaire.  Ce 
n'est  qu'en  1849  que  W.-C.  Bond,   directeur  d'Harvard  Collège, 


502  TRAITÉ   GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

obtenait  la  première  reproduction  daguerrienne  de  la  lune  vrai- 
ment satisfaisante  et  digne  de  figurer  à  l'Exposition  de  1851. 

Quant  à  la  photographie  solaire,  elle  remonte  à  l'éclipsé  du 
8  juillet  1842  :  peu  avant  la  disparition  totale  de  l'astre,  Majocchi,  à 
Milan,  exécutait  un  daguerréotype  sur  lequel  se  montrait  nettement 
le  mince  croissant  lumineux.  La  première  photographie  complète 
du  soleil  fut  obtenue,  en  1/60  de  seconde,  le  2  avril  1845,  par 
Fizeau  et  Foucault.  On  peut  en  voir  une  excellente  reproduction 
en  héliogravure  dans  les  Œuvres  complètes  d'Arago. 

Avec  le  collodion,  ces  mêmes  astres  furent  copiés  avec  une 
remarquable  perfection;  on  photographia  aussi  les  plus  brillantes 
étoiles,  et  il  devint  même  possible  de  fixer  quelques-uns  des  prin- 
cipaux détails  des  disques  planétaires,  comme  les  bandes  de  Jupi- 
ter, l'anneau  de  Saturne  et  les  neiges  polaires  de  Mars.  Ces  résul- 
tats, dus  principalement  à  Whipple,  à  Warren  de  la  Rue,  à  Airy,  à 
Grubb,  au  P.  Secchi,  à  Rutherfurd,  ont  été  singulièrement  dépas- 
sés, depuis  la  création  des  plaques  au  gélatin  )bromure.  La  fin  du 
dix-neuvième  siècle  marquera,  dans  l'histoire  de  l'astronomie,  une 
étape  aussi  importante  que  l'application  des  lunettes  et  des  téles- 
copes à  l'étude  du  ciel.  Actuellement,  la  photographie  tend  à  se 
substituer  de  plus  en  plus  aux  observations  oculaires,  et  l'adop- 
tion de  cette  méthode  s'explique  aisément. 

La  plaque  sensible  a,  sur  l'œil  humain,  une  merveilleuse  supé- 
riorité. Ce  que  notre  œil  n'a  pas  pu  distinguer  après  un  instant 
d'attention,  il  ne  le  verra  jamais.  Que  l'on  observe  à  l'œil  nu  ou 
dans  un  télescope,  s'il  s'agit  d'un  objet  trop  éloigné  ou  trop  peu 
lumineux,  on  ne  gagne  rien  à  prolonger  l'observation  :  au  contraire, 
l'œil  se  fatigue  et  perd  de  plus  en  plus  sa  puissance  de  pénétration. 
Il  en  est  tout  autrement  pour  la  plaque  photographique  :  cette 
«  rétine  du  savant  »,  comme  l'a  si  justement  surnommée  Janssen, 
a  le  don  de  voir  l'invisible,  pourvu  qu'on  lui  en  laisse  le  temps, 
parce  qu'elle  accumule  indéfiniment  l'impression  lumineuse,  de 
telle  sorte  que  les  radiations  les  plus  faibles,  en  s'ajoutant  sans  cesse 
les  unes  aux  autres,  finissent  à  la  longue  par  y  déterminer  une  ré- 
duction suffisante  pour  être  révélée  au  développement. 

Cette  propriété  caractéristique,  si  difi*érenle  de  celle  de  notre 
organe  visuel,  suffirait  amplement  à  justifier  l'adoption  de  la  pho- 


LA   PHOTOGRAPHIE   ASTRONOMIQUE  503 

tographie  dans  les  observatoires.  Mais  la  plaque  sensible  a  d'autres 
titres  encore  à  la  faveur  croissante  dont  elle  jouit  auprès  des  astro- 
nomes :  c'est,  d'abord,  la  rapidité  avec  laquelle  elle  analyse  et  fixe 
les  détails  les  plus  minutieux  et  les  plus  fugitifs;  c'est,  ensuite, 
l'exactilude  et  la  sûreté  de  ses  indications. 

Un  dessin,  quelque  habile  et  consciencieux  qu'en  soit  l'auteur, 
est  toujours  plus  ou  moins  une  œuvre  d'interprétation  et  de  mé- 
moire, surtout  pour  les  détails  difficilement  visibles.  On  a  souvent 
remarqué  que  deux  astronomes  observant  tour  à  tour  le  même 
astre  dans  le  même  instrument  en  donnaient  des  croquis  sensible- 
ment différents.  Et  d'ailleurs,  la  concordance  même  des  dessins 
n'est  pas  une  garantie  de  fidélité,  car  l'observateur  peut  être 
influencé  par  des  jugements  antérieurs.  La  photographie,  au  con- 
traire, échappe  à  toutes  les  influences,  physiologiques  ou  morales, 
qui  peuvent  faire  dévier  la  main  ou  le  jugement  de  l'artiste,  et  ses 
témoignages  restent  toujours  susceptibles  d'être  contrôlés,  comme 
on  le  fait  d'ailleurs  le  plus  possible,  par  la  répétition  des  poses. 

Enfin,  l'étude  des  documents  photographiques  a,  sur  l'observa- 
tion directe,  l'immense  avantage  de  pouvoir  se  faire  à  loisir  et  d'af- 
franchir l'astronome  des  caprices  du  temps.  Désormais,  ce  n'est 
plus  en  plein  air  ou  sous  une  coupole  ouverte,  accroché  au  téles- 
cope, dans  les  positions  les  plus  incommodes,  que  l'explorateur  du 
ciel  se  livre  à  ses  investigations  les  plus  fécondes.  C'est  dans  le 
silence  et  la  tranquillité  de  son  cabinet  de  travail  qu'il  consulte  les 
données  recueillies  par  l'objectif,  et  souvent  des  mois  entiers  d'é- 
tudes et  de  calculs  ne  suffisent  point  à  épuiser  tous  les  renseigne- 
ments condensés  sur  une  seule  plaque. 

A  ces  avantages,  communs  à  toutes  les  applications  de  la  pho- 
tographie astrouonfiique,  il  convient  d'ajouter  quelques  particu- 
larités qui  seront  rapidement  énumérées  dans  les  paragraphes 
suivants,  de  manière  à  donner  une  idée  des  principaux  résultats 
obtenus. 

Photographie  du  soleil.  —  La  vive  luminosité  de  cet  astre  et 
l'extrême  pouvoir  photuchimique  de  ses  radiations  en  ont  de  bonne 
heure  rendu  facile  la  reproduction  fidèle  et  très  détaillée.  Il  n'y  a 
pas  à  se  préoccuper,  dans  celte  application  de  la  méthode  photo- 
graphique,   des    déplacements   occasionnés    par    le    mouvement 


504  TRAITÉ.   GÉNÉRAL   DK   PHOTOGRAPHIE 

diurne  (mouvement  apparent  de  la  voûte  céleste,  résultant  du  mou- 
vement réel  de  la  terre),  car  une  pose  extrêmement  courte  suffît 
pour  créer  un  cliché  parfaitement  fouillé,  même  avec  un  objectif 
de  faible  diamètre,  et  même  en  employant  des  plaques  très  peu 
sensibles.  Du  reste,  pour  avoir  des  images  plus  finement  détaillées, 
on  a  souvent  recours  au  coUodion. 

A  l'observatoire  de  Meudon,  le  soleil  est  photographié  tous  les 
jours,  quand  l'état  du  ciel  le  permet.  L'objectif,  construit  par  Pra^- 
mowski,  n'a  que  i35  millimètres  de  diamètre,  avec  une  longueur 
focale  de  2  mètres.  L'image  qui  se  forme  à  son  foyer,  n'ayant  que 
2  centimètres  de  diamètre,  est  amplifiée  par  une  lentille  qui  pro- 
jette sur  la  plaque  sensible  un  disque  solaire  dont  le  diamètre 
atteint  30  centimètres.  Un  obturateur  rapide  réduit  le  temps  de 
pose  à  1/3000  de  seconde  :  cet  instant  si  bref  suffit  pour  enregis- 
trer toutes  les  taches,  les  facules,  les  lucules  et  les  granulations 
delà  photosphère.  Les  clichés  sont  d'ailleurs  assez  finement  dé- 
taillés pour  supporter  une  nouvelle  amplification.  A  l'Exposition 
universelle  de  1900  figuraient  de  remarquables  agrandissements 
exécutés  à  Meùdon.  Les  plaques  au  coUodion  mesuraient  1"',50  de 
,côté;  c'étaient  d'épaisses  glaces  pesant  chacune  38  à  40  kilos.  La 
cuvette,  pesant  elle-même  193  kilos,  contenait  48  litres  de  bain 
d'argent  pour  la  sensibilisation. 

M.  Steinheil  construit  une  lunette  raccourcie  spécialement  afl'ec^ 
tée  à  la  photographie  solaire.  En  arrière  de  l'objectif  convergent 
est  interposée  une  lentille  achromatique  divergente,  qui  raccourcit 
le  tirage  de  la  chambre  sans  diminuer  les  dimensions  de  l'image. 
Cette  comibinaison  optique  constitue  donc  un  véritable  téléobjectif. 

Le  globe  solaire  est  entouré  de  couches  gazeuses  dont  Tobserva- 
tion  n'était  jadis  possible  que  pendant  les  rares  et  fugitifs  instants 
des  éclipses  totales.  On  apercevait  alors,  autour  du  disque  noir  de 
la  lune,  les  protubérances  roses  de  la  chromosphère,  autour  de 
laquelle  s'étendait  la  couronne,  çà  et  là  prolongée  par  de  longues 
aigrettes  blanches. 

Actuellement,  l'atmosphère  solaire  est  constamment  accessible  à 
l'observation,  par  la  spectrographie,  basée  sur  un  principe  décou- 
vert en  1868  par  Janssen  et  Lockyer.  Si  l'on  dirige  un  spectroscope 
sur  l'un  des  bords  du  disque  solaire,  on  distingue  deux  spectres 


LA  PHOTOGRAPHIE   ASTRONOMIQUE 

juxtaposés,  très  différents  l'un  de  l'autre  :  celui  de  la  photosphère 
est  une  bande  brillante  coupée  de  raies  noires,  tandis  que  celui  des 
protubérances  gazeuses  est  formé  de  raies  brillantes  se  détachant 
sur  un  fond  obscur.  Gomme  la  lumière  ne  pénètre, dans  le  spectro- 
scope  que  par  une  fente  étroite,  l'éclat  du  premier  spectre  est  assez 
atténué  pour  laisser  apercevoir  le  second,  dont  l'intensité  est  indé- 
pendante de  la  largeur  de  la  fente,  car  il  est  constitué  par  des  radia- 
tions concentrées  en  lignes  très  étroites.  En  déplaçant  peu  à  peu  l'ins- 
trument, il  est  facile  de  délimiter  les  contours  des  protubérances, 
en  repérant  les  limites  de  leur  spectre,  et  de  reconstituer  leur  forme 
exacte  par  des  coupes  successives.  En  -communiquant  un  mouve- 
ment oscillatoire  au  spectroscope  monté  sur  une  chambre  noire,  on 
obtient  une  image  continue  des  protubérances,  dont  la  photographie 
enregistre  ainsi  les  variations  incessantes.  Les  appareils  combinés 
à  cet  effet  portent  le  nom  de  spectrohéliographes  :  leur  emploi  se 
généralise  de  plus  en  plus,  dans  les  grands  observatoires.  Certains 
de  ces  appareils  fonctionnent  sans  qu'il'soit  nécessaire  de  les  dépla- 
cer pendant  la  pose  :  ils  donnent  ainsi  la  reproduction  simultanée 
de  l'atmosphère  solaire  tout  entière,  simplement  en  ne  laissant  agir 
sur  la  plaque  sensible  que  les  radiations  d'une  longueur  d'onde  stric- 
tement Umitée.  Par  les  clichés  qu'ils  fournissent,  il  est  maintenant 
très  facile  d'étudier  à  loisir  des  phénomènes  très  importants  par  la 
relation  qu'ils  paraissent  avoir  avec  la  météorologie  terrestre,  et 
que  l'on  ne  pouvait  autrefois  qu'entrevoir  à  la  hâte,  de  loin  en  loin. 
Photographie  de  la  lune.  —  La  photographie  de  notre  satellite 
est  devenue,  depuis  quelques  années,  une  opération  relativement 
facile,  du  moins  lorsqu'on  se  contente  d'images  de  faibles  dimen- 
sions, car  dans  ce  cas  le  temps  de  pose  se  trouve  réduit  à  moins 
d'une  seconde,  si  l'on  se  sert  de  plaques  extra-rapides.  La  plupart 
des  grands  observatoires  ont  exécuté  de  nombreuses  reproductions 
de  la  lune,  et  plusieurs  amateurs  d'astronomie  obtiennent  même, 
dans  cette  voie,  des  résultats  intéressants,  bien  qu'ils  soient  loin 
d'atteindre  la  valeur  du  magnifique  Atlas  que  nous  devons  à  la  col- 
laboration de  Maurice  Lœwy  et  de  M.  Puise ux.  «  Je  ne  crois  pas 
être  aveuglé  parla  fierté  patriotique,  dit  M.  H.  Poincaré*,  en  décla- 

1.  Annuaire  du  Bureau  des  Longitudes  pour  1908. 

29 


S06  TRAITE   GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

rant  que  ces  planches  sont  très  supérieures  à  ce  que  Ton  a  fait  d'a- 
nalogue à  l'étranger.  Ce  n'est  certes  pas  à  la  pureté  du  ciel  parisien 
ni  à  la  puissance  de  l'instrument  que  nous  le  devons.  C'est  d'abord 
à  l'habileté  des  opérateurs,  c'est  surtout  à  leur  infatigable  persévé- 
ance.  » 

L'instrument  auquel  il  vient  d'être  fait  allusion  est  le  grand 
équatorial  coudé  de  l'observatoire  de  Paris,  construit  en  1889  par 
M.  Gautier.  Sur  les  plaques  directement  exposées  au  foyer  de  la 
lentille,  le  disque  lunaire  a  déjà  un  diamètre  de  près  de  18  centi- 
mètres. Bien  que  le  temps  de  pose  ne  dépasse  pas  7/10  de  seconde, 
les  grandes  dimensions  de  l'image  exigent  une  compensation 
rigoureuse  des  déplacements  dus  au  mouvement  diurne.  Dans  ce 
but,  il  n'a  pas  été  possible  d'utiliser  le  mécanisme  d'horlogerie 
dont  l'équatorial  est  muni;  malgré  tout  le  soin  avec  lequel  il  avait 
été  installé,  on  ne  parvenait  pas  à  éviter  de  fâcheuses  vibrations. 
Il  a  donc  fallu  renoncer  à  faire  mouvoir  la  lunette  elle-même, 
pendant  la  pose  :  ce  n'est  plus  ce  poids  énorme  qui  se  déplace, 
c'est  la  plaque  sensible,  légère  et  plus  docile,  qui  suit  exactement, 
à  l'aide  de  mouvements  compliqués,  le  déplacement  apparent  de 
l'astre. 

La  compensation  obtenue  de  la  sorte  est  si  précise  que,  lorsque 
l'agitation  atmosphérique  n'occasionne  aucune  perturbation,  les 
clichés  sont  d'une  finesse  et  d'une  netteté  qui  permettent  d'am- 
plifier l'imagé  jusqu'à  14  fois  son  diamètre.  On  a  ainsi  exécuté  des 
épreuves  sur  lesquelles  le  disque  lunaire  atteint  2™, 50  et  oii  l'on 
distingue  des  détails  qui,  en  réalité,  ne  mesurent  pas  plus  de 
'  400  mètres.  Un  village,  un  monument  même,  s'il  en  existait  sur 
notre  satellite,  y  seraient  certainement  aperçus. 

Malheureusement,  les  circonstances  qui  permettent  d'arriver  à 
de  tels  résultats  sont  extrêmement  rares,  car  les  mouvements  de 
l'air,  ces  bouillonnements,  ces  vagues  tremblotantes  que  tout  le 
monde  a  eu  l'occasion  de  remarquer  même  dans  les  lunettes  ter- 
restres, troublent  presque  toujours  les  images  photographiques. 
Ces  perturbations  échappent  à  peu  près  complètement  au  pouvoir 
de  l'astronome,  qui  en  est  réduit  à  guetter  les  instants  où  elles 
se  font  le  moins  sentir.  Pour  montrer  à  quel  degré  leur  influence 
est  nuisible,  MM.  Lœwy  et  Puiseux  faisaient  remarquer,  en  1898, 


LA   PHOTOGRAPHIE   ASTRONOMIQUE  S07 

que  pendant  quatre  anne'es,  au  cours  desquelles  ils  avaient  utilisé 
toutes  les  circonstances  favorables  à  Texécution  de  leurs  photogra- 
phies, une  dizaine  de  soirées  au  plus  avaient  donné  des  épreuves 
réellement  convenables  et  susceptibles  de  supporter  un  fort  agran- 
dissement. 

Ce  n'est  pas  tout  :  même  en  n'opérant  que  dans  ces  rares  cir- 
constances favorables,  sur  dix  clichés  obtenus  il  fallait  en  rejeter 
neuf,  pour  ne  conserver  que  ceux  dont  la  netteté  était  parfaite  et 


MmHiiiTiimTr  TT" 


l'ig.  194.  —  Ëquatorial  coudé  (observatoire  de  Paris). 

qui  ne  présentaient  ni  la  moindre  piqûre  ni  la  moindre  tare.  Les 
auteurs  de  l'Atlas  lunaire  s'étaient,  en  effet,  interdit  toute  retou- 
che, de  la  façon  la  plus  absolue.  Ce  n'est  évidemment  qu'à  ce  prix 
que  l'on  peut  acquérir  un  document  d'une  réelle  valeur  scienti- 
fique. 

Du  reste,  il  convient  de  remarquer  qu'un  seul  cliché  parfaite- 
ment réussi  renferme  une  abondance  de  détails  que  le  dessinateur 
le  plus  laborieux  mettrait  plusieurs  années  à  réunir.  J.  Schmidt 
avait  entrepris,  à  Athènes,  de  dresser  une  carte  de  la  lune  :  il  la 
cûmmença  en  1835  et  ne  la  termina  qu'en  1874,  après  un  labeur 


508  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE   PHOTOGRAPHIE 

acharné  de  trente-neuf  ans.  En  moins  d'une  seconde,  la  photogra- 
phie accompht  aujourd'hui  la  même  lâche,  avec  plus  de  sûreté  et 
plus  de  précision,  a  D'ici  quelques  années,  dit  M.  H.  Poincaré^ 
nous  pourrons  savoir  si  notre  satellite  est  figé  dans  une  définitive 
immobilité,  ou  s'il  s'y  produit  de  rares  changements,  comme  on  la 
affirmé  quelquefois,  sans  en  avoir  d'autre  preuve  que  la  fantaisie 
d'un  dessinateur.  » 

La  photographie  a  permis  d'aller  plus  loin,  dans  l'étude  de  la 
lune,  en  fournissant  un  moyen  de  mesurer  les  reliefs  de  son  sol, 
par  la  stéréosôopie.  Notre  satellite  est  animé  d'un  lentmouvement 
d'oscillation  autour  de  son  centre  de  gravité  :  ce  balancement  est 
connu  sous  le  nom  de  libration.  En  opérant  successivement  à  deux' 
époques  convenablement  choisies,  on  obtient  donc  deux  vues  légè- 
rement différentes  et  qui,  examinées  dans  un  stéréoscope,  mon- 
trent l'astre  en  relief.  Cette  méthode  avait  été  appliquée,  dès  1851, 
par  Warren  de  la  Rue,  mais  elle  a  été  reprise  il  y  a  quelques 
années  et  perfectionnée,  si  bien  qu'elle  a  permis  dç  calculer  la 
hauteur  des  montagnes  de  notre  satellite,  les  dépressions  de  ses 
cratères,  la  profondeur  de  ses  vallées.  C'est  ainsi  que  M.  Pulfricby 
en  opérant  sur  deux  épreuves  qui  lui  avaient  été  communiquées 
par  MM.  Lœwy  et  Puiseux,  est  parvenu,  à  l'aide  de  son  stéréo-com- 
parateur (V.  p.  Mo),  à  dresser  des  courbes  de  niveau  du  sol  lunaire, 
désormais  mieux  connu  que  certaines  régions  de  notre  propre 
globe. 

Planètes  et  satellites.  —  Appliquée  à  l'étude  de  la  constitution 
physique  des  planètes,  la  photographie  reste,  jusqu'à  présent, 
manifestement  inférieure  à  l'observation  visuelle.^Les  mouvements 
aériens  qui  troublent  et  ternissent  les  images  lunaires  prennent 
ici  une  importance  exagérée,  jusqu'à  empêcher  à  peu  près  com- 
plètement de  fixer  quoi  que  ce  soit  des  détails  découverts  sur  les 
disques  planétaires.  La  photographie  de  Jupiter,  de  Mars  et  de 
Saturne  n'est  encore  pratiquement  abordable  qu'avec  de  très 
grands  instruments,  installés  à  une  haute  altitude,  sous  un  ciel 
très  pur. 

Cependant,  le  peu  que  nous  montrent  les  photographies  des 
planètes  a,  sur  les  dessins  antérieurs,  l'avantage  d'une  certitude 
hors  de  contestation.  C'est  ainsi  que  l'existence  des  canaux  de 


LA   PHOTOGRAPHIE  ASTRONOMIQUE  509 

Mars  avait  été  mise  en  doute  par  plusieurs  observateurs,  qui,  ne 
parvenant  pas  à  les  apercevoir,  croyaient  à  un  phénomène  pure- 
ment subjectif,  à  une  illusion  d'optique.  Cette  incertitude  n'a  pris 
fm  que  le  jour  où  M.  Lowell,  réussissant  à  photographier  ces  tra- 
cés énigmatiques,  en  a  défîniliviinent  confirmé  la  réalité  objective. 

Quant  à  la  forme  sphérique  des  planètes,  les  opérateurs  savent 
depuis  longtemps  la  mettre  en  évidence,  dans  le  stéréoscope,  à 
l'aide  de  photographies  exécutées  à  deux  intervalles  calculés  d'a- 
près la  vitesse  de  rotation.  Warren  de  la  Rue  avait  fixé  ces  inter- 
valles à  2  heures  pour  Mars  et  à  26  minutes  pour  Jupiter.  Deux 
images  de  Saturne,  prises  à  trois  ans  et  demi  d'intervalle,  montrent 
en  relief  les  anneaux  qui  entourent  le  globe  planétaire. 

La  stéréoscopie  facilite  singulièrement  la  recherche  des  petites 
planètes  qui  gravitent  entre  Mars  et  Jupiter.  Autrefois,  la  décou- 
verte de  ces  astres  exigeait  une  attention  soutenue,  une  patience 
peu  commune  et  la  faveur  d'un  hasard  assez  rare.  Aujourd'hui,  il 
suffit  de  placer  dans  le  stéréoscope  deux  clichés  représentant  la 
même  région  du  ciel,  mais  pris  à  un  jour  d'intervalle.  Les  étoiles 
y  occupent  les  mêmes  positions  relatives,  et  leurs  images  se  con- 
fondent; mais,  si  une  planète  s'est  trouvée  dans  le  champ  de  la 
lunette  photographique,  le  mouvement  propre  qu'elle  a  effectué 
entre  la  première  et  la  seconde  pose  la  fait  paraître  fortement  en 
relief.  Depuis  que  M.  Max  Wolf,  d'Heidelberg,  a  imaginé  cette  mé- 
thode d'investigation,  près  de  500  planètes  ont  été  découvertes. 

La  photographie  a  aussi  révélé  l'existence  de  nouveaux  satel- 
lites gravitant  autour  de  Jupiter  et  autour  de  Saturne.  Ce  sont  de 
très  petits  corps,  qui  néanmoins  ont  pu  ensuite  être  reconnus  à 
l'examen  télescopique,  à  l'exception  d'un  seul.  Thémis,  découvert 
par  M.  Pickering  le  16  avril  1904,  ne  nous  est  connu  que  par  les 
traînées  que  sa  marche  a  marquées  sur  des  plaques  exposées  pen- 
dant de  nombreuses  heures  dans  la  direction  de  Saturne.  Ces  traî- 
nées ont  permis  de  calculer  les  éléments  de  l'orbite  décrite  par  le 
minuscule  satellite.  Mais  il  est  impossible  de  le  voir,  parce  que  sa 
luminosité,  comparable  à  celle  d'une  étoile  de  18^  grandeur,  est 
inférieure  h  la  limite  de  visibilité  dans  les  télescopes  les  plus  puis- 
sants. Et  il  en  sera  ainsi  tant  que  l'optique  n'aura  pas  accompli  de 
notables  progrès. 


510  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE    PHOTOGRAPHIE 

N'y  a-t-il  pas  là  un  étrange  sujet  d'étonnement?  Voilà  un  objet 
que  personne  n'a  vu  et  que,  probablement,  aucun  de  nos  con- 
temporains ne  parviendra  à  distinguer.  Mais  l'objectif  l'a  aperçu; 
la  rétine  photographique  en  a  gardé  l'empreinte,  et  son  témoi- 
gnage sufût  à  nous  guider.  Nous  savons,  à  n'en  pouvoir  douter, 
que  ce  monde  invisible  existe  et  gravite  autour  de  Saturne;  nous 
en  suivons  la  marche,  nous  en  mesurons  les  dimensions,  comme 
s'il  était  à  notre  portée,  et  l'analyse  des  perturbations  qu'il  exerce 
sur  les  autres  satellites  nous  permettra  un  jour  de  le  peser. 

Comètes.  —  C'est  en  1881  que  fut  obtenue,  à  Meudon,  la  pre- 
mière photographie  de  comète,  mais  le  premier  de  ces  astres  qui 
ait  été  tlécouvert  par  la  photographie  est  la  comète  de  Barnard. 
Cet  astronome  aperçut,  en  examinant  un  cliché  d'une  portion  de 
la  voie  lactée,  exécuté  à  l'observatoire  Lick,  le  12  octobre  1892, 
une  tramée  lumineuse  figurant  la  queue  d'une  comète.  L'observa- 
tion visuelle  confirma  ensuite  la  découverte  photographique. 

Depuis  cette  époque,  la  photographie  révèle,  chaque  année,  le 
passage  de  plusieurs  de  ces  masses  légères  et  inconsistantes,  dont 
un  grand  nombre  échappent  à  l'observation  (|irecte. 

La  comète  périodique  de  Halley  est  revenue  à  proximité  du  soleil 
en  avril  1910,  ainsi  que  l'avait  fait  prévoir  la  théorie.  Les  observa- 
tions à  l'œil  nu,  gênées  presque  partout  en  Europe  par  des  mauvais 
temps  persistants,  n'ont  été  favorisées  qu'en  Amérique.  Mais  la 
photographie  a  permiç  de  fixer  l'image  de  cet  astre  pendant  une 
assez  longue  période.  Dès  le  12  septembre  19Û9,  M.  Max  Wolf  dé- 
couvrait la  comète  sur  un  cliché  exposé  vers  la  région  du  ciel  que 
le  calcul  avait  précisée.  Jusqu'au  mois  de  janvier  &uivant  il  ne  fut 
pas  possible  de  l'observer  au  télescope,  et  l'étude  de  cet  astre  de- 
meura limitée  aux  méthodes  photographiques  :  la  plaque  sensible 
en  enregistrait  les  aspects  changeants;  combinée  avec  le  spectro- 
scope,  elle  en  faisait  connaître  la  composition  chimique,  et  c'est 
ainsi  que  l'on  apprit  que  cet  objet  encore  invisible  contenait  divers 
gaz,  et  notamment  du  cyanogène. 

Carte  du  ciel.  —  Les  premiers  essais  de  photographie  stellaire 
remontent  à  1850  et  sont  dus  à  Bond  et  à  Whipple,  qui  obtinrent 
sur  plaques  daguerriennes  quelques  images  d'étoiles  de  première 
grandeur,  telles  que  Véga  et  Castor.  En  1865,  avec  le  collodion, 


LA  PHOTOGRAPHIE   ASTRONOMIQUE  511 

Rutherfurd  photographia  les  Pléiades  et  entrevit  la  possibilité  de 
dresser  une  carte  photographique  du  ciel.  Toutefois,  cette  vaste 
entreprise  ne  devint  pratiquement  abordable  qu'après  la  décou- 
verte du  gélatinobromure.  Son  exécution  exigeait,  naturellement, 
le  concours  de  plusieurs  observatoires  situés  sous  des  latitudes 
différentes,  mais  l'initiative  en  est  due  aux  astronomes  français. 

En  1852,  Chacornac  s'était  proposé  de  dresser,  à  l'observatoire 
de  Paris,  une  carte  des  régions  avoisinant/J'écliptique,  afin  de  faci- 


Fig.  195.  —  Lunette  photographique,  pour  l'exécution  de  la  carte  du  ciel. 

liier  la  recherche  des  petites  planètes.  Cette  carte  devait  être 
formée,  comme  on  l'avait  fait  jusque-là,  en  guettant  le  passage  de 
chaque  astre  au  foyer  de  la  lunette  méridienne.  A  la  mort  de  Cha- 
cornac, Paul  et  Prosper  Henry  résolurent  de  continuer  cette  œuvre 
rrstée  inachevée,  mais  ils  ne  tardèrent  pas  à  être  arrêtés  par  une 
difficulté  insurmontable.  A  l'approche  de  la  voie  lactée,  les  étoiles 
06  présentaient  si  nombreuses,  si  confusément  compactes,  que  les 
mesures  les  plus  minutieuses  n'en  seraient  jamais  venues  à  bout. 
C'est  alors  que  les  frères  Henry  eurent  l'idée  de  recourir  à  la  pho- 


512  TRAITÉ    GÉNÉRAL  DE  PHOTOGRAPHIE 

tographie,  et  les  résultats  de  leurs  premiers  essais  furent  à  ce  point 
satisfaisants,  que  la  plupart  des  astronomes  de  toutes  les  nations 
se  rallièrent  au  projet  d'un  travail  d'ensemble,  à  répartir  entre  les 
principaux  observatoires  du  monde  entier.  Réuni  pour  la  première 
fois  en  avril  1887,  le  Congrès  astronomique  de  la  carte  du  ciel 
élabora  définitivement  le  plan  de  cette  œuvre  en  1891, 

La  sphère  céleste  a  été  divisée  en  18  zones  approximativement 
égales,  et  le  soin  de  phqftographier  chacune  d'elles  a  été  confié  à 
un  observatoire  distinct.  Les  observatoires  choisis  comme  étant  les 
plus  importants  et  les  mieux  outillés  sont  ceux  de  Greenwich,  Rome, 
Gatane,  Helsingfors,  Potsdam,  Oxford,  Paris,  Bordeaux,  Toulouse, 
Alger,  San-Fernando,  Santiago-du-Chili,  Tacubaya,  La  Plata,  Rio- 
de-Janeiro,  cap  de  Bonne-Espérance,  Sydney  et  Melbourne. 

L'appareil  employé  à  Paris  "par  les  frères  Henry  a  été  construit 
par  M.  Gautier.  L'objectif  photographique  est  formé  d'un  système 
de  deux  lentilles  de  flint  et  de  crown  achromatisées  pour  les  rayons 
chimiques  les  plus  intenses  du  spectre  et  aplanétique  pour  ces 
mêmes  rayons.  Il  a  0™,33  de  diamètre.  La  lunette  a  3"*, 43  de  dis- 
tance focale.  Une  deuxième  lunette,  juxtaposée  à  la  première,  fait 
fonction  de  chercheur.  L'instrument  est  monté  de  manière  que 
rimage  d'une  étoile  se  maintienne  toujours  à  la  même  place. 

La  carte  du  ciel  doit  être  double.  Elle  comprendra  d'abord  un 
atlas  où  seront  relevées,  avec  leur  longitude  et  leur  latitude,  toutes 
les  étoiles  jusqu'à  la  11*  grandeur,  au  nombre  d'environ  quatre  ou 
cinq  minions.  La  seconde  partie  du  travail  entrepris  sera  l'établis- 
sement de  la  carte  proprement  dite,  précisant  les  positions  res- 
pectives de  toutes  les  étoiles  jusqu'à  la  19^  grandeur,  au  nombre 
d'environ  trente  à  quarante  millions. 

Depuis  1891,  les  observatoires  désignés  poursuivent  assidûment 
•leur  tâche.  L'inventaire  de  l'univers  stellaire  se  complète  peu  à  peu 
et  sera,  pour  les  astronomes  de  l'avenir,  le  plus  riche  et  le  plus 
sûr  de  tous  les  documents. 

Une  demi-seconde  suffit  pour  reproduire  tous  les  astres  visi- 
bles à  l'œil  nu,  dans  le  champ  exploré  par  la  plaque  sensible.  En 
13  minutes,  et  même  moins  encore  si  l'on  emploie  des  émulsions 
très  rapides,  l'objectif  imprime  l'image  des  étoiles  les  plus  faibles 
que  permettent  d'apercevoir  les  télescopes  les  plus  puissants.  Si  la 


LA  PHOTOGRAPHIE   ASTRONOMIQUE  513 

pose  est  prolongée  plus  longtemps,  alors  nous  pénétrons  dans  le 
domaine  de  Tinvisible  :  des  millions  d'astres  dont  nous  n'aurions 
jamais  pu  soupçonner  l'existence  viennent  marquer  leur  empreinte 
sur  le  bromure  d'argent  et  attester  leur  présence  à  de  telles  dis- 
tances que  l'imagination  demeure  impuissante  à  s'en  représenter 
la  grandeur. 

Chacun  de  ces  points  fixés  sur  les  clichés  est  catalogué  avec  le 
plus  grand  soin.  Des  mesures  de  haute  précision  déterminent 
rigoureusement  leurs  positions  relatives,  et  la  superposition  de 
deux  images  d'une  même  région  du  ciel  exécutées  à  quelque  temps 
d'intervalle  met  en  évidence  les  moindres  déplacements  de  cette 
multitude  de  soleils. 

Parmi  ces  déplacements,  les  uns  résultent  des  mouvements  pro- 
pres des  étoiles,  tandis  que  d'autres  ne  sont  qu'une  apparence 
résultant  du  mouvement  de  translation  de  la  terre  autour  du  so- 
leil. Par  suite  de  ce  mouvement,  notre  planète  se  trouve  constam- 
ment à  environ  299  millions  de  kilomètres  de  la  position  qu'elle 
occupait,  par  rapport  au  soleil,  six  mois  auparavant.  Il  en  résulte 
un  changement  de  perspective  qui  se  traduit  par  une  modification 
dans  les  positions  des  étoiles  les  plus  rapprochées,  tandis  que  les 
étoiles  les  plus  éloignées  restent  au  même  point.  Le  calcul  a  per- 
mis d'en  déduire  les  distances  réelles  de  plus  de  300  étoiles.  D'au- 
tres changements  de  perspectives  stellaires  sont  dus  au  mouvement 
de  translation  du  système  solaire,  qui  se  meut  tout  «ntier  vers  la 
constellation  d'Hercule.  La  comparaison  d'un  grand  nombre- de 
clichés  a  permis  de  calculer  la  vitesse  avec  laquelle  le  soleil  et 
son  cortège  planétaire  se  déplacent  :  cette  vitesse  serait  de  près 
de  20  kilomètres  par  seconde. 

Enfin,  la  photographie  fixe  l'image  des  nébuleuses,  dont  la 
lumière  est  beaucoup  trop  faible  pour  que  notre  œil  puisse  les 
distinguer  :  sans  cesse, -de  nouvelles  créations  apparaissent  ainsi,  et 
les  limites  de  Tunivers  visible  sont  indéfiniment  reculées.  Là  même 
où  les  télescopes  les  plus  puissants  ne  parvenaient  pas  à  percer  les 
ténèbres,  en  ces  endroits  déserts  que  William  Herschel  qualifiait 
de  «  sacs  à  charbon  »,  la  rétine  photographique  découvre  encore 
des  amas  d'étoiles  et  de  matière  cosmique.  Au  delà  de  ces  univers 
inconnus,    d'autres  n'attendent,   pour  se  montrer   à    leur  tour, 


514  TRAITÉ    GÉNÉRAL   DE  PHOTOGRAPHIE 

qu'une  pose  plus  longue  ou  une  émulsion  plus  sensible.  A  mesure 
que  nos  proce'dés  vont  se  perfectionnant,  l'objectif  sonde  de  plus 
en  plus  profondément  les  abîmes  de  l'infini. 


OUVRAGES  A  CONSULTER 


Annuaire  du  Bureau  des  Longitudes  pour  les  années  1878,  1887,  1890,  1898, 
1901,  1907,  1908,  1910,  Paris  (Gauthier-Villars). 

E.  CousTET,  l'Astronomie  mise  à  la  portée  de  tous,  Paris  (J.  Tallandier),  1908. 
A.  Jarson,  la  Photographie  astronomique,  Paris  (Ch.  Mendel),  1904. 

P.  PuiSEux,  Sur  quelques  progrès  re'cents  accomplis  avec  l'aide  de  la  photogra- 
phie dans  l  étude  du  ciel,  Paris  (Gauthier-Villars),  1899. 

F.  QuÉNissET,   Manuel  pratique   de  photographie  astronomique,    Paris    (Gh. 

Mendel). 

G.  Rayet,  Notes  sur  l'histoire  de  la  photographie  astronomique,  Paris  (Gau:hier- 

Villars),  1887.  ^ 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Introduction 


LIVRE  PREMIER 
MATÉRIEL    PHOTOGRAPHIQUE 

Chapitre  premier.  —  La  chambre  noire. 

Organes  essentiels 15 

Chambres  noires  d'atelier 16 

Chambres  noires  portatives 18 

Châssis 22 

Magasin 23 

Viseurs 27 

Supports  des  appareils  légers  . 30 

Ouvrages  à  consulter 31 

Chapitre  II.  —  L'objectif. 

Propagation  de  la  lumière 32 

Lentilles 33 

Aberration  de  sphe'ricité  . 35 

Profondeur  de  foyer  et  profondeur  de  champ 36 

Courbure  du  champ 38 

Distorsion 38 

Astigmatisme 38 

Aberration  chromatique  ou  de  réfrangibilité 39 

Diffraction .  40 

Réflexion  de  la  lumière  sur  les  surfaces  des  lentilles 41 

Caractéristiques  d'un  objectif 41 

Longueur  focale 42 

Ouverture 42 

Angle 43 

Construction  de  l'objectif.  Monture 44 

Diaphragmes 44 

Parasoleil 46 

Classification  des  objectifs 47 

Objectifs  simples. 47 

Objectif  double  à  portraits 48 

Aplanat 49 


5^6  TABLE  DES  MATIERES 

Anasligmats 50 

Objectifs  à  liquides.   . 57 

Téléobjectifs ' 57 

Objectifs  anachromatiques    ...........".... 58 

Choix  et  emploi  des  objectifs 60 

Sténopé.   . 63 

Ouvrages  à  consulter 65 

Chapitre  III,  —  L'obturateur. 

Notions  générales 67 

Obturateurs  à  volets 68 

Obturateur  à  guillotine 69 

Obturateurs  à  rideaux 70 

Obturateurs  centraux 72 

Obturateurs  de  plaques.   . 73 

Déclancheur  Bowden 75 

Détermination  de  la  vitesse  des  obturateurs .  .  75 

Ouvrages  à  consulter 77 

Chapitre  IV.  —  Le  laboratoire  et  l'atelier. 

Dispositions  générales s  ....,,   .^ 78 

Cabinet  noir 78 

Outillage 81 

Cuvettes .  82 

Laboratoire  simplifié  pour  amateurs ,   .   .   .  83 

Contrôle  de  l'étancbéité  du  laboratoire. 85 

Atelier  dépose.   .   .   . 86 

Accessoires  de  pose ....>...  93 

Ouvrages  à  consulter 96 

LIVRE  II         ^ 
PROCÉDÉS   NÉGATIFS 

Chapitre  V.  —  Le  ge'latinobromure. 

Historique 97 

Fabrication  des  plaques  au  gélatinobromure 98 

Supports' souples K)l 

Plaques  ortho chromatiques 102 

Plaques  anti-halo    . 107 

Conservation  des  plaques -.   .   .  108 

Sensitométrie , 109 

Ouvrages  à  consulter 111 

Chapitre  VI.  —  L'exposition. 

Chargement  des  châssis 112 

Installation  de  l'appareil 113 

Mise  au  point H-i 

Temps  de  pose 116 

Photomètres ' H^ 


TABLE   DES  MATIÈRES  517 

Temps  de  pose  des  sujets  en  mouvement 122 

Prise  du  sujet 124 

Artifices  divers    .   .   '    . ^  124 

Lumière  ariificielle.    ...»....., 126 

Ouvrages  a  consulter.   .   „  „ 131 

Chapitre  VIL  —  Le  développement. 

Image  latente .   , , ,   .  ,  132 

Destruction  de  l'image  latente  » 135 

Généralités  sur  le  développement  .   .   ^ '. 136 

Composition  et  caractères  des  principaux  révélateurs 138 

Révélateur  à  l'adurol , , ^  138 

Révélateur  à  l'amidol  ou  diamidophénol  „<-,,.. „  .  139 

Révélateur  au  crésophénol , 140 

Révélateur  à  la  diamidorésorcine , ^  ,  141 

Révélateur  à  l'édinol =   .   »   . ,  141 

Révélateur  à  la  glycine  .   .   ,   .  .  »  »  .   ,  „ ,   .  142 

Révélateur  a  l'hydramine  .   .   .   ^  .  .  .,   .   .   t   . o  ,   o  142 

Révélateur  à  l'hydroquinone  .,...,„.,. ,..,  143 

Révélateur  à  l'iconogène , ,   ,   ,  143 

Révélateur  à  l'hydroquinone  et  à  riconogène.   ............  144 

Révélateur  au  métol ,  ,   .  144 

Révélateur  à  l'hydroquinone  et  au  métol .   .  145 

Révélateur  à  la  métoquinone  ........  ^ 145 

Révélateur  à  l'ortol. 146 

Révélateur  à  l'oxalate  ferreux ,   ,  147 

Révélateur  au  paramidophénol ; ,  ,  c,   c  148 

Révélateur  à  la  paraphénylènediamine c   .   .   .  149 

Révélateur  à  la  pyrocatéchine „   .   .   .  149 

Révélateur  au  pyrogallol.    . 149 

Révélateurs  physiques , ,  ,   ,   ,   .  150 

Méthodes  de  développement ,    .  .   .  151 

Développement  contrôlé  . ,  151 

Développement  rationnelou  méthodique  au  pyrogallol  .,.,....  154 

Développement  en  deux  cuvettes «   .  156 

Développement  lent , 157 

Développement  chronométré  .   .  ^ „ ,..,,,  159 

Développement  à  durée  fixe »  .   .   c  .   ,   .   .  160 

Développement  en  machine. 162 

Développement  en  pleine  lumière 163 

Développement  et  fixages  simultanés 166 

Développement  après  fixage. 168 

Ouvrages  à  consulter 170 

Chapitre  VIII.  —  L'achèvement  du  phototype. 

Fixage  . 171 

Durcissement  de  la  couche 172 

Elimination  de  l'hyposulfite 173 

Dessiccation 174 


518  TABLE  DES   MATIÈRES 

Correctifs  du  développement , 175 

Renforçateur  au  bichlorure  de  mercure  ., 176 

Renforçateur  à  l'iodure  de  mercure 178 

Renforçateur  au  ferricyanure  d'urane 178 

Renforçateur  au  ferricyauure  de  cuivre  ......< 180 

Renforçateurs  à  l'argent 181 

Renforcement  par  chloruration  et  second  développeniiit 181 

Affaiblisseur  au  ferricyanure  de  potassium 182 

Affaiblisseur  aux  sels  de  cérium. 183 

Affaiblisseur  au  persulfate  d'ammoniaque 183 

Affaiblisseur  à  la  quinone.   ,,.....,...., 184 

Affaiblisseur  à  l'acide  chromique 185 

Affaiblisseur  à  l'acide  permanganique 186 

Affaiblisseur  à  l'eau  céleste 186 

Affaiblissement  par  second  développement.   ,,, 186 

Vernissage 188 

Retouche 189 

Pelliculage 1^ 

Insuccès  dans  les  procédés  négatifs 193 

Ouvrages  à  consulter. 197 

Chapitre  IX.  —  Les  procédés  au  collodion. 

Généralités 199 

Procédé  au  collodion  humide , 199 

Pr;océdés  au  collodion  sec 203 

Emulsion  au  collodion-bromure 204 

Ouvrages  à  consulter •, 205 

<» 

LIVRE  III 
PROCÉDÉS    POSITIFS 

Chapitre  X.  —  Les  photocopies  var  noircissement  direct. 

Procédés  au  chlorure  d'argent 206 

Papier  salé 207 

Papier  albuminé 207 

Papier  au  gélatinochlorure 208 

Papier  au  collodiochlorure 209 

Emploi  des  papiers  au  chlorure 210 

Tirage , 211 

Marges  et  vignettes  . 218 

Virage 214 

Fixage 217 

Virage-fixage 217 

Virage-fixage  sans  or. 220 

Virage  au  platine. 220 

Virages  divers , 220 

Lavages 221 


TABLE  DES  MATIERES  519 

Séchage.   . 223 

Insuccès 223 

Photographie  sur  étoffes 224 

Ouvrages  à  consulter 226 

Chapitre  XI.  —  Les  photocopies  par  développement. 

Développement  des  papiers  au  chlorure 227 

Papiers  au  gélatinobromure  d'argent 229 

Virage  des  photocopies  au  bromure  .  . 233 

Insuccès 235 

Plalinotypie 236 

Papiers  aux  sels  de  fer 240 

Callitypie 242 

Papier  sépia • 243 

Papier  aux  sels  de  cuivre 244 

Papier  aux  sels  d'uranium 245 

Ouvrages  à  consulter.   ,  .  ; 246 

Chapitre  XII.  —  Les  procédés  pigmentaîres. 

Invention  du  procédé  au  charbon 247 

Fabrication  du  papier  au  charbon 248 

Sensibilisation 249 

Conservation  du  papier  sensibilisé 252 

Tirage 252 

Transfert  simple 253 

Dépouillement 255 

Double  transfert , 256 

Insuccès .  258 

Procédé  au  charbon  sans  transfert 259 

Procédé  à  la  gomme  bichromatée 262 

Procédé  ozotype 265 

Ozotypie  à  la  gomme 269 

Procédé  ozobrome. 269 

Procédé  aux  encres  grasses 272 

Procédés  aux  poudres .* 275 

Emaux 278 

Hydrotypie •  279 

Teinture  photographique. 280 

Ouvrages  à  consulter ,  .  284 

Chapitre  XIII.  —  Le  montage  des  photocopies. 

Calibrage 286 

Montage  à  la  côîle  liquide 287 

Satinage 288 

Montage  à  sec. .  290 

Emaillage 293 

Retouche  des  photocopies 294 

Coloriage 296 

Ouvrages  à  consulter 293 


520  TABLE   DES   MATIÈRES 

Chapitre  XIV.  —  Les  diapositifs. 

Notions  générales , «  299 

Plaques  à  tons  noirs ^  300 

Plaques  à  tons  chauds .  300 

Virages ....,.,.  301 

Coloriage 803 

Montage .  303 

Ouvrages  à  consulter 304 

Chapitre  XV.  —  Positifs  directs  et  contretypes. 

Positifs  directs  par  réflexion.   ,• .   ^  .   .  305 

Contretypes  au  gélatinobromure  bichromate , ,  ,  307 

Contretypes  par  surexposition 308 

Contretypes  par  inversion oc  309 

Phototégie .....,,.  311 

Ouvrages  à  consulter .....,,.......-   =   ,..  313 

Chapitre  XVI.  —  Les  impressions  photomécaniques. 

Historique. .....>,.  314 

Phototypes »  316 

Photocollographie .   .   .  o  ,  318 

Photolithographie  .   , 324 

Héliogravure    .   .   .   , 327 

Photogravure .  334 

Similigravure 338 

Ouvrages  à  consulter 346 

LIVRE  IV 
CHROMOPHOTOGRAPHIE 

Chapitre  XVII.  —  Le  procédé  trichromé. 

Historique 348 

^    Principe  de  la  trichromie ~. 350 

Pratique  de  la  trichromie c  .354 

Analyse  ou  sélection 354 

Synthèse  par  le  procédé  au  charbon. 358 

Procédé  par  imbibition ^  359 

Similigravure  trichromé '. -....   =  .  360 

Ouvrages  à  consulter. 363 

Chapitre  XVIIT.  —  Les  plaques  à  filtres  colorés. 

Invention  de  la  trichromie  par  éléments  juxtaposés 365 

Fabrication  des  plaques  autochromes 367 

Exposition  des  plaques  autochromes 369 

Traitement  normal  des  autochroraes 370 

Développement  méthodique 375 

Traitement  simplifié  des  autochromes 379 

Insuccès 379 

Autochromie  instantanée - 382 


TABLE  DES  MATIÈRES  521 

Reproduction  des  autochromes 385 

Reproductions  négatives 387 

Filtres  trichromes  à  éléments  rég-uliers 388 

Procédé  Paget  Golor 389 

Applications  des  plaques  à  filtres  colorés 393 

Ouvrages  à  consulter. 397 

Chapitre  XIX.  —  Les  procédés  par  adaptation. 

Coloration  du  chlorure  d'argent. .- 398 

Adaptation  par  décoloration 400 

Ouvrages  à  consulter 404 

Chapitre  XX.  —  La  méthode  interférentielle. 

Historique 405 

Principe  de  la  méthode  interférentielle 407 

Préparation  des  plaques 410 

Exposition 411 

Développement 412 

Examen  et  montage  . .  414 

Insuccès 417 

Applications  de  la  méthode  interférentielle 419 

Ouvrages  à  consulter 420 

LIVRE  V 
APPLICATIONS    DE    LA    PHOTOGRAPHIE 

Chapitre  XXI.  —  La  stéréoscopie. 

Vision  binoculaire.  Stéréoscope.   . " 421 

Appareils  et  méthodes  stéréophotographiques 423 

Plaques  autostéréoscopiques 426 

Photographie  intégrale 428 

Ouvrages  à  consulter ,  .  430 

Chapitre  XXII.  —  La  photographie  documentaire. 

Généralités 431 

Reproductions 432 

Photographie  judiciaire 436 

Métrophotographie '. 439 

Ouvrages  à  consulter 448 

Chapitre  XXIII.  —  Agrandissements  et  projections. 

Généralités 449 

Agrandissements  à  la  lumière  diurne 449 

Agrandissements  à  la  lumière  artificielle 450 

Agrandisseurs • 450 

Artifices  d'exécution 451 

Retouche  des  agrandissements .  , 452 

Projections .• 453 

Ouvrages  à  consulter.  ,,,,,,, ,  456 


522  TABLE   DES  MATIÈRES 

Chapitre  XXIV.  —  La  cînématographie. 

Analyse  du  mouvement •  •  • '^^^ 

Synthèse  du  mouvement •459 

Prise  des  vues  cinématographiques  ,, 462 

Développement  et  tirage •  463 

Projection  des  vues  cinématographiques 466 

Ouvrages  à  consulter »  470 

Chapitre  XXV.  —  La  microphotographie. 

Premiers  essais 471 

Emploi  du  microscope  composé 471 

Eclairage • • 477 

Limites  du  grossissement 478 

Ouvrages  à  consulter •.,....  481 

ÊHAPiTRE  XXVI.  —  La  radiographie. 

Découverte  des  rayons  X 482 

Matériel  radiographique 484 

Procédés  radiographiques • 493 

Ouvrages  à  consulter «.. 499 

Chapitre  XXVII.  —  La  photographie  astronomique. 

Généralités .  501 

Photographie  du  soleil , .  503 

Photographie  de  la  lune .  505 

Planètes  et  satellites 508 

Comètes 510 

Carte  du  ciel 510 

Ouvrages  à  consulter. 514 


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et  de   leurs  Applications 

PAR  MM.  t  , 

P.  POIRÉ,  Agrégé  des  Sciences  physiques,  Prof,  honoraire  au  Lycée  0^  / 
ED.  PERRIER,  Membre  de  l'Institut,  Directeur  du  Muséum  d'Histoire  t  ^ 
R.  PERRIER,  Chargé  de  cours  à  la  Faculté  des  Sciences  de  Paris.  f 

A.  JOANNIS,  Professeur  à  la  Faculté  des  Sciences  de  Bordeaux,  Chargé  \ 
la  Faculté  des  Sciences  de  Paris.  7; 

Précédé  d'une  Préface  de  M.  EDMOND  PERRIER 
Directeur  du  Muséum  d'Histoire  îiaturelle. 

A^ec  la  collaboration  d'une  réunion  de  Savants,  de  Professeurs  et  d'h 

PRINCIPALEMENT   .M.M.  ' 

V,  Baudoi,  prof,  de  Mathématiques  au  Lycée  St-Louis.  —  F.  Bernard,  |  / 
Muséum  d'Iiistoire  Naturelle.  —  A.  Billard,  agrégé  de  rcniversité.';  : 
docteur  en  médecine,  agrégé  de  l'Université,  préparateur  à  la  1 
Sciences  de  l'Université  de  Paris.   —  D.  Bois,  assistant  au  Muséî" 
chaire  "de  Culture.  —  J.-F.  Bois,  professeur  à  l'École  primaire  supérie 

—  A.  Daguitlon,  chargé  de  cours  à  la  Faculté  des  Sciences  de  l'Li 
Paris.  —  J.  Giraud,  agrégé  de  l'Université.  —  J.  Joannis,  architecte  du 
ment,  licencié  en  droit.  —  H.  de  Lappareni,  inspecteur  général  de  l'A 

—  F.  Leteur,  préparateur  à  la  Faculté  des  Sciences  de  l'Université  r 
D'A.  Vigoureux,  médecin  en  chef  des  Asiles  de  la  Seine.  ,. 

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