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Full text of "Voyage autour du monde sur la frégate la Vénus"

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VOYAGE 
AUTOUR DU MONDE 


SUR LA FRÉGATE 
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LA VENUS 


ZOOLOGIE 


PARIS. — IMPRIMERIE J. CLAYE 


RUE SAINT-BENOIT, 7 


VOYAGE 
AUTOUR DU MONDE 


SUR LA FREGATE 


LA VENUS 


COMMANDEE 


PAR ABEL DU PETIT-THOUABS 


Capitaine de vaisseau, Commandeur de la Légion d’houneut 


ZOOLOGIE 


MAMMIFERES., OISEAUX, REPTILES ET POISSONS 


231233 


PARIS 


GIDE ET J. BAUDRY. EDITEURS 
RUE BONAPARTE. 9 


1859 


E, db Si 5. 


MAMMIFERES. 
Par M. Isibore GEOFFROY SAINT-HILAIRE. 


ER EC E D—— 


La mammalogie, ordinairement si négligée dans les 
voyages de circumnavigation, doit à l’expédilion de 
la Vénus plusieurs acquisitions intéressantes. M. le 
contre-amiral Du Petit-Thouars, au milieu des devoirs 
et des soins mulüpliés du commandement; M. le doc- 
teur Néboux , malgré ses occupations de tous les 
instants comme chirurgien-major de la frégate, ont 
su trouver, dans leur zèle éclairé pour la science, les 
moyens d'enrichir les collections de la Fénus de di- 
vers représentants mammalogiques des contrées suc— 
cessivement visitées par l'expédition. L'un et l’autre 
ont recueilli un assez grand nombre d'éléments et de 
matériaux, précieux pour l’histoire spéciale de la pre- 
mière classe du règne animal, en même temps que pour 
la géographie zoologique. 

Invité par M. le contre-amiral Du Petit-Thouars à 
me charger du soin de mettre en œuvre ces éléments 
et ces matériaux, je n'ai pas hésité à accepter ce de- 


ZooLo&rr. 4 


— 9 — 


voir, Afin de m'en acquitter d’une manière plus digne 
de l'importance de l'expédition et plus fructueuse pour 
la science, j'ai cru devoir suivre de nouveau ici le plan 
que je m'étais tracé dans plusieurs publications ana- 
logues', et dont l'expérience m'a démontré de plus 
en plus les avantages. In décrivant les espèces nou- 
velles ou imparfaitement connues qui ont été rappor- 
tées par la J’énus, je les rapprocherai de leurs con- 
génères, soit déja connus, soit récemment découverts 
et encore inédits; je considérerai les uns et les autres 
sous un point de vue comparatif; et, par-la même, je 
chercherai à faire nettement ressortir ce que les espè- 
ces établies dans ce travail ont en elles de spécial et 
de caractéristique, et ce qu'elles peuvent offrir de 
neuf et d’intéressant pour la science. 

Parfois même, lorsque les familles et les genres aux- 
quels se rapportent ces espèces, n'auront point en— 
core été étudiés d’une manière aussi complète que 
permet de le faire l'état actuel de la science, je pré- 
senterai aussi sur eux quelques considérations géné- 
rales, et je ne croirai pas sortir de mon sujet en 
donnant l'indication succincte de toutes les espèces 
congénères anciennement connues où qu'il m'aura été 
possible de déterminer par mes propres observations. 


L'immense avantage des travaux monographiques 


1 Dans les parties erpétologique et ichthyologique du grand 
Ouvrage sur l'Egypte, 1827; dans la partie mammalogique de 
l'Ouvrage sur la Morée, 1833 ; mais surtout dans les parties mam- 
malogiques du Voyage aux Indes Orientales de Bélanger, 1830- 
1851, ct du F'oyage dans l'Inde, de Victor Jacquemont. 


se — 
est, aujourd'hui, contesté par personne; mais peut- 
être la science recevrait-elle un accroissement plus 
rapide encore, si les naturalistes de chaque pays, 
principalement ceux qui se trouvent placés près des 
grandes collections, adoptaient lusage d’ajouter à Ja 
description des espèces nouvelles qu'ils publient, le ta- 
bleau des espèces anciennement décrites, dont ils ont 
par eux-mêmes constaté l'existence. S'il en était ainsi, 
plusieurs de celles qui restent douteuses encore, se- 
raient bientôt définitivement établies dans la science; 
et d’autres au contraire ne tarderaient pas à être re- 
connues pour nominales ou établies seulement sur de 
doubles emplois, et à être retranchées du Systema. 


2: - 


PREMIÈRE SECTION. 


PRIMATES. 


Parmi les quatre familles qui composent l'ordre des 
Primates, trois, celles des Lémuridés, des Tarsidés et 
des Cheiromydés, habitent exclusivement des régions 
que n’a point visitées l'expédition, et je ne nr'arrêterai 
pas ici sur elles. La famille des Singes compte au con- 
trare des représentants plus ou moins nombreux sur 
plusieurs points de l'itinéraire de la Vénus, et notam- 
ment au cap de Bonne-Espérance et au Brésil. Parmi 
les Singes de l'Afrique australe, je décrirai une espèce 
depuis longtemps connue, mais non distinguée par les 
meilleurs auteurs eux-mêmes, le Cercopithèque De- 
lalande, dont j'éclaircirai et compléterai la détermi- 
nation par un synopsis des espèces congénères. De 
même, à l’occasion de quelques Singes du Brésil, je 
cherchera à éclaircir l’histoire, encore fort embrouil- 
lée, des Singes américains , à queue faiblement pre- 
nante, et particulièrement à montrer que les Saïmiris, 
réunis par presque tous les auteurs aux Callitriches, 
constituent en réalité l’un des genres les plus dis- 


üncts et les plus remarquables de la grande famille 
des Singes. 


PREMIERE PARTIE. 


Descrivrion pu CERCOPITHÈQUE DELALANDE, Cercopi- 
thecus Lalandir, Xs. Gxrorr.; Et Synopsis pu GENRE CErcorr- 


THÈQUE. 


$ 1. — Remarques prélinunaires sur les Singes du Cap 
de Bonne-Espérance. 


Tandis qu'en Amérique, les Singes, si abondam- 
ment répandus dans la région centrale, disparaissent 
au sud et au nord à une distance très-considérable des 
extrémités de ce continent, l'Afrique, que l'équateur 
coupe exactement par son milieu, et dont les extré- 
milés au sud et au nord ne/dépassent les tropiques que 
d’un petit nombre de degrés, possède, dans toute son 
étendue,des représentants de la grande famille des 
Singes. Il existe toutefois une très-grande différence 
entre le nombre des espèces qui peuplent l'Afrique 
centrale et le nombre de celles qui habitent les deux 
extrémités de l'Afrique. Ainsi, dans l’Afrique centrale, 
les contrées équatoriales, telles que la Guinée et le 
Congo, ont fourni déjà et fournissent chaque jour 
une mulütude d'espèces, appartenant aux sept genres 
Troglodyte, Colobe, Miopithèque, Cercopithèque, 
Cercocèbe où Mangabey, Théropithèque et Cynocé- 
phale : vers les tropiques au contraire, plusieurs de 
ces genres sont déjà sans représentants, ou ne sont 


lus représentés que par un très-petit nombre d’es- 
} que p 


ve 

pèces ; et tout-à-fait vers l'extrémité, au-delà du tren- 
tième degré, nous ne trouvons plus au nord, en Bar- 
barie, au sud, au cap de Bonne-Espérance, qu'un 
très-petit nombre de Singes, tous dépourvus de ces 
couleurs vives et de ces développements du pelage qui 
rendent si remarquables presque toutes les espèces de 
la région équatoriale de l'Afrique. 

Au cap de Bonne-Espérance, en particulier, on ne 
connait que deux espèces, un Cynocéphale et un Cer- 
copithèque *. 

La première est le Cynrocephalus porcarius des 
auteurs, le Choak-Kama des Hottentots; espèce gé- 
néralement connue sous le nom de Chacma, et que 
caractérisent suffisamment sa grande taille et son pe- 
lage d’un brun-verdâtre, sans crinière. Tous les voya- 
geurs qui ont exploré l'Afrique australe, particulière- 
ment Kolbe, dont les récits, presque toujours mêlés 
de fables, ne peuvent d’ailleurs être acceptés qu'en 
parüe, Sparrman, Levaillant, Thunberg*?, Delalande *, 


1 Sparrman mentionne, il est vrai, dans son Voyage au Cap 
de Bonne-Espérance ( traduct. de Letourneur, t. 1, p. 306), des 
Singes qui sembleraient n'être ni le Cynocéphale ni le Cercopi- 
thèque que nous connaissons ; car il les dit noirs comme le char- 
bon, et de la grosseur à peu prés d’un chat ordinaire. Mais Sparr- 
man n'avait vu ces Singes que de loin, et la courte indication 
qu'il donne, n’est d'aucune valeur. 

2 Sous le nom inexact de Simia sphynx. Voyez les Mém. de 
l’Acad. imp. de Saint-Pétersbourg, t. HE, p. 301, 1811. 

5 Les faits trés-intéressants qu'a recueillis Delalande sur le 
Cynocephalus porcaruws ont été publiés , d’après les notes prises 
par lui sur les lieux, par Desmoulins, dans l'article Cynocéphale 
du Dictionnaire classique d'histoire naturelle, L. V, p. 257 et 260. 


ee 
Burchell ‘, nous ont transmis des renseignements plus 
ou moins nombreux sur cette espèce qui, d’ailleurs, a 
vécu plusieurs fois en Europe dans les ménageries, 
dont il existe de nombreux individus dans toutes les 
grandes collections, et que l’on peut considérer au- 
jourd'hui comme bien déterminée et bien connue. 

Il en serait de même du Cercopithèque de l'Afrique 
australe, si l'on devait en croire les auteurs. ‘Tous 
s'accordent à désigner comme habitant le cap de 
Bonne-Espérance avec le Cyrocephalus porcarius, 
l'espèce que M. Frédéric Cuvier, dans la première 
édition de son ouvrage sur les Mammifères, a décrite 
et établie en 1821 sous le nom de Vervet, Sinua py- 
gerythra; puis décrite de nouveau, quelques années 
plus tard, dans la seconde édition du même ouvrage, 
sous le nom de Cercopithecus prgerythrus. Les mê- 
mes indications” se trouvent, à l'égard de cette pré- 
tendue espèce du Cap, dans tous les ouvrages géné- 
raux sur les mammifères, tels que la Mammalogie de 
M. Desmarest®, le Synopsis Mammalium de J.-B. 


! Sous le nom de Cercopithecus ursinus dans plusieurs passages 
de ses Travels in the interior of. southern Africa. 

2? Seulement l'espèce est nommée tantôt Sénia pygerythra où 
Cercopithecus pygerythrus , tantôt S. erythropyga (nom employé 
par G. Cuvier, qui l’attribue à tort à Fr. Cuvier ), tantôt Cerco- 
pithecus où Cercocebus pygerythræus ; où S. pygerythræa. C'est 
Desmarest qui a introduit cette dernière modification, afin de rec- 
tifier un nom qu'il croyait irrégulièrement formé. Il se trompait à 
cet égard : on dit également EovOpoc et Epubpaos. I n'y a donc au- 
cun motif pour ne pas adopter le nom le plus ancien. 

5 Dans le Supplément. L'espèce n'était pas connue lorsque 
M. Desmarest a fait paraître la première partie de son ouvrage. 


= 
Fischer, le Physical history of Man and Quadru- 
mana de M. Linnæus Martin, le Manuel de Mamma- 
logie et le Spectes des Mammuferes bimanes et quadru- 
manes de M. Lesson, et un grand nombre d’autres. 

On les trouve également reproduites dans les ou- 
vrages spéciaux sur la Faune d'Afrique ou sur les 
Mammifères du cap de Bonne-Espérance. 

Ainsi, le docteur A. Smith, dans son Æ4frican z00- 
logy ‘, place à la suite des Cercopithecus sabœus et 
C. viridis (qu’il nomme génériquement Cercocebus), 
le Cercocebus pygerythræus ou Red-vented Monkey; 
et il ajoute : « Inhabits south Africa, and troops… 
« are ofien seen in woods and thickets, at no great 
€ distance from Cape Town. » 

De même, dans un ouvrage plus spécial encore, et 
composé avec beaucoup de soin, Enumeratio Mam- 
malium Capensium”®, Smuts, selon l'exemple des 
auteurs qui l’ont précédé, place à la tête des mam- 
miferes de l'Afrique australe le Cercopithecus py- 
gerythræus, dont il donne ainsi lhabitat : « Pegunt 
Çin plagis magis sylvestribus , nec prope urbem 
€ principem Promontori occurrunt. » 

Si l’on ne savait avec quelle facilité une erreur une 
fois introduite dans la science, y prend peu à peu 
racine, et finit par y être universellement admise, 
j'oserais à peine dire, après tant d’assertions positives 


! Insérée dans The south African quarterly journal, t. U, Cap 
de Bonne-Espérance : 1999. 
? In-4. Leyde, 1832. 


10 — 


émanées de zoolosistes distingués et ordinairement di- 
genes de toute confiance, que la patrie du Cercopithecus 
prgerythrus reste aujourd’hui encore tout-à-fait in- 
connue ; et même si je puis aflirmer quelque chose à 
son égard, c'est que cette patrie n’est pas le cap de 
Bonne-Espérance. Il est hors de toute vraisemblance 
que le C. pygerythrus, S'il avait l'habitat qu'on lui 
attribue, eût pu échapper aux recherches de Dela- 
lande, de ses neveux et si dignes continuateurs, 
MM. Verreaux, et de tant d’autres. Il est d’ailleurs à 
remarquer que la presque identité du pelage du C. 
prgerythrus avec celui du C. Sabæœus qui habite le 
Sénégal, et celui du €. griseo-viridis, qui habite la 
Nubie et le sud de l'Egypte, indique à elle seule une 
analogie très-orande dans la zone d'habitat de ces 
trois espèces; considération qui, au premier aspect, 
semble de peu d'importance, mais qui empruntera 
quelque valeur de l'examen que je vais faire tout-à- 
l'heure de l'état du pelage chez le véritable Cercopithè- 
que du Cap, le Cercopithèque Delalande. 

Les détails dans lesquels je vais entrer feront voir 
aussi que toutes les assertions inexactes que j'ai dû 
rappeler plus haut, ont leur source dans la confusion 
qui a été faite, d’abord par M. Fr. Cuvier, puis, à son 
exemple, par les autres zoologistes, entre le C. pyrge- 
rythrus et le C. Lalandü; espèce voisine, mais dis- 
tincte du C. pygerythrus, et qui m'est aujourd’hui 
connue par une belle série d'individus des deux sexes 
et de tout âge. Je me plais, du reste, à reconnaitre 
que l'erreur que je relève ici, était à peu près inévila- 


= 'A# — 
ble à l’époque où elle a été commise, et lorsqu'on ne 
possédait encore qu'une très-faible partie des maté 
riaux dont je puis aujourd’hui disposer. 


S Il. — Historique et synonynue. 


L'histoire et la synonymie du Cercopithèque Dela- 
lande sont tellement difhciles et embrouillées, que 
quelques remarques explicatives me paraissent devoir 
nécessairement précéder la description de l'espèce. 

Le Cercopithèque Delalande a été successivement 
considéré comme spécifiquement le même que le C. 
sabœus des auteurs (Simia sabæa, Lix.), comme 
identique avec le C. prgerythrus de M. Fr. Cuvier, 
el comme constituant une espèce distincte, principa- 
lement caractérisée par la petitesse de sa taille. Ces 
trois opinions sont également erronées. 

Le C. pygerythrus est, en réalité, une espèce 
exactement de même taille que la plupart de ses con- 
génères, et se distinguant par des différences de pe- 
lage et non de dimensions. 

C’est Thunberg qui, ayant l’un des premiers observé 
le Cercopithèque Delalande, l’a considéré? comme ne 
différant pas du €. sabœus. Cette erreur était natu- 
relle à une époque où l’on n'avait point encore intro- 
duit, dans la détermination des espèces, cette préci- 
sion, parfois un peu minutieuse, mais indispensable, 
qui caractérise la zoologie actuelle. Il suffisait pres- 


1 Loc. cut., 1811. 


— 19 — 


, 


que alors que le Cercopithèque nouvellement observé 
eût les formes et les proportions du €. sabæus, et le 
pelage généralement verdätre, pour qu'on crût re- 
connaître en lui cette espèce, si souvent désignée sous 
le nom de Callitriche ou Singe-vert. Aujourd'hui il 
serait superflu d’insister sur les caractères différentiels 
du €. sabæus, espèce aussi commune qu'elle est fa- 
cile à reconnaître, et par suite depuis longtemps et 
complétement déterminée. 

En rectifiant l'erreur commise par Thunberg, les 
zoologistes récents en ont eux-mêmes laissé échapper 
une autre. Dans les immenses collections faites dans 
l'Afrique australe par Delalande, se trouvaient quel- 
ques individus de l'espèce précédemment observée par 
Thunberg, et avant lui par Levaillant ; mais ces indivi- 
dus étaient tous fort jeunes. Lors de l’arrivée en France 
des collections de Delalande, M. Fr. Cuvier crut trou- 
ver dans ces jeunes Singes le premier âge d’un Cercopi- 
thèque qui vivait alors à la ménagerie du Muséum, et 
dont ce savant zoologiste ! a fait le type de son C. 
pygerythrus. C'était une erreur, mais une erreur à la- 
quelle il était alors difficile d'échapper : les aflinités 
qui existent entre le C. pygerythrus et l'espèce de 
Levaillant, de Thunberg et de Delalande, sont telle- 
ment intimes, qu'ayant sous les yeux, d’un côté, l'état 
adulte du premier sans son jeune âge , et, de l’autre, 
le très-jeune âge de la seconde sans son état adulte, on 
devait être porté à attribuer à de simples différences 


1 Zoc. cit. 


NS — 
d'âge les différences que lon apercevait entre le pe- 
lage de l’une et celui de l’autre. M. Frédéric Cuvier 
n'’hésita donc pas à les réunir, et c’est par suite de 
cette confusion, qu'il donna l'Afrique australe pour 
patrie au C. pygerythrus : espèce n'ayant en réalité 
pour type qu'un individu, acheté de marchands qui 
ignoraient entièrement son origine , et dont la véri- 
table patrie reste aujourd’hui même inconnue. 

Les auteurs ont généralement suivi M. Frédéric Cu- 
vier, aussi bien pour la caractéristique qu'il assigne 
au C. pygerythrus, que pour la patrie qu'il lui attribue. 
Il en est ainsi en particulier de Desmoulins; dans l’ar- 
ücle étendu qu'il a publié en 1825 sur le genre Cer- 
copithèque ou Guenon', ce zoologiste termine la 
description du C. pygerythrus en disant, d’après 
Fr. Cuvier, que Delalande a rapporté beaucoup d'in- 
dividus de cette espèce, du Cap où elle peuple les 
forêts. Mais, dans un autre passage, le même auteur, 
sans s'apercevoir qu'il fait un double emploi, cite de 
nouveau les Singes rapportés par Delalande, et les dé- 
crit comme constituant une espèce distincte, ayant le 
pelage grisätre, et seulement g à 10 pouces (environ 
0",25) du bout du museau à l’origine de la queue. En 
raison de cette taille prétendue naine, Desmoulins 
donne à l’espèce le nom, d’ailleurs très-irrégulière- 
ment formé, de Guenon naine Delalande, C. pusillus 
Delalande. C’est sous ce double nom spécifique , 
formé contrairement aux règles de la nomenclature 


! Dans le Dictionn. class. d'hist. natur., t. VI, p. 560 etsuiv. 


12 — 


linnéenne, que l’on trouve l'espèce pour la première 
fois introduite dans la science * comme distincte. 
La place que lui assigne l’auteur, n'est pas moins 
singulière que son nom: le €. pusillus Delalande, 
décrit comme ayant le pelage d’un gris-cendré, com- 
pose, avec le C. ruber où Patas, dont le pelage est 
rouge, et le C. latibarbatus *, dont le pelage, dit Des- 
moulins, est notr à l'état adulte, et roux dans le jeune 
âge, la section des Singes-verts; section dont ne font 
partie, au contraire, ni le C. sabæœus ou Singe-vert des 
auteurs, ni les €. cynosurus, C. griseo-viridis et C. 
pygerythrus, espèces qui ont toutes le pelage vert. 
Toutes ces contradictions avaient déjà fixé mon at- 
tention, et j'avais acquis la certitude que Desmoulins 
avait pris de très-jeunes sujets pour des adultes, lors- 
que, dans divers envois, et d’abord dans la grande 


1 Dans ses Reisen im südlichen Africa, dont la publication re- 
monte à 1811, l'un des zoologistes les plus distingués de l’Alle- 
magne, M. Lichtenstein, paraît, il est vrai, avoir désigné cette 
espèce sous le nom de C. glaucus. Mais ce nom n’est accompagné 
ni d’une description, ni même d’une caractéristique sommaire ; et 
c’est pourquoi cette indication a été considérée comme non ave- 
nue par tous les auteurs. Voici le passage tout entier de M. Lich- 
tenstein (t. L, p. 507 ); passage que l’on a négligé jusqu’à présent 
de citer : « In den Gebüschen durch welche dann und wann die 
« Reise ging, fand man oft eine grosse Menge Affen von der lang - 
« geschwänzten grünen Art, die dieser Gegend des südlichen 
« Africa eigen ist. Einzelne der Colonisten besassen eine beson- 
« dere Geschiklichkeit darin, diesen niedlichen Thieren behende, 
«auf die Bäume nach zuklettern, und sie einzufangen.» 

? Ce dernier n'est, d'ailleurs, pas un véritable Cercopithèque, 
mais un Semnopithèque. 


MAD = 

collection rapportée du Cap par MM. Verreaux, je 
trouvai le C. pusillus Delalande, avec tous les ca- 
ractères du pelage que je lui connaissais, mais avec 
la taille des autres espèces à pelage vert ou verdàtre. 
Dès-lors il devenait évident que les jeunes Cercopi- 
thèques de M. Delalande avaient été à tort rapportés 
par M. Frédéric Cuvier, et d’après lui, par tous les 
auteurs, M. Desmoulins excepté, au €. pygerythrus, 
et qu'ils doivent être considérés, en rectifiant la dé- 
termination de celui-ci, comme appartenant à une 
espèce distincte, plus voisine d’ailleurs qu'aucune 
autre du C. pygerythrus. 

En rectüifiant la détermination de M. Desmoulins et 
la place qu'il assignait à cette espèce, j'ai cru devoir 
aussi rectifier, mais non abandonner, le nom qu'il lui 
donnait; nom qui rappelle l’un des plus beaux voyages 
zoologiques qui aient jamais été exécutés. J'ai donc 
proposé, d’abord dans mes cours, puis dans l’article 
Cercopitheque du Dictionnaire d'Histoire Naturelle, 
de donner à l'espèce le nom de Cercopithèque Dela- 
lande, €. Lalandu. 


$ HT.— Description. 


_ Le Cercopithèque Delalande apparüent à la section 

dont le C. sabæus est le type, section que caracté- 
risent un museau un peu plus allongé que chez les 
€. petaurista, C. cephus et les autres espèces voisines, 
des formes généralement moins sveltes que chez 
celles-ci, et un pelage plus ou moins verdätre. 


— 16 — 

Le caractère par lequel on peut le distinguer dès le 
premier aspect de ses congénères, est la teinte géné- 
rale du pelage qui n’est pas vert, même sur la tête et 
sur le dos, mais d’un gris-verdatre. 

Cinq couleurs, dont la distribution est caractéristi- 
que, se remarquent dans le pelage de cette espèce : le 
gris-verdàtre, le gris-pur, le blanc sale, le noir et le 
roux. 

Le gris-verdâtre occupe le dessus de la tête, du cou, 
du dos jusqu’à quelques centimètres de l'origine de la 
queue, les épaules et les flancs. Dans toutes ces par- 
ties, il existe deux sortes de poils : des poils laineux, 
longs et abondants, d’un gris clair à la base, d’un 
gris foncé dans le reste de leur étendue; des poils 
soyeux beaucoup plus longs encore (de 3 à 5 centi- 
mètres), colorés, par anneaux d'une assez grande 
étendue, de noir et de jaune-verdàtre. De là résulte 
une teinte générale d’un gris sale, légèrement verda- 
tre, tiqueté de blanchatre. 

La face externe de l'avant-bras, de la cuisse et de 
la jambe, la croupe et les trois premiers quarts environ 
de la queue, sont d’un gris tqueté. La longueur des 
poils est moindre dans ces parties, mais leur mode de 
coloration est le même; seulement les poils sont an- 
nelés de noir et d’une couleur blanchatre à peine 
teintée de jaune. 

Le blanc sale occupe la face interne des membres , 
le dessous du corps et la partie inférieure et latérale 
de la tête. De plus, il existe un assez large bandeau 
de même couleur à la partie antérieure du front, im- 


EN 

médiatement derrière les sourcils. Ce bandeau, com- 
posé de poils presque ras, se confond à ses deux extré- 
mités avec le blanc de la région latérale de la tête, où 
lespoils, dirigés en arrière, sont au contraire très-longs. 

Le bandeau blanc frontal et les poils blancs des 
parties inférieures et latérales de la tête, encadrent la 
face et le menton qui sont, au contraire, noirs. Les 
quatre mains et le dernier quart de la queue sont aussi 
de cette dernière couleur. 

Enfin , le roux forme une tache très-remarquable 
autour de l'anus ; tache qui s'étend aussi sous la base 
de la queue. C’est l'existence d’une tache rousse anale, 
observée d’abord par M. Frédéric Cuvier, chez Le Ver- 
vet , c'est ce caractère considéré par lui comme pro- 
pre à ce Singe ( d’où le nom de €. pygerythrus), qui 
ont entrainé ce célèbre zoologiste à confondre avec le 
Vervet , l'espèce dont je viens de décrire les couleurs. 
J'ai reconnu depuis que, non-seulement Îa tache anale 
existe dans deux espèces d’ailleurs très-distinctes , 
mais qu’elle est représentée par quelques poils roux, 
en d’autres termes, qu'elle existe aussi, mais beau- 
coup plus petite et moins distincte, dans deux autres 
espèces, le C. cynosurus où Malbrouck des auteurs, et 
le C. rufo-vrridis. 

Le màle, d'après les renseignements que j'a re- 
cueillis, aurait le scrotum d’un bleu-verdätre. On sait 
par les observations de M. Frédérie Cuvier, que cette 
parue est verdâtre chez le €. sabæus, vert-de-cris 
chez les C. griseo-viridis et €. pygerythrus, d'un 
bleu lapis chez le C. cynosurus. 

Loorocir. 2 


== DS 
Les dimensions prises, ainsi que les caractères 
précédents, sur l'adulte , sont les suivantes : 


m. 
Longueur du bout du museau à l'origine de la queue. 0,45 


Longueur de la queue. 2 Vi ON te le 0:00) 


J'ai pu comparer aux individus adultes plusieurs 
autres sujets de différents ages. Les différences de 
pelage qu'ils m'ont présentées, sont relatives, les unes 
aux mains, que jai trouvées tantôt grisatres, tantôt 
noirâtres, mais non noires ; les autres à la couleur géné- 
rale, aui, chez les jeunes sujets e7 bon état”, est plus 
lavée de vert, et se rapproche beaucoup de la cou- 
leur du Macaque ordinaire. 

Cette espèce , dont j'ai déjà donné sommairement 
les caractères dans le Dictionnaire universel dhis- 
torre naturelle?, mais qui n'avait encore été ni décrite 
en détail, ni figurée, habite exclusivement l’Afrique 
australe. C’est à MM. Verreaux que l’on doit le plus 
grand nombre des individus existant au Musée de 
Paris : ils avaient été tués dans la vaste forêt de l'Au- 
teniquoi, qu'ils habitent par bandes de vingt à trente 


individus. 


1 Si, au contraire, les jeunes ne sont pas en bon état, si une 
partie des poils soyeux a disparu, le pelage paraît de même nuance 
que chez les adultes, ou même encore plus gris, parce que les poils 
laineux deviennent plus ou moins apparents. 

? Article Cercopithèque. Voyez t. IE, p. 305, 1842. — Voyez 
aussi un mémoire qui paraîtra prochainement dans les Archives 
du Muséum d'hist. nat., 1. II, sous le ütre suivant : Description des 
mammifères nouveaux de la collection du Muséum. Premier mé- 
moire. Famille des Singes. 


ND 
$ IV. Synopsis du genre Cercopithèque. 


Je ne comprends, dans ce genre, niles Mangabeys 
qui, d’après divers caractères récemment observés, 
ne sont pas de véritables Cercopithèques , et pour les- 
quels il convient de rétablir le genre Cercocebus ; ni 
le Talapoin, dont j'ai fait récemment le type d’un genre 
nouveau, sous le nom de Miopithecus'; ni, à plus 
forte raison, les Semnopithèques , le Nasique et les 
Colobes, que personne, depuis vingt ans, ne confond 
plus,avec les Cercopithèques. 

Les travaux par lesquels ont été fondés ces cinq 
genres, ont enlevé au groupe des Cercopithèques 
près de trente espèces‘; et cependant, après toutes 


1 Voyez les Comptes rendus hebdom. de l’Acad. des sciences, 
t. XV,p.720et1037, et les travaux cités dans la note précédente. 

2 Savoir : 1° deux Cercocèbes : 1. CERcOCEBUS FuLIGINOSUS , 
Geoff. S.-H. ; 2. C. ærmiors, Geoff. S.-H. (Sémia œthiops, L) 

2° Un Miopithèque : Mioriruscnus raLapoix, Isid. Geoff. {S. 
talapoin, L.) 

3° Seize Semnopithèques : 1. Semnoriruecus NEMÆUS, Fr. 
Cuv. (le Douc de Buffon); 2. S. LEeucorryunus, Desmar. (Cer- 
cop. leucoprymnus, Otto); 3.8. Larisargarus, Isid. Geoff. (Sim. 
latibarbata, Tem.); 4.58. osscurus, Reid. et Mart. ; 5. S. cucur- 
LaTus, Isid. Geoff. ; 6. S. Dussuarert, Isid. Geoff.; 7. S. rxrer- 
LUS, Fr. Cuv. (Sim. entellus, Dufresne); 8.8. aurarus, Desmoul. 
(Cerc. auratus , Geoff. S.-H.); 9. S. crisrarus, Mart. (Sim. cris- 
tata, Raffl.); 10. S. maurus, F. Cuv. (Sim. maura, Schreb.); 
11. S. remoraLis, Horsf. ; 12. S. mirratus, Sal, Mull. et Schleg. 
(Presbytis mitrata, Eschsch.); 13. S. nicrimanus, Isid. Geoff.; 
14. S. rLavimanus, Is. Geoff.; 15. S. mrrazoruos, Fr. Cuv. (Sim. 


— 90 — 


ces éliminations successives , il en reste encore dans 
ce genre plus de vingt, toutes habitant, soit le con- 
tinent africain, soit les iles d'Afrique, telles que les îles 
du Cap-Vert et Fernando-Po, soit PArabie et la Syrie, 
contrées que les géographes comprennent dans l'Asie, 
mais qui sont essentiellement, par leurs productions 
naturelles, de véritables dépendances de l'Afrique. 

En raison du nombre des espèces connues de Cer- 
copithèques , et aussi de quelques différences organi- 
ques assez marquées entre les premières et les der- 


nières, j'ai cru devoir! diviser les Cercopithèques en 


melalophos, Raf.); 16. S. rurrcunpus, Sal. Mull. et Schleg. 
(Dans un travail récent, où sont décrites plusieurs de ces espèces, 
la Mammalogie du Voyage de Victor Jacquemont, j'ai montré que 
le S. albo-cinereus et le C. fulvo-griseus de quelques auteurs mo- 
dernes sont des espèces purement nominales ; c'est pourquoi ces 
deux Singes ne figurent point dans ce tableau des Semnopithe- 
ques.) 

4° Un Nasique : Nasazis rarvarus, Geoff. S.-H. (Stm. nasica, 
S. nasalis où $. rostrata des auteurs ). 

5° Enfin, veuf Colabes (dont plusieurs restent malheureusement 
très-mal connus ou même douteux }) : 1. COLOBUS VELEEROSUS , 
Isid. Gcoff. (que j'avais d'abord décrit sous le nom de Semn. vel- 
lerosus , et qui est devenu depuis le Seran. bicolor de M. Wes- 
mael et le Col. leucomeros de M. Ogilby ; 2. C. evereza, Rupp.; 
3. C. roycowos, Geoff. S.-H. (Sim. polycomos, Schreb.); 4. C. 
urRsiNUS, Ogilb. ; 5. C. saraxas, Waterh.; 6. C. ruricinosus, Og,.; 
7. C. rennucinosus, Geoff. S.-H. ( Sim. ferrugineu, Sh.); 8. C. 
PENNANTII, Waterh. ; 9. C. venus, Van Beneden. 

1 Dans un travail resté inédit, mais qui a servi de base à la ré- 
daction de l’article Cercopithèque du Dictionnaire universel d'his- 
totre naturelle. 


ET 
deux sections et en quelques petits groupes secon- 
daires dont ladmission me semble très-propre à 
faciliter la distinction et la détermination des espèces. 

Dans le Synopsis que je vais donner des Cercopi- 
thèques , j'insisterai surtout sur ceux qui, ainsi que le 
Cercopithèque Delalande , appartiennent à la seconde 
section. Ce sont les seuls, en effet, avec lesquels on 
puisse être exposé à confondre ce dernier. 


PREMIÈRE SECTION. 
Cercopithèques a museau plus court et a formes plus svelles. 


Ces espèces ont le naturel plus calme et plus doux que celles 


de la seconde section, et se rapprochent davantage des Miopi- 
thèques et des Semnopithèques. 


À. — Espèces à nez velu et blanc. 


Esr. 1. Le CERCOPITHÈQUE HOCHEUR, Cercopithecus 


nictitans, ERXLES. 


Synonymie. GUENON 4 NEZ BLANC PROÉMINENT, Buff., Suppl., VII, 
SIMIA NICTITANS, puis C. nicrirans de tous les auteurs métho- 
diques, Hliger excepté, qui, croyant à tort cette espèce dénuée 
de callosités ischiatiques, en faisait un Lasioryea.— Hocueur, 
Audeb., Singes. 

Caractéristique. Pelage d’un nor trés-tiqueté de jaune pâle olivä- 
tre, sur les parties supérieures et latérales de la tête (y com- 
pris les pommettes ) et du corps ; d’un gris noirâtre un peu 
tiqueté inférieurement : le menton blanchâtre ; les membres 
et la queue noirs. 


nn 


Les poils du devant de la tête et des joues s'allongent et se 
relèvent un peu chez les individus complétement adultes. 
Habitat. La Guinée. 


Esr. 2. Le C. BLANC-NEZ, C. petaurista, ERxLES. 


Sy. BLaxc-xez, Allamand, Additions à l'Hist. nat. de Buffon; 
Buffon, Suppl, VII. —S.reraurisra, puis C. p£raurisra des 
auteurs méthodiques. — BLANG-NEZ et ASCAGNE, S. PETAURISTA 
et S. ascanius, Audeb.—C. PEraurisra et C. Ascanius, Latr., 
Singes. = 

Car. Pelage supérieurement d'un vert plus ou moins lavé de 
roux, et tiqueté de noir; parties inférieures d’un blanc qui 
est très-pur sous la gorge et sous le menton; membres, en de- 
hors, et queue, en dessus, d’un gris foncé, tiqueté d’oli- 
vâtre ; le dedans des membres cendré; le dessous de la queue 
blanc. 

Les poils du dessus de la tète sont allongés et un peu re- 
dressés chez les adultes. 


Hab. La Guinée. 


B. — Espèces à longs poils sur les parties latérales et inférieures de la face. 


Esr. 3. Le C. À LONGUE BARBE, C. pogonias, BENNETT. 


Syn. C. rocoxras, Bennett, Proceedings zoo. Soc. of London, 
part. I, p. 67, ann. 1833 ; Lesson, Compl. de Buffon, deuxième 
édit., et Species ; Ogilb., Monkeys.; Martin, Quadrum., fig. 

Car. Une très-longue barbe d’un blanc jaunâtre, couvrant toutes 
les parties latérales et inférieures de la bouche, et tombant 
jusque sur le col. Pelage noirâtre , tiqueté de blanc, passant 
au noir sur le milieu du dos, la croupe, le dessus et l'extrémité 
de la queue ; front et face externe des cuisses, jaunâtre tiqueté 
de noir ; parties inférieures du corps et de la queue, et face 
externe des membres, jaune roussâtre. 

Hab. Fernando-Po. 


C. — Espèces à queue d’un roux vif. 
Esr. 4. Le C. MOUSTAC, C. cephus, Erxz. 


Syn. Mousrac, Buff., XIV.— Mousraoue money, Penn. — Sin. 
cEpuus, puis C. ceraus des auteurs méthodiques. 

Malgré le nom spécifique qu’il porte dans tous les ouvrages, 
ce Singe n’est pas le Cephus des anciens. 

Car. Tour de la bouche noir, avec du blanc immédiatement au- 
dessus du noir; dessus de la tête d’un vert lavé de roussätre 
et tiqueté de noir ; des poils allongés formant une tache jaune 
assez étendue entre les yeux et les oreilles ; dessus du corps et 
face externe des membres, d’un roux légèrement verdâtre, et 
tiqueté de noir ; mains, noirâtres ; corps et dessous du corps, 
blancs ; face externe des membres, cendrée, de même que la 
région anale; queue, près de son origine, grise en dessous, 
d’un brun roux tiqueté, en dessus : le reste d’un roux vif, 
plus clair en dessous et vers l’extrémité. 

La tache jaune des joues est d’un jaune doré chez les adul- 
tes, d’un jaune verdâtre chez les jeunes. 


Hab. La Guinée. 


Esr. 5. Le C. A OREILLES ROUGES, C. erythrotis, Wavern. 

Syn. S.rrxrnroris, Waterh., Proceed. zoo!. Soc. of London, VI, 
58, ann. 1838 ; Mart. 

Car. Pelage gris, les poils étant annelés de jaune et de noir ; joues 
et gorge, blanches ; bras , noirâtres ; orerlles et région anale, 
rousses ; queue d’un roux vif, avec sa ligne médiane supé- 
rieure et son extrémité, noirâtres. 

Hab. Fernado-Po. 

D. — Espèces ayant la queue de couleur variable, mais terne, et sans bande 


surcilière blanche ou blanchâtre. 


Ese. 6. Le C. AUX LÈVRES BLANCHES, C. TS 
Is. Grorr. 


Syn. C. ragrarus, Is. Geoff., art. Cercopitheque déja cité, 1842, 
et Mém. sur les Singes, dans les Arch. du Mus., t. VW. 


= 07 = 
Car. Pelage supérieurement long, bien fourni, d'un gris foncé, 
très-tiqueté de jaune pâle, olivâtre ; une tache noire sur la 
face, au-dessus de la commissure des lèvres ; /e reste du tour 
de la bouche, blanc ; gorge et parties inférieures, d’un blanc 
sale ; les quatre mains et la face interne des membres de de- 
vant, noires ; tour de l'anus et dessous de la queue dans une 
assez grande étendue, d’un fauve sale; dessus de la queue 
dans la même portion , varié de roux et de noir ; le reste de 
cet appendice, noir. 
Hab. La côte occidentale d'Afrique. (?) 


Esp. 7. C. CAMPBELL, C. Campbell, Watern. 


Syn. C. Caurgezut, Waterh ; loc. cit., part. VI, p.61, ann. 1838; 
Mart. 

Car. Pelage très-long ; de longs poils sur les joues ; poils se par- 
tageant et divergeant sur le milieu du dos; parties supé- 
rieures, d'un gris olivâtre, les poils étant annelés de noir et 
de jaune; parties postérieures du corps et cuisses, d’un gris 
ardoisé , avec de très-petits anneaux ; parties inférieures du 
corps et externes des membres, blancs ; queue variée, en des- 
sus, de noir et de jaune sale, en dessous, de noir et de blanc 
brunâtre ; les poils de l'extrémité, plus longs et noirs. 

Hab. Sierra-Leone. 


Esr. 8. Le C. MARTIN, C. Martini, WATERu. 
Syn. C. Martins, Wat., tbid., p. 58; Mart. 


Car. Poils assez longs; partiessupérieures, grisâtres, les poils étant 
annelés de noir et de blanc jaunâtre ; dessus de la tête, bras et 
queue, noirâtres ; poitrine, d’un blanc sale ; abdomen et face 
externe des cuisses, brunätres ; des poils d’un brun rougeâtre 
à la base de la queue. (Espèce encore imparfaitement connue.) 

Hab, Fernando-Po. 


. 


Esr. 9. Le C. TEMMINCK, C. Temminchkü, Ocire. 


Syn. C. Teuminoxtt, Og., Monk., déc. 1838. 


Car. Pelage, süpérieurement, d'un cendré tiqueté de blanc, avec 


— 0% — 


les membres noirs, le menton et la poitrine d’un blanc pur, et 
le ventre cendré : la couleur de la queue n’est pas connue. 

Hab. La côte de Guinée. 

Observation. Cette espèce doit être considérée comme très-dou- 
teuse : elle ne repose que sur un individu du Musée de Leyde, 
qui est en fort mauvais état , et n'a pu même être complétement 
décrit. 

Ese. 10. Le C. MONOIDE, C. monoides, Is. GEorr. 

Syn. C. monoïdes, Is. Geoff. article Cercopithèque, 1842, et Mé- 
moire sur les Singes, avec fig. 

Car. Dessus de la tête et nuque, d’un vert olivâtre, uqueté 
de noir; dessus du col, longs poils sur les joues, par- 
es inférieures des flancs, d’un gris tiqueté; dos et parties 
supérieures des flancs, d’un roux tiqueté, légèrement verdä- 
tre; épaules, face externe des bras, avant-bras, les quatre 
mains, une partie des cuisses et la plus grande partie de la 
queue, d’un noir pur ; devant de la poitrine et gorge, blancs ; 
oreilles garnies supérieurement, à la face interne, de poils 


blancs, assez longs. 


E. — Espèces ayant la queue de couleur variable, mais terne, et une bande 
surcilière blanche ou blanchätre. 


Esr. 11. Le C. MONE,, C. mona, Erxzes. 
Syx. Mowe et moxa, Buff., Hist. nat., t. XIV, et Supplém., VIL. 


— S. moxa, puis C. moxa des auteurs. 

Mone, Mona, Monina, Mounina (d'où dérive vraisembla- 
blement Monkey), est, d’après Buffon , le nom des Guenons 
dans plusieurs langues méridionales. 

Car. Pelage olivâtre sur la tête, olivâtre clair sur les joues ; une 
tache noire allongée de la partie supérieure de lorbite à 
l'oreille , et une ligne d’un blanc verdâtre sur le devant du 
front ; dos, épaules, flancs, d’un roux tiqueté de noir ; croupe 
noire, à l'exception de deux taches elliptiques, blanches, pla- 


cées à droite et à gauche de l'origine de la queue ; mans et 


900 — 


face entière des membres, noires ; parties inférieures du corps 
et internes des membres , d'un blanc pur, qui, sur ceux-ci, 
tranche avec le noir de la région externe ; queue variée de 
jaune et de noir, avec l'extrémité noire. 

Il est à remarquer que les jeunes ont le dos roux olivâtre, 
et que le gris plus ou moins foncé remplace le noir sur les 
membres. Par ce dernier caractère, les jeunes se rapprochent 
de l'espèce précédente : mais on les reconnaîtra immédiate- 
ment par la lunule frontale, d'un blanc verdâtre, par les taches 
blanchâtres de la région fessière , et mieux encore par le sys- 
tème de coloration des membres, sur lesquels la couleur fon- 
cée des parties externes tranche nettement avec le blanc des 
parties internes. 


Hab. La Guinée. 
Esr. 12, Le C. ROLOWAY, C. Roloway, ErxLEs. 


Syn. Pazarix ou Rozoway, Allam., Addiions à lHist. natur. de 
Buffon; Buff., Supplém., VII. — S. Roroway, Schreb.; J.-B. 
Fisch. —C. Rozoway, Erxl.; Zimmerm.; Less., Spec. 

Car. Dos brun, trés-foncé, presque notr ; tête, flancs, cuisses , 
jambes, d’un gris obscur, les poils étant terminés par une 
pointe blanchâtre; ligne sur le devant du front et barbe poin- 
tue, blanches ; poitrine, ventre et face externe des cuisses, de 
couleur blanche , tirant sur l'orangé (quand l’animal est vi- 
vant ). 


Hab, La Guinée. 


Observation. Cette espèce a été confondue par presque tous les 
auteurs avec l'espèce suivante, sous le nom de C. Diana, qui ap- 
partient en propre à celle-ci. Ces auteurs se sont appuyés, pour 
réunir le C. Roloway et le C. Diana, sur l'insufisance des carac- 
tères différentiels signalés par ceux qui ont admis comme dis- 
ünctes les deux espèces. Les deux principaux de ces caractères 
sont Ja disposition de la lunule blanche frontale, et la barbe bi- 
fide ; et il est incontestable que ces caractères sont absolument 


= 97 — 


sans valeur. Mais la couleur très-foncée et presque noire du dos 
(marron ou roux vif chez la Diane) et la couleur blanche du ventre 
(noir chez la Diane) distinguent bien le Roloway. 


Esr. 13. Le C. DIANE, C. Diana, L. 


Syn. Exquixa des habitants de quelques parties de la Guinée. — 
Exquima, C. barbatus guineensis, Marcgr. —S. Diana, Lin., 
Mém. de © Acad. de Stockholm pour 1754, avec fig. C. Draw, 
Erxleb. 

Observation. Un grand nombre d'auteurs ont repris le nom de 
$. ou C. Diana, mais en l’appliquant en même temps à cette es- 
pèce et au C. Roloway. M. Fr. Cuvier l’a appliqué, au contraire, 
au C. Diana et au C. leucampyx, dont la description va suivre. 
Car. Parues latérales de la face, poils du menton, lesquels for- 

ment une barbe pointue et assez longue, gorge, poitrine, partie 
interne et antérieure de l'épaule et du bras, d’un blanc pur; 
une ligne blanche, étroite, à la partie antérieure du front ; 
milieu du dos, marron; ventre, noträtre; flancs, d’un gris 
foncé, tiqueté de blanc ; la queue noire, ainsi que les mem- 
bres, sauf le dedans de la cuisse, qui est roux ou roussâtre, 
et une ligne longitudinale jaunâtre sur sa face entière. 

Le Muséum d'histoire naturelle possède deux individus de 
cette espèce : l’un, nouvellement acquis, à cuisses intérieure- 
ment d’un roux vif (selon la description de Linné), et à ligne 
jaune sur la cuisse. Chez l’autre individu, conservé depuis 
fort longtemps , cette dernière ligne est faiblement indiquée, 
et le dedans de la cuisse est jaune. Cette dernière différence 
serait-elle un effet de la décoloration ? 

Hab. La Guinée, le Congo, Fernando-Po. 


Esp. 14. Le C. A DIADÈME, C. leucampyx, Mar. 


Syn. Diane, var., Fr. Cuv., Mamm., 1824. — Sim. LEucamPyYx , 
J.-B. Fisch., 1829.—G. à prapème, C. diadematus, 1s. Geof., 
Zoo!. du Voyage de Bélanger, 1830-31;Less., Spec.—C. D1- 
Lornos, Ogilb., Monk., 1838.—Dianem Monkey, C. LEUCAMPYX, 
Mart., 1841. 


= où — 


On voit par cette synonymie que M. J.-B. Fischer le premier, 
puis moi peu de temps après, nous avons déterminé comme une 
espèce distincte la prétendue variété de la Diane décrite par M. Fr. 
Cuvier. Le nom spécifique lucampyx (mème signification que 
diadematus } doit ètre préféré comme ayant l'antériorité d’une 
année. 

Cer. Dessus du corps et joues, d’un gris olivâtre tiqueté de noir; 
une tache en forme de croissant sur le front : cette tache est 
blanche , ainsi que le dessous du menton (mais non toute la 
gorge et la poitrine); queue non tiquetée de blanc; le reste, 
notr. 

Hab. La côte occidentale d'Afrique (région encore indéterminée). 

Observation. Parmi les trois espèces que l’on avait confondues 
sous le nom de Diane, on voit que la première a toutes les parties 
inférieures blanches, tandis que cette couleur occupe seulement 
la gorge et la poitrine chez la seconde, et le menton chez la troi- 
sième : celle-ci, en outre, n’a point de barbe, et la lunule frontale 


est beaucoup plus grande. 


SECONDE SECTION. 


Cercopithèques à museau plus allongé et a formes moins svelles. 


Ces espèces ont le naturel plus pétulant et plus irascible que 
celles de la première section, et se rapprochent davantage des Cer- 
cocèbes (Mangabeys) et des Macaques. 


F. — Espèces à pelage gris verdàtre ou vert. 


On a désigné plusieurs de ces espèces sous le nom commun de 


Singes verts. 
Esr. 15. Le C. DELALANDE, C. Lalandii, Nos. 


Syn. G. Naxe, de Lalande ; C. rusizus, de Lalande, Desmoul., 
Dict. class. d'hist. nat., arücle Guenon, 1825.—C. Laranxput, 
Is. Geoff., article Cercopithèque, et Mém. sur les” Singes. 
Est-ce le C. glaucus, Lichtenst., loc. cit.? (simple mention , 


sans description ; CE méme sans phrase caractéristique ). 


= 00 = 


Car. Une bande blanche au-devant du front. Pelage long, d'un 
gris légèrement olivätre sur le dos et les flancs ; parties infé- 
rieures du corps et externes des membres, blanchâtres ; la face, 
le menton et les quatre mains, notrs ; queue grise, avec l'extré- 
mité noire; l'anus entouré de poils ras, d'un roux vif. (Voyez 
plus haut, p. 15, la description détaillée.) 

Hab. L'Afrique australe, spécialement la forêt de l'Auteniquoi. 

Observation. Le C. Lalandi est distinct de toutes les espèces 
suivantes, en ce qu'il n’est véritablement pas vert, même sur le 


dos et la tête, mais d'un gris à peine teinté de vertou d'olivâtre. 
Ese. 16. Le C. VERVET, C. pygerythrus, Fr. Cuv. 


Syn. Venver, S. rvérnyrera, Fr. Cuv., Mamm., 1831; Desmoul., 
J.-B. Fisch.—C. Pscenvraræus, Desmar., Suppl. a la Mamm., 
1822.—Jard.—C.rryraroryGA, G.Cuv., Rér. an., deuxième 
édit. (nom que G. Cuvier attribue à tort à son frère).—C. »x- 
ceRyraRus, Fr. Cuv., Mamm., deuxième édit.; Geoff. S.-H., 
Cours; Less.; Ogilb.; Mart. — CERCOCEBUS PYGERYTHRÆUS , 
Smith, loc. cit. 

Car. Une bande blanche au devant du front. Pelage d’un vert 
jaunâtre, tiqueté de noir sur la tête, le dos, les épaules, les 
flancs et le dessus de la queue; gris sur la face externe des 
membres. Parties inférieures du corps et de la queue et in- 
ternes des membres, blanches ; la face, le menton, les quatre 
mains dans leur totalité, le bout de la queue, noirs; tour de 
l'anus, d'un roux vif. 

Hab. L'Afrique, région encore indéterminée. (V. plus haut, p.13) 

Observation. Très-distincte de la précédente par son pelage 
vert jaunâtre et non gris, cette espèce l’est de toutes Les suivantes 
par la coloration du tour de l'anus, des mains, et surtout du men- 
ton; dernier caractère généralement omis d’après les descriptions 
antérieures. Le scrotum est vert-de-gris. 

La description que je viens de donner, d’après l'individu type 
de l'espèce, est fort différente de celle des auteurs les plus récents. 

Parmi ceux-ci, les uns ont attribué au C. pygerythrus la plupart 


50 — 
des caractères du C. Lalandu, qu'ils avaient seul observé, etqu'ils 
croyaient être le C. pygerythrus ; les autres ont mélangé les traits 
des deux espèces , décrivant le C. pygerrthrus en partie d'après 
leurs propres observations, en partie d'après M. Fr. Cuvier. 


Ese. 17. Le C. MALBROUCK, C. cynosurus, Grorr. S.-H. 


Syn. Six. cyxosunus, Scopoli, Delic. floræ et faun.; Schreb.. 
3.-B. Fisch.—Mareroucx, Buff., XIV (9; Fr. Cuv., Mam- 
malogie.—C. Marerour, Latr.—C. cyxosurus, Geoff. S.-H., 
Tableau des quadrumanes ; Desmar.; Less., Complément et 
Spec. ; Mart.— Cercocebus cynosurus , Jard.— Cercoc. Mal- 
brouck, Less., Man. (et non Geoff. S.-H.) — C. rérnrors, 
Benn., Procecd. z00l. Soc. Lond., 1833, p. 109.—C. rauxus, 
Ogilb., Monkeys. 

La plupart des auteurs rapportent aussi à cette espèce, mais 
sans motifs suffisants, le C. pargarus PRImuS, Clusius ; Sim. 
Faunus, Lin.; C. raunus, Erxleb. 

Car. Une bande blanche au devant du front (plus large, mais 
moins nettement caractérisée que dans les espèces précédentes 
et que dans la suivante). Pelage d’un vert très-jaunâtre , ti- 
queté de noir sur la tête, le dos, les épaules et les flancs ; gris 
sur la face externe des membres. Parties inférieures du corps, 
y compris le menton, etinternes des membres, blanches ; la face 
noirâtre, avec le tour des yeux livide; mains noires ou noirâ- 
tres, avec l'extrémité des doigts plus claire; queue d’un gris noi- 
râtre en dessus, blanchâtre en dessous; quelques poils roux 
autour de l'anus, ne formant point une tache bien circonscrite. 

Hab. L'Afrique occidentale. 

Observation. Cette espèce a, comme on le voit par ce qui pré- 
cède , le bandeau blanc plus large, le pelage plus jaune que le 
C. pygerythrus, etelle a le menton blanc ; la face est, en outre, en- 
tièrement colorée; enfin, dans les mâles, le scrotum est d’un bleu 
lapis, et non vert-de-gris. 

Quant à la différence de coloration du pourtour de l'anus, elle 
n'existe pas telle que l'a dit M. Frédéric Cuvier. Selon lui, le Ver- 


— SÉ— 
vet, nommé pour cette raison même C. pygerythrus, aurait seul le 
pourtour de l'anus et le dessous de la base de la queue, roux ; 
non-seulement ce même caractère existe, et tout aussi manifeste, 
chez le C. Lalandiï, mais j'ai constaté aussi, sur un grand nom- 
bre de Malbroucks l'existence de poils roux à droite et à gauche 
de l'anus, et souvent aussi sous l’origine de la queue. Tantôt ces 
poils forment une tache distincte, mais beaucoup moins étendue 
que dans les deux espèces précédentes ; tantôt ils se perdent sous 
les poils blancs un peu plus longs des parties environnantes , et 
il faut quelque attention pour les découvrir. Un seul Malbrouck 
ne m'en a présenté aucune trace, et encore est-ce un individu en 
mauvais état, et ayant perdu une partie des poils de la région 


anale. 


Ese. 18. Le C. GRIVET, C. griseo-viridis, Desmar. 


Syn.'Tora des Abyssins, et ABEezLan des habitants du Sennaar (d’a- 
près Ruppell). — Griver, Fr. Cuv., Mamm., 1819. —C. ert- 
sEo-viRipIs, Desmar., Mamm., 1820; Jard.; Mart.—Crnco- 
CEBUS GRISEO-VIRIDIS , Less., Man., Jard. — Srura sunviRipis , 
Desmoul., 1825; J.-B. Fisch.— C. criseus, Fr. Cuv., Mam- 
mif., deuxième édit.; Less., Compl. et Spec.; Ogilb., Monk. 

Observation. Il est très-douteux que l'on doive rapporter à cette 
espèce le Sim. exGyruiria de Hermann, Obs. zoo!. 

Car. Une bande blanche, étroite, au devant du front; sur les 
joues, de longs poils blancs dirigés en arrière. Pelage d’un 
vert jaunâtre tiqueté sur la tête, le dos, les épaules et les 
flancs, d’un gris pur, tiqueté de blanc, sur la face externe des 
membres ; parties inférieures du corps, y compris le menton, 
et de la queue, et parties internes des membres, blanches; la 
queue, en dessus, d’un gris qui devient de plus en plus foncé, 
et passe au noir vers l'extrémité; la face noire, avec mains 
noirâtres. Point de poils roux autour de l'anus. 

Le mâle a le scrotum vert-de-gris. 

Hab. L'Abyssinie, la Nubie, le Kordofan, le Sennaar, l'Egypte. 

Observation. D'après la description sommaire qui précède, le 


_ 32 — 


C. griseo-viridis, quoique très-semblable aux deux espèces précé- 
dentes par l’ensemble de sa coloration, se distingue, 1° du €. py- 
gerythrus, en ce qu'il n’a ni le menton et les mains dans leur tota- 
lité, noirs, ni la tache rousse de l'anus ; 2° du C. cynosurus, par 
les longs poils de ses joues , par l'absence complète de poils roux 
à l'anus, autour duquel sont, au contraire, des poils blancs assez 
longs ; par la bande blanche frontale , plus étroite et plus nette ; 
et par la couleur verte du scrotum. Ces caractères de coloration 
sont sans doute de peu d'importance, et peuvent paraître insufli- 
sants; mais ils concordent avec des différences très-marquées 
dans la forme de la tête, plus ronde et à museau plus gros chez 
le C. cynosurus, pyramidale et à museau plus fin chez le C. gri- 
seo-viridis. Ce dernier est aussi généralement plus svelte 1. 

L'existence de poils orangés autour du serotum n’est point un 
caractère constant. 

Cette espèce est l'une de celles qui ont été connues des anciens. 


On la trouve figurée sur plusieurs monuments egypuens. 


Esr. 19. Le C. CALLITRICHE, C. sabœus, Desmar. 


Sy. Vulgairement SINGE VERT OU SINGE DE SAINT JACQurES.—CaL- 
Lirrioue, Buft., XIV.—S. saræa, Lin.; Schreb.; J.-B. Fisch. 
—C. saræa, Erxleb., Latr.—Crncocreus sagæus, Geoff. S.-H., 
Tabl. des quadr.; Less., Man.; Jard.—C. sarxus, Desmar., 
et tous les auteurs modernes. 

Car. Bande blanche, peu distincte, au devant du front: face 
entièrement noire. Pelage d’un vert doré, passant au gris 
sur la face externe des membres et une partie de la queue ; 
celle-ci terminée par un flocon de poils jaunes. Parties inférieu- 
res, blanches. 


Le pelage plus vert de cette espèce , et la coloration de sa 


1 On voit qu'il «est nécessaire de recourir, pour la distinction des C. cyno- 
surus et griseo-viridis, et généralement de toutes les espèces de ce groupe, à 
des caractères presque toujours négligés par les anciens auteurs; aussi la syno- 
nymie offre-t-elle ici les plus grandes difficultés, et reste-t-elle fort obscure et 
douteuse, quelque soin que l'on porte dans l'interprétation des auteurs. 


queue , rendent sa distinction très-facile : c'est d'ailleurs le 
plus commun de Cercopithèques. 

Observation. Le mâle a le scrotum vert, entouré de poils tantôt 
blancs’, tantôt jaunâtres où orangés ( mais non constamment 
orangés ). 

Hab. Le Sénégal et les îles du Cap-Vert. 


Esr. 20. Le C. TANTALE, C. Tantalus, Ocixs. 


Syn. C. Tanrazos, Ogilb., Proceed. Soc. 2001. of London, ann. 
1841, p. 33. 

Car. Une bande surcilière blanche. Pelage d’un vert olivâtre en 
dessus, cendré sur la face externe des membres ; queue brune, 
terminée par des poils jaunes ; face noirâtre, avec le tour des 
yeux livide (espèce imparfaitement connue). 


Esp. 21. Le C. ROUX-VERT, C. rufo-viridis, Is. Georr. 

Syn. C. ruro-viripis, Îs. Geoff., article Cercopitheèque, et Més. 
sur les Singes, avec fig. 

Car. Une bande surcilière blanche, dont la couleur contraste avec 
celle de la face, qui est entièrement noire. Pelage d’un vert oli- 
vâtre sur la tête, d’un roux vert sur le corps, et d’un roux pur, 
à peine tiqueté de noir, sur les flancs, depuis les membres 
autérieurs jusqu'aux postérieurs. Les épaules et les cuisses , 
d'un gris verdâtre ; le reste de la face externe des membres, 
gris ; les mains antérieures, d'un noir tiqueté ; les postérieu- 
res, grisâtres. Les parties inférieures du corps et internes des 
membres, blanches ; la queue d'un gris foncé en dessus, et 


d’un gris blanchâtre en dessous. 


Hab. L'Afrique occidentale (7). 
G. — Espèces à pelage roux. 


Esp. 22. Le C. PATAS, C. ruber, Georr. S.-H. 


Syn. Vulgairement SINGE ROUGE. — PaTas À BANDEAU NOIR et P. 4 
BANDEAU BLANC, Buff., XIV.—S. nugra, Lin., Gm.—S. ruras 


ZooLoctr. 3 


., 


et S. RurFa, Schreb. — C. nurra , Erxleb. — C. raras, Latr. 
— C. rurrA, Geolff. S.-H.; et tous les auteurs modernes. 

Car. Pelage roux en dessus, blanc en dessous , d’un fauve gri- 
sâtre sur la partie inférieure des membres. Nez norr. 


Hab. Le Sénégal. 
Esr. 23. Le C. À DOS ROUGE, C. pyrrhonotus, Exe. et Eur. 


Syn. Nisnas des Ethiopiens. — C. ryrrnonorus, Ehrenb.; Fer- 
hand. Gesellsch. naturs. Freunde, t. 1, p: 183,1829: Hemprich 
et Ehrenb., Symb. phys., 1830. 

Car. Pelage roux en dessus, blanc en dessous et sur la partie in- 
terne des membres, partie postérieure du dos et dessus de la 
queue, d’un roux plus foncé que le reste du pelage; nez blanc. 

Hab. La Nubie. 

Observation. Cette espèce se distingue aussi de la précédente 
par la couleur des épaules et de la face externe des bras, qui sont 
roux comme le corps (et non gris ou d’un fauve grisâtre). L'une 
et l’autre ont d’ailleurs, à l’état adulte, exactement la même taille; 
l'assertion contraire n’a été émise que parce qu'on avait comparé 
le C. pyrrhonotus parfaitement adulte à des Patas encore jeunes ?. 


1 Bien que j'aie cru devoir admettre dans ce Synopsis quelques espèces en- 
core fort imparfaitement connues, et même une qui reste douteuse, le C. Tem- 
minckii, je laisse entièrement en dehors du cadre de ce travail une espèce dont 
l'existence est parfaitement authentique, mais dont les rapports d’aflinité et la 
place naturelle sont encore tout-à-fait indéterminés; je veux parler du Semno- 
pithecus albogularis de M. Sykes ( Proceed. Zool. Soc. of Lond. 1850-51), 
reporté depuis par cet auteur lui-même et par MM. Ogilby et Martin dans le 
genre Cercopithecus, près des C. Cynosurus et C. griseo-viridis, et considéré 
aussi par quelques zoologistes comme faisant le passage des Semnopithèques 
aux Cercopithèques. N'ayant jamais eu occasion d'observer cette espèce, ne la 
connaissant que par les descriptions des auteurs et par quelques renseignements 
dus à M. Gervais, je ne puis présentement que rappeler les diverses opinions 
émises à l'égard du Semn. ou C. albogularis, sans me prononcer à leur 
égard. 


SECONDE PARTIE”. 


SUR LES SINGES AMÉRICAINS COMPOSANT LES GENRES CALLITHRICHE, 


SAIMIRI er NYCTIPITI IEQ UE. 


De même que les Singes de l’Ancien-Monde, ceux 
de l'Amérique se divisent en deux tribus entre les- 
quelles les genres et les espèces se répartissent fort 
inégalement?. L'une, celle des HAPALIENS, ne com- 
prend qu'un seul genre, Hapale Williger, dont les 
espèces si remarquables par l'élégance de leurs formes, 
par la petitesse de leur taille et par la beauté de leur pe- 
lage, sont fréquemment apportées vivantes en Europe, 
et dont la connaissance est dès à présent assez avancée. 

A l’autre tribu, au contraire, celle des CÉBIENS, 
se rapportent tous les Singes que mon père, dans son 
Tableau des Quadrumanes , a compris sous les noms 
d'Hélopithèques et de Géopithèques ; en d’autres 
termes, les Cebus et une partie des Callithrix d'Erx- 


leben : groupes qui sont aujourd’hui, le premier sur- 


: Cette seconde parte à été présentée et en partie ue à l'Aca- 
démie des sciences, dans sa séance du 29 mai 1843. 

? Les deux tribus des Singes de l’Ancien-Monde, selon la clas- 
sification que j'ai exposée dans mon mémoire déjà cité sur les 
Singes, sont celle des Prriécrexs, comprenant les trois genres 
Troglodytes, Pithecus et Hylobates ; et celle des Cyvoririierexs, 
dans laquelle se trouvent réunis tous les autres Singes africains e! 
asiatiques. 


ee 
tout, subdivisés en un assez grand nombre de 
uenres. 

Parmi ces genres, 1l en est quelques-uns que l’on 
peut considérer comme déjà connus d’une manière 
assez satisfaisante. Tels sont, par exemple, Les Atèles 
de mon père el mes Ériodes , quoique ce dernier 
groupe ne soit établi que depuis peu d'années. L'étude 
de plusieurs autres genres, au contraire, loin qu'ils 
aient été le sujet de travaux plus ou moins nombreux, 
est entièrement à reprendre. Pour les uns, il est 
vrai, tels que le genre Hurleur et surtout le genre 
Sapajou, nous sommes très-riches en matériaux ; 
mais la difliculié du sujet est extrême; et, pour ma 
part, les études que j'ai faites sur ces Singes, m'ont 
conduit presque toujours, non à résoudre les difi- 
cultés que j'avais d'abord apercues , mais tout au con- 
traire à apercevoir, par une étude plus attentive, 
des difficultés qui n'avaient d'abord échappé. A lé- 
sard d’autres genres, tels que les Callitriches et les 
Nyctipithèques, les diflicultés paraissent moindres ; 
mais les matériaux sont rares el parfois manquent 
entièrement. 

C'est de ces derniers genres, c'est, en général, des 
Géopithèques de mon père que je vais nr'occuper dans 


ce travail', afin de mettre à profit pour la science 


1 En laissant toutefois de côté le genre Saki, Pothecia, qui n'a 
que des rapports assez éloignés avec les autres genres. 

J'ai traite ailleurs avec détail des Hélopithèques de mon père. 
Voyez Remarques sur les caractéres généraux des Sinses améri- 
cains, el description du nouveau genre Eriode, dans les Mém. du 


me per 
— eh 


divers matériaux que les envois de divers VOyageurs , 
mes propres recherches et parfois le hasard n'ont 
procurés depuis quelques années, et qui ont tri- 
plé le nombre des individus dont j'avais pu disposer 
jusqu'alors. 


S 1. Sur le genre Callithrix d'Errleben et des 


auteurs qui l'ont suivr. 


On sait que Buffon divisait les Singes en cinq 
groupes; trois appartenant à l’Ancien-Monde, les 
Singes proprements dits, sans queue, les Zabouins à 
queue courte, les Guenons à queue longue; deux 
autres appartenant au Nouveau-Monde, les Sapajous, 
à queue prenante , les Sagoins à queue non prenante. 
Cette classification de Buffon, fort remarquable pour 
l'époque où elle fut proposée, est devenue le point 
de départ de tous les travaux ultérieurs sur la classi- 
fication des Singes. Erxleben, en particulier, qui a 
été cité souvent comme l’un des fondateurs de cette 
partie de la méthode zoologique, n'a fut, dans son 
Systema regni animalis', qu'adopter purement et 
simplement les cinq groupes de Buffon, en substi- 
tuant aux noms de Buffon, fort difficiles à introduire 


Mus.,t. XVIT, 1829; Description de deux espèces nouvelles de 
Singes à queue prenante, ibid. ; et article Sapajous ou Hélopi- 
thèques du Dict. class. d’hist. nat., t. XN, p. 129-151. M. Lesson 
m'a fait l'honneur de réimprimer en entier ce dernier travail dans 
son Cosrplément de Buffon, t. AV, p. 159-225. 

1 Lipsiæ, 1777. 


ne 
dans la nomenclature latine, les noms suivants : Sr- 
mia, Papio, Cercopithecus, Cebus et Callithrix. 

Les caractères qu'assigne Erxleben à ses Callithrix, 
en d’autres termes, aux Sagoins de Buffon, sont au 
nombre de sept. Il ne sera pas imutile de les rappeler 
ici, et de présenter sur eux quelques courtes re- 
marques. 

Les deux premiers, tirés du nombre et de la dis- 
position des incisives et des canines, et de même, 
le quatrième qui consiste dans l'existence de deux 
mamelles pectorales, bien loin d’appartenir en pro- 
pre aux €Callithrix, sont communs à tous les sin- 
ges. Ce sont donc, non de véritables caractères gé- 
nériques, mais, au contraire. des caractères de 
famille. Si Erxleben les a compris dans la caractéris- 
üque du genre, c'est parce que cet auteur , fidèle au 
plan qu'il s'était tracé, et dans lequel il n’a heureuse 
ment trouvé que peu d’imitateurs, divise immédiate- 
ment la classe en genres; d'où résulte pour lui la 
nécessité de comprendre dans la caractéristique de 
chacun de ceux-ci, avec les véritables traits génériques, 
les divers caractères ordinaux et sub-ordinaux. 

Le troisième des caractères d’Erxleben, est l’exis- 
tence de mains aux quatre extrémités : manus in 
palmus plantisque. Ce caractère n’a pas plus que les 
précédents de valeur générique : il est, aussi bien 
qu'eux , Commun à tous les Singes (du moins si l’on 


adopte la définition que Jai donnée de la main), et 


: J'appelle main, toute extrémité poureue de doigts allongés , 


méme aussi à tous les autres Primates. C’est donc un 
caractère très-général, un caractère d'ordre. 

Les deux derniers caractères qu'Erxleben attribue 
à son genre Calliührix sont l'absence des callosités 
ischiatiques (rates tectæ) et le défaut d’abajoues. Or, 
ces mêmes caractères se retrouvent chez les Cebus, 
et ne peuvent encore fournir les éléments d’une dis- 
Hincuon générique. 

Il reste donc pour séparer les Callithrix, soit du 


profondément divisés, très-mobiles, tres-flexibles, et par conséquent 
susceptibles de saïsir entre eux et la paume les objets placés à leur 
portée. Si ces objets sont légers et non fixes, l'animal peut les atti- 
rer vers lui, par exemple, les porter à sa bouche, ou les mouvoir 
dans toute autre direction ; s'ils sont lourds ou fixes, il peut s’ac- 
crocher à eux, et s’en servir pour se mouvoir lui-même. 

La définition que je viens de rappeler est très-différente de 
celles que l’on trouve dans tous les traités de zoologie. On y lit, 
en effet, que la main est constituée par la faculté d'opposer le 
pouce aux autres doigts pour saisir les plus petites choses ( défini- 
tion de Cuvier); phrase dans laquelle je vois bien plutôt la des- 
cription sommaire d’une main parfaite que la définition de la 
main en général. J'ai montré ailleurs (dans mon Mémoire sur les 
Singes) que, par l'adoption de la définition ordinaire, on se 
place dans la nécessité, ou de briser, en raison de quelques carac- 
tères secondaires , l'unité de groupes véritablement naturels, ou 
de placer illogiquement parmi les caractères généraux des Pri- 
mates des caractères que tous les Primates ne présentent pas. 
Entre ces deux inconvénients, également graves, Cuvier et pres- 
que tous les auteurs ont accepté de préférence le premier ; et c’est 
ainsi qu'après avoir donné de la main une définition qui n’est 
applicable qu'a un tiers environ des Singes, ils n'hésitent pas à les 
comprendre dans un ordre expressément caractérisé par l'exis- 
tence de mains aux quatre extrémités, et nommé, pour cette raison 
même, Quadrumanes. 


D 
reste de la famille des Singes, soit plus spécialement , 
des autres Singes américains , un seul caractère : la 
queue prenante (prehensilis) chez les Cebus, n’est 
pas prenante chez les Callithrix. Et lon voit que cet 
unique caractère est purement négatif, et, par consé- 
quent ne saurait être , fût-il parfaitement exact, d’une 
grande valeur pour l'expression des rapports na- 
turels. 

Aussi, ne doit-on pas s'étonner que le genre Calli- 
thrix renferme des espèces appartenant à deux types 
génériques assez différents pour qu'aujourd'hui nous 
soyons obligés de les répartir entre deux tribus 
distinctes. 

Sur les six espèces qu'Erxleben comprend sous le 
nom générique de Callithrix, une, C. pithecta, est le 
type du genre Saki, Pithecia, appartenant à la tribu 
des Cébiens; et toutes les autres font partie du genre 
Ouisütü, Hapale, qui compose à lui seul la tribu des 
Hapaliens. 

En réunissant dans le même genre des espèces que 
sépare, en réalité, un assez grand intervalle, Erxle- 
ben à d’ailleurs eu le mérite d'éviter une faute dans 
laquelle sont tombés la plupart des zoologistes venus 
après lui. Tous ses Callithrix ont bien la queue lache 
el non prenante : la caractéristique cauda elongata 
non prehensilis est exacte et applicable, sans excep- 
Uon, à toutes les espèces qu’elle comprend , si diffé- 
rentes qu'elles soient d’ailleurs par leur système den- 
taire, la conformation de leurs doigts et de leurs 


onoles. 


EN" E 

Les classificateurs qui ont succédé à Erxleben, ont, 
au contraire, souvent réuni dans un même groupe , 
soit sous le nom de Sagoins, soit sous celui de Géopi- 
thèques ; ils ont caractérisé en commun par lexis- 
tence d’une queue longue, mais lâche et non prenante, 
d'une part, des espèces chez lesquelles ce caractère 
existe en effet rigoureusement, telles que les Sakis et 
les Ouistius, ou les Callithrix d'Erxleben; et d’une 
autre part, des espèces, telles que le Simia sciurea 
des auteurs où Saïmiri de Buffon, et le Cebus Moloch 
de Hoffmansegg, chez lesquelles la queue est /rble- 
ment prenante. Et ce qu'il importe de remarquer, c’est 
que ce sont ces dernières espèces placées, non sans rai- 
son, par Erxleben à la fin des Cebus, qui se trouvent 
comprises sous Le nom de Callithrix par les auteurs du 
dix-neuvième siècle; par exemple, par mon père, 
dont la classification, publiée sous le ütre de Tableau 
des Quadrumanes \, à été très-généralement suivie ; 
par M. de Humboldt dans son Tableau des Singes de 
l'Amérique * ; par G. Cuvier dans la première édition 
du Règne animal; par Desmarest dans la Mammalo- 
gie de l'Encyclopédie; par M. Lesson dans son 
Complément de Buffon, et par une foule d’autres. 


Voici donc, par suite d’une véritable transposition 


LLoceir. 

? Inséré dans le Recueil d'observations de zoologie, p. 357.—Le 
ütre de ce volume porte la date de 1811; mais le Tableau des Singes 
placé à la fin du volume est évidemment postérieur d’une année 
au moins à 1811, puisque l’illustre voyageur y cite le travail de 
mon père publié en 1812 dans les Annales du Muséum. 


2.49 = 
du nom de Callithrix, deux sens fort différents 
attribués à ce mot. Les Callithrix d'Erxieben sont tous, 
pour les auteurs modernes, où des Pithecia, où des 
Hapale ; etréciproquement , tous les Callithrix de 
ceux-ci, ceux du moins qui étaient connus d'Erxleben, 
étaient pour lui, non des Callithrix , mais des Cebus. 


Pour achever de débrouiller cette synonymie gé - 
nérique, il faut remarquer que, dès 1811, une troi- 
sième acception était donnée au mot Callithrir. Pour 
lliger, les Cebus de M. de Humboldt, de mon père 
et des auteurs Contemporains, étaient réunis au Saï- 
miri sous le nom de Callithrix, singulièrement éloi- 


gné, comme on le voit, de sa signification première. 


Enfin, la détermination que j'ai faite du Saïmiri de 
Buffon, comme type d’un genre distinct, vient mo- 
difier d’une autre manière encore, et cette fois par 
restricüon, le sens du mot Callithrix, appartenant 
dès-lors en propre au Cebus Moloch de Hoffmann- 
segg (Callithrix Moloch, Geoff. S.-H. et Humb.), 
au Call. personatus de mon père, et aux autres espè- 
ces liées avec celles-ci par des rapports véritablement 
intimes. 


En résumant tout ce qui précède, on voit que le 
genre Callithrix , tel qu'il doit être déterminé d’a- 
près les travaux les plus récents, correspond : 

1° À une parte du genre Cebus d'Erxleben, et nul- 
lement à ses Callithrix ; 

2° Au genre Callührix d'Higer, moins le Simia ca- 
pucina et les autres Sapajous, d’une part, et de l’autre, 


VS 
moins le S. sczurea, devenu le type du genre 
Saïnuris * ; 

3° Au genre Callithrix de mon père et des auteurs 
modernes, moins le $. sciurea. 

IL est à remarquer que bien que le nom de Calli- 
thrix n'ait point été appliqué d’abord aux espèces qui 
le portent aujourd’hui, il leur convient parfaitement, 
en raison de leur pelage long, touffu, abondant, et 
parfois remarquable par la beauté de ses couleurs. 


$ I.—EÆEtat de la science en ce qui concerne les 
genres Saïmiri et Nyctipithèque. 


M. Cuvier, dans la seconde édition du Règne ani- 
mal”?, sans ériger les Saïmiris en un genre nettement 
déterminé, en a fait, parmi les Sapajous, une peute 
section que l’auteur, non-seulement distingue bien des 
Callitriches, mais qu'il en sépare même par l’interca- 
lation, d’ailleurs fort contraire aux rapports naturels, 
du genre Saki ou Pithecia. 

Il ne sera pas inutile de citer ici textuellement le 
court passage dans lequel est nmdiquée cette première 
distinction : 

€ Dans les Saimiris, dit Cuvier, la queue est dé- 


‘Illiger ne connaissait, et par conséquent il ne mentionne au- 
cun des véritables Callithrix décrits par Hoffmansegg, par mon 
père, etc.; mais toutes ces espèces ne rentrent pas moins dans le 
genre Calliüthrix d'Iiger, d’après la définition qu'il en donne. 


VD. 109: 


or 
«_ primée et cesse presque d’être prenante; la tête est 
«_très-plate !; 11 y a à la cloison interorbitaire du 
« squelette un espace membraneux. Nous n'en con- 
«_naissons qu'un, le Saïmiri (Srmia sciurea) Buif. » 

Suit une courte deseripuüon du pelage du Saïriri de 
Buffon. 

Dans la traduction qu'il a donnée du Regne animal, 
M. Voigt *, en reproduisant le passage qui vient d’être 
cité, lui a fait subir une modification qui, toute lé- 
sère qu'elle est, mérite d'être mentionnée. 1j a placé le 
nom de Saïinuri en Utre, avant le passage qui vient 
d'être cité; et par-là, indiqué plus nettement la sépa- 
ration des Saïmiris en un groupe distinct *. 

C'est en n''appuyant sur diverses observations de 
mon père *, que je considérai à mon tour les Saïmiris 


1 Ce caractère n'est pas exact. L’aplatissement de la tête forme, 
au contraire, l’un des caractères distincufs des vrais Callitriches 
par rapport aux Saïmiris. 

? Thicrreirh. Leipzig, 1831. 

5 C’est ce qui explique comment M. Lesson , dans son Species 
des Mammiferes bimanes et quadrumanes, p.155, a cité M. Voigt, 
et non G. Cuvier, comme ayant le premier séparé les Saïmiris 
des Callitriches. 

% Voyez son Cours de l'histoire naturelle des Mammiféres, 1829, 
p- 12 et suiv.— Voici ce que mon père dit du crâne du Saïmiri ; 
le passage est un peu long, mais il est bon de le citer ici en entier : 

«Dire en termes généraux que le crâne du Saïmiri con- 
tient, toutes proportions observées, le cerveau le plus volumi- 
neux, ne suflit pas à l'expression de ma pensée... Dans le jeune 
sujet que voici, la boîte cérébrale forme un sphéroïde de 18 lignes 
en longueur (0°,040), de 16 (0,036) dans la plus grande largeur, 
et de 15 (0,034) en hauteur verticale. Je mesure de plus tout le 


crâne sur sa base, que je trouve de 27 lignes (environ 0,060). Si 


— 45 — 


dans mes cours sur les Mammifères ‘, comme devant 
constituer, non une simple section, mais un genre, 
qui se distingue surtout * par l'énorme volume du cer- 
veau; caractère fqu'avaient omis, malgré sa haute im- 
portance, G. Cuvier et son traducteur M. Voigt. 

J'ai fait voir en même temps que le genre Sai- 


nuris*, ne se compose pas seulement d’une espèce, 


de cette quantité 27 (0,060) vous soustrayez la longueur trouvée 
du sphéroïde entier, ou le chiffre 18 (0,040), vous avez 9 (0,020), 
ou le tiers, pour la profondeur palatine de la face. 

« Reprenons par parties la longueur de la base, afin de con- 
naître quelle est à son égard la position du trou occipital. Or, 
voici ce que donnent nos mesures : 


m. 


Longueur en avant du trou occipital. . . . . . . . . 14 lig. (0,051) 
MONCUCUNMEN ALICE Re RE  - . - 9. (0,020) 
Diamètre du trou occipital. . . . . . . . . . . . . . 4 (0,009) 

Mot ne 27 (0,060) 


« Les mêmes mesures prises sur un crâne humain donnent à 
peu près les mêmes proportions. » 

1 Voyez l'analyse que M. Gervais a publiée de mes lecons de 
1835 sous ce tre : Résumé des Leçons de mammalogie professées 
au Muséum par M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire. Paris, in-8. Voyez 
aussi l'Érho du monde savant. 

? Voici comment M. Gervais en indique, d’après moi, les carac- 
tères (p. 19) : Poils ras; oreilles plus petites et plus courtes que 
chez les Callitriches ; et surtout développement très-considérable 
de l'encéphale, qui, proportion gardée, est peut-être plus volu- 
mineux que celui de Fhomme. Les yeux sont extrêmement rap- 
prochés , et la paroi interne des orbites est incomplète. Le trou 
occipital estsitué au milieu de la base du crâne, disposition re- 
marquable, et qui ne se trouve pas à un degré aussi élevé chez 
toutes les races humaines. 

Et non Saëmiri, comme on l'a imprimé par erreur. J'ai adopté 
Saëmiris, à exemple des mots Zndris, Loris, etc. 


_ 46 — 
comme on l'avait toujours dit, mais de trois, L'une 
de celles-ci venait d'être découverte par M. d'Or- 
bieny, qui l’a figurée depuis. Une autre avait été rap- 
portée plus anciennement par mon père, qui se l'était 
procurée dans un voyage en Portugal. 

Le groupe des Saïmiris a été admis, mais seulement 
comme une simple section assez peu distincte, dans 
l'Ostéograplhie” de M. de Blainville. Ce célèbre zoolo- 
eiste décrit les Saïmiris comme de petites espèces de 
Sapajous, à queue extrêmement velue et à peine pre- 
nante, à tête longue et comme étirée, et offrant une 
particularité remarquable; l’état incomplet de la cloi- 
son interorbitaire, par absence de ce qu’on nomme 
l'os planum dans l'anatomie de l’homme, ou le peu 
de développement des masses latérales de l'ethmoïde. 
L'auteur fait aussi remarquer que toute la tête est 
comme bulbeuse par la grande minceur des os et l’état 
lisse de toutes ses parties. Quant au reste du squelette, 
il n'offre pas, dit M. de Blainville, de différences un 
peu importantes : c’est à tort que Daubenton avait cru 
à l'existence de trois vertèbres lombaires seulement; 
il en existe sept, le nombre des vertèbres dorsales 
était de treize. 

En 15/0, M. Lesson, dans son Species des Mam- 
mufères bimanes et quadrumanes *, et de même, 
en 1542, dans son Tableau du Règne Animal, a 


* Fasc. IT, p. 17. 1839. 
"Loc.'crr. 


A7 — 


admis le groupe des Saïmiris, toutefois en le con- 
sidérant comme un simple sous —genre parmi les 
Sagoins (Saguinus de Lacépède) : sous-genre pour le- 
quel l’auteur propose le nouveau nom de Pithesciu- 
reus, et dans lequel il n'admet qu’une seule espèce, 
le Saïmiri écureuil, Pithesciureus Saïmirr. 

M. Pouchet, dans sa Zoologie classique, en 1841, à 
aussi admis le genre Saïmiri, mais sans lui donner de 
nom latin. Comme les auteurs précédents, il n'indique 
qu'une seule espèce. 

On voit que, parmi les auteurs eux-mêmes qui ont 
cessé de confondre les Saïnuris avec les Callitriches, 
il existe encore une très-grande discordance, soit re- 
lativement à la valeur de ses caractères, soit quant au 
nom qu'il convient de lui appliquer. 

La science est un peu plus avancée à l'égard du 
genre Nycüpithèque, dont il me reste à dire ici quel- 
ques mots. On est au moins d'accord sur ses caractères, 
et sur la nécessité de séparer les Nyctipithèques en un 
groupe distinet. La nomenclature seule varie selon les 
auteurs, et encore n’existe-t-1l à son égard que de très- 
légères difficultés. 

Ce genre a pour type un Singe découvert à Cassi- 
quiare par M. de Humboldt, décrit par lui sous le nom 
de Simia trivirgata, ei érigé, dès 1811, sous le nom 
d’Aôte, en un genre qui est aujourd'hui généralement 
admis. Par qui ce genre a-t-il été créé ? 

Par une circonstance singulière, les auteurs eux- 
mêmes qui ort accompli ce progrès, loin de le reven- 
diquer pour eux-mêmes, l’attribuent à d’autres. Le 


— AG — 


genre Aôte, selon M. de Humboldt", appartient à mon 
père et à Iliger; et au contraire, selon mon père * et 
selon Iliger *, il appartient à M. de Humboldt. 

Le fait est que ces trois auteurs ont contribué à l’é- 
tablir. M. de Humboldt a seulement indiqué, dans son 
Mémoire sur les Singes de l’'Orénoque *, une nouvelle 
famille de Singes, que l'on pourrait, dit-11, désigner 
par le nom d’AGtes (xwro:). Quelques mois plus tard, 
!liger a introduit dans le système le nouveau genre 
sous le nom d’Æotus. Enfin, en 1812, mon père en 
a recüfié les caractères sur un point important. 
M. de Humboldt, dans sa description, avait dit les 
oreilles externes presque nulles (auriculæ fere nullæ), 
et de là le nom d’Aôte; Illiger, substituant à une in- 
dication inexacte une expression erronée, avait dit 
auriculæ nullæ; mais mon père, en cela suivi par 
M. de Humboldt dans son Tableau des Singes de 
l'Amérique”, s'est tenu dans les limites de la vérité en 
disant seulement les oreilles très-petites. 

Le nom d'Æotus, d'abord adopté par plusieurs 
zoologistes °, est depuis plusieurs années entièrement 
abadonné. Deux noms nouveaux , successivement 
proposés, l’un, Vycäpithecus, en 1823, l'autre Noc- 


1 Loc. cit, p. 357 et 358, 

? Tableau des Quadrumanes, loc. cit. 

PA 

4 Loc. cit., p. 306. 1811. 

# Publié à la fin du volume où se trouve le travail plus baut 
clé. 

6 Desmarest, Mammalogie , 1820; Latreille, Familles naturelles 


du règne animal, 1825; et Jardine, Monkeys, 1833. 


Ad 


chora, en 1824, se partagent les auteurs modernes. 

Spix * est l’auteur du premier de ces noms. Il a dé- 
crit sous les noms de Nycüpithecus felinus et N. vo- 
ciferans, deux Singes dans lesquels, trompé par la ca- 
ractéristique erronée d’Illiger, 1 n'a point reconnu 
des Æotus. Aujourd'hui, il n’est pas douteux que le 
prétendu nouveau genre de Spix ne soil, sous un au- 
tre nom, le même que l’Æotus. M. de Humboldt nous 
‘fait connaître? que mon père, dans un travail par lui 
communiqué à lillustre voyageur, avait donné au 
Sakis ce même nom générique Wycuipitheque. Mais 
mon père n'ayant jamais publié ce nom, Spix a pu 
sans inconvénient le transporter aux Æotus. Mon père 
en a lui-même jugé ainsi, puisque dans son Cours sur 
l'histoire naturelle des Mammiferes, 11 a admis la sub- 
sütution du nom de Nyctipithecus au nom d’A4otus. 

C'est M. Frédéric Cuvier qui a introduit dans la 
science le nom de Nocthore, Mocthora*. Ayant eu 
occasion dobserver à la ménagerie du Muséum un 
Aotus vivant, el ayant constaté chez lui l'existence 
des conques auditives qu'il croyait n'avoir encore été 
signalées par personne, ce célèbre zoologiste a cru 
devoir rejeter comme erroné, et comme propre à in- 
duire en erreur, le nom d’Æotus, et il a proposé le 
mot nouveau Vocthora. 


En appliquant les règles de nomenclature que j'ai 


 Simiarum et Vespertilionum Species novæ, gx. in-fol. Munich, 
1823. 
2 Locsjeit., p.306 et 311. 
3 Hist. nat. des Mammifères de la ménagerte, août 1824. 
ZLooro&is. 4 


— 50 — 
cru devoir adopter et suivre invariablement depuis 
quelques années", le choix à faire entre les noms pro- 
posés pour le Sëmia trivirgata et ses congénères, est 
exempt de toute difficulté. Le nom d’Zotus, d’une 
part, comme exprimant un faux caractère , de l’au- 
tre, comme tombé en désuétude, doit être écarté”. 
intre les deux autres noms, Nycupithecus et Noc- 


1 Voy., à la fin du mémoire déjà cité sur les Singes, les notes If, 
II, IV et VIT. 

Parmi ces règles, dont la stricte observation pourra seule ban- 
nir de la nomenclature l'arbitraire qui y règne si déplorablement 
aujourd’hui, je citerai, en les exprimant de la manière la plus 
concise , celles qui sont relatives au choix des noms en général, 
à cause des applications que j'ai à en faire ici, et celles qui se 
présenteront par la suite presqu’à chaque page. 

1. Rejeter les noms absurdes par eux-mémes, ou contradictoires 
avec les faits ou les idées qu'ils sont destinés & exprimer; cax ils sont 
proscrits par la logique comme causes probables d'erreur. 

IL. Rejeter les noms déja employés dans une autre acception : Va 
logique les proscrit également comme causes probables de con- 
fusion. 

HT. Considérer comme non avenus (toutefois en les citant en 
synonymie) {es noms tombés en désuétude. En eflet, ces noms n’ont 
réellement plus d'existence dans la science, et leur rétablissement 
entraînerait tous les mêmes inconvénients que la création de mots 
nouveaux. 

IV. Sauf ces trois éxceptions, entre plusieurs noms proposés, 
préférer invariablement le plus anciennement publié. La justice et 
le respect envers les travaux antérieurs ne commandent pas seuls 
cette préférence : la logique la réclame aussi. On doit choisir le 
nom qui est le plus ancien, et non celui qui paraît le meilleur : 
car, sauf des cas fort rares et exceptionnels, la date d'un nom est 
un fait incontestable et incontesté; sa valeur peut être diverse- 
ment interprétée, selon les temps, les lieux et les doctrines. 


2 Règles Let III. 


= — 
thora, le premier doit être préféré, en raison de son 


antériorité !. 


$ HI. — Des caracteres et des mœurs des Nyctipi- 


thèques. 


Avant d'aborder l'étude comparative des caractères 
des Callitriches, des Saïnuris et des Nyctipithèques, il 
m'a "paru utile d’écarter, à l'avance, quelques diflicul- 
tés terminologiques qui auraient pu se présenter, el 
notamment de fixer la nomenclature oénérique dont 
je devrai me servir. Dans une science où la nomen- 
clature est si complexe et si immense, il importe de 
ne pas ajouter les difficultés des mots aux difficultés 
des choses. 

C’est aussi afin de mettre plus de précision dans 
l'exposition des caractères et plus de clarté dans tout 
ce travail, que je place ici, en première ligne, le genre 
Nycüpithecus, celui de tous dont la détermination 
laisse le moins à désirer. 

Son principal caractère, d’où dérivent les habitudes 
essentiellement nocturnes des Nyctipithèques, et que 
leur nom rappelle mdirectement, c’est l'énorme dé- 
veloppement des globes oculaires. Les Nyctipithe- 
ques, comme l'ont très-justement remarqué MM. de 
Humboldt et Fréderic Cuvier, sont les Loris où mieux 
encore, les Cheirogales du Nouveau Monde *. 


1 Règle IV. 


? Cest, du reste à- fait à tor ‘un zoologiste anglais : 
SL , este, tout-a-fait & tort qu'un 700 ogiste anglais à 


Re 

Les yeux, qui de nuit, dit M. de Humboldt, res- 
semblent à des yeux de hibou, ont, d'après les obser- 
vations de M. Frédéric Cuvier, les pupilles rondes. 
Les orbites, séparées par une cloison extrêmement 
mince et transparente même, surtout en arrière, 77@1$ 
complète, sont d'une étendue considérable ‘, ainsi 
qu'on en jugera par les mesures suivantes, prises chez 
un Nyctipithèque et, comme termes de comparaison, 
chez un Sapajou et chez l'Homme. 


: NYCGTIPITHÈQUE.  SAïMmI. SAJOU. Home. 
Diamètre antéro-postérieur : ; - h 
de la tête osseuse. . . . 0,061 0,065 0,092 0,190 
Diamètre transversal au ni- 
veau des trous auditifs. . 0,031 0,034 0,051 0,150 
Distance entre les parois ex- 
ternes des deux orbites. . 0,040 0,031 0,043 0,094 
Diamètre inféro - supérieur 
de l'orbite (hauteur). . : 0,019 0,015 0,022 0,032 
Diamètre transversal (lar- 
geur). . . + + + + 0,019 0,01/Â 0,019 0,037 
Diamètre antéro-postérieur 
(profondeur). . . . . 0,022 0,020 0,025 0,045 
Moyenne des trois diamè- 
tres orbitaires. . + . . 0,020 0,016 0,022 0,038 
Rapport de cette moyenne 
au diamètre antéro-posté- 


f 


rieur de la tête. . . . A DES EE RS LE SR 


La simple comparaison de ces chiffres fait voir que 
chez le Nycüpithèque, si inférieur par les dimensions 


récemment proposé de placer les Nyctüipithèques parmi les Lému- 
ridés. 


1 Voyez la planche. 


ne 

générales au Sajou, les orbites ont cependant, à trois 
millimètres près, la même profondeur et la même 
hauteur, et, exactement, la même largeur ‘. Aussi Ja 
plus grande largeur du crâne des Nyctipithèques est- 
elle donnée par le diamètre transversal pris au niveau 
des orbites, tandis que chez le Sajou, le crâne est 
beaucoup plus large en arrière que la face ne l’est en 
avant dans la région orbitaire. Les différences que l’on 
trouve en comparant le crâne du Nyctipithèque à celui 
de l'Homme et à celui du Saïmiri, sont analogues, mais, 
à légard de l'Homme, bien plus prononcées encore. 

Afin de mettre ces différences dans tout leur jour, 
on peut substituer à la comparaison des divers diamè- 
tres des orbites chez l'Homme, le Sajou et le Nycti- 
pithèque, celle des surfaces des ouvertures de ces 
mêmes orbites, ou plus exactement des sections des 
cavités orbitaires au niveau de leurs ouvertures. Je 
mettrai, pour chaque espèce, en regard de ces surfaces 
de la section orbitaire, celle du grand trou occipital. 


Nycririr. SaimMini. SAJOU. AouuE. 


Surface de la section orbitaire. 2718 c454mm.c.976mm.c.s 6 /igmm.e. 
Surface du grand trou occipital. 55 53 91 877 


! Le crâne que j'ai pris pour type est celui d’un Vyctipithecus 
Jelinus. 

J'ai sous les yeux le crâne d’un autre Nyctipithèque, N. lemu- 
rinus, chez lequel les orbites sont plus étendues encore que chez 
le précédent, et d’une largeur absolue plus grande que chez le 
Sajou. J'ai fait figurer ce crâne fort remarquable ( voy. l’atlas); 
mais comme il est incomplet en arrière, j'ai préféré donner les 
mesures d’après un crâne de N. felinus, qui est en parfait état de 
conservation. 


_ 54 — 
D'où l’on voit qu'en prenant pour unité la surface 
du grand trou occipital, la surface de la section orbi- 
taire serait exprimée par les nombres suivants, savoir : 


Pour le Nyctipithèque. - 4000 à: 06,11 
Pourle Sao, sue EN 5; 09 
Pour le Samir: Le SN 1,89 
Pour l'Homme. . . + . . . 4 . . 4,24 


Les énormes orbites que je viens de décrire, oc- 
cupent presque toute l'étendue de la face. Il n'existe 
qu’une très-pelite distance entre le bord inférieur de 
l'orbite et l'arcade alvéolaire, et le museau est droit, 
court et un peu rentrant, de sorte que la ligne faciale 
qui est concave chez le Sajou, et que nous verrons 
être sensiblement droite chez les Callitriches, et sur- 
tout chez les Saïmiris, est ici plus où moins régulière- 
ment convexe. La tête, portée sur un col court et gros, 
est donc dans son ensemble très-arrondie. Ce sont ces 
caractères qui ont fait dire à M. de Blainville ! que la 
téte entotalité rappelle un peu celle des Felis; etecomme 
la physionomie extérieure résulte nécessairement de 
la conformation interne, cette analogie avec les Felis a 
frappé tous ceux qui ont vu des Nyctipithèques vi- 
vants *; par exemple, M. de Humboldt qui compare 
leur tête à celle du Chat-tigre, et Spix qui donne à 


1 Loc. cit., p. 20. 

? On donne méme en quelques lieux, d'après M. de Humboldt, 
au N. trivirgatus le nom de Tüi-tigre (Singe-tigre). Toutefois , 
M. de Humbotdt dit que c'est en raison de la ressemblance qui 


existe entre Le cri du N. srivirgatus et celui du Jaguar. 


__5S — 
l’une de ces espèces Le nom de Nycapithecus félinus. 

Les narimes, de forme ovalaire, sont en partie la- 
térales et en partie inférieures, la cloison internasale 
ayant peu de largeur. Elles n’offrent donc pas com- 
plètement la disposition qui a fait désigner si souvent 
l’ensemble des Singes américains sous le nom de Pla- 
tyrrhimus. 

Bien que la tête soit, comme on l’a vu, beaucoup 
moins large en arrière qu’en avant, le cerveau est vo- 
lumineux. Le crâne est, il est vrai, déprimé et très- 
peu convexe supérieurement; mais la boite cérébrale 
est large et elle à de l'étendue en longueur, le trou 
occipital, qui est circulaire, occupant à peu près le 
milieu de l’espace compris entre locciput et les con- 
dyles de la machoire inférieure. 

Celle-ci a ses branches montantes assez étroites su- 
périeurement, mais très-dilatées inférieurement; forme 
qui semble devoir être liée à un développement assez 
marqué de l'appareil hyoïdien et du larynx. 

Les dents offrent la même conformation que chez 
les Sajous, remarque déjà faite par M. Fréd. Cuvier. 
Toutefois les canines ne paraissent jamais prendre le 
même accroissement que chez ceux-e1. 

Les formes générales semblent lourdes chez l’ani- 
mal vivant, en raison de son pelage très-long, très- 
abondant, très-touffu. Mais elles sont en réalité très- 
légères et très-sveltes, et, sous ce rapport encore, Pani- 
mal rappelle les Loris. Comme chez ceux-ci, la région 
lombaire , en particulier, est remarquablement aïlon- 


gée ; elle se compose de huit vertèbres, nombre plus 


196 — 


considérable à ma connaissance, du moins , que chez 
aucun autre Singe. 

Les membres antérieurs sont de hauteur moyenne, 
les postérieurs beaucoup plus developpés, ainsi qu'on 
en jugera par les mesures suivantes. 


mm LLER EL 


Fémur. . : . o,o90 Humérus. . . . 0,070 
Tibia. . . . . 0,088 Radius. . . . 0,062 
Main postérieure. 0,082 Main antérieure. 0,055 


La queue, qui forme à peu près la moitié de la lon- 
gueur totale, est très-velue et non prenante. Aussi les 
vertèbres caudales , très-allongées et très-crêles, res- 
semblent-elles beaucoup à celles des Ouistitis. 

Les doigts que l'animal tient presque toujours demi- 
fléchis, surtont aux membres de devant, sont assez 
longs. Les pouces antérieurs sont à peine opposables, 
et leurs ongles sont seulement un peu plus larges que 
ceux des autres doigts : ceux-ci sont repliés sur eux- 
mêmes , el conformés en gouttères ; ceux des pouces 
antérieurs sans être précisément en gouttière, sont 


de même très-convexes : ceux des pouces postérieurs 


7 
sont au contraire très-aplatis. 

Enfin, pour achever de faire connaître les carac- 
tères génériques des Nyctipithèques, je dois mention- 
ner leur petite taille, très-inférieure à celle des Sajous, 
et à peu près la même que celle des Saïmiris. 

Ces remarques ne sont sans doute pas suffisantes 
pour faire nettement approuver les caractères des 
Nycüupithèques; mais ils seront bientôt comparés aux 
caractères des Saimiris et à ceux des Callitriches. On 


2 MS 


trouvera, en outre, les uns et les autres reproduits 
sous une forme concise et méthodique dans le Synopsis 
placé à la fin de ce travail. 

Quant aux mœurs des Nyctipithèques, il me suflira, 
en renvoyant aux ouvrages de MM. de Humboldt, 
Spix et Frédéric Cuvier, de rappeler ici les faits prin- 
cipaux déjà signalés par ces auteurs. 

Le plus important de tous, est relatifaux habitudes 
nocturnes de ces animaux. J'ai vu, ainsi que M. Fré- 
déric Cuvier, le Nyctipithèque de la ménagerie, dormir 
presque constamment le jour, la tête repliée sur la 
poitrine : habitude qui a valu au NW. trivirgatus, sur 
les bords de l'Orénoque, le nom de Mono dornulon 
ou Singe dormeur. M. de Humboldt a vu un indi- 
vidu qu'il a possédé pendant plus de cinq mois, s’en- 
dormir assez régulièrement à neuf heures du matin, 
parfois dès l'aube du jour, et ne se réveiller qu'à sept 
heures du soir. La lumière, dit M. de Humboldt, l’in- 
commodait beaucoup, et c’est aussi ce qu’aflirme Spix, 
des Nyctipithèques du Brésil. Oculr igner, dit-l, lucem 
perhorrescentes. C'est donc un fait parfaitement avéré 
que la vie nocturne des Nyctipithèques, aussi actifs du- 
rant la nuit, aussi ëmpétueux même, selon l’expression 
de M. de Humboldt, que le sont le jour presque tous 
les autres Singes, et aussi endormis le jour que ceux- 
ci le sont lanuit. Il y aici, commeonle voit, un accord 
parfait entre le trait le plus caratéristique de lorgani- 
sation du genre N yctipithèque, l'énorme volume de ses 
yeux, et le fait le plus remarquable de ses habitudes. 


Ce sont ordinairement des creux ou trous d'arbres 


— DB — 

qu'il choisit pour gite. L'habitation sur les arbres 
résultant en quelque sorte comme conséquence néces- 
saire des conditions de Porganisation du Singe en gé- 
néral, et Phabitation dans les trous ou cavités obscu- 
res se liant avec les habitudes nocturnes, on eût pu 
déduire 4 priori ce fait qui est d’aulleurs attesté par 
M. de Humboldt. Au défaut de trous les Nyctipithè- 
ques se logent parfois entre les grosses branches des 
arbres. 

Ils sont à peu près omnivores, ainsi que le sont la 
plupart des petites espèces soit de Singes, soit de Lé- 
muridés. Is vivent en grande partie de fruits, saisis- 
sent avidement et adroitement les insectes, et chassent 
parfois aux petits oiseaux. En captivité ils se mon- 
trent avides de friandises, et notamment de sucreries. 

M. de Humboldt assure que les Nyctipithèques ne 
vivent pas en troupes comme les autres Singes, mais 
deux à deux dans une véritable monogamie. M. Spix 
nous représente au contraire les N yclipithèques comme 
vivant en troupes. 

Enfin un dernier fait avec lequel se lie manifeste- 
ment la conformation remarquable de la machoire in 
{érieure , signalée plus haut, c'est la force de la voix 
des Nyctipithèques : leur eri nocturne, dit M. de Hum- 
boldt, d’une force vraiment extraordinaire, ressem-— 
ble à celui du Jaguar, d’où les noms de Mono-tigre 
et de Titi-tigre que l'on donne au W. trivirgatus dans 
les missions de l'Orénoque ! 


L'animal, d'après M. de Humboldt, a deux autres cris : 


à 59 2 

Spix est beaucoup moins explicite à cet égard que 
M. de Humboldt; mais le nom spécifique F’ocrferans, 
qu'il a donné à l’une de ces espèces, ne peut guère 
laisser de doute qu'il n'ait fait des observations ana- 
logues à celles de son illustre devancier. 


S IV. — Des Nycupithèques décrits par les auteurs. 


Avant de faire connaître les caractères de l'espèce 
nouvelle pour laquelle je propose le nom de NW, lemu- 
rinus, j'analyserai le diverses descriptions données 
par les auteurs, et je chercherai à en faire ressortir 
les traits et les caractères propres des sujets de ces des- 
cripuons. 

La marche que je vais suivre, n'est prescrite par 
l'extrême difficulté du sujet; difficulté qui est telle que 
je ne saurais encore espérer, dans l'état présent de la 
science, d'arriver à des résultats complétement satis- 
faisants. 


A. — Miriquouina d’Azara. 


Azara est Le premier qui ait, sinon indiqué, au moins 


décrit, un Nyctipithèque. C'est incontestablement une 


espèce de ce genre qu'il décrit sous le nom de Miri- 


quouina *, et non le Saki de Buffon ou une espèce 


une espèce de miaulement, et un son guttural très-désagréable 
qu'il fait entendre lorsqu'il est irrité. 

UT, p. 243 de la traduction francaise de Moreau de Saint- 
Méry. 


— 60 — 

voisine, ou encore bien moins le Marikina, comme l'ont 
cru Azara et tant d’autres après lui, Dans cette supposi- 
tion, tant de différences se présentent entre les carac- 
tères réels et la description de Buffon, qu’Azara est 
obligé de relever successivement chaque trait de celle- 
ci, et qu'il accuse Buffon d’avoir décrit de mémoire et 
donné une planche arbitrairement faite. 

Les traits caractéristiques, malheureusement un peu 
insuflisants, que l’on peut extraire de la description 
d’Azara, sont les suivants : 


Cloison internasale peu large; caractère qui suflirait seul pour 
prouver que le Miriquouina appartient au genre Nyctipithèque, 
et non au groupe des Sakis, si remarquables par l'extrême écar- 
tement et la forme très-allongée de leurs narines !. 

Longueur totale d'environ 87 centimètres, dont 38 pour la dis- 
tance du bout du museau à l’origine de la queue, et 49 pour la 
longueur de celle-ci. 

Parties inférieures, y compris le dessous de la tête, face interne 
des membres antérieurs jusqu'aux coudes, et des postérieurs jus- 
qu'aux genoux, d’une couleur cannelle qui, en dedans des fesses, 
est plus rougeñtre. Parties supérieures, d’une couleur mélangée 
que l'auteur ne détermine pas, mais qui est évidemment grisâtre, 
les poils ayant la pointe blanche, puis une portion noire, puis 
upe autre portion blanchâtre. 

Joues et menton, blanchâtres ; au-dessus de chaque œil, une 
tache de même couleur, peu prononcée, finissant supérieurement 


en pointe; milieu du front et face, de couleur foncée. 


Un passage de la description pourrait toutefois faire penser le 
contraire. « L'oreille, dit le traducteur, est très-large ; dans son 
point le plus élevé, elle n'égale pas la hauteur de la tête. » 1 faut 
entendre que le haut de l'oreille, qui est large mais courte, n'at- 
teint pas le niveau de la face supérieure du crâne. 


= OC — 


Poils de la queue, noirs à la pointe, et le reste de couleur tabac 
d'Espagne faible , le noir occupant une portion d'autant plus 
grande du poil, et se prononcant d'autant plus qu’on approche 
davantage de extrémité de la queue. Les poils de la base de la 
queue ayant de 2 à 3 centimètres de long; ceux de son extré- 
mité, de 4 à 5. 


Tel est le résumé de la description que donne 
Azara de cette espèce, découverte par lui dans la 
province du Choco, sur la rive occidentale du Pa- 
raguay. 

Presque tous les auteurs, à lexemple de mon 
père", en font un Saki sous le nom de Pithecia Miri- 
quouina. M. de Humboldt, dans son Tableau des 
Singes de l'Amérique, lui a donné la même place 
dans le système, mais sous le nom de S$ëmia Azarc. 

Y ; 
M. Lesson, au contraire, ayant reconnu en lui un 
1 2 
véritable Nyctüipithèque, l’a reporté dans le genre où 
il doit rester. 


B.— Douroucouli, Simia trivirgata de M. de Humboldt. 


Voici le résumé de la description donnée par l’au- 
teur de ce Singe , habitant, dit M. de Humboldt, les 
forêts épaisses du Cassiquiare , près du village indien 
de l’Esmeralda, et les environs des cataractes de May- 
puras, entre le deuxième et le cinquième degré de 
latitude boréale. 


. Longueur totale d'environ 74 centimètres, dont 26 environ 


1 Tableau des Quadrumanes. 


__ 62 — 


pour la distance du museau à l'anus , et 48 pour la longueur de 
la queue. 

Gorge, poitrine, ventre et parües internes des extrémités, d’un 
jaune orange qui üre sur le brun ; parties supérieures , d'un gris 
mêlé de blanc, et comme argenté; les poils de cette partie, très- 
doux. Une ligne brune, longitudinale, sur le dos, depuis l'occi- 
put jusqu'à la queue ; une tache blanche au-dessus de chaque 
œil ; trois raies noirâtres, parallèles, sur la tête, et surtout sur le 
front. Visage couvert de poils noirâtres ; nez pareillement noir, 
mais avec une ligne blanche, longitudinale, sur le milieu. 

Queue touffue , de même couleur que le dos, à l'exception de 


son extrémité, qui est noire. 


Le Singe de nuit de Buffon est le seul Singe avec 
lequel M. de Humboldt ait comparé le Douroucoul, 
et il n'a point eu de peine à prouver qu'il en diffère 
spécifiquement. Diffère-t1l aussi du Miriquouina? 
Il est impossible de rien aflirmer à cet égard, puisque 
nous n'avons, comme éléments d’une comparaison 
en elle-même fort difficile, que deux descriptions 
concises, et dont l’une est fort peu exacte. Cependant 
la diversité spécifique de l’un et de l'autre me semble 
devoir être admise comme très-vraisemblable. 

1° La coloration si caractéristique de la face et de 
la partie antérieure de la tête, chez le S. trivrrgata, 
ne se retrouve pas chez le Miviquouina. On à quelque- 
fois donté, il est vrai, que la figure de M. Humboldi 
qui représente trois raies étroites ou lignes noires 
parallèles, soit parfaitement exacte. Mais le texte est 
aussi explicite que possible ; les trois raies frontales , 
que lillustre voyageur rappelle, comme le trait le 
plus caractéristique de l'espèce, par le nom de S. 


— 65 — 

trivirgata , sont tellement remarquables, même pour 
les personnes étrangères à l'histoire naturelle, qu'elles 
ont fourni l'un des noms vulgaires. Les missionnaires 
de l’Orénoque appellent le Douroucouli Cara rayada, 
c'est-à-dire face rayée. 

2 Le S. trivirgata a encore quelques autres carac- 
tères distincufs dans la raie blanche médio-nasale 
décrite par M. de Humboldt, dans la coloration de sa 
queue, et dans sa taille inférieure à célle du Mi- 
riquouina. 

3° Enfin, il importe de remarquer que ces deux 
Singes viennent de régions que sépare une immense 
distance. C’est entre le second et le cinquième degré 
de latitude boréale que M. de Humboldt a découvert le 
Douroucouli; Azara avait trouvé le Miriquouina vers 
le treizième degré de latitude australe. 


C. — Singe de nuit à face de chat, Nyctipithecus felinus de Spix. 


Voici la caractéristique que donne SpixX pour 
ce Singe trouvé par lui au Para. 


Sub-barbata, mystace ad latera male disiicho ; corpore toto vil- 
A, 60 
loso-lanuginoso, supra olivaceo-cineraceo, subis pallidé ochraceo ; 
caudd corpore multo longiore , supra radium cinerascente, subtus et 
versus latera üsque ad medium rufescente, reliqua nigra; fascia ni- 
gra utrinqué é malis verticem versus clongala, alia nigra frontis 
tntermedia cum lateralibus confluente ; maculis duabus supra oculos 
Ù l 
albicantibus. 
Les dimersions assignées à cette espèce par Spix sont, pour le 
O ; 
corps et la tête, environ 16 pouces allemands, ou, en réduisant en 
à. F] j 


mesures métriques, 0,376; pour la queue, 14 pouces, ou 0,340. 


GA — 

Comme le fait observer Spix, ce Singe diffère du Dourou- 
couli par la non existence de la ligne blanche médio-nasale et par 
la moindre longueur de la queue. Ce dernier caractère distingue 
de mème le N. felinus du Miriquouina. 

L'auteur fait seul remarquer que les poils du dessus du corps, 
d'un cendré foncé superficiellement, sont roux et noirs dans leur 
première portion. 

La queue est presque toute noire, sa base étant seule d'un roux 
grisâtre en dessus, et ferrugineuse en dessous. 

Enfin, parmi les caractères distinctifs de cette espèce, il importe 
d'insister sur la coloration de la tête. Il existe sur le milieu du 
front une tache noire, et sur chacun des côtés de la face et du 
front une ligne noire dirigée de la joue vers le haut de la tête. 
Cette tache et ces deux lignes correspondent évidemment aux trois 
raies qui ont fait nommer le Douroucouli S. trivtrgata; mais ici 
ce n'est pas une simple raie qui existe sur la ligne médiane, c'est 
une tache étendue. Spix se borne, il est vrai, à dire, dans sa carac- 
téristique, qu'elle est confluente avec les raies latérales ; et les deux 
descriptions qu'il donne, lune en francais, l’autre en latin, ne 
sont pas non plus suflisamment explicites. Mais la figure que Spix 
donne de son N. felinus, toute mauvaise qu’elle est, ne laisse au- 
cun doute qu'il s'agisse ici, non d'une simple raie, mais d’une 


tache étendue. 


D. — Babillard brun, Nycripithecus voriferans de Spix. 


Celui-ci, qui vient des forêts de Talatinga, au Bré- 
sil, près des frontières de ce vaste empire du côté du 
Pérou, peut, selon Spix, être amsi caractérisé : 


Imberbis, corpore toto villoso-lanuginoso ; capite rufescenti-brun- 
neo ; strus tenuibus è malis versus occiput ascendentibus, nigro- 
brunnets ; maculà ad frontis apicem nigricante, brevi, haud con- 


fluente; ali& utrinque supra oculum flavicante; caudä corpore vix 


 — 
longiore , ad radicem usque ad parte tertiam ferruginea ; digritis 
palme plantæque pedis longioribus. 

Cette espèce , selon Spix , aurait à peu près les mêmes propor- 
tions que le N. felinus : elle différerait done notablement, sous 
ce point de vue, du Miriquouina, et aussi, quoique M. Gray la 
considère comme identique avec celui-ci 1, du $. trivirgatus. Elle 
est représentée comme ayant les oreilles plus courtes que le 
N. felinus, dont elle diffère aussi par la couleur de la queue, d’un 
roux ferrugineux dans la première moitié, noir dans la seconde. 
Enfin, ce qui n’a lieu chez aucun des Nyctipithèques précédents , 
le corps est entièrement d'un brun qui, seulement, pälit sous le 
ventre. Supérieurement les poils sont noirs à la racine, puis va- 
riés de roux et de noir. 

Les joues, les lèvres et le menton sont blancs ; une tache tri- 
angulaire, jaunâtre, estau-dessus de chaque œil; une autre, semi- 
circulaire et brunûtre, est en dehors de ce même organe. Le front 
présente, au milieu, une petite tache d’un noir brunâtre, et, de 


chaque côté , une bande étroite, presque filiforme. 


E. — Douroucouli de M. Frédéric Cuvier. 


Dans un Nycüpithèque qui a vécu à la ménagerie 
en 1824, M. Frédéric Cuvier a cru retrouver le Dou- 
roucoulr de M. de Humboldt, que personne n'avait 
encore revu depuis cet illustre voyageur. Aucune 
difiiculté ne s'élève en ce qui concerne la détermina- 
tion générique; mais il n’en est pas de même de la 
détermination spécifique. 


4 
. PES - -.N + 
Le Douroucouli de M. Frédéric Cuvier est bien, comme le 


Douroucouli de M. de Humboldt, d’un cendré argenté supérieu- 


1 Ann. of nat. history de Jardine, décembre 18/2. 


[Sa 


ZooLocie 


__ @6 — 
rement,'et d'un jaune assez vif inférieurement ; mais il existe aussi 


plusieurs différences notables : 
1° La queue ne fait guère chez le premier que la moitié de la 


longueur totale. 

9° Il n'existe point de ligne foncée médio-dorsale. 

30 Il existe bien trois taches noires sur le devant de la tête, 
mais les latérales peuvent seules étre dites des raies, la tache cen- 
trale, qui est d’une assez grande étendue , étant aussi large que 


longue. 
4 Le nez est entièrement noir, et les côtés de la face sont, ainsi 
que le menton et une tache au-dessus de chaque œil, d’un rous- 


sâtre brun clair. 
5° La queue, loin d’être de même couleur que le dos, est d’un 
roux ferrugineux, qui peu à peu passe au noir, le tiers terminal 


environ étant de cette dernière couleur. 


En présence de toutes ces différences, il y avait 
au moins lieu d'examiner si le Singe décrit par M. Fré- 
déric Cuvier est bien le véritable Douroucouli de M. de 
Humboldt. 

L'origine de l'individu de M. Fr. Cuvier, venu vivant 
par la voie du commerce, est restée inconnue ; mais le 
même Nyctipithèque a été envoyé de Moxos au Mu- 
séum d'histoire naturelle par M. d'Orbigny, en sorte 
que sa patrie est aujourd'hui déterminée. Le Dourou- 
couli de M. de Humboldt vient, comme on l’a vu, 
d’une région fort différente. 

En comparant de même le Douroucouli de M. Fr. 
Cuvier aux autres Nycüpithèques décrits, on trouve : 
qu'it se rapproche beaucoup du Miriquouina par son 
mode de coloration, mais qu'il a des proportions no- 
tablement différentes. L'inverse a lieu à égard du 


— 67 — 
N. vociferans de Spix, assez semblable par es pro 
portions, mais assez différent par la couleur. 

Quant au NW. felinus, au contraire, la comparaison 
très-minutieuse que j'ai faite entre les descriptions et 
la figure de Spix, d’une part, et, de Pautre, l'individu 
lui-même qu'a décrit et figuré M. Fr, Cuvier, ma 
pleinement convaincu de leuridentité spécifique. Voici 
quelques-unes des bases de cette détermination : 


1° La coloration caractéristique de la face est la même. Il existe, 
en effet , chez l'individu de M. Frédéric Cuvier, une tache noire 
médio-frontale, assez étendue , noire, ayant la forme d’un tri-: 
angle dont la base serait en arrière. A droite, de chaque côté de 
cette tache noire, au-dessus de l'œil, est une tache jaunâtre clair; 
plus en dehors, une ligne noirâtre, commencant sur la joue, re- 
montant vers le haut de la tête, et venant se terminer à l'angie 
postérieur de la tache médio-frontale. 

L'individu envoyé de Moxos par M. d'Orbigny diffère seule- 
ment en ce que les taches super-oculaires sont d’un blane sale, 
un peu jaunâtre, et non d’un jaunâtre clair, différence qui est 
absolument insignifiante. 

2° Le pelage,'chez l'individu de la ménagerie, est d'un cendré 
presque pur, un peu argenté sur les parties latérales du dos, d’un 
cendré olivâtre sur le milieu. L'individu de Moxos offre de même 
ces deux couleurs, mais la première seulement sur les épaules 
et la face externe des membres, et la seconde sur toutes les par- 
ties supérieures, sauf le devant de la tête. L'individu de Spix 
ressemblait plus sous ce point de vue à ce dernier qu’à l'individu 
de M. Frédéric Cuvier, peut-être parce que celui-ci était mort en 
cage après une assez longue captivité. 

3° Cette explication rend également compte, et ici je puis être 
beaucoup plus aflirmatif, d'une différence existant entre la colo- 
ration de la queue chez l'individu de Spix et chez celui de M. Fr. 
Cuvier. Chez le premier, sauf quelques poils gris à la base, la 


— 68 — 

queue est rousse dans sa première moitié, noire dans le reste ; 
chez le second, le roux passe un peu moins promptement au noir: 
le dernier tiers environ est seul tout-à-fait de cette dernière cou- 
leur ; mais il existe aussi, dans la partie qui précède, des poils 
noirs, seulement en plus petit nombre. Le mauvais état du pelage 
de la queue explique cette légère différence ; et je retrouve d'ail- 
leurs, dans l'individu de M. d’Orbigny, tous les traits de la des- 
cription de Spix. 

4° Quant à la couleur des parties inférieures, la description de 
Spix est également applicable de tout point aux deux individus 
que j'ai sous les yeux. 


Ces analogies, et d’autres encore, relatives, soit à di- 
vers détails de coloration, soit à l'étendue des oreilles, 
me mettent en droit de conclure que le Douroucouli 
de M. Frédéric Cuvier n’est point le véritable Dourou- 
coul, N. érivirgatus, mais le N. felinus de Spix. 

C’est par conséquent aussi à celle espèce qu'il faut 
rapporter les résultats des diverses observations faites 
par plusieurs zoologistes francais sur le squelette du 
prétendu Douroucouli de M. Fréd. Cuvier. 


F. -— Résumé. 


En admettant provisoirement comme espèces dis- 
tinctes, ceux des Nyctipithèques, jusqu'a présent 
décrits, dont l'identité spccifique ne peut pas être dé- 
montrée, ce genre comprendrait donc présentement : 

1° Une espèce, de l'est du Brésil, que distinguerait 
surtout la non-coloration en fauve ou cannelle des par- 
ties inferieures, le V. vocrferans de Spix. 

2 Le N. trivirgatus, des bords de l'Orénoque, 


que caractérisent, d’après l'illustre auteur qui Pa décrit, 
le pelage d'un cendré argenté supérieurement, la 
queue beaucoup plus longue que le corps, une ligne 
blanche médio-nasale, et surtout trois raies foncées 
sur la partie antérieure de la tête, enfin des oreilles 
très-courtes *. 

Cette espèce de Singe, aussi bien que la précédente, 
ne m'est connue que par une description et une figure. 

3° Le NW. félinus, du Para et de Moxos, à queue 
rousse et noire, seulement un peu plus longue que le 
corps, et à tache médio-frontale noire, assez étendue, 
à peu près aussi large que longue. 

Cette espèce m'est connue, outre la description et la 
figure de Spix, par la peau et le squelette d’un imdi- 
vidu, décrit par M. Fréd. Cuvier et par plusieurs 
auteurs sous le nom de Vocthora, Simia où Nyctipi- 
thecus trivirgatus, et par la peau d’un autre individu 
envoyé de Moxos par M. d'Orbigny. 

4° Le Wiriquouina, du sud du Paraguay, quiaurait 
le pelage du W. felinus, mais auquel Azara attribue une 
taille plus considérable et une queue plus longue. 

Ce dernier, connu seulement par une description 
incomplète, et non encore figuré, est une de ces espè- 
ces vaguement indiquées, que l’on ne peut introduire, 


1 C’est sans doute à tort qu’on a contesté ce caractère, dont 
l'expression toutefois semble avoir été un peu exagérée par M. de 
Humboldt. On verra plus bas que les oreilles sont, dans une par- 
tie des Nyctipithèques, notablement plus courtes que M. Fréd. 
Cuvier ne les à trouvées chez son Douroucouli, c’est-à-dire chez 


le N. felinus. 


= ft 

même avec doute, dans le système, et qui doivent être 
mentionnées hors rang, en attendant de nouveaux 
éléments de détermination. 


SV.— Descripuon d'une nouvelle espèce de Nyctpr- 
theque , N. lemurinus. 


J'établis cette espèce sur l'examen des peaux et des 
cränes de plusieurs individus des deux sexes et de diffé- 
rents âges, que le Muséum d'histoire naturelle a récem- 
ment recus de Santa-Ffé de Bogota par diverses voies. 

Le nom spécifique de Lemurinus que je donne à 
cette espèce, est destiné à rappeler, non-seulement 
les analogies générales qui existent entre les Nyctipi- 
thèques et divers genres de la famille des Lémuriens, 
mais aussi et surtout les caractères particuliers du pe- 
lage chez le N. lemurinus. C'est le même poil, long, 
touffu, laineux, qui existe chez les Lemur, et c’est 
même aussi, quant aux parties supérieures la couleur la 
plus fréquente dans ce genre, notamment dans les plus 
communes de ses espèces. Ajoutons que c’est aussi 
la même tendance à la production de variétés indivi- 
duelles qui, sans apporter aucune modification im- 
portante à la distribution des couleurs, changent du 
moins d’une manière assez prononcée la nuance de 
celles-cr. 

Dans le plus grand nombre des individus, les parties 
supérieures sont d'un cendré plus où moins lavé de 
roux et légèrement tiqueté. Cette couleur cendrée se 


= 
montre plus pure sur les parties latérales du corps, 
plus rousse tout-à-fait en dessus. 

Les poils de cette région, longs de 5 à 4 centimètres, 
ont tous leur bout noirâtre, puis une portion assez 
étendue cendré-roussatre, et la pointe annelée de fauve 
ou de roussatre et de noir. 

La couleur cendrée des flanes s'étend sans changer 
très-sensiblement de nuance, sur les côtés du col et 
sur la face externe des épaules, des bras et des cuisses. 

Le dessus de la tête est d’un cendré plus ou moins 
lavé de roussâtre. En avant, au milieu du front, il 
existe une petite tache noire ou noirâtre, placée entre 
deux taches blanchàtres, plus étendues qu’elle. Le 
dessous des yeux et le menton sont blancs, le nez 
étant au contraire couvert de poils ras très-foncés. 

Le dessous du corps et la face interne des bras et 
des cuisses sont d’un jaune orangé ou roussâtre, plus 
vif sous le ventre, un peu moins sous la poitrine 
et en dedans des membres. Le dessous du col est seu- 
lement d’un cendré pale roussatre. 

Les membres sont cendrés en dehors jusqu'aux 
mains; ils sont, en dedans, de la couleur de la poitrine 
ou du ventre , jusqu'aux coudes ou aux genoux, puis 
cendrés. Les mains sont couvertes de poils ras cen- 
drés, fauves et noirs. 

La queue près de sa base est, en dessous, rousse; en 
dessus, d’un cendré plus où moins roussâtre qui se 
confond avec la couleur du dessus du corps. Le reste 
de la queue, couverte en dessus et en dessous de longs 
poils à base jaunâtre et à extrémité noire, paraît tantôt 


_ 79 — 
d'un noir pur, tantôt d’un noir mêlé de jaune, selon 
qu'on apercoit ou non la portion jaune des poils sous 
la noire. 

Sous la base de la queue, au milieu de la partie 
rousse, des poils noirs où noirâtres, rendus secs, 
roides et comme agelutinés par la présence d’une ma- 
üière grasse dont ils sont fortement imprégnés, et 
formant dans leur ensemble une tache étroite et allon- 
gée, attestent la présence dans cette partie d’une 
glande assez développée. J'ai trouvé cette disposition 
chez tous les individus adultes soit mâles, soit femelles. 
L’analogue de cette glande existe chez le W. felinus, 
mais elle parait moins développée, et les poils qui la 
couvrent, sont roux comme ceux qui les entourent. 

Les oreilles sont, dans cette espèce, beaucoup plus 
courtes que chez le NW. jélinus. Jetrouvela distance de la 
base libre de l'oreille, au point où l’oreille a le plus 
de longueur, égale à 9 millimètres seulement , tandis 
que je trouve 3 millimètres de plus chez le N. felinus, 
bien que ce dernier soit de plus petite taille !. 

Nos individus adultes ont en effet tous de 36 à 38 
centimètres d'1bout du museau à l’origine de la queue, 
celle-ci ayant aussi à peu près cette même dimension. 
Je ne trouve au contraire que 31 à 32 centimètres chez 
les individus du W. felinus que j'ai sous les yeux. 

J'ai dit au commencement de cette description que 
quelques individus n'ont présenté des variétés. 


| 145 » . . 
1 Dans l’état frais, les oreilles seraient, sans nul doute, trou- 
vées plus grandes ; mais le rapport subsisterait. 


= 7 

L'un d'eux est remarquable par ses couleurs, généra” 
lement plus pales et plus lavées de roux. il est plutôt 
fauve roussatre supérieurement que cendré roussâtre, 
avec le dessous d’une couleur moins vive que chez les 
autres individus, et la queue, dans la plus grande par- 
üe de son étendue, d’un roux qui, même vers la fin, 
ne passe pas tout-à-fait au noir. La tache et le dessin 
de la partie antérieure de la tête sont les mêmes, 
mais la nuance diffère également : le dessus et le des- 
sous des yeux, qui sont ordinairement blanchîtres, 
sont presque fauves. Cet individu est femelle, mais une 
autre femelle m'a présenté les teintes ordinaires. Il 
s'agit donc bien ici d’une variété individuelle, et non 
d’une différence sexuelle. 

Chez d'autres individus, la variété résulte de l’é- 
tendue plus grande de la partie noire de l'extrémité des 
poils. J'ai observé cette modification sur le dos et les 
mains chez un adulte, et sur le dos chez un très-jeune 
sujet, également remarquable et par l'extrême mollesse 
de son pelage et par la couleur presque noire de son dos. 

Ces variétés, quoique assez différentes pour la cou- 
leur, sont facilement réductibles à leur espèce, en rai- 
son des caractères très-constants que fournissent 
l'abondance et le mode de coloration des poils, la 
taille et les proportions, la distribution des couleurs, 
et notamment la disposition des taches de la face et 
du front. 

C’est en ayant égard à ces caractères qu’on distin- 
guera toujours le Â. lemurinus et ses congénères, 
SaVOIr ; 


ss 

1° Du M. vociferans, chez lequel le corps est entiè- 
rement d’un brun qui seulement pàlit sous le ventre; 

2° Du N. trivirgatus, qui a la queue beaucoup plus 
longue que le corps, une raie médio-nasale blanche, 
et le pelage supérieurement d’un cendré argenté, avec 
une ligne foncée sur le milieu du dos ; 

3° Du Miriquouina, qui serait beaucoup plus grand, 
et aurait la queue proportionnellement beaucoup plus 
longue ; 

4° Du N. félinus, qui a la tache médio-frontale beau- 
coup plus étendue, le pelage généralement beaucoup 
plus court, et notamment la queue beaucoup moins 
touffue; chez lequel la couleur orangée où rous— 
sâtre couvre inférieurement la gorge, aussi bien que 
la poitrine et le ventre; enfin, chez lequel aussi les 
oreilles sont plus grandes ou, plus exactement, moins 
courtes que chez le W. felinus. 

À l'égard de ces deux derniers Nycüpithèques, je 
puis confirmer la différence réellement spécifique de 
l'un et de l'autre par la comparaison de leurs cranes. 
Quelque grande que soit l’'analogie de l’un et de l’au- 
tre, les différences suivantes peuvent être signalées : 

Le N. lemurinus a les orbites sensiblement plus 
larges que hautes, et par suite proportionnellement 
un peu plus larges que chez le W. felinus, qui a le dia- 
mètre orbitare transversal et le diamètre inféro-supé- 
rieur égaux entre eux : la différence est d’ailleurs peu 
marquée. 

La boîte cérébrale est, chez le N. felinus, très-sen- 


siblement moins large en arrière qu'en avant ; chez le 


— 7$ — 

N. lemurinus, elle conserve presque en arrière la 
même largeur qu’en avant. Ici encore la différence est 
d’ailleurs légère, et offre elle-même une confirmation 
de l'intimité des rapports qui unissent les deux espèces. 

La machoire inférieure est la seule partie qui pré- 
sente une diversité plus marquée. Chez le N. felinus, 
la branche horizontale a les deux bords presque pa- 
rallèles, la mâchoire étant de très-peu plus large au- 
dessous des dernières molaires qu'au-dessous de la 
canine. Chez le N. lemurinus, la mâchoire dont, par 
suite, le bord inférieur est très-sinueux, est, au con- 
traire , dilatée en arrière, beaucoup plus étroite en 
avant. J'essaierai de rendre cette différence sensible 
par quelques mesures. 


Distance entre les deux bords, priseau- N°: remmus. N: reuuninus, 


dessus de la seconde molaire. . . . 9 8 millim. 
Distance au-dessous de la quatrième. . 9 10 
Distance au-dessous de la sixième. . . 10 14 


Cette inégalité, très-marquée, est un caractère telle- 
ment inhérent à notre nouvelle espèce, queje la trouve 
déja indiquée chez un très-jeune individu, n'ayant en- 


core que les vingt-quatre dents dela première dentition. 


L'espèce que je viens de décrire, habite les Andes de 
la Nouvelle-Grenade, où elle parait être fort com-— 
mune, à en juger par le grand nombre d'individus qui 
nous sont tout à Coup parvenus par diverses voies. 

Parmi les voyageurs qui ont les premiers apporté en 
France le N. lemurinus , lun d'eux, M. Goudot, qui 


— 76 — 
l'a plusieurs fois chassé , et qui la observé avec soin , 
a bien voulu, à ma demande, rédiger sur les mœurs 
de cette espèce une note, dans laquelle se trouve plu- 
sieurs détails intéressants. Je ne saurais mieux faire 
que de la citer ici textuellement. 

«Ce petit quadrumane habite les grands bois de la 
région tempérée du Quindit, dans la Nouvelle-Gre- 
nade, depuis 1400 mètres, et même bien plus haut. Il 
ne sort ordinairement ! qu’à la nuit tombante, vit en 
petits groupes ou familles , et ne paraît pas s'éloigner 
beaucoup de certains sites où il semble qu'il trouve 
facilement sa nourriture. Ces animaux font entendre 
presque continuellement, de nuit, lorsqu'ils vont dans 
les bois, un petit cri sourd, qui se trouve assez bien 
rendu par la parole douroucou, sourdement et faible- 
ment prononcée, sans y ajouter lz (ainsi qu'il est 
écrit par M. de Humboldt.) Ils sont très-agiles. J'en 
ai vu qui venaient régulièrement chaque nuit dans 
les mêmes parages se nourrir des fruits de goyaviers, 
qu'ils paraissaient rechercher. Lorsqu'on leur trait un 
coup de fusil, ils se retiraient, mais ne tardaient pas à 
revenir. De jour, ils restent cachés, et se trouvent réu- 
nis en petits groupes au sommet des arbres, non les 
plus élevés, mais les plus touffus. Peut-être même les 
amas de petites branches et feuilles sèches qu’on trouve 
dans les lieux où ils se tiennent, y sont-ils réunis par 


1 Je dis ordinairement, parce que, bien que je n’en aie jamais 
trouvé de jour, un chasseur m'a rapporté le fait qu’il en avait vu 
allant dans l'après-midi. {Note de M. Goudot./ 


7 
eux. C'est dans ces sortes de nids qu'ils restent toute 
la journée à dormir. On a de la peine à découvrir ces 
gites, et lors même qu'on frappe contre l'arbre, ils ne 
se dérangent pas : ce n’est qu’en leur tirant des coups 
de fusil que je les faisais sortir de leur retraite : leurs 
mouvements ne paraissaient pas alors aussi vifs que 
pendant la nuit. La femelle porte, comme celle de plu- 
sieurs autres quadrumanes, son peut sur le dos. Les 
habitants le désignent sous le nom de Mico-dornulon. 

« Bien que je n’aie pas vu ce même pelit animal dans 
la Cordilière orientale, il parait hors de doute qu'il S'y 
trouve. M. le docteur Roulin en a vu un individu à 
Bogota, qui y avait été apporté des environs de la 
Mesa (village situé à une journée de la capitale), où 
ils sont aussi connus avec le nom de Micos-dormi- 
lones. » 


$ VI. — Des caractères et des mœurs des Saïimiris. 


Les yeux sont grands encore chez les Saïmiris, com- 
parés à leur développement moyen dans la famille des 
Singes; mais ils sont très-inférieurs en volume à ce que 
nous venons de les trouver chez les Nyctipithèques. On 
a vu, par les mesures et les calculs donnés plus haut, 
qu’une section de la fosse orbitairefaite au niveau deson 
ouverture antérieure, s'est trouvée avoir pour surface, 
chez un Saimini, environ 150 millimètres carrés, tan- 
dis qu'elle en a jusqu'à 270 chez un Nyctüipithèque fort 


liNoyezp. 75. 


SR 
peu différent par la taille. En prenant pour unité, chez 
ces deux mêmes animaux, la surface du grand trou 
occipital (qui était chez l’un et chez Pautre d’un peu 
peu plus de 5o millimètres carrés), on trouve, et la 
différence devient bien plus sensible sous cette forme, 
que la surface de la section orbitaire représentée, chez 
le Nyctipithèque, par le nombre 5,11, l’est seulement, 
chez le Saïmiri, par Le nombre 2,85. Il est à peine né- 
cessaire de faire remarquer que ce dernier nombre ne 
dépasse pas de beaucoup la moitié du premier. 

Une autre différence, et plus remarquable encore, 
entre les Nyctipithèques et les Saïmiris, est l’état in- 
complet de la cloison osseuse inter-orbitaire, irès- 
mince en arrière chez les premiers, mais partout ossi- 
fiée : cette cloison est, au contraire, seulement mem-— 
braneuse chez les Saimiris, dans un espace de forme 
elliptique, et d’une assez grande étendue, qui corres- 
pond à ia place ordinairement occupée par l'os pla- 
num. Il est donc une partie des orbites dans laquelle 
les deux globes oculaires viennent presque au con- 
tact, disposition fort analogue à celle que lon ob- 
serve chez une partie des monstres que j'ai désignés 
sous le nom de Cyclocéphaliens !. 

Cet extrême rapprochement des globes oculaires est 
encore exprimé dans le squelette par une autre dispo- 
sion qui mérite d'être indiquée, la réunion et, pour 
ainsi dire, la fusion, à leur partie postérieure, des re- 
liefs que produit, à la base du crâne, la saillie des deux 


! Histoire générale des anonralies de l'organisation, t. H. 


0 — 
orbites. Les trous optiques sont extrêmement rap- 
prochés. 

Il est fort remarquable que la perforation de la cloi- 
son inter-orbitaue s'observe chez les Saïmiris, dont 
les yeux sont d’un volume plus qu'ordinaire, mais non 
énorme, et qu'elle n'existe pas , comme on eût pu être 
porté à le supposer, chez les Nyctipithèques, à globes 
oculaires si démesurément volumineux; mais, chez 
ceux-ci, les orbitesse sont étendues et, pour ainsi dire, 
dilatées en denors, comme le fait voir l'excès de leur 
saillie sur celle des parties postérieures du crane *. 
Chez les Saïmiris, au contraire, les orbites ne font pas 
en dehors plus de saillie qu'à l'ordinaire, et la tête est 
généralement de forme droite et allongée; elle est 
comme comprimée; modification d'où résulte néces- 
sairement le rapprochement en dedans, la concentra- 
tion vers le plan médian de tous les organes latéraux. 

L'allongement de la tête des Saïmiris résulte d’ail- 
leurs, non-seulement de sa forme comprimée, mais 
aussi, et surtout, du développement considérable de la 
région occipitale; développement déjà signalé par mon 
père *, et qui forme le trait le plus remarquable et 
physiologiquement le plus important de l’organisation 
des Saimiris. 

On sait que, chez presque tous les Singes, et les 
Nycüpithèques et les Callitriches sont eux-mêmes de 
ce nombre, la base du crane se relève immédiate- 


1 Voyez les mesures données plus haut, p. 52. 
? Voyez plus haut, p. 44 et 45. 


— 80 — 


ment ou presque immédiatement en arrière du trou 
ocCipital, et remonte, soit obliquement, soit même 
presque verticalement, de manière à représenter bien 
plutôt une face postérieure que la continuation de la 
face inférieure du crane. Chez les Saïnnris, au con- 
traire, Pocciprtal presque tout entier est horizontal, 
et par conséquent compris dans la face inférieure du 
crâne ; d'où l'existence derrière le trou occipital d’une 
étendue horizontale encore considérable. Cette éten- 
due est telle que, chez l'adulte, la distance comprise 
entre les incisives et la partie antérieure du grand 
trou occipital, n’est que sensiblement double de celle 
qui sépare la partie postérieure de ce même trou de 
l'extrémité postérieure de la face inférieure du crâne. 
Chez les jeunes sujets, le cerveau étant plus développé 
encore , et la face plus courte, le rapport entre ces 
deux distances est moindre encore : selon l’âge, il est 
égal à un et demi, à un et un quart et même à un. 

Voici quelques mesures prises comparativement sur 
deux individus, l’un adulte, l’autre jeune encore, mais 
déjà presque arrivé à la taille de l'adulte *. 

J'exprimerai les diverses dimensions que j'ai à indi- 
quer, non par les mesures elles-mêmes telles que les 
donne le compas, mais d’une manière plus facilement 


comparable, en fonctions du diamètre antéro-postérieur 


1 Ces deux indiviäus appartiennent à l'espèce commune, ou 
selon le nom que je lui ai donné, Saëmiris sciureus. 

J'ai sous les yeux une tête beaucoup plus jeune ; mais elle est 
en mauvais état, et n'eût pu fournir les éléments d'une comparai- 
son exacte. 


_ gi — 
du grand trou occipital. La longueur de ce diamètre 
peut être prise pour unité, d'autant plus qu’elle est 
égale, aussi bien chez l'un que chez l’autre individu, à 
5 nullimètres; en sorte qu'en multipliant par 8 les 
nombres ci-dessous, on obtiendra immédiatement les 
longueurs absolues, exprimées en millimètres. 


Diamètre antéro-postérieur du grand SaïMiRt ADUUTE.  SAÏMIRT FRCNE 


(TOU OCGIDIAR- EN: «+ » SD, 1 1 
Longueur totale de la tête osseuse... 8,1 7,5 
Largeur, au niveau du grand trou oc- 

CD LT PET 4,1 4,1 
Distance de la partie postérieure du 

grand trou occipital à la partie pos- 

térieure de la voûte palatine. . 3,9 1,9 
Distance de la partie postérieure de la 

voûte palatine au bord des incisives. 2,2 1,7 
Longueur de la portion de la face infe- 

rieure du crâne, en avant du grand 

HOME PEL Li LE 5 3,6 
Longueur de la portion de cette même 

face, en arrière du même trou. . . 3,2 2 
Distance de la partie postérieure de ce 

même trou à la partie la plus reculée 

de ROCARUL PEN ESC 2,5 3,1 


La portion de la face inférieure du crâne que je 
viens de désigner comme comprise entre le grand trou 


1 Chez l'adulte, à 18 millimètres environ du grand trou occi- 
pital, la paroi du crâne remonte presque tout à coup verticale- 
ment. Chez le jeune, à 16 millimètres, elle commence à remonter 
très-obliquement : d'où la différence qui existe entre la terminai- 
son de la facz inférieure du crâne en arrière et le point le plus 
reculé de l'occiput. Voyez les figures (PL ID) 

Zoorocir. 6 


_ ga — 

occipital et l'occiput, n'est pas moins remarquable par 
sa configuration que par son étendue. Il existe chez 
l'homme, derrière le trou occipital, au milieu, un 
creux, latéralement, deux saillies assez prononcées. 
Chez les Saïmiris l'inverse a lieu : il existe derrière l'oc- 
cipital, sur la ligne médiane, une saillie longitudinale, 
et à droite et à gauche sont deux fossettes très-mar- 
quées; puis, plus en arrière, l’occipital est très-renflé 
dans toute son étendue transversale, Ces mdications, 
que complètera d'ailleurs et qu'éclaircira l’une des 
figures jointes à ce mémoire, sont suflisantes pour don- 
ner une idée de ce qui a lieu chez le Saïmiri ordinaire 
ou sciurin. Mais, dans une autre espèce, désignée par 
moi sous le nom de Saÿmiri à dos brülé, ces divers 
caractères, que j'ai fait aussi représenter dans la plan- 
che , se présentent avec un singulier degré d’exagé- 
ration : les fossettes que j'ai tout à l'heure mentionnées, 
sont tellement profondes, et la partie postérieure de 
l'occtpital est tellement saillante inférieurement, qu'il 
existe entre le fond des unes et la surface de celle-ci 
une différence de niveau égale à un demi-centimètre ; 
nombre considérable eu égard aux proportions géné- 
rales du crâne, qui n’a guère plus de 3 centimètres et 
demi dans sa plus grande largeur. 

Ce n’est pas seulement en arrière que le crane des 
Saïmiris présente un développement remarquable : en 
avant, le coronal s'élève de beaucoup au-dessus du 
niveau supérieur des orbites; en d’autres termes, il 
existe un véritable front.Il faut remarquer, toutefois, 
que ce front est fort différent de celui de l’homme, 


nn 
qui est, comme chacun sail, concave au milieu, et qui 
a latéralement ses maxima de saillie aux lieux dési- 
gnés en anthropologie, pour cette raison même, sous le 
nom de bosses frontales. Chez les Saïimiris, et il en est 
de même, au reste, comme je l'ai fait vou ailleurs‘, de 
tous les Singes qui ont un front, la plus grande saillie 
est située sur Îa ligne médiane, et correspond par con- 
séquent, non au cerveau lui même, mais à l'intervalle 
compris entre les deux hémisphères, et par consé- 
quent à l'insertion de la faux. À mesure que l’on s'é- 
carte de la ligne médiane, du moins chez l'adulte, le 
front devient à la fois moins saillant en haut et en 
avant ; il se déprime et se recule, et bientôt se confond 
avec la saillie que forme lextrémité supérieure du : 
bourrelet assez épais dont chaque orbite est bordée en 
dehors. 

Encéphale.—J'avais depuis longtemps le désir d’exa- 
miner l’encéphale contenu dans ce crâne si remarqua- 
ble. Ce désir était devenu surtout très-vif chez moi, 
depuisque, par diverses observations, dont la première 
remonte à 1840, j'avais constaté l'absence des circon- 
volutions et des anfractuosités cérébrales chez les Ha- 
paliens, remarquables, comme les Saïmiris, toutefois à 
un bien moindre degré, par le volume de leur crâne. 
Devait-on penser que les Saïmiris auraient, comme les 
Hapaliens , le cerveau lisse? et ces Singes, placés an 
premier rang entre tous, et à côté de l'Homme lui- 
même, si ce n’est au-dessus, par la masse proportion- 


Voyez mon Mémoire déjà cité sur les Singes. 


n 

nelle de leur encéphale, devaient-ils descendre au der- 
nier rang, et presque se placer au niveau des Ron- 
geurs par la structure de ce même encéphale? 

Déjà M. Desmoulins avait répondu aflirmativement à 
cette question. Dans l'ouvrage que ce zootomiste à 
publié, en commun avec M. Magendie, sur les sys- 
ièmes nerveux !, on lit qu'il r’existe pas de sillons au 
cerveau du Saïimiri. L'auteur fait même de l'absence 
des sillons un caractère commun aux Singes améri- 
cains, par opposition aux Singes de l’ancien monde, 
qui tous, dit M. Desmoulins, ont le cerveau plissé. 
Cette assertion est fort positive ; mais il était clair qu’elle 
ne mérite aucune confiance. L'auteur mentionne, par- 
mi les Singes américains chez lesquels il aurait constaté 
l'état lisse du cerveau, Pune des espèces du genre 
Sapajou , le Saï, Cebus capucinus. Or, à l’époque où 
écrivait M. Desmoulins, les circonvolutions et les an- 
fractuosités cérébrales du €. capucinus lui-même, sans 
parler des observations faites sur d’autres espèces du 
même genre, se trouvaient déjà figurées depuis quatre 
ans par Tiedemann dans ses Zcones cerebri simia- 
rum*. Il y a plus: les Sapajous sont si communément 
amenés vivants dans nos pays, et les occasions de les 
examiner après leur mort sont si fréquentes, que tous 
les zoologistes avaient pu examiner par eux-mêmes 
leur encéphale, et constater non-seuiement l'existence, 
mais même le développement assez grand de ces cir- 

IT, 1(1825),;-p. 276. 

2 In-fol. Heidelberg, 1821. 


— 85 — 

convolutions niées par M. Desmoulins. Ce zootomiste 
s'était donc manifestement trompé à Pégard du Saï, 
et dès-lors il pouvait s'être trompé aussi à l'égard du 
Saïmiri. J'ai dû d’abord? les moyens de m'en assurer à 
l'obligeance de M. de Blainville, qui voulut bien faire 
reüirer, à ma demande, l’encéphale d'un Saïmiri sciu- 
rin, conservé dans lalcohol au Musée d'anatomie com- 
parée. Bientôt après, un autre individu de la même 
espèce, et tout récemment un autre encore étant morts 
à Paris chez des particuliers, j'ai pu me procurer deux 
autres encéphales de Saïmiris, et examiner ceux-ci 
d'une manière plus complète. 

Sans donner dans ce travail, purement zoologique, 
des détails anatomiques que je réserve pour un mé- 
moire spécial, je ferai du moins connaître la configu- 
ration générale de l'encéphale des Saïmiris, Son carac- 
tère Le plus remarquable est sans contredit l'extrême 
développement de la partie postérieure des hémi- 
sphères. Le lobe moyen du cervelet est, il est vrai, 
très-développé et très-saillant en arrière ; mais lui- 
même est dépassé par les hémisphères cérébraux de 
près d'un centimètre : les lobes latéraux du cervelet 
sont dépassés d’un centimètre et demi; ce qui est rela- 
tivement considérable, l'encéphale tout entier n’ayant 
qu'environ cinq centimètres et demi de long. 


1 J'avais espéré d’abord trouver les éléments qui m’étaient né- 
cessaires dans une note anatomique sur les viscères d’un Saïmiri, 
insérée dans les Proc. of the zool. Soc. of Land., part. FT (1833), 
p. 88. Mais l’auteur de ce travail, d’ailleurs intéressant, M. Mar- 
‘in, ne dit rien de l’encéphale, qu’il paraît n'avoir pu examiner. 


= pp — 

En comparant le cerveau au erâne, on reconnait 
que la saillie postérieure et inférieure que j'ai décrite 
plus haut, et qui est si prononcée surtout chez le Saï- 
miri à dos brûlé, correspond à la saillie postérieure 
des hémisphères cérébraux, qui sont en ce lieu comme 
bombés. Quant aux fosseltes, qui sont si profondes 
dans l'espèce que je viens de rappeler, et que l'on re- 
trouve moins prononcées, mais très-distinctes encore, 
chez le Saïmiri sciurin, elles correspondent à linter- 
valle compris de chaque côté, entre la face latérale du 
lobe médian du cervelet, le lobe latéral de ce même or- 
ane et le lobe postérieur du cerveau. 

Les hémisphères cérébraux finissent en avant plus 
en pointe que chez les Sajous, genre dans lequel la 
coupe du cerveau représente duns son ensemble une 
ellipse presque parfaite, ayant ses deux axes dans le 
rapport de 3 à 2. Le rehaussement des hémisphères 
en avant, chez les Saïmiris, donne au cerveau la forme 
d’un ovale assez allongé plutôt que d’une ellipse. 

Quant aux circonvolutions, li er existe quelques- 
unes chez les Saimiris, très-supérieurs par conséquent, 
sous ce rapport, aux Ouistitis, mais très-sensible- 
ment inférieurs aux Sapajous. Il en est surtout ains! 
des lobes antérieurs, dont la surface est lisse dans la 
plus grande partie de son étendue. Les lobes posté- 
rieurs n’ont, de même, que très-peu de circonvolu- 
tions; mais ce dernier caractère est commun aux 
Singes des trois dernières tribus. | 

Caractères extérieurs et dentaires. — Telles sont, 


dans leur ensemble, la conformation du crâne et celle 


= 
de l’encéphale chez les Saïmiris; et nul autre genre, 
pas plus les Callitriches avec lesquels on les à si sou- 
vent confondus, que les Nyctipithèques ou tout autre 
groupe, ne partage avec eux ces caractères, notam-— 
ment la perforation de la cloison osseuse inter-orbi- 
taire, et l'énorme saillie postérieure, soit de l’occipi- 
tal, soit des hémisphères cérébraux. Si les Singes qui 
les présentent, ont été confondus avec d’autres Cé- 
biens, c’est, sans nul doute, parce que ces caractè- 
res, quelque remarquables, quelque importants qu'ils 
soient, ne sont pas de nature à se traduire à l'exté- 
rieur par des modifications très-prononcées. L’extrême 
rapprochement, la presque contiguité des globes oculai- 
res vers la partie moyenne et postérieure des orbites, 
n’est pas facilement appréciable à l'extérieur; elle est 
toutefois indiquée par l’étroitesse de l'intervalle qui 
sépare les yeux en avant. Il en est à peu près de même 
des caractères résultant de la conformation générale 
du crâne et de l’encéphale : ils ne sont guère indi- 
qués extérieurement que par la grosseur considérable 
de la tête, et notamment de sa partie postérieure, par 
la saillie du front, et par l'extrême brièveté de la face. 

Les conditions organiques qui caractériseñt fonda- 
mentalement les Saïmiris, étant de nature à n'être 
que très-imparfaitemert indiqués au dehors, il im- 
porte d’insister sur les caractères extérieurs qui con- 
cordent avec elles, et à l'aide desquels du moins il 
sera toujours facile de distinguer les Saïmiris. 

Les narines fournissent, sinon à l'égard des Calli- 
iiches, du moins à l'égard des Nyctipithèques , lun 


— ue 
de ces caractères éminemment distinctifs. Elles se pré- 
sentent sous la forme d'ouvertures elliptiques placées 
tout-à-fait latéralement, et séparées par un intervalle 
assez grand entièrement recouvert de poils ras. Les 
Saïmiris:sont donc du nombre des Singes auxquels le 
nom de platyrrhinins était justement appliqué. 

Les oreilles, qui, en raison du développement de 
l'occiput, semblent ne pas occuper leur place ordi- 
naire, sont médiocres. Elles sont de forme très-simple, 
la conque représentant un demi-cercle dont le bord 
supérieur se reploie sur lui-même. 

Les dents, fort différentes, comme on le verra bien- 
tôt, de celles des Callitriches, ressemblent à celles des 
Sajous et des Nyctipithèques, mais avec quelques diffé 
rences. Les principales de ces différences, à la machoire 
supérieure, sont relatives à l'avant-dernière molaire, 
qui a la couronne plus petite et plus simple, notamment 
moins étendue d'avant en arrière que chez les Nycti- 
pithéques ; et surtout aux incisives , placées, chez les 
Saïmiris comme chez les Singes supérieurs de l’ancien 
monde et chez l'Homme, presque exactement en ligne 
droite. Chez les Nyctipithèques, la paire intermédiaire 
est placée beaucoup plus en avant. A la mâchoire infé- 
rieure , les incisives, et même aussi les canines , sont 
pareillement placées sur une ligne droite. L’avant-der- 
nière molaire, aussi longue que large, est, comme à la 
mâchoire supérieure, plus petite que la dent corres- 
pondante des Nyctipithèques; et, de plus, une diffé- 
rence analogue, mais beaucoup plus prononcée, existe 


entre la dernière molaire des Saimiris, qui est fort pe- 


0042 
ute et presque rudimentaire, et la dernière molaire des 
Nyctipithèques. À l’une et à l’autre mâchoire, les ca- 
nines sont, chez les vieux individus, saillantes, très- 
épaisses à leur base, et creusées d’un sillon très-pro- 
noncé, placé, pour les supérieures, à la face antérieure, 
pour les inférieures, à la face interne. 

Entre ces différents caractères du système dentaire, 
le plus remarquable est, sans nul doute, la disposition 
recüligne des incisives. Au point de vue zologique, c’est 
un très-bon caractère à l'égard, soit des Nyctipithè- 
ques, soit des Callitriches; et sous un point de vue 
plus général, c’est un rapport fort curieux avec 
l'Homme et les premiers Singes, dont les Saïm ris, 
seuls entre tous les Cébiens, se trouvent reproduire en 
même temps, à quelques égards, les conditions cranien- 
nes et cérébrales, d'une part, de l’autre les caractères 
dentaires. 

Ajoutons, pour terminer ici Ce qui est relatif à l’ap- 
pareil de la mastication, que la mâchoire inférieure des 
Saïmiris est remarquable par la forme de la branche 
montante, fort peu haute, mais très-large, et non di- 
latée postérieurement. Les branches horizontales ont 
un peu plus de hauteur en avant qu'en arrière. Chez 
les Nyctipithèques et les Callitriches, l'inverse a lieu, 
mais, chez les premiers, d’une manière peu marquée, 
et, chez les seconds, d’une manière si prononcée que 
la hauteur de la branche de la machoire est presque 
double au-dessous de la dernière molaire de ce qu'elie 
est au-dessous de la première. 


Les Saïmiris ressemblent beaucoup plus aux Nycu- 


— 90 — 
pithèques et aux Callitriches par le corps et les mem- 
bres que par la tête, etil suflit d'indiquer succinctement 
des caractères qui sont loin d’être aussi remarquables 
que les précédents. 

Les formes sont généralement grêles, ei les mem- 
bres, surtout les mains et les pieds, allongés. Les ongles 
des quatre doigts externes sont en gouttière ; ceux des 

pouces antérieurs sont très-pelits et à demi-conformés 
en gouttière; ceux des pouces postérieurs sont aplatis. 

La queue forme environ la moitié de la longueur 
totale. Elle est très-faiblement prenante et entière- 
ment velue chez l'adulte en parfait pelage. Chez un 
très-jeune individu venant de la Nouvelle Grenade, 
je trouve au contraire la queue dénudée à son extré- 
mité el sur toute sa face inférieure. Chez un autre plus 
avancé en âge, mais non encore adulte, je la trouve en 
partie dénudée. 

Le pelage qui rappelle celui de plusieurs Singes de 
l'Ancien Monde, est généralement ras. 

Enfin la taille est, comme chez les Nyctüipithèques, 
très-inférieure aux dimensions moyennes de la famille 
des Cébiens. 

Maœurs.—Je m'étendrai peu, en terminant ce para- 
oraphe déjà très-étendu, sur les mœurs des Saïmiris. 
Le passage suivant de M. de Humboldt *, sauf un seul 
point sur lequel je reviendrai, résume à peu près tout 
ce que l’on sait de plus positif sur ces animaux. 

« Leur physionomie est celle d'un enfant ; même 


1 Loc. cit, p. D J0. 


— M — 

expression d’innocence; même sourire malin, même 
rapidité dans le passage de la joie à la tristesse. Les 
Indiens assurent que cet animal pleure comme l’homme 
lorsqu'il éprouve du chagrin, et cette observation 
est très-exacte. Les grands yeux du Singe se mouil- 
lent de larmes à l'instant même qu'ils marquent de la 
frayeur ou une vive inquiétude. 

«Le Titi (Saïmiri) est dans une agitation continuelle, 
mais ses mouvements sont pleins de légèreté et de 
grace ; il n’est jamais irrité comme le $. œdipus ou le 
S. leonina. On le voit occupé à jouer, à sauter et à 
prendre des insectes, surtout des araignées qu'il pré- 
fère à tous les aliments végétaux. Il a l'habitude bizarre 
de regarder fixement la bouche des personnes qui par- 
lent; et s’il parvient à s'asseoir sur leurs épaules, il tou- 
che de ses doigts leurs dents ou leur langue... La saga- 
cité de ce petit Singe est si grande, qu'un de ceux que 
nous conduisimes à San Tomas de la Nueva Guayana 
distinguait, parmi les différentes planches annexées au 
Tableau élémentaire de l'histoire naturelle de Cuvier. 
celle qui présente les formes extérieures des insectes. 
Les gravures de cet ouvrage ne sont pas coloriées, et 
cependant le Titi avancait sa petite main dans l'espoir 
de prendre une sauterelle, une guêpe, une demoiselle, 
chaque fois que nous lui présentions la XI° planche *. 


! Des observations analogues ont été faites par M. Audouin à 
l'égard de lOuistiti ordinaire (voyez mon article Ouistiti dans le 
Dict. class. d’hist. nat.), et plus récemment par moi-même à l'é- 
gard de lOuistiti à pinceau. 


_ 92 — 

Lorsque les Indiens tuent une femelle, au moyen 
de leurs sarbacanes,.… le petit Singe reste attaché à la 
mère, il tombe avec elle, et S'il n'est pas blessé par la 
chute, il ne quitte plus l'épaule ou le col de l'animal 
mort. La plupart des Titis que lon trouve vivants 
dans les cabanes des indigènes, ont été ainsi arrachés 
au cadavre de leurs mères ?. » 

Un point sur lequel je regrette de ne point trouver 
de renseignements dans l’intéressante relation de 
M. de Humboldi, c’est l’action de la lumière sur les Saï- 
miris. M. Gama de Machado, qui a longtemps possédé 
et qui a observé avec soin un Saïmiri, a rempli cette la- 
cune, et constaté * que l'animal fuit le jour et détourne 
les yeux d’une lumiere trop vive. C'est, au reste, ce 
qu'on aurait pu déduire & priori de l'examen des yeux 
des Saïmiris, si inférieurs en développement à ceux des 
Singes nocturnes, les Nyctipithèques, mais cependant 
si remarquables encore par leur volume, 


1 La tendresse extrême des mères pour leurs petits et des petits 
pour leursmères chez un Singe si remarquable par le développe- 
ment des lobes du cerveau, est sans nul doute un fait très-con- 
forme au célèbre système de Gall; et les phrénologistes n’ont pas 
pas manqué de l’invoquer comme une preuve de plus en faveur 
de leur doctrine. On peut ajouter que cette tendresse réciproque 
des mères pour leurs petits et des petits pour leurs mères, très- 
générale dans la famille des Singes , paraît moins développée où 
moins constante chez les espèces qui ont l'occiput déprimé, tels 
que les Hurleurs. 

% Théorie des ressemblances, in-4, 1841, p. 36. 


se 


$ VII. — Des espèces du genre Sainuri. 


Les auteurs n'ayant pas séparé les Saïmiris des Cal- 
huiches, ont dû ne donner qu’une faible attention aux 
différences spécifiques qui peuvent venir modifier, chez 
ces animaux, les caractères génériques communs à 
tous. Aussi trouve-t-on décrits ou figurés, dans les au- 
auteurs, sous le nom de Saïmiri, Sénua sciurea où Cal- 
lthrix sciureus, des animaux plus ou moins différents. 
Dans cette espèce prétendue unique, je trouve dès à- 
présent des éléments suflisants pour distinguer et ca- 
ractériser rigoureusement trois espèces, et pour en 
indiquer une quatrième. Les trois premières ont pour 
types : 

A. Le Saimiri de la Guyane, le plus commun dans 
les collections, et auquel appartiennent essentielle- 
ment les noms de Sema sciurea et de Callithrix sciu- 
reus. Cette première espèce sera done pour moi le 
Saïmiris sciureus, nom que je rendrai en francais par 
celui de Saïmini sciurin. 

B. Un Saïimiri, habitant le Brésil, que mon père 
s’est, le premier, procuré en Portugal, dans un voyage 
fait en 1808, et qu'il a décrit comme une variété du 
précédent ‘. Je lui donnerai le nom de Saimiri à dos 
brûlé, Saëmiri ustus. 

C. Enfin, un Saïmiri que M. d’Orbigny a découvert 
il y a peu d’années et qu'il a figuré sous le nom de Calli- 


! Tableau des Quadrumanes, loc. cit. 


_ 94 — 


thrix entomophagus. Ce Saïmiri, queles auteurs les plus 
récentsont rapportécommesimple variété au Callithrix 
scrureus, est bien réellement une espèce distincte, et 
doitconserver lenomd'ertomophagus, quoique ce nom 
exprime un fait demoeurs commun à tous les Saïmiris *, 
et même, plus généralement, à tous les petits Singes. 

Outre ces trois espèces pour lesquelles j'ai sous les 
yeux des éléments suflisants de détermination, une 
quatrième se trouve indiquée par M. de Humboldt. 
On ne saurait, en effet, reconnaitre dans le Ti de 
l'Oréroque de cet illustre voyageur, d’après la descrip- 
tion qu'il en donne, aucune des trois espèces précé- 
dentes. Je désignerai provisoirement cette quatrième 
espèce sous le nom de $. lunulatus. 


À. — Saïmiri sciurin, Saëmiris sciureus. 


Les caractères de cette espèce, aussi répandue dans 
les collections que les autres y sont rares, sont les 
suivants : 

Pelage d’un gris olivatre, avec le milieu du dos d’un 
vert olivätre tiqueté et tirant sur le roux, les côtés de 
la tête blancs ou blanchatres, les parties inférieures 
d'un blane lavé de jaunâtre, le dernier: tiers ou le der- 
nier quart de la queue noir, et les avant-bras, le bas des 


jambes et les pieds d’un jaune roux plus ou moins vif. 


L 
! En effet, si ce nom est peu convenable, il n'est du moins ni 
absurde, ni contradictoire ; et dès-lors il doit être admis. (Rè- 
gles 1, I et IV; voyez plus haut, p. 50.) 


— 95 — 


Face couverte de poils ras, blancs, sauf le tour de 
la bouche qui est noiratre. 

Taille de l'adulte : trois décimètres et demi à quatre 
décimètres du bout du museau à l’origine de la queue, 
qui a environ quatre décimètres. 

J'ai sous les yeux un assez grand nombre d’indivi- 
dus et de crânes de cette espèce, venant, la plupart, 
de la Guiane francaise, un autre du Para, un autre de 
Santa-Fé-de-Bogota, les autres de parties non déter- 
minées de l'Amérique méridionale. 

Les principales différences de pelage que présentent 
ces divers individus, sont les suivantes : 

La queue est noire, tantôt dans le dernier quart 
seulement, tantôt dans le dernier üers de son éten- 
due. Dans la partie qui n’est pas noire, le dessus est 
constamment d'une teinte plus foncée que le dessous; 
mais il arrive tantôt, et ceci a lieu surtout chez les 
adultes, que la différence soit peu sensible, le dessus 
étant d’un cendré olivâtre peu foncé, et le dessous d’un 
cendré fauve; tantôt, au contraire, et c’est ordinaire- 
ment le cas des jeunes sujets, que la différence soit 
très-marquée, le dessus étant d’un cendré olivätre mé- 
langé de noirâtre, et Le dessous d’un fauve ou jaunâtre 
sale. Jai cité plus haut un individu, le plus jeune de 
tous ceux que j'ai sous les yeux, chez lequel la queue 
est entièrement nue inférieurement : cette modifica- 
tion, qu'il faudra voir sur d’autres individus avant de 
se prononcer sur Sa nature et sa cause, doit être rap- 
pelée ici. 


La couleur des membres est, comme celle de la 


sobre 
queue, suscepluble de quelques variations. Ainsi quel 
ques sujets, et particulièrement tous les jeunes, dif- 
fèrent par la moindre intensité, par la teinte plus ver- 
dâtre, et aussi par la distribution sur une moindre éten- 
due du beau roux, souvent doré, qui orne les membres. 
La face interne des cuisses et des jambes est tantôt 
d'un blanchàtre teinté de jaune, ce que l’on voit sur- 
tout dans le jeune âge , tantôt jaune, mais toujours, 
surtout en ce qui concerne le dedans des cuisses, d’une 
nuance beaucoup moins vive que celle des pieds. 
Quant au dos, il m'a présenté à peine quelques 
légères différences de coloration chez les individus, 
d’âges et de lieux si différents, que j'ai examinés : sa 
couleur générale est toujours l’'olivâtre lavé de roux, 
et plus ou moins tiqueté de noir. Cette couleur résulte 
du mode de coloration des poils, qui ont, après la 
racine, colorée de gris noirätre, une zone d’un jaune 
grisâtre, puis une zone d’un jaune roussatre, à peu 
près de même nuance que les pieds, puis une zone 
noire, moins étendue, immédiatement avant l'extrême 
pointe, qui est jaunatre. 


B. — Saïmiri à dos brûlé, Saëmiris ustus. 


Cette espèce a, comme la précédente, le dessus de 
la tête et les parties latérales du corps d’un gris oli- 
vâtre, les parties inférieures et le dedans des membres 
d'un blanc jaunatre clair, la parüe antérieure et ex- 
terne des avant-bras et les quatre mains dorés, et la plus 
grande partie de la face blanche, avec les lèvres noires. 


— 97 — 

La queue offre aussi les mêmes couleurs semblable- 
ment disposées ; seulement le noir occupe à lextré- 
mité une étendue un peu moindre. 

La taille de cette espèce est un peu supérieure à celle 
du S$. sctureus; mais les proportions paraissent être 
les mêmes. 

Le Saïmiri à dos brûlé est donc, en somme, fort voi- 
sin du Saïmiri sciurin; mais il s’en distingue nettement 
par la coloration des parties supérieures du corps. On a 
va que le dos, chez le S. sciureus, est d'un vert olivà- 
tre le long de la ligne médiane, mais non sur les par- 
ties latérales, qui sont grisètres, comme les flancs, le 
dessus de la tête et la plus grande partie des membres 
et de la queue. Chez le $. ustus, le dos, aussi bien laté- | 
ralement que sur la ligne médiane, est couvert de poils 
colorés par zones de trois couleurs, savoir, d’un jau- 
nâtre sale à la racine, d’un roux ferrugineux sur la zone 
intermédiaire, assez étendue, enfin, noir à la pointe”, 
cette dernière couleur étant plus prononcée sur la 
partie médiane et inférieure du dos que latéralement 
et antérieurement. De là résulte une coloration géné- 
rale mélangée de roux et de noir, le roux dominant 
en avant et sur les côtés, et le noir en arrière. Cette 
coloration, dans son ensemble, rappelle celle d’une 
étoffe inégalement brûlée, seulement roussie dans quel- 
ques partes, et noire dans d’autres ; et de là le choix 
que j'ai fait du nom spécifique d'ustus, déjà usité à 


* On a vu que chez le $. sciureus les poils du dos ont une zone 
noire vers la pointe, mais que celle-ci est jaunâtre. 
Zoorocrr. 7 


— 98 — 
l'égard d’un Bradype pour désigner un caractère fort 
analogue de coloration. 

Les détails que je viens de donner sur la coloration 
du dos chez le $. ustus, sont suffisants pour en rendre 
la distinction nette et facile. Cette distinction est d’ail- 
leurs confirmée par des différences ostéologiques beau- 
coup plus prononcées que celles que lon pourrait s’at- 
tendre à trouver entre des espèces extérieurement 
aussi VOIsines |. 

Le S. ustus exagère encore, en quelque sorte, les 
conditions craniennes du genre Saïmiri, par la saillie 
vraiment singulière de la partie postérieure de lPoccipi- 
tal à la base du crâne. J'ai décrit plus haut” cette dispo- 
sition, qui est telle, que la portion postérieure de loc- 
ciput forme une sorte de poche ou de tambour osseux, 
dans lequel l'extrémité des hémisphères semble venir 
faire hernie hors de la cavité générale du crâne. J'ai 
mentionné aussi les fossettes très-profondes qui, à la 
face inférieure du crâne, séparent ce renflement sous- 
occipital de la portion de l’occipital qui correspond au 
cervelet. 

Le crane du $. ustus diffère, en outre, de celui du 
S. sciureus par la longueur proportionnellement * un 


peu plus grande du diamètre antéro-postérieur, par 


1 L'individu, rapporté de Lisbonne par mou père en 1808, sur 
lequel j'ai établi cette espèce, avait dans la peau un crâne parfai- 
tement entier, que j'ai fait retirer afin de l’examiner, de le décrire 
et de le faire figurer. 

2 Page 82. 


5 La longueur absolue est de 72 millimètres au lieu de 65. 


One 


l'étendue plus grande et la forme plus allongée du 
trou occipital, et par la plus grande longueur de l’ar- 


cade zygomatique. 
C. — Saïmiri entomophage, Saëmiris entomophagus. 


Je me bornerai à indiquer succinctement cette es- 
pèce, que M. d'Orbigny a figurée dans lune des pre- 
mières livraisons de son voyage, et dont il doit donner 
prochainement l'histoire détaillée. Elle présente la 
même distribution de couleurs que le $.scrureus; mais, 
toutes ces couleurs étant fort affaiblies, c’est un 
jaune peu intense, qui remplace sur les membres an- 
térieurs et sur les mains postérieures le beau jaune 
roux doré du $. sciureus; et de mème, sur le corps, 
un gris jaunatre pale, un peu plus vif seulement sur 
le dos, remplace les couleurs que j'ai décrites dans les 
espèces précédentes. La face a la même coloration; 
mais la nuque, tout le dessus de la tête, et, latéra- 
lement, de larges favoris, sont, chez l'adulte, noirs, et 
chez le très-jeune individu, noirûtres; les poils de 
cette région, d'un gris jaunâtre dans leur première 


parüe, se terminent par une Zone noire assez étendue. 


D. — Saïmini à lunule, Saëmiris lunulatus. 


Le Tix' de l'Orénoque, de M. de Humboldt, a été 


1 Dans l'Amérique méridionale, on donne ce nom, d’où dérive 
Ouistiti, uon pas en propre à telle ou telle espèce, mais, en com- 
mu, à tous les petits Singes. Aussi l’applique-t-on, selon les pays, 
à des espèces fort différentes. 

M. de Humboldt fait à son occasion des remarques très-judi- 


— 100 — 


généralement rapporté, et cela à l'exemple de lillustre 
voyageur, au Simia sciurea de Linné, ou Saïmiri de la 
Guiane. M. Lesson, dans son Species, déjà cité, paraît 
être jusqu’à présent le seul qui ait fixé son attention 
sur les caractères particuliers que présente le Saïmiri 
de M. de Humboldi: caractères d'après lesquels M. Les- 
son a, en effet, séparé ce Singe, si ce n’est comme une 
espèce, au moins comme une variété distincte de 
tous les autres Saïmiris connus. 

Voici la caractéristique que donne M. de Humboldt. 
On y remarquera, comme le trait le plus remarquable 
de ce Saïmiri, l'existence de deux lunules noiràtres sur 
la tête, lunules par lesquelles cette espèce se lie mani- 
festement avec l'espèce précédente, sans pouvoir d’ail- 
leurs être confondue avec elle. 

« Simua sciurea /Cassiquiarensis/, ex aureo flaves- 
cens, abdomine, humeris, brachio et femore [nec 
antibrachio nec ibid) ex ferrugineo cinerascentibus… 
Frons cordata. Lunulæ duc nigrescentes ubi pili 
Jusco-flavescentes frontem a sincipite secernunt..…. 
Cauda corpore longior, haud prehensiis ‘, apice 
floccosa nigra. 


cieuses sur les inconvénients qu'entraine Femploi des noms tri- 
viaux comme noms spécifiques. 

1 1] faut entendre par ces mots (l'analogie ne permet pas d'en 
douter) que la queue est très-faiblement prenante , ou, comme le 
dit M. de Humboldt qui plus bas développe sa pensée, sub-pre- 
hensilis. 


— 101 — 


E. — Singe à tête de mort, Simia morta où Caput mortuum des 


auteurs. 


Si l’on devait en croire les anciens auteurs, à la suite 
du Simia sciurea devrait se placer une espèce fort 
voisine des Saimiris par ses formes, ses proportions et 
les couleurs de son pelage, mais à queue nue et écail- 
leuse : cauda nuda squamosa , disent Gmelin et les 
auteurs linnéens; cauda murina, dit Brisson. 

Erxlében a pensé le premier que le Singe à tête 
de mort n’est pas une espèce distincte, mais seulement 
un fœtus de Saimiri. Cette dernière opinion a pré- 
valu parmi les auteurs modernes; et quelques-uns ont 
même pensé que le Snia morla avait été établi sur un 
fœtus de Saïmiri, auquel on aurait mis une queue de 
Didelphe. 

L'examen que j'ai fait des divers éléments de la 
question, m'a convaincu que le Singe décrit sous lenom 
de morta est, non un fœtus, mais un jeune âge de 
Saïnuri, très-vraisemblablement du Saïmiri sciurin. 
Et quant à l'explication que lon a donnée de sa queue 
nue et écailleuse, il n’est point nécessaire de recourir 
à la supposition d’une queue de Didelphe ou de Rat, 
substituée artificiellement à la queue véritable. C'est ce 
dont chacun peut se convaincre facilement en remon- 
tant aux sources. 


Les sources sont ici l’une des figures du Thesaurus 


1 Systema regnt animals, p. 53. 


— 102 — 
de Séba, et le texte qui se rapporte à cette figure *. 
C’est, en effet, le Singe qu'il nomme Cercopithecus 
americanus minor Monkje dictus, et qui est connu 
aussi, remarque Séba, sous le nom de Caput mortuum; 
c'est ce Singe qui a été inscrit dans le Systema naturæ 
sous le nom de Simia morta. 

Il est hors de doute que ce Singe n’est autre qu'un 
Saimiri : la figure est passable, assez bonne même, 
sauf la queue; et la description, quoique succincte, est 
fort claire, ainsi qu’on peut en juger par cette descrip- 
üon des couleurs de la face : f’ultus omnis pilosus 
est, et albicat, ad medium usque nast et oris ambi- 
tum, ubi nigrido regnat. 

Quant à la queue, elle est mal représentée, mais elle 
a, du moins, les proportions d’une queue de Saïmiri, et 
je ne vois nullement dans la figure les écailles par les- 
quelles tous les auteurs ont caractérisé le Simia morta. 
Les traits croisés dans lesquels ils ont cru apercevoir 
des écailles, ont la plus grande similitude avec les ha- 
chures fort imparfaites employées habituellement par 
plusieurs des graveurs de Séba. Au bas de la planche 
qui représente le Caput mortuum, on peut voir sur 
des feuilles et sur le terrain lui-même de tels traits 
croisés dans lesquels ici personne ne méconnaitra de 
simples hachures. 

Le texte ne mentionne d’ailleurs pas plus clairement 
les écailles que la figure ne les représente. L'auteur ne 
dit rien de plus de la queue que ce qui suit : Cauda 


LA je pl. XXXIIT, fig. 15 TENTE, P: 52, 


— 105 — 


longa, crassiuscula, qualis Philandrorum aut Mu- 
réum majorum sy lvestrium : phrase qui, dans une des- 
cripüon aussi précise, aussi vague, aussi Incorrecle , 
peut tout aussi bien désigner une queue allongée, co- 
nique et nue, mais non écailleuse, qu'une queue abso- 
lument comparable à celle du Rat. 

Or, si la queue était nue, mais non écailleuse , elle 
était telle qu’on pouvait s'attendre à la trouver chez 
un Saïmiri jeune âge, soit que les poils de la queue 
eussent été usés ou fussent tombés, soit que la queue, 
chez de très-jeunes sujets, se trouve parfois naturelle- 
ment dénudée dans son entier, et telle que je lai vue, 
dans plus de la moitié de son étendue, chez un Saï- 
miri sciurin, le plus jeune de tous les individus que 
j'aie observés. 


$ VIII. — Remarques sur les caractères du genre 
Callitriche. 

Le genre Callitriche, par la séparation des Saïmiris, 
devient un groupe fort naturel, dont le Moloch de 
Hoffmansegg et le Callitriche masqué de mon père 
peuvent-être considérés comme les types. Près de ces 
Singes viennent se grouper plusieurs autres espèces, 
distinctes surtout par des différences dans la taille et 
dans la coloration. 

Après les détails dans lesquels je viens d’entrer sur 
les caractères distinctifs des Nyctipithèques et des Saiï- 
miris, il ne suflirait presque de renvoyer, en ce qui con- 
cerne la caractéristique des vrais Callitriches, au $y70p- 
sis par lequel sera terminé ce travail. Cependant une 


— 104 — 
comparaison succincte de ces Singes et des Saïmiris, 
et surtout de leur caractères craniens, ne seront pas 
inutiles, afin de faire apprécier l'énorme différence 
existant entre les cranes de ces deux genres, si long- 
temps confondus entre eux. 

Chez les Callitriches, le crane proprement dit, com- 
parativement à ce qui a lieu chez les Saïmiris, est con- 
sidérablement restreint, et la face, au contraire, a pris 
beaucoup de développement. 

Aussi, d’une part, en avant, le front est très-déprimé, 
ou plutôt, chez les adultes du moins, il n'existe pas 
de front. Immédiatement au-dessus des orbites dont 
les bords sont épais et en bourrelets, il existe même, 
comme chez la plupart des Cynopithéciens, une dé- 
pression transversale. 

La forme de l’occiput et la disposition du grand 
trou occipital, sont beaucoup plus différentes encore 
de ce qui a lieu chez les Saïmiris. Au lieu d’être com 
pris dans la face inférieure du crane, fort prolongée 
même en arrière de lui, le trou occipital est plutôt 
postérieur qu'inférieur, la portion basilaire de l'os oc- 
cipital étant seule horizontale, et tout le reste de cet 
os étant fortement relevé. 

Dans la face, les orbites ont leurs ouvertures an- 
térieures aussi larges que chez les Saïmiris; mais ces 
ouvertures sont séparées par un espace double de ce- 
lui qui existe chez les Saïmiris. La cloison osseuse inter- 
orbitaire est complète, comme chez tous les Singes, les 
Saïmiris exceptés. 

La mâchoire inférieure présente un développement 


— 105 — 

très-grand, et, très-différente de celle des Saïmiris, elle 
rappelle par sa forme celle des Hurleurs. Les branches 
montantes sont très-hautes, et inférieurement très-di- 
latées. Les branches horizontales, également très-hau- 
tes en arrière, se rétrécissent en avant, en sorte que les 
deux bords, loin d’être sensiblement parallèles, sont 
très-obliques l'un sur l’autre. 

Cette forme de la mâchoire est tellement remarqua- 
ble et caractéristique à l'égard des Callitriches, qu'il im- 
porte de la rendre sensible par des mesures. Afin de 
rendre celles-ci comparatives, j'ai choisi, pour les pla- 
cer en regard, deux cranes dont la longueur absolue est 
sensiblement la même. L'un appartient au Callithrix 
personatus de mon père, lPautre au Saïmiris ustus. 


CALLITRICHE.  SAÏMIRI. 
Longueur totale du crâne. . . . . . . 0,070 0,072 
Longueur de la mâchoire inférieure. . . . 0,048 0,040 
Hauteur de la branche montante au niveau 
ducondyle © 5e. 1.  : en. “0,094 0,016 
Largeur maximum de la même branche, vers 
sa partie inférieure. . . . . . . . 0,024 0,018 
Largeur minimum, prise à sa partie supér. 0,012 0,013 
Hauteur de la branche horizontale, au-des- 
sous de la première molaire. . . . : . 0,010 0,011 
Hauteur au-dessous de la troisième. . . . 0,012 0,009 
Hauteur au-dessous de la cinquième. . . . 0,015 8,008 
Hauteur au-dessous de la sixième. . . . . 0,018 0,008 


On doit s'attendre à trouver de très-grandes diffé- 
rences de dentition entre des genres chez lesquels la 
conformation de la mâchoire inférieure, ou mieux, des 
deux mâchoires, est si différente, et même, à quelques 


— 106 — 
égards, si manifestement inverse. C'est, en eflet, ce qui 
a lieu. 

Chez les Saïniris, les molaires supérieures, ce 
qui est parfaitement en rapport avec la brièveté 
des mâchoires, sont larges transversalement, mais, 
sauf la quatrième molaire, fort peu étendues d’a- 
vant en arrière; d'où il suit que leurs couronnes re- 
présentent des bandes beaucoup plus étendues dans 
un sens, le sens transversal, que dans l'autre. Les 
molaires supérieures des Callitriches, d’ailleurs à 
tubercules beaucoup moins pointus, ont leur couronne 
plus rapprochée de la forme carrée, et surtout beau- 
Coup plus grande; au point qu’en comparant de nou- 
veau les deux individus dont je viens de parler, je 
trouve que la surface de toutes les molaires supérieures 
d’un coté, chez le Saïimiri, est tout au plus égale à la 
surface des trois dernières molaires chez le Callitriche. 

Il existe à la mâchoire inférieure des différences tout à 
fait analogues ; elles sont très-prononcées surtout à l’é- 
gard des deux dernières machelères, fort petites dans 
le genre Saïimini, grandes dans le genre Callitriche. 

Aux deux machoires, les incisives des Callitriches 
sont disposées bien plus manifestement sur une ligne 
courbe que chez les Saïmiris. Immédiatement après 
elles, vient de chaque côté la canine, qui est courte et 
épaisse, et qui est contiguë en arrière, à la première mo- 
laire comme, en avant, à la seconde incisive. Toutes les 
dents, à l’une et à l’autre mâchoire, sont donc exac- 
tement en série continue, et leur ensemble représente 
une deni-ellipse parfaitement régulière. 


— 107 — 

Le système dentaire offre donc, chez les Calli- 
triches, comme la forme des mâchoires, comme la con- 
formation du crâne, et évidemment aussi comme celle 
de l'encéphale, des conditions qu'il est impossible 
d’assimiler plus longtemps à celles des Saimiris. Et 
même, entre ces deux genres, dont la différence était 
restée méconnue, il existe en réalité beaucoup plus 
de différences qu'on n’en observe d'ordinaire entre 
deux genres voisins. 

On verra d’ailleurs par le Synopsis qui va suivre, et 
dans lequel on trouvera à la fois le résumé et le com- 
plément de tout ce travail, que la détermination ex- 
térieure des Saïmiris et des Callitriches n'offre point 
de diflicultés réelles. Et si ces deux genres ont été si 
longtemps confondus, je ne crains pas d'aflirmer que 
c’est à cause de la rareté de la plupart de leurs espè- 
ces dans les collections, et, par suite, du défaut de no- 
üons exactes sur leurs caractères. 


SIX.—Synopsis des Saïinuris, des Callitriches et des 
Nyctipitheèques. 


I. SAIMIRI, SALMIRIS 1. 


Synonyme. 
SaimiRr, . . . . (simple section).  G. Cuvier (1829); Voigt. 
SaïimiRt, SaïmiRis (genre distinct)... Is. Geoff. (1835). 
SAÏMIRI, PITHESCIUREUS. . . . . . . Lesson (18/40). 
SAIMERTS + à ee ee -. + «+ +  Pouchet (1841). 


1 Etnon Saëmiri, comme on l’a imprimé par erreur. 


— 108 — 

Les Saïmiris, avant d’avoir été distingués généri- 
quement, avaient fait successivement partie du grand 
genre Sëmua Lin., puis du genre Cebus Erxl. et en 
dernier lieu, du genre Callthrix, Geoff. S. Hil. 


Caractéristique. 


Formes légères. Membres allongés, les postérieurs 
beaucoup plus longs que les antérieurs. Pouces mé- 
diocrementallongés, les antérieurs à peine opposables. 
—Ongles des pouces postérieursaplatis, ceux despouces 
antérieurs convexes ; les autres en gouttière.—Queue 
longue, assez grêle, entièrement velue (à l’état adulte), 
très-faiblement prenante. 

Tête très-allongée, très-volumineuse, surtout en 
arrière. Occiput séparé des oreilles par une distance 
assez considérable, en raison du développement con- 
sidérable du crâne et de l'encéphale en arrière du grand 
trou occipital. Front assez élevé au-dessus des or-- 
bites sur la ligne médiane, mais, latéralement, fuyant 
et se confondant avec les bourrelets sus-orbitaires. 
— Face très-courte. 

Yeux volumineux, très-rapprochés l’un de l’autre, et 
surtout en arrière où lacloison inter-orbitaire est seule- 
mentmembraneuse. —Conquesauricularesmoyennes, 
de forme simple. — Narines de forme allongée, laté- 
rales, séparées par un large intervalle. — Pelage peu 
fourni, principalement composé de poils annelés. 


Incisives à la machoire supérieure, meisives et cani- 


— 109 — 

nes inférieurement, disposées en ligne droite. Canines 
longues, carénées. Canine supérieure de chaque côté, 
séparée de l’incisive externe par un intervalle qui recoit 
la canine inférieure correspondante, quand les mà- 
choires sont fermées. Molaires à couronne médiocre- 
ment étendue, à tubercules les uns mousses, les autres 
aigus, surtout ceux de la partie externe. Molaires 
supérieures, disposées par rangées irrégulièrement rec- 
lignes, sensiblement aussi distantes en avant qu’en 
arrière. Les supérieures, surtout les fausses molaires, 
transversalement allongées. La dernière molaire, de 
chaque côté et à chaque machoire, très-petite. 

Taille très-inférieure à la taille moyenne des 


Singes. 
4. S. SCIURIN, S. scrureus. 


Syn.Vulgairement SINGE ÉCUREUIL, SAPAJOU AURORE 
OU ORANGÉ. 

SaïuiRt (nom formé du nom Galhbi Kaï-miri), Buff. 
XV; Fr. Cuv. Mamm.; Gama de Mach. loc. cit. fig. — 
SimiA scIUREA, Lin.; Schreb.—Cegus scrureus, Erxl.; 
J.-B. Fisch.—CaLLITRICHE SAÏMIRI, CALLITHRIX SCIU-— 
REUS, Geoff. S. H. Tableau des quad. et Cours; Des- 
mar.; Less., Compl. de Buffon; Jardine, Monk. fig. 
—SAGOIN SAÏMIRI, SAGUINUS SCIUREUS, Less., Manuel. 
— SAÏMIRI ÉCUREUIL, PITHESCIUREUS SAIMIRI, Less., 
Spec. et Nouveau Tableau. 

C’est un jeune Saimiri sciurin qui a été décrit sous 
les noms suivants : CERCOPITHECUS AMERICANUS, MINOR, 


— 110 — 
Monkje dietus où CAPUT MoRTUUM, Séba. — Siura 
morTA des anciens auteurs.— CEBUS CAPUT MORTUUM, 
Fermin, Descr. de Surinam. 

Car. Pelage d'un gris olivatre, passant à l’olivätre 
sur le dos. Les avant-bras et les quatre mains, d’un 
jaune roux doré. 

Hab. La Guiane, la Nouvelle-Grenade et le Para. 


2. S. A DOS BRULÉ, S. uslus. 


Syn. Saïmirt, variété, Geoff. St.-Hil., Tabl. des 
Quadrumanes ; Less., Species. 

Car. Dessus de la tête et face externe des membres, 
d'un gris olivätre; les parties supérieures du corps, 
d'un roux vif varié de noirätre, passant au noir sur la 
partie postérieure et médiane du dos. Les avant-bras 
et les quatre mains, d’un jaune roux doré. 

Hab. Le Brésil (d’après mon père, qui a rapporté 
de Portugal le seul individu qui me soit connu). 


3. S. À LUNULES, S. lunulatus. 


Syn. Brrscusrscnt des Indiens des Maypures; Brrr- 
TENI des Maravitains.—"T1ri DE L'ORENOQUE, SIMIA SCIU- 
REA, Var., Humb., loc. cit.—Pirnesc. SAÏMIRI, var., 
Less., Species. 

Car. Pelage d’un jaune doré. Deux lunules noi- 
ratres sur la tête. 

Hab. Les forêts de l’Orénoque. 

Obs. Espèce encore imparfaitement connue. 


— 11 — 
4. S. ENTOMOPHAGE, $. entomophagus. 


Syn. CALLITHRIX ENTOMOPHAGUS, d’Orbigny, Atlas 
de son Voyage, Mamnuf., pl. 4 (non encore décrit). 
—Prrugsc. SAïmiRI, var., Less., Species. 

Car. Pelage d’un gris jaunâtre clair, devenant un 
peu plus foncé sur le dos. Les avant-bras et les quatre 
mains, jaunes. La nuque et le dessus de la tête, noirs 
(état adulte) ou noirâtres (jeune äge). 

Hab. Guarayos, où l’espèce a été découverte par 
M. d'Orbigny. 


IT. CALLITRICHE, CALLITRIX. 


Synonymie. 


CazrirricHe , Carrirurix, Geoff. S.-H. (1812); Desmar. ; 
Less., Compl. de Buff.; Jaxd., 
et presque tous les auteurs. 

SacouiN, SaGuInus 1. . . . . . Less., Manuel (1827); Species et 
Nouv. tabl. 


! Ce nom aurait l'antériorité d’un grand nombre d'années, s’il 
était vrai, comme on l’a dit, qu'il fût, dans la classification de La- 
cépède, la dénomination générique des Callitriches. Mais le genre 
SAGOUIN, SaGoix (et non Saguinus) de ce célèbre zoologiste n’est 
point le genre que nous appelons aujourd'hui Callitriche. IF a 
pour type, non un Callitriche (aucune espèce de ce genre n’était 
alors connue), mais l'Ouistiti ordinaire, Hapale jacchus, que La- 
cépède désigne sous le nom de Sagouin jacchus. Voyez Tableaux 
des divisions des Mammifères, in-4. Paris, an VII (1799). On 
trouve ces tableaux, réimprimés en l'an IX (1801), à la fin du 
troisième volume des Mémotres de l'Institut, classe des sciences. 


— 112 — 


Avant le travail de mon père, la plupart des Calli- 
triches alors connus (et le nombre en était fort petit) 
étaient placés parmi les Cebus, et non parmi les Calli- 
thrix d'Erxleben. 


Caractéristique. 


Formes assez légères; membres allongés, les posté- 
rieurs plus que les antérieurs; pouces médiocrement 
allongés, les antérieurs à peineopposables. —Onglesdes 
pouces postérieurs aplatis ; ceux des pouces antérieurs 
concaves, les autres reployés en gouttière. — Queue 
longue, grêle, entièrement velue, à peine prenante. 

‘Tête petite, déprimée ; les oreilles à peu de distance 
de l’occiput. — Face courte. | 

Yeux volumineux, séparés lun de l’autre en avant 
par un intervalle assez grand, se rapprochant davan- 
tage en arrière, où ils sont, d’ailleurs, séparés (comme 
à l'ordinaire , mais non comme chez les Saïmiris) par 
une cloison complétement osseuse. —Conques auricu- 
laires assez grandes, de forme simple.—Narines ellip- 
tiques , latérales, séparées par un large mtervalle, 
— Pelage très-long et très-fourni, en grande partie 
composé de poils annelés. 

À chaque machoire, toutes les dents contiguës les 
unes aux autres; et la série continue qui résulte de 
cette disposition, représentant une demi-ellipse très- 
régulière. Canines courtes et épaisses. Molaires très- 
larges, à tubercules presque tous mousses : les mà- 
chelières supérieures presque aussi étendues, et les 


— 115 — 


inférieures plus étendues d’avant er arrière que dans 
le sens transversal; dernière mâchelière de chaque 
mâchoire bien développée. 

Taille inférieure à la taille moyenne des Singes. 

Le Callitriche donacophile de M. d'Orbigny, figuré 
par lui dans l'Atlas de son Voyage, est la seule espèce 
nouvelle que je connaisse, et elle doit être prochaine- 
ment décrite avec détail par le savant voyageur qui l’a 
découverte. Je dois m'abstenir d'anticiper ici sur le 
travail de M. d'Orbigny ; et les matériaux nouveaux 
que je possède à l'égard des autres espèces, ne sont pas 
assez nombreux pour que je puisse utilement en re- 
prendre ici l'histoire. 

Je passe donc immédiatement au troisième des genres 
dont la comparaison et l'étude font l'objet de ce travail. 


III. NYCTIPITHÈQUE, N YCTIPITHECHUS. 


S} nonymie. 


DR Re ae ai à de Humboldt (1811). 
Aorus . . . . . . . . Illig. (1814 )}; Geoff. S.- 
Hil., Tabl. des Quadr.; 
Desmar. 
Nyompiraèque, Nycripirugous. . . . Spix (1823); Geoff. S.-H., 


Cours ; Less., Compl. de 
Buff., Species et Nouv. 
tabl. ; Xs. Geoff., Cours. 


Noctuore, Nocrnora.. . . . . . Fréd. Cuv. (1824); .Less., 
Man. G.'Cuv., Régne 
an., 2° éd. 

Aoves.. . . . . . . . Jard. (1833), Montk., Sy- 
nops. 


Zoorocix. 8 


— 114 — 


Caractéristique. 


Formes assez légères. Membres postérieurs beau- 
coup plus longs que les antérieurs. Pouces médiocre- 
ment allongés. 

Tête arrondie; front très-peu développé. Face 
courte, très-large. 

Yeux énormes, occupant la plus grande partie de 
la face, très-rapprochés l’un de l’autre, surtout en 
arrière, où la cloison inter-orbitaire, partout osseuse, 
est extrêmement mince.— Conques auriculaires peti- 
tes. — Narines ovalaires, rapprochées l’une de l’autre, 
s'ouvrant obliquement sur les côtés et au-dessous du 
nez!.—Pelage long et bien fourni, en partie composé 
de poils annelés. 

Incisives rangées sur une ligne courbe : les laté- 
rales supérieures séparées par un intervalle assez 
étendu des canines, qui sont (chez les adultes ) lon- 
gues et carénées. Molaires à couronne peu étendue, 
à peu près aussi longues que larges, à tubercules les 
uns mousses, les autres aigus; dernière molaire, à 
chaque mächoire, moins développée que les précé- 
dentes. 


Taille très-inférieure à la taille moyenne des Singes. 


i Cette disposition est assez différente de celle qu’on observe 
géralement chez les Singes américains, 


— 145 — 
Espèces. 


1. N. FEUN, N. FELINUS. 


Syn. SINGE DE NUIT A FACE DE CHAT, N. FELINUS, 
Spix; Geoff. St.-Hil., Cours; Less., Compl. — Dou- 
ROUCOULI, NOCTHORA TRIVIRGATA, Fr. Cuv., Mamnuf. 
(confondu par cet auteur et, d’après lui, par plu- 
sieurs autres, avec l’une des espèces suivantes ). 

Car. Pelage cendré supérieurement, d’un jaune 
orangé inférieurement (y compris la gorge). Queue 
rousse dans sa première moitié environ, puis noire. 
Une tache médio-frontale noire, assez étendue, à peu 
près aussi large que longue ; au-dessus de chaque oeil, 
une tache blanchätre, et plus en dehors, deux raies 
noires. Oreilles courtes. 

Hab. Le Para et Mojos. 


2. N. LÉMURIN, N. LEMURINUS. 


Syn. Mico DoRMILON (Singe dormeur ) des habitants 
de la Nouvelle-Grenade. 

Espèce encore Imédite. 

Car. Pelage d’un cendré lavé de roux supérieure- 
ment, cendré sur les flanes et la face externe des mem- 
bres, d’un jaune orangé sous le ventre et sous la poi- 
trine (mais non sous le col). Queue d’un noir plus 
ou moins mêlé de roux, avec la base rousse en dessous 
et d’un cendré roussâtre en dessus. Une tache médio- 


frontale noire, peu étendue, entre deux taches blan- 


— 116 — 


chatres, et plus en dehors, deux raies noires. Oreilles 
trés-courtes. 

Obs. Il existe dans cette espèce des variétés chez 
lesquelles les couleurs présentent des nuances diffé- 
rentes, mais toujours la même distribution. 


Hab. La Nouvelle-Grenade. 


3. N. A TROIS BANDES, À. trivirgalus. 


Syr. Vulgairement, Cousi- cOUSI; SINGE DORMEUR 
(Mono DoRMILON }; SINGE OÙ TITI-TIGRE; CARA RAYADA 
(face rayée ) des missionnaires de l'Orénoque.—Dou- 
ROUCOULI des Indiens Maravitains. 

DouroucouLt, SIMIA TRIVIRGATA, Humb.— Aotus 
TRIVIRGATUS, Geolf. St.-Hil., Tabl, des Quadr.; Des- 
mar.—DOouROUCOULI, AOTES TRIVIRGATUS, Jard. 

On vient de voir que les noms de Douroucoul, 
JV. trivirgatus, ont été transportés par erreur au N. 
felinus. 

Car. Pelage supérieurement d’un gris argenté, avec 
une ligne médio-dorsale brune, et les parties inférien- 
res d’un jaune orangé. Queue de même couleur que le 
dos, à l'exception de son extrémité, qui est noire. 
Trois raies noirâtres parallèles sur le devant de la tête; 
une tache blanche au-dessus de chaque œil. Nez noir, 
avec une ligne blanche longitudinale sur le milieu. 
Oreilles très-courtes. 

Hab. Les forêts du Cassiquiare. 


— 117 — 
4. N. cRiARD, N. VOCIFERANS. 


Syn. Caraï des Indiens. 

N. vociFERANS, Spix ; Geoff. St.-Hil., Cours; Less., 
Compl. de Buff. 

Car. Pelage généralement brun, les parties imfé- 
rieures d’une nuance plus pâle que les supérieures. 
Queue d’un roux ferrugineux dans la première moitié, 
noire dans la seconde. Une petite tache médio-frontale, 
d'un noir brunâtre, une tache triangulaire jaunatre 
au-dessus de chaque œil, et plus en dehors, une bande 
noirâtre très-étroite. Oreilles très-courtes. 

Hab. Les forêts de Tabatinga, au Brésil, à peu de 
distance des frontières du Pérou. 

Obs. Cette espèce est encore très-imparfaitement 


connue :. 


4 Je me borne à mentionner ici pour mémoire le Miriquouina 
d’Azara, qui est encore beaucoup plus imparfaitement connu, 
et que l’on ne saurait introduire dans le Systema jusqu'à ce 
qu'on possède sur lui des notions plus précises. Voyez l'extrait 

sie) a 1 . . , ° 
que j'ai donné plus haut de la description d’Azara. 


“ 


SECONDE SECTION. 


CARNASSIERS. 


Les espèces dont j'ai à m'occuper dans ce travail, 
appartiennent toutes à cette grande famille qui pré- 
sente par excellence le type des carnassiers, et qui 
s'étend des Ours aux Tigres en passant des premiers à 
ceux-ci, par une longue série de genres de plus en 
plus carnivores, et en même temps de plus en plus 
complétement digitigrades. Sans entrer ici dans la dis- 
cussion de rapports dont je me suis occupé il y a quel- 
ques mois dans un autre travail !, je me bornerai à 
faire connaître les espèces des genres Ours, Raton, 
Moufette et Lynx, qu'a rapportés l'expédition de la 
Vénus. 

Outre les carnassiers qui viennent d'être mention- 
nés, les naturalistes de l'expédition se sont procuré à 
l’île San-Lorenzo, près de Lima, un beau crâne d’O- 
tarie, que M. de Blainville a figuré dans son Ostéogra- 
plue *, et sur lequel il serait superflu de revenir ici. 

Je diviserai cette seconde section en deux parties, 


1 Voyez les articles Carnassiers et Carnivores du Dictionnaire 
universel d'histoire naturelle, t. NI, p. 175 et 177 (1842). 
? Atlas du septième fascicule, pl. VI. 


— 120 — 


l'une comprenant trois espèces, l’Ours brun, le Raton 
laveur et la Moufette mésomèle, toutes trois déjà éta- 
blies dans la science, et sur lesquelles il suflira de pas- 
ser rapidement. 

La seconde partie aura pour sujet la description 
d’un Felis du groupe des Lynx, et à l’occasion de ce 
Carnassier , quelques remarques sur plusieurs de ses 
congénères. 


— A21 — 


PREMIERE PARTIE. 


Descriprion De L'Ours BRUN, VARIÉTÉ DU KAMTSCHATKA, DU PRATON 


LAVEUR, VARIÉTÉ MEXICAINE, ET DE LA MOUFETTE MÉSOMÈLE. 


$ I. Description de l’Ours BRUN, Ursus aretos, variété 
du Kamtschatka. 


Cet Ours, ramené vivant par l'expédition, et existant 
encore aujourd'hui à la Ménagerie du Muséum, a été 
pris en septembre 1837, à l'extrémité méridionale du 
Kamtschatka, près de Pétropawlowskoi, par 53 de- 
grés environ de latitude et 157 de longitude. L’ani- 
mal était au bord de la mer, mangeant un saumon, 
lorsqu'il fut apercu et poursuivi. Il était fort jeune 
alors : car sa longueur totale n’était que de 60 à 70 
centimètres. À son arrivée en France, il y a précisé- 
ment quatre ans, il avait déjà un mètre et demi de 
long, et il a encore grandi à la ménagerie. Aujour- 
d’hui sa hauteur au garrot dépasse un mètre, et sa lon- 
gueur totale est de 18 décimètres : la tête seule, à 
parür du milieu de l'intervalle qui sépare les deux 
oreilles jusqu’au bout du museau, n'a pas moins de 
4 décimètres. 

Cette taille est considérable sans doute; mais ne 


dépasse pas les dimensions que l’on à souvent obser- 
vées, non-seulement chez des Ours de Sibérie, mais 


— 199 — 
aussi chez des Ours bruns d'Europe, et plus spéciale- 
ment, de l'Europe septentrionale. 

Le pelage est d’un brun très-foncé qui s'éclaireit un 
peu sur le museau et sous la gorge, et qui, au contraire, 
devient plus foncé encore, et même passe au noir sur 
la parue postérieure du dos et des flancs et sur la 
croupe. Les quatre membres sont de même noirs. Le 
mufle est noirätre , et la muqueuse de la cavité buc- 
cale est généralement d’un rose violacélivide. Les yeux 
étant depuis longtemps malades (lanimal est même to- 
talement aveugle), je ne puis indiquer la couleur de 
l'iris. 

Les poils sont longs sur le corps, et très-longs der- 
rière les membres et sur le garrot, sans toutefois qu'il 
existe sur celui-ci cette toufle épaisse de poils exces- 
sivement longs que l’on a observée chez d’autres Ours. 
Sur le devant des membres, les poils sont comparati- 
vement très-courts, eLils sont peu longs sur les oreilles. 

Les ongles, qui sont noirätres, semblent plus com- 
primés et sont plus allongés qu’on ne les trouve d’or- 
dinaire. Mais il faut faire ici la part de l'influence de 
la captivité et des habitudes paresseuses de lanimal 
qui, renfermé dans une cage , et passant la plus 
grande partie du jour dans le repos, use fort peu les 
extrémités de ses ongles. 

D'après quelques renseignements qu'a bien voulu 
me donner, en l'absence de M. Néboux ‘, l’un de 


1 M. Néboux est reparti peu de temps après l’arrivée de la 
Vénus en France pour une autre expédition lointaine , qu'il 
saura, sans nul doute, faire tourner aussi au profit de la science. 


— 195 — 

ses collaborateurs, M le docteur Guéneau de Mussy, 
l'Ours du Kamtschatka était déjà brun lorsqu'on le 
prit, et non gris, comme le sont les jeunes de l'Ursus 
ferox de l'Amérique du Nord, et aussi les jeunes 
Ours des Pyrénées, J'ignore s’il avait de chaque côté, 
sur la partie latérale du col, la bande transversale 
blanchätre que chacun sait exister chez les jeunes Ours 
européens, et que M. Frédéric Cuvier a retrouvée 
beaucoup plus marquée et plus large chez un Ours du 
Nord de l'Asie, considéré par lui, pour cette raison 
même, comme appartenant à une espèce distincte, et 
nommé ÜUrsus collaris. Soit que cette bande n'ait ja- 
mais existé chez notre individu, soit qu’elle se soit gra- 
duellement effacée, comme il arrive le plus souvent 
chez les Ours d'Europe, à mesure qu'ils vieillissent, 
je n’ai pu en apercevoir la moindre trace. 

La description que je viens de donner et surtout la 
figure, dessinée sur le vivant par M. Werner, qui fait 
partie de notre Atlas *, font suflisamment connai- 
tre l’Ours ramené du Kamtschatka par la Vénus. 


1 Voy. la pl. IV. — Dans la planche suivante, j'ai fait repré- 
senter un beau squelette de l'U. ferox des zoologistes américains, 
trouvé aux environs de Monterey en Californie, et rapporté par 
M. Néboux. Ce squelette a déjà été figuré par M. de Blainville 
dans son Ostéographie (loc. cit. pl. ID); mais il présente trop d'in- 
térêt pour que j'aie pu ne pas lui donner place dans latlas des- 
tiné à représenter les principaux objets des collections de la Fé- 
nus. En effet, «c'est peut-être, dit M. de Blainville , le seul 
«exemple que la science possède d’un squelette d'Ours etde grand 
« Carnassier parvenu à tout son développement à l'état sauvage.» 
Voyez le huitième fascicule de VOstéographie. 


— 124 — 
Elles pourront fournir par la suite quelques éléments 
pour la détermination des variétés que subit l'Ursus 
arctos dans les diverses localités où 1l se trouve; va- 
riétés dont on s'est haté d’ériger plusieurs en espèces 
distinctes, caractérisées par quelques légères et insi- 
gnifiantes différences de proportions ou par des dif- 
férences de couleur moins importantes encore. Ces es- 
pèces me paraissent pour le moins fort douteuses. Les 
observations que j'ai faites sur les Ours de la Ménage- 
rie, m'ont fourni, en eflet, de nombreuses preuves 
que, non-seulement le pelage des Ours peut varier 
beaucoup d’une saison à l’autre; mais qu'il présente 
en outre, d’un sujet à l’autre, des diversités indivi- 
duelles extrêmement marquées. Ainsi tandis que j'ai 
vu, dans l’un des fossés de la Ménagerie, un Ours 
conserver en toute saison la même coloration (brun 
fauve clair), la plupart de nos individus ont présenté 
des changements très-notables, le pelage devenant plus 
foncé l'hiver : et encore n'est-ce pas d'une manière 
régulière et constante. Je puis citer pour exemple un 
individu qui, après avoir été brun pendant deux ou trois 
années, est devenu presque aussi noir que l'U. ame- 
ricanus, el surtout deux individus qui, nés jumeaux, 
tous deux mâles, élevés ensemble sans jamais se quit- 
ter, el parlageant constamment la même nourriture, 
n’ont été semblables lun à l’autre que dans leur pre- 
mière jeunesse. Cette époque passée, lun d’eux a été 
tantôt d'un brun-roux clair, tantôt d'un brun médio- 
crement foncé : l’autre tantôt d’un brun foncé, tan- 
tôt noir et tel que l'Ours norr d'Europe est décrit par 


— 195 — 


les auteurs qui croient devoir admettre cette très- 
douteuse espèce. 


S IL.— Description du RaAToN LAVEUR, Procyon lotor, 
variélé mexicaine. 


On n’a connu pendant longtemps, où du moins on 
n'a admis dans le Systema, que deux espèces de Ra- 
tons, le Laveur, Procyon lotor, de PAmérique septen- 
tronale, et le Crabier, Pr. cancrivorus, de l'Amérique 
méridionale. Ces deux espèces étaient aussi distinctes 
par leurs caractères zoologiques, que différentes par 
leurs patries. Le genre Procyon faisait ainsi une ex- 
ception tranchée à un fait général que j'ai signalé, 
il y a plusieurs années, à légard des mammifères 
américains, et qui, malheureusement pour les z00- 
logistes nomenclateurs , n'est que trop invariable- 
ment vrai, savoir : la modification graduelle, et par 
nuances presque insensibles, des types génériques qui 
se trouvent répandus à la fois sur une grande partie 
du continent américain, et par suite l'extrême difi- 
culté, pour ne pas dire plus, d'établir, dans les genres 
américains, des espèces tranchées et susceptibles 
d'être nettement et rigoureusement caractérisées. 
C'est ainsi que, depuis tant d'années, les classificateurs 
s'efforcent, sans pouvoir jamais y réussir, soit de don- 
ner une détermination spécifique et satisfaisante de 
divers genres américains, tels que les Sapajous, les 
Hurleurs, les Coatis, les Moufettes, soit de définir 


avec quelque rigueur les espèces américaines de di- 


— 126 — 


vers genres Cosmopolites, par exemple, parmi les car- 
nassiers, l'Ocelot, le Chatietles autres Felis voisins de 
ceux-ci, et parmi les ruminants, les petits Cerfs amé- 
ricains. Et ici, il est à remarquer que le plus souvent 
les nouvelles acquisitons de la science ne font que 
rendre les déterminations plus difficiles et les ques- 
tions plus obscures : preuve certaine que les zoolo- 
gistes, en tout ce qui touche le grand problème de 
l'espece (selon moi, encore entièrement irrésolu), 
sont engagés dans une fausse voie. Ils partent d’un 
principe inadmissible, la fixité de l'espèce, et de dé- 
finitions, les unes inexactes, les autres vagues, hy- 
pothétiques et entièrement inapplicables aux faits : 
aussi n'arrivent-ils qu'à des résultats douteux, admis- 
sibles seulement à titre provisoire, et devant être néces- 
sairement un jour modifiés ou réformés. 

C’est ainsi que, près des genres que j'ai cités plus 
haut et qui font depuis si longtemps le désespoir 
des zoologistes classificateurs, d’autres venant chaque 


1 « En nous élevant ici après Lamarck et M. Geoffroy Saint- 
« Hilaire, disions-nous dans un autre travail { article Zoologie 
« de l'Encyclopédie du dix-neuvième siècle), contre la doctrine de 
« la fixitéde l'espèce, nous n’ignorons pas que son abandon pourra 
«et devra entraîner l'ébranlement de l'édifice zoologique tout 
«entier. Mais ce danger même, dont nous sommes le premier à 
« reconnaitre la gravité, ne doit pas nous retenir : détruire l'er- 
« reur, alors même que nous ne savons pas encore exactement ce 
« qu'il faut mettre à la place, c’est déjà faire un premier progrès. 
« Pour qui veut construire un édifice nouveau, le premier soin à 
« prendre, n'est-il pas de déblayer le terrain des vieux matériaux 
«< qui l’encombrent? » 


— 127 — 


jour se placer, les découvertes des voyageurs ajou- 
tent bien plus encore aux embarras qu'aux richesses 
de la science. Ainsi, parmi les Singes, la détermi- 
nation spécifique des Lagotriches, des Nyctipithè- 
ques, semblait, il y a peu d'années encore, aussi 
facile que celle des Sapajous et de Hurleurs est diffi- 
cile et confuse; mais il en était ainsi, parce que les 
premiers de ces Singes sont aussi rares en Europe 
que les derniers y sont communs, et depuis quel- 
ques années le nombre des individus existant dans 
les collections, s'étant beaucoup augmenté, les diffi- 
cultés de leur détermination se sont accrues précisé- 
ment dans la même raison. 

De même les Ratons qui semblaient, il y a peu d’an- 
nées encore, aussi faciles à déterminer que le sont peu 
les Coatis, commencent aujourd’hui à embarrasser les 
zoologistes. M. Wagler a décrit, en 1831 *, souslenom 
de P. Hernandez, une espèce mexicaine que Hernan- 
dez paraît avoir anciennement indiquée ?, et qui est in- 
termédiaire, par ses caractères zoologiques aussi bien 
que par son habitat, au P. lotor des Etats-Unis, et au 


41 Einige Mittheilungen über Thiere Mexicos, dans l'Isis, ann. 
1831,p. 514. 

2 Dans son Thesaurus historiæ animalium, p. 9. Voici le pas- 
sage tout entier de Hernandez : 

DE TEPE MAXTLATON. Genus est felis sylvestris, mustellæve , 
nam et æluro par feré est magnitudine, pilisque vestitum nigris, et 
promiscuë candentibus, pulvis ejus dicitur febrientibus conferre, 
rostrum est longum, auriculæ parvæ, breia crura, et cauda eisden 
transversis fasciis, rigris, candidisque, quibus Tepemaxtla, ocoitu- 
censis, Cujus videlur species Variare. 


— 128 — 


P. cancrivorus du Brésil. De même une espèce qui 
habiterait les Anül les, P. brachyurus, une autre, ha- 
bitant la Californie, P. Psora, ont été proposées, l’une 
en 1837 par M. Wiegmann ‘, l'autre en 1842 par 
M. Gray ?, en sorte que le nombre des espèces du 
genre Procyon se trouverait porté de deux à cinq, 
non compris le P. obscurus de M. Wiegmann ?, 
dans lequel on ne saurait guère voir qu'une variété 
mélanienne , et non une espèce ou variété impor— 
tante de localité, telle que les précédentes. 

Le Raton qui fait le sujet de ce paragraphe, vient de 
Mazatlan, au nord du Mexique, el par conséquent a 
été trouvé dans une localité peu distante de la patrie 
du P. Hernandezù et de celle du P. Psora. I était 
donc à présumer que le Raton rapporté par la Y’énus, 
appartiendrait à l’une ou à l’autre de ces espèces, si tou- 
tefois le P. Hernandez et le P. Psora doivent être 
toutes deux admises dans le sytème. Oril n’en est rien, 
à en juger selon les caractéristiques de ces deux espèces, 
telles qu’elles ont été données par MM. Wiegmann et 
Gray. Le Raton de la F’énus a de nombreux rapports 
avec l’une et avec l’autre; mais il s’en distingue en 
même temps par plusieurs caractères. Au contraire, il a 
les affinités les plus intimes avec le P. otor, dont je le 


1 Voyez Archiv für Naturgeschichte de Wiegmann, 1837, part. 
IV. Ce mémoire a été reproduit dans les Annals of natural his- 
tory de Jardine, t. À, p. 132. 

2 Dans les Anna/s déjà citées de Jardine, t. X, p. 261 (décem- 
bre 4842). 


8 Locis cit. 


— 1925 — 
considère comme une simple variété de localité, dis- 
tincte surtout par le moindre développement du pe- 
lage ; modification dont il est à peine utile de signaler 
la concordance avec les conditions du climat du Mexi- 
que, comparées à celles du climat des Etats-Unis. 

La couleur générale de notre individu est le cendré 
lavé de fauve et tiqueté de noir : la teinte fauve 
domine sur le col, le devant du dos et les épaules; la 
croupe, au contraire, tire sur le noiïratre. La face est 
noire et blanche. Le noir occupe la ligne médiane de- 
puis le mufle jusqu'au niveau des yeux, et les parties 
latérales, dans une direcuon oblique de haut en bas et 
d'avant en arrière, depuis la ligne médiane jusqu'au- 
dessous de l'oreille. La bande noire oblique qui résulte 
de ce système de coloration, a une largeur moyenne 
de 6 centimètres : Poil s'y trouve compris, mais placé 
très-près de sa limite supérieure. Les oreilles sont en- 
tièrement blanches à leur face concave; elles sont de 
même blanches à leur face convexe, mais avec la base 
brunâtre. Derrière l'oreille, de chaque côté, une 
ligne noire, médiocrement distincte, se porte d’abord 
directement en arrière, pus se détourne en dedans 
presque à angle droit, et vient se perdre sur la ligne 
mediane vers le devant du dos. 

Tous ces caractères sans aucune exceplion, et sans 
aucune différence appréciable, se retrouvent chez le 
Raton laveur des Etats-Unis, et la coloration géné- 
rale des poils, d’abord noivs, puis d’un cendré jaunatre, 
enfin noirs à la pointe, est aussi la même. Mais le pe 


lage de notre Raton du Mexique est beaucoup plus 
Zoovocir, 9 


— 1350 — 


as. Sous ce rapport, notre imdividu se rapproche du 
P. cancrivorus, et c’est, au reste, ce que chacun eût 
pu prévoir, en raison des circonstances climatolo- 
giques de l'habitat de ces animaux. Comme le P. 
lotor, notre Raton a les poils des pieds blancs; mais 
ces poils sont excessivement ras, el, SOUS Ce rapport 
encore, notre Raton mexicain se rapproche du P. 
cancrivorus qui a, comme on le sait, le bas des mem- 
bres dénudé, et chez lequel la région immédiatement 
au-dessus de la partie nue, est couverte de poils très- 
ras. Je dois même ajouter que chez notre individu le 
dessus de la patte antérieure droite est presque en- 
tièrement dénudé, et à peu près tel qu’on l'observe 
chez le P. cancrivorus. Cette analogie serait assuré- 
ment fort remarquable; mais la disposition dont elle 
résulte est-elle naturelle à Panimal? On doit en dou- 
ter, puisqu'elle n'existe que d’un coté; et il y a lieu 
de supposer que lanimal ayant été préparé avec 
peu de soin, les poils de la patte antérieure droite 
sont tombés, comme il arrive généralement en pareil 
Cas. 

La queue, dont la longueur ne peut malheureuse- 
ment être déterminée d'après une peau préparée, à, 
sur un fond gris jaunâtre, six anneaux noirs très-dis- 
tincts, y compris l'anneau terminal. Le P. lotor des 
Etats-Unis n’a, le plus ordinairement, que cinq an- 
neaux noirs distincts; mais souvent un sixième est 
indiqué, et parfois même il est assez nettement marqué 
pour que la queue doive être dite à six anneaux ; en 
sorte que, d'après la coloration elle-même de la queue, 


— 181 — 


il y a plutôt lieu de réunir notre Raton mexicain au 
P. lotor, que de l'en séparer. Quantau P. cancrivorus, 
il a la queue notablement plus longue et ornée de 
sept ou huit anneaux; mais ceux de la première moi- 
tié de la queue sont le plus ordinairement confluents 
et confus. 

La taille de notre individu est un peu au-dessous 
de la taille ordinaire d’un Raton laveur. En; raison 
de la moindre abondance et de la moindre longueur 
des poils, notre individu paraît d’ailleurs plus svelte 
ou plutôt de forme moins lourde. Ses dimensions sont 
comme :l suit : 


Distance du museau à Porigine de la queue. . 0,55 
Hauteuraux épaules. »: : 0, 1 052 
LonSneunde queue: +. ns 0 0 , 30 


Il reste à comparer notre individu aux espèces qui 
ont été décrites dans ces derniers temps, et quelques 
lignes me suffront pour cette comparaison. Aucune 
dificulté de s'élève en premier lieu, ni à l'égard du 
P. brachyurus, ni à l'égard du P. obscurus, en suppo- 
sant qu'il doive être admis comme espèce distincte; les 
noms de ces deux Ratons suflisent pour rappeler leurs 
caractères distincüfs. Le. P. Hernandez est, de 
même, très-distinct, s'il est vrai qu'il ait les pieds 
bruns, et non blancs, ainsi qu’on l’admet dans toutes 
les caractéristiques : Mariculis ac podarts fuscrs, dit 
M. Wagler; pedibus fuscis, dit M. Wiegmann. Enfin, 
le P. Psora est d’une autre couleur, d’après la carac- 


—_ 439 — 
téristique donnée par M. Gray : Fellowish brown, dit 
cet auteur, and gray, grisled; face, temples, side of 
neck, chest, belly and sides of body dirty yellow; 
forehead, cheeks under the eyes, each side of the 
throat and back of the ears dark blackish brown. 

Rappelons du reste, en terminant, combien sont 
fréquentes et remarquables les variétés individuelles 
chez les Ratons, et particulièrement chez le P. lotor, 
le mieux connu de tous. Parmi les individus que pos- 
sède le Muséum, les uns offrent l'état normal, et, par 
conséquent, sont gris ; d’autres, plus ou moins complé-. 
tement albinos, soit jaunes ou blancs ; d'autres, affectés 
au contraire de mélanisme à des degrés divers, sont 
oris-brun, bruns ou noirs. En présence de toutes ces 
variétés que présente le P. lotor aux Etats-Unis, et 
après avoir vu qu'il existe, au Mexique, un Raton qu'il 
semble impossible de séparer spécifiquement du P. lo- 
tor, on est fondé à se demander si le P. Hernandez, 
qui est aussi du Mexique, et le P. Psora, qui habite la 
Californie, sont bien des espèces distinctes, ou si ce 
ne seraient aussi que de simples variétés locales ou 
individuelles. C’est une question que je ne puis d’ail- 
leurs que poser, et dont la solution ne peut être ob- 
tenue tant que le P. Psora ei le P. Hernandezt ves- 

.teront connus seulement par l'examen extérieur d’un 


ou de quelques individus. 


— 155 — 


$ IT. — Description de la Moufette mésomèle, 
Meplitis mesomelas, Licurensr. 


Dans son rapport à l’Académie des sciences, sur les 
résultats zoologiques de l'expédition de la Fénus ", 
M. de Blainville a signalé, comme un fait fort inté- 
ressant pour la géographie, l'existence à la Californie 
du genre Moufette, si commun dans l'Amérique du 
Sud, et déjà connu aussi dans plusieurs parties de 
l'Amérique du Nord, Ce fait a été constaté par M. Né- 
boux, qui, en effet, s'est procuré en Californie, à Mon- 
terey, une Moufette adulte. Examinée avec soin, cette 
Moufette m'a paru très-semblable à une Moufette de la 
Louisiane , que M. Lichstenstein a décrite, en 1827, 
dans sa Darstellung neuer Sœugethiere*, et de nou- 
veau, en 1838, dans un mémoire spécial *. 

Cette Moufette de la Louisiane a recu du célèbre 
zoologiste de Berlin, le nom spécifique de Mesomelas, 
et est ainsi caractérisée par lui : 

Plantis pilosis. Lined angustΠmedi& a rostro ad 
verhicem; macul& nuchali anticè truncat&, posticè 
bipartit& in vittam duplicem, per latera dorsi et cau- 
dæ continuatam. 


Cette caractéristique est parfaitement applicable 


Comptes rendus de ? Academie des sciences, t. XI, p. 339. 

? Berlin, in-fol., 1837. 

5 Ucber die Gattung Mephitis, eine akademische Abhandlung. 
Ce mémoire a élé publié à part (in-4, Berlin, 1838), et inséré 
dans le Recueil de l'Académie de Berlin. 


— iS4 — 
aussi bien à notre individu qu'à celui qu'a décrit 
M. Lichtenstein. Il existe toutefois, à quelques égards. 
entre l'un et l’autre des différences que je dois indi- 
quer ici, et qu'il m'a paru nécessaire de faire con- 
naître aussi par une figure. 

Les parties inférieures et latérales sont, chez notre 
individu, d'un noir profond, ainsi que le milieu du 
dos, dans un espace triangulaire compris entre deux 
raies blanches obliques, partant de chaque côté de la 
base de la queue, et venant se réunir sur la ligne mé- 
diane entre les deux épaules. Sur l’occiput et la nuque 
est une large tache blanche, ayant la forme d’un tri- 
angle équilatéral dont la base serait en avant, et dont 
le sommet viendrait en arrière se confondre avec la 
ligne blanche du dos. Tout ce qui est en avant du tri- 
angle blanc occipito-cervical, est noir, sauf une très- 
petite ligne blanche médiane, commencant à 2 centi- 
mètres de la tache blanche plus haut décrite, et finissant 
à 2 centimètres du mufle. Cette petite raie, fort étroite 
et tout-à-fait linéaire, n’a que 3 centimètres, encore est- 
elle interrompue vers son milieu par des poils noirs. 
C'est cette ligne qui correspond à la lnea angusta 
media a rostro ad verticem, mentionnée par M. Lich- 
tenstein comme l’un des caractères de l'espèce; mais 
il est à remarquer que si elle la représente exactement 
par sa direction, elle est du moins beaucoup plus 
courte et plus étroite encore. Et même, comme elle 
est interrompue vers son milieu, ainsi que je l'ai dit, 
il y a tout lieu de présumer qu’elle disparait plus ou 
moins complétement chez certains mdividus. 


La queue, remarquable par la longueur considera- 
ble de ses poils, est mélangée de noir et de blanc. 
Sauf quelques pinceaux entièrement blancs, les poils 
de cette partie sont blancs dans leur première portion, 
et noirs dans la seconde. La zone blanche des poils se 
montre partout à l'extérieur à travers le noir, à cause 
de la divergence des poils de la queue qui même est 
assez régulièrement distique sur sa face inférieure ou 
postérieure. | 

Les poils sont abondants et assez longs sur le corps. 
Leur longueur est d'environ 4 centimètres sur la par- 
Ue antérieure du dos, et de 6 etmême 7 sur la croupe 
et vers la base de la queue. Quant aux poils de la 
queue, ils ont près d’un décimètre de long vers l'ori- 
gine et vers l'extrémité de la queue, et jusqu’à 15 cen- 
üumètres dans sa région moyenne. 


Les dimensions générales sont les suivantes : 


Distance du museau à l’origine de la queue. . 0,42. 
Hauteur aux CDARLOSS ae Sat du 2-08 10) 
Longueur de la queue, non compris les poils 

quel terminent À LE nn Las le «0 07% 00: 
Longueur de la queue, les poils compris. . . . 0,32. 


Dans son mémoire sur le genre Meplutis, M. Lich- 
tenstein à exprimé le regret de n'avoir pu examiner 
la dentition de la 37. mesomelas. On verra, par les 
figures du crâne et des dents que j'ai jointes à la 
figure de l’ensemble de l'animal, que cette espèce a 
bien les caractères des véritables Mephitis, et non 
ceux du groupe auquel M. Lichtenstein a donné le 


2 die 
nom de Thuosmus, et qui se distingue par l'existence 
de trois molaires seulement à la mâchoire supérieure ”. 


1 Molares supra utrinsecüs tres, dit M. Lichtenstein dans la 
caractéristique de ce groupe... Rhinarium proboscideum, naribus 
anticis et inferis. Auxiculæ orbiculares vix emergentes. Plantæ 
latiores denudatæ. À ces caractères s’opposent les suivants, chez 
les véritables Moufettes : Molares suprà utrinsecüs quatuor... 
Rhinarium prominulum naribus lateralibus. Auriculæ ampliores 
ovales emergentes. Plantæ angustiores seminudæ aut pilose. 


— 137 — 


SECONDE PARTIE *. 


Descriprion pù CHAT BAI er pu CHAT ALBESCENT ; £r 
REMARQUES SUR LES CARACTÈRES ET SUR LA DISTRIBUTION GÉOGRA- 
PHIQUE DE PLUSIEURS AUTRES CHATS. 


Quel que soit le point de vue auquel on se place 
pour étudier la distribution géographique des mammi- 
fères à la surface du globe, soit que l'on considère 
cette étude comme étant de nature à jeter quelques 
lumières sur la formation des diverses parties du 
monde , ainsi que le pensait Zimmerman , soit qu’on 
demande aux faits qu'elle nous dévoile, des éléments 
pour la solution du problème relatif à l'influence des 
agents physiques sur les formes animales, on ne peut 
manquer de recueillir des notions importantes, même 
pour la distinction spécifique des animaux. On arrive, 
en effet, par ce moyen à former des groupes compo- 
sés d'individus assez semblables, et ces groupes une 
fois établis, les diagnoses différentielles des espèces 


4 Cette seconde partie est rédigée par M. le docteur Pucheran, 
attaché aux galeries de zoologie du Muséum, et dont la colla- 
boration m'est et me devient chaque jour de plus en plus 
précieuse dans le soin et le classement des collections dont la 
direction m'est confiée. M. Pucheran, ayant fait depuis plusieurs 
mois une étude spéciale du groupe des Felis, je ne pouvais mieux 
faire que de lui confier cette partie du travail. 1. G. S.-H. 


— 158 — 
qui en forment l’ensemble, deviennent plus faciles 
à constater el à déterminer. 

De lamême main qui tracait le principe dela spécialité, 
soit générique, soit spécifique des animaux qui habi- 
tent les latitudes australes des deux continents, Buffon 
esquissait les caractères différentiels qui établissent une 
ligne de démarcation si facile à saisir entre les Singes 
américains et ceux qui, dans l’ancien continent, habi- 
tent l'Afrique, PAsie et les archipels qui en dépendent. 
En agissant ainsi, Buffon ajoutait évidemment l’exem- 
ple au précepte, et faisant en quelque sorte descendre 
le principe qu'il avait établi du rôle spéculatif qui sem- 
blait uniquement pouvoir lui être attribué, il en faisait 
l'application la plus ingénieuse à la distinction d'ani- 
maux que Linné lui-même avait réunis dans son genre 
Simia; prouvant, par cet exemple, que si les généra- 
lisations satisfont l’esprit en lui faisant considérer les 
fats d’un point de vue plus large et plus vaste, elles 
ne sont pas moins utiles à la science par la manière 
dont elles simplifient la solution des problèmes qui 
composent son domaine. 

Aussi tous les zoologistes qui ont suivi Buffon, ont- 
ils généralement sanctionné, par leur approbation, les 
vues de cet homme célèbre. Nous dirons même que 
la distribution géographique des races humaines con- 
concorde parfaitement avec les lois de distribution 
géographique que Buffon a établies. C’est la même race 
qui, dans les deux continents, en Asie et en Europe, 
comme en Amérique, habite les latitudes boréales. 
Dans les latitudes australes, au contraire, qui ne sait 


— 39 — 

que les peuplades de l'Amérique du sud sont diffé- 
rentes de celles du sud de l'Afrique ? Qui ne sait en- 
core que les nations qui peuplent l'Asie, les divers 
archipels de l'Océanie et le vaste continent de la Nou- 
velle-Hollande, ne sont point les mêmes que celles 
qui peuplent le sud de l'Afrique et de l'Amérique ? 

Mais si, d’une part, comparés aux animaux de l’an- 
cien continent, les animaux américains en diffèrent 
comme espèces, on ne peut s'empêcher de convenir, 
d'autre part, qu'ils offrent des rapports d’ensernble 
et de forme qui permettent d'établir leur parallélisme 
réciproque. Ainsi, dans la famille des Singes, les Atèles 
du nouveau continent correspondent aux Semnopi- 
thèques de l’ancien, les Hurleurs aux Macaques; de fa- 
con que les Animaux des deux mondes, comparés soit 
entre eux, soit avec leurs congénères des mêmes loca- 
lités, offrent des types de forme totalement analogues. 

Dans les types divers de formes et de coloration 
que nous offrent les espèces du genre Fels, on re- 
trouve ce même parallélisme de création des deux 
mondes. Ainsi, parmi les espèces unicolores à grande 
taille, le Couguar, en Amérique, correspond au Lion 
de l’ancien continent; dans les espèces à taille mfé- 
rieure, l'Eyra et le Jaguarondi, correspondent au Fe- 
lis Temminki de MM. Vigors et Horsfield, et au 
Felis moormensis de M. Hodgson. Ainsi, encore dans 
les deux continents, on retrouve des espèces à pelage 
couvert de taches en rose; en Amérique, le Jaguar, 
et dans l’ancien continent, les divers types de forme 
que lon rapporte à la Panthère et au Léopard. Aussi, 


— 140 — 


en décrivant dans le Zoological journal, le Felis ma- 
crocelis de M. Temminck, M. Horsfield n’hésita point 
à dire qu'il représentait dans l’ancien continent les 
Chats à taches ocellées du continent américain. 

En général, comparées à leurs analogues de l’ancien 
continent, les espèces du genre Felis propres au con- 
tinent américain, s’en distinguent par un prolonge- 
ment caudal moins allongé. Que ce fait soit vrai pour 
les Chats américains à pelage simplement tacheté, ceci 
ne doit pas nous surprendre; car on observe ce carac- 
tère de brièveté de la queue dans la presque totalité 
des espèces de l’ancien continent, que la coloration de 
leur robe rapproche du Serval, telles que les Fes 
javana et sumatrana de M. Horsfield , le F. rubigi- 
nosa de M. Isidore Geoffroy St.-Hilaire, le Fetis 
viverrinus de M. Bennett, et la plupart des individus 
qu'ont décrit dans ces derniers temps MM. Gray, 
Elliot *, Hodgson *, Ogilby *, Lesson , Jardine f, 
et Waterhouse”, Mais on sait que le Jaguar, comparé 


L Felis neglecta, Ann. of nat. hist., t. 1, 1838, p. 27. — Felis 
chinensis, dans Loudor”s magazine, t. 1, 1837, p. 577. 

2 Felis Wagati, Journal de Madras, n° 24. 

5 Felis viverriceps, dans le Journ. of asiat. soc. of Beng., t. V, 
DATE: D: 202. 

4 Felis servalina , dans les Proceed. of the zool. society de Lon- 
dres, 1839, p. 94. 

$ Felis senegalensis, dans l'Institut, 1834. 

6 Felis himalaicus, dans the natur. library, t. W, p. 230. Le 
Jelis servalina du même naturaliste paraît faire exception, en 
supposant que ce soit bien une espèce; car il a une queue très- 
longue. 

7 Felis rutilus, dans les Proceed. 1843, p. 180. 


= A = 

à la Panthère, se distingue par une queue plus courte ; 
caractère qui, indépendamment de ceux fournis par 
la forme des taches, permet de reconnaitre facilement 
ces deuxe spèces. | 

Nous croyons être dans le vrai, en disant qu'il en 
est du Couguar, de l'Eyra et du Jaguarondi comparés 
sous ce point de vue au Lion, au Felis Temminckü et 
au Felis moormensis comme du Jaguar comparé à la 
Panthère. 

Au reste, tous ces Chats à taches ocellées qui pa- 
raissent habiter presque uniquement le continent 
américain, ne peuvent laisser le moindre doute à ce 
sujet. S'il est vrai que le Felrs macrocelis de Suma- 
tra représente, dans l’ancien monde, les Ocelots du . 
nouveau , l'allongement de sa queue est un caractère 
bien suffisant pour l'en distinguer avec facilité. Enfin 
c'est tout au plus si, dans le Fes macroura de M. de 
Wied ', on trouve une espèce qui représente à un 
faible degré, par une queue un peu plus allongée que 
ne le sont celles de ses congénères, les divers Chats 
qui ont été décrits sous le nom de Felis pardus, Felis 
leopardus, Felis 1rbis et Felis Nimr, et dont les carac- 
tères distinctifs sont déterminés d’une manière si con- 
fuse. Quant au Chau, aux diverses variétés d’Ocelot, 
décrites par M. Griffith d’après les observations du 
colonel Hamilton Smith, et dont M. Fischer a fait 
des espèces, elles confirment en tout point les données 


1 Nous ne parlons point du Felis elegans de M. Lesson par le 
motifbien simple que nous croyons que c’est la même espèce que 
le Chat de M. de Wied. 


— 142 — 


différentielles que nous venons de brièvement esquis- 
ser. Un individu que nous possédons présentement 
dans la collection de mammalogie du Muséum, ne fait 
pas non plus exception sous ce rapport. 

Dans ce Fes, le fond du pelage est blanchâtre, lavé 
de fauve sur le front et la tête, sur le dos du cou, 
sur la grande tache de l'épaule et au centre des petites 
taches qui se voient sur la face externe des membres 
antérieurs. 

A l'angle interne de l'œil se voit une petite tache 
noire, pleine, verticale et allongée, du centre de la- 
quelle partent quelques soies, et immédiatement au- 
dessus, séparée de la première par un intervalle blanc 
fauve, s’en trouve une autre plus large, également 
verücale et dont l'extrémité supérieure est dirigée en 
dedans. Au-dessus de cette seconde tache, et séparée 
d'elle par un intervalle également fauve, commence 
une raie noire qui se dirige en arrière et, au niveau 
du bord interne de l'oreille, se dirige en dedans; cette 
pare transversale occupe sur le front l’espace d’un 
centimètre. 

Ces deux raies interceptent entre elles un espace 
fauve blanchètre, occupé par des taches noires, les 
unes verticalement , les autres transversalement diri- 
gées : sur la portion du front, qui sépare les unes des 
autres les deux taches superposées situées à l'angle 
de l'œil, ce ne sont plus que des mouchetures. Disons 
cependant qu'en dedans de la tache intra-oculaire la 
plus antérieure se trouve , à droite et à gauche, une 


tache noire allongée. 


— 143 — 

L'occiput est occupé par sept lignes noires, longi- 
tudinalement dirigées. Les deux plus externes naissent 
à gauche d’une ligne de même couleur qui commence 
à quelques millimètres en avant de l'oreille, en ar- 
rière de la courbe que forme pour s’infléchir en de- 
dans la ligne noire qui occupe le front et dont nous 
avons déjà parlé. Elle cotoie ensuite l'oreille à sa 
base, pour se diviser en deux raies qui descendent 
le long du cou, et se réunissent de nouveau, inter- 
ceptant une tache fauve qui inférieurement, au-des- 
sus de la ligne transversale de réunion des deux raies 
qui la bornent, présente deux mouchetures noires. 
A droite, elles naissent en haut isolément , de sorte 
que la longue tache qu’elles forment est ouverte su-. 
périeurement. Celle qui occupe la partie médiane est 
une raie pleine, naissant plus en arrière que toutes 
les autres, à 13 centimètres + de la pointe du nez; 
elle s'étend sur la région médiane du dos, jusqu’à la 
réunion du tiers moyen avec le tiers antérieur de 
l'espace compris entre le bout du nez et l'origine de 
la queue : c’est la qu’elle cesse. Quant aux deux raies 
qui, toujours sur la partie supérieure du cou, sont 
situées à droite et à gauche de la ligne médiane, elles 
naissent plus en avant que toutes leurs congénères, 
au niveau du bord antérieur de l'oreille, à 11 cen- 
üimètres environ du bout du nez. Elles se dirigent 
d'abord verticalement en arrière, puis en dehors et 
ensuite reprennent leur direction première. A droite 
et à gauche, chacune d’entre elles se divise, intercep- 
tant un espace fauve et descendant le long du cou, 


— 144 — 
elles se séparent de nouveau, de facon que l'espace 
qu’elles interceptent est ouvert inférieurement; mais, 
dans un plus grand espace à droite qu'à gauche, les 
deux raies venant plus au contact sur cette dernière 
partie du cou. 

Sur le milieu du dos, règne une série de taches 
allongées, dont l'extrémité de la plus antérieure com- 
mence à 47 centimètres environ de la racine de la 
queue. Les deux premières sont parfaitement isolées : 
les autres tendent de plus en plus à se constituer 
en ligne continue, et cette fusion est d'autant plus 
complète que l’on se rapproche plus de l’origine: de la 
queue. Dans l'endroit où deux taches tendent à se 
confondre, la ligne médiane présente un rétrécisse- 
ment dû à la moins grande largeur de la tache qui 
occupe cet espace. Toutes ces taches sont d'un noir 
parfait : les poils qui les forment sont grisatres à leur 
racine, puis brunâtres et noirs dans le reste de leur 
étendue. Cà et là, on apercoit dans leur intérieur ou 
dans leurs points de fusion, quelques poils à pointe 
fauve; chez ces derniers, qui se présentent surtout 
dans les points d'intersection des taches et qui sont 
des vestiges de leur séparation, un anneau fauve se 
trouve subjacent à lanneau noir de la pointe. Cet 
anneau fauve varie en étendue ; il nous semble de na- 
ture à faire présumer que dans les mues antérieure- 
ment éprouvées par lindividu que nous décrivons, les 
poils qui se trouvent noirs dans la majeure partie de 
leur étendue avaient été en partie de couleur fauve, 
au moins à leurs pointes. 


— 145 — 


Sur les côtés de cette ligne dorsale, se trouvent 
deux rangées de taches, allongées dans le sens de la 
longueur de l'animal, bordées de lignes noires, ouver- 
tes pour la plupart et de couleur blanchatre, légère-. 
ment teintes de fauve dans leur centre, les poils qui 
forment la partie centrale ayant leurs pointes de cou- 
leur fauve très-clair. Plus on se rapproche de la queue 
et plus les taches deviennent étroites : à droite, on 
voit que ces taches ont moins qu'à gauche de la ten- 
dance à se dessiner en bandes. 

Au-dessous de ces rangées de taches, s'en trouvent 
deux autres totalement ocellées. La plus supérieure 
est bordée de lignes noires ondulées, qui à son bord 
postérieur ne viennent point au contact. Le centre 
de cette tache, qui est de couleur blanchâtre, les 
poils qui le composent étant de cette couleur dans 
leurs deux üers supérieurs, le centre de cette tache 
présente des mouchetures noires; à la réunion de son 
tiers antérieur avec ses, deux tiers postérieurs, une 
raie noire verticale la divise en deux parties. Elle 
a 23 centimètres environ dans ses dimensions longitu- 
dinales, du côté gauche; du côté droit, sa partie pos- 
térieure n’est point encore réunie à sa partie centrale. 
La tache qui lui est subjacente est de même forme, 
mais plus longue, présentant plus de mouchetures, 
tant à droite qu’à gauche, que celle qui lui est super- 
posée. Des deux côtés du corps, elle va s’arc-bouter 
en avant, sur la bordure noire qui limite supérieure- 
ment les petites taches qui couvrent les épaules; en 
dehors et en arrière, elle est continuée par les taches 

Zoorocig 10 


— 146 — 
allongées et imparfaitement bordées de noir, qui cou- 
vrent la face externe des cuisses et les hanches. 

Au-dessous de ces deux taches s'en trouve une 
troisième , ocellée comme elles, occupant environ 
la moitié de l'espace qui sépare le membre anté- 
rieur du membre postérieur : elle est continuée en 
arrière par d’autres qui sont imparfaitement bordées 
et ne communiquent point avec elle, isolées même 
qu'elles sont les unes des autres. 

Les épaules sont occupées par de nombreuses ta- 
ches et mouchetures noires, quelquefois se convertis 
sant en lignes; une rate noire les encadre en dessus et 
en dessous. D’autres, de même couleur, affectant la 
disposition transversale, entourent les membres anté- 
rieurs et postérieurs, en dehors comme en dedans. Aux 
membres antérieurs, ces taches présentent en avant un 
grand nombre de poils, dont les pointes sont de cou- 
leur fauve. Les pattes sont, aux deux membres, mou- 
chetées de noiratre ; au membre postérieur, une tache 
présentant cette coloration s'étend en arrière presque 
jusqu'au jarret *. 

L’abdomen présente un fond de couleur d’un blanc 
très-pur : il est occupé par des taches d’un brun cho- 
colat, assez larges, et offrant un grand nombre de 
poils à pointes blanches. Il en est de même de la face 
interne des membres. 

Les joues, le menton et la gorge, sont d’un blanc 


1 Les ongles sont comprimés, assez forts, de couleur nacrée, et 
plus longs en avant qu’en arrière. 


— 147 — 

très-pur. De l’angle antérieur et externe de l'oreille, 
part une ligne noire qui va en s'élargissant et, recevant 
un autre trait noir qui aboutit en avant à l'angle 
externe de l'œil, rejoint sa congénère sous la mà- 
choire inférieure, de facon à former à l'animal un col- 
lier complet. Au-dessous de ce collier se trouvent, sur 
les cotés de la ligne médiane, deux traits noirs, le 
premier transversalement et le second, en dehors de 
celui-ci, verticalement dirigés. Enfin, en avant de 
l'espace qui sépare l’un de lautre les deux membres 
antérieurs, se trouvent trois autres colliers, le plus 
supérieur bien complet, les deux autres formés de 
taches transversalement dirigées et isolées : ils unis- 
sent l’une à l’autre la grande plaque de taches qui 
couvre les épaules en dehors. Les soies des mousta- 
ches sont les unes en entier blanches, les autres en en- 
üer brunâtres : quelques-unes sont brunätres à leurs 
racines et blanches dans le reste de leur étendue. En 
arrière d'elles, commence une ligne noire eflilée qui se 
change, sur la joue, en une large tache de même cou- 
leur, présentant dans son centre quelques poils à 
pointes fauves. Les oreilles très-larges et très-amples, 
offrent au dehors un liseré noir sur le bord externe de 
la tache blanche qu'elles présentent dans leur centre. 

La queue qui descend jusques à la plante des pieds, 
présente à sa base des taches noires affectant une dis- 
position transversale; mais, à partir de la réunion de 
son premier avec son second tiers supérieur, ces an- 
neaux deviennent plus distincts. Près de la pointe, il 
en existe deux qui ont jusqu'à 3 et 4 centimètres de 


— 148 — 


largeur. Le fond blanc qui sépare les anneaux noirs 
perd de plus en plus de sa largeur, à mesure que l’on 
s'approche de la pointe qui offre quelques poils blancs 
sur sa face inférieure, et supérieurement offre un an- 
neau noir. 

Les dimensions de cet individu monté sont les 
suivantes : 


Longueur du corps du bout du nez à la racine de la 


queue. aa 
Longueur dead 24 es aol 
Distance du bout du nez à l'angle interne et antérieur 

délOtellé AR Ed e... ;. mee 
Distance du bout du nez à l'angle externe et antérieur 

de l'OTENIES  ORENREETT,..6, POE RRRE U 
Distance du bout du nez à l'angle antérieur de l'œil. . . 4 
Distance entre les deux oreilles. . . . . . . . . . . 7 
La plus grande hauteur de l'oreille est de. 7 
Sa plus grande largeur de... . . 4 


Nous considérons cet individu comme étant simple- 
ment une différence d'age de l'espèce que M. Frédéric 
Cuvier a décrite sous le nom de Feës brasiliensis, en 
juillet 1828 (LVIIL livraison), dans l'ouvrage de 
mammalogie qu'il publiait avec Pun de nos grands 
maitres en zoologie et en anatomie comparée, M. le 
professeur Geoffroy Saint-Hilaire père. Il est bien 
vrai que dans la figure pleine d'exactitude que 
M. Werner a donnée de l'animal, les taches sont beau- 
coup moins ocellées que dans l'individu que nous 
avons décrit; mais cela provient de la circonstance sui- 
vante, M. Frédéric Cuvier n’a décrit que le côté droit 


— 149 — 


de l'animal, et c'est aussi ce côté qu'il a fait représen- 
ter. Sur le côté gauche, en eflet, les taches sont beau- 
coup mieux ocellées que sur le côté droit. Tel est le 
motif qui nous fait considérer ces deux Chats comme 
étant la même espèce : car tous les deux se séparent 
des Ocelots par le fond blanchître du pelage et du 
centre des taches des flancs : tous les deux ont les 
oreilles plus grandes, plus étalées, le museau moins 
large que l'Ocelot. 

Mais cette espèce mérite-t-elle de conserver dans 
les catalogues des espèces du genre Chat, l4 dénomi- 
nation de Felis brasiliensis, que lui a imposée M. Fr. 
Cuvier, croyant que l'individu qu'il décrivait avait 
été amené du Brésil à Cuba et de l'Ile de Cuba en 
France? C'était la croyance de M. Frédéric Cuvier au 
mois de juillet 1828; mais dans la seconde édition de 
son ouvrage, en 1834, il recüifia cette donnée, en di- 
sant que cet animal avait été amené en France de 
l'Ile de Cuba, mais que l'on ignorait de quelle partie 
du continent américain il y avait été apporté. Quant à 
l'individu que nous avons décrit, c'était un individu 
du sexe mâle, originaire de l’état d’Arkansas, dans la 
Louisiane, et qui avait été donné à notre ménagerie 
par M. Trudau. Rien ne nous prouve que cette espèce 
habite le Brésil, et comme l'application du nom cité 
plus haut entraîne à sa suite une erreur, nous croyons 
légitime, jusqu'à plus ample mformé, de lui substituer 
la dénomination de Chat albescent (Felis albescens ), 


dénomination qui rappelle à la mémoire la teinte blan- 
châtre du pelage. 


__ 130 — 

Mais si le continent américain, dans ses parties 
australes, paraît surtout habité par les Félis à taches 
ocellées, l’ancien continent à son tour, dans ses lati- 
tudes correspondantes, paraît être la patrie à peu près 
exclusive ‘ de ces espèces de Chats. que Pallas, sui- 
vant M. de Blainville, avait désignés sous le nom de 
Cato-lynx, espèces qu'isolent si naturellement leur 
pelage en général touffu, et leurs oreilles uniformé- 
ment colorées en dehors. 

Il devient évident dès-lors que la plupart des Félis 
munis de trois molaires à la machoire supérieure et 
à oreilles dénuées de pinceaux de poils bien marqués, 
sont surtout habitants des régions australes. C'est 
l'inverse pour les Lynx, dont le séjour est réel- 
lement propre aux zones boréales des deux hémi- 
sphères. 

C’est à cette division du genre Félis, qu'appartient 
le Chat bai (Felis rufa, Guld. ), rapporté de Californie 
par M. Néboux. Le pelage est long, touffu , doux au 
toucher : il est sur les flancs fauve roussâtre, teint 
de blanchâtre, la plupart des poils étant de cette der- 
nière couleur dans leur moitié la plus externe. Sur 
la ligne médiane du dos, règnent depuis l'intervalle 
de séparation des épaules, des stries noires non limi- 
tées, produites par la prédominance, dans cette ré- 


M. Gay, auquel nos collections doivent tant de richesses, 
nous ayant rapporté un Chat qui, par ses caractères extérieurs, 
nous a semblé appartenir à cette section des Cato-lynx, on s’expli- 
quera comment nous sommes moins aflirmatfs sur le fait de la 
distribution géographique des psendo-Iynx. 


sion, des poils à pointe noire. La teinte roussâtre do- 
mine sur le dessus du cou', la teinte blanchâtre sur 
le front où se dessinent quelques lignes horizontales 
brunatres : l'extérieur des membres présente la colo- 
ration fauve roussatre des flancs; elle est plus pure 
sur les membres postérieurs, plus lavée de blanchâtre 
sur les membres antérieurs. Les taches brunes noirà- 
tres qui les couvrent sont également plus détachées en 
avant qu’en arrière : elles sont surtout marquées en 
dedans où le pelage est blanc. Le haut des membres 
présente en dedans deux bandes transversales parfai- 
tement bien tranchées et d’un noirâtre foncé. Le 
dessous est blanc, marqué de taches noires. La queue 
est blanche en dessous et noire en dessus à son ex- 
trême pointe. 

Ce Chat, qui a été tué à Monterey, avait donc revêtu 
sa robe d'hiver. D'après la description que nous en 
avons donnée, il est facile de voir que si les lignes noi- 
res de la région dorsale sont mieux dessinées chez 
les individus dans leur pelage d'été, les taches brunes 
noirätres de la face externe des membres, le bout de 
la queue noir en dessus et blanc à son extrême pointe, 
permettent (ces caractères sont reconnaissables en 
toute saison), permettent, disons-nous, de différencier 
l’espèce des autres Lynx de ces régions. Ces parties 
présentent donc, chez le Fels rufa, le même ca- 
ractère de permanence qui est dévolu aux taches des 
fesses et de la face chez certains Cerfs auxquels les 
saisons font éprouver des changements de colora- 
(ion. 


— 152 — 


Les dimensions sont les suivantes : 


Du bout du nez à l'origine de la queue. . . . . . bgcent. 
D ns, 
Longueur du membre antérieur. . . . . . . . 18 
Longueur du membre postérieur mesuré le long de 

son bord postérieur. .  . AS OPA PRE 
De l'angle interne de l'œil au ra ARMOR NE S 
Du bordinterneetantérieur de loreilleau boutdunez. 81 


Les dimensions de cet individu prouvent qu'il était 
jeune ; les formes propres au crane ne nous laisseront 
point d'incertitude à ce sujet. 

On sait que, comparé au crane du Felis boreals de 
M. Temminck, le crane du Felis bai s'en disüngue par 
une saillie plus grande de la crête sagittale, par un 
plus large étalement du frontal, par un cadre orbi- 
taire plus allongé, par des arcades zygomatiques plus 
déjetées en dehors. Dans la face, les os nasaux sont 
plus étalés, plus larges, et le bord, par lequel ces piè- 
ces osseuses s'unissent au frontal, est plus étendu. En 
outre, la ligne d’articulation des os nasaux avec le fron- 
tal, au lieu de se trouver sur la même ligne horizontale 
que la suture de l'articulation du frontal avec la por- 
tion montante du maxillaire supérieur, cette articula- 
üon se trouve au-dessus de cette dernière. Sur le crâne 
de l'individu rapporté par la F’énus , les caractères 
que nous venons de tracer se trouvent réunis, mais 
modifiés, comme le sont les crânes de tous les jeunes 
animaux, par rapport à ceux de l'adulte de lespèce à 
laquelle ils appartiennent. Le crane est plus arrondiet 


LS er 


— 1995 — 
plus aplati que chez ladulte, les sutures non encore 
totalement effacées n’ont point permis aux crêtes d’in- 
sertion musculaire l'obtenir le développement qui les 
caractérise ; les rugosités d'insertion du musele tem- 
poral ne sont même point ébauchées; la portion de la 
voûte du crâne qui se trouve située derrière l’apo- 
physe orbitaire du frontal, n’est guère plus comprimée 
que la partie de la région temporale qui sert de point 
d’attache à Îa racine transversale de l’apophyse zygo- 
malique ; cette apophyse zvgomatique elle-même est 
peu déjetée en dehors. Avec lPâge les formes propres à 
l'adulte se dessinent et s’établissent : le crâne s’allonge 
et se rétrécit, les crêtes et les rugosités osseuses se 
dessinent et les caractères de l'instinct carnassier se 
révèlent par le développement des organes dévolus 
aux fonctions de la mastication. 


TROISIÈME SECTION. 


RONGEURS. 


Parmi les Rongeurs rapportés par l'Expédition, trois 
espèces m'ont paru pouvoir être utilement décrites et 
figurées : ce sont le Néotome de la Floride, l'Ecu- 
reuil à ventre roux, dans divers états de pelage, et 
une espèce nouvelle à laquelle j'ai cru devoir donner 
le nom du savant chirurgien auquel est dû l'individu 
type, M. le docteur Néboux. 


$ I. Note sur le NÉOTOME DE LA FLoribE, Neotoma 
floridana, Say et Or. 


On sait que le genre Néotome a été établi, en 1825", 
par MM. Say et Ord, d’après un Rongeur de la Floride 
de l’est, précédemment décrit par M. Ord* comme une 
espèce nouvelle du genre Rat et nommé Mus flori- 
danus : c'est aujourd'hui le Weotoma floridana , 
connu non-seulement en Floride, mais aussi dans plu- 


1 Voyez le Journal ofthe Acad. of natural sciences of Philadel- 
pluia, 1. XV, p.345. 


? Bulletin de la société philomathique, an. 1818, p. 181. 


— 155 — 
sieurs autres parties des États-Unis, notamment dans 
la région qu'arrosent le Mississipi et le Missouri. 

C’est cette même espèce que M. Néboux nous a rap- 
portée de la Basse-Californie, où elle se retrouve avec la 
même taille, mais avec une nuance un peu plus grise. 
La queueest aussi un peu plus blanche inférieurement. 
Ces différences sont d’ailleurs sans importance; et 
si j'ai cru devoir revenir ici sur leNéotome, c’est, d’une 
part, pour constater son habitat en Californie; de 
l'autre, afin de mettre à profit l’occasion qui s’offrait à 
moi de donner une bonne figure coloriée du Néotome, 
représenté seulement en noir par MM. Say et Ord. La 
détermination spécifique des Rongeurs, et surtout des 
Muridés, présente, en effet, de telles difficultés que l'on 
ne doit laisser échapper aucun moyen de fixer nette- 
ment leurs caractères spécifiques. Peut-être notre fi- 
gure sera-t-elle consultée utilement par les zoologistes 
qui chercheront à déterminer enfin d’une manière ri- 
goureuse les rapports naturels et, par conséquent, la 
véritable place d'un Rongeur que l’on trouve décrit, 
tantôt sous le nom Weotoma Drummondiü, tantôt sous 
celui de Myoxus Drummondü, et qui, en réalité, est 
trop imparfaitement connu pour qu’on puisse se pro— 
noncer à son égard sans le secours de nouveaux maté- 
raUX. 


— 136 — 
$ HE. Note sur les EcurEeuiLs rapportés par l'expédition 
de la Vénus, Sciurus aureogaster, Fr. Cuv., ef Sciu- 
rus Nebouxi, Is. GEOFF. 


On doit à l'expédition de la F’énus, et spécialement 
aux recherches de M. Néboux, plusieurs Ecureuils in- 
téressants, la plupart venant de la Californie, un autre 
du Pérou. Les premiers se rapportent au Sczurus au- 
reogaster de M. Frédéric Cuvier, bien qu'ils manquent 
plus ou moins complétement du caractère que rappelle 
ce nom; et l’on va voir, par les détails que je donne- 
rai sur eux, combien l'on doit modifier la caractéris- 
tique ordinairement assignée à l'espèce. 

Quant à l'Ecureuil du Pérou, il appartient à une 
espèce nouvelle à laquelle je donnerai le nom du sa- 
vant et zélé médecin de la J’énus. 


1. L'ÉcuREUIL À VENTRE DORÉ, Sciurus aureogaster, 
Fr. Cuv. 


Deux individus de cette espèce, de sexe différent, 
mais fort semblables Pun à Pautre, ont vécu il y a quel- 
que temps à la ménagerie du Muséum, et c'est d’après 
eux que M. Frédéric Cuvier a établi l'espèce. Je ci- 
terai ici textuellement une partie de l’article qu'il lui 
a consacré dans son Æistoire naturelle des Mammufe- 
res de la ménagerie": 


1 Septembre 1829. Cet article est intitulé : £cureur! de la Cali- 
fornie où à ventre doré. 


« 


« 


= 


( 


— 197 — 

« Cet Ecureuil nouveau paraît être propre aux ré- 
gions occidentales de l'Amérique du Nord, depuis le 
Mexique jusqu’en Californie. M. Desmarest a eu la 
complaisance de mecommuniquer la description qu'il 
avait faite au Havre d’un individu de cette espèce qui 
avait été pris entre Mexico et la Vera-Cruz..… 

« L'Ecureuil à ventre doré, comme l’Ecureuil de la 
Caroline, a toutes les parties supérieures grises, mais 
un peu plus foncées; etau lieu de n'avoir que quel- 
parties des flancs d’une teinte fauve, 1/ a toutes ses 
parties inférieures d'un roux orangé ou doré bril- 
lant .… La queue est distique, et les oreilles ne sont 
point surmontées par des pinceaux comme chez l’'E- 
cureuil commun. L'iris est brun et la pupille ronde. 

« Cette espèce est plus grande que l’Ecureuil de la 
Caroline; la longueur de son corps, du bout du mu- 
seau à l'origine de la queue, est de dix pouces. La 
queue en a huit. 

« Je proposerai de donner à cet Ecureuil, qui n’est 
point encore entré dans les catalogues méthodiques, 
le nom de aureogaster, à cause de la couleur de ses 
parties inférieures. » 

C’est en 1829 quela ménagerie du Muséum avait recu 


de la Californie les deux individus sujets de la des- 


cripüon précédente. En 1831, d’autres individus, en- 


tièrement semblables, vinrent se placer près d'eux dans 


les galeries du Muséum. Ceux-ci faisaient partie d’une 


collection de mammifères et d'oiseaux du Mexique, 


acquise à Berlin par les soins de M. le professeur Valen- 


ciennes. Ils portaient sur leurs étiquettes le nom de 


— 1358 — 


Sciurus hypoxanthus, sous lequel M. Lichstenstein 
avait provisoirement désigné l'espèce dans le Musée 
de Berlin. 

L’épithète spécifique d'y poxanthus est évidemment 
tirée du même caractère que M. Frédéric Cuvier avait 
exprimé par Le nom d’aureogaster'; et depuis MM. Fré- 
déric Cuvier et Lichstenstein, tous les auteurs ont 
adopté l’un ou l’autre de ces noms, et caractérisé le 
Sciurus aureogaster où hypoxanthus par la couleur 
rousse de ses parties inférieures. 

Et cependant, il faut reconnaitre aujourd'hui que ce 
caractère n’est nullement constant : le ventre est, chez 
certains individus, d’un gris clair, r’offrant pas méme 
la plus légère teinte de roux. Parmi les Ecureuils rap- 
portés de Monterey par la Vénus, il en est un qui offre 
ce caractère ; el un autre, que j'ai fait représenter sur 


1 Le nom de $. kypopyrrhus, que M. Wagler ( Jsis, 1831, 
p- 510), a donné à un Ecureuil du Mexique, aencorele mêmesens, 
et se rapporte au même caractère. Voici la caractéristique du S. 
hkypopyrrhus telle que la donne M. Wagjler : 

Cauda longissima, nigra, pilis nonnullis, omnibus versus ejus 
basin  fuscescenti-griseo Variegalis ; capile, trunco pedibusque supra 
nigris, undique fuscescenti-sive flavido-griseo irroratis; auriculis, 
naso, podariis ac vibrissis atris; gastræo pedumque latere interno 
ferrugineis. 

Je n'ai vu chez aucun de nos S. aureogaster tous ces caractères 
réunis : mais les différences sont si légères, et les Ecureuils, 
comme cet article même va en fournir de nouvelles preuves, 
sont d’ailleurs sujets à tant de variétés, que l'existence au Mexi- 
que de deux espèces aussi voisines que le seraient le Sc. aureo- 
gaster où Sc. hypoxanthus, et le Sc. hypopyrrhus, doit sembler 
pour le moins bien douteuse. 


— 159 — 

la même planche, à même le ventre aussi blanc qu'un 
Ecureuil de la Caroline. Mais celui-ci, chez lequel la 
nuque et la croupe sont rousses, a le dos et les mem- 
bres d’un gris très-clair, et est évidemment revêtu d’un 
pelage anomal * : il présente à notre observation un cas 
d’albinisme partiel, fort remarquable sans doute, mais 
dont on ne peut tirer aucune conséquence relative aux 
caractères de l'espèce. C’est donc à l'examen du pre- 
mier individu que je dois spécialement m'attacher. 

Celui-ci, qui parait male”, est généralement gris en 
dessus ; mais le gris n’est pas pur, les poils, noirs à 
leur base, blancs à leur pointe, ayant une zone inter- 
médiaire rousse qui se montre un peu au dehors, et 
jette sur l’ensemble du pelage unelégère nuancerousse. 
Sur la croupe et la nuque le roux devient même domi- 
nant. Le dessus de la tête et des pattes est d’un roux 
tiqueté de blanc; et le tour de la bouche et tout le 
dessous sont d'un gris très-clair ou blanc-grisatre. Les 
oreilles n’ont que des poils très-ras et sont grisatres. La 
queue, dont la base est rousse, est en-dessus d’un noir 
fortement nuancé de blanc, les poils ayant leur extré- 
mité blanche sur une assez grande étendue. En des- 


1 Les poils ont sensiblement la même longueur dans les parties 
qui ont conservé leur couleur normale et dans celles qui sont at- 
teintes d’albinisme. Parmi les autres Ecureuils albinos que pos- 
sède le Muséum, se trouve un Ecureuil d'Hudson chez lequel 
une partie du pelage n’est pas moins anomale par sa brièveté que 
par sa blancheur. J'ai mentionné déjà ce cas remarquable dans 
mon Histoire générale des anomalies, t. T, p. 312. 

2 L'état imparfait de la région sexuelle m'oblige de n’exprimer 
ici avec quelque doute. 


— 4160 — 

sous, la queue, qui est distique, montre très-distinc- 
tément, et pour ainsi dire disposées par bandes longi- 
tudinales, les trois couleurs que présente chaque poil 
en parüculier, le roux, le noir, le blanc. Ainsi, la pre- 
mière partie des poils forme, de chaque côté, le long 
de la ligne médiane, une bande rousse, limitée en de- 
hors par une bande noire, en dehors de laquelle les 
extrémités des poils forment une bande blanche, d’ail- 
leurs moins étendue et plus confuse. 

Les grandes dents antérieures sont d’un jaune orangé 
en avant, blanches latéralement. Les moustaches sont 
noires. 

La longueur de lindividu que je viens de décrire 
est d'un peu moins de trois décimètres, non compris 
la queue, qui a environ deux décimètres et demi. 

En comparant cette description à celle de M. Fré- 
déric Cuvier ou à l’un des individus qui nous sont ve- 
nus en 1829 et en 1831 de la Californie et du Mexique, 
on reconnaitra immédiatement de nombreuses et re- 
marquables analogies avec ceux-ci, mais aussi de no- 
tables différences. L'Ecureuil de la Fénus, en même 
temps qu'ilmanque inférieurement de la couleur rousse 
qui serait Caractéristique pour l'espèce selon les au- 
a teurs, plus de roux sur les.parties supérieures; et 
cela, non-seulement sur la croupe et la nuque où le 
roux domine, mais même sur le dos, où les poils ont 
une zone rousse dont d’autres individus ont à peine 
un vestige. L'Ecureuil de la F’énus ne devrait-il donc 
pas être considéré comme une espèce voisine, mais dis- 
üncte du Sciurus aureogaster où hypoxanthus ? 


— 161 — 


Sije n'avais comme éléments de détermination que 
les individus dont j'ai fait mention jusqu'à présent, 
l'hypothèse de deux espèces fort voisines, l’une à ven- 
tre roux, l’autre à ventre gris-clair, serait fort sou— 
tenable. Mais j'ai sous les yeux plusieurs individus 
dont l'examen démontre d’une manière certaine la va- 
riabilité de la coloration des parties inférieures, qui 
sont tantôt rousses, tantôt d’un gris clair, et tantôt va- 
riées en des proportions diverses de roux et de gris ‘. 

Le premier individu à ventre varié que j’aie vu, est 
une femelle donnée, en 1836, au Muséum de Paris par 
celui de Lyon. Cet Ecureuil, dont la nuque et la croupe 
(celle-ci sur une très-grande étendue) sont roussâtres, 
a le ventre coloré de roux et de gris clair selon une 
disposition très-remarquable. Le devant de la poitrine 
est entièrement d’un roux beaucoup plus pâle que 
chez les individus de M. Frédéric Cuvier; mais, sur la 
partie postérieure de la poitrine et sur le ventre, le 
roux forme trois bandes longitudinales, deux latérales 
s'étendant de chaque côté, comme chez l'Ecureuil de 
la Caroline, de l'insertion du membre antérieur à celle 


1 Il est peu de genres dans lesquels les espèces soient, plus que 
chez les Ecureuils, sujettes à des variations indivividuelles. Tout 
le monde connaît les belles variétés que présentent le Sciurus 
vulgaris dans le nord de l'Europe et de l’Asie, et les Sc, cine- 
reus et Sc. capistratus dans le nord de l'Amérique. Un autre 
exemple non moins remarquable est celui d'un Écureuil de l'A- 
mérique méridionale que j'ai décrit, pour cette raison même, 
sous le nom de Sc. variabilis. Voyez Notice sur plusieurs espèces 
nouvelles du genre Ecureuil, dans mes Études zoo/ogiques où 
dans le Wcgasin de Zoologie; année 1832. 

Zooroeir. 11 


— 162 — 


du membre postérieur, et l’autre, médiane. Entre 
celle-ci et chacune des bandes latérales, est une bande 
plus large d’un gris clair : c'est dans cette bande grise 
que sont comprises les mamelles. 

Chez un autre individu, également femelle, je 
trouve une disposition analogue, avec des nuances 
différentes. Presque toute la potrine et même une par- 
tie du dessous du col, sont d’un roux très-vif qui se 
prolonge en perdant peu à peu de sa vivacité, en trois 
bandes, l'une médio-ventrale, les autres latérales. La 
queue, chez cet individu, est fortement nuancée de 
roux. 

J'ai le regret de ne pouvoir faire connaître de quelle 
localité viennent les deux individus précédents. Celui 
dont il me reste à parler, et qui est assurément le plus 
remarquable de tous, vient du Mexique. Celui-ci, fe- 
melle comme les précédents, a la nuque et la croupe 
plutôt teintées de roux, que véritablement rousses, et 
il offre en dessous une disposition très-curieuse. Toutes 
les parties inférieures sont d’un roux vif, sauf huit ta- 
ches circulaires grises, ayant un peu moins de 2 cen- 
ümètres de diamètre, et dont chacune a, non à son 
centre, mais vers sa partie antérieure, Pun des huit 
mamelons. Entre la première et la seconde tache 
de chaque côté, on remarque quelques poils gris 
qui, à droite surtout, lient manifestement ces taches 
l’une à l'autre, et tendent à rappeler la disposition en 
bandes que nous ont présentée les deux individus qui 
viennent d’être décrits. Cette disposition existe même 


déjà assez distinciement en arrière : la troisième et la 


— 165 — 
quatrième lache sont, en effet, réunies par des poils 
oris beaucoup plus nombreux , et tellement, qu’à ne 
considérer que le bas-ventre, il existe entre cet indi- 
vidu et le précédent une ressemblance presque com- 
plète. Au contraire, la seconde et la troisième tache 
de chaque coté, sont parfaitement isolées. 

J'ai fait représenter ! cet individu fort remarquable 
par, la coloration de ses parties inférieures, ainsi que 
son crâne. Îl importe de noter, à cause d’un caractère 
qui sera tout-a-l'heure mentionné à l'égard d'une 
autre espèce, que la dentition de cette espèce est celle 
que l’on trouve ordinairement chez les Ecureuils. Il 
existe quatre machelières de chaque côté et à chaque 
mâchoire, et de plus, supérieurement, en avant de la 
première machelière , une fausse molaire. Celle-ci est 
d’ailleurs tellement petite et si étroitement serrée 
contre les premières machelières, qu'on la prendrait 
pour un simple tubercule de celle-ci. 


2. L'Écureuis De Nésoux, Sciurus Nebouxt, Is. Geoff. 


Je dédie cette espèce à M. le docteur Néboux, qui 
l’a découverte, et aux recherches duquel sont dus 
aussi la plupart des Mammifères et des Oiseaux de la 
Vénus. 

C’est au Pérou, à Payta, que M. Néboux s'est pro- 


1 Dans la planche XI. — On pourra comparer cet individu à 
deux autres variétés de la même espèce ( l’une auomale par aibi- 
nisme partiel), représentées dans la planche X. 


— 164 — 


curé l'individu, malheureusement unique, dont je vais 
donner la description. 

Sa taille est un peu moindre que celle de l'espèce 
précédente : elle est de 27 centimètres, du bout du 
museau à l’origine de la queue, et celle-ci a de 
même près de 3 décimètres. 

La couleur générale du pelage est le gris. Cette 
couleur, plus ou moins modifiée, est en effet celle de 
l'animal entier, moins les oreilles, les moustaches et 
les quatre pattes qui sont noires, et une tache blanche, 
composée de poils beaucoup plus longs que les autres, 
et située sur le col, à peu de distance de la base des 
oreilles. 

Le gris est d'une nuance pure et qui rappelle la 
couleur du Capistrate, sur la plus grande partie du 
dos et sur la face externe des membres antérieurs; 
mais il passe au noir tiqueté sur la tête, et au fauve 
sur la partie postérieure du dos, la croupe et les fa- 
ces extérieure et postérieure des membres, ainsi 
que sur la base de la queue. Dans la portion qui est 
d'un gris pur, les poils sont noirs avec leur extrémité; 
dans la portion roussatre, ils sont de même noirs, 
mais avec l'extrémité fauve. 

Les parties mférieures du corps et les parties in- 
ternes des membres, ainsi que le tour de la bouche, 
sont d’un gris clair légèrement teinté de jaune. Les 
poils des côtés du ventre ont les deux mêmes couleurs 
que les poils du dos, mais sont beaucoup plus courts. 
Les poils plus courts qui couvrent le milieu du ventre 
et de la poitrine, présentent aussi les deux mêmes 


— 165 — 
couleurs; mais avec cette différence que le blanc ou 
le fauve occupe la plus srande partie de leur étendue. 

La queue, ronde et non distique, est, sauf sa base 
dont la couleur a été plus haut indiquée, d’un gris 
blanchätre, les poils étant noirs dans leur première 
portion, puis blancs vers leur extrémité. De plus, 
parmi eux, sont entremêlés quelques poils entière- 
ment blancs. 

Les grandes dents antérieures! sont d’un jaune 
orangé antérieurement, et blanches dans le reste de 
leur étendue. Ce sont, comme on le voit, les mêmes 
couleurs que chez le Sc. aureogaster (et chez la plu- 
part des Ecureuils); mais ce ne sont pas exactement 
les mêmes formes. Ces dents, chez le $. Nebouxu, 
sont sensiblement plus petites, plus serrées l’une con- 
tre l’autre, notamment à leur sortie des alvéoles, et 
dirigées parallèlement, tandis qu'elles sont obliques 
l’une sur l’autre chez le Sc. aureogaster. Toutes ces 
dispositions sont en rapport avec la forme, un peu 
plus rétrécie, du museau chez le $. Nebouxixr. 

Enfin, il est entre ces deux espèces, relativement 
au système dentaire, une autre différence très-digne 


1 Je me sers ici à dessein de ce terme vague, et qui, tiré seule- 
ment de la position des grandes dents des Rongeurs , n'implique 
aucune détermination. En eflet, ce n’est pas le lieu d'examiner si 
les grandes dents antérieures doivent être considérées, selon leur 
détermination ordinaire, comme des incisives, ou, selon la déter- 
mination de mon père, comme des canines. Voyez le Mémoire que 
mon père a publié sur cette difficile question de zoologie, dans 
les Hémotrres de l Académie des sciences, t. XI. 


— 166 — 

d'être notée. Notre imdividu n'a pas le moindre ves- 
tige de la petite fausse-molaire que j'ai décrite chez le 
$c. aureogaster, et que l’on trouve presque toujours 
chez les Ecureuils : la place à laquelle on l'observe 
ordinairement, est occupée, chez le Sc. Nebouxi, par 
une racine de la première mâchelière; racine très- 
considérable, en grande partie apparente au dehors 
de l’alvéole, et se portant directement en avant. 

Au lieu de la formule dentaire que l’on trouve chez 
le Sc. aureogaster, et qui est aussi celle de presque 
tous les Sciuridés ‘, savoir : 


2(R+m+4M)) 


+ DR + 4 M) 2? 


la formule dentaire du Sc. Nebouzxt est donc, comme 
on vient de le voir, 


En y comprenant méme très-vraisemblablement quelques- 
uns des Écureuils que le docteur Bachman a décrits comme ayant 
seulement quatre molaires à chaque mâchoire. (Voyez les Procce- 
dings ofthe zool. socteiy, an. 1838, p. 85, et les Annals of natural 
history, 4839, t. HT, p. 275.) D’après l’analogie extérieure, j'o- 
serais affirmer que ces espèces sont dans le même cas que le Sc. 
aureogaster, c'est-à-dire que la fausse molaire est excessivement 
petite, difficile même à apercevoir, et d’ailleurs vraisemblablement 
caduque. 

* Dans cette formule j'ai désigné par M les grandes molaires 
ou mâchelières, par » les petites molaires, et par R les grandes 
dents antérieures caractéristiques de l'ordre des rongeurs. 

Voyez sur ces nouvelles formules dentaires le mémoire que 
j'ai recemment publié dans les Archives du Muséum d'Histoire na- 
turelle sous le titre de : Descriplion des mammifères nouveaux ot 
tmparfaitement connus de la collection du Muséum. 


— 167 — 
&(R+4M ) = 20 


Qant à sa caractéristique, on peut la donner ainsi : 
, ve . , } CR 
Pelage d’un gris tiqueté, passant au fauve posté- 
rieurement ; les oreilles et les quatre pattes noires. 
Queue ronde, à poils noirs et blancs, paraissant grisà- 
tre dans son ensemble. 


1 Il est à peine utile de faire remarquer que la formule 
4(R+4M)=20 
est ici pour 
2(R+M . _.— 
+2 (R4+M) 


Il y a ici une abréviation , ou pour mieux dire, une simplifi- 
cation résultant de la similitude des dents des deux mâchoires. 


sl 


# 


EXPLICATION DES PLANCHES. 


PLANCHE °°. 


Le Cercorirnëque Deraranne, Cercopithecus Lalandu, Isid. 
GeorFROY=ST.-HiLaïRE. 


[Au tiers de la grandeur naturelle.] 


PLANCHE II. 


Crânes et cerveaux de Sarmiris, comparés à un crâne de Car- 

LITRICHE et à un cerveau d'Oursrirr. 

[Toutes les figures de cette planche sont de grandeur naturelle.] 

Fig. 1. Crâne et mâchoire inférieure du CALLITRICHE À MASQUE 
Noir , Callithrix personatus , Gvorr. Sr.-Hir., vus de 
profil. 

Fig. 2. Dents supérieures du même Singe, vues par ia cou- 
ronne. 

Fig. 3. Mâchoire et dents inférieures du même animal, vus par 
dessus. 

Fig. 4. Crâne et mâchoire inférieure du SAIMIRI A DOS BRULÉ , 
S'aïmiris ustus, Is. Grorr. Sr.-Hi. 

Fig. 5. Le même crâne, vu par dessous. 

Fig. 6. Le même, vu par dessus. 

Fig. 7. Crâne du Sarmirx scruRIN , Saimiris sciureus, Is. Grorr. 
ST.-Hic., coupe verticale. 

Fig. 8. Crâne d’un autre individu de la même espèce, vu par la 
face inférieure. 


ne 
Eug. 9 


Fo, 
Fig. 4 


Fig. 1 


— 170 — 


, Crâne d'un jeune sujet de la même espèce, vu de 
profil. 

o. Cerveau d’un autre SammiR1 SCIURIN, vu par la base. 

1. Le même cerveau, vu par la face supérieure. 

2. Cerveau d’un Ovisriri onviNAIRE , Hapale jacchus, vu 
par la face supérieure. 


PLANCHE III. 


Tête et crâne du NyxortPiTnÈQue LÉmuRIN, Nyctipithecus lemu- 


TINUS , 


Fio. 1. 


es 
CE 
D 


Fra 

mt 
LE 
Si 


Fig. 9. 


> 
$ 
or 


Is. Grorr. Sr.-Hic., et crâne du N. rÉuN, N. felinus, Srix. 
[Toutes les figures de cette planche sont de grandeur naturelle.] 


Face du NycTIPITHÈQUE LÉMURIN, chez un individu de 
couleur ordinaire. 
. Face d’un autre individu de même espèce, chez lequel le 
pelage offre une teinte rousse très-prononcée. 
. Crâne d'un individu adulte de cette espèce, vu de 


profil. 


. Le méme crâne, vu par dessous. 


Le même, vu par dessus. 

. Contours du même crâne, et spécialement des orbites, vus 
de face. 

. Crâne d’un jeune individu de la même espèce, vu de 
profil . 

. Le même crâne, vu par dessous. 

Le même, vu par dessus. 


Fig. 10. Crâne du Nyorrrruèque FÉLIN, adulte, vu de profil. 


Fig. 11. Le même crâne, vu en dessous. 


Fig. 12. Le même, vu en dessus. 


Fig. 13. Contours du même crâne, et spécialement des orbites, 


vus de face. 


PLANCHE IV. 


L'ours BRUN, Ursus arctos, LiNNÉ, variété du Kamtschatka. 


[Au septième de la grandeur naturelle.] 


— A7 — 


PLANCHE V. 


Squelette de l'Ours rerriLe, Ursus ferox, Levvis et Cranxe. 
[Au cinquième de la grandeur naturelle.] 


Le sternum n'ayant pas été trouvé avec le reste du squelette, 
n'a pu être représenté. 


PLANCHE VI. 


Le Raron LAvEuR, Procyon lotor, Srorr, variété mexicaine. 


[Au tiers de la grandeur naturelle.] 


PLANCHE VIT. 


La MourertE MÉSOMÈLE, Mephitis mesomelas, LicuTENsTEIN. 
[Aux trois-cinquièmes de la grandeur naturelle.] 
A. Son crâne, vu en dessus. 
B. Le même, vu en dessous. 
C. Le même et les dents, vus de profil. 
D. La mâchoire inférieure et ses dents, vues par la 


couronne. 


[ Les figures A, B, C, D sont de grandeur naturelle. ] 


PLANCHE VII. 


Le Cnar azBesceNr, Felis albescens, PUuCHERAN. 


{ Au tiers de la grandeur naturelle. ] 


PLANCHE IX. 


Le Cuar Bat, Felis rufa, Guzpensræpr. 


| La figure 4 est au tiers de sa grandeur naturelle; les figures 2, 5 et 4 sont de 
grandeur naturelle. | 

Fig. 1. Individu, en pelage d'hiver, venant de Californie. 

Fig. 2. Crâne du même individu, vu par dessus. 

Fig. 3. Même crâne, vu par dessous. 


Fig. 4. Crâne d’un autre individu plus âgé, vu de profil. 


— 173 — 


PLANCHE X. 

L'EcuREUIL 4 VENTRE DORÉ, Sciurus aureogaster, Fr. Cuvrer ; 

variétés. 
[Aux deux tiers de la grandeur naturelle.] 

L'un des deux individus figurés dans cette planche est une 
variété par albinisme partiel. 

L'autre individu offre un exemple des variations normales du 
pelage dans cette espèce. Le ventre est gris, et non roux, comme 
dans les individus jusqu’à présent décrits ou figurés. 


PLANCHE XI. 


L'EcureuiL À VENTRE DonÉ, Sciurus aureogaster, Fr. Cuvier; 
variétés. 
[Figure 1 aux deux tiers de la grandeur naturelle; figures 2 et 5 de grandeur 
naturelle; figure 4 grossie. | 
Fig. 1. Individu femelle, à ventre roux, avec le tour des t6- 
tines d’un gris blanchâtre. Il offre ainsi réunies dans la 
région abdominale la couleur grise observée chez l'in- 
dividu précédent, et la couleur rousse, regardée par les 
auteurs comme caractéristique de l'espèce. 
Fig. 2. Le crâne, vu en dessus. 
Fig. 3. Le crâne, vu de côté. 
Fig. 4. Les dents de la mâchoire supérieure. 


PLANCHE XII. 


L'Ecvreuiz pe Népoux, Scrurus Nebouxit, Is. Georr. Sr.-Hi. 


{L'individu entier, aux deux tiers de la grandeur naturelle; les figures À, B, C 
de grandeur naturelle ; D grossie. ] 


A. Son crâne, vu par dessus. 
B et C. Le même et les dents, vus de profil. 
D. Les dents, vues par la couronne. 


— 175 — 


PLANCHE XIIT. 


Le NéoTomE DE LA FLorine, Neotoma Floridana, Or» et Say. 
{ L'individu entier de grandeur naturelle ; les figures A, b, € de grandeur natu- 
relle, B et G grossies.] 
A. Mâchoires et dents, vues de profil, de grandeur na- 
turelle. 

B, #. Dents de la mâchoire supérieure. 
C, c. Dents de la mâchoire inférieure. 

Les unes et les autres vues par la couronne. 


INDEX 


DS ESPÈCES DÉCRITES OU INDIQUÉES ET DES NOMS GÉNÉRIQUES ET 
SPÉCIFIQUES CITÉS DANS CE TRAVAIL. 


AOTE, AoTUS (syn. de NYCTIPITHÈQUE, N YcC- 
TIPITHECUS). . 48-49, 113 
AOoTESs (pour AOTUS). . . 115 


CALLITRICHE, CALLITHRIX. 103-107, 111- 


415 
CaLLiTarix d'Erxleben.. . . . . . 35-45 
Cegus d'Erxleben.. . . . . . 35, 41, 42 
CERCOGÈBE, CERCOCEBUS. . . . . . . 6 
CDINODSAE ELE ESS AN 19 
CETURDINOSUSS 2 5 5 2 EN re 19 
CERCOPITHÈQUE, CERCOPITHECUS.. 6, 19-54 
C. blane-nez, C. petaurista. . . . . 22 
C. Callitriche, C. sabœus.. 32 
€. Campbell, C. Campbelli. 24 
C. Delalande, €. Lalandii.. . 11-18, 28 
; à diadême, C. leucampyx.. . . . 27 

3. Diane, C. Diana. . . . . 97 
; à dos rouge, C!. An 35 
C. Grivet, C. giseo-viridis. . . . . . 51 
C. Hocheur, C. nictilans. . + AOL 
C. aux lèvres blanches, C. labiatus.. 95 
C. à longue barbe, C. pogonias…. 29 
C. Malbrouck, C. cynosurus.. . . 50 
C. Martin, C. Martini... . . . . . . 24 
C. Mone, C. Mona. . 25 
€. Monoïde, C. monoïdes.…. . 25 
C. Moustac, C. cephus.. . . . . . . 25 
C. à oreilles rouges, C. erythro- 

HER LE ss : 25 
C. Patas, C. ruber.… RSS 
GC. Roloway, C. Roloway.. . . . . . 26 
€. roux-vert, C. rufo-viridis.. . . . 535 


mr me 


29 
24 


G. tantale, C. fantalus. Fe 

C. Temminck, C. Temminckii. . . . 
C. vervet, C. pygerythrus. . . 8-11, 
CHAT, FELIS. . . . . . .. . 137-155 
C. albescent, F. Diconss 149-149 


29 


C. bai, F. rufa. > + + .. 149-159 
COLOBE, GOLOBUS.. . . . . . . . . . 6 
C. ferruginosus…. . . . .. , 20 
Ce JUUTINOSUS... NN 20 
C. Guereza. : . . à, : . . . 20 
C. Pennantii. - 20 
C. polycomos. . . ........ 20 
C: Satanas.… . . . . à... . 20 
CUTSMUS Se RE re 20 
C. vellerosus.. . . . ... . . . . . . 20 
C. verus. . . . . … . .. CU ERS AO) 
CYNOCÉPHALE, CYNOCEPHALUS.. .. . . 6 
C. Chacma, C. porcarius.. .. . .. 7 
Ecureuil de Néboux, Sciurus Ne- 
bouxii RATE te ac io 
E. à ventre doré, S. rene 15 
HAPALE, HAPALE.. . . . . .. 35, 40 
MANGABEY. Voy. CERCOCÈRE. 
MioPITHÈQUE, MIOPITHECUS. . . . . .  G 
M. talapoin. . : .… . : - : . . 19 
MoureTre mésomèle, Mephitis me- 
somelas. . - 155 
NasiQUE, NaASaLiIsS. 19 


N. larvatus. 20 


— 176 — 


NEOTOME DE LA FLORIDE, Neotoma 


HOTTES Ce “10 
Nocruore, NocrHora (syn. de NycrTi- 
PITHÈQUE, NYCTIPITHECUS).. . . 49, 115 
NYCTIPITHÈQUE, NYCTIPITHECUS. #7 - d9, 
113-114 
N. criard, NN. vociferans.. . . . 64, 117 
N. félin, N. felinus. . . . . 63, 67, 115 
N. lémurin, N.lemurinus.. . . T0, 115 
N. Miriquouina. . . . . . . . . 59, 117 
N. à trois bandes, N. trivirgatus. 61, 
65, 116 
Ours brun, Ursus arctos, var. . . . 121 
O. terrible, U. ferox.. . . . . . . . 193 
Prraesciureus (syn. de SAïMIRIS). . . 47 
RATON, PROCYON. . . . . . . . 495, 132 
R. laveur, P. lotor, var. . . . . . . 128 


SAGOUIN, SAGUINUS Où SAGOUIN (sens 


AIVETS) ee. 51, 41, 111; 
SAÏMIRI, SAÏMIRIS.. . . . . 43-47, 71-99, 
407, 109 


S. à dos brûlé, S. ustus. 93, 96-99, 110 
S. entomophage, S. entomophagus.. 95, 
99, 111 


S. à lunules, S. lunuiatus. 94, 99, 110 
S. sciurin, S. sciureus. . 93, 94-96, 109 
S. à tête de mort, Simia morta (es- 
pèce à retrancher). 401-105 
SAKI, PITHECIA. . 40 


Site le re, 0 + ©, + he 


SEMNOPITHÈQUE, SEMNOPITHECUS. . . . 19 
S. albo-cinereus (espèce nominale)... 20 
D. QUIEUS EE Ne scene) 49 
D. CTIS IIS ER 0e eu oi ie 4 16) 
SCUCUIEUS RER 0 see 19 
S. Dussumiert.. . eo. 19 
DAENIEUUS. 2e es: se ee 19 
S:ÉMOTANS. ee. 49 
S'IGUbArNBAUS ne à 19 
SH DUMOMUS SL 08 ve eme 19 
S. fulvo-griseus (espèce nominale). 20 
S. leucoprymnus. . . . . . . . .. 19 
SNS RE ER en le = Ce 49 
S. melalophos. . . . . . . . : . . . 49 
SA TUITOIUS M en ue 19 
SITEMIEUS: eee se + - A1 
S.TMAQTÜIMANUS 0. 0 + este. 19 
S\ODSCUMUS. a eus À solar eue 19 
S. rubicundus.. . - . . . .. . . à 20 
THÉROPITHÈQUE, THEROPITHECUS.. . . 6 
TROGLODYTE, TROGLODYTES.. . . . . 6 


OISEAUX, 


Par MM. FL. PRÉVOST er O0. DES MURS. 


’ 


Les Oiseaux de l'expédition de {a Vénus composent la 
plus riche partie des récoltes scientifiques faites par les 
Officiers naturalistes de cette frégate. C’est pour les Ver- 
tébrés ce qu'ils ont rapporté en plus grand nombre; 
c'est aussi ce dont ils ont rapporté le plus de nouveau- 
tés. Douze espèces composent, en effet, leur part de 
découvertes en Ornithologie. Or, si l’on se rend compte 
des dillicultés qui viennent accabler les officiers d’un 
navire, lorsqu’à l’accomplissement de leurs devoirs et 
de leurs obligations du bord, ils veulent joindre le tribut 
de leur zèle pour la science, on comprendra qu’ils n’ar- 
rivent que péniblement à réunir en quantité suflisante 
les matériaux nécessaires aux progrès d’une science 
aussi multiple que l’histoire naturelle, et l'on doit leur 
savoir d'autant plus de gré des efforts qu'ils font à cet 
sgard , que c’est pour ceux un surcroit purement gratuit 
de peines et de fatigues dont ils ne trouvent le faible 


Où1sEAUx. 19 


— 178 — 
prix que dans la publication des résultats de leurs tra- 
vaux. Aussi nous estimons-nous heureux d’avoir été 
désignés par les Ofliciers de la Vénus, et notamment par 
M. le docteur Néboux, son chirurgien-major, pour être 
leurs interprètes et les divulgateurs de leurs découvertes 
et de leurs observations Ornithologiques. 

Si importantes que paraissent cependant ces décou- 
vertes et ces observations, on conçoit qu'elles ne sont 
pas assez complètes pour nous permettre une œuvre 
d'ensemble, ou des développements aussi étendus que 
nous l’eussions désiré. il faut à de semblables travaux 
des séries d'individus d’un même genre, souvent même 
de la même espèce, et c’est ici ce qui nous manque, 
par le fait même des circonstances au milieu desquelles 
s’est effectuée l'expédition, de la brièveté de ses sta- 
tions et de la rapidité de son parcours. Une circon- 
stance entre autres est venue diminuer une partie de 
l'intérêt qui devait s'attacher aux résultats de cette 
expédition. La portion la plus riche de ses découvertes 
et de ses récoltes scientifiques est celle relative à la 
Haute-Californie et aux Gallapagos : or, le malheur a 
voulu que la Vénus commençàt à parcourir ces parages 
si curieux et si riches au point de vue Ornithologique, 
au moment même où le navire anglais le Beagle venait 
de les explorer et les quittait. Il s’en est suivi que notre 
travail, éprouvant les mêmes retards relatifs, sans parler 
de ceux dus aux événements politiques survenus en 
France, n’a pu venir qu'en second ordre; c’est ce 
qui nous a rendus si sobres dans la représentation des 
figures. Nous espérons néanmoins qu'il ressortira des 


— 179 — 

notes de MM. Néboux et Fillieu (ce dernier commis de 
la Marine à bord de la Vénus) jointes à nos descriptions, 
un intérêt qui justifie suffisamment l’empressement du 
Ministère de la Marine à en faciliter la publication. Cet 
empressement , du reste, qui n’est que l’expression de 
l'hommage que rend le Gouvernement à la science, et 
l’accomplissement d’un devoir bien entendu de sa part 
envers ceux qui la cultivent, a déjà trouvé sa justifica- 
tion dans le concours si dévoué aux encouragements 
et aux progrès scientifiques donné par un des membres 
les plus distingués de l’Institut, M. Isidore Geoffroy 
Saint-Hilaire à M. le contre-amiral Dupetit-Thouars, 
chef de l'expédition de la Vénus , pour la mise en œuvre 
des matériaux relatifs à la partie Mammalogique de ce 
voyage. h 

Sans avoir la prétention d’attemdre l'élévation de 
vues et d’appréciations du Savant Académicien , nous 
suivrons , à peu de chose près , la ligne tracée par lui 
pour ces sortes de publications dans de précédents tra- 
vaux : c’est notre devoir comme disciples de l’illustre 
Professeur ; c’est de plus la condition indispensable 
à l'unité d'ensemble et à l'harmonie de ce livre en 
tant qu'ouvrage d'histoire naturelle: c’est du reste 
ce que nous avons déjà fait dans d’autres publica- 
tions *. 

Nous ne nous bornerons donc pas à la simple des- 


1 Voyage en Abyssinie , du lieutenant de marine Th. Lefebvre 
(partie Zoologique ).— Aistoire politique et naturelle du Chili; 
par M. CL Gay (partie Ornithologique ). 


— 150 — 

cription des espèces figurées dans les dix planches qui 
composent l’atlas Ornithologique de la Fénus. Nous x 
joindrons , en dehors de ces descriptions et des considé- 
rations auxquelles elles pourront donner lieu de notre 
part, la reproduction de quelques détails sur d'autres 
espèces déjà publiées soit par M. le docteur Néboux , 
soit par M. Léclancher, son aide, toutes provenant de 
la même expédition. C'est, nous le pensons, le seul 
moyen de rendre plus utile en le complétant, un tra- 
vail tel que le nôtre, purement scientifique ; nous nous 
faisons même un devoir d'ajouter que ces excursions 
que nous croirons devoir faire en dehors des notes spé- 
ciales à nos 10 planches d'Oiseaux, nous ne nous les 
permettrons que d'accord avec M. Néboux, et de son 
autorisation expresse : ce zélé Naturaliste nous avant 
témoigné l'intention de faire taire toute autre considé- 
ration de prérogative, de droits ou d’amour-propre, en 
présence d’un service à rendre à la science. 

Enfin, nous compléterons autant que possible notre 
travail par lindication de quelques espèces bien con- 
nues, mais dont lhabitat à été constaté par le docteur 
Néboux en dehors de la circonscription géographique 
qui leur était jusqu’à présent assignée , surtout en lati- 
tude septentrionale. 


— 181 — 
CARACARA VULGAIRE. 


Polyborus Brasiliensis, Swains. 

———— vulgaris, Vieill., Gal. des Ois., pl. 7; Spix, Av. Bras.. 
tom. 1°, tab.'12, 

Falco cheriway, Jacq. 

V'ultur plancus, Lath. 

Falco Brasiliensis, Gm. 

—— Tharus, Mol, 


Jusqu’à ce jour, ce Falconidé ne s’est encore commu- 
nément trouvé que dans l'Amérique méridionale, à la- 
quelle on le considère comme exclusivement propre : ce 
ce qui n’a pas empêché qu'on ne lv ait rencontré sur 
les deux côtes de ce continent, à l’est, depuis le Brésil, 
à l’ouest , depuis le Chili jasqu’à la pointe la plus aus- 
trale, fa Terre-de-Feu et le Cap Horn; en remontant 
vers le nord, M. Gould avec les voyageurs naturalistes 
du Beagle ne les fait pas remonter au delà de la pointe 
extrème de la Floride, c’est-à-dire, à environ 25 de- 
grés de latitude septentrionale, car c’est à peine si à 
cette latitude on avait constaté sa présence dans l’Amé- 
rique septentrionale. 

M. le docteur Néboux l’a rencontré à Monterey, 
(Haute-Californie) , d’où il en a rapporté plusieurs 
exemplaires ; en sorte que lhabitat de cet oiseau 
se trouve reculé par le fait au nord, de près de 
10 degrés. 


 — 
PROCNÉ MODESTE. 


Procne modesta (Gould.), Zool. Beagl., p. 39, pl. 5. 
Hirundo concolor (Gould.), Proc. zool. Soc., 1839. 
modesta ( Néboux) , Rev. z00l., oct. 1840, p. 291. 


Cuar. spec, Pr. (Mas.) nitidè cœærulescenti-nigra (Gould ). 
Loc. cit. 


Le docteur Néboux à rapporté de cette espèce la fe- 
melle dont la couleur générale est d’un gris-brun ; elle 
est plus petite que le male; longueur totale, 44 centi- 
mètres. 

Habit. L'île Saint-Charles des Gallapagos. 


NOTICE 


SUR LE 


GENRE HÉMIGNATHE (Hemignathus , Lichtenstein) , 
(1837). 


Heterorhynchus ( La Fresnaye), 1839. 


La perfection de toutes méthodes naturelles , c’est de 
se montrer rationnelles et logiques. Ce qui s'oppose en 
général, et ce qui s’opposera toujours à cette perfec- 
tion, est l'impossibilité de fixer une limite aux deux 
extrêmes de chaque division qu’on y introduit ; impos- 
sibilité telle que de logiques et rationnelles qu’elles de- 
vraient paraitre, elles semblent d'ordinaire, sinon 
suivre une marche contraire au raisonnement, du 
moins arriver à un résultat presque diamétralement op- 
posé à celui qu’elles laissent entrevoir. 

Ainsi, parfois on y remarque, mais bien rarement, 
un ensemble des plus satisfaisants de caractères orga- 
niques chez les individus composant une série Zoolo- 
gique : plus souvent, au lieu de cet ensemble, on y voit 
des rapprochements en quelque sorte monstrueux quant 
à l’apparence de ces caractères. Mais alors les vides et 
les intervalles si brusquement franchis se trouvent com- 
blés par des caractères tirés d’un autre ordre d'idées où 
ces rapprochements d'aspect si hétérogène trouvent leur 


— 15h — 

raison (dlêtre; c’est-à-dire que, forcé que l'on est de 
concilier le classement par indication d'organes avec le 
classement par Indication de mœurs où d'habitudes, on 
en est réduit à emprunter à lun ce qui manque à l’autre, 
et réciproquement ; d'où 1} suit que les méthodes, en 
voulant tout à la fois parler aux sens, c’est-à-dire à la 
vue et à l’esprit, ou mieux encore, à la raison , ne sa- 
üisfont jamais complétement celle-là qu'aux dépens de 
celle-ci; de là, leur mobilité; de là également leur dé- 
faut d'unité de diagnoses génériques, et leur peu d’ap- 
plicabilité spéciale aux genres qu’elles veulent caracté- 
riser; la plupart de ces caractères pouvant plus ou 
moins s'appliquer à une infinité d’autres genres. En 
sorte qu’en définitive les méthodes jusqu’à présent ont 
plus aidé, dans une certaine mesure, à la mémoire de 
ceux qui s'occupent d'histoire naturelle, qu’elles n’ont 
simplifié ou fait progresser la science. Peut-être , après 
tout, la faute en est-elle à l'absence; chez les métho- 
distes, de toute idée philosophique, sans laquelle il ne 
peut jamais y avoir de classification passable. Nous 
nous empressons toutefois ici de faire exception, nous 
ne dirons pas au blàme, car ce n'est qu'une opinion 
personnelle, mais au regret que nous exprimons à ce 
sujet, en faveur d’une nouvelle méthode introduite 
dans la sience par notre savant maître et ami M. Isidore 
Geoffroy Saint-Hilaire. Nous voulons parler du parallé- 
lisme appliqué à la classification naturelle, méthode in- 
spirée par une idée philosophique dont le développe- 
ment et l’application permettent d'espérer les progrès 
les plus sérieux. 


— 185 — 

Ces réflexions nous sont suggérées par l’'Hémignathe 
que nous figurons. Cet oiseau est sans contredit le plus 
curieux de l’expédition de la Vénus; par l’ensemble de 
ses formes et de son port, il est bien évident qu’il rap- 
pelle au premier aspect les formes et le port des Souï- 
mangas (Nectarinia) : aussi le docteur Néboux l’indiqua- 
t-il pour tel dans les notes de son voyage, comme dans 
la note insérée par lui (Revue zoologique, 1840, 
page 289). 

En eflet, à part la forme si anormale de sa mandi- 
bule inférieure, le développement de la mandibule su- 
périeure et l’are de cercle décrit n’offrent rien de beau- 
coup plus extraordinaire que chez d’autres espèces de 
Souimangas, notamment le Cynniris (Nectarinia) ænea 
de Vieillot, figuré par Levaillant, Ois. d’Afr. pl. 297: 
car la corde de cet arc de cercle n’excède celle du Cin- 
nyris œnea que d’un 1/2 centimètre, notre oiseau me- 
surant 3 centimètres, et ce dernier 2 centimètres 1/2, en 
mesurant la corde depuis les narines jusqu’à la pointe, 
et le Drepanis coccinea inférieur à celui-ci de 3 milli- 
mètres. 

Pourtant en examinant la forme de la mandibule in- 
férieure si peu proportionnée à la supérieure, la forme 
des tarses et le développement des pennes , on ne peut 
s'empêcher d'y saisir des différences comparatives no- 
tables. 

C’est cet examen qui porta M. de La Fresnaye, dans 
le Magasin de zoologie, 1839, à faire de cette sorte 
d’Oiseaux un sous-genre auquel il donna le nom d’He- 
terorhynchus, oubliant que le genre Hemignathus avait 


— 186 — 


été déja précédemment créé en 1838 par Lichtenstein, 
et que son espèce, qui est aussi la nôtre, avait été dé- 
crite par ce naturaliste qui en avait fait le type du 
genre. 


Voici, à ce sujet, comment s’exprimait l'honorable 


M. de La Fresnaye : 


ÿY 


« La forme toute anormale du bec de cet Oiseau 
semble autoriser, au premier abord, la formation 
d’un genre nouveau ; mais en comparant ses pattes, 
ses ailes , sa queue et même la grande courbure de 
son bec avec ces mêmes parties chez l Æéorotaire ves- 
tiaire, habitant les iles Sandwich comme lui, on est 
frappé de leur grande analogie, et la différence seule 
du bec, quoique assez marquée, ne nous a paru in- 
diquer qu’une distinction sous-générique entre eux. » 
Puis 1! en établissait les caractères en ces termes : 

« Bec allongé, très-arqué, formant exactement un 
quart de cercle; mandibule supérieure un peu élargie 
à sa base, et retombant sur l’inférieure , puis rétrécie 
subitement et très-comprimée, creusée intérieure- 
ment jusqu'à moitié seulement de sa longueur , et de 
là jusqu’à la pointe, cylindrique , très-mince et très- 
pointue ; la mandibule inférieure beaucoup plus 
courte et plus épaisse qu’elle , et n’atteignant que la 
moitié de sa longueur, creusée dans toute sa lon- 
gueur , comme de coutume, et recourbée comme la 
supérieure; pieds robustes, tarses, doigts et ongles 
allongés , le pouce et son ongle très-forts ; ailes cour- 
tes, à rémiges subobtuses ; queue terminée carré- 
ment. » 


— 187 — 


M. de La Fresnaye était donc dans le vrai en cher- 
chant à séparer son nouvel Oiseau de l'Héorotaire écar- 
late, Mellithrepus vestiarius (Vieillot), Certhia coccinea 
(Gmel.), et en faisant un sous-genre. Suivant nous, 
néanmoins il n’osait pas assez, car ses caractères sont 
assez tranchés et assez distincts de ceux de ce dernier 
pour en faire la base, non pas d’un sous-genre, mais 
d’un véritable genre. 

C’est effectivement de la sorte que l'avait envisagé 
Lichtenstein, lorsqu'il éleva ce nouvel Oiseau au rang 
de genre sans cependant en assigner les caractères au- 
trement que par la composition d’un nom générique 
qui en indique au moins le principal. Afin de compléter 
l’ensemble de ces caractères , nous allons les rendre ici 
tels que nous les saisissons : 

Le bec est excessivement allongé et arqué, non dans 
le sens du prolongement de la ligne frontale, mais en se 
relevant brusquement à partir de sa base , le sommet de 
l'arc de cercle dépassant ainsi le niveau du front : la man- 
dibule inférieure atteint à peine la moitié de la mandi- 
bule supérieure qui est d’abord dilatée dans son pre- 
mier quart, ensuite comprimée et se termine en alène 
arrondie et fine comme une aiguille: les pieds sont forts; 
l’'ongle du pouce est plus développé que les autres ; la 
queue est très-courte; la base du bec est garnie de quel- 
ques poils noirs. | 

Pour se rendre compte des différences organiques 
qui apparaissent entre l’Hemignathus lucidus et GCerthia 
{Drepanis) vestiaria Où coccinea, il suflit de les com- 
parer. 


— 188 — 

Le Vestiaria offre pour caracteres les suivants : Bec 
plus Jong que la tête, épais , tres-recourbé, pointu , à 
arête arrondie, à bords lisses ; la corde de l'arc de 
cercle dessiné par sa courbure mesurant 22 millimètres ; 
les deux mandibules paralièles et s'accompagnant jusqu’à 
la pointe, par conséquent d’égale longueur; narines 
ovalaires , basales, recouvertes par une pellicule ; ailes 
peu obtuses : la deuxième et la troisième rémiges d’é- 
gale longueur; la premiere la plus courte. Tarses, 
minces, gréles , Scuteilés, terminés par trois doigts far- 
bles, l’externe soudé à sa base dans presque toute la 
longueur de la première phalange, pouce avec son 
ongle dépassant à peine ja moitié de la longueur du tarse. 

Maintenant, nous le demandons : quel ensemble de 
rapports peut-l exister entre un Oiseau à mandibules 
égales , à bec dont la courbure offre une corde de 
22 millimétres de longueur, à tarses minces et grêles, 
à ongles faibles , à pouce égal à peine à la moitié de la 
longueur du tarse ; 

Et un oiseau à mandibules mégales, linférieure n’at- 
teignant qu'à moitié de la supérieure , celle-ci formant 
un arc de cercle de 30 millimètres; à pieds et ongles 
robustes , à pouce égal à la longueur du tarse ? 

Avec une distance telle et une pareille différence entre 
ces deux termes , nous comprenons bien le rapproche- 
ment, par transition, d’un genre à un autre, mais nous 
ne comprenons pas le rapprochement d'espèce à espèce, 
ou pour mieux dire la confusion des deux espèces dans 
un méme genre. 

C’est pourtant ce qu'a fait M. G. R. Gray, qui, dans 


— 159 — 
Gener. of Birds, juin 1847, a compris ces deux espèces 
si exclusives l’une de l’autre, dans son genre Drepanis ; 
et en cela nous estimons qu'il n’a été ni dans la vérité ni 
dans la logique de la méthode naturelle. 

Non pas que nous prétendions avoir quoi que ce soit 
à redire à la composition du genre Drepanis, en tant 
que coupe géographique ; mais comme division géné- 
rique nous ne nous expliquons point pourquoi par 
exemple le Cinnyris ænea n’y figurerait pas aussi bien 
que Certhia vestiaria, et réciproquement pourquoi ce 
dernier s’éloignerait du genre Nectarinia plutôt que le 
premier dont le bec est même encore un peu plus long 
et tout aussi courbé. 

Quoi qu'il en soit, ce qui résulte de ces réflexions , 
c’est que c’est à bon droit que Lichtenstein a constitué son 
genre Hemignathus. I est même remarquable que le type 
de ce genre soit l'espèce publiée et figurée par M. de 
La Fresnaye sous le nom d'Heterorhynchus olivaceus , et 
par nous sous celui d’ÆZemignathus , d’après un individu 
de l’expédition de la Vénus, mais à laquelle son fonda- 
teur avait donné déja le nom de Zucidus, par opposi- 
tion sans doute à l’Hemignathus obscurus (Certhia obscura 
de Latham). 

Il est bien vrai que M. de La Fresnaye avait été pré- 
venu par Natterer « que cet Oiseau , ainsi qu'il le dit lui- 
» même, avait été déjà décrit en Allemagne et en Russie 
» SOUS un nom générique nouveau, et qu'il en existait 
» même deux espèces différentes, mais l’une et l’autre 
» à couleur olivâtre et jaunûtre comme celle rapportée 
» par la Vénus. » 


— 190 — 


Mais, induit en erreur par une note de M. Léclan- 
cher, il crut devoir révoquer en doute ce témoignage. 
«M. Léclancher, à propos de cet Oiseau, me mande, 
» continue M. de La Fresnaye : L'Héorotaire à mandibu- 
» les inégales est plus commun que le Vestiaire, car les 
» enfants en apportaient un plus grand nombre pour vendre; 
» je n’en ai pas vu de rouges comme le Vestiaire, j'en ai 
» seulement écorché qui avaient quelques plumes rouges 
» sur le dos, ce qui me faisait croire qu'ils devenaient rouges 
» avec l’âge. L'espèce toute rouge , le Vestiaire, que j'ai 
» vue au pic Parry, s'accrochait aux branches en sautant 
» plutôt comme les Mésanges que comme notre petit Grim- 
» pereau , et ne se collait point sur leur surface comme les 
» Pics et les Grimpereaux. » 

Or, il nous est démontré que l'observation de M. Lé- 
clancher exacte peut-être en fait, a donné lieu de sa part 
à une induction complétement erronée, car aucun des 
individus rapportés par le docteur Néboux, et aucun 
de ceux qu’il a eu occasion d'observer sur les lieux n’a 
présenté le moindre vestige de rouge ou de rougeûtre; 
et nous craignons que M. Léclancher n’ait confondu 
dans sa remarque ou dans ses souvenirs le jeune 
Vestiaria avec l’'Hemi. lucidus, le premier, à cette 
époque ayant la plus grande analogie de coloration jau- 
nâtre et olivätre avec ce dernier : Ainsi les jeunes mâles 
du f’estiaria, avant de prendre le plumage brillant de 
l’adulte, sont d’un jaune olivätre avec des points ou des 
écaillures noirätres sur chaque plume de la tête et de la 
gorge; et dans leur plumage de transition le fond jau- 
nâtre est parfois strié de fines plumes rouges d’autant 


— 191 — 


plus remarquables dans leur éclat qu'elles sont plus 
clatrsemées. 

Nous pouvons donc aflirmer au moins quant à notre 
espèce, qui est la même que celle observée par M. Lé- 
clancher, qu’elle ne devient jamais rouge dans l’état 
adulte ; et nous n’hésitons pas à croire que si l’hono- 
rable M. de La Fresnaye eut été instruit de la connais- 
sance qu'avait eue avant lui Lichtenstein, de ce genre, 
puisqu'il en est le fondateur, il eut donné pleine créance 
à l’avis oflicieux de Natterer qui, comme on le sait, ne 
se trompait guère en Ormithologie, d'autant mieux qu’en 
eflet Lichtenstein en fondant son genre ", le composait 
de deux espèces, à savoir : 4° H. obscurus (Certhia ob- 
scura de Lath.), qui sans offrir la même disproportion 
dans la longueur des deux mandibules, a cependant 
celle inférieure notablement plus courte que la supé- 
rieure ; 2° H. lucidus mäle, adulte et jeune. 

Ce genre se compose donc encore aujourd’hui, 
comme à l'époque à laquelle le créa Lichtenstein, 
en 4837, de deux espèces : 


4° Hemignathus obscurus (Licht.), Abhandl. akad. der 
Wiss., zu Berlin, 1839, p. 449, tab. 5, fig. 1; 
Certhia obscura, (Lath.). 
Drepanis —  (G. B. Gray.), Gen. of B., 1847. 
2° Hemignathus lucidus (Lichtenstein , 1837) ; 
Heterorhynchus olivaceus (de La Fresnaye), Mag. de 
zool., 1839, Ois., pl. 10; 


! Abhandl. akad, der Wiss. zu Berlin, 1859, p. 451, tab. 5, 
fig. 1, 2, 3 (mémoire lu en juin 1837). 


40 — 

Vestiaria heterorhynchus (Lesson) ; 

Drepanis lucida (G. R. Gray.), Gen. of B., 1847; 
flemignathus olivaceus (Fior. Prév.), Voy. de la Vénus, 

Oïs.; pl. 1; 

Drepanis olivacea (G. R. Gray), Gen. of B., 1847; 

Car c’est par erreur du graveur que le nom spécifique 
d'Olivaceus a été mis au bas de notre planche 1" de 
l'Hemignathus, avec l'indication de Lichtenstein pour au- 
teur, notre indication ne se rapportant qu'à la dénomi- 
nation générique. 

Cette réflexion est d'autant plus importante à faire 
ici que lerreur dont il s’agit a déjà trompé M. G. R. 
Gray qui, dans son Genera of B., a reproduit la désigna- 
tion fautive de notre planche en conservant sous le nom 
Drepanis olivacea, une espèce dont ne s’est jamais 
occupé Lichtenstein, par cette seule raison qu’elle 
n'existe pas, et ne repose que sur cette erreur chalco- 
graphique. 

PLANCHE LI. — Fic. 4 er 2. 
HÉMIGNATHE BRILLANT. 


Hemignathus lucidus (Lichtenstein), Abhandl. akad. der Wiss. 
zu Berlin, 1839, p. 451, tab. 5, fig. 2, 
5, lu en juin 1837. 

Heterorhynchus oüivaceus (de La Fresnaye), Mag. de zool., 1859, 

Ois., pl. 10. 

Vestiaria heterorhynchus ( Lesson ). 

Drepanis lucida (G. B. Gray), Gen. of B., 1845. 

Hemignathus olivaceus (Flor. Prévost), #oy. de la #énus, 

pl. 1, Ois. 
Drepanis olivacea (G.R. Gray), Gen. of B., 1845. 


SPEC, CHAR. Âem. suprä olivaceus, capite dilutits ; superciliis 


— 193 — 


et corpore infero lucide flavis, pectore ferè junquillaceo : striga 
olivaced à commissurd usque ad aures transeunte 


Notre but, en publiant cette figure, avait été, non 
pas de la donner comme nouvelle, mais de la donner 
plus parfaite que celle de Lichtenstem, et de grandeur 
naturelle. 

Description. Tout le dessus du corps d'un olivätre 
foncé, plus clair sur le sommet de la tête; le front, 
les sourcils, à partir des narines, les joues, la gorge, 
le devant du cou et la poitrine sont d’un jaune vif, 
presque jonquille sur ces deux dernières parties ; une 
large bande d’un olivâtre tournant au noir vers l’'o- 
reille, part de la commissure du bec, recouvre le lo- 
rum , et va se terminer au méat auditif, faisant ressortir 
plus vivement le jaune de la bande sourcilière ; les pe- 
tites couvertures alaires sont d’un olive verdâtre ; les 
rémiges secondaires bordées de la même temte; les 
rémiges primaires et les grandes couvertures bordées 
de jaunàtre. Bec et pieds couleur de corne bleuâtre, 
Mâle adulte. 

La femelle est d’un olivâtre obseur et presque fuligi- 
neux en dessus, et en dessous d’un brun clair presque 
couleur de biche; elle n’a de jaune qu'aux sourcils, 
aux joues et à la gorge; toutes les plumes des ailes et 
de la queue sont bordées de verdätre. 


Lonoueur totale, & 4 44. .. 15 centimètres. 
— AU Des Vire 2 00 
— qui LATS es 1 ils Le onO 


Habit. Mes Sandwich. 


O1SEAUX. 13 


— 194 — 


PLANCHE II.—Fic. 4 ET 2. 
OISEAU MOUCHE DE COSTA. 


Ornysmia Costæ (3. Bourcier), Rev. z00l., 1839, octobre, 
p. 294; Ann. des sc. phys., etc., de Lyon, 
1840, p. 229. 

Mellisuga Costæ (G. B. Gray), Gen. of B., 1848. 


Cnar. spec. O. nuchà et corpore superiore lateribusque metallicè 
viridissimis ; vertice fronte genisque ac qulà, plumulis squa- 
mosis indutis purpurescenti-cϾruleis ; illis ex latere colli pro- 
longatis et lanceolatis, ex œneo, granatinoque splendentibus ; 
maculâ post-ocularinigro-cærulescente line albà trans-notatà ; 
alterd maculà mystacaliformi ex commissuris ad aures descen- 
dente, concolore; qutture, pectore, crissoque albis ; abdomine 
albo-cinerascente viridi-nigro squamulato ; tectricibus caudæ 
inferioribus albis viridi extenso squamulatis ; rectricibus ex- 
ternis tribus albo apice fasciatis. 


La description de cet Oiseau-Mouche, faite dans la 
Revue zoologique de 1839 (octobre), page 294, par 
M. J. Bourcier , qui l’a nommé et dédié à M. Costa, di- 
recteur du Musée de Naples, l’a été sur un jeune mâle 
des individus envoyés par M. le docteur Néboux. Mais un 
envoi postérieur en renfermait un individu beaucoup 
plus adulte et en plumage parfait. C’est celui que nous 
figurons dans notre planche 2, et dont nous allons don- 
ner une description qui viendra compléter la première. 

Description. Mâle adulte. Bec allongé, mince, droit ; 
tout le dessus du corps vert brillant à reflets métalliques ; 
couvertures supérieures alaires et caudales de même 
couleur , celles-ci de forme élargie et allongée ; dessus 
de la tête, joues et devant du cou recouverts de plumes 


— 195 — 

squammeuses d’un reflet bleu-d’acier bruni. Mais ces 
plumes, tout en conservant à la base leur forme d’é- 
cailles sur les deux dernières de ces parties, se prolon- 
gent des deux côtés du cou en façon de jabot ou de 
cravate de la forme la plus gracieuse; elles atteignent 
alors une dimension qui, pour les plus longues, va 
jusqu’à À centimètre; leur ton général d’acier bruni, 
en cetétat, emprunte à la lumière une couleur de grenat 
clair ou rosé sur les barbules de l’un de leurs côtés, et 
une couleur de noir-bleuàtre velouté sur les autres bar- 
bules ; la tige de ces plumes se dessine en blanc formant 
entre ces deux teintes une strie très-apparente. Une 
tache post-oculaire d’un noir bleuâtre qui s'élève un 
peu sur la partie externe du soureil se trouve partagée 
en deux par une étroite ligne blanche partant de l’angle 
externe de l’œil et s'étendant jusqu'au méat auditif; une 
autre tache, en forme de moustache du même ton noir- 
bleuàtre, part de la commissure du bec et encadre toute 
la partie inférieure de la joue. Estomac et poitrine, ainsi 
que la région anale, blanc pur, ventre blanc-grisâtre, 
moyennement écaillé de vert sombre; flancs du même 
vert brillant que le dessus du corps; couvertures cau- 
dales inférieures blanches largement écaillées de vert, 
bec et pattes noirs. 

Les ailes, plus longues que la queue et falciformes, sont 
d’un ton noirätre ; queue triangulaire , avec les deux 
premières rectrices très-étroites, arrondies et recourbées 
intérieurement vers l’extrémité qui est, ainsi que celle 
de la troisième rémige, bordé: d’une tache blanche à 
la pointe. 


— 196 — 


Longueur totale. . , , . . . . . . . #5 millimètres. 
— du EDS RS RS 16 
— de la queut., +. 7. 20 


Ailes dépassant la queue de. , .. . 9 


Jeune mäle. Nous reproduirons pour cet àge la des- 
cription donnée par M. I. Bourcier : « Dessus du corps 
» à légers reflets vert brillant , poitrine blanche, flancs 
» et abdomen garnis de quelques plumes aussi d’un vert 
» brillant, couvertures de la queue larges et longues, 
» d’un vert métallique ; calotte, joues et devant du cou 
» recouverts de plumes écailleuses d’un reflet de bleu 
» d'acier bruni. » 

Femelle. La femelle manque de tous les ornements 
du mâle. Elle a le dessus de la tête et le derrière du cou 
d'un gris brunâtre avec quelques plumes éparses d’un 
vert plus ou moins doré ou olivatre; le dessus du corps 
du même vert que le mâle ; les couvertures supérieures 
alaires d’un vert à reflets dorés ; les trois rectrices ex- 
ternes bordées de blanc à leur extrémité; le menton et 
la joue d’un blanc ocracé; une tache grisätre post- 
oculaire; la poitrine grisätre, et l'abdomen blan- 
châtre. 

M. le docteur Néboux a trouvé cette espèce avec ses 
différents àges dans les environs de Monterey, Nouvelle 
ou haute Californie. 

Cet Oiseau-Mouche, que M. Bourcier fait entrer dans 
les Lucifers de Lesson, a les plus grands rapports d’or- 
nementation avec les Ornata, Strumaria , Petasophor« , 
Vieilloui, etc. C’est un des plus remarquables de l'Expé- 


dition. 


— 197 — 


TAICHAS VOILE. 


Trichas velatus, G.-B. Gray, Gen., 1848. 
Sylvia velata, Vieill., Ois. Am. sep. , vol. 2, p. 74, d'Orb, 
et Lafr., Mag. de zool., 1836, p. 20. 
—  canicapilla, Pr. Max. 
T'anagra -- Swains., LU, orn., pl. 174. 
Trichas — id. 


Trouvé à Maldonado par les naturalistes du Beagle, 
à Monterey, Haute-Californie, par le docteur Néboux. 


MNIOTILTE A SOURCILS. 


Mniotilta superciliosa, J.-B. Gray, Gen. 

Sylvia — Bodd., PI. enl., 686, fig. 1. 

Motacilla pensilis, Gm. Vieill. , Ois. Am. sept. , pl. 72. 
—  flavicollis, Gm. 

Sylvia pensilis, Ch. Bonap. 


Trouvé à Monterey. 
MNIOTILTE D'ÉTÉ. 


Mniotilta æstiva, J.-B. Gray. 
Motacilla Canadensis, Bodd. 
Sylvia citrinella, Will., Am. orn., pl. 15, fig. 6; Vieill., 
Ois. Am. sept. , pl. 95. 
—  æsliva, Gm., Gab. Buff., pl. enl. 58, fig. 1-2. 
Sylvicola æstiva, Swains. 
Motacilla albicollis, Gm., Briss. orn., t. 5, tab. 26, fig 5. 
Sylvia Childreni, Audub., pl. 55. 
Rhimanphus citrinus, Rafin. 


De passage dans tout le Continent Américain, émigre 
en hiver vers les Tropiques, de la Pensylvanie, où elle est 


— 195 — 
commune , d’après les observations de M. Ch. Bonaparte 
et de Richard et Swainson. 
Trouvée aux Gallapagos par M. Néboux. 


FAUVETTE DE WILSON. 


Erythaca Wilsonii, Swains. 

S'ialia — id. 

Motacilla sialis, Linn. Wils., Am, or., pl. 5, fig. 5. 
Ænanthe —  Vieill. 

Saxicola — Ch. Bonap. 


Se rencontre jusqu’à l’est des montagnes Rocheuses 
d'après Richard et Swainson; trouvée à Monterey, 
Haute-Californie , limite extrême de son habitation occi- 
dentale, par le docteur Néboux. 


PLANCHE IL. 
GRALLARIE SQUAMMIGÈRE. 
Grallaria squammigera (F1. Prévost et O. des Murs). 


Car. srec. Gral. Suprà olivascente schistacea unicolor, 
plumis fusco vix conspicuè marginatis ; subtüs lateribusque 
colli et loris ochracea, plumis totis ante apicem maculà 
squamæformi nigrà notatis; quiture et collo antico albis aut 
pallidè ochraceis utrinque vittà nigrà limbatis. Tibüs grises- 
centibus, pedibus pallidè rubro-brunners (de La Fresnaye, Rev. 
zool.,novembre 1842, p. 333). 


Description. Cette nouvelle espèce de Grallarie, re- 
marquable par sa taille de beaucoup plus forte que celle 
des Grallaria rex et imperator, a la coloration générale 
de tous ses congénères. 


— 199 — 

Elle a le sommet de la tête, la nuque et le derrière du 
cou gris de fer légèrement écaillé de noirâtre ; les 
épaules, le dos, le manteau, les scapulaires et le crou- 
pion brun-olivâtre ; les grandes couvertures lisérées fi- 
nement de fauve à leur extrémité; les rémiges et les 
rectrices couleur de terre d’ombre beaucoup plus pale 
sur leur tranche extérieure; le front, les lorums, les 
parties latérales du cou, l'estomac , la poitrine et le 
ventre d’un joli fauve-jaunatre écaillé régulièrement de 
brun-noirätre sur chaque plume ; les couvertures infé- 
rieures de la queue fauves, sans taches; le menton , la 
gorge et le devant du cou blancs, ce blanc encadré de 
deux traits noirs partant de chaque côté du menton; 
bec couleur de corne; pieds d’un brun-rougeàtre. (Mâle 
adulte.) 

La femelle ne diffère du mâle que par l’absence de 
blanc à la gorge. 

Longueur"totale, ms 25 centimètres. 
— des tarses. "7: 06 


Habit. Santa-Fé de Bogota en Colombie. 


PLANCHE IV. 
GRALLARIE DE GUATEMALA. 
Grallaria Guatemalensis (Flor. Prévost et O. des Murs). 


Cuar. srEc. G. suprà brunnea; sublüs rufescens; pectoris 
maculis aliquot semi-collaribus nigris (de La Fresnaye, Rev. 
zool., 1842, p. 334). 

Il existe une telle affinité de couleur entre cette espèce 

et la précédente, que nous avons hésité longtemps à 


— 200 — 

les différencier l’une de l'autre, pensant que la plus 
petite pourrait bien n'être que le jeune de la plus grande. 
Mais un examen approfondi nous a bientôt convaincus 
que si rapprochée et si uniforme, en quelque sorte, 
qu'en était la Pülose, elles devaient constituer deux 
espèces bien distinctes, rien, dans celle-ci, n’indiquant 
trace du moindre caractère propre au jeune âge. 

En voici au surplus la description. Description : Tête 
et derrière du cou gris de fer, chaque plume cerclée 
régulièrement de noir; dos, manteau et couvertures 
alaires brun olivatre écaillé légèment de noir ; rémiges 
secondaires brunes; rémiges primaires et rectrices 
rousses; paupières blanchâtres; tout le dessous du 
corps, depuis le menton jusqu'aux couvertures infé- 
rieures de la queue d’un fauve roussâtre, les plumes 
de la gorge offrant quelques traits écailleux noirâtres. 

Longueur totale. . . . . . . . . . 16 centimètres. 


= des tarses, , . . . . . . 05 


Habit. Guatémala. 


CYANOCORAX DE SAN-BLAS. 


Cyanocorax San-Blasianus (3.-B. Gray.); Gen. of B., 1845. 
Pica San-Blasiana (de La Fresnaye), Rev. zool., 1840, p. 323, 
Mag. de zool., 1842, Ois., pl. 28. 


Cnar. srec. C. Suprà ultramarino-cœrulescenti, subtüs ni- 
grescenti-indigotino, crista frontali nigrâ, singulis plumis 
apice revoluto cϾruleis, collo capiteque nigris, rostro albo ni- 
groque semi-partito, pedibus nigris. 


Cet Oiseau, qui fait partie des belles espèces du 
Voyage de la Vénus, a été décrit ainsi dans la Rev. 


— 201 — 
zool. d’octob. 1840 , pag. 290, par le docteur Néboux , 
qui lui a donné le nom de Geai de San-Blas : 

« Bec blanc mêlé de noir. Huppe noire; les extré- 
» mités des plumes ayant une teinte bleue. Tête et cou 
» noirs. Manteau bleu, ventre noir nuancé d’indigo. 
» Ailes d’un bleu plus clair que le manteau en dessus 
» et grises en dessous. Queue bleu de Prusse. Tarses 
» NOITS. 

» Longueur totale. . . . . . 25 centimètres. » 

Habit. San-Blas (Mexique). M. Léclancher en a rap- 
porté des individus d’Acapuleo. «Elle y vit, dit-il, 
» (dans ses notes publiées Rev. zool. nov. 1840, page 
» 323) en troupes, et j'aurais pu en tuer cinquante 
» dans un jour, au moyen d’un Pic blessé que je faisais 
» crier et qui, par ses cris, les attirait en grand nom- 
» bre ainsi qu'une foule d'oiseaux , tels que Pics, 
» Perruches , etc. » 

La figure en fut publiée sur un individu provenant de 
l'Expédition de la Vénus, dans le Magas. de z0ol. 1842, 
pl. 28, par M. de La Fresnaye qui l’accompagna de la 
description et des observations suivantes : 

« Cet oiseau, d’après la forme de son bec, appar- 
» tient plutôt au groupe des Corvus, que l’on est 
» convenu de désigner par le nom de Pie, qu’à celui 
» des Geais proprement dits à bec plus faible. Son bec 
» est même si grand, à proportion de sa taille assez 
» petite, qu'on serait tenté, d’après ce Caractère, 
» comme aussi l'habitude de vivre en bandes , observée 
» par M. Léclancher, de le ranger avec les Corneilles , 
» si la brièveté de ses ailes ne s’y opposait. 


— 202 — 
» De la taille de la Pie geng de Temminck, pl. col. 469, 
son bec est plus allongé au moins d’un quart, la tran- 


A4 
T 


NA 
LA 


che supérieure entre assez avant entre les plumes du 
» front, la courbure en est prolongée et n’est pas plus 
» sensible à l'extrémité que dans le reste de la lon- 
» gueur ; il parait avoir été d’un blanc bleuàtre avec la 
» base et la pointe couleur de plomb. La tête, le cou en 
» entier, ainsi que tout le dessous, sont d’un noir pro- 
» fond ; de la base du bec s'élève un faisceau de plumes 
» étroites en partie décomposées , formant une huppe 
» frontale recourbée en avant à son extrémité, haute de 
» 10 lignes; elle est noire dans notre individu, et légè- 
» rement terminée de bleu dans celui décrit par M. Né- 
» boux dans la Revue zoologique ; toutes les plumes du 
» sommet de la tête sont également terminées de bleu 
» sombre. Le dos en entier, le croupion et les scapu- 
» laires sont d’un bleu d’outremer, la queue est d’un 
» beau bleu de Prusse plus foncé, elle est de longueur 
» moyenne etsimplemeni arrondie. Les ailes sont courtes, 
s'étendant à peine au tiers de sa longueur et sont d’un 


A 
Le 


» bleu vert de mer. Les couvertures inférieures de la 
» queue sont nuancées du même bleu qu’elle. Les pattes 
» paraissent plombées. 

» Longueur du bec, depuis son ouverture, À centi- 
» mètres. » 


— 203 — 


CYANOCORAX DE BEECHEY. 


Cyanocorax Beecheii (G.-B. Gray), Gen. of B., mars 1845. 
Pica Beecheii (Nig.), Zool. journ., t. 4, p. 353, Zool. of 
Beechey's voy., pl. 22, p. 6. 
Corvus (pica) Beecheù (Eyd. et Gerv.), Mag. de zool., 1837, 
Ois., pl. 20. 


L’individu décrit primitivement par Vigors avait été 
rapporté par l’Expédition de Beechey de l’île de Mont- 
réal. Le nôtre, comme celui de M. Botta, figuré par 
MM. Eydoux et Gervais, provient de la Californie. C’est 
à Monterey que M. Néboux l’a pris. 


CASSE-NOIX. 


MNucifraga caryocatactes, Briss. 
Corvus —— Linn., PI. enl. 50. 
Nucifraga guttata, Vieill., Gal., pl. 150. 


Considéré pendant longtemps comme particulier à 
l'Europe, s’est retrouvé constamment depuis au Japon 
et au Kamtschaka. Le docteur Néboux en a rapporté 
de cette dernière localité plusieurs individus qui ne dif- 
fèrent aucunement de ceux d'Europe. 


ÉTOURNEAU MILITAIRE. 


Sturnella militaris, Vieill. 
Sturnus — Gmel., PI, ent. 113. 


Cet Oiseau , considéré jusqu'à ce moment comme ap- 
partenant exclusivement au Continent Méridional de 
l'Amérique , n'avait jamais été supposé devoir faire 
d’excursions vers le Continent Septentrional ; la Science 


— 20h — 
du moins ne l'avait pas encore constaté. Les Naturalistes 
du Beagle ont seulement reconnu dernièrement sa trace 
sur la côte orientale du Détroit de Magellan et des îles 
Malouines. 

C'est un fait assez curieux que la présence de cette 
espèce essentiellement méridionale en Californie d’où 
elle a été rapportée de Monterey par le docteur Néboux, 
car cet Oiseau ne figure pas sur la table de Richard et 
Swainson, des Oiseaux sédentaires ou de passage aux 
États-Unis. 

BEC-CROISÉ LEUCOPTÈRE. 
Loxia leucoptera, Gmel. Vieill., Gal., pl. 52. 

—  falcirostra, Lath. 

Curvirostra leucoptera, Wils., Am. or., pl. 31, fig. 3. 
Pihiopsistacus Americanus. 
Curvirostra leucoptera, Daud. 


Commun dans toute l'Amérique du Nord. Rapporté 
de Monterey par le docteur Néboux. 


CACTORNIS GRIMPEUR. 


Cactorms scandens (Gould.), Proc. zool. soc., 1857, Zool. of 
the Beagle, p. 104, pl. 42. 
C. ... intense fuliginosa, crisso albo ; rostro et pedibus ni- 
grescenti-brunneis. 


Fæm. — Corpore superiore, gutture pectoreque intensè brunneis, 
singulis plumis pallidiore marginatis ; abdomine crissoque 
cinereis, stramineo tinctis; rostro pallidè fusco; pedibus nigres- 
cenh-fuscis (Gould., loc. cit.). 


Cet Oiseau , nommé par le docteur Néboux Tisserin 
des Gallapagos dans la Rev. 10ol. d'octobre 1840, 


— 905 — 
page 291 , y a été décrit ainsi par lui d’après un individu 
qu'il a rapporté : 

« Corps en général brun-noiràtre , chaque plume est 
» légèrement bordée de blanc, surtout sous le ventre , 
» et en avançant vers la région anale; mandibule supé- 
» rieure à arête arrondie, très-pointue et noire; mandli- 
» bule inférieure jaunâtre, la mandibule supérieure dé- 
» passant l’inférieure de deux millimètres environ. 


» Longueur totale. . . . . . . 
» — de la queue. . . . 04 centimètres. 
D _— du bec . . . . . . 18 millimètres. 


» Habit. Ye St-Charles (Archipel des Gailapagos). » 

Cet individu est un jeune màle prêt à prendre la livrée 
d’adulte , ainsi que l'indique le brun foncé de sa couleur 
générale , et surtout la couleur de son bec, qui est déjà 
celle du màle adulte. Celui-ci est entièrement d’un noir 
intense avec les rémiges primaires brunâtres et la région 
anale d’un blanc cendré. 

Dans la Revue zoologique du mois de novembre de 
la même année 1840, page 323, M. de La Fresnaye, à 
qui M. Léclancher avait communiqué un autre mdividu 
de cette espèce, publia à son sujet les observations sui- 
vantes que nous croyons devoir citer tout entières parce 
qu’elles expriment et résument aussi bien et mieux que 
nous ne le pourrions faire ce que nous avions à dire sur 
cet Oiseau. 

« Nous avons, dit notre Ornithologiste, quelque 
» doute que l’Oiscau décrit sous ce nom par M. Néboux 
» soit réellement un Tisserin , et nous serions plutôt 
» porté à croire, d’après la description de son plumage 


— 206 — 
» brun-noirâtre avec chaque plume bordée de blanc, 
» d’après la brièveté de sa queue longue seulement 
» de # centimètres, chez un Conirostre à bec long de 
» 48 millimètres, qu'il doit faire partie de ce nouveau 
» groupe de Granivores marcheurs, recueillis aux Gal- 
» lapagos par les naturalistes anglais du Beagle, que 
» M. Gould a désignés et décrits sous le nom de Geo- 
» Spiza dans les Proceedings 1837, pag. 5 et 49, ei for- 
» mant douze espèces différentes, remarquables toutes 
» par une forme courte et ramassée, par une queue fort 
» courte, par des ailes obtuses et arrondies, par des 
» pieds d’Oiseaux marcheurs, à ongles peu arqués, par 
» un plumage noir ou noiràtre chez les mäles, moins 
» obscur chez les femelles, dont les plumes sont bor- 
» dées de cendré ou de roussâtre, ou d’olivâtre, et par 
» l'habitude de se tenir en grandes bandes à terre, où 
» ils se nourrissent de graines de graminées dont il y a 


de 
T 


ample récolte dans ces îles. M. Darwin, le naturaliste 


Ne 
ST 


de l'expédition, ajoute qu’ils sont si peu farouches 
» qu'on n’a pas besoin de fusil pour s’en procurer. Ils 
» sont encore remarquables en ce que les douze espèces 
» décrites par M. Gould, et dont cinq sont déjà figurées 
» dans le Beagle’s Voyage, tout en réunissant les carac- 


ŸY 


tères communs indiqués ci-dessus , différent entre 
» elles par la forme du bec présentant chez quelques- 
» unes l’énormité d’un bec de Coccothraustes le plus vo- 
» lumineux , et se dégradant jusqu’à celle d’un Pinson 


NA 
S 


ou d'un Ignicolor, en se comprimant et s’allongeant 


) 


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chez quelques autres, ce qui le fait alors ressembler à 


> 


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un bec de Tisserin ou plutôt d’Euplectes. 


» 
» 


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O0 — 


» Nous avons dans les Oiseaux de M. Léclancher 
une femelle appartenant à ce groupe et à la petite di- 
vision à bec long et comprimé, désignée par M. Gould 
sous le nom de Cactornis. M. Léclancher me dit à pro- 
pos de cet oiseau : I! vient des Gallapagos ; j'y en ai tué 
un autre à plus gros bec, mais je ne sais ce qu'il est de- 
venu. Presque toujours à terre, ils sont si peu farouches 
qu'on en a tué plusieurs à coups de baguettes de fusil. 
Les espèces de ce genre qui étaient à bord ont été re- 
mises par MM. Néboux et Filleux au Muséum. 

» À ces divers détails qui m'ont fait soupçonner que 
le Tisserin décrit par M. Néboux était un de ces Géo- 
Spizas, j'ajouterai quelques considérations d’Ornitho- 
logie géographique. 

» Les Gallapagos, peu éloignés du Continent Améri- 
Cain, n’ont encore fourni, tant aux explorateurs du 
Beagle qu’à ceux de la Vénus, qu'une Ornithologie tout 
américaine quant aux genres; des Moqueurs, des 
Gobe-Mouches rubins , des Effrayes , et enfin ce nouveau 
groupe de Geo-Spiza, et on n’y a trouvé aucun genre 
particulier à l'Ancien Continent. La présence du genre 
Tisserin, dont on ne connait aucune espèce améri- 
caine dans ces îles, serait donc un fait tout nouveau 
et qui ne serait pas sans importance. Nous invitons 
donc M. Néboux à comparer l’Oiseau qu'il décrit 
comme Tisserin , avec les descriptions des différentes 
espèces de Géo-Spizas de M. Gould , tant dans les Pro- 
ceedings, 1837, que dans le Beagle’s Voyage, où cmq 
sont figurées, et à vouloir bien publier de nouveau le 
résultat de ses recherches qui sera loin d’être indiffé- 


— 208 — 

» rent pour la science et pour l’Ornithologie géogra- 
» phique. 

» Quoique les auteurs anglais regardent ce groupe de 
» Géo-Spiza comme particulier aux Gallapagos, nous 
» avons la conviction que le Continent Américain doit 
» renfermer quelques espèces analogues au milieu de 
» ses nombreux Conirostres , et nous croyons déjà entre- 
» voir quelque analogie de couleur et de forme de bec, 
» entre Île sous-genre Cactornis et l'Oiseau connu sous 
» le nom de Pêre-Noir de la Martinique. » 


GEOSPIZA FULIGINEUX. 


Geospiza fuliginosa (Gould.), Zool. Beagl., p. 101. 


Cnar. spec, G. ( Mas) intense nigro-fuliginosa, tegminibus cau- 
dæ inferioribus apice, remigibus rectricibusque lateraliter al- 
bido-marginatis, rostro ingro, pedibus nigris. 


L'individu dont M. Gould a fait le type de cette espèce 
n'était pas adulte, ainsi qu'on peut en juger d’après la 
diagnose suivante qu'il en a donnée : 

G. (mas) intense fuliginosa, crisso albo, rostro fusco, pedi- 
bus nigrescentifuscis. 

Un individu se rapportant évidemment à la même 
espèce, rapporté par la Vénus et donné au Muséum de 
Paris par M. Filleux, diffère de celui décrit par M. Gould, 
en ce que tout le corps est, non pas fuligimeux, mais 
d’un noir assez intense, mais à reflets brunètres; la 
région anale est du même ton que le reste du corps; 
seulement les couvertures inférieures de la queue sont 
finement cerclées de gris blanchâtre; la même teinte 


— 00 — 

borde les rémiges et ces rectrices; les primaires sont 

brunàtres , et le bec et les pattes sont d’un noir pur. 

Le dessous de la queue est grisätre, rubané transversa- 

lement et d’une manière assez régulière de stries d’une 

teinte plus foncée. 

C’est sous ce rapport que nous avons cru devoir 
refaire, en la complétant, la diagnose latine du natu- 
raliste anglais. 

Voici celle qu'il a donnée de la femelle que nous ne 
connaissons pas. 

Fœmina : sunmmo corpore, alis, caudäque intensè fuscis ; 
singulis plumis cinerascenti-ferrugineo marginatis ; cor- 
pore infra cinereo ; Sinqulis plumis medium versus obscu- 
rioribus ; rostro brunneo ; pedibus nigrescenti -brunneis. 
Dimensions de notre individu : 


Eongueur totale.. . . . . . Re US 
_— dtbec Le 0 0 o14 1m 
— de la queue. : . . . 03 005 
— du +arsé. - : 0 
Hautenr du bec. . - - .. . :. 013 


Habit. Les Gallapagos. 


GUIRACA CENDRÉ. 


Guiraca cinerea (de La Fresnaye), Mag. de zool., 1845, Ois., 
pl. 50. 
Camarhynchus cineraceus (G.-B. Gray), juin 1844. 


Cnar. sec. G. — Suprà dilutè cinerea; fronte basique rostri 
nigris, subis cinereo-albida, qutture et collo anteriore albis, 
rostro flavo, pedibus tantüm flavidis. 


Ce Gros-Bec, que l'expédition de la Vénus doit re- 
vendiquer au nombre de ses découvertes, a été décrit 
O1SEAUX. 14 


 — 


sur un individu à lui communiqué par M. Léclancher, 
par M. de La Fresnaye qui en a publié la figure dans le 
Mag. de Zool. 1843, ois., pl. 30, en en faisant l’objet 
de l’article suivant que nous nous bornerons à repro- 


duire : 


Ÿÿ 


» 
» 


» Swainson, dit l’habile Ornithologiste, désigna par 
le nom générique de Guiraca, qu’il changea ensuite en 
celui de Coccoborus , une partie des Gros-becs d’'Amé- 
rique. Les espèces types sont : le Gros-bec bleu des 
États-Unis, le Gros-bec azulam du Brésil et le Gros-bec 
rose-gorge , qui, réellement, different assez de notre 
Coccothraustes d'Europe pour avoir autorisé cette sé- 


) paralion. 


» Notre nouvelle espèce américaine, rapportée des 
iles Gallapagos par M. Léclancher, alors chirurgien de 
la Vénus, offre, dans la forme de son bec et de ses 
pattes, des modifications assez distinctes du genre 
Guiraca pour qu’on puisse l’en séparer à son tour, au 
moins comme sous-genre, surtout si, à ces Caractères 
différentiels , il s’en joint aussi quelqu'un dans les ha- 
bitudes. Ce bec, effectivement aussi élevé que celui 
des Guiracas , en diffère en ce qu'il est très-arqué en 
dessus et beaucoup plus comprimé; et ne peut guëre 
être comparé, parmi les espèces américaines, qu’à 
celui du Père noir (Fringilla noctis), espèce toute 
noire, qui a le devant du cou et des yeux roux-can- 
nelle, tandis que les pattes, très-robustes, à ongles 
courts, mais larges et fortement courbés, n’ont guère 
d’analogues parmi les Gros-becs américains, mais 
bien chez le genre Psittacin des Sandwich. On peut 


— 21 — 

» dire, enfin, que notre nouvelle espèce est un Gros-bec 
» Guiraca à bec de Pére-noir et à pattes de Psittacin. 

» Il se rencontre déjà, dans la famille Tanagridée d'A. 
» mérique, quelques espèces à pattes remarquablement 
» fortes, comme chez notre oisesu, et à bec aussi com- 
» primé quoique moins élevé, ce sont, 1° l’Esclave des 
» palmiers (Vieil. Gal., pl. 146); le Tanagra rubriqularis 
» ou rubricollis (Spix, pl. #6), dont Swainson a fait 
» son genre Lamprotes, etle Tanagra ruficollis (Licht.), 
» Tangara hirondelle (Lesson., Tr.) dont cet auteur fait 
» son genre Cypsnagra, et Swainson celui de Leucopygia. 
» Il est certain que, si ces trois oiseaux présentent, dans 
» leurs habitudes comme dans la grosseur de leurs 
» pattes, quelques caractères particuliers qui en seraient 
» la conséquence et différeraient de ceux des autres 
» Tanagridées, leur formation en genres distincts de ce- 
» lui de Tachyphone, auquel ils semblaient appartenir, 
» serait fondée, de même que celle de notre Gros-bec à 
» bec comprimé et à pattes de Psittacin le serait aussi, 
» si les mêmes différences de mœurs avaient lieu entre 
» lui et les autres Guiracas d'Amérique. Je proposerais 
» alors, pour nom de genre, dont il deviendrait le type, 
» celui de Piezorhina (bec comprimé). 

» Le Guiraca cinerea, de la grosseur, à peu près, du 
» Gros-bec bleu des États-Unis, a la queue beaucoup 
» plus courte et presque carrée, les ailes plus longues 
» et s'étendant jusqu'au delà de la moitié de celle-ci; 
» les tarses , les doigts et les ongles tres-robustes et d’un 
» blanc jaunätre; le bec élevé, très-arqué en dessus, 
» comprimé, avec les narines petites, rondes, percées 


— 212 — 
» à égale distance de sa partie supérieure, et de sa 
» commissure, cette commissure très-sinueuse à sa base 
» et à son extrémité ; il est partout d’un jaune assez vif. 
» Tout le dessus de l’oiseau est d’un cendré peu foncé. 
» Le front et le tour du bec, excepté en dessous, sont 


A 


» noirätres. La gorge et le devant du cou sont blancs. 
» Tout le dessous est d’un cendré blanchätre, avec les 
» flancs un peu plus foncés , l'abdomen et l’anus pres- 
» que blancs. Les rémiges et les rectrices sont gris-ar- 
» doise, finement bordées de blanc-grisatre. 

» Longueur totale, 15 centimètres. 

» Cette espèce a été tuée aux îles Gallapagos. » 


PLANCHE V.— Fic. 1. 
TANGARA À NUQUE ROUSSE. 
Tanagra (Calliste) rufivertex (F1. Prévost et O. des Murs ), 


Cuanr. spec. Tan. capite nigro, singulis plumis apice violaceo 
nitentibus, verticis exceptis apice rufis; corpore toto cobalto 
cærulescenti; pallio malachite virescenti cobalto squamulato; 
remigibus rectricibusque nigris margine concoloribus; crisso 
fulvo-albido; rostro et pedibus nigris. 


Ce Tangara, sinon par la similitude des tons au 
moins par l’exacte et semblable distribution de ses cou- 
leurs sur fond bleu, rappelle un peu le Procnopis atro- 
cϾrulea(Thchud.), Consp. av. n. 128, et Faun. Per. Vog. 
Taf. 13, fig. 2; sauf la distinction générique, et à 
l'exception que chez celui-ci, c’est le bleu-noirâtre qui 
domine, tandis que, chez notre Oiseau, c’est le bleu- 
clair mat ou cobalt, tournant parfois au malachite. 

Descripüon : Tête et base du bec noires , les plumes de 


— 213 — 
la base du front, de la nuque et du derrière du cou ter- 
minées d'indigo tournant au violet brillant; celles du 
sommet de la tête terminées de roux ; du reste en entier 
d’un bleu-cobalt mat et sans reflet; toutes les plumes du 
croupion et du dessous du corps ciliées et décomposées ; 
les autres au contraire squameuses et bien distinctes ; 
manteau vert malachite, chaque plume lserée fine- 
ment de cobalt; rémiges et rectrices noires, les pre- 
mieres jusqu'aux deux tiers de leur longueur, les der- 
nières dans toute leur étendue largement liserées sur leur 
tranche extérieure de cette dernière couleur; les rémiges 
secondaires entièrement noires dans leur page interne, 
bleu-cobalt dans celle externe, croupion et cuisses d’un 
fauve léger : bec et pieds noirs. 

Longueur totale. 0%, 14 1 14 1/2 centimètres. 


Habit. Guatemala. 
PLANCHE V.— Fic. 2. 
TANGARA LABRADOR. 


Tanagra Labradorides ( Boissonneau ), Rev. zool. 1840, p. 67. 
Caliste  ————— (J. R. Gray). 


Car. spec. Tan. suprà viridi-aurato, lumine Labradorensis 
lapidis splendenti; rostri basi, capite summo, colloque su- 
perno, ac scapularibus, remigibus, rectricibusque nigris; 
illis cœruleo virescenti tenuissimé marginatis; flexurà alarum 
cœæruleä; legminibus minoribus splendidè viridibus; crisso 
cruribusque auratè rufis. 


Nous nous bornerons à transcrire ici la description 
donnée de cet Oisean par celui qui le premier la fait 
connaître dans la Revue zoologique de 1840, page 67. 

« Cette jolie espèce, dit M. Boissonneau, à tout le 


= th — 

» corps dessus et dessous d’un vert doré à reflets bleus 
» et or qui rappellent tout à fait les reflets de la pierrè 
» de Labrador ou Feldspath chatoyant. Le devant des 
» yeux, le bord du front, ainsi que le menton sont 
» noirs. Une large bande de cette couleur part du vertex 
» etse prolonge en arrière sur toute la partie supérieure 
» du cou. Les ailes et la queue sont noires avec leurs 
» pennes finement bordées de vert. Le poignet de laile 
» est d’un bleu passant au vert brillant sur toutes les 
» petites couvertures. Les couvertures inférieures de 
» l'aile sont d’un blanc légèrement ocracé, ainsi que le 
» milieu de l'abdomen qui prend une teinte d’ocre plus 
» prononcée vers l'anus, sur les couvertures inférieures 
» dela queueetsur les jambes. Bec noir; pattes brunâtres. 

» Longueur totale, 143 centimètres. » 

Habit. Santa-Fé de Bogota. 


PASSERINE DE LÉCLANCHER. 


Passerina (Spiza) Leclancheri (de La Fresnaye), Rev. zool., 
1840, p. 260; Mag. de zool., 1841, Ois., pl 22. 
Callisie Leclancherii (G. R. Gray), Gen., juillet 1844. 


Cran. srec. Pass. suprà cœrulea capite dorsoque olivascentibus ; 
subtüs junquillacea , pectore aurantiaco ; alis et caudà nigres- 
centibus, viridi cœrulescenti marginals; rostro corneo, pe- 
dibus plumbeis. 

Nous reproduirons encore pour cette espèce, dont 
deux individus ont été rapportés par la Vénus, la des- 
cription détaillée qu’en a publiée le premier M. de La 
Fresnaye, dans la Rev. zool. 1840, page 260. 

« Cette charmante petite espèce, dit:1l, au plumage 
s lé plué suave , doit être classée dans les Passérinés de 


— 25 — 

» Vieillot, ou Spiza , Bonaparte, et dans le petit groupe 
»ÿ que ce savant a désigné par le nom de Spizas-Tanagras, 
» et qui renferme, outre les espèces nommées le Pape 
» et le Ministre, les Spiza amæna et versicolor de cet Au- 
» teur. La nôtre est donc la cinquième espèce de ce 
» petit groupe de transition des Fringilles aux Tangaras, 
» genre qu'il rappelle non-seulement par l’agréable va- 
» riété de la coloration , mais aussi par l’échancrure du 
» bec, qui se remarque chez quelques espèces, telles 
v que le Spiza amæna et notre espèce nouvelle. 

» Celle-ci, de la taille à peu près de la Passerie Pape, 
» a le dessus de la tête olive, tout le dessus du corps, 
» les joues, les côtés du cou et les couvertures des ailes 
» d’un joli bleu de cicl mêlé d'olive sur le milieu du dos 
» et sur la nuque. Les ailes et la queue sont noirätres, 
» mais toutes les pennes sont bordées de bleu verdàtre. 
» Tout le dessous est du plus beau jaune jonquille, pre- 
» nant sur la poitrine une nuance orangée très-vive, 
» puis se dégradant insensiblement en jaune-serin vers 
» l'abdomen. Les lorums et le tour des yeux sont jaunes. 
» Le bec est couleur de corne avec la mandibule supé- 
» rieure légèrement échancrée. Les pieds sont plombés. 

» Habit, Tuée près d'Acapulco, au Mexique. 

» Deux seuls individus de cette jolie espèce ont été 
» rapportés par la Vénus, dont untué par M. Léclancher. 

» Cet Oiseau se tient habituellement dans des brous- 
» sailles épineuses ressemblant à notre épine noire, et 
» où ilest très-difficile de l’apercevoir. On trouve aussi 
» sur le tronc du même arbuste un beau Bulime blanc 
» zébré de violet. 


— 216 — 

» L'habitation de cet Oiseau, dans les buissons four : 
» rés et dans les vallées, comme chez les Passerines 
» Pape et Ministre, est une conformité de mœurs bien 
» remarquable entre ces trois espèces, et qui, malgré 
» leurs rapports de coloration, les éloigne des Tangaras 
» qui se tiennent habituellement à découvert et se per- 
» chent sur le sommet des arbres des forêts. » 


PLANCHE VI. 
BRUANT A DOUBLE CROISSANT, 


cmberiza biareuata (F1, Prévost et O. des Murs). 
Fringilla  — (FL. Prévost et O. des Murs), Atlas, pl. 6. 
Arremon biarcuatus (J.-B. Gray), Gener. 1849, Append. 


Car. Srec. E, — Suprà fuliginosé brunnea parumper olivas- 
cens , fronte, genisque nigris, regione periophthalmicà albà 
rufo circumecincltà, vertice et collo posteriore rufis : subtus 
alba , lateraliter cinerascens, crisso ochraceo, remigibus rec- 
tricibusque orunneo-nigrescentibus, primis cinereo marginatis, 
rostro nigro, pedibus brunneis. 


Ce Fringille, désigné sur notre planche VI sous le 
nom génér'que de Moineau, est un véritable Bruant. 
Ainsi la commissure des deux mandibules, au lieu de 
ne former qu'une ligne plus ou moins courbe ou inflé- 
chie, forme une ligne brisée à angle obtus vers son 
ouverture ; de plus la mandibule supérieure porte cette 
protubérance interne si caractéristique chez les vrais 
Bruants. Toutefois les caractères des pattes différent un 
peu de ceux assigrés à ce genre : elles sont ici très- 
fortes, les ongles sont également forts et très-arqués , 
ongle méme du pouce est de la longueur de ce doigt 


— 217 — 

et très-arqué. Par ce dernier caractère 1l se rapproche- 
rait des Plectrophanes, à part la courbure de l’ongle. 
On peut même dire que , n’était la forme du bec, qui 
est celle si spéciale aux Bruants, ce serait un de ces 
Tangaras à couleur sombre, dans le genre du Tanagra 
ruficoilis de Spix, Av. Bras., 2? vol., tab. 53, f. 3, ayant 
le plus grand rapport avec celle des Bruants. 

Description. Celui-ci a le milieu du front et le bas de 
la joue noirs; une tache superciliaire partant des na- 
rines , la région periophthalmique, le menton, les bords 
inférieurs de la joue, la gorge, le cou et le milieu de 
l'abdomen blancs ; le dessus de la tête, la nuque et le 
haut postérieur du cou d’un roux-marron, Ce roux en- 
cadrant la région periophthalmique et se continuant 
jusqu’au méat auditif; le bas postérieur et les côtés du 
cou, ainsi que ceux de la poitrine, sont d’un gris- 
cendré ; le dessus du corps et de la queue d’un brun 
enfumé légèrement olivâtre; l'anus et les couvertures 
caudales inférieures d’une teinte ocracée; les rémiges 
et les rectrices d’un brun-noirâtre, les premieres fine- 
ment bordées en grisàtre; les grandes couvertures 
alaires bordées de roussâtre ; la queue est arrondie, le 
bec noir, les tarses sont bruns, 


Longueur totale, . . . . . . . . . 16 centimètres. 
e de la queue. . . 7 1/2 
— Qu IUTSee 2 - . . m0) 


Hab. L'individu que nous avons figuré, sur un exem- 
plaire dont le bec était incomplet, a été rapporté de la 
Californie par le docteur Neboux; celui qui a servi à 
notre description vient de Guatémala. 


= — 


SUR LE GENRE PTILONOPÉE, 


ET LA DIVISION A Y INTRODUIRE. 


On sait que le genre Ptilonopus , créé par Swainson 
(Zool. Journal, vol. 1, p. #73, ann. 1824-1825), a été 
adopté par tous les Ornithologistes, et respecté par 
M.G.-R. Gray, qui l’a conservé dans son Genera of Birds. 

Or, ce genre a été destiné par son auteur à renfermer 
les Colombidés offrant pour tous caractères des ailes 
médiocres, à première rémige tres-brève, la plus 
courte , et tellement échancrée intérieurement qu’elle en 
devient courbe et presque falciforme ; à becs grêles et à 
tarses presque entièrement emplumés. Il le caractérisait 
en effet dans les termes suivants : 


Alæ mediocres, remiqum primä apicem versüs contractà, 
tertid quartäque longissimis ; 

Rostrum gracile ; 

Tarsi plumosi. 


Et il donnait pour type de ce genre ce qu'il considé- 
rait comme une simple variété, nommée par lui Varietas 
Regina, du Ptilonopus purpuratus, Columba purpurata , 
de Gmelin et Latham, c’est-à-dire du Kurukuru de 
Temminck, la plus anciennement connue de toutes les 
espèces de ce genre. 

A prendre dans les termes de Ta Caractéristique de 
Swainson , nul doute que son genre Ptilonopus, tel que 
l’a composé M. G.-R. Gray, ne soit rigoureusement 
exact. Mais on remarquera que parmi les espèces qui 


— 219 — 
y figurent, il en est qui possèdent seules un caractère 
unique et des plus tranchés dans la conformation de 
leurs plumes pectorales, caractère véritablement suffi- 
sant pour en constituer un genre à part. 

Nous pensons donc que le genre Ptilonopus deman- 
derait, pour plus d’exactitude et de clarté, à être di- 
visé en deux parties. 

La première comprendrait les vrais Pülonopes, tels 
que les a définis l’ornithologiste anglais , et conserverait 
son nom générique de Ptilonopus. 

Et il conviendrait de composer la deuxième des es- 
pèces qui, aux caractères assignés aux Ptilonopes, 
joindraient ce caractère si singulier que présente no- 
tamment le Kurukuru, Columba purpurata, dans la pti- 
lose de sa région pectorale; nous voulons parler de la 
forme des plumes de cette partie, qui présentent toutes 
l'aspect de plumes dont le rachis serait coupé à peu de 
distance de sa pointe, qui se trouverait ainsi dépassée 
par la longueur des barbules de droite et de gauche, et 
ne figurerait plus alors qu'un V renversé À, dont l’ex- 
trémité subsistante du rachis serait le sommet. Il est 
même remarquable que le nombre de ces espèces ne 
laisse pas que d’être considérable, et comprend près de 
la moitié de celles rangées jusqu’à présent dans le genre 
Ptilonopus , toutes espèces appartenant exclusivement 
aux archipels de là mer du Sad. Cette seconde partie 
prendrait pour nom générique celui de Kurukuru , im- 
posé par M. Temminck à celles des espèces les plns 
anciennement connues qu'il ait figurées le premier, et 
sérait caractérisée ainsi : 


— 220 — 


GENRE KURUKURU. 


Plumes du cou et de la poitrine roides, et échancrées à 
leur extrémité qui est bifide ; 

Ailes médiocres, la première rémige très: brève , et fal- 
ciforme la plus courte , les troisième et quatrième les 
plus longues ; 

Bec grêle ; 

Tarses à demi ou presque entièrement emplumés. 


Genus KURUKURU. 


Plumæ colli pectorisque rigidæ apice bifidæ vel furcatæ ; 

Alæ mediocres , remigum primä apicem versùs contractà , 
tertià quartäque longissimis ; 

Rostrum gracile ; 

Tarsi plumosi. 


Quant aux espèces qui nous paraissent devoir entrer 
dans la composition de ce genre, nous nous réservons 
de les indiquer après que nous aurons passé en revue 
les individus, à notre connaissance, qui doivent être 
considérés comme appartenant réellement au Ptiloncpus 
( Columba) purpuratus, et ceux qui en ont été ou doivent 
en être entièrement distingués. 

Ainsi, de tout temps, depuis Gmelim et Latham, 
jusqu’à ces dernières années, il est constant que l’on a 
confondu et que l’on confond encore avec le vrai 
PL. purpuratus, et comme variétés de cette espèce, des 
individus dont on à, avec raison, fait depuis des es- 


— 201 


pèces distinctes, parce qu’elles en diffèrent essentielle- 
ment, et que les observations successives des voya- 
geurs , de même que les études des Ornithologistes ont 
démontré jusqu’à l'évidence la raison de ces différences. 

Ces variétés sont en effet si nombreuses que ce ne 
pouvait être qu’à force de temps et d'observation qu’on 
devait espérer arriver à les débrouiller. Aussi est-ce 
avec quelque apparence de raison que Lesson a pu dire, 
à l’époque où il décrivit sa Col. Kurukuru, variété Taï- 
tensis (Voy. de la Coquille, 1 vol., p. 297, ann. 1824), 
que : «Cette Col. Kurukuru, qui se trouve dans toutes 
» les îles de la Malaisie et de l'Océanie, depuis les Mol- 
» luques, les Philippines et les Mariannes, jusqu'aux 
» Sandwich et aux iles de la Société et qui, en tout 
» lieu, identique par l’ensemble de ses formes et les 
» masses de couleur de son plumage , offre partout des 
» nuances si variées, qu'elles ont déjà cent fois torturé 
» les naturalistes systématiques, aux définitions précises 
» desquels elle semble vouloir échapper. » 

il est vrai que vingt-cinq ans après, c’est-à-dire en 
4847, instruit par l'expérience et par les progrès de 
l'Ornithologie, auxquels il avait donné lui-même un si 
puissant Concours , il exprimait une opinion différente 
et plus exacte, à l’occasion de la description de son 
Ptil. Emiliæ, qu'il reconnaissait être le même que notre 
Kurukuru Dupetit-Thouarsii, et plus conforme à la vé- 
rité, en disant, à propos du groupe des Ptilonopes 
auquel il rapportait cette Colombe, que « comme chaque 
» archipel a des variétés constantes , force est de les 
» décrire comme espèces distinctes. » 


— 22 — 

C’est pour bien faire sentir l'importance de ces dis- 
tinctions que nous avons entrepris le travail qui suit, 
et pour vulgariser le résultat des travaux de nos prédé- 
cesseurs, tels que MM. Swainson et Gould, toujours 
excellents par leurs résultats, mais manquant en gé- 
néral de cet esprit d'analyse qui, en établissant une 
distinction entre deux termes de comparaison, fournit 
les moyens de contrôle indispensables à tout observa- 
teur, pour bien saisir la raison des rapports ou des dif- 
férences qui presque toujours précèdent et devraient 
accompagner l'établissement et la création d’espèces 
nouvelles en histoire naturelle. 

Cela posé, nous allons, si ingrat que soit le travail 
dont nous parlons , puisqu'il ne doit consister en grande 
partie qu'en citations et en descriptions , nous allons 
passer en revue les diverses descriptions données du 
PE. purpuratus, comme type du nouveau genre Kurukuru 
que nous proposons d'établir, et indiquer les espèces 
qui doivent entrer dans ce genre. 


KURUKURU A COURONNE POURPRÉE. 


Kurukuru purpuratus, O. Desmurs et Flor, Prévot. 
Columba purpurata , Loth., Gmel. 

Ptilonopus purpuralus, Swains. 

Columba viridissima , Tunn. 


Srec. Cnar. X, viridis, sublüs in cinereum vergens, fronte et 
verlicis parle purpureis, crisso flavo, remigibus viridi ni- 
grescentibus, remiges primores prœler duas primas, margine 
[lavæ, rectrices æquales, subovalæ, margine anteriori virides, 
fascia interruptà grised notatæ. 


Comme toutes les espèces exotiques anciennement 


connues, le Kurukuru à couronne pourprée, quant à 
son véritable type, a fini par être confondu avec ses 
variétés congénéres plus ou moins réelles, à tel point 
que chaque auteur ayant eu son type parüculier, il de- 
vient assez difficile de se fixer sur la variété, ou soi- 
disant telle, qui doit définitivement être prise pour le 
type de l'espèce. 

_ C'est ce que prouvent les Diagnoses latines de Latham, 
de Gmelin , et de M. Temminck lui-même, qui, toutes 
concordantes entre elles, sont inapplicables à la figure 
que cet Ornithologiste a le premier donnée de son Kuru- 
kuru, Columba purpurata. 

La diagnose de Latham porte : 


Col. viridis, pileo coccineo, cristo flava; capite collo pec- 
toreque cinereo-albis. (Ind. ornith., p. 269, n° 17.) 


Celle de Gmelin : 


Col. viridis, subtus in cinereum vergens, fronte et verticis 
parte purpureis, crisso flavo, remigibus nigris. (Linn., 
n° 64.) | 
Celle de M. Temminck : 


Col. viridis, fronte purpurascenti, capite colloque cinereo- 
albis, cristo flavo, apice caudæ virescente; remigibus 
nigris : rostrum nigrum, apice albo; pedes nigri. 
(Hist. natur. des Pigeons, in-8, 1813, t. I”, p. 474.) 


M. Temminck fait suivre cette diagnose de celle d’une 
variété , ou prétendue telle, conçue en ces termes : 


Var. Fronte pileoque minüs saturatiore et in quibusdam 
vertex absque ullä rubedine, capite colloque cinereo- 


"oh — 
virescens , crislo aurantio ; rostrum nigrum : pedes ru- 
bicundi ; 
dont plus tard il fit une espèce distincte, ainsi qu'on 
le verra bientôt. 


C’est en effet au K. purpuratus , le plus anciennement 
connu , que l’on a rapporté comme variété tous les in- 
dividus , si nombreux aux îles Marquises, dans les diffé- 
rents archipels de la mer du Sud ou de l'Océanie, et 
même dans la Nouvelle-Hollande, qui empruntaient 
quelque chose de leur coloration si brillante et si diver- 
sement nuancée au plumage de cette espèce, dont on 
en faisait alors comme le type. 

Ainsi l’on voit dans Lathiam, dont les premières pu- 
blications de M. Temminck ne sont que la reproduction 
presque textuelle : 


Var. Fronte pileoque minüs saturatis ; quibusdam vertex 
absque rubedine. 


Dans Gmelin : 


Frons et vertex varius concolor, aut flavä lined circum- 
scriplus, caput collumque ex cinereo virescentia. 


Il en est résulté qu'une fois les variétés de l'espèce 
admises à l'infini, chacun a pris pour type celle qui lui 
convenait le mieux , sans s'occuper de mettre d'accord 
avec sa propre description détaillée la Diagnose Lin- 
néenne qu'il en donnait. 

Latham a pris pour type de l'espèce et de sa descrip- 
tion, conforme en cela à sa diagnose, la variété dont 
la calotte pourprée est privée d’un cercle jaune, et dont 
le ventre, à l'exception de la région anale, est vert; ne 


— 225 — 
considérant que comme variété les individus d'Otahiti 
et de Tonga-Tabou dont la calotte pourprée est en- 
tourée de jaune. 

Et voici comme il la décrit : 

« Le bec est aux trois quarts d’un blanc jaunâtre ; 
» l'iris d’un jaune pâle; le front est couronné de pour- 
» pre; la tête, le cou et tout le dessous du corps sont 
» d’un vert pale tournant au cendré ; les couvertures 
» inférieures de la queue et la région anale sont jaunes; 
» le dessus du corps est d’un joli vert à reflets; les ré- 
» miges sont noires, les deux externes extérieurement, 
» les autres bordées de vert; les secondaires sont fran- 
» gées extérieurement de jaune; la queue à 3 pouces 
» de longueur ; les rectrices, d’un noir verdàtre, sont 
» vertes extérieurement ; lorsque la queue est étendue 
» on voit une barre verdätre vers la pointe, mais cette 
» couleur, en lexaminant bien, n’occupe que la page 
» intérieure de chaque penne, en sorte que cette bande, 
» au lieu d’être continue , est réellement interrompue ; 
» les pieds sont d’un beau rouge ou d’un noir brunâtre; 
» les ongles sont noirs. » 

M. Temminck, au contraire, prend pour type et 
comme variété la plus constante, selon lui, les indi- 
vidus dont la calotte est encadrée de jaune, et il accom- 
pagne la figure qu’il en donne, planche XXXIV de ses 
Pigeons , de la description suivante : 

« Nous figurons dans la planche XXXIV de l'édition 
» en grand format, le Kurukuru mâle tel qu’on le trouve 
» habituellement. C’est dans cet état que nous avons eu 
» occasion d’en examiner plus de vingt individus ve- 


= 


O1SEAUXx. 15 


MA 


Y 


ŸY 


Y S ÿ 


È-2 


= 0 
nant d'Otahiti; nous en avons encore trouvé deux au 
Muséum de Paris, rapportés par les naturalistes qui 
accompagnérent le capitaine Baudin dans son voyage 
de découvertes aux terres australes, 

» Cette premiere variété, qui nous paraît la plus 
constante , a tout le haut de la tête d’un beau rouge 
rose ; cette couleur est entourée, dans les individus 
adultes , par une bande jaune. L’occiput, le cou et la 
poitrine sont d’un gris cendré, nuancé de légères 
teintes verdätres, plus sombres cependant sur la 
partie postérieure du cou. Toutes les parties supé- 
rieures du corps sont d’un beau vert lustré marqué 
de taches vertes, plus foncées sur les grandes couver- 
tures des ailes les plus proches du corps; les couver- 
tures moyennes sont frangées de jaune, les rémiges 
sont noires intérieurement et vertes sur les barbes ex- 
térieures ; la deuxième penne de l'aile est terminée 
en pointe. Les barbes extérieures de toutes les pennes 
caudales sont vertes, mais les barbes intérieures sont 
noirtres; l'extrémité de toutes les pennes est d’un 
blanc nuancé de vert; le ventre a plusieurs nuances 
de jaune et d’orangé ; l’abdomen et les couvertures 
inférieures de la queue sont jaunes; les tarses sont à 
moitié emplumés ; le reste, ainsi que les doigts, sont 
couverts d’écailles noires; l’origine du bec est de 
cette couleur, mais la pointe est blanchâtre ; les yeux 
sont d’un jaune pàle. » 

Ce qui résulte de ces deux descriptions, c’est qu’elles 


concernent véritablement deux individus différents, 
deux variétés distinctes ; et avant de décider si elles se 


— 9227 — 
rapportent à la même espèce, il s’agit de comparer 
chacune d’elles avec la diagnose la plus ancienne du 
C. purpurata. 

Or ilest évident, d’après les citations que nous en 
avons faites en commençant, que la description de 
Latham est la plus exactement conforme à sa diagnose, 
qui, comme type, doit avoir la préférence et la priorité. 
Il n’est pas moins évident que M. Temminck a repro- 
duit textuellement la même diagnose que Latham et 
Gmelin, sans s’occuper de mettre d'accord avec elle la 
description qu’il a prétendu donner de la même es- 
pèce, car sa diagnose et sa description sont en contra- 
diction manifeste. 

D'où la conséquence que le type du K. purpuratus 
est bien réellement, à l'heure qu'il est, la variété qui a 
servi à la description de Latham, la description de 
M. Temminck concernant certamement une autre es- 
pèce, que nous croyons devoir se rapprocher de 
l'Ewingii de Gould, ou Roseicapilla de Lesson. 

Ceci nous est même clairement démontré par la des- 
cription que cet ornithologiste a faite d’une variété à 
laquelle il a cru plus tard pouvoir imposer le nom de 
Viridissima , et que nous considérons comme identique, 
malgré l'absence de toute bordure jaunâtre aux rémiges 
et aux couvertures alaires, avec la variété typique dé 
crite par Latham, dont elle serait, selon nous, la fe- 
melle, car tous les autres caractères de ptilose sont 
exactement les mêmes que ceux signalés par l’auteur 
anglais pour sa C. purpurata. 

Quant à cette variété ou espèce prétendue C. viridis- 


— 998 — 

sima, constatons que M. Temminck, qui avait reçu son 
individu de Timor, a fait un rapprochement et une ci- 
tation des plus inexacts en la considérant comme la 
même que celle que Latham dit être propre aux îles 
de Tonga-Tabou et d'Ulieta. 

Voici en effet comment il s'exprime (Hist. des Pigeons, 
t. [®, in-8°, 1813, p. 283) : 

« Une variété que Latham dit être propre aux îles de 
» Tonga-Tabou et d’Ulieta, mais qui se retrouve aussi 
» à Timor, diffère de la précédente (c’est-à-dire de celle 
» que Temminck venait de décrire comme type de son 
» Kurukuru, €. purpurata), en ce que le front et le 
» sinciput sont d’un violet pourpré très-foncé, sans être 
» entouré d’une bande jaune ; le vert de toutes les parties 
» supérieures est plus foncé et bleuâtre ; les couvertures 
» ne sont pas frangées de jaune ; le ventre, ainsi que 
» l'abdomen , est vert; enfin les pieds sont d'un brun 
» rougeàtre, et le bec est entierement noir. Les natura- 
» listes français qui firent partie de l’expédition com- 
» mandée par le capitaine Baudin , ont trouvé cette der- 
» nière variété du Kurukuru dans l’île de Timor. » 

Et immédiatement il fait figurer cette variété comme 
jeune de son Kurukuru , dans la planche XXXV de ses 
Pigeons. 

Puis plus tard, et en 1824, dans un article relatif à 
sa Columba diademata, pl. col. 254, il en résume de 
nouveau en ces termes les caractères principaux, en 
élévant cette variété, ou jeune àge du Kurukuru pour- 
pré, au rang d'espèce, sous la dénomination de C. viri- 
dissima : 


20 

« Nous possédons les sujets de la Colombe viridissime 
» de Tonga, dont les caractères les plus marquants 
» sont : 4° un plumage teinté généralement de diffé- 
» rentes nuances vertes ; 2° point de couleur jaune ou 
» orange au ventre, qui porte un ceinturon vert très- 
» foncé; 3° point de bordures jaunes aux ailes, ni de 
» jaune au menton ; et 4° tout le plumage plus soyeux, 
» et l’échancrure aux plumes de la poitrine à peine mar- 
» quée. » 

Or Latham (Gen. Syn., t. Il, 1783, p. 626) se borne 
à dire : 

« Les individus d’Otahiti ont la calotte d’un pourpre 
» très-faible ; ceux d'Uliaeta et des autres iles voisines 
» l'ont plus foncée; quant à ceux de Tonga-Tabou, ils 
» ont le sommet de la tête d’un pourpre excessivement 
» vif et encadré de jaune; le bec est noirâtre; l'iris 
» jaune; la région anale orangée, et les pattes sont d’un 
» rouge foncé. » 

Comme on le voit, il n’y a pas la moindre concor- 
dance entre le texte de l’auteur anglais et la citation de 
l'ornithologiste hollandais. 

Quoi qu'il en soit, le rapprochement de la descrip- 
tion donnée de cette variété par M. Temminck, de la 
description donnée par Latham de sa C. purpurata, 
suffit, ce nous semble, pour démontrer que les deux des- 
criptions ont rapport à une seule et même espèce. 

Une description du C. purpurata, qui est à reporter 
également à une autre espèce, est celle donnée par 
Lesson (Traité d'orn., p. 472) : 

« Tête purpurine, bordée de jaune; ailes et dos 


— 9230 — 
» verts, ponctués de bleu; queue vert bleu, bordée de 
» jaune ; 2orge jaune; thorax grisjaune; ceinture jaune ; 
» milieu du ventre vineux; ventre orangé; couvertures 
» inférieures jaunes; queue brune en-dessous. » 

Citer cette description, c’est réfuter suflisamment 
l'assimilation que cet auteur en a voulu faire au C. pur- 
purata. 

Un individu exactement conforme à la description 
donnée par Latham du GC. purpurata, existe au Muséum 
d'histoire naturelle de Paris, où il a été rapporté par 
Quoy et Gaimard de Pexpédition de lAstrolabe. I pro- 
vient de Tonga-Tabou, et ne diffère de cette description 
que par une large tache d’un vert noirâtre à reflets 
d’indigo existant au bas de l'estomac, ce qui le rap- 
proche beaucoup sous ce rapport du Viridissima de 
Temminck. 

Nous rappellerons en terminant qu’un caractère 1m- 
portant que le Kurukuru pourpré partage avec quel- 
ques-uns de ses congénères, est celui de la forme des 
ailes, déjà indiqué en ces termes par M. Temminck : 

« Dans l’espèce du Kurukuru, les grandes pennes 
» alaires vont en diminuant de longueur jusqu’à l’exté- 
» rieure, qui est la plus courte de toutes : celle-ci est 
» terminée en pointe.» 

Ce qui donne à ces ailes une configuration arrondie 
ou obtuse, tandis que d’autres espèces les ont d’une 
forme presque aiguë. 

Notre but, en insistant sur ces détails à l’occasion de 
cette espèce, qui devient pour nous non-seulement le 
type du genre Kurukuru, mais le type spécifique du 


En. 

vrai Kurukuru pourpré (Columba purpurata), a été de 
mettre les ornithologistes en garde contre la confusion 
introduite depuis longtemps par les auteurs dans ce 
groupe, et de bien les fixer sur les caractères de cette 
espèce typique. 

Dans une note du voyage de l’Uranie , page 34, Quoy 
et Gaimard nous apprennent que cette espèce est très- 
commune dans l’île de Guam ; qu'ils en avaient tué un 
grand nombre, qu’ils en ont même possédé «longtemps 
» un couple mâle et femelle pris sur le nid, dont les 
» individus ne différaient pas le moins du monde l’un 
» de l’autre, tant pour la couleur que pour la grosseur. 

» Les Mariannais, ajoutent-ils, la nomment Toto, et 
» les Papous Manobo. Elle fait sa principale nourriture 
» du fruit rouge d’une orange épineuse ( Limonia trifo- 
» liata) qu’elle transporte partout, et contribue par ce 
» moyen à multiplier d’une manière fort incommode. » 


KURUKURU POUKIOBOU. 


Kurukuru superbus, O. des Murs et FL. Prévost. 
Ptilonopus — J.-B. Gray. 
Columba superba ; Term. 


Srec. cuar. À, Viridis, capite purpureo, cervice subrubicundà, 
collo cano, alæ spuriæ cingulo cœruleæ, maculis ovatis ex 
cϾrulescente nigris in tectricibus alarum, abdomine et tec- 
tricibus sub caudû albis. — Rostrum nigrum ; orbitæ pedesque 
rubri (Temm., Hist. des Pig.,t. 1*, Ind., p. 474). 


C’est à M. Temminck que l’on doit la première des- 
cription de cette belle espèce de Colombe (Hist. des 
Pig., tome I, in-8, 1813, p. 277, Pig., pl. 33). 


— 232 — 

Si l’on s’en rapportait à ce qu'en dit l'honorable 
Ornithologiste, cette Colombe, d’après les caractères de 
Ptilose sur lequel nous avons établi notre genre Kuru- 
kuru, n'y devrait pas figurer. 

Cet auteur, en effet, dans la comparaison qu'il fait 
du C. purpurata et du C. superba (p. 281), et dans les 
caractères différentiels qu’il indique, insiste particulie- 
rement sur celui-ci : 

« Toutes les plumes du Kurukuru, dit-il, ainsi que 
» des variétés de ce Pigeon, sont échancrées du bout, 
» tandis que celles du Poukiobou, étant sans échancrure, 
» sont arrondies. » 

Nous signalons ici une erreur manifeste. Il suflit 
d'examiner attentivement ces plumes chez le A. su- 
perbus, pour se convaincre qu’elles sont également 
échancrées et bifides à leurs pointes : seulement les 
barbules de droite et de gauche, au lieu d’être rigides 
et de finir en pointe des deux côtés, sont molles comme 
toutes les autres et légerement arrondies. Le doute à 
cet égard n’est donc plus permis, car le fait est 
exact. 

Quant aux rémiges, au lieu d’être arrondies et éta- 
gées, comme chez le K. purpuratus, elles ont une 
forme presque aiguë, les premières étant les plus 
longues , ainsi que le dit fort justement M. Temminck. 

Nous ferons remarquer que dès sa publication son 
auteur n’entra dans les plus minutieux détails à son 
sujet que dans la crainte qu’elle ne fût considérée 
comme une simple variété de sexe ou d'âge du K. pur- 
puralus. 


ep — 


En voici la description , telle qu'il Pa donnée pour le 


mâle adulte : 


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« Une calotte d’un violet éclatant couvre la tête ; 
l’occiput et les joues sont d’un vert tendre ; la nuque 
est colorée de brun rougeàtre; le manteau, le dos, 
les grandes et les moyennes couvertures des ailes, 
sont d’un vert brillant nuancé de quelques teintes 
olivacées ; sur les grandes et sur quelques-unes des 
moyennes couvertures se dessine, vers leur extré- 
mité, une tache ovoiïde de couleur bleu noirûtre ; 
le poignet de l’aile porte une espèce d’épaulette d’un 
bleu légèrement violacé ; les pennes secondaires des 
ailes sont noires sur les barbes intérieures, et d’un 
vert foncé en dehors; toutes ces pennes, ainsi que 
leurs couvertures, se trouvent bordées de jaune : 
les rémiges sont noirätres , bordées de jaune blan- 
châtre ; la queue, qui est composée de seize pennes, 
est d’un vert olivacé à son origine, d’un beau vert foncé 
au centre, et terminée de blanc nuancé de vert; les 
trois pennes latérales de chaque côté sont noires ; les 
autres ont leurs barbes intérieures de cette couleur ; 
le dessous de la queue est gris, et terminé de blanc. 
Diverses nuances de gris cendré et de violet tendre 
sont répandues sur le devant du cou; l’origine de 
toutes les plumes de cette partie est colorée de violet, 
tandis que leur extrémité est grise. Un large croissant 
d’un bleu foncé ceint la poitrine ; le ventre et l’ab- 
domen sont blancs; les flancs sont verts, marqués de 
taches blanches; les couvertures inférieures de la 
queue, blanches depuis leur origine, ont sur leurs 


— 23h — 
» barbes intérieures des taches oblongues vertes; les 
» yeux , placés dans un cercle dénué de plumes, sont 
» rouges ; le bec est couleur de corne, et les pieds sont 
» rougeatres. 

» Longueur totale, 9 pouces 1/2. 

» Habit, Otahiti. » 

Cette espèce, dont il n'existait qu'un seul individu 
lorsque M. Temminck le décrivit, qui était encore im- 
connue à Lesson lorsqu'il composa son Traité d'Ornitho- 
logie en 1831, puisqu'il ne l'y mentionne que dans une 
note, page #72, est devenue depuis assez commune 
pour être suflisamment connue et distincte du K, 
purpuratus, avec lequel il n’est plus possible de la 
confondre. 

Pour ce qui est de l'individu décrit dans le deuxième 
volume des Pigeons, p. TT, et figuré par madame Knipp, 
pl. 42, comme femelle du K. superbus, d'après les ren- 
seignements mêmes de M. Temminck, nous croyons, 
après un mür examen, que cet individu doit constituer 
une espèce à part dont nous allons donner la descrip- 
tion. 


KURUKURU DE TEMMINCK. 


Kurukuru Temminckii, O. des Murs et FI. Prévost, 
Columba superba , fæœmina , FI. Prévost et Knipp., Pig., t. IX, 


p- 77; pl. 42. 
Ptilonopus superbus, J.-B. Gray. 


SrEc. cHar. X. viridis; suprà auratè; tectricibus alarum cœ- 
ruled maculà notatis; quiture ex cinereo-grisescenti; pectore 
cærulescente viridi; abdomine flavidè albo; lateribus viridi 


— 235 — 

aurals; rectricibus viridibus, apice cinereis ; rostrum cϾru 

lescens , oculi rubri, pedes fuscè rubidi. 

Voici comment s’exprimait celui d’entre nous qui dé- 
crivit cette espèce comme femelle du K. superbus dans 
le &euxième volume des Pigeons : 

« Nous avons eu un double motif pour faire connaître 
» la femelle de cette espèce : c’est d’abord qu’elle diffère 
» beaucoup du màle, et ensuite c’est que malgré cette 
» différence, et quoiqu’elle conserve jusqu’à un certain 
» point, par Comparaison avec celui-ci, lun des plus 
» brillants, il est vrai, et des plus richement coloriés 
» des Oiseaux du genre qui nous occupe, cette simpli- 
» cité relative de coloration, caractère habituel des 
» femelles, est elle-même encore assez brillante pour 


LA 


» qu'il doive infailliblement arriver quon la considère 
» comme le mâle d’une autre espèce, si on la voyait 
» seule et si l’on n’était point averti. 

» Cette femelle n’était pas connue lorsque M. Tem- 
» minck a publié la figure et la description du màle 
» dans le premier volume de cet ouvrage. Depuis il Pa 
» reçue de plusieurs localités, et a bien voulu nous 
» mettre à même de la figurer en nous en envoyant 
» deux individus, l’un des Célèbes , l’autre de Ternate, 
» dans les Moluques, qu’il considère tous deux comme des 
» femelles, quoiqu'il existe entre eux quelques différences. 
» Ces différences tiennent-elles à l’âge ou à la localité, 
» ou bien l’un de ces individus ne serait-il pas un jeune, 
» comme nous sommes disposé à le penser? C'est ce 
» que, faute de renseignements, il nous est impos- 
» sible d'examiner, et nous ne pouvons, quant à présent , 


—_ 236 — 
» qu'admettre la détermination qui «à été établie et 
» adoptée. » 

Nous avons en effet toujours douté, dès le principe, 
de cette identité d'espèce entre les deux individus. Une 
étude plus attentive que nous avons faite depuis n’a eu 
pour résultat que de nous confirmer davantage dans 
nos doutes primitifs. Ce qui nous détermine aujourd’hui 
à cette spécification nouvelle et distincte , c’est l’obser- 
valion que nous avons constamment faite, observation 
confirmée par tous les voyageurs, que dans le groupe 
de Pigeons composant le grand genre Prilonopus de 
SwWalnson, Jamais la femelle ne diffère autrement du 
mâle que par des teintes moins brillantes dans les cou- 
leurs, qui sont presque toujours les mêmes chez les 
deux sexes. 

C'est, au surplus, ce que M. Temminck lui-même a 
déjà reconnu à l’occasion des K, diadematus où xantho- 
gaster et purpuratus , dans le texte explicatif du n° 254 
de ses planches coloriées, où il dit : 

«La Colombe diadema et le Kurukuru forment en 
» effet deux espèces ou races distinctes dont nous 
» connaissons maintenant les deux sexes, et que nous 
» savons très-positivement qu'il n'existe point de différence 
» marquée de livrée ; les mâles, chez les deux espèces, 
» portent seulement des couleurs plus vives que les 
» femelles. » 

Nous regrettons bien certainement, pour asseoir 
notre conviction d'une manière encore plus solide, de 
n'avoir pas en n0s mains les éléments de comparaison 
que possède le célèbre Ornithologiste hollandais ; mais, 


= 997 — 

en l'absence de ces matériaux, nous croyons que les 
deux exemplaires qu'il a envoyés sont suffisants pour 
appuyer notre Opinion. 

En attendant , nous allons reproduire la description 
qui en accompagnait la figure. 

« Cette espèce a le dos, le dessus des ailes et de la 
» queue d’un beau vert brillant à reflets dorés ; sur le 
» milieu de la partie visible de chacune des plumes des 
» couvertures des ailes, on distingue une tache, en 
» forme de goutte, d’un bleu foncé, ce qui donne à 
» cette partie un aspect très-remarquable. La gorge est 
» d’un gris cendré qui prend une teinte d’un vert bleuâtre 
» en descendant vers la poitrine. Celle-ci est entièrement 
» couverte, jusqu'à sa partie inférieure, de plumes 
» échancrées de cette même couleur. Le ventre est d’un 
» blanc jaunâtre , et les flancs sont du même vert que le 
» dos. La queue est d’un vert foncé , et les taches qui en 
» terminent les pennes sont grises à leur extrémité et 
» n'ont point.de blanc. Les veux sont rouges, le bec est 
» d’un gris bleuàtre et les pieds sont d’un rouge terne, » 

La longueur totale est de 10 pouces. 

Un caractère entre autres bien suffisant pour distin- 
guer spécifiquement ce Kurukuru du Superbus, est la 
forme des plumes pectorales, dont l’échancrure pro- 
noncée attire l'attention au premier aspect, de même 
que chez le Purpuratus, le Xanthogaster et le Dupetit- 
Thouarsii, etc., tandis que le chez Superbus il faut y 
regarder de très-près pour bien saisir ce caractere, les 
barbules qui dépassent le rachis dans cette espèce s’ar- 
rondissant au lieu de finir eu pointe. 


ve — 
KURUKURU A DIADÈME. 


Kurukuru xanthogaster ( Wagler ), O. des Murs et F1. Prévost. 
Columba xanthogastra , Wagl. 

——— purpurata,Temm., pl. col. 254, 

——— diademata, Temm., pl. col. 254, texte. 

Ptilonopus flavigaster , Swains. 

———— æanthogaster, G. R. Gray. 

Srrc. cHar. À. supr@ viridis, subtüs junquillaceus; capite, 
collo pectoreque flavide albis ; vertice à commissuré usque ad 
summum capitis lineä flavä circumcincto; scapularibus in 
medio cœruleis; secundariis et tegminibus flavo marginatis ; 
gutture flavo, lateribus cruribusque virescentibus. 


On sait qu’à l’époque où M. Temminck fit paraitre le 
n° 254 de ses planches coloriées, il y donna la figure de 
ce Kurukuru sous le nom de Kurukuru femelle (Columba 
purpurata, Lath.), tant on était alors porté à référer à 
une seule et même espèce tout ce qui, de près ou de 
loin, présentait le même ensemble de couleur ou de ré- 
partition de teintes. 

Il fallut, pour relever presque immédiatement cette 
erreur, que Quoy et Gaimard fussent de retour de leur 
si riche exploration de l'Uranie, et s’occupassent fort 
heureusement de la publication des découvertes de leur 
voyage. C’est en ces termes qu’ils le firent (foyage au- 
tour du monde de VUranie, p. 34, note 2) : 

«Dans l'ouvrage qui fait suite aux Oiseaux de 
» Buffon, par M. Temminck (43° liv., pl. 254), ce 
» naturaliste fait figurer une Colombe qu'il regarde 
» comme la femeile de lespèce Kurukuru. Elle a le 
» dessus de la tête cendrée, avec une bande jaune au- 


— 239 — 

» dessus de lœil. Si c’est une femelle, nous ne pensons 
» pas qu'elle doive appartenir à cette espèce. Ces Oi- 
» seaux sont très-communs dans l’île de Guam; nous 
» en avons tué un très-grand nombre; nous avons 
» même possédé assez longtemps un couple mâle et fe- 
» melle, pris sur le nid, dont les individus ne diffé- 
» raient pas le moins du monde lun de lautre, tant 
» pour la couleur que pour la grosseur, et tous ces 
» Oiseaux avaient l’élégante calotte purpurime qui la 
» distingue, Voilà bien certainement ce qui existe dans 
» cette Île; peut-être ailleurs la femelle présente-t-elle 
» quelque différence. » 

C'est alors que M. Temminck s’empressa de faire la 
rectification suivante : 

« Induit en erreur par des données inexactes, nous 
» avons publié le portrait de cetie nouvelle espèce sous 
»le nom de ÆXurukuru femelle (Columba purpurata , 
» Lath.); l’ensemble des formes ferait en effet présumer 
» que notre Oiseau, figuré planche 254, est la femelle 
» de cette espèce. Des renseignements obtenus depuis, 
» ainsi que l’examen de plusieurs sujets des deux sexes, 
» et le doute émis par MM. Quoy et Gaimard , au sujet 
» de cette identité présumée, nous mettent à même de 
» revenir sur cet article, vu que la Colombe diadème et 
» le Kurukuru forment en effet deux espèces ou races 
» distinctes, dont nous connaissons maintenant les deux 
» sexes, et que nous savons très-positivement qu'il 
» n'existe point de différence marquée de livrée, les 
» mâles, chez les deux espèces, portant seulement des 
» teintes plus vives que les femelles. » 


— 20 — 

En voici maintenant la description : 

Dessus de la tête, depuis la commissure du bec jus- 
qu'au sommet du vertex, d’un blanc mat d’un aspect 
cendré , encadré par une ligne jaune-serin partant de 
la commissure, passant en forme de sourcil au-dessus 
de l’œil, et allant en s’élargissant au vertex. Le menton 
et la gorge sont du même jaune-serin. Nuque, côtés 
de la tête et du cou, et poitrine, d’un blanc légère- 
ment jaunàtre : cet aspect jaunâtre à la poitrine tient à 
la forme échancrée des plumes de cette partie, dont la 
base étant jaunâtre sert comme de fond à la couleur 
blanche des barbules échancrées, qui viennent s’y dé- 
tacher d’une manière assez tranchée. Dos et manteau 
verts : cette couleur est aussi celle des petites couver- 
tures des ailes ; moyennes couvertures vertes largement 
bordées de jaune ; grandes couvertures d’un bleu foncé 
également bordées de jaune; rémiges primaires d’un 
vert bleuätre foncé sur leur page externe , qui est fine- 
ment lisérée de blanchâtre , vertes sur leur page in- 
terne; ventre, dans toute son étendue, d’un beau 
jaune jonquille ; flancs et tarses d’un vert nuancé; 
queue d’un vert foncé, terminée par une large bande 
d’un vert clair variant du grisâtre au blanchâtre; yeux 
rouges ; bec blanc à la pointe; doigts noirs. 


Longueur totale de . . . . , . , . 20 à 21 centimètres. 


Habit. L'ile Banda. 


— 2 — 
KURURKURU DUPETIT-THOUARS. 


Columba Dupetit- Thouarsii (Néboux), Rev. zool., 1840, p. 289; 

Poy. au pôle Sud, pl. 29, fig. 1. 

Ptilonopus leucocephalus ( Gray), Birds. Brit. mus., v11, p. 2. 

Columba kurukuru purpureo-leucocephalus (Hombr. et Jacq.), 
Ann. sc. nalur., 1841. 


ee ee 


Ptilonopus —— (G. R. Gray). 
—— ÆEmiliæ (Lesson), Ech. rnond. sav., 1845, p. 871. 
Kurukuru Dupetit- Thouersii (Néboux ), FL Prévost et O. des 


Murs. 


Caar. sec. Phil. suprà viridi-olivaceus; capite albo , strià au- 
rantiacà cinclo; quiture flavo ; collo et loris cinereo-virescen- 
tibus ; peclore medio aurantiaco ; abdomine et crisso pallide . 
flavis: remigibus primariis in primd dimidià parte à stipite 
nigris, in ullimä, ad apicem intense viridibus, albo flavido 
striclè, secundariis eodem viride latiùs flavo, marginaus ; 
tegminibus majoribus viride splendidè cœrulescenti notatis; 
rectricibus lœtè metallicèque viridibus, flavo pallescentibus 
ad apicem. 


Description. Le docteur Néboux à donné de cet Oi- 
seau, dans la Revue zoologique de 1840, page 289, la 
description succincte suivante : 

Mâle adulte. « Calotte d’un blanc pur entourée d’un 
» liséré orange ; dos vert olive; ventre d’un beau jaune 
» orange; région anale Jaune serin; ales : première 
» penne très-rétrécie dans son tiers postérieur, la qua- 
» trième est la plus longue ; rémiges secondaires et cou- 
» vertures supérieures à reflet vert doré métallique, 
» bordées de jaune et présentant une tache bleue au 
» centre ; queue légèrement fourchue; rectrices d’une 
» couleur verte à reflet métallique, puis d’un blanc jau. 


O1sEAUx, 16 


— 99 — 
» nâtre à leurs extrémités ; tarses rouge orangé ; ongles 
» noirs; bec noir à la base, blanc à l'extrémité; iris 
» rouge. » 

Habit. L'ile Christine, l’une des Marquises. 

Les indigènes l’appellent Koukou. 

Nous allons compléter ces caractères principaux par 
les détails de ptilose qui suivent : 

Tout le dessus de la tête, depuis les narines , d’un 
blanc mat entouré d’un cercle étroit de couleur orange; 
gorge jaune pale; cou et lorums d’un cendré verdàtre 
mat; tout le dessus du corps d’un vert légèrement oli- 
vâtre; rémiges primaires noires dans leur moitié in- 
terne, d’un vert foncé dans le surplus, finement lisérées 
extérieurement d’un filet blanc jaunâtre ; rémiges secon- 
daires également vertes, lisérées plus largement d’un 
jaune serm; les grandes couvertures présentent vers 
leur pointe une large tache angulaire d’un vert tour- 
nant au plus beau bleu foncé ; quelques traces de cette 
dernière couleur se retrouvent clairsemées sur les pe- 
tites couvertures; milieu de l'estomac jaune orange, 
tournant au Carmin violacé au centre et quelquefois au 
minium, d’après un bel individu rapporté au Muséum 
d'histoire naturelle de Paris par M. Mercier, attaché au 
jardin botanique; abdomen et couvertures inférieures 
de la queue Jaune serin; rectrices d’un beau vert dans 
les deux premiers tiers de leur longueur, à reflet mé- 
tallique jaune päle dans le surplus jusqu’à la pointe, 
qui devient presque blanche ; queue légèrement échan- 
crée; la première rémige, un peu plus courte que la 
seconde, est échancrée profondément sur les deux 


— 2h3 — 
bords et réduite à une espèce de ruban, ce qui est un 
des caracteres des vrais Ptilonopes. 


Longueur totale, . . . . .. . . «+ 25 1/2 centimètres, 


C’est le même Oiseau qui, depuis la publication que 
le docteur Néboux en à faite dans la Revue zoologique 
de 1840, a été décrit par M. J.-E. Gray (dans Birds in 
the Brit. Mus., IT, p. 2), sous le nom de Ptilonopus 
leucocephalus, et par Lesson (Écho du monde savant, 

1845, p. 871) sous celui de Ptilonopus Emiliæ, réformé 
dans ses Suites à Buffon, 1847, page 209. 

C’est encore le même Oiseau que MM. Hombron et 
Jacquinot (dans les Annales des sciences naturelles, 1841, 
zoologie, p. 316) ont décrit de la manière suivante, 
et sous une dénomination si en dehors des règles lin- 
néennes !: 

« Colombe kurukuru leucocéphale. 

» Columba kurukuru purpuro-leucocephalis. 

» Variété de la Colombe kurukuru femelle. Cette Co- 
» lombe leucocéphale (à tête blanche) est une jolie va- 
» riété de la Colombe kurukuru femelle représentée par 
» Temminck ". 

» Tête blanche, entourée d’une auréole jaune d’or ; 
» cou vert grisätre; dos, tectrices, vert à reflets jau- 
» nâtres ; de chaque côté trois tectrices scapulaires ma- 
» culées dans leur centre de bleu azur, entouré de vert 
» semblable à la teinte générale du dos; rémiges vert 


! Temminck n’a jamais donné la figure de la femelle du Ku- 
rukuru, mais ce qu'il en considère seulement comme une "Hbnis 
variété qui se voit à sa pl. 55. 


— 2h — 
» Vif, taché de bleu azur, lequel est bordé de vert jau: 
» nâtre en arrière et de jaune en avant; queue verte à 
» reflet bleu, traversée d’une bande jaune à son extré- 
» milé. 

» Menton, gorge , jaunes; joues gris verdètre ; cou 
» et plastron grivelés de jaune verdâtre et de gris ver- 
» dâtre; poitrine et ventre roux rose; croupion et tec- 
» trices caudales jaunes; cuisses jaune verdàtre; flancs 
» verdàtres; tectrices alaires inférieures grises, salies 
» çà et là de jaune verdâtre; rémiges gris ardoise. 

» Pieds roses ; bec noir, blanc à son extrémité anté- 
» rieure; iris jaune. 

» Taille 33° centimètres. Habit, Nuhiva. » 

C’est enfin le même Oiseau que ces voyageurs, mieux 
renseignés, ont figuré dans la zoologie de leur Voyage 
au pôle Sud, Ois., pl. 29, fig. 4, sous son véritable nom 
de Colombe Dupetit-Thouars. Il est probable qu’ils re- 
viendront sur cette erreur lorsqu'ils publieront le texte 
à l'appui de leur riche atlas. 

Ces quatre descriptions, toutes concordantes, font 
suflisamment connaître le plumage du màle adulte de 
cette espèce. 

Les caractères d'organisation et de coloration sont, 
on le voit, tous ceux assignés au genre Ptilonopus , si 
judicieusement créé par Swainson : c’est la même forme 
de bec, de queue et de tarses légèrement emplumés à 
leur naissance; c’est de plus la même distribution gé- 


1 C'est 23 qu'il faut lire; c'est certainement une erreur du 


typographe. 


me 
uérale de couleur si remarquable, surtout par cette 
plaque occipitale presque toujours encadrée et comme 
isolée du reste de la coloration; c’est enfin la même na- 
ture de plumes à la région pectorale, toutes étant tron- 
quées bifides et d’un aspect rigide. 

Nous ajouterons que notre Colombe compose, avec 
le Pr. purpuratus (SWains.), Pr taïtensis, Lesson 
(G.-R. Gray), Pt. œanthogaster (G.-R. Gray) ou dia- 
demata (Temm.), un petit groupe offrant les rapports 
d'ensemble les plus complets, et remarquable avant tout 
par la forme si exceptionnellement acuminée des plumes 
de la poitrine. Nous ne pouvions donc hésiter à classer 
notre espèce dans le nouveau genre Kurukuru. 

Maintenant on conviendra qu'il est difficile de ne pas 
apercevoir les rapports les plus intimes entre cette 
Colombe et la Colombe diadema de Temminck, Ptilo- 
nopus æanthogaster (G.-R. Gray), pl. col. 254, rapports 
tels que ce n’est qu'après un long et minutieux examen 
que nous nous sommes décidés à en faire une espèce 
distincte, que le docteur Néboux à dédiée à M. Pa- 
miral Dupetit-Thouars, commandant de l'expédition. 

Ainsi, ce que le Pt. xanthogaster a de plus remar- 
quable , parmi ses congénères à plaque occipitale si vi- 
vement colorée , c’est d’avoir la sienne d’un blanc mat 
pur, et d'autant mieux indiquée qu’elle se trouve cir- 
conscrite par une bande étroite, d’un jaune serin, par- 
tant des narines, passant au-dessus de l'œil, en forme 
de soureil, et allant, en s’élargissant, contourner cette 
plaque blanche par-dessus la nuque, où elle forme 
vraiment diadème. 


— 2h6 — 

Or cette plaque est la même dans notre espèce; elle 
est également encadrée d’un cercle jaunâtre partant du 
même point et décrivant la même ligne que dans le 
Pt. xanthogaster : seulement ce cercle est dans tout son 
parcours très-étroit, d’un jaune faiblement orangé, 
moins apparent néanmoins que dans cette dernière , le 
fond de couleur sur lequel il se dessine chez elle étant 
d’un blanc presque pur, tandis que, chez la nôtre, ce 
fond est d’un cendré verdätre mat et terne, presque 
comme chez les Trerons ; la gorge est également jaune, 
mais d’un jaune soufre; enfin les taches bleues des 
grandes couvertures et leur liséré jaune sont les mêmes. 

Mais ce qui l'en distingue complétement, à part la 
couleur cendrée du cou et de la poitrine, e’est d’abord 
une tache du même blanc que le dessus de la tête, en 
forme de moustache, placée au-dessous de la mandi- 
bule inférieure, et encadrant ainsi à sa base la tache 
gulaire jaune; ensuite le ton olivâtre de tout le dessus 
du corps, qui est d’un vert gai chez l'autre; puis l’ab- 
sence de cette teinte jaune vif uniforme qui colore tout 
le ventre et les flancs du P4 xanthogaster, cette teinte 
étant remplacée chez notre Oiseau par un jaune sale un 
peu verdätre, etau milieu du ventre par une large tache 
rouge orangé passant au Carmin violacé dans le centre ; 
ensuite une bande blanc jaunâtre de pres de 2 centimè- 
tres de largeur, qui termine chacune des rectrices à la 
pointe, au lieu que cette partie ne se distingue, chez 
le Pr. æanthogaster, que par une teinte d’un vert plus 
clair que le reste de la queue; et enfin la couleur des 
tarses, d’un gris noirâtre chez celle-ci, d’un rouge 


— 97 — 


orange chez celle-là, sans parler de la taille, plus grande 
chez notre Oiseau de 3 centimètres au moins. 


KURUKURU DE SAMOA. 


Kurukuru Samoensis, O. des Murs et F1. Prévost. 
Ptilonopus —— J. Verreaux , mss. 
Püilonope de Marie, Hombr. et Jacq., f’oy. au pôle Sud, atlas, 
Oïs., pl. 29, fig. 5. 
Colombe de Vincendon , \ 
Columba kurukuru superba, fæmina, Ann. sc. as ibid. 
t. XVI, 1841, p. 516, 


SrEC. CHAR. À. flavus; fronte, vertice, scapulo humerali et 
tectricibus subcaudalibus ex roseo vinaceis, pileo flavo cir- 
cumcinclo ; reliquo capitis et collo albis levissimé flavidis ; 
pectore rosaceo , albo striolato ; collo post-infero rufo ; pri- 
mariis viridi splendentibus; secundariis, tectricibus majoribus 
et rectricibus ex cinereo albis; illis fascid apicali viridibus ; 
rostrum, orbilæ pedesque cærulei. 

La première description et la premiere figure de cette 
remarquable espèce ont été données par MM. Hombron 
et Jacquinot, chirurgiens de la Zélée. Mais quoique 
récemment découverte, cette espèce est une de celles 
dont l’élucidation nous paraît avoir le plus d'impor- 
tance, par suite de la confusion qui règne dans sa dé- 
nomination scientifique, confusion que le temps ne fe- 
rait qu’accroitre. 

Ainsi dans les Annales des sciences naturelles, 2° série, 
t. XVI, 1841, p. 316, on lit l’article suivant, commu- 
niqué à l’Académie des sciences de Paris par ces deux 
VOYageurs : 

«Colombe Kurukuru de Vincendon (Columba kuru- 


» kuru superba), fœmina. 


— 2h85 — 

» En dessus, tête pourpre, tendant un peu vers Île 
» roux, entourée d’un cercle Jaune peu marqué; cou 
» blanc, traversé d’une bande jaune d’or à sa base; 
» ceinturon pourpre, étendu d’une épaule à l’autre ; 
» dos, tectrices alaires et caudales, rectrices grises ; 
» la circonférence des plumes seulement encadrée de 
» jaune d'or un peu verdâtre; mais, au milieu du dos 
» et sur les tectrices caudales supérieures , la totalité de 
» la surface des plumes revêt cette teinte brillante d’or 
» nuancé légèrement de verdàtre. Les rémiges sont vert 
» éclatant aussi varié d'éclat que l'incidence de la lu- 
» mière est variable; chacune d'elles sont denticulées 
» en avant de jaune paille. Une bande vert brillant tra- 
» verse la queue vers son extrémité libre. 

» En-dessous : menton, gorge, cou, blancs ; plumes 
» du plastron grivelées de rose et de blanc : ce joli 
» plastron se détache sur un fond orangé, qui orne le 
» milieu de la poitrine ; le ventre est blanc, un peu mêlé 
» de jaunâtre; les tectrices caudales inférieures sont 
» presque roses; les pennes sont grises. 

» fris blanchätre ; pieds et bec gris verdtre. 

» Taille 33 centimètres (c’est 23 qu'il faut lire). 

» Habit. Les iles Viti. Notre spécimen provient de 
» Balaan. » 

Et d’abord, pourquoi lui donner en français un nom 
spécifique nouveau, alors qu'on reconnaît dans la même 
ligne que l'individu pourrait n'être qu'une femelle du 
C. superba, et qu'on ajoute entre parenthèses Columba 
kurukuru superba, fæmina. 

Cette contradiction valait au moins la peme d'une ex- 


— 249 — 
plication dans le cours de la note, et on ne Fy trouve 
pas. 

Ce n'est pas tout : l’'exemplaire ainsi décrit est figuré 
par les mêmes voyageurs dans l’atlas de leur Voyage au 
pôle Sud, pl. 29 des Ois., fig. 2: on va sans doute lui 
donner au bas de la planche l’un des deux noms insérés 
dans la note lue à l'Académie des sciences? Nullement. 
C’est un troisième nom qu'on lui donne, el ce nom est 
Ptilonope de Marie. 

Et pas un mot d'observation pour aider à débrouiller 
ce chaos! 

En présence d’une confusion semblable, qu'il ne nous 
était pas possible de ne point signaler, nous n’avons vu 
d'autre moyen d’en sortir, quant à la dénomination 
scientifique à donner à cette espèce magnifique et en- 
core bien rare, que de lui imposer celui de Samoensis, 
que nous avons trouvé dans les notes manuscrites si 
précieuses de F. Verreaux, qui a rapporté au Muséum 
d'histoire naturelle de Paris deux exemplaires de la 
même espèce, dont ün parfaitement adulte, qu'il a eu 
vivant, et d’une fraicheur de plumage extraordinaire. 

Voici la description fort exacte qu'il en a faite dans 
ces notes, et que nous reproduisons textuellement : 

« Calotte d'un beau rose vineux très-brillant, légère- 
» nent bordée de jaune pâle ; tout le reste de la tête et 
» du cou d'un blanc mat légèrement teint de jaune, 
» c'est-à-dire que le centre de chacune des plumes est 
» de cette derniére couleur; une tache d’un jaune rous- 
» sètre sur le bas du derriere du cou, suivie d’une large 


» bande transversale du même rose vineux que sur le 


— 250 — 

» sommet de la tête, mais cette bande s'étend jusque 
» sur les petites couvertures des ailes ; le reste des par- 
» ties supérieures est d’un jaune olivâtre qui devient 
» plus foncé sur le croupion et les couvertures supé- 
» rieures de la queue : cette même couleur est aussi ré- 
» pandue sur les ailes et s’y trouve mélangée de gris ; 
» toutes les rémiges sont d’un vert brillant , excepté les 
» plus rapprochées du corps, qui sont grises, frangées 
» de jaune olivâtre. » (Toutes les rectrices sont grises et 
portent à leur extrémité une large bande du même vert 
que celui des rémiges : cette bande n'existe que sur le 
côté externe des six rectrices latérales, et à 1 centi- 
mètre de leur pointe; les médianes n’en portent pas 
l'apparence et sont entièrement d’un gris pâle ou blan- 
châtre. ) « Sur le devant du cou se trouvent des plumes 
» échancrées vers leurs pointes , d’un rose le plus beau 
» sur une partie de leur longueur, mais blanchâtres 
» vers leurs pointes. » (En sorte que le cou et la poi- 
trine paraissent grivelés de rose et de blanc.) «Au- 
» dessus de ces plumes se trouve une tache roussâtre , 
» mais en relevant ces plumes il est facile de voir le 
» rose qui en colore le centre : tout ie reste des parties 
» inférieures est d’un jaune päle, excepté les couver- 
» tures inférieures, qui sont encore du même rose vi- 
» neux que la tête. L'œil se trouve entouré d’une cou- 
» leur bleuâtre, et cette dernière couleur existe sur les 
» pattes et la moitié du bec, dont l'extrémité est oli- 
» vâtre; celui-ci est très-court et légèrement vouté; les 
» ongles sont bruns; l'iris est blanc cerelé de rouge 
» pale. 


— 251 — 

» Longueur totale 7 pouces; de laile fermée 4° 4! ; 
» de la queue 2° 05". 

» La première rémige se trouve échancrée et exces- 
» sivement rétrécie vers son extrémité d'environ 4°. » 

Les tarses sont emplumés dans les trois quarts de 
leur longueur. 

Trouvée à lile Samoa , l’une des Navigateurs. 


KURUKURU DE TAÏITI. 


Kurukuru Taïlensis, O. des Murs et FL Prévost, 

Ptilonopus — —, GR. Gray. 

Columba kurukuru, var. Taïtensis ( Lesson), Foy. de la Co- 
quille, 1° vol., p. 297. 


Cuan. srec. Ptil, fronte ac pileo pallidè roseis, line flavä cir- 
cumscriplis: collo, corporeque inferiori cinereis, viridi pal- 
lidé tinctis ; qulà pectoreque pallescentibus ; corpore superiori 
viridi-auralo ; caudà apice albido fasciatà. 


Les ornithologistes sont généralement d'accord au- 
jourd’hui pour considérer comme espèce distincte du 
Ptilonopus purpuratus (Swains.) ou Kurukuru, celle dé- 
crite par Lesson comme Columba kurukuru , Var. Taïten- 
is, et dont il a donné la description suivante dans le 
Voyage de la Coquille ,t. K*, p. 297 : 

La Kurukuru d'Otahiti, dit-il, a la taille un peu plus 
» forte que la variété de Timor dont elle se rapproche 
» le plus. La calotte purpurime qui revêt le sommet de 
» la tête est d’un rose très-pâle, que circonserit une raie 
» assez large d’un jaune peu intense. Le cou en entier, 
» jusqu'aux épaules , et tout le dessous du corps sont 


« 


— 


ee 
+) 4 


Le 


» d'un gris cendré uniforme, teinté de verdàtre plus 
» foncé sur la poitrine. Le menton, la gorge et le devant 
» du cou sont blanchätres. La région anale et les cou- 
» vertures inférieures de la queue sont d’un jaune vif. 


» Le manteau , le dos, le croupion et les ailes sont d’un 


— 


» vert doré avec des teintes rousses. Les rémiges sont 
» brunes en dedans. La queue est régulièrement recti- 
» ligne; chaque rectrice est d’un vert métallique en 
ve 


rw bé 


» dehors, brune en dedans et terminée par une lar 
» raie blanchätre bordée &e brunâtre. Le bec est plombé 
» et blanc à l’extrémité : il est recouvert dans l’état de 
» vie par deux petites caroncules orangées qui surmon- 
» tent les narines. Les tarses à moitié emplumés sont 
» de couleur orangée. » 

C’est avec juste raison que le docteur Néboux a dé- 
crit sous le nom de Colombe de Taïti, dans la Rev. zool., 
octobre 1840, p. 289, un individu qu'il ne consi- 
dérait que comme une variété de celui décrit par 
Lesson. 

« Celleque nous avons rapportée, dit-il, diffère sur- 
» tout de celle de M. Lesson en ce que la calotte est 
» violette, les tarses noirs, et en ce que la zone blan- 
» châtre qui se remarque à la queue n’occupe pas pré- 
» cisément extrémité des rectrices : dans notre indi- 
» vidu, cette zone se trouve à un centimètre de l’ex- 
» trémité. » 

Un individu exactement semblable à ce dernier avait 
déjà été rapporté à Paris par l'expédition de lAstrolabe 
en 1829 : il provenait de Tonga-Tabou. 


Longueur totale, . . . , . . . . 22 1/2 centimètres. 


= JT — 
KURUKURU DE NÉBOUX. 
Kurukuru Nebouxii (FI. Prévost et O. des Murs). 


Cuan. sec. Pl. capte, collo, corporequeinferiori cinereo leviter 
flavo-virescenti ; naribus et qulà albidis; fronte verticeque cine- 
reo-lilaceis; pallio et alarum tegminibus œre virescentibus ; 
majoribus primarisque lœtè et metallicè viridibus ; his late, 
lis strictè flaro pallidè marginatis ; crisso flavo; rectricibus 
apice exlerno fiavo pallidè fimbrialis, interno cinereo fasciatis. 
Caudà furcatà; rostro albo ; pedibus ac digitis nigris. 


Malgré les rapports assez intimes qui paraissent au 
premier aspect exister entre cette Colombe et le Pr, Taï- 
tensis de Lesson , nous n'avons pas hésité à la considérer 
comme constituant une espèce nouvelle parmi les Ptilo- 
nopes. 

En voicila description : Tout le dessus de la tête à par- 
ür de la naissance du bec jusqu'au sommet de la nuque 
est l’un cendré lilas tres-clair ; la gorge et les narines 
sont d’un blanc fort légèrement lavé de jaunâtre, les côtés 
de la tête et du cou, le derrière de celui-ci jusqu'aux 
épaules, et tout le dessous du corps sont d'une teinte 
grise légèrement zonée de vert jaunâtre; les plumes de 
l'estomac ont la forme lancéolée qui se remarque chez 
les Pt. purpuratus, Taïtensis et Dupetit-Thouarsiü, et 
se dessinent en gris sur le fond plus ou moins verdàtre 
ou jaunàtre que forme la première moitié de chacune de 
ces plumes de cette dernière couleur ; le dos, les petites 
etles moyennes couvertures supérieures des ailes de 
même que celles de la queue sont d’un vert uniforme, 
légèrement olivàtres à reflets de bronze ; les grandes 


— 25h — 

couvertures, de même couleur, sont bordées extérieure- 
ment de jaune, les rémiges secondaires et primaires, 
d’un beau vert foncé à reflets métalliques, sont égale- 
ment bordées, mais très-finement, sur leur tranche ex- 
térieure, d’un jaune blanchâtre, et sont noires sur leur 
page interne; la région anale est jaune jonquille ; les rec- 
trices, du même vert que les rémiges primaires, ont le 
reflet bronzé des plumes du dos, etelles portent toutes, 
à l'exception des deux médianes, sur la partie de leur 
tranche externe la plus rapprochée de la pointe, un fin 
liséré de jaune de 1 centimètre d’étendue, et dans toute 
la largeur de leur page interne, à partir du rachis, une 
bande gris cendré qui ne s'aperçoit que lorsque la queue 
est étendue. Le bec est d’un blanc d'argent; les tarses 
et les ongles sont noirs. 


Longueur totale. . 4.5.) . . 24 centimètres, 


—- de queue cé nos 7 — 

Elle vient de Taïti, d’où elle a été rapportée par 
M. Filleux, qui en a fait hommage au Muséum d'histoire 
naturelle de Paris. 

Sans doute la forme des plumes de la poitrine, l’en- 
semble semi-grisàtre et verdàtre de la coloration, cette 
teinte rosacée qui apparaît au sommet de la tête, pour- 
raient donner l’idée que cet individu ne serait peut-être 
bien qu’un jeune ou une variété du Pr. Taïtensis, décrit 
par Lesson. 

Mais tout doute à cet égard doit tomber devant les 
différences caractéristiques qui séparent notre exem- 
plaire de ce dernier; voici en effet sur quoi reposent 
ces différences organiques, qui sufliraient à la rigueur 


— 955 — 

non-seulement pour la faire séparer spécifiquement de 
celui-ci, mais encore pour la distinguer génériquement 
des vrais Ptilinopes. 

La partie cornée du bec, d’une couleur blanchâtre , 
est plus renflée ; les tarses sont emplumés à peine au- 
dessous du genou ; la première rémige , de très-peu de 
chose plus courte que la deuxième (d’un demi-centi- 
mètre), ne porte pas d’échancrure bien sensible, et 
offre presque la forme habituelle des autres ; les ailes 
sont, du reste, proportionnellement plus longues que 
dans les Kurukurus : chez ces derniers, elles arrivent 
à # centimètres 1/2 de l'extrémité de la queue; chez 
notre Colombe elles s’en rapprochent de 2 centimètres 
seulement; par la même raison, les grandes couver- 
tures qui, chez les Kurukurus, ne sont éloignées, à 
leur pointe, de l'extrémité des rémiges primaires que 
de 2 centimêtres 1/2, le sont ici de # centime- 
tres; enfin, la queue est positivement échanchrée, 
les deux rectrices latérales étant les plus allongées, 
et les deux médianes les plus courtes, même pliée, 
c'est-à-dire à l’état de repos : ce qui établit entre 
elles une différence sans doute peu sensible à la me- 
sure, puisqu'elle est de 6 millimètres, mais frappante 
pour l'œil le moins exercé, qui ne saurait sy 
tromper. 

Nous avons retrouvé dans la riche collection du 
Muséum de Paris un individu exactement semblable au 
nôtre provenant également de Taïti, et qui en avait été 
rapporté par l’'Expédition de la Zélée. 

Nota. C’est par erreur typographique que notre 


CDN — 
planche VI, qui contient la figure du Kurukuru Nebouxiü, 
porte le nom de Columba Dupetit-Thouarsii. 


KURUKURU DE SWAINSON. 


Kurukuru Swainsonti, O des Murs et FL Prévost. 
Ptilonopus purpuralus, var. Regina, Swains., Zool. j. 1, p. 475, 
1829. 
Columba purpurata, Temm., pl. col. 254; Jard. et Selby, JL 
orn., vol. IT, pl. 70. 
Ptilonopus Swainsoni, Gould., Pr. z. S., 1842, p. 18. 
Nec Columba roseicapilla, Lesson, Trait. d'orn., p. 47°. 


SPEc. cuar. À. fronte et vertice splendidè, coccineis. hoc colore 
lineä angustà flavà nisi apud frontem cincto : peclore sordidé 
viridi, singulis plumis ad apicem bifidis, more jurculæ , cujus 
apices maculà triangulari argenteo-cinereä notantur ; abdo- 
mine medio aurantiaco (cum maculà medià lætè violaceà ); 
caudæ apicè laté flavissimo ( Gould, loc. cit. ). 


Cette espece vient à l'appui de ce que nous avons déjà 
dit de la confusion à laquelle ont donné lieu les rapports 
d'ensemble existant entre les différentes espèces de 
Kurukurus, tous remarquables par leur caiotte presque 
toujours purpurine, confusion qui à fait pendant long- 
temps rapporter à cette derniere tous les individus re- 
connus depuis pour especes bien distinctes. Ainsi, il a 
fallu pres de vingt ans pour arriver à la véritable spécifi- 
cation du Swainsonii. Tenminck, à la même époque, la 
considérait comme C. purpurata, dans la note rectifica- 
tive de la description de son Diadema (xanthogoster ), 
pl. col. 264, où il s'exprime ainsi : 

« Cette race constante, qui à pour patrie les îles Cé- 
» lebes et Banda, diffère du vrai Kurukurn (C. purpurata) 


» de la Nouvelle-Hollande, et qu'on retrouve aussi à 

» Timor et à Guam. » 

Lorsque Swainson fit connaitre cette espèce ( Zool. 
Journal, vol. 1, p. 473, 1824-25), il ne la décrivit que 
comme une belle variété de €. purpurata, à laquelle il 
donna le nom distinctif de Regina , avec la diagnose sui- 
vante : 

Pt. viridis; vertice purpureo roseo margine semi-lunari 
aureo; fascià latä abdominali aurantiacä ; tegminibus 
inferioribus flavis ; pennis colli rigidis apice furcatis. » 
Quelques années après, MM. Jardine et Selby, restant 

dans les mêmes errements, en donnèrent la figure et la 

description, sous le nom de C. purpurata (Ill. orn., 
vol. 2, pl. 70), avec laquelle ils l’identifièrent complé- 
tement, confondant avec elle les prétendues variétés des 

Célèbes, d’Uliéta et de Tonga-Tabou, citées par Latham, 

et même celle de Timor. 

Quant à la Colombe des Mariannes, décrite par Lesson 
(Traité d'ornit., p. #72) sous le nom de Columba rosei- 
capilla , nous croyons que c’est à tort qu'il l'a rapportée 
à la var. Regina de Swainson , dont elle nous paraît tout 
à fait distincte, ainsi que nous l’expliquerons tout à 
lheure , surtout par la forme arrondie de ses ailes : elle 
se rapprocherait plutôt du Pt, Ewingii, Gould, dont 
nous parlerons bientôt. 

Voici la description exacte du À. Swainsonii, d’après 
un bel individu du Muséum. 

Front et occiput, à partir des narines, d’un violet car- 
miné pur encadré, à partir de la dernière moitié du 
sourcil, par une fine raie ou bordure d’un jaune serim 


OISEAUX, 15 


“ 


— 258 — 


vif; une tache blanche , partant de la commissure du 
bec, occupant le lorum et s’amincissant à la naissance 
du sourcil, complète sur le devant l'encadrement de 
cette plaque violette; nuque et derrière du cou d’un 
cendré verdàätre presque cendré bleu ; côtés du cou d’un 
gris de perle ; menton et gorge blancs se fondant sur les 
bords dans le gris des côtés du cou ; toutes les plumes 
garnissant l’estomac et la poitrine sont vertes dans leur 
première moitié à partir de la base, et gris perle dans 
l’autre moitié vers la pointe : ce gris perle, d'autant plus 
remarquable et se détachant d'autant mieux sur le fond 
verdâtre, que chacune de ces plumes est matte et sans 
reflets , et porte cette échancrure si caractéristique dans 
la ptilose de cette partie chez le K. purpuratus, et dont 
M. Temminck a donné la structure en détail : dos, man- 
teau, scapulaires et croupion d’un beau vert; petites 
couvertures des ailes d’un vert bleuâtre finement bor- 
dées de jaunätre; cette bordure un peu plus large aux 
moyennes couvertures qui sont de même couleur ; gran- 
des couvertures de même couleur, se terminant par un 
large miroir bleu, encadré largement de vert et le tout 
frangé à la pointe d’une bande jaune beaucoup plus 
large extérieurement ; les rémiges secondaires, du même 
vert que les autres plumes, sont finement entourées de 
jaunâtre; il en est de même des rémiges primaires; 
mais celles-ci terminent en noir le côté externe de 
leur pointe qui est verte, et ont leur page interne de 
même couleur ; abdomen d’une belle teinte orange fon- 
cée ; le centre de cette région portant à sa partie supé- 
rieure une large tache du même violet carminé que la 


— 259 — 


plaque occipitale ; cette couleur orange se dégradant en 
jaune serm vers le bas de l'abdomen ; plumes des cuisses 
et des tarses vertes, les premières largement terminées 
de jaune serin ; région anale et couvertures inférieures 
de la queue du même ton orangé que l’abdomen ; rec- 
trices vertes dans leur page externe, d’un noir cendré 
dans leur page interne : ces deux couleurs séparées vers 
le bas par une nuance bleue, semblable à celle des 
moyennes couvertures , et terminées à la pointe par une 
large bande d’un beau Jaune serin ; couvertures supé- 
rieures de la queue finement terminées de jaunâtre. 


longueur totale. ; 6 21. 24 centimètres 1/2. 
Cette espèce parait ne se trouver qu’en Australie, où 
elle habiterait exclusivement, principalement dans la 
Nouvelle-Galles du Sud ; c’est de la Rivière-Clarence et 
de Morton-Bay que M. Gould l'a presque toujours reçue. 


KURUKURU DES MARIANNES. 


Kurukuru roseicapilla, O. des Murs et FL. Prévost. 
Columba roseicapilla , Lesson , Traité d’Ornith., p. 472. 
Ptilonopus purpuratus, var. Regina , id. 

P. Swainsontu , G. R. Gray. 

P. Evingü, Gould, Zool. Soc., 1842. 

Columba purpurata, Temm., Pig., pl. 54? 


Srec. car. À. fronte el vertice roseus, hoc colore lineâ flavä 
nisi ad frontem cincto; peclore virescenti-cinereo  plumis 
bifidis, et ad apicem pallidè cinereis; fascià infrà pectorali 
pallidè sulphureä, abdomine medio saturaté aurantiaco, cum 
lunulà centrali helvo-cæruled; caudæ rectricibus ad apicem 
flavis, non sine tincturà viridi præsertim in rectricibus duo - 
bus intermediis notandä (Gould, Proc. zoo. soc., 1842, p. 18* 


M. Gould a, sous le nom de Ptilonopus Ewingii, donné 


— 260 — 


la diagnose dans Proc. zool. soc. 1842, p. 18, et la 
figure dans Birds of Austr., d’une Kurukuru dont il 
donne la description suivante : 

« Front et dessus de la tête roses, cette couleur entourée 
au sommet du vertex par une ligne jaune; cou et poi- 
trine d’un cendré verdätre à plumes échancrées, dont 
les pointes d’un cendré blanchätre se détachent et res- 
sortent sur le fond cendré verdâtre formé par la base 
de chacune de ces plumes ; bas de l’estomac d’un jaune 
soufre; ventre d’un jaune orange avec une tache mé- 
diane d’un violet bleuàtre; queue verte terminée par 
une bande apicale jaune légèrement teintée de verdâtre, 
surtout à l’extrémité des rectrices médianes où le jaune 
s'aperçoit à peine. » 

En rapprochant cette description de celles données 
par Lesson (Traité d’ornithologie, p. #72, l'une sous le 
nom de Colombe des Mariannes, Columba rosei-capilla , 
l'autre sous le nom de Colombe kurukuru, Columba 
purpurata , il est dificile de ne pas y trouver une con- 
cordance frappante. 

Voici la première de ces descriptions : 

« Calotte pourpre vif, cerclée de jaune päle ; ailes et 
» dos verts, avec des taches bleues ; gorge blanchâtre ; 
» joues grises ; thorax et devant du cou gris roux ; mi- 
» lieu du ventre rose vineux ; ventre et couvertures in- 
» férieures orangé ; queue blanche en dessous, » 

Nous pensons, ainsi que nous l'avons déjà dit au 
sujet du À. Swainsonii, que cette identification est erro- 
née en tout point, d’abord sous le rapport de la localité , 
car cet individu vient des Mariannes, tandis que le 


— 261 — 


Swainsoni ne se trouve nulle part en dehors de la Nou- 
velle-Hollande ; ensuite sous le rapport de la coloration, 
qui offre de notables différences ; et enfin sous le rap- 
port de l'organisme, les ailes de cette espèce étant 
presque arrondies et rentrant daus la forme et la dimen- 
sion de celles du Purpuratus, sans parler de la taille 
bien moindre. 

Nous donnons, au surplus, la description dé- 
taillée faite sur le même individu qui a servi de type 
à Lesson, et qui fait partie de la riche collection 
du Muséum d'histoire naturelle de Paris, auquel il 
a été rapporté par Quoy et Gaimard, chirurgiens de 
l’Astrolabe, commandée par le capitaine Freycinet, 
en 1829: 

Calotte lilas foncé , encadrée d’une bande jaune blan- 
châtre formant sourcil au-dessus de Pœil; quelques 
plumes de même couleur que la calotte se remarquent 
à la base de la mandibule inférieure ; nuque, joues et 
bas de la partie antérieure du cou, ainsi que l’estomac, 
d’un gris mat se détachant sur un fond vert - brunàtre 
qui forme la base de chacune des plumes pectorales ; 
une bande d’un violet noirâtre au bas de l'estomac ; tout 
le reste du ventre et région anale d’un jaune orangé ; 
flancs et tarses vert olive; dessus du corps vert à reflets 
bronzés foncés ; fines bordures jaunes aux rémiges pri- 
maires et secondaires ; moyennes couvertures avec un 
œil ou miroir central d’un beau vert émeraude d'autant 
plus remarquable, que le vert qui l'entoure est olivâtre 
et à reflets bronzés très-intenses; queue à large bande 
apicale, de deux centimètres de hauteur, d’un blanc 


— 262 — 


grisätre sale, beaucoup plus clair sur les barbes internes 
de chacune des rectrices. 


Longueur totale, . . . . . . . «<- . 20 centimètres. 


Les différences de coloration qui se remarquent entre 
cette espèce et celle de Swainson sont faciles à saisir, 
les couleurs en général en étant plus sombres et beau- 
coup moins vives que celles de cette dernière espèce que 
Lesson n’avait pas vue en nature et qui lui a fait défaut 
comme terme de comparaison. Le Swainsonii se rappro- 
cherait davantage du Clementinæ; mais outre que la 
partie antérieure du corps en est moins jaunâtre, 1] y a 
entre eux une différence constante dans la forme et la 
longueur relative des ailes, suffisante pour les distinguer 
l’une de l’autre, celles de notre espèce étant plus courtes 
de deux centimètres et demie. 

Voici maintenant la description donnée par Lesson 
sous le nom de Colombe kurukuru , Colomba purpurata, 
et que nous transerivons 1C1 : 

« Tête purpurine, bordée de jaune ; ailes et dos verts, 
» ponctués de bleu; queue vert bleu , bordée de jaune ; 
» gorge jaune; thorax gris jaune; ceinture jaune; mi- 
» lieu du ventre vineux; ventre orangé; couvertures 
» inférieures jaunes. Queue brune en dessous. De Timor, 
» par Maugé. » 

Il en est de même d’un autre individu provenant de 
la même localité, rapporté par le même voyageur de 
l'expédition aux terres australes du cap Baudin, qui se 
trouve aussi dans les galeries du Muséum d'histoire na- 
turelle de Paris. En voici la description que nous don- 


— 263 — 
nons , parce qu'elle présente quelques différences , et in- 
dique seulement une variété : 

Plaque occipitale lilas, plus foncé sur les bords , en- 
cadrée d’une fine raie à peine sensible, jaunâtre ; tête, . 
cou, haut du dos, estomac et partie supérieure du ventre 
d’un joli gris clair ; gorge blanche; dos et scapulaires 
d’un vert olive à reflets bronzés ; moyennes couvertures 
à reflets bleuâtres ; grandes couvertures et rémiges pri- 
maires , frangées largement à l’intérieur de reflets bron- 
zés très-marqués, et qui donnent à ces plumes un aspect 
de brun rougeûtre; les rectrices de même couleur avec 
une bande apicale blanc jaunâtre ; une tache d’un noir 
violacé occupe le milieu de l'abdomen dont le bas est 
olivâtre ; région anale jaune jonquille tournant au mi- 
nium à l'extrémité des plumes. 


Longueur totale. . . . : . . . . . . 20 centimètres 1/2. 


Enfin, nous n’hésitons pas à rapporter à la même 
espèce la variété sur laquelle à été faite la planche des 
Pigeons, 34, de M. Temminck, sous le nom de Colombe 
kurukuru, Colomba purpurata, Lath. (dont nous l’avons 
séparée dans notre article sur cette espèce), et dont il 
donne la description que nous avons reproduite p. 225. 

Nous croyons qu'examinant trop légèrement l’exem- 
plaire qu’il a eu entre les mains à cette époque, il aura 
négligé de constater la présence de la tache violacée 
qui se retrouve sur le roseicapilla où Ewingii, comme 
sur le Swainsonii et le Clementinæ. 

Resterait donc la question d'habitat, car s’il était 
prouvé que lEwingii ne se trouve nulle part ailleurs 


— 264 — 
qu'en Australie, où l'a observé M. Gould qui lui assigne 
le Port-Essington, notre assimilation serait sans valeur ; 
mais alors encore le roseicapilla de Lesson n’en devrait-1l 
pas moins être conservé comme espèce distincte. 


KURUKURU DE CLÉMENTINE. 


Kurukuru Clementinæ, O. des Murs et FI. Prévost. 

Ptinolope de Clémentine, Hombr. et Jacq., pl. 29, fig. 3, Foy. 

au pôle Sud. 

Srec. car. X. viridis; pileo hyanthino-purpurescenti, line 
flava strictè circumscripto; capite, collo pectoreque anterioribus 
cinereo-albidis, posterioribus flavidis; tegminibus  alarum 
flavo marginatis ; scapularibus speculo pulvurescente-violaceo 
notatis ; rectricibus flavo, margine virescenti, apice fasciats ; 
lateribus olivescentibus; pectore inferiore fascià violace no- 
tato ; abdomine medio longitudinaliter castaneo-rubido ; crisso 
flavo. 

C'est à MM. Hombron et Jacquinot, chirurgiens de 
la Zélée, que l’on doit la première figure de cette es- 
pèce dont plusieurs mdividus étaient depuis longtemps 
au Muséum d'histoire naturelle de Paris : c’est le n° 3 
de la pl. 29 de l'Atlas de leur Voyage au pôle Sud, sur 
laquelle elle porte le nom que ces voyageurs lui ont 
donné, et que nous lui conservons , de Clémentine, en 
souvenir d’illustres infortunes. Quoiqu'ils n’en aient 
publié aucune diagnose soit latine, soit française , nous 
y suppléerons par la description suivante : 

Calotte d’un pourpre violet, dépassant l'angle externe 
de l'œil d’un demi-centimètre, encadrée à son bord d’une 
étroite bande orangée se perdant dans la nuance vio- 
lette ; tête, cou, estomac et poitrine d’un gris blanchâtre 

? pl ? © ? 
plus pèle et presque blanc au menton et à la base de la 


0 — 


mandibule inférieure, jaunàtre sur la nuque et le der- 
rière du cou; plumes de lestomac échancrées , leur 
échancrure laissant voir pour fond la temte jaunâtre de 
la première moitié de la plume que chacune d’elles re- 
couvre, en sorte que leurs pointes gris pale se dessi- 
nent assez nettement sur ce ton jaune ; dos et petites 
couvertures alaires d’un vert à reflet légèrement bronzé 
ou olivätre, les moyennes et les grandes couvertures 
d’un beau vert métallique finement frangé de jaune ; les 
trois ou quatre plus rapprochées du corps portant sur 
le côté extrème de leur page interne, à découvert, une 
jolie tache ou miroir d’un violet bleuâtre d'aspect pul- 
vérulent; rectrices et rémiges d’un vert foncé mé- 
tallique ; les secondaires noirâtres intérieurement, les 
primaires extérieurement, les rectrices terminées à leur 
pointe par une large bande jaune légèrement fran- 
gée de verdàtre ; flancs vert olive ; le gris de l'estomac 
terminé , au sommet de l'abdomen, par une tache ou 
plastron d’un violet noirâtre, reproduisant parfois chez 
quelques individus , et d’une manière à peine sensible, 
des reflets qui rappellent le ton pourpré de la calotte; 
le milieu de l'abdomen dans toute sa longueur, à parüur 
de cette tache, d’un rouge marron se nuançant avec le 
jaune serin qui termine la dernière moitié des couver- 
tures fémorales , et qui teint la région anale, ce même 
jaune se terminant en orangé foncé et presque rouge de 
saturne, sur les couvertures inférieures de la queue: 
les rémiges, comme les rectrices, d’un beau gris de fer 
en dessous ; la bande jaune apicale de ces dernières pa- 
raissant blanche frangée de jaunatre à chacune d'elles : 


— 266 — 


bec noir à sa base, d’un blanc verdätre à sa pointe; 
pattes d’un brun orangé. 

Quelques individus ont l’estomac plus gris, d’autres 
plus jaunàtre. 


La longueur totale des Late est de, . . 22 centimètres. 
Celle des seconds, de.. . . . . .. a 
Les ailes, assez aiguës, arrivent à 3 centimètres de l’extré- 


mité de Ja queue. 
KURUKURU DE MERCIER. 
Kurukuru Mercier , O. des Murs et F1, Prévost. 


SPEC, CHAR. À. viridis; capile à naribus usque ad nucham infe- 
ram purpureo-violaceis , absque line circulari; maculà com- 
missurali latà concolore; corpore reliquo anteriore cinereo- 
virescenti; dorso viridi-olivescente; legminibus alarum et 
majoribus tectricibus , illis cœruleis, flavo marginatis; re- 
migus viridi-nigrescentibus; thorace abdomine olivescenti- 
flavis ; abdomine inferiore crissoque flavo-junquillaceis; caudà 
basi grised, medio viridi, reliquà grisescenti, apice flavo 
fasciatä. Rostrum basi nigrum apice corneo ; pedibus rubris. 


Cette jolie espèce, qui fait aujourd'hui partie de la col- 
lection du Muséum d'histoire naturelle de Paris, y a été 
apportée en 1848, sous le nom de Colombe Kurukuru à 
calotte pourpre, par M. Mercier, auquel nous la dédions, 
attaché au Jardin botanique ; en voici la description : 

Tout le dessus de la tête, depuis les narines jusqu’au 
bas de la nuque, d’un carmin vif violacé, bordant la 
paupière supérieure et occupant la moitié de la surface 
du lorum , sans aucun encadrement ni ligne circulaire 
semblable à celle des autres Kurukurus. Unelarge tache de 
même couleur se trouve à la base de la mandibule infé- 
rieure, et y occupe un espace d’un centimètre en hauteur ; 


— 067 — 
tout le reste supérieur du corps, depuis les joues 
jusqu’à l'estomac, d’un gris légèrement verdâtre, plus 
pale et presque blanchâtre sur les Joues, plus verdätre 
sur les épaules, légèrement jaunâtre à la gorge ; toutes 
les plumes pectorales échancrées et grises dans la pre- 
mière moitié de leur longueur ; elles se dessinent donc en 
points ou stries d’un blanc jaunâtre sur un fond gris, 
au rebours du Swainsonii, dont les stries se dessinent en 
gris sur un fond vert; dos et couvertures alaires d’un 
joli vert olivâtre , bordé de jaunâtre sur ces dernières ; 
les moyennes et grandes couvertures les plus rappro- 
chées du corps ornées d’un beau miroir bleu encadré 
d’une frange jaune serin ; rémiges primaires noires, se- 
condaires d’un vert foncé sur leur page extérieure et 
noires sur l’autre ; estomac et ventre d’un jaune olivâtre, 
les barbules de chacune des plumes de ces parties se 
terminant à leur extrémité de jaune; région anale ef 
couvertures inférieures de la queue jaune jonquille ; 
queue légèrement arrondie; les rectrices grises à leur 
base dans le premier tiers de leur longueur, d’un vert 
foncé vers le milieu, d’un gris sale dans le dernier tiers 
jusqu’à leur pointe qui est frangée de jaune ; tarses em- 
plumés dans presque toute leur longueur; bec noir à sa 
base, couleur de corne olivâtre à la pointe; pattes rouges. 
Ponsueurtatale. ss 2e: Déc 29 centimètres. 


Ailes arrivant à 1 centimètre 1/2 de l'extrémité de la 
queue et de forme aigue. 


Habit. Tes Marquises, Noukiva, où l'individu unique 
a été tué par M. Mercier, dans la vallée de Mohana, sur 
un figuier dont cet oiseau mangeait la graine. 


— 268 — 


Notre genre Kurukuru se composerait done , quant à 
présent, des espèces suivantes : 


10 Kurukuru purpuratus, O. des Murs et F1. Prévost. 


5° 


6° 


Columba purpurata, Lath. 
C. viridissima , Temm., Pig., pl. 35. 
Ptilonopus purpuratus , Swains. 


Kurukuru superbus, O. des Murs et FI. Prév. 
Columba superba, Temm., Piq., pl. 33. 
Ptilonopus superbus, G.-R. Gray. 


Kurukuru Temmainckii, O. des Murs et FL Prévost. 

Columba superba, fæmina, FL Prévost et Knipp, Pig. 
t. Ip: 77 ph 40. 

Ptilonopus superbus , G.-R. Gray. 


Kurukuru xanthogaster , ©. des Murs et FL Prév. 
Columba xanthogastra, Wagl. 

C. purpurata, Temm., pl. col. 254. 

C. diademata , ibid., texte. 

Ptilonopus flavigaster, Swains. 

P. xanthogaster, G.-R. Gray. 


Kurukuru Dupelit- Thouarsii, O. des Murs et FI. Prév. 

Columba ————————, Néboux, f’oy.au pôle Sud, 
pLa0, EE | 

C. kurukuru purpureo-leucocephalus, Hombr. et Jac- 
quinot. 

Ptilonopus leucocephalus, G.-R. Gray. 

P. Emiliæ, Lesson. 

P. purpureo-leucocephalus , G.-R. Gray. 


Kurukuru Samoensis, O. des Murs et FI, Prev. 
Ptilonopus ———— ,J. Verreaux , mss. 

Colombe de Vincendon, Hombr. et Jacq., Ann. sc. 
Columba kurukuru superba , nat., 1841. 

Ptilonope de Marie, id., Foy. au pôle Sud, pl. 29, fig. 2. 
Kurukuru Taïtensis, O. des Murs et FL. Prév. 

Columba kurukuru, var. Taïtensis, Less. 

Pälonopus Taïtensis, G.-R. Gray. 


— 1200 — 


S° Kurukuru Nebouru, O. des Murs et F1. Prév., 7'oy. de la 
Vénus, pl. 5. 
9° Æ. Swainsonü , O. des Murs et FI Prév. 
Ptilonopus purpuratus , var. Regina, Swains. 
Columba purpurata, Temm., pl. col. 254, Jard. et Selb., 
Ill. orn., vol. IT, pl. 70. 
Ptilonopus Siwainsont, Gould., Pr. zool. Soc., 1842, p.18. 
Nec Columba roseicapilla, Less. 


10° Xurukuru roseicapillus, O. des Murs et FI. Prév. 
Columba roscicapilla, Lesson. 
C. purpurala , id., Temm., Pig., pl. 54? 
Ptilonopus purpuratus , var. Regina, Lesson. 
P. Ewingü, Gould. 


11° Kurukuru Clementinæ, O. des Murs et FI. Prév. 
Ptilonope de Clémentine, Homb. et Jacq. 


120 Kurukuru Mercier, O. des Murs et F1. Prév. 
15° Kurukuru roseicollis, O. des Murs et F1. Prév. 
Columba —— , Wagl. 
C. porphyrea, Teram., pl. col. 106. 
Ptilonopus erythrocephalus, Swains.; Knipp et Prév., 


Pig., pl. 4. 
P. roseicollis, G.-R. Gray. 


Dont les plumes pectorales sont également échan- 
crées, mais dont les barbules latérales du rachis s’ar- 
rondissent à leur extrémité au lieu de s’allonger en 
pointes. 


— 270 — 
PLANCHE VIII. 


COLOMBI-GALLINE DES GALLAPAGOS. 


Columbi-Gallina Gallapagoensis (Néboux), Rev. zool., 1840, 
pag. 290. 

Zenaïda Gallapagoensis ( Gould), Zoo!. of the Beagle, pi. 46, 
pag. 115. 


Cnar. spec. Zen. corpore toto suprà rufo-cinerascente et pa- 
rumper vinaceo; collo imo lateralique viridi-aurato purpu- 
reoque metallicè splendente; qutture et pectore vinaceis ; remi- 
gibus primaruüs nigris albo anguste marginatis ; secundariis 
externê cinereis; lectricibus minoribus in margine externo 
speculo nigro notatis ; illo intüs albo cincto; mediis in primd 
parte externe nigris, secundà albis, ultimä concoloribus; ma- 
joribus omninè nigris, in medio albo striatis, apice rufis; alulà 
nigrà; regione periophthalmicà nigrà ; auribus albis, strià 
nigrà infrà cincthis; qulà nigro tenuissimè squamatà; 4 rec- 
tricibus lateralibus paginä externà cinereis, albo marginatis, 
nigro propé apicem laté fasciatis ; mediis apice cinereis : rostro 
nigro-cinerascente, pedibus carneis. 


Cette espèce de Colombidé a déjà été figurée par 
M. Gould, dans la zoologie du voyage du Beagle, pl. 46, 
et décrite par lui page 145 ; mais outre que le docteur 
Néboux l'avait déjà nommée et décrite en 1840 , dans 
la Revue zoologique, page 290, celui des individus rap- 
portés par celui-ci que nous figurons est d’un àge plus 
adulte et d’un plumage plus parfait que celui du natu- 
raliste anglais. Cette différence d'âge, peut-être même 
de sexe, en amenant une dans la livrée, il ne sera 
pas sans intérêt de comparer l’un et l’autre exem- 
plaires. 


— 2 — 

Description. Nous reproduisons les caractères princi- 
paux de cette espèce d’après la note insérée par le doc- 
teur Néboux dans la Revue 20ologique : 

« Bec noir, eflilé, assez long. Au-dessous de l'orbite, 
» on remarque deux lignes noires qui partent de cha- 
» cune des mandibules et vont se terminer à l'oreille 
» qu’elles embrassent dans l'intervalle qui les sépare : 
» là les plumes sont blanchâtres. Toute la partie supé- 
» rieure du corps est d’un gris roux. Au niveau des 
» ailes et à la base du cou seulement cette couleur prend 
» un aspect métallique à reflet pourpre ou vert doré. 
» La gorge, blanchâtre sous la mandibule, passe au vi- 
» neux. Poitrine vineuse. Ventre, anus et dessous des 
» ailes gris cendré. Rémiges primaires noires, lisérées 
» de blanc. Couvertures moyennes blanches sur le bord 
» externe. Rectrices de la même couleur que le corps ; 
» elles présentent une zone d’un beau noir à 2 cen- 
» timètres de leur terminaison. Tarses rouges , ongles 
» NOITS. » 

Nous ajouterons, pour compléter cette description 
succincte, que les petitescouvertures alaires, de la même 
couleur que le dessus du corps, portent sur chacune 
de leurs plumes, au bord et tout le long de leur page 
externe, une grande tache noire formant la moitié d’une 
écaille, encadrée à sa base et le long de son bord inté- 
rieur d’un liséré blanc; que les couvertures moyennes 
ont la même page noire à sa naissance jusqu’au tiers de 
sa longueur, blanche dans le deuxième tiers et rous- 
sätre dans sa dernière partie; que les couvertures dor- 
sales sont noires dans la plus grande partie de leur sur- 


@ 


face; que ce noir est encadré de roussâtre et divisé 
dans toute Ja longueur de la partie rachidienne qui les 
traverse par une ligne blanche s’élargissant à Ja base ; 
enfin que les rémiges secondaires sont grises extérieu- 
rement ; que les quatre rectrices latérales , de la même 
couleur, sont finement lisérées de blanc, et que les cou- 
vertures supérieures de la queue présentent un faux 
reflet métallique verdätre. 


Longueur totale, , Lx 4,07 . 21 centimètres. 
de Ia queue... 5 00 
= DOS HAPBONeS Sls .  eu 2 


Voici maintenant la diagnose donnée de l’individu du 
Beagle par M. Gould : 

(CZ. vertice, cervice, dorso caudæque tegminibus obscure 
» fuscis vinaceo tinctis; dorso nigro-quttato ; alarum 
» tegminibus fuscis, plumä singul& pallidè vinaceo-fusco 
» terminatà, pogonit utriusque margine ; macul& oblongä 
» magnû nigr@, line& alb& separatä ; remigibus primariis 
» et secundariis nigrescenti-fuscis, cinerascenti-albo an- 
» qustè marginatis ; caudä fuscescenti cinereo ad apicem 
» fascià lat irregulari nigrä; loris lineäque augustä suprà 
» et infrà oculari nigris pallidè fusco mixtis; qulä pecto- 
» reque vinaceis, colli lateribus œærato tinctis; crisso, 
» caudæque tegminibus inferioribus cinerascentibus ; rostro 
» nigro, pedibus rufescenti-aurantiacis. » 

Il suit, on le voit, de rapprocher les deux descrip- 
tions comme les deux figures pour juger des différences 
qu’elles présentent. 

Ainsi, la plus notable de ces différences réside dans 
l'absence presque complète, chez l'individu du Beagle, 


er. 

de la large tache noire du lorum dont on entrevoit à peine 
la trace dans un trait noir finement tiré de la base de la 
mandibule inférieure à l'angle externe de l'œil, dans 
l'absence de l’oreillon blanc, et de la ligne noire qui 
l’encadre à sa partie inférieure , remplacée 11 par une 
tache brune ; ensuite les rémiges secondaires, d’an beau 
gris cendré chez notre individu, sont d’un brun noirâtre 
chez celui du Beagle; enfin les rémiges et les rectrices 
qui, chez celui-ci, sont à peine bordées de brunâtre ou 
de gris obscur, sont, chez l’autre, bordées dans toute 
leur longueur d’un blanc bien prononcé. 

Toutes ces différences, sans parler du ton général 
beaucoup plus sombre et plus foncé chez l’individu du 
Beagle que chez celui de {a Vénus, prouvent surabon- 
damment que ce dernier représente bien un mâle adulte 
tel que se sont trouvés tous ceux rapportés par lexpé- 
dition que nous avons eu occasion d'observer, et que le 
premier représente tout au plus une femelle adulte de la 
même espece. 

M. de La Fresnaye, dans la Rev. z00l. 1840, pag. 322, 
dii, au sujet d’un individu de sa collection qu’il a com- 
paré avec trois individus de la Vénus : « F’ai remarqué 
» entre eux une différence de taille tout à fait notable, 


» ce qui semble indiquer deux races de la même espèce 
» plutôt qu’une différence de sexe, le plumage étant ab- 
» solument coloré de même chez les quatre individus, 


— 


» et paraissant un plumage adulte, quoique deux d’entre 
» eux soient presque d'un tiers plus forts que les 


NA 


» deux autres. » Cette remarque, exacte en elle-même, 
n'avait pas échappé au docteur Néboux, et nous ne 


O1sEAUx. 18 


9 


pouvons que la confirmer. Au reste, cette différence de 
taille, de même que les différences de coloration que 
nous venons de signaler entre lindividu du Beagle et 
celui de la Vénus, n’ont rien de plus extraordinaires et 
sont relativement les mêmes que celles qui s’observent 
fréquemment dans la Columba Fitzroy, dont on a long- 
temps formé deux espèces sous le nom de C. Denisca 
(Temm.), pl. col. 502, et €. Araucana (Less.), Voy. de 
la Coquille : car nous croyons que c’est à tort que 
M. G.-R. Gray persiste encore, dans son Genera of 
Birds, à maintenir la première de ces dénominations 
isolée spécifiquement des deux dernières, toutes les 
trois, selon nous, se rapportant à une seule et même 
espèce. 

Quant à la comparaison que fait M. de La Fresnaye 
de notre espèce avec C. Montana (Linn.) qui est la même 
que €. Martinica (Temm.), elle repose sur une donnée 
plus spécieuse que réelle; car si, par le fond principal 
de sa coloration, elle rappelle effectivement un peu ce 
type américain, elle s’en éloigne considérablement par 
la forme de son bec eflilé, qui l’a fait placer par M. Gould 
dans le genre Zenaïda de M. Ch. Bonaparte, adopté de- 
puis par M. Gray. 

C’est dans l’île Saint-Charles de l'archipel de Gallapagos 
que le docteur Néboux a découvert les individus par lui 
rapportés. Ses observations sur ces oiseaux étant les 
mêmes que celles communiquées à M. de La Fresnaye 
par M. Léclancher, nous les rapporterons telles qu’elles 
ont été publiées dans la Revue zoologique de 840, p. 322: 
« Ces trois Colombes brunes de Gallapagos, dit:1l, vivent 


— 275 — 
» à lerre, et sont si peu sauvages que les déportés de 
» Guayaquil qui habitent les Gallapagos les tuent au 
» moyen d’une perche, et en assez grand nombre pour 
» les vendre par paquets comme des Alouettes, et à 
» assez bas prix. » Elles se rencontrent dans toutes les 
parties rocheuses de Archipel. 


PLUVIER DE WILSON. 


Charadrius Hilsoni, Ch. Bonap., Suppl. à His, LU IX, 
pl. 75, fig. 5. 


F4 


Trouvé à Monterey (Haute-Californie). 


HÉRON DE LA LOUISIANE. 


Ardea Ludoviciana, Gm., pl. enl. 908 , 909 ; 915. 


Descend au midi jusqu'a Cayenne, St.-Thomas, Porto- 
Rico, et dans presque toutes les Antilles. Trouvé par le 
docteur Néboux aux Gallapagos, d’où on ne Pavait pas 
encore rapporté. 


CANARD DE LA CAROLINE. 


Aix Sponsa, Boié. 
ANQS ——— , Gm., pl. enl. 950, 981. 
Dendronessa ———, Rich. et Swains, 


Indiqué par Richard et Swainson, comme émigrant 
en hiver aux États-Unis et peut-être au Mexique ; 
trouvé à Monterey par le docteur Néboux qui l'en a 
rapporté. 


PLANCHE IX. 
NODDI CENDRE. 


Stolida cinerea (Néboux ), Rev. zvol., oct. 1840, p. 291. 
Anous cinereus (FI. Prévost et O. des Murs). 


CHar, spEC, An. Corpore cinereo ; suprà fuscius infrà dilutius ; 
capile et fronte sericeis albescentibus ; maculä oculari albà ; 
remigibus nigrescentibus; tegminibus brunneis; caudä fur- 
catà : rostro ac pedibus nigris ; palmis flavescentibus. 


Voici la description que le docteur Néboux a donnée 
de cet Oiseau dans la Rev. zool. d’oct. 1840 , p. 291. 

» Sterne cendré. (Sous-genre Noddi) : Bec noir, grêle. 
» [ris noir; paupières noires. Tête et front gris blan- 
» châtre, ayant l'aspect satiné. Col et dos cendré foncé. 
» Gorge, ventre et dessous des ailes bruns. Queue 
» passablement fourchue, de la même couleur que le 
» manteau ; la seconde penne est la plus longue. Tarses 
» très-longs et noirs : membranes interdigitales Jau- 
» nâtres. 

» Longueur totale, 24 centimètres. 

» Habit. Pris à la mer dans l’océan Pacifique (hémi- 
» sphère boréal). » 

Ce Noddi a les plus grands rapports de coloration 
dans l’ensemble avec le Noddi (Anous) Melanogenys, fi- 
guré par G.-R. Gray dans son Gen. of B. en juin 4846, 
pl. 182. Comme celui-ci, il a une teinte générale cen- 
drée plus ou moins claire à la tête et au-dessous, plus 
ou moins foncée en dessus; comme chez lui aussi, les 
plumes de la tête et du front prennent un aspect soyeux. 


— 271 — 
Mais il en diflére d’abord, organiquement, par une 
taille moindre , le Melanogenys ayant près de # centi- 
mètres de plus; par un bec beaucoup plus en rapport 
avec celui des vrais Sternes, et n’ayant pas trace de 
l’inflexion si prononcée chez ce dernier ; par l'échancrure 
très-prononcée de sa queue, et sous le rapport de la pti- 
lose par un gris plus franc et par conséquent moins 
noir ; par l'absence de cette dernière couleur aux joues ; 
par une tache d’un bleu pur qu'il porte à l'angle imterne 
de l’œil, à la hauteur du sourcil, et par la coloration 
des petites plumes garnissant le bord des paupières , 
qui en font un cercle, encadrant l'œil, noir dans la 
partie interne et blanche dans l’autre ; en outre par la 
coloration des palmures, qui sont noires chez le Mela- 
nogenys. 
Notre espèce fait la onzième du genre. 


PLANCHE X. 


MOUETTE A QUEUE FOURCHUE. 


Larus furcatus (Néboux), Rev. z00!. 1840, p. 290. 


Cuar. spec. L. supra cineraceus , capite colloque fuliginosé ni- 
grescentibus ; subtüs albus ; strigà postoculari et basi frontali 
albis ; palpebris aurantiis; tarsis palmisque rubris. 


Le docteur Néboux a donné dans la Rev. z0ol., oc- 
tobre 1840, p. 290, la description suivante de cette belle 
espèce de Mouette : 

« Tête et la presque totalité du cou gris brun. Deux 
» petites taches blanches arrondies embrassent symé- 
» triquement l'extrémité postérieure de la mandibule 


— 278 — 

» supérieure. Manteau blanc gris. Poitrme, ventre, 
» région anale, dessous des ailes blancs. Ailes plus 
» longues que la queue de # centimètres. Rémiges pri- 
» maires noires sur le bord externe et le bord interne. 
» Couvertures moyennes blanches; les supérieures ar- 
» doisées et bordées de blanc. Queue tres-fourchue et 
» blanche. Les deux rectrices plus longues qu’elles ne 
» le sont d'habitude dans ce genre d’Oiseau. Bec très- 
» arqué, noir à sa base et blanc à lextrémité. Iris 
» rouges. Paupières orangées. Tarses et palmes rouges. 
» Ongles noirs. » 


Longueur totale.. . . . . . . . . Go centimètres. 


{abit. Prise dans la rade de Monterey (Haute-Calr- 
fornie). 

Malgré la grande difliculté que l’on éprouve généra- 
lement à distinguer spécifiquement les nombreux indi- 
vidus qui composent le genre Larus, à cause des grandes 
analogies et aussi des fréquentes variations qu'ils pré- 
sentent dans leur coloration, notre espèce se sépare à 
première vue de ses congénères par la couleur orangée 
de ses paupières et la couleur rouge de ses tarses et de 
ses palmures , surtout par le miroir blanc mat qui orne 
la partie supérieure du bec où basale du front, quoique 
le rouge des pattes soit commun à plus d’une espèce, 
entre autres aux ZLar-Hæmatorlynchus de King et Bo- 
napartei de Richard et de Swainson. Nous ne parlons pas 
de la tache blanche formant demi-cercle à la paupière 
inférieure , parce que cette tache se retrouve tantôt en 
bas, comme ici dans le Zarus Franklinii (Rich. et Sw.), 


— 279 — 
tantôt en haut, comme dans le L. Bonapartei. Les deux 
autres caractères les plus saillants et les plus remarqua- 
bles chez notre espèce sont la forme arquée du bec qui 
rappelle un peu cependant celui du L. modestus de 
Tschudi, et la forme profondément fourchue de la queue 
qui ne se retrouve que chez les vraies Sternes. 


PÉLICAN BRUN. 


Pelecanus fuscus, Gm., pl. enl. 957. 
P. Carolinensis, Gm. 


Commun anx Antilles ; trouvé sur la côte occidentale 
de l'Amérique méridionale , au Pérou; observé sur la 
même côte de l’Amérique septentrionale par le docteur 
Néboux , qui l’a rapporté de Monterey. 


INDEX 


DES ESPECES DÉCRITES OU INDIQUÉES ET DES NOMS GÉNÉRIQUES 


ET SPÉCIFIQUES CITÉS DANS CE TRAVAIL. 


Pages. Pages. 
ATX-SpONSA 5. es 5 275 | Columba superba.. . . . . 231, 268 
ANGS ——. na 0 de: 0 . 275 | Colombe à diadème, . . . . . .. 239 
Anous cinereus. , : . . . .« . .. 276 | Columba diademata. . . . 238, 268 
A. melanogenys.. . . . . .. . 276 | C. superba, fœmina. . . . 234,268 
Ardea Ludoviciana. . . ... . . 275 | €. æanthogastra. . . . . . 238, 268 
Arremon biarcuatus. . . ... 216 | €. Dupetit-Thouarsii. . . 2h1, 268 
Colombe kurukuru leucocéphale. 243 
Bec-croisé leucoptère. . . . . . . 204 | Columba kurukuru purpureo- 
Bruant à double croissant. . . . 216 leucocephalus.. . . . . . 241, 268 
Colombe de Vincendon. . . 247, 268 
Cactornis grimpeur. . . . . . . + 204 | Columba kurukuru superba. . 247, 
Giiscandens. . 5: ...7 -0f 268 
Camarhynchus cineraceus. . . 209 | Colombe de Taïti . . . . . . . . 259 
Calliste rufivertex.. . . . . .. 212 | Columba kurukuru, var. T'ahi- 


C'abradorides 1.116." 
CLeclancherit Ms MN 
Canard de la Caroline. . . . . . . 
Caracara vulgaire. . . . . . . . . 
Casse-noix.. . 
Certhia coccinea.. . . . . 
CHODSCUTAS . 2. - 


Charadrius Wilsonii.. . . . . . . 275 
CinnyTIS ENCAN LENS IMAST 
COCCODonuss. se. ME ee. 1210 


Goccothraustes… ...:. 1.1. 206 
Colombe kurukuru, . ....,.. 
Columba kurukuru. . . . . . . 221 
C. purpurata. . 218, 219, 222, 238, 

256, 259, 268 
Colombe viridissime,, . . . . . . 229 
Columba viridissima. 222, 227, 268 


OisEaux. 


Drepanis coccinea.. . . . 


lensis.. : . 201, 208 
C. roseicapilla. . . . 256, 259, 269 
CoNTOSEICOUISS. RE ER 1260 
Cporpiyreas SEE 060 
Colembi-galline des Gallapagos. 270 
Columbi-gallina Gallapagoensis, , 270 
Corvus caryocalactes . ... . 203 
CNBRECRE LC 203 
Curvirostra leucoptera. . . . . 204 
Crucirostra leucoptera. . . . . 
Cyanocorax de San-Blas. , . 
G. San-Blasianus. . . . . . . . 
GC: ‘de Beechey.. . 
Cypsnagra.. . . 


. 


es 


. 275 
185, 187 


Dendronessa sponsa. . + . . 


Pages. 

Drepanis lucida.. . . . . .. . 192 
DA OPSCUTE ER - : = es sf 191 
D OUDACER ER 0e tee +102 
Emberiza biarcuata. . . . . . . . 216 
Erythaca Wilsonii. . . . . 1208 
Esclave des palmiers... . . . .« . . 211 
Étourneau militaire. . . + . « . . 203 
ÉUDICCIES sr se eus 206 
Falco cheriway. . . . . . . . . 181 
HÉPDrasiniensis. +... 181 
HÉRTIRONUSEAS SEE eme 181 
Fauvette de Wilson ...... . 198 
Fringilla biarcuata.. . .... 216 
HÉNNOGLIS Os nm ces se « :.. JU 
Geai de San-Blas. . . . . . . . . 201 
Gé Sn eue dl. 206, 207 
Géospiza fuligineux. . .. . . . . 208 
Geospiza fuliginosa.. . . .. . 208 
Grallarie squammigère. . . . . . 198 
Grallaria squammigera. . . . . 198 
GT TT ere et dt ce LUE 
Gr. imperator. . : . .. . 198 
Grallarie de Guatémala. . . . . . 199 
Grallaria Guatemalensis. . . . . . 199 
Gros-bec azulam du Brésil 210 
Gros-bec bleu des États-Unis. . . 210 
Guiraca cendré, 1 nn 209 
Ga CINErE - - : ces 209, 211 
Hémignathe. +... 183 
Hemignathus.. .. 183, 185, 189 
Hémignathe brillant. . . . . . . . 192 
Hemignathus lucidus. 187, 190, 191, 
192 

H. obscurus. . . . . . .. 189, 191 
FH, olivaceus.. . + «+ +. : 192 
Héorotaire vestiaire. . . . . . . . 186 
HT: écarlate... 0 187 
Héron de la Louisiane. . . . . . 275 
Heterorhynchus. . . + . . . . . . 183 
Heterorhynchus olivaceus. 189,191, 
192 

Hirundo concolor,. . . . . . . 182 
H. modesta.. . . ., . .. . . . 182 


— 252 — 


Pages. 
KuUruKUE 4... 5 219, 220 
K. à couronne pourprée, « . . . 222 
K. purpuratus. . . . . « . 222, 268 
K. Poukiobou . . . .... oO 
RS 'SUPErDUS Le - . - 231, 268 
Ke a diadème 1... 238 
K. xanthogaster . . . . . . 238, 268 
K. Dupetit-Thouars . . . .. . lil 
K. Dupetit-Thouarsii . . . 241, 268 
KAUCISAMOA 4e ee. ci. ce 247 
K. Samoensis. . ..... 247, 268 
Re de Tale es. eee 251 
K:-Taitensi8. : - 7... . 251, 268 
Ke NEDOUX ee E- -  - . 253 
K. Nebouxii. .. .., . . 253, 269 
KcderSwamson. 256 
K. Swainsonii . . . . . . . 256, 269 
K. des Mariannes . ....... 259 
K. roseicapillas ....,.. 259, 269 
K. de Clémentine . ....... 264 
K. Clementinæ. .,. . . . . 264, 269 
K. de Mercier . . . . . . . . . + 266 
Re Merciérile et ene ie 266, 269 
K. de Temminck. . . . . . . . . 234 
Æ. Temminckii.. . . . . . 23h, 268 
Éamprotés 1... 000. 211 
Larus Bonapartei. . . .. 278, 279 
Le Franchlins re 278 
TÉSTULLOLUSIe CRE AT 
L, hœmatorhynchus.. . .. -- 278 
Li MOdESLUS. NS NE 000279 
ÉeéucOpybia =, +. Re li 
ÉOxia leucoptéra 7. 204 
EsNfalcirostra. ne... 204 
HUCIIPRSA AR ER eee + - + 106 
Mellithreptus vestiarius. . . . 187 
Mellisuga Costæ. ... . ... 194 
MITISTE ER 0 le Let . 216 
Mhniotilte à sourcils. . . . . . . . 197 
Mniotilta superciliosa. . . . . . + 197 
Mniotilleid'été:1.. 0. 197 
Mniotilta æstiva. . . . . . . . . . 197 
Motacilla pensilis . . . . .. . 197 
M. flavicollis. . ..... - 197 


— 983 


Pages. 
Motacilla sialis. . . . . . . .. 198 
M. canadensis . . . + . TO 
M. albicollis.. -.. 0 197 
Mouette à queue fourchue. . . . 277 
IVectarinia œnea . . . . . . .. 185 
Nectatinides à e.. ee... 185 
Noddi cendré: -. 7 «: . 276 
IVoddi melanogenys. . . . . .. 276 
Nucifraga caryocatactes . . . . . 203 
IN. guttata - . . .. . 203 
COEnanthe sialis. . . . . .. . + 198 
Oiseau-mouche de Costa. . . . . 194 
Ornysmia Costæ.. . . . . . . .. 194 
O. ornalas . : . ... 196 
O. strumaria. . ...... 196 
O. petasophora. . . . . .. .. 196 
O. Wieilloti. - ." : 2. . 106 
Passerines . . . . . . . 214, 216 
Passerine de Léclancher. . . . . 214 
Passerina Leclancherii. . . . . . 214 
Passérine Pape. -. - 210 
Pélican Drun. . «. =... . 279 
Pelecanus fuscus. , . . . . . .. 279 
Pelecanus Carolinensis.. . . . 279 
Pére-noir. - . -. + . + -.- .. + 208 
Pica san Blasiana. . . . . . . 200 
P. Beecheii. . .. . ., . .. . 203 
Pie Gens... +. 202 
Piezorhina. . . . . ... -. : -. - 211 
Pitiosittacus Americanus. : ; 204 
Plectrophanes.. . ,.. . . . . + 217 
Pluvier de Wilson, . . . . . . . 275 
Polyborus Brasiliensis.. . . . . . 181 
PAUUIGArIS M... 181 
Procnopis atro-cærulea. . . . . 212 
Procnémodeste. . . . . . . . + + 182 
Procne modesta. . . . . . . . . . 182 
PSILLACINS 2 +. 5 se. : 210 
Ptilonope. -. ... . . 210 
Ptilonopus. . .. . . . , + - + + 218 
Ptilonopus Emiliæ. . . . 2h11, 268 


P. xanthogaster.. . . . . 238, 
P., purpuratus . . . 218, 222, 


Pages 

Ptilonopus T'aitensis. . . 251, 268 
P. leucocephalus . . . . . 241, 268 
P. superbus. . 231, 234, 268 
P. flavigaster. . . . . . . 238, 268 
P.purpureo-leucocephalus. 241, 265 
P. samoensis. . . . . . . 247, 268 
Ptilonope de Marie. . . . . 247, 26$ 
Ptilonopus S'wainsonii.. 256, 259, 
269 

P. Ewingii. - : . + : =. 259, 269 
P. purpuratus, var. Regina. 259, 
269 

P. superbus,var. Regina. 218, 256 
Ptilonope de Clémentine. . 264, 269 
Ptilonopus erythrocephalus. . 269 
PATOSCACOUS. ne: 269 
Rhimanphus citrinus. . . . . . 197 
S'axicola sialis. . . . . . . . . 198 
S'ialia Wilsonii. . . . . . .. . 198 
SOUI-IMANT AS re ie re 140 
SDIZAS eee Le ete iz ls 
Spiza amæna. . .. ... +. + 215 
Spizas Tanagras . . . . . . . . . 215 
Spiza versicolor . . .. . , . . 215 
Ÿ. Leclancherii. . . . . . . .. 214 
Sterne cendrée. . . . . . . . .« . 276 
Stolida cinerea. . . . . - . .. 276 
Sturnella militaris. . . . . + . . 203 
SEUTNUS ———— .... ... . 203 
Sylvia æstiva. . . . , +... . 197 
S. canicapilla . . - . . . 107 
S. childreni. . . . . .. ae 00 
S. citrinella. . . - : . . . . .. 197 
19 DENSILS.... à : = se + LOT 
$. superciliosa . . . .. re 197 
D UBIQI. +0 sa ses + 0 107 
Sylvicola. . ., .,.... +. 197 
Tachyphone …. ,--... 211 
Tanagra canicapilla. . . . .. 197 
T. Labradorides . . . . . . . . . 213 
MH rufivertex. .. . . =... 212 
T. rubrigularis. . . . . . . . . 211 
T, rubricollis., . . . . . . . + . 211 
T. ruficollis. . . . . . . . 211, 217 


— 28h — 


Pages. Pages 
Fanagridés. 04 2414 TE CAMCAnUIan ARC 197 
Tangara à nuque rousse. . . . . 212 
T. Labrador. . ......... 213 | Festiaria... ....... 188, 190 
Tr Hirondelle  .  .rn 211 | F’estiaria heterorhynchus . . . 192 
Tisserin des Gallapagos. . . . . 204 | J’ultur plancus. . . . . . . .. 181 
MMICHaS YONNE ner 197 
M VEIdilS. -  - le mur 197 | Zenaïda Gallapagoensis. . . . 270 


s 


REPTILES 


PAR 


M. DUMÉRIL. 


Les Reptiles que nous allons faire connaître sont en 
petit nombre : ils appartiennent à un genre de Sauriens 
dont la plupart des espèces n’ont été observées qu’au 
Chili; ce sont celles que les auteurs de lErpétologie gé- 
nérale ont désignées sous le nom de Proctotrètes . 

Ces petits Lézards appartiennent à la grande famille 
des Iguanes dont le corps est revêtu de lames cornées, 
placées en recouvrement les unes sur les autres, à la ma- 
nière des tuiles. Ces écailles sont distribuées en quin- 
conce et non par bandes ou en verticilles circulaires, et 
celles qui recouvrent le ventre sont arrondies ét non 
en plaques carrées. 

Le dessus de leur tête est protégé par un grand 
nombre de plaques symétriques , mais disposées de di- 


* Duméril et Bibron, t. IV, p. 266, pour indiquer les pores 
ou les trous qui se trouvent au-devant du cloaque. De rpwxroc, 
podex , et de rpatès, perforatus. 

REPTILES. 20 


— 986 — 

verses manières dans leur arrangement. Les veux soni 
constamment garnis de paupières mobiles revêtues de 
fines granulations ; leurs dents petites , légèrement com- 
primées, sont implantées dans une rainure pratiquée 
sur les bords de l’une et de l’autre mâchoire; leurs ra- 
cines cachées sont adhérentes aux os et par leur côté 
externe. Elles ne sont pas creuses et se trouvent rangées 
dans un sillon qui leur forme un alvéole commun. Outre 
ces dents latérales, il y en a d’autres plus petites qui 
garnissent la région moyenne du palais. 

Leur langue est molle, charnue, couverte de papilles 
veloutées ; elles ne peut pas rentrer dans une sorte de 
gaine ou de fourreau comme celle des Varans avec les- 
quels on pourrait les confondre, parce qu’ils n’ont pas, 
non plus, de crête dorsale; cependant 1ls n’acquièrent 
jamais d'aussi grandes dimensions. 

Ces espèces, comme toutes celles de la Famille des 
Eunotes dans laquelle on les a placées, différent surtout 
de nos Lézards, parce qu’elles ont des écailles qui re- 
couvrent la partie inférieure de leur ventre et non des 
plaques carrées, disposées par bandes transversales et 
régulières, mais placées en recouvrement les unes sur 
les autres en quinconce comme les tuiles de nos toits, 
D'ailleurs le plus souvent les écailles du dos et des flancs 
sont allongées, pointues à leur extrémité libre; elles 
sont surmontées d’une arête saillante qui règne sur toute 
leur longueur; celles qui recouvrent les régions infé- 
rieures du cou, du ventre et même souvent du dessous 
de la queue, sont lisses et arrondies. Aucune des espèces 
de ce genre ne porte, le long du bord imterne des 


— 287 — 
cuisses, la série de pores ou de petits orifices glanduleux 
qui se voient dans les vrais Lézards. 

A ces caractères généraux on pourrait en joindre 
plusieurs autres pour les faire distinguer des espèces qui 
sont également rangées dans la même familledes Iguanes. 
Ainsi ils différent d'un grand nombre par la conforma- 
tion, déjà indiquée, des écailles carénées du dessus 
de leur corps; les bords de leurs doigts et de leurs 
orteils ne sont pas élargis ou dilatés comme ceux des 
Anolis. Même, par une sorte d’anomalie ou d'exception 
dans cette famille, la partie moyenne de leur dos ne 
porte pas de crête ou de ligne saillante, produite 
par une série de très-grandes écailles cornées et. 
flexibles. 

Leur queue, arrondie et conique, n’est pas garnie d’é- 
pines à la base; elle n’est pas destinée à s’enrouler ou 
à se courber en dessous, comme celle des Urostrophes ; 
leur gorge ne forme pas un repli de la peau simulant une 
sorte de fanon ou de goître, et leur cou, quoique présen- 
tant le plus souvent des lignes saillantes longitudinales 
au delà du conduit auditif, n'offre pas ce pli transversal 
qui s’observe au devant des épaules et au fond duquel 
on distingue de petites granulations dans quelques 
genres VOISINS. 

Toutes ces particularités, que nous avons cru néces- 
saire de rappeler, ont servi à distinguer ce genre des 
Proctotrètes de la race très-nombreuse des Iguaniens, 
famille dont toutes les espèces paraissent habiter les 
contrées les plus chaudes des deux Amériques. 

Ainsi, en résumé, les espèces que nous devons faire 


ER 
connaitre appartiennent au genre Proctotrète et peuvent 
être ainsi caractérisées : 

Leur corps est allongé, cylindrique , légerement dé- 
primé, couvert d'écailles entuilées; à doigts distincts , 
onguiculés, COnIques; sans pores aux cuisses; sans crête 
ou ligne saillante au milieu du dos ; à queue sans épines 
à la base, dont le dos est garni d’écailles carénées ; sans 
fanon ou goître , ni pli transversal au cou au devant des 
épaules. 

C’est un genre peu nombreux dans lequel on n’a en- 
core inscrit que dix espèces, la plupart originaires du 
Chili, parmi lesquelles sont rangées celles dont la des- 
cription va suivre et qui sont figurées dans cet ouvrage. 

Comme ces espèces sont petites, qu’elles sont orga- 
nisées de manière à exercer des mouvements prompts 
et faciles; que leur bouche est étroite, garnie de dents 
tranchantes et que leur palais est muni de petits cro- 
chets, tout porte à croire que la principale nourriture 
de ces Sauriens consiste en insectes qu'il doivent saisir 
et poursuivre avec une grande agilité. 


PLANCHE 1.— Fi. 1 et 2. 


PROCTOTRÈTE DU CHILL 


Proctotretus Chilensis. 


Cette espèce diffère de toutes celles qui ont été jus- 
qu'ici rapportées au même genre parce qu'elle n'offre 
pas de différence dans les écailles qui recouvrent les 


— 289 — 
parties latérales du cou ou dans l’espace compris entre 
la tête et les épaules. On ne voit d'autre enfoncement 
que celui qui correspond au trou auditif, au fond duquel 
on distingue la membrane du tympan et cet orifice est 
bordé à son pourtour de petites écailles plates, comme 
festonnées. 

Les lames cornées minces, à reflet brillant, qui re- 
couvrent le dos et les flancs et même tout le pourtour de 
la queue , surtout à la base, sont allongées, pointues et 
surmontées d’une forte carène saillante sur toute leur 
longueur, de sorte que leurs séries forment des lignes 
saillantes qui paraissent se continuer et produire ainsi 
entre les écailles de véritables sillons longitudinaux. 

Les figures qui représentent deux des principales va- | 
riétés de ce Saurien sont très-exactes, et quoique ce 
Reptile ait été le sujet des descriptions de plusieurs au- 
teurs, nous croyons que les dessins soignés qui ont été 
exécutés sur les objets mêmes, en parfait état de con- 
servation, seront fort utiles pour la science. 

C'est d’après plusieurs individus semblables que les 
auteurs de l’Erpétologie générale avaient fait connaître 
l’histoire de cette espèce ". On trouve là les citations 
qu'ils ont faites de l'ouvrage de MM. Lesson et Garnot 
dans la partie zoologique du voyage de la coquille pu- 
blié en 1819, où ce Saurien se trouve décrit ou figuré 
sous le nom de Galéote, genre dont il diffère essentielle- 
ment, parce qu'il n’a pas de grande crête dorsale, éten- 
due depuis l’anus jusqu’à la queue. On voit aussi que ce 
Reptile a été observé et décrit par M. Wiegmann sous 


* Tome IV, page 260. 


_ 990 — 
le nom de Tropidurus dans le tome X VII des Curieux de 
la nature, publié en 1835. Ce nom de genre ne pouvait 
en effet convenir qu’à cette seule espèce à cause des ca- 
rènes ou des lignes saillantes qui se prolongent sur la 
plus grande partie de la queue. 

Les Planches parfaitement coloriées nous dispensent 
de les décrire. On vera que c’est principalement par la 
distribution des taches que ces deux individus diffèrent 
entre eux, car la forme et la disposition de leurs écailles 
sont absolument sembables. L’arrangement des plaques 
qui recouvrent le dessus de la tête se trouve indiqué 
par la figure (1, 2.b), Les grandes écailles de la base 
de la queue vue en dessous avec la plaque qui recouvre 
le cloaque, font voir les deux pores qui ne s’observent, 
à ce qui parait, que dans les mâles. Ce sont ces pores 
qui ont fait donner aux espèces de ce genre le nom de 
Proctotrète. 

Beaucoup d'individus recueillis au Chili par MM. Gay 
et d'Orbigny sont déposés dans les collections du mu- 
seum d'histoire naturelle de Paris. 


PLANCHE IL. — Fi. 1. 


PROCTOTRETE INTERMÉDIAIRE. 


Proctotretus intermedius. 


Ce petit Saurien offre en effet beaucoup de rapports, 
par sa configuration générale, avec celui qui se trouve 
représenté sur la même planche où il est désigné sous 


— 001 

le nom de Ventre bleu ; mais il offre deux raies longitu - 
dinales jaunes ou blanches bien distinctes et parallèles 
de chaque côté du tronc. La bande inférieure plus étroite 
se termine à l’origine de la cuisse; la supérieure, un 
peu plus large, surtout au milieu, naissant à peu près 
à la même distance près de l’œil, se prolonge sur 
la queue au delà du quart de sa longueur vers la 
base. 

Comme on a eu soin de bien représenter la distri- 
bution des plaques qui recouvrent le sommet de la tête 
(1 b), on peut remarquer que leur arrangement est tout 
à fait inverse de celui qui est reproduit pour l'espèce à 
Ventre bleu (PI. IT, fig. 2.b). Ici le disque antérieur est 
produit par cinq plaques qui touchent une grande écaille 
centrale à cinq pans dont l’intérieur se trouve excessi- 
vement petit, relativement aux quatre autres; puis vient 
un écusson impair, allongé, qui rejoint en arrière un 
second disque ou cercle formé de six grandes plaques 
rangées également autour d’une autre plus grande qui 
se trouve ainsi impaire et centrale. 

La figure (4.d) fait connaître la disposition remar- 
quable du prolongement de la peau du ventre au-dessus 
du cloaque dont il forme la lèvre antérieure. C'était pro- 
bablement chez un individu màle, puisqu'on y voit in- 
diqués les pores qui sont ici au nombre de cinq, ce qui 
semble caractériser le sexe de l'individu, dont la collec- 
tion du Muséum possède en effet un exemplaire qui est 
sans doute celui qui a servi de modèle au peintre. Car 
il n’est pas décrit dans le volume quatrième de l'Erpé- 
tologie générale publié en 1837. 


099$ 


PLANCHE IL — Fic. 2. 


PROCTOTRÈTE VENTREBLEU. 


Proctotretus cyanogaster. 


… Ce petit Lézard, quoique n'ayant pas de pli transver- 
sal au cou en avant des épaules, offre cependant laté- 
ralement des espaces longitudinaux couverts de petits 
tubercules granulés qui commencent immédiatement en 
arrière des trous auditifs. Cette disposition se remarque 
dans la plupart des espèces différentes de celle du Chili, 
dont la peau du cou est recouverte de grandes écailles 
semblables entre elles. 

Celui-ci est facile à distinguer, d’abord par la couleur 
bleue qui tient toute la région inférieure de la gorge, 
du ventre et de la queue. Le dessus du tronc est d’un 
brun verdàtre à reflets brillants et un peu métalliques ou 
nacrés. Les flancs portent deux bandes longitudinales 
Jaunes qui, naissant derrière lorbite, se prolongent 
jusque sur le premier quart de la queue. Cette partie du 
corps est deux fois plus longue que le reste du tronc; 
elle se termine insensiblement en pointe, et, dans Îles 
trois quarts de son étendue, elle est fortement colorée 
d’une teinte rouge briquetée, et comme cuivreuse ou 
métallique. 

La figure (2.a) indique la disposition des plaques 
labiales, les granulations fines qui recouvrent l’une et 
l’autre paupières, ainsi que les plis collaires longitu- 


dinaux. 


__ 993 — 

Le dessin inscrit sous le n° 2.b montre les plaques qui 
revêtent le dessus de la tête. On voit qu'elles sont autre- 
ment distribuées et configurées que celles dont nous 
avons indiqué l’arrangement dans lespèce qui porte le 
nom d’intermédiare. Il y a ici six plaques formant une 
sorte de cercle ; toutes sont rangées autour d’un axe 
commun, mais sans écaille centrale. À la suite, on 
trouve un écusson impair, allongé, rétréci en arrière et 
beaucoup plus large en avant. 

La figure (2.d) est destinée principalement à faire 
voir comment la partie interne des cuisses est finement 
chagrinée ou recouverte de petits tubercules tout à fait 
différents des écailles entuilées et des granulations qui 
se retrouvent en outre sur les bord du cloaque. 

Il paraît que les individus qui appartiennent à cette 
espèce ne prennent jamais une grande taille. Nous avons 
vu plusieurs mdividus rapportés du Chili par M. Gay ; ils 
étaient à peu près de la taille de nos Lézards des Sou- 
ches. La couleur bleue s’est parfaitement conservée dans 
l'alcool. 


PLANCHE EL. — Fic. 1. 


PROCTOTRÈTE A TACHES NOIRES. 


Proctotretus nigro maculatus. 


Le nom spécifique donné à ce Saurien par M. Wieg- 
mann s’appliquait au même animal ; mais il était pour 
lui un Tropidure à gorge lisse (Leiolæmus); car sa 
description, insérée dans le travail que nous avons cité 


— 294 — 
précédemment, ce nom paraît devoir convenir à l’indi- 
vidu qui se trouve ici représenté. 

Sa couleur est d’un brun roussâtre en dessus, avec 
deux bandes longitudinales plus pèles, parsemé de 
taches noires irrégulières qui sont surtout remarquables 
sur l’occiput. Une raie noire borde le cou au-dessus de 
l'épaule, et s'étend, avec de légères interruptions, jusqu’à 
l'origine des cuisses. Le dessous du corps est d’un gris 
pèle et sans taches. 

Ce qui distingue principalement cette espèce, ce sont 
des granulations qui occupent tout le dessous et le bord 
interne des cuisses, ainsi que la lèvre postérieure du 
bord du cloaque, comme l’indiquent les figures (4.d 
Étee) 

On voit les plaques syncipitales figurées (1 b); elles 
sont tout autrement disposées que dans les autres es- 
pèces. Il v a quatre écussons impairs. Deux petits qui 
se touchent en avant et sont encadrés par huit autres 
plaques disposées par paires, dont les postérieures sont 
les plus étendues. Vient ensuite un grand écusson régu- 
lier et plus large en haut. Le quatrième impaire 
a huit pans, dont les deux intérieures sont les plus 
petits. 

Les trous auditifs (4.a) sont bordés et précédés de 
quatre grandes écailles dentelées et suivies de granu- 
lations limitées entre deux replis saillants et écailleux de 
la peau du cou. 

La queue est longue : elle dépasse de moitié l'étendue 
du tronc. Très-grosse à la base, elle diminue insensi- 
blement pour se terminer en pointe aiguë. 


= DONS 

Les pattes postérieures sont du double plus longues 
que les antérieures; car, dirigées en avant du côté de l’é- 
paule, les doigts dépasseraient de beaucoup cette région ; 
tandis que les membres de devant, étendus le long du 
ventre, atteignent à peine le commencement de ja cuisse. 

On peut voir, dans la collection Erpétologique du 
Muséum de Paris, plusieurs individus appartenant à 
cette même espèce : ce sont ceux qui ont été recueillis à 
Coquimbo par le savant botaniste M. Gaudichaud. 


PLANCHE IE. — Fic. 2. 


PROCTOTRÈETE DE WIEGMANN. 


Proctotretus IF iecgmanni. 


Ce Saurien est d’une taille très-ramassée, sa queue 
étant fort courte, ayant au plus la moitié de la longueur 
du reste du tronc quiest, en outre, assez large dans la 
région moyenne. 

Le dessus du corps est d’un gris foncé avec des 
bandes longitudinales blanchätres. Entre ces deux raies 
dorsales on voit une double série de lunules noires con- 
caves en arrière et cernant des taches blanches. D’autres 
lunules semblables, mais plus petites, forment aussi, de 
chaque côté des flancs, deux séries de taches réguliè- 
rement espacées et de même étendue. Le dessous du 
corps est blanc dans toutes ses régions. 

L'un des caractères qui est très-propre à faire distin- 
guer cette espece, c’est que le bord de la lèvre supé- 


— 296 — 
rieure, recouvert comme à l'ordinaire de grandes pla- 
ques, se trouve surmonté de trois rangées ou bandes 
d’autres écailles comprises sous la grande plaque sous- 
orbitaire. C’est ce que représente la figure (2.a) qui est 
considérablement grossie pour faire voir, de côté, toute 
la partie antérieure du tronc. 

La figure (2.e) est destinée aussi à indiquer une par- 
ticularité de cette espèce dont le dessous de la cuisse 
offre, parmi de petites granulations, un amas de plus 
gros tubercules disposés régulièrement en un quin- 
conce formé de quatre bandes. 

Comme la région inférieure vers l’origine du cloaque 
représentée par la figure (2.4) est celle d’un mâle, on y 
voit six grands pores à la suite des grandes écailles 
entuilées, tandis que le pourtour de l’orifice ne porte 
que de fines granulations. 

Il y a également au Muséum de Paris plusieurs indi- 
vidus de cette espèce qui ont été rapportés du Chili par 
MM. les voyageurs Gay et d'Orbigny. 


ICHTHYOLOGIE 


PAR 


M. A. VALENCIENNES. 


L'amiral qui a fait, dans la campagne de {a Vénus, de 
très-belles collections zoologiques, n’a rapporté qu'un 
petit nombre de poissons préparés pendant la relâche 
aux îles Galapagos. Cet essai d’études Ichthyologiques 
a été très-heureux , parce qu’il complète ce que les zoo- 
logistes anglais ont déjà commencé sur l’Ichthyologie de 
cet archipel pendant l'expédition du Beagle. M. Darwin 
y a réuni plusieurs espèces différentes des nôtres. Elles 
ont été décrites par M. Jenyns avec le talent que lon 
pouvaient attendre de cet habile Ichthyologiste, et la 
plupart ont été figurées. En comparant les espèces 
mentionnées par cet auteur avec celles que je publie, 
on peut conclure que la Faune ichthvologique des 
Galapagos est composée d'espèces qui lui sont par- 
ticulières, mais qui rappellent plus par leurs affinités 
les espèces américaines de Atlantique que celles de la 
mer des Indes. 


ICHTHYOLOGIE. 20, 


— 295 — 


GENRE SERRAN. 


On sait que le genre des Serrans est l’un des plus 
nombreux de la classe des poissons : 1l appartient à la 
famille des Percoïdes à une seule dorsale, et 1l peut en 
être donné comme le type le plus caractérisé. 

Il est réduit aux espèces qui ont une seule nageoire 
sur le dos parce que la portion épineuse est unie à la 
partie soutenue par des rayons articulés et branchus. 
Ces Percoïdes ont des épines à l’opercule, des dentelures 
au préopercule, des dents en carde assez fortes avec 
quelques crochets saillants aux deux màchoires, aux 
palatins et sur le chevron du vomer. 

L’archipel, encore peu exploré des Galapagos, a 
fourni à l'expédition de l'amiral Dupetit-Thouars deux 
Serrans nouveaux, dont l’un, voisin du Serranus scriba, 
a des couleurs vertes et rouges qui sont plus communes 
chez les Labres que dans le genre que je vais décrire. 

Les naturalistes du Beagle " ont trouvé des Serrans 
aux Galapagos. Celui que je vais décrire sous le nom de 
S. Psittacinus est plus voisin du Serranus labriformis, de 
M. Jenyns, p. 8, pl. 3, que de son Serranus olfax, ejusd., 
ib., p. 9, pl. #. Ces deux espèces sont plus voisines du 
Mérou que de nos Perca scriba de la Méditerranée. Il n’en 
est pas de même de ceux que j'ai fait figurer. Les miens 
différent des deux espèces du zoologiste anglais. 
M. Darwin a donné ces poissons comme étant assez 

‘ The Zoology of the Voyage of H. M. S. Beagle, by Ch. 


Darwin. Fishes, by Rev. Leon. Jenvns. 


— 9299 — 
communs sur les côtes de larchipel; je n’ai aucune 
observation sur ceux que je fais connaitre. 

M. Jenyns a décrit dans le voyage du Beagle, pag. 3, 
pl. 2, un Serranus albo-maculatus qui a les derniers rayons 
de la dorsale très-abaissés comparativement au troi- 
sième. Il a aussi chservé l'absence de dents canines; les 
deux màächoires ont les dents en velours. Je doute que 
ce poisson appartienne au genre des Serrans. M. Jenyns 
semble croire qu’il a plus d’affinité avec nos Centro- 
pristes. En joignant au caractère de la première dorsale 
celui de la forme allongée du museau, de la dentition et 
des épines de l’opercule et du préopercule, je crois 
que ce poisson est plutôt intermédiaire entre le genre 
des Centropristes et celui des Grystes. | 


PLANCHE LE — Fic. 1. 


LE SERRAN PSITTACIN. 


Serranus Psittacinus, Val. 


Il semble que chaque archipel, chaque mer montrera 
de nouvelles espèces de Serrans, tant cette forme est 
abondante dans toutes les eaux du globe. Celui-e1 appar- 
tient à la division du Serranus scriba, c’est-à-dire que ses 
mächoires ne sont pas recouvertes de petites écailles. 

Il a la forme ronde et allongée des Serrans des côtes 
du Brésil, tels que le Serranus irradians : sa hauteur 
est le cinquième de la longueur totale; sa tête en est 
plus que le tiers, elle est allongée comme le corps. L’œæil 
est de grandeur médiocre et rond; son diamètre est 
contenu près de cinq fois dans la longueur de la tête. Le 


préopercule est arrondi et très-finement dentelé, l'oper- 

cule a ses trois épines. La mâchoire inférieure dépasse la 

supérieure. La pectorale est elliptique, ses rayons mi- 

toyens étant plus longs que les latéraux. La dorsale a ses 

épines courtes ; la caudale est tronquée, un peu concave. 
D. 10/1923 À: 03/75 0: 17 Das): 

Le bord des écailles est âpre, de médiocre gran- 
deur ; 1! y en a plus de cinquante rangées entre les hu- 
mérus et la nageoire de la queue. 

La couleur générale du corps et des nageoires est un 
vert assez brillant, le dessus de la tête, le dos, les côtés 
de la queue, sont rouges. Les deux taches de la queue, et 
les six autres placées sur les côtés inférieurs du ventre et 
dela queue ont le centre noir, ce qui donne à ces taches 
l'apparence de grands ocelles brillants. L’œil est jaune. 

Le poisson a 0*,21 de long. 


PLANCHE IL. — Fic. 1. 


LE SERRAN COLON. 


Serranus colonus, Val. 


Ce poisson d'un genre si nombreux et si varié en 
espèces, est un de ceux qui se rapprochent beaucoup 
des Serrans, appelés par les habitants de nos Antilles 
le Colon, et que nous avons désigné dans notre Ichthyo- 
logie ‘ sous la dénomination de Serranus creolus. Il en a 
les formes générales, et si le ton des couleurs n’est pas 
le même, leur distribution est tout à fait semblable. 


1 Cuv., Val., Mist. nat. Poiss , t IT, page 265. 


— 301 — 

La forme du corps est un ovale très-allongé. Le profil 
du dos est cependant un peu plus soutenu que celui du 
ventre. La hauteur est quatre fois et près de deux tiers 
dans la longueur totale. La tête est courte, le museau est 
assez obtus. Les dentelures du préopercule arrondi sont 
fines, les épines de l’opercule sont aplaties. 

L’œil est assez grand; car le diamètre de l’orbite me- 
sure le tiers de la longueur de la tête, qui est elle-même 
comprise quatre fois dans celle du tronc. La bouche est 
de grandeur moyenne, les branches des mâchoires sont 
nues et sans écailles. Il y à quatre dents coniques diri- 
gées horizontalement en avant et au centre de l’arc su- 
périeur, et en arrière quatre crochets un peu plus forts. 
que les autres dents en carde. Je vois aussi quatre ca- 
nines à la symphyse de la mandibule. Les dents pala- 
tines sont sur une bande très-étroite, au contraire celles 
du chevron du vomer forment un petit groupe assez 
large. 

La dorsale est longue , arrondie en arrière; l’anale 
est plus haute que la portion molle de la dorsale; la 
caudale est très-profondément fourchue, car les lobes 
ne sont que deux fois et un tiers dans la longueur du 
tronc, ou, ce qui revient au même, trois fois et un tiers 
dans la longueur totale. Les pectorales sont longues et 
pointues, les ventrales sont un peu plus courtes que les 
autres nageoires paires. 


Bros A 5)10: 0. 17:40. 19; V.1/5: 


Les écailles sont petites, finement ciiées ; J'en compte 
cent vingt rangées entre l’ouie et la caudale, et quel- 


IcaTnxoLOoGiE. 21 


— 302 — 
ques-unes s'avancent sur le haut de chaque lobe de 
la nageoire de la queue. Il y en a aussi sur la base de 
la pectorale. Celles de lopercule sont semblables à 
celles du corps, mais celles du préopercule sont plus 
petites. 

Tout le corps de ce poisson est d’un beau jaune de 
chrome, devenant plus foncé sur le dos, qui prend des 
teintes un peu vertes. On compte une trentame de 
raies obliques sur chaque flanc. 

La ligne latérale est tracée parallelement au dos par 
le tiers de la hauteur. Elle est formée d’une suite de 
petits traits noirâtres où rembrunis qui répondent aux 
tubulures de ses pores eflérents. 

L’exemplaire que j'ai décrit est long de 0°,218. 

La ressemblance que je Jui ai trouvé avec le Serran 
créole m'a fait imaginer le nom de Serranus colonus. 


GENRE DIACOPE. 


Le genre des Diacopes est une de ces heureuses créa- 
tions de M. Cuvier. Il est un de ceux que l’on peut 
donner comme exemple, pour montrer que l’étude des 
différences, même les plus légères en apparence, sert 
souvent à rapprocher les êtres selon leur plus grand 
degré de ressemblance ; c’est ce qui conduit à établir 
de bonnes familles naturelles. 

La dentition des Diacopes est celle des Serrans, des 
Plectropomes, et des Mésoprions; mais l’échancrure 
du préopercule pour recevoir le tubercule articulaire de 


— 303 — 

l’interopercule, caractérise ce groupe générique. Îl se 
compose d'espèces qui ne sont connues jusqu'à présent 
que dans le grand Océan Indien. Presque toutes les 
Diacopes sont rouges , et les raies dont le corps est orné 
sont jaunes et dorées ; l'espèce dont il va être question 
est remarquable par sa couleur verte. 

M. Darwin n’a pas trouvé cette espèce ni aucune 
autre de ce genre. 


PLANCHE I.— Fic. 2. 


LA DIACOPE VERTE. 


Diacope viridis, Val. 


La Diacope que M. de Fréminville vient de donner au 
Muséum, offre une variation de couleur tres-notable 
dans un genre aussi naturel que celui des Serrans 
et des Diacopes, dont le fond de la couleur, et sur- 
tout des dernières, est toujours du rouge plus ou 
moins vermillonné ou carminé. Dans cette espèce, 
le fond est vert et les raies se détachent par une 
nuance plus foucée; ces couleurs exceptionnelles sont 
rares dans un genre naturel. Nous voyons, au con- 
traire , les couleurs des genres naturels offrir de la con- 
stance, soit dans les teintes soit dans les distributions. 
Ainsi, presque tous les carnassiers de la famille des 
Félis ont du fauve et une tâche sur l'oreille; le vert, le 
rouge sont les couleurs les plus constantes chez les Per- 
roquets ; les moustaches rouges des pics mâles et beau- 
coup d’autres exemples encore viendraient à l'appui de 


— 304 — 

cette proposition. Nous retrouvons toutefois dans la 
Diacope que nous allons faire connaître une distribu- 
tion de couleurs semblable à celle de plusieurs autres 
espèces de ce genre, puisque le corps est rayé longitu- 
dinalement. Un naturaliste qui s’en tiendrait à l'examen 
rapide de la disposition des couleurs d’un individu dé- 
coloré, le prendrait pour la Diacope à huit raies ( Pia- 
cope octo-lineata *) . 

Cette nouvelle espèce a la tête assez longue, elle est 
comprise trois fois et un tüers dans la longueur totale; 
la hauteur du corps y est contenue quatre fois et demie. 
L’œil est grand et le cerele de l'orbite touche presque à 
la ligne du profil. Le plus long diamètre de l'œil est le 
longitudinal, et il est du quart de la longueur de la tête. 
Il est éloigné du bout du museau d’une fois et demie le 
diamètre. Les quatre canines antérieures de l’intermaxil- 
laire sont assez fortes; les dents latérales sont fai- 
bles à la mächoire inférieure, les latérales sont plus 
grandes que celles de devant. L’échancrure du préoper- 
cule et le tubercule du sous-opercule qui s’y articulent 
sont trés prononcés. Les dentelures du bord montant 
de l’angle arrondi de l'os sont très-manifestes. L'oper- 
cule est anguleux, mais sans épines. Les premiers 
rayons épineux sont assez longs, les mous n’ont 
guère que la moitié de ceux-ci; la caudale est 
échancrée. 


Das, À 9/03 0 1732193 V5. 
Les écailles sont lisses et peu larges ; j'en compte plus 


1 Cuv., Val, Hist. nat. Poiss., t. II, p. 418. 


— 305 — 

de cinquante rangées entre l’ouïe et la caudale. La hgne 
latérale est un peu marquée, à peine visible; la couleur 
générale est verdâtre, devenant plus foncée sur le dos, 
et ayant le long des flancs, de chaque côté, quatre raies 
longitudinales droites, vert-foncé; les nageoires sont 
verdâtres. 

La longueur de l'individu est de 0,265. Cette Dia- 
cope est peut-être rare aux Galapagos, puisqu'elle à 
échappé aux recherches de M. Darwin. 


LES SMECTIQUES. 


Smecticus, Nob. 


Nous avons séparé des Grammistes, Percoïdes à 
dents en velours et à deux dorsales, les Savonniers qui 
ont une seule nageoire étendue sur le dos. Cette na- 
geoire est remarquable par le petit nombre de rayons 
épineux qui la soutiennent. L'absence d’épines à 
l’anale, si rares dans les poissons osseux, constituent 
les caractères génériques des denx seules espèces 
connues de l'Atlantique. 

L’Archipel des Galapagos a donné un nouveau genre 
que l’on pourrait facilement confondre avec les Savon- 
niers, si On m'attachait pas assez d'importance au 
nombre des rayons épineux de la dorsale et à l’absence 
des épines de l’anale. 

En effet, le poisson que j'ai sous les yeux a des 
dents en velours, des épines à l'angle du préoper- 
eule et à l’opercule, caractères qui conviennent aux 
Ryptüicus et aux Grammistes. Mais ces derniers on 


— 306 — 

deux dorsales; par conséquent le poisson, dont il 
va être parlé avec détail, ne peut être de ce genre. 

Sa forme générale, la brièveté de sa dorsale couchée 
sur le dos, la forme de l’anale, la dentition l’appelle- 
raient auprès des Rypticus ; mais ceux-ci n’ont que trois 
rayons à la dorsale et en manquent à l’anale, tandis 
que la nouvelle espèce en a dix à la dorsale et deux à 
l'anale. Je n'avais pas cru d’abord, à cause de cette 
différence dans les rayons des deux nageoires verti- 
cales , faire un genre de notre nouveau poisson, parce 
que tout le reste du poisson me paraissait le placer 
avec les Savonniers de l'Atlantique. Aussi c’est sous ce 
nom générique qu'il a paru dans Patlas, pl. I, fig. 2; 
mais en l'étudiant avec plus de soin, je trouve dans 
ces formes , d’un poisson de l’Atlantique, plusieurs ca- 
ractères empruntés aux Grammistes du grand Océan 
Indien. Il a, comme eux, deux épines à l’anale et une 
dorsale soutenue par plusieurs rayons épineux ; mais 
il n’a, comme les Savonniers, qu’une seule dorsale. 
C'est donc un assemblage des caractères des deux 
genres. L'importance de ces caractères m'a déterminé 
à considérer cette nouvelle espèce comme un genre 
nouveau, et elle servira à fixer d’une maniere plus 
étroite et plus philosophique les caractères des Ryp- 
ticus, qui rentrent dans les formes générales des 
Percoïdes à une seule dorsale et à dents en ve- 
lours. 

Le nom de Smecricus que je donne à ce nouveau 
genre rappelle les aflinités des Savonniers avec l’espèce 
que je vais décrire sous le nom suivant : 


— 307 — 
PLANCHE IL. — Fic. 2. 


SMECTIQUE AUX DEUX COULEURS. 


Smecticus bicolor, Val. 


(Ryplicus bicolor, pl. I, fig. 2.) 


Cette espèce a le corps allongé. La ligne du profil 
est assez soutenue sur la nuque, puis elle s’abaisse et 
se rend assez droit à la queue, celle du ventre est plus 
horizontale. La hauteur est à peu de chose près le cin- 
quième de la longueur totale; la queue n’a pas tout à 
fait moitié de la hauteur prise à la nuque. 

La tête est trois fois et quatre cinquièmes dans Ja 
longueur totale ; le préopereule est arrondi, et le Himbe 
est armé vers le haut d’une épine plate, triangulaire, 
assez forte. L’opercule a deux pointes plates et plus 
petites que la précédente ; œil est éloigné du bout du 
museau d’une fois son diamètre, lequel est le cinquième 
de la longueur de la tête. 

La bouche est peu fendue ; les dents sont égales et en 
cardes fines, sur une bande étroite aux deux mâächoires, 
aux palatins et sur le chevron du vomer; la langue est 
libre, étroite, pointue et lisse. 

La dorsale s'élève à peu près au tiers de la longueur ; 
assez au delà de l'insertion de la pectorale ; elle a dix 
rayons épineux, assez bas, et dont les trois premiers 
sont cependant un peu plus haut que les suivants; la 
dorsale, l’anale, la caudale et les pectorales sont ar- 
rondis , les ventrales sont petites. 


B760-10/2vs, Aa /haislC: 195 P. a93 V.-1/5, 


— 308 — 

Les écailles sont très-petites , j'en compte cent vingt 
rangées au moins entre l’ouie et la caudale. 

La ligne latérale remonte en se courbant vers le dos, 
puis elle s’infléchit lentement , de manière à se terminer 
par le milieu de la hauteur de la queue, tandis qu'elle 
s’est maintenue sur le tronc par le cinquième ou le quart 
de la hauteur. 

Ce poisson est d’un beau rouge vermillon, marbré 
plus clair , avec toutes les nageoires noires. 

L'exemplaire qui est déposé dans les collections na- 
tonales du Muséum est long de 0®,230. 


GENRE CIRRHITE. 


Le genre des Cirrhites ne se compose jusqu’à présent 
que d’un petit nombre d'espèces, presque toutes remar- 
quables par la vivacité de leur couleur, mais les individus 
restent dans de petites dimensions. Le Girrhite que je vais 
faire connaître, sans être encore très-grand, atteint à la 
taille d’une Carpe ordinaire. Pour ceux qui s’en tien- 
draient sans aucun examen à la diagnose du genre 
Cirrhite, je ne m’étonnerais pas de voir placer le pois- 
son que je vais décrire dans un genre distinct des Cir- 
rhites. Ceux-ci ont, entre autres caracteres, le bord 
montant du préopereule dentelé; or, sur lPindividu que 
j'ai sous les yeux, je ne puis apercevoir aucune dente- 
lure le long du bord de cet os. Mais 1l faut faire atten- 
tion que l'individu dont il s’agit a le double au moins 
de grandeur des autres Cirrhites connus , etil faut alors 
se rappeler que dans beaucoup de Percoïdes , et no- 


300 
tamment parmi les Serrans, nous voyons les dentelures 
s'évanouir avec l’âge du poisson. Notons aussi que 
dans le Cirrhites pantherinus" , les dentelures sont d’une 
finesse excessive, et qu’on ne les aperçoit qu'à l’aide 
d’une forte loupe. L'exception ou l’absence de dente- 
lures au préopercule doit devenir un caractere peu im- 
portant quand nous trouvons que ce poisson offre tous 
les autres Caractères du genre auquel nous le rappor- 
tons. Nous observons, en première ligne, les rayons 
simples de la pectorale , et les dents vomériennes ; puis 
la disposition des dents des màchoires, et l’ensemble 
du facies ne peuvent laisser aucun doute. 


PLANCHE IIL.— Fic. 1. 


CIRRHITE RIVULÉ. 


Cirrhites rivulatus. Val. 


La nouvelle espèce de Cirrhites que je vais décrire est 
la plus grande et une des plus ornées dans ce genre. 

Son corps épais est assez élevé à la nuque et au 
devant de la dorsale; puis il diminue assez prompte- 
ment de hauteur, de façon que celle du tronçon de la 
queue derrière la dorsale n’est plus que du tiers de 
celle du tronc à la région des pectorales. Cette hauteur 
est comprise trois fois et cinq sixièmes dans la longueur 
totale. Celle de la tête égale la hauteur du tronc. Le 
front est creusé en une sorte de gouttière entre les deux 
veux. Une crête bifurquée arrête cette gouttière , et forme 


1 Cuv., Val., Hist. nat. Poiss., & IIT, p. 70. 


— 310 — 
une coulisse dans laquelle jouent les pédicules des 
intermaxillaires : l’œil est placé très-haut sur la joue; 
son orbite entame fortement la ligne du profil. Son 
diamètre fait le quart de la hauteur, et plus du sixième 
de la longueur de la tête. Il est éloigné du bout du mu- 
seau de deux fois la longueur de son diametre. 

A peu de distance de l'œil sont les deux ouvertures 
de la narine. La postérieure est petite et rapprochée du 
cercle de l'orbite; la premiere, plus en avant, est munie 
d’une forte caroncule charnue. Le sous-orbitaire, étroit 
et oblong, est entièrement caché sous une peau épaisse. 
Le préopercule a le bord arrondi en demi-cercle , et re- 
couvert aussi sur tout le limbe par un cuir très-épais. 
Le reste de la joue a de tres-petites écailles. L’oper- 
cule à une pointe plate et mousse, son bord membra- 
neux est large et anguleux. Le sous-opercule est petit, 
et l’interopercule est grand et nu. La gueule est large et 
bien fendue. La mâchoire supérieure à quatre fortes ca- 
nines, puis un rang de dents coniques le long du bord, 
et derrière, une bande de dents en velours. A l’inférieure 
on trouve un groupe de dents en velours, et une petite 
canine sur le rang externe ; puis sur les côtés deux ca- 
nines plus grosses, ensuite une quatrième grande, forte 
et conique, suivie d’une plus courte, et de plusieurs 
plus petites dans l’angle. Le groupe de dents vomé- 
riennes est tres-sensible. La dorsale antérieure est basse, 
soutenue par de fortes épines; une échancrure bien 
prononcée la sépare de la seconde qui est beaucoup 
plus haute. La caudale est coupée carrément ; l’anale 
est longue et étroite. La pectorale grande à ses rayons 


— 311 — 
branchus plus longs que les simples. On en compte sept 
de ces derniers. De très-petites écailles montent sur 
la membrane des nageoires impaires, principalement 
sur la dorsale. 


D'ioius À 3163 Can: P9-6 5 V. 1/5: 


Le tronc est recouvert d’écailles solides, et beaucoup 
plus grosses que celles du préopercule. Elles sont très- 
finement striées et chagrinées. J'en trouve environ 
quarante-cinq entre l’ouïe et la caudale. La ligne laté- 
rale est droite et par le tiers de la hauteur. 

Ce poisson a le corps vert-olive plus ou moins foncé. 
Sur ce fond on voit des taches plus claires, bordées d’o- 
live foncé, et liserées de beau bleu de cobalt. Ces mar- 
brures et les rivulations qui les bordent forment cinq 
grandes et larges bandes sur le tronc. Quatre bandes 
olive rembruni, et liserées de bleu de cobalt traver- 
sent les joues , une sur le sous-orbitaire , deux sur le 
préopercule , et la quatrième à l’angle de l’opercule. 
Deux autres taches oblongues entourées d’une ellipse 
bleue, sont à la base de la pectorale; les nageoires 
olivâtres ont des rivulations bleues. Elles forment sur 
la caudale une sorte de réseau hexagonal qui doit 
être fort agréable à voir pendant la vie de ce beau 
poisson. 

La longueur de l'individu donné au Muséum d’his- 
toire naturelle, par M. de Fréminville, est de 0",445. 

Je ne vois pas de Cirrhite cité dans le travail de 
M. Jenyns. Est-ce une preuve que ce poisson soit rare 
aux Galapagos ? 


— 312 — 
GENRE SCORPENE. 


La famille des Percoïdes à joues cuirassées par le 
sous-orbitaire articulé avec le préopercule, a donné, 
dans les mers des Galapagos, plusieurs espèces inté- 
ressantes pour lIchthyologie. M. Darwin y a trouvé 
un Prionote nouveau, que M. Jenyns a fait connaître 
sous le nom de Prionotus Miles. 

Le genre des Scorpènes, limité par M. Cuvier aux es- 
pèces qui ont la tête grosse armée d’épines, et dont la 
dentition se développe sur les maxillaires , les palatins 
et le chevron du vomer, a aussi fourni au même natu- 
raliste une espèce qui a pris rang, en Ichthyologie, sous 
le nom de Scorpæna histrio. Elle est différente de celle 
que j'ai à décrire. 

Les Scorpènes sont propres aux mers équatoriales ou 
à celles qui baignent les parties chaudes des zones 
tempérées : nous avons démontré dans notre [chthyo- 
logie que les poissons des mers du nord de l’Europe 
rangés, avant nous, parmi les Scorpènes appartiennent 
à des genres différents. Une seule des Scorpènes d'Eu- 
rope, le Scorpæna Porcus se montre à de rares inter- 
vales dans la Manche. L’Atlantique européen, et le 
grand bassin de cet Océan , compris entre l’Afrique et 
l'Amérique, en nourrit moitié moins d'espèces que la 
mer de l'Inde. Puisque les espèces sont plus communes 
dans le grand Océan Indien , 1l n’est pas surprenant que 
M. Darwin et M. l'amiral Dupetit-Thouars aient donné 
l’occasion d’en faire connaître aux Ichthyologistesde nou- 


— 313 — 
veiles, pendant la relàche qu’ils ont faite aux Galapagos. 
A cause des couleurs rouges dont les côtés de la tête 
sont colorés , ce qui rend les joues du poisson comme 
fardées , je propose de désigner cette nouvelle espèce. 


PLANCHE II. — Fic. 2. 


LA SCORPÈNE FARDÉE. 


Scorpæna fucata, Val. 


Cette Scorpène rappelle par ses marbrures et par ses 
écailles notre Scorpæna scrofa de la Méditerranée : mais 
elle n’a pas comme elle le corps couvert de lambeaux 
cutanés. Elle a les crêtes des joues et de la tête plus pro- 
noncées. Le tronc, gros ettrapu, est à peu près rond à la 
région pectorale, car le diamètre transversal mesure les 
six septièmes de la hauteur, l'épaisseur de la queue est 
encore moitié de la hauteur. La tête est grosse et longue 
comme dans toutes les espèces de ce genre; la lon- 
gueur est à peu de chose près le tiers du corps entier. 
Les yeux sont gros et saillants. Le diamètre est com- 
pris trois fois et quatre cinquièmes dans la longueur de 
la tête. L'intervalle qui les sépare est égale à la moitié 
du diamètre. Il est profondément creusé à cause de la 
hauteur des crêtes surcillières. Chacune porte en avant 
une trés-forte épine, en arrière deux très-courtes. Une 
petite carène frontale peu saillante s’avance jusqu’au 
delà de la narine, et elle est armée d’une forte épine. 
Derrière les épines postérieures de la crête de l'orbite, 
on voit une épine mastoïdienne réunie à celle du côté 
opposé par une crête transversale, et au delà il existe 


— 31h — 

deux autres épines dont la dernière est la plus forte ; 
elles sont réunies par une crête transversale occipitale 
concave , et moins élevée que celle qui précède. Je vois 
derrière l'œil deux petites épines comprimées , tran- 
chantes, mais peu élevées, dont la plus grosse est au- 
dessus de l'articulation du préopercule ; puis je compte 
deux épines oblongues sur le suscapulaire, et enfin une 
épine termine le haut du scapulaire. L’intervalle entre 
toutes ces petites épines est semé de granulations os- 
seuses quelquefois hérissées. 

Le préopercule arrondi porte trois fortes épines à 
son angle , et deux sous le limbe horizontal. 

La crête du premier sous-orbitaire qui traverse et 
cuirasse la joue, se rend à l’épine supérieure ; le bord 
inférieur du sous-orbitaire est armé de quatre épines. 

L’opercule a deux fortes carènes divergentes et ter- 
minées chacune par une pointe aiguë qui dépasse le bord 
de l'os. Les dents des mâchoires sont en velours assez 
rare; celles des palatins et des chevrons du vomer 
sont en cardes ; ces dernières sont un peu plus fortes. 

La dorsale avance vers l’occiput de manière que le 
quatrième rayon épineux correspond à l’angle de l’oper- 
cule. La portion molle n’occupe en iongueur que la 
moitié de la portion épineuse. Les rayons épineux de 
l’anale sont très-forts; la caudale est tronquée. La pec- 
torale dépasse un peu le tiers de la longueur du tronc. 
Les ventrales sont petites. 


B. 7; D. 12/10; A. 3/5; C. 15; P. 19, dont 9 simples; V. 1/5. 


Les écailles sont assez grandes et lisses : l'en compte 
LE ? J 


— 315 — 
quarante-deux rangées entre l’ouïe et la caudale. La 
ligne latérale est presque droite. 

Le fond général de la couleur est un vert d’eau 
plus clair sous le ventre , et plus vif et plus foncé sur la 
tête ; les joues sont colorées d’un beau rouge marbré 
plus foncé sur le préopercule et sur les crêtes. Les taches 
du dos et des flancs sont lie de vin. La dorsale a le 
fond vert, un peu citrin, avec des taches lie de vin 
claires : le bord de la portion molle est rosé. La cau- 
dale a la base verte, et le bord libre rosé assez vif; je 
vois trois rangées de points rouges sur la base de la 
pectorale qui est verte avec le bord rosé. 

L’anale et les ventrales vertes n’ont aucunes taches. 

La longueur de l'individu est de 0,225. | 


GENRE MYRIPRISTIS. 


Parmi les Percoïdes nous avons signalé un certain 
nombre de poissons qui ont plus de cinq rayons aux ven- 
trales. Il est assez curieux de voir comment la nature offre 
tout d’un coup une déviation à un nombre aussi géné 
ralement adopté par elle pour presque tous les Acanthop- 
térygiens. On aurait pu croire à l’établissement d’une loi 
qui n'aurait pas manqué d’être soutenue par une com- 
paraison naturelle. On considère les nageoires paires, 
comme les représentants des quatre membres des ver- 
tébrés. Les pectorales correspondent aux membres an- 
térieurs , et les ventrales aux postérieurs. Trouver dans 
la généralité des espèces cinq rayons articulés aux na- 
geoires ventrales , donnait lieu de croire que ce nombre 


— 6 — 
variable pour les pectorales rappelait au moins celui 
des doigts des membres du plus grand nombre des ver- 
tébrés ; mais une exception se présente dans les Holo- 
centres, les Myripristis, les Bervx, dont le nombre est 
souvent de sept, et dépasse quelquefois pour attemdre 
à celui de dix. 

Les Mvripristis sont, à l'exception d’un seul, origi- 
naires du grand Océan. L’Atlantique en nourrit un 
connu dans les Antilles sous le nom de FRÈRE JACQUESs ; 
c'est notre Myripristis Jacobus. 

Celui des Galapagos a beaucoup de rapport avec cette 
espèce; je lui trouve un caractère saillant et distinctif 
dans ses mâchoires lisses ; c’est ce qui me le fait ap- 
peler : 


PLANCHE IV. — Fic. 1. 


LE MYRIPRISTIS AUX MACHOIRES LISSES 
ou MYRIPRISTIS LEIGNATHE 


Myripristis Leignathos. 


Ce Myripristis est également voisin de celui qui a été 
trouvé au port Praslin de ia Nouvelle-Irlande, et que 
nous avons nommé M. Parvidens, à cause de la peti- 
tesse de ses dents. Celui dont nous nous occupons a les 
dents au moins aussi petites, et il offre comme lui, le 
caractère de manquer de dentelures à l’angle du maxil- 
laire ; mais il à l’intervalle entre les yeux plus étroit, 
œil plus grand, et les nombres un peu différents. 

Ce poisson a, comme la plupart de ses congénères, le 
corps en ovale régulier, jusqu’à la naissance du tronçon 


— 817 — 
de la queue. La hauteur fait près du üers de fa Jon: 
gueur totale. L’épaisseur n’est guère que moitié de la 
hauteur. 

La tête est courte , sa longueur est comprise trois fois 
et trois quarts dans la longueur totale. L’œil est grand ; 
cependant son diamètre est un peu moindre de la 
moitié de la longueur de la tête. L’orbite n’entame pas 
la ligne du profil, mais 1l la touche. 

L'intervalle entre les deux veux égale ie quart de la 
longueur de la tête. Les deux ouvertures de la narine 
sont petites, rapprochées l’une de l’autre et de l'orbite, 
la postérieure a une fente oblongue plus grande que 
l’antérieure. Les palmures du crâne sont peu profon- 
dément ciselées, et précédées de deux arêtes di- 
vergentes entre les veux. Sur le devant du crène est 
une échancrure pour recevoir les pédicules des inter- 
maxillaires. Le sous-orbitaire est étroit, et a ses deux 
bords faiblement dentelées. Le préopercule, l’opercule, 
et l’interopercule sont aussi finement dentelés; le bord 
du sous-opercule est lisse , et n’a aucune dentelure ni 
épine. 

L'intermaxillaire a le bord étroit, le maxillaire a 
quelques stries très-fines , son angle est arrondi , il n’a 
aucune épine ni dentelure. L’os de Pépaule est éga- 
lement lisse. La dorsale à des rayons grêles, dont le 
second , double du premier, est compris deux fois et 
demie dans la hauteur du tronc mesuré sous lui: les 
rayons commencent à diminuer à parür du cinquième ; 
le dernier est très-petit, et presque entièrement caché 
dans la rainure de la dorsale, Le premier rayon de à 


ICHTHYOLOGIE, 29 


— 318 — 
seconde dorsale est une épine assez forte; cette na- 
geoire est assez nettement séparée de la précédente. La 
caudale est peu échancrée ; les épines de lPanale sont 
courtes, 


Dita 1hies À 48 Gr 62 abs Years 


Les écailles ont le bord strié et même dentelé, j'en 
compte trente-huit rangées entre l’ouïe et le caudale. 
La ligne latérale suit parallèlement à la courbure par le 
quart supérieur de la hauteur. 

La couleur est un beau rouge vermillon à reflets 
dorés, qui rendent le poisson très-brillant. 

La longueur de l'individu que je décris est de 0",165. 


DU GENRE DOYDIAODON. 


La famille des Sciénoïdes est représentée aux Gala- 
pagos par des espèces dont nous ne connaissons en- 
core qu'un très-petit nombre. M. Jenyns n’en a eu que 
trois à faire connaître, et la collection de l'amiral 
n’en fournit pas une seule. De ces trois espèces, l’une 
vient augmenter un genre qui compte déjà beaucoup 
d'espèces, celui des Pristipomes. Mon savant collègue 
l'a nommé Pristipoma cantharinum, parce que ses teintes 
rappellent celles du Cantharus griseus de la Manche; les 
formes de ce Pristipome sont celles des espèces de l’Atlan- 
tique, et principalement du Pristipoina rubrum, à cause 
du peu de force du second rayon épineux de l'anale. I 
a cependant le museau un peu plus arrondi. 


Un second Sciénoïde, le Latilus princeps, augmente 


— 319 — 
ce genre peu nombreux, dont nous avons décrit trois es- 
pèeces, Lac. argentatus ", Lat. doliatus* et Lat. chrysops? ; 
car je ne parle pas ici de mon Latilus jugularis qui offre 
une légère différence avec celles-ci. 

Je trouve encore dans le travail de M. Jenyns une 
intéressante découverte due à M. Darwin, dont le z00- 
logiste du Beagle a fait le genre Prionodes. Il faut toute 
la juste confiance que l’on doit ajouter aux travaux de 
mon célèbre confrère, pour ne pas être plus étonné de 
la nouvelle combinaison de caractères zoologiques que 
la nature a faite dans ce poisson. On pourrait dire, si 
l’on osaits’exprimer ainsi, que le Prionode estun Serran 
auquel la nature a enlevé les dents du palais. Les cou- 
leurs de la seule espèce vue par M. Jenyns sont égale- 
ment très-semblables à celles de nos Serrans communs. 

Je n'ai trouvé aucune de ces espèces intéressantes, 
mais les naturalistes de la Vénus ont eu le bonheur de 
prendre deux autres poissons de la famille des Squam- 
mipennes dont M. Darwin ne me parait avoir trouvé 
aucun représentant. L'un d’eux constitue dans lesSquam- 
mipennes un genre nouveau des plus remarquables qui 
vient s'ajouter à la petite tribu des Squammipennes à 
dents tranchantes. Celles de l'espèce sur laquelle nous 
établissons ie genre Doypixopox sont différentes des 
dents des Piméleptères et des Diptérodons, et à cause 
de leur grand nombre et de leur finesse, ‘elles fixent 
les rapports qui lient les deux genres Piméleptères et 

 Cuv., Val, fist. nat. Poiss., t. V, pag. 569 et 571. 


* Eorumdem, ibid., t. IX. Supplément au 


pag. 496. 


volume V, 


400 — 

Diptérodons de la grande famille des Squammipernes. 
Les deux genres nommés plus haut me paraissent y 
représenter les Perches, les Bars , les Apogons et autres 
genres qui forment la première famille des Percoïdes à 
deux dorsales ; je crois donc que la tribu dénommée 
d’après les dents dans notre Histoire des Poissons, 
tt VII, p. 25%, serait caractérisée plus philosophi- 
quement par le nom de Squammipennes à deux dor- 
sales. Elle deviendrait sous ce nom le groupe parallele 
à notre Perche et aux espèces voisines. Le genre 
Doydixodon devient le Hen qui unit cette tribu à celle 
des autres Squammipennes à une seule dorsale; car 
la nageoire dorsale du poisson, dont il va être traité 
dans cet article, est unique, mais les derniers rayons 
beaucoup plus bas que ceux qui les précèdent, laissent 
aisément croire à la présence de deux nageoires. Ce- 
pendant on acquiert bientôt la preuve de leur connexité 
et de leur continuité en enlevant les écailles étendues 
depuis le troisième rayon jusquesur la fin de la nageoire. 
Toutes les autres nageoires sont écailleuses, à la ma- 
nière des Chætodons, des Holacanthes et de tous les au- 
tres groupes génériques de la famille. Il n'y a done 
aucun doute possible, par lexamen de ce caractère, 
sur la place à assigner à notre nouveau genre. 

Les dents, quoique différentes, sont cependant faites 
d’aprèsle plan de celui des Pimélepteres, mais en mar- 
chant vers la figure des dents des Chætodons. Elles 
sont en effet implantées sur plusieurs rangs. Elles pa- 
raissent d'autant plus longues sur le poisson desséché, 
que l'on en voit toute la racine, à cause du retrait des 


“ie 
parties molles de la lèvre sur laquelle elies sont évidem- 
ment mobiles. Cette racine forme un talon dirigé 
presque à angle droit sous la couronne , comme dans 
le Piméleptère, mais elle est rejetée ou reculée en ar- 
rire ; la dent est done un peu coudée. La couronne est 
en forme de cuilleron. Les germes se développent au 
fond d’une gouttière de l’os. Ces dents très-nombreuses 
descendent après leur croissance , et sont prises par la 
lèvre avec laquelle elles restent mobiles; mais comme 
elles sont chassées par la succession incessante des nou- 
veaux germes, elles finissent par se souder sur plusieurs 
rangs sur le corps de los en dedans et hors de la lèvre, 
et elles font ainsi une seconde rangée interne que le 
retrait des parties molles rend encore plus sensible. 

L'étude de cette curieuse dentition fournit une nou- 
velle preuve de ce que J'ai souvent vu dans lhistoire de 
l’Ichthyologie. La nature, dans sa force créatrice, si 
puissante et si active, trouve toujours le moyen, en em- 
ployant les mêmes éléments dans des conditions ana- 
logues , d'arriver à un résultat qui paraît tres-différent. 
Si l'os de la mâchoire ne contenait pas le germe des dents 
dans cette rainure, si la lèvre qui recouvre l'os ne venait 
pas les prendre, mais laissait ces germes adhérer sur la 
face extérieure de l'os; nous aurions dans cette famille 
une mâchoire de Scare ou de Tétrodon. La nature à em- 
ployé le mode de formation et de succession des dents de 
ces derniers, en conservant au produit le caractère des 
dents longues, grêles, serrées les unes contre les autres 
de la famille des Squammipennes. Ces études détaillées 


des différences établies par la nature font comprendre 


parfaitement la structure des mâchoires des Scares ou des 
Fétrodons tels que Cuvier l’a expliquée. 

Je n’ai pu compter que cinq rayons à la membrane 
branchiostége, les Piméleptères en ont sept, dont quatre 
seules sont faciles à trouver ; 1l faut pour observer les 
autres une dissection attentive. Jai cru que les Diptéro- 
dons n’en ont que six ; on ne doit pas s'étonner que ce 
nombre vienne à varier dans un autre genre. Mais comme 
je n’ai examiné qu'un exemplaire desséché , il ne serait 
pas impossible que des naturalistes plus heureusement 
placés que moi ne trouvassent un nombre plus grand de 
rayons sur un individu conservé dans l'alcool, et sur 
lequel on pourrait compter les rayons à laide du 
scalpel. 

Il résulte donc de ces observations que les Doydixo- 
dons sont des Squammipennes à une seule dorsale forte- 
ment échancrée et comme divisée au devant de la portion 
molle ; que les dents mobiles sur les lèvres, et implantées 
sur plusieurs rangs, ont la couronne dilatée, arrondie 
en dehors et creusée en cuilleron en arrière ; le palais 
est lisse et les opercules n’ont ni épines ni dente- 
lures. 

La membrane branchiostége est soutenue par cinq 
rayons. 

Je ne connais encore qu’une seule espèce de ce genre 
remarquable, que je me fais un plaisir de dédier à 
M. de Fremimville, oflicier de marine fort instruit, qui a 
rendu de grands services aux sciences naturelles sous 
la direction scientifique qu'il a reçue de M. Alexandre 
Brongniart et aux soins éclairés duquel les collec- 


re 99 
uüuons du Muséum d'histoire naturelle sont redevables 
des produits ichthyologiques de l'expédition de la 


Vénus. 


LE DOYDIXODON DE FREMINVILLE. 


Doydixodon Freminvillu , Val., Poiss. Fénus, pl. 5. 


La régularité du profil, la grosseur et la largeur de la 
tête, rappelle la forme générale de nos Carpes , en même 
temps que la forme horizontale de la bouche, l’épais- 
seur des lèvres et des mâchoires et leur mouvement 
rattacheraient cette singulière espèce au groupe des 
Muges. 

Ce poisson à des formes trapues. La hauteur du 
tronc est trois fois et un tiers dans la longueur totale; 
l’épaisseur mesure les deux tiers de la hauteur; la 
tête est courte et large, le museau très-gros et obtus: 
l’échancrure de l’occiput, marquée par le sinus rentrant 
de l’attache des muscles du dos, atteint au moins au 
milieu de l'œil; l'intervalle qui sépare les deux yeux 
égale deux fois et demi leur diamètre. I n’y a que 
deux diamètres au devant de l'œil, et encore cela dé- 
pend-il de l’épaisseur de la lèvre. L’orbite est tout à 
fait sur le haut de la joue; le diametre de l'orbite est 
trois fois et un tiers dans la longueur de la tête; le sous- 
orbitaire, caché sous une peau tres-épaisse, estau devant, 
mais peu au dessous l'œil; son bord postérieur est 
échancré en arrière ; le préopercule, légèrement courbé, 
est haut et étroit; le limbe et la joue sont entièrement 


couverts d’écailles, tandis que les trois autres pieces de 


mn 

l'appareil operculaire en sont totalement dépourvues ; 
elles n’ont ni épines ni dentelures; les lèvres sont 
d’une épaisseur remarquable, ainsi que les intermaxil- 
jaires ct la mâchoire inférieure. Les premiers ont une 
branche montante assez prononcée pour rendre la bouche 
un peu protraclile, los lui-même est creux, et contient 
dans sa racine, recouverte par lalèvre, les germes nom- 
breux des dents très-singulières de ce poisson. Il ne 
n'est pas diflicile d'en compter sept à huit rangées. Les 
dents mobiles dans l’épaisseur de la lèvre descendent au 
fur et à mesure qu'elles sont poussées par les rangées 
supérieures, et alors elles se soudent avec le corps 
aplati et élargi de lintermaxillaire. Cet os est formé 
d’une jame arquée, étroite à l'angle de la bouche, mon- 
tant en s’élargissant de manière à présenter une plaque 
triangulaire , dont le bord interne se courbe pour com- 
piéter Paxe dentaire en se réunissant à l’intermaxillaire 
opposé. Le bord externe de los se porte en arrière et 
forme une voûte à parois minces pour constituer la rai- 
nure où sont les germes dont j'ai parlé plus haut, et 
être recouvert par les lèvres épaisses qui sertissent les 
premières rangées de dents mobiles, avant qu’elles ne 
descendent se souder sur le corps de l’intermaxillaire. 
Le maxillaire mince est aplati en lames cachées derrière 
la lèvre, sous le bord hbre du sous-orbitaire, mais il se 
plie en se contournant sur lui-même en formant une large 
palette que lPon voit à l'angle de la bouche le long des 
branches de la mâchoire inférieure. Celles-ci sont faites 
comme l'intermaxillaire, c’est-à-dire que leur branche 
s'élargit en avant el en dedans en une palette triangu- 


— 325 — 

laire qui vient se poser sur la plaque supérieure de l’in- 
termaxillaire quand la bouche est fermée. Elle porte de 
‘oème les dents fixées à l'os, mais en dehors l'os se 
creuse en une large gouttière recouverte par une lèvre 
épaisse garnie de dents. La description de ces différents 
os et leur mouvement prouvent que j'ai eu raison de 
les comparer à ceux de la bouche des Muges; ils en dif- 
fèrent cependant beaucoup par la dentition. Le palais est 
lisse et sans dents; l’ethmoïde forme à l'extrémité au 
devant du chevron du vomer deux grosses éminences 
boursouflées; les palatins sont élargis en deux lames 
latérales et presque verticales. 

Les dents ont une forme très-particulière. Portée sur 
uu très-long talon, la couronne ressemble à un petit 
cuilleron , pl. 5-C., redressé et faisant un angle avec la 
tige radicale. Elles sont serrées par lignes obliques va- 
riant de six à quatre même à deux seulement près de 
l’angleexterne; ces dents gencivales sont suivies d’autres 
semblables, maïs beaucoup plus petites, qui sont fixes 
sur le corps de los. Sur les côtés de chaque màchoire, il 
n'y à qu'un seul rang de petites dents de même forme ; 
la dessiccation et le retrait de la lèvre paraissent dis- 
tribuer ces dents sur deux rangées distinctes, ainsi que 
cela est représenté pl. 5, A-B. 

La dorsale épineuse est beaucoup plus basse que la 
portion molle, ce qui peut faire croire à deux dorsales; 
als comme les écailles remontent sur la base de la 
partie postérieure, on retrouve ici ce que présente un 
grand nombre de Squammipennes. Le premier ravon 


répond au second tiers de la pectorale; ces espèces 


— 326 — 
sont courtes et fortes. L’angle de parties molles est ar- 
rondi, le postérieur est aigu, la caudale et l’anale sont 
échancrées ; la pectorale , pointue à son extrémité, a le 
bord inférieur arrondi. 


B.93:D.12/20: À. 3/19: G'25; P° 285.10. 


Je compte de quarante à quarante-cinq rangées 
d’écailles entre l’ouie et la caudale ; elles sont épaisses, 
solides, plus hautes que larges, à surface sculptée ou 
ciselée; elles diminuent à mesure qu’elles s’avancent sur 
les nageoires, etsur la nuque et les scapulaires; celles des 
préopercules sont aussi très-petites; le reste de la tête 
en est tout à fait dépourvu. 

La couleur est un vert rembruni et presque noirâtre 
sur le dos et le sommet de la tête. Les nageoires et sur- 
tout les portions épineuses de la dorsale sont claires. 

La longueur de l'individu est de 0,430. 


GENRE HOLACANTHE. 


Le second Squammipenne rapporté par la Vénus ap- 
partient à un genre bien déterminé par Lacépède, mais 
il est d’une espèce nouvelle, que M. Darwin n'a pas 
trouvée. 

Le genre des Holacanthes, représenté dans PAtlan- 
tique par deux espèces seulement (Ho. ciliaris et Hol. 
tricolor, Lac.) , est nombreux dans tout le grand Océan 
indien. L'espèce nouvelle que j'ai à faire connaitre res- 
semble le plus par la distribution des couleurs au Chæ- 


todon asfur de Forskal, originaire de la mer Rouge. 


— 327 — 

Elle en diffère par les teintes des couleurs et par un 
caractère plus important. Le préopercule du Hol. 
asfur n'a pas de dentelures sensibles ; elles sont au 
contraire très-prononcées le long du bord montant du 
préopercule de notre poisson. 

Comme le mot asfur, que les Arabes de Lohaja donnent 
à cet Holacanthe, signifie Moineau , j'ai voulu rappeler, 
par l’épithète de l'espèce nouvelle, son aflinité avec 
l’'Holacanthe de la mer Rouge. 


PLANCHE VE. 


L'HOLACANTHE MOINEAU. 


Holacanthus passer, Val, 


Cette espèce nouvelle d’'Holacanthe est, comme Je 
viens de le dire, voisine de lHolacanthus asfur du 
Forskal. 

Son corps est comprimé, et le profil du tronc en 
ovale régulier assez allongé. La hauteur est deux fois 
et demie dans la longueur totale ; la tête est courte, le 
museau fait une courte saillie. La bouche est petite, peu 
fendue, ses dents longues et fines sont serrées les unes 
contre les autres. L’œil est au haut de la joue. Il est 
écarté de l’autre d’une fois le diamètre qui mesure un 
peu du tiers de la longueur de la tête ; celle-ci est com- 
prise cinq fois dans la longueur totale du corps. Le 
sous-orbitaire, aussi haut que l'ail est large, porte quatre 
épines courtes, mais fortes sur le bord libre. Le pré- 
opercule à son bord oblique fortement dentelé, IF donne 


— 328 — 
de son angle un long et grand aiguillon strié qui atteint 
jusqu’à la pectorale, et au-devant de lui il y a sur le 
bord horizontal une épine courte et forte. L’interoper- 
cule porte trois fortes pointes aiguës ; les deux autres 
os cachés sous les écailles n’ont aucunes épines ni den- 
telures. 

La dorsale est étendue tout le long du dos, en partie 
cachée à partir du troisième rayon sous les écailles 
nombreuses qui la revêtent. L’angle de la portion molle 
se prolonge en un lobe pointu, tres-aigu, ce qui rend, à 
cause de la briéveté de l'angle postérieur, le bord de 
cette nageoire très-fortement échancré. L'anale ressem- 
ble à la dorsale, mais elle est plus courte ; la caudale est 
tronquée , la pectorale secondaire arrondie en dessous, 
les ventrales sont un peu plus longues. 


B..75 D. 14/18, À SN8:Ca7s p.178 V, al5. 


Ce poisson est couvert d’écailles épaisses, solides, et 
très-profondément striées, ce qui rend sa surface très- 
rude. Je compte soixante-quinze à quatre-vingts rangées 
d'écailles entre l’ouïe et la caudale qui est comme les 
autres nageoires, et toute la tête couverte d’écailles 
semblables à celles du corps, mais beaucoup plus pe- 
üites. La ligne latérale suit la courbure du dos par le 
quart de la hauteur. 

La couleur est un brun uniforme traversé par 
une large bandelette argentée descendant sur le tronc 
à la hauteur de la sixième épine dorsale. La partie 
épineuse de cette nagcoire, la caudale, les pectorales 


et les ventrales, sont d’un jaune soufre. La dorsale 


— 329 — 
et l’anale sont bordées d’un trait jaune liséré de 
brun. 
La longueur de l’exemplaire est de 0°,265. 


DU GENRE DAURADE. 


Le Sparoïde que j'ai à faire connaître dans cet article 
pourraient tout aussi bien être placés parmi les Pagres 
que dans le genre des Chrysophrys. C’est une de ces 
espèces intermédiaires difficiles à placer, parce qu’elles 
ont des caractères qui tiennent de plusieurs groupes. 
Ce Sparoïde a en effet, comme les Pagres, des dents 
molaires sur deux rangs; comme les Pagels, des dents 
en cardes assez fines derriere les incisives, et il a, comme 
les Daurades, des molaires rondes ou ovales, à cou- 
ronne tellement large, que j'ai trouvé dans le dévelop- 
pement de ce caractère un trait plus saillant des Chrv- 
sophrys que de tout autre genre. 

Je concevrais cependant que des naturalistes vinssent 
critiquer la place que j'ai assignée à ce poisson; ce- 
pendant je vois avec plaisir que je trouve le même sen- 
timent dans M. Jenyns. M. Darwin a rapporté cette 
même Daurade. Elle est décrite est figurée, dans la zoo- 
logie du Beagle*, sous le nom que je m'empresse ici 
d'adopter, afin de ne pas augmenter la liste des 
synonymes, déjà trop nombreux. M. Jenyns n'a eu, 
comme moi, que cette seule espèce de la famille des 
Sparoïdes. 


1 Jenyns, Fish. of Beagle, pag. 56, pl. 12. 


— 330 — 


PLANCHE IV. — Fc. 2. 


LA DAURADE CYANOPTÈRE. 


Chrysophrys Taurina, Jen. ?. 


Ce poisson a le prolil de nos Spares à museau tron: 
qué, la courbe du dos arquée et très-soutenue vers la 
nuque, la ligne du ventre presque droite. 

La hauteur est comprise trois fois et quatre cinquièmes 
dans la longueur totale. La tête, à peu près aussi courte 
qu'elle est haute, est aussi comprise quatre fois et un 
tiers dans la longueur totale. L’œil est grand sur le haut 
de la joue. Le sous-orbitaire forme sur le devant de la 
joue un large trapèze recouvert par une peau adipeuse. 
Le préopereule est étroit et couvert de cinq à six rangées 
d'écailles. Tout lopercule, le sous-opercule et linter- 
opercule sont cuirassés par de fortes écailles semblables 
à celles du tronc. Les deux premiers de ces os sont 
confondus sous les écailles qui les cachent. Il y a trois 
rangées de dents molaires à la machoire d'en haut, les 
dernières du rang interne sont rondes et les plus 
grandes. La mâchoire inférieure n’en a que deux ran- 
gées. Le devant de la bouche a quelques dents coni- 
ques, et derrière elles des dents en carde. Le palais est 
entièrement lisse. La dorsale répond à peu pres au tiers 
de la pectorale : elle est basse. La caudale est fourchue, 
à lobes larges, et celui d’en bas est moins pointu que 

1 Indiqué sur la planche de notre atlas Chrysophrys cyanop- 
era, Val, 


— 9331 — 
le supérieur, La pectorale est longue et aiguë; elle 
se termine à peu près sous le onzième rayon épi- 
neux. 


Den D is Ans Phi sv 25: 


Les écailles sont grandes, osseuses et lisses. Il y en a 
cmquante le long de la ligne latérale, et quelques-unes 
sur la base de la caudale. 

La ligne latérale est marquée par une série de petites 
tubulures ; elle s’infléchit vers la queue. La couleur est 
jaune pâle, avec du rougeàtre sur le devant de la face. 
Les nageoires sont bleuûtres. 

La longueur de notre exemplaire est de 0",360. 


GENRE CARANYX. 


Le genre des Caranx est un des plus nombreux, non- 
seulement de la famille des Scombercoïdes, mais de la 
classe entière des poissons. 

L'espèce nouvelle que j'ai à décrire appartient à cette 
tribu, qui à une seule fausse nageoire libre derrière la 
dorsale et l’anale. Elle a, comme tous ces Caranx, les 
formes allongées, la côte longue, et larmure latérale 
de la queue cuirassée par de petts boucliers qui ne se 
montrent qu’au delà de la moitié du tronc. Les pecto- 
rales sont plus longues que celles des autres. Ces formes 
donnent à ce poisson une assez grande ressemblance 
avec nos Maquereaux, et que j'ai signalée en nommant 
cette espèce, 


_— 499 = 


PLANCHE VIE — Fic. 1. 


LE CARANX SCOMBRIN. 


Caranx scombrinus, Val, 


Le Caranx que j'ai à faire connaitre ici ressemble 
beaucoup à notre Maquereau commun par la forme ar- 
rondie de son corps par la grandeur et la longueur de sa 
tête ; mais il tient des Caranx par la petitesse de sa bouche 
et par les boucliers latéraux de la queue. I doit prendre 
place à côté des espèces qui ont une petite pinnule 
libre dessus et dessous la queue, C’est donc pres des 
Caranx Alexandrinus, C. tela et autres espèces voisines 
qu’il faut le placer. 

Le corps est rond, fusiforme. Sa hauteur est moindre 
que le sixième de la longueur totale; celle de la tête y 
est comprise quatre fois et quelque chose. L'œil est 
grand , éloigné du bout du museau d’une fois son dia- 
mètre, et contenu trois fois et un tiers dans la lon- 
gueur de Ja tête. Le sous-orbitaire est caverneux, les 
dents sont en velours ras. La première dorsale trian- 
gulaire touche à la seconde, qui est longue et basse vers 
la fin. L’anale a la même forme; la caudale est bilobée 
ou peu profondément fourchue. La pinnule libre, su- 


périeure ou inférieure, est élargie en palettes égales. 
Dr ns À abs C0 js tBr 237 VS. 


« 


Tout le corps est couvert de petites écailles très- 


i . 7 Ar . 
N. B. Que le dessinateur à oublié la neuvième et les petits 
rayons des nageoires. 


= 

minces. Je compte Jusqu'à quarante-deux petits bou- 
cliers, à parür de ceux de l’extrémité de la queue où 
ils sont encore visibies. 

La ligne latérale n’a qu'une bien faible courbure. 

La pectorale en faux atteint à la fin de la dorsale. 
Le dos est vert foncé, devenant argenté sous le ventre. 
Les pectorales et les ventrales sont plus foncées que les 
autres nageoires, qui sont transparentes avec une légère 
teinte verdàtre. 

L'exemplaire a 0°,400 de long. 

Cette espèce manque à lIchthyologie du Beagle, qui 
n’a d’ailleurs aucun autre Scombéroïde. 


GENRE PRIONURE. 


La famille des Teuthies se compose, comme on le 
sait, de trois groupes distincts : celui des Ampha- 
canthes caractérisé par les deux épines de chaque 
ventrale, celui des Acanthures qui ont de chaque côté 
de la queue un aiguillon mobile que le poisson peut 
redresser à volonté, et celui des Nasons dont la queue 
porte des boucliers osseux fixes, immobiles et sur 
lesquels il y a une carène relevée et tranchante. 

La peau de tous ces poissons est dénuée d’écailles, 
même quand elle est chargée d’àpretés plus où moins 
rudes au toucher. 

Les dents, disposées sur un seul rang, sont lisses, 
coniques où quelquefois crénelées , et leurs caracteres 
se combinent avec ceux que je viens de rappeler. Tai 
établi des genres faciles à reconnaitre dans cette famille, 


ICHTHYOLOGIE, 29 


— 334 — 

Les Nasons et leurs congénères sont tous originaires 
du grand Océan indien; je n’en connais encore aucune 
espèce dans PAtlantique. 

Le Prionure que j'ai à faire connaitre a l’aspect des 
poissons de ce genre, et comme J'ai publié un Nason 
à trois boucliers, j'avais d’abord cru que le Teuthie à 
trois écussons, originaire des Galapagos, devait être 
placé près du Nason à trois boucliers d’Amboime, déjà 
connu de Valenty et de Renard. Mais en étudiant cette 
nouvelle espèce avec plus de soin pour la décrire, je 
n'ai pas tardé à reconnaître que les dents avec leur 
couronne dentelée plaçaient cette nouvelle espèce par- 
mi les Prionures, et non pas parmi les Nasons qui ont 
leurs dents coniques et sans dentelures. 

Elle prend alors un nouveau caractère d'intérêt, 
car elle ajoute une troisème espèce à un genre fondé 
sur une première due aux recherches de Péron. 
Elle confirme la justesse de nos vues, lorsque nous 
avons établi le genre des Prionures. Nous voyons ce 
genre répandu dans tout le grand Océan, depuis la 
Nouvelle-Hollande jusqu'aux côtes du Japon, et en 
dernier lieu sur ce petit archipel des Galapagos rap- 
proché du continent américain. 

Cette famille des Teuthies doit être signalée aux re- 
cherches des voyageurs; elle est presque exclusive- 
ment confinée dans les mers de l'Océan indien; ear à 
l'exception de quelques espèces d’Acanthures, et en 
très-petit nombre, du grand bassin de l'Atlantique, 
toutes les autres si nombreuses viennent du grand 
Océan. Depuis la publication de la monographie de cette 


— 339 — 
faille, donnée dans la grande histoire des poissons, 
les collections nationales et étrangères se sont accrues 
d’un assez bon nombre d’espèces nouvelles. 


PLANCHE VIE. — Fic. 2. 


LE PRIONURE A LARGE RAÏIE. 


Prionurus laticlavius , Val. *. 


Nous avons à ajouter aux Prionures déja connus 
celui-ci, qui n’a pas de cornes avancées sur le front, 
ni même de tubérosité au devant des yeux. | 

Le profil, un peu soutenu et convexe entre les yeux, 
descend par une concavité profonde vers le museau qui 
fait une petite saillie par suite du rétrécissement de la 
face sur le devant des yeux. Au-dessus de ces organes 
la ligne monte par une courbe régulière pour former, 
avec la courbure un peu moins forte du ventre, l’ellipse 
du corps. La queue sort de cet ellipse. La hauteur fait le 
tiers de la longueur totale, jusqu’au centre du bord 
concave de la caudale. Le tronçon de la queue est très- 
étroit, car sa hauteur ne fait que le cinquième de celle 
du tronc. La longueur de la tête égale le cinquième de 
la longueur totale du corps. L’œil est placé haut et en 
arrière sur la joue, éloigné du bout du museau de trois 
fois la longueur de son diamètre, et de la ligne du profil 
de moitié de ce diamètre. On ne voit rien de son orbitaire 


? A tort sur la pl. VII : Vaseus laticlavius. 


—— 336 — 

au devant de l’œil; il est entièrement caché par la peau, 
Le bord du préopercule se dessine par une ligne oblique 
assez haute; son angle est arrondi, et le bord inférieur 
est légèrement concave; l’opercule est faiblement strié 
et étroit, car il est deux fois plus haut que large, et sa 
largeur égale le diamètre de l’œil. La bouche est peu fen- 
due ; le maxillaire est presque en entier recouvert par la 
peau qui entoure le sous-orhitaire et les côtés de la joue. 
L’intermaxillaire a peu de mobilité; il porte huit dents, 
ce qui en fait seize à la mâchoire supérieure. Elles sont 
élargies, comprimées, tranchantes, à émail ciselé, et 
à bord dentelé ou festonné de quatre à cinq dentelures 
mousses et arrondies, et seulement sur le tranchant 
de la couronne et du côté externe ou postérieur. Le 
bord interne est lisse et sans aucune dentelure, La mà- 
choire inférieure a seize ou dix-huit dents comprimées et 
dont la couronne seule a le bord festonné. Le suscapu- 
laire et l’huméral sontstriés, le cubital l'est également sur 
les bords de sa plaque qui est triangulaire, et chagrinée 
dans le milieu. La pectorale est obtuse et épaisse; elle 
est comprise cinq fois et demie dans la longueur totale. 
Les ventrales ne sont pas très-longues; leur épine est 
forte et à peu près de moitié de la longueur du 
rayon. 

La dorsale commence en arrière de l’aplomb de 
l'insertion de la pectorale; elle a huit rayons épineux, 
dont le premier est très-court. Les autres restent assez 
bas, car la hauteur de la nageoïre ne mesure que le 
cinquième de la hauteur du corps. L'anale n’est pas 
plus élevée et de même forme; elle commence sous les 


— 331 — 
premiers rayons mous de la dorsale. La caudale a les 
iobes arrondis, obtus, non prolongés en pointe ; le bord 
est concave. 


D.-8/28:. A 3/55;s C7 EMI EN. 00. 


Le corps n’a pas d’écailles, mais une sorte de cuir 
hérissé de petites aspérités très-fines. De chaque côté 
de la queue, il v a trois boucliers osseux. La couleur est 
jaune, avec une large bande brune ou bistre étendue sur 
le côté. La tête est un peu plus foncée que le dos. La 
dorsale et l’anale ont les rayons Jaunes et la membrane 
roussätre ; la caudale et la pectorale ont plus de jaune. 

L'individu qui a fait le sujet de cette description a 
0®,390 de longueur. 


GENRE LABRE. 


Les Labroïdes sont, comme on le sait, abondants et 
presque également répandus dans toutes les mers, de- 
puis les deux pôles jusqu’à l'équateur. Les naturalistes 
explorateurs de l'archipel des Galapagos ne nous en 
ont fait connaître que peu d'espèces. Je n’en vois qu’une 
seule décrite dans l'excellente publication des Poissons 
du Beagle. Elle appartient au genre des Cossyphes. 

L’amiral Dupetit-Thouars a été plus heureux dans les 
recherches qu'il a fait faire. La petite collection que je 
fais connaître en avait deux. L’une d'elles est aussi un 
Cossyphe. 

L'autre est du genre Labre, réduit aux caracteres 
que je lui ai assignés. Elle est nouvelle et doit prendre 


— 338 — 
place à côté du Labrus scrofa de l'Atlantique. J’indique 
cette affinité en la nommant : 


PLANCHE VII. — Fic. 1. 


LE LABRE SANGLIER. 


Labrus aper, Val. 


Ce grand et beau Labre a la plus grande ressemblance 
avec le Labrus Scrofu, découvert dans le grand bassin de 
l'Atlantique, depuis les Canaries et Madère, jusqu'aux îles 
du cap Vert. La disposition des dents et la distribution 
des couleurs montrent le voisinage de ces espèces. 

Ce poisson a le port et la forme régulière de nos 
Labres. Le profil est un peu soutenu sur le front jus- 
qu’à la nuque. La longueur comprend trois fois et un 
quart la hauteur. La tête est un peu plus courte que la 
hauteur du tronc. L’œil est éloigné du bout du museau 
de deux fois le diamètre. Le sous-orbitaire est large et 
caché sous une peau épaisse. Le préopercule a le bord 
vertical lisse, sans dentelures ; l’angle et le bord infé- 
rieur arrondi. Les dents de l'extrémité et de l’angle de 
la mâchoire sont saillantes et comme des défenses; le 
reste de l'os porte des dents coniques égales, et le 
côté interne est couvert de petites granulations. 

La dorsale et l’anale sont prolongées en pointes ai- 
guës ; la caudale est peu échancrée à quelques rayons 
externes prolongés en un lobe court; la pectorale est 
large et triangulaire. 


pri Dituo us A: 9/65 Cas ass Nr 


-50e 

Les écailles sont de grandeur médiocre, j’en compte 
soixante-deux rangées entre l’ouïe et la caudale. Celle 
de lopercule sont semblables à celles du tronc, celles 
du préopercule sont beaucoup plus petites ; il y en a 
dix rangées sur un espace qui en contiendrait à peine 
six de celles du tronc. 

La couleur générale est un rouge brique plus ou 
moins vif, avec quelques rayures longitudinales qui se 
montrent par reflets. Une large tache jaune est sur 
chaque flanc au-dessus de la pectorale. Toutes les na- 
geoires sont bleuâtres, la dorsale a une tache noire sur 
les quatre premiers rayons épineux, comme cela se 
trouve sur plusieurs autres Labres, et notamment sur le 
Labrus scrof«. 

La ligne latérale n’est pas interrompue 

La longueur de l’individu est de 0,430. 


DES COSSYPHES. 


Ce genre n’est jusqu’à présent représenté dans lAt- 
lantique que par une seule espèce signalée déjà par 
Margrave, mais dont les caractères et les synonymies 
avaient été si mal établis que j'ai eu beaucoup de peine 
à fixer la place de ce curieux Labroïde. Aujourd’hui 
que ce genre et ses espèces sont caractérisées et 
limitées, il m'a été facile d'ajouter à celle qui sont 
connues le nouveau Cossyphe que je vais décrire. 

Il a les formes du Cossyphe du Brésil, et en gé- 
néral de ces mers américaines; mais 1} rappelle par la 
disposition des couleurs nos espèces indiennes. 


— 3h40 — 

Je me conforme au désir qui m'a été exprimé par 
M. de Freminville, donateur de cette précieuse collec- 
tion au Muséum, et dédiant cette belle en nouvelle 
espèce de Cossyphe à M. L'Éclancher. 

J'ai dit plus haut que M. Jenyns avait publié un nou- 
veau Cossyphe ; il la nommé Cossyphus Darwini, en le 
dédiant au zoologiste habile et distingué par ses belles 
observations sur les Coraux et les Zoophytes du grand 
Océan indien, comme je le fais pour Poflicier du service 
de santé de l'expédition qui a formé cette collection. 


PLANCHE VITE — Fic. 2. 


LE COSSYPHE DE L'ÉCLANCHER. 
Cossyphus Eclancheri, Val. 


Ce brillant poisson a l'aspect des autres Cossyphes ; 
des écailles recouvrent la base de la dorsale, la portion 
molle de cette nageoire, l’anale et les ventrales prolon- 
gées en pointes aiguës; de grandes écailles sur les 
opercules et font aisément reconnaitre ce poisson. La 
longueur de la tête égale à la hauteur du corps fait 
le quart de la longueur totale. Le front est assez sou- 
tenu entre les yeux, le museau est aigu; lœil de 
grandeur médiocre à un diametre qui ne fait que le 
sixième de la longueur de la tête, et a une fois ce 
diamètre au-dessous de la ligne du profil. Le préoper- 
cule est couvert de petites écailles , mais celles de 
l'opercule ressemblent presque à celles du corps par 
leur grandeur. 


La pectorale est large et insérée sous l’aplomb de 
l’angle de lopercule. Le premier rayon de la dorsale est 
un peu plus reculé; sa hauteur égale les deux tiers de 
la dernière épine , et n’est pas le tiers du rayon le plus 
long de la dorsale. La caudale a le bord coupé carré- 
ment, et ses angles arrondis n’ont aucun espace de 
prolongement. Les ventrales égalent en longueur près 
des quatre cinquièmes de la hauteur correspondante du 
tronc. 

D; 19/105"44,5/1a5 C0 1258. 183 V.' 1/6: 

Les écailles sont minces et assez grandes, j'en trouve 
trente-deux rangées entre l’ouïe et la caudale. La ligne 
latérale est tracée parallèlement au dos par une suite de 
tubaclures, sous l'extrémité postérieure se redresse un 
peu vers la dorsale. Tout le corps est peint d’un beau 
rouge vermillon, avec de grandes maculatures noires , 
étendues sur les six premiers rayons de la dorsale, et 
descendant sur le dos, puis couvrant toute la base 
de la dorsale et le dos de la queue sans atteindre la cau- 
dale. Ces taches noires remontent sur toute la portion 
molle de la dorsale en laissant sur les deux bords un 
liséré rouge vif. 

Ce poisson est grand comme nos Tourds ordinaires 
(Labrus Turdus, Nob.). Il a 0*,439 de longueur. 


GENRE TURBOT. 
Passer, Cuv. 


Le nom de Rhombus , sous lequel M. Cuvier à établi, 


avec raison, la coupe générique des Turbots de la fa- 


= — 
mille des Pleuronectes avait été déjà employé par Lace- 
pède pour un poisson voisin des Stromatées, et que 
Linné a fait connaître sous le nom de Chætodon Alepi- 
dotus. I le tenait de Garden. En faisant la monographie 
de ce genre (Hist. nat. Poissons, tome IX, p. #00), 
j'ai dit que je reprenais les dénominations consacrées 
par Lacépède, et que M. Cuvier avait eu tort de ne pas 
accepter dans le Règne animal. N'ayant pas reconnu le 
genre établi par Lacépède, 1l n’en avait pas moins bien 
recherché et déterminé le poisson de Garden, et croyant 
qu'il fallait en faire un genre distinct, M. Cuvier le 
désigna par un nom nouveau, celui de Peprilus. Lors- 
qu'il en vint à parler, dans la famille des Pleuronectes, 
du genre des Turbots, il trouva la grande espèce de nos 
mers , désignée par Linné sous le nom de Pl. Rhombus. 
C’est bien , en effet, le Rhombus des naturalistes grecs 
et latins; il faut cependant remarquer qu'Athénée et 
Naurate, cité par le premier de ces deux savants ont 
confondu le Péuéos d’Aristote avec le y#:72, qui est plus 
spécialement notre Barbue. Faisant avec raison un genre 
de ces Pleuroncetes à dorsale avancée jusque vers le bord 
de la mâchoire supérieure, l’auteur du Règne animal 
désigna sa nouvelle coupe générique par l’épithète que 
Linné avait empruntée aux anciens. Mais si M. Cuvier 
avait d’abord cherché à reconnaitre le genre désigné 
par Lacépède, sous le nom de Rhombus, 11 n'aurait 
pas employé, quoiqu’à regret sans doute, cette déno- 
mination pour le nouveau genre de la famille des Pleu- 
ronectes. Jusqu'au travail que J'ai donné sur la famille 
des Stromatées, les Ichthvolosaistes ont admis le nom 


— 3h38 — 
de RaomBus pour désigner le genre de Pleuronectes 
établi par Cuvier. J'avoue qu'après avoir reconnu le 
genre de Lacépede qui était resté presque ignoré, 
tandis que celui de Cuvier avait été accepté; j'ai 
eu beaucoup de peine à me déterminer à rétablir les 
noms suivant leur chronologie. Je sentais bien, et 
je sens encore que ce changement de nom va faire 
une petite perturbation dans la nomenclature; et la 
langue des zoologistes et surtout celle des Ichthyo- 
logistes est déjà assez surchargée de noms inutiles, fai- 
sant double emploi où confusion , pour ne pas y ajouter 
encore en voulant rectifier. D'un autre côté, J'ai cru 
qu’il était de toute justice, surtout dans un ouvrage, 
comme celui auquel M. Cuvier m'a fat consacrer 
une partie de ma vie, en recherches littéraires et sy- 
nonymiques, la dénomination qu’un homme aussi 
illustre que Lacépède avait donnée à un genre par- 
faitement établi. Ce grand zoologiste s’est servi du 
nom de Pserrus employé déjà dans les manuscrits 
de Commerson pour un genre bien déterminé de la 
famille des Squamipennes. Je n'aurais pas hésité à 
donner au genre des Turbots le nom latin tiré de la 
dénomination de la Barbue. Maïs je ne pouvais pas 
le faire. Jai pris alors dans les noms latins imposés 
aux Pleuronectes un de ceux que nos prédécesseurs 
n'avaient encore employé; celui de Passer, l’un des 
plus connus, et que par lequel tant d'auteurs ont 
désigné les Pleuronectes, m'a paru convenable. Quand 
j'aurai publié , soit en entier, soit par extrait, la Mo- 


nographie des Pleuronectes dans la seconde série de 


— 3h — 
l'Histoire des Poissons, j'espère établir définitivement 
cette nouvelle dénomination, et qu’elle sera acceptée 
par les zoologistes. 

D'ailleurs je ne serais pas éloigné de croire que le 
poisson que je décris ici sous le nom de Passer Mar- 
chionessarum ne constituera avec le PI. Podas, et quel- 
ques espèces voisines, un genre distinct du Turbot et de 
la Barbue des mers d'Europe; mais ces coupes ne peu- 
vent être faites qu’à la suite d’un examen détaillé et cri- 
tique de toutes les espèces de cette grande famille, et 
ce n’est pas ici le lieu d'établir cette discussion. 


PLANCHE IX. 


LE TURBOT DES ILES MARQUISES. 


Passer Marchionessarum . Val. 


L'espèce nouvelle dun grand Océan à de la ressem- 
blance avec les espèces de l'Atlantique, et même avec 
le Pleuronectes Podas de la Méditerrannée. Elle tient 
cette aflinité du grand écartement des yeux de la saillie 
des crêtes surcilières et de l’épine relevée qui termine 
la maxillaire. 

Ce Turbot à le corps allongé; la largeur des flancs 
fait le tiers de la longueur totale. La tête y est com- 
prise quatre fois et trois quarts. Le profil est un peu 
sinueux entre les deux yeux ; l’œil gauche est inférieur, 
répond à l’angle supérieur de la bouche, le droit ou 
le supérieur est éloigné du premier de deux fois le 
diametre ; à lintervalle un peu creux qui les sépare est 


— 3h>5 — 

lisse , le préopercule à son bord vertical droit , l’autre 
descend très-obliquement vers l'angle de la mâchoire ; 
il est tout couvert d’écailles comme les autres pièces de 
l'appareil operculaire. Les dents sont en cardes très- 
fines. Il y en a aussi sur le chevron du vomer. Outre la 
grande espèce du maxillaire, il y en a une seconde 
plus courte et cannelée le long de l'os. La dorsale est 
étendue depuis le devant de l'œil jusqu'auprès de la 
queue. L’anale commence à l’aplomb de lépaule, la 
caudale est arrondie. La pectorale gauche est longue , 
et les trois premiers rayons sont prolongés en filaments 
déliés ; leur longueur entière portée sur le corps v 
est égale à la hauteur du tronc, ou est comprise trois 
fois et trois quarts dans la longueur totale. 

La longueur de la pectorale droite est du tiers de la 
gauche. 


B:95 D'00; À 703 CG 10,P-. 412 V6; 


Il y a environ cent rangées de petites écailles le long 
des flancs ; elles sont toutes marquées de stries concen- 
triques et grenues. La ligne latérale est fortement cour- 
bée à son origine au-dessus de l'insertion de la pecto- 
rale , elle se rend ensuite droite à la queue par le mi- 
lieu du corps. 

La couleur est brune du côté gauche, et blanche de 
l'autre côté. 

Ce poisson m'a élé indiqué comme provenant des 
îles Marquises , il est long de 0".400. Il serait le seul 
de cette collection qui fût étranger aux Galapagos. 


— 340 — 


GENRE MURENE. 


M. Darwin a trouvé aux Galapagos un Gobiésoce 
que les navigateurs sur {a Vénus n’y ont pas observé. Ce 
poisson, décrit par M. Jenyns, est devenu le Gobiesox 
pæcilophthalmus. Je cite cette jolie espèce pour compléter 
ici la revue des Poissons déjà connus de Parchipel. 

La famille des Anguilliformes a fourni au contraire 
des espèces aux deux expéditions. Elles appartiennent 
toutes deux au genre Murène. 

Les Ichthyologistes ont tous senti la nécessité de sub- 
diviser le grand genre Muræna de Linné. Déjà Thunberg, 
sous le nom de Muræna, Bloch, sous celui de Gymno- 
thorax , Lacépède, sous celui de Murænophis , ont réuni 
les espèces sans pectorales, pour les séparer des An- 
guilles qui ont les nageoires thoraciques plus où moins 
développés. L'on trouvera dans l'analyse de la famille 
des Anguilliformes que j'ai raison d'employer une ex- 
pression douteuse sur la valeur du caractère fourni 
par la présence ou l’absence de la pectorale; car ces 
nageoires diminuent par degrés insensibles. L'étude des 
dents fournira des caractères bien plus positifs; elle 
démontrera que les premières modifications apportées 
par l’auteur du Règne animal au genre Muræna de Linné, 
n'étaient que l’ébauche d’un travail plus considérable, 
qui doit être précédé de la description et de la dissec- 
tion des nombreuses espèces de cette familie très-nom- 
breuse et répandue dans toutes les mers. 

M. Darwin a pris à l’île Chatam et à l’île Charles les 


“+ 


— 347 — 
deux exemplaires du Murænophis nommé par M. Jenyns 
Murænophis lentiginosa. N n’en a pas publié de figure. 
La description que j'ai comparée à mon poisson ne lui 
convient pas assez pour que je le regarde comme de la 
même espece. 

Celle que je décris 1c1 appartient au groupe des 
Murænophis, dont la gueule est armée de dents poin- 
tues et tranchantes sur un seul rang, et qui ont les na- 
geoires impaires assez élevées pour en énumérer faci- 
lement le nombre des rayons. Il me paraît probable 
qu’elle restera dans le genre qui sera plus spécialement 
désigné par le nom générique sous lequel je vais la 
faire connaître. 


PLANCHE X. — Fic. 1. 


LA MURÈNE MARBRÉE. 


Murenophis marmoreus, Val. 


Cette Murène élégante par ses couleurs, appartient à 
cette division des espèces à dents triangulaires, poin- 
tues, tranchantes sur les côtés, sans dentelures ni cro- 
chets. Le vomer en porte aussi une série longitudinale ; 
mais les palatins sont lisses. Les yeux sont au milieu de 
la longneur de la fente de la gueule, l'occiput est peu 
soutenu, les narines antérieures sont tubuleuses , l’ou- 
verture postérieure est une fente longitudinale sous 
l'œil. [n’y a comme dans les espèces de ce genre au- 
cunes nageoires paires, le nombre des rayons des trois 


— 348 — 
autres réunis, et de quatre cents et quelques, car j'en 
compte 
D. 164; À. 1273 C. 12. 
Tout le corps est marbré de brun sur un fond jaune. 
Longueur 0°,530. 


GENRE TÉTRODON. 


Deux espèces du genre Tétrodon ont été observées 
aux Galapagos. L'une à été rapportée par M. l’amiral 
Dupetit-Thouars ; mais l’exemplaire, en assez mauvais 
état, n'a pu être figuré; et Je n’en aurais pas même 
parlé, si M. de Freminville n'avait joint à l'envoi de 
cette collection le dessin de cette espèce. Il m'a servi à 
reconnaître le Tetrodon angusticeps de M. Jenyns. 

La seconde ne m'est connue que par la description du 
Beagle : c’est le Tetrodon annulatus. C'est une des 
espèces dont la peau est couverte de fines épines. 


LE TÉTRODON A TÊTE ÉTROITE. 


letrodon angusticeps, Jenyns, loy. du Beagle, pl. 28. 


Celui-ci est du petit nombre des Tétrodons à peau 
lisse et sans épines. Sous ce rapport, elle tient plus des 
Tétrodons de l'Atlantique que de ceux de la mer des 
Indes. 

La tête est oblongue et étroite. Les veux sont très- 
rapprochés; l'intervalle qui les sépare égale leur dia- 
méêtre. Le dos est droit, le ventre assez renflé, et 
animal peut se gonfler beaucoup. La dorsale est pe- 


— 349 — 

tite et répond à l'anale, qui est aussi étroite. La caudale 
est coupée carrément. La ligne latérale est infléchie sur 
le corps et rameuse sur la tête; une branche fait une 
grande anse sur la narine; deux autres vont, en tra- 
vers , se perdre sur la nuque et sur le commencement 
du dos, sous la première de celle-ci, un rameau des- 
cend sur la joue. 

Le dessin, coloré par M. de Freminville, peint le dos 
en brun, ainsi qu’une large bande qui court sur le bas 
des côtés. Une autre bande de couleur jaune sépare le 
brun du dos de celui des côtés. Tout le dessous du 
corps est également jaune, ainsi que les dorsales, 
l’anale et les pectorales. La caudale est brune. Une 
tachefoncée, presque noire, est à la base de la pectorale. 

M. Jenyns indique des teintes un peu différentes. 
Suivant ce zoologiste, le dos serait verdâtre, un peu 
rembruni ; la base de la pectorale et la dorsale seraient 
noires. N’a-t-il pas dit, par inadvertance , dorsale pour 
caudale? D'ailleurs M. Jenyns reconnait queles couleurs 
du poisson ont été altérés par l’action de l'alcool. 

Malgré ces légères différences, je ne doute pas de 
l'identité spécifique des poissons recueillis par M. Darwin, 
sur le Beagle, et par M. L'Éclancher, sur la Vénus. 


GENRE CESTRACION. 


Le genre des CEsrracions est encore une des excel- 
lentes créations de Cuvier. Elle a fixé la place d’un Squale 
des mers de la Nouvelle-Hollande, qui paraissait tout à 
fait étranger dans cette grande famille, à cause de la 

IcarnYOLOGiE. 2/4 


— 350 — 

singularité de sa dentition. Les caracteres et les formes 
de ses dents sont, en effet, tellement différentes de 
celles des autres Squales, que l’on ne peut hésiter 
sur la fixité que donne létude de ces dents. Elle a 
un autre avantage, c’est de faire connaître d’une ma- 
nière plus précise les rapports des Hybodes et autres 
Squalides connus par leurs dents fossiles et communes 
dans la période crayeuse. 


PLANCHE X. — Fic. 2. 


LE CESTRACION PANTHÉRIN. 


Cestracion pantherinus, Val. 


Ce poisson de la famille des Squales a le port d’une 
Roussette : le dessus de la tête est plus creux , mais 
il l'est beaucoup moins que celui du Cestracion 
Phillipi, qui habite les eaux de la Nouvelle-flollande. 
Ce peu de profondeur de la gouttière occipitale dépend 
du peu de redressement des arcades sureilières. 

La première dorsale l’éléve au tiers du corps , et la 
seconde au milieu de l’intervalle entre l’épme de cette 
première dorsale et la caudale. Les espèces sont grosses, 
un peu renflées, et n'atieignent qu’à moitié de la hau- 
teur de la nageoire. L’angle de ces nageoires est ar- 
rondi, la membrane est trapézoïdale. L’anale est étroite 
et arrondie. La caudale a le lobe supérieur tronqué, 
large et à angles mousses; le lobe inférieur est triangu- 
laire. 

La pectorale est insérée au milieu de l'espace entre 


— 351 — 
le bout du museau et la ventrale , et ceiles-ci sont aux 
deux cinquièémes du corps. Ces nageoires paires sont 
assez larges , à bords arrondis. 

La troisième des cinq fentes branchiales est à l'angle 
de la pectorale ; je vois sous l'œil un petit avant. 

La bouche n’est pas trés-large, elle porte en avant 
cinq à six rangs de petites dents aiguës, ayant à la base 
deux petits talons épineux, puis viennent sur les côtés 
des màchoires six rangées de molaires arrondies et ca- 
rénées sur le milieu. 

Toute la peau est couverte d’aspérités mousses à 
l'extrémité du museau , sur les nageoires et même 
sur le palais; mais sur le tronc et au delà, ce sont 
des tubercules à trois pointes aiguës, les deux laté- 
rales comme de petits talons, et implantées en quin- 
conces serrés, elc. 

La couleur est un gris roussâtre, avec de grosses 
taches noires arrondies éparses sur les corps et sur les 
nageoires. 

L'individu est un mäle, ses appendices sexuels sont 
gros, Coniques mousses , et dépassant la ventrale ; ils 
sont presque aussi longs qu'elle. 

La longueur est de 0",475. 


TABLE DES MATIÈRES 


MAMMIFÈRES. 
Pages 
Intronnchon........7.,.. D I LT TT i 
Première section. — Primates..................... Ron: . 5 
Deuxième section. — Carnassiers.................... ce 119 
Troisième section. — Rongeurs ........... se Sn . 154 
Explication des planches de Mammifères ................... RS 169 
Index des espèces de Mammifères décrites ou indiquées, et des 
noms génériques et spécifiques cités. ........... Ne nee 175 
OISEAUX. 
Introduction ....... ARARE RS te ARE . A7 
Index des espèces d'Oiseaux décrites ou indiquées, et des noms 
génériques et.SpéCIques CLÉS. =... ..............0. 281 
REPTILES. 
INOTOUCHON EE Se ere ee CR MAR te cd . 285 
Proctotrèête du Chili................ PL 4, fig. 1 et 2.......... 288 
= intermédiaire. .... ‘.. Pl: 2,19 1-00... 290 
— ventre bleu.......... ... PJ. 9, fig. 2........ ou 292 
—— A taches noires. ......... Pl. 9, (ge 1.0.7: 293 
— de Wiegmann........ Pl. 3, fig. 2. 295 


11 TABLE DES MATIERES. 


ICHTHYOLOGIE. 


IATOQUCTOR se se 6 he coueon de 297 
GENRE NDERRAN ASE eme secs esse Re. -ecc re 
LérSernran PELTACINREERE ee PIONEER 7... 299 
LeSerran COl0n.......:.- +... PI OP AUIP MERS 2: 300 
GENRE DMCOFE...-. 2..........- store esse smile scie. 
LaiaCOnEVeNC re. ne.-. 7. Ai I it. CEE SCENE 303 
ES SMECTAUES............ feet Sete CO CARRE 
SMectique AUxeUx CONlEUTS...- Pl 2 MER. 307 
GENRE ACGIRREUTE. + ste do cites se nectess eee ce e desc cs ce 308 
CInTHITÉTIVNIEr.. +... AE A Re mure les Se ee. 309 
GENRE SCORPÈNE....... MP RN Su De LT HP ARTE 3412 
La Scorpène fardée................ PIS AE Pre re 313 
GENRE MYRIPRISTIS................ Re Mu e 315 
Le Myripristis aux maächoires lisses, 

ou Myripristis Leignathe....... - HD Or lever ce 316 
(ENRE DOMDIXODON, 262... Sn 
Le Doydixodon de Freminville..... PI. 5....... RO 393 
GENRE HOLAGANTHE eee encore PP te ss ee .. 
L'Holacanthe moineau............ Pl 0Ri rer ee. Der 
GENRE DAURADE es... ce Te 329 
BaPDiDradeNOYANOPIÈrE. - e  COPIN Eee De 330 
GENREUGDARANX eee... TO CN DE sn ler eee < 
LeCaranx SCOMbTN....-.-.:....0. PL. 
GENRE MPRIONURE.--- eee Mrs SR OS eco 
Le Prionure à large raïe...... ere DT MT RE rene 
GENRE LABRE. .....,..... RO TUE 
Le Labre sanglier... .... Te PL 18, Hg: M. te.... 338 
DES ACOSSVBHES En caen lae se eemenccces ere b eu oo e 339 
Le Cossyphe de l’Éclancher......... PAS AD... 1e 340 


GENRE DURBOM 5... D A A TR 341 


TABLE DES MATIÈRES. 


Le Turbot des Iles Marquises...... 


GENRE MURÈNE. ........,...... 


LarMurenemmarbrée 2... 


GENRE TÉTRODON.............0.0. 


Le Tétrodon à tête étroite... 


GENRE CESTRACION.. esse 


Le Cestracion panthérin......... 


FIN 


PROS Eee ee rer 


2... (Pltl0 net PES 


DE LA TABLE DES MATIÈRES. 


FARIS. — IMPRIMERIE J. 


CLAYE. RUE SAINT-BENOIT, 


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SMITHSONIAN INSTITUTION LIBRARIES 


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