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Collection
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of Medical
and Related
Sciences
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TRAITÉ
ZOOLOGIQUE ET PHYSIOLOGIQUE
SUR
LES VERS INTESTINAUX
DE L'HOMME.
PARIS. — IMPRIMERIE DE C.-L.-F. PANCKOUCKE,
RUE DES POITEVINS, N° 14.
TRAITE
ZOOLOGIQUE ET PHYSIOLOGIQUE
SUR
LES VERS INTESTINAUX
DE L'HOMME
PAR M. BREMSER D. M.
TRADUIT DE L'ALLEMAND
PAR M. GRUNDLER D. M P.
REVU ET AUGMENTÉ DE NOTES
PAR M. DE BLAIN VILLE
D. M. DE LA FACULTÉ DE PARIS ET PROFESSEUR D’ANATOMIE COMPARÉE
ET DE ZOOLOGIE À LA FACULTÉ DES SCIENCES, ETC. , ETC.
AVEC UN ATLAS
eomrosk DE DOUZE PLANCHES IN-QUARTO»
Re PARIS
- CL. F. PANCKOUCKE erreur
rue des Poitevins n°. 14
MDÉÉCXXLV
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RER
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Lettre de M. de Hurboidt à M. Panckoucke.
Moseur ,
VEUrLLEZ bien m’excuser si, m’adressant à votre bienveillance
souvent éprouvée , je vous parle d’une affaire à laquelle je prends
le plus vif intérêt. L’excellent Traité sur les vers intestinaux de
l’homme , du docteur Bremser , est un ouvrage justement célèbre
en Allemagne, en lialie et en Angleterre; il n’a point encore été
traduit de l'allemand en français. Un de mes compatriotes ‚le doc-
teur Grundler , qui habite depuis long-temps cette capitale, etqui
connaît à la fois les langues et l’état de la science médicale, a en-
trepris cette traduction. J’ose espérer que, si quelque natura-
liste français au courant de la matière, par exemple M. de Blain-
ville, voulait se charger de revoir la traduction, et d’y ajouter
quelques notes instructives, M. Grundler pourrait être assez heu-
reux pour trouver un éditeur. L'ouvrage est également intéressant
pour la médecine pratique et pour l’histoire naturelle descriptive.
Il existe au Muséum du Jardin du roi une belle collection des
vers intestinaux de M. Bremser ; elle prouve l'étendue du travail
auquel ce savant s’est livré avec tant de succès. Je serais bien heu-
reux d'apprendre que vous voulussiez vous intéresser, Monsieur,
à cette utile entreprise : ce serait un nouveau service que vous ren
driez aux sciences.
Agréez l'expression de la haute considération avec laquelle j’ai
l'honneur d’être ,
Monsieur ,
Votre très-humble et très obéissant
serviteur ,
ALEXANDRE DE HUMBOLDT.
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AVERTISSEMENT.
D: que cetouvrage nous fut connu, il y a plusieursannées,
par l'entremise d’un jeune Allemand alors à Paris, qui venait
de le recevoir de Vienne, la réputation de M. Bremser, re-
gardé avec juste raison comme le premier helminthologue
praticien de l’Allemagne et de l’Europe entière, le besoin
urgent que la médecine avait d’un traité qui contint à la fois
la description avec figures des vers qui séjournent dans l’es-
pèce humaine, et des considérations générales et particulières
sur les moyens hygiéniques et thérapeutiques propres à les:
combattre, nous firent vivement désirer que quelque médecin
zoologiste en entreprit la traduction. Nous nous en serions
peut-être même chargé volontiers, si nous n’eussions appris, !
dans une lettre de M. Bremser lui-même, qu’un médecin de
Genève, alors à Vienne, était occupé à traduire son ouvrage
en français sous ses yeux, et qu’il ne tarderait guère à paraître.
Cependant une année et plus s’etait déja écoulée sans que
nous eussions entendu parler le moins du monde de cette tra-
duction, lorsque M. le docteur Grundler, médecin allemand ,
établi depuis un assez grand nombre d’années à Paris ‚et que
nous avions l'avantage de connaître depuis long-temps, vint
nous consulter sur la traduction qu'il avait commencée du
Traité de M. Bremser , et nous demander de vouloir bien l’ai-
der dans cette entreprise. Nous y fümes aisément déterminé
par l'intérêt mérité que nous lui portons et par l'utilité
que nous voyions dans un ouvrage qui offre une des applica-
*
ij AVERTISSEMENT.
tions les plus immédiates de la zoologie à la pratique me-
dicale. D’après nos conseils , il commenca par avertir de son
projet M. Bremser, en lui demandant sil avait continué à
faire traduire son ouvrage à Vienne, et, dans le cas con-
traire, s’il voudrait y faire quelques changemens et addi-
tions. M. Bremser nous apprit que le médecin génevois ayant
quitté Vienne avant la terminaison de sa traduction, il
avait été obligé d'abandonner son projet, et qu’il nous four-
nirait plusieurs additions importantes. Il nous envoya en
effet les matériaux de quelques changemens ou de rectifica-
tions de diverse nature; il y joignit des réponses aux obser-
vations critiques fondées, le plus souvent justes, mais aussi
quelquefois passionnées qui ont été faites de son ouvrage
depuis sa publication, et entre autres à celle qui a été insérée
dans le journal italien intitulé Vuovi commentari di medi-
cinae di chirurgia pour l’année 1820; critique extremement
longue, détaillée, qui a été tirée à part et répandue avec
profusion en Allemagne, en Angleterre et en France, où elle
a été traduite dans un de nos journaux de médecine. M. Brem-
ser nous a aussi fourni quelques dissertations publiées en
Allemagne par ses élèves sur plusieurs vers intestinaux
propres à l’homme, que cependant il ne connaissait qu’in-
complétement auparavant. Ces matériaux , auxquels nous
avons cru devoir quelquefois ajouter des notes ampliatives ou
explicatives étaient assez étendus pour qu’il fût difficile de les
intercaler dans le corps de l’ouvrage, ou même en note au
bas des pages, sans nuire à sa constitution primitive. Nous
avons donc cru préférable de les comprendre dans une partie
à part, que nous placerons à la fin du volume; et, comme
elle sera composée d'autant de chapitres que l'ouvrage lui-
même, il sera aisé d'y avoir recours successivement après
qu’on aura lu chacun de ceux-ci. ?
AVERTISSEMENT. ij
Voila en quoi consiste le premier changement que nous
ferons à l’ouvrage de M. Bremser, ce qui donnera à la tra-
duction de M. Grundler une valeur évidemment supérieure
a celle de l'ouvrage original.
Un autre changement moins important, mais qui nous a
paru cependant nécessaire , est celui que nous avons fait dans
la disposition de l’ouvrage. Nous n’avons pas suivi rigoureu-
sement l’ordre de l’original, qui traite dans autant de cha-
pitres, 1° de la formation des vers intestinaux en général ;
2° de leur distribution systématique générale; 3° de la des-
cription de ceux qui vivent dans le canal intestinal de l’homme;
4° des causes de ia formation de ces vers; 5° du diagnos-
tic; 6° des remèdes généraux; 7° des remèdes spéciaux ;
8° de la description des vers nématoïdes qui séjournent hors
du canal intestinal; 9° des vers trématodes; 10° des vers
vésiculaires; 11° des formules de médicamens; 12° enfin des
pseudohelminthes ou pretendus vers intestinaux. Il nous a
semblé que ce mélange de la partie zoologique et médicale
pouvait nuire à la régularité de l'ouvrage, et par conséquent
à sa conception, et nous l’avons nettement divisé en deux par-
ties, la première physiologique et zoologique, la seconde
médicale ou thérapeutique. Chacune est ensuite subdivisée
en trois chapitres qui sont consacrés successivement , le pre-
mier, aux considérations générales sur la formation des vers
intestinaux ; le deuxième, à la division systématique de tout
ce groupe d'animaux; le troisième, à la description des espèces
qui vivent dans le corps de l’homme. Ce chapitre est partagé
en trois sections, vers intérieurs au canal intestinal, vers
extérieurs et pseudohelminthes. Les trois autres chapitres
constituent la seconde partie de l’ouvrage; le premier ou le
quatrième de tout l'ouvrage traite des causes qui déterminent
Ja formation'des vers chez l’homme ; le deuxième ou cinquième
iv AVERTISSEMENT.
donne le diagnostique, et enfin le troisième ou sixième et
dernier, les moyens thérapeutiques propres à combattre les
causes productrices des vers, et les vers eux-mêmes.
On trouvera aussi que le système de classification des vers
intestinaux en général n’est pas rigoureusement semblable à
ce qu’il est dans l'ouvrage allemand; mais ici nous avons
suivi les désirs de M. Bremser lui-même, qui nous a priés de
donner ce système tel qu'il est dans le Synopsis publié par
M. Rudolphi depuis son grand Traité sur les entozoaires.
Nous avons même cru faire encore mieux, en extrayant cetie
partie de la dissertation de M. Fischer, publiée l’année der-
nière sous les yeux mêmes de M. Bremser à Vienne, et qui
est sans doute ce qu’il y a de plus complet.
Les planches ne sont pas non plus rigoureusement sem-
lables à celles de l’ouvrage allemand. D'abord nous avons
été obligés de les réduire au formatin-8°, parce que le texte
a ce format, au lieu de celui in-4° de l'ouvrage original ;
ensuite, comme il y a une sorte de luxe dans les figures de
M. Bremser, nous en avons un peu diminué le nombre, en
conservant cependant toutes celles qui étaient évidemment né-
cessaires, même à des degrés différens. Nous avons composé
la neuvième planche avec la figure des pseudohelminthes ,
représentés d'une manière pittoresque sur le titre même de
l'ouvrage allemand. En général nous avons attaché une
grande importance à ce que nos figures, quoique lithogra-
phiées, rendissent exactement celles de M. Bremser, qui sont
véritablement excellentes.
Quant au texte même de l’ouvrage, nous n'avons dü,
comme on le pense bien, rien changer à tout ce qui est de
pure description ou de pure thérapeutique; nous aurions pu
ne pas faire de même de la partie étiologique qui traite de la
formation des organisations vivantes dans les corps organisés,
AVERTISSEMENT. - v
et nous aurions dû être d’autant plus naturellement portés à
l’abréger, que c’est cette partie qui nous a donné le plus de
mal ; mais comme les idées de l’auteur à ce sujet sont en rap-
port avec sa méthode thérapeutique, et que d’ailleurs il
pourra être assez agréable aux lecteurs de connaître queiques-
unes des idées de la philosophie allemande actuellement en
vigueur, nous nous sommes décidés à ne rien changer à ce
chapitre évidemment un peu long, sauf à donner quelques
observations à ce sujetdans l’appendice.
Nous ne parlerons pas du style d’un ouvrage de cette na-
ture ; il nous suffira de dire que nous avons täche de faire en-
tendre les idées de M. Bremser, et que pour cela même nous
n’ayons pas toujours voulu lui ôter la physionomie un peu
allemande conservée par le traducteur. Ce que nous savons,
c’est que M. Grundler paraît avoir eu beaucoup de peine,
quelquefois à entendre, et souvent à rendre son original,
comme au reste il le déclare dans la note ci-jointe.
Nous devons avertir, en terminant , que les notes conservées
au bas des pages appartiennent toutes à M. Bremser ou à
M. Grundler ; celles du premier étaient dans l’ouvrage ori-
ginal, ou ont été envoyées par lui au traducteur; celles du
dernier n’ont trait qu’a la thérapeutique; les nôtres ne se
trouveront que dans la troisième partie ou dans l’appendice.
Paris, 10 aoûl 1823.
H. D. DE BLAINVILLE.
vj AVERTISSEMENT.
Note du traducteur.
Les personnes versées dans la connaissance des deux langues ,
et qui liront l'ouvrage original , pourront seules juger de la dif-
ficulté que j'ai éprouvée à rendre les idées philosophiques de
M. Bremser de la manière claire que l’on demande en France ,
ce qui a pu dépendre de plusieurs causes ; la principale sans doute
vient de moi, qui ne me suis pas essentiellement occupé de ces
matières ; mais n’est-il pas possible que M. Bremser lui-même ne
se soit pas toujours exprimé d’une manière facile à saisir dans un
sujet (la théorie de la formation du globe et des êtres vivans ) en-
core si obscur? Aussi je ne veux pas assurer que j'y ai complé-
tement réussi : je dois même déclarer que je n'aurais peut-être
pas persisté dans mon entreprise, si d'après mon jugement , d’ac-
cord en cela avec un grand nombre de médecins allemands, an-
glais et même français , et malgré la critique aussi amère qu’in-
juste d’un Italien, qui paraît être M. Brera, je n’eusse regardé
l'ouvrage de M. Bremser comme tres-important pour la pratique ,
et surtout si M. de Blainville, auquel j'en fais ici mes remerci-
mens, n’ayait bien voulu m’aider de ses conseils, et enfin si M. de
Humboldt, qui exerce constamment un patronage si noble en fa-
veur de ses compatriotes , ne s’était intéressé pour la publication
de ma traduction, comme le prouve la lettre ci-jointe.
N. B. Les notes signées Br. m'ont été communiquées par M. Bremsez
dans une lettre qu’il a bien voulu m'adresser.
RAR ELLE EU VE LR ALU EUT EE PUR AVAL TU UE VU URL VULR VUVE RATTE LULU AAA LA EUR LEUR MUR ELT/D
PRÉFACE.
Ex publiant un nouvel ouvrage sur un sujet qui a
déjà été traité par beaucoup d’autres auteurs, on
contracte jusqu'à un certain point l'obligation de
faire connaître les raisons pour lesquelles on s’y est
déterminé. Je puis heureusement me dispenser de
recourir à de longues explications , comme cela
résultera tout à l'heure de la revue des ouvrages qui
ont quelque ressemblance avec le mien. Il est natu-
rel, ce me semble, de ne pas parler des écrits dans
lesquels il n’a été fait mention des vers intestinaux
qu’en passant, parce qu'ils n’ont rien de commun
avec mon livre. Mais il n’en est pas de même des
ouvrages d’Andry et de Leclerc, publiés il ya une
centaine d'années, et de celui de Van Dœvern,
connu depuis cinquante ans; ils ont en effet quelque
analogie avec le mien; car tous les trois ont traité de
P’helminthologie, comme moi, sous le double rap-
port de l’histoire naturelle et de la médecine pra-
tique; mais, lorsque ces médecins écrivaient, V’hel-
minthologie était encore au berceau.
7 PREFACE.
Les ouvrages couronnés de Bloch et de Goëze,
noms connus sans doute de tous mes lecteurs, ne
ressemblent que très-peu au mien. Les écrits de ces
deux auteurs ont un intérêt plus réel pour les natu-
ralistes, et particulièrement pour les helmintholo-
gues, que pour les médecins praticiens.
Mais, abstraction faite de la ressemblance que
ces différens ouvrages peuvent avoir avec le mien, ıl
faut encore les regarder presque comme s'ils n’exis-
taient pas; car on ne les trouve plus chez les libraires.
Zeder et Rudolphi ont enrichi l’helminthologie
de beaucoup d'observations nouvelles : leurs ouvra-
ges, quoique classiques , n’ont cependant qu'un rap-
port très-éloigné avec le mien. M. Rudolphi, qui
mérite à juste titre qu'on l'appelle le premier des
helminthologues (car depuis long-temps aucune
branche de la zoologie n’avait été développée aussi
complétement que celle qui regarde les vers intesti-
vaux, dans son Traité d’entozoologie ); M. Rudol-
phi, dis-je, a consacré quelques chapitres aux mé-
decins dans le premier volume de son incomparable
ouvrage : cependant on n’y trouve pas ce qui interes-
serait justement le plus les médecins praticiens , qui
ne font pas ordinairement une étude particulière de
l’histoire naturelle, savoir les figures des vers intes-
PRÉFACE. ; u;
tinaux de l'homme et les règles de thérapeutique
propres à combattre chaque espece en particulier ,
choses auxquelles cet auteur, d’apres son plan, ne
pouvait pas donner un assez grand développement.
Les ouvrages encore recherchés aujourd’hui avec
lesquels le mien peut encore être mis en comparaison
se bornent (à l’exception peut-être de quelques-uns
que je n’ai pas vus, el de quelques dissertations fran-
caises qui ne se, Lrouvent pas ordinairement chez les
libraires ) à ceux de Joerdens, Brera et Bradley; je
craindrais d’offenser ces trois médecins, si je mettais
dans la même catégorie le livre insignifiant sur le
même sujet de M. le docteur Albrecht, et plusieurs
autres semblables. Je ne puis cependant pas regarder
ces trois auteurs comme ayant répandu beaucoup
de lumière sur la connaissance des vers intestinaux
propres à l'espèce humaine, ces auteurs n'étant pas
des helminthologues praticiens.
Joerdens s’est contenté de donner des descriptions
et des dessins des vers intestinaux de l’homme , mais
il y à entremélé une si grande quantité d'autres ani-
maux qui ne sont pas des vers intestinaux, que Ceux
qui ne sont pas bien au courant de l’helminthologie
ne savent trop à quoi sen tenir. Du reste, cet auteur
iv. PREFACE.
n'a pas envisage les vers intestinaux sous le rapport
de la pathologie, ni sous celui de la thérapeutique.
M. Brera a rédigé fidèlement ses lecons confor-
mément au titre qu’il leur a donné, c’est-à-dire , que
ce ne sont que de véritables lecons sur les princi-
paux vers intestinaux propres à l'espèce humaine. Ces
lecons ont été faites dans le genre de celles que l’on
trouve ordinairement dans les thérapeutiques spé-
ciales, dans le chapitre des vers intestinaux. Mais
M. Brera a développé ce sujet beaucoup plus com-
plétement que l’on n’a coutume de faire, et il a eu
soin de citer les ouvrages qui s’y rapportent. Malgré
quelques inexactitudes que l’on rencontre dans ce
travail, et que je passe sous silence, il est toujours
trés-flatteur pour l’auteur que son petit livre ait été
traduit en peu de temps, une fois en allemand et
deux fois en francais. Brera aurait dû se borner à ce
travail sur l'helminthologie; les supplémens, quoi-
que volamineux, qu’il y a ajoutés depuis, ne peu-
vent être regardes, selon moi , que comme un amas
d'erreurs et d'idées hasardées, et j’ai peine à croire
que l’on puisse en prendre une autre opinion. J'e prie
mes lecteurs de veuloir bien regarder tout ce que
jen dis dans plusieurs endroits de mon ouvrage,
PRÉFACE. v
sous le seul point de vue scientifique; car sans cela
ils pourraient croire que j'en veux à la personne de
|
M. Brera, ce dont je suis cependant bien éloigné,
n'ayant jamais eu aucune espèce de relation avec lui.
Au reste, mes observations critiques sur son livre
sont toujours accompagnées de la citation des en-
droits qui s’y rapportent.
Bradley n’a également fait mention dans son ou-
vrage que des vers qui séjournent dans le canal intes-
tinal de l’homme. Il ne dit rien de nouveau, et son
livre n’a pas été accueilli avantageusement, même
par ses compatriotes. Ses dessins sont en outre en
"grande par ie inexacts.
Par cette revue, un peu rapide à la vérilé, mais
complète, on voit donc, ce m& semble, qu’il n'existe.
pas encore d'ouvrage à l’aide duquel les médecins
on puissent connaître tous les vers observés
jusqu’à présent dans l’homme, et tous les moyens
thérapeutiques propres à combattre chaque espece
de vers en particulier. C'est pour remplir cette la-
cune, que Jai travaillé depuis un grand nombre
d’anndes, comme cela pourra malheureusement se
voir assez aisément dans plusieurs repeuitions qui se
sont glissées dans cet ouvrage, et que l'on voudra
bien sans doute me pardonner.
vj | PRÉFACE.
Il y a à présent. plus de douze ans que M. de
Schreibers fut mis à la tête de la direction du cabinet
impérial d'histoire naturelle de Vienne. Il s'était
déjà livré depuis long-temps à l’étude de l’helmin-
thologie. Plusieurs objets scientifiques furent cause
que je fis sa connaissance particulière, et c’est depuis
cette époque, c’est-à-dire, depuis douze aus, que
je m'occupe exclusivement d’helminthologie. La
collection de vers intestinaux qui se trouve dans le
cabinet impérial de Vienne, et qui n’a pas de pa-
reille dans le monde, fera voir si j'ai travaillé avec
quelque succès. Mon collègue, M. Joseph Natterer
et M. son frère Jean Natterer m'ont aidé d’abord
dans mes recherches sur les vers dans les animaux et
dans la formation de cette collection. Le dernier.de
ces deux savans l’a enrichie considérablement, sur-
tout de vers de poissons de mer trouvés dans les
voyages qu'il a faits en Hongrie et le long des côtes
de la mer Adriatique et de la Méditerranée. Cepen-
dant j'étais seul chargé de la description, de la clas-
sification et de’la conservation des vers recueillis. Je
puis dire sans exagération que j'ai examiné moi-même
au moins vingt-cinq mille animaux sous ce point de
vue , et cela m’a valu, comme cela peut se concevoir
aisément, une grande quantité de découvertes, tant
PRÉFACE. vi;
sous le rapport de l'histoire naturelle que sous celui
de la médecine pratique. J'aurai beaucoup d’obliga-
tions à ceux qui voudront bien soumettre mon ou-
vrage à une critique sévère , et je promets d'en profi-
ter à la première occasion. !
Je ne parle dans cet ouvragé que des vers qui ont
été réellement trouvés dans le corps de Thomme, et
que les helminthologues reconnaissent positivement
comme y ayant pris naissance. C’est pour cette raison
que j'en compte moitié moins que M. Brera ; mais la
suite de l'ouvrage prouvera, je l’espère, que j'ai eu
raison de n’en pas admettre davantage.
Je suis loin de regarder mes descriptions comme
parfaites, mais je puis garantir l'exactitude des des-
sins ; ils ont été faits sous mes yeux, et d’après nature,
à l'exception de deux ou trois, qui ne sont que des
copies; de ce nombre sont le filaire, copié d’après
un dessin de M. Rudolphi, sur la troisième plan-
che, l’hamulaire lymphatique et le polystome pin-
guicole, dessinés d’après les figures de Treutler.
L’extrémité de la queue du strongle, représentée
figure 3c pl. 111, n’est aussi qu’une copie. Toutes
les figures qui se trouvent neuvième planche, dans le
groupe des pseudohelminthes ,ne sont que des copies,
à l’exception de la fig. f, qui est un dessin original.
viij PRÉFACE.
J'ai cité un tres-grand nombre d'ouvrages; mais’,
pour ne pas être obligé de revenir un grand nombre
de fois à la citation du même, j'ai cru devoir réunir
les titres de ces ouvrages par ordre alphabétique,
dans une table particulière à la fin du traité. Afin que
mes citations portent le cachet de la vérité, je me suis
fait un devoir de lire moi-même tous les ouvrages
mentionnés, à l'exception de quelques-uns marqués
ar un astérisque, que je n’al pas pu me procurer.
sq Pas P
Vienne, août 1818,
L'AUTEUR.
DR" US CENNAAU LES SS
TABLE
DES MATIÈRES.
PREMIÈRE PARTIE. — CHAPITRE PREMIER.
Su la formation des organisations vivantes dans les corps organisés.
Diverses opinions sur Ja formation des vers intestinaux..."
On ne les trouve ni dans la terre, ni dans Veausr ann Anka St
Des vers de terre et d’eau ne prennent pas une autre forme dans le
borps animabun sd A ae ne salat
Les vers intestinaux ne peuvent vivre que dans le corps humain ou
animal. Drcmwen ROME UE ame DD 0 dE UE FINS EMI
Examen de la question : Gomment ces vers peuvent-ils arriver dans
le corps d’autres animaux ? La génération des vers ou deleurs œufs
s’opère-t-elle par Vintermediaire des alimens ?...- eures.
Preuves contre... ET D pate ge d'air BR NAT
Les vers peuvent bien vivre comme parasites pendant quelque temps
in autrk.animal. à à ran SERRES MEME PTE d énstey
Ligules daos l'homme... ART TRE. > SRG En HE
Observation singulière faite par M. Brera sur l’inoculation d'œufs de
SERA RO TERRES DURS BARS ME EEE EE re
Les parens peuvent-ils communiquer des vers intestinaux à leurs en-
fans pendant l'acte de la génération, elC..---:: BR PARA eher
Digression de la formation des vers intestinaux sur la formation
probable de notre terre... °°°" RE RE
On ne trouve pas des ossemens d’hommes dans les terrains secondaires.
Nous pouvons distinguer trois genres de corps sur noire terre. ....
L'acte de la vie est un acte de fermentation... dojo XP
La différence des animaux wiammifères vivipares et des animaux
ovipares est plus grande qu'on ne Va cru ordinairement. ....+-
Tl parait qu'il a lieu, pour ainsi dire , chez les vers intestinaux , une
répétition de tousies modes de générations d'organisations animales.
ww #1
11
99
109
\
ij TABLE DES MATIÈRES.
CHAPITRE DEUXIÈME.
Division systématique des vers intestinaux en LS PTT Eee 117
CHAPITRE TROISIÈME.
SECTION 1.
Description des vers qui séjournent dans le canal intestinal de l’homme 143
I. Le tricocephale:....i... N Er AN Rec ıb.
I. L’oxyure vermiculaire........ N RE 149
Il. L'ascaride lombricoïde : . . 22 22.242" 4 0 7 157
IV. Le bothriocéphale SE a ee DE neue Pie de 163
Be Bol à Qt ALT ae ES 178
® SECTION "1.
Description des vers qui séjournent hors du canal intestinal de
hommes eut auf az el au» AU 198
MALE dragonneamgni. Sal A true N Ina doce ba ad ib
Nom et histoire de ce ver, et diverses opinions sur sa nalure.... 199
Deseniptiomdeipmverti. au, use, dar u eve, Aa 217
Du diagnostic de Vexistence du dragonneau dans l’homme ..... sa203
Des accidens qui arrivent pendant la durée de la maladie occasionde
par la présence du dragonneau ; et de son traitement. ......... 230
VI Poeme a een bite à ana 250
VI. Da strongle Bean end pre is as 253
Des trematodes...........0. SN TRE A AIR re 265
Be N ron Len vale Ren PNG Eat tb.
X. Dapolystome pinguicole à 44 4009 40102228 de na dense Le 272
Des cystica ou vers vésiculaires....................... ER 273
XI Du cysticerque........... se er 280
XI. De INchiibesonmwne N. Reise 293
Sur-les pseudohélminthes,. . \......a..0. 20... 0. rl: 319
I; Ditrachycère rude de Sulzer...........,,........../ 000 320
IT. Ascaris stephanostoma. ............ RE. ART A ae à Le 322
III. Ascaris conosoma de Jœrdens. ...... EEE «te ae: ıb
IV. Cercosoma de Brera......... Re ALLÉS ae Wann Ai 1177325
V. Hexathyridium venarum de Teutler. ...................... 327
VI. Diacanthos polycephalus de Stiebel. ...................., 330
VAL Des versules\dents. . dt Lue:. 0.0 EN NR 332
\ ...
TABLE DES MATIERES. ji}
SECONDE PARTIE — CHAPITRE QUATRIEME.
Des causes de la formation des vers dans le canal intestinal de
UI NEE BR ES ENS AR 14827
A F 9
CHAPITRE CINQUIEME.
Du diagnostic de la présence des vers dans le canal intestinal, et
des déranc os qu'ils peuvent occasioner............ PANNE 57
SypLomeRn Banane. DEAN NOIR ib,
Quelques cas où on avait présumé que les vers avaient été la cause
de la maladie et même de la mort........... Sa AE ISO
Ils causent divers embarras dans l'estomac. ................... _ 384
On à tort de croire qu’ils perforent les intestins. ...:.......... 385
On les accuse d’être une des causes de l’étranglement d’hernies... 394
CHAPITRE SIXIEME.
Du traitement hygiénique et thérapeutique contre les vers intesti-
DAUSE Ne eye OAI RER MAR ARE DER 1 NER N AN 400
SECTION
Des remèdes en général. ..2.............. MAS IS EU M PT;
Raison probable pourquoi nous en avons tant...... SE PET PA 1b.
Expériences faites avec des remèdes hors du canal intestinal... . 4o4
I. Des remèdes qui agissent sur les vers d'une manière mécanique.. 407
IT. Des remèdes qui agissent d’une manière spécifique contre les vers
TN LEP en RE AR EME NEN. ala PAS RN ie
Remèdes à employer exterieurement. ........ NAN EUROS ea ME
III. Des remèdes purgatifs. .......... A A a AE RUN EM \ 433
SECTION U.
Du traitement particulier qu'il faut employer contre chaque espèce
dorer di ie NEN RAU N, Bel RN SEN RN CLEAN ! 444
Traitement particulier contre h EU (AE AN OR EN. ıb.
— core Koxyure vermieulaire. "241.1... CHE EE 45
— contre les ascarides lombricoides. ............ AE Be Ep) 451
— contre, les cestoides ........... BE DA CES LOE N DIN BE: 454
SECTION IL. )
Des différentes méthodes de traitement contre Jetænits ts etats 455
SECTION IV.
Méthode de traitement de l’auteur. .................. SAS 486
Le par M. de Blainville. .......... D'RANTRLS AE 3 150
Table d'auteurs par ordre AMADÉPIEUe a Las Hl dern, 554
ne Ft er ans a ee
vier
TRAITÉ
SUR
LES VERS INTESTINAUX
DE L'HOMME.
AAA AAA AAA AA AAA EE AA AT AAA AAA LUI AAA
PREMIÈRE PARTIE.
CHAPITRE PREMIER.
Sur la formation des organisations vivantes dans les
corps organisés.
Th. les infusions de substances tant végétales qu’a-
nimales , il se forme, après un certain temps, des
animaux vivans, mais qui ne peuvent être aperçus
qu’au moyen du microscope. Personne ne doute de ce
fait, seulement on n’est pas d’accord sur le mode de
form ationde ces êtres ; en effet on ne sait pas encore
si ces animaux sont sortis d'œufs, qui auraient pu se
trouver dans la substance soumise à l’infusion , dans
l'eau ou bien dans l’air environnant, ou enfin s'ils
sont un produit de la décomposition et de la fermen-
tation de la substance infusée. On n’est pas non plus
1
‘
2 SUR LES VERS INTESTINAUX
d'accord si chaque corps organisé vivant doit être né-
cessairement produit par d’autres corpsorganisés sem-
blables à lui sous tous les rapports, ou bien si quelques-
uns, dans des circonstances favorables, ne peuvent
pas se former spontanément. Les naturalistes appel
lent cette dernière formation generatio spontanea ou
æquivoca ; je crois que l’on devrait l’appeler plutôt
formatio primitiva; aussi je me servirai toujours de
cette dernière dénomination.
Beaucoup de nos naturalistes modernes n’ont pas
seulement regardé la matière verte de Priestley, les
moisissures, les tremelles, les champignons, les
nostocs, les infusoires, les animalcules spermati-
ques , etc. „comme des organisations primilives , mais
ils ont aussi considéré comme telles, les poux, les
cirons et les vers inteslinaux.
Comme la plupart de ces derniers se distinguent
trop clairement par la grosseur , par un canal intesti-
nal souvent complet, par des organes sexuels séparés,
même sur des individus différens, par une structure
musculaire, etmême par des nerfs, comme M. Otto
Ya dernièrement démontré, de tous les animalcules
microscopiques et de ces corps organisés encore si
douteux, que quelques auteurs les rangent parmi les
vegelaux, ilne sera pas sans intérêt de s'occuper de
l’origine des vers intestinaux , et d'examiner les diffé-
rentes opinions émises sur ce sujet. ÿ
En examinant la question rigoureusement , ıl est
évident qu'il ne peut y avoir que deux origines
pour les vers dans le corps de l’homme et dans
‘DE L'HOMME. 3
celui des animaux. Dans l’une ils proviennent du
dehors, et dans l’autre leur source est dans le corps
animal lui-même, où ils se forment spontanément.
Dans le premier cas, ils parviennent dans le corps
animal on à l’état de vers , ou à l’état d'œufs, n’im-
porte que la mere qui leur a donné naissance soit
androgyne , ou qu’elle ait eu besoin, pour être fécon-
dée, de l’action d’un individu mâle, et encore plus
d’où elle provient elle-même.
Dans le second cas, ces vers, ou au moins ceux
qui se trouvent pour la premiere fois dans un indi-
vidu, doivent être nécessairement regardés comme
des animaux sans parens, comme une production
spontanée de la substance vivante (de la matière or-
ganique) qui, partout et de toute éternité, tend à
former des êtres distincts et complets en eux-mêmes,
ou, en d'autres termes, les vers doivent leur existence
à une formation primitive. Cependant, comme cette
dernière supposition déplait singulièrement à quel-
ques médecins et naturalistes, qui la regardent pres-
que comme un blasphème, l’on s’est efforcé, pour
n’etre pas obligé d'adopter cette opinion, de decou-
vrir d’autres manières par le moyen desquelles les
vers pourraient arriver dans le corps animal. Nous
allons examiner successivement les diverses opinions
à ce sujet.
Les auteurs qui veulent rendre la chose plus facile
à concevoir , à ce qu'il leur semble, supposent que
les vers intestinaux proviennent des vers de terre ou
d’eau , et qu'ils ont pu s’introduire dans le corps ani-
ra
4 SUR LES VERS INTESTINAUX
mal avec les alimens, soit à l’évat de vers, soit à ce-
lui de germe ou d'œuf.
Les défenseurs de cette hypothèse s'appuient sur la
prétendue observation , que les vers intestinaux de
Vhomme et ceux des animaux se trouvent également
dans l’eau ou dans la terre; mais nous allons voir
que cette hypothese est basée sur des faits mal ob-
servés. |
Linné a cru à tort avoir trouvé la douve du foie
(distoma hepaticum), le tænia large (tenia lata) et
l'ascaride vermiculaire (ascaris vermicularis) dans des
marais ou dans des racines de plantes pourries ;
car Ouo-Frédérie Müller‘ a prouvé, jusqu'à l’évi-
dence, que cet auteur s'était trompé, qu'il a encore
confondu le bothriocephalus solidus (Rud. ) tantôt avec
la douve du foie, tantôt avec le tænia large (teenia
lata) , et qu'il confond également ce dernier avec le
tænia du cheval. Il paraît également qu'il a regardé à
tort un ver qui vit dans les marais, COMME un asca-
ride vermiculaire (ascaris vermicularis )?. Linne,
homme du plus grand mérite, ne peut cependant être
considéré en aucune manière comme juge com-
pétent dans les discussions sur l’helminthologie. Il a
vu et examiné trop peu de vers intestinaux, car sans
cela il n’aurait pas nié dans les tænias la présence de
la tête, que l’on peut voir avec tant de facilité sur la
grande espèce du cheval.
Gadd a commis à peu près la même erreur que
x Naturforscher, st. 18, 5. 21-37.
a Verm. terr., vol. ı, part. 2, p. 36.
DE L'HOMME. 5
Linné; voici comme il s'exprime : « Le même tænia
que Linné a rencontré pendant son voyage en Lapo-
nie (1734), dans une source ferrugineuse, a été
trouvé par moi, en 1747; dans un endroit semblable.
Ce tænia était articulé, plane, et pourvu de deux
ouvertures latérales (tenia articulata, plana, osculis
lateralibus geminis ), et par conséquent doit être re-
gardé comme le même qui séjourne dans l'homme. »
L’cn voit, par la définition que Gadd a donnée de ce
ver, et par la conclusion qu’il en a tirée, avec com-
bien peu d’attention il l’a examiné. Du reste, Gadd
lui-même n’a pas la prétention d’être helminthologue.
Unzer regarde comme une chose prouvée , que les
lombrics ou vers de terre, et les ascarides sont les
mêmes animaux, et que la couleur différente de ces
derniers ( comme si toute leur différence ne consis-
tait qu’en cela) provient du lait qu'ils rencontrent et
mangent souvent dans le canal intestinal de l'homme.
Cet auteur a également soutenu avoir recueilli dans
uue fontaine des morceaux de tænia; mais Ouo-Fré-
déric Müller lui ayant demandé quelques détails plus
circonstanciés sur ce fait, Unzer répondit : « Il se
pourrait bien que ce seul échantillon eüt été déposé
ou par un poisson ou par un homme. »
Transeat cum celeris.
Tissot communique, dans une lettre à Zimmer-
mann, l’histoire de la maladie d’un jeune garçon,
: Gæœze. N. G. D. Eingew, p. 15
6 SUR LES VERS INTESTINAUX
dans laquelle il est encore question d’un ver intesti-
nal analogue à un ver extérieur trouvé dans une fon-
taine. Voici ses propres paroles : « Mane in lecto cum
levi ani pruritu dejicit simul et teretem et nascentem tæ-
niam, filum nimirum crassum, album æquabile, viginti
quinque circiter pollices longum, quatuor aut quinque
circumvolutum giris, lisque omnind similem , quas in
fontibus Sueciæ invenit LU. Linnœus et in fonte Helve-
tico amicus medicus. » Par ces details, on ne peut pas
savoir au juste quel ver Tissot a vu, encore moins à
quelle espèce de ver trouvée par Linné il ressemble,
mais encore beaucoup moins quelle forme avaient les
vers que son ami a observés, et comme les connals-
sances de cederniersousle rapportde l’helmintholo-
gie nous sont tout à fait inconnues, son observation
ne peut pas trouver place parmi les preuves qu'il
existe dans l’eau des vers analogues aux véritables en-
tozoaires.
Beireis raconte aussi qu'il a découvert, dans la
fontaine de Eudger, près Helmstædt, et dans une
fontaine pres Ballenstedt, l’ascaride lombricoide
de l’homme. Cependant il résulte de l’ensemble de sa
description, que ce ver, malgré les trois petits bou-
tons et le sucoir de la tête, n’était autre chose que
le même animal qu'Ouo-Frédéric Müller: a de-
crit, et que l’on voit souvent dans l'eau. Le ver de-
crit par Beireis était blanc comme de la neige, 1l
n'avait que trois ou qualre lignes de longueur, et de-
ı Verm, terr. hist. , vol. 1, part. I, p. 36.
DE L'HOMME. 7
vait parvenir dans les intestins de l’homme (lieu,
selon cet auteur, le plus favorable pour la nourri-
ture et pour la propagation des vers ), à une grosseur
pareille à celle de l’ascaride lombricoïde. Beireis ne
dit rien de la structure interne du ver, non plus que
de la conformation de la fin de la queue, etc. : c’est
ce que Goze a remarqué comme nous. L'expérience
nous démontre cependant, que chaque animal se
trouve le plus convenablement dans les endroits que
Ja nature lui a assignés. Les animaux du sud ne sup-
portent pas le climat froid du nord; les rennes, par
exemple, nés en Laponie, ne peuvent vivre en Alle-
magne, pas même dans la partie septentrionale, et
encore moins dans l'Italie. L’on ne concoit pas, par
celte raison, comment un ver, destiné d’ailleurs à
vivre dans l’eau froide (Beireis en a trouvé une fois un
au mois de décembre), pourrait supporter aussi bien,
en arrivant dans le corps animal, des changemens
si subits et si brusques sous le rapport de la tempé-
rature du milieu et de la nourriture, de manière que
ces changemens opéreraient encore en lui un déve-
loppement assez considérable pour le faire parvenir
à la grandeur de l’ascaride lombricoïde. Cependant
nous observons que le contraire arrive chez tous les
autres animaux, quand ils se trouvent soumis à des
circonstances à peu près semblables, Beireis a avancé
par conséquent une pure hypothèse , en disant que
les lombricoïdes et les vers qu'il a rencontrés dans
l’eau sont'les mêmes, excepté que les premiers ne
sont qu'un peu plus développés.
8 SUR EES VERS INTESTINAUX
Gmelin ‘ donne la description de tænias qu’il a ob-
servés dans une eau stagnante, et il les désigne avec
raison sous le nom de tænia dubia; car il est certain
que ces tænias douteux n'étaient autre chose que
du frai de crapauds et non pas de grenouilles,
comme Pallas? l'a soutenu. Cela résulte , non-seule-
ment de la description, mais se confirme encore da-
vantage par la figure, si on la compare avec la planche
xx de Resel.
L'on compte également Leeuwenhoeck parmi les
personnes qui ont trouvé, dit-on, des vers intestinaux
hors du corps animal. Cependant son mémoire , qui
a donné lieu à cette assertion, nous apprend unique-
ment que l’on observe des vers dans le foie des mou-
tons et des beufs, et qu'il y a aussi de trés-petits vers
dans la terre, deux choses dont personne, jusqu à
présent, n’a douté. Du reste, il n’est pas même ques-
tion, dans ce mémoire , d’une comparaison entre ces
deux espèces de vers, et encore moins que cet auteur
ait regardé les vers de terre comme identiques avec
les douves du foie.
Schæffer* a également prétendu avoir vu des
douves du foie dans l’eau ; cependant il est très-pro-
fable qu'il s’est trompé, car Otto-Frédéric Müller ni
aucun autre naturaliste n’ont pu y en découvrir.
Supposé même que Schæffer ait-trouvé des douves
ı Reisen 3ter Theil. , s. 302 , tab. 30.
3 Nordische beitr., 1,5. 42.
3 Die Egelschnecken , s. 29.
DE L'HOMME. 9
du foie dans l’eau , il nous reste toujours à soupcon-
ner que ces vers ont pu y avoir été déposés par des
brebis qui paissaient près de là.
Hahn, dans une lettre à Pallas sur une Epizootie
qui avait régné tout le long de la rivière Ob, en Rus-
sie, croit quelle pouvait être attribuée à ce que les
petites rivières et eaux stagnantes de ce pays étaient,
à cette époque, remplies d'une quantité considérable
de filaires ( gordius aquaticus ). Il pense que les bœufs
et les chevaux qui furent atteints de cette maladie
les avaient avalés en buvant , et que ces vers s’étaient
frayé une route à travers les parois de l'estomac,
pour arriver dans les poumons et dans le foie, où on
les a trouvés. Il fait observer que ceux de ces anı-
maux auxquels on a donné à temps des sels et des
vermifuges furent sauvés.
A juger d’après ce récit, il paraît que l’on n’a pas
du tout rencontré de vers dans l'estomac des ani-
maux atteints de l’épizootie. Quant à moi, il me
semble plus probable que ces vers se sont engendrés
dans leurs poumons, comme cela a lieu très-souvent
chez les moutons, et qu’ensuite ils les ont commu-
piqués aux eaux dans lesquelles ils s’abreuvaient,
par l’expectoration ; car Pallas dit lui-même, comme
nous le verrons plus tard, quand il sera question
du filaire de Médine ( félaria Medinensis), qu'il a
observé très-fréquemment le gordius aquaticus dans
l'eau de quelques contrées , sans avoir entendu dire
* Nord. beitr., st. 1, p. 160.
10 SUR LES VERS INTESTINAUX
qu’on l'ait jamais rencontré ni dans l'homme ni dans
les animaux :.
Voilà, à ce que je crois , tous les exemples de vers
intestinaux regardés comme ayant pris naissance
dans la terre et dans l’eau , séparés du corps animal,
ou , en d’autres termes, ce sont tous les faits venus à
ma connaissance qui sont adoptés comme preuves,
que les vers intestinaux doivent être considérés
comme semblables , sous tous les rapports, aux vers
que l’on trouve dans la terre et dans l’eau. L'on voit
aisément quel peu de cas on doit faire de pareilles
preuves; car on peutsupposer queles vers trouvés dans
ces circonstances n'étaient 'pas les mêmes que ceux
qu’on observe daus l’homme et dans les animaux ; ou
bien, cela füt-ıl vrai, ıl resterait encore à supposer
que ce pouvait être ou des hommes ou des animaux
qui les avaient rendus. En dernière analyse, si l’on
réfléchit que chaque espèce d’animal serencontre plus
fréquemment dans le lieu que la nature lui a assigné
que partout ailleurs, cela doit faire naître en nous en-
core plus de doute sur les observations mentionnées
ci-dessus ; car si les vers que l’on découvre assez
souvent dans l’homme et dans les animaux séjour-
naient originairement dans l’eau ou dans la terre,
l'on devrait les rencontrer encore beaucoup plus
: Le docteur Karl a également trouvé en Moravie, dans les
poumons du bœuf, une espèce de strongle (strongylus filaria) ,
que je w’ai rencontrée que dans les moutons, les antilopes etles
chamois. (Br.)
DE L'HOMME. 11
fréquemment dans ces derniers lieux, chose qui
n’est certainement pas.
Quoique l’on ne puisse pas aisément combattre
l'exactitude de cette conclusion, et que l’on ne puisse
pas non plus prouver la présence de vers intestinaux
hors du corps animal , les défenseurs de cette théo-
rie, pour n'être pas obligés de V’abandonner tout à
fait, ont cherché à la défendre par une autre hypo-
thèse; ils prétendent que les vers de terre et d’eau
ne prennent la forme spécifique des vers intestinaux
qu’en arrivant dans le corps animal. D’après cette as-
sertion, le changement de séjour peut produire un
changement de conformation. M. Brera est surtout
très-porté pour cette opinion; et, pour lui donner
plus de poids, il dit que plusieurs plantes changent
peu à peu leur forme originelle, quand elles se
trouvent soumises à l'influence d’une culture diffé-
rente et d’un climat étranger. Il cite, entre autres
chosés, un exemple: de grains d'avoine, qu’un sol-
dat avait avalés pendant l'hiver, et qui, pendant l'été
suivant, commencèrent à germer dans son estomac,
à pousser des racines et même des tiges, non pas ce-
pendant de la même manière que cela a lieu lorsque
ces semences sont mises dans la terre; observation
qui me paraît la seule vérité de toute cette citation.
Cependant M. Brera ne semble pas avoir réfléchi
que le changement de forme parmi les plantes n’a pas
lieu subitement, et que cela n'arrive que tres-leute-
* Memorie, p. 420.
12 SUR LES VERS INTESTINAUX
ment et après plusieurs générations. Si l’on voulait
même supposer que les vers eux-mêmes ne s’intro-
duisent pas dans le corps animal , et que ce ne sont
que leurs germes, ou plutôt leurs œufs fécondés qui
y arrivent, l’analogie seule ne nous met cependant
pas en droit de croire que les petits qui écloraient des
œufs prendraient une forme différente de celle de
leurs parens, car la forme spécifique leur a été don-
née par l'acte de la generation, et elle ne se laisse
plus changer par les circonstances au moyen des-
quelles ces jeunes vers reçoivent leur développement
complet. D'une semence placée dans une terre ou
sous une zone quelconque, il sortira (supposé qu’elle
ne périsse pas ) la même plante dont elle provient,
n'importe que cette plante croisse originairement au
Cap de Bonne-Espérance ou bien au pôle du nord ,
seulement avec la différence qu’elle se développera
mieux dans sa mere-patrie. Un œuf de coucou, par
exemple, produira un animal semblable, n'importe
par queloiscau il aura été couvé. Arioste dit, par cette
raison, três-à-propos :
Da vacca nas:er cerva non vedesti,
No mai colomba d'aquila*.
Cependant les naturalistes au-delà des Alpes ne
paraissent pas vouloir ajouter foi aux vers de leur
compatriote; car Gautieri’, par exemple, ne doute
: Ces vers sont également cités dans l'ouvrage de Vallisnier:.
? Ouvrage cité, p. 81.
DE L'HOMME. x
nullement que les cestoides, les échinorbynques,
les nématoïdes et les hydatides puissent se dévelop-
per des mêmes germes.
On me fera peut-être l’objection suivante : quel-
ques animaux subissent, avec le temps, une méta-
morphose, quoique incomplète, dans laquelle ils
passent à l’état de chrysalide , comme cela arrive chez
les insectes. Ils éprouvent alors un changement si
considérable dans leur structure extérieure, que l'on
ne reconnaît plus leur forme primitive dans l'animal
complétement développé. Cela se voit, par exemple,
chez les crapauds et les grenouilles. Ne pourrait-on
pas également supposer qu’un semblable changement
lent dans la structure extérieure et intérieure püt être
accéléré ou retardé par quelque différence dans le sé-
jour , la température et la nourriture ? Nepourrait-on
pasencore admettre que ces mêmes circonstances pus-
sent donner à la structure un tout autre mode de con-
formation , de manière qu’il en résultât un change-
ment tel, qu'un ver, par exemple, qui aurait pris
naissance dans son élément naturel, c’est-à-dire dans
l’eau ou la terre, et qui se serait développé par la
suite dans le corps animal, ne se ressemblerait au-
cunement dans ces deux états.
Je réponds à cela : les vers en general, et les vers
intestinaux en particulier n’éprouvent jamais un pa-
reil changement de forme. Il y a cependant quelques
exceptions, dont je parlerai plus tard ; mais dans ce
cas nous pouvons clairement voir la transition d’une
forme à une autre. On a examiné dans le cabinet
14 SUR LES VERS INTESTINAUX
d'histoire naturelle de Vienne cinquante mille ani-
maux au moins, dans le but de découvrir des vers
intestinaux. Ceux que l’on a trouvés, et dont le
nombre n’est pas peu considérable, ont tous passé
plusieurs fois par mes mains ; mais je n’ai jamais été
embarrassé, en voyant un ver vivant, pour dire sur-
le-champ , si c’etait un ver intestinal , ou bien un ver
de terre ou d’eau.
Tous les vers vivans que l’on a trouvés dans les
animaux examinés portaient les caractères spécifiques
des vers intestinaux. On a bien remarqué quelquefois
d’autres vers dans l'estomac de ceux qui s’en nour-
rissent, mais ces vers étaient moris et presque tou-
jours à moitié digeres, comme par exemple des larves
d'insectes. Dans un nombre de recherches aussi con-
siderable, il aurait dü arriver quelquefois que l'on
eût rencontré des vers vivans provenant de la terre ou
de l’eau, et que l’on eût observé la transition gra-
duelle de leur forme en celle des vers intestinaux ;
mais pareille chose n'a jamais eu lieu.
Je suppose, sans vouloir cependant l’affirmer , que
la structure des nématoïdes et des trématodes ait pu
donner lieu à une illusion, à cause de la légère res-
semblance qui existe peut-être entre ceux-ci et cerlains
vers de terre et d’eau, de manière que l’on se serait
cru en droit de regarder de véritables descendans de
ces derniers comme, nés dans le corps animal. Mais,
je le demande , où trouvons nous hors de lui des vers
que nous puissions regarder comme parens primitifs
des echinorhynques, par exemple. Renier a cepen-
DE L'HOMME. 15
dant compris parmi les vers intestinaux ( Vermi,
Tab. vi) un échinorhynque (echinorinco scudato)) pro-
venant de la mer Adriatique; mais sitôt que cet au-
teur eut vu chez moi de véritables échinorhynques,
il fit sur-le-champ, du ver qu’il avait observé, un
genre particulier. Je demande ensuite que l’on me
désigne, parmi les vers de terre ou d’eau , ceux que
l’on peut regarder comme la souche de l’ordre, si riche
en espèces et en genres, des cestoides; que l’on m’in-
dique enfin un ver hors du corps animal, ou bien
un être quelconque vivant, duquel on pourrait dé-
river l’origine des hydatides, qui ne se trouvent pas
même , à ce que l’on peut juger jusqu’à present, dans
tous les genres d’animaux, et qui vivent seulement
dans le corps des mammifères, et principalement dans
les animaux rongeurs et ruminans, animaux qui
broient leur nourriture très-soisneusement. Si l’on
voulait par hasard regarder comme tel quelque ani-
mal du genre medusa de Linnæus, je prie que l’on
m'indique par quel chemin il aurait pu arriver de la
mer Adriatique dans le foie d’une souris domestique
de Vienne, ou dans le mésentère d’un chamois qui
vit dans les Alpes de la Styrie.
Je crois avoir démontré par cètte discussion d’une
manière suffisante que les vers intestinaux ne peu-
vent pas être des descendans de vers, qui vivent
originairement dans l’eau ou dans la terre, d’où il
résulte par conséquent naturellement, que l’on doit
en former un ordre particulier, comme d'êtres qui
Peuvent seulement exister dans le corps del’hommeet
16 SUR LES VERS INTESTINAUX
dans celui des animaux. Cependant cette conclusion
ne s'appuie pas seulement sur la preuve négative rap-
portée ci-dessus, mais elle est encore confirmée da-
vantage, je pourrais même dire qu’elle se trouve
élevée jusqu’à la certitude mathématique par les con-
sidérations suivantes.
10. Les vers qui vivent dans le corps de l'homme et
dans celui des animaux en général , ont une structure
toute particulière par laquelle ils se distinguent clai-
rement de ceux qui séjournent dans l’eau ou bien
dans la terre. Aussi, de même qu'un botaniste habile
distinguera sur-le-champ, par la conformation exté-
rieure, une plante aquatique de celle qui croît sur
les Alpes, aussi facilement l’helminthologue exercé
décidera si tel ou tel ver doit être compté parmi les
vers intestinaux ou non.
Il y a quelques années que l’on m’apporta de tres-
petits vers que l’on prétendait provenir d’un animal
dont je ne me rappelle plus le nom. Je doutai sur-le-
champ qu'ils fussent des vers intestinaux, et je me
proposai de les examiner pendant qu’ils vivaient en-
core. Le lendemain on m’en apporta de pareils, que
l'on avait encore trouvés dans les intestins de deux
différens animaux. Il résulta , de l'examen particulier
que j'en fis, que c'étaient de petites sangsues (hirudo)
que lon avait recueillies dans l’eau dans laquelle on
avait lavé ces intestins.
Une autre fois, on me remit deux petits vers con-
tenus dans un vase rempli d’eau, sans me dire d’ou
ils provenaient; je déclarai également, sans hésita-
DE L'HOMME. 17
tion, quecen’etaientpas des vers intestinaux , en effet
c’étaient des planaires que l’on avait recueillies dans
l’eau , et ces dernières ont cependant quelque ressem-
blance avec les trématodes, qui séjournent dans le
corps des animaux. Nous avons déjà remarqué que
l’on ne trouve aucun animal ni dans l’eau, nı dans la
terre, qui ressemble, quant à la conformation, aux
echinorhynques, aux cestoides ni aux hydatides.
Chaque famille de vers intestinaux a même tant de
signes caractéristiques qui lui sont particuliers, que
le naturaliste exercé n’hésite pas long-temps dans la-
quelle il doit ranger tel ou tel ver qui lui est présenté.
2°. Quelques animaux ont des vers intestinaux
qui leur sont propres, et que l’on ne rencontre pas
dans d’autres. Je ne veux cependant pas admettre
|
pour cela, comme cela a été fait à tort par quelques
personnes, que chaque espèce d’animaux ait des es-
peces de vers particulières, et que l’on ne puisse dé-
couvrir dans d’autres, car l’expérience nous fournit
plusieurs exemples qui prouvent le contraire. L’as-
caride (ascaris lombricoides), par exemple, qui sé-
journe dans les intestins grêles de l’homme, ne se
distingue en rien des ascarides que l’on voit souvent
dans le canal intestinal des cochons, des bœufs et des
chevaux. Les douves du foie, que l’on a trouvées jus-
qu’à présent dans le corps de plusieurs mammifères,
c’est-à-dire dans celui de l’homme, des lièvres , des
bœufs , des chameaux, des cerfs, des chevaux et des
cochons, appartiennent toutes à la même espèce.
M. Rudolphi a vu dans le corps d’un lion né à Lon-
2
19 SUR LES VERS INTESTINAUX
dres, une quantité extraordinaire d’ascarides, et
moi-même j'ai rencontré dans un individu de cette
espèce né à Tunis, de pareils vers. Mais le bothrio-
céphale et le tænia propres à l’homme se distinguent
clairement de tous lesautres bothriocéphales et taentas
propres aux animaux; il en est de même de plusieurs
autres vers qui séjournent dans le corps des différens
animaux.
3°, On trouve des vers dans toutes les parties du
corps animal : on en rencontre dans le canal intesu-
nal d’un bout à l’autre, dans le tissu cellulaire, entre
la peau et les muscles, dans le foie , dans la vésicule
du fiel, dans la trachée-artère , dans les poumons,
dans le cerveau , dans les reins, dans le cœur , dans
la rate, dans la vésicule aérienne des poissons, dans
la vessie abdominale des reptiles et même dans des
parties désorganisées du corps animal. Treutler a
observé le polystome pinguicole dans un steatôme des
ovaires d’une femme , et le strongle armé dans des
andvrysmes des artères du mésentère des chevaux.
Hopkinson et Morgan ont rencontré des filaires
vivans (ilaria papillosa) dans la ciambre antérieure
de l'œil des chevaux.
Plusieurs médecias et moi, nous avons vu égale-
ment de pareils vers se mouvoir dans la chambre an-
tiérieure de l'œil d’un cheval qui se trouvait en 1813 .
à l’école vétérinaire de Vienne.
M. Jean Natterer a observé en Italie, en 1815,
deux fois chez la mouette brune (larus fuscus ) et trois
fois chez la mouette glauque (Zarus glaucus) des dis-
DE L'HOMME. 19
tomes de la longueur de trois ou quatre lignes et de
la largeur de plus d’une ligue sous la troisième pau-
piere. Il y avait trente-un de ces vers dans les yeux
d’un de ces oiseaux. Je possede plusieurs nématoïdes
de la longueur d’un pouce, qui avaient séjourné
sous la troisième paupière et dans le conduit auditif
du faucon bleu (falco naevius ), d’une part, et de
l'autre dans le sinus maxillaire (antrum Hishmori) du
faucon noir (falco ater) et de l’Echasse (charadrius
himantopus). On observe souvent, dans la cavité du
tympan du marsouin ( delphinus phocæna ), des stron-
gles. J’ai découvert deux fois des Cysticerques ténui-
colles ( cysticercus tenuicollis, Rud. ) dans le cœur de
deux bœufs, et j'ai conservé un morceau de l’un de
ces cœurs, sur lequel on peut voir la capsule dans
laquelle a séjourné un de ces vers. La rate n’est pas
non plus exempte de vers; exemple les amphistomes
(amphistoma ) que Caldani, en premier lieu, et moi,
plus tard , avons observés dans cet organe. Ces der-
niers animaux, enfermés dans des capsules particu-
lières, se trouvent presque toujours dans toutes les
parties internes de la grenouille verte (rana escu-
lente, L.), et sont implantés à la superficie de la rate,
ainsi que sur celle des auires viscères. M. Lüdersen
a également découvert des hydatides dans la sub-
stance de la rate. M. Rudolphi croyait que ces der-
nieres ne devaient pas être regardées comme de vé-
ritables hydatides ; cependant je démontrerai ‚ Quand
il sera question de ce genre de vers, qu'elles doivent
l'être comme telles.
2:
20 SUR LES VERS INTESTINAUX
4°. Certains genres et espèces de vers ne se trou-
vent jamais que dans les mêmes parties et dans les
mêmes organes du corps animal. Les douves du
foie, par exemple, ne s’observent que dans le foie
et la vésicule du fiel des mammiferes. Sı elles prove-
paient de vers qui vivent dans l’eau, et qu'elles eus-
sent été introduites dans le corps de ces animaux avec
les boissons, on devrait plutôt les rencontrer dans
l'estomac ou dans le reste du canal intestinal qu’ail-
leurs , par la raison que ces vers trouveraient dans
ces endroits de l’eau, c’est-à-dire leur nourriture ac-
coutumée , tandis qu’ils ne rencontrent rien d’ana-
logue dans la vésicule du fiel.
Le polystome (polystoma integerrimum ) séjourne
uniquement dans la vessie abdominale des crapauds
et des grenouilles ‚et V’ascaride à veines noires (ascaris
nigrovenosa ) dans les poumons de ces animaux.
Le coenure cérébral (cœnurus cerebralis) s’observe
seulement dans le cerveau des moutons atteints du
tournis, et jamais dans le foie, où séjournent ce-
pendant bien souvent des hydatides, mais qui ap-
partiennent à un autre genre. On voit souvent dans
la vessie aérienne des truites (salmo fario) des mil-
liers de vers de la même espèce, et dont on ne ren-
contre aucun individu ni dans le canal intestinal ni
dans aucun autre viscere de ces poissons : j’en al ce-
pendant examiné huit cent cinquante-buit.
Le canal intestinal, qui n’offre aux vers intestinaux
aucun obstacle mécanique à un changement de de-
meure , a néanmoins des endroits déterminés où nous
DE L'HOMME. De
trouvons seulement tel ou tel ver. Le strongle ( stron-
gylus horridus ou papillosus, Rud.) se trouve seule-
ment dans l’œsophage ou l’estomac de plusieurs oi-
seaux aquatiques ; l’ascaride obtus (ascaris obtusa, R.)
uniquement dans l’estomac des souris ; le distome 1£-
nuicolle ( distoma tenuicolle , Z.), dans celui de quel-
ques poissons voraces ; dans tout le reste du canal ali-
mentaire de ces derniers , on ne rencontre pas un
seul de ces vers. Les ascarides séjournent presqu’ex-
clusivement dans l'estomac et les intestins greles, et
non dans d’autres organes , comme quelques natura-
listes l’ont prétendu. Les trichocéphales et les oxyures
se trouvent dans les gros intestins , les premiers bor-
nés même à l’intestin cœcum, et l’amphistome en
massue (amphistoma subelavatum ) n’existe que dans le
rectum.
Si ces vers séjournaient originellement dans la
terre ou dans l’eau , et s’ils pouvaient quitter leur de-
meure:et leur nourriture ordinaires sans préjudice de
leur bien-être, pour se rendre dans un lieu tout à fait
étranger , l’on ne conçoit pas pourquoi un ver, que
l’on ne rencontre que dans le rectum, supposé que
ce ver se füt introduit dans le corps animal avec les
alımens, m’aurait pas choisi aussi bien un autre
endroit que le rectum, dans lequel il aurait vécu;
on ne conçoit pas non plus qu'est-ce qui aurait pu
lempécher de prendre quelquefois une direction la-
térale, comme le fait la douve du foie dans les canaux
hépatiques ; on comprend encore moins pourquoi on
ne l'aurait jamais rencontré, pendant qu’il voyagerait
22 SUR LES VERS INTESTINAUX
de la bouche à l’anus, que justement dans un seul
endroit, c’est-à-dire dans le rectum.
Dans le cas où des vers s’introduiraient réellement
du dehors dans le canal alimentaire, et qu'ils y vi-
vraient comme parasites ’, ils seraient arrêtés par la
suite dans leur trajet, comme nous aurons occasion
plus tard d’en donner un exemple.
5°. Tous les vers intestinaux ne se conservent pas
seulement dans le corps animal, mais ils y multi-
plient ; ils meurent au contraire tres-vite, quand ils
sont forcés de le quitter. C’est là une des plus fortes
preuves en faveur de l'opinion que les vers intesti-
naux sont propres au corps animal, et qu'ils lui ap-
partiennent exclusivement. S1 ces vers n'étaient pas
une production particulière du corps animal, si ce
dernier n’était pas leur demeure naturelle, ils y
mourraient aussi bien que les vers de terre et d'eau,
au moins ils ne s’y multiplieraient pas. Il ya cepen-
dant quelques larves d'insectes qui se conservent
dans le corps animal, et on les y trouve sous la peau,
dans les fosses nasales, dans l'estomac, dans le rec-
tum, etc. Mais nous savons très-bien que les œufs
dont elles proviennent ont été déposés dans ces en-
droits par des insectes, afin que la larve aussitôt
sortie de l'œuf, y trouvât une nourriture convenable.
1 Rigoureusement parlant , on devrait regarder tous les vers in-
testinaux comme parasites. Je me sers ici seulement du mot para-
site pour indiquer les vers qu’un animal a gagnés en en mangeant
un autre.
DE L'HOMME. 23
Du reste, le séjour de pareilles larves d'insectes dans
le corps animal ne se prolonge que pendant un temps
déterminé, c’est-à-dire jusqu’à l’époque où elles doi-
vent, bientôt après, se changer en chrysalide ; sitôt
que cette époque est arrivée , elles quittent l'animal
aux dépens duquel elles s'étaient nourries pendant
tout ce temps, et parviennent au dehors à l’état d’in-
secte parfait". Ce dernier, par conséquent, continue
à vivre, quoique sous une forme différente, hors du
corps animal, ce qui causerait , au contraire, la mort
d’un ver intestinal.
Schæffer , qui a prétendu, comme nous Pavons re-
marqué plus haut, avoir rencontré des douves du foie
dans l’eau , n’a pas manqué d’observer que l’on pour-
rait, à l’aide de raisonnemens semblables à ceux que
nous venons de faire tout à l'heure, mettre en doute
l'identité des vers trouvés dans l’eau et de ceux qui
séjournent dans le foie des mammiferes. Cet auteur
a tâché d'expliquer la mort subite de ces douves
quand on les ôte de leur séjour naturel , en disant que
ces animaux étaient accoutumés, depuis trois ou
quatre générations, à la température élevée du corps
animal, demanière qu'ils ne peuvent descendre à celle
de l’eau froide sans perdre la vie. Mais, à juger d’a-
près une analogie raisonnable, on devrait admettre
également que des vers qui auraient vécu auparavant
pendant cent ou mille générations dans une eau froide
pourraient supporter encore bien moins un change-
* Voyéz l’ouvrage de Clark sur les esires.
24 SUR LES VERS INTESTINAUX
ment aussi subit que celui qu'ils Eprouveraient en
passant dans une température aussi élevée que celle
du corps des mammifères. Les vers intestinaux meu-
rent néanmoins quand on les retire de leur séjour ha-
bituel, même en les exposant à une température
semblable à celle du corps animal dans lequel ıls
avaient vécu. La mort est seulement retardée, parce
qu’une influence nuisible, c’est-à-dire le changement
de température, agit de moins sur eux.
Nous devons en outre considérer que chaque ani-
mal revient beaucoup plus aisément à son état primi-
tif et naturel, qu'il ne s’accoutume , après en avoir été
tiré, à un autre état d'existence qui lui est étranger.
Nous serions donc obligés de regarder les vers intes-
tinaux, supposé même qu’ils séjournent originaire
ment dans l’eau ou dans la terre, comme des animaux
qui se trouvent, dans le corps animal, dans un état
d'existence contraire à leur nature. Ne devrait-on pas
conclure , par analogie , que les vers intestinaux ren-
dus à la terre ou à l’eau, desquelles ils sont provenus,
dans la supposition que nous combattons, pourraient
revenir ou se réaccoutumer à leur ancien état primitif
d'existence? L'expérience prouve , comme nous l’a-
vons démontré, justement le contraire. Voilà par
conséquent une nouvelle preuve contre l’idée que les
vers intestinaux tirent leur origine des vers de terre
et d’eau, ce qui confirme en même temps leur nature
particulière.
6°. Il existe souvent une grande quantité de vers
intestinaux dans le corps de l’homme ou dans celui
DE L'HOMME. 25
d'autres apimaux, sans qu'il en résulte la moindre
gene ou le plus petit changement dans leur sante. J’ai
connu plusieurs personnes dans le corps desquelles
sejournaient des tænias, vers regardes par beaucoup
de médecins comme extrêmement dangereux pour la
santé, sans qu’elles en fussent incommodées le moins
du monde. Ces mêmes personnes ne se seraient jamais
doutées d’avoir le tænia, si elles n’en avaient pas re-
marqué par hasard quelques morceaux dans leurs
selles.
Le cabinet d’histoire naturelle de Vienne possède
plusieurs morceaux d’intestins sur lesquels se trou-
vent implantés une grande quantité de vers intesti-
naux. Il y a, entre autres echantillons, un morceau
d’intestin de la longueur de deux pouces et demi,
provenant d’un edicnème ou pluvier de terre ( chara-
drius œdicnemus, L.), sur lequel soixante-cinq échino-
rhynques de la longueur de cinq lignes sont implan-
tés , sans compter les individus qui s’en sont détachés
pendant la préparation de ce morceau. Notre cabinet
possède également une portion d’intestin de la lon-
gueur de trois pouces à peu près, provenant d’un
hibou (strix otus, L.), sur lequel on voit fixés au
moins deux cents amphistomes macrocéphales (am-
phistoma macrocephalum) , et malgré cela ces deux
oiseaux n'étaient pas maigres, et n'avaient pas l'air
malade.
Il y a cependant des cas où les vers intestinaux
peuvent être extrêmement nuisibles à la santé, et
nous en citerons des exemples par la suite, mais cela
26 SUR LES VERS INTESTINAUX
n’arrive pas constamment. D’autres vers, außcontraire,
ou bien des larves d’insectes transmis de dehors dans
le corps animal, ne peuvent pas y vivre sans causer
beaucoup de gêne, et ceux de ces animaux qui ont
été introduits avec les alimens œu boissons dans le
canal intestinal sont ordinairement soumis, comme
nous l'avons déjà remarqué, aux lois de la digestion.
7°. On a découvert des vers intestinaux dans des
fœtus nouvellement nés. Tous les exemples de ce
genre cités par les auteurs ne méritent peut-être pas
que l’on y ajoute foi, mais néanmoins ce fait a été
constaté par un certain nombre d'hommes dignes de
confiance , de manière que l’on ne peut pas douter de
la vérité de leurs observations.
Fromann a trouvé des douves du foie, non-seule-
ment chez les moutons, mais encore chez des agneaux
nouveau-nés qui avaient succombe à une épizootie
pendant laquelle des troupeauxentiers de cès animaux
ont péri.
Kerkring a vu un fœtus dont le canal intestinal
était presqu’entierement rempli de petits vers; le
même auteur a découvert une autre fois des ascarıdes
d’un volume trois fois plus-considérable qu’à l'ordi-
paire, dans l'estomac d’un fœtus de six mois et demi.
Pallas‘ et Bloch assurent que Brendel? et Heim
ont trouvé des tænias dans des fœtus.
Blumenbach a rencontré, d’après le témoignage de
1 N.n., beür.,1, s. 435.
3 Ouvrage cité, p. 38.
DE L'HOMME. 27
M. Rudolphi’, plusieurs tænias dans le canal intes-
tinal d’un chien nouveau-né.
M. Hirsch, médecin à Beyreuth, a vu dans le jé-
junum d’un enfant ; qui avait été probablement étrau-
glé en naissant, un ascaride de deux pouces et demi
de longueur.
Geeze?, Bloch? et Rudolphi ont souvent observé
des tænias d’une tres-grande dimension chez des
agneaux qui tetaient encore.
Ce dernier assure avoir vu des douves du foie chez
plusieurs jeunes oiseaux qui étaient encore presque
sans plumes.
J’ai découvert moi-même, il y a quelques années,
chez un freux (corvus frugilegus, L )ıres-jeune et sans
plumes , quarante-cinq tænias de plusieurs pouces de
long.
Il me serait facile de doubler, et même de tripler
le nombre de ces observations : les sources dans les-
quelles elles ont été puisées-sont d’une nature à pou-
voir aisément contrebalancer celles que nous avons
rapportées plus haut, et d’après lesquelles des vers
intest:naux auraient été trouvés hors du corps animal.
ll reste prouvé, à ce qu’il nous semble, d'une ma-
nière suffisante , que les vers intestinaux ne peuvent
pas tirer leur origine de vers qui, d’après les lois de
la nature, vivent hors du corps animal, et qu'il faut
. .* Je n’ai pas encore pu me procurer l’édition dans laquetie il
est mention de ce fait.
» N. G. d. Eingew. , p. 371.
3 Ouvrage cité, p. 38.
28 SUR LES VERS INTESTINAUX
les regarder comme des animaux d’un genre parti-
cuher.
Il reste cependant encore la question suivante à ré-
soudre : de quelle manière les vers, qui forment ainsi
un ordre particulier d’etres dans le règne animal, ar-
rivent-ils dans le corps d’autres animaux ?
L’on peut concevoir la chose de deux manières :
Les vers ou leurs œufs propres à l'espèce hu-
maine et aux animaux, et évacués par eux, peuvent
être communiqués à d’autres hommes et à d’autres
animaux par les alımens, par les boissons , et peut-
être même par l'air.
C’est surtout Pallas : 'qui.a le plus soutenu cette
opinion : elle a eu également pour partisans M. Rein-
lein et Brera. Il n’y a cependant que Brera qui ait
cité une observation à l’appui de cette opinion, ob-
servation qui sera examinée à la fin de ce paragraphe.
Les preuves que Pallas a apportées pour soutenir
son assertion, sont les suivantes :
1°. « La maladie vermineuse est très-répandue
parmi les hommes et les animaux qui vivent dans les
grandes villes ou dans des endroits très-populeux,
surtout où les hommes se tiennent d’une maniere
malpropre , où l'humidité de l'air et de la contrée est
propice à la conservation des œufs hors de leur séjour
nature} , et où l’on se sert, pour boisson ordinaire,
d’eau de réservoirs, de sources ouvertes et de rivières
qui recoivent toutes les iImmondices. On rencontre au _
3 NN. n. beitr. , s. 43.
DE L'HOMME. 29
contraire tres-rarement ces différentes espèces de vers
intestinaux dans les contrées peu peuplées de la Rus-
sie et de la Sibérie. On en voit également peu sou-
vent chez les peuplades errantes, qui changent leurs
demeures très-fréquemment; à peine ai-je trouvé dans
les animaux sauvages de ces pays la centième partie de
ce que j'ai rencontré de vers intestinaux dans les ani-
maux d'Europe.
20, « Quant à la raison pour laquelle on rencontre
constamment telles ou telles espèces de vers, les unes
dans les animaux à sang chaud, les autres dans les oi-
seaux et dans les poissons, il me semble que l’on peut
la trouver, en disant que les œufs dont sortent les vers
ne trouvent que dans tel ou tel animal les circons-
tances , la chaleur et la nourriture nécessaires à leur
développement, et sans lesquelles ils périraient.
« J'ajoute à cela 3°., l'observation déjà faite par
Hippocrate, que l’on rencontre des tænias dans les
enfans nouveau-nés, et, d’après Brendel, même dans
les fœtus.
« On a également remarqué que plusieurs per-
sonnes appartenantes à la même famille sont souvent
tourmentees par le tænia comme d’un mal endémique.
« Il a été également pour moi très-remarquable et
concluant de voir que les animaux de proie, les oi-
seaux carnivores, surtout ceux qui vivent dans le voi-
sinage des hommes, et les poissons voraces ( voya-
geant en troupes et jouissant d’une vie plus longue
que les autres poissons )sont ordinairement sujets aux
vers intestinaux ; le contraire a lieu chez les animaux
30 SUR LES VERS INTESTINAUX.
rongeurs, Qui se nourrissent avec beaucoup de pré-
caution, et chez les animaux ruminans, qui broyent
leur nourriture avec soin. y
J’oppose à la première assertion de Pallas, que s’il
arrive réellement ( ce dont je doute encore) que la
présence des vers intestinaux soil plus fréquente
parmi les honimes qui habitent les grandes villes, on
pourrait assez bien en trouver la raison dans ce que
leur nourriture est trés-mélangée, et qu'ils ne jouis-
sent ordinairement pas d’une bonne digestion. Les
habitans de la Russie et des pays encore plus éloi-
gnés de nous sont au contraire très-robustes ;leur di-
geslion par conséquent se fait bien; ces hommes
font surtout un grand usage d’eau-de-vie, et se nour-
rissent de choses très-simples. Cela est peut-être aussi
la raison pourquoi les vers intestinaux se trouvent
plus rarement chez eux,
Il ya en général sur ce sujet encore beaucoup de
choses dont nous ne pouvons nous rendre compte.
J'ai trouvé, par exemple, chez plusieurs animaux
très-communs, des vers qui n’ont pas encore été dé-
couverts par d'autres naturalistes habitant- d’autres
pays, tandis que j'ai cherché vainement quelques
vers que ces naturalistes avaient déjà observés depuis
long-temps.
Les entomologistes ont remarque que les insectes
et leurs larves sont plus sujets aux filaires dans une
année que dans une autre.
Abildgard prétend avoir observé que les chevaux
sont tr&s-incommodes pardes vers à certaines époques
DE L'HOMME. 31
de l’année. Sloane dit quelque chose de semblable
concernant le ver de Médine.
Pendant les cinq premières années de nos re-
cherches sur les vers, nous avons examiné quinze cent
soixante-trois campagnols (mus arvalis, L.) et nous
n’avons trouvé que trois fois des échinorhynques bien
développés dans des individus qui en avaient trois ou
quatre en même temps. En 1812 nous avons encore
rencontré quatre de ces vers parmi quatre cent trente-
deux individus de la même espèce. Deux échino-
rhynques (parasites ) furent également découverts à
cette époque, une fois dans un putois, et l’autre fois
dans un faucon cendré (falco, cinereus, L.). Tous
ces campagnols , au nombre de dix-neuf cent quatre-
vingt-quinze, ne nous ont fourni dans les premières
années de nos travaux que deux fois l’occasion d’ob-
server des cysticerques qui nageaient en grande
quantité, librement, dans la cavité ıhorachique de
deux individus, et depuis nous n’en avons jamais
rencontré d’autres. Au commencement de l’année
1807 j'ai trouvé entre les tégumens et les muscles
d’une grenouille verte (rana esculenta , L. ) un filaire
que j'ai cherché vainement par la suite parmi plus de
douze cents individus de cette espèce, et ce n’est que
dans l’année 1813 que j'ai revu ce ver trois ou quatre
fois dans la même espèce, sur un petit nombre d’in-
dividus.
Dans quelques pays on peut regarder les vers in-
testinaux comme un mal endémique ; dans d’autres
on ne les voit que d’une manière sporadique. Les ha-
38 SUR LES VERS INTESTINAUX
bitans de la Russie, de la Pologne, de la Suisse et de
quelques contrees de la France sont sujets au bo-
thriocéphale ; le reste des Européens est incommodé
par le tænia. Qui peut nous indiquer la raison de tout
cela? Ce n’est pas moi, assurément.
Le second argument de Pallas prouve plutôt contre
lui qu’en sa faveur , car cette constance avec laquelle
on ne rencontre que telle espèce de ver dans telle es-
pèce d’animal nous fait présumer d'autant moins que
les vers puissent arriver du dehors dans le corps
animal. Si nous voulions poser en fait, pendant un
moment, que cela füt possible, nous serions alors
obligés d'admettre : d'abord que le ver transmis
dans le corps d’un animal prendrait la forme particu-
lière de l'espèce de ver qui est propre à cet animal ;
ou, en d’autres termes, la forme et la structure du
ver seraient déterminées par l'animal dans lequel ıl
devrait séjourner ; et ensuite qu'il ne peut se déve-
lopper dans un animal que des œufs ou des germes
de vers qui soient propres à son espèce , ou, pour le
moins, à son genre.
Nous avons déjà démontré plus haut, lorsqu'il était
question de la prétendue métamorphose des vers de
terre et d’eau en vers intestinaux , que le premier cas
ne peut pas avoir lieu; et, en effet , quel changement
tout à fait singulier ne devrait-il pas s’operer dans
plusieurs especes de vers, si cela arrivait ainsi ? Sup-
posons qu’une souris eut avalé les œufs d’une espèce
d’ascaride particulière à l’homme, et qu'un autre eut
mangé les œufs d’un ascaride propre aux chats. Ges
DE L'HOMME. 33
deux ascarıdes ne difièrent pas seulement entre eux-
mêmes, mais ils différent encore de l’ascaride parti-
culier à la souris. Füt-il par conséquent possible que
l'ascaride trouvé dans le corps d'un animal ait pu tirer
son origine d’un ascaride d’un autre animal d’un
genre différent, nous devrions alors presumer dans le
cas supposé (c'est-à-dire où les œufs de ces deux dif-
férens ascarides auraient pu se développer sous la
forme d’ascarides propres aux souris) que les chan-
gemens suivans auraient dü s’opérer. 1°. Les rainures
latérales propres aux ascarides de l’homme auraient
dü se remplir et s’aplanır sur les individus qui se se-
raient trouvés dans le corps de la premiere souris; et
20, les membranes latérales en forme d'ailes, qui ca-
ractérisent l’ascaride du chat, auraient dü se rétracter
chez les individus qui se seraient trouvés dans le
corps de l'autre souris; par conséquent celte méta-
morphose aurait nécessité deux opérations tout à fait
opposées » sans parler de beaucoup d’autres qui au-
raient dû encore s'effectuer avant que la forme des
ascarides propres à l’homme et au chat, et transfé=
rés dans le corps de ces deux souris, füt devenue
identique à celle qui caractérise l’ascaride de la sou-
ris. Ces vers nouvellement transformés auraient subi
encore une autre métamorphose, si ces deux souris
eussent été avalées par un chat.
Quand même on voudrait admettre que les œufs
de tel ou tel ver pourraient se développer dans un
animal, pourvu qu'ils provinssent d’un individu de
la même espèce que celui-ci, on rencontrerait en-
r
(6)
34 SUR LES VERS INTESTINAUX
core une nouvelle difficulté, en ce que l'on ne pour-
rait nullement concevoir par quel moyen, chez cer-
tains animaux, Cette communication des œufs aurait
pu s'effectuer. Aiusi fa fréquence des vers chez les
hommes extrêmement propres, comme les Hol-
landais, ne pourrait être expliquée; en effet, quoi-
que lon ait raison de dire, homo homini lupus , -on
voit, au moins en Europe, que les hommes ne se
mangent entre eux que dans un sens figuré; ce ne
serait alors que par les matières fécales qu’une pa-
reille communication pourrait s’opérer; cependant
cela ne peut être supposé chez les hommes, qui
ont toujours soin d’Eloigner ces matières des choses
qui leur servent de nourriture. La possibilité d’une
pareille communication se conçoit cependant par
l'eau, en ce que nos latrines s’ecoulent ordinaire-
ment dans les rivières, qui sunt souvent en commu-
nicalion directe avec nos puits. Mais quel chemin
l'œuf du ver n’aurait-il pas à faire? Pendant combien
de temps ne serait-il pas obligé de conserver la vie
dans des circonstances défavorables, et dans les-
quelles les vers intestinaux meurent si vite ? Pallas dit
lui-même que les œufs des vers périssent, s'ils ne
rencontrent des circonstances favorables à leur con-
servation, c'est-à-dire la nourriture et la chaleur.
Nous rencontrons encore plus de difficultés pour
expliquer la communication des œufs de vers intes-
tinaux entre les animaux, qui ne boivent pas en
général, comme cela a lieu pour les oiseaux de
5
proie. Dans l’état libre ces animaux ne se mangent
DE L'HOMME. 35
pas entre eux, et ils mangent encore moins leurs ex-
crémens ; les animaux qui leur servent de nourriture
n’avalent pas non plus les matieres fecales que ces
oiseaux rejeltent; car dans ce cas on pourrait suppo-
ser que les œufs des vers provenant d’un de ces oi-
seaux auraient pu être communiqués à un autre indi-
vidu de la même espèce par cet intermédiaire.
Il nous reste enfin encore à supposer que c’est
peut-être par le moyen de l'air que cette communica-
tion des œufs de vers intestinaux peut s’effectuer ;
mais cette supposilion;n’est pas non plus admissible.
En effet un corps qui, à cause de sa pesanteur speci-
fique, ne se soutient pas meme sur la surface de l’eau,
comme cela arrive pour les œufs de vers intestinaux ,
peut encore moins s'élever et flotter dans l’air. Pour
que cela püt avoir lieu , il faudrait nécessairement
supposer qu'ils se seraient préalablement desséchés
de telle sorte, qu'ils ne formeraient pour amsi dire
qu'une espèce de poussière. Mais est-1l probable que
ces œufs, ainsi desséchés, pussent encore conserver
la faculté de se développer?
Ce que Pallas a envisagé comme un troisième ar-
gument pour soutenir son hypothèse , sert justement
à la réfuter; car on doit plutôt regardes comme une
contre-preuve la circonstance que l’on a rencontré des
vers dans des fœtus, qui assurément n’ont pas pu
manger des substances chargées d'œufs de vers. Du
reste, plus loin nous aurons également occasion de
démontrer qu'il est tout à fait impossible qu'une mère
puisse transmettre des œufs de vers au foetus qu’elle
3.
36 SUR LES VERS INTESTINAUX
porte dans son sein. S'il arrive quelquefois que plu-
sieurs personnes de la même famille soient sujettes
aux vers intestinaux, cela s'explique aussi facilement
que la raison pour laquelle plusieurs personnes ap-
partenantes à la même famille ont de mauvaisesdents,
ou qu’elles sont sujettes à la goutte.
L’assertion du même auteur, que les animaux car-
nassiers ont beaucoup plus souvent des vers que les
animaux rongeurs et ruminans , ne se confirme
nullement par les observations que j'ai faites à ce
sujet : je vais seulement citer quelques exemples.
Parmi vingt-une loutres, il n'y en avait pas une seule
dans le corps de laquelle il se soit trouvé un ver.
Parmi cinquante-quatre lapins sauvages, il n'y en
avait au contraire que cinq qui en fussent dépourvus.
Nous avons trouvé dans plusieurs de ces animaux en
même temps des nématoides, des cestoïdes et des
eystoides. La loutre est cependant un animal carnas-
sier qui mange presqu’exclusivement des animaux
chez lesquels on rencontre beaucoup de vers. Le la-
pin, au contraire, ne vit que de végétaux; c'est un
animal rongeur et qui rumine également.
J'ai disséqué en 1816, dans le mois de septembre,
dix-sept chamois qui ont été tués à une chasse sur les
Alpes de la Styrie. Parmi ces animaux 1l n’y en avait
qu'un seul qui n’eut pas de vers; quelques-uns
avaient des trichocéphales ou des sirongles, et huit
des itænias. Les chamois vivent cependant bien éloi-
gnés des grandes villes.
Sans doute on pourrait encore dire que les ani-
DE L'HOMME. 37
maux qui ne mangent pas de chair peuvent se com-
muniquer leurs vers, en admettant que , rejetés
avec les excrémens, ceux-ci se trouveraient meles
avec les alimens ou avec les breuvages; mais com-
ment expliquer la communication d’hydaudes, chez
lesquelles nous ne connaissons point d'œufs, et qui,
enfermées dans des capsules particulières, sejournent
dans des viscères qui n’ont aucune communication
directe avec le canal intestinal, ce qui empêche par
conséquent de supposer que les vers ou leurs œufs
pourraient être transmis à ces viscères par celte voie.
Alors, se demande-t-on toujours, par quel chemin
‚les hydatides sont-elles arrivées dans les organes dans
lesquels nous les trouvons ? Les animaux rongeurs et
ruminans sont réellement, au moins dans beaucoup de
cas, presque remplis d’hydatides ; nous en observons
au contraire très-rarement chez les animaux carnas-
siers : on en a tout au plus deux ou trois exemples.
Le fait suivant est très-concluant et vient à l'appui
de ma théorie. M. Schreiber a nourri en 1806 un pu-
tois (mustela putorius , L.) pendant six mois, unique-
ment de lait, de vers intestinaux de toule espèce et de
leurs œufs ; au lieu de cette nourriture, on n’a subs-
titué que très-rarement un peu de mie de pain. Cet
animal fut tué ensuite et examiné; mais, au grand
étonnement de tout le monde, on n’y trouva pas la
trace d’un ver quelconque. Il est à regretter que le
temps et l’occasion nous aient manqué pour répéter
cette expérience sur d’autres animaux el dans des cir-
constances difiérentes.
38 SUR LES VERS INTESTINAUX
Quoique j'aie posé en fait que la communica-
tion des vers ne pouvait pas avoir lieu par linter-
mediaire des alimens'et des boissons, je ne veux pas
cependant nier la possibilité que les vers qui se sont
introduits par ce moyen dans le canal intestinal d’un
animal, ne puissent y vivre, dans quelques cas, pen-
dant un certain temps. J’aı rapporté moi-même plus
haut que l'échinorhynque, que l’on voitires-rarement
dans le campagnol, fut rencontré comme parasite
dans un putois, et une autre fois dans un faucon cen-
dré (falco cineraceus); mais on a trouvé en même
temps dans les deux cas les restes des campagnols
dans l'estomac de ces animaux.
On a observé également l’échinorhynque nommé
echinorhynchus hæruca , qui ne se rencontre que dans
1a grenouille verte, dans Pestomac du crapaud gris
(bufo cinereus, Rec.); mais on y voyait encore les
restés d'une jeune grenouille.
J'ai observé dans l'estomac d’une couleuvre à col-
lier (coluber natrix, L.) implantée dans les parois
de cet organe une espèce de nématoïde, qui ne sé-
journe ordinairement que dans les crapauds couleur
de feu (rana bombyna), dans les salamandres aqua-
tiques et dans les protées de la Carniole (proteus an-
guinus). Mais cette couleuvre avait vomi, dans les
vingt-quatre heures qu’elle avait été enfermée, un
crapaud couleur de feu.
On découvre souvent des ligules (qui se trouvent
originairement dans la cavité abdominale des pois-
sons du genre cyprinus ) comme parasites dans le ca-
DE L'HOMME. 39
"nal alimentaire d’oiseaux aquatiques, et dans celui
de poissons voraces. Mais ces vers, qui ont la vie
tres-dure, nous fournissent un exemple de influence
des fonctions digestives : on en remarque quelque
fois tout le long du canal intestinal de ces oiseaux ,
mais ces vers, quoique vivans, sont dans un état Ires-
différent; ils n’éprouvent en effet aucune altération
dans l'estomac, on les y voit tels qu'ils se trouvent
dans la cavité abdominale des poissons; mais ceux qui
se sont glissés plus loin que l'estomac ontéprouvé une
altération, et elle est d’antant plus visible, qu'ils se
trouvent plus éloignés de ce viscère. On voit alors que
la couleur blanche de ces vers s’est changée en un
jaune sale; leur corps est allongé, aminei, ou au
moins lésé ou "comme macéré à l’une de ses extré-
mités, de manière que l’on aperçoit clairement qu'ils
ont été en partie soumis aux lois de la digestion.
Je n’ai observé des ligules chez les poissons voraces
que dans l'estomac, mais il y avait toujours en même
temps des restes de poissons nou digérés. Je n’ai ja-
mais rencontré ces vers dans les intestins ; il me pa-
raît probable qu'ils sont entièrement dissous dans
l'estomac.
Montin prétend avoir observé des morceaux de
ligules dans les déjections d’une jeune dame de vingt-
einq ans; cependant on peut bien présimer qu'elle
v'avait pas mangé de poissons crus pourvus de leurs
intestins, Cet auteur ajoute qu’elle a rendu en même
temps des ascarides et des tæuias. Il est très-probable
que Montin a pris un morceau de ces derniers très-
4o SUR LES VERS INTESTINAUX
allongé, ou peut-être très-contracté, pour celui d’une
ligule. D’après les expériences de Bloch: , les ligules
meurent dans l’eau bouillante dans l’espace de deux
minutes , et je crois que l’on fait bouillir les poissons
au moins autant de temps en Suede pour les manger.
L'observation de Montin ne met donc nullement en
droit de placer les ligules parmi les vers inlestinaux
propres à l'homme, comme l’a fait Brera.
Rosenstein a prétendu, indubitablement à tort,
avoir trouvé des ligules vivantes dans des poissons
bouillis. Quand on transporte un deces vers d’uneas-
siette très-chaude sur une très-froide, ıl s’opere alors
par le changement de température des contractions
inégales des fibres, que l’on peut aisément prendre
pour des mouvemens volontaires.
De peuts vers retirés de V’esprit-de-vin, où ils ont
été depuis très-long-temps, et placés dans de l’eau,
semblent se mouvoir , quoique morts, d’une manière
extraordinaire, et ces mouvemens durent jusqu'à ce
que l’esprit-de-vin contenu dans ces vers se soit en-
tierement mêlé avec l’eau.
La prétendue expérience de Rolandson Martin sur
l'introduction de vers de poissons dans le canal intes-
tinal de l’homme mérite encore moins notre atten-
tion. Cet auteur raconte qu’il a rendu souvent, pen-
dant qu'il demeurait dans le voisinage de la mer, des
petits vers qu’il croyait être desoxyures, quoique son
âge aurait dü, d’après son opinion, l'en exempter.
1 Ouvrage cité.
DE L'HOMME. A
J'ai connu moi-même un vieillard de quatre-vingts
ans et plus, qui en rendait tres-souvent, preuve que
l'âge avancé ne met pas à l’abri de ces vers.
Rolakdson examinant un jour la vessie d’un Eper-
lan (salmo eperlanus, L.), poisson dont il mangeait
ires-frequemment, y trouva une grande quantité de
petits vers, qu'il décrit avec beaucoup de soin; il
croit que les petits vers qu'il a rendus souvent prove-
naient de ce qu'il s’était nourri de ces poissons.
La description que Rolandson donne des vers
trouvés dans cet éperlan, prouve clairement la grande
difference qui existe entre ces vers el les oxyures
propres à l’homme. Ceux-là sont probablement les
mêmes que Fischer a observésle premier dans la ves-
sie aérienne d’une truite (salmo fario, L.) , et que cet
auteur a décrits sous le nom de cystidicola. Tout ce
que Rolandson dit des vers rendus par lui se rapporte
parfaitement à la conformation des oxyures. On voit
dans chaque ligne de ce récit, qu'il est sorti de la tête
d’un hypocondriaque.
Pallas * a prouvé par une expérience, que des vers
peuvent se développer par l'insertion de leurs œufs
dans un animal. Voici ses propres paroles : « J'ai es-
sayé, par le moyen d’nne petite incision , à introduire
les œufs rouges du tænia du chien dans la cavité ab-
dominale d’un jeune animal de cette espèce. J’ai
trouvé en effet, après l’espace d’un mois, des petits
tænias renfermés dans cette cavité. Ces vers avaient
tout au plus un pouce de long, et leurs arucu-
1 N.n. Beitr., p. 58.
ha SUR LES VERS INTESTINAUX
lations étaient encore plus courtes que celles re-
présentées fig. zu. Je suis fâché que le temps et l'oc-
casion m’aient manqués pour répéter cette expérience
de différentes manières, et même avec des vers cucur-
bitains. » Pallas est un observateur fidèle, et on ne
doit pas douter de la vérité de son observation , qui
ne prouve cependant rien contre ma théorie; car ces
œufs avaient été pris fraîchement d’untænia de chien,
par conséquent ils étaient doués de vie, et 1ls ont
trouvé dans la cavité abdominale d’un autre chien
tout ce qui était nécessaire à leur développement,
c’est-à-dire la chaleur et l'humidité, et dans celle-ci ıl
y avait même quelque chose qui a pu leur servir de
nourriture. Le développement peu considérable opéré
dans l’espace d’un mois sur ces tænias, qui grandis-
sent en général très-vite, doit être attribué à la pe-
tite quantité de nourriture que ces vers ont rencontrée
dans la cavité abdominale, c’est-à-dire hors du tube
alimentaire. Cette expérience ne prouve cependant
nullement que ces vers introduits par la bouche n’au-
raient pas été soumis aux lois de la digestion, comme
nous l'avons vu arriver chez le putois.
Brera: s’est flatté d’avoir fait une experience sem-
blable à celle de Pallas ; cependantil n’en est pas ainsi,
comme nous allons le voir. Le fait suivant, com-
muniqué par Rubini à Brera, a fourni matière à
cette expérience : une petite fille de deux ans, jouis-
sant d’une bonne santé, rendit, avec les matières fé-
cales, des petits corps arrondis et jaunätres. En les
: Memorie , p. 186.
DE L'HOMME. 43
pressantentre lesongles, len sortit une humeur blan-
châtre; leur enveloppe semblait composée de deux
membranes, une interne blanchätre, et une externe
jaunâtre. Plusieurs de ces corps furent placés dans
une boîte, et le lendemain on remarqua que quel-
ques-uns s’etaient ouverts, el que plusieurs petits
oxyures très-vifs en sortirent; cependant ces vers
moururent promptement. Le frère de cette petite
fille évacua de pareils corps l'année suivante. Rubini
en envoya à Brera, en 1805, au mois de février, plu-
sieurs dans une petite boîte. Il est à remarquer que
le thermomètre était à deux degrés audessous de zéro.
Ces corps étaient petits, durs, tout à fait desséchés, -
et ressemblaient à des grains de sable. A une loupe,
qui grossissait dix fois, ils paraissaient cordiformes;
sous un microscope de Dollond , leur superficie était
velue. En les fendant dans toute leur longueur, on
remarqua que ces prétendus œufs n'étaient qu'un
_agrégat ou plutôt un réceptacle de plusieurs œufs de
différentes grosseurs, qui contenaient encore, Sans
doute , comme Brera le presume, d’autres œufs très-
petits et impercepübles. Brera, persuadé que ces
corps contenaient plusieurs germes de vers, en in-
troduisit dix (le 4 février, c’est-à-dire un. mois après
qu'ils avaient été évacués ) dans la cavité abdominale
d’un jeune chien, moyennant une petite incision
pratiquée à l'extérieur. La plaie se cicatrisa dans l’es-
ace de quatre jours, el l'animal fut tué vingt-un
jours après. On trouva la cavité abdominale remplie
de petits vers qui portaient tous les caractères des
hi SUR LES VERS INTESTINAUX
oxyures. Leur couleur était jaunätre, leur longueur
de quatre millimètres à peu près, et la grosseur la
plus considérable du corps d’un millimètre et demi.
Ces vers étaientitrès-vifs, et sautaient à la lueur
d'une chandelle. Leur tête était grosse, obtuse, et
leur queue se terminait en un cône obtus, au lieu
' d’être pointue.
Voilà l'essentiel du contenu de l’observation de
Brera, et si elle est exacte, elle servirait de preuve
que des vers provenant d’œufs tout à fait desséchés
peuvent se développer dans des circonstances favo-
rables; pourquoi n’en serait-il pas de même de ceux
qui flotteraient dans l’eau ?
Mais je me permets de faire observer à Brera que
les petits corps que Rubini lui envoya n'étaient pas
des œufs de vers.
Si Brera était aussi bon observateur qu’il s'annonce
lui-même, il aurait dû d’abord douter de la nature
d'œufs qu'il attribue à ces corps , et s'étonner ensuite
que ces deux enfans n’eussent jamais rendu de vers,
ce que leur mére , du reste, aurait dû facilement re-
marquer, quoique ces vers ne se fussent pas fait sen-
tir par des démangeaisons à l'anus. Mais il est dit ex-
pressément, en parlant de cette fille, qu'elle n’a
éprouvé aucun symptôme morbide (sensa essere a/-
Jetta da verun sintomo morboso ); cependant il paraît
que Brera ne s’en souvenait pas à la page 374, où il
cite ce cas et le désigne comme une maladie vermi-
neuse trés-grave, excilde par-la présenee d’oxyures :
(caso di verminatione incommodissima eccitata della pre-
DE L'HOMME. 45
‘senza delle ascaridi vermicolari). En lisant l'ouvrage
de Brera avec attention, on trouvera souvent de pa-
reilles erreurs et contradictions.
Cet auteur aurait dû, en outre, trouver étrange
que ces vers n’eussent besoin, la première fois, pour
se développer , que d’une seule nuit, tandis que dans
la seconde ils restèrent un mois sans le faire. Si Brera
les eùt bien examinés, ıl aurait vu sur-le-champ
que c'était contre toute analogie que ce fussent des
capsules qui en auraient contenu d’autres, dans les-
quelles à la fin les véritables œufs seraient enfermés.
Il y a bien des infusoires, par exemple le volvox glo-
buleux (volvox globator ), où un animal se trouve en-
fermé dans l’autre, et où les jeunes en contiennent
encore d’autres plus petits, mais je ne connais aucun
exemple où des œufs séparés de la mere et provenant
surtout d'animaux qui ont des parties sexuelles sépa-
rées, et qui s’accouplent complétement, comme toutes
les espèces de nématoïdes , puissent être réunis dans
une seule capsule. Cela peut arriver tant que les œufs
sont encore contenus dans le sein de leur mére, soit
dans une membrane, soit dans une sorte de matrice,
mais non pas quand ils en sont sortis. Brera aurait dû
encore être surpris qu'il ne sortit la première fois de
chaque corps qu’un seul ver , tandis que des milliers
se-développèrent lors de son expérience de dix in-
troduits dans l’abdomen du chien. Il aurait pu se
convaincre aisément que ce n’était pas des œufs
d’oxyures qu'il observait, s’il s'était donné la peine
de les comparer avec des œufs sortis récemment d’une
46 SUR LES VERS INTESTINAUX
femelle de cette espèce ; il anrait alors vu que ces
œufs sont tellement petits, qu'il est impossible de les
apercevoir à l'œil nu, de les compter lorsqu'ils sont
desséchés , etencore bien moins de les dissequer. Les
œufs des oxyures desséchés sur une plaque de verre,
ne peuvent pas même être sentis par le toucher ; ceux
de Brera, d’après sa description, avaient une en-
veloppe dure, composée de deux membranes, et
ils étaient aussi gros, et peut-être plus que cer-
tains oxyures. Il nous dit aussi que ces corps étaient
cordiformes; cela se peut bien, mais les œufs
d’oxyures sont ovalaires, justement comme il les a
representes, lab. 1v, fig. 10, quoique un peu inexac-
tement, d’après une figure de Goeze. Ces œufs ont,
même en les grossissant sous les plus fortes loupes,
une superficie tout à fait lisse, et non pas velue,
comme Brera le prétend des corps qu'ila observés.
Ainsi donc, si Brera n'avait pas été trop prompt dans
ses conclusions et assertions , l’idée ne lui serait pas
venue de regarder les œufs d'oxyures comme identi-
ques avec ces pelits Corps.
Le lecteur demandera enfin, qu’etait-ce donc que
ces corps ? Ne les connaissant que par une descrip-
tion et une figure qui se Lrouve copiée pl.1x, fig. 1,
jene puis rien avancer là-dessus; mais qu'il me soit
permis de faire une observation. Au premier aspect
je les ai pris pour les graines d’une plante, mais je ne
savais pas à laquelle elles appartenaient. Pour m’e-
clairer là-dessus, je demandai à M. le baron de Ja-
quin quellesgraines de cette formeet grosseur avaient
DE L'HOMME. 47
pu être mangées par un enfant,: cet auteur me ré-
pondit que c'était probablement celles des fraises,
quise trouvent au dehors du fruit, et qui, introduites
dans le canal intestinal, s’y grossissent considérable-
ment. Nous en examinâmes sur-le-champ qui avaient
été recueillies fraîchement de ce fruit, et nous vimes
qu’elles ressemblaient parfaitement aux corps repré-
sentés par Brera. J'en dennai ensuite à un enfant à
manger, et quarante-huit heures après je retrouvai
dans ses matières fécales les graines considérable-
ment gonflées : 1l sortait de ces dernières, écrasées
entre les ongles, non pas une humeur blanchâtre,
mais bien un germe déja développé. C'était proba-
blement de fraises fraîchement cueillies, que prove-
-naient les premiers corps observés par Rubini au
mois de juin, tandis que les autres observées par lui
en hiver provenaient sans doute de fraises confites.
Les mouvemens vifs dont parle cet auteur se laissent
également expliquer. Ces graines furent probable-
‘ment mises dans l’eau, où il s’opéra une absorption
inégale de ce liquide, qui, causant une différente
tension des fibres, produisit des sautillemens en dif-
férens sens, qu’un homme peu exercé a pu regarder
comme des mouvemens volontaires.
La villosité apparente, qui n’est pas propre aux
graines de fraises, pouvait provenir de la poussière
adhérente, ou d’une macération de l’épiderme, ou
peut-être même était-elle due à de la moisissure.
Les corps ronds que Brera prétend avoir observés
dans ces apsules n'étaient tres-probablement dus
43 SUR LES VERS INTESTINAUX
qu’à uneillusion d'optique. Celui qui ne sait pas bien
manier le microscope composé ne doit pas trop se
fier à ses yeux, car rien n’est plus facile que de se
tromper dans l'emploi de cet instrument.
L'origine des milliers de vers rencontrés ensuile
par Brera dans la cavité abdominale du chien ne peut
étre aussi faciiement expliquée : j'ai cependant la cer-
utude que ce n'étaient pas des oxyures. Ces vers.
étaient d’un jaune foncé : les oxyures sont blancs
comme du lait; la longueur de chacun était de quatre
millimètres à peu prés, et la grosseur la plus consi-
dérable d’un millimètre et demi, par conséquent une
proportion de la longueur à la grosseur ; comme trois
à huit. Chez les oxyures, cette proportion est d’un à
vingt, sans compter la partie la plus pointue de la
queue. Ils avaient la tête grosse el obtuse. Les
oxyures sont très-fortement amincis vers l'extrémité
antérieure , qui est pourvue d’une membrane latérale;
la queue formait un cône obtus, tandis que la queuc
des oxyures est très-pointue et est tellement amincie
vers son extrémité, qu'on ne peut guère la voir qu’a-
vec l'œil armé du microscope. Peut-on trouver des
différences plus grandes, je le demande, chez des
animaux, comme les nématoïdes , dont les genres et
les espèces sont seulement déterminés par la propor-
ion de la grosseur avec la longueur ‚et par la confor-
mation de la tête et de la queue ? Et Brera dit ce-
pendant qu'ils offraient tous les caractères des oxyures
(offrivano tutti à caratleri dell’ ascaride vermicolare ).
Les differences, selon lui, auraient pu provenir de ce
DE L'HOMME. 49
qu'ils ne s'étaient pas développés dans le corps de
l’homme. En général Brera a supposé bien des choses
qui ne sont nullement fondées : je vais en donner
quelques exemples. Il croit que le polystome 1tæ-
nioide. ( polystoma teenioides, Rud.), dentelé sur les
bords, et non pas articulé, provenant des sinus fron-
taux du chien, est identique avec le véritable 1ænia
articulé (tænia lanceolata ), qui séjourne dans les in-
testins de l’oie, d’où il tire diverses conclusions. 11
a décrit une larve de mouche trouvée dans le pot de
chanibre d’une femme, pour un nouveau ver intes-
tinal provenant de la vessie’. Que doit-on penser
d’un pareil observateur ? Comment peut-on ajouter
foi à ce qu'il dit, quand on sait qu’il rapporte iafide-
lement, et qu’il arrange , comme bon lui semble , les
expériences faites par d’autres, comme nous le ver-
rons quand il sera question de l’hamulaire lympha=
tique de Treutler et du polystome des veines (polys-
toma venarum ) ? Qui s’étonnera alors, si je soupconne
que Brera n’a trouvé ses prétendus oxyures que plu-
sieurs jours aprés l'ouverture du chien, ce qu'il lui
aura paru convenable de nous laisser ignorer , ou que
pendant cet espace de temps, les mouches ont pu y
déposer leurs œufs, et qu’il a pris alors leurs larves
pour des vers ? Toute sa description rend cette sup-
position trés-probable.
Je prie ceux de mes lecteurs qui pourraient croire
que je me suis occupé trop long-temps de réfuter
* Voyez Circosoma , parmi les pseudohelminthes.
4
5o SUR LES VERS INTESTINAUX
Brera, de considerer que plusieurs raisons ont dü
m’y determiner. Brera est, pour ainsi dire, le seul
(Joerdens et plusieurs auteurs de dissertations ex-
ceptés) qui ait publié dans les temps modernes un
ouvrage même très-volumineux sur les vers intesti-
naux de l’homme. Cet auteur s'annonce lui-même
comme un homme qui a approfondi et examiné avec
le plus grand soin tout ce qui a rapport à ce sujet.
Quel médecin n’etant pas lui-même helminthologue,
ne croirait pas Brera sur parole ? Alors, entraîné par
les raisonnemens de cet auteur, il n’hésitera pas
d'admettre ces trois choses : 1°. que des œufs de vers
tout à fait desséchés peuvent éclore si on les soumet
à l'influence de la chaleur animale et de l’humidité ;
2°. que les œufs de vers peuvent être transférés d’un
animal dans un autre , et y atteindre leur développe-
ment ; 3°. que la structure des vers prend une toute
autre forme quand ceux-ci sont éclos dans un corps
organisé autre que celui dans lequel ils séjournent
originairement. Réfuter ces trois points, prouver
leur peu de vraisemblance et même leur impossibi-
lité, était le but de toute cette discussion. J'étais
surtout obligé de réfuter avec beaucoup de details
la prétendue observation concernant le développe-
ment de vers tout à fait desséchés , et par laquelle
ma théorie aurait complétement échoué, afin de
mettre mes lecteurs en état d’en pouvoir juger eux-
mêmes. Ceux qui ne veulent pas ajouter foi à mes as-
sertions peuvent facilement, par des expériences, se
convaincre de leur vérité.
DE L'HOMME. 51
Après avoir prouvé par des raisonnemens l’impos-
sibilité de la communication des vers intestinaux par
l'intermédiaire des alimens, des boissons et même de
Vair, il ne reste d’autre voie, dans la supposition que
les vers intestinaux seraient gagnés par communica-
uon, que celle de la succession par les parens, c’est-
à-dire que ceux-ci les transmettraient à leurs enfans,
soit par l’acte de la génération, soit par la nutrition,
dans le sein de la mére, soit enfin par l'allaitement.
Les défenseurs de: cette hypothèse sont obligés de
convenir , ou plutôt ils sont forcés d'admettre que les
parens primitifs de l’homme et de tous les autres ani-
maux ont porté en eux toutes les espèces de vers par-
üculières à chaque espèce d’animal. Si l’on considère
combien d'espèces de vers on rencontre chez quel-
ques animaux , chez l’homme, par exemple, douze’,
sans compter le tænia vulgaire comme une espèce
particulière , ct sans y comprendre le polystome des
veines (polystoma venarum), et plusieurs autres dont
nous parlerons par la suite; chez le chien huit; chez
le renard, neuf; chez le putois, également neuf; chez
le hérisson , dix à onze; chez le campagnol, sept;
chez le lièvre, huit; chez le mouton, neuf; chez le
bœuf, dix à onze; chez le cochon, huit à neuf; chez
le cheval , neuf; chez le faucon cendre, huit; chez la
pie, huit ; chez la corneille bleue , sept; chez le cor-
moran, huit; chez la cicogne, sept ; chez le vanneau,
dix; chez le pluvier , sept; chez la grenouille tempo-
raire, huit; chez la grenouille verte, dix ; chez le si-
Jure , sept; chez la perche, onze; chez le sandre(perca
4
52 SUR LES VERS INTESTINAUX
lucio , L.) sept; chez la truite, dix; chez la truite sau-
monnée , neuf; chez le saumon, huit ; chez le brochet,
dix, etc., sans parler de ceux que nous ne connaissons
pas encore, et de ceux dontlarace s'estpeut-êtreéteinte;
il faudrait alors admettre que ces parens primiufs
auraient été, pour ainsi dire, de véritables magasins
de vers, auxquels la génération de ces parasites a dû
causer plus d'obstacles que la conservation de leur
propre race.
On pourra sans doute objecter contre cette asser-
tion , que les parens primitifs ont dü avoir nourri
dans leur corps toutes les espèces de vers que l’on
rencontre dans leurs descendans; que cela n’a pas été
absolument nécessaire, par la raison que les vers ap-
partenant originairement à la même espèce sauraient
pu recevoir, par le croisement des espèces , par l'in-
fluence du climat, de la nourriture, du chyle, une
structure tout à fait différente de leur premiere forme,
de manière à ne plus être reconnus, ce qui fait que
nos naturalistes d’aujourd’hui les regardent comme
autant d'espèces différentes, ce que nous avons éga-
lement raison d'admettre pour les animaux d’une
conformation parfaile, savoir que ceux que nous re-
gardons aujourd'hui comme formant des races parüi-
culières, ne furent primitivement que des variétés.
Quand même on voudrait admettre que cela puisse
arriver dans quelques cas pour les vers appartenant à
la même famille, ou pour ceux qui séjournent dans
le même organe ou viscere, on concevrait diflicile-
ment que cela eût pu avoir lieu pour des vers, qui dif-
DE L’HO"!ME. 53
ferent entre eux, non-seulement d’espèceet de genre,
mais encore d'ordre, et qui séjournent dans-des or--
ganes différens. Si l’on voulait supposer , par exemple,
que l’hydatide qui se trouve dans le cerveau du mou-
ton, le nématoïde dans la trachée-artère du même
animal, le tænia dans ses intestins grêles, et le ver
(de l’ordre des trématodes ) dans son foie, aient eu
le même père primitivement, on ne pourrait pas, par
conséquent, regarder comme un homme dépourvu de
bon sens celui qui croirait qu’un animal quelconque,
l'éléphant, par exemple, serait à la fois le père des
baleines, des bouquetins, des lions, des kangu-
roos , etc.; et cependant dans ce cas la différence ne
serait pas même aussi grande, car ces animaux appar-
tiennent tous à la classe des mammifères.
Quoiqu’il'ne soit pas probable que chaque individu
des parens primitifs de l’homme ou des animaux ait
porté autant de vers différens dans son corps, il n'est
cependant pas encore clairement démontré que cela
ne soit pas possible. Je ne veux pas, pour cette rai-
son , que l’on regarde ce que j'ai avancé jusqu’à pré-
sent à ce sujet, comme une preuve admissible contre
cette hypothèse. Supposé que les parens puissent
communiquer les vers à leurs enfans , on devrait ne-
cessairement admettre en même temps que les pa-
rens portaient en eux-mêmes les vers qu'ils devaient
transmettre à leurs descendans ; car on ne peut pas
communiquer quelque chose que l’on ne posséde pas
soi-même. Mais c’est justement ici que cette hypo-
thèse n’est pas confirmée par l'expérience. Nous
54 SUR LES VERS INTESTINAUX
voyons beaucoup de personnes trés-sujettes aux vers,
sans que l’on en ait vu une trace chez leurs parens ;
comment ceux-ci, par conséquent, auraient-ils pu
les leur transmettre ? Alors, par quel moyen cette
communication s’est-elle opérée ? Brera’, défenseur
de cette hypothèse, a toujours un refuge quand il se
trouve embarrassé dans ses assertions, et c’est en ef-
fet par un moyen de cette sorte, qu’il a cherché à la
soutenir. 2
Cet auieur, s’en rapportant à ses expériences, dit
que quelques hommes sont quelquefois tres-sujets
aux vers, tandis que leurs enfans n’en ont pas , et que
les mêmes vers dont leurs pères ont été affectés ne
se montrent que chez leurs petits-fils. On ne peut
rien objecter contre cette expérience, et il peut
même arriver que les arrière-petits-fils aient les
mêmes vers que leurs bisaïeux avaient jadis, tandis
que tous les autres membres de cette famille n’en
avaient pas. Mais je doute de la conclusion que Brera
en tire, savoir que les œufs des vers du grand-père
ont traversé le corps du fils, dans lequel ils n’au-
raient pas trouvé une occasion favorable à leur déve-
loppement, pour se rendre dans celui du petit-fils.
Le lecteur doit facilement voir tout le ridicule que
contient l’idée d’une’ pareïlle succession de vers du
grand-père au petit-fils, en omettant son propre fils.
Je crois cependant encore nécessaire de faire remar-
quer les points suivans :
ı Memorie , p. 401.
DE L'HOMME. 55
ı*. Nous pouvons supposer que les deux sexes de
V’espece humaine, arrivés à l’époque à laquelle ils
peuvent se reproduire, ne conservent pas, à cause du
changement continuel de la matière un seul grain de
la substance osseuse primitive qu’ils avaient en quit-
tant le sein de leur mère; encore moins les corps
étrangers, parmi lesquels je compte les vers, pour
raient-ils se conserver aussi long-temps dans l’inté-
rieur du corps, ou des évacuations continuelles ont
lieu par le moyen des vaisseaux exeréteurs. Brera a
dit lui-même que, lorsque les œufs de vers ne trou-
vent pas dans un corps les conditions nécessaires à
leur développement, ils sont évacués intacts ( quoi-
que cette assertion ne soit appuyée d’aucune preuve}
comme d’autres substances destinées à être excrétées,
Pourquoi les œufs de vers communiqués par la ge-
nération feraient-ils une exception à celte règle? Car
ou l'œuf comme tel est détruit, comme cela a lieu
quand il arrive dans l’estomac, ce que du reste l’ex-
périence rapportée sur le putois a prouvé, ou bien
l'œuf rencontre les conditions requises à son deve-
loppement, et le ver en sort. En eflet, à juger d’après
toute analogie , l'œuf d’un ver vivant et fécondé, par
exemple celui d’un mammifère , n’a pas besoin d’autre
condition pour son développement que la chaleur
animale et l'humidité. Au moins on ne voit point
la raison pour laquelle un œuf qui se trouverait
dans de pareilles sireonstances. ne pourrait pas se dé-
velopper aussi bien qu’un œuf de poule, qui n'a be-
soin pour cela que d’une chaleur sèche dans un four.
56 SUR LES VERS INTESTINAUX
Le ver par conséquent se développera toujours etäun .
endroit quelconque du corps, pourvu qu'il ne ren-
contre pas quelque chose, comme par exemple dans
l'estomac, qui agisse sur lui d’une manière destruc-
tive; mais autre chose est sa croissance et sa conser-
vation future. L'expérience précitée de Pallas faite
sur les œufs du tænia du chien paraît non-seulement
prouver qu'il peut s’accroitre, mais encore donner
des éclaircissemens sur son développement ultérieur.
Si des œufs de vers pouvaient être introduits dans
la matrice avec le sperme de l’homme, il serait sans
doute à craindre , comme ils y trouvent de la chaleur
animale et de l'humidité, que ces vers ne se dévelop-
passent plus tôt que le fœtus dans lequel ils devaient
séjourner, qu’ils ne le mangeassent à l’état d’em-
bryon, et que la femme, à la fin, n’accouchät, au lieu
d’un enfant, d'un amas de tænias ou d’ascarides ; mais
un fait semblable n’a jamais été observé.
2°. La chose ne devient pas encore claire, en ad-
mettant même que des vers puissent être communi-
qués au fœtus pendant l'acte de la génération (je dé-
montreral cependant par Ja suite que cela ne peut pas
ävoir lieu}; qu'ils puissent être seulement déposés
dans les organes générateurs par une loi d’attraction,
bien difficile à la vérité à expliquer, et qu'ils puissent
y séjourner tranquillement jusqu’à ce que ces or-
ganes soient arrivés à leur développement complet;
caril est impossible qu’un père communique à son
fils des millions d'œufs, surtout quand ils sont de la
grosseur de ceux dont Brera a parlé, et les œufs,
DE L'HOMME. 57
comme tels, ne peuvent pas non plus se multplier.
Quand on réfléchit combien de sperme l’homme perd
ouseulementcombien il s’en forme dans ses testicules,
et quelle quantité est de nouveau absorbée, avant
qu’il ne cohabite avec une femme; quand on consi-
dere qu’il ne faut qu’un seul acte de génération pour
la fécondation , on serait forcé , si on voulait défendre
l'hypothèse de Brera, d'admettre qu’une puissance
surnaturelle surveille ces œufs de vers, et que par sa
prévoyance il ne s’en détacherait que quand le coit
serait fécond , et chaque fois seulement une certaine
quantité.
3°. Quand on pense combien’peu de fois nous ren-
controns certaines espèces de vers chez l’homme et
les animaux ( par exemple, chez le premier, les hy-
datides, les douves du foie , et les strongles dans les
reins, ’hamulaire lymphatique et le polystome pin-
guicole , deux vers qui n’ont été trouvés qu’une seule
fois), on est, pour ainsi dire, forcé de croire que
quelques œufs de vers auraient été obligés de par-
courir, à cet état, trente à quarante générations,
jusqu’à ce qu’enfin un ver, peutêtre après mille ans,
eut réussi à sortir de l’œuf. Qui pourrait admettre, je
le demande , une pareille supposition ?
4°. Toute cette hypothèse est réfutée par un seul
ver, c’est-à-dire le cœnure cérébral dans le cerveau
des moutons atteints du tournis. Ce ne sont ordi-
nairement que les agneaux qui en sont incommodés
la première année de leur vie; cependant la même
chose s’observe quelquefois aussi chez les béliers et
58 SUR LES VERS INTESTINAUX
les brebis. Cette maladie devient toujours mortelle,
à moins qu’on ne parvienne à détruire le ver par le
moyen de la trépanation. Si le premier ver de cette
espèce avait élé créé au même moment que le pre-
mier mouton, celui-ci aurait dü être nécessairement
détruit par la présence de ce ver, comme cela arrive
encore aujourd'hui, et par conséquent la propagation :
des moutons n’aurait pu avoir lieu. L'expérience ce-
pendant nous démontre le contraire.
Br Quand même nous trouverions chez les parens
les mêmes vers que nous observons chez leursenfans,
il ne serait pas prouvé pour cela que les derniers les
auraient gagnés des premiers. Une telle communica-
tion du côté du père n’est pas même imaginable , car
quand même un mélange réel de l'humeur sperma-
tique des deux sexes aurait lieu pendant lacte de la
génération, chez l'homme et les mammiferes, la
même chose n'arrive cependant pas dans la plus
grande partie des animaux des autres classes du règne
animal. J'aurai occasion, par la suite, de démontrer
l'impossibilité d’un pareil mélange dans une grande
partie des oiseaux.
Spallanzanı nous a démontré, par des expériences
faites à ce sujet, combien peu de sperme il faut pour
rendre fécond : trois grains de celui d’une grenouille
mâle étendus dans une livre d’eau , furent suflisans
pour féconder une grande quantité de frai de gre-
nouille.. L’attouchement seul de la pointe d’une
épingle trempée dans le sperme rendit un œuf com-
piétement fécond. Qui pourrait donc croire que
DE L'HOMME. | 59
cette petite portion d’humeur spermatique adherente
à la pointe de l’épingle ait encore contenu les œufs de
dix espèces différentes de vers, et dont on rencontre
souvent six à sept dans une grenouille verte, sans
parler des individus dont il y a souvent une centaine
à la fois; car on trouve fréquemment les vers suivans
dans le corps de cet animal, savoir , dans ses intestins
greles, des strongles , des echinorhynques, des dis-
tomes ( distoma, Rud. Zed.); dans le rectum, une
espèce de nématoïde et des amphistomes; dans les
poumons, une espece de nématoïde et des distomes;
dans la vessie abdominale des distomes (tous ces trois
distomes diffèrent entre eux spécifiquement); sous les
iégumens , des filaires; outre cela ilfy a encore sou-
vent dans le tissu cellulaire de tous les viscères et
muscles des amphistomes enfermés dans des cap-
sules. Comment les œufs des vers de tous ces difle-
rens visceres pourraient-ils arriver dans les testicules
pour être excrétés de là avec le sperme? Par quel
moyen pourraient-ils s’introduire dans l'œuf de la
grenouille, et y rester jusquà ce que cet animal eut
atteint sa maturité? Et comment enfin, chaque es-
pèce d'œufs de vers pourrait-elle justement arriver
dans l’organe déterminé pour s’y développer. J’a-
joute encore que trois espèces de ces vers sont vivi-
pares, savoir l’ascaride (de l’ordre des nematoides),
provenant des poumons, une autre ascaride du même
ordre que le précédent, provenant du rectum, et
Vamphistome, du même organe.
Si par conséquent une communication de ces vers
Go SUR LES VERS INTESTINAUX
avait eu lieu par le moyen du père, on devrait voir
nager ces jeunes vers dans l'humeur spermatique, à
l'aide d'un microscope ordinaire, cependant il n’en
est pas ainsi.
Des difficultés insurmontables s'opposent égale-
ment à ce que la communication se fasse par la mère;
car pour qu'elle püt avoir lieu , il faudrait nécessai-
rement admettre que les œufs des vers qui séjour-
nent dans les différens viscères de la mère seraient
absorbés par les vaisseaux lymphatiques, et conduits
de là dans la masse du sang, qui les déposerait
ensuite, par le moyen des vaisseaux exhalans, dans
la matrice, d’où le fœtus devrait les absorber de nou-
veau par ses vaisseaux lymphatiques, qui eux-mêmes
les porteraient dans le torrent de la circulation, par
Vintermede de laquelle ils seraient enfin transmis à
des organes propres à leur développement, où ils se-
raient déposés par les vaisseaux exhalans. C’est, à la
vérité, un chemin à la fois long et dangereux que
l'œuf aurait à parcourir, car il courrait continuel-
lement le risque d’être transporté dans un autre or-
gane excréteur, où il serait perdu à jamais. Suppo-
sons même que dix mille se perdissent avant que l’un
ou l’autre püt atteindre sa destination , on devrait
alors retrouver ces œufs, non-seulement dans le sang
de la mère, mais encore dans celui du fœtus ; cepen-
dant on n’y en trouve point, et même il est impossi-
ble d’en rencontrer , quoique le volume des œufs pro-
venant des plus petits vers, soit, d’après un calcul
approximatif de M. Rudolphi , dix mille fois plus gros
DE L'HOMME. 61
que celui des globules du sang, estimation qui ne pa-
raît pas exagérée. Or, nous savons que les dernières
ramifications des vaisseaux que les œufs des vers de-
vraient parcourir à plusieurs reprises , s'ils suivaient
le chemin mentionné, ne laissent pas même passer
une globule rouge du sang, encore moins un œuf de
ver pourrait-il y circuler. Chez les animaux ovipares,
la grenouille, par exemple, le commencement pri-
mitif de l'œuf, entouré d’une membrane particulière,
forme un tout par lui-même, qui dans son origine
n’est pas probablement plus grand qu’un œuf de ver.
La membrane qui couvre d'œuf de la grenouille est
cause que cet œuf ne peut recevoir sa nourriture que
sous forme de vapeur. Comment un œuf de ver, vi-
sible à l’aide d’une simple loupe, pourrait-il s’y in-
troduire , n’ayant pas d'organes par lemoyen desquels
il se frayerait un chemin? Ces raisonnemens sufli-
ront, ce me semble, pour se convaincre de l’impos-
sibilité de la communication des œufs de vers de la
mére à son fœtus.
Brera n’est pas de l’opinion que l’on doive regar-
der ces petits corps ovales, elliptiques et sphériques
que nous trouvons dans le corps des vers intestinaux
comme des œufs simples , et il prétend que ce ne sont
que des capsules dans lesquelles les œufs sont enfer-
més. Mais comme cette hypothèse n’est soutenue ni
par l’analogie ni par experience, on me pardonnera,
ce me semble, si je passe outre.
Enfin l’expérience prouve encore contre P’hypo-
thèse d’après laquelle les parens communiqueraient
62 SUR LES VERS INTESTINAUX
les vers à leurs enfans; je vais le montrer par quel-
ques faits. L’Europeen n'est jamais incommodé par
le ver de Guinée ( filaria dracunculus) , quelle que soit
la durée du temps qu'il reste en Europe; cependant
cela arrive très-facilement quand il a habité les pays
où ce ver séjourne. Il est évident qu'il n’a pas pu en
hériter de ses parens, et nous savons également que
ses enfans, petits-fils et arrière-petits-fils n'en se-
ront jamais attaqués, pourvu qu'ils ne se rendent pas
eux-mêmes dans ces contrées.
Les cochons domestiques, qui ont sans doute tire
leur origine du sanglier, ont cependant une espèce
de vers (le cysticerque, cysticercus cellulosus, Rud.)
que l’on ne rencontre jamais chez les sanglıers; il re-
sulte alors de là que les cochons n’ont pas pu gagner
ces vers par voie de succession.
Les raisons qui nous ont servi à démontrer que les
parens ne peuvent pas communiquer les vers au fœtus
par l’acte de la generation, ni pendant que celui-ci
était encore nourri dans le sein de sa mère, suflisent
aussi pour prouver que le fœtus ne peut pas les
gagner par le lait de celle-ci, ce qui a été admis
par Thomas. Il est d’ailleurs de fait que beaucoup
d’enfans, élevés sans avoir tetté, sont souvent très-
sujets aux vers. Du reste, cette dernitre sorte de
communication ne pourrait avoir lieu que chez les
mammifères. On objecte à cela que les oiseaux pour-
raient communiquer les vers à leurs petits avec la
nourriture qu'ils leur degorgent; mais beaucoup
d’oiscaux ne nourrissent pas leurs peuts de cette
DE L'HOMME. 63
maniere, et cela n'empêche pas ces derniers d’avoir
des vers.
Les amphibies et les poissons ne s'occupent pas du
tout de leurs petits , qui habitent souvent d’autres en-
droits que leurs parens : la salamandre terrestre, par
exemple, vit sur terre, tandis que ses petits vivent
dans l’eau. Chez les insectes, la mère estordinairement
morte depuis long-temps avant que le petit ne sorte de
l'œuf. Comment, dans ces cas-ci, pourrait-il yavoir
‘une communication de vers, qui, comme nous l’a-
vons démontré, est impossible dans le sein de la mère.
Les raisonnemens précédens ont, comme je les
père, convaincu mes lecteurs que les vers intestinaux
ne peuvent pas arriver du dehors dans le corps ani-
mal; j'ai posé, dans le commencement, pour prin-
cipe, qu’il ne peut y avoir que deux origines pour les :
vers ou leurs œufs dans les animaux. Dans l’une ils
proviennent du dehors, et dans l’autre leur origine
est dans l'animal lui-même, où ils se forment spon-
tanément.
Si j'ai réussi à prouver que la communication par
la première voie ne peut s'effectuer, j'aurai alors,
par cela même, fourni une preuve, négative il est
vrai, en faveur de la réalité de la derniére; je vais
essayer maintenant d’y ajouter quelque chose d’affir-
matif. Pour atteindre ce but, je suis obligé , autant
que cela peut se faire, de remonter à la formation de
tous les corps organisés; mais avant d’entrer dans ce
sujet, je suis forcé de m'occuper d’abord de la for-
mation probable de notre globe.
64 SUR LES VERS INTESTINAUX
Les recherches sur la formation de notre planète
nous ont appris les choses suivantes : la dernière
couche jusqu’à laquelle nous avons pu pénétrer est
composée de granit, c'est ce qui forme les terrains
primitifs ; au-dessus d’elle se trouvent les terrains de
transition , placés couche par couche ; et au-dessus les
terrains secondaires. Outre cela, nous distinguons
les terrains d’alluvions et les terrains volcaniques.
Dans les terrains primitifs, comme dans ceux de tran-
sition, nous ne trouvons pas de traces d’êtres qui
aient eu vie; ce n’est que dans la première couche des
terrains secondaires que nous rencontrons des restes
de formations organiques; ce sont en grande partie
des crustacés ou des animaux aquatiques du premier i
degre d’organisation. Dans les couches deposees plus
tard, et par conséquent plus haut, nous observons
des restes d'animaux qui ont jadis vécu sur la terre ;
mais dans celles situées un peu plus profondément,
nous ne découvrons que des restes d'animaux dont la
terre, dans son état actuel, ne possède plus d’analo-
gues, au moins en espèce. Ce ne sont que les couches
les plus récentes des montagnes secondaires qui nous
fournissent des restes d’animaux semblables aux nö-
tres, ou ayant au moins quelque affinité avec ceux qui
existent encore. On ne découvre dans aucun terrain
secondaire des ossemens d'hommes; il y en a cepen-
dantquelquefois dans des profondeurs considérables;
mais ces dernières n'étaient formées originairement
que par des crevasses qui ont die probablement rem-
plies plus tard par les éboulemens des parties supé-
DE L'HOMME. 65
rieures. Nous ne connaissons donc pas encore de vé-
ritables anthropolithes. Les vertebres pétrifiées trou-
vées par Scheuchzer, pres d’Altorf, ont appartenu,
comme M. Cuvier* l’a démontré, à une espèce de
crocodile , et son témoin du déluge (homo diluvii tes-
tis) n’a jamais été regardé par un autre naturaliste que
lui comme un véritable squelette d'homme, ce qui
résulte des recherches faites à ce sujet par Kargs et
M. Cuvier. Le squelette humain fossile apporté par
Cochrane ‚de la Guadeloupe à Londres, n’est pas non
plus un véritable anthropolithe. — Voy. Mémoire sur
un squelette humain fossile de la Guadeloupe‘, par Charles
Kœnig, écuyer, extrait d’une lettre à l'honorable sir
Joseph Banks, dans les Transactions philosophiques,
Londres, 1814; dans le Journal de physique et d’his-
toire naturelle, septembre 1814, p.196, ainsi que
danslessuivans: Allgemeine geographische ephemeriden,
herausgegeben von Bertuch; Julius, 1814, p- 556; et
le Bulletin des sciences par la Société philomatique
de Paris, livraison de novembre 1814, p. 140.
Cette structure de la terre me paraît devoir con-
duire à penser que primitivement, au moment où elle
formait un tout existant en lui-même, ce n’était en.
quelque sorte qu’une masse liquide (tropfen) sans
forme, mais vivifiée , c’est-à-dire douée de l'esprit
vivant, ou bien simplement del’esprit universel. On ne
doit pas cependant confondre ce dernier, appelé par
MOI esprit vivant, avec l’ame du monde de nos philo-
= Össemens fossiles , t, 4.
66 SUR LES VERS INTESTINAUX
sophes , ame qui a créé non-seulement le monde d’a-
pres leur opinion, mais qui s’est encore creee elle-
même ; car jen’entends autre chose par cet esprit que
ce qu’on pourrait appeler également la vie, force vi-
tale, en un mot la cause primitive de la vie en géné-
ral, delaquelle tousles mondes, lors de leur création ,
ont été doués, ou plutôt animalisés par lêtre des
êtres , par Dieu le créateur ’.
Cette masse s'était probablement détachée du so-
leil, ainsi qu'il y a lieu de croire que la lune s’est
séparée plus tard de notre terre , l’une et l’autre pour
former un tout clos, un système, et pour jouir d’une
vie particulière, chacune séparément. Buffon était
déjà de cette opinion. ( Voy. Epoques de la nature;
première époque.) Quoique cette opinion appar-
tienne à un naturaliste déjà un peu ancien, et non
pas à un de nos modernes , je ne vois pas de raison
suffisante pour ne pas l’adopter. Du reste, dans la na-
ture de mes recherches , il est tout à fait indifferent
que notre terre ait formé primitivement un tout en
elle-même, ou bien qu’elle ne soit effectivement
qu'un morceau séparé du soleil. Jene disputerai pour
cela avec personne, car il est à peu près impossible
de savoir quelque chose de certain là-dessus.
: Le conseiller Voigt a également désigné, dans ses Elémens
d'histoire naturelle publiés en 1817 , sous le nom d'esprit la cause
primitive de la vie; cependant je n’ai pas pu lui emprunter cette
expression, par la raison que mon ouvrage avait déjà reçu l’im-
primalur au mois de juin 1812.
DE L'HOMME. 67
Peu à peu il se développa dans cette masse liquide
sans forme.un noyau, c’est-à-dire nos terrains pri-
mitifs. La cause principale de cette formation du
noyau , ainsi que celle des précipitations successives
sur ce noyau, c’est-à-dire des terrains de transition et
des montagnes secondaires, peut£tre cherchée ou dans
une force particulière appelée morte et inhérente à la
matière comme telle, ou bien dans l’esprit, qui vi-
vifie la substance et qui la conserve comme un tout
clos par lui-même. La force que l'on prétend inhe-
rente à la matière a été désignée par nos naturalistes
sous le nom de gravitation (gravitatio ), que l'on veut
‘expliquer par une tendance vers le centre. Si cette
force était la seule agissante sur notre globe, il serait
déjà depuis long-temps contracté en une masse morte.
On en a par conséquent imaginé une autre , directe-
ment opposée à la force attractive vers le centre, ou
à la contraction, et on l’a appelée force expansive
(expansio). Mais quoique je ne sois pas porté à cher-
cher dans la gravitation , pour me servir d’un terme
plus court, la cause de la formation de notre terre et
de la conservation de son existence, je ne crois pas
cependant que l’on ait besoin, pour expliquer les
phénomènes qu'elle présente, d'avoir recours à une
nouvelle force expansive particuliere. Nous savons
que le grand corps attire le petit. Le soleil est en ef-
fet un corps beaucoup plus grand que notre terre :
la force attractive vers lui-même doit nécessairement
affaiblir celle de notre terre vers son centre, car
celle-ci est encore située dans la sphère du soleil,
B,
68 SUR LES VERS INTESTINAUX
dont elle forme une partie intégrante. La force at-
tractive du soleil est affaiblie nécessairement par la
grande distance; car sans cela elle aurait depuis
long-temps englouti la terre; par conséquent elle
contrebalance la force attractive de la terre, et em-
pêche celle-ci de se contracter ( erstarren ) comple-
tement. D’après cette supposition , la cause des phé-
nomènes doit être atiribuée à la force attractive du
soleil, et non pas à une force expansive particulière,
comme on l’a admis à tort.
On peut ainsi se rendre raison de la conservation
de la terre comme telle, mais nullement de l'origine
et de la formation des corps isolés, qui formeraient :
en eux-mêmes un tout, ou bien un monde particu-
lier. Si je me représente la force attractive de la terre
vers son centre, comme agissant de a à m, et la force
attractive du soleil comme de z à m, je concois que
ces forces puissent agir avec une intensité égale ou
inégale. Nous avons déjà démontré que ce dernier
cas, à ce qu'il paraît au moins, ne pouvait pas avoir
lien, par la raison que la terre se serait depuis long-
temps contractée en une masse morte, ou bien
qu’elle aurait été engloutie par le soleil. Si au con-
traire le premier cas avait lieu, on ne conçoit pas
pourquoi la terre n'aurait pas continué de rester dans
le même état dans lequel elle s’est trouvée lorsqu'elle
s’est détachée du soleil, et pourquoi elle n’y aurait
pas resté jusqu’à sa destruction.
On pourrait cependant objecter que par le mouve-
ment de rotation de la terre, un de ses hemispheres
DE L'HOMME. 69
se trouve toujours moins exposé à l’action de la force
attractive du soleil que l’autre, et que la force attrac-
tive de la terre devrait alors agir avec plus d'intensité
‚sur l’hémisphère où il fait nuit, que sur l’autre où il
fait jour, et où la force attractive du soleil devrait
avoir la prépondérance.
Quand même nous concéderions cela, et que nous
admetirions par conséquent que les deux forces aient
continue leur action en ligne directe, c’est-à-dire Ja
force active de la terre de a à b, c, etc., et la force
réactive du soleil de za y, x, etc. , il n'aurait pu ré-
sulter de ces actions autre chose qu’une masse morte
d’un côté, et d’eiher de l’autre . Il reste cependant
inexplicable comment un corps organisé vivant, qu’il
soit animal ou bien plante, aurait pu se développer
par ces simples réactions.
L’explication de la formation de la terre et de celle
des corps organisés offre moins de difficultés , si nous
cherchons la cause principale dans quelque chose de
plus élevé, c’est-à-dire dans l'esprit même, dans la
tendance à dominer la matière et à former continuel-
lement, par sa liaison intime avec elle, des tous clos
existans par eux-mêmes, comme nous le voyons jour-
nellement dans la formation de chaque corps orga-
nisé. Dans cette idée Vesprit sépara d'abord la matière
/
* Ou rigoureusement et métaphysiquement parlant , la terre se-
rait réduite , d’un côté , à un point mathématique égal à rien , et,
de l’autre , son expansion aurait été également poussée jusqu’à un
rien absolu.
no SUR LES VERS INTESTINAUX
brute, la rejeta au centre de la terre, et c’est ainsi que
les terrains primiufs se formèrent. Peut-être a-t-ıl
fallu des milliers d'années pour arriver à ce résul-
tar; car Ja formation de ces terrains paraît s’être opé-
rée peu à peu par eristaliisation. Apres que la plus
grande partie de la matière qui était la moins pro-
pice à la vie, c'est-à-dire à celle des corps isolés, se
fut cristallisée, esprit put agir déjà plus Hbrement;
1] s’effectua alors une révolution ou bien une fermen-
ration dans la totalité de Ja masse, et les terrains de
transition se précipitérent probablement d’une ma-
nière subite. Cependant on peut présumer par la dis-
position stratifiée de ces terrains, que plusieurs
fermentations semblables ont dù contribuer à leur
formation. Jusqu'à cette époque, c’est-à-dire jus-
qu'au complétement des terrains de transition , la
terre continua encore une vie universelle, c’est-à-dire
une vie qui n’était pas encore divisée, ou bien qui
n’étail pas encore communiquée à des corps isoles;
car nous ne trouvons nulle part, ni dans les forma-
tions primitives, DI dans celles de transition, aucune
trace d'êtres jadis vivans, et encore bien moins d’or-
ganisations animales.
Ce n’est qu’apres la précipitation de ces terrains ,
que Pespritfut à même de s'emparer de telles ou telles
parues de la matière , et d’en former des corps isolés
doués d’une vie individuelle. Nous trouvons les restes
de corps jadis vivans dans les couches inférieures
des terrains secondaires, qui, selon toutes les appa-
rences, se sont formés, comme les terrains de tran-
DE L'HOMME. 71
sition, apres des fermentations semblables et par-
tielles. Les corps anciennement vivans que nous de-
couvrons dans les couches inférieures des terrains
secondaires appartiennent lous à des animaux aqua-
tiques ; on n’y trouve pas de plantes. Apres la forma-
lion des terrains de transition et avant la précipitation
des premiers terrains secondaires , ıl est à présumer
qu'il n’y avait point de terrain à découvert, non plus
peut-être que d’atmosphere, de même que la lune,
comme partie détachée plus tard de la terre, en est
encore actuellement privée.
Par la suite il s’opera une nouvelle revolution où
fermentation. La premiere création fut détruite par
la précipitation suivante, cl la terre fut de nouveau
peuplée d'animaux qui étaient cependant d’une autre
espèce que les premiers. On ne peut déterminer au
juste combien il y aeude pareilles révolutions suivies
de précipitations, qui avaient lieu, chaque fois au
moins, sur de grandes étendues de la terre. Il est
seulement certain que chaque précipitation fut sui=
vie d’une nouvelle création, et que l’homme est un
produit de la dernière; car on n’observe, commeil
a été remarqué, aucun ossement d'homme, pas
même dans les couches supérieures des terrains se=
condaires ; el, qui plus est, on ne commence à voir
des ossemens de mammifères que dans ces couches
: Cela se rapporte parfaitement avec le premier chapitre de la
Genese. On n’a qu'à s'imaginer, comme Buffon l’a déjà observé „
au lieu des jours , de grandes époques.
72 SUR LES VERS INTESTINAUX
supérieures, et, M. Cuvier’ presume par cette rai-
son , qu'ils sont un produit de l’avant-dernière révo-
luuon de notre terre.
Comme après chaque précipitation il se formait
ioujours des êtres plus parfaits, etenfin celui qui jus-
qu’à présent est le plus parfait de tous, c’est-à-dire
l'homme, mon opinion, de voir la cause principale
d’action dans l'esprit, et dans sa tendance à dominer
la maticre, gagne, par cette raison , toujours plus de
probabilité. C’est bien un esprit qui vivifie l'huître
et qui anime l’homme; mais l’esprit est, dans les
deux cas, pour me servir d’une expression de lélec-
tricité, sous des degrés três-différens de tension; dans
l’homme il est monté jusqu’à l'intelligence , et dans
Vhuitre nous trouvons à peine des traces de sepu-
ment. Les animaux de la première création ne pou-
valent pas être aussi parfaits que ceux de la dernière;
dans la première, l’esprit était encore trop enchaîné
à la matière , et ce n’est qu'après s'être débarrassé de
cette dernière, non propice à l’animalisauion, qu'il
pouvait agir plus librement, et parvenir à la fin à
gouverner l'existence corporelle de l’organisation, à
laquelle il est inhérent ; car l’homme animé par l’es-
prit veut, et sa volonté est une loi pour la matière.
Cette assertion souffre cependant quelquefois des
exceptions dans certains cas; mais alors l'esprit de-
maude plus que la matière ne peut faire, et nous de-
a r “
vons également considérer que l’homme n’est pas un
2 Ossemens fossiles, discours préliminaire , p. To.
» P- 7
DE L'HOMME. 73
pur esprit, mais seulement un esprit borné par la
matiere de différentes manières. En un mot, l'homme
n’est pas un dieu , mais malgré la captivité de l’esprit
dans sa corporéité , celui-ci est déjà devenu assez
lıbre en lui pour qu'il s’'apercoive qu’il est gouverné
par un esprit plus élevé que le sien, c’est-à-dire par
un dieu. Pouvoir ou plutôt devoir comprendre cela
est ce qui forme la différence entre l’homme et les
animaux, différence que l’on a voulu chercher dans
l’absence du ligament cervical et de l’os inter-maxil-
laire, dans la coïncidence des dents canines, dans la
réunion du pouce aux autres doigts dans les extrémi-
tésinférieures , dans sa station bipède, etc. Schrank’,
qui a rendu tant de services à l’histoire naturelle, a
placé avec raison l’homme dans une classe particu-
lière du règne animal.
ll est encore à présumer, dans la supposition qu'il
y aurait une nouvelle précipitation, que des êtres
beaucoup plus parfaits que ceux qui ont été le résultat
des précédentes seraient créés. L'esprit dans l’homme
est à la matière dans la proportion de 5o à 50, avec
de légères différences en plus on en moins, car c’est
tantôt l'esprit et tantôt la matière qui domine. Dans
une création subsequente, si celle qui a formél’homme
n’est pas la dernière, il y aurait apparemment des or-
D, f " . 1e
Briefe an Nau, p. 247. Il a cependant oublié un signe carac-
ténistique, c'est-à-dire que l’homme peut devenir fou : bonne
occasion pour certains critiques de mettre au jour une idée spiri-
tuelle.
7h SUR LES VERS INTESTINAUX
ganisations où l'esprit agirait plus librement , et où ıl
serait dans la proportion de 75 à 25. Il résulte de
cette considération , que l’homme a été formé comme
iel à l’époque la plus passive de l'existence de notre
terre. L'homme est un triste moyen terme entre l’a-
nimal et lange; il tend aux connaissances élevées et
ne peut pas y atteindre; quoique nos philosophes mo-
dernes le croyent quelquefois, cela n’est réellement
pas. L’homme veut approfondir la cause premiére de
tout ce quiest, mais ilne peut pas y parvenir : avec
moins de facultés intellectuelles, il n’aurait pas la
présomption de vouloir connaître ces causes , qui se-
raient au contraire claires pour lui, s’il était doué
d’un esprit plus étendu. L’homme se fait une idée
incomplète ou fausse du temps et de l’espace, quoi-
qu’il sache , ou plutôt qu'il doive savoir qu'il n'y a
pas de temps pour l'éternité, ni d'espace pour Piofi-
nité ou pour l’immensité. Les idées d'espace et de
temps lui sont en effet innées, ou bien elles sont
jointes nécessairement à son existence comme homme,
: Je ne veux nullement dire par cela que l’homme soit quelque
chose de vil ou de misérable, car il est, au moins sur notre globe,
Pêtre le plus parfait, le chef-d'œuvre de la création ; j'ai voulu
seulement indiquer que l’homme n’est ni un ange, ni un dieu ,
qu'il doit être très-pénible pour lui de n’avoir justement qu’autant
d’esprit qu'il en faut pour concevoir qu’il n’en a pas assez pour
approfondir les choses qu’il désire, par une tendance innée , le
plus ardemment de connaître ; cependant il n’a pas le droit de sen
plaindre. Le prophète Isaïe s'exprime là-dessus d’une manière
très-juste. Voy. chap. 45, vers. q.
DE L'HOMME. 75
mais elles ne sont pas placées dans l'esprit, qui
est infini, sans bornes et éternel, et elles lui sont
pour ainsi dire imposées par sa corporéité, par la
matière ,! qui gêne l’action libre de l'esprit, comme
esprit dans toute sa pureté. L'homme , tel qu'il est
dans sa corporéité, ne parvient pas même autrement
à la connaissance de lui-même que par la réflexion
de l’esprit sur la matière. Mais ces considérations
n’appartiennent pas à mes recherches, etj’enreprends
par conséquent la continuation.
De même qu’il est probable que chacune des pré-
cipitations qui formèrent notre globe eut lieu subite-
ment, les corps des animaux et des plantes dürent se
former jadis aussi d’une maniere subite ou d’un seul
jet. Dieu voulut et sa volonté fut faite; car je crois
aussi peu que le cèdre du Liban fut originellement un
lichen, que l’éléphantdoive son origine à une huitre ou
àun zoophite, eüt-il passé même par mille gradations ;
j'admeis encore moins que fhomme ait été originelle-
ment un poisson ou un animal couvert d’ecailles ,
comme quelques naturalistes modernes s'efforcent de
nous l'expliquer. Si les choses se fussent passées ainsi,
alors de pareilles métamorphoses progressives, OU
bien dés formations graduelles d'êtres , en d’autres de
plus en plus parfaits, soit chez les plantes soit chez les
animaux , devraient avoir lieu journellement sous nos
yeux. Mais, pour parler seulement de l’homme, au-
cun fait ne nous prouve qu'il y ait dans son organisa -
tion physique et morale, aucun progrès qui indique-
rait un développement ultérieur ; il est toujours le
76 SUR LES VERS INTESTINAUX
même, tel qu'il fut il y a des milliers d'années. La
manière dont les gouvernemens, l'éducation et le sol
ont influé sur quelques peuples, ne peut pas être
prise en considération; il existait dans les temps les
plus reculés des hommes doués d’un esprit élevé et
des hommes bornés , ainsi que nous l’observons en-
core actuellement.
Les vers intestinaux mêmes, qui s’engendrent
journellement sous nos yeux, prouvent contre une
pareille transformation progressive d'animaux de de-
grés inférieurs en des animaux de classes plus éle-
vées. En effet, si cela avait lieu, les vers les moins
parfaits devraient toujours se former les premiers, et
les plus parfaits se développer par la suite; mais au-
cune observation ne nous met en droit de croire
qu’une ascaride , par exemple , tire son origine d’une
hydatide ou d’un tænia. Dans cette hypothèse on pré-
sume , comme cela se voit, que la plus grande perfec-
tion consisterait dans une composition plus grande et
plus variée, et que l’imperfection serait en rapport
direct avec la simplicité ; ce que je viens de dire arri-
verait cependant, quand même l’opposé aurait lieu.
Je ne puis pas décider si les premieres plantes et
les premiers animaux se sont détachés de la terre
comme totalites sans forme, mais ayant une existence
propre, c’est-à-dire comme des embryons qui n’au-
raient recu leur développement complet que peu à
peu, ou bien s'ils se sont présentés , des leur origine,
entièrement formés et à l’état adulte. Si le premier
cas avait eu lieu , le développement aurait dü s’opérer
DE L'HOMME. ‘ 77
plus vite que dans la suite par la voie de la genération.
Je crois cependant que le tétard et la chenille exis-
taient avant la grenouille et le papillon ; mais comme
tout cela est indifférent par rapport à l’examen du su-
jet dont je m'occupe actuellement , je passe d’autres
recherches de cette nature sous silence.
J’aı voulu uniquement démontrer par la précé-
dente digression, que notre terre dans son état pri-
mitif et sans forme, jouissait seulement d’une vie
universelle, et que ce n’est qu’apres la séparation des
substances , qui étaient plus propres à former le sque-
letie du corps de la terre, qu’à jouir d’une vie parti-
culiere et individuelle, que la vie se présenta sur
notre terre dans des organisations individuelles in-
nombrables.
Si nous considérons l’état de notre terre dans le
moment actuel, et les substances desquelles elle est
composée, nous pouvons distinguer clairement trois
genres de corps.
1°. Des corps morts inorganiques. — Minéraux.
2°. Des corps vivans ou organisés. — Plantes,
animaux.
3°. Des corps sans forme tenant le milieu des deux
précédentes espèces. -- Air, eau.
1°. Des corps morts inorganiques.
2 A x Li ?
- Nous appelons peut-être à tort les minéraux des
Corps morts, car nous ne savons pas d’abord quelle
part ils peuvent avoir à la vie universelle de la terre ,
8 SUR LES VERS INTESTINAUX
et ensuite nous trouvons dans le sang chaud et rouge
le fer à l’état liquide et par conséquent vivant ; ce mé-
tal peut de nouveau reparaitre sous forme solide par
des procédés chimiques. Nous voyons aussi quelque-
fois que des parcelles provenant d’un corps organisé
se décomposent sur le point le plus élevé d’une roche
nue, quelques gouttes de pluie les arrosent, et un li-
chen vivant se produit. Il suit de là que le mort, le
solide, peut devenir partie intégrante de la vie, et
qu’il peut être vivifié lui-même.
Il résulte encore de là que les minéraux ne doivent
pas être considérés comme absolument privés de vie,
cependant ils le sont quand on les compare avec de
véritables corps organisés, à cause de leur tension
vitale, si peu perceptible. Du reste, dans la nature
inorganique, tout se forme par lignes droites, par
angles et par cristaux.
2°. Des corps vivans ou organisés.
Ceux-ci se forment par lignes courbes : jy range
tous les animaux, les végétaux ou bien leurs parties,
n’importe que ces corps aient une vie propre percep-
üble à nossens , ou qu’elle se trouve chez eux dans un
état latent. Le dernier cas a lieu chez tous les corps
privés de la vie dont ils ont joui, que l'on ne doit nul-
lement confondre avec les corps morts où minéraux ;
car les corps qui ont cessé de vivre peuvent non-seu-
lement être employés à la conservation de la vie ac-
tive, c’est-à-dire à la nourriture d’autres corps vivans,
DE L'HOMME. -9
mais encore ils peuvent étre rappelés de nouveau à
une vie active propre sous une forme, il est vrai , dif-
férente de celle qu’ils avaient précédemment.
On s’etonnerait à tort que jadmette une vie à l’état
latent; car nous avons beaucoup d’exemples où la vie
propre et individuelle reste pendant un tres-long es-
pace de temps dans un pareil état. Nous amassons or-
dinairement les œufs des poules pendant plusieurs
semaines avant que de les donner à couver; les œufs
du ver à soie (bombix mori) se conservent d’une an-
née à l’autre, et les graines des plantes peuvent être
gardées pendant plusieurs années sans perdre leur
vie individuelle. Dans ces différens cas, la vie est as-
surément dans un état latent; cependant la durée de
cette vie propre et latente n’est pas toujours égale, elle
est plus courte chez les animaux, et beaucoup plus
longue chez les plantes : chez celles-ci elle est même
quelquefois tellement longue, que l’on ne peut dé-
terminer au juste le temps de sa durée. Van Swieten®
raconte que des haricots qui avaient été renfermés pen-
dant deux cents ans, ont germé, et sont parvenus à une
hauteur très-considérable. Cet auteur a vu lui-même
germer des graines provenant de la sensitive (mimosa
sensitiva), que l’on avait conservées depuis quatre-
vingts ans. Des faits semblables de germination de
graines de soixante ou soixante-dix ans sont connus de
tous les jardiniers. Toutes les graines de plantes ne se
ressemblent cependant pas, quant à la durée de leur
= Comment. V:, ad $ 125, de podagré , p. 260.
80 SUR LES VERS INTESTINAUX
conservation ; chez les unes le principe vital s'éteint
plustötque chez les autres. Nous ne sommes pas encore
parvenus à découvrir à l'extérieur ou à l'intérieur une
différence entre une graine véritablement privée de
vie et celle qui en est encore douée. En les mettant
toutes deux dans la terre, il ne se développera un
germe que de la dernière. Mais le fait qu'il peut se
développer de la première de la moisissure et des in-
fusoires, sert de preuve qu’elle n’avait pas perdu la
vie universelle en perdant la vie individuelle.
3°. Des corps sans forme tenant le milieu des deux pré-
cédentes espèces : air, eau.
J'ai dit plus haut que les corps sans forme, l’air et
Veau , tiennent le milieu entre les deux autres genres
de corps organiques et inorganiques, par la raison
qu’ils appartiennent aussi bien à l’un ou à l’autre de
ces règnes. D’après les expériences d’Ingenhouss, ıl
se forme de la matière verte: dans de l’eau pure mise
sous un globe de verre. D'un autre côté , de l’eau m&-
lée avec une certaine quantité de plâtre calciné se so-
x Cependant il n’a jamais vu se reproduire de matière verte dans
l'eau bouillie pendant deux ou trois heures , et qu'il avait empe-
ché de communiquer avec l’air, par le moyen du mercure, quoi-
que le vase qui la contenait eût resté exposé aux rayons solaires
pendant dix-huit mois. Cetle matière se reproduit cependant, si
l'on introduit dans cette eau une substance organisée quelconque,
par exemple de la viande toute fraîche , et pourvue encore de sa
contracülité.
DE L'HOMME. 81
lidifie en une masse morte. La partie de l’air atmo-
sphérique que nous appelons oxygène est une con-
dition nécessaire pour la conservation de chaque être
organisé doué d’une vie propre et active ; ce même
oxygène cesse d’être fluide élastique, et devient so-
hide par sa combinaison avec le mercure coulant,
et il se forme alors un oxyde solide. L'animal meurt
presque subitement dans l’autre partie de l'air atmo-
sphérique, c’est-à-dire dans l'azote, dont le corps
animal est en grande partie composé. Il résulte de là
que l’on ne doit pas compter ces deux corps sans
forme (l’oxygene et l’azote) parmi les corps morts,
mais que l’on ne doit pas non plus chercher en eux
l'esprit qui vivifie la matière. Cependant ils sont cer-
taınement des conditions nécessaires, non-seulement
à la formation de chaque être doué de la vie active,
mais encore à la conservation des êtres déjà develop-
pés ; car, pour qu’il puisse se former une nouvelle
vie de la matière convenable au développement et à
la conservation des corps organisés, il est nécessaire
qu’elle passe préalablement à l’état fluide ou sans
forme. Cela ne peut s’effectuer autrement que par le
mélange de l'air et de l’eau. Chaque corps vivant ou
chaque organisation, n'importe qu’elle s’appelle ani-
mal ou plante, commence sa vie dans l’état amorphe.
La graine mise dans la terre se liquéfie (lest sich auf‘)
avant que le germe ue paraisse; mais la graine elle-
même , avant qu’elle se produise comme telle dans la
mére plante, n’est qu'une goutte sans forme. Le pre-
| 6
82 SUR LES VERS INTESTINAUX
mier développement de chaque animal n’est absolu-
ment rien autre chose; car autrement, comment au-
rait-il pu se faire qu’un fœtus se trouvât enfermé
dans un autre fœtus, et ce dont nous avons plusieurs
exemples‘? Les plantes ne peuvent prendre leur
nourriture autrement qu’à l’état informe ou liquide.
Les alimens mangés par les animaux ne peuvent pas
non plus être employés à la nutrition avant que ces
alimens ne soient passés à l’état informe; car les anı-
manx reçoivent également leur nourriture par des
espèces de racines qui se trouvent placées dans les
intestins. Cette observation a été faite, si je ne me
trompe, par Boerhaave.
» Maisquedeviennentles substances pendant qu’elles
se trouvent à l’état amorphe? Celles qui étaient au-
paravant unies se séparent et entrent dans de nou-
velles combinaisons avec d’autres. Ces séparations,
ces décompositions et nouvelles combinaisons n’ont
pas seulement lieu à la première formation de chaque
corps organisé , mais elles se continuent pendant
toute la durée de sa vie individuelle, et ne cessent
qu'avec elle. Nous designons une pareille décompo-
sition et nouvelle composition de substances sous le
nom dé fermentation; par conséquent l'acte de la vie
est semblable à celui de la fermentation.
Je prie mes lecteurs de ne pas s’impatienter , et de
: Voy. Med. Jahrb. des esterr. staates li Bd. Lies st. Wien., 1814,
8. s.67. ff.
DE L'HOMME. 33
vouloir bien me suivre encore quelques momens ; car
je m’imagine déjà voir quelques personnes sourire
de pitié à l'emploi de cette ancienne théorie rebattue
de la fermentation; je les entends également deman-
der, avec un ton moqueur, si l’auteur enfin ne va pas
distiller des hommes dans sa cornue? Patience, mes-
sieurs, cette théorie n’est pas aussi absurde qu’elle
paraît l’être. J’envisage la fermentation sous un tout
autre point de vue que nos chimistes; ils nous indi-
quent, par exemple, dans la fermentation du suce ex-
primé d’une plante avec l'exactitude la plus tons-
ciencieuse sur des tables de plusieurs pages, chaque
millieme partie de tel ou tel gaz dégagé pendant cette
fermentation, ou dans quelle nouvelle combinaison il
est entré ; ils décomposent encore tout le résidu de la
manière la plus exacte, pour nous démontrer la suite
de l'opération, jusqu’à ce que ce suc soit converti en
vinaigre; mais ils passent totalement sous silence le
dernier produit de la fermentation, c’est-à-dire la
formation de la moisissure et des infusoires ; ils font
cependant quelquefois mention de la fermentation
putride qui suit la fermentation acétique, et des
substances qui se forment pendant'sa durée; mais ils
ne disent pas un mot de l'acte particulier de la vie,
qui se développe justement à cette époque de la fer-
mentation. Cela provient de ce que le chimiste re-
garde tous les corps qu’il soumet à son examen
comme morts, et qu'il ne fait aucune différence entre
un corps mort et celui qui a été privé de vie, entre
lesquels il en existe cependant une considérable.
6,
84 SUR LES VERS INTESTINAUX
1°. I ne peut jamais se développer du mort’ un être
vivant, et le mort ne peut jamais non plus servir à la
conservation d'une vie déjà existante. On a beau ar-
roser de la terre pure ou de la limaille d’un métalavec
de l’eau, et les conserver pendant des années, jamais
il ne s’en développera un infusoire. En exposant ces
substances au soleil , il pourra peut-être se former de
la matière verte, mais c’est un produit de l’eau auquel
ces substances mortes mélangées n’ont aucune part.
M. Alexandre de Humboldt nous a bien rapporté
(Rel. hist.) que les Otomaques, près de l’'Orénoque,
se nourrissent d’une espèce de terre glaise pendant la
saison pluvieuse, qui dure à peu près deux à trois
mois. M. Vauquelin a examiné cette terre chimique-
ment, et l’a trouvée toute pure, sans être mélangée
d'aucune trace de substance organisée; mais, plus
loin M. de Humboldt dit : « Ces hommes mangent de
temps à autre ( s’ils peuvent sele procurer) un lézard,
un petit poisson ou une racine de fougère. » Ge sont
par conséquent ces substances qui servent de nourri-
iure , et non pas la terre pure, qui cependant ,malgré
toutes les recherches* chimiques, pourrait encore
contenir des substances propres à la nutriuon, subs-
tances qui, pendant l’analyse, ont pu s’évaporer.
Les ours , les marmottes, les loirs et d’autres anı-
maux ne prennent non plus aucune nourriture pen- |
dant l'hiver, pas même de leau avec laquelle les
* Il faut se rappeler que l’auteur emploie le terme ort pour
celui de brute ou inorganique. (G.)
DE L'HOMME. 85
sauvages de l'Orénoque arrosent la terre qu’ils man-
gent avant de l’avaler. Si cette eau se trouve char-
gée d'insectes ou de repüles pourris, elle peut alors
remplacer en quelque sorte un potage d’Oglio. Le
passage suivant, tiré de l'ouvrage du même auteur,
p. 609, prouve que l’Otomaque ne doit pas être
tres-difficile dans le choix de sa boisson. « Quand les
nations éloignées de l'Orénoque veulent parler de
quelque chose tres-malpropre, ils se servent d’un
proverbe qui dit : que rien n’est si dégoûtant qu’un
Otomaque ne le mange. » Du reste, ıl est probable
que la manière de vivre d’un Otomaque pendant le
temps pluvieux, ne doit pas beaucoup différer du
sommeil d’une marmotte pendant l'hiver.
2°. Le corps mort est composé de substances toutes
différentes que celui qui est organisé, et que les par-
ties qui en proviennent après sa mort. Les corps
morts se laissent aussi bien dissoudre et décomposer
que les corps privés de vie. Quelques corps morts,
comme par exemple les métaux, se laissent même
transformer dans des états sous lesquels on peut à
peine deviner leur état primitif; mais par des procé-
dés chimiques on peut de nouveau les réduire et les
ramener à cet état primitif. Par exemple, le fer, dis-
sous dans l’eau sans en altérer la limpidité, peut être
de nouveau réduità son état métallique. Des corps or-
ganisés privés de vie se laissent également décompo-
ser par l’art dans leurs substances originelles, mais
jamais un chimiste n’a réussi à rendre ensuite à un
corps organisé et décomposé sa structure véritable
56 SUR LES VERS INTESTINAUX
et primitive. Le chimiste peut décomposer le cinabre
en soufre et en mercure; il peut préparer avec le
premier de Facide sulfürique, du sublimé corro-
sif avec l’autre, et dissoudre ce dernier dans l’eau. Il
résulte de là deux liquides aussi limpides qu’elle, et
dans lesquels on n’apercoit pas une trace de Pétat
solide des substances employées primitivement. Le
chimiste peut cependant tirer de ces deux liquides,
par des nouvelles opérations, du cinabre solide tel
qu'il était originairement , et qui aura toutes les qua-
liés de celui avec lequel on avait préparé ces liquides.
Cela ne se passe pas de la même manière dans les
corps organisés. En versant de l’eau bouillante sur
de l’amidon , il se forme une sorte de bouillie, mais
le chimiste emploiera inutilement tout son art pour
former de l’amidon tel qu'il était. Suôt que le sang
sorti de la veine s’est divisé en partie fibreuse ei en
partie aqueuse, jamais on ne parviendra à lui rendre
son ancienne liquidité.
3°. Tous les corps morts, c’est-à-dire les minéraux
autant que nous en connaissons , différent les uns des
autres par la nature de leurs parties constituantes ; il
en est même qui ne consistent que dans une seule
substance. Tous les corps organisés sont composés de
plusieurs substances, mais tous des mêmes : la dıffe-
rence ne consiste que dans la diverse proporuon de
ces substances entre elles.
Cependant on ne doit pas croire que la cause prin-
cipale de la vie repose dans le mélange de ces subs-
tances ; l'admettre serait du matérialisme tout pur.
DE L'HOMME. 87
La cause principale de la vie est placée dans ce que
j'ai nommé l'esprit, et que l’on pourra appeler x si
l’on veut ; mais qui est tout à fait différent du mélange
des substances, et par lequel ce mélange devient vi-
vant”. Si la vie n’était que le produit d’un certain
mélange proportionné des substances, le chimiste,
après avoir décomposé un Corps organisé, pourrait
redonner à ce dernier sa structure primitive; mais
c’est ce que ne peut faire le chimiste, par la raison
qu’il n’est pas maître de l'esprit. Celui-ci cependant
» On m’objectera que je cherche la cause principale de la vie
dans une force cachée inexplicable, et que l’esprit est une faculté
occulte (facultas occulta). Mais sommes-nous plus avancés dans
l'explication des autres forces? Nous apercevons seulement les
phénomènes dans ce monde corporel, et nous concluons de là
une cause principale occasionelle, que nous appelons force, sans
avoir expliqué quelque chose avec cela : qu'est-ce autre chose que
la force vitale, si en faveur aujourd’hui, qu’une faculté occulte ,
qu’une cause à nous inconnue de certains phénomènes que nous
appelons phénomènes de la vie, ou simplement la vie ? Que nous
a expliqué Newton, en disant : la gravitation est l'attraction vers
le centre de la terre? Quelle est la cause de cette attraction ?
peut-être que les grands corps attirent les petits; bien : mais
quelle est la cause que le plus grand attire le plus petit ? Personne
ne peut l'expliquer , et personne ne le comprendra aussi long-
temps que notre esprit sera capüvé par notre corporéité ; mais
nous le saurons quand cette tension élevée de l'esprit, ce que
nous appelons dans le sens strict esprit on inielligence , aura quitté
la matière ; car cet esprit arrivé dans mon nor jusqu’à l'intelligence
existera assurément toujours ; el ne sera jamais employé à la vivi-
fication d'un limaçon ou d’une graine quelconque.
85 SUR LES VERS INTESTINAUX
peut faire beaucoup plus, car il peut changer même
des substances dans d’autres , et en créer de nou-
velles qui n’existaient pas auparavant. Nous ne trou-
vons dans l’eau et le pain ni ammoniaque, ni phos-
phore, ni urée, etc.; mais nous pouvons tirer ces
substances du corps des hommes et des animaux qui
se sont uniquement nourris d’eau et de pain. M. Vau-
quelin a fait des recherches sur la formation de la
chaux dans le corps des poules, et a trouvé que les
alimens qui avaient servi à la nourriture d'un de ces
oiseaux , ne contenaient pas autant de chaux, à beau-
coup pres, qu'il y en avait dans les coques de l’œuf
et les matières fécales. Cet auteur a trouvé au con-
traire une diminution de la terre siliceuse contenue
dans ces alimens. Une autre particularité digne d’être
remarquée, c'est que le sang des animaux à sang
chaud reste à peu prés toujours dans le méme degré
de température, sous des degrés tres-differens en plus
ou en moins de température extérieure ; la vie par
conséquent n’est pas un produit du mélange de cer-
taines substances, mais bien un produit de l'esprit.
Quand l'esprit doit former, par le mélange de ces
substances une nouvelle vie individuelle , ou quandil
doit conserver celle qui existait déjà, il est absolu-
ment nécessaire, comme nous l'avons déjà démontré
plus haut, que les substances se trouvent à l’état
amorphe. Si, d’après la supposition que nous avons
établie dans le commencement, la totalité de la terre
se. trouvait à l’état sans forme avant l’existence des
corps organisés vivans; et si, également d’après notre
DE L'HOMME. 89
supposition , ces corps se développèrent seulement de
la matière amorphe, nous ne devons pas assurément
nous étonner si la même chose se produit encore au-
jourd’hui, c’est-à-dire, si, partout où il se trouve de
la matière animalisee à l’état sans forme , ıl se déve-
loppe encore de nouvelles vies individuelles ou bien
de nouvelles organisations. Que nos infusions ne pro-
duisent pas des éléphans ou des baleines, et qu'il ne
se forme dans nos fumiers que des champignons et
non pas des chênes et des pins, cela est facile à con-
cevoir , quand on compare les masses en fermentation
entre elles; car celles qui fermentent sous nos yeux,
et qui produisent de nouvelles vies individuelles, ne
sont pour ainsi dire que des points mathémauques en
comparaison avec la totalité de la masse de notre
terre jadis en fermentation. Qui sait quel serait le pro-
duit , si des millions de grands corps organisés étaient
soumis à la fois à une pareille fermentation prolongée
et entretenueavec soin?
Ce que j'ai dit jusqu’à présent sert à prouver qu'il
ne peut pas être question de mort dans toute la nature
organisée. La mort n’est qu'une transition à une nou-
velle vie ou bien à une autre forme de vie‘: c'est une
vérité que nous trouvons constatée dans toute la na=
1 Terra nostræ telluris putredinis producta absorbendo nigra et fer-
ulissima evadit, hinc plantis prestantissimum præbet pabulum.
Hinc elucescit morte , et putrefactione hominis corpus non perire , sed
duntaxat ejüsdem structuram organicam deleri , et perenni circulo ele-
meniorum unius destruclionem ‘alierius esse generalionem. Plenk,
ITysrogologia.
90 SUR LES VERS INTESTINAUX
ture organique. Les corps privés de vie ne servent
pas seulement, comme nous l'avons déjà souvent re-
marqué, à la conservation de la vie déjà existante ;
mais encore il peut même s’en développer de nou-
velles vies individuelles, comme la moisissure, les
nostocs ‚les champignons, la matière verte de Priest-
ley, les infusoires, etc., nous le prouvent jusqu’à
l'évidence.
Mais j’entends me faire cette question : est-ce une
chose bien prouvée et constatée, que ces organisa-
tions doivent leur existence à une formation sponta=
née ou primitive, et qu’elles ne se sont pas dévelop-
pées, comme toutes les autres, par le moyen de
graines et d'œufs? Un critique, après s'être ap-
puyé dans son texte sur des argumens bien faibles
contre la formation spontanée des vers intestinaux ;,
s'exprime encore dans une note de la manière sul-
vante : « Les infusoires ne nous mettent pas tout à
fait en droit de détruire l’axiome omne vivum ex ovo°;
Annalen der litteratur und kunst in dem esterr kaiserthum gtes
Heft. 1812 in der Recension des Buchs : de tzeniä latä vom Hrn,
Prof : Reinlein , s. 317. |
2 L’axiome omne vivum ex ovo a été attribué à tort par ce cri- ”
tique à Linne, tandis qu’il provient de Harvey. Si ce critique aime
à s'appuyer sur des autorités, je peux cependant lui en opposer
une autre , qui dit justement le contraire ; il la trouvera dans l’ou-
vrage de M, Oken , ayant pour titre : Die Zeugung. Voyez la der-
nière page, où il est dit : nullum vivumex ovo ; omne vivum è vivo.
Un grand partisan de M. Oken , M. Goldfuss, a cependant rétabli
l’axiome omne pivum ex ovo ; mais ce dernier auteur ne veul pas
DE L'HOMME. OL
car il est plus facile de concevoir que ces animaux se
forment de germes existans, mais développés depuis
peu, que d'admettre qu’ils tirent leur origine d’un
mélange produit par la décomposition des végétaux
infusés. » | ;
Il est vrai que ce mode de formation ne saute pas
immédiatement aux yeux, c’est probablement pour-
quoi ce critique ne l’a pas pu comprendre.
Quand certains auteurs se trouvent embarrassés,
et qu'ils ne savent trop que dire, ils cherchent alors
prudemment à cacher leur ignorance sous des expres-
sions douteuses et hasardées : cela a au moins un air
savant, mais il s’en faut beaucoup que ce le soit réel-
lement; car on ne sait trop quelle conséquence on
pourrait tirer d’une manière de voir qui, du reste,
n’apprend rien. Le vulgaire des lecteurs s’ımagine
cependant assez souvent à tort qu'un pareil langage
renferme quelque chose d’une certaine importance.
Dans toutes les organisations je ne connais que les
modes suivans de génération : ou elle s'opère par la
naissance de petits vivans’ , par des œufs et par des
graines”, ou bien par marcoties?, en y comprenant
la reproduction des greffes et bourgeons. On appelle
germe, dans Je langage usité, la première formation
perceptible d’une plante ou d’une de ses parties, ou,
designer par là un œuf pondu par un animal, mais bien un œuf
imaginé , ei appelé par cet auteur zoographique polarisé.
* Génération vivipare.
? Génération ovipare.
* Génération scissipare.
92 SUR LES VERS INTESTINAUX
en un mot, son premier développement visible ; mais
je ne puis pas me former une idée de la sorte de
germes dont les infusoires pourraient se développer.
Ce critique n’a pas osé parler d’œufs, par la raison
que l’on n’en aperçoit point chez ces animaux. Il a
employé par conséquent le mot germe, par lequel il
s’est imaginé produire le même effet que celui que
quelques auteurs se promettent en ajoutant une barre
à la fin d’une phrase, c’est-à-dire d'inviter les lecteurs
a pousser encore plus loin la pensée de l’auteur, si
cela leur est possible. Cependant ce critique exige
encore davantage de ses lecteurs, comme cela résulte
du passage suivant, p. 316 : « J’ai trouvé les reins
d’une femme couverts de grandes hydatides (an
strongylus hydatis gigas ? ), mais à cette époque j'étais
trop peu naturaliste pour examiner ces vers. » Il pa-
rait que ce critique s’est imaginé qu'il était plus sa-
vant lorsqu'il avanca une erreur aussi grave. Pour
mettre mes lecteurs à même de concevoir toute lé-
tendue de l’erreur contenue dans ces trois mots, je
suis obligé de leur expliquer les deux premiers l’un
aprés, l’autre. Les helminthologues désignent par le
mot, strongle un ver qui a le corps allongé, cylin-
drique, élastique, aminei vers les deux extrémités,
pourvu de fibres musculaires, d’uneiouverture buc-
cale, d’un canal alimentaire tres-visible et d’un ap-
pareil générateur de l’un ou de l’autre sexe. Le
strongle géant ( strongylus gigas) , chez lequel M. Otto
croit même avoir découvert un système nerveux, a
été Ir&s-souvent confondu par les médecins avec l’as-
DE L'HOMME. 93
caride lombricoide ( ascaris lombricoides) Le strongle
se trouve représenté plu, fig. 3. On comprend sous
le nom d’hydatide (hydatis) une espèce de boule d’eau,
c’est-à-dire un sac formé par une membrane très-
mince, presque toujours d’une figure sphérique,
contenant une liqueur transparente, limpide comme
de l’eau, ou bien trouble, et sur lequel on n’apercoit
aucun organe ni à l'extérieur ni à l’intérieur.
Quel homme, je le demande, peut réunir ces deux
idées disparates dans une seule? On ne devrait pas
au moins charger une personne capable d'avancer des
choses aussi incoherentes, de juger les écrits scienti-
fiques des autres.
Je conseille, au-reste, à ce critique, de lire un
passage du second livre de Samuel : et de bien étu-
dier la Biologie de Tréviranus. Je recommande éga-
lement ce dernier ouvrage, vraiment classique, à tous
mes lecteurs qui auraient encore quelque doute sur
la formation primitive de la matière verte de Priest-
ley, des infusoires et de la moisissure. |
Tréviranus n’a pas seulement examiné avec une at-
tention particulière les expériences de Needham,
Wrisberg, Outo-Frédéric Müller , Ingenhouss, etc.,
auteurs qui croient à celte formation ; mais 1l a encore
étudié avec beaucoup de sagacité les recherches de
Spallanzani et Therechowsky, auteurs qui ont cru
réfuter , par leurs expériences, celles des naturalistes
que nous venons de mentionner. Treviranus, du
* Livre de Samuel, chap. 10, vers. 5.
94 ‘SUR LES VERS INTESTINAUX
reste, a fait lui-même encore quelques expériences
à ce sujet; en un mot cet auteur a, pour ainsi dire,
épuisé cette matière, et ce serait une vaine entre-
prise de ma part de vouloir encore y ajouter quelque
chose ; car celui qui n’a pas été convaincu par Trevi-
ranus de la formation primitive des infusoires , ne le
sera pas non plus par moi, et ne le sera probablement
jamais.
Quant à moi, je regarde comme une chose prou-
vée la formation primitive de la moisissure et des in-
fusoires, par le moyen des corps organisés privés
de vie.
Mais s’ilse développe réellement de ces derniers des
organisations vivantes et existantes par elles-mêmes,
une semblable formation, ce me semble, doit d’au-
tant plus facilement avoir lieu dans les organisations
vivantes elles-mêmes. Il nous est encore permis d’ad-
mettre que les organisations qui se développent dans
le vivant, n'importe que ce soit dans un homme,
dans un animal ou dans une plante, doivent être
beaucoup plus parfaites que celles formées d'un corps
privé de vie, par la raison que le principe de la vie,
dans le premier cas, se trouve monté plus haut, et
agit d'une manière plus intense. L'expérience même
nous le démontre aussi réellement. Il se forme des
plantes ou des organisations privées de vie, selon les
circonstances , tantôt de la moisissure et tantôt des in-
fusoires. Nous voyons, par exemple, que des infu-
soires se développent dans la colle de farine fortement
délayée , et que de la moisissure croît sur un morceau
DE L'HOMME. 95
de viande roue mouillé; mais le contraire a lieu sı la
chair trempe dans beaucoup d’eau , et si on laisse fer-
menter la colle telle qu’elle est'. Dans les organisa
tions vivantes , le nouveau produit est toujours déter-
miné par la nature de l'organisation dans laquelle il a
été formé. Des lichens et des mousses croissent sur
des plantes, et il se forme des vers intestinaux , des
pous et des cirons dans le corps animal.
Je m’attends que l’on me dira : comment, vous
croyez aussi que les pous doivent leur existence, dans
certains cas, à une formation primitive ? Ces animaux
pondent des œufs ; la manière et le mode de leur dé-
veloppement et de leur génération sont par conse-
quent tout à fait évidens. Je sais très-bien que ces ani-
maux pondent des œufs, et qu’il en est de même d’une
grande partie des vers intestinaux, et que d’autres
parmi ceux-ci sont même vivipares; cependant je
prétends que les vers intestinaux, c’est-à-dire ceux
qui se trouvent pour la première fois dans le corps
animal, sont le produit d’une formation spontanée, et
qu’il en est de même des pous dans certains cas. L’on
voit quelquefois sur la tête d’un enfant en bas âge une
quanuté innombrable de ces animaux, sans cepen-
dant observer d'œufs, et on remarque encore que la
mère et la nourrice de cet enfant n’en avaient point.
D'où proviennent alors les pous dans un cas sem-
blable? On me dira sans doute : il est possible que
* Voyez Rheinische Jahrbücher für med. und chır. ». Harles Borr
1820. (Br.)
96 ‘ SUR LES VERS INTESTINAUX
cette communication ait élé opérée par une troi-
sieme personne. Supposé même que les choses se
fussent passées ainsi, nous pouvons cependant pré-
sumer avec raison que cette personne m'aurait pas pu
transmettre, pour ainsi dire, invisiblement, une si
grande quantité de pous; en admettant même que
cette personne eût communiqué à l'enfant deux ou
trois individus, ceux-ci, avant de se multiplier de
cette sorte, auraient dü d’abord pondre des œufs,
que l’on aurait infailliblement remarqués dans les
cheveux de cet enfant; cependant cela n’a pas eu lieu,
car de pareils petits pous se développent dans quel-
ques cas, pour ainsi dire dans une seule nuit, et
souvent on ne peut pas même parvenir à les détruire.
D'où viennent encore les pous dans cette affreuse
maladie nommée phthiriasis , de laquelle nous avons
des exemples même récens, qui ont été rapportés
par M. Hufeland : ? |
M. le professeur Rust a traité en Pologne un em-
ployé atteint de cette maladie, et il a fallu neuf mois
à ce médecin avant de le guérir radicalement, malgré
l'emploi des remèdes les plus efficaces. Il n’est pas
aussi difficile de détruire les pous qui ont eté gagnés
par une communication directe. Îl ÿ a neuf à dix ans
que beaucoup de marchands allemands se rendirent
par la Bosnie ei l’Albanie à Salonique. Le troisième
ou quatrième jour de leur voyage, tous ces hommes
furent couverts de pous qu'ils avaient gagnés de
1 Jahrsang 1813. 3tes Heft page 122, f.
DE L'HOMME. 97
Tures, qui voyageaient dans leur société. A près le
départ de ces derniers, et après s'être bien nétoyés,
ils en furent entierement débarrassés.
Ce fait démontre la grande différence qui existe
entre les pous gagnés par communication directe et
ceux qui se sont formés spontanément. M. le docteur
Fechner croit avoir observé que quelques personnes
atteintes de maladies chroniques, et qui n'avaient
pas élé auparavant incommodées par les pous, com-
mencérent cependant à en être remplies peu de temps
avant de mourir.
M. Rust m'a communiqué l'observation suivante ;
digne d’être citée. Voici ses propres expressions :
« Je fus engagé, en 1808, par M. le docteur Müller,
pendant que je séjournais à Zaslaw, en Volnie, à la
cour du prince Sangusko, à assister à une consulta-
tion devant se faire chez un enfant juif du sexe mas-
culin, âgé detreize ans, qui avait une très-grosse tu-
meur sur la tête, et pour laquelle on avait déjà employé
inutilement beaucoup de remèdes sans pouvoir la dis.
soudre.Je m'y rendis et je visque la plus grande partie
du crâne était occupée par une tumeur très-élevée,
mollasse, mais sans la moindre fluctuation. Je ne pus
non plus trouver nı trace d’inflammation actuelle ou
passée, ni lésion ou anomalie dans les tegumens du
crâne. Le malade avait un air cachectique et se plai-
gnait seulement d'une démangeaison insupportable
dans l’intérieur de la tumeur , qui semblait avoir &é
formée par métastase à la suite d’une fieyre ner-
veuse. Cette tumeur s'était grossie dans l'espace de
7
98 SUR LES VERS INTESTINAUX
huit jours jusqu'à un volume considérable. Pour nous
faire une idée exacte de la nature du contenu ; nous
convinmes de faire une incision dans la tumeur, et
cela fut pratiqué sur-le-champ ; alors une quantite
énorme de petits pous blancs en sortit, lesquels,
réunis et mesurés ensemble , remplissaient une pinte
de Pologne ; ce fut tout ce que contenait la tumeur.
Des frictions faites avec l’onguent mercuriel sur les
tégumens du crâne, et des injections de même nature
dans la cavité de la tumeur, jointes à l'usage de mé-
dicamens intérieurs, rétablirent bientôt le malade
sans que nous ayons pu connaître la nature de cette
maladie singulière; ıl est encore digne de remarque
que ce malade , d’après les renseignemens donnés par
les parens, n'avait jamais eu auparavant de croüles
laiteuses sur la tete, et qu’il avait eu toujours moins
de pous dans son enfance que les autres enfans n’ont
coutume d’en avoir. »
Le ciron (acarus exulcerans, L.), dans mon opi-
nion, n’est pas la cause, mais une production de la
gale, ou du pus qui est contenu dans les boutons des
galeux; c'est par celie raison que l’on ne rencontre
pas cet insecte dans toutes les éruptions de cette na-
ture , et sa production paraît dépendre de causes par-
ticulières ànous inconnues. D’Azara raconte : « Quel-
ques habitans du Paraguay sont sujets à une espèce de
gale qui diffère de la gale ordinaire; il se forme dans
chaque bouton un petit insecte blanc de la grandeur
d’une puce. Ge sont ordinairement des femmes qui les
extraient avee la pointe d’une épingle, et la guérison
DE L'HOMME. 99
de ces malades en resulte. J’ai vu retirer plus de
soixante de ces insectes des fesses d’une femme. Il pa-
raît qu'ils ne se produisent pas par l'acte de la généra-
tion, mais bien par une disposition particulière des
humeurs du malade. Les vers’ que l’on rencontre dans
les reins de l’aguara-ouaza (espèce de chien sauvage )
semblent avoir la même origine. »
Mais j'entends dire : nous ne pouvons nullement
concevoir comment un corps organisé vivant pourrait
se développer sans Pintermede d’un autre corps or-
ganisé de même nature, ou semblable à lui sous tous
les rapports. Je conviens qu'une pareille formation
n'est pas facile à comprendre , mais j'ajoute quela plus
grande quantité des phénomènes de la nature en ge-
néral, sont encore des problèmes pour nous; car, je
le demande, quel est l'homme qui sache au juste com-
ment une nouvelle vie individuelle se produit par la
voie de la génération? Celle des mammifères est peut-
être la moins difficile à concevoir ; mais celle de la plus
grande partie des autres animaux est, pour nous, aussi
incompréhensible que la formation primitive. On ne
doit pas s’imaginer que la différence entre les mam-
miferes vivipares et les animaux oviparés soit aussi
peu considérable que plusieurs physiologistes, et
entr’autres Gautieri, se plaisent à croire. Ce dernier,
par exemple, place les vivipares et les ovipares sous
* Il résulte de ce que cet auteur dit dans son Essai sur l’histoire
naturelle des quadrupèdes de la prövince du Paraguay, 1. 1, p.313,
que ce sont des strongles géans.
7°.
100 SUR LES VERS INTESTINAUX
Je rapport de la génération dans la même classe, et il
admet pour toute différence entre ces deux classes
d'animaux , que l’œuf, chez les premiers, se déve-
loppe dans la matrice elle-même, et dans les autres
au dehors. il est vrai que le mode de génération des
salamandres et des orvets vivipares, et celui des lé-
sards et couleuvres ovipares, n’est pas très-différent ;
bien plus, c’est presque le même; car chez les lé-
sards et les couleuvres l’œuf parfait se sépare de la
mère avant que le jeune animal ne soit formé com-
plétement. Chez les salamandres etles érvetsl’œuf sé-
journe dans le sein de la mère jusqu'au développe-
ment complet du petit, cependant, sans que cel œuf
semble avoir plus de rapports directs avec sa mére,
que celui qui est déposé immédiatement sur la terre
par la sienne.
Les différences sont plus considérables et plus es-
sentielles entre les mammifères vivipares et tous les
autres animaux ovipares ou vivipares; les VOICI :
1°. Chez les mammifères un accouplement complet
a lieu. Les humeurs spermatiques du mâle et de la
femelle se mélent ensemble , au moins cela paraît se
passer ainsi.
20. L'animal nouvellement formé jouit d’une vie
propre, des le moment de la fécondation. Get animal
semble, à la vérité, ne consister ‚au commencement,
que dans un point sautillant (punctum saliens ); mais
c’est néanmoins déjà un véritable animal; 1l grandit,
il se développe peu à peu, et il se sépare de sa mére
après un temps exactement determine; mais ıl meurt
DE L'HOMME. 101
si le développement progressif de sa formation est in-
terrompu par une cause quelconque. Les choses se
passent autrement si la conception a eu lieu hors de
la matrice , et chez le fœtus enfermé dans un autre.
3°. Ce qu'on nomme à tort l’oeuf* (car on ne peut
pas avec juste raison lui donner ce nom, en le compa-
rant avec les véritables œufs) ou bien les membranes
qui entourent le nouvel animal , se forment plus tard.
4°. Le placenta, quelque forme qu’il ait, par le-
quel le jeune mammifere- reçoit sa nourriture, est
placé hors de ce prétendu œuf, ou bien hors de ses
membranes, et ıl est au moins dans une communica-
tion médiate avec la mère; car , quoique-les vaisseaux
du placenta ne s’anastomosent pas avec ceux de la
matrice, cette dernière acquiert cependant un vo-
lume beaucoup plus considérable pendant la gros-
sesse, c'est-à-dire pendant le développement du jeune
animal; les vaisseaux de cet organe se dilatent con-
siderablement, et il en suinte des substances nutri-
* Les vésicules de Graaf ne sont pas de véritables œufs, et elles
ne doivent nullement être comparées avec des œufs provenant d’a-
nimaux ovipares ; car le jeune animal ne se forme pas dans des vé-
sicules ; elles ne grossissent pas comme d’autres œufs, et elles ne
descendent pas non plus dans la matrice. Ossiander s’exprime là-
dessus ainsi : « Les œufs de Graaf ne sont pas de véritables œufs,
mais bien des bourses gélatineuses de forme irrégulière et de gros-
seur très-variable. Les corps , de couleur jaune, ne sont égale-
ment rien autre chose que des bourses semblables remplies d’une
matiere (smegma) colorée. Voyez Getlingsche gelehrte anzeigen
1814. 1634es stück.
102 SUR LES VERS INTESTINAUX
tives selon le besoin du fœtus, qui se développe tou-
jours de plus en plus. Ces substances sont absor-
bées par les vaisseaux du placenta et communiquées
ensuite au jeune animal. En un mot celui-ci se nour-
rit aux dépens de sa mère aussi long-temps qu’il reste
enfermé dans son sein.
Pxaminons à présent ce qui a lieu dans les ani-
maux ovipares, et surtout chez les animaux à sang
chaud , les oiseaux, qui ont le plus d’affinité avec les
mammifères; car, si nous voulions aller plus loin,
nous pourrions facilement rencontrer des animaux
chez lesquels nous ne trouverions plus de points de
comparaison.
1°, 11 se détache de la totalité de la masse de l'ovaire
de la poule une goutte d’une substance amorphe, et
il s’en forme un tout clos en lui-même, le commen-
cement de l’œuf. Ce développement primitif de l'œuf
perceptible à nos yeux est bien renfermé dans une
poche, qui est fixée à l'ovaire par un pédoncule, mais
l’œuf forme néanmoins par lui-même un tout séparé.
2°. L’œuf qui s’est formé spontanément dans le .
corps de la poule, c’est-à-dire sans l'intermédiaire du
coq, se développe néanmoins et jouit d'une vie indi-
viduelle. Il grandit, et non pas comme un cristal,
par couches de substances semblables ( per juxtaposi-
tionem), mais par sa propre force vitale interne (per
intussusceptionem ). Il faut cependant que l'œuf re-
coive du dehors, c’est-à-dire de sa mère, les substances
nécessaires à son propre accroissement ; Car sans cela
il ne pourrait pas atteindre son développement com-
DE L'HOMME. SALE 103
plet. Il paraît aussi qu’elles doivent être extrémement
simples et ténues pour pénétrer à travers des mem-
branes qui peuvent retenir l’air donion les a remplies.
L'œuf forme, de ces substances qui lui ont été com-
mupiquées par sa mére, le jeune et le blanc ; il les
prépare lui-même, car ilne les recoit pas tout formés
de la poule. L’oeuf, par conséquent, a sa vie propre
parfaitement semblable à celle des autres corps orga-
nisés. Après avoir attemt son développement com-
pler, il se couvre, dans le rectum, de la coque cal-
caire, et il ne diflère à l'extérieur en rien d'un œuf
fécondé par l’intermédiaire du coq. La différence se
trouve donc dans son intérieur, en ce qu'il ne peut
jamais s’en développer un petit. L’œuf non fécondé
et formé spontanément dans la poule, nous fournit
ainsi un exemple remarquable d’une vie individuelle
dans une subsiance sans forme, car le jaune et le
blanc sont liquides. Comme l’œuf se forme, se con-
serve et se développe tout à fait à la manière de tous
les corps organisés vivans, nous sommes par Celle
raison obligés d'admettre qu'il vit réellement.
3°. L’œuf, qui s'était déjà formé avant que le coq
n’eût agi sur la poule, est bien rendu fécond par cet
acte de la génération; mais ici il ne s’opere pas,
comme dans l’accouplement des mammiferes, un
melange des humeurs spermatiques ; il est même 1m-
possible qu’un peu de sperme du coq puisse arriver
jusque dans le voisinage de l'œuf. Chez les coqs et
la plus grande partie des oiseaux, les canaux defe-
rens partent des testicules, et ils se terminent dans le
104 SUR LES VERS INTESTINAUX
rectum par deux petits mamelons ; mais ceux-ci sont
beaucoup trop petits pour atteindre le rectum de la
poule, et encore moins pour pouvoir s’y introduire
pendant l’accouplement; les plumes mêmes offrent
un obstacle à l’éjaculation du sperme jusqu’à cet en-
droit. Par conséquent, dansce cas-c1 rien de corporel
ou de matériel ne peut contribuer à la fécondation ‚et
ce qui rend l'œuf fécond doit être placé dans une force
particulière, qui a nécessairement le sperme pour
conducteur ; cependant cette force se communique à
l'œuf d’une manière inconcevable pour nous, et lui
donne, dans quelque degré de développement qu'il
soit (car plusieurs œufs sont fécondés à la fois, et
chacun se trouve dans un état parüculier de develop-
pement ) la faculté de produire un petit animal sem-
blable à ses parens.
4°. Mais le commencement de la vie individuelle
du jeune oiseau ne résulte pas encore de cet acte de la
génération, et de cette fécondation, la possibilité de
son développement est seule déterminée par là. Chez
les mammifères, la nouvelle vie commence au mo-
ment même d’un accouplement fécond , et après un
espace de iemps exactement déterminé pour chaque
espèce, le jeune animal se sépare de sa mére. Cela ne
se passe pas ainsi chez l'oiseau. Nous remarquons
bien le germe dans un œuf fécondé ; mais le punctum
saliens, c’est-à-dire le commencement de la vie indi-
viduelle, ne se développe que pendant l’incubauon,
et à dater de cette époque seulement, on peut déter-
miner le moment de la sortie du petit. Il est du reste
DE L'HOMME. 105
- indifférent que l'œuf ait été fécondé à un degré quel-
conque du développement qui lui est propre ; mais ce
qui est seulement nécessaire, et ce qui détermine la
principale différence entre le développement d’un
mammifère et celui d’un oïseau, #stque, chez le der-
nier , l'œuf doit être complétement développé avant
que la nouvelle vie individuelle puisse commencer ,
au contraire de ce qui a lieu dans le premier; d'où
résulte la cinquième différence entre les mammifères
et les oiseaux, c’est-à-dire que le placenta ne se trouve
pas au dehors, mais bien dans l'intérieur de l'œuf,
dans lequel ıl a déjà été amassé par avance autant de
substance qu’il en est besoin pour nourrir et conser-
ver le jeune oiseau jusqu’au moment de sa sorlie,
tandis que cela se passe tout differemment chez les
mammifères ,comme nous l’avons déjà vu.
Ces réflexions peuvent suffire pour démontrer la
grande différence qui existe réellement entre le mode
de génération des mammifères vivipares et celui de
toutes les autres classes d'animaux. Nous avons égale-
ment montré dans nos réflexions qu’une nouvelle vie
individuelle peut réellement se développer spontané-
ment dans un corps organisé: l’œufnon fécondé de loi.
seau nous en fournit un exemple remarquable. L’on
m’objectera peut-être, que l'appareil générateur de la
poule est conformé de manière à ce qu'un œuf puisse
ou plutôt doive s’y développer spontanément, et que
la productiou des œufs est inhérente aux fonctions,
naturelles des organes sexuels de cet animal. Mais je
pourrais alors aussi bien admettre que la production
106 SUR LES VERS INTESTINAUX
des ascarides et des cestoides est inhérente aux fonc-
tions du canal intestinal, et que la formation des
douves et des hydatides appartient aux fonctions du
foie. Si on voulait me dire que ces vers ne se trouvent
ni dans tous les intestins ni dans tous les foies, je ré-
pondrais qu'il y a également des animaux qui ne sont
pas non plus susceptibles d’être fécondés, et qui ne
pondent jamais d'œufs. Les personnes qui regardent
la production des vers intestinaux comme le résultat
ou plutôt comme la suite d’une lésion des fonctions
des organes en général, peuvent encore avoir raison.
Il reste cependant certain que telle ou telle espèce de
vers se développe seulement dans des organes deter-
mines; car les douves du foie, par exemple, se pro-
duisent seulement danse foie, etc. Nous reviendrons
plus tard sur ce sujet.
J'ai tâché jusqu’à présent de démontrer que le dé-
veloppement d'un jeune animal, surtout quand ıl
n'appartient pas à la classe des mammifères, opéré à
la suite d’un accouplement fécond , est aussi incom-
préhensible que le développement d’un animal sans
l'intermédiaire de parens, c’est-à-dire par formation
primitive ou spontanée. Nous sommes donc obligés
de recourir à la formation probable des premiers corps
organisés; ce n'est pas dans l’espoir de comprendre
par là la génération ou une formation quelconque ,
n'importe de quelle manière elle s’opere, mais bien
pour qu'il nous soit possible de déduire les mêmes
effets des mêmes causes. Eu suivant cette route , nous
devons nécessairement arriver à des corps organisés
DE L'HOMME. 107
qui n’ont pas été produits par des parens, mais bien
qui se sont développés spontanément par la maliere
sans forme; car j'ai täché de démontrer dans le com-
mencement de cette digression , que notre terre exis-
tait long-temps avant la formation des corps organisés
isolés, et que les matitres brutes ont dû être séparées
d’abord comme masses mortes, avant que l'esprit ait
pu transformer les parties intégrantes de la matiere
épurée en corps isolés doués d’une vie individuelle.
Nous avons également démontré que plusieurs créa-
tions semblables ont dû avoir lieu sucessivement, et
qu’elles ont été la suite des fermentations générales
de la terre. Chaque corps organisé vivant doit par con-
séquent être considéré comme une partie intégrante
de toute la terre vivante; et il forme en lui-même un
monde, qui est à la terre comme celle-ci est au so-
leil. Il s'opère en lui en petit ce qui s’opère en grand,
ou plutôt ce qui s’est déjà opéré dans la terre ; car
depuis que la vie individuelle de cette dernière a été
divisée et communiquée à tant d'êtres isolés, elle
jouit d’une vie plus tranquille; sa vie actuelle est à
comparer, pour ainsi dire, au sommeil. La vie in-
: Ce sommeil est cependant quelquefois interrompu par des réves
violens, en considérant comme tels les éruptions volcaniques , les
tremblemens de terre, les écroulemens de montagnes, etc. Du
reste, nous ne pouvons pas démontrer ayec certitude qu'il n’y
aura pas un jour encore une fermentation générale de la terre;
dans ce cas on peut très-bien s’imaginer que d’autres substances
pourraient être encore precipitees comme brutes au-dessus des
108 SUR LES VERS INTESTINAUX
dividuelle, principalement celle des organisations
animales, est plutôt à comparer à la vie de la terre
lors de ses époques tumultueuses , où les grandes fer-
mentations suivies de nouvelles créauons avaient
lieu. La vie universelle, ou bien l'acte éternel de fer-
mentation, a été en quelque sorte transférée a des
corps isolés doués de vie. Dans chaque organisation
animale existe une fermentation continuelle, pendant
laquelle de nouvelles substances sont admises, pré-
cipitées , appropriées , dissoutes, décomposées et ex-
crétées ; en un mot, la vie consiste dans une décompo-
sition continuelle et dans une combinaison nouvelle de
substances. Si nous réfléchissons à la grande quantité
de substances animalisées sans forme qui se trouvent
dans chaque corps animal, est-il alors étonnant qu'il
puisse se former de celle dont le corps n’a pas besoin
pour sa nutrition, ou qui n’y est pas même propre à
cause de sa composition particuliere, une petite
masse, un tout existant par lui-même, ou bien qu'il
se produise un ver intestinal dans ce petit monde (x
crocosmus ) , à l'exemple du grand , dans lequel se dé-
veloppa jadis un ver de terre. Ce nouveau ver une fois
autres masses mortes, et qu'il se produirait alors des êtres dans
lesquels l'esprit agirait encore plus librement que dans l’homme ;
car quoique la création actuelle ne puisse pas exister sans eau li-
quide et sans une atmosphère qui fait monter le mercure à vingi-
huit degrés dans le baromètre , il ne suit nullement de là que la
même chose devrait avoir nécessairement lieu dans une création
subsequente,
DE L'HOMME. " 109
formé, pourra ensuite multiplier son espèce en pro-
duisant des animaux semblables à lui. Nous sommes
obligés de nous imaginer, comme il a été déjà remar-
. que, les parens primitifs de tous les animaux à nous
connus , comme des animaux originairement sans pa-
rens , et cependant comme doués de la faculté de ré-
générer leur espèce de manière différente; et juste-
ment les différens modes de génération que l’on ob-
serve chez les vers intestinaux, prouvent que la marche
de la nature créatrice en petit est tout à fait semblable
à sa marcheen grand, et qu’il ne s'opère actuellement
rien autre chose dans le corps animal vivant, que
ce qui s’opera de même anciennement dans notre
globe vivant. En effet, chez les vers intestinaux, on
trouve, pour ainsi dire, une repetition de tous les
modes de generation qui existent dans la serie des or-
ganisations animales. 2
L’&chinocoque se trouve au plus bas degré de for-
mation organique. J’ai eu occasion de faire les obser-
vations suivantes sur son mode de génération. Un foie
de bœuf pesant cinquante-deux livres , était rempli
d'hydatides , parmi lesquelles il y eu avait quelques >
unes de la grosseur du poignet d’un homme robuste.
Je tâchai de les disséquer à la manière accoutu-
mée, mais je ne pus atteindre mon but, parce que
la membrane interne ou bien la membrane particu-
liere du ver était fortement adhérente aux parties
environnantes, parties par le moyen desquelles la
capsule s’était formée. En incisant une de ces vessies
d’une extrémité à l’autre, il en sortit une quantité
110 SUR LES VERS INTESTINAUX
considérable de vésicules formées par une membrane
très-mince remplie d’eau , et de différentes grosseurs ;
les plus petites moins grosses qu’un pois, et les plus
fortes de la grosseur d’une noix. En ouvrant une des
dernières, je trouvai qu’elle en contenait encore plu-
sieurs plus petites, et ce ne fut que dans celles-ci
que je remarquai la matière appelée granuleuse (ma
teries granulosa ), c’est-à-dire les véritables échinoco-
ques. J’ai trouvé également des emboîtemens sem
blables dans une hydatide énorme provenant du foie
d’un homme. En 1814 j'ai encore eu occasion d’ob-
server sur les poumons et le foie d’un chameau (came=
lus dromedarius ) la generation des échinocoques, ce
qui m’a permis de confirmer ce que j'avais vu précé-
demment. Ces animalcules , placés au plus bas degré
de la série animale , se multiplient par conséquent de
la manière la plus simple. L'animal qui reproduit
ses descendans cesse lui-même d’être un animal et se
transforme en une membrane dans laquelle ses petits
se trouventenfermés, comme la graine cesse d'exister
comme telle, sitôt que le germe de la nouvelle plante
s’est développé en elle. On observe un semblable
mode de génération chez le kolpode capuchon ( koi-
poda cucullus ? et chezle volvoce globuleux (volvox
globator ji
: Voyez, plus loin, le chapitre sur l’échinocoque.
2 O. Fr. Müller , Verm. terrestr., vol. ı , part. 1 , p. 58.
3 Reesel Insecten belustigungen, 3 Th. s. 617. Tab. 101, fig. 1, 2, 5.
De geer in den schwed. Abhandl. auf das Jahr 1761. Bd. 23.s: 112),
tab. 111, fig. 1-5.
DE L'HOMME. 118
On n'a pas encore pu découvrir les organes destinés
à la génération chez le cysticerque , animal également
d’une structure tres-simple : je crois cependant avoir
observé quelque chose à ce sujet. J’aı trouvé dans la
cavité thoracique de deux campagnols (mus arvalis,
L.) des eysticerques en assez grand nombre, et qui
y nageaient librement”. Ces vers étaient à peine un
peu plus gros qu'un grain de millet. A la vessie ter-
minale de plusieurs de ces individus, on voyait
pendre au dehors un, plus souvent deux, mais plus
rarement trois jeunes cysticerques. On ne doit nul-
lement croire que j'aie peut-être pris des aspérités de
la vessie caudale pour des vers, car on voyait claire
ment leur cou (leur tête, à cause de sa petitesse , ne
put pas être vue ni séparée } à l’aide duquel ils étaient
implantés comme par un pédoncule sur la mère. Il pa-
raît que Goeze a observé quelque chose de semblable.
Par conséquent la génération de ces vers s’opere en
quelque sorte par marcottes, comme cela a lieu chez
les polypes et chez les animaux du corail.
Le polycéphale ( polycephalus,'Led.,cænurus, Rud.)
fait peut-être la transition du premier mode de géné-
ration au second. Îci plusieurs têtes sont implantées
sur une vessie commune. Peut-être ces têtes se for-
ment-elles peu à peu : mais nous ne savons encore rien
de positif là-dessus* .
* C'était , en effet, une rencontre très-rare , car ces vers, ainsi
que les hydatides en général, sont ordinairement enfermés dans
des capsules particulières.
* Voyez Fischer dissert. ; y est question d’un polycéphale de la
112 SUR LES VERS INTESTINAUX
Les cestoides sont de véritables kermaphrodites, et
les articulations du même ver peuvent s’accoupler
mutuellement.
Les trématodées sont androgynes. L’apparcil géné-
rateur des deux sexes se trouve réuni dans chaque in-
dividu; mais celui-ci ne peut pas se féconder lui-
même; il a besoin pour cela d’un autre individu de
son espèce , qui est fécondé à son tour par le premier.
Les trématodes sont en général ovipares, mais d’aprés
le témoignage de Zeder , ’amphistome subclaviforme
(amphistoma subclavatum), provenant du rectum des
grenouilles , est vivipare. Il y a par conséquent 1Ci un
rapprochement dans le mode de génération avec les
animaux d’une organisation plus parfaite, c’est-a-dire
avec ceux de la classe des reptiles, ‘qui sont égale-
ment en général ovipares ; mais dont quelques-uns
sont aussi vivipares, comme les orvets, les vipéres »
les salamandres , etc.
Les acantocéphales ont bien des parties sexuelles
séparées , et le mäle se distingue par une vessie qui se
trouve placée à la partie postérieure, mais ıl n’y a pas
d’accouplement, et la fécondauon s'opère d’après la
supposition très-probable de M. Rudolphi , comme
chez les poissons, les crapauds, les grenouilles, etc.,
par aspersion des œufs avec le sperme du mâle au
dehors de la mère.
Nous arrivons enfin aux vers intestinaux du plus
rosseur d’un pois, que l’on a trouvé dans les ventricules d’un
g ,
mouton d'Espagne. ( Br.)
DE L'HOMME. | 113
haut degré d'organisation , c’est-à-dire aux nématoï-
. des. Ceux-ci ont des organes sexuels séparés. Les fe-
melles sont pourvues d’un vagin , et les mâles ont un
pénis (qui est peut-être double et bifurqué) tres-fa-
cile à apercevoir. On trouve dans le corps des pre.
mieres une espece de matrice et des oviductes, et
dans celui des derniers des vaisseaux spermatiques.
La plus grande partie de ces vers est ovipare; mais
il y en a quelques-uns qui sont vivipares , comme,
par exemple, le genre entier des cucullans, et les né-
matoïdes provenant du poumon et du rectum des
crapauds, des grenouilles et de quelques autres
reptiles.
Quoique les vers intestinaux aient la faculté de se
reproduire de tant de manières différentes, cepen-
dant, comme ils ne peuvent pas être transmis d’un
animal dansun autre, ce qui a été déjà prouvé, il faut
nécéssairement que les premiers de ces individus ;
c’est-à-dire ceux qui se trouvent pour la premiére fois
dans un corps animal, n’importe lequel, se forment
spontanément. Mais ici il ne s'opère rien autre chosè
que ce qui s'était déjà souvent opéré en grand sur la
terre: chaque fois que la terre changea la forme de
son existence *, la création existante fut aussi chaque
fois détruite. La même chose arrive quand l'animal,
» Je ne veux pas parler ici de la forme extérieure , car elle a
été probablement toujours sphérique ; mais.j’entends les différens
modes d’être , les différens états sous lesquels elle s’est trouvée ,
depuis qu’elle a formé un tout éxistant par lui-même.
8
114 SUR LES VERS INTESTINAUX
dans lequel les vers s'étaient produits et mulupliés,
meurt. L’animal, après sa mort, passe à une autre
forme d'existence , ou bien à une autre forme de vie;
le ver, qui est le produit de l'animal dans lequel il
séjourne, doit, par conséquent, nécessairement chan-
ger aveclui, en même temps, sa forme d’existence
ou bien sa forme de vie. Le ver est Soumis, comme
l'animal dans lequel il s’est produit, aux lois de la
putréfaction , à moins qu'un helminthologue ne
s’en empare à temps, el ne sauve la forme primitive
du ver.
Si quelqu'un voulait m’objecter que dans ma ma-
nière de voir, la terre a toujours produit à chacune
de ses métamorphoses des êtres qui ne ressemblaient
pas à ceux des précédentes, mais que ce n’est pas le
cas chez les vers intestinaux , puisque de temps im-
mémorial nous rencontrons toujours les mêmes vers
chez l’homme , et que, par consequent, ma compa-
raison ne peut se soutenir ; je répondrais à cela que
notre terre, à l'exception de la lune, n’a pas produit
de globes ou de petits semblables à elle. Du reste,
nous ne savons pas ce qui se passe dans la lune ; nous
ignorons également sı elle n’a pas déjà subi les mêmes
métamorphoses que notre terre ‚ou bien sielle est en-
core à les éprouver. Chez leshommes et les animaux,
lesemblable reproduit le semblable ; par conséquent ,
les animaux qui se sont développés d’eux et dans eux,
doivent nécessairement se ressembler. Nous obser-
vons cependant dans le microcosmus , dans l’homme
comme animal , soumis à une métamorphose moins
DE L'HOMME. 115
lente , une difference ou une tendance prédominante
à la formation spontanée de tel ou tel parasite, selon
que ce microcosme se trouve à tel ou tel degré de
développement. Ainsi, pour ne parler que de nos
vers, il ne se produit Chez les enfans en général, car il
n’y a rien sans exception dans ce monde, que des as-
carides et des oxyures, et chez les adultes, nous obser-
vous plus souvent des cestoides, des strongles, etc.
Voilà donc encore ici un rapport avec ce qui a eu lieu.
La certitude de la formation primitive des vers in-
testinaux est donc clairement établie, non-seulement
par des preuves négatives, puisque les vers intesti-
naux ne peuvent pas arriver du dehors dans le corps
animal , mais elle est encore déduite de l’analogie de
la formation primitive des infusoires, de la moisis=
sure , etc., et enfin elle est démontrée par l'induction
tirée de la formation première probable de tous les
Corps vivans; mais, pour un observateur exact, il
existe encore des preuves directes.
M. Rudolphi* croit avoir observé le développe
ment: du tænia dans un chien. On rencontre assez
fréquemment le géroflé (caryophyllœus mutabilis ,
Rud.) dans les poissons du genre cyprinus. Ge ver a
reçu son premier nom de sa ressemblance avec un
clou de girofle, et la grande variabilité de la partie
antérieure de la tête lui a valu le second. J’ai remar-
qué trés-souvent le premier développement de ces
vers; j'ai trouvé notamment bien souvent dans là
2 Entoz., vol. 1, p. 411.
116 SUR LES VERS INTESTINAUX
mucosité, dont les parois internes des intestins de
ces poissons sont enduites, de ls corps de la lon-
gueur d'une ou deux lignes, et même quelquefois
un peu plus, qui remuaient et qui donnaient claire-
ment des signes de vie. Ces corps ressemblaient ,
quant à leur couleur et à la nature de leur substance,
aux gerofles; mais ils étaient dépourvus de tête. Je
puis assurer que la tête n’était ni déchirée ni ré-
tractée, car je les ai examinés long-temps avec la plus
grande exactitude , et jamais je n’ai vu quelque chose
quiressemblât à la tête. Apres lesavoir nétoyés, à l’aide
d’un pinceau , de la mucosité dont ils étaient entou-
rés , on royal qu'ils formaient un tout clos, étonne
remarquait, à l’une ou l’autre de leurs extrémités,
aucun filament, aucune villosité, comme cela au-
rait eu lieu si la tête avait éié déchirée. La forma-
tion primitive de ces vers s'opère, suivant mot,
de la manière suivante : une partie de la mucosité
intestinale , ou plutôt de la mucosité vivante ct sans
forme, se coagule en une masse un peu compacte ;
elle se couvre d’un épiderme , et jouit, des ce mo-
ment , d’une vie propre; la tête se forme par la suite,
et à la fin les organes dela génération paraissent. Cette
supposition a gagné chez moi encore plus de pro-
babilité, par la raison que j'ai rencontré de pareils
géroflés beaucoup plus petits, pourvus d’une tête
complétement développée. 11 paraît, par conséquent,
que tantôt une plus grande quantité , et tantôt une
plus petite quantité de cette mucosité , se coagule en
une totalité, et forme le commencement du ver. Ces
DE L'HOMME. : 117
vers, incomplétement développés, sont: cependant
tous amıncıs versunede leursextrémités, absolument
comme leclou de girofle. J’ai trouvé également quel-
ques individus qui commencaient déjà à devenir plus
larges et plus transparens à l’autre extrémité; c'était,
par conséquent , le premier développement de la tête.
Pourrait-1l rester encore quelque doute sur la for-
mation primitive des vers intestinaux, après tant de
preuves, iant négatives qu’aflirmatives?
Celui qui douterait de la formation primitive par
la seule/raison qu’il ne la comprend pas, et que les
animaux ont, en général, la faculté de se multiplier
par l'acte de la generation, serait à comparer à un
homme qui voudrait nier l’inflammation spontanée
de la matière électrique, la foudre, par la raison
qu'il ne-peut produire lui-même des éuincelles élec-
triques que par le frottement des corps solides.
An AV
WUVELUUU VUUY LA UU LAVER AUTRE LUI A URS
}
- CHAPITRE DEUXIÈME.
Division systématique des vers intestinaux en général.
On sait que les médecins et les naturalistes anciens
n'étaient pas très-avancés dans l’helminthologie : leur
science se bornait à connaître quelques-unes des es-
peces de vers intestinaux que l’on rencontre dans le
corps humain et que l’on trouve désignés , dans leurs
ouvrages , sous les noms suivans : ascarides , lumbrici
118 SUR LES VERS INTESTINAUX
teretes, lumbrici lati, teenia lata, tænia solium, vermes
cucurbitini. Ces derniers ont été regardés à tort comme
formant un genre particulier , puisque ce ne sontque
des articulations détachées du tænia. Le dragonneau
(filaria dracunculus ) était également connu par beau-
coup de personnes ; mais on ne le placait pas parmi
les vers intestinaux, parce quion le confondait avec.
le filaire aquatique (gordius aquaticus), et que l’on
croyait que ces deux vers n'en formaient qu’un.
Avant Redi, médecin du grand-duc Cosme im
de Médicis, dans le dix-septieme siècle, il n’était
venu dans l’idée de personne d'examiner les animaux
sous le rapport helminthologique : il fut le fondateur
de cette science; mais il se contenta de décrire et de
dessiner les vers intestinaux à mesure qu'il en trou-
vait, et cela ne pouvait pas se faire autrement à cette
époque: Après lui, cette branche de l'histoire na-
turelle resta long-temps inculte; personne ne s'en
occupa d’une manière spéciale, à l’exception de Léo-
nard Frisch, qui a fait insérer quelques mémoires
sur les vers intestinaux, dans les Melanges de Berlin.
Dans la dernière moiué du siècle précédent,
_Pallas, Otto-Fréd. Müller et Otto Fabricius com-
mencérent à regarder ces animaux comme dignes de
quelqu'attention. Linné leur assigna bien une place
dansson Système de la nature, maisil les rangea parmi
les autres vers, et placa les filaires (gordius filaria), les
ascarides (ascaris) et les douves ou fascioles (distoma),
parmi les. vers intestinaux; l’hydatide et le tænia ,
parmi les zoopbytes.
DE L'HOMME. 119
La société des sciences de Copenhague paraît avoir
éveillé le goùt pour cette science, principalement
parmi les paturalistes allemands, en proposant pour
prix, en 1780, de chercher, par l'expérience etle rai-
sonnement , si les œufs des vers intestinaux, comme,
par exemple, ceux du tænia, de la douve-fasciole ,
sont innés dans les animaux, ou s’ils y arrivent du
dehors, et, dans ce cas, d'exposer les moyens pro-
pres à s’opposer à leur introddetion. La grande-quan-
tité de vers intestinaux que l’on découvrit alors jour-
nellement, et qui sont si différens entre eux, lani
par leur forme extérieure que par leur structure
intérieure, nécessita une classification.
Bloch, qui remporta le prix, les a divisés dans
son ouvrage en deux ordres : le premier comprend
les vers plats ou larges; le second , les vers ronds.
Il compte, parmi les premiers, les ligules (Zigula },
les douves (distoma) et le ver solitaire ; et parmi les
seconds , les hydatides et les caryophillées.
Goeze se contenta d'établir seulement des genres.
Otto-Fred. Müller: et Francois de Paula Schranck
suivirent son exemple ; ces deux derniers ont publié
presqu’en même temps, c'est-à-dire en 1787 et en
1788, des tableaux de tous les vers intestinaux de-
couverts jusqu'alors ; mais il manque, dans tous ces
travaux , un bon principe de classification , et les dif-
férens genres de vers intestinaux sont souvent rappro-
.
ches d’une manière peu naturelle. ”
» Naturforscher, st. 22. 5. 33 et 86.
120 SUR LES VERS INTESTINAUX
Nous devons à Zeder, homme du plus grand mé-
rite, les premières bases d’une bonne division systema-
tique; elle fut publiée en 1800 , dans son premier
supplément pour l’histoire naturelle des vers intes-
tinaux, par Goëze : ıl est malheureux qu'il ait re-
noncé depuis à l’étude de cette science. Il partage
_tousles vers intestinaux en cinq classes, auxquellesila
substitué plus tard le nom de familles ; d'aprés le
conseil de M. Rudolÿhi :. Celles-ci sont suhdivisees
en genres, qui quelquefois sont subdivisésde nouveau
‘en sections, et les genres en espèces. Cette division
systématique a été adoptée par M. Rudolphi, dans
son grand ouvrage; cependant il a trouvé conve-
nable de faire quelques changemens dans la circons-
cription des genres et dans leur disposition. Il a
aussi remarqué que les deux derniers ordres ne sont
pas naturels. Je crois, en outre, que le troisième
et le quatrième auront besoin de quelques modifi-
cations, et je pense que M. Rudolphi sera obligé
de réunir dans son ouvrage supplémentaire les mo-
nostomes hypostomes ( monostomata hypostomata) et
les polystomes pentastomes (polystomata pentaslo-
mata), qui formeront, avec le caryophiliée, un
sixième ordre,’ que l’on sera peut-être obligé de
placer entre le troisième et le quatrième.
Wilbrand a imité, comme M. Rudolphi, la clas-
sification de Zeder. M. Olfers s’en est écarté de
même que M. Cuvier, et ce dernier a réuni des
ı Wiedemanns archiv. 4. 5 44.
DE L'HOMME. 121
‚vers extérieurs avec les vers intestinaux ; enfin,
M. Brera a classé les vers intestinaux de l’homme
à-sa manière : il en forme: cinq ordres, qui sont
encore subdivisés eh douze genres et en vingt-six
Pppres, ce qui faqusiénient une fois plus que je
n’en connais; il est vral qu ıl yena quelques-unes
parmi elles qui ne sont pas même des vers. Je vais
-me bornerà exposer la classification de M. Rudolphi,
telle qu'il Va établie dans son Zraité sur les entozoaires *«
Oro. I. NÉMATOIDES ( Nematoidea ).
Corps arrondi, élastique ; canal intestinal complet,
pourvu d’une bouche et«d’un anus. Les deux sexes
3
séparés sur deux individus différens.
Cet ordre comprend des vers allongés, cylindi-
ques dans presque toute leur longueur, et plus ou
moins atténués aux deux extrémités. La tête, non dis-
tincte, est obtuse ou tronquée, quelquefois accom-
pagnde de membranes latérales. L'ouverture de ha
* M. Bremser , dans son ouvrage , do nne ici la méthode suivie
par M. Rudolphi dans son grand Traité sur les entozoaires ; mais
il nous a invités à y substituer celle que ce dernier a adoptée dans
‚son Synopsis , publié en 1818. Nous avons cru faire encore mieux
en traduisant presque motà mot l’extrait qu’en a publié à Vienne ,
en 1822 , M. le docteur Fischer , aide-naturaliste dans univ ersité
‘impériale de Vienne , sous les yeux de M. Bremser lui-même,
sous le titre suivant : Brevis entozoorum seu vermium intestinaltum
expositio et methodus eosdem investisændi et conservandi , cum icone ;
nous en reparlerons dans notre supplément.
‘129 SUR LES VERS INTESTINAUX
bouche offre de bons caractères génériques dans sa
forme, et surtout dans l'existence des lèvres, des tu-
bercules ou des valvules dont elle peut être pourvue.
La queue continue avec le corps , a son extrémité ob-
tuse ou aiguë, droite ou oblique, fléchie ou non. Les
individus mâles ont presque toujours le corps plus
court, plus grêle que les femelles ; l'extrémité de leur
queue infléchie offre souvent des aiguillons ou des fi-
lamens qui appartiennent à l'appareil de la généra-
tion. Dans les deux sexes, les organes internes de la
génération, les ovaires dans les femelles, les testi-
cules dans les mâles, ont la forme de longs filamens
tres-fins qui s’entortillent autour du canal intestinal,
souvent plus coloré que le reste, et leur communi-
cation extérieure se fait par un orifice médian situé
vers le tiers antérieur du corps.
Les différentes espèces de cet ordre se trouvent
dans toutes les classes d'animaux beaucoup plus sou-
vent dans le canal intestinal que dans le tissu des
autres parties.
On les partage en onze genres , qui sont les suivans :
G. i. FırAıre, Filaria.
Corps allongé , cylindrique , presque d’un égal dia-
mètre dans toute son étendue; bouche orbiculaire;
l'organe excitateur mâle formé par un seul ou par un
double aiguillon. |
Les filaires se trouvent non-seulement dans les anı-
maux vertébrés, mais encore dans les insectes et dans
DE L'HOMME. 123
leurs larves; savoir dans le tissu cellulaire sous-cu-
tané, autour des yeux, des oreilles, des joues, du
cou, sous la peau des narines, entre les muscles du
cou , dans l’œsophage, dans la cavité de la poitrine,
dans les bronches, dans les cavités de la plevre, adhé-
rens au cœur, dans l'estomac, à la superficie externe
des intestins, dans le foie, le mésentère, l'épiploon,
dans la région lombaire ou coxale, et même dans
les parties génitales; libres, adherens aux organes ou
comme mélés avec le tissu cellulaire.
A. Espèces à bouche simple,
Le F. de M£pıne , F. medinensis , dans le tissu cel-
lulaire de l’homme.
Le F. cRÈLE, F. gracilis, dans la cavité abdomi-
nale des sapajous.
Le F. ATTÉNUÉ, F. attenuata, dans la cavité abdo-
minale du geai, C. frugilegus.
B, Espèces à bouche papilleuse ou labiée.
Le F.pPApiLLEux, F. papillosa, dans la cavité tho-
racique du cheval.
G. IL Trıcnosome, Zrichosoma.
Corps arrondi, élastique, très-fin'en avant et S’ac-
croissant peu à peu en arrière; bouche ponctiforme à
l'extrémité amincie ; l'organe excitateur mâle formé
par un fil simple contenu dans une gaine.
Les espèces de ce genre existent chez ies mammi-
124 SUR LES VERS INTESTINAUX
fères, les oiseaux et les amphibies, entre les mem-
branes de l'estomac, dans les intestins grêles ou gros,
et surtout dans le cœcum, dans la vessie urinaire.
… Ex. Le T. ivrcécut , 7. inflexum, des intesuns du
merle bleu, et très-communément de ceux des pi-
geons et de beaucoup d’autres oiseaux.
G. 1II. Trıcnoc£ruAue, Zrichocephalus.
Corps arrondi, élastique, capillaire en avant et se
renflant subitement en arrière; bouche orbiculaire ;
l'organe excitateur mâle simple, et contenu dans une
‚gaine. 4
Dans l’intestin cecum des mammiferes.
A. Espèces inermes.
Le T. de L'Homme, 7. dispar, dans Vıntestin coe-
cum de espèce humaine.
Le T. DéPRIMÉ, 7. depressiusculus, dans les intes-
tins du chien.
B. Espece armee.
Le T. n£rısst, T. echinatus, dans l'estomac du lé-
zard apode ( Zac. apoda , L. ).
G. IV. Oxyure, Oxyuris.
Corps arrondi, élastique, subulé à sa partie posté-
‘rieure; bouche orbiculaire; organe excitateur dans
une gaine. ARTS |
"Les espèces de ce genre n’ont été jusqu'ici trou-
DE L'HOMME. 125
vées que. dans les gros intestins des mammifères.
L’une d'elles, la plus commune, l'O. vrermicuraims,
O. vermicularis , placée par Rudolphi parmi les asca-
rides , se trouve communément dans le rectum del’es-
pece ins elle est figurée pl. retrr, fig. 3 et 1-2.
1L’O. DouTEux, O. ambigua, vient des intestins du
apin sauvage.
G. V. CucurLAan. Cucullanus.
Corps cylindrique , élastique , amimei postérieure-
ment; la tête pourvue d’une bouche orbiculaire et
d’une espèce de capuchon strié; organe excitateur
mâle formé par un aiguillon simple.
Dans les intestins et l'abdomen des reptiles et des
poissons.
Le C. ELEGANT, C. elegans, dans les appendiecs
pyloriques de la sandre ( perca lucio-perca , L.).
G. VI. SPIROPTÈRE , Spiroptera.
Corps arrondi, élastique, aminci aux deux extré-
mites; la bouche orbiculaire ; l’organe excitateur sor-
tant entre les ailes latérales d’une queue roulée en
spirale.
Dans les animaux vertébrés, entre la troisième
_ paupiére et le bulbe de l'œil, dans l’œsophage, l'es-
tomac‘; tres-frequemment entre les membranes et
dans des tubercules de cet organe chez les poissons,
136 SUR LES VERS INTESTINAUX
dans les intestins et la vessie natatoire de ces mêmes
anımaux.
A. Espèce à bouche nue. :
Le Sp. srroNGLOÏDE, S. strongylina, dans l'esto-
.
mac du sangiier. |
B. Espèce à bouche papilleuse.
Le Sp. osrus, S. obtusa, dans l’estomac de la souris.
On a aussi trouvé des spiroptères dans la vessie
urinaire de l'espèce humaine.
G. VII. PrysALOPTÈRE, Physaloptera.
Corps arrondi, élastique, aminci aux deux extré-
mités ; la bouche orbiculaire ; la queue du mäle dé-
fléchie , ailée de chaque côté, ct pourvue inférieure-
ment d’une sorte de vessie; l'organe excitateur sortant
d’un tubercule.
Dans l'estomac des mammifères , des oiseaux et des
reptiles.
Le P. ENFERMÉ, P. clausa, dans l’estomac du he-
rissOn.
G. VIIL STRONGLE , Strongylus.
Corps arrondi, élastique, aminci aux deux extré-
mités ; la bouche orbiculaire ou anguleuse ; la pointe
de la queue du mâle terminée par une bourse d’où
sort l'organe excitateur.
Les espèces assez nombreuses de ce genre ont été
trouvées dans les trois premières classes d'animaux
DE L'HOMME. 157
vertébrés , dans la caisse du tympan , la trachée-
artère, les bronches, l’œsophage , les poumons, le
cœur, les intestins , le foie , les reims, et dans des tu-
meurs anévrismales des artères mésaraïques.
A. Espèce à bouche orbiculaire ou aiguillonnée (sderosiomata).
Le S. ARME, S. armatus, dans l'intestin cœcum du
cheval. /
B. Espèce à bouche orbiculaire et papilleuse.
Le S. GÉANT , S. gigas, dans les reins de l’homme,
du chien, de la loutre, du phoque, du cheval, du
bœuf, etc.
C. Espèce à bouche nue.
Le S. FILAIRE , S. filaria , dans la trachée-artère et
les bronches des moutons , où il est souvent en grand
nombre.
G. 1X. AscariDE, Ascaris.
Corps arrondi , élastique, atténué aux deux extré-
mités ; la bouche à trois valvules; l'organe excitateur.
mâle formé par un double aiguillon.
Dans presque toutes les parties du corps des ani-
maux vertébrés; une seule espèce a été découverte
dans un animal du type des mollusques (/epas fascicu-
laris ), par M. Soemmering. On trouve des ascarides
dans la gorge, l’œsophage, entre les bronches, dans
les poumons, l’estomac et surtout dans les intestins,
leurs membranes et leurs tubercules, dans Vabdo-
men, le foie, la rate, le mésentère, le périnée, le
plus souvent libres, mais aussi quelquefois adhérens.
128 SUR LES VERS INTESTINAUX
Ce genre, le plus nombreux parmi les vers intes-
tinaux, contient un très-grand nombre ‘d'espèces,
dont quatre-vingt seulement sont bien déterminées:
A. Espèces atténuées également aux deux extrémités.
a. La tête nue.
L’A. vomsrıcoipe , A. lombricoides , dans les intes-.
tins.de l'homme et de plusieurs autres animaux mam-
miferes.
b. La tête ailée.
L’A. ou cHAT, À. mystax, dans les intestins du
chat domestique.
B. Espèces dont l'extrémité antérieure est la plus grosse.
a. La tête ailée.
PA. VERMICULAIRE, A. vermicularis (oxyuris ver-
micularis, Br.), dans le canal intestinal de l’espece
humaine.
L'A.rAcneré, 4. maculosa, dans le pigeon domes-
tique. |
N) b. La tête nue.
L’A. DENTÉ, A. dentata, dans le canal intestinal
du barbeau ( cyprinus barbus ).
C. Espèces dont l'extrémité postérieure est la plus grosse.
a. La téle nue.
L’A. sPICULIGÈRE , A. spiculigera, dans l'estomac
du cormoran (pelecanus carbo ).
DE L'HOMME. | 129
b. La tete ailee.
L’A. SERPENTULE, 4. serpentulus, dans le heron
cendre.
G.X. Opniostomr, Ophiostoma.
Corps rond, élastique, atienue aux deux extrémi-
tés; la bouche pourvue de deux lèvres ; l’une supé-
rieure et l’autre inférieure,
Dans les intestins greles et gros des mammiferes et
des poissons.
L’O. sPHÉROCÉPHALE , O. spherocephalus, des gros
intestins de l’esturgeon (4. Auso ).
G. XI. LiornynQuE, Ziorhynchus.
Corps rond , élastique; bouche à l'extrémité d’une
sorte de trompe érectile et lisse.
Dans l’estomac et les intestins de quelques mammi-
feres et de plusieurs poissons.
Le L. ve L’ANGuILLE , L. denticulatus, dans l’an-
guille.
On. IL. ACANTHOCEPHALES ( Acanthocephala ).
Corps subarrondi, utriculaire, élastique; l’extré-
mité antérieure prolongée en une sorte de trompe
rétractile et garnie de crochets disposés par séries. Les
deux sexes distincts sur des individus differens.
Cet ordre ne contient encore qu’un seul genre.
9
130 SUR LES VERS INTESTINAUX
G. XIL. EcHmiNORHYNQUE , Echynorhynchus.
Corps subarrondi, utriculaire, élastique; une
trompe retractile pourvue de crochets, les sexes dis-
tincts sur des individus différens.
Les espèces de ce genre, quisontasseznombreuses,
existent dans toutes les classes d'animaux vertébrés;
le plus souvent fixées dans le canal intestinal, entre
ses membranes et même à l'extérieur dans l’épiploon
et le peritoine; on en a aussi trouvé quelquefois au
cou, sous la peau.
La forme de la trompe, l’existence ou l'absence
d’un rétrécissement ou d’une espèce de cou entre elle
et le corps, l'existence ou l'absence de crochets sur
l’une ou l’autre de ces trois parties fournissent les bases
de la subdivision des espèces.
A. Espèces dont le cou et le corps sont sans crochets.
a. Le cou très-court ou long.
1°. La trompe subglobuleuse.
L’E. céanT, E. gigas, des intestins du cochon.
2°. La trompe ovale.
L’E. ccosureux, E. globulosus, dans la sciène
ombre et plusieurs autres espèces de poissons.
3°. La trompe oblongue, plus grosse au milieu.
L’E. cent, E. cinctus, de la couleuvre noir-ver-
dätre (col. atrovirescens ).
4°. La trompe claviforme, ou „plus grosse à l’ex-
trémité.
DE L'HOMME. 131
D’E. AG1LE , E. agilis, des intestins du muge (mug.
cephalus ).
5°. La trompe conique ou plus épaisse à la base.
L’E. curnırLıe, E. heruca, de la grenouille ordi-
naire (7. esculenta ).
6°. La trompe cylindrique ou linéaire.
L’E. À QUEUE , E. caudatus, dans les faucons.
b. Le cou long.
L’E. nopurEeux, E. nodulosus, dans le barbeau
(cyp. barbus).
B. Le cou ou le corps armé.
L'E. sPHÉROCÉPHALE, E. spherocephalus, dans
l’huîtrier (himant. ostralegus ).
On». II. TRÉMATODES S (fremaioda ).
Corps déprimé ou subarrondi , mou; des pores ou
sucoirs ; tous les individus androgynes.
Les vers intestinaux compris dans cet ordre ont
une forme trés-variée; la tête est très-rarement dis-
tincte, et par conséquent le cou , sous lequel sort un
filament cirreux servant à la génération. Le corps, or-
dinairement déprimé, ovale, elliptique, linéaire ou
subarrondi, est souvent nu, mou, rarement denti-
culé sur ses bords; on y remarque au-dessous un,
deux ou plusieurs pores plus ou moins antérieurs 5
disposés de manière différente , outre un autre qui se
trouve quelquefois en arrière. Ces pores, le plus
9.
139 SUR LES VERS INTESTINAUX
souvent simples, sont aussi quelquefois pourvus de
nodules ou d’aiguillons. Il n’y a pas de canalintestinal
proprement dit ; tous les individus ont à la fois les or-
ganes génitaux des deux sexes.
On trouveles trématodes dansles animaux vertébrés.
G. XIII. MonwosTome , Monostoma.
r
Corps mou, subarrondi ou déprimé ; un seul pore
antérieur.
Dans les mammifères, les oiseaux, les reptiles et
les poissons, entre les muscles, dans le thorax, les
poumons, les intestins et l'abdomen.
A. L'ouverture du pore inférieure.
Le M. carvoPpayLuin , M. caryophyllinus, dans les
ur
intestins de l’épinoche (gast. aculeatus js
B. L'ouverture du pore antérieure.
Le M. rouAcé, M. foliaceum , dans l'esturgeon (a.
sturio ).
G. XIV. AmpıstoMmE, Amphistoma.
Corps mou, subarrondi; deux pores, Yun anle-
rieur et l’autre postérieur.
Dans l'estomac, les intestins , l'abdomen et les hy-
datides des viscères des mammifères, des oiseaux et
des reptiles.
A. La tête distincte.
L’A. A LONG COU , A. longicolle, dans les hérons.
DE L'HOMME. 133
B. La tête non distincte.
L’A. SUBCLAVIFORME , 4. subelavatum, dans les
_ grenouilles, crapauds et rainettes.
G. XV. Disrome, Distoma.
Corps mou , déprimé ou subarrondi ; deux pores,
dont l’un antérieur et l’autre ventral.
Les espèces de ce genre , qui montent aujourd’hui
à plus de cent quarante, peuvent être divisées ainsi :
A. Espèces non armées.
a. Planes ou déprimées.
1°. Le pore ventral le plus grand.
Le D. pu FoıE, D. hepaticum , dans l’homme , plu-
sieurs rongeurs , le cheval , le cochon et presque tous
les animaux ruminans.
2°, Le pore antérieur le plus grand.
Le D. m£cAstomr, D. megastomum , dans lesto-
mac du squale milandre ( sq. galeus ).
3°. Les pores égaux.
Le D. macrosTOmE, D. macrostomum , dans les es-
pèces du genre fauvette ( motacilla ).
b. Subcylindriques.
1°. Le pore ventral le plus grand.
Le D. rourcuu , D. furcatum , dans les intesuns du
surmulet (mullus surmuletus ),.
134 SUR LES VERS INTESTINAUX
2°, Le pore antérieur plus grand.
LeD.cour£, D. excisum, dans l’estomac du ma-
quereau (S. scomber ).
3°. Les pores égaux.
Le D. poınt, D. punctum, dans le barbeau ( cyp-
barbus ).
B. Espèces armées.
a. Noduleuses ou papilleuses.
Le D. noouLeux, D. nodulosum, dans les perches.
b. Aiguillonnées.
Le D. A1GUILLON NÉ, D. echinatum, dans les hérons,
les canards, etc.
G. XVI. Trıstome, Tristoma
Corps deprime; trois pores, dont deux antérieurs
simples , et le troisième postérieur rayonné.
Le T. oRANGÉ, 7. coccineum. La seule espèce de ce
PER [4 » .
genre a été trouvée fixée aux branchies el au corps du
poisson lune ( orthragoriscus mola ).
G. XVII. PENTASTOME, Pentastoma.
Corps un peu arrondi ou déprimé ; la bouche entre
deux pores de chaque côté, d’où sort un aiguillon.
Dans les sinus frontaux, les poumons , à la surface
du foie des mammifères et des reptiles.
Le P. renıoipe, P. tænioides, dans le chien, le
loup, le cheval.
DE L'HOMME. 13
Qt
G. XVII. Porystome, Pobystomi:
Corps subarrondi ou déprimé; six pores anté-
rieurs, outre un ventral et un postérieur.
Dans la gorge, les branchies des poissons, la ves-
sie urinaire des grenouilles, dans l’ovaire de l’espèce
humaine.
Le P. pıncvicorz, P. pinguicola , dans l'homme.
Or». IV. CESTOIDES ( Cestordea ).
Corps allongé, déprimé, continu ou articule; la
tête tres-rarement pourvue de lèvres simples, et le
plus souvent de deux ou quatre fossettes ou sucoirs;
tous les individus androgynes.
Les vers rangés dans cet ordre ne forment pas une
famille véritablement naturelle, tant la tête diffère de
structure dans chaque genre. Dans quelques-uns, en
effet, elle est polymorphe, tétragone, pyramidale,
comprimée , avec la bouche pourvue delevres ou su-
coirs, tandis que dans les autres elle est tronquée, hé-
misphérique ou globuleuse, lisse en avant et pourvue
d’un tubercule ou d’un rostre, inerme ou armée
d’une couronne simple ou double de crochets ; quel-
quefois même on y remarque quatre espèces de
trompes armées de crochets rétracules. Le cou est
souvent nul. Le corps est allongé , déprimé, mou,
continu ou formé d’un grand nombre d’articulations
136 SUR LES VERS INTESTINAUX
percées de pores latéraux ou marginaux, et pourvues
de papilles ou de filamens érectiles. La queue est ob-
tuse ou articulée. Le canal intestinal n’est pas visible;
il est remplacé par des espèces de vaisseaux qui pro-
viennent des sucoirs; il en est de même des organes
de la génération; quelquefois cependant on voit une
série d’ovaires simples en forme de taches dans toute
la ligne médiane , et des orifices des articulations sor-
tent des filamens que l’on regarde comme des organes
mâles de la génération.
On les trouve dans le canal intestinal.
G. XIX. GérorLé, Caryophylleus.
Corps déprimé, continu; la tête dilatée, divisée
en lanières et pourvue de lèvres, l’une supérieure et
l’autre inférieure.
Dans les intestins des poissons.
Le G. cHANGEANT, C. mutabilis, dans les carpes,
les cobites.
G. XX. Massère, Scolex.
Corps déprimé , continu; la tête pourvue de quatre
fossettes.
Dans les intestins et la cavité abdominale des pois-
sons et des sèches (sepia ).
La M. PoLYMoRPKE , S. polymorphus.
G. XXI. GYmNoRHYNQUE, Gymnorhynchus.
Corps déprimé, continu, très-long , avec un récep-
DE L'HOMME. 137
tacle globuleux au cou; la tête pourvue de deux fos-
settes bipartites et de quatre trompes nues, rétractüles.
Dans la chair de plusieurs poissons.
Le G. RAmMPANT, G. reptans , dans la chair du
spare de Ray (sp. Rai).
G. XXII. TÉTRARHYNQUE, Zetrarhynchus.
Corps deprime, continu; la tête pourvue de deux
fossettes bipartites et de quatre trompes rétractiles
garnies d’aiguillons recourbes.
Dans les reptiles, les poissons et les mollusques,
dans les chairs , les branchies, l’estomac et ses mem-
branes, le foie, le péritoine.
Le T. piscormore, 7. discophorus, dans les bran-
chies et entre les membranes de l’estomac du spare
de Ray (sp. Raï).
G. XXIH. Lacure, Ligula.
Dans son premier degré de développement : corps dé-
primé, continu , très-long , avec un sillon longitu-
dinal, sans apparence de tête ni d’organes de la gé-
nération.
Dans son état complet : corps déprimé, continu,
très-long ; la tête pourvue de chaque côté d’une fos-
sette tres-simple; des ovaires avec des lemnisques
formant une serie simple ou double dans la ligne
médiane.
Les animaux de ce genre,rès-communs dans les
138 SUR LES VERS INTESTINAUX
oiseaux et les poissons, sont au contraire tres-rares
dans les mammifères.
A. Espèces à ovaires distincts.
La L. uniSÉRIALE, L. uniserialis , dans les oiseaux
du genre falco.
B. Espèce à ovaires évidens.
Le L. TRès-simpLe, L. simplicissima, dans beau-
coup de poissons.
G. XXIV. TricusPiDAIRE , Zrienophorus:
Corps allongé, déprimé, subarticule; la bouche
bilabiée et armée de chaque côté de deux aiguillons
tricuspides.
Dans les intestins des poissons, dans des kystes du
mésentère et du foie.
Le T. nopurzux, 7.nodulosus, dans la perche, le
brochet, le saumon, etc.
G. XXV. BoTHRIOCÉPHALE , Bothriocephalus.
Corps allongé, déprimé, articulé ; la tête subtétra- |
gone et pourvue de deux ou quatre fossettes opposées.
Les espèces de ce genre se trouvent tres-frequem-
ment dans les poissons et les oiseaux, et plus rare-
ment dans les mammifères et dans l'espèce humaine,
ire \
dans les branchies, l’œsophage, les appendices pylo-
riques , les intestins, la cavité abdominale.
DE L'HOMME. 139
A. Espèces non armées ( gymnobothri ).
a. À deux fossettes ( dibothrii ).
Le B. LARGE, B. latus (Br.) (Ten. lata, Aucth. ),
dans les intestins de l'espèce humaine en France, en
Suisse, en Russie.
b. A quatre fosseites ( tetrabothrii ).
Le B. RENFLÉ, 2. tumidulus, dans la raie paste-
naque.
B. Espèces armées. Toutes sont à quatre fossettes (teirabothrii.)
a. Aiguillonnées (onchobothrii )
Le B. couronn&£,2. coronatus, dans les raies et les
squales.
b. Pourvues d'une trompe.
Le B. À sucoırs m£rıssts, B. corollatus, dans le
même groupe de poissons.
G. XX VI. Tania.
Corps déprimé, allongé , articulé ; quatre sucoirs
à la tête.
Dans les intestins, les conduits biliaires ‚la vési-
cule du fiel, le foie des animaux vertébrés ; une seule
fois dans la cavité abdominale.
A. Espèces non armées.
a. La tête simple ou sans rostre.
Le T. PECTINÉ, 7. pectinata, dans les lapins, la
marmotte. |
140 SUR LES VERS INTESTINAUX
b. La téle avec un rostre rétractile.
Le T. vıLLeux, 7. villosa, dans l’outarde.
B. Espèces armées.
Le T. cucursiTain, 7. solium, dans le canal intes-
tinal de Pespece humaine en Allemagne, en Anfgle-
terre, en Hollande et dans l'Orient.
Oro. V. CYSTOIDES ( Cystica ).
Corps déprimé ou un peu arrondi , se terminant en
arrière par une vessie pour chaque individu, ou
commune à plusieurs; la tête pourvue de deux ou
quatre fossettes ou de quatre sucoirs avec une cou
ronne de crochets ou enfin de quatre trompes. Les or-
ganes de la génération presque inconnus.
Cet ordre renferme les vers intestinaux dont l’or-
ganisation est la plus simple. Leur corps est formé
par un sac membraneux, pellucide , plein d’une hu-
meur aqueuse , et le plus souvent est renfermé dans
un autre sac formé par l’organe dans lequel se trouve
l'animal. La tête est pourvue de quatre ouvertures et
d’aiguillons ou de quatre trompes; elle est rétracule
dans le corps. Dans un genre plusieurs têtes appar-
tiennent à la même vessie; dans un autre, les vers
sont extrêmement petits, et occupent la face interne.
de la vessie, ou nagent librement dans le fluide qu’elle
contient. Les organes qui servent à la nutrition et à la
DE L'HOMME. 141
génération de ces animaux n'ont pas encore été de-
couverts.
G. XX VII. AnTuoCcÉPHALE, Anthocephalus.
Corps allongé, déprimé, termme en arrière par
une vessie caudale, et en avant par. une tête pourvue
de deux ou quatre fossettes et de quatre trompes gar-
nies d’aiguillons.
Contenu solitairement dans une double vessie,
dont l’une externe dure, élastique, et l’autre interne
plus mince.
Dans le foie, le mésentère, le péritoine, les hyda-
des viscérales des poissons.
L’A. MACROURE, A. macrourus , du spare.
G. XX VIII. CystTicerquz, Cysticercus.
Corps subarrondi ou déprimé, terminé par une
vessie caudale ; la tête avec quatre sucoirs et un rostre
garni de crochets recourbés.
Contenu solitairement dans une vessie externe
simple.
Entre les muscles, dans la graisse, dans le cerveau,
Je thorax , la plèvre, le cœur, le foie, le mesentere ,
le péritome des mammifères.
Le C. pu Tissu CELLULAIRE, C. cellulosus , dans
Vhomme, les singes, les cochons.
G. XXIX. Centre, Cenurus.
Corps allongé, subdéprimé, rugueux, avec une
142 SUR LES VERS INTESTINAUX
tete pourvue d’un rostre garni de crochets et de
quatre sucoirs, adherens en plus ou moins grand
nombre à la face interne d’une vessie simple remplie
de fluide.
Le C. céréBr AL, C. cerebralis, dans le cerveau des
moutons, des bœufs et des antilopes.
L’apercu systématique que je viens d’exposer
servira à mes lecteurs pour assigner à chaque ver
qu'ils pourront rencontrer dans l’homme, sa place
dans le système ; je ne le suivrai cependant pas ponc-
tuellement, et la division que j’etablis conviendra
mieux au médecin praticien. Je partage les vers en.
ceux ‘qui séjournent dans le canal intestinal de
l’homme, et en ceux qui se trouvent dans un autre
organe. On peut, sur les premiers, donner beaucoup! |
de généralités sous les rapports de l’éuüologie, du
diagnostic et de la thérapeutique, ce qui m’evitera
plusieurs répétitions inutiles ; quant aux seconds, au
moins pour la plus grande partie, on ne peut presque
en rien dire d’un peu certain, même de particulier,
et à plus forte raison de général. |
Je donnerai d’abord une courte descripition zoolo-
gique des vers qui séjournent dans le canal intestinal
de l’homme, et j'aurai toujours soin de renvoyer aux
figures, qui , comme je me plais à le croire, ont été
exécutées d’une maniere à rendre superflues des des-'
eriptions plus détaillées.
Puis je m’occuperai des causes les plus prochaines
de leur production, des signes à l’aide desquels on pré-
DE L'HOMME. 143
sume ordinairement leur présence, et enfin des re-
medes propres à les expulser. Apres cela je donnerai
® ” ; . pe -
une description des vers qui séjournent hors du canal
intestinal, et je ferai connaitre de chacun en particu-
lier tout ce que l’on sait jusqu’à présent d’intéressant
pour le médecin praticien:.
RAR UV LULU UEUUUE
AAA
AURA UV VUS
CHAPITRE TROISIEME.
SECTION PREMIÈRE.
Des vers qui séjournent dans le canal intestinal de
l’homme.
I. TRICHOCEPHALE.
Trichocephalus dispar ( en allem. der Peitschenwurm ou Haarkopf)
L Tab. 1, fig. x et 2.
TRICHOCEPHALUS : parte capillari longissima , capite acuto indis-
linclo , corpore maris spiraliter involuto , feminæ subrecto. RUD.
Morgagni , Epist. anatomica XIV , art. 42.
Roederer et Wagler , L. C. , zrichuris.
* Nous avons jugé plus convenable d’etablir une disposition
de chapitres un peu différente de celle de l’auteur, pour ne pas
rompre la partie descriptive par des considérations de séméio-
tique et de thérapeutique , et pour rendre chaque partie indépen-
dante des autres,
14/4 SUR LES VERS INTESTINAUX
Goeze , Eingeweidew., p.112; 116, tab. vi, fig. ı et 5, Zrichoce-
phalus hominis.
Gmelin, Syst. nat., p. p. 5037, n°.1, trichocephalus hominis.
Werner, Verm. intest., p. 84 , ascaris trichiura.
Joerdens, Helminth., p. 17; A) 1, fig. 6 et 10, trichocephalus
hominis.
Brera , Vorlesung , p. 16, tabl. 1V, fig. x et 5 der Haarkopf; N oy:
aussi Memorie du même, p. 171 , éricocefalo.
Zeder , Anleït., p. 69, mastigodes hominis.
Rudolphi , Entoz., tom. 11, p. 88, trichocephalus dispar.
Bradley, À treatise on worms , P. 72; plate 11, fig. x et3, the
long thread worm.
Cuvier , Regne animal, t. IV, p- 31 , trichocéphale de l’homme.
De Lamarck, Anim. sans vert. , tom. II, p. 212 , Ze trichiure de
l’homme.
Cette espèce séjourne ordinairement dans les gros
intestins, mais principalement dans l'intestin cecum;
Werner prétend cependant l'avoir rencontrée dans
la partie inférieure de l'iléon.
DESCRIPTION:
Ce ver est de la longueur d’un pouce et demi à |
deux pouces; la partie mince capillaire forme les,
deux tiers de toute sa longueur ; il est ordinairement |
blanc , quelquefois cependant il est coloré par lesali-
mens dont il est rempli. La partie capillaire ou anté= |
rieure passe assez brusquement à la partie renflée ou
postérieure.
Le mâle ‚fig. 1,1. et ıb., plus peut que la femelle,
est tellement pointu vers le commencement de la
tête, que l’on peut à peine voir l’ouverture de la
a
DE L'HOMME. 145
bouche. Wrisberg* croit avoir trouvé à cet endroit
un petit tube; mais ni Müller , ni Rudolphi, ni moi
n’avons pu le découvrir. Le canal al mentaire traverse
en ligne directe la partie antérieure capillaire qui est
striée en travers; il s’étend dans la partie postériéure
plus épaisse, qui est un peu sp riforme. Dans cette
dernière partie se trouvent aussi les vaisseaux sper-
matiques, repliés sur eux-mêmes, et qui se terminent
dans la partie inférieure de la fin de la queue par un
‚petit tube transparent ou espèce de vagin, par lequel
sort le pénis; ce tube ou ce vagin n’a pas toujours la
même forme , comme cela se voit par les fig. 1. a., et
16., pl.1.
La femelle fig. 2., pl. 1, se distingue du mâle, d’abord
par une plus longue partie antérieure et capillaire , et
parce que la partiepostérieure est presque droite ou à
peine recourbée ; c’est là que se trouventles oviductes
et les œufs d’une forme elliptique placés autour du
tube intestinal ; il y aa son extrémité une petite ou=
verture, qui peut servir en même temps d’anus et de
vagin.
REMARQUES.
Il n’y a pas encore soixante ans que les natura-
listes et les médecins ont quelque connaissance de
cette espèce et même de ce genre de vers. Morgagni
Yavait connu bien antérieurement comme Rudolphi
l'a prouvé; mais cette découverte , comme beaucoup
d’autres, était tombée dans l'oubli pour reparaitre plus
* Ouvrage cité, p. 13.
10
mi]
146 SUR LES VERS INTESTINAUX
tard comme nouvelle. Un étudiant dissequait, dans
l'hiver de 1760 à 1761, à l'amphithéâtre anatomique
de Goettingue, la valvule du colon d’un enfant de
cinq ans, du sexe féminin. Il fit par hasard une petite
ouverture dans le cœcum, et il en sortit plusieurs des
vers dont nous nous occupons. Wrisberg et plu-
sieurs autres jeunes médecins les regarderent comme
une espèce de vers inconnue jusqu'alors ; le prosec-
teur Wagler crut que ce m'était que des oxyures
(ascarides vermiculaires ) d’une taille extraordinaire ;
d’autres les prirent pour de jeunes lombricoïdes.
Cette incertitude donna lieu à une dispute assez sé-
rieuse, mais il ne vint dans l'idée de personne d’é-
claircir la chose par des comparaisons , des exa-
mens et des recherches exactes. Raederer, informé de
cette dispute, en fit l'examen lui-même; ce dernier
et Büttner regardérent ces vers comme une espece
inconnue jusqu’alors, et Büttner lui donna le nom de
trichuris ; dès ce moment les intestins de tous les
cadavres furent examinés soigneusement. À cette épo-
que il régna une épidémie dans un corps d'armée
français stationne à Goettingue. Roederer et Wagler
ont décrit cette épidémie sous le nom de morbus mu-
cosus, et l'on trouva souvent de ces vers dans les cada-
vres des soldats qui moururent à la suite de cette
épidémie, ce qui engagea Roederer à regarder ces
animaux comme une production de cette maladie;
mais Wrisberg remarqua qu'on les aurait assurément
trouvés plus tôt si l’on y avait fait attention. On les
rencontre en effet aujourd’hui days presque tous les
7 DE L'HOMME. | 14
cadavrès d'hommes, mais très-souvent il py en a
qu’un seul; M. Rudolphi en a cependant observé une
fois plus de mille ensemble.
L'on regarda d’abord la partie mince ou capillaire
‘comme la queue du ver d’où vient le nom de #ri-
churis, et l’on crut avoir trouvé une trompe ‘dans
le tube ou dans le vagin, qui entoure le pénis; et
comme celui-ci ne se remarque pas dans la fe-
melle, Rœderer, Wagler et Wrisberg ‘ont pris les
deux sexes pour deux différentes espèces. Bloch n’a
vu qu’une seule femelle de cette espèce de ver, qui
provenait d'un homme, et il l’appela également tri-
churis. I paraît que Werner, qui le désigne sous le
nom d’ascaris trichiura, wa vu que des mâles, et il
présuma que la trompe que l’on ne trouve pas chez
les individus presque droits, c’est-à-dire chez les
femelles, s'était détachée par suite de la putrefaetion.
Werner n’aurait pas fait cette supposition s’il avait
vu la femelle elle-même; car il avait trop de con-
naissances en helminthologie pour ne pouvoir pas
distinguer un ver entier de celui qui est à moitié
pourri. Il ne faut pas s'étonner que Jeerdens, qui
du reste n’ignorait pas ce que Pallas et Goeze ont
avancé sur ce sujet, ait adopté les idées de Werner;
car Joerdens n’a jamais observé ou examiné un seul
ver lui-même ; le nom de zricocephalus hominis, que
Von trouve dans l’ouvrage de ce dernier est assez mal
inventé.
Pallas, qui rencontra vers l’époque de cette dé-
couverte, dans une espèce de lésard ( Zacerta apus),
10.
148 SUR LES VERS INTESTINAUX
un ver appartenant à ce genre, et auquel il donne as+
sez inexactement le nom de tania spiralis ; Goœze, qui
a reçu de Wagler plus de cent de ces vers, et qui
les a comparés avec les vers du même genre , prove-
nant des souris et des sangliers (car celui du cheval
n'appartient pas à ce genre ); et Müller: ont prouvé
jusqu'à l'évidence que l’on ne doit chercher la tête de
ces vers qu’à la partie la plus pointue. Ges auteurs
ont également prouvé que les spiriformes sont les
mâles, et les droits les femelles. Depuis l’on a ren-
contré dans diverses espèces de singes, dans les
chiens, dans les renards, dans beaucoup d’ani-
maux rongeurs, et dans un grand nombre d'animaux
ruminans, comme les chamois , les cerfs, les gazelles
et les moutons, beaucoup de vers de ce genre, et
toujours les deux sexes dans chacun de ces animaux;
et je crois qu'il n’y a plus de naturalistes qui n’aient
pas connaissance aujourd'hui de leur véritable na-
ture. Une chose qui vient à l'appui de ces décou-
vertes, est que la partie la plus pointue est toujours
assez fortement implantée dans les parois intestinales,
tandis que l'extrémité la plus grosse, qu’elle soit
droite ou spiriforme, se trouve libre dans les ma-
tières fécales ; tout cela prouve que la partie la plus
pointue est le côté où est la tête. On ne conçoit donc
pas comment Brera” peut encore engager les naturalis-
tes à éclaircircesujet par desrecherches plus exactes-
: Naturforcher 12 Stück. s. 182 in der note.
a Mernorie , p- 177-
DE L'HOMME. 4:49
Nous serions fort heureux d’être aussi avancés dans
d’autres points d’helminthologie que nous le sommes
sur celui-c1. |
ll. OxYURE VERMICULAIRE.
Oxyuris vermicularis (en allem. der pfriemenschwanz ), pl.ı,
fig. 3, le mâle, et pl. 1, fig. 1, la femelle.
OXYURIS : capitis obtusi membrana laterali utrinque vesiculari ,
cauda maris spirali obtusa , feminæ subulata recta.
Bloch, Abhandl. s. 31. Ascaris vermicularis. Der aflerwurn.
Goeze , Engeweidew. s. 102-106, tab. v, fig. ı et 5., der mens-
chliche pfriemenschwanz.
Werner , Vermes intest., p. 72, fig. 133 et 157, asc. vermicularis.
Gmelin., Syst. nat. , p. 3029, 1, asc. vermic.
Joerdens, Helminihol., page 19 , tab. 11, fig. ı et 5, asc. vermic,
Der afterwurm. À .
Zeder, Anteilnng , p. 107 , n., fusaria vermic.
Brera, Vorlesung, p. 18, tab. ıv, fig. 7 et ı1; Memorie du
même , p.178, tab. IX, fig. 14 et 15, ascaride vermicolare.
Rudolphi, Entoz., t. I, part. 1, pag. 192, n°. A1, ascarıs ver-
micularts.
Bradley, A treatise, p. 56, vol. 11, fig. ı et3 , the ascaris vermi-
cularis , commonly called the maw , or thread worm.
Cuvier, Règne animal, t. iv, p. 33, l’ascaride vermiculaire.
De Lamarck, Anim. sans vert.,t. 111, p. 104 , loxyure vermiculaire,
Ce ver a encore les dénominations suivantes : les Allemands
l’appellent der kinderwurm , mastdarm»urm , madenwurm , die as-
caride „ die arschmade, darmschabe ; les Hollandais, aarsmade ; les
Danois, smaa spolorme , boerneorm ; les Suédois, barnmask ; les
Anglais, bots ; les Francais, ascarides.
L’oxyure vermiculaire séjourne dans les gros in-
testins, et principalement dans le rectum.
159 SUR LES VERS INTESTINAUX
DESCRIPTION.
Le male, de la longueur d’une ligne ou d’une
ligne et demie, a le corps mince, tres-Elastique, et
d’une couleur blanche; la partie antérieure, obtuse,
est entourée d’une membrane transparente (Voyez
pl. 1, fig. 3); on aperçoit à travers cette dernière,
formant une espèce de vessie, un tube droit, qui est
l'œsophage, et qui devient claviforme à l'endroit où
il se perd dans un estomac globuleux. Le tube intes-
tinal s'étend dans toute la longueur du corps, qui
devient peu à peu plus gros, et se contourne en spi-
rale vers la queue. L'on ne peut pas bien voir les
vaisseaux spermatiques, qui entourent le canal ali-
mentaire, chez les vers qui ont resté pendant quel-
que temps dans l’esprit-de-vin, et jusqu’à présent je
n’ai pas encore cu occasion d’en examiner de vivans.
Je n’ai pas encore observé non plus un pénis allongé
chez cette espèce d’oxyure, mais bien chez les vers
du même genre provenant des lapins sauvages.
La femelle, pl. 2, fig. 1 et2,est plus grande etacquiert
une longueur de quatre à cinq lignes; la conforma-
tion de la partie antérieure ressemble, par sa struc-
ture intérieure et par l’extérieure, parfaitement à
celle du mâle , jusqu'à l’endroit où se termine l’esto-
mac; à parlir de cet endroit, le canal alimentaire est
entouré de tous côtés par les oviductes; le ver aug-
mente toujours en grosseur depuis la tête jusque
vers le premier tiers de sa longueur ; au-delà ıl
DE L'HOMME. 151
devient plus mince, et la queue se termine en forme
de Paaison , tellement fin à son extrémité que l'œil
non armé du microscope a de la peine al’ apercevoir :
la fig. 2b., pl.2 représente un morceau de ce ver
considérablement grossi et dans lequel on peut voir
les œufs.
REMARQUES.
Ce ver est connu des médecins de temps immémo-
rial, et comme il est très-commun chez les enfans,
que sa conformation differe de celle des autres vers
de l’homme, on devrait eroire qu'il aurait été impos-
sible de le mécouuaître. Néanmoins, nous trouvons
beaucoup d'exemples chez les auteurs, où des larves
de mouches et des articulations détachées du tænia
ont été prises pour cette espèce de ver. L'on a pre-
tendu également en avoir rencontré hors des gros in-
teslins dans d'autres parties du corps; Bloch * rap-
porie que Wulf en a trouvé une grande quantité
dans un sac formé dans les parois de l'estomac.
Brera” dit en avoir observé dans l’œsophage d’une
femme une quantité innombrable. Cette personne
avait succombé à la suite d’une fièvre lente nerveuse.
Le même auteur cite plus loin * une observation faite
par Bianchi, qui prétend en avoir vu dans les ven-
tricules du cerveau.
ı Abhandl , s. 31.
2 Vorlesung , p- 19.
3 Memorie , p. 181.
152 SUR LES VERS INTESTINAUX
Je passe sous silence d’autres observations sembla-
bles , et je doute très-fort qu'il y ait un naturaliste
qui croye que c’étaient de véritables oxyures, avant
qu’il n'ait été convaincu par ses propres observations.
Goeze a pensé à tort que lesoxyures sont vivipares,
probablement parce qu'ayant fait l'observation que les
œufs de ces animaux sont dans un mouvement conti-
nuel d'avant en arrière et d’arrıere en avant, il les a
regardes comme des fœtus. [est bien vrai qu'il existe
dans le rectum des grenouilles et des crapauds des
petits vers qui sont vraiment vivipares, mais ils ap-
partiennent à un autre genre.
Les anciens médecins ont appelé ces vers ascarides,
et ils voulaient les distinguer, par eette dénomina-
tion, des lombricoïdes, auxquels ils avaient donné le
nom de Zumbrici teretes. Linné employa plus tard le
nom d’ascaris comme nom de genre , et alors le Zum-
bricus teres a été appelé ascaris lombricoides , et le ver
dont nous parlons ascaris vermicularis ; mais dans les
derniers temps, on a mieux approfondi la chose, et
l'on s’est convaincu que ces deux vers ne different
pas seulement entre eux comme espèces, mais même
qu'ils ne sont,pas du même genre , comme nous le
verrons par la suite.
M. Rudolphi, qui doutait depuis long-temps’ que
ceux observés par Goeze dans les gros intestins du
cheval (ces vers étaient renflés à une de leurs extré-
mités et tres-pointus à l’autre) appartinssent au
+
* Wiedemanns archw.
DE L'HOMME. 153
genre trichocépha'e, confirma plus tard sa supposi-
tion par un examen particulier ; d’après cela il crut
devoir former de ces vers un genre distinct sous le
nom d'oxyure.
Je trouvai dans l’hiver de 1809 une grande quan-
tité d’une espèce de vers dans les gros intestins de
plusieurs lapins sauvages , et je n’hésitai pas un ins-
tant à.les ranger dans ce genre, quoiqu’alors je ne
connusse les oxyures du cheval que par les dessins de
Goezeetde Rudolphi'. Lorsqueplustardjjeffisdessiner
ces vers sous une échelle beaucoup plus grande que
nature , je fus frappé de leur ressemblance avec ceux
qui proviennent du rectum de l’homme ; je les com-
parai alors plus soigneusement, et je me convain-
quis que ces derniers (les oxyures ) ne doivent plus
être rangés avec les lombricoïdes ; car ceux-ci sont
toujours amincis (attenuat®) vers les deux extrémi-
tés, et en outre se distinguent tres-clairement de tous
les autres nématoïdes par trois papilles ou boutons à
l'extrémité antérieure? ; les oxyures sont bien égale-
ment amincis vers leur extrémité antérieure, mais
ils se terminent à l’autre en forme de poincon ( subu-
latæ); cela a lieu au moins chez les femelles, et du
reste il leur mauque les trois papilles au commence-
ment de la tête; la structure intérieure de ces deux
=
"Jen ai reçu plus tard une grande quantité du docteur Bros-
ché, de Dresde. ( Br.)
* Il faut comparer les signes caractéristiques de ces deux genres
de vers rapportés plus haut.
154 SUR LES VERS INTESTINAUX
espèces de vers n’est pas moins différente. Je com-
muniquai mes observations à M. Rudolphi; ce savant
observateur partagea mon opinion: Son volume sup-
plémentaire parlera de plusieurs nouvelles espèces de
ce genre; mais avec tout cela je n'étais cependant pas
encore sur ce sujet arrivé au degré de cerutude que |
je désirais.
Goeze a bien dessiné un ver de ce genre (voyez sa
pl.5, fig. 5), qu'il regarde comme un mâle , proba-
blement par la raison qu'il ne put apercevoir d'œufs.
On trouve un ver semblable dessiné sur ma premiere
planche (voy- fig. 3 et 3a.). Les mâles de tous les né-
matoides sont en général plus petits d'un quart ou
d’un tiers que les femelles , et la terminaison de leur
queue est tout à fait différente. Dans les figures de
Goeze, copiées par Joerdens et Brera, on voit que la
grandeur est la même, et que la terminaison de la
queue est absolument semblable; mais on n’ob-
serve point d’œufs sur les individus représentés dans
les figures 8 et 9; c’étaient peut-être des femelles qui
avaient pondu leurs œufs, ou bien ces œufs n'étaient
pas encore complétement formés ou n'étaient pas
encore fécondés. Enfin ces individus n’étaient-1ls
pas dépourvus d'organes sexuels, comme il s’en
trouve parmi les abeilles et les fourmis ? je ne puis
rien décider là-dessus. Les oxyures que M. Ru-
dolphi a trouvés dans les chevaux avaient tous des.
œufs , les miens pareillement ; tous étaient donc par
conséquent des femelles. Parmi les vers provenant
des lapins sauvages, j'en ai rencontré beaucoup qui
DE L'HOMME. _, 155
avaient la fin de la queue obtuse et roulée en spirale;
j'ai remarqué également sur plusieurs un petit dard |
( spiculum ) allongé , et ceux-ci étaient en général plus
petits que ne le sont ordinairement les femelles ; je
conelus de là que les mâles des oxyures provenant de
Vhomme devaient être conformés de la même ma-
nière ; mais parmitous les individus que j'eus à ma
disposition, je ne pus en trouver un seul qui eût les
mêmes signes caractéristiques ; il en futlong-temps de
même desoxyures provenant des lapins domestiques,
et d’un grand nombre de souris. Cette circonstance
m'aurait presqu’engagé à regarder la génération des
oxyures comme analogue à celle des pucerons, qui
sont en général vivipares, et qui ne produisent que
des femelles en été, pendant la durée duquel ils ont
de la nourriture en abondance , mais qui au contraire
pondent en automne des œufs dont il se développe
au printemps (fabula si vera) des femelles et des
mâles , etices derniers , comme on l’a prétendu, ren-
dent alors féconde toute la génération pour l’année
prochaine; mais en faisant l'observation que les la-
pins domestiques , l’homme et le'cheval reçoivent or-
dinairement de la nourriture en suffisante quantité,
et que par conséquent les vers qu'ils portent en eux
ne doivent pas en manquer, je fus porté à presu-
mer que les femelles des oxyures étaient, peut-être
à cause de cela , en état de multiplier leur espèce sans
l'entremise du mâle. Il arrive au contraire bien sou
vent que les lapins sauvages , et par conséquent leur
vers, manquent de nourriture pendant l’hiver, et
156 SUR. LES VERS INTESTINAUX
c’est justement dans cette saison que je n’ai trouve
que des oxyures mâles. La faim n’influe pas avantageu-
sement, comme nous le savons, sur la faculté proli-
fique; il me parut alors conforme aux sages dispo-
sitions de la nature, qui n'aime qu’à produire et.
conserver la vie, que la faculté générative eût été
partagée entre deux individus , afin que chacun d’eux
eût moins de peine à conserver son espèce, et que les
vers provenant d’une formation primitive ne pussent
pas étre détruits entièrement. Pendant que je me
livrais à ces conjectures et que j'avais une sorte de
satisfaction d’avoir entrevu, à ce que je croyais,
pourquoi on ne rencontre pas d’oxyures mâles chez
de certains animaux, laissant à d’autres à juger la
probabilité de ces conjectures, je communiqual mon
opinion AM. Soeemmerring, et peu de temps apresil
cut la bonté de m’envoyer un petit vase rempli
d’oxyures dans l’esprit-de-vin. Ces vers provenaient
de son propre fils, qui les avait rendus après avoir
pris un lavement d'huile d’olive. Sæœmmerring m’ob-
serva que je trouverais peut-être parmi eux quelques
individus qui offriraient les signes caractéristiques
des mâles, à la recherche desquels j'étais, comme il
le savait, depuis long-temps. Je les ai examinés, et
j'ai trouvé en effet ces caractères (Voyez pl. 1 ; fig. 3)-
J'en ai recu plus tard de pareils encore une fois du
même médecin et de M. Hermann. M. Rudolphi
n’a pas hésité un instant à les reconnaître pour des
mäles, et il en aura probablement trouvé depuis lui-
même.
|
|
|
DE L'HOMME. 157
Il résulte de ces observations, que les vers connus
sous le nom d’ascarides vermiculaires, doivent être
compris dorénavant dans le genre oxyuris, et non pas
dans le genre ascaris, et que les deux sexes de ces
oxyures se distinguent entre eux par les caractères
que nous avons rapportés plus haut.
II. ASCARIDE LOMBRICOIDE.
Ascaris lombricoides (en allem. der spulwurm) , pl. X, fig. 2-3.
ASCARIS : corpore utrinque sulcato , cauda obtusiaccula.
Bloch, Abhandlung , p. 29 , tab. VIN, fig. 4-6 , asc. lumb. _
Goeze , Eingeweide» , p.65 et 72, tab. , fig. 1-3, asc. gigas.
Werner, Verm. intest., p. 75 et84 , tab. VU, fig. 153 et 159,
asc. lumb.
Gmelin, Syst. nat., p. 3029 ,n°. 2 , asc. lumb.
Zeder , Nachtrag , p. 25 et 31, fusaria lumbricoides ; le mème, An-
leitung , p.102, n°. ı , fus. lumb.
Joerdens, Helminth. , p. 22, tab. 11, fig. 6 et 15, asc. lumbr.
Brera, Vorlesung , p. 21, tab. V, fig. x et 11 ; le même, Memo-
rie, p. 195, tab. It, fig. 18 et 20, lombr.
Rudolphi, Wiedemanns archiv., n°.2, page. 20, asc. lumbr. ; le
même, Entozoolog. I, part. 1, p.124, n°1, asc. lumbr.
Bradley, A treatise, p. 34 et 55, tab. 1, the asc. lumbr.
Cuvier, Règne animal, tom. !V, p. 33, l’ascaride lombrical.
De Lamarck, Anim. sans vert., t.Y11, p. 2075 Vascaride lombricoïde.
- Les Allemands V’appellent encore rundwurm ‚. les Hollandais
rondewurm , menschenworm , kinderenworm ; les Danois menneske-
orm, spolorm, skolorm ; les Suédois mennisko-mask , spolmask ;
les Anglais the round worm , large round worm, round gut worm,
les Français lombric des intestins, strongle; les Italiens verme
rondo , lombrico ; es Espagnols Zombriz ; les Portugais lombrisa.
155 SUR LES VERS INTESTINAUX
Cette espèce de vers ne séjourne pas seulement dans
les intestins greles de l’homme, mais elle se trouve
également dans ceux des bœufs, des chevaux et des
cochons.
DESCRIPTION.
Ces vers ont le corps de la grosseur de deux ou
trois lignes, sur une longueur de six, dix, jusqu'a
quinze pouces. Les petits, de la longueur d’un pouce
et demi, sont rares; on en trouverait sans doute beau-
coup plus souvent, si l’on examinait les intestins des
cadavres d'homme aussi souvent que cela a lieu pour
ceux des autres animaux. La couleur de ces vers est
ordinairement rouge brunätre; mais elle varie cepen-
dant quelquefois ; elle est plus claire ou plus foncée,
selon la couleur des alimens dont ils sont gorges;
elle est même quelquefois d’un rouge de sang; les
organes de la génération sont tres-souvent visibles à
travers les tégumens ; il en est de même du canal ali-
mentaire, que l’on reconnaît à sa couleur brunûâtre; la
tete, pl. 2, fig. 3a., se distingue du reste du corps par
un enfoncement ou dépression circulaire. Il se trouve
au-dessus de cette dépression trois boutons ou plutôt
trois valvules, qui peuvent s'ouvrir et se fermer ;
quand elles s'ouvrent, il se présente alors au milieu
d’elles un petit tube, quiest l’ouverture de la bouche
proprement dite. Le corps est cylindrique, et pres-
que également aminci vers ses deux extrémités; il
Vest cependant plus du côté de la tête; il y a dechaque
côté et le long du corps une petite rainure. Le canal
DE L'HOMME. 159
intestinal , reconnaissable à sa couleur brunâtre, se
termine par une fente transversale ou anus , qui est
située à la partie inférieure un peu avant l’extrémné
postérieure du corps.
Le mäle se distingue de la femelle (qui est ordi-
nairement plus grande) par la fin de la queue, qui
est recourbée , et par laquelle sort quelquefois un
double pénis. Foy. pl. 2, fig. 3c.
L'appareil générateur du mäle est d’un volume
moins grand que celui de la femelle: cette dernière
est représentée dans la fig. 3. Les or&anes de la géné-
ration de la femelle remplissent pour ainsi dire tout
le corps , et la fin de la queue est droite. A l'endroit
où les tégumens du ver avaient été dechires, voy.
fig. 3,on remarque une trés-petite ouverture, qui est
l'entrée du vagin. Comme ce ver est connu de tout le
monde, je n’ai fait représenter avec dessein qu’une fe-
melle , dont le ventre se trouvait accidentellement ou-
vert , afin que l’on puisse se faire une idée de son orga-
nisation intérieure. L’intestin large et brunätre , que
Von voit au dehors , est une partie du canal alimen-
tire , et les autres parties blanches sont les organes de
Ja génération. Les plus volumineuses sont les oviduc-
tes, que Zeder appelle la matrice. Les plus minces sont
les canaux excréteurs des œufs, d’une forme cylin-
drique ; car ces vers sont ovipares , et non pas vivi-
pares, comme Wendelstadt l’a prétendu à tort; Wer-
her croit cependant avoir observé des fœtus déjà
développés dans les œufs , et c’est ce que M. Rudol-
phi paraît vouloir confirmer également. Ceux qui
. 160 SUR LES VERS INTESTINAUX
voudront connaitre la disposition des organes sexuels
du mâle et de la femelle de cette espèce de ver peuvent
les étudier dans l’ouvrage de Werner. Ses figures
ont été copiées par Jœrdens et Brera. Il n’entrait
pas dans mon plan de donner a mes lecteurs l’ana-
tomie des vers intestinaux, mon but était seule-
ment de leur offrir la description et la figure de tous
ceux qui ont été trouvés dans l'homme jusqu’ici,
afin de les mettre en état de pouvoir reconnaître, par
des caractères certains, les différentes espèces de vers
qui pourront se présenter à eux; j'ai regardé par con-
séquent comme superflu d’ajouter des dessins d’ana-
tomie, ce qui du reste aurait augmenté de beaucoup
le nombre des plancheset le prix de l'ouvrage ; les mé-
decins, quiauront envie de connaitre la structure inté-
rieure de ces vers, se donneront eux-mêmes volonuers
la peine de les examiner sous le rapport anatomique ;
ce qu'ils pepe faire d’autant plus facilement, qu ls
sonttoujours à même de s’en procurer, et ils n'auront
pas à regretter le temps qu'ils y auront employé,
quand même ces connaissances ne leur serviraient seu-
lement qu’ase mettre à l'abri du reproche d’être 1gn0-
rans, quand] s’agira de donner leur avis sur €e sujet.
L’anecdote suivante publiée par Goeze* peut ser-
vir à les engager davantage à ce genre de travail.
« Quelques enfans firent un jour une incision sur un
lombricoide, et cela fit sortir ses intestins au dehors ;
le père, qui arriva dans ce moment, recueillit le ver
1 Ouvrage cité, p.70.
DE L'HOMME. 161
et le conserva dans de l’esprit-de-vin, pour demander
à son médecin (du reste homme habile ) ce qu'il
croyait que cela pouvait être. Le médecin regarda
les oviductes sortis au dehors, et les prit pour de
jeunes ascarides , et le canal alimentaire pour un
jeune tænia. Goeze rectifia cette erreur en présence
du disciple d'Hippocrate qui avait porté ce jugement
erroné, et qui par conséquent eut un peu à rougir
de son ignorance.
La fig. 3 représente une petite femelle d’ascaride
de grandeur naturelle; cet individu provenait du
nez d'une vieille femme, qui l'avait rendu en se mou-
chant. Un de mes confrères m’a communiqué ce ver
sans cependant pouvoir me donner beaucoup de dé-
tails sur ce fait; il ajouta , que cette femme était trop
bornée , pour qu’il füt possible de tirer d’elle quel-
ques renseignemens détaillés ; tout ce qu'il a pu ap-
prendrese borna, à ce qu’elle avait éprouvé avant que
de le rendre un grand mal de tête. Ce ver s’était sans
doute glissé sur la voüte palatine par suite d’un vo- _
missement qu’elle avait éprouvé précédemment, et
était resté tres-probablement depuis quelque temps
dans la région supérieure des fosses nasales , jusqu'à
ce qu’un.effort pour se moucher l'ait enfin fait sortir
de cet endroit.
REMARQUES.
Le lombricoide est connu des médecins depuis
‚aussi long-temps que celui dont nous venons de nous
11
162 SUR LES VERS INTESTINAUX
occuper précédemment; on l’appela Zumbricus; et,
pour le distinguer des cestoides, il fut nommé Zum-
bricus teres. On le regarda également comme identique
avec le Zumbricus terestris ; mais nos meilleurs natura-
listes ont découvert tant de caractères propres à dis-
tinguer ces deux animaux, qui n'avaient pas même
échappé à Tyson ‘ , qu’il est impossible de supposer
qu'il puisse exister; aujourd’hui un médecin qui les
confondrait.
Cependant Brera , pour montrer le genre d’exac-
ütude qu'il met dans ses recherches et ses examens,
a encore employé dernièrement six grandes pages
in-quarto * de son ouvrage pour montrer la ressem-
blance qu’il suppose entre ces deux vers, où il met
toujours en avant son ancienne hypothèse ( regardée
par lui comme prouvée ), que toutes les différences
de conformation ne dépendent que 1°. des endroits
dans lesquels le développement s’opere, 2°.de la nour-
riture, 3°. de la température. Si l’on voulait étendre
_ autant que Brera, l’influence de la manière de vivre,
de la nourriture, du climat, etc., sur les corps or-
ganisés , on pourrait alors facilement prouver , que
l'homme, le singe, le maki, et beaucoup d'autres
animaux proviennent tous de la même souche, et
que la différence de leur structure , tant intérieure
qu'extérieure, n’est résultée que des diverses influen-
ces dont nous venons de parler. Je ne suis pas du tout
* Philosophical transactions | 1683, p. 153.
2 Memorie , p. 201-206,
DE L'HOMME. n 163
disposé à entrer en dispute avec Brera, sur ce sujet,
car Jacques-Theodore Klein, Goeze, Pallas, etc.
ont prouvé jusqu’à l'évidence que ces deux animaux
différent tout à fait l’un de l’autre. J’engage mes lec-
teurs à décider eux-mêmes celte question. Ils n’ont
qu’à comparer ces deux animaux ensemble, et ils
verront aisément de quel côté est la vérité.
Le stomachide de Peereboom n’est rien autre chose
qu’un lombricoïde mutile ou défiguré , et ilne doit pas
être considéré comme une nouvelle espèce. Il en est
de même de celui trouvé par Treutler: parmi beau-
coup d’autres Zombricoides bien conformés. Ce ver
n’avait que deux valvules à la bouche, et ne doit
être regardé que comme une difformité.
IV. BOTHRIOCEPHALE.
Bothriocephalus latus (en allem. der bandwurm ) , pl. tv et v.
BOTHRIOCEPHALUS : capite foveisque marginalibus oblongis , collo
subnullo , articulis anterioribus rugæ formibus , insequentibus plu-
rimis brevibus subquadratis latioribus , ultimis longiusculrs.
Bonnet, Mémoires présentés , t. 1, p. 478, tab. I et ir, {ænia à an-
neaux courts ou à mammelons ombilicaux ; le même, Nowelles
recherches dans les observations de Rozier sur la physique , t. 1x,
p. 243-257, tab. r, fig. x et 12.
Pallas , Elenchus zoophyt. , p. 408 , n°. 3, 1. grisea; p. ER „m.4,
1. lala.
Bloch, Abandlung, p. 17 , tænia lata , der breite bandwurm.
Goeze , Eingeweidew , s. 290 , fig. 8 , £. lata.
Batsch, Bandw., s. 107, fig. 33-50, t. membranea ; Der hœutige
bandwurm , s. 111, fig. 51-2 , t. lata.
1 Ouvrage cité, p. 17, fig. 6 et 7.
11.
164 SUR LES VERS INTESTINAUX
Gmelin, Syst. nat., p. 3065 , t. vulgaris; p. 3067, n°. 3, 2. lata.
Joerdens, Helminth., s. 47 , t. IV, fig. 1-4 , £. vulgaris; der kurz-
gliedrichte bandwurm , s. 49, t. IV, fig. 5, 8, 9, 10, der breite
Bandwurm. |
Brera, Vorselung, s. 12, tab.1, fig. 3, 7 , 13, 14, der unbewaff-
nete menschliche bandwurm ; Memorie du même, 81-87 , tenia
inerme umana.
Zeder, Anheitung , s. 347, n°. 46 , halysis lata;s. 348, n°. 47,
h. membranacea.
Rudolphi, Entoz., p. 70, n°. 1, 2. lata.
Bradley, A treatise , p. 84-86, tab. 11, fig. 3-4 , the broeslt ope worm.
Cuvier, Règne animal, p. 44 , le tenia large.
De Lamarck , Anim. sans vert., t. II, p. 167 , le bot. de l’homme.
Ce ver, nommé par Plater zenia prima , a reçu différentes dé-
nominations : les Hollandais le nomment Zindworm , les Danois
baandvorm , baendelorm, les Suédois Binnike-mask , les Anglais the
tape worm , jointed-worm, les Français le tenia, le ver plat, et plus
particulièrement ienia à épines, à anneaux courts ou à mamelons
ombilicaux.
Le bothriocéphale se trouve dans les intestins
grêles des habitans de la Pologne, de la Russie, de
la Suisse et de quelques contrées de la France.
DESCRIPTION.
Ce ver, qui est plat en général, plus mince et tres-
souvent beaucoup plus large et non pas plus étroit,
comme on l’a prétendu , que le ver solitaire (tænia
solium) , acquiert souvent une longueur de vingt pieds.
Gœze assure cependant avoir recu de Bloch un in-
dividu qui avait une longueur de soixante aunes un
DE L'HOMME. 165
quart, et Boërhaave : prétend qu’il en a fait rendre
un , à un Russe, qui avait trois cents aunes. La partie
la plus large du bothriocéphale est rarement de six
lignes; il y a cependant des individus chez lesquels
cette largeur s'étend jusqu’à un pouce, comme cela
m'a été assuré par M. Rudolphi, qui en possède méme
plusieurs de cetie dimension.
- Ce ver est ordinairement de couleur blanche, mais
‚eependant il n’est jamais d’un blanc parfait, et cette
couleur se change en grisätre quand on le met dans
l’esprit-de-vin ; d’où vient le nom de zenia grisea em-
ploye par Pallas. L’échantillon que Soemmerring a
donné à notre eabinet d'histoire naturelle est égale-
ment devenu gris, quoique ce ver füt mis dans de
l'esprit de-vin qui avait été distillé avec le plus grand
soin par Soemmerring lui-même: Cet échantillon se
trouve dessiné d’après nature sur la planche 4.
On peut clairement voir à sa tête allongée (Foy.
pl. 5, fig. a,b, c.) des dépressions oblongues ou des fos-
settes, que M. Rudolphi regarde comme des organes
destinés à absorber la nourriture. Quant à moi, je
crois que l’ouverture de la bouche proprement dite,
qui conduit au canal alimentaire, est placée au milieu
de ces deux dépressions. La fig. c fait voir au moins
une trace d’une pareille ouverture ; mais on peut voir
cette derniere tres-clairement sur le bothriocéphale pro-
venant du pleuronectes maximus. Nous possédons ce-
pendant des bothriocephales, appelés par M. Cuvier
* Præ. ad institut. , t. VL, p. 180.
166 SUR LES VERS INTESTINAUX
‚floriceps * , provenant du requin et de la raie, qui pre-
sentent, selon l'apparence, quatre organes en forme
de fleurs, ou bien quatre canaux destinés à puiser ia
nourriture; mais il reste à savoir si ce ne sont pas
des organes avec lesquels ces vers peuvent se cram-
ponner pour sucer plus facilement leur nourriture
au ie de l’orifice de la bouche, qui se trouve,
d après ma supposition , au milieu de ces organes ; au
moins il y a assez de place en cet endroit pour une pa-
reille ouverture. M. Rudolphi, qui a eu occasion de
voir, lors de son dernier voyage en Italie, quelques-
uns de ces vers vivans , nous donnera, sans doute
bientôt, des éclaircissemens là-dessus ; la limite entre
la tête et le cou est, dans le plus grand nombre des
cas, très-clairement marquée, comme on le voit sur
les fig. bet c. La fig. a nous montre que la tête se
confond quelquefois insensiblement avec le cou. Les
helminthologues appellent cou, chez les cestoïdes ,
la partie qui suit immédiatement la tête et qui ne
paraît pas être articulée ; cependant le microscope
fait souvent voir des traces d’articulations sur un
cou, qui paraît à l’oeil n'être pas articulé ; mais il pi a
des cas où les articulations peuvent être tellement re-
tractées, qu’elles ont l’air, vues même avec un bon
microscope, den’ötre qu’une sur face continue. L’exis-
ı M. Jean Natterer, qui se trouve à présent au Bresil, a deja
envoyé , il y a quelques années, à notre cabinet , plusieurs espèces
de ces vers, et il leur avait déjà donné auparavant, € ’est-à-dire
avant M. Cuvier, le nom de fuliparia.
DE L'HOMME. 167
tence ou la non-existence d’un cou ne peut pas
servir, d’après moi , comme signes propres à établir
la différence des espèces parmi les cestoïdes. Les fig.
aetc font clairement voir un cou; il manque pres-
que totalement dans la fig. d, et les articulations com-
mencent immédiatement derrière la tête; mais ce-
pendant tous ces vers sont de la même espèce ; la tête
représentée dans la figure 5 provient d'un individu
qui n'avait que quatre pieds de long, et la dernière
articulation arrondie faisait clairement voir que ce
ver était entier, mais encore tres-jeune. La tête de
celui représenté dans la figure c appartient à un échan-
tillon de vingt-quatre pieds de long; c'était une
femme de Pétersbourg qui l'avait rendu ; l'extrémité
de la queue arrondie n'existait pas; il s’était déja pro-
bablement détaché plusieurs pieds de ce ver à une
époque antérieure. Quelquefois on observe (à parur
de la tête ) un morceau filiforme de vingt pouces et
plus , avant que le ver ne s’elargisse. Nous possédons
un pareil échantillon, que nous devons à Jurine,
de Genève. On ne doit pas cependant regarder, d’a-
pres moi, ce morceau filiforme comme un véritable
cou, car quand le ver sort du canal intestinal sous
forme de pelotte, cette partie filiforme ne s'aperçoit
pas, mais bien quand ıl en sort en se déroulant peu
à peu; il arrive alors que le cou et les articulations
antérieures sont tellement distendus par la pesanteur
du corps du ver, que lon ne peut plus reconnaitre
les articulations. Comme le cou manque dans quel-
ques cas, et qu'il existe dans d’autres, c’est la raison
168 SUR LES VERS INTESTINAUX
pour laquelle on trouve dans la définition collo subnullos
Les articulations sont en général plus larges que
longues, quoiqu’elles forment quelquefois vers le
milieu du corps un carré oblong; mais les côtés les
plus longs de ce carré tombent toujours sur la lar-
geur des articulations du ver, comme on le voit par,
les figures. Les vers conservés en entier montrent que
les articulations vers la partie postérieure du corps
deviennent de nouveau oblongues ( Voyez pl. 4). Les
articulations des bothriocéphales , quand ils sont en-
core jeunes, se contractent quelquefois tellement, que
l’on pourrait douter au premier abord qu'ils fussent
articulés, d’où vient que Zeder a donné à ce genre le
nom de rhitelminthus et plus tard celui de rhytis, en’
francais ver ridé, en allemand runzelwurm (Poy. pl. 4).
L’on peut voir facilement, au milieu des articu-
lations complétement développées, une dépression,
fosselte, ou ouverture ; quelquefois on en aperçoit
une seconde plus petite, un peu plus en arrière, c'est-
a-dire vers l'extrémité postérieure ( Voyez fig. h); ıl
sort dans quelques cas de la fossette un petit dard
(Voy. fig. g représentée sous une échelle plus grande
que nature ) que Bonnet a déjà remarqué. C’est pro-
bablement l'organe sexuel du mäle; les oviductes en
forme de fleurs , entourent cette ouverture : on peut
clairement voir ces oviductes en mettant un petit mor-
ceau de cet animal sous le microscope composé, et
en passant en dessous, au licu d’une tablettenoire, une
petite plaque de verre sur lus le miroir réfléchit
la lumière.
-
DE L'HOMME. 169
L'on trouve quelquefois une espèce d’incision sur
l'extrémité large du ver, comme cela se voitgans
la fig. À, pl. 5, et que plusieurs medecins ont re-
gardée comme la fin de la tête. Tulpius’ a représenté
un pareil morceau large et détaché d’un ver sous le
titre de genuinum lati lumbrici caput, parce qu'il prend
les articulations postérieures fendues pour des têtes.
Sa figure ressemble à une tête d'oiseau , et un trou
superficiel (foramen superficiale ) paraît être l’œil de
ceue tête. Leclerc l’a copiée dans sa planche vi. Mais
cette incision ou ces deux lèvres se forment quand on
déchire les articulations, et ne sont qu’accidentelles;
nous observons également souvent un ou plusieurs
trous au milieu des articulattons, mais cela ne nous met
pas en droit de regarder un ver ainsi conformécomme
constituant une espèce particulière ; car il me paraît
probable , que ces trous proviennent de Voviducte,
qui s’est ouvert dans ces endroits là.
REMARQUES:
Plusieurs médecins anciens ont déja observé que
l’on rencontre dans l’homme deux différentes espèces
de cestoides. Je ne veux pas cependant décider qui a
remarqué le premier cette différence; nous savons
seulement que Sennertet Tyson en avaient déjà con-
naissance; mais Bonnet, qui le premier à fait dessiner
® Lib. 11, cap. 52, p. 161 et 162.
? Philosophic. transact. , 1683, p. 113.
170 SUR LES VERS INTESTINAUX
la tête d'un cestoide, qu’il regardait à tort comme
appartenant à un tænia large, est cause que nos meil-
leurs helminthologues ont placé , même encore dans
les tempsmodernes, ce ver dans le genre tænia. Bonnet
tomba par hasard sur une tête de tæmia , qu’il croyait
provenir (àcause desarticulations courtes du cou) d’un
tænia à anneaux courts ou bothriocéphale ; comme on
représente ordinairement la tête du véritable tænia,
pourvue d’une couronne de crochets entre les quatre
suçoirs ; et comme cette couronne manquait justement
à la tête examinée par Bonnet (j’en possède moi-même
plusieurs semblables échantillons }, on regarda d’au-
tant plus volontiers son dessin comme conforme à la
structure d’un bothriocephale, que Pon cherchait
justement dans ce manque de couronne une diffé-
rence essentielle entre la tête de ce dernier et celle
d’un tænia proprement dit (tenia solium). Bonnet
rectifia cette erreur dans une nouvelle dissertation
sur ce sujet, publiée en 1777, c’est-à-dire trente-
quatre ans après la premiere; mais il paraît que l’on
ne l’a pas regardée comme digne d’une attention par-
ticuliere; car dans toutes les descriptions et des-
sins concernant le tænia à anneaux courts, ou le bo-
thriocéphale, qui ont paru depuis, on est toujours
revenu à la première idée qu’il en avait donnée.
Brera a cependant copié une figure appartenant à
la seconde dissertation de cet auteur; mais Brera a
choisi la quatrième figure , c'est-à-dire la moins
* Tab. 1, fig. 7 , Vorlesungen.
DE L'HOMME. 171
bonne, qui provenaitd’un échantillon reste quinze ans
dans l’esprit-de-vin,, tandis que la troisième n’est pas
mauvaise et est assez conforme à la nature. Lorsqu’en
1811 on avertit toutes les sociétés savantes de la for-
mation de notre grande collection de vers intesti-
paux, On pria en même temps de vouloir bien nous
envoyer un tænia \ anneaux courts ou un bothriocé-
phale pourvu de sa iêle, en cas que quelqu’un s'en
trouväten possession. Ilnousarriva, le 20 mars 1812,
de la part de M. Saemmerring, une boite contenant
plusieurs vases remplis de ces vers, parmi lesquels il
yaun échantillon qui est représenté dans la pl. 5, et
que M. Soemmerring avait rendu lui-même plusieurs
années auparavant. Mon étonnement fut à son com-
ble , lorsque je pus remarquer, à l’aide d’une simple
loupe, les deux fossettes ou dépressions oblongues
qui existent à la tête de ce ver. Je compris alors sur-
le-champ la différence qui existe réellement dans la
conformation des deux cestoides, qui se irouvent
dans l’homme, car ces animaux se ressemblent si peu,
que non-seulement ils n’appartiennent pas à la même
espèce, mais même qu’ils ne sont pas du même genre,
et j'avoue que je fus fäch& de n’avoir pas placé plus
tôt ce prétendu tænia à anneaux courts, par la simple
conformation de ses articulations , dans le genre qui
lui convenait; car l’ouverture des organes de la géné-
ration, chez ce dernier, se trouve sur la face des
articulations, tandis qu’elle est placée au bord sur le
véritable tænia. Je crois qu'aucun helminthologuc
qui aurait trouvé un morceau d'un ver pareil, même
172 SUR LES VERS INTESTINAUX
sans tete, dans un poisson ou bien dans un oiseau
aquatique, n'aurait hésité un instant à le ranger
dans le genre bothriocéphale; mais je me suis con-
solé en pensant que d’autres avaient commis la même
erreur. Depuis, j'ai fait évacuer à une personne un
ver de cette espèce pourvu de sa tete, et j'en ai aussi
recu quelques échantillons de la Suisse. J’ai choisi,
pour le genre de ce ver , le nom de bothriocéphales
et celui de large pour son nom d’espece.
Avant que nous nous occupions du véritable tæ-
nia, il faut que je fasse mention que notre collection
possède un bothriocéphale difforme que M. Sæmmer-
ring nous a procuré par un échange avec le cabinet
d'histoire naturelle de M. Voith; c’est un fragment
de bothriocéphale qui fait voir , à l'endroit où il a été
déchiré (ce qui a pu avoir lieu dans toute la longueur
de l’animal } deux fossettes sur chaque articulation ;
ces fossettes ne sont pas placées l’une après l’autre,
mais bien l’une à côté de l’autre , comme cela est re-
présenté par les fig. k, pl. 5. Cette disposition des
fossettes ne se trouve cependant que sur onze articu-
lations , car au-delà de la onzième iln’y a, sur le
reste du morceau, qu'une seule fossette sur chaque
articulation. Il ne faut pas cependant regarder cela
comme une monstruosité semblable à celle dans la-
quelle deux jumeaux sont accollés l’un à l’autre; mais
il paraît plutôt que ces articulations, au moment de
leur premiere conformation , se sont dérangées de
leur position naturelle, et sont devenues adliérentes.
Ce fragment présente encore cela d’extraordinaire,
DE L'HOMME. 173
que les articulations à sa partie postérieure se trou-
vent fendues pendant un assez long espace. Pallas a
publié le dessin d’un semblable échanullon. Du reste,
nous ne devrons pas regarder ce ver comme apparle-
nant àune nouvelle espèce, car cen’est qu'un bothrio=
céphale ordinaire. Nous avons encore une seconde
difformite d’articulations provenant d’un autre échan-
tillon (Yoy. fig. h, pl. 5). M. Kudolphi observe que
l'on n’a pas encore rencontré, autant qu’il s’en rap-
pelle, debothriocéphale dans le cadavre d’un homme;
j'ai entendu dire la même chose, il y a plusieurs an-
nées , à un médecin suisse. Les médecins qui exercent
dans le pays où ce ver séjourne, devraient bien nous
donner des éclaircissemens à ce sujet.
J'étais au moment de faire imprimer cette feuille,
lorsque je fis rendre, le 17 juin 1819, un ver de
cette espèce à un Suisse de vingt-six ans, du canton
de Glaris, et cela m’a fourni l’occasion de faire en-
eore quelques remarques sur le bothriocéphale ; car
la femme suisse incommodée par ce même ver, que
j'ai traitée à Vienne, et à laquelle j'ai administré mon
huile anthelmintique, ne l’a pas rendu d’une manière
visible. La tête du bothriocéphale , que je fis évacuer
entier à une femme de Pétersbourg, m’oecupa alors
trop pour avoir pu prêter une attention suffisante
aux articulations : ce ver était, du reste, tellement
gros et renflé, que l’on ne voyait les articulations
que d’une manière tres-peu distincte.
2 N. nord Beitr., 1. tab. fig. Wu, fig. 16,
174 SUR LES VERS INTESTINAUX
Le jeune Suisse dont nous venons de faire men-
tion vivait déjà, depuis douze ans, hors de sa patrie,
et ce ne fut que l’année passée qu'il fut averti, par
l'évacuation de quelques morceaux , qu’il nourrissait
un bothriocéphale dans son corps ; il avait, du reste,
toujours joui d’une bonne santé, et ce ne fut que de-
puis le traitement que l’on avait entrepris contre ce
ver (traitement qui consistait en médicamens ver-
mifuges et drastiques, que l’on avait employés pen-
dant plusieursisemaines ), qu'il se trouva un peu af-
faibli ; il cessa l’usage des médicamens, et se porta
parfaitement bien. Cependant il vint me voir un jour,
et me pria de m’assurer au juste si ce parasite exis-
tait encore dans son corps, ou non; car il n'avait
pas examiné ses évacuations alvines depuis quelque
temps:
Je n’hésitai pas à le soumettre à cet essai, en ce
qu’il ne pouvait en résulter aucun danger pour sa
santé. Je lui fis prendre un jour, le matin avant de
se lever, trois gros de fougère mâle, choisie et
fraîchement pulvérisée, en une seule dose, et je
Vengageai à boire par dessus une tasse de café à
l'eau, aussi chaud que possible (les médecins de
Genève suivent cette méthode, par laquelle ils évi-
tent souvent les vomissemens causés par cette racine);
je lui ordonnai ensuite de prendre, deux heures
après , une cuillerée à bouche d'huile de ricin frai-
chement exprimée et mêlée avec un peu de bouillon,
de demi-heure en demi-heure, et jusqu’à la consom-
mation de trois onces. Lorsque je fus le voir à deux
E L'HOMME. “Mb
heures après midi, il avait déjà diné d’un tres-bon
appeut, et il n'avait eu, dans la matinée, que deux
selles liquides très-copieuses, sans cependant être
pres Il n'avait, du reste , rien senti qui püt lui
faire présumer la sortie d’un ver; c est pourquoi ıl
ne s'était pas donné la peine de le chercher; ce-
pendant ce ver se fit voir après qu'on eut examiné
les déjections alvines ; elles en contenaient trois mor-
ceaux, dont le plus long avait vingt-cinq pieds (me-
sure de Vienne); les deux autres étaient tres-minces,
et avaient l’air de provenir du voisinage de la tête,
et Jeur longueur était de six à huit pouces. Je wai
pu découvrir la tete, et!’ extrémité postérieure n’e-
tait pas conservée en entier ; l’on voyait clairement
qu’un morceau en avait été déjà détaché quelque
temps auparavant. Voici ce que j'ai remarqué sur ce
ver, qui est le second que j'ai observé fraîchement
rendu, et avant qu'il eùt été mis dans l'esprit de
vin. Le ver fut bien lavé avec de l’eau, et lorsque je
Vai examiné , il ne s’était passé qu’une heure depuis
qu'il avait été rendu. Sa couleur n'était pas parfai-
tement blanche, comme Jœrdens et Brera le préten-
dent ; mais il était d’un gris clair , tel qu’il est repre-
senté sur la pl. 5, fig. d, f, i. Les tænias sont en général
beaucoup plus blancs que les bothriocéphales. Mais
le docteur Gaede de Kiel, qui arriva justement dans
le moment où mon dessinateur venait de terminer
de dessiner ce ver, peut attester que cet animal a
été représenté avec la plus grande exactitude; car
M. Gaede l’a vu aussi avant qu'il ne füt mis dans
176 SUR LES VERS INTESTINAUX
V’esprit-de-vin. Quant aux articulations antérieures
de ce ver, je n'ai rien remarqué qui ne puisse
être vu sur la planche 5, si ce n’est qu’elles diffé -
raient dans la couleur. Les articulations étaient trans-
parentes dans le milieu, à l'endroit où le ver com-
mence à s’elargir, et l’on pouvait clairement voir
les ouvertures , en forme de petites fossettes rondes,
qui conduisent aux organes de la génération.
Ces articulations n'étaient pas transparentes sur
leurs bords; cependant on distinguait, dans leur
intérieur, des points isolés de forme ronde; c'é-
taient peut-être des œufs non fécondés ( Voyez
fig. h, pl. 5). Un peu plus loin que les aruiculauions.
dont nous venons de parler, il y en avait quelques-
unes de fécondées : cela peut se voir sur lasfig. f. Ces
articulations ne sont pas dessinées d’une manière
aussi élégante et symétrique que celles de Bonnet,
copiées par Joerdens et Brera; mais je puis assurer
que mon dessinateur les a représentées fidelement
et telles qu’elles se trouvaient dans la nature. On ob-
servait, sur différens endroits de ces articulations, à
quelque distance de là, de petites protuberances ou
papilles jaunâtres (Voyez fig. :). En ouvrant une de
ces protubérances avec une épingle , il en sortit des
œufs fécondés.
On peut les voir représentés, mais considérable
ment grossis ,„ dans la fig. Z. Ces œufs n'avaient pas
tous la même forme, comme on le voit par la même
figure.
A l'endroit où les œufs fécondés se trouvent pla-
DE L'HOMME. 177
ces , le ver perd de sa largeur; les bords ou plutôt les
parties latérales des articulations sont ridées , et l’on
ne remarque pas dans ces dernières des points ou
grains blancs , comme cela peut se voir sur la fig. d.
Il me paraît probable que toutes les articulations
de bothriocéphale ne sont pas fécondées; car on ne
voit sur la fig. : (qui représente un morceau de tæ-
nia de treize articulations) que deux protubérances
ou papilles remplies d'œufs ; une troisième protubé-
rance se trouve sur le bord dela fente, et a l'air d’avoir
été déjà vidée à moitié; je ne puis pas pan af-
firmer que la chose soit ainsi.
Apres qu'une articulation a été fécondée, il me
paraît probable que, des ce moment, tout le travail
de la nutrition n’influe que sur les œufs, qui se irou-
vent contenus dans cette articulation, et n’agit plus
sur cette dernicre elle-même ; elle dépérit alors de
plus en plus, se crispe, perd de sa largeur, se ride
sur ses bords et meurt à l’époque à laquelle ses œufs
sont parvenus à leur développement complet et ou ils
en sortent. L'endroit perforé que l’on remarque sur
la fig. i paraît venir à l’appui de ma supposition ; car
ıl est probable que cette perforation ne s’est opérée
qu'au moment où les articulations se sont rompues
pour laisser sortir les œufs complétement dévelop-
pés dont elles étaient chargées. On voit sur la der-
mère figure mentionvée, que les articulations n’é-
taient pas loin de leur destruction totale, car elles
avaient déjà perdu leur couleur naturelle et étaient
devenues tout à fait brunes ; ilest donc permis de sup-
12
178 SUR LES VERS INTESTINAUX
poser que ce morceau se serait déchiré sous peu en
cet endroit, et que le ver aurait perdu deux pieds de
sa longueur, car le morceau, qui faisait suite à ces
articulations , était de cette longueur.
Les observations que je viens de rapporter ont été
pour moi d'un grand intérêt, je désire qu’elles
n'aient pas fatigué mes lecteurs. |
V. TÆNIA.
Tania solium ( en allem. der kettenwurm), pl. VI et var.
TÆNHA : capite subhemispherico , discreto ; rostello obtuso ; collo ar-
trorsum increscente , articulisque anticis brevissimis , insequentibus
subquadratis , reliquis oblongis , omnibus obtusiusculis ; foramini-
bus marginalibus vage alternis.
Pallas, Elench. Zoophyt, p. 405, n°. x, 1. cucurbilina.
Neue ‚nord. beitr. du même, t.1, p. 46 et 37, tab. It, fig. 4 et 9,
1. cucurb.
Bloch , Abhandl., s. 20 et 28 , der kürbiswurm.
Werner , Verm. intest., p. 18 et 49, 4. solium; p. 49 et 54, fig,
47 et 57, t. vulgaris.
Goeze , Eingeweidew , s. 269 et 296 , tab. xx1, fig. 1, 7, 9 et ı2.
Gmelin , Syst. nat. , p. 3062, n°. ı , t. solium; p. 3073, n°.3, t.
dentata.
Batsch , Bandwürmer, s. 117-123, fig. 1,6, 9, ı1, 21, 23,
54, der kürbisbandwurm; s. 184-187 , fig. 10 et 113, der ge-
-aehnte band. k
C. =, Inthe Transat. of the Linn. soc. , vol. I1, p. 247 et 262,
tan. XXV , fig. set 8, £. solium.
Joerdens , Helminth., s. 40 , tab. 111, fig. x et 7, der langgliedrichte,
bandwurm, s. 47 , tab. IV.
Brera , Vorlesung. , p. 9, fig. 1, 3, 8, 10 et 11; der bewaffnete
DE L'HOMME. 170
menschliche bandwurm. Memorie du même , p. 64 et 80, tab. ı,
fig, 1, 14, 17, 22, tenia armata umana.
Zeder , Änteitung , p. 359 , n°. 48 , halysis solium.
Rudolphi, Entoz. II, part. 1, p. ı6o , n°. 56, £. solium.
Bradley , À treatise, p. 75 et 83, pl. 111, fig. 4 et 10, iania os-
culis marginalibus. tape worm.
Cuvier, Règne animal, p. 43 , tenia à longs anneaux.
Olfers , De vegetativis, p. 35 et 37, 1. solium.
De Lamarck, Anim. sans vert., tome 11, page 164, tenia cu-
curbitain.
Le bothriocephale et le véritable tænia, appelé par
Plater 1ænia secunda , portent ,! chez les auteurs,
comme nous l’avons déja remarqué, le même nom;
cependant les Français désignent ordinairement le
véritable tzenia sous les noms suivans : le solitaire,
le tænia sans épines, tænia à anneaux longs.
Le véritable tænia séjourne dans lesintestins grêles
de l’homme de toutes les nations européennes à
l'exception de celles que nous avons mentionnées
lorsqu'il était question du bothriocephale. On ren-
contre aussi tres-souvent le tzenia.chez les Egyptiens.
DESCRIPTION.
Je crois que personne n’a encore vu un tænia en-
tier, c’est-à-dire qui für à la fois pourvu de la tête
et de la queue; car souvent il arrive que les dernières
articulations, qui sont ordinairement chargées d'œufs
fécondés, se détachient et sont évacuées par les
selles, avant que les articulations antérieures, les
12.
189 SUR LES VERS INTESTINAUX
plus près de la tête, soient encore complétement déve-
loppées ; c'est pourquoi on ne peut pas fixer au juste
quelle longueur ce ver pourrait atteindre, si toutes
les articulations restaient ensemble. Les tænias d'une
longueur de vingt-quatre pieds ne sont pas très-rares :
notre collection cependant n’en a pas de plus longs.
Reinlein , dans son ouvrage, parle souvent de ces
vers, et porte leur longueur à quarante jusqu’à
cinquante aunes. |
Dans les Dissertations ‘ de Copenhague, on fait
mention d’un tænia de huit cents aunes de long.
Robin ratonte qu'il a trouvé dans le cadavre d'un
homme (qui avait rendu, peu de temps avant de
mourir, un morceau de tænia de plusieurs pieds de
long), : mmédiatement au-dessous du pylore, un de
ces vers reployé en forme de pelotte et qui s’etendait
dans toute la longueur des intestins, jusqu’à six OU
huit pouces de anus ; Robin remarque que sa lon-
gueur a pu se monter àtrente pieds ;, ÿ compris lemor-
ceau qui avait été détaché auparavant. Si un tænia
qui occupait presque tout le tube intestinal, comme
eclui dont nous venons de parler, n'avait que trente
pieds de longueur; il est alors bien permis de pré-
sumer que les auteurs cités plus haut se sont trom- .
pés dans l'indication de leurs mesures, et qu'ils ont
compris, sans doute, plusieurs vers ensemble, comme
cela a dû avoir lieu pour celui de huit cents aunes.
Admettons en effet que la longueur du tube intes-
» Act. hapnıens., vol. U, p. 148.
DE L'HOMME. 181
tinal de l'homme ne soit que de trente pieds, et
qu'une aune ne forme qu’une longueur de douze
pouces, c'est-à-dire qu’un pied , le ver de huit cents
aunes de longueur aurait été, par conséquent ; obligé
de se reployer au moins vingt-six fois, pour trouver à
s’y placer. Une telle quanuté de replis aurait natu-
rellement rempli presque toute la capacité des in-
testins , et l’on ne conçoit pas comment les alimens
etles matières fécales auraient pu encore s’ecouler.
Il est cependant facile de concevoir ce quia engage
les médecins à croire qu'il y avait des tænias d’une
longueur aussi extraordinaire ; c’est qu'ils suppo-
saient que tous les morceaux de tænias, rendus peu
à peu par un homme, appartenaient à un seul in-
dividu.
Hufeland : fait mention d’un enfant de six mois,
qui avait rendu peu à peu trente aunes de tænia, sans
éprouver la moindre aliération dans sa santé. Suppo-
sons que cet enfant en eût évacué une pareille quantité
tous les six mois, jusqu'à l’âge de la puberté, la lon-
gueur du ver se serait alors montée à mille quatre
cent quarante aunes, à peu pres; on au rait cependant
bien tort de conclure de là qu'il y ait des tænias aussi
longs.
La largeur de ce ver varie beaucoup : vers la fin
de la tête , il n’a souvent qu'un quart ou qu'un tiers
de ligne de largeur ; mais elle augmente peu à peu
jusqu’à trois, quatre, ou même six lignes; du reste,
ı Journal Bd, 18, st. 1, p. 3.
182 SUR LES VERS INTESTINAUX
quand on mesure ce ver, il faut toujours faire atten-
tion s’il se trouve dans un état de contraction ou d’ex-
tension ; car sans cela la mesure ne peut pas être re-
gardée comme conforme à la vérité (Poy. pl. 6, fig. 1).
La grosseur du tænia varie aussi beaucoup ; quelque-
fois il est très-mince et presque transparent , et dans
d’autres cas 1l est gros, comme cela est démontré
par les articulations de la fig. a, pl. 7; sa tête est en
général très-petite ( Voyez pl. 6, fig. 1 ); elle est ce-
pendant quelquefois assez grosse pour être vue à l’œil
nu (Voyez fig. a).
Mais , à l’excepuon de l'individu , fig. a, j'avoue
n’en avoir jamais vu, depuis, un semblable, dans le-
quel une tête si volumineuse füt placée sur une tige
aussi mince , et qui se changeät si brusquement en
un cou d’une largeur assez considérable. On trouve
la forme de la tete, en général, variable, surtout
lorsqu'on l’examine sur des individus morts, comme
cela arrive presque toujours. Cette diversité de forme
s'explique tres-bien, quand on a observé un de ces
vers vivant hors du canal intestinal, comme j'en
ai eu l’occasion. La tête et le cou de l’animal sont
alors dans un mouvement continuel, et son corps
se contracte et s’allonge alternativement. Ces change-
mens de dimension influent également sur celles du
cou et de la tête; et les têtes paraissent tantôt plus
Jongues et plus étroites, et tantôt plus larges et plus
courtes. En tuant subitement un individu obtenu
vivant, au moyen de l’eau fraîche ou de l’esprit-de-
vin , 1l conserve la forme qu’il avait au moment de
DE L'HOMME. 183
mourir. On doit également remarquer que Vesprit-
de-vin très-concentré a la propriété de rétrécir ou de
contracter les individus morts. Le ver représenté sur
la fig. 5, pl. 6, a été tué dans de l’eau tiède que l’on avait
laissée peu à peu refroidir. L’on peut facilement se
faire une idée de la diversité des dimensions dans la
tête des cestoides , si l’on examine les tricuspidaires
provenant du brochet , et les bothriocéphales pro-
venant des barbeaux : l’on rencontre presque tou-
jours vivantes ces deux dernières espèces de vers,
dans ces deux genres de poissons. M. Rudolphi : a
indiqué six différentes formes de tête sur les tricus-
pidaires : j'en ai fait dessiner neuf des mêmes vers,
et cinq du bothriocéphale provenant du barbeau.
Je crois que les trois figures de tête de tænias, qui
avaient séjourné dans l’homme (Foy. fig.b,c,d, pl.6),
et qui sont représentées sur une echelle plus grande
que nature, suffiront pour donner a mes lecteurs
une idée claire de ces variations.
L'on remarque toujours à ces têtes, si variables
dans leur forme, quatre suçoirs qui sont, dans l’état
vivant, tantôt plus proéminens, tantôt plus rétractés-
Le tænia vivant que j'ai examiné allongeait toujours
les deux diagonalement opposés ; tandis qu'ilraccour-
cissait les deux autres de lamême manière. J'ai observe
dans les tubes de deux tænias qui avaient été rendus
vingt-quatre heures auparavant, une matière nolrälre,
représentée dans la fig. d, pl. 6: cette matière se dis-
ı Entoz., tab. 1x ‚fig. Get 11.
184 SUR LES VERS INTESTINAUX
solvit et disparut après un court espace de temps;
ce n’était rien autre chose qu'un peu de matière fé-
cale qui s'était introduite dans les tubes des sucoirs
de ces deux individus, et ce qui donnait à leur tête
l'apparence d'avoir quatre yeux. C’est de là d’où pro-
vient, sans doute, que les anciens médecins représen-
taienttoujours la tête des cestoïdes pourvue de quatre
yeux; Andry, par exemple’, défend encore l’opi-
nion que les cestoides ont quatre yeux, contre Mery,
qui regardait les sucoirs comme autant d’ouvertures
nasales.
Quand la tête est tout à fait allongée, l’on voit,
entre ces quatre suçoirs , une protubérance convexe
(Por. fig. b, pl. 6), sur laquelle se trouve toujours un
cercle au milieu duquel est placée une petite ouver-
ture presque imperceptible. On observe quelquefois
sur. ce disque un double rang de petits crochets;
l’on fait mention dans presque toutes les descriptions
de ce disque pourvu de crochets , et on les trouve
également représentés dans presque toutes les fi-
gures ; mais cela ne s’observe pas toujours en réa-
lité. J'avais déjà examiné cinq à six de ces vers, y
compris celui qui était encore vivant, et dont j'ai
parlé plus haut, sans qu'il m’eût été possible de dé-
. Gouvyrir une couronne de crochets sur la tête , malgré
que je me fusse servi d’excellens microscopes. J’en fis
part à M. Rudolphi, et peu de temps après ıl m’en-
voya un tænia pourvu d’une pareille couronne très-
* Ouvrage cité, p. 609.
DE L'HOMME. 185
visible (Yoyez fig. c ). Plus tard je recus encore un
semblable individu de M. Goergen.
I1me paraît probable que le ver dont nous nous oc-
cupons maintenant perd sa couronne de crochets en
vieillissant. J’admettrais cette supposition d'autant
plus volontiers que l’on rencontre assez souvent d’au-
tres vers intestinaux chez lesquels les crochets se dé-
tachent : cela se remarque assez fréquemment sur le
ver nommé par moi echinorhynchus polymorphus.
Notre collection possède un tzenia très-long (tæ-
nia serrata) provenant d’un chien. La tête de ce ver
est aussi dépourvue de crochets, chose qui n’arrive
pas ordinairement chez les individus de cette espece.
Le véritable tænia a le cou aplati ou déprimé, et
variable en longueur. Je ne lai jamais vu manquer
tout à fait dans aucun individu de cette espèce : après
le cou dépourvu d’articulations, arrive le corps arti-
culé. Les premières articulations sont d’abord ires-
étroites, et toujours plus courtes que larges ; a mesure
qu’elles s’élargissent, leur longueur augmente pro-
portionnellement beaucoup plus, et elles forment par
la suite de vrais carrés qui deviennent plus loın des
carrés oblongs , dont la longueur surpasse la largeur
au moins du double ; mais on rencontre souvent des
individus qui sont conformés differemment, et sur
lesquelsl’onremarque des articulations pluslarges que
longues, suivies d’articulations qui sont plus longues
que larges. Cet tat de chose provient des contractions
inégales de quelques parties du corps ; car les mou-
vemens de ces vers consistent, comme nous l'avons
186 SUR LES VERS INTESTINAUX
déjà remarqué, en contractions et en allongemens
continuels de leurs aruculations. Les contractions ren-
dent ces dernières plus larges et plus courtes , et les
allongemens, plus longues et plus étroites. J’ai fai!
dessiner un individa qui était d’une longueur de huit
pieds, en omettant plusieurs longs morceaux d’arti-
culations qui avaient la même conformation que les
précédentes. Les fig. b, c, e,pl.7, font voir plusieurs
anomalies dans la conformation des articulations.
Les difformités proviennent souvent, comme je.
l'ai déjà remarqué, de la manière subite dont on tue
le ver, soit en le plongeant dans l’eau froide, soit
dans l’esprit-de-vin. |
On observe , pres des bords des articulations, de
chaque côté et le long de tout le corps de quelques in-
dividus ( Joy. fig. a, pl. 6), deux lignes blanches assez
marquées; elles sont placées l’une sur l’autre , de ma-
niere que celle située supérieurement couvre et cache
Vinferieure. M. Rudolphi regarde ces lignes comme
des canaux alimentaires qui.urent leur origine des
sucoirs de la tête. Je possède un tænia tres-mince ét
transparent, que l’on a fait rendre à un homme : ce
ver n’était pourvu que d’un seul canal alimentaire,
placé au milieu des articulations.
On observe encore, sur les bords des articulations
bien développées, tantôt à droite, tantôt à gauche, de :
petites protubérances papilliformes, qui sont pour-
vues, dans leur milieu, d’une ouverture bien visi-
ble ; on distingue clairement cette dernière sur les
articulations du milieu (Yoyez fig. 1, pl. 6), mais en-
DE L'HOMME. 187
eoremieuxsurlesfig. d,e, f,i, pl.7.Ona cru pendant
long-temps que le ver s’attachait, avec ses ouvertures
latérales, aux parois desintestins , pour sucer sa nour-
riture ; mais les naturalistes modernes sont tous d’avis
que ces ouvertures, ainsi que les petits canaux qui en
proviennent, conduisent aux oviductes : ceux -ci,
dont la forme est assez variable , présentent cepen-
dant presque toujours une disposition phytoïde sur
les individus dont le corps est mince, et sur ceux qui
ont été déjà un peu macérés (Voyez fig. d). Is cons-
lituent presque tout l'appareil de la generation.
On observe sur quelques tænias, surtout sur ceux
provenant d'oiseaux aquatiques , des petits filamens
qui sortent des ouvertures des ovaires, etque l’on peut,
ce me semble , regarder comme les parties sexuelles
des mâles. Je n’ai pas encore pu découvrir ces filamens
sur des tænias provenant de l’homme; la position des
ouvertures latérales n’est pas soumise à un ordre cer-
tain ; quelquefois il y en a trois, quatre ou davantage
du même côté , placées l’une après l’autre , sans in-
terruption, tandis qu'il n’y en a qu’une ou deux de
V’autre côté. Les personnes qui désirent connaître la
structure interne de ces organes, doivent étudier
l'ouvrage de Werner.
REMARQUES.
Les médecins les plus anciens font déjà mention
de ce ver, mais sous deux noms différens; car ils
188 SUR LES VERS INTESTINAUX
distinguent le Zumbricus latus, ou le tænia solium, qui
a été probablement confondu quelquefois avec le bo-
thriocéphalus latus, des vers cucurbitains; quantau pre:
mier, ils croyaient qu’un homme ne pouvait être at-
teint que d’un seul individu à la fois, et, quant aux
derniers (les vers cucurbitains), ces medecins les ont
regardes comme appartenant à une espèce parlicu-
lière, ou, selon l’opinion d’Andry, comme des œufs
du tænia; l’une et l’autre de ces suppositions sont
erronées. D'abord, nous avons de nombreux exem-
ples qui prouvent que plusieurs tænias PÉRXENL se
trouver en même temps dans les intestins du même
homme. De Haën: en a fait rendre dix-huit a une
femme de trenteans, dans l’espace de quelques jours,
et qui étaient tous très- minces ou filiformes à l’une de
leurs extrémités. J’en ai vu moi-même deux ou trois
dans le même individu, et j'en ai souvent rencontré
soixante-dix ou quatre-vingts à la fois dans les intes-
uns de jeunes chiens ; et quant aux vers cucurbitains,
les auteurs ont remarqué que ce ne sont que des
articulations postérieures fécondées ou chargées
d'œufs développés qui se sont détachés du tronc du
tzenia.
On a encore eu autrefois des idées tout à fait sin-
gulières sur la véritable nature de ces vers. Linné,
par exemple, niait la présence de la tête du tænia.
Blumenbach regarda pendant long-temps , comme
1 Ratio medendi, vol. xt, p. 218.
DE L'HOMME. 189
les premières éditions de son ouvrage le prouvent,
les articulations de ce ver comme autant d'animaux ,
et il pensait qu'ils n'étaient que collés l’un contre
l'autre *; mais cet auteur a abandonné plus tard cette
opinion. Carlisle prétend qu’il peut se développer un
nouveau ver de chaque articulation.
Les personnes qui onteu occasion d'observer beau-
coup d'animaux dans lesquels le tænia séjourne sou-
vent, et qui ont rencontré et observé des jeunes vers
de cette espèce, nadmettent aucune des opinions que
nous venons de rapporter. J’ai trouvé plusieurs fois,
dans les intestins du cormoran ( pelicanus carbo ) de
jeunes tænias appelés par M. Rudolphitænia scolecina ,
qui n’avaient que trois ou quatre lignes de long; leur
queue était arrondie et leur tête pourvue de quatre
sucoirs et d’une couronne de crochets très-visibles,
preuve que ces vers étaient entiers, quoique l’on
ne püt y distinguer des articulations, pas même avec
un microscope; on voyait néanmoins à leurs bords
des filamens (/emnisci ) dont nous avons fait mention
plus haut. Cette observation prouve que les tzenias,
et les cestoides en général , se forment d’un seul coup
comme embryons, .et qu’ils parviennent, commetout
autre animal, peu à peu à leur grandeur naturelle,
sans qu'il soit nécessaire pour s'étendre, que de nou-
velles articulations se forment après leur naissance.
Les naturalistes ont avancé beaucoup de choses et
1 Gættinssche anzeigen von gelehrien sachen. 1774. , st. 154, p.
1313.
190 SUR LES VERS INTESTINAUX
souvent tout à fait chimériques sur cette formation,
et nous verrons par la suite quel degré de confiance
elles méritent.
La formation de nouvelles articulations peut être
conçue de trois manières différentes , c’est-à-dire
qu’il est possible d'imaginer sur le corps du ver trois
endroits où cette formation puisse avoir lieu : 1°. à la
fin de la tête , c’est-à-dire entre elle et l'extrémité an-
térieure du corps ; 20, entre les articulations, dans un
seul ou dans plusieurs endroits du corps à la fois : il
faudrait alors admettre que les anciennes articula-
tions se diviseraient en plusieurs, et que les articula-
tions nouvellement produites acquerraient peu à peu
la grandeur de celles entre lesquelles elles se seraient
intercalées ; et 3°. à l’extrémité postérieure du corps,
ou à la fin de la queue.
Si l'addition des nouvelles articulations pouvait
avoir lieu à l'extrémité antérieure du corps, il serait
plus naturel d’admettre que le cou recevrait une aug-
mentation de la tête elle-même , et que pour conser-
ver, malgré cette augmentation , sa longueur primi-
tive, sa partie postérieure se diviserait en articula-
tions, que de supposer que la totalité du cou se
diviserait d’abord en articulations, et que les nou-
velles pousseraient, pour ainsi dire, plus tard, de
la tête elle-même. Cette hypothèse ne peut être com-
battue par l'observation, que nous avons faite plus
haut, que notre collection ne possède aucun tænia
provenant de l’homme, qui ne soit pourvu d’un cou
plus ou moins long, parce qu'il y a, en eflet, une
DE L'HOMME. OI
grande quantité de tænias provenant d'animaux, aux-
quels le cou manque totalement ; et, comme le iénia
de l'homme leur ressemble pour le reste, il est alors
permis de supposer qu'il n’en diffère pas non plus
sous ce rapport.
Si le second cas avait lieu, c’est-à-dire s’il arri-
vait que des articulations (dans un endroit quel-
conque du corps ) se divisassent en plusieurs autres,
on aurait dù le remarquer déjà depuis long-temps,
par la raison que la formation des nouvelles articula-
tions produites par la division de l'ancienne, n’au-
rait pu s'effectuer que peu à peu, c’est-à-dire dans
un espace de temps plus ou moins long, et sans avoir
été observé par les naturalistes.
L'on rencontre bien quelquefois des articulations
difformes et mégales , quant à la longueur des deux
côtés ; mais jamais on n’a observé, sur une articula-
tion, des espèces d’incisions ou de rainures iranver-
sales , qui auraient pu nous mettre en droit de pré-
sumer que cette articulation eût été sur le point de se
diviser en deux, division que l’on peut opérer, par
des moyens artificiels , sur les vertèbres des sala-
mandres aquatiques.
Andry a fait , sur l’accroissement de nouvelles ar-
üculations à l'extrémité eaudale, une observation qui
lève, au premier abord, tous les doutes qui existent
à ce sujet ”. Ce médecin engagea un de ses malades,
* Jai extrait cette observation de l'ouvrage de M. Rudolphi
(Entoz., vol, 1, p. 337), n'ayant pu me procurer l'ouvrage
192 SUR LES VERS INTESTINAUX
qui avait déjà rendu, à plusieurs reprises, des mor-
ceaux de tænia de quatre à six pouces de longueur,
mais sans la tête, 1°. de passer tres-promptement, au
moyen d’une aiguille, un fil à travers le corps de
l'animal , aussitôt qu’il s’en présenterait, de nouveau,
quelques parties hors du rectum ; 2°. de déchirer tout
ce qui serait au-dessous de l'endroit où le fil aurait
été passé, et de laisser rentrer le reste dans le canal
intestinal. Tout cela fut en effet exécuté , et, au mo-
ment de la rentrée , il n’y avait, du corps du tenia,
qu’une longueur égale à quatre travers de doigt, et
formée de cinq articulations. Après l’espace d’un
mois, Andry ordonna une médecine qui fit évacuer
le tænia pourvu de la tête. En examinant la portion
du ver au-dessous du fil, on vit qu’elle était d’envi-
ron un pied de longueur, et composée de quarante
articulations, au lieu de cinq qu’elle avait un mois
auparavant. Malgré cela, cette expérience ne prouve
rien , comme M. Rudolphi l’a également remarqué.
D'abord, la proportion du nombre des articulations
ne s'accorde pas avec celle de la longueur; car, si
cinq articulations étaient de la longueur de quatre
travers de doigt, longueur que nous n’evaluerons
qu’à trois pouces, quarante articulations auraient dü
étre d’une longueur de deux pieds. En outre, 1l
faut considérer qu'il était impossible de ne pas se
tromper dans la mesure et l'évaluation du nombre
d'Andry, publié à Paris, 1718, sous le titre : Vers sollaires ct
autres espèces , elc.
DE L'HOMME. 103
des articulations , lors de l'expérience. La piqüre
a dû nécessairement irriter le ver, qui s’est con-
tracté spasmodiquement, comme cela a lieu chez
tous les animaux des classes inférieures ; on le dé-
chira , et il se contracta encore davantage. Les arti-
culations allongées de lextrémité caudale , que le
malade avait rendues en premier, ont probablement
fait croire que le nombre de celles qui étaient infé-
rieures au fil, n'allait pas au-dessus de cinq au
moment de l'expérience. Un morceau de tænia de
quarante articulations peut, en effet, se contracter
de manière que sa longueur ne dépasse pas la largeur
d’une main.
Les objections que nous allons faire maintenant à
une asserlion avancée par Brera, peuvent également
s’appliquer à l'observation d’Andry.
Brera s’est efforcé de montrer comment le tænia
perd les articulations de la partie terminale de son
corps ; et comment d’autres se reproduisent à leur
place, de maniere que le ver devrait toujours con-
server le même nombre d’artieulations.
Cet auteur s'exprime ainsi! : « Il pousse , d’une des
parties latérales de l'un des bords, par lesquelles les
articulations sont jointes les unes aux autres, un
petit bouton formé de la même substance que les
articulations. Ce bouton grandit, s’élargit, repousse
et sépare peu à peu l'articulation voisine, et ne prend
pas seulement sa place, mais encore sa forme, de
1: Memorie , p. 46.
194 SUR LES VERS INTESTINAUX
manière que l’irticulation détachée se trouve tout à
fait remplacée. » À
Cependant cela n'arrive pas ainsi en réalité, comme
on peut le démontrer par la théorie et par l’expé-
rience. Supposé que ces choses se passassent comme
Brera l'a prétendu , on aurait remarqué que la queue
ou plutôt la dernière articulation du verse détacherait
toujours en premier lieu, et, comme d’après l'opinion
de ce médecin, la nouvelle articulation prend la
forme de celle qui vient d’être séparée , on devrait
conclure de là qu'il ne pourrait sortir que des ar-
üculations arrondies ou terminales. Cependant on
voit journellement des individus rendre plusieurs
articulations, sans qu’une seule portät le même carac-
were ou la même forme que la dernière; outre cela,
il n’est pas probable que tant d’aruculations rendues
par des hommes qui n’ont qu'un ou deux iænias,
puissent se reproduire journellement, et si, par ha-
sard, nn bouton, tel que le decrit Brera, se formait
à la vingtieme articulation, à compter de la queue,
les dix-neuf autres, qui se trouveraient au-dessous,
devraient également être séparées avec la vinglieme,
et, par conséquent, la nouvelle articulation , qui se
serait formée à l’endroit de cette dernière, ne pour-
rait pas servir d’equivalent, ou plutôt ne pourrait
réparer la perte d’un morceau aussi considérable.
Nous voyons encore que les articulations posté-
rieures des vers parvenus à leur développement,
sont toujours chargées d'œufs fécondés, et qu’elles
se détachent d’elles-mêmes. 11 faudrait alors suppo-
DE L'HOMME. 195
ser, dans l’assertion de Brera, que les articulations
nouvellement formées pourraient être chargées, des
leur origine , d'œufs fécondés, tandis que ceux qui
se trouveraient dans des articulations précédentes ou
anciennes resteraient, pour ainsi dire, immobiles
et sans pouvoir atteindre leur développement com-
plet, chose absolument dépourvue de probabilité.
Le tænia, d'après mon opinion, est, des sa nais-
sance, entier, n'importe qu'il doive son origine à
une formation spontanée ou bien à un œuf. Get ani-
mal commence alors à grandir; ses articulations de-
viennent de plus en plus marquées, surtout celles de
la queue ; ce sont aussi ces dernières qui se sépa-
rent d’elles-mêmes du tronc, sitôt qu’elles ont acquis
leur développement, et que les œufs dont elles sont
chargées, ont atteint leur maturité. Ge dernier état
de choses peut déjà avoir lieu avant que les articula-
tions voisines de la tête soient encore visibles , et
lorsqu'elles ne forment encore qu’une espèce de cou
allongé. Mais, par la suite, les articulations anté-
rieures et la tête elle-même se développent à leur
tour et se détachent successivement comme celles qui
l'ont été en premier lieu. Je ne puis pas cependant
indiquer au juste combien de temps il faut pour que
cela s'opère ; mais je doute très-fort qu'il faille dix ans
et plus, comme on se croyait en droit de l’admeitre,
parce qu’on voit des hommes qui rendent, pendant
cet espace de temps, presque continuellement des
articulations dépourvues de tete’.
* Voyez Carlisie.
19.
106 SUR LES VERS INTESTINAUX
Il se forme, dans mon opinion, dans l'intervalle
de temps que la nature emploie pour le développe-
ment d’un tænia, d’autres vers de son espèce, soit
par des œufs, soit spontanément, supposé que la dis-
position pour cette dernière formation continue à
exister ; car, par exemple, on ne trouve point de tri-
cuspidaires daus les brochets en automne, tandis
qu'ils en sont remplis au printemps.
On aurait souvent tort de croire que le tænia existe
toujours dans le canal intestinal d’un homme, par la
raison qu'il aurait rendu beaucoup d’articulations,
sans que l’on ait pu remarquer la sortie de la tête.
Il arrive dans beaucoup de cas que cet animal se
rompt dans le voisinage de la tête, et alors elle de-
vient tres-difhicile à découvrir dans les matieres fé-
cales, La meilleure manière pour atteindre ce but est
la suivante : l’on fait verser de l’eau tiède en petite
quantité sur les déjections , afin de les faire ramol-
lir ; quelques momens après on laisse découler avec
précaution tout ce qu'il ya de liquide ; on répète en-
suite celte opération jusqu’à ce que le ver et ses par-
ties détachées restent seules au fond du vase. Je me
suis procuré, de cette manière, la tête d’un tænia
qui se trouvait jointe à un morceau d'un pouce de
long seulement.
Parmi plusieurs centaines de personnes tourmen-
tées par ce ver, et traitées par moi, il n'y en a pas
une seule qui ait vu sortir la tête de son tænia, et ce-
pendant je puis assurer que quatre-vingt dix-neuf
sur cent se trouvent gucries.
DE L'HOMME. 197
Outre les difformités dans la swucture des articu-
lations, que nous avons indiquées plus haut, et re-
présentées par des figures, on remarque quelquefois
des tænias avec des articulations percées. J’en ai fait
rendre deux semblables; sur l’un on ne voyait que
quelques articulauons conformées de cette sorte ,
mais sur l’autre ıl y avait un morceau troué presque
d’un bout à l’autre dans l’espace de plusieurs pieds.
La fig. f représente un petit morceau de ce ver.
Masars de Cazeles a fait dessiner un tænia semblable,
et 1l le regarde à tort comme appartenant à une nou-
velle espèce. IL paraît que les oviductes de ce ver
étaient également crevés, ce qui a engagé cet auteur
à le désigner sous le nom de tenia fenestrata.
Notre collection possede un individu bien remar-
quable, c’est un morceau de tænia de plusieurs pieds
de long, et qui offre cela de particulier, qu'il ya
de:ıx tænias fortement unis au bord d’une artıcula-
uon. Les figures g, À, i, pl. 7, représentent différentes
parues de ce ver. Il est à regretter que la tête ne s’y
trouve pas. Il y a également dans cette collection
un peut tzenia tout au plus d’un pouce de long, armé
et pourvu de six sucoirs au lieu de quatre. Get indi-
vidu a été rencontré dans les intestins d’un chat.
La forme de ce ver était prismatique, et on observait
_ des rainures le long de son corps. Il se peut bien que
_ cette difformité se soit opérée par la réunion de trois
tænias ou de trijumeaux accollés l’un contre l’autre.
Brera prétend avoir observé un tænia hybride, c'est-
a-dire un ver qui tenait le milieu entre le bothrioce-
198 - SUR LES VERS INTESTINAUX
phale et le véritable tænia. L'individu dont il est
question ici se serait formé, d’après la supposition
de cet auteur, par suite de ’accouplement de ces deux
espèces de vers. La description que Brera donne de
son prétendu tænia hybride ne suflit pas pour en avoir
une idée claire, et ilest à regretter, comme M. Ol-
fers l’a également remarqué, que ce ver n’ait pas été
dessiné. Olfers le regarde comme un tænia ordinaire,
et ajoute dummodo observationi credendum. Il est à la
vérité bien difficile de simaginer qu’un bothriocé-
phale et un tænia aient pu se trouver dans le canal
intestinal du même homme.
SECTION 1.
Des vers qui séjournent hors du canal intestinal de
l’homme.
VI. VER DE MÉDINE OU DE GUINÉE.
Filaria dracunculus ( en allem. fadenwurm ), pl. T7, fig. 1.
Fırarıa : Loneissima , margine oris tumido , caudæ acumine inflexo.
Gmelin , Syst. nat. p. 5039, n°. ı , filaria Medinensis.
Joerdens, Helminth., p. 94, n°.2, tab. I, fig. 1, der hautwurm ,
fil. med.
Rudolphi, Entoz., vol. 11, p. 56, fl. Med.
Brera , Memorie , p. 289 , spec. 2 , fil. Med.
Bradley, À treatise on worms , p. 103, the Guinea worm.
Cuvier , Regne animal, t. XV , p. 30 ‚le ver de Médine ou de Guinée.
De Lamarck, Anim. sans vert. , t. 111, p. 217 ‚le ilarre de Médine.
De Plainville, Dictionn. des sciences nat., tom. XVIX, p- >, Æf-
laire de Médine.
DE L'HOMME. 199
Noms et histoire de ce ver, avec les diverses opinions sur
sa nature.
Gmelin est le premier qui ait rangé ce ver parmi
les vers intestinaux ; les Grecs l’appelaient Apaæzoyrio,
nom que les auteurs romains ont traduit par dra-
cunculus.
Galien : proposa d'appeler la maladie à laquelle ıl
donne naissance Apazovrıaaıs.
Aëtius’ le décrit sous le nom de dracunculus leonide.
Les Arabes lindiquent sous celui d’ark, a’kr ou
irk almedinı.
Ark signifie, d’après le dictionnaire arabe de Go-
lıus, radix,, origo, stirps,, genus, vena , arteria et simile
quid.
Kunsemüller traduit ce mot par vermis, el dit que
ce nom a aussi la signification de nervus. j
Ce ver porte encore le nom d’almedini, qui pro=
vient de celui de la ville de Médine, où on le ren-
contre souvent.
Almedini signifie de préférence civitas, parce que
Mahomet s’y était réfugié de la Mecque.
La signification variée du substantif et de l’adjecuf
qui composent le nom de ce ver chez les Arabes , est
cause que les traducteurs des auteurs de cette na-
tion lui ont donné différentes dénominations, et qu'ils
ont eu diverses opinions sur sa véritable nature.
: Ouvrage cité, introd., chap. XVI.
3 Ouvrage cité.
200 SUR LES VERS INTESTINAUX
Plusieurs de ces traducteurs ont entendu ark par
vena : Von trouve dans Halyabbas vena saniosa, ce
que Guy de Chauliac arendu, sans doute par distrac-
tion, par vena famosa et vena meden.
Rhazes appelle ce ver vena medeme ou vena civilis,
et Ebn-Sinah ou Avicenna , vena medinensis , comme
Gerard et Velsch ont rapporté.
Bertapalia l’appelle vena civilis ou medena ; Kzæmp-
fer et Cartheuser , nervus medinensis.
Alsaharavius ou Albucasis le nomme vena cruris
ou exiens ; Pedemontanus, vena egrediens ; Avenzoar,
vena medina et halalnachalaidini, ce que Velsch a tra-
duit par serpens pulposus seu musculosus , medinensis,
telæ araneæ in modum convolutus.
Montanus le nomme vena eudimini.
A Haleb, d'après Niebuhr, il est connu sous le
nom d’aerck el insil, ce qui se rapporte a vena exiens
ou egrediens.
Niebuhr, Cartheuser et Kæmpfer disent qu’on
le nomme en Perse pejunk et naru.
D’après ces deux derniers auteurs et Velsch, on
lui donne le nom de nigritien ikon, sur la Côte d’Afri-
que, en Guinée.
A la Mecque , celui de LA selon Niebuhr.
Dans l'Inde, d’après Dubois, celui de narambo ou
nurapoo chalandy.
En Bucharie, celui de irschata, selon Sam. Goul.
Gmelin.
Kæmpfer l'appelle dracunculus persarum , et Laune,
gordius medinensis.
DE L'HOMME. 201
Les auteurs allemands le désignent sous les noms
suivans : der medina wurm , der guineische fadenwurm ,
hautwurm, beinwurm, pharaonswurm, der guineische
drache.
Warenius propose de le nommer sehnadernspul-
wurm.
Les Hollandais lui ont donné les noms suivans :
huidworm , becnworm , traadworm , guineeische draakje.
Les Anglais le nomment the hairworm , guinea-worm.
Les Français, Ze dragonneau, le ver de Guinée, la
weine de Médine , d'après Labat; ou bien le ver cutané.
Les Portugais lui ont donné le nom de culebrilla.
Les Suédois , celui de onda-betet ; Tagetmatk.
Le premier qui ait fait mention de ce ver est, au-
tant que nous le savons , Agatharchides , né à Kuide;
il était historien et philosophe, et il a vécu à peu
près vers lan cent quarante ou cent cinquante avant
Jésus-Christ, du temps de Ptolomée Alexandre.
D'après quelques auteurs, il était le gouverneur de
ce dernier.
Plutarque parle de ce ver dans ses Propos de
table, et s'exprime ainsi : « Les peuples qui séjour -
, ment près de la mer Rouge ont élé tourmentés ,
comme le raconte Agatharchides, par des accidens
aussi extraordinaires qu’inouis : il sortait de leur
corps des vers en forme de petits serpens Apaxoyrız
exp, Qui rongeaient leurs bras et leurs jambes; quand
on les touchait, ils se retiraient, s’entorullaient
dans les muscles, et causaient des souffrances hor-
ribles. » Tout cela se rapporte parfaitement à notre
202 SUR LES VERS INTESTINAUX
ver, et s’accorde avec les observations des naturalistes
modernes. Cromer dit, en effet, que, quand on les
tourmente , ils causent des douleurs atroces qui sur-
passent celles de la goutte. Plutarque ajoute plus loin
(je ne sais par quelle raison ) « Ce mal avait été jus-
qu’alors tout à fait inconnu, et on ne l’a pas ren-
contré depuis chez aucun autre peuple, excepté chez
. celui dont je viens de parler, et qui était encore sujet
à plusieurs autres incommodités. »
Cette dernière phrase a engagé Licet, Nierem-
berg et Reies,ä regarder la maladie dont parle Aga-
tharchides, comnie n’ayant rien de commun avec
celle que produit le ver de Guinée; ces trois au-
teurs presument qu’Agatharchides avait probable-
ment puisé cette description dans Moïse, et qu'il
faut entendre par ce nom de petits dragons, les ser-
pens ardens dont les enfans d'Israël ont été tour-
mentés pour avoir murmuré lorsqu'ils étaient campés
le long de la mer Rouge.
Bartholin est d’un avis contraire, et prétend que
ces serpens ardens n'étaient rien autre chose que le
ver en question.
Sennert s'efforce cependant de réfuter cette opi-
nion , en disant que les Juifs avaient été attaqués de
ces serpens extérieurement, et que par celte raison
ils ne s'étaient pas formés dans leur corps.
Laissons aux docteurs en théologie à décider ce
qu’étaient ces serpens ardens des Hébreux ; ıl nous
suffit de savoir que les habitans de la cöte de la mer
Rouge sont encore actuellement souvent incommo-
|
DE L'HOMME. 203
dés par ce ver; et nous ne risquerons rien à ædopter
l'opinion d’A gatharchides. Après ce dernier, les me-
decins Soranus et Léonidas en parlent de nouveau?
mais Soranus le regarde comme un plexus nerveux.
Galien, qui ne l'avait pas vu, était assez modeste pour
ne vouloir rien décider là-dessus. Les médecins grecs
et arabes , qui ont eu occasion de l’observer , le
regardent presque unanimement comme un animal
vivant. .
Les médecins qui ne l'ont pas vu, et qui ne le
connaissent souvent que par de mauvaises traduétions,
ont eu des opinions assez singulières sur sa nature.
Ambroise Paré déclare que ce n’est qu’une tumeur
ou qu’un abcès provenant du sang âcre. Velsch et d’au-
tres ont réfuté cette opinion erronée.
Aldrovande et Montanus sont de l'opinion d’Am-
broise Pare.
Lafaye le regarde comme un aposteme occasioné
par l’épaississement du sang, et Guy de Chauliac
comme une veine allongée.
Polux croit que c’est une substance nerveuse Cor-
rompue.
Tagantius pense que c’est de la bile noire.
Wieurus prétend que ce ver est identique avec
ceux nommés en Allemagne mitesser (comedones) , mas-
clous, Sauv.
Fiélitz a très-probablement observé un dragon-
neau; cependant il ne le regarde pas comme un ani-
mal vivant, mais il w’explique pas ce que cela pou-
vait être. Cet auteur doute de même que les masclous
204 SUR LES VERS INTESTINAUX
soient de véritables animaux ou bien de véritables
vers vivant dans la chair ; il prétend les avoir observés
une fois, et croit que ce ne sont que des tumeurs en-
kystées ou bien des glandes de la peau.
Meyer a sûrement supposé à tort que le ver ob-
serve par Fielitz était un gordius aquatique.
Les médecins qui ne connaissaient le dragonneau
que par oui-dire ou par des descriptions , doivent
être excusés quand ils portent des jugemens erro-
nés sur sa nature; mais il est inconcevable que
M. Larrey, qui aurait pu recueillir des renseigne-
mens exacts la-dessus pendant qu'il était en Égypte a
ait prétendu que ce ver n’est rien autre chose qu'un
preduit de l’opération que l’on pratique pour l’ex-
taire , et que la chose que l’on regarde comme un ver
n'est que du tissu cellulaire frappé de mort, d’où il
conclut que la maladie n’est qu'un furoncle. Il tâche
de soutenir son opinion en disant qu'il a opéré deux
guérisons uniquement par des remèdes qui facilitaient
la formation du pus, et sans faire l'extraction du ver.
Mais nous verrons plus loin que cela ne prouve rien
du tout, et qu’une pareille guérison s'accorde tres-
bien avec l'existence du ver.
L'opinion de M. Larrey est réfutée par les obser-
vations de Kæmpfer, qui a extrait deux fois ce ver
vivant du scrotum; elle est encore réfutée par les
observations de Bajon, de Gallandat et de Dubois,
qui ont remarqué que ce ver jouissait réellement de
la vie”.
* M. Delorme a yu distinctement des mouyemens d’ondulation
DE L'HOMME. | 205
Peré et Kæmpfer ont vu sortir une humeur blan-
châtre quand on l’incisait ou quand on le déchirait.
L'expérience nous démontre encore qu'on ren-
contre des filaires, non-seulement chez les animaux
à sang chaud, mais encore chez les reptiles et les
poissons, et même dans les insectes et leurs larves.
Quelle raison pourrait alors nous engager à douter de
l'existence de celui qui se trouve dans l'homme?
La plupart des médecins et des naturalistes qui ont
eu occasion de l’observer, conviennent qu'il faut le
regarder comme un animal vivant, mais ils ne s’ac-
cordent pas quand il s’agit d’assigner à quelle classe
ou à quel ordre d’animaux il doit appartenir ; quel-
ques-uns le regardent comme une larve d’insecte,
d’autres le confondent avec le gordius aquaticus.
Les défenseurs de la première opinion prétendent
qu'un insecte dépose, dans quelquet cas, son œuf
sous les tégumens sans que l’on s'en apercoive, que
sa larve y éclot, et qu’elle y parvient à une longueur,
sans parler de la grosseur , qui diffère totalement de
celle des larves d'insectes.
L'on pourrait objecter à cette opinion ,
1°. Que personne n'a encore vu l'insecte qui,
comme on le suppose, pourrait donner lieu à la for-
mation de pareilles larves, et si cette supposition
était fondée, nous serions encore obligés de croire
sur ce ver, et un jeune nègre sentit de pareils mouvemens pro-
venant de la portion de ver qui était restée dans l’intérieur de son
pied. Voyez Journ. de phys., chimie , etc, , par M. Ducrotay de
Blainville, Août 1818, p. 155 (Br.).
206 SUR LES VERS INTESTINAUX
qu'il y aurait autant d'espèces de ces insectes qu'il y
a d'espèces de filaires.
Du reste, il n’y a aucune raison plausible pour ad-
mettre que les filaires qui séjournent dans lesanimaux
n'aient pas la même origine que celui de l’homme.
Nous en rencontrons dans toutes les classes du
règne animal. Dans les singes nous observons sou-
vent des filaires qui ressemblent beaucoup à celui de
l’homme. On en trouve également dans les cochons,
les chevaux, les cerfs et les bœufs ; l’on remarque des
filaires assez souvent dans la cavité thoracique et ab-
dominale des oiseaux de proie, et dans plusieurs es-
pèces de corbeaux. Ils sejournent sous les tégumens
dans le tissu cellulaire du rollier (coracias garrula ,
L.), et chez d’autres oiseaux dans d’autres endroits
de leur corps. On en voit également dans les gre-
nouilles, les serpens et les poissons, comme par
exemple dans le cyprinus gobio et dans le cyprinus
phoxinus ; ils entourent le foie de ces poissons; 1l
n’est pas même rare d’en rencontrer dans les insectes
et leurs larves. Tous ces filaires forment des espèces
distinctes , et s'ils n'étaient originairement que des
larves d’insecte, il faudrait alors admettre , comme
nous l'avons déjà démontré, qu'il y aurait autant
d'espèces de ces insectes qu’il y a d'espèces de filaires,
et comme les animaux chez lesquels on les rencontre
vivent les uns dans l’eau et les autres dans l'air, nous
devrions par conséquent trouver également ces in
sectes dans ces deux élémens, car sans cela les pois-
sons et les oiseaux ne pourraient pas être incommo-
DE L'HOMME. 207
dés des mêmes vers en même temps. Mais jusqu’à
présent nous n'avons pas encore rencontré cet insecte
ni dans l’un ni dans l’autre de ces élémens ; par cette
raison il est bien permis de douter de l'existence
d’un insecte dont le ver de Médine serait la larve.
2, Chaque insecte dans l’état libre ne dépose ses
œufs que dans un endroit où sa larve trouve non-seu-
lement une nourriture convenable, mais aussi l’oc-
casion d'arriver facilement de là à un endroit dans
lequel elle puisse attendre son développement com-
plet. Les oestres ( oestri) nous fournissent une preuve
remarquable de cela ; leurs larves , comme quelques
autres insectes ( par exemple les pous et les puces),
ne peuvent conserver leur existence qu'aux dépens
d’autres animaux. Les oestres, par cette raison, dé-
posent leurs œufs dans différens animaux, mais les
individus de chaque espèce d’oestres déposent seule-
ment leurs œufs dans les animaux de tel ou tel genre;
ils placent leurs œufs dans des endroits differens ,
mais toujours dans ceux d’où leurs larves peuvent ai-
sément , avant de se changer en chrysalides , parvenir
dans la terre pour y passer à cet état , et par suite ac-
quérir leur développement complet *. Mais cela se
passe tout autrement chez les filaires. Un individu
de cette espèce n'est jamais sorti spontanément du
corps de l’homme, et ceux qui en ont été extraits vi-
Vans sont morts bientôt après. Du reste, nous ne
connaissons aucune observation qui puisse nous
* Voyez Bracy Clarck.
208 SUR LES VERS INTESTINAUX
mettre en droit de présumer que ces prétendues
larves se changent en chrysalides dans l’intérieur du
corps animal (comme par exem ple les larves d’ichneu-
mon), et qu'elles ne le quittent que sous la forme
d’insecte parfait. Les larves elles-mêmes n’existent
que momentanément sous cette forme. Ilsuitde là que
le mode de génération des oestres ne peut pas être
appliqué aux filaires , et que le corps humain ne peut
pas être regardé comme l'endroit que la nature au-
rait assigné à ces insectes pour le développement de
leurs œufs; car sans cela leur espèce aurait dù être
détruite déjà depuis long-temps.
3°, Si même l’on pouvait croire que ces insectes
fissent une exception, en supposant qu'ils prépare-
raient, pour ainsi dire, un sort incertain à leurs des-
cendans, en déposant les.œufs dont ils devraient pro-
venir, ou dans des endroits qui nous sont inconnus
jusqu’à présent, ou bien, par une sorte de caprice,
dans un corps animal où ils devraient être nécessai-
rement détruits comme larves; l’on ne concoit pas
alors pourquoi chaque espèce de ces insectes choisi=
rail toujours pour y placer ses œufs une espèce par-
ticulière d’arimal qui servirait de tombeau à sa race.
S'il était une fois décidé que l'insecte dût périr
comme larve, il devait être alors indifférent que
cela arrivât dans un mammifere ou dans un o1-
seau. L'opinion que les filaires proviennent de larves
d'insectes n’est par conséquent appuyée sur aucune
preuve valable.
J'ai été obligé de m’arrêter plus long-temps que je
DE L’HOMME. 209
ne le voulais à réfuter cette hypothèse, parce qu'on
ne l’a pas encore tout à fait abandonnée.
Brera est encore incertain sur ce qu'il doit en
croire , et il termine sa definition, an haeruca ? |
Jcoerdens combat l'opinion de ceux qui regardent le
- dragonneau comme une larve d’insecte, mais il croit
que ce ver est identique avec le gordius aquaticus , L.
Joerdens explique l'introduction de ce ver dans le
corps animal d’une maniere peu intelligible, comme
Sci ? Au L , à
on peut le voir par le’ passage suivant". « Je regarde
-comme plus probable l'opinion de ceux qui confon-
dent le gordius aquatique avec le filaire, qui le font
vivre dans l’eau, maïs qui ne le font cependant pas
arriver par la bouche dans le corps animal. Des natu-
ralistes prétendent aussi que ce ver s’introduit, étant
très-petit, et non complétement formé, sous la peau
pendant que l’on se baigne ou que l’on entre seule-
ment dans l’eau les pieds nus, et qu’il y parvient à ha
longueur extraordinaire qui lui est propre; car il
n’est pas probable qu’un ver aussi long, c’est-à-dire
complétement formé, puisse s’introduire sans causer
des douleurs, et sans que le malade s’en aperçoive , à
travers les tégumens et les muscles, et avec une assez
grande rapidité pour qu’on ne püt le saisir et l’ex-
traire sur-le-champ. Il doit être extrêmement fin à l'é-
poque à laquelle il pénètre; l'extrémité antérieure
ne doit pas être obtuse, mais au contraire capillaire,
afin qu’elle puisse s’'introduire dansles pores dela peau
? Ouvrage cité , p. 99-
14
210 SUR LES VERS INTESTINAUX
d’une maniere insensible. Cette introduction doit
avoir lieu dans un terrain sablonneux ou dans la
poussière, mais non pas dans l’eau, car les mouve-
mens de cette dernière ne permettraient pas à un
corps aussi léger de s'attacher à la peau. » Jœrdens
paraît avoir oublié à la fin du paragraphe ce qu'il
a dit au commencement; du reste l'on ne con-
coit pas de quelle manière les jeunes ou bien les pe-
tits de ces animaux aquatiques pourraient arriver
dans du sable sec.
Outre Joerdens, il y a encore plusieurs autres per-
sonnes qui regardent le ver dont nous nous occupons
comme identique avec le gordius aquaticus, et qui
croyent qu'il arrive dans l'animal avec l’eau qu'il boit
ou lorsqu'il se baigne.
Leefler, qui a habité les contrées de l'Afrique dans
lesquelles les hommes sont incommodés par ce ver, a
pris des informations exactes à ce sujet, et 1l n’a ja-
mais appris qu'on l'ait observé dans l’eau.
Liod, qui a eu aussi l’occasion d'examiner l’eau de
ces contrées , n'y a jamais vu de traces de ces vers ni
de leurs œufs.
Pallas” a rapporté qu'il n’a rencontré nulle part
une aussi grande quanuté de gordius aquaticus , que
dans le lac de Waldei. «Gependant je n'ai jamais pu
apprendre (ce sont les paroles de:cet auteur), que
l'on ait trouvé de ces vers sous les tegumens de
l'homme. » Si, par conséquent, l’on ne trouve pas le
2 Reisen durch Russland , ı. s. 3.
’ DE L'HOMME. 211
dragonneau dans l’eau des régions où les hommes en
sont incommodés, et si d’un autre côté les hommes
ne sont pas non plus incommodés par ce ver dans les
endroits où les gordius aquatiques se trouvent en
grande quantité, il résulte de là que ces deux vers ne
peuvent pas être identiques. Nous sommes alors obli-
ges d'admettre que le dragonneau se forme de la
même manière que les autres vers intestinaux , c’est-
à-dire spontanément, dans le corps animal , et qu’il
faut le regarder comme un ver sui generis, qui peut
seulement se reproduire dans le corps de l’homme.
On remarque cependant une particularité tou-
chant la génération de cet animal. D'abord on ne le
rencontre pas dans toutes les contrées, ni dans toutes
les parties du monde; ensuite ce ver n’incommode
pas seulement les natifs des contrées dans lesquelles
il séjourne, mais encore les étrangers qui y arrivent,
de quelque nation qu'ils soient.
Il ne se produit jamais spontanément en Europe,
mais on a souvent remarqué que les Européens qui
revenaient de ces contrées l'en ont apporté. Le dra-
gonneau ne se montra chez Cromer’ qu'après qu'il
fut de retour en Suisse, de ses voyages.
La zone torride est, d’après Kunsenmüiller, la véri-
table patrie de ce ver , cependant on ne le rencontre
pas dans tous les pays situés sous le tropique. Il
se trouve principalement dans l’Arabie Pétrée, sur
les bords du golfe Persique , de la mer Caspienne,
* Voyez Wepfer, dans les Eph. nat. cur.
212 SUR LES VERS INTESTINAUX
du Gange , dans la Haute-Egypte, en Abyssinie, et
en Guinée.
D’apres Loeffler on le trouve le plus souvent en
Afrique dans les colonies anglaises et hollandaises.
Cet auteur-ajoute que cette fréquence n’est pas la
même partout. Parmi deux cent vingt esclaves que l’on
avait achetés à Capmonte, à Messerade et à la Hou,
il ne s’en trouva qu’un seul qui eùt un dragonneau
dans le gros orteil; et parmi six cents esclaves afri-
cains achetés à Angola, il n’y en avait aucun qui en
füt incommode.
Sloane prétend également que les nègres qui arri-
vent à la Jamaïque d’Angola et de Gamba ne souf-
frent jamais de la présence du dragonneau.
D'après Bosmann, on l’observe sur toute la côte de
“Guinée, mais principalement à Cormantiaet à Apam.
D’après Linchot on le rencontre dans l’ile d’Or-
mus et surtout dans le château de Mourre,
D’après Lachmund et Arthus, on le trouve rare-
ment a Acra. Dans le château appelé Joris de Minna
et aux environs, il est tellement commun, que Hem-
mersan dit en plaisantant, que l’on éprouve déjà des
‘ démangeaisons sous la peau lorsqu'on ne fait que de
passer à la voile devant ce château. Mais d’après Ar-
thus on ne connaît pas cet animal vingt-cinq lieues
plus loi du côté du nord.
D’apres Gregor , le quatre-vingt-sixieme régiment
anglais n'avait pas un seul homme incommode de ce
ver avant qu'il arrivat à Bombay en septembre 1780.
Il en fut de même jusqu'à l’époque où règne la
DE L'HOMME. 213
mousson; mais alors trois cents soldats en furent at-
teints. Le quatre-vingt-huitième régiment, qui avait
‘campé sur l'ile de Coulabah depuis le mois de juin
1799 jusqu’au mois d'octobre 1800, n’en fut nulle-
ment incommodé. Cette île n’est cependant éloignée
que d’une lieue anglaise de Bombay, et ce n'est qu’a-
près avoir remplacé le quatre-vingt-sixième, qui
était en garnison dans cette dernière ville, qu'un
homme en fut atteint. À près un séjour de deux mois
dans ce dernier endroit, le régiment fut embarqué,
et ce n’est qu'à celte époque que cette maladie se de-
clara d’une manière extraordinaire; parmi trois cent
soixante hommes, cent soixante-un en furent incom-
modés. Le séjour de Bombay paraît principalement
donner lieu à cette maladie. Le vaisseau sur lequel
Paton se trouvait, avait fait voile, le 15 août 1804, de
celte dernière ville pour se rendre en Chine; pendant
la traversée, un homme fut incommodé d’un dra-
gonneau ; le 5 janvier le malade fut mis à terre. Le
vaisseau partit le même jour de Canton, et des ce mo-
ment personne de l’équipage ne mit pied à terre jus-
qu’à l’arrivée du vaisseau à Sainte-Hélène, qui eut
lieu le 2 avril; le ver se montra alors pour la pre-
miere fois, le trente mai, chez un homme qui n'avait
jamais débarqué. Cet animal n’est pas connu dans
celte île , et sur les bätimens qui y mouillaient alors,
ıl n'y avait personne qui en füt attaqué. Parmi deux
cents hommes qui formaient l’équipage , vingt-six en
furent incommodés successivement. Il me paraît pro-
bable qu'ils avaient gagné cette maladie à Bombay.
214 SUR LES VERS INTESTINAUX
Le dragonneau règne d’une manière endémique au
Sénégal , à Gabon, etc. , rarement à Gongo , d’après
Peré; il se répand d’une manière endémique, d’a-
près Dubois, dans les Indes-Orientales, et quelque-
fois, surtout dans les mois de novembre , décembre,
janvier , la moitié de la population d’un village en est
attaquée à Latimunculum et dans le district de Kar-
natık et de Madura*.
Sloane remarque qu'il se montre plus souvent
dans une année que dans une autre, et Kæmpfer dit
que plus il fait chaud , plus il y a de ces vers. D’après
Niebuhr‘, le dragonneau est tres-commun à Jemen,
dans la presqu'ile de l’Inde, et à Gambron ou Bender
Abbas, en Perse.
En A mérique il ne se montre que parmi les nègres,
qui ne font que d’y arriver de l'Afrique. L’ile de Cu-
racao fait cependant exception; car d’après Dampier,
les blancs et les noirs en sont indistinctement atteints.
Le feu baron de Jaquin m’a également assuré que
l’on peut admettre que le quart de la population de
cette île, tant noirs qu’indigenes , en souffre. 11 m’a
dit aussi que deux de ces vers s’étaient développés
chez un de ses compagnons de voyage, qui était Eu-
ropéen, et qui n’avait jamais été auparavant ni en
Asie ni en Afrique; il a ajouté que le dragonneau
est inconnu dans les îles environnantes.
: Dans l'ouvrage cité il y a Madéra; ce que je dois regarder
comme une faute d'impression, car Karnatik est bien dans le voisi-
nage de Madura, mais non pas de Madéra.
DE L'HOMME. 215
Les naturalistes ont des idées ıres-differentes sur la
nature de cet animal, ou plutôt sur les causes de sa
formation. 1
Plusieurs croient que la mauvaise qualité de l’eau
favorise son développement; Bernier , Bruce, Char-
din, Dampier, Dubois, Galandat, Linchot, Lister
et Niebuhr sont de cette opinion; ce dernier raconte
que lon fait filtrer l’eau a Jemen à travers de la toile
afin de s’en garantir.
Arthus remarque que les habitans de Pile d’Ormus
font par cette raison puiser l'eau de mer à dix-huit
toises de profondeur, et Galandat prétend que ceux
qui ne boivent pas d’eau en Guinée ne sont pas alla-
qués par ce ver. D’autres attribuent les causes de sa
formation à l'usage du vin de palmier, de certains
poissons, du froment de l'Inde, du pain que les
Iudiens appellent kauhkiens, ou bien à un exercice
immodéré de l'acte de la génération ; d’autres regar-
dent le vent ou les rosées du pays comme causes de
sa formation. Mercurialis croit qu’on le gagne eu
mangeant des sauterelles. Le docteur Kier est de
l'opinion que ces vers sont introduits dans le corps
animal au moyen des vents et de la pluie, mais 1l
n’explique pas de quelle manière leurs ceufs ont pu
arriver dans l'air ou dans la pluie.
Ce médecin, ainsi que les docteurs Heath et An-
derson observent que les ofliciers, qui ne se prome-
nent ni ne se couchent pas sur la terre, les pieds et
les bras nus, n’en sont pas affectés.
Quelques personnes regardent celte maladie comme
216 SUR LES VERS INTESTINAUX
contagieuse , et Lind conseille aux Européens de ne
pas fréquenter les nègres qui en sont attaqués, et de
ne pas coucher dans la même chambre.
Grégor et Ninian Bruce sont également portés à
croire que celte maladie est contagieuse. L’on peut
très-bien expliquer pourquoi, dans l’exemple cite
plus haut, elle ne se fit pas voir aussi souvent sur le
vaisseau, après que l’on eut séparé les malades de
ceux qui se portaient bien, car cette maladie s’était
déjà déclarée chez la plus grande partie de ceux qui
l'avaient gagnée à Bombay.
Les faits suivans prouveront quel peu de cas lon
doit faire des causes que l’on a regardées comme pré-
disposantes de la production de ce ver.
Arthus raconte que quelques personnes quiavaient
évité soigneusement ces causes, en furent néanmoins
atteintes, tandis que d’autres qui s’y exposerent har-
diment ne le furent pas.
Anderson ' a prouvé à Dubois que les hommes qui
demeurent le long des rivières en sont aussi bien at-
taqués que ceux qui boivent de l’eau provenant des
citernes.
Lorsque le baron de Jaquin arriva à Curacao ‚on
l'informa que l’on gagnait ce ver par l’usage de l’eau:
tres-bien, répondit le compagnon de voyage dont nous
avons parlé plus haut, je promets de n’en pasboire une
goutte; et, malgré qu'il ait tenu parole (ce qui ne
lui a pas coûté beaucoup, comme on le prétend ), ila
été le seul qui en ait été atteint , tandis que Jaquin,
* Voyez l'ouvrage de Dubois.
DE L'HOMME. 217
qui n'était pas accoutume aux boissons spiritueuses ,
et qui par conséquent était obligé de s’en tenir à l’u-
sage de l’eau , ne le fut pas.
Cromer, qui attribue la production de ce ver uni-
quement à un air malsain , fait mention d’un général
hollandais qui demeurait à Angola‘, et qui ne put
s'en garantir, malgré qu'il'ne fit usage que d’ali-
mens et de boissons provenant de l'Europe.
Chardin, qui a parcouru cinq ou six fois les ré-
gions de la Perse où l’on rencontre souvent ce ver,
n’en a jamais été affecté.
Ninian Bruce dit par conséquent avec raison que
son origine est encore couverte d’un voile épais.
Description du dragonneau.
L'on ne peut pas ajouter grand’chose à la defini-
tion que nous avons donnée plus haut de ce ver, à
cause de l’extrême simplicité de sa conformation. Je
crois que mes lecteurs pourront s’en former une idée
exacte par la figure 1, pl. 8, qui est une copie fidele
d’un dragonneau très-petit que M. Rudolphi a fait
dessiner d’après nature.
Notre collection en possède un individu que Fer-
ger, professeur de Copenhague, a eu la bonté de
nous envoyer, mais Vesprit-de-vin l’a tellement rem-
bruni, qu'il n’était pas propre à être dessiné.
: Ce général a dü auparavant s'arrêter à une autre place de dé-
barquement , car on n’observe pas de dragonneaux, d’après le
témoignage de Loefller et de Sloane, à Angola.
213 SUR LES VERS INTESTINAUX
Ce ver est d’une couleur blanche et presque d’une
égale grosseur d’un bout à l’autre, si ce n’est à son ex-
trémité postérieure, qui est plus amincie et un peu
recourbée.
Kæmpfer observe que sa tête est pourvue d'une
petite trompe, qui est appelée par les Perses la barbe,
et qui, examinée au microscope , semble, à ce que
l'on prétend, être formée par de petits poils.
Fermin , Hemmersan et Lachmund disent avoir
observé à l'extrémité de la tête deux filamens que l’on
pourrait appeler ‚selon eux ‚des poils ou des antennes.
Mais ces filamens provenaient peut-être d’une lésion
du ver, ou bien n'étaient que des restes d’un peu
de ussu cellulaire. Il arrive en effet souventquele ver
étant déchiré, se montre de nouveau dans un endroit
assez éloigné de celui où il a d’abord paru. Ne pour-
rait-on pas alors croire que la fin de la queue ait pu sor-
tir la première dans quelques cas, et que ces deux
filamens n’étaient rien autre chose qu’un double pénis.
Le cas observé par Kæmpfer, et dans lequel le
dragonneau se faisait voir au creux du jarret, quoi-
qu'il eut son point d’adhérence au gros orteil > paraît
venir à l’appui du cette supposition.
Andry et Galandat se sont assurément trompes en
supposant que ce ver élait pourvu d’une tête à chaque
extrémité.
Les auteurs ne sont pas non plus d'accord quant à
sa longueur.
Albucasis dit qu'il y a des individus de trois, dix,
jusqu’à vingt pieds de long.
x
DE L'HOMME. So
Barère prétend que sa longueur est quelquefois de
six aunes.
Dampier observe qu’elle est de cinq à six verges-
Dubois en a vu qui avaient plus d’une aune de lon-
gueur et qui étaient gros comme le Za d’un violon.
Louis Franck indique sa longueur de quatre à six
pieds, Gallandat de huit à douze, Gmelin de plu-
sieurs aunes, Hemmersan d’une aune el demie, tan-
1öt gros comme un fil, et quelquefois aussi gros
qu’une ficelle. Celui que Gründler a reçu de Malabar
avait trois pieds et demi ; il était de la grosseur d'une
ficelle et d’une couleur jaunätre qui provenait peut-
être de l’esprit-de-vin dans lequel il était conservé.
Celui qu'Isert possède a deux aunes de longueur ,
et il est de la grosseur d’un fétu de paille.
Kunsenmüller n’a jamais vu de dragonneaux dépas-
ser la longueur de deux pieds.
Heath a observé soixante-quatorze malades qui en
étaient incommode&s, et 1l rapporte qu'il y en avait
parmi eux plusieurs qui avaient deux, trois, quatre
même cinq vers , dont la longueur la moins considé-
rable était de neuf pouces, et la plus grande de qua-
rante-deux.
Bajon a vu un ver de six aunes de longueur, et
Bruce dit qu'il est rare d’en voir au-dessous d’un pied
et demi et au-dessus de six. Cromer, dans l'ouvrage
de Wepfer, indique sa longueur de deux aunes, Labat
de six, et Lister de six à sept aunes.
D’apres Scheeler, il ne dépasse jamais la longueur
de deux à trois aunes.
220 SUR LES VERS INTESTINAUX
Hutcheson et Forbes en ont d’abord extrait à un
malade trois aunes et demie (mesure anglaise ) pro-
venant d’une tumeur, et dans l’espace de huit se-
maines plus de trente aunes provenant de plusieurs
autres tumeurs.
Arthus prétend qu’un second ver se présente sou-.
vent dans le même trou aussitôt que le premier en est
sorti.
M. Rudolphi, en indiquant la longueur du ver de
deux, huit et douze pieds, observe qu'il est possible
que l’on ait mesuré plusieurs individus ensemble.
Cependant, si l’on juge d’après l’analogie , il est
concevable que ces vers puissentatteindre la longueur
la plus considérable dont il a été fait mention par les
auteurs ; car nous possédons des filaires provenant de
petites sauterelles qui sont de la longueur de quinze
pouces *.
Ce ver séjourne ordinairement dans le tissu cellu-
laire, au-dessous des tégumens. M. Rudolphi pré-
sume cependant qu'il pourrait bien aussi se montrer
dans l’intérieur du corps, comme cela arrive pour
l'espèce de filaire que l’on rencontre quelquefois dans
la cavité abdominale des singes. Cette supposition,
qui n'est pas dépourvue de probabilité, n’a cepen-
dant pas encore été prouvée par aucune observation.
Onrencontre le dragonneau le plus souvent auxex-
trémités supérieures et inférieures , surtout aux infé-
rieures , entortillé autour des malléoles; mais toutes
* Je possède maintenant un filaire provenant d’une sauterelle ,
qui est d’une longueur de trente pouces. (Br.)
DE L'HOMME. 221
les autres parties du corps peuvent également en
être affectées.
Kæmpfer l’a extrait vivant deux fois, d’une seule
‘traction , du scrotum.
Baillie * a vu un testicule sur lequel il y avait une
petite tumeur qui contenait un de ces vers.
Peré Ya rencontré à la tête, sur le cou et au tronc.
Bajon l’a vu deux fois sous la membrane externe
du globe de l'œil, et il est heureusement parvenu à
Vextraire en totalité au moyen d’une incision.
Le ver que Mongin a reuré de l'œil d’une né-
gresse, moyennant une incision, paraît, d’après la
description de ce médecin, avoir été un filaire.
Gregor a publié un recueil de cent quatre-vingt-
une observations sur le dragonneau. Cet animal s'est
montré dans®e nombre cent vingt-quatre fois aux
pieds, trente-trois fois aux jambes, onze fois aux
cuisses, deux fois au scrotum et deux fois aux mains.
Quelquefois il est placé assez superficiellement,
et on peut alors aisément le sentir par le toucher,
mais quand cela a lieu, il arrive bien souvent que
l'on se trompe dans le diagnostic, et qu’on le prend
pour un vaisseau variqueux; quelquefois il est caché
plus profondément entre les muscles.
Cromer, en faisant des autopsies cadavériques, a
observé qu'il entourait les nerfs et les tendons. Il est
très-souvent contenu dans un tres-pelit espace, con-
tourné en forme de cercle à la manière des serpens.
Cela a surtout lieu lorsqu'il entoure les malléoles;
* Ouvrage cité, p. 439.
222 SUR LES VERS INTESTINAUX
quelquefois on le trouve allongé le long des bras et
des cuisses.
Peré l’a vu s'étendre en forme de serpent sous les
tégumens de l'abdomen, et en partie sous ceux du
thorax.
Kæmpfer a observé un cas où il se présenta au
creux du jarret. Ghaque traction que l’on exercait sur
lui mettait le grand orteil en mouvement, comme s’il
eùt été tiré par une ficelle, ce qui causait des dou-
leurs tres-fortes Il se forma par la suite de la sup-
puration en cet endroit, d'où le ver sortit en effet.
Chez un autre malade, il s'était creusé une route à
travers le mollet, et entourait la malléole avec le
milieu de son corps; l’autre extrémité s'était frayé -
une issue à travers la plante du pied.
Chardin assure qu’il n’a jamais entébdu dire que
Von puisse être incommodé de plusieurs dragonneaux
à la fois ; cependant tous lesautresauteurs affirment le
contraire; Bajon a dit même qu'il est rare de n’en
rencontrer qu'un seul à la fois dans le même indi-
vidu.
Bosmann raconte que leur nombre se monte quel-
quefois à neuf, à dix; et Arthus cite des cas dans
lesquels il en a souvent vu dix à douze réunis, et qui
se présentaient dans différens endroits du corps.
Andry* a fait mention d’un cas où il y en avait
vingt-trois chez le même individu.
Un cuisinier qui se trouvait sur le vaisseau de
" Ouvrage cité ; p. 94.
DE L'HOMME. 223
Hemmersan en avait trente, dont trois ou quatre
sorlirent toujours à la fois.
Poupée Desportes ' a vu un exemple où il y en
ayait jusqu’à cinquante.
Du diagnostic de l'existence du dragonneau dans
l’homme.
”
Gallandat, un des meilleurs auteurs qui aient
écritsur cesujet, s'exprime en ces termes. « Aussitöt
que quelqu’un se plaint (dans le pays où ce ver sé-
journe), d’une démangeaison désagréable sur une
partie quelconque du corps, surtout aux pieds, l’on
peut déja présumer la présence du dragonneau.
Cette supposition gagne encore en probabilité s’il se
forme une tumeur qui prend les caractères d’un fu-
roncle. »
Cependant ıl peut rester long-temps caché dans le
corps sans causer la moindre incommodité ; le ma-
lade éprouve tout au plus la sensation d’un corps qui
rampe sous la peau.
La présence de cet animal ne se déclara chez Dam-
pier qu’au bout de cinq à six mois, et chez Isert
qu’au bout de huit mois après qu’ils eurent quitté le
pays dans lequel le dragonneau se trouve. Ni l’une
ni l’autre de ces deux personnes n'avait éprouvé la
moindre incommodité avant ce temps-là.
Arthus, Bernier et Labat prétendent que cet ani-
* Voyez Kunsenmüller, sur les maladies de Saint-Domingue.
224 SUR LES VERS INTESTINAUX
mal peut rester caché un an et même quinze mois
sans donner le moindre signe de son existence, comme
cela paraît avoir eu lieu chez le malade dont Paton
fat l’histoire.
Cromer fixe cette époque à plusieurs années.
Kæmpfer cite un exemple où le ver ne se montra
qu'après un espace de trois ans, sans que le malade
eût éprouvé la moindre incommodite pendant ce
temps-là.
Cependant il n’en est pas de même chez tous les
malades.
D'après Peré ils meurent souvent cachectiques ,
sans cependan. éprouver ni fièvre ni perte d’appetit
jusqu’au dernier moment de leur existence.
L. Frank dit également que quelques personnes
meurent d’epuisement , si l'on ne vient pas à temps
à leur secours.
Bajon prétend qu’il n’a observé aucun deperisse-
ment chez les malades.
Peré cependant appuie son assertion sur une ob-
servation dont nous parlerons plus bas, et qui met
la chose hors de doute. Cela est également demon-
tré par la maladie dont Drumont fut atteint. Il
s'exprime en ces termes : « Je sentis, à la fin de no-
vembre 1791, une roideur et un peu de douleur à la
partie inférieure des jumeaux de la jambe droite, à
l'endroit où les tendons de ces muscles se réunis-
sent pour former le tendon d'Achille. Cette douleur
n’était jamais très-considérable , et elle ne me genait
pas en marchant. Quelques jours après, j'observai à
1
DE L'HOMME. 295
cette partie une tumeur qui cependant n'était accom-
pagnée ni de changement de couleur à la peau , ni de
douleur. Quelques jours après l’apparition de la tu-
meur , il se montra, à la partie interne de la jambe,
à peu près un pouce au-dessus de la imalléole du
même côté, et à la partie musculaire de la jambe,
derrière le tibia, une petite pustule rougeätre, avec
un point noir au milieu. Je sentis en même temps,
tres- distinctement , sous la peau, une substance
compacte et cylindrique, et il m'était facile de suivre
avec le doigt, sur un trajet assez considérable, la po-
sition de l'animal, qui s’etendait obliquement, et en
serpentant, derrière la partie supérieure et postérieure
de la jambe. Quoique je reconnusse alors la nature
de cette maladie , je ne crus pas cependant nécessaire
d'employer quelque chose contre elle, pour empé-
cher ses progrès, ou plutôt pour détruire le ver;
mais , je l'avoue, je ne connaissais pas non plus un
remède capable d’atteindre ce but. Je pensai que le
ver chercherait un jour à sortir , et qu’il était plus pru-
dent de ne pas le tourmenter. Dans la nuit du 17 dé.
cembre, quelques jours après l'apparition de la pus-
tule, et après m'être couché bien portant, je me ré-
veillai à deux heures du matin, éprouvant sur tout le
corps une démangeaison insupportable, qui me for-
cait de me gratter d’une maniere extraordinaire. Je
sentis bientôt après une forte chaleur à la figure ; je
m’apercus aussi, en me regardant dans une glace,
que mon visage était d’un rouge foncé , et que les
muscles étaient gonflés et dans un état convulsif. En
15
226 SUR LES VERS INTESTINAUX
touchant avec les doigts les parties de mon corps,
qui me démangeaient beaucoup, je découvrais un
Epaississement, comme s’il était dans la peau même,
et il me semblait qu’elle était remplie de nodosi=
tés. Pendant que je réfléchissais pour m'expliquer
ces. accidens sur lesquels je n’avais aucune connais-
sance, je fus atteint de coliques violentes ; je fis des
efforts pour vomir , et je finis par le faire et par aller
à la selle. Je rendis, par haut et par bas, de la bile
et une matière acide, mais en si petite quantité,
que je croyais que les accidens que j'éprouvais ne
pouvaient pas avoir éLé provoqués par la présence de
ces humeurs. Les vomissemens durerent, autant que
je me le rappelle, plus d’une demi-heure, sans pres-
que discontinuer ; ei pendant tout ce temps, les dou-
leurs continuèrent avec une égale force. Ces acci-
dens furent suivis d’un froid tres-violent qui dura
pendant plusieurs heures, et qui ressemblait au fris-
son, d’une violence peu commune , que l’on éprouve
dans les fievres intermittentes. Lorsque les vomis-
semens eurent cessé, je me couchai, et l’on me cou-
vrit de plusieurs couvertures de laine. Je com-
mencçai à me réchauffer peu à peu, et je m’endormis.
Je craignais que le froid ne füt suivi d’une chaleur
extraordinaire ; mais cela n'eut pas lieu, et en me
réveillant le matin, je ne trouvai qu’un peu de
moiteur aux pieds. La pustule avait crevé pendant
la nuit, et il parut une substance dure et blanche;
mais elle était tellement profonde, qu’on ne pouvait
pas la saisir. L'animal avait changé de position pen-
DE L'HOMME. 227
dant Ja nuit, et il s'était glissé sous les muscles à une
profondeur assez considérable, de manière que lon
ne pouvait plus le sentir avec le doigt. Je pouvais en-
core le distinguer le 17 par le toucher ; mais il avait
disparu entièrement le 18. L'accès éprouvé dans la
nuit m'avait un peu affaibli; mais je ne fus nulle-
ment incommodé le jour suivant, et jen’eus pas même
de rechute dans la nuit du 18; cependant il s'était
formé une inflammation très-considérable autour
de la malléole , ce qui m’empêcha de marcher le 19;
et je fus même obligé de garder une position hori-
zontale. Le 22, je passai, à travers la plaie résultant de
l'ouverture de la pustule, un fil, afin d'atteindre, par
ce moyen , une des extrémités de?’animal , qui était
ires-dure au toucher, et fortement implantée dans
les chairs. L’irritation provoquée par l'opération
occasiona une évacuation considérable d’une hu-
meur aqueuse; il resta une plaie très-douloureuse à
l'endroit de la pustule, avec un écoulement de ma-
tieres ichoreuses et teintes de sang. Cet état de choses
dura jusqu’au commencement du mois de février
1792, époque à laquelle la plaie se cicatrisa, sauf
une très-petite ouverture. L'animal se montra alors
de nouveau , et je fus assez heureux de pouvoir le
saisir à l’aide d’un fil. Quelques autres personnes et
moi nous roulâmes le ver sur une baguette, et nous
exercämes deux fois par jour des tractions à la ma-
nière accoutumee. Apres l'espace de vingt jours,
nous parvinmes à l’extraire complétement. Le ver
avait plus de deux aunes de long, et sa grosseur
15.
228 SUR LES VERS INTESTINAUX
égalait celle d’une plume de corbeau. Après que
nous en eùmes retiré la moitié, sa grosseur dimi-
nua peu à peu. Je remarquai que l'application de
feuilles d’aloës , aussi chaude que je pus l’endurer,
sur la partie dure, douloureuse et gonflée du pied,
facilitait sa sortie. Les frictions fortes produisaient
le même effet. Pour pouvoir les supporter plus
long-temps, et avec moins de douleur, je me fis
frotier avec un corps gras; le ver s'était entortille
dans plusieurs endroits du pied en forme de pe-
tits pelotons, sur lesquels nous dirigeämes surtout
les frictions. Il m'a paru que l'emploi de feuilles.
d’aloes, et surtout les frictions, causèrent une ir-
ritation au ver, et le forcerent à quitter plus vite
sa place, qu'il n'aurait fait sans cela. L’applica-
tion de la chaleur sur la partie souffrante a dü oc-
casioner une accumulation d’humeurs autour de l’a--
nimal, ce qui sans doute facilita sa sortie. Je suis
porté à croire, continue Drumont, que les accidens
extraordinaires que j’eprouvai dans la nuit du 17 de-
cembre provenaient d’un changement de position de
l'animal. Peut-être aurait-on pu prévenir ces acci-
dens , si l’on avait fait une incision à la partie saine
de la peau , sous laquelle le dragonneau se trou-
vait; et, en le saisissant à l’aide d’un fil, on aurait
alors pu l’extraire tres-probablement, sans le moindre
danger , en entier, ou au moins une grande partie de
son corps. »
Quand le ver est prêt a sortir (ce sont les paroles dé
Dubois } ‘il se forme une petite pustule, souvent sans
DE L'HOMME. 229
le moindretaccident antécédent, à l'endroit par ou
il veut se frayer une issue; mais quelquefois le ma-
lade sent, plusieurs jours avant la formation de la
pustüle , un malaise , des maux de tête, des maux
d’estomac , des nausées , et la douleur devient fixe,
un à deux jours auparavant , à l'endroit par où le ver
doit sortir. Il se forme en même temps de petiles vé-
sicules qui causent de fortes démangeaisons : elles
sont surtout tres-vives à la place ou l’animal perce
la peau, et la douleur devient à la fin conuinuelle.
La partie affectée se gonfle quelquefois tres-forte-
ment; elle s’enflamme, et passe à la suppuration. Si
cela a lieu , le ver se présente aussitôt que la suppu-
ration est établie, ou bien il ne se monire que
quand la suppuration est sur le point de cesser. La
partie au-dessous de laquelle le ver se trouve, se
gonfle quelquefois et forme une espèce de poche, qui
est remphie d’une humeur transparente; mais, dans
d’autres cas, on ne sent, à cet endroit, qu’une du-
reté qui n’est pas même aecompagnee d’une inflam-
mation considérable,
D’après Kaempfer, la formation de la pustule est
précédée d’une fièvre ordinairement éphémère ; mais
plus souvent elle dure pendant trois jours. Si le ver
est placé au-dessus d’une articulation, comme, par
exemple, quand ıl s’étend de la cuisse à la jambe,
‘en passant au-dessus du genou , les mouvemens de
eette articulation deviennent quelquefois très-péni-
bles et même impossibles.
Ce sont à peu pres là tous les aceidens qui arrivent
230 SUR LES VERS INTESTINAUX
quand le ver veut se frayer un chemin au dehors. Du
reste, comme les accidens qui ont lieu pendant la
durée de cette maladie dépendent plus ou moins du
mode de traitement que l’on emploie contre elle,
j'ai trouvé plus convenable de parler en même temps.
et des accidens et du traitement de cette maladie.
Des accidens qui arrivent pendant la durée de la ma-=
‚ladie occasionée par la présence du dragonneau , et de
© son traitement.
Quand, après l’espace de deux ou trois jours , le
pus s’est accumulé dans la pustule , elle crève sou-
vent d'elle-même; mais ordinairement on l’ouvre au
moyen d’une lancette ; il en découle alors du pus teint
de sang, ou une matiere ichoreuse très-liquide ;
et l'extrémité céphalique du ver, avec deux ou trois
pouces de longueur de son corps, sortent en même
temps au dehors. On doit alors saisir la tête , et exer-
cer sur elle des tractions lentes avec beaucoup de
précaution ; souvent, par ce moyen, on en fait
encore sortir quelques pouces de plus; mais, dans
le cas où le ver ne cède pas facilement, l’on doit bien
se garder d'employer la force, de peur de le déchirer,
ce qui peut occasioner des suites tres-fächeuses. On
roule la partie sortie autour d’un petiteylindre detoile,
ou bien autour d’une baguette de bois mince, et on
la fixe avec une bandeletie d’emplätre agglutinauf,
ou à l’aide d’une compresse , au-dessus de la plaie,
Avenzoar, Rhases et plusieurs autres roulaient la
DE L'HOMME. 231
partie sortie autour d’un morceau de plomb du poids
d’un gros; mais Paul d’Egine avait déjà désapprouvé
ce moyen , parce que la pesanteur de ce métal était
cause que le ver se déchirait facilement. On peut
encore se servir, dans le même bui, d'un morceau
de bois fendu à Fune de ses extrémités, avec lequel
on serre le ver.
Velsch a proposé un appareil très-compliqué pour
Vextraction de cet animal. Cet auteur a même donné
la figure de cet appareil: mais un petit cylindre de
toile est suffisant pour obtenir ce résultat. On con-
seille en général de faire deux tractions lentes par
jour sur le ver, jusqu’à cé qu'il soit entièrement
enlevé. On ne peut pas déterminer au juste l’espace
de temps qu'il faut employer pour atteindre ce but.
Kaempfer est parvenu , dans deux cas differens,
à l’extraire en totalité du scrotum d’un seul coup.
Dubois remarque également que lon trouve le
dragonneau, dans quelques cas, en enter dans la
plate.
Isert en fut entierement débarrassé dans l'espacé
de huit jours, quoique le ver für de la longueur
de deux aunes et de la grosseur d’un fétu de paille.
Le même auteur rapporte que l’on est, en Afrique,
souvent plusieurs mois avant d’obtenir la guérison
de cette maladie. Dans le plus grand nombre de cas,
on obtient sa terminaison dans l’espace de trois où
quatre semaines; mais, quand il y a plusieurs vers
dans le même individu, le’ traitement peut alors
durer plusieurs mois. On panse la plaie qui reste
23a SUR LES VERS INTESTINAUX
apres l'extraction de l’animal, comme une plaie
simple, et elle guérit ordinairement tres-vite et sans
difficulté.
Loefller a souvent suivi un autre mode de traite
ment : il consistait à faire une incision au milieu de
l'endroit où le ver était perceptible au toucher, ce
que Schoeler n’a jamais pu remarquer, afin de le
mettre à nu. Loefller plaçait la partie du corps qui
se présentait, dans un morceau de bois fendu à l’une
de ses extrémités, et il exerçait ensuite des tractions
tantôt sur l’une, tantôt sur l’autre moitié du corps de
l'animal ; et, par ce moyen, il est parvenu à le faire
sortir une fois plus vite que s’ilavait suivi la méthode
ordinaire.
Gregor rapporte que les médecins indiens em-
ploient le même mode de traitement. N. Bruce et
Peré le recommandent également. Ce dernier fut
un jour chargé d’examiner à à Saint-Domingue un bä-
timent qui venait de Guinée; il trouva sur ce bäti-
ment un jeune nègre de dix à douze ans, qui était
tellement maigre et affaibli, qu'il ne pouvait pas se
tenir sur ses jambes. Apres un examen attentif, il re-
marqua que cet enfant était incommodé par un dra-
gonneau qui était perceptible au toucher, non-seu-
lement sur presque toute la surface du bas-ventre,
mais encore sur une grande partie de la poitrine. Le
chirurgien du bâtiment avait pris les protubérances
que l'animal formait à l'extérieur, pour des veines
superficielles ; cependant ces protubérances prove-
naient de la position du dragonneau. Le chirurgien ,
DE L'HOMME. 233
après avoir employé inutilement toutes sortes de-re-
medes pour opérer la guérison , abandonna à la fin
cet enfant comme un malade étique et incurable. Il
est à remarquer que le petit nègre avait toujours con-
servé son appétit pendant la durée de la maladie.
Peré l’acheta, pour une bagatelle, dans l'intention
de le débarrasser de son ver, sil était possible. Il
commenca , à l’aide d’une pince à disséquer , à sou-
lever la peau à l’endroit où il presuma que le ver
pouvait avoir le milieu de son corps. Il pratiqua une
incision de quatre lignes sur cette partie de la peau
soulevée. Après avoir disséqué et écarté les lèvres
de la plaie , il vit un corps blanc de la grosseur du
la d’un violon, sur lequel , en exerçant une traction
lente, il donna lieu à la formation. d’une espèce
d’anse. Quand le ver ne voulut plus céder à la trac-
tion qui était exercée sur lui d’un côté, le médecin
le faisait tenir par un aide, et il essayait de urer sur
l’autre bout. Il ordonna en même temps au malade
de se tenir dans une position convenable, afin que les
parties qui environnaient le ver se trouvassent dans
un état complet de flexion ou de relâchement, de
manière que la tension des muscles n'empêchät pas
les mouvemens du ver, et par conséquent sa sortie.
En moins de quatre heures, ce médecin fut assez
heureux pour l’extraire entièrement. Le malade ne
sentit aucune douleur pendant cette opération , et il
voyait sortir le ver avec le plus grand sang-froid ; il
se rétablit ensuite à vue d’eeil, sans prendre de medi-
camens et il devint tellement gras ct robuste, que
234 SUR LES VERS INTESTINAUX
Peré put le vendre douze cents francs trois mois plus
tard, époque à laquelle il fut obligé de revenir en
France. |
Ces deux méthodes simples suffisent, dans les cas
ordinaires, pour obtenir la sorte du dragonneau ,
et l'on n’a besoin d’employer de médicamens ni à
extérieur , ni à l’intérieur ; mais, quand le ver est
placé dans des parties tres-musculeuses; quaud il a
déjà causé dans ces parties ; avant son apparition , une
forte inflammation , une tuméfaction et de la dou-
leur ; ou bien quand il ne veut pas céder aux trac-
ions que l’on exerce sur lui, ou ehfin quand il
s'est déchiré, c’est alors que le secours de la mé-
decine devient nécessaire. J’ındıquerai brièvement
les médicamens que les médecins tant anciens que
modernes ont employés dans le but d’accélérer la
guérison. |
Les médecins arabes et beaucoup d’autres recom-
mandent en général les fomentations, les saignées ;
et, parmi les purgaufs, les myrobolans, et prineipa-
lement l’aloës, tant à l'extérieur qu’à l’intérieur, et
quelques onguens.
Anderson a dernièrement recommandé de nou-
veau l’aloës ; ıl s'exprime ainsi à ce sujet : « Dans ma
pratique, je n’ai rien trouvé de plus efficace que les
cataplasmes préparés avec l’aloë littoralis. Ce médica-
ment m'a été communiqué par un Indien: sa qualité
savonneuse paraît prévenir la gangrène , en ramollis-
sant les tegumens enflammés, et, par conséquent,
faciliter la sorue du ver. »
DE L'HOMME. 235
Aëuus” recommande, pour empêcher la rétro-
gradation du ver, la ligature du membre dans lequel
il se trouve ; outre cela, il conseille l'emploi des fo-
mentaiions faites avec une infusion de graines de
laurier dans l'huile.
Bajon propose des frictions mercurielles et des ti-
sanes amères. Au cas que le ver ne cède pas facıle-
ment aux tractions, quand on a à craindre sa rupture
et sa putréfaction , il conseille alors d’arroser la plaie
à plusieurs reprises dans la journée avec des liqueurs
spiritueuses, comme, par exemple, avec de la teinture
de myrrhe, d’aloës, ou avec de l’eau vulnéraire.
Bancroft a indiqué le mode de traitement suivant
comme le meilleur : il conseule d’abord d’appliquer
sur la tumeur un cataplasme fait avec des oignons,
de la mie de pain et suffisante quantité de lait ; toutes
ces substances doivent avoir bouilli ensemble. Sitôt
qu’on aperçoit la tête du ver, on l'enveloppe avec du
coton, maissansexercer detractions. Le malade doiten
ouire faire usage du mélange suivant : prenez poivre
noir en poudre, ail pilé, fleurs de soufre, de chaque
une once; rhum, une bouteille ; mêlez et er. une
demi-tasse matin.et soir. Un ou deux jours après l’em-
ploi de ce médicament, on trouvera le ver contourné
de diverses manières au-dessous du cataplasme.
Griffith Hughes, qui avait déja proposé les mêmes
remèdes que nous venons de mentionner, est telle-
ment convaincu de leur bon effet, qu'il dit, que
? Tetrabibl,, Quart. serm. Il, cap. LXXXV , pP. 904.
236 SUR LES VERS INTESTINAUX
quand même un homme aurait un millier de dra-
gonneaux, il en serait débarrassé d’une manière cer-
taine. Par ce procédé, chaque ver se contracte, se
pelotonne et meurt; une tumeur se forme et perce
par la suite.
Hillary vanteles bons effets d’une composition sem-
blable. La voici : Prenez soufre et ail, de chaque une
once; poivre noir, une demi-once; camphre , deux
gros; vinaigre, deux livres. Mêlez, faites digérer et :
passez dans un linge : à prendre deux cuillerées à
bouche , deux ou trois fois par jour.
Barère recommande un liniment composé de feuil-
les brülées de cotonnier melees d’un peu d’huile
d’aoüara, que l’on extrait d’un palmier de ce nom.
Cet auteur rapporte encore que quelques person-
nes croient pouvoir faciliter l’extraction du ver en
faisant tomber sur la plaie du jus de tabac provenant
des pipes à fumer.
Dampier , qui avait vers la malléole un dragon-
neau , dont il avait déjà extrait un morceau de deux
pieds de longueur, alla consulter , accompagné d’un
de ses amis, un nègre qui traitait le cheval de ce der-
nier. Le nègre examina la malléole, la frotta dans
différens sens, et appliqua ensuite une poudre que
Dampier présume être celle de tabac. Le nègre lui
ordonna de n’enlever l’appareil qu’apres trois jours;
mais le jour suivant, comme il s'était détaché , on vit
que le ver était déchiré et la plaie cicatrisée. Dam-
pier craignait des suites fâcheuses, qui cependant
n’eurent pas lieu.
DE L'HOMME. »37
On s’est convaincu en Europe (ce sont les paroles
de M. Louis Frank) par des expériences faites pour.
l'extraction du dragonneau, que la fumée de tabac
souflée dans la plaie causait la mort de l’animal. |
Un médecin indien a communiqué le remède sui-
vant à Dubois : on prend sept panamdör, pesant à
peu près trois quarts d’une pagode, d’assa fœtida
d’une bonne qualité , puis le fruit tres-connu dans
toutes les Indes sous le nom de Aatricahe par les
Tamuls, et de beringelle ( solanum melongena, L.) par
les Portugais, et enfin de l’huile de sésame, appelée
par les Tamuls halla venie, en suffisante quantité
pour frire le fruit du solanum.
On pile l’assa fœtida, et après avoir divisé le be-
ringelle en trois portions, de manière qu’elles soient
encore adhérentes au pédoncule, on introduit dans
chaque portion un tiers d’assa fœtida; puis on entoure
le fruit d’un fil, et on fait frire le tout dans de l’huile
de sésame.
Le malade doit manger une portion avant de se
coucher , une autre dans la matinée du jour suivant,
et la troisième le surlendemain au soir. La partie du
corps où se trouve le ver doit être frottée trois fois
par jour pendant trois jours consécutifs avec l’huile
dans laquelle on a fait frire le fruit chargé d’assa fœtida.
Ces moyens employés dans le commencement de
la maladie empêchent le développement du ver, et
celui qui est déjà complétement formé sort bientôt
apres. Dans tous les cas , ils calment la douleur dans
l’espace de trois ou quatre jours. Mais si la maladie
. 238 SUR LES VERS INTESTINAUX
est ir&s-opiniätre, on est obligé de recommencer l'u-
sage de ce moyen, etilestrare qu'il ne soit pas efficace.
Pour engager à son emploi, Dubois remarque que
les Bramines qui assaisonnent très-fortement leurs .
mets avec de l’assa fœtida ne sont jamais incommodés
par le dragonneau. |
Gallandat croit qu’il y a plusieurs indications à
remplir dans le traitement de cette maladie ; il con-
seilleaux malades, dans le but de faire cesser l’inflam=
mation, chose essentielle pour prévenir toute suite
fâcheuse ; 1° de se faire saigner plus ou moins copieu-
sement, selon la violence des symptômes inflamma-
ioires , afin de diminuer l’afllux du sang vers la partie
affectée ; 2° de boire des tisanes rafraichissantes,
avec addition d’un peu d'esprit de nitre, ou bien
d’esprit de vitriol dulcifié , et de faire diète; 3° de se
purger, selon les circonstances , plus ou moins co-
pieusement; 4° d'appliquer trois ou quatre fois par
jour, sur la partie affectée, des cataplasmes émolliens
et calmans, afin de diminuer la douleur et d'accé-
lérer la suppuration; 5° après l'ouverture de l’ab-
ces, et après avoir roulé le ver à la manière accou-
tumde, on doit exercer une legere pression, afin
d’évacuer le pus, panser la plaie avec de la char-
pie trempée dans du miel rosat , et la couvrir avec
un emplâtre; 6° dans le cas où l’on aurait à craindre
une nouvelle inflammation, ou bien dans le cas où le
ver offrirait trop de résistance, il faut alors continuer
l'usage des remèdes, tant internes qu’externes, déjà
mentionnés ; en outre, on doit souvent arroser la
DE L'HOMME. 239
<
parue affectée avec du miel rosat, faire deux trac-
üons par jour sur le ver, et panser la plaie autant de fois.
Tout en faisant l'observation que des pilules mer-
curielles administrées jusqu’à exciter une salivation
complete n’ont pas contribué à faciliter sa sortie,
et qu’apres cinq ou six semaines d’autres vers se sont
présentés de nouveau ; et ont donné des signes evi-
dens de vie, Gallandat prétend que l'usage du su-
blimé corrosif, dissous dans de l’eau-de-vie à la ma-
niere de Van Swieten , contribue, 1°. à faciliter la
sortie du dragonneau ; 2°. à diminuer la douleur et
linflammation ; 3°. à empêcher que le ver ne se dé-
chire ; 4°. à faire terminer le traitement avant le ving-
tieme jour ; 5°. à causer la mort de l'animal.
Gregor croit que des frictions avec des onguens,
et surtout avec longuent mercuriel, devraient être
d'une grande utilité.
Des étincelles électriques dirigées à travers la par-
tie affectée , n’ont produit aucun effet utile.
Hemmersan rapporte que les nègres se guérissent
eux-mêmes; leur méthode est la suivante : Sitôt que
le ver est sorti de la longueur d’un doigt , ils le cou-
pent ; ils frottent ensuite la plaie avec de l'huile de
palmier , et mettent quelques feuilles vertes, au lieu
d'un emplâtre, sur la partie malade: ils ouvrent la
tumeur, en font découler le pus et lavent la plaie,
dans l'intention de causer une irrltation, avec de
Veau dans laquelle ils ont fait infuser du poivre et
d’autres plantes ; ils calment ensuite cette irritation
par l'emploi de l'huile de palmier et de quelques
2/0 SUR LES VERS INTESTINAUX
feuilles vertes. En général les nègres guérissent toutes
leurs plaies avec ces derniers remèdes.
Isert croit pouvoir attribuer sa prompte guérison
aux grands mouvemens qu’il se donnait, quoiqu’aveë
peine, pendant la durée de cette maladie, et à un grand
usage des bains.
Dans le cas où le ver ne cède pas aux tractions (ce
sont les paroles de Kæmpfer), et que le malade
éprouve de la douleur à l'extérieur, dans un endroit
éloigné de celui ou le dragonneau se présente ‚on doit
le laisser en repos et abandonner la guérison à la na-
ture ; il arrive ordinairement que le ver se fraye un
chemin vers cet endroit. Kæmpfer ne desapprouve
pas la méthode proposée par quelques personnes,
et qui consiste à faire des affusions fréquentes d’eau
froide sur les parties saines, dans l'intention de les
garantir de la corrupuüon, de diminuer l’accumula-
tion des humeurs , et d'empêcher la formation d'un
ulcère ; méthode qui doit très-bien trouver son ap-
plication dans les climats chauds. Du reste cet auteur
conseille de faire évacuer le malade au commence-
ment de la maladie , et de lui faire observer un ré-
gime sévère pendant sa durée, afin que la plaie ne
prenne pas un mauvais caractère, ce qui arriverait
si on n’empechait pas l'accumulation des humeurs
vers la partie affectée. Kæmpfer avertit en même- .
temps , que l’on doit éviter l'emploi des corps gras,
par la raison qu'ils amenent facilement la gangrène
dans les pays chauds. Cet auteur regarde les cata-
plasmes comme trés-eflicaces. Il rapporte encore;
DE L'HOMME, 2/41
que le bas peuple n’a recours pendant Ja durée de
cette maladie, qu’à l’usage d'oignons rôtis ; méthode
qui n’est pas à mépriser.
Linschot conseille l'application de beurre, et Lei-
ter celle d'oignons et de feuilles de riz bouillies dans
du lait.
Lœffler prétend que les frictions mercurielles
sont plutôt nuisibles qu’utiles, par la raison qu’elles
augmentent la douleur et la tumeur. Le liniment vo-
latil avecaddition de laudanum liquide lui paraît plus
convenable. Le sublimé corrosif, recommandé par
Gallandat, ne s’est pas montré efficace dans ses expé-
riences. Les esclaves, qui en avaient fait usage, per-
datent l'appétit, et ils maigrissaient. I] rapporte que
Valoös ne s’est pas non plus montré efficace, et que
l'usage des purgatifs légers paraît produire de meil-
leurs effets.
Paul d’Egine recommande seulement des fomen-
tations chaudes; et, d’après toutes les recherches
que j'ai faites sur le traitement de cette maladie, ıl
résulte que les fomentations chaudes doivent être re-
| gardées comme le remede le plus convenable pour
faciliter la sortie du dragonneau. Dans le cas où cet
animal n’occupe qu’une petite place, comme par
exemple une des malléoles, qu'il entoure souvent
eirculairement, l'emploi de l’aloës et des oignons rô-
tis peut être trés-uiile; car ces deux substances faci-
litent la suppuration. Dans les deux cas cités par
M. Larrey les dragonneaux étaient probablement dans
une semblable position; et c'est sans doute la raison
16
jh SUR LES VERS INTESTINAUX
pour laquelle ce médecin a pu détruire ces animaux
à l’aide de la suppuration et sans avoir bésoin de les
extraire, Il est aussi possible que M. Larrey n’ail
eu à traiter que de simples furoneles, car on ne rén-
contre pas le dragonneau dans la Basse-Egypte. Du
reste il n’est pas non plus constaté que cet animal ,
dans le pays où il séjourne, doive se trouver dans
chaque faroncle. Kæmpfer rapporte que les bar-
biers et les hommes ignorans causent souvent beau-
coup de mal, par la raison qu’ils ouvrent la pustule
en général trop Löt, et qu'ils saisissent , dans beau-
coup de cas, quelque tendon au lieu du ver. Le
même auteur raconte en effet, qu'il a connu deux
personnes qui ont été estropiées par suite d'une bé-
vue pareille. Dans les pays où l’on est accoutumé à
rencontrer des dragonneaux dans l’intérieur des pus-
tules , il doit aussi arriver quelquefois que Von pré-
sume la présence de ces vers dans des tumeurs où
il n’y en a réellement pas.
D'après ma manière d'envisager la nature de cette
maladie, il me semble que l’on ne peut pas beaucoup |
se promettre de l'emploi des remèdes internes; leurs
effets doivent se borner, à ce que je crois, à dimi-
nuer la trop grande tension des fibres. Je regarde
l'assa füetida comme'un remède préservatif plutôt que
curatif. I me semble aussi que l'on ne doit'pas avoir
besoin , au moins dans beaucoup de cas, de recourir
à la saignee ; ‘elle pourrait cependant être indiquée
dans celui où plüsieurs vers semblerarent sortir -eh
méme temps, et quand l'inflammation menacérait de
DE L'HOMME. 243
dégénérer en gangrène. Du reste le médecin doit
diriger son traitement selon la constitution du malade,
Il me reste encore quelque chose à dire sur les
accidens qui arrivent après la rupture du ver; elle
est ordinairement occasionée par une manœuyre
trop brusque, ou bien par des tractions trop violentes.
Cependant le ver se déchire dans quelques cas, mal-
gré les plus grandes précautions possibles. Les suites
en sont souvent bien malheureuses, et, quoique le
malade, d’apres le témoignage d’Avenzoar, n’en
meure pas subitement, les cas ne sont pas cependant
rares, comme cela a été attesté par Bancroft, Chardin,
Gallandat, Labat et Lister , où cette rupture a causé
la gangrene, et même la mort. Dubois n’a jamais vu
arriver la gangrène dans ce cas, mais il a observé que
des raccourcissemens et des difformités des jambes
en étaient quelquefois la suite.
Quoiqu'il soit prouvé que la mort n'arrive que
rarement après la rupture du ver , néanmoins la plu-
part des auteurs conviennent que cet accident con-
tribue à compliquer la maladie, à la trainer en lon-
gueur , et à donner lieu à des fistules tres-difficiles à
guérir. 1l résulte de là, que l’on fait toujours très-
bien d’eviter, autant qu'il est possible, la rupture de
cet animal. Le célébre voyageur James Bruce, à l’é-
poque de son retour au Caire, fut atteint de cette
maladie; malheureusement on ne connaissait pas
alors dans cette ville le mode de traitement que l’on
doit employer dans ce cas. Les medieamens qu’on
lui administra restèrent sans eflet; enfin on se dis-
16,
ah SUR LES VERS INTESTINAUX
posa à faire l'extraction du ver, et en effet on par-
vint à faire sortir dans l’espace de huit jours trois
pouces du corps de cet animal ; cette opération ne
caasa à Bruce ni douleur ni fièvre. Ce voyageur s’em-
barqua alors pour la France, et confia son traitement
au chirurgien en chef du bâtiment. Ce chirurgien
déchira un jour le dragonneau par une traction trop
forte ; il survint alors une inflammation tres-violente
avec tuméfactiou, et la gangrene était à craindre; le
chirurgien en second du bâtiment effectua plus tard
la guérison par le débridement de la plaie. La ma-
ladie de Bruce a duré cinquante deux jours, et il
éprouva pendant trente-cinq les douleurs les plus
atroces ; pendant une année entière, il se sentit tres-
faible , et il ne fut entiérement guéri qu'après avoir
fait usage des bains de Poretta, situés dans les monta-
gnes du Bolonnais. |
Rhazès avait déjà recommandé le débridement de
la plaie après la rupture du ver; Gallandat est d’un
avis contraire, et il regarde cette opération, non-seu-
lement comme inutile, mais encore comme dange-
reuse. L'expérience a prouvé, selon ce dernier, que
cette opération augmente l'inflammation, la tumé-
faction., et donne lieu à la gangrene.
Une femme, habitante de l'Afrique , avait un dra-
gonneau au coude (ce sont les paroles de Gallandat );
ce ver se déchira malgré toutes les précautions pos-
sibles , et il survint une inflammation accompagnée
de fièvre et de délire. La malade était dans le plus
grand danger ; l'usage des cataplasmes emolliens, les
DE L'HOMME. 245
saignées et de légers purgatifs firent cesser ces accı-
dens, et le ver se fraya une autre route pendant
Vemploi de ces medicamens. Dans un autre cas ou
un dragonneau avait également été déchiré, le res’e
de Panımal, quinze jours aprés, put aussi prendre
une nouvelle direction, sans causer cependant d’in-
flammation ; plus tard on réussit à l’extraire en tota-
lité, et Gallandat vit clairement des mouvemens à l’une
de ses extrémités. Cette observation sert à réfuter une
assertion que cet auteur à avaucée plus haut; il rap-
porte, «que les malades sont dans le plus grand danger
quand le ver reste vivant après s'être déchiré ,» et ıl
ajoute : « Quand le ver meurt après sa rupture, ıl ne se
forme par la suite qu'une fistule, que l'on parvient à
guérir peu à peu.» Hunter prétend le contraire ; et il
s'exprime ainsi : « Si long-temps que le ver vit, 1l ne
cause que peu d’embarras, mais lorsqu'il est mort,
il irrite comme tout autre corps étranger , et la sup-
puration s'établit dans tout l'espace qu'il occupe.
Gallandat rapporte encore un troisième cas, dans le-
quel la mort survint à la suite de la rupture d'un
dragonneau, qui séjournait dans le serotum.
Hemmersan raconte qu'il a été incommode par
trois dragonneaux pendant son séjour dans le pays
où cet animal se trouve : deux individus étaient pla-
ces à la jambe droite et le troisième à la jambe gauche.
Celui qui était à la plante du pied droit l'empêéchait
de marcher. Cet animal se déchira. Le second se fit
sentir sous le calcanéum (c'était peut-être la conti-
puation du premier ), et il se fit une ouverture à l'or-
246 SUR LES VERS INTESTINAUX
teil; des ulcères se formèrent en cet endroit, et
Hemmersan ne fut guéri qu'après avoir éprouvé
beaucoup de douleur ; le troisième dragonneau parut
sous le calcanéum du pied gauche. Après que cet
animal en fut sorti de la longueur d’un quart d’aune,
‘| se déchira et s’enfonca dans la jambe, ce qui
occasiona une tuméfaction considérable dans cette
partie. Hemmersan souffrit pendant quatre mois
consécutifs.
Lister a été également incommodé par un dra-
gonneau qui ; pendant quarante ou cinquante jours;
Sortait par petites portions, sans causer beaucoup
d’embarras. Quand cinq quarts d’aune de cet animal
furent extraits, il se dechira par suite d’une trop
forte traction; il s’enfonca alors plus profondément,
et produisit au mollet une tuméfacuon tellement
considérable, que l’on craignait la rupture de la
peau à cet endroit. Lister avait en même temps des
insomnies accompagnées d’une forte fièvre, et il fut
obligé de garder le lit pendant trente jours. Le dra-
gonneau se montra dans différens endroits du pied ;
son chirurgien appliqua des remèdes qui causèrent
probablement Ja mort du ver, et la guérison eut
heu.
Cromer éprouva, après la rupture d’un dragon-
neau, des douleurs tellement violentes, qu'il fut
obligé de garder le lit pendant quatre semaines, Sans
pouvoir dormir et sans pouvoir éteindre une soif
extraordinaire dont il était tourmente.
Ces cas prouvent, d’une manière suffisante, que
DE L'HOMME. 247
la rupture du dragonneau n’est pas une chose de peu
d'importance.
Avant de terminer ce chapitre, je suis obligé d’a-
jouter encore une remarque. N’ayant pas eu occasion
de recueillir moi-même sur les lieux les observa-
tions que je rapporte sur ce ver, j'ai lu à son sujet
tous les auteurs qu’il m’a été possible de me procu-
rer; cependant je n’aı pu faire mention de tous ceux
qui sont cités par Joerdens dans sa description du
dragonneau; la raison en estque plusieurs de ces au-
teurs n’en ont parlé que vaguement; plusieurs autres
sont bien entrés dans quelques détails à son sujet ;
mais , comme ils ne connaissaient pas cet animal, par
des observations qui leur fussent propres, ils se
sont bornés à copier les auteurs qui out écrit sur
celte matière ex professo ; plusieurs autres enfin ont.
passé le dragonneau entièrement sous silence, ou bien
ils n’ont fait que de le nommer. Voici les noms des
auteurs que l’on trouve dans l'ouvrage de Joerdens :
Actuarius, Blumenbach , Borelli, Castel, Doe-
vern , Fallope , Freind , Corræus, Gruner : ce der-
nier a seulement tâché de prouver l'identité de la
veine de médine (vena medinensis) et du dragonneau
(dracunculus); Heurnius, Ingrassias , Klein , Lange,
Léoni, Lesser, Linné (Amenit, academ.), Lorrey : la
description que cedernier a donnée du dragonneau est
assez complète , mais elle a é/é faite d'après celle de
Kæmpfer ; Manardus , Mad ( Onomatologia, hist.
nat.), Pollux, Sauvages, Schenk , Veiga, Vogel,
Woyt. Les auteurs suivans ont entierement passé le
248 SUR LES VERS INTESTINAUX
dragonneau sous silence , ou bien, je le repete,, n’ont
fait que de le nommer. Voici leurs noms : ı°. Bauhin;
cet auteur entend sous le nom serpigo des vers sous-.
cutanés (vermes subcutaneï ); 2°, Constantini : il parle
d'un petit et d’un grand ver sous-cutane, dont le
premier n’était qu’un herpes miliaris, et le second
n’était qu’un erysipelas exulceratum ; 3°. Donat : 1l rap-
porte qu’un homme a rendu , en urinant, un dragon
ailé; 4°. Ettmüller : cet auteur remarque que Velsch
a également écrit une dissertation sur les masclous,
et que cette dissertation a été ajoutée, par ce der-
nier, à son rapport publié sous le titre Exercitatio
de vend medinensi ; 5°. Hannow a fait plusieurs re-
cherches sur le gordius aquatique; 6°. Hassel-
quist parle d’un zenia solium , qui a été appelé , daus
les annonces de Goettingue, nestelwurm; 7°. Joel dit
expressément que les vers sous-cutanés (vermes sub-
cutanei ) n’ont rien de commun avec le ver nommé par
Paul d’Egine ( dracunculus ); 8°. et 9°. Le Genüil et
Olendorp parlent du pulex penetrans (Linn.); 10°. Pa-
racelse dit seulement qu'il y a des vers où ıl ya
des apostemes, et vice versä; 11°. Plater' fait men-
tion, à l'endroit cité, de pustules (phlictæna) , et cet
auteur ne parle nulle part de filaires; 12°. Scholz rap-
porte seulement quil a vu des enfans incommo-
dés par des masclous; 13°. Schwenkfeld confond
le dragonneau avec le gordius aquatique; et14° Spie-
gel raconte qu'il a trouvé, sous la peau de la hanche
4 Praxcos „ Lom. Hi.
DE L'HOMME. 249
d’un chardonneret, un dragonneau d’un pied de long,
et qui était roulé en forme de serpent.
Brera : prétend à tort que Soemmerring a trouvé
un filaire de Médine chez un mouton d’origine arabe.
Sœmmerring?, à l'endroit cité, rapporte seulement
qu’ilarencontre, dans l’estomac d’un mouton arabe,un
ver qui ressemblait à un dragonneau; mais je réponds
à cela qu’un ver qui ne faitque ressembler à un autre
n’est pas pour cela de la même espèce. Brera, dans ses
mémoires ?, a encore cité et tronqué un passage de
Pline, comme cela se voit quand on confronte le texte
latin avec les paroles de Brera. Pline dit : Vascuntur....
sicut intra hominem teenie tricenium pedum , aliquando
et plurium longitudine. Brera Va traduit : Welle opere
di Plinio trovasi pure fatio cenno di alcune sottili tinee ,
ö meglio tenie della lunghezza di tre pedi. Brera a re-
tranché vingt-sept, mais il a ajouté, au contraire ,
quelques mots dont Pline n’a nullement parlé : Che
in alcuni pæsi penetrano la pelle degli uomini.
Il me semble avoir assez parlé de semblables cita-
tions infidèlement rapportées. J’ai encore ajouté cette
dernière, afin d’avertir mes lecteurs de ne pas ajouter
foi trop légèrement aux citations, et de les engager
à confronter toujours le texte des auteurs dont on
prétend les avoir extraites. Du reste, il me paraît
probable que Brera a été induit en erreur par Kun-
* Memorie , p. 249.
2 Ballie, p. 103, note 218.
3 Memorie, s. 241.
250 SUR LES VERS INTESTINAUX
semüller, qui a également rapporté le passage men-
tionne de Pline. Néanmoins, Brera a 1âché de ra-
conter, d’une manière élégante, l'introduction des
tæuias sous la peau, manière qui convient bien à un
poëte, mais nullement à un naturaliste.
VII HAMULALRE.
Iamularia : subcompressa ( en allem. der fülhwurm) , pl. 01 , fig. 2.
HAMULARIA : subcompressa , anlice atlenuala.
Treuiler, Auctuar. , p. 10-13, tab. 11, fig. 3-7, Ham. lym-
phatica.
Joerdens, Hekninthol., page 31, tab. vi, fig. 9-12, ham. lymph.
Zeder, Naturgesch, s. 45, Tentacularia subcompressa.
Brera, Memorie, p. 225, tab. IV, fig. 1-3, amularia linfalica.
Rudolphi, Entoz., t. It, part. 1, pag. 82, Ham. subcomp.
De Lamarck, Anim. sans vert., tom. 311, pag. 216 , l’hamulaire de
l’homme.
En disséquant ‚en 1790, le cadavre d’un homme de
vingt-huit ans, qui était né avec une predisposiuon
héréditaire à la phthisie et à l’hydropisie, et qui
s'était épuisé par la masturbation , par les plaisirs
vénériens et par un usage démesuré du mercure,
Treutler trouva, dans les glandes bronchiales d’un
volume contre nature, des vers dont les uns avaient
plus d’un pouce, et les autres beaucoup moins. Ces
animaux étaient allongés , arrondis, un peu com-
primés des deux côtés , de couleur noire brunätre,
parsemée en partie de taches blanches, un peu amin-
cis vers l'extrémité antérieure, à moitié transparens
DE L'HOMME. 251
vers l'extrémité caudale, et recourbes (après leur
mort) aux deux extrémités.
On remarqua sur la tête, qui était peu distincte,
et qui se terminait en une pointe obtuse, deux cro-
chets proéminens, qui pouvaient être soulevés par
l'animal. L’extrémité caudale était également obtuse
et peu distincte. Excepté les deux crochets, on ne
voyait , sur touté la surface de ces animaux, aucune
trace d’autres organes.
Ces vers, étant différens, selon l’opinion de Treu-
tler ; de ceux que l’on trouve dans les bronches des
putois et des rénards; cet auteur en a formé un nou-
veau genre, sous le nom d’hamularia , dont il a donné
les caractères suivans:
Corpus lineare, teretiusculum, éaput obtusum, infra
duobus hamulis prominentibus instructum.
La figure 2, qui représente ce ver huit fois” plus
grand que nature, est une copiede Treutler.La figure
2b représente l'extrémité de la tête encore plus grossie
que dans la précédente.
J’ai déjà remarqué, quand j'ai parlé de l’indica-
tion des caractères des genres de vers , que ce genre
me paraît douteux, et je le répète encore une fois
ici, Zeder compte cependant des vers provenant de
la cavité thorachique de la pie-grièche rousse (Zanius
collurio, L.), comme de ce genre. Mais ceux que
* Ce n’est pas ma faute si cette figure, grossie huit fois , ne
s'accorde „as avec la mesure naturelle indiquée plus haut,
252 SUR LES VERS INTESTINAUX
j'ai trouvés moi-même dans cet oiseau appartenaient
aux filaires. Quant aux vers provenant des gros intes-
ins des poulets, et que Rudolphi range encore dans
ce genre , ce sont assurément des capillaires. Excepté
Treutler, personne n’a encore trouvé ces vers dans
les bronches de l’homme; cependant Brera prétend:
que Vercelloni et Bianchi en ont fait mention; mais,
comme Brera n’indique pas en quel endroit de leurs
écrits ,nous laisserons cette assertion dans le doute.
Comme Treutler n’a trouvé ces vers qu’une seule
fois, il est, par cette raison, possible qu'il se soit
trompé, et qu'il ait pris l'extrémité caudale pour
l'extrémité antérieure , et que ces deux crochets
(hamuli) ne fussent qu'un double pénis, ou bien
peut-être des viscères qui pendaient au dehors.
Treutler dit lui-même que ces vers étaient telle-
ment implantés avec leurs trompes dans les mem-
branes , qu'il n’en a pu extraire presque aucun 1n-
dividu , sans déchirer ses trompes. Cette circonstance
sert à augmenter la probabilité que ces vers apparte-
naient à ceux que l’on rencontre assez souvent dans
les bronches et les poumons des animaux du genre
mustela , et dont Rudolphi , Olfers, Leuckart , Nat-
terer et moi, n’avons non plus pu parvenir à extraire
un seul individu entier des masses qu'ils forment,
et c’est aussi la raison pour laquelle leur genre n’a
pas pu être déterminé jusqu'à présent. Rudolphi
n’est pas tres-porte à croire que ce fut de véritables
ı Memorie, s. 226.
DE L'HOMME. 253
glandes dans lesquelles Treutler prétend avoir trouvé
ces animaux.
Du reste, nous pouvons en toute confiance ad-
mettre que Treutler aeffectivementrencontré des vers
dans des capsules particulières, et qu'il ne nous a
rapporté que ce qu’il a réellement vu; mais comme il
ne parle pas de leur structure interne, il serait à
désirer que Brera eût la bonté de nous dire de qui
il a appris que ces vers, trouvés dans l'homme seu-
lement par Treutler , et décrits par lui seul, ont un
système nerveux composé de ganglions *.
VII. STRONGLE GÉANT.
Sirongylus gigas, R., (en allem. der pallisadenwurm) , pl. UE, fig. 3.
STRONGYLUS : capite obtuso, ore papillis planiusculis sex cincto ,
bursa maris truncata integra, cauda feminæ truncaia.
Rudolphi, Ento=., 1, ı,p. 210, tab. 11, f. 1-4.
Cuvier, Règne animal, tom. !v , p. 34 , Le strongle géant.
De Lamarck, Anim. sans vert. , t. 111, p. 202 , le strongle des reins.
Ce ver séjourne dans les reins et peut-être aussi
dans les muscles qui les environnent.
DESCRIPTION.
Les strongles que M. Rudolphi a trouvés étaient
* Memorie, p. 32. Ne’ gordi e nell’ amularia linfatica si vsserva
pure questo sistema nervoso ganglionico , colla differenza che à ganzlı
254 SUR LES VERS INTESTINAUX
de la longueur de cinq pouces à trois pieds , et de la
grosseur de deux à six lignes. M. Cuvier a eu la
bonté d’envoyer à notre collection un strongle qui.
est de la longueur de trente pouces et de la grosseur
de quatre lignes, et qui provenait du rein d'une
fouine. Les vers de cette espèce, que l’on rencontre
dans les reins des animaux tués depuis peu , sont
aussi rouges que du sang; mais ils perdent bientôt
cette couleur, quand on les nret dans de l’esprit-
de-vin.
Le mäle est plus petit que la femelle, et il est
aminci vers ses deux extrémités; sa bouche est circu-
laire (Por. fig. 3a)et pourvue de six petites papilles ;
son corps, composé; pour ainsi dire, d’anneaux,
offre plusieurs depressions longitudinales; sa queue
(Voy. fig. 3b) forme à son extrémité une vessie par
laquelle sort un pénis extremement fin. Cette espece
de vera cela de particulier, que sa vessie est entiere
(integra) ; mais elle est, au contraire , bifurquee et
formée de différentes manières chez tous les autres
strongles.
La femelle est plus grande ; la fin de sa queue est
droite et obtuse : on remarque à cet endroit un anus
longitudinal. L'entrée du vagin est éloignée, selon la
différente longueur du ver, d’un ou de plusieurs
sono piu piccioh ; et p. 228 : Ho già falto rimarcare , che ganglionico
ne é pure il cordone nervoso , che nel suo interno scorre dall’ altra es-
iremitü, al pari di quello del lombricoide, colla sola differenza, che
piu piccioli ne sono i ganglj nell’ amularıa.
| DE L'HOMME. 255
pouces de l'extrémité de la queue. M. le professeur
Otto croit avoir observé un système nerveux chez les
strongles.
Ces vers , dont Brera et Jœrdens ne font mention
qu'en passant , ont été souvent trouvés dans des
fouines , des chiens, des loups, des bœufs , des che-
vaux et des phoques. 1] paraît qu’on les rencontre ra-
rement dans l’homme.
11 faut bien se garder de vouloir compter, comme
appartenant à ce genre de vers, tous les corps que
les hommes ont rendus, ou que l’on suppose avoir
été rendus par ces derniers en urinant; car ces corps
ont été souvent qualifiés à tort, par les médecins, du
nom de vers : ce n'étaient souvent que des larves
d'insectes , qui n'avaient pas été réellement évacués
par l’urètre, mais s’étaient introduits sans doute, par
hasard, dans le vase de nuit des malades.
Dans le cas où il y a adhérence entre le rectum et
| la vessie, avec complication de sinus fistuleux, il est
possible que des vers intestinaux aient pu être éva-
cués par P’uretre. Il arrive encore que des femmes
| rendent des.oxyures avec l’urine; mais cela n’a rien
d'étonnant ; car nous savons que ces vers, après avoir
quitté le rectum, s'introduisent souvent dans le va-
gm, d'où ils sont rejetés en urinant. Il est de fait
que l’on a regardé, dans bien des cas, des concré-
tions polypeuses et membraneuses, à cause de leur
_ forme arrondie , comme des strongles. C’est aussi ce
que Grimm a observé chez un homme qui avait
des pierres dans les reins et dans la vessie ; il croit
256 SUR LES VERS INTESTINAUX
que ces faux vers prennent leur forme arrondie en
passant dans Vuretre.
Le ver dont parle Tulpius' n’était assurément rien
autre chose que du sang coagulé, par la raison que
ce prétendu ver se dissolvit entièrement. Je doute
aussi des cas rapportés par Paulin et Barry.
Decerf raconte le cas suivant : Un homme âgé de
cinquante ans, avait eu souvent dans sa jeunesse des
hémorragies violentes, qui cessèrent à l’âge de vingt-
cinq ans , époque à laquelle il commença à ressentir
des douleurs dans l’hypochondre droit; on présuma
que ce mal siégeait dans le foie : tous les remèdes
employés restérent infructueux ; cependant quelque
temps après , le malade sentit une diminution de
douleur ; il s'y accoutuma à la fin , etsuspendit l'usage
des médicamens. Le 15 juillet, il fut incommodé par
une violente hémorragie de l'urètre, qui était accom-
pagnée de douleurs horribles dans les cuisses et dans
la vessie. L'application des sangsues ; l'usage des
bains et des boissons mucilagineuses , furent sans
succès ; le malade maigrissait à vue d'œil ; on con-
sulta quelques médecins de Paris; ils ordonnerent |
des médicamens , mais qui ne produisirent aucun
effet. Dans les premiers jours du mois de septembre;
le malade , après avoir éprouvé une hémorragie sem-
blable à la précédente, accompagnée des même dou= |
leurs et d’un accés léger de fièvre, rendit en urinant |
un ver enduit de sang. Le ver était de la grosseur
» Ouvrage cité, chap. 49, P- 172:
DE L'HOMME. - 25%
d’un tuyau de plume, et de la longueur de quatorze
pouces et huit lignes. Il est à regretter que cet ani-
mal ait été jeté. Immédiatement après sa sortie, le
malade se sentit soulage , les douleurs cesserent
subitement, ainsi que l’hémorragie. A dater du 15
septembre jusqu’au 2 décembre, il évacua par l’u-
retre au moins cinquante vers de différentes formes
et grosseurs. La plupart de ces prétendus animaux
étaient de la grosseur d’un tuyau de plume, de la
longueur de six à huit pouces, et ressemblaient aux
ascarides , surtout l'échantillon dont Tulpius fait
mention : ; d’autres n’ayaient que dix-huit lignes de
longueur , et ressemblaient plutôt aux filaires. Leur
corps aplati se terminait par une queue allongée et
très-fine. Il est à remarquer que le malade de Decerf,
qui s’est trouvé parfaitement guéri, n'aurait rendu
que des vers morts.
Lors de mon séjour à Paris, en 1815, je me suis
entretenu , au sujet de ces vers, avec M. Duméril,
J'ajoute ici, par parenthèse, que ce professeur a
eut la bonté de mettre sa bibliothèque à ma disposi-
tion à toutes les heures de la journée, et que j'y ai re-
cueilli beaucoup d'observations qui se trouvent rap-
portées dans ce traité. M. Duméril eut la complaisance
d'écrire à M. Decerf, et de le prier de vouloir bien
nous communiquer quelques échantillons ; nous en
recûmes en effet six : deux avaient bien l’air d’avoir
* Jai déjà remarqué plus haut que l'existence de ce ver ne me
paraît pas avoir été constatée d’une manière suffisante.
#1
258 SUR LES VERS INTESTINAUX
été séparés et de n'avoir formé auparavant qu’un seul
et même morceau. Nous nous sommes convaincus ,
après un examen soigné, que ces prétendus vers
n'étaient que des concrétions Iymphatiques, parmi
lesquelles il n’y en avait pas deux qui se ressemblas-
sent, ce qui aurait dû avoir nécessairement lieu, si
cela avait été de véritables vers. L’un de ces échan-
tillons était mince et long; un autre était deux fois
plus gros à l'une de ses extrémités que dans le reste
de son étendue , et son extrémité opposée était tout à
faitamincie; un troisième échantillon était obtus à ses
deux extrémités, ete. Il est possible et même pro-
bable que le premier corps rendu par ce malade fut
un strongle , et qu'après sa sortie tous les symptômes
cessérent.
Un cas semblable, observé par Barnett et rapporté
par Lawrence , augmente la probabilité de mon opi-
nion, que tous les autres morceaux, à l'exception
du premier peut-être, que ce malade avait rendus,
n'étaient que des concrétions lymphatiques.
Lawrence raconte qu’une femme, existante en-
2
core, fut incommodée , pendant plusieurs années, par
des douleurs violentes dans les cuisses et la vessie;
elle eut aussi une rétention d’urine. Apres avoir en=
duré toutes ces souffrances , elle commenca par ren
dre des corps vermiformes; et, dans l’espace d'un an
environ , elle en évacua à peu près huit cents ou
mille. Barnett a envoyé à M. Rudolphi plusieurs de
ces prétendus vers, et ce dernier a eu la bonté de
n'en céder deux échantillons.-Ni M. Rudolphi, mi
DE L'HOMME. 259
Moi , ne sommes portés à les regarder comme de véri-
tables vers, quoiqu’ils se ressemblent davantage entre
eux, sous le rapport de la forme exterieure ,que ceux
recueillis par Decerf. La forme allongée des corps
dont parle Lawrence a dù provenir, dans ce cas-
ci, d'après mon opinion, plutôt des uretères que de
Vurètre, par la raison que ce dernier n’a que très-peu
d’étendue chez les femmes. ll est vraisemblable que les
concrétions Iymphatiques trouvées par Decerf ont
pu recevoir leurs différentes formes, pendant qu'ils
traversaient l’uretre. On voit sur la planche 9, fig. k
une figure pliée en deux; elle est de la longueur
de cinq pouces, amincie dans son milieu; à partir
de la, elle devient plus grosse, et elle est pointue
à ses deux extrémités. Cette figure a été faite d’a-
près une copie de la figure originale de Barnett, et
elle m’a été envoyée par Nasse, conjointement avec
son explication , qu’il a bien voulu extraire du jour-
nal anglais ( Medico-chirurgical transactions), par la
raison que ce journal ne se trouve pas à Vienne,
M. Rudolphi m'a envoyé également , à la même Epc=
que, un extrait du même journal anglais. Cette fi-
gure s'accorde assez bien avec mes échantillons,
cependant je ne remarque rien de dentelé dans les
depressions longitudinales ; ils ne sont pas non plus
aussi régulièrement pointus que cela se voit sur la
figure, et ils ont l’air d’avoir été déchirés ; en un mot,
il leur manque le caractère de l'intégrité.
Ce pseudohelminthe est représenté de grandeur
naturelle, et Barnett assure qu'il n’a pu découvrir
I7.
260 SUR LES VERS INTESTINAUX
sur lui aucune trace d'organisation, ni à l’aide du
scalpel, ni au moyen du microscope. La même per-
sonne de laquelle provenait ce pseudohelminthe a
rendu une autre fois plusieurs petits vers qui ne res-
semblaient pas à ceux d’une dimension beaucoup
plus considérable, qu’elle avait évacués antérieu-
rement. Ces petits vers ont vécu dans de l’eau tiède
pendant quarante-huit heures. M. Rudolphi en a recu
six individus , et il a bien voulu m’en céder deux.
On les trouve représentés de grandeur naturelle
( Voyez pl. 3, fig. 4 et 5) et l’un d'eux tres-grossi,
même planche, fig. 5a; la fig. 5 5 indique la tête,
et la figure 5c, la queue encore plus grossie que
dans la figure précédente. Ces vers, immédiatement
après avoir été rendus, étaient transparens; mais ils
sont devenus opaques dans l’esprit-de-vin. Barnett
assure qu’il les a examinés plusieurs fois à l’aide d’un
microscope , mais qu’il n’a rien pu découvrir de leur
structure particulière. Néanmoins, l’on ne peut pas
nier. que ce soient de véritables vers; en effet, on
n’a qu'à les regarder pour en être convaincu ; mais il
n’est pas prouvé pour cela qu'ils appartinssent aux
strongles dont nous nous occupons ; il est cepen-
dant possible que ce fussent de jeunes strongles qui
peut-être s'étaient formés spontanément peu de
temps avant d'avoir élé évacués, quoique leur struc-
ture extérieure ne vienne pas à l'appui de eette
supposition; toutefois, M. Rudolphi remarque tres-
justement, dans une lettre qu'il m’a adressée, que
les petits provenant des autres espèces de ce genre
DE L'HOMME. 261
de vers, diffèrent beaucoup de ceux qui sont com-
plétemient formés. Nous n’avons pas encore observé
jusqu’à présent les petits du strongle péant. Il
Doit p 13 8 € géant. I se
pourrait donc que les vers vus par Barnett fussent de
ces petits ; ce qui confirme encore cette Opinion,
est que l’on remarque sur la figure 5 quelque chose
qui ressemble assez à une ouverture de bouche cylin-
drique pourvue de papilles. Cette bouche se présente
en biais; mais cela peut provenir d’un effet de l’es-
prit-de-vin. L’on remarque encore sur la figure 5c,
au milieu de l’extrémité caudale, une petite vessie
. \ A
quiressemble un peu à la fig. 3c, même planche; car la
membrane détachée, que l’on voit sur les côtés de l’ex-
trémité caudale, n’est pas la véritable vessie de la
queue, ce n’est que l’épiderme décollé ou bou rsouflle,
comme cela se remarque encore sur plusieurs autres
endroits de la figure 5c. L’epiderme des individus
5 r
morts de plusieurs espèces de nématoïdes, se décolle
| facilement quand on les laisse trop long-temps dans
| l’eau. 11 résulte de ces réflexions, qu’il n’est pas im-
possible que ces petits vers dont nous venons de
parler fussent de jeunes strongles. Mais on me fera
la question : où étaient donc leurs parens ? Je re-
ponds à cela que je n’en sais rien ; mais Je puis ce-
pendant m'expliquer là dessus : D'abord, 10. il n’est
pas du tout nécessaire qu'il existe en même-temps
| des vers tout à fait développés, où l’on remarque des
| Petits, car ces derniers peuvent rovenir d'une for-
D P
mation spontanée et récente; 2°. il est aussi possible
que les parens de ces petits vers fussent déja morts ;
262 SUR LES VERS INTESTINAUX
et qu'ils eussent été rendus conjointement avec ces
concrétions ; 3°. l’on peut aussi supposer que leurs
parens sejournaient encore, lors de leur évacuation,
dans les reins de la personne citée par Decerf, par
la raison que cette dernière, d’après le rapport de ce
médecin, se trouvait bien un peu soulagée , mais
qu’elle n’était pas encore tout à fait guérie *.
Les cas que je vais maintenant citer doivent être
regardés , ce me semble, comme ceux dans lesquels
on a réellement observé des strongles plus ou moins.
grands , et dont les uns séjournèrent dans les reins 5.
et les autres’ avaient été déjà rendus par Vuretre.
ı°. On a trouvé une pierre et un ver dans les
reins du grand-duc Ernest d'Autriche , qui mourut
en 1595 dans les Pays-Bas, où il fut gouverneur:
Hugo Grotius rapporte que ce ver était encore vi=
vant lorsque lon eut ouvert le corps de ce duc, et
que cet animal avait rongé les parties environnantes»
2°, Ruysch*, qui a souvent observé des strongles
chez les chiens, trouva un jour un ver de cette es:
pèce dans les reins d'un homme. |
2. Blasius raconte qu’il n’a remarqué qu’une seule,
fois, dans les reins d’un vieillard, deux vers rouges, |
de la longueur d’une aune , et il ajoute que l’on ren,
contre Souvent ces vers chez les chiens. |
4°. Rhodius a connu un homme, atteint d’une |
2 Rudolphi (Synops. , p- 250 ) fait mention des petits vers dont |
il vient d’être question sous le nom de spiroptera hominis. (Br.)
2 Ouvrage cité , 64°. observat.
IN
DE L'HOMME. 263
fievre maligne , qui avait rendu, en urinant, le cin-
quième jour de sa maladie , un ver vivant, de forme
ronde et d’un pied de longueur. Cet homme n’a ja-
mais éprouvé de difficulté à uriner, ni avant ni après
la sortie du ver. |
5°. Albrecht fait mention d’un soldat qui avait
éprouvé , depuis sept ans, une difficulté d’uriner, et
qui en fut entièrement débarrassé aprés qu'il eut
rendu par l’urètre un ver de la longueur de trois
doigts et de la grosseur d’un tuyau de plume.
6°. Raisin rapporte qu’un homme de cinquante
ans était incommode, depuis deux ans, de coliques
néphrétiques; son urine était sanguinolente et noi-
rätre. Tous les remèdes que l’on avait employés
étatent restés infructueux. Un jour cet homme rendit
en urinant un ver de la longueur de trois pouces ;
après quoi l’urine reprit sa couleur naturelle, et le
malade guérit.
7°. Duchäteau cite une observation semblable,
8°. Le cas le plus remarquable a été communiqué
par Monblet : Un enfant de dix ans, du sexe mascu-
lin , à qui ce médecin avait déjà fait l'opération de la
taille à l’âge de trois ans, éprouvait des douleurs
très-fortes à la région lombaire, et ıl s'y développa
une tumeur. L'enfant était en même temps incom-
mode d’une rétention partielle d'urine. La tumeur
fut ouverte, 1l s'en écoula beaucoup de pus, et la
plaie guérit. Une nouvelle tumeur, accompagnée de
violentes douleurs, nécessita une seconde ouver-
ture. Pendant trois ans, celle tumeur souvrait et
264 SUR LES VERS INTESTINAUX
se fermait alternativement. A la fin, il parut, dans
la plaie, un ver de la longueur de cinq pouces, et de
la grosseur d’un tuyau de plume, qui fut bientôt suivi
d’un second de même forme : sa longueur était de
quatre pouces. Peu de temps après la sortie de ces
deux animaux, la rétention devint complète, et la
vessie fut très-distendue , accidens que cet enfant n’a-
vait pas encore éprouvés. Tout à coup un troisième
ver, semblable aux deux précédens, sortit, et il fut
bientôt suivi d’un quatrième. Après l'évacuation des
quatre vers, la santé du malade commença à s’ame-
liorer. On employa un traitement convenable, et cet
“enfant guérit complétement.
Chapotain , Monceau, Holler et Renner font éga-
lement mention de vers que des hommes avaient
rendus par l’uretre. Schenk cite des exemples sem-
blables.
Le ver qui a été trouvé dans la cavité thorachique
d’un homme par Hiehne, était aussi très-probable-
ment un strongle.
Mes lecteurs devineront facilement la raison pour-
quoi je ne suis pas entré dans plus de détails, dans
ce chapitre, sur les causes particulières qui favo-
risent la formation de ces vers; ıls sentiront éga-
lement pourquoi je n’ai rien dit sur les symptômes
à l’aide desquels on peut reconnaître l’existence de
ces animaux, et pourquoi je n'ai pas fait mention
des remèdes propres à les expulser. Le fait est que
nous n'avons pas encore de données certaines sur
tous ces points. Du reste, les personnes versées
|
}
|
|
|
DE L'HOMME. 265
dans l’art de guérir ont sans doute remarqué que
les symptômes qui ont précédé l'évacuation de ces
vers avaient pu être attribués aussi bien à d’autres
maladies des reins et de la vessie, qu’à la présence
de ces animaux; et, quand on n’est pas au fait du
diagnostic d’une maladie, il est alors bien difficile ou
plutôt impossible de proposer un plan de traitement
rationnel.
Les trois espèces de vers dont nous venons de
nous entretenir, et qui séjournent hors du canal in-
Mestinal de l’homme , appartiennent tous au premier
|
ordre des entozoaires, c’est-à-dire à celui des né-
| matoïdes. Des vers provenant du second ordre, c’est-
_à-dire des acantocéphales , n’ont pas encore été trou-
| vés dans l’homme, commenous l'avons déjàremarqué.
M. d’Olfers ‚ pendant son séjour au Brésil, a ren-
| contre des échynorhynques chez un singe.
Jusqu'à présent on n’a encore découvert dans
l'homme que deux espèces de vers de l’ordre des
trématodes; et encore les rencontre-t-on très-rare-
| ment : ce sont la douve du foie et le polystome pin-
| guicole.
IX. DOUVE Du FoïE.
Distoma hepaticum ( en allem. der leberegel) ‚pl. 1x, fig. 1-16.
| Distoma : obovatum , bi collo subconico , brevissimo , ports
| orbicularibus , ventrali majore.
| Gmelin, Syst. nat. » P. 3085 , n°. 2, fasciola humana.
Joerdens, Helminth., s. 64, tab. VU, fig. 13 et 14, der leber-
blattwurm , fasciola hepatica.
266 SUR LES VERS INTESTINAUX
Brera, Memorie , p. 92, tab. r, fig. 22 et 23, fasciola epalica..
Rudolphi, Entoz., vol.1t1, p. 352, Distom. hepatic.
Cavier, Règne animal, tom. IV, p. 41, douve du foie.
De Lamarck, Anim. sans vert. , t.111, p. 182, fasciole hépatique.
Ce ver porte les noms vulgaires suivans : les Allemands Pap-
pellent das leberdoppelloch, der leberwurm , schafegel, die egelschnecke,
les Hollandais Zeverworm , botten, les Danois faarefly nder , ikte ,
igler, iiler , souaegler , souigler , les Suédois Zever-mask , les An-
glais Ihe liver fluke , les Italiens bisciuola , les Espagnols caracolil-
los, serillas , pujarıllos.
La douve du foie sejourne dans la vesicule du fiel,
ou peut-être aussi dans le foie de l’homme. On la |
rencontre également dans le foie des moutons, des
bœufs , des cerfs , des gazelles , des chèvres , des cha-
mois, des cochons, des chevaux; des lièvres, des
kanguroos, etc.
DESCRIPTION.
Les vers de cette espece sont de la longueur d’une
à quatre lignes , et de la largeur d’une demie , jus-
qu’à une ligne; ils ont la forme d'une lancette, et ıls
sont obtus à leurs deux extrémités. L'ouverture anté=
rieure est ordinairement dirigée obliquement en de-
dans , le cou esi un peu arrondi , et d’un blanc jau=
nâtre ; l'ouverture postérieure ou ventrale est un peu
-
proéminente ; sa direction n’est pas toujours la même.
Un peu plus bas l’on remarque quelques taches d'un
blanc opaque et un paquet de vaisseaux ou de tubes
d’une couleur jaune ou brune; ce sont probablement
les oviductes. Les vaisseaux qui se trouvent le long
DE L'HOMME. 267
de deux cötes paraissent former les tubes alımen-
taires. On ne remarque pas les oviductes sur tous les
individus, comme cela est démontré par les figures
1a et IC.
M. Otto croit avoir observé sur ces vers un système
nerveux, ce que cependant Gædde ne veut pas ad-
metire.
La description que nous venons de faire de cette es-
pèce de vers se rapporte aux douves du foie, quel’on a
trouvées jusqu’à présent dans la vésicule du fiel de
l'homme. Les douves que l’on rencontre souvent
dans le foie des animaux cités ci-dessus, sont ordi-
nairement beaucoup plus grandes; leur longueur est
d’un pouce à peu près, et leur largeur de quatre à
six lignes. Ces animaux sont d’un jaune sale, ou bru-
nätre, et l’on ne peut que tres-diflicilement disun-
guer quelque chose de leur structure intérieure ;
leur peau est aussi plus compacte; cependant l'on
rencontre souvent chez les animaux des petites dou-
yes conjointement avec les grandes, et Zeder a
prouvé d’une manière suflisante, que les douves
d’une dimension moins considérable ne sont que les
jeunes ou les petits des autres, et qu’elles ne for-
ment nullement une espèce particulière ; on est d’au-.
tant plus en droit de le croire, que l’on a trouvé chez
les grandes des œufs tout à fait développés :.
Zeder° a rencontré dans le foie d’un lievre, no-
* Voyez sur ce sujet, Nau neue entdeckung , etc. , s. 40.
> Erster Nachtrag, s. 167.
268 SUR LES VERS INTESTINAUX
tamment dans un des conduits biliaires, des vers
de cette espèce, qui étaient de la longueur d’une
ligne et un quart jusqu’à sept lignes et demie ; ces ani-
maux étaient placés, dans cet organe, dans un ordre:
en rapport avec leur grandeur, c’est-à-dire que ceux
de la longueur d’un quart de ligne, et ceux d’une
demi ligne se trouvaient réunis.
Mais comme les petites douves, que l’on a obser-
vées dans l’homme jusqu’à présent ressemblaient tout
à fait aux petits, ou aux jeunes douves que l’on voit
souvent dans le foie des moutons et dans celui d’autres
animaux, nous sommes alors également portés à croire
que les douyes que l’on trouve dans l’homme ne
sont que des petits ou des jeunes individus de vers
de cette espèce. Il paraît du reste , qu’on ne les ren=
contre que tres-rarement; car les prétendus vers que
des médecins assurent avoir remarqués dans le foie de
l'homme n’appartenaient pas, pour la plupart , à l’es-
pece dont nous nous occupons à présent. Cependant
il n’y a pas de doute que Malpighi savait déjà que l’on
rencontre des douves du foie chez l’homme et chez
les animaux; mais il n’est pas démontré d’une manière
suffisante, que les vers dont parle Bauhin ' fussent de
véritables douves du foie.
Bidloo *, qui connaissait quel dérangement ces
vers peuvent occasioner dans le foie des animaux, en
a réellement observé dans celui de l’homme.
* Voyez Boneli sepulchret.
2 Clerici hist. , la'ı lumbr. , p. 119.
DE L'HOMME. 269
Wepfer' raconte qu'il a souvent vu le canal he-
patique rempli de vers, qu’il a appelés sangsues (hi-
rudines. )
Pallas rapporte: qu’il a trouvé des douves en dis-
sequant à l’amphithéâtre anatomique de Berlin; ces
animaux étaient comme enclavés dans le canal hépa-
tique d’une femme.
Chabert en a fait rendre à une fille de douze ans
(a laide de son huile empyreumatique) une quan-
tite innombrable; ces animaux étaient de la longueur
d’une ligne et demie jusqu’à trois lignes.
Bucholz a trouvé une grande quantité de ces vers
dans la vésicule du fiel d’un forcat mort d’une fièvre
putride. |
Brera nous assure qu’il en a également observé
dans le foie d’un homme mort à la suite de séorbut
compliqué d’hydropisie. Cet auteur remarque que
| ces vers étaient d’une dimension beaucoup plus con-
‚ siderable que ceux trouvés par Bucholz. Je ne
| doute nullement de la vérité de ce fait, mais je ne
puis pas m'empêcher d’avouer que je ne concois pas
pourquoi Brera ne les a pas fait dessiner d’après na—
ture, et pourquoi 1l a préféré copier la figure tout à
fait inexacte de Jœrdens; car les circonvolutions des
oviductes représentées sur cette figure sont d’abord
tout à fait mal dessinées, en outre il y manque les
? Dans les Ephem. nat. cur.
® De infest. vivent. , p. 252 et 270.
? Rudolphi, Bemerk. , auf einer Reise 11, 5. 37.
270 SUR LES VERS INTESTINAUX
deux sucoirs caractéristiques du genre, que lon
découvre à l’aide d’une simple loupe jusque sur les
plus petits individus. On les voit même sur mes fig. ı
et 1a, pl. 9, qui représentent animal de grandeur
naturelle, et je dois faire remarquer que les indi-
vidus qui ont servi de modèle avaient la même ori-
gine, ou mieux, provenaient du même endroit que
ceux de Joerdens.
Lorsque son altesse royale le grand duc de Wei-
mar visita notre collection en 1814 , je lui montrai le
désir d’avoir quelques individus des douves du foie,
que Bucholz avait recueillies, et qui se trouvent à
Jena. A peine quinze jours s'étaient écoulés, que j'en
reçus une grande quantité de la part du professeur
Lenz. Le cabinet impérial d'histoire naturelle de
- Vienne envoya en revanche à l’université de Jena
cent six vases remplis de vers intestinaux de tous les
ordres, genres et espèces.
Je fais mention de cette circonstance; uniquement
afin de prévenir les médecins qui voudront bien nous
envoyer des objetsrares concernant l’helminthologies
trouvés par eux dans les cadavres de Phomme, que
nous serons toujours disposés à leur prouver notre
reconnaissance.
Brera parle avec beaucoup d’eloge de la figure de
Jœrdens et l'appelle eccellente figura ; il désapprouve
au contraire celle de Bidloo copiée par Leclerc. Les.
figures de Bidloo, représentant des vers grossis, ont
en effet un air un peu singulier, mais celles faites de
D
«randeur naturelle ne sont pas mal dessinées. Il me |
|
|
Il
|}
N
|
DE L'HOMME. a7i
paraît du reste, que Brera a regardé les vers recueil-
lis par lui-même d'une manière bien superficielle,
car sans cela il aurait dü remarquer que les sucoirs
manquaient à la figure de Jaerdens.
Les exemples mentionnés ci-dessus de douves du
foie trouvées chez l’homme, sont les seuls qui soient
venus à ma connaissance ; cela prouve qu’on les ren-
contre bien rarement. Cependant il est possible
que l’on ne reconnaisse pas toujours leur existence,
ainsi que les désorganisations qu’elles produisent dans
quelques cas dans le foie. Je n’ai jamais eu occasion
d'observer cette espèce de vers chez les hommes ;
mais chez les animaux j'en ai rencontré bien souvent.
Les douves siégent ordinairement, chez ces derniers,
dans les conduits biliaires. Ces conduits s’élargissent
quelquefois d’une manière extraordinaire, leur paroi
interne est enduite d’une mucosité épaisse, d’un
brun noirâtre , et leurs membranes s’epaississent for-
tement. Cette mucosité se durcit avec le temps et se
change en une véritable substance osseuse. Quand on
voit des inégalités sur la surface d’un foie, on peut
‘presque assurer d'avance quelle espèce de désorga-
nisations il a subies, et quand on entend une crépita-
tion en pressant l’organe, crépilation qui provient du
brisement des lames osseuses , on est alors sûr que
ce foie contient, ou bien qu’il a contenu des douves
hépatiques. L’incrustation est quelquefois tellement
forte, que l’on peut obtenir, par la dissection, de
véritables tubes osseux.
Le docteur Freese de Meklembourg a rencontré,
272 SUR LES VERS INTESTINAUX
dans un foie de bœuf, une pareille desorganisation
des conduits biliaires, qui avait presque la forme
d’une main d'homme.
Quand ces conduits se trouvent désorganisés à ce
point , alors les douves meurent peu à peu. 11 peut
bien se faire que l’on remarque dans un foie de sem-
blables altérations, qui provenaient originairement
de ces animaux, sans cependant, dans bien des cas,
y trouver de ces derniers.
Je n’ai aucune notion certaine provenant de ma
propre experience, ou de celle des autres sur l’ori-
gine et sur le diagnostic de cette espèce de vers dans
l'homme; Brera a indiqué une asthénie générale
comme la cause predisposante à leur formation : mais
qu’entend-il par là ? il me semble que cette explication
est peu satisfaisante.
Si l’on était cependant convaincu de leur presence,
je „ne saurais proposer rien de plus efficace que
l'huile empyreumatique de Chabert, et l'inventeur
de ce remède a réellement eu occasion de se con-
vaincre de son efficacité dans des cas semblables. Je
suis également persuadé que ce remède doit être d’une
grande utilité pour les moutons, qui sont bien sou-
vent incommodés par des douves qui les font quel-
quefois périr par milliers.
X. POI YSTOME PINGUICOLE.
Polystoma pinguicola ( en allem. das vielloch) , pl. 1X, fig. 2.
PoLysToMA : Depressum oblongum , antice truncatum ; postice acu=
minatum : poris sex anticis lunatim positis .
ne ie
| que ses bords étaient repliés. On voit
| cette raison, de toute autre description.
copiés fidèlement d'après ceux de Treutler
DE L'HOMME. 273
Treutler, Auctuar., p. 19-20, tab. 111, fig. 5-11,
pinguicola.
Joerdens, Helminth., p.66, tab. ı, fig. 3-5 , der fettblatiwurm.
Zeder, Naturgeschichte, p. 230 , n°. 2, polystom. pinguicola.
Rudolphi > Entoz. IT, part. 1, p. 458, poly st. pinguicola.
Brera , Memorie, P- 100, tab. 1, fig. 28, tab. ır, fig. ı
tiridio pinguicola.
hexaihyridum
-2, exa=
De Lamarck , Anim. sans vert. ‚tome II; ,p. 174, da linguatule
des ovaires.
En disséquant le cadavre d’une jeune paysanne de
vingt ans , qui avait succombé à la suite d’un accou-
chement ır&s-laborieux, Treutler a trouve, dans la
graisse qui entouraitl’ovaire gauche (à Pendroit où le
ligament large de la matricecom mence), un engerge-
ment dur, a peu pres de la grosseur d’une forte
noisette et de couleur rouge. Cet engorgement était
fixé légèrement dans le tissu ecllulaire, de manière
que l’on pouvait le faire glisser dans tous les sens. Ce
corps étranger n’était qu’un paquet de graisse en-
durcie, creux à l’intérieur, et contenant un ver libre
semblable à celui qui est représenté tab. 9, fig. 2
La figure 2a fait voir le ver isolé > et notamment par
le côté où l’on ne peut remarquer les sucoirs
> parce
> au contraire
trés-clairement, ces organes, fig. ab. Ces dessins ,
> pour-
ront suflire, ce me semble > pour donner à mes lec-
teurs une idee claire de ce ver. Je m’abstiens > pour
Il est trés-probable que les vers vésiculair
18
es ou
374 _ SUR LES VERS INTESTINAUX
hydatides existent depuis aussı long-temps que les
diverses maladies auxquelles le genre humain est as-
sujéti. Les plus anciens médecins en font en effet
déjà mention ; mais ils ignoraient alors, presque tout
à fait, que ces vers, OU, si l’on veut mieux, ces ves-
sies remplies d'eau, fussent d’une nature animale,
ou bien qu’elles fussent douées d’une vie indivi-
duelle.
- Aretée' observe seulement que l’ona souvent trouvé
de ces vessies dans la cavité abdominale de l’homme ,
et qu’elles obstruent, dans quelques cas, louver-
ture que l’on pratique quand on fait la paracentèse ;
mais cet auteur ne s’explique pas sur leur origine, ni
sur la cause de leur formation.
PA près cet auteur, les médecins émirent différentes
opinions sur ce sujet : Pison croyait que ces vessies
se forment , dans un endroit quelconque, par le mé-
lange du serum avec de la mucosité, ou plutôt par
le mélange d’une matiére purulente.
Ruysch paraît avoir eu sur la nature des hydatides
diverses opinions à différentes époques: tantôt en effet
il les a regardées comme des glandes*, tantôt comme
les extrémités de vaisseaux sanguins , qui auraient
changé de nature’, et tantôt il croyait qu’elles se for-
maient par le tissu cellulaire qui se trouve entre les
vaisseaux , et dans lequel ıl s’amasse de Yeau dans un
: Ouvrage cité, p. 51.
2 Obs. anat. XXX!M.
3 Advers. anat., decad. :, p- 8.
DE L'HOMME. 275
état contre nature. Cette eau, selon son idée, com-
prime les vaisseaux environnans, de manière à faire
disparaître leur capacité , et à les oblitérer entière -
ment '.
Grashuis était aussi de l’opinion que les hydatides
se forment dans le tissu cellulaire, et principalement
dans la tunique adipeuse.
Aucun de ces auteurs n’est entièrement dans l’er-
reur dans sa maniere d'envisager ce sujet, notamment
quand il ne parle qu’en général, de ces changemens
morbifiques qui s’operent dans le corps humain , et
auxquels on donne ordinairement le nom d’hyda-
tides; en effet, ce sont tamtôt des vaisseaux san-
guins et Iymphatiques varıqueux, tantôt des disten-
sions du tissu cellulaire, et tantôt une toute autre
désorganisation , qui produisent cette forme. vési-
culaire.
Le docteur Rust m’envoya, il y à quelque temps,
un testicule avec le cordon spermatique, qui étaient
gonflés d’une manière extraordinaire, et qui étaient
remplis de semblables distensions vésiculaires.
Le docteur Schiffner a trouvé, dans lecadavre d’une
femme , les deux reins gonflés d’une manière contre
nature ; 1] n’y avait plus de trace de la véritable sub-
stance des reins : l'un et l’autre ne formaient qu'un
aggrégat de cellules ou de capsules, qui contenaient
une matière gélatineuse de différentes couleurs.
* Thes. anat. sext., N. x1, not. 1. Ibid. , N. cıv, not. — 44.
anal. , dec. IL, p. 24.
18
276 SUR LES VERS INTESTINAUX
Le chirurgien Rollet, à Paade , a observé une
semblable difformité dans les reins d'une femme
que l'on avait trouvée morte dans Ja rue. Excepie
la desorganisation des reins, il n’y ‘avait aucune
autre anomalie sur le reste du corps ; il n’y avait
non plus aucune trace de lésion à l'extérieur.
Cependant ni les distensions vésiculaires dans le
testicule et le cordon spermatique , nı celles des
reins , dont nous venons de parler, n'étaient de vé-
ritables hydatides ; car elles étaient fortement adhé-
rentes à l'organe, ce qui n'a pas lieu pour les vers
vésiculaires. On en a réellement trouvé dans le plexus
choroïde dn cervean; mais, d'un autre côté , 1l faut
remarquer que l’on a aussi très-souvent pris des vais-
seaux lymphatiques variqueux pour des hydaudes ,
ce que Baillie a déjà justement remarqué.
Notre collection possède deux semblables plexus
variqueux.
J'ai trouvé ‚il y a quelque temps, un véritable cys-
ticerque dans le plexus choroïde d'un singe ( simia
cephus). |
Le nom d’hydatide devrait seulement être donné,
dans mon opinion, à une vessie (n'importe dans
quelle partie du corps animal elle se trouve) qui
est remplie d’un liquide aussi limpide que l'eau,
ou bien d'une matière plus épaisse, complétement
enfermée dans une capsule ; mais où elle se trouve
librement, C'est-à-dire sans avoir aucune adhérence
avec les parois internes de la capsule. Cette dernière
forme une partie intégrante de l'organe dans lequel
DE L'HOMME. >=
7
elle est placée, de la même manière que le cristallin
Vest daus sa capsule.
La nature animale de ces hydatides enfermées dans
des capsules particulières , comme nous venons deles
décrire , a été découverte, vers la fin du dix-septieme
siècle, par Hartmann , Malpighi et Tyson’. L’on peut
ires-bien accorder à tous les trois l'honneur de cette
découverte ; car il est très-probable qu'aucun de ces
trois auteurs n’avait eu connaissance de la découverte
des deux autres. Les mouvemens de ces vessies, ob-
servés par ces trois naturalistes, les avaient conduits à
penser que c’etaient des vers ou de véritables animaux
doués d'une vie individuelle. Cependant ils n'avaient
pas découvert leur extrémité céphalique.
Ce sont Pallas et Goeze qui ont les premiers dé-
montré d’une manière évidente l'existence de la tête
de ces animaux. Nous devons également à ces deux
auteurs une description claire, non-senlement des
cysucerques, ou des hydatides ordinaires , mais en-
core des polycéphales (cenurus, Rud., polycephalus,
Zed.) et des échinocoques.
Les hydatides sont ordinairer- «nt remplies d’une
liqueur limpide, mais elles contiennent aussi, daus
quelques cas, une matière plus épaisse , et se trans-
forment même quelquefois en une substance com-
pacte; quand cela a lieu, on doit alors regarder l’hyda-
tıde transforméecomme étant dans un état morbifique.
J’ai eu souvent occasion d’observer dans les visceies,
* Lumbric. hydropic.
4
278 SUR LES VERS INTESTINAUX
principalement dans le foie des animaux bisulques,
les désorganisations graduelles des hydatides , des
cysticerques et des échinocoques. Ces désorganisa-
tions s’operent de la manière suivante.
D'abord le liquide limpide commence par per-
dre sa transparence, et la vessie, auparavant très
distendue, s’affaisse; le liquide s’épaissit de plus en
plus, il devient jaunätre et ressemble à du fromage
mou. La vessie se ride, enfin la substance ancienne-
ment liquide se durcit complétement. Quand on ob-
serve une semblable dégénération dans son origine ;
l'on trouve encore quelques traces ou parcelles de la
vessie ridée. A la fin elle disparaît, et l’hydatide se
transforme entièrement en une masse calcaire, que
l’on peut quelquefois détacher, aussi facilement que:
l'hydatide saine, de l’organe danslequelelle se trouve.
Cette masse calcaire est aussi recouverte d’un épi-
derme particulier.
J'ai souvent rencontré dans le foie des bœufs à côté
des hydatides complétement développées et saines ,.
tous ces degrés de désorganisation. L’hydatide same,
remplie d’un liquide limpide, forme à la surface de
l'organe dans lequel elle séjourne , une protuberance
convexe et élastique; mais si au contraire cet animal
s'est déjà changé en une masse ossiforme, l’on trouve
alors une dépression entourée de rides. |
Ruysch avait déjà connu toutes les désorganisa-
tions dont cette espèce de vers est susceptible, et
cet auteur ne doutait pas que ces animaux ne pus-
DE L'HOMME. 279
sentse changer en athérome, stéatome , et meliceris'.
- J'ai toujours pensé, avant de connaître l’opiuion de
Ruysch, que les athéromes n'étaient que des hyda-
tides désorganisées *.
Dehaen*? a trouvé dans une glande thyroïde d’un
volume énorme, à côté d’hydatides véritables, diffé-
rentes espèces d’engorgemens. Je présume que ces
derniers n'étaient que des hydatides dégénérées ,
comme j'ai eu souventoccasion dele voir, je le répète,
chez les animaux. Les obstructions au foie observées
par Mekel devaient aussi sans doute leur origine à des
vers de cette espèce.
Les dissertations de M. Laënnec et de Ludersen
sur ces animaux méritent d’être lues. M. Duméril a
eu la bonté de me prêter la dissertation du premier,
lors de mon séjour à Paris; j'en ai extrait plusieurs
notes; les ayant perdues en grande partie, je ne
* Dilucidat. valv. in vas. Iymph., Obs. XXY, p. 29.
2 Dans le Journal de médecine de M. Horn ( Archiv für med. Er-
Jahrung , julius und august 1821 ), il est fait mention d'une obser-
vation très-remarquable d’une Ossification de l'ovaire ; c'était le
docteur Belniz ; à Lignitz, en Silésie, qui l'avait communiquée, La
personne dans laquelle on avait trouvé cette désorganisation avait
reçu de fortes contusions sur le bas-ventre à l’âge de douze ans,
néanmoins elle a vécu jusqu'à l’âge de soixante-quatre ans. Les
prétendues dents que l’on a trouvées dans cet ovaire ossifié me pa-
raissent être des hydatides dégénérées. Voyez également The ame-
rican. medical recorder , vol. 11, p. 491-498 ; le même Journal,
p- 371. Le ver dont il y est question n'était sans doute qu'une
larve de mouche. ( Br.)
3 Ratio medendi , VI, p. 131.
280 SUR LES VERS INFESTINAUX
pourrais en aucune manière m’en servir avec cer-
utude.
La dissertation de Ludersen m’a été communiquée
par Osiander.
Jusqu'à présent l’on n’a trouvé dans l'homme que
deux espèces de vers vésiculaires, savoir les cysticer-
ques (cysticercus), etles échinocoques (echinococcus)..
XI. CYSTICERQUE DU TISSU CELLULATRE.
Cysticercus cellulosæ, R. (en allem. die finne oder der blasenschwanz),,
pl. VEIL.
CYSTICERCUS : capite tetragono ; rostello terete uncinato , collo brevis-
simo,; corpore cylindr:co longiore, vesica caudalı elliptica, transversa.
Gmelin, Syst. nat. p. 3059, n°. 6., tenia cellulosæ ; p.. 3063 , n°.
27, tanıa finna.
Jœrdens, Helminih., s. 57, t. V, fig. 12-16, tzenia muscularis ,
seu finna humana ; der muskelblasenwurm, s. 39 , t. V, fig. 17-21.
tænia pyriformis ; der birnfærmige blasenwurm , 5. Gr, tab. v, fig.
1-2 , tœnia albopunctata ; der weisspunctirte blasenwurm.
Brera , Vorlesung., s. 14, tab. 4, fig. 89, tab. ırı, Blasenwurm.
Memorie du même, p. 130, tab. it, fig. 5, fischiosoma glo-—
boso *; p. 138 , fischiosoma pyriforme ; p. 1 53 „tab. 11, fig. 11-13,
tab. 10, fig. 6-10 , fina muscolare.
Zeder , Anleitung , p. 4.07 , n°. 2, cystic. finna; p. 414, n°. 6 , cys-
tic. pyriformis ; p. 42, n°. 21, cystic. albopunctatus.
Rudolphi, Entozoolog. p. 226 , cystic. cellulosæ
De Lamarck, Anim. sans vert., t. 111, p. 154 , hydatide lanceole.
Ces vers séjournent dans le tissu cellulaire des
muscles et du cerveau ; on les observe souvent dans
ı Ce dessin n’est qu'une copie de la vingt-septième figure de
Hartmann.
EUR EEE SE ES SEEN ER EN FEN N BIER BZ SSR sus
DE L'HOMME. 281
les cochons, mais non pas dans les sangliers. On les
trouve rarement chez l'homme; on les a également
rencontrés dans les singes.
J’ai déjà remarqué que j'ai trouvé moi-même un
cysticerque chez un animal de ce genre.
Comme j’ai fait dessiner un de ces vers avec la plus
grande exactitude, non-seulement dans sa position et
sa grosseur naturelles , mais encore sur une échelle
beaucoup plus considérable que nature; il m’a sem-
blé qu’une explication détaillée des figures serait plus
instructive que toute autre description qui en serait
privée. La figure 14 représente un morceau de mus-
cle dans lequel la capsule contenant le eysticerque
est fixée. La figure 16 représente un petit morceau
de graisse sur lequel le ver est placé ‚et la figure ıc
fait voir le ver avec sa capsule. Cette dernière n’a pas
appartenu , d'aprés mon opinion, ‚au ver, mais bien
à l'organe dans lequel il avait séjourné; car on ob-
| serve des vaisseaux qui passent à la surface de cette
capsule. En général, on ne peut en effet séparer cette
dernière qu’apres avoir coupé ou déchiré les fibres
qu ap
| par lesquelles elle est fixée à l'organe ou aux muscles
qui l’entourent. |
La formation de la capsule s’opere probablement
par lirritation que la presence du ver cause à l’en-
droit de l’organe dans lequel il se developpe. Cette
formation de la capsule par l'irritation du ver (sup-
posé qu’elle se développe ainsi) ressemble à celle de
la noix de galle.
En ouvrant la capsule, le ver, qui y est placé li-
282 SUR LES VERS INTESTINAUX
brement, se présente, comme cela se voit dans les
figures 1det 1e. L'intérieur de la capsule est lisse et
contient un peu de liquide. Aussitôt que le ver se
présente hors d’elle, il rétracte ordinairement la
tête , le cou et même le corps dans la vessie. L'on re-
connaît le siége de ces parties par une tache qui est
blanche comme du lait , opaque et un peu dure au tou
cher. En pressant la vessie avec les doigts ou au moyen
de l'instrument de Goeze, dont je ne me suis jamais
servi, l'on peut forcer le corps , le cou et la tete à
sortir de la vessie ; mais, en employant ces moyens;
on déchire toujours la vessie du cysticerque ; car ce-
lui-ci, en se retractant, prend une forme plus ou
moins ovalaire , et les différentes parties de son corps
occupent alors le diametre transversal de la vessie
(Voyez figure 1f). Pour éviter cet inconvénient, On
fera mieux de mettre les vers extraits de leur cap-
sule dans de l’eau tiède, et en tâchant d’entretenir ce
liquide , pendant quelque temps , à la même tempe-
rature , il arrive alors que l’un ou l’autre de ces cys-
ticerques fait sortir spontanément la tete et le cou;
comme cela se voit sur la figure 1g. Lie ver représenté
sur la figure ı f avait déjà le cou allongé; mais aussi-
tôt que l’eau commengca à se refroidir , ıl se rétracta:
Les personnes qui ont la vue bonne remarquent;
même à l'œil nu (sur un individu complétement de-
veloppé, et tel qu’il a été représenté fig. 18)» la têtes
le cou très-court, le corps ride et la partie impropre= |
ment appelée vessie transparente. Je dis impropre-
mentappelée , par la raison que ce n'est en effet qu'une |
DE L'HOMME. 283
| continuation distendue du corps ride, ayant la forme
| d’une vessie. Cela peut surtout clairement s’aperce-
voir dans le cysticercus fasciolaris* provenant du foie
des souris, et qui a probablement donné lieu à la de-
nomination de tout ce genre de vers. Ce ver vésicu-
laire, souvent de la longueur de quatre à cinq pouces,
et de la largeur d’une à deux lignes , est presque ride
d’un bout à l’autre , et pourvu d’une trés-petite vessie
à l'extrémité postérieure. Quelquefois cet animal est
| tellement aplati, et les rides sont souvent rapprochées
‚les unes des autres si régulièrement, que l’on serait
porté de regarder ce ver comme étant réellement ar-
ticulé , si l’on ne voyait pas quelquefois, même au
milieu de cesarticulationsapparentes, desendroits qui
| sont tout à fait boursoufflés, et qui servent en même
temps à prouver que la vessie et le corps sont formés
| de la même membrane. Cette circonstance est cause
que Brera a entièrement rejeté la dénomination de
‚eysticerque. Je l’ai conservée 1°. parce que les meil-
leurs helminthologues lont adoptée ; 2°. parce que
‚on doit avoir différentes dénominations pour indi-
‚quer divers genres; 3°. parce que la dénomination de
‚fischiosoma proposée par Brera s’adapte aussi bien que
celle d’hydatis à toutes les hydatides; et 4°. parce
qu’elle désigne l’ordre et non pas le genre. Le tablearı
‚stivant prouve que Brera s’est servi de la denomina-
tion fischiosoma , aussi bien comme nom d’ordre que
comme nom de genre?.
* Himly l’a appelé faussement douve du foie.
* Memorie , p. 8.
284 SUR LES VERS INTESTINAUX
Ord. IT, Fischiosomi ( vermi vesicolari ).
Gen. I, Eremitr.
Spec. I, fischiosoma globoso.
Spec. II, fischiosoma piriforme.
Spec. Ill, ditrachierosoma.
Gen. Il, socali.
Spec. , fischiosoma policefalo.
Gen. I, capsoları.
Spec. I, fina muscolare.
Spec. Il, fina epatica.
Spec. LE, fra viscerale.
Spec. IV , fina idaloide.
U
Il résulte de ce tableau qu'il y a, selon Brera, huit |
différentes espèces d’hydatides dans le corps humain:
Cependant, dans la grande quantité d'animaux de
différentes classes, ordres et espèces examinés par
moi, je n'ai peut-être pas trouvé en tout autant d'esz
pèces d’hydatides, différentes les unes des autres par
des signes caractéristiques paruculiers ; aussi je prends !
la liberté de douter de l’énumération de Brera.
L'on peut clairement voir, sur la figure 1h, les dif: !
férentes parties de l'extrémité céphalique tres-groS- |
sies. Au-dessus de quatre sucoirs, sort une protubé-
rance tantôt plus courte, tantôt plus longue ou plus
ou moins conique , selon qu’elle est plus ou moins
étendue. Cette protubérance est pourvue, dans son
milieu, d’une double couronne de crochets. L’on
DE L'HOMME. 285
voit un de ces derniers considérablement grossi dans
la figure 17; le cou et le corps, de même considéra-
blement grossis, sont représentés sur la figure 1.
La figure 13, qui fait voir la vessie caudale dans
sa grosseur naturelle, est dessinée de maniere à
donner une idée très-claire de cette partie du ver, et
il m'a semblé inutile de la faire représenter sur une
plus grande échelle que nature.
A l'exception de Treutler et Brera, aucun des au-
teurs qui ont donné une description de ce ver, n’a
fait dessiner en entier, autant du moins que je me le
rappelle , la vessie de la queue ; et ce que Zeder dit,
8 366, corfternant les hydatides, est tellement obscur
et inintelligible, que celui qui n’a pas étudié lui-
. même l’économie de ces animaux pourrait être porté
à croire que le ver est attaché à la capsule par la vessie
de sa queue ; cependant cela n’a pas lieu, et le ver, Y
compris sa vessie, se trouve au contraire libre
dans la capsule. Les passages suivans, que l’on trouve
dans l’ouvrage de Zeder, comme, par exemple,
| «les vers s’enfoncent dans la vessie», ou bien «les vers
sortent de la vessie de la queue », n’ont nullement
un sens clair, parce qu'ils peuvent donner lieu à faire
croire, à un homme peu instruit sur cette matière,
que le ver et la vessie sont deux choses différentes.
| Quaud on veut parler des mouvemens de cet animal N
‚Al faut s'exprimer ainsi : La tête et la partie anté-
rieure du ver se rétractent dans la vessie caudale ;
car la vessie elle-même appartient au corps de l’ani-
mal, et en effet on voit seulement qu'une partie du
286 SUR LES VERS INTESTINAUX
ver s'enfonce ou se rétracte dans l’autre. Cette con-
traction s'opère de la manièresuivante:le pointle plus
saillant de la protubérance, qui se trouve au milieu
de la couronne de crochets, s’affaisse en premier lieu;
la couronne de crochets suit après; les sucoirs ren=
trent plus tard, et à la fin toute la partie ridée du corps;
de maniere que lorsque celui-ci est entièrement con-
tracté, la tête est la partie qui se trouve la plus pros |
fondément située dans la vessie caudale. Quand
la tête veut sortir, les parties mentionnées se prés
sentent dans un ordre inverse. Les plis du corps
paraissent d’abord ; viennent après les sucoirs, la cou:
ronne de crochets, et à la fin la protubérance co=
nique , qui, quand elle n'est pas entierement sortes
a souvent l'air de former une fossette. La figure 1f
donne une idée assez claire de la contraction et de |
l'extension du ver. Du reste, le mécanisme de la cons !
traction du ver ne peut être mieux comparé qui laı
rétroversion d’un doigt de gant, où la partie pointue |
se trouve rentrée la première; et, en la repoussant,
elle sort la dernière.
Les cysticerques, observés chez les cochons de-
puis long-temps , ont été découverts dans l’homme;
pour la premiére fois, par Werner :. Il les a ren-
contrés dans le cadavre d’un soldat de quarante ans;
qui avait péri dans l’eau. Cet auteur rapporte que
presque tous les muscles de cet homme contenaient
de ces vers.
2 Verm. intest., cont. IL, p. 7.
DE L'HOMME. 387
Fischer * , aprés Werner, en a trouvé vingttrois
dans les deux plexus choroïdes du cerveau d’un jeune
homme. Ces vers étaient fortement attachés à ces
plexus, et Fischer prétend qu'il n’a pas observé sur
eux de vessie extérieure. M. Rudolphi a répondu à
cela que le ussu cellulzire est extrêmement fin à
l'endroit où ces animaux se trouvaient , et c’est pro-
bablement la raison pour laquelle Fischer n’a pas
remarqué la vessie extérieure.
Quant à moi, je suis de l'opinion que les vers,
ayant été mis dans l’eau tiède, se seront gonflés au
point de faire crever la vessie, probablement très-
fine, et qu’elle se sera rétractée ensuite de manière à
ne pouvoir plus être apercue.
Cependant il est de fait qu'il y a quelquefois des
cysticerques qui se trouvent placés librement dans
de grandes cavités du corps animal, comme j'ai eu
occasion de l’observer dans la cavité thorachique des
campagnols.
Dans le cadavre d’une femme morte par suite
d'une hydropisie , Treutler” a remarqué dix-sept
eysticerques dans les plexus choroïdes , quinze d’un
côté et deux de l’autre, Cet auteur les appela tænia
albopunctata, et ıl croit qu'ils différaient, par leur
structure, de ceux rencontrés par Werner et Fis-
cher. Cependant M. Rudolphi pense, et même avec
raison, que c’étaient des vers de la même espèce ;
* Ten. hydatig. , p. 28.
? Ouvrage cité, p. 1.
288 SUR LES VERS INTESTINAUX
du reste, il n’est pas probable que ceux trouvés par
Treutler n'eussent qu’un seul sucoir et qu’une cou-
ronne simple composée de six crochets. I] paraît plu-
töt que leur tête n’était pas entièrement développée :
cette seule observation, par conséquent , ne nous
mettrait pas en droit d’admettre qu’il ya dans le cer-
veau une seconde espèce de cysticeraues d’une struc-
ture différente. |
Brera a également trouvé des individus de cette
espèce dans le plexus choroide, et Steinbuch en a
rencontré vingt-cinq dans les muscles du cou et du dos.
Loschge a encore observé quelques individus dans
le plexus choroïde du même cadavre que Steinbuch
avait déjà examiné.
Isenflamm a remarqué un individu de cette espece
sous l’aisselle d’un autre cadavre.”
Himly a rencontré des cysticerques non-seulement
dans les muscles, mais encore dans plusieurs viscères
d'un cadavre humain ; 1l y en avait en effet à la sur-
face du cerveau , quelques-uns étaient suspendus à la
pie-mère , et enfin d’autres étaient enfermés dans le
cerveau lui-même; un seul individu fut remarqué
dans les poumons: le foie, la rate etles autres viscères
n’en contenaient point. Le même Himly a encore
trouvé des cysticerques sur quelques muscles d’un
autre cadavre.
M. Kudolphi m'a fait savoir , par une lettre qu'il
m'a adressée , que jusqu'ici, chaque hiver, il a ob-
servé quelques vers de cette espèce a l’amphitheätre
de Berlin.
DE L'HOMME. 289
J’ai fait mes cfforts depuis dix ans, mais en vain,
pour m'en procurer dans le grand hôpital de Vienne
et dans l’amphitheätre anatomique de la même ville,
Notre collection doit plusieurs individus à la bonté
de M. Rudolphi.
Les observations qui ont été faites jusqu’à présent
sur les cysticerques ne nous ont pas encore fourni de
certitude sur les symptômes d’après lesquels on peut
présumer leur présence, et elles ne nous ont pas fait
connaitre non plus les accidens qu'ils peuvent oc-
casioner pendant la vie. J'indiquerai ici brièvement
LAURE renseignemens que l’on a recueillis sur cette
espèce de vers.
Werner raconte que le sujet dans lequel il en a
trouvé était un homme fort et robuste.
Fischer * rapporte qu’un de ses amis, mort par
suite d’une fièvre maligne, était tres-porte à la mé-
lancolie; quelques années avant de mourir, il se
plaignait souvent d’une fatigue et d’une pesanteur
dans les membres; et quoique Fischer ne veuille pas
décider que ces accidens aient été réellement occa-
sioués par la présence des cysticerques, il remarque
cependant qu'il les a justement trouvés dans les par-
lies qui avaient fait le plus souffrir cet homme pen-
dant sa vie,
Treutler a examiné le cadavre d’une femme qui
avait succombé par suite d’une hydropisie, et qui
avait éprouvé , pendant long-temps, beaucoup d’ac-
cidens très-graves. On était d’ayis qu'ils provenaient
WConst. It, p. 47.
19
290 SUR LES VERS INTESTINAUX
d’une affection de la tête. Outre les cysticerques que
l’on a trouvés dans les plexus choroïdes, on a remar-
qué dans le cerveau une désorganisation d’une élen-
due considérable ; il y avait en même temps des ex-
croissances osseuses d’un volume énorme à la base
du crâne.
Brera a observé des cysticerques dans le cadavre
d’un homme de cinquante-cinq ans, mort par suite
d’aploplexie; les ventricules du cerveau étaientrem-
plis d’une sérosité sanguinolente.
Treutler en a rencontré dans le cadavre d’un homme
de soixante-cinq ans, qui était mort de consompuon.
Les cysticerques décrits par Himly provenaientdes
muscles, du cerveau ‚et des poumons d'un homme qui
avait succombé à la suite d’un cancer au visage; ce-
pendant cet auteur a examiné d’autres cadavres de
personnes mortes de la même maladie, mais elles .
n'avaient pas de traces d’hydatides. Gelles que Himly
a vues dans une seconde observation provenaient
d’une personne qui n'avait pas non plus succombé
par suite d'un cancer, mais bien par celle d’une toute
autre maladie ; et les accidens qu’elle avait éprouvés
avant de mourir ne pouvaient pas être attribués , avec
certitude , à la présence des hydatides. De
Le singe dont j'ai parlé plus haut, et dans leque
j'ai rencontré quelques vers de cette espèce, avait
souvent des accès convulsifs , et mourut un jour su-
bitement.
Comme on sait si peu de choses sous le rapport de
l'étiologie, de la pathologie et du diagnostic sur les
DE L'HOMME. 291
cysticerques, on peut encore moins dire quelque
chose de positif sous le rapport thérapeutique.
Les eysticerques, dans Je premier cas observé par
Hinily, se sont fait remarquer , à l'extérieur, sur la
poitrine et le bas-ventre, par des espèces de Bou he
de la grosseur d’une lentille.
Si un homme se présentait chez moi avec de sem-
blables boutons, je tächerais d’abord de m’assurer ,
par une incision, si J'ai réellement à combattre de
véritables eysticerques. Convaincu de leur ee,
je m’ordonnerais cependant rien autre chose qu'un
changement de régime : ; car j’ai raison de croire que
ces vers se détruisent souvent d'eux-mêmes. La dé-
génération d’hydatides dont j'ai parlé plus haut, me
le fait également presumer; car on peut très-bien
conclure de l’étendue des rides du foie qui entourent
les cysticerques transformés en une masse calcaire ;
que le volume de ces animaux a dû égaler au moins
celui d’une noix, à l’époque de leur distension la plus
considérable. Cette dégénération du ver, qui est sou-
* Je crois que ce serait ici le cas d'employer les vermifuges à l’ex-
térieur sous forme de frictions. En effet, l'expérience ayant prouvé
que ces médicamens administrés de cette manière agissent sur les
vers qui séjournent dans le canal intestinal, à plus forte raison
doivent-ils se montrer encore plus efficaces sur ceux qui se trouvent
sous les tégumens. Il me paraît que les huiles empyreumatiques ,
par exemple, employées en frictions, devraient être d’une grande
utilité ; il serait seulement à craindre que leur mauvaise odeur
ñ'empêchât beaucoup de personnes d’en faire usage. ( Note du tra-
ducteur.
» 19.
202 SUR LES VERS INTESTINAUX
vent telle qu'il se trouve réduit, probablement au
moyen de la résorplion ,àn’avoir plus que la grosseur
d'un pois, nous meten droit de croire que tout le reste
de cette masse calcaire peut étreentiérement résorbé.
Le fait suivant vient encore à l'appui de ma sup-
position, que les eysticerques disparaissent quelque-
fois d'eux-mêmes.
Pour obtenir ces animaux en grande quantité ,
dans le but d'étudier leur Ecopnomie aussi exacte-
ment que possible, on avait donné ordre aux experts
pour la vente des animaux, il y a à peu près quinze
ans, d'acheter , pour le compte du cabinet impérial
d'histoire naturelle, un cochon qui se trouverait
rempli de cyslicerques; en effet on nous envoya un
individu qui avait été censé en contenir une grande
quantité. Avant de faire tuer cet animal, nous le nour-
rimes pendant quelque temps (probablement avec
des substances autres que celles qu’il avait mangées
auparavant) dans l'intention de faire augmenter le
nombre de ces vers; mais nous fümes trompés dans
notre attente, car au lieu d’en rencontrer un nombre
considérable, nous ne trouvâmes que douze ou quinze
individus.
El reste à savoir si les experts ne s’étaient pas trom-
pés, et si cet animal en avait réellement un grand
nombre ; ou bien si les cysticerques n’avaient pas dis-
paru spontanément, peut-être par le changement de
nourrilure.
Outre le cysticerque dont nous venons de parler ,
Gmelin (Syst. nat., p. 5059, n°. 5, tenia visceralis );
LA
DE L'HOMME. 29
Treuuler ( Observat. path.-anat. ; pag. 14, fig. 1et4),
Jœrdens ( Helminth., pag. 56, tab. v, fig. 8et 11), et
Zeder (Anleit., s. 418, n°. 11), font encore mention
de cysticerques viscéraux. M. Rudolphi remarque
trés-justement que les observations de ces auteurs
se rapportent ou aux hydatides en general, que l’on
a trouvées dans les animaux, ou bien à d’autres vers,
que l’on doit compter parmi les échinocoques.
La fina epatica de Brera est peut-être , d'a pres mon
idee, un eysticerque viscéral, si toutefois c'est au-
tre chose qu’un cysticerque celluleux. M: Rudolph:
ne veut pas cependant nier l’existence d’un eysli-
cerque viscéral dans l’homme, etje n’ar rıen non plus
à objecter contre elle. J’engage les naturalistes, en cas
qu'ils aient occasion d'observer un de ces vers, à
indiquer exactement les caractères par lesquels ıl se
distingue, principalement à l'extrémité cephalique,
des autres espèces de ce genre; car tous les eysticer-
ques se ressemblent surtout par la forme de la tete,
qui est constante; Ja forme de la vessie eaudale n’est
qu’accidentelle, par la raison que sa structure dépend,
dans mon idée, de l'organe dans lequel le ver se de--
veloppe.
XIE ECHINOCOQUE DE V'HOMME.
Echinococcus hominis (emallem. der hülsenwurm), pl. vaxt, fig. 2-2
Joerdens , Helminih., s. 62 , tab. vir, fig. ar et 23, der menschen
vielkopf,, polycephalus hominis.
294 SUR LES VERS INTESTINAUX
Zeder, Anheitung ,s. 431 , n°. 2, tab. ıv ‚fig. 7-8 , polyceph. hu-
manus; 5.432 , n° 6 , polycephal. echinococcus.
Brera, Memorie, p. 149 , fischiosoma policefalo ; p. 164, tab. 1,
fig. 1-3, fina idatoide.
Rudolphi, Entoz., 11, 2, p. 247, tab. x1, fig. 4 , echinococcus
humanus.
De Lamarck , Anim. sans vert., tom. 11, p. 157 , l’échinocuque de
l’homme.
M. Rudolphi distingue les hydatides en vivantes et
en non vivantes ; il regarde l’échinocoque provenant
des intestins des bisulques (echinococcus vetcrinorien )
comme une hydatide vivante, par la raison que l’on
trouve dans le liquide qu’elle contient les Echino-
coques proprement dits, c’est-à-dire de petits corps
microscopiques, pourvus de quatre sucoirs et d’une
couronne de crochets. Ainsi il paraît que Rudolph
ne regarde pas la vessie dans laquelle ces pelits corps
sont contenus comme un véritable animal; à plus
forte raison il ne doit pas non plus regarder toutes
les autres vessies, qui ne contiennent point de pe-
tits corps pourvus de sucoirs et de couronnes de
crochets, comme de véritables animaux; cependant
comme ces vessies ressemblent, sous tous les rap-
ports , aux échinocoques, je me crois pour cette
raison en droit de regarder aussi comme de veri- .
tables anımaux toutes les hydatides qui, selon la
definition ci - dessus établie, sont contenues libre-
ment dans des capsules particulières, sans être adhé-
rentes ni à celles-ci, ni à l'organe dans lequel elles
se trouvent.
DE L'HOMME. 295
Home croit que l’hydatide sphéroïdale est j'animal
le plus simple, et qu’elle est pour ainsi dire tout es-
tomac.
Himly est l’auteur dont la manière de voir à ce su-
jet me paraît atteindre le plus directement le but.
Voici ses propres expressions : « On irouva des vesi-
cules isolées ( hydatis simplex) flouantes et libres :
plusieurs médecins les regardèrent comme de simples
dilatations de vaisseaux lymphatiques. Cette hydaude
est en effet un être extrêmement simple et peut-être
le plus simple de tous les animaux ; je dois cependant
la considérer comme un animal parce qu’elle vit,
puisqu'elle ne pourrit pas et qu’elle n’a aucune ad-
hérence avec le corps de l’homme ou de l'animal dans
lequel elle s’est produite : ainsi les humeurs n'étant
pas douées de vie, elle doit être regardée comme un.
être vivant individuellement, et par conséquent
comme un animal particulier. On ne doit pas s’at-
tendre à ce qu’elle soit pourvue de tête, de bouche
ou de quelque organe analogue, et encore moins
qu’elle soit douée d'intelligence. La lymphe épan-
chée entre deux parties d’un animal, par exemple
entre les surfaces enflammées , et par conséquent plus
activement productrices du poumon et de la plevre,
recoit aussi bien des vaisseaux sanguins que les par-
ties avec lesquelles s'établit Vadherence , tandıs que
la même substance animalisée sans communication
ou adhérence avec les parties du corps dans lesquelles
elle s’est produite, et par conséquent individuelle,
n’a pas la nature des animaux parfaits à sang chaud ,
296 SUR LES VERS INTESTINAUX
mais constitue un animal aquatique’. Ces hydatides
sont, lorsque leur enveloppe est un peu épaisse,
d’une substance semblable à celle du cristallin, et
lorsqu'elle est plus épaisse, elles présentent alors l’as-
pect d'une membrane cartilagineuse , transparente et
incomplétement incolore, tirant un peu sur la cou-
leur de l’opale, et qui s’affaisse quand on vient à l’in-
ciser. Par l'analyse chimique elles se comportent
complétement comme les substances animales ; ainsi
ce sont des individus particuliers vivans qui n'ont
rien du tout de commun avec les plantes, ce qui nous
oblige de les regarder comme des animaux, d’où ré-
sulte que la definition ordinaire de l'animal, urée de
la présence d'une bouche et de la faculié d’y intro-
duire la nourriture, de son propre mouvement*, est
1 « Le développement de la vie individuelle dans ce cas-cı n’est
pas pour nous un plus grand problème que le développement de
la vie en général, qui restera toujours pour nous insoluble. Je
prie de croire que je n’ai pas la prétention de vouloir le résoudre ;
j'observe seulement que l’on ne doit pas s’imaginér être beaucoup
avancé dans son explication en admettant que la vie se développe
par le moyen d’un œuf. Je suis étonné de ee que M. le professeur
Oken , qui n’aime pas cependant à être gêné par des entraves quel-
conques dans sa manière de penser , ait pu, dans son ouvrage sur
la génération (die zeugung) , revenir surlesmonades , qui ne seraient
pour ainsi dire que des œufs primitifs , ce que l’on n’a pas besoin
d'admettre , à moins qu’on ne veuille supposer que l'esprit pris
mitif soit mort, et qu'il ne vive que par ses créations. » x
? Blumembach dit seulement dans son ouvrage ayant pour
titre : Handbuch der Naturgechichte te auflage, Geettingen, 1807,
,
.
DE L'HOMME. | 297
beaucoup trop restreinte. Quelques-unes des hyda-
tides sphéroïdales contiennent encore une autre mem-
brane plus mince qui offre épars ca et la, et le plus
souvent par groupes, des corpuscules d'une apparence
glanduleuse ; enfin ıl esi des hydatides sphéroïdales
qui en renferment d’autres plus peutes, et qui ainsi
réalisent, pour ainsi dire, le systeme d’emboite-
ment. Toutes, contenantes et contenues, se sont-elles
formées à la fois ? ou bien la plus grosse a-t-elle pro-
duit la plus petite ? ou peut-être enfin les corpuscules
d'apparence glanduleuse se comportent-1ls comme
les gemmules sphéroïdaux de la conferve des fontai-
nes, qui se détachent et vont former de nouvelles con-
ferves. »
Cette dernière opinion me paraît la plus probable,
comme il résullera encore davantage, à ce que je
crois, de l'explication des figures; les hydatides re-
présentées dans la planche 8 provenaient toutes de
Ja même poche d’un volume énorme qui s'était for-
mée dans le foie d’une femme que l’on avait amente
mourante à l’hôpital de Vienne. Toutes les hydau-
des se trouvaient placées hbrement dans cette poche,
très-lisse dans son intérieur. La figure 2a représente
une des petites hydatides, mais non pas la plus pe-
te, et les figures 2 et 2e représentent deux indivi-
dus un peu plus gros. En regardant la figure 2e on est
p. 36, « Ces animaux paraissent avoir tous une bouche.» Mais
comme il admet à la même page une excention nour les infuseires
FAC 1 7
les hydatides ne peurraient-elles pas être regardées comme tels?
298 SUR LES VERS INTESTINAUX
porté à croire qu'un peut ver est contenu dans un
autre plus grand. Cependant il n’en est pas ainsi ; Car
la membrane interne du ver (cet animal est composé
de deux membranes) s'était seulement détachée et
rétractée de l’externe; cela est prouvé par les deux
figures 2 et 2e, qui ont été faites d’après le même
échantillon. La figure 2 fut dessinée aussitôt que le
ver eut paru hors de la poche; il fut placé dans l’eau, ;
eu le lendemain matin la membrane interne s'était
détachée, comme cela est indiqué dans la figure 2e. .
Ces vessies avaient l'air d’être couvertes de granula-
ions très-fines qui, représentées sur une échelle
plus grande que nature, ressemblaient à de petites
boules transparentes (Voy. fig. 2c ). Quelquefois les
petites boules contenues dans celles d’un plus grand |
volume sont assez volumineuses pour être aperçues
à l'œil nu , comme cela se voit dans la figure 22. La.
[4 Al hd
figure 2c en représente une très-grossie. En suppo-
sant que l’hydatide représentée dans la fig. 2 était |
deja le produit d’une autre hydatide plus grosse el
plus ägde, comme je vais le démontrer tout à l’heure,:
il faudrait par conséquent considérer les petites boules
contenues dans l'hydatide ( fig. 2c) comme provenant
de la troisième génération, etcelles représentées dans
la figure 25 comme provenant de la quatrième gene-
ration, à partir de l’hydatide primitive *.
|
: Voyez Meckels, Archiv. für physiologie , vol. vi, heft. 2. Et
was über den echinococcus , Bud. par le docteur Bremser; voyez
Meckels, Archiv. , VE, heft. 4. Jægers Beobachlung über den hülsen- |
wurm. ( Br.)
DE L'HOMME. 209
J’ai remarqué plus haut que les échinocoques de
Vhomme ressemblent , sous tous les rapports, à ceux
que l’on rencontre dans les intestins des bisulques.
Je vais maintenant tâcher de prouver cette assertion.
L'on observe souvent, surtout dans le foie des bi-
sulques, des échinocoques tres-volumineus, qui
ont quelquefois une forme irrégulière. Ces animaux
sont remplis, dans l’état sain, d'une liqueur limpide,
qui dépose cependant une matière trouble. Si l'on
place une goutte de cette matière sous un microscope,
on y voit nager une grande quantité de petits corps
de différentes forme et structure; 1l y en a qui sont
ronds, ovalaires, presque cylindriques, cordiformes,
claviformes, et d’autres semblent être divisés en deux
parues d’une structure différente. L’on remarque
clairement sur quelques-uns de ces corps quatre su-
coirs et une couronne de crochets. On voit encore
| nager dans cette matière une grande quantité de pe-
‚tits crochets détachés , absolument de la même forme
| que celui représenté dans la figure 17 et qui provient
| d’un cysticerque. Ces faits nous prouvent jusqu’à l'é-
| vidence , que les crochets se détachent. Les sucoirs
disparaissent également, et les petits corps de tant de
formes différentes prennent avec le temps celle de pe-
tits globules lisses. J’en possede, qui sont de la gros-
Seur des graines de coquelicots. Aussi long-temps
que les choses restent dans cet état, la mère hyda-
tide se laisse encore facilement séparer du sac dans
| lequel elle est contenue; ou plutôt elle sort d’elle-
même sı on fend ce dernier avec précaution au moyen
300 SUR LES VERS INTESTINAUX
d’une incision d’une étendue convenable ; mais quand
cesanimalcules, transformés eux-mêmes enhydatides,
commencent à se développer davantage , ’hydatide |
primitive devient adhérente au sac dans lequelelle est |
contenue, et elle ne s’en laisse plus séparer ; en ous !
vrant un de ces sacs on voit sortirlibrement au dehors à
ces petites hydatides , et on trouve déjà dans leur ine)
iérieur les animalcules de différentes formes, dont
nous venons de parler; mais comme leur nombre |
dans une vessie est très-considérable, 1ls n’y trouvez
raient pas assez de place, si tous arrivaient à leur de-
veloppement complet; il me paraît alors probable, |
que les animalcules développés en premier lieu doi- !
vent empêcher complètement , ou au moins en par-
tie, l'accroissement des autres; aussi voyons-nous |
également un grand nombre de ceux-ci dans un éLat
de difformité. La figure 2d nous en fournit un exenl- |
ple; on y reconnaît facilement la forme sphérique l
primitive, et il est très-probable qu'une hydatide
voisine volumineuse a empêché son développement |
complet. Dans quelques cas on n’observe pas dans les
vessies une accumulation considérable de ces animal |
cules ; dans d’autres, au contraire , ceux-ci se mulu=\
plient probablement trop tumultueusement, de ma-
nière que Ja mère hydatide tombe dans un état ma-
ladif, ou même finit par en mourir; si cela a lieu,
elle est alors soumise à tous les changemens men-
tionnés plus haut, et elle se desseche à la fin en une
masse dure et calcaire.
in.
La même chose s’opere chez les hydatides que Von
DE L'HOMME. 5ot
rencontre dans l’homme; à l'exception que l'on n'a
trouvé jusqu'à present, dans leur intérieur, que de
petites boules lisses , etnon pasencore des petits corps
pourvus de sucoirs et d'une couronne de crochets.
J'avoue que je ne me fie pas entièrement à l’observa-
tion faite par Goöze', qui prétend avoir observé chez
les hydatides que Meckel lui avait communiquées, de
petits corps de forme olivaire, pourvus d’une simple
couronne de crochets. Je crois que l'instrument de
compression dont il se servait volontiers dans les ob-
servations de ce genre, a été cause de quelque illusion
d'optique. J’ai ECHO trouvédes corps d’une forme
olivaire, dans des hydatides qui provenaient d’un
homme *; mais ces corps n'étaient point pourvus
d’une couronne de crochets : je dois ces hydatides à la
bonté de M. Soemmerring.
. Néanmoins ces petites vessies se développent,
quoiqu’elles n'aient de communication directe avec
aucun autre corps, absolument comme les hydatides
des bisulques, et elles sont aussi sujettes aux mêmes
désorganisations ; nous devons, par cette raison, ran-
‚ger les hydatides de l'homme et celles des bisulques
‚ dans le même genre. Peut-être trouvera-t-on les cou-
| ronnes des crochets et les sucoirs, quand l’occasion
| serprésentera d'examiner une hydatide primitive. Ce
| qui m'a surtout engagé à ajouter foi à cette supposi-
* Zeder nachirag , s. 310.
2 De hydatidibus in corpore humano ,presertim in cerebro repertis ;
| Diss. auct. Car. Rendtorff. Berolini, 1822 , in-8°. ( Br.)
3v2 ' SUR LES VERS INTESTINAUX
tion , dest la circonstance que les petits vers prove= |
nant des échinocoques des bisulques de la seconde et :
troisieme generation, perdent plus vite leur forme
particulière, et s’approchent de la forme globuleuse. ;
Il me paraît également qu’aussitöt que l'acte de la :
génération se trouve une fois bien en vigueur chez
ces animaux , le développement des petits de la troi-
sième et quatrième génération s'opère plus vité
5
Toutes les hydatides de l’homme, examinées par
moi , provenaient, pour le moins, de la seconde CTP
nération. Je n’ai pas encore rencontré, dans les ca-
davres d'hommes , des hydatides primitives , c’est-à=
dire où une seule hydatide volumineuse remplissait |
un seul sac, ce que j'ai observé très-souvent chez
:
les bisulques.
Il est probable que Félix Plater’ a vu des hyda
. .. . \ %
tides primitives dans le foie et dans le mésentère d’un |
homme ; car 1l fait mention de vessies remplies d'une
cau claire , qui étaient de la grosseur d’une pomme:
L’hydatide dont parle de Haen * était aussi cerlai- |
nement une hydatide primitive. Cet auteur rapporte W
que le foie tres-volumineux d’un homme de vingt-
quatre ans, était rempli de tumeurs qui ressem= |
blaient à des squirres. On fit une incision sur une |
de ces tumeurs, et il en sortit environ une pinte de li=
quide; après sa sortie, on put facilement extraire la |
vessie affaissée ; car elle n’avait pas la moindre adhé=
! Obs., lib. 111, p. 617.
2 Ratio medendi, v!!, p. 125. 5
DE L'HOMME. 303
rence avec la concavité dans laquelle elle se trouvait;
ainsi l'hydatide primitive, dans ce cas, était la seule
qui S'y trouvât dans un état sain. Plusieurs des
autres tumeurs en contenaient beaucoup, de gros-
seur différente; d’autres étaient remplies d’une ma-
tiere grasse (crassa et pinguis amurca), ei d’autres
enfin contenaient une matière qui semblait être sa-
blonneuse au toucher; il y avait par conséquent dans
le même organe une mere hydatide, beaucoup d’in-
dividus de la seconde génération, et quelques-unes
qui étaient désorganisées.
J’ai observé, ıl y atquelque temps), absolument la
même chose dans le foie d’ur chameau ( camelus bac-
trianus , L. )
Comme on n’a pas encore constaté d’une manière
positive la présence d’une couronne de crochets chez
les échinocoques de l’homme, il me semble par con-
séquent, que le nom d’échinocoque n’est pas bien
choisi pour cette espèce , en ce que ce ver est plutôt
un liocoque (Ziococus ); mais si l’on choisit cette der-
mère dénomination , on ferait alors des échinocoques
de l’homme un nouveau genre, ce qui cependant ne
conviendrait pas; je propose par conséquent d’ap-
‚peler le genre splanchnococcus , une des espèces echi-
natus, et une autre lævis, jusqu’à ce que l’on ait dé-
‘couvert les couronnes de crochets chez les individus
de ce genre. M. Laënnec appelle le ver dont nous
nous occupons maintenant, acephalocystis.
| Excepté dans le canal intestinal, on a rencontré
des hydatides dans tous les organes de l’homme; ce-
304 SUR LES VERS INTESTINAUX
pendant il est de fait, que beaucoup d’auteurs ont cru
avoir observé ces animaux, et que ce n’était pas de
véritables hydatides, je n’escepte pas même le cas
observé par Kelch, et rapporté par Lüdersen. Parmi
toutesces hydatides, il paraît qu'il n’y en avait qu'une
seule adherente au foie, qui méritât d’être qualifiée
comme telle. Je prie de croire que je n'ai pas re-
levé cette erreur de Lüdersen dans l'intention de! |
nuire à sa mémoire. Cet auteur a travaillé avec um |
zèle extraordinaire, et il a recueilli tout ce que les
médecins ont publié sous le nom d’hydatıs : dureste, |
dans sa classification des hydatides, 1l s’est ample= |
ment justifié de sa manière d'envisager ce sujet.
Les cas observés par Persius et Goiter', où tous les
organes de la poitrine et du bas-ventre étaient cou=
verts d’hydatides , doivent être regardes comme con
formes à la vérité. |
Morgagni, dans son ouvrage (De caus. et sedib.
morb. ), rapporte qu'il a rencontré des hydatides dans |
le cerveau , dans la moëlle épinière, et leurs mem-
branes ; cet auteur a également trouvé cette espèce de
vers dans d’autres cavités et d’autres parties du corps |
humain; plusieurs de ces animaux appartenaient |
sans doute au genre cysticerque; Je possède aussi!
quelques Echinocoques provenant de la glande pitui-
1
= . . . D . 19
taire (glandula pituitaria) que je dois à la bonté de!
M. Soemmerring; ces vers sont encore plus petits que |
les graines de senevé. |
1
l
. |
1 Buneli sepulchret. , Nb. 112 . sect. XXXT, obs. 21,, 867. |
DE L'HOMME. 305
Morrach rapporte qu’une fille de seize ans avait
toutes les trois semaines deux accès de syncopes tres-
violens ; à la fin , elle perdit l’ouie, la vue et l’odo-
rat; elle devint ensuite paralytique de tout le côté gau-
che; huit mois après, à compter de la premiére syn-
cope , elle mourut d’une apoplexie; on trouva dans
Phemisphere droit du cerveau une hydatide de la
longueur de trois pouces et de la largeur de deux.
Adam Schmidt a observé une hydatide dans la
glande lacrymale.
Morgagni’ a trouvé un de ces vers d’un volume
très-considérable , qui était adhérent au cœur. Le
même auteur’ cite encore de semblables observations
faites par Cordæus, Fontanus, Persius, et Ballonius.
Geoffroi rapporte qu’il a trouvé dans la cavité tho-
rachique deux hydatides d’une grosseur extraor-
dinaire. |
Collet raconte qu’une femme de quarante-sept ans
avait évacué, en toussant, depuis le 6 septembre 1771
jusqu’au 1° janvier 1772, cent trente-cinq hydatides
de la grosseur d’un pois, jusqu’à celle d’un œuf de
poule ; toutes ces hydatides étaient déchirées. Cette
femme avait également une tumeur dans la région du
foie ; ıl est possible que ces vers provinssent de cet
endroit.
Le Journal de médecine publié à Edimbourg * fait
= De causts et sedibus , XXV , 13.
? Ibid., xxx VIN, 35.
3 The Edinburgh medical and surgical Journal, vol. vır, 18:1 >
p- 490.
20
306 SUR LES VERS INTESTINAUX
mention d’une femme de vingt-quatre ans, qui avait
évacué, en toussant, après avoir éprouyé une inflam-
mation des poumons, une grande quantité de mem-
branes, que l’on a dü regarder, d’après leur structure,
comme des dépouilles d’hydatides.
Monro rapporte un cas où la famée du tabac faci-
lita l'évacuation d’hydatides qui siegeaient dans les
poumons.
Nous avons déjà fait mention plus haut de l'hyda-
tide que Dehaen a rencontrée dans la glande thyroïde.
M. le professeur Kern a extirpé, il y a quelques
années, une tumeur qui était placée au-dessus du ster-
num et qui contenait plusieurs hydatides ; M. Kern
a eu la bonté de me les communiquer.
Ruysch: a examiné un foie qui ne consistait, pour
ainsi dire, qu’en hydatides, et qui contenait une Ma-.
tière sablonneuse transparente; l’on ne voyait plus
dans ce foiela moindre ramification provenant de la
veine porte ni de la veine cave; les conduits biliaires
avaient disparu ainsi que les artères du foie.
Veit a observé un abcès entre la dixième et la
douzième côte du côté droit, par lequel plusieurs cen-
taines d’hydatides de la grosseur d’un pois, jusqu'à
“elle d’un œuf de pigeon, étaient sorties dans l'espace
de quatre à cinq jours.
Pemberton a trouvé sur l'épiploon un de ces vers
le cinq pouces de diamètre; le même auteur a vu
ju foie un abcès qui s'était étendu jusqu'aux pou-
ı Thesaur. I, n. xU.
DE L'HOMME. 307
mons, et qui contenait au moins cinq cent soixante
hydatides d’un diamètre de deux pouces et demi jus-
qu’à celui d’une tête d’epingle. Le même auteur a
observé dans le parenchyme de la rate deux hydatides
globuleuses de trois pouces de diamètre chacune, qui
contenaient une liqueur très-limpide , dans laquelle
nageaient de petites hydatides'.
Lüdersen a examiné le cadavre d’un homme de
quarante ans, mort d’hydropisie; la rate de cet indi-
vidu s'était transformée en un sac d’un volume énorme,
et qui contenait une quantité extraordinaire d’hyda-
tides ; la plus volumineuse était de la grosseur d’un
citron, et pesait à peu prés trois onces; les plus
petites étaient de la grosseur des graines de moutarde.
Boudet* a rencontré entre les muscles abdominaux
et le péritoine, un sac qui contenait à peu prés quatre
mille vessies remplies d’eau.
Maclay raconte qu’il se forma dans le mésentére
d’un homme, dans l’espace de dix-huit mois, une
tumeur énorme, qui occupait toute la capacité du
bas-ventre, et qui contenait à peu près trente-cinq
pintes d’hydatides, parmi lesquelles il y en avait plu-
sieurs de la grosseur d’une orange.
Lecat a publié une observation semblable.
M. Cullerier a rencontré dans le tibia une conca-
© 1 David Price a trouvé des hydatides dans la substance du cœur
chez une personne morte subitement. Voyez Med. et chir. Trans. ,
vol. xt, p. 1. (Br.)
2 Giornale di medicina pratica compilato da V. L. Brera, v. ı1,
Padua, 1812.
20.
308 SUR LES VERS INLESTINAUX
vité de la longueur de trois pouces , et de la largeur
d'un pouce et demi, qui contenait une bydatide de
plus d’un pouce de diamètre, et dans laquelle il yavait
d’antres petits vers semblables.
Il me serait facile d'augmenter d'une cinquan-
ane le nombre des observations que Von a faites
sur ce sujet, si je ne craignais pas de fatiguer mes
lecteurs. J'avoue qu'il serait beaucoup plus satisfai-
sant pour mot, el beaucoup plus interessant pour mes
lecteurs, si je pouvais indiquer quelque chose de
certain concernant le diagnostic de l'existence decette
espèce de ver dans Fhomme, ou bien concernant les
causes prédisposantes de sa production , et un mode
de traitement propre à la combattre.
Lassus nous a indiqué les symptômes suivans, par
lesquels on peut, selon lui, présumer l'existence des
hydatides dans le foie; il dit que les personnes qui
en sont incommodées ont le teint pâle, mais non pas
jaune ou bilieux; elles éprouvent de temps à autre
des douleurs violentes au foie et de Ja constipation ;
le bas-ventre est cependant souple. Elles ont des nau-
ses et vomissent quelquefois ; elles croyent qu'elles
seraient débarrassées de la sensation de pesanteur
dont elles sont incommodées, si elles pouvaient
vomir fortement; la région épigastrique Se gonfle
un peu, et elle est presque toujours douloureuse ;
les malades éprouvent à cel endroit une sensa-
tion de pesanteur, qui les menace d’étouffement ;
cette sensation rend leur respiration difficile et pro-
voque une LOUX sans expectoralion ; Ces malades sont
DE L'HOMME. 309
à peu près incommodes des mêmes symptömes qu'é-
prouvent les asthmatiques; à la fin il se forme peu à
peu ala région épigastrique une tumeur un peu elas-
tique avec une surface inégale; son volume augmente
insensiblement; et l’on y sent plus ou moins disuinc-
tementune fluctuation ; les malades ne peuvent pas fa-
cilement rester couchés sur le dos , ils se reposent de
préférence sur le côté droit, surtout quand !’hydatide
a son siége dans le grand lobe du foie , et ils ne peu-
vent pas être assis sans se courber en avant. En ge-
neral Lappetit manque , la digestion est mauvaise , la
langue est pale sans être chargée. Cependant cet au-
teur a observé quelques malades, également INcom-
modés par des hydatides, qui avaient conservé leur
appétit jusqu’à la mort, leurs pieds ne se gonflaient
que dans le cas où ıl y avait complication d’ascite et
vers la fin de la maladie. L'on ne remarque pas non
plus, d’après cet auteur, des signes d’une inflamma-
tion précédente ni de suppuration; le pouls , qui
windique point l'existence de la fièvre, est lent ,
petit et tendu.
J'avoue franchement. que je ne regarde pas le ta-
bleau de ces symptômes comme très-exact : je crois,
du reste, que Lassus les a puisés dans une observa-
tion faite par Roux ’; mais, dans le cas rapporté
par ce dernier, ıl y avait non-seuleisent des hydatides
au foie, mais il y avait aussi des desorganisations
dans le cœur et les parties environnantes, désorga-
* Journal de Médecine , octobre 1774, p. 514.
310 SUR LES VERS INTESTINAUX
nisations qui ont pu facilement causer des acces
d'asthme , et à la fin une mort subite.
_ Malgré le grand nombre d'observations recueillies
par moi sur les hydatides, il me serait réellement
impossible d'indiquer les symptômes par le moyen
desquels on peut reconnaître, avec certitude, l’exis-
tence de cette espèce de vers. Il me serait également
aussi difficile de dire quelque chose de satisfaisant
sur les causes qui favorisent leur formation. Cepen-
dant , je ne puis passer sous silence que l’on a souvent
trouvé des hydatides justement dans des organes qui
avaient éprouvé auparavant des contusions. Les sep-
tième er huitieme observations de Lassus font mention
de deux filles qui avaient recu en tombant de fortes
secousses sur la région épigastrique.
Corvisart et Leroux ont rapporté l’histoiré d’un
cordonnier qui avait également reçu un violent coup
dans l’hypocondre droit; cet homme éprouva, par
suite de cet accident, une douleur tres-forte, qui
cependant se dissipa peu à peu entierement; trois ou
quatre mols après , le malade remarqua un léger gon-
"flement du bas-ventre et surtout à l’endroitou il avait
reçu le coup; cette tumeur augmenta pendant six ans
de plus en plus, de manière à le forcer d'abandonner
entièrement ses travaux.
Le malade dont parle M. Cullerier avait également
recu un coup sur le tibia, en montant à une échelle.
En supposant que des violences dirigées à l’exte-
rieur de notre corps favoriseraient le développement
de l'espèce d’hydatide dont nous nous occupons ;
DE L'HOMME. Sr
il serait alors également pérmis d'admettre que toute
autre commotion violente, comme par exemple un
saut d’une hauteur considérable, une touxtrès-grave,
des dternuemens violens, etc., pourraient avoir les
mêmes résultats. Cette supposition ne me parait pas
dépourvue de bon sens ; car s’il est de faitqu'une com-
motion violente sur la colonne vertébrale peut oc-
casioner une hydropisie dans les ventricules du cer-
veau, ne serait-il pas aussi bien admissible qu’une
goutte de substance plastique et vivante, sortie de
la circulation, püt être épanchée dans un tout autre
organe , et que cette goulte se formät subitement en
un tout individuel ? Ce tout prendrait alers la forme
primitive de tous les corps organisés (c’est-à-dire
la forme sphéroïdale), se développerait par la suite
aux dépens de l'organe ; et finirait par jouir d’une vie
indépendante.
Aussi long-temps que le diagnostic et l’étiologie de
ces parasites seront couverts d’un voile aussi épais, on
ne pourra pas établir une thérapeutique rationnelle.
Lassus est de l’opinion que l'ouverture de ces sacs
ou bien des hydatides a toujours Ele suivie de mort;
mais il cite cependant lui-même un cas ' tiré de l’ou-
vrage de Guattani, où un semblable sac s’ouyrit spon-
tanement, et duquel sortirent plus de trois cents hy-
datides ? ; il resta une fistule pendant six ans, qui se
: Quyrage cité, p. 137.
3 Rheinische Jahrbücher für med. und chır. , v. Harles. Bd. 11, st.
1 , blasenmolen. ( Br.)
312 SUR LES VERS INTESTINAUX
cicatrisa à la fin, et le malade guérit. La personne
dont il est question dans la première observation,
faite par Lassus, vécut encore pendant une année,
après que l’on eut pratiqué une ouverture dans la
tumeur.
L'yson ‘parle d’une femme, chez laquelle il fit pra-
tiquer , dix ans auparavant, une incision au Géfaut des
côtes; ilen sortit unegrande quantité d’uneeauclaire,
et plus de cinq cents hydatides, dont la plus grande’
partie étaient entières et remplies d’un liquide lim-
pide; les plus grosses, qui ne pouvaient pas passer à
travers l’ouverture, furent déchirées, A près l’évacua-
tion de ces animaux, cette femme se porla mieux
qu'avant. ”
On a aussi des exemples que des hydatides ont été
quelquefois évacnées par le canal.intestinal.
Bidloo * fait mention d’une observation semblable ;
il est probable que le sac qui entourait les hydatides
était dans ce cas-ci adhérent aux intestins , et qu'après
la rupture du sac ces animaux s'y sont épanchés ; car
l'on conçoit aisément que ces vers n’ont pas pu se pro-
duire et se multiplier dans le canal intestinal.
1 faut que je fasse encore ici mention d’une es-
pece d'hydatide, qui diffère, sous plus d’un rapport,
de l’échinocoque , je veux parler des hydatides qui
se forment souvent dans la matrice, soit seules ou
conjointement avec un fœtus, ou bien seulement
* Lumbricus hydropicus.
* Ouvrage cité, p. 28.
} |
|
DE L'HOMME. 313
dans le placenta, et qui ont été appelées par Weiss-
mantel kydrometra hydatica.
Le docteur Helm a eu la complaisance de m’en
envoyer un échantillon avec l’histoire de la maladie
que je vais rapporter ici.
Barbe St. était, dès son enfance, d’une constitution
faible et maladive; elle était sujette aux engorgemens
glanduleux et aux maladies de la peau; ses règles se
montrèrent dès sa neuvième année, et toujours tel-
letient aboudantes, qu’elle les gardait chaque fois
une quinzaine de jours. Elle éprouva plusieurs ma-
ladies, entre autres une blennorrhagie, dont elle
fut guerie, et le flux menstruel diminua; elle se maria
à l’âge de vingt-deux ans, dans le mois de juin 1815;
ses règles cesserent au mois d'octobre, et plusieurs
symptômes firent présumer une grossesse.
. Cette femme fit appeler le docteur Helm le 7 jan-
vier 1816; elle se plaignit de fortes douleurs dans
les reins , qui duraient déjà depuis un mois; elle per-
dait en même temps par le vagin une plus où moins
grande quantité de sang noir; du reste , cette per-
sonne assura à Helm que tous ces accidens n’in-
fluaient pas trop sur sa santé; quelle n'avait pas
beaucoup d’appetit, mais une grande soif.
. L'on pouvait facilement sentir au-dessus du pubis
la matrice qui était distendue. La moindre pression
que l’on y exercait causait une douleur violente.
Les médicamens qu'on lui avait ordonnés firent
cesser l’hémorrhagie; mais, après l’espace de quel-
ques jours, elle reparut conjointement avec les dou-
314 SUR LES VERS INTESTINAUX
leurs de reins ; à dater de cette époque, elle se porta
tantôt assez bien , et tantôt plus mal.
Le 30 janvier, elle fut de nouveau incommodee
par de grandes douleurs, et elle éprouva en même
temps une hémorrhagie par le vagin.
L’orifice de la matrice, que l’on ne pouvait pas at-
teindre auparavant, était dilaté, mais il était impos-
sible de sentir la présence d’un enfant. À neufheures,
les douleurs devinrent violentes, et une mole, de la
grosseur d’une tete, sortit; elle &ait entourée d’une
membrane , que la sage-femme déchira, et quelques
milliers d’hydatides se presenterent. 5
Deux jours après, cette femme fut atteinte d'une |
fièvre , ses seins se gonflèrent, et il en sortit du laits |
un traitement convenable a promptement produit la
guérison complette : dans la même année, cette femme |
devint de nouveau enceinte, et accoucha d’une fille
saine et bien conformée. : à
Je recus, le lendemain de leur sortie, les hydatides
observées par M. Helm; elles étaient attachées, au
moyen de pédoncules , à une espèce de placenta; les
plus volumineuses étaient de la grosseur d’une nOi= |
sette , et les plus petites de celle de grains de chene-
vis : elles étaient transparentes et remplies d'un lı-
quide limpide. Je versai sur-le-champ, sur une partie |
de ces vers, de l’esprit-de-vin , pour mieux conserver |
cette espèce de placenta, qui semblait devoir se dis- |
soudre facilement dans l’eau. Ces vessies prirent!
bientôt une couleur rouge. La même chose arriva |
pour celles qui se trouvaient dans l'eau , conjointe= |
DE L'HOMME. 315
ment avec les annexes sanguinolentes, et elles ne se
decolorerent que peu à peu.
Il paraît résulter de là que les hydatides sont réel-
lement douées d’une vie individuelle, et qu’elles for-
ment des animaux particuliers. Gette supposition
west nullement réfutée par la circonstance qu’elles
se trouvent implantées , au moyen de pédoncules ,
sur un corps commun, ou bien qu’elles sont adhe-
2
rentes et placées les unes sur les autres; car il ya
dans le grand règne aquatique un nombre infini d’a-
nimaux qui ont le corps ainsi fixé. En outre la cır-
constance que pendant leur vie elles n’admettent dans
l'intérieur de leur corps que la quantité nécessaire
d’un liquide convenable, tandis que ce n’est qu'après
la mort que peut y pénétrer celui qui les entoure,
estencore en faveur de leur vie individuelle. La même
chose a lieu pour les échinocoques , quand on les met
dans un liquide coloré. Une môle en forme de grappe
ne peut pas être regardée comme une simple disten-
| sion ou boursouflement des vaisseaux lymphatiques,
ou d’autres vaisseaux , par la raison que les pédoncules
| mesont pas creux. On peut se convaincre de ce fait,
sion remplit de mercure une de ces vessies un peu
volumineuse, dans laquelle d’autres plus petites se
trouvent placées plus profondément; ce liquide ne
pénètre pas dans ces dernières.
Je ne prétends cependant pas que l’on doive ran-
ger dorénavant ces vessies, d’après ma seule autorité,
parmi les vers intestinaux; c’est par cette raison que
je fais placer la figure qui représente une petite par-
316 SUR LES VERS INTESTINAUX
tie de la môle, examinée par moi, parmi les pseu-
dohelminthes (Yoy. pl. 9, fig: f)-
Une semblable môle, assez bien dessinée, se trouve
dans Bidloo :.
Clarke cite un cas qui paraît tout-à-fait semblable
à celui rapporté par Helm; il s'était également formé
du lait, dans une circonstance pareille, dans le sein
d’une femme, de manière qu’elle aurait pu alaïter un |
enfant.
Moreau rapporte un cas analogue.
Watson raconte le suivant : « Une femme de qua- |
rante-huit ans, quiavait eu plusieurs enfans, se crut de
nouveau enceinte dans le mois de novembre; depuis
le mois de février jusqu’à la fin du mois de mars, elle
eut chaque nuit des pertes de sang par le vagin. Ce: |
pendant, comme elle ne remarqua pas un gonflement
du ventre, ni des seins, elle simagina qu’elle était arr
rivée à l’époque où elle perdrait tout-à-fait ses règles;
elle rendit, le premier avril, après avoir éprouvé au-
paravant de fortes douleurs de reins, beaucoup d’hy- |
datides, qui étaient de la grosseur d’une noix muscade |
jusqu'à celle d’une tête d’epingle; quelques-unes
étaient remplies d’une lymphe transparente , et d’au- |
tres d’une lymphesanguinolente ;peu de temps après» |
elle fut complétement rétablie. » |
Mougeot a aussi écrit sur ce sujet; mais les obser-
vations qu’il rapporte ont été faites par M. Percy. |
Ce dernier regarde également les bydatides comme |
* Ouvrage cité, tab. 2.
DE L'HOMME. 317
des animaux vivars , et il ajoute qu’on les rencontre
souvent dans le placenta et qu'on les observe presque
toujours dans les animaux ruminans. Il établit les
Doom suivans , comme ceux d’après lesquels on
peut présumer une grossesse d’hydatides. Les femmes
éprouvent souvent de petites pertes de sang ou de
glaires, à dater du second mois jusqu’à Vaccouche-
ment. L’orifice de la matrice est toujours dilaté, et il
ne change presque pas de forme n1 de place; le bas-
ventre est en effet gonflé, mais il est plutôt souple
que dur. |
L'époque de l'accouchement des hydatides n'est
| ii fixe ; leur sortie a lieu quelquefois dans le tro1-
sieme mois, et quelquefois dans le dixième, mais
rarement plus tard.
Pour accélérer la sortie de ces animaux, Percy
conseille de faire des injecuions d’eau de mer, ou
d'une dissolution saturée de sel marin, avec du
vinaigre.
Une seconde observation que nous allons rap-
porter a prouvé à ce médecin qu’une semblable
| formation de möles peut avoir lieu dans l’état de
| Virginité.
" Une chanoinesse de vingt-six ans éprouva un re-
| tard de règles dans le mois de juiilet 1788; son
ventre se ballonna, etc. Le 5 avril 1789, elle rendit
par le vagin deux pots de chambre d’eau, conjointe-
ment avec des hydatides, qui étaient en partie entières
eten parlic déchirées.
318 SUR LES VERS INTESTINAUX
Le docteur Guillaume Schmidt a rapporté trois
cas semblables.
Dans le premier, les hydatides ressemblaient tout-
à-fait à celles que le docteur Helm avait examinées; |
dans les deux autres cas, qu'il a eu occasion d’obser-
ver plus tard, les boules ou vessies étaient beaucoup |
. vn, , \ CEE L
plus petites, et en général d’une grosseur tres-ıme-
gale; elles se trouvaient entassées par-ci par-la dans
une substance gélatineuse, qui ressemblait beaucoup
au frai des grenouilles. Toutes ces vessies étalent cou-
vertes d’une membrane qui avait la consistance du
chorion. |
Ne pourrait-on pas supposer que les hydatides,
dans ces deux derniers cas, se trouvaient dans un
état maladif ? |
Plusieurs naturalistes parlent de l’evacuation de
vers vesiculaires, sans cependant nous faire savoie
s'ils avaient été réunis par le moyen de pédoncules:
Ne pourrait-on pas admettre que les hydatides se
séparent, avec le temps, de leur pédoncule, de la
même manière que les œufs se séparent de l’ovaire
de la poule?
Je crois la chose possible, et elle me paraît même |
très-probable ; justement au moment où cette feuille |
allait être livrée à l'impression, je reçus de M. Brera!
2 Tabula anatomico-pathologica ad illustrandam historiam vermium
in visceribus abdominis degentium , hydropem ascitem , vel gravidita-
tem simulantium, cum epierisi , auctore Valeriano Aloysio Brera ,
D. M. Viennæ Austriæ, 1818, ın-4°.
DE L'HOMME. ng
une petite dissertation, accompagnée d’une grande
planche , où se trouvent représentées de semblables
hydatides.
Autant que je puis en juger par le texte, elles
étaient placées entre les muscles abdominaux et le
péritoine. La plus grande partie consistent en vessies
isolées plus grosses et tout à fait libres. Dans trois
différens endroits, se trouvent cependant plusieurs
hydatides beaucoup plus petites, qui ont l'air d’être
unies les unes aux autres par le moyen de pédoncules.
SECTION IM.
Des pseudohelminthes, ou des corps, animaux ou non,
regardés à tort comme des vers intestinaux.
. Je donne cette dénomination a tous les corps étran-
gers, soit qu'ils aient appartenu au règne animal
jou à tout autre, que des hommes ont rendus, ou bien
ue l’on a trouvés dans les cadavres, et que les mé-
„erg
| decins ont regardés Atortcomme des vers intestinaux.
f
Cependant, je passerai seulement en revue quelques-
uns des pseudohelminthes , que les auteurs moder-
nes nous ont fait connaître; car si je voulais m’oc-
euper de ceux qui sont cités par les anciens méde-
eins, et qui en général ne sont rien autre chose que
des insectes ou leurs es, je pourrais remplir un
volume en entier.
On trouvera un catalogue tres-détaillé de sem-
blables observations dans l'ouvrage de Brera, sous
320 . SUR LES VERS INTESTINAUX
le titre de vermi metastatici, notamment dans lase- !
conde section , où cet auteur traite des insectes. |
Je ne crois pas que beaucoup de personnes ajou-
tent foi à ce que cet auteur a avancé sur Îles vers
accessoires, vermi accessori. Il y est fait mention,
entre autre choses, d’une femme qui aimait beaucoup
la viande de mouton, et qui a rendu un tænia que
l'on ne trouve que dans cet animal; ıl y est encore
question d’un homme qui faisait un grand usage dé
viande de porc, et qui a rendu un échynorhinque
géant que l’on ne rencontre que dans cet animal;
mais je reviens à mon sujet.
1. DITRACHYCÈRE RUDE.
Ditrachyceros rudis( en allem. das rauhe doppelhorn ), pl. ıx , fig: 3.
X
Karl Sulzer’s Beschreibung eines neu-entdeckten Fingeweide-wurms
im menschlichen Korper. mit drei kupfertafeln. Strasburg und Pa-
ris, 1802. |
Bi |
Zeder , Anleitung , s. 421 , cysticercus bicornis.
a u : |
Rudolphi, Entoz., 11,2, p. 288, tab. xu1, fig. 5, dieerasrud. »
Brera, Memorie , p. 140, tab. ut, fig. 11-ı3, ditrachiserosoma.
De Lamarck, An. sans vert., t. HE, p. 190, le bicorne hérissé.
De Blainville, Die. des Sc. Nat., tom. xut, p. 369.
Une demoiselle de vingt-six ans, qui avait déjà
éprouvé plusieurs maladies, fut incommodée un
jour d’uneesquinancie ; le huitieme jour de cette ma-
ladie, elle prit un purgatif, composé de manne et de
|
DE L'HOMME. 321
sel de Glauber, qui lui fit rendre pendant deux jours,
conjointement avec les matières fécales, une quantité
extraordinaire de petits corps, que Sulzer regarda
comme des animaux. |
Apres avoir fait usage des amers pendant quelque
temps, cette demoiselle évacua de nouveau plusieurs
corps semblables , mais qui n'étaient pas entiers.
On envoya tous ces échanullons, conservés dans
Vesprit-de-vin, a Sulzer, qui, après les avoir exami-
nés tres-soigneusement, publia une description de-
taillée , accompagnée de plusieurs dessins, sur une
échelle très- grande, qui représentaient non-seule-
ment le ver en entier, mais également plusieurs de
ses parties. Un de ces échanullons est figuré de
grardeur naturelle, fig. d, pl. 9. Les antennes re-
courbees, qui avaient l’air d’être velues sous le mi-
croscope, n'avaient pas Ja même direction dans tous
les échantillons. Parmi la grande quantité de ces
corps, 1l n’y en avait que quatre qui fussent pour-
vus de ces organes. Cependant on voyait nager plu-
sieurs de ces derniers dans l’esprit-de-vin.
Sulzer a rangé ces petits corps parmi leshydatides.
Zeder ne veut pas les reconnaître pour telles.
M. Rudolphi est de l’opinion qu’on devrait plutôt
les ranger (supposé qu'ils fussent de véritables vers,
ce qui lui paraît encore douteux) parmi les acanto-
céphales, et qu'ils devraient former un genre parti-
culier , sous le nom de dirhynchus. Quant à moi, je
ne me suis pas encore inquiété quelle place ils doi-
. vent occuper dans un systeme d’helminthologie; car je
2,
352 SUR LES VERS INTESTINAUX
n'ai pas encore pu me convaincre que ce fussent de
véritables vers; il me paraît plus probable ( je puis
cependant me tromper) que ces corps n’etaient rien
autre chose que des graines d’une plante que cette
demoiselle avait avalées ; mais je ne puis pas dire de
quelle plante ıls provenaient. Les antennes de ces
corps, telles qu’on les voit représentées dans les figu-
res de Sulzer , ont l’air de n’être que les germes de
ces graines. Ceux qui ont lu avec attention tout ce
que cet auteur a dit sur leur structure extérieure et
intérieure, et ceux qui ont bien examiné les figures
qu'il en donne, seront peut-être de mon opinion.
Il. ASCARIS STEPHANOSTOMA.
(En allem. das kronenmaul) , pl. IX, fig. e.
Jœrdens, Helminth. ‚5.29 , tab. vu, fig. 5-8.
Brera, Memorie, p. 189, tab. lt, fig. 14-17, ascaride stepha-
nosloma.
III. ASCARIS CONCSOMA
(En allem. der kegelwurm ) , pl. xt, fig. e.
Joerdens , helminth. , s. 30 , tab. vit, fig. 9-12.
Brera , Memorie , p. 193; tab. IX, fig. 18-21, ascaride conosoma.
Je réunis ces deux vers ensemble, parce qu'ils
proviennent de la même source, et qu'ils appar-
tiennent à Ja même famille.
Quelques médicamens ordonnés par le professeur
DE L'HOMME. 323
Bretsthneider, de Jena, à yn jeune homme, firent
rendre à ce dernier les animaux dont nous nous oc-
cupons maintenant. Bretsthneider , voyant que ce
n’était pas des oxyures, les envoya au professeur
Lenz; ce médecin donna aux plus considérables le
nom de stephanostoma , et il appela les petits conosoma.
11 communiqua quelques échanullons à Jærdens,
qui les rangea dans le genre ascaride.
M. Rudolphi s'exprime à ce sujet en ces termes * :
« Joerdens a décrit et dessiné, sous le nom d’as-
caris stephanostoma et conosoma, des corps qui ne
sont rien autre chose que des larves de mouches.
Après avoir examiné la description et les figures de
cet auteur, je conclus sur-le-champ qu'il ne s’agis-
sait ici que de larves d'insectes. Cependant je priai
le professeur Lenz de me communiquer quelques-
uns des échanullons de Joerdens, et, en effet, ıl
eut la bonté de m’en envoyer. Je me trouvais à cette
époque à Berlin, qui possède un grand nombre
d’entomologistes tres-habiles. Je leur fis voir ces
prétendus vers, et ils les regardérent également
comme des larves.
« On devrait supposer qu’un homme qui s’est dé-
cidé à publier une helminthologie du corps humain,
serait en état de distinguer une larve de mouche
d’un ver; je ne concois pas comment Jeerdens put
adapter à ces deux larves les signes caractéristiques
propres au genre ascaride. En général, cet auteur n'a
2 WW iedemanns archiv., 11, 2, 8. I.
324 SUR LES VERS INTESTINAUX
jamais fait attention aux caractères dans ses obser-
vations ; tout son ouvrage porte le caractère de l’igno-
rance et de la légéreié ; il a même ignoré que son
prétendu ascaris conosoma se trouve dessiné dans
l'ouvrage de Phelsum, qu'il a cité cependant quel-
quefois.
«Il est arrivé assez souvent que des larves de mou-
ches ont séjourné dans le canal intestinal de homme.
Acrel, Osiander et beaucoup d’autres en citent des
exemples; mais il est assez étrange, et cela mérite
d’être relevé sévèrement, qu’un helminthologue du
dix-neuvième siècle ait regardé des larves comme
des oxyures. »
Brera, qui a également reçu, par la bonté de
M. Gautieri, quelques-uns des échantillons dont
nous venons de parler, les regarde aussi comme des
larves de mouches, et il désigne même l'espèce à
laquelle èlles appartiennent. Il a attribué les pre-
mières (stephanostoma) à la musca carnaria, et les au-
tres à la musca domestica; mais néanmoins il leur a
assigné une place parmi les ascarides, sans doute par
la raison qu'il ne voulait pas contredire un autre
naturaliste, qui les avait rangées avant lui dans ce
genre. C’est pousser, réellement, la condescendance
un peu trop loin, etelle est cèrtainement tres-mal
placée dans un cas pareil.
La figure c, pl. 9, représente le stephanostoma ;
et la figure e, même planche , le conosoma.
DE L'HOMME. 325
IV. CERCOSOMA, pl. IX, fig. 2.
CERCOSOMA : species nova ; capile distincto ; labio amplissimo , qua-
dricuspidato , quatuor papillis insignito ; corpore oblongo , subde-
presso , nodoso , spiræ adinstar fibroso ; retrorsum caudato ; mar-
gine superiori ac inferiori dentritico; dorso punctato ; poro caudalı ;
cauda longissima ,tereti , subeirrosa. Habitat in vesica urinaria.
Brera, Memorie , p. 106 , tab. 1, fig. 26-27.
Nous devons au professeur Canalı de Perouse la
découverte de cette nouvelle espèce d’un prétendu
ver intestinal qui, étant encore vivant, a été rendu par
une femme pendant qu'elle urinait ; je crois que l’on
aurait dü plutôt dire, que l'on a trouvé dans le pot
de chambre d’une femme.
Après que ce ver eut été examiné et disséqué avec
soin , on en fit une description détaillée que l’on en-
voya à Fabbroni à Florence, qui la fit insérer, par
les soins de M. le professeur Gatteschi, dans le Gior-
nale litterario de Pise. Brera a eu le bonheur d’enri-
chir sa collection de cet échantillon rare et unique;
quant à moi je n'en suis pas envieux, et je crois que
mes lecteurs ne le seront pas nôn plus, quand ils en
auront vu le dessin (Voyez fig. b, pl. 9). Tous les
entomologistes sans exception, ce me semble, re-
garderont sur-le-champ cet animal comme une larve
d’insecte ; cependant, pour lever tous les doutes sur
la nature de cet animal , je consultai mon collègue
M. Ziegler, et voici la réponse qu'il m'a faite : Cet
animal n’est qu’une larve d’éristale, et très-probable-
ment de l’eristalis pendulus, Fabrie. (Syst. Entliat.,
326 SUR LES VERS INTESTINAUX
n°.7, p.233); car les autres espèces d’éristales connues
eu Europe sont plus petites, et par conséquent leurs
larves doivent être également moins grosses; la re-
marque ajoutée par Fabricius à la description qu'il a
donnée de cet animal parait confirmer encore davan-
tage celte ‚supposition ; ‚il s'exprime ainsi : « Habitat
in E uropæ aquis stagnantibus larva tubo filiformi respira-
torio suspensa. »
Brera a regardé également cet animal dans le com-
mencement comme une larve de syrphe, dénomi-
nation synonyme de celle d’eristale ; mais en l’exa-
minant au microscope , il trouva que les signes ca-
ractéristiques propres à ces larves manquaient au
cercosome; il ajoute que les caractères qu'il avait
observés sur cet animal appartenaient au contraire,
selon lui, au genre Zinguatula ou polystoma ; mais je
crois que personne, excepté cet auteur, ne trouvera
de semblables caractères sur une larve d’éristale. L’on
ne peut pas s'expliquer comment Brera a vu au mi-
croscopeautre chose que cequ’il aval aperçu si exacte-
ment auparavant à l’œil nu ; je présume que cet auteur
a encore, dans ce cas-ci, adopté par condescendance
l'opinion des trois autres médecins, qui avaient mal
observé, ou qui avaient pour le moins mal envisagé
le sujet en question. Cependant une chose essentielle
manque à ce fait, c’est-à-dire la preuve que la femme
ait réellement rendu cet animal en urinant; quant à
moi , je ne puis pas m’imaginer qu'il provenait de la
vessie, il est plutôt probable qu'il était tombé par
hasard dans le pot de chambre de cette femme.
DE L'HOMME. * 397
V. HEXATHYRIDIUM VENARUM.
(en allem. der venenblattvurm ) , pl. 1x, fig. u.
HEXATHYRYDIUM : corpore depresso lanceolato , poris anticis sex in-
. ira labium.
Treutler , Auctuar. , p. 23 , tab. IV, fig. 1-35.
Joerdens , Hehninth., s. 67 , tab. vi, fig. 6-8 , der venenblatiwurnr.
Zeder, Anleit. , s. 231 , n°. 4 , polysioma venarum.
Rudolphi , Entoz. IT, 1, p. 456, n°. 6, pol. venar.
Brera, Memorie , p. 101 , tab. 11, fig. 3-4 , exatiridio sanguïcola.
De Lamarck , Änım. sans vert. , tom. 111, pag. 174 , lingualule des
veines.
De Blainville, Dictionn. des sciences natur. , tom. XXL, pag. 144.
Cet animal doit être placé sans contredit parmi
les vers ; mais il est encore bien douteux si on doit le
ranger parmi les vers intestinaux.
Treutler avait à traiter un jeune homme de seize
ans qui, d’après ce qu'il croyait, était tourmenté par
des oxyures. Gomme ce jeune homme était extrême-
mentmalpropre , Trentler lui conseilla de se baigner
souvent dans la rivière ( frequenti lavatione in flumine
-uti admonitus est); ce sont les paroles de ce médecin.
Un jour ee jeune homme entra lentement dans
l’eau (cum aliquando pedetentim aquam tntrasset); à
peine y était-il depuis une minute, que la veine
saphène du pied droit se rompit subitement et spon-
tanément (sponte rupta est vena). 1 s’ensuiv:t une
hémorrhagie qui s'arrêta et se renonyela de momens
à autres. Des remedes stypliques et une forte ligature
328 SUR LES VERS INTESTINAUX
ne purent pas la faire cesser entièrement. Treutler,
qui fut appelé, vit sorur de la plaie une substance un
peu compacte, qu'il prit au commencement pour du
sang coagulé, mais un examen plus exact le convain-
quit que c’etaient deux animaux vivans, qu'il enleva
sans peine, et l’hémorrhagie cessa. Cependant la
plaie ne se cicatrisa que trois semaines aprés. Le ma-
lade se sentit un peu soulage, mais il retomba bien-
tôt après dans sou ancien état maladif. Les meilleurs
vermifuges furent vainement employés, aucun ver
ne fut rejeté, et Treutler conclut de là que les ac-
cidens que ce jeune homme continuait à éprouver ,
provenaient sans doute des vers quiséjournaient dans
les vaisseaux sanguins.
On aurait tort de douter un instant de la vérité du
fait rapporté par ce médecin; cependant il n’est pas
prouvé que ces vers provinssent réellement de l’in-
térieur d’un vaisseau sanguin; Rudolphi et Zeder ne
le croyent pas. Ces deux auteurs sont plutôt portés à
regarder ces vers comme des planaires (plañaria) qui
vivent dans l'eau , et qui peuvent facilement s’attacher
à notre corps et causer une hémorrhagie.
Si ces vers étaient venus réellement de dedans au
dehors, il me paraît qu'ils auraient dü en premier
lieu présenter la tête et une petite partie du corps;
mais sortis de cette manière, ils n'auraient pas pu
long-temps se soutenir au dehors; car leur tête une
fois passée à travers les tégumens ( comme elle est
chez ces animaux le seul organe avec lequel ils peu-
vent s’accrocher), leur corps aurait dû être entrainé
par l’eau ou bien par l’écoulement du sang.
DE L'HOMME. 329
Brera rapporte aussi cette observation, mais il s’est
permis de le faire avec quelques changemens afin de
pouvoir mieux l'adapter à sa théorie des vers dans le
sang. Ii raconte que le malade de Treutler a pris un
bain tiède, et qu’il s’est ouvert une veine avec une
esquille en entrant dans la baignoire.
J'ai rapporté plus haut les propres paroles de
Treutler, afin de pouvoir les mettre en comparaison
avec la traduction de Brera, dans laquelle il cite
exactement les pages de l’ouvrage de cet auteur « Un
giovane............ entrato essendo in un bagno caldo
urto col piede destro in una scheggia del recipiente, che
era de legno , rimasse ferito nella saffena anteriore, etc.»
En lisant cette traduction , comment peut-on ajou-
ter foi aux paroles d’un homme qui se permet de dé-
naturer ainsi les observations faites par d’autres au-
teurs; que doit-on penser des observations qu’il cite
comme siennes et sur lesquelles on ne peut pas le con-
trôler ? L’on ne s’étonnera pas alors, si je ne crois
pas, entr’autres , à celle qui a été rapportée dans le
commencement de ce traité, où ıl nous raconte que
des milliers d’oxyures se sont développés dans la ca-
vité abdominale d’un chien, dans laquelle il avait ın-
troduit, au moyen d’une incision, dix prétendus @uls
de vers. Ces œufs, grossis dix fois , selon cet auteur,
et copiés d’après sa figure, se trouvent représentés
dans notre pl. 9, fig. i.
330 SUR LES VERS INTESTINAUX
VI. DIACANTHOS POLYCEPHALUS , pl. 1x , fig. 9:
Meckels, Deutsches archiv. für die phy siologie. bd. 111 , hefl. 2. s. 174-
Le docteur Stiebel avait à traiter un enfant de
onze ans, du sexe masculin, qui avait déja éprouvé,
des l’âge de deux ans, des accés spasmodiques. Ces
accès étaient d’une nature tout-à-fait singulière, et
méritent d’être connus. Un jour, en se frappant
vers la région épigastrique, cet enfant s’écria : « com-
ment une aussi petite chose me peut-elle tant tour-
menter ?» Une autre fois il dit : «quand viendra done
le vrai remède qui pourra m'en débarrasser ? » Le
lendemain il ne se rappelait rien de tout ce auwıl
avait dit pendant la nuit. Les symptômes cesserent
tout-à-coup le premier novembre, et le lendemain
il rendit un petit animal particulier enduit de mu-
cosités ; dès ce moment, cet enfant fut complétement
guéri.
Cet animal se trouve représenté de grandeur natu-
relle sur notre planche 9, fig. 9.
Stiebel a fait dessiner différentes parties de ce pré-
tendu animal sur une échelle très-grande, parnu les-
quelles on peut voir des tentacules, armés de griffes
cornées, des lèvres pourvues de petits crochets, des
trompes susceptibles d’être alongées et rétractées.
L’original a été communiqué à Blumenbach.
Stiebel a regardé ce corps comme le tronc ( stamm)
d’un ver intestinal. Je n’ai jamais été de cette opinion,
DE L'HOMME. 331
et j'ai cru, au premier abord, que cet échantillon n'é-
tait rien autre chose qu’un tronc d’artere, provenant
d’un petit animal, d’un oiseau peut-être, avec des
ramifications rongées ou déchirées: de semblables
échantillons, auxquels on avait donné le nom de vers,
m'ont été déja communiqués bien souvent ; cepen-
dant les parties dures que l’on a observées sur l’e-
chantillon en question , m’ont convaincu que cela ne
pouvait pas être un tronc d’arlere. M. Rudolphi me
fit part, dans une lettre datée du 18 juillet 1818, que
l'animal nommé par Suebel diacanthos polycephalus ‘,
n’était rien autre chose qu’une petite tige de plante,
peut-être celle d’une grappe de raisin. Rudolphi
ajouta qu'il était allé voir lui-même Blumenbach ‚qui
possede ce pretendu animal, dans l'intention de l’exa-
miner. « Je ne l’avais jamais regardé ni comme un
animal, ni comme un ver intestinal de l’homme (ce
sont les paroles de Rudolphi); je l'avais pris pluiôt
pour la depouille d’une larve d’insecte ; mais un exa-
men particulier me fit voir qu'il tirait son origine
d’un végétal , et, au moyen d’une petite incision , J'ai
trouvé même les vaisseaux spiraux. » ;
Nous voyons par là que Stiebel s'était trompé,
comme il peut arriver à tout le monde, et ıl est à
présumer que ce médecin a été induit en erreur par
la cessation subite des souffrances au moment où cet
enfant avait rendu ce corps ; il est également possible
: Journal complémentaire du Dictionaire des sciences médi-
cales, tom. ı, cah. 2, 1818. (Br.)
332 SUR LES VERS INTESTINAUX
que ce dernier se füt fixé à un endroit tres-sensible ;
et qu’il ait occasioné les accidens mentionnés.
Je saisis ici l’occasion d’observer que l’on m’a déjà
envoyé souvent des restes non digérés de tendons,
de membranes, de ligamens, de vaisseaux , des fibres
de plantes quelquefois provenans des asperges et
des champignons, etc., substances auxquelles on
avait donné le nom de ver.
Il est souvent très-facile de reconnaître la verita-
ble nature d’un pseudohelminthe ; dans d’autres cas,
il est très-diflicile , même impossible de la deviner;
car l’homme se nourrit de tant de substances diffé-
rentes, que l’on ne peut pas savoir de laquelle il a fait
usage en dernier lieu. Je ne puis pas non plus m’em-
pecher d’avertir ici mes collègues que le microscope
composé , dont on se sert en général pour faire des
recherches, peut très-facilement induire en erreur,
si l’on n’a pas l’habitude de s’en servir. Le micros-
cope simple offre moins d’inconveniens, etil montre
les choses sous un point de vue plus vrai. Cependant
il y a beaucoup de cas dans lesquels on ne peut pas
se passer du premier.
VII. DES VERS DES DENTS.
Je puis bien présumer qu’il n’y a pas un de mes
lecteurs qui n’ait déjà entendu dire que l’on rend
quelquefois avec la salive des vers, après avoir fait
usage de certaines fumigations, vers que l’on prétend
provenir des dents creuses; mais, d’un autre côté, il
DE L'HOMME. 333
est aussi de fait que tout le monde ne sait pas ce que
l'on doit penser de cette assertion.
Il y a quelques années qu’un médecin présenta à
notre société de médecine le couvercle d’une taba-
tiere noire, sur lequel on avait desseché des prétendus
vers, qu’un homme avait rendus aprés avoir fait des
fumigations préparées avec les semences de jus-
quiame. Ce médecin était présent lorsque le malade
les avait rendus, et il a également observé qu'ils se
remuaient dans l’eau.
Nous n’avons pas douté de la vérité du rapport de
ce médecin; mais nous avons seulement présumé
qu'il avait mal observé, et qu'il avait regardé à tort
les mouvemens de ces corps comme des mouvemens
spontanés d'animaux vivans. Nous avons également
présumé , et avec raison, que ce médecin était en-
core dans l’erreur, en supposant que ces corps étaient
| de véritables vers sorus des dents de son malade.
| Les prétendus vers des dents ne sont rien autre
| chose que les germes des BR avec lesquelles on
| prépare les fumigations.
Au moment où on jette la graine sur des charbons
rouges, sa capsule crève, et le germe saute loin
d'elle. S'il tombe dans l’eau, il s'opère , à cause des
contractions inégales des fibres , un mouvement cir-
culaire, que l’on peut regarder aisément, mais à
tort, comme un mouvement volontaire.
Il y a à peu près un demi-siècle que Schaeffer a déjà
| donné des éclaircissemens sur ce sujet, et ıl a même
publié une dissertation sur les vers imaginaires des
dents.
33, SUR LES VERS INTESTINAUX
Chacun de mes lecteurs peut préparer à volonté
ces prétendus vers, au moyen des graines de jus-
quiame. Pour les obtenir , on n’a qu’à mettre une
petite barre de métal, rougie ou très-chaude , au-
dessus d’un vase rempli d’eau ‚et poser sur cette barre |
une petite quantité de ces semences. Cela fait, on |
couvre le vase sur-le-champ avec un entonnoir. En |
l’ötant un moment après, on verra nager dans l’eau |
les germes de ces graines. Ces germes se heurtent en
sautant contre la paroi de l’entonnoir, et retombent
dans le liquide.
Schaeffer a prétendu à tort que cette expérience |
ne réussit qu’avec le fruit nommé alkehengi ou co-
queret, et après avoir enduit ces semences de cire: |
La fig. k,pl. 9, est une copie de la figure de Schaef
fer, elle représente les germes de ce fruit. La fig. 4,
fait voir les germes de graines de jusquiame que!
jai obtenus moi-même par le même procédé.
APPENDICE.
Le chapitre précédent peut servir à prouver à
mes lecteurs que l’on ne doit pas regarder trop pré= |
cipitamment les corps que les hommes rendent,
ou que l’on suppose avoir été formés dans leur in-
iérieur, et évacués par eux conjointement avec les
|
déjections, pour des nouvelles espèces de vers intes- |
tinaux. Avant de porter un jugement dans un pareil |
cas , il faut examiner soi-même les objets avec beau-|
coup de soin, ainsı que les circonstances qui les ont
accompagnés; Car il arrive souvent que des per-
sonnes, guidées par des intérêts particuliers , veulent
DE L'HOMME. 335
faire croire des choses qui n’ont pas réellement existé.
Si je voulais citer tous les récits mensongers de cette
nature qui sont venus à ma connalssance, je pourrais
facilement en remplir des feuilles entières; cepen-
dant, qu'il me soit permis de rapporter le suivant.
Une femme d’une quarantaine d’années éprouvant
des indispositions de toute espèce, on présuma qu’elle
avait le ver solitaire, et l’on employa des vermifuges.
Apres lavoir fatiguée par beaucoup de médicamens
pendant six semaines, cette femme éprouva une
nuit,une oppression violente, accompagnée de nau-
sées, etc. En effet, elle vomit quelques matières,
dans lesquelles se trouvait un petit crapaud et des
membranes. Apres cette évacuation, tous les symp-
tômes qui avaient précédé le vomissement cessèrent
sur-le-champ; mais, du reste , il ne s'était opéré au-
cune amélioration dans sa santé.
Ce crapaud , y compris les membranes, furent
| communiqués à M. le baron de Türkheim, et c’est
chez lui que j'ai vu, quelques joursMäprès , ces ob-
| jets conservés dans de l’esprit-de-vin.
C'était un crapaud ( rana bombyna var., Linn.,
Gmel. ; bufo igneus, Daud.) qui avait les pattes deder-
‚ Tiere cassées. Il y avait également quelques mem-
| . ’ . x
J branes, qui cependant n ont pas pu appartenir a cet
animal; car elles étaient d’une texture très-com-
Pacte , ce qui n’est pas du tout propre aux membranes
des crapauds.
Pour découvrir la vérité de ce fait, j'ai pris toutes
les informations possibles; je me suis adressé à cette
336 SUR LES VERS INTESTINAUX
femme elle-même; mais comme elle était trop obsti-
née ettrop réservée dans samaniére de se prononcer ;
je n'ai pu ürer d'elle rien de satisfaisant. Son mari
m'inspirait trop de confiance pour ne pas ajouter foi à
ce qu’il me disait; ilassura que sa femme avait réelle-
ment vomi, en sa présence, un crapaud dans une
cuvette vide. Je ne savais que dire à cela; cependant,
il ne paraissait pas du tout probable que cette femme
eût pu avaler cet animal en buvant de l’eau sans s’en
apercevoir, ou bien que ce crapaud fût arrivé dans
l'estomac, sous forme de tétard , ou bien sous celle
de frai, et qu'il s’y für développé peu à peu. Je fus
fiché de n'avoir pu découvrir le fond de la chose;
mais j'avais cependant l'espoir que le temps dévoi-
lerait cette énigme. En effet, cela est arrivé comme
H 3
je l'avais présumé. On s’apercut un jour que celte
femme avait, de temps à autre, des accès de folie, |
et on a même été obligé de la mettre plus tard dans !
une maison d’aliénés. Avant de devenir tout-à-fait
folle, elle aväit encore quelquefois des intervalles
lucides. Dans un de ces derniers, elle avoua à quel-
ques personnes de sa connaissance qu’elle avait avalé |
ce crapaud, venimeux, selon son idee, entouré
d’une membrane, qu’elle avait ramassée dans une
boucherie, dans l’intention de mettre un terme à sa |
vie, dont elle prétendait être lasse.
Son estomac supporta tres-bien ce prétendu poison
pendant toute la journée jusqu’à minuit, heure ala-
quelle elle vomit ce crapaud, conjointément avec la
membrane, qui était déjà à moitié digérée.
DE L'HOMME. 337
AT
ER EL EU AR AU LU UE VUE TREE AU N A CUVE Ban
DEUXIEME PARTIE:
CHAPITRE QUATRIEME.
Des causes de la formation des vers dans le canal intes-
tinal de l'homme.
Si nous admetions comme prouvé que les vers in-
testinaux n'arrivent pas du dehors dans le corps de
l’homme, qu'ils n’y sont pas innds, et qu'ils doivent
par conséquent leur existence à une formation primi-
tive’, nous ne pouvons chercher ailleurs la cause
première de leur production, que dans une altéra-
ion de la nature et du mélange des substances
propres à l'entretien ou à la nutrition du corps en
général, ou bien dans une surabondance de ces sub-
stances , auxquelles les vers intestinaux doivent pro-
bablement aussi souvent leur production qu’à toute
autre cause. Cependant la cause première d’une pa-
reille altération de la nature, ou bien de la dispro-
: Dans toute cette seconde partie il n’est question que des es-
» pèces de vers qui séjournent dans le canal intestinal de l’homme,
et non de ceux qui se trouvent dans quelques autres parties , les -
- causes de leur formation , leur diagnostic et leur traitement étant
trop obscurs pour pouvoir donner lieu à des généralités » Ont été
rapportées à chacun d’eux en particulier.
2 Woyez Mémoire de Robert Knox inséré dans l’ouyrage de
Froriep , ayant pour titre : Notizen etc. , n°. 8, 1821, p. 121.
3
D.
A2
338 SUR LES VERS INTESTINAUX
portion des substances propres à lanutrition du corps
ne peut provenir que d’une faiblesse relative des or-
ganes en particulier, et non pas d’une faiblesse
générale de tout le corps; car cette faiblesse, généra-
lement parlant, peut être regardée aussi peu comme
une maladie que comme une cause de la production
des vers, quand du reste lharmonie existe entre
toutes les fonctions. Une maladie ne résulte que d'un
défaut d'harmonie dans les fonctions des organes. Un
semblable état a lieu sans doute quand des vers doi-
vent se former; car, par exemple, 1°. s'il ne se pré-
pare, par le moyen des alimens arrivés dans l'estomac,
ni plus et ni moins de substance nutritive qu'il n’est
nécessaire pour le remplacement des humeurs exere-
tées, pour la conservation et pour l’accroissement
du corps; 2°. s’il ne s’auimalise pas dans le même or-
gane plus de substances que les vaisseaux lympha-
tiques ne peuvent en absorber, ou qu'ils en absor-
bent réellement ; et 3°. s’il ne se secrete pas de la part
du corps animal plus d’humeurs provenant de sa
propre masse, qu'il n’est nécessaire pour animaliser
ou pour organiser les substances qui se trouvent dans
l'estomac, alors la production des vers ne pourra
pas se faire dans le canal intestinal. S'il existe au
contraire une disproportion , c'est-à-dire s’il s’anıma-
lise plus de substance qu’il ne peut en être absorbé,
alors rien n’est plus facile que cette production. C’est
pour cette raison que nous observons souvent des
personnes qui paraissent parfaitement saines et ro-
bustes, et qui ont néanmoins des vers dans le canal
DE L'HOMME. 339
intestinal. Ici 1l paraît que l’estomac et les intestins,
ou, si l’on aime mieux, les premières voies, se trou-
vent dans un état d’activite vitale plus grand qu'il
n’est réellement nécessaire à la conservation du corps,
et que l’activité des vaisseaux lymphatiques qui ab-
sorbent seulement autant qu'il faut pour réparer la
perte des humeurs, se trouve en disproportion avec
celte activité vitale, et que par conséquent l'appareil
alimentaire animalise plus de substances que les vais-
seaux lymphatiques ne peuvent en absorber ; ensorte
que la substance animalisée ici stagnante est déter-
minée à se transformer en un fout existant par lui-
même , ou bien en un ver; c’est pourquoi la prédis-
position (opportunitas ) à la formation des vers, ainsi
qu'à beaucoup d’autres maladies, peut être hérédi-
taire innée ou bien acquise. On explique même par là
pourquoi les enfans sont plus disposés que les adultes,
les femmes plus que les hommes, à la formation des
vers; car le système lymphatique des enfans et des
femmes se trouve en général dans un état particulier
de faiblesse. On observe souvent que des enfans, sur-
tout quand ils ne sont pas nourris par le sein de leur
mère, se développent tres-lentement, malgré la quan-
tité d’alimens qu'on leur donne. Cela ne dépend pas
ordinairement du peu de substance nutritive contenue
dans ces alıınens, mais bien de la mauvaise élabora-
tion de ceux-ci et du chyle qui s’en sépare, et qui
n'est pas absorbé en suffisante quantité. Chez les
enfans scrofuleux et atrophiés, la circulation libre
dans les vaisseaux destinés à absorber les substances
197
340 SUR LES VERS INTESTINAUX
nutritives, estinterceplde ou au moins Lres-gende;
une grande quantité de suc nutritif reste par consé-
quent en stagnation dans le canal intestinal. Je com-
prends sous le nom de suc nutritif non-seulement
celui qui s’est formé dans l'estomac aux dépens des
alimens, mais encore son mélange avec les humeurs
propres du corps, en un mot un suc déjà animalisé,
qui se prête facilement à la formation des vers, si
toutefois ıl n’est pas rejeté par les selles conjointe-
ment avec les substances quine sont pas propres à la
nutrition; aussi ces enfans scrofuleux et atrophiés
sout-ils tres-souvent , comme lexperience nous le dé-
monire, sujels aux vers.
Cette manière d’envisager le mode de formation
des vers intestinaux me semble s’approcher un peu
plus de la vérité que l'opinion des Aëtius', des Paul
d’Egine, des Riolan et des Gabucinus; ces auteurs
croyaient que le ver solitaire n’était autre chose que |
la membrane interne détachée des intestins greles et
transformée en un corps vivant. On rencontre encore
aujourd’hui des hypothèses de la même force.
Sı cependant les vers intestinaux se produisent
fréquemment dans les conditions que nous venons de
mentionner ; il ne suit nullement de là qu'ils doivent
se former absolument partout où ces conditions se
trouvent réunies. Une pareille assertion aurait même
l'expérience contre elle, car toutes ces circonstances
ont quelquefois lieu, ıl y a même encore souvent
tous les symptômes par lesquels on se croit ordinai-
* Tetrabibl. WI, serm. 1, cap. XL, p. 597.
DE L'HOMME. 341
rement en doit de pouvoir présumer la présence des
vers, et cependant il n’y en a point.
_ Pour que la génération primitive des vers ait lieu,
1] faut admeitre l’action de deux agens ( factor), l'un
que nous pouvons concevoir, on peut appeler
agent matériel, et l'autre dont nous ne pouvons pas
nous faire d'idée, que nous ne connaissons pas, et
qu’en attendant je demanderai la permission de nom-
mer agent spirituel. La coopération simultanée de ces
deux agens est absolument indispensable lorsqu'il
doit se développer, de la matière animalisée sans
forme, un nouvel animal. Vouloir approfondir la na-
ture du second agent, qui n’est autre chose que l’es-
prit vivifiant de l’univers qui domine déjà dans la
substance animalisée amorphe, mais pas encore au
degré de tension nécessaire au développement de Ja
vie individuelle, serait une vaine entreprise pour
l'espèce humaine tant qu’elle restera ici bas. Nous ne
connaissons sa présence que par ses effets, mais nous
savons qu’elle donne lieu à des conditions sans les-
quelles, quoique l’autre agent puisse exister, la ma-
tiere animalisée ne peut s’individualiser, et c’est
probablement le cas dont nous venons de parler,
Nous pouvons compter parmi les causes éloignées
qui favorisent la formation des vers, une vie seden-
taire et inactive, une habitation humide et non aé-
rée, une nourriture de laquelle se prépare un chyle
trop nutriuf, l'usage des corps gras , des farineux, du
laitage ‚etc.
Feuiliée croit pouvoir attribuer la fréquence des
342 SUR LES VERS INTESTINAUX
vers chez les sauvages de l'Amérique méridiouale à
un trop grand usage du sucre.
La vie sedentaire des femmes est probablement
une des causes éloignées pour lesquelles elles ont plus
souvent des vers que leshommes. j
Un sejour prolongé dans une habitation humide
( où la sappression de la transpiration agit indirecte-
ment d’une manière nuisible sur les fonctions du sys-
ième lymphatique propre au canal intestinal) aug-
mente la disposition à cette maladie. Si de plus les
alimens sont d’une nature à favoriser la production
des vers, il y a alors tout ce qu'il faut du côté de la-
gent matériel pour faciliter la formation de ces animaux.
Il est connu que le pâturage dans des endroits ma-
récageux détermine souvent la formation des douves
du foie chez les moutons; c’est pour celte raison que
dans les établissemens bien administrés, on rend les
bergers responsables des ravages que cette maladie
fait dans un troupeau, car on peut alors presumer,
presqu’avec certitude, que l’on a fait paître ces anı-
maux dans des lieux marécageux, et qu’on leur a
donné, surtout en hiver, des fourrages humides et
malpropres ; ıl arrive cependant dans des années plu-
vieuses que la maladie vermineuse fasse de grands
ravages parmi les moutons, sans que cela soit par la
faute des bergers; l'emploi prompt de substances
amères et fortifiantes, comme par exemple la gen-
tiane, le calamus aromatique, etc., peut encore arre-
ter dans quelques cas les progrès de cette maladie.
De même que des maladies vermineuses peuvent
DE L'HOMME. 343
régner d’une manière épizootique chez les ani-
maux (car, outre la douve du foie, nous voyons
souvent que les strongles (strongylus filaria, Rud.),
qui séjournent dans la trachée-artère et ses ramifica-
tions chez les moutons, agissent également dans
beaucoup de cas comme une cause de maladie, et
font périr une grande quantité de ces animaux, ainsi
que j'ai eu occasion de l’apprendre très-souvent
d'agriculteurs); de même, dis-je, ces maladies peu-
vent se montrer d’une manière endémique et épidé-
mique chez les hommes; car si par exemple une dis-
position particulière de l'atmosphère peut contribuer
et même occasioner , dans quelques contrées, à cer-
taines époques, des fièvres bilieuses ou d’autres
maladies non contagieuses, nous pouvons également
admettre avec juste raison, que la formation des vers
et des accidens qu’ils font naître peuvent être occa-
sionés dans quelques cas par des causes générales,
ou bien par des causes qui agissent d'une manière
endémique ou épidémique : les épidémies vermi-
neuses par conséquent ne doivent pas être regardées
comme des chimères,
Marie a observé à Ravennes et aux environs une
épidémie de ce genre qui fut tres-remarquable, et
durant laquelle tous les malades rendaient des vers
par haut et par bas.
Cependant il ne faut pas regarder toutes jé mala-
dies que l’on a qualifiées de vermineuses comme de
véritables épidémies. Je ne puis pas non plus m'i-
maginer que la présence des vers ait pu occasioner
344 SUR LES VERS INTESTINAUX
des fievres putrides régnantes d'une manière épidé-
mique, comme Bernard est porté à le croire. Il me Pe
rait plutöt probable quejla maladie vermineuse aregne
quelquefois d'une manière endémique dans les con-
trées qu'il habitait, et qu’elle s’est montrée conjointe-
ment avec une fièvre putride à l’époque dont il parle.
Bonnevault a donné sans doute à tort à une fièvre
putride ordinaire le nom de fièvre putride vermi-
neuse épidémique, par la seule raison que quelques.
personnes qui en étaient atteintes rendaient des
vers. Ou observe avec juste raison, dans le Journal
de médecine de Paris, où il est encore question
d’une semblable maladie décrite par Dufour, que
l’on aurait dû plutôt la désigner sous le nom de
fièvre avec complication vermineuse. Les épidémies
vermineuses ne PHARES par conséquent se montrer
que dans les contrées où les vers doivent être regar-
dés comme appartenant à une constitution Epide-
mique ; l'expérience nous prouve même qu'il ya
réellement des pays dans lesquels on observe des
vers intestinaux beaucoup plus fréquemment que
dans d’autres. Daquin prétend que l’on pourrait dif-
ficilement s’imaginer un pays où il y ait une plus
grande quantité de vers intestinaux qu'en Savoie,
auprès de Chambéry; et, d’après ce qu'il assure, on
n'y observe pas seulement ces animaux chez les
pauvres, mais encore chez les riches, et on ne peut
par conséquent regarder dans ce cas-cı la mauvaise
nourriture comme ayant favorisé la formation des.
vers; aussi Daquin ne sait à quoi on pourrait Paltri-
DE L'UOMME. 345
buer. Outre les habitans de beaucoup d’autres con-
trées, on regarde surtout Ceux de la Hollande et de
la Suisse comme trés-sujels aux vers intestinaux:
L’explication de ce fait n'est pas facile chez les habi-
tans de ce dernicr pays; on ne peut gucre en eflet
V’attribuer à la disposition de l'air atmosphérique,
qui du reste, dans ce pays montagneux, diffère tout
x fait de celui de la Hollande. On ne peut pas non
plus l'attribuer à la qualité des alimens ; car la ma-
nière de vivre, au moins celle des grandes villes, ne
diffère pas essentiellement de celle des pays limi-
trophes; peut-être doit-on attribuer la fréquence des
vers intestinaux à l’usage du fromage, et principale-
ment à celui du lait, non-seulement par laraison qu'on
en boit beaucoup, mais parce qu'il est d’une sı bonne
qualité dans ces deux pays, et qu’on le vend sans
être mélé avec de l’eau ? J’ai dit peut-être, parce que
je regarde cette idée comme conjecturale, etje l’a-
bandonnerai volontiers si quelqu'un pentm’expliquer
d’une manière plus satisfaisante la fréquence des vers
intestinaux chez les Suisses, et surtout celle des bo-
_thriocéphales, que l’on ne remarque presque jamais
chez les habitans des pays voisins.
Parmi les Allemands et la plus grande partie des
habitans de la France, chez les Italiens et même chez
les Tyroliens, on n’observe en général que le tænia,
tandis qu’un véritable Suisse, c’est-à-dire celui qui
est né d’une mère suisse, n’a peut-être jamais été in-
commodé par cette espèce de ver. En Russie et en
Pologne on ne rencontre que le bothriocéphale, et
346 SUR LES VERS INTESTINAUX
M. Radolphi assure qu’il n’a recu que des tænmias de
la Suede. Cette derniere circonstance pourrait bien
être attribuée à une certaine particularité de nation,
ou bien à la différence d’origine qui existe entre le
peuple russe et celui de la Suede. Mais d'où vient
que les Suisses et les Russes sont sujets aux mêmes
vers? c’est un problème qui probablement ne sera
pas résolu de long-temps.
Chez les Hollandais on pourrait peut-être avec rai-
son attribuer la fréquence des vers à la disposition
particulière de Pair atmosphérique et du climat, qui
ont déjà une si grande influence sur le tempérament
de ce peuple , mais on aurait tort de vouloir Pattribuer
à l'usage fréquent du poisson. D’après M. Rudolphi,
d’autres habitans des côtes mangent également beau-
coup de poisson , et ils ne sont pas extrêmement su-
jets aux vers.
Feu le professeur Reinlein * a été pendant dix
ans médecin de chartreux, qui ne mangent ni viande
pi lait, et qui se bornent en général à l’usage du pois-
son; cependant il n’a vu aucun de ces moines être
incommodeé par le bothriocéphale. Les plus anciens de
ces peres ne se rappelaient pas non plus avoir connu
un de leurs confrères attaqué par un ver de cette es-
pece; du reste la qualité de la nourriture peut assuré-
ment contribuer beaucoup à la formation des vers;
Reinlein a même rapporté quelques faits tres-remar-
quables sur ce sujet: voici ses paroles * : «J'avais à
: Ueberseizung , p. 25.
2 Ibid., p. 21.
DE L'HOMME. 347
traiter, il y a quelques années, un céhbatare de
soixante-quatre ans, qui menait une vie très-régulière:
"aussi avait-il fort bonne mine, et il jouissait d’une
santé parfaite. Lorsque je fus appelé chez lui, sept
mois s'étaient à peu près écoulés depuis l’époque à la-
quelle un de ses amis Ini avait donné le conseil, bien
mal à propos à la vérité, dechanger sa manière de vivre,
vu son âge avancé , et de faire usage de laitagede préfé-
rence à toute autre chose. Ce vieillard suivit ce con-
seil, et supporta même pendant plusieurs semaines ce
changementdenourriture sans en éprouver lemoindre
malaise; maïs bientôt après il commenca à senur,
surtout après le diner , une plénitude dans le bas-ven-
tre, une gêne vers la région précordiale, des palpita-
tions de cœur , et une diminution d’appetit; sa mine
ordinairement bonne s’altera, et il éprouva en outre
souvent des nausées. En arrivant chez ce vieillard, on
m’informa de tout ce qu’il avait éprouvé depuis son
changement de nourriture. Je trouvai les hypochon-
_dres et la région ombilicale très-tendus. Je conclus
alors de la que j'avais à combattre un embarras gas-
trique, et je prescrivis par conséquent une mede-
cine composée de cinq onces de la potion purga-
tive ordinaire de Vienne, avec addition de six gros
de tartrate de soude. Le lendemain j’allai le voir de
nouveau. Le domestique qui servait déjà depuistrente-
deux ans ce vieillard, m’attendaitavec impatience pour
me faire voir la grande quantité d’excrémens , mêlés,
selon lui, de graines de citrouille ou de melon, que
son maître avait rendus. Je demandai à ce domes-
318 SUR LES VERS INTESTINAUX
tique s'il en avait déjà observé une autre fois dans les
déjecuons. Il me répondit qu'il n’y avait trouvé rien
de semblable depuis un grand nombre d'années,
excepté il y avait deux ou trois semaines, époque à
liquelle il en avait vu des traces par-ci par-la.
«Je dirigeaien conséquence par la suite mon traite-
ment contre le tænia, et je fus assez heureux pour le
faire évacuer entièrement au bout de sept jours. Ce
vieillard a repris depuis son ancienne maniere de
vivre , et il jouit maintenant d’une santé parfaite.
Peut-on s’imaginer , continue Reinlein, que le germe
de ces vers ait pu rester plus de soixan:e ans dans le
corps de cet homme avant de se développer ? »
Le même auteur m'a communiqué une observa-
tion non moins intéressante sur ce même sujet. La
voici : «Je connais une dame (ce sont les paroles de
Reinlein) depuis plus de trente ans, qui a encore
fort bonne mine, et qui a mis au monde douze enfans,
dont six du sexe masculin, et six du sexe féminin. |
Chaque fois qu’elle fut enceinte d’une fille , elle
Eprouva toujours une envie irrésistible de manger de
la crème et des alimens farıneux, mais chaque fois
elle fut aussi incommodée par les symptômes qui
indiquent ordinairement la présence des vers, etelle
évacua réellement des ascarides de temps à autre
jusqu’à la fin de la gestation. Les mêmes symptômes
n'avaient pas lieu lorsquelle était enceinte d’un en-
fant mâle ; elle avait alors au contraire le plus grand
dégoût pour les alimens que nous venons de mention-
ner. Six accouchemens terminés avec de pareilles cir-
DE L'HOMME. 349
_ constances Jui avaient appris à prédire exactement le
sexe du fœtus qu’elle portait dans son sein dans les
grossesses suivantes. »
Quoique ces deux observations pussent nous en-
gager à regarder un trop grand usage du lait et des
farineux, comme une cause prédisposante à la forma-
tion des vers, nous ne pouvons cependant considé-
rer ces substances que comme un des agens, où
plutôt que comme la moitié de lun des agens, c'est
à dire du matériel; mais il reste encore à considérer la
constitution du corps; car ce m'est que lorsqu'elle
existe à la fois avec une cause prédisposante que la-
gent matériel peut être complet pour la production.
Un plat de pois ou de lenulles avec lequel un ou-
vrier assouvit sa faim , ne donne pas moins lien aux
flatuosités , que la purée de pois ou de lentilles de la-
quelle un hypocondriaque ne fait que goûier ; cepen-
dant le premier supporte ces substances sans éprouver
le moindre dérangement, tandis que le dernier en est
tellement incommodé, par le développement de quel-
ques pouces cubiques d’air, qui par hasard ne trou-
vent pas aisément une issue, qu'on croirait quil
va rendre l’ame. En général les alimens agissent de
même sous le rapport de la production des vers, c’est-
à dire que leurs effets sont différens sur différens in-
dividus. Les paysans du Tyrol ne souffrent pas sou-
vent de la présence des vers, autant que je me le
rappelle, et cepeudant ils ne mangent de viande
que quatre ou cinq fois dans toute l’année. La nour-
riture des forcats dans la maison de correction de
350 SUR LES VERS INTESTINAUX
Vienne consiste en farineux et légumes secs, mais ces
hommes sont en même temps obligés de travailler
constamment, souvent en plein air, et du reste on
a toujours soin de faire renouveler l'air, autant que
cela est possible, dans les lieux qu’ils habitent. M. dé
Guldener, qui fut médecin en chef de cette maison.
pendant quatorze ans, m'a assuré que ces hommes
étaient très-rarement incommodés par des vers intes+
tinaux. |
Le lait et ses préparations , telles que le beurre,
le fromage , etc: , seraient alors, comme nous l'avons
remarqué, les seuls alimens que l'on pourrait con
sidérer, de préférence, comme cause occasionelle,
ou bien comme offrant plus de matière propre à
la formation des vers que beaucoup d’autres; mais
le lait doit être aussi regardé, parmi les alımens pro-
venant du règne animal ou végétal, comme celui
qui contient je plus de substance nutritive. La for-
mation si subite de vers dans le fromage paraît venir
à l'appui de cette opinion, que je ne regarde, du
reste, que comme une supposition, et non pas comme
une preuve de ce que je viens de dire.
Je suis cependant convaincu que l’usage d’alimens
qui ne contiennent pas beaucoup de substance nu-
tritive, ne favorise pas la production des vers viscé=
raux, encore moins celle des vers intestinaux, et je
suis érstisdé que ceux-ci se trouvent fort mal dans
un corps animal qui 5 e un manque d’alimens.
Nous avons examiné pres de deux cents carpes
(cyprinus carpio, L.), et à peu près cinq cents tan-
|
DE L'HOMME. 351
ches (cyprinus tinca, L.); ce ne fut que dans six de
ces dernières que nous avons rencontré des vers.
Nous en avons bien également observé dans des
carpes, mais ce n’élait que dans celles qui nous étaient
parvenues directement du lac Neuside , dans lequel
on les avait pêchées depuis peu , tandis que les car-
pes provenant du Danube n’en avaient point. Les
tanches et les carpes qui servent à l’approvisionne-
ment de Ja ville de Vienne sont élevées dans les étangs;
mais, avant de les porter au marché, on les conserve
pendant long-temps dans des réservoirs placés dans
le Danube, afin que ces poissons perdent le goût
bourbeux occasioné par l'eau dans laquelle ils avaient
vécu auparavant. Ces animaux manquent de nourri-
ture pendant qu'ils sont enfermés dans ces réser-
voirs, c’est pourquoi l’on ne trouve souvent dans
leur canal intestinal pas même de trace de cette mu-
cosité sı abondante dans d’autres individus de lenr
espèce. Leur canal intestinal est comme lavé, tandis
qu'il est, dans les poissons fraîchement péchés dans
le Danube , comme, par exemple, le barbeau ( cypri-
nus barbus, L.), fortement enduit de mucosités ; mais
aussi ce canal est-il souvent rempli de vers. On a con-
serve, 1l y a plusieurs années, quelques dorades de la
Chine (cyprinus auratus, L.), provenant d’un réser-
voir de Scheenbrun, dans des bocaux de verre rem-
plis d’eau pure. La plus grande partie de ces animaux
mourut au bout de quelques jours. Chez un individu
de ces derniers, un &chynorhinque (echinorh. clavi-
ceps, Rud.) s'était frayé une route, non-seulement à
352 SUR LES VERS INTESTINAUX
travers les parois du canal intestinal, mais encore à
travers les muscles et les tégumens. Ge ver, après la
mort du poisson dans lequel il séjournait , aura voulu
sans doute se procurer de la nourriture au-dehors;
mais, ne trouvant pas dans l’eau ce qu'il Jui fallait , et
voyant qu'il était arrivé à la limite de son propre PA
monde, il se décida, probablement pendant que la
partie postérieure de son corps était encore fixée dans
celui du poisson, à y rentrer denouveau ; car on voyait
qu'il avaitessayé à se frayer un chemin du dehors dans:
une autre partie du corps que celle d’où il était sorti:
Cet échynorhinque estconservé ainsi attaché à lasur-
face du poisson dans notre collection. Chez d’autres de
ces poissons morts ; des vers delamémeespèce avaient, |
seulement perforé le canal intestinal, et ıls se trou
vaient implantés aux parois internes de l’abdomen,
ou bien à la surface extérieure des intestins. Dans le
cabinet impérial d'histoire vaturelle de Vienne , on
nourrit, pendant toute l'année, beaucoup d'oiseaux |
de differens ordres et espèces , dans le but de cher- |
cher particulièrement des, vers. Il est rare de trouver
dans ces oiseaux, surtout dans ceux qui ont été en
fermés pendant loug-temps, un ver intestinal, etce- |
pendant, malgré la peine que l’on se donne, on ne |
peutpas procurer } ces animaux une nourriture sem- |
blable à celle qu'ils trouvent en état de liberté. |
On dit ordinairement que la production des vers |
est causée par l’usage d'alimens d’une mauvaise quas |
lité. Je ne veux pas nier celte assertion, mais je me |
permets seulement d'observer ici que l’on regarde |
DE L'HOMME. 353
souvent à tort des alimens comme mauvais, tandis
qu'ils sont réellement bons; et, en effet, une subs-
tance peut être excellente pour l’un, et être très-
mauvaise pour l’autre. Par exemple, les légumes secs
et les farineux, qui conviennent en général si bien
à la classe laborieuse , causent souvent toutes sortes
de malaises, et favorisent même, dans quelques cas,
la production des vers chez les personnes qui mènent
une vie sédentaire, ou bien qui ont les voies diges-
tives très-faibles ; je crois aussi que les écolés moder-
nes ont avancé à tort que les alimens tirés du règne
végétal contiennent moins de substance nutritive
que ceux tirés du règne animal. Les Tyroliens, race
_ d'hommes extrêmement robustes , qui ne se nourris-
sent, comme nous l'avons déjà remarqué, que de
végétaux, et qui ne mangent dans toute l’année que
quatre ou cinq fois de la viande , lévent tous les dou-
tes à ce sujet.
On a encore faussement prétendu autrefois que
les œufs des vers étaient introduits dans le corps de
l’homme et dans celui des animaux, par l'usage des
fruits véreux, parce qu'on supposait que les excré-
mens déposés dans ces fruits par les larves qui y sé-
journent, étaient les œufs de ces animaux. Un pareil
préjugé n'a pas besoin , ce me semble, d’être réfuté
de nos jours.
Une fois que les vers se sont formés spontanément
dans un corps animal, ils peuvent alors se régénérer
et se multiplier par l'acte de la génération, quand
même les causes qui avaient favorisé leur développe-
23
354 SUR LES VERS INTESTINAUX
ment auraient cessé, par la raison que les véritables
vers intestinaux sont tous pourvus d'organes sexnels :
néanmoins, il faut que les circonstances soient favo-
rables à cette génération ; car nous voyons, par exem-
ple, que les vers qui avaient auparavant résisté à
l'emploi des meilleurs remèdes, disparaissent spon-
tanément chez les enfans, quand ils arrivent à un
âge mûr; ces animaux disparaissent aussi dans beau-
coup de cas chez les hommes adultes, quand ils
changent de climat ou de régime. 1] arrive également
quelquefois que certaires maladies de l’homme dé-
terminent la mort des vers, comme nous aurons oC-
casion de le montrer plus loin par des exemples.
AAA UE EE ELU EUUEUUVE VV VUS VU AAA VEUVE LUTUS LUAU LUR TR
CHAPITRE, CINQUIEME.
Du diagnostic de la présence des vers dans le canal in-
tinal , et des derangemens qu'ils peuvent occasioner.
On reconnaît en général la présence des vers intes-
tinaux aux signes suilvans :
Le visage des personnes qui en sont affectées est
change; elles sont ordinairement trés-pâles, leur
teintest même plombé, cependant leur figure sanıme
souvent tout à coup, et on croit encore avoir observé
que la rougeur se borne à un seul côté; les yeux per-
dent leur brillant, ils deviennent ternes, la pupille
est élargie et les paupières inférieures sont ceruées
par un cercle bleuätre.
DE L'HOMME. 255
Les malades ont le nez souvent enflé ; ils y éprou-
vent une démangeaison presque continuelle, et telle
qu'ils ne peuvent s’empêcher de le gratter ou de
le frotter ; ils saignent souvent au nez, et ils éprou-
vent de temps à autre un mal de tête accompasné
d'un bourdonnement d'oreilles. LA langue est char-
gée; ıl s’accumule souvent beaucoup plus de salive
dans la bouche que dans l’état naturel. L’haleine
est féuide , surtout à jeun. "
L’appetit est très-variable ; tantôt il a l'air d’avoir
disparu entièrement, et dans un autre moment les
malades sont comnie affamés. On observe encore chez
eux des nausées ou des envies de vomir, et même
des vomissemens d’un liquide aussi limpide que
l’eau ; des coliques souvent très-violentes: , et princi-
palement dans la région ombilicale ; des excrétions
alvines glaireuses, et souvent teintes de sang ; une
urine trouble , sedimenteuse ou ressemblant à du lait
étendu d’eau ; un ballonnement et une dureté du bas-
ventre; un amaigrissement général du corps. Le
sommeil est troublé, et souvent accompagné de grin-
cement de dents. Les malades sont en général pa-
resseux , tantôt de bonne , et tantôt de mauvaise
humeur.
"Vai traité des personnes incommodées par des vers intestinaux
qui éprouvèrent de temps à autres des coliques tellement fortes
qu'elles se roulaient par terre; l'emploi des vermifuges efficaces a
fait cesser cet état de choses et aidé à ramener la santé. (Note du
traducteur. ) ;
? Jai remarqué dans ma pratique particulière que des attaques
23.
356 SUR LES VERS INTESTINAUX
Courbon Perusel croît avoir observé que lapho-
nie est souvent causée par la présence des vers, et Gi-
randy nous assure que la cecité, la surdité, et le dé-
lire dérivent dans quelques cas de cette même cause.
On remarque enfin plus rarement dans les matie-
res vomies, mais plus souvent dans les matieres ster-
corales, des morceaux de vers ou m&me des vers en-
tiers. Je ne crois pas avoir besoin de faire observer à
mes lecteurs, questous ces symptômes ne se trouvent
que très-rarement réunis dans un individu ; il me
semble aussi inutile de remarquer qu'aucun de ces
symptômes, à l'exception du dernier, n'indique réel-
lement et infailliblement l'existence des vers, et que
chacun de ces symptômes peut aussi bien faire pré-
sumer d’autres affections, comme par exemple l’hy-
drocéphale, maladie qui se caractérise également par
une pupille élargie, par des envies de vomir, par un
abattement d’esprit, etc." Quand cependant plusieurs
de nerfs, des syncopes et la diarrhée avaient été provoquées par la
présence de vers intestinaux ; les enfans qui en étaient incommodés
se réveillaient en sursaut en poussant en même temps de grands
cris. Des oxyures qui se trouvaient en grand nombre dans le rectum
de trois hommes âgés de dix-huit , vingt et quarante ans, cause-
rent non-seulement des démangeaisons très-fortes à l’anus , mais
encore firent naître les désirs vénériens jusqu’à porter ces hommes
à se masturber. L'auteur, en parlant des oxyures , cite des cas où
ces vers, qui s'étaient introduits dans le vagin, excitèrent égale-
ment des désirs vénériens à un tres-haut degré. Avis important
pour le médecin. ( Note du traducteur. )
1 On conçoit aisément que des médecins peu versés dans l’art de
guérir aient pu se tromper dans le diagnostic de l’hydrocéphale
DE L'HOMME. 357
de ces signes se trouvent réunis, et quand on n’a du
xeste aucune raison de les attribuer a une affection
idiopathique de la tête, mais plutôt à un dérangement
dans les fonctions des organes du bas-ventre, on se
trompera rarement si l’on en conclut l'existence d’une
maladie vermineuse' ; et même dans le cas où une
chronique , et le regarder comme une maladie vermineuse , à cause
de la ressemblance de quelques symptômes qui sont propres aux
deux affections; mais il est inconcevable que des praticiens aient
pu confondre , comme on en connaît des exemples , l’hydrocéphale
aiguë (encephalitis exudatoria , hydrocephalus aculus) avec une fièvre
nerveuse ou bien avec une affection vermineuse. Mon ancien ami
et professeur le docteur Wendt s’exprime sur ce sujet (Voyez son
ouvrage ayant pour titre : Die kinderkrankheiten s ystematisch dar-
gestellt, Breslau, 1822, p. 197.) de la manière suivante : « La fa—
culté de porter un diagnostic médical juste est un don d e la nature
celui qui n’en a pas été doué sera toujours embarrassé dans ses
jugemens , et les meilleures monographies des maladies ne peuvent
pas non plus suppléer à ce défaut. Je ne peux m’imaginer comment
un médecin habile peut confondre l’hydrocéphale aiguë avec une
maladie de nerfs ou bien avec les accidens occasionés par la pre-
sence des vers intestinaux; et, comme cela a été rapporté par
Henke , il est possible que quelques médecins aient pu commettre
de semblables erreurs de diagnostic, mais on peut présumer avec
raison que ces médecins n’etaient pas très-familiers avec les symp-
tômes qui caractérisent si bien l'affection imflammatoire du cer—
veau. Je ne puis nullement concevoir comment la marche toute
différente d'une maladie de nerfs , ou bien les accidens causés par
des vers , accidens qui ne sont jamais ni aussi violens ni aussi con-
tinus que ceux occasiones par l’existence d’une hydrocephale aiguë,
pourraient être confondus avec celle-ci. » (Note du traducteur.)
* Si dans un cas douteux pareil le praticien ne prescrit à son ma-
358 SUR LES VERS INTESTINAUX
affection de latête ne pourrait pas être méconnue, on
fera toujours très-bien d'avoir égard au bas-ventre
c'est-à-dire aux derangemens probables dans les fonc-
tions de ses organes; car j'espère qu'aucun médecin
ne me contredira, si je prétends que les affections
de la tête sont occasionées dans beaucoup de cas
par les affections ou dérangemens des vicères du bas-
ventre , et vice versa. Mais est-on toujours en état de
désigner exactement quelle est l'affection primitive ?
Quand même cela serait déterminé, nous sommes
néanmoins toujours obligés d’avoir égard aux deux
affections, à cause des rapports mutuels qui exis-
tent réellement entre elles. : |
Je n’ai parlé jusqu’alors que de la maladie vermi-
neuse et non pas des vers, par la raison que, mal-
gré l’existence de presque tous les symptômes rap-
portés ci-dessus, malgré l'emploi continu de vermi-
fuges les plus efficaces, on a vu des cas où l’on n’a
pu faire rendre aucune trace de vers ni même en
trouver dans le canal intestinal ouvert apres la mort.
J'entends, sous le nom de maladie vermineuse, un dé-
rangement ou bien une disproportion dans les fonc-
tions des organes destinés à la digestion et à la nu-
triion; pendant la durée de ce derangement il se
produit ou bien il s’accumule dans le canal intestinal
lade que des purgations douces, assurément on ne pourrait pas
blâmer son plan de traitement. Il n’en serait pas de même s’il ordon-
nait au hasard des drastiques ou bien l’huile empyreumatique de
Chabert, dans le cas surtout où le canal intestinal se trouverait
dans un état inflammatoire, (Note du traducteur.)
| DE L'HOMME. 359
des substances à l’aide desquelles ıl peut se former,
dans des circonstances favorables , des vers; mais ce-
pendant il n’y a pas nécessité absolue que cette for-
mation doive en résulter. L’accumulation de ces
substances, en pareil cas, ne constitue que l'agent
matériel propre à la production des vers; l'existence
de ces animaux dans le canal intestinal ne forme pas
par conséquent une maladie primitive; ıl ne fant pas
même les regarder comme constituant une maladie
( excepté dans quelques eas dont nous parlerons par
la suite ); ils sont plutôt un produit de Pétat maladıf
des organes propres à la digestion et à la nutrition ,
ou bien ils sont le produit d'un derangement de l'é-
quilibre et de l’activité réciproque de ees organës,
ce qui peut alors occasioner tous les symptômes rap-
portés plus haut, sans que pour cela la présence des
vers doive avoir nécessairement lieu. L'expérience
a démontré en effet fréquemment qu'une maladie,
n'importe laquelle, ne.se développe pas toujours
dans un corps animal, quoiqu'il y existe des vers; ce
fait n’est pas seulement démontré par l'évacuation de
ceux-ci chez des hommes se trouvant bien ', mais ıl
est encore constaté, principalement par l'existence
d'une grande quantité de vers dans le canal intesti-
: Il faut soigneusement distinguer se trouver bien ou plutôt se
sentir bien, d'être bien, car tres-souvent les anomalies ou l’état
maladif des organes ne sont nullement senties. Par cela je ne veux
rien dire de nouveau aux médecins qui ont fait beaucoup d’autop-
sies cadavériques.
360 SUR LES VERS INTESTINAUX
nal des animaux qui ne sont pas morts par suite de
maladie, mais bien qui ont été tués d’une maniere
violente ; et cependant on ne remarque pas pour cela
chez eux un changement contre nature dans les or-
ganes, et ils n’ont pas non plus l'air de s’être trouvés
dans un état de dépérissement pendant leur vie, ce
que du reste nous avons déjà remarqué dans le pre-
mier chapitre de ce traité. Cependant il pourrait pa-
raître à quelques personnes que je suis icien con-
tradiction avec moi-même, car d’un côté j'attribue la
cause de la production des vers à un dérangement
dans les fonctions des organes précités, et dé l’autre
je suis obligé de convenir que l’on remarque sou-
vent des vers où l’on n'avait pas observé aupara-
vant de dérangemens dans les fonctions. En réponse
à cela, je commence par dire qu'il existe souvent
dans le corps animal des lésions ou des dérangemens
beaucoup plus considérables que ne sont ceux qu'y
occasione la production des vers, et cependant
ces dérangemens ne se font pas apercevoir claire-
ment par une sensation désagréable ou maladive.
Cet état de choses dépend, dans beaucoup de cas,
de la constitution particulière, ou plutôt du degré
d’irritabilité de l'individu; le cas suivant peu ser-
vir à confirmer cette assertion : J’ai soigné pendant
plusieurs années un homme qui mourut par suite
d’une paralysie des poumons. Je fis l’autopsie ca-
davérique, et je trouvai dans le rein gauche une
pierre d’une grosseur considérable, et cependant sa
DE L'HOMME. 361
presence ne s’élait fait remarquer par aucun symp-
ıöme pendant la vie. Tous les anciens praticiens peu-
vent citer de semblables observations.
Mais la circonstance, que des vers sont fréquem-
ment rendus sans avoir causé auparavant des déran-
gemens , et que, d’un autre côté, la production des
vers fait néanmoins toujours présumer un état contre
nature, quoiqu'il ne soit pas toujours senti, a en-
gagé quelques naturalistes d'admettre que les vers
sont quelque chose de salutaire, et qu’ils sont desti-
nés à se nourrir des substances qui surchargert ou
incommodent le canal intestinal.
Goeze était de cette opinion. Cet auteur s’est cru
encore obligé de prouver que chaque être était d’une
utilité plus ou moins directe pour l’homme, ou, plu-
tôt, que tous les êtres avaient été créés seulement à
cause de lui. Cependant cette assertion serait bien dif-
ficile à prouver ; car nous trouvons toujours dans le
canal intestinal, conjointement avec les vers , une su-
rabondance de glaires, etilest même tres-probable
que la sécrétion des mucosités est augmentée par l’ir-
ritation que ces animaux y causent.
Abilgard presume bien que la production des vers
s'opère originairement par suite d’une inertie ou
inactivité du canal intestinal, mais d’un autre côté il
croit que ces animaux réagissent d’une manière salu-
taire sur ce canal, en ce qu’ils augmentent ses mou-
vemens par lirritation produite par leur succion.
Gauthieri * affirme même que la ( prétendue )
? Ouvrage cité , p. 66.
362 SUR LES VERS INTESTINAUX
consommation des glaires est la moindre des uulités
que le corps humain tire de la présence des vers-
D'après cet auteur, les mouvemens de ces animaux
aident à mieux développer les poumons et à déprimer
les intestins du bas-ventre; il ajoute que les enfans
qui ont des vers se grattent souvent le nez, et provo-
quent par cela assez fréquemment des éternümens,
moyen tres-eficace, selon lui, au développement des
poumons, à la dépression des intestins , à la descente
des testicules, à l'évacuation de l’urine, des matières
stercorales et même des vers. Lorsque Gauthiéri écri-
vit cela, il paraît qu'il n’avait pas réfléchi que st,
dans sa supposition , la présence des vers dans le tube
intestinal était réellement aussi avantageuse, l’évacua-
tion de ces animaux ne devrait pas par conséquent
être regardée comme quelque chose d’utile.
Quand même les vers, considérés comme un pro-
duit vivant et individuel provenant d’une activité ano-
male, ne devraient pas être regardés comme aussi di-
rectement favorables au corps animal, on acependant
tort de les considérer comme des êtres des plus mal-
faisans , et comme les plus grands ennemis de la
santé de ce corps, ce que Fortassin a cherché à
soutenir dans sa dissertation. D'après ce médecin, il
n’y a pas une maladie qui ne puisse être provoquée
par ces animaux ; il les considère en effet comme la
cause des affections du cerveau , des ophtalmies, des
maladies de poitrine, des vomissemens, des nausées,
des éructations, de la gangrène, de la paralysie, etc.
Ce médecin prétend également que les vers peuvent
DE L'HOMME. 363
devenir une cause prédisposante des maladies pério-
diques et spasmodiques, en un mot, si l'on en croit
M. Fortassin, il n’y a rien au monde de plus nuisible
et de plus pernicieux que les vers intestinaux.
Marteau de Grandvilliers les regarde aussi comme
la cause des apoplexies, des sueurs colliquatives, etc.
Beaucoup de médecins accusent encore ces ani-
maux d'être la source d’un grand nombre d’autres
maux ; On ne rencontre guère, par exemple, d’épilep-
tiques ou d'hommes affectés de la danse de Saint-Guy
ou d’autres maladies nerveuses, maladies pour les-
quelles la médecine théorique el pratique éprouve
si souvent des échecs , auxquels les médecins n%ient
pas donné quelquefois des vermifuges'. Si un de
ces malades rend un ver, on peut dire dans quel-
ques cas pour son malheur, un morceau detænia, ou
s’il en a rendu seulement dix ans auparavant , on re-
garde exclusivement les vers comme étant la cause de
la maladie, et très-souvent on ne se donne plus alors
la peine d'examiner si elle a été réellement déterminée
par la présence des vers où non.
* Ce n’est pas déjà si mal agir que d’avoir recours dans des cas
pareils aux vermifuges, après que d’autres moyens therapeuti-
ques ont été inutilement employés , quand même l'indication à
l’emploi de ces remèdes ne paraitrait pas établie d’une manière
suffisante , car la présence des vers , comme il a été déjà démontré
plus haut , a souvent lieu sans que l’on s’en aperçoive, et occasione
maintes fois toutes sortes d’accidens plus ou moins graves. Un pa-
reil plan de traitement dirigé avec prudence, loin de pouvoir être
nuisible aux malades, peut au contraire étre couronné dans bica
des cas d'un plein succès, ( Note da traducteur. :
=
364 SUR LES VERS INTESTINAUX
Je citerai ici, dans le but d'éclairer cette mauére;
quelques cas, les uns observés par d’autres médecins
et les autres par moi-même, cas où il est au moins
très-problématique si ces animaux avaient été en effet
la cause de la maladie ou même de la mort,
Courbon Perussel a rapporté dans le Journal de
médecine de Paris plusieurs cas analogues : je me
bornerai à citer les suivans. Le premier a été publié
sous le titre : « Rapport de l’ouverture du cadavre
d’un homme que l’on croyait avoir élé assassinée,
mais dont la mort a été probablement occasionée par
la présence des vers intestinaux. » Un homme de
vingt-cinq ans et d’une bonne constitution, fut battu
le 13 mars; les coups ne parurent pas avoir dérangé
sa santé, car il continua ses travaux jusqu’au 19)
jour où il commença à se sentir malade. Le 21 Cour-
bon fut appelé : le malade, qui était au lit, avait perdu
la parole, mais il conservait sa connaissance ; ıl s'était
plaint (comme on le rapporta à ce médecin ) depuis
le 19 et les jours suivans, d’un grand mal de tête et
d’envies de vomir; l’on ne voyait à l'extérieur aucune
lésion sur la tête. Courbon lui ordonna une tisane ra-
fraîchissante. Le troisième jour le malade mourut
sans avoir repris la parole. Le cadavre fut examiné
le 24. Excepté quelques légères contusionssur le dos,
l'on ne trouva aucun dérangement ni à l’intérieur ni à
l'extérieur de la tête ; les poumons et le cœur étaient
sains ; les intestins du bas-ventre paraissaient égale-
ment être dans l’état naturel. En ouvrant le canal in-
testinal, on vit beaucoup de vers longs et gros ; ils
DE L'HOMME. 365
étaient entortillés ensemble dans un endroit où 1ls
semblaient avoir obstrué le canal intestinal; Cour-
bon en retira quarante-deux ; la mauvaise odeur l’em-
pêcha de pousser ses recherches plus loin ; l'estomac
n’en contenait cependant aucun, et il n’y en avait que
trés-peu dans les gros intestins, qui, du reste, n'é-
taient nulle part enflammés.
Courbon avoue, dans une note ajoutée à ses
observations, qu’il n’a jamais examiné, dans les cas
qu’il rapporte, la moelle épinière, et qu’il n'avait pas
même ouvert les ventricules du cerveau du cadavre
dont nous venons de parler.
Une autre observation du même médecin est inti-
tulée : « Rapport sur l'ouverture d’une femme que
l'on croyait avoir été assassinée par son mari, mais
dont la mort paraît avoir été occasionde par la pré-
sence des vers. » Le cadavre de cette femme, âgée de
vingt-un ans, avait quelques écorchures légères à la
partie antérieure du cou, et une petite excoriation à
la joue droite. La tête fut rasée, et l’on trouva le
crâne, le cerveau et ses membranes sans lésions; les
poumons et l’estomac étaient sains; ce dernier con-
tenait des alimens à moitié digeres; le duodénum
était également sain, mais le jéjunum était rempli de
vers; dans plusieurs endroits ils étaient réunis en
forme de peloton, et paraissaient obstruer le canal
intestinal ; Courbon en retira cent quatre; les autres
intestins n’en contenaient point; aucune membrane
n'avait l'air d’être dans un état inflammatoire. Cour-
bon finit par conclure que la mort avait été causée par
366 SUR LES VERS INTESTINAUX
la présence des vers, et il présume que les excoria-
tions que l’on remarquait sur la figure et sur le cou
avaient été probablement faites sur la femme par elle-
mème dans des mouvemens convulsifs. L'on observe
encore cependant dans ce rapport que cette femme
avait prié le juge de paix, quelque temps ävant sa
mort, de faire enfermer son mari parce qu’il la mal-
traitait. Le juge de paix lui ayant refusé sa demande,
elle s’en alla fort tristement en disant qu'elle serait
assassinée sous peu, Ne pourrait-on pas croire, ajoute
Courbon, que l’état maladif de cette femme ait pu
influer sur son imagination ? Je le présume, dit-il, et
ma supposition se base , du reste ‚sur l’axiome d’Hip-
pocrate : Ubi aliqua parte dolent ; neque dolorem sentiunt
iis mens ægrotat. Quant à moi, je doute très-fort qu'un
tel rapport de médecine légale ait pu engager un juge
criminel à regarder les vers comme cause de la mort
de-ces deux personnes. |
Je ne crois pas non plus que beancoup de mede-
cins soient tout à fait de l’avis de Courbon dans le
cas suivant, qu'il a publié sous le titre de: « Mort su-
bite probablement causée par la présence des vers. »
Une jeune fille de dix-neufans, bien portante et non
menstrude , jouissait encore d’une bonne santé le 5
aviil, comme dans les jours précédens ; le 6 avril, à
onze heures, elle fut saisie de frissons et commença à
vomir; à midi elle perdit la parole et la faculté d’a-
valer. Courbon alla la voir à sept heures du soir : le
pouls n’était pas trop fréquent, pas trop faible, et
était assez régulier ; la pupille était élargie et ne se con-
DE L'HOMME. di 367
tractait presque pas à l'approche d’une lumière. La
Malade ne parlait pas etne répondait à rien. On voulut
lui faire prendre une cuillerée d’une potion éthérée,
mais sitôt qu’ellé sentit le liquide dans la bouche, elle
s’agita avec violence, fit entendre quelques plaintes,
pendant lesquelles elle semblait faire beaucoup d’ef-
forts. Courbon ordonna un bain et des vermifuges,
sitôt que la malade serait en état d’avaler. La malade
| ne prit pas de bain et elle mourut à neuf henres du
soir, c’est-à-dire dix heures aprés le commencement
| de la maladie. Courbon pensait que cette fille avait
succombé à une maladie vermineuse.
Un cas à peu près semblable a été rapporté par
| Krause '. « Une fille de treize ans, après avoir été
| guérie d’une gale six mois auparavant, se plaignit
qu’elle rendait de temps à autre des vers, et qu'elle
‚se trouvait un peu incommodee. On lui administra
des vermifuges pendant quelque temps, et un jour
elle mourut subitement à midi pendant qu’elle était
occupée à coudre. À l’exception d’une faiblesse de la
vue, elle n’avait éprouvé la veille de sa mort aucune
incommodité allarmante. »
M. Serres a publié une observation sous le titre :
‚Affection vermineuse simulant la rage. Un enfant
de treize ans, du sexe masculin, fut mordu par un
chien enragé; six mois après, le 2 septembre, tous
les symptômes de l’hydrophobie se déclarèrent, et il
mourut deux jours après. L’autopsie cadavérique
prouva que le cerveau , la moelle épinière, les pou-
| * Voyez préface, à l'ouvrage de Vandævern.
368 SUR LES VERS INTESTINAUX
mons et le larynx étaient dans un état sain , l'estomac
ne contenait rien d’extraordinaire , mais les intestins
greles étaient remplis d’ascarides qui obstruaient tout
À fait leur cavité. Le nombre de ces animaux était
très-considérable. MM. Serres et Bosquillon presu-
ment que l’on doit attribuer la maladie et la mort de
cet enfant à la présence des vers et non pas à la mor-
sure du chien. Ces médecins remarquent encore que
l’hydrophobie se montre souvent peu de temps avant
la mort.
Geischlæger rapporte qu’un enfant scrofuleux ren- .
dit deux ascarides peu de temps avant de mourir. Ce-
pendant cela ne prouve pas, ce me semble, que ces
vers aient été la cause de la nialadie et de la mort.
Quoique je sois tres-peu porté à regarder les vers
dans les différens cas que je viens de citer comme
ayant causé la mort, je ne puis cependant pasnier que
ces animaux ou bien la maladie vermineuse n'aient
souvent déterminé ou n’aient au moins beaucoup
contribué à causer des accidens graves et même tout à
fait extraordinaires.
Krause rapporte le cas suivant : « Je fis connais-
sance , il y a quelques années , d’un homme de trente-
un ans, d’une constitution robuste, qui était trés:
souvent obligé, depuis plusieurs années, et même
encore à l'époque où je le vis pour la première fois;
de rire aux éclats ( cachinnum) malgré lui ; il Eprou-
vait en même temps à chaque accès un malaise dont!
ıl ne pouvait se soulager qu’en se couchant à plat
ventre dans son jardin.
| u
—_—— u ne
- | DE L'HOMME. 369
Les medecins qu'il avait consultés jusqu'alors n'a-
vaient pas supposé qu'il eut des vers, c'est pour-
quoi les medicamens qu’on lui avait ordonnés res-
ièrent sans éffet. Cet homme me demanda mon avis.
Apres lui avoir adressé plusieurs questions , je lui fis
entendre que je présumais chez lui la présence des
vers; son teint était en effet pâle, et ses yeux étaient
ternes. Sa réponse fut qu'il n'avait pas été seulement
incommodé par des vers dans sa jeunesse, mais qu'il
en avait encore rendu il y a quelques années. L'usage
de vermifuges tres-eflicaces l’a au moins débarrassé
alors de tous ces accidens désagréables; mais je ne
peux pas dire avec certitude s’ıl n’en a pas été incom-
modé de nouveau, A je n’ai pas reçu de ses nou-
velles; il habitait en ellet une ville assez éloignée de
celle où je résidais.
Parmi plusieurs observations tres-curieuses ciiées
par Girandy, la suivante mérite surtout d’être rap-
portée : Un jeune homme de seize ans avait, entre
autres accidens tres-singuliers, cela de partieulier,
qu'il lui était impossible de marcher sur un corps
quelconque, füt-ce même une feuille de papier.
Chaque fois qu'il voulait vaincre ceite difiiculté, il
tombait en syncope; des vermifuges qu’on lui admi-
nistra opererent l'évacuation de plusieurs vers, et la
guérison en est résultée.
M. Hufeland ' rapporte le cas suivant: Un homme
tourmenté par les vers voyait, étant à jeun, pen-
dant des quarts-d’heure entiers, tous les objets en
" Journal Baad, 1\ , p. 252.
b2
EN
370 SUR LES VERS INTESTINAUX
jaune ; cependant il n'avait aucun symptöme de jau-
nisse , et ses yeux élaient dans un état sain, Le malade
fut débarrassé de cet accident par l'évacuation des vers.
Ackard a publié une dissertation (que je n’ai pas
pu me procurer } où il est question d’an homme chez
lequel la présence des vers provoquait une véritable
ruinminalion.
Delisle fait mention d’une jeune personne qui ren-
dit spontanément pendant une année entière des as-
carides et des morceaux de tænia; pendant tout ce
temps elle ne pouvaitsupporter de musique ni vocale
ni instrumentale.
Désarneaux rapporte l'observation suivante : « Un :
jeune homme éprouvait des gonvulsions horribles ,
qui continuérent jusqu'à sa mort; il avait été égale-
ment incommodé par des vers. Un jour un accés con-
vulsif fut par hasard calmé par de la musique vocale, |
et plus tard on s’est convaincu que ses convulsions
diminuaient chaque fois qu’on jouait du violon. »
D’après Hannæus , une petite fille de quatre ans,
qui avait perdu la faculté de voir et de parler, fut
rétablie par l'usage des vermifuges ; et Hannes rap-
porte qu’une jeune fille de onze ans, qui ne pouvait
plus parler ni marcher, fat guérie par l'usage du
tartre stibié, qui produisit l'évacuation de vers in-
iestinaux.
Marchal de Rougeres a publié six observations de
maladies vermineuses tres-compliquees. Je prie mes
lecteurs de 1âcher de se procurer l'ouvrage dans
lequel ilen parle, et d’en croire ce qui leur plaira.
DE L'HOMME. 371
Un malade qui a fourni matière à une de ces ob-
servations , éprouva les symptômes suivans : douleur
insupportable et engourdissement de tous les mem-
bres, difficulté de parler et d’avaler , mal de tête vio-
lent et beaucoup de fièvre. Une saignce calma un
peu le malade, mais bientôt après tous les acc!dens
se renouvelèrent avec plus de violence, et ils furent
même accompagnés de convulsions. On pratiqua une
seconde saignée sans en tirer aucun avantage ; le ma-
lade ne guérit complétement qu'après l'usage du
tartre stibié ordonné par Marteau de Rocquemont.
Ce médicament fit évacuer beaucoup de bile et plus
de trente vers, tant par haut que par bas.
Remer a guéri deux personnes attaquées d’une
amaurose, par l'évacuation des ascarides , et Rosière
de Lachassagne a débarrassé un homme d’un étour-
dissement subit, qui avait augmenté pendant trois
jours , par l'emploi d’une infusion purgative, com-
posée de follicules de séné et de tamarın; elle fit éva-
cuer au malade par la bouche deux ascarides, et tous
les symptômes cesserent sur-le-champ.
Kichard fait mention d’une diarrhée occasionée
par la présence d’un tænia. L'usage des purgatifs, de
la fougère mâle et de l’éther sulfurique a produit la
guérison.
Thomassen à Thuessink , a guéri une petite fille
scrofukeuse, de six ans, de la danse de Saint-Guy, par
des remèdes qui firent évacuer beaucoup de glaires
et de vers.
Le même a observé, chez un canonnier de vingt
ah.
372 SUR LES VERS INTESTINAUX
ans, la métamorphoseremarquable d’une fievre quo-
tidienne en une Epilepsie. Il présama chez cethomme
la présence de vers intestinaux, et ordonna l’électuaire
vermifuge de Stoerk, qui en eflei fit rendre par haut
_des paquets de vers, des glaires, et par bas beaucoup
de matières glaireuses, après quoi la fièvre reprit son
ancien Lype; mais comme elle était toujours accom-
pagnée de légers accès d'épilepsie, Thomassen or-
donna de nouveau un purgatif, quelque temps apres
une infusion de geoffrea , et à la fin du quinquina en
poudre. L'emploi de ces médicamens produisit une
guérison complete.
Thomassen citeencore le cas suivant: « Un homme
robuste er sanguin, âgé de vingt ans, avait des accès
de manie, que ce médecin qualifie du nom de manie
vermineuse. La mère de ce malade était également
folle et elle a continué de l'être jusqu'à sa mort. Ce
jeune homme fut guéri par l'usage de la belladonne
en poudre, dont il prit d’abord deux grains matin et
soir, et plus tard jusqu’à huit grains.» Thomassen ne
dit pas que son malade ait rendu des vers, el ilne
s'explique pas non plus sur ce qui lui a fait présu-
. mer que leur présence fût réellement la cause des
accès de manie.
Le docteur Suck, à Wolmar en Livonie, a ob-
servé une rétroversion du globe de l’œil causée par l'ir-
rilalion des vers; une jeune paysanne âgée de douze
ans, fut tout à coup atteinte de maux de ièle très-vio-
lens; cinq heures après elle tomba dans un délire
furieux accompagné de convulsions qui semblateut
DE L'HOMME. 373
devoir mettre fin à ses jours. Elle se réveilla, vingt-
quatre heures apres, débarrassée des douleurs; les
cavités orbitaires étaient comme remplies de chairs
crues (rohem fleische ) et la pupille avait disparu; le
globe de Peeil s'était contourné de bas en haut, de ma-
niere que les parties qui reposent sur l’orbite étaient
tournées , conjointement avec les muscles, par devant
entre les paupières ; la cornée et la pupille étaient en-
tiérement cachées sous la voûte orbitaire. On présuma
que Ja présence des vers était cause de ces accidens,
et on administra des vermifuges conjointement avec
des purgatifs. Apres en avoir fait usage pendant trois
jours consécutifs, la malade commenea à rendre quel-
ques oxyures; elle en évacua encore davantage le
quatrième jour, époque à laquelle les yeux éprou-
verent des contractions convulsives, et l’on apercut
de temps en temps une petite partie de la conjoncuive;
le sixième jour elle ne rendit pour ainsi dire que des
vers; aprés celte évacuation extraordinaire , les yeux,
reprirent leur position naturelle et la vue futrétablie.
A près une évacuation semblable, d’à peu pres trois
cents vers, Sylvestre a vu cesser entièrement des con-
vulsions violentes, qui ressemblaient à la danse de
Saint-Guy.
Dufau a également guéri cette même affection par
l'usage des purgatifs, qui firent rendre beaucoup de
vers par haut et par bas; cependant ıl faut remarquer
que cette maladie avait déjà cessé une fois d’elle-
même à une époque antérieure,
Moœnnich a traité un enfant de deux à trois ans,
374 SUR LES VERS INTESTINAUX
qui,ayant auparavantl’aır robuste el bien portant , fut
atteint tout à coup d'une paralysie des extrémités 1n-
férieures, il était en même temps strabite de l’œil
gauche, et toute sa figure était décomposée; après
l'emploi de vermifuges, il rendit dix-huit ascarides
avec une grande quantité de glaires, et sa santé se ré-
tablit.
Delacroix a vu disparaître un vomissement pres-
que continuel accompagné de hoquets et de convul-
sions , après que le malade eut rendu par la bouche
sept ascarides très-longs.
J'ai observé moi-même lesdeux cas suivans : On me
présenta, en 1816, un enfant de neuf ans, du sexe
masculin, qui avait depuis deux ans des accès très-
violens et très-fréquens d’épilepsie, il rendait .en
même temps des morceaux de tænia. Je fus assez
heureux pour le débarrasser du reste de l’animal, et
dès ce moment il n’eut plus d'accès d’épilepsie*.
Une jeune fille de onze ans était tourmentée par
une toux sèche et presque continuelle. Ayant observe
qu’elle rendait des articulations de tænia, on Jui fit
faire usage d’anthelmintiques; elle évacua un grand
morceau de l'animal, et la toux se calma pendant deux
mois, époque à laquelle elle reparut de nouveau. Une
nouvelle évacuation d’un morceau de iænia eut lieu,
et latoux cessa encore une foismomentanément. Cette
fille éprouva encore par la suite les mêmes accidens
trois ou quatre fois, jusqu à ce qu’enfin je parvins, ıl
: Le même enfant est venu me voir le 4 février 1821 ,1l a tou-
jours joui, depuis mon traitement , d’une santé parfaite. (Br. )
DE L'HOMME. 375
y a à peu pres huit ans, à détruire complétement son
tænia , et depuis ce temps la toux n’a plus reparu.
Lepelletier attribue les accidens suivans à la pré-
sence des vers : « Une femme de trente-six ans , d’une
constitution cachectique, fut subitementatteinte d’une
douleur violente au côté gauche , accompagnée de
toux sèche, d’une forte oppression , d’une soif exces-
sive ,,de maux de tête et de fièvre; sa figure était en
même temps trés-animée ; on lui fit une saignée, puis
on administra un vomiuif et un purgatif qui lui firent
rendre par haut quelques ascarides. C'est pourquoi on
employa des purgatifs et des vermifuges d’une nature
huileuse, qui firent encore évacuer quelques vers
avec beaucoup de matière glaireuse , et la santé se re-
tablit. » Je pense qu’on aurait dû appeler cette mala=
die pneumonie et non pas maladie vermineuse.
Sumeire attrıbua aussi la cause d’un point de côté
à la présence des vers, par la raison que la mousse de
Corse en avait fait évacuer quelques-uns ; ce méde-
cin remarque cependant qu’on avait fait précéder de
quelques saignees lPusage de ce médicament; en
outre il observe dans son rapport que la mousse de
Corse est souvent tres-eflicace dans le cas de coliques
subites, quoiqu'il n’y ait pas de vers.
Il me serait facile d'augmenter le nombre des ob-
servations de ce genre ürces des ouvrages tant anciens
que modernes, mais toutes ces observations reu-
nies ne prouveraient pas davantage que celles que
je viens de rapporter, Vinfluence nuisible des vers
376 SUR LES VERS INTESTINAUX
sur le corps animal; d’autre part, tout médecin im-
partial conviendra que dans ces exemples une ac-
cumulation de glaires et de matières fécales dans le
canal intestinal, en un mot un derangement dans ses
fonctions, ou bien une disproportion de son activité,
relativement à celle des autres organes, a pu donner
heu, aussi bien que l'irritation appelée vermineuses
aux symptômes les plus singuliers.
Les faits que nous venons de rapporter parlent en
faveur de cette supposition. Nous avons d’abord vu
qu'une grande quantité de vers séjourne quelquefois
dans le corps animal sans se faire sentir enaucune ma-
nière. D’un autre côté , nous avons remarqué que tous
lés symptômes à l’aide desquels on suppose ordinaire-
ment l’existence des vers, se trouvent souvent réunis
sans cependant qu’on puisse en découvrir. Ces ani-
maux sont eux-mêmes le produit ou bien le résultat
d'un état morbide! ou contre nature. Ainsi done tout
ce qui peut contribuer à la production des vers peut
également devenir la cause prédisposante des accidens
les plus extraordinaires. Combien de fois n’arrive-
t-il pas que la manie, ’hypocondrie et d’autres affec-
tions mentales sont le résultat d’un derangement dans
* Nathaniel Ramsey cite des cas par lesquels il paraît démontrer
que quelques personnes sont en meme temps incommodées de
vers intestinaux et de crachemens de sang. Le même auteur re-
marque qu'il est probable que ces deux affections sont dans un
rapport mutuel. Voy. Medic, chir. transaci. of London , vol. IX,
part, ir, 1818 , n°. D, (Br.)
DE L'HOMME. 37
les fonctions des organes du bas-ventre, maladies
que nous parvenons cependant, dans quelques cas,
à guérir par la méthode évacuante, sans que nous
| voyons de traces de vers; quoiqu'il soit arrivé dans
plusieurs des cas cités que l’évacuatuion de quelques
vers füt suivie d’une diminution des symptômes gra-
ves, il ne résulte nullement de là que la présence de
ces animaux fût la seule cause de ces symptômes. Le
cas observé par moi-même ne fournit pas non plus
une preuve suHisante quele tænia fut la cause première
de l’épilepsie; car ce ver fut détruit par un usage
continu de mon buile anthelmintique, composée en
grande partie d'huile de térébenthine , substance
qui en effet a die employée par les médecins anglais
Percival, Latham et Philipps dans plusieurs cas avec
le plus grand succès contre Vepilepsie, non compli-
quée de maladie vermineuse.
Quand il s’agit de déterminer la cause d’une mala-
die, j'engage les praticiens à ne pas attacher trop
d'importance , sauf quelques exceptions, à la présence
des vers et encore moins à une évacuation de ces ani-
maux à une époque très-éloignée.
Lorsque j'étudiais à Jéna, feu mon ami le docteur
Schleussner me fit faire la connaissance d’une femme
hystérique qui avait rendu un jour, je peux dire pour
son malheur, un tænia; elle avait déjà consulté
beaucoup de médecins qui ayant tous dirigé leur
plan de traitement contre ce ver, avaient employé
inutilement toutes les méthodes connues pour le faire
évacuer ; elle me fit même voir un verre de mercure
378 SUR LES VERS INTESTINAUX
coulant qu’on lui avait administré dans le même bat ;
et qu'elle avait rendu par bas. Je plaignis beaucoup
cette pauvre femme, et je fus étonné de ce que l’on
n'eut pas pu parvenir, après l'emploi des médicamens
les plus eflicaces, à la débarrasser de son ver. Mainte-
nant que Jai appris à envisager un peu mieux celte
matière, jai raison de la plaindre encore davantage,
et je ne m'étonne plus pourquoi les remèdes quelle
avait pris n'avaient pas opéré l’évacuaton d’un tænia;
car je suis presque convaincu qu’elle n’en avait pas.
Je connais quelqu'un à Vienne qui ayant rendu un
wenla vingt-cinq ans auparavant, sans avoir éprouvé
le moindre dérangement de santé, en fit part un jour
à son médecin; celui-ci regarda cela comme une
chose d’une haute importance, et il Jui annonca
qu'il voulait le soumettre à un traitement complet,
afin de le débarrasser entièrement de son ver; ce
dont cet homme n'avait ni le temps ni l'envie. Le
traitement fut par conséquent remis à un autre mo-
ment. Le malade recut tout-à-coup ordre de se rendre
à l’armée dans les Pays-Bas ; pendant son absence de
Vienne, qui a duré plusieurs années, il n’a plus
pensé à son tænia, et 1l n'en a pas même vu la moin-
dre trace; il faut avouer que ce fût un vrai bonheur
pour lui d'avoir pu se soustraire à la guérison que
son médecin lui avait promise avec tant d’empres-
sement.
Le cas suivant mérite encore d'être cite. Je fus
consulté par écrit, il y a trois ou quatre ans, sur lé-
tat de santé d’un prêtre qui habitait la Moravie. H
DE L'HOMME. 379
était dit dans le rapport, que cet homme avait LOL -
jours joui d'une santé parfaite, jusqu'au momeul où il
avait rendu un tænia il y avait trois ans. Depuis ce
tempsilavait essayé tousles remèdes connus proposés
par des médecins et par des charlatans pour se de-
barrasser de son ver, mais aucun de ces remèdes n’en
avait pas même fait rendre un seul morceau. Il était
également dit dans ce rapport, que cet homme, jadis
robuste, avait tellement maigri, qu'il ressemblait à un
squeleue couvert de la peau, et que sa faiblesse était
telle qu'il pouvait à peine se tenir sur ses jambes.
Je lui conseillai, comme on peut bien se l'imagi-
ner, de s'abstenir sur-le-champ de toute espece de
vermifuges , étant convaincu que son Mauvais état de
santé ne provenait pas de la presence d’un tzenlay,
mais bien de l’abus de vermifuges drastiques. Je ne
puis pas dire si ce prêtre a recouvré la santé, n'ayant
pas recu depuis de ses nouvelles.
Quoique la présence des vers ne cause dans
beaucoup de cas que très-peu ou même point de dé-
rangemens (ce sont les paroles de quelques méde-
eins ), nous ne devons cependant pas mer d’un autre
côté qu’une grande quantité de ces animaux ne puisse
obstruer d’une manière mécaniquele canal intestinal,
et causer par cela des coliques mortelles ; voilà ce dont
on se plaint, et dont nous avons même déjà rapporté
quelques exem ples, c'est-à-dire où l'on se croyait en
droit de présumer que les vers avaient réellement
causé de pareils accidens : en voici quelques autres.
380 SUR LES VERS INTESTINAUX
Daquin nous a communiqué lobservation sui-
vante : « Un enfant du sexe masculin ; de dix à douze
ans, fut amené à l’hôpital le 14 novembre. Il s'était
déjà plaint de coliques depuis plusieurs jours ; on lui
administra une potion huileuse vermifuge, qui lui
fit rendre des matières glaireuses et jaunâtres par
hautet par bas. Le 15 les coliques étaient augmentées
de beaucoup, il vomissait tout ce qu'il prenait ; il n’y
avall pas de traces de hernie : le bas-ventre était souple
et aplati. Le malade sentait une douleur violente
audessous de la région du foie, quand on y exer-
call une pression. L'huile d'amandes douces, qu'on
lui avait ordonnée, fut vomie. sur-le-champ, et les
souffrances du malade continuèrent. Dans l'apres-
midi il avait l'air d'avoir perdu complétement la rai-
son; 1] sauta de son lit, Ota sa chemise et se roula à
terre, etc.; il ne pouvait rien garder dans son corps.
Le 16 il était sans pouls, sans connaissance, dans
un état comaleux et complétement amaurotique. Il
succomba à une heure après midi. Son corps était
desséché ; l’epiploon avait presque entièrement dis-
paru. On trouva dans l'estomac un ascaride très-
gros, de la longueur de l’avant-bras ; une des extré-
mités de cet animal se trouvait bien haut dans P’oeso-
phage, tandis que l’autre était descendue très-bas
dans le duodénum. Cet intestin, ainsi que les autres
intestins greles et le cœcum, étaient tellement remplis
de vers, qu'ils paraissaient y avoir été mis par force;
l'on en trouva également quelques-uns dans les gros
DE L'HOMME: 38:
intestins. Malgré la présence d’une si grande quantité
de vers, iln’yavaiı pas de traces de phlogose dans le ca-
nal intestinal. La tête decetenfantne fut pas ouverte. »
Au premier abord on serait tenté de croire que
Vobstruction causée par cette grande quantité de vers
fut l’unique et principale cause de la mort de cet en-
fant , mais l’on doit prendre en considération que ces
vers n’ont pas pu se produire pendant une nuit, et
‚sı nous voulions même admettre que celà ait eu lieu,
‚ces animaux n'auraient pas pu, dans tous les cas, at-
teindre leur développement complet assez subite-
ment pour obstruer totalement les intestins. Du reste,
si l’obstruction avait été la principale cause de la
mort, chose que nous ne pouvons admettre, par la
raison que cet enfant avait encore eu une évacuation
le 14, une inflammation et la gangrène auraient dü
alors avoir lieu auparavant, comme on le voit en
pareil cas, mais ıl n’y avait pas même Ja moindre
trace d'inflammation dans les intestins du cadavre.
Pendant la vie, cet enfant pouvait en outre suppor-
ter une pression sur le bas-ventre, qui était méme
aplatı, par conséquent les intestins étaient suscep-
tibles d’une distension beaucoup plus considérable.
I] résulte de l’ensemble de cette histoire, que ni la
grande quantité de vers existant sans doute depuis
long-temps dans le corps du malade, comme cela
paraît être prouvé par son extrême maigreur, ni en-
fin Vobstruction apparente des intestins, attribuée à
la présence du grand nombre de ces animaux, ne peu-
vent être regardés avec certitude comme la cause des
382 SUR LES VERS INTESTINAUX
accidens et de la mort de cet enfant. Il me paraît trèss
probable que le ver que l’on a trouvé dans l'estomac a
provoqué les vomissemens; cependant il reste en-
core à savoir si ce ver n’avait pas pris la position
dans laquelle on l’arencontre seulement après la mort
de l'enfant ou peu de temps auparavant; je me plais à
admettre cette supposition par la raison que cet anı-
mal aurait dù être déplacé et arraché de sa position par
les efforts que l'estomac fait ordinairement en pareil
cas dans le vomissement. Du reste, je ne concois pas
comment la presence d’un seul ver dans l’estomac
aurait pu irriter cet organe au point de causer une
mort subite; il est toujours à regretter que l’on n’ait
pas ouvert la tete du cadavre.
Le cas suivant, rapporté par Campedon, paraît
prouver davantage qu'une mort subite peut être OC-
casionée par une très-grande quantité de vers. « Un
homme succomba après avoir éprouvé pendant vingt-
quatre heures des coliques violentes. L’autopsie ca-
davérique fut faite , et l'on trouva l'intestin cœcum et
une partie du colon rem plis et entièrement distendus
par un peloton d’ascarides (il y en avait trois cent
soixante-sept de la longueur de cinq à six pouces );
de manière que ces intestins ont dû s’enflammer et
tomber en gangrène. »
Les observations suivantes prouveront cependant
te)
le caval intestinal sans causer des accıdens graves.
qu'une grande quantité de vers peut séjourner dans
J’ordonnai un jour à un bonnetier d’A polda (à trois
lieues de Jena) l'électuaire vermifuge de Stoerk;
DE L'HOMME. 383
quelques jours après je fus le voir, et il me conduisit
dans son jardin afin de me montrer les matières ster-
corales qu’il avait rendues et auxquelles était mêlée
une quantité extraordinaire de vers. Si je ne les avais
vus de mes propres yeux, je n'aurais jamais cru qu’un
aussi grand nombre ait pu se trouver à la fois dans le
corps d’un homme, et cependant le malade, autant
que je me le rappelle, n’en était pas très-incommodr.
Si, à cette époque, il avait succombé par hasard à la
suite d’une colique violente occasionde par le refroi-
dissement, par l’usage d'une mauvaise bière, etc.,
on aurait, sans le moindre doute, regardé les vers
comme la cause de sa mort.
Dall’ Olio raconte qu'il a rendu par la bouche, dans
l’espace de quinze jours, quatre cent cinquante asca-
rides qui étaient de la longueur de la main’.
Marteau de Grandvillers a connu un soldat de
vingt-trois ans qui a évacué trois cent soixante-sept
ascarides dans l’espace de six jours.
Il résulte de ces faits, que si l’on trouvaitune grande
quantite de vers réunis dans une partie quelconque
du canal intestinal, l’on porterait un jugement an
moins très-hasardé, en les regardant comme ayant
été réellement la cause de la maladie ou de la mort. Je
crois aussi que les accidens observés par Muralto sur
une femme en couche attaquée d’un iléus violent pro-
venaient de sa hernie ombihcale et crurale, et non
pas de vers intestinaux. Cette femme se trouva soula-
gée après qu’elle eut fait usage de bains tiedes, et
" Memorie, p. 215.
384 ° SUR LES VERS INTESTINAUX
immédiatement après elle rendit plusieurs vers par
haut et par bas. |
L'on ne peut pas nier que les vers ne deviennent
beaucoup plus incommodes quand ils sortent du lieu
que la nature leur a assigné, et quand ils se rendent
dans d’autres organes. Dans le cas où les ascarides ,
par exemple, qui, chez l'homme, vivent dans les in-
testins grêles, se portent à l'estomac, ils y causent
alors beaucoup d’accidens désagréables , lesquels
continuent jusqu’à ce que l'estomac, par un eflort
considérable, les ait rejetés. Dans plusieurs des cas
ci-dessus rapportés, il y avait des vers dans l'estomac,
et il est très-vraisemblable que Palmer se trompe en
croyant qu'ils peuvent séjourner daus l’estomac long-
temps sans donner lieu à des accidens.
Désarneaux a observé un accès Ires-grave d’épi-
lepsie qui, d’après la relation de get auteur, avait LÉ
produit par un seul ascaride qui s'était glissé dans
l'estomac.
Cependant il n'est ici question que des vers intes-
tinaux de l'homme , car il y a chez quelques animaux
des vers que l’on rencontre toujours uniquement
dans l’estomac; il est très-probable qu'ils s'y dé-
5 Dr. Joseph Klapp Ueber die Würmer des magens. Voyez The
American recorder Philadelphie, vol. XX, n°. HH, april 1820. Ibid.,
Haguer , Würmer , in der leber einer wahnsinmuigen (vers trouvés
dans le foie d’une femme aliénée). Cette femme avait également
Ges hydatides dans le plexus choroide et d’autres désorganisaiions
dans le cerveau. Voyez Zeitschrift fur physische Aerzte von Nasses
4 tes heft:1818, Leipzig, page 514. ( Br.)
DE L'HOMME. 385
veloppent aussi, et qu’ils ne causent en cet endroit
pas plus de gêne que les autres vers dans les intes-
tins, si long-temps qu'ils ne quittent pas l'endroit
que la nature leur a assigné. Il vit en effet dans l’es-
tomac de la souris un ascaride assez gros, et j’en ai
trouvé une fois vingi-trois réunis, une autre fois
vingt-quatre qui, mis dans l’eau, et conservés après
dans l’esprit-de-vin, causent l’étonnement de tous
ceux qui les voient, parce qu’on ne pent pas com-
prendre comment tous ont pu trouver place dans une
cavité aussi petite.
Quand les vers se portent d’un endroit du canal
intestinal dans un autre, ou, pour mieux dire, quand
ils changent leur siége naturel, il est à présumer
qu'ils ont été forcés à se déplacer par des cireonstan-
ces extérieures indépendantes de leur volonté.
Quand les sucs contenus dans le canal intestinal,
dont ces animaux se nourrissent, changent de nature,
quand les intestins se contractent spasmodiquement,
il est probable qu'ils ne se trouvent pas à leur aise,
et qu'ils tâchent alors de découvrir un endroit qui
leur soit plus convenable. S'ils se portent par hasard
de bas en haut, ıls arrivent, à leur grand desavan-
tage , dans l'estomac ; car cet organe n’étant pas accou-
tumé à la présence d’un corps de cette nature, fera
tous ses efforts pour le rejeter au dehors.
Mais on a certainement tort d'admettre qu'ils per-
forent les intestins, et que par là ils causent la mort.
Felix Plater aîné, dont les idées sont conformes aux
nôtres sur la formation des vers intestinaux, a déjà
29
386 SUR LES VERS INTESTINAUX
douté de ce fait, par la raison qu'il faudrait des or-
ganes particuliers , tels qu'une trompe pointue ou
bien des dents , organes qu'il n’a pas pu remarquer
sur ces animaux , pour opérer une semblable perfo-
ration, et il ajoute qu’une simple succion ne peut pas
l’effectuer.
Bianchi et Wichmann ' sont de la même opinion,
et le dernier range les lumbrici effractores parmi les
fables de Ta pathologie. M. Rudelphi, qui a fait des
recherches très-étendues à ce sujet, a prouvé que les
vers intestinaux de l’homme ne peuvent pas perforer
les intestins ni les tégumens en général, et il remarque
que tout homme impartial peut se convaincre qu'ils
manquent des organes nécessaires pour le faire. Il a,
qui plus est, démontré que des espèces de vers
étrangères à l'espèce humaine, comme les acanthocé-
phales , qui peuvent parvenir à perforer l'intestin, ne
produisent pas même d’inflammation dans cet or-
gane, sans doute à cause de la lenteur avec laquelle
la perforation a lieu ?.
Cependant ‚comme on parle souvent de semblables
* Ouvrage cité, p. 84.
? On ne doit pas regarder l’exemple cité par moi plus haut con-
cernant les dorades (cyprinus auratus ) comme une preuve contre
cette assertion. Quoiqu'il y soit dit que l’on a trouvé dans le bocal
plusieurs de ces poissons morts etperforés par des échynorhinques ;
car on ne peut pas admettre que ces poissons soient morts par
suite de cette lésion , je crois plutôt qu'ils avaient succombé, ainsi
que les échynorhinques mêmes, par le manque total d’alimens ,
ce qui met une fin naturelle à la vie dans tous les animaux. |
DE L'HOMME. 38-
perforations, je vais citer seulement quelques exem-
/
ples (car si je faisais mention de tous je remplirais
un volume) afin de mettre mes lecteurs à même de
juger quel degré de confiance ils méritent.
Gramann raconte le cas suivant: Une femme sentait
une tumeur de la grosseur d’une noix dans la région
inguinale; un chirurgien y appliqua pendant quinze
jours des émolliens ; à la fin la tumeur s’ouvrit, des
matières fecales sortirent d’abord, et un instant apres
cinq vers de forme ronde, qui furent suivis successi-
vement de beaucoup d’autres. Gramann, que l’on
avait appelé en consultation, déclara sur-le-champ
cet accident comme étant le résultat de la perforation
des intestins causée par les vers intestinaux. L'emploi
des amers produisit, dans l’espace de quatre jours, la
sortie de plus de cent vers de la longueur d’un pied,
et pour chacun d’eux la malade éprouva dans la plaie
une sensation semblable à celle d’une morsure ; néan-
moins elle fut complétement guérie dans l’espace de
trois semaines. Gramann remarque qu'il avait déjà
observé un cas analogue, mais où il ne sortit que
trois vers.
Vollgnad rapporte l'observation suivante : Une
femme qui avait déjà éprouvé des symptômes qui
avaient fait presumer la présence des vers, et dont .
elle avait en effet vomi quelques-uns, fut tout à
coup effrayée par une sensation douloureuse, qu'elle
éprouva en tendant fortement le bras en haut, pen-
dant qu’elle travaillait; il lui sembla que quelque
chose s'était détaché de l’ombilic, et s’était porté vers
2
388 SUR LES VERS INTESTINAUX
la région inguiuale. Cette femme fut obligée de garder
le lit, et elle s'apercut bientôt qu'il se formait à ce der-
nier endroit une tumeur quiaugmenta peu à peu jus-
qu'à la grosseur du poing. Les douleurs étaient con-
tinuelles et semblables à la sensation qu’on éprouve
quand on est pincé. Elle croyait aussi remarquer
d'une manière distincte que quelque chose de vivant
seremuait. La tumeur creva le troisième ou quatrième
jour, et il sortit une grande quantité d’une matière
rès-fétide dans laquelle se trouva nn ver qui res-
semblait à un lombrie (Zumbricus), d’un pied de
long, et pourvu d'une trompe. Pendant trois semaines
beaucoup de matière purulente s’Echappa de la plaie,
et la femme succomba.» Cependant je ne pense pas
que sa mort puisse être attribuée à la présence du ver.
Schelhammer tâche de réfuter l'opinion de Plater,
dont ıl a été fait mention plus haut, par l'observation
suivante : Une paysanne de quarante-six ans avait
éprouvé depuis long-temps des coliques violentes. II
se forma dans un de ses hypocondres une tumeur qui
s’enflamma et tomba en gangrene. Apres la rupture
de Ja tumeur il en sortit d'abord du pus tres-féude,
et, ensuite, c'est-à-dire dans l’espace de huit jours,
vingt-quatre ascarides plus ou moins gros. Quelques-
uns de ces vers se présentérent par la teie, d’autres,
étant ployés, se montrerent par le milieu du corps, ce
qui permit de les extraire avec quelques précautions
dans la forme qu'ils avaient. De l'huile que l’on avait
aonnee à boire à cette femme sortit peu de temps
après par l'ouverture. La plaie se cicatrisa bien une
DE L'HOMME. 389
u
premiere fois, mais elle s’ouvrit de nouveau, et lors-
que Schelhammer fit la connaissance de cette fenıme,
cet état de choses avait déjà duré dix-huit ans.
Sı Schelhammer conclut de tout cela qu’il y a cu
réellement dans ce cas-cı perforation des intestins,
personne ne pourra nier ce fait, mais il n'a pas
prouvé que cette perforation avait GLE produite par les
vers que la malade avait évacués, et la circonstance
rapportée par lui-même, que ces animaux s'étaient
présentés par le milieu du corps, prouve plütöt contre
que pour son assertion.
Tous mes lecteurs approuveront sans doute Marcus
d'avoir voulu garantir une femme malade, atteinte de
S b)
| Ja danse de Saint-Guy, du soupçon qu’onavait qu’elle
était possédée du diable; mais e’est une chose qui
restera toujours problématique, de savoir si les qua-
rante-un ascarides qu’elle avait rendus en partie avant
de mourir, et dont le reste fut trouvé dansıles intes-
| tins sphacélés, avaient été la cause de sa maladie ct
| de sa mort.
Lüdücke donne, à tort, ce me semble, à un cas
particulier qu'il cite, la dénomination de perforation
des intestins causée par des vers; car depuis plusieurs
| mois la tumeur avait déjà ereve dans la vegioningul-
pale, et ce ne fut que douze jours avant la mort de
Yindividu qu'un ver apparut dans la plaie.
M. Godot me paraît avoir commis une erreur de
meme sorte, Un abcès considérable au foie fut ou-
Vert; au huitiéme pausément on apereut dans la plaie
un ascaride qui fut suivi de quelques autres. Godot
' 390 SUR LES VERS INTESTINAUX
croit que ces vers avaient perforé l'estomac; mais il
est plus vraisemblable que c'était le N qui avait
causé cette perforation.
Hünerwolf a publié l'observation suivante sous
le titre : De ileo lethali a vermibus. Une femme de.
trente ans vomit, après avoir éprouvé de fortes coli
ques, seize ascarides fort gros, et mourut bientôt
après. Les intestins grêles étaient sphacélés et percés
à plusieurs endroits. On ne dit cependant pas dans
l'histoire Que l’on y ait trouvé des vers.
Dans le cas rapporté par Fischer‘, où un ascaride
fut trouvé dans la cavité pelvienne, mais où un autre
pendait à moitié hors du eoecum, il y avait également
inflammation des intestins, et les trous dans l'intestin
avaient été probablement causés par la gangrène dont
celte partie se trouvait déjà frappée.
Wichmann affirme en effet qu’il a souvent trouvé
des trous d’une forme ronde dans les intestins de vieil-
lards chez lesquels il ne s’était pas manifesté de traces
de vers ni pendant leur vie, ni après leur mort.
J'ai prévenu mes lecteurs dans le commencement,
que je me bornerais à leur faire connaître un petit
nombre des cas dans lesquels on a cru pouvoir at-
tribuer la mort à la perforation des intestins par les
vers; les personnes qui voudront prendre connais= |
sance de plusieurs autres cas semblables peuvent les
trouver dans les ouvrages de Lebeau, Borellus, Gi-
rard, Goekel, Heister, Marteau, Moulenq , Offred,
Schmidt, Tulpius, etc. , et j’abandonne à leur juge-
» Poen. hydatig. , p. 40.
DE L'HOMME. 391
ment à décider si c’est avec raison que l'on a regardé
les vers dans les cas cités comme ayant causé la mort.
Cependant je ne puis m'empêcher de rapporter ici les
propres expressions d’un célèbre médecin allemand ‚*
Baldinger ; elles servent de complément à l’histoire
d’une maladie rapportée dans son Journal‘, etqui ne
diffère de celles que nous venons de citer que par une
plus grande complication; les voici : « On me com-
muniqua l'histoire de cette maladie afin d’avoir mon
avis. Malgré toute l’exactitude avec laquelle elle a été
rédigée, j'ai pu seulement reconnaître que la fistule
en question descendait obliquement entre les muscles
abdominaux. Il me paraît probable que lPintestin se
trouvait dans le commencement etrangle dans Panneau
inguinal , et que le chirurgien appelé en premier lieu
aura pris unehernie pour un abces, ce qui arrive assez
sauvent, et ce dont Heister cite plusieurs exemples.
L’intestin par conséquent fut frappé de gangrene,
et des ascarides sortirent alors par l’abces, ce qui a
été déjà observé un grand nombre de fois.
Hirsch , dans ses remarques faites sur un cas rap-
porté par lui-même , et qui est semblable à ceux que
nous venons de citer, ne croit pas que les vers pro-
vinssent du canal intestinal. Voici ses propres expres-
sions : « En considérant l'amas énorme de vers qui
s'était accumulé dans cette femme, surtout à l’e-
poque de la grossesse, où leur contact avec les parois
du canal intestinal a dü être favorisé par la pres-
sion de la matrice, et ou, par Ja double ırritation
3 Neues magazin für aerzte | bd.6, st r , s. 75.
392 SUR LES VERS INTESTINAUX
des vaisseaux lymphatiques, leur activité fut augmen-
Lee, 1l paraîtra concevable que!’ absorption de la ma-
tière plastique de ces zoogénites ait pu avoir lieu par
les vaisseaux éphaititée des intestins. Lorsque la
substance absorbée par les plus fins de ces vaisseaux
arrive promptement à sa formation, elle agit aussi
d'une manière destructive sur eux, et parvient après
leur rupture dans des cavités qui différent du séjour
ordinaire des vers, c’est-à-dire hors desintestins. Les
larves de ces animaux se nourrissent, dans l'endroit
où elles se trouvent déposées, de la vapeur animale
et de l'humeur exsudée par les vaisseaux lymphati-
ques; elles parviennent bientôt, à l’aide de cette
nourriture , à se multiplier, et elles forment alors un
amas qui doit réagir d’une manière anomale sur les
parties environnantes. »
Cependant M. Hirsch n'aurait pas eu besoin d’a-
voir recours à cette explication hasardée pour démon-
ter comment les vers auraient pu arriver dans la plaie,
s’il n'avait pas mis trop d'importance à la circonstance
qu'il ne s'était pas formé à l'endroit affecté un anus ar-
uficiel, qu’ilregarde comme une suite certaine dans le
cas d’une perforation de l'intestin. Des guérisons , à la
suite de hernies étranglées compliquées de gangrène,
ne sont pas du toutimpossibles. J’ai observé moi-même
un cas semblable étant encore étudiant en médecine.
Voici le fait : Une femme à Apolda avait une hernie
qui s’étraugla un jour et tomba en gangrène; des ma-
iéres stercorales (qui cependant ne contenaient pas
ide vers), sortirent par Ja plaie. Comme cependant
DE L'HOMME. | 303
ces matières ne pouvaient s’écouler par l’anus qu'à
l’aide de lavemens, je me proposai, secondé par deux
de mes amis, de fixer l’intesuin au péritoine , ou bien
aux autres tégumens, afin de prévenir l'épanche-
ment de ces matières et de conserver la vie de cette
femme, düt-elle même garder un anus contre na-
ture. Cependant l’essai échoua, et nous ne pümes
parvenir, malgré la dilatation de l'ouverture de Ia
plaie, à saisir Y’intestin déchiré.
* Qu'arriva-t-il alors ? la nature, si puissante dans ses
effets, effectua spontanément une cicatrice, et la
femme fut rétablie sans avoir d’anus aruficiel.
Ces cas sont, à la vérité, très-rares : en voici
encore quelques autres.
Needham , médecin a North-Wolsham, a rap-
porté l’observation suivante très-remarquable : Un
enfant de treize ans, du sexe masculin, fut renversé
par une voiture qui lui passa surle corps; une grande
partie des intestins et du mésentère était sortie par le
réctum, et bientôt après la gangrène s’y déclara.
Needham enleva une longueur de cinquante-sept
pouces d’intestins sphacélés, et le malade guérit.
Borell et Marteau parlent de hernies ombilicales ,
et Goeckel et Moulenq, de hernies inguinales, où
les plaies se cicatrisèrent entierement sans laisser ni
fistule, ni anus artificiel.
Roudier rapporte aussi un cas de hernie étranglée
avec complication de sangrene; il se forma à Pendroit
. » , . . A
affecté une ouverture de laquelle sorurent dix-neuf
ascarides et toutes les matières stercorales; Pexcré-
394 SUR LES VERS INTESTINAUX
tion par l’anus avait entièrement cessé: nonobstant
le malade guérit.
Baillie fait également mention dé plusieurs exem-
ples d’anus artificiels par suite de gangrène, qui ont
été guéris.
Nous ne nous tromperons par conséquent pas, _
si nous admettons que les vers, dans l’observation
citée par Hirsch , provenaient également du canal in-
testinal, dont ils sortent en pareil cas, et qu’ils n’a-
vaient eu aucune part à sa rupture. Cependant celte
dernière assertionn’est pas généralement admise, et si
l'on ne peut pas accuser ces animaux de la perforation
des intestins, puisqu'ils ne sont pas pourvus d’or-
ganes propres à l'effectuer, on les regarde au moins
comme une cause d’etranglement de hernie.
Richter comprend les vers intestinaux parmi les
causes qui peuvent produire cette espèce de mala-
die. L’explication de la manière dont il conçoit
que cela puisse s'effectuer, s'accorde avec celle de
Wedekind; ce dernier a même publié une disserta-
tion sous le titre des étranglemens de hernies occasionés
par les vers.
Wedekind admet bien plus que l’on doit attribuer
les cas très-multipliés, et presque endémiques de her-
nies avec complication de vers dans le comté de
Diephols, où il était autrefois médecin en chef, à
cette cause, et à la manière de vivre des habitans de
ce pays. D’après cela, il cherche à démontrer avec
beaucoup de sagacité, comment les vers peuvent
produire de deux manières ces étranglemens. D'a-
DE L'HOMME. 395
bord, notamment par irritation consensuelle ( étran-
glement spasmodique), et puis par obstruction ou
compression des intestins contenus dans le sac her-
niaire. Le premier genre d’étranglement, d’après
lui, est une suite d’irritaion vermineuse. Mais
qu'est-ce que l'irritation vermineuse ? un terme
de médecine, comme beaucoup d’autres, par les-
quels on s’imagine avoir désigné quelque chose,
sans cependant pouvoir en rendre compte ni à SOI-
même ni à d’autres. Comment et de quelle manière
irritent les vers, surtout les ascarides, car ce sont
sans doute eux dontil est ici exclusivement question?
J'avoue que je ne saurais l’expliquer.
Tous les ascarides que j'ai rencontrés dans des
animaux fraîchement tués se trouvaient libres, isolés,
ordinairement enveloppés de mucosités dans l’intes-
tin, et ils étaient loin de toucher sa tunique mu-
queuse (tunica villosa). Places de cette maniere, je
ne concois pas comment ils peuvent causer une irri-
tation semblable à celle dont parle Wedekind; la sen-
sation, comme s’il rampait quelque chose dans le
corps, dont les malades se plaignent assez souvent,
est aussi illusoire que celle des femmes hystériques,
qui croyent bien des fois que la matrice se porte réel-
lement vers la gorge. |
J'ai traité depuis plus de dix ans plusieurs cen-
taines de malades tourmentés par des vers, ou qui
croyaient l'être, et j'ai toujours remarqué que ceux
qui en avaient réellement dans leur canal intestinal,
366 SUR LES VERS INTESTINAUX
se plaignaient le moins de ces sensations singulier es,
surtout lorsqu’on ne les avait pas encore fatigués de:
beaucoup de vermifuges ; mais les personnes au con-
traire qui avaient rendu un jour des vers, et dont il
ne restait probablement plus de traces depuis un long
espace de temps, ou enfin celles-auxqueiles les mé-
decins avaient mis dans la tête qu'elles en étaient in-
commodées, se plaignaient en effet que les vers les
pincaient, ls mordaient, les sucaient ou les fatiguaient
par leurs mouvemens, etc.
Quand on examine de pareils malades , ils nous di-
sent souvent qu'ils sentent les vers tantôt dans le duo-
dénum , et tantôt dans lestomae, dans le jéjunum ,
dans le rectum, dans la gorge, dans les épaules, etc.
Qui voudrait admettre qu’un ver intestinal , naturel
lement très-lent dans ses mouvemens, puisse par-
courir aussi promptement le canal intestinal, si long
et si 1ortueux ? qui pourrait encore croire, que les
mouvemens d’un tel animal, si souple, seraient sen-
us plus distinctement que, par exemple, le roulement
d’un noyau de cerises, dont plusieurs centaines par-
courent souvent le canal intestinal, sans cependant se
faire remarquer par une sensation quelconque ?
Aucune de semblables sensations morbides ne
nous autorise par conséquent à conclure la pré-
sence des vers ; il nous est seulement permis de soup-
conner une maladie vermineuse, généralement par-
lant , si toutefois les circonstances mentionnées plus
haut ont réellement lien; car, je le répète , il ya des
DE L'HOMME, 397
hommes qui ont souvent une tres-grande quantité de
vers dans le corps et qui cependant ne se plaignent
jamais d’aucune de ces sensations.
On m’objectera sans doute que ceue assertion peut
être vraie seulement dans le cas où les vers séjourne-
raient dans un canal intestinal parfaitement sain, mais
non pas dans celui qui se trouverait dans un état d'ir-
ritation contre nature. Mais alors la cause de la ma
ladie ne doit pas être directement attribuée à la pré-
sence des vers, qui existaient peut-être déjà 1c1 depuis
des années, mais bien à quelque autre chose (peut-
être aux remedes employés contre les vers) qui a pro-
duit cette irritatıon considérable du canal intestinal.
Le second genre d’étranglement de hernies, d'après
Wedekind, est celui que les vers occasionent, ou
par une obsirucuon, ou bien par une pression des
aAntestins contenus dans le sac herniaire. Ce médecin
raisonne là-dessus de la manière suivante; «les vers,
en obstruant le canal intestinal, peuvent donner lieu
au zmiserere (ou bien au vomissement de matières
stercorales), par conséquent ils peuvent bien plus
facilement produire cette maladie, quand ils se
trouvent placés dans le sac herniaire.» Mais je ré-
ponds à cela : l’antécédent de cette couclusion n’est
que présumé et nullement constaté (je renvoie mes
lecteurs aux réflexions que j'ai faites plus haut sur les
obstructions du canal intestinal causées par la pré-
sence des vers); quant à la conclusion elle-même,
elle doit être naturellement inexacte.
- Cependant Wedekind défend son opinion comme
398 SUR LES VERS INTESTINAUX
de coutume, avec beaucoup d’esprit, et il prétend
que les vers contenus dans le sac herniaire provo-
quent d’abord, par leur irritation, une contrac-
tion de l'intestin, et il ne regarde l’etranglement que
comme une suite de l’inflammation. Il tâche de prou-
ver son assertion en disant, que la douleur dans la
hernie précède toujours l'inflammation.
En admettant , même pendant un moment, la pos-
sibilité de ce fait, il me semble cependant que les an-
técédens ne sont pas établis d’une manière tout à fait
exacte ; car les ascarides, conformément à la struc-
ture de leurs organes destinés à recevoir la nourri-
ture , peuvent toutau plus s'implanter dansla tunique
muqueuse des intestins. (Jen’admets cela que comme
une chose possible, car je viens de remarqüer que je
n’ai jamais rencontré un ascaride qui fût implanté
dans cette tunique , et encore moins dans la tunique
appelée nerveuse); mais il ne me paraît nullement
probable que cela pourrait produire dans lVintestin,
supposé même qu’un, deux ou trois vers s'y trou-
vassent implantés , une constriction capable de faire
naitre un ıleus.
J’ai tropd’exemples à ma disposition pour être con-
vaincu du contraire. Les échynorhinques s’accro-
chent quelquefois par centaines sur les intestins des
poissons , des oiseaux aquatiques et même des pores,
et tellement profondément, que l’on peut reconnaître
le siége de chaque ver par une petite protubérance
sur la paroi externe de l'intestin. Dans la cigogne se
trouve un distome qui se forme des excavations très-
DE L'HOMME. 399
profondes dans les parois du canal intestinal : nous
voyons souvent dans les intestins des brochets une
quantité enorme de tricuspidaires, qui s’y implantent
également profondément : chaque endroit où un in-
dividu avait été accroché est marqué par une protu-
bérance papilliforme qui est creusée par une conca-
vité dans son milieu.
Le docteur Gelis a bien voulu me céder un jour
le cadavre d’un enfant mort rachitique et par suite
d’une carie presque générale des os, dans les intestins
duquel j'ai trouvé un tænia vivant fortement implanté
par son orifice buccal à la paroi interne de l'intestin ;
mais il n’y avait ni constriction, ni inflammation,
ni aucun autre changement morbide. I] en est tou-
jours de même pour les animaux cités plus haut,
Comment, par conséquent, les ascarides , qui sont jus-
tement les moins propres a s’accrocher, pourraient-ils
causer tant de dérangemens. N’expliquera-t-on pas le
fait rapporté par Wedekind beaucoup plus naturel-
lement en regardant la circonstance, qui, d’après
l'opinion de ce médecin, donne lieu à la fois à Ja
production des vers et à la formation des hernies,
comme la cause primitive des coliques et de l’étran-
glement ? Du reste, il me paraît qu’une hernie conte-
nant un ou plusieurs ascarides vivans devrait toujours
être plus facile à réduire qu’une autre qui nt renfer-
merait que des matières stercorales endurcies. Le ver
comprimé par les doigts que le chirurgien emploie
pour opérer le taxis, se détachera non-seulement
( chose que je suppose, mais que je n’admets pas) et
400 SUR LES VERS INTESTINAUX
levera par là la cause de l’etranglement; mais encore
il s’en ira par Je chemin par où ıl est venu. Cela fait,
la circulation libre du chyle et des matières fécales
sera retablie , si toutefois aucun autre obstacle ne s’y
oppose.
Des vers morts offriront à peu près autant d’obs-
tacles que des matières stercorales endurcies; cepen-
dant ceux-là, à cause de leur superficie lisse et de
leur structure cylindrique „qui se termine. en cône
aux deux extrémités, seront toujours plus faciles à
éloigner que celles-c1.
Mais à quoi bon poursuivre plus long-temps la
défense de ces animaux : tout homme qui a la ceru-
tude d’en avoir désire d’en étre débarrassé ; c’est pour-
quoi nous avons indiqué dans le chapitre suivant les
moyens thérapeutiques propres à les combattre.
AA US LU LULU TUE LEUR 0010028 4 7
Unna
CHAPITRE SIXIEME.
« sir: r « x
Du traitement hygienique ettherapeutique contre les vers.
intestinaux.
SECTION I. Des remèdes en général.
L'espèce humaine est sujette à peu de maladies pour
lesquelles on ait proposé autant de remèdes que pour
les affections vermineuses. Cette observation en don-
nera sans. doute, une idee très-défavorable en réflé-
DE L'HOMME. :- hot
chissant que ce sont en général les maladies les plus
incurables, telles que la phthisie pulmonaire, les
scrofules, etc., contre lesquelles on cherche encore
. \
‚tous les jours des remèdes plus efficaces que ceux que
lon connaissait et que l’on avait d’abord regardés
comme infaillibles, tandis que le traitement de la pé-
ripneumonie, par exemple, est aussi simple dans le
dix-neuvieme siècle qu’il Petait du temps d’Hippo-
crate. Ce n’est cependant pas l’opiniâtreté avec la=
quelle les vers résistent aux remèdes dont l'expérience
a sanctionné l'efficacité, qui est la canse principale
que ces remèdes ont été rejetés pour être remplacés
par d’autres, qui souvent même ne jouissaient pas de
la propriété vermifuge; cela tient à plusieurs autres
raisons.
D’abord avec l'emploi de ces remèdes on n’a pas
eu égard à la cause déterminante de la formation des
vers, et par conséquent à son éloignement, en sorte
que toutes les fois ou, après l'emploi efficace d’un
médicament, les vers ont reparu, on en a substitué
un autre; ajoutons que l’usage du premier a pu aussi
n'être pas continué assez long-temps. C’est ainsi que
Dianière, dans un cas qu’il rapporte, où tout semblait
indiquer lexistence de vers intestinaux, et où des
vermifuges administrés deux ou trois fois conjointe-
ment avec des purgatifs , n'avaient déterminé la sortie
d'aucun de ces animaux, ayant trouvé à l’ouverture
du corps un grand nombre d’ascarides réunis par pe-
lotons dans différens endroits du canal intestinal, en
conclut un système particulier pour le traitement de
26
402 SUR LES. VERS INTESTINAUX
l'affecuon vermineuse. L'administration des vermi=
fuges doit être, suivant lui, continuée long-temps et
avoir lieu deux ou trois fois par jour , immédiatement
avant ou après le repas, afin, dit-il,«que les vers affa-
mes se jettent sur ces substances avec plus d’avidite.
Il faut leur associer des matières sucrées et propres
à rendre le poison plus agréable; enfin le traitement
doit être termine, lorsque toutefois rien ne dénote
plus la présence des vers, par l'emploi des purgaufs ;
car dans le cas contraire on doit recommencer le
même système de traitement qui, abstraction faite de
l’idée d’affamer les vers et d’Edulcorerles vermifuges,
n’est pas à dédaigner.
Une autre raison pour laquelle on a quelquefois
eu recours à de nouveaux vermifuges, c’est que leur
emploi est souvent déterminé par l'existence de quel-
ques symptômes généraux qui ont pu induire en er-
reur, comme nous l'avons démontré plus haut, et
sans avoir des preuves. certaines de l'existence des
vers, ou bien qu’apres l'évacuation de quelques-uns
de ces animaux on a continué de leur attribuer des
accidens dont la cause réelle aurait dû être cherchée
ailleurs. | ;
Les deux observations que j'ai rapportées plus
haut, savoir l’histoire de la maladie de la femme
de Jena et celle du prêtre de la Moravie viennent à
l'appui de ce que je vieus de dire.
I est aussi arrivé que l’on a attribué la propriété
vermifuge à des substances qui ne l’out réeilement
pas, au moins d’une manière directe. Ainsi, par
DE L'HOMME. 403
exemple, si pendant le traitement d’une maladie
quelconque, le malade a rendu des vers, il est sou-
vent arrivé que l’on a attribué cette évacuation à Ja
substance médicamenteuse qui venait d’être employée
et qui dès-lors a été vantée comme un vermifuge in-
faillible ; mais dans ce cas et dans d’autres semblables ”
les vers ont pu être évacués accidentellement ‚comme
cela arrive souvent; ils ont pu être ne par un
effet même de la maladie, ce qui donne l’ explication
du grand nombre de fievres épidémiques dites ver-
mineuses, dans des pays où les affections de ce genre
sont véritablement endémiques, et où les vers dis-
paraissent naturellement par la corruption des hu-
meurs contenues dans Je canal intestinal; enfin ce
médicament a pu faire cesser entièrement à disposi-
tion inorbide {opportunitas ) qui avait favorisé la pro-
duction des vers; ceux qui se trouvaient alors dans le
canal intestinal ont été rendus, et il ne s’en produisit
plus d’antres. Ainsi, par exemple, Vandævern a
placé, page 329, l'écorce de simarouba parmi les
vermifuges, parce que Hempel, qui l'avait employée
contre une diarrhée chez un malade attaqué depuis
quinze jours de la petite vérole, avait observé une
évacuation considérable d’ascarides. |
. Ona donc pu croire que les derniers remèdes em-
ployés dans un traitement quelconque fussent de ve-
ritables vermifuges ; cependant il n’en est pas tout à
fait ainsi, car 1l faut faire une distinction importante
entre les remèdes qui produisent l'évacuation des vers
26.
hof SUR LES VERS INTESTINAUX
existant dans le canal intestinal, et ceux qui empe-
chent la formation de nouveaux vers, parce qu'ils
font cesser la cause essentielle et primitive de leur
reproduction. À
Un médecin, dont le nom m'est échappé, demeu-
rant à Brünn, m'a raconté qu’il avait administré plu-
sieurs fois, pendant un assez long espace de temps,
des vermifuges et des purgatifs, sans cependant pou-
voir effectuer une évacuation de vers qui n’eut lieu
que lorsqu'il eut ordonné le fer et d’autres médica-
mens fortifians.
Cependant je me croirais aussi peu engagé par
cette observation à commencer le traitement d’une
affection vermineuse avec le fer ou autres remèdes
semblables, dans un cas où le canal intestinal se trou-
verait chargé de glaires et de vers, qu’à employer
dans le commencement d’une inflammation des pou-
mons le polygala sénega on le camphre.
En soumettant les vers intestinaux hors du canal
intestinal à l’action de différens remèdes, on s’ima-
gina que ce serait le meilleur moyen de connaître
ceux qui causeraiert la mort la plus subite à ces ani-
maux. Redi fut le premier qui fit des expériences de
cette nature ; elles ont été répétées par Baglivi, An-
dry, Torti, Goulet, Aruemann et Chabert; cepen-
dant toutes ces expériences n’dtaient pas propres à
conduire à un résultat certain; car il faut considérer
que la plus grande partie des vers intestinaux meu-
rent tres-vite quand ils se trouvent éloignés du lieu
a
DE L'HOMME. 405
de leur séjour naturel, quoiqu'il y ait quelques
exceptions , le spiropiere' (spiroptera cystidicola ,
Bud.) qui provient de la vessie abdominale de la
. truite se conservant vivant dans l’eau froide pendant
huit jours au moins. Exposés à l'influence de l'air at-
mosphérique, les vers intestinaux meurent tous sans
exception très-promptement ‚et ils se contractent.
Les expériences que l’on fait sur les vers intesti-
naux de l’homme sont encore moins exactes, par la
raison que l’on ne peut employer que des vers rendus
avec les matières stercorales, et par conséquent déjà
affaiblis, ou bien parce qu’on se sert de ceux que l’on
a recucillis dans I. s cadavres. Dans le dernier cas on
peut, généralement parlant, présumer que leshommes
avaient succombé par suite d’une maladie qui a éga-
lement pu agir sur les vers d’une manière nuisible ;
comme d’ailleurs nous pouvons rarement ouvrir des
cadavres avantque vingt-quatre heures ne soient écou-
lées, à compter du moment de la mort, il est alors
permis d'admettre que les vers commençaient aussi à
perdre la vie.
Enfin il faut considérer que les remedes adminis-
trés à intérieur passeni d’abord ‚ avant d’être en con-
tact avec les vers, par l'estomac, où ils subissent de
grands changemens, de manière que ceux qui sont
contenus dans l’intesuin ne sont jamais directement
soumis à leur iüfluence, ce qui au contraire a lieu
quand on emploie les remèdes sur ces animaux hors
du canal intesunal.
’ Nouvear genre créé par M. Rudolphi.
+
406 SUR LES VERS INTESTINAUX
Ces remarques, au premier abord de peu d’ımpor-
tance, méritent cependant d’être prises en considé-
ration, quand on veut faire des expériences de ce
genre; du reste celles de Redi et d’Arnemann nous
ont appris que les huiles grasses n’agissent pas sur les
vers intestinaux d’une manière aussi nuisible que lon
s'était cru en droit d'admettre , d’après l'influence dé-
létère que ces huiles ont sur les insectes, et surtout
sur leurs larves. Ce fait est facile à expliquer : l'huile
bouche, chez les insectes, les organes respiratoires,
ce qui n'a pas lieu pour les vers intestinaux, qui
n’ont pas ces organes. 1] résulte encore des expérien-
ces d’Arnemann que l'huile dericin, si vantée comme
agissant d’une manière délétère contre le tænia, n’a-
git réellement que comme un purgatif, en même
temps qu’elle rend le canal intestinal glissant; car
des ascarides, provenant des cochons, mis dans cette
huile, ontconservé la vie pendant trente-six heures, et
des ascarides provenant de l’homme, depuis quarante-
quatre jusqu’à quarante-huit heures. Dans aucune
autre huile, à l'exception de l’huile d'amandes dou-
ces’, les vers w’ont vécu aussi long-temps.
Les expériences ont appris que la manière la plus
prompte et la plus sûre de causer la mort aux vers in-
testinaux consiste à les soumettre à Pinfluence du
froid, de l’esprit-de-vin ou d’autres liqueurs spiri-
tueuses et des huiles empyreumatiques.
1 Je n’aı pas lu l’ouvrage d’Arnemann Mona de olcis un-
guinosis, Gœtiing., 1789, sect. IV, et j'ai tiré ce que je viens de
rapporter de Rudolphi, Entoz., vol. I, p. 487 et 488.
DE L'HOMME. 407
L’emploi du froid et des liqueurs spiritueuses sur
les hommes offre souvent, comme on peut bien se
l'imagiuer, beaucoup de difficultés, mais il n’en est
pas de même de celui des huiles empyreumatiques ;
on peut en faire usage très-facilement , et leur utilité
a été déjà souvent constatée par l'expérience, comme
nous le verrons par la suite.
Prenons maintenant en considération les remèdes
que l’on a essiyés ou employés contre les vers sur
l’homme vivant. On peut, ce me semble, les diviser
d’après leur mode d’action 1°. mécanique, 2°. spéci-
fique , 3°. purgatif, 4°. forufiant.
I. Des remèdes qui agissent sur les vers d'une manière
mécanique.
Le zınc, tant sous forme de limaille qu’en grains,
occupe le premier rang parmi ces médicamens. Il a
été d’abord recommandé par Alston, et, plus tard,
par Pallas’ et Bloch‘.
Le zinc doit être pur, c’est-à-dire débarrassé de
tout alliage de plomb et d’arsenice ; ıl agit d’une ma-
nière purement mécanique; cependant ıl se montre
beaucoup plus actif contre les vers, sous forme de li-
maille, que sous celle de grains; mais la limaille ir-
rite trop le canal intestinal, c’est ponrquoi Pallas a
préféré l'usage du zinc en grains. |
Nous ferons encore une fois mention de ce médi-
2 Nord. beitr., st. 55.
? Preisschrift , s. 56.
u
408 SUR LES VERS INTESTINAUX
cament quand nous indiquerons les méthodes de
traitement spécifiques recommandées par divers au-
teurs contre les cestoïdes. «
Le STIZOLOBIUM, appelé communément dolichos
pruriens, a été beaucoup vanté par Chamberlaine , et
M. Rudolphi a remarqué que les huit espèces de ce
genre de plante sont douées des mêmes propriétés.
L’on se sert seulement des petits poils qui se
trouvent à lextérieur des gousses dans lesquelles les
graines sont contenues. Ces poils appliqués sur la
peau de l’homme occasionent une démangeaison in-
supportable, cependant dans les Deux-Indes lon
s'en sert déjà depuis très-long-temps comme d'un
vermifuge , sans que l’on ait vu en résulter le moindre
accident. Toutefois , on a soin de donner ce re-
mede dans un véhicule mucilagineux, ou bien dans
un sirop épais, qui, conjointement avec les mu-
cosités de l’estomac et des intestins, mitige singu-
lierement l’action mécanique de ces poils. Ce se-
rait A tort cependant, si l’on croyait que les vers
vivant dans ces mucosités sont garantis également
de l’action mécanique de ce remède, puisque, d’a-
pres les nombreuses expériences de Chamberlaine
et l’assertion de beaucoup d’autres médecins, il fait
évacuer des vers toutes les fois qu'il en existe dans le
canal intestinal. Cet effet avantageux s’étend surtout
aux ascarides; car, d’après ce qu’en dit Chamber-
laine, il ne s’observe pas d’une manière aussi satifai-
sante, lorsqu'il s’agit de combattre le tænia.
C’est de ces poils, dont il n’indique point la pro-
EE >
|
DE L'HOMME. 409
poruon, qu'il fait faire, avec suflisante quantité de
sirop commun , un électuaire dont il ordonne matin
et soir une cuillerée à café aux enfans de six à buit
ans, une petite cuillerée aux enfans de huit à quatorze
ans, et une cuillerée à bouche à tous les individus
au-dessus de quatorze ans. Ce médecin administre
en outre tous les trois ou quatre jours un purgatif.
Palmer a également vanté ce remède, notamment
comme agissant d’une maniere purement mécanique ;
quant à moi je n'ai aucune expérience personnelle à
cet égard, attendu que les autres vermifuges m'ont
toujours paru suflisans.
Cuargon PuLVÉRISÉ. Suivant Pallas' cette subs-
tance est employée en Islande comme vermifuge, et
il dit avoir opéré par ce moyen l'expulsion d'un long
morceau de tænia.
Les carottes jaunes, que l’on räpe, et que l’on mange
le matin à jeun, constituent un autre vermifuge dont
on fait usage dans plusieurs contrées d'Allemagne.
Il est hors.de doute que les remèdes qui n’agisseut
que mécaniquementirritent les vers, et les disposent
à quitter le corps dans lequel ils sont renfermés; c’est
ainsi que l’on trouve souvent des vers dans le canal
intestinal des oiseaux, qui en été se nourrissent d'in-
sectes, au lieu qu’en automne, où ces oiseaux se
nourrissent de graines mêlées de sable , leur canal in-
testinal ne présente aucune trace de vers. Cette cir-
constance semble faire croire que l’on pourrait encore
employer comme vermifuges agissant d'une maniere
“ N.n., beitr., 1, s. 64.
N
410 SUR LES VERS INTESTINAUX
mécanique , une foule d’autres substances , dont
cependant il faut s'abstenir, à cause de l'effet nui-
sible qu'elles pourraient produire sur la santé du
malade. Toutefois, je dois faire remarquer qu'il.
n’est nullement nécessaire de recourir à l'usage de
substances dont l'effet se borne à éloigner le produit
de la maladie en laissant subsister la maladie elle-
même. Quant à moi, je n'ai jamais eu recours à de
tels moyens malgré le grand nombre d'individus
affectés de vers que j'ai eus à traitér dans l'espace de
plus de dix ans.
ll. Des remèdes qui agissent d'une manière spécifique
contre les vers intestinaux.
Eau FROIDE. Rosenstein et Pallas ont recommandé
emploi de ce liquide. ll est certain que l'impression
du froid agit d'une manière très-nuisible, et même
délétère, sur les vers intestinaux. C’est pourquoi,
s’il y avait possibilité de faire arriver l'eau à une tem-
pérature très-basse jusqu'au séjour des vers, ce
moyen devrait être regardé comme étant à la fois
très-simple et très-cfhcace pour opérer leur expulsion ;
mais il est à remarquer que ces animaux sejournent
chez l'homme dans les intestins, et non pas dans l’es-
tomac, et quand même on boirait Peau à une tempé-
rature tres-basse , elle se réchaufferait déjà dans cet
organe, ein’arriverait par conséquent pas assez froide
jusqu'au séjour du ver. Cependant comme il est cons-
‘talé par l'expérience que l’eau prise à froid, et sur-
DE L'HOMME. his
tout en grande quantité, a opéré bien souvent, non-
seulement lévacuation des ascarıdes, mois encore
|
celle des tænias, M. Rudolphi s’est Frame d’expli-
per, bien ingénieusement à la vérité, de quelle
manicre elle agit. 1 croit que ! a a faite par
ce kanide sur l'estomac s'étend jusqu’aux intestins;
1l s’ imagine en outre que l'eflet de cette impression
doit consister en une espece de commotion violente.
| Puis il remarque que les vers qui se trouvent pour
ainsi dire incndes par F Lu: d’une grande quantité
d’eau , doivent facilement être entraînés avec elle, par
a raison que ces animaux, mis dans l'eau, en absor-
bent une plus ou moins grande quantité, ce qui les
gonfle , et les rend presque roides; et que réduits à
cet état, ils ne peuvent plus résister à l'affluence de
ce SAS
L'eau salde agit encore d’une manière plus efficace.
Pallas® raconte, qu'il y a à St.-Chat, petit village
pres de Londres, et pas loin de Sadlerswell, un
hôtel et un jardin publics, dans lesquels il se trouve
une source uommée Battelbridge- Wells, conteuant
une eau chargée d’un peu de sulfate de soude. Cette
eau est regardée comme un remède très-efficace con-
tre le ver solitaire. L’on fait voir dans cet hôtel une
l collection de plus de cinquante bocaux remplis de
tænias de différentes espèces, surtout provenant de
l'espèce large et membraneuse, qui onvété rendus en
| entier par l'usage de cette eau.
Cependant l'histoire de la maladie d’une dame,
je EN. n. beitr. , I, s. 64.
FE
412 ‚SUR LES VERS INTESTINAUX
rapportée par Rosenstein, prouve que les eaux miné-
rales froides ne doivent pas être regardées comme un
remède souverain contre les cestoides; car quoi-
que cette dame eüt déja fait usage de l’eau de la
source, dont il vient d’être parlé, pendant plusieurs
années consécutives , elle rendait toujours des mor- |
ceaux de tænia.
Van Swieten ' croit que des lavemens d’eau froide
doivent être tres-utiles contre les oxyures , et Loef-
fler conseille d’avaler de petits morceaux de glace,
dans le cas où l’on supposerait des vers dans l’estomac.
VALERIANE (valeriana sylvestris ). La racine pulve- |
risée de cette planie doit être regardée comme la
substance la plus active contenue dans l’électuaire
vermifuge de Stoerk , dont voici la formule: :
À. salis polychrest., pulv. rad. jalapp, , valerian. sylv.,
de chaque 3j; oxymel scillit., Zi, m. s. Les adultes
en prendront une demi-once quatre fois par jour, et
les enfans depuis un jusqu’à deux gros.
Dans le mode de traitement proposé par Lagene
comme infaillible contre les cestoïdes, c’est aussi la |
valériane qui est le médicament principal, car le
reste n’est composé que de purgatifs.
Tous les médecins connzissent les grandes vertus
de cette plante; elle mérite d’être employée surtout
dans les maladies vermineuses ; en effet elle agit d’a-
bord , à cause de son odeur spécifique, comme un
bon vermifuge, et ensuite comme combattant avec
* Comment. , t. XVI! , $ 1371.
2 Ann. med. , 1, p. 103, 162, 228 et 386.
DE L’ECMME. 413
beaucoup d'efficacité les symptômes nerveux qui ac-
compagnent ordinairement la présence des vers.
= Oùcnon ( allium cepa) et A1L ( allium sativum). Ces
deux substances sont employées depuis long-temps
contre les vers.
Rosenstein a obtenu, même dans deux cas, l’éva-
‘euation d’un tænia par l’usage d’une gousse d’ail prise
ajeun et legerement mâchée. Ce médecin observe ce-
pendant que cette substance n’agit contre les vers que
dans le cas où l’on n’en aurait pas mangé habituelle-
‚ment auparavant.
| Cranz a au contraire attribué la grande quantité de
vers qu'il a trouvés dans les intestins d’un homme, à
l'usage immodéré que cet individu avait fait de l'ail
pendant sa vie. Cependant Émbard a justement ré-
futé cette assertion. On administre aussi souvent du
lit dans lequel on a fait bouillir de l'ail, comme un
reméde contre les vers.
Embard rapporte que Binninger l'a également
employé dans ce but sur un homme qui était, pour
ainsi dire, à l’agonie , et qui, après avoir rendu des
‚vers, se trouva soulagé.
Baglivi' a connu un jeune homme de vingt ans, qui
était chargé un matin de couper de l'ail; tout à coup
odeur de cette substance l’incommoda tellement,
qu'il manqua d’étouffer; quelques minutes après il |
commença à vomir d’une manière violente, et rendit
un ver rond, de trente aunes de longueur, et qui
* était contourné en forme de peloton.
! Ouvrage cité, p. 696.
414 SUR LES VERS INTESTINAUX
Dans ma jeunesse j'ai été également obligé de boire
pendant long-temps du lait chargé d’ail, mais la rai- |
son pour laquelle ce remède ne me débarrassa pas de
mes vers, doit être attribuéeà la manière irrégulière
dont je Vai pris; en effet, au lieu de le boire, je me suis
permis bien souvent de le jeter, ayant toujours eu
une repngnance extraordinaire pour lail. Je fais
mention de ce fait seulementafin que l’on ne regarde
pas tout de suite un bon vermifuge comme inefli-
cace, quand il n’opère pas l'évacuation de quelques
vers, et afin que l’on s’informe d’abord si le malade
l'a regulierement pris ; car les ordonnances que nous
prescrivons contre les vers sont en général suivies
d'une manière tres-inexacte : cela dérive ordinaires
ment de ce que les vermifuges ont presque toujours
un très-mauvais goüt, et de ce que les malades, qui |
ne croyent pas leur vie en danger, se permettent d’au-
tant plus volontiers quelques neglıgences. |
> Lorsque je me fus décidé à employer l'huile em-
pyreumatique de -Chabert contre le tzenia, je prépas |
rai ce médicament moi-même, et je le distribuä |
gratis. Plusieurs de mes malades n’en ressentirent |
ancun effet, par la raison toute simple qu’ils ne Pa= |
vaient pas pris; cependant tout cela s'explique assez |
facilement. D'abord les remèdes qui ne coûtent rien |
n'inspirent pas beaucoup de confiance à certaines!
personnes, el puis elles se disent: si nous avouons
‘que le remède a manqué son effet, le médecin nous en,
donnera bien unautre qui sera peut-être d’un meil-
leur goût. Depuis que ce sont les apothicaires qui
DE L'HOMME. 415
fournissent l'huile de Chabert à mes malades, et que
beaucoup d’entre eux ne veulent pas avoir inutile-
ment dépensé leur argent, ils la prennent régulière
ment et ils guérissent. Mon ami le docteur Albert
doit se rappeler encore qu’ilatrouve un jour, lors de
5 re a ‚ . . 1 . =
son séjour à Jena, trois pots remplis d’électuaire de
Stoerk sous le lit d’un jeune homme qui était soisné
aux frais de la clinique. Je demande pirdon à mes
lecteurs pour cette digression, mais l’occaßion en était
bien naturelle.
Le SEEN tonTRA ( artemisia judaica, L., semen
santonici, semen cinæ), et les graines ou plutôt les
fleurs bien développées de la ranaısıE (tanacetum
vulgare).
Le semen contraesteonnu depuis long-temps comme
un remède contre les vers, surtout contre les asca-
rides ; cependant il peut très-bien être remplacé par
| Ja tanaisic.
Avant d’administrer l'une ou l’autre de ces plantes,
il faut être sûr de leur bonne qualité ; en effet, quand
on les prescrit telles qu’elles se trouvent ordinaire-
ment dans les pharmacies, c’est-à-dire tres-finement
pulvérisées, peut-être conservées depuis plusieurs
mois, et par conséquent dépourvues de leur odeur
spécifique, on en obtiendra bien pew d'effet.
J : > ; ER
en al pris, etant enfant, une grande quantıic,
| mais aussi je ne fus pas débarrassé de mes vers. J’en
|
.:
.
:
|
fus encore incommodé à l’âge de treize ou quatorze
ans, et on aitribua la päleur de mon teint à la pré-
sence de ces animaux ; cela m’engagea à les combattre
416 SUR LES VERS INTESTINAUX
de nouveau, et en effet j'avalai, tous les matins à
jeun , autant que le creux de ma main en pouvait con»
tenir, de semen contra , après l'avoir légèrement mä-
ché. L'effet a répondu à mon attente, je fus entiere-
. ment et assez promptement guéri, sans éprouver de
rechute. Il est cependant également possible que le
changement dans ma manière de vivre ou bien la pé-
riode de la vie à laquelle j’arrivais alors aient contri-,
bué à ma guérison. En conséquence de cela, je ne
prescris le semen contra jamais autrement que gros-
sierement pulvérisé, et je présume qu'il agit sous
cette forme à la fois d’une manière spécifique et me-
canique.
Je ne crois pas que les graines confites de celte
plante ( confectio semen-cinæ ) soient tres-eflicaces :
prises à fortes doses, elles agissent alors, dans mon
opinion, plutôt comme un remède mécanique que
spécifique; car la chaleur à laquelle elles sont sou-
mises dans la chaudière pour les enduire de sucre,
doit leur ôter leur odeur particulière, et en outre
après que le sucre s’est dissous, la graine restée en- |
tière se comportera comme telle, et sortira de même
entière par l'anus.
La mousse DE Corse (helminthocorthon) appelée
conferva helminthocorthos ou corallina corsicana ; c'est
une espèce de conferve provenant de la Corse.
D'après Sumeire un Grec nommé Stephanopoli,
fut le premier qui apporta ce remède de la Corse, et
il le publia en 1777 dans un mémoire. Depuis, la
mousse de Corse, connue dans le pays de ce nom
DE L'HOMME. 417
depuis tres-long-temps comme un bon remède contre
les vers et surtout contre les ascarides, est devenu le
remède. favori des médecins francais. On peut l’ad-
ministrer en poudre à la dose d’un scrupule jus-
qu’à un demi-gros ; mais on la donne plus volontiers
en decoction à peu pres à la dose d’une demi-once,
bouillie dans suffisante quantité d’eau, jusqu’à ré-
duction de quatre onces, et que l’on fait prendre
dans la journée. On peut aussi l’administrer sous
forme de gelée. L'efficacité de cette plante dépend
peut-être du sel marin dont elle est imprégnée.
CHENOPODIUM ANTHELMINTICUM. Les semences
de cette plante sont, d’après ce que l’on dit, souvent
employées en À mérique contre les ascarides'.
ÜORTEX ANGELINE. L’on fait bouillir ane once de
cette écorce dans trois livres d’eau, jusqu’a reduction
d’une livre, et les malades en prennent une à deux
onces ious les matins. On prétend que ce remède
cause des coliques, mais provoque l'évacuation des
ver s
GRANA TIGLIE (croton uoglium ou ricinoides ). Ces
graines devraient plutôt être placées parmi les purga-
ufs que parmi les vermifuges proprement diis®.
SPIGELIA ANTHELMIA et SPIGELIA MARILANDICA.
L'on se sert depuis long-temps en Amérique de la
première de ces plantes ; Bergius regarde la seconde
comme beaucoup plus efficace : l’une et l’autre ont
: Brera, Vorlesung, s. 97.
2 Même ouvrage, s. 03.
3 Vandæœvern, s. 299.
27
418 SUR LES VERS INTESTINAUX
une propriété narcotique, et; prises à grandes doses,
elles causent des vertiges, troublent la vue et excitent
des mouvemens convulsifs dans le globe de l'œil,
c’est pourquoi nous devons être circonspects dans leur
emploi.
Van Swieten les a regardées comme trèés-veni-
meuses, et rapporte que les Français appellent le
spigelia Brainvilliers ; nem d'une empoisonneuse très=
connue. Ce médecin a remarqué que ce remède cause
des évacuations très-fortes par haut et par bas, et
qu'il fait rendre les vers d’une manière certaine.
D’après mon idée, on pourrait très-bien se passer
de cette plante. .
Non-seulement les feuilles , mais encore les racines
de la spigelia sont employées tant sous forme de
poudre, à la dose de dix grains pour les enfans, que
sous celle d’infusion à la dose d’un demi-gros.
Browne conseille de faire bouillir deux poignées
de cette plante dans deux livres d’eau, jusqu’à ré-
duction de la moitié; il y fait ajouter suflisante quan-
té de jus de citron et de sucre pour rendre la décoc-
tion plus agréable au goût. Les malades doivent en
prendre deux; trois, jusqu’à quatre onces, toutes les
six à douze heures, pendant trois jours consecuufs;
Browne ordonne ensuite un purgatif.
Je ne sais pas pourquoi ce médecin administre ce
dernier, puisque, d’après Van Swieten, la spigelia
jouit elle-même de vertus purgalives itres-fortes.
Rosenstein‘ recommande également ce remede;
T4 dé,
: Ouvrage cité , p- 564.
DE L'HCMME. kıg
quant à moi je n’ai pas eu occasion de Pemployer.
GEOFFREA SURINAMENSIS. On emploie l'écorce de
cet arbre.
Bondt, Eggert et Schwartze ont publié des disser=
tations sur sa propriété vermifuge.
Je ne possède que la dissertation du dernier, que
je dois à la bonté de M. Osiander : les observations
qu'elle renferme concernant l'évacuation du tænia
opérée par cette écorce, ne me paraissent pas suffi
santes ; Schwartze l’ordonne de la manière suivante :
R. Pulv. gross. cort. geoff. sur. , une. ij, infund. ag.
Font. comm., Nbr. 1j, spir. vin. rect., unc. iv; stet. vase
clauso in digest. per sex dies ; dein coque lent igne donec
post colaturam remaneat libr.]. A prendre pendant
deux jours à jeun deux cuillerées toutes les heures,
pendant trois heures consécutives; le troisième jour
on doit boire le reste par verres, et le quatrième on
se purge avec du calomélas et du jalap.
Cévanirre (semen sabadilli.) Les semences, y
compris les capsules de cette plante pulvérisées, sont
employées depuis trés-long-temps contre les poux:
Seeliger a administré ces semences avec succés
contre le tænia, à la dose d’un demi-gros par jour ,
avec addition d’une conserve convenable et de sufi—
sante quantité de miel pour en former un bol, et tous
les einq jours il faisait interrompre l'emploi de cette
substance par un drastique.
Comme les graines de cévadille ont elles-mêmes la
propriété drastique, il faut les employer avec une
grande circonspecuon , et 1] me semble qu'il ne fau-
om
2 ©
d
420 SUR LES VERS INTESTINAUX
drait pas en donner aux enfans plus de trois ou quatre
grains à la fois.
Ce remede a été également recommandé en lave-
ment contre les oxyures; mais même employé de certe
manière, il cause des nausées et des vomissemens.
Ceux qui désirent avoir des renseignemens plus
étendus sur l'emploi de ce médicament, doivent lire
l'ouvrage de Schmucker :.
JucLans REGI1A. On ordonne le brou de noix non
mûres en infusion, ou bien on en prépare un ex-
trait, que l’on fait prendre dissous dans une eau aro-
malique.
Hippocrate et Dioscoride avaient déjà remarqué
que l'usage de ce remède agissait sur le tænia; Andry
l'a surtout beaucoup recommandé.
Rosenstein? conseille de faire dissoudre deux gros
de l'extrait de cette substance dans une demi-once
d’eau de canelle et d'en donner cinquante gouttes
pendant six jours aux enfans de deux ou trois ans.
Il les purge ensuite, du sixième au huitième jour,
avec suffisante quantité de pilules mercurielles.
Assı retına ( /crula asa fetida). Ce remède est
ires en usage contre les vers, probablement parce
qu'il sent mauvais. Je l'ai vu souvent employé sans
succès contre le tænia. Mellin?, cependant, rapporte
qu’il s’est montré efficace contre ce ver.
On administre ordinairement J’assa fœuda sous
ı Vermischte chir. schrift. Bd. 111.
2 Ouvrage cité, p. 236.
3 Materia medica , s. 90.
RE
DE L'HOMME. kan
forme de pilules. Rosenstein en fit préparer du poids
d’un grain, et en donna cinq à un enfant toutes les
trois ou quatre heures pendant deux joursconsécutifs,
et le troisième jour il le purgea avec suffisante quan-
une de rhubarbe.
D’autres médecins prescrivent lassa fœtida con-
jointement avec des purgatifs. Leclerc l'employait
dissous dans du vinaigre ou dans l’eau.
Campure ( camphora ). Baldinger, Leclerc, Hirs-
chel, Mœbius, de Pauliz, Prange , Zacharias Vogel,
Wedel vantent beaucoup les vertus vermifuges de
ce remède.
D’après Brera * , le célèbre Moscati préfère en ge-
neral le camphre à tous les autres vermifuges, sur
tout quand il s’agit de faire évacuer des ascarides.
Rosenstein? s'exprime sur ce remède de la ma-
niere suivante : « Comme les vers ne peuvent pas sup-
porter le camphre, et que ce remède, avec addition
de vinaigre , est très-eflicace contre les fièvres mali-
gnes, la potion suivante peut être employée avec
avantage dans ces affections.
«Pr.camphre, un gros ; esprit-de-vin; quinze gout-
tes; mêlez, broyez, et ajoutez vinaigre d’une bonne
qualité, cinq onces ; sucre en poudre, une demi-once ;
melez avec soin. À prendre une cuillerée à bouche
toutes les heures ou toutes les deux heures °. »
ı Vorlesungen, s. 99-
? Ouvrage cité, p. 971.
3 Je ne crois pas que beaucoup de praticiens se décident à
mettre en usage à la leitre l’ordannance de Rosenstein. Une: si
422 SUR LES VERS INTESTINAUX
Cependant Arnemann présume'que l'évacuation
des vers dans le cas des fièvres malignes doit être at-
tribuée plutôt aux accès de ces fièvres qu’à l'usage du
camphre.
Fouckre MALE ( polypodium filix mas.). Galien' et
Pline? connaissaient déjà les vertus vermifuges de
cette plante , qui est encore actuellement employée,
et qui entre dans presque toutes les compositions
contre les cestoïdes. C’est en effet un excellent re-
mede contre le bothriocéphale, mais non pas contre
le véritable tænia; cartout en provoquant l’evacua-
tion de quelques morceaux de ce dernier, elle ne
cause pas sa destruction, et on apercoit ordivaire-
ment de nouvelles traces de ce ver trois mois après.
Cependant on peut administrer la fougere comme
remède indicateur contre le tænia, dans le cas où
l'on n’a pas des preuves évidentes de sa présence,
et où l’on voudrait acquérir une certitude sur ce
point. Dans ce but je fais prendre au malade, dans
la matinée, à jeun, deux ou trois gros de la racine
pulverisde , et quelques heures aprés un léger purga-
tif, n'importe lequel, mais on doit avoir égard aux
deux circonstances suivantes :
1°. 11 faut que la racine de fougere soit saine , que
Von ait coupé la partie inférieure trop vieille et la
grande quantité de vinaigre , tel qu’on le trouve à Paris, par
exemple, causerait sans doute de violentes coliques. (Note du
traducteur.)
ı De simplic. medicam. facult., Gb. VIH, p. 512.
s Lib. XXVIX, cap. IX, p. 490.
DE L'HOMME. 423
partie supérieure encore verte. Il faut, en outre , que
l’on enlève l'écorce avant de la piler, et que l'on
n'emploie pour l'usage interne que de la fougère frai-
chement pulvérisée.
2°. L'expérience peut facilemeut tromper, si peu
de temps auparavant le malade avait rendu spontané
ment , ou bien après l’usage de vermifuges , plusieurs
aunes de tænia pourvues de la tête ou seulement d’ar-
ticulations voisines de cette dernière. Dans le cas où
les intestins n'auraient contenu qu’un seul ver de cette
espèce , le malade n’en rendra pas même de traces, et
cependant il est possible qu'il évacue de nouveau
spontanément quelques articulations de tænia deux
ou trois semaines après. La raison en est facile à
concevoir; mais si l’on ne trouve pas, pendant deux
mois ou plus, des traces de ce ver dans les matières
stercorales que le malade rend journellement, et s'il
éprouve , après cet espace de temps quelque nou-
velle incommodité qu'il pourrait attribuer à la pré-
sence d’un tænia, on peutalors, à l’aide dela fougere,
mettre le malade au fait presque d’une maniere cer-
taine , si ses inquiétudes sont réellement fondées ou
non; car si, après l'emploi de ce médicament , ıl ne
rend pas des morceaux de tzenia, on peut alors parier :
dix contre un qu'il en estentiérement débarrassé.
Les anciens n’osaient pas administrer cette plante
aux femmes, parce qu'ils croyaient qu'elle provoque
l'avortement en cas de grossesse, ou bien quelle
leur ôte la faculté prolifique. Quant à cette dernière
1 Sans doute avant de la dessécher. ( Note du traducteur.)
424 SUR LES VERS INTESTINAUX
assertion , Spiegel avait déjà démontré d’une manière
évidente qu'elle n’est nullement fondée.
J’ai ordonné moi-même la fougere à une jeune
femme qui, sans le savoir, était enceinte, pour la
première fois, de deux mois, et qui était en même
temps incommodée d’un bothriocéphale. L’emploi
de ce médicament n’a pas agi sur elle d’une manière
nuisible, car elle accoucha à terme d’un enfant bien
développé.
L’ACIDE PRUSSIQUE a Été également employé contre
les vers”.
PETROLE (petroleum). Leclerc, Rosenstein, We-
del et beaucoup d’autres médecins l’ont recemmandé |
surtout contre le tzenıa.
Lors de son séjour en Égypte, et notamment au
Caire (où le tænia est tellement fréquent, que lon
peut admettrequeles trois quarts deses habitans , sur-
tout les juifs et le bas peuple, en sont incommodes),
Hasselquist? a vu chez un chirurgien français nommé
Foumace, trois morceaux de tæmia qu'il avait fait
rendre à différentes époques à une femme à l’aide du
pétrole. Un de ces morceaux était de la longueur de
quarante pieds français, un autre de quinze, et le troi-
sième de dix ; ils étaient de la largeur du petit doigt.
On fait prendre ce médicament à la dose de vingt à
trente gouttes pendant trois jours consécutifs, et le
quatrième on purge le malade.
ı Brera, Nuovi commeniatori di med. et chir., 1818, semestro se-
cundo , p. 199. (Br.)
2 Ouvrage cité, p. 587.
a
DE L'HOMME. 425
Le cas de la femme traitée par Foumace prouve
que le pétrole ne détruit pas le tænta entierement.
Quelques médecins donnent le pétrole conjointe-
ment avec l'huile de térébenthine.
Huize DE TÉRÉBENTHINE (oleumterebinthine). Les
Anglais recommandent beaucoup cette huile contre
les cestoïdes , et surtout contre le tænia:
Fenwik l’emploie à jeun, à la dose de deux onces,
et en cas qu’elle ne produise pas de selles, il en fait
prendre encore une à deux onces ; il n’a jamais vu
arriver d’accidens fâcheux après l’usage de cette
huile, et dans six cas elle a fait évacuer très-promp-
tement le tænia.
11 est de fait que l'évacuation de ce ver peut être
aussi bien effectuée par de fortes doses d’huile de 1é-
rébenthine et de pétrole que par celles de fougère ;
mais ıl n’est pas encore constaté par l'expérience
qu’un traitement terminé aussi promptement puisse
pour toujours débarrasser les malades de leur tænia;
car dans toutes ces observations on rapporte bien
combien d’aunes de ce ver ont été rendues dans
l'intervalle de tant et tant d'heures, mais on a
toujours négligé de nous faire savoir si les malades
n’en ont pas été incommodés de nouveau deux ou
trois mois après; cependant on nous a rapporté
qu'un boucher de Duraham avait évacué, quatre
mois après avoir fait usage d'huile de térébentbime,
des morceaux de tænia. Un cordonnier a été obligé
de reprendre cette huile à quatre époques différentes.
Le troisième malade du docteur Osann s’est vu éga-
426 SUR LES VERS INTESTINAUX
lement dans la nécessité de prendre ce remède trois
fois. Les deux autres observations rapportées par
le même ne prouvent pas non plus en faveur de ce
médicament; et quoique des doses aussi grandes de
cette huile n’aient pas produit de suites fächeuses
pour l’état de santé des personnes qui étaient incom-
modées par des vers, elles ont néanmoins donné lieu,
comme ıl résulte de plusieurs rapports, à un ma-
laise general, à des douleurs dans le bas-ventre, à
des ‘étourdissemens , à des nausées, à des vomisse-
mens, à une chaleur dans l’uretere et dans le rectum.
L’HUILEDE CAJEPUT (oleum cajeput ) a été recom-
mandee par M. Rudolphi.
Huise ANIMALE DE Dipper ( oleum animale Dip-
peli)". Dans un des cas rapportés par Moutin, et dont
1 Je dois à l’huile empyreumatique de Dippel que j'ai prise pen-
dant six semaines, matin et soir , à la dose de cinq jusqu’à quinze
gouttes , d’être entièrement débarrassé de mon tænia, après en
avoir été affecté pendant vingt-deux ans consécutifs. Le médecin
qui était chargé de me soigner dans mon enfance , m’a fait prendre
le remède de madame Nouffer , dans l’espace de dix ans , pour le
moins une vingtaine de fois , sans pouvoir détruire ce ver. Fatigué
par tant de remèdes, surtout par l'usage des drastiques , auxquels
j'attribue en grande partie l’état de faiblesse dans lequel je me
trouve actuellement, j'ai renoncé pendant une douzaine d'années
d'autant plus volontiers à l'usage des médicamens, que mon tænia
ne m’a jamais incommodé le moins du monde. Arrivé à Päge de
trente ans , et voyant toujours des traces de ce ver, je me décidaï
à le détruire à l’aide du remède déjà mentionné, dont les grandes
vertus anthelmintiques m’etaient connues , et je fus assez heureux
pour atteindre mon but; car depuis huit à neuf ans il n’a plus re-
paru. ( Note du traducteur. )
nn. az
DE L'HOMME. kon
| nous avons fait mention plus haut, l’usage de cette
huile continué pendant long-temps a produit de
| bons effets, et M. Rudolph: qui, à défaut d'huile de
- Chabert, employa celle de Dippel trois fois par jour,
à la dose de cinq à dix gouttes mélées dans une lasse
| de bouillon, obunt non-seulement l'expulsion d’as-
h carides, mais encore celle de quelques longs mor-
| ceaux de tænia. M. Rudolphi regarde cependant le
| médicament suivant, c’est-à-dire l'huile de Chabert,
| comme plus efficace.
| HvıLE EMPYREUMATIQUE DE CHABERT ( oleum em-
| pyreumaticum Chaberti ). L’inventeur de ce remede a
| indiqué la manière suivante pour le préparer :
| Pr. huile empyreumatique de corne de cerf, une
| partie ; huile de térébenthine, trois parties; melez.
Au bout de quatre jours on fait distiller ce mélange
au bain de sable dans une cornue de verre, et on en
retire les trois quarts. Le liquide qui se trouve trans-
| vasé doit être employé à l’usage interne.
| Lecontactdel’air rend cette huile noirätre, épaisse
| et plus degoütante à prendre, c’est pourquoi on fait
bien de la mettre dans de petits flacons (contenant
une once ou bien une once et demie) bien bouchés
et coiffés avec des morceaux de vessies de cochon.
Nous parlerons plus loin des vertus et de l'emploi
| de cette huile.
| MERCURE COULANT ( mercurius vivus). L’eau dans
! Jaquelle on a fait bouillir ce métal a été regardée
depuis long-temps comme ayant des vertus vermi-
428 SUR LES VERS INTESTINAUX
fuges ; c'est dans ce but que Baglivi' conseille de faire
infuser une once de mercure coulant dans trois onces
d’eau de chiendent, et dans autant d’eau de pour-
pier, de remuer ce mélange et de le d&canter ensuite.
Ce liquide forme, d'après le témoignage de George
q P gras
Bateus, un vermifuge très-eflicace.
Cependant il est prouvé que ce métal, étant bien.
purifié, n’est pas susceptible de dissolution dans
l’eau; il faudrait alors seulement attribuer la pro-
priété vermifuge au mercure, tel qu’on le trouve
dans le commerce, et qui n'ayant pas été prealable-
ment purifié, contient du plomb; mais comme la
quantité de ce dernier métal contenu dans le mercure
ne peut pas être calculée au juste, ce remède doit être
regardé comme tout à fait incertain.
Du reste, l'expérience a prouvé que le mercure
n’agit pas sur les vers intestinaux d’une manière spé-
cifique ; on a même des exemples que des personnes
l'ont pris jusqu’à salivation, et que cependant elles
n’ont pas été débarrassées de leurs vers.
Scopoli croit que l’on ne peut guère rencontrer
une plus grande fréquence d’ascarides que chez les
ouvriers qui travaillent à Idria dans les mines de vif
argent.
Ce médecin employait bien aussi le mercure pour
faire évacuer les vers, mais il ne se servait de ce
métal que comme purgatif; envisagé sous ce point
de vue, il en sera fait mention encore une fois plus
* Ouvrage cité, p. 49.
DE L'HOMME. 429
Join ; mais de vouloir administrer du sublimé-corro-
-sifcontreles vers, c'est réellement plus qu’imprudent.
| Le MÉCONATE DE BARYTE agit, comme ıl résulte
des expériences de M. Sertuerner a Einbeck, contre
les vers intestinaux de l’homme et des animaux ; mais
comme l'acide méconique est un poison ds plus
violen:, il ne sera PAPE jamais placé parmi
es vermifuges; il en est de même de la solution ar-
senicale proposée par Hill.
. Plusieurs des médicamens dont nous venons de
#4 ont été employés extérieurement et même avec
succès dans le but de faire évacuer des vers; mais ilne
| faut pas s’imaginer qu'étant, ce que l’on croit à tort,
l implantés dans les parois des intestins, ils aient eie
forcés par ce moyen de s’en détacher. Quant aux as-
N carides ; il est prouvé 10. qu'ils ne s’accrochent pas
| Aux intestins, au moins Se plusieurs milliers de
| vers de cette espèce que j'ai observés dans les cada-
| vres de l’homme et surtout dans ceux des animaux
| récemment tués, je n’en ai rencontré jamais un seul
| ainsi implanté. Ce fait a été également constaté par
| M. Rudolphi. 2°. On trouve souvent d’autres néma-
toïdes, plus particulièrement encore des échynorhin-
ques , ainsi que des trématodes et des cestoïdes atta-
| chés fortement aux intestins des animaux ,quelquefois
| même avec perforation ‚chez lesquels on n’a pas pu
| apercevoir, pendant leur vie, le moindresigue de dou-
leur. Le tænia même, propre à l’homme, s'implante
| aussi dans les parois desintestins, comme j'ai eu occa-
- sion de le remarquer dans des autopsies cadavériques ;
430 SUR LES VERS INTESTINAUX +
mais parmi des centaines de personnesattaquées de ce
ver et traildes par moi, je ne me rappelle pas en avoir |
rencontré une seule qui se soit plaint de douleurs.
que l’on aurait pu attribuer à la succion du tænia. Il!
est encore de fait que l'on ne rencontre dans. le ca- |
nal intestinal de l’homme qu’un, deux, ou tout au
plus trois tænias à la fois, et comme ce ver peut seu-
lement s’accrocher par son extrémité céphalique très- |
petite, la douleur résultant de la succion devrait!
toujours partir d’un seul point, mais , je le répète,
je wai jamais entendu porter une plainte semblable. w
Ceux de mes malades qui étaient dans un état de
souffrance se plaignaient des accidens généraux dont!
|
nous avons parlé plus haut; plusieurs autres n'é-!
Le nn en 2 au
prouvaient aucun malaise, et comme on peut bien |
supposer que leur tænia se sera également attaché ou |
accroché aux parois internes de leurs intestins, ON
a raison, ce me semble, de présumer que cette |
succion ne doit pas causer de douleurs aussi atro- |
ces que celles que l’on remarque dans le cas de co=|
liques ou de spasmes dans le bas-ventre. Enfin il est)
encore de fait, et comme cela a été également remar- |
qué par M. Rudolphi, que les vers qui se trouvent |
accrochés aux parois des intestins ne s’en détachent |
pas même, du moins pour la plus grande partie, aprés |
avoir été tués dans l’esprit-de-vin. Notre collection !
possède plusieurs morceaux d’intesuns et d’esto-
macs, qui prouvent ce fait d’une manière incontes=
table. |
Le bien qui résulte de l'emploi externe des reme- |
DE L'HOMME. 431
| des, dans des cas de pretendues coliques vermi-
| meuses, doit être ordinairement attribué à l’influence
| que ces remèdes exercent sur le système nerveux en
général, et surtout sur celui du bas-ventre en parti-
| culier ; c’est pourquoi l’évacuation de quelques vers,
| qui aurait lieu, après avoir administredes vermifuges
| en fricuons, ne peut pas servir de preuve que ces ani-
: maux avaient été réellement la cause des souffrances.
Al est cependant possible que les médicamens em-
ployés ainsi , aient agi contre les vers, et qu'ils aient
en effet provoqué leur évacuation; car nous connais-
| sons beaucoup de medicamens, qui, administrés à
| l'extérieur, montrent leur efficacité aussi bien que
| si on les avait fait prendre par la bouche.
| L'application des vermifuges à l’extérieur est sur-
| tout à recommander dans les cas où les malades ne
"sont pas disposés à les prendre à l’intérieur; c’est
pourquoi je vais indiquer quelques formules de ver-
| mifuges vantés par des auteurs, comme se prêtlant
! facilement à l'emploi externe.
. M. Rudolphi recommande contre les coliques,
‘dites vermineuses, des fricuons avec l'huile de caje-
put, et l’usage de bains tiedes; du reste ce médecin
‚ne s'inquiète pas s’il y a, en pareil cas, réellement
présence de vers ou non, et je crois qu’il a parfaite-
ment raison.
» Rosenstein conseille de frictionner le bas-ventre
‚avec du pétrole mélé d'ail, à l'endroit où les vers,
d’après son idée, veulent perforer le canal intestinal.
=
432 SUR LES VERS INTESTINAUX
Mellin fait encore entrer dans ce même mélange du
fiel de bœuf récent.
D'après Crato de Kraftheim, Jean Næsius s’est
servi avec succès contre les vers d’un onguent com-
posée d’une once de pétrole noir mêlé avec un gros
et demi de cire nouvelle.
Lower etSchenk vantent, contre les prétendus vers
du cœur, l'ail à l'extérieur , sous forme de cataplasme,
dans lequel ils font entrer la linaire, la tanaisie et
Vabsinthe. Le tout doit être bouilli dans du vinaigre:
Vandævern conseille l’usage de l’onguent nommé
unguentum Agrippæ , et celui appelé unguentum Ar-
thanithe, sive de cyclamine , mélés ensembles à par-
ties égales, et employés en frictions'.
Brera propose, dans le même but, les deux formu-
les suivantes” :
1. Pr. Fiel de bœuf ,un gros ; savon de Venise, au=
tant; mélez et faites, avec suffisante quantité d’huile
de tanaisie, un liniment. |
1. Pr. Fiel de bœuf, deux onces ; aloës en poudres
pulpe de coloquinte préparée, de chaque une demi-
once; faites digérer dans un endroit chaud * pendant
vingt-quatre heures dans suffisante quantité de suc
: Ouvrage cité, p. 3/45.
x .
3
» Vorlesung, p. 129
3 On trouve dans la traduction allemande : faites digérer dans
de l'huile chaude. Je regarde cela comme une faute d'impression ;
je n’en suis cependant pas sür, n'ayant pas eu l'original italien à |
ma disposition.
1 —
DE L'HOMME, 433
gastrique ou de salive, et ajouter à la fin suffisante
quantité de graisse purifiée, pour former un on-
guent.
Le même auteur a encore fait connaître une for-
mule pour préparer un esprit d’ail, avec lequel on
peut rendre les deux linimens précédens plus ac-
ufs, ainsi qu'une autre formule pour la préparation
d’un emplätre; les voici :
I. Pr. Ether sulfurique, six onces; ail pilé, une
once; camphre pulvérisé, un gros ; mélez avec soin.
IL. Pr. Assa foetida, emplätre de céruse, cire jaune,
de chaque, parties égales ; galbanum purifié, la moi-
tie autant ; faites selon les régles un emplätre.
On emploie aussi sous forme de lavemens plu-
sieurs des remedes que nous venons d’examiner.
Nous aurons encore occasion d’en parler, quand
nous indiquerons les modes de traitement qu'il faut
employer pour combattre chaque espèce de vers en
particulier.
III. Des remèdes purgatifs.
Quand on est parvenu à faire périr les vers avec les
remèdes que nous venons de mentionner, il est alors
nécessaire , si toutefois ces remèdes n’ont pas déjà
produit d'augmentation dans la sécrétion du canal
intestinal, que l’on tâche de faire évacuer non-seule-
ment les vers morts , car ceux-ci s’en vont naturel-
lement , mais encore les glaires qui se trouvent pres-
que toujours en pareil cas en grande abondance.
Pour atteindre ce but, l’on doit avoir recours aux
28
434 SUR LES VERS INTESTINAUX
remèdes qui jouissent de propriétés purgatives, tels
que, par exemple, les sels neutres dont on emploie
de préférence, en pareil cas, le sulfate de potasse et
le sulfate de soude, de même que les caux minérales
contenant beaucoup de ce dernier sel. Weigel vante
même le sulfate de soude comme un remède presque
infaillible contre letænia. Nous ferons connaître plus
loin la méthode que cet auteur emploie contre cette
espèce de ver.
Lr seL MARIN, pris à fortes doses, et dissous dans
l'eau , agit de la même manière, comme cela ré-
sulte d’un cas tiré des dissertations de médecins de
Londres , et rapporté par Mellin:. Le voici : « Un
homme qui se plaignait depuis quatre ans d’une gêne
dans le bas-ventre, et qui maigrissait à vue d'œil,
prit, par le conseil d’un de ses amis, deux livres de
sel marin dissous dans deux pintes d’eau de fontaine ;
il s’en suivit une forte oppression dans la poitrine,
et à la fin il rendit par haut et par bas beaucoup de
glaires et de vers. La grande soif et la dysurie, qu'il
éprouva en même temps, furent calmées par l’usage
d’eau pure, et par celui du lait de beurre, et peu de
temps après la santé fut rétablie. » Ce même homme
prit encore une fois trois ou quatre jours avant la
nouvelle et la pleine lune, ce sel comme remede pro-
phylactique, à la dose d’une demi-livre.
Le TARTRE STIBIÉ a été surtout recommandé par
Mellin* contre les maladies vermineuses, et il rap-
1 Ouvrage cité , p. 99.
» Ouvrage cité, p. 20.
LE DE L'HOMME. 435
porte que Ludovici a fait évacuer par hasard un tæ-
nia à l’aide de ce remede.
Après avoir employé inutilement beaucoup de
médicamens , Marci a guéri avec le même remède
une jeune fille de onze ans, atteinte d'une maladie de
nerfs très-violente, qui avait été occasionée par la
présence d’un ver solitairé. Brouset et Hirschel font
aussi mention de cas semblables.
Scheid raconte qu’Aulbert administra un jour,
avec le plus grand succès, un remède ( composé d’un
grain et demi de tartre stibié, d’un peu de résine de
jalap et de cinabre ) à un enfant de onze ans, du
sexe masculin, affecté d’epilepsie causée par la pré-
sence d’ascarides.
Dans le cas de complication de maladie vermineuse
avec l’Epilepsie, Armstrong et Tode préférent le
tartre stibié à tout autre remède.
Muteau de Rocquemont, Lepelletier et beaueoup
d’autres médecins francais se servent exclusivement
de ce médicament contre les vers.
D’après notre manière d’envisager les épidémies
dites vermineuses , l'emploi du tartre stibié nous pa-
rait, du moins dans beaucoup de cas, très-conve-
nable; car dans ces épidémies, ou plutôt dans ces
fièvres , il y a toujours en même temps un embarras
gastrique , que nous devons combattre par la méthode
évacuante. Le tartre subié remplit très-bien ce but,
car il provoque à la fois par haut et par bas des excré-
tions qui entraînent souvent les vers avec elles.
Quant au mercure doux donné souvent contre les
28.
436 SUR LES VERS INTESTINAUX
vers , il est très-vraisemblable qu’il n’agit que comme
tout autre purgatif, toutes les fois qu'il détermine
l'évacuation des Yers. Glossius dit expressément qu’il
s’est convaincu, par des essais réitérés, de linefli-
cacité des remèdes mercuriels dans le cas de maladies
vermineuses. Ce médecin pense qu’un usage continu
de ces médicamens, à petites doses, par lesquelles
la sécrétion des intestins ne serait pas augmentée,
produirait plutôt la salivation que la destruction des
vers intestinaux. Cependant il arrive quelquefois que
des enfans scrofuleux rendent des vers après l’usage
du calomélas; mais on aurait tort si on voulait attri-
buer directement l’évacuation de ces animaux à la
propriété vermifuge de cette substance, car cela peut
aussi bien être attribué à un effet du hasard, ou bien
à ce que la constitution deces enfans s’était améliorée,
et que les vers ont disparu naturellement, comme
cela a lieu en pareil cas.
En outre, comme nous devons également Adasanige
que la vie des vers intestinaux doit avoir un terme,
quand il sera atteint, le corps de ces animaux sera
alors rejeté conjointement avec les matières fécales.
Si dans ce moment, par hasard, le canal intestinal
n’a plus la disposition à la formation de ces parasites,
alors l’homme n’en aura plus. Presque tous les mé-
decins connaissent des hommes qui, ayant été incom-
modes, dans leur enfance, d’ascarides, n’en ont plus
offert de traces dans un äge mür, sans cépendant
pouvoir dire avec certitude à quelle époque les der-
niers de ces animaux ont été rendus, ou à quel re-
DE L'HOMME. 435
mede on doit attribuer leur destruction. Quand un
médecin parvient à guérir une maladie scrofuleuse,
il ne manque pas non plus, du moins, dans beaucoup
de cas, de débarrasser en même temps le malade de
ses vers, n'importe quels remèdes il aura employés.
Ce que je viens de dire s'applique, ce me semble, au
muriate de baryte, proposé comme un bon vermi-
fuge par Hufeland', Willis, Bucholz, Stark, Müller
et Sulzer.
Huires orasses. Passerat de la Chapelle est le
premier quiait recommandé l’HuILE DE No1x comme
un remede certain contre le tænia; il conseille de
prendre à jeun, pendant quinze jours consecu-
ufs, cinq onces de ce liquide, et de boire, deux
heures et demie après, quatre onces de vin d’Ali-
cante. Binet a confirmé par sa propre expérience les
bons effets de ce traitement. Je ne crois pas qu'il
puisse obtenir une grande faveur parmi les Alle-
mands : d’abord le prix élevé du vin d’Alicante offri-
rait déja beaucoup d’obstacles; mais, ce qui est plus
essentiel, je crois que beaucoup d’estomacs ne sup-
porteraient pas une aussi grande quantité d'huile.
Postel de Franeiere, qui a du reste des idées très-er-
ronées sur la nature et le séjour du tænia, n’envisage
cependant pas trop mal la maniere dont ces deux
liquides agissent; voici ses. expressions : « l’huile
obstrue les sucoirs des vers (ce qui reste encore à dé-
montrer ), elle rend le canal intestinal glissant , et,
prise à aussi grandes doses, elle agit comme purga-
* Ueber die salzsaure schwererde , s. 89, ff,
x
438 SUR LES VERS INTESTINAUX
uf. Le vin d’Alicanıe sert à corriger leflet nuisible
que l'huile produit sur l'estomac, et en outre le vin
est, en pareil cas, un remede préservatif contre la re-
production du ver solitaire. »
L'uuie DE Rıcın (oleum ricini ) est plus souvent
employée dans ce but que l'huile dont il vient d’être
question. Dunani et Odier sont les premiers qui ont
recommandé et administré l'huile de ricin contre le
iænia , en place du bol drastique de madame Nouffer.
Il est cependant de fait que c’est Odier qui l’a em-
ployée le premier contre le tenia, et Dunant n’a fait
que devancer ce médecin dans la publication de ce
remède, ce qu'Odier n’a pas non plus passé sous
silence. |
On ne devrait pas se servir de l'huile de ricin, telle
qu'on la trouve dans le commerce, par la raison
qu'elle est presque toujours rance où qu’elle le de-
vient bientôt, surtout lorsqu'elle n’a pas été préparée
de la manière la plus convenable ; celle-ci consiste à
enlever aux graines , avant deles exprimer à froid, la
pellicule externe , qui est d’un goût tres-äcre et mor-
dant. La grande quantité de substances mucilagi-
neuses et aqueuses contenues dans cette huile, est
x MM. Boutron-Charlard et Henri fils, dans un mémoire qu'ils
ont lu à l'Académie royale de médecine, le 17 avril 1824, com-
battent par des expériences positives les opinions de certains au-
teurs qui attribuent à l'embryon et à la partie corticale l’âcreté
qu’on remarque dans l'huile de ricin. Nous croyons devoir trans-
crire ici les principales conclusions de leur intéressant mémoire :
1°. Que l'enveloppe corticale ne contient aucun principe capable
DE L'HOMME. 439
cause qu’elle se gäte très-facilement; c’est pourquoi
on devrait la faire préparer nouvellement autant de
fois que l’on en aurait besoin. Une huile faite de cette
manière agit comme un purgatif tres-doux, et sans
causer les moindres coliques.
Cependant les expériences du docteur Arnemann
ont prouvé que cette huileïn’a pas de vertus spécifi-
ques contre les vers; c’est pourquoi l’on pourrait la
remplacer par l’huile d'amandes douces ou par toute
autre huile grasse dans laquelle on aurait dissous
un peu de résine de jalap. Au reste, quand il ne s’a-
git que de faire évacuer des vers, je me sers de pré
férence, pour atteindre ce but, de follicules de séné et
du jalap. J’ordonne plus volontiers les follicules de
séné en substance, c’est-à-dire sous forme de poudre,
de pouvoir communiquer à l’huile de ricin une saveur äcre et de-
sagréable.
20, Que l'embryon ou germe, qui jusqu’à ce jour avait été re-
gardé comme le siége d’un principe âcre et vénéneux , ne renferme
au contraire qu’une huile douce ayant un goût agréable analogue à
celui du café vert.
30. Que le périsperme est la partie du ricin qui contient le prin-
cipe purgatif.
4. Que les procédés par la chaleur développent dans l’huile de
ricin une Âcreté qui n’existe pas dans celle préparée à froid et par
expression.
5°, Enfin que l'huile de ricin préparée à froid et par expression
étant la plus pure, est la seule qui doive être employée en médecine.
L'huile de ricin extraite à froid peut se conserver fort long-
temps sans être susceptible d’altération ni de rancidité. (Note
- du traducteur. )
430 SUR LES VERS INTESTINAUX
qu'en infusion, parce que je crois qu’une partie de la
poudre peut arriver dans le canal intestinal sans avoir
été entièrement digérée, et qu’elle agit alors, par
son goût äcre, plus directement sur les vers que si
on l’avait administrée en infusion.
LA RACINE DE JALAP est sans contredit, dans le
cas de maladies vermineuses , in des meilleurs pur-
gaufs, et qui peut-être possède en même-temps plus
de vertus anthelmintiques que tous les autres.
Wepfer: vante cette racine comme un vermifuge
excellent. Van Swiéten? l’a également employée avec
succes contre le tænia.
Je ne me sers jamais de la résine de jalap, quoique
ÂArnemann* la regarde comme agissant plus eflica-
cement que la racine de cette plante; ce médecin
prétend qu’en donnant une dose de la racine, l’on
ne sait pas au juste, n'étant pas sûr de la quantité de
résine qu’elle contient, combien on a administré de
celle-ci. Cependant le raisonnement de ce médecin
n'est pas propre à me convaincre que la résine doit
être préférée à la racine; car, toute réflexion faite,
on ne sait jamais au juste, à l’avance , combien de ré-
sine tel ou tel canal intestinal peut supporter ; mais
en administrant avec circonspection Ja poudre de
jalap , il peut tout au plus arriver qu'elle n’agisse pas
au degré que l’on s'était proposé, et l’on peut fa-
cilement remédier à cet inconvénient, si c’en est un,
: Cicut. aquat. hist., p. 224.
» Loco citato , $ 1372, p. 54o.
3 Ouvrage cité, p. 476.
DE T'HCMME. Ahı
en donnant la racine à plus forte dose. Il n’en est
pas de même avec la résine; car si, par hasard, cette
substance s’est précipitée dans un seul endroit de l’es-
tomac ou des intestins, ce qui peut arriver par une
faute dans Ja diète, ou par l'emploi d’une boisson très-
froide , le malade éprouvera de fortes coliques qui,
quoiqu’elles ne soient pas toujours accompagnées de
suites graves, peuvent néanmoins beaucoup inquié-
ter et le médecin et le malade.
Pour faire rejeter les vers hors du canal intestinal,
je ne me sers jamais d’aloës, non plus que de gratiole
ni d’ellébore, de gomme-gutte , de scammonée, ni
d’autres drastiques semblables.
J’ordonne cependant bien souvent l’aloës, mais
| seulement à la fin d’un traitement, à des doses très-
| peutes, et plutöt comme tonique que comme purgatif.
Werlhof et d’autres médecins regardentla gomme-
gutte comme un remède spécifique contre le tænia.
Bissetsurtoüt vante beaucoup ce médicament, mais
je ne sais pas trop pour quelle raison, car il l’admi-
nistra un jour à un marin à des doses très-fortes, qui
firent en effet rendre quelques morceaux bien longs
| de tænia, néanmoins ce ver se montra de nouveau au
rue 3
bout de quelques mois, c’est pourquoila gomme-gutte
fut employée de nouveau, et même à plusieurs re-
rises; cependant les résultats furent toujours les
; )
memes; enfin Bisset l’ordonna encore une fois à son
malade au mois d'octobre ; et, à dater de cette époque
jusqu’au 18 décembre, comme il résulte de l’histoire
de la maladie, le ver n’a plus reparu ; mais il reste à
hie SUR LES VERS INTESTINAUX
savoir sile malade n’en aura pasrendu d’autresmor- ,
ceaux le mois suivant.
IV. Des remèdes fortifians.
‘A près avoir détruit et fait évacuer les vers à l’aide
des vermifuges et des purgaufs convenables, il est sou-
vent d’une grande utilité d'employer des médicamens
fortifians afin de prévenir une nouvelle production
de ces animaux; j'avoue cependant, que la méthode
que j'ai suivie jusqu’à présent contre les affecuons
vermineuses, m'a presque toujours dispensé d’avoir
recours à ces remèdes.
Ce sont ordinairement les amers et le fer que l’on
emploie en pareil cas ; ce dernier peut être adminis-
tré , tant sous forme métallique que sous celle d’oxide
et de sel neutre. On peut également se servir dans
le même but des eaux minérales ferrugineuses.
Werlhof rapporte une observation où il administra
4 une femme, deux fois par jour, de la limaille de
fer, qui lui fit rendre beaucoup d’ascarides (c’étaient
probablement des oxyures); plus tard elle fit usage
d’eau de Pyrmont,qui produisit. d’abord l'évacuation |
de quelques morceaux de tænia, etenfin un tænia
entier; après quoi elle fut débarrassée, comme par
enchantement, de toutes ses souffrances.
I
Je crois inutile de parler ici en detail de l'emploi
des remèdes fortifians, car je dois presumer que,
tous les médecins, à l'usage desquels cet ouvrage a
été écrit, connaissent la manière de les administrer.
DE L'HOMME. 443
Les remèdes dont nous venons de parler jusqu'à
présent doivent être regardés , généralement parlant,
comme les meilleurs que l’on doive employer contre
les vers. Les personnes qui désirent en connaître da-
vantage, n'ont qu’à lire les ouvrages de Vandævern
et de Leclerc; mais comme probablement peu demes
lecteurs possèdent l'ouvrage du dernier, c’est ce qui
m’a décidé A leur donner un petit échantillon de l’ar-
senal vermifuge de ce médecin.
Medicamenta simplicia adversus lumbricos petila ex animalibus.
‘Alcis ungula.
Anseris adeps.
Apri urina.
Avium quarumcunque pennarum combusiarum cinis.
Dezoar.
Bovis talus ustus, ejus et siercus ustum cum castoreo suffitum.
Butyrum.
Caprinum siercus , aridum tritum , ex melle potui daium tineas om-
nes radicitus eximit. (Plin. Valer.)
Caseus veteratus.
Castoreum.
Cantharides.
Cervi cornu et medulla.
Ebur.
Fel variorum animalium.
Gallinæ adeps , item ejus ovorum putamen contritum.
Hominis urina , et ossa , præsertim combusta.
Ichneumonis pilorum suffitus.
Lumbrici terreni.
Lumbrici intestinorum human. exsiccali , contriti , ore assumpti.
Mel.
Monocerotis et rhinocerolis cornua.
444 SUR LES VERS INTESTINAUX
Muris stercus , triduo bibitum.
Pisces , muria conditi.
Secundiñæ mulieris primiparæ pulvis.
Scorpiones.
Vermiculi spongiæ bedesar.
Viperæ.
Mon recueil vermifuge tout entier ne consiste pas
dans la moitié des remèdes que l’on voit rapportés
dans ce tableau, qui ne contient cependant que ceux:
tirés du règne animal,
SECTION II. Du traitement particulier qu'il faut employer
contre chaque espèce de vers ’.
Nous passons maintenant à l'indication du traite
ment ou des moyens que l’on doit employer contre
chaque espèce de vers intestinaux en particulier, où
nous devons ajouter ce que l’on peut dire des signes
par lesquels on peut reconnaître la présence de telle
ou telle espèce de vers.
Le TRICHOCÉPHALE (trichocephalus dispar) séjourne
principalement dans le cœcum , mais on le remarque
aussi dans les autres grosintestins. Je ne connais réel. -
lement aucun signe par lequel on puisse soupçonner
sa présence , et néanmoins on le rencontre dans pres-
que tous les cadavres de l’homme , comme Wrisberg?
l'a aussi remarqué; le plus souvent on ne trouve qu'un
peutnombre d'individus de cette espèce dans le même
cadavre ; cependant M. Rudolphi en atrouvé une fois
* Felix Pascal. Voyez Nouveau Journal de médecine , rédigé par
Beclard , Chomel, etc. Mars 1818.
? Dans la préface ajoutée à l’ouvrage de Rœderer et Wagler.
DE L'HOMME. 445
_ plus de mille dans celui d’une femme. On en observe
au contraire quelquefois une quantité extraordinaire
dans les intestins de quelques bisulques , comme par
exemple dans ceux du chamois et du mouton.
Aucun médecin, autant que je me le rappelle, n’a
encore observé qu’une personne ait rendu le tricho-
| céphale pendant la durée de sa vie, ce que cependant
j'ai eu occasion de remarquer une fois dans Le cas
| suivant :
: J’aitraié,ilyaà peu pres dix ans, une petite fille
| de six ans qui était affectée du tænia. Pendant l’em
| ploı des médicamens que je lui avais ordonnés, elle
rendit à plusieurs reprises des ascarides et des Oxyu-
res, et une seule fois un trichocéphale.
Cependant comme on trouve ce ver, je le répète,
| dans presque tous les individus de l'espèce humaine,
| et que cependant la plupart ne s'étaient jamais plaint
| d’avoir étéincommodés par les vers, il résulte delà que
‚les trichocéphales doivent rester dans le cœcum sans
| déterminer aucun accident , de manière que l’ou n’a-
| pas besoin de s'occuper de leur expulsion.
| Sicependantune personne en rendait, et s’il yayait
des symptômes que l’on püt attribuer à leur pré-
sence , je conseillerais d'employer les mêmes remèdes
que Jindiquerai tout à l'heure contre les oxyures.
ÖXYURE VERMICULAIRE (oxyurisvermicularis). Les
oxyures séjournent ordinairenrent dans le rectum 3
Cependant j'en ai rencontré même dans le cœcuin.
: Ilest de fait que les vers de cette espèce incom-
modent les malades plus que tous les autres, et
416 SUR LES VERS INTESTINAUX
sans excepter même le tænia, car il reste encoré
à savoir s’il donne réellement lieu aux accidens que
Von se plaît à lui attribuer, mais au contraire on né
peut nier que les oxyures n’incommodent maintes |
fois les hommes à un très-haut degré. Il y a cepen-
dant des cas où il existe dans le même individu des
milliers de ces vers, sans qu’ils annoncent leur pré»
sence par aucun symptôme désagréable. J'avais à |
traiter, il y a quelques années, un jeune homme |
de douze ans, atteint d’une fièvre nerveuse : un la=
vement que je lui avais ordonné fit rendre une quan
tité considérable d’oxyures, et cependant le malade
n’en avait jamais été incommodé : il en fut de même
après son rétablissement. Mais dans beaucoup de cas
les oxyures ne se comportent pas d’une manière aussi |
indifférente; ils se tiennent, il est vrai, ordinaire
ment assez tranquilles pendant la journée, mais à.
l'approche de la nuit ils commencent presque tous
jours à causer des démangeaisons insupportables
dans le rectum ; il paraît que la chaleur du lit er !ele=
vation de la temperature du corps animal les excitent |
considérablement. On les rencontre le plus souvent
chez les enfans, cependant les adultes n’en sont pas
toujours exempts. J'ai connu un vieillard de quatre=
vingts ans qui en rendit jusqu'à sa mort. Les déman:!
geaisons auxquelles ces animaux donnent lieu provo-
quent souvent, chez les enfans , des convulsions qui
ressemblent à l’éclampsie. Les oxyures s’introduisent
aussi dans le vagin, et ils excitent alors les femmes à |
la masturbation ;je connais même plusieurs exemples
[
DE L'HOMME. 4
ou ilsavaient presque causé une veritablenymphoma-
nie. Scharf rapporte une observation ou les oxyures
qui s'étaient introduits dans le vagin d’une femme
de cinquante ans, produisirent dans cette partie pen-
dant long-temps une démangeaison et une chaleur
trés-vives. Elle rendit en effet, à plusieurs reprises,
une quantité extraordinaire de ces vers.
Becker a observé le même accident chez une femme
de soixante-dix ans: les démangeaisons qu’elle éprou-
.vait dans le vagin firent naître en elle certains désirs
à un tel point, qu’elle renouvelait presque les tur-
pitudes de Messaline '. Des injections composées de
plantes ameres dirigées dans le vagin firent évacuer
beaucoup d’oxyures , et tous les symptômes cessérent
sur-le-champ.
Dans le traitement des affections des parties sexuel-
les chez les femmes, les praticiens feront bien de se
rappeler les cas que nous venons de rapporter.
Cette espèce de vers n’est pas seulement, je le ré-
pete, la plus incommode pour l'espèce humaine, mais
elle est aussi la plus difficile à combattre ; car on a beau
faire évacuer des milliers de ces animaux, il en reste
toujours dans les replis des intestins, et comme ils se
‚regenerent avec une rapidité étonnante, les mêmes
inconvéniens ne tardent pas à recommencer.
Les vermifuges ordinaires pris par la bouche per-
1
Et resupina jacens mullorum absorbuit ictus.
Et lassala viris, sednon satiala recessit. JUVENAL.
448 SUR LES VERS INTESTINAUX
dentdans l'estomac et les intestins grêles, du moins en
grande partie, leur propriété essentielle; c’est pour-
quoi, en arrivant dans les gros intestins , séjour natu-
rel des oxyures, ils agissent d’autant plus faiblement ;
que cesanimaux se trouventtoujours entourés de beau-
coup de matières fécales. Les vermifuges administrés
sous forme de lavement opèrent bien sur les oxyures
qui séjournent dans le rectum, mais non pas sur
ceux qui siégent dans le cœcum; c’est pourquoi le
but que l’on s'était proposé n'est pas complétement
atteint.
Quoique leur destruction totale ne puisse être ob-
tenue que trés-difficilement par des médicamens, car
dans l’âge adulte les oxyures disparaissent souvent
naturellement, il faut cependant employer quelques
moyens contre eux, ne füt-ce que pour soulager mo-
mentanément les personnes qui en sont incommodées.
La méthode que j'ai mise en pratique contre ces vers
jusqu’à présent avec plus ou moins de succès est la
suivante : Je commence par faire prendre, maun et
soir, une cuillerée à café de l’électuaire n°. 1 (in-
diqué dans la dernière section ) dans l'intention de
forcer les oxyures qui se trouvent le plus rapprochés
des intestins grêles à descendre plus bas ; j'ajoute vo-
lontiers à cet électuaire le jalap à une assez forte dose
pour causer une légère évacuation. Outre cela, j'en=
gage les malades à prendre par jour deux petits lave-
mens composés de plantes amères (on peut suivre la
formule n°. 2, qui se trouve aussi dans la dernière
section). 1l est à remarquer que le malade ne doit
DE L'HOMME. 449
prendre le lavement qu’apres avoir été à la selle, et
dans ce cas on peut ‘espérer qu’il restera pendant
quelque temps dans le canal intestinal, condition
essentielle pour qu'il puisse produire de l'effet. Chez
les personnes peu irritables, je fais ajouter quelque
fois aux lavemens une cuillerée de fiel de bœuf frais,
Les malades doivent faire usage des médicamens que
je viens d'indiquer pendant plusieurs semaines con-
sécutives , après quoi ils resteront souvent pendant
long-temps en repos, et se trouveront même quel-
quefois radicalement guéris. Un lavement d’huile
grasse’ fait souvent cesser su r-ie-champ les déman-
geaisons insuportables causées par les oxyures?.
Pallas? à vu employer dans le même but ; avec suc-
ces, la fumée de tabac.
Van Swieten conseille les lavemens d’eau froide.
Le meilleur moyen pour débarrasser les femmes
des oxyures qui se seraient introduits dans le vagin,
consiste dans une injection d’eau froide, avec addi-
tion d’un peu de vinaigre.
Le docteur de Vest, de Gratz, m'a assuré qu’il
n’emploie contre les oxyures que les fleurs de soufre,
* M. Soemmerring a également employé avec succès l'huile d’c-
live en lavement à la dose de deux ou trois onces. ( Br.)
» Une dame de vingt-cinq ans, qui était tourmentée de ces vers
depuis son enfance , s’en debarrassa à la fin en prenant deux fois
par semaine (mercredi et vendredi ) une botte d'ail coupée menue
. dans une demi-tasse d’huile d’olive. (Br.)
> De infest. viventib., p. 258.
=g
550 SUR LES VERS INTESTINAUX
à la dose de dix à quinze grains. Ce médicament doit
être pris à jeun , et pendant un certain temps.
Depuis re M. de Vest m'a fait connaître ce re-
mede, je n’ai eu occasion de l’administrer qu'à une
seule per sonne, mais l'ayant perdue de vue, je ne puis
dire quel effet il a produit. J' ai engagé un jour le
docteur Fechner à le donner à un de ses malades, chez
qui il avait déjà essayé inutilement beaucoup de re-
mèdes pour le débarrasser des oxyures; mais ce mé-
decin m’observa que son malade avait déjà fait usage
pendant long-temps de fleurs de soufre mêlées avec de
la crême detartre, pour combattreune autreaffection ;
cependant les vers n'avaient pas été détruits pour cela.
Il ajouta qu'il employait ordinairement avec succès
contre les oxyures des lavemens composés d’une infu-
sion de plantes ameres avec addition d'huile empyreu-
matique. Je crois en effet que ce mélange doit être
très-actif. L'huile de Chabert' ne pourrait guère être
employée en lavemens’,a cause de l'huile de térében-
thine dont elle est en grande partie composée, néan-
moins on pourrait fort bien ’administrer par la bouche
en même temps qu’on employerait les lavemens dont
* M. Rollet, chirurgien à Baade, a employé avec succès l’huile
de Chabert en lavemens , à la dose de deux cuillerées à café mê-
lée avec une décoction de graines de lin ou une toute autre décoc-
tion mucilagineuse. ( Br.)
2 Je ne concois pas pourquoi U er a pu hésiter un moment
d’administrer cette huile en lavement, tandis qu’il la donne à si
larges doses par la bouche. Je m'étendrai dans une note plus loin
sur ce sujet. (Note du traducteur. )
|
|
|
|
|
DE L'HOMME. 45
nous venons de parler, afin d'augmenter leur effet.
Je me suis aussi proposé de donner l'huile de Cha-
bert, si efficace contre le tænia, dans le but de com-
battre des oxyures; mais excepte la personne chez
laquelle j'ai essayé les fleurs de soufre, 1l ne s’en est
pas présenté d’autre qui en füt incommodée. En oé-
néral on s’en plaint dans ce pays-ci beaucoup plus
rarement que des ascarides et des tænias.
Les AscaRiDES ( ascaris lumbricoïdes ) sejournent
dans les intestins greles, cependant ils se glissent
aussi quelquefois dans l’estomac, où ils donnent lieu
à des accidens plus cu moins graves. L’estomac, ir-
rité par la présence de ces animaux , fait ordinaire-
ment beaucoup d’efforts pour les rejeter prompte-
ment au dehors. Dans les commentaires de Leipzis :
on rapporte un cas où trois de ces vers s'étaient in-
troduits dans la vésicule du fiel par le canal cho-
lédoque.
Cependant je dois remarquer ici que ceux des nd-
matoides d’une forte taille que l’on a souvent trou-
vés dans les reins, ou que l’on a vu sortir par l’ure-
tere n’appartiennent pas au genre d’ascarides dont il
est question ici, mais bien à celui des strongles.
Les ascarides font soupconner leur présence par
les symptômes décrits plus haut; on peut les com-
battre par tous les remèdes que nous avons aussi déjà
indiqués comme les meilleurs vermifuges, et parmi
lesquels chaque médecin pourra choisir suivant sa pre-
* Commentarii de rebus in scientia naturali et medicina gestis. Tom.
XIV , Lipsiæ, 1767, p. 664. (Voyez la note. )
29.
453 SUR LES VERS INTESTINAUX
dilection. Nous avons rapporté à quelle dose et sous
quelle forme on doit les administrer ; du reste, en
cas de besoin ! on n’a qu’à consulter les matières me-
dicales. Aucun de ces remèdes n’est absolument à
rejeter. La chose principale consiste toujours, dans
le traitement contre les ascarides , à avoir non-seule-
ment égard aux vers, mais encore aux Causes qui
avaient favorisé leur production.
Ma méthode d'agir contre les ascarides est 1res-
simple. Si l'on me présente un enfant chez lequel
on remarque plusieurs des signes pathognomoniques
qui caractérisent ordinairement la maladie vermi-
neuse, je lui ordonne l'électuaire n°. 1’, à la dose
d’une cuilleréeà café, matin et soir, peu m’im-
porte que cet enfant eùt réellement rendu auparavant
des vers ou non; après un usage de ce médicament
continué pendant trois ou quatre jours, les excré-
lions alvines commencent à devenir plus copieuses
et plus liquides, elles sont presque toujours chargées
de glaires, et quelquefois de vers. Dans le cas où cet
@lecinaire ne produit pas cet effet, je V’administre à
plus forte dose. Pendant l'usage de ce médicament, si
toutefois on ne s'était pas trompé dans le diagnostic,
et si la maladie était réellement le résultat d’un dé-
rangement, ou plutôt d’une inaction dans les fonc-
tions des intestins, le rétablissement du malade s’o-
père à vue d'œil. Cela se caractérise surtout par le re-
1)
La formule de cet éleciuaire et des autres médicamens nume-
rotés est indiquée daus la dernière section.
DE L'HOMME. 453
tour de la gaite, que l’on remarque ordinairement
=
chez les enfans bien portans.
Si la premiere portion de cet électuaire n'était pas
suffisante pour rétabli la santé, Jen ordonne nne
f F \ . 1 1
seconde, en réglant toujours la dose de maniere
qu'elle augmente l'évacuation des matières fécales
et des glaires, mais qu’elle ne provoque pas d’excré-
tions aqueuses ou séreuses.
Dans le cas où les circonstances paraîtraient exi-
ger que le malade soit purge , je préfère de suspen-
‘dre l'usage de V’eleciuaire et jordonne à sa place la
poudre purgative n°. 3; car, en ne purgeant le
malade qu’une seule fois, cela ne peut pas autant af-
faıblır le canal intestinal que sil se faisait pendant
plusieurs semaines une perte continuelle des hu-
meurs nécessaires à une bonne digestion. Je ne me
rappelle pas avoir eu besom d'employer plus de
deux portions de lélectuaire pour faire disparaître
tous les accidens. 1] m'est du reste indifférent si, pen-
dant ce traitement, le malade rend des vers ou non;
j'ai remarqué quelquefois que les malades n'avaient
évacué quelques ascarides qu’apres un rétablissement
complet.
Si j'ai a traiter une personne d’une constitution
lymphatique, jordonne pendant quelque temps lu-
sage des gouttes n°. 4, pour prévenir les rechutes.
. A l'égard du régime que l’on doit observer pen-
dant le traitement, je défends l'usage des farineux,
des légumes secs et des substances grasses ; j'engage
également les malades à ne pas manger trop de pain.
454 SUR LES VERS INTESTINAUX
Je ne me suis jamais trouvé dans le cas d’avoir be-
soin de recourir à d’autres moyens pour combattre
les ascarides.
Le BOTHRIOCÉPHALE (bothziocephalus latus), et le
TÆNIA ({ænia solium. )
Je suis obligé de parler de ces deux genres de vers
à la fois, parce que les praticiens, en indiquant les
remèdes propres à les combattre, n'ont pas eu égard
à la grande différence qui règne réellement entre ces
deux animaux. L’un et l’autre séjournent dans les ın-
testins grêles, quoique Postel de Francière prétende
qu’ils ne séjournent que dans le coecum. Cette asser-
tion a valu à ce médecin une dispute savante avec
MM. Robin et Binet.
La presence de ces deux animaux dans le canal
intestinal n’est pas caractérisée par des signes parti- |
culiers et qui ne puissent aussi bien indiquer l'exis-.
tence des ascarides. Mais les tænias s’annoncent,
dans beaucoup de cas, plus aisément que ceux-ci
par l'évacuation de quelques articulations ; au moins
cela a lieu pour le véritable tzenia : quant au bothrio-
céphale, je ne puis rien dire avec certitude, faute
d’une expérience suffisante. Celui-ci ne se découvre
pas ordinairement par la sortie de petites parties d’ar-
ticulations détachées, mais bien par celle de mor-
‘ceaux d’une certaine longueur.
Comme ces deux espèces de vers ne cedent pas
en général à l'emploi des vermifuges ordinaires , et
quoiqu'ils soient quelquefois rendus spontanément,
beaucoup de médecins et de charlatans ont proposé
DE L'HOMME. 455
plusieurs remèdes, en général très-compliqués, qu'ils
out tenus ordinairement secrets pendant long-temps,
et qu'ils ont vantés comme de vrais spécifiques.
Afin de ne choquer personne, nous allons faire
connaître, par ordre alphabétique, les différentes
méthodes proposées jusqu’à présent contre le tænia,
SECTION LL Des différentes méthodes de traitement contre
le tænia
Miruope D'ALSTON. « Après avoir purge le ma-
lade, un jeudi avant le changement de lune (ce sont
les paroles d'Alston), avec suffisante quaauté de fol-
licules de séné et de manne (substances que j'ai fait
infuser dans une décoction de racine de chiendent),
je lui donne, le vendredi suivant , une once de zinc
pur (passé au tamis), dans quatre onces de sirop
ordinaire * ; le samedi, une demi-once de zinc dans
deux onces de sirop, et autant le dimanche ; le malade
doit être purgé le lundi avec la même médecine.
Quoiqu'il soit probable que le jour et l’époque à la-
quelle on doit administrer ces médicamens n’influent
pas sur leur eflicacité, je me suis cependant tenu
strictement à la prescription proposée par un charla-
tan, et comme l'emploi de ces remèdes avait ré-
pondu à monattente, je n’ai rien voulu changer à son
mode de traitement. »
LL
* Common treacle ne peut signifief rien autre chose dans ce cas-ci
que du sirop hollandais et non pas de Ja ihériaque , comme on le
Louve indiqué dans la traduction allemandi # = l’ouvrage d’Alston
et dans la Matière médicale de Mellin ; car üne pareille dose de
thériaque causerail la mort d'un homme.
456 SUR LES VERS INTESTINAUX
Pailas l’approuve beaucoup, cependant il a vu un
cas où 1l n’a pas répondu à son attente.
A vant de mettre ma méthode actuelle en pratique,
j'ai essayé celle d’Alston sur plusieurs de mes malades
incommodés du tænia;maisaucun n'aété radicalement
guéri : tous sont revenus, après un espace de trois
mois, se plaignant de l’inefficacité des remèdes qu’on
‘leur avait administrés, car le tænia s'était montré de
_ nouveau.
Méraope pe Beck. Nous en devons la publica-
tion à M. Lange’. En voici l'exposé :
Re. Mercurii dulcis , scrupulum unum ; cornu cervi usli , cinnabaris
an'imonü , ana grana decem ; m. , f. pule. d. s. (A.)
Rc. ol. amygdal. dulc., uncias duas , d. s. (B.)
Re. radic. filicis mar. , drachmam unam ; jalapp. , gummi-gulte ,
Lerb. cardui benedict., eburis usti, ana drachm. semis., m., f. pub. sub-
1rliss. divide in ii) part. æq. d. s. (C.) ou spécifique.
Le malade tourmenté par le tænia commence par
prendre, à Fe ou cinq heures de l'après-midi, la
poudre marquée À dans une cuillerée d’eau com-
mure, où bien dans une cuillerée d’eau de gruau;
je soir, après avoir mangé un potage, il doit boire
deux onces d'huile d'amandes douces; le matin sui-
vant, il prendra un des trois paquets de la poudre du
spécifique marqué G, dans un peu de thé édulcoré
avec une cuillerée de sifop de fleurs de pêcher. Cette
poudre détermine ordinairement, dans l'espace de
deux heures, deux ou trois vomissemens; le malade
peutalors faire usage d’un peu de thé. Tout ce qu'il a
1 Hufelands Journal, t. XVH, st 2, p. 123.
DE L'HOMME. 457
rendu par le bas, pendant la nuit et dans la matinée,
doit être examiné, et si le tænia ne s’y trouve pas
en entier, on doit administrer au malade un se-
cond paquet, c’est-à-dire deux heures après avoir
pris le premier, et enfin le troisième : dans le cas où
ces remèdes ne produisent pas l'effet désiré, on fait
passer un lavement , composé d’une decoction de
plantesameres et d’une suffisante quantité desulfate de
magnesie, et, si le ver n’est pas évacué par ce moyen,
on donnera alors au malade, dans l’espace de trois
heures, la poudre suivante, divisée en trois paquets.
Re. pub. radic. jalapp., drachm. unam; herb, gratiolæ , scrupul.
unum; m.,f. dos.tres. (D.)
Cette niéthode peut être uule contre le bothriocé-
phale, mais non pas contre le véritable tænia. Le
mélange de la racine de fougere mâle avec les pur=
gatıfs n’est point du tout convenable.
Méruons pe Bucuanan. Buchanan a recu du
docteur Roussel la formule de ce remède indien.
L'on fait bouillir une demi-livre d’écorce fraiche de
la racine de grenadier, dans trois pintes d’eau com-
mune , jusqu'a réduction de deux *. Outre cela, l’on
fait un mélange de graines pulvérisées de seca dana
(convulvulus nil), avec celles de putas papara (erythrina
monosperma ), de chaque substance, un demi-gros.
A près avoir fait fondre un peu desucre dans la bouche,
* Breton (Voy. med. chirur. transact., vol. X1, part. 11) fait
bouillir deux onces de cette racine fraîche dans une pinle et demie
d'eau jusqu'à réduction de moilie ; il en donne un verre toutes
les demi-heures. ( Br.)
438 SUR LES VERS INTESTINAUX
on avale cette poudre, et on boit par dessus une tasse
de la decoction précédente pendant qu'elle est encore
chaude; on doit en faire usage à des intervalles très-
courts, jusqu’à ce qu’elle soit entierement prise. Ces
médicamens produisent des évacuations par haut et
par bas.
Les graines de seca dana et celles de putas papara
sont ordinairement employées comme purgatifs par
les médecins de l'Inde. Buchanan regarde la decoc-
tion comme le remède le plus actif de ce traitement.
Méruone pe CLossius. Ceite méthode a été dé-
crite en premier heu dans les Annales de Fritze. Le
fils de Clossius l’a publiée de nouveau dans le Ma-
gasın de Baldinger, telle qu'il lavait apprise de feu
son père, qui l'avait découverte par hasard. Voici
comment 1l s'exprime : « Mon père avait à soigner
une dame en Hollande, qui était malade depuis long-
temps, et qui avait en même temps le ventre extré-
mement‘ballonné ; il lui ordonna , je ne me rappelle
plus po’s quelle raison , de la térébenthine de la ma-
nière suivante :
Re. terebinth. Venet., drachm. j ; sol. in vitell. ovor. q. s.; add.
az, menth. piperit., unc. iv, S., à prendre peu à peu.
Il fut appelé tout à coup le soir, et on lui dit que
la malade était expirante. En effet, il la trouva sans
connaissance , el le front couvert d’une sueur froide.
Enfin , elle se remit peu à peu, et lui dit qu'elle
éprouvait une sensation semblable à quelque chose
qui descendait dans le ventre, et qui lui donnait en
même temps envie d'aller à la selle; une évacuation
1
|
)
|
DE L'HOMME. 459
de matières stercorales eut réellement lieu , ce qui
produisit l’affaissement presque complet du bas-
veutre. L'on vit dans les LR un paquet blanc,
an n'était autre chose qu’un bothriocéphale, mais qui
n'était pas pourvu de trompe. Quelque iempsapres,
le ventre se ballonna de nouveau , et presque aussi
fortement que la première fois; il ordonna alors son
drastique (que nous ferons connaître plus bas ), qui
fit évacuer le ver en entier , et il n’a plus reparu.
« Depuis ce temps , mon père ädministra à tous les
malades qu'il croyait affectés du tænia , son remède
explorateur, c’est-à-dire de la térébenthine, en ré-
glant toutefois les doses selon l’âge, l’irritabilité, etc.,
1: desindividus. Apres s’elre convaincu par cemoyen de
l'existence du ver, il commencait par faire observer
aux malades un régime particulier ; ils étaient obli-
gés de ne manger, pendant un mois, que des choses
piquantes et salées, comme, par exemple, du fro-
_ mage, du poisson salé, du saucisson , de la viande
SC P > ,
silée, du jambon, etc. En outre, ils devaient aussi
boire plus de vin que d'habitude; quelques jours
avant de faire usage de son drastique, il administrait
aux malades, tous les soirs, un grain d'opium , ou
| bien un peu de laudanum hquide de Sydenbam. En
suivant cette méthode, il m’assura qu'il avait été
obhgé, dans bien des cas, de ne donner qu’une
seule dose de son drastique pour faire évacuer le tæ-
Dia en entier. Voici la formule du drastique et des
autres médicamens dont il se servait dans le cours du
traitement.
460 SUR LES VERS INTESTINAUX
Re. mercurü duleis , gr. xij; lap. canc. ppt. , gr. xij ; specif. cephal. ,
M. gr. vj; m. ‚f. pule. S. (N°. 1.) | |
Re. ul amygdal. dulc. unc. Ss: 5. (N°. 2.) “:
Re. g.-guttæ, gr. xxxvj , rad. angel. , gr. vüij, pub. card. bened. ,
pulv. epileps. , ana serup.j, m. , f. pule. subtiliss. div. in 1] p. æq. S.
(N°.3.)
« Le malade prend, à quatre ou cinq heures de
l'après-midi, la poudre prépafatoire marquée n°. 1,
mélée dans une cuillerée d’eau; ıl doit souper res
gerement, et boire, avant de se coucher, à la dose
prescrite le remède n°. 2. Le malin suivant, le malade
étant encore au lit, ou levé (l’auteur préfère cepen-
dant qu'il soit couché, comme on peut le conclure
d’après ses remarques), doit prendre une dose de
la poudre marquée n°. 3, dans une petite tasse de
thé ou d’eau tiède, ou bien, s'il le prefere, ıl peut
l'avaler enveloppée dans du pain à chanter. Cette dose
occasione ordinairement , dans l’espace de deux
heures, deux ou trois vomissemens et quelques sel-
les. L’on peut faciliter ces évacuations par l'usage de
bouillons légers, ou de quelques tasses de thé faibles
deux heures après on examine les excrémens , et si le
ver ne s’ytrouve pas encore enentier , le malade ava=
lera une seconde dose de la même poudre. Si deux
heures et demie après le ver n’est pas encore évacué, le
malade doit faire usage de la troisième dose. Cette der- |
nière ne manque jamais de faire sortir le ver en entiers |
qui, s'il est rendu de bonne heurele même jour, don= |
nera des signes de vie; daus le cas contraire on letrou-
vera mortle lendemain dans les déjections du malade. »
DE L'HOMME. 46:
L'auteur de cette méthode ajoute encore dans ses
remarques, qu'il ÿ a des malades auxquels cesremedes
| me causent ni vomissemens ni selles, et qui cepen-
dant rendent le ver dans l’espace de vingt-quatre
| heures par une selle naturelle. Gette remarque ne
m'étonne pas, car je crois avoir observé que de très-
peutes doses d’aloës et de remèdes drastiques en ge-
néral produisent une plus grande abondance d'excré-
tions alvines aqueuses on séreuses , que des doses
plus fortes de ces médicamens”. ;
J'ai copié textuellement, non-seulement les ordon-
nances, mais aussi toute la méthode de traitement de
Clossius, parce que, dans l'emploi de médicamens
| aussi héroïques, il importe beaucoup d'être informé
| de toutes les mesures de précautions que l’on doit
prendre , et dont la négligence pourrait mettre la vie
du malade en danger.
+ En général, quand il s’agit de donner son avis sur
| l'efficacité ou la non efficacité d’une méthode curative
quelconque, je crois qu’il faut la suivre telle que sou
inventeur l’a proposée; mais’ ordinairement on se
permet de la modifier, de la moderniser, pour ainsi
Mdire, de manière qu'il ne reste à la fin qu’une sorte
| de squelette. £
Nous devons sans doute aux progres de la chimie
| qu'il n’y a plus de médecins aujourd’hui assez igno-
ı J'avoue avoir observé constamment le contraire de ceque l’au-
| teur avance concernant les effets de l’aloës et des autres drastiques.
( Note du traducteur.)
462 SUR LES VERS INTESTINAUX
rans pour prescrire ensemble le tartre vitriolé, l’ar-
canum duplicatum et le sel nommé sal polychrestum
Glaseri, parce que ce serait indiquer la même
chose sous trois noms différens. Mais il y a des
composés d’autres substances médicamenteuses qui
ne forment pas exactement un tel'coniresens chi-
mique (chemisches neutrale), et qui dans leur com-
position agissent d’une maniere toute différente que
chacun des composans pris à part; aussi différente
est Yaction des sels neutres de l’action des acides
et des alcalis, dont ils sont composés; aussi diffé-
rente est, parexemple, l’action de l’opium et celle
des acides minéraux quand On les donne mêlés en-
semble ou bien chacun séparément. La même chose
doit avoir plus ou moins lieu pour d’autres mélan-
ges moins hétérogènes. C’est pourquoi les médica=
mens indigènes que nous voulons substituer aux
exoliques se montrent si peu efficaces. On ne cherche
ordinairement l'efficacité d’un médicament que dans
sa propriété la plus saillante. Si l’on trouve par hasard
cette même propriété dans une autre substance indi-
gene, on s’imagine qu’elle peut remplacer l’exotique,
mais on n'a pas égard au mélange d’autres parties
constituantes, par la raison qu’on ne les considère pas
comme essentielles , tandis que ce sont peut-être elles
qui modifient justement le remède de manière quil
produise tel effet et non pas tel autre.
La vanille, le poivre, la canelle, sont connus sous
le nom d'épices; mais qu’elle est grande la difference
de leur action seulement pour le goût, faculté inhe-
DE L'HOMME. 463
rente à notre individualité; peut-on douter que ces
trois substances n’agissent pas aussi d’une manière
toute différente sur la totalité de notre économie ani-
male. Quelle substance pourrait remplacer , par exem-
ple, le gingembre ? je n’en connais aucune , et cepen-
dant on se permet souvent de le retrancher dans la
préparation de l’elixir acide anglais.
Méruope pe Desauzr. M. Brera s'exprime à ce
sujet de la manière suivante : « Le fameux docteur
Desault avait observé à Bordeaux que les tænias (sans
doute ceux qui sont armés ) s’attachent souvent aux
parois des intestins, de manicre que leur expulsion
est trés-difficile à obtenir; cela lui fit naître l’idée
aussi spirituelle que hardie d’administrer alternative-
ment aux malades incommodés du tænia, des frictions
mercurielles sur le bas-ventre, et deleur donner un re-
mede purgatif chargé d’une forte dose de calomélas. »
. D'après mon idée, cette méthode n’est rien autre
chose qu’une méthode évacuante et qui n'offre aucun
avantage réel en pareil cas; car j'ai déjà dit avoir vu
des personnes qui avaient fait un usage meme immo-
| dere de préparations mercurielles sans avoir pu se
1 ‚ .
| débarrasser de leurs tænias. e
M£rTnope ve Rıcuarv DE HavTtessıerck. 1 pro-
| pose les remèdes su:vans pour détruire le tænia.
Bolus summi-gutiæ. — Ke. gummi-gutie, gr. x; semin. colocynth.,
| n°. ii), cum amygdal. amar. n°. 1. > triturentur et cum syrupo ab-
ı ynih. f. bol. ij.
* Vorlesungen, p. 118, où il cite Venel (Précis de matière mé-
464 SUR LES VERS INTESTINAUX
. 4 it à
Le malade doit prendre ces deux bols en une fois ,
et réitérer leur usage tous les huit jours.
= Pilule felide. — Re. aloës soccotrinæ , asæ fœtidæ , ana unc.j"
salis absynthii, semi-unc. ; olei roris marini, drachm. 1j; cum elix.
ppt. f. piles ST: X) pund. S. ; à prendre matin et soir deux pilules, et
boire par dessus six onces d’une décoction de fougère mâle.
Oprata jovialis. —Re. stanni purissimi, mercurii pivi , ana um. |
stanno liquefacto, adde argentum vivam , pos!quam mizxtura refrixe=
rit , in pulverem cum concharum ppt. unc. j, redigatur. }
Rec. hujus pulveris, conserv@ absynthil, ana une.1) , cum syrupo ab-
synth. f. opiata ; à prendre deux gros dans la journée.
il est à remarquer que le gros en France contient
soixante-douze grains , c’est pourquoi ıl faut toujours
rétrancher un sixième du poids, si l'on veut que la
dose des médicamens corresponde à la mesure alle-
mande. u |
Mivnone DE HERRENSCHWAND. Après avoir fait
un secret de sa méthode pendant long-temps et dans
des intentions qui ne sont pas très-louables, Herrens-
chwand la communiqua enfin à plusieurs médecins;
maisles différentes formulesqu'ilen a données ne s’ac-
cordent pas très-exactement entre elles. Pallas assure
que l'examen chimique que Yon avait fait à Péters=
bourg des remèdes anthelmintiques ‘de Herrens- |
chwand a fait voir qu'ils conteuaient non-seulement du
mercure, mais aussi de l’arsenic et une terre absor-
bante. Herrenschwanda indiqué le traitementsuivant |
dicale , augmenté de notes , eic., Par Carrere. Paris, 1718, 1.15
p. 337-)
DE L'HOMME. 455
dans sa dissertation , et en ces termes : « Le moyen le
plus efficace qui soit venu à ma connaissance pour
|
|
expulser les deux espèces de tænia et qui agit sans
nuire à la santé, consiste à prendre, supposé que
l'estomac soit en bon état, pendant deux jours consé-
culifs, et à deux reprises, c’est-à-dire le matin à jeun,
et le soir , après avoir soupé légèrement, un gros de
fougere mâle pnlvérisée, délayée dans de l’eau ou
enveloppée dans du pain à chanter. Faute de fougere
mâle , on peut se servir de l’autre espèce de fougere,
mais il faut qu’elle ait été cueillie en automne, et
qu’on l'ait fait sécher à l'ombre. Ge remède provisoire
ne cause que peu ou point de gêne. Le troisième jour
le malade doit prendre à jeun la poudre suivante :
Rec. gummi gutlæ gr. xij; sal. absinth. neutr. gr. xxx; sapon.
Siarkei gr. ij; misce intime , d. ad. chart.
Cette poudre excitera, pendant l’espace de deux ou
trois heures, un ou deux voriissemens, et produira
autant de selles, On peut faciliter ces evacuations en
buvant, après chacıne, un verre d'eau tiede ou
quelques tasses de thé. Trois heures après le malade
doit faire usage d’une tasse de bouillon, dans lequel
on aura versé une once d'huile de ricin provenant de
l'Amérique, qui vaut beaucoup mieux que la nôtre;
cependant l’on peut également se servir de la der-
nière, faute de l’autre. Une heure après ie malade
prendra de nouveau une même dose de cette huile,
et si, après un intervalle de deux heures, le ver
n’était pas encore rejeté, le malade sera obligé d’a-
valer une troisième dose. Ce remède purge très-
30
466 SUR LES VERS INTESTINAUX
doucement, et le ver ne tardera pas à être évacné;
mais en cas que cela n’ait pas lieu, on doit adminis-
trer vers le soir un lavement composé de parties
égales d’eau et de lait, avec addition d’huile de ricim,
qui fera rejeter le ver en entier. »
Dans cette prescription il n’est question ni de la
gratiole, ni du mercure doux, ni de la scammo-
née, etc. , quise trouvent cependant dans les prescrip-
tions publices par l’auteur antérieurement. Il paraît
résulter de. l'emploi de medicamens si variés, que
toutes les méthodes lui ont paru insuffisantes contre
le véritable tænia; c’est sans doute la raison pour la- :
quelle il a eu aussi recours à l'huile de ricin propo-
see par Odier, mais cette huile n’a pas non plus,
comme cela a déjà été observé plus haut, de vertu
spécifique contre celte espèce de vers.
Méruope pe Hurerano. M. le professeur Hufe-
land a publié sa méthode dans son Journal de méde-
cine (vol. x, cah. 3, p- 178). 11 fait boire aux malades,
tous les matins à jeun, une d&coction d’ail dans du
lait, et il leur administre dans la matinée , dans l’a-
pres-midi et le so!r, une cuillerée à bouche d’huile de
ricin. Outre cela les malades doivent prendre jour-
nellement une demi-once de limaille de zinc mêlée
avec de la conserve de rose, et faire plusieurs frictions
avec du pétrole sur le ventre. Le soir on doit admi-
nistrer du lait en lavement. Les malades sont en outre
obligés de ne manger que des substances salées et
äcres. Cette méthode doit être continuée pendant
plusieurs semaines conséeutives, et même plus long-
DE L'HOMME. 46;
temps, jusqu’à ce qu’enfin la tête du tiemia ait été
rendue. Dans le cas où cela n’aurait pas lieu , les ma-
lades sont alors forcés de prendre de nouveau les re-
medes déjà cités, mais à plus fortes doses. Ce méde-
cin conseille également l'usage de l’eau de Pyrmont
et de Driburg.
Nous ignorons si cette méthode a été souvent em-
ployéeavec succès ,néanmoins nous pouvonsconclure
de la durée du traitement, que M. Hufeland n’a pas
une grande confiance aux remedes que l’on dit expul-
ser le tænia au bout de trois heures ; et nous croyons
qu'il a parfaitement raison.
Méruope ve Lacene. L'auteur assure, dans une
letire adressée à M. Minaur, qu'il n’a jamais fait un
secret de son remede contre les cestoïdes. Il re-
garde, comme contraire aux devoirs d’un médecin,
de tenir un remède caché quand il peut être utile à
l'humanité souffrante : son mode de traitement contre
ces espèces de vers est le suivant. Le malade com-
mencera par prendre, avant de se coucher, un lave-
ment fait avec une décoction de figues; le matin sui-
vant, à jeun, il fera usage de la poudre suivante dé-
layée dans un ver de vin blanc:
Re. Radic. valerian. s. recent. pulv. drachm. j ; putamin. ovor. cal-
cinat. et ppl. gr. xx; misce.
Le malade restera couché et se couvrira bien; il s’o-
pere alors ordinairement une douce transpiration. On
ne donne au malade, pendant trois heures, ni à boire
ni à manger; ensuite ıl lui est permis de prendre un
potage ; en général, il est obligé d'observer un régime
30,
466 SUR LES VERS INTESTINAUX
sévère pendant tout le temps du traitement. Le ma-
lade doit prendre la même poudre pendant trois jours
consécutifs, et le quatrième jour le purgauf suivant :
Re. mercurü dulcis gr. x; panac. mercurialis gr. iv; diagrydié
sulfurat. gr. xij; syrupi flor. persicor.g. s.ut fiat bolus. d. s.; à prendre
à jeun.
Deux heures après le malade boira un verre de la
Lisane suivante :
Re. fol. senn. mund. une. semis ; infund. in aq. fervid. libr. 1;
adde salis tartarı fixi gr. vüj; diger. per noct. et col. ad usum.
Une heure après on lui donnera un bouillon. L’u- |
sage de cette tisane doit être continué ou suspendu ,
selon qu’elle purge plus ou moins fortement ; dureste,
on gouvernera le malade comme quelqu'un qui a
pris médecine. Le soir on lui administrera de nou-
veau un lavement composé de la manière déjà citée
plus haut. Si l'on a à traiter des personnes robustes,
ou d’autres, qui ont la langue chargee, et chez les-
quelles se remarque un embarras gastrique , ON com-
mencera par les faire vomiravec le tartre stibié donné
en lavage, c’est-à-dire étendu dans une grande
quantité d’eau. Je fais, dit Lagene, répéter ordinai-
rement l’asage de la poudre vermifuge pendant trois
jours, et j’ordonne ensuite la poudre purgative; il
m'est arrivé, ajoute-t-il, plusieurs fois d’être obligé
de revenir sur l'emploi de ce remède une troisième
fois; mais ces cas sont très-rares. La dose des re-
mèdes est calculée pour une personne adulte, et on
la varie selon l’âge et les circonstances.
Je ne doute pas que, par ce traitement, on ne
DE L'HOMME. 469
fasse souvent évacuer les deux espèces de cestoides;
mais il ne me paraît pas certain que les malades en
soient radicalement guéris.
- M&£Truope ve Lievraup. M. Reinlein' l’a fait con-
naître telle qu’elle se trouve indiquée dans le Précis
de matière médicale de Lieutaud. ( Voy.t.1,p.432.)
Elle consiste dans l’emploi des remèdes suivans:
Re. diagryd., cremor. tartar., ana scrup. semis. ; antimonü diaph.
gr. xij; pulv. rad. filic. mar. , mori fructu nigro , ana drachm. semis ;
m. f. pub. d. s.; à prendre à la fois.
Re. pule. sabin. , semin. ruth., ana gr. vu)’, mercurii dulcis gr. iv;
olei essent. lanacet. guti. x); m.f. cum syrupo persicor. bolus. s., à
prendre à la fois le matin, et boire après un verre d’une infusion
vineuse de noyaux de pêches.
Méruope pe Marmieu. Ellea été long-temps tenue
secrète jusqu’à ce que S. M. le roi de Prusse l’acheta ;
elle fut publiée d’abord dans les éphémérides de
Formey, et, plus tard dans le journal de Hufeland.
Voici de quoi elle se compose.
A. Re. Zimat. stann. anglic. pur. une.) ; rad. filicis mar. drachm. vj;
pul. semin. cinæ unc. dimidiam; pule. rad. jalapp. resinos., salis
polrièrest., ana drachm. j; m. f. cum mellis communis sufficiente
quanlitate electuarium.
B. Rc. pue. rad. jalapp. resinos., salis polychrest. , ana scrup. ij;
scammon. Alepp. scrup.j; gummi gullæ gr. x; m. f. cum melli com-
mune electuarium.
Avant de faire usage de ces remèdes , le malade est
obligé d'observer un régime sévère pendant plusieurs
jours. Il se tiendra à l’usage de choses salées, comme
des harengs , etc., d’un potage de pain léger et de 16-
&umes d’une facile digestion. On commence le traite-
* Ueberseizung , p. 179.
470 SUR LES VERS INTESTINAUX
J
ment par l’électuaire A, à la dose d’une cuillerée à
café toutes les deux heures, pendant deux ou trois
jours consécutifs, et même plus long-temps, jus-
qu’à ce que le malade sente les mouvemens du ver
dans les intestins. Lorsque cela a lieu, il doit alors
faire usage de l’électuaire purgatif marqué B, à la :
inême dose que le précédent, et dans les mêmes 1n-
tervales de temps jusqu’à l'évacuation du ver. Dans
le cas où cette évacuation tarde trop à s'effectuer ,
on donne au malade quelques cuillerées d'huile de
ricin fraîchement préparée, ou bien on lui administre
cette huile en lavement. On doit varier la dose de
ces medicamens selon l’âge, le sexe et la consti-
tution.
11 me semble que cette méthode ne valait pas beau-
coup la peine d’être tenue secrète. * $
Miruove pe Nourrer. Madame Nouffer , demeu-
rant à Morat, dans le canton de Berne, a fait beau-
coup de bruit pendant vingt ans consécutifs avec un
remède contre le ver solitaire, dontelle avaithérité de
son mari, et qu’elle a administré à beaucoup de per-
sonnes qui s’etaientrendues auprès d’elle pour se faire
guérir. Pour le bonheur de cette dame il se trouva
dans ce nombre un prince russe nommé Baratinski,
qui rendit, après avoir fait usage de son remède,
quatre aunes de bothriocéphale ; cependant ce ver
reparut six mois après : le prince, qui se trouvait
alors à Paris, invita cette dame à venir le trouver, ce
qu'elle fit en effet, et elle fut assez heureuse pour Jui
* Mongany et Ritter. Voyez Rust magazin für die gesammte heil-
kunde. 8ter band , 2tes heft 1820 , p. 352. ( Br.)
CRE CRE RE RE RE EE TEEEEEEEETEEEEE ones
ae
DE L'HOMME. 471
faire évacuer un ver d’une longueur de huit auncs.
Plusieurs autres personnes furent encore traitées par
elle avec un égal succès. Ces cures si heureuses firent
grand bruit et parvinrent même jusqu'aux oreilles du
roi, qui convoqua une commission dans le but d’exa-
miner le remède de madame Nouffer. Sur le rapport
que fit la commission , le roi l’acheta une somme de
dix-huit mille livres Madame Nouffer indiqua à
MM. Lassonne, Macquer; Couriez de la Motte,
A.-L. de Jussieu, J.-B. Carburi et Cadet, membres
de la commission, la manière de préparer son re-
mede et le mode d'emploi suivant, que nous allons
rapporter dans ses propres termes”.
« Les malades n'ont besoin d'aucune préparauon
particulière jusqu’à la veille de l’administration du
remède. Ce jour ils doivent se priver de tout aliment
après le diner, et prendre seulement, sur les sept ou
huit heures du soir, la soupe (n°. 1); un quart-
d'heure après je leur donne un biscuit et un gobe-
let ordinaire de vin blanc, pur ou détrempé avec de
l'eau , ou méme de l’eau toute pure à ceux qui ne sont
pas habitués au vin. Sile malade n’a pas été à la garde-
robe ce jour-là, ou qu'il soit échauffé ou sujet aux
constipations, ce qui est rare quand on a le ver plat,
je lui fais prendre le lavement simple (n°.2), quil
doit garder le plus long-temps qu’il pourra, ensuite
il se couchera et reposera de son mieux.
* Voyez Traitement contre le tænia ou ver solitaire , pratiqué à
Morat, en Suisse, examiné et approuvé à Paris, publié par ordre
du roi. Paris, 1776, de l’infprimerie royale.
5 17795 y
472 SUR LES VERS INTESTINAUX
«Le lendemain de grand matin, environ huit ou
neuf heures après la soupe, ıl prend dans son ht le
spécifique (n°. 3), et pour faire passer les nausées
qui viennent quelquefois à la suite, il mäche du ci-
iron ou autre chose semblable, ou se gargarise la
bouche avec quelque liqueur’, sans rien avaler , ou il
se conteute de respirer du bon vinaigre. Si, malgré
ces précautions , les nausées sont trop fortes, si les
efforts du malade pour garder le spécifique sont im-
puissans, il en reprendra une nouvelle dose dès que
les nausées seront passées, et tächera de s’endormir
aussitôt apres.
« Au bout de deuxheures, ıl se levera pour prendre
le bol purgauf(n°. 4) en une ou plusieurs prises, et
boira pardessus une ou deux tasses de thé vert peu
chargé; ıl se promenera ensuite dans sa chambre.
Lorsque la purgation commencera à faire eflet, ıl
prendra de temps à autre une nouvelle tasse de thé
léger jusqu’à ce que le ver soit rendu; alors, et pas
avant, je lui donne un bouillon qui est bientôt suivi
d’un autre ou d’une soupe, si le malade la préfère; il
dine comme on fait un jour de purgation; après le
diner 1l se repose sur son lit, ou va faire un tour de
promenade , se conduisant tout ce jour avec ménage-
ment, soupant peu et évitant les alımens indigestes.
« La guérison est alors parfaite, mais elle ne s’opere
pas avec la même promptitude dans tous les sujets.
Celui qui n’a pas gardé tout le bol, ou que ce bol ne
: Les médecins de Genève et de la Suisse française ordonnent ,
pour aiteindre le même but, une tasse de café à l’eau bien chaud.
DE L'HOMME. 473
purge pas assez, prend , au bout de huit heures , de-
puis deux jusqu’à huit gros de sel de Sedlitz, ou, à
son défaut , de sel d’Epsom dissous dans un petit go-
belet d’eau bouillante. On varie la dose selon le tem-
pérament et les circonstances.
«Si le ver ne tombe pas en peloton, mais qu'il file
(ce qui arrive particulièrement quand le ver est en-
gagé dans des glaires ienaces qui ont peine à se déta-
cher), le malade doit rester à la garde-robe sans le
tirer j et boire du thé léger un peu chaud. Quelque-
fois cela ne suffit pas, et l’on a recours à une dose de
sel de Sedlitz, sans changer de position jusqu’à ce que
le ver soit rendu.
« 1l est rare que les malades qui ont gardé le spe-
cifique et la purgation ne rendent pas le ver avant
l'heure du diner : ce cas particulier a lieu lorsque le
ver tué reste en gros pelotons dans les intestins, de
facon que les matières, ordinairement plus claires
“sur la fin de la purgation, passent au travers et ne
V’entrainent pas. Le malade peut alors diner, et l’on a
observé que le manger, joint à un lavement, con-
courait à la sorue du ver.
« Quelquefois le ver sort par l’action seule du spé-
cifique, avant qu’on ait pris le bol, alors on ne lui
donne que deux uers de celui-ci, ou on lui substitue
le sel.
? Sitôt que le tænia paraît hors du recium, il faut plonger sur-
le-champ la partie sortie dans du lait ou de l’eau tiède; ce seul
moyen suffit souvent, dans le cas où le ver jouit encore de la vie,
Pour opérer promptement la sortie du reste. ( Note du traducteur.)
454 SUR LES VERS INTESTINAUX
« Les malades ne doivent pas s'inquiéter des cha-
leurs et des malaises qu'ils éprouvent quelquefois
pendant l’action du remède avant ou après une forte
évacuation, ou lorsqu'ils sont prêts à rendre le ver;
ces impressions sont passagères et se dissipent d’elles-
mêmes, ou à l’aide du vinaigre respire par le nez.
« Ceux qui ont vomi le spécifique et le bol, ou qui
n’en ont gardé qu’une partie, ne rendent quelquefois
pas de ver ce jour-là; je leur fais reprendre le soir la
soupe (n°. 1), le biscuit, la boisson, et, suivant les
circonstances , le lavement (n°.2). Si le ver ne sort
pas dans la nuit, je donne , le lendemain de bon ma-
tin, une nouvelle dose de spécifique, deux heures
après six à huit gros de sel, et je dirige du reste mon
malade comme le jour précédent, à l’exception du
bol , que je supprime.
« J’ai remarqué queles grandes chaleurs diminuent
un peu l’action de mon remède, aussi j'ai toujours
préféré de l’administrer dans le mois de septembre.
Quand je n’avais pas le choix de la saison, et que je
me suis vu obligée de traiter des malades dans les
jours les plus chauds de l’été, je donnais le spécifique
de très-grand matin. Avec cette précaution je n'ai re-
marqué aucune différence dans les effets ni dans les
suites, »
Le ver solitaire: est le seul sur lequel le remède de
madame Nouffer a une action certaine, quoiqu’elle le
: Les membres de la commission ont appelé de préférence le
bothriocéphale ver solitaire , pour le distinguer du ver cucurbi-
tain, nom qu'ils ont appliqué au tenia solium.
CREER
DE L'HOMME. 475
regarde aussi comme trés-utile contre le véritable tæ-
nia ; elle avertit pourtant que ce dernier est beaucoup
plus difficile à déraciner , et que, pour en guérir , ıl
faut répéter le traitement plus ou moins souvent.
Apres cette déclaration ‚il fut décidé que le 23 juin
on procéderait aux premières experienges qui de-
va'ent constater la bonté du remède demadame Nouf-
fer. Cette dame, de concert avec M. Mottet (ancien
conseiller secret et chirurgien de la ville de Morat,
et depuis environ huit ans confident de sa mé-
thode de guérir cette maladie), administra, en pré-
sence des membres de la commission, suivant le
procédé indiqué, la soupe, le lavement, le spécifique
et le bol purgatif à cinq sujets différens, en pré-
venant qu'un seul avait décidément le ver solitaire,
et qu’elle ne proposait que celui-là pour l'essai de
son remède. Le second et le troisième malades étaient
incommodes du véritable tænia, et les quatrième et
cinquième étaient seulement soupconnés d’être affee-
tés de vers.
Ce premier essai ayant prouvé que le remède pro-
posé était efficace dans le premier cas, et en général
nullement dangereux , les membres de la commis-
sion jugerent qu'il convenait de répéter eux-mêmes
les expériences sur de nouveaux sujets, et pour les
mettre à portée de les faire, madame Nouffer leur
donna les recettes suivantes :
Ne. 1. La soupe. Prenez une livre et demie d’eau ordinaire , deux
à trois onces de bon beurre frais et deux onces de pain coupé en
petits morceaux , ajoutez-y la quantité suffisante de sel pour l’as-
476 SUR LES VERS INTESTINAUX
saisonner , cuisez le tout à bon feu , en le remuant souvent jusqu'à
ce qu'il soit bien lie et réduit à une bonne panade.
N°. 2. Lavement. Prenez feuilles de mauve et de guimauve , de
chacune une petite poignée, faites-les bouillir dans suffisante
quantité d’eau , mêlez-y une pincée de sel ordinaire, et après avoir
coulé, ajoutez deux onces d’huile d’olives.
N°. 3. Speafique. Prenez deux ou trois gros de la racine de fou-
gère mâle, cueillie en automne et réduite en poudre très-fine,
donnez cette poudre dans quatre à six onces d’eau de fougère ou
de fleurs de tilleul. Il faut que le malade passe deux ou trois fois
de cette même eau dans son gobelet, et qu'il la boive après s’en
être rincé la bouche , pour n’y rien laisser *.
N°. 4. Bol purgatif. Prenez panacée mercurielle sublimée qua-
torze fois, résine de scammonée d’Alep bien choisie , de chacune
dix grains? ; gomme gutte bonne et fraîche, six à sept grains ; ré-
duisez chacune de ces substances en poudre fine, ensuite vous les
mêlerez ensemble pour en faire un bol avec de la bonne confec-
ton d’hyacinthe.
J’ai rapporté la méthode de madame Nouffer dans
toute son étendue, parce qu’on la trouve souvent de-
naturée dans les ouvrages qui en ont fait mention.
Les membres de la commission font la remarque,
que la fougère mâle, comme nous le savons tous tres-
bien, est connue depuis très-long-temps comme un
bon remède contre les cestoides, et que beaucoup de
: L'eau de tilleul ou celle de fougère ne sont pas absolument
nécessaires et peuvent être remplacées par l’eau simple. Madame
Noufler ne regardait pas cette différence comme fort importante.
2 Dans quelques prescriptions l’on trouve indiqué douze grains
au lieu de dix ; cela provient , comme nous avons déjà remarqué ,
de la différence qui existe entre la mesure allemande et la mesure
française.
DE L'HOMME. 477
inedecins célèbres l’ont recommandée de temps à au-
tre ; ils ajoutent que ce remède est tombé dans lou-
blı, comme beaucoup d’autres, parce qu'il n’a pas
toujours répondu à l'attente que l’on s’en était pro-
mise, ce qui a pu bien provenir de ce qu’on n’avait pas
bien décrit la manière et le mode de son emploi, ou
bien que l’on s’était écarté de la route prescrite, dans
le but de faire de prétendues améliorations.
Je crois plutôt que cela dépendait de ce que lon
ne savait pas toujours distinguer les deux genres de
vers, comme cela arrive encore tres-souvent aujour-
d'hui.
Cette remarque ne peut cependant pas atteindre
messieurs les membres de la commission, qui ont
observé très-expressément , à la fin de leur rapport,
que l’on a fait différens essais de ce remede , et même
à plusieurs reprises, sur des personnes incommodées
par le véritable tænia, et qu’il a toujours manqué son
effet.
Néanmoins, beaucoup de médecins allemands
administrent encore actuellement le reméde de ma-
dame Nouffer, quoiqu'ils n’aient en général que le
véritable tæwia à combattre. Il n’y a pas même long-
temps, que l’Observateur autrichien nous a fait con-
naître en entier comme un secret nouvellement de-
couvert, après qu’un charlatan francais venant de
Pétersbourg l’eut débité pendant quelque temps à
Vienne, le mode de traitement de cette dame, à la
différence près, que ce charlatan employait l'huile
de ricin au lieu du bol purgatif. Il est bien vrai qu'au
478 SUR LES VERS INTESTINAUX
grand étonnement de tout le monde, ce prétendu
médecin fit évacuer plusieurs fois, dans l’espace de
quelques heures, des morceaux de tænia plus ou
moins longs , mais avant que trois mois fussent écou-
les, les malades en rendirent spontanément de nou-
veaux. Plusieurs personnes qui avaient pris le remède
jusqu'à deux ou trois fois sans. être guéries, se sont
par la suite adressées à moi.
Quoique quelques malades nt O du bo-
_thriocéphale n’aient pas été entièrement guéris après
avoir fait usage du remède de madame Nouffer ,
comme par exemple le prince Baratinsky , et une au-
tre personne observée par Odier, néanmoins il faut
avouer que ce remède est efficace dans le plus grand
nombre de cas, si toutefois on l’administre exacte-
ment selon les prescriptions ci-dessus indiquées; car
c’estatort, (comme cela a été justement remarqué par
messieurs les membres de la commission) que l’on a
coutume de donner des purgatifs conjointement avec
la fougère. Celle-là doit d’abord détruire le ver, ou
le forcer à se détacher des parois des intestins avant
de l’expulser. En joignant ces deux remèdes ensem-
ble, le purgatif entraîne le vermifuge avant que ce-
lui-ci puisseagir efficacement contre le ver. Sennert*
* Ideoque fortioribus medicamentis opus est, ut interficiantur (sc.
Zlumbrici lati) quapropter etsi in terelibus purgantia cum interficientibus
commode admisceantur : præstat tamen , nulla its purgantia primum
admiscere, cum purgantia non sinant medicamenta vermes interficentia
diu in intestinis hœrere , sed ea citu per aleum secum educant. Si vero
prius exhibeantur medicamenta , que ipsum debilitant, totus rotundus
DE L'HOMME. 479
avait déjà fait cette observation. Si l’on donne au con-
traire le purgatif plus tard il entraînera facilement le
ver tué, ou qui, s'il est encore vivant, se sera pour
le moins déja détaché des parois des intestins, si
toutefois on a tâché auparavant de rendre le canal
intestinal glissant. Cela s'opère ici à l’aide de la pa-
nade grasse , qui offre encore, dans mon opinion,
Vavantage que le bol drastique n’irrite pas trop les
intestins; car les membres de la commission ont
remarqué qu'ils n’ont jamais observé de suites fä-
cheuses après l'emploi de ces remèdes, et que les
malades étaient bien portans le jour suivant. Ces mé-
decins n’avaient pas donné, dans les premiers essais,
le bol en entier, ce qui avait retardé beaucoup son
effet, de manière que le ver ne fut évacué que dans
la nuit ou même le lendemin. Le bol, administré
entier, l’expulsa tres-vite, et sans danger pour le
malade.
Méruone Dp'Opter. Cette méthode ne diffère de
celle de madame Nouffer, qu’en ce que M. Odier
prescrit, en place du bol purgatif, trois onces
d'huile de ricin, dont il fait prendre une cuillerée
à soupe, de demi-heure en demi-heure dans un
peu de bouillon. Avant la publication du remède de
madame Nouffer, Odier avait déjà employé l'huile
de ricin avec quelque succès contre le bothriocé-
phale; mais il n’en fut pas de même contre le tænia
solium.
Jactus ad pile figuram exil et homo sanus evadit. Voyez ouvrage cité,
p- 420. On oublie avec le temps de pareilles règles.
480 SUR LES VERS INTESTINAUX
METHOoDE DE RATHIER.
Rec. pulo. herb. sabin. gr. xx; semin. ruth. gr. xv ; mercurit dulcis
gr. x; olei dest. tanaceti gr. xij ; syrup. flor. persicor. qu s; ul f. mass.
ex qud form. bol. n.ij.
Le malade prend un de ces bols le matin etun le
soir, mêlé avec un peu de sirop de fleurs de pêcher.
Une demi-heure après il boit un verre de vin, dans
lequel on a fait infuser vingt noyaux de pêches pen-
dant douze heures. |
Cette méthode est la même que celle de Licutaud,
à la différence près que les doses sont plus fortes.
Miéruope DE Scumucker. Ce médecin s'exprime,
sur l'emploi des graines de cévadille contre les vers,
de la manière suivante:
«1°. Je fais réduire en poudre très-fine les cosses
jaunes et oblongues de cévadille, avec les graines
d’une forme pointue et d’une couleur noirätre.
«J'en prends cinq grains dont je fais faire, avec
suffisante quantité de miel, une grosse pilule. De cette
manière je sais au juste la quantité que jordonne au
malade. Je désigne ces pilules sous le nom de pilules
vermifuges.
«Je commence par purger le malade avec une sut
sante quantité de poudre de rhubarbe et de sel de
Glauber, en réglant toutefois la dose selon läge et
la constitution. Le jour suivant j’administre aux
individus d’un âge adulte, surtout au moment où
ils se plaignent de beaucoup de nausées, un demi-
gros de poudre. de cévadille mélée avec une égale
quantité d’olæosacharum de fenouil, aprés quoi il doit
DE L'HOMME. 481
boire d’abord une à deux tasses d’une infusion de fleurs
de camomille ou de fleurs de sureau, et une heure
après une tasse d’eau d'orge. »
« Si l'estomac contient des vers, ceux-ci, irrités par
Ja poudre de cévadille, se meuvent LE qe
ment; ils augmentent par là les nausées etle vomisse-
ment, et ils finissent par être rejetés. Les ascarides
et les lombrics ordinaires, vivans, soumis à l’action
immédiate de cette poudre, se tordent aussi d’une
manière convulsive , el meurent tres-promptenient. »
« J’ordonne le jour suivant une même dose de cé-
vadille qui provoque également des vomissemens;
quand le malade ne rend plus de vers, il ne doit
prendre les troisième et quatrième jours, matin et
soir , que six grains de ce remède, et il se purgera le
cinquiemie jour dans la matinée avec un demi-gros de
rhubarbe et huit grains de résine préparée, ce qui
produira l’évacuation de vers morts ou vivans. Si les
matières fécales ne contiennent pas de ces animaux,
elles seront néanmoins chargées de beaucou p de glai-
res, ce à quotil faut faire attention. Le sixième jour,
le malade ‘doit prendre, matin et soir, trois de nos
pilules vermifuges , et boire après une tasse d’une in-
fusion de fleurs de camomille ou de fleurs de sureau ;
Je huitieme jour il se purgera de nouteau avec le re-
mede deja indiqué ; dans le cas où les matières fécales
seraient encore chargées de beaucoup de glaires, le
malade sera obligé de prendre, les jours suivans, trois
pilules vermifuges matin et soir, et il continuera
ainsi jusqu’à ce que les glaires aient disparu, et jus-
51
182 SUR LES VERS INTESTINAUX
qu'à ce que les matières fécales aient repris leur aspect
naturel; en un mot il continuera l'usage de ces pilules
jusqu’à ce qu'il ne soit plus incommodé par les mémes
accidens qu'il éprouvait auparavant. J’airété oblige
dans quelques cas de continuer les mêmes moyens,
vingt jours de suite, avant de faire disparaître entiere-
ment les glaires. Pendant la durée du traitement, le
malade ne doit presque pas manger de viande ; il doit
au contraire se nourrir de légumes et de laitage. »
« La dose des médicamens dont nous venons de
parler convient seulement aux personnes de l’âge de
vingt ans et au-dessus; pour les enfans de l’âge de
deux à quatre ans, je réduis la poudre de cévadille,
à la dose de deux grains.»
Smucker prétend avoir obtenu l'expulsion des tæ-
nias à l’aide de son remède, je ne Pa jamais employé.
Miéruone pe WeıczL. L'on fait dissoudre une
demi-once ou tout au plus une once de sel de Glau-
ber dans deux livres d’eau de fontaine , et l’on en boit
tous les soirs une tasse; le malade prend, outre cela,
dans la journée, deux fois trente gouttes de l’élixir
vitriolique de Mynsichtou dix gouttes del’élixir acide
de Haller, dans une demi-tasse d’eau commune, ou
bien d’eau sucrée ; l’on continue , selon les circons-
tances , pendanit plusieurs mois, l’usage de ces médi-
camens, et l'expérience a prouvé qu'ils avaient été
efficaces dans plusieurs cas.
Kortum a rapporté une observation où l’usage du
lait de jument a effectué l'évacuation d’un tænia; une
paysanne conseilla à une demoiselle de trente à qua=
DE L'HOMME. 483
rante ans, qui avait un dégoût contre toute espece de
médicament , de boire de ce lait. En effet elle en fit
usage pendant quelque temps quoiqu'il lui causät de
fortes coliques, et enfin elle rendit un tænia à moitié
pourri. Cette seule observation, ce me semble, ne
doit pas nous engager à substituer ce lait à d’autres
vermifuges plus actifs.
Le journal intitulé Allgemeiner „Anzeiger der deut-
schen, année 1817, n°. 295, p. 3332, fait mention
d’un nouveau remède anthelmintique que l’on avait
tiré d’un journal de Londres intitulé the News, du 5
octobre.
Un jeune homme , qui était souffrant depuis long-
temps, et qui avait déjà fait usage inutilement de
beaucoup de remèdes, but tous les matins, par le
conseil d’un maréchal-ferrant, une certaine quantité
d’eau dans laquelle on avait fait infuser du lin vert
pendantune dixaine de jours, et peu de temps apres il
rendit un tænia d’une longueur de huit pieds et demi.
Cependant toutes les méthodes dont nous avons fait
mention jusqu’à présent sont insuflisantes pour dé-
truire entièrement le véritable tænia, eteneffet l’on est
encore à la recherche d’un moyen plus efficace : >,
En Suisse personne ne se donne plus la peine d’es-
* Le docteur Kipke, à Breslau, vient d'inventer un nouveau
remède tres-efficace contre le tænia : il y a lieu de croire que ce re-
mède sera publié sous peu par ordre du gouvernement prussien.
. (Note du traducteur.)
? Voyez Notice sur une nouvelle plante de la famille des rosa-
cées, employée avec le plus grand succès en Abyssinie contre le
31:
484 SUR LES VERS INTESTINAUX
sayer contre le bothriocéphale un autre remède que
celui de madame Nouffer,, etapres l'avoir pris tout au
plus deux fois, on se trouve ordinairement guéri.
Quoique je regarde ces différentes méthodescomme
tænia et apportée de Constantinople par Brayer, D. M. P.; c’est
M. le professeur Kunth , botaniste célèbre, qui s’est charge d’exa-
miner cette plante, presque réduite en poussière. À force de pa-
tience il a reconnu qu’elle appartient à la famille des rosacées,
et qu’elle en forme un nouveau genre. Je joins ici la description
qu’il en a donnée, et dont il a fait lecture à la société d'histoire
naturelle , il ya environ quinze mois.
« M. Brayer , médecin distingué , a apporté de Constantinople
les fleurs d’une plante originaire d’Abyssinie, vantées dans ce
pays-la comme un spécifique certain contre le ver solitaire. Il a été
lui-même témoin de ses prompts et heureux effets dans un cas ex-
trêmement opiniätre. Il a eu la complaisance de me remettre des
fragmens de ces fleurs ; j'y ai reconnu la structure suivante :
» Quatre fleurs pédiceliées, entourées d’autant de bractées mem-
braneuses. Calice tubuleux, persistant, rétréci à son orifice;
limbe à dix lobes , dont les cinq extérieurs plus grands. Cinq pé-
tales très-petits, linéaires , insérés au limbe du calice. Etamines,
12 à 21 , insérées au même endroit, filets libres. Antheres bilocu-
laires. Deux ovaires attachés au fond du calice, parfaitement libres,
uniloculaires , monospermes. Ovule pendant. Deux styles termi-
naux. Stigmates élargis , légèrement lobes. Fruit point observé.
» D’apres ces caractères , cette plante doit être rapprochée du
genre Agrimonia, dont elle ne diffère que par son limbe double,
par ses pétales extrêmement petits, et par ses stigmates élargis,
différences qui suffisent pour constituer un genre distinct. Le fruit
doit être semblable à celui des agrimonia.
» Je propose de donner à ce nouveau genre le nom de Brayera , '
en l'honneur de M. Brayer , à qui nous devons la première con-
DE L'HOMME. 485
plus ou moins insuffisantes contre le tænia, ncan-
moins je les ai rapportées toutes, d’abord pour com-
naissance de cette plante. Le nom spécifique de anthelmintica doit
rappeler ses propriétés anthelmintiques.
BRAYERA (Kunth ). Genus novum ex rosacearum familid, agri--
moniæ proximum , distinctum : calycis limbo duplici, utroque 5-par-
tito; petalis parvis, squamæformibus ; sligmatibus peltato-dilutatis et
inflorescentia ramosa.
Species unica (Prayera anthelmintica ). — Descriptio. — Calyx
persistens; tubus turbinatus , exierne sericeus , interne glaber et de-
cemnervius ; nervi lacinits oppositi ; limbus decempartitus , membra-
naceus , paiens ; laciniæ quinque exteriores magnæ , oblongæ , venosæ,
quinque interiores cum exterioribus alternantes üsque duplo triplove
brevicres, spatulatæ , trinerviæ ; faux conico-prominens , membrana-
cea , apice pervia, glabra.
Petala 5, imæ basi limbi imposita , cum lacınits interisribus aller-
nantia üsque triplo breviora , squamæformia , linearia , glabra , æqua-
La , decidua.
Stamina 12, 13, 18, 21, ıbıdem inserta, subæqualia, pelalis
Breviora. Filamenta linearia? libera, glabra. Antheræ subrotunde ,
didyme , bilocslares , glabræ , longitudinaliter dehiscentes.
Ovaria duo, in fundo calycis sessilia, libera , lineari-oblonga , apice
pilosa et in stylum desinentia , unilocularia. Ovulum solitarium (in
unico ovario vidi ocula duo apposita) , angulo central affızum, pen-
dulum , ovato-oblongum , glabrum. Styli tot quot ovaria , exserti , gla-
bri. Stigmata magna , subpeltata , crenato-lobata et undulata , carnosa
et papillosa.
Fructus. ....
Arbor. Pedunculi ramosi , tereies , molliter pilosi, flexuosi, brac=
teati; ramis alternis. Bracteæ solitarie, integræ. Pubes simplex.
Flores quaterni , pedicellati, bracteis quatuor involucrati. Bracteæ sub-
rotundo-ellipticæ , oblusæ , concave ; tenuiter membranateæ.
Flores in Abyssinid contra teniam adhibentur. (Note du traduet.}
436 SUR LES VERS INTESTINAUX
‚ . A
pléter mon ouvrage, ensuite pour empêcher quele pu-
blic neselaisse tromper et »’achète un anthelmintique
secret, prétendu nouveau, connu peut-être depuis.
long-temps, et enfin pour donner aux médecins la fa-
cilité de pouvoir choisir l’un ou l’autre remède, en cas
qu’ilsrencontrent des malades quise refuseraient à em-
ployer ceux que je vais indiquer ci-après, et comme
cela m'est arrivé dans la personne d’un médecin, qui
préféra expulser quelques morceaux de son tænia
tous les trois mois, à l’aide de la fougere et de huile
de ricin, que de prendre de Fhuile empyreumatique.
SECTION IV. Méthode de traitement de l’auteur, »
Jen’aieuàtraiter que trois personnes incommodees
par le bothriocéphale; la premiere était une femme
suisse que j'ai guérie radicalement à l’aide de l'huile
vermifuge de Chabert, quoique lon n'ait trouvé
aucune trace de ce ver dans les matières stercorales.
La seconde était une femme de Pétersbourg, qui vint
me consulter en 1812. Je lui administrai la fougère et
l'huile de ricin , afin d’expulser son bothriocéphale
entier, ce qui eut lieu en effet. J’ai déjà fait mention
plus haut de la troisième personne à laquelle j'ai éga-
lement fait rendre un ver de celte espèce.
Je puis assurer avoir traité plus de cinq cents per-
sonnes de différens âges et sexes, même deux enfans
de l’âge d’un an et demi, incommodées par le véri-
table tænia. Parmi cette grande quantité de malades,
il ny en a eu que quatre qui furent obligés de
prendre l’huile de Chabert une seconde fois, savoir
né
DE L'HOMME. 487
trois dans l’année 1814, et le quatrième dans l’année
1817. 1] se présenta en outre, il y a plusieurs années,
yn cinquième malade qui, après en être resté délivré
pendant deux ans, fut de nouveau incommodé par le
tænia ; mais cette personne n'en a plus remarqué de
traces depuis qu’elle a fait de nouveau usage du même
remède ; tous mes autres malades, autant que je le
sache , n’ont pas eu de rechutes depuis le traitement
que je leur ai fait subir.
L'on me demandera peut-être si j'ai eu occasion de
m’informer auprès de toutes ces personnes, au bout
de trois ou quatre mois, si elles n'ont pas rendu de-
puis le traitement quelques morceaux de tænia. Je
suis obligé d’avouer franchement de n’en avoir vu à
cette époque, et encore toujours par pur hasard , que
le plus petit nombre; mais on me demandera encore :
d’où savez-vous qu’elles soient restées débarrassées ?
Je le sais, 1°. par la raison qu’elles ne se sont pas fait
voir chez moi; car un homme soulagé de souffrances
doit à son médecin de la reconnaissance , mais en gé-
neral on aime assez à pouvoir s’en dispenser. Si un
malade au contraire est inutilement tourmenté par les
médicamens que son médecin Jui a prescrits, il ne
manque jamais de lui dire, avec une espèce de satis-
faction : vous m’aviez promis de me guérir el vous
n’avez pas tenu parole, ce qui m'est arrivé en effet
bien souvent aussi long-temps que j'ai suivi la me-
thode d’Alston. 2°. Je conclus du nombre assez con-
sidérable de malades que j'ai eu souvent occasion de
revoir depuis letraitement, aux autres que j'ai perdus
483 SUR LES VERS INTESTINAUX
de vue , et de la santé desquels je recois maintes fois
des nouvelles par de nouveaux malades qui m'ont été
adressés par eux.
Je commence le traitement par l’électuaire n°. 1 ';
je le donne de la manière? que j'ai indiquée lorsque
j'ai parlé du traitement qu’il faut employer contre les
ascarides. Sitôt que la première portion de cet élec-
tuaire est finie, je commence l’emploi de Fhuile em-
pyreumatique de Chabert, à la dose de deux cuille-
rées à café matin et soir, mélée avec un peu d’eau. Ce
médicament a une odeur que beaucoup de personnes
n'aiment pas; cependant son goût ne me paraît pas
désagréable: je conseille aux personnes qui, après en
avoir fait usage, veulent se débarrasser de son odeur,
d’avaler quelques gorgées d’eau avec un certain effort,
et je leur conseille en outre de ne pas se rincer la
bouche; car il pourrait arriver alors que quelques
parcelles de ce médicament fussent poussées dans les
fosses nasales, et l'on ne serait pas alors quitte de long-
temps de sa mauvaise odeur.
Pour corriger le goùt désagréable de ce médica-
ment, l’on fera bien de mâcher, après son usage, un
peu de canelle ou un clou de gérofle ; mais que l’on
se garde bien de manger quelque chose qui causerait-
des renvois, comme par exemple des pastilles de
menthe et d’autres choses semblables, car on aurait
1 Voyez la cinquième section, qui contient la formule des mé-
dicamens employés par l’auteur. ( Note du traducteur. )
a C'est-à-dire à la dose d’une cuillerée à café matin et soir.
{ Note du traducteur. }
DE L'HOMME. 489
le désagrément de renouveler le goût de ce médica-
ment avec chaque éructation.
La dose de deux cuillerées à café deux fois par jour
est en général supportée très-bien par des personnes
de tout âge’; il est cependant des personnes qui ne
* I! me semble que l’auteur emploie ce médicament , notamment
dans le commencement , à des doses trop fortes. Toute réflexion
faite , il est beaucoup plus prudent, et on ne s’exposera pas à faire
naître d’accidens fâcheux, surtout chez les enfans, si on com-
mence l’usage d’un médicament aussi violent à petites doses, que
l’on est toujours & même d'augmenter quand on voit qu’elles ne
causent aucune incommodité au malade,
Dansle seul but de savoir quel effet cette huile produirait sur mon
corps , je m'étais décidé, il y a à peu près unan , à la prendre de la
manière prescrite par l’auteur , quoique je prévisse, et avec raison,
comme On verra par la suite, qu’elle ne me conviendrait pas. Je
dirai, par parenthèse, que l'huile de Chabert dont je fis usage
avait été préparée avec le plus grand soin par M. Faguer, très-ha-
bile pharmacien à Paris. A peine en avais-je pris deux cuillerées à
café, que je sentis un grand malaise qui fat suivi de coliques , de
nausées ei d’éructations fréquentes, symptômes qui ne cessèrent
que peu à peu vers le soir. Je m'étais proposé de répéter cette ex-
périence le lendemain , mais je me trouvai trop fatigué , et je la
remis au surlendemain. Quoique je n’eusse pris ce jour-là qu’une
cuillerée à café de ce remède, cependant les mêmes symptômes,
quoique moins violens, se renouvelèrent, ce qui m'engagea à
ne faire usage , le quatrième jour, que de la moitié d’une cuillerée
à café , et cette fois je fus quitte pour quelques éructations qui me
rappelèrent le goût et l'odeur détestables de ce médicament. J'ai
rapporté ce fait, non pas dans l'intention de faire croire que
V’huile de Chabert, à la dose que je l’ai prise , causerait à tout le
monde les mêmes accidens , une telle assertion aurait les expé—
riences multipliées de M. Bremser contre elle: mais ce fait prouve
490 SUR LES VERS INTESTINAUX
peuvent pas prendre une aussi forte dose de ce médi-
cament sans éprouver une grande irritation et même
de légers étourdissemens ; en pareil cas on diminue
un peu la dose. Ces accidens n'arrivent souvent qu’au
commencement, et le malade supporte par la suite le
remède plus aisément. Quelques personnes peuvent
le prendre très-facilement à jeun, mais celles aux-
quelles il causerait des nausées feront bien de n’en
faire usage qu’une heure et demie après avoir dejeune.
Il est des cas où ce remède cause aussi une chaleur
dans les voies urinaires et dans les intestins; quel-
ques verres d’orgeat ou quelques cuillerées d’une
émulsion huileuse , font assez facilement cesser ces
accidens.
cependant que j'aurais agi beaucoup plus prudemment et que j'au-
rais probablement évité tous les accidens , sij’avais commencé par
ne prendre que la moitié d’une cuillerée à café. |
Qu'il me soit encore permis une remarque. Je ne puis pas
croire que l’huile de térébenthine ajoutée à l'huile animale de
Dippel (mélange qui forme l’huile de Chabert) puisse augmenter
de beaucoup les vertus vermifuges de cette dernière, qui, prise
seule, agit dejà d’une manière si efficace contre toute espèce de
vers. Ce qui paraît confirmer mon opinion, ce sont les cas rap—
portés par plusieurs médecins , où l'huile de térébenthine donnée,
même à la dose de plusieurs onces , n’avait pas opéré la destruc-
tion des vers. Du reste Chabert , comme je viens de l’apprendre de
M. le docteur Schwediaur, n’a ajouté l’huile de térébenthine à
celle de Dippel que dans l’intention de rendre le goüt de cette
dernière un peu moins mauvais, et de former par ce melange un
médicament à la fois purgatif et vermifuge. ( Note du traducteur. )
: Ces accidens prouvent assez que nous devons être circons—
pects dans l’emploi de cette huile. (Note du traducteur.)
DE L'HOMME. 4ox
Apres que le malade a pris deux onces et demie ou
trois onces de cette huile, ce qu’il peut faire à peu près
dans l’espace de dix à douze jours, je lui ordonne un
léger purgatf, par exemple les poudres n°. 3; en-
suite il doit recommencer l’usage de l'huile. J’en
fais prendre ordinairement quatre à cinq onces dans
le cours d’un traitement ; mais dans le cas où le ver
aurait déjà résisté à beaucoup d’autres medicamens,
j'emploie six à sept onces de l'huile empyreumatique.
J'avoue que le traitement est un peu long, mais son
résultat est certain; il ne cause aucune incommodité,
et n'offre pas le moindre danger. Du reste, il paraît
constaté par l'expérience qu’il faut toujours continuer
le traitement pendant long-temps, si l’on veut entiè-
rement débarrasser quelqu'un du tænia.
Lengsfeld et Geischlæger, médecins de Vienne, qui
avaient gardé leurs vermifuges secrets , les donnaient
à leurs malades pendant un mois consécutif; Dya-
niere a également observé que l’usage des vermifuges
doit être continué pendant long-temps, sı on veut ;
obtenir la destruction entière des vers intestinaux.
Le mode de traitement des deux médecins de
Vienne m’a déterminé à administrer pendant long-
temps et à petites doses l'huile anthelmintique de Cha-
bert. Il est possible que, par ce moyen, la disposition
pour la formation des vers soit entièrement détruite.
Mais il est aussi possible que ce remède n’agisse pas
sur les œufs des vers qui se trouvent dispersés cà et là
dans la mucosité du canal intestinal ; de même que le
492 SUR LES VERS INTESTINAUX
suc gastrique n’agit pas non plus sur une graine en-
tiere, c’est-à dire sur celle qui n’a pas été attaquée
par l’ébullition, et qui est rendue sans être digérée.
En ne donnant qu’une seule fois, mais à forte dose,
l'huile anthelmintique, il se pourrait donc bien
que cela ne produisit que la destruction des vers et
non pas celle de leurs œufs; en continuant au con-
traire l'usage d’un remède vermifuge pendant long-
temps, les vers sortiront ,sur cesentrefaites, des œufs,
et le remède agira alorseflicacement sur eux, du moins
cela ne me paraît pas impossible. Ma méthode d'agir
contre le tænia n’a pas ordinairement besoin d’être
suivie d’un traitement secondaire; c’est seulement
dans le cas où il y a prédisposition à la formation des
glaires, et par conséquent à celle des vers, que jad-
ministre pendant quelques semaines la teinture forti-
fiante marquée n°. 5.
Je ne soumets pas mes malades pendant le traite=
ment à un régime particulier , et je ne les force pas
non plus à faire usage de harengs ou de viandes sa-
lees, etc.; cependant je les engage à ne pas faire abus
de fariveux, de légumes secs et de viandes grasses ; je
leur conseille en général d'éviter tout ce qui favorise
la formation des glaires et des vers.
11 faut que je fasse encore une remarque. Après
l'usage des anthelminthiques ordinaires, vanles sOU-
vent à tort comme très-eflicaces , on est accoutumé de
voir sortir le tænia par longs morceaux. Je préviens
que cela n’arrive que rarement après l'usage de l'huile
DE L'HOMME. 493
de Chabert. Son efficacité consiste à détruire le ver
et à empêcher qu'il ne s'en forme de nouveau; c'est
pourquoi il est rendu pendant les premiers jours, à
moitié ou même entièrement digéré, de manière que
l’on a souvent beaucoup de peine à reconnaître dans
les déjections des traces de sa forme primitive. Du
reste, quant à la tête de l'animal, peu m'importe de
savoir si on l’a trouvée ou non dans les matières éva-
cuées; car deux ou même trois têtes peuvent avoir été
rendues , et les malades n’être pas débarrassés pour
cela de leur tænia, par la raison que plusieurs peu-
vent se trouver à la fois dans le canal intestinal.
Le seul indice certain que le malade en est entière-
ment débarrassé, consiste à savoir qu’il n’a pas rendu
dans l’espace de trois mois des traces de ce ver. Si on
voyait de nouveau, deux ou trois ans après, des
traces de tænia, elles proviendraient alors bien cer-
tainement d'individus nouvellement formés, qui ce-
pendant ne doivent pas être regardés comme les pe-
tits de ceux contre lesquels on avait employé le re-
mède.
SECTION V. Des formules de médicamens de l’auteur.
N°. 1. Re. Semin. cine. S. tanacet. rudit. contus. ; zB; pul. va-
lerian. 5. , 31) ; jalapp. 3jß-3ij ; tartar. vitriolat. > 38-31); Oxy-
mel. scillit. ,q. s., ut f. electuar. d. S : à prendre deux ou trois cuil-
lerées à café par jour”.
* Cet électuaire , ainsi que l’huile empyreumatique de Chabert,
sont sans doute les meilleurs vermifuges que nous connaissions,
mais ils offrent l'inconvénient d’être d’un tres-mauvais goüt, ce
494 SUR LES VERS INTESTINAUX
Je me sers de cet électuaire depuis plusieurs an-
nées avec le plus grand succès contre toutes les es-
pèces de vers intestinaux. Cette composition me
paraît une des plus convenables, sauf meilleur avis,
pour atteindre le but que l’on se propose pendant le
traitement de la maladie vermineuse.
Le semen contra, ou en sa place les graines ou plu-
tôt les fleurs bien développées de tanaisıe, ont tou-
jours été regardées comme de bons vermifuges. Le
semen contra , tel qu’on le trouve ordinairement dans
les pharmacies, c’est-à-dire très-finement pulvérisé,
qui fait que beaucoup de personnes, et surtout les enfans, ne
veulent pas les prendre. Pour le premier de ces médicamens, on
peut remédier à cet inconvénient en donnant la dose prescrite par
l’auteur , qui est de deux cuillerées à café (environ deux gros pe-
sant ) par jour sous forme de pilule. Quant à l’huile de Chabert,
elle ne peut guère être employée sous cette forme; d’abord elle
s’evaporerait à la longue entièrement ; en outre il faudrait une trop
grande quantité de masse pilulaire pour absorber les quatre cuil-
lerées à café formant la dose à consommer dans une journée. Ne
connaissant aucun moyen propre à administrer cette huile d’une
manière plus convenable , je me suis adressé à M. Page, pharma-
cien distingué (successeur de M. Faguer). Après plusieurs essais
qu'il a eu la bonté de faire, il a trouvé que deux parties de sirop
de limon ajoutées à une d'huile empyreumatique, corrigeaientassez
bien son goût désagréable. Un autre moyen que M. Page m’a in-
diqué , atteint plus directement le but que je m'étais proposé; mais
il est un peu plus embarrassant dans l’exécution ; il consiste à ajou-
ter à l'huile empyreumatique, au moment où on veut en faire
usage , suffisante quantité d’une poudre vermifuge , de manière à
former une espèce d’electuaire qui , divisé par petits bols , pour-
rait être pris dans du pain à chanter. (Note du traducteur. )
DE L'HOMME. 495
conservé depuis long-temps et privé par conséquent
en grande partie de son odeur et de son goût parti-
_culier, n'est pas un remède très-actif. Je n’emploie
ces graines que légèrement concassées, et, données
sous cette forme, je m’imagine qu’elles ne sont pas
tout a fait décomposées dans l'estomac , et qu’elles
agissent par conséquent sur les vers d’une manière
mécanique. Supposé même que cela ne se passe-
rait pas ainsi, il est toujours permis de présumer
que des graines ainsi préparées auront encore con-
serve, en arrivant dans les intestins greles (séjour des
ascarides et des cestoïdes ) une bonne partie de leur
vertu spécifique.
La valériane n’est pas seulement connue comme un
excellent vermifuge, mais aussi comme un des meil-
leurs antispasmodiques ; ajoutez à cela que son em-
ploi offre si peu de contre-indications. Comme du
reste le système nerveux est ordinairement plus ou
moins affecté dans les maladies vermineuses, je crois
que personne ne voudra retrancher la valériane de
cette formule. |
Le jalap donné avec les précautions convenables
est, ce me semble, parmi tous les purgatifs, celui
qui affaiblit le moins le canal intestinal , et il mérite-
rait même qu'on l’appelät un purgatif tonique. Le
jalap est, en un mot, un des remèdes les plus propres
à dissoudre et à expulser les glaires et les matières f€-
cales stagnantes.
Le sulfate de potasse occupe depuis long-temps
une place parmi les meilleurs purgatifs. Je le préfère
496 SUR LES VERS INTESTINAUX
à tous les autres, parce qu'il se dissout très-diffcile-
ment, ce qui est la raison pour laquelle il agit d’une
manière plus lente, mais d’autant plus certaine. Le
sulfate de potasse doit être regardé comme un remède
qui dissout les glaires tenaces et qui provoque, en
irritant le canal intestinal, des excrétions séreuses à
l'aide desquelles les glaires détachées et atténuées sont
entraindes. Du reste, en l'administrant à une dose
aussi petite que celle indiquée dans la formule, on
n’a pas à craindre qu'il produise des selles aqueuses
qui affaibliraient le malade.
L’oxymel scillitique n’a pas été choisi non plus au
hasard comme véhicule. Cette substance est connue
depuis long-temps comme un excellent dissolvant,
mais elle est encore douée de propriétés à l’aide des-
quelles elle se montre ici utile d'une manière indi-
recte. L’oxymel scillitique augmente, comme nous
le savons, la sécrétion des reins, de la peau et des
poumons. À mesure que ces organes opèreront une
augmentation dans la sécrétion des matières qui mo-
lestent le corps animal, les intestins en seront d’au- !
tant moins chargés, par conséquent il s ’accumulera
non-seulement dans ceux-ci une moins grande quan-
tité de mauères qui peuvent contribuer en partie à la
production des vers, mais encore lechyle provennuf
des alimens serä alors aussi plus pur et plus propre à
rétablir les forces physiques et l'harmonie dans les
fonctions.
Il est possible que ma manière d'envisager l'action
de chacun de cesmédicamens en particulier ne soit pas
DE L'HOMME. 497
tout-à-fait exacte, mais je puis toujours assurer que
le remède, tel qu’il a été indiqué, ne m’a jamais
trompé dans mon attente.
N°. 2. Re. herb. absinthi, rad. valerian. S., ana unciam unam ;
semen. tanacet. , cortic. aurant., ana unciam dimidiam, c. c, m. d. S!
On verse sur deux cuillerées à bouche pleines de ces substances À
une livre d’eau bouillante ; cela fait , on couvre le vase , et on laisse
infuser ces substances pendant une nuit; ensuite passez, exprimez
etemployez l’infusion pour deux lavemens. On ajoute à chacun une
cuillerée d'huile empyreumatique de corne de cerf.
N°. 3. Rec. pub. rad. jalap., scr.j ; fol. senn., drach. dimidiam ;
tartar. vitriol, drach. unam ; m. f. pulo. divid. in ti] vel iv part. æq.
d. 5. Prendre toutes les heures un paquet, ou toutes les demi-
heures un demi-paqnet, jusqu’à ce que cette poudre opère.
N°. 4. Huile anthelmintique. (La manière de la préparer a été
indiquée page 427.)
Ge remède a été inventé par Chabert, qui l’a
souvent administré avec succès aux animaux, dans le
but de les débarrasser des vers de toute espèce; il a
également fait rendre, à l’aide de cette huile, des
douves du foie à une petite fille de douze ans, comme
cela a été rapporté par M. Rudolphi. (Foy. Voye ge,
vol. 11, p. 37.)
Goëze avait déjà recommandé cette huile aux mé-
decins , afin de la soumettre à un examen particulier.
Il en est de même de Brera’, et Rudolphi° la re-
regarde comme le vermifuge par excellence.
Chabert a bien indiqué à quelle dose il faut la
Vorlesungen, p. 111,
2 Entoz. 1, p. 493.
32
495 SUR LES VERS INTESTINAUX
donner aux animaux, mais personne n’a encore in-
diqué jusqu’à présent celle qu’on peut administrer
aux hommes. À yant grande envie de la faire prendre
à mes malades , sans cependant vouloir les exposer à
des accidens qui auraient pu me mettre dans l’embar-
ras, je me suis décidé à l'essayer d’abord sur moi-
même, quoique je ne fusse pas incommode de vers.
Je commencai par en prendre de très-petites doses,
que j'augmentais peu à peu ; le goût et l'odeur de ce
remède n’ont rien de désagréable pour mol. Voyant
qu'ilne me causait pas la moindre incommodité, je
l'ai ordonné à mes malades, et je n'ai jamais remar-
que qu'il ait causé d’accidens fâcheux, si toutefois ıl
avait été administré avec les précautions convenables.
Une cuisinière s'avisa d'en boire un flacon entier,
c’est-à-dire plus d’une once dans une nuit, ce qui lui
causa en effet des coliques assez violentes, qui se dis-
sipèrent cependant entièrement vers le soir, après
l'usage d’une émulsion huileuse.
No. 5. Teinture fortifiante. — Rec. tinctur. alves compos. pharm
ausir., drach. unam; tinctur. martis pomat. , unciam unam ; elix. Di
triol. anglic. pharm. Lond., unciam dimidiam , M. d. $.; à prendre
dix, vingt, trente et plusieurs gouttes, trois à quatre fois par
jour dans un peu d’eau ou de vin.
Le remède connu sous le nom de tinctura aloes com-
posita , est le même que l'on appelait autrefois elixi-
rium proprietatis dulce ; ıl est com posé d’aloes, de
myrrhe et de safran ; et, donné à petites doses, il agit
comme un excellent tonique, et tient le ventre hibre-
Le fer, surtout lesulfate de fer, a été placé par
DE L'HOMME. 499
plusieurs médecins parmi les vermifuges ; mais nous
avons déjà fait remarquer qu’il mérite seulement ce
ütre, en tant qu’il empéche, par le rétablissement
des forces physiques et du mélange convenable des
humeurs, la production des vers; mais en pareil cas
1l se montre comme un remède des plus exquis, si
toutefois le canal intestinal avait été préalablement
débarrassé de glaires tenaces et épaisses.
L'élixir connu sous le nom d’eixirium vitrioli an-
glicanum porte également celui d’elixirium vitrioli
Mynsichti. Je le fais toujours préparer d’après la phar-
macopée de Londres, et non pas d’aprés celle d’Au-
triche.
Je me sers de ces gouttes fortifiantes que l’on peut
sans doute appeler un remède trés-compliqué non-
seulement à la fin d’un traitement contre les vers;
mais je les administre aussi avec beaucoup de succés
dans les cas de chlorose , de blennorrhagie etde ma-
ladies semblables, bien entendu lorsqu'ik y a indi-
cation.
Afin qu’un critique n’ait pas occasion de m’objec-
ter que la teinture appelée tinctura martis Pomata se
trouve décomposée dans le mélange ci-dessus indi-
que, je dois le prévenir que je le sais tres-bien, et
| que je le savais déjà lorsque je l'ai employée pour la
premiere fois. J'avoue cependant n'avoir Pas encore
cherché à savoir combien de fer se trouve transformé,
par l'acide sulfurique contenu dans l'élixir anglais ,
en sulfate de fer, et combien de malate de fer se pré-
37.
5oo SUR LES VERS INTESTINAUX
cipite dans ce mélange. Tout ce que j'ai appris par
l'expérience, c'est que l'emploi convenable de ces
gouttes change la couleur pâle des lèvres en rouge, et
donne au teint une couleur plus animée, rend les
muscles plus vigoureux, en un mot forufie tout le
corps, et cela me sufht.
RU EL UT LUEUR LULU DUBAI VERRE LEVEL URL LES
“ APPENDICE
PAR M. H.-D. DE BLAIN VILLE.
L'OUVRAGE de M. le docteur Bremser „dont nous venons de
donner la traduction aussi littérale qu’il a été possible au docteur
Grundler , a été apprécié comme il devait l’être par les journaux
de médecine de presque toutes les nations européennes, et tous
en ont fait un éloge mérité ; un seul peut-être en a donné une cri-
tique évidemment passionnée : et t'est en Italie, dans ce pays où
toutes les connaissances humaines ont repris naissance, où l’hel-
minthologie a évidemment commencé , comme le prouve le Traité
de Redi, que cette critique a été publiée ; elle a été ensuite répandue
avec profusion en France, en Angleterre et même en Allemagne ;
mais ce n’est que dans ces premières contrées que , par un abus
blämable , elle a passé dans les journaux de médecine en extrait et
sans en indiquer la source. C’est M. Raickem qui la traduite en
français en Italie, sans doute sous les yeux de son auteur , en pas-
sant sous silence plusieurs passages de l’analyse italienne, qui lui
ont avec raison paru peu convenables ; et il l’a introduite dans le
Nouveau Journal de médecine de Paris , octobre 1820. Un extrait de
cette même critique a été inséré dans le Medical Journal de Londres,
novembre 1820 et janvier 1821 ; en eflet il est sans nom d’au-
teur, il contient les mêmes objections , fausses ou vraies, et,
bien plus, les mêmes inexactitudes et oublis, comme l’a démontré
clairement M. Bremser, dans un article en réponse à cet ex-
trait du même journal anglais. M. James est le seul qui ait pris la
peine , bien inutile à ce qu'il nous semble , d’en faire une refuta—
tion qui aurait pu aisément être plus vigoureuse. Nous ne nous
arreterons pas à relever nous-mêmes les nombreuses imputations
erronées qu’elle contient , et entr’autres , que M. Bremser re—
garde le cinquième chapitre de son ouvrage comme un chef-
502 APPENDICE.
d'œuvre; car dans tout le livre cette expression n’est employée
qu’à l’occasion de l’homme, qu’il appelle le chef-d’ceuyre de la
création ; nous nous bornerons à dire que, quoique fort longue ,
puisqu’elle contient soixante-dix-neufpages d’une justification in-8°
assez serrée, nous l’avons lue avec toute l’attention que méritaient
son objet et son titre : Analisi ragionate delle opere recentamente pu-
blicate sui vermi del corpo umano e degli animali dai chiarissimi si-
gnori dottor Bremser di Vienna ei cons. Rudolphi di Berlino, mais nous
n’yavons rien trouvé de cette critique éclairée et de la bonne foi
qui devraient guider tout homme qui s’est arrogé à lort ou à raison
le droit de juger et de porter publiquement un jugement sur les
ouvrages d'autrui. Nous croyons au contraire y avoir remarqué
presqu’à toutes les pages les indices d’un amour-propre blessé
qui se regimbe contre la vérité des observations critiques que
MM. Bremser et Rudolphi ont faites sur beaucoup de points de
l'ouvrage de M. Brera sur les vers intestinaux *. L’analyste tâche
en effet de défendre plusieurs des opinions de ce dernier , et il
V’exalte presque constamment aux dépens des heiminthologues alle-
mands. Nous n’y avons au reste trouvé qu’un très-petit nombre
d'observations justes dont nous ayons pu nous servir dans cet ap-
pendice , où nous allons successivement passer en revue chacun
des chapitres de l’ouvrage de M. le docteur Bremser , en y ajoutant
ce qui nous a paru plus convenable, ce qu'il nous a indiqué lui-
même pour le rendre plus complet, ce que nous avons puisé dans
une excellente analyse de l’ouvrage de M. le docteur Bremser par
feu le docteur Albert , inséré dans la Gazette de Salzbourg (n° xx
et 12, février 1820), eten proposant quelque doute sur ce qui
nous semblera plus ou moins erroné.
Sur la formation des vers intestinaux.
La question de physiologie générale que traite M. Bremser, dans
le premier chapitre de la première partie de son ouvrage, ne doit
1 Au sujet de ces critiques, nous sommes cependant obligés de souscrire
au jugement de l’auteur de l’Ælgmeines repertorium , qui dit que celle de
M. Bremser est mordante, et que le style dans lequel elle a été conçue
manque souvent de noblesse.
_ APPENDICE. | 503
pas être placée au nombre de ces questions oiseuses qu'il imporie
fort peu d’envisager. En effet, quand même on ne parviendrait pas
à résoudre complétement le problème qu’elle renferme , il est aisé
de voir que la formation spontanée des vers intestinaux dans l’être
vivant qui les nourrit doit avoir une influence considérable sur les
moyens thérapeutiques propres à les combatire, puisqu’il ne suf-
fit plus, comme on l’a fait long-temps, de chercher à détruire le
ver lui-même; mais qu'il faut essentiellement combattre la dia-
thèse vermineuse , ou l’ensemble des causes de leur reproduction.
Malgré l'importance de cette question, et malgré les argumens
négatifs et positifs apportés dans sa discussion par M. Bremser , il
faut convenir que la génération spontanée d'animaux aussi com--
pliqués que l’ascaride lombricoïde, où les sexes sont distincts sur
des individus séparés , est quelque chose qui paraît répugner à la
raison, surtout lorsqu'on croit que la génération par l’accouple-
ment d'individus semblables soit plus aisée à comprendre.
En étudiant l’histoire de l'esprit humain sur ce point, nous
irouvons que, comme dans tant d’autres , il oscille perpétuelle-
ment d’une opinion à l'opinion opposée. Les anciens physiolo-
gistes, et Aristote à leur tête, admirent la génération spontanée
pour un très-grand nombre d'êtres organisés. La combinaison de
l'humidité , de la chaleur et du limon leur paraissait suffisante pour
former de toutes pièces non-seulement des vers, mais des insectes ;
mais comme ils avaient compris dansle nombre des animaux qui se
reproduisent spontanément des êtres dont la génération n’est
nullement équivoque, comme les mouches, il fut aisé à Redi,
par des expériences positives, de renverser l’opinion d’Aristote;
mais, comme il fut aussi entraîné trop loin , il conclut absolument
l’opposite de l’opinion d’Aristote, et tout animal fut déclaré pro-
venir d’un animal semblable à lui et d’un œuf. Cependant, les
observations s’accumulant , s'appliquant à un plus grand nombre
d'êtres, la plupart des physiologistes prirent dernièrement une
opinion intermédiaire , et semblèrent admettre qu’à l’origine de la
série animale il y a des générations spontanées; enfin aujourd’hui
plusieurs personnes pensent et commencent à professer l’opinion
que toute génération est spontanée, Comment concevoir autrement
la production des animaux microscopiques, que l’on voit pour ainsi
504 APPENDICE.
dire naître sous le champ du microscope dans les infusions végé-
tales ou animales ? mais dans cette opinion on a été encore beau-
coup plus loin , en prétendant que des mélanges de gai pouvaient
donner naissance , en les exposant, dans un ballon bien fermé, à
la chaleur d’un fumier , à des animaux , et même à des animaux assez
élevés , comme M. Frey l’a soutenu dans un ouvrage publié une
première fois en Allemagne , et depuis peu d'années à Paris. Quoi-
que les physiologistes ne passent certainement pas adopter les faits
qui y sont rapportés, cependant comme ils semblent appuyés par
des expériences et sur l'autorité imposante , sous tous les rap-
ports, de M. Berthoilet, nous devons dire que ce savant même les
regardait celles-là comme complétement inexactes.
Avant d'établir sa manière de concevoir le mode de genera-
tion des vers intestinaux , opinion qui s'accorde parfaitement bien
avec ce que dit à ce sujet M. Treyiranus dans le second volume de
sa Biologie, M. Bremser passe en revue et réfute d’une manière
assez sévère, souvent même trop aceıbe , mais irrécusable , les
opinions des auteurs qui l’ont précédé. Etablissant ce dilemme,
admettant ce principe rigoureusement vrai, que ces vers ne peu—
vent provenir que de deux sources où extérieure ou intérieure , il
combat successivement l'opinion de ceux qui veulent que les vers
intestinaux proviennent :
10. De vers de terre ou d’eau qui se seraient introduits dans le
corps animal, en supposant que les vers intestinaux se trouvent
également dans l’eau ou dans la terre.
0. De vers de terre et d’eau, mais ne prenant la forme spéci-
fique des vers intestinaux qu’en arrivant dans le corps animal , opi-
- nion qui est celle de M. Brera, et qui se réfute presqu’avec autant
de facilité que la première; 1°, car s’il est quelques vers intestinaux
qui pourraient laisser quelques doutes , comme les nématoïdes et
les trématodes , il est évident qu’il n’y aura plus de doute pour les
échinorhynques , les cestoïdes et les cystoïdes, dont la forme et
la structure n’offrent rien de comparable avec ce qui existe dans
les autres animaux; 2°. plusieurs animaux ont des vers qui leur
sont propres, quoique bien certainement il y ait des espèces com-
munes à plusieurs animaux ; 30, on trouve des entozoaires dans
toutes les parties de l'animal les plus éloignées du canal intestinal ;
CE
APPENDICE. 505
je ne vois cependant pas qu’on en ait encore trouvé dans le canal
médullaire des os, ni même dans le canal vertébral ; 4°. certains
genres et certaines espèces d’entozoaires ne se trouvent jamais
que dans les mêmes parties et dans les mêmes organes du corps
animal; 5°. tous les entozoaires meurent plus ou moins vite quand
on les a retirés du lieu où ils vivaient et se multipliaient, tandis
que les insectes qui y subissent une partie de leur développement
sont forcés d’en sortir pour le reste, et, à plus forte raison, ne
peuvent y multiplier ; 6°. il existe souvent une grande quantité
d’entozoaires dans un animal, sans que sa santé en souflre; 7°. on
a découvert des entozoaires dans des fœtus nouvellement nés.
Les entozoaires ne sont donc pas des animaux extérieurs qui
auraient pénétré accidentellement dans le corps animal, ou qui y
auraient subi des changemens dépendans des circonstances nou-
velles dans lesquelles ils se seraient trouvés.
Mais quelle est leur origine ?
Ont-ils été communiqués à l’état parfait ou à l’état d'œufs d’un
animal à l’autre, par les alimens solides, liquides ou aériformes ?
ce qui au reste ne ferait que reculer la question.
Cette opinion , soutenue surtout par Pallas, nous paraît soli-
dement réfutée par M. Bremser ; cependant l’auteur de l'analyse de
l'ouvrage de ce dernier inséré dans la Gazette de Salzbourg pense
qu’elle n’a pas été suffisamment développée. Ne serait-il pas pos-
sible, dit-il, que les œufs des entozoaires , ainsi que les graines
de quelques végétaux pussent rester dans des circonstances parti-
culières pendant un long espace de temps sans se développer,
comme les expériences de Leuwenceck , Spalanzani , Fontana, etc. ,
l'ont prouvé pour le rotifère. L’analyste aurait pu ajouter le gordius
aquatique , comme je l’ai observé moi-même, et surtout les œufs
de la limace agreste, d’après les expériences de M. Leechs, sans
que cela rendit l’opinion de Pallas plus admissible, puisque dans
toutes ces expériences il y avait dessiccation préalable , ce qui ne
peut avoir lieu quand l’œuf ou le germe du ver est dans le corps
animal. Quant à la confirmation qu’on pourrait tirer de l’observa-
tion rapportée par M. John Miller Barry, dans les Transactions
des médecins du collége du roi et de la reine en Irlande, vol. x
DES)
1818, qu'une famille dans le voisinage de Macrony en Irlande,
506 APPENDICE.
avait été tellement tourmentée par les ascarides provenant de l’eau
d’une source dont elle faisait usage , il paraît qu’elle peut encore al-
ler avec les autres observations analogues rapportées par M. Brem-
ser, puisqu'il résulte du récit que ce n’étaient que des larves.
Ainsi, après avoir successivement montré que cette communica-
tion ne peut avoir lieu par les alimens* ni par la boisson, M. Brem-
ser a recherché si cela ne pouvait pas avoir lieu par l’air ; et pour
réfuter cette opinion, il ajoute que cela ne pourrait se faire que dans
le cas où les œufs seraient extrêmement desséchés , et alors pour-
raient-ils conserver leur faculté de se développer? Oui, d’après
les expériences de Leechs ; mais cela ne fait rien à la force des rai-
sonnemens de Bremser.
Si donc ce n'est par aucun des alimens que les germes des vers
s’introduisent dans le corps animal , ce ne peut plus être que par
la transmission des parens, soit dans l’acte de la generation, soit
par la nutrition dans le sein de la mère, soit par l’allaitement. Or
il n’est pas difficile à M. Bremser de jeter à bas tous les raisonne-
mens qu'on a employés pour soutenir cette hypothèse; car il
prouve que des enfans ont eu des vers, ce que leurs parens n’a-
vaient pas, et que l'explication de Brera est bien gratuite.
Il prouve que les germes n’ont pu être introduits par le sperme
du mâle, qu’ils n’ont pu l’ötre par la circulation dans la mère, et
qu'ils ne peuvent l’être davantage par l'allaitement.
Ainsi ayant rapporté successivement les preuves que les ento-
zoaires ne peuvent provenir du dehors dans le corps animal , reste
par voie negative qu’ils proviennent de l’intérieur , qu’ils y nais-
sent ; en un mot leur génération spontanée.
1 ]] admet cependant que quelquefois une espèce introduite avec un
animal maugé peut vivre quelque temps, mais non se reproduire, et l’ex-
périence de Pallas , du développement d’œufs d’un ver propre à une es-
pèce, quand on les a introduits dans un autre individu de la même espèce,
lui semble plutôt à l’appui de son opinion que contraire. C’est à ce sujet
qu’il réfute avec vigueur, d’une manière irréfragable , un fait cité par
Brera, dans lequel il est question de prétendus vers, qui n’etaient qne des
graines de fraises, et qui cependant introduites dans la cavité abdomi-
nale d'un chien, ont donné naissance à des milliers de petits vers que
celui-ci regarde comme des ascarides vermiculaires, quoiqu’ils n’en eus-
sent aucun des caractères.
APPENDICE. 509
Ici l'auteur , pour faire mieux concevoir son idée ou la manière
dont il conçoit la chose, remonte à la formation du globe, etnous
aurons peut-être besoin de nous faire excuser d’avoir traduit tout
ce chapitre , qui n’est qu’une pure hypothèse , et qui contient même
quelques erreurs ; comme celle-ci, que, danses terrains de transi-
tion , il existe peu de traces de corps organisés; car on y connaît
maintenant beaucoup de végétaux, des coquilles, des trilobites,
et même un grand nombre de poissons , etc. ; mais nous avons saisi
cette occasion de faire connaître en France la manière de philoso-
pher de l’école allemande, et nous convenons même que ce n’a
pas été sans quelque peine que M. le docteur Grundler et moi
sommes parvenus à bien saisir le sens de l’auteur , et à lier ses
idées dans notre langue. Il se pourrait même que nous n’eussions
réussi qu’assez incomplétement, ce qui nous forcerait dans ce cas
de prier M. Bremser de ne pas trop nous en vouloir.
L'auteur expose d’abord comment il conçoit la formation de la
terre.
C’etait au commencement une masse liquide sans forme , mais
vivifiée, c’est-à-dire , douée de l'esprit vivant ou de l'esprit uni-
versel ; peu à peu il se développa un noyau et les terrains primi—
tifs : la cause principale de cette formation du noyau n’est pas dans
une force morte inhérente à la matière ou gravitation, mais bien
dans l’esprit même, dans sa tendance à dominer la matière et à
former par sa liaison intime avec elle des iouis clos existant par
eux-mêmes, Alors l’esprit sépara d’abord la matière brute et la re-
jeta au centre , d’où les terrains primitifs ; après que la plus grande
partie de la matière la moins propre à la matière fut cristallisée x
Pesprit fut plus libre. Il y eut alors une révolution ou fermentation
dans toute la masse, et les terrains de transition se déposèrent en
un grand nombre de fois ; il n’y avait cependant pas encore de vie
particulière.
Ce ne fut qu’à cette époque qu’elle commença. Une nouvelle
fermentation eut lieu ; la première création fut détruite; la terre
fat peuplée de nouveaux animaux. Sans pouvoir estimer le nombre
de ces révolutions , chaque précipitation fut suivie d’une nouvelle
création , et l’homme fut le produit de la dernière, c’est-à-dire ,
l'être où l'esprit domine le plus la matière,
508 APPENDICE.
D’après cela, M. Bremser ne peut admettre que les espèces ani-
males soient provenues les unes des autres par des perfectionne-
mens successifs ; mais bien qu’elles ont été créées d’un seul jet, et
sans doute à l’état complet, du moins sous le rapport des organes
nutritifs. Ne serait-il pas plus rationnel de penser que ce ne sont
pas les animaux eux-mêmes qui se forment spontanément , mais
seulement leurs œufs et leurs germes? Il y aurait plus d’analogie
avec ce qui existe dans la reproduction des animaux les plus élevés.
Cela posé, notre auteur divise les substances dont se compose
en ce moment notre terre, en
10. Corps morts inorganiques (minéraux ) ;
2°, Corps vivans organisés (végétaux et animaux ) ;
3°. Corps sans forme , sans limites (air et eau).
Les minéraux ne peuvent être considérés comme absolument
privés de vie; elle est seulement chez eux à un degré de tension
très-faible.
C’est au sujet des corps vivans qu’il recherche ce que c’est que
la vie, et il la trouve dans ce qu’il a nommé l'esprit.
D’après cette idée, que la totalité de la terre.existait à état
amorphe avant l'existence des corps organisés, et que ceux-ci se
sont développés successivement de la même substance également
à l’état amorphe, il ne doit pas paraître étonnant que la même
chose se reproduise encore aujourd’hui, et que partout où il se
trouve de la matière animalisée, ou à l’état sans forme, il se de-
veloppe de nouvelles vies individuelles ou bien de nouvelles or-
gauisations ; et si une de nos infusions ne Hot pas des baleincs
ou des chênes , cela tient, dit notre auteur , à ce que la masse en
fermentation est infiniment petite comparativement avec ce qu’elle
a dû être à une époque ancienne de l’état de la terre.
Il n’y a pas de véritable mort dans le règne organique , la mort
n'étant que le passage à une nouvelle vie.
Convaincu par les observations et les expériences de Treviranus
sur la génération spontanée des infusoires, il conclut que, s’il est
évident que la moisissure et des infusoires peuvent se former
par le moyen de corps organisés privés de vie, cela peut encore
plus aisément avoir lieu dans les organisations vivantes.
Dans les organisations vivantes ; le nouveau produit est tou-
APPENDICE. 509
jours déterminé par la nature de l’organisation de laquelle il a
été formé; ainsi, des lichens et des mousses croissent sur les
plantes , des vers intestinaux, des poux et des cirons dans le corps
animal.
Mais comme on pourrait douter que les poux pussent aussi se
reproduire spontanément, étant des animaux déjà élevés dans
l'échelle, M. Bremser rapporte quelques faits à l’appui de son
opinion, soit pour les poux, soit pour l’acarus de la gale.
Au reste, aux personnes qui, disent-elles, ne peuvent pas con-
cevoir la génération spontanée des vers intestinaux et des cirons,
il demande si elles concoivent mieux celle par la succession des
parens, qu’il montre avec raison être tout aussi spontanée,
avec la seule différence que c’est dans un lieu déterminé de la
mère. C’est ce qu'il fait voir surtout pour l’oiseau chez lequel
l’œuf se produit dans la capsule de l'ovaire sans communication
réelle avec lui. Quant à ce qu’il ajoute, que le jaune et le blanc
sont également produits par cet organe, il se trompe. Le dernier
n'est qu'une excrétion de l’oviducte à mesure que l’œuf le traverse
et constitue ce que j’ai nommé les membranes adventives.
Après cette démonstration indirecte, M. Bremser se voit pour
ainsi dire forcé de conclure que les vers intestinaux se forment
spontanément ; alors, appliquant ici sa théorie générale de la for
mation des individualités du globe terrestre, et admettant que
dans chaque organisation animale il existe une fermentation cont’-
nuelle, pendant laquelle de nouvelles substances sont admises ,
précipitées , appropriées , dissoutes , décomposées et excrétées: et
réfléchissant à la grande quantité de substances animalisées sans
forme qui se trouvent dans chaque animal, il ne lui paraît pas
étonnant qu'il puisse se former de l’excédant de ces substances à
sa nutrition, ou même de celles qui n’y sont pas propres, un tout
existant par lui-même ou un ver, comme dans le monde se forma
autrefois le ver de terre : parmi ces vers offrant toutes les espèces
de génération. comme les animaux extérieurs, il s’en trouvera
qui, étant pourvus des deux sexes, pourront se reproduire en—
suite par l’acte de la génération; mais cela ne devra jamais avoir
lieu que dans le même individu; dans chaque animal nouveau
ıl y aura une nouvelle génération spontanée, et cette production
510 APPENDICE.
pourra différer non-seulement suivant les espèces, mais encore
suivant l’âge du même individu. En effet , les ascarides et les
oxyures sont plus communs dans le jeune âge, et les cestoïdes
dans l’àg e adulte.
A toutes ces preuves négatives ou analogiques en faveur de
son opinion, M. Bremser en ajoute encore de directes en rap-
portant les observations curieuses qu’il a eu l’occasion de faire
sur le développement des géroflés dans les poissons , en sorte qu’il
reste bien convaincu que les vers intestinaux ne pouvant provenir
de l'extérieur, se forment de toutes pièces dans les différentes
parties de l'animal, en sont pour ainsi dire le produit, comme
dans les mammifères et les oiseaux le fœtus est le produit de
Vovaire. La formation spontanée des vers intestinaux s’opère donc
probablement de la même manière que celle des infusoires dont
l’origine, pendant la fermentation des substances organiques, a
été mise hors de doute par les belles expériences de Treviranus ,
l’organisation d’une plante ou d’un animal retombant pour ainsi
dire ici en plusicurs organismes.
Cette théorie de la formation spontanée des vers intestinaux
paraît si peu extraordinaire aux physiologistes allemands, que
M. Oken, dans la Chronique de la litierature autrichienne ,
n°. 9, nov. 1819, dit que M. Bremser aurait pu tirer des preuves
plus concluantes en sa faveur de la formation de l’organique de
Vinorganique, puisque, dit-il, il aurait pu démontrer par des
faits qu'il se forme avec de la chaux, du charbon , du sel et de
l’eau de la mucosité qui est déjà, eo ipso, un animal qui sesdivise
en globules et en infusoires.
Sur la distribution systématique des vers intestinaux.
M. Bremser , ayant démontré que les entozoaires ne peuvent
être rapportés à aucun des animaux extérieurs , en a conclu trop
=: dore suivant nous qu’ils doivent former un type parti-
culier; car c’est un principe de toute classification zoologique ,
que le séjour ne doit avoir aucune influence sur la place d’un
animal dans la série , mais seulement l’ensemble de son organisa-
tion. Or; comme il est évident que celle d’un ascaride est extrê-
APPENDICE. 5ıı
mement différente et supérieure à celle d’un échinoccoque sous
tous les rapports , il en résulte que, dans un système général de
zoologie, ces animaux ne doivent pas même appartenir à la même
classe, et doivent au contraire être répartis dans des types diffé-
rens, par conséquent étre entremêlés avec des animaux extérieurs,
comme l’ont fait MM. Oken, de Lamarck » Cuvier , et encore plus
M. de Blainville.
Le système de distribution des entozoaires de M. Bremser est
calqué exactement sur celui de M. Rudolphi , qui n’est lui-même
qu’une imitation de celui de Zeder , comme nous l'avons déjà dit,
en grécisant les dénominations allemandes que celui-ci avait don-
nées. Avant Zeder cette distribution éta’t presque nulle.
M. le professeur Oken, dont le Manuel d'histoire naturelle a
paru à Leipzick en 1815, à ajouté peu de choses à la distribution
systématique des vers intestinaux du premier ouvrage de M. Ru-
dolphi; mais, par une singularité assez remarquable , son système
différe sensiblement dans le corps de l'ouvrage, de ce qu'il est
dans le tableau analytique qui est au commencement : comme nous
présumonsque celui-ci est postérieur à celui-là, nous allons com-
mencer par son analyse.
Dans l’ouvrage les vers intestinaux forment le premier ordre de
la quatrième classe, ou mieux le dernier, à cause de l’ordre de
composition croissante que suit M. Oken, entre les beroès qui
commencent la cinquième, et les mollusques acéphales qui ter-
minent la troisième, et ils sont entremélés de plusieurs genres
d'animaux extérieurs. Il suit ici le système de divisions ternaires,
c’est-à-dire, que cet ordre est partagé en trois tribus divisées cha-
cune en trois familles contenant chacune trois genres.
TRIBU PREMIÈRE.
Fam.T. Echinoccoque, cœnure > eyslicerque.
— ll. Tania, bothriocephale , rhytis.
— III. Ligule, tricuspidaire , prionoderme.
TRIBU SECONDE.
Fam. ı. Polystome , scolex , distome et planaire.
— Il. Porocephale , tetrarhynque , echinorh ynque.
— II. Phyline, schisture , lernée. %
UT
12 APPENDICE. _
TRIBU TROISIÈME.
Fam. 1. Hamulaire, liorhynque , cucullan.
— IL Gordius, trichocéphale , oxyure.
— Ill. Strongle , ophiostome , ascaride.
Dans le tableau analytique , les vers intestinaux forment les trois
premières tribus de la première division de l’ordre des vers, qui
est le premier de la quatrième classe, comprenant tous les animaux
articulés , en sorte qu’ils sont avant les sèches, qui commencent
la classe -des mollusques , et après les chétopodes ou vers à sang
rouge de M. Cuvier, qui forment les premières tribus du même
ordre. Une autre différence, c’est qu'ici M. Oken adopte le sys-
ième quartenaire. En voici le tableau. à
TRIBU PREMIÈRE.
Fam.I. Echinoccoque, coenure.
— II. Cysticerque, cysture* , pesicaire?.
— III. Halysis, tœnia ou bothriocéphale , fümbriaire°.
— IV. Tricuspidaire , rhytis #, ligule.
TRIBU SECONDE.
Fam.L. Scokex, caryophyllée.
— II. Monostome, amphistome ou strigée, distome ou fas-
ciole , festucatre*.
— II. Polystome ,linguatule.
— IV. Porocephale®, heruque , tétrarhynque , echynorhynque.
1 Nouveau genre établi avec le cysticercus ‚fasciolaris de Rudolphi, et
qui correspond au genre hydatigère de M. de Lamarck.
2 Nouveau genre établi avec le cysticercus lucii de M. Rudolphi.
3 Nouveau genre établi pour le tænia malleus de M- Rudolphi.
4 Nouveau genre adopté pour quelques espèces de bothriocéphale, et
entr’autres pour le bothriocephalus solidus.
5 Genre adopté de Shrank pour le distoma trigonocephalum , qui paraît
n'être qu’une espèce de monostome.
6 Genre adopté de M. de Humboldt, pour un animal qui paraît être
une espèce de polystome de M. Rudolphi, ou de linguatule de M. de La-
marck.
APPENDICE. 513
TRIBU TROISIEME.
Fam. I. Prionoderme*, schisture?.
— I. Filaire?, capsulaire #, hamulaïre 5, biorhynque.
— IM. Capillaire , trichocéphale, oxyure.
— IV. Cucullan, strongle, ophiostome et fusaire ou ascaride.
Pr
Ainsi, dans cette nouyelle classification des vers intestinaux ,
les lernées, les planaires, les gordius en ont été retirés.
La distribution de M. de Lamarck est un peu différente.
Les entozoaires , qui terminent la division des animaux apathi-
ques, sont tous compris dans la cinquième classe du système des
animaux sans vertèbres, entre les ascidies et les diptères; mais
ils n’en constituent que les deux premiers ordres , sous le nom de
vers mollasses et de vers rigidules , le troisième et dernier étant
formé par les vers hispides , qui sont des animaux extérieurs. Voici
le tableau de la distribution des genres.
ORDRE PREMIER.
Vers nus , d’une consistance molle, sans raideur apparente, di-
versiformes , et la plupart irréguliers.
PREMIÈRE SECTION. — Les Vésiculaires.
Leur corps est vésiculaire , ou se termine postérieurement par
une vessie, ou adhère à la vessie qui le contient.
Proposé par M. Rudolphi, mais qu’il a reconnu depuis être établi sur
son polystoma tænioides.
| ? Genre fort douteux établi par M. Rudolphi sur un animal incomplé-
tement décrit par Redi.
5 Genre de Zeder, peu ou point distinct des véritables filaires.
| 4 Cest le genre trichosoma de M. Rudolphi.
N 5 Genre établi par Treutler sur un animal décrit à l'envers et supprimé
par M. Rudolphi. (On peut voir ce qu’en dit M. Bremser, p. 250.)
33
|
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|
VERS MOLLASSES.
|
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|
|
1}
Sad APPENDICE.
Bicorne’, hydatide*, hydatigere?, cœnure , échinoccoque.
DEUXIÈME SECTION. — Les Planulaires.
Leur corps est toujours aplati.
Tania, bothriocéphale , tricuspidaire , ligule , linguatule #, polys-
tome 5, fasciole®.
TROISIEME SECTION. — Les Hetéromorphes.
Leur corps est tantôt aplati, tantôt cylindracé, et souvent dif-
forme.
Monostome , amphistome , géroflé7, iötragule®, masselle 9, tenta-
eulaire*°, sagittule **.
ORDRE DEUXIÈME.
VERS RIDIGULES.
Îls ont un peu de raideur, ce qui les rend presque élastiques,
et sont nus, cylindracés , filiformes, la plupart réguliers.
a. intérieurs.
Porocéphale, échinorhynque , strongle , cucullan, fissule *?, oxyure,
trichiure , ascaride , hamulaire, liorhynque , filaire.
E
b. extérieurs.
Dragonneau.
ı Genre fort douteux établi par Sulzer sous le nom de ditrachyceros
pour des corps de la nature animale desquels M. Breinser parait peu per-
suadé (Voy. p. 320).
2 Ce sont les eysticerques de M. Rudolphi.
3 Genre distinct que M. de Lamarck forme avec les espèces de cysli-
cerque à corps allongé.
4 C’est le genre polystome de Rudolphi.
5 M. de Lamarck a adopté ce genre de Delaroche ; il est établi sur un ani-
mal de la famille des sangsues, suivant nous.
6 C’est le genre distome de Rudolphi.
7 Caryophyliæus.
8 Ce genre , admis de M. Bosc, est établi suivant nous sur le polystoma
serratum de Rudolphi, linguatule de M. de Lamarck.
9 Scolex.
10 Tetrarhynchus. .
11 Nouveau genre dent nous parlerons plus tard.
12 Cest le genre ophiostome de M. Rudolphi. |
APPENDICE. 515
M. G. Cuvier fait des vers intestinaux la deuxième classe de ses
zoophytes , et les place après les échinodermes, entre ses échino-
dermes sans pieds ou siponcles, et les actinies > qui commen-
cent sa classe des acalephes; il y réunit plusieurs genres d'animaux
extérieurs. Sa distribution est la suivante : .
ORDRE PREMIER.
INTESTINAUX CAVITAIRES.
Qui ont un canal intestinal flottant dans une cavité abdominale
distincte, une bouche et un anus : ce sont les E. nematoidea de
M. Rudolphi.
T'laire, hamulaire , trichocéphale , oxyure, cucullan , ophiostome ,
escarıde, strongle , prionoderme*, lernée » némertes ?.
ORDRE DEUXIÈME.
INTESTINAUX PARENCHYMATEUX.
Dont le corps renferme dans son parenchyme des viscères mal
terminés et ressemblant le plus souvent à des ramifications vascu-
laires, ne s’apercevant même quelquefois pas du tout.
Cet ordre comprend les quatre derniers ordres de M. Rudolphi.
PREMIÈRE FAMILLE, — Les Acanthocéphales.
Echinorhynque.
Héruque?.
DEUXIÈME FAMILLE. — Les Trématodes.
Douwve.
Festucaire (monostoma, R.) , strigée ( amphistoma , R.), géro—
Îlé, poly stome #, tristome 5.
Planaire.
* C’est le genre polystome de M. Rudolphi, linguatule de M. de La-
marck.
* Genre ronveau établi pour un ver marin ‚que M. Oken avait déjà dis-
tingue sous le nom de Borlasia.
3 Genre adopté de Gmelin, pour un ver que M. Rudolphi confond
parmi les echinorhynques. RE
3 Sous ce nom M. Cuvier réunit les polystomes de Rudolpbi et le po-
lystome de Delaroche.
5 Nouveau genre que M. Bosc avait nommé câpsule pour un animal
3%
516 APPENDICE. .
'TROISIEME FAMILLE. — Les T'œnioïdes.
Ternıa.
Tricuspidaire , bothriocéphale , floriceps ', tétrarhynque, cysticer-
que „ cœnure „ échinoccoque.
Scolex.
QUATRIEME FAMILLE. — Les Cestoïdes.
Ligule.
M. de Blainville regarde les vers intestinaux comme appartenant
à différens degrés d'organisation, et par conséquent à différens
types de la série animale ; aussi dans son système général de z00-
logie en place-t-il une partie parmi les entozoaires, une autre
dans le sous-type des sub-annelidaires , intermédiaire au type des
animaux articulés et à celui des rayonnés ; enfin, en admettant que
les acéphalocystes soient de véritables animaux, ıl en fait un genre
d’amophozoaires. Voici le tableau de ses divisions, et comme il y
distribue les genres.
CLASSE DES ENTOMOZOAIRES APODES.
ORDRE 1. — Les Polyporides.
Le corps court, déprimé, irès-contracüle, pointu en avant,
élargi en arrière et garni au-dessous de son bord postérieur de
plusieurs paires de pores contenant chacun un ou deux crochets;
bouche à l'extrémité pointue du corps ; une ouverture abdomi-
nale pour l’appareil générateur.
Hexathiridium”.
parasite sur les branchies des poissons, que je regarde comme de la fa-
ınille des sangsues.
ı Nouveau genre nommé anthocéphale par Rudolphi, établi par M. Cu-
vier pour un ver intestinal que M. Bremser pense n'être qu’un degré de
développement d’une espèce de bothriocéphale.
2 Je doute beaucoup que ce genre puisse être regardé comme véritable-
ment intestinal; il est extrêmement rapproché du polystome de Delaroche :
aussi pensais-je qu'il a été décrit à l'envers, ce que l’on voit dans ma dé-
finition des caractères de l'ordre,
APPENDICE. Sir
ORDRE II. — Les Onchocephales.
Corps peu allongé, sub-cylindrique , sub-articulé ; canal intes-
tinal complet; bouche orbiculaire inférieure , pourvue de chaque
côté de deux crochets cornés , recourbés, dirigés en arrière et
rétractiles chacun dans un tubercule ; anus terminal et postérieur ;
sexes distincts.
Linguatule.
EZ
Linguatule, pentasiome*‘ , tétragule, porocephale , prionoderme ,
cucullan ?, nettorhynque ?, caryophyliee 4.
ORDRE III. — Les Oxycéphales ou Ascaridiens.
Corps médiocrement allongé, élastique, cylindrique , atténué
aux deux extrémités , sans presqu’aucune trace d’articulations ; ca-
nal intestinal complet; bouche terminale orbiculaire > nue ou
pourvue de quelques tubercules radiairement disposés : anus plus
ou moins terminal; sexes séparés.
a. Bouche en suçoir , à lèvres simples ou tuberculeuses.
Filaire, trichosome , oxyure , trichocéphale „ ophiostome , pleuro—
rhynque°, physaloptere , spiroptere , liorhynque®.
' Je prefere, pour réunir les cinq premiers genres, qui n’en sont évi-
demment qu'un, la dénomination de linguatule à celle de pentastome, qui
donnerait une idée fausse.
? Ce genre est trop mal connu pour assurer sa place.
3 J'établis ce genre avec un ver intestinal observé par Paisley, et dont
il sera parlé plus loin.
4 C’est encore un genre trop mal connu pour juger ses rapporls na-
turels. |
> Ce genre est établi par M. Nau pour une espèce d’ophiostome , ©.
spherocephalum. |
5 C’est encore un genre bien douteux.
518 | _ APPENDICE.
b. Bouche close etarmée de nodules ou d’espèces de dents radiaires.
Capillaire *, fusaire*, ascaris , thélazie ?, strongle , sclérostome =
selerotrique°. 2
CLASSE DES SUB-ANNELIDAIRES ou GASTRORHYZAIRES.
oRDRE I. — Les Porocéphales.
Corps très-mou, sans traces d’articulations , très-déprimé ou
cylindrique , avec un ou deux grands pores medians , l’un anté-
rieur , le plus souvent terminal, et l'autre plus ou moins reculé
en arrière , servant de ventouses ; canal intestinal incomplet , vas-
culaire, commençant par un très-petit orifice percé dans le fond
de la ventouse antérieure ; sexes réunis sur le même individu ; l’or-
gane femelle se terminant dans la ventouse postérieure; l'organe
mäle saillant en avant sous forme d’un tentacule.
Hypostome °, festucaire?, fasciole , alaire®, hirudinelle®, lobos-
tome 20, echinostome *', strigée ou amphiosiome , holostome '?.
ı J'appelle capillaire les trichocéphales qui ont trois nœuds ou tuber-
cules à la bouche, comme le tricocephalus nodosus, Rud.
2 Ce sont les filaires, dont la bouche est pourvue de tubercules, comme
le F. coronuta, R >
3 Genre établi par M. Bose (Journ. de phys., 1819), pour une très-
etite espèce d’ascaridiens trouvée sur la cornée d’un bœuf, et qui serait
P D 2 à : re ; a
fort remarquable, si en effet elle offrait l’organisation qu'on lui assigne.
> & Cv sont les strongles beaucoup moins allongés et plus raides que les
autres, et dont l'extrémité antérieure un peu renflée ou tronquée carré-
ment, est armée d'une sorle de couronne cornée divisée en six parties,
comme le strongle du cheval.
5 J'admets ce genre avec M. Rudolphi pour la singulière espèce de tri-
chocéphale, qu’il a nommée 7". echinatum.
6 C’est un genre bien douteux, peat-être un degré de développement.
7. Ce sont les monostomes cyliadriques et à bouche terminale de M. Ru-
dolphi. .
8 Je propose de rétablir ce genre pour quelques espèces de fascioles
cylindriques, avec une assez longue queue , et qui ont des espèces d’ailes
de chaque côté du corps:jen ai décrit une trouvée dans le pancréas du
Simia maimon de Linné, à l’art. fésciole du Diciionn. des sciences nat.
9 J'admets ce genre pour les fascioles cylindriques qui ont quelque res-
semblance avec les sangsues , el entre autres le füsc. clavata, Lin. .
10 Ce sont les fascioles cylindriques dont la lèvre de la ventouse anté-
rieure est lobée, comme le dist. Jaureatum de Rudolph.
ir Ce sont les espèces de fascioles cylindriques qui ont des crochets vers
le pore antérieur, comme le distoma echinatum , Rud. ;
12 Nouveau genre établi par Nitzsch (Encycl, Halensis, pour les am-
APPENDICE. 57
ORDRE II.—Les Acanthocephales. ;
©
Corps plus ou moins sacciforme , peu ou point articulé, obtus
aux deux extrémités; l’antérieure avec une. sorte de renflement
céphalique ou de trompe céphaloïde garnie d’aiguillons recourbés
et percée d'un pore médian extrêmement petit; la postérieure
percée par un orifice médian également terminal, souvent très-
petit; canal intestinal ? sexes séparés ?
Heruque , échinorhynque.
ORDRE Ill. — — Les Bothriocéphales.
Corps de forme tres-variable, avec un renflement céphaloïde,
sans bouche proprement dite, mais pourvue de quelques organes
saillans et surtout de fossettes disposées à sa circonférence et sub-
radiairement; canal intestinal nul ou subyasculaire; sexes non
distincts; tous les individus semblables.
FAMILLE I. — Les Polyrhynques.
a. Le corps court et sacciforme.
Dibothriorhynque‘, gymnvrhynque , tétrarhynque , hépatoxylon ,
anthocéphale.
b. Le corps tres-long, tænioïde , articulé.
Rhynchobotris ?, onchobotris °, tricuspidaire 4,
phistomes à Lête non distincte de Rudolphi, et les d. alatum et excavatum
du même. .
! J'établis ce nouveau genre pour un ver intestinal trouvé dans les intes-
tins du poisson appelé sabre ou ceinture d’argent sur nos côtes (lepido-
pus Guanii) , attaché en assez grand nombre à des paquets de cellulosites
renfermant des filaires. Il est caractérisé aisément, parce que son corps
court, sacciforme, porte en avant une sorte de renflement céphaloïde
allongée, de chaque côté dugqnei est une longne fossette , un peu bipar-
lite en arrière ; à la partie antérieure est en outre de chaque côté un tu-
bercule rétractile, pédiculé, sphérique , ga ni de petitsaiguillonsrecourbes.
Cettecombinaison de deux suçoirs ou fossetteset de deux trompes;n’existant
dans aucun groupe de cette famille, méritait d'être distingnée.
? Section génériqueétablie pour le 8. corollatus de Rudolphi.
3 Division des Lothriocéphales, les 5. uncinati, et, entre autres, lg b:
ceoronalus.
4 Je place ici ce genre, parce que je suppose que les dents tricuspides
sont les analogues des trompes aiguillonnées des genres précédens.
520 APPENDICE.
=
FAMILLE II. — Les Siéphanorhynques.
a. Le corps très-long, tænioïde , articulé.
Alyselminthe*, halyse?, tenia, hydaligere.
b. Le corps court , hydatoïde.
Cysticerque , ceenure „ échinoccoque °.
FAMILLE III. — Les Céphalorhynques.
a. Quatre fossettes ou appendices nus.
Scolex , tentaculaire , tétrabotris 4.
b. Deux fossettes sans appendices ni trompes.
Bothridium®, rhythis®, ligule.
CLASSE DES MONADAIRES.
Acéphalocy ste , hydromètre.
Quant au genre schisture, dont il n’est pas question dans ce
tableau, et qui est établi sur une description et une figure tres—
incomplettes d’un animal trouvé par Rédi dans le canal intestinal
d’un tétraodon mola, ne serait-ce pas le singulier siponcle dont
M. Rolando a fait son genre Bonellie ?
» Les tenias sans trompe ni couronne de crochets, comme le £. plicata, R.
2 Les tænias à trompe non armée, comme le £. farciminula, Lin.
3 J'avoue que, malgré les nouveaux détails que nous a donnés M. Rent-
dorf sur ce singulier animal, je ne conçois pas trop comment la vessie qui
contient les individus en fait réellement partie.
4 Je réunis dans ce genre les espèces de bothriocépale qui ont quatre
fossettes bien distinctes, que le corps soit articulé ou non, comme les
b. auriculatus et macrocephalus de Bremser.
5 Je donne ce nom générique à un ver tænioïde bien régulièrement ar-
ticulé, à articulations droites, serrées, nombreuses, comme dans le i@-
nia plicata, et dont l'extrémité antérieure ovale est formée par deux
fossettes, ou mieux par deux espèces de petites capsules ouvertes en
avant seulement par un orifice arrondi ; il provenait d’uae grande espèce
e.serpent du genre pithon, qu’on montrait vivant à Paris en 1823.
5 Je réserve ce nom aux bothriocéphales qui n’ont que deux fossettes
jeu marquées, comme le b. de l’homme (tenia lata).
.
Se
SG
APPENDICE!: - 521
Sur la description des vers intestinaux propres à l'espèce humaine.
Les descriptions que M. Bremser donne des différentes espèces
d’entozoaires qui ont été observées jusqu’aujourd’hui dans le
corps de l’homme ne sont pas toujours très-étendues, mais elles
sont cependant presque constamment suffisantes , quoi qu’en ait dit
son critique italien , surtout accompagnées qu’elles sont d’excel-
_ lentes figures originales détaillées. On pourrait plus justement lui
reprocher de n’avoir pas parlé de l’organisation. Cela me semble
une véritable lacune qui nuit à la conception de tout ce qu'il dit
sur la formation de ces animaux.
Parmi les espèces qui séjournent dans le canal intestinal,
M. Bremser décrit et figure successivement :
1°. Le irichocéphale de l’homme.
20, L’oxyure vermiculaire.
3°. L’ascaride lombricoïde.
4°. Le bothrioc£pbale large.
5°. Le tænia de l’homme.
Et parmi celles qui se trouvent hors du canal intestinal :
6°. Le ver de Médine.
7°. L’hamulaire subcomprime.
8°. Le strongle géant.
9°. La douve du foie.
10°. Le polystome pinguicole.
11°. Le cysticerque du tissu cellulaire.
12°. L’echinoccoque de l’homme.
Nous n’ayons rien à ajouter à ce qu’a dit M. Bremser sur les
| espèces de vers qui vivent dans le canal intestinal de l’homme ;
nous nous bornerons seulement à faire remarquer que c’est aux
observations assidues et délicates de l’auteur que la zoologie doit
être éclairée sur la véritable place de l’oxyure vermiculaire et du
bothriocéphale large, dont on faisait jusqu'ici du premier un as-
caride sous le nom d’ascaride vermiculaire , et du second un tæria
“sous la dénomination de tænia large ou à anneaux courts, et qu'il
a aussi observé le premier le mâle de l’oxyure vermiculaire *.
! Nous devons cependant dire que M. Hippolyte Cloquet a figuré
dans sa Faune des médecins un ver intestinal qu’il regarde comme ap-
522 APPENDICE.
Nous ajouterons cependant à ce chapitre Pindication d’un ver
intestinal auquelnous ayons donné le nom de nettrorhynque , et qui,
quoique observé depuis longtemps, a été passé sous silence par
les meilleurs helminthologues modernes. C’est dans le tome II des
Mémoires de la Société de médecine d’Edimbourg qu'il en est
question dans un mémoire intitulé ‚Description d'un ver extraordi—
naire , par J. Paisley , chirurgien à Glasgow. Ce ver était fort con—
siderable , puisqu'il avait deux pieds six pouces de longueur sur un
pouce et demi de diamètre; il était formé de plusieurs grands an-
neaux semblables à ceux du ver de terre; les intervalles entre ”
chaque articulation étaient de couleur brune, les articulations
mêmes de couleur de chair livide. La tête, beaucoup plus petite
qué le corps, quoique formée également d’anneaux, ressemblait
beaucoup au bec d’un canard , étant aplatie en dessus. La bouche
était triangulaire comme celle d’une sangsue. Ce ver fut rendu par
l'anus avec une très-grande quantité de sang. Le malade en ren-
dit un second encore plus gros , mais par morceaux. Le premier
fut dessiné en présence de plusieurs docteurs de l'université. Il
était d’abord beaucoup plus gros ; mais, aussitôt que le malade l’eut
rendu à l’aide d’une personne qui le lui tira en partie du corps,
un assistant plongea un ou deux fois un canif dans le ver, et il en
sortit une immense quantité de sang. “|
Nous en donnons la figure , planche I, de l’appendice , fig. 1 et
2, copiée de l'ouvrage cité.
Quant aux entozoaires qui vivent hors du canal intestinal, nous
allons joindre quelques observations à celles de l’helminthologue
viennois.
partenant au genre ophiostome, et qu'il nomme ophiostome de Pon-
tier, O. Pontieri, da nom du médecin qui le lui a envoyé. Ce serait
donc la première fois qu’un ver de ce genre aurait été découvert dans
l'espèce humaine, Il avait été rendu par le vomissement provoqué par
Vellebore dans une épilepsie désignée sous le nom de vermineuse. Ce, vers
grosseur d’une corde à violon; à
l'une de ses extrémités était une petite tête garnie de deux m ächoires, dit
Vobservateur original. Ne se pourrait-il pas que ce für un gordius aqua-
tique, auquel tous ces caractères conviennent assez bien ? Nous devous
aussi dire que le même médecin , M. Cloquet, annonce avoir observé une
avait neuf pouces de longueur et la
APPENDICE. 523
Ver de Médine ou dragonneau. Je possède dans ma collection un
individu de cette espèce qui n’a été envoyé par M. Delorme, au-
quel nous devons les observations dont M. Bremser a parlé,
page 204, dans la note. Quoique bien évidemment différent du
gordius aquatique par sa longueur ei sa grosseur.* , on ne peut
nier qu’il soit d’un genre bien voisin. Mais est-il absolument cer-
tain que cet animal ne provienne pas de l'extérieur. M. Bremser
combat fortement cette opinion. Certainement ce ne peut être
une larve d’insecte; car, comme nous le ferons observer plus loin,
une larve d’hexapodes , seuls insectes qui éprouvent de véritables
métamorphoses, n’a aucune ressemblance avec ce ver. C’est ce-
pendant l'opinion d’un médecin praticien anglais, le docteur Chi-
solm, qui l’a émise d’abord dans la préface de son ouvrage inti-
tulé : Essay on the malignant pestilentiel fevers introduced in to west
indian Islands from Boullan on the coast of Guinea as it appeared
in 1793-1796; 2° édit., Londres, 1801, mais plus particulière
ment dans un mémoire inséré dans l’Edimbursh-medical and sur—
gical journal, 1815, vol. 15 , pag. 145-164. Ce médecin , qui se
vante d’avoir traité dans l’espace de trois ans plus de mille ma-
lades attaqués du dragonneau, pense que l’on pourrait admettre ,
mais seulement comme une hypothèse , que ce ver est introduit
dans le corps par le moyen des œufs que l’insccte a déposés sous
la peau , ou qu’on a gagnés en buvant de l’eau, et que dans ce
dernier cas les œufs avalés sont conduits par les organes de la
sécrétion dans les interstices de la peau et des muscles,
Un auire auteur de la même nation , Thomas Heath, dans un
mémoire inséré dans le même journal ( Observations on the gene-
ration of the Guinea Worm), vol. 12, pag. 120 , réfute l’opinion
de la contagion par l’eau , et croit que le ver s’introduit dans la
peau pendant qu'il est encore très-jeune ou à l’état d’embryon.
Hamulaire subcomprimé. Cet animal, dont le seul Freutler a dé-
. espèce nouvelle d’hamulaire qui avait déterminé des accidens nerveux
» trés-graves. Or nous avons vu que ce genre est bien douteux.
|" T0 L > A & ;
M. Bremser possède cependant aujourd’hui un filaire provenant d'une
| sauterelle, qui a trente pouces de longueur. Tous les gordius que j'ai vus
ont l’extrémité antérienre divisée en forme de pince, ce qui n’a pas licu
dans les filaires.
524 APPENDICE.
couvert deux seuls individus dans l’intérieur d’un vaisseau Iym-
phatique de la glande bronchiale d’un homme, est décidément
reporté par M. Rudolphi dans son synopsis parmi les trichosomes,
admettant que les deux crochets (hamuli‘) , décrits par Treutler ,
comme servant à l’animal pour se cramponner et sucer sa nour-
riture, ne sont que les organes mâles.
Comme MM. Bremser et Rudolphi n’admettent pas l'existence
de ce ver comme distinct des irichosomes, et que le premier a
paru douter qu’il eût été vu anciennement par deux médecins ita—
liens, Vercelloni et Bianchi, ainsi que le dit M. Brera, et en-
core plus que celui-ci ait pu en faire Panatomie , le critique ita-
lien, en répondant à ces doutes de M. Bremser, cite de Vercel-
loni la dissertation intitulée : De glandulis esophagis conglomeratis,
succo vero nutritivo et vermibus. Cestæ , 1711, in-8°., et la page 349
de l'ouvrage de Bianchi, De naturali in humano corpore vitiosa ,
morbosaque generatione , et ajoute que la description extérieure
et anatomique de Brera est faite sur ’hamulaire cylindrique
commun dans les pies-grièches , et qu’il regarde comme au moins
du même genre que l’hamulaire lymphatique ou subcomprimé :
mais, en admettant ce rapprochement, il est assez difficile de penser
qu’on ait pu voir le système nerveux ganglionique ou non sur un
. animal aussi grêle.
Sirongle géant. J’ajouterai à ce que dit M. Bremser sur cet en—
tozoaire, ce que j'ai vu sur un individu trouvé par moi dans le
rein d’une marte et à peine mort, lorsque j’en fis la description
et la figure. Le corps presque cylindrique et s’atténuant insensi-
blement , mais très-peu jusqu’aux deux extrémités fort obtuses ,
avait une largeur totale de vingt-neuf pouces trois lignes , sur
deux lignes et demie de largeur dans son plus grand diamètre. Sa
couleur était d'un brun-clair tirant sur le jaunätre, parsemé d’une
très-grande quantité de taches jaunes oblongues ou transverses. On
remarquait dans toute la longueur du corps huit stries étendues de
la bouche à l’amus, dont quatre alternativement plus grosses et
quatre plus petites. Celles du dos et du ventre paraissaient faire
des espèces de circonvolutions, mais peu profondes. Les deux la-
térales offraient chacune une série régulière de petits tubercules
percés à leur sommet, au nombre de quinze à seize par pouces
ke -
IE
|
APPENDICE. 525
L’extrémité antérieure ou buccale était un peu plus étroite, un
peu plus atténuée que la postérieure. La bouche était entourée
de huit tubercules tres-courts portés sur un anneau glanduleux.
L’anus , au contraire, formait une ouverture coupée obliquement
et assez large. Le canal intestinal, vu à travers la peau de l’animal,
m'a paru libre et s'étendant d’une extrémité à l’autre sans cir-
convolutions. On ne voyait aucune trace des organes de la gé-
nération , comme cela a lieu dans les ascarides.
Le rein dans lequel était contenu te ver beaucoup plus gros que
l’autre dont la longueur était de vingt lignes , sur neuf de largeur,
était réduit à une minceur d’une demi-ligne environ , et n’offrait
plus aucun indice de son organisation normale.
Polystome pinguicole. C’est encore à Treuiler que nous devons
la connaissance de ce singulier entozoaire dont il n’a vu qu'un
seul individu , trouvé dans la graisse qui entourait l’ovaire d’une
jeune paysanne , et qui n’a été observé par aucun autre natura-
liste. J’ai dit plus haut que je soupgonnais fortement que cet ani-
mal a été décrit à l’envers, et que ce pourrait bien n’eire autre
chose que le polystoma integerrimum trouvé dans le poumon et la
vessie urinaire d’une grenouille, que je suis tenté de regarder
comme une espèce de sangsue; mais comment s’est-il trouvé si
profondément dans le corps de la jeune fille de Treutler ?
Echinoccoque de l’homme. Au moment où M. Bremser écrivait
son ouvrage , il paraît qu’il n'avait pas encore eu l’occasion d’ob-
server rue l’échinoccoque de l’homme , puisqu'il dit,
page 303 qu’ on n’a pas encore constaté, d’une manière positive,
une couronne de crochets chez ces animaux; depuis ce temps il
a été plus heureux, et M. Charles Rendtorff, dans sa thèse inti-
‘tulée : De hydatidibus in corpore humani præsertim in cerebro repertis,
u
nous a donné une description et des figures qui laissent peu de
chose à désirer. Nous allons rapporter ici la traduction de ce qui
regarde l’animal que les figures sa, 10, ıc de noire planche x
représentent.
Le sac qui contenait toutes les hydatides était d’un blanc de
lait, semblable à de la lymphe plastique, pellucide et de l’epais-
seur d’une demi-ligne environ. Il ue renfermait rien autre chose
que de Peau avec les vésicules, et remplissait tout le ventricule
Hab APPENDICE.
droit du cerveau qu'il avait dilaté , au point que la matière céré-
brale qui le recouvre n’avait plus que lépaisseur d’une demi-
ligne. Le nombre des hydatides extraites du ventricule latéral était
de soixante-onze ; elles n'avaient elles-mêmes aucune odeur, et
différaient beaucoup de grosseur. Quelques-unes avaient un dia-
mètre d’un pouce et démi; les autres étaient plus petites , la plu-
part égalant la grosseur d’un grain de raisin de Malaga. Elles
étaient globuleuses, ovales ou pyriformes. Toute la masse des hy-
datides avec le sac qui les contenait pesait deux livres trois gros
(poids médicinal ) ; et la plus grosse des hydatides deux onces
deux gros. Les plus petites vésicules avaient leur enveloppe un
peu plus épaisse que les grosses. Elles étaient toutes indépendantes
les unes des autres, sans ancune trace de vaisseaux , de fibres ou
de ligamens qui les réuniraient. Le fluide qu’elles contenaient
était limpide et pellucide. La face interne ne paraissait pas partout
de la même couleur , quelques parties étant blanchâtres et celles
qui élaient couvertes par des échinoccoques tout-à-fait blanches.
En agitant un peu les hydatides , les petits animaux se detachaient -
de la membrane interne et se répandaient dans le fluide.
Csuantä la structure de ces animaux , M. Rendtorff ne nous four-
nit presque que ses figures. On voit que’ les peliis vers sont épars
d’une manière fort irrégulière dans l’intérieur de la vessie, et que
chacun d’eux en forme de petit corps ovalaire est un peu attenué
aux deux extrémités et renflé au milieu. L’extrémité céphalique est
armée d’une couronne de crochets. Mais il ne paraît pas qu'il y
ait de sucoirs, comme dans les coenures, du moins d'après la fi-
gure. Quant aux rapports des animalcules avec la vessie, M. Rend-
torff dit positivement : Mihi autem animalcula, qui propriam desunt
yılam , neque vesiculæ partes habenda videntur , et parait n’avoir
pas entendu M. Bremser , lorsqu'il ajoute, page 22, chap. 10:
Hos quidem vesicæ quam habitant parliculas existimat esse; car
celui-ci, dans une lettre qu’il nous a écrite, assure n’ayoir pas
dit un seul mot de cela , ni dans les Archives de Mekel , ni dans
sen livre, où il s’est exprimé clairement. Il entend, sous le nom
d'échinoccoque, les petits corps pourvus de quatre sugoirs et
d'une couronne de crochets, qui nagent librement dans l'hyda-
tide. À mesure que ces petits corps microscopiques grossissent ;.
4
APPENDICE. 527
ils prennent peu à peu la forme sphérique , les crochets se déta-
chent, et il se produit de nouveaux échinoccoques dans ces petits
corps changés eux-mêmes en hydatides. Les nouveaux échinoc-
coques sont des petits fils de l’hydatide primitive, qui ne fut elle-
même probablement d’abord qu’un corps microscopique semblable.
Cœnure cérébral. Puisque je viens de parler de ce singulier ani-
mal, j’ajouterai ici une explication des figures qu’en a données
. M. le docteur C. Fischer de Vienne dans sa dissertation De ento-
zois sive vermibus intestinalibus, dont nous avons parlé déjà plus
haut, et qu’à cause de leur beauté nous avons copiées dans notre
planche 10, 2a, 25, 2c, et des observations faites par moi sur
un chamois , né et élevé au Jardin du roi, et mort du tournis.
Son abdomen contenait plusieurs eyslicerques , mais son cerveau
surtout renfermait une tres-grande quantité de coenures. Les ves-
sies de grosseur très-variable, ainsi que de forme, étaient remplies
d’un fluide séreux, plus ou moins enfoncées dans la substance du
cerveau, et quelquefois même encore recouvertes de cette sub-
stance, ce qui prouve qu’elles se développent de dedans en dehors.
Il yen avait surtout une fort remarquable occupant l'extrémité
antérieure de l’hémisphère gauche, et qui semblait avoir rongé la
table interne de la partie de los frontal qui répond aux sinus
… frontaux, en sorle qu’ii n’y avait qu’une simple membrane entre
h les deux cavites.
Les animaux composans étaient irrégulièrement répandus sur
ces vésicules et réunis par groupes plus ou moins considérables ;
mais il n’y avait nullement de rapports entre leur nombre et la
grosseur de la vessie commune. A l’œil nu, ils ressemblaient à de
petits points carlilagineux qui commenceraient à se développer à la
* surface de la membrane externe d’un organe. Mais au microscope,
ils formaient de petites têtes blanches, en partie rentrées ou sor-
tes, portées sur un cou plus ou moins long, et pourvues d’une
couronne de crochets terminale et de quatre sucoirs arrondis. On
voit dans la figure 22 un cœnure avec un grand nombre de têtes
5 disposées par petits groupes subréguliers ; ; 2b en est un autre
E beaucoup plus petit trouvé dans la substance du cervelet ; 2c offre
deux têtes grossies, dont l’une est rentrée et l’autre sortie.
Sur les hydatides en général. Luedersen,, en envisageant son
528 APPENDICE.
sujet d’une manière complète, et plutôt, il est vrai, pathologique
que zoologique, partage les hydatides en sept groupes distincts :
so. Les vésicules ayant des corpuscules saillans pourvus d’or-
ganes de differentes sortes, contenus quelquefois dans une cap-
sule externe. LR
20, Les vésicules uniformes, globuleuses, complétement libres,
et entourées d’un sac extérieur.
30, Les vésicules adhérentes à une partie du corps, le plus sou-
vent petites, et contenant de petits vers sans aucune connexion
avec elles.
4». Les vésicules simples, de structure variable , adhérentes à
une partie grande ou petite du corps sans capsule externe.
50, Les vésicules réunies entre elles en séries continues, et se :
terminant pour ainsi dire par un filet au moyen duquel elles sont
attachées au corps. 1
Go. Les vésicules de forme variable adhérentes au corps par un
pédoncule , et réunies en grappes.
7°. Les vésicules irrégulières, simples ou celluleuses, adhe-
rentes au corps d’une manière si forte, qu'on ne peut les en deta-
cher sans dilacération.
M. Rudolphi a traité ce sujet un peu plus zoologiquement; il
divisait en effet d’abord toutes les hydatides en deux ordres, les
unes inanimées et les autres contenant des animaux. Dans le pre-
genres , suivant que l’hydatide est solitaire, ou
qu’elle est groupée, ou enfin qu’elle est contenue dans un sac;
dans le second il y en avait cinq, suivant que l'animal contenu
dans le sac était un strongle, un tricuspidaire, une fasciole, des
mier étaient trois
échinoccoques, ou enfin un ou plusieurs tænias; mais dans son, r
dernier ouvrage, admettant en principe que les vessies pleines
d’eau que l’on rencontre souvent dans l’homme et les animaux
ne sont pas du domaine de la zoologie , il réunit dans le même
ordre (eystici) toutes les hydatides et les partagé en quatre genres,
anthocéphale, cysticerque, coenure el échinoccoque , division
que nous avons vue adoptée par M. Bremser, mais qui pourrait
bien être fort peu naturelle , puisque les anthocéphales paraissent
n’etre que de jeunes echinorhynques ou bothriocéphales , et que
les echinoccoques different beaucoup .des coenures.
APPENDICE. 529
On a pu voir, en lisant ce que dit M. Bremser des hydatides
en général, et avant de traiter particulièrement des cysticerques
et des échinoccoques de l’homme, depuis la page 273 jusqu’à la
page 280, que, contre la manière de voir de M. Rudolphi, il re-
garde comme une hydaiide animale toute vessie pleine d’eau
qui est renfermée, mais complétement libre, dans une capsule
faisant partie intégrante de l'organe dans lequel elle est, ce qui
comprend évidemment les acéphalocystes de M. Laënnec; mais
alors il me semble que ces animaux ne pourront être rangés, ni
avec les tænias hydatigères, ni avec les cœnures, ni même avec
les échinoccoques , mais qu’ils devront être rapprochés des mo-
nadaires dans le type des amorphozoaires, quoiqu’ils puissent par-
venir à une bien plus grande taille.
Comme M. Bremser n’a pu parler du travail de M. Laënnec,
parce qu’ilne l’avait pas en sa possession, nous allons y suppléer en
donnant l'extrait du mémoire de celui-ci sur les vers vésiculaires -
et principalement sur ceux qui se trouvent dans le corps humain,
qui fut lu à la Société de l'Ecole de médecine en 1814. Il y dis-
tingue, comme nous l’avons déjà dit, les corps organisés dont il
estquestion, sous le nom générique d’acéphalocystes, en les regar-
dant comme de véritables animaux, et il en caractérise trois es—
pèces : 1°. l'A. A ŒUFS, A. ovoidea. À. pyriformis , simplex, vesi-
cularis , corporibus ovalis prædita intus ; 2°. A. A BOURGEONS, A.
surculigera. A. pyriformis, simplex, vesicularis, surculis predita
intus; et 3°. A. A GRAINS, A. granulosa. A. pyriformis, simplex,
vesicularis , granulis intus predita. Ainsi ces trois espèces ne diffe-
rent que parce que la première offre dans ses parois de petits
corps sphériques, blancs, opaques, peu adhérens, et souvent
creux dans le centre; que la seconde présente à ses deux surfaces
de petits bourgeons d’une forme très-irrégulière et très-variée, à
peine visibles , ou de la grosseur d’un grain de chenevis , et enfin
que la troisième est parsemée intérieurement de granulations trans-
parentes de la grosseur d’un grain de millet. Quoiqu’en apparence
peu différentes, ces trois acéphalocystes ne se trouvent jamais
dans le même kyste. Logées dans le tissu des parties, elles sont
enfermées dans des poches dont les parois les isolent absolument
du parenchyme de l'organe; celles-ci sont de nature fibreuse, sou-
DW)
>4
530 APPENDICE.
vent avec quelques points cartilagineux et même osseux , el leur
surface interne est tapissée par une sorte de fausse membrane. Le
liquide dans lequel nagent les acéphalocystes est souvent sem
blable à de l’eau; mais quelquefois il est plus ou moins épais ;
Quant à celui de l’acéphalocyste elle-même, il est presque tou-—
jours parfaitement transparent. Ces kystes augmentent quelque-
fois de manière à contenir plusieurs pintes de liquide ; il paraît
qu’on en trouve dans presque toutes les parties du corps de
l’homme, mais surtout dans le foie, le rein, les poumons, etc.
M. H. Cloquet, dans l’article de sa Faune des médecins, qu'il
à consacré à l’histoire de ces animaux douteux sous bien des rap-
ports, a proposé d'ajouter aux trois espèces de M. Laënnec une
quatrième sous le nom de A. GRANULEUX , A. granulosa, pour des
granulations lenticulaires , hydatiformes , trouvées dans la capsule
du tendon du grand fessier.
Sagittule. Adoptant la manière de voir de M. Bremser, qu'il se-
rait inutile de parler de tous les corps que les médecins ont re-
gardés à tort comme des vers intestinaux, je me bornerai à donner
l'histoire du prétendu ver intestinal, dont M. de Lamarck a fait
son genre sagittule. C’est un médecin italien, M. le docteur Bas-
tiani, qui a induit en erreur le célèbre zoologiste francais , dans
un mémoire assez étendu, intitulé : Historia medica illustrata
con reflessioni sopra un animale bipede evacualo per secesso in cardial-
gia verminosa , et inséré dans le tome VI, page 241 des Actes de
l'Académie de Sienne, avec figures, pl. xx, fig. 3-4. Le malade
était un ecclésiastique de cinquante ans , qui était réellement tour-
mente par des ascarides lombricoïdes , et qui rejeta, avec quel-
ques-uns de ces animaux et les matières stercorales, un corps
que tous les médecins et naturalistes de l’Académie, après un
examen attentif extérieur et intérieur, regardèrent à l'unanimité
comme un nouveau ver intestinal. Cependant il est aisé de s’as-
surer, par la description comme par la figure, que ce n’était que
l'appareil hyolaryngien tronqué de quelque oiseau. La trompe n’est
sans doute qu’un reste de la langue ; la bouche , l'ouverture de la
trachée , dont le docteur Bastiani décrit même les cartilages ary-
thénoïdes, les ailes ou nageoirss cariilagineuses, les dentelures de
la base de 1a langue, le fémur, le genou, le tibia, les cornes de
APPENDICE. 531
l’hyoïde ; et enfin la queue, probablement un reste de la trachée-
artère. Ce prétendu animal était percé d’outre en outre par un
canal qui ne contenait aucun viscère, et en effet c’était la trachée-
artère. Voy. sa figure, pl 1 de l’Appendice, fig. 14.
“
Sur les pseudo-helminthes.
Dans cette section de son ouvrage M. Bremser s’est borné,
comme il a soin d’en prévenir ses lecteurs, à parler des principaux
faits apocryphes rapportés par les auteurs, et qui deviennent de
moins en moins nombreux à mesure que l’helminthologie fait plus
de progrès ; mais il n’a pu entrer dans son plan d’analyser et de
critiquer tout ce qu’on trouve à ce sujet dans les recueils d’obser-
vations de médecine. Les exemples qu'il a choisis suffirent sans
doute pour faire que les médecins se tiennent dorénavant sur
leurs gardes. On y voit que le plus souvent ce sont des larves
d’hexapodes, comme pour les prétendus ascarides stephanostome,
conosome, cercosome, ou des animaux que l’on peut tout au
plus rapprocher des entozoaires, comme le ditrachycéros de
Sulzer que M. Bremser paraît regarder comme une graine, mais
réellement sans en donner de preuves, comme me paraît justement
le lui reprocher le critique italien, l’hexathyridium des veines qui
pourrait bien n’être qu’une espèce de planaire ou de sangsue, ou
enfin quelques parties de plantes, comme le diacanthos polyce-
phalus de Stiebel, qu’on est étonné de trouver dans le savant
recueil de physiologie de M. Meckel, ainsi que dans le Journal
complémentaire des sciences médicales , t. 1, cah. 2, 1818, et qui
n’était qu'une rafle de raisin, comme l’a montré M. Rudolphi,
et les prétendus vers des dents dont M. Bremser donne une étio-
logie hors de doute, en faisant voir que ce ne sont que des germes
de graines d’alkekengi ou de jusquiame.
M. Bremser joint à ce chapitre comme appendice quelques ob-
servations sur les corps que peuvent rejeter les individus de
l'espèce humaine, et sur la grande attention que l’on doit apporter
à leur examen, avant de décider que ce soit une nouvelle espèce
de ver intestinal. Nous allons nous-mêmes y joindre quelques
considérations propres à rendre cet examen plus facile.
ra
I:
532 APPENDICE.
Il faut d’abord faire la plus grande attention à la source ou à
l'endroit d’où est sorti le corps, regardé à tort ou à raison
comme un entozoaire, savoir s’il n’y a pas quelque plaie simple ou
fistuleuge; ainsi le critique allemand de l'ouvrage de M. Brem-
ser rapporte le cas d’un paysan-qui a rendu pendant plusieurs
années consécutives et de temps à autres des larves d'insectes avec
beaucoup de difficulté, par le canal de l’'urètre, et l’on trouve
dans les recueils médicaux une foule d'exemples semblables.
On devra ensuite, avant de soumettre le corps rendu à un
examen attentif, le suspendre dans une assez grande quantité d’eau,
pour le laver et le débarrasser des matières qui pourraient l’en-
- velopper et pour permettre son extension complète : alors on
pourra avoir égard aux observations suivantes.
Les corps rendus par l'espèce humaine avec les évacuations na-
sales, salivaires, pulmonaires, stomacales, duodénales, alvines
ou uretrales , peuvent être de deux natures très-différentes, ve-
gétale ou animale.
Dans le premier cas, la structure seule du corps rejeté doit suf-
fire pour reconnaître sa nature , surtout si l’on joint à cela la con-
sidération de la forme extérieure, qui ne peut être régulière ou
symétrique si ce n’est pour les fleurs, tandis que dans un ento-
zoaire comme dans tout autre animal, elle l’est constamment.
Dans le second cas, ce sont des produits animaux, des parties
d’animaux , ou enfin des animaux tout différens des entozoaires.
Quand ce sont des produits animaux, comme ce qu’on nomme
des concrétions lymphatiques , la structure non celluleuse et seu-
lement gélatineuse, ainsi que le défaut de symétrie dans la forme,
ne peuvent laisser longtemps dans le doute un observateur de
bonne foi; mais, pour en faire l’examen , il faut mettre le corps dans
l’eau,
Des parties d'animaux sont encore peut-être plus aisées à re-
connaître, pour peu qu’on ait quelques connaissances grossières
d'anatomie , et l’on est réellement étonné de voir que le docteur
Annibal Bastiani et le corps tout entier des médecins et des natu-
ralistes de l’académie de Sienne, devant lequel en fut fait, en
1777, l'examen extérieur et intérieur, n’ait pas reconnu que son
prétendu animal bipède n’était autre chose que l’appareil hyola-
APPENDICE. 533
ryngien d’un oiseau, quoique le secrétaire de ceile académie,
dans une note ajoutée au mémoire de Bastiani, ait dit: E provato
abbaitanza essere il verme vero , verissimo animale vivente.
Si ce sont des animaux plus ou moins tronqués , un peu de sa-
gacité et quelques bonnes figures d’animaux devront suffire pour
reconnaître aisément l'erreur.
Enfin, quand ce seront des animaux complets , quelques con-
naissances de zoologie, et surtout pour les médecins qui en man-
quent, ce quiest malheureusement trop commun, de bonnes
figures d'animaux faciliteront la reconnaissance.
Ils auront aussi bientôt reconnu si c’est un animal vertébré, et
par conséquent une supercherie ; car, quoi qu’on en ait dit, il n’est
guère admissible que même un reptile, lézard ou couleuyre, ou
un amphibie, grenouille , crapaud, ou salamandre eût pu s’intro-
duire dans le canal intestinal d’un homme, par accident, et sans
que celui-ci s’en füt aperçu.
Si c’est un animal articulé exterieurement, ce qu'il est fort aisé
de voir , on pourra se guider d’après la distinction du nombre des
articulations, et l'existence ou nôn des appendices sur leurs côtés.
Tous les entozoaires connus jusqu'ici ont les articulations de
leur corps peu ou point marquées, mais toujours fort nombreuses
et sans traces d’appendices locomoteurs ; par conséquent on ne
peut les confondre ni avec les myriapodes, ni avec les chétopodes
ou néréides qui, ayant des articulations très-nombreuses, les ont
très-distinctes, et pourvues d’appendices complets ou incomplets.
Par la même raison ils ne peuvent l’être avec les larves ou vers
d’hexapodes qui , si quelquefois leurs articulations sont peu mar-
quées et sans pattes , n’ont jamais des premières au-dessus de qua-
torze, ni des secondes au-dessus des trois paires.
On ne peut cependant nier qu’il soit à peu près impossible de
ne pas confondre plusieurs entozoaires avec plusieurs animaux ex-
térieurs , par exemple les filaires avec quelques gordius, certaines
fascioles avec des planaires, et peut-être même quelques siponcles
avec plusieurs ascarides. Il n’y a peut-être alors que la couleur
presque constamment blanche, du moins à l’extérieur , qui puisse
servir à assurer qu’un de ces animaux similaires présenté à l’exa-
men d’un médecin soit un ver intestinal ou non.
534 APPENDICE.
La question des véritables hydatides n’est peut-être pas
moins difficile à résoudre, à moins que d'admettre la definition
tranchée de M. Bremser , ce que je suis assez porté à faire. Ainsi,
toutes les fois que, dans une partie quelconque de l’homme, on
trouvera une ou plusieurs vessies pleines d’eau, de forme ou de
grosseur variable, libres et flottantes dans une sorte de vessie ad-
hérente au reste de la partie, et en continuité de substance avec
elle, on pourra les regarder comme des hydatides simples ou des
acéphalocystes ; mais, s’il y avait une adhérence quelconque vas-
culaire ou celluleuse entre la vessie et le kyste, ce ne serait plus
une véritable hydatide animée. On conçoit cependant que, par
suite de la mort d’une hydatide simple et de sa désorganisation,
l’adhérence puisse avoir lieu. C’est peut-être ainsi qu’ii faut con—
sidérer les hydropisies enkystées de l’ovaire, à moins que de
croire que les espèces de kystes qu’on remarque souvent dans ses
parties, et surtout dans les vieilles filles, ne soient dues au déve-
loppement contre nature des calices des germes qui n’auraient
pas pu suivre leur accroissement normal par défaut d’action du
fluide spermatique.
Quant aux hydatides en grappe de l’utérus , s’il n’y avait point
de continuité de substance avec les parois de cet organe, et s’il y
avait seulement adhérence, on pourrait croire que ce serait le
germe ou le fœtus lui-même, ou son placenta, qui se serait pour
ainsi dire développé en hydatides simples.
Au sujet de cette singulière espèce d’hydatides qui se forment
souvent dans la matrice, tantôt isolées, tantôt avec adhérence avec
le fœtus ou avec le placenta, et que M. Weismansel a nommé
hydrometra hydatica , il est très à regretter, dit le critique alle-
mand, que M. Bremser n’ait pas connu l'excellent mémoire de
Gregorini : De hydrope uteri et de hydatidıbus in utero viris aut ab eo
exclusis, Halæ, 1794 ; car il en aurait au moins fait mention dans
sa bibliographie. La figure qu’il cite de Bidloo n’est pas à compa-
rer avec celle de Gregorini, qui représente une tres-grande möle
vésiculaire dans laquelle est contenu un fœtus, et qui existe dans
la collection de M. Meckel. Quoique Gregorini ait pu recueillir
toutes les observations qui ont trait à son sujet, il en a omis lui-
même un très-grand nombre, comme M. le professeur Sprengel
APPENDICE. 535
l'a fait voir dans un mémoire ex professo sur cetle matière, Le der-
nier cas de ce genre se trouve consigné dans un article de M. Le-
mon, dans le vol. x1, p. 96-100 de l’Edimburgh medical and sur-
gical Journal, et qui a pour titre : Case in wich a mass ressemblins
a placenta without a fœtus, was discharged from the womb.
M. H. Cloquet a aussi rapporté dans sa Faune des médecins,
p. 133, un cas analogue; il y figure , pl. IV, la masse d’hydatides
sous la dénomination d’acéphalocyste en grappes, acephalocystis
racemosa. Dans ce même ouvrage M. Cloquet a recueilli avec soin
toutes les observations qui ont un rapport plus ou moins immé-
diat avec son article 111 des acéphalocystes , qu'il envisage d’une
manière assez complète.
Des causes de la formation des vers intestinaux.
Dans ce chapitre , qui commence la seconde partie de son ou-
vrage, M. Bremser ne parle que des vers qui séjournent dans le
canal intestinal ; les causes de la formation , de même que le dia-
gnostic et le traitement de ceux qui vivent ailleurs paraissant jus-
qu'ici beaucoup trop obscurs.
Sans admettre la théorie de notre auteur , qui du reste n’est que
le développement de la manière dont il conçoit la génération des
entozoaires en général, on ne peut nier qu’elle ne se trouve assez
bien concorder avec les faits et les lier d’une manière ration-
nelle et fort satisfaisante ; par conséquent elle mérite d’être prise
en considération. Quelques personnes ontcependantregardé comme
peu vraisemblable que des vers puissent se former des humeurs
versées à la surface du canal intestinal ; et l’auteur de la Chronique
autrichienne, qui admet cependant bien complétement la généra-
tion spontanée des entozoaires, pense que ce sont les parties
même de l'intestin, comme son tissu cellulaire , ses villosités qui
s’allongent , et qui jouissent peu à peu d’une vie indépendante ; en
sorte qu’il voit dans cette transformation une ramification de l'in-
testin , comme chez les polypes. Les hydatides ne sont très-proba-
blement, suivant lui, que du tissu cellulaire pourvu de suçoirs.
On a pu voir, p. 349, que M. Bremser paraît assez porté à
croire que l'usage du lait peut contribuer à la formation des vers
536 APPENDICE.
intestinaux. Le critique allemand de la gazette de Salzbourg , trou-
vant que cette assertion n’est pas dépourvue de vraisemblance,
cite.à l'appui l'observation , quela plupart des enfans des paysans
de la contrée qu’il habite sont très-tourmentés par les vers, et
qu'ils se nourrissent principalement de pain de seigle, de pommes
de terre, et surtout de lait, dont ils boivent régulièrement trois
fois par jour.
Une autre opinion de M. Bremser, que la nourriture maigre,
composée de substances peu nutritives, n’estpas propre à favoriser
la formation des vers intestinaux proprement dits, et que leur plus
grand ennemi est la faim de l'animal dans lequel ils séjournent,
s'accorde parfaitement avec l'expérience du même critique, qui
pense même que l’on peut en tirer l’explication, pourquoi surtout
les ascarides sortent par les deux orifices du canal intestinal de la
personne malade, qui n’avait encore pris aucun médicament. Il se
pourrait aussi que certaines maladies déterminassent la sortie na-
turelle de certains vers ; par exemple, il paraît que le iænia ne
peut rester dans le canal intestinal des personnes affectées de fièvre
intermittente, et que les ascarides lombricoïdes sortent de celui
des enfans atteints de fièvre intermittente ou plutôt encore du ty-
phus, ce qui a porté quelquefois à penser que c'étaient ces vers
qui avaient occasioné ces maladies.
Du diagnostic de la présence des vers intestinaux.
Quoique l’auteur de l'analyse italienne citée plus haut ait forte-
ment critiqué M. Bremser au sujet de cette partie de son ouvrage,
qu’il regarde comme fort incomplète, en la comparant avec ce .
qu'a dit M. Brera sur le même sujet, il est évident qu'elle est bien
suffisante , et qu'aucun des symptômes importans n’a été oublié.
Après avoir donné tous les caractères qui indiquent la diathèse
vermineuse en général, il rapporte successivement ceux qui peu-
vent faire présumer la présence de telle ou telle espèce de ver in—
testinal. Nous n’avons done que très-peu de chose à ajouter à ce
que dit M. Bremser, surtout parce que M. le docteur Grundler l’a
fait au fur et à mesure que s’en est présentée l’occasion.
Nous allons nous borner à rapporter quelques faits qui sem-
. APPENDICE. 537
blent prouver que les ascarides lombricoïdes peuvent percer le
canal intestinal , et pénétrer dans la cavité péritonéale.
A ce sujet M. Bremser , adoptant la manière de voir de M. Ru-
dolphi, pense que c’est certainement à tort que l’on admet que les
ascarides lombricoïdes perforent les intestins , et par la causent la
mort (p. 385). La preuve tirée de ce que ces animaux n’ont pas
d'organes propres à effectuer cette perforation n’est pas tout-à-
fait irrécusable ; car , sans admettre avec Jacopi, comme le fait le
critique italien, que la bouche de ces animaux est armée de trois
pointes cornées, formant par leur réunion un instrument tres-
aigu , il est cependant vrai que les espèces de valvules qui l’entou-
rent sont assez dures et même un peu tranchantes, du moins à
leur bord. D'ailleurs les vers de terre qui ont leur bouche encore
moins armée que les ascarides, ne percent-ils pas la terre, il est
vrai humide, par la forme pointue et l’espece d’erection dont
l'extrémité antérieure de leur corps est susceptible; les lombri-
coïdes ne pourraient-ils pas en faire autant , surtout si les parois
du canal intestinal étaient préalablement ramollies par la suite de
quelque inflammation, ou mieux peut-être si le ver a introduit
l'extrémité de son corps dans quelque orifice des glandes de Peyer,
qui sont le plus souvent les parties qui s’enflamment les premières
dans les affections du tube intestinal, et lorsque la maladie dont le
sujet est atteint force ces animaux de désirer un séjour qui leur
convienne davantage ?
Le critique italien cite, à l'appui de son opinion contraire à
celle de MM. Rudolphi et Bremser , des observations de M. Gau-
tier de Claubry , insérées dans le Nouveau J ournal de médecine
de Paris , juillet 1818, où celui-ci, en rapportant plusieurs exem-
ples de perforation del’estomac occasionée par des ascarides ,
conclut que chaque ver effectue une ouverture particulière , et
que jamais deux individus ne passent par la même; que les bords
de ces orifices tombent en suppuration et en gangrène, et que
par là ils arrivent dans la cavité abdominale, où l’on en rencontre
d’une grosseur extraordinaire , puisqu'il en a vu qui avaient de six
à onze lignes de circonférence.
Il aurait pu citer également le fait observé par M. Fischer et
inséré dans sa Dissertation sur l’hydatide du plexus choroïde, d’une
538 APPENDICE.
vieille femme de soixante ans, qui s'était laissée mourir de faim,
et sur le cadavre de laquelle il trouva le cœcum percé de deux
trous ronds assez grands, dans l’un desquels un ascaride avait
son corps à moitié engagé, tandis qu’un autre individu, qui sans
doute avait passé par l’autre trou, était déjà dans la cavité abdo-
minale.
Il aurait troavé contraire à cette manière de voir l’observation
faite sur l’évacuation des lombricoïdes à travers les tégumens de
l'abdomen par Mécanly, et qui a été publiée daus le tom. rır,
p- 491-498 de I’ American medical recorder.
Nathaniel Ramsey cite plusieurs cas qui prouvent que des vers
et des hématodes ou pierres de sang (concrétions sanguines en-
durcies sans doute } peuvent se trouver en même temps dans les
intestins, et il ajoute qu’il est probable que ces deux affections
sont en rapport entre elles. Voy. Medico-chirurgical transactions de
Londres, vol. 1x, part. II, 1818.)
On trouvera une dissertation particulière sur les vers de l’es-
tomac par le docteur Jos. Klapp, dans le journal de Philadelphie
intitulé The American medical recorder, vol. II, n°. I, 1820 , où
le diagnostic de cette maladie est analysé.
Quant aux vers trouvés dans l’estomac d’une maniaque dont
parle Hagner, dans le journal intitulé Zeëstchrift für psychische
aerzie von Nasse. 4% heft, 1818, Leipzig, p. 514, il faut remar-
quer qu’il y avait aussi des hydatides dans le plexus choroide ei
et d’autres anomalies dans le cerveau.
Quoique M. Bremser , dans ce chapitre, n’ait parlé que des vers
qui séjournent dans le canal intestinal, nousallons donner l’histoire
des phénomènes qu’a présentés la malade sur laquelle M. Rent-
dorff a observé les echinoccoques, et dont nous avons parlé plus
haut, parce qu’elle nous a paru aussi complète que curieuse.
Historia morbı.
Guilelma Ohle, Berolinensis, anno ı811, parentibus, bona
valetudine gaudentibus, nata est. Partum difficilem , et forcipe
absolutum esse commemorare non alienum existimavi. Puella,
matre affırmante, tenerrima state bona, si nonnullas levioris mo-
APPENDICE. 339
menti ægritudines excipias, valetudine gravisa est. Quinto et sexto
ætatis anno bis terve laborabat capitis impetigine, quæ, nullo
curante medico, paulo post sponte evanuit. Mense julio anni
proximi ægrota, septem annos nata, febre corripiebatur vario-
losa, quæ cum graviora non præ se ferret signa, matri adeo vide-
batur benigna, ut medico opus ‘non esse existimaret. Decimo
quarto morbi die puella convalescens vehementioribus ita vexa-
batur subito convulsionibus, ut mentis impos fieret. Neque de
hoc morbo mater consuluit medicum, quia convulsiones, quæ
primo quidem die , quo videbantur , ter, altero totidem redierant,
proximis omnino remiserant. Eodem anno ægrota, e mensa pr&—
cipitata , tam vehementer in occipite offendebatur , ut totum caput
doleret; qui casus, doloribus postero die cessantibus, sympto-
ınata nulla reliquit. Quod ad animi puellæ indolem pertinet, us-
que ad annum zetatis octavum satis exculta videbatur. Ab*hoc
autem tempore filiam initio minores , postea nullos in iis, quibus
puellæ institui solent, progressus fecisse mater animadvertebat
Puella usque ad octayum annum ita robusta et sana erat, ut op-
tima eam gaudere valetudine dixeris; post sæpe laborabat levioris
momenti ægritudinibus ; alvus ei plerumque vel oppressa, vel, si
ducebatur , pituitosa erat, ejusque ventriculus interdum adeo ex-
pletus sordibus, ut he vomitu sponte redderentur. Mense aprili
anni abhinc proximi puella, octo annos nata, valde refrigerata ,
hora præterita tam vehementes pede sinistro sentiebat dolores, ut
claudicare cogeretur. Qui, cum per quatuor hebdomades duras-
sent, etiam brachium sinistrum capiebant, ut ad nullum officium
perficiendum idoneum remansisset.
Quæ cum esset morbi conditio, ægrota die VII mensis juli
anni præteriti medici auxilium in instituto polyclinico, quod viro
perill. C. W. Hufeland rectore hac urbe floret, quæsivit; et conti-
git, ut curatio morbi ejus mihi committeretur.
Quamquam morbi conditio, qualis sit, jam ex relatis cognosci
potest, oportet tamen , ut etiam horum faciam mentionem; pul-
sus paululum frequentior , in utraque arteria radiali idem sentieba-
tur, tussis nulla , respiratio bona, caput non affectum , pro totius
quidem corporis ratione paululum justo majus , oculorum pupillz
naturali conditioni convenientes, visus et auditus sani, functiones
54o APPENDICE.
intestinorum non læsæ, dolores abdominis nulli, vermes denique
nunquam erant excreti. Itaque morbus hemiplegia rheumatica no-
minandus, et usum eorum postulare videbatur remediorum , qua
oppressam cutis functionem restituerent, nervosque incitarent.
Quæ ut amoverem indicia , ægrotæ rationem vivendi morbo aptam
commendavi, præter hoc eam infuso flor. arnic., rad. valerian.
min. cum spirit. sulph. æth. et syrup. simp. uti jussi; simul pul-
veres, ex calomel. , sulph. antim. aur. et extr. aconit. paratos, su-
mendos ei dedi, neque alienum existimavi partes doloribus affec-
tas unguent. nerv., cui tinct. canth. admixta esset, bis quotidie
perfricare, et emplastrum vesicatorium in scapula sinistra ponere.
Tribus præteritis diebus , medicamentis bene adhibitis , morbus
in melius mutatus videbatur , dolores remiserant, corporis partes
afflictæ facilius poterant moveri; neque erat, quod remedia, qua
adhibenda præscripseram , cum aliis mutarentur.
AÆgrotam die XII mensis julii aggressus, eam pedem quidem
facilius movere, brachium autem minime posse observavi. Alvus
ei erat oppressa, quamobrem , ut duceretur, enéma injici Just.
Sequentibus quatuor diebus ægrota bene , si hemiplegiam ex-
cipias, se habebat; quinto autem die cibum assumptum unacum
magna pituitæ copia bis sponte vomens excernebat ; frequenter
laborabat ructibus, cupiditate edendi carebat, linguam ostendebat
pituita obtectam, ejusque pulsus frequens et durior febrieulam
adesse indicabat; de capitis autem doloribus filia non querebatur.
Hæc cum animadvertissem symptomata, ægrotæ vomitorium ,
quo ventriculus sordibus liberaretur, sumendum præbui, quod
sumptum quater excitabat vomitus, quibus magna pituitæ copia
ejiciebatur.
Postero die ægrota melius se habebat; pulsum ejus condition:
normali convenientem, linguam minus, quam pridie, sordidam
observavi, et alvum satis frequenter- ductam esse mihi denuntia-
batur ; ab omnibus igitur eam remediis internis abstinere, externis
autem continuo uti jussi.
Die XIX mensis julü egrota , lectulo affixa, quinque conyulsio-
nibus vehementer vexabatur, quæ maxime brachium et pedem
sinistrum corripiebant, et quarum quisque impetus per horæ qua-
drantem durabat; pollices in volam flexi, animi defectus , magna
APPENDICE. hr
_ denique corporis lassitudo et sopor, quemque impetum secuti,
epilepticas eas fuisse perspicue probabant. Palsus inzequalis erat
et parvus, urina tenuis et alba. Vespere, convulsionibus remit-
tentibus , puella ter sponte vomebat, dolorem in regione cardiaca
sentiebat , linguam habebat flavescentem, pituita obtectam. Vomi-
torium igitur præscribendum videbatur.
Postero die ægrota, quæ vomitorio sumpto ter vomuerat , de-
nuo conyulsionum impetu concutiebatur , qui binis interpositis
horis, quater redibat. Pulsus vespere erat frequentior , inzequalis ,
debilis. Paralysis pedis sinistri, cum valde remisisset, puella am-
bulare, simul brachium sinistrum melius movere potuit. Edendi
cupiditas erat depravata, lingua albescens , urina ex albo flaves-
cens , alvus adstricta, quare solutionem ex elect. lenit., tartaro
tartaris. cum vino stibiat. paratam sumendam dedi; præter hoc
partes resolutas ung. nervin. cum tinct. canth. perfricari, et ulceri
arte effecto ung. irrit. quotidie imponi jussi.
Die XXII mensis julii puella, quæ nocte præterita bene dor-
mierat, et mane alvum bis duxerat, melius se habere et hilaris
videbatur ; pomeridiano tempore denuo corripiebatur convulsio-
nibus , quæ per decem circiter sexagesimas horse durantes , minus
antecedentibus erant vehementes. Vespere doloribus partium re-
solutarum auctis, ægrota, neque manum sinistrum ad caput mo-
vere , neque meare potuit; quamobrem cruri etiam emplast. vesic.
imponebatur. Coeterum morbi conditione non mutata, non erat
quod remedia præscripta mutarentur. Cum convulsionum causa
nondum remota videretur , intestinorum functio kesa, et oculo-
rum pupillæ dilatatæ essent, eam vermibus , qui intestina occupa-
rent, tribuendam suspicans, puellæ, pulvere ex rad. jalapp. et
hydrarg. muriat. mit. composito , purgatæ , decoctum, ex semin.
santon. cum tart. tartaris. paratum , sumendum præbui.
Die XXIII mensis juli ægrota, convulsionibus non vexata,
meliori gaudebat valetudine, caput ei non dolebat, et cibum as-
sumere cupiebat ; lingua quidem pituita erat obtecta , et alvus, bis
quotidie ducta, nullos excreverat vermes.
Tribus diebus sequentibus morbus melior videbatur ; partes
hemiplegia affectæ facilius poterant moveri, stercoris parum , id-
que mucosum, vermes nulli dejiciebantur.
54a APPENDICE.
Itaque die XX VII mensis julii , ne convulsiones redirent, solu-
tionem e sale mirab. Glaub. et elect. lenit. paratam sumi, simul
partes resolutas bis quotidie ungi, et ung, irrit. ad ulceris suppu-
rationem sustentandam adhiberi jussi.
Proximis ad secundum usque mens. august. diebus, valetudo
puellæ, si hemiplegiam excipias, in melius convertebatur ; caput
non dolebat, et cerebri functiones, linguæ color, appetitus
edendi, pulsus , alvus denique naturali conditioni convenientes
videbantur.
Die XVI mensis augusti puella magnam pituitæ copiam ter
sponte vomebat, linguam ostendebat muco obtectam , et ructibus
frequenter vexabatur ; quamobrem emeticum aptum existimavi,
quo sumpto, melior valetudinis conditio efficiebatur. Morbus se-
quentibus diebus non mutatus , nullam mutandorum medicaminum
causam afferebat.
Die XXV mensis augusti paralysis partium correptarum tanta
erat, ut ægrota neque brachio, neque pede sinistro uti posset,
simul de visu hebetiori querebatur , et pupillæ oculorum luce al-
lata non diminutæ erant. Per quinque igitur hebdomades remediis
accurate adhibitis, morbus tamen gravior, quam ineunte cura-
tione exardebat. Quare de alia, quam initio, causa, quæ morbum
sustineret, suspicatus, et alvum frequenter adstrictam, capitis
magnitudinem pro corporis ratione paululum majorem respiciens ;
in opinionem discessi, ab hydrope cerebri interno morbi sympto-
mata esse deducenda. Iterum,, iterumque, quibus causa morbi
detegi possit, ex ægrota quæsivi, nihil autem investigare potui.
Morbum , quo se conversurus esset nullis remediüis sumptis, per
nonnullos dies observarem , necesse existimans, ægrotam omni-
bus antea adhibitis abstinere jussi; ut autem amblyopiæ, quæ fre-
quenti asu florum arnic, fortasse affecta esset , mederer , camphor.
cum gumm. mim, et acet. vin. illi præbui.
Primo die mensis septembri puella, cum nonnullis diebus ante
refrigerata esset, et ciho se obruisset , febre corripiebatur gas-
trica , quæ ex nausea , lingua flavescente , pulsu frequenti et pleno,
urina crocea cognosei poterat. Itaque vomitorium præscribebatur ,
et postero die, excrelis sordibus gastricis, febris symptomata
mitigata observabantur. Tunc, ut alyus duceretur , solutionem ,
APPENDICE. 543
ex elect. lenit. cum tart. tartaris. paratam præbui ægrotæ, quæ
proximo die, febre omnino liberata , melius se habebat.
Cum remedia bene quidem, sed frustra essent adhibita , et am-
blyopia aucta, morbi symptomata ab hydrope cerebri interno esse
deducenda certior eram factus ; aliam igitur curandi methodum ,
qua serum, præter naturam in cerebro accumulatum resorbere-
tur, inire mihi proposui; et ægrotam pulveres ex hydrarg. mu-
riat. mit., herb. digit. purp. flor. arnic. et sacch. alb. compositos
sumi jussi, simul in scapula sinistra et in crure sinistro emplastrum
vesicat. perpetuum ponere,, et resolutas partes ung, nervino cum
linct. canth. quotidie perfricare non alienum putavi.
Quam quam ægrota die III mensis septembri, quod ad morbi
naturam , bene se habuerat, postero tamen vehementer quater cor-
ripiebatur couyulsionibus epilepticis, et, cum remisissent, sopore
tenebatur, vehementer stertebat, pulsus ei debilis erat, inæqualis
et parvus. Præterea urina pallida erat, et alvus per biduum op-
pressa, quare clyster injiciebatur , et inf. fol. sennæ cum sal. mir.
Glaub. et vino stibiat. sumebatur. Postero die, purgataægrota denuo
ter vexabatur convulsionibus, quibus cessantibus , morbus multo
gravior factus videbatur ; paralysis enim gravior etamblyopia utrius-
que oculiaucta erat,, urina insciente ægrota excernebatur , et tanta
ipsi erat virium debilitas, ne lectulo se surgere posset,
Die IV mensis septembri convulsiones plures faciebant impe-
tus, singulum quemque priori minus vehementem. Paralysis par-
tium aucta videbatur, urina ægrota inscia reddebatur , lingua erat
sordida , alvus oppressa ; quamobrem medicamentum purgans adhi-
bendum erat.
Septimo mensis septembri et sequentibus diebus ægrota indies
paululum melius se habebat, incontinentia urinæ omnino remise-
rat, alvus quotidie ducebatur, et partes resoluta facilius moveri
poterant; visus autem non melius videbatur. Usa tunc erat pulve-
ribus ex hydrarg. muriat. mit. , floribus arnic. et herb. digital. purp.
compositis; simul partes resoluiæ unguent. neryin. cum tinct.
canth. ungebantur, et ulcera continuo suppurabant.
Die IV et sequentibus mens. octob. diebus ægrota, quamquam
meliuscule se habebat, nullam tamen conyalescendi spem præbuit.
41 APPÉNDICE.
Utebatur tune infus. flor. arnic. cum spirit. sulph. æth. et syrup.
simpl., simul pulveribus ex hydrarg. muriat. mit., herb. digit.
purp. camph. et sacch. alb. paratis.
Die XV mens. octob. ægrota epilepticis subito härtiebare
convulsionibus , quibus cum hora præterita ter sponte vomuisset ,
liberabatur ; alvum, per duos dies oppressam, ut duceret, infus.
fol. sennæ cum tartar. tartaris. sumebat. Postero die alvus bis du-
cebatur , neque convulsiones redibant. — Quæ cum ita essent,
omnibus, excepto unguenti, quo coitus materiæ ex ulceribus
fieret, usu , medicamentis puella per nonnullos dies abstinebat.
Die XVIII mens. octob. ei proximis morbus, quamquam con-
vulsiones non redierant , multo gravior videbatur ; pulveres igitur
supra laudati denuo , et majori quidem portione sumebantur, et
alyus clysteribus adhibitis sæpe erat ducenda.
Die XX VI mens. octob. die ægrota adeo erat debilis, ut per se
neque stare, neque in lectulo recta sedere posset, caput enim
dextrorsum in pulvinar recidebat. Urina plerumque, excrementa
alvi interdum inscia puella reddebantur ; amblyopia adeo creverat,
utamaurosin eam dixeris, cum clarior etiam lux percipi vixposset;
caput frequenter scabebat ægrota; sopor gravior et animi lenti-
tudo aucta videbantur. Ne re negligeretur, occiput tonsum un-
guento, e tartar. stibiat. drachmis duabus et axungiæ porcin. uncia
ddr parato , quotidie perungebatur. Quo ide per quinque
dies adhibito , pustulæ , pure repletæ , neque dolentes , nasceban-
tur; morbus tamen nullo modo levior, neque amaurosis sublata
videbantur.
Die XXXI mens. octob. die præter morbi signa, quæ antea
fuerant, oscitationes frequentes , respiratio bach et stertens ,
pulsus intermittens et frequens observabantur. Oculi et os ægrotæ
AR late patebant ; lingua ei muco erat obtecta, appetitum
ciborum ipsa non habebat, et ructibus frequenter vexabatur. Vo-
mitorio sumpto melius se habebat.
Primo die mens. novemb. nulla de morbo removendo spes ade-
rat; excrementa enim dejiciebantur insciente »grota, oculorum
bulbi erant collapsi , cutis coloris pallidi, et rerum memoria tra
ditarum postera die puella erat immemor.
APPENDICC. | 545
Die XIV mensis septembri amblyopia valde erat progressa,
pupille non nisi clariori luce incitante, paululum tantum, con-
trahebantur ; oculi speciem propriam, quam amauroticorum so-
lent, pr se ferebant; paralysis lateris sinistri eadem remanserat,
memoria ita imbecillis videbatur, ut puellarum sodalium æorota
vix recordari posset. Symptomata morbi respiciens, magnam fluidi
alicujus copiam in cerebro esse accumulatam et pessimum illius
exitum exspectandum existimabam. Ut vitam, etsi bona non erat
recuperanda valetudo, quam diu fieri posset, sustentarem, ad
methodum roborantem et incitautem adhibendam confugi. Itaque
puellam alimenta facilia concoctu et nutrientia sumere, præterea
decoctum rad. arnic. cum rad. valerian. minor. et extr. aloes aquos.
haurire, porro pulveres ex hydrarg. muriat. mit., herb. digit.
purp., camph. et sacch. albo paratos adhibere , denique in cervi-
cibus emplast. vesicat. ponere, et cæteris remediüs iternis continuo
uti jussi.
Die XVI mens. septemb. et sequentibus diebus conditio morbi,
remediis bene adhibitis , indieis pejor fiebat; ægrota res minutas
oculis oblatas non cognoscebat, lecto semper affixa tenebatur ,
caput dextrum sæpe scabebat , de doloribus ejus autem non quere-
batur, solito magis dormiebat, olfactus et auditus hebetiores erant,
matris amorem et curam lente accipiebat, et de appropinquante
morte haud evitanda sæpius loquebatur. Pulsus plerumque erat,
satis frequens , debilis, maxime in membris sinistris, vicesimus
quisque intermiltebat, partes resolutæ paulisper erant sanis frigi-
diores , alvus, quotidie ducta , stercora magna muci copia obtecta
excernebat. Cum in curandi methodo nihil mutandum videreiur à
vivendi ratio et remedia, quæ præscripseram, continuo adhibe-
bantur.
Die Ill mens. octob. gravior , quam præterito, videbatur mor-
bus, cujus rei causa detegi non poterat. Lethargus et animi lenti-
tudo valde erant aucta , pulsus frequens, parvus et intermittens,
cutis arida , lingua ex albo flavescens , urina pallidı, ejusque copia
satis magna , alvus denique per biduum oppressa. Quare injicie-
batur clyster, et cum remediorum adhibitorum optima viderentur
vesicanlia, ulcera, ut suppurarent, unguent. cantharid. irrita-
bantur.
35
546 APPENDICE.
Die ll mens. noyemb. ægrota, sponte vomens , jus sumptum
reddidit.
Die VI mens. novemb. convulsionum impetu corripiebatur,
et per horam dimidiam mentis non erat compos. Facultas loquendi
sublata videbatur, interrogata enim non nisi signis datis respon-
dere studebat ; adeo difficile audiebat,, ut clariorem tantum vocem
excipere posset; me jubente linguam, non nisi maxima opera,
porrigebat. Amaurosis ad summum usque erat aucla , membrana
conjunctiva bulbi inflammata. Partes sinistræ corporis non nisi
vehementiori digitorum vellatione afficiebantur dolore, et mox
calidæ erant , mox frigidæ , plerumque tamen cæteris frigidiores ;
multum sudorem tenacem et odoris acidi emittebat, scabebat se-
pius caput dextrum, pulsus ei debilis erat , inæqualis et frequens,
duodevicesimus quisque intermittebat, spiritum illa stertens et
difficilius reddebat ; excrementa insciente ipsa excernebantur. Quæ
cum esset morbi conditio pulveres, ex calomel., florib. arnic.,
herb. , digital. purp., camph. et sacch. alb. parati, sumebantur ;
simul ulcera in occipite , cervicibus, scapula et crure arte effecta
irritabantur.
Die VII mens. novemb, ægrota mane per horam dimidiam con-
vulsionum impetu concutiebatur , quem gravis sopor sequebatnr;
vespere et postero die convulsiones multo leviores antecedentibus
redibant. De vehemente siti ducta, multa bibebat, brevi post au-
tem evomebat ; interrogata non voce , sed signis respondebat, Al-
vus per biduum oppressa clystere injecto ducebatur.
Die IX mens. novemb. ægrota mane vexabatur convulsio-
nibus , quæ postero die denuo faciebant impetum. Morbi conditio
quam maxime pessima erat, pulsus parvus , inæqualis, intermittens
et tardus ; urinam et stercus inscia excernebat ægrota ; moribunda
in inferiorem lectuli partem prolabebatur, dentibus sæpe frende-
bat, spiritum stertens trahebat, potum vix devorare poterat,
omnia mortis instantis signa præseferebat. Vespere puella levio-
ribus iterum corripiebatur convulsionibus, quibus remittentibus
facultatem loquendi recuperabat ; morbum suum brevi transactum
fore æquo animo profitebatur, et matri interruptis verbis valedi-
cebat. Haud multo post sopore tenebatur, et secunda hora post
mediam noctem convulsionum impetu correpla, animum eddidit.
APPENDICE. 5!
_
1
De üs que in funeris capite dissecta observata sunt.
Die altero post mortem cerebri conditionem , præsente viro cl.
Busse, medico aulico , et assistentibus viris doct. Otto,M.DR
et Grape M. D D. ut morbis causa cognosceretur, dissecando in-
vestigavi. — Priusquam autem de iis agam , quæ in cerebro nobis
apparuerint, de corporis symptomatibus nonnulla dicenda viden-
tur. Membra totius corporis rigidissima , vix flecti poterant. Volæ
manuum et ungues coloris erant cærulei. Digiti manuum pedum-
que , przecipue pollices valde erant flexi. Integumentum abdominis
maculis non erat obductum ; partes, quibus nisum jacebat corpus,
imprimis ex scapularum , coccygis et natum , ut solent,, fuso san-
guine observabantur repletz. — De capitis magnitudine jam supra
mentionem feci. Integumenta ossium cranü integra reperiebantur.
Fonticuli omnino erant clausi; suturæ calvariæ nihil præsefere-
bant, quod naturali conditioni non convenisset. Cranium serra
‚circumfissum adeo adhærebat duræ matri, ut ab hac vix sejungi
posset , ipsum miræ erat tenuitatis et levitatis, crassioribus parti-
‚bus lineæ fere et dimidiæ, tenuissimis vix dimidiæ. — Cerebrum
paulisper erat sueto firmius, coloris flavescentis , pallidi, et vasis
sanguiferis repletum. Hemisphærium cerebri dextrum propemo-
dum tertia parte sinistro majus animadvertebatur. Cum dura mater
latere dextro incisa et remota esset, cerebri partem, quæ ventri-
culum lateralem tegebat , crassitudinis invenimus lineæ tantum di-
midiæ ; hac parte remota , tanta hydatidum copia in conspectum
nobis veniebat , ut ventriculi cavum mire esset dilatatum , neque
cornu ejus anterius discerni posset. Omnis hydatidum copia tunica
propria erat circumdata , quæ ob tenuitatem suam una cum hydati-
dibus e ventriculo tollinon poterat. Omnibus remotis hydatidibus,
cerebri , pars, qua ventriculum dextrum constitueret, propemo-
dum omnino deesse videbatur, ipsa enim ad latus utrumque cras-
situdinis erat linearum trium usque ad quatuor , et in fundo mem-
branam tendineam æquabat. — Uterque plexus choroideus coloris
pallidi, et sanguine carens reperiebatur; dexter autem multo erat
sinistro major. Nuspiam vasa cerebri sanguine valde impleta, ne-
85:
548 APPENDICE.
que sanguis ex vasibus progressus videbatur. — Ventriculus late-
ralis sinister aquæ continebat circiter unciam ; etiam ex medullæ
spinalis canali aqua profluebat. — In basi encephali nervi optici,
acustici , trigemini , olfactorii a eonditione naturali non cedebant.
— Glandula pituitaria, quam in epilepticis mortuis majorem se
reperisse contendit Wenzel, integra videbatur. — Glandula pinea-
lis nullum continebat acervulum , qui in hominum ætate provec-
tiorum cadaveribus plerumque reperitur. — In cerebello nihil
notatu dignum observabatur. Neque thoracis , neque abdominis
viscera dissecari permittebat mater.
Traitement hygiénique et thérapeutique contre les vers intestinaux.
Les considérations de notre auteur sur les moyens hygiéniques
ct thérapeutiques propres à combattre la diathèse vermineuse en
général , et les vers en particulier , sont en rapport avec l’etiolo-
gie de la maladie ; M. Bremser insiste avec grande raïson , ce nous
semble , sur le principe qu’il est moins important de combattre les
vers actuellement existans, que les causes qui peuvent en deter-
miner la formation ou la reproduction, et sur cette observation
que, très-souvent , les remèdes inconsidérément administrés sont
plus nuisibles au malheureux malade que la présence des vers in-
testinaux regardés comme les plus dangereux. Dans un cours spé-
cial sur les vers intestinaux , que nous fimes en 1813 à la faculté
des sciences , nous avions été assez heureux pour être conduits aux
mêmes résultats, beaucoup plus, il est vrai, par la théorie que par
la pratique. Au reste, on ne peut guère nier que M. Brera n’ait
admis à peu près les mêmes conséquences , quoiqu’iln’ait pas suivi
la même division des médicamens vermifuges.
Dans ce chapitre, M. Bremser parle successivement des diffé
rentes espèces de remèdes qu’on a proposés successivement contre
les vers , en les partageant suivant leur mode d’action ; après quoi
il rapporte avec toute la bonne foi convenable les systèmes de irai-
tement que les médecins ont employés contre telle ou telle espèce
de vers.
On peut sans doute trouver quelque chose à reprendre dans sa
APPENDICE. 549
classification des remèdes vermifuges , parce que dans la nature
3 n’y a rien d’absolu ; et il a pu en oublier quelques-uns , parce
qu’un ouvrage hnmain ne peut être parfait.
Il est évident en effet, comme le fait justement remarquer le cri-
tique allemand, que M. Bremser range à tort les carottes, mangées
crues ou räpees, comme un remède dont l’action est mécanique ,
puisque le suc de cette racine agit également comme vermifuge , et
que d’ailleurs des pommes et autres substances mangées crues
devraient agir d’une manière mécanique aussi bien que les carottes.
Il ne paraît pas probable, ajoute ce même observateur, que la
propriété vermifuge de l’helminthgcorton , ou mousse de Corse,
dépende du sel marin qui s’y trouve adhérent ; car il y en a en si
petite quantité, que c’est à peine si on le sent au goût.
Le camphre lui semble un excellent remède contre les ascarides,
car on-observe qu’ils sont évacués chez les enfans auxquels on ad-
ministre cette substance.
Le même critique a employé souvent avec le plus grand succès
l’huile de térébenthine contre le tænia. Il est vrai cependant que
cette espèce de vers reparait souvent après l’emploi de ce remède;
mais ne peut-on pas faire la même objection pour beaucoup d’au-
ires vermifuges.
Il ne partage nullement l’opinion de M. Bremser , suivant lequel
le mercure doux ne serait qu’un simple purgatif privé de véritables
propriétés vermifuges ; car il a observé que de très-petites doses de
ceite substance qui n'avaient pas d’action purgative ont cependant
produit l’évacuation d’ascarides. Il cite, à l'appui de cette manière
de voir, la grande confiance que les médecins anglais , et spéciale-
ment le célèbre docteur Latham , ont dans le calomélas employé
comme vermifuge, comme le prouve le mémoire de celui-ci
intitulé : Some observations respecting the medicines usually given in
worm cases, with remarks upon the collateral advantages some times
derivedfrom them in cases ofepilepsy (Médical. trans. , Lond., 5° vol.)
Nous venons de dire que, sans aucun doute, parmi un si grand
nombre de substances réputées vermifuges, M. Bremser a dû en
oublier quelques-unes, comme le lui reproche amèrement le cri-
tique italien. En effet, on trouve qu'il a passé sous silence l'huile
essentielle d’ail, les graines du papayer (carica papaya, L.), le
550 APPENDICE.
deléa officinale, le lonicere , le tabac, la noix vomique , le phel-
landrinm aquatique, le psoralier , le diagrede sulfuré , le muriate
d’ammoniaque, l’antimoine , le sulfure d’etain d’apres le procede
d’Alemanni , le zinc, le soufre , les eaux sulfureuses; substances ,
il est vrai, assez généralement peu employées, ou dont le mode
d'action rentre dans celui de plusieurs des médicamens dont
M. Bremser a parlé.
Quant à l’étain , que le critique italien dit aussi avoir été passé
sous silence , il est certain que M. Bremser en a parlé à l'article de
la méthode d’Alston, p. 455.
L’acide prussique a été également oublié. Voyez à ce sujet Brera,
Nuovi commentari re medic. et chir., ann. 1818, sem. seg., p. 195.
Il paraît qu’il n’a pas non plus rapporté absolument toutes les
méthodes de traitement qui ont été proposées contre les vers. Du
moins, le critique italien lui reproche d’avoir oublié celles de Ro-
senstein et Meier, dont Brera a parlé, qui consistent, l’une à faire
avaler au malade une grande quantité d’eau froide après un purga-
üf (ne vaudrait-il pas mieux que ce fût avant ?), et l’autre à donner
toutes les heures une cuillerée à café de carbonate de magnésie, et
aussitôt après une autre cuillerée de tartrite acidule de potasse.
Quant à l'oubli de l'emploi de l’huile de ricin si vantée par
Odier, M. Bremser en a réellement parlé à l’article de cette
huile, en rapportant la méthode de ce médecin, p. 479.
On pouvait sans doute aisément allonger beaucoup la liste des
méthodes de traitement et des médicamens proposées contre les
vers en général, et contre chaque espèce de ver en particulier
qu’a donnée M. Bremser ; mais , comme cela serait sans beaucoup
d'avantages, nous nous bornerons à ajouter quelques-unes de
celles qui nous sont presque tombées sous la main.
Colin Makensie, dans un ouvrage anglais intitulé Operative cy-
clopedia, qui contient cinq mille procédés ou recettes , annonce
qu’un médecin, d’une grande autorité en Italie, a donné avec le
plus grand succès l’essence de bergamotte à la dose d’un ou deux
gros mêlée avec du miel ; il ajoute que ce remède agit plus ef
cacement que l’essence de térébenthine et que le naphte dans le
traitement contre le tænia ou telle autre espèce de ver que ce soit.
|
APPENDICE. 551
On trouve rapporté dans le même ouvrage, que le docteur
Mongeny , médecin de l’hôpital de la colonie Ferdinéenne à Pile
de Cuba, a administré avec un succès étonnant , contre le tænia ,
les feuilles d’une plante aromatique très-commune dans le pays et
eonnue sous le nom de baume. On les réduit en pâte, fraîchement
eueillies; l’on en prend à jeun trois onces, en y ajoutant une cer-
taine quantité de miel : une heure après on avale deux onces de
miel pur, puis d'heure en heure une once de la même substance ;
au bout de six à sept heures le tzenia est expulsé.
D’après ce que M. lé comte de Champigny a dit à M. le docteur
Grundler, il paraît que ce baume de Cuba n’est rien autre chose
que la menthe poivrée (mentha piperata, L.) ; mais il est plus pro-
bable que c’est la balsamite odorante, dont les feuilles et les grai-
wes sont vermifuges ; car la menthe poivrée est d'Europe.
Bourdier , médecin de l'Hôtel-Dieu de Paris, faisait usage avec
succès, comme nous en avons élé plusieurs fois témoin, de l’éther
sulfurique dans un verre de décoction de racine de fougère mâle à
jeun; cinq minutes après il faisait prendre un lavement de. la
même décoction, contenant deux gros d’ether, et une heure
après il administrait deux onces d'huile de ricin et une once de
syrop de fleurs de pêche. Il continuait ce traitement pendant trois
Jours.
Enfin, pour ne rien oublier, nous citerons encore le moyen
annoncé dans les journaux par M. de La Bernardière , naturaliste-
voyageur , et qui consiste à avaler dans l’espace d’une heure une
livre et demie d'huile d'olives ou d'amandes douces.
Traitement particulier de l'auteur.
Nous n'avons pas grand’chose à dire sur la dernière section de
l'ouvrage de M. Bremser, dans laquelle l’auteur détaille la méthode
de traitement qui lui est particulière, d’autant plus que M. le doc-
teur Grundler a parlé dans ses notes des précautions à prendre
dans l’administration de l’huile empyreumatique de Chabert , dont
la dose indiquée par M. Bremser serait trop forte chez nous, de
la manière de la préparer , et d’en former un médicament moins
répugnant aux malades, etc. Voyez en effet p. 426 et 489. Nous
allons nous borner à rapporter textuellement les observations
552 APPENDICE. à
faites par le critique allemand, parce que, comme toutes les
autres , elles sont marquées au coin du savoir et de la bonne foi.
M. Bremser n'avait hésité d'employer l'huile empyreumatique
de Chabert en lavement , qu’à cause de l’huile de térébenthine
qu’elle contient ; mais cette hésitation a dû être détruite par les
expériences des médecins anglais qui ont administré cette dernière
huile en lavemens dans plusieurs maladies, et entre autres dans un
cas de trismus, rapporté par le docteur Phillips dans le vol. v,
p. 65-72 des Transactions medico-chirurgicales de Londres. Le
critique ne sait cependant pas qu’elle ait été employée comme ver-
mifuge,
M. Bremser donne dans certaines circonstances un purgatif; le
critique allemand lui conseille très-expressément d’employer alors
le calomélas comme le font les médecins anglais, non pas comme
simple vermifuge , mais comme faisant cesser le plus sûrement l’état
morbide des intestins qui a lieu dans la maladie vermineuse.
Quant à la précaution que prenait M. Bremser de donner l’huile
vermifuge à pelites doses pendant long-temps, parce qu'il lui sem-
blait que de grandes doses tuent bien le ver, mais ne détruisent pas
ses œufs ; il pense à présent qu’il serait au contraire possible que les
vers sorlissent à la longue pendant un usage prolongé du medica-
ment, et que ce soit pour cela qu’il se montre efficace dans ce
mode d'administration. Le critique M. Albers pense que l'emploi de
l'huile de térébenthine , continué de même pendant long-temps à
petites doses, produirait absolument lemême résultat que l'huile
empyreumatique ; et, en effet, il est bien convaincu d’avoir entière-
ment guéri plusieurs personnestourmentées de tænias par l’usage de
cette substance , en imitant les expériences multipliées des Anglais
sur ce remède, qui ont été rapportées dans leurs différens jour-
naux de médecine, comme dans l’Edimburgh medical and surgical
journal; London medical repository ; London medical and physical
journal, etc.
Fisures.
© La plupart des figures que donne M. Bremser sont originales et
faites avec le plus grand soin sous ses yeux. Tout le monde est
d'accord pour les regarder comme excellentes et comme tres-supé-
APPENDICE. 553
rieures à ce que nous avions déjà à ce sujet; aussi Le critique ita-
lien ne pouvant sans doute y trouver à redire , puisqu'il les déclare
nitide , venuste e chiare , s’est borné à ajouter que le mérite en était
au dessinateur et au graveur ; que la manière de rendre les vers en
blanc sur un fond noir n’est pas de l'invention de M. Bremser; ce
qui est sans doute vrai, puisque Gaspard Asello avait déjà fait
ainsi représenter, quoique grossièrement , les vaisseaux lactés, et
surtout que Hopper ( Robert) avait employé le même moyen pour
les planches figurant les vers intestinaux dans son mémoire inti-
tulé Observations on human intestinal worms, etc. ; Mem. of medic.
soc. of Lond., vol. v, Londres, 1799, in-8°, comme le fait juste-
ment observer le critique italien ; mais cela n'empêche pas que les
figures de Bremser ne soient bien plus exactes même que celles de
Joerdens, ce qui est ici la chose importante. Nous ne pouvons en
dire positivement autant des planches de Hopper, quoique nous
soyons fortement portés à le croire, parce que nous n'avons pu
trouver à Paris les Mémoires de la Société médicale de Londres,
pas plus que M. Bremser n’a pu le faire à Vienne , quoique le cri-
tique italien ait écrit que l’on sait (si sappia ) qu’ils existent dans
la bibliothèque impériale et royale de cette ville, en luireprochant
amèrement de n’ayoir pas cité le mémoire de Hopper.
J’ai fait copier avec soin les figures de M. Bremser , et j'ai em-
ployé pour cela la lithographie ; j'espère qu’on n’en sera pas trop
mécontent : il n’en existe certainement pas de meilleures dans aucun
ouvrage français sur les vers intestinaux.
Dans le but de rendre cet ouvrage plus complet et plus utile aux
médecins qui ne peuvent pas toujours aisément recourir aux Ou-
vrages de zoologie, j'ai cru devoir ajouter aux neuf planches co-
piées du Traité de M. Bremser , non-seulement la planche x, qui
renferme la copie des bonnes figures de coenure et d’echinoccoque
.donnée par MM. Fischer et Rentdorff, mais encore deux planches
de supplément ou de l’appendice : j’y ai représenté une espèce de
chaque genre d’entozoaires, en sorte que les praticiens qui ren-
contreraient une espèce qu'ils croiraient nouvelle, pourront s’ai-
der de nos figures pour les rapprochemens et la description qu'ils
en feront; c'était d’ailleurs une conséquence de Pexposition du
système de classification des entozoaires de M. Bremser ei du mien.
AA VU VU EU LUE LU VUE UL LU UUE LU RU RL URL EUL EURE LULU LS VU MURS UE LEVRETTE
TABLE
ALPHABÉTIQUE
DES NOMS DES AUTEURS
CITÉS DANS CET OUVRAGE.
Je n’ai pas lu ceux désignés par un astérisque.
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Lisez, page
ERRATA.
LE
26, ligne 24, fig. ?, au lieu de fig. 1.
47»
20, capsules au lieu de apsules.
30, lucio perca au lieu de perca lucio, L.
8, fig. 3-4, au lieu de 3-3.
8, lumbricoides au lieu de lombricodes.
10, fig. 4, au lieu de fig. 3.
8, anleitung , au lieu de anheïtuug.
11, the broad tape au lieu de the broadt ope.
8, fig. b, au lieu de c.
5, fig. c, au lieu de d.
12, pl. 4, au lieu de pl. 5.
16, ce qui a paru avoir lieu au milieu de toute la
longueur de l'animal, au lieu de ce qui a pu
avoir lieu dans toute la longueur.
3, pl. 4, au lieu de he
13, fig. d, au lieu deh.
16, pl.f7, au lieu de 6.
1, fig. g, au lieu de f.
18, dans toute la longueur d’un côté, au lieu de
au bord d’une articulation.
19, fig. h, au lieu de k.
19, pl. 3, au lieu de pl. 8.
17, fig. 5a, au lieu de 5c.
16, fig. 1e, au Lieu de Lf.
26 , fig. 2a, au lieu de 2e.
15 , fig. 2d, au lieu de 2b.
18, fig. 2b, au lieu de 2c.
19, fig. 2d, au lieu de 2.
14, fig. d, au lieu de fig. 3.
2. fig. a, au lieu de fig. u.
reti8, fig.g, au lieu de fig. 9.
note 3, wahnsinnigen, au lieu de wahnsinmuisen.
30, visis au lieu de viris.
Il est question de crachemens de sang et non
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pas d’hématodes, comme au reste cela a
déjà été dit, p. 376, dans la note,
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