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T838
.Ysn
Sneyders de Vogel,Komelis
Tristan et Iseut
d'après publications
récentes.
TS'ào
PRESENTED TO
THE LIBRARY
BY
PROFESSOR MILTON A. BUCHANAN
OF THE
DEPARTMENT OF ITALIAN AND SPANISH
1906-1946
NEOPHILOLOGUS
DRIEMAANDELIKS TIJDSCHRIFT VOOR
DE WE rENSCHAPPELIKE BEOEFENI1
\A\ LEVENDE VREEMDE TALEN EN VAX
HAAR I ETTERKUNDE
Onder Kodak tic van Prof. Dr. J. J. A. A. FRANTZEN,
Prof. Dr. J. J. SALVERDA DE GRAVE, Prof. J. H. SCHOLTE,
Dr. K. SNEYDERS DE VOGEL, Prof. Dr. A. E. H. SWAEN
Sekretaris der Redaktie K. R. GALLAS.
EERSTE JAARGAXG.
TWEEDE AFLEYERING.
TE GRONINGEN BIJ J. B. WOLTERS, 1916.
X
WIJZE VAN UITGAAF.
NEOPHILOLOGUS verschijnt om de 3 maanden tôt een omvang
van 20 vel druks, groot 8° formaat. — Prijs per jaargang f 3,50.
franko per post f 3,80.
Brieven en stukken voor de Redaktie en boeken ter bespreking
gelieve men te zenden aan K. R. GALLAS te Amsterdam,
Palestrinastraat 7.
I N H O U D.
Dr. K. Sneyders de Vogel, Tristan et Iseut, d'après des publications
récentes 81
P. Valkhoff, Louis Ménard (1822—1901) 88
B. H. J. Weerenbeck, Le gérondif français avec sujet sous-entendu? 101
Prof. Dr. R. C. Boer, Over den samenhang der klankverschuivingen
in de Germaansche dialecten 103
Prof. Dr. J. J. A. A. Frantzen, Romantisches in Schillers Dramen . 111
Prof. Dr. A. Kluyver, Over het Spel Granida 123
Dr. F. P. H. Prick van Wely, Holl.-Eng. raakpunten en parallellen 139
VARIA.
Prof. J. H. Scholte, Justinus Kerner, Der reichste Fiïrst 147
Prof. Dr. J. J. A. A. Frantzen, Zu Geibels Jugendlyrik 149
Prof Dr. A. E. H. Swaen, Old English Myl 152
BOEKBESPREKINGEN.
Prof. Dr. J. J. Salverda de Grave, L. Foulet, Le Roman de Renard 153
Prof. Dr. A. E. H. Swaen, W. T. Young, A Primer of English
Literature 155
Prof. Dr. R. C. Boer, J. P. M. L. de Vries, Studies over Fœrôsche Balladen 1 58
INHOUD VAN TIJDSCHRIFTEN.
Revue du XVIe siècle. - Zeitschrift fur franzosische Sprache und Litte-
ratur. - Germanisch-Romanische Monatsschrift. - Herrigs Archiv. -
Zeitschrift fur deutsche Philologie. - Euphorion. - Jahresbericht ûber
die Erscheinungen auf dem Gebiete der germanischen Philologie. -
Anglia. - Jahrbuch der deutschen Shakespearegesellschaft .... 159
Nadruk der artikelen is verboden.
In de volgende nummers zullen o.a. verschijnen: Prof. Dr. J. J. SALVERDA de
Grave, Observations sur le texte de la Chanson de Guillaume (suite et fin);
Dr. C. de Boer, Hermioneet Andromaque; G. Kramer, Œuvres posthumes
d'André Chénier; Prof. Dr. J. J. A. A. FRANTZEN, Chrétien, Kyôt, Wolfram;
Dr. LÉON Polak, Zinmelodie en Lichaamsreactie; Prof. Dr. J. J. A. A.
Frantzen, Ûber den Stil der Piôrekssaga; G. Ras, Borne und Heine
als Vermittler zwischen deutscher und franzôsischer Kultur; J. Kooistra,
Shelley's Prometheus Unbound; B. Westerveld, Georgian Poetry;
Prof. Dr. A. E. H. Swaen, Bestaat Oudengelsch Cocor = zwaard'i
Prof. Dr. A. G. van Hamel, Gotica; Dr. E. Kruisinga, Bijdragen tôt de
Engelse spraakkunst; Prof. Dr. W. Logeman, Notes on Romeo and Juliet.
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,1:m 487605
IK'islAN ET ISE! I, .
D'API '^* *• "^
i .1 légende de rristan H Iseut n< et d'inspirer Ici artistes
,.( i, le renottvellemenl fait par Joseph Bédfer1) est n» l'une
haute vtleur artistique, qui i été traduite dam pluaieun langues*); accompa
de la musique, l'histoire tragique des héros de Cornouailk m public
plus grand encore dans la Tristan urul Isolât de Richard W 'out
dernièrement ou ■ tenté en Italie une nouvelle reconstruction, basée surtout
sur la Tavota ritonda 3).
Les savants, eux aussi, ont continué à s'intéresser à notre légende. M
tandis que les artistes des XIX* et XX* siècles, comme ceux du douzième,
s'appliquent à l'adopter au goût du public auquel ils s'adressent, tout en
dégageant du poème médiéval ce qu'il contient d'éternellement beau, d'éter-
nellement vrai ; les savants essaient, à travers les adaptations et les renouvel-
lements, d'arriver à la source - perdue hélas! - où sont allés puiser les
poètes qui ont chanté l'amour de Tristan et Iseut.
On sait que nous n'avons plus Le roman de Tristan et Iseut, on n'est
pas même tout à fait sûr que ce roman ait jamais existé. Ce qui est arrivé
jusqu'à nous, ce spnt des fragments, des poèmes épisodiques, des traductions,
des remaniements en prose, un nom d'auteur, Li Kièvre, cité dans le prologue
d'un conte dévot4) et par le Roman de Renard 5).
Or, pour remonter plus haut, pour reconstruire une forme plus primitive
de la légende, il faut de toute nécessité étudier les différentes versions
et les fragments qui nous sont parvenus. Et cette étude n'est devenue possible
que de nos jours après la publication critique des fragments de Béroul 6)
et de Thomas7) et de quelques poèmes contenant des aventures qui se
rattachent à l'histoire de Tristan8), après enfin que le roman en prose lui
aussi est devenu accessible aux savants9).
A Gaston Paris revient l'honneur d'avoir donné des bases solides à ces
recherches en mettant à l'étude pour ses conférences de l'Ecole des Hautes
Etudes la légende de Tristan et Iseut. Les volumes XV et XVI de la Romania
contiennent une série d'articles de ses élèves. Parmi eux J. Bédier a continué
ses recherches. Il ne s'est pas contenté de publier les fragments seuls de
Thomas, en comparant les différentes versions et traductions qui dérivent de
*) Le roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier, préface de O. Paris, 19e éd.
Sevin et Rey, Paris, 1908. Ouvrage couronné par P Académie française.
2) e. a. en hollandais: De roman van Tristan en Isolde, naar de bewerking van J. Bédier,
vertaald door Marie Loke, 1903.
s) O. L. Passerini, // romanzo di Tristano e Isotta ricostruito, Milano, Trêves, 1914.
*) Publié par Groeber dans Festgabe Foerster, Halle, 1902.
■"•) éd. Martin, II, 93.
6) Fi. Muret. Le roman de Tristan par Béroul et un anonyme, Soc. d. anc. textes, Paris,
1903. Le même savant en a publié tout récemment une autre édition bon marché dans les
Classiques français du moyen âge, Paris, Champion, 1913.
i) Thomas, Le roman de Tristan, p. p. J. Bédier, Soc. d. anc. textes, I, 1902; II, 1905.
Les deux Poèmes de la Folie Tristan, p. p. J. Bédier, Soc. d. anc. textes, 1907. — Marie
de France, Le lai du Chievrefueil, éd. Warnke, p. 183. — Donnei des Amants, p. p. G. Paris.
Romania. XXV, 503 et 533.
'■') Le roman en prose de Tristan etc. Analvse critique p. E. Lôseth. Bibl. de PEc. d. H.
Etudes, fasc. 82.
Neophilologus, I. 6
t= o-'
-«r&j \G
82
Thomas - la Saga norvégienne, Gottfried de Strasbourg, Sir Tristrern, La
Folie Tristan du ms. Douce, la Tavola Ritonda - il a réussi à reconstituer
le poème tout entier de Thomas sinon pour la forme, du moins pour
l'esprit et le contenu.
Mais le roman de Thomas n'est pas le seul roman qui traite notre légende.
Il y a d'autres versions représentées par la traduction d'Eilhart von Oberge1),
le fragment de Bérou'l, la Folie de Berne et certaines parties du Roman en prose.
Or, M. "édier, étudiant les sources de Thomas, a été tout naturellement
amené à examiner les autres versions et à se former un jugement sur l'origine
de la légende elle-même, et Van Hamel a exposé pour les lecteurs du Gids2)
les résultats auxquels est arrivé le successeur de G. Paris; le même savant
a étudié aussi le rapport entre le roman de Thomas et le Cligès de Chrétien
dans un article lumineux3), où, profitant des données que Foerster, l'éditeur
de Chrétien de Troyes, lui fournit, il analyse finement l'œuvre du poète
champenois.
On sait que M. Bédier combat l'hypothèse de son maître G. Paris. Celui-ci
avait défendu dans une brillante étude4) l'origine celtique de notre légende:
à la base des poèmes français se trouvent des lais sur l'amour de Tristan et
Iseut, non un poème unique. Or, Bédier6) nie la celticité de presque tous
les éléments que G. Paris avait déclaré être celtiques: le rôle de la mer, le
séjour dans la forêt, les traits barbares et primitifs, le milieu humain n'ont
d'après lui rien de celtique. Il n'admet l'origine celtique que pour quelques
traits : le don d'imiter les oiseaux, l'arc qui ne faut, le chien faé; quelques
épisodes: les copeaux jetés dans le ruisseau qui traverse la chambre d'Iseut,
la scène Atsfaulx; Tristan porcher, récit qu'on trouve dans un conte gallois «).
Ces traits, ces épisodes, s'ils sont celtiques, ne touchent pas le fond du
récit. Bédier ne nie pas qu'il y ait eu en Angleterre des contes sur nos héros.
Mais tout nous porte à croire, dit-il, que ces contes étaient de banales et
sanglantes histoires d'adultère. Ce n'est pas là ce que nous appelons la légende
de Tristan et Iseut. Le conflit douloureux de l'amour et de la loi, voilà toute
la légende. Celui qui a eu l'idée de faire de quelques données banales un
récit tragique et profond comme l'est notre Tristan et Iseut est le vrai
créateur de la légende.
Non, il n'y a pas eu que des lais à la base de l'évolution, il y a eu, dit
Bédier, un artiste avisé et conscient, qui a voulu donner corps à ce qu'il
sentait en lui; il y a eu un poème unique pénétré d'un seul esprit, d'une
seule idée dominante. Cette idée, nous l'avons dit, c'est le conflit entre la
passion et la loi. Elle se base sur la conception du mariage indissoluble. Le
tragique dans la vie de Tristan et d'Iseut, c'est qu'ils se sentent liés par une
loi qu'ils reconnaissent, tout en la violant continuellement. Or, il est impos-
i) Eilhart von Oberge, hsgg. v. F. Lichtenstein, Quellen u. Forsch. z. Sprach. u. Cultur-
gesch., XIX.
") Middeleeuwsche Tristan-romans, Gids, 1905, 477—516.
3) Cligès et Tristan, Romania, 1904, 465—489.
*) Tristan et Iseut, dans La Revue de Paris, 1894, 1er avril, article reproduit dans Poèmes
et légendes du moyen âge, Paris, 1900.
5) Thomas, le Roman de Tristan, II, 145 svv.
6) Livre Rouge, tirade 63, dans J. Loth, Malinogion, II, Appendice.
83
lible qu'un * eltc lil eu l'Idée de baser son pocme sur cette conception <lu
mari que i<- mariage chez les Celtes - les lois de Howcl le prouvent -
pouvait se dleeoudre très ISacUement Non, le milieu dans lequel notre légende
a pu naître, c'eal la lOdété i lin tienne et française du commencement du
me siècle.
On peut même aller plus loin: il y a dans toute la légende, à côté de
l'idée fondamentale dont nous venons de parler, un autre élément qui relie
les différents épisod n accusé d'adultère rédame le combat judiciaire,
convaincu que Dieu l'aidera. Or, cette idée particulière de la justice, d'après
laquelle ce qui importe n'est pas le fait lui-même, mais l'issue du combat
judiciaire, remonte à une époque où le jugement de Dieu était encore en
vigueur, mais où pourtant ou commençait déjà à admettre qu'il ne couron-
nait pas toujours le droit.
Ce poème primitif, M. Bédier croit pouvoir le reconstituer, du moins dans
ses éléments essentiels. Il compare ligne après ligne les versions existantes. Toutes
les fois que deux parmi elles sont d'accord, Thomas et la Folie p. ex. contre
Eilhart, il adopte ce trait comme primitif; il le rejette, si une version est
seule à le donner. Cette méthode mécanique a donné, d'après Bédier, des
résultats surprenants: l'ensemble des passages qu'il adopte forme un récit
merveilleusement agencé, chaque trait en forme un chaînon indispensable,
chaque épisode cadre avec les caractères une fois posés des personnages.
Voilà dans ses grandes lignes la théorie de Bédier, telle qu'il l'a exposée dans
son second volume. Et d'autres, comme Golther1) sont arrivés à des résultats
semblables. Lui aussi, il rejette résolument l'ancienne hypothèse d'après la-
quelle notre roman serait une agglomération de lais, comme celui du Chievrefueil;
lui aussi fait remonter toutes les versions conservées à un seul roman primitif.
Sa reconstruction de ce roman diffère pourtant en quelques points de celle
de Bédier.
C'est d'abord qu'il croit que Béroul et Eilhart représentent chacun deux
versions indépendantes, tandis que Bédier est d'avis qu'ils sont intimement
liés et ont donc ensemble la même valeur que chacune des autres rédactions:
Thomas, la version en prose et la Folie de Berne. Voilà pourquoi Golther
admet le récit donné par Eilhart et Béroul, qui tout en disant que l'effet du
philtre bu par les amants se fait sentir pendant toute leur vie, en limitent
pourtant à trois ou quatre ans la force irrésistible qui les empêche de rester
séparés l'un de l'autre plus longtemps qu'une semaine2). De même il attribue
à l'auteur du premier Tristan le personnage d'Ugrin, l'ermite chez qui les
amants se rendent avant leur retour de la forêt.
Une autre différence entre Bédier et Golther se rapporte à la Folie Tristan.
Les versions où est raconté le déguisement de Tristan en fou sont d'abord
deux poèmes épisodiques, puis Eilhart von Oberg et le Roman en prose.
Aussi Bédier admet-il que cette histoire appartient déjà au Tristan primitif.
Lutoslawski, partisan de la théorie de Gaston Paris, et qui s'était déjà occupé
l) W. Golther, Tristan und Isolde in den Dichtungen des Mittelalters und der neueren Zeit,
Leipzig, Hirzel, 1907.
i) Eilhart, 2279 sw., 4729 svv. ; Béroul, 2133 sw. Il est vrai que le dernier n'ajoute pas
que l'effet du philtre soit éternel.
6'
84
de la question ]), croit au contraire que la Folie a existé d'abord à l'état
indépendant, et qu'ensuite la source commune d'Eilhart et du Roman en
prose l'a introduite dans la trame du récit, mais à un endroit mal choisi,
parce qu'il y interrompt l'histoire des amours de Kaherdin et de Gargeolain.
Golther, lui aussi, suppose que le récit de la folie a été introduite plus tard,
parce que Thomas ne la connaît pas, mais cette histoire aurait été inventée
seulement après que le roman de Tristan a été composé et est devenu célèbre.
On pourrait représenter l'opinion des trois savants par les schémas suivants :
Lutoslawski.
Bédier.
(O = Tristan primet)
Qolther.
Eilh.
Prose.
F.deB. F.d'O
F.deB. F.d'Ô. Eilh. Prose.
F.deB. F.d'O. Eilh.
Prose.
Je signale l'importance du problème que les lais nous posent:
La Folie- et les autres poèmes épisodiques - appartient-elle au roman primitif
(Bédier), ou bien a-t-elle une existence indépendante? et dans ce dernier
cas, est-ce un conte inventé sous l'impression du succès qu'avait le roman
(Golther), ou est-ce plutôt un des fils de la légende qui flottaient dans l'air
avant qu'un artiste les ait réunis pour en faire la trame de son roman
(Lutoslawski)?
Bédier ne nie pas plus que Golther qu'il y ait eu des contes sur Tristan,
antérieurs au roman, mais ces contes ne constituent nullement la légende de
Tristan et Iseut. Il y a eu un stade picte: Zimmer a trouvé un Drostan
mac Talorg chez les Pietés. Ce Drostan, dont nous ne savons d'ailleurs rien,
doit être identifié avec Trystan mah Tallwch qu'on trouve au pays de
Galles2). Il faut chercher de même Loonois3) et la forêt de Morrois en Ecosse.
En gallois se rencontre pour la première fois Essylt. Il est vrai que Golther
croit que Iseut est français et que Essylt en est une modification galloise.
On voit donc que Bédier et Golther sont d'accord en admettant un
archétype, source de toute la tradition sur Tristan, et en niant l'importance
des éléments celtiques. Quant à la date, Golther croit le Tristan primitif
plus récent que Bédier, qui le place vers 1125; il voit dans l'amour de
Tristan et Iseut une imitation des amours de Modred et de Guanhumara
chez Gaufrei de Monmouth, dont YHistoria regum Britanniae date de 11364).
Dans les dernières années on a attaqué de divers côtés l'hypothèse de
M.M. Bédier et Golther. Niant l'autorité du roman en prose, Zenker5)
n'admet donc que deux versions comme sorties de l'archétype; ainsi, une
i) Romania, XV, 525.
î) J. Loth, Mabinogion, passim.
3) Oolther place le Loonois en Bretagne.
*) Cf. la critique de O. Huet dans le Moyen Age, 1907, p. 285 svv.
3) Die Tristansage und das persische epos von Wîs und Ramîn dans Roman. Forsch., 1911,
p. 321—369.
i, tituii<m de l'original manquerai! de base solide et des argumente de
■. (le sentiment, de logique décideraient seuls. Kek-mina >) va encore plus
loin: il objecte à Bédier que ks différente! versions ont bien pu subir l'in-
du,-m, • l'une de l'autre; lui-même, Il croil (pie la légende à existé à une
époque prélittéraire bous deu don( on retrouve des traces
diun le roman en prose n admet enfin l'hypothèse de Sttcbler*) d'après
laquelle la Irt^nde finissait pi imitivi-nn-ut avec le retour des deux amants
leur séjour dans la I
M. J. Loth*) et M"c 0, Schoepperle4) ont étudie plus à fond qu'il n'a
été possible jusqu'ici les éléments celtiques de notre légende, et ils arrivent,
en partie du moins, à des résultats opposés à ceux de leurs devanciers.
M. Loth a ébranlé la pierre angulaire même de l'hypothèse de Bédier,
qui avait dit: «le trait le plus singulier de la vie celtique, c'est la
llité du lien conjugal." Or il paraît que M. Bédier s'est abusé sur la
valeur des documents qu'il cite, et qu'en réalité l'adultère était sévèrement
puni chez les Celtes. Il est vrai qu'on aurait été content de voir M. Loth
dter plus de textes qu'il ne le fait en faveur de cette assertion.
«Tristan et Iseut sentent peser sur eux la pression de la loi sociale qui
soumet le vassal au seigneur. Ils sont donc Français", dit M. Bédier. «Mais
le dévouement absolu au chef de clan", lui oppose M. Loth, «est la loi
fondamentale de la tribu et de la famille celtique", et il en allègue une
preuve convaincante5).
Ainsi le fonds sur lequel se base le poème de Tristan et Iseut peut être
celtique aussi bien que français. L'étude des noms propres permet à M. Loth
de préciser et de localiser la légende en Cornouailles, et la valeur de cette
étude ne sera, je suppose, appréciée par personne plus que par M. Bédier
lui-même, qui précisément par un procédé pareil à pu localiser les légendes
épiques.
Dans une série de petites études, que nous n'avons pas la compétence de
juger, M. Loth prouve d'abord que le stade picte de la légende n'a jamais
existé: on n'a pas le droit d'identifier le picte Drostan mac Talorg avec
Trystan mah Tallwch, comme le fait le celtisant Zimmer; la phonétique s'y
oppose d'une manière absolue. Le Loonois n'est pas le Lothian en Ecosse6);
c'est peut-être la région de Caerlleon sur Wysc. La forêt de Morrois n'est
pas non plus le Moray en Ecosse; c'est le Moresc actuel, le Moireis (il faut
corriger Morreis) du Domesdaybook, et il se trouve en Cornouailles, de même
que le Costentin ">) que Muret avait identifié avec le Cotentin en Normandie.
Ces constatatious amènent M. Loth à placer la berceau de la légende dans
la Cornouailles. Et le fait qu'on trouve dans nos poèmes des noms celtiques,
anglo-saxons et français, confirme cette hypothèse. En effet, ni le pays de
0 Untersuchungen zur Tristansage, Teutonia 16.
2) Suchier und Birch-Hirschfeld, Gesch. der franz. Literatur, Iï, 116.
3) Contributions à Fétude des Romans de la Table Ronde, Paris, Champion, 1912.
*) Tristan and Isolt, A study of the source of the romance, 2 vol., Frankfurt and London,
1913. Cf. Oolther dans Englische Studien, XLVIII, p. 299—306.
s) o. c, 12.
6) F. Lot dans Romania, XXV, 16; XXVII, 608.
1) Béroul, v. 2386.
86
Galles, ni la Bretagne française ne présente la fusion de ces trois éléments;
il n'y a que dans la Cornouailles que s'explique l'introduction dans la légende
de ces noms de provenance diverse.
Le livre de Mlle Schoepperle contient une étude détaillée de chaque épisode
en particulier: elle conclut que les versions de Béroul, Eilhart, Thomas, la
Folie de Berne remontent à une seule source, mais que la version en prose
et la Tavola Ritonda, qui présentent la mort de Tristan d'une façon tout à
fait spéciale (Tristan y est tué par son oncle Marc), et encore le lai du
Chievrefueil de Marie de France prouvent qu'il circulait des contes sur
Tristan et Iseut avant que le poète de Yestoire — c'est ainsi qu'elle
appelle la source de Béroul et des autres — eût composé son poème, en
mettant largement à profit les données qu'il trouvait. En effet, le Chievre-
fueil est une autre version, une version plus primitive d'après Mlle Schoepperle,
du récit d'Eilhart, où Tristan, caché avec Kaherdin dans le bois, prévient
Iseut de sa présence, en tirant une branche à travers la crinière du cheval
que montait la reine.
Mlle Schoepperle nie donc l'existence d'un archétype, elle attribue beaucoup
plus d'importance aux éléments traditionnels que ne le fait Bédier.
Ces éléments sont pour une bonne partie celtiques. Si Bédier a nié la
celticité des traits allégués par son maître, Mlle Schoepperle, tout en rejetant
même les quelques traits qu'il avait retenus, reconnaît une origine celtique
à nombre d'épisodes. On sait qu'il est difficile de décider si tel trait est
originaire de l'Angleterre ou non, parce que les textes gallois ou comiques
sont presque tous récents et ont pu subir l'influence française. C'est pour-
quoi Mlle Schoepperle a eu recours aux textes irlandais qui sont sensiblement
plus anciens. Si donc notre Tristan contient un trait qui ne se trouve que
dans la littérature irlandaise, ce trait est indubitablement celtique.
Un des épisodes les plus importants est celui où est dépeinte la vie des
deux amants dans la forêt. Or, tandis que dans la littérature française on ne
trouve rien de tel — dans Aucassin et Nicolette et dans Guillaume de Païenne
il s'agit de tout autre chose — la littérature irlandaise nous donne plusieurs
exemples d'un pareil exil. La comparaison avec le récit de Diarmaid et Grainne
est instructive sous ce rapport, puisque celui-ci offre des analogies frap-
pantes avec notre roman : on y retrouve l'eau plus hardie que l'amant et on
y lit l'épisode suivant: quand Diarmaid et Grainne se couchent, ils se tien-
nent éloignés l'un de l'autre, ou, d'après une autre version, Diarmaid place
une pierre entre eux deux. Cela nous fait penser à la scène dans laquelle le
roi Marc surprend les deux amants, endormis, avec l'épée qui les sépare. Ni
Eilhart, ni Gottfried ne sont parvenus à s'expliquer ce trait que pourtant ils
n'ont osé éliminer. Dans Diarmaid et Grainne par contre le trait est pleinement
justifié: le héros suit la femme de son oncle contre son gré, et il veut la lui
rendre intacte; dans Tristan et Iseut l'épée reste inexplicable, ou plutôt on
ne saurait en rendre compte que par l'hypothèse que l'auteur du Tristan a
connu une histoire comme celle de Diarmaid.
Mlle Schoepperle trouve encore d'autres points de rapprochement entre les
deux récits, par exemple les copeaux que Diarmaid, tout comme Tristan, jette
dans l'eau.
87
i i.i con< lu Ion qui, d'tpi I bc toi . m as it
concdved, tnd conoelyed In no les» of tragic beauty than in the
tormi In whien wt nom hâve It, wat Cdl n» Ti tan as we
bave it, In EJIhart, In Béroul, In rhomae, à French, and M. Bédier, in his
:i ol it, i tory M it it." I-a rédaction de XLstoire
daterait de la Hn du x 1 1 ■ tiède,
I ii formulant cette OU, M"e Schoepperle se base surtout sur le
caractère de la première partie, qu'elle croit primitive; elle néglige le reste
du poème qui, d'après elle, est l'œUVR d'un porte plus récent1). Et pour-
tant, le caractère de notre légende est précisément hybride, si j'ose dire; sans
les éléments contenus dans la seconde partie on aurait une autre histoire,
intéressante peut-être, mais bien différente de notre légende. Non, l'auteur
qui a composé THsiaH d hait aura, certes, largement mis à profit un
route comme relui de Diarmaid et Grainne, mais en y ajoutant une suite,
composée d'éléments et de traits de provenance diverse, il a tellement modifié
le conte celtique qu'il a vraiment créé une nouvelle légende. Nous serions
donc porté à attribuer plus de valeur que Bédier aux sources que le poète
a mises à contribution, mais nous n'allons pas jusqu'à croire avec M"e
Schoepperle que notre poème, tronqué des éléments les plus importants,
puisse encore s'appeler la légende de Tristan et Iseut "conceived in no less
of tragic beauty than in the forms we now hâve it"2).
Pourrait-on remonter encore plus haut le courant de la légende? On l'a
essayé. M. Zenker, dans l'article cité plus haut, a, après M. Ethé3), relevé
des parallèles intéressants entre notre poème et l'épopée perse Wîs et Ramîn.
Malheureusement, il n'a pas connu l'étude de Mlle Schoepperle, parue après
la publication de son article; s'il y a dépendance d'une des deux œuvres —
ce qui ne me semble pas encore démontré — la question de la priorité n'est
pas encore résolue, parce que la source celtique de notre Tristan est très
ancienne, plus ancienne que le roman perse, qui est du onzième siècle seule-
ment. Y a-t-il eu des points de contact entre la source perdue de Wîs et
Rarnin d'un côté et la source également perdue de Tristan et Iseut de l'autre?
Pour donner une réponse quelque peu satisfaisante à cette question, il
faudrait d'abord indiquer d'une façon plus précise les rapports littéraires qui
existent entre la Perse et l'Angleterre, puis comparer avec l'œuvre orientale
des récits celtiques comme Diarmaid et Grainne ou Deirdre et Naisi.
Leiden. K. Sneyders de Vogel.
li "This last portion is the work of a ver)' récent court poet", o. c, II, 472.
î) Cf. là-dessus mon article Tristan en Iseut dans un des prochains numéros du Giets.
3> H. Ethé, Verwandte persische vnd occidentalische Sagenstoffe, dans: Essays und Studien,
Berlin, 1872, et Die hôfische und romantische Poésie der Persen dans Vortrâge hsgg. v.
Viidiow-Holtzendorf, N. F. 2, Hamburg, 1887.
VAN J. B, W< )l 1 1 RS I i
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CATALOGUS
DER
AFDEEL1NG DUITSCHE LETTERKUNDE
EN LETTERKUND1GE GESCH1EDENIS DER
LAATSTE VIER EEUWEN
VAN DE BIBLIOTHEEK DER RIJKSUNIVERSITEIT
TE GRONINGEN.
Prijs f 1,25.
Dr. L. WIRTH,
der deutsch-niederlàndischen Sprache.
Prijs, ingenaaid f 2,75. Gebonden f 3,25.
UITGAVEN VAN J. B. WOLTERS TE GRONINGEN.
UITGAVEN VAN J. B. WOLTERS TE GRON1NGEN.
DE NIEUWE TAALGIDS.
TWEEMAANDELIKS TIJDSCHRIFT
ONDER REDAKTIE VAN
J. KOOPMANS en Prof. Dr. C. G. N. DE VOOYS.
NEGENDE JAARGANG.
Prijs per jaargang f 3,50; franko per post f 3,80.
Zoo juist verschenen :
OPSTELLEN OVER
SPELLING EN VERBUIGING
DOOR
Dr. R. A. KOLLEWIJN.
DERDE DRUK.
Met een woord vooraf van Prof. Dr. C. G. N. de Vooys.
Prijs, gebonden . . . . f 1,75
INHOUD: Onze lastige spelling. — Over spelling en
verbuiging. — De e- en o-spelling. — De geschiedenis van
de geslachten der zelfstandige naamwoorden in het Neder-
lands. — Over taalfouten en nog wat. — Woordorde en
buigingsuitgangen. — Vreemde woorden. — De spelling-
kwestie. — De spelling van De Vries en Te Winkel. —
Over Noord- en Zuidnederlands woordgeslacht. — Een
taaldespoot uit de pruiketijd. — Een bui. — Is bemiddeling
mogelik? — Regels van de vereenvoudigde spelling. — Register
UITGAVEN VAN J. B. WOLTERS TE GRONINGEN.
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