This is a digital copy of a book that was preserved for generations on library shelves before it was carefully scanned by Google as part of a project
to make the world's books discoverable online.
It has survived long enough for the copyright to expire and the book to enter the public domain. A public domain book is one that was never subject
to copyright or whose legal copyright term has expired. Whether a book is in the public domain may vary country to country. Public domain books
are our gateways to the past, representing a wealth of history, culture and knowledge that's often difficult to discover.
Marks, notations and other marginalia present in the original volume will appear in this file - a reminder of this book's long journey from the
publisher to a library and finally to you.
Usage guidelines
Google is proud to partner with libraries to digitize public domain materials and make them widely accessible. Public domain books belong to the
public and we are merely their custodians. Nevertheless, this work is expensive, so in order to keep providing this resource, we have taken steps to
prevent abuse by commercial parties, including placing technical restrictions on automated querying.
We also ask that you:
+ Make non-commercial use of the files We designed Google Book Search for use by individuals, and we request that you use these files for
personal, non-commercial purposes.
+ Refrain from automated querying Do not send automated queries of any sort to Google's system: If you are conducting research on machine
translation, optical character recognition or other areas where access to a large amount of text is helpful, please contact us. We encourage the
use of public domain materials for these purposes and may be able to help.
+ Maintain attribution The Google "watermark" you see on each file is essential for informing people about this project and helping them find
additional materials through Google Book Search. Please do not remove it.
+ Keep it legal Whatever your use, remember that you are responsible for ensuring that what you are doing is legal. Do not assume that just
because we believe a book is in the public domain for users in the United States, that the work is also in the public domain for users in other
countries. Whether a book is still in copyright varies from country to country, and we can't offer guidance on whether any specific use of
any specific book is allowed. Please do not assume that a book's appearance in Google Book Search means it can be used in any manner
anywhere in the world. Copyright infringement liability can be quite severe.
About Google Book Search
Google's mission is to organize the world's information and to make it universally accessible and useful. Google Book Search helps readers
discover the world's books while helping authors and publishers reach new audiences. You can search through the full text of this book on the web
at |http : //books . google . com/
A propos de ce livre
Ceci est une copie numerique d'un ouvrage conserve depuis des generations dans les rayonnages d'une bibliotheque avant d'etre numerise avec
precaution par Google dans le cadre d'un projet visant a permettre aux internautes de decouvrir 1' ensemble du patrimoine litteraire mondial en
ligne.
Ce livre etant relativement ancien, il n'est plus protege par la loi sur les droits d'auteur et appartient a present au domaine public. L' expression
"appartenir au domaine public" signifie que le livre en question n' a jamais ete soumis aux droits d'auteur ou que ses droits legaux sont arrives a
expiration. Les conditions requises pour qu'un livre tombe dans le domaine public peuvent varier d'un pays a 1' autre. Les livres libres de droit sont
autant de liens avec le passe. lis sont les temoins de la richesse de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de la connaissance humaine et sont
trop souvent difficilement accessibles au public.
Les notes de bas de page et autres annotations en marge du texte presentes dans le volume original sont reprises dans ce fichier, comme un souvenir
du long chemin parcouru par 1' ouvrage depuis la maison d' edition en passant par la bibliotheque pour finalement se retrouver entre vos mains.
Consignes d 'utilisation
Google est fier de travailler en partenariat avec des bibliotheques a la numerisation des ouvrages appartenant au domaine public et de les rendre
ainsi accessibles a tous. Ces livres sont en effet la propriete de tous et de toutes et nous sommes tout simplement les gardiens de ce patrimoine.
II s'agit toutefois d'un projet couteux. Par consequent et en vue de poursuivre la diffusion de ces ressources inepuisables, nous avons pris les
dispositions necessaires afin de prevenir les eventuels abus auxquels pourraient se livrer des sites marchands tiers, notamment en instaurant des
contraintes techniques relatives aux requetes automatisees.
Nous vous demandons egalement de:
+ Ne pas utiliser les fichier s a des fins commerciales Nous avons congu le programme Google Recherche de Livres a I'usage des particuliers.
Nous vous demandons done d' utiliser uniquement ces fichiers a des fins personnelles. lis ne sauraient en effet etre employes dans un
quelconque but commercial.
+ Ne pas proceder a des requetes automatisees N'envoyez aucune requete automatisee quelle qu'elle soit au systeme Google. Si vous effectuez
des recherches concernant les logiciels de traduction, la reconnaissance optique de caracteres ou tout autre domaine necessitant de disposer
d'importantes quantites de texte, n'hesitez pas a nous contacter. Nous encourageons pour la realisation de ce type de travaux 1' utilisation des
ouvrages et documents appartenant au domaine public et serious heureux de vous etre utile.
+ Nepas supprimer r attribution Le filigrane Google contenu dans chaque fichier est indispensable pour informer les internautes de notre projet
et leur permettre d'acceder a davantage de documents par I'intermediaire du Programme Google Recherche de Livres. Ne le supprimez en
aucun cas.
+ Rester dans la legalite Quelle que soit I'utilisation que vous comptez faire des fichiers, n'oubliez pas qu'il est de votre responsabilite de
veiller a respecter la loi. Si un ouvrage appartient au domaine public americain, n'en deduisez pas pour autant qu'il en va de meme dans
les autres pays. La duree legale des droits d'auteur d'un livre varie d'un pays a I'autre. Nous ne sommes done pas en mesure de repertorier
les ouvrages dont I'utilisation est autorisee et ceux dont elle ne Test pas. Ne croyez pas que le simple fait d'afficher un livre sur Google
Recherche de Livres signifie que celui-ci pent etre utilise de quelque fagon que ce soit dans le monde entier. La condamnation a laquelle vous
vous exposeriez en cas de violation des droits d'auteur pent etre severe.
A propos du service Google Recherche de Livres
En favorisant la recherche et I'acces a un nombre croissant de livres disponibles dans de nombreuses langues, dont le frangais, Google souhaite
contribuer a promouvoir la diversite culturelle grace a Google Recherche de Livres. En effet, le Programme Google Recherche de Livres permet
aux internautes de decouvrir le patrimoine litteraire mondial, tout en aidant les auteurs et les editeurs a elargir leur public. Vous pouvez effectuer
des recherches en ligne dans le texte integral de cet ouvrage a I'adresse lhttp : //books .google . com
3» -ff jr K-m^;'Jtrv r r*
ALVMNVS BOOK FVND
BIBLIOTHEQUE LITURGIQUE
TOME CINQUlfeME -^ 2° LIVRAISON
fiTUDE CRITIQUE
SUR L ORIGINE DU
PAR
< Le Uhanoine Lrrr:?5E{cHEYALIER
Correspondant de VInstitut
^
PARIS
ALPHONS& PICARD, LIBRAIRE
82, RUE BONAPARTE
1900
ETUDE CRITIQUE
suR l'origine du
S* SUAIRE DE UREY-CHAMB£RY-TUR1N
BIBLIOTH&QUE LITURGIQUE
TOME CINQUlfeME — 2* LIVRAISON
£tude critique
SUR L ORIGINE DU
PAR
Le Chanoine Ulysse CHEVALIER
Correspondani de VInstitut
PARIS'
ALPHONSE PICARD, LIBRAIRE
83, RUE BONAPARTE
1900
£./ "
'■•?
■S4Ctt
Imprimatur.
Valentin, die ,8. ,u„ii ,900.
L. Chosson, vie. gen.
• • •• • •
• • • • •
k • * • ft •
'""Uiiis
fiTUDE CRITIQUE, : :•.:.
SUR l'origine du*. .v.: ::•'•'' :."••:'.:!
S' Sifaire de Lirey-Chaiiib^ry-Tiirln ""
■ rc:oj>'»^''
Veritas nihil erubescit, nisi solummodo abscondi.
(Tertullibn).
a On sait que le culte des reliques, grave et respectueux dans
Tantiquite, prit insensiblement, chez nos ancdtres a demi barbares,
un tout autre caract^re. Le d^sir de poss^der des reliques s'exag^ra
chez eux jusqu'^ Ik passion, et finit, disons le mot, par d^g^n^rer
en d^oience. La discipline s^v^re qui avait et^, jusqu'a un certain
point, la sauvegarde de Tauthenticit^ des reliques, tomba entidre-
ment. Ce fut k qui poss^derait les plus extraordinaires et les plus
pr^cieuses ; et I'ardeur qu'on mit k se les procurer, fit n^gliger, la
plupart du temps, les lois les plus ^l^mentaires de la prudence.
11 ^tait trop naturel qu'il se trouvat des hommes sans conscience
pour exploiter pareille situation. Les reliques devinrent objet de
commerce, et Ton eut recours aux moyens les moins avouables
pour satisfaire a la demande, toujours croissante, des prdats et
des peuples. L'ambition des ^glises particuli^res de se distinguer
par quelque insigne relique, fut Toccasion de plus d^une manoeu-
vre criminelle, dont une pi^t6 trop confiante se fit souvent com-
plice. A partir du 1X« si^cle surtout, les Revelations et les Inventions
se multiplient d'une fafon inqui6tante et amdnent au jour des
reliques que raniiquite avait toujours ignor^es, qu'elle aurait
(i) Ce m^moire a ^te lu k la Sorbonne, au Congr^s des socidt^ savantes,
section d'histoire et de philologie, le 6 juin 1900.
6 iTUDE CRITIQUE SUR
m6me repouss6es avec horreur, tant rimagination surexcit^e se
donna de licence.
c Insensiblement les fausses reliques se mM^rent aux vraies
dans une confusion d^concertante, et un inventaire m^thodique-
'.toeot dr^^;<%St leeSques conservees dans les ^glises vers la fin du
moyen |ig[e^po'urrait ,seul donner une juste id^e des abus accumul^s
/•dja}'iu>t*.^$^i^(;(e;^^'-et.^ontre lesqueis le Concile de Trente s'61eva
avec vigueur.
« Dans un grand nombre de cas, il n'est nuUement difficile de
montrer qu'il y a eu supercherie ou erreur grave k Torigine du
culte de certaines reliques, et Ton ne prit jamais au s^rieux ce
docteur aux abois qui pronon9ait le mot replication lorsqu'on lui
montrait le chef de S. Jean-Baptiste dans plusieurs ^glises. De
m^me, ceux qui pr^tendent possdder un bras de S. Pierre ou le
chef de S'* C^cile, ne seront pas crus sur parole ; tout le monde,
avec raison, exigera la preuve de leur affirmation et un authen-
tique incontestable.
« La question est 6galement facile a Fdgard de certaines reliques
trop ^videmment invraisemblables, trop peu d^centes mdme, que
la simplicity de nos anc^tres acceptait sans difficult^, et que nous
rejetons sans h^siter. Pour celles-1^ on n*a aucune peine k avouer
que leur authenticity ne repose sur aucune preuve s^rieuse.
« La difficult^ commence lorsque Fob jet en litige est v^n^rable
de sa nature, et ne se heurte, en apparence, a aucune impossibilite.
On croit n'avoir aucune raison de s'en defier. Pourtant, la plupart
des reliques extraordinaires, qui, sans attestation ant^rieure,
paraissent au jour en un endroit d^termin^, durant la pdriode du
IX« au XV* si^cle, ne sont point dans de meilleures conditions.
Alors que, vu les circonstdnces od elles ont ^t^ produites, elies
doivent nous paraitre suspectes, et exigeraient des garanties dou-
blement sdrieuses, nous irions nous contenter de la possibility
d'une tradition ant^rieure, dont personne n'est capable de signaler
la trace ? Ce serait manquer de logique et de prudence dans une
mati^re si grave, sans avoir Texcuse de la simplicity dont peuvent
ben^ficier nos anc^tres » (i).
(i) Analecta Bollandiana^ 1900, t. XIX, p. 46-7, k propos de la relique du
sang de N.-S. J.-G. que S. Longin aurait apport6e k Mantoue.
LE SUAIRE DE TURIN. 7
Ces paroles graves, s^v^res m^me, ^manent du college des
Bollandistes de Bruxelles, tribunal critique d*hagiographie et de
lipsanographie le plus competent qui existe en Europe. Elles
trouveront leur confirmation dans Texamen auquel je vais sou-
mettre une relique insigne, dont on fait grand bruit, depuis deux
ans, dans la presse religieuse. L'assentiment des Bollandistes est
acquis d'avance aux conclusions de cette ^tude. Je le sais, car un
premier essaisur ce sujet d^licat (i) a obtenu leur approbation (2).
Une mince brochure a suscit^ la contradiction dans divers rangs
de la society eccl^siastique. Le pro-vicaire general de Turin a cru
de son devoir de contredire ma th6se au sujet de Tdpoque r^cente
que j'avais assignee au Suaire honors dans sa ville (3). Trois
mois apr^s, un lalque de Paris est entr^ en lice, appuyd sur un
argument, tir^ de Tart photographique, qui lui parait ineluc-
table (4). Des ^vfiques (5), des archevSques (6), des cardinaux (7)
m^me ont accorde a mes contradicteurs Tappui de leurs hautes
approbations. J'estime qu'il est imprudent de consid^rer Tensemble
des traditions comme un bloc intangible, k la conservation int^-
(i) Ulysse Chevalier, Le saint Suaire de Turin est-il Voriginal ou une
copie ? itude critique, dans.^/^m. et doc. publ. par la Societe Savois. d'hist. et
d'archioL, 1899, ^* s^^., t. XIII, p. io5-33; Chamb^iy, V^« Menard, i899,in-8<>
de 3i p.
(2) Analecta Bollandiana^ 1900, t. XIX, p 215-7.
(3) De V authenticity du saint Suaire de Turin, observations de Mgr Emma-
nuel CoLOMiATTi, pro-vicaire general de Turin (R^ponse k une brochure
publi^e par M. i*abb6 Ulysse Chevalier, sous ce titre : Le saint Suaire de
Turin est-il Voriginal ou une copie ?) ; LiUe, H. Morel, 1899, in-8® de 35 p.
Ulysse Chevalier, Reponse aux Observations de Mgr Emmanuel Colomiatti,
pro-vicaire general de Turin, sur la brochure Le saint Suaire de Turin est-il
Voriginal ou une copie? ; Paris, Alph. Picard, 1900, in-8* de 8 p.
L*attaque et la riposte ont 6galement paru dans la Revue des sciences
ecclisiastiques de Lille (nov.-d6c. 1899, janv. 1900}.
(4) Le Portrait dt JV.-5. Jisus-Christ d'apris le saint Suaire de Turin, avec
reproductions photographiques, par Arthur Loth,...; Paris, H. Oudin, s. d.,
gr. in-8» de vi-64 p., 4 planches.
(5) D'Annecy (Isoard), de Montpellier (de Cabriires) et de Versailles (Goux).
(6) D'Alby (Mignot) et de Chambiry (Hautin).
(7) De Rennes (Laboure) et de Turin (Richelmy). — - Voir leurs lettres dans
le journal parisien La Virit€ des 28 et 29 mars, 4, 6 et 10 avril derniers.
8 &TUDE CRITIQUE 6UR
grale duquel tous les catholiques seraient gravement int^reta^s ;
on se fait un point de conscience d'en conserver intact le d^pd^
et de n'en laisser dissiper la moindre parcelle, k Tinstar d'u^
capitaliste qui, faisant le bilan de sa fortune, oublierait d'en d^fal-
quer les valeurs d^pr^ci^es k la bourse.
J'avais provoqu^ mes adversaires k exhumer des documents
in^dits en faveur de leur th^se; ils n'en ont pas produit une ligne.
Plus heureux, j*en ai trouv6 une trentaine, dont je puis attester
Tauthenticit^ : on en trouvera le texte en appendice k ce travail.
Pour proc^der avec m^thode, il y a lieu de rechercher d'abord
tous les anciens textes relatifs k des Suaires qui ont une attache
avec la Palestine ou Constantinople, puis de faire Thistoire de
celui de Lirey^ Taide des documents et das chroniqueurs contem-
porains ; aprds avoir ^tabli que, d^s son origine, par prescription
des 6v6ques et des papes, il fut montr^ aux fiddles comme une
simple peinture, je suivrai la faveur progressive du culte qui lui
fut rendu et prouverai en terminant que I'op^ration photographic
que, dans laquelle on a cru voir un t^moignage irrecusable de son
originality, n*est pas concluante et tendrait au contraire a etablir
qu'on a bien k faire k une copie.
Si je ne m'abuse, la certitude des conclusions permettra de faire
justice des proc^dds de discussion historique employes dans cer-
tains milieux du monde religieux.
I
D'apr^s un t^moin oculaire, I'dvangeliste saint Jean, le Sauveur
fut enseveli suivant la coutume des Juifs (i): on sait qu'elle se
rapprochait beaucoup de celle des Egyptiens. On fermait d'abord
les yeux et la bouche du defunt; sauf aux condamn^s, on coupait
les cheveux ; puis venait la lotion et Tonction du cadavre ; enfin,
on enveloppait le corps d'un linceul et on Tattachait avec des
bandelettes. Ces derni^res particularit^s sont saisissantes dans
le r^cit de la resurrection de Lazare.
(i) S. Joannes, c. xix, v. 38-42.
LB SUAIRE DE TURIN* 9
L^8 ^vang^listes synoptiques (i) ne parlent q.ue d'un suaire
(sindon), achet6 par Joseph d'Arimathie. Apr^s la resurrection du
Christy saint Jean vit dans le s^pulcre des linceuls (linteamina)
et, pU6 k part, le suaire (sudarium) qu'on avait mis sur la tdte
de J^sus (2).
Recherchons tout d'abord dans Tantiquit^ les documents qui se
referent k ces reliques, en nous attachant exclusivement k celles
qui, de Palestine ou de Constantinople, purent dtre transferees en
Europe.
1 . Le plus ancien t^moignage est celui d'Arculphe, evdque (de
P^rigueuz !) sacre en France, qui visita longuement la Terre-
Sainte vers 670. II n'a pas r^dige lui-mdme le r^cit de.son p^le-
rinage ; mais, jete par «ne tempdte sur les cdtes de TEcosse, il
fut accueilli dans le monast^re de Hy (lona), dont Fabbe Adamnan
nlit par ^crit, plus ou moins sous sa dict^e, ses souvenirs de
Palestine. Le xi* chapitre du !•' livre a pour objet : De sudario
ilio^ quo Domini caput sepulti contectum est (3).
2. Cinquante ans plus tard (vers 720), le venerable Bdde, anglo-
saxon, dontTEglise vient tardivement de rendre le culte universel,
redigea un Libellus de locis Sanctis, qui n'est point un simple
abr^ge d*Arculphe ; toutefois le chapitre iv : De sudario capitis
Domini^ n'a rien d'original (4).
3. Troissiedes et demi s^parent cette description de la Chanson
du Voyage de Charlemagne d Jerusalem, M. Gaston Paris, qui
en place la redaction au commencement du dernier quart du XI*
(i) S. Matthjeus, c. xzvii, v. 58-6o ; S. Maacus, c. xv, v. 43-6; S. Lucas,
c. xxiii, V. 52-3.
(3) « Eq comparant tous les passages oH il est parl6 des linges qui senri-
rent k ensevelir le corps du Sauveur, il paroit qu*il y avoit un linceul... et
outre cela des bandelettes... ; et enfin un suaire, ou un linge particulier dont
la t6te du Sauveur 6toit enveloppee » (D. Calmbt, Comment, litteral sur la
Bible, 1726, t. VII, p. 789).
(3) ToBLBR (Tit.), Itinera et descriptiones Terrcs sanctcs (Genevae, 1877),
pp. 1 33-6 et 2o5-6 (redaction abr6g6e de Cadouin), cf. p. xzz-iij.
(4} Op. cit^ p. 219-20, cf. p. xxxiy*viij. Cf. Baronius, Ann, eccl., a. 678,
n* 14.
10 ETUDE CRITIQUE 8UR
si^cle (vers lo/S) (i), a montr^ qu'elle reflate avec exactitude ]es
rapports des pterins contemporains.
L'empereur demande des reliques au patriarche, qui lui r^pond :
169 c Durrai vus tels reliques, meillurs n'en at suz del :
Del sudarie Jesu que il out en sun chief,
Cum il fut al sepulcre e posez e culchiez,
Quant Judeu le guarJdrent as espies d*acier » (2).
4. La lettre soi-disant adress^e de Constantinople, au printemps
de 1093, par Alexis I*' Comndne, cmpereur d'Orient, k Robert le
Prison, comte de Flandre, renferme un catalogue de reliques, qui
est ind^pendant de son authenticite ; on ytrouve: « Linteamina,
post resurrectionem ejus [Domini] inventa in sepulcroB f3).
5. Vers 1140, Pierre diacre (du Mont-Cassin) reproduit tex-
tuellement Tabr^g^ du v^n^rable B6de (4).
6. Au canevas d'un Sermo ad Jherosolimitas (vers 1146) on a
ajoute un catalogue de reliques, qui concorde assez avec la lettre
prdcddente : 9 In Constantinopoli habentur reliquie pretiosissime
Domini ; Linteamina, post resurrectionem ejus in sepulcro
(i) Contre le sentiment de L^on Gautier, qui Tattribuait au premier quart
du XII* si&cle (Epopees Franfaises, 1880, t. Ill, p. 371).
(3) MiCHBLANT et Raynaud, Itineraires d Jerusalem (Gendve, 1883), p. 5
(lextc de Koschwitz, revu par 0. Paris), cf. p. xj-ij. D*apr&s ies Annates
d'EciNHARD (an. 799) : « Monachus quidam de Hierosoiyma veniens, bene-
dictionem et reiiquias de loco resurrectionis dominicae, quae patriarcha regi
miserat, detulit » (6d. Tbulbt, t. \, p. 343-4) La tradition de la Chanson est
reproduite dans la Chronique rimie de Philippe Mousk^s, trourire de Tournay
(vers 1 341):
1 1430 « £t le suaire Jhesu Christ
Ki viertus et miracles fist,
Dont il ot la face couverte,
Aporta il, c'est cose apierte » (ed. de Reiffenberg, i836, t. I, p. 441).
(3) Riant, Exuvice sacrce Constantinopolitance (Genevae, 1878), t. II, p. 308^
cf. t. I, p. ccij-v; le meme, Alexii I Comneni Romanorum imperatoris ad
Robertum I Flandrice comitem epistola spuria (ibid., 1879), PP- '7» ^^ ®^ ^7*
cf. pr6f. ; le meme, Invent, critique des lettres histor. des croisades (Paris,
1880), p. 71-89.
(4) Gamurrini (Joh. Frand.), S. Silvice Aquitance peregrinatio ad loca sancta,
1888, p. 119-30.
LE SUAIRE DE TURIN. 1 1
inventa » ; et plus haut : « Apud Compendium est Sudarium
Domini » (i).
7. Vers 1 1 5o un pterin anglais joignit a ses notes de voyage
le catalogue des reliques conserv^es dans la chapelle de Tempereur
a Constantinople : « He sunt relliquie que apud Constantinopo-
lim, in capella imperatoris, monstrantur. » La 4* est: « Sudarium,
quod fuit super caput ejus » (2).
8. Peu aprds, en 11 67, un b^n^dictin, Nicolas Soemundarson,
abbe de Thingeyrar en Islande, dressa, k la suite de son itin^raire
en Terre-Sainte, le catalogue des reliques constantinopoliiaines ;
il mentionne en islandais : « Likbloejur med Sveitadtik ok B16di
Crists », ce que le comte Riant traduit en latin : « Fasciae cuni
Sudario et Sanguine Christi » (3).
9. A Tannde 1171, Guillaume de Tyr (Historia belli sacri^
XX, 23) mentionne une ostension des reliques de la chapelle des
Blachernes, faite par Tempereur Manuel au roi Amaury ; I'^nu-
m^ration comprend: « ... Syndonem... » (4).
10. Dans un inventaire du trdsor de la chapelle de Bucoleon,
dressd probablement par un pdlerin de la troisidme croisade (vers
1 190, mais pouvant remonter au milieu du XI I« sidcle), figure:
« Item pars Linteaminum, quibus crucifixum Christi corpus
meruit involverc.. Arimatensis Joseph, in supradicta imperiali
capella continetur ». II ajoute immediatement : « Syndon enim...,
ex Karoli Calvi dono, habetur Carropoli Gallie » (5).
(i) Riant, Alexii I Comneni... epistola spuria, p. 47-8, cf. p. Ixxiv-vj.
(3) Riant, Exuvia sacrce Constantinop,, t. II, p. 211, cf. t. I, p. ccv.
(3) Riant, op. cit., t. II, p. 214, cf. t. I, p. ccv-j.
(4) Riant, op. cit., t. 11, p. 216.
(5) Riant, op. cit., t. II, p. 217, cf. t. I, p. ccvj-ij. — Dans ma prcmidre
brochure I'avais signal^ Tindex des Exuvice sacrce CPolitance du comte Riant
comme pouvant mettre sur la vole de documents concemant les Suaires.
M. Loth ne cite pas cet ouvrage, mais renvoie aux sources indiqu^es en t6te
des documents qui y sont reproduits ; ce proced^ l*a expos6 k des m^prises.
Pour Guillaume de Tyr, il renvoie au livre xxii qui concerne Baudouin,
tandis qu'il s'agit d'Amaury et du livre xx (c. 25, 6d. Migne). En note (p. lo-i)
il mentionne la Descriptio (n© 10), mais, comme elle ^tait inddite, il vise les
manuscrits de Rome et de Paris, qu'il n'a silrement pas collationn^s : ce n'est
pas k TEcole des Chartes qu'on apprend k demarquer ainsi le linge d'autrui.
la iruDE cmnouE sur
11. En i2o3, nous trouvons mentionn^ de nouveau le linceul
conserve k Sainte-Marie des Blachernes par Robert de Clary,
dans son Estoires de cfiiaus qui conquisent Constantinoble ; « ... Et
entre ches autres en cut j[un] autre des moustiers, que on apeloit
medame Sainte Marie de Blatcerne, od li Sydoines, \k oti Nostre
Sires fut envolep^s, i estoit, qui cascuns devenres se drechoit tous
drois, si que on i pooit bien velr le figure Notre Seigneur ; on ne
sent on onques, ne Grieu ne Franchois, que chis Sjdoines devint,
quant le vile fu prise » (i).
1 2. Parmi les reliques de BucoUon dont Tempereur Baudouin II
fit Tabandon, par un chrysobulle dat^ de Saint-Germain-en-Laye,
en juin 1247, au roi saint Louis, figure: «... partem Sudani quo
involutum fuit corpus ejus [D. N. J. C] in sepulchro » (2).
1 3. Durand de Mende (mort en 1296) t^moigne, dans son Ratio-
nale divinorum officiorum^ avoir vu de ses yeux dans la Sainte-
Chapelle du roi de France, le titre de la vraie croix: «... cum
Sindone, qua corpus fuit involutum... » (3).
14. De \k^ nous descendons jusqu*en 145 1. Dans une de ses
^pltres h^rolques (en vers), Antoine Astesan fait la description
des reliques de la Sainte-Chapelle :
De plus, comme les hagiographes de vulgarisation aiment les dat6s precises,
il la met k 1 190, sans tenir compte du c. (circiter) qui pr6cdde le milUsime :
il fallait lire la preface. Pourquoi arreter la citation au mot « contineiur »
et omettre le paragraphe suivant, relatif au Suaire de Compidgne ? sans doute
pour ne pas nuire k celui de Turin, que les textes citis (p. 10) ne concer-
nent pas avec plus de certitude que les autres.
' (i) Riant, op. cit., t. II, p. a 32, cf. t. I, p. cciz. — II est k remarquer
qu'aucun Suaire ne figure dans la description des sanctuaires de Constanti-
nople et de ses alentours, r^dig^e en laoo par Antoine, futur m^tropolitain
de Nowgorod. Le linteum » pris dans ce document pour un suaire par M. de
DoBSCHl^Tz (p. i45*)6tait le linge dont J.-C. se ceignit k la derni^re c^ne. Par
contre, il d^crit le vase de la C^ne (Riant, op. cit., t. II, p. 319), qui fut
envoy^, peu d'ann^es aprds, par Teveque de Troyes, Gamier de Trainel, au
tr6sor de sa cath6drale (Ch. Nior^, Inventaire des princip, iglises de Troyes^
1893, t. I, p. cviij ; le meme, Le vase de la Cine dans Vancien Msor de la
catMdrale de Troyes^ Troyes, 1896, gr. in-8® de 39 p.).
(3) Riant, op. cit., t. II, p. i35, cf. t. I, p. cixxK>j.
(3) Riant, op. cit., t. II, p. aSo, cf. 1. 1, p. ccxiij.
LB SUAIRE VK TUXIIf. 1^
« Illic esse ferunt etiam Sodaria sacra,,
Ilia quibus Christum tumulandum, impulsus amore,
Involvit Joseph, partem aut (ne fallar) eorum » (i).
La poursuite de ces diverses reliques dans ieurs peregrinations
successives et leur identification actuelle ne sont point chose
facile. Voici les principes qui guidaient le comte Riant, aussi bon
Chretien (2) que grand savant, dans cat ordre special de recherches :
« Tout en ne professant pas certaines doctrines ind^pendantes
sur I'histoire des temps apostoliques, tout en s'inclinant, sans
discussion, devant les traditions I6gu6es par les premiers Chretiens,
tout en reconnaissant pour authentiques les reliques que tenaient
pour telles, sans preuves ^crites, les P^res de TEglise, il me sem-
ble que I'on peut faire passer au second rang, pour les temps
post^rieurs et dds que commence la s^rie continue des t^moigna-
ges historiques Merits, la tradition orale, e^demander que Tauthen-
licite d*une relique de premier ordre, solennellement ofiTerte k la
veneration des fiddles, soit etablie pas une chdine non interrompue
de temoignages Merits, recueillant directement I'heritage de la
tradition des temps apostoliques, pour nous la transmettre sans
lacune... J'ajouterai qu'une rigueur encore plus grande dans la
continuite des preuves ecrites, me semble naturellement n^ces-
saire, lorsqu*il s'agit ... d'une relique multiple, c'est-a-dire d'un
objet sacre partageant avec plusieurs autres le nom sous lequel ils
sont tous egalement veneres et lorsque, par consequent, Ton peut
craindre qu'etablir rauthenticite de I'un de ces objets, aboutisse
infailliblement a rendre plus que suspecte celle de tous les
autres » (3). II est facile de prevoir que ce minimum de ti'adition
exigee sera neanmoins fatal k bien des reliques.
Dans son Mimoire sur les instruments de la Passion de N.-S.
J.'C.^ plus remarquable par la reproduction des monuments que
(i) Riant, op. cit., t. II, p. 357.
(3) Le Memento imprime k sa mort ^num&re les a Sanctuaires ou le comte
Riant se transportait tous les soirs par Tesprit en r^citant chaque pri^re de
son chapelet » (66) et les « Litanies des saints que le comte Riant a v6ner6$ en
d^couvrant Ieurs reliques ou Ieurs tombeauz pu en parlant de leur vie » (43).
(3) Revue des questions historiques, 1870, t. VIII, p. 33 x.
14 irUDB CRITIQUE 8UR
pour les recherches historiques, Ch. Rohault db Flbury donne
des renseignetnents sur les saints Suaires de Besan9on, Cadouin,
Cahors, (Carcassonne), Compi^gne etTurin^ outre Tindication de
divers fragments ou linges (i). Plusieurs d'entre eux ne peuvent
6tre que des suaires b^nits, que les pMerins rapportaient d'Orient,
apr^s leur avoir fait toucher le saint sepulcre et qui ^taient r6put6s
avoir acquis par ce contact la vertu de faire des miracles : on les
nommait aussi Sanctuarium ou Brandeum (2). D*apr^s T^rudit
qui le premier a tent^ d'approfondir la mati^re, le m^decin Jean-
Jacques Chifflet (3), le Suaire achet^ par Joseph d'Arimathie
(i) Paris, 1870, in-4% p. 334-43.
(3) Voir Baromius, MariyroU Roman., Dote a du i5 juin, et ses Annaies
eccUsiast,, an. 55, n® 13 ; et aussi Du Gangs, Glossar, latin,, v" Brandeum i*
et Sanctuarium 5*. '
(3) Voici, pour ne pas la disperser dans les notes de cette dtude, la biblio-
graphie surtout ancienne du Suaire de Turin, pour laquelle j'ai mis k contri-
bution, outre ma propre bibliothdque, les collections de la Biblioth. nation,
de Paris, le catalogue du British museum et celui du comte Riant.
Phi lib. PxNGONii Sabavdi, Cvsiac^n. baronis, Sindon evangelica^ access,
Hymni aliquot, insignis Bulla pontiflcia^ elegans Epist, Franc. Adokni les. de
Peregrinatione memorabili ; Avgustae Tavrinorvm, i58i, in-4» de 4 f.-88 p.,
pi., iigg. ; rdimpr., ibid., la mdme ann^e et en 1777, in-4*. '— Sur Pingone
et ses ouvrages, voir Tart, du comte Mareschal de Luciane, dans Mint,
de Vacad, de Savoie, 1893, 4* s6r., t. IV, p. 467-76.
Esplicatione del len^volo oue fu inuolto il Signore, e delle piaghe in esso
impresse col suo pretioso sangue, confrontate con la Scrittura, Profeti e Padri^
con la notitia di molte piaghe occulte & numero de* chiodi, e con pie medita-
tioni di dolori delta B. Verg^; dell' Alfonso Palbotto; Bologna, 1598, in-4*
de 16 f.-i46 p.-3o f., 3 pi.; E. d, sacro I. ovefv t. il 5. et d.„ Padri, con p.
m, de* d, d, beata.,, Verg^, da.. A. P., ibid., 1599, in-4* de *7 f«-'44 P«-«9
f., 3 pi.
La sacra historia delta santissima Sindone di Christo Signor nostro, raccolta
in compendio da graui auttori per Prosp. Bonafamiglia ; Roma, x6o6, petit
in-80 de 56 p., fig.
Jesv Christi crvcifixi Stigmata sacrce Sindoni impressa ab Alph. Paljeoto...
explicata, melliflvis elvcidationibvs, vt rerum copia vheri amplissimis, ita his-
toriarum varietate priscce vetustatis multiptici, & eiudita sacrarum Scriptura-
rum enucleatione conditis, quibus vniuersas Christi Seruatoris nostri acerbis-
simce Passionis series, eiusdemq ; mysteria, necnon sacerrimce virginis Deiparce
agones declarantur,.,, quam plvrimis qvoestionibvs vt valide pijs, ita & h ne-
mine,,, pertractatis.,, exomata,,,^ auctore f. Dan. Mallonio... ; Venetiis, 1606,
LE 8UAIRE DE TURIN. 1 5
servit exclusivement k recevoir le corps du Sauveur k la descente
de la croix (a Turin) ; il serait done different de celui dans lequel
in-49 de 16 f.-a94p.-i9 f., pK; (m6me titre impr. ; grav^] Historia admiranda
de lesv Christi stigmatibvs sacra Sindoni impressis, ab Alph. Paleoto...
explicatay figuris ceneis, qvcestionibus, contemplationibus et meditationibus
pijssimis illiutrata, cum universa Passionis serice, mysteriis et sacraiissimce
Virginis Deiparce agonibus.,,^ avctore Dan. Mallonio, Duaci, 1607 (a la fin
1606), in-4* de 16 f.-428 p.-aS f., figg. ; Augustas Vindel., 1607, in-4®; Ant-
verpiae, 161 6, in-4*, pi. ; Duaci, 1646, in-4*.
Tabieav de mortification, tir6 sur VHistoire miraculeuse des Stigmates de
lesvs Christ marque^ au S. Suaire, descrite par AIph5se Palbot... et depuis
enrichie par F. D. Maillon de belles explicatios des mysteres plus remarquables
de la Passion de nostre Seigneur crucifie et de la Vierge nauree du glaiue de
douleur, et finalement traduicte et ampliflie de plusieurs conceptions prises de
VEscriture saincte, par N. I[avpitrb] S. Destiollbs ; Paris, 1609, in- 12 de
6-597-3 f., figg.
Beschreibung der Leinwath oder Grabtuchs Christi, teusch durch C. Sten-
gel; 8. 1. n. d., in-4®, figg. [traduct. de Paleotti].
L'histoire sacree du tris- saint Suaire de N.S. Jesus Christ, inestimable tresor
de la maison de Savoye, auquel est contenu en bre/, comme il a ete conserve
depuis quHl fut achepte par Joseph d'Arimathie, jusques a prisent, recherche
de diuers hauteurs (tant italiens que Francois) par Nicolas du Moinb et mis en
rime par lui-mesme; Turin, 1623, pet. in-8*'de 85 p.
Ragionamenti sopro la sacra Sindone di N. S. Giesv Christo, fatti da f .
Cam. Balliani...; Torino, 1610, la parte; ibid., 1618, 2a p.; ibid., 1624, 3a p.;
novamente ristampati, accrescivti e diuisi in tre parti ; ibid., 1624, pet. in-4*
de 10 f. 280-8 p.-4 f.-(28i-) 618 p., figg. (m6dailles].
lo. lac. Chifflbtii De linteis sepvJchralibvs Christi Servatoris crisis histo-
Pica ; Antverpiae, Plantin., 1624, in-4« de 8 f.-288 p.-7 f., pi., figg. ; 2a edit.,
ibid., 1688, in-4* (exempl. aux arch, du Doubs); f^impr. dans Ugolinus,
Thesaurus antiquitatum sacr., Venet., 1767, t. XXXIII, c. dccczix-dccccxlviij,
figg. — Hierothonie de lesvs-Christ, ov discovrs des saincts Svaires de Nostre
Seignevr, extrait et traduit du latin de lacques ChifHet, par A. D[uchb8ne]
C. P. ; Paris, i63i, pet. in-8* de 8 £.-240 p., figg. — Une autre paraphrase
fran^aise forme la i'* partie du ms. i33 du fond Chiflet k la biblioth. de
Besanfon (54 p.).
Sindone evangelica, historica e theologica, di... Agaffino Solaro de conti di
Morbtta; Torino, 1627, in-4* de 4 f.-2i8 p.-3 f.
Histoire ov bref traiti dv S, Svaire de N. S. lesvs Christ, pretievse reli-
qve de la maison de Sauoye, qui se garde a Turin, ville capitale du Piemont,
par Francois Victon [publ. par Hilarion de Costs] ; Paris, 1634, in-8* de
4 f.-84 p.
Histoire trH^remcf qvable dv sainct Svaire qvi est a Tvrin, contenant quel-.
r6 trvuE critique sur
J^sus fut mis an tbmbeau (k Besan^on), distina lui-mtm^e decelai
de la t6te (ACadouin); \tperi\oma (i) serait ik Aiz-la-Chapelk :
ques miracles et meditations denotes sur la Passion de Nostre Seigneur^
traduite de ritalien en fran^ois par le s' Fournybr; Paris, 1641, in- is* de
4 f.-93 p.
CAPRi (Franco. Traits du Saint-Suaire de Turin ; Turin, 1654, fol. ; repro-
duit k la fin de son Traiti historique de la <lhambre des comptes de Savoie
justijli par titres, statuts, ordonnances, Edicts et autres preuves tiroes des
archives^ Lyon, i66a, in-4*, 143 grav.
Compendia istorico della Santa Sindone (fatto dal P. D. Vltt. Amad.
Baralis) ; Torino, 1685, in-8®.
Ctpriamus (E. S.) et Schmidt (Job. Andr.), Sudaria Christi ; Helmstadii,
1698, 4^ ; ibid., 1726, in-4* de 38 p.
ViGus (Job. Bern.),*.. De Sindone Taurinensi libri duo; Augustae Tauri-
norum, 1768, in-4».
AvoNDo (Franc), Disserta^ione sopra la ss. Sindone esposta al pubblico cut-
to.,,; Torino, 1775, in- •.
Vassalli (M. A.)> Discorso sopra la sacra Sindone di GesU Cristo ; Parma,
1787, in- •.
Commentarii critico-archeologici sopra la ss, Sindone de N, 5. Gesii Cristo
venerata in Torino^ del P. Lazz. Gius. Piano... ; Torino, i833, 3 vol. in-4^
de 440 et 469 p., 3 port., 3 pi., fig.
Moroni (Gaet.), Di^ionario di erudi^ione storico-ecclesiastica ; Venezia, i854,
t. LXV, p. 188-95.
Storia della arte cristiana nei primi otto secoli della Chiesa, scritta dal P.
Raff. Garrucci e corredata della coilezione di tutti i monumenti di pittura e
scultura incisi in rame... ed illustrati; Prato, 1876, gr. in-fol, t. III. (al. 11),
pi. 106, n** 4-5. Aprds de vains efforts pour obtenir une pbotograpbie, rdduit
k Paleotti, Cbifflet et Piano, ^met des conjectures erron6es.
Lalorb (abb^ Ch.), Historique de Vimage du 5. Suaire de Jisus-Christ^
primitivement h Lirey (Aube) et maintenant h Turin^ dans Revue cathol. du
dioc.de Troyesy 9 et 16 mars 1877; reproduit dans ses Milanges liturg.
relat. au dioc. de Ttvyes^ 1895, t. II, p. 66-73 ; et dans ma i'* brochure,
p. 9-39. J'en ai conserve quelques passages (entre guillemets) dans la pr^sente
6tude.
ChristusbildeTy Untersuchungen s^ur christlichen Legende, von Ernst von
DobschQtz (Texte und Untersuchungen jftir Geschichte der altchristlichen Lite"
ratury herausgeg. von Osc. von Gbbharot u. Ad. Harnack) ; Leipzig, 1899,
p. 73-9 et p. 143-6*. Ce livre, dont on a fait grand ^tat, est d*une insuffisance
notoire en ce qui concerne le Suaire de Lirey : ses sources se r6duisent k
Cbifflet et aux Exuvia.
(i) Ce n'est pas le lieu d*approfondir la question, de savoir si le Christ en
croix avait un linge autour des reins : Salmeron et autres pieux commentateurs
LE SUAIRE DE TURIN. I7
il ne faut voir Ik qu'un effort pour faire cadrer les reliques exis-
tantes avec le tcxte 6vang61ique (i).
Le Suaire de Cadouin a ^t^ transf^r^ dans une nouvelle chdsse
le 5 septembre 1866. La ftte a 6t6 racont^e par M. Delpit(2) et
I'histoire de la relique par Tabb^ Carles (3), dans un petit liV're
a oh il n*est arrive qu'^ compromettre, par des proc^d^s d'argu-
mentation tr^s discutables, la thdse si brillamment et si solidement
soutenue par le vicomte de Gourgues » (4). Le comte Riant, au-
quel j'emprunte cette appreciation (5), a montr^ qu'en Tabsence
i'affirment contre Lorin, Gretser, Suarez, Jans^nius, etc. Dire, avec Mgr Co-
LOKiATTi, qu'il n'en est pas fait mention dans TEvangile (p. 3i), c'est s'exposer
k recevoir en r^ponse que celui-ci ne mentionne pas non plus Pempreinte
que le corps du Sauveur aurait laissee sur les Suaires. Le plus piquant est^
que Chifflet, pour s'autoriser k difiF6rencier le Suaire de Besan^on de celui
de Turin, afiErme que celui-ci porte le peri^oma tandis que Tautre ne Ta pas
(p. 195-8 et la grav.) : en r(ialit6 les deux images ^talent semblables. Au sur-
plus, ChifRet s'en est rapport^, pour le Suaire de Turin, aux renseignements
fournis par sonfrdre, le j^suite Pierre-Franfois, qui y r^sidait alors (p. 123),
(i) Cette identification fantaisiste, imagin^e par Pingone, Paleotti et leurs
copistes, avait pour but de r6pondre k une objection : on faisait remarquer
que rimpression du corps du Christ sur le suaire ne pouvait comprendre la
tete, envelopp^e directement dans un linge particulier. La buUe de Jules II
(du a5 avril i5o6) n'a pas laiss6 d'ailleurs de les embarrasser, le pape affir-
mant que le suaire {sindon) de Chamb^ry ^tait celui « in qua ipse Dominus
noster Jesus Christus in monumento positus involutus fiiit » (Pingonb, p. So).
Comme les apologistes ont reponse k tout, Qhifplbt (ou son fr^re le j^suite)
a cm s'en tirer en disant que Jules II n'a rien tranche, mais s'est exprim6
suivant le sentiment du vulgaire (p. 147). — Ce serait le lieu de reproduire
les savantes et judicieuses remarques de rabb6 Martigny sur I'horreur des
premiers Chretiens contre I'idol^trie et les arts qui I'entretenaient (Diction.
des antiq, chr^t.^ 1877, p. 386-7]; les juifs convertis hdritaient de leur pre-
miere religion une repulsion instinctive contre les reliques.
(2) Relation de la fete de la translation du saint Suaire ; Perigueux, 1866,
in-8».
(3) Histoire du saint Suaire de Cadouin ; Perigueux, 1868, in-32 de viij-
104 p. ; Paris, 1875, in-8» de 370 p.
(4) Le saint Suaire ^ suivi d'un Essai sur les pilerinages d Jerusalem avant
les CroisadeSy par Delpit; Perigueux, 1868-9, in-8* de 288 p., pi. Les ouvra-
ges ant^rieurs sont indiqu^s dans ma Topo-bibliographie, c. 539.
(5) Exifin^ sacrof Constantinopolitance^ 1. 1, p. ccxx, n. 4 ; cf. p. clxvij, n. 3.
1 8 tnjDR CRITIQUB SUR
de tout t^moignage interm^diaire, rien ne prouve que le sudarium
Yu par Arculphe au VII* sidcle et le suaire qui parvint k Cadouin
vers 1 2 10 soient une seule et mdrne relique (i). Longp^rier conve-
nait que Vaspect de la relique permet de Tattribuer au P' sidcle.
EUe mesure 2*8 1 sur i"i3. Ses f6tes au deuxidme dimanche apr^s
Pftques et au 8 septembre n'ont pas de t^moignage ancien (2). On
peut lui rapporter les n*' i, 2, 3, 5 et 7 ci-dessus.
Des fragments de suaires (sudarium) se conservaient au moyen
fige k Clermont, Corbeil, Halberstadt, V^zelay (3), Reims (4),
Troyes (5) et Zante (6).
Compidgne poss^dait un suaire, d6nomm^ le saint Signe, et
beaucoup de bandelettes. De la chapelle de Bucol^on, ce suaire
serait pass6 au pouvoir de Charlemagne, qui le donna k Aix-
la-Chapelle (7), d'oti Charles le Chauve le fit porter en 877
k Tabbaye de Saint-Corneille de Compidgne (n^ 6 et 10). II fut
conserve dans un vase d'i voire jusqu'au jour de sa translation
dans une chlisse, enrichie d'or et de pierres pr^cieuses, don de
Mathilde, reine d*Angleterre ; la c6T6monie se fit le dimanche de
Loetare^ qui resta fix^ pour la f6te. Le tout est attest^ par un di-
pl6me du roi de France, Philippe !•% de Tan 1092. Une ostension
solennelle fut faite, le 21 octobre i5i6, par I'^vdque de Soissons,
Foucaud de Bonneval (8). Je donne en note le texte du chroni-
queur Richard de Poitiers qui concerne ce suaire (9). Un de mes
(i) Revue des questions historiques, 1870, t. VIII, p. 330-7.
(2) Riant, Exuvice s, Constantinop.^ t. II, pp. 298 et 3o2.
(3) Voir les sources dans Riant, op. cit., t. II, p. 39o».
{4) Voir notre Bihliothique liturgique, 1900, t. VII, p. xix.
(5) NioRi, op. cit., t. I, p. c; t. II,.pp. 3 (n® 9), i3 (n* in) et 272 (n« 2322).
(6) E. von DoBscHUTZ, Christusbilder, p. 326, n. 3.
(7) Un inventaire des reliques conserv^es k Aiz-la-Chapelle, du temps de
Charlemagne (804), mentionne express^ment : « Sudarium Domini » (O. Gre-
nier, Coll. de Picardie, t. LXXVI, p. 96; F. db Mbly, dans Revue archiolog,^
1899, t. II, p. 394).
(8) Chifflet, op. cit., p. 151-60. Voir Topo-bihliographiey c. 76a.
(9) c Carolus Calvus post mortem fratrum suorum regnat super Francos
annis xxix. et nobilem ecclesiam apud Cbmpendium de novo construxit,
multisque reditibus et praediis illam ditavit, insuper reliquiis quas de Jeroso-
lymis et ConstantinopoH advexerat eamdem insigniyit ; inter quae pretiosis-
LE SUAIRE DE TURIN. I9
amis m'a ^crit que la pr^cieuse relique s'est fondue dans I'eau
bouillante, oix la servante de I'un des pr^d^cesseurs de Tarchiprdtre
actuel Tavait plong^e pour lui rendre sa puret6 primitive. Cette
version est un peu diff^rente de celle qui a 6t€ recueillie par I'au-
teur du M^moire sur les instruments de la Passion (i).
Le suaire conserve, depuis saint Louis, dans la Sainte-Chapelle,
provenait des Blachernes {ti^ 12 k 14). La f<§te s'en cdldbrait le
3o septembre avec celle des autres reliques (2).
Un autre se conserve encore k Rome. On le regarde comme au-
thentique, parce qu'il avait support^ T^preuve du feu : or on voit,
dans le Voyage de Marco Polo, que c*6tait une ceinture de poll de
salamandre (d'amiante) que le grand Khan avait envoy^e au
pape (3).
Des fragments de linceuls (sindon) dtaient anciennement con-
serves k Clairvaux, Narbonne, Soissons et TolMe (4).
A Cahors, on v^n^re la sainte Coiffe, et k Carcassonne, le saint
Cabouin. Restent les suaires de Besan9on et de Turin, qui peu-
vent se rdclamer des n<* 4, 6, 8 ^ 1 1 , sans qu'aucun d'eux puisse
justifier d'une filiation.
Celui de Besan9on, auquel Chifflet a consacrd la majeure partie
de son livre, ^tait v^n^r^ le 3 mai et le 11 juillet (5). La tradition
en faisait un don de Tempereur Th^odose, qui Taurait envoys
avec le bras de saint Etienne (6). II dut parvenir k Besan^on en
simum sudarium Christi Domini, quod in sepulchro habuit, in praefata
ecclesia reposuit, quod usque hodie ibidem consenratur » (Martbnb, Vet,
script, etmonum. coll., 1729, t. V, c. 1166).
(i) RoHAULT DE Flburt, op. cit., pp. 24 1 et 327.
(2) Riant, Exuviae s, Constantinop.^ t. IT, pp. 48 et 298.
(3) F. de M^LY, dans Journal officiel, 7 juin 1900, p. 3579.
(4) Riant, op. cit., t. II, p. 388. — L*inventaire des reliques dont on fit la
translation k Saint-Trophime d' Aries, le 29 septembre 1151, mentionne :
c Quidam pannus lineus..., qui est sutus cum quodam panno aureo, in quo
panno lineo fuit D. N. Jhesus Christus involutus » {Gallia Christ, noviss,^
Aries, 1900, c. 1046). Nul doute que des recherches dans les inventaires par-
ticuliers des ^glises qui en possident encore, ne fissent ddcouvrir d'autres
reliques analogues.
(5) Riant, op. cit., t. II, pp. 294 et 296.
(6) Jnles Gauthhk, Notes iconographiques sur le saint Suaire de Besan^
20 irVDE CRITIQUE 8UR
1208 (i). Son authenticity a 6x6 d6fendue par Gollut (2), Fran9
d^Orival (3), Chifflet, Duchesne, son traducteur, et Dunod(4);
elle a ^t^ attaqu^e par Baillbt(5), dom Calmbt (6) et Beroier (7).
Ce suaire mesurait 2"6o sur i"3o. Sa trace est perdue & partir
' du 34 mai 1794, jour oix il parvint k la Convention ; d'apr^s le
Journal de Paris du lendemain, cette assembl^e aurait ordonn^
d'en faire de la char pie (8).
La tradition du suaire de Besan^on remontait peut-6tre au XIII*
si^cle : on ne saurait en direautant de celui de Turin, dont 11
nous reste k faire Thistoire, d'apr^s les nombreux documents heu-
reusement retrouv^s k son pays d'origine et ailleurs (9).
fo», dans Acadimie des sciences ... de Besangon^ 1883/4, p. 289. D'apr^s
M. Tarchiviste du Doubs, la plus ancienne mention qui s'en rencontre dans
les registres capitulaires est du 27 mars i523, k Toccasion de la representa-
tion du mystire de la Resurrection, dont il ^tait Taccessoire (p. 290) ; les
mots « ostendendo Sudarium seu Sindonem ostendi consuetum, prout moris
est a cetero, » donnent k entendre que cette coutume n'^tait pas r^cente. Le
travail de M. Gauthier a ^t^ tird k part, Besanfon, in-8% 4 pi.
(1) Le comte Riant se demande s*ii ne faut pas « rapporter aux bons offices »
de Ponce de Lyon (de ia maison de Ghaponay ?), agent financier de Tempe-
reur Henri, Tarriv^e en France du saint Suaire de Besan^on et de certains
reliqoaires de Troyes (op. cit., t. !••, p. clxiij).
(2) M^moires historiques de la Ripublique Sequanoise, iSgS, liv. I*% c. 26.
(3) Le sainct Suaire de Besanfon, antiquiU, miracles et vin&ations dHce-
luy, 161 o, in-4« de 41 p. (Arch, depart, du Doubs, n^ 45). Une copie 8*en
trouve dans le ms. 4 du fonds Chiflet k la biblioth. de Besan^on, f^ 168 ; voir
encore le ms. 5o, f* 2.
(4) Histoire de Viglise de Besangon^ ly^o, t. !•', p. 401-25.
(5) Histoire des festes mobiles dans VEglise^ 1703, t. !••, p. 523-4.
(6) Dictionnaire historique de la Bible^ ^l^o, t. Ill, p. 596.
(7) Dictionnaire de thiologiey Lille, 1844, t. Ill, c. 798-9. D'apris Bergier,
k repoque ot. s'introduisit la coutume de repr^senter des mystdres dans les
egiises, le jour de P&ques, arrive au mot sudarium de la prose Victims pas^
chalij on montrait au peuple un linceul empreint de la figure de Jesus-Ghrist
enseveli : c'6tait un tableau parlant.
(8) ^ies des saints de Franche-ComtS, i856, t. IV, p. 5x8; Rohault db
Fleury, ouvr. citd, p. 3 10.
(9) II est tristement curieux de voir comment on sait supplier, dans cer-
taines feuilles pieuses, k I'absence des documents et au silence de Thistoire
pour teconatituer sans lacunes les annates d'une relique. Sans s'en douter,
LE 8UAIRE DE TURIN. 21
II.
Le 20 juin i353, GeofiFroy I" de Charny, seigneur de Savoisy
leurs redacteurs sont de I'ecole de Renan, pour qui I'histoire est le ricit, non
des choses qui ont 6x6, mais a d'une des manidres dont les choses ont pu
6tre. » Voici Thistoire du Suaire de Turin jusqu'aux Croisades, tracie dans
la Semaine religieuse du dioc, de Camhrai (34* an., p. 149) par son directeur,
le chanoine Delassus :
« Ce linge precieux fut certainement recueilli par les Apdtres et par Marie-
Madeleine apr^s la Resurrection de Jesus-Christ. Transporte en lieu siir,
peut-£tre dans la demeure de Joseph d'Arimathie, il dut etre I'objet de soins
religieux de la part de ces amis du Sauveur, qui tenaient k garder avec
amour et k transmettre aux generations futures les reliques de la Passion
du Maitre. On raconte, en effet, que Nicod^me, disciple cach6 de J6sus, k
peine eut-il re^u de Joseph d'Arimathie ce tresor pr6cieux que Ton croyait
plus en sillretd chez lui, le tint longtemps cache jusqu'au moment oil, reconnu
comme disciple de Jesus-Christ, et, k ce titre^ condamn^ k mort, il se r6fu-
gia dans une viile situ6e k quelques milles de Jerusalem, aupr^s d'un de ses
oncles appele Gamaliel. Nicodime avait emporte avec lui le Saint-Suaire.
Quelques ann6es aptr^s, lui et Gamaliel furent admis k I'honneur du martyre ;
les Chretiens s'empress^rent alors de sauvegarder le Saint-Suaire, pour le
remettre bientdt k saint Jean TEvang^liste, qui le confia k son tour k saint
Simeon, second ev6que de Jerusalem.
« Quand les Romains assiegdrent la Ville Sainte, les Chretiens se repan-
dirent dans les alentours, emportant avec eux toutes les reliques de la Pas-
sion de leur divin Mattre, e^en particulier le Saint-Suaire, pour les d6poser
en une cachette qui les protege&t contre toute profanation.
« Le jour ou Constantin eut donne la paix k TEglise, les reliques purent
6tre de nouveau exposees au grand jour et k la veneration des fiddles; et
nous savons par saint Jean Damascene qu'au vii* siScle le Saint-Suaire 6tait
gard6 avec honneur dans TEglise patriarcale de Jerusalem, ot il demeura
trois slides, jusqu'au jour oCl, publiquement et avec la plus imposante so-
lennitii, il fut port^' au-devant des premiers Crois^s commandos par le pieux
Godefroy de Bouillon qui, le premier, avait eu le bonheur et la gloire d'arra-
cher la Terre Sainte aux Musulmans. »
Le texte all6gue de saint Jean Damascene est fort problematique : dans son
iiomelie pour le Samedi-Saint, il n'y a qu'un mot (n* 29) sur le suaire
(aiv^dvc xoOopa) ; dans le traite de la foi orthodoxe, il relate seulement la
tradition (rtc ifftopte) touchant le portrait du Sauveur envoye k Abgar
(1. IV, c. 16). — En face de I'esqulsse ci-dessus, combien sont plus exacts
Baillet {Histoire des festes mobiles dans VEglise, lyoS, t. !•% p. 5 1 8-23) et
22 irUOB CRITIQUB 8UR
et de Lirey (i), fondait, sp^cialement en Thonneur de I'Annon*
ciation, une ^glise coll^giale pour six chanoines k Lirey, petite
locality sur la Mogne, k 6 kilom. de Bouilly et 19 de Troyes
(Aube) (2). II obtint, au inline temps (3), du roi pour cette fonda-
tion ramortissement de 120 livres de rente, lesquelles furent
augment^es de moitid en juillet i353. On sollicita Tapprobation
du pape pour le nouvel ^tablissement ; Innocent VI I'accorda par
bulle du 3o Janvier i354. Par trois autres bulles donn^es au mois
suivant, il le constitua d'une mani^re definitive et Tenrichit de
droits et de privileges (4). L'ann^e m^me de sa mort (i356), le 20
le continuateur de Flburt {Histoire ecclisiastique, 1737, t. XXII, p. 577-9),
sans excursions, il est vrai, dans la p6riode pr6historique. Le Dictionnaire
critique Ues reliques et images miraculeuses de Collin de Plancy (1822, t. Ill,
p. 100-2) leur est inf6rieur.
(i) II d6buta dans la carridre des armes comme bachelier sous le comte
d'Eu, conn6table de France, en 1337; il 6tait chevalier le 2 aoi!it 1346. Fait
prisonnier par les Anglais, le i*' Janvier i35o, k Calais qu'il voulait repren-
dre sur eux, il dut payer une forte ran^on. Le 25 juin i355, le roi de France
lui conf6ra la charge de porte-oriflamme ; il I'exer^ait k la bataille de Poi-
tiers, oi!l il fut tu6 (19 septembre i356). II fiit enseveli, aux d6pens du roi,
dans rdglise des C^lestins de Paris (Nic. Camuzat, Promptvarivm sacr. anti^
qvitatvm Tricassinas dioscesis^ Trecis^ 1610, (^410-1; Chipflbt, op. cit., pp.
95-9 et 142-4; Anselmb, Hist, giniaL de la maison de France, 1733, t. VIII,
p. 201-3; Sim. Lues, dans son 6dit. de Froissart, t. IV, p. xxxj, n. 2).
Geoffroy de Chamy est Tauteur de trois ouvrages sur la chevalerie, deux en
prose et un en vers, conserves k Bruxelles et ailleurs (Arthur Piaobt, Le
livre messire Geoffroi de Chamy^ dans Romania^ 1897, t. XXVI, p. 394-411).
— F. DB GuiLHBRMY a pubHd les inscriptions des dalles fun6raires de la
femme et de la fille (Marion) de Robert de Chamy ; elles provenaient de
Tabbaye de Saint-Pierre de Lagny et appartenaient k la premiere moiti^ du
XlVsiicle (Inscriptions dela France^ 1879, t- ^V, p. 522-3, fig.). Les armoi-
ries (un lion) sont differentes de celles de Geofiroy (de gueules, k trois 6cus-
sons d'argent, 2 et i).
(2) Archives de TAube, fonds de Lirey. Le texte de Tacte se trouve dans
Camuzat, op. cit., fo 412-20. — Le mobile aurait hti Taccomplissement d'un
voeu fait durant sa captivit6 , pour obtenir son ^largissement (Chifflbt ,
p. 98-9) : il n*en est nuUement question dans Tacte.
(3) Anselmb (op. cit., p. 202) dit a au mois de juin 1343 » ; tout me porte
k croire qu'il y a une l^gire erreur et qu'il faut lire « i353 ».
(4) Arch, de I'Aube, fonds de Lirey (Lalorb, Milanges liturg,, t. II, p. 66).
LE SUAIRE DE TURIN. 33
(lire 23) mai, k Paris, Geoffroy ajouta deux clauses, relatives k la
fondation de pr^bendes par des etrangers et a la nomination du
doyen (i); la mSme semaine, le 28, son pieux dtablissement fut
confirm^ avec doges par T^v^que de Troyes, Henri de Poi-
tiers (2). II est k remarquer que ces sept documents primordiaux
ne parlent pas de la relique insigne qui vint bientot augmenter la
dotation et valoir a la jeune coU^giale une certaine c6l6bnt6, Ce
point est important : il montre que cette coll^giale n'a point ^t^
fondce comme une sorte de Sainte-ChapelJe pour y d^poser le
Suaire, mais que celui-ci fut adventice. C'est par les actes subsd-
quents que nous serons fixds sur sa nature et son origine.
L'ostension du saint Suaire donnd par Geoffroy (3) attira bientdt
de partout les foules et les aumdnes. L'dv^que de Troyes, dont on
avait oublid de demander Tautorisation, tint conseil k ce sujet :
des thdologiens lui firent remarquer que les evangdistes n'auraient
pas manqud de mentionner Tempreinte du Sauveur sur le Suaire
dans lequel il avait 6x6 enseveli, si elle s'^tait produite, et qu'un
fait de cette importance n'aurait pu d'ailleurs rester jusqu'ici
ignore des evdques : tout ce mouvement devait fitre attribu^ a la
cupidity du doyen, qui, pour accrottre Tempressement des fiddles,
avait fait colporter le rdcit de faux miracles, soi-disant obtenus
par des gens soudoyds (4) ; on finit d'ailleurs par obtenir la con-
fession du peintre qui avait artistement confectionn^ le Suaire (5).
(i) Camuzat, op. cit., f* 420 vo-2 r«.
(2) Camuzat, £• 422 v*. Henri ne prend que le titre de « Dei et apostolicae
sedis gratia electus confirmatus Trecen. » : ii n'^tait pas encore sacr^, bien
qu'ayant dejk occup^ le si^ge de Gap pendant pr^s de quatre ans (Albanjcs,
Gallia Christ, noviss., Aix, 1899, c. 498-500).
(3) a Olim genitor ipsius Gaufridi [le fils], zelo devotionis accensus, quan-
dam figuram sive repraesentationem Sudarii Domini nostri Jesu Christi, sibi
liberaliter oblatam, in ecclesia Beatae Mariae de Lireyo, diets [Trecensis]
dioecesis, cujus ipse fundator extitit^ venerabiliter collocari fecerat » (Appen-
dice K).
(4) « Ad ipsos alliciendos populos, ut subtili ingenio aurum extorqueretur
ab eis, inibi confingebantur miracula mendaciter certis hominibus, ad hoc
pretio conductis, qui se sanari fingebant in ostensione dicti Sudarii » (Me-
moire de Pierre d'Arcis, Append. G).
(5) a Reperit fraudem et quomodo pannus ille artificialiter depictus fuerat,
et probatum fuit ctiam per artificem qui ilium depinxerat » (Ibid.)
J4 trVDE CRITIQUB 8UR
II n'en fallait pat d'aranuge pour convaincre le prdat que ce ne
pouvait £tre Foriginal : il n'b^sita plus k interdire rexhibition de la
relique. Elle fut enlev^e du tresor de I'^glise et remise sans dome
au donateur (i), qui la conserva durant cette p^riode od la Cham-
pagne fut afBig^e de la guerre et de la peste. Pendant trente-quatre
ans il n'en est plus question (2). Geoffroy II, qui avait succ6d6 a
son pdre en i356, profita du passage du cardinal de Sainte-Su-
sanne, Pierre de Thury, envoys au d^but de 1389 (3) comme
Ugat dans lia province de Sens (dont Troyes d^pendait) par le
pape Clement VII au roi Charles VI, pour en obtenir Pautorisa-
tion de replacer son Suaire dans I'^glise de Lirey et de Ty exposer
de nouveau k la v^n^ration des fiddles, sans avoir k solliciter
d*autre permission (4). L'indult obtenu fut mis k execution et
Geoffroy se pourvut, sans doute par I'entremise du cardinal, de
lettres confirmatives de Charles VI (5). Ces manoeuvres ^murent
(0 « Quandam figuraxn sive repraesentationem Sudani D. N. J. C, quae in
ecclesia Beatae Mariae de Lireyo, dictae [Trecen.] dioec, antea venerabiliter
collocata et demum, ex certis causis, ad alium locum translata et custodita
cxtitcrat » (Append. N).
(3) D*apr^8 une tradition recueillie par Chipflbt (p. 107), on I'exposait
chaque ann^e en dehors du bourg de Saint-Hippolyte, ftur la rive du Doubs,
dans un pr^ qui consenrait de \k le nom de Domini pratum ; il mentionne
d*autres souvenirs dans I'^glise de Saint-Hippolyte et k Villersexel.
(3) II etait k Avignon en i388 (Baluzb, Vitce papar. Aven., t. I*, c. i35o).
Ses pouvoirs de 16gat dat^rent du 1 1 Janvier 1 389 ; il fit sa premiere entree k
Notre-Dame de Paris le 6 avril et fut de retour k Avignon le 19 juin (No&l
Valois, La France et le grand schisme d'Occident, 1896, t. II, p. 144, n. i).
(4) « Cum dudum dil. fil. n. Petrus, tit. Sanctae Susannae presb. cardi-
nalis, quern tunc ad... Carolum regem Francorum... destinaveramus,... per
Senonen. provinciam, de qua dioecesis Trecen. existit, transitum faciens,...
nob. Gaufrido, domino loci de Lireyo, dictae dioec, ut ipse quandam figuram
sive repraesentationem Sudani D. N. J. C... in dicta ecclesia Beatae Mariae
poni et collocari facere posset, per suas litteras indulsisset » (Append. N).
«... Congruo honore et decenti loco poni et collocari facere posses, dioece- .
sani vel alterius cujuscumq. non petita vel obtenta licentia... » (Append. O).
— L'enqufite faite k Chimay en 1449 (Append. U) donne k entendre que I'in-
dult du cardinal pr^cisait que ce linge n'^tait point Toriginal du Suaire, mais
une peinture figur^e ; voir d'ailleurs TAppend. G.
(5) Chifflet, op. cit., p. loi. '
LE SUAIRE DE TURIN. ^5
le nouvd 6v«que dc Troyes, Pierre d'Arcis ; il n*eut pas de peine k
constater la nulHt^ de I'induit, comme obtenu subrepticement ;
de plus les chanoines ne se contentaient pas de tenir le Suaire en
un lieu decent, comme lis y avaient 6t^ autoris^s, mais en faisaicnt
I'ostension solennelle. En consequence de la prohibition lanc^e
par son pr6d6cesseur, il d^fendit en plein synode {i) k tons cur6s
de son diocese et prddicateurs de parler ni du Suaire de J.-C, ni
de son image, soit en bien, soit en mal ; puis il interdit au doyen
de Lirey, sous peine d'excommunicatibn, de montrer cette figure
ou representation a qui que ce fut (2). Le doyen de Lirey en
appela de cette prohibition au Saint-Si^ge et continua d'exposer
solennellement Timage en question (3).
<c Le messager qui avait 6t6 d^pSche k la cour d' Avignon par le
chapitre de Lirey, rapportait bientdt un rescrit de Clement VII
k Tadresse de Geoflfroy de Charny. Le pape confirmait la permis-
sion donn^e par le l^gat Pierre de Thury et autorisait les chanoi-
nes a exj)oser publiquement la representation du saint Suaire,
malgre la defense de Tev^que de Troyes ; de plus le pape imposait
a reveque « perpetuum silentium j> sur cette question (4). » Peu
(i) Le Chan. Lalorb nc fait pas mention de cette assemblee de iSSq dans
son opuscule : Les synode s du diocdse de Troyes^ 1867, p. 1 1.
(2) « Postmodum venerabilis frater noster Petrus, episcopus Trecensis, ex
hujusmodi indulto commotus in sua synodo ultimo celebrata rectoribus par-
rochialium ecclesiarum ac aliis quos , proponere contingeret verbum Dei, ne
de Sudario Jesu Christi, figura seuque repraesentatione ipsius in suis eccle-
siis aut sermonibus sive in bono sive in malo aliquam mentionem facerent,
ac demum dilecto filio decano ecclesiae Beatae Maris praedictae, ne sub ex-
communicationis poena dictam figuram seu repraesentationem alicui osten-
deret, inhibuerat » (Append. K).
(3) « A qua quidem inhibitione eidem decano facta, pro parte dicti decani
fuerat ad Sedem apostolicam appellatum » (Append . K) .
(4) « Et quia dicta figura sive' repraeseatatio, post appellationem hujusmodi,
populo publice exhibita extiterat et ostensa, nos indultum praefatum ex certa
scientia, auctoritate apostolica confirmavimus et nihilominus eidem decano
et .. capitulo dictae ecclesiae Beatae Mariae concessimus quod, inhibitione hujus-
modi non obstante, figuram seu repraesentationem eandem populo publice
ostendere et ostendi facere valerent, quotiens foret opportunum, eidem epis-
copo super inhibitione praedicta perpetuum silentium imponendo » (Appen-
dice K).
26 irUDB CRITIQUE 8UR
apr^s, une nouvelle buUe r^glait les conditions dan$ lesquelles
devait se faire I'ostension de la relique (i).
Pierre d*Arcis ne se tient pas pour battu : il 6crit k Charles
VI. A la cour de France, I'affaire prit bien vite une autre tournure:
au regu de la requite de T^v^que de Troyes, le roi r^voqua, le 4
aoAt 1389, la permission accord^e k Geoffroy de Charny et au
chapitre de Lirey {2). Comme consequence/ en vertu d*une com-
mission ^manant de la cour du Parlement de Paris, le bailli de
Troyes signifia au doyen et aux chanoines de Lirey d'avoir k
lui livrer le SutAre (drap), pour le transporter k Troyes: ceux-cis'y
refus^rent et inter jetdrent appel au Pape (3). N^anmoins leSuaire
fut declare mis sous la main du roi (4).
R^duit k rimpuissance de ce cdt^, I'^v^ue s'entoure d'une
commission de thdologiens et r^dige un m^moire explicite sur la
question : d'un cdt^, il 6tablit que le Suaire de Lirey n*est pas le
vrai Suaire de J^sus-Christ, mais qu'il en est seulement une image
ou representation et qu'il a 6t6 peint de main d'homme ; d'un
autre c6te, il montre que toutes les c^r^monies qui accom-
pagnent Tostension de ce suaire exposent les &mes faibles et
ignorantes au p^ril de Tidoldtrie (5). Ce m^moire dm parvenir k
Clement VII vers la fin de Tann^e 1389 (6).
(i) « Subseqaenter, circa modum ostensionis hujusmodi certos modos et
formam statuendos duxerimus et etiam ordinandos » (Append. N). Voir en
outre TAppend. U.
(3) Appendice, lettre A : Le Suaire de Lirey 6tait c quidam pannus manu-
factus et in figuram vel similitudinem ac commemorationem aacri Sudani,
in quo pretiosissimum corpus Domini nostri Jesu Christi salvatoris, post
ejus sanctissimam passionem involutum fuerat, artificialiter depictus ».
(3) Appendice, lettres B et D. Le r6cit de cette sommation est Curieux k
lire ; les subtilit^s k Taide desquelles le doyen dejoue la mission du bailli font
plus d'honneur aux ressources de son esprit qu'k sa veracity : on peut y re-
lever plus d'une restriction mentale. -
(4) Appendice, lettre B.
(5) Chifflet, op. cit., p. 10 1. Les chanoines de Lirey, outrepassant les termes
de rindult du ligat Pierre de Thury, qui permettait « repraesentionem seu fi-
guram Sudarii dominici in dicta ecclesia vel alibi in loco honesto ponere »
(Append. J), exposaient le Suaire a cum solemnitate maxima et majori quam
ibi ostendatur Corpus Christi » (Ibid.).
(6) Capital dans la question et precieux k plus d'un titre, ce document his-
torique m^rite d'etre lu int^gralement. Son authenticity est hors de doute,
LE SUAIRE DE TURIN. 7^
De son cot^ Geoffroy avait signals au pape les difficult^s que 1'^-
vdque suscitait de la part du roi et de ses gens (i). Pour mettre fin
k cette contestation, qui ne pouvait manquer de diviser les esprits
dans le diocese, Clement VII fit expddier simultan^ment, le 6 Jan-
vier iSgOy quatre buUes dont on trouvera le texte en appendice.
La premiere, adperpetuam reimemoriam^ relate la plupart des faits
pr6c6dents et conclut k la l^gitimit^ de Tostension du Suaire,
mais interdit les c^r^monies incrimin^es par T^vSque ; de plus
celui qui fera Texposition devra proclamer k haute et intelligible
voix que cette image ou representation n'est pas le vrai Suaire
de N.-S. J.-C, mais seulement une peinture, un tableau qui le
figure ou repr^sente (2). La deuxidme, adress^e k T^y^ue de
puisque j'cn ai retrouv6 la minute, distraite jadis des Archives de V6Y&ch6 de
Troyes. Pour bien etablir i'homog^n^it^ des copies qui en subsistent, j'ai
donne, avcc le texte original, la collation rigoureusc d*une transcription con-
temporaine (Appendice, lettre G) et reproduit une analyse (App. H) et deux
sommaires (App. I et J) conserves en divers lieux. II porte en 4ui-m6me des
preuves intrins^ques de sa v^racite. L'^vdque reprend la fraude des chanoines
k son origine et relate tous les incidents qui ont signale I'ostension du
Suaire sous son predecesseur, Henri de Poitiers. II 6tablit qu'il est libre de
toute passion dans cette controverse, ne poursuivant qu'un but, sauvegarder
la foi du troupeau confie k sa charge. La presomption doit 6tre en sa faveur:
jamais il ne lui viendrait k la pensee de s'opposer k une devotion discrete et
bien ordonnee. II s'etonne k bon droit des obstacles qui, de toute part, cons-
pirent pour Tempdcher de remplir les fonctions de son pouvoir ordinaire,
alors qu'on devrait Tencourager. Loin d*avoir int^rdt k combattre Tauthenti-
cite du Suaire, il eut ete tout fier que son diocese possed^t une relique de
premier ordre.
(i) a Sicut exhibita nobis pro parte dicti Gaufridi petitio continebat, tu
adversus praemissa nonnulla impedimenta perRegem... et ejus gentes opponi
feceris et etiam procurari » (Append. N).
(2) « Ostendens dictam figuram, dum major ibidem convenerit populi multi-
tudo, publice populo praedicet et dicat alta et intelligibili voce, omni fraude
cessante, quod figura seu repraesentatio praedicta non est verum Sudarium
Domini nostri Jesu Christi, sed quaedam pictura seu tabula facta in figuram
seu repraesentationem Sudani, quod fore dicitur ejusdem Domini nostri Jesu
Christi ft Appendice, lettres K et M. — M. Loth met en note : a Voir la buUe
de C16ment VII, Apostolicce Sedis, du 6 Janvier iSgo, dans Chronicon Cornelii
Zantfliet, ad ann. 1449, ou k la Biblioth. nation, de Paris, fonds latin, ms.
104x0, f* ii3 ». S'il avait travaille autrement qu*i I'aide du labeur d^autrui,
il aurait constate que la bulle du ms. 104 10 est diff^rente de celle de Zant-
^ irVOZ CRITIQUE lUR
Troyei, resume les monies faits et lui interdit, sous peine d'ex-
communication^ de s'opposer k Tostension de la relique, pourvu
que les conditions sp^cifi^es dans une buUe pr6c6dente soient
inviolablement observ^es (i). La troisidme, k noble Geoffroy sei-
gneur de Lirey, relate la petition qu'il a adress^e au Saint-Sidge,
les obstacles qui ont entrav^ une premiere concession et Tautori-
sation definitive qui lui est accord^e (3). La quatri^me, aux offi-
ciaux de Langres, Autun et Ch41ons-sur-Marne, les charge de
publier les decisions du Pape k regard du Suaire de Lirey et de
les faire observer (3).
Cette s^rie de pieces contradictoires nous permet d'etre d*s
maintenant fixes sur la nature de cette relique. Peu de choses sur
son origine : d'apr^s Texpos^ par lequel debute la premiere bulle,
Geoffroy II disait simplement que cette image ^tait un cadeau fait
k son pdre {sibi liberaliter oblatam). C'^tait une representation par
la peinture : ces textes et ceux qui suivent ne permettent aucun
dome, aucune hesitation k cet egard. Les chanoines de Lirey
redamaient la liberie de Texposer dans leur eglise, mais ne soutin-
rent jamais que ce f(!it Toriginal. S'il en eiXt 6x6 autrement, les
buUes en auraient fait mention, car on salt Phabitude de la chan-
cellerle pontificate, de relater exactement tous les dires des parties.
Les eveques de Troyes s'opposerent avec perseverance a Tostension,
parce que les ceremonies dont on Taccompagnait etaient de nature,
par leur somptuosite, k faire croire au peuple qu'il y avait autre
chose qu'une peinture (4). Or, on sait si la masse des fideles est
fliet, Tune commenfant bien par Apostolicce sedis providentia^ mais Tautre par
Ttue devotionis sinceritas (Append. O).
(i) Appcndice, lettre N.
(a) Appendice, lettre O.,
(3) Appendice, lettre P.
(4) Cette prohibition radicale est a rapprocher de celle que promulgua
rev^que de Grenoble, Laurent Allemand, durant une visite pastorale, le 4
juillet 1488, k Echirolles, dont Teglise paroissiale avait pour vocable Tapdtre
saint Jacques (ou Jesme) : il fit ouvrir son pretendu tombeau, ou Ton trouva
les restes d'un corps gigantesque {magncs longitudinis et grossitudinis)^ et,
comme il ne constait ni de la vie ni des miracles pretendus (assertis) de ce
saint, ni mfime de son nom, il defendit de I'honorer et d*en faire I'office
jusqu'k ce que le Saint-Si^ge en eut informe {Visites pastor, et ordinations
des eveques de Grenoble de la maison de Chisse^ 1874, p. xviij-ix).
LE SUAIRE DE TURIN. 29
cr^dule et exag^re facilement. Une tradition est vite ^tablie: il
serait facile d'en citer des exempies pris k notre ^poque.
A ces documents qu'a-t-on r^pondu ? rien contre leur authenti-
city, du moins depuis ma premiere brochure. Chifflet se plaignait
(c'^taijC dans son rdle) que des exemplaires de ces bulles eussent
6t6 r^pandus en France et en Bourgogne (i). Celui de la premidre
reproduit par Piano (2) provenait d'une lettre du comte Vernon au
marquis del Borgo (11 Janvier 1723). J'ai dit ailleurs qu'il a faliu
a cet auteur, ppur I'arguer de faux, « I'aplomb et les subtilit^s dont
ses cong^ndres sont coutumiers dans la defense des bulles de la
plus insigne fausset^. » J'ajoutais : « L'histoire des fabrications de
faux est aujourd'hui mieux connue: dans I'esp^ce, on en cr^ait
pour ^tablir I'authenticit^ d'une* devotion et non pour la nier ».
Depuis que la minute de la seconde buUe a 6x6 retrouvde dans les
archives du Vatican, on a change detactique, v^rifiant ainsi le mot
de TertuUien : « Quibus fuit propositum aliter docendi, eos neces-
sitas coegit aliter disponendi instrumenta doctrinae ». Mgr Colo-
miatti s'est bien gard^ de r^voquer en doute Tauthenticit^ de ces
bulles, mais pour lui ce n'est que « Toeuvre d'un simple particulier,
Robert, des comtes de Geneve, qui s'est arrog^ (!) la dignity
papale ; cette lettre est de nuUe autorit^ pour les catholiques »
(p. 1 5). Et « si Ton trouve ces actes dans les archives du Vatican,
cela ne veut pas dire qu'ils ont 6t6 reconnus comme legitimes,
mais qu'ils sont conserves comme documents historiques, comme
beaucoup d'autres documents contraires k I'enseignement de
I'Eglise » (p. 17). On croit rdver enlisantde pareilles affirmations;
j'y avals repondu d'avance en disant : « Les faits qui ressortent de
r^tude plus complete du XIV« si^cle eccl^siastique ne concordent
(i) Op. cit., p. iSy. Dans son livre, Chipflbt a promis k plusieurs reprises
de router la bulle de Clement VII : il a oubli6 de le faire, car dans son
chap. XXIII : a Aliquid pro veritate Sindonis Taurinensis, contra sententiam
iniquam dementis antipapae » (p. 137-43), il n'ya que des railleries et des
injures k Tadresse des detracteurs anciens et modernes du Suaice : rien de
sp^ifique contre la bulle. Si le P. L. db Grandmaison Tavait lu, il n'aurait
pas dit a que Chifflet combat ce jugement de Tantipape » {Etudes publ, p, la
Comp. de Jisus^ 1899, t. LXXIX, p. 660).
(3) Op. cit., t. II, p. 377-86.
30 iTUDE CRITIQUE 8UR
pas toujours avec les id^es qui ont cours vulgairement. A T^poque
dont il s'agit, il n'y avait pas un pape vrai et un ou plusieurs anti-
papes. Chacun des pontifes opposes ^tait consid^r^ comme le pape
veritable dans son obedience, et celle de Clement VII n'^tait pas
moins considerable que celle de Boniface IX. La papaut^ conserve
pr^cieusement dans les archives du Vatican aussi bien les minutes
ou copies des bulles des pontifes d'Avignon que de ceux de Rome.
On a compt6 des saints dans toutes les obediences ; il est m^me
remarquable que Louis Aleman, seul archev^que d'Arles pendant
une partie du schisme^ excommunie par Eugdne IV, a 6x6 beatific
par Clement VII (de Rome) en 1527. De chaque cdte on etait
fermement persuade de la legitimite exclusive du pape auquel on
obeissait ; on affectait de reiterer cette declaration dans son tes-
tament ».
Le pro-vicaire general de Turin ajoutait : < Tous les actes des
antipapes sont done sans autorite dans TEglise, quand ils n'ont pas
ete ratifies par les papes legitimes ». (ibid.) J*ai fait observer
qu* « une regie eiementaire en histoire est de juger des faits d'une
periode, d*apres les idees ayant cours k cette epoque, et non
d'apres celles de notre temps ». De nos jours, malgre des recher-
ches approfondies dans les documents, on hesite k se prononcer
sur la legitimite de Teiection d'Urbain VI. F(it-elle incontestable,
les principes de la critique historique, non moins que la loyaute,
exigeraient de juger d'apres les faits ce qui se passait au point de
vue de I'autorite souveraine ecciesiastique dans le diocese de
Troyes. Quand Geoffroy de Charny et le chapiire de Lirey voulu-
rent en appeler de Tinterdiction prononcee par Tordinaire, ce
n'est pas k Boniface IX, alors residant k Rome, qu'ils s*adresserent,
mais k son competiteur Clement VII, k Avignon. On ne voit pas
que personne ait refuse de se soumettre k sa decision : il etait done
considere k Troyes et k Lirey comme le pape legitime (i).
(i) Au surplus, k la fin du grand schisme^ pour donner une paix complete
k TEglise, on r6integra chaque dignitaire dans ses b6nefices et on confirma
les actes des papes des diverses ob6diences : faire le contraire 6tait impos-
sible, sous peine de tout remettre en discussion et de bouleverser de nou-
veau TEglise.
LE SUAIRE DE TURIN. 3-{
I
Nous allons voir si l*histoire subs^quente du Suaire donne un
dementi ^ cat ensemble de faits concordants.
« Apr^s ces d^bats, la devotion k Fimage du saint Suaire dut
s*affaibUr rapidement en Bourgogne, et les p^lerins oublidrent
sans doute ie chemin de Lirey. Pendant vingt-huit ans, la nuit se
fait autour de cette controverse.
« Nous sommes en 1418. La France est ddsol^e par I'invasion
6trang6re et par la guerre civile ; le parti bourguignon et $on chef
Jean sans Peur avec Isabeau de Bavidre dominent k Troyes ; des
pillards, gens de sac et de corde, parcourent les campagnes et
jettent partout Teffroi. Dans ces conjonctures, les chanoines de
Lirey confient ce qu'ils ont de plus pr^cieux dans le tr^sor de leur
dglise k Humbert, comte de la Roche (i), seigneur de Villersexel
et de Lirey, gendre et successeur de Geoffroy II de Charny. Le
6 juillet, le comte Humbert d^livrait » aux chanoines un regu, dans
lequel figure au premier rang : a Ung drap ou quel est la figure
ou representation du Suaire Nostre Seigneur Jesucrist, lequel est
en ung coffre armoy^ des armes de Charny » (2). Ces termes sont
tr^s formels et ne permettent aucune ^chappatoire. II ne s'agit pas
dans cet acte de complaire a un ennemi de Tauthenticit^ de la
relique, I'^vfique de Troyes ou tout autre: en des circonstances
p^nibles on ne cherche pas a faire de la diplomatie; on d^crit
rapidement les objets comme ils sont et tels qu'on les croit. Pour
le petit-fils du donateur et pour les chanoines, le Suaire de Lirey
^tait done Men une copie et non I'original.
« Humbert mourut sans avoir rien restitu^ a ses commettants.
a Vingt-cinq ans s'^taient ^coul^s depuis que I'image du Suaire
avait quitte » le tr^sor de Lirey. Apr6s Tavoir vainement reclame
k Marguerite de dharny, veuve de Humbert (3), les chanoines
(i) VHistoire 4u comU de la Roche et de Saint-Hippolyte, sa capitale^ a
6t6 6crite par rabb6 Lots (Montb^iiard, 1888, in-i8 de 463 p.); ce m6moire
a ^t^ appr^ci^ par le chan. Suchet dans les travaux de VAcadimie de Besan^
fon (1887/8, p. i32-8), qui Tavait couronn^.
(3) Appendice, lettre Q.
(3) Marguerite avait d'abord ^pous6, en 1400, Jean, seigneur de Baufifre-
mont et de Charny^ qui fiit tu6 k la batailie d*Azincourt (a 5 octobre 141 5);
eUe se remaria peu apr^s avec Humbert de la Roche. II sera question plus
33 ETUDE CRITIQUE 8UR
assign^rent celle-ci au parlement de Ddle. Le 8 mai 1443, Pierre
Sauvageot, doyen, Evrard des Champs et Nicole de la Rothidre,
chanoines de la colUgiale de Lirey, s'y pr^sentdrent pour r^clamer
^ Marguerite c plusieurs reliques et aornemens d*6glise », qui
avaient 6x6 confi^s k son mari d^funt en 141 8. Avec une subtilit^
toute feminine, elie fit remarquer que le regu de son mari ne Teno-
gageait pas en ce qui concerne le « sainct Suaire, lequel pieca fut
conquis par feu messire Geoffroy de Charny, mon grant pere » (i);
et que, au surplus, les reliques en question ne seraient pas en
sQret^ k Lirey, attendu que ce « lieu n'est pas ancor bien appaisi6
des guerres et tribulations de France ». On transigea, pour ^viter
les frais d'un procds. Marguerite remit incontinent aux chanoines
toutes les reliques, k Texception du Suaire, qu'elle fut autoris^e k
loin de son frire et de son h^ritier. — Comme specimen des inventions aux-
quelles les historiens du Suaire se sont livr6s, il faut lire la page consacr^e
par PiNGONB k Marguerite : originaire de I'lonie ou de I'Eolide, descendue
des rois de Jerusalem, elle fut mari6e k Hector de Lusignan, etc.; il ajoute
triomphalement : « quibus omnibus tempora conveniunt » (p. 17).
(i) Cette assertion, jet6e comme au hasard, est en contradiction avec ce
que nous avons lu plus haut (liberaliter oblatam)^ bien que M. Loth ne trouve
aucune difference entre les deux affirmations (p. i a). On salt d'ailleurs que
Geoffroy I** passa sa vie k guerroyer contre les ennemis de la France et de
TEglise. Si Ton tient k ce que le Suaire ait ^t^ apport6 d*Orient, je r^vilerai,
k la suite de M. N. Jorga {Philippe de Mi\iireSf la croisade au XIV* sUcle^
1896, p. 56), que son donateur accompagna le dauphin Humbert II k la croi-
sade de 1346. La chevalerie de la Passion de Jhesu Crista de Philippe ok
MaiziArbs (ms. de TArsenal 3a5i, f* ia-3)^ le cite parmi les combattants qui
furent vainqueurs des Turcs pr^s de Smyme, le 14 juin, d'apr^s mon Itini-
raire des Dauphins de la 3* raofi (1887, p. i5). ^ D*apr^s une notice histori-
que sur la colMgiale de Lirey, ^crite apris i525 et ins^rde dans la Collection
De Camps (v. 124, f^' 21 3-6; copie dans la Coll. de Champagne, v. i54,
f^* 1 33-6) ff Geoffroy de Charny, chevalier, comte dud. Charni et seigneur de
ce present lieu de Lirey, descendus des anciens ducz de Bourgoigne et des
seneschaulx de Champaigne, baronie de Joinville », re^ut du roi Philippe de
Valois, en recompense desavaillance, c le S* Suaire de Nostre Seigneur, sau-
veur et redempteur Jesuchrist, avec une belle portion de la vraie Croix et
plusieurs autres relicques et sanctuaires, pour estre mis et coUocquez en
Teglise qu'il esperoit et proposoit bastir, ediffier et doter en Thonneur de la
glorieuse vierge Marie ». Cette version semble conforme k celle du fils du
donateur.
LE SUAIRE DE TURIN. 33
garder trois ans durant, sauf k payer annuelletnent a la coUdgiale
1 2 francs, pour compenser les a biens faiz et aulmosnes que pour
occasion dudict precieulx jouyaulet sainct Suaire pourroicnt venir
et escheoir a ladicte ^glise de Lirey », et 3o francs comme indem-
nity des frais. Toutefois, elle s'engageait k devancer ie d^lai de la
restitution, au cas od Fran9ois de la Palud, dit de Varambon, k
present comte de la Roche, serait possesseur du lieu de Lirey k la
Saint-Jean prochaine. Marguerite remit en outre aux chanoines
divers ornements dMglise. Son frdre, Charles de Noyers, se consti*
tua garant de ses promesses (i).
Le lendemain, la cour rendit une ordonnance au nom du due
Philippe le Bon. Le proems avait commence le i^ mars prdc^dent.
Avec Marguerite figurait, comme partie principale, Fran9ois de la
Palud, h^ritier d'Humbert de la Roche. Conform^ment k un ordre
de la cour, elle avait apport^ les « reliques et joyaulx » qu'elle
d^tenait en vertu de I'acte de 1418 ; ils furent d^pos^s dans T^glise
Notre-Dame de Dole. La cour d^cida, malgr^ I'opposition de
Fran9ois, que les chanoines enverraient une procuration k la fdte
de Pentecdte pour donner d^charge k Marguerite, k Frangois
de la Palud et k sa femme, Jeanne de la Petite-Pierre, h^ritiers
d'Humbert; que jusque-lil le Suaire demeurerait entre les mains
de Marguerite et les autres reliques en d^pdt dans I'^glise des
Franciscains (2).
Malgr^ les provisions. Marguerite resta (et restera toute sa vie)
dame de Lirey. Elle laissa m6me passer le dOlai de trois ans 6x6
pour la restitution du Suaire. Apr^s avoir pris patience plus de
deux mois, les chanoines I'assigndrent devant Tofficial de la cour de
Besan90n. Le 18 juillet 1447, Marguerite y comparut, assistOe de
trois « pleiges et principaulx rendeurs », ainsi que le doyen Pierre
Sauvageot et le chanoine de la Rothi^re. Marguerite fit valoir de
nouveau a que pour fortune de guerres de France qu*avoient long
temps estOes empr^s TOglise de Lirey, icelle estoit venue en telle
ruine que le sainct Souaire seurement ne se pourroit guerder en
icelluy lieu » ; pour ce motif elle hdsitait k s'en dessaisir. Les cha-
(i) Appendice, lettre R.
(3) Appendice, lettre S.
34 iTUDB CRITIQUE SUR
noines, toujours cr^dules k ses promesses (ils le seront longtemps),
consentirent un nouveau ddai jusqu'il la ttxt des apdtres Simon et
Jude (38 oct.) de Tan 1449; et d'ici lors, comme « recompensation
des aulmones et bien faictz qui se pourroient faire en lad. ^glise a
Toccasion dud. sainct Souaire », Marguerite leur payera chaque
ann^e i5 francs, plus 5o pour les < fraiz, missions et despens »
qu'elle avait occasionn^s, soit 20 francs comptant et 3o k la Purifi-
cation (3 f^vr.). L'acte ne porte pas quittance (i).
Comme on Va compris et comme la suite le montrera, ce zMe
pour la conservation du Sualre n'6tait pas d^sint6ress6 et la dame
de Lirey trouvera le moyen d*duder ind^finiment ses promesses,
malgr^ la « bonne et souffisante caution » qu'elle fournit.
Avant I'expiration du ddai, mais en cette m^me annee 1449,
nous trouvons Marguerite en Hainaut. Le chroniqueur, qui va
nous renseigner sur ses faits et gestes, est Corneille Zantfliet (ou
de Santvliet), bto^dictin del'abbaye de Saint-Jacques k Lidge, puis
doyen de Stavelot, mort vers 1462, contemporain par consequent
et tenu comme trds v^ridiqne et digne de foi (2). Elle arriva k
Chimay, portant dans son bagage un linceul (linteum), sur lequel
6tait admirablement peinte (miro artificio depicta) la forme du
corps de N.-S. J.-C, avec les moindres traits (Uneamentis) des
membres» les plaies du cdt^, des mains et des pieds sanguinolentes
comme si les blessures ^talent r^centes. Pour augmenter la devo-
tion populaire et stimuler la g6n6rosh6 des fiddles, certains affir-
maient que ce Sualre etait v^ritablement celui dont Nicodeme et
Joseph d'Arimathie avaient envelopp6 le corps du Sauveur dans
le s^pulcre, etc. {et ccetera ialia). II se faisait un concours ^norme
de gens de tout sexe, accourus des provinces voisines. Le bruit de
cette exhibition arriva jusqu'aux oreilles du v^n^rable ^v^que Jean
de Heinsberg, qui occupait le sidge de Lidge depuis quarante ans.
Emu des sentiments opposes qui divisaient k ce sujet les fiddles
cpnfies k sa charge pastorale, il del^gua deux renommds professeurs
en theologie, le cistercien Thomas, abbe d'Aulne (3) et maitre
(i) Appendicc, lettre T.
(3) Voir Paquot et les autres sources indiqu^es dans mon Ripertoirt,
(3) Gallia Christiana nova^ t. Ill, c. 1018.
LE SUAIRE DE TURIN. 35
Henri Bakel, chanoine de sa cath^drale. Apr^s s'^tre livr^s k une
consciencieuse enqu^te [diligentes investigationes)^\\sAtm9itiA^xexit
k Marguerite, generosa mairona^ de leur montrer les indults ou
bulles qui I'autorisaient k exhiber ainsi cette peinture [effigiem] ou
linceul {linteum) et qui confirmaient ses dires. Ainsi accul^e (in
arcto) et n'osant r^sister, elle fit voir trois bulles du pape Cle-
ment VII et un indult du cardinal l^gat Pierre de Luna (sic)^ qui
t^moignaient expressdment que ce linge n'^tait pas le vrai Suaire
de J.-C, mais une representation ou figure (dumtaxat reprcesenta-
tionem aut figuram). Zantfliet a donn^ le texte complet (sauf la
finale} de Tune de ces bulles (Append. O) : elle est parfaitement
conforme k celles que nous avons recueillies dans d'autres manus-
crits^ et certifie k la fois la parfaite authenticity de tout le dossier
et la cr^ance que m^rite le chroniqueur si intimement mt\h k cette
affaire (i).
Le terme du 28 octobre 1449 est pass^. La comtesse de la Roche
est peut-dtre encore en Hainaut: il lui importe de ne point se
laisser « ex^cuter ». Son frdre, Charles de Noyers, seigneur de
Watefale et Seigny-le-Petit, est charge de la repr^senter devant le
pr^vdt de Troyes; quatre chanoines de Lirey, dont le doyen
Pierre Sauvageot, sont presents avec lui le 6 novembre. II recon-
natt que sa soeur aurait dti rendre k la coU^giale le Suaire, qui
« est le plus notable joyau d*icelle ^glise » et qu'elle d^tient depuis
longtemps, et aussi lui payer certaines sommes, « dont elle n'ait
riens faict». Les chanoines consentent it un nouveau sursis de trois
ansy Marguerite leur promettant de faire construire « une forte
place audict Lirey, pour tenir seurement leditt Suaire et autres
choses » ; elle s'oblige, ou plutdt son frdre pour elle, k verser entre
leurs mains 5o livres par an, qui seront employees k r^parer les
edifices de I'^glise et les maisons canoniales : comme ces refections
sont urgentes, la comtesse s*engage ^ anticiper le versement des
deux premieres annees et k faire remettre le montant k THdtel des
c Mores » k Troyes, k la fete des Rois (6 Janvier). On a soin de
stipuler que, s'il y avait anticipation dans la restitution du Suaire,
la rente cesserait par le fait meme (2).
(i) Appendice, lettre U.
(a) Appendice^ lettre V.
36 iTUDB CRITIQUE 8UR
Le Suaire avait quin6 la Bourgogne : il ne devait plus y revenir.
Pour quels motifs Marguerite se rendit-elle en Savoie, k la cour
du due Louis I*' et de sa femme Anne de Lusignan? ChifBet
incline k croire que ce fut pour obtenir par leur entremise la
d^livrance de Th^ritier de son mari, Francois de la Palud, qui
^uit all6 guerroyer contre les Turcs (p. 109). J'ai cru inutile de
faire de longues recherches sur ce point de detail (i) : il y a peu
de faits certains k extraire des historiens du Suaire de Turin. Tous
affirment que Marguerite fit don de sa relique aux souverains
Savoyards, par acte du 22 mars 1452, k Chamb^ry (2). On cher-
cherait vainement chez les auteurs les plus prolixes, comme Piano,
le texte de ce document capital et aucun ne semble embarrass^ de
son absence (3). Tous, par contre, s'^tendent longuement sur les
(i) II n'en est pas question dans les auteurs qui ont pari^ de Francois de
la Palud : S. GuichbnoN) Hist, de Bresse et de Bugey^ i65o, 3* part., p. 292;
le mCme, Hist, ginial. de Savoiey t. II, pp. 83, 86, 89 ; Cronica latina Sabau-
di£e, dans Mon, hist, patriof^ t. I*', pp. 621 et 639; Costa, Families hist, de
Savoie, 1844, pp. 49-3 1 et 36-9. D'apr&s l'abb6 LoYK(ouvr. cit6, anal. p. i35),
c Francois de la Palud, devenu comte de la Roche, fiit fait prisonnier dans la
croisade pour Jean II, roi de Chypre, et dilivr6 miraculeusement par la pro-
tection de Notre-Dame de Consolation ».
(2) Leur seule autorit^ est cette note marginale de Pingone : « Ex dona-
tionis tabulis actis Camberij 22. Mart, anno 1432 » (Pingonii Sindon, p. 17}.
— Je me suis assure aupris du surintendant des archives royales de Turin,
M. le baron Bollati di Saint-Pierre, qu'il n'existe point parmi les documents
confi6s k sa garde et dont j'ai eu nagu&re le plaisir d'admirer le classement
parfait. Dans leur Histoire de la commune de Flumet, Aug. Dupour et Fran9.
Rabut ont public le texte de I'acte d*inf(6odation du chAteau, bourg et man-
dement de Flumet accord^ par le due Louis k sa parente Marguerite de
c Cherny », comtesse de la Roche, sa vie durant (k Chamb6ry, le 1 1 avril
1433), en compensation de pareille infeodation du ch&teau, ville et mande-
ment de Miribel, qu'il lui avait pr^c^demment octroyee par lettres dat^es de
Geneve le 22 mars 1433 (en tomes lettres) et dont il Tavait ensuite destitute
{M^m, et doc.pubUp, la Societe Savoisienne d'hist. et d'archioLy 1867, t. XI,
p. 73-8). GrAce k M. di St-Pierre, je sais que I'acte de 1433 ne parle pas plus
du Suaire que celui de 1433.
(3) M. Loth dit que Marguerite ceda le Suaire « par lettres authentiques
du 22 mars 1432 » (p. i3) : pour 6tre autorise k s'exprimer ainsi, il faudrait
6tre en mesure d'en indiquer un texte original ou contemporain, une copie
quelconque au moins.
LE SUAIRE DE TURIN. 37
miracles qui se seraient produits et en particulier sur celui qui
aurait fix^ I'indecision de la comtesse de Charny (i); tous aussi
reproduisent ou d^crivent les m^dailles qui auraient 6x6 frapp^es
a cette occasion ou post^rieurement par les dues de Savoie en
Thonneur du Suaire (2).
Les chanoines ne connurent pas tout de suite la perte irrepara-
ble que leur coll^giale venait de subir. Quand le bruit en vint k
(i) P1N6ONB, p. 19; Chifflbt, p. 108; Piano, t. I", p. 307-8. La bdte de
somme (mulus clitellarius) chargee de la relique refusa obstin^ment de sortir
de Chambery ! Miracle pour miracle, je comprendrais mieux que la Provi-
dence etit pouss6 le mulet k reprendre le chemin de la Bourgogne, pour res-
titucr leur bien aux chanoines de Lirey.
(2) PiNGONE, pp. 19, 30 et a3 ; Chipplet, p. 119-20; Piano, t. I", p. Syo,
pi. Inutile aux partisans du Suaire d'en faire 6tat. D^s 1869, A. de Jussieu
s'exprimait ainsi k leur sujet dans son m^moire sur La Sainte-ChapeUe du
chateau de Chambery : « ... II paraif d^montr^ aujourd'hui qu'elles sont apo-
cryphes. C'est du moins I'opinion de M, le chev. Dominique Promis, conser-
vateur du cabinet de S. M. le roi d'ltalie, que nous avons consultd k ce sujet
et dont Fopinion doit faire autorit6 en cette mati&re. Le savant numismate
pensQ que si les pieces, signalees par Pingon dans son Traite du Saint-
Suaire et dont il n'a jamais rencontrd un seul exemplaire, ont r^ellement
existe, ce n'etaient ni des monnaies ni des jetons, mais des medailles frap-
p^es du temps de Charles-Emmanuel P' ou d*Emmanuel-Philibert, c'est-&-
dire bien posterieurement k la date qu'elles portent » {Mimoires de VAca-
dimie,, de Savoie^ 3* s6r., t. X, p. 119). — Par contre, une enseigne de
p^lerinage du XVI* sidcle, trouv6e par A. Forgbais en i 85 5 au Pont au Change
k Paris, semble avoir txi attribuee k tort au Suaire de Besan^on [Numisma-'
tique des corporations Parisiennes, mitiers^ etc, d'apris les plombs histories
trouves dans la Seine, 4* s^r., n* io5) et devoir etre restitu6e k celui de Tu-
rin. Ce plomb « repr6sente un suaire ^tendu, support^ par deux'personnages
vetus de chapes, et portant I'empreinte antdrieure et postdrieure du corps du
Christ. Des deux c6tes sont des contreforts ajourds, au bas un medallion cir-
culaire contenant un tombeau vide, sur lequel est plantee une croix qui sup-
porte une couronne. A c6t6 de ce tombeau deux ecus, k gauche Charny
(trois ecussons pos^s deux et un [cf. p. 22, n. i ]}, a droite trois quinte-
feuilles posees deux et une dans une bordure (?} » (Jul. Gauthier, dans
Acad, d, scienc. de Besangon, 1883/4, P* 397-8). L'attribution erron^e de
cette enseigne au Suaire de Besan^on a 6x6 reproduite par Fouray (Mireaux
FranC'Comtois, pi. xiv, n*" i); mais on est en droit de se demander si la
presence des armes de Charny n*oblige pas k la faire remonter avant le
transfert de la relique k la maison de Savoie.
38 irUDE CRITIQUE 8UR
leurs oreilles, on chercha sans doute k les rassurer ; mais un jour
il fallut se rendre k la certitude des t^moignages et k T^vidence.
Le ddai pour la reintegration du Suaire k Lirey etait passe
depuis longtemps (diu est profteritum). Dans rintervalle, deux des
cautions de Marguerite, Jean de Pierre-Fontaine et Charles de
Roussans vinrent k mourir. Les chanoines n'avaient re9U ni Suaire
ni argent ; ils craignirent de se trouver sans garantie. Toujours
hemes depuis prds d*un demi-sidcle, ils finirent par perdre patience
et recoururent au moyen supreme, alors en usage, pour contrain-
dre les dehiteurs recalcitrants. lis s^adressdrent k la metropole de
Besan9on, dont Tofficiali aprds avoir vainement enjoint k Margue-
rite de Charny et k son secretaire, Philihert Thihaud, d'avoir k
restituer le Suaire (sanctum Sudarium seu Sanctuarium) (i) de
Lirey et payer deux termes arrieres de la rente, fulmina contre eux
une sentence d'excommunication (2).
Marguerite ne tint aucun compte de ces censures et ne semhle
pas meme avoir essaye de se justifier, en pretextant I'alienation de
la relique au due de Savoie. Le 29 mai 1457, elle etait depuis
longtemps (diu) privee de la communion de TEglise, animo nequi-
ter indurato, Le ch&timent devant fitre proportionne k la malice
du pecheur (crescente ipsius malitia, merito crescere debeat et
pamajy le meme official mande k tous les cures de I'archidiocese de
Besan^on de prononcer aggravation des censures contre elle les
dimanches et fetes ; au cas oti Ton constaterait sa presence dans
une eglise ou dans une localite, on devrait cesser tout office
divin (3).
Le lendemain, 3o mai, le meme juge ecciesiastique s'adressa a
ses collegues de Lyon et de Troyes, pour les prier de faire pro-
mulguer cette excommunication par les cures de leurs diocdses
respectifs (4).
(i) Voir, 8ur la signification de ce mot, qui n'implique pasle sens d'origi-
nal, la n. 2 de la p. 14.
(3) Dans Tacte du 3o mai 1467 (Append. X).
(3) L'aggravation, outre la privation des biens spirituels, interdisait le
commerce de la vie civile ; elle se publiait au son des cloches, des cierges
allumes dans la main, que Ton jetait ensuite k terre et foulait aux pieds.
(4) Appendice, lettres W et X.
LE SUAIRE DE TURIN. 3g
Marguerite resta endurcie jusqu'ft sa mort. EUe consentit bien
encore a trailer avec ies chanoines de Lirey, mais d^cid^e k ne
jamais tenirses promesses oudu moins empfich^e de lefaire. Par
contre, Ies membres de la coU^giale feront jusqu'au bout preuve
d'une mansu^tude, qu*on serait tent^ de qualifier de simplicity.
Un nouveau traits fut bientdt pass^, sous le seel de la pr^vdt^ de
Troyes. Marguerite de Charny, comtesse de la Roche et dame de
Lirey^ s'y engagea k payer au chapitre 800 ducats d'or, repr^sentant
la valeur du « sainct Suaire de Nostreseigneur Jhesucrist, lequel
est le plus bel et notable joyau de la dicte ^glise et qui long temps
a fut prins ... par lad. dame... et depuis par elle ali^n^ » (i). De ce
jour Ies chanoines furent fixes sur la perte irremediable de leur
reliqueet tomes leurs n^gociations, pendant vingt-cinq ans encore,
se borneront k obtenir une compensation.
Le nouveau traits ne fut pas mieux execute que Ies. precedents
par la noble dame, qui demeura sous le poids de I'excommunica-
tion. Les chanoines Tassigndrent de nouveau devant le pr^vdt de
Troyes. lis comparaissent devant lui,toujours les m6mes, le doyen
Pierre Sauvageot, Evrard des Champs et Nicole de la Rothiere, le
19 Janvier 1458 (1459 n. St.). Charles de Noyers, seigneur de
Watefale et de Seigny-le-Petit, se pr^sente au nom de sa soeur,
Marguerite de Charny, dame de Lirey. Les promesses ne lui coil-
tent pas plus qu'k elle. II s'engage done, en son nom personnel, k
payer au chapitre k la Saint- Remy, « chef (c'est-k-dire i^) d'octo-
bre », les 800 ducats d'or promis pr^cedemment, plus 3oo livres
pour interdts et frais de justice; il se charge aussi de procurer aux
chanoines des buUes du pape les autorisant k aligner le Suaire et
le consentement de Tevfique de Troyes, k Teffet de les mettre k
Pabri de tout reproche de la part de leurs successeurs. De leur
cdte ils n'ont pas de peine k reconnaitre que le Suaire est passe en
de telles mains (pas un mot du due de Savoie) qu'il leur est impos-
sible de songer a « jamais le recouvrer j». Les sommes promises
seront employees k reconstituer les revenus et k reparer les edifices
de la coliegiale, ruinee par les guerres « qui long temps ont couru
en ce royaulme » ; d'autre part, ils ne sauraient oublier que les sires
(i) Dans Tacte du 19 Janvier 1458/9. (Append. Y].
40 iTUDE CRITIQUE 8UR
de Charny sont les fondateurs de leur ^glise et que les bto^fices en
3ont k la collation de Marguerite. lis ne voient aucun avanuge k
la maintenir excommuni^e pour des dettes auxquelles ils la savent
incapable de satisfaire ; ils consentent done k ce que les censures
soient suspendues jusqu'A la Saint-Remy et que, au payement des
sommes stipul^es, elle et ses cautions en soient d^finitivement rele-
v6es (i).
Vaines promesses I Les chanoines de Lirey ne re9urent pas un
ducat de Charles de Noyers et Marguerite mourut I'ann^e sui-
vante, le 7 octobre, apr^s avoir c^d^ sa terre de Lirey k son cousin
et fiUeul, Guerry des Essars, et institu^ pour h^ritier partesument
Guillaume de Roussillon, seigneur du Bouchage (2). Toujours
sous le coup de Pexcommunication, elle devait 6tre fig^e de plus
de soixante-quinze ans, son premier mariage datant du commen-
cement du XV* si^cle ou, pour parler plus exactement, de la der-
ni^re ann^e du XIV*. Elle nous apparait surtout besoigneuse ; k cela
il y a une explication naturelle : les guerres, qui de son temps rava-
gdrent la Bourgogne, durent singuli^rement diminuer ses rerenus.
Elle r^it^ra sans fin des promesses toujours plus on^reuses, sans
avoir jamais de quoi les tenir. On salt que rien ne rend malhonnSte
et de mauvaise foi comme les dettes.
D^9us du cdt^ de Marguerite, de ses cautions et de son frdre, les
chanoines de Lirey se retourndrent naturellement vers le d^tenteur
actuel de leur Suaire, ie due de Savoie. lis profitdrent de son
s^jour en France, oh il ^tait venu soUiciter I'appui de son gendre
Louis XI contre son propre fils Philippe, pour lui d^pficher des
a orateurs ». Leurs confreres, Nicole de la Rothidre et Jean Larre-
cier, arrivdrent k Paris, munis de pouvoirs sufiisants, certifies par
Fevfique de Troyes, Louis Raguier, et son official, en trois lettres
authentiques. lis obtinrent de lui une charte solennelle, dat^e du
6 ftvrier 1464 (Nativ.), dont le pr^ambule relate Thistoire du
Suaire (sacratissimum Sudarium^ ^ffigi^wi Salvatoris et RedemptO"
ris nostriJhesu Christi reprofsentanSy plus loin sacratissimum reli-
(i) Appendice, Icttrc Y.
(3] Anselkb, ouvr. cite, t. VIII, g. 2o3 ; Ern. Petit, Histoire des dues de
Bourgognej t. 11, p. 448.
LE 8UAIRE DB TURIN. 4 1
quiarium)yXellt que nous la connaissons^ depuis Torigine de la col-
l^giale. On aurait souhaitd que le due nous apprtt k quelles condi-
tions il lui avait ^t^ c^d^ ; il se borne k des termes assez vagues:...
dom. Margareta apud nos transtulit.,., ... ob remissionem seu
translationem... nobis factam,..; k notre sens, ils sont cependant
assez clairs pour indiquer une cession k titre on^reux. II n'y eut ni
donation ni vente, mais transfert ; Marguerite re9Ut en ^change
le chateau de Miribel (1453)^ puis celui de Flumet (1455), com-
me on Ta vu plus haut : on ne saurait trouver une autre cause
a ces inf^odations. Les chanoines avaient supplid le due de leur
restituer I'image v^n^r^e ou de leur donner une compensation. De
la premiere hypoth^se il ne semble pas avoir ^t^ question ; mais le
prince, mil de piti^ sur les pertes [damna et reddituum attenuatio)
que la coU^giale avait subies, leur assigna une rente de 5o francs
d'or petit poids, monnaie de Savoie, payables. & la Saint- Andr^
(3o novembre), k toucher sur les revenus du ch&teau Gaillard (a
une lieu Est de Gendve), sous I'obligation pour les chanoines de
cd^brer au grand autel^ tons les mois, une grand'messe du Saint-
Esprit pendant la vie du due et de Requiem apr^s sa mort (i).
Les chanoines de Lirey avaient ^t^ si souvent dup^s qu'ils n'at-
tach^rent qu'une mediocre confiancc k la pancarte ducale, en
6change de laquelle ils avaient abandonn^ tous leurs droits sur le
Suaire : les revendications qu'ils auront encore k faire valoir, mon-
treront que leur defiance ^tait justifi^e. lis refusdrent done de
consentir k Tabsolution de Philibert Thibaud, jadis secretaire de
Marguerite, et ne se gfindrent pas pour d^biter que cette dame
restait elle-mdme, aprds sa mort, sous le coup des censures qui
Tavaient frapp^e. Le due leur 6crivit encore de Paris, le 23 mai
suivant, comme k ses « tresehiers et espeeiaulx amys », pour leur
demander de renoncer k poursuivre des foudres de I'Eglise les
d^funts au del^ de la tombe et de mod^rer leurs expressions a
I'endrolt de Marguerite (2].
(i) Appendice, lettre Z. Les chanoines se firent d^Iivrer une expedition
authentique de cette charte le 5 d^cembre 1467 (Camuzat, f^ 413 r«; Chip-
FLST, p. III). Pietro Datta en aurait r^yoque en doute Tauthenticite k l*aca-
d6mie des sciences de Turin le 4 f^vrier i8ai (Piano, t. I, p. a55-6o).
(3) Appendice, lettre AA.
43 trUDE CRITIQUE 8UR
La cb«rit< prit-elie le pas sur I'int^rtt dans I'fime des bons cha-
noinet? nous ne savons. Ce qui est sAr, c'est qu'en 1473 huit ans
s'^taient ^coul^s sans qu'ils eussent refu un sol de la rente du-
cale (i). Louis ^tait mort k Lyon le 29 Janvier 1465, laissant pour
successeur son fils aln^, le bienheureux Am^d^e IX, d€c€d6 lui-
mSme JiVerceil, le 3o mars 1473. Le fils de celui-ci, Philibert le
Chasseur, d^buta sous la r^gence de sa m^re Yolande, fille du roi
Charles VIL Le 14 mai de I'ann^e suivante, les chanoines de Lirey
lui d^put^rent Marc de Vaudrey, de la maison de Saint-Phal, proto-
notaireapostoliqueetarchidiacrede Besan9on, et Hugues Mergey,
maltre ^s-arts, pour lui r^clamer quoddam jocale pretiosissimum
vocatum sanctissimum Sudarium nostri Salvatoris et Redemptoris
Jhesu Cristi, qui ^tait entre ses mains (in cujus tnanibus et potes--
tate est et evenit)^ et les arr^rages pour huit ans 6coul^s de la rente
de 5o francs par an promise par le due Louis (2).
Quel r^sultat obtint cette deputation de gens qualifies ? nous
rignorons. C'est notre dernier document. II est k croire que les
chanoines de Lirey se lassdrent de r^clameren vain capital etint6-
r6ts. La th^orie de la force qui prime le droit est de tons les temps.
Les rois d*Italie ne laisseront pas plus contester leur possession
du Suaire que celle de Rome capitale. Les d^uils de procedure que
j*ai d^roul^s devant les yeux du lecteur ont pu lui paraltre par ins-
tant fastidieux : ils ^talent n^cessaires pour ^tablir, par une chaine
non interrompue de documents, que les annales du Suaire de
Turin sont une longue violation des deux vertus si fr^quemment
recommandtes dans nos saints Livres, la justice et la v^rit^ (3).
(i) On pourrait conjecturer qu*une annuity arait 6t6 payde, la premiire
solution ayant dt 6tre faite le 3o novembre 1464.
(a) Appendice, lettre BB.
(3) Ces scrupules n'arrdtent pas Chifflbt. II remarque agr^ablement que,
du jour 01^ les chanoines de Lirey n'avaient pas voulu reconnattre dans leur
Suaire Toriginal, il s'^taient rendus indignes de le conserver (p. 119]. Ceci
n*est gatrc exact : Topposition k cette pretention ezag^ree vint surtout des
^vdques et du pape. Le dernier acte des chanoines a d'ailleurs un tout autre
ton (Append. GG). La Constance de leurs reclamations devant toutes les juri-
dictions pourrait sembler elle-m6me une preuve de leur ardente conviction
en Tauthenticite : ils constataient simplement les benefices que Marguerite
tiraity k Taide de sa relique, vraie ou fausse, de la cridulit^ publique.
LE SUAIRE DE TURIN. 43
III
II n*entre pas dans le cadre de cette ^tude de poursuivre en detail
I'histoire de la fameuse relique k partir de son arriv^e k Chamb^ry.
Je lA tracerai k grandes lignes, m'arrdtant seulement aux faits et
aux documents dont on croit pouvoir s'autoriser pour ^tablir sa
quality d*original.
Le Suaire de Lirey fut d^pos^, d^s I'abord (en 145 3), dans
r^glise des Franciscains de Chamb^ry. En 1466, Am^d^e IX, qui
ne semble pas s'dtre jamais pr^occup^ de faire servir leur rente de
5o francs aux anciens propri^taires de la relique, faisait construire
dans la forteresse de Chamb^ry une somptueuse chapelle, destin^e,
dans la pens^e constante des souverains de la Savoie, k servir de
cath^drale et de sidge a un archev6ch6. C'est Ik qu'en attendant
cette creation, on conserva et v^n^ra Timage du Suaire. Pour
commencer, le due soUicite du Saint-Si^ge I'^rection de cette cha-
pelle en coU^giale. Par buUe du 21 avril 1467, Paul II autorise le
due Am^d^e et la duchesse Yolande de France k 6riger dans leur
chateau de Chambery une chapelle, qtue collegiata sit et capella
ducalis nuncupetur^ oh ils se proposent de conserver de fort pr^-
cieuses reliques (pro conservatione quarumdam pretiosissimarum
reliquiarum) qu'ils possddent (i). Cette pidce, dont on a le texte
complet d'aprds les archives de Turin, est absolument muette k
regard du saint Suaire (2). Rien non plus de I'insigne relique dans
les buUes de Sixte IV des i5 septembre et i« octobre 1472 et du
21 mai 1474, qui concernent les dignit^s de la nouvelle fonda-
(i) GuicHEKON, Histoire genealogiqve de la rqy, maison de Savoye, 1660,
t. II, p. 671-4; M^. de VAcad, de Savoie, 2* sdr., t. X, p. 333-9.
(3) Mgr CoLOMiATTi a un mot d^licieux k ce sujet : « Le nom du Saint
Suaire, il est vrai, ne se trouve pas dans le rescrit, ... mais ce nom est cer-
tainement dans la demande qui a provoqu^ le rescrit » (p. 19-30). Le texte
de la supplique n'existe nulle part et mon contradicteur ne Pa si^rement pas
vu. A la fin de ses Observations, il m'assure du concours de ses priires pour
m'obtenir c Tintelligence de la vraie science » (p. 35). Je n*ose prier pour sa
conversion : prendre le faux pour le vrai et vice-versa, n'est-ce pas une pre-
destination k I'impdnitence finale... scientifique ?
44 ^TUDE CRITIQUE 8UR
tion (i). Elle figure au premier rang dans VInventaire des reliqueSy
meubles et omements de Viglise dt la Sainte-Chapelle du chateau
de Chambiry^ dress6 le 6 juin 1483 : « Primo quidem, sanctum
Sudarium, existens in una cassa coperta velluto cramesino, munito
cum clavis argenteis deauratis ; quod quidem Sudarium est in dicta
capeilasancta castri Chamberiaci » (2).
De nouvelles bulles des papes Sixte IV (1480), Jules II (8 Janvier
et 25 avril i5o6)et L^on X (7 aoilt 1 5 1 8) enrichirent d'induigences
le pHerinage, la confr^rie, TofEce et la f6te (4 mai) en Thonneur
du saint Suaire, successivement ^tablis dans la Sainte-Chapelle de
Chamb^'ry (3). La tradition d'un culte public et autoris^ s'affirma
bientdt et alia d^s lors en s'accentuant (4) ; celle qui pr^yaut actuel-
lement ne saurait remonter plus haut : les documents cit^s le lui
interdisent. Elle ne remplit done en aucune fafon les conditions
indiqu^es par le comte Riant pour qu'une relique insigne de la
Passion puisse 6tre qualifi^e originale et authentique.
(i) Mim. de VAcad. /fe Savoie, 2* sdr., t. X, p. 339-46, d'apr&s les c Archi-
ves du s^nat de Savoie ». -— Encore simple cardinal (Francois de La Rovere),
ce pape avait exprim^, au sujet du Suaire de Chamb6ry, un sentiment que
rimpartialit6 me faisait un devoir de rechercher : M. Charles Sustrac Ta
d^couvert dans un incunable de la Biblioth. Nation, et on en trouvera le
. texte dans TAppendice CC.
(3) Mim, cit^s, p. 348 ; A. Fabrb, Trisor de la chapelie des dues de Savoie,
1868, p. 46.
(3) Chifflet, p. 1 30-1. — On trouvera dans TAppendice EE le texte complet
de rOfficeduS. Suaire accord^ par Jules II; ce document liturgique peutdtre
consid6r^ comme in6dit, malgr6 une Edition faite par Guigand KOln k Geneve :
Officium Sancte Syndonis cum missa ejusdem, Festum dicti sancti Sudarii ;
s. d., pet. in-8* goth. D'apr&s les recherches de M. Th^oph. Dufour [Notice
biohliogr. sur le catechisme et la confession de foi de Calvin, 1878, p. 67-78),
Wigand Koeln, franconien, exer^a Timprimerie k Geneve de iSsi k i535.
(4) On tirera peut-6tre avantage de ce que la bibliographie doim^e plus
haut ne mentionne aucune attaque contre Tauthenticit^ du Suaire ; on
s'6K>nnera du moins que le souvenir des contradictions qu'il dut subir n'ait
laiss^ aucune trace. II est k croire que Calvin ne fut pas le seul k faire les
reflexions qui 6maillent son Traite des reliques (Appendice FF). Qu'on y rc-
fl^hisse toutefois : aux si^cles passes, I'auteur qui, k Chamb^ry ou k Turin,
aurait par ^crit 6ieve des doutes sur la sainte relique n'eut jamais obtenu de
Tautorit^ eccUsiastique la permission indispensable pour se faire imprimer,
et son obstination lui aurait k coup sillr procure le d^sagr^ment de faire
connaissance avec les prisons ducales.
LE SUAIRE DE TURIN. 45
Le 1 1 juin i5o2, on transf^ra en grande solennit6, de T^glise des
Frdres-Mineurs dans la Saintc-Chapelle, sacrosanctum Sudarium
(supplier in quo) sanctissimum ac pretiosissimum Redemptoris nos^'
tri Jesu Christi corpus ^postqmtn a salutif ere cruets patibulo depo*
situm exstitit^ sacra involutum fuisse testantur eloquia..,^ in quo
non solum eminent vulnerum et plagarum^ ac ipsius pretiosissime
(sans doute pretiosissimi) sanguinis vestigia^ sed et totius corporis
sanctissimi effigies. Ce futT^v^quc de Grenoble, Laurent AUcman,
qui fit la c^r^monie, entour^ d'un grand nombre de prdtres, en
pr6sence du due Philibert, de la duchesse Marguerite d*Autriche,
sa femme, du prince Charles de Savoie, son frdre, de Francois de
Luxembourg, du mar^chal de Savoie Hugues de la Palud, de
personnages distingu^s et d'une foule de fiddles. Le suaire fut
plac^ in quodam armario in ipsa capella et infra menia ipsius
econtra ipsum magnum altare constructo,.. valvis ferreis et quatuor
seris quatuor clavibus munitis clauso ; le due garda deux de ees
clefs, remit la troisidme aux chanoines et la quatridme au president
de la Chambre des comptes (i).
Le Suaire devint dds lors comme It palladium des princes de la
maison de Savoie: ils s'en firent aeeompagner dans leurs peregri-
nations. D6s Tann^e suivante il quitta Chambery ; du chateau de
Pont-d'Ain il fut port6 k Bourg-en-Bresse, lors du passage de
Philippe le Beau, archidue d'Autriche, beau-frdre du due de
Savoie ; la cour des deux princes le v^nera le 14 avril i5o3 et on
possdde depuis quelque temps, sur cette c^remonie, le recit d'An-
toine de Lalaing (2]. Du chateau de Billiet le Suaire ne revint k
Chambery qu'en 1 5o6.
On attribue au roi Frangois !«' un voeu, a la journ^e de Mari-
(x) M4m. de VAcad. de Savoie , 2* s^r., t. X, p. 281-4. Avant de me pro-
noncer sur I'absolue authenticite de cette pi^ce, qui commence ainsi : « Etsi
Olympi rector inclitam, antiquissimam et illustrissimam domum Sabaudie...
decoraverit... dignum est tarn divas reliquias... », j'avoue sentir la necessity
d'en examiner Toriginal, conserve aux « Archives de Turin » . M. Loth par-
tage mes scrupules (p. 14-5).
(2) Voir le texte dans I'Appendice, lettre DD, et sur Tauteur du document
Le Mystire des trois DomSy 1887, p. 697, n. 2. On peut rapprocher cc qu'il
raconte de Tdpreuve de Teau et du feu qu'on aurait fait subir au Suaire,
d'une Ugende analogue rapport^e par Chifflbt (p. 92).
46 irUDE CRITIQUE 8UR
gnan, de faire k pied le pMerinage du Saim-Suaire. Le Journal de
sa mdre^ Louise de Savoie, est precis quant k rez6cadon : c Le 28
de may i5i6, environ cinq lieures apr^s midi, mon fils pardt de
Lyon pouraller k pi^ au Saint-Suaire de CliamMry » (i). Chorisr
ajoute que le roi ^tait « vfttu d'une aube de toile blanche, comme
le sont les confreres du Gonfalon » (2).
Un violent incendie, qui ^clau le 4 ddcembre i532 dans ies
stalles des chanoines de la Sainte-Chapelle, manqua ddtruire la
pr^cieuse relique ; le d^vouement d'un gentilhomme la sauva de
la destruction. Des doutes circuldrent ndanmoins sur Tidentit^ du
Suaire pr^sentd ensuite k la d^vodon des fiddles. A la demande du
due Charles III, le pape Clement VII commit, le 8 avril i534, son
l^gat, le cardinal Louis de Gorrevod, pour proc^der k la verifica-
tion du pannum^ sindon nuncupata Salvatoris nostri Jesu Christie
ut pie creditur ; la reconnaissance eut lieu le i5 suivant (3).
Le m6me due, menace en 1 5 36 par les Franfais, les Bernois et
les Genevois, se retira k Verceil, emportant aveclui le saint Suaire,
qui le suivit Tann^e suivante k Nice (4). Charles repartit pour Ver-
(i) MicHAUD et PouJOULAT, Nouv. colL d, MimoireSf 1866, t. V, p. 90^.
(3) Histoire gener, de Davphini^ 1672, t. II, p. 5i5; cf. Guichxnon, op. cit.,
1778, t. II, p. 198.
(3) L£on BoucHAGS, Le saint Suaire de Chambiry a Sainte-Claire en ville^
dans Congris des sociMs savantes Savoisiennes^ 1891, xx* s^r., p. a8i-a. —
Si on en croit mattre Francois Rabblais, la destruction du Suaire fiit com-
plete. Avant M. de M61y, personne n'ayait songi k recueillir sur ce fait le
t^qioignage de Tauteur de Gargantua^ liv. I**, chap, xxvii : « Comment ung
moyne de Seville saulra le dos de Tabbaye du sac des ennemis... Les ungs
crioient : Saincte Barbe... Les ungs se yoOoient k sainct Jacques ; les aultres
au Sainct Suaire de Chambery : mais il brusla trois mois apres, si bien
qu*on n*en peust saulver ung seul brin. Les aultres k Cadotlin... » (^d. Le
Duchat, 1 741, t. I**, p. 1 11; ^d. Marty-Laveaux, 1868, t. I*% p. 107). On sait
que 4a premiire Edition du I** livre en 56 chap, est de i535 (Brunbt, 3/antte/,
i863, t. IV, c. 1043); la date de Tembrasement de la Sainte-Chapelle de
Chambery ^tablit qu'il n'a pu 6tre rddig^ avant la fin de i53a.
(4) On posside, sur son s^jour dans cette ville, un double t6moignage d'Al-
phonse Salmbron : « Sindon etiam munda, qua fuit sepeliendus Dominus
et involvendus k Josepho ab Arimathia, quae etiam hodie Nic« ostenditur,
reliquit integram Ghristi figuram, in qua tam pars anterior Domini quam
posterior ostendit hujus veil signa apertissima » {CwnmenU in evangel.
LE SUAIRE DE TURIN. 47
ceil en 1541, avec la pr6cieuse relique, laquelle ne fut rdm^gr^e
dans la Sainte-Chapelle de Chamb^ry que vingt ans aprds, en
vertu de lettres-patentes du due Emmanuel-Philibert, en date du
1 5 avril i56i.
Lorsqu'en iSjS on apprit que saint Charles Borrom^e allait
quitter Milan pour venir k pied v^n^rer I'image miraculeuse du
Suaire de Chambdry, Emmanuel-Philibert et sa femme, Margue-
rite de France^ voulurent lui ^pargner la moiti^ de ce voyage
fatigant (i). Le due ^crivit k Pierre de Lambert, ^vdque de Mau-
rienne et doyen de la Sainte-Chapelle, pour faire transporter la
relique k Turin, avec promesse de la renvoyer aprds qu'elle aurait
satisfait la devotion des villes du Piemont. Le pr^lat finit par y
consentir et le Suaire fut remis, par deliberation capitulaire, au
chantre Neyton ; accompagn^ d'un autre chanoine, il la porta au
due et en retira un charge : c*etait le 14 septembre. Mais 11 etait
eerit que la fameuse relique serait sans cesse un motif k reclama-
tions. Malgre les instances du pr^vdt, le due refusa de priver
Turin de ce joyau^ « sous pretexte qu'il ne serait pas assez en
surete k Chamberi », et il y est reste (2).
histor,^ 161 3, t. X, p. 394^}. c ... In duplicato linteo effigies Christi induti
emersit, et anterior et posterior. Hanc autem dux Sabaudiae in civitate sua
ducali, Yulgo Zamberic, prius habuit, deinde vero propter bella in Nicseam
Provincial civitatem transtulit ; ubi in die Sabbati sancti yenerabiliter toti
populo spectanda proponitur. Altera pars sindonis hujus, mazime quae refe-
rebat anteriorem partem, in Besantio civitate Burgundies religiose conspl-
cienda exhibetur » (/6ti., p. 40 1»).
(1) La lettre du j6suite Francois Adorno, de Gtoes, 01^ il raconte le p^leri-
nage de saint Charles, n*a pas 6te publi6e dans son original italien. EUe a
ete traduite en latin par Jean-Ant. Guarnbrio et imprim^e k Bergame en
1579 (la s* et la 3* 6dit. de la Biblioth, des PP. de Backer disent i57i» ce
qui est une grosse erreur) sous ce titre : Epistola, qua peregrinatio ab illnw
cardinali Sancti Praxedis suscepta exponitur^ cum ad inuisendum sacrum
Linteum Augustam Taurinorum se contulit (Calvi , Scritt. Bergam,^ 1664,
p. aao); Pingone Ta reproduite deux ans aprds, op. cit., p. 65-85 (p. 57-73
de la reimpression de la mdme annee et dans P6dit. de 1777). Chifplbt a
reproduit uiie partie de la trad. lat. (p. 89-93).
(3) Bbsson, Memoires pour Vhistoire ecclesiastique des diocises de Geneve^
Tarantaisef Aoste et Maurienne,.,^ ^1^9y iQ'-4S P* ^i^- Les pages qui pr6ci-
dent (3 1 4-6) sont un extrait du Traite sur le saint Suaire de Turin^ par
Fran(. Cape^ (voir p« 16, n.).
48 irVDE CRITIQUB 8UR
Avant d*aborder le dernier argument, d'ordre purement scienti-
fique, invoqu^ en favear de rauthenticit^ du Suaire de Turin, je
croit devoir faire une double obtenration au sujet des miracles et
des documents post^rieurs dont on s'autorise.
Faisons d*abord remarquer que, si les auteurs parlent tous de
miracles, aucun n'en donne de proc^s-verbal en rdgle. Quant k
ceux dont ils auraient 6ti tdmoins, en admettant leur parfaite v6ra-
cit^, ils ne sauraient £tre invoqu^s comme preuve de Foriginalitd
du Suaire. La question vient d*6tre I'objet de deux articles et j'ai
lieu de croire que ma premiere brochure n*y a pas M ^trangdre ( i ).
(i) [PouDOu], Se una reliquis fotse ftlsa ? an po' di teologia per mtti,
dans CiviltA eattolica^ 1900, sen xyn, t. V, p. i8-33 ; Boudimhok (A.)« Et si ce
n'^tait pas yrai?, dani Revue du elergi FranfaiSf 1900, t. XXII, p. 341-63. —
L'article de la revue des J^suites est une r6ponse & celui du d' P. Caviglia
ins^r^ dans une feuille bimensuelle de Rome, Presente e awenire (i** sept.
1898, t. I*, p. i36*4o) : c La santissima Sindone, appunti critici e ricerche
sperimentaii. » Le R. P. se borne k r^pondre k la 3* partie, c critica teolo-
gica », qu'il prend facilement en d^faut, mais laisse yolonuirement de c6t^
la I**, « critica storica », bien plus ^tendue. Panant de ce fait psychologique,
que rhomme parle yolontiers des choses qui frappent viyement son imagi-
nation, le d' itaiien se demande comment les ^ang^listes auraient omis de
mentionner Timpression^aiss^ par le corps du Sauyeur sur le suaire, an
cas oii elle se serait produite ; le silence des Pires de TEglise et des &ri-
yains eccl6siastiques k cet ^gard lui paratt ^galement inexplicable. II fait
facilement justice de Tinsuffisance du liyre du chanoine (aujourd'hui monsi-
gnore) Giov. Lanza, cappellano di S. M., La santissima Sindone del Signore
che si venera nella r. cappella di Torino^ iiofLfte e c(msidera:(ioni (Torino,
1898, pet. in-8« de4 f.-i66 p., figg.)» dont il m'a paru inutile de charger la
bibliographie du Suaire (p. 14-6, n.). II faut en dire autant des pages con-
sacr6es k ce sujet par Gius.-Isid. Arniudo, dans sa Torino sacra (ibid., 1898,
in-80, p. 381-95, figg.)> approuy^e par le chan. Emm. Colomiatti; etd'autres
brochures de circonstance, comme : Chiuso (Tom.)» La ss. Sindone di N. S,
Gesii Cristo venerata nella real cappella in Torino (Torino, s. d. [approb.
i885], in-i6 de 144 p., fig.); Rahbllo (Guil.)> De sancta Sindone evangelica
quae in regio sacello apud ecclesiam metropolitanam Taurinensem servatur et
colitur^ dissertatio historica et critica (Augustae Taurinorum, 1898, gr. in-8*
de 40 p., pi.) [reproduction de TAppendice k la 3* part, de VUniv, catholicae
doctrinae exposition explicatio atque defensio de I'auteur] ; Vomaggio dei
secoli alia sacra Sindone evangelica venerata nella chiesa metropolitana di
Torino, studio storico critico (Torino-Roma, 1898, in-8* de 60 p., pi.) [tra*
LE SUAIRE DE TURIN. 49
« La correlation entre le miracle et rauthenticit^ d'unerelique(ou,
si Ton veut, avcc la v^ritd d'un fait historique) nc se presume pas,
mais elle est r^gulidrement exclue par la manidre dont les choses
se passent.... Les miracles reldvent uniquement de la bont^ de
Dieu et de Tefficacit^ de la pridre ; ces deux causes sont ind^pen-
dantes de Tauthenticit^ d'une relique, tout comme des apparitions,
cause premiere des pdlerinages. On devra done, en rdgle g^n^rale,
^carter la pr6tendue preuve tir6c des miracles de toute controverse
relative k Tauthenticit^ d'une relique, k la v6rit6 d'un fait d'histoire
religieuse ». Je n'aurais pas mieux dit.
En second lieu, TEglise a s'efforce de garantir les fidMes contre
toute erreur et supercherie en mati^re de reliques ; mais... elle ne
jouit, sur ces questions, d*aucune infaillibilit^, d'aucun privildge.
Les moyens qu'elle emploie pour s*assurer de Tauthenticit^ des
reliques, sont les critdres ordinaires que tout le monde emploie
pour contrdler les faits historiques... L^ se borne son role et son
action, et sa responsabilit^ ne s'^tend pas plus loin... » Dans Tes-
p^ce, comme j'ai eu I'occasion de le dire, a les bulks des papes,
dont on voudrait s'autoriser, sont toutes post^rieures au XV* si^cle ;
adress^es aux souverains du Pigment, k leur demande, elles repro-
duisent la teneur de leurs suppliques et on ne saurait leur donner
une port^e historique ; il n y a pas trace de discussion critique k
cet 6gard et de refutation des documents ant^rieurs ». Malgr^ la
colossale reputation de Benolt XIV et de son tcaite De servorum
Dei beatificatione et canoni^^atione, je n'hesite pas k dire que ses
affirmations ne constituent pas un jugement de TEglise : n'est-il
pas m^me k croire que la lecture de la pr^sente etude edi modifie
ses affirmations qui concernent le Suaire de Turin ?
IV
Sans contester Fauthenticite et I'importance des documents que
j'avais tout d*abord fait valoir, M. Loth a cru trouver dans la
duction du prec6dent] ; Didibr (Fr. M.), Le saint Suaire h Chambiryet h Tu^
ririf par le d' T. Chiuso, traduit de I'italien (Bruges, 1900, in-8* de yj-63 p.,
5 planches).
4
50 irUDB CRITIQUB 8UR
photographie un argument qui ies r^duisait k n6ant et prouvait
d'une manidre irrefutable roriginalit^ du Suaire de Turin. J'ai
imerrog^ k cet ^gard un de mes amis, qui £ait de la photographie
et de la peinture depuis trente*cinq ans et pour qui ces deux arts
n'ont pas de secret. Voici, sans autre pr^ambule, sa rdponse,
p^remptoire k son tour :
Monsieur le Chanoine,
J'ai lu la brochure de M. Arthur Loth, Le Portrait de N.'S.
Jisus-Christ cTapris le Saint'Suaire de Turin, que vous m'avez
remise, en me demandant de vous donner mon avis sur des ques-
tions photograph iques qu'il y traite et dont il fait, k Texclusion des
textes, le pivot de sa th^se, pour prouver que le Suaire de Turin
est certainement Toriginal et non une copie ; qu'il n'a pu Stre peint
de la main des hommes et que la photographic le prouve a'une
fa^on p^remptoire.
Je ne suis pas du tout de son avis et voici pourquoi : M. Loth
^crit bon nombre de pages pour ddmontrer que la photographie
donne toujours, sur la plaque sensible expos^e devant robjectif,
une image negative, soit Timage inverse de i'objet reproduit. Cette
affirmation est trop absolue.
Si M. Loth avait dit d'une manidre plus precise: Ies plaques
sensibles au collodion ou a la gelatine, employees d'habitude dans
la photographie, donnent, traitdes par Ies rdactifs en usage, une
image negative, ou mieux encore, relativement negative, ce serait
la v^rite ; mais soutenir que Tdpreuve obtenue directement a la
chambre noire d'un objet positif ne peut pas ttre un positif, voila
oil est Terreur, et il a tort de vous accuser de n'^tre pas tr6s fort
en photographie quand il fait lui-mdme preuve d*une si profonde
Ignorance.
Oui, on peut obtenir directement k la chambre noire une dpreuve
positive et, pour s'en convaincre, il n*a qu'a lire dans le Bulletin
de la Societe franqaise de photographie^ n® de novembre iSSg, la
communication que ht, a ce sujet, Poitevin a cette Socidtd. 11 y
trouvera toutes Ies formules a employer et Ies manipulations, du
reste assez simples, a faire et^ s'll le veut, pourra trds facilement
rdpdter lui-m6me Texp^rience.
Quelques mois aprds, en f^vrier i860, Poitevin pr^senta, a la
mdme Society, une s^rie d*6preuves st^reoscopiques positives par-
faites, obtenues directement a la chambre noire par ce mSme
proc^dd.
Ce proc^de est bas^ sur Ies diverses reactions chimiques de
LE SUAIRE DE TURIN. 5 I
racide gallique, pyrogallique ou du sulfate de protoxyde de fer, qui
ne donnent des noirs par continuation qu^avec le chlorure, Tiodure
ou le bromure d'argent influences par la lunii^re, en presence d*un
oxysel de la mdme base, le nitrate d^argent, par exemple.
On pent done obtenirune image photographique positive directe
a la chambre noire, quoi qu'en dise M. Loth, et la plaque pr^par^e
par M. Pia, par un proced6 de son invention, dont M. Loth ne
donne pas la formule, ne pouvait-elle lui rdserver pareille surprise,
puisque c'est par hasard ^galement, en experimentant les proc^d^s
de pnotographie sur gelatine, que Poitevin decouvrit son proc^d^,
Cette m6me surprise m'a 6x6 ofiferte k moi-mfime dans la prepa-
ration de n^gatifs speciaux pour la production d*6maux limousins
et je crois avoir trouv6 la raison de ce ph^nom^ne dans Texplica-
tion qu'en donnent Bareswil et Davanne, dans leur Chimie photo^
graphiquCy sous le nom d'image amphitype,
M. le docteur Sabatier donne le proc^de suivant, q^uipermet de
reproduire ce phenomdne a volonte et d'obtenir ainsi imm6diate-
ment des images positives k la chambre noire : il suffit, aprds un
premier d^veloppement ordinaire tr^s l^ger, de laver la plaque, la
couvrir d'une solution d'argent a reaction alcaline, ou mSme d'une
faible solution alcaline quelconque et de recommencer le develop-
pement.
II y a lieu de croire que lorsque ce ph^nomdne se produit acci-
dentellement (c'est mon cas), on doit en rechercher la cause soit
dans le manque d'acidite de I'azotate d'argent, soit dans Talcalinite
passagdre des eaux de lavage.
Autre erreur : M. Loth dit (page 39) : « Le terme de n6gatif
s'explique, si Ton consid^re que toutes les parties blanches ou
Claires du sujet photographic viennent en noir sur la plaque, tan-
dis que les parties noires apparaissent en blanc II est
clair que le dessin^btenu sur le papier, sera A son tour le contraire
de la plaque » : cela, oui. « Ce sera le positif, et par suite la
reproduction exacte du sujet photographic. » Ceci, non, pas tou-
jours. Ce sera la reproduction exacte, quant k la forme, mais pas
quant aux valeurs colorCes, a moins qu'on ait employ^ des plaques
Cgalement sensibles k tons les rayons colorCs.
Or, tout le monde sait que les plaques employees ordinairement
en photo^raphie ne sont pas Cgalement sensibles k toufes les cou-
leurs ; et il n'est pas un photographe, si peu versC qu'il soit dans
la pratique de son art, qui ne sache que s41 photographie, par
exemple, une fleur Jaune sur un fond bleu, mfime foncC, il Cprou-
vera k Toeil, en regardant le sujet, la sensation d'une fleur tris
Claire sur un fond sombre; c'est cette mSme impression de fleur
claire sur fond noir qu'il aura par transparence sur la plaque nega-
tive, alors que I'epreuve positive, sur papier, lui donnera finaic-
mcnt une fleur sombre sur un fond clair, c'est-&-dire le contraire
de la rdalitC.
53 irUDE CRITIQUE 8UR
Mais tout cela, Monsieur ie Chanoine, n'est que redire du tr^s
connu. J'admets parfaitement que la plaque de M. Pia a donn^ un
n^gatif du saint Suaire, et comme ce n^gatif «st lui-m6me une
image positive, cela prouverait simplement que, pliotographique-
ment parlant, le saint Suaire est une image negative.
Mais cela ne prouve pas du tout que le Suaire n*ait pas ^t^ peint
par la main des hommes. A cela, M. Loth r^pond que le Suaire
n*a pas ^t^ peint en n^gatif, et qu'aucun artiste, si habile qu'il eUt
€t€, n*aurait pu le faire. Quant k cette dernidre assertion, ie ne suis
pas de son avis et je suis intimement persuade que dans les condi-
tions de facture aussi sommaires que celles donn^es par la repro-
duction, un artiste aurait facilement pu le faire, mais il serait telle-
ment absurde et incomprehensible qu'il Vedt fait, que je dis qu'il
ne Ta pas fait.
M. Loth fait rhypothdse d*une impression dectrioue. II me
semble que des lin^es imbibes d'aromates ne sont pas d'excellents
conducteurs du fluide. C'est se lancer dans un tel vague que cette
supposition semble ^chapper k tout examen scientifique et ne devoir
pas 6tre prise au s^rieux.
N^anmoins, pour ne pas parattre rejeter cette supposition sans
examen, voyons la fa90n dont cette impression aurait dt se pro-
duire.
Je ne vols pas de milieu entre ces deux hypotheses : ou I'effet
sera produit au dehors en dedans, de Pext^neur k rint^rieur ; ou
de dedans en dehors^ de Tint^rieur k Fext^rieur.
Par la premiere supposition^ en admettant que les rayons flui<-
diques, ^lectriques ou autres inconnus, soient panis d^un point
perpendiculaire au plan form^ par le corps de Notre-Seigneur
envelopp^ dans le Suaire, ils auraient dd, si on s'en rapporte aux
effets naturels, donner d*abord, en traversant le Suaire, une
impression sur le corps, du treillis, du quadrillage de I'^toffe, et
ensuite traversant le corps donner sur Tautre partie del'dtoffe Tim-
pression de la silhouette du corps, mais sans en reproduire les
effets picturaux donnas par la photographie de M. Pia, effets pic-
turaux qui sont trop ceux que donne la main de Tartiste, qui pro-
c^de par masses, pour donner Teffet cherch^ et qui ne sont pas
ceux de Texactitucie donn^e par la photoffraphie ou tout autre
moyen de precision absolue. En tout cas, fl ny aurait eu qu'une
image: i® de la face antdrieure du corps^ si les rayons fluidiques
^taient partis de bas en haut, soit de la terre vers I'espace ; 2® de la
face post^rieure, si les rayons fluidiques ^talent dirig^s de haut en
bas, soit de I'espace k la terre.
Or, il y a deux images. C'est ce qui aurait dd arriver en admettant
que les rayons fluidiques soient partis de I'int^rieur k I'ext^rieur,
soit du corps lui-m6me au Suaire et ensuite dans Tespace. Mais
c^uels pourraient bien 6tre ces rayons? S'ils avaient laiss^ une
impression sur I'^toffe du Suaire, cette impression aurait produit
LE SUiURB DE TURIN. 53
un d^veloppement de Tiinage et non une silhouette, puisqu'il est k
croire que toutes les parties du corps auraient 6mis les mdmes
rayons et I'image aurait ^t^ la indme que celle qu'aurait produite
I'impression par contact du corps lui-mdme, soit une figure
Strange, trds 61argie, ce qui n'a pas eu lieu.
Inutile d'insister, je pense.
Reste une dernidre hypoth^se, que je crois s6rieuse. L'image du
Suaire a-t-elle pu fitre peinte positive, c'est-i-dire a-t-elle pu 6tre
peinte par un artiste habile du XIV* sidcle (le caract^re de i'image
photographique semblerait lui assigner cette 6poque) en couleurs
vraies, repr^sentant Timage de Notre-Seigneur, comme on Taurait
fait sur un tableau de l'6poque? et cette image alors positive a-t-elle
pu devenir negative, c'est-^-dire prendre, comme couleur, une
valeur telle, qu'elle ait pu impressionner en positif la plaque nega-
tive de M. Pia?
Je crois que c'est trds possible et mdme trds probable, et voici
pourquoi.
La couleur chair a pu se peindre en m6lan^eant du blanc, qui
est ff^n^ralement un oxyde de plomb ou de zinc, avec des rouges
(sulfure de mercure), des ocres, ou des terres naturelles color^es ;
les ombres ont pu fitre faites avec du noir, les mfimes ocres et terres
naturelles ou calcin^es, ou enfin du bitume.
Les parties claires, chairs ou autres, sont plus empfit^es et les
ombres sont peintes plus l^g^rement, pour leur donner de la pro-
fondeur. Peint dans ces conditions, qui sont les conditions habi-
tuelles, le saint Suaire a dH traverser des p^riodes critiques, comme
I'incendie de la Sainte-Chapelle en i532, par exemple, oil la cons-
titution de ses couleurs aurait ^t^ profond^ment modifi^e. Les
oxydes de plomb formant les clairs ont pu dtre intimement sulfur6s
par les rouges ou par des Emanations ext^rieures, comme on le
voit presque toujours dans les peintures anciennes ; les terres natu-
relles ont pu dtre EcaillEes par la chaleur ou le bitume br<il6, Eva-
porE etdisparaltre; tout cela est possible.
Alors que serait-il restE aprEs Tincendie ?
Une image oti les clairs et toutes les parties plus ou moins mE-
langEes de blanc seraient devenues proportionnellement noires, ou,
sans dtre compldtement noires, absolument antiphotogEniques ; et
des parties plus ou moins ddnudEes, oti I'Etoffe aurait conserve
une puissance photogEnique supErieure et d*une valeur photogEni-
que Egale k celie du fond oti le Suaire n'a pas 6x6 peint, comme le
montre TEpreuve photographique.
Cette difference photog^nique, certainement insensible k I'oeil le
plus exerce, doit 6tre relativement considerable pour la plaque
sensible.
Done rien de bien etonnant que cette peinture, comme toutes les
peintures de son epoque, ait pu, par telle ou telle circonstance, en
54 iruDB CMTiQuc Sim .
Tespace de trois on quatre si^cles^ se modifier au point de donner,
sur le n^gatif photographic|ue, avec les plaques ordinaires, k Pin-
yerte de ce qui se produit d'habitude, une image positive. Les
aoteurs photographiques, pour la plupart praticiens tr^s habiles,
nous disent tous que la reproduction des tableaux et surtout des
tableaux anciens, est sans contredit celle ^ui offre les plus grandes
difficult^s. On ne pern mtme pas savoir par Tinspeaion d'un
tableau, si la reproduction en pnotographie sera bonne ou mau-
vaise, sans avoir fait au pr^lable un essai ; car telle couleur qui k
Poeil paralt tr^s claire et brillante, pent ttre d'une nature peu pho-
tog^nique et devenir noire, tandis qu'une autre, dont Taspect est
beaucoup plus sombre, se traduira au contralre en une nuance
uds claire, donnant alors k la reproduction un aspect tout different
de celui du tableau.
Que sera-ce done lorsque le tableau ne donne pas d'image
appreciable k I'oeil ?
Je sais bien que diverses substances permettent de rendre les
plaques ordinaires sensibles k certains rayons normalement peu
pbotog^niques et mtme k tous les rayons, mais il eOt 6x6 n^cessaire
de faire plusieurs experiences avec aes plaques ainsi pr^par^es et
k travers des ^crans color^s de nuances approprides; la plaque
alors aurait probablement donn^ le n^^atif normal et la th^se de
M. Loth en serait tealement ddtruite, puis^ue dans ce cas le Suaire
ne serait pas lui-meme un n^^atif, mais bien un positif peint dans
les conditions habituelles, mais dont les valeurs color^es se seraient
renvers^es, comme nous I'avons vu tout k Theure.
Je me resume :
Toute la brochure de M. Loth est ^crite pour dire ceci :
De textes, point n'est besoin.
La photographie explique tout.
L'epreuve photographique obtenue par M. Pia aurait dH nices--
sairement dtre negative ; mais elle est positive, done le Suaire est
lui-mdme un n^gatif, done nous avons la certitude absolue qu'il
est authentique.
Inutile de nous arrfiter k I'absurdite de ce raisonnement, puisque
nous savons que :
I® On pent, quand on le veut ou k son insu, produire directe-
ment un positifa la cbambre noire.
3® On obtient souvent^ k cause de la couleur photog^nique des
objets photographies, un n^gatif qui donne I'impression d*un posi-
tif, comme la fleur jaune sur foncl bleu*
3^ Les valeurs pbotpg^niques d'une peinture peuvent, pour une
cause ou pour une autre, se renverser, sans que ce renversement
soit appreciable pour un oeil mtme experimente, et produire un
positit sur la plaque, alors que primitivement elles eussent produit
un negatif.
LE SUAIRB D« TURIN« 55
4^ En employant les preparations panchromatiques connues et
les ^crans colords n^cessaires, la plaque aurait pu donner un n6*
gatif.
Que conclurc de tout ceci ?
Que, contrairement aux assertions de M. Loth, la pbotographie
n'a rien prouv^, absolument rien, et que le parti le plus sage est,
quoi qu'il en dise, de s'en rapporter aux textes.
Vous me dites que plusieurs ^vfiques ont donn^ leur approbation
k M. Loth : je ne puis le croire.
Revenons aux textes ; les documents sont votre affaire, Monsieur
le chanoine, a vous de nous faire voir clair avec eux, apr^s quoi
toute pol^mique me semble inutile.
Je vous prie d*agr6er, etc.
Hippolyte Chopin.
Ginissieux^ 20 mai igoo.
Je n'ajouterai qu'un mot k cette dissertation apodictique : si, au
lieu de s'adresser k des photographes amateurs, comme son fils et
I'abbe Raboisson, M. Loth avait soumis le cas k des sp6cialistes et
k des praticiens, il aurait 6yit6 d'etre complice d'une immense
mystification, qui a fait des victimes dans Pdpiscopat lui-m£me et
dont les Sal^siens de don Bosco se sont faits — malgr^ mes aver-
tissements — les propagateurs dans les deux mondes, avec les
encouragements des autorit^s. J'ai soumis k Paris les conclusions
de M. Chopin k un physicien hors ligne, M. Gabriel Lippmann,
membre de I'Institut (acad^mie des sciences) : elles ont obtenu
son plein assentiment (lettre du 16 juin 1900) (i).
Au point de vue archdologique, le Christ du Suaire n'a ni le galbe
du !•' sifecle, ni le type oriental. Les proportions du corps ne
(i) M. Loth Youdra sans doute dire au public qui m'a sugg^r6 de prendre
M. lippmann comme arbitre. Acceptera-t-il son jugement ? P^riodiquement
on voit annoncer dans les feuilles religieuses, sous la rubrique : Clergi et
science, que M. Tabb^ X. ou M. le chanoine Y. ou le R. P. Z. vient d'etre cou-
ronn^ pour tel ouvrage par Tln^titut de... ou TAcad^mie de..., qui lui a attri-
bn^ le prix... Suit une note bien sentie sur les m^rites scientifiques du clerg6
s6culier ct r^gulier. Port bicn fusqu'ici. Mais qu'un mcmbrc dc cet Institut ou
de cette Acad6mie, competent d*ailleurs et bon catholique, s'inscrive en faux
contre une erreur populaire ou une fausse devotion, son t^moignage sera r6-
cus^ ou on Tenterrera dans le silence.
56 iTUDB CRITIQUB SUR
r^pondent pas k Viquation du beau^ trac6e par le g^nie de Michel-
Ange. C'est le type du XIV*si^cle, tel qu'on Tadmire dans le beau
Dieu de la cath^drale d'Amiens. Sous la main de quelques artis-
tes, Tart avait atteint k cette ^poque un haut degr6 de v6rit^ : les
musses de TEurope en offrent des t^moignages convaincants.
Comme contrdle k ma th^^e, j'ai demand^ qu*on soumette le
Suaire k une experience chimique. L'application de divers r^actifs
permettrait de faire ressortir soit des traces de peinture, soit des
taches de sang. On ne Pa pas tent^e et, je le crains, on ne la tentera
pas. On salt cependant que Mgr I'^vdque de Versailles s*est pr^t^
k pareille experience pour la Tunique d'Argenteuil. On sait aussi
que les experts choisis ne Tout pas conduite avec la precision que
permettent les d^couvertes de la chimie. Deux professeurs de la
facuhe de m^decine de Lyon Tont d^montre (i) : s'il leur parait
tem^raire de nier la presence du sang sur la Tunique, il ne Test
pas moins de Taffirmer jusqu'^ nouvelle et concluante experience.
C'est le sort des reliques fausses de s'appuyer sur une tradition
denude de preuves documentaires ou bas^e sur des pieces apocry-
phes. Le Suaire de Turin nous fait assister a un spectacle nouveau :
on maintient la verite de cette relique k I'encontre de tout une
serie de documents in(jiscutables et concordants. Ce comble est
digne de notre fin de sidcle, oti la piete consiste, moins dans la
pratique des vertus evangeiiques et des conseils de perfection, que
dans la cr^ance, le fideisme aux choses les plus merveilleuses, k
celles qui deroutent la raison en se pla^ant au-dessus d*elles, aux
saints les plus extraordinaires, les plus contestables : il y a dans
certain milieu une orientation constante vers le miracle (2).
(i) La Tunique d'Argenteuilf etude midico-legale sur son identiti^ par les
docteurs Flokbncs et Lacassagne ; Lyon et Paris, 1895, gr. in-80 de i f.-43 p.
(2) M. Tabbe Raboisson va nous donner le diapason auquel op pent monter
dans cet ordre d'idees. II examine « Thypoth^se de Tintervention de la main
humaine » dans la peinture du Suaire de Turin : « La possibility de Taction
humaine ici devrait etre repouss^e comme en opposition ayec les lois psy-
chologiques de FAme chr^tienne, telle que nous la montre I'histoire de tons
les si^cles. S41 est une chose ^tablie, c*est que le g^nie chr6tien fut toujours,
en tons les temps, absolument respectueux de Tauthenticitd, de la Y^rit6, de
rinviolabilit^ de ses reliques r^v^r^es. Quelle qu*ait £t6 parfois Tindiscr^-
LE SUAIRE DE TURIN. >7
A la fin de 1898, la plupart des |Ournaux et surtout des feuilles
religieuses annonc^rent la d^couverte par M. Boyer d'Agen, chez
un marchand de bric-lt-brac du Campo dei Fiori k Rome, d'une
mddaille en cuivre k l^gende h^bralque, reproduisant Teffigie de
N.-S. J^sus-Christ et remontant aux premiers sidcles : comme dans
le Suaire on aurait un portrait authentique. Un industriel s'em-
pressa d'en faire des reproductions en bronze et en argent. Mis en
6veil, les arch^ologues n*eurent point de peine k d^montrer que la
pi^ce n*^tait pas d'une insigne raret^ : elle aurait ^t^ model^e et
coulee par Jean-Antoine Rossi, sous le pontificat de saint Pie V, et
distribute aux juifs convertis (i). Ce sentiment n'a point, il est vrai,
converti tout le monde, surtout le ddcouvreur (2). La m^daille en
tion de la pi6t6 k entourer d'ornements excessifs... des vestiges... — voire k
en multiplier des copies, jamais les Chretiens n'en eussent toUr£ des altera-
tions ou des contrefa^ons, et la pi6t6 indiscrete qui eflt os^ tracer sur le
linceul de Fensevelissement une image du Sauveur aurait 6x6 honnie comme
la plus ttodraire, la plus abominable des impi^t^s, Timposturel d'autant
plus ez^rable qu*elle se fClt exerc^e sur I'objet le plus r6n€r€. Un tel atten-
tat eiit soulev^ des temp6tes dont le retentissement aurait traverse lea
sidles. » Cest h61as I le contraire de la v£rit£ historique. Dans cette mani-
festation de la figure divine, Tauteur voit « le dogme integral de la foi catho-
lique, dans son bloc, confirm6 avec le fait de la resurrection du Sauveur,
de I'union hjpostatique, de la diviniti de Notre-Seigneur J^sus-Christ », et
salue en terminant « Taube d*un Age Chretien ! » {La Viriti, 38 juil. 1899).
(i) H. DE La Touk, dans Bulletin de la Saciiti des antiquaires de France,
1898, p. 384-6; Dbsnotbrs, dans Bulletin de la Sociite archioL et histor. de
VOrlianais^ 1899, t. XII, p. 308-14; H. C, dans Revue Suisse de numisma-
tique^ 1899, t. VIII, p. 353-4, cf. IX, 340. — La Ga3[ette numismat, de Bruxelles
s'est demand^ (1899, t. Ill, 4* livr.) s'il n'y avait pas identity entre la m£-
daille en cuivre de M. Boyer et le medallion en plomb d^couvert k Sainte-
Livrade, qu'une note de M. G. Tholin a d6crit dans le meme Bull, de la Soc,
des antiq, de France (p. 375-81). II n'y a qu'H comparer le dessin de celui-ci
(p. 376-7) avec une reproduction de la m^daille romaine [JLa vie illustrie^
1898, t. I*, p. 83) pour constater la parfaite identity des deux 16gendes
h^braiques. II faut done qualifier de purement fantaislste la traduction faite
par M. Bruschon, doyen de la faculty de Montauban, qui a lu le nom d' t Isaie
Malar » et attribu6 k un protestant un medallion oti figure un christ k nimbe
crucif dre.
(3) BoTER d'Agxn, Notice sur la midaille dv Campo dei Fiori; Paris, [1899],
in-8* de 34 p. et 3 planches.
58 trVDE CRITIQUE 8UR
question avail d^jll attir^ I'attention des collectionneurs : en 1819,
le R^v. Walsh en fit I'objet d'une communication k I'acad^mie
royale d'Irlandeeten signals buit variantes. line neuvidme semble
reside inconnue : c'est pr6cis6ment le premier historiendu Suaire
de Turin qui la possddait. Avec sa cr6dulit^ habituelle, Pingone la
tenait pour tr^s anciennc [numismata antiquissima) (i). Ce petit
^v^nement numismatique me servira seulement k montrer avec
quel empressement on accepte comme authentique la moindre
decouverte qui se r^fdre auz origines de PEglise : ceuz qu'elle inte-
ressait k ce point de vue se sont bien gardes de faire part k leur
public des justes scrupules de la science. « Qui parum sciunt, pa-
rum dubitant », disait le jdsuite BoUand.
L'^tude que je termine offre un exemple sans lacunes de ce qu*on
appelle la vie d'une I6gende. Nous assistons k la fondation de la
colUgiale de Lirey et k celle de la Sainte-Chapelle de Chambery
sans qu'il soit question du Suaire. A Lirey, il est officiellement
tenu pour une reproduction par la peinture, mais par I'^clat dont
ils entourent son ostension, les chanoines laissent d^velopper dans
le vulgaire la cr^ance k son originalite. Les ^vdques et le pape rea-
gissent contre cette l^gende : aucune opposition n*est faite contre
la decision du Saint-Sidge. Revenu, k Toccasion des guerres, en
d^pdt entre les mains des h^ritiers du donateur, le Suaire est
transport^ au loin et offert k Tardente devotion de populations cr6-
dules. Enfin il devient ill^gitimement la propridte des dues de
Savoie et, un demi-si^cle aprds, personne ne r^voque en douteson
authenticity. Je crois avoir fait justice des proc^d^s mis en ceuvre,
de nos jours, pour la d^fendre. Aprds avoir pr^cis^ le minimum
de preuves qu'une insigne relique doit fournir, j'ai prouv6 que,
dans I'esp^ce, il n'y en a aucune. Appuy^es sur une s^rie de docu-
ments authentiques, mes conclusions n'auraient qu'une chance
d'etre fausses, c*est qu'il y ait eu, au d^but de Tapparition du
Suaire, complot contre la vdrite : or, rien n'autorise pareil soup9on.
(i) Reproduite p. 14 de son Sindon; elle semblerait identique k celle de
M. Boyer et au n* i de Walsh, n'^tait la tttt tourn^e k droite (peat-6tre par
erreur de gravure).
LE SUAIRE DE TURIN. Sq
La contradiction ne pouvait manquer de faire produire les docu-
ments qui auraient constat^ Tantiquitd dc la relique : il n'y en a
aucun. '
Ce n'est point sans de longues hesitations quo j'ai entrepris ct
que je poursuis, seul, cette campagne contre une errcur qui en auto-
rise d'autres. L'^rudition est « une mani^re trfes humble, et par Ik
mfime d'autant plus m^ritoire de servir la v^rit^, non enim possu-
inus aliquid adversus veritatem » (i). EUe « est peut-Stre la meil-
leure 6cole d'humilit^ et de respect par laquelle on puisse passer ;
ces deux vertus... sont Tame de loute recherche » (2). Transformer
Tauthenticite pr^tenduc d'une relique en v6rit6 dogmatique et se
borner, d^pourvu de tout document, k faire des objections, n'est
point 6crire de Thistoire ni servir la v6rit6. Suivant la parole d'un
saint : Christus non dixit: Ego sum traditio, sed dixit: Ego sum
Veritas (3).
On Ta dit depuis longtemps : les haines th^ologiques sont impla-
cables ; celles qui surgissent a Toccasion du culte des reliques ne le
sont pas moins. Accuser ses adversaires de manquer « de raison, de
logique et de critique », quand on en est soi-m6me m^diocrement
pourvu, est de la suffisance et non de Thumilit^. Les traditions
sont respectables quand elles sont vraies, mais c'est un devoir de
conscience de les d^poss^der de la place qu'elles ont usurp^e dans
Vkme du public quand elles sont fausses. Quoi qu'enait dit S. E. le
cardinal de Turin, il n'y a rien de commun entre mon travail ct
« le intemperanze della critica moderna ». Ce serait une grandevic-
toire que la critique historique, telle que Tout faite Mabillon et ses
successeurs, vint reprendre, « tranquille, r^solue, bien accueillie de
tons », la stalle que la cr^dulite s'est appropri^e dans le choeur de
TEglise (4). Ne d^sesp^rons pas d'assister un jour a ce triomphe et,
ftit-il reserve a d'autres de le voir, ne regrettons pas nos efforts
pour le rendre prochain : Scribantur hcec in generatione altera,
(i) Sabatier (Paul), Fratris Franc, Bartholi de Assisio Tractatus de induU
gentia S. Maries de Portiuncula; 1900, p. ix.
(3) Ibid,, p. X.
(3) Ibid., p. XXX.
(4) Jbid.f p. xxxj.
'M^^lei'
APPENDICE
4 aoOt 1389.
KAR0LU8, Dei gracia Francorum rex, baillivo Trcccnsi aut ejus
locuntenenti, salutem. Curie nostre Parlatnenti die date pre-
scncium ej^oni fecit dilectus et fidelis consiliarius noster, Trecensis
cpiscopus, quod in ecclesia coUegiata Beate Marie de Lireyo, in
Campania, diocesis Trecen., erat quidem^ pannus manufactus et in
figuram vel similitudinem ac commemoracionem sacri Sudarii, in
quo preciosissimum corpus Domini nostri Jhesus Xpisti salvatoris,
post ejus sanctissimam passionem involutum fuerat, artificialiter de-
pictus, et quod ad predictam ecclesiam pro dicto panno adorando
populares Campanie et patriarum circumvicinarum , ydolatriam
committere non verentes, omni die affluebant habundanter; necnon
ct quod dilectus et fidelis noster Gaufridus de Charniaco, miles, vir-
tute cujusdam salve gardie nostre se manuteneri et conservari fecerat
in possessione et saisina exhibendi aut exhiberi faciendi dictum
pannum dictis popularibus ac ceteris ibidem profiscici volentibus,
cisdem inhibendo, sub certis magnis penis nobis applicandis, ne
dictum militem in premissis perturbarent aut impedirent quoquo-
modo. Quo facto, dictus mile^ predictum explectum eidem episcopo
in personam sui oiScialis notificari fecerat; et deinde predictum
pannum cum torcheis accensis et presbiteris indumentis sacerdotali-
bus inductis, ac si esset verum Xpisti Sudarium, omnibus et singulis
illuc accedentibus et propter solennitatem pretactam erronee verum
esse Xpisti Sudarium credentibus ostendi fecerat ac ostendere non
cessabat, in sancte matris Ecclesie ac fidei orthodoxe iliusionem et
irreverenciam, animarum eciam ibidem affluencium periculum ac
ydolatriam commictendo, ut dicebat dictus episcopus, supplicans
sibi de remedio provideri. Quocirca nos, animarum talium persona-
rum periculis obviare cupientes, vobis commictimus et mandamus,
a. Lir$ quidam. a
II iTUDB CRITIQUE BUR
quatinus dictum pannura, ubicumque ilium reperire poteritis, ad
manum nostram realitcr et de facto ponatis, et sub eadem manu
nostra in altera ecclesiarum ville Trecensis aut alibi in certo loco
tuto et honesto custodiri et conservari faciatis, quousque per nos
super hoc fuerit aliud ordinatum, et tali persone seu talibus personis
ejusdem panni gardiam seu custodiam commictatis, que de ipso
respondere ac ilium restituere teneatur seu teneantur, ubi ac dum et
quociens dicta curia hoc duxerit ordinandum. Si vero super hoc
debatum oriatur, dicto panno in et sub dicta manu nostra posito ct
in eadem remanente, partibus ipsis auditis exhibeatis justicie com-
plementum ; ab omnibus autem justiciariis et subditis nostris vobis
ac deputandis a vobis in hac parte pareri volumus et intendi. Datum
Parisius, in parlamento nostro, quarta die mensis augusti, anno
Domini millesimo trecentesimo ottogesimo nono et regni nostri nono.
Per cameram, JouvENCE. — Lecta... — Au revers : Ponant, Troyes.
Paris, Biblioth. Nation., Collection de Champagne, v. 164, f* 138, original
parch , le sceau pendant sur queue coupi ; au do6 : « Lictere regie tangentes
Sudarium de Lyreyo, d*— XIIJ ». — Ibid., Collection De Camps, v. 134, £•
333 (14.7), copie de 161 6.
B
15 aoOt 1389.
ATOus ceulx qui ces presentes lectres verront et orront, Jehan de
Venderesse, sire de Marfontainnes, chevalier, bailli de Troyes,
salut. Saichent tuit que le dimenche xv« jour du mois d*aoust, jour
de feste de TAssumpcion Nostre Dame, Tan mil CCC quatre vins ct
neuf, nous, a la requeste de reverant pere en Dieu mons. Tevesque
de Troyes et par vertu de certainnes lectres royaulx a nous adress^e
et presentees par le dit reverant pere, pass6es par la court de Parle-
ment, dont la teneur s'ensuit : « Karolus... {Append.A).,, nono ». Sic
signatis: « Per cameram, Jouvence ». Nous transportasmes es villes
et eglise collegial de Nostre Dame de Lirey, ou diocese de Troyes,
et illuec trouvasmes ou jub6 de la dite eglise le doyan et aucuns
chanoinnes d'icelle, estansen ycellui jub6; lesquelx se ordonnoient,
si comme il semhloit, pour monstrer au peuple qui estoit dehors la
d. eglise le drap dessus dit, et nous demanderent pour quoy nous
estions monstez audit lieu : aux quelx nous respondismes que c estoit
pour veoir ledit drap; et ycilz nous dirent, tant que nous feussions
illuec, ilz ne montreroient point ledit drap, mais senous voulions aler
LE SUAIRE DE TURIN. Ill
dehors avec ledit peuple, nous le verrions assez tost. Et pour ce que
nous estions informez par aucuns que ledit drap estoit audit reli-
quiaire et que nous veismes les torches que on vouloit alumer pour
le monstrer, si comme on disoit, et que le peuple dessus dit se
actendoit de incontinent le veoir, et que par la situacion du lieu, se
nous feussions yssus et alez dehors, en peust avoir destournd ledit
drap, nous ne voussismes partir dudit lieu. Et lors presens lesdiz
doyan et chanoinnes et auxin pluseurs autres personnes, Huguenin
de Nantuse soy portent procureur dud. mons. Tevesque, fond6 de
procuracion dont il nous apparut prumptement, nous presenta dere-
chief les dites lectres dessus transcriptes et nousrequist instamment
Texecucion et accomplissement d'icelles par pluseurs foiz ; par vertu
des quelles lectres dessus transcriptes nous feismes commandement
de par le Roy nostres. audit doyan, qu'il nous baillast et delivrast le
drap qui estoit en ycelle eglise et dont les dites lectres font mencion.
Le quel doyan nous respondist qu*il n*estoit pas en sa poissance de
nous baillier le dit drap ; et pour ce que^ au debout dudit jub6, a ung
petit retrait que Ten appelloit ung tresour, fermant a pluseurs clefs,
au quel lieu en a acoustumd de mectre les reliques, vestemens,
aournemens et livres de la dite eglise, ou quel lieu le procureur de
mon dit seigneur Tevesque disoit et afifermoit estre ledit drap, et le
dit doyan opposoit le contraire, disant que nous gardissiens que
nous ferions et que dedans le dit retrait avoit pluseurs reliques, les
vestemens et aournemens, livres, argent et pluseurs autres choses
appartenans a la dite eglise, du quel tresour, qui estoit fermez de
pluseurs clefs comme dit est, ycilz doyans ne avoit que une clef tant
seulement et pour ce ne le pouoit ouvrir ou desfermer ; le dit procu-
reur, ou nom que dessus, nous, requist par pluseurs fois que ledit
tresour fust desferm6, rompu et brisi6 a force, et disoit que nous le
deviens ainsin faire, et le dit doyan d*autre part disent le contraire
et que ledit drap n y estoit point, et ledit procureur ades au con-
traire. Pour le debat des quelles parties et auxin qu'il estoit midi et
temps de disner, pour doubte que, pendent le temps que nous
seriens au diner, le dit drap ne fust par lesd. doyan et chanoines
destourn6 et port6 hors, aux requestes dudit procureur nous seellas-
mes Puis dudit tresour de nostre seel, et avec ce furent par nous
commis deux sergens royaulx pour garder que ledit seel ne fust
rompu, c'est assavoir Adenot d*Aubruissel et Jehan de Beaune, qui
pendent la dite heure de disner demourerent en la dite eglise pour
IV iTUDB CRITIQUE 8UR
garder ledit huis de nostre comtndement et a la requeste dudit
procureur. Et apris ce, environ heure de vespres, ledit doyan nous
requist instamment par pluseurs foiz qu*il nous pleust a desseeller
ledit tresour, pour ordonner et mectre en sauf, comme il appartient,
les dites reliques, vestemens et autres choses de ladite eglise,
et auxin pour avoir de Targent et autres besoingnes dont ilz avoient
grant besoing et necessity pour la dite eglise, et que le dit drap n'y
estoit point ; avec ce que ycilz doyan et chanoinnes estoient en plu-
seurs appellacions au Saint Siege de Rome a Tencontre dudit mons.
Tevesque pour ceste matiere, si comme il disoit, en nous requerent
ades Touverture estre faicte, a quoy le procureur dudit mons. Teves-
que s*opposa tousjours au contraire, pour et ou nom dudit mons.
l*evesque ; et disoit que point ne devpns oster notre seel du dit
tresour se !e dit doyan ne le desfermoit et ouvroit a plain, le dit
doyan affermant que desfermer ne le pourroit tout seul, car il
n*avoit tant seulement que une clef du dit tresour et les gens du
seigneur de Lirey avoient Tautre, sans lesquelx il ne pouoit des-
fermer ne le pourroit tout seul. Nous li ofifrismes et respondismes
que, s'il vouloit envoier querir ou faire que Ten eost Tautre clef,
nous feriens attendre deux sergens pour garder ledit seel jusques
a tant que Taustre clef fust apporti&e, et lors nous osteriens nostre
seel du dit huis ; a quoy le dit doyan nous respondi qu il ne savoit
quant ne a queie heure devoit venir cellui qui avoit la garde de
Tautre clef pour le dit seigneur de Lirey, et requeroit ades que
ledit seel fust ostez. Neantmoins pour le debat des parties nous
deismes que nous auriens nostre advis jusques au lendemain ; et
pour ce que ycilz doyans se santoit estre grev6, si comme il disoit,
de ce que le dit tresour estoit et demouroit seell6 et que nous li
avions dit par avant que par contreinte nous mettriens le temporel
de Teglise en la main du Roy nostres., se il ne nous bailloit ledit
drap, ycilz doyan appella de nous et auxin firent les chanoinnes
d'icelle eglise qui estoient present tout conjointement avec le dit
doyan, pour et ou nom de doyan et chanoines de la dite eglise ; pour
occasion de la quelle appellacion ainsin interject6e, nous ne proce-
dasmes plus avant en ce fait, mats surseismes du tout en tel estat.
Donn6 soubz le contreseel dudit bailliage, Tanet le jourdessus diz,
Paris, Bibl. Nat., Coll. de Champagne, v. 154, f« i3o, original parch., a eu
sceau sur repli ; au dos : « Pour le fail dou Suaire. — BB b (Append. D). —
Ibid., Coll. De Camps, v. 134, f* 333 (147}, copie de 16 16.
LE SUAIRE DE TURIN. T
c
15 ao&t 1389.
ATOUS cculs qui ces presentes lectres vcrront, Jehan dc Vcndc-
resse, seigneur de Marfontainnes, chevalier, bailii de Troyes et
commissaire du Roy nostre seigneur en ceste partie, salut. Savoir
faisons que, avecques Texploit et choses contenues en nos autres
lectres esquelles ces presentes sont fich6es, nous par vertu des
lectres royaulx transcriptes en nos dictes autres lectres, le jour de la
date de ces presentes, meismes verbaulment en la main du Roy
nostredit seigneur, le drap dont lesdictes lectres font mencion, en la
presence de messire Nicole Martin, prebtre, doian de Teglise de
Lirey, mess. Jehan Boygncy, mess. Jaque Colardot et mess. Thie-
baut Goutey, eulx disens chanoines ou chappellains et vicaires de
ladicte eglise de Lirey. Lesquelles choses nous par inadvertance
avions obliges a mectre en nos dites lectres. Et ce nous certifions a
tous a qui ce pourroit toucher par ces presentes. Lesquelles en
tesmoin de ce nous avons seell6es du contreseel dudit bailliage.
Donne le xv* jour d'aoust, Tan mil trois cens quatrevins et neuf.
Paris, Bibl. Nat. Coll. de Champagne, v. 154, f* 139, original parcb., sceau
sur repli disparu.—- Ibid., Coll. De Camps, v. 134, f* 334 (148) v*, copie de
1616.
Item littera baillivi Trecensis, in qua inseritur commissio a curia
Parlamenti emanata, directa baillivo, in vim cujus dictus baillivus pre-
cepit decano et canonicis de Lireyo sibi tradi Sudarium sive repre-
sentationem Domini nostri Jhesu Christi ad ipsum transferendum
Trecis, prout mandabatur ; a quo quidem expleto dicti decanus et
capitulum appellaverunt ad dictam curiam Parlamenti. Cui littere
infixe sunt tres alie littere, negocium dicti expleti continentes. Quot-
tata BB.
Archives de TAube, G. 15, f* 19 ▼•-30 r*.
B
5 septembre 1389.
JEHAN de Venderesse, sire de Marfontainnes, chevalier, bailly de
Troyes, au premier sergent du Roy nostre sire dudit baillage sur
ce requis, salut. A la requeste de reverend pere en Dieu, M*^ Tevesque
VI iTUDE CRITIQUE 8UR
de TroyeSy nous vous mandons que le conteuu en nos autres lettres,
esquelles ces presentes sont fich^es, vous S]gnifi68 et faictes scavoir a
messire Nicole Martin, prebtre, doyen de Teglise de Lirey, messire
Jehan Boygney, messire Jacques Colardot et messire Thiebault
Goutey, chanoines ou vicaires et chappellains de ladicte eglise, et a
tous autres dont vous serez requis de par ledit reverend, affin qu*ii
n*en puissent ou doient pretendre ignorance, en faisent relation, si
mestier est, de ce que faict en aurez ; de ce faire vous donnons
pouvoir, mandons et commandons a tous les subjectz dudit ballia^e
que a vous obeissent en ce faisant. Donn6 soubzle contrescel dudict
balliage, le v* jour de septembre, Tan mil trois cens quatrevingt et
neuf.
Paris, Bibl. Nat., Coll. De Camps, v. 134, f* 234(148) v*, copie de 1616.
F
5 septembre 1389.
A NOBLE homme et sage, mon trescher seigneur mons' le bailiy
de Troyes, Jehan de Beaune, sergent du Roy nostre sire en la
prevost6 de Troyes, a le vostre honneur, service et toute obeissance.
Mon trescher seigneur, plaise vous scavoir que, par vertu de vos
lectres de commission, esquelles ceste moye relacion est annex6e, et
a requeste de reverend pere en Dieu mons' Tevesque de Troyes
nomm6 en icelle, je le jourd*uy, en la ville de Lirey, la justice de ce
lieu appell6e et presente, ay signifi6 a messire Nicole Martia,
prebtre, doyen de Teglise dudit Lirey, messire Jacques Colardot et
messire Thiebault Goutey, nommis en vosdictes lectres, a leurs
personnes le contenu en vos autres lectres, esquelles vosdites
lectres de commission sont fich6es, lesquelles je leur ay exib6es
et monstr6es, et a eulx expose le contenu en icelles faisent
mention que le drap dont elles parlent estoit par vous mis verbaul-
ment en la main du Roy nostre sire ; et pareillement ay ce signifii en
la fort maison dudit Lirey a noble homme Monsieur Geufroy de
Chamy, chevalier, seigneur dudit Lirey, a la personne de Jacquemon
dc Montfort, escuier et soy disant familier dudit chevalier, et luy ay
command^ de le faire scavoir audit chevalier, ladicte justice presente
a ce. Et ce je vous certifie par ceste moye relation, donn6e soubs
mon seel, le cinquiesme jour de septembre, Tan mil trois cens quatre
vingt neuf.
Paris, Bibl. Nat., Coll. De Camps, v. 124, f*.335 (149), copie de 1616.
LB SUiUM DB TURIN. VII
a
Fin 1 389.
Veritas panni db Lireyo, qui alias et Dtu est
OSTENSUS FUERAT ET DE NOVO ITERUM FUIT OSTENSUS,
SUPER QUO INTENOO SCRIBERE DOMINO NOSTRO PaPE,
IN FORMA SUBSCRIPTA ET QUAM BREVIUS POTERO.
SEiPSUM ad devota pedum oscula beatorum, cum omni prompti-
tudine debite servitutis. Beatissimc pater, quia majores cause,
quibus presertim de pericuio agitur animarum et quibus propter
potenciam aliquorum non potest per inferiores commode provided,
sunt ad Sedem sanctam apostolicam referende, cujus provisione
provida cuncta salubriter disponantur, ad Dei laudem et subditorum
salutem. Eapropter factum quoddam periculosum exemploque per-
niciosum, quod nuper contigit in Treccn&i diocesi, duxi v[estre]
S[anctitatis] auribus intimandum, ut ejusdem S[anctitatis] providen-
cia, que subditorum^ commodis invigilare eorumque periculis obviare
solicite non desinit, ad Dei laudem, honorem Ecclesieet subditorum
salutem celeri remedio succurratur. Siquidem, beat, p., dudum in
diocesi Trecen., cujusdam ecclesie collegiate decanus, videlicet de
Lireyo, dolose et inique, avaricie et^ cupiditatis igne succensus, non
ad tinem devocionis, sed questus, quemdam pannum artificiose depic-
tum in sua ecclesia procuravit habere, in quo subtili modo depicta
erat duplex^ effigies unius hominis, videlicet tarn a parte anteriori
quam posteriori, falso asserens et confingens iilud esse proprium
Sudarium quo Salvator noster Jhesus Xpistus in sepulcro fuerat
involutus, et in quo effigies tota ipsius Salvatoris, cum vulneribus
que pertulit, remanserat sic impressa ; quod fuit, nedum per regnum
Francie, sed quasi per totum mundum adeo divulgatum, quod de
universis mundi partibus populi confluebant. Et ad ipsos alliciendos
populos, ut subtili ingenio aurum extorqueretur ab eis, inibi con-
fingebantur^ miracula mendaciter certis hominibus ad hoc precio
conductis, qui se sanari fingebant in ostensione dicti Sudani, quod
Domini Sudarium ab omnibus credebatur. Quod aitendens bo[ne]
me[morie] dom. Henricus de Pictavia, tunc Trecensis episcopus,
multorum prudentum persuasione pulsatus, prout eciam sibi ex
a. B subditos. — 6. B ac. ^ c, B dupplex. — d, B configebantur.
VllI AtUDB critique 8UR
officio poteslatis ordinarie incombebat, solicite investigare curavit
hujus negocii veritatem : multis theologis et aliis prudentibus viris
asserentibus quod hoc revera dominicum Sudarium esse non poterat,
quod ipsius Salvatoris effigiem habebat impressam, cum de bujus-
modi impressione sanctum euvangelium nuUam facial mencionem,
cum tamen, si vcrum esset, non est verisimile quod fuisset per sanc-
tos euvangelistas taciturn vel obmissum,ncc usque ad hoc tempos
celatum vel occultatum. Et tandem, solerti diligencia precedente et
informacione super hoc facta, finaliter repent fraudem et quomodo
pannus ilie artificialiter depictus fuerat, et probatum fuit eciam per
artificem qui ilium depinxerat, ipsum humano ope factum, non
miraculose confectum vel concessum. Et propterea habito cum
multis prudentibus tam theologis quam jurisperitis maturo consilio,
quod hoc nee sic dimitterre nee dissimulare debebat vel poterat,
cepit ex officio procedere contra decanum predictum et suos com-
plices, ad extirpandum errorem predictum. Qui videntes detectam
ipsorum maliciam, dictum pannum occultarunt et suppresserunt,
ut per ipsum ordinarium reperiri non posset ; et depost ipsum
semper tenuerunt suppressum per xxxiiij*' • annos vel circa, usque
ad presentem annum. Nunc autem, fraude premeditata, ad finem
questus modemus decanus dicte ecclesie, ut dicitur, suggessit dom.
Gaufrido de Charny, militi, domino temporali loci, ut procuraret
diet, pannum in ecclesia predicta reponi, ut peregrinacione rcnova-
ta, dicta ecclesia de proventibus ditaretur. Qui miles, ad dicti decani
suggestionem, sui predecessoris vestigia imitantis, accessit ad dom.
cardinalem de Thureyo, in partibus Francic v. S. nuncium et
legatum, et tacito quod dictus pannus tempore supradicto assere-
batur fore Sudarium Salvatoris, et quod effigiem Salvatoris haberet
impressam, et quod ordinarius prosecutus fuerat hujusmodi factum,
tendens ad extirpacionem erroris inde exorti, et quod metu ipsius
ordinarii fuerat predictus pannus suppressus, ymo extra diocesim,
ut dicitur, deportatus ; prefato dno cardinal! suggessit diet, pannum
fore Sudani representacionem seu figuram, ad quam multi devocione
ducebantur, qui alias in dicta ecclesia fuerat in veneracione multa
habitus et cum devocione maxima frequentatus, scd propter gucrras
regni et alias causas, et^ de mandato ordinarii loci fuerat diu in
custodia tutiori positus et servatus ; supplicans ut dictam ^ Sudarii
representacionem seu figuram, ad quam multi ex devotione ferc-
e. B triginta quatuor. — f. B ac. — g. B dicti.
LE SUAIRE DE TURIN. IX
bantur et earn videre cupiebant, in dicta ecclesia sibi liceret ponere,
ut ibi posset populo exhiberi et ostendi et a fidelibus venerari. Qui
dom. cardinalis, non in totum annuens supplicacioni, sed verisimi-
liter ex certo proposito et quo ad hoc prudenter concessit suppli-
canti apostolica auctoritate quod, non petita licencia ab ordinario
loci vel quocumque alio, hujusmodi representationem seu figuram
Sudani dominici in dicta ecclesia vcl alibi in loco honesto ponere
vel collocare valeret. Quarum licterarum pretextu dictus pannus
fuit in dicta ecclesia populo exhibitus et ostensus in solennitatibus
et festis frequenter et alias manifeste, cum solennitate maxima et
majori quam ibi ostendatur Corpus Domini nostri Jhesu Xpisti,
videlicet duobus sacerdotibus albis indutis cum stolis et manipulis,
quamplurimum reverenter, accensis torchiis in loco eminenti et
alto ad hoc solum et specialiter fabricato ; et licet in publico non
asseratur esse verum Xpisti Sudarium, in occulto tamen asseritur et
predicatur, et sic a multis creditur,.ex eo maxime quod alias, ut
premissum est, Xpisti verum Sudarium dicebatur, et quodam modo
loquendi conficto nunc in dicta ecclesia, non Sudarium, sed Sanc-
tuarium nuneupatur, quod idem sonat in auribus populi talia minime
discementis ; confluitque inibi multitudo populi, quotiens ostenditur
vel ostendi speratur, credentis, ymo verius errantis, quod sit verum
Sudarium ; curritque £ama in populo quod sit per Sedem apos-
tolicam approbatum per licteras prefati dom. cardinalis. Porro,
p[ater] be[atissi]me, ego videns tantum scandalum in populo reno-
vatum et errorem hujusmodi succrescere in periculum et deceptionem
animarum, attendens quod decanus dicte ecclesie non erat terminis
licterarum dom. cardinalis contentus, que tamen per veri suppres*
sionem et falsi suggestionem fuerant^ impetratte, ut est premissum,
volens occurrere pro posse periculis animarum et errorem hujusmodi
detestandum a grege michi credito tollere et extirpare, prchabito
eciam super hoc multorum prudentum maturo consilio, inhibui
dicto decano, sub pena excommunicacionis eo ipso late, ne dictum
pannum populo exhiberet vel * ostenderet donee super hoc esset
aliter ordinatum ; sed ipse inobediens ad appellacionem convolans,
contra inhibicionem veniens, ut prius perseveravit ostendendo ; ipse
eciam miles, negocium hujusmodi sustinens et defendens, quadam
die solenni propriis manibus dictum pannum tenens et populo
h. B faerunr.
X irUDE CRITIQUB 8UR
publice ostendens cum solennitate supradicta, per uoam salvam-
gardiam regis se fecit teneri in possessione et saisina ipsum pannum
ostendendi et ipsam saivamgardiam michi significari : sicque, tarn
sub umbra appeilacionis quam dicte salvegardie, error iste defen-
ditur, tenetur et invalescit, ia contemptum Ecclesie et populi scan-
datum ac periculum animarum, quibus non possum, premissrs
obstantibus, providere, ymo in opprobrium prefati predecessoris
mei, suo tempore factum prosequcntis, et meum, qui eciam pro
modulo providere circa hoc consulte desidero, hoc proth dolor!
sustinetur et defenditur ; quinynto sustinentes hoc seminar! faciunt
in populo quod, tum propter invidiam, tum propter cupiditatem et
avariciam et ut ipsum pannum habeam, hoc prosequor, prout impo-
situm fuit alias prefato predecessori meo ; nonnulis eciam dicentibus
quod nimis tepide in hoc procedo et quod magna' dcrisio hoc sit
tolerari. Et licet cum instancia et humilitate diet, militem sommari
fecerim et requiri, ut ad tempus cessaret et supersederet ab osten-
sione dicti panni, donee v. S. super hoc consuleretur et ordinaret,
ipse hoc facere non curavit, quinymo me ignorante eidem S. fecit
exponi id quod exposuerat dicto dom. cardinali, quodque licteris
ipsius dom. cardinalis obtemperare recusans nee appellacionibus
deferens, procedcre non cessabam ad inhibiciones et excommunica-
cionis sentencias contra ostendentes ipsum pannum ac contra popu-
los locum ilium frequentantes ad diet, pannum venerandum. Sed,
salva reverencia exponentis, quia procedendo contra ostendentes
modo premisso ilium pannum et ipsum venerantes, nullatenus
attemptavi contra licteras quamquam surrepticias^ prefati dom. car-
dinalis, quibus minime concesserat quod posset populo ostendi vel
eciam venerari, sed dumtaxat quod posset in dicta ecclesia vel alibi
in loco honesto reponi vel collocari. Et quia non contenti conces-
sione prefati dom. cardinalis, idcirco contra eos ordinario jure pro-
cess!, non sine magno consilio, prout michi incombit ex officio,
ad toUendum scandalum et errorem hujusmodi extirpandum, credens
non sine grandi culpa fore si conniventibus oculis talia pertransirem;
sed et michi prospiciens in hoc facto, semper consilio fretus pruden-
tum, ad auxilium brachii secularis neccessitatus tamen recurrens,
potissime attento quod ipse miles inceperat causam ponere in
manu secularis potestatis, sc, ut premissum est, faciendo teneri
in possessione et saisina ostendendi diet, pannum et populo exhi-
t. B surrectidaft.
LE 8UAIRE DE TURIN. XI
bendi per dictam salvamgardiam regis, quod videtur absurdum
satis<^, ipsum pannum in manu regis ponendum procuravi, semper
ad ilium finem tendencjio, ut saltern dum facti seriem ad v. S. noti-
ciam deducerem, interim supersederetur ab ostensione predicta,
quod leniter et sine difiScuItate quacumque obtinui cum tota curia
Parlamenti regis, de supersticiosa invencione hujusmodi Sudarii et
ejus abusu, ac de errore et scandalo predictis sit pleniter informata.
Miranturque universi scientes merita facti, quod impedior per
Ecclesiam in prosecucione hujusmodi, qui deberem viriliteradjuvari,
ymo puniri graviter si in hoc * essem negligens vel remissus.
Sed tamen miles prefatus, me preveniens et ut premictitur que
superius premissa sunt exprimens, tandem a v. S. licteras repor-
tavit quibus narratur in effectu, licteris prefati dom. cardinalis et ex
certa sciencia confirmatis, dicto militi conceditur quod non obstan-
tibus inhibicionibus et appellacionibus quibuscumque, liceat diet,
pannum populo exhiberi et ostendi et a fidelibus venerari, michi
perpetuum silentium imponendo, prout fertur, quia ipsarum lictera-
rum copiam habere nequivi : cum tamen michi precipiatur a canone
ne variis figmentis aut documentis falsis paciar aliquem decipi propter
questum, sed certus quod per falsi suggestionem et veri suppressio-
nem impetrate fuerunt, et quod alias non fuissent tales obtente, me
non vocato nee audito, maxime cum pro me debeat esse presumpcio
quod sine causa negocium hujusmodi impedire non vellem aut ali-
quem in devocione discreta et bene ordinata aliqualiter perturbare.
Confido firmiter quod S. v. equanimiter tolerabit si dicte ostensioni
resisto, premissis attentis, donee ab ipsa S. v. veritate facti plenius
informata aliud habeam in mandatis. Dignetur igitur, p. b°^', S. v.
sue consideracionis aciem ad premissa dirigere et circa ea taliter
providere, quod error et scandalum hujusmodi et supersticio detcs-
tanda tam ex facto quam ex modo ejusdem S. providencia radicitus
extirpentur, ita videlicet quod pannus ille nee pro Sudario nee pro
sanctuario, nee pro representacione vel figura Sudarii dominici, cum
Sudarium dominicum tale non fuerit, aut alio quovis exquisito modo
vel nomine exhibeatur populo aut eciam veneretur ; sed in signum
dampnate supersticionis publice condampnetur*, licteris surrepticiis^
de quibus premittitur revocatis, ymo nUUis verius declaratis, ne forte
dicant emuli persecutores Ecclesie et invidi detractores contra regi-
men Ecclesie irreverenter obloquentcs, quod promptius remedium
;*. B satis absurdum. — k. B conbmatur. — LB subrepticiis.
XU irUOB CRITIQUE SUR
«t 8tlubriu8 reperitur in foro secular! quam"*eccie8iMttco adversus
•candala et errores ^. Paratum enim me offero hie in promptu per
famam publicam et alias de omnibus supra' per me pretensis suffi-
cienter informare et indubitanter ad eicusacionem meam et ezone-
racionem consciencie circa factum hujusmodi quod michi est valde
cordi, necnon ad meam querimoniamP pro modulo proponendam
in propria ad ipsius S. v. presentiam personaliter accessissem, si
valitudo corporis permisisset, arbitrans quod non plene aut satis
sufficienter possum scriptis ezprimere gravitatem scandali, oppro-
brium Ecclesie et jurisdictionts ecclesiastice, ac periculum anima-
rum : facto tamen quod possum, ut merear excusari principaliter
apud Deum, relinquens residuum disposicioni v. S. prefate, quam
feliciter et longeve conservare dignetur Omnipotens utilem et nec-
cessariam ad regimen Ecclesie sue sancte. Scriptum
Paris, Biblioth. Nation., Collection de Champagne, ▼. 154,^* i38, minute
originale sur papier ; au dos : c Copia licterarum domino nostro pape per
episcopum Trecentem transmissarum, super facto Sudarit de Lyreyo, — F
▼• » (Append. J). (Af. — Ibid., mdme vol., f 137, mise au net de la prdc^d.
sur papier, avec titre (de la main de r^vdque ?) ; au dos : « Magistro Guillelmo
Fulconis. — De panno sepulture dominice — NNN t (Append, i). {B), — Ibid.,
Coll. De Camps, ▼. 134, f** 239-33 (143-6), copie du XVI* s.
H
Fin 1389.
Extrait que fay fait d'unepi^ce laiint sans datU
qui est(i) une lettre ou requeste d'un iveque de Troyes (a) i un pape.
IL dit que les grandes affaires qui concement le p6ril du salut des
&mes doivent estre port^es au St-Siige, que c*est ce qui Tobiige
d'informer sa Saintetd d*un fait arriv6 depuis peu dans le dioctee de
Troyes et dans T^glise coll^giale de Lyrey, scavoir que le doyen de
cette 6glise « dolose et inique, avariti» et cupiditatis igne succensus,
non ad finem devotionis, sed quacstus, quemdam pannum artificiose
depictum in sua ecclesia procuravit, in quo subtili modo depicta erat
duplex effigies unius hominis, videlicet tarn a parte anteriori quam
m. B ajoute in. — n. Dans A tout U passage Ne forte a iti cancelU et on a
mis au^dessus Va-cat ; en U relisant Vivique ne Vaura pas trouvi asset respectueux
vis-^'Vis du pape. — 0. B omet. —p.Bq.m.
(i) On a rayi paroit estre.
(a) On a rayi ou aatre eccldsiastiqae.
LE SUAIRE DE TURIN. XIII
]>osterion, falso asscrens et confingens illud esse proprium Sudarium
quo Salvator noster Jesus Christus in sepulcro fuerat involutuSy et
in quo e£Bgies tota ipsius Salvatoris quae pertulit, remanserat sic
impressa » ; ce qui avoit 6t6 divulg[u]6, non seulement dans le
royaume de France, mais encore dans touttes les parties du monde,
et y avoit attird un grand concours de peuple, < et ad ipsos allicien-
dos populos et ut subtili ingenio aurum eitorqueretur ab eis, inibi
confingebantur miracula mendaciter certis hominibus ad hoc pretio
conductis, qui se sanari fingebant in ostensione dicti Sudarii ». II
ajoute que ut ayant excitd Tattention de Henry de Poitiers (i),
alors 6v6que de Troyes, il consulta plusieurs thdologiens, qui d6ci*
dirent que ce ne pouvoit estre Timpression de Teffigie du Sauveur,
puisque aucun des Evangdlistes n^avoit fait mention de cette efiSgie,
ce qails n*auroient pas omis et ce qui ne seroit pas restd jusqu'alors
inconnu aux 6vdques ; qu^ensuite cet 6v6que ayant fait faire touttes
les informations ndcessaires, en avoit decouvert la fraude « et quo-
modo pannus ille artificialiter depictus fuerat, et probatum fuit etiam
per artificem qui ilium depinxerat. » Ce qui ayant obligd le meme
6v£que de procdder contre le doyen et ses complices, ils avoient
cacb6 ce Suaire, affin qu*on ne put le trouvec ; en sorte qu*il avoit
6t6 suprimd pendant 34 ans, mais que dans Tannde dont Tdcrivain
parle, un nouveau doyen de la mdme ^glise, excite par Geofroy de
Charny, seigneur de Lirey, dlssimulant ce qui seroit pa^se autrefois,
8*6toit adress6 au cardinal a de Thureyo, » nonce et 16gat de sa
Saintet6 en France, et luy avoit expose que ce saint Suaire avoit M
autrefois en grande vdndration dans Teglise de Lirey, mais que les
guerres et d*autres accidens ayant obligd de le tenir cachd, et le
supplioit de luy permetre de Texposer k la ddvotion des fiddes : sur
qooy le 16gat avoit ordonnd qu^avec la permission de Tordinaire, le
Suaire seroit mis dans un lieu decent ; que sous le prdtexte de cette
ordonnance du 16gat, le Suaire avoit et6 plusieures fois expose au
peuple les jours de festes solemneles et autres, et avoit dt6 plac6
dans un lieu 61ev6 de T^glise par deux prestres avec leurs orncmens
et avec des torches allum^es, sans assurer ndanmoins en public que
ce fut le vrai Suaire de Notre Seigneur, mais en le r^pandant en
secret et en ajoutant qu*il etoit approuvd par le Saint-Si^ge et par
les lettres du Idgat, en sorte que leur fraude attire un grand concours
de peuple. C est pour cela (continue Tdcrivain en son nom) que d6si-
(1) En inUrligff de Pictavia.
XfV irUDE CRITIQUE 8UR
rant selon mon pouvoir arrester ce scandale dans le troapeau qu
m'est confi6f j*ay defifeodu k ce doyen sous peine d*ezcoininunica-
tton d^exposer ce Suaire jusqu*& ce qu*il en ayt 6tt autrement
ordonnd. Mais ce doyen d^soMissant, ayant appel6 de mon ordoa-
nance et obtenu des lettres du roy qui le maintient dans sa posses-
sion, il continue d*exposer ce Suaire avec solemnity, k quoy je ne puis
remddier, quoyque ce soit k i*opprobre de mon pr6d£cesseur ; n^n-
moins plusieurs me reprochent que je n*agis pas avec assez de
fermet6 dans cette affaire et que c'esi une dMsion de tol^rer ce
scandale. Cependantce m6me seigneur de Lyrey c^est adress6 k mon
insceu k votre Saintetd, pour demander la confirmation des lettres du
cardinal 16gat, quoyque subreptices et par lesquelles il n*a point
permis d*ezposer ce Suaire k la v6n6ration du peuple, mais seulement
de le placer dans un lieu ddcent ; et ce seigneur a obtenu des lettres
de votre Saintet6, qui permettent d'exposer ce Suaire k la pi6t6 des
fidties, et nonobstant toutes deffenses ou appellations, en m'impo-
sant silence k cet 6gard. Mais comme il m^est de£fendu par les
canons de 8ou£frir une semblable superstition et que ces lettres ont
6x6 obtenues sur un faux expose et sans que j*aye6t6 entendu, j*ay
une enti&re confiance^ue votre Saintet6, apr&s avoir 6tt sufisamment
informde de ce fait, arrestera un pareil scandale et une semblable
superstition, en ordonnant que ce Suaire ou sanctuaire [sic] ou
representation de Notre Seigneur ou sous quelqu 'autre nom que ce
soit ne pourra estre expose k la v6n6ration des fidiles, et que pour
rdparer mon honneur et justifier de la r6gularit6 de ma conduitc k
cet 6gard il sera inform^ de la subreption des lettres pr6cedentes. II
finit en disant qu*il auroit 6x6 luy-m6me vers sa Saintetd si sa sante
avoit pu le luy permectre.
Paris, Biblioth. Nation., Collection de Champagne, t. i8» p. 69. En marge:
« Extrait sur le manuscrit dans le 4* recueil de M. de P. »
Item copia rescriptionis episcopi Trecensis ad dominum Papam
super abusu. decani et canonicorum de Lyreio, super dolosa pictura
Sudani Domini nostri in ecclesia dicti loci de Lireyo reposita. Quot-
tata NNN.
Archives ddpartem. de TAube, G. 1 5 : Inventarium privilegiorum, cartarum, titu-
lorum et aliorum documentorum in thesauro episcopatus repertorum, inceptum die
vicesima prima mensis junii, anno Domini millesimo quingentesimo decimo nono,
LE SUAIRE DE TURIN. XV
Item copia in papiro litterarum domino nostro Papc per episcopum
Trecensem, super facto Sudani de Lireyo transmissarum. Quot-
tata Fv.
Archives dc TAube, G. 15, f« 48 v* -49 r«.
6 Janvier 1390.
CLEMENS, etc., ad futuram rei memoriam. — Apostolice Sedis
providencia circumspecta non nunquam concessa per earn
modificat, ac circa ilia statuit et disponit prout rerum et temporum
qualitas exigit, etid conspicit in Domino salubriter expedire. Dudum
siquidem pro parte dilecti filii nobilis viri Gaufridi, domini loci de
Lireyo, Trecensis diocesis, nobis exposito, quod nuper dilecto filio
nostro Petro, tituli Sancte Susanne presbitero cardinali, pro parte
ejusdem Gaufridi exposito, quod olim genitor ipsius Gaufridi zelo
devocionis accensus, quandam figuram sive representacionem Su-
dani Domini nostri Jhesu Christi sibi liberaliter oblatam, in ecclesia
Beate Marie de Lireyo, dicte diocesis, cujus ipse fundator extitit,
vcnerabiliter coUocari fecerat, et quod demum, Domino permictente
partes illas guerris et mortalitatum pestibus graviter concuti, figura
sive representacio A, eciam ad mandatum ordinarii loci et ex aliis cer-
tis causis, de dicta ecclesia Beate Marie ad alium tu(i)tiorem locum
translata et decenter usque tunc recondita extiterat et venerabiliter
custodita; et quod idem Gaufridus ad ecclesie predicte decorem,
devocionem populi et cultus divini augmentum cupiebat prefatam
figuram sive representacionem in ecclesia predicta reponi, idem
cardinalis, quem tunc ad carissimum in Christo filium nostrum Ca-
rolum, regem Francorum illustrem , pro certis nostris et predicte
Romane ecclesie negociis destinaveramus, quique faciendi, gerendi
et exercendi, hujusmodi negociorum prosecucione durante, in civi-
tatibus et diocesibus ac provinciis, per quas eundo et redeundo ^ et
in quibus moram trahere ipsum contingeret, omnia et singula que
Romane ecclesie cardinalis legacionis fungens officio infra sue lega-
cionis terminos facere, gerere et exercere potest a nobis fadultatem
a. B C P ajouUnt hujusmodi. -^ b, B C P ajoutent transire.
XVI irVDE CRITIQUE 8UR
habebat ; quique per Senoncnsem provinciam, de qua dicta dioccsis
Trecensis eztstit, transitum fecerat, eidem Gaufrido, hujusmodi
negociorum prosecucione durante, ut figuram seu reprcsentacionem
predictam in prefata ecclesia Sancte Marie congruo, honorabili et
deceati loco poai et coUocari facere posset, diocesani vel alterius
cujuscunque non petita vel obtenta licencia, per litteras suas indul-
serat; quodque dicta figura sive representacio, hujusmodi indultt
vigore, in dicta ecclesia Beate Marie reposita fiierat decenter ; et
quod postmodum venerabilis frater noster Petrus, episcopus Tre*
censis, ex hujusmodi indulto commotus, in sua synodo ultimo cele-
brata rectoribus parrochialium ecclesiarum ac aliis quos proponere
contingeret verbum Dei, ne de Sudario Jhesu Christi, figura seuque
repreaentacione ipsius in suis ecclesiis aut sermonibus, sive in bono
sive in malo aliquam mencionem faccrent ; ac demum dilecto filio
decano ecclesie Beate Marie predicte, ne sub excommunicacionis
pena dictam figuram seu representacionem alicui ostenderet, inhi-
buerat; a qua quidem inhibicione eidem decano facta, pro parte
dicti decani fuerat ad Sedem apostolicam appellatum, et quia dicta
figura sive representacio, post appellacionem hujusmodi, populo
publice exhibita extiterat et ostensa, nos indultum prefatum ex
certa sciencia, auctoritate apostolica confirmavimus; et nichilominus
eidem decano et dilectis filiis capitulo dicte ecclesie Beate Marie
concessimus, quod, inhibici6ne hujusmodi non obstante, figuram
seu representacionem eandem populo publice ostendere et ostendi
facere valerent, quociens foret oportunum, eidem episcopo super
inhibicione predicta perpetuum silencium imponendo, prout in
nostris inde confectis litteris plenius continetur. Nos igitur circa
modum ostensionis hujusmodi, ad omnem erroris et ydolatrie « ma-
teriam submovendam, de opportuno remedio providere intcnden-
tes ^, volumus et tenore prescncium auctoritate apostolica statui-
mus * quod, quocienscunque dictam figuram seu representacionem
deinceps populo ostendi contigerit, dccanus et capitulum predicti et
alie persone ecclesiastice hujusmodi figuram seu representacionem
ostendentes et in hujusmodi ostensione presentes, quandiu ostensio
ipsa durabit, capis, supcrpelliciis, albis, pluvialibiis vel aliis quibus-
libet ecclesiasticis indumentis seu paramentis nullatenus propterea
induantur, nee alias f solempnitates faciant que fieri solent in reliquiis
c, Var, idololatrie. — d, B C P curantes. — e. B C P afouUnt ct ctiam ordi-
namus. ^ f. B C P nmplaunipar nuUat tout le passage pricidtnt d§puis quandiu.
LE SUAIRE DE TURIN. XVII
ostendendis, quodque propterea torttcia, facule seu candele minime
accendantur, nee eciam propterea luminaria quecunque ibidem 9 ad-
hibeantur ; quodque ostendens dictam figuram, dutn major ibidem
convencrit * populi multitudo •, publice populo predicct et dicat aha
et intelligibili voce, omni fraude cessante, quod figura seu repre-
sentacio predicta non est/ verum Sudarium Domini nostri Jhesu
Christi, sed quedam pictura seu tabula facta in * figuram seu repre-
scntacionem ' Sudarii, quod fore dicitur ejusdcm Domini nostri Jhesu
Chris ti. •"Prefatas litteras nostras et earum efFectum et voluntatem
ac statutum et ordinacionem nostram hujusmodi non servaverint
carere viribus decernenles... NuUi ergo, etc. hanc pag. nostre vo-
luntatis, statuti, ordinationis et constitutionis infring.... — Datum
Avinione, viii idus januarii, anno xii.
Paris, Biblioth. Nation., foods latin, ms. 10410, f* 113 {A)* Longue bande de
papier de la fin du XIV* siicle, comprenant les Append. K, P et N, les deux derniers
au V* ; en tfttc : « Copia » ; entre P et N : a XXJ » (App. L). — Ibid., Collection
de Champagne, t. 1 8, f* 70. Double exemplaire d'une copie notarise, faite k Troyes
le 15 oct. 1636, d*un vidimus ex^cutd le 16 juin 1390^ indiction i3, an la de
Clement VII, « in villa de Sinemuro [Semur], Eduensis diocesis », sur requftte de
Nicolas Martin, doyen de Lirey, par « Adam Panri, de Maceyo super Thiliam »,
notaire, et collationn6 le 25 juin suivant, k la requftte de Nicolas Martin et d'an
autre chanoine (B). — Mdme Collection, y. 154, f^ 14 1-5, copie du mftme vidimus^
confront^e sur Texempl. des archives dpiscopales, k la requftte du chanoine Nicolas
Camusat, secretaire de Tivftque Rend de Bresley, le 15 oct. 1626 (C) ; voir Ap-
pend. M. — Ibid., f<* 139, copie du XVI* sifccle (D). — Piamo, op. cit., t. II, p.
377-81 rp;.
Item copia papirea cujusdam bulle dementis pape, facientis men-
tionem de pictura sive representationem Sudarii Domini nostri Jhesu
Ghristi existentis in ecclesia Beate Marie de Lireyo, de modo et forma
ct seric observanda in ostensione dicte representate. Quottata XXI.
Archives de PAube, G. 15, f» 18 r*.
g. B C n*ont que min. propt. ; P min. propterea ad solemnitatem aliquam ace.
ncc lum. q. i. propterea. — h, P concurrent. — 1. B C P ajoutent aliquoties
saltern, dum sermonem ibidem fieri contigerit. — /. A omet ; B C P figuram s.
r-onem p-am n. ostendunt ut. ^ k, B et P sed tanquam. — /. B C P r. dicti. —
m. P Eos qui (?).
XVIII iTUDE CRITIQUE 8UR
Item instrumentum sub signo publico Ade Parvi, publici auctori-
tate apostolica et imperiaU notarii, confectum, continens builam
dementis pape scptimi per quam apparet de modo et forma osten-
dendi pannum vocatum Sudarium Domini nostii Jhesu Christi in
ecclesia de Lireyo existens, et quod non accendantur cande[le], facule
nee torticia aut alia ad ostendendum dictum pannum, et quod etiam
illud ostendendo, dum populus in eadem ecclesia congregatus fuertt,
dicatur quod non ostendunt dictum pannum ut verum sudarium
Christi, sed tanquam figuram et representationem dicti sudarii
Domini nostri Jhesu Christi, ne populus pro vero sudario eum ado-
raret. Quottatum F vi.
Archives de TAube, G. 15, f* 49 r*.
N
6 Janvier 1390.
CLEMENS, etc., venerabili fratri Petro, episcopo Trecensi, salutem,
etc. — Cum dudum dilectus filius noster Petrus, tituli Sancte
Susanne presbyter cardinalis, quem tunc ad carissimum in Xpisto
iSlium nostrum Carolum, regem Francorum iilustrem, pro certis
nostris et ecclesie Romane negociis destinaveramus, habens a nobis
faciendi, gerendi et excercendi, hujusmodi negociorum prosecutione
durante, in civitatibus et diocesibus ac provinciis per quas eundo
et redeundo transire et in quibus moram trahere ipsum contingeret,
omnia et singula que Romane ecclesie cardinalis fungens legationis
officio infra sue legationis terminos facere, gerere et exercere potest
facultatem ; ac per Senonensem provinciam, de qua diocesis Tre-
censis existit, transitum faciens, dilecto filio nobili viro Gaufrido,
domino loci de Lireyo, dicte diocesis, ut ipse quandam figuram
sive representationem Sudarii Domini nostri Jhesu Xpisti, que in
ecclesia Beate Marie de Lireyo, dicte diocesis, antea venerabiliter
coUocata et demum ex certis causis ad alium locum translata et
custodita extiterat, in dicta ecclesia Beate Marie poni et coUocari
facere posset, per suas litteras indulsisset ; dictaque figura, hujus-
modi indulti vigore, in eadem ecclesia, sicut accepimus, reposita
fuisset decenter. Nosque postmodum indultum hujusmodi ratum et
LE SUAIRE DE TURIN. XIX
gratum habentes, illud ex certa scientia confirmaverimus ac dilectis
filiis dccano et capitulo dicte ecclesie concesserimus quod figuram
eandem, tua inhibitione contraria non obstante, populo publice
ostendere et ostendi facere valerent, quociens foret oportunum. Et
subsequenter, circa modum ostensionis hujusmodi.certos modos' et
formam statuendos duxerimus et eciam ordinandos, prout in diversis
nostris inde confectis littcris plenius continetur. Et quia ^ sicut
exhibita nobis pro parte dicti Gaufridi petitio continebat, tu adver-
sus premissa nonnuUa impedimenta per regem predictum et ejus
gentes opponi feceris et eciam procurari ; nos volentes ut concessio
ac statu tum et ordinatio nostra hujusmodi suum debitum sorciantur
effectum, fraternitati tue presentium tenore et sub excommunica-
tionis pena, quam si secus feceris incurrere « te volumus, expresse
mandamus quatenus impedimenta predicta, dummodo in ostensione
hujusmodi statutum et ordinatio nostra predicta inviolabiliter obser-
ventur, facias et procures realiter et cum effectu penitus amoveri. —
Datum Avinione, viii. idus januarii, anno duodecimo.
Archives da Vatican, Reg. Avign. 361 {coi6 au dos : Clemens VIL An. XIL
Part, IL Tom, LVII), f» 337 : « Littere de indultis, privilegiis et dispensiis dni
Clementis pape Vllmi. Anni duodecimi. Q. I. » {A), — Paris, Bibl. Nat., ms. 1.
10410, f» 113 ¥• (B),
6 Janvier 1390.
CLEMENS, episcopus, servus servorum Dei, dilecto filio nobili viro
Gaufrido, domino loci de Lireio, Trecensis dioecesis, salutem
et apostolicam benedictionem. — Tuas devotionis sinceritas, quam
erga Deum et nos, ac Romanam ecclesiam gerere nosceris, prome-
retur utpetitionibus tuis, illis praesertim quasdivini nominis honorem
et gloriam respiccre dinoscuntur, favorabiliter annuamus. Exhibitae
siquidem tuae peti[ti]onis series continebat, quod nuper dilecto filio
nostro tituli Sanctae Susannas presbytero cardinali pro parte tua*
exposito, quod olim genitor tuus zelo devotionis accensus, quamdam
figuram sive repraesentationem Sudarii Domini nostri Jesu Christi
sibi liberaliter oblatam, B. Mariae de Lireio, Trecensis dioecesis, cujus
fundator extitit, venerabiliter collocari fccerat ; et quia demum,
Domino permittente partes illas in guerris et mortalium pestibus
a. B modum. — b, A omet, -^ c, B secus incurrens.
a, Chron, sua.
XX AtUDE critique 8UR
graviter concuti, figura'sive repraeaentatio hujusmodi, etiam ad tnan-
datum ordinarii loci et ex aliis ceteris causis, de dicta ecclesia B. Ma-
ris ad alium tutiorem locum transiata, et dcccnter usque tunc recon-
dita extiterat et venerabiliter custodita ; et quod tu ad ecclesiae
prsdictae decorem devotionemque populi etcultusdiviniaugmentum,
cupiebas pracfatam figuram sive repraesentationem in ecclesia prae-
dicta reponere ; idem cardinalis, quern tunc ad christianissimum in
Christo filium nostrum Carolum, regem Francorum illustrem, pro
ceteris nostris et Romanac ecclesiae negotiis destinaveramus, quique
faciendo, gerendo, exercendo, hujusmodi negotiorum prosecutione
durante, in civitatibus et dioecesibus ac provinciis, per quas eundo
et redeundo transire, et in quibusmoram trahere ipsum contingeret,
omnia et singula, quae Romanae ecclesiae cardinalis legationis fungens
officio, infra legationis suae terminos facere, gerere et exercere potest
a nobis facultatcm habebat. Quique per Senonensem provinciam, de
qua dicta dioecesis Trecensis existit, transitum fecerat, tibi, hujus-
modi negotiorum prosecutidne durante, ut figuram seu repra&sen-
tationem praedictam in pra&fata ecclesia S. Mariae, congruo honore
et decenti loco poni et coUocari facere posses, dioscesani vel alterius
cujuscumque non petita vel obtenta iicentia, per litteras suas indul-
sit ; quodque dicta figura sive repraesentatio hujus indulti vigore, in
ecclesia dicta B. Marias reposita fuit decenter ; et quod postmodum
vcnerabilis frater noster Petrus, episcopus Trecensis, ex hujusmodi
indulto commotus, in sua synodo ultimo celebrata, rectoribus paro-
cbialium ecclesiarum ac illis quos proponere contingeret verbum Dei,
ne de sudario Jesu Christi, figura sive repraesentatione ipsius in suis
ecclesiis aut sermonibus, sive in bono sive in malo, aiiquam mentio-
nem facerent; ac demum dilecto filio decano ecclesia^ B. Mariae
praedictae, ne sub excommunicationis poena dictam figuram seu reprae-
sentationem alicui ostenderet, inhibuit. A qua quidem inhibitione
eidem decano facta, pro parte dicti decani fuit ad sedem apostolicam
appellatum. Et quia dicta figura sive repraesentatio post appellationem
hujusmodi populo publice exhibita extitit et ostensa ; nos igitur tuis
in hac parte supplicatiouibus inclinati, indultum praefatum ratum et
gratum habentes, illud, prout superius enarratur, ex certa scientia,
auctoritate apostolica confirmamus, et praesentis scripti patrocinio
communimus ; et nihilominus eidem decano et dilectis filiis capitulo
dictae ecclesias B. Marias, prassentium tenore concedimus, quod,
inhibitione hujusmodi non obstante, figuram seu reprttsentationem
LE 8UAIRE DE TURIN. ZXI
eamdem publice ostendere et ostendi facere valeant, quoties fuerit
opportunum; eidem episcopo super inhibitione praedicta perpctuum
silentium imponentes. NuUi ergo hominum liceat, etc.
Ins6r£es k la suite de PAppendice U. Cf. TAppend. K.
6 Janvier i ^90.
CLEMENS, episcopus, servus servorum Dei, dilectis filiis Lingonen.,
Eduen. et Cathalaunen. officialibus, salutem et apostolicam
benedictionem. — Dudum pro parte dilecti fiiii nobilis viri Gaufridi,
domini loci de Lireyo, Trecensis diocesis, nobis exposito, ut in alia
usque decernentes, prout in aiiis nostris litteris plenius continetur.
Nos itaque cupientes ut voluntas ac statutum et ordinacio nostra
prcdicta inviolabiliter observentur, etc., mandamus qualinus vos vcl
duo aut unus vestrum per vos vel aiium seu alios voluntatem, statu-
tum et ordinacionem prefata, ubi et quando expedire videritis,
auctoritate nostra solemniter publicantes, faciatis ilia auctoritate
prcdicta per censuram ecclesiasticam firmiter observari, contradic-
tores, etc. Non obstante si eisdem decano et rapitulo ac personis
vel quibusvis aliis communiter vel divisim a Sede apostolica sit
indultum quod interdici, suspendi vel excommunicari non possint
per litteras apostolicas non facientes plenam et expressam ac de
verbo ad verbum de indulli hujusmodi mencionem. — Datum Avi-
nioniy viii idus januarii, anno xii.
Paris, Biblioth. Nation., fonds latin, ms. 10410, f^ 1 13 v». — Cf. Piano, op. cit.,
t. II, p. 386-7.
Q
6 juillet 1418.
Lectres contenant la reception en garde dudict sainct Suaire de Nostre
Saulveur Jesuchrist, a cause des guerres regnans pour lors en
Francey etplusieurs autresjoyaulx.
HOMBART*, conte de la Roche, seigneur de Velar Cessey et de
Lirey, scavoir faisons a tous que, pour la guerre qui * a present
est et pour la doubte des gens de male voluntd <», avons reccu par la
a. B Hambart. -^ b. C E que. — c. B voulant^t
XXII ETUDE CRITIQUE 8UR
main de noz amez chappelains, doyen et chappitre de Nostre Dame
dudict Lirey, des joyaulx et sanctuaires ^ de ladicte eg)ise, les choses
qui s'ensuivent : premierement, ung drap, ou quel est la figure ou
representation du Suairc Nostre Seigneur Jesucrist, lequel est en
ung cofiFre armoyd des armes de Charny... — Lesquelz joyaulx • et
reliquiaires ^, pour la seurtd d^estre bien et seurement gardez, en
nostre chastel de Montfort avons prins' etreceuz* en garde desdictz
doyen et chappitre de nostredicte eglise, et promectons en bonne
foy, pour nous et les atans* cause de nous, de les restituer et bailler
a ladicte eglise, toutesfois que la tribulation qui a present est en
France sera fin6e, et nous en serons requis de par nosdictz chap-
pelains. En tesmoing des choses dessusdictes, nous avons seel6
ces presentes lectres de nostre propre seel. Faictes.et donndes Ic
vj- jour de juiUet, Tan mil III J* et XVIII / .
Archives de J'Aube, 9 G. 4, <• a {A) et 2 v» (B).
Charl. Lalori, Inventair$s des principalis 4glis§s de Trayes, 1893, t. II, p.
283-5. Ce cahier 9 G. 4 in-4*' contient 24 feuillets de papier, cotds 2 ^ 25. En
haut du I*' : a Manque ici au moins un feuilleC en 1727 ; Tai cott6 le tout et
comenc^ par 3 » ; le texte debute par : « Item, vng ymage de sainct Jefaan Bap-
tiste » (Lalori, Invent*, n^ 2230). Au verso du dernier : CoUatio facta est de
preinserta copia ad originalia ejusdem per nos notarios publicos, curie Trecensis
tabelliones subsignatos, anno Domini mill^^ quingentesimo decimo nono, die quarta
mensis octobris. N. Venel, Guille ». Au dos (6crit en 1727): « Cecy est vne
coppie de toutes les autres pieces estantes en parchemin, ou il y manque quelques
feuillets au commancement; et sert pour faire foy desdis originaux. » Le texte A est
insiri dans un vidimus d61ivr6 k « Troyes le mardi vij* )our d'aoust Tan de grace
1442 ». — Paris, Bibl. Nat., Coll. de Champagne, v. 154, f* 146 : « S'ensuiveni
plusieurs coppies de certainnes lectres ou enseignemens du tressacr^ et precieux
sainct Suaire de Nostre Seigneur Jhesus Christ appartenant k Teglise coUegial de
Nostre Dame de Lirey, ou diocese de Troyes, estant de present en Savoye ; icelles
coppies extraictes k la diligence de venerable et discrette personne mons' maistre
Jehan Huyart^ prebtre, chanoine des eglises de Troyes et doyen de lad. eglise »
(C D). — Ibid., Coll. De Camps, v. 124, f* 217 (131), copie p08t6r. du mftme
dossier (E F),
d. C D sainctuaires. — e. i4 juyaulx. -^ f, C D reliquaires, E F relicquaires
— g. B C E. prinses. '— A. B receu. — t. C-F ay ans. — ;. B quatre cens dix
huit.
LE SUAIRE DE TURIN. XXIII
R
8 mai 1443.
Sommations sur cefaicteSy contenant certain accord faict entre
lesd, venerables el lad, dame Marguerite,
EN nom dc Nostrc Seigneur, amen. Nous Pierre Sauvageot,
doyen, Euvrart des Champs et Nicole de la Rotiere, tous prestres
ct chanoines de Teglisc collegial de Nostre Dame de Lirey, ou dio-
cese dc Troyes, tant en noz propres et privez noms, comme nous
faisans fors et promectans de faire ratifier, se mestier est, pour tous
les autres conchanoines, chappelains et clercs desservens en icelle,
d'une part, et dame Marguerite de Charny, vesve de feu noble et
puissant seigneur mess* Hambart, jadiz conte de la Roche et sei-
gneur de Velar Cessey, d*autre part. Savoir faisons a tous ce qui ces
Icctres verront et oirront que, comme debat, controversie et different,
question et proems feussent mehuz et plus grand esperez de mouvoir
en la court du noble parlement de Dole, entre nous lesd. parties, de
et sur ce que nous lesd. doyen et chappitre querelions et demandions
a lad. dame plusieurs reliques et aornemens d*eglise, que nous
disions et maintenons estre et appartenir a nostred. eglise de
Lirey, et pieca avoir estd mises en depost es mains dud. feu mess*
Hambert, lequel en son vivant congnut et confessa les avoir en garde
riere ly de lad. eglise, comme peult apparoir par sa lectre en laquelle
sont exprimdes et declardes icelles reliques, de laquelle lectre la teneur
s'ensuit : « Hambart (Appendice Q).., dix huit. » Et je ladicte dame
disoye et maintenoye du contraire, c'est ascavoir que ladicte lectre
cy dessus transcripte ne m*estoit et ne m'est en riens prejudiciable,
du moins au regard dud. sainct Suaire, lequel pieca fut conquis par
feu messire Geoffroy de Charny, mon grant pere ; disoye aussi que,
vchuc lad. lectre, je n'estoie point tenuc de rcndre lesdictes reliques
et sainct Suaire, actendu que le lieu de Lirey n*est pas ancor lieu
appaisid des guerres et tribulations de France ; et mesment que le
chastel d'illec n estoit pas bien fort ne sehur, pour y tenir lesd. reli-
ques et sainct Suaire. Ainsi est que finablement, pour bien de paix
etpour entreteniret nourrir amour entre nous lesd. parties, et aussi
pour eviter plait et procis, et les fraiz et missions qui en pourroient
sordrc et s en ensuyr, d'icculx debatz et proems avons traictd et accor-
ds en la maniere que s*ensuit. C*est a scavoir que je lad. dame Mar-
XUV l^TUOB CRITIQUB 6UR
■N,
guerite ausd. doyen et chappitre, auxpersonnesdesd. messire Pierre
Sauvageot, doyen, Euvrard des Champs et Nicole de laRotiere, dc-
vant nommez chanoines de ladicte eglise de Lirey, presens, agreans,
traictans et stipulans pour eulx et leurs conchanoines, chappelains et
clercs desservans en iceile,... comme la plus saine partie de lad.
eglise..., ay rendu et restitu^, au jourduy datte de cestes, reaulment
et de faict toutes lesd. reliques specifi^es et declair^es cy dessus,
reserve tant seulement ledict sainct Suaire, lequel par accord et con-
sentement de nous lesd. chanoines... demeurra 6s mains et en la
puissance d*icelle dame Marguerite de Charny, pour le temps et
terme de trois ans, se tant ly plait de le garder, commencans aud.
jour duy... et finissans a tel jour lesd. trois ans revoluz. Duquel
joyaul precieux du sainct Suaire je lad. dame suis, seray et demourray
tenue et obligee bien et songneusement garder durant le temps et
terme desd. trois ans, et au chief d*iceulx ou pendent led. terme, se
bon me semble et en anticipant icelly, le reporter ou faire reporter et
remectre seurement et saulvement en lad. eglise de Lirey, a mes
propres coustz, fraiz, missions et despens. Et d'en payer pour la
garde d'icelly, au proffit de lad. eglise pour la fabrique et reparation
d'icelle, chacun an d*iceulx trois ans, douze francs, pour et en lieu
des biens faiz et aulniosnes que pour occasion dud. precieulx jouyaul
et sainct Suaire pourroient venir et escheoir a lad. eglise de Lirey,
iceulx trois ans durans; et moyennant aussi la somme de trante
francs, que nous lesd. chanoines... en avons eu et receu realment et
de faict de lad. dame Marguerite, pour noz fraiz et missions ; pourveu
toutesvoies et parmy ce que, s'il estoit diet el declard deans la feste
de la Nativit6 Sainct Jehan Baptiste prochainemcnt venant, la ville
dudict Lirey appartenir a noble et puissant seigneur mess* Francois
de la Palu, dit de Varambon, a present conte de lad. Roche, en ce
cas je lad. dame suis et seray tenue de rendre led. sainct Suaire ausd.
doyen et chappitre de Teglise de Lirey. deans trois sepmaines apr^s
lad. declaration, et de le reporter... a mes missions et despens... Et
en oultre et pardessus lesd. reliques et le contenu es lectres dud.
feu mess* Hambart, je lad. dame Marguerite ay rendu et delivre aux
devant nommez chanoines deux chasubles, Tune de satin blanc
renforcid et ung osfroy de drap d'or, Tautre de drap d'or vielz,
ensemble la tunique, deux amys, une estolle et trois aulbes de lin,
pardes de mesmes. Et avec ce, en faveur et pour contemplation de
lad. eglise, ancores et d'abondant, je lad. dame Marguerite, de ma
LB &UiaRB OB TURIN. XZV
science ccrtainc, bon propos, franchc ct liberalc voulcnte, ay confcrmc
et conferme par ces presentes les donations, aulmosnes et biens faiz
par mes predecesseurs et ancesseurs donnez et octroiez a lad. eglise...
Et parmy ce toutes lectres que nous Icsd. doyen et chappitre avions,
pourrions et debvrions avoir a cause des choses avant dictes et d'une
chascune dHcelles, sont et demeurent vaines, nulles et cass6s et de
nul effect et valeur dts maintenant... Et affin que ce soit chose plus
fcrme et plus estable et aussi scure pour iceulx doyen et chappitre
dud. Lirey, je Charles de Noyers, frere de lad. dame Marguerite de
Charny, me suis constitud et estably plesge et principal rendeur, se
mestier est, defaire, parfaire, tenir, entretenir, payer, rendre, restituer
et acomplir toutes les choses avant dictes. .., soubz Tobligation de
mes biens... Promectans en bonne foy... par noz seiremens pour ce
donnez aux sainctes Euvangiles de Dieu, aussi nous lesd. chanoines...
in verbo sacerdotali, en mectant la main aupictz... Et avons renonce
et renoncohs..., mesment je lad. dame... a la loy de Julian du senat
consul, du fonds dotal non aliener, a Texpitre de dan Adrian, a
Tautentique Si qua mulier,,.; et nous lesd. doyen, chappitre et cha-
noines... especialment slu droit disant general renonciation non valoir
si Tespecialne precede... Nous... soubzmectons... aux juridictions..
des cours de mons*" Ic due et conte de Bourgongne, de mons' ToflScial
de Besancon... En tesmoins desquelles choses, nous les parties
devant nommdes... avons... faict mectre a ces presentes lectres le
seel duquel on use en la court et tabellionnage de mond. s' a Gray,
ensemble et avec le seel de mond. s*" I'official de la court de Besan-
con... — Et nous oflScial dessus diet, es prieres et requestes desd.
parties..., avons faict mectre le seel de nostred. court de Besancon...
a cesd. presentes^ par lesquelles... nous... enjoingnons ausd. parties
et sur ce de vive voix par nostred. jur6 les avons amonnestez et mes-
ment lad. dame Marg. principale et led. Charles son frere, plaige et
principal, qu'ilz paient... lad. somme de douze francs... Faictes et
passees a Dole, en presence de honor, homme et sage m* Jehan de
Salme, clerc, licencic en loix et bachelier en decret, Regnault de
Myon, escuier, Guillemin Richard, clerc, dcmorant a Salme,... le
huitiesme jour du mois de may, Tan mil IIIJ* quarante trois. Ainsi
signe : P. Anarechier, G. Alart et Re. Pureceti.
Archives de I'Aubc, 9 G. 4, !•• 2 v-7. — Paris, Bibl. Nat., Coll. de Champagne,
V. 154, f* 147 V*. — Ibid., Coll. De Camps, v. 124, f« 218 (13^).
TX91 iTUDS CRITIQUE 8UR
8
9 «M «441.
Arrest ou appoincti bailU ou parUment de Dole
le Undemain enpris led. accord.
PHELIPPB, par la grace de Dieu due dc Bourgongne, de Lothier,
dc Brabant, de Lembourg, contc dc Flandrcs, d'Artois, dc
Bourgongne, palatin de Haynnau, de Hollande, dc Zellandc ct dc
Namur, marquis du saint empire, seigneur de Frise, de Salins ct
de Malines, savoir faisons a tous que, comme en certaine cause
naguieres pendant en la court de nostre present parlement de Dole,
qui commanca le premier jour de mars dernier pass6, entre'lcs
doyen ct chappitre dc reglise de Lirey, pr^s dc Troycs, impctrans
ct demandeurs, d*une part, ct nostre am^ ct feal chevalier messirc
Francois de la Paluz, conte de la Roche ct seigneur de Villarsaxel,
heritier de feu mess* Humbert de Villarsaxel, jadiz conte dcia Roche
ct seigneur dud. Villarsaxel, defendeur, ct dame Marguerite de
Charny, contesse ct dame desd. lieux, vesve dud. feu mess* Hum-
bert, appell6e a garend par icelluy mess* Francois, d'autre part ;
il ait est^ appoinct6 que lad. dame apporteroit dedans certain jour
ja pass^ Ics reliqucs ct joyaulx qu'elle avoit ct povoit avoir de cculx
contenuz ct declarez es lectrcs dud. feu mess* Humbert, jadiz conte
de la Roche, exhib^es judicialement en nostred. court par lesd.
doyen ct chappitre, ct en icelle leues et publiecs publicqucment,
deans Quasimodo derrcnicrcment passd, lesquelles seroient mises
en garde en Teglise de Nostre Dame dudict Dole jusques autrcment
en feust ordonn6 ; et le lundi lendemain dud. jour de Quasimodo
lad. dame viendra proccder ct defendrc avec led. mess* Francois a
ce que lesd. de chappitre leur vouldront demander touchant lesd.
reliqucs et joyaulx. Depuis Icqucl appoinctcment faict et donne lad.
dame Marguerite a apportd pardevcrs lad. court, pour obeir ct
obtempcrer a Tordonnance d*icelle, lesd. reliqucs et joyaulx ; et de
ce que lesd. doyen et chappitre luy quercloyent ct demandoient
touchant ce que diet est, ont eonvenu transiger, pacifi6 et aecordd
avec clle, ainsin comme lesd. parties comparens au jourd*uy, dattc
de cestes, judicialement en nostred. court. C*est a scavoir, lesd.
doyan ct chappitre par messirc Pierre Sauvageot, doyen de lad.
eglise, tant en son nom comme pour et ou nom dud. chappitre,
LE 8UAIRE DE TURIN. XXVII
d'une part, ct lad. dame par Phillebcrt Thibault, son procurcur,
d*autre part, ont humblement exposd a nostred. court, requerant
humblcmcnt a iccUc led. accord, Icquel dc leur conscntcment a cstd
mis et redig6 par escript et Tont apport6 judicialement, estre receu
par nostrcd. court, ct que a icelluy fussent mis et intcrpos6 Taucto-
ritd et dccrct d'iccUc court. Oye laquelle requeste, oy aussi Pierre
Fcvre, procurcur dud. mess* Francois, contrariant aud. traictc pour
certaines causes, nostred. court a ordonnd et ordonne que de la
partie desd. doyen ct chappitrc sera apportd dcvers nostred. court,
deans la feste de Penthecouste prochainemcnt venant, procuration
d'eulx trois iensemble faicte en leur chappitre comme il appar-
tiendra, par laquelle ceulx qui passcront de par eulx led. accord
ayent puissance de prandre et recevoir lesd. reliques et joyaulx, de
faire et passer led. accord, faire quictance vallable d*icelles reliques
et joyaulx a lad. dame Marguerite et aussi aud. conte de la Roche,
et a dame Jehanne de Petite Pierre, sa femmc, hcritiers dud. feu
mess® Humbert, jadiz conte de lad. Roche, a laquelle quictance
soient mis et interposez lesd. auctoritez et decret de nostred. court,
jusques auquel jour de Penthecouste le sainct Suaire estant es
mains de lad. dame Marguerite, luy demorra en garde et les autres
reliques demorront jusques alors en Teglise des Freres Mineurs
dud. Dole. Donnd judic[ialement] en nostred. court de parlement,
soubz le seel d'icelluy, le neuf* jour dc may Tan de grace mil 1III«
XLIII. Ainsi signe : Par mess'* tenant le parlement et P. Borrclicr.
Archives de TAubc, 9 G. 4, f» 8-9 r«. — Paris, Bibl. Nat., Coll. de Champagne,
V. 154, f» 154. — Ibid., Coll. De Camps, v. 124, f» 223 (139) v«.
18 juillet 1447.
Lectres de la court de mons^ de Besancon^ contenant la promesse et
obligation de rendre et restituer led, sainct Suaire j et la reprinse d'icelle
jusques a trois ans apres ensuivant.
Nous, official dela court de Besancon, faisons savoir a tous... que,
pardcvant Esticnne Pepol, dc Fontenoy, clerc notaire de nos-
tred. court de Besancon, nostre commandenxent especial, ...; par-
dcvant nostred. juri en lieu de nous personnellcment cstablis et
ad ce espccialment venant noble et puissant dame Marguerite de
XZVIll iTUDB CRITIQUB SUR
Charny, vesve de feu noble et puissant seigneur mess* Humbert,
jtdiz conte de la Roche, seigneur de Villersexel, principal, noble
homme Jehan de Pierre Fontaine, escuier, messire Charles de
Roussans, prestre, et Phillebert Thibault, clerc, pleiges et princi-
pauU rendeurs...; et venerables et discretes personnes messires
Pierre Sauvageol, doyen, et Nicole de la Rothiere, prestres, cha-
noines de Teglise coUegiale de Lirey, au diocese de Troyes, tant
en leurs noms comme procureurs... des autres chanoines..., d'aultre
part. Lesquelles parties ... ont faict, inhis, traict6 et accordd les
pactions, traictiers, accords et convenances qui s*cnsuigant. Sans
vouloir aucunement ni en aucune manicre innover certaines lectres
ne les choses contenues en icelles lectres, aultresfois par lad. dame
et certains ses pleiges au proffit et utiiit6 desd. doyen et chappitre
de et sur la restitution du saint Souairc que tient pardcvers elle lad.
dame Marguerite, lou^s et passdes le huitiesme jour du mois de
may Tan mil IIII<' quarante et trois, lesquelles lectres, ensemble tout
le contenu en icelles demeurent... en leur force et vigueur, nonobs-
tant quelzconques choses cy apr^s accord^es, pass^es, louch^s ou
consentement de relaxation desd. messires Pierre et Nicole donnes
ou a donn^. Et en oultre ont traictd et accord^ lesd. parties... que
led. sainct Souaire, dont debat est entrc les parties, pour ce que
lesd. doyen et chanoines disoicnt qu*il estoit a leur eglise et en
queroicnt avoir restitution pour le remectre en leurd. eglise, comme
faire se devoit. Lad. dame disoit et affermoit que pour fortune de
guerres de France qu*avoient long temps est6es empr^s la dessusd.
eglise de Lirey, icelle eglise estoit venue en telle mine que led.
sainct Souaire seurement ne se pourroit guerder en icelluy lieu ;
pour ce prioit icelle dame, pour la conservation dud. sainct Souaire
lesd. doyen et chanoines dessus nommez... que led. sainct Souaire
demorast ancores arrier icelle dame Marguerite comment avoit
paravant par plusieurs annees, pour le garder sehurement au proffit
d'icelle eglise de Lirey, soubz les promesses, obligations et poins
contenuz es lectres aultresfois louhdes et passdes par lad. dame et
ses plaiges au proffit de lad. eglise de Lirey, jusques a certain
terme qui seroit lors advise par les parties, soy o£Frant lad. dame
donner bonne et souffisante caution ausd. doyen et chanoines..., avec
telle que desj^ paravant estoit donnde par elle pour faire restitution
dud. sainct Souaire deans certain temps qui seroit advisd par icelles
parties. Lesquelles choses considcrdes par lesd. doyen et cha-
LE SUAIRE DE TURIN. XXIX
noines..., par Tad vis et deliberation de plusieurs notables gens qui
dc ce sont entrenus iceulx doyen et chanoines..., ont voussu et
consentu, veullent et consentent,... pour la sehurte dud. sainct
Souaire, que icelluy sainct Souaire demeure es mains et en la garde
de lad. dame Marguerite, ainsi que paravant avoit demeur6, et
soubz les obligations, promesses et poins contenuz esd. lectres,
jusques au jour de la feste Sainct Symon et Sainct Jude qui sera en
Tan mil quatre cens quarante et ncuf prochainement venant ; deans
lequel jour lad. dame Marguerite a de rechief promis et promect de ^
rcndre et rcstitucr ausd. doyen et chappitre en lad. eglise de Lirey,
a ses propres missions et despens, led. sainct Souaire, a la caution
des dessus nommez Jehan dc Pierre Fontaine, Charles de Roussans
et Phillebert Thiebault, ...; lesquelz..., mesment lesd. plaiges...,
ont promis de rendre et payer ausd. doyen el chappitre... chascun
an de cy aud. terme, pour la fabrique et refection de lad. eglise et
pour aucune recompensation des aulmones et bien faictz qui se
pourroient faire en lad. eglise a Toccasion dud. sainct Souaire, se
mis et assis estoit en lad. eglise, la somme de quinze francs mon-
noye ; et aussi traict^, inhis et accorder entre les parties... que pour
tons fraiz, missions et despens, que pourroient avoir suobtenus et
incouruz lesd. doyen et chappitre a Toccasion de la recuperation
dud. sainct Souaire, que icelle dame Marguerite... rendra et payera
ausd. doyen et chappitre... en leurd. eglise de Lirey... la somme de
ctnquante frans monnoye, dont icelle dame paiera incontinent apr^s
la date des presentes... la somme de vingt francs monnoi^e, et les
autres trante frans deans la feste de la Purification Nostre Dame
prochainement venant , moyennant laquelle * somme icelle dame
Marg. demeure quicte envers lesd. doyen et chappitre... pour tout
le temps pass6 et aussi de toutes sommes d^argent contenues esd.
principalles lectres. Promect'ans lesd. parties... par leurs sermens
pour ce donnez et touchans corporelment..., tenir, entretenir et
garder fermement et inviolablement observer toutes et singulieres
les choses dessusdictes... ; vuillans... iceulx principal et plaige estre
contrainctz et compellez par Tune et Tautre de noz cours et jurisdic-
tion ecclesiastique et temporelle..., toutes exceptions... non obstant ;
soubmectans... leurs biens... a la compulsion et contraincte de
nostred. court de Besancon et de toutes autres...; renoncans... a
toutes exceptions... Et nous, official dessusdict, oyes les confes-
sions desd. plaiges et principal..., a iceulx... avons enjoingt et
ZZX iTUDB CRITIQUE SUR
enjoingnons. .. de rendre et rcstituer ausd. doyen et chappitre de
Lirey en lad. eglise, par la forme et maniere que dessus et au terme
que dessus led. sainct Souaire, et... rendre et payer les sommes
d*argent dessusdictes... En tesmoins de laquelle chose nous official
dessusd. avons faict mectre en ces presentes lectres le seel de
nostred. court de Besancon. A la fealle relation de nostred. jure,
faictes et donnees le mardi xviij* jour du mois de juillet, apr^s heure
de prime, Tan Nostre Seigneur courrant mil quatre cens quarante
sept, presens honnorable et discrete personne maistre Jehan Baro-
nelet, licenci^ en loiz, Othenin Mallefer et Richard Sixsoiz, clercs
notairea jurds de la court de Besancon... Ainsin sigtU : E. Pepol.
Archives de TAabe, 9 G. 4, f* 9-13 r*. — Paris, Bibl. Nat., Coil, de Champa-
gne, V. 154, f* 155 ▼•. — Ibid., Coll. De Camps, ▼. i34» f* 234 (138) v«.
De quodam linteo habito pro vero Christi sudario.
ANNO DominicsB Incarnationis MCCCCXLIX. qusdam generosa
matrona de territorio Tricassino venit ad oppidum Hannoniae
dictum Cimai, deferens secum quoddam linteum, in quo egregie
miro artificio depicta fuerat forma corporis Domini nostri Jesu
Christi, cum omnibus lineamentissingulorummembrorum, tamquam
ex recentibus vulneribus et stigmatibus Christi pedes et manus ct
latus videbantur rubore sanguinolento intincti. Asserebatur autem
a quibusdam, ob devotionem populi augmentandam et multiplicis
lucri gratiam, hoc linteum esse sudarium cui involutum erat pretio-
sum corpus Domini nostri, dum reclinatum fuerat in sepulchro per
Nicodemum et Joseph de Arimathia, et cetera talia. Cumque id veri-
simile videretur, fiebat illic ingens concursus hominum utriusque
sexus de circumjacentibus provinciis. Tandem etiam fama volitantc
per ora multorum, dumque diversimode inde opinantibus, dominus
Johannes de Heinsberch, venerabilis Leodiensis episcopus, in cujus
dioecesi praedictum oppidum situm est, volens de hac materia
certitudinem habere plenissimam, nee patiens sui juris Christi fideles
in hujus rei credulitate longius fluctuare, duos illic destinavit egre-
gios sacras paginas professores, videlicet dominum abbatem de Alna,
Cisterciensis ordinis, et magistrum Henricum Bakel, canonicum
LE SUAIRE DE TURIN. XXXI
Leodiensem, qui super sibi commissis diligentcs facientes investiga-
tiones ct scrutinium dcbitum, petierunt a supradicta matrona et
suis auctoritate domini Leodiensis exhiberi sibi litteras aut bullas, si
quas haberent, quarum auctoritate praedictam audebant e£5giem aut
linteum ostendere, et vera esse quae praedicabant comprobarent. Ula
se in arcto comperiens, nee tamen valens reniti, ostendit eisdem tres
bullas a domino Clemente VII. pro tunc in Avinione residente, nec-
non et Petro de Luna, pro tunc cardinali et legato sed is apostolicac,
suis praedecessoribus concessas, in quibus continebatur expresse
dictum linteum non esse verum sudarium Jesu Christi, sed ejus
dumtaxat repraesentationem aut figuram ; quarum unam ex tribus
hinc inserere curavi de verbo ad verbum, ut rei gestae Veritas com-
prohclur (Appendice 0).
Chronicon Cornelii Zantfliet, S. Jacobi Leodiensis monachi, dans Marteni et
DuRAND, VeUr. scriptor. et monum, coUecUo^ '739, t. V, c. 461-3. — Suivent les
Idgendes recueillies par Zantfliet : « De sacro sudario Christi a transport^ de J6ru-
•alem c ad plagam pelag^ Lunensis » (c. 463), « De Veronica » (c. 464) et sur
« Alia Tultus Christi effigies » (c. 465).
6 novembre 1449.
Obligation a rencontre de noble homme Charles de Noyers,
frere de lad, dame Marguerite de Charny,
ATOUS ceulx qui ces presences Icctres verront, Anthoine Guerry,
escuier, licentid en loix, prevost de Troyes et garde du seel de
lad. prevost^, salut. Savoir faisons que, par devant Nicolas Guidier
et Jehan du Lutel, clercs notaires, jurez et cstabliz a ce fere aud.
Troyes de par le Roy nostre sire, furent presens venerables et dis-
cretes pcrsonnes messire Pierre Saulvageot, doyen, Jehan Crespelor,
cur6 de Chaource, Nicole de la Rotiere, cur6 de Sainct Jehan de
Bonnevau, et Evrard des Champs, curd de Moncey, tous prestres,
chanoines de I'eglise Nostre Dame de Lirey, ou diocese de Troyes,
poureulx et pour messire Jehan Pauche, curd de Brenon, leur con-
chanoine en lad. eglise, faisans et representans tout le chappitre de
lad. eglise, d'une part ; et noble homme Charles de Noyers, seigneur
de Vvatefale et de Seigney le Petit, pour et ou nom et comme soy
faisant fort en ceste partie de noble et puissant dame ma dame Mar-
UZJI ^TUDB CRITIQUE 8UR
guerite de Charny, contesse de la Roche r.t dame dud. Lirey, sa
seur, pour laquelle il a promts faire, tenir, enteriner et acomplir les
choses qui s*ensuivent et en bailler lectres soufBsantes d*elle ausd.
veaerablcs, ou les pater fournir et fere valoir pour elle par led. escuier ;
et recogQurent de leurs bonnes voulent6s que, combien que par
autre traicti^ et autres lectres icelle dame ait promis rendre, resti-
tuer et remectre a ses propres coustz et despens, dedans le jour de
feste Sainct Simon et Sainct Jude derrenier pass6 dedans lad. eglise
de Lirey le sainct Suaire de Nostre Seigneur Jhesucrist, estant par-
devers elle d^s longtemps a, lequel est le plus notable joyau d'icellc
eglise, et que aultresfois fut prius en icelle eglise par elle ou de par
elle, et de payer certainnes sommes et a certaines peines contenues
esd. lectres et en aultres sur ce faictes, dont elle n'ait riens faict. Tou-
tesvoies iceulx venerables, pour consideration et en entention que
icelle dame fera une forte place aud. Lirey, pour tenir seurement led.
Suaire et autres choses en apris escriptes, ont voulu, consenty et
acord^... que led. Suaire soit et demore encor pardevers elle,
depuis led. jour de Sainct Symon et Sainct Jude derrenier pass6 jus-
ques a trois ans apr^s ensuivant, sans prejudice ou innovation desd.
aultres lectres et du contenu en icelles et sans ce que a Toccasion de
ceste dilation ou prorogation icelle dame ou aultre se puisse excuser
de faire lad. restitution ne de faire et acomplir les autres choses...;
et pour aucune recompensation des oblations et biens qui pourroient
estre faiz en icelle eglise, si led. sainct Suaire y estoit, icelle dame
sera tenue, et led. escuier la promis pour elle, de rendre et payer
ausd. venerables en la villede Troyes, pour chascun desd. trois ans,
cinquante livres Tournois pour tourner et convertir ea la reparation
des edifices de lad. eglise et des maisons des chanoines d*icelle aud.
lieu de Lirey, pour iesquelles reparations fere et communcier icelle
dameanticiperale payementdes deux premieres ann6es, qui montent a
cent livres t., et sera tenue de icelle somme de cent livres t. faire appor-
ter a ses despens en Tostel des Mores a Troyes es mains dejaqumot
de Ponan, diet Poche, seigneur dud. hostel, dedans le jour des Roys
prochainement venant, pour icelle somme de cent livres t. bailler
ausd. venerables. Et s'il advenoit que icelle dame anticipast le temps
desd. trois ans et restituast led. sainct Suaire en lad. eglise, elle
demeureroit quicte de ce qui resteroit a payer de lad. somme de cent
livres t. au jour qu'elle feroit lad. restitution pour rate de temps. Et
lesd. venerables seront tenuz de bien et loyaument emploier lesd.
LE SUAIRE DE TURIN. XXXIII
deniers esd. reparations, si comme lesd. recognu disoient, dontilz se
tinrent pour bicn contents ; et promistrent lesd. parties chacune en
droit soy, par leur foy donn^e en presence desd. notaires, soubz Tobli-
gration..., sans aucun default..., sur peine... renoncans... En tesmoing
de ce nous avons seell6 ces lectres du seel et contreseel de lad. pre-
vost6, par le rapport desd. noteres, avec leurs signetz et seings manuelz,
Ce fut faict le six* jour de novembrcj^ Tan mil quatre cens quarante
neuf. Ainst signS : J. du Lutel et N. Guidier.
Archives de TAubc, 9 G. 4, f» ai-a, copie de 15 19. — Paris, Bibl. Nat.,
Coll. de Champagne, v. 154, f* 170.
29 mai Y457.
Aggravement envoyi aprhs Us dessusdictes lectres a I'encantre
de lad, dame Marguerite de Charny,
OFFiciALis curie Bisuntine capellanis universis Bisuntin. diocesis,
ad quem seu quos hec nostre presentes littcre pervenerint seu
presentate fuerint exequende, in Domino salutem. Quia nobilis
domina dom. Margareta de Charny, relicta defuncti nobilis et potentis
domini dom. Humberti, quondam comitis de Ruppe et domini de Vil-
lario, excommunicationis sententiam in eam latam auctoritate nostra
pro re confessa, ad instantiam venerabilium et discretorum virorum
dom. decani et capituli ecclesie collegiate de Lireyo, Trecen. diocesis,
videl. pro defectu traditionis et restitutionis sancti Sudani, alias per
dictos dom. decanum et capitulum dicte dom. Margarete in fideli cus-
todia traditi et expediti, nullatenus, ut asseritur, dictis dom. decano et
capitulo per dictam dom. Margaretam restituti, diu sustinuit et adhuc
sustinet, animo ipsius nequiter indurato; et cum crescente ipsius
malicia merito crescere debeat et pena. Hinc est quod vobis capellanis
pred. mandamus quatinus ipsam, quam nos inhiis scriptis aggrava-
mus, excommunicationem et aggravationem publice nuncietis in
ecclesiis vestris singulis diebus dominicis etfestis feriiset non feriis,
quibus vos divina contingent celebrare. Et dum ipsam in ecclesiis
vel civitatibus vestris presentem esse sciveritis, cessetis penitus a
divinis. Datum iij* kalendas junii, anno Domini miiro CCCCo quin-
quagesimo septimo. R[eddite] licteras. Impetrans venerabilis et
discretus vir dom. Petrus Savageti, decanus dicte ecclesie. Sic »-
voir iruPB ceitiqub sur
gnaium : j. Bonirelli (i). Et au dos desd. lectres esi escript : Ezecutum
est presens mandatum per me curatum de Villacaprioly ut infra con-
tinetur, teste signo meo sic posito, die sinodi mail, anno infrascripto.
Stic signaium : Johannes Descuvilly.
ArehiTM de TAube, 9 G. 4, ^ 15 ▼«-i6, copie de 1519 (A). — Paris, Bibl. Nat.,
GoU. de Ghampagne, t. 154* f* i6| (B).
30 mai 1457.
Lectres contenant excommuniment a Tencontre desd, dame Morgue^
rite et ses pleges^ obstant le delay de lad. restitution d'iceUe sainci
Suaire et le payement des sommes devantdictes.
ViRis venerabilibus et discretis dnis officialibus Lugdunen. et
Trecen., officialis curie Bisuntin., salutem et sinceram in Do-
mino caritatem. Cum alias, videl. die martis decima octava mensis
julii, post horam prime, anni Domini millesimi CCCO quinquage-
simi (a) septimi ultimo preteriti, ex certis pactionibus, tractatibus,
conventionibus et concordiis inter nobilem et potentem dominam
dom. Margaretam de Chamy, relictam defuncti nobilis et potentis
domini dom. Humberti, comitis quondam de Rupe et domini de
ViUario Sexel, tanquam principalem debitricem, nobilem virum Jo-
hannem de Petra Fonte, domicellum, dom. Carolum de Roussans,
presbiterum, et Phillebertum Thiebauldet, loci de Villariocexel, cleri-
cum, tanquam fidejussores et principales redditores dicte dom.
Margaretc; qui quidcm fidejussores... rcnunciaverunt cxceptioni de
principali prius conveniendo, monendo seu excommunicando, ex
una ; et venerabiles et discretos viros dom. Petrum Savageti, deca-
num^ ct Nicoiaum de la Rotiere, presbiteros, canonicum ecclesie
collegiate de Lireyo, Trecen. diocesis, tam eorum propriis nominibus
quam etiam tanquam procuratores... et se fortes facientes de aliis
dom. canonicis de capitulo dicte ecclesie..., ex alia partibus; factis
initis et habitis...<iicta dom. Margarcta et supradicti sui fidejussores...
inter cetera promiscrunt ct convenerunt, fide et stipulatione dccenti-
bus, rcddere et restituere dictis dom. decano et capitulo... sanctum
Sudarium seu sanctuarium dictis dom. decano et capitulo competens,
spectans et pertinens, alias per dictos dom. decanum et capitulum
(i) B Bonrelli. — (3) Lir4 qvadragesimi (P9ir Fappiudice T),
LB SUAIRB 0B TURIN. ZXZY
dicte dom. Margarete ad presenrandum et fideUter custodiendum
traditum et expeditum, et adbuc penes eamdem dom. Margaretam..,
existens, ad seu infra festum beatorum Simonis et Jude apostolorum
quod esset et fuit in anno Domini mill'o quadringentesimo (i) qua-
dragesimo nono tunc proxime venturum et nunc diu est preteritum.
Et ulterius dicta dom. Margareta et sui supranominati fidejussorea
promiserunt... predictis dom. decano et capitulo singulis annis..*
usque ad diet, terminum... pro fabrica et reparatione dicte ecclesie
collegiate de Lireyo et pro aliquali recompensatione elemosinarum et
benefactorum qui in dicta ecclesia, dicto termino durante, fieri pos-
sent si iddem Sudarium seu sanctuarium in ipsa ecclesia foret seu
existeret repositum, dare tradereque et solvere sommam quindecim
francorum monete ; et insuper promiserunt... eisdem... etiam dare
tradereque et solvere summam quinquaginta francorum monete pre-^
tacte pro missionibus et expensis... factis et sustentis occasione recu-
perationis dicti sancti Sudarii seu sanctuarii pro tempore tunc
preterito; premissaque..* dicta dom. Margareta et sui.. fidejussores
inter cetera confessi fuerunt fore et esse vera... Ea propter nos
officialis curie Bisuntinepred., audita confessione dicte dom. Marga*
rete et suorum pred. fidejussorum..., injunxerimus... ut ipsa dom.
Margareta etprenom. fidejussores... restituerent... predict, sanctum
Sudarium seu sanctuarium, necnon... solverentpro duobus annis...
sommam triginta francorum..., ac etiam... solverent... sommam quin-
quaginta francorum monete pred. : prouthec inter cetera... laciud con-
tinentur... in., licteris originalibus... super hoc... confectis... Unde,
cum dicti Johannes de Petrafontc et dom. Carolus confidejussores,
sicut Domino placuit, viam universe carnis fuerint ingressi et sint
ingressi et dies suos clauserint extremos, relictis et supers titibus ac
etiam in humanis agentibus dictis dom. Margareta, principali debi-
trice, et Philliberto confidejussore, non sitque vel fuerit dictum
sanctum Sudarium seu sanctuarium eisdem dom. decano et capitulo
restitutum, nee de dicta somma triginta francorum monete, que sol-
venda erat eisdem dom. decano et capitulo per dictam dom. Marga*
retam, Johannem de Petrafonte, dom. Carolum, dum viverent, et
Phillibertum, fidejussores, pro duobus terminis in quibus et per
quos ipsa domina habuit et tenuit predict, sanctum Sudarium seu
sanctuarium, in aliquo satisfactum, prout ex parte diet. dom. decani
et capituli nobis extitit intimatqm. Hinc est quod vos in juris Subsi-
(i) Ce mot a iU barri par §rr$ur en A.
tXXVl . iTUDE CRITIQUE 8UR
dium requirimus et rogamus, quatinus ipsam dom. Margaretam,
principalem, debitricem, et Philibertum confidejussorem, superstites,
insolidum obligatos, jam excommunicatos virtute diet, licterarum ori-
ginalium inunctis, monitis et excommunicatis, excommunicatos ob
hoc auctoritate nostra, ad instantiam diet. dom. decani et capituli,
tam ob defectum traditionis et restitutionis dicti sancti Sudarii seu
sanctuarii quam ob defectum solutionis diet, triginta francorum
mon.,... publice nunciari facialis, si placet, et mandetis per capella-
num seu capellanos vobis subditum aut subditos, ad quern vel ad
quos pertinere noveritis; tantum inde super premissis pro nobis
&eientes, quantum veiletis nos pro vobis fore facturos in casu simili
vel majori. Datum Bisuncii, sub sigillo nostre curie Bisuntine, die
lune post festum Ascensionis ejusdem Domini millesimo quadrin-
gentesimo quinquagesimo septimo. Reddique faeiatis et mandetis, si
placet, presentes licteras earum portitori executioni demandatas.
Impetrans prefatus dom. Petrus Savageti, decanus diete eeelesie de
Lireyo. Sic signate: P. Bonirelli (i).
Et au doi desd. Uctres est escript : Executum est presens manda*
tum per me Jo. de Cubry Veluti, mandat (a), teste signo meo ma-
nuali sic (3) apposito, die ultima mcnsis maii, anno Domini millo
CCCC^ quinquagesimo septimo.
Archives de TAube, 9 G. 4, f* 13-5, copie de 1519 (^4). — Paris, Bibl. Nat.
Coll. de Champagne, ▼. 154, (^ 160 (B).
(1) B Bonnelli. — (a) B mandatur. — (3) B hie.
19 Janvier 1458/9.
\Obligation soubz ce mesme seel
et a rencontre dud. Charles de Noyers, subsecutive de la precedente,
ATOus ceulx qui ccs presentes Icctres verront, Anthoine Guerry^
escuier, iicencid en loix, prevost de Troycs et garde du seel
de lad. prevost6, salut. Savoir faisons que, pardcvant Jehan du
Lutel et Jehan Thevemin, clercs, notaires jurez et establis a ce faire
en lad. prevost6 de par Ic Roy nostre sire, furent presens pour ce
faire especialment venerables et discretes personnes messires Pierre
LE SUAIRE DE TURIN. XXXVII
Sauvajot, doyen, Evrard des Champs, cur6 de Moussey, et Nicole
de la Rotiere, curd de Sainct Jehan de Bonnevau, tous prestres,
chanoincs de Teglise Nostrc Dame de Lirey, au diocese de Troyes,
faisans et representans les doyen et chappitre de lad. eglise, comme
ilz disoient, et assemblez ensemble pour faire, consentir, accorder et
promcctre ce que cy aprds sera cscript ; et ancor led, messire Nicole
dc la Rotiere, ou nom et comme procureur dcsd. doyen et chappitre,
deuement fondd par lectres de procuration d'iceulr doyen et chappi-
tre, faictes et pass6es soubz leurs seaulx..., ayant par icelles puissance
de faire et passer, consentir et promectre ce qui s'ensuit...; parmy
lesquelles lectres de procuration les lectres de noble seigneur Charles
de Noyers, seigneur de Vvatefale et de Seigney le Petit, cy aprds
nomm6, semblables a ces presentes, sont infichdes, d'une part, et led.
Charles de Noyers, d'autre ; et recognurent lesd. parties et chacune
d*elles avoir faictz entre elles accords, convenances, promesses,
traictiers et obligations qui s'ensuivent. C*est a scavoir que, moyen-
nant et parmy ce que led. Charles de Noyers, en son propre et priv6
nom a promis, doit et sera tenu de payer et bailler ausd. venerables
doyen et chappitre ou leur certain commandement pour eulx, dedans
la Sainct Remy, chef d*octobre prochainement venant, en la ville de
Troyes, la somme de huit cens ducas d'or bons et suffisans ou la
valeur d*iceulx en bonne monnoye qui les vaille ; lesquelz aultresfois
avoient est6 promis payer ausd. venerables par noble et puissant
dame ma dame Marguerite de Charny, contesse de la Roche et
dame dud. Lirey, suer dud. Charles de Noyers, avec autre somme
de deniers par certain autre traictid touchant le sainct Suaire de
Nostreseigneur Jhesucrist, estant jadiz pardevers elle, lequel est
le plus bel et notable joyau de lad. eglise et qui, long temps a, fut
prins en lad. eglise par lad. dame ou de par elle, et depuis par elle
alien6, dont iceulx doyen et chappitre querrent restitution, et Teust
lad. dame promis restituer a certaines peines dedans certain temps
pass6, dont elle n*eust rien faict ; et pour leurs interestz et dommages
leur eust icelle dame promis payer certain autre somme de deniers.
Et de ces choses eust faict et passdes lectres au proffit desd. venera-
bles, soubz le seel de lad. prevoste et autrement, et en eust estd et
soit ancor a present icelle dame excommunide ; et avec ce payer et
bailler par ledict Charles de Noyers ausd. venerables en lad. eglise,
dedans le jour de Sainct Remy, en lad. ville de Troyes, la somme
de trois cens livres t. monnoye courrant a present, tant pour Tinterest
txmu Atudi ciutiqub sur
que lad» e^ise a eu en ce que, a Toccasion dud. sainct Suaire noii
estant en lad. eglise, lea oblations d*iceUe egliae en ontest^maindres
et dont autreafois avoir est6 promts payer certaine somme d*argent,
eomme pour les fraiz de justice et autres fraiz a poursuir contre
lad. dame par lesd. venerables ; faire aussi avoir ausd. venerables
lectresetbulles de nostre sainct pere le Pape, contenant son autorit6
et consentement de povoir aliener ledict sainct Suaire, et le con--
sentement de reverend pere en Dieu monseigneur I'evesque de
Troyes, ordinaire dead, doyen et chappitre, sur le contenu esd.
bulles, affin que les successeurs d*iceulx doyen et chappitre ne autres
ne leur en puissent ou sachent valablement aulcune chose reprocher
ou reclamer ores ou pour le temps advenir. Et aussi que toutes les
lectres, obligations, executions, tant de court laye comme de court
d*eglise, qui obtenues ou levdes sont par lesd. venerables et a leur
profit contre lad. dame et ses pleiges, tant led. Charles de Noyers
comme autres, demorent et demoreront en leur force et vertu jusques a
plain payement et acomplissement des choses dessusd... et sans au*
cune innovation ou adnullation...; et que led. Charles a consenty...
pour lors estre admonest6 de Tauctoritd de monseigneur TofiBcial de
Troyes vioa voce^ ou cas qu*il n*aroit acomply et faict ceque diet est.
Iceulx venerables recongnoissans et mesmement led. mess* Nicole
dela Rotiere..., considerans qu'il est a eulx impossible de jamais
recouvrer ne avoir led. sainct Suaire, et que lesd. sommes de huit
cens ducas d*une part et trois cens livres d*aultre, ainsi promises
et accord^s par led. Charles de Noyers, seront emploi6ea au plus
profitablement que faire ce pourra en rentes et rcvenus pour lad.
eglise, et les reparations et ouvrages necessaires a faire es heritages
el edifices d*icelle eglise qui sont bien ruyneulx^ a Toccasion des
grans guerres qui long temps ont couru en ce royaulme, et aussi
en £aveur de ce que lad. dame et ses predecesseurs sont fondeurs
de lad. eglise, et les benefices d'icelle a la collation et disposition
totalle d'icelle dame, et que iceulx doyen et chappitre ne pourroient
gueresproffiter a la tenir excommuni^e touchant led. joyau et autres
promesses par ellefaictes, a quoy elle ne puet ne pourroit bonnement
satisfoire, ont voulu, consenty, accord^, octroy^ et promis, veulent,
consentent, accordent, octroyent et promectent aud. Charles de
Noyers que, en faisant par iuy et acomplissant tout ce que dessus
est diet, icelle dame sa seur et ses plaiges et cautions touchant les
ezcomunimeos, en quoy ilz eatoient et povoient estre encouruz
LB SUAIRE DB TURIN. XXXIZ
«oient relachez et tenuz en suspens jusques aud. jour de Sainct Remy
prochainement venant, et desmaintenant pour lors en faisant et
acomplissant ce que dessus est diet, consentent a leur absolution,
et si sont mis au neant desmaintenant pour lors et deslors pour
maintenant, en faisant ce que diet est, tout proems de court deglise^
executions, monitions et toutes autres lectres, traictiers et obli-
^tions qui sont et peuent estre faictes et pass6es... touchant led.
sainct Suaire et les dependances ; et seront rendues aud. Charles de
Noyers... lesd. lectres, obligations et tous aultres explois... comme
vaines, cass^es, nulles... Et demourent desmaintenant pour lors lesd.
dame et sesd. pleiges, en faisant par led. de Noyers ce que diet est,
quictes et deschargez entierement dud. sainct Suaire... ; et promis-
trent icelles parties..., c'est a scavoir lesd. venerables par leur foy
donn6e en parole de prestre, lamainmiseaupectz..., etled. Charles
de Noyers par sa foy donn6e es mains desd. notaires... ; sur peine
de tous coustz et dommages..., renoncans... En tesmoins de ce
nous avons seelld ces presentes lectres du seel et contreseel de lad.
prevost6, par le rapport desd. notaires, avec leurs signetz manuelz.
Ce fut faict le dixneufiesme jour de Janvier, Tan de grace mil quatre
Cens cinquante et huit. Ainsi signi : J. du Lutel et J. Tbevemin.
Archiirei de TAube, 9 G. 4, f* 93 ▼•-35. — Paris, Bibl. Nat., Coll. de Cham-
pagne, ▼. 154, f* 131, copie n6gUg6e du XVI* s.
6 fi&mer 1464..
Lectres de treshault et puissant prince mons^ le due de Savoye, par
laquelle faict assignation ausd, venerables de cinquante francs sur le
chastel Gaillard.
LUDOVicus, dux Sabaudie, Chablaysii et Auguste, sacri Romani
imperii princeps vicariusque perpetuus, marchio in Italia,
Pedemontium princeps, Gebennensis et Baugiaci comes, baroque
Vaudi et Foucigniaci, ac Nicie, Vercellarum, Friburgique dominus,
universis modernis et posteris, rei geste noticiam cum salute. Oblata
nobis supplicatio pro parte venerabilium oratorum nostrorum de-
cani et capituli ecclesie collegiate Beate Marie de Lireyo, Trecensis
diocesis, in effectu continebat, quod pridem agente in humani$
XL iTUDI CRXTIQUB 8UR
spectabili milite dom. Jofiredo de Charny, domino de Savoisi et
dicti loci de Lireyo, ipse apectabilia miles pia devotione molus, inter
alias reliquias per eum tunc coUatas ipsi ecclesie, dedit et largritus
est quoddam sacratissimum Sudarium, effigiem Salvatoris et Re-
demptoris nostri Jhesu C[h]risti representans , per decanum ct
capitulum ipsius ecclesie per eum fundate, tunc et in futurum exis-
tentesy custodiendum, pro devotione et salute animarum ipsius, ac
benefactorum ecclesie predicte ; etiam ut ex illius custodia ecclesia
ipsa frequentius et libentius a Xpisticolis visitaretur, et ipsorum
deemosinis divinus cultus uberius augeretur. Quod quidem devo-
tissimum et colendum Sudarium, metu guerrarum tunc ibidem
vigentium, per decanum et canonicos ipsius ecclesie pro tunc, repo-
situm extitit custodiendum in manibus ct potestate quondam spec-
tabilis militis dom. Humberti, comitis Ruppis et domini loci predicti
de Ureyo ; qui morte preventus, illud spectabili domine Margarete
de Cbamy, ejus quondam uxori, reliquit ; quod exinde dicta dom.
Margareta apud nos transtulit. Subjungentes prefati decanus et
capitulum, eorum predictam ecclesiam varia damna et reddituum
attenuationem ex hoc sustulisse, et presentialiter sustinere ; suppli-
cantes hoc ideo, ut premissorum consideratione ipsum devotis-
simum reliquiarium sibi restituere, aut saltem oculos nostros pie et
misericorditer erga eos divertere dignaremur. Pro qua re nobiscum
tractanda, concordanda et pa8ci[s]cenda ac condudenda, impre-
sentiarum ad nos specialiter transmiserunt venerabiles viros dom.
Nicolaum de la Rothiere et Johannem Larrecier, presbyteros, dicte
ecclesie concanonicos, a decano et toto capitulo prementionato
sufficientem potestatem circa hec habentes, confirmatam et obser-
vari promissam per reverendum in C[h]risto patrem et dominum
dom. Ludovicum, modernum Trecensem episcopum, ejusque offi-
cialem, constantibus tribus publicis licteris, signatis et debite sigil-
latis, de quibus promptam et validam fidem fecerunt, easque penes
nos reliquerunt. Nos itaque dux prefatus, audita eorum supplica-
tione predicta, cupientes eosdem graciis et favoribus amplecti, ut
perinde suas solitas orationes et deprecationes valeant continuare,
3rmo etiam augmentare, in honorem sanctissime et individue Trini-
tatis, et gloriosissimc Virginis Marie, ad cujus exultationcm ecclesia
predicta fundata extitit, ut premictitur, et ne ob remissionem seu
translationem per ante latam quondam dom. Margarctam, de dicto
sanctissimo Sudario, ut prefertur, nobis factam, jacturam patiantur,
LE SUAIRE DE TURIN. XU
pioque et sincero devotionis zelo, aliis etiam multis laudabilibus
considerationibus animum nostrum quoad bee moventibua, et quia
sic fieri volumus et nobis placet, dictis decano et capitulo ecdesie
prcdicte collegiate de Lireyo, seu prenominatis dom. Nicolao et
Johanni, nunciis et procuratoribus eorum propterea ad nos specia-
liter transmissis, hec omnia, nomine quo agunt, evident! utilitate
dicte ecclesie pensata, acceptantibus et recipientibus, et sic agen-
tibus et fieri assentientibus, ex nostra certa scientia, motu proprio,
ac pro nobis et nostris heredibus et successoribus universis, damns,
donamus, largimur, conferimus, et in elemosinam ac honorem
C[h]risti omnipotentis, proque salute et remedio animarum illus-
trium progenitorum, nostrique et nostrorum perpetuo successorum,
concedimus et erogamus per presentes quinquaginta francos auri
p[arvi] p[onderis] monete nostrc Sabaudie annuales, deinceps per
dictos decanum et capitulum, seu eorum procuratores legitimos, ac
eorum in dicta ecclesia successores, annis singulis imperpetuum
ievandos et percipiendos in quolibet festo sancti Andree apostoli,
primo solutionis termino in instanti dicti beati Andree apostoli
festo incipiente; in videlicet et super preysiis, exitibus, valoribus
et aliis quibuscumque emolumentis castri nostri Gailliardi prope
Gebennam, et mandamenti ejusdem, quos, quas et que dictis
decano et capitulo, et suis imperpetuum successoribus propterea
specialiter et expresse, ac pro nobis et nostris predictis heredibus
et successoribus, seu causam habentibus, obligamus et ypothe-
camus per presentes. Et hiis mediantibus, dicti decanus et
capitulum, amodo inantea celebrare tenebuntur et sui in dicta
ecclesia successores, in magno altari dicte ecclesie, pro salute et
remedio animarum illustrium progenitorum, nostrique et nostrorum
successorum predictorum, quolibet mense quamdiu fuerimus in
humanis unam altam missam de Spiritu Sancto, et post hujus
carnis humane nostrum egressum de mortuis, cum coUectis
solitis et debitis. Et ita facere promiserunt et convenerunt prefati
nuncii et procuratores, nomine quo supra, tactis Evangeliis sacro-
sanctis, in presentia consiliariorum nostrorum subscriptorum, sine
omissione aliquali, conscientias suas et suorum in dicta ecclesia
successorum propterea onerando. Mandantes idcirco castellano
nostro dicti castri Ga[i]lliardi et mandamenti, presenti et qui pro tem-
pore fuerint, seu ipsorum locatenentibus, sub pena quingentarum
marcharum argenti pro quolibet, quatenus prementionatos quin-
XLO trvm ouTiQui sur
qaaginta francos aari p. p. dicUs decano et capitulo, seu ipsorum
legitimis procoratori aut procuratoribus, amodo inantea singulis
annis imperpetuum , in festo predicto sancti Andree apostoii
soWanti liberent et realiter ac integraliter expediant, in et super
preysiis, exitibus et aliis proventibus dicti castri nostri Gailliardi,
et mandamenti ejusdem ; sic quod merito babeant contentari, reci-
piendo tamen per ipsos castellanos, a prefatis decano et capitulo,
seu procuratoribus eorumdem, in prima solutione, cum copia pre*
sentium debite tabellionata» licteram quictationis ; in aliis autem
sequentibus soluttonibus, confessionem de recepta duntaxat oppor-
tunam. Et nos hujusmodi quinquaginta francos, quos ut premittitur
annuatim persolverint, eisdem castellanis suis in computis propterea
reddendis, per dilectos fideles consiliarios, presidentem et magistros
camere computorum nostrorum predpimus et jubemus indifficiliter
allocari, sine exceptione et di£BcuItate quibusvis, premissa sic fieri
et observari volentes, pro nobis et nostris predictis heredibus,
successoribusque seu causam habentibus ; quibuscumque regulis,
statutis et constitutionibus dicte camere, oppositionibus, exception
nibus, assignationibus etassignationuminterruptionibus,licterisque»
mandatis et aliis omnibus in contrarium forte facientibus, et imper-
petuum inadvertenter concedendis, sub quacumque verborum forma
et intellectu, rejectis penitus et non obstantibus. Quibus omnibus
ex nunc prout ex tunc, ac pro nobis et nostris predictis, sub quorum
onere hujusmodi largitionem nostram remictimus, post nostrum
decessum predictum, protinus omnino et expresse derogamus, et
derogatum fore volumus per presentes. Datum Parisius, die sexta
februarii, anno Domini millesimo quatricentesimo sexagesimo quarto
a Nativitate sumpto. Sic signatum : J. Bolomyer, Gyport ; et in
capite : Loys ; et in infimo diet, licterarum scribitur : Per dominum,
presentibus dominis Aymerico episcopo Montisregalis, B. episcopo
Niciensi, Jobanne de Compesio, cancellario Sabaudie, Anthonio de
Flisto, apostolico prothonotario, Amblardo de Viriaco, abbate Habun-
dantie, Anthonio Piocheti, cantore Gebennensi, Urbano Bon[i]vardi,
priore Sancti Victoris, Jacobo Richardi, presidente, Humberto
Vellueti, presidente Gebennensi, Jobanne domino Bastite, magistro
hospicii, Anthonio Campiois et Johanne Maleti, thesaurario.
Archive! de l*Aube, 9 G. 4, f» i6 v*-i8. — Paris, Bibl. Nat., CoU. de Champa-
gne, V. 154, ^ 164 ; Coll. De Camps, ▼. 124, f» 336 (150)1 vidimus du 5 d^c.
1467. — Gamuzat, op. cit., f* 433 ; Chifplit, op. dt., p. 111-7 i Puno, op. cit.,
1. 1, p. 243-9, ^^* P* 350-60.
It 8UAIRE DB TURIN. SUtt
AA
33 mai 1464.
Aultres lectres dudict prince^ au dos desquelles est escript :
A venerables noz trescbiers et especiaulx amys les doyen et
chappitre de Teglise de Lirey.
VENERABLES^ trcschiers et especiaulx amys. Nagueres, ainsi que
savezy en recompense du sainct Souaire, lequel feue dame
Marguerite de Charny nous a bailld, vous avons assign^ certaine
somme d*ai*gent perpetuelle, laquelle voulons entierement estre
observ6e» car ainsi est nostre vouloir. Et ce non obstant, ainsin que
avons entendu, n*avez voulu consentir a Tabsolution d*un nommd
Pbillebert Tbibault, jadiz secretaire et serviteur de lad. dame Marg.,
lequel avoit pieca pleigd icelle dame envers vous a rendre led. sainct
Souaire ; et d*autre part aucuns de vous publiez que ladicte dame est
excommunide, dont nous sommes bien merveilieux, actendu les pas-
cbes derrenierement entre vous et nous sur ce faictes. Sy vous prions
bien afifectueusement que dorenavant de telles cboses vous veuillez
abstenir et consentir a Tabsolution dud. Pbillebert et aussi de lad.
dame Marg., se mestier seroit. Et en ce faisans, vous ferez vostre
debvoir et a nous tressingulierement service et plaisir. Et quant
aucune cbose vouldrez, nous le ferons de bon vouloir. Aydant le
benoist sainct Esperit, venerables, trescbiers et especiaulx amis, qui
vous ait en sa saincte garde. Escript a Paris, le xxiij* jour de may,
mil IIIJ^ LXIIIJ.ilinst signi-: Le due de Savoye ; et au bos est escript:
Latour do (al. Latoryer).
Archives de TAubc, 9 G. 4, f* 19 r*. — Coll. de Champagne, ▼. 1549 ^ 167.
BB
14 mai 1473.
Procuration passie par les subsequent doyen et chanoines^ affin d'aller
pardevers ma dame la duchesse de Savoye, vesve dud, prince.
IN nomine Domini, amen. Per hoc presens publicum procurato-
rium instrumentum cunctis pateat evidenter et sit magnifestum,
quod anno ejusdem Domini mill'o quadringentesimo septuagesimo
XUT AtUOS CRITIQUI 8UR
lercio, indictione sezta, mensis vero maii die decimaquarta, pontifi-
catus sanctisaimi in Xpiato patris et domini nostri dom. Sixti, divina
proyidentia pape quarti, anno aecundo. In nostrum notariorum...
preaentia propter hoc peraonaliter constituti venerabiles et discreti
viri domini et magiatri Jacobaa Martin, decanus, Evrardus de Cam-
pi8| Jacobus Dorey, in legibus iicentiatus, Johannes Larrecier et
Nicolaus Mergey, presbiteri, canonici ecclesie collegiate Beate Marie
de LireyOi Trecen. diocesis, capitulum suum tenentes et represen-
tantes in ecclesia Trecensi, ex eorum certa scientia..., dilectos suos
et fideles, venerabiles et discretos viros dominos et magistros Mar-
cum de Vaudrey, presbiterum, in decretis licentiatum, prothono-
tarium domini nostri pape canonicumque et archidiaconum ecclesie
Bisuntinen., et Hugonem Mergey, in artibus magistrum, eorumque
quemlibet insolidum, latorem seu exhibitorem presentis publ. pro-
curatorii instrumenti, ... suos fecerunt, constituerunt, vocaverunt,
nominaverunt, ordinaverunt et elegerunt... procuratores generates
et nuncios speciales, scilicet specialiter et expresse ad, nomine diet,
constituentium et pro ipsis, accedendum ad illustrem et excellentem
principem dominam ducem Sabaudie, in cujus manibus et potestate
quoddam jocale preciosissimum vocatum sanctissimum Sudarium
nostri Salvatoris et Redemptoris Jhesu Christi, ad dictam ecclesiam
de Lireyo spectans et pertinens, est et evenit, eidemque domine
illud preciosissimum jocale petendum et requirendum et possetenus
recuperandum» necnon ad petendum, requirendum, habendum et
recipiendum nomine diet, constituentium et pro ipsis ab ipsa excel-
lenti domina aut aliis quibus decebit, sommam quinquaginta fran-
corum auri p[arvi] p[onderis] monete Sabaudie, anno quolibet per
nunc defiinctum illustrissimum et nobilissimum dominum dom.
Ludovicum, dum viveret ducem predicte Sabaudie, eisdem consti-
tuentibus et eorum ecclesie de dicto Lireyo assignatos imperpetuum
annis singulis, levandos et percipiendos in festo beati Andree apos-
toli in et super preysiis, exitibus, laboribus et aliis quibuscq. emo-
lumentis castri Gaillardi prope Gebennam, prout latius in licteris
dicti defuncti dom. Ludovici, nuper ducis dicte Sabaudie, super hoc
confectis, dictis constituentibus et eorum ecclesie concessis, conti-
netur ; necnon etiam petendum arrcragia per ipsum defunctum dom.
Ludovicum et suos heredes debita, ex et pro causis predictis, pro octo
annis nunc finitis. Ipsamque illustrem et excellentem dominam et
suos heredes... de eadem summa quinquaginta francorum auri... per
LE 8UAIRE DB TURIN. XLV
eosdem procuratores... recepta et habita recipiendum, quictandum
et se ab eisdem pro contentis... levandum et habendum ; Ucterasque
quictancie validas, utiles et opportunas... passandum et conceden-
dum; et generaliter... ; promitentes dicti constituentes... per fides
suas propter hoc in verbo veritatis et sacerdocii, manibus pectoribus
suis corporaliter prestitas ac sub hypotheca... se ratum etgratum
habituros... quicquid per dictos procuratores... erit actum, dictum,
gestum, factum, receptum, quictatumve... De et super quibus...
petierunt.. sibi fieri atque tradi publ. instrumentum... Acta fiierunt
hec Trecis, in ecclesia Trecensi... Et ego Stephanus Seguini,
Trecen. clericus, publicus auctoritate apostolica notarius curieque
Trecen. tabellio,... presens... fui..., ideo presens publ. procurato-
rium instrumentum, alia manu fideliter scriptum, me alias legitime
impeditum manu mea propria subscripsi signoque meo publico et
fieri consueto... signavi, in fidem et testimonium premissorum...
Et deinde sequitur : Et ego Johannes Vitot, clericus Trecen., publ.
auctoritate apostolica curieque Trecen. notarius juratus, ... hoc
presens publ. instrumentum inde confectum manu mea propria
fideliter scriptum signo publico et subscripttone meis... subscripsi
et signavi...
Archives de TAube, 9 G. 4, f* 19 v* -ai r*. — Coll. de Champagne^ ▼. 154,
f> 167 ▼•.
GC
Cardinalis de la Rovere, De sanguine Ckristi.
Consimilis etiam ratio adduci posset de Sudario in quo Christi
corpus fuit circumvolutum, cum fuit e cruce depositum, quod est
apud duces Sabaudie magna cum devotione custoditum, quodque
est Christi sanguine rubricatum.
Argument enfaveur de la proposition suivante : Non fuit necessa-
rium neque congruum ut totus Christi sanguis efifusus in passione
ipsius ab eo resurgente reassumeretur.
Romee, per Philippum de Lignamine, 1473 (voir le Regisirum k la fin du D§
poUntia Dei) ^ a mazime » r« (Bibl. Nat., D. 48a).
JJUfl AtUOX CRITIQUI 8UR
DD
Voyage de tarchiduc d'Auiriche^ Philippe le Beau^
par Antoine de LAXjaNO, seigneur de Montigny.
Le jour du sainct et graadt venredi [14 avril 1503] hx presch^e
la passion en la cbappelle de Monaigneur [Philippe le Beau], par son
confesseur, oyans lui, le ducet la ducesse. Puis all&rent en grande de-
votion aux hallesde laviUe[deBourg-en-Bresse],oi!i ungtrte grandt
peuple escoutoit preschier la passion par ung Cordelier. Apr&s quoy,
trois ^vesques monstr&rent publicquement le sainct Suaire de nostre
Signeur Jhesu Crist ; et apr&s le service, fu monstr6 en la chapeUe de
Monsigneur. C'est, ce me samble, entre les choses devotes, la plus
devote et comtemplative chose qui soit sur terre. C*est le rice 83rndont
et noble Suaire achetd par Joseph d*Arimathie, long de seize a dix-
sept pieds, large de sept pieds ou environ, od il Tensepvelist avec
Nycodesme quand iU le eurent ostet de la croix. On le voidt cl6re-*
ment ensanglent6 du tr&s precieux sang de Jhesus, nostre R6demp«
teur, comme se la chose avoit est6 faicte aujourd*hui. On y voidt
rimprimure de tout son tris sainct corpz, teste, viairc, bouce, yeulx,
nezy corps, mains, pieds et ses chincq playes : esp6cialement cdle
du co8t6, longue environ d'ung bon demi piedt, est fort ensanglent6e;
et de Tautre part, comme il estoit convert et redoubl6 dudict linchoel,
on voidt le vestige et figure de son dos, teste, chevelure, coronne et
espaules. Et pour esprouver se c'est le mesme, on Ta boulit en huille,
boutd en feu et buet par pluseurs fois ; mais on n'a pent effachier
ne oster ladicte imprimure et figure.
Chap. ziY, dans CoUecHon d$$ voyagu des Souviraim d$$ Pt^t'Beu (Bmzellea,
1S76), 1. 1, p. aS6.
EE
Tenor officii sanctje Sindonis Jesu Christi.
Ad VesperaSf supra Psalmos, antiphona,
Gaude, felix laeta Sabaudia,
Sindonis dabis mundo gaudia ;
Gaude, tota mater Ecclesia,
Novas laudis agens solennia. Alleluya.
Cceteroe antiphonce accipiuntur in Laudibus.
LE 8UAIRB DE TURIN. ZLVII
Psalmi Vesperorum. Credidi. Ad Dominum. Eripeme. Domine,
damavi. Voce mea.
Capitulum. Acceperunt Joseph et Nicodemus corpus Jesu, et
ligaverunt illud linteis cum aromatibus, sicut mos est Judaeis sepe-
lire. Deo gratias.
Hymnus.
GAUDE, mater Ecclesia, Aurum in petra latuit,
La&tam agens memoriam, Ut sol fiilgens sub modio,
Quae Sindonis solennia Christus jacuit triduo,
Mittis ad coeli curiam. Sic involutus Sindone.
Joseph, relicto palio, Lectus regis Salomonis,
Liber fugit ; nova arte (i), Ceila plena aromatum,
Derelicto jam linteo, Vellus fusum Gedeonis,
Christus surrexit a morte. Hortus clausus carismatum.
Tempore Paschali. Tempore Ascensionis.
QuassumuSy auctor omnium. Memento nostrum.
Vers. In hac sancta Sindone adoramus te, Domine, alleluya.
Resp, Tuam gloriosam recolimus passionem, alleluya.
Ad Magnificat, Pontifex sacerdos maximus, super cujus caput
fusum est unctionis oleum, et cujus manus in sacerdotio consecrates
sunt, vestitus est Sanctis vestibus, alleluya.
Oratio. Omnipotens sempiteme Deus, qui in memoriam passionis
Unigeniti filii tui, sanctam ejus Sindonem, cum expressa ipsius effi-
gie, venerandam reliquisti in terris : tribue quaesumus nobis, ut per
virtutem ejusdem sanctas Sindonis, faciem tuam contemplari merea-
mur in coelis. Per eundem Dominum.
Ad matutinas, Invitatorium, Christum regem, in sepulcro involu-
turn Sindone, venite adoremus, alleluya. Psalmus. Venite.
Hymnus, ut in Vesperisi Gaude mater.
In prima nocturno. Antiphona. Rebecca colli Jacob nuda contexit.
Virgo filium pannis inrolvit, alleluya. Ps. Cum invocarem.
Ant. Rahab sub ligno explorantes abscondit. Plebs fidelis Christi
effigiem linteo impressam suscepit, alleluya. Ps. Domine quis habi-
tabit.
Ant. Samuel accinctus Ephot lin(t)eo, ante faciem Domini minis-
trabat. Christus pra&cinctus linteo discipulorum pedes lavabat, alle-
luya. Ps. Conserva me.
(i) D*aprte V Errata il faut lire a arte nova t, contraire h la rime.
XLVUl irUDB CRITIQUE 8UR
V«r«. In hac sancta Sindone adoramus te, Domiae, allduya.
Rnp, Tuam fl^oriosam recolimus passionem, allduya.
Sanctus Thomas db Aquino, super quatuor Evanoeustis, ex
variis ecclxslb sacri8 doctoribus.
LeUio prima. Postquam Evangelista Matheus (ut gloaa ait) retulit
ordinem Dominican passionis et mortem, nunc agit de ejus sepul-
tura, dicens : Cum autem vespere factum esset, venit homo quidam
dives ab Arimathia, nomine Joseph, qui et ipse discipulus «rat Jesu.
Ut autem Rhemigius super Matheum ait, Arimathia ipsa est civitas
Samuelis, qus sita est in regione Chana(ma)nea, juxta Diespolim,
qam secundum Hieronymum super Marcum, interpretatur depo-
nens. De qua fuit Joseph, qui venit ad deponendum corpus Christi
de cruce. Hie autem, teste Rhemigio, secundum seculi statum,
magns fuit dignitatis, sed multo majoris meriti apud Deum fuisse
laudatur, Siquidem Justus fuisse describitur. Decebat quippe eum
talem existerei qui corpus Domini sepeliret, quantus per justitiam
meritorum dignus esset tali officio. Et secundum Bedam, super
Marcum, per nobilitatem potential secuiaris, facultatcm posset obti-
nere ministrandi. Ideo dicitur quod crat nobilis decurio, expectans
regnum Dei. Decurio autem vocatur, quia sit de ordine Curiae, et
officium Curiae administraret. Non enim quilibet ignotus, aut me-
diocris, ad praesidem Romanae potestatis accedere poterat, et Cruci-
fixi corpus impetrare. Ut autem in alio Evangclio ait Hieronymus :
Joseph iste Boulites appellatur, id est consiliarius, sive vir magni
consiliiy quia non acquievit Judaeorum pravo consilio, de quo qui-
dem putant primum Psalmum fuisse compositum : Beatus vir qui
non abiit in consilio impiorum. Tu autem, Domine.
Resp. Mulier sapiens operata est opere manuum suarum, digiti
ejus apprehenderunt fusum, Sindonem fecit et vendidit, allcluya.
Vers. Hanc Justus Joseph ab Arimathia mercatus est Sindonem,
quam fecit.
Lectio secunda. Marcus provide in evangclio ait : Joseph autem
mercatus est Sindonem, et deponens eum involvit in Sindone. Su-
per quae Hieronymus in Omclia ait : Pretiosum^ corpus, prctiosc
sepeliens, cum esset discipulus Domini, sciebat qualiter corpus
Domini honorari dcberct. Idem vero super Marcum : Ex simplici
sepuitura Domini, ambitio divitum condemnatur, qui nee in tumulis
quidem possunt carere divitiis. Possumus autem juxta intelligcn-
tiam spiritualem et hoc sentire, quod corpus Domini non auro, non
LE SUAIRE DE TURIN. XLIX
gcmmis, non serico, sed linteamine puro obvolveadum sit, quam-
quam et hoc significat, quod ille in Sindone munda involvit Jesum,
qui pura mente eum susceperat. Vel alitor, secundum Remigium,
quia Sindon lineus pannus est, linum autem ex terra procreatur, et
cum magno labore ad candorem perducitur, quo designatur quia
corpus illius, quod ex terra, id est ex Virgine sumptum est, per
laborem passionis pervenit ad candorem immortalitatis. Tu autem.
Resp^ Noe nudatus jacuit, quod cum vidisset Cham, patrem deri-
dens, nunciavit fratribus suis, Sem et Jaffet, qui palio operuerunt
eum, alleluya.
Vers. Quem Judasi nudaverunt, Joseph et Nicodemus in Sindone
munda involverunt. Qui palio.
Lectio III, Hinc autem (ut Rabanus ait) Ecclesiae mos obtinuit,
ut sacrificium altaris, non in serico, neque in panno tincto, sed in
licio terreno celebretur, ut a beato papa Silvestro legimus esse sta-
tutum. Secundum autem Hilarium, justiciar Joseph apostolorum
habet speciem, hie in munda Sindone corpus involvit quidem, in
linteo reperimus, de coelo ad Petrum, universorum animantium ge-
nera submissa : ex quo intelligitur, sub lintei illius nomine, conse-
peliri Christo Ecclesiam. Ut autem ait Origines, non fortuito scrip-
turn est, quoniam involvit corpus in Sindone munda, et posuit in
monumento novo, et advolvit lapidem magnum, quoniam omnia
qutt sunt circa corpus Jesu, munda sunt et nova, et omnia magna
valde. Tu autem. '
Resp. Cecidit super Petrum mentis excessus, et vidit coelum aper-
tum, et descendens vas quoddam, velut linteum magnum quatuor
iniciis submitti de coelo in terram, alleluya.
Vers. In hujus quippe lintei nomine, Christo consepelitur Eccle-
sia, alleluya. Vers. Gloria Patri, alleluya.
In secundo noctumo. Antiphona. Posuit Moyses velamen super
faciem suam. Milites vero velaverunt faciem Christ!, et conspuentes
colaphis eum ceciderunt, alleluya. Ps. Domini est terra.
Antiphona. Samson viros vestibus spoliavit. Joseph vero ab Ara-
mathia Christum in Sindone munda involvit, alleluya. Ps, Dominus
illuminatio.
Antiphona, Tulit mulier velamen, et posuit super os putei. Joseph
vero advolvit saxum magnum ad ostium monumenti, alleluya. Ps.
Exaltabo te Deus.
Vers. Joseph et Nicodemus acceperunt corpus Jesu, alleluya.
L ^TUDB CRITIQUS SUR
Re$p. Et ligaverunt illud linteis, cum aromattbus, alidttya.
Lectio IV. Sequimr in Evangelio Marci : Et posuit cum Joseph in
moQumento, quod erat excisum ia petra, et advolvit lapidcm ad
ostium monumenti. Unde (ait Hieronymus) sepoltura Christi, resur-
gimus decensione ejus ad Inferos, nos ascendimus ad Coolos; huic
enim (ut in libro Judicum dicitur) invenitur mel in ore leonis mortui.
Theophilus vero vos (t) admonet, dicens : Incitemus in nos Joseph,
recipientes Christi corpus per unitatem, et ponamus iilud in«moau-*
mento exciso de petra, in anima memorante, et non obliviscente
Deum. Ilia enim anima ex petra excisa est, id est ex Christo, qaas
continet firmitatem. Involvere etiam dd>efflus ipsum in Sindone, id
est in corpore puro su^cipere. Sindon namque est corpus, quod est
corporis indumentum : decet enim non solum puram animam cor-
pus Christi suscipere, sed ia corpore puro. Involvere autem oportet,
sed non aperirei nam secretum dausum est et occultum. Tu autem.
RMp* Daniel levavit oculos suos^ et ecce vir unus vestibus lioeis,
et renes ejus accincti, alleluya.
Vers. Hunc Joseph et Nicodemus ligaverunt lintris, cum aroma-
tibus, sicut mos est Judasis sepelire. Et renes.
Lectio V. Quia vero (ut ait Cbrisostomus) brevitate temporis
urgebantur, nona enim hora, mortuo Christo, deinde accedentibus
ad Pilatum et deponentibus Christi corpus, vespera imminebat, ideo
posuerunt eum in proximum monumentum. Unde subditur : Erat
autem in loco ubi crucifixus est hortus, et in horto monumentum
novum, iti quo non[dum] quisquam positus fuerat, quod divina dis-
pensatione factum est, ne alterius alicujus qui cum eo jaceret, exis-
timaretur resurrectio facta esse : sicut etiam (ut ait Augustinus) in
Maris virginis utero, nemo ante ilium, nemo post ilium susceptus
est. Per hoc etiam (secundum Theophilum) quod novum fuit sepul-
chrum, datur intelligi, quod per Christi sepulturam, omnes inno-
vamur, morte, corruptione destructa. Attende etiam eum abundan-
tiam pro nobis suscipere paupertatis, nam qui in vita domum non
habuit, post mortem quoque in alieno sepulchro reconditur, et k
Joseph operitur. Tu autem.
Resp, Sapientia stragulatam vestem fecit sibi, bissus et purpura
vcstimcntum ejus ; Sindonem fecit et vendidit, et angulum (a) tradi-
dit Cananeo, alleluya.
Vers, Joseph dcponens eum involvit SindonCf et posuit in monu-
mento. Et angulum (2).
(1) Lire not. — (a) Uu cingulum.
LE SUMRE D£ TURIN. LI
Lectio VL Postea sequitur : Ibi, ergo, propter Parascevem Judaeo-
ram, quia juxta erat monumcntum, posuerunt Jesum. Ubi Augus-
tiaus ait, acceleratum, vult iatelligi sepulturam, ac vesperasceret,
quando jam propter Parascevem (quam coenam Judaei, Latini coavi-
vium vocant), facere aliquid non licebat; propiaquum autem (secun-
dum Chrisostomum) fuit sepulchrum, ut^iscipuli possent; cum
facultate accedere et consideratores fieri eorum, qus fiitura erant in
resurrectione^ et non solum ipsos, sed ut etiam inimid tunc testes
sepulture essenty custodientes sepulchrum, et ut falsus ostenderent
is, qui erat de furto sermo. Justitias autem Joseph, apud Bedain
apt6, interpretatur per acceptlonem boni operis : quo monemur , ut
corpus Domini dign^ percipere mereamur . Hinc Tlieophiius ait :
Tunc etiam quodammodo Christus apud avaros mortificatur in pau-
I>ere fiamem patiente. Es1k> ergo Joseph, tcgt Cfaristi nutlitalem noti
semel, sed in tuo tumulo spirituali considerando reconde et cooperi,
ct misce mirrham et aloem amaricantia, considerando vocem iUam :
Ite maledicti in ignem sternum^ quia nihil amarius existimo. Tu
autem.
Re^. Quis est iste qui venit de Edon, tinctts vestibus de Bosra,
sicut calcantium in torculari > Iste formosus in stola sua, gradiens
in multitudine virtutis suas, alleluia.
Vers. Milites exuerunt ilium purpura, quem Joseph et Nicodemus
sepdierunt in Sindone munda. Iste formosus. Gloria Patri, alleluya.
In teriio nocturno, Antiphona. Apprehcnderunt Philistini Sanson,
et vinctum catenis clauserunt in carcere* Quem Joseph et Nicode-
mus ligaverunt lintels, et posuerunt in monumento, alleluia. Psal.
Deus in nomine.
Antiphona. Rex Babilonis Sedechiam regem vinxit compedibus,
et posuit in domo carceris. Pilatus autem ait: Ite, custodite sicut
scitis^ alleluia. PsaL Notus in Judaea Deus.
Antiphona. Missus est Hieremias caesus in carcerem. Abientes
autem principes Sacerdotum, miserunt, sepulchrum signantes cum
custodibus, alleluia. Ps. Domine Deus salutis.
Vers, Joseph, accepto corpore, involvit illud in Sindone, alleluia.
R€sp. Et posuit illud in monumento suo novo, q4K>d exciderat in
petra, alleluia.
Lectio VII. Secundum Joannenu In illo tempore, rogavit Pilatum
Joseph ab Arimathia, eo quod esset discipulus Jesu, occultus autem
propter metum Judaeorum, ut toUeretur corpus Jesu* et pennisit
UI irUDE CMTfQUB 8UR
Ptiatus, et reliqua. Ezposmo Evanobui bz varus Ecclesle sacris
DocTORiBUs. Ut enim Chrisostomus in Omelia ait : Existimans Jo-
seph extiactum esse Judsorom furorem, Christo cracifixo, cum
fiducia accessit ad Pilatum, ot deponendum funus procuraret, eo
quod esset discipulus Jesu, non ex daodecim, sed ex septuaginta.
Sed quomodo nullus ex duodedm, et si timorem Judsorom quis
pro caosa assumpserit, hie eodem detinebatur timore, unde didtur :
occultus autem propter timorem Judsomm. Ut autem Graecus super
Lucam, fuerat quandoque Joseph occultus Christi discipulus, deni-
que vinculum timoris rumpens ferventior factus Dominicum corpus,
turpiter pendens, k ligno deposuit, comparans pretiosam margari-
tam, verborum modestia. Et secundum Marcum : Audacter introi-
vit ad Pilatum, et petiit corpus Jesu. Super quo Theophilus ait :
Audet ausum laudabilem, non enim excogitavit : a divitiis deddans
et expellar a Judaeis, si corpus petam ejus, qui est blasphemus con*
demnatus. Hinc et in Omelia Hieronymus : Inspice hujus viri forti-
tudinem, in mortis enim periculum se tradidit, inimicitias omnes
assumens, propter benevolentiam Christi ; et non solum audet coi>
pus Christi petere, sed et sepelire ; unde sequitur : Et accepit corpus
Jesu, et involvit eum in Sindone munda. Augustinus vero de con-
cordantia evangelistarum ait : In extremo illo offido funeri exhi-
bendo, minus curavit de Judsis, quamvis soleret in Domino
audiendo, eorum inimicitias devitarc. Hinc Beda in Omelia ait :
Sedata quacunque Judaeorum s»vitia,eo quod se advcrsus Christum
praevaluisse gaudebant, corpus Christi petiit Joseph, quoniam non
videbatur causa discipulatus, sed pietatis venisse, ut fiineris offidum
impenderet, quod homines non solum bonis, sed etiam malis solent
impendere. Tu autem, Domine.
Resp. Videntes Joseph fratres ejus, nudaverunt eum tunica talari
et polluta (i), quam in sanguine hoedi tinxerunt, miseruntque in
cisternam. Alleluia.
Resp. (a) Erat autem tunica inconsutilis, desuper contexta per tO"
turn. Miseruntque.
Lectio VIIL Adjungitur autem ipsi Joseph , secundum Bedam ,
Nicodemus ; unde sequitur : Venit autem et Nicodemus, qui venerat
ad Jesum nocte primum, ferens mixturam mirrhas et aloes, quasi
libras centum . Ubi Augustinus ait : Non ita distinguendum est,
(i) Lift polimita. — (3) Lire Vers.
LS 8UAIRE »E TUIUN. LIU
ut dicamas primum ferens mixturaai mirriis» sed ut quod dictum
est primum ad superiorem sensom pertineat* Venerat enim ad
Jesum Nicodemus nocte primum : quod idem Joannes narravit in
prioribus Evangelii sui partibus, hoc ergo intelligendum ad Jesum,
non tunc solum, sed tunc primum venisse Nicodemum, venisse
autem postea ut fieret audiendo discipulus ; fuerunt autem pigmenta,
quas maxime ad corpus apta sunt, quae plurimum conservare solent
et non permittere cito subjici corruptioni ; adhuc entm ut de nudo
homine disponebant, sed tamen nuUam dilectionem demonstrabant.
Tu autem.
Resp. David accinctus Ephor (i) lineo, obtulit holocausta coram
Domino et pacifica, quem Micol filia Saul humilitatem prospiciens
despexit. Alleluia.
Vers. Praetereuntes blasphemabant cum, moventes capita sua.
Quem Micol.
Lectio 8 (2]. Sequitur autem, ut Evangelistaait : Acceperunt ergo
corpus Jesu et ligaverunt eum linteis, sicut mos est Judaeis sepelire.
Super quo Augustinus ait : Evangelista admonuit in hujusmodi
officiis, qu» mortuis exhibeatur, morem cu)uscunqae gentis esse
servandum : erat autem iliius gentis consuetudo ut corpora mortuo^
rum variis aromatibus condirentur, ut diutius servarentur illaesa.
Hinc idem de concordantia Evangelistarum ait : Neque autem hie
Joannes aliis repugnat, neque enim illi qui Nicodemum tacuerunt,
affirmaverunt a solo Joseph Dominum sepultum, quamvis solius
commemorationem fecerunt ; aut quia ilia una Sindone a Joseph
involutum dixerunt, propterea prohibuerunt intelligi, et alia lintea
potuisse afferri a Nicodemo et superaddi, ut venim narret Joannes,
quod non uno linteo, sed linteis involutus sit quamvis et praeter
Sudarhim, quod capiti adfaibebatur, et instrtas fuisse quibus corpus
totum alligatum esset, et quia omnia de lino erant, etiam quod
vere Sindon ibi fuit, veracissime dici potuit : ligaverunt linteis;
lintea quippe generalxter dicvatur, quas lino texuntur. Tu autem.
Rap. Ingressns Aaroo tabemaciilom, ot olocausta offerret super
altare Domini pro peccatis fiUomm Israel, tunica lioea indut«M est*
Alleluia.
Vers. Christus sacerdos in astemum, secundum ordinem Melchi-
sedech. Tunica linea. Ven. Gloria Patri. AHeluia.
Te Deum laudamus.
(i) Lire ephod. — (a) Lire nona.
•UV iftTUDB CRITIQUE 8UR
Vert. Tuam sanctam Sindonem adoramus Domine. Alleluia.
ReMpan. Tuam gloriosam recolimus passtonem. Alleluia.
InJaudibuM^ Anti^unta. Adsont honeste Siudonis l«ta solennia,
pulsu Psalterii plaudat Eccieaia. Alleluia. Psal. Dominua regnavit.
Aniiphona. In Heliae pallio, et Sanaonis spolio, Sindon demons-
tratur. Alleluia. Ps* Jubilate.
Antiphona. Bias! stola cingitur, Christus lino tegitur, sepulchro
locatur. Alleluia. PsaL Deus Deus meus.
Antiphona. Aurum latet occultatum, sidus jacet obumbraium,
granum tegit palea. Alleluia. PsaL Benedicite.
Antiphona. Veste nudum crucifigunt Judaei, quem sepeliunt
Joseph et Ntcodemus. Alleluia. Psalmus. Laudate Dominum de
coelis.
Capitulum. Acceperunt Joseph.
H
Hymnus.
YMNUM nov» l«titi«, Concha plena aromathum,
Dulci productum cantico, Testa nardi concassata,
Chorus depromat hodie Latet sidus obumbratum,
[In] linteo Dominico. Margarita concultata,
Petra in petra latuit, Oranum mundum a palea,
Vermis fuit et non homo, Corpus jacet examine,
Leo prostratus jacuit, Vellus siccum in area,
Christus repostus in humo, Cadit Deus pro homine.
Tempore Paschali. Quaesumus. Tempore Ascensionis. Tu esto.
Vers. Introivit Petrus in monumentum, et vidit linteamina posita.
Alleluia, Alleluia.
Resp. Et Sudarium quodfuerat super caput ejus. Alleluia, Alleluia.
Ad Benedictus. Antiphona. Heliseus in sepulchro mortuum susci-
tavit, Christus sua morte hominem k peccati morte liberavit^
Alleluia. PsaL Benedictus Dominus Deus Israel.
Oratio, ut in Vesperis.
Ad Primam. Antiphona. Adsunt honestae Stndonis.
Ad Tertiam, Sextant et Nonam, Antiphone Laudum,
Ad Tertiam. Capitulum. Acceperunt Joseph.
Resp, Tuam sanctam Sindonem adoramus, Domine, Alleluia^
LE SUAIRE DE TURIN. LV
Alleluia. Vers, Tuam gloriosam recolimus passionem. Resp. Alle-
luia, Alleluia. Vers. Gloria Patri. Resp. Tuam sanctam. Vers,
Joseph et Nicodemus acceperunt corpus Jesu, Alleluia. Resp, Et
ligaverunt illud linteis cum aromatibus, Alleluia.
Ad Sextam, Capitulum. Accepto corpore, Joseph involvit illud in
Sindone munda, et posuit illud in monumento suo novo, quod
exciderat in petra. Deo gratias.
Resp, Joseph et Nicodemus acceperunt corpus Jesu. Alleluia,
Alleluia. Vers, Et ligaverunt illud cum aromatibus. Resp, Alleluia,
Alleluia. Vers, Gloria Patri. Resp, Joseph et.
Ad Nonam, Capitulum. Joseph autem mercatus est Sindonem, et
deponens eum involvit Sindone, et posuit eum in monumento, quod
excisum erat in petra. Deo gratias.
Resp, Joseph, accepto corpore, involvit illud in Sindone munda.
Alleluia, AUe. Vers, Et posuit in monumento suo novo, quod exci-
derat in petra. Resp, Alleluia. Vers, Gloria Patri. Resp, Joseph,
accepto. Vers, Introivit Petrus in monumentum, et vidit linteamina
posita. Alleluia. Resp, Et sudarium quod fuerat super caput ejus,
Alleluia.
Ad Vesperas, cAntiphone Laudum, Psalmi et HymnuSj ut in primis
Vesperis,
Ad Magnificat, Antiphona, Cum mortuus fuerit Sacerdos magnus,
tempore illo revertetur fugitivus, et ingredietur civitatem et domum
suam, de qua fiigerat. Alleluia, Psal, Magnificat.
Oratio. Omnipotens sempiterne Deus.
Miss A SANCT£ SiNDONIS.
Introitus. Respice, Domine, de excelso in faciem Christi tui, sancto
velatam Sudario, et non recedant ab oculis cicatrices ejus in perpe-
tuum, qui sibi obediens factus est usque ad mortem. Vers. Signatum
est super nos lumen vultus tui Domine ; dedisti lastitiam in corde
meo. Vers. Gloria Patri.
Oratio. Omnipotens sempiterne Deus ut supra.
Quinta Lectio libri Genesis. In diebus illis, tulerunt tunicam
Joseph fratres ejus, et in sanguine hoedi, quern occiderant, tinxerunt,
mittentes qui ferrent earn ad patrem, et dicerent : Hanc invenimus,
vide utrum tunica filii tui sit, an non > Quam cum agnovisset pater:
Tunica filii mei est, fera pessima comedit eum, bestia devoravit
Lvi irvDB curnQUB tuB
Joseph ; scissis v^stibva, indutut est cOicio, iogeas filium multo
tempore* congregatisqae cunctis liberis ejus, ut deiiairent doiorem
petris, noluit consolationem accipere, descendam ad filium meum
Ittgeus in infernum.
Re»p. Mulier sapiens Sindonem fecit et vendidit, qaam JosepH
ab Arimathia mercatus est. VtrB. Venit Nicodemns cum aromatibas
mirrhe et aloes, et sanctum sancto recluserunt sepulchro. Alleloia.
Vers, Adoramus in nomine tuo, Christe, tnae victorioss crucis
vexillum, tuum diadema spineum, tuam sanctam Sindonem, tuos
rubentes sanguine clavos, ac tuo sacro lateri immersam lanceam.
Tempore Paecalu Alleluia. Vers. Surrexit Christus de sepulchro,
derelicto Sudario, qui pro nobis pependit in ligno.
Tempore Asceneionis, Alleluia. Ascendens Christus.
Tracius in Septuagesima. Ego dizi : in dimidio dierum meorum»
vadam ad portas inferi. Vers. Qussivi residuum annorum meorum,
dixi non videbo Dominum Deum in terra viventium. Vers. Non aspi-
dam hominem ultra, et habitatorem quietis. Vers, Generatio mea
ablata est, et convoluta est a me, quasi tabernaculum pastorum.
Vers, Praecisa est velut a tezente vita mea, dum adhuc ordirer,
succidit me, de mane usque ad vesperam finies me. Vers. Sperabam
usque ad mane, quasi leo sic contrivit omnia ossa mea. Vers, De
mane usque ad vesperam finies me. Sicut pullus hirundinis, sic
clamabam, meditabar ut columba.
PROSA.
PLAUDAT cceli ierarchia, In Hellis pallio,
Nova sonet harmonia, Et Sansonis spolio^
Pulsa millenario. Sindon prsmonstratur.
Hinc concordet in hac via Bissi stola cingitur,
Nostri chori melodia, Christus lino tegitur,
Pro sacro linteamine. Sepulchro locatur.
Joseph fratrcs devestitum Esk ctbus de edcale^
Veo dunt, asttunt in M^fftamL, Faviis mellift de )aceftte,
Pt0 aommi eaoBftine. Et dulcedd de forti.
Ltt^et ,^Kob devetatiun^ Rahab sub lino abscondtt,
Gersena J<m^ vosHioieiilnai, Qisem viogo paiuMS invoLviA,
TinctoMn Jioedi sanguine, Gfaristum tradeadum morti • .
LE SUAIRE DE TURIN.
LVII
Tegunt patrem Sem et Jafet,
Quern Cham ridet,
Dum sic jacet,
Condat Noe racemus.
Veste nudum crucifigunt,
Judaei quern sepeliunt
Joseph et Nicodemus.
Sindon per quam gaudia
Foelix jam Ecclesia
Sumens exaltatur :
Montem nubes operit,
Deum Sindon contegit.
Homo sublimatur.
▲urum latet occultatum,
Sidus jacet obumbratum,
Granum tegit palea.
Radix Christus dum marcessit,
Ramus homo tunc virescit,
Salva Dei idea ;
Oaude, foelix Sabaudia,
Gaude, tota Ecclesia,
Novae laudis gloria.
Artus fracti solidantur,
iEgri currunt, et curantur,
Virtutum frequentia.
Rea, pete suffragia,
Clama, voca auxilia
Plebs nimis egena.
Ei^o laudes pro linteo
Christi demus vestigio,
Idque voce plena.
Tua morte suscitatos,
Bone Jesu, et redemptos,
Prece serva sedula.
Apud thronum Dei Patris,
Cum precibus tuae Matris,
Commenda per sascula. Amen.
EvANOEuuM secundum Joannem. In illo tempore, rogavit Pilatum
Joseph ab Arimathia, eo quod esset discipulus Jesu, occultus
propter metum Judaeorum, ut toUeret corpus Jesu, et permisit
Pilatus. Venit ergo, et tulit corpus Jesu ; venit autem et Nicodemus,
qui venerat ad Jesum nocte primum, ferens mixturam mirrhas et
does quasi libras centum ; acceperunt ergo corpus Jesu, et ligaverunt
eum linteis cum aromatibus, sicut mos est Judasis sepelire. Erat
autem in loco ubi crucifixus est, hortus, et in horto monumentum
novum, in quo nondum quisquam positus fiierat ; ibi ergo propter
Parascevem Judaeorum, quia juxta erat monumentum, posuerunt
Jesum.
Offertorium. Ingressus Aaron tabernaculum, ut holocaustum
offerret super altare Domini, pro peccatis filiorum Israel, tunica linea
indutus est. Tuam clementiam Jnvocantibus, Domine. Prjefatio.
Qui salutem.
Secreta. Accepta tibi sunto, Domine, virtute sanctae Sindonis haec
munera, cui pro mundi salute, accepta extitit filii tui passio gloriosa,
per eumdem Dominum nostrum.
Vna iTUDS CRITIQUS SUR
CoMMumo. Aecepto corpore, Joseph tavolvk in Sindone munda,
et posuit in monumento soo novo, quod ezciderat in petra,
PosTCOMMUNio. SatiMti, Domine, in via familiam tuam mune-
ribus sacrit : quJMumua, ut per virtutem sanctae Siodonts £aae tua
in patria noa aatiare digneria. Per Dominum ooatrum. Deo gratM.
i
PiMOOHB» SJniofi 9VMngdic^ p. 59-64. — Get office a pour aiUeor le domiaicaia
Antoine PimriT, dont rezemplaire de prdteatadon au due de Sayoie, Charles II,
est eontenr^ k la biblioUi^oe de rumverait^ de Tarin* aeoa la cote E. (V. i ^
(aae. F. III. 9). Oa ea treafora la deecriptioa dans Pasimvs, Codd. mm. kihiiotk.
r.Tmurin. Mtk§nam, 1749, 1. 1, p. 69 (cod. 339). La page initiale est reproduiie en
photographte, avec uoe courte notice, dans Lamza. (op. cit., p. 84-5) et dans les
Manum, faUiogr, sacrti des objets exposte k Turin en 1898 (pi. lzx, n* 2).
FF
TraM dn R^liqtms, par Jean Calvw.
11 eat temps de traiter du Suaire, au quel ils ont encores mieuz
monstrd tant leur impudence que leur sottise. Car outre le suaire
de la Veronique, qui se monstre k Rome en Teglise de Sainct Pierre,
et le couurecbef, que la Vierge Marie, comme ils disent, mit sur les
parties bonteuses de nostre Seigneur, qui se monstre a sainct Jean
de Latran ; lequel aussi bien est derecbef auz Augustins de Carcas-
sonne : item, le suaire qui fut mis sur sa teste au sepulcbre, qui se
monstre U mesme : il y a une demie douzaine de villes^ pour le
moins, qui se vantent d*avoir Ic suaire de la sepulture tout entier :
comme Nice, cclui qui a est6 transport^ Ik de Cbamberi. Item, Aix
enAlemagne; item, le Traict; item, Besanson; item, Cadoin en
Limosin ; item* une ville de Lorraine, assise au port d'Aussois :
sans les pieces qui en sont dispersdes d*un costd ct d'autre : comme
k Sainct Saluador en Hespagne et aux Augustins d'AIbi. Jc laisse
encores un suaire entier qui est k Rome en un monastere de fcm-
mes : pour ce que le Pape a defendu de le monstrer solennellcment.
Je vous prie, le monde n*a il pas esti bien enragd, de trotter cent
ou six vingts lieues loin, avec gros frais et grande peine, pour voir
un drappeau, duquel il ne pouuoit nuUement estre asseur6 : mais
plustost estoit contraint d*en douter > Car quiconque estime le suaire
estre en un certain lieu, il fait faussaires tons les autres, qui se van-
tent de Tauoir. Comme, pour exemple, celuy qui croit que le drap*
LE SUAIRE DE TURIN. UK
peau de Ghamberi soit le vray suaire : ce&tuy la condamne ceux de
Besanson, d*Aix, de Cadoin, de Trier et de Rome, comme menteors,
et qui font meschamment idolatrer le peuple en le seduisant, et lui
faisaiit accroire qiu^un drappeau prophane est le linceul oil fiit enve-
lopp6 son Redempteur. Venons maintenant k TEvangile: car ce
seroit pen de chose quails se desmentissent Tun Taiitre , mais le
S. Esprit leur contredisant k tons, les rend tons ensemble confon-
dus, autant les uns que les autres...
Adviftissement ires utile du grand profit qui reviendroU d la Chrestienti s*U u
faisoit inventaire de tons les corps saincts et reliques qui sont tant en Italie qu'en
France^ Allemagne^ Hespagne et autres royaumes et pays (titre coiirant : Traiti
des reliques); Geneve, 1563, in- 1 6, p. 39. Les variantes de Tidition de 15999
rdimprim^e par les soins de E. Revilliod el E. Fick, ne concernent qut la poac-
tuation (Commanication obligeante de M. H.-V. Aubert).
OG
Habuimus verum (quod dolenter refero), postea amisimus sanctis-
simum ejusdem Domini Sudarium, candidissimum scilicet sindonem,
in qua idem Dominus de cruce depositus in gremio pientissimae
Matris suae reclinatus involutus fuisse dicitur ; quo quidem Sudario
(ut testantur qui viderunt) totius corporis ipsius lineamenta omnia
divinitus impressa adeo clare cernuntur, ut nemo ipsum intuitus
non plurimum admiretur lacrymeturque ; quod post obitum nobilis
memoriae domini Gauffridi, qudndam Charneii comitis ac Lireii
domini, illustris fundatoria^ nostri, a quo tantum munus cum pleris-
que aliis recepimus. Cum post regis Francorum Johannis captivi-'
tatem turbata essent omnia, passimque ac diu per regnum grassa-
rentur Angli, omnia incursionibus ac rapinis foedantes,
decanus et canonici hujus ecclesiae, ne ab hoc inermi et immunito loco
dominicum pra&dictum Sudarium vi inimica manus auferret, no*
bili ac potentissimo domino, domino Humberto de Rupe et dominae
Margaritas Charneii comitissae ac Lyreii dominae, ipsius Humbert!
uxoris, filiae vero domini Gauffridi comitis, superioris Gauffiridi
fundatoris nostri filii, tutius servandum, donee pacatura redirent
tempora, commendarunt ac pra&dicto Humberto, pra&stito prius ab
CO Sacramento de praedicto Sudario huic ecclesiae restituendo, nee
non super hoc ipsius Humbert! chirographo confecto et eis tradito,
IX irvDm critiquk sur lb suaim dk turin.
confidenter dederant. At Humberto de humams sublato, Margarita,
prsdactorum boaorum omnium hsres et domina, depoaitum hu)U8
ecdeais dacano et canonicta reddere negavit et ad se pertinere,
utpote domins Lyreii ac veiot inter prstiosam patris ac Humberti
pnedicti conjugia soi aupellectilem repertum, perperam affirmavit.
Verum post multoa ac vanos ad earn discuraua (nam in Burgundia
morabatur) et diutumoa iitiam anfractua, quoa taediosum asset
prsaeoti lectioni inserere, prsdictum Domini Sudarium duci Sabau-
di» Ludovico perfida fcemina tradidit et, ut dicunt, vendidit, a quo
in Camberiaco castro ducali sacello honorifice reconditum ac sedulo
hactenus observatum, ab incolis visitatur et religiose colitur.
Parisy BibUoth. Natioa.t CoUoctioa de ChtrnpAgae,. ▼. la, p. 68 (toitnre de la
fin da XVI* oa da commeacemeot do XVII* titele). Aa-deooot du titre : « ISrty^
S*-8oain t, oa a rsyi : t Tirt do 4* reeoeil de M. de P. »
Du meme Auteur
HIBLHlTHeQr^E LITliHaiQUE
-. Pjiri*, A. I*k«rd; Ly<>n» E» Vine, 1893, gmnd in-^ d'
9 l»L efi pholoiypic*
— II. IH?*»*« htuf^t^itt iradiiionnetU dt tEflUe ctfMo%»« m Otdd^nr ot
fittlft Jm liiim»hi it iy ^fitiet» — Tourtiijf Denclof. Lvffbxrt et C .
11*9^, in*S* ti« l4viii-a88 p., illuntr, . , , * . * . ^
— Ill, Rtptttorinm hymn^hf^icum. C^iihgut d$* ckantit hymttes^ f^roxe^, 1-
fuenetit ir<fpti f/i u^agt tXimt VE^t%*§ iaitnt ^epuh iet originti fui^\i r.o
/oiiff. — Louviirri, Lflttver, i89(o-)4, ttimc h% A-K (n" i-99|aj» gf. m-h-
dc rttj*toi p ,,,.*.-,♦.,,. *9 f*
— rV. Mftme ouvrage. — Ibi^i.* I*olktir»isci Ceuicnck, t89(4*)7^ tome II, L*/.
(n" 990~aaiitj, gr, k*S* do 1 r-766 p» *.*..,, 2i (.
-^ V* i'* Un ProsQlarium ecU^Ua* Amci^nct*. Office en ven d4 la CincHCt^
iion rfrftii (EgU&e du Puy* — Valcdcc, j. C^fts, 189^, iii-*f dc 6^ p. 2 f.
iuivje dc dcjcumonu madiis et de I'Oflice du Si-Suaire, — Pani, A. Pt
1900, m-8" d« 59-J* p* , ' . * . ,
i# diux Mniirti liiurgi^uti^ pubha^ d'tiprfc* IcB m«tiii§crits origiotym,
PaHa, A. Pkard, ttg;, gr. irr-S** dc illij-^og p.^ i pL tn phoiolypk )n
— VIL Sj4;r^meiiri«tre «i Marly tifiogi Jt i*abbay€ Jt Saini-Remy, M^rtyf
Calmdrier, OrdinairM it Prm^iri di k mitrcpoU Ji RMtnts {Vflt-:.,.,
tiichsh pubh^s d/apri* lea maouserits de P*ifi«* Londrcs* Reims, ci Aatiac —
Paris^ A, Picardi igootgf in-t^de Uxtj-^iS p., 10 planchca , . lO tq
— VI 11. Ordinairts di rEglm cjlhidtsU d€ Bayeux (XIH* ^idde), pubtH
d'aprfea tcs onginaajt du chapiire de Baycust (bqij* pFcsue).
— IX, InitituiiQm Hturgifues d^ i'Egtise dt Marssitk {Xiit *rci./«:,> puf
d'apris Ic manu&cril origmiiU sutviee de dottiments sur la lilurgie e:
biblioLhitjucs Proven gales (sous pressc).
— X. TropiiUi>*Ptosairt d£ tabtaye SniHt-Mdirim de MonUurml (dioUit d«
M9iitauh^n)t piibtie d'aprta Ic manuscHt original et annoie par I'abb^ C l)«ii*
(sous presse).
V^LEMec, Imp. J. CfAK & Bla,
^
t
RETURN CIRCULATION DEPARTMENT
TO*^ 202 Moin Library
NRLg
LOAN PERIOD 1
HOME USE
AIL iOOKS MAY iE RECALLED AFTER 7 DAYS
R«fi*wati ond R^chorg** mof b« mod# 4 dayi firl9f to th« 4um
ftcmki may b« R*n*w*d by calling M3*3405
DUE AS STAMPED BELOW
SENT ON ILL
SEffTONfLL
AU 6 1 2 1996
SEP 8 1999
U .C.PERKCLCY
U. C. BERKELEY
RENT ON tLL
SENT ON lU
SEP ^ 2003
JUN 2 1997
O.C.BbHKEL E V
U.C. BERKELEY
SENTONrLL
JUN2 9 1998
U. C. BERKELEY
FORM NO. DD6
UNIVERSITY OF CALIFORNIA, BERKELEY
BERKELEY, CA 94720
Si
YC)U^6^^
'BT5S7
S4C4-G
THE UNIVERSITY OF CAUFORNIA LIBRARY
\ K\ f V ' "" ' »-T ' "l.j» • " *^ '^ ■ y< r v" '
.■"Wf-rn"*:* w