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Full text of "Voyage aux sources du Rio de S. Francisco et dans la province de Goyaz"

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VOYAGES 

B*NS 

L'INTÉRIEUB    DU    BRÉSIL. 


TROISIÈME   PABTIK. 


,.;.  Google 


Toutes  les  fois  que  l'imaife  de  ee  nouueau  monde  qne  Diea  m'a  raït 
voir  se  repriMote  déliant  mes  jeui ,  et  que  je  côsidères  la  sereaifi  de 
l'air,  la  diaersilé  des  animaui ,  U  wiHé  des  ojtieaui ,  U  beauté  des 
arbres  et  des  plantes,  l'eTcelleDce  des  fruicls  et,  brief  en  général,  les 
richesses  doot  ceste  terre  du  Brésil  est  décorée ,  iocoaiinët  ceete  eicli- 
matioDdu  Prophète,  au  Psan.  104,  me  vient  en  mémoirt  : 

0  Seigneur  Dieu ,  que  tes  nuorcs  djners 
Sont  menieilleui  par  le  monde  nnitier^ 
0  que  tu  as  tout  Tait  par  grand'  sagesse  : 
Brer  la  terre  est  pleine  de  ta  largesse. 


INPIIIIin»  DE  H"  V  BOLCIAHD-HUEAtlD,  HUE  nt  L  EKHON  , 


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7^^ 


VOYAGE 

m  mm 

DU  RIO  DE   S.   FRANCISCO 


ET  DtNS  LjI 


PROVINCE   DE  GOYAZ 


M.    AUGUSTE    DE    SAINT-HILAIRE, 


■«ME  FBEHIEB. 


ÀRTHUS   BERTRAND,   LIBRAIRE-ÉDITEUR 

RUE     HAUTEPEDILLE  ,     25. 


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PREFACE. 


J'avais  trop  présumé  de  mes  forces  :  i{uan(]  je  re- 
vins du  Brésil ,  elles  étaient  épuisées ,  et  bientôt  je 
fus  obligé  d'interrompre  mes  travaux.  Quinze 
années  environ  que  je  leur  aurais  consacrées  m'ont 
été  enlevées,  à  trois  différentes  reprises,  par  des 
souffrances  cruelles ,  et ,  par  conséquent ,  il  ne 
faut  pas  être  surpris  que  j'aie  mis  de  si  longs  inter- 
valles entre  mes  diverses  publications. 

Lorsque  j'ai  commencé  à  me  rétablir  de  la  longue 
maladie  à  laquelle  je  viens  d'échapper  encore,  je  me 
suis  mis  à  rédiger  la  relation  de  mon  voyage  à 
Goyaz.  J'écartais  l'idée  du  présent ,  si  douloureux 
pour  moi,  en  me  transportant  en  imagination  sous  le 
beau  ciel  du  Brésil,  et  à  une  époque  où,  avide  de  sa- 
voir, je  parcourais  les  déserts  de  cette  vaste  contrée, 
à  peu  près  aussi  peu  soucieux  de  l'avenir  que  les 
Indiens  eux-mêmes. 


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Je  publie  aujourd'hui  ce  travail,  encouragé  par  lea 
suffrages  des  voyageurs  de  toutes  les  nations ,  en- 
couragé surtout  par  les  Brésiliens,  meilleurs  juges 
de  ce  qui  les  regarde  que  les  Européens,  surpris  trop 
souvent ,  il  faut  le  dire,  de  ne  pas  trouver,  dans  un 
pays  qui  commence,  les  ressources  sans  nombre  que 
leur  offre  leur  patrie.  En  redoublant ,  s'il  est  possi- 
ble, de  soin  et  d'attention  pour  être  toujours  exact 
jusque  dans  les  moindres  détails,  j'ai  tâché  de  prou- 
ver que  je  n'étais  pas  indigne  de  l'indulgence  que 
l'on  m'a  témoignée. 

Lorsque  je  commençai  mon  voyage  à  Goyaz ,  je 
jouissais  d'un  grand  avantage,  celui  de  trouver,  dans 
mes  souvenirs,  des  objets  de  comparaison  autres  que 
ceux,  qu'auraient  pu  me  fournir  l'Allemagne  et  la 
France ,  pays  portés  au  plus  haut  degré  de  splendeur 
par  les  efforts  d'une  longue  suite  de  générations.  J'a- 
vais Don-seulement  parcouru  le  littoral  du  Brésil , 
mais  encore  j'avais  passé  quinze  mois  dans  la  partie 
la  plus  civilisée  de  la  province  de  Hinas  Geraes,  ac- 
cueilli avec  tant  de  bienveillance,  que  je  m'étais  iden- 
tifié avec  les  intérêts  de  ses  habitants.  Je  me  trou- 
vais presque  dans  la  position  où  aurait  été  im  Hi- 
neiro  qui ,  après  avoir  étudié  son  pays,  aurait  voulu 
connaître  aussi  les  autres  parties  du  Brésil.  La  pro- 


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vince  de  Minas  est  une  sorte  de  type  en  regard  du- 
quel je  place,  pour  ainsi  dire,  chacune  des  provinces 
que  j'ai  parcourues  plus  lard ,  et  de  ces  rapproche- 
ments il  résulte  qu'en  décrivant  celles-ci  je  com- 
plète eocore  mes  relations  précédentes. 

Halbeureusement ,  je  dois  le  dire,  la  comparaison 
ne  sera  pas  favorable  à  Goyaz ,  ce  pauvre  pays  si 
longtemps  livré  à  une  administration  presque  tou- 
jours imprévoyante ,  souvent  spoliatrice ,  et  je  trou- 
verai plus  de  différence  encore,  quand  je  comparerai 
la  partie  orientale  de  Minas  Geraes  avec  la  partie  tout 
à  fait  occidentale  qui ,  en  général ,  a  été  peuplée  par 
le  rebut  des  eomarca$  les  plus  anciennes. 

On  sera  peut-être  tenté  de  croire  que  mes  descrip- 
tions, se  rapportant  à  une  époque  déjà  assez  éloignée, 
ne  conviennent  plus  au  temps  actuel.  Qu'on  ne  juge 
point ,  par  l'Europe  ,  de  l'intérieur  de  l'Amérique. 
Dans  les  pays  déserts ,  les  choses  ne  changent  qu'a- 
vec une  lenteur  extrême;  les  éléments  des  grandes 
améliorations  y  manquent;  une  rare  population  dis- 
séminée sur  une  surface  immense,  à  peu  près  livrée 
à  elle-même ,  énervée  par  un  climat  brûlant ,  sans 
émulation,  presque  sans  besoins,  ne  change  rien,  ne 
veut  et  ne  sait  rien  changer.  Le  botaniste  Georçe 


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Gardner  a  parcouru,  en  4840,  une  petite  partie  du 
désert  que  j'avais  visité  en  1818;  il  y  a  vu  ce  que 
j'avais  vu  moi-même  et  rien  de  plus. 

Au  reste,  non-seulement  j'ai  rattaché  mes  récita 
aux  temps  antérieurs  à  mes  voyages  par  l'histoire 
des  lieux  où  j'ai  passé ,  mais  encore  je  les  ai  ratta- 
chés h  des  époques  plus  récentes ,  en  citant  les  au- 
teurs qui  ont  indiqué  quelques  faibles  changements. 
Cet  ouvrage  pourra  donc  être  considéré  comme  une 
sorte  d'ébaudie  de  la  monographie  des  contrées  que 
j'ai  décrites. 

Pendant  bien  longtemps  encore,  monté  sur  le 
sommet  des  Pyreneos ,  on  ne  découvrira ,  dans  un 
espace  immense,  aucune  trace  de  culture;  pendant 
bien  longtemps,  le  S.  Francisco  sera  tout  au  plus 
effleuré  par  quelques  légères  pirogues;  mais  ces  beaux 
déserts  contiennent  les  germes  d'une  grande  pros- 
périté; un  temps  viendra  où  des  cités  Ûorissanles 
auront  pris  la  place  des  misérables  chaumières  dans 
lesquelles  je  pouvais  à  peine  trouver  un  abri,  et  alors 
les  habitants  jouiront  d'un  avantage  que  l'on  a  ra- 
rement en  Europe;  ils  sauront  avec  certitude,  par 
les  écrits  de  quelques  voyageurs ,  quels  furent  les 
premiers  commencements  non  -  seulement  de  leurs 


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'Tilles ,  mais  t)e  leurs  moindres  bourgades.  ■  Les 
voyages,  a  dît  Chateaubriand,  sont  une  des  sources 
de  rhistoire  (1).  »  Aujourd'hui  nous  puisons  des 
documents  précieux  pour  celle  de  Rio  de  Janeiro 
dans  les  récits  naïfs  du  véridique  Lery,  qui,  le  pre- 
mier parmi  les  hommes  un  peu  instruits  de  notre 
Dation ,  a  visité  la  côte  du  Brésil  :  aucun  Français , 
avant  moi,  n'avait  parcouru  Minas  Geraes,  Goyaz,  S. 
Paul,  etc.  ;  si  quelques  exemplaires  de  mes  relations 
échappent  au  temps  et  à  l'oubli ,  un  jour  on  y  trou- 
vera aussi  sur  ces  vastes  provinoes ,  devenues  [>eut- 
être  des  empires ,  des  renseignements  qui  peut-être 
ne  seront  pas  sans  intérêt.  On  s'étonnera  d'appren- 
dre que,  là  où  seront  alors  des  villes  riches  et  peu- 
plées ,  il  n'y  eut  d'abord  qu'une  ou  deux  maison- 
nettes presque  semblables  à  la  hutte  du  sauvage  ; 
qu'où  l'air  retentira  du  bruit  des  marteaux  et  des 
machines  les  plus  compliquées  on  entendait  à  peine 
le  coassement  de  quelques  batraciens  et  le  chant  des 
oiseaux;  qu'avant  les  nombreuses  plantations  de 
mais,  de  manioc,  de  cannes  à  sucre  et  d'arbres  frui- 
tiers qui  couvriront  la  terre,  elle  offrait  une  végéta- 
tion brillante,  mais  inutile;  à  la  vue  des  campagnes 
sillonnées  par  des  chemins  de  fer,  peut-être  même 

il)  Prérace  du  Foyagc  en  Amérique. 


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par  des  véhicules  plus  puissants  que  dos  locomo- 
tives,  on  sourira  en  lisant  qu'il  fut  un  temps  où  le 
voyageur  s'estimait  heureux ,  lorsque,  dans  sa  jour- 
née, il  était  parvenu  k  faire  4  à  5  lieues. 

Toutes  les  fois  que  j'ai  emprunté  quelque  chose 
aux  écrivains  qui  m'ont  précédé  ou  suivi ,  je  les  ai 
cités  avec  le  plus  grand  soin,  et,  lorsque  la  connais- 
sance que  j'ai  des  lieux  ne  m'a  pas  permis  d'adopter 
entièrement  leurs  opinions ,  j'ai  rendu  compte  des 
motiis  qui  m'ont  déterminé. 

Un  auteur  brésilien  a  dit  (1)  que,  par  la  rectifi- 
cation des  nombreuses  erreurs  qui  se  sont  répandues 
dans  tes  livres  sur  la  géographie  et  l'etnographie  du 
Brésil,  on  r^idrait  plus  de  services  à  la  science 
qn'en  proclamant  quelques  vérités  nouvelles.  II  est 
impossible  de  ne  point  partager  cet  avis ,  lorsqu'on 
retrouve  dans  des  livres  classiques  les  méprises  de 
l'Anglais  Hawe,  qui,  le  premier,  a  écrit  sur  le  Brésil, 
depuis  que  cette  contrée  a  cessé  d'être  une  colonie 
soumise  au  Portugal.  Je  me  suis  donc  imposé  la  pé- 
nible tâche  de  signaler  les  erreurs  que  j'ai  cru  re- 
connaître dans  les  ouvrages  relatifs  aux  pays  dont  je 


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donne  la  description,  et  je  me  suis  fait  un  devoir  de 
rectifier  celtes  qui  m'ont  échappé  à  moi-même.  Les 
livres  les  plus  parfaits  ne  sont  point  exempts  de 
fautes;  quand  des  hommes  aussi  sincèrement  amis 
de  la  vérité  que  l'abbé  Hanoel  Ayres  de  CazaI ,'  mon- 
segnor  José  de  Sousa  Pizarro  e  Âraujo ,  le  docteur 
PohI ,  le  général  Raimundo  José  da  Guaba  Mattos 
se  sont  quelquefois  trompés ,  qui  pourrait  se  flatter 
de  ne  se  tromper  jamais  7 

Des  observations  critiques  auxquelles  je  me  suis 
livré  pour  remplir  le  but  que  je  me  proposais ,  il  ré- 
sulte que  cet  ouvrage  se  trouvera  chargé  d'un  très- 
grand  nombre  de  notes  dont  la  lecture  mêlée  à  celle 
du  texte  serait  peut-être  pénible  quelquefois.  On 
îen  bien,  par  conséquent,  de  lire  ce  dernier  en  lais- 
sant de  côté  les  notes,  et  de  revenir  à  celles-ci  après 
avoir  achevé  chacun  des  chapitres  dont  l'ouvrage  se 
compose.  Pour  faciliter  les  recherches ,  j'ai  eu  soin 
d'indiquer  les  notes  critiques  à  la  table  générale 
sous  le  titre  de  reaifieaiûm». 

Le  général  Raimundo  José  da  Gunha  Mattos  a  fait 
sentir  (1  )  combien  il  est  essentiel  de  conserver  soi- 

(I)  tUncrarin. 


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goeusement  les  noms  de  lieux  consacrés ,  dans  les 
divers  cantons,  par  les  habitants  du  Brésil.  Si  cha- 
que voyageur  était  en  droit  d'écrire  à  son  gré  ceux 
des  pays  par  lesquels  il  passe  ,  il  régnerait  bientôt 
dans  la  géographie  une  confusion  inextricable.  J'ai 
donc  fait  des  efforts  pour  n'altérer  en  rien  la  no- 
menclature géographique,  et  j'ai  donné  le  même 
soin  à  l'orthographe  des  noms  d'hommes,  de 
plantes  ou  d'animaux.  Parmi  les  villages,  les 
habitations  et  les  rivières  du  Brésil  ,  il  en  est 
une  foule ,  je  le  sais ,  dont  les  noms  ont  été  écrits 
d'une  manière  fort  différente,  même  par  des  hommes 
instruits  ;  en  pareil  cas,  je  n'ai  pris  aucun  parti  sans 
consulter  les  autorités  les  plus  graves,  la  connais- 
sance des  étymologies  ne  m'a  pas  non  plus  été  inu- 
tile ,  j'ai  cru  surtout  devoir  prendre  pour  guide  l'u- 
sage et  le  bon  sens. 

Il  serait  possible  que,  malgré  les  efforts  que  j'ai 
faits  pour  réunir  les  ouvrages  pubUés  sur  le  Brésil, 
en  diverses  langues,  plusieurs  m'eussent  échappé. 
Malheureusement  il  n'existe  point  en  France  de  dé- 
pôt où  l'on  puisse  se  procurer  les  livres  qui  parais- 
sent en  Amérique,  et  sans  l'extrême  complaisance  de 
M.  le  chevalier  d'Araujo  Ribeiro,  ministre  du  Bré- 
sil à  Paris,  de  M.  le  docteur  Sigaud,  médecin  de 


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l'empereur  doD  Pedro  II,  de  M.  Ferdinaûd  Denis, 
l'homme  qui ,  en  Europe ,  connaît  le  mieux  ce  qui  a 
été  écrit  sur  l'Amérique  portugaise ,  enfin  de  mon 
jeune  ami  M.  Pedro  d'Alcautara  Lisboa ,  attaché  à  la 
lotion  brésilienne ,  je  n'aurais  pu  consulter  divers 
écrits  fort  importants  imprimés  à  Rio  de  Janeiro ,  à 
Pemambouc  et  à  S.  Paul.  Qu'ils  veuillent  bien 
agréer  l'assurance  de  ma  gratitude. 

J'ai  souvent  eu  l'occasion  d'indiquer,  dans  cet 
ouvrage ,  diverses  quantités  en  poids  ou  en  mesures 
brésiliennes;  mais,  à  côté  de  ces  indications,  on  trou- 
vera celle  des  chiffres  équivalents  dans  notre  système 
métrique.  Pour  la  réduction  des  valeurs  numéraires, 
j'ai  toujours  pris  pour  base  le  pair,  c'est-à-dire 
160  reis  pour  1  franc.  On  peut  voir,  par  le  tableau 
synoptique  qu'a  publié  M.  Horace  Say  dans  son  ex- 
cellent ouvrage  intitulé ,  Hûtoire  det  relations  com- 
merciales entre  la  France  et  le  BrétU,  que  tel  était  à 
peu  près ,  à  l'époque  de  mon  voyage ,  le  taux  de  l'ar- 
gent brésilien. 

Une  lacune  immense  restera  toujours  dans  la  géo- 
graphie botanique  de  l'Europe  ;  c'est  à  peine  si  nous 
pouvons  former  quelques  conjectures  plausibles  sur 
la  nature  des  plantes  qu'ont  remplacées  nos  champs 


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de  céréales,  nos  vignes  et  nos  plantations  d'oliviers. 
J'ai  tâché  que  cette  lacune  n'existât  pas  dans  l'his- 
toire naturelle  du  Brésil  ;  j'ai  fait  connaître  la  to- 
pographie botanique  des  divers  cantons  que  j'ai 
visités ,  et ,  lorsqu'un  jour  la  culture  les  aura  en- 
vahis ,  on  n'ignorera  pas  ce  que  fut  leur  végétation 
primitive. 

J'aurais  désiré  faire  davantage.  J'avais  annoncé , 
dès  les  premières  pages  de  ce  livre,  que  des'  numéros 
renverraient ,  comme  dans  mon  Voyage  sur  le  litto- 
ral, aux  descriptions  des  plantes  caractéristiques  de 
chaque  canton;  mais  la  relation  de  voyage  était 
achevée;  je  me  voyais  forcé,  par  ma  santé,  de  quitter 
Paris  et  de  passer  l'hiver  dans  le  midi  de  la  France; 
pour  quelques  descriptions  de  plantes,  il  aurait  fallu 
que  je  remisse  à  près  d'un  an  la  publication  de  cet 
ouvrage  :  à  mon  âge  et  avec  une  santé  délabrée ,  on 
ne  doit  point  attendre.  La  description  des  plantes 
caractéristiques  de  Goyaz  se  trouvera,  j'espère,  à  la 
fin  de  l'ouvrage  que  j'ai  commencé  sur  S.  Paul  et 
Sainte-Catherine. 

Un  écrivain  qui  rendit  de  grands  services  à  son 
pays,  mon  ami  M.  José  Feliciano  Fernandes  Pinhei- 
ro,  baran  de  S.  Leopoldo,  que  tout  le  Brésil  a  re- 


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gretlé,  m'engageait  avec  instance,  il  y  a  bien  peu  de 
mois  encore ,  à  publier  la  reladon  du  voyage  que 
j'ai  fait  dans  la  province  de  Rio  Grande  de  S.  Pedro 
do  Sul,  proviQce.où  je  l'ai  connu  et  dont  il  a  si  fi- 
dèlement retracé  l'histoire.  Si  un  peu  de  temps  m'est 
accordé,  je  regarderai  comme  une  sorte  de  devoir  de 
remplir  ses  intentions. 

La  protection  que  M.  le  ministre  de  l'instruction 
publique  veut  bien  accorder  à  cet  ouvrage  est  encore 
un  puissant  motif  pour  m'engager  à  redoubler  d'ef- 
forts et  à  continuer  mes  travaux.  Mais  je  ne  saurais 
me  le  dissimuler,  quelque  chose  qui  arrive  ,  la  plus 
grande  partie  des  recherches  que  j'ai  faites  sur  le  Bré- 
sil sera  perdue,  et  je  serais  presque  tenté  de  m' écrier 
avec  un  écrivain  célèbre,  qui,  lui  aussi ,  a  longtemps 
vécu  dans  des  contrées  lointaines  :  •  Heureux  ceux 
qui  ont  Bni  leur  voyage  sans  avoir  quitté  te  port,  et 
qui  n'ont  pas,  comme  moi,  traîné  d'inutiles  jours  sur 
la  terre  (1).  » 

Monlpellier,  lOjaDTier  184». 
(i)  ChatMiibriaiHl, 


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D,<j,i,.,.d.:,  Google 


VOYAGE 

iDX! 


RIO  DE  S.  FRANCISCO 


DANS  LA  PROVINCE  DE  GOYAZ. 


CHAPITRE  PREMIER. 

VOYAGE  DB  MO  AB  JAKBIRO  A  DBA',  PAR  POBTO  DA  ESTlELtA 

BT  LA  GKANDE  EOCTB  DB  MIRAS  GERAES. 

L'avMtr  B'einbirqDe  sur  la  baie  de  Rio  de  Janeiro.  — U  riritre  d7n*W- 
mfrftn.  —  Le  Tillagc  de  Porlo  da  Etlrella.  —  Détails  sur  )a  tonte  de 
Mijuu.  — L'égKM  de  Noua  Smhora  da  Piedaàl  if  infcumirtm.— LTm- 
bilalioD  de  Mamdioea.—h*.  Strra  da  BtbrtUa.—  TamtmUt.—  Paàre 
Correa.  —  SéebeTeas*.  —  EtéDeiira*  aar  l'agricultiire  brésilienne.  — 
UOeuons  SUT  l'eseUrige —  L'anlenr  tgtoII  rhtbUatiOD  dllbi.  -~ 
Pwtrait  d'un  muletier. 

J'ai  dit ,  dniiB  Is  rdatioD  de  nuto  voy^e  sur  le  littonl 
du  Brésil,  qu'après  m' titre  embarqué  À  Villa  da  Victoria 
j'hais  arrivé  À  Rio  de  Jaueiro  au  bout  de  quatre  jours. 
Bientdt  je  m'occupai  à  foire  de  oouveaox  préparatifs  pour 


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s  VOYilJE  AV\  SOUiCES 

ftller  visiter  tes  provinces  de  Goyaz,  Saiot-Paul,  Sainte- 
Catherine  et  Bio  Grande  do  Sul.  Avant  de  parcourir  la  côte, 
j'avais  demandé  au  ministère  portugais  un  passe-port  qui 
me  permit  d'étendre  mes  voyages  jusqu'à  Matogrosso  ;  mais 
l'entrée  de  cette  province  m'avait  été  interdite,  sami  doute 
par  un  reste  de  cette  déûance  qui  avait  porté,  pendant  si 
longtemps,  le  gouvernement  dn  Portugal  à  éloigner  les 
étrangers  de  sa  riche  colonie.  Au  reste,  quoiqu'il  me  fât 
défendu  de  franchir  les  frontières  de  Goyaz,  on  laissait  en- 
core À  mes  recherches  un  champ  assez  vaste. 

Les  préparatifs  4e  dmd  voyage  me  priient  ua  temps  con- 
sidérable (1).  Il  faut  avoir  habité  Bio  de  Janeiro  à  cette 
époque  pour  se  faire  une  idée  de  la  lenteur  avec  laquelle  y 
travaillaient  les  ouvriers;  la  moindre  bagatelle  y  devenait 
une  affaire  interminable,  ie  surmontai  enfin  tous  les  obsta- 
cles, et,  le  26  jaavier  1819,  je  m'embarquai  sur  la  baie  de 
Bio  de  Janeiro ,  pour  Porto  da  Estrella  (Port  de  l'Étoile), 
petit  village  où  vient  aboutir  la  route  de  Minas  Geraes,  pro- 
vince dont  je  devais  parcourir  la  partie  occidentale  avant 
d'arriver  i  Goyaz. 

On  a  vu,  par  mes  deux  premières  relations  (S),  qu'à 
l'endroit  appelé  Encruzilhada ,  cette  route ,  venant  de  la 
capitale  de  Minas  (Ouro  Preto] ,  se  divise  en  deux  embran- 
chements, l'un,  que  l'on  nomme  le  chemin  déterre  (co- 
mmAo  da  terra] ,  qui  conduit  directement  Â  Rio  de  Janeiro, 

(1)  J'embcllai  srec  le  plos  grand  toia  Ira  oombrenses  collections  que 
f  avais  tbiniées  JDBqa'alors  et  les  liiSMÎ  entre  les  mains  de  H.  Haller, 
ronnil  géoértl  de  France,  qui ,  pudantnuM  MjDQran  Biéall,  M'aconi- 
Mé  Ab  maïques  d'amitié  «t  m'a  nodu  tons  les  aerviees  qni  ont  dépendu 
de  li^.  Qu'il  reçoive  ici  l'eipressioo  de  ma  recoanaissaoM. 

(î)  Voyage  dant  la  province  de  Ko  dt  Janeiro,  elc,,TOl,  I,  p.  «0. 
—  Votant  iani  U  di*4rM  dM  WamoNb ,  «oi.  I ,  p.  asi . 


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DO  RIO  DE  S.  FBANCISCO.  3 

et  l'autre.qui  ne  s'étend  pas  plus  loin  que  Porto  da  Estr^a, 
où  il  faut  s'embarquer  pour  se  rendre  à  la  capitale  du  Bré- 
sil. Je  ne  couoaigsais  pas  encore  ce  dernier  embraoche' 
meut;  c'est  celui  que  je  me  proposais  de  suivre  pour  entrer 
dans  la  province  des  Mines. 

Après  une  courte  navigation ,  j'arrivai  à  l'embouchure 
du  Rio  (Tlukumirim  ou  da  Eitrella,  une  des  petites  ri- 
vières, si  iKimbreuses,  qui  se  jettent  dans  la  baie  de  Rio 
de  Janeiro  (1).  On  sait  qu'une  chaîne  de  montagnes  s'éteDd, 
parallèlement  à  la  mer,  dans  une  grande  partie  du  BrésU , 
et  laisse ,  entre  elle  et  le  rivage ,  un  espace  plus  ou  moins 
considérable  :  ici  l'intervalle  n'est  pas  même  de  5  lieues 
portugaises.  Je  commençai  i  le  parcourir  en  remontant  le 
Rio  da  Estrella ,  qui  serpente,  au  milieu  des  Mangliers  (â)> 

(f  )  Cette  riTière,  où  pullulent  d'inoombrables  moustiques  et  d'iutres 
diptèMS  malfaisants,  preud  si  source  dans  la  chaîne  maritime,  et  elle 
a,  à  sou  embouchure ,  M  ï  60  pas  de  largeur;  dans  son  cours,  qui  est 
de  pen  d'teDdne,  elle  retoît  lei  eam  An  Sto  da  Crtu  ou  de  SatUa 
Ctiu,  du  CayiiabaetdaSaraeurtata;  enfin  un  canal  établit  une  com- 
muoicalion  eutre  elle  et  le  Kio  do  pilar  {  Eschw.,  Journ.,  n ,  G6.~Ci- 
tiL,  Corot..  H,li.  —  Pa.,  Vem.  hUl.,  m,  305).  Le  nom  defifo  da 
EtbrtUa  est  le  seul ,  i  ce  qu'il  m'a  paru,  par  lequel  on  U  désigne  aujour- 
d'hui dans  le  pajs  ;  cependant  je  dois  dire  que  celui  de  Rio  (T/nAumi- 
rïM  a  été  admù  par  Cual  et  son  traducteur,  Eeaderson  ;  par  Eschwege, 
Kaddi,  Fotd,  fiejânel,  Spii  et  Uartius.  Quanti  Pizarro,  il  dit  que  le 
mol  JnAusiirini  est  une  corrnplioD  d'Anhunfmirim ,  et  il  adopte  ce 
denùecmot,  qui,  selon  loi,  voudrait  dire ,  dans  la  langue  des  Indiens, 
ckamp  p<tU.  &cbwege  a  déji  Tait  remarquer  que  Hawe  avait ,  ï  tort , 
•ppeU  Moremim  la  rivière  dont  il  s'agit  :  ainsi  il  serait  inutile  de  s'ap- 
pesantir «ar  celle  erreur. 

(2)  Arec  les  colrâs  de  Saint-Domingue  et  même  plusieurs  natura- 
bslM,  Anioioe-Laurent  de  Jussieu  et  Achille  Richard ,  j'emploie  ici  le 
nom  de  Mantliert  comme  un  terme  générique  applicable  à  plusieurs 
Tégétaui  ligneui  des  plages  de  TAmérique  équiuoxiale.  Ce  soiit  des 
Rhfxopbora  Jlanf  Je ,  des ^trfc«nnfa ,  des  Conocnrptu.que  MH.  Spii 


,„,A,8lc 


*  VOYAGE  AUX  SOURCES 

dans  un  terrain  marécagenx.  De  distaoce  en  distance,  ceHe 
rivière  cAtoie  de  petites  collines  sur  lesquelles  on  aperçoit 
ordinairement  une  modeste  habitation  entoarëe  de  Bana- 
niers. Dans  )e  lointain,  Je  voyais  s'élever  une  portion  de  la 
chaîne  maritime,  dont  l'aspect  varie  à  mesure  qu'on  re- 
monte la  rivière.  Le  ciel,  parfaitement  serein,  était  de 
l'atur  le  plus  éclatant  ;  la  verdure  des  Hanglïent  et  des  an- 
tres arbrisseaux  qui  bordent  le  petit  fleuve  avait  cette  fraî- 
cheur qu'on  ne  saurait  s'empêcher  d'admirer  dans  tous  les 
environs  de  Rio  de  Janeiro ,  et  la  vivacité  de  ces  couleurs 
brillantes  formait  un  agréable  contraste  avec  les  teintes 
vaporeuses  des  montagnes. 

J'étais  parti  k  midi  de  Rio  de  Janeiro  ;  j'arrivai  à  sis 
heures  è  Porto  da  Estrella,  où  déjà  la  rivière  a  fort  peu  de 
largeur.  Ce  petit  village  appartient  à  la  paroisse  d'Inhu- 
mirim  et  ne  possède  qu'une  chapelle  bAtie  sur  une  hauteur 
et  dédiée  à  Notre-Dame  (1).  Depuis  que  je  voyageais  dans 
le  Brésil ,  aucun  lieu  ne  m'avait  offert  autant  de  vie  et  de 
mouvement  que  Porto  da  Estrella.  On  a  peine  ft  se  recon- 

et  MartJDs  iadiqvenl  eonuiie  croissant  h  l'embonchare  dn  Rio  di  Es- 
trtUa  {Reite  in  BraiilUn,  1 ,  1Ï3).  —  Il  paraîtrait,  d'après  ce  qne  dit  Pi- 
larro  {Memoriat  hUtor.,  TO,  19),  qae  la  destruction  des  mangvet  (le 
Bhitopliora  Mangle ,  et  peat-£tre  d'antres  espèces  de  Hoogliers) ,  dont 
l'écorce  est  fort  aille  dans  le  tannage ,  donna  lien  antretbis  à  de  Tires 
discussions  entre  les  autorités  ciriles  et  ecclésiastiqnes  do  Brésil.  — 
Tris-probablement ,  dans  nn  bot  de  conservation,  les  jésniies  et  l'értqae 
de  Rio  de  Janeiro  s'opposcieni  ï  ce  qu'on  abattit  ces  arbres  ;  mais  un  àé- 
txeHearlaregia)àa  f  di!cembre  1678  permit  qu'on  les  canpit,saos 
avoir  égard  ani  censures  de  l'évèqne  et  des  pères  de  la  compagnie  de 
Jésus.  Plus  tard,  cependant,  l'administra tion  civile  modifia  un  peu  ses 
idées  destructrices;  car  un  alvarâ  du  9Jiiillet  1760  défendit  de  couper 
les  mmguet .  ï  moins  qu'ils  n'eussent  été  auparavtat  dépouillés  de 
leur  écorce  au  profit  des  tanneries. 
(1)  Pu.,  Mem.  hi$t.,  m,  Ml. 


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DU  BIO  DE  S.  nUHCISCO.  5 

nalbï  au  milieu  des  mulets  qdi  partent  ou  qui  arrivent , 
des  ballots ,  des  muletiers ,  des  marchandises  de  toute  es- 
pèce qui  encombrent  ce  village.  Des  boutiques  assez  bien 
garnies  fouroissent  aui  nwnbreui  voyageurs  ce  dont  ils 
ont  besoin  (1).  D'ailleurs  il  n'existe,  autour  de  Porto  da 
Estrella,  aucune  habitation  considérable  (1819);  mais  on 
cultive  un  peu  de  café  dans  ses  alentours.  La  première 
maison  qui  se  présente  est  le  rancho ,  destiné  à  abriter  les 
caravaneB;  c'est  un  bâtiment  très-long ,  divisé  en  eqièces 
de  cdlules  par  des  cloisons  en  terre,  et  au  devant  duquel 
le  toit  pnrfoQgé  forme  une  vaste  galerie  dont  les  piliers 
sont  en  briques  (1819).  Chaque  caravane  s'établit  dans 
une  des  chambreltes  du  rancho ,  y  arrange  son  bagage  et 
y  fait  sa  cuisine  :  là  aucune  espèce  de  commodité ,  pas 
même  une  table,  pas  même  un  banc,  et,  lors  de  mon  pas- 
sage, on  voyait  le  jour  h  travers  les  cloisons  mal  entrete- 
nues (2). 

Je  trouvai  A  Porto  da  Estrella  mes  mulets ,  que  j'y  avais 
AJt  conduire  par  terre.  Les  serviteurs  qui  devaient  m' ac- 
compagner étaient  le  muletier,  qui  m'avait  déjà  suivi  jus- 
qu'au Rio  Doce;  l'Indien  Firmiano,  que  j'ai  foit  connaître 

(1)  Selon  H.  Pohl  (ll«((f,  I,  ITfl],  une  twnda  Mriit  atucbée  à  ïb»qne 
nuiBan  ;  HH.  Spii  et  Hirtins ,  plus  eucU ,  se  boment  h  dire,  m  psrlini 
de  Porto  d«Eitre]lt,  qu'il  fl'ftTcove  quelques  wndat  {KtUe,  I,  1S6]. 

(3)  H.  J.  F.  Toa  Weccfa ,  qai  a  pawé ,  quelque*  anoées  ipris  moi ,  k 
Porto  da  EalrelU,  confirme  ce  qae  je  rapporte  ici  du  moaTemeul  qai  j 
T^ne,  et  ajonic  que  coutiDuelletnent  on  j  construit  de  DOUTclles  nui- 
■ODS  (Beitt,  B ,  138).  Oa  m'a  mime  assuré  qne  ce  village  avait  reçu  du 
loaTenwnient  actuel  le  nom  de  ville,  et  c'est  effectivement  celui  que  lui 
dODue,  dans  son  livre,  le  comte  de  SuxaniKt  {Sotm.,  3S9).  Je  n'ai  pas 
besoin  de  dire  que  Porto  da  Estrella  ne  porta  point  le  nom  d'aUe»,  que 
lui  ailrilme  H.  Walab  ;  c'est  seulement  aui  villages  de»  Indiens  que  le» 
Brésilieas  appliquent  ce  mol. 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


A  TOTAGG  AUX  $OimCES 

dans  mes  Relations  précédentes  ;  mon  domestique  Prégent , 
dont  la  santé  s'altérait  chaque  jonr  davantage,  et  un  autre 
jeune  homme,  Clément  Français,  Antoine  Laruotte,  qui 
devait  aider  Prégent  dans  son  traTail. 

Il  est  difficile  de  voir  une  roule  plus  fréqamtée  que  celle 
de  Porto  da  Ëstrellaè  Minas,  et,  si  elle  l'était  moins  lors- 
que j'y  passai  en  décembre  1816  (1),  c'est  qu'au  temps  de 
Ifoël ,  qui  est ,  pour  les  Brésiliens ,  l'époque  de  la  réunion 
des  familles,  peu  de  muletiers  se  mettent  en  voyage.  Cette 
route,  ouverte,  il  y  a  environ  un  siècle  et  demi ,  par  le 
guarda  mi5r  Garcia  Bodrigues  Paes  (3),  a  surtout  acquis  de 
l'importance  depuis  que  l'on  cultive  le  coton  A  Minas  No- 
vas  (3) ,  et  que  l'on  a  commencé  à  exporter  le  café  du  midi 
de  la  province  des  Mines;  ce  qui,  lors  de  mon  séjour  an 
Brésil,  ne  datait  encore  que  d'un  petit  nombre  d'années. 
Le  jour  où  je  Rs  halte  au  rancho  de  Boa  Vista  da  Patn- 
pulha,  dont  je  parlerai  bientôt,  cent  trente  mulets  s'y 
étaient  arrêtés,  et  ce  raneho  n'est  pas  un  des  plus  consi- 
dérables du  canton  :  par  là  on  peut  se  faire  une  idée  de  la 
quantité  prodigieuse  de  bétes  de  somme  qui  devaient  se 
trouver  en  marche  sur  la  route  tout  entière. 

Jusqu'à  Encruzilhada,  lieu  où  je  quittai  le  grand  che- 
min, se  succèdent,  à  de  faibles  intervalles ,  les  fazendas, 
les  ranchot,  les  ventUu,  les  atdiers  de  maréchaux  ferrants. 
La  multiplicité  de  ces  établissements  ne  surprendra  pas  : 
les  cultivateurs  doivent  naturellement  se  rapprocher  d'une 

(1)  voyaçe  dant  Ut  provineei  de  Rio  de  Janeiro  tt  de  Mina»  Gt- 
raet,  voi.  1. 

(21  Piz„  Mem.  hitt.,  n,  105,  ei  Vil,  secoada  pirl.,  3. 

(SI  Voyage  dant  let  prnvinret  de  Rio  d*  Janeiro  et  de  JWtnt»  C<- 
rart,  vol.  11. 


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DU  RIO  DE  S.  FIANCISCO.  T 

route  tarès-fréquentée ,  près  de  laquelle  ils  peuvent  trouver 
fecileraent  le  débit  da  produit  de  leurs  terres  ;  les  hommes 
qni  tiennent  le»  vendas  ont  l' occasion  de  se  défaire  de  leur 
la^,  deleurcochofa,  deleur  farine,  et,  en  général,  des 
comestibles  qui  font  l'objet  de  leur  commerce;  enfin  les 
mirédiiux  ferruits  peuvent  être  souvrat  appelés  à  exerce 
leur  Indostrie,  Le  mais  est  la  drarée  qui  se  vend  le  plus 
géeà^ment ,  parce  qu'elle  fait  la  nourriture  des  mulets 
et  que  les  caravanes  n'en  portait  point  avec  elles  (1). 

Quelque  fréquentée  que  soit  cette  route ,  il  ne  faudrait 
pas  que  le  voyageur  anglais,  français  ou  allemand  s'attendit 
i  y  trouver  les  ressources  que  lui  ofi'rent,  dans  sa  patrie , 
les  ht^telleries  les  pins  médiocres.  Un  établissement  du 
genre  de  dos  grandes  auberges  n'aurait  probaMement  ici 
aucun  succès  ;  les  bcHnmes  qui  parcourent  ce  pays  sont  ac- 
coutumés à  la  frugalité  et  à  des  privations  continuelles.  Les 
{Kovisions  qui  leur  sont  indispensables,  ils  les  chargent  sur 
teors  muleta,  et,  si  les  propriétaires  des  vmd(u  les  garnis- 
saient moins  mesquinement,  peut-être  auraient-ils  le  cha- 
grin de  voir  une  partie  de  leurs  marchandises  se  perdre 
dans  leurs  boutiques. 

Ce  n'est  qu'à  ifatM^toea  (manioc],  éloigné  de  3  lieues 
portugaises  de  Porto  da  Estrella,  que  l'on  trouve  la  chaîne 

(1)  O*  tronen  daas  moD  TOfoçe  à  Jf  (nu  Garaei,  etc.  (vol.  1 ,  308, 
M,  U,  60),  l'eipliutioa  détaillée  des  mots  faiendai,  rwMhot,  vendat, 
eaehaça,  Iropa  on  caranDe.  Je  me  bornerai  h  redire  ici  qo'nne  fU' 
stnda  est  nue  habitabon  rurale  de  quelque  importance ,  que  les  ratt- 
efeo*  BODt  des  iMDgars  destinés  h  servir  d'abri  aai  voyageurs,  que  le 
eaehaçatit  le  lafia  dn  pars,  qu'on  appelle  wndat  (tes  cabarets  où  l'on 
TPnd  DOD-seulement  de  reBD-d»-Tie  de  sacre,  mai»  encore  des  comes- 
lîblrs  ;  enfin  que  les  ciraTanes  de  mulets  (  Iropai  )  sont  diTiséei  en 
lots  (  lofe*  >  de  *sptbAtee,  coadait»  ehanm  par  on  loucbenr  { fonuior). 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


s  VOYAGE  AUX  SOURCES 

maritime.    Jusque-là    le   pays   est   parhilement    plat. 

Le  chonin  que  l'on  suit  en  sortant  de  Porto  da  Estrella , 
tortaeoi,  mais  assee  large,  est  bordé  des  deux  cAtés  par 
de  grands  taillis  (a^oemu)  qui ,  snr  la  droite ,  laissent ,  de 
temps  en  tonps,  entrevoir  les  montagnes,  et  an  milieu 
desquds  croit  on  nombre  infini  de  ces  betles  Hélastomées 
&  fleurs  violettes  qu'on  appelle  fior  de  guareima  (1).  Mal- 
gré la  poussière  qui,  lors  de  mon  voyage,  s'élevait  sans 
cesse  sous  les  pieds  des  mulets  et  des  voyageurs ,  la  verdure 
conservait  encore  une  fraîcheur  extrême. 

A  oiviron  i  lieue  et  demie  de  Porto  da  Estrella,  le  che- 
min aboutit  à  une  place  très-grande  snr  laquelle  s'étend  un 
magnifique  gason.  C'est  là  qu'à  gauche,  su  pied  d'une  col- 
line couverte  de  taillis,  a  été  bdtie  l'église  paroissiale  de 
ffo$$a  Senhora  da  Piedade  d'Inhumirim  (3).  Sur  la  droite 
sont  quelques  maisons,  et,  du  m£me  cAté,  on  a  devant 
soi  la  cbahie  maritime.  Ce  paysage  si  simple  ottn  quelque 
chose  de  riant  et  de  majestueux,  et,  i  l'époque  de  mon 
voyage,  il  empruntait  encore  des  beautés  à  l'aïur  ivillaot 


(1)  SoQfi  ce  nom  I'od  comprend,  comme  j'ai  ea  occmImi  de  le  dire 
aUleors,  plasleaTs  «spècps  qui  k  reuemblnt  pv  Vtàtfafioik  de  leur 
lige  et  U  graDdeor  de  leurs  Heurs. 

(S)  HH.  Spix  et  MartiuB  indiquent  cette  église  comme  une  simple 
ehapelle  {Rtite,  1 ,  1^8)  :  miis  Cu«l ,  Eschwege  et  Piurro  disent  eiprcs- 
atment  qu'elle  est  paroissiale ,  et  le  deroier  ajonle  qne  ce  Ait  ca  1690 
qa'elle  fut  érigée  en  paroisse.  Peudant  longtemps,  le  Icrritoire  qnî  en 
dépendait  s'est  étendu ,  dn  celé  du  nord ,  snr  la  ronle  da  Blinas,  jnsqa'à 
la  faxenda  de  Govemo ,  qni  e«l  éloignée  dn  fteure  Parahyba  de  S  lieues 
eoTJTon  (  Escbw.),  et  où  comotence  U  pcroïKe  dite  da  Pamliiiba  Vtlka. 
Qooiqn'an  asseï  grand  nombre  de  chapelles  se  fassent  élerées  sur  ce 
territoire ,  on  finit  par  retonnattre  qn'il  était  trop  Tule  pour  one  seule 
panMsse.et,  en  ISIS,  on  en  détacba  tout  ce  qui  se  trouvait  au  deli  de 
la  chalue  maritime ,  pour  en  fonner  nne  portion  de  U  peroisae  nouvelle 


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DD  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  9 

do  ciel ,  h  la  rerdure  alors  si  flitche  des  gazons  et  des  tail- 
lis, au  calme  profond  qui  régnait  dans  toute  la  nature. 

Le  jour  où  je  quittai  Porto  da  £strella,  je  fis  halte  à  la 
faxenda  de  Handioca,  située  tout  à  Toit  au  pied  des  mon- 
tagnes. Cette  faxenda,  qui  appartenait  au  consul  de  Russie , 
N.  Lang8dorff(l),  voyageur  instruit  et  infatigable,  ne  peut 
manquer  d'être  célèbre  dans  l'histoire  naturelle  du  Brésil  ; 
car  la  plupart  des  savaDls  qui  étaient  venus  pour  vi^ter cette 
partie  de  l'Amérique,  k  l'époque  du  premier  mariage  de 
don  Pedro  I",  passèrent  quelques  jours  à  Handioca,  et  y 
recueillirent  beaucoup  d'objets  intéressants  (3).  Il  est  inqtos- 
sible ,  eu  effet ,  de  rencontrer  une  localité  où  le  naturaliste 
puisse  faire  de  plus  belles  récoltes.  A  peine  s'est-on  avancé 
.  de  quelques  pas  vers  le  nord,  que  l 'on  trouve  les  montagnes, 
qui  présentent  tanlM  des  rodiers  et  tantAt  des  terres  excel- 
lentes ;  on  est  entouré  de  bois,  les  uns  encore  vierges,  les 

40  s,  Jo$é  do  Svmiâowro.  AvidI  cette  dinsiim,  U  parmase  de  Noua 
Seabort  da  Fiedade  d'iahumirini  coropreoBit  plus  de  480  Tem  et  plas 
de  a,eoo  idaltes  (Jf«n.  M((.,  HI,  255  et  suiv.).  U  serait  carieni  de 
eonnaltre  d'une  manière  prédge  les  aagmentaliooB  que  ce  cautoo ,  ai 
TOiliii  de  la  capitale  et  de  la  mer,  a  dâ  éprouTcr  pendant  les  derniires 
•DiKes,  et  de  Ice  comparer  avec  Im  changemeuta  qui  ont  po  avoir  lieu 
dans  l'îDtJTiear,  h  dea  diaUac«s  de  U  cAle  ^aduées  aatant  que  possible, 
et  sons  des  inaueiKes  diTerses  et  bien  délermiuées. 

(1)  M.  LangsdorlT  avail  accompagné  l'amiral  KniaenaierD  dons  aon 
Tojage  aotcur  da  moDde  :  od  a  va ,  par  ma  prtntiire  rtlalion ,  que 
noua  aoauDeaallJB  ensemble  jusqu'à  Itajarii,  dans  la  proTÎoce  des  Mines, 
et ,  depnis ,  il  a  encore  parcouru ,  soiu  la  protection  de  l'empereur  de 
Bnaaie,  une  partie  de  l'intérieur  du  Brésil. 

(2)  On  trouve  de«  détails  sur  Handioca  dons  les  écrits  de  PohI  et  de 
Spii.  Raddi  a  donné  le  nom  de  XanAUxaiM  h  un  Oxalit  que  j'ai  di'crii ,    , 
arec  détail ,  dans  le  Flora  Brasilia  m«rtdHnH)ltf ,  I ,  p.  lis.—  Handioca 

a  él^  acheté  par  le  gouveroemeul  actuel ,  qui  ;  a  établi  une  fabrique  de 
poudre  (GtnDH.,  TToneU,  Vt\). 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


10  VOTAGE  AUX  S 

autres  en  taillis,  et  de  tons  cMéi  coulent  des  ruineaux  qui 
contribuent  à  rendre  la  Tég^Uon  aussi  Tariée  que  vigou- 
reuse. 

J'ai  dit  ailleurs  (1)  qu'une  cttalne  de  m<«itagne9  se  pro- 
longe le  long  de  la  mer  dans  une  partie  du  Brésil  (Serra  do 
Mar),  et  qu'elle  est  couverte  de  bois  vierges  ;  f  ai  ajouté 
qu'une  antre  chaîne  plus  élevée  (Serra  do  Espinbaco),  s'a- 
vançant  h  peu  prés  du  nord-est  de  la  province  Saint-Pau), 
s'étend  presque  paraHélentent  è  la  première  et  ne  laisse 
qu'une  distance  de  30  A  60  lienea  entre  elle  et  la  Cordillère 
maritlnie  ;  j'ai  encore  ajouté  que  la  chaîne  intérieure  sépare 
toute  la  province  des  Mines  en  deux  parties  fort  inégales, 
qu'elle  divise  les  eflux  du  Rio  Doce  de  celles  du  S.  Fran- 
cisco, qu'elle  va  se  perdre  dans  le  nord  du  Brésil  ;  enfin 
que  l'espace  compris  entre  les  deux  chaînes  est  coupé  par 
d'autres  montagnes,  et  que  le  pays  qui  s'étend  d'une  chatoe 
à  l'autre  est  généralement  couvert  de  bois  comme  la  chaîne 
maritime  (3).  C'est  ce  réseau  de  montagnes  boisées  que 
j'allais  d'abord  parcourir.  Je  devais,  me  dirigeant  vers  le 
septentrion,  monter  la  Serra  do  Mar,  et  la  descendre  en- 
suite, afin  d'entrer  dans  le  bassin  du  Parahyba  ;  je  devais 
passer  cette  rivière,  quitter  la  direction  du  nord  pour  suivre 
celle  de  l'ouest,  traverser  la  chaîne  intérieure,  sortir  alors 
de  la  r^t'ondM^or^te,  trouver,  à  l'occident  de  la  dernière 

(i)  VojM  mon  Voyage  dont  Ut  prooineei  ieBlodt  Janetro,  etc., 
TOI.  I,  p.  08. 

(3)  Oa  verra,  par  1i  Enile,  qu'il  J  ■  nne  nreplion  pour  11  partie  la 
plDS  méridionale  de  l'espace  compris  entre  les  deux  chaînes,  et  que, 
depnis  )e  rillage  appelé  Porto  da  Cofhoêira  jnsqn'ï  la  ville  de  Saint- 
Paul  ,  on  troare  an  pajs  généralemeol  plat  on  ondulé ,  coupé  de  boa- 
queu  de  bois ,  de  marécages  et  de  pltur^M  nalureb  enlièrement  dé- 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


m  UO  m  s.  FRANCISCO.  11 

chaîne,  ta  région  des  campot  ou  pays  découvert ,  et  m' y  en- 
foocer  ponr  me  rendre  dans  la  province  deGoyaz,  après 
avoir  parcouru  la  partie  ta  plus  déserte  de  celle  de  Minas 
Geraes. 

A  peioea-t-on  commencé  à  monter  la  Serra  do  Har,  qn'oD 
voit  te  pays  clienger  d'aspect.  La  nature  ne  perd  rien  de  sa 
majesté,  mais  etle  emprunte  on  caractère  Apre  et  sauvage 
de  l'élévation  des  montagnes,  de  leurs  anfractuosités ,  des 
rocben  dus  qui  s'y  montrent  au  milieu  des  forêts,  enfin  de 
la  verdure  foncée  du  feoillage  des  arbres  ;  elle  paraîtrait 
oflgjanique  sans  l'éclat  brillant  de  l'azur  des  cieux. 

La  partie  de  la  Serra  do  Mar  au  pied  de  laquelle  est  si- 
tuée Mandioca  s'appelle  Serra  da  Eslreîta,  nom  sans  doute 
emprunté  k  une  montagne  du  Portugal  située  dans  la  pro- 
vince de  Beira  (1).  Dans  une  étendne  de  1  lieue  et  demie , 
depuis  te  bas  de  la  Serra  dâ  EAtrella  jusqu'à  son  sommet, 
et  sur  une  partie  de  ce  sommet  lui-même,  le  diemin  pré- 
sente une  véritable  rareté  pour  le  pays  (1819)  :  il  a  été 
pavé,  et,  qui  plus  est,  il  ne  t'a  point  été  mti.  Cependant, 
quoique  ses  sinuosités  aient  été  ménagées  avec  assez  d'art, 
il  ne  laisse  pas  d'être  difBcile  pour  les  hommes  et  pour  les 
animaai.  Lorsqu'on  est  arrivé  i  une  certaine  hauteur,  on 
découvre  une  grande  partie  de  la  plaine  diongée  que  l'on 
a  parcourue  en  venant  de  Porto  da  Ëstrella,  et  qui,  cou- 
verte de  gazon,  serpente  entre  des  collines  boisées  comme 
un  ruban  ondulé  et  d'un  vert  tendre.  Parvenu  au  point  cul- 
minant, je  me  trouvais  à  5,G07  pieds  anglais  [1,099°,55) 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer  (S) ,  entre  les  eaux  qui  se 
jettent  dans  la  baie  de  Rio  de  Janeiro  et  celles  qui  groeds- 

(I)  Tojei  EscBwicE,  Jfmm.  von  Brat.,  U,  71. 
■i)  Hcsarc  empronife  à  »on  Esfhwej». 


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tS  VOYAGE  AUX  SOURCES 

sent  l«  ^ahyba.  Alors  je  commençai  à  descendre  pour  me 
rendre  dans  )a  vallée  où  coule  ce  fleuve,  et  après  avoir  fait 
3  lieues  environ ,  depuis  Mandioca,  je  m'arrêtai  au  roneko 
de  la  faxenda  de  TamaraU  (Ij ,  que  je  trouvai  encombré  de 
muletiers  et  de  marchandises. 

Cette  fazenda,  située  à  une  hauteur  encore  très-consi- 
dérable, mais  dans  un  enfoncement,  est  entourée  par  des 
montagnes  arrondies  i  leur  sommet  et  couvertes  de  Iwis. 
L'une  d'elles  se  termine  par  une  croupe  taillée  à  pic  où  le 
rocher  nu  et  noirAlre  présraile  à  peine ,  çà  et  là ,  quelques 
liantes  grasses;  au-dessous  du  rocher,  sur  une  pente  très- 
roide,  on  voit  un  taillis,  et  c'est  au  bas  de  cette  pente  qu'ont 
été  bfltis  la  fittenda  et  le  rancho  ;  à  peu  de  distance,  sur 
le  bord  de  la  route,  un  autre  ranctut  sert  de  supplément  au 
premier  ;  dans  une  vallée  étroite  coule  un  ruisseau  dont  le 
murmure  s'entend  du  rancho  (3),  et  qui,  sans  aucun  doute, 
réunit  ses  eaux  k  celles  du  Piabanha  (5) ,  l'un  des  affluents 
du  Parahyba  ;  sur  une  pente,  on  voit  une  vaste  plantation  de 
mais.  La  hauteur  des  montagnes ,  les  bois  sombres  qui  les 

(1)  Piurro  a  écrit  llamarali  (If  An.,  vol.  m,  264),  et  Lnccock  {NoUt, 
375  )  itamareU.  Peut-être  ce  dernier  mot  indiqne-l-il  U  ?ériuble  i^tj- 
mologie  de  TamaraU,  qui  Tieodrail  des  mots  BOinDis  Ua,  pierre,  et 
mbaraeté,  fort  (Au.  Rdie  de  Uontot*,  Tm.  teng.  awr.),  on  d'aaires 
mots  aiulogaes  empruatés  i  quelque  dialecte  Toisin  du  guarani.  Si  cette 
étjinologie  n'est  point  erronée,  comme  cela  est  misemblable,  il  est 
dair  qu'il  ne  fendrait  pas,  aTec  le  général  Htimnodo  Jo«4  da  CuDba  Hal- 
tos ,  écrire  Tamarati/. 

{i)  D'aprts  ce  qu'ont  écrit  Pizarro  et  M,  Baimundo  José  da  Cunfaa 
HaUOs  {Hem.  Ii/it..  ni,  304.  —  Hin.,  I,  S),  il  est  érident  que  ce 
ruisseau  est  le  Rio  TomaraJi  on  ItamaraU ,  qui ,  selon  le  premier  de 
ces  écrÏTains,  Tient  du  lefaU ,  pour  se  jeter,  après  un  cours  tfaoe  lieue. 


(3)  Le  nwn  de  PiofranAa  est  celni  d'un  paisgou  d'eau  douce.  C'est  à 
tort  que  Hawe  écrit  Piatmnha,  Loccorli  Pintuno,  cl  Wsish  Pinhwiila. 


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DO  RIO  DE  S.  FBANCISCO.  >3 

couvrent,  ce  large  rocher  noirAtre  qui  domine  \aiftaenda, 
la  vallée  étroite  qui  se  dessine  au-dessous  d'elle  donnent 
h  tout  c«  paysage  l'aspect  le  plus  sévère. 

Au  delà  de  Tamaratl ,  le  chemin  suit,  à  mi~câte,  les  si- 
nuosités de  la  vallée  dont  je  viens  de  parler  et  où  coule  le 
Piabanha.  Toute  la  contrée  présente  ce  caractère  sauvage 
qu'ont  en  général  les  pays  de  montagnes  et  de  bois.  BiratAt 
on  passe  près  d'une  belle  fasenda  appdée  Samambaia  (i). 
Un  peu  plus  loin ,  la  vallée ,  jusque-là  assez  étroite,  s'élar- 
git, et  l'on  voit  les  bords  de  la  rivière,  plantés  de  cognas- 
siers alignés  avec  soin,  qui,  à  l'époque  de  mon  voyage, 
étaient  chargés  de  fruits  mûrs  :  on  est  alors  sur  les  terres 
d'une  fazenda  appelée  Padre  Coma  (S) ,  du  nom  d'un 
ecclésiastique,  son  propriétaire.  4près  les  cognassiers,  vien- 
Dent  de  nombreux  pêchers  sur  lesquels  je  vis  également 
des  fruits  mûrs  (39  janvier).  Quant  à  la  fasenda  elle-même, 
elle  a  été  bâtie  dans  un  grand  espace  que  les  montagnes 
laissent  entre  elles ,  et  qui  est  tout  à  la  fois  sans  inéga- 
lités et  de  niveau  avec  le  diemin  (3).  L'aspect  de  cette  vallée 

(1)  Samambaia,  on  mieni  eacore  Çamtmbata,  est  le  nom  de  !■ 
grande  toagète  qni,  ta  Uut  de  lient,  s'empare  des  terrains  autrefoit 

(!)  Ce  n'est  ni  Padre  Corrao,  comme  ont  écrit  Hâve,  Loceoek  et 
SouiBMt,  m  Faére  Corré,  comme  écrit  Henderaon.  —  Dn  dei  voya- 
genreqne  je  Tieiudc  citer  dit  (Scz.,  Sow>.,  36a)qne  Padre  Correa  est 
aojonrd'lini  an  village;  il  aura  <té  trompé,  sans  donle,  par  la  raale 
etendae  de*  bllimetria  qu'il  }  a  na  j  car  H.  Oardoer,  qui  mérite  tonte 
eonfiance  et  a  passé  par  le  mtme  lien  en  1840,  ne  lui  donne  encore  que 
le  nom  de  fatenda  (TraveU,  SSÎ). 

(3)  Ba  Cnnhi  Mattos  dit  (Illn.,  1,  I0)cp]'il  euaiedans  la  cour  ((«r- 
rajro  )  de  la  faitnda  de  Padra  Gottm  un  arbre  lallement  (ouSq  ,  qae, 
a«  miliea  dn  jodt,  il  poorrait  couvrir  de  son  ombre  un  bataillon  tout 
entier.  Cet  arbre  aurait  presqoe  rivalisé  avec  celui  qui  abrita  la  petite 
année  de  Corlei. 


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14  VOYAGE  AUX  SOUHCES 

si  bien  cultivée,  au  milieu  des  montagnes  âpres  et  sauvages 
qui  la  bornent,  a  quelque  cbose  qui  surprend  et  qui  charme; 
là,  on  peut  voir  ce  que  rboouae  ferait  dans  ce  pays  avec  plus 
d'industrie  et  plus  d'efforts.  L'abbé  CoiHEA,  qui  faisait  va- 
loir l'babitation  dont  je  viens  de  donner  une  description 
succincte,  jouissait,  à  l^o  de  Janeiro,  d'une  grande  r^a- 
tation  pour  ses  connaissances  en  agriculture,  et  il  parait 
qu'elle  était  justement  méritée.  Il  avait  profité  de  la  tou- 
pérature  modérée  de  la  Serra  pour  cultiva  un  grand  nom- 
bre de  plantes  d'origine  caucasiqueou  européenne,  et  l'on 
m'a  assuré  qu'il  retirait  beaucoup  d'ai^nt  seulement  des 
ceillets  qu'il  envoyait  vendre  i  la  ville.  Dans  la  saison  où 
nous  éHaaa  alors ,  il  faisait  partir,  m'a-t-on  dit,  chaque  se- 
maine ,  pour  Porto  da  Estrella ,  une  troi^  de  nuilets  char- 
gés  de  pèches,  et  l'on  ajoutaitqu'il  en  vendait  pour  environ 
10,000  cnuades.  Ce  fait,  soit  dit  en  passant,  prouve  com- 
bien la  ten^rature  de  la  Serra  diffère  de  celle  de  Rio  de 
Janeiro,  car  les  pêchers  ne  donnent  point  de  fruits  dans  les 
jajrdinsdecetteviUe.  Asiibeuresdumatin,  dans  la  plaine, 
le  thermomètre  de  Réaumar  m'avait  indiqué  33°  1/â,  et, 
à  midi ,  il  indiquait,  i  Tamarati,  dans  la  montagne,  33,'  i  12 
seulement. 

Après  avoir  passé  la  fatenda  de  Padre  Correa ,  je  dttoyai 
une  immense  plantation  de  ma'is.  Plus  loin ,  sur  le  bord 
de  la  rivière,  des  nègres  ^ent  occupés  à  préparer  la  leire 
pour  y  mettre  des  haricots  qui  devaient  ètn  récoltés  en 
juin.  Cens  que  l'on  plante  ainsi ,  de  manière  i  pouvoir  faire 
la  cueillette  dans  l'hiver  des  tropiques,  prennent  le  nom  de 
feijôet  àa  teca ,  c'  est-è-dire  haricot»  de  la  sécherette. 

Pendant  longtemps  le  chemin  avait  suivi  la  rive  droite 
du  Piabanha  ;  on  passe  cette  rivière  sur  un  pont  pittores- 


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DU  RIO  DE  S.  FVAMCISCO.  la 

que,  et  I'od  câtoie  u  rive  gauche  jiuqu'au  rancho  assez  in- 
sigDiSaat  qa'on  appelle  Svmidouro  (gouffre].  C'est  là  que  je 
Sfi  halte  le  jo«r  où  j'avais  quitté  Tamara^. 

L'habitation  la  plus  importante  de  celles  que  je  vis  entre 
Sumidouro  ^  Boa  Yista  da  Pampulha ,  où  je  m'arrêtai  le 
jour  suivant,  est  Secret^np  (secrétaire).  Depuis  cet  endroit 
jnsqu'i  Boa  Vista,  dans  l'espace  de  1  lieue,  je  comptai  en- 
core 5fuatre  faamtà^t,  nais  elles  sout  peu  considérables. 
Avant  celle  ^Fagwadet[i),  le  cfaemin  commence  à  mon- 
ter; là  on  voit  HO  ruisseau  qui  coule  eo  sens  contraire  du 
Piabuiba,  que  j'avais,  comme  je  l'ai  dit,  cAtoyé  U  vejlle, 
«t ,  à  la  fazenia  de  Fs^iudes ,  la  montée  devient  Irès-roide. 
lies  terres  de  oe  cantoa  sont  bonnes  et  rendent ,  en  maïs, 
150  à  200  pour  1  ;  mais  l'eitrème  sécheresse  qu'on  prou- 
vait alors  Aisak  beaucoup  de  tort  à  cette  plante.  Dans  l'été 
de  18i6  à  1817,  les  pluies  avaient  été  peu  abondantes , 
elles  le  furent  ezceasivemeot  é»m  iceiui  de  1817  à  1818  ; 
la  sécheresse  se  faisait  de  aouvieau  sentir  de  1818  à  1819, 
et,  lorsque  de  1819  à  1820,  je  traversais  la  province  de 
SaÙBt-fanJ,  je  Eus  eitrèmeiaeift  oontivrié  pai  l'abondance 
desfluîes.  Il  serait  tmi  d'«b«erv«r  si  cette  alteruanee  sio- 
gulière  se  renouvelle  souvent  ;  mis  ce  que  je  puis  dire , 
£'cstiqu'«Uen'»raitfNHOt  été  offi»1e  par  lea-^iés Immédia- 
tement antérieurs  k  celui  de  1816  à  1817  ;  car ,  lorsque 
j'éttts  à  Itabira  de  Mato  deotro  (S) ,  je  sus  par  mon  hdte, 
M .  le  capitaine  Pires ,  -que  ce  mÊme  été  était  le  troisième 

(t)  Fagoodes  est  vn  nom  d'hoiaine.  11  ne  tt,at  pas ,  coaao»  Satbwtge, 
éaitt  Peçundei ,  ni  Faipnulat  comme  le  iûOwa  PoU ,  oa  Faetmda 
cooimalf.  Wabh. 

(X)  TofM  BWD  rouage  diuu  ta  protlmt»  4«  Biv  At  j«meiro,  «te, 
Tol.  I,  360  et  miT. 


D,g,l,.,.d.i.COOt^lC 


w  voTAOË  AUX  soncis 

où  l'on  eût  i  se  plaindre  de  la  sécheresse,  et  il  n'est  nulle- 
ment k  croire  qu'elle  ait  été  limitée  au  canton  d'Itabira. 

Je  reviens  à  mon  itinéraire.  Le  cours  du  Piabanha  suffi* 
rait  pour  montrer  que,  pendant  longtemps,  la  roote  suit  un 
plan  qui  incline  vers  le  nord;  cependant  elle  ne  descend 
pas  toujours,  puisqu'il  existe  à  Fagundes,  ccmune  je  l'ai 
dit ,  une  montée  rapide  ,  et  qu'alors  on  voit  un  ruisseau 
qui  coule  en  sens  contraire  du  Rio  PitdMDha.  L'habitation 
de  Boa  Vista  da  Pampulha  se  trouve  plus  élevée  que  Su- 
midouro,  qui,  pourtant,  est- plus  rapproché  de  3  lieues  du 
sommet  de  la  chaîne  maritime  ,  et ,  par  conséquent ,  plus 
éloigné  de  la  vallée  du  Parahyba  ;  mais  ensuite  ,  d^uis 
cette  même  habltotion  jusqu'au  fleuve ,  on  descend  d'une 
manière  sensible  (1). 

La  seule  ftaeada  un  peu  considérable  qui  se  trouve 
entre  Boa  Vista  da  Pampulha  et  6oMrno,  où  je  Os  halte  , 
est  celle  de  Cebola  (oignon)  (2),  dont  la  cour,  très-vaste 
et  entourée  de  nombreux  bUmienls  ,  est  traversée  par  le 
chemin. 

En  me  rendant  de  Boa  Vista  A  Govemo  ,  je  m'amnsai  i 
questionner  quelques  nègres  de  Benguela  ,  que  je  trouvai 
sur  mon  diemin.  Ils  me  dirent  que,  dans  leur  pays,  on 
cultive  la  terre  comme  au  Brésil;  que  l'on  y  coupe  les  bois 

(1)  Toid  la  note  des  binlennqDl  ODtélé  prise*  par  H.  iTEe^wege, 
depuis  k  sommet  de  la  Serra  jusque  sar  le  bord  du  Paralijbe  : 

Sommet  de  la  Serra 3,007  pieda  anglais  ou  1,0B9>,SS 

Conego  Seco 3,405          —              733-,80 

.  snmidoaro l.SOS           —                M9-,08 

Boa  ViMa  di  Painpalha.  .  .  .  I,ft79         —              601-, 78 

Bords  du  Parabjba. 610           —                ltt9-,86 

(2)  Ceet  i  ton  queHam  a«eritz<itotia,LiicMd[CatohM,  WaUta. 
SMoola. 


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DO  RIO  De  s.  PKANCISCO.  17 

et  qu'on  les  brûle,  qae  c'est  là  l'ouvrage  des  hommes, 
et  qu'ensuite  les  remmes  et  les  enrauts  plantent  et  font 
la  récolte.  La  ressemblance  des  pratiques  que  Von  suit 
à  Bengaela  et  de  celles  qui  ont  été  adt^tées  par  les 
Brésiliens  ne  doit  cependant  pas  faire  penser  qu'en  agri- 
cnlture  les  n^^res,  barbares  et  esclaves,  aient  été  nécessai- 
rement les  maîtres  des  Portugais  plus  civilisés.  Quand 
ccHï-ci  arriTèrent  en  Amérique ,  ils  y  trouvèrent  leur  mé- 
thode actuelle  de  cultiver  en  usage  parmi  les  Indiens,  et  ce 
serait  probablement  i  ceux-ci  plutôt  qu'aux  Arricains  qu'il 
faudrait  en  faire  honneur  (i).  Mais,  lors  même  que  les  Por- 
tugais n'auraient  point  eu  sous  les  yeux  de  modèle  pour 
cette  méthode ,  l'impérieuse  nécessité  la  leur  aurait  sans 
doute  luentôt  enseignée.  Qu'aaraient-ils  pu  imaginer,  en 
effet,  quand  ils  auraient  voulu  planter  dans  un  bois  vierge, 
si  ce  n'^t  de  couper  les  arbres  et  de  les  brûler?  Il  serait 
donc  injuste  de  leur  faire  un  reproche  d'avoir  commencé 
de  cette  manière;  mais  ce  dont  on  pourrait ,  avec  raison , 
bUmer  aujourd'hui  leurs  descendants,  c'est  de  continuer  à 
brûler  les  forêts ,  lorsque  tant  de  terrains  découverts  et  &- 
nies  è  labourer  sont  i  leur  disposition  ;  c'est  de  priver,  sans 
nécessité ,  ceux  qui  viendront  après  eux  des  ressources  si 
nombreuses  que  présentent  les  bois  ;  c'est  de  courir  le  risque 
de  dégarnir  leurs  montagnes  de  terre  végétale  et  de  rendre 
leurs  eaux  moins  abondantes  ;  c'est,  enfin,  de  retarder  les 
progrés  de  leur  propre  civilisation ,  en  se  disséminant  cha- 
que jour  davantage  dans  leurs  vastes  déserts  pour  y  trouver 
des  arbres  i  incendier. 
Les  nègres  de  Benguela  ,  dont  j'ai  parlé  plus  haut ,  me 

(I)  Vojei  nMi)  royage  Han*  le  dùlricl  dtt  ùiamanU,  vu.,  II,  271. 


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18  VOYAGE  AUX  SODRCES 

dirent  qu'  ils  avaient  été  enlevés ,  étant  encore  enfants ,  par 
une  horde  voisine  de  ta  leur,  lorsqu'ils  étaient  occupés  dans 
la  campagne' avec  leur  mère.  Si  la  traite  était  bien  fran- 
chement abolie,  de  pareils  enlèvements  n'auraient  plus  lieu 
chez  les  Africains,  ou  dn  moios  ils  deviendraient  plus  rares 
vA  la  principale  cause  de  guerre  cesserait  parmi  ces  peuples. 
Mais,  dans  l'état  actuel  des  choses  ,  il  faut ,  an  Bré^l 
éprouver  le  dégoût  d'être  servi  par  des  esclaves ,  ou  se  ré- 
signer ,  comme  je  l' ai  dit  ailleurs,à  être  soi-même  à  la  merci 
des  hommes  libres  que  l'on  emploie;  j'en  ai  fait  trop  sou- 
vent la  triste  épreuve.  Vers  Governo,  mon  muletier  me  dé- 
clara qu'il  était  décidé  à  retourner  chez  lui,  et  j'obtins  avec 
beaucoup  de  peine  qu'il  ne  m'abandonnerait  pas  dans  on 
lieu  où  j'étais  inconnu,  mais  qu'il  me  conduirait  jusqu'à 
IM  (1) ,  où  j'avais  l'espérance  de  le  remplacer.  D'un  autre 
c6ié,  k  peine  étais-je  arrivé  è  Porto  da  Ëstretia  que  le  pauvre 
Prégent  avait  voulu  se  rembarquer  pour  Rio  de  Janeiro , 
afin  d'y  aller  chercher  une  bagatelle  asseï  inutile,  et  m'avait 
fait  one  scène  qui  s' était  prolongée  pendant  plusiran  jours. 
Ainsi  je  m'étais  trouvé  entre  deni  hommes  dont  l'un 
prétendait  que  j'avançasse  el  l'autre  que  je  retournasse 
sur  mes  pas.  Je  n'entrerai  pas  dans  le  détail  de  ces  bacas- 
series;  je  me  contenterai  de  dire  qu'en  continuant  ma  route 
avec  les  gens  qui  m'accompagnaient  alon,  je  montrai  plus 
de  persévérance  peut-être  que  dans  aucune  autre  circon- 
stance  de  ma  vie. 


(1)  Tojei  moD  Voyage  dan*  U»  provincei  da  Rio  d»  Janeiro,  etc.. 
1,28. —  C'est  ïlortqas  Loccock  a  écrit  I/ca,  an  lieu  d'UM.  Ou  trouve 
aassi  Uva  dans  ooe  DeieriplUm  d«  Rio  dt  Janeiro,  qni  a  été  imprimée 
diaa  les  HiMoeilt*  onnalM  Aet  votiagei,  toI.  IT,  et  où  les  géograpb«a 
Teront  biea  de  ne  |khdI  aller  cbereher  des  reaseignemeDla. 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  19 

A  Encrtuilhada  [1j,  je  quittai ,  pour  me  rendre  à  Ubé,  la 
grande  route  de  Minas  Geraes  (2)  ;  j'entrai  dans  le  chemin 
de  terre  {camàiho  da  terra)  (5),  me  rapprochant  ainsi  un 
instant  de  mon  point  de  départ ,  et ,  au  lieu  appelé  Soco- 
pira  (4) ,  je  pris  le  chemin  de  traverse  qui  devait  me  con- 
duire A  ma  destination.  Je  parcourus  les  lieui  que  j'arais 
d^  visités  l'année  précédente,  et  enfin  j'arrivai  k  Ubé. 

Ce  fut  ta  dernière  fois  que  je  revis  cette  habitation  ,  on 
]" avais  passé  de  si  heureux  moments  et  où  j'avais  pu  me 
livrer  au  bonheur  d'observé  une  nature  aussi  brillante  que 

(1)  Ce  doit  ttn  ce  lien  que  Pohl  et  Eschwege  appellent  Litea*  ■■  le 
^rnier  dit  mtme  qae  Lacas  porte  on  antre  nom  qui  loi  «  écbtppé.  En- 
tntxilhada  est,  tu  reste,  no  mot  générique  qui  désigne  tout  embran- 

(S)  Da  Cnnba  Haltes  établit  comme  il  suit  ritinéTaire  de  Rio  de  Ja- 
neiro i  Gorenio  : 

-   De  Rio  de  Janeiro  i  Porto  da  Estrella 5         legooa. 

—  —  Muidioca 2 

—  —         Pidre  Correa i 

—  —        Boodui  do  Almeidâ.  ...  11/3 

—  —         Bu  Vista  da  Ptmpnlhi.  .  S  1/3 

—  —         Oofemo î  1/2 

2(1  t/2  legoas. 
Il  fuit  se  rappeler  qne  les  Ugoat  on  lienes  portngaises  sont  de  18  au 
degré. 

(3)  Le  ehtmln  de  terre  est  celui  qne  l'on  prend  lorsqu'on  va  de  Hinas 
i  Rio  de  Janeiro  et  qa'on  rent  ériter  de  s'embtrqner.  (Vo7ei  le  royiiff* 
dans  let  provitteet  d«  Kio  iMJaii^ro,  etc.,  1,  6,  et  celui  dans  le  d<(- 
triet  de»DiaMantt,  etc.,  I,  281.) 

(4)  J'ai  écrit  ailleurs  S^uvpira  {Voyage  dan*  U  dittriet,  etc.,  I, 
182)  ;  mais  je  crois  l'orthographe  que  j'admets  ici  pins  conforme  i  la 
proDondatioD.  Il  parait  que  l'on  appelle  anoti  ttenpira  l'arbre  on  les  ar- 
bres aoiqnek  le  lien  dont  il  s'agit  ici  a  emprnnté  iton  nom  ;  car  c'est  ainsi 
qn'ont  écrit  dea  hommes  qoi  doirenl  bite  anlorilé.  (Vojei  F,  Dncis, 
BréHl ,  60.  —  Gabon..  Trav.,  un.) 


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30  VOYAGE  ADX  SOURCES 

variée,  sbds  éprouver  les  privations  par  lesquelles  il  fallut, 
plus  tard ,  acheter  si  cher  tes  jouissances  de  mon  voyage. 
H.  Joâo  Rodrigues  Pereira  de  Almeida  (1]  n'était  point  k 
Ubé  quand  je  m'y  arrêtai  ;  mais ,  avant  mon  départ,  il  m'a- 
vait donné  ,  pour  différentes  villes ,  des  lettres  de  recom- 
mandation et  de  crédit  qui  me  furent  de  la  plus  grande  uti- 
lité. Sans  son  appui  et  son  amitié,  je  le  répète  ici  plein  de 
reconnaissance,  je  n'aurais  pas  achevé  mon  voyage. 

L'administrateur  de  sa  belle  habitation  fit  des  démarches 
ponr  me  procurer  un  muletier;  il  s'en  présrata  un  qui  était 
assez  bien  recommandé,  et  je  m'arrangeai  avec  lui  à  raison 
de  7,300  reis  (45  fr.)  par  mois.  José  Harianoo,  c'était  son 
nom,  avait  un  teint  extrêmement  foncé;  mais,  comme  en 
même  temps  ses  cheveux  ,  durs  et  noirs  ,  n'étaient  nulle- 
.ment  crépus  et  que  son  nez  était  aquilin ,  je  ne  doute  pas 
qu'un  mélange  de  sang  caucasique,  nègre  et  américain  ne 
coulit  dans  ses  veines.  Cet  homme  possédait  au  plus  haut 
degré  les  bonnes  et  les  mauvaises  qualités  qui  caractérisent 
les  métis  ;  il  avait  une  très-grande  intelligence  et  une 
adresse  peu  commune  ;  mais  il  était  à  la  fois  imprévoyant , 
léger,  prodigue  et  vaniteux.  Souvent  on  le  voyait  gai  tA  Jo- 
vial; alors  il  prenait  des  manières  enfantines ,  et  devenait 
câlin  avec  ses  supérieurs  ;  il  se  plaisait  i  causer,  et  racon- 
tait avec  esprit  les  histoires  de  tous  les  muletiers  du  Brésil, 
en  se  les  atbibuant  à  lui-même  ;  il  ne  s'était  |»obablement 
guère  éloigné  de  Saint-Paul  et  de  S.  Joao  d'EI  Rei ,  mais, 
i  l'entendre,  il  connaissait  tout  l'empire  brésilien;  il  avait 
voyagé  dans  les  Campos  Parexis,  qui  sont  si  peu  connus,  et 
il  y  avait  eu  mille  aventures  merveilleuses  ;  son  père,  disait- 


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m  aïO  DE  s.  FIURCISCO.  !t 

il,  était  un  blanc  fort  riche,  ses  frères  étaient  des  blancs,  il 
ni'ac«ompagnait  pour  son  seal  plaisir,  ou  bien  encore  parce 
que  l'infant  don  Pedro  l'en  avait  prié  avec  instance.  J'au- 
rais été  trop  heureux ,  au  reste ,  si  l'on  n'avait  eu  à  lui  re- 
procher que  sa  vanité  excessive  ;  mais,  après  quelques  jours 
de  bonne  humeur,  sa  physionomie  changeait  presque  tout 
à  coup  d'expression  ;  elle  devenait  sombre;  il  ne  souriait 
plus,  ne  disait  plus  rien,  ou,  s'il  laissait  échapper  qod- 
ques  paroles,  elles  étaient  empreintes  de  mécontentement 
et  d'aigreur  ;  alors  il  devait  certainemoit  beaucoup  souffrir. 
Sa  mélancolie  durait  ordinairement  une  semaine  ou  deux  ; 
mais  ensuite  il  reprenait  sa  galté  et  il  la  perdait  de  nou- 
veau qudque  tanps  après.  On  verra  plus  tard  combien  de 
désagréments  m'ont  causés  les  bizarreries  de  cet  homme  , 
et  combien  elles  me  faisaient  payer  cher  les  services  fort 
importants  qu'il  me  rendait. 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  II. 


LE  CBEHIM  DU  RIO  PBBTO.  —  LA  VILLE  DE  VALEHÇA  ET  LSS 

COHOADOS. 


HbbûTe  do  chemin  da  Rio  Preto,  Les  Umchean  de  baafs  et  de  pour- 
ceani.  —  Le  ftrrador.  —  tt  port  dn  Panhjba.  Comment  la  bceufe 
traTenent  cette  rifitTe.  Peinture  de  ses  bords.  Péage.  —  ChemiD  dé- 
teatoble.  —  Les  bois  vierges.  —  Qnelqaes  faxendat.  —  Les  Indiens 
Coroados.  —  La  Tille  de  Valença-,  son  histoire  ;  sod  état  acUiel.  Ré- 
OexîiHM  sur  la  métamorphose  des  Tillages  en  Tïlles.  —  Le  rancho  Sot 
Cobrat  ;  ou  pajwge  an  clair  de  la  lone.  —  Le  Ato  Btmilo. 


Le  chemin  que  j'allais  parcourir  pour  me  rendred'Ubi  (1) 
AS.  Joâod'El  Rei,  et  de  là  à  Goyaz ,  en  visitant  la  partie 
occidentale  de  la  province  des  Mines,  porte  le  nom  de  ea- 
mirAo  do  Rio  Preto  (chemi  n  du  Rio  Preto) ,  parce  qu'effec- 
tivement il  traverse  cette  rivière  (â).  Lorsqu'on  veut  le 

(1  )  ItioéraiTe  approiimatif  Û'Obi  an  rillage  de  Rio  Pralo  (■rraial  do  Rio 
Pitto}  ; 

D'Dbà  m  Porto  da  Parabjba 3/4  legoas. 

—  Forqnitbi  (rancbo) S 

—  FazeiidadeJotqiiimHarcos(IiabitatiOD).  i 

—  As  Cobras  (raocho) 3 

—  Arraial  do  Rio  Preto  «illage) 3 

13  3/4  legoas. 
(2)  PIds  lard ,  an  mois  de  février  1S2S ,  je  passai  par  tm  antre  che- 
min ,  qui  commence  an  delà  d'Agnassû ,  toat  mprès  de  Bemfica  on  Pë 
da  SeiTi  (voyei  ras  premier»  relation,  1 ,  8),  et  qui  tombe  dans  le  che~ 


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DU  MO  DE  S.  FUNCISCO.  2S 

stiiTre,  CD  parlant  de  Rio  de  Janeiro,  on  prend  d'abord  le 
eanùaho  da  terra  (clieniin  de  terre),qui  mène  h  FaoGrande. 
Là  eoDt  deux  embrancbemeals  :  l'un  n'est  que  la  continua- 
tion du  caminAo  fia  terra  et  aboutit,  comme  je  l'ai  dit,  à 
Eocnuilhada,  dans  la  grande  route  de  Villa  Rica  ;  l'autre 
est  le  commencement  du  eamtnho  do  Rio  Prtto  et  passe 
auprès  de  l'habitation  d'iibà.  Déjà,  depuis  longt^nps,  ce 
dernier  chemin  était  indiqué  par  un  sentier  fréquenté  uni- 
quement par  les  piétons;  on  reconnut  qu'il  serait  moins 
long,  pour  les  habitants  de  S.  Joâo  d'El  Rei,  que  la  grande 
route  de  Villa  Rica,  et,  lors  de  mon  voyage,  il  ;  avait  en- 
viron six  ans  qu'il  était  entièrement  ouvert  au  public.  Ce- 
pendant ,  comme  le  seul  avantage  de  gagner  qudques 
jours  n'eût  pas  décidé  les  conducteurs  des  caravanes  â 
suivre  une  route  qui  ne  leur  offrait  encore  aucune  com- 
modité, on  accorda  une  diminution  sur  le  péage  des  hom- 
mes et  des  animaux  qui  traversent  le  Parabyba  an  regtê- 
lro(l]du  chemin  du  Rio  Preto.  Ainsi  les  bœufs,  qui  payent 
une  pataqne  (S  fr.)  au  regùtro  du  Parabybuna ,  sur  le  che- 
min direct  de  Villa  Rica,  ne  payent  ici  qu'une  demi-pataque  ; 
les  mul^  charf;és,  qui  payent  460  reis  au  Parabybuna  , 

min  do  Uo  Preto,  immidiatemcnt'ta-dessns  de  Tilenç*.  lieu  dont  je 
(Mrlerai  bienlAL  C'est  la  jonts  du  commerce  de  Rio  de  Juniro  ijunta 
doromniercio)qaiir«iibirececbeoiîii.  M,  poar  ceUe  ni»oii,  oa  l'ap- 
pelle eaminho  do  eommereio,  od  bien  encore  oa  lui  douoe  le  ttom  de 
caminAo  noco,  extrada  nom.  On  j  trataillail  encore,  en  1819,  lorsque 
je  sulvaii  le  cafnJnfto  do  Rio  Prtto  :  c'est  depuis  celte  époqoe  qu'il  a 
m  permis  d'y  passer,  et  il  est  assez  Traiaemblable  qu'alors  od  aura  fermé 
nuninho  do  Rio  Prelo,  poar  ne  pas  mnlIipLer  les  lieui  de  péage. 

(1)  Od  doone  ce  nom  aux  lien  oà  l'on  acquitte  les  droits  dus  i  l'ÉUt 
et  où  l'oD  demande  lea  pasae-porls.  (Vojei  le  Vonaçe  data  Um  provitwm 
de  Rio  de  Janeiro,  etc..  I,  00.) 


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M  VOYAGE  AUX  SOURCES 

en  payent  ici  80,  et  les  hommes  n'ont  égatement  à  donner 

que80reis(18i9). 

Il  rallait  qn'oD  trouvAt  sur  cette  route  de  tels  avantages 
pour  qn'elle  ne  restât  pas  déserte,  car  elte  est  tnfinnnent 
plus  difficile  que  le  chemin  direct  de  Villa  Rica  ;  eHe  n'est 
point,  comme  ce  dernier,  bordée  d'an  grand  nombre  d'ha- 
bitations, ievmdas,  àeranchoi;  les  ressources  y  wnt  en- 
core moins  multipliées,  et  le  maïs,  indispensable  aux  mu- 
lets, y  manque  presque  partout.  Le  caminho  do  IHo  Preto 
me  montra  ce  que  devait  être  la  grande  route  de  Villa  Rica , 
peu  de  temps  après  la  découverte  de  la  province  de  Minas 
Geraes.  Traversant  le  réseau  de  montagnes  qui  s'étend  de  la 
chaîne  maritime  à  la  chaîne  intérieure  (Serra  doEspinbaço), 
il  doit  nécessairement  présenter  de  grandes  in^lités,  et, 
comme hrégiondes  (or Ai  comprend  toat  l'espace  renfermé 
entre  les  deux  chaînes ,  on  ne  sort  de  cette  r^on ,  ainsi 
que  cela  a  lieu  sur  la  route  de  Villa  Rica ,  et  l'on  n'entre 
dans  la  région  des  campos  (1)  qu'après  avoir  passé  la  Serra 
da  Mantiqueira ,  partie  méridionale  de  la  plus  occidentale 
des'  deux  dialnes. 

Sur  le  chemin  du  Rio  Preto,  je  rencontrai  très-peu  de 
troupes  de  mulets  chargés  de  marchandises;  mais,  en  re- 
vanche ,  un  grand  nombre  de  cochons  et  de  bœufs.  C'est 
par  ce  chemin  que  l'on  fait  passer  presque  tous  les  trou- 
peaux de  bëtes  à  cornes  que  l'on  mène  à  Rio  de  Janeiro 
de  la  partie  occidentale  de  la  province  de  Minas ,  où  l'on 
(1)  Ltrégion  d«i  forétt  sVteiid  t  p«a  près  dcpais  U  mer  jnsqn't  b 
chitne  iDléneate  (Serra do Espiobacv):  l>  région  de*  eampoi  corn- 
mente  à  l'oaest  de  la  mtme  cIuIm.  Od  peut  Toir  des  déuib  sur  ces  râ- 
gioos  et  learg  limites  daps  mou  tiAteau  dt  la  vigéuaum  ût  la  pro- 
vinet  de  Minoë  Geroêt,  imprimé  dios  les  Annale»  det  lelenret  noAt- 
reltet,  vol.  XXIV,  p.  G4  et  auir. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  23 

élève  beaucoup  de  bétail.  Pour  ces  animaux  ,-  on  n'a  pas 
besoin  des  commodités  qu'exigent  les  caravanes  de  mulets» 
et,  en  les  conduisant  par  cette  route,  on  jouît  du  double 
avantage  de  payer  des  droits  moins  élevés  et  d'abréger  te 
voyage.  Comme  on  ne  pourrait  embarquer  les  bœuË  et  tes 
cochons  sans  des  frais  probablement  très-considérables,  on 
leur  foit  prendre  le  cbemin  de  terre  à  Pao  Grande,  et  ils 
passent,  avantd'arrîveri  Rio  de  Janeiro,  par  la  Serra  da 
Viuva ,  Aguassû  et  Iraj  (1). 

Les  bœuft  sont  envoyés  à  la  capitale  [Mir  des  marchands 
du  sud-ouest  de  ta  province  des  Mines ,  qui  les  achètent 
dans  les  fazendtu.  Ces  marchands  conGent  la  direction 
entière  d'un  troupeau  de  bœu&  et  la  vente  de  ce  bétail  à 
des  hommes  qu'on  appelle  eapataxeg,  et  qui ,  m'a-t-ou  dit, 
sont  très-bien  payés.  Le  capotez  a  sous  lui  des  loucfaeurs, 
et  chacun  de  ceux-ci  est  chargé  de  ta  conduite  de  vingt 
bœufs.  On  ne  fait  faire  à  ces  animaux  que  3  lieues  par 
jour;  mais,  jusqu'à  leur  destination,  on  ne  les  laisse  point 
reposer,  tandis  qu'on  a  coutume  de  faire  marcher  une  jour- 
néeetde  laisserpattre  le  lendemain  tes  bestiauiquel'oncon- 
duit  du  sertâo  (désert]  oriental  de  Minas  à  la  ville  de  Bahia. 

Les  hommes  qui  mènent  les  bœub  et  les  cochons  de 
la  comarca  (â)  du  Rio  das  Mortes  à  Rio  de  Janeiro 

(1)  Comme  j«  l'ai  ditpltisluiit,  je  suivis,  en  1822,  dd  diemiD{ea- 
wtinhodoeimmeTcio)qni  retombait,  i  Uf^nlé,  t  Agnassii,  nwiaqni, 
•n  lien  de  traverser  U  Serra  da  Tinn ,  pasMîl  par  une  antre  partie  de  la 
efaatne ,  à  laquelle  on  a  doiué  U  nom  de  Strra  da  Eitrada  fîova ,  em- 
pranié  an  cberaiD  lui-mime.  En  18ï2,  c'était  par  ce  dernier  que  pissait 
ime  gnnde  partie  des  bœati  et  des  cochons  que  la  eomarea  da  Rio  das 
HoUcs  fournit  è  Rio  de  Janeiro. 

(1)  Les  eomarcai,  comme  on  a  pu  le  vcur  dans  mes  antres  relations, 
ïonl  les  divisions  de  premier  ordre  dans  plnsievs  provinces. 


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36  VOYAGE  AUX  SODBCES 

se  fou'.,  reconnaître  facilement  à  leur  tournure  et  à 
leur  costume.  Il  y  a  parmi  eux  autant  de  blancs  que 
de  mulâtres.  Comme  on  les  accoutume  de  bonne  heure 
à  de  longues  marches  et  au  régime  le  plus  frugal ,  Ils 
sont  généralement  maigres,  minces  et  asseï  grands.  Leur 
figure  est  étroite  et  allongée;  de  tous  les  Mineiros,  ce 
sont  fux  ,  peut-être,  qui  ont  le  moins  d'expression  dans 
la  physionomie.  Ils  marchent  un  long  bâton  à  la  main, 
les  pieds  et  les  jambes  nus,  et  ont  l'habitude  de  faire  de 
grands  pas.  Leur  tète  est  couverte  d'un  chapeau  à  bord 
étroit,  à  forme  très-haute  et  arrondie  (1819)  ;  ils  ont  une 
chemise  de  toile  de  coton,  dont  les  pans  flottent  par-dessus 
un  caleçon  de  la  même  toile  ;  un  gilet  d'une  étoffe  de 
laine  grossière  complète  leur  costume. 

Je  reviens  au  détail  de  mon  itinéraire.  Entre  Ubà  et  le 
Parahyba,  qui  n'est  qu'à  trois  quarts  de  lieue,  j'eus  encore 
le  plaisir  d'entendre  le  ferrador  ou  araponga  (casman/n- 
chos  nudicollis)  (Ij.  Le  chant  de  cet  oiseau  n'est  point 
agréable  par  lui-même;  mais  il  y  a  un  charme  inexpri- 
mable dans  le  contraste  du  calme  profond  des  forêts  vier- 
ges avec  ces  sons  qui ,  après  avoir  retenti  avec  une  force 
surprenante ,  s'affaiblissent  en  se  prolongeant  et  recom- 
mencent par  intervalles. 

BientAt  j'arrivai  sur  les  bords  du  Parahyba ,  à  l'endroit 
appelé  i'orfo  (port) ,  où  l'on  passe  le  fleuve.  Ce  dernier  peut 

(t)  Od  ■ ,  je  croig ,  écrit  quelque  part  uruponga  ;  mais  le  mot  ara- 
ponga est  coDMcré  par  le  dicttoDuiire  portugais  de  Horaes  ;  d'ailleurs 
wn  étjiDDlogie  est  asseï  claire,  comme  on  peut  le  voir  dans  ma  teeondt 
nlatitm,  toI.  II ,  64.  J'ai  encore  p«rl6  de  Varaponfa  ou  ferrador  daos 
la  même  relation  ,  vol.  I ,  lOT,  et  dans  la  premiire ,  vol.  1 ,  17.  Le  ftr- 
radoT  eet  aujourd'hui  trop  bien  coddu  pour  qu'il  soit  nécessaire  de  dire 
que  ce  n'est  point  une  grenouille ,  comme  l'a  cru  H.  Wabh. 


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DD  MO  DB  S.  FRANCISCO.  37 

avoir  ici  un  peu  moins  de  largeur  que  le  Loiret  à  quelque 
distance  du  pont  d'Olivet  ;  il  serpente  entre  des  montagnes 
peu  élevées ,  couvertes  de  bois  touffus ,  qui ,  en  certains 
endroits,  ont  été  remplacés  par  des  plantations  de  maïs. 
Ses  eaux  coulent  avec  rapidité,  et  des  roches  grisâtres  s'é- 
lèvent çA  et  là  au-dessus  de  leur  surface.  On  ne  voit ,  sur 
les  deux  bords ,  d'autres  places  découvertes  que  celles  où 
l'on  s'embarque  quand  on  passe  le  fleuve  (1819).  Sur  la 
rive  droite  est  une  modeste  vmda  avec  un  petit  rancho  ; 
mi  la  rive  gauche ,  la  maison  du  péage ,  dont  le  toit  cou- 
vert s'avance  pour  former  une  varanda  (galerie)  (1). 

Dans  le  moment  où  j'arrivai ,  les  deux  bords  du  Fara- 
hjba  étaient  couverts  de  bœuts  ;  quelques-uns  se  trouvaient 
d^i  sur  te  rive  droite ,  et  l'on  était  occupé  à  faire  passer 
les  autres.  Des  nègres  armés  de  grandes  gaules  et  poussant 
des  cris  affreux  forçaient  les  bœufs  à  entrer  dans  le  fleuve; 
mais  à  peine  ceux-ci  étaient-ils  dans  l'eau ,  qu'ils  (dier- 
chai^t  à  revenir  but  le  rivage,  malgré  les  coups  que  leurs 
conducteurs  bisaient  pleuvoir  sur  eux,  malgré  les  pirogues 
dont  on  se  servait  pour  leur  barrer  le  passage.  Au  lieu 
d'avancer  vers  l'autre  bord,  ces  animaux  tournoyaient  dans 
l'eau,  en  se  précipitant  les  uns  sur  les  autres,  et  ce  ne  fut 
qu'avec  des  peines  incroyables  qu'on  parvint  k  les  faire 
passer  tous.  Les  bœub  qui  viennent  de  fort  loin,  et  qui  ont 
déjà  rencontré  quelque  rivière,  traversent  celle-ci  sans  dif- 
Soilté;  mais  il  en  coule  toujours  beaucoup  pour  forcer  ces 
animaux  à  passer  l'eau  une  première  fois ,  et  alors  il  s'en 
noie  souvent. 

(I)  J'ai  donné  dans  ma  pretniire  relation  une  eiplicalion  dftaillM 


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iS  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Ici  il  n'y  a  point  de  bac;  oa  sa  sert  de  pirogues  con- 
duites par  deu\  nègres.  Pendant  quelque  temps,  le  péage 
avait  été  affermé;  mais  ensuite  on  l'a  perfu  directement 
pour  le  compte  du  fisc,  et,  lors  de  mon  voyage,  il  rendait 
annuellement  de  13  à  30,000  cruzades.  La  garde  préposée 
an  registro  se  composait  seulement  d'un  caporal  et  de  trots 
soldats  de  la  garde  nationale  (milicia). 

Ce  n'était  pas  la  première  fois  que  je  me  trouvais  au 
Porto  du  Parahyba;  j'avais  déjà  visité  ce  lien  ,  lorsqu'on 
1816  j'habitais  la  fazmda  d'Ubi.  Un  parent  de  M.  Joâo 
Rodrigues  Pereira  de  Almeida,  qui,  an  jour,  voulut  goiïter 
le  plaisir  de  la  chasse,  m'engagea  à  l'accompagner.  Nous 
commençAmes  par  passer  la  rivière,  et  à  peine  fûmes-nous 
dans  la  forêt  que  les  chiens  firent  partir  un  cerf  (veado)  ; 
celui>cj  s'élança  dans  l'eau  et  la  traversa.  Nous  repassâmes 
de  l'autre  c4té  du  fleuve  dans  une  pirogue;  là  je  m'assis 
sur  un  rocher  et  me  mis  i  contempler  les  lieux  qui  m'en- 
touraieut.  Au  Porto,  le  paysage  est  animé  par  la  présence  de 
l'homme;  ici  la  nature  n'avait  rien  perdu  de  sa  physiono- 
mie primitive.  Un  détour  que  Tait  la  rivière  me  dérobait 
la  suite  de  son  cours,  et  ce  que  j'en  pouvais  découvrir  sem- 
blait un  lac  allongé  entouré  de  forêts  vierges.  Les  eaux 
baignaient  le  pied  de»  grands  arbres,  tandis  que  diverses 
espèces  d'oiseaux  aquatiques  planaient  au-dessus  d'elles. 
Des  rochers  noirâtres,  qui  s'élevaient  de  leur  lit,  augmen- 
taient la  vitesse  du  courant ,  et  la  rapidité  de  la  rivière 
contrastait  avec  l'immobilité  des  aii>res ,  dont  le  feuillage 
n'était  agité  par  aucun  vent. 

A  cette  heureuse  époque ,  je  pouvais  me  livrer  tout  en- 
tier à  la  contemplation  des  beautés  de  la  nature.  Lorsque 
je  revi.-;  le  Porto  du  Parahyba ,  il  n'en  était  plus  ainsi  :  les 


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DO  MO  DE  S.  nuNasco.  » 

embarras  du  voyage ,  et  surtout  les  chagrins  que  me  fai- 
saient éprouver  ceux  qui  m'accompagnaient ,  troublaient 
Mns  cesse  mes  plus  douces  jouissances. 

Je  partis  fort  tard  du  Porto  du  Parahyba.  Comme  il  n'y 
I  point,  en  cet  endroit,  de  véritables  pâturages,  les  mulets 
sont  obligés  de  se  contenter  du  peu  d'herbes  qui  crott 
auprès  de  la  maison  du  registro  ;  aussi  trois  des  miens,  mé- 
contents de  ce  régime ,  avaient  passé  la  rivière  et  étaient 
retournés  à  Ubi;  il  fallut  les  y  aller  chercher,  et  cela  prit 
on  temps  considérable. 

Je  finis  cependant  par  me  mettre  en  route.  Immédiate- 
ment après  avoir  quitté  le  Parahyba,  je  me  dirigeai ,  par 
une  pente  roide,  vers  le  sommet  de  la  montagne  qui  Re- 
lève derrière  le  rtgitln  ,  et ,  pendant  très-longtemps ,  je 
continuai  à  monter.  Le  chemin  que  je  suivis  ce  jour-là  est 
on  des  plus  affreux  que  j'eusse  vus  pendant  mes  voyages  ; 
il  eût  certainement  été  impraticable  après  une  pluie  de 
quelques  jours.  Ses  deux  cAtés  n'ont  point  été  dégarnis 
d'arbres,  comme  la  roule  de  Villa  Rica;  il  a  peu  de  lar- 
geur, et  les  bois  touDto  qu'il  traverse  y  donnent ,  à  toutes 
les  heures  du  jour,  un  ombrage  épais,  qui  nécessairement 
doit  y  entretenir  une  fâcheuse  humidité.  Presque  partout, 
les  boeufo  avaient  formé ,  par  leur  marche  régulière ,  des 
éminences  et  des  fosses ,  qui  se  succédaient  alternative- 
ment, et  ces  dernières  contenaient  une  boue  épaisse  dans 
laquelle  enfonçaient  profondément  les  bâtes  de  somme. 
Ce  n'est  pas  tout  encore  :  des  troncs  d'arbres  renversés, 
de  grosses  racines  qui  rampaient  sur  la  terre  faisaient  sans 
cesse  trébucher  les  mulets  ou  les  arrêtaient  dans  leur 
marche. 

Mais  si  je  ne  pouvais  faire  un  pas,  dans  les  sombres  fo- 


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30  VOYAQE  AUX  SOURCES 

rets  que  je  parcourais  alors,  sans  trouver  de  nouvelles  dir- 
ficultés,  d'un  antre  cAté  elles  m'offraient,  k  chaque  pas, 
des  sujets  d'admiration.  Les  arbres  dont  elles  étaient  for- 
mées avaient  tant  de  vigueur,  ils  étaient  tellement  garnis 
de  feuilles,  qu'en  plusieurs  endroits  il  ne  croissait  au- 
dessoas  d'eux  qu'un  très-petit  nombre  d'arbrisseaux,  oe 
qui,  dans  ce  pays,  est  assez  rare.  J'étais,  à  cette  époque, 
bien  accoutumé  aux  bois  vierges,  et  cependant  je  ne  pou- 
vais m  traverser  sans  les  contemi^er  avec  ravissement. 
Quelle  richesse  de  végétation!  quelle  pompel  quelle  ma- 
jesté! que  de  variété  dans  les  formes!  que  de  beautés  dans 
les  contrastes!  Comme  le  feuillage,  composé  des  Mimoses, 
fait  ressortir  la  simplicité  des  Palmiers!  comme  les  ra- 
meaux d'une  Myrtée ,  couverts  de  petites  feuilles ,  parais» 
■eut  délicats  et  Dexibles  auprès  d'un  Cecropia ,  qui  étale 
quelques  branches  roides  en  forme  de  candélabre!  Dans 
quel  délicieux  recueillement  l'on  tombe  au  milieu  du  calme 
profond  de  ces  forêts,  qui  n'est  troublé  que  par  la  vois 
retentissante  du  ferrador  ou  le  bruit  de  quelque  torrent  I 
Parmi  les  arbres  qui  croissent  dans  les  bois  voisins  du 
Parahyba ,  je  vis  avec  un  nouvel  étonnemeni  celui  qu'on 
appelle  le  Cipô  matador  (la  Liane  meurtrière)  (i).  Il  atteint 
i  peine  la  grosseur  de  la  cuisse  et  est  presque  ^1  dans 
toute  sa  longueur;  cependant  il  s'élève  Ji  SO  ou  60  pieds, 
mais  on  ne  le  vott  jamais  isolé  ;  il  se  presse  contre  quelque 
arbre  plus  gros  que  lui,  et  il  l'embrasse  étroitement  i  l'aide 
de  racines  aériennes  qui  partent  de  sa  tige  et  qui,  simples 
A  leur  naissance,  se  divisent,  se  subdivisent  et  se  terminent 


(1)  Vojtt  moii  vogagt  Oant  let  prov^uet  et  Ko  tle  Janeiro ,  etc., 
1,14. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  31 

par  un  chevelu  fortement  collé  à  l'arbre  voisin.  Cette  Liane 
singulière  est  couronnée  par  un  petit  nombre  de  branches 
écartées;  mais  celles-ci  se  partagent  en  une  multitude  de 
rameaux  délicats  et  pressés .  qui  portent  des  feuilles  en- 
tières, oblongnes- lancéolées  et  assez  petites,  autant  du 
moins  que  je  pus  en  juger  à  la  distance  où  il  m'a  été  per- 
mis de  les  apercevoir  [\). 

Après  avoir  fait  S  lieues  dans  les  sombres  forêts  du 
Parahyha,  je  m'arrêtai  au  lieu  appelé  Forqwlha  (fourche). 
Là  se  trouve  une  maisonnette  devant  laquelle  est  le  rancho 
des  voyageurs ,  couvert  de  feuilles  de  Palmier  et  soutenu 
par  des  troncs  d'arbres.  Ces  humbles  bAtiments,  entourés 
de  palissades ,  sont  construits  sur  une  petite  plate-forme 
au-dessous  de  laquelle  coule  un  ruisseau ,  et  qui ,  de  tous 
les  c6tés,  est  dominée  par  des  montagnes  couvertes  d'é- 
paisses forêts.  Cependant,  à  travers  les  arbres,  j'apercevais 
pinsienrs  vastes  plantations  de  mats  qui  dépendaient  de 
l'habitation.  Les  terres  me  parurent  bonnes,  et  le  proprié- 
taire on  celui  qui  le  représentait  me  dît  qu'effectivement 
le  manioc,  le  riz,  les  haricots,  la  canne  à  sucre  y  réussis- 
saient bien,  mais  que  le  maïs  n'y  rendait  que  80  pour  1. 

Au  Porto  da  Parahyba  ,  à  six  heures  du  matin  ,  le  ther- 
momètre de  Réanmur  avait  été  à  20  degrés ,  et  le  lende- 
main à  la  même  heure,  à  Forquilha  (le  7  février) ,  il  n'était 

(1)  Un  touriste  qui  parcoarait,  ai  IMS,  l'Amënqne  portn^aÎM  ■ 
£l  (  Sdz-,  Souv.,  278  )  que  ■  ttaverseî  des  bois  vierges  était  pour  1m 
Brjsilieiis  dd  sajet  d'eftroi.  •  Il  n'est  pas  ï  ma  connaissaDce  qn'ancan 
antre  écriraÎD  ait  parlé  de  cette  ftajear,  et ,  duia  le  ronrs  de  mes  longs 
TOjages,  perecMUM  a'en  a  donné  derant  moi  le  nMindre  ûgne.  Si  les 
colons  répnmvent ,  on  grand  nombre  d'entre  eai  ont  été  bien  mal  avi- 
sés et  doivent  être  bien  malbeureni,  car  c'est  dans  les  bras  vierges 
qa'ila  ont  Ûii  leurs  demeures. 


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n  VOYAGE  «ox  somcES 

qu'à  ilàegTési!^.  Cette  différence  de  température  tenait 
sans  doute  i  celle  des  hauteurs ,  car,  depuis  le  Parahyba, 
j'avais  toujours  monté.  En  quittant  Forquilha  ,  on  monte 
encore ,  dans  un  espace  de  1  lieue  ,  jusqu'à  une  fazenda 
appelée  José  FratKÙco,  du  nom  de  son  propriétaire. 

Entre  Forquilha  et^oagutni  Mareos,  habitation  dont  je 
parlerai  bientôt,  les  bords  dn  chemin ,  dans  la  plus  grande 
partie  de  son  étendue ,  avaient  été  dégarnis  des  grands  ar- 
bres; en  d'autres  endroits ,  où  l'on  avait  autrefois  cultivé 
la  terre .  il  n'existait  plus  que  des  taillis.  C'était ,  pour  la 
conservation  du  chemin ,  un  graod  avantage  ,  sans  doute  ; 
mais  le  défaut, d'ombrage  rendait  la  chaleur  si  forte, 
qu'ayant,  une  heure  après  la  cliute  du  jour,  tiré  mon  ther- 
momètre de  ma  malle,  je  le  trouvai  à  28  degrés,  tant  celle- 
ci  avait  été  échaufTée  par  les  rayons  du  soleil . 

La  fœtenda  de  José  Francisco  ,  dont  j'ai  déjà  dit  quel- 
ques mots,  possède  un  moulin  à  sucre  ;  mais  on  n'y  em- 
ploie le  vesou  qu'à  faire  de  l'eau-de-vie,  ce  qui  a  lieu  ches 
tous  les  propriétaires  peu  riches,  parce  que  cette  fabrica- 
tion exige  moins  de  bras  et  de  travail  que  celle  du 
sucre. 

Ayant  passé  la  fazenda  de  José  Frandseo  ,  j'allai  faire 
halte  à  celledeJoaçutmJfarcot  (nom  d'homme],  située  à 
4  lieues  de  Forquilha;  j'y  demandai  si  l'on  avait  du  maïs  à 
me  vendre  :  on  m'en  refusa  d'abord;  mais  à  peine  meflis- 
je  recommandé  de  Joào  Rodrigues  que  l'on  mit  à  ma  dis- 
position tout  ce  que  je  désirais.  II  n'est  pas  étonnant ,  au 
reste,  que  l'on  eût  commencé  par  me  faire  essuyer  un  re- 
fiis  ;  les  propriétaires  craignaient  alors  de  se  défaire  de  leur 
maïs  ,  parce  que  le  manque  d'eau  avait  fait  le  plus  grand 
tort  à  ce  grain;  j'avais  vu  moi-même,  du  c4tédeCavenca, 


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DU  EUO  DE  S.  FfurfCISCO-  33 

entre  Eocruzilhada  et  Ubâ,  de  grandes  plantations  de  maïs 
entièrement  desséchées. 

Dans  les  terres  du  canton  où  est  situé  Jottquini  Marcos  , 
le  maïs  rend  1 SO  pour  i .  Elles  produisent  aussi  le  manioc, 
les  haricots  ,  la  canne  à  sucre  et  les  caféiers  ;  mais  mon 
hdte  me  dit  que  la  gelée  faisait  souvent  beaucoup  de  tort 
aux  derniers  de  ces  végétaux ,  ce  qui  suffirait  pour  prou- 
ver combien  le  pays  est  plus  élevé  que  Rio  de  Janeiro. 

Quant  à  ma  récolte  de  plantes,  j'étais  bien  loin  de  pou- 
voir en  être  satisfait.  Je  n'avais  jamais  trouvé  aussi  peu 
d'espèces  en  fleur  que  pendant  ce  voyage;  mais  nous  étions 
en  février,  et  l'on  me  dit ,  h  Forquilha ,  que  le  mois  d'août 
était  celui  oii  l'on  voyait  fleurir  le  plus  grand  nombre 
d'arbres  (i). 

Je  traversais  alors  les  bois  oi!i  le  bon  José  Rodrignes  da 
Cniz ,  oncle  de  Joâo  Bodrigues  Peireira  de  Almeida,  avait 
naguère  exercé  son  zèle  pour  le  bonheur  des  Coroados  (2)  ; 
et  probablement  même  le  chemin  du  Rio  Preto  n'est-il 

(DAintiqaej'aieDroccasioDdeleinoQtreriillears,  ilB'eDraulbiea,  en 
féotral,  qa'oD  trODve  daiu  les  bois  viorges  mUat  de  fleurs  qu'on  te  l'i- 
D^iiie  en  Europe.  ■  Ouu  les  forêts  primitiTes  des  contre  Équinoiiales, 

•  «i-je  dit ,  il  e«t  des  arbres  qui  Denrisseot  très-rarement ,  parce  que  la 
■  T#gélation ,  sans  cesse  eicitée  par  l'huinidité  et  la  cbaleur,  éprouve , 

•  soos  ces  heureux  climats ,  des  repos  fort  rares ,  et  qu'elle  Ta  se  cooU- 

•  nvHit  toujours  avec  nue  égale  rigoenr,  taudis  que  la  fleur  u'est  tiel- 

•  iement  que  la  dernière  production  d'une  vie  qni  s'épuise  et  va  finir.  " 
{Morphologie  végélale,  36.) 

(3)  II  est  bon  d'ajouter  au  nom  de  ces  Coroados  celai  d'aue  rivière 
qo)  coule  dans  leor  pajs,  le  Rio  Bonilo ,  et  de  les  appeler,  comme  je 
l'ai  hit  dans  ma  pr#ml^«  relolton ,  les  Coroado*  du  Rio  Bonilo.  Par 
ce  mojen,  on  empêchera  qn'ou  ne  les  confonde  avec  les  Coroados  de 
Hatogroseo,  avec  ueui  de  Saiot-Panl,  on  encore  avec  les  Coroados  du  Rio 
CbipoU  dont  s'est  occupé  le  bon  Harlière ,  et  sur  lesquels  les  savants 
Spii  et  Hartins  ont  publié  d'intéressants  détails, 

I.  3 


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M  TOTACE  AUX  S 

autre  chose  qu'un  élargissement  de  la  percée  qu'arait  hit 
faire  cet  homme  généreux  pour  porter  des  secours  i  ses 
chers  Indiens  (1).  1]  y  a  i  peine  cinquante  ans ,  eux  seuls 
possériaient  cette  contrée,  où  aucun  blanc  n'aurait  eu,  sans 
doute,  la  hardiesse  de  se  montrer;  et,  lors  de  mon  voyage, 
c'était'au  milieu  des  enfants  des  Portugais, devenus  maîtres 
dn  pays,  qu'erraient  les  faibles  restes  de  leur  nation.  Déjà, 
entre  Forquilha  et  Joaquim  Marcos,  j'avais  trouvé,  au  pied 
d'un  arbre,  deux  Indiennes  assez  mal  vêtues,  auprès  des- 
quelles  était  un  gros  paquet  d'écorce  verte  dont  elles  se 
proposaient  de  tirer  de  l'étoupe.  Avant  de  quitter  la  ^- 
zenda  de  Joaquim  Marcos ,  je  vis  passer  un  homme  et  une 
femme  de  la  même  race.  L'Indienne  était  vêtue  d'une  jupe 
et  d'une  chemise  de  toile  de  coton  grossière,  comme  le 
sont,  en  général ,  dans  ce  pays  ,  les  femmes  pauvres  de  la 
campagne;  l'Indien  ne  portait  qu'une  chemise  et  tenait  à 
la  main  son  arc  et  une  poignée  de  flèches.  Celui-ci  parlait 
assez  bien  le  portugais ,  et  j'appris  de  lui  qu'il  était  venu , 
étant  encore  enfant,  du  Rio  da  Pomba  (rivière  de  la  co- 
lombe), que  sa  nation  portait  le  nom  d'Emwrim  (2) ,  et 
qu'il  vivait ,  depuis  un  grand  nombre  d'années  ,  dans  les 
forêts  des  alentours,  au  milieu  des  Coroados. 

Le  nom  A'Aldea,  donné  alors  (1819)  à  un  hameau  que 
je  rencontrai  à  une  demi-lieue  de  la  fazmda  de  Joaquim 

(I)  Voyei  mon  roj/age  dan*  Ut  prfninett  dt  R(o  de  Janeiro ,  etc., 
1,43. 

(!)  SelOD  Spii,  Hartiuset  Eschwege,  les  bords  do  Rio  da  Pomba,  l'oD 
des  ifOiieiits  du  Pirahjbi,  soot  bthUéa  par  la  petite  natioa  des  CoTOpèt. 
Od  peut,  avec  quelque  vraisemblance,  Sonpçonoer  que  les  Etmurim 
liaient  aoe  sabdirisioa  de  cette  nation  :  car  Escbwege  dit  qu'uu  grand 
iKHnbre  de  Corop6s  avaient  quitté  leur  pay »  pour  passer  dans  la  prO' 
vince  de  Rio  de  Janeiro. 


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DU  tlO  DE  S.  FRANCISCO.  SA 

Harcos ,  seraUait  indiquer  que  f  y  trouverais  ud  grand 
nombre  d'Indiens  (1) ,  car  c'est  ce  nom  que  les  nouveaux 
possesseurs  du  Brésil  appliquent  (S)  aux  villages  des  iadi- 
gènes;  mais,  dès  l'époque  démon  voyage,  des  descendants 
de  Portugais  étalent  les  seuls  habitants  de  l'Aldea. 

Avant  1800,  ce  hameau  n'existait  pas  encore.  Alors  les 
Coroados,  mitftres  du  pays  situé  entre  le  Parahyba  et  le  Rio 
Preto ,  faisaient  de  fréquentes  incursions  sur  le  territoire 
des  paroisses  voisines;  mais,  d'après  les  ordres  de  Lciz  dk 
Vascohcellos  b  Souza,  Tice-roi  de  Rio  de  Janeiro,  ils 
forent  en&n  repousses,  en  1789,  par  le  capitaine  Ignatio 
dbSocu  Wauieck.  Le  vice-roi  eut  l'idée  de  profiter  de 
cette  circonstance  pour  civiliser  ces  Indiens,  et  il  chargea 
de  cette  commission  Wameck  et  José  Rodrigues  da  Cnu, 
qui  était  connu  d'eux  par  ses  nombreux  bienfaits,  et  dont 
j'ai  déjà  parlé  plus  haut.  Tout  concourut  à  faire  obtenir  le 
résultat  désiré ,  qni  était ,  dit  bien  sérieusement  Pizarro , 
«  de  faire  entrer  tant  d'infidèles  dans  le  sein  de  l'Église , 
et  de  réunir  à  l'État  un  peuple  nombreux,  en  t'emparatU 
dei  torts  qtt'H  occupait  tans  le  moindre  avantage  pour 
l'agriculture.  »  Un  prêtre  fut  chargé  d'instruire  les  pauvres 
Coroados  (3),  et  l'on  fonda  pour  eux  une  aidée  assez  con- 

(1)  On  Ter»  loot  à  fbeare  que  U  rille  de  Valença  n'est  autre  chose 
qne  l'&ldea. 

0}  Ed  Poriugal ,  cm  désigne  tout  village  par  le  mot  aldea  (fojei  ma 
pramiA-f  relation,  vol.  1,  13). 

(3)  Le  nom  de  Coroadoa  est  le  seul  qni  se  traave  dans  les  Vamorfot 
lUtlorieiu  dePiurro  (vol.  V,  388),  et  c'est  aussi  le  senlgui  soit  admis 
dans  le  pays  par  les  Br^i  liens-Portugais.  11  ne  faut  pas  oublier  «peo- 
dant  que  ce  nom  est  on  rentable  sobriquet  emprunté  à  la  langue  porta- 
gaiae,  el,  par  conséquent,  les  tribus  auxquelles  on  l'a  appliqué  devaient 
rteUanent  en  porter  d'autres.  Tai  appris  cbei  les  Indiens  qui  Tivaient  h 
qnelqaes  lieues  de  Tildes  que  leur  nation  se  composait  de  deux  peu- 


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3a  VOYAGE  AUX  SOURCES 

sidérable,  i  laquelle  od  donna  le  nom  à'Aldea  de  Noua 
Smhora  da  Gîorùi  de  Vcdença ,  en  l'bonnear  du  vice-roi 
d'alors,  Fehsando  José  oe  Pobtdgal,  qui  était  de  la  Ta- 
mille  des  Valença.  Mais  bientôt  des  colons  portugais  vin- 
rent se  mêler  aux  Indiens,  et  aujourd'hui,  comme  je  l'ai  dît, 
l'aldea  n'est  plus  habité  que  par  ces  derniers  (1).  En  1843, 
José  Caetako  da  Silva  Codtinho,  évéque  de  Rio  de  Ja- 
neiro, visita  l'aldea  de  Valença  ;  il  crut  devoir  en  faire  le 
cheMieu  d'une  paroisse  à  laquelle  il  assigna  pour  limites  le 
Parahyba,  le  Rio  Preto,  la  paroisse  de  S.  Anna  do  Piraky, 
et  celle  de  la  Cmceçàio  da  Parahyba  Velha;  et,  au  mois 
d'août  1817,  le  roi  confirma  définitivement  les  arrange- 
ments pris  parl'évèque  (3]. 

Lors  de  mon  voyage,  en  1819,  l'Àldea,  qui  est  situé 
dans  une  petite  plaine  entourée  de  montagnes  boisées ,  se 
composait  seulement  d'une  vingtaine  de  maisons  ,  dont  la 
plupart  n'étaient  pas  encore  entièrement  bâties  et  dont  les 
plus  anciennes  ne  dataient  guère  que  d'une  domaine  d'an- 

pbdes  réonies,  les  Tamprun*  el  les  SararieS a  {wojtx  rnoo  Foyof* 
^n*  k$  province*  (te  Rio  (i«  Janeiro,  etc.,  toL  1,41);  mais  Cual  et 
Walsh,  après  Ini,  ont  écrit  que  la  populatioD  de  l'Aide*  de  Valeaçi  as 
composait  de  quatre  hordes  :  les  PNrft,  les  Ararye,  les  PiMatetles 
ChwneUo*.  —  La  manière  doot  j'écris  ici  le  mot  SararieOet  serrira  k 
rectifier  deai  fautes  d'impression  fort  grares  qui  se  sont  introduites 
dans  ma  prnnMre  relation ,  h  la  p^e  indiquée  plus  hanU 

(1)  H  est  clair  qae  l'on  aindnil  en  erreor  HH.  Spiiet  HarLius,  lors- 
qu'on leur  a  dit  qae  l'établissement  d'une  colonie  suisse  dans  les  euTi- 
roos  de  Rio  de  Janeiro  arait  tait  déserter  ani  Indiens  l'Aldea  de  Valençi  : 
cette  eolonie,  en  eflét ,  n'existait  pas  encore  au  conunencemeot  de  1819, 
époque  de  mon  voyage,  et  déjk,  comme  je  le  dis  ici,  il  n'y  avait  plus,  à 
Taleii{4i ,  que  des  descendants  de  PoriDgais. 

(3)  Les  détaib  historiqnes  qne  je  donne  id  sur  Talents  sont,  pour 
ainsi  dire,  tous  empruntas  i  Piiarro  (Tojei  Memoriat  hittoricat , 
V,  289). 


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DO  BIO  DE  S.  FBAnClSCO.  37 

aéra  (1).  Ces  maisons,  écartées  les  unes  des  autres,  avaient 
un  aspect  fort  misérable,  et  plus  de  la  moitié  était  de 
chétives  vendas ,  où  l'on  trouvait  à  peine  quelques  bou- 
teilles d'eau-de-vie  de  sucre.  Alors  l'Aldea  n'avait  point 
encore  d'église  proprement  dite,  et  le  cnré  était  obligé  de 
célébrer  la  m^se  dans  une  humble  chapelle.  Trois  ans  plus 
tord,  en  4832,  je  repassai  par  le  même  lieu.  Dans  l'inter- 
valle ,  les  terres  des  alentours  s'étaient  peuplées  un  peu 
davantage;  on  comptait,  dans  le  village,  une  soixantaine 
de  maisons  et  l'on  était  occupé  à  y  construire  une  petite 
église  en  pierre  (3].  Ces  augmentations  n'étaient  pas  encore 
bien  considérables;  cependant  l'Aldea  était  devenu,  sous 
le  nom  pompeux  de  Villa  de  Valença,  le  chef-lieu  d'un 
termo  [S],  qui  s'étend,  comme  le  territoire  paroissial,  de- 
puis le  Parabyba  jusqu'au  Rio  Preto. 

On  ne  sera  pas  fliché,  je  pense,  de  trouver  ce  qu'a  écrit, 
sur  les  m^amorphoses  des  villages  en  villes ,  un  homme 
qui  a  longtemps  vécu  au  milieu  des  Brésiliens ,  et  qui  était 

(1)  Piurro  dit  qu'en  ISU  il  j  avait,  dans  l'Aldea,  119  feai  et 
088  adalies,  sans  coinpter  les  Indiens,  et  il  ajoale  que,  k  l'^oqve 
où  ûitiil  «Kl  lirre.qni  porte  la  date  de  1820,  le  nombre  des  babi- 
laols  allait  josqu'k  1,000.  II  est  k  croire  que ,  par  m»  de  ces  coofaiioiis 
malbenreuseinent  trop  communes  dans  les  Mémorial  hûtorictu,  ou- 
nage  ponrlant  si  remarquable  et  si  utile,  l'auteur  aura  appliqué  an 
seul  Aldea  de  Valence  ce  qu'on  lui  aura  dit  de  la  paraisse  tout  eatiîre. 

(2)  H.  Walsh ,  qui  passa  par  Valenta  vers  le  commencement  de  1829, 
dil  qn't  cetle  Époque  l'église  était  acberée ,  mab  que  la  ville  ne  se 
composait  encore  que  d'une  soiianlaiiie  de  maisons,  et,  par  conséquent, 
n  elle  avait  fait  quelques  progrès  de  ISIB  à  1822,  elle  était  ensuite  restée 
statMfloaîre ,  ce  qu'il  Tant  attribuer  mbs  doute  aux  désavantages  âe  sa 
situation  (vojez  plus  bas,  page  31)  ]. 

(3)  Un  Urmo  est  le  ressort  d'une  justice  de  première  instance  ;  le  chef- 
lien  àm  termo  porte  le  nom  de  villa  (  vUle).  (  Voyez  ma  première  rela- 
tion, 1 ,  3«4.t 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


3»  VOYAGE  ADX  SOOICES 

employé  par  leur  gouvernemeot.  «  Il  a  étédemode,  daos 
«  ces  dernières  années,  dit  M.  d'Ëschewege,  d'ériger  en 
li  villes  les  hameaux  les  (dus  insignifiants.  Mais  c'est  rare- 
u  ment  le  bien  général  qae  l'on  a  consulté  en  foisant  ces 
«  changements  ;  s'ils  devaient  profiter  à  un  petit  nombre 
«  d'individus,  la  plus  grande  partie  des  habitants  avait 

u  presque  toujours  à  en  souffrir Quand  un  village  de- 

V  vient  ville,  il  a  sa  justice  particulière,  et  à  chaque  jus- 
tt  tîce  nouvelle  s'attachent  une  quantité  de  gens  qui  vivent 
tt  aux  dépens  des  citoyens.  La  paix  de  ces  derniers  est 
u  bientdt  troublée  par  l'arrivée  d'une  armée  d'employés 
«  subalternes,  qui  ne  sauraient  subsister  s'ils  ne  trouvaient 
a  des  ressources  dans  les  querelles  qu'ils  ont  le  talent  de 

u  faire  naître Les  hommes  les  plus  tranquilles  et  les 

«  plus  heureux  qu'il  y  ait  au  Brésil  sont  ceux  qui  se  sont 
«  fixés  le  plus  loin  possible  du  chef-lieu  d'une  justice. 
li  S'élëve-t-il  entre  eux  quelque  dispute?  ou  elle  s'apaise 

«  amicalement ,  oubienonsefait  jusUceàsoi-mime, 

«  on  assassine.  C'est  là  de  la  barbarie,  sans  doute;  mais 

«  on  n'y  remédioa  certainement  point  par  la  manière 
K  dont  on  rend  la  justice;  car  de  cette  partialité  qui  fait 
a  le  caractère  des  juges  il  résulte,  presque  toujours ,  que 
«  c'est  le  plus  faible,  le  plus  pauvre  qui  a  tort  :  les  procès 
«  minent  les  familles ,  et  un  projet  de  vengeance  une  fois 
«  formé,  ce  n'est  certainement  pas  la  crainte  de  la  Justice 

«  qui  en  arrête  l'exécution Un  vieillard  de  quatre- 

«  vingts  ans ,  qui  aimait  Dieu  et  ses  semblables,  me  disait 
«  que  souvent  il  avait  changé  de  domicile ,  et  qu'il  choi- 
(f  sissait  toujours  les  lieux  où  n'avait  encore  pénétré  au- 
«  cune  autorité  judiciaire ,  civile  ou  ecclésiastique  ,  non 
«  qu'il  eût  commis  quelque  crime  ,  mats  parce  qu'il  avait 


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DU  RIO  DE  S.  PaiNGlSGO.  30 

M  peur  qu'on  ue  l'en  déclarAt  coupable.  »  {Brasilien  die 
New  Welt. ,  II,  49  j.  H  s'en  laut,  sans  doute ,  que  tout , 
dans  ce  tableau,  soit  dépourvu  de  vérité  ;  mais  on  sent  que, 
lorsque  la  population  d'un  pays  augmente  sensiblement , 
on  ne  peut  l'abandonner  entièrement  à  elle-même ,  pour 
ainsi  dire ,  sans  lois  et  sans  règle ,  et  que  la  laisser  tomber 
ainsi  dans  l'état  sauvage  serait  pire  encore  que  de  lui  faire 
courir  la  chance  d'être  dirigée  par  des  magistrats  corrom- 
pus, qui  pourtant  ne  sauraient,  à  chaque  instant,  s'écarter 
de  ces  règles  et  de  cette  discipline  conservatrice  de  la  civi- 
lisation. 

Quant  à  ce  qui  concerne  Valença  en  particulier,  je  ne 
saurais  dire  si  la  métamorphose  de  ce  hameau  en  ville  pou- 
vait être  justifiée  par  l'éloignement  du  dief-lieu  de  justice 
d'où  il  dépendait  autreFois,  par  des  difficultés  de  commu- 
nication ou  quelque  autre  circonstance;  mais,  ce  qu'il  y  a 
de  certain ,  c'est  qu'on  ne  saurait  donner  pour  motif  de  ce 
changement  ni  l'importance  de  la  population  qui  s'était 
flxée  sur  les  bords  de  la  route,  ni  celle  du  hameau  lui- 
même,  auquel  il  était  véritablement  ridicule  d' appliqua* 
le  nom  de  ville.  A.u  reste ,  si  l'on  croyait  nécessaire  d'en 
avoir  une  dans  ce  canton,  il  me  semble  que  ce  n'était  pas 
Valença  qui  devait  le  devenir;  car  ce  lieu  est  éloigné  des 
rivières  et  l'un  des  plus  tristes  que  j'eusse  vus  dans  la  pro- 
vince de  Rio  de  Janeiro.  C'est  sur  les  bords  du  Parahyba , 
dans  quelque  endroit  où  )a  pente  n'est  pas  trop  rapide 
qu'aurait  dû  être  fondée  la  ville  nouvelle;  une  église  et 
l'eiemption  d'une  partie  des  droits  y  auraient  bientôt  at- 
tiré des  habitante. 

Après  avoir  fait  connaître  l'histoire  de  Valença  et  l'état 
actuel  de  celle  chétive  ville ,  j'aurais  5  parler  de  ses  an- 


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40  VOYAGE  AUX  SOUBCCS 

ciens  habitants ,  les  Coroados ,  si  je  n'avais  donné  ail- 
leurs des  détails  étendus  sur  ces  Indiens.  J'ajouterai  ce- 
pendant que  Firmiano,  qui  se  plaisait  à  appeler  ses  oncles 
les  Chinois  qu'on  voyait  alors  à  Rio  de  Janeiro ,  ne  voulut 
point  reconnaître  pour  ses  parents  les  Coroados  du  Rio 
BonJto.  Il  j  a  certainement  trop  de  différence  entre  ces 
derniers  et  les  Botocudos  pour  qu'on  leur  suppose  une  ori- 
gine commune,  à  moins  de  la  faire  remonter  à  une  époque 
sur  laquelle  nous  ne  pourrions  former  que  de  vaines  con- 
jectures ;  si  donc  les  Botocudos  sont  issus ,  comine  on  l'a 
dit,  des  anciens  Tapuyas  (1),  il  ne  serait  gaère  vraisem- 
blable que  les  Coroados  du  Rio  Bonito  en  descendissent 
également.  Mais>  si  nous  ne  pouvons  rien  dire  avec  certi- 
tude de  leurs  premiers  commencements,  nous  savons  du 
moins  ce  qu'ils  furent  dans  les  temps  modernes.  Il  parait 
bien  certain  qu'ils  eurent  pour  pères  ces  Goitacazes  qui , 
chassés  par  les  Portugais,  vers  1650,  des  campos  voisins  de 
l'embouchure  du  Parahjba  (Campos  dos  Goitacazes) ,  se 
dispersèrent  dans  les  forêts  de  Minas  et  de  Rio  de  Janeiro. 
Les  Goitacazes  ne  pouvaient  conserver,  dans  des  bois  pres- 
que impénétrables,  les  habitudes  qu'ils  avaient  contractées 
au  milieu  de  campagnes  entièrement  découvertes;  ils  re- 
noncèrent à  leur  longue  dievelnre ,  et  la  façon  dont  ils  la 
coupèrent  leur  fit  donner,  par  leurs  vainqueurs,  le  nom  de 
Coroados,  qui  signifie  couronnés  (2).  A  présent,  il  ne  sera 


(1)  Les  Indiens  civilisas  dn  litloral  et  les  Portagsii  qui  nveot  in  int- 
liea  d'eux  disent  aujourd'hui  Tapttyo*.  et  ont  fait  de  ce  mot  on  sobri- 
quet injurieux,  qu'ils  appliquent  aux  indigines  encore  sauvages.  lion 
Bolocndo  était  pour  eux  un  Tapvyo. 

(3)  Vojei  mou  Voyage  dans  le  dMrici  de*  Dimnantt  e(  mt  le  liUo- 
ToId««r«i»(MI,3et  soir. 


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DU  RIO  DE  S.  PRANCISCO.  <l 

peut-être  pas  inutile  à  l'histoire  des  indigènes  de  recher- 
cher si  toutes  les  peuplades  qui ,  de  nos  jours ,  portent  ce 
même  nom,  descendent  également  des  anciens^ Goitacazes. 
La  comparaison  du  vocabulaire,  que  j'ai  donné  ailleurs,  de 
la  langue  des  Coroados  du  Rio  Bonito  avec  celui  de  la  langue 
des  Coroadoa  du  Rio  Chipotô  ,  communiqué  à  d'Eschwege 
par  leur  directeur,  notre  digne  compatriote,  Guide  Tho- 
mas Marlière  (i),  prouve  que,  s'il  existe  entre  ces  idiomes 
des  différences  très-sensibles ,  ils  ont  pourtant  encore  assez 
de  ressemblance  pour  qu'on  admette,  sans  hésiter,  une 
origine  commune-  Les  différences  s'expliquent  d'ailleurs 
par  la  facilité  avec  laquelle  s'altèrent  les  langues  dans  les- 
quelles rien  n'a  été  écrit;  les  Aymorés,  séparés  des  Ta- 
pnyas,  perdirent  leur  ancien  langage  et  s'en  formèrent  un 
autre  (2);  nos  patois  présentent,  dans  la  même  province, 
des  modificationsplusou  moins  nolable3;enfin  nous  voyons 
les  «ifants  qui  ont  coutume  de  jouer  ensemble  forger  sou- 
vent des  mots  qui  ne  sont  entendus  que  d'eux.  Tious  ne  de- 
vons point  être  surpris,  par  conséquent,  de  ce  que  tant  de 
langues  diverses  se  sont  répandues  sur  la  surface  du  Brésil, 
où  une  multitude  de  hordes  vivaient  ù  peu  près  isolées  les 
unes  des  autres ,  et  nous  ne  nous  étonnerons  pas  davantage 
que  les  tribus  des  Goitacazes ,  séparées  depuis  deux  siècles, 
ne  parlent  plus  exactement  la  même  langue.  Mais  c'est  né- 
cessairement par  degrés  que  l'altération  se  fait  sentir,  et 
puisqu'il  existe  encore  ,  dans  le  dialecte  des  Coroados  du 
Rio  Chipotô  et  celui  des  Indiens  du  Rio  Bonito,  des  signes 

{t)ro]iafe  datu  Us  provlnctt  de  Rio  diJaneiro,ete.,  1,  46.— £bcb- 
waci,  BraMim,  etc.,  I,  322. 

(2)  Vojez  la  citatioa  que  Tait  H.  Ferdinud  EleniB  d'un  aDcicn  maiiu- 
stril ,  dans  son  etcelleol  ouvrage  iutituU  BTétH ,  p.  310. 


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U  VOYAGE  AUX  SOURCES 

bien  évidents  d'une  origine  commune,  il  devrait  s'en  trou- 
ver aussi  dans  l'idiome  des  Coroados  de  la  province  de 
Saint-Paul,  s'ils  descendaient  également  des  Goitacazes, 
dont  la  dispersion  s'est  faite  en  un  seul  temps;  or  il  n'en 
est  pas  ainsi.  La  comparaison  du  vocabulaire  de  Marlière 
et  du  mien  avec  celui  que  j'ai  fait  de  l'idiome  des  Coroados 
des  Campos  de  Garaptuiva,  dans  la  province  de  Saint- 
Paul,  ne  m'a  pas  offert  un  seul  terme  commun,  eA 
les  deus  mots  les  moins  différents  sont  nhtm  et  inhiné, 
qui  signifient  nez,  et  appartiennent,  le  premier  aux 
Indiens  du  Rio  Bonito,  le  second  À  ceux  de  Saint-Paul. 
D'ailleurs  les  traits  de  ces  derniers  sont  fort  agréables  ,  si 
j'en  dois  juger  par  deui  femmes  que  je  vis,  en  18â0,  A 
Curitiba,  et,  au  contraire,  comme  je  l'ai  dit  dans  ma  pre- 
mière relation,  il  n'est  peut-être  pas  d'indigènes  plus  laids 
que  les  habitants  du  Rio  Bonito  Les  deux  peuplades  n'ont 
donc  de  commun  qu'un  nom  ,  qui  n'est  véritablement  pas 
le  leur,  mais  qui  leur  a  été  appliqué  par  les  Portugais,  et 
probablement  n'indique  même  pas  une  parfaite  identité 
dans  la  manière  de  couper  leurs  cheveux  ,  car  les  Coroados 
de  Saint-Paul  se  font  une  sorte  de  tonsure  au  sommet  de 
la  tète ,  et  il  paraîtrait  que.  ceux  du  Rio  Bonito  réduisaient 
autrefois  leur  chevelure  à  une  calotte  arrondie  comme  les 
Botocudos  (Ij.  Si  les  premiers  ne  sont  pas  issus  des  anciens 
Goitacazes,  à  plus  forte  raison  ne  doivent  pas  en  descendre 
les  Coroados  ou  Cavaris  de  Matogrosso ,  qui  vivent  dans 
un  pays  infiniment  plus  éloigné  que  Saint-Paul  et  Curitiba 
des  catnpog,  jadis  habités  par  ces  mêmes  Goitacazes  (â), 

(I)  Voj/age  dani  Ui  proviiKet  de  Rio  de  Jatuiro  «I  d;  Mituu  Ct- 
rtMi.ll,  MO. 
lit  Un  «avant ,  qui  a  eiploré  pcotUat  huit  ans  l'Amérique  espignolc. 


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DD  BIO  DE  S.  FRANCISCO.  43 

et  sont,  peut^^tre,  une  simple  tribu  des  Bororôs  (1]. 

Je  reviens  au  récit  de  moD  voyage ,  dont  cette  digres- 
sion m'a  peut-jitre  éloigné  trop  longtemps. 

Entre  Valença  et  A3  Cobrat ,  c'était  seulement  par  in- 
tervalles que  les  grands  bois  s'étendaient  sur  le  bord  du 
diemin.  Presque  partout  ils  avaient  été  coupés  et  rempla^ 
ces  par  des  taillis;  aussi  la  chaleur  se  faisait-elle  sentir 
d'une  manière  cruelle.  On  peut  juger  de  celle  qu'on  avait 
dû  ressentir  au  soleil,  à  deux  heures  après  midi,  par  l'indi- 
cation de  26  degrés  et  doni  que  donnait ,  à  quatre  heures 
du  soir ,  le  thermomètre  de  Réaumur  exposé  à  l'ombre. 

Ce  jour-^à,  je  ne  vis  aucune  fazenda,  mais  seulement 
qudques  maisonnettes.  Il  était  facile  de  .s'apercevoir  que 
-l'on  commençaîtà  peine  à  cultiver  les  terres  de  ce  canton, 
et  que  la  route  seule  y  avait  attiré  les  habitants. 

Je  6s  halte  au  rancho  d'Âs  Cobra»  (les  serpenta)  (â) , 
situé  è  3  lieues  et  demie  de  Valença.  A.  neuf  heures  du  soir, 
j'étais  soos  le  nmeho;  la  lune  jetait  une  clarté  assez  vive 
pour  qu'on  put  lire  saos  avoir  besoin  d'autre  lumière;  la 
fratcbeur  me  paraissait  d'autant  plus  délicieuse  que ,  pen- 

mis  qoi  n'a  point  parconm  le  Brteil,  dit  (&lf.  d'Obb.,  Vof.,  I,  38)  qne 
le  Dom  de  Goiumes  Tient  des  mots  goaranis  gwita  et  caa  (  voyageurs 
dif  boit).  Sans  rejeter  enlièremeat  cette  l'tjmoJogie ,  je  ferai  observer 
qn'ippeter  vova0«iir«  da*  boii  des  bemmes  qui  hibilaient  an  des  pays 
ieaplùdicoafwtadn  Brésil  eftttté  une  singalière  antiphrase.  Je  ferai 
ebscrver  encore  qne  tes  Goilacazes,  qui  ne  parlaient  auUeineot  la  lingoa 
ferai ,  portaient  originairement  lé  nom  iCtiuetaeae  on  Goavlacazee ,  et 
que,  par  conséquent ,  celui  de  Gailacaseï  doit  être  nn  mot  altéré  par  les 
FortDfcais(LERT,  Hi*t.,V  édit.,  45.  — SODTH.,  Hiel.,  H,  66S.— Fdidi- 
iiiNB Denis,  Bréiil,  368). 

(])  CAZ.,CoTog.,  ],  302.— Piz.,  Xem.,  OC,  lOi. 

(3)  On  désigne  aussi  ce  lieu  par  le  Domd'.4ld«a  àat  Cobrat,  qui  pour- 
rait dire  croire  qu'autreAtis  il  j  eut  en  cet  endroit  un  aUUa  d'Indiens. 


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44  V0YA6E  AUX  SOURCES 

dant  toute  la  durée  du  jour ,  j'avais  éprouvé  une  excessive 
chaleur  ;  aucun  vent  ne  se  faisait  sentir,  et  du  roncho,  dont 
le  toit  était  soutenu  par  de  simples  poteaux ,  je  pouvais 
contempler  à  mon  aise  le  paysage  qui  s'offrait  à  ma  vue. 
Nous  étions  dans  un  vallon  dessiné  par  des  collines  et  sé- 
paré du  lac  uniquement  par  le  chemin;  une  maisonnette 
entourée  de  Bananiers  se  voit  presque  sur  le  bord  de  l'eau  ; 
derrière  le  lac  s'élève  une  seconde  colline ,  dont  le  flanc 
était,  à  cette  époque,  couvert  de  maïs  et  dont  le  sommet  est 
couronné  par  un  bouquet  de  bois  et  quelques  chaumières 
éparses  ;  enBn ,  à  ses  deux  extrémités ,  le  vallon  est  borné 
par  d'épaisses  forêts.  Pendant  que  je  contemplais  ce  pay- 
sage, le  coassonent  d'une  multitude  de  grenouilles,  mfilé 
au  chant  aigre  et  varié  de  plusieurs  espèces  de  cigales,  for- 
mait un  bruit  confus  qui  n'était  pas  sans  quelque  chorme. 

Pour  arriver  d'As  Cobras  an  Rio  Preto ,  on  traverse  tou- 
jours un  pays  montagneux  et  couvert  de  bois  vierges  ,  et 
lorsque,  d'an  sommet  élevé,  on  peut  découvrir  une  grande 
étendue  tie  pays,  on  n'aperçoit  absolument  autre  chose  que 
des  forêts  et  des  montagnes  (1). 

Après  la  première  lieue  on  trouve ,  dans  un  fond ,  la  ri- 
vière appelée  Rio  Bomto  (la  jolie  rivière),  qui,  lors  de  mon 
voyage,  n'avait  pas  plus  de  S  pieds  de  profondeur ,  mais 
dont  le  passage  est  très-dangereux  après  de  longues  pi  uies . 
Auprès  de  cette  rivière,  qui  probablement  est  un  affluent 
du  Rio  Preto,  sont  quelques  pauvres  chaumières  {2}. 


Il)  U  eu  était  encore  ainsi  en  1823. 

{SJ  En  parlant  dn  Hio  B<Niito,  H.  Walsh  s'exprime  eomme  il  Mit  : 
"  Les  rats  de  ce  pays  aooi  de  l'esptce  la  plus  sauvage  ;  viviat  dans  les 
x  bois,  ils  j  acquièrent  la  tvTociit  des  antres  animani  de  la  rorét  et  sont 
x  gi^néralenent  considéras  comme  rormidabks.  Vingt  nègres  apparte- 


D,g,l,.,.d.i.C00C^IC 


DU  RIO  DE  s.  FRANCISCO.  4S 

Ad  ddà  du  Rio  BoQÎto ,  je  m'arrêtai  ud  instant  i  une 
venda  et  n'y  trouvai  pas  même  une  cuillerée  de  casso- 
nade (1).  Ce  n'était  pas  sur  cette  route  la  seule  venda  qui 
fât  aussi  misérable. 

Un  peu  avant  d'arriver  au  Rio  Preto,  on  découvre ,  du 
haut  d'un  morne,  une  vue  assez  belle,  ijea  montagnes  se 
retirent  brusquement  et  laissent  entre  elles  une  gorge 
large  et  profonde  où  sont  quelques  chaumières;  le  pen- 
chant du  morne  est  couvert  de  bois,  au  milieu  desquels  se 
trouvaient  alors  des  plantations  de  maïs;  devant  soi , 
on  a  une  échappée  du  hameau  de  Rio  Preto  (ArraùU  do 
Rio  Preto) ,  qui  forme  la  limite  de  la  province  de  Minas 
Geraes. 

■  Dint  à  mi  propriétaire  du  Toi>iiit§e  arueDt  été  presque  mangés  pir 

•  eui  ;  ces  paarres  gens  s'Ëtoient  couchés  tellemeiil  hligués  et  Âk- 

■  maieuIsiproroDdémeDt,  qn'am  légion  de  raisaTÛlt  peu  prèsdéToré 

■  leurs  orteils  «Ttot  qu'ils  euaseot  poussé  un  cri  ;  et  de  tels  accidents 

■  sont  (rès-commuiis Une  piuvte  racbe  hit  le  premier  objet  qui  se 

•  présenta  à  DOS  regarda  qusnd  nous  DODsIeTlmes Toutes  ses  jatubes 

•  afiieot  été  déchirées  par  les  rata ,  et  les  chauTes-soaris  eTeieut  fait  h 

■  son  cou  des  piqâres  prolbodes  d'où  te  sang  miiselait  eucore  ;  elle 

•  était  li  comme  un  eiemple  de  la  Térocité  des  horribles  animani  qne 

•  nous  arious  eus  poar  compagnons  pendant  la  nuit  [flolicei  ofBratil, 
'  D,  M).  ■  Je  dois  aTonerqoe,  ni  an  BioBanito,  ni  ailleurs,  je  n'ai  ru 
aoenn  de  ces  rats  formidables ,  et  que  je  n'en  ai  mtme  jamais  entendu 
parler. 

(1)  Au  Brésil,  on  ne  fabrique  point  de  sucre  en  pain  (1822). 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  lU. 


EimtÉE   DE   LA  PROVINCE   DE   HI5AS  GERAES  PAR  LE  RIO 
PBETO.  —  LE  VILLAGE  DE  CE  NOH. — LA  SEBBA  REGRA. 


Le  Rio  Preto.  —  Douane  plac^  ï  FfDtrée  de  la  prof ince  de  Minas  Gé- 
rées. —  Visite  k  des  malades.  —  Le  Tillage  de  Rfo  Preto  ;  soo  histoire  ; 
détails  rar  soo  élat  actuel.  —  CootinaatioD  de  la  mïme  roule.  —  Le 
ratieho  de  S.  CahrUl.  —  HerborisatiOQ  dans  )a  Serra  iïepro,  — 
Oiemin  déserL  —  Tlumt  de  Oliveira ,  cbanmière.  —  La  Serra  da 
Mantiqueira.  —  Alto  da  Serra,  chaumière. 


C'était  vers  le  haioeau  de  Rio  Preto  que  je  me  dirigenis  ; 
immédiatement  avant  d'y  arriver,  on  rencontre  la  rivière 
qui  lui  a  donné  son  nom  et  qui  est  un  des  afDuents  du  Pa- 
rabyba  (1).  T.e  pont  sur  lequel  on  la  passe  est  en  iMiis  et  a 
450  pas  de  longueur.  Jusqu'à  ce  moment ,  j'avais  voyagé 
dans  la  province  de  Rio  de  Janeiro  :  sur  la  rive  gauche  du 
Rio  Preto ,  je  me  rdroovai  dans  celle  de  Minas  Geraes.  Je 
ne  pus  sans  attendrissement  voir  encore  cette  terre  hospi- 
talière, où  j'avais  déjà  passé  quinze  mois,  et  où  j'avais  reçu 
tant  de  marques  d'intérêt  et  de  bienveillance. 

A  quelques  pas  de  l'extrémité  du  pont  est  un  hangar  ou- 
vert de  tous  les  cAtés  et  soutenu  par  des  poteaui  :  c'est  là 
ïeregislro  (douane]  où  l'on  fait  décharger  les  mulets  qui 
viennent  de  la  province  de  Minas  et  ceux  qui  s'y  rendent. 

<1|  C*z„  Corog,  Bra$.,  I,  367. 


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DD  BIO  DE  S.  PUNCISCO.  47 

On  Tisite  les  ballots  qui  sortent  de  cette  province ,  pour 
s'assarer  s'ils  ne  contiennent  ni  or  ni  diamants;  on  fliit 
payer  les  droits  sur  ceux  qui  yiennent  de  Rio  de  Janeiro  et 
on  les  visite  également ,  afin  de  Toir  si  l'on  ne  fait  point 
entrer  à  Minas  de  faux  billets  de  permuta  (1),  et  si  l'on  ne 
fimstre  pas  la  poste  de  ce  qui  lui  est  dû  en  emportant  des 
lettres.  Les  droits  se  payent  ici,  comme  à  Mathias  Barbosa 
et  à  Malhada  (2] ,  sur  le  poids  des  marchandises,  sans  aucan 
^rd  pour  leur  valeur  intrinsèque  et  leur  degré  d'uti- 
lité {5). 

Les  préposés  au  regiitro  sont  deux  employés  civils ,  un 
administrateur  qui  reçoit  les  deniers,  un  commis  qui  tient 
les  écritures,  et,  de  plus,  six  soldats  du  régiment  de  cava- 
lerie de  Minas ,  commandés  par  un  fourrier  et  par  un  capo- 

(1)  Les  billets  de  permuta  tiaierit  ceux  qae  l'oa  doonail  duis  les  mti- 
«ODB  de  ebange  (  caMt  d«  penmUa  )  poor  de  pelitea  quantités  d'or  en 
pondre  (T07ez  moD  Voyant  datu  Ut  provins  M  dtRiode  Janeiro,  etc., 
I,M1). 

(3)  Tojei  mon  rofofe  dans  lei  provineet  ielHodi  Janeiro ,  etc., 
I,go,et  n,38T. 

(3)  Od  sait  que  tons  tes  économistes  ont  vivement  condainDé  les  dooa- 
aa  iDiérienres ,  et  que  H.  Hortce  Saj  en  avait  fortement  conseillé  la 
snppresEinn  ani  aatorités  bréùlienoes  dans  son  eicellent  livre_intitulé , 
HUIotrê  de»  rttatioHi  eommereiaUt  entrt  ta  fiance  tt  le  Brétil,  Pa- 
ris, 1810.  L'administration  a  enfln  compris  les  véritables  intértts  dn 
pa;s  ;  le  regitlro  de  Uathias  Barbosa  sur  la  grande  route  de  Minas  k 
Rio  de  Janeiro  a'eiJst«  pins  [Set.,  Souv.,  K$),  et  il  n'est  pas  k  présa- 
mer  ^'w  ait  conservé  les  antres.  La  aniqiressioa  des  doaanes  inté- 
rieures a  d'autant  pins  d'imporlaoce  poar  le  Brésil ,  qu'elles  étaient  nne 
barrière  entre  les  différentes  provinces,  et  le  gouvernement  ne  saurait 
bire  trop  d'eRorls  pour  rapprocher  celles-ci  les  unes  des  antres,  pour 
animer  les  habitants  d'an  même  esprit ,  poor  effacer  jnsqa'anx  moindres 
traces  des  rivalités  mesquines  et  dimolvantes,  qui  étaiHit  en  grande 
partie  le  traitât  de  l'ancien  sjrsiéme  colonial  et  celui  des  entraves  mise* 
"    a  tes  pins  indispensables. 


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ii  VOYAGE  AUX  SOURCES 

rai  (1).  Comme  à  Mathias  Barbosa,  c'est  directemeat  pour 
le  compte  du  âsc  que  les  droits  se  perçoivent.  Les  deui 
employés  civils  sont  seuls  permanents  ;  on  change  de  temps 
en  temps  les  soldats  et  leur  cheT. 

Je  n'éprouvai  point  les  désagréments  de  la  visite;  j'en 
rus  exempté  par  les  passe-ports  que  je  tenais  du  ministre 
d'ÉUt. 

Je  m'établis,  pour  y  passer  la  nuit,  sous  le  hangar  qui 
servait,  comme  je  l'ai  dit,  de  regiêtro,  et  me  mis  A  analyser 
des  plantes ,  malgré  le  bruit  afireux  que  l'on  faisait  autour 
de  moi.  Mon  travail  fit  croire  que  j'étais  un  médecin ,  et, 
malgré  mes  protestations  d'ignorance,  le  soos-ofBcier  qui 
commandait  le  poste  voulut  absolument  me  faire  voir  deux 
de  ses  soldats  qui  étaient  malades.  Pour  ne  point  paraître 
manquer  de  complaisance ,  je  me  laissai  conduire  chez  ces 
deux  hommes;  je  fis  des  ordonnances  assurément  très- 
innocentes  ,  et  je  souhaite  que  le  ciel  ait  béni  ma  bonne 
volonté. 

Mes  visites  terminées,  le  commandant  me  mena  sur  une 
colline  d'oiî  l'on  découvre  le  hameau  de  Rio  Preto.  La  ri- 
vière à  laquelle  il  doit  son  nom  serpente  dans  une  large 
vallée  bornée  par  une  haute  montagne  ;  elle  coule  avec  ra- 
pidité ,  et ,  quand  elle  ne  sort  pas  de  son  lit ,  elle  peut  avoir 
une  soixantaine  de  pas.  Le  pont  en  bois  qui  la  traverse  est 
d'un  effet  assez  pittoresque.  A  celle  de  ses  extrémités  qui 
aboutit  au  hameau  est  une  croix ,  et ,  suivant  la  coutume , 
un  tronc  avec  un  tableau  qui  représente  les  âmes  du  pur- 
gatoire. On  a  bâti  le  hameau  sur  la  rive  gauche  du  Rio 

(1)  Ad  Brésil  comme  en  PoTliigol ,  les  ddid»  de  fonrrier  (furUl),  fier- 
gtal  {targtnto) ,  caporil  (  eabo  itaqvadra  ou  simpIcoMat  cato  )  Mat 
ea  UMge  dans  It  ctvalerie  comme  ding  l'infaDterie. 


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DU  110  DE  S.  PRAHCISCO.  40 

Preto.  dans  une  espèce  de  petite  plaine  qui  se  trouve  entre 
la  rivière  et  les  montagnes.  Il  se  compose  presque  unique- 
ment d'une  rue  fort  large,  parallèle  à  la  rivière  et  formée 
par  une  cinquantaine  de  maisons.  Celles-ci  sont  basses , 
étrtHtes,  écartées  les  nnes  des  autres ,  et  ont  tontes  un  petit 
jardin  où  les  Bananiers  et  les  Orangers  sont  entassés  sans 
ordre.  Parmi  les  maisons  de  Rio  Preto  on  compte  plusieurs 
vmdoi  et  quelques  boutiques.  Ce  hameau  possède  une 
église  qui  est  une  succursale;  en  1819,  11  faisait  partie  de 
la  paroisse  de  Barbacena,  ville  dont  il  est  éloigné  de  plus  de 
90  lieues,  et  alors  aucun  prêtre  ne  desservait  son  église; 
mais  lorsque,  en  1 822;  je  repassai  par  ce  même  Heu,  Il  avait 
un  chapelain  [capeltào)  (1)  ;  sa  succursale  n'appartenait  plus 
i  Barbacena ,  on  l'avait  réunie  è  une  autre  paroisse  dont  le 
village,  plus  voisin,  A'Pntipoca  est  le  chef-lieu.  Pour  ce 
qui  regarde  le  civil ,  le  Rio  Preto  dépend  (1822)  du  irnno  (2) 
de  Barbacena  et  de  la  comarea  de  S.  Jrâo  d'el  Rei  on  Rio 
das  Mortes ,  comme  aussi  toute  la  contrée  que  je  parcourus 
jusqu'au  Rio  Grande, 

Les  commencements  du  hameau  de  Rio  Prelo  ne  datent 
que  d'un  petit  nombre  d'années ,  et  son  histoire  est  celle 
de  la  plupart  des  villages  de  la  province  de  Minas  Geraes. 
Ses  premiers  habitants  furent  attirés  par  l'or  que  l'on  reti- 
rait autrefois ,  assez  abondamment ,  du  lit  de  la  rivière ,  et 
l'on  voit  encore  aujourd'hui,  sur  le  bord  de  celle-ci ,  quel- 
ques tas  de  cailloux,  résidus  des  lavages;  mais  l'or  s'est 

(I)  Sur  ]i  hifrarcbie  cecKuBaliqiie  dus  la  provÏDce  de  Hitias,  on 
pent  coimlter  mim  Vojfagt  dant  la  proehtee  de  Hlo  de  Janeiro ,  etc., 
I,  167. 

(3)  Les  IfmuM  sont  les  dinaioDB  des  comareaê ,  comme  cellee-ci  let 
imvooa  da  ]m)*înces. 


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su  VOYAGE  AUX  SOUKCES 

épuisé ,  les  bras  odI  manqué,  et  les  habitants  du  Rio  Preto 
ont  fini  par  renoncer  entièrement  au  travail  dee  lavages. 
Actuellement  ils  ne  vivent  plus  que  du  produit  de  leurs 
terres,  et  le  passage  des  caravanes  leur  en  assure  un  débit 
d'autant  plus  facile ,  qu'on  est  longtemps  sans  trouver  un 
village,  quand  on  a  passé  par  ici  en  venant  de  Rio  de  Ja- 
neiro. Cependant  les  terres  des  environs  de  Rio  VnHo  sont 
sablonneuses  et  peu  fertiles ,  et  si  la  canne  y  fournit  de 
très-beau  sucre,  ce  n'est  qu'en  petite  quantité. 

Entre  Rio  Preto  et  S.  Gabriel  (1)  le  pays,  fort  boisé 
et  très-montagneux ,  est  beaucoup  moins  cultivé  que  celui 
ofi  je  voyageais  depuis  quelques  jours,  k.  peine  rencontre- 
t-on  quelques  misérables  chaumières  (1822)  ;  presque  par- 
tout les  grands  arbres  de  la  forêt  s'étendent  jusque  sur  les 
bords  de  la  route  et  donnent  de  l'ombrage;  le  chemin  est 
mauvais,  le  terrain  sablonneux,  les  descentes  très-roïdes. 
Gomme  j'avais  beaucoup  monté  depuis  le  Parahyba,  je  ne 
ressentais  plus  une  chaleur  aussi  forte  ,  et  je  trouvai ,  dans 
les  bois  vierges,  quelques  plantes  que  je  n'avais  point  en- 
encore  vues  depuis  le  commeacement  de  mon  nouveau 
voyage.  Longtemps  avant  qu'on  arrive  à  S.  Gabriel ,  le 
paysage  devient  plus  austère;  alors  on  aperçoit  la  Serra 
Negra  [la  montage  noire),  une  des  montagnes  les  plus 
élevées  parmi  ces  contre-forts  qui  s'étendent,  comme  je 

(1)  Itinéraire  approumatif  dn  hUDeaa  de  Eio  Prelo  (Arraial  do  Rio 
Prelo)  juaqu'à  la  sortie  des  forêts  : 
De  VArraial  do  Rio  Preto  à  S.  Gabriel ,  rancho 11/3  legoas. 

—  ThomédeOliveira,  chaamière 3  1/2 

—  A)t4)da  Serra,  rancho 3 

B        legoa». 


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DD  R[0  DE  S,  FRANCISCO.  SI 

l'ai  dit,  entre  la  Serra  do  Mar  et  la  Serra  do  Espinhaç«. 

Le  raneho  de  S.  Gabriel,  oà  je  fis  halte,  est  situé 
dsDs  UD  fond  ,  presque  au  pied  de  la  Serra  I^egra  et  près 
d'une  petite  rivière  qui  porte  le  même  nom  que  loi.  De 
tous  les  ctHés,  il  est  entouré  de  sombres  forêts  et  de  hantes 
moota^es,  dont  la  Serra  est  la  plus  élevée;  admirable  so- 
litude, qui  a  un  caractère  d'austère  majesté  sans  porter  ce- 
pendant l'empreinte  de  la  tristesse. 

Le  nmcho  dépend  d'une  maisonnette  à  c6té  de  laquelle 
est  une  vmda  fort  mal  garnie.  Ainsi  que  la  maisonnette, 
il  est  couvert  avec  de  longs  morceaux  de  Palmier.  On 
coupe  par  la  moitié  la  tige  de  ces  arbres,  on  en  aie  la  par- 
tie intérieure,  et  l'on  forme  ainsi  des  espèces  de  gouttières, 
qu'on  arrange  sur  les  toits  comme  des  tuiles  creuses,  c'est- 
à-dire  de  façon  qu'une  des  gouttières  présente  le  cAté 
convexe  et  la  gouttière  voisine  le  cAté  concave.  Je  remar- 
'  quai ,  en  1832 ,  qu'il  y  avait  k  Valença  beaucoup  de  mai- 
sons couvertes  de  cette  manière. 

Je  ne  voulais  point  passer  si  près  delà  Serra  Negra  (4) 
sans  y  aller  herboriser,  et  je  commençai  cette  course  le 
lendemain  du  jour  oîi  j'étais  arrivé  à  S.  Gabriel.  Bientôt 
après  avoir  traversé  la  petite  rivière  de  ce  nom ,  j'arrivai 
à  un  terrain  composé  d'un  quartz  blanc,  grossièrement 
concassé,  mêlé  d'une  légère  portion  de  terre  végétale.  Ce 
terrain  est  semblable  è  celui  que  l'on  observe  dans  les  par- 
ties les  plus  élevées  de  la  montagne  ;  ce  sont  également  des 
arbrisseaux  qui  le  couvrent,  et,  parmi  eux,  j'en  vis  déjà 
que  je  devais  retrouver  beaucoup  plus  haut,  tels  qu'une 

(1)  Il  f4iii  éviter  de  conrondre  cetu  montogne  arec  d'autres  dn  mime 
■MM»  qni  Bc  tromenl  eDcore  dans  le  Brésil  ;  elle  a'est  point  ia  Dombre 
des  Serra  Neira  indignées  dans  le  Corografia  BraHlica  de  Cuti. 


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Sa  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Ericacée  et  la  Mélastoroée  (n'  53]  (1).  J'avais  à  peine  mar- 
ché quelques  instante,  que  le  sol  devint  beaucoup  moins 
mauvais  et  les  grands  bois  se  montrèrent  de  nouveau.  Ceci 
tend  à  prouver  que  la  nature  du  terrain  contribue ,  an 
Brésil ,  au  moins  autant  que  les  hauteurs ,  à  produire  des 
différmces  dans  la  végétation  (3)  ;  c'est  ainsi  que,  du  cAté 
de  Villa  da  Victoria,  dans  des  lieux  qui  soat  ivesque  de 
niveau  avec  la  mer  et  o&ent  un  mélange  de  saMe  blanc  et 
de  t^re  noire,  je  retroovai  quelque  chose  de  la  végétation 
des  montagnes  élevées  de  la  province  des  Mines  ,  monta- 
gnes où  j'avais  observé  un  t^rain  analogue  (3).  Ad  reste, 
je  dois  dire  que  les  grands  bois ,  dont  j'ai  parlé  toat  è 
l'heure,  croissant  dans  un  sol  fort  sablonneux,  quoique 
meilleur,  sont  \(àn  d'avoir  la  vigueur  dès  forêts  qui  végè- 
tent dans  de  bonnes  terres. 

Continuant  de  monter,  on  retrouve  un  terrain  où  le 
sable,  fort  abondant  et  composé  de  grafos  très-gros ,  est 
mélangé  d'un  peu  de  terre  gristtre,  et,  au  milieu  de  toutes 
lei  diflérences  de  sol  qu'on  remarque  dans  le  reste  de  la 
montagne,  c'est  toujours  le  sable  qui  domine.  Lorsque  Ja 
terre  redevient  très-sablonneuse ,  la  végétation  change  de 
nouveau,  et,  excepté  dans  de  petits  int^ralles,  on  ne  voit 
plus  que  des  arbrisseaux  serr^  les  uns  contre  les  autres ,  à 
tige  droite,  haute  d'environ  5  ^8  pieds.  Parmi  ces  arbris- 
seaux, il  en  est  qui  sont  plus  comBKins  que  d'autres;  par 


(I)  Cca  nniDéroB  renTOient  tut  DOtca  dncriptivea  qni  se  tronveront  t 
la  fln  de  chtqne  volume. 

(3)  Il  va  MTsit  antrement,  sans  aacnn  dooie,  si  let  mmlagncti  da 
BrMI  traient  une  plus  griadc  éléralioa. 

(3)  Vojn  mon  Introduction  à  FhUMrt  dét  planUt  ht  phu  ramar- 
ipuOlet  d*  Brétit  el  tfv  PnroffiKiK,  page  m. 


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DD  RIO  DE  S.  PRANdSGO.  Ï3 

ex«ii{de,  l'Ericacée  et  la  Mélastomée,  que  j'ai  déjA  iodiquées 
coflune  croissant  BU  pied  de  la  montagne,  un  Ca$tia  (n'6], 
une  Composée  (n»  60)  ;  mais,  en  général,  on  ne  bwive  point 
sur  la  Serra  Negra  de  plantes  qui  en  caractérisent  vérita- 
blement la  Tég^tion  ;  aussi  eus-je  le  plaisir  d'y  fecueillir 
un  très-grand  aombre  d'espèces  différentes.  A  peu  de  dis- 
tance du  sommet,  dans  un  espace  oà  la  terre  est  extrême- 
ment mauTaise,  mais  qui  n'est  pas  très-étendu,  les  arbris- 
seaux disparaissent  è  leur  tour,  et  l'on  ne  voit  pins  guère 
qu'un  BODB-arbrisseau ,  \t  Lœeoùitra  ctnUforwit ,  var.  tnn- 
gm  (Lmoùio'a  inngnii,  DC.)  (79),  Mélastomée  à  Truite 
sessiles  et  à  feuilles  disposées  sur  quatre  rangs.  Dans  les  en- 
droits où  la  v^étation  a  le  plus  de  vigueur,  j'admirai  une 
Apocynée  (67) ,  qui ,  s'entortillant  autour  des  arbres ,  orne 
leurs  troncs  et  leurs  rameaux  de  ses  belles  fleurs  en  enton- 
noir, oooleur  de  rose  et  plu»  grandes  que  celles  du  iVe- 
ntim  Oleander.  Vers  te  sommet  de  la  montagne,  on  vmt 
beaucoup  d'arbres  à  tige  assez  menue  ,  tortueux  ,  rabou- 
gris ,  d'oà  pendent  diverses  espèces  de  Lichens.  J'avais 
foit  use  si  belle  récolte  de  plantes ,  que  le  papier  me  man- 
qua un  peu  arant  que  je  fusse  arrivé  au  sommet  de  la 
montagne;  il  était  déjà  tard  et  je  pris  le  parti  de  revenir. 
Je  parriDS  cependant  assez  haut  pour  jouir  d'une  vue  ex- 
trêmement étendue  ;  mais  je  ne  découvrais  autre  chose 
que  des  montagnes  couvertes  de  bois,  dont  les  plus  élevées 
présentaient,  à  une  certaine  hauteur,  nue  zoue  d'une  cou- 
leur moins  obscure ,  formée  par  les  arbrisseaux  qui  crois- 
sent au-deseus  des  bois  vierges. 

La  route  passe  par  la  Serra  Negra;  Cendant  on  peut 
faire  un  détour  pour  éviter  cette  terrible  montée ,  et  je  ne 
conçois  pas  qu'il  y  ait  des  muletiers  assez  hardis  pour  la 


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H  VOYAGE  àVX  SODKCES 

préférer.  En  effet,  rien  n'est  affreux  comme  ce  chemin;  ce 
n'est  souvent  qu'un  sentier  étroit  qui  passe  sur  des  rochers 
glissants,  presque  à  pic,  où  l'on  marche  à  ctAé  d'un  pro- 
fond précipice  (i). 

Tout  te  monde  assure  qu'il  y  a  ordinairement  des  jagoars 
dans  la  âerra,  mais  je  n'en  aperçus  point,  ie  rencontrai 
deux  hommes,  dont  l'un  tenait  un  pistolet  et  l'antre  un 
grand  couteau;  c'était  vraisemblablement  dans  l'intention 
de  se  défendre  contre  les  bétes  sanvages  qu'ils  s'étaient 
ainsi  armés,  car  ils  m'ftt^ent  leur  chapeau  et  me  souhai- 
tèrent le  bonsoir  avec  beaucoup  de  politesse. 

J'avais  recueilli,  sur  la  montagne,  près  de  soixante  es- 
pèces de  plantes;  voulant  les  étudier,  je  passai  un  jour  à 
S.  Gabriel. 

Le  lendemain,  je  me  remis  en  route  et  pris  le  chemin 
qui  dispense  de  monter  la  Serra  Negra.  C'était  depuis  trois 
ans  qu'il  avait  été  ouvert  au  public ,  et  l'on  me  raconta 
qu'on  en  était  redevable  i  un  riche  marchand  de  bestiaux, 
nommé  Antonio  Francisco  de  Azevedo.  L'intendant  de 
la  police,  ajonta-t-on ,  avait  promis  à  cet  homme  que ,  s'il 
rendait  le  chemin  praticable  pour  des  chars  à  bœufis,  le 
bétail  qu'il  enverrait  à  Rio  de  Janeiro ,  pendant  tout  le 
reste  de  sa  vie ,  serait  entièrement  exempt  de  droits  (2). 
Antonio  Francisco,  me  dît-on  encore ,  avait  travaillé  à  ce 
chemin  pendant  deux  ans  et  y  avaitdéjà  dépensé  18,000  cru- 
sades.  On  ne  devine  pas  trop  ce  que  l'intendant  de  la  po- 

(1)  Lorsque  je  passai  par  S.  Gabriel ,  en  tSfS ,  je  montai  sur  la  ■»«□- 
UgH  arec  des  mulets  cbcrgOs.  Oo  avait  reudu  le  cbenia  un  peu  meil- 
leur; niais.par  ÎDtervilles,  il  (tait  encore  eitrémemeQtdifBdle. 

(!)  Od  voit,  d'après  la  maaière  dont  je  rapporte  ces  diyere  détails, 
que  je  D'oserais  lea  garantir  entièrement. 


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DD  UO  DE  S.  FRANCISCO.  Jï 

lice  avait  i  dentier  dans  cette  affaire;  malB,  à  cette  époque, 
tous  les  pouvoirs  étaient  confondus  :  j'ai  déjà  rapporté,  dans 
une  autre  de  mes  relations ,  qu'on  avait  pris  sur  les  fonds 
adfectés  è  la  police  l'argent  nécessaire  à  l'établissement 
d'une  colonie  nouvelle,  celle  de  Vianna  (1).  Quoi  qu'il  en 
soit  de  tout  ceci ,  on  n'avait  pu,  ou  bien  on  n'avait  pas  su 
éviter,  dans  le  nouveau  chemin,  une  suite  de  montées  très- 
roides  et  très-fatigantes. 

Là,  de  quelque  côté  que  se  portassent  mes  regards,  jene 
voyais  que  des  montagnes  élevées,  dont  les  flancs  sont  cou- 
verts de  grands  bois  et  le  sommet  d'arbrisseaux.  Partout  le 
terrain  est  sablonneux;  les  arbres  n'ont  qu'une  vigueur 
médiocre  et  offrent  une  teinte  sombre  et  grisâtre;  la  pro- 
fondeur des  vallons  ajoute  encore  à  l'âpreté  de  ces  vastes 
solitudes.  On  m'a  dit  quelesbdtes  sauvages,  les  jaguars, 
les  tapirs,  les  pécaris  {poreos  do  mato)  y  sont  très-com- 
muns; entendant  je  n'aperçus  aucun  de  ces  animaux.  Ce 
pays  jouit,  à  la  vérité,  d'un  grand  avantage  ;  mais  il  lui  est 
commun  avec  bien  d'autres  parties  de  la  province  desMines, 
celui  d'avoir  des  eaux  d'une  fraîcheur,  d'une  pureté  dont 
n'approchent  point  celles  qu'on  boit  en  Europe.  Chaque 
vallée  sert  de  lit  è  un  ruisseau  oà  le  voyageur  se  désaltère 
avec  une  sorte  de  volupté  qui  n'est  connue  que  dans  les 
pays  très-chauds.  C'est  sur  le  bord  de  deux  de  ces  ruis- 
seaux que  l'on  rencontre  les  deux  seules  chaumières  qui  se 
trouvent  entre  S.  Gabriel  et  le  lieu  où  je  Ûs  halte.  Dans  ce 
lien  était  aussi  une  misérable  chaumière  qui  avait  été  con- 
struite pendant  qu'on  travaillait  au  chemin  ;  elle  était  déjè  à 
moitié  tombée,  et  le  premier  vent  aura  achevé  de  l'abattre. 

ili  Voyage  dant  le  ttitlriel  itt  DfamanU,  clc,  II,  36.t. 


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se  VOYAGE  AUX  SODtCBS 

Ls  nuit  fut  très-froide;  la  triste  maisoDDette  oà  je  la 
passai  était  ouverte  de  tous  les  côtés,  et,  quoiqae  j'eusse 
sur  mon  lit  une  lourde  capote  et  une  couv^ture  de  cotMi , 
j'eus  betHConp  de  peine  &  me  réchautTer.  De  notables  chao- 
gemeots  ne  tardèrent  cependant  point  à  s'opérer  dans  la 
température.  A.  six  heures  et  demie,  le  tbermomètre  n'était 
encore  qu'i  13  degrés  Réanmur;  mais  ,  nue  demi-heure 
après,  il  était  déjà  à  M  degrés,  et  bientôt  la  chaleur  devint 
insupportable  partout  où'  il  n'y  avait  pas  d'ombre.  Les 
grands  arbres  avaient  été  coupés  sur  les  deux  bords  dn  che- 
min, et  le  soleil  dardait  sur  nos  tètes  ses  rayons  brûlants. 

L'ensemble  de  notre  route  nous  offrit  des  montagnes 
encore  plus  élevées  que  celles  de  le  veille ,  des  vallées  plus 
larges  et  plus  profondes,  des  montées  encore  plus  pénibles. 
Le  chemin  était  tellement  difScile  ,  que  nous  mimes  six 
heures  k  faire  3  lieues. 

La  première  montagne  que  je  trouvai,  après  avoir  quitté 
TTuMn^deOtinetra  [nom  d'homme),  le  lieu  on  j'avais  fait 
balte,  porte  le  nom  de  Monte  Verde ,  et ,  à  la  Sn  de  la 
journée,  je  passai  la  fameuse  Serra  da  Mantiqueira,  partie 
méridîonBle  de  cette  longue  chaîne  (Serra  do  Ëspinbaco, 
Esdiw.](l],  que  l'on  rencontre  lorsque,  après  avoir  passé  la 

U)  Caul  vfùl  rccomm  qae  la  Serra  di  Muitiqneira  biTcrse  réclle- 
moit  tonte  li  proTioce  de»  Mines  ;  eu  il  s'eiprime  tinii  ;  ■>  La  Serra  da 

•  Hauliqaeira,  qai  eat  la  plus  célUtre  de  la  province,  commeoce  dans  la 

■  partie  sepleutrioiiale  de  celle  de  Saint-Paul  ;  formant  des  siouosités, 

•  elle  B'ïtead  à  pen  pris  rers  te  aord-eat ,  jaiqDe  dan*  le  Toiiiitage  de 

■  la  ville  de  Barbacena ,  el  de  U  elle  se  dirige  do  cAté  du  nord ,  peur 

■  atteindre  l'eilrémilé  de  la  province  :  elle,  change  souvent  de  nom  et  ne 
«  conserve  pas  toujonrs  la  mèine  baulear  {Corografia  Bratiliea,  I, 
H  3601  •  Comme  r«tte  cbalne  n'est  réellement  connue  sous  le  nom  de 
Serra  da  Mantiqueira  que  dans  une  partie  de  son  ^tudoe,  d'EKbwrgr 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


DU  K(0  DE  s.  FHANGI8C0.  97 

chaîne  maritime,  on  se  dirige  vers  l'occident  de  la  province 
des  Mines.  La  Serra  da  Hantiqueira  divise  les  eaux  du  Pa- 
rahyba  et  du  Rio  Doce  de  celles  du  Rio  Grande  ,  qui  finit 
par  devenir  le  Rio  de  la  Plata  {!].  Je  l'avais  déjà  traversée 
CD  me  rendant  à  Villa  Rica  parla  ronte  ordinaire.  Du  som- 
met de  cette  Serra ,  je  découvris  une  immense  étendue  de 
montagnes  couvâtes  de  bois ,  et  en  particulier  la  Serra 
Negra. 

Ce  jour-là,  je  vis  sur  le  bord  du  chemin  trois  chaumières 
et  une  habitation  un  peu  plus  considérable.  Les  terres  valent 
mieux,  en  général,  que  celles  du  pays  que  j'avais  traversé 
la  veille  ;  sur  le  penchant  des  montagnes,  le  maïs  rend  Jus- 
qu'à 200  pour  1.  Jefisball£,  très-faligué,  sous  un  misé- 
rable rancho  ,  qui  lient  i  une  cabane  plus  misérable  en- 
core ,  et  où  demeuraient  de  pauvres  mulâtres.  Ce  lieu  porte 
le  nom  S  Alto  da  Serra  [le  haut  de  la  montagne}.  À  huit 
heure»  et  demie  du  soir ,  le  thermomètre  était  déjà  descendu 
à  1 6  degrés  Réaumur,  et  la  nuit  ftat  encore  plus  froide  que 
la  précédente. 

A  au,  avec  raiioa,  dcToir  im^iner  nixi  déDomÏDitioD  qui  en  ÏDdkpilt  !■ 
kagnear  toat  eotUre.  Le  nom  de  Serra  do  EtpivJuifo  (moDUgM  de 
rtpiue  dorade  )  pourra  paraître  biurre ,  mais  je  crois  qu'il  faut  le  coa- 
scirer,  parce  qu'il  a  été  employé  le  premier,  et  le  préfïrtr  k  cehii  de 
ckiOne  enUrah ,  proposé  par  l'eieellent  Béttgrapke  Baibi  du*  m  Géo- 
wnvU*  iuUverulh. 
<l)  Vojei  mOD  Voifagt  dans  U$  provinctt  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  1. 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  IV. 


LKS    CAHPOS.  —  TABLEAD  GÉNÉRAL    DD   CANTON    DE   BIO 
GRANDE. 


Eatrée  des  eampo$.  Cmm  de  li  dUKrence  qui  nisie  entre  la  végétatiiMi 
qui  les  cuBCt^rise  et  celle  des  bois  vierges.  Lear  moaotODie.  Ua  ne 
sODt  cepeadiut  pis  toujours  eiaclemeat  les  mêmes.  Idée  géaérale  de 
ceux  qui  s'éteodcDt  depuis  les  forêts  primili?es  jusqa'h  S.  Joio  d'EI 
Rei.  —  Le  Rio  Grande:  son  cours  gigantesque:  utilité  dont  il  peut 
être  pour  le  Brésil. —  Les  hibiltuts  du  caotoa  de  Hio  Grande,  d'abord 
mineurs,  puis  agriculteurs.  —  Détails  sur  l'éduuition  des  bétes  h  tor- 
ites  :  le  parti  qu'on  tire  des  besiiaui  ;  manière  de  faire  les  fromages. 
—  Comment  on  engraisse  les  cochons  ;  le  lard.  —  Les  moaloas  ;  lenr 
laine  i  le  pen  de  soins  qn'oa  leur  doaite  ;  nécessité  de  quelques  amé- 
liorations. —  Produit  des  faxettda$  du  canton  de  Rio  Grande.  — 
Mœurs  des  cultiratenrs.  Leurs  femmes.  Peiotare  de  leurs  babitatMos. 


Après  avoir  quitté  (le  14  février)  le  pauvre  raneho  où 
j'avais  passé  la  nuit,  je  cheminai  encore,  pendant  quelques 
instants,  dans  une  vallée  profonde  entourée  de  bois  vierges. 
Cependant  je  montais  peu  à  peu  :  tout  à  coup  l'aspect  du 
pays  changea  comme  une  décoration  de  théâtre ,  et  je  dé- 
couvris une  étendue  immense  de  mornes  arrondis ,  cou- 
verts seulement  d'une  herbe  grisâtre,  et  entre  lesquels  se 
trouvent  jetés  qi  et  là  des  bouquets  de  bois  d' un  vert  foncé. 
J'entrais  alors  dans  la  région  des  campos.  Je  n'avais  pas 
ignoré  que  j'y  arriverais  ce  jour-là;  mais  ce  que  j'avais  vu. 


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DU  RIO  DE  S.  PRâNCISCO.  » 

deux  ans  plus  tôt,  sur  la  route  de  Villa  Rka  ne  m' avait  point 
préparé  à  un  changement  aussi  brusque.  Il  produisit  sur 
moi  one  vive  impression  de  surprise  et  d'admiration  :  ces 
eampos  à  perte  de  vue  sont  une  image  bien  moins  impar- 
hite  de  l'immensité  qne  la  mer,  lorsqu'on  y  jette  les  yeax 
d'une  plage  peu  élevée,  et  cette  image  devenait  plus  frap- 
pante encore  au  sortir  des  forêts  primitives,  où  souvent 
on  toucherait  presque  de  la  main  les  objets  qui  bornent 
rhorizon. 

En  quitlant  les  bois  vierges,  je  pus  fbire  une  comparaison 
exacte  entre  la  disposition  des  t^rains  où  ils  végètent  et 
celle  du  sol  qu'occupent  les  eampos ,  et  je  me  confirmai 
dans  les  idées  que  j'avais  déji  sur  les  causes  d'une  diffé- 
rence si  prononcée  dans  la  végétation  (1).  Les  forêts  cou- 
vrent des  contrées  hérissées  de  montagnes  roides  et  escar- 
pées, qui  se  garantissent  les  unes  les  autres  contre  la  force 
des  vents-,  et  en  même  temps  les  ruisseaux,  qui ,  entre  les 
monts ,  arrosent  des  vallées  étroites  et  profondes ,  entre- 
tiennent dans  l'air  one  fraîcheur  et  une  humidité  conti- 
nuelles. Au  contraire,  dans  les  pays  de  campot,  les  mornes 
sont  arrondis  et  s'élèvent  par  une  pente  douce;  les  vallées 
qui  séparent  ceqx-ci  sont  larges  et  peu  profondes ,  et  enfin 
les  ruisseaux  sont  peu  multipliés;  aussi  la  sécheresse  est- 
dle  très-grande  dans  ces  régions ,  et  les  vents  y  règneot 
en  liberté,  deux  causes  qui  ne  permettent  pas  A  la  végéta- 
tion de  devenir  plus  vigoureuse.  Nais,  si  le  flanc  d'un 
morne  présente  un  enfoncement  qui  soit  abrité,  si  quel- 
que ruisseau  arrose  un  vallon ,  on  est  sCir  de  trouver  là  un 
bouquet  ou  une  lisière  de  bois  vierges,  qui,  défrichés, 

il!  Voffuife  dani  Ut  prminrei  âe  Rio  dt  Janeiro,  etc.,  Il ,  !3. 


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00  VOYASB  AUX  SOURCES 

prodairoat  du  mais  et  d'aulre»  plantes  utiles  i  rhomme. 
La  Serra  da  Mantiqudra ,  que  je  venais  de  traverser  et 
qui  forme  une  portion  de  la  Sern  do  E^inhaço  (  Escbv.), 
est,  comme  l'on  sait,  la  limite  des  forêts  et  des  eampo»  (1). 
Pendant  plosieurs  mois ,  j'allais  étendre  mes  regards  sur  an 
pays  découvert,  et  le  bois,  connu  sous  le  nom  de  Mato 
Grouo ,  que  je  traversai  dans  la  province  de  Goyai ,  arant 
d'arriver  i  sa  capitale  ,  est  bien  loin  d'avoir  la  majesté  des 
forêts  vierges  de  Rio  de  Janeiro  et  de  Minas  Geraes.  Mais ,  il 
faut  ledire,  la  répétition  des  mêmes  objets  a  bientôt  épuisé 
l'adoûration  ,  et.  au  milieu  de  ces  déserts  auxquels  l'in- 
dustrie bumaine  n'a  presque  rien  6té  de  leur  monotonie 
primitive,  le  voyageur  succomberait  sons  le  poids  de  l'en* 
nui ,  ^il  n'était  soutenu  par  de  grands  intérêts,  on  si ,  livré 
à  l'bistMre  naturelle,  il  n'échai^t,  par  l'étude  variée  des 
détails,  k  l'unifonnité  de  l'ensemble. 

Il  ne  faut  poiulant  pas  croire  qu'il  existe  entre  tous  les 
campo»  une  ressemblance  parfaite;  mes  deux  premières 


(1)  CeUe  limite  n'est  cependant  point  parfaitement  trandiëe.  r«i  dit 
ailleurs  (Jablmu  de  la  végétation  primiUvf  dam  la  procinee  de  Mt- 
wu  G«raet ,  impriin^  dans  les  Annalet  det  eeieneet  nAluretlet ,  aep- 
lembre  1831)  que,  an  midi  de  la  prOTincedeB  Hiaes,  les  bois dAOfdaBi 
sur  le  Tersant  occidental  de  la  Serra  do  Espinhaco.  Il  J  a  plus  ;  toujours 
au  midi,  vers  la  proriuce  de  Saint-Paul ,  j'ai  trouvé  un  pays  entièrement 
baMdana  l'espace  de  9  lieues  enriroa.  an  dell  de  la  Serra  da  Hantiqnien, 
depoia  Baepeodj  jnaqa'k  rendrait  appeU  Corrtfo  FMido.  Plus  an  midi 
Nioore.daiM  la  proviiKe  m(me  de  S.  Paul ,  Tenant  de  Gojaz,  j'ai  tra- 
versé des  bois  qui  commencent  à  I  lieue  du  Rio  Tibaya,  sur  un  terrai» 
qni  ne  m'a  point  semblé  pins  montneui  que  celui  que  j'avais  parcouru 
les  jours  prtoédeatg ,  et  ces  bois  se  sont  prolongés  dans  nn  espace  d'k 
pen  près  14  lieoes  juaqu'aui  montagnes  même  de  Jundiabj,  et  sont,  par 
coas6iuent .  situés  aussi  au  deli  de  ces  montagnes  ;  or  celles-ci  appar- 
tiennent bien  co'taiaemeut  k  cette  partie  de  la  Serra  do  E^inha^oqtii 
a*  dirige  dans  la  province  de  S.  Paul ,  da  sud-oueat  vers  le  nord-iM. 


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DU  RIO  DE  S.  FRAHaSGO.  Gl 

ntotionsont  sufAsamment  prouvé  le  contraire  (1).  Comme 
la  régùm  d«$  fortts  se  divise  en  plusieurs  sous-régione ,  de 
même  anssi  on  en  obtfCtye  deui  bien  distinctes  dans  la  ré- 
gion des  campos ,  qui ,  tantdt  ne  présente  que  des  herbes 
et  des  sous-arbrisseaux  (taboîevos  ■detecbertog) ,  et  tantAt 
^he  çà  et  li ,  au  milieu  des  pdloragea ,  des  arbres  tortueux 
et  rabougris  (taboîeirot  eobertoi).  Les  deui  gmu-régùmi 
entre  lesquelles  se  partagent  les  campos  n'ont  peut-être 
pas  de  limites  aussi  précises  que  celles  des  trois  sous-régioas 
dont  l'ensemble  compose  la  région  des  forêts ,  savoir,  les 


(1)  Dn  Tojagrar  qoi  ■  trireraé  U  régtMi  des  bois  vierges  en  miraot 
Il  fnnàe  roule  de  Rio  de  Jineiro  à  Onro  PreM ,  et  qni  ensuite  ■  passé 
dus  tes  mmpoj ,  dtfinit  ce  mot  de  la  maaière  auivuite  ;  ■  Le  oom  de 
tampo*  déûgna  uoe  suite  de  eoUinei  pnsqoe  enitèrement  dépouilliee 
dt  TéféuUoa  :  ce  n'est  que  4wis  les  vallées  qo'oa  iroDTe  quelques  ar- 
bres et  un  peadeTerdnre ;  oo  oeToitde  tous  cAtés  que  des  plolAuix 

arides  (Scz.,  Smto.,  STT,  278).  ■  Puis ,  quand  le  même  auteur  veut  pÙD- 
dte  le  disUiet  des  DiaiiHDtt ,  il  donne  cette  antre  déflnitkni  ;  ■  tes  eam~ 
Pùt  lutt  àtn-plaiM$  arides,  k  peine  cfiarertes  d'ane  monise  léfèr* 
(  ].  c.  333).  ■  Des  obserTalenrs  tr^-b«biles,  Uartiiu.  Pohi ,  Gardncr,  se 
Mot  occupés  »fte  un  soin  particulier  de  la  TégélalioD  de  Minas  Geraes, 
et  il  n'est  pas  k  ma  Gonnaissance  qu'aucDD  d'eni  ait  rapréseuté  les  ranT- 
pot  enomedes  eolUnet  prei^iu  ntUnmttU  ttépouHUtt  iÊvégébMm. 
Le  aanni  Harliua  dit ,  comme  moi ,  qu'ils  diStreot  beaucoup  entre  eux, 
et  j'en  pourrais  citer  dont  il  fait  nn  tableao  encbantenr.  Ceux  que  l'on 
Iratene,  ea  sortant  des  bols  tlerges-,  pour  se  rtudre,  par  la  grande 
tMie,  d«  U  capitale  dn  Brésil  k  Onro  Prelo,  ne  saaraieiit  être  mieat 
nuparés  qn'anx  pacages  de  plusieurs  de  dos  boules  montagnes  d'Eu- 
rope. Quant  an  district  des  Uiamaots,  il  est  incontestable  qne,  en  une 
(iMk  d'endroits,  il  serait  eotièrement  rebelle  à  la  culture;  mais  c'est 
pent>étre  dans  ce  district  qne  Ton  tronve  la  pins  belle  Flore  pbanéro- 
gmiqne  de  tout  le  Brésil  méridional,  et  ni  M.  Gardner  ni  moi  n'avons 
TD ,  aoil  dans  l«a  alentours  de  Diamantina  (Tijuco) ,  soit  dans  les  antres 
parties  de  ta  prtn>ince  des  Minea ,  dtt  plaine»  A  peiitt  emteerlet  ifWM 


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«i  VOYAGE  AUX  SOURCES 

matos  vùrgen»,  les  eatinga»  et  les  earraicos  (i).  Cependant 
on  peut  établir  que  les  parties  les  plus  élevées  de  la  régùm 
des  campoê  sont  généraleinent  couvertes  de  pâturages  her- 
beux, et  que,  dans  les  parties  les  plus  basses,  les  pâturages 
sont  parsemés  d'arbrisseaux.  Ainsi  je  n'ai  trouvé  que  des 
campoi  formés  d'herbes  et  de  sous-arbrisseaux  dans  une 
immense  portion  de  la  plus  haute  peut-être  des  eomarcoi 
de  la  provinre  des  Mines,  celle  de  S.  Joâo  d'el  Rei  ;  et  ne 
sont  encore  des  pâturages  de  même  nature  que  j'ai  revus 
partout,  en  traversant,  presque  au  pied  de  la  Serra  do  Es- 
pinhaço ,  le  pays  Tort  élevé  qui ,  à  l'ouest  de  cette  même 
Serra,  s'étend  de  Caeté  (2)  ou  Villa  Nova  da  Rainha  aux 
limites  du  territoire  de  S.  Joâo  d'EI  Bei.  Au  contraire,  ainsi 
qu'oD  le  verra  plus  tard ,  j'ai  trouvé  beaucoup  de  pâturages 
parsemés  d'arbres  rabougris  sur  le  territoire  de  la  comarca 
de  Paracatû,  et  en  1817  j'avais  constamment  observé  le 
même  genre  de  végétation  dans  les  160  lieues  portugaises 
que  je  parcourus  au  milieu  du  Sertâo,  k  peu  près  entre  les 
14*  et  18*  d^rés  de  latitude  sud,  du  cAté  oriental  du 
S.  Francisco,  à  une  distance  d^à  fort  considérable  de  la 
source  de  ce  fleuve.  De  là  il  résulte  que  la  tous-région, 
plus  méridionale  ,  des  ceanpos  simplement  herbeux  cor- 
respond particulièrement  à  celle  des  forêts  proprement 
dites  [matos  virgens],  ou^  si  l'on  aime  mieux,  que  ces 
tout-régifms  sont  plus  particulièrement  situées  entre  les 
mêmes  parallèles;  et  que  la  sous-rigxon,  plus  s^tentrio- 

(1)  Tojei  mon  TabUa»  tU  la  végétation  primitive  dant  la  pro- 
vince <U  Minât  Geraei,  àaoi  les  Annalei  dei  tcieneet  ttatureltes, 
septembre  1831,  et  ma  première  relalton^rvol.  II. 

(!)  J'ai  dit  ailleurs  pourquoi  je  doauaia  la  prélëreDce  i  cette  artho- 
praphe. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANasCO.  63 

nale,  des  campos  parsemés  d'arbres  rabougris  correspond 
duvaDtage  à  celle  des  carrascog  et  d&  catin^at  (1). 

Ce  qui  précède  indique  assez  quelle  doit  être,  dans  son 
eosemble ,  la  végétation  du  pays  situé  entra  les  forêts  et  la 
Tille  de  S.  Joào. 

Arant  d'arriTer  à  cette  ville,  je  fis  enviroo  14  lieues. 
Dans  cet  espace  s'étendent  des  campos  à  perte  de  vue.  Les 
mornes  sont  généralement  arrondis,  les  vallées  peu  pro- 
IcMides.  Dans  les  enfoncements,  l'on  voit  des  bouqaets 
de  bols  ;  ailleurs  croissent  des  Graminées ,  au  milieu  des- 
quelles sont  éparses  d'autres  herbes  et  des  sous-arbris- 
sesus.  Les  Graminées  appartiennent  à  ud  petit  nombre 
d'espèces  ;  aucune  fM^e  remarquable  ne  s'observe  chez 
les  plantes  qui  croissent  parmi  elles;  ce  sont  principale- 
ment des  Corymbifères  (Juss.),  dont  les  Qeurs  sont  flos- 
culeuses  et  hermaphrodites ,  l'involucre  embriqué ,  l'ai- 
grette sessile ,  le  réceptacle  presque  tonjoan  nu  ;  puis 
viennent  des  Mélastomées,  ensuite  quelques  Rubiacées  à 
fruits  séparables  (telles  que  les  n°*  95, 154] ,  et  enfin  les 
Ca«na(17letl50). 

Dans  la  partie  la  plus  basse  des  mornes,  Ia  végétation 
est  un  peu  différente  de  celle  des  hauteurs  ;  on  y  voit 
des  arbrisseaux  qui  appartiennent,  en  général,  à  la  fa- 
mille des  Composées ,  un  Ifyptù  (505),  et ,  en  très-grande 
abondance,  cette  Graminée  du  genre  Saccharum,  qui  se 
fait  remarquer  par  ses  tiges  dures  et  asseï  hantes,  par  ses 
feuilles  roides  et  horizontales,  et  qu'on  appelle  vulgaire- 
ment Aofro  de  reposa.  Queue-de-renard  (Ànalheriutn  bi- 

il)  TaUewi  de  la  végiUUion  dan*  la  proofne*  de  Kituu  Geraei, 
ptr  Angusto  de  S.  H.,  impriiDé  dons  le»  Àn»ale*  de»  gcitncet  tuUu- 
ritUt,  Mptembre  1831. 


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Af  VOYAOK  AUX  80DRC£S 

cornet).  Ces  campos  m'offrirent  sans  doute  des  dlffé* 

rences ,  soit  dans  la  disposition  du  terrain ,  soit  dans 

l'ensemble  de  la  végétation;  mais  je  me  réserve  de  les 

signaler,  en  présentant  les  détails  circonstanciés  de  mon 

itinéraire. 

Le  Tameux  Rio  Grande,  dans  son  cours  supérieur,  arrose 
les  campagnes  que  je  viens  de  faire  connaître ,  et  leur  com- 
munique son  nom  (le  canton  de  Atio  Gronde).  Cette  rivière 
divise  la  eomarca  de  S.  Joâo  d'el  Rei  en  deui  parties ,  l'une 
septentrionale  et  l'autre  méridionale.  ¥i\e  prend  sa  source 
dans  la  Serra  da  Juruoea,  éloignée  de  S.  Joâo  d'environ 
25  lieues  du  cAte  du  sud  ;  elle  coule  d'abord  vers  le  nwd  , 
puis  vers  le  nord-est,  puis  enfin  vers  l'occident.  A  90  lieues 
environ  de  S.  Joâo,  elle  reçoit  le  Rio  das  Mortes,  plus  loin 
le  Sapucaby ,  et  plus  loin  encore  le  Rio  Pardo  ;  elle  sert  de 
limite  aux  provinces  de  Saint-Paul  et  de  Goyai ,  et ,  réunie 
au  ParanaAi/&a ,  elle  prend  le  nom  de  Paraimà ,  pour  de- 
venir le  Paraguay,  l'un  des  deux  grands  cours  d'eau  qui 
forment  le  Rio  de  la  Plata  (4).  Voici  à  peu  près  comment 
s'expriment  MM.  Spix  et  Martius  sur  cette  bnportante  ri- 
vière :  «  Ce  n'est  pas  seulement  vers  le  sud  que,  du  voisi- 
nage de  S.  Joâo  d'K  Rei ,  on  powrait,  embarqué  sur  le  Rio 
Grande,  se  rendre  dans  le  Paraguay  et  à  Buenos-Ayres  ;  la 
navigation  serait  possible  par  les  afDnenIs  septentrionaux 

(I)  Cuu.,  Oorof.  Brat.,  I,  107,  37S.  —  Oo  utare  gte&tlement, 
à  ce  qne  prétend  Lticcock ,  qoe  le  Rio  Grande ,  lorsqD'il  est  déjk  dercDii 
un  OevTe  considérable,  disparaît  et  se  fraye  une  roole  soatemiiM  sons 
la  Borhce  d'une  plaine  immense,  qui  hii  doit  nne  riche  et  étenaelle  ver- 
dure (Hotêt  on  Brat.,  536).  Personne  oe  m'a  parlt  d'une  semblable 
merreille;  je  ne  IrouTe  rien  non  plos  dans  les  écrite  de  Caial,  de  Fi- 
larro,  de  Spix  et  de  Hartins ,  qui  JDStifie  raSHriion  de  Lnecock,  et  Je  ne 
saurais  m'empicber  de  )a  considérer  comme  erronée, 


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DU  RIO  SE  S.  FBANCISCO.  Oi 

de  cette  rivière  jusqu'à  quelques  lieues  de  Villa  Boa.  I^ 
capitaÎDe  José Pinto ,  qui,  ea  18iC,  entreprit  de  trouver 
une  roate  par  les  fleuves  entre  Villa  Boa  et  Saint-Paul ,  a 
jeté  assez  de  lumière  sur  la  géographie  de  ces  contrées  pour 
que  déjà  on  puisse  songer  à  la  communication  iiaportante 
dont  il  s'agit.  On  sait,  en  effet,  que,  si  l'on  s'embarque 
sur  le  Rio  dos  Boit ,  à  l'endroit  appelé  Annictmt ,  situé  à 
13  lieues  de  Villa  Boa ,  on  arrive  bientôt  au  Paranahyba. 
Quand  on  a  fait  3  lieaessur  cette  rivière,  on  rencontre  une 
cataracte.  De  li  au  confluent  du  Paranahyba  et  du  Rio 
Grande  où  tous  deux  réunis  prennent  le  nom  de  ParannA . 
il  n'y  a  qu'environ  âO  lieues,  et,  si  les  chutes  d'eau  doivent 
rendre  difficile  la  navigation  du  Rio  Grande  jusque  dans  les 
environs  de  S.  Joâo,  disent,  en  finissant,  MM.  Spii  et  Mar- 
tins,  du  moins  cette  navigation  ne  serait  pas  interrom- 
pue (1).  »  Quand  on  songe,  d'un  aub%  cAté,  que,  dès  à  pré- 
sent, on  communique,  par  le  Rio  do  Tocantins,  de  Goyiz 
avec  la  capitale  du  Paré,  en  s' embarquant  i  une  très-faible 
distance  de  Villa  Boa,  on  s'étonne  des  avantages  immenses 
qui  ont  été  départis  aux  Brésiliens  pour  la  navigation  inté- 
rieure de  leur  pays.  On  serait  t«ité  de  croire  que  l'auteur 
de  la  nature,  en  formant  ainsi  lui-même  des  liens  entre 
les  diverses  parties  de  cet  immense  empire,  a  voulu  indi- 
quer   ceux  qui  l'habitent  qu'ils  ne  doivent  pas  se  désunir. 
Voilà  un  point  qui ,  situé  environ  par  les  21°  7'  4"  latitude 
australe  et  les  47*  55'  longitude,  à  partir  du  méridien  de 
Paris  (2],  est  appelé  à  communiquer,  par  eau,  presque  sans 

(I)  A«iM,l,  313.—  Coosultex,  sur  ceue  MvigatioD,  l'KttMra no  de 
HaUM,  n,  193.  ' 

(3)  La  poûtiOD  que  j'iodiqae  ici,  d'après  l'ouvrage  de  Spix  tl  Har- 

tiiu  et  Ice  maihémattcieiu  porlugaîs  ciiés  par  d'Escbvcge,  csl  ceik  de 

1.  a 


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G6  VOYAGE  AUX  SOUHCFS 

interruption ,  avec  deux  ports,  Montevideo  et  Pnri,  placés 
l'un  è  l'embouchure  du  Bjo  de  la  Plata ,  l'autre  à  celle  du 
Hio  do  Tocantins,  de  jdus  avec  Matogrosso,  le  Paraguay, 
l'Entre  Rios  et  les  anciennes  Missions  de  l'Uruguay!  Que 
sont  nos  mesquines  rivières  auprès  de  ces  Beuves  gigan- 
tesques ,  qui  parcourait  tant  de  contrées  diverses  et  dont 
les  eaux ,  après  avoir  arrosé  les  arbres  majestueux  de  la 
zone  torride ,  font  naître  sur  d'autres  rives  les  humbles 
herbes  des  climats  tempérés  I  Malheureusement,  il  se  pas- 
sera sans  doute  bien  des  années  avant  que  les  Brésiliens, 
pouvant  aider  la  nature,  profitent  de  si  beaux  avantages, 
et  que  les  colons  des  environs  de  S.  Joâo ,  en  particulier, 
aient  d'autres  moyens  de  communication  que  leurs  mu- 
lets, actuellement  les  seuls  navires  de  leurs  déserts  (1). 

C'était  de  l'or  que  cherchaient  les  premiers  habitants 
du  canton  que  je  parcourus  pour  me  rendre  à  S.  Joào ,  et 
qui ,  comme  je  l'ai  dit,  est  arrosé  par  les  coomienc^nents 
du  Rio  Grande  ;  çà  et  là  on  voit  même  encore  les  traces  de 
leurs  travaux.  Peu  à  peu  cependant  le  métal ,  objet  de  tant 
de  recherches,  se  présenta  avec  moins  d'abondance;  il  de- 
vint plus  difficile  de  l'extraire  du  sein  de  la  terre ,  et  alors 
on  chercha  dans  l'agriculture,  et  principalement  dans  l'é- 
ducation des  bestiaux,  des  ressources  que  n'offrait  plus 

s.  Joào  d'El  Rci ,  ville  pu  liqiieHe  ae  passe  point  1«  Via  Grande.  C'est 
Ponte  Xova  qui  est  le  liea  juaqa'où  les  premiers  de  ces  saTanis  Toai  ro- 
monter  (a  navigitioa  du  Rio  Grande  :  mais  Ponte  Kova,  d'après  leur  carte 
g<!ni!rale  du  Btôsi} ,  semblerait  £lre  situd  h  pca  près  sous  le  uiéme  paral- 
lèle qne  S.  Jolo  et  k  environ  9  i  10  lieues  portugaises  de  cette  Tille.  Je  Fe- 
rai remarquer  que  les  mêmes  saranls,  en  di'sigaant  Ponte  Jim»,  oe  disent 
pourtant  pointqiie  la  navigation  ne  pourrait  pas  aller  plus  loin  encore. 

(1)  Celte  Ûgan  orientale  u'est  point  /trjingïre  aui  Hineiros  ;  c«r  ils 
se  Eeirenl  souvent  dn  mol  navrgar  quand  ils  parlent  de  leurs  voyages. 


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DU  BIO  DE  S.  PIUNCISCO-  67 

l'extraction  de  l'or.  Les  eicellents  pâturages  des  environs 
da  Rio  Grande  fournissent  aujourd'hui  (  4819,  1823)  la 
plus  grande  partie  des  bestîaui  qui  se  consomment  dans 
la  capitale  du  Brésil,  et  quelques  agriculteurs  de  ce  pays 
possèdent  jusqu'à  cinq  mille  bétes  à  cornes  (1). 

Bien  différents  de  ceux  des  Campos  dos  Goitacazes  (3) , 
les  bestiaux  du  canton  de  Rio  Grande  sont ,  avec  juste 
raison,  vantés  pour  leur  force  et  pour  leur  grandeur.  Ce- 
pendant on  est  obligé  de  leur  donner  du  sel ,  ainsi  que 
cda  se  pratique  dans  les  parties  de  la  province  des  Mines, 
où  il  n'y  a  ni  terrains  salpêtres  ni  eaux  minérales;  ainsi 
qne  cela  se  pratique  encore  dans  la  province  de  Saint-Paul , 
la  Colombie  et  l'Amérique  septentrionale,  depuis  la  ISou- 
velle-Ecosse  jusqu'au  Mississipi  {S)  :  tous  les  mois  ou  en- 
viron ,  chaque  bète  obtient  une  poignée  de  la  substance 
pour  laquelle  elle  a  un  goût  si  prononcé.  Tandis  que,  dans 
le  Sertâo  (désert)  oriental  du  S.  Francisco,  les  vachers,  qui, 
le  plus  souvent,  vivent  loin  des  yeux  de  leurs  maîtres,  sont, 
en  général ,  des  hommes  libres  (4) ,  ici  c'est  ordinairement 
à  des  esclaves  qu'est  confié  le  soin  des  bestiaux.  Comme 
dans  toutes  les  parties  du  Brésil  que  j'ai  parcourues,  on  ne 
sait  pas,  dans  le  canton  de  Rio  Grande,  ce  que  c'est  qu'une 
étable  ;  cependant  on  n'abandonne  pas  le  bétail  &  lui-même, 
comme  cela  a  Heu  dans  le  Sertâo.  Les  cultivateurs  qui  ^oc- 
cupent, un  peu  en  grand,  de  l'éducation  des  bètes  i  cornes 
divisent  leurs  pâturages  en  différentes  portions ,  soit  par  des 

(1)  Ce  n'est  p«s  sealemeot  en  1819  que  j'ai  tr«Ter«é  le  uoton  de  Rio 
Grand*  ;  je  l'ai  encore  parcouru  en  1822. 
(S)  Tojei  mon  Voyage  dant  U  diitrict,  etc.,  n,  lt7. 
(9)  Toilage  datu  ta  htatU  Peruylvanie,  H,  3S1-3. 
(1)  Vogaçe  dan*  la  promnee  de  Rio  de  Janeiro,  elc,  n ,  330. 


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ut  VOVAGE  AUX  SOURCES 

rossés,  soit  A  l'aide  de  palissades  Tailes  avec  de  gros  pieux, 
qui  ont  au  moins  la  hauteur  d'un  homme.  Dans  un  de  ces 
pâturages,  on  met  les  vaches  k  lait;  un  autre  est  pour  les 
veaux,  un  troisième  pour  les  génisses ,  un  autre  enfin  pour 
les  taureaux.  On  tient  les  génisses  et  les  taureaux  dans  des 
pAturages  séparés,  afin  que  les  premières  acquièrent  assez 
deforcepour  produire  des  petits  vigoureux,  et  qu'elles  ne 
soient  pas  couvertes  hors  de  saison.  Quant  aux  vaches  k 
lait,  elles  ont  toujours  dans  leur  pâturage  un  taureau,  que 
l'on  appelle  foro  gnmde  et  que  l'on  pourrait  comparer  au 
pasteur  des  juments  du  Ser(ào(1);  c'est,  en  quelque  sorte, 
à  lui  qu'est  confiée  la  garde  du  troupeau;  il  le  défend  avec 
fureur  contre  les  taureaux  qui  s'échappent  des  pâturages 
étrangers,  mais  on  prétend  qu'il  épargne  davantage  ceux 
qui  ont  été  élevés  avec  lui  dans  lii  même  fasenda. 

Jusqu'à  ce  que  les  veaux  soient  assez  forts  pour  manger 
de  l'herbe ,  on  les  garde ,  près  de  la  fazenda ,  sous  un  han- 
gar. Quant  i  ceux  qui  vont  au  pAturage  ,  on  les  enferme 
chaque  soir  dans  un  ewrral,  qui  est  un  espace  de  terrain 
fort  petit  et  entouré  de  palissades ,  lequel  tient  immédiate- 
ment à  l'habitation  ou  au  retira  ,  espèce  de  chalet  dépen- 
dant ds  l'habitation  elle-même  (â).  Le  lendemain  matin  , 
on  va  chercher  les  vaches  dans  leurs  pâturages,  lorsqu'elles 
en  ont  de  fermés  ;  celles  que  l'on  a  coutume  de  laisser  libres 
se  rapprochent  elles-mêmes  de  la  maison  du  maître.  Quand 
elles  arrivent,  les  veaux  ont  déjà  été  mis  dans  la  cour  de  la 
fazenda.  On  y  fait  entrer  successivement  une  quantité  de 
vaches  qui  correspond  au  nombre  de  personnes  qae  l'on  a 

(1)  royatr«  <latu  I«i  provincu  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  Il,  337. 
{i)  J'ai  d^jà  donDÏ,  dtiu  mt  premiire  rebUUm,  rtipYmtioa  àt» 
mot»  rurral  et  retiro. 


Disiti.rdrii.Goo'^lc 


DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.        .  KD 

pour  les  traire.  Chaque  veau  reconnaît  sa  mère  et  s'approche 
pour  la  teter.  On  le  lie  h  la  jambe  droite  de  la  vache ,  la 
tète  tournée  vers  les  mamelles  ;  on  tire  le  lait  de  trois  de 
ces  dernières  et  on  laisse  la  quatrième  pour  le  veau.  Le 
soir,  on  réunK  encore  les  vaches  et  leurs  veauT ,  mats  alors 
00  laisse  ceux-ci  teter  à  leur  aise;  ensuite  on  enferme  les 
veaux ,  comme  je  l'ai  dit ,  et  l'on  reconduit  les  vaches  au 
pâturage.  Quand  le  propriétaire  ne  met  point  les  veauT 
dans  un  pAturage  Terme,  ils  n'attendent  pas  ordinairement 
qu'on  aille  les  chercher;  d'eux-mêmes  ils  se  rendent  à  la 
fazmda  ,  tous  les  jours  À  la  même  heure.  C'est  un  plaisir 
de  voir,  chaque  soir,  ces  jeunes  animaux  accourir,  en  bon- 
dissant ,  pour  revoir  leur  mère  et  prendre  leur  nourriture 
accoutumée. 

En  général ,  dans  les  Mines,  on  ne  met  le  feu  aux  cam- 
pot  qu'au  temps  de  la  sécheresse;  mais  dans  le  canton  de 
Rio  Grande,  en  particulier,  les  propriétaires  des  grandes 
fazmdas  ont  coutume  de  diviser  en  quatre  portions  les  pâ- 
turages destinés  aux  vaches  â  lait,  et,  tous  les  trois  mois , 
on  met  le  feu  à  l' une  des  portions  ,  pour  procurer  à  ces 
animaux  une  herbe  fraîche.  A  cet  effet,  un  homme,  à  pied 
ou  à  cheval ,  parcourt  le  pâturage  qu'  on  veut  brûler ,  traî- 
nant derrière  lui  un  long  bambou  enflammé,  et  ayant  tou- 
jours soin  d'avancer  dans  le  même  sens'que  le  vent.  Le 
pâturage  est  bientôt  consumé,  et,  peu  de  temps  après ,  il 
succède ,  à  des  herbes  desséchées  .  un  gazon  fln  ,  du  plus 
beau  vert,  qui  ressemble  un  peu.au  froment,  quand  il 
commence  à  sortir  de  terre. 

Dans  les  environs  de  Juruoca,  village  situé  à  peu  près  à 
23  lieues  de  S.  Joâo,  vers  la  source  du  Rio  Grande,  un 
propriétaire  me  disait  que,  d'après  la  division  qu'on  fait 


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70  VOYAGE  AUX  SOURCES 

des  pâturages  en  différents  verts  [verdes)  (1  ),  par  le  moyen 
dés  incendies,  on  ne  peut,  dans  un  espace  de  S  lieues, 
nourrir  plus  de  6  à  700  tètes  de  bétail.  CeU  tendrait  à 
expliquer  pourquoi  j'ai  eu  à  me  plaindre  de  faire  beau- 
coup de  chemin  sans  roir  une  seule  béte  h  cornes  ;  cepen- 
dant il  est  encore  assez  vraisemblable  qu'on  ne  profite  pas 
autant  qu'on  le  devrait  de  l'immense  étendue  qu'ont,  en 
général ,  les  fazendas. 

Lors  de  mon  voyage  (1819],  les  bœu&,  dans  le  canton 
de  Rio  Grande,  s'achetaient  4,000  reis  (25  Trancs),  et  ils 
se  revendaient  7,000  reis  à  Rio  de  Janeiro.  Quant  aux  va- 
ches, on  ne  s'en  défait  que  lorsqu'elles  sont  trop  vieilles 
pour  porter  encore.  Un  propriétaire  ne  pourrait,  sans  en- 
tamer son  capital,  vendre,  chaque  année,  plus  du  dixi^e 
de  son  troupeau.  Si  le  bétail  rend  aussi  peu  au  cultivateur, 
ce  n'est  pas  qu'ici,  comme  dans  le  sud  du  Brésil,  on  ab- 
sorbe une  partie  de  son  troupeau  en  se  nourrissant  uni- 
quement de  la  chair  de  ses  vaches,  car,  dans  ce  pays, 
les  gens  les  plus  aisés. ne  mangent  que  des  haricots,  du 
porc,  da  rii,  du  lait,  du  fromage  et  de  la  eangiea  (S); 
mais  on  fait  périr  un  grand  nombre  de  veaux  par  le  régime 
austère  anquel  on  les  condamne  pour  profiter  du  lait  de 
leur  mère.  Les  ftaendeiros  (3)  riches  devraient,  ce  me  sem- 
ble, faire,  cfaaqiîe  année,  le  sacrifice  du  lait  de  quelques- 

(1)  Uestàpeiite  nécessaire  de  dite  que,  par  le  mot  porto gaii  vrr de* 
qae  je  traduis  ici  litténlemeot,  il  fant  euleodre  les  pleurages  de  diffË- 
reols  Ages  qui  rjsnlteot  de;  ioceodies  successif*  ddot  j'ai  parlé  pins 
haut. 

(2)  Hom  qae  l'on  donoe  au  maïs  ddpouiUé  de  ses  euveloppes  et  sim- 
plement cuit  dans  de  l'eao.  Oo  désigne  le  mime  mets  sous  le  nom  de 
mofammTOf  cfaei  les  Espagnols-Am^ricsins  de  la  Bania  Oriental. 

(3^  Les  faiendtirot  sont  Ira  propriétaires  de  fatendat. 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


DU  BIO  DE  S.  FtANCISCO.  71 

unes  de  leurs  meilleures  vaches  pour  obtenir  de  plus  belles 
génisses,  et  surtout  des  taureaux  plus  vigoureux ,  et ,  par 
là,  empêcher  la  dégénération  de  1»  race  bovine. 

Meilleures  laitières  que  celles  de  Formigas,  S.  Eloi  et 
probablement  tout  le  Sertâo  oriental ,  les  bonnes  raches 
du  canton  de  Rio  Grande  donnent,  comme  celles  des  en- 
virons de  Villa  Rica  et  de  Sitlo  do  Panlista,  près  Tes  Cam- 
pes dos  Goitacaies  (1),  quatre  bouteilles  de  lait  par  jour. 
Les  veaux  tettent  jusqu'à  l'âge  d'un  an,  et,  quand  une  va- 
che n'a  plus  de  veau,  ses  mamelles  se  dessèchent,  comme 
cela  a  lieu  dans  toute  la  province  des  Mines,  vraisembla- 
blement tout  le  Brésil  et  même  dans  la  Colombie,  singula- 
rité qui  parait  mériter  l'attention  des  loologistes  (S). 

Nourries  dans  des  pâturages  excellents,  les  vacbee  qui  ont 
encore  leurs  veaux  donnent  un  lait  presque  anssi  crémeux 
que  celui  des  troupeaux  de  nos  monti^nes  d'Auvergne.  On 
ne  met  point  le  lait  dans  des  pots,  mais  dans  de  petits  ba- 
rils cerclés  en  fer,  et  on  le  transvase  avec  des  gourdes  cou- 
pées longitudinalemeot  par  la  moitié.  On  fait ,  en  général , 
beaucoup  de  fromages  dans  la  eomarca  de  S.  Joâo  d'EI  Rei  ; 
mais  le  canton  de  Rio  Grande  est  celui  qui  en  fournit  le 
plus,  et  c'est  un  des  articles  qu'il  exporte.  Voici  de  quelle 
manière  se  font  ici  les  fromages.  Aussitôt  qu'on  a  tiré  le  lait, 
on  y  met  de  la  présure,  et  il  caille  à  l'instant;  on  donne  la 
préférence  à  celle  de  capivara  (cabiais) ,  lorsqu'il  est  possible 
de  s'en  procurer.  On  a  des  moules  en  bois  d'environ  2  pou- 
ces de  haut,  dont  le  milieu  présente  un  espace  circulaire  en- 
tièrement évidé,  à  peu  près  de  la  grandeur  d'une  assiette. 

(I)  Toïa  moD  PoyotftdaiM  UdUWielin  MomanU,  etc.,  I,1B3: 
H,  9». 
l3)  L.«.,  1,181. 


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n  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Ces  moules  se  placent  sur  une  table  étroite  dont  le  plan  est 
incliné.  On  les  remplit  de  lait  caillé,  que  l'on  a  eu  soin  de 
séparer  en  petits  morceaux  ;  on  presse  avec  la  main  ce 
caillé  ainsi  égrumelé  :  le  petit-lait  s'échappe,  ei  il  va  tom- 
ber dans  une  gamelle  placée  au-dessous  du  bout  de  la  table 
le  moins  élevé.  A  mesure  que  le  caillé  s'affaisse  dans  le 
moule,  on  en  remet  de  nouveau  ;  on  recommence  à  pres- 
ser, et  l'on  continue  jusqu'à  ce  que  le  moule  soit  plein  de 
caillé  bien  pressuré.  On  couvre  de  sel  le  dessus  du  fro- 
niage,  et  on  le  laisse  ainsi  jusqu'au  soir;  alors  on  le  re- 
tourne, et  on  couvre  l'autre  c6té  de  sel.  Le  lendemain, 
"on  expose  le  fromage  à' l'air  dans  un  endroit  ombragé; 
on  a  soin  de  le  retourner  de  temps  en  temps ,  et  il  est  Tait 
avant  l'espace  de  huit  jours.  Ces  fromages,  auxquels  on  ne 
donne  pas  d'autre  nom  que  celui  de  fromagei  de  Minas, 
sont  fort  renommés  :  leur  substance  est  compacte  ;  leur 
couleur  ressemble  à  celle  des  fromages  de  Gruyères,  mais 
elle  est,  je  crois,  d'un  jaune  plus  prononcé  ;  leur  savenr 
est  douce  et  agréable.  Quand  on  veut  transporter  les  fro- 
mages à  Rio  de  Janeiro,  on  les  met  dans  des  paniers  {ja- 
cas]  carrés  et  aplatis ,  faits  avec  des  morceaux  de  tiges  de 
bambou  grossièrement  tressés  ;  chaque  panier  contient  cin- 
quante fromages ,  et  deux  paniers  font  la  charge  d'un 
mulet. 

On  élève ,  dans  le  canton  de  Rio  Grande,  non-seulement 
un  grand  nombre  de  bètes  à  cornes,  mais  encore  beaucoup 
de  cochons  ;  on  engrai^e  ceux-ci  avec  des  racines  d'tnAa- 
me*  [Calladium  esculfnlum)  et  de  earâs  {Dioscorea] ,  et 
l'on  cultive  en  grand  ces  deux  espèces  de  plantes  (1).  Le 

(I)  Ici  j*  dois  pn'monir  If  lecteur  rrantiis  conlre  nne  eneur  de  noms 


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DU  RIO  «E  S.  VDANCISCO.  7S 

propriétaire  du  rancho  du  Rio  das  Mortes  Pequertù,  près 
S.  Joâo  d'EI  Reî,  chez  lequel,  comme  on  le  verra,  je  sé- 
journai fort  longtemps,  ne  paraissait  point  riche,  et  pour- 
tant il  avait  deux  champs  de  carat  d'une  certaine  étendue. 
Le  lard  forme,  comme  les  fromages,  une  branche  de  com- 
merce très-importante  pour  la  comarca  de  S.  Joâo  d'EI 
Rei.  C'est  aussi  dans  ces  paniers  de  bambou,  appelés /ocm, 
qu'on  le  transporte  à  Rio  de  Janeiro.  Deux  paniers  de  lard 
forment  la  charge  d'un  mulet,  et  chaque  panier  contient 
3  arrobes  de  lard  (44  kilog.  1  hect.)  quand  le  mulet  n'est 
pas  encore  habitué  à  la  charge ,  et  4  lorsqu'il  y  est  déjà 
accoutumé. 

Les  cultivateurs  de  ce  canton  et ,  en  général ,  ceux  de  la 
comarca  de  S.  Joâo  possèdent  un  troupeau  de  moutons. 
là  on  ne  fait  pas  comme  dans  les  environs  de  Rio  de  Ja- 
neiro, on  ne  laisse  point  perdre  la  laine  :  on  tond  les  bre- 
bis deux  fois  par  an ,  au  mois  d'août ,  vers  la  fin  des  froids, 
el  six  mois  après,  avant  celle  de  la  sécheresse.  Les  fazen- 
deirosen  font  faire,  dans  leur  maison,  des  tissus  grossiers, 
dont  on  se  sert  principalement  pour  habiller  les  nègres. 
On  l'emploie  aussi  pour  fabriquer  ces  chapeaux  â  larges 
bords,  à  forme  basse  et  arrondie,  dont  les  Mineiros  ont 
coutume  de  se  couvrir  la  tète  {chapeo  de  Mineiro],  et  qui, 
s'ils  sont  d'une  pesanteur  extrême,  ont  pourtant  l'avan- 
tage de  garantir  de  l'ardeur  du  soleil  comme  de  petits  pa- 
rasols; les  propriétaires  envoient  leur  laine  â  des  hommes 

duu  l*qiMlle  il  est  facile  à  lomber  et  h  bquelU  n'oat  même  pas  échappé 
deux  Ditnralialea  lUemauds  bien  jmteiueDl  célèbres  (  Spix  et  Uartios , 
Belu,  I  )  ;  c'est  de  prendre  l'inhanie  des  Brésilieas  pour  les  jpnoMei 
d«  DOS  colmiies  :  le  premiet  eet  le  Calladium  aeulnitum  des  boU- 
oistes  :  les  seconds  soal  des  espaces  du  genre  Dioicorea. 


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74  VOYAflE  AUX  SOURCES 

qui  saveat  faire  ces  chapeaui,  et  ils  leur  en  payent  la 
ftiçon. 

On  croira  sans  doute  que  les  cultivateurs,  tirant  un 
grand  parti  de  leurs  moutons,  donnent  beaucoup  de  soins 
à  )a  conservation  de  ces  animaux  ;  mais  il  n'en  est  pas 
ainsi.  On  ne  les  fait  point  garder  (1),  et  ils  sont  exposés  aux 
ravages  des  chiens  domestiques  et  à  ceux  de  quelques  bètes 
sauvages,  entre  autres  celles  appelées  cackorros  do  campo 
(chien  des  champs,  Canis  campestris  Neuu>.,  ex  P.  Ger- 
vais).  Lorsque,  eo  i8â2,  je  passai  par  la  fazenda  do  Be- 
tirù,  habitation  située  à  environ  17  lieues  de  S.  Joâo  et 
à  S  du  village  de  Jurugca,  la  maîtresse  de  la  maison  me  dit 
qu'elle  avait  autrefois  possédé  un  troupeau  de  montons 
assez  considérable,  et  qu'elle-même,  avec  ses  filles,  fabri- 
quait des  tissus  de  difiérentes  e^ces  ;  mais ,  comme  on 
avait  fait  passer  tout  récemment  devant  la  fasmda  un 
des  chemins'qui  vont  de  S.  Joâo  à  Rio  de  Janeiro,  celui 
appelé  caminho  da  Part^yba  Nova,  et  que  les  pauvres 
moutons  étaient  sans  pasteur,  le  troupeau  avait  été  détruit 
par  les  chiens  des  muletiers. 

On  voit ,  d'après  tout  ceci ,  combien  il  serait  important 
pour  les  colons  qu'on  leur  fit  venir  d'Europe  des  chiens  de 
berger  d'une  bonne  race,  et  peut-être  même  quelques  pas- 
teurs expérimentés  capables  d'en  former  d'autres  et,  assez 

(1)  H.  Lnccock  dit,  t  U  vérité,  qu'il  ■  va,  aoa  loin  de  S.  Joio  d'El 
Hei ,  plusieurs  bergers  dans  an  seul  jour,  et  il  ajoute  tpi'il  lui  semblait 
coDtriire  aai  lots  de  U  nitore  que  des  Ironpeanx  blues  fussent  saign.'s 
par  des  iMiDiiies  noirs  [yotei,  444).  11  aérait  fort  k  désirer  que  les  lois 
de  la  utnre  fnswnt  plus  soaveat ,  au  Brésil ,  violées  de  relie  manière , 
et  qu'elles  ne  le  Aueeot  jamais  aatrement.  Je  prisume  que  les  berfern 
doDl  parle  M.  Laccock  allaienl  occasiODiKilenienl  rhercher  1rs  brekâs 
daDs  la  campagne  pour  les  u 


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DU  UO  DE  S.  FIAMCISCO.  T9 

iotelligents  pour  sentir  que,  dans  un  pajs  lussi  chiad, 
on  ne  peut  pas  Boivre  exactement  les  pratiques  usitées  en 
fiance  et  en  Allemagne.  Le  gouvernement  brésilien,  à 
l'ezemple  de  ceux  d'Europe,  devrait  aussi  tourner  ses  re- 
gards vers  l'amélioration  des  troupeaux  et  tirer  de  nos  <  ou- 
trées des  mérinos  on  des  métis,  pour  essayer  de  les  natu- 
raliser dans  les  immenses  pâturages  du  Brésil ,  qui  varient 
pour  la  qualité  et  dont  quelques-uns ,  par  leur  élévation, 
ne  se  trouvent  point  exposés  h  des  chaleurs  trop  fortes.  Ce 
pays  n'a  pas,  sans  doute,  une  population  assez  considérable 
pour  qu'on  songe  à  y  établir  de  grandes  manufactures  ; 
mais,  puisque  les  cultivateurs  font  déjà  cbez  eux  des  tissus 
'de  laine,  ponrquoi  ne  pas  Ucher  de  les  amener  à  fabriquer 
des  étoffes  plus  fines,  et  d'affranchir  par  là  certains  can- 
tons d'un  tribut  onéreux  payé  i  l'étranger?  Il  y  a  plus  : 
puisque,  dans  le  Brésil ,  on  n'est  pas  obligé  de  nourrir  les 
moutons  i  la  crèche,  puisque,  par  conséquent,  les  frais 
doivent  y  être  moins  considérables  qu'en  Europe,  pourquoi 
oe  pas  feire  des  efforts  pour  mettre  ce  pays  en  état  d'ex- 
porter de  la  laine  comme  il  exporte  du  sucre,  des  cuirs  et 
da  coton? 

D'après  tout  ce  que  j'ai  dit  plus  haut,  i)  est  facile  de  ju- 
ger qu'il  n'en  est  point  des  fasendas  du  canton  de  Rio 
Grande  comme  de  celles  qui,  reléguées  dans  les  déserts 
de  Goyaz  et  même  dans  quelques  parties  éloignées  de  la 
province  des  Mines,  ne  rapportent  presque  rien  à  leurs 
propriétaires.  Le  voisinage  de  Rio  de  Janeiro  met  ce  pays 
et  toute  la  comarca  du  Rio  das  Mortes  dans  une  position 
[dos  favorable  ;  cependant,  suivant  un  homme  qui,  par  sa 
position ,  pouvait  savoir  la  vérité  et  qui  habitait  le  village 
de  Jnruoca,  les  fasendâroi  ne  retirent  pas  plus  de  10  pour 


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76  VOYAGE  AUX  SOURCES 

100  de  leurs  capitaux,  sans  en  déduire  les  frais  et  les  im- 
pôts. Quelque  basse  qu'elle  paraisse,  cette  évaluation  est 
bien  loin  d'être  sans  vraisemblance  :  en  effet,  ddus  savons 
déjà  que  le  fazetideiro  ne  peut  vendre,  chaque  année ,  que 
le  dixième  de  son  troupeau  de  bètes  à  comes  ;  donc  il  se- 
rait indispensable  de  trouver  dans  quelque  autre  branche 
de  revenu  l'intérJït  du  capital  que  représentent  les  pâtu- 
rages, les  bâtiments  de  la  fasenda,  les  esclaves  et  les  mu- 
lets. Les  récoltes  ne  servent  qu'à  la  nourriture  de  la  fa- 
mille ;  par  conséquent,  il  faudrait  que  l'intérêt  dont  il  s'a- 
git fût  représenté  par  le  produit  du  lard  et  du  fromage. 
MfHS,  s'il  est  vrai ,  comme  tout  le  monde  l'assure,  que  celui 
du  fromage  est  absorbé  par  l'achat  du  sel  dont  on  a  besoin 
pour  le  bétail,  etc.,  il  doit  rester  au  propriétaire  bien  peu 
de  chose  sur  ses  revenus  ;  car  il  est  nécessaire  qu'il  rem- 
place les  mulets  et  les  esclaves  qu'il  perd,  qu'il  achète  des 
fers  et  des  clous  pour  ses  bètes  de  somme,  et,  quoique  l'en- 
Iretien  de  ses  bâtiments  soit  peu  coûteux .  puisqu'il  trouve 
chez  lui  le  bois  et  qu'il  fait  faire  les  plus  gros  ouvrages  par 
ses  nègres,  il  faut  néanmoins  que,  de  temps  en  temps,  il 
paye  quelques  journées  de  charpentier  et  de  menuisier, 
et  qu'il  achète  des  tuiles. 

D'après  ce  qui  m'a  été  dit  (1822)  à  Juruoca,  les  bonnes 
fazendas  de  ce  pays  sont  portées,  dans  les  inventaires,  è  la 
somme  de  40  à  50,000  crusades  [100  à  155,000  francs).  Si 
l'on  compare  la  manière  dont  vit  en  France  le  propriétaire 
administratenrd'  un  fonds  de  terrede  cette  valeur  avec  la  ma- 
nière de  vivre  d'un  fazmdeiro  de  lacontrée  qui  nous  occupe, 
on  croira  les  revenus  de  celui-ci  l>eaucoup  moins  considé- 
rables ;  mais  cette  fa^on  de  juger  manquerait  d'exactitude 
(ISIO),  pui-ique  le  Brésilien  n'achèle  presque  rien  qui  ne 


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DU  RIO  DE  S.  FEANCISUI.  TT 

soit  infloiment  plus  cher  que  c«  qu'achète  le  Français  ou 
d'une  qualité  bien  inTérienre,  ce  qui  rerieat  au  même. 

Bieu  moÎDS  polis  que  les  fazmdeiroi  (\]  des  environs  de 
Villa  Rica  et  du  Serro  do  Frio,  ceux  du  canton  de  Rio 
Grande  et .  en  général ,  de  la  comarca  de  S.  Joâo  d'EI  Rei 
ressemblent  assez  par  les  manières  à  nos  paysans  aisés  ou  à 
nos  fermiers  de  Beauce.  S'appliquent  plus  exclusivement 
&  l'agriculture  que  les  fazendeiros  propriétaires  de  mines, 
ils  travaillent  avec  leurs  nègres,  passent  leur  vie  dans  leurs 
plantations  et  au  milieu  de  leurs  bestiaux,  et  leurs  mœurs 
doivent  oécessairement  emprunter  quelque  chose  de  la  rus- 
ticité de  leurs  occupations.  Au  contraire,  les  hommes  qui 

(1)  Ce  que  j'ai  iail  sar  ces  (aienâtiroi  diSire ,  je  dois  l'iToaer,  du 
porlr^t  qu'a  fail  d'eni  nn  touriste  qui  psrtonraîl  lenr  pajs  fa  1843 
iSoi.,  StMtti.,  280)  ;  mais  rien  doq  plus  dc  ressemble  t  ce  porlriit  dans 
roavra^  da  véridiqae  Gaf daer,  qui  est  égaleiueol  allé  tout  récemmeat  de 
DJamantiDi  iTijoco)  k  Rio  de  Janeiro,  eu  passant  par  la  cité  du  Serro  (Villa 
do  Principe)  et  par  Ouro  Preto  (Tilla  Rica).  Ce  naturaliste  et  le  savaui 
lUrtiiis  ont  joui ,  pour  rendre  leurs  descriptions  euctes ,  d'un  donhlc 
arantage  ;  ils  ont  parcouru  le  Brésil  pendant  de  longues  aoutes  et  ils  eu 
taraient  la  langue.  Le  touriste  dont  je  viens  de  parler  a  accompli  un 
TOjage  gigantesque  avec  une  rapidité  véritablement  merveilleuse  ;  il 
«lait,  le  S  décembre  1843,  k  Ouro  Preto  et  en  est  parti  le  7  ;  puis  il  a 
quitta  Diamantina  le  10  janvier  1843,  après  y  tin  via&i  resié  quelque 
temps,  et,  comme  il  le  dit  très-bien ,  ce  ne  sonl  pas  les  villes qu'babi- 
test  les  fatemUiroi  i  entre  Ouro  Prelo  et  Diamaatina,  il  a  passif  par  les 
villes  4e  Sabarà  et  de  Villa  do  Principe  (  Cidade  do  Serro) ,  il  a  visité  un 
•saei grand  nombre  de  villages,  il  a  recueilli  des  détails  iotéressanla  sur 
trois  eiploilalious  de  mines  appartenant  à  des  Anglais,  et,  parcouaùqueut, 
il  n'a  pas  eu ,  ce  me  semble ,  non  plus  un  temps  bien  cou&idÉrable  pour 
ttndier  les  fatendtirot  dans  le  cours  de  celte  excursion  ;  il  a  pu ,  sans 
doute,  en  voir  quelques-uns  pendant  les  donxe  jours  qu'il  a  mis  pour 
se  rendre  de  Rio  de  Janeiro  k  Ouro  Prelo,  mais  on  sait  que  ce  n'est  poiut 
par  cenx-U  qu'il  faut  juger  les  colons  aisés  des  eomaretu  d'Ouro  Prelo 
«t  du  Serro  do  Prio,  ni  même,  en  général,  ceui  des  autres  parties  de  ta 


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Ta  VOYAGE  AUX  80UICES 

s'adonnent  en  grand  k  l'extraction  de  l'or  ne  font  que  sur- 
veiller leurs  esclaves,  îlslie  travaillent  point,  ils  ont  plus 
de  loisir  pour  penser  et  pour  discourir,  leur  éducation  a  été 
plus  soignée,  et  ils  peuvent  soigner  davantage  celle  de  lairs 
enfants  (1817). 

Les  agriculteurs  du  canton  de  Rio  Grande  et,  m  géné- 
ral, de  la  comarea  de  S.  Joâo  ont  cependant  sur  les  mi- 
neurs un  grand  avantage,  celui  de  n'être  pas  entourés  d'un 
nombre  aussi  considérable  d'esclaves.  J'ai  dit  ailleurs  (i) 
que,  twme moyen,  les  blancs,  dans  cette  comarea,  étaient 
aux  hommes  de  couleur  derace  pure  ou  mélangée  comme  un 
est  à  trois  :  sur  la  paroisse  de  Jumoca,  en  particulier,  dans 
ses  alentours,  et  probablement  toutlecanton  de  Rio  Grande, 
les  mulâtres  sont  peu  nombreux,  et,  pour  trois  hommes  li- 
bres, on  ne  compte  qu'un  esclave.  Dans  lespaysoù  l'on 
élève  des  bestiaux,  les  esclaves  sont  en  effet  beaucoup  moins 
nécessaires  que  dans  ceux  où  l'on  cherche  de  l'or  et  où  l'on 
cultive  la  canne  à  sucre.  II  faut  peu  de  bras  pour  soigner 
des  troupeaux,  et  moins  il  y  a  d'esclaves,  moins  les  hommes 
libres  rougissent  de  travailler.  Une  grande  partie  des  tou- 
cheurs  de  bœufs  et  de  cochons ,  qui  vont  de  la  comarea  de 
S.  Joâo  è  Rio  de  Janeiro,  sont  des  blancs.  L'un  des  enfants 
d'un  fasmdeiro  devient  le  conducteur  de  la  caravane, 
un  autre  se  charge  du  soin  des  troupeaux,  et  un  autre  des 
plantations.  D'après  ceci ,  il  est  évident  que,  dans  celte 
partie  de  la  province  des  Mines,  plus  que  dans  celle  où  l'on 
lire  l'or  de  la  terre,  l'esclavage  doit  aller  en  diminuant,  à 
mesure  que  la  population  augmentera. 

I.es  femmes  du  canton  de  Rio  Grande  et,  en  général,  de 

(1  ]  Vofiag»  dant  le  dUlricl  du  DiamanU,  etc.,  1, 138. 


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DU  BIO  DE  S.  FKANaStO.  79 

la  eomarea  de  S.  Joâo  se  montrent  un  peu  ptns  que  celles 
des  autres  parties  de  la  province  des  Mines  ;  cependant , 
comme  cela  n'est  point  un  usage  universellement  reçu,  et 
que  celles  qui  paraissent  devant  leurs  hâtes  ne  le  font 
qu'en  triomphant  d'un  préjugé,  elles  laissent  voir  souvent 
une  certaine  audace  qui  a  quelque  diose  de  repoussant.  Ici 
comme  dans  le  reste  de  la  province,  les  maîtresses  de  mai- 
son et  leurs  filles  allongeaient  doucement  leur  nez  entre  le 
mur  de  la  chambre  où  je  me  trouvais  et  la  porte  entre- 
bâillée, afin  de  me  voir  écrire  ou  analyser  des  plantes,  et,  si 
je  me  retournais  brusquement,  j'apercevais  des  portions  de 
figures  qui  se  retiraient  bien  vite.  Cent  fois  on  m'a  donné 
celte  petite  comédie  (1). 

(1)  M.  1«  général  Raimnado  José  di  Çunlta  IUUm,  aTeckqnel  jemc 

niidle  d'être  g.'DéHlemcol  d'accord,  dit  (J(in.,  I,  47)  que,  à  8  lienes 

eoTiron  de  S.  Joâo  d'El  Hei ,  *  il  fut  rcfn  chez  une  dame  qui  parut  de- 

.    •  vaat  loi  el  lai  fit  voir  presqne  tonte  M  maiwa ,  démeutaut  ainai  ks 

••  aMertioas  de  qaelqoes  étrangers  qoi  ont  prÉteodu  que  les  Temmes 

■  de  Hiou  ne  se  moDlrcot  poiut  k  leurs  Mtes.  Je  n'ai  trouvé,  ajoute  le 

■  même  écrivain,  aoe  telle  coutume  établie  nuUeparl,  ou,  du  moins, 

■  les  peTBonnes  les  plus  honorables  l'ont  négligée  eu  ma  faveur.  ■  C'est 
pnDdpalemeot  la  eomarea  de  S.  Jdïo  d'El  Rei  qn's  parcourue  H.  di 
Canha  HattoB,  et ,  comme  on  Tient  de  le  voir,  les  femmes  ne  8'j  cacbeut 
pas  ansai  soigneusement  que  dans  les  antres  parties  de  la  province  de 
Uînas  :  d'ailleurs  il  ne  serait  point  extraordinaire  que  le  grade  d'ofBcier 
snpérîear  dont  était  rerètn  l'aQienr  de  l'Itinerario  l'eAI  fait  excepter  de 
ta  règle  commnne.  On  a  tu,  par  les  relations  que  j'ai  publiées,  qae,  si 
quelques  femmes  se  montrent  aux  étrangers,  en  générât  elles  se  déro- 
bent soigueusement  k  leurs  regarda.  J'ajouterai  encore  un  fait  aux  di<- 
lails  que  j'ai  déjà  donnés  sur  ce  snjet.  J'avais  passa ,  on  deux  diSUreoip* 
foi»,  enriron  soixaale  jonrs  ehei  un  fatendeiro  extrêmement  honorable 
qoi  voulait  bien  m'accordcr  de  l'amilié  el  pour  lequel  je  proftaaais  av- 
lant  d'attachement  que  d'estime.  Peu  de  temps  avant  que  nous  nous 
séparasdions  pour  jamais,  il  no  dit  avec  embarras  ;  Voujètessansdonie 

t  point  derani 


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su  VOYAGE  AUX  SOURCES 

D'Bprès  tout  ce  que  j'ai  dit  plus  haut  sur  les  habitants  du 
canton  de  Rio  Grande  et  de  la  eomarm  dont  il  fait  partie, 
il  est  évident  que  leurs  demeures  Ifazmdai)  ne  peuvent 
être  aussi  soignées  que  celles  des  propriétaires  des  parties 
aurirères  de  la  province.  Ces  dernières  ressemblent  un  peu 
à  nos  cbâieaus,  les  autres  à  nos  fermes.  Décrire  une  des 
fazendas  de  la  comarca  de  S.  Joao,  c'est  les  décrire  toutes, 
car  elles  sont ,  en  général ,  bAtîes  sur  le  même  modèle,  tin 
mur  de  pierres  sèches,  à  peu  prèsde  la  banteurd'un  homme, 
entoure  une  cour  très-vaste  au  fond  de  laquelle  sont  ran- 
gés les  cases  à  nègres,  les  bâtiments  d'exploitation  et  la 
maison  du  oialtre.  Celle-ci ,  construite  en  terre  et  en  bois  et 
couverte  en  tuiles,  présente  uniquement  un  rez-de-chaus- 
sée. La  salle  [sala]  (1)  est  la  première  pièce  que  l'on  trouve 
en  entrant ,  et  n'a  pour  ameublement  qu'une  table,  un 
couple  de  bancs,  et  souvent  un  ou  deux  bois  de  Ml.  On  man- 
que rarement  d'attacher  autour  de  la  salle  plusieurs  porte- 
manteaux destinés  è  suspendre  les  selles,  les  brides,  les 

TOUS  :  je  blime  l'auge  qni  m'oblige  k  les  éloigner  ;  miii  je  ne  pourrais 
m']' Mastotire  MUS  onirek  leur  éUbliasement...  Je  soulageai  d'un  grand 
poids  c«t  homme  recomroandalile  en  la[  répoodaut  qne  j'étais  loin  de  le 
déeapprouTer,  qu'on  ne  derait  jamais  benrter  bnuquement  les  idées 
reçues ,  qu'il  fallait  liissar  agir  le  tempe ,  el  que  peu  1  peu  il  amËnertit 
one  faenreuïe  rérorme.  Il  parait  que  cette  époque  n'est  point  encore 
arri*é«;  car  M.  Gardner,  dont  le  voyage  est  trèa-récent,  rapporte  qnll 
fbl  reçu  avec  la  plus  aimable  liospit«Lté  dans  une  fasmtla  où  j'arais 
été  moi-même  parfaitement  accaeilli ,  mais  où  je  n'avais  point  vu  la 
fflattresee  de  la  maison.  Devenue  plus  Igi^e,  cette  dame  oe  cbercba  point 
à  échqiper  aux  regards  du  voyageur  anglais;  mais  ses  filles  se  eacbi- 
rent,  comme  elle  avait  fait  «UB-mêmedana  sa  jeunesse. 

(1)  C'est  dans  la  mla  que  l'on  se  tient  ordinairement  et  qne  l'on  reçoit 
les  étrangers  {Vof/an*  da**  la  proviiua  A*  RU>  A*  Janeiro,  etc.,  1 . 
310). 


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DO  MO  DE  S.  FRANCISCO.  81 

chapeaux,  etc.  Entre  la  région  des  foriU  et  S.  ioâo,  je  fis 
halte  à  la  fazenda  da»  Veriente»  do  Sardim,  propriété  d'An- 
tonio Francisco  de  Azevedo,  qui ,  comme  je  l'ai  dit  plus 
haut  (1],  avait  fait  le  chemin  où  j'avais  passé  pour  venir  de 
S.  Gabriel  aux  eampot,  et  dont  on  me  vantait  la  richesse. 
En  voyant  cette  habitation,  on  ne  se  serait  certainement  pas 
douté  que  ce  fût  celle  d'un  homme  qui,  m'assura-t-on,  ache- 
tait ,  chaque  année,  de  cinq  à  huit  mille  bœufs  pour  les  en- 
voyer à  la  capitale.  Sa  maison,  qu'il  avait  cependant  fait 
construire  lui-même,  était  petite,  basse  et  i  un  seul  étage  ; 
les  murs,  bâtis  en  terre,  n'avaient  jamais  été  blanchis,  et 
tout  l'ameublement  de  la  salle  consistait  en  une  grande 
table,  deux  bancs  et  quelques  tabourets  revêtus  de  cuir. 
deai  ou  trois  petites  chambres,  qui  donnaient  sur  la  salle 
et  que  j'entrevis,  n'offi*aient  pas  un  ameublemrat  plus  ma- 
gnifique. Cqtendant  mon  muletier  me  faisait  un  grand  éloge 
de  cette  maison,  ce  qui,  certes,  prouve  que  le  luxe  n'avait 
pas  fait  de  grands  progrès  dans  cette  partie  de  la  province. 
Je  ne  veux  pas  oublier  de  dire  qu'on  entre  dans  ia  cour  des 
ftaendat  par  une  de  ces  portes  en  bois  qu'on  appelle  por- 
teirai  et  qu'on  emploie  aussi  pour  fermer  les  pâturages  ; 
dies  sont  faites  de  deux  montants  et  de  quelques  planches 
transversales  écartées  les  unes  des  autres  ;  on  a  soin  de 
donner  un  peu  d'obliquité  au  poteau  sur  lequel  elles  tour- 
nent, et,  retombant  par  leur  propre  poids,  après  qu'on  les 
a  ouvertes,  elles  se  ferment  d'elles-mêmes. 

Ici  je  terminerai  fe  tableau  général  du  canton  dt  Rio 
Grande  (â) ,  nom  par  lequel  j'entends ,  je  te  répète,  le  pays 

(1)  Vojei  p.  M. 

(3)  11  tant  bien  se  doimer  de  farde  de  cMifoodre  cette  contre  me  la 
pninoce  de  Bio  Grande  do  Snl ,  eomue  parait  l'avoir  fait  PUarm  quand 


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8S  .   VOTASB  AUX  SOURCES 

qa'arroseot  les  commencements  de  cette  même  liTJère ,  et 
qui ,  par  conséquent ,  est  situé  lu  midi  du  chef-lieu  de  la 
comarea  du  Rio  das  Mortes.  Je  vais  entrer  à  présent  dans 
quelques  détails. 

il  a  dit  que  ceUe  prOTiDce  fonnûsuit  d«s  froHWgH  i  CinpMdMGoiU- 
cues,  et,  comme  l'oat  fait  aussi  deevoyageiirs  justeaxnt  célébra,  cd 
attriboinl  k  la  même  proTince  les  bestUax  qni  vont  à  Bio  de  Janeiro,  do 
eHitoDdaRMQra(Mla(Spn«tV4iiTti]s,  ReiM,  I.ISÏ). 


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DU  MO  DE  S.  nunasco. 


CHAPITRE  V. 


VOTAGE    DANS   LE   CANTON    OE   RIO   GBANDE. 


TJgéUtioD  qa«  l'on  obwm  h  rentrée  des  eampot. — VÀTa»earia  Bra- 
tilientU.  —  lufluenM  de  l'tir  rif  des  eampot  snr  la  peso.  —  Passage 
da  Rio  Grande.  —  La  faunda  de  Sitiù  ;  ses  habitants.  —  Les  parasols 
d'un  usage  .général.  —  Faxmda  da»  Laranjttnu.  —  Faunâa  dot 
Vertentêi  do  Surdim.  —  Srrra  dot  dout  Irmàot.  —  Enrore  le  Rio 
Grande.  —  Le  bameaa  de  madré  de  Deot.  —  Faztnda  dt  ChaoeJ.  — 
iccident  arrivé  t  Prégent.  —  Le  Raneho  do  Rio  dot  Mortei  Ptqwno; 
rteeplion  qa'oa  ;  fait  k  l'antcnr. 

Immédiatement  après  être  sorti  des  sombres  forèta  que 
j'avais  parcourues,  presque  depuis  Rio  de  Janeiro  (1),  je 
trouvai ,  pendant  quelques  instants ,  des  arbrisseaux  de  5 
ou  4  pieds,  parmi  lesquels  la  Composée  n*  109  est  l'un  des 
plus  abondants.  Bientôt  it  ne  croit  que  des  sous-arbrisseaux 
au  milieu  des  Graminées,  et  la  Mélastomée  appelée  Mtero- 
hda  isophylla,  DC.,  se  fait  remarquer  par  les  touffes  arron- 

(I)  Itiiieraîre  approximatif  d'Alto  da  Serra  *  S.  Joio  d'Et  Rei  : 

VAllo  da  Serra  à  Sitio  (fawnda) 4       legoas. 

—  Faienda  das  LiTaojeiras 4 

—  Faienda  das  Verteates  do  Sardim.  .  1 1/ï 

—  Faienda  de  Chates 41/3 

—  Rancbo  do  Rio  dw  Hortas  PeqaeM.  4 

—  S.  Joio  d'U  Rei 1  1/8 

IVl/Zlegoas. 


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84  VOYAGE  AUX.  SOURCES 

dtes  que  forment  ses  liges  grêles  et  serrées  cooTOles  de 
fleurs  channanles.  En  avançant  davantage,  je  rencontrai 
moins  de  sous-arbrisseaux,  je  ne  vis  plus  que  des  Graminées 
et  quelques  autres  herbes  ;  enfin,  dans  les  endroits  arides,  je 
trouvai  seulement  un  gazon  ras  et  peu  fourni.  D'après  ceci, 
on  voit  que  le  passage  des  bois  aux  pâturages  simplement 
herbeux  ne  se  Tait  pas  absolument  sans  quelque  transition  ; 
mais  il  y  a  tout  de  différence  entre  les  arbres  gigantesques 
des  forêts  vierges  et  des  arbrisseaux  de  3  à  4  pieds  que, 
au  premier  abord ,  cette  transition  ne  pouvait  être  sen- 
sible. 

Au  milieu  des  mornes  nus  et  déserts  qui  s'offrirait  à 
mes  regards  quand  je  sortis  de  la  forêt ,  la  chapelle  de  Bom 
Jardîm,  bâtie  sur  l'un  d'eux,  jetait  un  peu  de  variété  dans 
le  paysage. 

Dans  un  fond,  je  traversai  un  bouquet  de  bois  presque 
uniquement  composé  d'Araucaria  Branliensîs  [pinheiro). 
Cet  arbre  magnifique,  noble  représentant  de  nos  Plus  et 
de  nos  Sapins,  croit  assez  abondamment  dans  le  canton  de 
Rio  Grande,  sur  !a  limite  des  bois  et  des  campog,  entre  les 
31'  53'  de  lat.  S.  et  les  21°  10',  par  une  hauteur  approxi- 
mative de  3,500  pieds  anglais  (l  ,066" ,450)  ;  on  le  retrouve 
sur  quelques-unes  des  plus  hautes  montagnes  de  Rio  de 
Janeiro  ;  presque  à  lui  seul,  il  forme  les  bouquets  de  bois 
des  Campos  Geraes,  pays  qui  s'étend  k  peu  près  des  34*  aux 
35°  50* ,  et  que  le  cours  du  Paranu  ainsi  que  l'absence  de 
mouvements  de  terrain  sensibles,  depuis  S.  Paul  jusqu'à 
Curitiba,  doivent  faire  considérer  comme  bien  moins  élevé 
que  le  canton  de  Rio  Grande  ;  enfin,  dans  la  province  de 
Rio  Grande  do  Sul ,  il  descend,  par  les  39*  30'  environ,  jus- 
qu'au bord  de  la  plaine,  qui  n'a  qu'une  très-faible  éléva- 


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DD  RIO  DE  S.  nUNClSCO-  85 

tion  BD-dessus  du  niveau  de  la  mer.  VArattcaria  Brasi- 
Ketms  trouve  donc ,  indépendaniineat  de  tonte  culture,  des 
conditions  d' existence  à  peu  près  analogues  entre  les  SI  '  lO* 
et  39*  50*  environ,  mais  à  des  hauteurs  fort  différentes  (1). 
II  formerait  une  sorte  de  thermomètre  indiquant  une  tem- 
pérature moyenne  presque  égale  dans  les  divers  lieux  que 
je  viens  d' indiquer ,  ou ,  si  l 'on  veut ,  il  offrirait  une  échelle 
où  l'élévation  serait  compensée  par  une  plus  grande  dis- 
lance de  l'équateur  [2}.  Cet  arbre,  un  des  plus  pittoresques 
que  je  connaisse,  change  de  port  à  ses  différents  Ages.  Dans 
sa  jeunesse,  ses  rameaux,  comme  brisés,  lui  donnent  un 
aspect  bizarre ,  alors  il  n'  a  pas  de  formes  arrêtées  ;  plus  tard , 
il  s'arrondit  è  la  manière  de  nos  pommiers;  adulte,  il  s'é- 
lance, parraitement  droit ,  à  une  grande  hauteur,  et  se  ter- 
mine par  un  corymbe  de  branches,  espèce  de  plateau  im- 
mense et  parfaitement  égal,  d'un  vertfoncé.Acette  dernière 
époque,  son  tronc  ne  porte  qu'au  sommet  des  verticilies  de 
branches  qui,  courbées  en  manière  de  candélabre,  et  d'au- 
taat  plus  courtes  qu'elles  sont  plus  voisines  de  l'extrémité 
supérieure  de  Tarbre,  élèvent  toutes  au  même  niveau  une 
tonffearrondie  de  petits  rameaux  feuilles.  Leboisdel'jlrau- 
caria  Brasitiensù ,  blanc,  marqué  de  veines  très-rares  d'un 
rose  vineux,  est  plus  dur,  plus  lourd,  plus  compacte  que  ce- 
lui de  nos  Pins.  Ses  feuilles  sont  beaucoup  plus  larges  que  les 
leurs.  Les  écailles  et  les  semences  qui  forment  ses  cônes, 

(1)  Vojei,poar  les  posiliaos et  les  hautents  indiquées  ici.CluIel 
gartoot  Egchwe^e. 

(3}  rai  montré,  dans  VEieaUonia  jfoHMtmfa,  dm  tcbelle  da  mtme 
genre,  niais  bien  plus  étendae,  pnisqoe,  comnentaal  au  Rio  de  la  Plaia, 
eDe  va  s'élenot  toajours  jusque  rers  l'équateur  (voyei  ioc.  de  S.  HtL., 
Flora  DraMia  meridionalit ,  III ,  02 ,  on  les  Arehivti  de  botaniqve 
pubiii'es  par  les  Nius  de  H.  6.  DeJessert,  vol.  Il,  1tL13). 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


sa  VOYAGE  inX  SODRCBS 

gros  comme  la  tôte  d'an  enfant,  se  séparent  à  la  maturité 
et  se  répandent  sur  la  terre.  Les  dernières,  presque  lon- 
gues comme  la  moitié  du  doigt,  rappellent  la  châtaigne 
par  leur  saveur  ;  mais  elles  sont  plus  délicates  et  n'ont  point 
une  chair  farineuse.  Comme  nos  Pins  et  nos  Sapins,  VAritu- 
caria  BrasilieiuU  se  plaît  dans  les  terrains  sablonneui ,  et 
l'abondance  de  c^  arbre  est,  pour  les  colons  des  Campos 
Geraes,  l'indice  des  lieux  les  moins  propres  à  la  culture. 

Si  l'entrée  dans  les  campoê  avait  excité  mon  admiration. 
il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  moi  et  ceux  qui  m'accompa- 
gnaient Qmes  un  b-iste  essai  de  ce  gmre  de  pays,  dès  le 
premier  jour  que  nous  y  voyage&mes.  Le  défaut  d'ombrage, 
le  vent  sec  et  brûlant  qui  régnaient  sur  les  atomes  me  firent 
beaucoup  de  mal  aux  nerfs  et  causèrent  plus  de  mal  encore 
au  pauvre  Prégent,  qui  s'obstinait  à  ne  pas  se  servir  de 
parasol.  Lui  et  Firmiano  eurent  les  lèvres  gercées,  comme 
cela  était  déjà  arrivé,  en  1816,  èi  moi  et  à  mes  compa- 
gnons, quand  nous  entrâmes  dans  les  campos,  du  côté  de 
fiarbacena,  et  comme  cela  était  encore  arrivé  à  Prégent  lui- 
même,  lorsque,  quinze  mois  plus  tard,  il  avait  repassé  par 
le  même  lieu  (1).  M.  Luccocltse  plaint  aussi  d'avoir  éprouvé 
cette  incommodité,  après  être  sorti  des  forêts  par  une  autre 
route  pour  se  rendre  à  S.  Joào  (S).  C'est  une  sorte  de  tribut 
que  la  différence  d'atmosphère  fait  sans  doute  payer  sou- 
vent à  ceux  qui  entrent  dans  les  eampos,  mais  dont  ma 
propre  expérience  me  fait  croire  que  l'on  est  exempt,  lors- 

(1)  Vojrei  mon  royofft  daiM  It*  provinea  dt  Rio  tie  Janein ,  fie, 
1,  113. 

(3)  ■  Le  rent,  n'éUot  ping  rsTralcbi  par  rioflneôee  de  le  mer  ou  des 
■  fordis......  dessécha  toutes  les  particules  hnmides  de  Dotre  peau  ei 

•  d^poailla  catièrcment  nos  Urrte •  (NoUi  on  BroMil ,  147i. 


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DO  uo  ns  s.  FUNcasco.  n 

qu'on  Inverse  la  Serra  do  Egpinhaço  dans  un  pays  moins 
élevé  et  où  l'air  doit  être  moins  vif. 

Ce  jonr-là,  je  passai  le  Rio  Grande,  qui  sert  de  limite 
(1819)  an  termo  de  Barbacena  (1),  où  j'avais  voyagé  depois 
mon  entrée  dans  la  province  des  Mines ,  et  ce  fût  alors  qne 
je  me  trouvai  dans  le  femto  dont  U  ville  de  8.  Joâo  est  la 
capitale. 

Après  avoir  fait  4  lieues,  depuis  Alto  da  Serra,  je  m'ar- 
rêtai k  une  faxmda  d'assez  chétive  apparence,  cdlede  5tiNb, 
bide  dans  un  fond,  au-dessus  d'un  niisseaa.  Elle  est  en- 
tourée de  mornes  peu  élevés  et  arrondis  ;  le  fond  de  le  val- 
lée (^re  une  lisière  de  bois,  et  l'on  découvre  quelques  eti- 
poM  (â)  dans  des  enfoncements,  sur  le  flanc  des  hauteurs. 

Le  mattre  de  la  maison ,  qui ,  comme  tous  les  autres  fa- 
%endeirot  de  cette  contrée,  avait  les  manières  de  nos  paysans 
aisés,  me  reçut  asset  poliment,  et  fit  décharger  mes  effets 
dans  une  grande  chambre  passablanent  sale,  plafonnée 
avec  une  natte  et  qui,  pour  tout  ameublement,  n'offrait 
que  deux  bancs  et  une  table.  Le  soir,  pendant  que  j'écri-  ' 
vais  et  que  Prégent  préparait  des  oiseaux,  tous  les  habitants 
de  la  maison  se  rangèrent  autour  de  nous ,  occupés  à  nous 
regarder  ;  un  groupe  de  femmes  était  resté  à  la  porte ,  et 
tontes  allongeaient  le  cou  pour  mieux  nous  observer.  Je  dis 
que  j'allais  me  coucher,  je  mis  mon  bonnet  de  nuit,  j'dtai 
ma  veste,  et  pourtant  personne  ne  se  retira. 

Comme  tous  les  habitants  du  canton  de  Rio  Grande,  mon 
hAte  élevait  des  moutons  et  des  bœufs.  U  portait,  chez  lui, 


(1)  Vojei  mon  Voyane  dartt  le  diilriel  ttet  DiamonU,  etc.,  I,  ÎM. 

(2)  Comim  je  l'ai  dit  dins  ma  première  relation,  le»  eapùet  soat  des 
bouqvets  de  bow  diipenOs  dans  les  eaitipnt. 


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S8  VOYAOB  AUX  SOURCES 

un  ptDtalen  de  toile  de  coton,  pnr-dessos  lequel  était  pa»ée 
sa  chemise,  suivant  l'usage  des  toncheurs  de  mulets  et  des 
gens  du  commun  ;  d'ailleurs  il  n'avait  sur  le  corps  qu'un 
gilet  d' uoe  étoffe  grossière,  et  sur  sa  tête  il  mettait  un  cha- 
peau de  Hineiro.  Les  femmes  de  la  maisou  avaient  pour  tout 
vêtement  une  jupe  ti  leur  chemise,  et  sur  leur  tête  elles  poi^ 
taieut  un  mouchoir. 

Après  avoir  quitté  Sitio  ,  je  passai ,  dans  un  espace  de 
3  lieues  portugaises,  devant  deux  ou  trois  chaumières  peu 
importantes,  et  je  laissai  sur  la  gauche  le  village  de  Turvo, 
qui  est  situé  dans  un  fond.  Je  voyais,  dans  le  lointain,  la 
Serra  da  Juruoea,  qui  s'élève  beaucoup  au-dessus  de  tous 
les  mornes  et  se  trouve  à  8  lieues  de  l'endroit  où  j'allais 
Taire  halte. 

Dq>uis  Sitio  jusqu'à  peu  de  distance  de  S.  Joâo,  je  ne 
rencontrai  absolument  personne  dans  les  chemins.  Je  dé- 
couvrais une  vue  d'une  étendue  immense ,  mais  rien  qui 
arrêtAt  mes  r^rds  ;  partout  des  solitudes  aussi  monotones 
qu'elles  sont  vastes. 

Dans  la  saison  où  l'on  était  alors  (février) ,  les  campo$ 
offrent  ordinairement  la  verdure  la  plus  fraîche  ;  mais  la  sé- 
dieresse  avait  été  si  forte  cette  année-là,  que  l'herbe  était 
aussi  desséchée  qu'elle  Test  communément  pendant  les  mois 
de  juin  et  de  juillet. 

Quant  aux  bouquets  de  bois,  ils  offraient  encore  une 
très-belle  verdure,  et  au  milieu  d'eux  se  faisaient  re- 
marquer deux  grands  arbres  en  fleur  d'un  très-joli  effet. 
L'un  était  un  Vochyna  chargé  de  longs  épis  d'un  jaune 
doré;  l'autre,  que  j'avais  déjà  vu  dans  tous  les  bois  vierges, 
depuisleParahyba,  ét«illet7hmna5pect'oja,  A.ug.  S.  Hil., 
Juss-,  Camb-,  dont  les  feuilles  sont  composées  de  cinq  fo- 


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DD  UO  DE  S.  FRinCiSCO  89 

lioles,  et  dont  les  rameaux  en  corymbe  se  couvrent  d'une 
mullitade  de  fleurs  roses,  jaunes  h  la  base,  aussi  grandesqoe 
des  lis. 

Il  est  facile  de  se  Sgurer  combien  le  soleil  était  iH^lant 
dans  le  pays  découvert  qiie  je  parcourais  alon  ;  cependant , 
malgré  mes  sollicitations  réitérées,  Prégent  s'obstinait  à 
ne  point  se  servir  de  parasol ,  et,  à  mesure  que  le  soleil 
montait,  je  voyais  son  visage  devenir  rouge,  ses  yeux  s'en- 
flammer, ses  traits  se  décomposer,  l'accablement  se  pàn- 
dre  dans  toute  sa  personne.  En  même  temps  il  y  avait  lieu 
d'être  émerveillé  de  sa  force,  car,  si  moi-même  je  restais 
quelques  instants  sans  parasol ,  j'avais  la  tète  en  feu  et  les 
nerfs  malades.  Les  fwundeinu  tant  soit  peu  aisés  montent 
toujours  à  cheval  avec  un  parasol ,  et,  si  les  toucheurs  de 
mulets  font  à  pied  d'aussi  longues  routes,  sans  jamais  avoir 
antre  chose  qu'un  chapeau,  c'est  qu'on  les  y  a  accoutumés 
dès  la  plus  tendre  enfance. 

La  FoEcnda  das  Laranjeirat  {la  fazenda  des  orangers] , 
où  je  fis  balte  le  jour  que  je  quittai  Sitio,  est  bâtie  dans  un 
fond  et  entourée  d'arbres.  On  y  compte  un  nombre  assez 
considérable  de  cases  à  nègres  ;  mais  la  maison  dn  maître 
est  fort  misérable  (1819).  On  pla^  mes  effets  dans  une  salle 
[tala]  assez  grande  qui  offrait  pour  tous  meubles  une  table 
et  deux  bancs,  et  dont  les  murs  en  terre  n'avaient  jamais 
été  blanchis.  Le  mailre  de  la  maison  n'était  pas  chez  lui  ; 
cependant  des  nègres  m'apportèrent  â  dîner  ;  d'ailleurs  je 
ne  vis  paraître  personne  ;  j'aperçus  seulement  un  minois 
fêtnînin  qui,  suivant  la  coutume,  s'avançait  doucement  der- 
rière une  porte  entr' ouverte ,  et  qui  disparut  aussitôt  que 
mes  yeux  eurent  rencontré  les  siebs. 

De  Laranjeiras  j'allai  passer  la  nuit  à  la  Fasetida  dns 


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90  VOYAOB  ADX  SOORCES 

Vertenttt  do  Sardim  (fatenda  des  sources  du  Sardim),  qui 
appajteDaît  au  mardiand  de  bœu&  Antonio  Francisco  de 
Azevedo,  et  dont  j'ai  déjà  Tait  la  description  plus  haut. 

Comme  cette  fazenda  est  peu  éloignée  de  Larai^eiras , 
j'eus  assez  de  temps  pour  aller  herboriser  sur  la  Serra  do* 
dow  IrmAoi  (montagne  des  deux  frères).  On  donne  ce  nom 
à  deux  montagnes  quej'arais  rues  de  loin  pendant  toute  la 
journée  de  la  veille  ;  elles  sont  placées  l'une  à  cAté  de  l'au- 
tre; leur  hauteur  est  à  peu  près  la  même,  et  toutes  les  deux 
ont  la  forme  d'une  pyramide  courte,  à  base  très-élsrgie. 
Pour  s'y  rendra  de  la  Fazenda  das  Vertentes  do  Sardim,  il 
faut  faire  un  détour,  et  l'on  peut  compter  environ  1  lieu» 
et  demie  de  chemin.  Accompagné  de  José  Marianoo,  j'allai 
sur  mon  mulet  jusqu'au  bas  de  la  Serra  ;  ensuite  je  montai 
seul  et  k  pied  sur  l'une  des  deux  montagnes.  Dans  une 
grande  partie  de  sa  hauteur,  on  avait  élevé  un  mur  en 
pierres  sèches  très-bien  fait.  Au  delà  de  ce  mor  qui,  dans 
cette  ctMitrée,  pouvait  être  considéré  comme  une  chose  ex- 
traordinaire, j'avançai ,  sans  suivre  de  chemin,  au  milieu 
des  pierres  et  des  rochers  qui  couvrent  la  montagne.  Comme 
dans  tous  les  endroits  élevés  et  pierreux,  j'y  troovai  un 
assez  grand  nombre  de  VelUaia  (  vulgairement  eaïuia 
d'ema,  jambe  d'autruche).  Noos  étions  alors  dans  la  saison 
des  pluies  ;  cq>endant  l'eau  manquait  depuis  si  longtemps 
que,  quoique  les  VeiUtsia  demandent  peu  d'humidité,  les 
feuilles  de  ceux  que  j'avais  sons  les  yeux  étaient  presque 
flétries  ;  toutes  les  autres  plantes  étaient  entièrement  des- 
séchées, et  cette  course  assez  fatigante  n'augmenta  peint 
ma  coUectioD.  Parvenu  au  sommet  de  la  montagne ,  je  dé- 
couvris une  immense  étendue  de  pays,  la  Serra  da  J  uruoca  et 
beaucoup  d'autres  Serras  ;  d'ailleurs,  aucune  habitation  re- 


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DD  EUO  DE  S.  FRANCISCO.  SI 

BumpiaUe,  aucun  villagen'arrètaieDtmeg  regards.  La  course 
que  j'avais  bite  sur  l'uoe  des  deux  moDtagDes  ne  m'avait 
pas  assez  dédommagé  de  ma  peine,  pour  que  j'éprouvasse 
la  tentation  de  grimper  sur  la  seconde  ;  je  descendis  avec 
assez  de  difficulté  eu  milieu  des  pierres,  et,  étanl  monté  sur 
mon  mulet,  je  retournai  i  la  Fazenda  das  Vertentes. 

De  cette  fazeada,  je  me  rendis  à  celle  de  Chavei  (nom 
d'homme).  Pour  y  arriver,  je  parcourus  un  pays  qui  offre 
encore  des  monies  arrondis  couverts  de  Graminées  et  des 
vallées  peu  profondes,  dessinées  par  des  lisière  de  bois, 
dont  la  verdure,  extrêmement  fratcbe»  contrastait  alors 
arec  les  teintes  jauoltreB  des  pAturagea  desséchés. 

A  3  lieues  environ  de  la  Faienda  das  Vertentes  do  Sar- 
dim,  OQ  trouve  le  Rio  Grande,  qui ,  dans  cet  endroit,  a  peu 
de  largeur,  et  dont  les  eaux,  souillées  par  le  lavage  de  l'or, 
ont  une  teinte  d'^jn  rouge  sale  et  foncé.  On  passe  cette 
rivière  sur  on  pont  en  bois  mal  entretenu,  comme  tous 
ceux  de  la  province  (1819),  et  que  le  défaut  de  gard&4bus 
rend  fort  dangereux  pour  les  animaux  chargés.  J'eus  d'au- 
tant plus  d'inquiétude  pour  les  micos,  qu'on  me  fit  atleu- 
dre  fort  foDgteanps  avant  d'ouvrir  une  porte  qui  se  tronvait 
à  la  sortie  du  pont.  Le  péage  de  celui-ci  est  affermé,  ainsi 
que  le  sont,  en  général,  ceux  des  ponts  de  la  province  de 
Minas  Geraes.  Ici  l'on  paye  80  reis  (50  centimes)  par  per- 
sonne et  par  chaque  animal  ;  mais  mon  passe-port  privilé- 
gié (porïarùi)  m'exempta  de  cette  petite  dépense. 

A  pen  de  distance  du  Rio  Grande,  on  arrive  au  hameau 
ieHadre  de  Deot  (mère  de  Dieu),  qui  est  bâti  sur  une  hau- 
teur, et  se  compose  tout  au  plus  d'une  douzaine  de  mai- 
sons réunies  autour  d'une  chapelle.  Toutes,  sans  exception, 
étaient  fermées,  et  mon  muletier,  José  Marianno,  qui  con- 


;d:,i'GOOglC 


n  VOYAGE  lUX  8 

oaissait  parfaitemeot  ce  canton ,  me  dît  que  la  plupart 
n'avaient  d'habitants  que  lorsque  quelque  prêtre  venait  de 
S.  Joâo  célébrer  la  messe  dans  la  petite  église  (1). 

Après  Madré  de  Deos,  le  pays,  sans  avoir  moins  d'éléva- 
tion, devient  plus  égal,  et,  dans  le  lointain,  la  campagne, 
couverte  alors  d'une  berbe  jaunâtre  et  desséchée  par  l'ar- 
deur du  soleil ,  ressemblait  &  nos  plaines  de  Beauce ,  telles 
qu'on  les  voit  après  la  moisson. 

Un  peu  avant  d'arriver  à  la  fazetida  de  Chaves,  la  végé- 
tation éprouve  quelque  modification.  Ce  ne  sont  plus  seu- 
lement des  Graminées  et  un  petit  nombre  d'herbes  et  de 
sous-arbrisseaux  mêlés  parmi  elles  qui  couvrent  la  terre  : 
des  arbres  peu  élevés,  tortueux,  rabougris  et  h  écorce  su- 
béreuse croissent,  éparsçâ  et  là,  au  milieu  des  Gramens,  et 
rappellent  les  taboleiros  cobertos  du  Sertâo  (3)  oriental  du 
S.  Francisco,  ou,  si  l'on  veut,  nos  prairies  de  France  plan- 
tées de  pommiers.  Les  arbres  dont  je  viens  de  parler  sont 
principalement  la  L^uminense  (129),  ci  une  Guttifère  à 
grandes  feuilles  glauques  que  j'avais  souvent  vue  dans  le 
Sertâo.  Ici  ce  n'est  point  une  différence  dans  l'élévation 
du  terrain  ni  dans  la  forme  des  hauteurs  qui  produit  celle 
de  la  végétation;  mais  le  sol,  que  j'avais  trouvé,  dans 
tout  le  reste  de  la  journée ,  sablonneux  ou  caillouteux ,  de- 
vient beaucoup  meilleur  et  peut  produire  qu^ques  plantes 
plus  vigoureuses. 


(I)  L'égliM  de  Madré  de  Deos  est,  mIod  Piurro,  une  des  Baccnr- 
sales  {capella  nccwial  )  de  la  paroisse  de  S.  Joao  d'El  Bei  (Jfem.  hUt., 
VUE,  seconda  pari..  1271. 

(3)  Toiei  laou  Vouage  dam  le$  primincei  tU  Rio  de  Jarttiro  et  Wi- 
n:it  iieraet.  vol  11. 


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DU  RIO  DE  S.  FaiNCfSCO.  M 

La  fazmda  de  Qiaves,  où  je  fis  halte,  oui  située,  suiraot 
l'usage,  dans  un  fond  sur  le  bord  d'un  ruisseau.  Je  fu. 
étonné,  en  y  arrivant,  de  le  prodigieuse quantitéd' oiseaux 
qui  couvraient  les  arbres  dont  l'habitation  était  environ- 
née :  c'étaient  des  perroquets,  des  oiseaux  de  proie  et  beau- 
coup d'autres  espèces.  Comme  les  alentours  sont  extrême- 
ment secs,  ces  animaux  se  réunissent  dans  un  lieu  où  ib 
trouvent  de  l'eau  et  de  l'ombrage. 

Quand  je  me  présentai  à  la  fiaenda  de  Cbavea,  le  pro- 
priétaire était  absent;  la  maîtresse  de  la  maison,  après 
s'être  Tait  attendre  fort  longtemps,  parut  enfin,  et  elle  me 
donna  la  permission  de  m'arrèter  chez  elle.  An  bout  de 
quelques  instants,  le  couvert  fut  mis,  et  l'on  nous  apporta 
nn  plat  de  haricots  cuits  avec  des  herbes,  un  plat  de  riz  et 
de  la  cangica  :  je  me  retrouvais  dans  la  terre  hospitalière  de 
Minas  Geraes. 

Entre  Chaves  d  le  Rancho  do  Rio  das  Mortes  Pequeno, 
dans  un  espace  de  i  lieues,  je  vis,  dans  des  fonds,  trois  ou 
quatre  fazmdas  d'une  médiocre  apparence.  Avant  d'arriver 
an  Rancho,  je  passai  sur  des  mornes  peu  élevés  :  quelques 
crêtes  cependant  sont  effrayantes  par  leur  peu  de  largeur  et 
la  profondeur  des  vallées  que  l'on  découvre  au-dessous  de 
soi.  Sur  ces  montagnes,  le  terrain  est  sec,  aride  et  caillou- 
teux, l'herbe  courte  et  peu  fournie;  je  retrouvai  dans  cet 
endroit  quelques  plantes  que  j'avais  déjÀ  vues  à  mon  pre- 
mier voyage  des  Mines ,  dans  des  terrains  analogues,  telles 
que  les  Polygala  (155  et  165}  et  la  Rubiacée  (162). 

Ce  jour-li,  Prégent  s'était  mieux  porté;  mais,  en  arrivant 
au  Rancho  do  Rio  das  Mortes  Pequeno,  où  je  m'arrêtai, 
son  mulet  fut  effrayé  par  la  rencontre  d'un  de  ces  frères 
ermites  qui  vont  mendier  et  scandaliser  les  fidèles;  le  pau- 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


ftl  VOYAGE  AUX  SOURCES 

vre  Prégent  (ùt  jeté  par  terre  et  se  tronva  encore  plus 

malade  cpie  les  joon  précédents. 

José  Marianno  était  arrivé  à  la  halte  avant  moi;  et,  lors- 
que je  descendis  de  mon  mulet ,  il  vint  me  dire  que  le  maî- 
tre de  la  maison  r^ùsait  de  me  donner  une  petite  cham- 
bre ,  et  voulait  toe  laisser  sous  le  rancho  destiné  A  tous  les 
voy^eurs.  Comme  ce  randut  était  ouvert  de  tous  iea  côtés  et 
d'une  saleté  affreuse,  que  d'ailleurs  je  voulais  rester  quel- 
ques jours  dans  cet  Midroit  pour  faire  faire  des  malles  à  S. 
Joâo  d'EI  Rei,  j'allai  trouver  le  propriétaire  du  fwiefto  et  le 
priai  d'être  moins  sévère  ;  je  parlai  de  ma  portaria,  mais 
inutilemeDt.  Qu'ai-je  k  craindre  de  vous?  me  disait  le  bon- 
homme. Rien  du  tout  était  la  seule  réponse  que  j'eusse 
pu  faire  i  cette  question.  Celle-ci  me  ramena  à  une  idée 
juste  de  ma  position  ;  des  politesses  firent  plus  que  la  me- 
nace de  la  portaria,  et  l'on  finit  par  me  donner  une  petite 
chambre  où  nous  étions  empilés  d'une  mani^  Croyable. 


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MI  BIO  DE  s.  FRANCISCO. 


CHAPITRE  VI. 


sÉJons  A  8.  lOÀO  d'bl  hsi. 


I«  pijB  niai  entre  le  Buieho  do  Hio  dts  Mortes  Peqoeoo  et  S.  Joio  d'Et 
Bei.  —  Le  cnrt  de  S.  Joio.  —  Kemide  contre  rh;dr<^e. — Lei  deu 
ririères  ippelées  Rio  du  Hortes.  —  Le  serpent  mthM;  1«  bonunes 
qai  pTéteDdeni  prfserrer  de  la  moTsore  des  reptiles  dangeregi;r«m) 
#«r«M.  —  Procession  des  cendTes.  —  L'élise  brésilienne.  —  Mala- 
die «TTres  Prégent.  —  Les  enHoêo».  —  Une  aoberge.  —  Dn  fol.  — 
UfleiioD  sur  l'esdaTage  ;  de  qnelle  maniire  les  aigres  sont  traiUs  an 
Brtsi].  —  Décès  dTtes  Prégent.  —  Maladie  de  José  Marianno.  —  H«r> 
borisation  dans  l»  Serra  de  S.  Joào.  —  Maladie  de  Firmiano.  —  José 
Marianno  dareno  empaillear.  —  Recbercbes  inniilee  ponr  tronrer  nu 
leeadM*.  —  Départ  da  Hio  das  Morte*  PeqottKi. 


Le  lend^nain  du  jour  où  J'étais  arrivé  au  Rancho  do  Rio 
<hs  Mortes  Pequeno,  je  me  rendis  à  S.  Joào,  qui  en  est 
^igné  de  \  lieue  et  demie.  Sar  la  rive  droite  du  chemin , 
on  voit  des  eamipot  qui  ne  diffèrent  point  de  ceux  que  j'avais 
putoarrutout  les  jours  précédents  ;  mais,  iqaelquedistance 
do  raaeho,  la  vue  est  bornée,  k  gauche,  par  des  montagnes 
appelées  Serra  de  S.  Joào,  ad  des  rochers  nus  et  grisâtres 
w  montrent  de  tonte  part.  En  suivant  la  vallée  que  bornent 
ces  montagnes,  j'arrivai  i  la  ville  de  S.  Joâo  d'EI  Rei ,  dont 
f  ai  donné  aOleurs  une  description  trds-détaillée  (1). 

(1)  Vojei  mon  Tonaf*  dont  h  district  da  DiamanU.tte.,  1,3X3. 


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W  T0YA6E  AUX  SOUICES 

J'allai  présenter  les  lettres  de  recommaDdation  doDt  j'é- 
tais porteur,  et  je  commençai  par  le  curé,  qui  caïuait  à 
merveille  et  me  parut  bien  connaître  le  Brésil.  D  avait 
desservi  l'église  d'un  village  d'Indiens,  et  tout  ce  qu'il  me 
dit  de  cette  race  prouve  qu'elle  est  étrangère  à  l'idée  de 
l'avenir,  comme  je  l'avais  observé  moi-même.  Le  curé  de 
S.  Jmo  avait  été  à  Goyaz,  et  fit  tout  ce  qu'il  put  pour  me 
détourner  d'entreprendre  le  voyage  de  cette  province.  Je 
ne  trouverais,  me  dît-il ,  que  des  compof  d'une  monoto- 
nie fatigante  où  l'on  est  desséché  par  l'ardeur  du  soleil, 
où  les  provbions  manquent  souvent,  où  l'on  court  le  ris- 
que de  tomber  dangereusement  malade  :  ces  discours  in'é- 
branlèrent.  H  me  paraissait  impossible  que  Prient  sup- 
portât les  fatigues  d'un  tel  voyage,  et  je  pris  la  rést^ution 
de  ne  point  aller  jusqu'à  Villa  Boa,  si  réellement  je  re- 
cueillais aussi  peu  de  plantes  que  le  curé  le  prétendait. 

Cet  ecclésiastique  m'assura  que  l'Aristoloche  appelée  Jor^ 
rinha{ArittohchiaMacroura,  Gomes  ex  Mart.)  était  un  spé- 
cifique puissant  contre  l'bydropîsie.  Il  me  dit ,  comme  d'au- 
tres personnes,  que  cette  maladie  était  l'une  des  plus  com- 
munes dans  l'intérieur  du  Brésil;  mais  il  prétendait  que 
l'abus  de  l'eau-de-vie  de  sucre  n'en  était  pas  toujours  la 
cause,  et  assurait  qu'il  avait  vu  mourir  d'hydropiaie  beau- 
coup de  gens  très-sobres.  Ceux-là  auront  dA,  sans  doute, 
cette  maladie  à  un  défaut  de  ton  causé  par  la  chaleur  du 
climat  et  la  mauvaise  nourriture. 

De  retour  au  rancko,  j'allai  le  lendemain  herboriser  sur 
les  bords  du  Rio  das  Mortes  Pequeno  ;  mais,  à  cause  du 
manque  de  plt^e  extraordinaire  dans  cette  saison,  ils  étaient 
à  peu  près  aussi  secs  que  les  campoi  les  plus  arides.  J'y 
trouvai  cependant  une  plante  fort  intéressante  pour  la  gëo- 


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DD  MO  DE  S.  nuNCISCO.  VJ 

graphie  botanique ,  un  saule  assez  éleré  que  les  gens  du 
pays  me  dirent  être  indigène,  et  qui ,  effectivement ,  crois- 
sait dans  un  lieu  où  l'on  n'apercevait  aucune  trace  de  cul- 
ture.Cetteespèce  est  probablement  le  5a/ùc//um&QMtiana. 

Deui  rivières  portent  le  triste  nom  de  Rio  das  Mortes. 
Celle  qui  le  communique  au  Rancho  a  été  distinguée  par 
l'épithète  de  Peqrteno,  parce  qu'elle  est  moins  considérable 
que  l'autre  ;  elle  se  jette  dans  le  Rio  das  Mortes  Grande, 
près  la  faxenda  de  Barra  (confluent),  située  à  quatre  legoas 
du  rancho,  et  &  une  demie  du  village  de  Conceiçào.  Quant 
au  Rio  das  Mortes  Grande,  il  a  son  confluent  près  d'Ibitu- 
runa,  dans  le  Rio  Grande.  Je  dois  dire  que,  dans  l'usage 
habituel ,  les  habitants  du  pays  suppriment  les  épithètes 
distinctives  des  deux  rivières. 

Firmiano  m'accompagnait  dans  la  promenade  que  je  Ss 
sur  tes  bords  du  Rio  das  Mortes  Pequeno.  Tout  à  coup  je 
le  vois  de  loin  reculer  avec  effroi,  et  il  me  crie  :  Voilà  un 
serpent  trèa-méchant.  Je  m'approche  et  j'entends,  au  mi- 
lieu  des  feuilles  desséchées,  un  bruit  presque  semblable  à 
celui  que  feit  le  serpent  à  sonnettes  en  secouant  sa  queue. 
Bientôt  je  vis  la  t£te  du  reptile  s'élever  au-dessus  de  l'herbe; 
DODs  coupons  une  grande  gaule ,  mais  nous  ne  parvenons 
à  tuer  l'animal  qu'après  lui  avoir  donné  un  très-grand  nom- 
bre de  coups.  Je  l'apportai  i  la  maison  ,  et ,  quoiqu'il  fût 
mort,  sa  vue  Bt  reculer  de  frayeur  tous  ceux  qui  l'aper- 
çurent. Il  appartenait  A  l'espèce  qu'on  appelle  dans  le  pays 
UnUû ,  et  qu'on  regarde  comme  extrêmement  dange- 
reuse (4). 

(t)  Ce  serpent  faisait  paKie  de  l'immense  collectioD  qu'à  mon  arrivée 
CD  France  je  remis  au  muséom  de  Paria. 


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98  VOYAGE  AUX  SOUBCES 

On  m'a  dit  qn'il  y  avait ,  dans  la  province  de  Minas  ei 
dans  celle  de  S.  Paul ,  des  gens  qni  prétendent  posséder 
des  secrets  pour  préserver  de  la  morsure  ^ea  serpents  les 
plus  dangereux,  ce  qu'on  appelle  curar.  Le  curé  de  S.  Joâo 
me  raconta  qu'un  des  esclaves  de  son  père  prenait  impuné- 
ment les  serpents  venimeux.  Un  jour,  il  garrotta  cet  homme 
pour  le  forcer  d'avouer  quel  moyen  il  employait.  L'esclave 
lui  montra  une  herbe  qu'il  appelait  herva  d'undiû;  il  s'en 
Trotta,  ensuite  il  saisit  un  serpent  dangereux,  et  il  n'en  ré- 
sulta pour  lui  aucun  accident.  Le  curé ,  quand  ce  fait  ar- 
riva ,  était  Tort  jeune  et  se  trouvait  dans  la  province  de 
S,  Paul  ;  depuis  il  avait  beaucoup  voyagé,  et,  lorsque  je  le 
vis,  il  ne  se  rappelait  plus  ce  que  c'était  que  l'hena 
d'wnbû. 

J'avais  d'abord  eu  l'intention  d'aller  m' établir  i  S.  Joâo 
chez  cet  ecclésiastique  ;  mais  je  changeai  d'avis,  parce  qu'il 
n'y  avait  point  de  p&turage  autour  de  la  ville ,  et  que  j'au- 
rais été  obligé  de  diviser  mes  gens  et  mon  bagage ,  ce  qui 
eût  été  fort  incommode  pour  moi.  Je  restai  donc  au  Rancbo 
do  Rio  das  Mortes  Pequeno,  d'où  je  pouvais  faciinnent  fUre 
des  excursions  jusqu'à  la  ville. 

Je  fus  curieux  d' aller  voir  la  procession  que  la  confrérie 
de  S.  François  fait,  de  kun  en  loin,  le  mercredi  des  Cen- 
dres {proeùsào  dos  cinzat),  tant  à  S.  Joâo  que  dans  les 
autres  villes  de  la  cotmvca.  On  savait  qu'elle  aurait  lieu 
cette  année-là,  et,  dès  la  veille  de  la  cérémonie,  il  avait 
passé,  par  le  rancho  où  fêtais  établi,  un  grand  nombre 
d'hommes  et  de  Tenuues  à  cheval  qui  se  rendaient  à 
S.  Joâo  pour  assister  à  la  fête.  Le  jour  même  où  elle  eut 
lieu ,  je  rencontrai  encore  une  foule  de  g^is  qui  allaient  à 
la  ville.  Malgré  la  chaleur  qui  était  excessive ,  presque  tous 


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DU  UO  DE  S.  nuNaSCO.  99 

étaient  enveloppés  dans  des  capotes  d'étoffe  à  grand  collet 
telles  qu'on  en  porterait  en  France  dans  le  temps  de  Noël. 
Ce  costume,  qui  venait  originairement  du  Portugal,  avait 
été  longtemps  d'un  usage  général  dans  la  province  des 
Mines  et  peut-être  dans  beaucoup  d'autres  parties  du  Brésil  ; 
h  l'époque  de  mon  voyage,  les  Mineiros  d'un  certain  rang 
ne  portaient  la  capote  que  dans  leur  maison ,  lorsqu'ils 
étaient  déshabillés  ;  mais  pas  un  ouvrier  ne  sortait  sans  elle, 
et  la  possession  de  ce  vêtement  était  un  objet  d'envie  pour 
tous  les  mulAtres  libres. 

En  arrivant  â  8.  }oâo ,  je  trouvai  les  mes  remplies  de 
monde.  Il  y  avait  eu  une  messe  en  musique,  et  il  était  une 
heure  quand  le  curé  sortit  de  l'église.  Il  me  dit  qu'il  ne 
{rendrait  aucune  part  à  la  procession,  parce  qu'ici,  comme 
dans  d'autres  paroisses  de  la  province,  la  confrérie  de 
S.  filvDçois  prétendait  se  soustraire  à  Fautorité  paatorale(l)  ; 
il  ajouta  qu'il  était  en  guerre  avec  elle  depuis  dix  ans, 
qu'il  avait  adressé  des  réclamations  aux  autorités  de  Rio  de 
Janeiro ,  mais  que  ses  adversaires  étaient  soutenus  par  des 
protecteurs  paissante ,  «t  qu'on  n'avait  pas  même  daigné 
IdI  bire  de  réponse.  Le  curé  me  dit  encore  que  la  proces- 
sion passerait  k  quatre  heures  devant  sa  maison ,  que  nous 
pourrions  la  voir  de  son  halcon ,  et  en  même  temps  il  me 
{H^Dt  (pie  je  serais  témoin  de  choses  fort  ridicules ,  dont 
il  était  le  premier  à  gémir,  mais  contre  lesquelles  il  a' éle- 
vait en  vain. 


(1)  Ccsl  l'eiiBlcDce  de  ccUe  confrérie  el  de  celle  de  Notre -Dame -dn- 
itait-Caraiel  (Ordmt  Ureeira  d*  K.  S.  do  Cormo,  Ordem  Im-eetra  d« 
S.  Francûco)  qoi  *  fail  dire  k  M.  Wabb  {NotitM ,  a,  134)  qa'il  j 
mit  deat  caoTents  k  S.  Jo2o  d'El  Bei.  Od  sait  qu'il  c'était  pâs  permis 
«n  ordres  religieux  de  s'établir  dana  la  proTince  de  Miau  Gerau. 


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100  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Vers  les  cinq  heores ,  la  proces^on  commença  à  défiler 
dons  la  rue  où  demeurait  le  curé.  Elle  était  ouverte  par 
trois  mulâtres  vêtus  de  dominos  gris ,  à  peu  près  semblables 
à  ceux  qu'on  donne,  dans  nos  opéras,  aux  génies  iafernauK. 
T.'un  des  trois  portait  une  grande  croix  de  bois;  les  deux 
autres,  qui  lui  servaient  d'acolytes,  tenaient  chacun  un  long 
bâton  surmonté  d'une  lanterne.  Derrière  eux  venait  im- 
médiatement un  autre  personnage  revêtu  d' un  habillement 
de  drap  jaunâtre  très-serré,  et  sur  lequel  on  avait  bar- 
bouillé en  noir  les  os  qui  composent  le  squelette.  Ce  per- 
sonnage représentait  la  mort,  et,  faisant  des  arlequinades, 
il  allait  frapper  les  passants  avec  une  faux  de  carton.  A  une 
assez  grande  distance  était  un  autre  groupe,  précédé  d'un 
domino  gris  qui  portait  des  cendres  sur  un  plateau ,  et 
allait  et  venait  comme  pour  en  marquer  les  assistants.  Les 
personnages  qui  se  présentaient  à  la  suite  de  ce  domino 
étaient  une  femme  blanche,  sans  masque  et  très-parée,  et, 
à  cAté  d'elle,  un  autre  domino  gris  portant  une  branche 
d'arbre  ,  chargée  de  pommes ,  à  laquelle  on  avait  attaché 
une  figure  de  serpent.  L'homme  représentait  Adam,  et  la 
femme,  qui  jouait  le  rAle  d'Eve,  feignait  de  temps  à  autre  de 
cueillir  une  des  pommes.  Derrière  eux  marchaient  deux  en- 
fants couverts  de  feuillage ,  dont  l'un ,  qui  faisait  le  râle 
d' Abel ,  filait  une  quenouille  de  coton,  et  dont  l'autre,  qui 
représentait  Caïn ,  paraissait  vouloir  creuser  la  terre  avec 
une  bêche  qu'il  tenait  k  la  main.  Les  deux  groupes  que  je 
viens  de  décrire  étaient  suivis  de  treize  brancards  portés 
par  les  confrères  de  S.  François,  et  sur  lesquels  étaient  des 
figures  en  bois,  de  grandeur  naturelle,  peintes  et  habillées 
d'étoffe.  Les  treize  brancards  allaient  de  file  k  une  assez 
grande  distance  les  uns  des  autres.  Sur  l'un  d'eux  était 


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DD  BIO  DE  S.  PaANClSCO.  tUl 

Jésus  priant  dans  le  jardin  des  Olives  ;  sur  un  autre,  sainte 
Madeleine  et  la  bienheureuse  Marguerite  de  Cortone,  toutes 
deux  les  cheveux  épars  et  véluesd'étoffe  grise;  sûr  un  troî' 
gième  ,  S.  Louis  ,  roi  de  France  ;  sur  un  quatrième ,  le 
bieDheureoi  Yves,  évftque  de  Chartres.  La  Vierge,  dans  sa 
gloire ,  environnée  de  nuages  et  de  chérubins ,  était  portée 
sur  l'un  des  brancards;  d'autres  figures  représentaient 
S.  François,  recevant  du  pape  l'approbation  des  statuts  de 
son  ordre;  un  des  groupes  retraçait  le  miracle  des  stig- 
mates ,  et,  dans  un  autre  enfin ,  on  voyait  encore  S.  Fran- 
çois embrassé  par  Jésus-Christ.  Cette  suite  de  figures  était 
sans  doute  d'une  excessive  bizarrerie  ;  cependant  il  y  avait 
plus  de  mauvais  goût  dans  l'ensemble  que  dans  les  détails. 
Les  habillements  convenaient  aux  personnages  qui  en 
étaient  revêtus;  les  couleurs  étaient  fraîches,  et  je  ne  pus 
m'emp£cher  de  trouver  les  figures  assez  bien  sculptées ,  en 
pensant  surtout  qu'elles  l'avaient,  été,  dans  le  pays  même, 
par  des  hommes  étrangers  aux  bons  modèles.  Ce  que  la 
procession  offrait  peut-être  de  plus  ridicule ,  c'étaient  de 
petits  enfants  de  race  blanche,  qui  suivaient  chaque  bran- 
card et  représentaient  des  anges.  La  soie ,  les  broderies ,  la 
gaze  et  les  rubans  avaient  été  tellement  prodigués  dans 
leur  toilette,  qu'ils  pouvaient  à  peine  marcher,  comme  per- 
dus au  milieu  de  leur  accoutrement.  Une  espèce  de  tiare, 
composée  de  gaze  et  de  rubans ,  faisait  presque  disparaître 
leur  petite  tète  ;  ils  portaient  un  jupon  bouffant,  bien  roide, 
déplus  d'une  aune  de  diamètre,  et  à  leur  corsage,  déjili 
chaîné  de  rubans  et  de  gaze  plissée,  étaient  encore  attachées 
nne  demi-douzaine  au  moins  de  grandes  ailes  de  gaie.  A 
la  suite  des  brancards  venait  un  groupe  de  musiciens  qui 
chantèrent  un  motet  Jl  la  porte  du  curé.  Le  prêtre  suivait 


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IDÏ  TOTAGE  AUX  SOURCES 

aveË  le  saiat  sacrement ,  et  la  foule  Termait  la  marcbe.  A 
chaque  brancard  qui  passait,  tous  les  assistants  faisaient 
une  génuflexion  ;  ensuite  on  causait  sans  gène  avec  son 
voisin.  On  n'avait  pas  vu  la  procession  des  cendres  depuis 
quelques  années,  et  l'on  fut  charmé  de  cette  cérémonie 
irrévérente,  où  de  ridicules  momeries  étaient  mêlées  à  ce 
que  la  religion  catholique  présente  de  plus  respectable. 

Le  curé  de  S.  Joao  connaissait  bien  les  abus  de  l'Église 
brésilienne;  il  paraisssit  en  gémir  et  désapprouvait  les  dif- 
férents actes  de  simonie  qui  ont  passé  en  usage  dans  cette 
contrée.  Il  disait  avec  raison  que  les  Brésilieas  sont  natu- 
rellement religieux  ;  mais  il  avouait  que  leur  religion  ne 
va  guère  au  delà  des  sens,  et  que  les  pasteurs  semblent 
considérer  comme  un  jeu  l'offense  et  le  pardon. 

J'aurais  voulu  que  le  Brésil  fût  le  sujet  des  conversations 
que  j'avais  avec  le  curé  et  un  jeune  prêtre  qui  demeurait 
chez  lui  ;  mais  ces  messieurs  me  ramenaient  éternellement 
i  notre  révolution  dont  ils  connaissaient  très-bien  les  évé- 
nements principaux,  à  l'empereur  Napoléon,  à  ses  géné- 
raux, enfin  à  tout  ce  qui  s'est  passé  diez  nous  depuis  plu- 
sieurs années.  Notre  histoire  contemporaine  a  étési  extraor- 
dinaire, elle  se  rattache  tellement  aux  destinées  du  monde 
entier  que ,  même  dans  les  parties  les  plus  éloignées  de  la 
province  des  Mines,  je  trouvai  des  gens  qui  l'avaient  étudiée 
et  qui  en  recherchaient  curieusement  tous  les  détails. 

Le  26  février,  à  l'instant  où  j'allais  partir  de  S.  Jcûio 
pour  retourner  au  Rancbo  do  Rio  das  Mortes  Pequeno,  il 
survint  un  orage,  et  enfin  il  tomba  de  la  pluie.  Ce  moment 
était  attendu  avec  impatience  par  les  agriculteurs,  car  la 
sécheresse  n'avait  cessé  de  se  faire  sentir  dans  tout  le  pays 
depuis  le  jour  des  Bois  ;  elle  était  (elle ,  que  la  plupart  des 


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DD  UO  DE  S.  PIANOSCO.  10S 

flain,  brûlées  atusitAt  qu'elles  se  développaient,  ne  pro- 
duisBient  point  de  graines.  On  estimait  que  la  récolte  du 
maïs  ne  donnerait  que  la  dixième  partie  de  ce  qu'Ole  rend 
ordinairement;  aussi  ce  grain  était-il  d'une  cherté  aEhcuse. 

Pendant  que  j'allais  et  venais  entre  le  rancfut  et  S.  JoÀo, 
où  j' avais  eu  des  emplettes  à  faire  et  divers  ouvrages  &  com- 
mander, la  santé  du  pauvre  Prégent  s'altérait  chaque  jour 
davantage.  Je  me  décidai  à  lui  Taire  prendre  un  Vomitif, 
qui  lui  procura  un  soulagement  momentané;  mais  bientAt 
il  ctmimença  i  me  donner  de  vives  inquiétudes.  Dans  ce 
pays ,  comme  ailleurs ,  jles  gens  du  peuple  sont  insuppor- 
tables pour  les  malades.  Deux  mulâtresses  que  mon  vieil 
hâte  avait  chez  lui ,  et  qui  paraissaient  Être  de  fort  bonnes 
franmes,  voulaient  sans  cesse  persuader  à  Prégent  de  man- 
ger et  de  pr«idre  des  bouillons ,  et  elles  augmentaient  ses 
souffrances  par  leun  importunilés. 

Arrivant  un  jour  de  S.  Joâo,  je  le  trouvai  plus  mal.  Mon 
hAte,  toucbé  de  mon  inquiétude,  alla  chercher  un  pro- 
priétaire du  voisinage  qui  se  mêlait  de  guérir  les  malades, 
et  dans  lequel  tout  le  canton  avait  une  grande  confiance. 
La  nécessité  l'end  presque  médecins  une  foule  de  Hineiros, 
qui  sont  nés  avec  quelque  intelligence  et  désirent  se  rendre 
utiles.  Ils  ont  beaucoup  observé  les  malades ,  et  souvent 
très-bien;  ils  se  procurent  des  livres  de  médecine,  ils  les 
lisent,  les  relisent,  et  cherchent  i  faire  une  heureuse  ap- 
plication des  connaissances  qu'ils  y  ont  puisées.  Si,  pour 
former  un  très-bon  médecin,  il  faut,  je  suppose,  vingt  de- 
grés, me  disait  le  respectable  ouvidor  de  Sabarà ,  M.  José 
Teieira  (1),  il  n'est  guère  de  propriétaires  mineiros  qui  n'en 

il^  J'ai  fait  cooDiUre  dans  ma  leconde  reUUiott  (vol.  I,  p.  106)  l«  ra- 


,t,.;d:,i.  Google 


104  VOYAGE  AUX  SOURCES 

aient  au  moins  cinq  ou  six.  On  donne  le  nom  de  curiato» 
à  tous  ceux  qui  s'occupent  ainsi  de  médecine  sans  avoir  fait 
d'études  régulières ,  et  en  général  on  emploie  ce  mot  pour 
désigner  les  hommes  qui,  par  goût,  exercent  un  métier  ou 
cultivent  un  art  quelconque  sans  en  faire  leur  profession  (1  ). 
Je  trouvai  dans  Valftrei  (sons-lieutenant)  José  Pebeiba 
D&  SiLVA,  le  cun'ofo  que  m'amena  mon  hAte,  un  homme 
un  peu  embarrassé  dans  ses  manières,  mais  doux  et  hon- 
nête ;  il  me  parla  avec  beaucoup  de  sens  de  la  maladie  de 
Prégent  :  il  la  regardait  comme  une  fièvre  maligne,  et  me 
conseilla  de  continuer  à  donner  des  boissons  rafraîchis- 
santes et  d'administrer'  un  second  vomitif. 

Prégent  passa  une  mauvaise  nuit.  La  mienne  aussi  fut 
bien  loin  d'être  bonne;  je  fus  sans  cesse  sur  pied  pour 
donner  i  boire  à  mon  malade,  tourmenté  par  l'idée  de  le 
pMdre  et  livré  aux  pins  tristes  réflexions  :  il  me  semblait  que 
ce  voyage  était  réprouvé  par  la  Providence.  Que  d'embarras 
avant  de  l'entreprendre  et  d'obstacles  jusque  dans  les  plus 
petites  choses  !  Quelle  pénible  aventureque  celle  de  Porto  da 
Estrellal  Que  de  désagréments  m'avait  fait  essuyer  le  cod~ 
docteur  de  mulets  qui  m'avait  quitté  &  Ubé-I  Que  d'égards , 
que  de  soins,  que  d'attentions  il  m'avait  fallu  avoir  pour 
conserver  la  paix  avec  Prégent ,  et  ce  malheureux  était  dan- 
gereusement malade!  Tout  ce  que  j'avais  eu  à  souffrirde  lui, 
depuis  que  sa  santé  s'était  affaiblie ,  ne  saurait  s'exprimer  ; 
mais  il  n'en  est  pas  moins  vrai  qu'il  m'avait  rendu  de  très- 
grands  services,  et  qu'il  possédait  les  ciualités  les  plus  esti- 

rtcUre  hoaorible  de  H.  Josj  Teuira,  qui,  d^ais  moo  voyi^e.  ftitcréé 
baroD  de  C«eté  p«r  l'cmperear  0.  Pedro  I". 

(1)  L«  mal  curioio  répond ,  dans  noire  langue ,  k  celai  i'amaltHr  ; 
mais  il  a  un  sens  moios  limité. 


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DU  RIO  DE  S.  FRAHCISCO.  10» 

maUes Je  me  levai  découragé  et  accablé  de  tristesse. 

Je  partis  pour  S.  Joâo,  et,  arrivé  dans  cette  ville,  je  de- 
mandai quel  était  le  chirurgien  qui  avait  le  plus  de  répu- 
tation; on  m'indiqua  le  capitaine  Antonio  Felisberto,  que 
j'avais  déjè  eu  l'occasion  de  voir  l'année  précédente,  et  qai 
m'avait  alors  donné  quelques  renseignements  utiles.  D'après 
mes  récits,  cet  homme  jugea,  comme  le  curt'ojo  du  Rio  das 
Mortes  Pepueno,  que  Prégent  était  atteint  d'une  fièvre  ma- 
ligne, et  pensa  que  sa  maladie  avait  commencé  avant  même 
que  nous  fussions  sortis  des  bois  vierges.  Combien  cet  in- 
fortuné avait  dû  souffrir,  lorsque,  exposé  à  l'air  vif  et  au  so- 
leil ardent  des  campos ,  il  s'obstinait  à  ne  point  se  servir  de 
parasol  I 

Deux  ou  trois  jours  plus  tard  (le  2  mars) ,  je  fis  trans- 
porter Prégent  dans  une  auberge  de  S.  Joâo,  afin  qu'il  fût 
plus  prés  du  chirurgien ,  et  je.  m'établis  également  à  la  . 
ville.  J'avais  avec  moi  l'Indien  firmiano;  Laruotte  était 
resté  au  Rancho  avec  José  Marianne,  chargé  de  soigner  les 
mulets.  L'Indien  m'était  peu  utile  à  cause  de  son  inexpé- 
rience ,  et  c'était  moi  qui ,  nuit  et  jour,  prodiguais  tous  les 
soins  k  mon  pauvre  malade.  Il  est  impossible  d'être  pltis 
mal  servi  que  je  ne  l'étais  dans  l'auberge  où  je  me  trouvais 
logé;  il  fallait  des  heures  pour  y  obtenir  même  une  goutte 
d'eau.  On  m'avait  instaHé  au  rez-de-chaussée,  dans  une 
petite  chambre  assez  sombre;  j'y  passais  la  journée  dans 
l'ennui,  labistesse,  l'inquiétude,  et  la  nuit  j'étais  dévoré 
par  des  myriades  de  moustiques. 

Le  lendemain  de  mon  arrivée,  sur  les  neuf  heures  du 
soir,  je  m'étais  étendu  sur  mon  détestable  grabat,  lorsqu'un 
petit  marchand  italien  qui  se  trouvait,  comme  moi,  dans 
cette  auberge  entra  dans  ma  chambre  tout  effrayé,  en 


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IM  V0TA6E  AUX  SOOKCES 

s' écriant  qu'oa  venait  de  lui  voler  sa  malle  et  son  argent.  Je 
l'engageai  è  aller  sur-le-champ  porter  sa  plainte  à  l'ou- 
vidor,  et  c'est  le  parti  qu'il  prit.  Cet  homme  était  sorti  à  six 
heures,  après  avoir  fermé  la  porte  et  les  volets  de  sa  cham- 
bre, qui  étaitau  premier  étage.  Eo  rentrant,  il  avait  trouvé 
sa  porte  encore  fermée;  mais  la  fendre  était  ouverte,  et 
il  n'y  avait  plus  de  malle.  Le  maître  de  la  maison  et  les 
voyageurs  en  conclurent  que  la  malle  avait  été  descendue 
par  la  croisée,  et  qu'un  coup  de  BifQet  qu'on  avait  entendu 
était  le  ^gnal  que  s'étaient  donné  les  voleurs.  Tous  les 
voyageurs  étaient  rassemblés  devant  la  porte  de  l'Italien, 
et  chacun  formait  ses  conjectures,  lorsque  enfin  je  décidai  la 
société  à  faire  la  visite  de  l'aubei^e.  Nous  descendons  dans 
la  cour ,  et  à  peine  y  avons-nous  fait  quelques  pas ,  que 
nous  entendons  un  grand  bruit  da  cdté  de  la  porte  du 
malheureux  volé.  On  se  confirme  dans  l'idée  que  le  larcin 
avait  été  fait  par  la  croisée;  on  décide  que  le  voleur  était 
resté  caché  dans  ta  chambre,  et  qu'il  venait  de  s'échapper 
en  se  précipitant  dans  la  rue.  Cependant  l'ouvidor  arrive; 
il  fait  allumer  des  lampes  de  tous  les  cdtés,  place  du  monde 
à  toutes  les  issues,  et  commence  sa  visile.  D  ne  trouve  rien 
au  rez-de-chaussée  ;  il  monte,  parcourt  plusieurs  chambres, 
et  enfin  arrive  à  une  pièce  qui  n'était  occupée  par  aucun 
voyageur.  Il  demande  la  clef  :  elle  était  entre  les  m^insdu 
commis  de  l'aubergiste;  la  porte  s'ouvre,  et  la  malle  se 
trouve  sur  une  table  sans  qu'il  y  manque  rien.  Vouvidor 
continua  pourtant  ses  recherches ,  mais  il  ne  découvrit  per- 
sonne; il  essaya  toutes  les  clefs  de  la  maison  à  la  serrure 
de  la  chambre  où  s'était  retrouvée  la  malle,  aucune  ne  l'ou- 
vrait, et  il  envoya  en  prison  le  commis  qui  n'avait  rien 
m''glip<'<  |)our  nous  faire  prendre  le  change,  mais  qui,  évi- 


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DO  BIO  DE  S.  PUNOSCO.  107 

,  était  le  larron.  J'ai  su,  depuis,  que  cet  homme 
avait  ét^  reliché  fort  bénignement ,  ainsi  qne  le  maître  de 
l'auberge  que  l'on  avait  considéré  comme  son  complice. 

Le  lendemain  du  vol,  j'allai  Taire  une  visite  dans  la 
ville  :  la  conversation  devait  naturellement  tomber  sur  ce 
petit  événemeat.  Le  maître  de  la  maison  disait  beaucoup  de 
mal  des  Hineiros;  il  prétendait  qu'il  n'y  avait  chez  eux  ni 
délicatesse,  ni  bonne  foi;  que  les  ouvriers  laisaîent  de 
fausses  clefs  pour  les  nègres  qui  volaient  leurs  maîtres  ;  que 
lui-même  en  avait  fait  souvent  la  triste  épreuve  ;  qu'à  diffé- 
rentes reprises  il  lui  avait  été  volé,  de  cette  manière,  plus  ' 
de  soiiante  couverts  d'argent ,  et  qu'à  peu  près  tous  les 
marchands  de  S.  Joâo  d'El  Rei  achetaient  des  esclaves  les 
objets  dérobés  :  celui  qui  me  parlait  ainsi  était  un  Pauliste, 
et  l'on  sait  que  les  hommes  de  son  pays  n'aiment  point  les 
Mineiros  (1)  ;  il  n'est  donc  pas  étonnant  qu'il  exagérât  les 
torts  de  ces  derniers.  Un  Nîneîro  qui  tenait  un  rancho 
dans  la  province  de  S.  Paul ,  ti.  avec  lequel  j'eus  dans  la 
suite  l'occasion  de  m'entreteoir,  me  parlait  des  Paulîstes  à 
peu  près  de  la  même  manière.  Quoi  qu'il  en  soit,  dans  le 
coure  de  mon  premier  voyage,  j'avais  déjà  reconnu  qu'une 
délicatesse  scrupuleuse  n'était  point  la  vertu  favorite  des 
habitants  de  Minas ,  et  on  ne  doit  pas  être  surpris  qu'à 
S.  Joâo  d'El  Rei,  ville  qui  avoisine  le  plus  Rio  de  Janeiro, 
port  de  mer  et  capitale ,  il  y  en  ait  encore  moins  que  dans 


(i)  Les  P«nlisl«s  (tarent  anlreftoU  rnncns  it  chasïéB  pir  les  Forât- 
MrtM,  c*Mt'à-diTB  lu  étriagers  ipii  étaient  veaas,  tprig  aai,  dans  la 
pnniKC  dei  Hines ,  et  dont  les  descendants  forment ,  en  grande  partie , 
U  population  actuelle  de  «de  piorince.  L'Éloignement  que  les  Hineiros 
et  les  PaolistM  ont  en  longtemps  et  ont  pent^tre  encore  les  ans  pour  les 
■«très  date  de  cette  époqne. 


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106  TOYiOE  AUX  SOURCES 

les  autres  parties  de  la  province  (1),  où  d'ailleurs  l'éduca- 
tion est  généralement  plus  soignée.  On  sait  quels  furent  les 
premiers  habitants  de  la  province  des  Mines  ;  on  sait  qu'une 
nuée  d'aventuriers  fondît  sur  cette  province,  bientôt  après 
que  les  Paulistes  l'eurent  découverte  (S);  il  serait  bien  dif- 
ficile que  les  enfants  n'eussent  absolument  rien  conservé 
des  mœurs  et  du  caractère  de  leurs  pères.  Le  soin  que  pri- 
rent de  riches  Mineiros  d'envoyer  leurs  enfonts  en  Europe, 
et  l'établissement  du  séminaire  de  Harianna,  où  l'on  éle- 
vait la  jeunesse,  durent  sans  doute  contre-balancer  très- 
puissamment  l'Influenced'une  origine  malheureuse  ;  mais  il 
est  une  autre  influence  qui  agit  sans  cesse  sur  les  Brésiliens 
de  la  manière  la  plus  fflchense,  celle  de  l'esclavage.  L'exces- 
sive infériorité  de  l'esclave  le  conduit  naturellement  aux 
vices  les  plus  bas.  Je  ne  punis  point  mes  nègres,  quand  ils 
mentent  ou  qu'ils  me  volent,  disait  un  curé  de  Bahia,  jadis 
captif  chez  les  Africains,  parce  que  je  mentais  et  je  volais 
lorsque  j'étais  esclave.  Pour  se  soustraire  au  châtiment, 
'l'esclave  s'habitue  au  mensonge,  et  il  vole  parce  qu'il  ne 
possède  rien ,  qu'il  est  entouré  d'objets  qui  le  tentent ,  et 
que  souvent  ses  besoins  sont  mal  satisfaits;  peut-être  aussi 
considère-t-il  le  vol  comme  un  moyen  de  vengeance.  Et 
quels  motifs  empêcheraient  l'esclave  de  se  livrer  à  ses  mau- 

(1)  Tojei  ce  que  j'ai  écrit  snr  la  comarea  da  Rio  dis  Mortes  et  sa 
capitale,  dans  mon  Voyage  darw  ledittriet  de*  Diamanlt.tXe.,  1,  333 

(2)  •  DediSérenles  proriaces,  dilua  aatear  brésilien  tris-estimable,  se 
ce  répaadit  dans  les  forêts  de  Minas  ub  pea^e  nombreni,  qui  ae  coonais- 
1  sait  d'antre  droit  que  celui  de  la  force,  qai  s'abandouDiii  à  une  licence 
D  sans  borDca,  k  qui  tout  était  iadiffireut ,  eicepté  l'or,  et  dont  le  caric- 
-  tire  était  un  composé  d'orgueil ,  d'ambitioo  et  d'aadace  portés  au  der- 
n  uier  degré.  «  (Piiirro,  Mem.  ftiX.,  vni,  seguoda  pari.,  0.1 


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DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  109 

vais  penchants?  Des  sentiments  religieux?  on  lui  en  donne 
i  peine;  la  crainte  de  perdre  sa  réputation?  il  n'y  a  pas 
plus  de  réputation  pour  liii  que  pour  le  bœuf  ou  le  cheval  ; 
comme  eux ,  il  est  hors  de  la  société  humaine.  Reste  donc 
la  frayeur  des  chAtiments;  mais  il  est  quelquefois  puni 
pour  les  causes  les  plus  légères,  comment  ne  risquerait-il 
pas  de  l'être  pour  satisfaire  ses  goi^ts  et  ses  passions?  Le 
propriétaire  d'esclaves  est  donc  entouré  d'êtres  nécessaire- 
ment abjects  et  corrompus  ;  c'est  au  milieu  d'eux  que  ses 
enfants  s'élèvent ,  les  premiers  exemples  que  ses  Sis  auront 
soos  les  yeux  seront  ceux  du  vol  et  de  la  dissimulation  ; 
comment  ne  se  familiariseraient-ils  pas  avec  ces  «vices  et 
tant  d'antres  que  l'esclavage  traîne  à  sa  suite  (1)?  Plaignons 
fesclave,  sans  doute,  mais  ne  plaignons  guère  moins  le 
maître  qui  l'emploie  (3). 


(1)  Va  jEDne  BrJaitieD  fort  recOBunandable  m*  rtcontait  qœ,  lorsqu'il 
fuit  enfanl ,  il  loi  éuit  sfrirMueat  interdît  par  son  père  (Ttrolr  lies 
rapports  aret  les  petEts  nègres ,  mais  qu'il  riolait  cette  délïnse  le  plos 
souTenl  qu'il  lui  était  possible.  Je  présuma  que  beaucoup  d«  pères  fout 
la  miiDe  défense  et  ae  sont  pas  niienx  obéis. 

(2)  L'e.clarage,  on  le  TOit,  entraîne  avec  lui  bien  des  roani;  mais 
penl-eire  en  canserait-oa  dsTaot^e  «ucore  si  on  émancipait  brusque- 
ment les  esclaves,  comme  le  demandent  h  grands  cris  des  philanthropes 
^'animent  de  bonnes  intentions  sans  doute,  mais  qui  ignorent  entière- 
BKaI  ce  que  sont  les  nègres  et  l'Amérique.  Les  liens  qoi  retiennent  l'es- 
clave doivent  être  reUchés  peu  i  peu  ;  on  courrait  de  grands  risques  en 
tes  brisant  :  ce  qui  s'est  passé  an  Brésil  relativement  h  la  traite  tend  k 
confirmer  ce  qne  je  dis  ici.  Sons  le  gouTernemenI  de  Jean  VI,  on  avait 
filé  an  commerce  des  noirs  des  limites  étroites  et  mis  des  droite  élevés 
snr  ceni  qa'on  iinportail  :  alors  on  ne  hisaït  pas  la  contrebande ,  parce 
qu'elle  n'aurait  point  offert  des  bénéfices  qui  pussent  contre -balancer 
les  risques  ;  les  esclaves  étaient  ehers  ;  les  gens  pauvres  n'en  acbelaient 
pins  qu'à  des  crédits  longs  et  ouéreui  ;  l'bonime  libre  se  teraît  pea  à  peu 
résigné  an  travail ,  et ,  k  mesure  qu'on  l'aurait  vu  a'j  accontomer,  on 


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110  VOYAGE  AUX  SOUICES 

Comme  t'a  très^tioi  fait  obAeirer  H.  Perdiiunid  De- 

aarait  pu  anginenter  gridnellemeiit  le^  droits  et  gèaer  h  triile  dans  U 
nrfme  proportion.  Celle-ci  a  été  totalement  défendae  lorsque  tons  les 
Brésiliens  la  comidéraienl  Encore  comme  indispensable  k  lenr  p*j8: 
partout  oi)  il  j  ■  un  grand  iut^rtt  k  faire  U  conlrebaade ,  il  so^t  des 
contrebandiers  andacieni  qui  courent  tous  les  risques,  et  c'est  ce  qui 
est  arriva  an  Brésil.  Taudis  que  les  raisseani  des  royaumes  unis  croi- 
senl  eutre  l'Afrique  et  l'Amérique  pour  empêcher  la  traite,  et  font  méoie 
beancoup  de  prises ,  l'argent  des  eopitalistes  anglais  la  maintient  (TOjet 
KiDDiB,  Sketehet,  Il ,  390),  et  je  trahirais  la  vérité  si  je  disais  que  jamais 
un  Français  n'y  a  pris  part.  Les  bénéfices  sont  tels,  dit  le  Téridique  Gard- 
iwr,  qu'une  seule  cargaison  de  nèfres  qu'on  parvient  k  sauver  paye,  h 
ce  qu'on  assure ,  les  dépenses  de  trois  cha^ments  et  laisse  Nicore  on 
gain  cousidérable.  s  J'ai  de  bonnes  raisooi  pour  croire,  ajoute  le  mime 

■  auteur,  que,  pendant  les  cinq  ans  que  j'ai  passés  au  Brésil,  les  impor- 
cr  tatioas  ont  presque  toujours  répandu  aux  demandes...  Tout  le  monde 

•  sait  à  Kio  de  Janeiro  que  des  cbargemenls  d'esclaves  sont  régnlière- 
>  ment  mis  1  terre  k  peu  de  distance  de  cette  ville...,  et,  dans  les  diK- 

■  rents  voyages  qne  j'ai  faits  sur  la  cdte ,  j'ai  vu  Irès-fréqnemment  dé- 

■  cbarger  des  cargaisons  de  3  à  300  nègres  ;  sonveat  ausû  j'ai  rencon- 

■  iré ,  dans  l'intérieur  des  tioupes ,  de  20  1 100  Africains  que  l'on  ccm- 

■  dnisait  h  la  vente Les  magistrats  eui-mêmes  achetait  souvent  des 

■  esclaves,  et  l'on  n'ignore  point  que  les  hommes  placés  k  la  ttte  des  dia- 

■  tricts  où  l'on  débarque  les  noirs  retoiveni  nue  prime  pour  garder  le 

•  silence  {Traveli ,  Ifi].  ■  Voyons  donc  qnel  a  été,  pour  le  Brésil ,  k  ré- 
sultat de  la  BuppressioQ  trop  brusque  de  la  traite.  Une  parait  pas  qne  les 
importations  aient  diminué  ;  tlUt  corrttpondeM  ava  dtmandu  (royei, 
outre  Gardoer,  H.$iT,atal.rel.,249).  Les  nègres  ne  sont  probablement 
traités  ni  mieui,  ui  plus  mal,  et  les  enbnts  des  hommes  libres  conit- 

'  nueni  nécessairement  h  être  élevés  parmi  les  esclaves  :  des  changemMiti 
se  sont  opérés  cepeudauL  Les  lois  et  les  traita  proclamés  A  la  fkce  do 
runiverssoDt  violés  par  tout  le  monde,  Européens  et  Américains:  ceui 
qni  devraient  les  faire  exécuter  retoivent  de  l'argenl  pour  m  rien  voir  ; 
l'esprit  des  anciens  Dibustiers  s'est  leaonvelé  ches  des  hommes  qui  se 
placent,  comme  eux,  en  dehors  de  la  société  chrétienne;  les  tortures 
que  les  nègres  ont  souffertes,  dans  tous  les  temps,  pendant  la  trarerséo 
(UàKt.,  Ittiti,  11,  663)  sont  devenues  bien  plus  affreuses  par  les  moyen* 
qu'on  emploie  pour  les  soustraire  aux  croisents  (Walsi,  NoL,  U,  490), 
el  elles  augmentent  eocorc  lorsque  ceni-ci  prennent  quelque  négrier 


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DU  BIO  DE  S.  FUACISCO.  111 

DIS  (1),  le  r^me  auquel  les  nègres  sont  soumis  est  loin 
d'être  le  même  dans  les  différentes  parties  du  grésil.  Je 
m'empresserai  de  dire  que,  dans  la  province  des  Mines,  ils 
m'ont  paru  traités  avec  beaucoiq)  de  douceur,  et  il  est  cer- 
tain que,  même  k  Rio  de  Janeiro,  on  en  use  mieux  è  leur 
égard  que  dans  les  États  du  sud  de  la  tonfédération  amé- 
ricaine. L'écrivain  consciencieui  que  je  viens  de  citer, 
MM.  Spix  et  Martius,  M.  Gardner  et  même  le  comte  de 
Soiannet,  qui  s'est  montré  si  peu  favorable  aux  Brésiliens, 
s'accordent  &  reconnaître  que  ceux-ci  sont  généralement 
fort  indulgents  dans  leurs  rapports  avec  leurs  esclaves. 
Voici,  en  particulier,  commet  s'exprime  celui  de  ces 
voy^eurs  qui,  je  crois,  a  séjourné  le  plus  longtemps  dans 
FAmérique  portugaise  et  a  eu  le  plus  de  rapports  avec  ses 
habitants  :  u  Avant  mon  arrivée  au  Brésil ,  on  m'avait  fait 
«  croire  que  la  condition  des  esclaves  dans  ce  pays  est  la 
a  plus  malheureuse  que  l'on  puisse  imaginer;  mais  un 
«  pelij  nombre  d'années  a  suffi  pour  me  faire  revenir  de 

<f  cette  erreur Jamab  l'esclavage  ne  trouvera  en  moi 

a  un  défenseur;  mais  je  ne  coDS^itlrai  pas  non  plus  à  ad- 
«  mettre  que  les  Brésiliens,  propriétaires  d'esclaves,  sont 
«  des  monstres  de  barbarie  :  c'est  tout  au  plus  si,  pendant 
te  le  long  séjour  que  j'ai  fait  parmi  eux ,  j'ai  été  témoin  de 

■  quelques  actes  d'une  folle  cruauté Ces  hommes,  na- 

«  turelleraent  portés  k  la  lenteur  et  à  l' indolence,  font  peu 
«  d'attention  à  des  fautes  qui ,  chez  des  peuples  plus  actii^ 
«  et  plus  ardents,  seraient  punies  avec  sévérité...;  et  sou- 

(TOjra  Mtitena  BraHUentl,  UI ,  84)  ;  l'argent  qa'oo  pifiit  légalemeat 
•B  Bae  poar  les  imporlatioiifl  permitca  enrichit  des  ireiitiiricra  taaa  foi 
Di  loi  et  des  <»pii«li8t«$  anglais. 
{1}  BrHHy  14!. 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


lit  VOYAGE  AUX  SOURCES 

«  ?ent  on  se  contente  de  donner  quelques  coups  de  towi 
«  pour  de^  crimes  qui ,  en  Angleterre,  eatratneraient  la 

«  déportation  ou  inèrae  la  mort Sur  la  plupart  des  ha- 

«  bitations,  les  esclaves  sont  bien  traités  et  paraissent  très- 

«  heureux Je  n'aurais  jamais  pu  croire  que  les  nègres 

«  de  quelques-unes  des  plus  importantes  fussent  esclaves, 
«  si  je  D'en  avais  été  prévenu  d'avance  ;  je  voyais  une 
«  troupe  de  travailleurs  sortir  joyeusement  le  matin  de 
a  leurs  maisonnettes,  gui  souvent  sont  entourées  d'un 
a  petit  jardin ,  se  rendre  à  leurs  occupations  journalières 
«  et  revenir  te  soir  sans  être  en  aucune  manière  harassés 
«  de  fatigue..  ..  Les  dames  brésiliennes  m'ont  paru  pres- 
tt  que  toutes  pleines  de  bonté  pour  leurs  esclaves ,  et  sou- 
«  vent  elles  soignent  elles-mêmes  ceux  qui  sont  maJades.» 
(Gardn.,  Traveli,  etc.,  17-19.)  Le  même  auteur  con- 
firme aussi  ce  que  j'ai  dit,  il  y  a  longtemps  [Voyage  dans 
les  provincet  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  I,  9),  du  peu  de  re- 
gret que  les  Africains ,  transportés  en  Amérique ,  donnent  à 
leur  patrie,  a  Dans  toutes  les  parties  du  Brésil  que  j'ai  par- 
te courues,  j'ai  causé,  ajoute-t-il,  avec  des  esclaves,  et  j'en 
«  ai  trouvé  très-peu  qui  fussent  fïchés  d'avoir  été  enlevés 
«  À  leur  pays  ou  qui  désirassent  y  retourner.  » 

Je  reviens  à  la  triste  auberge  de  S.  Joâo  d'El  Rei  et  à 
l'infortuné  auquel  je  prodiguais  mes  soins.  Livré  à  des  agi- 
tations cruelles,  il  retrouva,  dans  les  secours  de  la  religion, 
le  calme  et  les  consolations  dont  il  avait  besoin.  Alors, 
patient  et  résigné,  il  n'était  presque  plus  un  instant  sans 
avoir  les  yeux  fixés  sur  moi  ;  mais  ses  regards,  par  lesquels 
il  semblait  m'implorer ,  me  déchiraient.  Découragé ,  ac- 
cablé de  fatigue,  je  renvoyai  au  Rio  das  Mortes  l'Indien 
Firmiano,  qui  semblait  s'ennuyer  de  prendre  part  à  tant  de 


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DU  UO  DE  S.  PUNCiSCO.  US 

soins,  et  je  fis  rester  avec  moi  José  Marianne,  qui  était  plus 
capable  de  me  seconder.  On  me  donnait  des  espérances; 
mais  elles  ne  se  réalisèrent  point.  Le  7  de  mars,  ïves  Fi- 
gent expira,  et  il  fut  enterré  avec  toute'la  décence  possible, 
dans  l'église  paroissiale  de  S.  Joâo  d'El  Rei. 

J'avais  eu  beaucoup  à  souffrir  de  ce  jeune  homme,  de- 
puis que  sa  santé  et  son  caractère  s'étaient  altérés;  mais  il 
était  plein  de  probité  et  d'honneur  et  m'avait  été  extrême- 
ment  utile.  Aucun  Français  n'a  pénétré  avant  nous  dans 
cette  province ,  m' avait-il  dit ,  quand  nous  entrâmes  à  Mi- 
nas; je  n'y  ferai  rien  qui  ne  puisse  honora*  notre  pays,  et  il 
avait  tenu  parole.  Sa  perte  fut  cruelle  pour  moi  ;  il  me  sem- 
blait que  j'étais  seul  dans  cette  immense  contrée ,  et 
qu'alors  une  distance  infinie  me  séparait  de  la  France. 

Je  désirais  vivement  compléter  la  collection  zoologique 
que  Prégent  avait  commencée  avec  beaucoup  d'habileté  et 
de  soin  :  deux  jeunes  gens  se  présentèrent  successivement 
pour  le  remplacer;  mais  les  renseignements  que  l'on  me 
donna  sur  leur  cojnpte  m'empêchèrent  de  les  prendre.  José 
Harianno  m'avait  dit  qu'ayant  vu  plusieurs  Tois  le  pauvre 
Prégent  préparer  des  oiseaux  il  se  sentait  capable  de  faire 
le  même  ouvrage,  et  que,  si  je  lui  donnais  un  tocador  (tou- 
cbeor)  (1),  il  pourrait  k  la  fois  surveiller  les  mulets  et  con- 

(1)  Le  loeodor,  comme  Je  l'ai  dit  Billenrg,  e«  ehtagi  de  !■  coodnite 
dn  muleta ,  mhb  l'iaspectian  da  ntnlelier  principa)  on  arrteiro  ;  c'est 
loi  qai  les  fait  arancer  et  qui  les  dirige  qniud  ils  sont  ea  marche.  Un 
TOTOgeur,  eo  parlaot  des  préparatifs  qa'il  tx  pour  traverser  la  provioce 
de  Hims ,  dit  qu'il  faut  apporter  dd  grand  soin  au  cboii  des  guides. 
■  11  ne  sodit  pas .  ajoute-t-il ,  qu'ils  conaaisiieiit  leit  routes  ;  ils  doiTent 
encore  prendre  soin  des  cheTaux ,  reilier  sar  eni  pendant  la  nuit ,  aSn 
qu'ils  De  s'écartent  pas  trop  du  campement  :  un  bon  guide  doit  savoir 
ferrer,  saigner  le^  «Diinani  bleasi^,  réparer  les  bits.  >  (Soi.,  Sow.,  35S.) 
I.  8 


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114  VOYAGE  ADX  SOtIKCES 

tioner  ma  collection.  Je  finis  par  accoter  aes  offres  ;  mais 
il  fallait  trouver  le  tocodor. 

Cependant  j'avais  quitté  S.  loào,  et  j'étais  retourné  au 
Rancho  do  Rio  das  Mortes  Pequeno.  Il  fallut  revoir  cette 
chambre  où  le  pauvrePrégent  avait  commencé  À  être  alité; 
ce  fut  encore  un  moment  très-pénible  pour  moi. 

Depuis  longtemps  José  Marianno  se  plaignait  de  violets 
maux  de  tète  et  ne  mangeait  plus;  le  jour  même  où  je 
quittai  S.  Joâo,  il  arriva  au  rancko  avec  la  fièvre.  Valfem 
José  Pereira  da  Silva,  ce  cwioso  dont  j'ai  déjà  parlé,  décida 
qu'il  fallait  qu'il  prit  l'émétique,  et  je  le  lui  adminiatrai; 
j'étais  véritablement  an  désespoir  d'être  obligé  de  faire 
encore  une  fois  l'infirmier. 

José  Marianno  fut  promptement  en  état  d'essayer  se*  ta- 
lents pour  la  taxidermie  ;  mais  je  ne  tardai  pas  k  ai(»T  on 

1)  est  bien  frident  qu'on  ■  vonln  parler  ici  des  arrieiroi ,  eu  ce  «Mt 
eux  qui  ferrent  le»  iniiiMai ,  th,.;  nais  ces  hommea  ne  sont  point  des 
guides  ;  ik  conduisent  teura  maltrea  (atMM)  partout  oA  c«ni-ci  oat  eane 
d'aller,  et ,  quand  ils  ne  savent  pas  le  dienin,  Us  le  demandent.  Excepta 
quand  on  veut  gravir  qaelqoe  moDlagne  élevée,  les  guides  sont  aussi 
peu  nécessaires  dans  la  province  de  Minas  qn'en  Snrope  ;  peul^itre  nitei* 
7  court-(Hi  moins  de  risques  de  s'égarer,  parée  que  les  cbemind  n*; 
sont  pas,  k  beaucoup  près,  aisii  nullipliés.  Quelque  arrieiro,  pour  se 
faire  valoir  aupris  de  son  mattre ,  a  pn  lui  dire  qu'il  veillait  ses  mulets 
pendant  la  nuit;  mais,  quand  il  n'y  a  point  de  piturage  fermé  (patlO 
feehado),  on  llche  simplement  les  mulets  dans  la  campagne,  en  leur 
cboisisMDtunbonberbage  et  BU  les  accotant  {eneattar),  anCanIqnc  faire 
se  peut ,  k  quelque  colline.  Les  twndoaou  tavernes,  les  ramehot,  ces  han- 
gars onverla  h  tout  venant ,  les  faxtndai  et  ka  titiot  ok  le  TOfagcm  n- 
(oil  rhospttalité  sont  probablement  g«  qu'on  a  appelé  campement;  car, 
même  dans  les  parties  les  plus  désertes  de  1«  province  de  Hinas  (  ter- 
(Ôo) ,  il  est  rare  qu'on  «oit  forcé  de  coucher  dehors ,  comme  j'en  ai  fait 
l'eipérience  pendant  deni  ans  de  vojage  dan  e«tle  province  (On  'peat 
consulter  anr  ces  divers  points  les  aaleiin  las  ] 
von  Eschwegc,  PoU,  Spiiet  Marlini.) 


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DU  RIO  DE  S.  nuncisco.  1» 

autre  malade.  Firmiano  m'avait  accompagné  dans  nne  des 
courses  qne  fêlais  sans  cesse  obligé  de  faire  à  la  ville;  il 
avait  été  monHIé,  et,  malgré  mes  recommandatio'ns,  il 
D'avaït  point  changé  en  arrivant  an  Rancho;  il  s'était  en- 
rhumé, et  la  fièvre  se  déclara.  J'étais  vérîtablem«it  abreuvé 
d'amertume.  Il  fallut  encore  avoir  recours  au  bon  alftret, 
qui  fit  son  ordonnance,  et  au  bout  de  quelques  jours  l'In- 
dien se  trouva  mieax. 

Pendant  qu'il  était  encore  malade,  j'allai  faire  une  her- 
borisation dans  ces  montagnes  pierreuses  que  l'on  a  à  sa 
gauche  lorsqu'on  va  du  Rancho  à  S.  Joâo  d'El  Rei  (Serra  de 
S.  Joêo);  j'y  trouvai  peu  de  plantes  en  fleur,  probablement 
k  cause  de  la  sécheresse  qu'il  avait  fait  pendant  si  long- 
temps. Le  sommet  de  la  Serra  présente  des  rochers  amon- 
celés, et  an  milieu  d'eux  il  ne  croit  guère  qu'une  espèce 
végétale,  un  amela  d'aaa  {Vellonia).  Les  tiges  de  cette 
plante,  qui,  comme  toutes  celles  du  même  genre,  a  un  as- 
pect singulier,  sont  hautes  de  4  à  9  pieds,  rabougries ,  tor- 
tueuses, divisées  ea  rameaux  qui  ont  nne  grosseur  égale 
dans  toute  leur  longueur  et  s<»it  entièrement  nus,  si  ce 
n'est  an  sommet,  où  ils  portent  une  touffe  de  feuilles  rotdes, 
linéaires,  aiguës  et  visqueuses. 

Au  retour  de  ma  promenade ,  je  trouvai  Firmiano  beau- 
coup mieux;  maisilétait  fort  triste.  Je  ne  puis  plus  être 
gai,  me  dit-il ,  depuis  que  nous  avons  perdu  notre  compa- 
gnon de  voyage.  Cette  perte  fut  règlement  bien  grande 
pour  le  pauvre  Indien  :  Prégent  l'amusait,  et  ne  lui  aurait 
jamais  donné  que  de  bons  exemples  et  d'utiles  leçons.  Au' 
milieu  des  Brésiliens  que  je  fus  obl^  de  prendre  pour  me 
servir  ,  il  n'avait  rim  à  gagner,  et  il  perdit  jusqu'à  ses 
grâces  sauvages. 


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116  VOYAGE  AUX  SODItCES 

Le  lendemain  de  mon  herborisation  dans  la  Serra ,  Fir- 
miano  était  presque  rétabli;  mais  il  semblait  que  je  ne 
dusse  plus  jouir  d'un  seul  jour  de  tranquillité.  José  Ma- 
riaono  faisait  avec  succès  son  apprentissage  d'empailleur; 
cependant  il  avait  laissé  passer  deux  repas  sans  prendre  de 
nourriture  ;  il  était  devenu  triste,  et  il  me  dit  qu'il  voulait 
aller  chet  lui  chercher  ses  effets.  Cette  espèce  de  menace 
me  livrait  k  de  nouveaux  tourments;  car  Firmiano  n'était 
pas  parfaitement  rendu  à  la  santé,  et  je  n'avais  pcunt  en- 
core de  tocador. 

Le  bon  alferes  avait  inutilement  tâché  de  m'en  procurer 
un;  il  finit  par  me  dire  qu'il  croyait  inutile  d'en  chercher 
plus  longtemps  dans  les  environs  du  Rio  das  Mortes.  J'allai 
donc  h  S.  Joâo,  et,  afin  d'être  assuré  de  trouver  quelque 
part  un  homme  tel  qu'il  m'en  fallait  un ,  je  priai  Vouvidcr 
de  me  donner  une  lettre  de  recommandation  pour  les  com- 
mandants des  villages  où  je  devais  passer  en  quittant  le 
Raocbo.  Ce  magistrat  me  reçut  parfaitement  et  me  remit 
une  lettre  pour  le  capitào  môr  de  Tamanduà. 

J'étais  plus  fatigué  que  je  ne  puis  le  dire  de  tous^  les  re- 
lards qne  j'essuyais.  Mes  jambes  pouvaient  à  peine  me 
soutenir;  on  me  trouvait  extrêmement  maigri,  etjecrai* 
gnais  de  tomber  malade  à  mon  tour ,  si  je  restais  plus  long- 
temps dans  un  pays  où  j'avais  éprouvé  tant  d'inquiétudes 
et  de  chagrins ,  et  pour  leqnel  je  sentais  A  chaque  instant 
augmenter  mon  aversion.  Enfin,  le  18  de  mars,  je  pris  la 
résolution  de  partir  le  lendemain ,  quelque  chose  qui  pût 
arriver.  Le  soir,  je  fis  mon  compte  avec  mes  hAtes  du  Rio 
das  Mortes  Pequeno;  mais,  à  l'exception  de  quelques  pe- 
tites provisions  que  je  les  avais  chargés  de  m' acheter,  ils  ne 
voulurent  rien  me  faire  payer,  et  ce^tendantc'  étaient  des  gens 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  117 

pauvres.  Nuit  et  jonr,  ils  avaient  prodigué  des  soins  à  mes 
malades,  ils  m'en  avaient  donné  à  mcH-mâme;  ils  avaient 
blaocbi  mon  linge,  ils  n'avaient  cessé  de  me  faire  de  petits 
cadeaux,  et  pendant  un  mois  ils  tétaient  privés  pour  nous 
d'une  partie  de  leur  maison.  Si  je  n'avais  pas  eu  à  me  louer 
des  habitants  de  S.  Joâo  d'ËI  Rei  (i) ,  du  moins  j'avais  re- 
trouvé chez  ces  bonnes  gens  l'aimable  hospitalité  qui 
m'avait  fait  vouer  aux  Mioeiros  une  reconnaissance  éter- 
nelle. 

(1)  Vojei  mon  fog^ff  dont  U  éitlriet  4et  Diamant*,  etc.,  vol.  1. 


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DD  BIO  DE  S.  F8ANC1SC0.  119 

éferé,  puisqu'il  se  trouve  compris  eutre  les  commencements 
du  Rio  Grande  et  les  sources  des  premiers  affluents  du 
S.  Francisco  {4]  ;  d'ailleurs  nous  savons ,  par  les  obserra- 
tions  barométriques  de  H.  d'Eschvege ,  que  la  fazenda  de 
VicenU,  située  i  4  lieues  de  la  petite  Tille  de  Tamanduâ, 
qui  se  trouve  sur  cette  route,  est  élevée  de  2,46â  p.  anglais 
(551  mètres)  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  que  le  vil- 
lage de  S.  Joâo  Batiita,  situé  è  5  lieues  de  celui  d' Olivàra 
où  je  m'arrèUi,  se  trouve  à  une  hauteur  de  3,36Sp.  anglais 
(994-,  8)  (2). 

Ce  pays  est  généralement  montueux  et  présente  une  al~ 
temalive  de  pâturages  et  de  bois  ;  il  existe  même  une  véri- 
table forêt  auprès  de  Tamandni.  L'herbe  des  eatnpoê  n'a 
point  ici  l'excdlente  qualité  de  celle  du  canton  de  Rio 
Grande ,  et  ce  n'est  que  vers  la  Serra  da  Canastra  qu'on 
trouve  le  eapim  /Wdia (herbe  flèche),  Graminée  qui  carac- 
térise les  m^eilleurs  pâturages.  En  divers  endroits,  les  etun- 
poi  sont  parsemés  d'arbres  tortueux-  et  rabougris,  comme 
le  sont  ceux  que  j'avais  parcourus  entre  le  nord  de  la  pro- 
vince des  Mines  et  le  Rio  de  S.  Francisco  (3). 

Cest  au  delà  de  Formiga,  village  situé  i  environ  24  lieues 


(1)  Od  *«m  bienUt  qoe  j*ai  donnt  à  ceUe  crête  le  nom  de  Sara  do 
Mo  Grand*  e  tlo  s.  FrtmeUco ,  pam  qu'elle  divise  les  eani  de  ces 
deai  rivières. 

<1)  Esow.,  Brtu.  dienéut  Welt,  1,  £3,28.  — «  Ceslieai,  dit  aussi 

■  d'Esdbvege,  doiTent  former  le  plaleiD  le  plas  élevé  nOD-Beulemeal  de 

*  l«  proriace  dea  HinM ,  mtis  encore  de  tout  le  Brésil ,  puisqne  leurs 

*  MOI  s'éeonkfit ,  d'an  ctté ,  josqa'anx  dernières  limites  méridiouilea 

■  de  c«t  empire ,  et ,  de  l'iatre ,  presqOe  josqa'i  ses  freatières  seplej!- 

*  triondes.  • 

(S)  Toyei  mon  P'oyofe  dont  Ici  provlnrei  de  Rio  de  Janeiro ,  etc ,, 

TOl.  II. 


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1»  VOYAGE  AUX  SOURCES 

de  s.  Joâo  d'El  Rei ,  que  l'on  place ,  de  ce  cdté,  les  limites 
du  Sertâo  ou  désert  ;  mais  le  pays  commence  bien  plus  tôt 
à  être  peu  habité.  Entre  la  fazmda  appelée  Capào  da$ 
Flores,  éloignée  de  6  Ugoat  et  demie  du  Rancho  do  Rio 
das  Mortes  et  celle  du  Capitào  Pedro,  je  ne  vis  qu'une  ha- 
bitation dans  un  espace  de  S  lieues  et  demie  ;  le  lendemain, 
je  rencontrai  une  seule  personne  ;  le  surlendemain,  je  n'a- 
perçus même  pas  un  voyageur. 

Il  existe  encore  des  minières  en  eiploitaUon  dans  les 
terrains  qui  avoisinent  le  plus  le  Rancho  do  Rio  das  Mortes 
Pequeno  et  S.  Joâo  d'El  Rei  ;  mais  celles  des  environs  de 
Tamandui  et  de  Piumhy  sont  aujourd'hui  entièrement 
abandonnées.  On  cultive  la  terre  ,  on  élève  des  bestiaux  et 
l'on  engraisse  des  cochons.  A  peu  près  depuis  l'habitation 
du  Capitâo  Pedro,  située  à  9  lieues  du  Rio  das  Mortes,  je 
vis,  dans  toutes  les /'azendiM,  un  grand  nombre  de  ces  der- 
niers animaux,  et  ce  sont  eux  qui  forment  la  principale 
richesse  des  environs  de  Pormiga. 

Il  faut,  dans  les  habitations,  être  continuellement  en 
guerre  avec  eux,  et,  en  certaines  circonstances,  surtout, 
ils  sont  d'une  impudence  très-embarrassante.  Je  vais  dire 
en  deux  mots  quels  sont  les  soins  qu'on  leur  donne.  On  ne 
tient  point  enfermés  les  femelles ,  les  verrats  et  les  jeunes  ; 
on  les  laisse  errer  en  liberté  autour  des  fazertdas  ;  deux 
fois  le  jour,  on  leur  donne  du  mais  en  épis,  et,  tous  les  deux 
mois ,  une  petite  portion  de  sel  délayé  dans  de  l'eau  ;  on 
examine  de  temps  en  temps  s'ils  n'ont  point  de  blessures , 
et  on  les  guérit  avec  du  mercure  dons.  Quant  aux  pour- 
ceaux châtrés  que  l'on  veut  engraisser,  on  les  soigne  davan- 
tage ;  on  les  enferme,  pendant  le  jour,  dans  on  cwrat,  et, 
pendant  la  nuit,  on  les  fait  entrer  sous  un  hangar  où  l'on 


D,g,t,.,.d.i.COOC^IC 


DD  RIO  DE  S.  FEUNCLSCO.  131 

étend  de  la  paille  de  maïs,  c'est-i-dire  les  enveloppes  des 
épis  ;  o»  leur  donne  è  manger  trois  fois  le  jour,  ordinaire- 
ment deux  fois  dn  maïs  égrené,  et  la  troisième  4u^&â(i), 
des  inhames{Catadium  esculentum]  ou  des  carâs  [Dioscorea 
alata)  (3)  ;  tous  les  quinze  jours,  ou  leur  fait  boire  de  l'eau 
salée,  et,  dans  tes  habitations  où  l'on  fait  des  fromages,  on 
nmpiace  le  sel  par  des  rations  journalières  de  petit-lait. 

La  race  de  pourceaux  la  plus  commune  dans  ce  pays  porte 
le  ooTaàeporeoacanastra  (cochons  malles).  Cescochons  sont 
ordinairement  noirs  ;  ils  m'ont  paru  avoir  les  jambes  plus 
longues  que  ceux  de  France ,  le  corps  plus  court  et  le  dos 
plus  arrondi  ;  leurs  oreilles  sont  redressées  dans  la  jeu- 
nesse, un  peu  pendantes  chez  les  adultes.  On  chAtre  ces 
animaux,  mâles  et  femelles,  è  l'Age  d'un  an,  et  il  leur  faut 


(1)  Le  /UMeslIa  Tariae  de  mats  simplement  nioaloe  ;  U  farinkatit 
le  mais  séparé  de  ses  eoTeloppes ,  mis  en  bouillie  à  l'aide  de  la  machiue 
appelée  manjola,  pois  séché  dans  une  efaaudière  peu  proronde ,  et  enfin 
rédoit  en  une  poudre  grossière  (tojci  mon  Voyage  dam  tet  protiineet 
de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  1, 13S). 

(2)  On  a  vu  que ,  dans  le  canton  de  Rio  Grande ,  on  donue  aussi  aui 
cochaus  des  irUiamei  et  des  eardj ,  et  qu'en  particulier  mou  bAte  du 
ranchodo  Rio  das  Mortes  Pequeno  trait  deux  cbamps  de  nirtit.  Ici  donc 
je  H  puis  être  d'accord  avec  H.  d'Eschwege ,  car  il  assure  qu'on  nonr- 
rit  les  cocboDS  uniquement  avec  du  maïs ,  et  qae  la  disette  de  ce  grain 
tendamne  ces  animaux  i  mourir  de  faim  ;  il  raconte  mtme  que ,  ajant 
conseillé  k  des  agricultears  de  cultiTer  la  patate  pour  en  nourrir  leurs 
poDrceam ,  ilB  lai  répondirent  qu'ils  n'iraient  cerlaiaement  pas  se  don- 
ner  la  peine  d'arracher  des  patates  ponr  les  cochons,  enfin  il  ajoute  que, 
lorsqu'on  tient  un  pareil  langage,  il  Tant  abondomwr  hommes  et  cochons 
à  )ear  malbetirenK  sort  (Brat.  die  neue  Welt,  I,  !T,  38).  Au  reste, 
H.  d'Eschwege  éeriTait  tout  ceci  en  1S14 ,  et  il  ne  serait  pas  absolument 
impossible  que  l'usage  de  donner  des  inhame*  et  des  cardt  aui  ro- 
chons  se  Ht  introduit  dans  cette  partie  de  la  province  des  Mines  de  IHIi 
à  ISIS. 


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IH  VOYAGE  AUX  SODKCES 

unaopoareDgraJBser.  Un  pourceau  moyen  de  cette  race  (1) 
pèse,  quaod  il  est  gras,  enriron  6  arrobes  (88  kil.  S  h.)  (3). 

Od  envoie  les  cochons  par  troupeaux  à  la  capitale  du 
Brésil,  en  leur  faisant  faire  5  lieues  portugaises  par  jour. 
Les  jenoes  gens  qui  les  conduisent  se  payent  i  raison  de 
6,600  reis  {4i  f.  30  c.)  pour  le  voyage,  et  il  y  a  80  legoat 
de  Rio  de  Janeiro  au  village  de  Formiga ,  qui  peut  Atre 
considéré  comme  le  centre  des  affaires  dans  la  contrée  que 
je  tAcbe  de  faire  connaître.  Les  marchands  de  Formiga 
achètent  les  pourceaut  dans  les  fazendai  des  alentours,  où 
l'on  ea  élève  un  très-grand  nombre,  si  peu  considérables 
qu'elles  soient,  et,  si  je  puis  croire  ce  qui  m'a  été  dit, 
un  de  ces  marchands,  &  lui  seul ,  en  avait  fait  partir  vingt 
mille  dans  l'année  1818. 

J'ai  déjà  dit  que  les  cultivateurs  de  la  eomarca  deS.  Jono 
d'EI  Rei  soignaient  moins  leurs  demeures  que  les  ^izen- 
deiroi  des  cantons  aurifères.  H  est  bien  clair  qu'il  ne  sau- 
rait y  avoir  d'exception  pour  une  des  parties  de  cette  eo- 
marca qui  s'éloignent  le  plus  des  centres  de  la  civilisation 
dans  la  province  des  Mines.  L'habitation  de  Cachoeirinha, 
située  un  peu  en  deçi  de  Tamanduâ ,  a  5  lieues  portu- 


(1)  Dans  le  uoton de  Rio  Grande,  oaéUfe,  m'a-l-oadit,  noeaapAcc 
de  cocboos  qa'oa  appelle  porco»  laté  (cochooB  utous);  ccui-ci  auraient 
Ira  jambes  enrare  plui  binles  que  les  poreoi  canattra  ;  ils  aeraieat 
beancoup  plus  couru,  plus  ramaaaés  ;  ils  auraient  Is  dos  plus  arrondi 
et  u'atteindraieat  jamais  le  poids  des  autres  :  oo  les  châtrerait  ï  six  ou 
sept  mois ,  et  ils  seraient  gras  k  ua  an.  Si  on  leur  donae  la  préférence 
dans  le  canton  de  Rio  Grande ,  c'est ,  m'a-t-on  ^outé ,  parce  qu'on  y 
trouve  un  di^bit  facile  du  mais ,  et  qu'il  n'eu  faut  pas  autant  pour  en- 
fraisser  les  poreoi  tatA  que  Im  autres  pourceaux, 

(!)  Selon  H.  d'Eschwege,  les  cocboos  gru  ne  pèsent  que  de  f  k 


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DU  UO  DE  s.  nUNOSGO.  IIS 

gaises  de  loag  sur  â  de  large  :  j'y  vis  un  oombre  considé- 
rable de  bètes  à  cornes,  de  pourceaux,  de  moutons  ;  le  pro- 
priétaire, H.  le  ca^tào  m6r  JoÀo  Qciirnwo  db  Olitbiba, 
avait  vendu,  cette  auDée-là,  i  Rio  de  Janeiro ,  des  cochons 
pour  la  valeur  de  deux  cotUoi  de  reit  (15,000  fr.],  et  c'était 
d'aillears  un  lionune  poli,  dont  la  table  annonçait  asses  la 
richesse  ;  cepoidant  les  bAtimentA  qu'il  occupait  étaient  i 
peu  près  aussi  négligés  que  ceux  qui  sont  r^rvés  pour  les 
maîtres  dans  toutes  les  autres  fazendat.  Ils  étaient,  avec 
les  cases  è  nègres,  placés  au  fond  d'une  vaste  cour  entourée 
de  pieux  qui  avaient  la  grosseur  de  la  cuisse  et  la  hauteur 
d'un  hcsnme ,  genre  de  ctMure  fort  en  usage  dans  ce  pays. 
D'une  galerie  {varatula)  (i)  ansez  large  dont  l'extrémité 
avait  été  réservée  pour  formerun  petit  oratoire,  on  passait 
dans  une  grande  pièce  sans  plafond,  sans  aucune  peinture, 
qui  n'avait  d'autre  ameublement  que  des  bancs  de  bois, 
quelques  tabourets  revêtus  de  cuir  et  une  énorme  dame- 
jeanne  avec  un  pot  en  fer-blanc  destiné  à  y  puiser  ;  quelques 
petites  chambres,  qui  ouvraient  sur  cette  Salle,  n'étaient 
pas  ornées  plus  richement  qu'elle.  Priacipalement  au  delè 
de  TamanduÂ,  c'est-à-dire  près  du  Sertâo  et  dans  ses  limi- 
tes, les  habitations  se  composent  de  plusieurs  p^ts  bAtt- 
ments  isolés,  mal  construits  et  disposés  sans  ordre,  au  mi- 
lieu desquels  on  distingue  h  peine  le  logement  du  maître. 
Je  citerai  celle  de  Dona  Thomaxia,  située  entre  le  village 
de  Fiumhy  et  la  Serra  da  Canastra.  Elle  avait  une  étendue 
assez  considérable  ;  Jy  vis  plusieurs  esclaves,  des  bêles  à 
cornes,  un  grand  nombre  de  pourceaux  ;  et  cependant, 

«  que  sont 


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1S4  VOYAGE  AUX  SOURCES 

au  milieu  de  plusieurs  maisonnettes  servant  de  gmoges  et 
de  cases  à  n^res,  la  propriétaire  habitait  une  misérable 
chaumière  construite  saus  aucun  art,  et  où  l'ou  ne  trouvait 
d'autre  ameublement  qu'une  table  avec  de  cbétives  bao- 
celles  (4). 

J'ai  ù  peine  besoin  de  dire  que  les  habitants  de  ces  fa- 
zmd/u  ne  ressemblent  point  aux  Mineiros  des  comarca»  de 
Sabaré,  du  Serro  do  Frio  et  de  Villa  Rica.  Ce  sont  des 
hommes  grossiers  et  ignorants.  Ils  ont  les  marnes  manières, 
  peu  près,  que  nos  paysans  de  France;  mais  il  ^en  faut 
bien  qu'ils  soient  aussi  gais  et  aussi  actifs.  Je  ferai  obser- 
ver, de  i^us ,  que  les  cultivateurs  de  ce  pays  ont  le  corps 
extrèmonent  droit,  tandis  que  nos  paysans  sont ,  en  géné- 
ral, plus  ou  moins  courbés,  différence  qui  tient  à  ce  que 
ceux-ci  travaillent  sans  cesse  la  terre  ,  tandis  que  les  pre- 
miers se  font  remplacer  par  des  nègres  ou  se  bornent  i  soi- 
gner leur  bétail. 

(1)  H.  da  CudIm  HattM,  qui ,  ta  lSi3,  s'est  rcada  ditecleraent  de  Rio 
de  Jtneiro  i  Goju ,  a  cependsat  passé ,  comme  moi ,  par  Oliveira ,  Ct- 
cboeiriaba,  Forroiga ,  et  a  pu  prendre  ane  idée  da  pays  que  je  cherche  i 
faire  comultre.  •  A  pea  de  distance  de  Formiga,  il  fut  reçu,  di^il ,  dans 

■  Due  maison  qui  était  cooatroite  avec  de  la  terre  et  dea  marceani  de 
a  bois  qn'oD  n'avait  pas  laime  pria  la  peine  de  dégrossir.  Dans  la  niii- 

■  raille,  on  avait  fiché  un  grand  nombre  de  cornes  de  cerf  (  veatba  )  ani- 
'  quelles  étaient  snspendns  divers  objets  :  k  celle-ci ,  une  selle  ;  k  cell»Jli, 
«  unfiisil;plustoin,nnchapeaa;enaiiite  une  corbeille,  puis  on  tamis,  et 
u  immédiatement  après  une  capote.  La  peinture  que  je  fais  de  cette  mai- 

•  ioa,  ajoute  l'auteur,  convient  h  tous  les  tiliot  et  à  la  plupart  dea  fa- 

•  zendat.  Bien  peu  de  personnes  connaissent  les  commodités  de  la  vie  ; 
Il  elles  habitent ,  pendant  un  grand  nombre  d'années,  des  propriété  qui 
-  semblent  destinées  h  être  abandonnées  k  chaque  quart  d'heure.  Les 
«  maisons  des  villages  sont  un  peu  pins  soignées  :  mais,  dans  les  faien- 
«  dut,  les  cornes  sans  riuncaui  et  fort  courtes  des  cerfs  du  pays  sont  les 
"  l'Ious  qui  soutiennent  les  radres  dont  l'appartement  est  orné ,  «t  ces 


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DU  niO  DE  s.  FUNCISCO.  12^ 

Quoique  ces  hommes  habitent  on  pays  éloigné  et  désert, 
on  ne  trouve  pas  chez  eux  cette  aimable  hospitalité  qui  est 
si  générale  dans  d'autres  parties  de  la  province  des  Mines. 
Je  citerai ,  pour  exemple ,  ce  qui  m'arriva  dans  une  habita- 
tion tr^-importante.  À  mon  arrivée,  on  fit  placer  mes  effets 
dans  une  petite  chambre  humide  et  obscure,  remplie  de 
puces  et  de  chiques  ipukx  penetram).  Pour  ne  pas  faire  de 
peine  an  fils  de  la  maison,  àveç  lequel  j'avais  voyagé,  je  ne 
me  plaignis  point,  et  j'allai  travailler  sons  la  galerie  {va- 
randa).  On  me  fit  la  politesse  de  défendre  à  Firmiano  de 
mettre  le  chaudron  au  feu  et  l'on  m'invita  à  dtner  ;  mais 
on  ne  me  donna  pas  de  quoi  satisfaire  l'appétit  le  plus  mo- 
déré. José  Marianno  et  l'Indien  furent  entièrement  oubliés, 
et  seraient  morts  de  faim  s'il  ne  leur  était  resté  un  peu  de 
haricots  du  repas  du  matin.  Le  soir,  j'attendis  inutilement 
qu'on  m'offrirait  un  lit;  il  n'en  fut  pas  question.  Cependant 
ta  chambre  où  l'on  m'avait  logé  était  tellement  embarrassé 
par  mes  effets,  tellement  remplie  d'insectes  malfaisants,  que 
j'aimai  mieux  faire  faire  mon  lit  dehors  que  d'y  coucher. 
Ayant  eu  froid  pendant  la  nuit,  je  me  levai  de  fort  mauvaise 
humeur,  bien  décidé  à  donner  une  bonne  leçon  à  mon  hAte. 
H  se  présenta  et  me  souhaita  le  t>onjour  ;  pour  tonte  réponse, 
je  lui  demandai  s'il  savait  lire,  et  je  le  priai  de  jeter  les  yeux 
sur  ma  portaria  (passe-port  royal).  A  mesure  qu'il  lisait,  je 
voyais  sa  ligure  se  composer  et  son  maintien  devenir  respec- 
tueux. «  Je  ne  vous  ai  pas  montré  ce  papier  hier  au  soir,  lui  , 
«  dia-je,  quand  il  eut  fini  ;  je  croyais  qu'un  homme  de  bien 

■  udrcB ,  te  sont  des  Belles ,  des  brides ,  des  fbsils  et  autres  objets  sem- 

■  bUbles.  •  (f(in.,  I,  66.)  Comme  od  ne  lue  p«s  des  cerfs  t  chaque  in- 
Waot,  je  ne  crois  pas  mentir  m  dîsut  que  le  laie  de  leurs  cornes  a  été 
plas  d'une  fois  remplacé  par  de  simples  m 


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136  TOTAGE  AUX  SOURCES 

«  n'aTait  pas  besoio  d'ordre  pour  donner  un  gtte  passable 
«  au  voyageur  qui  se  présente  d'une  manière  honnête;  je 
«  suis  bien  aise  de  vous  iiaire  voir  que  celai  que  vous  avei 
M  fait  coucher  à  votre  porte,  lorsque  vous  avez  une  maison 
«  aussi  considérable,  est  un  eavalheiro  honoré  de  la  pro- 
«  tection  particulière  de  votre  roi.  »  Et,  comme  je  connais- 
sais les  affaires  de  mon  hôte,  j'ajoutai  A  ces  paroles  une 
menace  qui  devait  lui  être  extrêmement  sensible.  Le  pauvre 
homme  resta  pétrifié;  il  se  confondit  en  excuses  et  m'offrit 
tonte  sa  maison.  Pour  unique  faveur,  je  lui  demandai  de 
mieux  recevoir  les  étrangers  &  l'avenir ,  et  je  m'obstinai  A 
payer  les  petites  provisions  que  j'avais  faites  chez  lui. 

Les  cultivateurs  passent  leur  vie  dans  les  fazendas,  et  ne 
vont  au  village  que  les  jours  oi!i  la  messe  est  d'obligation.  En 
les  forçant  A  se  réunir  et  A  communiquer  les  uns  avec  les 
autres,  l'accomplissement  des  devoirs  de  paroissien  les  em- 
pêche, peut-être  plus  que  toute  autre  cause,  de  tomber  dans 
un  état  voisin  de  la  vie  sauvage.  Il  faut  le  dire,  cependant, 
l'utilité  de  ces  voyages  A  la  paroisse  serait  bien  plus  grande, 
si  le  cultivateur  pouvait  en  rapporter  quelque  instruction 
morale  et  religieuse  ;  mais  les  ecclésiastiques,  dans  la  pro- 
vince des  Mines,  ne  s'occupent  point  A  instruire  les  fidè- 
les (1),  et,  trop  souvent,  ils  les  scandalisent  parleur  con- 
duite irrégulière. 

Dans  les  pays  très-civilisés,  l'absence  d'un  enseignement 
religieux  et  moral  conduit  A  un  grossier  matérialisnie;  dans 
ceux  qui  ne  le  sont  qu'imparfaitement,  die  mène  A  la  su- 
perstition. Ainsi  les  habitants  de  la  contrée  que  je  tAche 


(I)  Toyn  t»  que  f  <î  écrit  rar  le  clergé  de  11  pravinet  de»  Mines,  duH 
rooa  PoiKHr;  daM  In  priMrtnets  4t  Jtfo  dt  Janeiro,  etc.,  ni.  I ,  p.  tffl. 


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DU  UO  DE  S.  FRANCISCO.  IJT 

de  Rure  connaître  ajoutent  générilement  foi  aux  sorciers 
et  aux  loaps-ftarout ,  et  beaucoup  de  gem  vont  jusqu'à 
baiter  d'hérétiques  ceux  qui  se  refusent  i  cette  croyance.  , 

Je  viens  de  dire  combien  il  est  utile  pour  les  cultivateurs 
qu'ils  aient  l'occaston  de  se  rassembler  quelquefois  et  de 
commQiiiqaer  les  uns  arec  les  auties  ;  nuis  je  dois  (fouler 
que  les  avantages  de  leurs  réunions  dans  les  booi^ades  et 
les  petites  villes  sont  malheureusement  compensés  par  les 
dangers  qui  les  y  attendent.  La  population  permanente  des 
villages  est,  en  effet,  ici  comme  dans  le  reste  de  la  province 
des  Mines ,  composée,  en  grande  partie,  d'hommes  oisifs  et 
de  femmes  de  mauvaise  vie ,  et  sous  les  ranchoa  des  plus 
humbles  hameaux  un  lib^tinage  honteux  se  montre  quel- 
quefois avec  une  effronterie  dont  on  n'a  pas  d'exemple 
dans  nos  villes  les  plus  corrompues. 

Compagne  des  mauvaises  mœurs ,  la  fainéantise  est  une 
des  principales  plaies  de  cette  contrée.  Dans  un  espace  de 
60  lieues ,  je  fis  des  efforts  inutiles  pour  me  procurer  un 
tocador,  et  cependant  il  e-xiste  partout  une  foule  d'hommes 
pauvres  et  sans  occupation  I  Ceux  qui  sont  mariés  plantent 
sur  leterrain  d' autrui ,  et  se  résignent  à  travailler  pendant 
quelques  jours  pour  vivre  sans  rien  faire  tout  le  reste  de 
l'année.  Les  célibataires ,  et  c'est  le  plus  grand  nombre, 
vont  d'une  maison  dans  une  autre;  ils  vivent  aux  dépens 
de  leurs  compères  et  de  leurs  commères,  et  s'engagent 
souvent  dans  des  parties  de  chasse  qui  durent  plusieurs 
mois;  U  faut  bien  qu'ils  se  vêtent,  mais  te  plus  léger 
travail  leur  suffit  pour  monter  leur  garde-robe,  qui  se  com- 
pose de  deux  chemises  et  d'autant  de  pantalons  d'une  toile 
de  coton  grossière.  Outre  le  bonheur  d'être  oisifs,  ils  trou- 
vent ,  dans  cette  vie  nomade  et  indépendante  ,  un  antre 


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1»  VOYAGE  AUX  SOURCES 

aTanta^,  celui  de  se  soustraire  à  toutes  les  diarges  publi- 
ques, en. particulier  an  service  niilitaire.  Dans  le  désert , 
l'admiaistration  ne  peut  exercer  aucune  snrveillance,  les 
lois  restent  sans  force ,  et  beaucoup  de  gens  y  viennent  des 
autres  parties  de  la  province,  soit  pour  échapper  aux  pour- 
suites de  la  justice,  soil  uniquement  pour  jouir  d'une  liberté 
sans  bornes  (1). 

(1)  ■  Dus  OD  eampo  où  l'on  STiit  formé  deai  petites  lubilatioas, 

>  je  TÛ ,  dit  di  Canba  HatlOB  {Hin.,  1 ,  71] ,  dd  grand  nombre  d'ubres 

>  fruitiers  qui  ne  pronvèrent  que  l'on  pourrait  tirer  parti  des  pays  dé- 

•  couverts  pour  la  culture  de  ces  arïtrt*.  s'il  rt'goait  moins  de  paresse 

•  au  Brésil  et  priDciptlemeDt  dans  la  proriuce  de  Hioas  Geraes Tout 

■  vagabond  (vadio)  qui  possède  une  guitare  ■  son  pain  gagné  sans  noit 

•  besoin  de  trirailler,  et  tronve  lAujours  des  gens  qui  veulent  l'aroir 

■  cheï  eux.  •  [Itin.,  1.  71.)  Ceui-Ii,  du  moins,  amusent  leurs  hdles  :  ce 
sont  lis  mi'neslrels  du  disert;  mais  tout  oodlo  n'a  point  une  guitare,  il 
fïnt  d'abord  travalUer  pour  pountir  l'acheter.  ' 


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DO  UO  DE  S.  FBANCESCO. 


CHAPITRE  VIII. 

COmiENCEHENT  DU  TOTAGB  DE  S.  JOÂO  d'BL  REl  AUX 
SOUKCES  DU  S.  FBANaSCO.  —  LES  VILLAGES  DB  CON- 
CEIfiÂO  ET  D'OUVEIBA.  —  LA  VILLE  DE  TAHAHDUa'. 


Dépenrt  dn  ftancho  do  Rio  daa  Mortes  Peqneno.  —  Sntfiee  do  pajs 
sitné  entra  le  Rio  das  Hortea  Peqaeno  et  la  (axenda  de  Tan^iM; 
SI  jfgétatioa.  —  La  faxenda  de  Tmqae.  CIer{|é.  —  Le  village  de  Con- 
etifSo.  —  Pajs  situé  eotre  ce  TÏIlage  et  la  fatenda  da  Capw»  doa 
rioru.  Pajs  Bitaé  eotre  celte  babitàtion  et  celle  du  CapUâo  Ptdro.— 
Deso-iption  de  cette  derniire  faxenda.  Réception  qu'on  j  fait  k  l'aa- 
ttur.  Culture.  —  Le  Qaina  do  Catnpo  [Cinchona  ferruginea).  in- 
Bnenee  de  la  constitotion  min^ralogiqne  snr  la  natare  de  la  tég  jialion. 
RéSobODs  SUT  Vexploltetion  des  mines  de  fer.  —  PaxtHda  dtu  Fcr- 
tmtet  do  Jacaré.  Puces  pénétiantes.  —  Pajs  situé  au  deU  de  oellc 
habitation.  —  Le  nllage  couvrira.  Va  ranebo.  —  La  faxenda 
de  Bom  Jardim.  Costame  des  campagaards  peu  ais^.  Un  rêve.  — 
MoTTO  de  Comocfto.  Fatenda  da  CaehoeirinHa.  Son  prapriéiaite , 
H.  JoiTo  (^DINTINO  PI  Oliveira.  —  La  Tille  de  Tamanduà  ;  son  his- 
toire; seshabiteoU;  sa  population;  ses  rues,  ses  nuisons,  ses  égli- 
se* ;  maladies  qui  j  rigaent  le  plus  généralement.  —  Histeire  d'un 
bwnnie  bien  portant  morda  par  on  chien  enragé. —  Celle  d'nn  lépreui 
nMtrdn  d'abord  par  un  chien  enragé ,  pois  par  nu  serpent  h  «onneltes. 


J'ai  dit  ptoB  haut  que  je  n'avais  pu  trouver  un  tocador 
dans  les  environs  du  Rio  das  Mortes  Pequraio,  et  que  le 
principal  magistrat  de  S.  Joâom'avut  donné,  pour  le  ea- 
pitao  môr  de  la  ville  de  Tamanduâ ,  une  lettre  où  il  l'invi- 
tait è  m'en  procurer  un.  Le  two  alferet  José  Pereira  da 


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IJO  VOYAGE  tUX  SODRCES 

Silva  Tonlut  bien  ,  en  attendant ,  mettre  en  réquisition  dd 
homme  qui  reçût  l'ordre  de  m'accompagner  jusqu'A  Ti- 
manduà.  Il  me  l'amena  le  19  mars  au  matin ,  et  je  partis , 
après  avoir  pris  congé  de  mon  hAte,  le  vieil  Anjo,  de  sa  fille 
Dona  Bila  et  de  Dona  Isabel ,  sa  compagne.  Le  vieil  Anjo 
pleurait  en  m' embrassant,  et  tous  m'exprimaient  leurs  re- 
grets. Anjo  avait  près  de  soiiante-dii  ans;  il  était  dans  une 
activité  continuelle;  il  parlait,  il  riait,  il  grondait  toujours, 
mais  il  ne  passait  pas  un  instant  sans  donner  des  preuves 
de  la  bonté  de  son  cœur. 

Ce  fut  cependant  avec  un  grand  plaisir  que  je  quittai  ce 
Rio  das  Mortes,  oîi  j'avais  éprouvé  tant  de  diagrins et  d'in- 
quiétudes, et  dont  je  ne  pouvais  même  prononcer  le  nom 
sans  une  sorte  de  frémissement.  Au  commencement  do 
voyage,  j'étais  encore  plongé  dans  une  mélancolie  pro- 
fonde; les  idées  les  plus  tristes  m'obsédaient  ;  la  vie  me 
paraissait  un  poids  insupportable.  Mais  l'exercice  auqud 
j'étais  forcé^e  me  livrer,  le  travail ,  la  vue  de  nouveaux 
objets  m'arrachèrent  k  moi-même;  bient6tje  repris  des 
forces,  et  mon  courage  comm^ca  à  renaître  (1). 

(I)  Itioéraire  «pproiimiUTda  Rancho  do  Rio  das  Hortei,  près  S.  Joio 
d'El  Elei ,  k  U  rille  de  Tamândna  ; 

Dn  Rancho  do  Rio  daa  Hories  Peqaeao 

k  Ttnqae,  habitation s       legoas,- 

Capio  das  Flores,  habitation 3t/! 

Capilâa  Pedro,  habitation 21/3 

Faienda  das  Verlentes  do  Jararé,  habitation.      3  1/1 

OliTtira,  village 3  1/î 

Bom  Jardim ,  habitation il/S 

Cachoririoha,  habitation 3 

Tamandaii,  ville 2 

»l/3li«<Ma. 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DD  HIO  DE  S.  FBANCISCO.  131 

ie  SDJvia  qnelqne  temps  le  vallon  où  conle  le  Rio  (las 
Mortes  Pequeno.  A  peu  de  distance  du  Rancho  que  je  ve- 
nais de  quitter,  je  passai  auprès  d'une  chapelle  qni  est  du 
nombre  des  succursales  de  la  paroisse  de  S.  Joâo  d'El 
Bei  (1],  et  qui  porte  le  nom  de  S.  Àntotûo  dos  Mortes  ; 
pen  après,  je  traversai  une  grande  minière  du  genre  de 
celles  dites  de  guptara  [2},  et,  ensuite,  je  montai  sur  un 
morne  élevé  appelé  Morro  da  Lagoa  Verde  (le  morne  du 
lac  vert). 

La  végétation  avait  été,  jusque-là,  celle  des  fonds  dans 
les  pays  découverts;  j'avais  vu  des  arbrisseaux  et  de  petits 
arbres  d' nn  vert  très-beau,  mais  un  peu  foncé .  Sur  le  morne 
de  Lagoa  Verde,  je  retrouvai  les  plantes  ordinaires  aux  cam- 
pai; des  Graminées,  quelques  autres  herbes,  un  petit  nom- 
bre de  sous-arbrisseaux  parmi  lesquels  dominaient  les  Com- 
posées. 

Depuis  mon  entrée  dans  les  eompot,  je  n'avais  vn  nulle 
part  des  mornes  aossi  peu  arrondis,  des  vallées  aussi  étroi- 
tes et  aussi  profondes  que  dans  le  pays  où  je  voyageai ,  en- 
tre Lagoa  Terde  et  la  fasenda  de  Tanqw,  dont  je  parlerai 
bientAt  ;  et,  par  une  conséquence  naturelle  de  ce  que  j'ai 
dit  ailleurs  sur  la  coïncidence  de  la  végétation  avec  la  dis- 
position du  soi ,  je  troavai  dans  ce  canton  autant  de  bois 
que  de  pâturages. 

Du  sommet  de  quelques  mornes  on  découvre  une  im- 


(1)  Piz.,  Ment.  Mit.,  Vm,  seganda  part.,  126. 

(3)  Dans  la  minoration  de  gnpiara,  od  bc  borne  à  mettre  à  nn  la 
larface  anrifèrc ,  ea  la  diqMwant  de  manière  k  opérer  sar  place  une 
partie  du  lavage.  Ce  sodI  des  terrains  iDclinés  que  l'on  eiploite  ainsi. 
(Vojez  mon  Voj/age  dant  (m  fn-oDincti  de  Rio  dt  Janeiro,  etc.,  1 ,  347, 
Mî.) 


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132  V0YA6E  AUX  S 

mense  étendue  de  pays.  Il  existe  dans  les  fonds  des  fcœn- 
dai  assez  considérables.  Les  minières  sont  très-multipliées, 
et,  à  l'époque  de  mon  voyage,  plusieurs  d'entre  elles 
étaieut  encore  en  eiploitation  ;  toutes  appartirament  au 
genre  de  travail  appelé  gupiora  :  on  les  reconnaSt  aisément 
dans  le  lointain  à  la  couleur  rouge  des  terres  que  l'on  a 
mises  inu. 

La  position  de  la  fasenda  de  Tanqne  (réservoir),  où  je  fis 
halte  le  jour  que  je  quittai  le  bon  vieil  Anjo,  est  extrême- 
ment agréable.  Cette  habitation  a  été  bâtie  dans  une  large 
valléequ'arroseleRlo  das  Mortes  Grande.  Des  momes  pea 
élevés,  couverts  de  bois  et  de  pâturages,  dessinent  la  val- 
lée ;  un  peu  au-dessus  de  la  fazenda,  est  un  petit  lac  qui 
fournit  de  l'eau  à  un  moulin  i  sucre,  et,  du  cAté  iqiposé, 
00  a  une  édiappée  du  Rio  das  Mortes. 

Le  propriétaire  de  Tanque  était  un  prfttre.  Dans  ce  pays, 
un  graod  nombre  d'ecclésiastiques  se  bornent  à  dire  la 
messe,  et  font  d'ailleurs  toute  antre  chose  qu'exercer  les 
fonctions  du  ministère  sacré.  Rien  n'eri  si  commun  que  les 
prêtres /axend«tro«  ;  le  meilleur  apothicaire  de  S.  Joâod'El 
Rei  était  un  ecd^iastique  qui,  iui-mème,  préparait  et  ven- 
dait ses  drogues  ;  dans  cette  ville,  è  ce  que  me  dit  le  curé,  on 
autre  prêtre  débitait  des  étoffes  à  l'aune.  Que  peut-on  atten- 
dre d'hommes  qui  professent  aussi  ostensiblement  l'oubli 
de  toutes  les  règles?  et  je  passe  sons  silence  de  bien  plus 
grands  scandales. 

Lorsque,  après  avoir  passé  la  nuit  à  Tanque,  nous  vou- 
ïtanes  partir,  nous  cherchâmes  inutilement  le  tocador  que 
m'avait  procuré  l'alferes  José  Pereira  da  Silva  ;  il  avait  pris 
la  fuite.  A  la  vérité,  cet  homme  me  suivait  en  vertu  d'un 
ordre  de  son  supérieur  ;  mais  je  l'avais  prévenu  que  je  le 


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DD  MO  DE  S.  FRANCISCO.  13} 

payerais  sur  te  pied  de  100  reis  par  jour  (62  c],  et  il  était, 
depuis  longtemps ,  sans  occupation  comme  sans  salaire. 
Mais  pourquoi  ces  hommes  travailleraient-ils?  ils  trouvent 
partout  des  gens  qui  les  nourrissent  sans  rien  faire.  Force 
nous  fut  de  partir  sans  tocador. 

FarreoD  sur  le  sommet  des  collines  qui  dominent  la 
Tallée  où  est  située  la  fasenda  de  Tanque,  je  découvris  une 
immense  étendue  de  pays  mootueux  qui  présente  plus  de 
bob  que  de  pâturages.  Je  Bs  une  demt-lieue,  et  j'arrivai 
BU  village  [arraial]  de  la  Conceiçào  [conception]  {^). 

Ce  village  fait  partie  de  la  paroisse  de  S.  Joâo  d'EI  Rei 
et  en  est  une  succursale.  Il  doit  sa  fondation  &  l'or  qu'on 
trouvait  autrefois  dans  son  voisinage,  principalement  sur  les 
bords  du  Rio  das  Mortes.  Les  mines  se  sont  épuisées,  et  les 
habitants  un  peu  riches  ont  été  s'établir  ailleurs  ;  ceux  qu'oc 
voit  encore  aujourd'hui  à  la  Conceiçào  sont  presque  tous 
des  hommes  de  couleur  que  le  passage  de  quelques  cara- 
ranes  empAche  de  mourir  de  faim ,  et  des  mulâtresses  qui 
trafiquent  de  leurs  charmes.  Cette  histoire  est  celle  de  la 
plupart  des  villages  de  la  province  de  Minas  Geraes. 

Celui  de  la  Conceiçào  est  bAU  sur  la  croupe  d'un  morne 
peu  élevé.  Les  maisons  qui  le  composent,  au  nombre  de 
cent  CTviron,  sont  très-petites,  basses,  presque  carrées, 
couvertes,  les  unes  en  tuiles,  les  autres  en  chaume,  pour 
la  plupart  écartées  les  unes  des  autres.  Jamais  elles  n'ont 
dA  offrir  beaucoup  de  commodités,  et  aujourd'hui  qu'elles 

(1)11  ne  AtDtpascODfoadreceTillige,  âoDt  lenti  nom  m(  IVtwHt  ten- 
tera daCOTicefpào  du  fiarra,  avec  celui  de  la  Coiic«itSo  de  Htio  dentro, 
situé  entre  Harianna  et  Villa  do  Principe  (vojei  mon  Foj/age  ilaTU  les 
procinceê  de  Mo  de  Janeiro,  etc.,  1, 31).  Caial  indique  anssi  un  village 
de  la  ConceicSo  dans  la  province  de  Goirai  (Cor.  Brai.,  ) ,  3iTi. 


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lU  TOYAOE  AUX  SOURCES 

tombent  ea  ruine,  elles  ne  préseotent  plus  que  l'aspect  de 

la  misère  et  de  l'abandon. 

Au  milieu  de  ces  demeures  si  pauvres,  on  est  étonné  de 
roir  une  église  fort  grande  pour  le  pays  et  très-bien  entre- 
tenue. L'intérieur  répond  an  dehors;  il  est  bien  éclairé  et 
orné,  non-seulement  de  dorures,  mais  encore  de  peintures 
très-supérieures  à  celles  qu'on  voyait,  à  cette  époque,  dans 
celles  de  nos  églises  de  campagne  dont  on  prenait  le  plus 
de  soin.  Il  paraît  que  l'on  a,  dans  le  pays,  beaucoup  de 
dévotion  à  la  Vierge  de  Conceiçâo,  car  il  existe,  dans  son 
église ,  un  grand  nombre  de  petits  tableaux  qui  représen- 
tent des  guérisons  opérées  miraculeusemeot  par  son  inter- 


Cette  église  n'est  pas  la  seule  qu'on  voie  dans  le  village 
de  la  Conceiçào.  Tout  chétif  qu'il  est,  il  en  possède  encore 
une  autre  plus  petite  que  la  première.  La  manie  de  multi- 
plier les  églises  a  été  générale  dans  la  province  des  Mines, 
et  elle  l'était  même  encore  à  l'époque  de  mon  voyage.  U 
eût  été  plus  chrétien  de  former  des  associations  pour  amé- 
liorer le  sort  des  nègres  que  l'on  affranchit  quand  ils  ne 
peuvent  plus  ptmrvoir  à  leur  subsistance,  ou  bien  pour  em- 
pêcher que  tant  de  jeunes  gens  ne  deviennent  des  vaga- 
bonds [vadioi),  et  tant  de  jeunes  Qlles  des  prostituées. 

Malgré  l'état  de  misère  où  est  tombé  le  village  de  la  Con- 
ceiçào, il  jette  de  la  variété  dans  le  paysage,  et  y  produit 
un  effet  très-agréable. 

A  une  demi-lieue  de  ce  village,  près  la  fasenda  de  Barra 
(confluent),  je  retrouvai  lé  Rio  das  Mortes  Pequeno,  qui,  en 
cet  endroit,  comme  je  l'ai  dit,  se  jette  dans  le  Rio  das  Mor- 
tes Grande. 

Depuis  Barra  jusqu'à  la  faienda  du  Capào  das  Flores, 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


DU  MO  OE  S.  FRâHCBCO.  ISA 

dans  une  étendue  d'environ  3  tieaes  et  demie,  je  oe  tra- 
versai plus  qu'un  pays  généralement  boiaé.  Presque  par- 
tout ,  cependant,  les  bois  primitifs  ont  été  coupés  et  se  troo- 
vent  remplacés  par  des  capoeirat  ;  ils  le  sont  même  quel- 
quefois par  cette  grande  Fougère  [Pterii  caudata  ex  Mart. , 
le  Çamambaia  des  Mîneiros)  qui  fait  tant  de  mal  et  que  je 
n'avais  aperçue  nulle  part  depuis  ma  sortie  des  grandes  fo- 
rêts (1).  Avec  elle,  je  vis  en  abondance  un  Panicum  (n°  66S) 
qu'on  appelle  pegapega  (S),  parce  que  ses  soies  s'attadient 
fortement  aux  corps  qu'elles  approdient,  et  que  quelque- 
fois même  elles  retiennent  les  petits  oiseaux.  Où  croit  la 
grande  Fougère,  la  terre  est  d'un  rouge  foncé,  comme  dans 
le  canton  de  Matro  dento  (5]  et  ailleurs,  coïncidence  qu'il 
est  bonde  noter. 

Je  traversai  une  immense  capoeira  qui  avait  été  brûlée 
par  accident,  et  où  lee  troncs  noircis  des  arbrisseaux  s'élé- 
vai«it  encore  au  milieu  des  grandes  Fougères.  Le  système 
d'agriculture  adopté  dans  la  province  des  Mines  et  dans 
d'autres  parties  du  Brésil  rend,  conune  je  l'ai  dit  ailleurs, 
ces  incendies  très-fréquents,  et  c'est  encore  là  un  des  in- 
convénients qu'il  présente. 

Depuis  que  j'avais  quitté  le  Rancfao  do  Rio  das  Mortes,  je 
rencontrais  fort  peu  de  bestiaux.  On  en  élève  beaucoup 

|1)  Cette  fougère  s'empare  des  terrains  qni  ont  été  mis  plasienrs  fois 
en  culture  et  elle  lus  rend  iaaliles  (vojei  moa  Voyage  datu  lei  pro- 
vittMt  Ile  Rio  de  Jawiro,  etc.,  I,  2M]. 

(i;  Pêf/a  est  la  troisième  persouoe  du  présent  du  verbe  pegar,  qni 
ngnifie  taUactur. 

(3)  Parle  canton  de  ira(0(f«n(ro  (l'intérienT  des  bois),  j'eatends  le 
paya  situé  dans  la  régimi  d«t  foréU  au  delà  de  la  tille  de  HatiaoDa  et 
oii  plosieu»  vill^es  ont  été  distioBués  par  ce  nom  m^me^de  Malo  den- 
Iro,  tels  que  S.  Migncl  de  Halo  dentro ,  ttabîra  de  Malro  dentro ,  etc. 


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136  VOYAQK  AUX  SOURCES 

moins  dans  ce  canton  que  dans  celui  de  Rio  Grande,  sans 
doute  parce  que  les  p&turages  n'y  ont  pas  une  su&si  graode 
étendue.  Ils  me  semblèrent  composés  des  mêmes  plantes 
que  1^  campos  où' j'avais  passé,  entre  les  bois  vierges  et 
S.  Joâo  d'El  Bei,  mais  elles  sont  ici  plus  grandes  et  plus 
serrées  ;  on  m'assura  que,  lorsqu'on  mettait  le  feu  à  ces 
pâturages,  l'herbe  était  beaucoup  plus  longtemps  h  repous- 
ser que  dans  les  environs  du  Rio  Grande,  où  elle  est  plus 
fine,  et  c'est  lA  un  des  obstacles  qui  s'opposent  à  la  multi- 
plication du  bétail.  Je  dois  dire  encore  que  l'on  ne.  trouve 
point  ici  le  copitn  freeha,  cette  tiraminée  qui  caractérise 
les  meilleurs  pâturages.  C'est  principalement  à  la  culture 
de  la  canne  i  sucre  que  Ee  livrent  les  faxendeirt»  de  ce 
canton. 

Après  avoir  passé  la  uuit  à  la  fazmda  du  Ct^So  dat 
Flores  (le  bois  des  Qeurs] ,  je  suivis  ,  pendant  quelque 
temps ,  une  vallée  bumide,  où  des  bouquets  de  bois  ^ieot 
jetés  (à  et  là  au  milieu  d'une  herbe  épaisse.  Le  soleil  n'a- 
vait pas  encore  beaucoup  de  force;  le  ciel  était  du  plus  bel 
azur;  les  vapeurs  qui  s'échappaient  de  la  vallée  répan- 
daient dans  l'air  une  agréable  fraîcheur;  un  calme  déli- 
cieux se  répandit,  pour  quelques  instants ,  dans  tous  mes 
sens,  et  je  jouis  encore  des  beautés  de  la  nature. 

Nous  étions  au  21  de  mars ,  et ,  depuis  le  26  de  février, 
époque  i  laquelle  la  sécheresse  avait  cessé ,  il  y  avait  eu 
presque  tous  les  jours  du  tonnerre  et  de  ta  pluie  :  les  pA- 
turages  n'avaient  plus  cette  teinte  grisâtre  qui  fatiguait  la 
vue;  presque  partout  les  campos  s'étaient  parés  d'une  ver- 
dure qui  rappelait  celle  de  nos  champs  de  blé,  peu  de  temps 
après  que  le  grain  a  levé. 

Entre  le  Capâo  des  Flores  et  la  fazenda  du  CapilÔo  Pe- 


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DD  UO  DE  S.  FUNOSCO.  137 

dro ,  je  parcourus  ,  comme  les  jours  précédents ,  un  pays 
montaeux,  où  les  bois  sout  an  moins  aussi  communs  que 
les  pâturages.  Ce  pays  coupé  n'a  point  la  triste  monotonie 
des  immenses  pâturages  du  Rio  Grande,  et  cependant  on  a 
le  plaisir  d'y  jouir  aussi  d'une  rue  fort  étendue.  Il  est  seu- 
lemoit  à  regr^ter  que  le  paysage  ne  soit  pas  animé  par  des 
habitations.  La  veille  j'en  avais  moins  ru  que  le  jour  pré- 
cédent ,  et ,  entre  le  Capâo  das  Flores  et  le  Capitâo  Pedro , 
je  n'en  vis  qu'une  seule,  celle  de  /jorangeiras  (les  orangers). 

Depuis  que  le  paya  était  plus  boité ,  les  sous-arbrisseanx 
étaient  devenus  plus  communs  dans  les  pâturages,  prtDci- 
palement  vers  le  bas  des  mornes.  Là ,  au  milieu  d'une  berbe 
du  vert  le  plus  beau ,  l'on  voit  en  grande  quantité  un  Bau- 
Unia  i  tiges  nombreoses,  de  3  à  3  pîeds ,  et  à  feuilles  en- 
tières f233] ,  nne  Salicariée  (363) ,  une  Corymbifère  (306) , 
VHyptiê  (â33),  et  nue  autre  espèce  du  même  genre,  h 
fienrs  bleues  et  à  feuilles  très-odorantes  (SOfi). 

En  me  rendant  à  la  fazmda  du  Capitâo  Pedro ,  je  vis 
dans  un  pâturage  un  de  ces  quadrupèdes  que  l'on  appelle, 
dans  le  pays,  eachorros  do  campa,  et  qui  sont  si  redou- 
tables pour  les  bétes  à  laine.  José  Marianne  lui  tira  un  coup 
de  fusil;  mais  son  arme  n'était  chargée  qu'avec  de  la  cen- 
drée et  l'animal  ne  fut  que  blessé.  Il  vint  à  moi  ;  mal- 
heureusement il  passa  trop  vite  pour  que  je  pusse  le  bien 
observer.  Il  me  parut  avoir  la  grosseur  d'un  chien  qui  serait 
d'une  taille  au-dessous  de  la  moyenne;  son  museau  était 
un  peu  allongé ,  ses  oreilles  petites  et  droites ,  sa  queue  fort 
longue  et  horiiontale ,  son  pelage  d'un  gris  bleuâtre;  il  ne 
courait  pas,  mais  il  fuyait  en  btHidissant  avec  légèreté  (1). 

(I)  M.  le  proresseur  Gémis  pense  qne  cet  aaioMl  est  le  CanU  ram- 
ptttrit  de  H.  le  prince  de  Neuwied. 


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1»  VOYAGE  AUX  S 

Du  Capâo  das  Flores ,  je  n'allai  que  jasqn'à  la  fazenda 
du  Capitào  Pedro,  qui  eu  est  éloignée  de  2  lieues  et  demie. 
Cette  fazenda ,  comme  toutes  les  autres ,  est  située  dans  un 
fond;  les  bâtiments  qui  en  dépendent  sont  considérables, 
mais  la  maison  du  mattre  a  été  aussi  négligée  que  dans  tou- 
tes les  habitations  que  j'avais  rues  depuis  mon  entrée  dans 
la  comarca  de  S.  Joâo. 

Lorsque  je  me  présentai,  on  m'indiqua  pour  logement 
une  écurie  obscure  et  remplie  de  fumier.  Je  ne  fis  aucune 
plainte,  tant  que  mes  malles  ne  furent  point  déchargées  ; 
mois ,  lorsque  je  fiis  armé  de  ma  portaria ,  je  dis  an  mattre 
de  la  maison  que  je  serais  désolé  de  l'incommoder,  que  ce- 
pendant je  le  priais  de  vouloir  bien  m' accorder  un  gtte  plus 
convenable.  La  lecture  de  la  portaria  produisit  l'effet  d'un 
talisman;  on  devint  d'une  politesse  extrême,  on  fit  pla- 
cer mes  effets  sous  la  varanda ,  on  me  donna  un  lit ,  et 
l'on  empêcha  Firmiano,  que,  depuis  longtemps,  j'avais 
promu  au  grade  de  cuisinier,  de  mettre  U  ekattdron  au 
fmH). 

La  fazenda  du  Capitâo  Pedro  a  3  lieues  d'étendne  ;  on  y 
cuiti vêle  maïs,  les  haricots,  le  rÏE,  et  l'on  y  élève  des  bêtes 
à  cornes  et  des  pourceaux.  La  position  de  cette  propriété 
entre  S.  Joâo  d'EI  Rei ,  la  ville  de  S.  José ,  le  village  d'Oli- 
veira ,  la  ville  de  Tamandai  et  le  village  de  Formiga ,  as- 
sure le  débit  detoutes  les  productions  du  sol.  Année  com- 
mune, le  maïs  rend  ici,  dans  les  bonnes  terres,  ICO  pour 
1 .  On  cultive  aussi  un  peu  de  coton  dans  les  alentours  du 
Capilâo  Pedro;  mais  les  terres  fortes  et  rouges  du  pays 
conviennent  peu  à  ce  végétal ,  et  on  est  obligé  de  sarder 

(1>  C'esl  rfipKssJDD  coDsacT^P  pour  dirf  Taire  ta  cuisine. 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DU  BIO  DE  S.  FRANCISCO.  1S9 

trois  on  quatre  fois  la  terre  où  on  le  plante.  C'est  Ib  caone 
è  sucre  qai  peratt  réussir  le  mieux  dans  toute  la  cootrée 
que  j'avais  parcourue  depuis  le  Rio  das  Mortes. 

Un  peu  avant  d'arriver  i  la  faxendada  Capitao  Pedro, 
j'avais  vu  en  abondance ,  sur  une  cdte ,  au  milieu  des  pâtu- 
rages, ce  petit  Quinquina  à  fleurs  odorantes  et  à  feuilles 
couleur  de  rouille  [Cincbona  ferruginea,  ASH.),  qui  crott 
en  si  grande  quantité  près  de  Villa  Rica,  Itabira  de  Mato 
dentro,  etc.  (1),  et  que  je  n'avais  pas  encore  retrouvé  de- 
puis mon  premier  voyage.  C'est  dans  les  terrains  ferrugi- 
neni  que  je  l'avaisobservé  alors,  et,  quand  je  fus  arrivé  ili 
la  fazenda  du  Capitâo  Pedro,  j'appris  qu'il  y  avait,  auprès 
de  celte  habitation ,  une  mine  de  fer  dans  un  morne  ap- 
pelé Morro  do  Paîmital  (morne  du  champ  planté  de  pal- 
miers). Une  coîncideDce  si  souvent  répétée  doit  faire  con- 

(1)  Sous  le  Dom  de  Remija,  l'illustre  de  Candolle  a  séparé  cetu  pilote 
da  genre  Ctnehana  (  Prodr.,  Vf,  3ST] ,  parce  que ,  dit-il ,  la  déhiacence 
n'est  pu  sEDlement  Mpticide ,  mais  qae  la  feaille  carpellaire  ne  teni 
pins  oa  moins  dans  «on  milieu.  Si,  comme  je  l'ai  montré  ailleurs  (Jfor' 
pholotie  végitaU,  714),  ce  faible  caractère  safSMit  pour  l'établiaMiHDt 
d'un  genre,  il  faudrait ,  pour  peu  qu'on  vonlAt  être  conaétfooit ,  en  faire 
on  du  Veronica  Anagallii ,  chei  leqnel  nous  le  troaTons  «gaiement. 
H.  de  Hnmboldt  avait  cratancienaemeDt  qu'il  necroiaeaitpasdeOiuDqiii- 
Dtt  daiislapaTtieorienta1ederAmériquednSad;piu9il  reconnut. après 
la  dècdurerte  des  Cinckana  ferrvgvnta,  Remijiana  et  VellotH  (  Rapport 
Terbal  fait  à  l'Académie  des  sciencM  sut  ud  cuTrage  de  H.  Auguste  Saint- 
Hilaire,  intitulé  Plantes  «nullet  det  Bratilien*,  daos  les  Annalet  dtt 
ieieneei  d'Ortéatu,  Tl,  168),  qu'il  en  existe  trois  espèces  au  BTttÛ 
i  peut-être  de  simples  variétés  d'une  seule  espèce^  ;  et ,  k  présent ,  il  n'; 
«D  aurait  plus  t  l'est  de  l'Amérique,  parce  que,  avec  les  propriétés  des 
Cmchona,  leurs  caractères  et,  en  particulier,  leur  âi<bisc«nce,  les  plan- 
tes qoe  je  viens  de  nommer  présentent,  dit-on,  une  fente  dans  le  milieu 
de  leurs  valves  1  Si  l'on  devait  admettre  de  tels  principes,  il  faut  convenir 
qne  les  détails  de  la  g^'Ographic  bolsuique  reposeraient  su  r  des  bases  bien 
peu  MUdcs.  Hais  il  }  a  ploa  :  c'est  tout  simplement  une  faute  d'impres- 


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IM  VOYAGE  AUX  SOURCES 

sidérer,  ce  me  semble,  la  plante  dont  il  s'agit  comme 
l'indication  de  la  présence  du  fer;  ce  qui  prouve  que  la 
constitution  minéralogique  d'un  terrain  n'est  pas  toujours 
sans  influence  sur  la  nature  de  la  végétation. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  propriétaire  de  la  fazmia  du  Ca- 
pitâo  Pedro  avait  établi  chez  lui  un  petit  fourneau  de  forge, 
où  il  fondait ,  pour  l'usage  de  sa  maison  ,  le  minerai  du 
Morro  do  Palmîtal  ;  mais  il  se  plaignait  de  ne  pouvoir  faire 
que  de  l'acier.  Il  paraît  que,  en  général,  le  fer  brut  a  au 
Brésil  beaucoup  de  tendance  à  se  changer  en  acier.  Aux 
forges  dePrata,  oij  je  passai,  en  1S18,  on  cherchait  à  re- 
médiera cet  inconvénient,  en  n'employant  dans  les  four- 
neaux que  les  plus  gros  morceaux  de  charbon,  et  peut-être 
parviendra-t-on  à  y  remédier  dans  tout  ce  pays ,  lorsque 
ses  habitants  connaîtront  mieux  l'art  de  fondre  le  fer.  Il  y 
a  quelques  années,  le  gouvernement  du  Brésil  envoya  en 
France  un  grand  nombre  de  jeunes  gens,  en  leur  donnant 
l'ordre  d'acquérir  de  la  science;  comment  se  fait-il  qu'il 


■ion  on  de  copie  qaiduDgerait  ainsi  DM  idées  aorU  distribnliongéagra- 
^qae  des  QuinqniiiaB.  Eu  effet,  apris  le  passage  oà  je  dis,  du  fruit  dn 
Ctnehona  ftrrvuinea,  dans  mes  Planttt  VMulttt  dti  BratUietu,  n*  Il , 
que  la  eapiuU  «'ouvre  en  dtva:  vatoet  par  le  mili'nt  de  la  cloifcm, 
passage  qui  indiqae  le  plus  clairement  possible  DnedéhtsceaceseptJdde, 
ee  qui  est  entièrement  conGrmé  un  pen  plus  loin  (  page  i),  on  lit ,  entre 
deni  parenthèses,  ces  mots  (déhUctnet  loealieitte) ,  qni,  bien  évidem- 
ment, sont  le  résultat  d'une  distrarlioD  ou  d'une  erreur  de  plume.  Forcé 
de  IraraiUcr  Iris-rapidement ,  H.  de  Candolle  n'a  sans  doute  vu,  dans  ma 
deeeriplioD ,  que  ces  mots  erronée .  car  il  les  répète  dans  la  sienne  en 
■ne  citant ,  et  c'eat  là  ce  qui  l'a  engagé  k  constituer  le  genre  Remija. 
M.  George  Bentliam  a  déji  reconnu,  avec  sagacité ,  l'erreur  dans  laquelle 
estlonbé  l'auteur  dn  ProdroiRiu  (joNm.  M.,  III,  2lï),  et  de  ses  ob- 
servations, ainsi  que  des  miennes,  il  résulte  4(ae  le  genre  Bemija,  fonde 
sur  une  mi'prise ,  ne  saurait  être  admis  par  les  bolaaistes. 


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DD  MO  DE  s.  FHAHCISCO.  Hl 

n'ait  pas  imposé  h  quelques-uns  d'entre  eux  l'obligation 
d'étudier  l'exploitatiOD  des  mines  et  la  métallurgie?  L'ad- 
ministration de  la  province  de  Minas  Geraes,  pays  où  l'on 
trouve  à  peu  près  tous  les  métaos ,  a  entretenu  deui  jeu- 
nes gens  à  Paris;  on  croira  sans  doute  que  l'on  a  fait 
cette  dépense  pour  que  ces  jeunes  gens  apprissent  k  tirer, 
des  richesses  de  leur  patrie,  le  meilleur  parti  possible; 
tel  n'a  point  été  le  but  de  leur  long  voyage;  ils  sont  ve- 
nus, m'a-t-on  dit,  de  Minas  à  Paris,  pour  apprendre  à 
arpenter. 

Entre  te  Capitâo  Pedro  et  la  Fatenda  das  VertetUes  do 
Jaearé,  je  parcourus  un  pays  à  pei^  près  semblable  à  celui 
où  j'avais  voyagé  la  veille,  mais  peut-être  moins  boisé. 
Dans  toute  la  journée,  je  ne  vis  que  trois  habitations,  dont 
deux  peu  importantes,  et  Je  ne  rencontrai  qu'une  seule 
personne  :  à  mesure  que  je  m'éloignais  de  S.  Joâo  d'EI 
Rei,  le  pays  devenait  plus  désert. 

La  Ffomda  das  Vertenteê  do  Jaearé  (habitation  des 
sources  du  Jaearé)  (1),  où  je  Gs  balte,  est  située,  suivant  la 
coutume,  dans  un  Tond,  près  d'un  ruiseau;  de  tous  c4tés, 
die  est  entourée  de  collines  couvertes  de  pâturages  et  de 
bois ,  et  elle  pr^nte  l'image  d'une  profonde  solitude. 

On  m'avait  d'abord  donné,  dans  cette  fasmda,  une 
chambre  basse  et  obscure ,  dont  je  m'étais  contenté;  mais, 
à  peine  y  étais-je  établi  que,  moi  et  mes  gens,  nous  eûmes 
les  jambes  et  les  pieds  couvertâ  de  chiques  {pulex  pene- 
Oratu).  Je  demandai  nn  autre  local,  et  on  me  logea  dans 
]Avanmda;  mais  je  n'y  fus  pas  mieux.  Tandis  quej'écri- 

(1)  A  propremeal  parler,  le  mol  wrtMfsf  signifie  wrfanb ,- mais  il 
est  éTidenl  que,  an  Btésil  on ,  dn  moins ,  dus  quelqa«s  parties  do  Bré- 
til.M  Inidomie  b  signification  que  Dons  donootu  à  notre  mot  fowrcM. 


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142  VOYAGE  AUX  SOURCES 

rais,  je  sentais,  à  chaque  instant,  de  nouvelles  piqi^es, 
et  j'étais  obligé  de  regarder  mes  pieds  pour  en  arracher 
les  chiques  qui  cherchaient  à  s'y  enfoncer.  Nulle  part  je 
n'en  avais  encore  vu  un  si  grand  nombre,  fl  est  difficile 
de  croire  que,  avec  des  soins  et  de  la  propreté,  on  ne  fl^t 
point  parvenu  à  empêcher  ces  insectes  de  multiplier  d'une 
manière  aussi  effroyable. 

Entre  la  Fazenda  das  Vertentes  do  Jacaré  et  le  village 
d'Oliveira ,  qui  en  est  éloigné  de  5  lieues  et  demie,  le  pays 
moDtueux,  coupé  de  hois  et  de  pâturages,  présente  de 
vastes  solitades  ;  là  je  ne  rencontrai  pas  un  seul  voyageur , 
je  n'aperçus  point  de  bestiaux ,  je  ne  vis  que  deui  habita* 
tions,  l'une  sur  le  bord  du  chemin  et  l'autre  dans  le  loin- 
tain. La  veille,  j'avais  beaucoup  monté;  ce  jour-là,  je  des- 
cendis tout  i  coup  d'une  manière  très-sensible.  Feu  après , 
je  traversai ,  sur  un  pont  en  bois  fort  mauvais ,  comme  le 
sont  tous  ceux  de  ce  pays,  la  rivière  de  Jacaré,  qui  prend 
sa  source  è  la  fazenda  où  j'avais  passé  la  nuit  et  à  laquelle 
elle  donne  son  nom  {Fazenda  das  Vertentes  do  Jacar^. 
J'avais  monté  pour  parvenir  A  la  source  de  cette  rivière, 
puis  j'avais  descendu  pour  me  retrouver  sur  ses  bords. 
Immédiatement  avant  d'arriver  au  village  d'Oliveira,  je 
suivis  un  vallon  assez  agréable,  d'où  l'on  a  une  échai^tée 
du  village  et  où  l'on  voit  déjà  quelques  maisonnettes. 

A  Oliveira,  je  me  trouvai  encore  une  fois  confondu,  sous 
un  sale  rtawho ,  avec  des  tropeirot  de  toutes  les  couleurs. 
Dans  tous  les  coins  étaient  des  sacs  de  coton  amoncelés,  et 
des  bâts  couchés  sur  le  cAté  les  uns  dans  les  autres.  Deux 
ou  trois  feux  allumés  dans  ie  rancho  servaient  à  faire  cuire 
le  souper  des  muletiers.  Une  douzaine  de  personnes  m'en- 
touraient et  s'extasiaient  sur  la  patience  de  José  Marianno, 


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DU  RIO  DE  S.  FUMCISCO.  143 

occupé  à  préparer  des  animaui.  Les  Mineiros  ont  une  an- 
tipathie remarquable  pour  les  voyages  par  mer;  mais,  en 
revanche,  ils  aiment  à  voyager  par  terre.  La  liberté  dont  on 
jouit  dans  les  ranchos  plaît  surtout  aux  jeunes  gens  ;  après 
une  journée  Tatigante ,  ils  savourent  le  repos  nonchalam- 
ment étendus  sur  un  cuir  et  occupés  à  jouer  de  la  guitare 
ou  à  raconter  leurs  aventures. 

Oliveira  ou  Nos»a  Senhora  da  Oltveira  [Notre-Dame  de 
l'olivier),  où  je  passai  la  nuit,  est  une  des  succursales  de  S. 
José,  petite  ville  située,  commeje  l'ai  dit  ailleurs,  à  2  lieues 
de  S.  Joâo  d'El  Rei  (1).  Ce  village  est  du  petit  nombre  de 
ceux  qui  ne  doivent  pas  leur  fondation  à  la  présence  de 
l'or  ;  il  est  uniquement  redevable  de  son  existence  aux 
avantages  de  sa  position.  En  effet,  plusieurs  routes  impor- 
tantes passent  par  ce  point  ;  celle  qui  va  de  Barbacena  au 
village  de  Formiga,  celle  du  canton  de  Rio  Grande  à  la 
ville  de  Pitangui,  de  Rio  de  Janeiro  et  de  S.  Joâo  d'El  Rel 
i  Goyaz,  de  Villa  da  Campanha  à  Formiga,  etc. 

Le  villi^e  d'Oliveira  est  situé,  au  milieu  des  mornes,  sur 
la  croupe  d'une  colline  dont  le  sommet  est  trés-aplati .  Il  se 
compose  de  deux  rues  dont  la  principale  est  fort  large.  La 
plupart  des  maisons  qui  la  bordent  n'ont  que  le  rezrde- 
chaussée,  mais  elles  sont  assez  grandes  pour  le  pays  et  cou> 
vertes  en  tuiles.  En  général,  on  a  eu  soin  de  les  blanchir, 
et  elles  ont  des  portes  et  des  fenêtres  peintes  en  jaune  avec 
nne  bordure  rose ,  ce  qui ,  au  milieu  des  murailles  blan- 
ches, produit  un  effet  assez  agréable  (S).  Une  grande  partie 

(1)  Piz.,  Mtm.  Mil.,  VUI,  B«gimda  part.,  129  —  rofan*  daiw  U 
dUtTiet  da  DiomanU,  1,  203. 

(Z)  Lm  maisons  d'Olivtira  at  sodI  poiot  des  palais  :  mai ^  on  voit 
poQTlanl ,  d'après  ce  que  je  dis  ici ,  qu'elles  ne  méritent  pas  le  nom  de 


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U*  VOYAGE  AUX  SOURCES 

de  ces  maisons,  et  même  les  pins  jolies,  ne  sont  habitM 
que  le  dimanche  ;  elles  appartiennent  k  des  propriétaires 
qui  passent  leur  vie  dans  leurs  fiatndas  et  ne  vont  au  vil- 
lage que  les  jours  oiî  la  messe  est  d'obligation. 

Oliveira  possède  deux  églises  dont  la  principale  a  été 
bâtie  sur  le  sommet  de  la  colline,  au  milieu  de  la  grande 
rue,  et  à  égale  distance  des  deui  rangs  de  maisons  ;  elle  est 
assez  jolie  dans  l'intérieur.  On  a  employé,  pour  l'orner,  une 
pierre  d'un  beau  vert-pomme  que  le  minéralogiste  Pohl  dit 
être  du  talc  endurci  (1). 

On  voit  à  Oliveira  plusieurs  boutiques  d'étofite  et  de  mer- 
cerie qui  sont  très-bien  garnies,  des  tavernes,  une  phar- 
macie et  deui  auberges  dont  chacune  a  un  rancho.  On  y 
trouve  aussi  des  tailleurs,  des  cordonniers,  des  serru- 
riers, etc. 

Je  quitUi  bientét  ce  village,  et,  jusqu'à  la  faxenda  de 
Bom  Jarditn,  je  traversai  encore  un  pays  montueui,  coupé 
de  bois  et  depAturages.  Dans  an  espace  de  3  lieues  et  demie, 
jusqu'à  BomJardim,  je  ne  rencontrai  absolumeotpersonne, 
je  n'aperçus  point  de  besUaux  dans  les  pâturages  ;  je  ne 
vis  que  deui  chaumières  et  une  fazenda  assez  importante 
d'où  dépendait  une  sucrerie. 

Je  fis  balte  à  Bom  Jardim  (bon  jardin),  sous  an  raneho 
ouvert  de  tous  les  côtés  où  le  vent  nous  incommodait  beau- 
coup. Le  maître  de  la  maison  et  plusieurs  autres  cultiva- 
teurs se  réunirent  autour  demoi  pendant  que  je  travaillais. 

battes  qne  leur  donne  )e  dodear  Pobl.  Je  ne  nua  pa  non  plus  ifacccnl 
tmc  ce  Toiageur,  oi  stcc  d'EKhwqe,  rar  le  nombre  des  nies  d'OIi- 
veira ,  car  ils  disent  qu'il  n'j  en  a  qu'une  dans  ce  Tillage. 

(I)  Portai ,  Kaiuel .  AlUntiicke  tod  icb  ans  apfttgrâ&Mi  ferbirletani 
T«lk  (Heite,  I). 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  IIS 

-  Tous  étaient  des  blancs  ;  mais  ils  ne  ressemblaient  guère  aui 
colons  des  comarca$  de  SabarÂ,  de  Villa  Rica ,  du  Serro  do 
Frio  ;  par  leurs  manières ,  ils  diCTéraient  peu  de  nos  paysans 
français.  Comme  tous  ceux  des  campagnards  de  cette  con- 
trée qui  ont  peu  d'aisance,  ils  ne  portaient  qu'un  caleçon 
de  coton  et  une  chemise  dont  les  pans  flottaient  par-dessus 
le  caleçon  ;  leurs  jambes  et  leurs  pieds  étaient  nus  ;  un  large 
chapeau  rond  ombrageait  leur  tète,  et,  suivant  l'usage  des 
Hineiros,  ils  portaient  suspendus  à  leur  cou  un  rosaire  qui 
ne  sert  que  d'ornement. 

Auprès  du  raneko  de  Bom  Jardim,  où  avait  été  placé 
mon  bagage,  se  trouvait  une  petite  chaumière  abandonnée 
qui,  de  toute  part,  tombait  en  ruine  ;  ce  fiit  là  que  je  Ss 
mettre  mon  lit  pour  éviter  le  froid  qui ,  sur  le  soir,  était 
assez  vif.  Malgré  celte  précaution,  la  température  devint 
tellement  basse,  pendant  la  nuit,  qu'il  me  fut  presque  im- 
possible de  dormir.  Je  rêvai  que  j'étais,  i  Noël,  au  chAteau 
de  la  louche ,  près  Orléans ,  où  j'ai  passé  les  jours  les  plus 
heureui  de  mon  enfance  (!].  Mon  père  et  ma  mère  s'éton- 
naient de  me  voir  autant  vieilli  ;  ce  sont  bien  moins  les 
années  qui  en  sont  la  cause  que  ceci ,  leur  dis-je  en  mettant 
la  main  sur  ma  tète  ;  puis,  à  demi  éveillé,  je  me  repentis 
de  n'avoir  pas  également  porté  ma  main  sur  mon  cœur  ; 

tl)  Le  chiteaa  de  la  Tanche  appartenait  h  H.  et  i  M"  d'Alomie , 
■Km  oDcle  et  ma  tante,  qui ,  tous  les  deai .  étAient  adorés  de  knn  ptjr- 
HDS.  Onoiqne  ancien  seifpieiir,  M.  d'Alonne  était  encore  maire  à  l'épo- 
qne  de  la  terrear-,  on  la  mit  en  prison  ponr  n'afoir  pas  déDOOCé  nu  inil- 
beuTtoi  éclosier  qni  paja  de  sa  U\e  un  propos  impnideat,  et  prewioe 
liwie  M  commniie  fbl  app«Ue  en  témoignage  ;  il  ue  s'éleva  pas  contre 
hii  ime  seole  voii  ;  on  l'acqaitta ,  et  le  peaple ,  qni ,  an  milieu  de  ses 
cruelles  errears,  était  pourtant  bien  aise  de  trouTer  des  iaDoeents,  le 
porta  ea  trîMnpbe. 

1.  10 


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I4S  VOYAGE  iCX  SOURCES 

enfin  je  revins  entièrement  k  moi-même,  et  je  me  retrou- 
vai bien  tristement  dans  mon  misérable  gite. 

Je  le  quittai  bientôt  pour  me  rendre  i  Cachoeirintaa, 
l'habitation  du  capitâo  mâr  de  Tamanduà,  pour  lequel  j'a- 
vais,, comme  je  l'ai  dit ,  une  lettre  de  recommandation. 

Le  pays  que  je  parcourus,  avant  d'arriver  à  celte  habi- 
tation, est  un  pays  plus  montagneui  que  celui  où  j'avais 
voyagé  les  jours  précédents  ;  les  voilées  y  sont  plus  pro- 
fondes, en  même  temps  les  bois  s'étendent  davantage,  et, 
en  général,  on  ne  voit  guère  ie-campos  que  tout  à  fait  sur 
le  sommet  des  mornes.  Celui  de  ces  derniers  qui  domine 
la  petite  rivière  de  Comacho  est  le  plus  élevé  de  tous  ;  là. 
un  vaste  horizon  s'offrit  à  mes  regards,  et  je  trouvai  quel- 
ques plantes  que  je  n'avais  point  encore  rencontrées  de- 
puis le  commencement  de  ce  voyage. 

A  peu  de  distance  du  Motto  de  Comacho  [le  morne  de 
Comacho]  (1)  est,  dans  un  fond,  une  espèce  de  petit  hameau 
appelé  Currid  (enclos  pour  le  bétail},  qui  se  compose  d'une 
demi-douzaine  de  maisonnettes  bities  auprès  d'une  fa- 
zenda  de  qaelque  importance.  De  cet  endroit  jusqu'à  Ca- 
ehoevinha  [peUle  cascade),  il  n'y  a  qu'une  demi-lieue. 

J'ai  déjà  donné  des  détails  sur  celte  dernière  habitation 
dont  le  propriétaire,  M.  Joâo  Quintinode  Oliveira,  capitào 
fltér  de  Tamandui ,  m'accueillit  d'une  manière  parfaite.  Il 
n'en  était  pas  de  sa  table  comme  de  son  logement  (v.  plus 
haut,  p.  123).  Elle  était  servie  avec  abondance,  et,  dans 
tous  les  pays,  elle  aurait  passé  pour  très-bonne.  On  mettait 
devant  chaque  convive  un  carafon  d'excellentvîn  de  Porto, 

(1)  Ce  Dom  iiendrait-il  des  iDote  guranîs  eana,  wra,  et  eJitia,  choBe 


^d:,;.  Google 


DV  MO  DE  S.  FRANCISCO.  147 

et,  ce  qui  peut  fttre  cité  comme  une  merveille,  on  y  ajou- 
tait un  petit  pain  trèS'Savoureux.  Le  mattre  de  la  maison 
Eûsait  les  honneurs  de  cbes  lui  avec  beaucoup  de  bonté, 
sans  aucune  affectation,  et  il  était  bi^i  secondé  par  son 
aumAnier. 

A  l'instant  même  de  mon  arrivée  à  Cacboeirinha,  j'avais 
bit  part  à  H.  Jrâo  Quintioo  du  désir  que  j'avais  de  trouver 
OB  tocador.  Fonr  m'en  procurer  un,  il  avait,  sur-le-champ, 
écrit  i  Tamandué,  qui  est  situé  à  â  lieues  de  son  habitar 
tion  ;  mais  le  tocador  ne  se  présenta  que  le  surlendemain. 
Cétait  un  esclave  pour  lequel  on  demandait,  par  mois, 
6,000  reis  (37  f.  50  c.)-  ^e  payant  que  7,209  reis  {iS  Ar.) 
à  José  Mariauno,  je  ue  voulus  point  consentir  i  accorder  un 
prix  aussi  élevé.  Je  partis  donc  sans  tocador;  mais  mon 
hôte  me  remit,  pour  le  commandant  (1)  du  village  de  For- 
miga,  une  lettre  dans  laquelle  il  lui  donnait  l'ordre  de  me 
foire  accompagner  jusqu'à  Pîumhy  par  un  pédestre  (3). 

J'avais  été  si  bien  traité  dans  la  maison  du  capilâo  m6r, 
il  avait  eu  pour  moi  tant  d'égards  que  je  ne  pus  le  quitter 
sans  attendrissement.  Cet  homme  portait  sur  sa  figure  l'em- 
preinte de  la  bonté,  et  avait  su  se  concilier  l'estime  de  tout 
son  voisinage. 

Avant  que  je  prisse  congé  du  eapitào  m6r,  José  Marianno 
était  parti  avec  tout  le  reste  de  la  caravane,  et  devait  m'at- 


(1)  Les  commanda*lt  {eomandanta)  sodI  nomioés  pat  )«b  eapUàet 
mbru  i  kart  fooctioai  (18tO-182S)  odI  quelque  ehow  d'ouilosue  i  celles 
de  DM  miiree  ;  mais  il*  a'ool  d'ialoriU  qae  tar  l«e  homines  qui  ne  font 
pMDt  partie  dee  giTdes  nilioiulea  (miliciu).  (Foyo^a  àtm$  \a»  pro- 
ttoew  dgBiodi  Jmutro,  etc.,  1 ,  374.) 

(!)  LespniedrM,  comme  je  l'ai  dit  ailleara,  formeoE  (181ft-1832)  ane 
nilice  d'na  ordre  ioférienr. 


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14S  VOYAGE  AUX  SOURCES 

tendre  i  2  lieues  de  CBcboeirinha,  daos  la  fazmda  d'uo 
Dommé  Marcos.  Quant  à  moi ,  je  m'étais  dirigé  vers  Ta- 
maodué,  accompagné  de  l'avocat  de  cette  ville,  du  chi- 
rurgien et  de  l'adjudant  du  eapitâo  màr,  qui  étaient  venus 
passer  deux  jours  à  Cacboeirinba.  Pendant  tout  le  temps 
que  je  m'étais  trouvé  avec  ces  bonnes  gens,  la  conversation 
avait  presque  toujours  roulé  sur  la  France  ;  les  Mineiros  ne 
pouvaient  pas  se  rassasier  d'entendre  parler  de  Napoléon 
Bonaparte  et  de  l'histoire  tragique  de  notre  révolution. 

Tamandué,  on  j'arrivai  bientôt,  doit  ses  premiers  fon- 
dements à  des  criminels  qui  vinrent ,  il  y  a  une  centaine 
d'années  (écrit  en  1819] ,  chercher  un  asile  au  milieu  des 
bois  dont  ce  pays  est  couvert.  Ces  hommes  ayant  tué  un 
fourmilier  dans  le  lieu  où  ils  s'étaient  fixés,  donnèrent  k  ce 
lieu  le  nom  de  Tamanduâ  [i]  qui ,  en  portugais  comme  en 
guarani,  désigne  le  mangeur  de  fourmis  (2].  On  trouva  de 
l'or  dans  cet  endroit  ;  la  population  du  village  de  Tamandué 
devint  plus  considérable,  et  il  fut  érigé  en  ville,  en  l'année 
1 791 ,  sous  le  gouvernement  de  Luiz  AirroNio  Fustado  db 
Hbndonça,  vicomte  de  Bauacbna,  capitaine  général  de 
la  province  de  Minas  (3). 

On  voit  encore  autour  de  Tamanduâ  des  minières  consi- 
dérables qui ,  aujourd'  hui ,  sont  entièrement  abandonnées  ; 
elles  ont  fourni  beaucoup  d'or,  mais  il  fut  dissipé  par  ceui 


(1)  Eacnr-,  Bnu.  Nnu  WeU,  1,  ». 

(3)  Ant.  Rdu  m  HoNTOTt,  Tel.  tuar.,  953  M*.  —  Les  BTteUwns  di»- 
tiii|;iunl  deai  eqiiees  de  lomanAut  ;  le  (amandiid  bantUira ,  qui  est 
le  Uminoir  {KyMMcophaça  jubata,  L.) ,  et  le  faiiumdiHi  mirim ,  qni 
esl  le  Umandiu  des  Franteia  (  Kfrmecophaga  têlradaeljila,  L.;  Jl.  la- 
mandHa,  Cor.). 

(3)  Pu.,  HeM.  Mit.,  TDI,  segundi  part.,  M. 


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DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  119 

qui  l'avaient  recDeilli,  et  lears  enfanU  demandent  actuel- 
lement (1819)  l'aDmAne,  triste  exemple  des  suites  de  la 
minération  et  de  l'imprévoyance  trop  naturelle  aux  Nj- 
neiros. 

Les  habitants  actuels  de  Taroandui  sont  des  cultivatenrs 
qui  n'y  viennent  qneles  dimaodies  et  les  jours  de  fête, 
quelques  marchands,  des  ouvriers  et  des  hommes  pauvres 
qui,  profitant  de  l'abondance  dont  oh  jouit  dans  cette  con- 
trée, vont  manger  tantAt  chez  l'un,  tantAt  chez  l'autre,  et 
passent  leur  vie  dans  l'oisiveté. 

Chef-lieu  d'un  ttrmo  et  d'une  paroisse,  Tamanduà  est 
administré  par  des  juges  ordinaires.  Sa  population  s'élève 
(1819)  à  environ  1,000  Ames  ;  celle  du  ressort  de  l'église 
paroissiale,  qni  s'étend  dans  un  rayon  de  plus  de  â  lieues, 
monte  à  3,000;  enfin  celle  de  tout  le  termo  s'élève  à  24  ou 
25,000  (1] ,  et  il  y  a ,  selon  Pîzarro ,  30  lieues  du  nord  au 
sud,  sur  16  de  l'est  à  l'ouest  (2j.  Le  nombre  des  habitants 
de  ce  pays  a  beaucoup  augmenté  depuis  que  l'agriculture 
et  l'éducation  du  bétail  ont  pris  de  l'accroissement.      * 

Le  tabac  est  une  des  plantes  que  l'on  cultive  le  plus  an- 
tour  de  Tamanduà.  Les  environs  de  cette  ville  en  exportent 
une  quantité  assez  considérable. 

On  compte  36  lieues  de  TamanduA  jusqu'à  Villa  Rica, 
34  jusqu'à  S.  Joào  d'El  Rei,  32  jusqu'à  Sahara  (3).  Cette 

(1)  PiuTTO  (  I.  e.  )  ne  hit  monUr  la  popnUtiiHi  du  termo  de  Taman- 
d«i  qu'à  IS.TOS  individus.  Sairant  Eschwege ,  celle  de  tonte  la  paroisse 
s'tlerait  k  3O,DO0  habitaots  ;  mais  cet  écrivaiD  a  bien  certainement  pris 
la  paroisse  ponr  le  lemto.  Quant  je  donne  3,000  âmes  au  ressort  de  la 
paraisse,  il  est  clair  qu'il  ue  peut  ttrc  question  que  de  cette  dernière, 
iiidépeiidamiiiuit  de  ses  succursales. 

<3)  M«m.AM.,VIU,eegaadapart.,1V5. 

13)  Selon  Caial  {Corog.,  1 ,  379) ,  il  ;r  aurait  25  Ugoat  de  Villa  Rica  à 


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ISO  VOYAGE  AUX  SOURCES 

ville,  située  dans  un  fond,  est  entourée  de  mornes  asseï 
élevés,  couverts  de  bois  [  j  ).  Ses  rues  n'offrent  aucune  régu- 
larité ;  elles  montent  et  descendent  et  sont  embarrassées  par 
des  pierres  ;  ses  maisons,  dont  quelques-unes  ont  une  assez 
jolie  apparence,  sont,  en  général ,  écartées  les  unes  des  au- 
tres et  séparées  par  des  murs  de  jardin  ;  mais,  lorsqu'on 
jette  les  yeux  sur  la  ville  d'un  point  assez  élevé ,  il  résulte, 
des  irrégularités  qu'elle  présente,  un  effet  agréable  pour  le 
paysage.  Non-seulement  par  la  blancheur  des  mars  de  ses 
maisons  et  la  couleur  des  tuiles  qui  couvrent  les  toits,  la 
ville  contraste,  dans  son  ensemble,  avec  le  vert  sombre  des 
bois  qu'on  découvre  de  tous  cAtés  ;  mais  un  contraste  de 
même  genre  résulte,  en  particulier,  de  la  position  de  chaque 
maison,  qui  semble  jetée  au  milien  d'une  niasse  de  verdnre 
formée  par  les  Bananiers  et  les  Orangers  dont  les  jardins 
sont  remplis. 
TamanduÀ  possède  trois  églises  ;  S.  François  de  Paule, 

TamtiHlai,  15  de  S.  Joio  d'Bl  Rci  à  U  même  rille ,  et  30  de  Sebarl.  Pi- 
urro  admet  les  mêmes  distances  ponr  Satiarâ  et  S.  Joào  d'El  Elei  ;  mais 
il  place  Villa  Rica  à  36  tegoal  de  Tamandni,  et  Hirianna  h  56.  Quoi  qu'il 
en  soit  de  tonteit  les  autres  ÉTalaatlous ,  il  y  ■  bien  certainement  erreoT 
(laos  l'noe  des  deruières;  car  Mariaima  n'est,  comme  l'on  sait,qa'ï 
3  lieues  de  Villa  Rica. 

(1)  On  ■  dit  i  U,  Laccock  que  Timandui  était  situé  sor  une  h&utear 
{Kolêi  on  firai.,  482),  an  pied  de  laquelle  coulait  la  rivière  de  Ltant' 
bary,  l'un  des  aniuents  du  S.  Francisco  ;  et  cet  écrivain  ajoute  qat  h 
nom  de  cette  rivière  tend  h  prouver  que  le  Llama  (  lama)  a  tBlreToii 
eiislé  au  Brésil.  On  va  voir  ce  qu'il  tînt  penser  de  ces  isserlions  :  Ta- 
mandoi  n'est  pas  un  Tilhge  ;  il  se  trouve  dans  an  fond  et  non  sur  une 
hauteur  ;  il  est  placé,  d'après  la  carte  gi^nérale  de  Marlius,  el  h  peu  près 
comme  le  dit  Caial  {Corog.,  1 ,  379),  entre  deut  petits  ruisseaux  qui  se- 
raient les  premiers  commencements  du  Lambary;  enfin  ce  nom,  qui 
n'est  point  Llambary,  a  ai  peu  de  rapports  avec  le  lama .  que  e'est  tout 
simplement  celui  d'un  Irfs-petit  poisson. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO,  13l 

réglise  paroissiale,  dédiée  à  saint  Benoit ,  celle  du  Rdftatre , 
et,  en  outre,  deoi  petites  chapelles;  mais  aucun  de  ces 
édifices  ne  mérite  d'être  cité. 

D'après  ce  que  me  dit  le  chirurgien  de  cette  ville,  l'hy- 
dropisie  est  encore  la  maladie  dont  on  meurt  le  plus  ordi- 
nairement dans  c«  canton,  et  l'éléphanUasis  (mor/Î!a}  n'y 
est  pas  rare. 

Je  ne  puis  m' empêcher  de  rapporter  ici  deux  faits  que  Je 
tiens  du  même  chirurgien.  Le  premier  s'était  passé  à  Ta- 
manduâ,  et  me  fut  raconté  devant  plusieurs  personnes  qui 
neledémentirentpoÎDt.Un  chien  que  l'on  regardait  comme 
«iragé  mordit  plusieurs  individus ,  mais  tons  en  furent 
quittes  pour  les  douleurs  que  leur  causa  la  blessure.  Un 
d'entre  eux  avait  fait  réciter  des  prières  par  un  prêtre  et 
crut  leur  devoir  sa  guérisoa.  Quelque  temps  après,  il  alla 
voir  le  curé  et  lui  raconta  ce  qui  lui  était  arrivé.  A  votre 
place,  lui  dit  cet  ecclésiastique,  je  ne  me  considérerais  point 
comme  guéri ,  et ,  sans  aucun  délai ,  je  ferais  des  remèdes. 
L'homme  se  retira  pénétré  de  terreur  ;  le  jour  même,  ou  le 
lendemain,  il  eut  une  attaque  d'hydrophobie  et  il  mourut 
de  cette  maladie  affreuse. 

Le  second  fait  s'est  passé  i  Caeté,  où  le  chirui^en  de 
Tamonduâ  était  alors.  Un  homme  atteint  de  la  tnorfea  fiit 
mordu  par  un  chien  enragé  ;  les  plus  tristes  symptAmes  se 
déclarèrent,  et  on  enferma  le  malade  dans  une  petite  cham- 
bre. Sa  femme,  étant  allé  lui  porter  de  la  nourriture,  fiit 
effrayée  de  l'état  où  il  était,  elle  prit  la  fuite,  et  la  porte 
de  la  chambre  resta  ouverte.  Le  malade  s'échappa  et  se  mit  è 
courirdans  la  campagne  ;  cependant,  quelques  heures  après, 
on  le  vit  revenir  parfaitement  calme,  disant  qu'il  avait  été 
mordu  par  un  serpent  à  sonnettes  et  demandant  un  prêtre. 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


1S3  VOYAGE  AUX.  SOURCES 

D  se  confessa  dans  la  pleine  jouissance  de  sa  raison.  On  lai 
donna  pour  remède  de  l'alcali  volaUl  ;  il  fut  guéri  de  la  mor- 
sure du  serpent,  tous  les  symptAmes  d'hydrophobie  cessè- 
rent, et,  peu  de  temps  après,  l'éléphantiasis  avait  entière- 
ment disparu  (1). 

(1)  Ctei  nue  opiDJOD  généralement  rtpuidue  dans  pltuieare  parlies 
de  l'Amérique,  dit  H.  le  doclear  Sigaud  (voyez  l'imporUnt  oavrage  iDti- 
Inlé  Ou  climat  et  dei  matadie*  du  Br^iil ,  p.  3ST  et  van.),  qoe  U  mor- 
sure du  serpent  à  sonnettes  guérit  la  Upre  et  ne  lae  point  le  malade. 
Des  faits  raconli^s  par  plasienrs  personnes  décidèrent,  dans  ces  derniers 
temps ,  on  li^preui  nommé  Marianuo  José  Hachado  k  se  faire  mordre ,  i 
8io  de  Janeiro,  par  uo  serpeot  à  soDoetles  ;  mais,  ajoute  le  mCroe  uvant , 
il  SDCcomba  au  bout  de  viug(-qiia:re  beares,  après  d'affreuses  souf- 
frances. Cependwit  M.  Sigaud  croit  pouvoir  conclure,  des  sjmptAiDes 
qui  se  manifestèrent  chei  l'infortuné  Hachado,  que  l'action  dn  venin  mo- 
difie la  peau  d'une  manière  spéciale,  et  qu'on  doit  espérer  les  résultats 
les  plus  heureui  d'une  inoculation  ccuduile  avec  sagesse. 


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MJ  MO  DE  S,  FRANCISCO. 


CHAPITRE  IX. 

SCITB  DV  TOTAGB  DE  9.  JOÂO  d'eL  KEI  A  LA  SODSCE  DD 
S.    FRANCISCO.    —   LES  VILLAGES    DE    PORHIGA    ET   DB 

piDimT. 

L'ratear  séparé  de  m  cvavaae.— L«a  environs  de  Tamudoà. — ArriTée 
k  Formiga.  —  Les  femmes  privées  de  liberté.  —  Description  da  vil- 
lage de  Formigg  ;  rues,  maisons,  église,  bontiqaM,  commerce  ;  popu- 
Ubm  ;  mauvaise  répaiation  des  babitants  ;  on  mearire  ;  femmes  pa- 
bliqnes. —  Impossibilité  d'avoir  no  tocador. —  Le  pays  situé  entre 
Formiga  et  Pontt  A  Ua  -,  comparaison  de  sa  végélatioD  avec  celle  de  la 
partie  orientale  do  5«r(âo  du  S.  Francisco.  Époque  de  la  OoraisOD  des 
plantes  dans  les  Krtôtt  de  Hinos.  —  Fa%mda  de  Ponte  Alla.  Plantes 
naaellesi  eaUaiga. —  Pays  sitné  aa  deU  de  Ponte  Allas  —  Famtdade 
S.  Miguet  t  Alma$.  Indigo  foumi  par  le  Solaman  indigoferum.  — 
Serra  de  Piumhy.  Vue  admirable.  —  Village  de  Piitmhy  ;  et; mologie 
de  son  nom;  sonbisloire,  ses  rues,  son  église;  vue  que  l'on  découvre 
de  la  me  principale  ;  occupation  de  ses  habitants. — Le  curé  de  Piumhy, 
—  Toujours  point  de  loeador.  —  Paresse  des  gens  pauvres.  —  Pays 
situé  au  deU  de  Piumbj.  Habitude  qu'ont  les  bestiaux  de  se  cacher 
dans  les  bois  pour  éviter  les  mvlwea*. —  Familles  se  rendant  deui  fois 
Fan  au  village ,  sur  des  chars  à  baufs.  —  Fatenda  de  Dona  Thoma- 
tlo.  Produit  des  terres  ;  bestiaux.  —  Pays  situé  au  deU  de  Dona  Tho- 
mada.  —  Faservia  de  Joao  Diat.  Fer. 

Après  avoir  dtné  à  Tamanduà,  dans  la  maison  du  capit^ 
m6r,  je  partis  accompagné  de  ce  Marcos  dont  j'ai  parlé 
plus  haut  (p.  148),  et  chez  lequel  j'espérais  trouver  ma  ca- 
ravane (1). 

l)  llinrraire  apptoiimatir  de  la  ville  de  Tamanduà  a  la  Serra  da  Ca- 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


151  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Nous  traversâmes  d'abord  les  bois  qui  raviroonent  la 
ville  du  cAté  de  l'orient.  Ces  bois  se  prolongent,  m'a4-on 
assuré,  dans  un  espace  de  plus  de  20  lieues,  jusqu'à  Con- 
gonhas  do  Campo  (1).  Il  y  aurait  donc  ici  une  exception  k 
cette  espèce  de  loi  qui  veut  qu'on  ne  voie  que'  des  campo» 
k  l'ouest  de  la  Serra  do  Ëspinhaço  ;  mats  il  Taut  se  rappeler 
que  le  pays  est  extrêmement  élevé  et  montueux;  d'un 
autre  cAté,  Congonhes  do  Campo,  situé  entre  Sebari  et 
S.  Joâo,  ne  se  trouve  pas  dans  les  bois;  et  je  n'en  avais 
traversé  aucun  d'une  étendue  un  peu  considérable  en  cA- 
tofant  le  versant  occidental  de  )a  Serra  do  Espinbaço,  de- 
puis ta  première  des  deux  villes  que  je  viens  de  citer  jus- 
qu'à la  seconde;  si  donc  une  forêt  s'étend  de  Tamandui 
à  Congonhas  do  Campo,  du  moins  elle  ne  se  rattache 
pas  aux  forêts  continues  du  cAté  oriental  de  la  grande 
chaîne. 

Quoi  qu'il  en  soit,  tes  bois  de  Tamanduà  sont  bien  loin 
de  se  prolonger  également  dans  toutes  les  directions;  car. 


nastra  ; 

De  h  ville  de  Tamandua 

h  celle  de  Formiga 4       I^oas. 

pQDte  Alla,  htbiUtion 4 

Faieuda  de  S.  Migael  e  Aimas,  habi- 

""«• *  1/2 

Pimnhj,  village 2  1/î 

Faieoda  de  Dodb  Thomaiia ,  habi- 

(Btion I  .......  .      31^ 

Faieoda  de  Joào  Diaz ,  habilalioD.  .     3 1/2 
Serra  da^anïstra,  moDUgoe.  ...     S 

2S        legoas. 
lt)  J'ai  fail  connaître  ce  village  dans  mon  Voyage  dont  te  dUlrirt 
riet  niamanit,  »ol.  1 ,  MO. 


^d:,;.  Google 


DO  UO  DE  S.  FUHaSCO.  lU 

Bfant  même  d'arrirer  chez  Msr»»,  dont  la  maison  n'est 
qn'è  9  lieues  de  Cacfaoeirinha ,  nous  entrâmes  dans  des 
eampoi  i{ui ,  à  peu  près  semblables  à  ceux  de  la  partie  da 
Sertâo  que  j'avais  parcourue  en  1819,  présentent  de  petits 
arbres  tortueui  épars  au  milieu  des  Graminées.  Parmi  ces 
arbres,  je  Teconnus,  comme  sur  les  taboleinx  cobBrtOi{i) 
du  Sertâo .  des  Légumineuses,  des  Guttifères  et  des  Qualea. 
Après  ces  «omjHW ,  j'en  traversai  d'autres  qui  sont  couverts 
seulement  d'herbes  et  de  sous-arbriaseaux,  et  enfin  j'anivai 
k  la  fazenda  de  Marcoi ,  située  dans  un  fond ,  comme  cela 
est  l'usage. 

Je  fus  très-étonoé  de  ne  pas  y  trouver  mes  gens ,  qui 
n'avaient  eu  qne  3  lieues  à  faire;  je  ne  savais  trop  quel 
parti  prendre;  mais  enfin  je  me  décidai  à  aller  voir  s'ils 
n'avaient  pas  fait  hidte  dans  quelque  fanmda  voisine.  Je 
remontai  sur  mon  mulet,  et,  guidé  par  un  des  nègres  de 
Harcos,  je  me  présentai  inutilement  dans  quatre  faieneUu 
dilfêrentes.  Après  ces  recherches  infructueuses,  je  me  diri- 
geai une  seconde  fois  vers  la  fazenda  de  Marcos,  qui  m'a  - 
vait  offert  un  gtte  avec  beaucoup  d'amabilité.  Une  nuit 
obscure  me  surprit  lonque  j'étais  encore  dans  le  chemin; 
peu  k  peu  une  profonde  mélancolie  s'empara  de  moi;  de 
fiinestes  pressentiments  vinrent  se  mêler  aux  regrets  dont 
j'étais  consumé,  et  la  franche  galté  du  bon  Marcos  ne  put 
dissiper  ma  tristesse. 

Après  une  nuit  assex  mauvaise,  je  repartis  en  suivant  le 
chemin  du  village  de  Formiga ,  où  je  devais  me  rendre ,  et, 
Aune  demi-lieue  de  la  maison  de  Marcos,  je  trouvai  mes 
gens  établis  dans  une  grange  qui  dépendait  d'une  pauvre 

■1^  Et  non  IcOtUtlrai  cobhla$,  tommt  ■  *crit  Gardner. 


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156  VOYAGE  AUX  SOURCES 

maisonnette.  La  fazenda  de  Harcos  est  située  à  quelque 
distance  du  graud  chemin;  mes  gens  n'avaient  point  vu 
le  sentier  peu  frayé  qui  y  mène,  et,  après  avoir  fait  en- 
viron 3  lÏMies,  ils  s'étaient  arrêtés,  comme  je  leur  savais 
donné  l'ordre. 

Pour  arriver  k  Formiga ,  je  traversai  un  pays  montueni , 
coupé  de  bois  et  de  campot.  Les  sous-arbrisseaux ,  comme 
dans  le  canton  oùj'avais  voyagé  les  jours  précédents,  sont 
beaucoup  plus  communs  qu'aux  environs  de  S.  Joâo  d'EI 
Bel ,  et  l'on  voit,  en  plusieurs  endroits,  des  arbres  rabou- 
gris et  tortueux  qui  s'élèvent  çà  et  là  au  milieu  des  Gra- 
minées. Sur  un  de  ces  petits  taboleiroi  cobertoi ,  il  n'y 
avait  guère  d'autre  espèce  d'arbre  qu'un  Vochitia  ra- 
bougri ,  entièrement  couvert  de  longues  grappes  redres- 
sées de  grandes  fleurs  d'un  jaune  d'or,  autour  desquelles 
voltigeaient  une  foule  d'oiseaux-mouches.  Du  haut  de  plu- 
sieurs mornes  élevés ,  je  jouis  d'une  vue  imm«ise  ;  je  dé- 
couvris la  Serra  de  Piumhy  et  celle  da  Canastra ,  oà  je 
devais  bientôt  me  rendre. 

Arrivé  à  Formiga,  j'allai  présenter  au  commandant  de 
ce  village  ta  lettre  que  le  capitào  môr  de  Tamandui  m'a- 
vait remise  pour  loi.  et  où  il  lui  donnait  l'ordre  de  me 
procurer  un  pédestre  pour  m'accompagner  jusqu'à  Piumhy. 
Le  commandant  me  reçut  fort  bien  et  me  fit  des  reprodies 
d'être  descendu  à  l'aubei^e. 

Je  trouvai  réunis  dans  sa  maison  les  principaux  habi- 
tants de  Formiga ,  qui  étaient  des  marchands  et  apparte- 
naient tous  à  notre  race.  Suivant  l'usage  établi  dans  les 
bourgades  et  les  petites  villes ,  ils  portaient  une  veste  d'in- 
dienne, et,  par-dessus  cette  veste  que  capote  de  grosse 
étolTe  de  laine;  leurs  manières  étaient  à  peu  près  celles 


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DU  BIO  DE  S.  FRiNOSCO.  157 

de  nos  boui^eois  de  campagne.  On  parla  beaucoup  de  la 
France,  et  on  me  demanda  s'il  était  vrai  que  les  femmes 
y  eusseat  autant  de  liberté  qu'un  autre  Français  l'avait 
assuré ,  en  passant  par  ce  pays  quelque  temps  auparavant. 
Je  confirmai  les  récils  de  mon  compatriote,  et  les  détails 
que  je  donnai  parurent  tellement  étranges,  qu'on  des  as- 
tistants  s'écria,  en  mettant  ses  deux  mains  sur  «a  tète: 
Que  Dieu  noua  préserve  d'un  pareil  malheur  {Deoi  tto» 
fnre)!  Ces  bonnes  gens  ne  songeaient  pas  que  le  prison- 
nier  ne  croit  rien  devoir  an  ge61ier  qui  le  garde,  et  que  l'on 
est  plus  souvent  trompé  par  son  esclave  que  par  l'homme 
libre  auquel  on  «  accordé  sa  confiance. 

FomUga  {arraial  da  Formiga,  le  village  de  la  fourmi] 
est  situé  près  de  la  petite  rivière  qui  porte  son  nom  (1) , 
dans  une  large  vallée  bordée  de  collines  couvertes  de  pAtu- 
rages  et  de  bois.  Les  rues  de  ce  village  sont  mal  alignées, 
les  maisons  sont  écartées  les  unes  des  autres  ,  et  presque 
toutes  petites  et  mal  entretenues.  L'église  est  Mtie  à  l'ei- 
trémité  d'une  assez  grande  place  ,  sur  une  plate-forme  un 
peu  plus  élevée  que  le  reste  du  village;  elle  n'a  point  de 
I^afond,  elle  est  presque  nue  k  l'intérieur  et  répond  par- 
faitement à  l'état  misérable  des  maisons  (2). 

On  voit  à  Formiga  plusieurs  boutiques  et  quelques  ven- 
éas  assez  mal  garnies.  Une  enseigne  très-apparente,  sur- 
montée des  armes  du  Portugal,  indiquait  alors  la  maison 
où  se  vendaient  les  indulgences  de  la  Santa  Cruiada.  La 
boutique  la  mieux  fournie  me  parut  être  celle  de  l'apolhi- 

(1)  SoiviDt  la  carte  g^D^rale  d«  Spii  «t  Uartiut,  et  mitant  d'Each- 
vcge,  U  petite  rivière  de  Formiga  se  jette  tlana  le  Rio  Grande. 
(1)  D'tprte  Piiarro ,  Fotmigt  était  encore ,  ta  1832 ,  une  auccursale 


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1S8  TOTAGB  AUX  90DBCES 

Caire;  celui  qui  exerçait  cette  profession  était  encore  on 
prêtre,  qui  préparait  lui-même  ses  remèdes,  les  vendait 
et  ne  manquait  pas  de  dire  sa  messe  tous  les  jours. 

Malgré  l'indigence  qu'annonce  l'aspect  du  village  de 
Formiga,  il  paraît  qu'il  y  a  des  gens  asseï  riches  dans  ses 
environs  et  dans  le  village  même.  Situé  à  l'entrée  du  Serlào, 
Formiga  Tait  un  commerce  considérable  avec  cette  contrée. 
Les  marchands  entretiennent  des  relations  directes  avec 
Rio  de  Janeiro;  ils  envoient  dans  l'intérieur  du  Sertâo  le 
sel ,  le  fer  et  les  autres  marchandises  qu'ils  tirent  de  la  ca- 
pitale, et  ils  reçoivent  en  échange  des  cuirs,  des  peaux 
de  cerf,  du  coton  et  des  bestiaux.  Les  alentours  de  For- 
miga fournissent  eux-mêmes  beaucoup  de  coton;  mais  ce 
sont  les  porcs  qui ,  comme  je  l'ai  déjà  dit ,  forment  la  prin- 
cipale richesse  de  ce  canton.  On  en  élève  un  très-grand 
nombre  dans  les  moindres  fazendat;  les  marchands  les 
achètent  et  les  envoient  par  troupeaux  è  la  capitale  du 
Brésil. 

Comme  ce  pajs  est  fort  commerçant  et  qn'll  y  passe 
sans  cesse  des  caravanes  venant  de  Goyaz  ou  du  Sertâo , 
toutes  les  denrées  y  trouvent  un  débit  facile  et  ellee  y 
sont  très-chères.  Taudis  que,  du  cAté  de  Villa  Rica,  de 
Sabarà  et  dans  beaucoup  d'autres  endroits,  on  se  procure 
facilement  un  serviteur  libre  (cmuirada)  pour  un  oitaoa 
et  demi  par  mois  [11  fr.  25  e.},  ici  il  faut  donner  de  3  A 
6,000  reis  (18  fir.  75  à  37  fi*.  60  c.);  mais  je  croirais  que 
les  gages  élevés  que  l'on  exige  tiennent  bien  moins  en- 
core au  prix  des  denrées  qu'à  l'extrême  répugnance  des 
hommes  libres  pour  le  travail. 

Les  ouvriers  les  plus  nombreux  ,  à  Formiga ,  sont  les 
maréchaux  ferrants,  qui  en  même  temps  sont  serruriers  ; 


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DU  BIO  DE  S.  FRANCISCO.  159 

le  passage  contioDel  des  caravanes  rend  leur  état  fort  lu- 
cratif. 

Ce  qui  prouve  que  la  population  de  Formiga  augmente 
sensiblement,  c'est  que,  lors  de  mon  voyage,  on  était  oc- 
cupé à  y  construire  un  grand  nombre  de  maisons  (Ij  ;  ce 
village  contenait  alors  un  peu  plus  de  mille  individus,  dont 
enviroD  un  quart  d'hommes  de  notre  race;  et  cependant, 
vers  le  milieu  du  siècle  dernier,  il  n'existait  pas  encore. 
J'ai  connu  im  vieillard  centenaire  qui ,  le  premier,  vint 
s'établir  dans  cet  endroit,  il  y  a  environ  soixante-dix  ans 
{4819} ,  et  qui  y  jeta  les  fondements  d'une  chapelle.  Il  n'y 
a  point  de  mines  aux  alentours  de  Formiga,  et  c'est  prin- 
cipalement sa  position  favorable,  sur  une  route  fréquentée 
eti  l'enb^e  d'un  immense  désert,  qui  y  attire  des  habi- 
tants, n  paraît  aussi  que  souvent  des  criminels ,  poursuivis 
par  la  justice ,  sont  venus  se  réfugier  dans  ce  lieu  reculé  et 
ont  contribué  k  en  augmenter  la  population  ;  ses  habitants 
ne  jonissent  point  d'une  bonne  réputation,  et,  pendant 
que  j'étais  au  milieu  d'eux  ,  la  Jalousie  fit  commettre  un 
meurtre  ;  l'assassin  s'enfuit  avec  sa  maîtresse,  qui  n'était 
qu'une  femme  publique ,  et  je  ne  sache  pas  qu'aucune  me- 
sure fut  prise  pour  s'emparer  du  coupable. 

Je  n'eus  point  à  me  louer  de  la  politesse  des  habitants  de 
Formiga.  J'occupais  une  chambre  extrêmement  petite,  et 
j'étais  continuellement  entouré  de  curieux  ,  qui  me  pri- 
vaient de  ia  lumière  du  jour  et  m'accablaient  de  questions 
indiscrètes.  De  tels  rassemblements  ne  prouvent  pas  non 
{dus  que  ces  gens-là  fussent  très-occupés,  et  l'oisiveté  est 


(1)  Ceci  leadrait  à  eipliqnerceqnedildi  Cnnlii  Hatlos,  qne,  en  1823, 
il  Tit  k  FormigR  des  miisons  él/giates  (Hin.,  I ,  «). 


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ISO  VOYAGE  AUX  SOURCES 

effectivement  ub  rice  que  d'Ëschwege  reproche  (1)  atu 
hommes  qui ,  dans  ce  pays ,  tiennent  le  premier  rang. 

Ce  vice  en  amène  ordinairement  d'autres  avec  lai.  Dans 
tous  les  villages  de  la  province  des  Mines ,  dans  ceux  prin- 
cipalement où  passent  des  routes  fréquentées,  on  troave  un 
grand  nombre  de  femmes  publiques;  mais  nulle  part  je 
n'en  avais  vu  autant  qu'à  Formiga.  Une  demi-douzaine 
d'entre  elles  demeuraient  dans  l'auberge  où  j'étais  des- 
cendu, et  presque  toutes  étaient  des  blanches.  Ces  femmes 
ne  faisaient  de  propositions  à  personne;  mais  elles  allaient 
et  venaient  dans  la  varanda  de  l'auberge ,  étalant  aux  yeux 
des  muletiers  des  charmes  flétris  par  le  libertinage  (2). 

Le  lendemain  de  mon  arrivée  è  Formiga ,  le  comman- 
dant du  village  me  procura  pour  tocador  un  nègre  libre, 
avec  lequel  je  fis  marché  à  raison  de  5,600  reis  (23  fr.  50). 
J'attendais  cet  homme  le  surlendemain  au  matin;  mais 
comme ,  à  neuf  heures ,  il  n'avait  point  encore  paru ,  je  me 
rendis  à  la  maison  où  il  demeurait,  et  j'appris  qu'il  s'en 
était  allé  pendant  la  nuit.  Les  commandants  de  village  eser- 
cent  uo  pouvoir  despotique  sur  leurs  subordonnés,  et  ceux- 
ci  sont  toujours  dans  la  défiance ,  lors  même  que  le  com- 
mandant traite. avec  eux  sans  employer  l'autorité.  Je  fis 
part  à  celui  de  Formiga  de  ce  qui  était  arrivé  ;  il  me  promit 
de  me  procurer  un  autre  individu,  et,  malgré  mes  prières, 
il  jura  que  le  fugitif  serait  mis  en  prison.  Le  jour  de  mon 


(1)  Broi.  die  Neue  Wetl,  I.  3î. 

(3)  D'Eschwege  dit  qu'il  j  a ,  ï  Formig» ,  un  Dombre  de  filles  de  joie 
plus  coa^d^rable  que  dans  les  quartiers  drs  porta  de  mer  oii  rèfue  le 
plus  de  débordemeat.  Avec  raison,  U  utribae  cette  plaie  au  défaut  d'in- 
BlructMn  morale  et  ani  auDraii  eumplea  qne  les  eobnts  rafoivait  dei 
escUTea  dOs  l'ige  le  plus  tendre  (f.  r.\. 


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DU  RIO  DE  S.  FRAItaSCO.  Ifll 

départ,  le  commandant  m'envoya  encore  un  n^re  libre; 
quand  j'eus  Tait  mes  arrangements  avec  cet  homme,  il  me 
demanda  la  permission  d'aller  chercher  son  linge;  il  me 
pria  de  lui  avancer  quelques  sous,  et  je  lui  accordai  tout 
ce  qu'il  désirait.  Cependant  une  heure,  deui  heures  s'écou- 
lèrent, et,  comme  le  nègre  n'était  point  revenu,  je  me  dé- 
cidai à  faire  charger  mes  mulets  et  à  partir  sans  avoir  per- 
sonne. J'allai  auparavant  rendre  compte  bu  commandant 
de  ce  qui  s'était  passé,  et  il  m'assura  qu'il  était  impossible 
qu'on  l'eût  ainsi  trompé  deui  fois;  il  ajouta  que  le  nègre 
m'attendait  certainement  sur  le  chemin  ;  je  partis  et  je  ne 
rencontrai  personne. 

Entre  Formlga  et  Ponte  Àîta  (pont  élevé) ,  où  je  passai 
la  nuit ,  c'est-à-dire  dans  un  espace  de  4  lieues  portugaises, 
je  ne  vis  qu'une  chéUve  maisonnette ,  qui  mérite  A  peine 
qu'on  en  fasse  mention  ,  et  la  fazenda  de  Corrego  Fundo 
{ruisseau  profond],  qui  est  bfltie  à  moitié  chemin  sur  le 
bord  d'un  ruisseau.  Les  pâturages  que  je  traversai  sont 
excellents  et  l'on  pourrait  y  élever  un  grand  nombre  de 
bétes  k  cornes;  mais  i  peine  ea  aperçus-je  une  demi- 
douzaine  dans  toute  la  journée  (1).  De  difTérents  points,  je 
découvris  une  immense  étendue  de  pays;  entre  autres,  la 
Serra  de  Piumhy  qui  est  à  quelques  lieues  de  Ponte  Alta  ; 
mais  partout  ce  n'était  que  des  déserts. 

Dans  un  espace  de  3  lieues,  jusqu'à  Corrego  Fundo,  le 
terrain  ,  qui  est  montueux ,  présente  tour  à  tour  des  bois , 
de  simples  pâturages  et  des  eampos  pars^oés  d' arbres  ra- 


il) yojn  ce  qae  je  dis ,  an  peu  plos  loin ,  de  l'habitade  qn'ont  les 
twstisui  de  se  CAcber  an  foud  des  bois  pcadsot  cette  &aisoD,  afin  d'ériter 


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m  VOYAGE  AUX  SOUICES 

boogris  ;  diTersité  qni  produit  daos  le  paysage  nn  effH  très- 
^n^able. 

Ces  espaces  oà  croissent  ci  et  lA  des  arbres  raboogris  et 
ceux  de  même  nature  où  j'avais  pasïé  les  jours  précédents 
aoDOoçaient  le  voisinage  du  Sertâo  ou  désert.  Au  deli  de 
Corrego  Fundo,  je  ne  revis  pins,  pendant  tout  le  reste  de 
la  journée,  qu'une  v^^tion  analogue  k  celle  des  parties 
du  Désert  oriental  que  j'avais  parcourues  en  ISl  7  (i],  c'est- 
à-dire  des  Graminées  et  un  petit  nombre  d'herbes  parmi 
lesquelles  s'élèvent  des  arbres  tortueux,  rabougris,  hauts 
de  8  à  10  pieds,  dont  l'écorce  est  souvent  subéreuse,  dont 
les  feuilles  sont  dures  et  cassantes.  La  forme  de  ces  arbres 
rappelle  si  bien  celle  de  nos  pommiers,  que  le  bon  Laruotte, 
qui  était  loin  d'être  un  profond  observateur ,  fut  lui-même 
frappé  de  la  ressemblance.  Je  remarquai  cependant  que  les 
arbres  étaient  ici  plus  rapprochés  que  dans  la  partie  du 
Sertâo  ou  Désert  située  à  l'ouest  de  Minas  Novas,  et  que, 
par  conséquent ,  l'ensemble  de  la  végétation  ne  représen- 
tait pas  aussi  bien  nos  vergers  plantés  dans  des  prairies. 
D'ailleurs,  malgré  l'énorme  distance  qu'il  y  a  des  environs 
de  Formiga  à  Bom  Flm  et  à  Contendas  (4  à  $  degrés),  mal- 
gré la  différence  d'élévation  que  doivent  présenter  les  corn- 
mencementsdu  S.  Francisco  et  une  contrée  où  il  arrive  après 
un  si  long  cours,  je  trouvai ,  dans  les  détails  de  la  végétation, 
une  ressemblance  notable  entre  des  pays  si  éloignés,  et  je 
recueillis  près  de  Ponte  Alta  peu  de  plantes  que  je  n'eusse 
pas  déjà  récoltées  dans  mon  |vemier  voyage.  Auprès  de 
Chaves,  fasenda  du  canton  de  Rio  Grande,  et  auprès  du 


(1)  TojM  moD  WofOqt  doiu  Ut  proHtKM  d«  IMo  rfe  JmiMtQ.,  etc., 
II,  301. 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  103 

Rio  das  Mortes  Pequeno,  farais  vu  qnelqnes  pentes  où  des 
arbres  rabougris  sont  épars  çà  et  là  au  milieu  des  herbes  ; 
mais  ils  appartiennent  tout  au  plus  à  trois  ou  quatre  espè- 
ces, et  ce  sont  principalement  des  Guttifères  :  ici ,  an  con- 
traire, je  retrouvai  la  même  variété  que  sur  les  taboleirot 
coherlos  de  la  partie  du  Sertâo  comprise  entre  Minas  No- 
VBS  et  le  S.  Francisco  (1).  Les  arbres  les  plus  communs  font 
partie  de  la  famille  des  Légumineuses  et  de  celle  des  Gutti- 
fires  ;  je  remarquai  aussi  beaucoup  de  Qwdea,  une  Mal- 
pighiée  à  grandes  feuilles  et  à  longs  épis  de  fleurs,  que  j'a- 
vais rapportée  de  mon  premier  voyage,  des  Bignonées  en 
arbre  dont  les  feuilles  sont  composées  de  cinq  folioles  [fyi  - 
des  Sertanejo»  ou  habitants  da  Désert). 

Lors  de  mon  passage  (1"  avril],  la  verdure  de  ces  eampot 
était  d'une  admirable  fraîcheur  ;  tous  les  arbres  portaient 
des  feuilles,  mais  peut-être  y  en  avait-il  moins  en  fleur  que 
je  n'en  avais  vu  depuis  la  fin  de  juillet  jusqu'à  la  fin  de  sep- 
tembre 18i7,  dans  la  partie  orientale  du  Sertâo.  Alors,  plu- 
sieurs espèces  qui  fleurissent  avant  d'avoir  des  feuilles,  telles 
que  Vipé,  le  Caraiba,  le  Claraiba,  étaient  couvertes  de 
fleurs  ;  dans  le  voisinage  de  Ponte  Alta,  au  contraire,  je  ne 
vis  guère  sur  les  arbres  que  des  fruits  qui  n'avaient  point 
encore  atteint  leur  maturité.  Il  paraît  donc  que  la  véritable 
époque  de  la  fleuraison  des  plantes  du  Sertâo  est  le  com- 
mencement de  la  saison  des  eaux. 

Non-seulement  je  retrouvai ,  entre  Corrego  Fundo  et 
Ponte  Alta,  la  végétation  du  Sertâo ,  mais  encore  je  revis 
un  oiseau  qui  appartient  aux  taboleirot  cobertos  des  euvi- 


(I)  VojM  mon  Voffone  dant  Iti  proeincet  de  Rio  de  Janeiro  et  de 
UinaiGeratt.yol.U. 


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164  VOYAGE  AUX  SOURCES 

rons  de  Bom  Fim,  Cootendas,  etc.  (1),  le  moineau  ou  tao- 
gara  à  plumage  rouge ,  appelé  dans  le  pays  cordeau  (car- 
dinal). 

A  notre  arrivée  à  Ponte  Alla,  José  Marianno  alla  deman- 
der l'hospitalité  h  la  maîtresse  de  la  maison ,  et  la  pria  de 
nous  permettre  de  placer  nos  effets  dans  le  moulin  à  sucre 
qui  dépendait  de  son  habitation.  Sa  demande  Tut  rejetée, 
et  on  nous  relégua  dans  une  petite  chambre  que  l'on  ve- 
nait de  construire,  où  nous  avions  à  peine  la  place  de  nous 
retourner  et  où  les  chiques  (bichos  dopé,  pulex  pénétrons) 
nous  dévoraient.  Je  fus  cependant  forcé  par  la  pluie  de 
rester  deux  jours  entiers  à  Ponte  Alta,  et  je  ne  partis  que  le 
quatrième.  Dans  cet  intervalle  parut  le  maître  de  la  mai- 
son ;  je  lui  Bs  sur  mon  logement  des  reproches  un  peu 
durs  ;  mais  il  me  répondit  avec  tant  de  bonhomie  et  me  fit 
des  offres  si  honnêtes  que  ma  mauvaise  humeur  se  dissipa 
bieutAt. 

J'ai  dit  ailleurs  que  les  habitants  de  l'intérieur  du  Brésil, 
privés  de  médecins,  employaient  pour  la  guérison  de  leurs 
maladies  diverses  plantes  qui  croissent  autour  de  leur  de- 
meure, et  j'en  ai  fait  connaître  un  assez  grand  nombre  dans 
mon  livre  intitulé,  PlanUs  usuelles  des  Brésiliens  (2).  Par- 
tout où  je  m'arrêtais,  j'avais  soin  de  prendre  des  renseigne- 
ments sur  les  espèces  médicinales  le  plus  généralement  en 
usage.  Dans  leâ  environs  de  Ponte  Alta,  il  n'y  en  a  aucune 
que  l'on  vante  autant  que  celle  qui  est  appelée  calunga  par 
les  colons.  Ils  la  considèrent  comme  un  puissant  spécifique 
contre  les  fièvres  intermittentes,  les  indigestions,  les  coli- 

(1)  Tojei  moD  Vo^OQt  dam  le*  proviTtea  de  Rio  de  Janeiro,  etc., 
vpl.  II. 

(2)  A  Paris,  cbM  Grimbert  et  Dorez. 


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DU  i[o  DE  S.  PBANCisco.  ina 

qnes,  et  en  font  aussi  un  grand  usage  dans  la  médecine  vé- 
^rinaire.  C'est  la  racine  que  l'on  emploie  ;  elle  est  grosse 
et  fort  longue ,  sa  décoction  est  amëre  et  d'un  goût  très- 
désagréable.  Plusieurs  personnes  de  ce  canton  ont  vendu 
leur  plante  èi  des  pharmaciens  de  Tilla  Rica  et  de  Rio  de 
Janeiro,  et  l'on  prétend  ici ,  mais  h  tort ,  qu'elle  est  iden- 
tique avec  la  e(domba  de  l'Inde  (i).  Quoi  qu'il  en  soit,  la 
ealunga  du  canton  de  Ponte  Alta  est  bien  certainement 
identique  avec  la  plante  que  l'on  connaît  à  Tijuco  sous  le 
même  nom.  C'est  à  l'espèce  décrite  par  moi  sous  le  nom  de 
Simaba  ferruginea  (S)  que  M.  de  Martius  (3)  rapporte  la 
caltmga  des  Brésiliens. 

Le  pays  que  je  parcourus ,  après  avoir  quitté  Ponte  Alta , 
offre  une  alternative  de  bois,  de  catnpos  où  l'on  voit  seule- 
ment des  Graminées  et  quelques  autres  herbes,  d'autres 
campos,  où  des  arbres  rabougris  croissent  çà  et  là  au  milieu 
des  Graminées ,  et  d'autres  enfin  qui ,  intermédiaires  entre 
les  premiers,  ne  présentent  que  des  arbrisseaux  et  des  sous- 
arbrisseaux  au  milieu  des  herbes.  Je  ne  traversai  aucun  des 
bois  que  j'aperçus,  mais  je  reconnus  que  tous  n'étaieut 
pas  de  simples  bouquets  isolés  [capÔes];  il  en  est  même. 


(1)  La  calomba ,  appelée  aussi  eolunOo ,  est  le  Coceulm  palmatut , 
BC.i,Meniipermumpalmalum,  Lam.).  II  paratl  que  celte  plante  est  ori- 
ginaire de  Mozambique,  d'où  elle  a  élé  traasporti'e  h  l'tle  de  France  et 
dans  l'Inde.  C'est  le  radix  eolwnbo  des  pharmacies  qui ,  contenant  nii 
principe  amer  et  muciligiueai,  agit  avec  puissance  et  sans  inconvi^nient 
sar  les  organes  digestifs,  et  qu'on  emploie  contre  la  faiblesse  d'estomac, 
la  djssenlerie,  les  maladies  bilieuses  et  le  rboléra.  La  calomba  t  fait, 
pour  les  Portugais ,  l'objet  d'ua  commerce  fort  Incralif  (Kdnie,  Phamt. 
lioarCTiftunde,  11,  26). 

(2)  Flora  Bratitim  mûriiiionatii,  I,  p.  73,  tab.  x[v. 
^:t)  Ht'»*.  U,790. 


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IM  VOYAGE  AUX  SODHCES 

m'assurs-t-on,  qui  se  rattachent  à  la  forêt  de  Tamandai. 

Presque  toute  la  journée,  j'eus  devant  moi  là  Sara  de 
Piumhy,  qui  est  perpendiculaire  au  chemin  que  je  suivais. 
£lle  ne  s'élève  pas  à  une  grande  hauteur  ;  elle  présente  peu 
d'irrégularités  ,  et  son  sommet ,  parfaitement  égal ,  offre 
l'image  d'une  longue  plate-forme. 

  2  lieues  et  demie  de  Ponte  Alta  ,  je  passai  devant  la 
fasenda  de  Capitinga  (1) ,  bien  connue  dans  le  pays  pour 
son  étendue  et  la  bonté  des  rapaduras  (â)  que  l'on  y  fa- 
brique. A.  l'exception  d'une  petite  chaumière  plus  rappro- 
chée du  lieu  où  je  Bs  halte,  ce  fut  la  seule  habilatioa  que 
je  vis  dans  un  espace  de  â  lieues  et  demie  portugaises. 

Le  bon  eapitào  môr  de  Tamanduâ  m'avait  donné  une 
*  lettre  de  recommandation  pour  le  commandant  de  Piumhy. 
Sachant  que  ce  dernier  devait  se  trouver  à  Capitinga,  je  le 
fis  demander.  C'était  un  campagnard  qui  avait  un  certain 
air  de  bonté  ;  j'en  fus  pourtant  assez  mal  accueilli ,  mais  il 
me  donna  un  billet  pour  celui  qui  le  remplaçait  à  Piumby. 

Ce  jour-lâ  était  le  dimauche  des  Rameaux ,  et  l'on  avait 
dit  la  messe  k  Capitinga.  Je  rencontrai  beaucoup  de  gens 
qui  en  revenaient  et  qui  portaient  de  grandes  feuilles  de 
palmier  bénites.  Ces  véritables  palmes,  en  usage  dans  tout 
ce  pays ,  rappellent  bien  mieux  l'origine  de  la  FËte  que  les 
mesquines  branches  de  buis  ou  de  laurier  que  l'on  distribue 
dans  nos  églises  (3). 

(1)  Des  mots  gnaraniscapvi,  herbe,  et pUiunffa.qai  lent  Dunvaû, 
berbe  de  maoTeise  odeur. 

(2)  Les  rapattMrai  soal  des  cirrés  de  sucre  cuit  iTec  sod  sirop ,  qoi 
penreot  avoir  S  i  6  pouces  et  sont  fert  «piis  (tojbi  num  Voyagt  ikau 
kl  provineet  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  vol.  1 ,  136. 

l3)  Les  Pilmiers  sont  remplacés  par  le  buis  dsiiu  le  nord  de  U  France, 
el  par  te  laurier  dans  le  midi. 


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M  UO  DE  S.  PUNCISCO.  lOT 

Je  08  halte  à  5.  Migvel  e  Alnuu  (S.  Michel  et  les  Ames 
du  porgatoire) ,  (aaenda  très-considérable,  qui  possède  une 
sucrerie,  beauconp  de  dépendances,  et  qui,  sans  approcher 
des  habitations  des  comarcas  de  Sabaré,  de  Villa  Rica,  du 
Serro  do  FVio  (1),  a  cependant  plus  d'apparence  que  celles 
où  je  m'étais  arrêté  jusqu'alors. 

On  m'avait  parlé,  dans  plusieurs  endroits,  d'un  indigo 
supCHTbe  que  I'od  faisait  à  là  fasenda  de  S.  Miguel.  Je  vis 
des  étoffes  de  laine  teintes  avec  cette  couleur  et  je  les  trou- 
vai du  pins  beau  bleu  ronce.  M'étaot  fait  montrer  le  vé- 
gétal d'où  cet  indigo  avait  été  extrait,  je  reconnus  un  So- 
lartum  [Sol.  indigoferum ,  Âug.  S.  Hil.  )  à  tige  frutescente, 
&  feuilles  lisses,  à  fleurs  blaochea,  extrêmement  conunan 
dans  les  bois  vierges,  et  qui  se  trouve  surtout  près  de  Rio 
de  Janeiro  (2).  Ou  me  dit  qu'on  en  tirait  le  principe  colo- 
rant de  )a  même  façon  qu'on  l'extrait  des  Indigofères ,  et 
qu'on  le  fixait  à  l'aide  de  l'uriae.  H  est  véritablement  ex- 
Iraordïnaire  que  la  pn^riété  d'une  espèce  aussi  répandue 
soit  restée  ignorée  partout  ailleurs  que  dans  un  coin  re- 
culé de  la  province  de  Minas.  Il  serait  k  désirer  que  les 
habitants  des  parties  très^loignées  de  l'empire  du  Brésil  se 

(1)  Tojei  mon  rcj/ate  iant  Itt  provincti  ds  Mode  Janttro ,  etc., 
Tol  lelU. 

(3)  M.  Danal  ■  bien  vouln  me  permettre  de  joindre  ici  le  description 
qu'il  a  faite  de  ulte  espèce  pour  le  ProdrOffiW  de  M.  de  Cendolle  :  <•  So- 

•  UNDN  iHDicorEBUH  (Auc.  PB  5.  HiL.  In  Her.,  et  de  Lens,  Dict.  de  Mal. 

•  méd.,  VI ,  p.  tl6].  Himis  gUbris,  leretibns,  bine  iode  angnlatis ,  sdb- 

■  dicbotoDiisi  ToUia  breviter  petioUtis,  feminis  altéra  minore,  laDceo- 

■  Utis,  ntriDqaeacaminatis,  supra  glabris,  nitidiuscalb,  sobtus  palli- 

■  diorilKia;  racemis  gracilibus,  cjmosis,  anboppositifoliis,  io  sammi- 
•■  tatibna  ramonim  gape  approiimstis ,  coafertis.  —  S.  caratenm  Vn,- 

•  wio ,  FI.  FI,  I,  ex,  et  SïrcoTN.  ia  Var..  Htrb.  Brtu.  —  Ewl.  et 

•  llMT.,FI.Brat.Sot.^  p,  !1,  n*  17, 1. 1,  f.  .IS-W,  <• 


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IM  VOYAGK  AUX  SOURCES 

missent  à  cultiv»-  les  Indigorères  doot  ils  pourraient  expor- 
ter les  produits  avec  utilité,  et  en  raème  temps  ils  feraient 
bien  de  rechercher,  par  des  expériences  comparatives,  si 
le  Solanum  indigoftrum,  qui,  dît-on,  donne  une  plus  belle 
fécule  que  les  Indigofères  eux-mimes,  n'aurait  pas  encore 
l'avantage  de  moins  fatiguer  le  sol,  de  fournir  des  résul- 
tats plus  considérables  et  d'être  enfin  d'une  culture  plus 
facile. 

Après  avoir  quitté  la  fazenda  de  S.  Miguel  e  Aimas,  je 
traversai,  pendant  environ  1  lieue,  des  campos  couverts 
d'arbres  rabougris,  et  j'arrivai  au  pied  de  la  Serra  de 
Piumhy,  que  j'avais  déjà  vue  dans  le  lointain,  avant  même 
d'arriver  à  Ponte  Alta.  Elle  est,  en  grande  partie,  couverte 
de  pâturages  au  milieu  desquels  des  rochers  nus  et  noi- 
râtres se  montrent  par  intervalles;  dans  tous  les  enfonce- 
ments on  voit  des  bouquets  de  bois.  En  suivant  un  chemin 
souvent  pierreux  et  difficile ,  je  montai  la  Serra  très-obli- 
quement ,  et  enfin  je  parvins  À  son  sommet ,  où  je  jouis 
d'une  des  vues  les  plus  étendues  que  j'eusse  jamais  admi- 
rées. Le  pays  que  je  venais  de  parcourir  ne  présentait,  à  la 
vérité,  qu'une  immense  suite  de  mornes  couverts  presque 
tous  de  pâturages  et  où  rien  n'arrêtait  mes  regards;  mais 
celui  où  j'allais  descendre  m'offrait  quelques  points  où  mes 
yeux  pouvaient  s'arrêter  avec  plaisir.  Au  pied  de  la  mon- 
tagne ,  j'apercevais  une  fazenda  entre  des  bois  ;  plus  loin , 
sur  la  droite,  je  découvrais,  i  l'entrée  d'une  plaine,  le 
village  de  Piumhy  ;  enfin ,  plus  sur  la  droite  encore  et 
beaucoup  plus  loin ,  je  voyais  à  l'horizon  la  Serra  da  Ca- 
nastra  (  la  montagne  de  la  malle] ,  qui  mérite  assez  bien  ce 
nom,  puisqu'elle  est'allongée,  qu'elle  parait  égale  et  un 
peu  bombée  à  son  sommet,  et  qu'elle  est  coupée  verticale- 


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DU  KIO  DE  S.  rRANClSCO.  169 

ment  À  ses  deux  extrémités.  J'avais  fondé  de  grandes  espé- 
rances pour  la  botanique  sur  la  Serra  de  Piumhy;  elles 
ftirent  entièrement  trompées;  je  n'y  trouvai  aucune  plante 
que  je  n'eusse  déjà;  j'y  vis  extrêmement  peu  de  fleurs,  et 
je  n'y  observai  même  qu'une  seule  espèce  qui  appartint  à 
des  pays  de  montagnes. 

Depuis  le  bas  de  la  Serra  jusqu'à  Piumhy,  il  y  a  environ 
trois  quarts  de  Heue/  Avant  d'arriver  à  ce  joli  village,  je 
traversai  à  gué  la  petite  rivière  des  Araras  (aras],  et  au 
pied  du  village  le  ruisseau  de  Tabuôes  (grosses  planches). 

En  arrivant  à  Piumhy  (!},  je  me  présentai  chez  ïalfere» 
(sous-lieutenant  j ,  qui  remplaçait  le  commandant ,  et  je  le 
priai  de  me  procurer  un  logement,  car  il  passe  trop  peu  de 
monde  dans  ce  village  pour  qu'on  ait  songé  à  y  bàlir  une 
aubei^e.  Valferes  me  conduisît  à  une  maison  où  j'étais 
extrêmement  bien,  et  promit  de  f^ire  tout  ce  qu'il  pourrait 
pour  me  procurer  un  toeador. 

Le  nom  de  Piumhy  est  commun  au  village,  h  une  rivière 
qui  en  est  éloignée  de  1  ou  2  lieues  et  à  la  Serra  dont  j'ai 
déjà  parlé  plus  haut.  On  m'assura,  dans  le  pays,  que  c'était 
celui  d'une  petite  mouche  fort  incommode,  très-commune 
sur  le  bord  de  la  rivière  (â). 

I.e  petit  village  de  Piumhy  doit  son  origine  à  un  rassem- 
blement que  l'on  avait  formé  pour  détruire  une  réunion  de 
nègres  fugitifs  (quilombo),  qui  s'étaient  retirés  dans  la 


(1)  Cest  h  ton  que  d'Eschwege  écrîl  Finhoi ,  et  Pohl  Piuliy.  PÎMrro 
ditd'sbordqoe  le  village  de  FormigacEtVu(<lo>gn<!  de  relui  de  PiauAv 
(  Hem.  hUt.,  vol.  VUI ,  part,  seganda ,  19G)  ;  nuiis ,  quand  il  eiilre  dans 
quelques  détails,  il  l'crit,  comme  moi,  Piumhy  (I.  c,  1981. 

ci)  Piumhv  iH' viendra ii-il  pnsplaiAtdu  mol  guarinî  .lib'Vi,  hiron- 
delle ! 


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ITO  VOVAGE  AUX  SOURCES 

Serra  da  Canaslra ,  et  qui  ioijuiétaieiit  le  petit  Dombre  de 
cultivateurs  établis  daos  le  voisinage.  Après  la  destruction 
daquilombo,  le  rassemblement  continua  àsubuster;  on 
bâtit  une  chapelle  à  Piumhy;  les  colons  dispersés  s'en  rap- 
prochèrent, et  peu  A  peu  se  forma  le  village.  On  trouva  de 
l'or  dans  les  environs  et  l'on  travailla  à  l' extraire  ;  mais 
bientât  on  reconnut  que  l'on  n'était  point  dédommagé  de 
ses  frais' par  le  produit  ;  ou  renonça  entièrement  an  travail 
des  mines,  elles  habitants  de  Piumhy  ne  s'occupent  plus 
aujourd'hui  que  de  l'agriculture.  Ils  passent  I«ir  vie  dans 
leurs  fatendas  ou  lears  iitiot  et  ne  viennent  au  village  que 
le  dimanche,  aussi  trouvai-je  la  plupart  de  leurs  maisons 
ferroéçs. 

C'est  du  termo  de  Tamanduà  que  déprad  Piumby.  Ce 
village  est  le  cbef-lieu  d'une  paroisse  qui  comprend  quatre 
mille  âmes  [1},  dans  une  étendue  de  23  lieues  portugaises 
de  longueur  sur  i4  de  large ,  c'est-à-dire  à  peu  près  treize 
individus  par  lieue  carrée.  L'église  paroissiale,  dédiée  à 
Notre-Dame  de  la  délivrance  (Nossa  Senhora  do  lÀvra- 
merUo)  (2),  n'a  point  de  succursale  (1819);  on  compte  seu- 
lement dans  son  ressort  quatre  diapelles  particulières 
[eremidas) ,  dont  les  propriétaires  ont  coutume  de  faire 
venir  un  prêtre  pour  leur  dire  la  messe  les  jours  de  grande 
fête  (5). 

(1)  Je  tiens  ce  chiffre  da  caré  de  Piomby ,  c'esl-k-diiti  de  U  personne 
qui,  par  U  aatore  de  an  deroirs.  était  le  plus  en  état  de  ccnoaltre  11 
vérité.  PiuTTO  faÎMit  monter,  ea  1B2!,  la  population  de  cetle  paroisae 
à  3,620  personnes  sealement.  • 

(2)  Piz.,  Mem.,  VID,  pan.  seganda,  198. 

(3)  C'est  encore  do  coré  de  Piomhi  que  je  tiens  ce  détail.  Piiarro  dit 
|I.  e.  l0B)qae  la  paroisse  de  Piumh}  a  une  succursale  {eapella  cunuta), 
•-elle  de  S.  Franrùro,  âlutt  aui  soarccs  de  la  rivière  du  même  nom  : 


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DO  RIO  DE  S.  FUNOSCO.  171 

Piumhy  est  sitaé  presque  à  l'entrée  d'une  plaine  ondulée 
couverte  de  pâturages  ,  au  milieu  desquels  s'élèvent  quel- 
ques bouquets  de  bois.  Quoiqu'A  une  demi-lieue  de  la 
Serra  qui  porte  son  nom,  ce  village,  vu  des  coteaux  voisins, 
semble  être  adossé  à  la  montagne,  et  l'on  croirait  que  les 
bois  qui  l'en  séparent  appartiennent  encore  à  cette  der- 
nière. Des  collines  peu  élevées  et  arrondies  bordent  la 
plaine  où  le  village  est  bâti,  et,  du  cAté  de  l'occident,  on 
découvre  dans  le  lointain  la  Serra  da  Canastra. 

Quoique  Piumhy  soit,  comme  je  l'ai  dit,  le  chef-lieu 
d'une  paroisse,  on  n'y  compte  pas  plus  d'une  soixantaine 
de  maisons,  dont  trente  environ  sont  couvertes  en  tuiles. 
Elles  sont  disposées  de  manière  â  former  une  sorte  d'Y  très- 
imparfait.  Les  mes  qui  s'étendent  du  cAté  de  la  Serra  vont 
en  pente  et  n'ont  aucune  régularité;  mais  celle  qui  ter- 
mine le  village  du  câté  de  la  plaine  occupe  une  plate-forme 
parfaitement  égale  ;  elle  est  extrêmement  large,  régulière 
et  bordée  de  maisons  assez  jolies.  L'église  s'élève  A  l'entrée 
de  cette  rue  h  une  égale  distance  des  deux  rangs  de  mai- 
sons; elle  est  neuve  et  bien  bâtie. 

De  cette  même  me  on  découvre  tout  â  la  fois  la  plaine 
et  les  montagnes,  et  l'ensemble  de  cette  vue  a  quelque 
chose  de  riant  et  de  majestueux ,  qui  empmnie  un  charme 
de  plus  du  contraste  que  produit  le  village  avec  la  profonde 
solitude  de  tous  les  alentours.  Le  lendemain  de  mon  arri- 
vée à  Piumhy,  je  sortis  aussitât  après  m'ètre  levé  ,  pour 
contempler  ce  paysage  ;  le  ciel  était  de  l'azur  le  plus  beau  ; 
ce  calme  délicieux  que  l'on  ne  counatt  point  en  Ëurq»  re- 
niais, comme  le  Uttc  de  cet  aaleur  porte  la  date  de  1822,  il  a'est  pas 
absolameat  impossible  que  ta  sacciir»ale  qu'il  iudiqae  ait  éli  créée  de- 
puis mon  passage  daus  le  pajs. 


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I7S  VOYAGE  iUX  SOURCES 

gnait  dana  toute  la  nature  ;  j'éprouvai  encore  un  instant 
d'entfiousiasnie. 

Il  n'y  a,  k  Pinmhy,  que  deux  boutiques  fort  mal  garnies 
et  quelques  vendas  qui  ne  le  sont  pas  mieut .  Les  habilaols, 
comme  je  l'ai  dit,  sont  à  peu  près  tous  des  agriculteurs. 
Ils  mettent  à  profit  les  terres  des  bois  voisins  (1],  qui  sont 
propres  à  tous  les  genres  de  culture,  et  ils  s'adonnent 
principalement  à  celle  des  cotonniers  ,  qui  réussissent  fort 
bien  dans  ce  canton.  A  en  juger  par  les  apparences ,  on 
croirait  aussi  que  les  pâturages  sont  très-boos  ;  mais  on  as- 
sure que,  vers  les  mois  de  juin  et  de  juillet,  époquedela 
plus  grande  sécheresse ,  il  y  meurt  un  très-grand  nombre 
de  bestiaux ,  ce  que  les  uns  attribuent  &  la  dureté  de 
l'herbe,  les  autres  i  la  mauvaise  qualité  de  certaines 
plantes. 

Pendant  mon  séjour  à  Piumhy,  je  reçus  la  visite  du  curé 
du  village.  C'était  un  homme  encore  jeune,  poli,  et  bien 
élevé  ,  décoré  de  l'ordre  du  Christ ,  comme  l'étaient  alors 
tous  les  curés  de  la  province  des  Mines.  Je  lui  dois  les  ren- 
seignements que  j'ai  donnés  plus  haut  sur  l'histoire  de 
Piumhy,  l'étendue  et  la  population  de  cette  paroisse  {3). 

Le  commandant  temporaire  du  village,  qui,  comme  on 
l'a  vu,  m'avHît  promis,  lors  de  mon  arrivée,  de  faire  son 
possible  pour  me  procurer  un  tocador,  m'amena  un  pedei- 
tre  [3]  le  lendemain  matin,  et  me  dit  que,  n'ayant  pu  trou- 
ver personne  qui  voulilt  me  suivre  volontairement ,  il  avait 

(1)  Comme  je  l'ai  sonveut  rëpété ,  les  Brésiliens  ne  cnltiTcot  qae  les 
terrtias  originaiTement  bois^  dont  ito  ool  eonpé  et  brûlé  les  arbres. 
-  (2)  Voyez  les  notes  qui  précèdent. 

(3)  Les  pedetlrei  formeal  uue  milice  inférieure  composée  d'hommes 
de  couleur  (  vojei  mes  relalioni  précédentes  ', 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DU  RIO  DE  S.  FlUNaSGO.  iT3 

été  obligé  d'en  donoer  l'ordre  à  l'homme  qu'il  me  présen- 
tait ;  il  ajouta  que  cet  homme  m'accompagnerait  jusqu'au 
districtvoisîn,etquelà  il  serait  remplacé  par  un  autre  jw- 
destre.  <i  Personne,  me  dit  le  commandant,  ne  veut  ici  ga- 
gner de  l'argent,  pour  peu  qu'il  soit  nécessaire  de  travailler 
d'une  manière  suivie.  Les  fazendeiros  ,  qui  ont  tous  une 
grande  étendue  de  terre ,  laissent  les  pauvres  en  cultiver 
autant  qu'ils  veulent;  avec  très-peu  de  travail,  ces  derniers 
sont  sârs  de  recueillir  assez  pour  vivre  pendant  le  cours 
d'une  année,  et  ils  aiment  mieux  se  reposer  que  de  jooir 
d'une  aisance  qu'ils  devraient  à  quelques  sueurs,  n 

Le  soir  du  jour  on  j'avais  arrêté  le  pedettre,  je  l'envoyai 
chercher,  mais  il  me  fit  dire  qu'il  ne  pouvait  se  rendre 
chez  moi  parce  qu'il  était  occupé.  Cette  réponse  était  d'as- 
sez mauvais  augure;  le  lendemain  matin  l'homme  avait 
disparu.  J'allai  en  donner  avis  au  commandant,  qui  ne  put 
pas  même  me  procurer  un  autre  pédestre  pour  me  suivre 
pendant  deui  jours.  Tous  les  jeunes  gens  avaient  pris  la 
fiiile,  lorsqu'ils  avaient  su  qu'on  voulait  mettre  l'un  d'eux 
«I  réquisition ,  et  cependant  j'avais  répété  que  je  payerais 
bien  celui  qui  me  suivrait  même  une  seule  journée.  Je  par- 
tis encore  une  fois  sans  tocador. 

J'ai  déjà  dit  que  Piumh;  est  situé  à  l'entrée  d'une  plaine. 
Le  pays  que  je  traversai ,  dans  un  espace  de  3  lieues  et 
demie,  pour  me  rendre  à  la  fazenda  de  Dona  Tliomazia,  où 
je  fis  halte,  est  presque  plat  et  offre  des  pâturages  naturels 
an  milieu  desquels  de  petits  bois  épars  forment  des  espèces 
de  compartiments  d'un  effet  très-agréable.  Suivant  l'épo- 
que k  laquelle  les  pâturages  avaient  été  brûlés,  ils  présen- 
taient une  teinte  différente,  et,  comme  l'on  n'en  brûle 
qu'une  certaine  quantité  à  la  fois,  on  voyait,  dans  la  cam- 


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IT4  VOYAGE  AUX  SOURCES 

pagne,  toutes  les  ouances  de  verdure.  Aucao  aitre  ne  croit 
dans  ces  camfos,  fonnés,  ce  qui  est  rare  dans  cette  contrée, 
d'une  herbe  presque  aussi  haute  que  celle  de  nos  prairies. 
La  Graminée  n*  535,  recherchée  des  besttauT,  principale- 
ment lorsqu'elle  commence  k  croHre,  est  ici  fort  commune  ; 
elle  l'est  également  dans  les  eampos  du  canton  de  Hio 
Grande  ;  mais  je  l'avais  à  peine  aperçue  depuis  8.  Joâo  d'EI 
Rei. 

Je  n'aperçus  pas  une  seule  tête  de  hétail  durant  toute  la 
journée;  mais  on  me  dit,  h  la  fazenàa  où  je  fis  halte,  que, 
dans  cette  saison  (avril),  les  bétes  h  cornes  se  retiraient 
toujours  dans  les  bois,  et  qu'on  ne  les  voyait  dans  les  cam- 
pas que  pendant  la  saison  des  pluies,  parce  qu'alors  les  bois 
étaient  remplis  de  taons  (mumceu).  Peut-être  est-il  arrivé 
plus  d'une  fois  que,  lorsque  je  me  plaignais  de  ne  point 
apercevoir  de  bestiaux ,  ils  étaient  ainsi  cachés  dans  les 
bois;  mais  il  n'en  est  pas  moins  trèa-vraisemblable  que 
toute  la  partie  occidentale  de  la  province  de  Minas  pourrait 
nourrir  des  troupeaux  infiniment  plus  nombreux  que  ceux 
qui  y  existent  (i). 

Depuis  Piumby  jusqu'à  la  fazenda  de  Dona  Thomazia, 
j'eus  toujours  devant  moi  la  Serra  da  Canastra,  qui  se  pré- 
sentait dans  le  lointain  avec  son  imposante  régularité. 

Je  n'aperçus,  dans  le  chemin,  ni  maisons  ni  plantations; 

(1)  Va  pwUot  éa  pijs  qnt  s'étend ,  ea  ligne  h  peu  près  directe,  de  B*r- 
becene  an  Rio  de  S.  Friucisco,  celai  où  se  trooTcnt  situés  les  rillages  de 
S.  Joâo  Biplisla,  d'OliveiraetdeFormigt,  M,  da  Cuolui  Haltosdit  (/(tn., 
1 ,  71)  1  qu'on  n'y  élère  pas  U  millionième  partie  des  bétes  h  cornes  qai 
pourraient;  vittc.  >  Ce  chiffre  n'est  qa'nne  SgaTe,  sans  dente;  mais  il 
indique  osseï  combien,  dans  Topinion  de  l'honorable  TOfagMr,  on  ponr- 
'  rait  tirer  parti  de  la  contrée  dont  il  s'agit ,  et  combien  h*  habitants  se 
rendent  coapables  de  paresse  et  d'incurie. 


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DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  17S 

10819,60  revBDcbe,  je  reocootrai  plusieurs  chariots  attelés  de 
trois  oo  quatre  paires  de  bœufs  qui ,  à  t'occasion  des  tètes 
de  PAqoes,  transportaient  des  familles  au  village.  Daos  le 
Sertâo,  où  les  fasendas  soot  souvent  fort  éloignées  de  la  pa- 
roisse, les  bomroes  seuls  s'y  rendent  dans  le  courant  de 
l'année  ;  nuiis,  aux  deux  grandes  (%tes,  Noël  et  Pâques,  la 
bmilie  entière  entreprend  ce  voyage  ;  on  empile  les  femmes 
et  les  enfants  dans  des  chars  à  bœufs  ;  oo  passe  quelques 
jours  dans  la  maison  que  l'on  possède  au  village  et,  ensuite, 
oo  revient  k  son  habitation. 

hea  chariots  dans  lesquels  on  fait  ces  voyages  sont  ceux 
dont  se  servent,  pour  le  transport  de  leurs  denrées,  les  cul- 
tivateurs des  parties  de  la  comarea  de  S.  Joao  d'El  Rei  qui 
ne  sont  pas  très-montagneuses.  Comme  jeraiditaillenrs(l), 
ces  chariots  sont  semi-elliptiques  et  portés  sur  deux  roues 
presque  pleines.  De  longs  bitons  retiennent  une  grande 
natte  qui  ferme  la  voiture  par  devant  comme  un  char  de 
triomphe  et  la  laisse  ouverte  par  derrière.  On  couvre  ces 
chariots  avec  des  cnirs  de  bœufs, 

La  fazenda  de  Dona  Thomazia,  où  je  fis  halte,  était 
ainsi  appelée  du  nom  de  celle  qui  la  possédait.  Ainsi  que 
faidéjèeu  occasion  de  le  dire  (S),  cette  ^smfla  a  une  éten- 
due assez  considérable  ;  j'y  vis  plusieurs  nègres,  des  bëtes 
à  cornes  et  un  grand  nombre  de  pourceaux  :  cependant  la 
maison  de  la  i^opriétaire  n'était  qu'une  misérable  cabane 
dont  tout  l'ameublement  se  composait  d'une  table  et  de 
quelques  bancelles.  Dans  le  Sertâo ,  nne  foule  de  ftam- 
âeùros  ne  sont  pas  logés  d'une  manière  plus  magnifique. 


(I)  Vo)M  mon  rojiatt  dont  le  dUlriet  d»i  DiamanU,  t ,  U4. 
{2\  ToyM,  plus  hmt,  ck*p.  Vf. 


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17fi  VOYAGE  AVX  SOURCES 

Je  fis  ma  visite  dans  toutes  les  maisonnettes  qai  dépen- 
daient de  la  fazenda  de  Dona  Thomazia ,  dans  la  grange, 
dans  tes  cases  à  nègres ,  et ,  ayant  reconnu  qu'il  était  im* 
possible  d'y  placer  mes  effets,  je  me  li^eai  sous  un  hangar 
ouvert  de  tous  les  cAtés  et  embarrassé  par  les  pièces  d'un 
chariot  que  l'on  y  construisait.  Pendant  que  f  analysais  les 
plantes  que  j'avais  recueillies  dans  le  cours  de  la  journée, 
j'étais  dévoré  par  des  insectes  et  obligé,  à  chaque  instant, 
de  changer  de  place  pour  éviter  le  soleil. 

Dona  Thomazia  et  sa  fille  vinrent  me  visiter  dans  mon 
triste  gtte,  et  me  dirent  que  les  terres  de  ce  canton,  d'une 
fort  bonne  qualité,  étaient  propres  à  tous  les  genres  de  cul- 
ture et  que  le  maïs  y  rendait,  par  alquein,  dii  à  onze  cbars 
de  vingt  alqueira,  c'est-à-dire  300  à  ââO  pour  1  (1)  ;  elles 
ajoutèrent  que  ce  n'était  point  dans  les  campot,  mais  dans 
les  bois,  que  les  bestiaux  trouvent  les  herbes  qui  en  font 
périr  un  si  grand  nombre  ;  ce  qui  est  asses  vraisembla- 
ble, car  les  Rubiacées  connues  sous  le  nom  i' Erras  dé  ralo, 
que  l'on  r^arde  comme  si  dangereuses  pour  le  bétail,  sont 
des  plantes  de  bois  vierges  ou  de  capoeira$  (S) . 

Entre  l'habitation  de  Dona  Thomazia  et  celle  de  Joâo 
Dias,  oïl  je  fis  halte,  le  pays,  plus  rapproché  de  la  Serra  da 
Canastra,  devient  moins  égal ,  mais  il  offre  la  même  alter- 
native de  bouquets  de  bois  et  d'excellents  pAturages  on  le 


(1)  Comme  je  l'ii  iii  aiWeuTs  (Voyage  dan*  te  dittrM  dêi  Diamault, 
I ,  SM) ,  les  propriéuirra  de  li  partie  de  U  comarca  de  S.  Joio  où  l'on 
peat  Taire  usage  de  voitures  pour  le  trausport  des  deurOee  comptent  par 
chars  le  produit  de  leurs  lerres. 

(ï)  Telles  sODt  les  espèces  que  j'ai  appelées  RuMa  Tioxia,  Piychotria 
tUKCla,  Palicowea  Uarcgrapii  (voyez  qiod  HiiloiTedaplanUt  lei  plut 
remarquables  da  Brétil  el  dit  Parag%Mii,  329  et  soir.!. 


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I^U  RIO  DE  S.  FRANCISCO-  ITT 

eapim  freeha  croit  toujours  avec  abondance.  Devant  moi, 
k  l'horizoD,  la  Serra  da  Canastra  qui  se  présentait  avec  la 
même  forme;  un  peu  sur  la  gauche,  d'autres  montagnes 
beaucoup  moins  élevées  ;  deux  on  trois  misérables  chau- 
mières coastmites  en  terre  et  en  bois  où  le  jour  pénétrait 
de  toute  part,  une  seule  habitation  passable  ;  point  de  bes- 
tiaux, aucun  voyageur  dans  les  chemins,  pas  la  moindre 
,  trace  de  culture  ;  partout  une  vue  très-étendue ,  mais  qui 
montrait  combien  le  pays  est  désert  :  voilà ,  en  deux  mots, 
le  taUeau  qui  s'oStit  i  mes  regards  pendant  toute  ma 
journée.  Je  ne  pois  dire  cependant  qu'  il  y  e&t  rien  dans  le 
paysage  qui  inspir&t  le  tristesse  :  ce  mélange  de  bois  et  de 
pâturages  d'où  résultent  des  espèces  de  compartiments  de 
différentes  nuances,  les  ondulations  variées  du  terrain,  les 
montagnes  élevées  qui  bordent  l'horizon  du  cAté  de  l'ouest, 
tout  cet  ensemble  produit  an  effet  trè»-agréah4e. 

Depuis  Piumhy,  le  terrain,  surtout  dans  les  fonds,  avait 
pris  une  teinte  d'un  rouge  foncé.  Là,  comme  dans  les  au- 
tres parties  du  Désert  que  j'avais  parcourues  à  l'époque  de 
mon  premier  voyage,  les  bords  des  ruisseaux  sont  fangeux 
et  ofirent,  avec  un  grand  nombre  de  Palmiers,  des  arbres 
serrés  les  uns  contre  les  autres,  i  tige  assez  grêle,  élancée, 
rameuse  dès  la  base,  mais  dont  les  branches  sont  en  partie 
dépouillées  de  feuilles.  Cette  nuance  de  végétation  est  par- 
ticulière au  Sertâo. 

A  une  demi-lieue  de  la  fazenda  de  JToào  Diat,  je  traversai 
un  ee^pâo  {i  )  dont  la  verdure  était  d'une  fraîcheur  qui  éga- 
lait au  moins  celle  des  boudes  environs  de  Rio  de  Janeiro. 


(1 }  Les  capSti  soot ,  corame  oa  sait ,  dn  bowpwta  d<  boia  qui  s'éU- 
mut,  daiw  les  fonda,  m  milien  deseampoi. 


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IT8  TOYAOE  AOX  SOURCES, 

Après  ce  eapào,  je  passai  la  petite  rivière  qui  porto  le  nom 
de  Aifretrôo  dos  Cabrestoi  (torrent  des  licous),  et  j'arrirai 
âla^asettda  de  JoâoDiaB(DOm  d'homme),  qui  fut  le  terme 
dn  voyage  de  la  journée. 

On  voyait ,  dans  cette  fasmda,  une  cour  immense  bordée 
de  grands  pieux ,  beaucoup  de  petites  chaumières  oà  cou- 
chaient les  nègres,  où  l'on  serrait  la  récdlte,  etc.,  mais  on . 
cherchait  inutilement  la  maison  du  mettre  ;  il  demeurait  loS- 
mème  dans  une  misérable  cabane  qui  ne  différait  pas  des 
antres.  Je  ne  ba  point  mal  nça,  mais  tout  ce  qu'on  pot 
faire  pour  moi  fut  de  me  placer  dans  one  petite  forge  où  le 
vent  pénétrait  de  tons  les  cAtés,  et  où  moi  et  mes  gens  n'dr 
vioos  pas  la  place  de  noua  retourner. 

Je  teni  remarquer  que,  tandis  qu'il  y  a  partout  des  mi- 
nes de  fer  immenses  dans  la  province  de  Minai  Geraee,  ce- 
lui que  l'on  travaillait  à  la  fàxmda  de  Joâo  Dias  vaiait  de 
Rio  de  Janeiro,  qoi  est  éloigné  de  ce  pays  de  plus  de 
400  lieues  :  cela  tient  peut-être  à  ce  que  l'on  préférait  le 
fer  étranger  comme  plus  malléable,  ou  à  ce  que  les  &bri- 
cants  de  fer  de  la  province  avaient  trop  négligé  de  s'aasurer 
des  débouchés  ;  peut-Mre  aussi  le  bon  propiiétaire  de  la 
fœunda  de  Joâo  Dias  s'imaginait-il  travailler  le  fer  étran- 
ger, lorsquetoutboanement  il  «nployaitoelni  de  aoa  pro- 
pre pays. 


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DU  RIO  DB  S.  nuncisco 


CHAPITRE  X. 


LA  8EBRA  DA  CANASTKA  ET  LA  CASCADB  APPELÉE  CACUOBIRA 
DA  CASCA  D'AITTA,  SOCHCE  DC  KIO  SE  S.  PRANCISCO. 


A  qnelh  dutue  da  moaUgnes  m  ntuche  la  5n-ra  da  Caitattr».  — 
L'anlMir  part  «rM  José  HtriannD  poor  U  Tisiter.  —  Pajs  siioé  aa  deik 
de  Joio  Dias.—  ChanniiiTes.  Béponse  du  propriétaire  d«  l'une  d'elles. 
—  Le  cAlë  oriealal  â«  la  moalagoe.  —  Défilé  eotre  le  côté  méridional 
et  k  Serra  Oo  Rio  Granda.  —  Descr^oa  dn  c4lé  méridional.  — 
U  CMcatle  appelée  Caehoeira  da  Ca«ca  tTAnla,  origioe  da  Hio  de 
S.  Francisco.  —  La  dMamièrs  ds  F4lUbgrlo  ;  réceplioo  qu'il  fait  i 
l'antear;  portrait  de  cet  homme.  —  L'aaieur  «e  rend  au  pied  de  la 
cascade.  Descripiioa  de  cette  dernière.  —  L'auteur  se  met  en  roule 
pour  retroBTer  it  cararaoe.  —  Chànnaifavs  Toisiiica  de  la  Caclmalra  da 
Catca  d'AoU.  Faibles  ressources  des  faibitants  de  ces  chaumières. 
Leurs  plaintes.  Éloignement  de  l'église  paroissiale  ;  dilGcnlté  des  eu- 
terremoits.  —  Pays  ntné  an  delà  de  Joio  Dias.  Chars  charges  de  den- 
rées. —  numAi  do  Gtraldo,  —  L'sntear  psn  ane  Fitmiano  pour 
moDler  sur  la  Serra  da  Ganaatra.  —  Le  flanc  de  U  montagne  ;  char- 
mante cascade.  Sommet  on  chapadJo.  Éleadne.  --  L'auteur  se  met  en 
route  pour  Arat^  ;  il  touroe  la  Serra  da  Canastra.  Cascade.  —  La  m- 
■«nda  4te  NoMel  AnUmio  SiiiSei.  —  La  oMcade  apptdée  Coehotira 
io  KoUm.  Dm  autre  cascade.  —  Pajs  situi  entre  Maiwel  Anlooio  Si- 
môee  et  la  faienda  de  Paiol  Quffimado. 


Enm'éloignaDtduRio  daa Mortes  Peqaeno,  je m'éUis, 
comme  on  l'a  vn,  dirigé  k  peu  près  vers  l'ouest-quart-oord- 
oDest,  sulrant  toujours  une  croupe  élevée  d'oà  naissent,  du 
cAté  du  nord ,  les  premiers  affluents  du  S.  Francisco,  et,  du 


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180  TOTACE  AUX  SOURCES 

c6té  du  sud ,  ceux  do  Rio  Grande  (4).  Cest  cette  croupe  qui 
borne,  au  midi ,  le  vaste  bassin  du  S.  Francisco  et  de  ses  af- 
Oueols,  basgio  formé,  à  l'est,  par  la  Serra  do  Espinbaço,  et, 
à  l'ouest,  par  une  autre  chaîne  dont  j'ai  parlé  ailleurs  (2). 
Cette  dernière  divise,  en  partie,  les  eaux  du  nord  du  Brésil 
de  celles  du  sud  ;  elle  forme  une  portion  de  l'immense  sy^ 
tème  de  montagnes  que  d'Eschwege  a  nonuné  Serra  da$ 
Vwrtmta,  et  a  été  appelé  par  moi ,  comme  Je  l'expliquerai 
bientAt ,  Serra  do  S.  Francisco  «  da  Paranahyba. 

Déjè,  avant  d'arriver  k  Formiga,  j'avais  aperçu,  A  l'hori- 
zon, la  Serra  da  Canastra.  Cette  montagne,  qui ,  semblable  k 
un  immense  coffre,  présente,  dans  le  lointain,  sa  masse 
imposante ,  parait  alors  isolée ,  mais  il  n'en  est  réellement 
pas  ainsi.  Elle  fait  partie  de  la  Serra  das  Tertentes,  c'est-à- 
dire,  comme  on  l'a  vu  tout  k  l'beiu^,  de  ce  plateau  élevé 
ou  cette  chaîne  qui,  da  cAté  de  l'ouest,  borde  le  bassin  du 
S.  Francisco. 

Plus  tard,  j'aurai  occasion  de  parler  de  cette  mtoe  chaîne  ; 
ici  je  m'occuperai  uniquement  de  la  Serra  da  Canastra. 

Depuis  longtemps  je  savais  confusément  qu'il  existait 
dans  cette  montagne  ou  dans  son  voisinage  une  cascade  fort 
remarquable,  mais  personne  n'avait  pu  me  donner,  i  cet 
égard,  aucun  renseignement  bien  précis.  Voulant  visiter  la 
cascade ,  je  laissai  à  la  fazenda  de  Joâo  Dias  Finnieno  et 
Lamotte  avec  tout  mon  bagage  et  n'emmenai  (9  avril) 
avec  moi  que  José  Marianno.  Je  partis  persuadé  que  j'avais 

<1)  Jeo'u  point  va  la  Serra  Negra  qni,  selon  Caial  iCorog  Bra*.,  1, 
ST4 ,  381},  «ëpare ,  dans  Due  grande  étendue ,  la  eimarea  de  Stbar;'i  de 
celle  da  Rio  das  Mortes  ;  mais  il  est  éTident  qu'elle  fait  partie  da  pla- 
teau dont  il  s'agit  ici ,  qae  pent-tire  elle  le  comiuence  du  câté  de  l'est. 

(3)  Vo^oe  dam  I<(  proottteet  de  Mo  dt  Janeiro,  etc.,  I,  09. 


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DU  UO  DE  S.  FIANOSCO.  181 

à  peine  5  lleaea  à  faire  pour  arriver  A  la  cascade  et  qu'elle 
tombait  des  moDlagoes  voisines  de  Is  Serra. 

A  mesure  que  nous  nous  éloignions  de  la  fiaenda  de 
Joâo  Diaa,  le  pays  devenait  plus  montagneux,  offrant  tou'- 
jonn  des  bois  dans  les  fonds  et  des  pAtarages  sur  les  hau- 
teurs. 

C^iaidant  nous  avions  déjà  fait  beaucoup  plus  deS  lieues, 
et  nous  n'avions  pas  encore  aperçu  de  maisons ,  quoiqu'on 
nous  en  eût  annoncé  plusieurs  :  aucun  voyageur;  point  de 
bestiaux  ;  une  belle  solitude,  mais  une  solitude  profonde. 

A  notre  grande  satisfaction ,  nous  rencontrâmes  enfin 
une  négresse  à  qui  nous  demandâmes  le  diemin,  et  j'ap- 
pris, avec  autant  de  surprise  que  de  plaisir,  que  nous  ne 
nous  étions  pas  égarés  un  seul  instant.  José  Marianno  sa- 
vait saisir  le  moindre  indice,  il  en  tirait  les  conclusions  les 
plus  justes,  et  possédait  l'art  de  se  conduire  avec  sûreté  dans 
un  pays  où  un  autre  se  serait  égaré  mille  fois.  Nous  sûmes 
par  la  négresse  que ,  quoique  nous  eussions  fait  beaucoup 
de  chemin,  nous  étions  encore  bien  loin  de  la  cascade. 

Alors  noua  avions  déjà  passé  plusieurs  ruisseaux  d'une 
limpidité  que  rien  n'égale,  entre  autres  ceux  appelés  Bi- 
beirâo  da  Prala  [torrent  d'ai^nt] ,  RUteirÔo  da  Capim- 
vara  (torrent  du  capybara],  et ,  dans  le  reste  de  la  journée, 
nous  en  travers-Ames  encore  d'autres,  qui  tous  se  joignent 
au  Rio  de  S.  Francisco. 

A  mesure  que  nous  avanciom ,  nous  découvrions  mieux 
la  Serra  da  Canastra.  Vu  de  plus  près,  son  sommet  cesse  de 
présenter  la  même  régularité;  cependant  il  est  bien  loin 
d'crffrir  aucune  de  ces  anfractuosités  que  l'on  observe  com- 
munément dans  les  grandes  chaînes  de  montagnes. 

Nous  avions  feit  environ  4  lieues,  quand  nous  aperçûmes 


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183  TOTIOB  AUX  MDMES 

les  premi^«9  choumièree,  mais  elles  étafeot  db  pea  éloi- 
gnées du  chemin.  Plus  loin,  nous  en  rhnes  une  sur  le  bord 
inèiDe  de  la  route  ;  nous  nous  y  arrâUmes  un  Instant,  et  l'on 
nous  dit ,  comme  la  négresse  â  laquelle  nous  nons  étions 
adressés  en  premier  lieu,  que  nous  étions  encore  A  une 
très-grande  distance  de  la  cascade. 

Je  demandai  an  propriétaire  de  ta  chaumière  CMunent 
il  pouvait  vivre  dans  une  telle  solitude.  Je  n'aime  pas  le 
bruit,  me  rendit-il;  mais  je  ne  suis  pas  seul,  puisque 
j'ai  aveo  moi  ma  femme  et  mes  enfants,  et,  excepté  le  sel , 
ma  terre  produit  avec  abondance  tout  ce  dont  j'at  besoin. 

Jusqu'alors  nous  avions  toujours  en  devant  nous  le  cété 
oriental  de  la  montagne.  Ce  cété  oBre  une  pente  phis  ou 
moins  rapide  ;  cm  y  voit  des  pàtarages,  et  presque  nulle 
part  il  ne  me  parut  inaccessible.  A.  mesure  qu'on  se  rap- 
proche de  la  montagne,  les  maisoas  deviennent  moins  m- 
rea  ;  nous  vîmes  aussi  quelques  idautations  de  maïs  et  quel- 
ques bétes  à  Gcuves. 

Cependant  noua  nous  étions  dirigés  un  pea  vers  le  midi , 
et  hientût  nous  airivAmes  à  l'ertr&nité  sud  du  cAté  orien- 
tal de  la  montagne.  Là  est  uue  espèee  de  défilé  qui  sépare 
le  cAié  méridional  de  la  Serra  da  Canastra  d'uneautre  Serra 
appelée  Serra  do  Ria  Grande.  Celle-ci,  beaucoup  moias 
haute,  beaaconp  moins  régulière  que  l'autre,  se  dirige  À 
peu  près  de  l'ouest  vers  le  sud-est,  et  se  rattadie  à  d'autres 
montagnes  plus  orientales  qui  font  partie  de  la  eofRorea  du 
Rio  das  Mortes.  11  paraîtrait  aussi ,  d'après  ce  qui  m'a  été 
rapporté,  que  la  Serra  da  Canastra  et  celte  du  Hio  Grande 
se  joindraient  à  l' extrémité  occidentale  de  Fespèce  de  dé61é 
qu'elles  laissent  entre  elles.  Quoiqu'il  en  soit,  si,  comme 
je  le  proposerai  bientAt,  on  convient  de  donner  un  nom 


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DO  BU)  Dfi  s.  FUmaSCO.    '  183 

généra)  au  diviseur  des  «lax  do  Paranahyba  et  du  S.  Fran- 
cisco, celai  de  Serra  do  S.  Franeiico  e  da  Paranahyba, 
il  faadrait  dire  que  l'extrémité  de  cette  Serra  est  formée 
par  la  Serra  da  Canastrs,  car  le  Rio  de  S.  Francisco  natt  du 
càté  austral  de  cette  dernière. 

Dans  le  de&lé  dont  j'ai  parié  plus  haut,  nous  nous  bou- 
vions  fort  rapprochés  de  cette  montage.  Le  son  sommet 
est  parfaitement  ^1  ;  ses  flancs ,  dans  une  grande  partie 
de  sa  hauteur,  offrent  des  rochers  sillonnés,  exactement 
taillés  A  pic  et  inaccessibles,  au-dessous  desquels  des  bois 
et  dee  pitnrages  naturels  s'étendent,  par  une  pente  assez 
doQce,  josqu'à  la  partie  la  plus  basse  d'une  vallée  profonde 
oncooledéjiileRiodeS.  Francisco.  Les  rochers,  quoiqu'ils 
se  présentent  comme  une  sorte  de  muraille  presque  ver- 
ticale, sont  loin  cependant  d'être  entièrement  nos;  cà  et 
]k  il  sont  couverts  d'un  gazon  très^n  qui  ne  laisse  aperce- 
voir leur  Goolenr  grisâtre  que  par  intervalles.  Ilulle  part  je 
n'avais  va  one  verdure  anssi  belle  et  aussi  fraîche  que  celle 
des  pàtorages  qui,  amme  je  l'ai  dit,  s'étendent  au-des- 
loos  des  rochers  A  ;mc  ,  et  les  tdntes  plus  foncées  des  bois 
voisins  ne  lui  étaient  point  inférieures  en  beauté. 

Ayant  traversé  an  bois  dont  la  végétation  était  d'une 
Iralcbenr  extrême,  nous  arrivâmes  à  une  chaumière  et  nous 
demandâmes  la  maison  de  Felisbebto  ,  cultivateur,  que 
nous  savions  demeurer  fort  près  de  la  cascade.  Lui-même 
était  présent  et  nous  répondit  qu'il  allait  nous  servir  de 
guide. 

Noos  nous  enfonçâmes  dans  un  bois,  et  bienbM  nous 
conunNtçftmes  à  entendre  le  bruit  de  la  cascade.  D'après 
des  renseigneraents  que  l'on  m'avait  donnés  qudques  in< 
stanis  auparavant,  je  savais  alors  qu'elle  tombait  du  c6té 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


IBI  TOTAGB  AUX  SODRCES 

méridional  de  Is  Serra  da  Canastra.  Tout  à  coup  j'en  aper- 
çus le  sommet,  et  bientôt  je  la  découvris  tout  entière,  aa- 
tant,  du  moins,  qu'on  peut  la  découvrir  ds  lieu  où  nous 
étions.  Ce  spectacle  nous  arracha,  à  José  Harianno  et  à 
moi,  un  cri  d'admiration.  A  l'endroit  où  l'ean  tombe,  tes 
rochers  &  pic  de  la  moatagne  s'abairaeot  un  peu  À  leur 
somm^  et  laissent  voir  une  crevasse  large  et  profonde  qui, 
formant  un  zig  zag,  nous  parut  se  prolonger  dans  les  deux 
tiers  de  leur  hauteur.  Du  point,  encore  très-éleré,  où  ^ar- 
rête la  crevasse,  s'^ncbe  majestueusement  une  belle  nappe 
d'eau  dont  le  vt^ume  est  plus  considérable  d'un  c6té  que 
de  l'autre.  Le  terrain  qui  s'étend  incliné  au-dessous  de  la 
cascade  est  fort  inégal  ;  un  mamelon,  couvert  d'un  gaz(»i 
verdoyant ,  cacbe  la  partie  inférieure  de  la  nappe  d'eau,  et, 
sur  le  c6té  droit,  descend  vers  elle  un  bois  d'une  teinte 
sombre.  Telle  est  le  source  du  Rio  de  S.  Francisco. 

La  vue  dont  j'ai  tAché  de  donner  une  idée  est  aussi  celle 
que  l'on  a  de  la  maison  de  Felisb^lo.  Le  soir,  on  clair  de 
lune  superbe  me  permettait  de  distinguer  tons  les  objets, 
et  la  cascade  semblait  illnmÎDée  par  le  feu  qui  consumait 
un  pAturage  voisin. 

Felisberto  nous  accueillit  à  merveille.  Il  habitait  une 
humble  chaumière  dépourvue  de  toute  espèce  de  commo- 
dité. Du  lait  et  des  haricots  cuits  dans  de  l'eau  firent  no- 
tre souper;  pour  lit ,  on  me  donna  un  matelas  de  paille 
de  maïs,  sans  draps;  mais  tout  cela  était  ofi'ert  de  bon 
cœur. 

La  maison  de  Felisberto  est  située  snr  le  bord  d'une 
route  qui  conduit  aux  parties  les  plus  reculées  du  désert 
et  au  village  de  Detemhogue ,  célèbre  dans  le  pays  par 
la  fécondité  des  terres  qui  l'environnent.  Cette  route  so- 


■.vGooiîlc 


DU  UO  DB  S.  raiNdSCO.  185 

litaire  suit,  entre  les  deax  Serras  (1),  le  défllé  qai  .les 
divise  et  qui  peut  avoir,  m'a-t-on  dit,  4  lieues  de  Iod- 
gneur. 

Mon  bâte  m'avait  <^ert  de  me  conduire  le  leDdemain 
BQ  matÏD  RU  pied  de  la  cascade  qui  porte  le  nom  de  Ca- 
choeira  da  Catca  d'Anla(^;  mais  quelques  occupations 
l'en  empêchèrent ,  et  il  me  donna  ponr  gnide  son  beao- 
père,  Maroel  Lopes,  qui  demeurait  à  une  demi-liene  de 
chez  lui.  Avant  de  prendre  congé  de  Felistterto ,  je  voulus 
lui  foire  accepter  quelque  aident  ;  cela  ne  fat  pas  possible . 
Pendant  que  j'étais  resté  chez  lui ,  cet  bonme  m'avait  mon- 
tré une  bonté,  une  tranquillité  d'âme,  une  résignation  aui 
volontés  da  ciel,  une  patience  è  supporter  la  pauvreté  que 
l'on  ne  trouve  guère  que  loin  des  villes.  Felisberlo,  s'il  vit 
encore,  a  sans  doute  oublié  l'étranger  qui  vint  de  si  loin 
loi  demanda*  un  abri  ;  moi ,  je  crob  le  voir  encore  assis 
sur  DD  banc  de  bois,  dans  une  cbambre  obscure  et  sans 
meaMes;  je  croîs  l'entendre  me  raconter  avec  calme  les 
vexations  dont  il  avait  été  l'objet  :  les  exemples  d'honnêteté 
et  de  vertus  ne  sont  pas  assex  communs  pour  qu'on  puisse 
les  oublier. 

Sur  les  onze  heures  du  matin,  nous  partîmes,  José  Ma- 
nanno  et  moi ,  de  la  maison  de  L(q>es  pour  nous  rendre,  à 
la  cascade.  Après  avoir  traversé  un  bois  touffu,  en  suivant 
on  petit  sentier  peu  fnjé  et  embarrassé  par  des  Bambous, 


(1)  La  Serra  da  Canastra  et  h  Serra  do  Rio  Graode  (rojet  pieu  haut , 
p.  185). 

(3)  Caehottra  Bignifie  caicade.  Cofca  ifAiHa  {twnt  de  tapir)  est  le 
■mhh  que  l'on  donne  aa  Drimy*  Granalentit ,  parce  qo'oo  prétend  que 
r'est  le  tapir  (ania)  qai  ■  fait  découvrir  les  propriétés  eicellcutes  de 
Técorce  de  eei  arbre  (  voïei  mes  Ptantei  HtuelUt  dei  BTé$llif!n*). 


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186  TOYAQE  AUX  SOURCES 

□0U8  BiTifâmes  sur  le'bord  da  Rio  de  S.  Fraocigoo,  qai,  en 
cet  endroit,  est  èi  environ  une  demi-lieue  de  m  source  et 
pent  avoir  vingt  â  trente  pas  de  largeur.  Seseaui,  d'une 
limpidité  et  d'une  fraîcheur  extrêmes,  ont  peu  de  proton- 
denr  et  laissent  voir  jusqu'au  mcùndre  caillou  du  lit  où 
elles  coulent.  Je  me  déchaussai  pour  passer  la  rivière ,  et , 
comme  elle  est  embarrassée  par  des  pierres  extrêmement 
glissantes,  ce  ne  (ut  point  sans  quelque  peine  que  je  par- 
vins sur  l'autre  rive.  Là  nous  tronv&mes  un  ttois  encore 
plus  difficile  que  le  premier,  et  Manoel  Lopes,  qui  me  pré- 
cédait, était  oUigé,  à  chaque  pas,  de  couper  les  Bambous 
et  les  tuani^MS  d'arbres  qui  gênaient  notre  maFdie.  Bientôt 
nous  passâmes  une  seconde  fob  le  Rio  de  S.  Francisco ,  et , 
après  avoir  traversé  un  pâturage  naturel ,  nous  trouvAnes 
les  bords  de  la  rivière  tellement  obstrués  par  des  bran- 
chages, qu'il  DouB  fallut  marcher  dans  son  lit.  Jusqu'au 
pied  de  la  cascade,  il  est  ronpli  de  grosses  pierres  glissan- 
tes, qui  taotAt  sont  couvertes  par  l'eau,  tantét  s'éléveot 
au-dessus  de  sa  surfece,  et  il  m'e&t  été  impossiUe  d'à- 
'  vancer,  si  je  n'avais  été  ooothiudlement  aidé  par  Nanod 
Lopes  et  José  Marianno.  Enfin ,  après  une  marche  extrê- 
mement pénible,  nous  parvînmes  au  pied  de  la  Cachoeira 
da  CasCB  d'Anta,  que  nous.découvrions  déjà  depois  Imig- 
temps. 

Cbei  Feltsberto,  j'en  étais  k  plus  d'un  quart  de  lieue  et 
je  ne  la  découvrais  qu'imparfoitement.  Je  vais  la  peindre 
telle  qu'elle  s' oQrit  à  mes  regards,  lorsque  j'en  fus  aussi 
rapproché  qu'il  est  possible.  Au-dessus  d'elle  on  voit,c<Hnme 
je  l'ai  dit,  une  large  crevasse;  à  l'endroit  où  elle  tombe, 
les  rochers  forment  une  concavité  peu  sensible.  De  la  mai- 
llon de  Felisberlo  ,  la  cascade  m'avait  paru  n'avoir  que  le 


■v,  Google 


un  MO  DB  S.  FIANOâCO.  tST 

tiers  de  la  hantear  des  rochers  ;  nprè»  l'avoir  examinée  de 
différents  points,  je  crois  ponvolr  dire  avec  pins  de  certi- 
tnde  qu'dle  en  a  les  deux  tiers.  Je  ne  l'ai  point  mesurée  ; 
mais,  d'après  l'estimatioii  probablement  très^pproxims- 
tive  de  H.  d'Esdiwege,  die  aarait  plus  de  667  pieds  an- 
glais (30^,23)  (t).  Elle  ne  se  précipite  point  avec  rapidité, 
mais  elle  présente  une  belle  nappe  d'ean  blanche  et  éco- 
mense  qni  s'épanche  lentement  et  qui  semble  Formée  par 
de  largea  flocons  de  neige.  Ses  eaux  sont  reçues  dans  un 
bassin  demi-circolaire,  bordé  de  pierres  entassées  sans  or- 
dre; et  de  là,  par  une  pente  asœx  rmde,  elles  s'écoalent 
poar  former  ce  Rio  de  S.  Francisco  qui  a  près  de  700  lienes 
de  cours  et  reçoit  une  foule  d'autres  rivières. 

En  tombant ,  les  eaux  de  la  Cacboeira  da  Casca  d'Anta 
font  un  ÏHnit  que'  l'on  entend  d'usés  l<Hn ,  et  en  m£me 
temps  elles  produisent  an  bronillard  extrêmement  fin,  que 
l'air,  agité  par  lenr  chute,  porte  h  une  assez  grande 
distance. 

Des  deux  cMéa  de  la  cascade,  les  rochers  humides,  quoi- 
que taillés  presque  k  pic ,  sont  converts  d'an  gazon  fin  et 
assez  vert ,  qui  ne  laisse  voir  qne  par  intervalles  leur  cou- 
leur noirAtre.  Au-dessoas  des  rochers,  le  terrain  s'étend 
en  pente  josqu'Â  la  rivière  :  dans  la  partie  la  plus  rappro- 
chée de  la  cascade  ,  il  n'oflVe  que  des  arbrisseaux;  mais, 
quelques  pas  pins  loin,  il  est  déjÀ  couvert  d'épaisses  forêts, 
où  l'on  voit  nue  foule  de  Palnùers  h  la  tige  élancée  et  me- 
une'.  La  verdure  de  toutes  les  plantes  est  d'une  fraîcheur 

(1}  D'EK^nnce  pense,  cooiim  je  Fat  dit ,  que  ta  rocher  1  pic  a  phu  ite 
1,000  pieds  (  Brof.  ttie  Ne%e  Welt ,  1 ,  102).  Si  l'on  retraoche  le  liera  de 
ce  nombre  pour  la  partie  de  la  moDl^sne  supérieure  à  la  cascade ,  il  est 
clair  qnc  l'on  inra  STiT  pieds. 


,,;.  Google 


18S  VOYtOB  AUX  SODKCES 

extrême ,  qu'entretient  sans  cesse  le  voisinage  des  eaux. 
Vis-è-vis  de  la  cascade,  l'horiion  est  borné  par  des  mon- 
tagnes couronnées  de  rochers  qui  appartiennent  A  la  Serra 
do  Rio  Grande. 

Pour  sentir  combien  cet  ensemble  est  ravissant ,  qu'on 
tÂcbe  de  se  représenta  la  réunion  de  tout  ce  qui  charme 
dans  la  nature  ;  le  plus  beau  ciel ,  des  rochers  élevés ,  une 
cascade  majestueuse,  les  eaux  les  plus  limpides,  la  verdure 
la  plus  firalcbe,  enfin  des  bois  vierges  qui  préseatent  toutes 
les  formes  de  la  végétation  des  tropiques. 

Après  nous  être  éloignés  de  la  Cachoeira  da  Casca  d'Anta, 
nous  retonrnAmes  à  la  maison  de  Manoel  Lopes ,  qui  avait 
été  d'une  bonté  et  d'une  complaisance  extrêmes  pendant 
tout  le  temps  qu'il  m'avait  seni  de  guide  ,  et  qui  ne  se 
montra  pas  moins  désintéressé  que  son  beau-frère  Felia- 
berto. 

Ayant  partagé  avec  Lopes  son  dtné  de  bananes  et  de  ha- 
ricots noirs,  je  montai  sur  mon  mulet,  et,  pour  n'avoir  pas 
autant  de  chemin  à  faire  le  lendemain ,  je  me  rapprochai 
deâ  lieues  de  l'habitation  de  Joâo  Dias,  oît,  comme  je  l'ai 
dit,  j'avais  laissé  mes  gens  et  mon  bagage. 

Je  couchai  dans  une  de  ces  maisonnettes  que  l'on  ren- 
contre avant  d'arriver  à  la  Serra  da  Canastra,  et  dont  j'ai 
déjà  parlé.  La  moindre  cfaaumière  de  Sologne  offre  plus 
de  commodités  que  ces  misérables  demeures.  Elles  sont 
construites  grossièrement  avec  des  bAtons  croisés  et  de  le 
terre  glaise  qui  se  détache  de  tous  les  côtés  ;  une  herbe 
menue ,  arrachée  avec  la  terre  qui  environne  ses  racines, 
forme  leur  couverture.  L'intérieur  est  divisé,  par  des  cloi- 
sons ,  en  petits  réduits  obscurs  qui  n'offrent  d'autre  ameu- 
blement qu'une  couple  de  bancelles  et  quelques-uns  de  ces 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DD  WO  DE  S.  ntANOSCO.  18» 

lits  rustiques  que  j'ai  décrits  ailleurs  (f  )  ;  i  ta  muraille 
pendent  des  hardes  et  une  selle. 

Ce  qu'il  y  a  d'assez  extraordinaire,  c'est  que  des  bommes 
blancs  habitent  ces  pauvres  cabanes.  Il  est  assez  vraisem- 
blable  que  les  premiers  qui  se  sont  établis  dans  ces  lieux 
écartés  étaient  quelques  coupables  poursuivis  par  la  rigueur 
des  lois.  Leurs  enfants  ,  élevés  dans  la  solitude  ,  auront 
mieux  valu  qu'eux;  l'occasion  et  Iç  commerce  des  hommes 
développent  le  germe  des  passions,  il  périt  s'il  reste  sans 
alimait. 

Les  habitants  peu  nombreux  des  environs  de  la  Serra  da 
Canastra  ,  qui  paraissent  avoir  les  uns  avec  les  autres  des 
Keos  de  parenté  ,  cultivent  la  terre  de  leurs  mains;  mais 
leurs  denrées  n'ont  aucun  débonché. 

Les  bestiaux  qu'ils  élèvent  peuvent  seuls  leur  procurer 
un  peu  d'argent,  et  encore  sont-ils  obligés  de  Taire  des 
avances  considérables  pour  le  sel,  qui  est  ici  d'une  cherté 
exorbitante.  Des  marchands  de  bétail  viennent  jusque 
dans  ces  lieux  écartés  et  font  leurs  achats  chez  les  proprié- 
taires. On  se  plaint  encore,  dans  ce  canton,  des  berbes  vé- 
néneuses qui ,  dit-on ,  nuisent  aux  bétes  h  cornes  ;  cepen- 
dant il  est  permis  de  regarder  cette  assertion  comme  une 
conjecture  fumée  pour  expliquer  la  mort  presque  subite 

(1)  C«s  Ula  s'appellent  giraot.  Toici  commeDi  on  les  rorme  :  on  eo- 
foDce  dans  la  terre,  lopria  de  la  maraiUe,  qnatre  pieni  qne  l'on  dispose, 
en  carrilong,  comme  les  qoeDonillM  de  nos  lits,  et,  sDr  chaqoe  paire 
de  pieux  les  plus  rapprocha,  on  Sie,  arec^nne  écorce  tenace  et  fleiiblc, 
■n  moreean  de  bois  Irustersal  ;  snr  les  deai  morceani  de  b(ris  trins- 
veruai,  on  rangt  des  perches,  que  l'on  coiiTre  d'une  natte  on  d'an  cuir 
écni ,  et  c'est  U  que  l'on  dort ,  adossé  contre  le  mnr  et  enreloppé  dans 
■me  coaTOiinre  ou  une  capote  (  Tojei  mou  Voyagt  daiu  le*  province* 
de  Rfo  dt  Jamin,  1 ,  3M }. 


^d:,;.  Google 


IW  VOYAOE  AUX  SOURCES 

des  bestiaux ,  car  persoDoe  ne  peut  montrer  ces  herbes  dont 
il  est  tant  question. 

Ud  sujet  de  plainte  mieun  fondé ,  c'est  la  manière  dont 
les  daimeù-oi  (receveurs  de  la  ^Jne)  veulent  que  l'on 
paye  l'impAt,  reftuant  les  deorées  et  exigeant  du  oiuné- 
raire.  Il  faut  convenir  qu'il  est  difficile  de  donner  de  l'ar-  - 
gent  lorsqu'on  ne  peut  presque  rien  vendre  (1). 

Tout  le  cAté  oriental  de  la  Serra  da  Cana^ra  d^poid 
de  la  paroisse  de  Piumby;  mais,  comme  il  y  a  environ 
a  lieues  portugaises  jusqu'à  l'église ,  les  fenuies  ne  fcnt 
presque  jamais  ce  voyage ,  et  les  hommes  le  font  k  peine 
une  fois  daDS  l'année.  A.  la  vérité,  un  prêtre  vient  qu^œ- 
fois  dire  la  messe  dans  une  petite  chapelle  qui  est  i  une 
couple  de  lieues  de  la  ftuenda  de  Joao  Dias  (S) ,  et  les  habi- 
tants profitent  de  l'occasion  pour  se  confesser  et  blre  bap- 
tiser leurs  enfants;  mais  cette  occasion  est  extrèmemoit 
rare. 

Comme  les  Brésilirai  tienoeot  beaucoup  k  èixe  înhnmés 
dans  les  élises ,  et  que  le  curé  de  Piumhy  ne  permettait 
point  qu'on  enterrAt  àan»  la  chapelle  dont  j'ai  parlé  tout  & 
l'heure,  on  transportait  les  corps  à  dos  d'homme  de  laS^ra 
jusqu'au  village,  et,  pour  me  servir  de  l'eipreagico  do  cul- 
tivateur chei  lequel  j'avais  couché  à  2  lieues  de  la  cascade , 
les  porteurs  arrivaient  presque  dans  le  même  état  que  celui 
qu'ils  portaient  en  terre. 

(1)  J'ai  d^l  dit  ullgan  <«  qu'étaient ,  i  cette  éfotiàt,  le*  dUimtirM 
eteomliieooa  «vait  i  m  plaindre  iTeni.  Je  rnieni  nu  m  Mjel.dai» 
celte  troitUnu  relation ,  aa  chapitre  inlilolé  Tablta»  ti»éral  4»  (a 
piwtnet  dt  Coytu. 

(3)  C'est  probafalemeDt  cette  chapelle  qni  formerait  la  anccarsale  qoe 
Pizarro  appelle  eapella  curoda  de  S.  frmtcitco,  et  dont  j'ai  ditqwl- 
quu  mots  dans  le  chapitre  pr^cédeal. 


^d:,;.  Google 


DD  RIO  DE  S.  FRAKCISCO.  191 

Je  retournai  k  la  fasenda  de  i  oâo  Ding  psr  le  chemin  que 
]" avais  d^&  saiW.  Od  croira  peut-être  que,  dans  ces  lieux 
déserts,  je  dus  trouver  beaucoup  de  quadrupèdes;  je  n'en 
aperças  pas  un  seul  ;  mais  cela  n  'est  point  surprenant ,  perce 
que  les  habitants  du  Sertâo  passent  la  moitié  de  leur  vie  i 
dwsser  et  s'étendent  très-loin  de  chei  eux. 

Après  avoir  quitté  la  fraenda  de  Joâo  Dias  pour  me  ren- 
dre k  Arax  [1] ,  je  traTemi  des  pitnrages  dont  l'herbe , 
composée  en  grande  partie  de  la  Graminée  n*  535 ,  est 
[wesque  aussi  "haute  et  aussi  serrée  que  le  foin  de  nos 
prairies. 

En  passant  par  ces  pâturages,  je  rencontrai  une  snite  de 
durs  qui,  attelés  de  trois  et  quatre  paires  de  bœufs,  étaient 
dtai^és  de  lard  et  conduits  par  des  blancs.  Je  demandai  d'oà 
ih  venaient,  et  j'appris  qu'ils  étaient  partis,  Il  y  avait  denze 
jours,  du  village  d'Araxé ,  et  qu'on  les  conduisait  à  S.  Jmo 
d'EI  R^,  où  ils  deralmt  arriver  an  bout  d'un  moiH.  Les 
frais  d'an  \si  voyage  sont  pen  eonridéraMes,  parce  que  les 
conducteurs  ranportent  avec  eux  ce  qui  est  nécessaire  poor 
leur  noorritore  et  même  le  maïs  destiné  ponr  les  bœu6. 
Ifalgré  cela ,  il  fout  que  les  denrées  trouvent  bien  pen  d'a- 
il) IVatnbe  apfNiiiiutif  ds  la  FiiMiéi  ta  Mo  Km  m  vfllie« 
d'inu: 

De  la  Fuenda  de  Joao  Diia  h  U  Fanoda  do 
Oeraldo,  habitatirai S  1|2  legoM. 


301/211 


Paiol  ODaimada,  habitalioD 

■etiro  da  Jabvtlcabeira ,  cbalais.  . 
■étira  de  Iris  os  Mimtea ,  ehallis.. 

Paripitinf*,  hiUlotioii 

Arasa,  TiUagc 


^d:,;.  Google 


192  TOTiGE  AUX.  SOOaCES 

cheteurs  dans  ce  pays  et  y  soient  &  bien  bon  marché  pour 

qu'il  y  ait  quelque  avantage  à  leur  Gsire  fiûre  un  si  long 

voyage. 

A  environ  une  demi-lieue  de  la  faxenda  de  Joâo  Dias,  je 
traversai ,  au  milieu  d'un  capâo ,  le  Rio  de  S.  Francisco, 
qui ,  en  cet  endroit ,  peut  avoir  20  pieds  de  largeur,  et  dont 
les  eaux  limpides  coulent  sur  un  lit  de  pierres  et  de  cail- 
loux. Comme  il  n'était  pas  tombé  d'eau  depuis  qudques 
temps,  cette  rivière  était  guéable;  mais,  après  des  pluies 
UD  peu  longues ,  elle  cesse  de  l'être ,  et  il  n'y  a  aucun  pont 
pour  la  passer. 

Entre  3oào  Dias  et  la  Faxenda  do  Genddo ,  on  je  fis 
halte,  j'aperçus  dans  le  lointain  deax  ou  trois  faxenda* 
assez  considérables  pour  le  pays  ;  mais  je  dois  dire  que,  pres- 
que partout,  ma  vue,  que  rien  n'arrêtait,  pouvait  em- 
brasser un  horizon  immense. 

Je  ne  revis  la  Serra  da  Canastni  qu'après  avoir  fait  ploa 
d'une  lieoe.  De  ce  cêté,  celui  de  l'est,  elle  ne  présente, 
comme  on  l'a  vu ,  aucun  de  ces  accideots  si  ordinaires  dans 
les  pays  de  montagnes;  mais,  par  sa  niasse  et  son  éléva- 
tion ,  elle  répand  de  la  variété  dans  le  paysage.  La  verdore 
des  bois  et  des  campo»  était  alors  si  fratche ,  le  ciel ,  dans  le 
voisinage  de  la  niontagne,  avait  une  teinte  si  douce,  que 
je  ne  pouvais ,  sans  plaisir,  jeter  les  yeux  sur  cette  vaste  et 
tranquille  solitude. 

A  peu  de  distance  de  la  Fatenda  do  Geraldo  ,  je  passai 
devant  la  chapelle  de  S.  Roque  (S.  Roch),  où  an  prêtre 
rient  quelquefois  dire  la  messe  aux  habitants  du  pays.  Elle 
est  isolée,  située  sur  une  hauteur,  construite  en  bois 
et  en  terre,  sans  aucun  crépi  et  dans  l'état  le  plus  mi- 
sérable. Tout  auprès ,  on  a  bâti  une  maisonnette  et  un  nm- 


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DU  RIO  DE  S.  nUNCISCO.  t» 

G^,  pour  receroirceui  qui  viennent  y  entendre  la  messe. 

La  Fazenda  do  Geraldo  est  assez  considérable.  On  y  voit 
une  vaste  cour.,  des  curraeg  {endos  pour  le  bétail)  fort 
grands,  une  grange  qui  nel'est  guère  moins,  des  cases  à 
nègres;  mais,  comme  ailleurs,  la  maison  du  maître  est 
petite  et  très-mal  entretenue.  On  me  plaça  dans  un  rancho 
fermé,  où  j'étais  parfoilement  libre  et  i  l'abri  du  vent  et 
du  froid. 

Voulant  monter  sur  la  Serra  da  Canastra ,  je  laissai,  à  la 
Fazenda  do  Geraldo,  Laruotte  et  mon  muletier,  et  je  partis 
accompagné  de  l'Indien  Firmiano. 

A  environ  une  demi-iîeue  de  la  fazenda ,  nous  conmiea- 
càines  à  monter.  J'ai  déjà  dit  que -le  côté  oriental  de  la 
Serra  fonbe  une  pente  douce  et  offre  des  pâturages  dans 
les  parties  élevées,  des  bois  dans  les  enfoncements.  En 
suivant  un  chemin  difficile  et  pierreux  ,  nous  traversâmes 
un  bois  d'une  extrême  fraîcheur  qu'arrose  un  ruisseau  lim- 
pide, et  nous  arrivâmes  à  de  vastes  campos,  où  tout  récem- 
ment on  avait  mis  le  feu.  Cette  portion  de  la  Serra ,  noircie 
et  dépouillée  de  verdure,  avait  assez  l'aspect  de  certains 
terrains  volcaniques  de  nos  montagnes  d'Auvergne.  Le  feu 
n'était  pas  encore  éteint;  je  voyais  une  flamme  rouge  et 
paillante  s'étendre  rapidement  dans  les  gazons  et  des 
lourbillons  de  fumée  s'élever  lentement  vers  le  ciel. 

Arrivés  à  la  moitié  environ  de  la  hauteur  de  ta  mon- 
tagne, nous  laissâmes  sur  notre  droite  une  fort  jolie  cas- 
cade, n  s'en  faut  qu'elle  ait  la  majesté  de  la  Cachoeira  da 
Casca  d'Anta,  mais  elle  produit  dans  le  paysage  un  effet 
très-agréable.  Elle  peut  avoir  50  à  40  pieds,  et  tombe  du 
haut  d'un  rocher  grisâtre  et  i  pic,  couronné  par  d'énor- 
mes touffes  de  lichens  d'un  blanc  verdâtre.  Quelques  petits 


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IM  VOYAGE  «DX  SOURCES 

arbres,  qui  ont  pODseé  dans  les  fentes  du  rocher,  cachent 

en  partie  les  eaux  de  la  cascade,  qui  s'écoulent  dans  un 

rayln  profond ,  dont  les  cAtés  sont  revêtus  du  gazon  le  phH 

vert. 

Continuant  à  monter,  nous  laissâmes,  à  droite  et  à  gan- 
che,  tantAt  des  pâturages,  et  tantAt  des  bois  au  milieu  des- 
quels un  Vochyna  se  foisait  remarquer  par  une  immense 
quantité  de  fleurs  dorées,  disposées  en  longues  grappes. 

Au  bout  d'une  couple  d'heures,  nous  airivAmes  an  som- 
met  de  la  montagne. 

Lorsqu'on  découvre,  de  Plumhy,  la  Serra  da  Canastra, 
elle  semble  avoir  sa  plus  grande  longueur  dn  midi  au  nord, 
mais  il  n'en  est  réellement  pas  ainsi  ;  elle  n'a ,  dans  cette 
direction,  qu'A  peu  près  cinq  îegooê,  tandis  qu'elle  en  a 
beaucoup  plus  de  dix  d'orient  en  occident.  Son  cAté  orien- 
tal, celui  qui  se  présente  quand  on  vient  de  Pinrahy,  est  è 
peu  près  d'une  hautear  égale,  mais  elle  va  «i  s^  inclinant  de 
l'està  l'ouest.  A  son  sommet,  elle  oflRre,  dans  toute  sa  lon- 
gueur ,  un  vaste  plateau  inégal  que  les  habitants  dn  pays 
appeneotChapadôo,  mot  qui  est  un  augmentatirdecAâptufa, 
et  ne  signifie  pas  autre  chose  que  grand  plateau  (1  ].  De  là  je 
découvris  la  plus  vaste  étendue  de  pays  qui  peut-être  se  tùt 
offerte  k  mes  regards  depuis  que  f  existais  :  d'un  cAté  la 
Serra  de  Piumhy  bomaitrhorizon  ;  ailleurs  ma  vue  n'était 
limitée  que  par  sa  propre  faiblesse,  mais  aucun  village, 
ancunebabitation.ancun  point  remarquable  se  Axaient  RMs 

(1)  Oa  cn^nit,  d'après  l'eicelleota  urU  de  HH.  Spii  et  Hartius,  que 
la  Serra  da  Caoutra  s'étand  depuis  U  SgvTtt  Neçra  (de  Sabiri)  jusqu'au 
divigeiir  des  eaoi  de  5.  Fraucisco  et  du  Parauahyba  ;  mai»  ce  que  j'ai  dit 
de  cettr  montagne  prouve  suffi^aII]meDt  qu'elle  commence  ce  gréai  di- 
«Ueur  et  que,  tout  eotière.  elle  cq  fait  partie. 


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ou  RIO  DE  S.  ntANOSCO.  195 

regards;  piutout  ud  terrain  simplement  ondulé  et  un  mé- 
langé de  pâturages  naturels  et  de  bouqnets  de  boù;  je  n'a- 
percevais pas  même  le  village  de  Piamhy,  sans  doute  caché 
par  quelque  moroe. 

Le  Ckapadao  est  entièrement  inculte  et  inhabité  ;  il  n'a 
même  pas  encore  de  maître  (i819) ,  mais  les  propriétaires 
des  fuMndas  situées  au-dessous  de  la  montagne  envoient 
k«rs  bestiaui  paître  dans  les  parties  les  plus  voisines  de 
leurs  babitatioBS.  Dans  les  mois  de  juin  et  de  juillet,  il  gèle 
habituellement  sur  le  sommet  de  la  Serra  ;  cependant  les 
bétes  i  cornes  n'en  descendent  point  à  cette  époque,  tan- 
dis qn'dies  n'y  veulent  pas  rester  durant  la  saison  des  pluies, 
parce  qu'il  y  tcmbe  plus  d'eau  que  partout  ailleurg. 

Le  plateau  est  b-av»^  par  un  chemin  très-battu  qui  est 
la  continuation  de  celui  que  j'avais  suivi,  et  qui  a  deux  em- 
branchements, dont  l'un  conduit  au  village  de  Desemboque 
et  l'autre  jt  celui  de  Fronça  dont  je  parlerai  ailleurs.  Je  vis, 
en  plusieurs  endroits,  les  traces  des  feux  qu'avaient  allumés 
les  caravanes  ;  les  voyageurs  trouvent  de  l'eau  dans  la  mon- 
tagne, Doais  ils  y  chercheraient  vainement  un  abri. 

Les  parties  les  plus  élevées  du  plateau,  du  moins  celles 
que  j'ai  vues,  ne  présentent  guère  que  des  pierres  amonce- 
lées au  milieu  desquelles  croissent  abondamment  plusieurs 
espèces  de  Canela  i'Ema  { Velhsia)  et  la  Composée  d"  37â. 
Les  parties  les  plus  basses  sont  couvertes  de  pAturages  où 
l'herbe  est  plus  ou  moins  haute,  plus  ou  moins  épaisse, 
suivant  que  la  terre  végétale  se  bïiuve  mêlée  avec  le  sable 
dans  nue  proportion  plus  ou  moins  considérable.  Si  quelque 
filet  d'eau  s'échappe  sur  un  terrain  en  pente,  la  végétation 
y  est  plus  fraîche  et  plus  vigoureuse,  et  même,  en  certain:* 
endroits ,  il  eiiste  des  bouquets  de  bois. 


r„s,i,.,x,.i.  Google 


IM  VOYAGE  itUX  SOURCES 

Depuis  la  Serra  Tfcgra,  je  n'avais  vu  nulle  part  une  aussi 
grande  variété  de  plantes  que  dans  la  Serra  da  Canastra.  La 
fomille  qui  y  domine  est  celle  des  Composées.  Plusieurs 
Eriocmilon  y  croissent  aussi  en  grande  abondance,  et  là  ils 
trouvent,  comme  dans  les  montagnes  élevées  de  la  Serra  do 
Espinhaço,  ce  genre  de  terrain  qu'ils  préfèrent,  un  mélange 
de  sable  blanc  et  de  terre  végétale  noire.  La  Gentianée 
n'575,  la  Convolvulacée  n'STO,  les  Scrophularinée»  n^SSl 
et  577,  sont  aussi  très-communes  dans  lea  pâturages  du 
plateau  de  la  Serra  da  Canastra.  Quant  aux  Mélastomées, 
si  communes  dans  d'autres  montagnes,  je  n'en  trouvai  que 
six  espèces.  D'ailleurs ,  en  très-peu  de  temps ,  je  recueillis 
cinquante  espèces  de  plantes  que  je  n'avais  pas  encore  trou- 
vées dans  ce  voyage,  et  dont  plusieurs  m'étaient  entière- 
ment inconnues. 

En  descendant  de  la  Serra ,  je  jouis  dâicieusement  des 
beautés  de  la  campagne.  Le  temps  était  frais,  et  des  nuages 
blanchâtres  parcouraient  légèrement  un  ciel  d'un  bleu  ten- 
dre, un  peu  plus  brillant  que  cdui  du  nord  de  la  France 
pendant  les  beaux  jours  de  l'automne.  Cette  continuelle 
alternative  de  bois  et  de  pâturages,  la  diversité  de  teintes 
qui  en  résultait ,  le  contraste  de  la  plaine  et  de  la  montagne 
produisaient  un  effet  charmant. 

Dans  toute  ma  journée ,  je  n'aperçus  d'autre  mammifère 
qu'un  singe.  Comme  je  l'ai  déjà  dit.  les  habitants  du  Sertae 
(désert]  sont  tous  d'ardents  chasseurs  et  détruisent  les  ani- 
maux dont  la  peau  peut  être  un  objet  de  commerce;  je  ne 
passais  pas  devant  une  habitation  sans  y  voir  une  quantité 
considérable  de  grands  chiens  courants. 

Lorsque  j'étais  à  la  Pazenda  do  Geraido,  ceux  du  pro- 
priétaire tuèrent  un  jeune  (apir.  Je  don^^erai  ici  quelques 


.;.  Google 


DD  BIO  DE  S.  FBAMCfSCO.  lOT 

détails  sur  son  pelage  pour  cootriboer  à  compléta  ce  que 
dit  l'exact  d'Azzara  (4)  des  petits  de  cette  espèce.  Le  jeune 
individu  de  la  Fazeoda  do  Geraido  avait  le  ventre  entière- 
ment Ubdc,  le  dos  et  les  câtés  d'un  gris  foncé  couleur  de 
cendre  qui  devenait  plus  pâle  dans  le  voisinage  du  ven- 
tre et  était  coupé  de  lignes  blanches  longitudinales.  De 
chaque  calé  du  milieu  du  dos,  trois  de  ces  lignes  s'éten- 
daient dans  toute  la  longueur  du  corps  ;  chacune  d'elles 
avait  environ  i  centimètre  de  largeur,  et  les  bandes  grises 
qui  atternairat  avec  les  blanches  étaient  larges  d'environ 
5  centimètres  et  tachetées  de  points  blancs.  Outre  les  six 
bandes  blanches  dont  je  viens  de  parler ,  on  en  voyait ,  sur 
les  côtés,  plusieurs  antres  incomplètes. 

Pendant  mon  séjour  à  la  Fazenda  do  Geraido ,  José 
Marianno  chassa  et  prépara  des  oiseaux.  Il  était  déjà  fort 
habile  dans  cet  art,  et,  quoique  je  n'eusse  pas  de  tocador, 
la  taxidermie  ne  paraissait  rien  prendre  sur  le  soin  des 
mulets. 

Le  chemin  que  je  suivis  en  quittant  la  Fazenda  do  Ge- 
raido et  qui  mène  au  village  d'Àraxâ ,  où  j'allais  bientôt 
arriver,  est  parallèle  è  la  Serra  da  Canastra  et  s'en  éloigne 
peu.  Le  flanc  de  cette  énorme  montagne  continue  i  n'offrir 
ancone  anflractnosité  remarquable,  et,  presque  partout,  il 
est  revêtu  d'une  verdure  très-fratche.  Je  longeai  (l'abord 
tout  le  côté  oriental,  mais  j'atteignis  son  extrémité  un  peu 
avant  d'arriver  è  la  fazenda  de  Manoel  AMonio  Simôes,  où 
je  fis  halte,  et  alors  je  tournai  parallèlement  au  côté  sep- 
tentrional. 

Je  n'avais  bit  qu'une  demi-lieue  environ,  è  partir  de  la 

(I)  Euai  mr  te*  qMadntpide*  du  Paraguay,  I,  2. 


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198  VAÏAGE  ftUX  SOUfCES 

Faaends  do  Geraido,  quand  je  vis,  à  qnelqDe  disUace,  une 
Mie  cascade  tomber  du  haut  de  l«  montagae,  en  s'épu- 
chant  sur  des  rochers  grisitres  et  à  pic.  Le  sommet  de  ces 
rochers  est  couronflé  par  des  bois,  et  quelques  arbres  oDt 
poussé  (À  et  là  entre  les  fentes  des  pierra.  Mais  une 
cascade  empruate  une  partie  de  sa  beau^  du  cootrasle  que 
forme  le  mouvemeat  des  eaux  iTec  l'iaHwbilité  des  objeti 
enviroaoaRts  ;  quand  ou  k  làt  de  iota,  elle  paraît  aussi  ôq- 
mobile  qu'eus ,  et  ne  s'en  distingne  que  par  une  diffëreooe 
de  couleur;  ce  c'est  {dus  qu'un  tableau  sans  vie. 

Le  pays  que  je  parcouma  entre  la  f>uenda  do  Geraido  et 
celle  de  Manoel  Antonio  Simdes  est  mootueux  et  offire  en- 
core nue  alternative  de  bois  et  de  pâturages  de  la  |riu8  beUe 
Vfvdure.  Les  fleurs  étaient  peu  aoAbreuses  ;  oepeadant 
un  des  pâturages  que  je  traversai  en  ofiireit  de  charmantes, 
luie  Mimose  élégaate  (q°  41 1  ],  use  belle  Gentianée  À  fleurs 
Ueues{n''206),  et  une  Malpighiée  à  fleurs  roses  (d"  117). 
La  fazenda  de  Manoel  Antonio  Simôes  me  parut  avoir  été 
considérable,  mais  elle  avait  suivi  le  sort  du  vieillard  dé- 
croît   qui  elle  appartenait  ;  tous  les  bâtiments  qui  en  dé- 
paidaient  tombaient  en  raine. 

On  m'avait  indiqué,  pour  y  placer  mes  effets  et  m'y  lo- 
ger, une  des  petites  oiaisonnettes  dont  se  composent,  es 
général ,  les  fcaendai  de  ce  pays  désert  ;  mais  je  la  trouvai 
si  sale,  ù  peu  comaiode,  que  j'en  demandai  une  autre,  en 
traitant  le  pauvre  vieillard  un  peu  cavalièrement.  11  n'avait 
réelleoieat  rien  de  mieux  à  m' offrir  :  la  maisonnette  fut  ba- 
layée, et  je  m'y  établis;  mais  je  craignais  beaucoup  pow  la 
nuit  la  visite  des  pourceaux,  car  la  maison  n'avait  point 
de  porte,  et  ses  murailles  étaient  simplement  formées  de 
grands  pieux  mal  rapprochés.  Non  vieil  Mte  m'invita  à  par- 


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m  BfO  DE  fi.  FUNCi&CO.  IM 

tager  «oo  dîner,  etJetAcliai  d'expier  ma  preoùère  impcdi- 
tesse  par  tonte  .SMte  d'égards. 

U  est  difficile  d'imaginer  une  posiliiHl  plus  «gréable  que 
ccUe  de  la  fatnda  de  Manod  Antooio  Simdes.  Elle  est  si- 
tuée dam  UD  food,  sur  le  bord  d'uD  misseau  limpide,  et 
«Rtourée  par  des  oollioe»  peu  ^e¥ée8  couFertes  de  pAhva- 
ges.  Vers  le  midi ,  l'horizoa  est  borné  par  ta  Serra  da  Ca- 
nastra,  qui  n'est  guère  qu'à  ua  quart  de  lieue  de  l'habito- 
lîoD  eH  d'où  l'on  voit  tonber  deux  cascades  peu  éloignées 
l'ODederatUre. 

La  ptuB  considéraUe  est  plus  rapprochée  du  cAté  oriea- 
tal  de  la  Serra  et  porte  le  nom  4e  Cwhoeira  do  Rollim.  A 
l'endroit  où  elle  twnbe,  la  montagne  présente,  dans  stm 
flanc,  UD  eafoncement  dont  la  îorme  raj^Ue,  d'une  ma-r 
nière  impai^le,  celle  d'un  bémicyde.  L'eau  ne  se  préei- 
pite  point  de  la  cime  même  de  la  montagne;  celle-ci,  qni 
est  couronnée  par  un  bouquet  de  bois,  B'iacline  d'abord  en 
Tormaot  une  pente  douce  couvole  de  gazon  ;  puis ,  tout  à 
coup,  elle  n'offre  plus  que  des  rocfaers  bus  et  i  pic,  et  c'est 
dans  ta  partie  la  plus  enfoncée  de  ces  rochers  que  s'épan- 
che une  belle  nappe  d'eau  plus  blanche  que  la  neige.  On  ne 
voit  cependant  pas  l'eau  tomber  jusqu'au  pied  de  la  monta- 
gne ;  elle  semble  s'arrêter  vers  le  milieu  de  celle-ci ,  sur  un 
second  plan  de  rochers  plus  avancé,  et  là  elle  s'écoule  dans 
une  crevasse  profonde  cachée  par  des  arbres.  Dans  la  sai- 
son des  pluies,  la  u^pe  d'eau  devient,  ditH)ii,  très-coosi- 
dérablé,  et  fait  un  bruit  que  l'on  entend  de  fort  loin.  4u- 
deseous  du  second  plan  de  rochers  dont  j'ai  parlé  tout  à 
l'heure,  la  montagne  ne  présente  plus  qu'une  pente  très- 
douoe  où  s'écoule,  surun  lit  de  pierres  et  de  sable,  la  rivière 
de  S.  AiUotûo,  que  forment  les  eaux  de  la  cascade  et  dont 


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300  VOTAOE  AUX  SOUMCES 

les  bords  sont  dessinés  par  une  lisière  de  bois.  A  droite  et  i 
gauctie  de  la  cascade,  le  flanc  nseï  escarpé  de  la  moDt^^ne 
est  coarert  de  gazons  au  mîlien  desquels  des  rochers  nus 
se  montrent  (À  et  là.  Telle  est  l'idée  qae  je  pris  de  la  Ca- 
choeira  do  Rollim,  non-seulement  en  la  Toyant  de  la  mai- 
son de  Manoel  Antonio  SimOes,  mais  encore  en  m'en  rsp- 
procbant  autant  qu'il  me  Ait  possible  dans  le  court  espace 
de  temps  dont  je  pouvais  disposer. 

Quant  à  la  seconde  cascade,  je  la  ris  seulement  de  la 
maison  de  Manoel  Antonio  Simôes.  A  l'endroit  oà  die 
tombe,  le  flanc  de  la  montagne  présente,  dans  une  hauteur 
«sseï  considérable,  une  pente  qui  n'a  aucune  roideuret 
offre  des  gazons.  Au  milieu  de  ces  derniers,  on  voit  une 
crevasse  profonde,  d'où  s'échappent  deux  filets  d'eau  qui, 
après  3*  être  écoulés  sur  des  rochers  k  pic ,  forment  aussi  un 
ruisseau.  Celui-ci ,  comme  le  Rio  de  S.  Antonio ,  doit  se 
réunir  au  S.  Francisco  ou  k  l'un  de  ses  affluents. 

Après  avoir  quitté  la  {axmàa  de  Manoel  Antonio  Simôee , 
je  passai  le  Rio  de  S.  Antonio,  et,  pendant  plusieurs  lieues, 
je  marchai  parallèlement  i  celui  des  côtés  de  la  Serra  qui 
est  à  peu  près  tourné  vers  te  nord ,  traversant  la  chaîne 
dans  sa  largeur  et  me  dirigeant  vers  Araxé. 

Le  cAté  septentrional  de  la  Serra  da  Canastra  n'est  pas, 
A  beaucoup  près,  taillé  à  pic  comme  celui  du  midi ,  d'où 
s'échappe  la  Cachoeira  da  Casca  d'Anta;  cependant  il  est 
plus  escarpé  que  le  cAté  qui  regarde  à  peu  près  l'orient  ;  il 
l'est  même  asseï  pour  paraître  de  loin  presque  vertical  et 
contribuer  à  donner  à  la  montagne  cette  forme  de  coffre 
qui  lui  a  valu  son  nom. 

Tant  que  je  pus  apercevoir  la  Serra  da  Canastra ,  je  jouis 
d'une  fort  belle  vue.  Sur  la  droite,  je  découvrais  une  vaste 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  Wt 

éteodue  de  pâturages,  et  j' avais  à  gauche  le  Serra  du  haut 
de  laquelle  tombent  quatre  cascades. 

J'avais  commencé  à  monter,  n'étant  qu'à  peu  de  dMance 
de  la  faxetida  de  Manoel  Antonio  Simôes,  et  je  continnai  i 
parcourir  un  pays  très-montagneux,  oà  l'on  trouve  des 
mines  de  fer  et  qui  offre  de  vastes  pAturages  parsemés  de 
quelques  bouquets.de  bois.  Ce  jour-li,  }e  fis  5  Ugoat,  et 
je  n'aperçus  pas  une  seule  maisonnette,  quoique  souTent 
une  immense  étendue  de  terrain  s'offrtt  à  mes  regards  ;  je 
ne  vis  non  plus  la  moindre  trace  de  culture  ;  je  ne  rencon- 
trai pas  QD  seul  voyageur  ;  de  loin  en  loin ,  je  découvrais 
seulement  quelques  bétes  à  cornes  au  milieu  de  pâturages 
qui  me  semblaient  pouvoir  en  nourrir  une  quantité  in- 
nombrable. Dans  un  espace  de  4  legoai,  à  partir  de  la 
fazmàa  de  Manoel  Antonio  Sim5es ,  je  ne  trouvai  pas  une 
seule  goutte  d'eau,  ce  qui  est  étonnant  pour  cette  con- 
trée, où  ordinairement  on  rencontre  sans  cesse  des  ruis- 
seaux. 

Depuis  le  canton  de  Rio  Grande ,  je  n'avais  pas  vu  de 
p&turages  aussi  bons  que  ceux  des  environs  de  la  Serra  da 
Canastra  :  partout  c'est  la  Graminée  n*  355  qui  j  domine, 
â,  comme  je  l'ai  dit,  elle  engraisse  beaucoup  les  bestiaux, 
qui  en  sont  très-friands.  Entre  Antonio  SimOes  et  Paiol 
Qumnado,  dans  les  parties  les  moins  élevées,  où,  de  temps 
à  autre ,  on  brûle  les  pAturages,  je  trouvai  ceux-ci  de  la 
plus  belle  verdure;  sur  les  sommets  ,  au  contraire ,  où  il 
parsJt  que  l'on  met  le  feu  très-rarement,  l'herbe  avait  la 
même  hauteur  et  la  même  teinte  que  celle  de  nos  prairies, 
quinze  jours  avant  qu'on  la  coupe.  Des  plantes  autres  que 
les  Graminées  ne  sont  pas  fort  communes  dans  ces  campo»; 
je  n'en  vis  presque  point  en  fleur,  et,  malgré  la  longueur 


^dr^i'Googlc 


m»  VOYAOB  tUK  SOUBCES 

du  voyage,  ma  réotrite  entre  Manod  Antonio  SimOes  et 
Paiol  Queimado  fut  presque  nulle. 

A  pea  de  dntaDce  de  la  premiàre  de  ces  ftumdat,  f  a- 
vaifl  tnrrené  d'immeiues  eamfo»  qae  l'on  avait  brAlés  il  y 
avsit  pea  de  }ours.  Dans  les  parties  de  la  ^woriiice  des 
Mines  que  j'araja  parcourues  jiuqu'alors,  on  met  le  feu  au 
pâturages  vers  la  fin  du  temps  de  la  séeberease  ,  fi.  c'est 
uniquement  quelques  parties  réservées  dans  le  canton  de 
Rio  Grande,  pour  les  vaches  à  lait,  que  l'on  iocendieà 
d'autres  époques.  Ici ,  au  cmtraire ,  où ,  dit-on ,  l' herbe  ne 
sèche  jamais  entièrement,  on  met  le  feu  aux  pAturages  ïn- 
difKremment  dans  toutes  les  saisons;  mais  les  cnltivatean 
croient  devoir  ne  le  ftire  que  lorsque  la  lune  est  dans  son 
décours. 

Dans  la  Serra  da  Canastra  et  cbee  Geraldo ,  f  avais  été 
fort  tourmenté  par  ces  petites  moaches  noirea  appelées 
6ernuA«idM(1],  qui,  «près  avoir  piqué,  laissent  sur  la 
peau  une  marque  rouge;  mais  nulle  part  je  n'en  avais  vu 
une  aussi  grande  quantité  que  dans  les  i^tarages  nouvel- 
lement incendiés  dont  j'ai  parlé  tout  à  l'beuFe.  Ces  in- 
sectes me  couvraient  le  visage  et  les  mains,  et  j'étais  obligé, 
pour  les  écarter,  d'jivoir  flans  cesse  recours  k  mon  mou- 
choir. 

Il  y  avait  huit  heures  que  j'étais  parti  de  la  fasmda  de 
Manod  Antonio  Sindes ,  lorsqoe  j'arrivai  à  celle  de  Paioi 
Qy^mada  (grange  brûlée),  où  je  fis  halte.  J'avais  Eait, 
comme  je  viens  de  le  dit« ,  5  Ugatu,  et,  dans  ce  pays,  c'est 
une  très-AHie  joamée  pour  des  voyageurs  qoi  ont  une 

(1)  J'ai  parlé  des  borrofbudoi  dans  mou  Voyage  dans  le»  pi-ovinrei 
UeRiode  }a7ieiri>,eic.,l,yi.Ti.Pohl,qw  («sa  ir^-bien  Hgnn^,  trs 
nomme  Himulinm  pertinar  [KHtt,  I). 


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DO  BIO  DB  S.  FBAHOESOO.  KM 

loQgne  route  à  parcourir  et  marcheot  avec  des  mulets 
châtiés  de  bagage. 

Je  ne  saurais  dire  bien  po^Tement  quel  point  forme  la 
limite  de  la  cofRorca  de  S.  Joâod'EI  Rei(l};  mais  il  est 
vraisemblable  que  je  la  IraiM^  dans  cette  journée,  ou  que 
je  l'avais  passée  la  veille,  lorsque  j" avais  commencé  à  suivre 
le  cdté  septentrional  de  la  Serra  da  Canastra,  pour  traverser 
la  cwdilière  dont  oette  montagne  lait  partie ,  et  que  j'  »f- 
pelle  Serra  do  S.  Franeùeo  t  da  Paranahyba.  De  la  eo- 
marca  de  S.  Joâo',  je  passai  dans  celle  de  Paracatà  et  sur 
le  territoire  de  la  justice  {jvlgado)  d'Ârax&,  qui  eu  dépend 
ai^ourd'ltui  (1849). 

(1)  DeceqaeiUfftéchwegtiBrat.rtewWell,  I.  tM),  oopeutseu- 
lemeDt  coodare  qne  la  limite  est  itas  la  cordilièTe  mfime ,  et  Caul 
iCorog.  Braz.,  I,  S82)  se  cont«Dl«  d'iadlquet  celle-ci  comine  la  limile. 


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TOTAOE  kVX  SOORCES 


CHAPITRE  XI: 

COUP  S'OEIL  GÉNÉRAL  SCS  LA  COHABCA  DE  PARACATÉ  (1). 


Limites  et  ét«Ddne  de  la  eomarca  de  Parautù.  —  St  popnlation.  —  Idée 
génénle  des  chaînes  de  montagoea  qu'on  traverse  pour  se  rendre  de 
Rio  de  Janeiro  daos  la  eomarca  de  Paracatù.  —  Da  dhisenr  des  eani 
do  S.  Francisco  et  da  Rio  ParauabjbA.  —  La  Serra  da*  VerlenUt  de 
Ton  Eschwege.  —  Description  exacte  due  k  l'abbé  Caial.  ^  La  Srrra 
dot  VerttnUi  de  Balbi.  ^  Système  de  Domenclatnre  pour  les  moDla- 
gnea  du  Brésil.  —  Idée  générale  de  la  Serra  do  S.  Francitco  e  da 
ParatMhyba.  -—  Rivières  de  la  eomarca  de  Paracatù.  —  Villes  et  vil- 
lages de  celte  eomarca.  —  Caractère  de  ses  habitants.  —  Leurs  de- 
meares.  —  Leurs  orcnpationa.  —  Fertilité  de  leurs  terres.  —  Hanioc. 

—  Le  eapita  gordura ;  ses  limites;  sa  patrie.  —  Les  biles  k  cornes. 

—  Les  montODS.  —  Surface  da  pajs.  —  Sa  végétatian.  —  Sécheresse  : 
disette.  —  DitDcnltés  et  ennuis  des  voyages  dans  ce  pajs.  —  Éléments 
de  prospérité  que  renferme  la  eomarca  de  Paracatù. 


La  eomarca  de  Paracatù  a  été  longtemps  comprise  dans 
celle  de  Sabari  et  en  était  la  partie  la  plus  occidentele  ; 
maison  l'en  sépara  par  un  décret  [alvarâ]  da  17  juin 
1815  (â),  et  un  autre  décret  du  4  avril  1810  réunit  à  la 
noiivelle  eomarca  les  justices  [julgadot]  d'AraxA  et  de  De- 

(1)  Poar  bien  comprendre  lei  premières  pages  de  ce  chapitre,  il  est  bon 
d'avoir  soos  les  revx  une  carte  générale  du  Brésil ,  par  eiemplc ,  celle 
de  Brué. 

i3)  Cette  date  est  empruntée  i  Caial  iCnrog.,  1 ,  3021. 


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DU  Rro  DE  s.  FRANCISCO.  305 

semboque,  qui  jusqu'alors  avaient  appartenu  à  la-prorincc 
de  Goyaz. 

Cette-  comarca  est  formée  de  deux  parties  :  l'une  au 
nord,  plus  orientale,  l'autre  au  midi,  plus  occidentale,  qui, 
comme  deux  cases  de  même  couleur  dans  un  échiquier, 
se  touchent  par  un  de  leurs  angles;  et  la  cbatne  que  j'ap- 
pelle Serra  do  S.  Francùco  e  àa  Paranah^ba  est  la  ligne 
qui  borne  la  partie  la  plus  orientale  du  càtë  de  l'ouest ,  tan- 
dis qu'elle  borne  Ea  partie  la  plus  oncideutale  du  cAté  de 
l'est.  Si  l'on  veut  indiquer  d'une  manière  plus  précise  les 
limites  de  la  cojtiarca  de  Faracatù,  on  dira  qu'au  sud  le  Rio 
Grande  coule  entre  elle  et  la  province  de  S.  Paul  ;  qu'  au  nord 
elle  est  bornée  par  iafCarwihanha  (1),  qui,  lors  de  noon 
voyage ,  la  séparait  de  la  province  de  Femambouc  ;  qu'à 
l'ouest  le  grand  diviseur  des  eaux  du  S.  Francisco  et  du 
Tocantins  (S] ,  le  Rio  S.  Marcos  et  le  Paranahyba  la  sépa- 
rent de  Goyaz  (3);  enfin  que  ses  limites  orientales  sont  le 
Rio  de  S.  Francisco ,  XAhaité,  XAbaité  do  Std  et  la  partie 
la  plus  méridionale  de  la  Serra  das  Vertentes  (Eschw.  ] , 
partie  que  je  nomme,  comme  on  va  le  voir.  Serra  do 
S.  Francisco  e  da  Paranahyba. 

Cette  immense  subdivisiond' une  immense  province  com- 

41)  J'ai  dit  ailleQrs  que  l'oD  avait  Écrit  Caryntianha  et  Carinhanlta. 
On  inmve  anssi  dans  Caial  Carinhenha  et  Carynheitha ,  et  c'Mt  ce 
dernier  inot  qu'a  admis  Gardner.  Dans  le  pays ,  j'ai  enteadu  prononcer 
CanmAanha,  comme  a  rassi  écrit  Fiurro. 

(3)  Ce  diTiaenr  est  celui  qne  j'appelle ,  comne  od  le  verra  ptos  bas , 
Serra  do  s.  Franciteo  t  do  ToeatUin». 

(3)  Ce  qne  je  dis  ici  snr  les  limitte  occidentales  de  la  eomareu  de  Pa- 
raeatù  doit  servir  i  rwtifler  celles  qae  j'ai  indiqni^es  aiUeara,  aur  la  foi 
de  PiiUTo,  ponr  Minas  G«raet  et  Gof ai  (  Vofiage  doM  lei  provineti  lie 
Kio  d«  Janeiro,  etc.,  1 ,  74). 


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XM  TOYAOB  AUX  SOOECES 

prend  plusdeSdegréa  de  laUtude,et,8mTaiitd'Eschwege(4], 
5,888  îegotu  carrées,  sur  lesquelles,  d'après  iemënie  au- 
teur, ilexistait,  en  1831,  une  population  de21,772ha' 
bitants,  ce  qui  ne  fait  pas  même  six  individus  par  lieue 
carrée  {8}. 

J'ai  dit  aillours  (3)  qu'une  chaîne  de  montagnes  qu'on 
doit  appeler  Serra  do  Mot  se  prolonge,  le  long  de  la  ma, 
dans  une  grande  partie  du  Brésil;  qu'une  autre  chaîne , 
presque  parallèle  à  la  première,  mais  plus  élevée,  la  Serra 
do  Espinhaço  (  Esdiw .  ] ,  s' avance  à  peu  près  du  nord-est  de 
la  province  de  S.  Paul ,  ne  laissant  guère  qu'une  distance 
de  30  à  60  lieues  entre  elle  et  la  cordillère  maritime; 
qu'elle  divise  les  eaux  du  Rio  Doce  et  du  S.  Francisco,  et 
va  se  perdre  dans  le  nord  du  Brésil  ;  qu'à  l'ouest  de  celle- 
ci,  le  terrain  s'abaisse  peu  à  peu  jusqu'au  Rio  de  S.  Fran- 
cisco, nudsque,  toujours  dans  la  direction  de  l'occidaat , 
le  Bol  s'élève,  pour  la  deuxième  fois  ,  jusqu'à  une  chaîne 
qui  sépare  les  eaux  du  même  fleave  de  celles  du  Parana- 
byba  (4).  C'est  cette  demi^  chaîne  qui ,  du  câté  de  l'est, 

(1)  B%iU.FéTuuaeK.Qioç.,Ti-m.VI. 

<3)  SniTODt  VD  Ublean  envoyé  aa  gouvernemeal  par  Vowoidor  <te  St- 
bara ,  et  cité  par  PiiSTro  et  par  le  detembargador  A.  R.  Veloso  de  Oli- 
Teira  [  /innatt  Flumininê  ) ,  la  populatiOD  de  la  romarea  de  Paracatâ 
annil  monU,  ta  1818,  à  59,053  habitants.  Q  eal  difficile  de  wtoit  lequel 
des  deni  chifhM ,  m  diffireota  l'an  de  ranire,  est  k  plus  «uct  :  u  qa'il 
y  a  de  sAr,  e'esi  qne  j'ai  rencontré  bien  peu  de  aïoode  daiu  ce  pajs. 

(3)  Tojei  moQ  Vo^iage  4ant  le»  prooiMcf  de  Rio  dt  Janeiro ,  e(c^ 
1,89. 

(4i  En  faisant  conoattre  pour  la  {vemière  foia  cette  disposition  d'une 
partie  dn  sol  bi^ilien.  j'ai  éeril,  «iKima  a  fait  rtcemmoat  le  célibre 
g^oftapbe  Balbi,  que  le  diviMur  d'eaux  dool  je  parle  ici  s'étendait  entre 
les  afllnents  da  S.  Francisco  et  ceui  dn  Parauni  :  il  eût  él^  pins  eiaet 
d'indiquer  le  Paranahjba,  ainsi  que  je  le  bis  k  présent,  car  le  Paraoai  «si 


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DU  UO  DE  9.  FUNCISCO.  SOT 

sépare  la  comarea  de  Paracatù  de  celle  du  Rio  das  Mortes 
ou  de  S.  Joào  d'Kl  Rei ,  comme  c'est  elle  qui ,  du  c4té  de 
roccideot ,  la  sépare  de  la  provioce  de  Goyaz  [1}  ;  et,  par 
cooséqueDt,  elle  est,  ainsi  qu'on  l'a  vu,  entre  les  deux 
parties  de  la  comarec,  l'une  au  uord-est  et  l'autre  au  sud- 
oaest,  ce  que  serait  la  ligne  fornaée  par  deus  cases  d' échi- 
quier se  touchant  seulement  par  un  de  leurs  angles.  Cette 
chaîne  se  continue  vers  le  sud,  puisqu'il  n'y  a,  entre  la 
Serra  da  Canastra ,  qui  en  fait  partie .  et  les  moDlagnes  de  - 
la  Serra  do  Rio  Grande ,  qu'un  déâléde  très-peu  d'étendue 
(voir  le  chapitre  précédent);  elle  donne  passage  au  Rio 
Grande,  fournit  quelques  petits  afBuenta  à  ce  dernier,  et, 
prenant  le  nom  de  Serra  de  Mug^f^vastu,  elle  s'avance 
dans  la  province  de  S.  Paul ,  où  elle  parait  former  une 
sorte  de  nœud  avec  la  partie  de  la  Serra  do  Ëspinhaço ,  ap^ 
pelée  Serra  da  Maotiqueira  (2].  Du  c6té  opposé,  elle  se  pro- 
longe, vers  le  septentrion ,  jusqu'aux  limites  de  la  province 
de  Piauhy,  bornant  toujours  le  bassin  du  S.  Francisco  ; 
mais  si,  à  l'est,  elle  ne  cesse  de  donner  des  afOuents  à  ce 
fleuve,  à  l'ouest  elle  n'en  envoie  au  Paranahyba  que  dans 
sa  partie  méridionale,  et,  plus  au  nord,  c'est  a»  Rio  do 
Tocantins  qu'elle  fournit  de»  eaux. 

Considérée  s^emeot  comme  dîvisenr   des  eaux  dn 
S.  Pranosco  et  du  Paranahyba,  il  est  bien  clair  qu'elle  ne 

fonnj  par  la  r^anian  dn  ParaDah]>bsetdulUo  Grande,  el  aucim  aftliieat 
venant  de  U  chaîne  doni  il  s'agit  ue  se  jette  immédiatement  dans  le  Pa- 
ranai  (wjta  Cie-,  Corog.,  1 ,  205 ,  et  U  earle  géufrale  de  MH.  Spii  et 
Marliiu).  J'avais  aussi  donné  le  nom  d«  plateau  an  diviseur  des  eaui  dn 
5.  Franciseo  et  du  Parmalij'ba;  celui  de  chaîne  ou  de  tordllière  eât  été 
plus  rouveuablc. 

(1)  Ciï.,  Corog.,  l,  318. 

,•>}  Bra*.  noie  WeU ,  1 ,  50.  —  Voj'ei  aussi  la  carie  de  Braé. 


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206  VOYAGE  AVX  SOURCES 

s' étend  pas  au  delà  des  sources  de  ces  deux  rivières,  dont  la 
première  coule  vers  le  nord  et  la  seconde  vers  le  sud ,  ou , 
si  l'on  aime  mieux,  elle  sera  limitée  par  deus  autres  divi- 
seurs d'eaui  qui  lui  sont  à  peu  près  perpendiculaires  :  l'un 
qui ,  partant,  au  sud,  du  versant  oriental ,  va,  comme  je  l'ai 
dit,  r^oindre  la  Serra  do  Espinhaço,  et  fournit  tout  à  la 
fois  des  affluents  au  Rio  Grande  et  les  premiers  affluents  du 
S.  Francisco  dont  il  borne  le  bassin  ;  l'autre  qui ,  i  l'extré- 
mité Dord,  se  rattache  au  versant  occidental  ti  d'où  nais- 
sent, du  cdté  du  septentrion,  les  sources  du  Rio  do  Tocan- 
tios  et,  au  midi,  celles  du  ^orum&d.  Eo  un  mot,  la  dialne 
ou  plulAt  la  portion  de  chaîne  qui  divise  les  eaux  du  S.  Fran- 
cisco de  celles  du  Rio  Paranahyba  peut  être  représentée  par 
le  corps  d'un  Z  entre  les  deux  lignes  transversales  qui  te 
bornent,  et  qui  représenteraient,  si  je  puis  m'expri'mer 
ainsi,  l'une,  la  tète  du  bassin  du  S.  Francisco,  l'autre  celle 
du  bassin  du  Tocantins. 

Dans  un  morceau  du  pins  haut  intérêt  où  il  fait  parfaite- 
ment connaître  la  surface  du  Brésil ,  d'Eschwege  indique 
une  Serra  das  VertenUt  [1)  qui  formerait  une  vaste  cour- 
bure et  diviserait  les  eaux  du  nord  de  celles  du  sud,  com- 
prenant la  Serra  da  Canasba,  les  Pyreoeos  et  les  montagnes 
du  Xingù  ei  du  Cuyabâ.  Le ,  malheureusement,  se  borne 
la  description  du  savant  écrivain,  qui  ne  dit,  d'ailleurs,  ni 
où  finit  ni  où  commence  cette  Serra  das  Vertentes  ;  et  peut- 
être  même  la  seule  induction  doit  nous  faire  croire  qu'il 
considère  les  Montes  Pyreneos  comme  en  faisant  partie.  Si 
la  Serra  das  Vertentes  se  compose  tout  à  )a  fois  des  Montes 
Pyreneos  et  de  la  Serra  da  Canastra,  elle  changerait  de  di- 

(1)  BratiUen  die  New  WeU.l,tGt. 


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DC  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  309 

rection  dans  son  étendue ,  elle  formerait ,  comme  dit  l'au- 
teur all^nand,  une  vaste  courbure,  et  comprendrait  en 
mime  temps  des  tètes  de  bassin  et  des  limites  latérales  ;  or 
on  peut  demander  ce  que  serait ,  dans  ce  cas ,  le  prolonge- 
meotdu  diviseur  des  eaux  duS.  Francisco  et  du  Paranahyba. 
prolongement  qui,  dans  une  étendue  immense,  suit  la  même 
direction  qae  ce  diviseur,  qui  continue  à  limiter  le  bassin 
du  S.  Francisco  et  è  envoyer  des  affluents  à  ce  fleuve,  tout 
en  fournissant  des  eaux,  de  son  revers  opposé,  au  Rio  do 
Tocantins;  il  faudrait  sans  doute  le  considérer  comme  un 
simple  chaînon  de  la  Serra  das  Vertentes,  mais  une  suite 
de  monts  et  de  hauteurs  limitant  le  même  bassin  et  s'éten- 
dant  parallèlement  à  une  de  ses  rives ,  sans  déviation  au- 
cune, doit  certainement  être  considérée  comme  une  chatoe 
unique;  le  chaînon,  au  contraire,  serait  la  croupe  qui, 
partant  des  Pyreneos  continus  rax-mèmes,  avec  d'autres 
monts  plus  occidentaux,  forme  un  angle  avec  la  chatue  vé- 
ritable, ne  la  prolonge  point  dans  une  m^e  direction,  s'ar- 
rête à  elle  et  ne  forme  la  limite  latérale  du  bassin  d'aucun 
fleuve  (1). 

Casai ,  bien  moins  savant  que  le  colonel  allemand,  mais 
dont  l'exactitude  et  les  longues  recherches  méritent  la  plus 
grande  estime,  ne  distingue  point,  à  la  vérité,  les  deux 

fl)  s  H.  Lniz  Antonio  da  Silva  e  Sousa  [ilemoria  etlalira  da  provin- 
tia  dt  Goyaz ,  183!  )  parait  proresscr  une  opinion  analogue  k  celle  de 
H  [TEMbwege ,  di  Caaha  Matlos  partage  eulièremeot  la  mienne.  El  re- 
garde comme  otie  seale  chaîne ,  qu'il  appelle  Serra  Gérai ,  les  moo- 
UgofS  qoi  commencent  an  midi  de  la  Serra  da  Canastra,  arrivent  an 
Registro  dOB  Arrependidos  et  se  conlinnent  jusque  dans  la  province  de 
Piauhj  ;  puis  il  recoDuatt  que  la  chaîne  k  laquelle  appartiennent  les  Hou- 
les P;reueos ,  tout  en  abouli&ganl  à  la  Serra  Gérai ,  forme  pourlanl  un 
autre  ajstèmt  {llintrario,  etc.,  II  v 

1.  Il 


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210  TOYâGE  AUX  SOURCES 

parties  de  la  chatoe  ;  celle  qni,  plus  méridionsle,  envoie 
des  eaux  au  Rio  Paranahyba,  et  l'autre  qui,  au  nord,  en 
Iburpit  an  Tocantîns;  mais,  d'ailleurs,  il  reconnaît  parfai- 
tement que  cette  dulne,  quoique  changeant  souvent  de 
nom,  est  réellement  une,  qu'elle  se  dirige  du  sud  ao  OOTd, 
séparant  tioyaz  de  Minas  et  de  Feroambouc,  (4  qu'elle  est 
seulement  interrompue  par  des  défilés  (boguêirÔei}  {i). 

Le  vague  qui  règne  dans  la  description  de  la  Serra  das 
Vertentesesttel  que  M.  Martius  paraîtrait  croire  (3],  comme 
j'avais  d'abord  fait  moi-même,  qu'Eschwege  limite  cette 
Serra  au  diviseur  des  eaux  du  S.  Francisco  et  du  Rio  Para- 
nahyba,  tandis  que  l'exeeUent  géographe  Baibi,  damnant 
une  idée  de  l'ensemUe  des  croupes  qui  séparent  toutes  les 
eaux  du  nord  de  celles  du  midi .  étend'  la  Serra  das  Ver- 
tentes  depuis  Ja  frontière  de  la  provioce  de  Ceari  jusqu'i 
l'extrémité  méridionale  de  celle  de  Matogrosso,  et  ne  parle 
des  Serras  Negra,  da  Canastra,  da  Harcella  et  dos  Cristaes 
que  comme  d'un  chatuon  d' une  vaste  chaîne  (5). 

Dans  un  tableau  rapide,  il  est  philosophique,  sans  doute, 
de  faire  voir  d'un  coup  d'œil  et  nème  d'indiquer  par  un 
seul  nom  rensemble  des  montagnes  qui ,  se  prolongeant 


(1)  Corografla,  I,  319.  —  M.  F.  Denis,  kqni  l'on  doit  les  rechercliei 
l«s  plus  coDscienciensea  SUT  l'histoire  du  Erfeilel  boo  ttBlictnel.s  con- 
saeréle  nom  ie  pirt  àt  la  g^raphie  bTétiUtniu,  quej'«rai*crapoa- 
Tolr  doDDCT  k  l'abbé  Nanoel  ijres  dt  Cusl.  J'ii  vu  «Dg»i  kk  griad 
plâUliqne,  k  Rio  de  Janeiro,  on  rend  toute  joctice  à  l'aalear  de  II  Co- 
rografia  BraiiUea,  qu'un  long  séjonr  eu  Amérique  et  la  oatun  de 
ses  uavaui  peuvent  faire  complar  parmi  les  anieun  l»Mlieos  {Miit. 
Brat.,  »2). 

(2)  ««ife,  D. 

(3)  Airégi  tU  Géographit.  —  Je  n'ai  pu  malbeoreiiHinetit  cmisuUcr 
qne  la  première  édition  de  re  bel  onrrage. 


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DU  UO  DB  S.  FRANCISCO.  Sit 

en  demi-cercle  de  l'est  vers  l'oaest,  embrasse  la  moitié  de 
l'Amérique  dn  Sud  ;  nuis,  pour  peu  que  l'on  veuille  des- 
cendre dans  quelques  détails,  il  faudra  des  noms  particu- 
liers, surtout  lorsqu'il  s'agira  des  chaînons  et  des  contre- 
forts, et  il  est  clair  qu'on  ne  présent^ait  réellem^it  riea 
à  l'esprit,  si,  en  parlant  du  diviseur  des  eaux  du  S.  Fran- 
cisco et  dn  Paranahyba ,  du  Xiagà  et  du  Paraguay,  on  di- 
sait également  que  l'on  a  traversé  la  Serra  das  Vertentes. 
Les  habitants  du  pays  ont  nommé  isolément  les  montagnes 
qu'ils  avaient  à  parcourir ,  chacun  dans  leur  district,  et  le 
géograpâe  comme  le  voyageur,  pour  éviter  tonte  confu- 
sion, doit  conserver  ces  dénomi  nations  religieusement,  sans 
en  restreindre  et  sans  en  étendre  la  signiBcation.  Mais,  si 
un  seul  nom  ne  suffit  point  pour  tous  les  diviseurs  d'eaux 
réunis,  les  notas  restreints  h  chaque  élévation  particulière 
détruisent  toutes  les  idées  d'ensemble.  Je  croirais  donc 
qu'outre  le  nom,  en  quelque  sorte  générique,  de  Serra  das 
Vertentes  que  l'on  peut  admettre,  si  l'on  veut,  dans  le  sens 
qœlni  attache  H.  Balhi,  il  est  bon  d'en  donner  un  k  cha- 
que diviseur  de  deux  ^nds  fleuves. 

On  sent  que  de  telles  dénominations,  pour  être  adopta 
par  les  habitants  du  pays,  ne  doivent  rien  leur  rappeler  qui 
soit  étranger  au  pays  même,  et  je  crois  qu'on  ne  saurait  en 
proposer  de  plus  méthodiques  que  celles  qui  présenteraient 
pour  chaque  diviseur  la  réunion  des  noms  des  fleuves  dont 
il  sépare  les  eaux ,  à  peu  près  comme  le  nom  de  plusieurs 
de  DOS  départements  se  composede  celui  de  deux  des  rivières 
qui  y  coulent.  Mais ,  pour  former  les  noms  de  nos  départe- 
ments, oit  aurait  pu  souvent  choisir  d'antres  rivières  que 
celles  que  l'on  a  préférées,  tandis  qu'il  n'y  a  rien  -d'arbi- 
traire dans  les  dénominations  que  je  propose,  et  une  con- 


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«2  VOYAGE  AUX  SOURCES 

naissance  exacte  de  la  géographie  brésilienne  les  ferait  né- 
cessairement composer  par  tout  le  monde  de  la  même  ma- 
nière. Ainsi  cette  chaîne  qui,  comprenant  la  Serra  He^gn 
(de  Sahara],  ^'étend  à  peu  près,  de  l'est  à  l'ouest,  de  la  Serra 
do  Ëspinbaço  à  la  Serra  da  Canastra  et  forme  la  tète  du 
bassin  du  S.  Francisco,  serait  la  5erra(io  5.  Franaseaedo 
Rio  Grande  ;  j'appellerai  Serra  do  S.  Franàico  e  da  Pa- 
ranakyba  (1)  le  diviseur  qui  s'étend  de  cette  première 
chatne,  ou,  si  l'on  reut,  des  sources  du  S  Francisco  à  la 
ligne  des  sources  du  Conanbâ;  je  donnerai  le  nom  de  Serra 
do  S.  Fnotcisco  e  do  Tocantini  au  prolongement  plus  sep- 
tentrional de  ce  même  diviseur,  d'où  s'échappent  tout  à  la 
fois  les  premiers  afQuents  du  Tocantins  et  de  nouveaui  af- 
fluents pour  le  S.  Francisco;  la  chaîne  qui,  venant  de 
Matogrosso,  se  dirige  d'occident  en  orirat,  comprend  les 
Montes  Pyreneos,  fournit  les  premières  eaux  du  Tocan- 
tins (2)  et  du  Conimbâ,  forme  la  tète  du  bassin  de  cha- 
cune de  ces  deux  rivières ,  sera  la  Serra  do  Corumbâ  e  do 
Tocantins;  enfin  la  Serra  do  Espinhaço  (Eschw.)  compr»i- 
dra,  dans  la  seule  province  de  Minas,  au  midi,  la  Serra 
do  S.  Francisco  e  do  Rio  Doce,  et,  plus  au  nord,  la  Serra 
do  S.  Francisco  e  da  Jiquitinkonha,  etc. 

(I)  Cual  et  piMTKi  onl  jcrii  O  Paranahyba;  nuis  j'ti  passé  deni 
rois  cette  riviire,  el  je  trouve,  dans  mes  notes,  les  endroits  où  je  l'ai  tra- 
versée indiqués ,  l'ua  par  le  nom  de  PotIù  da  Faranahyba ,  et  l'aatre 
par  celui  de  Porto  Real  da  Paranahyba.  Au  reste,  les  luèmes  auteurs 
ont  écrit  O  Parahyba,  et,  dana  le  pajs,  on  dit  bien  certaiocment  Pro- 
vineia  da  Parahyba ,  Diilrilo  da  Parahyba  Xova ,  S.  Joào  da  Para- 
hyba, Porto  daParaAybd.  —  Jeilois  dire  inssi  que,  sur  les  lieui,  J'ai 
euMadu  proDOOcer  Parnaltyba,  k  pei|  prés  comme  a  écril  H.  Gardoer. 

(!)  On  Mit  que  le  Rio  do  Tocantins  porte  d'abord  le  nom  de  Rio  dot 
Aima». 


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BU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  313 

Ces  noms,  je  l'avoue,  ont  rinconvéaient  d'être  longs, 
parce  que  ceux  dont  ils  se  composent  ne  sont  point  mono- 
syllabiques ,  comme  les  noms  d'un  grand  nombre  de  nos 
filières  ;  mais  des  noms  composés  et  d'une  grande  lon- 
gueur sont  bien  loin  d'être  étrangers  à  la  géographie  bré- 
silienne, ainsi  qu'on  en  a  pu  voir  des  exemples  dans  cette 
relation  et  les  deux  précédentes  (1). 

Je  reviens  à  la  Serra  do  Francisco  e  da  Paranahyba,  dont 
la  digression  à  la<|uelle  je  viens  de  me  livrer  m'a  peut-être 
éloigné  trop  longtemps. 

Au  nord  de  la  Serra  da  Canastra,  qui  forme  le  commen- 
cement de  cette  grande  chaîne ,  je  traversai  celle-ci  dans  sa 
largeur ,  pour  me  rendre  au  village  d'Àraxé ,  qui  est  situé 
au-dessous  de  son  versant  occidental  ;  pendant  une  quin- 
zaine de  jours  je  suivis  ce  versant;  je  ne  remontai  sur  le 
sommet  de  la  chaîne  que  pour  y  faire  environ  5  legoas,  et* 
ensuite  je  descendis  le  versant  oriental ,  que  je  cAtoyai  jus- 
qu'à Paracatù  ;  je  ne  puis  donc  indiquer  la  suite  bien  exacte 
des  montagnes  qui  forment  l'ensemble  de  la  chaîne.  Je  dirai 
cependant  qu'elle  se  prolonge  à  peu  près  dans  un  espace  de 
5  degrés  et  demi ,  changeant  sans  cesse  de  nom ,  et  que  ses 
sommets  les  plus  élevés  se  trouvent  dans  sa  partie  la  plus 
méridionale.  Après  la  Serra  da  Canastra ,  dans  la  direction 
du  sud  au  nord,  viennent  successivement,  selon  d'Eschwege, 
\esSerrasdo  Vruhî,  da  Marcello,  d'Indaiâeid' Abatte  {i). 

(1)  Ë\.  :  Rio  Grande  de  s.  Pedro  do  Sul ,  s.  Miguel  eAlma»,  Caiat 
Altaï  de  Mata  dentro ,  S.  Antonio  dot  Montée  Ctarot ,  etc. 

(3)  D'Esohwege  dit  qae  la  portion  de  cbaloe  formée  de  ces  dnq  iuod- 
lagoes  se  dirige  vers  la  rive  gauche  du  S.  Princisco,  le  traverae  en  for- 
niaai  la  chuie  de  Pirapord,  et  va  se  raltacher,  dans  les  Hius  Novas,  i  lo 
Serra  do  Espiobato  {Brae.  Seue  Welt,  1 ,  50).  Od  poorrail  cniire,  d'aprta 


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Jll  TOTASE  ADK  SODICBS 

Au  delà  de  ce  point,  aucun  auteur  ne  me  donne  de  rensei- 
gnements certains,  et,  comme  je  ne  suis  monté  sur  le  som- 
met de  la  chaîne  qu'à  5  lieues  et  demie  du  passage  du  Para- 
nabyba,  c'est-à-dire  à  une  distance  qui  ne  peut  guère  être 
moins  de  1  degré  de  la  Serra  d'Âbaité  (1],  je  ne  saurais 
rien  dire  de  cet  intervalle  (2).  Parvenu  au  somm^  de  la 
chaîne,  je  me  trouvai  sur  un  vaste  plateau  appelé  encore 
Chapadâo  (grand  plateau)  (3),  et  qui,  si  je  dois  croire  ce 

ceU ,  qae  la  Serra  do  S-  Francisco  e  da  Paraaihjbt  ne  s'ttend  point,  aa 
Dord ,  ping  loin  que  l'Abailé  ;  mais  il  ne  saurait  en  être  ainsi ,  et  c« 
(in'Eacliwcge  Ini-mème  dit  ailleurs  pronre  que  telle  n'a  point  «té  sa 
ftaete  :  ta  direction  qa'd  attribue  h  la  cbatue  an  deli  de  la  Serra  d'Abaité 
est  sans  donle  celle  de  quelque  contre-fort  oriental.  D'après  le  même 
tcriviiu,  OQ  appliquerait  le  nom  de  Mata  da  Corda  à  la  chaîne  partielle 
formée  par  les  cinq  Serras  ;  mais  Caial  dit  eipressément  (Coroç.,  1 ,  38!) 
que  ce  nom  est  celui  d'un  boii  qui  a'éiin  entre  les  deux  AbaiU ,  et  le 
nom  de  Mata  (  boia  )  rend  cette  opinion  plus  que  plausible. 

(1  )  Vojei  la  carte  générale  de  HM.  Spii  et  Hartius. 

(1)  La  carie  giénérale  de  HH,  Spii  et  Marlins  indique,  bous  le  nom  de 
Serra  do*  CrUlaet ,  une  portion  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Para- 
uakjba  plus  méridionale  que  Paracatti,  et  un  passage  de  Caial  (Corof ., 
1,  382)  lendratL réellement  ï  (kire  croire  que  telle  est  la  position  de  la 
Serra  âoi  CrUlaet  ;  mais ,  s'il  n'existe  pas  deni  montagnes  de  ce  nom , 
il  j  a  certainement  ici  nne  erreur.  Oo  me  parla,  dans  le  paf  s,  d'une  Serra 
dos  Crislaes  qa<  je  ne  visitai  point,  parce  que  Je  savais  qu'elle  av«it  M 
parcoume  par  le  docteur  Pohl  :  or,  par  la  relation  fort  ioiéreasanle  do 
Tojagequ'j  fit  ce  savant  (RefM,  seS),  on  peut  voir  que  la  â«rra  doa 
Critlaei ,  où  il  a  été ,  se  trouve  sitnée  h  l'onest ,  hors  de  la  Serra  do 
S.  Francisco  edaParanafaibai  que.  ponr  j  arriver,  Pohl  fut  obligé  de 
passer  le  Rio  de  S.  Harcoset  d'entrer  dans  la  province  dcGoyai;  que, 
arrivé  i  la  Serra  dos  Cristaes,  il  n'était  qu'i  peu  de  dislance  de  5.  Luxia 
de  Goyoi; ,  et  qu'eo&i  cette  montagne  ne  peut  être  qn'un  nntre-fort  ou 
nne  portion  d'un  contre-fort  du  diviseur  des  eaui  du  Paranahjba  et  du 
Totanlins.  Ce  que  je  dis  ici  est,  an  reste,  confirmé  par  Hatlos  (/(■,  U ,  1B5). 

(3)  Od  a  TU  que  le  plaleau  qui  termine  If  Serra  da  Canastra  porte 
aussi  le  nom  de  ekapadào.  Ce  mot  e«  en  quelque  sorte  géoériqne  et  dé- 


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MJ  RIO  DE  s.  FRANCISCO.  SI  5 

qui  m'a  été  dit,  a  presque  6  Ugoai  de  longueur  et  &  de  lar- 
geur, uns  aucune  discontinuité.  Après  le  Ghapn^diio  vient 
la  Serra  dos  Pildes;  mais  ce  fut  là  que  je  descendis  pour 
côtoyer  le  versant  oriental  et  me  rendre  k  ParacatA.  k  en- 
viroD  9  lieues  de  cette  ville,  je  montai  sur  un  autre  grand 
plateau ,  qui  est  encore  la  continuation  de  la  Serra  do 
S.  Francisco  et  da  Paranahytw;  et,  après  avoir,  pour  la 
bx)i»ème  fois ,  traversé  cette  chidne  dans  la  partie  qui  porte 
le  nom  de  Clu^iada  de  S.  Marcos,  j'arrivai,  du  cdté  occi~ 
dental,  au  Regtttro  dot  Arr^pmdidot,  limite  de  la  comarea 
de  Paracatiî  et  de  la  province  de  Goyaz.  Ce  qui  caractérise 
d'une  manière  particulière  la  Serra  do  S.  Francisco  et  da 
Paranahyba ,  c'est  cette  suite  de  plateaux  qui  la  terminent 
et  qui  lui  donnent  quelque  rapport  avec  les  Alpes  de  la 
Scaudinavie  (1). 

Les  deux  versants  de  cette  Serra  et  ses  cootre-forta  four- 
nissent UD  grand  nombre  de  rivières ,  parmi  lesquellea  on 
en  compte  de  diamantioes  ,  telles  que  l'Indaià  et  l'Abaîté , 
et  dont  la  plupart  arrosent  la  wmarca  de  Paracatû.  Mais 
ce  ne  sont  pas  les  seules  rivières  fournies  par  la  Serra  do 
S.  Francisco  e  da  Paranahyba  et  par  ses  contre-forts  qui 
coulent  dans  la  comarca  de  Paracatû;  au  nord  du  chef- 

(1)  Le  plalUQ  de  S.  HarceB  se  prolonge  jmqn'an  viUage  d«  Coaros, 
tm  U  Serri  éo  Viuuâaco  e  do  Tocaotins,  et  U  il  se  confood  probable- 
Duaitavec  celai  que  H.  Usrlios  {Reiu,  11)  eppeUe  Chapada  doê  Cowroë, 
SB,  du  moins,  ce  dernier  doit  se  présenter  après  lui  d«iis  l«  directioo  da 
Dord.  Ce  fnt  aussi  va  platean  que  IrooTi  H.  Oardoer  in  Bommet  de  la 
raéine  Serra ,  lorsqu'il  U  traversa  entre  les  villages  de  S.  Pedro  et  de 
N.  S.  da  AbbadiB  pour  se  rendie  de  Go; ai  k  flinas  ;  par  conséqnent ,  il 
est  fort  Traisemblalile  que  la  Serra  do  S.  Fraocitco  e  do  Tocutiu,  qui , 
en  rfalité ,  n'est  que  la  continuation  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Pa- 
ranabjlM,  est,  i  son  sommet,  aussi  pUte qu'elle. 


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SIS  VOYAGE  AUX  SOUHCES 

lien,  cette  comarca  est  traversée  par  d'autres  affluents  du 
S.  Francisco,  qui  naissent  de  la  continuation  de  la  même 
chatue. 

Si  l'on  excepte  Paracatû ,  il  n'existait ,  lors  de  mon 
voyage,  aucune  ville  dans  toute  la  comarca.  Quatre  vil- 
lages étaient  des  chefs-lieux  de  justice  [juîgados) ,  savoir, 
Salgado,  dont  j'ai  parlé  ailleurs  (1),  S.  Homâo,  situé  sur 
les  bords  du  S .  Francisco  (S] ,  Araiâ  et  Desemboque,  à  l'onest 
de  la  chaîne  ;  mais  il  faut  que  les  autres  bourgs  ou  hameaux, 
qui  n'avaient  pas  le  même  titre  que  ceux-là ,  fussent  bien 
peu  importants,  pnisqne,  aurapportde  M.  d'Eschwege  , 
Desemboque  ne  comprenait,  en  4816,  qu'une  soixantaine 
de  maisons.  Dans  un  espace  d'à  peu  près  70  hgoas  (  au 
moins  85  lieues  communes  de  France] ,  depuis  l'extrémité 
nord  de  la  Serra  da  Canastra  jusqu'à  Paracatû ,  je  ne  tra- 
versai d'autres  villages  qu'Araxà,où  l'on  comptait,  en  1816, 
soixante-quinze  maisons  (3) ,  et  Patrocinio ,  où ,  i  l'époque 
de  mon  voyage ,  il  n'en  existait  qu'une  quarantaine  ;  je 
trouvai  à  peine  un  chétif  hameau  dans  une  étendue  de 
23  îegoas,  entre  Paracotû  et  la  frontière  de  la  province  de 
Goyaz;  enfin,  lorsque,  à  mon  retour  de  cette  proTÎoce.jefis 


(1)  Voyage  dant  le*  provinee»  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  li,  407- 
(!)  L.  c,  tiS.  -~  Depuia  mon  voyage ,  S.  Rumio,  comme  Anià ,  a  été 
érigé  eoTiUe  (Gàrdmeii,  Travel*  ,ii3);  mais  il  ne  parait  pas  qae  son 
nOUTeau  litre  ait  influé  en  riea  snr  sa  prospérité,  car  Pizarro  fUsait 
monter  sapopalatioD,  ta  IB!!,  i  1,300  iudividns,  et,  d'apris  Gardner, 
OD  n'en  comptait  qne  1 ,000  en  IMO.  Ce  qai  prouve ,  an  reste ,  combien 
les  choses  changent  pen  dans  les  pays  diserts ,  ainsi  que  j'ai  eu  occasion 
de  le  dire  ailleurs ,  c'est  que  les  détails  donnés  par  le  naturaliste  anglais 
semblent  être  un  simple  commeutaire  de  ce  qu'écrivait  l'abbé  Manoel 
Ajres  de  Catal  ea  IBIT. 
(31  EscRW..  Brai.  .\«ie  Well ,  I,  fiO. 


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DU  RIO  DE  S.  nunCISCO.  117 

«Dcore  plus  de  30  iegoas  dans  la  eomarea  de  Paracatû  pour 
me  rendre  à  S.  Paul ,  je  ne  vis  que  quelques  pauvres  aldeat 
d'Indiens  civilisés.  La  comarca  de  Paracatà  n'est  donc  autre 
chose  qu'un  immense  désert. 

Je  n'ai  point  visité  toute  cette  partie  de  la  cotiuirea  com- 
prise entre  le  S.  Francisco  et  la  chaîne  qui ,  du  cMé  de 
l'ouest,  fournit  les  affluents  de  ce  fleuve;  mais  il  est  na* 
turel  de  croire  que  ce  désert  est  encore  moins  civilisé  que 
celui  que  j'avais  parcouru  sur  la  rive  droite  du  S.  Francisco, 
puisqu'il  est  plus  éloigné  du  pays  que  l'on  peut  consi- 
dérer comme  le  centre  de  la  civilisation  dans  la  pro- 
vince des  Mines.  Paracatû,  qui  compte  déjà  une  existence 
assez  ancienne ,  qui  fut  jadis  riche  et  florissant,  doit  ren- 
fermer une  population  plus  intelligente  et  plus  policée  que 
celle  des  déserts  environnants.  Mais  je  crois  pouvoir  dire 
que  la  population  du  pays  que  je  traversai  pour  arriver  à 
cette  ville  est  le  rebut  de  la  province  des  Mines.  Les  com- 
meocemenls  du  district  d'A.raxi  datent  de  nos  jours,  et  l'on 
sait  que  ce  bourg  fut  p^iplé  non-seulement  par  des  culti- 
vateurs dont  les  terres  commençaient  à  s'épuiser  et  d'autres 
qui  n'en  possédaient  point  encore,  mais  par  des  débiteurs 
insolvables  et  des  criminels  qui  cherchaient  à  se  dérober  i 
de  justes  châtiments.  Lors  de  la  réunion  dujtdgado  d'A- 
rasà  à  la  province  des  Mines  ,  d'Eschwege  ,  qui  avait  été 
chargé  par  l'administration  de  faire  un  rapport  sur  cette 
contrée,  s'aperçut,  étant  à  Patrocînio,  que  les  habitants 
s'éloignaient  de  lui ,  et  il  sut  bientôt  que  ce  canton  reculé 
était  devenu  l'asile  d'hommes  qui ,  ayant  commis  des  crimes 
ou  devant  de  l'argent  au  trésor  royal ,  avaient  fui  de  Minas. 

Pour  retremper  une  telle  population,  il  eût  fallu  pou- 
voir l'instruire  et  l'attacher  au  travail  ;  mais  de  qui  les  ba- 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


318  VOYAGE  AUX 

brtanU  de  ces  déserts  recevraient-iU  quelques  leçons  de 
morale  d  de  religioD,  on  mËme  l'inatrudion  la  plus  élé- 
m«ilaire?et  pourquoi  tniTailleraieDt-ils,  quand  leurs  be- 
soins si  peu  nombreux  sont  satisfaits?  Dans  ces  contrées, 
l'jsol^nent  détruit  l'émulation  ;  la  cbaleur  du  climat  invite 
à  l'oisiTcté ,  on  n'eiove  plus  sou  intelligence,  on  ne  pense 
plus,  et  l'on  tombe  dans  une  sorte  d'hébétement  grossier. 

Un  grand  nombre  de  txufÙM  (oisifs)  parcourent  le  canton 
d'Araii  et  désolent  les  propriétaires  eo  volant  leurs  bes- 
tiaux (1).  DaoBces  déserta,  les  hommes  établis  vivent  éloi- 
gnés les  Uns  des  autres;  ils  ne  connaisseot  point  la  société, 
ils  ne  connaissent  que  la  famille  :  les  vadios  ne  connaissent 
ni  l'une  ni  l'autre.  On  peut  les  comparer  à  ces  {riantes  pa- 
rasites qui,  étrangères  au  sol,  épuisent  les  végétaux  Qtiles 
dont  ils  tirent  leur  substance  et  ne  prodoiseat  que  de 
mauvais  fruits. 

S'il  y  a  quelque  remède  à  l'espèce  d'abrutissement  dans 
lequel  est  tombé  le  peuple  de  ce  pays,  c'est  naturellemoit 
du  clergé  qu'il  semblerait  qu'on  est  en  droit  de  l'att^dre. 
Quand  on  songe  c^ndant  qu'il  n'existequ'ane  demi-don  ' 
eaine  de  paroisses  dans  toute  la  eomarea  de  Paracatû  ,  on 
doit  sentir  que  les  pasteurs,  lors  même  qu'ils  seraient  ani- 
més d'un  véritable  zèle  ,  trouveraient  de  grands  obstacles 
dans  l'extrême  dissémination  des  habitants ,  si  peu  nom- 
breux, de  cette  vaste  contrée.  Mais  on  sait  combien,  en  gé- 
néral, le  clogé  brésilien  fait  peu  pour  l'instruction  du 
peuple  qui  lui  est  con6é,  et  il  y  a  encore  moins  i  espérer 


(I)  H.  Gtrdnw  dit  aosN  qne  tontes  les  canTines  qui  arriTeotà  S.  Bo- 
mâo  ont  à  se  plaindre  des  vote  de  cfaevini,  eilrémement  et 
M  cmUob  (Trav.,  418). 


■V,  Google 


DD  BIO  DE  S.  FRANCISCO.  SI» 

des  ecclésiastiques  de  la  eomarea  de  Paracatù  que  de  ceux 
des  pays  voisina.  Cette  comorea,  en  ^et,  ne  dépend  pas  de 
révèché  de  Marianne  (1819-22);  die  appartieot  â  celui  de 
Femambouc,  dont  le  chef-lieu  est  éloigné  de  450  à  600  h- 
goas,  et,  par  conséquent,  aucune  surveillance  ne  saurait 
être  exercée  but  le  clergé  de  cette  partie  dn  Brésil  (1).  Les 
prêtres  peuvent  impunément  suivre  les  exemples  des  laïques 
qui  les  entourent,  et  leur  conduite  ne  saurait  manquer  de 
réagir  ensuite  sur  ces  derniers.  La  division  des  évècbés  du 
Brésil  sersithje  le  répète,  indispensable;  mais  où  trouve- 
rait-on des  sujets  assez  vertueux,  assez  éclairés  pour  occu- 
per les  sièges  épiscopaux  ,  et  en  même  temps  assee  coura- 
geux pour  s'opposer  aux  abus  et  assez  prudents  pour  éviter 
les  écueils  qu'ils  rencontreraient  à  chaque  pas? 

Lorsque  je  parcourais  la  partie  orientale  de  la  province 
des  Mines,  charmé  de  l'hospitalité  de  ses  habitants  (3),  de 

(1)  Taici  ramBeut  t'eiprime,  à  ee  *iijet,  HooMgnor  Piiam ,  prêtre 
siiieèrHiient  MtlioliqiM,  anqnel  oa  doit  aa  irarwl  igimeiwe  •nr  les  ^li- 
M*  da  Brésil  et  la  géographie  de  cMte  coolrée  :  ■  De  l'éDOTine  distance 

•  qn'il  T  a  de  Paracitù  4  Feroambooc ,  il  tiaaUe  que  les  charge*  ecclé- 

•  siastiqncs  les  pins  imporUDIes  tombent  entre  les  mains  de  stijets  ÎBi' 
«  béciles  et  sans  conscience,  qni  ne  sayeot  mtew  pas  qoels  sont  leurs 

■  devoirs,  et  trop  souvent  ces  bonunes  devienneot  la  canse  principale  de 

■  la  raioe  des  églises  et  même  de  celle  de  ^  cluMe  publique,  aon-sen)e- 

■  menl  parce  qu'ils  sont  igooranls  et  sans  eipénenee,  mais  CDCore  paiee 
(  qu'ils  vivent  loin  d«  l'ail  vigikiit  de  leurs  évèqoes.  »  {Mem.  hUtori- 
etM,  vm.parun,  317.} 

(2)  M.  Gardner,  qni  êuit  ao  BrMI  de  1886  h  lUl ,  fait  an  três-gmnd 
éloge  de  l'bospitalité  des  Brésiliens  en  général  ;  cependant  il  ajoute  qae 
celle  des  habiianie  de  Minas  n'est  pins  ce  qu'elle  était  h  l'époqne  de  mon 
voyage,  et  il  en  accuse  les  relations  fréquentes  que  les  Hineiros  ont  eues 
crée  les  Européens,  prindpalemeni  avec  l«s  CMnpagaies  anglaise*  (Tro- 
cwl>,  468).  Par  conséquent,  gràeai  leon  conpatrïDtes ,  Hawe,  Loccock 
et  Walsh  ne  seraient  plus  aujourd'hui  refus  dans  les  Mines  comme  ils  le 


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320  VOYAGE  AUX  SOURCES 

leur  politesse,  de  leur  intelligence,  je  m'étais  bientdl  iden- 
tifié avec  leurs  intérêts  et  leurs  besoins  ;  ils  étaient  pour  moi 
des  amis ,  presque  des  compatriotes.  Dans  les  déserts  de 
Paracatù ,  je  redevins  un  étranger.  Depuis  Arasé  jusqu'A 
une  faible  distance  du  chef-lieu  de  la  comarca ,  dans  uii 
espace  de  48  legoat,  je  ne  trouvai,  je  crois,   qu'une 

forent  il  ;  a  pea  d'ian^es ,  et  c'est  ainsi  qae  se  vérifient  les  paroles  que 
j'écrivais  en  1830  ;  ■  Souvent  le  voyageur  hoonéle  a  porté  la  peine  des 
torts  de  ceax  qui  l'ont  précéda.  •  11  est  fort  ji  craindre  aussi  que  les  Fran- 
çais ne  lioient  pas  accueillis  avec  une  eilrème  bienveillance  par  ceni  des 
Brésiliens  qui  auront  lu  un  article  de  M.  de  Cbavaignes,  inséré  dans  \t 
Revne  de«  deux  moniei  et  reproduit  dans  l'ouvrage  intitulé  Somenirt, 
p.  260  :  1  Tai  eu  pins  d'une  fois  à  maudire,  dit  l'auteur,  l'hospitalité 
'  que  ce  peuple  accorde  si  gcoéreusement Vous  devei  vous  soumel- 

I  tre  i  des  Tormolités  cérémonieuses  toujours  déplaisantes;  vous  devei 
•  causer  ou  écouler  quand  vous  voudrici  dormir Accablé  de  qnes- 

II  tions  sur  le  but  de  votre  voyage,  sur  l'opinion  que  vous  avei  do  Bré- 
'  sil ,  il  vous  faut  parler  cette  langue  portugaise  si  dure  et  si  guttu  ' 
«  raie.  «  Ces  phrases  ont  eicir^  à  Rio  de  Janeiro  les  réclamations  les  plus 
vives  (  Minena  Bratilieme,  TIt  }.  Les  Brésilieiis  peuvent  répondre 
que,  dans  tous  les  pays  du  monde,  l'étranger  bonnSte  se  Ait  un  devoir 
de  se  gêner  pour  celui  qui  veut  bien  l'accueillir,  et  en  même  temps 
ils  peuvent  me  citer  comme  un  exemple  des  égards  et  des  soins  que  Ton 
prodigne  h  celui  qui ,  voyageant  chez  eux ,  tombe  réellement  malade.  Ils 
peuvent  dire  que,  partout  ei  dans  tous  les  temps,  depuis  celui  d'Homère 
jusqu'i  nos  jours ,  on  a  questionné  l'bomme  qui  vient  de  loin  ,  et  que 
1  nos  ancêtres  les  Gaulois  se  tenaient  sur  les  grands  chemins  pour  de- 
>  mander  aui  voyageurs  ce  qui  se  passait  dans  leur  pays  (HiNica., 
«  Uiêt.,  I ,  chap.  I).  •  Quant  aux  reproches  faits  à  leur  langue,  les  Bré- 
siliens s'en  convoieront  facilement  ;  car  il  pirelt  que  l'auteur,  lorsqu'il  a 
écrit ,  l'avait  i  peu  près  oubliée  :  h  plupart  des  mota  qu'il  cite  comme 
portugais  ou  sont  espagnols,  ou  n'appartiennent  k  aucun  langage;  ainsi 
*i«rraipour««To),  ciudad  [four  eidwit),  de  la  (yonr  da),  gobema- 
dor  (pour  pooernodor}  sont  espagnols,  et  on  cbercherait  inatilement, 
dans  quelque  dictionnaire  que  ce  fi^I,  eoreoval  (pour  corcotnifo),  ar- 
Toail  (  pour  arraial) ,  alquiere  (  pour  atgueire) ,  rachoiera  (  pour  ea- 
ehoeira),  ealrrei  (foar  eaàrat),  etc. 


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DU  RIO  DB  S.  FRANCISCO.  »1 

personne  avec  laquelle  je  pus  m'entretenir  quelques  in- 
stants. 

D'après  tout  ce  qui  précède  ,  je  n'ai  pas  besoin  de  dire 
que  les  grossiers  habitants  du  désert  qui  s'étend  de  la 
Serra  da  Canastra  à  Paracatû ,  et  probablement  ceux  de  la 
pins  grande  partie  de  la  comarca ,  ne  connaissent  aucune 
de  ces  commodités  auxquelles  nous  attachons  tant  de  prix, 
et  ne  font  même  aucun  effort  pour  embellir  leurs  demeu- 
res. Ils  occupent  des  chaumières  petites  et  obscures  ,  et, 
lors  même  qu'une  fœtenda  a  quelque  peu  d'importance,  la 
maison  du  propriétaire  ne  se  distingue  pas  des  cases  de  ses 
Degrés.  Le  désordre  caractérise  ces  misérables  demeures, 
toutes  construites  en  terre.  Il  ne  s'y  trouve  point  de  meu- 
bles, et  le  peu  d'effets  qu'on  y  aperçoit  gtt  dispersé  à 
droite  et  à  gaadie.  Pour  ne  pas  laisser  tout  ce  qu'on  pos- 
sède par  terre  ou  sur  les  gtraoa  ,  on  ne  connaît  d'autre 
ressource  que  d'enfoncer  dans  les  murs  des  morceaux  de 
bois  auxquels  on  suspend  sa  selle,  ses  éperons  et  de  mau- 
vaises hardes. 

A  l'endroit  appelé  Sapé,  situé  è  10  lieues  de  Paracatû , 
je  trouvai  deux  ou  trois  maisonnettes  écartées  les  unes  des 
autres.  L'une  d'elles,  qui  n'avait  point  de  porte,  se  compo- 
sait de  deux  petites  pièces  propres  et  bien  balayées  ;  comme 
elle  était  sans  habitants ,  je  m'y  établis ,  et  je  trouvai  que 
depuis  longtemps  je  n'avais  été  aussi  bien  nulle  part.  Qu'on 
juge  par  là  des  autres  gîtes  que  j'avais  occupés. 

Le  costume  des  gens  de  ce  pays  n'est  pas  plus  magni- 
fique que  leurs  habitations  ;  mais ,  pour  être  juste ,  il  faut 
dire  que,  si  leurs  vêtements  sont  souvent  déchirés,  ils  sont 
du  Dtoins  presque  toujours  propres. 

Qu'on  ne  s'imagine  pas  que  toute  cette  population  soit 


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SSS  VOTAGE  AUX  SODICES 

composée  d'hommes  de  coulear.  A  la  vérité,  sur  la  route 
deS.Paul  A  Goyaz,  je  traversai  des  âU«<u  d'Indiens  métis 
dépendants  du  territoire  d'Ar&ié  ;  mais  la  plus  grande  par- 
tie des  habitants  de  ce  julgado  sont  des  blancs.  Arrivé  prés 
de  Paracatû,  je  tronvai  enfin  un  propriétaire  dont  la  mai- 
son ^it  mieux  soignée  que  tant  d'autres  et  avec  leqoel 
je  pus  causer  :  ce  qui  est  asseï  remarquable,  cet  homme  était 
un'mulitre. 

k  Paracatû  mÊme,  on  exploite  encore  quelques  minières. 
D'ailleun,  dans  la  partie  de  la  comarea  que  j*ai  parcourue 
entre  la  Serra  da  Canastra  et  la  frontière  de  Goyat ,  tout  le 
monde  se  livre  &  la  culture  des  terres  et  surtout  k  l'éduca- 
tion des  bestiaux.  Les  habitants  du  territoire  qui  s'étend  de 
la  province  de  Goyaz  h  celle  de  S.  Paul,  c'est-&-dire  entre 
le  Paranahyba  et  le  Rio  Grande ,  sont  aussi  des  agricol- 
teura. 

Depuis  Araxè  jusqifau  Paranahyba,  dans  nu  espace  de 
3S  legooi,  les  terres  de  moyenne  qnatité  rendent  en  maïs 
SOO  pour  1 ,  et  ont ,  par  conséquent ,  uqe  grande  faillite. 
Les  environs  mêmes  de  Paracatû  sont  propres  à  tous  les 
genres  de  culture.  Enfin  entre  Goyaz  et  S.  Paul ,  sur  la 
route  qui  mène  i  cette  dernière  province,on  trouve  des  ter- 
rains d'un  très-bon  ra{q)ort.  Ceci  doit  suffire  pour  foire  voir 
combien  cette  contrée ,  aujourd'hui  si  déserte ,  pourrait 
nourrir  d'habitants,  et  combien  elle  a  été  favorisée  par  I» 
nature. 

Au  nord  du  Pariinahyba,  on  commence  k  planter  du  ma- 
nioc,  ce  qui  tend  à  prouver  que  le  pays  est  déjà  plus  chaud 
et  moins  élevé  ;  car  celte  plante ,  commune  dans  la  partie 
duSertâo  que  j'avais  parcourue  en  1817,  ne  se  voit  point 
dans  les  contrées  hautes  et  tempérées.  Le  même  végétal  se 


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DP  UO  »E  S.  FRAHCfSCO.  •    133 

cultive  avec  avaDtage  aux  environs  de  Paracatà,  et  il  eo  est 
|Rt>bablemeat  aÎDsi  dans  toute  la  partie  de  la  eomarea  qui 
s'étend  au  delà  de  cette  ville. 

U  ne  parait  point  qu'à  l'ouest  de  la  Serra  do  S.  Fran- 
cisco e  da  Paranahyba,  du  moins  jusque  Ters  la  hauteur  de 
Paracatii,  ou,  plus  exactement  encore,  vers  le  17*  degré  de 
latitude  sud ,  la  grande  Fougère  [Pterit  caudata,  ex  Mart.  ) 
et  le  Capim  gordura  {Melinù  minuUflora,  Palis  ;  —  Trii- 
ttgi*  gbuinosa,  Nées  ;  —  Capim  melado ,  i  Rio  de  Janeiro  ) 
s'emparent ,  cwnme  dans  la  partie  orientale  de  Minas ,  des 
terrains  qui  ont  été  quatre  i  cinq  foii  en  culture  (1).  Hais 
i  peine  me  trouvai-je  sur  le  versant  oriental  de  la  Serra  ' 
que  je  iXKamençai  à  revoir  la  dernière  de  ces  plantes ,  le 


(1)  ■  Lorsque,  à  l'orient  de  li  Sem  do  Eqùnhico,  on  ■  fait,  doDsim 

•  terrain ,  an  petit  nombre  de  récoltes,  on  j  Toit  nattre  nne  très-grande 
t  (bngère  dn  gtart  Pleri*.  Doe  firaminée  Tisqnetise ,  grislire  et  Tétide , 

■  a^eUe  Capte  gordura  on  kerbe  à  la  graiwa.  anecède  hienlAt  i  cette 

■  cr7pl«gaiiie  oa  croît  en  même  temps  qu'elle,  lion  presque  tonte* 
I  les  autres  plantes  disparaissent  avec  rapidité et  l'agricullenr,  ne 

■  ponrant  plas  espérer  Toir  natlre  de  aonTeanx  arbres  sur  son  terrain, 
I  dit  que  eaM-d  «1  fwrdv  lOM  retour  {Vogaçi  Auta  lea  provfncM 

*  iâ  hio  de  iantiro,  etc.,  I,  191}.  >  J'ai  dit,  en  parlant  du  Capim 
fordwra,  que  le  XT  40'  degré  de  latit.  S.  formait  sa  limite  seplen- 

nais  cela  ne  doit  s'entendre  que  dn  pajs  dont  Je  parlais  alors, 
lé  k  Test  de  ta  Serra  do  Eaplabaço,  t  peu  prêt  tena 

t  méridiene  que  Villa  Bica,  Tilla  do  Principe  et  les  paja  dr- 
conToisios.  Od  verra,  pins  tard ,  que  j'ai  retronvé  cette  mtme  firarajo^e, 
entre  le  16*  et  le  lï'  degré  (Eschw.,  Pii.),  dans  la  province  de  Gof  ai ,  en 
me  rendant  de  Santa  Lnzia  k  Villa  Boa.  M.  Gardner  dit  qu'il  l'a  obaeirée  i 
[tlnÉmn  degrés,  an  nord  dn  17*,  leraqi^il  tivent  ta  cfaaine  des  monta- 
gMB  qui  •éyareni  G»;u  de  Ittaa  et  de  nroanboac  ;  il  lyoute  que,  dans 
eea  ceibéea,  alla  n*  cntt  qa'auptte  des  maiaons  ;  il  lui  parait  évident 
qa'elk  ;  a  été  transportée  par  le*  caravanes,  et  il  pense  qu'elle  ne  tar- 
dera p«*  i  se  r^paadre  davantage  (rrowU ,  *n). 


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334  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Capim  gordura.  Elle  o'est  point  indigène  dans  ce  pays  (1); 
les  habitants  disent  qu'elle  vient  des  colonies  espagnoles  et 
qu'elle  a  d'abord  été  cultivée  comme  fourrage.  Aux  envi- 
rons de  Paracatâ  ,  [dus  au  nord  et  probablement  en  beau- 
coup d'autres  endroits  ,  elle  n'envahit  les  terres  que  lors- 
qu'on ne  les  laisse  point  reposer  assez ,  ou  lorsque  le  feu  y 
prend  par  accident,  ce  qui  malheureusement  u'est  pas  rare. 
Dans  le  canton  de  Tapera,  à  peu  près  &  10  Ugotu  de  Para- 
catâ, le  (7(i|>tni  (gordura  s'élève  quelquefois,  m'a4-on  as- 
suré, è  la  hauteur  d'un  homme;  ses  tiges  Eaibles,  couchées 
les  unes  sur  les  autres,  forment  des  lits  épais,  et,  lorsqu'on 
'  y  met  le  feu ,  elles  fournissent ,  comme  les  capoeiras ,  assez 
de  cendres  pour  fumer  la  terre ,  que  l'on  peut  ensemencer 
ensuite.  Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  que  ,  dans  ce  cas  ,  la 
Graminée  dont  il  s'agit,  ordinairement  si  nuisible  à  l'agri- 
culture, ne  présente  plus  aucun  inconvénient. 

n  est  assez  remarquable  que,  tandis  que  le  Capim  gor- 
dwra,  malheureusemeot  si  commun  à  l'est  de  la  Serra  do 
Espinhaço,  ne  dépasse  pas  beaucoup  le  versant  occidental 
de  cette  cbaine ,  il  se  soit ,  au  contraire ,  répandu  à  l'orient 
de  l'autre  chaîne  qui  limite  le  bassin  du  S.  Francisco,  et 
qu'il  ne  se  trouve  plus  à  l'occident  de  la  partie  méridionale 
de  cette  dernière.  Ici  il  est  bon  de  se  rappeler  que,  à  l'est 
de  la  Serra  do  Eepinha^,  s'étendent  de  vastes  forêts,  ^  que, 
à  l'ouest ,  plus  loin  même  que  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da 
Paranahyba,  il  n'eiiste  que  des  eampot.  AJnsi  le  Capim 

(\)  Vo^ei  t»  que  j'ai  dit ,  duB  moa  Vofiagt  a»  dittriet  du  Dia- 
manU.etc.,  1,22U,  sur  les  diverses  opinions  qa'oo  a,  eu  d'autres  en- 
droits, TelaiiremeDt  à  !■  patrie  de  cette  plante  H.  Garduer  isure,  ainsi 
qoe  moi  (rrotwlt,  477) ,  que  les  agricullenrs  brésiliens  ne  la  conaidè- 
reat  point  comme  iadigène,  et  tout  ce  qa'il  njonle  (end  h  le  eoofirmer. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  SU 

gordura  se  trouve  dans  des  régions  végétales  fort  différen- 
tes, celles  des  forêts  et  des  eampos,  et,  ensuite,  oo  ne  le 
voit  qae  dans  certaines  parties  d'one  même  région,  ce  qui 
tend  à  prouver,  de  plos  en  pins,  que  des  circonstances  for- 
tuites ont  introduit  cette  plante  è  Minas  Geraes. 

Les  pAtorages  natoreb  qui  couvrent  une  si  immense  poi^ 
tioQ  de  la  eomarea  de  Paracatû  le  rendent  aussi  bvorable  à 
l'éducation  des  bétes  k  cornes  qu'elle  l'est  i  l'agriculture. 
La  nécessité  de  donner  du  sel  au  bétail  doit,  il  est  vrai, 
diminuer  les  bénéfices  d'un  grand  nombre  de  cultivateurs, 
mais  cette  nécessité  n'est  point  générale.  Comme  dans  la 
partie  orientale  du  Sertâo  (1),  il  existe,  auprès  de  Paracatû, 
des  terrains  salpêtres  qui  remplacent  le  sel  pour  les  bêtes  à 
cornes,  et  il  peut  être  également  remplacé,  dans  plusieurs 
cantons,  tels  qu'Araxé ,  Patrocinio,  les  environs  de  Farinha 
Podre,  par  des  eaux  minérales  que  les  animaux  savourent 
avec  délices. 

Outre  les  bestiaux,  il  y  a,  dans  les  fazmdas  voisines 
d'Araxéi,  et  encore  ailleurs,  des  troupeaux  de  moutons. 
Avant  l'arrivée  du  roi  Jean  VI  au  Brésil ,  on  ne  songeait 
point,  dans  ce  canton,  à  élever  des  bètes  à  laine  ;  mais  le 
go6t  des  Européens  pour  la  chair  de  ces  animaux  et  le  prix 
élevé  auquel  on  les  payait  encouragèrent  les  cultivateurs  à 
en  former  des  troupeaux.  Eux-mêmes  ne  mangent  point 
leurs  moutons,  et ,  en  général ,  ils  témoignent  de  l'horreur 
pour  cette  viande  (â);  mais,  du  c6té  d'Araxé  et  peut-être 
dans  d'autres  parties  de  la  comarca,  les  propriétaires  fa- 

(I)  rodage  dant  Ut  provinre»  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  1,318. 

tï)  Dq  4iilciir  ingliù  a  pi^ieoda  qnc  les  Brésiliens  ne  mangeaient 
pa*  la  chair  des  moalcoB ,  parce  qae  l'agntAu  est  an  syinbole  pour  les 
chrétiens ( LcGcocB ,  Hôte*  on  BraiilV  Je  n'ai  ri«D  eateadu  dire  qai 

1.  15 


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HK  TOYAW  AUX  SOORCES 

briquent  dans  lean  maisoDB  des  tissus  de  laiu  ^rosaiers. 

Entre  la  Serra  da  Canastraet  Araxi,  à  l'ouest  de  Ia  grande 
chaîne,  le  pays  est  montagneux  ;  j'eus  même  i  tiSTerso- 
une  petite  chaîne  qu'on  appelle  Serra  do  Àraxâ,  et  qui  ne 
peut  être  qu'un  conb'e-fort  de  U  grande  Serra  do  S.  Fran- 
cisco e  da  Paranahyba.  Ayant  quitté  Araià,  je  traversai  en- 
core d'autres  petites  chaînes,  cetlei  qu'on  nranme  Semu 
do  Saiitre,  do  Dourado  et  da  Ftgueireda;  mais,  eo  géné- 
ral ,  le  terrain  est  ondulé,  quelqueEots  plat ,  et  les  collines, 
arrondies  et  très-larges  à  leur  sommet ,  s'inclinent  par  une 
pente  insenàble.  Après  avoir  passé  du  c6té  ori^tal  de  la 
Serra  do  S.  Francisco  et  da  Paranahyba,  je  fis  plusieurs 
lieues  dans  une  |daine.  Au  delà  de  Paracatû,  k  peu  de  dis- 
tance de  cette  ville ,  je  me  retrouvai  encore  dans  un  pays 
plat;  mais  je  ne  tardai  pas  à  monter  sur  le  plateau  qui  ter- 
mine la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paranahyba ,  et  c'est  en- 
suite que  j'arrivai  à  Goyaz. 

A  son  sommet  et  sur  l'un  de  ses  versants,  celui  qui  est 
tourné  vers  le  village  d'Araié,  la  Serra  du  même  nom  pré- 
sente des  arbres  tortueux  et  rabougris  :  d'ailleurs,  dans  un 
espace  d'environ  12i  iSieyooa,  depuis  la  Serra  da  Canastra 
jusqu'à  la  rivièrede&u«braiitisol,je  ne  découvris,  dans  la 
campagne,  que  d'immenses  pâturages  entremêlés  de  bou- 
qu^  de  bois.  Au  delà  de  Cackoàrinha,  lieu  situé  un  peu 
plus  loin  qu' Ara jé,  je  commençai  à  trouver  pins  de  vari^. 
Ce  sont  encore,  il  est  vrai ,  des  pâturages  et  des  bouquets  de 
bois  ;  mais  tantM  les  premiers  sont  simplement  eonposés 


justifiât  cette  aaMrtMU  :  «e  qu'il  ;  ■  de  Mitaio,  c'eM  <fM  la  ebair  dei 
■nouions  est,  dus  les  pirtieicluadaa  du  Btésil,  înAniinail  moins  Imiom 
qn'ea  Europe. 


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DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  SST 

de  Gramens,  d'autres  herbes  et  de  quelques  sous-arbris- 
seaux ,  taotit  ils  ùttrent  des  arbres  rabougris,  épars  ci  et  là 
au  milieu  des  herbes.  Cette  alternative  assez  singulière  tient 
éridemment  aux  différences  du  sol,  car,  lorsque  celui-ci 
[vend  une  couleur  rouge,  il  donne  toujours  naissance  à  des 
arbres  épars,  tortueux  et  rabougris,  et,  plus  la  teinte  de  la 
terre  est  foncée,  plus  ces  arbres  sont  nombreux.  Après  avoir 
passé  le  Paranahyba  et  traversé  le  diviseur  des  eaux  de  cette 
rivière  et  du  S.  Francisco,  je  me  trouvai,  comme  je  l'ai  dit, 
dans  une  plaine ,  et  là  je  ne  vis  plus  sur  mon  chemin  que 
des  eampos  parsemés  d'arbres  rabougris;  mais,  parvenu  au 
somm^  d'un  morne  élevé,  voisin  de  la  ville  de  Paracatù,  «t 
qui  lui  a  emprunté  son  nom.  Serra  de  Paracatù,  je  recon- 
nus qu'il  y  avait  encore  dans  cette  plaine  des  pâturages 
simplement  herbeux  mêlés  parmi  les  autres;  enfin,  au delè 
de  Paracatù,  j'observai  encore  la  même  alternative. 

Ce  pays  diffère  donc ,  dans  l'ensemble  de  sa  végétation , 
de  la  partie  du  Sertâo  que  j'avais  parcourue  en  1817;  car  je 
n'avais  guère  vu,  àl'orientduS.  Francisco,  que  des  camj»» 
parsemés  d'arbres  rabougris  (1).  Au  reste,  on  sait  que  les 
pdtnrages  simplement  herbeux  appartiennent  aux  cantons 
les  plus  élevés  delà  région  deseampos;  il  est  à  croire  qu'ici, 
quand  je  commençai  à  apercevoir  des  arbres  épars  au  milieu 
d'une  partie  des  pâturages,  le  pays  n'était  déjà  plus  aussi 
haut,  et,  vraisemblablement,  si  j'étais  descendu  vers  le  Rio 
de  S.  Francisco  et  que  Je  me  tusse  porté  davantage  du  c4té 
du  nord,  j'aurais  trouvé  des  arbres  dans  tous  les  pâturages. 

n  y  a  aussi ,  dans  les  phénomènes  de  la  végétation ,  une 

'1|  Toy«  nuHt  FofOtTR  4ant  In  provinet*  de  n(o  de  Janeiro ,  etc.. 


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ÏS8  VOYAGE  AUX  SOURCES 

différence  fort  remarquable  entre  ce  pays  et  le  Sertâo  orien- 
tal du  S.  Francisco  (1).  Oo  sait  que,  pendant  la  sécheresse, 
les  bois  de  ce  désert  se  dépooillent  entièrement  de  leurs 
feuilles  (2).  D'après  les  rensei^ements  qui  m'ont  été  don- 
nés, il  n'en  est  pas  ainsi  dans  la  comarca  de  Paracatû,  de- 
puis l'endroit  où  j'y  entrai  jusqu'au  village  de  Patrocinio  ; 
car,  dans  cet  espace,  quelques  arbres  seulement,  tels  que 
VIpé  (Bignonée)  et  les  Gameîeiros  (espèce  de  figuier),  per- 
dent, diaque  année,  tout  leur  feuillage.  Je  sais  aussi  que, 
sur  le  Cbapadâo  ,  les  bouquets  de  bois  ne  se  montrent  ja- 
mais entièrement  dépouillés.  Quant  au  reste  de  la  comarca, 
je  n'en  pourrais  rien  dire  sous  ce  rapport.  J'ai  montré  que 
la  sécheresse  était  la  seule  cause  de  la  chute  des  feuilles  dans 
les  catingas  de  Hinas  I4ovas  et  celles  du  Sertâo  oriental  ;  si 
donc,  dans  la  partie  de  la  comarca  de  Paracatiî  ,  dont  je 
viens  de  parier ,  les  arbres  conservent  leur  feuillage ,  cela 
doit  tenir  è  ce  que  cette  contrée,  plus  élevée,  est  aussi  moins 
sèche. 

Au  reste  ,  s'il  y  a  ,  pour  la  végétation  ,  quelques  diffé- 
rences entre  le  Sertào  oriental  et  la  porUon  de  la  comarca 
de  Paracatâ  que  j'ai  parcourue  depuis  la  Serra  da  Canastra 
jusqu'à  Goyaz,  les  ressemblances  sont  bien  plus  sensibles. 
Nous  avons,  dans  les  deux  pays ,  des  campos  qui ,  parsemés 
d'arbres  rabougris ,  présentent  le  même  aspect.  Les  ruis- 
seaux sont  ici,  comme  dans  le  Sertâo  oriental,  bordés  d'une 
étroite  lisière  d'arbres  serrés,  grêles,  élancés,  souvent  ra- 

(1)  Je  D'ai  pas  beaoia  de  dire  que  je  veni  sevleiDeiit  ptrier  ici  de  la 
partie  qne  j'ai  parcoarne  en  1817. 

O)  Tofei  tDon  Voyage  daru  lei  provineet  de  Bio  dt  Janeiro,  etc., 
II ,  132,  cl  moa  Tat>ltau  de  la  vigtiaiion  de  la  province  de  Mina* 
Seratt,  publié  dau  les  Annalei  de*  tdencei  naturellei,  1"  série. 


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DU  RIO  DE  S.  fbaucisco.  s» 

meax  dès  la  base  et  en  partie  dépouillés  de  feailles.  Avant 
d'arriver  À  Patrocinio,  je  vis,  pendant  plusieurs  jours,  dans 
les  parties  les  plus  basses  des  campos  ,  des  espaces  assez 
considérables  d'un  terrain  spongieqi  et  noirAtre,  où  crois- 
sent, an  milieu  d'épaisses  Graminées,  la  Geotianée  (484) , 
des  Xyrii  et  des  ErioeauUm  ;  le  désert  que  j'avais  par- 
cooru,  lors  de  mon  premier  voyage,  m'avait  offert  des 
marais  du  même  genre. 
Les  détails  de  la  végétation  m'offrirent  entre  les  deux 
.  contrées  encore  plus  de  rapports.  J'avais  pu  raisonnable- 
ment espérer  de  foire  une  riche  moisson  de  plantes  ,  en 
m' éloignant  peu  d'une  chaîne  qui  donne  naissance  à  deux 
des  plus  grands  fleuves  de  l'Amérique,  et  surtout  en  la  tra- 
versant ;  mais  je  fus  désagréablement  trompé  dans  mon  at- 
tente. La  plupart  des  plantes  que  je  voyais  autour  de  moi 
étaient  celles  que  j'avais  déjà  observées ,  il  y  avait  environ 
deux  ans  ,  près  du  Rio  de  S.  Francisco  ,  dans  une  contrée 
pourtant  beaucoup  plus  septentrionale,  et  sans  doute  beau- 
coup moins  élevée.  Parmi  les  arbres  rabougris  des  campos, 
je  retrouvai  à  peu  près  les  mêmes  Légumineuses,  les  mêmes 
Salicariées  ,  des  Bignonées  à  Oeurs  jaunes ,  les  mêmes 
Apocynées,  des  Vodiysiées,  et,  enfare  autres,  le  Saîvertia 
eomallanodora,  Aug.  S.  Hil.,  aux  fleurs  tout,  è  la  fois  si 
parfumées,  si  bizarres  ^t  si  belles ,  et  enfin  cette  espèce 
connue  sous  le  nom  de  Otàna  dû  campa  ou  ele  Mendanha , 
dont  récorce  remplace  le  Quioa  du  Pérou,  et  que  j'ai,  avec 
étonnement,  reconnue  pour  être  un  5(rychno*  (5frycAmu 
p$eadùquina,  Aug.  S.  Hil.}  (i). 

La  saison  pendant  laquelle  je  traversai  la  conutrea  de  Pa- 

(1)  Vojei  mon  ouvrage  inlitulé  Plante*  umUn  det  BratUieiu,  I. 


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S30  TOYifiE  AUJE  8 

racatû  était  d'ailteurs  peu  favorable  à  la  récolte  des  plantes; 
elles  avaioDt  déjÀ  perdu  leurs  fleurs  ,  et  les  fruits  a'étsirat 
poJDt  encore  mûrs. 

La  sécheresse  qu'il  avait  fait,  cette  année-là,  contribuait 
encore  à  rendre  les  fleurs  plus  rares.  L'herbe  était,  au  com- 
mencement  de  mai ,  vers  Patrocinio,  presque  aussi  sèche 
que  celle  des  compos  du  Sertâo  oriental  l'est  ordinairement 
en  août  et  en  septembre,  et  la  campagne  avait  une  teinte 
jaune  ou  grisAtre  qui  affligeait  les  regards. 

Le  défeut  de  pluie  avait  occasionné  une  disette  générale. 
Le  maïs ,  qui ,  dans  ces  contrées ,  remplace  l' avoine ,  man- 
qua souvent  à  mes  mulets.  Souvent  aussi  j'eus  beaucoup  de 
peine  à  renouveler  mes  [avisions  de  brine  et  de  haricots  ; 
je  fus  privé  de  rii  pendant  pias  de  trois  semaines,  et  ces 
comestibles  formaient  ma  seule  nourriture. 

Ce  voyage  fût  aussi  pénible  qu'il  était  peu  fructoens 
pour  la  science.  Au  milieu  de  ces  eampos,  où  il  n'y  a  point 
d'ombrage,  la  chaleur  éUit  excessive,  et,  à  la  fin  d'une 
journée  ennuyeuse  et  fatigante,  je  ne  trouvais  qu'une  nour- 
riture grossière,  de  l'eau  pour  boisson,  un  gtte  détestable 
et  des  hâtes  ignorants  et  stupides. 

Cependant,  malgré  les  tristes  détails  que  je  viens  de  dou- 
ner  sur  mon  voyage  dans  ïacomarcade  Paracatû,  il  n'en 
est  pas  moins  vrai  que  cette  comarca  renferme  tous  les 
éléments  de  la  richesse  et  de  la  prospérité.  Non-seulement 
on  y  trouve  de  l'or  et  des  diamants  [1],  mais  encore  du 
fer  et  de  l'étain  (2].  Diverses  plantes  y  offrent  à  l'homme 


(i)  H  selrooTe  desdiamaDts,  selon  Pîzarro,  dans  les  Rio*  da  Praia 
do  Sono,  Abailé,  S.  Antonio.  Andaia,  Preto. 
m  Pu.,  Htm.  hUt.,  Vni,  Begaoda  parle,  114. 


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DU  RIO  DE  3.  FRANOSGO.  331 

des  remèdes  salutaires,  tels  que  le  Qaina  do  campo  (Stryeh- 
not  pieudoquina,  A\ig.  S.  Hil.),  que  j'ai  déjà  cité.  Les 
terres  sont  fertiles ,  et  d*  immenses  pâturages  peuvent  nour- 
rir de  nombreux  troupeaux.  En  plusieurs  endroits,  des 
eanx  minérales  dispensent  l'agriculteur  de  donner  au  bé- 
tail le  sel ,  denrée  si  cbère  i  l'intérieur;  et  ces  eaux  pour- 
raient être  utilement  emidoyées  pour  la  gnérison  de  plu- 
sieurs des  maladies  qui  affligent  notre  espèce.  Enfin  les 
campagnes  sont  arrosées  par  une  foule  de  ruisseaux  et  de 
rivières  ;  elles  le  sont  par  le  Parsnahyba ,  l'un  des  com- 
mencements du  Rie  de  la  Plata,  et  le  S.  Francisco,  l'uo  des 
plus  grands  fleoves  de  l'Amérique,  qoi ,  par  la  suite,  au- 
ront la  plus  grande  importance  pour  l'exportation  des 
produits  du  sol.  Lorsqu'une  population  plus  nombreuse  se 
sera  répandue  dans  ce  pa^,  aiqonrd'bni  si  désert,  lorsqu'à 
l'aide  de  communications  pins  fréquentes  quelques  lumiè- 
res y  auront  pénétré,  il  ne  saurait  manquer  de  devenir  flo- 
rissant. 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


VOTtOE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  XII. 
auxa'  et  ses  eaux  uin6bales. 


Fatenda  de  Patol  Quttmado  ;  aoa  raneho.—  fUtiro  da  JàbtUieabaira. 
Les  propriéUires  des  udIods  TOisioa  d'Araià  sont-ils  richM?  —  Une 
cascade.  —  Pijs  situé  an  delà  dn  Kctiro  da  Jabalieobeira.  —  RtUro 
de  Triu-oi-MmUi.  Riceplion  qu'on  j  Aut  k  l'utear.  —  Serra  do 
Araxû.  —  Fatmda  de  Ptripittnga.  —  Ania.  Histoire  de  ce  rQUge. 
SoD  administration  civile  el  ecclésiasiiqne.  Son  nom.  Sa  sitoation.  Ses 
maisons;  «a  place  publique.  Ses  églises:  réfleiion  sar  leur  multipli- 
cilé.  Ses  habitants;  leurs  nueiirs.  ComneTce  de  bestiani.  Cnllare  des 
eDTiroDS.  Ëdncalioa  des  bêles  h  cornes.  —  Visite  «ni  eaai  minériles. 
De  quelle  manière  on  j  traite  le  bétail.  Goût  des  animaat  ponr  ces 
eani.  Précautions  qu'il  faudrait  prendre.  —  l'auteur  obtient  nu  to- 
cador.  —  De  quelle  manière  lea  lidèles  se  placeul  k  l'église  ;  le  cos- 
tume qu'ils  j  portent. 


Après  m'ètre  éloigné,  comme  je  l'ai  dit,  de  la  Serra  da 
Canastra,  je  parvins,  à  la  fin  d'une  longue  journée  de  voyage 
(16  avril),  à  la /às«nda  de  Patol  QuWmafJo  [grange  brûlée). 
Aussitôt  que  le  propriétaire  me  vit  venir  de  loin  avec  ma 
caravane,  il  fit  balayer  un  petit  raneho,  ouvert  de  tous  les 
cAtés,  qui  était  en  dehors  de  sod  habitation,  et  l'on  n'avait 
pas  encore  achevé  ce  travail  lorsque  nous  arrivâmes.  Je  fus 
fort  sensible  A  l'attention  que  l'on  voulait  bien  avoir  pour 
moi  et  à  la  politesse  mielleuse  avec  laquelle  on  m'accueillit; 
mais  i)  parait  que  le  raneho  que  l'on  m'avait  donné  pour 
-  gîte  n'était  pas  autre  chose  que  la  demeure  ordinaire  des 


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DU  UO  DE  S.  nuNClSCO.  3S3 

cochons.  Toute  la  nuit ,  il  fallut  faire  la  guerre  à  ces  ani- 
manx  ,  qui  venaient  ronger  nos  bats  et  réclamer  leur  do- 
micile ,  et  aucun  de  nous  ne  put  fermer  l'oeil ,  k  cause  de 
l'effroyable  cpiantité  de  puces  qu'ils  avaient  laissées  dans 
le  riaicho. 

Le  lendemain ,  nous  parUroes  très-tard.  Le  peu  de  som- 
meil  dont  nous  avions  Joui  et  l'extrême  chaleur  qu'il  fai- 
sait avaient  mis  tout  le  monde  de  mauvaise  humeur,  et 
nous  traversAmes  tristement  un  pays  fort  montueus ,  cou- 
vert encore  dé  pâturages  entremêlés  de  bouquets  de  bois. 

Ces  pâturages,  comme  ceux  que  j'avais  parcourus  précé- 
demment, se  composent  en  grande  partie  de  Graminées, 
principalement  de  celles  n°  335,  et  le  petit  nombre  d'es- 
pèces qui  croissent  au  milieu  de  ces  plantes  appartiennent 
surtout  à  la  famille  des  Composées  et  au  genre  Vemoma. 
Une  végétation  anak^e  caractérise  en  général  les  eampos 
simplement  herbeux. 

La  belle  Gentianéen' 100  est  fort  commune  sur  un  morne 
très-éievé  qui  se  trouve  à  un  quart  de  lieue  du  Retira  da  Ja- 
butictUteira  (1),où  je  fis  halte. 

Ce  retiro  ou  chalet  dépendait  de  l'immense  fazenda  de 
Quebra  anzol.  Il  se  composait  d'une  grange  et  d'une  mi- 
sérable chaumière  où  le  vent  pénétrait  de  tous  les  cdiés , 
et  qui  n'avait  d'autres  meubles  que  quelques-uns  de  ces 
lits  rustiques  dont  j' ai  déjÀ  parlé.  C'était  là  cependant  qu'un 
des  fils  du  propriétaire  de  la  fazenda  de  Quebra  anzol  de- 
meurait ordinairement  avec  sa  femme,  et  cette  fazenda 
n'avait  pas  moins  de  9  legoa*  de  longueur. 

(1)  JabtUieabetra  est  le  nom  valgtir«  du  Myrtnt  eauUflora,  Hart.. 
atbn  qni ,  comme  je  l'ai  dit  ailleurs ,  foaniit  l'un  des  meilleurs  fraib 
dn  Brtsil  m^ridionil. 


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23t  VOTAGE  ADX  SOURCES 

Ici  se  présente  natureUeroent  une  qoestîôn.  Ces  hommes 
sont-ils  réellement  dans  l'indigence,  ou  oot-ils  de  la  ri- 
chesse arec  toutes  les  apparences  et  tes  habitudes  de  la  pau- 
vreté? Eicepté  le  sel  et  quelques  n^res  qui  leur  rappor- 
tent un  intérêt  raisonnable,  ils  n'ont ,  pour  ainsi  dire,  rien 
à  acheter,  et,  d'un  autre  cAté,  ils  rendent  certain«nent 
beaucoup  de  bestiaux,  puisque,  après  le  canton  de  Bio 
Grande,  cette  partie  de  Minas  Geiaes  est  celle  qai  en  four- 
nit le  plus  à  la  capitale  du  Brésil.  Il  semble  donc  que  les 
fazendeiros  de  ce  pays  devraient  avoir  beaucoup  d'ai^ent, 
et  pourtant  la  manie  de  thésauriser  ne  s'accorde  guère  avec 
le  caractère  généralement  impréroyaiit  des  Brésiliens  de 
l'intérieur.  Il  est  extrêmement  vraisemblable  que  ces  bom- 
mes ,  dont  les  établissements  sont  tout  nooreaux ,  ont  com- 
mencé sans  avances',  qu'ils  ont  acheté  leurs  esclaves  et  ce 
qui  semble  leur  propriété  à  crédit,  peut-être  même  eu  payant 
des  intérêts  fort  usuraires,  et  que,  par  conséquent,  ils 
Kont  pauvres,  puisqu'ils  ne  powèdent  qu'imparfaitement 
ce  qui  parait  leur  appartenir  (i). 

Quoi  qu'il  en  soit,  je  ne  paie  m' empêcher  de  raconter 
ici  un  tBit  doDl  fti  été  lémoÎD.  Dans  nae àe»  fasendat  du 
julgado  d'Arsti,  José  Marianoo  présenta  au  maître  de  la 
maison  des  bagatelles  qn'tl  avait  è  vendre.  Celui-ci  trouva 
tout  extrêmement  joli ,  mata  il  se  récria  sur  sa  naisère;  & 
l'entendre,  il  n'aurait  pas  en  untrmtffn.  Cependant  je  vis 
autour  de  sa  maison  tant  de  moatons ,  de  pourceaux  et  de 
bétes  à  cornes,  queje  n'eus  point,  je  l'avoBerai,  la  tenta- 
tion de  lui  faire  l'anmtoe,  et,  so  moment  où  j'allais  par- 

(1)  H.  d'Esc)nr^«  umre.  «  tSlO,  qw  le  prii  d'oa  uèfcre  DOurMn, 
acbeln  150,000  ma,  s'élcnit ,  •prèi  ipHtre  ws  de  crédit ,  i  11  mxbum 
de  280,000  (Arai.,  [,  II). 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  NSi 

tir,  un  marchaDd  de  bestiaux  qai  se  trouvait  là  me  dit  qu'il 
venait  d'acheter  dans  cette  propriété  cinquante  bœufs  à 
4,800  reis  (30  fr.}. 

Je  reviens  au  Retiro  da  Jabaticabeira.  Il  est  situé  dans 
un  Tond ,  «itre  des  mornes  couverts  d'une  herbe  rase  ;  et , 
ân-desaous  de  la  cbaumière,  coule  un  ruisseau  dont  les 
bords  sont  garnis  d'une  lisière  d'arbres  et  d'arbrisseaux 
touffus  entremêlés  de  Palmiers.  A  une  petite  distance  du 
retiro,  le  ruisseau  se  précipite  du  haut  d'un  rocher  en  for- 
mant une  cascade  charmante.  Ici  l'eau  ne  tombe  point  ver- 
ticalement, mais  elle  s'écoule  par  bonds  sur  une  masse  de 
rodters  trèa-irrégnlière  qui  descend  obliquement.  A  droite 
et  i  gandte  de  ta  cascade,  qui  peut  avoir  ^à  60 pieds  de 
hauteur,  sont  des  arbres,  des  arbrisseaux,  des  Fougères  et 
d'autres  végétaux.  Je  récoltai  quelques  plantes  auprès  de 
cette  jolie  chute  d'eau ,  mais  je  fus  accueilli  par  des  nuées 
de  moucherons  qui  me  couvraient  les  mains  et  la  figure, 
lorsque  j'étais  un  instant  sans  agiter  mon  mouchoir. 

Au  delJt  de  Jabuticabeira ,  le  pays  est  élevé  et  monta- 
gneux. Sur  les  hauteurs,  je  trouvai  le  terrain  mêlé  de  sa- 
ble et  de  pierres  ;  la  végétation  était  moins  vigoureuse  que 
dans  les  fonds,  les  Graminées  moins  serrées  et  moins  touf- 
Ries.  Parmi  les  plantes  peu  nombreuses  qui  croissent  au 
milieu  d'elles,  les  plus  communes  sont  le  Snàthia  n°  436, 
la  Campanulacée  457  et  l'Amarantacée  438  qui  caractéri- 
sent tes  eampos  pi«'reux  ou  caillouteux. 

Toqjours  une  vue  très-étendue,  mais  qui  n'offre  absolu- 
nent  que  d'immenses  pâturages,  et,  dans  les  fonds,  des 
bouquets  de  bois.  Une  profonde  solitude,  presque  point  de 
bestiaux,  pas  une  seule  cbaumière,  quelque  loin  que  les  rc- 
Kards  puissent  s'étendre  ;  personne  dans  les  chemins. 


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236  VOYACE  ADX  SOURCES 

Depuis  Jabuticabeira ,  j'avois  fait  3  lieues  dans  ce  pays 
désert,  lorsque  je  m'arrêtai  au  Retira  de  Trai-os-MonUt 
[le  chalet  d'au  delà  des  monts] ,  qui  dépend  d'une  fasenda 
assez  considérable.  Là  je  trouvai  encore  quelques  chau- 
mières dispersées,  et  auprès  était  une  manjola  [i)  avec  une 
grange  dont  les  murs  étaient  remplacés,  comme  c^  a  sou* 
vent  lieu  dans  ce  pays,  par  de  longs  bâtons  très-rapprodiés 
les  uns  des  autres  et  retenus  en  haut  et  en  bas  par  d'autres 
bâtons  transversaux. 

Lorsqne  j'arrivai ,  je  demandai  à  une  négresse  où  je  pour- 
rais passer  la  nuit  ;  elle  me  répondit  qu'il  n'y  avait  de  place 
nulle  part.  Le  maître  de  la  maison  était  absent;  j'allai,  sans 
cérémonie,  parler  à  sa  femme,  malgré  l'indiscrétion  qu'il 
y  a,  dans  ce  pays,  à  faire  une  telle  démarche.  Dans  une 
chaumière  construite  comme  la  grange  dont  j'ai  parlé  tout 
à  l'heure,  mais  plus  petite,  je  trouvai  deux  femmes  jolies  et 
assez  bien  mises,  et  je  les  priai  de  me  donner  un  abri.  Avec 
un  air  encore  plus  impoli  et  plus  dédaigneux  qu'embarrassé, 
l'une  d'elles  m'envoya  à  la  manjola  ;  mais,  comme  il  aurait 
autant  valu  me  dire  de  coucher  dehors,  je  lis  connaître  qui 
j'étais,  je  réclamai  un  gtte  dans  la  grange,  et  j'allai  le  pren- 
dre presque  avant  qu'on  me  l'eût  accordé. 

Il  parait  que  la  maltresse  de  la  maison  n'était  à  ice  reltro 
qu'en  passant  et  pour  faire  les  honneurs  d'une  partie  de 
chasse.  Peu  de  temps  après  arrivèrent  les  chasseurs  pour 
lesquels  la  grange  avait  iÀé  réservée.  C'étaient  des  proprié- 


(1)  L«  manjola  tet  U  nMchine,  eilrêmcmait  «iiiiplt,  i  l'aide  de  )i- 
quelle  od  comnHDce  la  préparation  de  la  farine  de  msis  dent  en  uu- 
poDdre  les  aliments  et  qa'oo  «(^le  /iirtRAa.  On  donne  le  nom  de  /Mn 
k  la  farine  propremeol  dite ,  résultat  de  l'action  du  tdouIjd  sur  le  mats 
{Vn^t^  tlatu  Itt  provinret  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  1,  lOGct  23&v 


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DD  MO  DE  S,  FRANCISCO.  23T 

taires  aisés  du  voisinage  et  tous  des  blancs,  car  on  en  voit 
dans  ce  canton  beaucoup  plus  que  de  mulâtres.  Je  leur 
trouvai  A  peu  près  les  manières  qu'avaient,  à  mon  départ 
de  France,  les  petits  bourgeois  de  campagne  de  nos  dépar- 
tements. 

Après  avoir  quitté  le  reftr»  dont  je  viens  de  parler ,  je 
commençai  à  monter  la  Serra  do  Araxé.  Je  découvrais  de 
tous  cMés  une  vue  fort  étendue,  mais  elle  n'offrait  encore 
que  des  pâturages  parsemés  de  capBes,  A  mesure  que  je 
m'élevais,  le  terrain  deveuait  plus  sablonneux,  et  je  voyais 
cà  et  là  des  espaces  assez  considérables  couverts  de  pierres. 
La  Serra  do  Arasa,  qui  a  plusieurs  lieues  de  longueur,  n'a 
pas  une  hauteur  considérable  ;  cependant  je  fus  longtemps 
avant  d'arriver  à  son  sommet ,  parce  qu'il  me  fallut,  aup^ 
ravant,  monter  et  descendre  plusieurs  fois.  Ce  sommet 
offie  une  plate-forme  où  le  terrain  est  pierreux  et  sablon- 
Deni  ;  il  y  crott  çà  et  là  des  arbres  tortueux  et  rabougris, 
et  j'y  retrouvai  quelques-unes  des  plantes  que  j'avais  déjà 
recueillies  dans  la  Serra  da  Canastra,  telles  que  la  Radiée 
n'  S80,  la  Gentianée  d*  37fi,  et,  dans  les  endroits  pier- 
reux, la  Composée  frutescente  n*  372. 

Du  cAté  qni  regarde  le  village  d'Araxâ,  la  montagne  est 
très-escarpée.  Son  flanc,  couvert  de  rochers,  présente  en- 
core, par  intervalles,  d^  arbres  tortueux  :  ce  sont  principa- 
lement te  Kieîmeyera  specioêa,  Aug.  S.  Hîl.,  Juss.,  Camb. 
(vulgairement  Malva  do  Campo] ,  qui  alors  était  chargé  de 
belles  fleurs  roses  et  couleur  de  chair;  quelques  individus 
du  Voehysia  n°  356 ,  et  la  Composée  n"  372.  Certains  en- 
droits sont  presque  uniquement  couverts  d'une  espèce  du 
beau  genre  Vellosia  [Canela  dema) ,  dont  les  tiges,  grosses 
comme  le  bras  et  presque  toujours  simples,  n'ont  pas  plus 


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338  TOTAGE  ADX  SOURCES 

de  1  pied  k  1  pied  et  demi  de  haut  «t  se  tenninent  par  nn 
bouquet  de  feuilles. 

Ou  descend  la  montagne  par  un  chemin  pierreux,  eitr6- 
roement  difficile,  et ,  lorsqu'on  est  an  bas ,  on  se  trouve  dans 
une  plaine  ondulée  où  l'on  revoit  encore  des  plturages  et 
des  bouquets  de  bois.  Sur  la  gauche  est  une  petite  forêt  qui 
surpasse  tous  les  capHet  en  étendue.  C'est  là  que  se  trou- 
vent  les  eaux  minérales  et  fangeuses  que  les  habitants  de  ce 
caotOD  font  boire  à  leurs  bestiaux  pour  remplacer  le  sel. 

A  peu  de  distance  de  la  Serra  do  Àraxâ ,  je  fis  halte  à  la 
fazenda  de  Peripitinga  (1)  qui ,  comme  celles  de  tout  ce 
pays ,  n'offrait  que  des  maisonnettes  éparees  au  milieu 
desquelles  il  était  difficile  de  distinguer  l'habitation  du 
maître. 

Celui-ci  était  du  nombre  des  chasseurs  quej'avais  vus  au 
Retiro  de  Tras-os-Montes.  Je  l'avais  trouvé  plus  poli  que 
les  autres,  et  je  ne  fus  pas  étonné  d'apprendre  qu'il  était  né 
et  avaK  été  élevé  dans  la  comarca  de  Sabaré.  Il  me  logea 
dans  sa  grange,  mais  en  me  faisant  beaucoup  d'excuses  de 
ne  pas  avoir  un  meilleur  gîte  à  m' offrir;  et,  pendant  tout  le 
temps  que  je  restai  chez  lui ,  sa  complaisance  ne  se  dé- 
mentit pas  un  seul  instant. 

Quoique  nous  fussions  dans  l'automne  des  tropiques,  j'é- 
prouvai, en  quittant  Peripitinga,  une  chaleur  très-forte  ; 
depuis  longtemps  même  je  n'en  avais  ressenti  nne  sei&bla- 
ble,  ce  qui  vient  sans  doute  de  ce  que  le  pays  n'est  plus 
aussi  élevé.  Cependant,  quand  nous  traversions  quelque 
bouquet  de  bois  arrosé  par  un  ruisseau,  comme  le  sont  tous 


(1)  PeripUinga  ïient  pent-élre  des  mou  guaranis  pirt ,  jone ,  el  pi- 
Htnga,  qui  sent  mayvaù.  —  M.  d'Eschwrfie  s  écrit  Ptrepetinga. 


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DD  110  DE  S.  FIANCISCO.  Z3> 

ceiu  de  ce  pays ,  nous  éprouvions  une  fraîcheur  délicieuse. 

Au  delà  de  PeripitiDga ,  le  terrain  qui  s'étend  au  pied  de 
l«  Serra  do  Araxà  présente  encore  quelques  inégalités  ; 
mais,  À  un  quart  de  lieue  du  village ,  ou  ae  découvre  plus 
qu'une  belle  plaine  couverte  de  pAturages  et  bordée  par  des  . 
copies. 

C'est  dans  cette  plaine ,  sur  une  pente  peu  sensible , 
qu'est  situé  le  village  d'Araxâ{arraial  do  Araxâ).  Avant  d'y 
arriver,  on  voit  (â  et  là  quelques  jolies  cbaumières  entou- 
rées d'Orangers  et  de  Bananiers.  L'aspect  du  village,  dont 
toutes  les  maisons ,  lors  de  mon  voyage ,  étaient  encore 
nouvelles,  la  verdure  des  pâturages,  les  bouquets  de  bois 
dont  ils  sont  parsemés,  la  beauté  ravissante  du  ciel,  cet  air 
de  gaîté  qu'ont  si  souvent  les  pays  de  plaine,  tout  cela  for- 
mait UB  ensemble  charmant. 

J'avais  une  lettre  du  captlao  mor  de  Tamandu  pour  le 
juge  ordinaire  [Juiz  ordittario)  d' Araxà.  J'envoyai  José 
Harianno  eo  avant,  pour  la  remettre  à  son  adresse.  Le  jag^ 
habitait  la  campagne  ;  mais  la  personne  qui  gardait  sa  mai- 
son dit  à  mon  muletier  que  nous  pouvions  nous  y  établir. 
Pendant  que  l'on  déchargeait  lea  malles .  le  juge  arriva. 
Cétait  un  bon  et  joyeux  campagnard ,  qui  me  reçut  fort 
bien.  Je  le  priai  de  me  jvocarer  un  tocador,  un  muld,  une 
paire  de  malle» ,  et  il  m'assura  que  je  o'aurais  pas  de  peine 
à  être  servi.  Depuis  S.  Joâo  d'ËI  Rei ,  de  semblables  pro- 
messes m' avaient  été  faites  partout,  et  sans  doute  de  bonne 
foi;  maison  a  déjà  vu  de  quelle  manière  elles  s'étaient  réa- 
lisées. 

La  découverte  du  pays  où  est  actu^ement  Araxâ  et  celle 
des  eaux  minérales  qui  existent  dans  son  voisine^  sont 


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}M  VOYAGE  AUX  SOURCES 

dues  &  des  nègres  fugitifs,  venus  de  Minas  Geraes  poar  se 
cacher  dans  ce  désert.  Un  vieillard  qui  s'était  établi  k 
Àraxé  ,  il  y  avait  environ  trente  ans,  k  l'époque  de  mon 
voyage  (1819),  me  dit  qu'il  n'y  avait  trouvé  qu'une  pauvre 
chaumière.  Bientôt  on  répandit,  dans  toute  la  province  des 
Mines,  que  ce  pays  était  d' uoe  extrême  fertilité,  qu'il  oBtait 
une  immense  étendue  de  terrain  sans  propriétaire ,  qu'on 
y  trouvait  de  vastes  pâturages  ,  et  qu'on  pouvait  y  élever 
de  nombreux  bestiaux,  sans  faire  la  dépense  de  leur  donner 
du  sel.  Des  criminels  poursuivis  par  la  justice,  des  débiteurs 
Insolvables,  des  cultivateurs  dont  les  terres  ne  produisaient 
plus  avec  la  même  abondance,  d'autres  qui  n'en  possédaient 
point  encore ,  accoururent  en  foule.  On  vit  des  familles  se 
réunir,  pour  traverser  avec  plus  de  sûreté  un  pays  sans  ha- 
bitants et  arriver  jusqu'ici.  Cependant  ceux  de  ces  hommes 
qui  avaient  l'habitude  du  crime  s'y  livrèrent  avec  plus  de 
hardiesse  encore,  quand  ils  se  virent  éloignés  de  toute  es- 
•  pèce  de  surveillaoce ,  et,  à  l'époque  où  la  nouvelle  colonie 
commença  à  se  former,  les  meurtres  y  forent  très-fréquents. 
Lor?  de  mon  voyage  ,  les  premiers  habitants  étaient  morts 
pour  la  plupart  ;  des  communications  beaucoup  moins  dif- 
ficiles ,  un  accroissement  très-considérable  de  population 
avaient  diminuéles  chances  d'impunité;  mais,  si  les  mœurs 
se  sont  adoucies  peu  i  peu,  elles  sont  restées  extrêmement 


Quoique  les  premiers  qui  s'établirent  dans  ce  pays  vins- 
sent de  Minas  Geraes,  ils  reconnurent  l'autorité  du  gouver- 
nement de  Goyaz.  De  cette  manière,  ceux  des  colons  qui 
étaient  poursuivis  par  la  justice  se  trouvaient  avoir  changé 
'  de  province  et  rendaient  leur  châtiment  plus  difRcile;  et, 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  341 

d'an  sdtre  daté,  les  agricirfteurs  pouvaient  obtenir  des  iu- 
inart(M(l]  de  5  lieues,  telles  qu'on  les  donne  dans  la  pro- 
TincedeGoyai;  tandis  que,  dès  lors  ,  on  n'en  accordait 
plus  que  de  1  Utne  dans  ceUe  de  Minas  Geraes.  Le  gouver- 
nement reconnut  Araxâ  comme  appartenant  à  Goyat  ;  on 
fit  de  ce  village  le  chef-lieu  d'une  paroisse ,  et,  vers  1811 , 
on  l'érigea  mjulgado  ou  cheMien  de  justice,  en  y  créant 
des  juges  ordinaires. 

Cependant  les  habitants  hounétes  ne  tardèrent  pas  à  sen- 
tir  les  inconvénients  qu'il  y  avait  à  dépendre  d'une  pro- 
vince dont  les  magistrats  étaient  à  environ  140  lieues 
d'eux;  ils  réclamèrent  la  réunion  de  leur  pays  à  la  province 
des  Mines,  et  elle  fut  effectuée  par  une  ordonnance  {al- 
oard]  du  4  avril  1816  (2). 

Araii  fait  actuellement  partie  de  la  comarea  de  Para- 
catû,  et  dépend  entièrement  de  la  province  des  Minea  pour 
ce  qui  concerne  le  militaire  et  pour  l'administration  civile. 
Mais,  comme  la  province  de  Goyaz  est  très-pauvre  et  que 
les  dépenses  des  provinces ,  en  général ,  sont  uniquement 
prises  sur  leurs  revenus,  on  a  conservé  à  celle  de  Goyaz 
les  impAts  qui  se  lèvent  dans  les  deux  jvlgadoi  contigus 
d'Araxi  et  de  Desemboque  (1819). 

(1)  La  unnarta  est  h  quantité  de  terre  que  doiuie  TvlmiiustratiOD 
■ai  particaliers  qui  en  denacdenL 

(S)  D'EbcIiw^  ncoDte  qae ,  ven  cette  époque ,  il  Rit  clurgé  û'xme 
minjc»  dans  ce  dîMriet,  et  que  urtainea  personnes,  afin  de  Ntiafkire 
de  petites  amUtiona  et  des  riTalitts  de  iMurgade ,  itchtnnt  de  le  déci- 
der, par  des  piéseots,  à  oser  de  son  influence  ponr  tiire  ériger  Anvt  en 
Tille ,  soBS  le  nom  de  Villa  Viçota  ;  DMia  d'Kschvege  rejeta  les  pré- 
sents et  jnges,  dit-il,  qae  des  mililairea  valaient  mieui  pour  maiuieoir 
l'ordre  dans  le  pays  qae  les  sappAts  de  la  jnetice  (Brat.  Netu  Welt , 
I,  51). — Araim  a  réelleineat  été  érigé  en  ville  par  on  décret  dn  13  ociO' 
brelBSl. 

I.  18 


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S43  VOTAGE  AUX  SOUKCES 

La  paroisse  dont  Araxà  est  le  chef-lieu  comprrad  ^eat 
succursales,  Patrocinio  et  S.  Pedro  d'Àlcaotara  (1).  Sur 
36  lieues  de  longueur,  elle  ne  contenait  pas,  en  4819, 
plus  de  4,000  individus.  La  plus  grande  partie  des  habitants 
de  cette  paroisse  sont  des  blancs ,  ce  qui  ne  doit  pas  sur- 
prendre ,  puisqu'elle  est  voisine  de  U  eonuo-ca  de  S.  Jom 
d'El  Rei ,  oà  les  blancs  sont  plus  nombreui  que  dans  les 
autres  comarcas. 

Il  est  fort  vraisemblable  que  le  nom  d' Araxà  a  été  donné 
i  ce  pays  par  ces  Paulistes  (habitants  de  S.  Paul)  avepta- 
reux,  qui  jadis  parcoururent  l'intérieur  du  Brésil  avec  tant 
d'audace,  et  qu'il  vient  des  mots  guaranis  ara  echà,  chose 
qui  regarde  le  jour  (2).  Je  dois  dire  cependant  que  les  ha- 
bitants du  pays  expliquent  ce  nom  d'une  manière  fort  dif- 
férente, et,  toute  ridicule  que  me  parait  être  leur  esplica- 
tioo,  je  vais  la  rapporter  ici.  Comme  je  l'ai  dit,  ce  caol(m 
fut  découvert  par  des  nègres  qui  vinrent  s'y  réfugier  de  dif- 
férentes parties  de  la  province  des  Mines.  Ces  hommes,  de- 
venus audacieux,  sortirent  de  leur  désert  et  allèrent  inquié- 
ter les  fazendeiros  les  moins  éloignés;  mais  tm  envoya 
contre  eux  des  soldats  qui  en  prirent  le  plus  grand  nowère. 
On  s'était  imaginé  qu'il  y  avait,  dans  le  pays  où  ils  s'étaient 
r^rés,  un  ruisseau  très-riche  en  or,  et,  comme  ils  répon- 
daient k  toutes  les  questions  qu'on  leur  faisait  à  cet  égard  : 
Ha  dt  se  achtv  (on  le  trouvera} ,  on  fut  frappé  de  c«s  pa- 
roles répétées  sans  cesse  et  m^  prononcées,  et  le  nom 
d'Àraxé  en  est,  dit-on ,  resté  au  pays. 


(1)  PfZ.,  Mtm.  hUt.,  T,  343. 

(!)  Je  mis  rcdgvable  de  cetl«  étjmologîe ,  comme  de  brsucoup  d'« 
très ,  k  na  Espagool-AméricaiD  fort  versé  dans  U  langue  guarini. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  2<3 

Araxi  est  situé  à  l'eitrémité  d'un  vaste  pâturage ,  dans 
une  plaine  où  rhorizon  se  trouve  borné  en  partie  par  des 
bois  et  en  partie  par  la  Serra  de  Monte  Alto  ,  qui  n'est 
qu'une  continuation  de  celle  à'Anxk  et  se  termine  par  une 
plate-forme.  Ce  village  s'étend,  par  une  pente  peu  sensi- 
ble, jusque  sur  les  bords  d'un  ruisseau  très-étroit,  de 
l'autre  cAté  duquel  sont  des  collines  couvertes  de'  bois  et 
de  pAturages. 

En  1816,  on  ne  comptait  h  Arasé  que  75  maisons  (1). 
Tontes  sont  p^iles,  et,  lors  de  mon  voyage,  il  n'y  en  avait 
que  deux  qui  ne  fussont  point  bornées 'au  simple  rez-de- 
chaussée.'  Ces  maisons  sont  couvertes  avec  des  tuiles  dont 
la  coolear  est  très-pàle  ,  et  bAties  en  terre  et  en  bois  on 
avec  des  adobes  (2}.  Tontes  ont  un  très-petit  enclos  formé 
par  des  murs  fort  bas  et  en  terre. 

On  voit  à  Araiâ  une  place  allongée ,  très-large  et  régu- 
lière ;  mais  les  maisons  qui  ne  donnent  point  sur  cette  place 
sont  dispersées  çà  et  là,  presque  sans  ordre  (1819)  (3). 

L'église  est  bâtie  vers  l'extrémité  la  plus  élevée  de  la 
place ,  et,  conformément  à  l'usage  général ,  elle  est  placée 
à  une  égale  distance  des  deux  rangs  de  maisons.  Tout  ré- 
cemment (1819),  on  a  aussi  commencé  à  construire  deux 
chapelles  ;  mais  on  eût  beaucoup  mieui  Tait  de  rebâtir 
relise  paroissiale,  qui  est  fort  petite  et  tombe  en  ruine. 


(1)  Ce  cbiSrt  est  emprunté  t  d'EscbTege  (voju  Brat.  Stve  WtU, 
I.  M). 

(2)  Les  adobei  sont  des  parallélipipèdes  de  Uire  glaise  sécbJs  an  so- 
leil et  qui  penveot  avoir  eariron  1  pied  et  1/3  de  long  sur  i  pouces 
tépaîasnat  {rodage  dam  U'i  province*  de  Rio  ds  Janeiro,  etc.,  1,119). 

(S)  Ici  je  De  suis  point  d'aceord  avec  d'Escbwege  qni  dit  que  l'oo  voit 
des  mes  droites  I  Araiâ. 


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34t  VOYAGE  AUX  SOURCES 

La  multiplicité  des  églises  et  des  oratoires  dans  les  villes  et 
les  villages  de  la  province  des  Mines  n'est  dne,  comme  j'ai 
déjè  eu  occasion  de  le  dire,  qu'à  la  vanité  des  confréries. 
Chacune  veut  avoir  son  église  particulière  et  fait  des  ef- 
forts pour  qu'elle  l'emporte  sur  celles  des  confréries  ri- 
vales (1819). 

Pendant  les  jours  ouvrables,  la  plupart  des  maisons  d'A- 
raiâ  restent  fermées;  leurs  propriétaires  n'y  viennent  que 
le  dimanche,  pour  entendre  la  messe,  et  passent  le  reste 
du  temps  dans  leurs  plantations.  Ceux  qui  habitent  le  vil- 
lage toute  la  semaine  sont  des  ouvriers ,  dont  quelques-uns 
ne  manquent  pas  d'habileté,  des  hommes  sans  état ,  quel- 
ques marchands  et  des  femmes  publiques.  Ce  que  je  dis 
ici,  on  peut  à  peu  près  l'appliquer  i  tous  les  villages  de  la 
province  des  Mines. 

Comme  dans  le  reste  de  cette  province ,  le  nomluv  des 
femmes  publiques  est  ici  très-considérable  (1).  Chaque  oisif 
(vadîo)  a  une  maîtresse  avec  laquelle  il  partage  le  fruit  de 
ses  petites  escroqueries ,  et  qui ,  à  son  tour ,  foit  vivre  son 
amant  du  produit  de  quelques  galanteries  passagères.  On 
assure  cependant  qu'il  y  a  ici  beaucoup  de  gens  mariés; 
mais  on  y  respecte  peu  la  fidélité  conjugale. 

Il  s'en  faut  bien  que  les  habitants  d'Aiaxi  aient  cette  po- 
litesse qui  distingue  ceux  de  la  partie  orientale  de  Minas 
Geraes.  Leurs  manières  sont,  en  général,  grossières  et  dé- 
daigneuses. On  entrait  dans  la  maison  où  j'étais  logé  sans 


(1  )  QDoiqae  1«  liste ,  publiée  ptr  Hattos ,  de*  mistres  trop  récU<s  qt» 
ces  cr^alares  Tépoodeiit  loloar  d'elle*  dans  Im  tilUgw  dn  Sertio  ne  dé- 
passe pae  trois  lignes ,  je  ne  pourrais  la  Iradnire  eo  ft'aocais  sans  hire 
naître  nu  eiteBsirdégoâl. 


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DU  RIO  DE  5.  FRANCISCO.  tii 

saluer,  sans  proférer  une  parole;  on  me  regardait  travail- 
ler, et  l'OD  s'en  allait  comme  on  était  venu.  Je  dois  dire 
cependant  que  J'ai  trouvé  à  Araxi  deux  ou  trois  personnes 
bonnfttes  et  complaisantes ,  et  je  mettrai  à  leur  tête  l'ecclé- 
siastique qui  enseignait  les  enfants. 

1^  habitants  d'AraxÀ  ne  se  sont  point  encore  avi8és[1819) 
de  faire  eux-mêmes  le  commerce  des  bestiaux ,  branche 
presque  unique  d'exportation  que  leur  pays  fournisse.  Ce  * 
sont  les  marchands  de  la  comarca  de  S.  Joâo  d'El  Rei  qui 
proRtent  seuls  des  bénéfices  de  ce  commerce.  Ils  vont  dans 
tes  fasendat,  ils  y  achètent  le  bétail ,  et,  à  Vépoqoe  de  mon 
voyage,  ils  payaient  les  bœufs  4,800  reis  (30  f^.]- 

Comme  partout  ailleurs,  on  ne  plante  ici  que  dans  les 
capôet;  les  campoi  sont  entièrement  réservés  pour  les  trou- 
peaux. Ce  pays  convient  également  à  tous  les  genres  de 
culture;  mais,  quoiqu'il  soit  réellement  très-productif,  on 
exagère  beaucoup  sa  fertilité  dans  le  reste  des  Mines.  Les 
terres  moyennes,  plantées  eh  mats,  rendent  300  pour  1  ; 
mais,  excepté  le  coton,  les  produits  de  laculture  ne  sauraient 
avoir  aucun  débouché,  À  cause  de  la  distance  qu'il  y  a  de 
cette  contrée  aux  villes  et  villages  un  peu  considérables. 
On  ne  peut  guère,  non  plus,  faire  marcher  des  pourceaux 
vivants  d'ici  k  Rio  de  Janeiro ,  et  le  sel  est  trop  cher  pour 
qu'il  y  ait  de  l'avantage  i  y  envoyer  du  lard. 

Les  b^es  à  cornes  forment  donc  la  richesse  de  ce  pays. 
Gommeje  l'ai  déj  dit,  les  pAturages  sont  excellents,  et  les 
eaux  minérales  qui  se  trouvent  dans  le  voisinage  d'AraxÀ 
dispensent  le  cultivateur  de  donner  du  sel  à  ses  bestiaux. 
La  multiplication  des  bètes  à  cornes  est  telle  que  celui  qui 
ne  voudrait  point  augmenter  son  troupeau  et  qui,  par 
exemple,  poMéderait  cent  bètes  pourrait,  chaque  année. 


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■Ue  VOTAGE  iCX  SODSCES 

en  vendre  cinquante.  Cependant  les  cotons  se  plaignent 
beaucoup  de  plusieurs  causes  qui  mettent  obstacle  à  l'ac- 
croissement de  leurs  troupeaux,  la  morsure  des  serpents, 
la  vase  épaisse  qui  borde  la  plupart  des  ruisseaux  et  d'où  les 
animaux  ne  peuvent  plus  se  retirer  lorsqu'ils  y  enfoncent, 
surtout  enfin  ces  morts  subîtes  qui  ont  lieu  principalement 
dans  la  saison  de  la  sécheresse  et  que  l'on  attribue  à  des 
herbes  vénéneuses.  Les  fazendàros  disent  aussi  que  beau- 
coup de  bestiaux  leur  sont  volés  par  ces  hommes  oisifs  et 
sans  état  [vadios] ,  si  nombreux  dans  le  pajs  et  qui  en  sont 
la  plaie. 

Comme  ce  district  ne  compte  qu'un  p^t  nombre  d'ha- 
bitants, et  que  les  hommes  libres  y  ont  autant  de  peine 
qu'ailleurs  à  se  décider  à  travailler,  la  main-d'œuvre  y  est 
fort  chère,  malgré  l'abondance  et  le  bas  prix  ordinaire  des 
vivres.  Les  cultivateurs  son.t  donc  dans  l'impossibilité  d'en- 
clore leurs  p&turages  et  de  les  diviser,  comme  cela  se  pra- 
tique dans  le  canton  de  Rio  Grande.  11  en  résulte  que  les 
bestiaux  ne  peuvent  recevoir  les  mêmes  soins  que  dans  ce 
canton,  et  qu'il  s'en  perd  un  grand  Dombre.  Enfin,  quand 
le  troupeau  d'un  cultivateur,  revenant  des  eaux  minérales, 
passe  sur  leS  terres  d'un  autre  cultivateur,  il  arrive  souvent 
qu'il  s' y  mêle  quelques-uns  des  bestiaux  de  ce  dernier,  et , 
malgré  la  marque  qui  les  distingue,  ils  ne  reviennent  pas 
toujours  À  leur  véritable  propriétaire  [i). 


(1)  Ant  reiùeigoeineotB  qne  je  donne  ici  sur  In  bestiiai  do  untoo 
d'Arati ,  j'ajauterai  quelques  délails  qui  ae  tronveol  dans  le  Braiilien 
die  Neue  Well  de  H.  d'Rschwcgc.  Cet  l'crivaia  dit  que  les  Taches  d'Arai^'t 
metleot  bas  depuis  le  mois  d'août  jusqu'au  mois  de  janvier;  qu'elles 
ne  donnent  qu'on  lait  maigre  et  peu  Bboodanl;  qu'on  chltre  les  jeunes 
laureaui  h  deux  sus  «t  qu'on  vead  les  bœuffi  à  quatre. 


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DU  110  DE  S.  PUnCISCO.  »7 

Les  faundâa  ont  nne  étendue  immense;  il  n'est  pas  rare 
d'ea  voir  de  8  à  10  lieues  de  longueur.  Cependant  les  cul- 
tivateurs, qui,  pour  la  plupart,  ne  font  que  commencer 
leur  établissement,  ont  en  général  peu  d'aisance;  on  en 
compte  à  peine  un  oii  deux  qui  possèdent  mille  bétes  à  cor- 
nes, et  celui  qui  a  huit  h  dix  esclaves  passe  déjà  pour 
riche. 

le  ne  pouvait*  guère  séjourner  à  Araxé  sans  aller  voir  les 
eaux  mincies  auxquelles  ce  pays  est,  en  grande  partie, 
redevable  de  sa  population .  Je  partis  de  très-bonne  heure  ; 
le  froid  se  faisait  sentir  assez  vivement.  Je  passai  d'abord 
par  un  pAturage  composé  seulement  de  Graminées  et  d'au- 
tres herbes,  et  ensuite  j'en  traversai  un  second  où  des  ar- 
bres rabougris  croissent  (à  et  là.  Quelques-uns  commen- 
çaient i  perdre  leun  feuilles  (25  avril)  ;  l'espèce  de  Pachira 
que  l'on  trouve  ordinairement  sur  les  taboleiros  cobertos 
tSt  qD'<Hi  appelle  Paineira  do  eampo  {Pachira  mturginata, 
Aug.  S.  Hil.,  Juss-,  Camb.)  avait  déjà  presque  entièrement 
perdu  les  siennes. 

A  l'extrémité  du  pâturage  dont  je  viens  de  parler,  j'en- 
trai dans  un  bois  assez  épais.  Enfin,  après  avoir  fait,  depuis 
AraxA,  environ  i  lieue  et  demie,  par  un  chemin  très-battu, 
j'arrivai  au  lieu  oà  sont  les  eaux  minérales  et  auquel  on 
donne,  dans  le  pays,  le  nom  de  barreiro  (glaislère). 

Dans  une  partie  du  bois  où  les  arbres  serrés  et  touffus 
donnent  un  ombrage  épais,  on  volt  un  espace  d'environ  5 
ou  600  pas  de  circonférence  qui  est  entouré  d'un  mur  d'ap- 
pui, et  n'offre  qu'une  boue  noire  et  compacte.  Cest  au  mi- 
lieu de  cette  boue,  dans  cinq  ou  six  endroits  différents,  que 
s'échappent  les  sources  d'eau  minérale. 

Elles  sont  claires  ,  d'une  couleur  roi^eàtre,  et  elles  ont 


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3W  WYkGB  AUX  S0URCB3 

uD  goût  amer  qui,  en  même  temps,  rappelle  celui  des 

œufs  g&tés.  L'iodication  de  ce  petit  nombre  de  caractères 
montre  assez  qu'  elles  sont  sulfureuses ,  et ,  par  conséquent , 
elles  pourraient  être  employées  pour  la  gaérison  de  toutes 
les  maladies  dans  lesquelles  on  conseille  des  eaux  de  cette 
nature,  et,  en  particulier,  des  maladies  cutanées,  si  com- 
munes au  Brésil  (1). 

Le  barreiro  est  une  propriété  publique.  De  10  lieues  à  la 
ronde,  les  foiendeiroi  y  amènent ,  tous  les  nois,  leurs 
bétes  à  cornes,  et  chacun  a  son  jour  indiqué  par  le  juge. 
On  fait  entrer  les  bestiaux  le  soir  dans  l'endos,  on  les  ; 
laisse  la  nnit  ;  ils  boivent  tout  à  leur  aise,  et  on  les  fait  sor- 
tir le  lendemain.  Les  bétes  très-maigres  refusent  quelque- 
fois de  boire  l'eau  du  barreiro,  mais  on  la  lear  foit  avaler 
de  force.  Souvent  plusieurs  faxmdeiro»  confondent  leurs 
troupeaux  et  les  font  entrer  ensemble  dans  l'enclos.  Une  des 
principales  occupations  des  cultivateure,  dans  les  pays  de 
campos,  est  de  réunir,  chaque  mois,  leurs  bestiaux  :  ils 
tnontent  à  cheval,  galopent  dans  les  pâturages,  souventpen- 
dant  plusieurs  jours ,  et  amènent  le  troupeau  à  la  fazenda, 
soit  pour  lui  donner  du  sel ,  soit ,  comme  dans  les  uivirons 
d'Araxà  et  de  Salitre  ou  Patrocinio,  pour  les  mener  aux 
eaux  minérales. 

Tous  les  animaux  ont  un  goût  extraordinaire  pour  ces 
eaux  désagréables.  Jamais  je  n'avais  vu  une  aussi  grande 
quantité  d'oiseaux  que  dans  cet  endroit.  Des  nuées  de  per- 
roquets et  de  colombes  volaient  sur  les  arbres  voisins,  en 


(1)  Vojeice  qaeje  dis,  dansle  dupitresniTiat,  deaeâni  minérales 
lie  Stlilra ,  qni  paraisMnt  avoir  Im  pin*  grands  rapporU  avK  cdlea 


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DU  UO  I>B  s.  nuMcisco.  sw 

bisant  entendre  ud  ramage  confus  et  étourdissant,  et  ve- 
naient en  foule  se  poser  sur  la  fange  du  Ixareiro.  Les  chas- 
seurs ge  mettent  en  embuscade  derrière  les  arbres ,  et  d'un 
seul  coup  de  fusil  ils  tuent  souvent  un  grand  nombre  d'oi- 
seaux. Autrefois  il  venait  aussi,  d'ans  ce  lieu,  beaucoup  de 
ceth,  de  pécaris  et  d'autres  quadrupèdes;  mais  on  leur  a 
&it  la  guerre  avec  tant  d'acharnement,  qu'aujourd'hui  il 
n'en  parait  presque  plus. 

n  est  une  précaution  que  l'on  néglige  et  qui  cependant 
serait ,  je  crois ,  nà^essaire  ponr  entretenir  toujours,  dans 
le  bmrevro,  la  m£me  abondance  d'eau;  ce  serait  de  le  faire 
nettoyer.  Les  nombreux  bestiaux  qui  s'y  promènent  sans 
cesse,  délayant  la  terre  dans  l'eau,  forment  ainsi  une  boue 
épaisse ,  et  les  anciens  du  pays  prétendent  qu'ils  ont  déjà 
bouché  quelques'souFces  (1). 

Je  passai  quelques  jours  k  Araxà,  et  je  n'y  fds  point 
trompé  dans  rïies  espérances  comme  i  Piumhy  et  Formiga. 
Non-seulement  je  pus  acheter  un  mulet  et  des  malles,  mais 
encore,  à  mon  départ,  j'emmenai  avec  moi  un  tocador. 
C'était  un  jeune  homme  bhinc  auquel  je  donnais  3,000  reis 
(18  fir.  75  c.)  par  mois.  II  s'appelait  Marcellino.  Ses  traits 
étaient  agréables;  il  avait  une  figure  ouverte,  et  je  ne  lui 
vis  jamais  un  instant  d'humeur.  Si  on  lui  avait  donné  quel- 
ques principes,  peut-être  mftme  s'il  eût  été  seul  avec  moi, 
Prégent  ou  Laruotte,  il  eût  fait  un  excellent  serviteur.  Mar- 
cellino avait  une  fort  jolie  roix,  et,  plus  d'une  fois,  ses 
chants  diarmèrent  mes  ennuis  au  milieu  des  déserts. 

Je  passai  un  dimanche  à  AiAk  et  je  vis  les  fidèles  ras- 


Ci]  D'BKhvege  dît  qa'il  eiùte  dus  le  roîgiiiafe  des  caax  u 
de  fer  qui  ponmit  Un  MilM*  (SrOt.  Nnu  WeU,  1 ,  67,  68). 


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150  YOYAOE  AUX  SOUR<XS 

semblés  daas  l' église.  Là  comme  ailleurs  les  femmes  étaient 
accroupies  dans  la  nef,  et  les  hommes  plus  rapprochiés  de 
l'autel.  Telle  est  la  puissance  de  la  coutume  que,  malgré  la 
chaleur  qu'il  faisait,  les  hommes  elles  femmes  étaient  tons 
également  «iveloppés  dans  de  grandes  capotes  d'^ffe  de 
laine. 


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DU  UO  DE  S.  FUNCISGO. 


CHAPITRE  XIII. 


VOYAGB  DAAAXA  A   PABACATtI 


CaekoeiriKha.  —  La  rifitrt  de  <2w«6ra-atMoI.  —  C«ap  d'tell  général 
snr  le  paya  Bitné  au  delà  da  Onebra-iuiol.  —  La  fiaewla  it  Fran- 
eiteo  JoU  de  Maioi.  —  Serra  do  Salitre.  —  Eaux  minérales  de  5a- 
lUre.  —  Pâturages.  —  Faxenda  de  Damaio.  —  Prodnils  du  pajs.  — 
Village  de  Patroeinio.  Chiques.  —  Fazetida  do  Arrxtda.  —  Serra  do 
Dmarado.  —  Fazenda  do  liandro.  —  Les  habitations  de  ce  pays  si- 
tuées faTOrablemenl.  —  Sources  miuérales  de  la  Serra  Negra.  —  Pijs 
BJiné  au  delà  de  Leaadro.  ~  Hamein  de  Campo  Alegre.  —  Letort(|r. 

—  Pajs  situé  au  delà  de  Campo  Alegre.  —  Le  Rio  Paranahyba.  Une 
belle  soirée.  —  Mogvem.  —  L'auteur  monte  snr  le  sommet  de  ta  Serra 
do  S.  Francisco  e  da  PaTaothjba.  Le  ChapadOo.  —  La  Serra  et  le  Si- 
ttOitot  PHôet.  Ifanioc. —  L'auteur  descend  la  Serra  du  cAté  de  l'orient. 

—  Fatenda  do  Cvardamùr.—  Sapi.  Feinlare  de  la  ïégétation. 

Fazenda  de  Joào  Gomei.  Soa  propriétaire.  —  Le  poste  de  5anla  lia- 
bel.  —  Histoire  d'un  coDlrebandier.  —  Serra  de  Paracatû.  —  L'an- 
tenr  airire  à  la  ville  du  mtme  nom. 


Je  quittai  Araxâ  pour  me  rendre  h  Paracatû  (1).  Le  pre- 
mier jour,  je  ne  lis  que  2  lieues  et  demie  et  je  m'arrêtai  à 
une  maisonnette  appelée  Cackoeirinha  (petite  cascade). 
On  m'y  logea  sous  un  appentis  très-étroit,  qui  était  ouvert 
par  devant,  et  des  animaux  de  toute  espèce  vinrent,  pendant 
la  nuit,  troubler  mon  sommeil .  Le  froid  contribua  beaucoup 

|l)  Itinéraire  approiimaiif  d'Araiàà  Paracati'i  : 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


3SS  VOYAGB  AUX  SOURCES 

aussi  à  m' empêcher  de  dormir  ;  nous  y  étions  d'autant  plus 
sensibles,  moi  et  mes  gens,  que  nous  passions  les  journées 
dans  des  eampoi  où  il  n'y  a  pas  le  moindre  ombrage  et  où 
la  chaleur  est  excessive. 

Le  jour  suivant ,  je  fis  4  lieues  et  n'aperças  qu'une  fa- 
senda  et  quelques  misérables  cabanes  rapprochées  les  unes 
des  autres.  Je  fus  étonné  de  voir ,  dans  ces  dernières ,  une 
douzaine  de  jeunes  filles  couvertes  de  haillons,  quoique 
blanches  et  extrêmement  jolies. 

Le  terme  de  cette  journée  fiit  la  rivière  de  Quebra-araol 
(brise-hameçon )  (1).  qui  prend  sa  source  à  la  fazenda  du 

D'Artii  k  Cachoeiriohi,  maisonnelM S  1/3  kgoas. 

—  bonis  da  Quebra-uiiol 4 

—  Francisco  José  de  Hatos ,  habitatîoa.  3  l/I 

—  Datuaso,  habitation S 

—  Palrocinio ,  village Z  1/3 

—  Arrada,  habiUtÛHi 3 

—  Leandro,  habiUtïOD 1 

—  Campo  Alegre ,  liamefla 31^ 

—  bords  An  Paranahjrba. 0 

—  Hoqaem,  eo  plein  air 3 

—  Silio  dos  Pifôes,  chaamitre S 

—  Gnardi  mdr,  habitation 3 

—  Sapi ,  maiBonnelte 3 

—  Joào  Gomei,  habitation 3 

—  Gnarda  de  S.  Isabel,  poale  militaiTe.  a 

—  Paracali'i,  ville 1 


Daos  son  utile  Itinerariù ,  U.  da  Cunba  Haltos  indique  avec  détail  la 
distance  de  Patrocinio  au  Paraoab  jba.  Hons  différons  ea  qaelquee  points  i 
moia  je  crois  qoe ,  de  longtemps ,  on  ne  saura,  avec  nue  eaiière  terlitude, 
qui  de  nous  a  raison,  et  il  serait  possible  qua  nous  nous  fosaiona  un 
peu  trompés  tous  les  deux. 

(1)  C«st  k  tort  que  Caul  a  écrit  Qutbra-anioti  { Corof.,  1 ,  350  )  cl 
Escfawege  Qtubre  ansol. 


^driiGooglc^ 


DD  a.0  DE  S.  FHANCISCO.  US 

même  nom ,  d'où  d^nd  le  Retire  da  Jabuticabeira ,  et  se 
jette  dans  le  Rio  da»  Velkai  (1).  Ici  le  Quebra-aoïol  peut 
aroir  la  laideur  de  dos  rivières  de  troisième  ou  de  qua- 
trième ordre ,  et  ses  rives  préseuteat ,'  de  droite  et  de  gau- 
che, une  étroite  lisière  de  bois. 

Nous  trouvimes  sur  le  bord  de  l'eau  une  pirogae,  dont 
nous  nous  servîmes  pour  passer  de  l'autre  c6té.  Ik  sont 
quelques  chaumières  et  une  misérable  vmda,  qui  dépen- 
daient du  même  propriétaire.  On  me  donna  l'ho^italité 
dans  le  meilleur  local  ;  c'était  une  chambre  tellement  pe- 
tite que  mes  malles  pouvaient  à  peine  y  tenir,  ^  dont 
l'entrée  n'était  point  fermée.  Cette  fois  encore,  le  froid  me 
priva  du  sommeil. 

Le  paya  que  je  parcourus  au  delà  du  Quebra-aniol  est 
ondulé,  comme  celui  que  favais  traversé  les  deui  jours 
précédents,  et  il  offre  également  une  alternative  de  vastes 
pâturages  et  de  bouquets  de  bois. 

A  partir  d'Arasé ,  on  a  évité  de  faire  passer  le  chemin 
par  des  bois ,  pour  ne  point  se  donner  la  peine  de  faire  des 
percées ,  et  de  là  il  résulte  que  le  voyageur  reste  toujours 
exposé  à  l'ardeur  du  soleil  des  tropiques. 

Dans  un  espace  de  3  lieues  et  danie,  du  Quebra-aniol  à 
la  faxenda  de  Francisco  José  de  JUatot,  je  ne  vis  aucune 
maison ,  je  ne  rencontrai  personne  dans  le  ch«nin ,  j'aper- 
çus k  peine  une  demi  -douraine  de  bètes  à  cornes  au  milieu 
des  pAtorages.    . 

Lorsque,  dans  les  mois  d'ao&t  et  de  septembre  4847,  je 
parcourais  la  partie  du  Sertâo  qui  s'étendà  l'est  du  S.  Frao- 

(Ij  Ce  Mo  Au  Velluu  n  grossir  le  Paruuhjba  et  oe  doit  point  élra 
confDiMla  >Tee  no  ■aire  ftio  doa  Velhu,  beiaconp  pliu  coiuia ,  qui  est 
■n  des  prineipinx  affluents  do  S.  Praocisco ,  dn  cÂlé  de  l'orJeot 


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2M  VOYAOE  AUX  SOURCES 

cisco,  vers  )e  nord  de  la  proviace  des  Mines,  les  bois  et  les 
eampos  étaicDt  dépouillés  de  verdure,  et  rien  ne  me  récréait 
la  vue.  Il  n'en  fut  pas  de  même  ici  ;  les  ondulations  variées 
du  terrain,  ces  bois  d'un  vert  foncé  qui  offrent  des  compar- 
timents de  différentes  formes  au  milieu  des  pAturages,  les 
diverses  nuances  de  verdure  que  présentent  les  cim^o»  sui- 
vant l'époque  à  laquelle  on  y  a  mis  le  feu,  l'alternative  des 
pAturages  simplement  herbeai  et  de  ceux  où  croissent  çà  et 
là  des  arbres  rabougris ,  tout  cela  produit  un  très-be)  en- 
sonble.  Dans  les  endroits  un  peu  élevés,  on  a  l'image  de 
l'immensité ,  et  d'une  immensité  sans  monotonie. 

En  quittant  le  Porto  do  Quebra-anzol,  c'est  ainsi  qu'on 
appelle  le  lieu  où  l'on  passe  cette  rivière,  je  traversai  d'a- 
bord un  pAturage  uniquement  composé  d'herbes,  puis  un 
immense  taboleiro  coberto,  et  en&n  un  second  pâturage , 
qui  me  conduisit  jusqu'à  la  fasenda  de  Francisco  José  de 
Matos,  où  je  fis  halte. 

J'ai  dit  ailleurs  (1)  que  l'on  appelait  taboleiroâ  eobertos 
les  collines  on  des  arbres  rabougris  croissent  çà  et  là  au 
milieu  des  herbes,  et  taboleiros  âeseohertot  celles  qui  don- 
nent uniquement  naissance  A  des  plantes  herbacées  et  à 
des  sous-arbrisseaux.  Entre  Cachoeirïnha  et  la  fasenda  de 
Frandso)  José  de  Hstos,'  je  trouvai  les  U^leiroi  eobertos 
UD  peu  moins  verts  que  ceux  de  Fonniga ,  mais  aucun  arbre 
n'y  avait  encore  perdu  ses  feuilles  (96-27  avril).  Ici,  comme 
ailleurs  ,  les  arbres  des  taboUirot  sont  tortueux  et  rabou- 
gris; Ils  ont  8  à  1S  pieds  de  hauteur,  une  écorce  qui  ordi- 
naimnent  se  rapproche  de  celle  du  liège  et  souvent  des 


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DtF  RIO  DE  S.  FRANCISCO,  Ki 

Swianm  dores  et  cassantes.  Panni  eux ,  iMi|trouvai9  tou- 
jours avec  ationdance  une  Malpîghiée  à  gr?lmes  feuilles  co- 
tooneuses,  des  Qualea,  des  Bignonées  et  des  Légumineuses. 
Sur  les  taboleiroi  qui  s'étendent  au  de)A  des  deux  rives 
du  Quebra-anzol ,  je  vis  aussi  beaucoup  d'individus  du 
Q'  457  bi»,  dont  le  feuillage  rappelle  si  bien  nos  peupliers, 
et  UD  graod  oombre  de  Vochysia  n°  356 ,  dont  les  belles 
grappes  de  fleurs  jaunes  attirent  une  prodigieuse  quantité 
d'oiseaux-mouohes.  £d  quelques  endroits,  ces  arbres  sont 
plus  rapprochés;  dans  d'autres ,  ils  le  sont  moins  :  il  y  a 
même  des  p&turages  qui  offrent  une  nuance  entre  les  tabih 
leirotcoberloseldescobartos,  car  on  y  voit  quelques  arbres 
rabougris,  mais  seulemnat  de  loin  en  loin.  Les  arbrisseaux 
et  les  sous-arbrisseaux  qui  croissent  au  milieu  des  herbes , 
entre  les  arbres  des  taboîeiro»  eoberto»,  sont  plus  nombreux 
que  ceux  qui  naissent  sur  les  taboUiros  deseobertot.  Comme 
les  plus  commons,  on  peut  cltM*  des  Casna,  des  Malpi- 
gfaiées  et  l'Eupborbiacée  n'  479. 

La  fazenda  de  Francisco  José  de  Matos  (nom  d'homme), 
où  je  Gs  hait*  apr^  m'étre  éloigné  du  Quebra-anzol ,  est 
située  sur  le  bord  d'un  ruisseau,  entre  des  collines  asseï 
élevées.  Quoique  cette  fazenda  ne  soit  pas  des  moins  con- 
sidérables, elle  oeprésaite,  comme  twt  d'antres ,  qn'un 
anus  de  maisoiuettea  di^oaées  sans  ordre  et  parmi  1m- 
'  quelles  on  distingue  à  peine  l'habitation  du  maître.  On  me 
logea  encore  dans  une  oahane  sans  fmMrft,  dont  l'enlréo 
ne  fermait  point;  mais,  du  moins,  elle  était  assez  propre. 

A  peu  de  distance  de  Francisco  José  de  MatOs  se  trouve 
une  petite  ciuiae  de  montagnes  qui  porte  le  nom  de  Serra 
do  Salitre,  et  ne  peut  être  qu'un  contre-fort  de  la  Serra  do 
Francisco  e  da  Faranahyba.  Ces  montagnes  sont  pierreiTses, 


i^iÇooglc 


VOYAGE  AUX  SOURCES 

OD  voit  de  loifrffi  loin  quelques  arbres  rabougris,  priDCipa* 
\aneat\e  Kielnuyera  tpteiota,  ASH,,  J.,Caiiib.;  quant  aux 
Graminées,  ce  sont  le  C(^m  fnxa,  le  n*  32S  et  an  p^t 
nombre  d'autres  espèces.  Du  haut  de  la  Serra,  on  déconvre 
ane  vue  extrêmement  étendue,  qui  offre  encore  d"  immenses 
pâturages  et  des  bouquets  de  bois  dispersés  çà  et  là.  Si  cette 
petite  chaîne  porte  le  nom  de  Serra  do  Salitre ,  ce  n'est 
point  qu'on  y  trouve  du  salpêtre;  mais  on  a  imaginé  de 
l'appeler  ainsi ,  parce  qu'il  existe  dans  son  voisinage  des 
eaux  minérales  qne  l'on  a  crues  sans  doute  imprégnées  de 
cette  substance,.et  qui,  comme  celle  d'Araxà,  peuvent  rem- 
placer le  sel  pour  les  bétes  à  cornes. 

Après  avoir  traversé  la  Serra  do  Salitre ,  j'aperçus  de 
grands  bois,  au  miliai  desquels  je  vis  une  multitude  de 
beaux  arbres  qui  étaient  couverts  de  fleurs  roses  et  pro- 
duisaient un  effet  charmant  entre  les  masses  de  verdure 
dont  ils  étaient  environnés  (probablement  des  Ch&ritia 
tpeciosa). 

Cest  dans  les  bois  dont  je  viens  de  parler  et  qui ,  dît-on, 
peuvent  avoir  6  Ugoai  de  longueur  que  sont  les  eaux  mi- 
nérales dites  do  Salitre.  Comme  celles  d'Araxé,  elles  appar- 
tiennent au  public;  mais  on  assure  qu'elles  sont  plus  abon- 
dantes. On  ajoute  que  les  sources  sont  entourées  de  murs , 
que  l'eau  est  conduite  dans  des  anges  oà  les  bestiaux  la 
boivent,  A  qu'ils  ne  peuvent,  en  aucune  manière,  boucher  . 
les  sources  comme  h  Araxi  (4). 

(t)  J'ai  avancé  ùlUnra  {rouagt  iant  le  dUMct  dei  DUaimnlM,  etc., 
n,  2TT)  que  le  père  Leandro  do  Sacraroento  iTiit  fail  l'analyse  deseani 
d'Araiâ  :  ce  BoDt  celles  de  Salitre  qa'a  analfsécs  ce  saTaot  religieni. 
Eachwege  dit  que  ces  demitrea  lui  parareot  plus  rortcs  que  cellea 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  tST 

Dans  toufl  les  pAturages  que  je  vis  le  jour  où  je  traversai 
la  Serra  do  Salitre  (29  avril) ,  l'herbe,  aussi  mûre  que  celle 
de  nos  prés  lorsqu'on  les  fauche,  avait  une  teinte  grisâtre 
qui  fiitiguait  la  vue.  On  n'y  mettait  pas  le  feu,  me  dit-on , 
parce  que  la  sécberesse  durait  cette  année-là  depnis  très- 
longtemps  et  que  l'herbe  n'aurait  point  repoussé.  Au  reste, 
oo  n'a  pas,  dans  ce  canton,  d'époque  fixe  pour  briller  les 
pâturages  ;  ce  sont  les  besoins  du  bétail  qui ,  à  cet  éganl , 
servent  de  règle  au  cultivateur. 

La  fazmda  de  Dmnato  (nom  d'homme) ,  où  je  fis  halte, 
au  deli  des  montagnes  de  Salitre,  a  peut^tre  moins  d'ap- 
paraice  que  celle  où  j'avais  passé  la  nuit  précédente  ;  mais 

d'An»  ;  qa'niM  odmr  de  mafte  se  répand  dans  lenr  roisioage  ;  qu'elles 
ootnngoAlde  pooiri,  d'abord  on  peu  «alItaTeoi,  ensuite {Mqnut,eaSii 
■mer,  etqne,  loraqn'on  les  emploie  pour  se  laver  les  mains,  ellet  le* 
rendent  glissantes  comme  quand  on  fait  usage  du  savon.  Une  quantité 
de  50  ttrres  d'ean  de  Salitre  qu'Eschirefte  Bt  éraporer  lui  procura  un 
peu  plus  d'une  demi'lirre  d'un  sel  amer  et  on  peu  piqoant,  ec  c'est  ce 
sel  dont  l'analyse ,  faite  par  le  père  Leandro,  a  été  publiée  dans  le  Bra- 
tilien  die  New  WeU{\,  Ti).  Eachwege  pense ,  d'après  cette  analysée! 
ce  qu'il  a  lui-mEme  observé  sur  les  lieui,  que  les  eaui  minérales  de 
Salitre  peuvent  être  conseillées  contre  les  maladies  du  foie  ;  que  le  sel 
qu'on  en  relire  serait  utile  dans  diverses  fabrications,  et  qne  l'on  ferait 
«ne  spécnlatien  eicellrale  en  l'eitrajant  par  l'évaporatioa  solaire,  pour 
l'Mvojer  dans  les  parties  du  Serlào  qui  ne  possèdent  point  de  bebedott- 
Toi  (  sonrcee  d'eani  minérales  ),  et  où  le  sel  commun  se  paye  6,000  reis 
<37  fr.  90  c.)  le  sac  de  66  livres.  Après  avoir  pris  connaissance  de  l'ana- 
lyse du  père  Leandro,  M.  Balard,  chimiste  cdèbre,  membre  de  l'In- 
stitut ,  m'a  dit  qne  la  eompONtion  des  eani  de  Salitre  lui  paraissait  évi- 
demment analogne  t  celle  des  eiui  sulfureuses  d'Enropej  qne  le  sel 
qn'oD  pouvait  en  eilraire  serait  utilement  employé  dans  plusieurs  pro- 
cédés industriels ,  notamment  le  blanchissage  ;  qu'il  pouvait  être  donné 
au  bétail ,  mais  qne ,  pour  l'homme ,  il  ne  remplacerait  point  le  sel  ma- 
rin. J'ai  à  peine  besoin  d'ajouter  que  ces  eaui  devraient  être  conseillées 
pour  la  goérison  des  m 


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tu  VOYAGE  AUX  SOURCES 

ses  MtiinenU  sont  disposés  arec  un  peo  plus  d'ordre.  Le 

propriétaire  me  parut  être  un  excellent  homme ,  supérieur 

À  tous  tes  fasendeirot  que  j'aTais  rus  def)nis  ud  certain 

tempe. 

n  me  dit  que  le»  terres  de  son  pays  convïeoBent  i  tons 
les  genres  de  cultures.  Au  bout  de  cinq  ans,  tes  eapeetntt 
sont  déjà  en  état  d'être  coupés  (i);  \e  eapim  gordvra  {Me- 
IwM  mmuUfiora)  ne  s'empare  point  des  terrains  que  l'on 
a  mis  en  culture ,  et  le  bois  repousse  après  chaque  récotte 
D' ici  on  commence  déjA  à  envoyer  les  productions  du  sol  è 
Faracatù,  éloigné  d'environ  40  lieuea;  le  coton  seul  s'ex- 
pédie  pour  Rio  de  Janeiro.  Jusqu'à  Barbacene  {2} ,  on  fiut 
ordînairementToyager  cette  dernière  denrée  sur  des  chars 
à  bœufs ,  qui  portent  âO  arrobes ,  et  à  Barbaceoa  ob  charge 
sur  des  mulets.  La  location  d'un  char,  du  village  de  IVitro- 
cinio  à  Barbaceoa,  était  de  ii  oitavas  [iO&  fr.],  è  r époque 
de  moD  voyage.  Le  coton  ,  dans  les  derniers  temps ,  avait 
valu  600  reis  (3  fr.  75  c),  sans  être  dépotdllé  de  se»  se- 
mences. Ici  encore  ce  sont  les  bestiaux  qui  font  la  princi- 

(1)  Od  Torafenr  ■  terilqa'wi  liiiuit  repsaw  U  torre  [xmtaBl nagl 
aiu,  mot  à'j  jeter  de  nwivdles  Bemence»  (Scz.,  Saw.,  saS).  U  eM  ia- 
contestabk  qae,  dane  le  rauvais  syatème  de  coltue  adopté  d«u  le 
Brteil  Iropiul ,  on  De  norait  teuter  eni  terres  wi  trop  kwg  repos 
(EacKw.,  ara4.,I)imeii,pMirpMTair  les  liiaierniigt  «m  eus  rien 
rapporter,  U  fendrait  qve  les  BrégUieos  en  eostent  cocMe  ptu  qu'ils 
o'eo  pMsident.  Dam  les  parties  de  la  pmince  des  Hiaes  qoi  aivoiaiDeat 
■a  capitale,  «p«oii|w  d'ontiosire ,  au  kaot  dp  ciiM},  aiiomi^leus,  les 
beis  icapoeirmt)  qui  om  remplacé  lee  farèls  liei^ei.  Quiod  ili  ont 
povsaé  pendant  TÎigl  au,  ces  bois,  alors  iW^^B  oa^oa-àn,  «al  ^«a- 
qne  aeqûia  U  * igveor  des  fmtts  primitifts. 
(S)  Vojei  mon  Yogatt  don*  le*  pnminee»  de  Rio  d«  Janeiro,  etc., 
HT.  — H.  BaUii,daDSaoDeicelleoleG^O0raykwtiMitMr*eJle.  ajcrit 
I  ;  j'ai  déjk  rele*é  cette  errMK,  qui  ap^rtint  i  Hawe. 


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DU  BfO  DE  S.  FaiNCISCO.  290 

pale  richesse  du  cultivateur.  Des  marctuDds  viranent  les 
acheter  chez  les  propriétaires ,  et  ils  enlèveot  mâme  les 
moutons ,  qu'ils  payent  de  2  i  3  paUuat  (4  à  6  fr.  ). 

Au  delà  de  Damaso ,  je  trouvai  encore  des  tid>oleiro$  eo- 
herto$  et  âescob«rto»,  d'autres  miites,  et  en&n  des  bouquets 
de  bois  dans  les  enfonc^nents.  Je  traversai  aussi  un  petit 
espace  de  terrain,  dont  la  végétation  me  rappela,  pour  l'as- 
pect, les  aaratcoB  ou  forêts  naines  de  Minas  Novas  [1)  ;  des 
individus  serrés  et  nombreux  du  Bavhmia  (SIO  bû],  à  tiges 
étalées ,  à  rameani  ordinairement  disposés  sur  deui  rangs, 
formaient  un  fourré  de  5  à  5  pieds,  au  milieu  duquel  ii\e- 
vaient  (à  et  li  des  arbres  de  moyenne  grandeur. 

Entre  Damaso  et  Patrocinio ,  je  rencontrai  une  caravane 
asseï  considérable ,  qui  venait  de  Goyaz  et  allait  à  Rio  de 
Jandro.  Elle  appartenait  à  un  homme  qui  faisait  ce  voyage 
une  fois  chaque  année,  et  employait  cinq  mois  pour  aller 
et  autant  pour  revenir.  Il  prenait  à  Rio  de  Janeiro  les  mar- 
chandises destinées  pour  les  négociants  de  Goyaz,  et  faisait 
payer  32,000  reis  (200  fr.)  la  charge  d'un  mulet.  Mais, 
quand  il  r^uroait  de  Goyaz  à  la  capitale,  il  emportait 
pour  son  compte  de  la  toile  de  coton  et  du  coton  en  laine, 
parce  qu'avec  des  frais  aussi  considérables  les  marchands 
de  Goyaz  croyaient  ne  pouvoir  trouver  aucun  avantage  k 
exporter  les  denrées  de  leur  pays  (2). 

A  2  lieues  et  demie  de  Damuo ,  je  fis  halte  à  Patrocinio 
(arrwa/  do  Patrocinio  ou  Nosia  SetAora  do  Patroeiaio).  Ce 

(I)  T«7<*  mM  royofw  dam  Um  provineêt  dâModt  Janeiro ,  etc., 

n,». 

(3)  VojSî  M  qoe  j«  dis ,  SDT  les  traneports  de  Goju  t  Rio  de  Juteira, 
<n  chipitre  de  cet  oavrage  intitoli ,  Cantmtnetment  d»  vot/açe  de  la 
eiUde  Gngtu  à  S.  PoNl.  —  Le  Moto  Grotio,  île. 


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«tO  VOYAGE  iVX  SOLFBCES 

petit  TJllage  (1) ,  ordinairement  appelé  Salitre,  doit  son  ori- 
gine aux  eaui  minérales  qui,  comme  je  l'ai  dit,  se  troU' 
vent  dans  ses  environs  ;  il  n'avait  pas ,  lors  de  mon  voyage, 
plus  d'une  douiaine  d'années  d'existence,  et,  d'après  le 
nombre  de  maisons  indiquées  en  4816  par  d'Eschw^e,  il 
aurait  doublé  dans  l'espace  de  trois  ans.  H  est  situé  sur  la 
croupe  arrondie  d'une  colline  dont  les  lianes  sont  couverts 
de  pAturages,  et  qui  est  dominée  par  d'autres  collines  un 
peu  plus  levées.  En  1819,  on  y  comptait  une  quarantaine 
de  maisons  très-petites,  bAties  en  terre  et  en  bois,  cou- 
vertes en  toiles  et  sans  crépi.  Ces  maisons,  disposées  sur 
deux  rangs ,  forment  une  place  allongée  au  milieu  de  la- 
quelle est  une  petite  chapelle  construite,  comme  les  mai- 
sons elles-mêmes,  en  bois  et  en  terre.  Patrocinio  est  une 
succursale  d'Araià  et  a  un  desservant.  Comme  partout  ail- 
leurs, les  maisons  qui  composât  ce  village  appartiennent 
à  des  fazendârot  qui  n'y  viennent  que  le  dimanche  (2). 
Ceux  des  habitants  de  Patrocinio  qui  y  restent  habituelle- 
ment sont  quelques  ouvriers,  deux  ou  trois  petits  mar- 
chands ,  des  oisife  [vadios]  et  des  femmes  publiques. 

José  Marianno  était  arrivé  an  village  avant  moi,  et,  d'après 
mes  ordres,  il  était  allé  demander  un  gite  au  desservant; 
mais  la  maison  de  cet  ecclésiastique  s'était  trouvée  si  petite 
qu'il  n'avait  pu  nous  recevoir.  Une  autre  maison  que  l'on 
venait  de  finir  et  qui  n'était  pas  encore  habitée  fut  indiquée 
à  José  Marianno  par  le  commandant ,  et  ce  fut  là  que  je 

(1)  H.  Pohl  doDiM  k  Patrocinio  le  litre  de  TÎUe.  A  l'époqnc  où  il 
voyageait  (1818),  Paracatn  seul  portait  ce  titre  dans  loal«  la  eomarea. 
C'est  aussi  k  tort  que  le  même  «utear  a  écrit  Padroeinio,  trompé  sans 
doute  par  la  pronoudatioa  de  sod  pays. 

(2)  M,  Gardner  a  retrouvé  1«  m^roe  usage  dam  le  nord  du  Brésil. 


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DU  RIO  DE  S.  PUHCISCO.  »! 

trouvai  meseff^.  Lorsque  j'arrivai  au  village,  José  Na-> 
riauDO  se  btta  de  me  préveuir  que  cette  maisou  était  rem- 
plie de  chiques  (fri'cfcw  do  p^;  je  n'y  restai  qu'un  instant, 
et  j'eus  les  pieds  couverts  de  ces  insectes.  Moi  et  mes  gens 
nous  primes  le  parti  de  nous  établir  dehors  ;  pendant  que 
nous  travaillions,  tous  les  habitants  nous  entourèrent, 
et  je  les  trouvai  beaucoup  plus  grossiers  encore  que  ceux 
d'Araxà  (1).  Pour  la  première  fois,  depuis  Rio  de  Janeiro, 
je  passai  la  nuit  à  la  belle  étoile,  et  il  est  à  remarquer 
que  ce  fut  dans  un  village. 

On  a  va  que  je  m'étais  éloigné  de  la  grande  route  de  Rio 
de  Janriro  à  Goyaz,  pour  aller  voir  la  source  du  S.  Fran- 
cisco. J'étais  rentré  dans  cette  route  avant  même  d'arriver 
A  Patrocinio,  et  pourtant,  dans  un  espace  de  3  legoat,  entre 
ce  village  et  la  Fwtenda  do  Arrv4a,  je  ne  rencontrai  qu'une 
seule  personne  et  je  ne  vis  aucune  habitation. 

Partout  l'herbe  était  presque  aussi  desséchée  que  celle 
du  Sertào  de  Bom  Fim  et  Contendas,  dans  les  mois  d'août 
et  de  septembre  (2)  ;  cependant  je  vis  un  grand  nombre 
d'individus  du  Voeh^sia  n"  503  dont  les  grappes  verticales 
et  extrêmement  nombreuses  avaient  souvent  plus  de  2  pieds 
de  longueur. 

>  Pendant  celte  journée,  Lamotte  m'avait  paru  triste,  mais 
je  l'avais  inutilement  questionné  pour  en  savoir  la  cause. 
Quand  nous  fAmes  arrivés  à  la  Faxenda  do  Arrvda{uom 
d'bomme)  [3] ,  où  je  fls  halte ,  José  Marianno  lui  visita  les 


(1)  Vojei  ce  qae  j'ai  dit  plus  liaut,  page  243,  snr  lei  luiUUnb 
d'Aru». 

(3)  Vofu  moii  rotFagt  doM  fe(  prottincM  de  Rio  de  Jaittiro,  etc..  11. 

(3)  C'est  am  doate  cette  faftnda  qoi  a  éU  dtsignce  par  Pohl  soub 
le  iiom  impropre  de  Faxenda  d'Arrudo  Vetho, 


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■Ml  TOViâE  AUX  SOURCES 

pieds  et  en  tira  Une  cinquantaine  de  chiques.  Ces  animaux, 
comme  je  î' ai  dit  ailleurs,  se  trouvent  principalement  dans 
les  maisoni  inhabité  et  qu'on  ne  nettoie  pas. 

La  saison  des  antres  insectes  était  passée  depuis  long- 
tonps  ;  je  ne  troanis  qu'un  petit  nombre  d'espèces  &  ailes 
nues. 

La  Fazenda  do  Arrada  dont  je  viens  de  parler  est  située 
an  pied  d'une  petite  chaîne  de  montagnes  fort  peu  élevée 
qui  commence ,  m'a-t-on  dit ,  vers  le  village  de  Patrocinio 
et  qu'on  appelle  5erra  do  Dourado  (i).  Dans  fespace  de 

(1)  Pohl  et  tadrwt%t  s'ioeordenl  h  àin  qu'élit  l'étend  de  l'est  k 
l'ooest.  Le  premier  l't[^lle  Serra  iPOwiula,  et  le  secoad  Serra  4ot 
Doiratloi.  Le  Dom  indiqué  par  Pohl  est  évidemmeat  ineuct  ;  c«r  le  mot 
irovrada  n'Appartient  pas  i  la  langue  portagaise.  —  Pohl  n'a  pas  tout 
TU  Mie  doate,  et  qai  poorrait  tMl  veirT  mais  il  raconte  arec  sinpli- 
cité  et  bonhomie  ce  qui  a  6té  bod  attention ,  et  i]  mérite  beaacoBii  de 
confiance.  S'il  lui  a  échappé  quelques  légères  erreurs,  cela  lient,  en 
grande  partie ,  k  ce  qu'il  ne  possédait  qn'imparraitemeut  la  langue  pM*- 
tugaise.  four  bien  coaualtre  le  pa;^  où  I'od  voyage ,  U  est  essentiel  de 
comfireDdrt  ses  hobitauts,  et  c'est  certiioement  parce  que  Haire  et  Lue- 
cocli  ne  possédaient  pas  cet  avantage  qu'ils  se  sont  trompés  tant  de  fols. 
On  a  ta  blessé,  h  Rio  de  Jaueiro,  de  la  manière  dont  H.  Jacques  Arago  ■ 
parlé  du  Brésil  ;  maïs  cet  écrÎTaïn  appartient  k  une  tout  autre  calé- 
gorie  qne  les  deui  Anglais  dont  je  viens  de  citer  les  noms.  U  n'a  certai- 
nement pas  eu  la  préteutian  de  faire  faire  des  progrès  k  queiqae  branche 
qne  ce  soit  de  la  géographie  ou  de  l'histoire  natarelle  :  homme  de  beau- 
coup d'esprit ,  il  aura  simplement  Tonlu  amuser  ses  lecteurs  i  il  a  de- 
vancé l'époque  d«s  ttnpreaiom  de  wj/age.  Qutat  k  feu  Jaquemont,  dont 
on  s'est  éjalemeut  plaint  au  Brésil,  on  peutjusqu'k  un  certain  point  le 
justifier  ;  ce  n'est  pas  lui  qui  a  publié  son  rojage.  S'il  avait  en  le  bon- 
heur de  revoir  sa  patrie ,  il  aurait  senti ,  mûri  par  les  années  et  par  la 
réflexion,  que,  dans  un  livre  publié  aui  frais  dek  contiibnablee  et  mu 
kl  avtpicn  du  miniitre  de  Fitutrvelion  publigtte,  il  ne  pouvait, 
sous  la  plus  grive  ioconveoance ,  publier  des  morceani  empreinU  d'un 
athéisme  grossier  ;  il  aurait  senti  q«e,  s'il  est  permis  de  peiDdre  un  pêjg 
huit  fois  plus  grand  que  la  France,  déparier  de  sa  capitale,  de  sa  ma- 


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DO  BIO  n;  s.  FRUfdSCO.  S6S 

f  liene  envinHi,  je  la  cMoyai  &  uoe  eertaJne  distance;  je 
m'en  rapprochai  ensuite,  et,  après  avoir  passé  an  rulnean 
assez  profond  qai  porte  le  Dom  Douradmho  [i],  je  com- 
mençai à  monter.  Au  bout  de  quelqaes  instants,  nous 
eûmes  traversé  la  Serra  dans  toute  sa  lai^ar.  Elle  est  trop 
peu  élevée  pom-  offrir  nne  végétation  fort  différente  de 
celle  de  la  \Aa.ine  ;  aussi  n'y  trouvai-^  pas  une  espèce  que 
je  Dépossédasse  d^à. 

Dt^is  la  Serra  do  Donrado  jusqu'au  hameau  de  Catnpo 
AUgre,  le  pays  est  mootuenx.  Des  endroits  les  plus  élevés, 
qui  sont  caillouteux,  on  découvre  une  vue  immense  et  toti- 
joors  une  tdtemative  de  bois,  de  taboleirot  a^tertoi  et  de 
taboieiroi  detcoberta»,  mais,  d'ailleurs,  on  n'aperçoit  au- 
cune habitation;  dans  toute  la  journée,  je  ne  vis  qu'une 
chaumière  qui  est  située  prés  du  Douradinho.  L'aspect  de 
la  campa^e  était  d'une  tristesse  extrême;  partout  l'herbe 
était  desséchée  et  avait  une  tdnte  grisfltre  qui  affligeait  les 
regards.  Un  très-petit  nombre  de  plantes  étaient  en  fleur  ;  je 
me  contenterai  de  citer  la  fiignonée  n"  506,  qui  croit  abon- 
damment sur  plusieurs  tabolein»  deacobertos. 

A4  lieues  d'Arrnda,jeQsbahe  à  une  pauvre  chaumière 
k  laquelle  on  prétend  donner  le  nom  de  fazmda,  Fasmda 
do  Letmdro  (nom  d'homme).  Un  oè^,  qui  était  à  ta  porte 
de  cette  cbaumière,  me  permit  de  foire  décharger  mes 


me,  de  MD  ciboUge,  deson  «HDmerce,  desMflnMCM,  daebftf  deeon 
gooTeTnenieiit ,  dea  rappciis  des  provineo  avec  la  métropole ,  du  sorc 
des  esckrei ,  dea  dÎTersee  classes  de  la  ■octété,  de  k  lUiUire  des  dâtaU 

parlemeolaires ce  n'est  pas  apris  noc  ralàche  de  dooie  joan. 

(1)  H.  d«  Gonba  HaUM  «crit,  peuUtre  arec  raisOD,  RiMrw»  do* 
Oimradinho*  ;  il  parle  aoBsi  da  Rio  doi  Bowailot. 


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364  VOYAGE  AOX  SOURCES 

effets  dans  une  petite  chambre.  Sa  maîtresse  seule  était  à 

la  maison  et  elle  ne  parut  point  [1]. 

Les  fazendat  de  ce  canton  sont  assez  favorablement  si- 
tuées ;  elles  trouvait  un  débit  facile  de  leurs  produits  k  Pa- 
racatà,  oà  l'on  peut  arriver  en  dix  jours  avec  des  chars  A 
bœub ,  et  elles  ont  pour  leurs  bestiaux  des  eaux  minérales. 
A  6  legoas  de  Leandro,  il  en  existe  des  sources  de  même 
nature  que  celles  d'Araié  et  de  Salître,  dans  une  petite 
chaîne  de  mfmtagnes  appelée  Serra  Negra  (3).  Ces  sources 
appartiaineut  également  au  public,  et  l'eau  y  est  reçue 
dans  des  auges  où  le  bétail  va  la  boire. 

Au  delà  de  Leandro,  le  terrain,  dans  l'espace  de  f  lieue, 
est  presque  plat.  Plus  loin,  je  passai  près  d'une  chaumière 
que  l'on  décore  du  nom  de  Fazenda  do»  Mituu,  et  j'en- 
trai de  nouveau  dans  un  pays  montueux.  Le  chemin  y  est 
très-beau  et  suit  presque  toujours  les  parties  les  plus  élevées. 
Là  on  jouit  d'une  rue  fort  étendue;  mais  on  ne  découvre 
encore  que  de  vastes  solitudes.  La  verdure  n'avait  de  flral- 
cheurque  dans  les  pâturages  incendiés  depuis  peu  de  temps, 
et  ceux-là  étalent  extrêmement  rares. 

Comme  le  feu  consume  avec  une  très-grande  rapidité 
l'herbe  des  pâturages,  il  ne  brûle  point  le  tronc  des  arbres 
dispersés  sur  les  taboleiros  cobertoa  et  ne  foit  que  les  noir- 

(I)  Toicî  DD  ciemple  que  donne  d'Escbvege  d«s  prfcanUoas  qn«  pron- 
nent  les  Temmes  de  ce  paje  ponr  ae  poiol  se  faire  roir.  Ce  savant  ofUcier 
Alt  reta  dans  qdb  habitation  da  cantoo  de  Patrociniv  par  nne  femme 
dont  le  mari  «tait  absent,  et  ipii  lui  dinna  le  moulin  pour  gtte.  On  lai 
fit  h  souper  ;  mais,  comme  la  mattrease  de  la  maison  ne  voulait  point  se 
montrer,  elle  se  glissait  aree  sa  Bile  derrière  le  maulin  et  faisait  «otrer 
les  plats  par  on  trou  (Brtu.,  1,  80), 

(3)  On  a  TU  que,  dans  la  praviitce  de  Minas,  il  eiiste  plusieurs  mon- 
tagnea  de  ee  nom. 


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DU  UO  OE  S.  FRANCISCO.  26» 

cir.  Il  dessèche  les  feuilles,  mais  bientAt  elles  sont  rempla- 
cées par  d'antres. 

A  5  lieues  et  demie  de  Leandro,  je  m'arrêtai  à  une  espèce 
de  petit  hameau  composé  de  quelques  pauvres  chaumières 
épaises  çk  et  là.  Auprès  de  ces  cabanes  on  construisait,  h 
l'époque  de  mon  voyage,  une  petite  chapelle,  et  l'on  pré^ 
teodait  en  faire  une  succursale  de  la  paroisse  d'Aiaxè  (1). 

Lorsque  je  passai  parCanqM>  Alegre  (champ  joyeux),  c'est 
le  nom  du  hameau ,  il  s'y  trouvait  un  prêtre  que  les  habi- 
tants avaient  fait  venir  de  Paracatù ,  tH  cette  circonslaDce 
avait  attiré  un  grand  nombre  de  cultivateurs. 

Le  lendemain,  la  messe  fVit  célébrée  dans  la  chapelle  en- 
core inachevée.  Un  toit  couvert  en  tuiles  s'élevait  déjji  an- 
dessus  de  quelques  poteaux.  Des  feuilles  de  palmier  rem- 
plaçaient les  murailles;  d'autres  feuilles  jetées  sur  la  terre 
tenaient  lieu  de  plancher.  H  me  semblait  être  au  temps 
oii  le  christianisme  jeta  ses  premiers  foDdem«its  en  Amé- 
rique. 

J'étais  logé  à  Campo  Al^;re  sons  un  toit  qui  s'étendait 
entre  deux  chaumières.  L'espace  qu'il  recouvrait  était  ou- 
vert sur  le  devant  et  sur  le  derrière  ;  du  côté  de  la  cour,  il 
était  fermé  par  de  longs  bAtons.  Toute  la  journée,  des 
femmes  passèrent  le  nez  entre  ces  bâtons  pour  examiner 
ce  que  nous  foisions  ;  les  hommes  venaient  causer,  personne 

(1)  Eu  1824, 1«  btmeaa  àe  Cimpo  Alegre  aviil  déji  été  décoré  du 
nom  à'arraial ,  et  m  petite  chapelle ,  didiée  k  Sainte-  Anne ,  était  dere- 
nue,  coDum  on  l'avait  désiré,  nue  snceareale  de  Téglise  paroissiale 
d'Aras*.  Le  noarel  arrafai  m  composait  alors  d'âne  quarantaiiM  de 
maïMBs  et  portait  le  nom  de  Sonia  ><nna  do  Ptmio  Afegrt,  auquel  on 
■nbstitaait,  dans  l'asage  ordinaire,  le  sobriqoet  de  Carabandella ,  dû 
k  rhabitode  qa'sTait  an  propriétaire  dn  voisinage  de  parler  d'im  esprit 
malhi  appelé  de  ce  noin  (Hattos,  lUn.,  I,  89). 


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2116  VOYAGE  AUX  SODBCES 

ne  traTailMt ,  et  la  conTersation  de  ees  braves  gens  offrait 
si  peu  d'intérêt  qu'ils  eussent  aussi  bien  fait  de  garder  le 
silence. 

Je  pro6tai  de  mon  séjour  à  Cantpo  Âlegre  pour  aller  her- 
boriser. Je  côtoyai  un  raisseau  bordé,  coDune  le  sont  tous 
ceux  de  ce  pays,  d'une  lisière  étroite  d'arbres  grêles  et 
serrés,  mais  je  retrouvai  les  plantes  que  m'avaient  offertes, 
en  181 7,  des  localités  semblables  au  milieu  du  déswt  orien- 
tal du  S.  Francisco  :  le  n"  566  dans  les  parties  boisées  ;  les 
Gentianées  531,  S24,  577  dans  les  terrains  marécageux  et 
couverts  d'herbes  qui  s'étendent,  comme  cela  a  lieu  ordi- 
nairement, derrière  la  lisière  des  bois. 

Ce  fiit  ici  que,  pour  la  première  fois  depuis  le  commen- 
cement de  ce  voyage,  j'eus  le  plaisir  de  revoir  te  bority 
(MauriHa  vifàfera ,  Mart.),  Palmier  i  la  fois  si  élégant  et  si 
utile  (1),  ce  qui  indiquait,  si  je  ne  me  bï)mpe,  que  le  pays 
on  je  me  bwivaifl  alors  est  moins  élevé  et  plus  chaud  que 
celui  où  je  venais  de  voyager. 

J'ajouterai  que  mes  gras  tuèrent  à  Cainpo  Âlegre  deux 
oiseaux  que  je  ne  connaissais  point  encore,  et  jusqu'alors 
Prégent  et  ensuite  José  Harianno  n'en  avaient  préparé 
aucune  espèce  qui  ne  fit  partie  de  ma  collection  du  voyage 
de  1817. 

Au  delà  de  Campo  Alegre ,  je  parcourus  ,  pendant  une 


(1)  \ajia  mon  foyatK  (toM  (m  protNitcM  d«  Mo  4e  Janeiro,  etc.. 
U ,  313.  —  Comme  je  l'ii  déjt  dit  (  1.  c),  i'«*ais  écrit,  dans  mes  notes, 
tmriU,  brthogiiphe  qu'oot  làaçtée  HM.  Muliaa,  OudDO'  et  Kidder; 
c'est  DDiqnement  ponr  me  cooroTiner  h  celle  d'an  écrivaiii  da  ptjB, 
l'tbbt  Fiiarro,  que  j'ki ,  pent-étre  k  tort,  imprimé  tortty.  Oq  pnmooee 
comme  s'il  ;  iriit,  en  frantab,  bouriU;  ma»  on  sait  que ,  dans  la  Un- 
fae  portugaise,  le  son  de  Ta  se  cODfood  bien  souvent  arec  celai  de  l'ti. 


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DD  BIO  M  S.  PHAHCISCO.  M7 

cou|rie  de  Méats,  un  pays  presque  plat.  Je  traversai  en- 
suite une  petite  chaîne  de  montagnes  arides  et  caillouteu- 
ses ,  qui  porte  le  nom  de  Serra  da  Figtmreda  (  nom  de 
femme) ,  et  qui ,  comme  les  Serras  do  Araxà ,  do  Salitre  , 
do  Dourado ,  doit  être  un  contre-fort  de  la  grande  Serra  do 
S.  FrMicisco  e  da  Paranahyba.  Enfin,  jugqu'i  ce  dernier 
fleuve,  je  ne  vis  plus  qu'un  terrain  montueux. 

La  campagne  avait  toujours  une  teinte  grisâtre  qui  affli- 
geait les  regards;  la  chaleur  était  excessive,  et,  h  mesure 
que  nous  marchions ,  il  s'élevait  une  poussière  rougettre 
qui  nous  desséchait  le  gosier  et  salissait  nos  vêtements.  Au- 
cune maison  ,  aucune  trace  de  culture ,  point  de  bestiaux 
du»  les  pâturages ,  aucun  voyageur  dans  les  chemins , 
presque  point  de  fleurs,  point  de  changement  notable  dans 
lav^étation;  toujours  les  plantés  que  j'avais  recueillies 
dans  le  désert  oriental  du  S.  li^ancisco.  fêtais  désolé  de 
tsire  pour  si  peu  de  chose  un  voyage  si  fatigant ,  et  pres- 
que tenté  de  ne  point  aller  jusqu'il  Villa  Boa. 

Après  avoir  fait  6  îego<u  depuis  Campo  Alegre ,  j'arrivai 
enfin  sur  la  rive  gauche  du  Paranahyba  [S  mai).  Là  il  peut 
avoir  la  largeur  de  nos  rivières  de  troisième  ou  quatrième 
ordre;  son  cours  est  très-lent;  une  lisière  de  bois  épais  le 
borde  des  deux  cAtés,  et  quelques  chaumières  sont  éparses 
sur  sa  rive  droite.  Nous  le  passâmes  dans  une  étroite  pi- 
rogue, et  je  m'établis  sons  un  rancko  ouvert  de  toute  part, 
situé  sur  le  bord  même  de  la  rivière.  Le  Paranahyba  est , 
dit-on,  fort  abondant  en  poissons.  Les  espèces  qu'on  y 
pêche  sont  appelées,  dans  le  pays,  dourado,  p*rdfAa  (1), 

(1)  HoB  yo\/age  dan*  Ut  provitteet  A*  Mo  di  Janeiro,  tte..  U ,  39S, 
fohtîent  du  dét«îlB  snr  le  dangereni  poisson  appelé  pirânlia.  D'api^ 
M.  Spii ,  je  l'aviiB  rapporté  au  Mglttet  macrnpomtM ,  Cuv.;  mais  il  est 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


368  VOYASE  AUX  SOUiCES 

ewmatâa ,  paeû ,  pttraetmjtAa  (  peut-être  mieux  pyracan- 
juba),  Êuntby  [l) ,  jahû ,  lu6arâo  (3),  pton^wira,  pioti, 
mandy ,  traira  et  tambtiré. 

Il  y  avait  encore  une  heure  de  jour  lorsque  j'arrivai  au 
Paranabyba;  je  me  misa  mon  travail.  Un  soleil  brûlant  me 
dévorait;  des  nuées  de  moucherons  me  couvraient  la  t£te 
et  les  mains;  chaque  mulet  qui  passait  l'eau  faisait  voler 
autour  de  moi  des  tourbillons  de  poussière;  j'étais  an  sup- 
plice. Avec  la  nuit,  tout  changea;  alors  le  lune  éclairait  les 
objets  dont  j'étais  entouré;  une  fraîcheur  délicieuse  avait 
remplacé  l'ardeur  do  sol«l  ;  un  calme  profond  régnait  dans 
toute  la  nature;  à  peine  entendait-on  le  bruit  de  quelques 
petites  cigales,  et  la  voix  agréable  de  Harcellino  ajoutait 
an  charme  de  plus  à  ceux  de  la  soirée. 

An  delà  du  Paranabyba  (3) ,  je  traversai  un  pays  plat , 
borné  de  tous  côtés  par  de  petites  montagnes.  Toujours  des 


érident  qoe  eeUe  détcniûiiatiOD  n'est  pu  eucte  et  que  \t  pfrdnha  est  b 
Serratalm*  Piraya  de  Cnrier,  puisque  u  savant  a  fait  sa  descriptioD 
da  Serraiatme  Piraj/a  d'après  □□  indirida  que  j'ai  lUoi-inËme  eniejé 
do  Brésil  (TOjex  Mem.  Mtu.,  Y,  368,  89), 

(1)  H.  Gardner  préfère  éeriit  im-ibim.  J'ai  dit  ailleurs  (1.  e.)  com- 
biea  OD  est  embarrassé  pour  l'orthographe  des  noms  brésiliens  de  lieai , 
d'aDimaui  et  de  plaDies,  et  quelles  raisons  me  fout  adopter  la  manière 
d'écrire  de  l'abbé  Piurro. 

(3)  Le  nom  de  tMarào  est  celai  d'un  poisson  de  mer  ;  il  a  été  irans- 
porl4!  par  les  Hineiros  k  du  poisson  d'eau  dooM. 

(3)  Très-peu  de  temps  après  monvojage,  le  goaTeroeurde  Gojai, 
Manoel  Igaicio  de  Sompsio ,  qui  succéda  k  Fernando  Delgado ,  dont  je 
parlerai  par  la  suite ,  fit  ouvrir  un  chemin  plbs  court  que  celui  qne  j'ai 
pareoara,  mai»  beaucoup  moins  iuléressant  pour  robeerralear  ;  ce  dw- 
min,  qui  porte  le  nom  de  Pieaaa  do  Correio  dg  Gofox  (  percée  do  ooar- 
rier  de  Oojai  ],  éuit  dèjk  transiULbte  eu  1S33 ,  puisque  ce  tut  celui  que 
suivit  alors  H.  le  général  Raimundo  José  da  Cauha  Mattos  (  lUtttraho, 
1 ,  93). 


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DD  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  M9 

eamipo»  et  des  boaqaeU  de  bois ,  toujours  la  naème  séche- 
resse ,  toujours  aussi  peu  de  plantes  en  (leur. 

Je  passai  devant  trois  fazendas  composées  chacune  de 
quelques  misérables  chaumières  ;  mais,  voulant  gagner  du 
temps,  je  pris  le  parti  de  ne  ra'arréter  à  aucune  de  ce» 
maisonnettes  et  de  coudier  à  la  belle  étoile. 

Je  fis  halte  dans  on  bois ,  sur  le  bord  d'un  ruisseau  lim- 
pide ,  an  lieu  appelé  Moqaem  {{).  Comme  les  caravanes  ont 
coutume  de  s'arrêter  en  cet  endroit,  la  place  où  mes  malles 
(tarent  déchargées  était  assez  bien  nettoyée.  Mes  gens  sus- 
pendirent à  de  grandes  lianes  une  partie  du  menu  bagage  ; 
ils  dressèrent  pour  moi  un  petit  toit  qu'ils  rouvrirent  avec 
des  cuirs,  pnis  ils  s'étendirent  auprès  du  feu  qu'ils  avaient 
allumé.  Tandis  que  j'écrivais  mon  journal ,  les  rayons  de 
la  lune  pénétraient  à  travers  les  branches  d'arbres  qui  s'é- 
tendaient en  voûte  au-dessus  de  nos  tètes;  un  profond  si- 
lence régnait  autour  de  moi  et  n'était  troublé  que  par  le 
chant  de  quelques  cigales. 

Là  je  me  trouvais  au  pied  de  la  longue  Serra  do  S.  Fran- 
cisco da  Paratlahyba.  Presque  anssitAt  après  avoir  quitté 
Moquem ,  je  commentai  à  monter,  et,  ayant  suivi  une 
pente  douce  d'environ  une  demi-liéue,  j'arrivai  au  sommet 
de  la  Serra.  Ce  sommet  présente  un  vaste  plateau  qu'on 
appelle  encore  CAopadâo  (grand  plateau],  et  qui,  comme 
on  l'a  vu  plus  haut  (p.  314] ,  a  presque  6  hgwu  de  lon- 
gueur, et,  m'a-t-on  dit,  K  de  large. 
Il  est  couv^  de  pttnrages  naturels  ,  dont  les  uns  sont 

(I)  Ce  qom  M  retionve  dans  d'antres  parties  du  Brésil  ;  il  j  a  t  Goyai 
na  Rio  Uoqwm  et  un  petit  Tillage  appelé  de  la  même  nmière  {  Caz., 
Corog.,  \ ,  336,  346).  Le  mot  moqUMn  siguiAe  ftoucan,  et  mofwfor, 
bouraner. 


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no  VOYAGE  AUX  S 

composés  d'berbes  et  les  autres  d'berbes  et  d'arbres  rabou- 
gris. Dans  les  endroits  un  peu  bas,  on  aperçoit  des  bonqu^ 
de  bois,  et  là,  pour  la  seconde  fois  depuis  le  commence- 
raent  de  ce  voyage,  je  revis  le  Palmier  du  désMl. ,  l'utile 
bority  {Mauritia  vimfera,  Mart.},  aux  larges  feuilles  f» 
éventail. 

A  l'entrée  duChapadâo,  le  sol  d' offre  qu'un  sable  blanc 
et  fin,  mélangé  d''une  faible  portion  de  terre  végétale,  et 
j'7  trouvai  un  assez  grand  nombre  de  plantés  intéressantes, 
comme  cela  m'était  toujours  arrivé  dans  des  terrains  sem- 
blables. Là  je  vis  une  espèce  de  Velîozia  [coMÎa  d'£ma),  à 
feuilles  radicales  ;  la  Composée  n"  547,  que  j'avais  déjà  ré- 
coltée, comme  plusieurs  autres  du  même  genre  et  d'un 
genre  voisin,  dans  des  localités  pareilles;  enfin  les  petites 
Melastomées  o"  549  et  KKO.  Bient6t  le  terrain  changn  de 
nature;  il  redevint  roageAtre,  comme  il  l'est  ordinairement 
sur  les  taboleiros  coberUtt ,  et ,  dans  son  ensemble,  la  végé- 
talion  ne  différa  plus  de  celle  des  tampoi  que  j'avais  par- 
coums  les  jours  précédents. 

.  En  plusieurs  radroits  du  Chapadâo,  on  découvre  une  vue 
fort  étendue.  D'ailleurs ,  depuis  le  point  où  je  commençai 
jk  voyager  sur  ce  plateau  jusqu'au  lieu  appelé  Sitio  des  Pi- 
lôes,  éloigné  de  Moquem  de  !S  legoas,  on  ne  trouve  aucune 
maison.  L'eau  est  rare;  cependant  U  existe  quelques  petites 
sources  dans  les  enfooçements. 

Pressé  par  la  soif,  je  m'af^roctuu  de  l'une  d'dies  et  j'y 
trouvai  deux  jeunes  mulâtres  qui  mangeaient  de  la  farine 
délayée  dans  l'eau  de  la  fontaine,  mets  frugal  qu'on  ap- 
pelle yacuba.  Ils  m' engagerait  k  manger  avec  eux ,  accom- 
pagnant leur  offre  de  cette  aimable  politesse  si  commune 
chez  les  habitants  de  la  partie  orientale  de  Minas,  mais 


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DU  RIO  BE  6.  FRANOSCO.  3Tt 

si  rare  parmi  ceux  des  déserte  que  je  parcourais  alors. 
Je  fis  halte  au  Siiio  dos  PUôes ,  misérable  chaumière 
dont  l'eutrée  n'était  pas  même  fermée,  qui  n'avait  poiot 
de  f^kètre,  et  où  l'on  ne  voyait  d'autres  meuUes  que  des 
girao*  ou  lits  rustiques.  J'étais  logé  dans  la  principale 
pièce,  et  je  n'avais  pas  même  assez  de  place  pour  pouvoir 
me  retourner.  Cependant  c'était  au  propriétaire  de  cette 
chétive  demeure  qu'appartenait  le  Chapadâo.  D  aurait  pu 
en  tîrar  parti  pour  élever  des  bestiaux;  mais  la  di«té  du 
sd  ne  le  lui  permettait  pas.  C'est  ici  que  l'on  commence  à 
cattivH' le  manioc,  ami  des  contrées  chaudes.  Le  maïs,  qui, 
du  cAté  d'Araxé,  rend  300  pour  1  dans  les  terres  moyennes 
(voir  plus  haut,  p.  â4S),  ne  produit  plus  que  iSO  sur  le 
Chapadâo. 

La  contiaiiation  de  ce  plateau  porte  le  nom  de  Snra  dot 
PHÔeg  (montagnes  des  pîl<Hia)(l).  Au  ddà  du  «^  da 
néme  nom  (Sitio  doi  Pilâes),  je  marchai  encore,  pen- 
dant raviroD  Uois  quHts  d'heure,  tonjours  snr  le  même 
plateau ,  Mtsnite  je  commençai  à  descendre ,  et,  après  avoir 
bit  unedemi-iieue,  j'arrivai  daua  la  plaine.  Alors  j'avais 
traversé  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Parsnahyha;  je  me 
trouvais  au  bas  du  versant  oriental  de  cette  chaîne,  et  je 
continoai  i  le  longer  jusqu'au  del  de  Paracatù. 

La  pente  qui  conduit  du  Chapadâo  h  la  pUine  est  asses 
douce;  le  terrain  y  est  pierreux  et  présente  des  Vdloxia , 
ainsi  qne  la  Composée  S47  ;  d'ailleurs  je  ne  trouvai  dans 
ces  lieux  aucune  espèce  qne  je  n'eusse  pas  déji  récoltée,  et 
je  n'y  vis  presque  point  de  Qeurs.  En  descendant  du  Oia- 


{i)Ct  n'ett  ai  Serra  Spitoe»$,  tùSerra  dr  Spiloens,  tommt  V»  itth 
H.  Pohl  {IMte,  1,  344-S). 


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373  VOYAGE  AUX  SOURCES 

padâo,  on  jouit  d'une  vue  fort  étendue  et  assez  agréable. 
De  grands  bois,  qui  étaient  encore  d'une  verdute  très* 
bdie,  bordent  le  plateau;  au  delà  sont  des  pAturagés,  et 
l'horizon  est  borné  por  de  petites  montagnes.  Le  cbemiu 
que  je  suivis,  étant  arrivé  dans  la  plaine,  est  parallèle  à  la 
grande  chaîne.  Il  traverse  des  pAturages  couverts  d'arbres 
rabougris ,  d'autant  plus  nombreux  et  plus  serrés  que  la 
terre  prend  une  couleur  plus  rouge. 

Ladialeur,  ce  jour-là  (Dmai),  pouvait  à  peine  se  sup- 
porter, le  temps  étant  lourd  et  couvert,  et  cependant  il  ne 
tomba  que  quelques  gouttes  d'eau.  A  la  vérité,  nous  n'é- 
tions point  dans  la  saison  des  pluies;  mais  il  eût  été  bieni 
désirer  qu'il  survint  quelque  averse;  car  la  sécheresse  ex- 
cessive excitait  les  plaintes  de  tous  les  cultivateurs.  La  ré- 
colte du  riz  et  celle  du  maïs  avaient  été  presque  nulles ,  et 
les  denrées  étaient  exceeiûvement  chères. 

Après  avoir  fait  3  lienra  depuis  le  Sitio  dos  Pildee,  je 
m'arrètel  à  une  fasenda  qui  portait  le  nom  de  Guarda 
mSr.  Si  on  l'appelait  ainsi ,  ce  n'est  pas  qu'elle  appartint 
alors  à  un  guardamàr;  mais  sonpremierpropriéteire  l'avait 
été ,  et  la  plupart  des  faxendas  conservent  le  nom  de  celui 
qui  en  a  jeté  les  fondements.  Quoi  qu'il  en  soit,  je  vis  ici 
plusieurs  nègres ,  et  le  possesseur  actuel  paraissait  avoir 
quelque  aisance.  Cependant  sa  maison  n'éteit  encore  qu'une 
chaumière  mal  arrangée  ;  car,  il  faut  le  dire,  le  désordre 
caractérise  toutes  les  habitations  qu'on  rencontre  disper- 
sées dans  ces  déserts. 

On  me  logea  dans  une  grande  pièce  où  était  placée  la 
manjola,^,  pendant  que  j'écrivais,  on  faisait,  près  de  moi, 
de  la  farine  de  maïs  (  farinka  ).  Le  bruit  criard  de  la  mon- 
jola  m'étourdissait  ;  j'étais  aveuglé  par  la  fumée  du  four- 


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DU  RIO  DE  5.  FRARCISCO.  373 

DMU,  et  il  GallaJt ,  de  plos,  que  je  Base  la  guerre  aux  chiens 
qui  venaient  ronger  le  cuir  de  mes  malles. 

On  jouit,  dans  ce  canton,  d'un  grand  avantage.  kS  tegotu 
de  Gnarda  m6r ,  il  y  a ,  dans  la  Serra ,  des  eaux  minérales 
qui ,  comme  celles  d'Araxi ,  de  Salitre ,  de  la  Serra  Megra, 
remplacent  le  sel  pour  les  bétes  à  cornes. 

An  delè  de  Guarda  m6r,  le  chemin  traverse  un  pay» 
très-plat  et  se  {ffolonge  parallèlemeat  h  la  continuation  du 
Chapadào,  ou,  si  l'on  aime  mieux,  de  la  Serra  do  S.  Fran- 
cisco e  da  Paranahyba ,  que  l'on  doit  naturellement  avoir  à 
sa  gauche. 

Dans  un  espace  considérable,  où  le  chemin  est  fort  lai^. 
les  arbres  assez  élevés  se  touchaient  presque  tous  par  l'ex- 
trémité de  leurs  branches ,  et  entre  eux  croissait  un  nom- 
bre considérable  d'arbrisseaux  et  de  sous- arbrisseaux  ,  en- 
semble qui  produisait  un  effet  très-agréable.  D'ailleurs  les 
arbres  rabougris  qoi  dominent  dans  les  campas  me  parurent 
appartenir  tonjoars  aux  mêmes  espèces. 

Après  une  marche  de  3  legoat,  à  partir  de  Guarda  mér, 
je  as  halte  à  Sapé,  lieu  ainsi  appdé  à  caase  de  la  Graminée 
du  même  nom  qui  crott  dans  son  voisinage  (  StMcharum 
Sapé,  Aug.  S.  Hil.  ).  Dans  le  même  endroit ,  je  revis  en 
grande  abondance  le  coptm  gordura  ,  dont  l'odeur  rési- 
neuse remplissait  l'air ,  et  que  je  n'avais  pas  rencoD^  i 
l'occident  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paranahyba. 

An  delà  de  Sapé  le  pays  est  encore  plat.  J'avais ,  k  ma 
gauche,  la  continuation  des  montagnes  de  PilSes,  qui, 
peu  à  peu ,  vont  en  diminuant  d'élévation ,  et  à  ma  droite 
s'étendaient  d'autres  petites  montagnes. 

Le  chemin  est  toujours  fort  beau  et  traverse ,  en  serpen- 
tant, des  pAturages  ou ,  suivant  la  nature  du  terrain ,  les 


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ST4  VOYAGE  mx  SOURCES 

arbres  et  les  aièrisseaux  sont  plus  ou  moins  nointH«ux. 
Quoique  alors  il  D'y  en  eût  presque  point  en  fleur  et  que 
leur  forme  générale  soit  la  même,  puisqa'à  peu  pràs  tous 
sont  tortueux  et  rabougris ,  cependant  ils  varient  tant  dans 
les  détails  que  leur  ensemble  produit  un  effet  charmant, 
surtout  lorsqu'ils  sont  b^e-rapprochés  les  uns  des  autres. 
A  e(Aé  de  la  Légumineuse  d°  575,  dont  les  feuilles ,  fine- 
ment déroupées,  atteigneot  jusqu'à  3  pieds  de  longueur, 
sont  des  Malpighiées  et  des  Âpocynées  qui  ont  les  leurs 
parfaitement  entités ,  larges ,  roides  et  cassantes.  De  pe- 
tits Palmiers  contrastent,  par  la  simplicité  de  leurs  Cormes, 
avec  les  rameaux  si  divisés  des  arbres  voisins ,  et  l'oo  voit 
une  Apocynée  confondre  son  feuillage  lisse  e!t  luisant  avec 
les  feuilles  cotoniieuaes  et  blanchâtres  d'une  Malpi^lacée. 
Lm  sous-arbrisseaux  qui  croissent  sous  ces  différents  arbres 
ne  sont  pas  moins  variés  qu'eux.  De  petites  Malpighiées 
aux  feuilles  sim{des  se  méleot  i  des  Caisia  qui  ont  les  leurs 
finement  découpées,  et  les  folioles  extrêmement  rappro- 
chées de  ces  dernières  plantes  contrastent  aussi  avec  le 
feuillage  également  découpé ,  mais  extrêmement  lâche ,  de 
ta  Signonée  a'  306-  De  distance  à  autre,  on  voit  i  droite 
et  à  gauche  du  chemin  des  endroits  bas  (t  marécageux ,  où 
l'herbe,  très-^isse,  est  d'un  vert  asseï  gai  :  U  point  d'ar- 
bces  tortueux  variés  pour  le  feuillage ,  absolumeot  aucun 
contraste;  le  seul  bority  se  montre  dans  la  partie  la  plus 
humide  de.cea  espèces  de  vallées,  lantAt  isolé,  taoiAt  par 
petits  groupe»;  les  j^inea  individus  n'oSorent  qu'une  touffe 
de  feuilles  en  éventail ,  qui  sortent  de  terre  portées  sur  de 
longs  pétioles ,  les  autres  s'élèvent  comme  des  colonnes 
surmontées  d'un  panache  saperhe. 

A  3  lieues  de  Sapé ,  je  reçus  l' hospitalité  dans  -  une  /à- 


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DD  MO  DE  S.  nuNOSCO.  m 

amda  qui  porte  le  nom  de  Joào  Gomei.  Elle  appartenait  k 
un  mulâtre ,  et  cependant  elle  avait  un  peu  plus  d'appa- 
rence que  celles  où  j'avais  fait  lialte  depuis  AraxA  ;  on  pou- 
vait du  moins  distinguer  la  mais(m  du  mahre  des  cabanes 
de  ses  nègres.  Je  Tus  aussi  beaucoup  plus  content  de  la 
conversation  et  des  manières  du  mulâtre  que  de  celles  de 
tant  de  blancs  chez  lesquels  je  m'étais  arrêté  depuis  un 
mms  (V-  p-  98S).  Alors  je  me  rapprochais  de  Paracatù;  le 
propriétaire  de  la  fasmda  de  Joâo  Gomes  appartenait  i  une 
population  plus  ancienne;  les  campagnards  que  j'avais  vus 
précédemment  étaient  la  lie  des  diverses  eomarcat  de  la 
province  de  Minas  Geraes. 

Les  eampot  qne  je  traversai,  après  avoir  quitté  Joâo  Go- 
mes, ont  un  aspect  riant ,  et  offraient  encore  une  très- 
belle  verdure  ;  cependant,  il  faut  l'avouer,  quelque  jolis 
que  soient  les  eampoi  d'arbres  rabougris ,  on  finit  par  être 
fatigué  de  ne  jamais  voir  autre  chose.  D'ailleurs,  dans  les 
S  mortelles  lieues  que  je  fis  entre  Joâo  Gomes  et  le  poste 
militaire  de  Santa  Isabel ,  je  n'eus  pas  le  plaisir  de  re- 
cueillir une  plante  que  je  ne  possédasse  point  encore  ;  je 
passai  même  des  demi-heures  entières  sans  apercevoir  une 
fleur. 

Depuis  trois  jours,  le  toonerre  se  faisait  entendre ,  il  ' 
tombait  de  l'eau  tons  les  jours,  et  cependant  la  chaleur 
était  encore  insupportable.  J'étais  néanmoins  bien  heureux 
que  le  temps  se  fiitt  mis  i  la  pluie,  car,  auparavant,  la  tem- 
p^ture  s'élevait  toujours  davantage. 

Entre  Joâo  Gomes  et  le  poste  militaire  de  Santa  Isabel , 
je  passai  plusieurs  petites  rivière  qui  prennent  leur  source 
dans  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paranahyba  et  vont  se 
jeter,  par  des  intermédiaires,  dans  le  S.  Francisco,  savoir: 


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978  VOYtâE  AUX  SOURCES 

le  Riberào  (torrenl),  tEseuro  Grande ,  VEaeuro  Pequeao 
et  enfia  le  Santa  Itabel.  Lea  eaux  de  ce  dernier  et  de  l'Es- 
euro  Grande  sont  sujettes  é  donner  des  fièvres  intennit- 
tenteSt  ce  qui  vient  sans  doute  de  ce  que  leurs  bords  sont 
marécageux. 

,  Aufvès  du  Santa  Isabel  a  été  Mlle  la  maisonDette  où 
l'on  a  établi  un  poste  de  militaires  du  régiment  de  cavalerie 
de  Villa  Rica  :  c'est  li  que  je  fis  balte.  Je  montrai  mes  pa- 
piers au  caporal  qui  commandait  le  poste ,  et  j'en  fus  très- 
bien  accueilli. 

te  poste  ne  se  composait  que  de  deux  soldats  tirés  d'un 
détachement  de  neuf  hommes  cantonnés  à  Paracatû.  Ces 
militaires  étaient  chargés  de  faire  la  visite  de  tous  les  bal- 
lots venant  de  Goyaz,  afin  de  s'assurer  s'ils  ne  contenaient 
pas  des  diamants  et  de  l'or  en  poudre.  Ils  devaient  empê- 
cher aussi  qn'on  ne  passât  des  piasb^  d'Espagne,  sans  un 
coin  aux  armes  de  Portugal,  que  le  gouvernement,  par 
une  frande  indigne,  faisait  mettre  sur  ces  moanaies,  lea 
portant ,  après  cette  formalité ,  de  780  reis  (  4  fr.  88  c.  )  i 
leur  valeur  réelle,  à  une  valeur  fictive  de  960  reis  (6  îi.). 
Le  poste  de  Santa  Isabel  avait  encore  une  autre  destina- 
tion :  on  ;  faisait  payer  un  droit  de  378  reis  (3  fr.  â4c.] 

'  par  arrobe,  sur  toutes  les  marchandises  qui  étaient  sorties 
de  Goyaz  pour  être  vendues  à  Minas  Geraes.  Je  n'ai  pas 
besoin  de  faire  sentir  combien  il  est  absurde  d'exiger  des 
droits  sur  les  productions  d'une  province  lorsqu'elles  pas- 
sent dans  une  autre  ;  combien,  surtout,  il  est  absurde  de 
mettre  des  droits  de  sortie  d'un  pays  comme  Goyaz ,  qui , 
dans  son  éloignement  seul,  trouve  déjà  tant  d'obstacles  à 
l'exportation  de  ses  produits. 
Ce  fut  à  Santa  Isabel  que  j'appris  la  fin  des  aventures 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  277 

d'un  contrebandier  français  qui  m'avait  inspiré  quelque 
intérêt  par  la  force  de  sa  volonté  et  sa  persévérance.  Pour 
ne  pas  courir  le  risque  de  compromettre  cet  bomme ,  je 
n'avais  rien  écrit,  dans  mon  journal,  de  ce  qui  le  concer- 
nait; je  vais  ici  raconter  son  histoire  aussi  fidèlement  que 
me  le  permettra  ma  mémoire.  Lorsque,  au  retour  de  mon 
voyage  dans  le  district  des  Diamants,  je  repassai  par  Villa 
do  Principe,  le  curé  de  cette  ville,  M.  Francisco  Rodrigues 
Rtbeiro  de  Avellar ,  me  demanda  si  je  voulais  recevoir  la 
visite  d'un  de  mes  compatriotes,  qui  alors  se  trouvait  dans 
le  pays.  11  y  avait  un  an  environ  que,  à  l'exception  de  mon 
domestique,  je  n'avais  aperçu  aucun  Français;  j'acceptai 
avec  plaisir  l'offre  de  l'excellent  curé.  Bientôt  je  vis  paraî- 
tre, dans  ma  chambre,  un  bomme  vêtu  d'une  redingote 
grise.  Agé  d'une  trentaine  d'années,  mince  et  très-grand  , 
dont  la  tète  était  ronde,  la  figure  rouge  et  commune.  Nous 
nous  mimes  à  causer.  Cet  homme,  qui  vivait  au  milieu  d'é- 
trangers dont  il  fallait  qu'il  se  défiât  dans  tons  les  instants, 
fnt  ravi  sans  doute  de  trouver  un  compatriote  avec  lequel 
il  pouvait  enfin  parler  sa  langue ,  s'entretenir  de  son  pays, 
de  ses  intérêts  et  de  son  avenir;  bientAt  il  se  laissa  all^  à 
tout  l'aÉNindon  de  la  confiance  et  il  me  raconta  son  histoire. 
Hélait  né,  jecrois,  à  Rodea  et  y  exerçait  la  profession  de 
boucher,  lorsque  la  destruction  du  gouvernement  impérial 
l'entraîna  à  faire  de  mauvaises  affaires.  A  cette  époque,  le 
voyage  de  l'Anglais  Mowe  dans  l'intérieur  du  Brésil  lui 
tombe  entre  les  mains ,  et  dès  lors  il  ne  rêve  plus  que  dia- 
mants et  richesses.  Persuadé  qu'il  peut  faire  fortune  au 
Brésil  par  la  contrebande  des  diamants,  il  part  pour  Mar- 
seille et  de  là  il  se  rend  k  Lisbonne  ;  mais  c'était  k  Rio  de 
Janeiro  qu'il  voulait  arriver,  il  va  trouver  le  consul  de 


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278  VOYAGE  AUX  SODKGES 

France  à  Lisboone,  tâche  de  l'intéresser,  et  ïe  supplie  de 
lui  indiquer  les  moyens  de  passer  au  Brésil.  Le  cousu)  l'a- 
dresse k  ipt  ot&ciet  portugais  qui  allait  s'embarquer  pour 
Rio  de  Janeiro  sur  on  bâtiment  de  guerre.  L'ofBeier  avait 
besoin  d'un  domestique  ;  il  prend  le  Français ,  ne  lui  pro- 
mettant d'autre  salaire  que  son  passage;  c'était  la  seule 
chose  que  celui-ci  désirât.  Jamais,  me  disait-il,  homme 
n'avait  été  mieux  servi  que  cet  ofBcier;  j'allais  au  devant 
de  ses  désirs,  je  les  devinais  dam  ses  regards.  Le  bâtiment 
arrive  heureusement  au  Brésil.  L'oiQder,  sensible  aux  at- 
tentions de  son  domestique,  lui  dit  alors  que,  quoiqu'il  lui 
eût  seulement  promis  le  passage ,  il  serait  charmé  de  faire 
quelque  chose  pour  lui.  On  assure  ,  lui  répondit  le  Fran- 
çais, qu'il  y  a  UQ  peu  d'argent  â  gagner  dans  le  pays  des 
Mines;  je  serais  bien  reconnaissant,  si  vous  pouviei  me  (aire 
avoir  un  passe-port  pour  cette  province.  L'officier' conoais- 
sait  l'intendant  général  de  la  police  ;  il  sollicite  le  pasee-port 
et  l'obtient.  Mon  Français  part  pour  Villa  Rica;  Il  s'y 
lie  avec  un  contrebandier  anglais  établi  dans  le  pays, 
travaille  qn^que  temps  avec  lui,  puis  il  le  quitte  et  le 
rend  dans  le  Serro  do  Frio.  Là  il  parvient  à  se  faire  ini- 
tier dans  tous  les  mystères  de  la  contrebande  des  diamants, 
fait  connaissance  avec  les  nègres  qui  volaient  ces  précieuses 
pierres,  et  pénètre  dans  le  district  dont  l'entrée  était  si  sé- 
vèrement défendue.  Les  chemins  secrets  pratiqués  dans 
les  lieux  les  plus  difficiles  par  les  anciens  j/anmpeù'Of  (1) 
lai  deviennent  bientôt  familiers,  et,  lorsque  je  le  vis,  il 

(1)  Les  oarinipeiro$  t^UEcnl  des  hommes  areotureat  qui ,  réttais  en 
troupes ,  ftigtieut  li  contrebande  des  diamants  et  se  réfugiaient  dan» 
kî  mODlagnes  les  plus  escarpe  (Voyage  daiu  U  ditlrM  de»  Dia- 
iMmit,  etc.,  1, 21). 


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DU  UO  BE  S.  FUNCISCO.  2T» 

avait  déji  commencé  è  gagoer  quelque  u^ent.  Quand  cet 
homme  eut  achevé  son  récit,  je  tâchai  de  le  détourner  du 
métier  aventureux  auquel  il  se  livrait;  je  lui  en  représentai 
tous  les  dangers ,  et  lui  répétai  que ,  si  on  voulait  faire  un 
exemple,  ceserait  certainement  lui,  étranger,  sans  amis, 
sans  protecteurs ,  que  l'on  sacrifierait-  Mais  les  diamants 
pouvaient  l'enrichir;  il  était  décidé  à  courir  tous  les  risques 
pour  parvenir  au  hut  qu'il  avait  poursuivi  jusqu'alors,  et 
mes  représentations  flirent  inutiles,  ie  le  décidai  coudant 
i  écrire  à  sa  famille,  à  laquelle  il  s'était  promis  de  oe  don- 
ner de  ses  nouvelles  que  lorsqu'il  aurait  fait  fortune ,  et  il . 
convint  qu'il  m'apporterait  sa  lettre  le  lendemain,  pour 
que  je  la  fisse  passer  à  Bodez.  Mais  cet  homme  se  repentit 
sans  doute  de  la  confiance  qu'il  m'avait  montrée;  il  ne  re- 
.vint  point,  et  je  fus  plus  d'un  an  sans  entendre  parlar  de 
lui.  Enfin,  lorsque  j'étais  an  poste  de  Sauta  Isabel ,  te  ca- 
poral me  dit  que,  quelque  temps  auparavant,  il  avait  arrêté 
UD  de  mes  compatriotes  dans  le  district  des  Diamants  ;  je 
lui  fis  des  questions  sur  cet  homme,  et,  aux  détails  qu'il  me 
donna ,  je  ne  pus  douter  que  ce  ne  fât  le  contrebandier  de 
Bodez,  Le  caporal  sortait  lui-même  en  cachette  du  district 
des  diamants,  par  des  chemins  détournés,  lorsqu'il  aperçut 
un  homme  qui  se  glissât  le  long  des  rochers.  Vêtu  en  bour- 
geois et  se  trouvant  avec  une  femme  -,  il  De  fit  rien  pour 
prendre  cet  homme  ;  mais ,  de  retour  à  son  poste ,  il  rendit 
compte  à  ses  camarades  de  ce  qu'il  avait  vu.  Les  soldats  se 
mirent  en  embuscade  et  ils  arrêtèrent  le  contrebandier, 
qu'ils  reconnurent  pour  un  Français;  cependant  celui-ci 
les  pria  avec  tant  d'instance  de  le  laisser  aller  qu'ils  y  con- 
sentirent. Cette  leçon  ne  le  guérit  pourtant  pas  de  son  in- 
concevable opiniAIreté.  Il  fut  bientêt  dénoncé  comme  étant 


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UO  TOYASE  AUX  SODICES 

caché  dans  tine  des  maisons  de  l'un  des  services  (1)  du 
district  des  Diamants.  On  cerne  la  maison  pendant  la  nuit, 
il  s'échappe  ;  on  le  poursuit ,  il  s'écliappe  nne  seconde  fois , 
et  il  en  fat  quitte  pour  la  perte  de  sa  bourse,  que  les  soldats 
se  partagèrent  et  qu'il  avait  laissa  tomber,  sans  doute  pour 
occuper  ceux  qui  le  poursuivaient  et  pour  gagner  du  temps. 
Le  caporal  ajouta  à  son  récit  que  cet  homme  s'était  retiré 
dans  les  environs  de  Sabari,  et  je  ne  sais  ce  qu'il  sera  de- 
venu. Il  est  fAcheux  qu'une  si  singulière  persévérance  n'eût 
pas  un  plus  noble  but. 

Peu  après  avoir  quitté  le  poste  de  Santa  Isabel ,  je  com- 
mençai A  monter  sur  un  mdme  élevé  qu'on  nomnie  Serra 
de  Paracatu.  Sur  le  flanc  de  ce  morne  et  sur  son  sommet , 
on  jouit  d'une  vue  extrêmement  étendue.  J'y  découvrais 
toute  la  plaine  que  f  avais  traversée  les  jours  précédents, 
tA  au  delà  les  montagnes  qui  la  bornent.  Les  bouquets  de 
bois,  les  pAturages  composés  seulement  de  Graminées  et 
ceux  où  s'élèvent  de  petits  arbres  forment,  lorsqu'on  les 
voit  de  loin,  des  compartiments  variés  d'un  ^et  très- 
agréable.  En  descendant  la  montagne  on  aperçoit,  à  peu  de 
distance,  la  ville  de  Paracatu,  située  sur  la  droite,  au  pied 
de  quelques  collines. 

J'étais  porteur  d'une  lettre  de  recommandation  pour  le 
targento  môr  Alexandre  Pbreira  b  Castro.  On  m'avait 
dit  qu'il  était  i  sa  maison  de  campagne  dont  on  m'avait 
mal  indiqué  le  chemin  ;  mais ,  après  avoir  erré  longtemps 
au  milieu  des  pâturages,  j'arrivai  è  l'entrée  de  Paracatà. 

(1)  On  appelle  ttrvie«$  {âerviçoi)  lu  lieui  où,  poar  extraire  des  dit- 
utnis,  ou  a  élabLi  une  troupe  ((ropa) ,  nom  que  l'on  douie  à  une  rén- 
oioD  d'eiiclaKa  dirigés  par  de»  emplojéa  libres  (  royale  dont  le  diilTiet 
det  Dtanutnlt,  elc,  1 ,  89). 


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DU  RIO  DS  S.  FtUHCISCO.  181 

Li  quelqu'un  m' apprit  que  le  targento  môr  se  trouvait  i 
la  ville  ou  i  UD  lavage  d'or  qu'il  possédait  dans  le  voisi- 
nage. J'envoyai  José  Marianne  pour  s'en  assurer.  Le  tar- 
gmto  môr  n'était  point  A  la  ville  ;  mon  messager  alla  le 
chercher  à  son  lavage ,  et  je  passai  deui  heures  exposé  aa 
soleil  le  plus  ardent,  sans  pouvoir  trouver  le  moindre  om- 
brage. Rarement  je  fus  aussi  fatigué  que  ce  jour-l&. 


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T0TA6B  AUX  SOOtCBS 


CHAPITRE  XIV. 


Histoire  de  Piricitô.  —  Par  qui  cette  TJlle  est  ■njonrd'fani  peuplée.  — 
Son  administratioD  civile.  Le  sonveraÎD  mal  obéi  par  les  magiab'ata. 
—  Population  de  Paracatù  et  de  la  paroisse  dont  cette  ville  eat  le  chef- 
lien. —  Sitaatioude  Piracatn. —  Les  misseani  qui  l'entourent.  Rues: 
Duisoos  ;  jardins.  —  Place  pabliqne.  —  FontaÏDH.  —  EgliMA. —  HAlel 
de  Tille.  —  Tavemes  ;  boutiques  ;  commerce.  —  Eiploitation  des  mi' 
nés.  —  Hessonrces  de  k  ville  de  Paracttn.  —  Guitare  des  terne.  — 
Bélail.—  EipoTlatiofks."  DiteUe.— Portrait  du  tùrgtnio  mdr  Auur- 
pu  PnunBn  ■  Cisno. 


Les  Faulistes  qui  allaient  i  la  découverte  de  nouvelles 
terres  ne  traversaient  jamais  un  ruisseau  sans  éprouver  le 
sable  de  son  lit  pour  s'assurer  qu'il  ne  contenait  pas  de  l'or. 
Ceux  qui  découvrirent  Goyaz  furent  conduits  par  le  hasard 
au  lieu  où  est  aujourd'hui  situé  Paracatù  ;  ils  trouvèrent  de 
Tor  en  abondance  dans  le  niisseau  qui  porte  le  nom  de 
Corrego  Rico  et  consignèrent  ce  fait  dans  leur  itiné- 
raire (1). 

Longtemps  après,  cet  itinéraire  tomba  entre  les  mains  de 
José  Rodrigues  Froes,  qui  appartenait  à  une  famille  recom- 
mandable  de  S.  Paul.  Il  part  seul  avec  deux  esclaves  noirs, 

(1)  On  raconte  même  qne ,  pour  mieui  faire  recoDualtre  l'endroit  dé- 
signa ,  ils  jr  avaient  rcuni  deni  Palmiers  avec  udc  chaîne. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  383 

traverse  des  contrées  encore  inhabitées,  et,  en  1744,  il 
arrive  enfin  au  lieu  qu'il  cherchait  avec  tant  de  courage  et 
d'ardeur, 

Ayant  trouvé  certains  poissons  d'un  goût  agréable  dans  le 
Corrego  Rico,  il  imagina  de  donner  au  pays  qu'il  venait  de 
découvrir  le  nom  de  Pyra-catu  (bon  poisson] ,  qu'il  em- 
prunta à  la  langue  des  Indiens  de  la  c6te  {Imgoa  gerat}, 
fidèle  À  l'usage  généralement  adopté  par  les  anciens  Pau- 
listes.  Les  travaux  des  mineurs  ont  détruit  les  poissons  qui 
vivaient  dans  le  Corrego  Rico  ;  le  nom  de  Pyracatû  s'est 
altéré  et  l'on  en  a  fait  Paracatà.  Cependant  quelques  per- 
sonnes qui  ne  sont  point  étrangères  à  l'histoire  du  pays  con- 
servent encore  le  nom  primitif  (1). 

Les  succès  de  José  Rodrigues  Froes  surpassèrent  ses  espé- 
rances, n  retira  du  Corrego  Rico  une  quantité  d'or  considé- 
rable, et  il  alla  porter  i  Sabaré  le  fruit  de  ses  travaux.  Il  fut 
nommé  gttarda  môr  (2)  et  on  lui  accorda  la  data  de  prété- 
wace[^ttadeprefereneia]  [5),qu'il  est  d'usage  de  concéder 
à  ceux  qui  découvrent  des  mines.  Froes  retourna  à  Para- 
catû  avec  un  grand  nombre  d'hommes  qui  voulaient  parta- 
ger les  trésors  des  mines  nouvelles;  beaucoup)  de  gens  vin- 
rent également  de  Goyaz  :  enfin  la  réputation  des  richesses 
du  pays  fut  bientâl  telle ,  que  plusieurs  Portugais  européens 
traversèrent  le  désert  pour  se  fixer  à  Paracatû. 

Dans  les  commencements  on  tirait,  sans  aucune  peine, 

(1)  Le  cachet  de  U  posie  porte  mt me  le  nom  dePJr[imlii(tS)9). 

(1)  U  ottartttt  mor  est  un  magistrat  cbargé  de  h  dùtribuiiOD  des  ler- 
tnua  auriftres  [Voyage  daiu  Ui  province*  de  Rio  de  Janeiro,  etc., 
I,!3B). 

(3)  Od  entead  par  dala  l'ûlcadue  de  lerraÎD  aurifère  que  le  g%Mrda 
mor  peut  douuer  a  chicun. 


...d:,;.  Google 


384  VOYAGE  AUX  SOURCES 

une  grande  qnantité  d'or  du  Corrego  Rico  et  de  quelques 
ruisseaui  voisius,  les  Corregos  de  S.  Domingot,  de  S.  An- 
tonio et  de  Santa  Rita.  Les  mineurs  de  Paracatû  achetè- 
rent un  grand  nombre  d'esclaves  (1]>  et  en  peu  de  temps 
s'éleva  une  ville  nouvelle. 

Alors  on  taisait  venir  &  grands  frais  les  vins  et  les  autres 
marchandises  d'Europe  è  travers  le  désert  ;  on  dépensait 
des  sommes  considérables  pour  les  fStes  d'église  ;  on  eut 
des  musiciens;  on  eut  un  petit  théâtre,  et  les  nègres  eux- 
mêmes,  dans  leurs  réjouissances ,  répandaient,  dît-on,  de 
la  poudre  d'or  sur  la  chevelure  de  leurs  meilleures  dan- 
seuses (S). 

Cependant  toute  cette  opulence  ne  pouvait  être  de  lon- 
gue durée.  Chacun  jouissait  de  ses  richesses,  personne  ne 
fonda  une  fortune  durable.  La  plupart  des  premiers  colons, 
qui  étaient  des  célibataires,  ne  songeaient  point  à  l'avenir, 
et  les  gens  mariés,  entraînés  par  l'exemple  des  autres,  se 
montrèrent  aussi  imprévoyants. 

Les  mines  des  environs  de  Paracatû  sont  loin  d'Être  épui- 
sées, mais  peu  à  peu  elles  sont  devenues  d'une  exploita- 
tion plus  difficile.  L'amour  et  la  reconnaissance  ont  fait 
affï^ncbir  un  grand  nombre  d'esclaves  [3]  ;  les  autres  sont 
morts,  et  ils  n'ont  pu  ^re  remplacés.  A  peineaujoard'hui 

(1)  Le  ftmeut  Felisberto  Cddeira  Braut ,  qni ,  soas  l'administration 
de  Gomes  Frejre,  fat  le  traisiènie  fermier  des  diamants  da  Brésil,  H 
qar ,  accusé  de  malTerutions,  Ait  mis  en  prison  A  Lisbonne ,  où  il  mou- 
rat,  était,  selon  Sonthej  [Hiit.,  Œ,  634],  un  ricbe  mineur  de  Paracatn. 

(!)  Vojez  l'introduction  k  mon  Hiiloire  da  planlei  tel  plut  remor- 
quaiUi  du  Bréiil  et  du  Paraouai/. 

(3)  Ceci  BafBrail  ponr  prouver  que  I'od  a  indnil  en  erreur  H.  Jaujucs 
Ar^o,  lorsqu'on  loi  a  dit  que  les  Brésiliens  D'aDraDchissaicnt  point  lenrs 
Digrra, 


...d:,;,  Google 


DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  385 

(1819)  compte-on  à  Paracatii  deux  ou  tn^s  persoDoes  qui 
s'occupent  en  graod  de  l'extraction  de  l'or;  la  population 
de  cette  ville  a  singulièremeot  diminué,  et  l'on  n'y  voit  plus 
qu'un  très-petit  nombre  de  blancs  qui  généralement  sont 
peu  riches,  et  auxquels  le  climat  et  l'oisiveté  ont  fait  per- 
dre cet  esprit  entreprenant  dont  leurs  pères  furent  animés.  - 

Il  existe  à  Paracatu  beaucoup  de  mulâtres;  mais  ce 
sont  les  nègres  libres  et  créoles  qui  forment  aujourd'hui 
la  majeure  partie  de  la  population  de  cette  ville.  Leurs 
femmes  filent  du  coton  pour  faire  de  grossiers  tissus  ;  quel- 
ques hommes  ont  des  métiers,  le  plus  grand  nombre  va  de 
temps  en  temps  cherdier  un  peu  de  pondre  d'or  dans  les 
ruisseaux  voisins.  Presque  tous  vivent  dans  une  extrême 
pauvreté;  mais  ils  ne  trouvent  point  que  ce  soit  adieter  trop 
cher  le  bonheur  de  passer  la  plus  grande  partie  de  leur 
temps  à  ne  rien  faire.  On  peut  croire  aisément  que  des 
hommes  sans  occupation  et  sans  principes  sont  enclins  à 
plus  d'une  sorte  de  vice.  Le  vol ,  qui  naît  de  l'oisiveté  et  qui 
la  favorise,  est  un  de  ceux  que  l'on  reproche  le  plus  aux 
nègres  de  Paracatu  ;  très-souvent  ils  enlèvent  des  bestiaux 
aox  cultivateurs  du  voisinage. 

Pendant  longtemps  Paracatu  ât  partie  de  la  eomarca  de 
Sahara.  Ce  fut  d'abord  un  simple  village,  puis  un  chef-lieu 
de  justice  [julgadit] ,  et  enfin  un  décret  du  30  octobre  1 798 
en  fit  une  ville  sous  le  nom  de  Villa  de  Paraealû  do  Prin^ 
e^  (1).  Dans  l'espace  d'environ  dix-huit  ans,  Paracatà 
resta  le  chef-lieu  d'un  termo  administré  par  un  jmz  de  fora; 
mais,  le  17  mars  1815  (â),  on  érigea  ce  lermo  en  chef-lieu 

(1)  Ce  nom  de  Paraealû  âo  Principe  n'esl  emplojiS  que  pour  li>i 
•clés  publics;  dansruuge  bibitael,  oa  dîl  simplement  Puracalii. 
(3^  Cette  date  et  la  précfdente  sont  empruntées  h  Piurro. 


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ISA  TOTAGE  AUX  SOURCES 

de  cotruarca,  et,  comme  je  l'ai  déjà  dît,  par  un  décret  du 
i  avril  i816,  on  réunit  à  la  nouvelle  comarca  les  justices 
d'Araxâ  et  de  Desentboque.  Il  fut  décidé  aussi  que  Para- 
cetû,  ayant  un  ouvidor,  n'aurait  plus  de  jiàz  de  fora, 
mais  seulement  deux  juges  ordinaires  {juises  ordùtarÙM] 
'  et  nn  juge  des  orphelins  (jutz  dos  orfhos). 

A  l'époque  de  mon  voyage,  il  y  avait  déjà  nn  certain 
temps  que  le  nouvel  ouvidor  de  Paracatû  était  nommé; 
mais  il  n'avait  pas  encore  songé  à  quitter  le  lieu  de  sa  rési- 
dence. C'était  alors  un  usage  général  dans  le  Brésil  que  les 
administrateurs  ne  se  rendissent  à  leur  poste  que  fort  long- 
temps après  leur  nomination.  On  a  vu  des  capitaines  géné- 
raux rester  plusieurs  années  à  Bio  de  Janeiro,  avant  de 
partir  pour  leurs  gouvernements,  paraître  à  la  cour,  et 
marchander  avec  le  roi  sur  le  pris  de  leurs  services  futurs. 
On  connaissait  toute  la  faiblesse  du  prince  et  on  en  pro- 
fitait. 

Quoique  détaché  de  Sabarà,  Paracatâ  continuait,  lors  de 
mon  voyage,  i  en  dépendre  pour  ce  qui  concerne  la  fonte 
de  l'or  (1).  A  la  vérit^,  Voumdor  de  cette  dernière  ville  est 
aussi  intendant  de  l'or;  mais  le  métal  extrait  de  tout  le 
territoire  de  Paracatij  devait  être  fondu  k  Sabarft.  Il  y  avait, 
dans  le  chef-lieu  de  la  comarca  nouvelle,  deux  maisons 
{casât  depremuta)  où  l'on  échangeait  l'or  en  pondre  contre 
des  hineis  (bilhetet  de  permuta),  et,  tous  les  trois  mois ,  on 
foisait  i  l'intendance  de  For  (ùOendenda  d'ouro)  de  Sabari 


(1)  Si,  de  1833  h  1S29,  OD  n'a  poiol  cnk'  k  Piracatii  d'él 
pour  la  fonte  de  l'or  [eaia  da  fundiçào) ,  M.  Walsh  s'est  trompe  quaad 
il  a  dit  que,  ï  la  dernière  de  cesi':poque^,  il  en  existait,  b  Minas,  dans 
chaque  cher-lieu  de  mmarra  (Solet,  II,  ISS). 


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DU  RIO  m  s.  FRANCISCO.  SST 

la  remise  de  celai  qui  arait  été  réuni  daos  les  maisons  de 
change  (1). 

Quant  au  spirituel,  Paracatû  est  le  dief-lieu  d'une  pa- 
roisse qui ,  autrefois ,  s'étendait  jusqu'à  Salgado  (S),  et  qui 
a  été  réduite  successivement,  â  mesure  que  le  Sertâo  s'est 
poiplé  davantage.  Aujourd'hui  (1819),  elle  a  30  lieues  dans 
sa  plus  grande  longuenr  et  environ  16  de  largeur;  mais, 
daos  cet  immense  territoire,  elle  ne  comprend  qu'une  popn- 
laition  de  7,000  Ames,  dont  3.000  dans  Paracatû  et  un 
rayon  d'environ  i  lieue.  Ce  qui  prouve,  au  reste,  combien 
cette  ville  a  perdu  et  son  importance,  depuis  que  ses  mi- 
nes ont  commencé  à  s'épuiser,  c'est  que,  suivant  Fizarro, . 
on  y  comptait  13,000  habitants  en  1766,  et  alors  sa  popu- 
lation n'était  déjà  plus  aussi  considérable  qu'elle  l'avait  été 
dans  l'origine  (3). 

Paracatû  est  situé  aux  limites  d'une  jdaine,  sur  la  par- 
tie la  plus  bassed'un  vaste  plateau  qui  counume  un  morne 
pen  élevé  et  qui  s'étend  par  une  pente  presque  insensible. 
Ce  morne  est  entouré  de  quatre  ruisseaux,  et  se  rattache , 
par  une  aorte  d'isthme,  à  la  montagne  appelée  Morro  da 
Cna  dot  Almat  (  montagne  de  la  cnux  des  dmes  du  pnr- 
^toire) ,  dont  il  n'e^  réellement  que  la  coutinuatbn ,  car 
il  en  suit  eiactement  la  pente. 

Trois  des  ruisseaux  d*Bt  je  ywa&  de  parler  firennent  leor 
soorce  dans  le  Merro  da  Ctue  das  Aimas ,  savoir  :  le  Cor- 

(1)  Mon  Yo^age  tUm*  Ui  prmineei  de  Rio  de  Jantiro,  etc.  (  1 ,  338 
et  laiT.),  contient  des  renseigDements  sar  les  raiat  de  permiUa,  les 
bilhtUi  depemtula,  et  tout  ce  qui  a  rapport  k  U  circulitiou  et  i  la 
fonte  de  l'or. 

l3)  On  trouvera  des  détails  sur  Salgado  daus  mou  Voyage  darit  J«* 
provineei  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  11 ,  4U7. 

l3)  Jfm.  Awl.,  VIU,  aegunda  part.,  213. 


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188  VOYAGE  AUX  SOURCES 

rego  Rico  (ruisseau  riche)  (1),  le  Corrego  dos  Maeaeo§ 
(ruisseau  des  singes]  et  celui  de  S.  ïhmingot.  Le  Corr^ 
Rico ,  dont  j'ai  ié^ii  parlé ,  doit  bod  nom  À  la  grande  quan- 
tité d'or  que  les  premiers  mineurs  tirèrent  de  son  lit  >  et 
fait  à  loi  seul  le  tour  d'environ  la  moitié  du  Morne  sur  le- 
quel est  bflti  Paracatû;  le  Corrego  dos  Macacos  Iwigne  un 
des  cAtés  du  morne  et  se  réunit  bientât  au  Corrego  Rico  ; 
celui  de  S.  Domingos  ne  touche,  pour  ainsi  dire,  le  morne 
que  par  un  point  [^);  enfin  le  Corrego  Pobre,  autrement 
dit  Corrego  Superbo  on  do  Mmitw  Dûdto  (ruissoin  pauvre, 
ruisseau  superbe,  ruisseau  de  l'enfant-diable),  complète 
cette  espèce  de  ceinture.  Les  trois  premiers  de  ces  ruis- 
seaux, et  principalement  le  Corrego  Rico,  ont  été  le  tbëitre 
des  travaui  des  mineurs  ,  et  leurs  bords ,  bouleversés  de 
toutes  tes  manières ,  laissent  voir  k  découvert  une  terre 
d'un  rouge  foncé.  Le  Corrego  Pobre  fournissait  beaucoup 
moins  d'or  que  les  autres,  d'où  lui  vient  son  nom.  Celui  de 
Superbo,  qu'il  porte  également,  lui  a  été  donné  parce  que, 
dans  le  temps  des  pluies,  il  devient  très-considérable.  Voici 
enfin  l'origine  du  nom  de  Merâno  Dit^m,  qu'il  a  reçu  en- 
core :  Dans  les  commencements  de  Paracatû,  il  s'éleva  une 
très-grande  rivalité  entre  les  jeunes  gens  qui  habitaient  le 
bas  de  la  ville,  près  de  l'église  de  Ste.  Anne,  et  ceux  qui  de- 
meuraient dans  le  haut ,  auprès  de  celle  du  Rosaire.  Les  uns 
et  les  autres  allaient  se  baigner,  les  soirs,  dans  le  Corr^ 
Pobre,  qui  devenait  le  théâtre  de  leurs  querelles,  et  c'est 


(  l)  En  écriTiDi  le  mot  emrtQO,  j'ai  lonjonr*  suivi  U  véritable  ortho- 
graphe portugaise;  mais,  k  Paracatn  comme  dana  le  reste  de  la  pro- 
vince des  Mines,  od  proooace  mrgo. 

(3)  La  source  du  Corrego  de  S.  Domingo  appelée  OCio*  iTAgua  (sDOr- 
ces)  fournit  l'eau  qne  l'oo  boit  ordioairetneut  t  Paracats. 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  289 

là  ce  qui  a  fait  appeler  ce  ruisseau  Corr^o  do  Henino 
Diabo  (ruisseau  de  l'eofïiDtrdiable). 

La  ville  de  Paracatû  n'occupe  qu'une  trè^petite  partie 
du  plateau  sur  lequel  elle  a  été  bAtie ,  et  s'élève  immédia- 
tement au-dessus  du  Corr^o  Pobre.  Sa  forme  est  allongée  ; 
ses  rues  principales  suivent  la  pente  presque  insensible  du 
morne.  Située  sous  un  beau  ciel ,  dans  un  pays  découvert , 
à  l'extrémité  d'une  plaine  qui  est  bornée  par  de  petites 
montagnes,  Paracatû  ne  pouvait  manquer  d'avoir  un  air 
de  gaité  étranger  à  toutes  les  villes  de  la  partie  ori«itale 
de  Minas  Geraes,  et  sa  positiqn  ai»|uîcrt  pluB  de  charme 
encore  aux  yeux  du  voyageur  par  l'ennui  qu'il  a  éprouvé 
si  longtemps  avant  d'arriver  i  cette  espèce  d'oasis. 

Les  principales  rues  de  Paracatû  sont  larges,  assez  régu- 
lières et  pavées  :  les  maisons  qui  les  bordent  n'ont,  pour 
la  plupart,  que  le  rez-de-chaussée;  elles  sont  basses,  pe- 
tites ,  bâties  avec  des  adobei ,  mais  blanchies  et  couvertes 
en  tuiles.  Toutes  ont  des  jalousies  qui  s'avancent  un  peu 
obliquement  dans  la  rue,  en  manière  de  botte,  s'ouvrent 
de  bas  en  haut ,  et  sont  formées  de  bâtons  croisés  et  fort 
rapprochés.  Un  grand  nombre  de  maisons  sont  aujourd'hui 
désertes  et  nul  entretenues  Celles  qui  sont  bAties  sur  le 
cMé  de  la  ville,  au  bord  du  Corrego  Rico ,  sont  habitées  par 
des  nègres  créoles;  elles  sont  très-petites ,  sans  crépi  et 
n'annoncent  qu'une  extrême  indigence. 

J'ai  dit  que,  dans  toutes  les  villes  et  villages  de  la  pro- 
vince des  Mines,  chaque  maison  a  un  petit  enclos  (qumtal) 
où  sont  plantés  principalement  des  Bananiers  et  des  Oran- 
gers. Ces  enclos  sont  plus  nombreux  peut-être  À  Paracatû 
qu'ailleurs,  et  les  groupes  d'arbres  qui  les  remplissent  pro- 
duisent un  effet  très-aj^éable,  lorsqu'on  découvre  la  ville 


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3W  TOYA«E  AUX  SOURCES 

da  haut  des  mornes  voîhÎds  :  d'ailleure,  À  quelques  excep- 
tions près,  on  ne  voit  dans  les  Jardins  de  Paracatû,  comme 
dans  la  plupart  de  ceux  des  autres  villes,  que  des  arbres 
fruitiers  entassés  sans  eocun  ordre  ;  mais  ,  quand  l'indo- 
lence des  habitants  ne  s'opposerait  pas  à  ce  qu'ils  soignas- 
sent davantage  leurs  jardins,  ils  trouveraient ,  dans  la  rveté 
de  l'eau  et  les  ravages  des  fourmis,  de  grands  obstacles  à 
la  culture  des  légomes  et  des  fleurs. 

Il  n'y  a  à  Paracatd  qu'une  place  publique,  dont  la  forme 
est  à  peu  près  celle  d'un  triangle  et  qui  tennfne  une  des 
rues  prinupales  appeléa  la  Rue  droUe  (rua  ^reita]. 

Cest  i  rextrémité  de  o^te  place  qu'est  bttie  l'église  de 
Ste.  Anne,  la  jdus  ancienne  de  Paracati.  Outre  cette  église, 
qui  déjè  tombe eo  raine,  il  y  en  a  encore  quatre  autres , 
toutes  construites  en  terre.  L'église  paroissiale ,  dédiée  Ji 
S.  Antoine,  est  ornée  avec  goCit;  on  dé^rerait  seulement 
qu'elle  fbt  plus  éclairée.  Après  cette  dernière  ,  celle  du 
Rotario,  qui  a  été  bâtie  aox  frais  des  esclaves,  est  la  plus 
grande  et  la  mieui  ornée. 

Deui  fontaines  fournissent  de  l'eau  aux  habitants  de  Pa- 
racatiï  ;  mais  elles  sont  sans  aucun  ornem^it. 

La  cota  da  ctmara  (  l'Mtel  de  ville}  est  une  petite  mai- 
son carrée ,  à  un  étage ,  et  dont  le  ret-de-cliaussée  sert  de 
prison,  suivent  la  coutume  de  la  province. 

On  voit  à  Faracatà  un  aisra  grand  nombre  de  tavernes  et 
plusieurs  boutiques  assec  bien  garnies.  Peu  de  marchands 
commercent  directanent  avec  Rio  de  Janeir»  ;  la  ^upart 
font  venir  de  S.  loâo  d'El  Rei  les  articles  dont  ils  ont  be- 
soin, et  envoient ,  eo  édiange,  des  cuirs  écrns  et  du  coton. 

Ilaétëun  temps  oà,  à  l'aide  d'une  sébile  [balea),  en 
retirait,  d'un  seul  coup,  jusqu'à  une  demi-livre  d'or  du 


D,s,i,.,.d.i.  Google 


DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  »1 

Corrego  Rico  (1} ,  et  aajourd'hui  les  mines  de  Paracatû  sont 
encore  très-riches.  A  la  vérité ,  lors  de  mon  passage ,  ce 
niisBean  ne  fournissait  pas  bdk  faitcaâoret  (3)  plus  de  1 
ou  3  nntoru  (46  14/16  cent.)  de  poudre  d'or  dans  tonte 
une  journée,  parce  que  la  saison  avait  été  extrêmement 
sèche;  mais,  quand  des  pluies  très-abondantes  ont  entraîné 
beaucoup  de  sable  avec  elles ,  ces  hommes  font  souvent  des 
journées  de  1,300  reis  [7  fr.  50  c.  ]  et  davantage.  Cepen- 
dant le  manque  d'esclaves  et  de  capitaux  ne  permet  pas 
qu'on  se  livre  actuellement  à  des  travaux  très-coosïdéra- 
bles,  et  une  autre  cause,  la  rareté  des  eaux,  y  met  encore 
obstacle.  Lorsque  les  premiers  mineurs  vinrent  s'établir 
.  dans  ce  pays ,  tous  les  ruisseaux  étaient  bordés  de  bois  ;  ils 
ont  été  coupés,  et  l'eau  est  devenue  beaucoup  moins  abon- 
dante. Tel  est ,  en  Amérique  comme  en  Europe ,  le  résultat 
des  déboisements. 

Panni  les  trois  ou  quatre  persounes  qui ,  lors  de  mon 
voyage ,  s'occupaient  en  grand  de  la  recherche  de  l'or  dans 
les  environs  de  Paracatû ,  je  dois  citer  mon  excellent  h<Ue , 
le  gargmto  môr  Alexandre  Pereira  e  Castro.  H  venait  d'ou- 
vrir une  mine  au-dessus  de  la  ville,  dans  un  terrain  dont 
la  superficie  avait  déjà  été  efBenrée  par  les  anciens  mi- 
neurs. A  une  profondeur  de  50  palmoi  {1  \  mètres),  il  avait 
trouvé  un  eatcalho  (3)  fort  riche,  et  il  en  avait  retiré  on 

<1)  Ptz.,  irmt.  fkf({.,  vni,put.s(«Bad«,314. 

(2)  Les  faiicaHore*  sont  des  bommes  bop  paarres  poar  se  livret  k 
de  grands  travaux  et  qnî  vont  chercher  no  peu  d'or  dans  le  Mbie  des 
rîTières  on  dans  le  résida  des  larages.  Tojei  mon  royojr*  dont  Iti  pro- 
vlncet  dt  RU)  ie  Jatttiro,  etc.,  I,  35T. 

(3)  Le»  mineuTS  désigoeat  par  ce  mot  nn  mélio^e  de  cailloux  et  de 
sable  qni  reurerme  des  parcelles  d'or  {Yonage  datu  Im  province*  âc 
Mo  da  Janeiro,  <ic.,  I,  S45). 


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3»  VOTAQB  AUX  SOURCES 

or  à  â5  carats  ,  de  la  plus  belle  couleur,  tandis  que  celui 
qu'on  trouve  dans  Je  lit  des  ruisseaux  n'est  guère  qu'à 
i9  carats.  En  général,  on  observe  dans  ce  pays,  et  peut- 
être  en  est-il  de  même  dans  toute  la  province ,  on  observe, 
dis-je ,  que  l'or  est  à  .un  titre  d'autant  plus  élevé  qu'il  a  été 
recueilli  h  une  plus  grande  profondeur.  Le  targento  môr 
avait  creusé  des  réservoirs  pour  conserver  les  eaux  plu- 
viales ,  et  de  petits  canaux  pour  conduire  celles-ci  à  sa 
mine,  et  il  est  à  croire  qu'il  aura  obtenu  quelque  succès. 

Cependant ,  il  faut  le  dire ,  ces  efforts  isolés  ne  sauraient 
amener  de  bien  grands  résultats.  On  ne  tirera  véritable- 
ment parti  des  mines  de  Paracatû  qu'en  formant  des  socié- 
té qui  réimîsHent  des  fonds  assez  considérables  pour  sub- 
venir aux  dépenses  préliminaires.  Mais,  comme  les  fortunes 
sont  actuellement  ici  très -médiocres ,  de  telles  sociétés  sont 
peut-être  impossibles  :  d'ailleurs  rapathie,ledéraut d'ordre, 
une  méQance  trop  souvent  justifiée  n'ont  pas  permis,  jus- 
qu'à ce  jour  (i819),  que  l'esprit  d'associalion  pénétrAt 
dans  tes  mœurs  des  Brésiliens;  d'un  autre  ctftè ,  peut-être 
5erait-ce  un  malheur  pour  le  pays  que  des  étrangers  y  son- 
geassent, car  ils  ne  manqueraient  pas  d'emporter  dans  leur 
patrie  le  fruit  de  leurs  travaux. 

Le  revenu  des  mines  ira  sans  doute  toujours  en  dimi- 
nuant; mais  la  ville  de  Paraeatû  trouvera  une  ressource 
dans  les  avantages  que  lui  procure  son  titre  de  chef-lien  de 
comarea;  elle  en  trouvera  surtout  dans  les  produits  de  ses 
alentours  et  la  vente  du  bétail  que  nourrissent  ses  pâtu- 
rages. 

Les  terres  des  environs  de  Paracatâ  sont  propres  à  tous 
les  (çenres  de  culture.  La  canne  à  sucre ,  le  maïs,  le  riz, 
les  haricots ,    le  manioc  y  réussissent  également  bien. 


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DV  RIO  DE  S.  FRAItaSCO.  ïM 

Comme  dans  les  autres  parties  de  la  province  des  Mines, 
on  ensemence  deui  Fois  de  suite  les  terrains  vierges;  il 
faut ,  après  cela ,  laisser  reposer  le  sol  pendant  cinq  ans , 
afin  que  les  taillis  prennent  assez  de  force  pour  pouvoir 
être  brAlés ,  et ,  cinq  ans  plus  tard ,  on  les  recoupe  pour 
les  brAler  encore.  Lorsqu'on  a  soin  de  donner  aux  terres 
un  repos  de  cette  durée,  le  capimgordura[Melinùminu- 
tiflora)  ne  s'en  empare  point;  mais,  quand  on  les  affaiblit 
en  ne  mettant  pas  un  aussi  long  intervalle  entre  deux  an- 
nées de  culture,  l'ambitieuse  Graminée  ne  tarde  point  i 
se  montrer. 

Autour  de  Paracatû,  on  est  obligé  sans  doute  de  donner 
du  sel  anx  bestiaux  ;  mais ,  comme  il  s'y  trouve ,  h  ce  qu'il 
parait,  des  terres  un  peu  salpètrées ,  la  distribution  ne  se 
fait  que  de  trois  en  trois  mois.  C'est  le  sel  ile  Pilao  Ar- 
cado  (1)  que  l'on  emploie  â  cet  ^et,  celui  qu'on  appelle 
tal  da  terra  (sel  du  pays).  Le  sel  venant  de  l'Océan  serait 
trop  cher,  et  il  n'y  en  avait  même  point  à  Paracatû,  A  l'é- 
poque de  mon  passage.  Plus  près  du  S.  Francisco,  il  n'est 
pas  nécessaire  de  faire  I9  même  dépense;  les  terres  salpè- 
trées y  sont  communes  comme  à  l'est  de  ce  fleuve  (3)  ;  le 
bétail  s'en  repaît  avec  avidité ,  et  elles  suppléent  au  sd. 

Aux  environs  de  Paracatû ,  on  n'incendie  les  pflturages 
que  vers  les  mois  de  juin ,  juillet  et  août,  c'est-à-dire  dans 

(1)  Ce  Bel  est  celai  qoe  fonnnsseiit ,  k  eoviroD  130  Ugoat  de  Salgido, 
ks  d«ai  cdlés  da  S.  Francisco  (Foyoffe  data  le»  prooincu  de  Rio  de 
Janeiro,  etc.,  n ,  412).  11  prend  le  nom  de  sel  de  Pilâo  Arcado ,  ptrce 
qa'oD  le  recneille  box  eu* irons  de  la  Tille  de  ce  nom ,  dans  la  prOTince 
de  Perniiubonc.  Si  je  u  me  trompe ,  i  Piracatù  et  d'anlreâ  parties  do 
Minas ,  on  dit,  par  corruption  .  Pilôee  Arcado*. 

Ci)  Vojei  mon  Voyage  dam  la  province  de  Rio  de  Janeiro,  eit., 
U,3)7. 


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2M  TOYAGE  AUX  SOURCES 

la  saison  de  la  sécherease,  et  le  feu  n'y  prend  pas  lors- 
qu'on le  met  avant  cette  époque.  Cependant  les  propriétaires 
qui  veulent  avoir  plus  tôt  de  l'herbe  fraîche  pour  leurs  va- 
ches k  lait  gardent  une  certaine  étendue  de  pAturages,  sans 
y  mettre  le  tmi ,  pendant  toute  une  année,  et  ils  peuvent 
les  brûler  l'année  suivante,  dès  les  mois  d'avril  et  de  nui. 
C'estpeuqu'unpajssoitfertile,  si,  comme  le  midi  de  la  pro- 
vince de  Goyaz,  il  a'a  aucun  moyen  d'exporter  ses  denrées. 
Il  n'en  est  pasainsi  deParacatù.  Cette  ville  n'est  éloignée  que 
de  8  legoas  du  Porto  de  Béserra,  où  la  rivière,  également 
appelée  Paramtû,  est  navigable.  Cette  rivière,  qui,  m'a- 
t-on  dit,  prend  sa  source  à  14  legoas  9e  la  ville  de  Para- 
catù,  dans  ]&  Serra  do  Carrapato[l],  se  réunit  au  S.  Fran- 
cisco, et,  comme  je  l'ai  dit  ailleurs,  les  bords  de  ce  grand 
fleuve  sont,  au  delà  du  Salgado,  d'une  stérilité  extr£me(2). 
Depuis  que  les  habitants  des  environs  deParacatù  s'occupent 
davantage  de  leurs  terres,  ceux  des  rives  du  S.  Francisco 
viennent ,  dans  ce  pays ,  chercher  du  maïs ,  des  haricots , 
du  sucre  et  de  l'eau-de-vie,  et  apportent  en  échange  le  sel 
de  Pilào  Arcado.  Pendant  que  j'étais  à  Paracatù,  il  s'y  trou- 
vait des  marchands  de  Caytelé  [5] ,  qui  tâchaient  de  ras- 
sembler des  vivres  pour  les  faire  passer  dans  leur  pays. 

(1)  Caul  dit  {Corog.  Brai.,  l,3M)  qae  les  priacipales  sources  da 
Psracatv  sont  le  Rio  Esearo  et  )e  Rio  dt  Prita. 

{2)  Vonaçe  doKM  Ut  provinett  de  Rio  tlt  Janeiro,  etc..  Il ,  413. 

(3)  CajUU  ou  Villa  not»  do  Principe  et  one  rille  de  U  cowtarea 
de  Jaeobina,  dus  U  protiaee  de  Bahia  (Cu-,  Coroç.  Brtu.,  Il ,  137). 
CeUe  TJlle ,  dit  too  H irtins ,  ofllre  1«  mfioie  cliout  et  la  même  Tégitatim 
que  HiuasMoTtS;  aussi,  depuis  nne  trtataiae  d'anuia,  s'j  esl-oo  li*ré 
eo  sraod  h  la  culture  du  cvtoanier.  Il  jr  a  1  Caf  lel6  des  marcbaiids  qid , 
diaque  »Da(-e ,  envoient  i  Bahia  une  quantité  de  cotoa  roroiaiil  la  cbiiBC 
de  mille  mulets .  et  c«  lieu  est  deveaa  le  plus  ricte  du  Sertào  de  Bahit 
\lieiM,  11,  MT). 


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DO  UO  DE  S.  PUHdSCO.  395 

Mais  cette  anaée-lè  était  peu  faforable  pour  des  achats 
de  ce  genre  ;  car  la  sécheresse  qn'il  avait  foit,  comme  on  l'a 
vu ,  peDdant  les  mois  où  il  pleut  ordiDairement ,  avait  oc- 
casionné une  disette  générale.  Cétait  surtout  dans  la  ville 
de  Paracatû  que  la  famine  se  faisait  sentir.  Pendant  quel- 
que  temps,  les  denrées  avaient  été  taxées  par  le  juge  ;  mais, 
«Hnme  personne  n'apportait  plus  rien,  ainsi  qu'il  devait 
être  Ihcile  de  le  prévoir ,  la  taxe  avait  été  levée.  Aussitôt 
qu'il  arrivait  un  chariot  chargé  de  v,irres ,  chacun  se  préci- 
pitait pour  avoir  sa  part,  et  le  magistrat  était  obligé  de  dé- 
terminer ce  que  chaque  maison  devait  acheter.  Sans  lui  et 
sans  le  targmto  môr,  je  serais  parti  de  Paracatû  sans  au- 
cune provision. 

Pendant  le  séjour  que  je  fis  dans  cette  ville,  je  fus  com- 
blé de  politesses  par  le  sargmlo  màr,  Alexandre  Pereira  e 
Castro,  qui  m'avait  abandonné  sa  maison  pour  aller  s'éta- 
blir dans  le  voisinage  et  me  rendît  mille  petits  services. 
Il  était  impossible  de  voir  un  hiHnme  meilleur  ;  il  était 
actif,  quoiqu'il  ne  fi^t  plus  jeune ,  toujours  gai,  toujours 
prêt  h  obliger,  toujours  disposé  ii  excuser  les  autres  et  à 
embrasser  le  parti  de  la  modération.  Il  aimait  soo  pays 
par-dessus  toutes  choses  et  croyait  que,  dans  le  monde  en- 
tier, il  n'y  avait  rien  au-dessus  de  Paracatû.  Ce  qu'il  aimait 
cependant  plus  encore  que  sa  patrie,  c'étaient  ses  mines, 
mais  bien  moins  à  cause  de  l'aient  qu'il  en  tirait  que 
parce  qu'il  avait  eu  la  gloire  de  les  ouvrir  et  d'y  faire  des 
ouvrages  assez  bien  entendus. 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  XV. 

VOYAGE  DE  PARACATÛ   A   LA  FRONTIÈKB   DS  GOYAZ. 


Vae  doD[  on  jouit  en  quittant  Paractiù.  —  Le  Morro  da  Onu  dat  Ai- 
mai. —  La  Serra  dot  Uonjolot  ;  cours  de  plusiears  TÎviires.  —  Ha- 
muu  de  Ktmjolot.  —  Un  unaL  Réanltat  tlcbem  de  la  eapUaUon 
poar  les  pajs  auriRres.  —  Fatenda  de  HoinAo.  —  Faxttida  de  Ta- 
pera. —  L'auteur  remonte  sur  le  tomniel  de  h  Serra  do  S.  Francisco 
e  da  ParaD  h)ba.  —  Deacriplion  générale  du  plateau  sur  lequel  il 
Tojrage  pendant  plusieurs  jours.  —  Fa*en4a  de  Softradtnho.  Sa  pro- 
priétaire. —  Marais.  Plantes  qui  semblent  s'attadier  aai  pas  de 
riiomiDe.  —  Cavetra  ;  une  nnit  passive  dehors.  —  L'aulear  entre  dans 
la  pronnce  de  Ooju. 


Pour  me  rendre  de  Paracatù  au  Regùtro  dot  Arrepea- 
didos,  limite  de  la  province  de  Goyaz,  je  pouvais  choisir 
entre  deux  chemins.  Le  plus  nouveau  est  bordé  de  quel- 
ques habitations,  maïs,  comme  il  traverse  des  marais,  on 
n'y  voyage  commodément  que  dans  le  temps  de  la  séche- 
resse. Je  passai  par  le  plus  ancien,  ignorant  peut-Mre,  au 
moment  de  mon  départ,  qu'il  y  en  eftt  un  autre  (1). 

En  quittant  Paracatù  (22  mai) ,  je  traversai  la  ville  dans 
toute  sa  longueur,  accompagné  par  mon  excellent  hAte  et 
par  un  mulâtre  esclave  qu'  il  voulut  absolument  me  donner 

II)  Itinéraire  approiintalir de  la  ville  de  Paracatù  aui  Arrepeudido^, 
frontière  de  la  province  de  Gojrai  : 


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DU  MO  DE  S.  FRAttaSCO.  19T 

pour  les  premiers  jours  de  mon  voyage.  Nous  suivîmes  le 
platesu  sur  lequel  la  ville  est  bâtie,  jusqu'à  cette  espèce 
d'isthme  qui  joint  ce  plateau  au  Morro  da  Cnu  das  Ai- 
mas (1).  Là  nous  nous  arrêtâmes  quelques  instants  à  une 
maisonnette  qui  dépendait  des  mines  du  largento  m6r,  et 
d'où  l'on  d^Mtnvre  une  très-belle  vue.  D'un  cMé,  tin  do- 
mine Paracalû  dont  les  maisons  et  les  églises  semblent  dis- 
persées BU  milieu  de  groiqies  d'Orangers  et  de  Bananiers. 
Dans  une  vallée  profonde  coule  le  ruisseau  de  S.  Domin- 
gos,  bordé  de  deux  lisières  d'une  belle  verdure  qui  décri- 
vent de  gracieuses  sinuosités  ;  et,  sur  la  rive  droite  da  ruis- 
seau, on  voit  la  petite  chapelle  de  S.  Domingos,  près  de 
laquelle  sont  des  maisonnettes  entourées  d'Orangers.  D'un 
autre  cAté ,  enfin,  on  découvre  le  Moito  da  Crut  das  Aimas 
dont  la  surface  est  toute  couverte  des  éclats  de  pierre  déta- 
chés par  les  anciens  mineurs,  et  au  milieu  desquels  crois- 
sait quelques  plantes  éparses,  principalement  des  Goya- 
viers et  des  Mélastomées. 

Le  Morro  da  Cruz  das  Aimas  présente  un  plateau  qui 
peut  avoir  1  lieue  de  circonférence.  C'est  de  li  que  les  an- 
ciens mineurs  ont  tiré  le  plus  d'or.  Je  fus  étonné  de  reten- 
due de  leurs  travaux  ;  il  n'est  pas,  dans  cet  endroit,  1  poufce 
de  terrain  qui  n'ait  été  remué  ;  de  tous  les  cAtés,  on  voit 

De  Parautù  k  Hoojolos ,  bamean 3  l/3kgou. 

—  Hwnbo,  petite  habibition 3  1/2 

—  Taper* ,  babilatiou 3 

—  Faieoda  do  Sobradinbo 1 1^ 

—  Cateira ,  bord  d'uD  Tuisaeau  en  pUa 

air « 

—  Arrapendidos,  douaH. -  .  -      S 

2i  l/3legiMS. 
il)  Voyez  le  chapitre  prtci.'dent. 


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sue  VOYAGE  AUX  SOURCES 

des  excavations,  des  monceaux  de  pierres,  des  réservoirs 
creusés  pour  recueillir  les  eaux  pluviales,  des  canaux  des- 
tinés à  faciliter  leur  écoulement;  partout  l'Image  du  bou- 
leversement et  de  l'aridité.  Au  milieu  de  cette  espèce  de 
chaos  se  voient  cependant  un  asset  grand  nombre  de  mai- 
sonnettes bflties  en  pierre  et  habitées  par  des  nègres  créoles 
qui  passent  leur  vie  à  ramasser  un  peu  de  poudre  d'or, 
soit  dans  les  ruisseaux  voisins,  pendant  la  sèdieresse,  soit 
sur  le  plateau,  dans  la  saison  des  pluies. 

Après  avoir  descendu  le  Morro  da  Cnu  das  Aimas,  je  par- 
courus, jusqu'à  Monjoios,  un  pays  montagneux,  couvert 
d'arbres  rabougris  dispersés  parmi  des  Graminées.  Lestv- 
rains  jadis  en  culture  sent  couverts  de  capm  gordura. 

Avant  d'arriver  è  Monjoios,  le  lieu  oii  je  fis  halte,  je  tra- 
veisai  une  partie  de  la  Serra  du  même  nom  [Serra  doi 
Mor^olot  (1),  vers  l'endroit  où  le  Corrego  de  Santa  Rita 
prend  sa  source,  c'est-à-dire  à  environ  1  Ueue  et  dnnie  de 
Paracatû.  Les  Corregos  de  S.  Domingos  et  de  S.  Antonio, 
dont  j'ai  parlé  plus  haut ,  se  jettent  dans  le  Santa  Rita ,  et 
ce  dernier  réunit  ses  eaux  A  cdles  du  At&nrôo  de  S.  Pedro, 
qui  commence  sur  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Parana- 
byba,  près  le  lieu  appelé  Tf^Kra.  Le  S.  Ffdro  se  jette  dans 
le  Rio  daPrata  (rivière  d'argent)  ;  celui-ci  dans  le  Rio  Prtto 
[rivière  noire],  navigable  pour  les  pirogues;  et  enfin  ce  der- 
nier dans  le  Paracatà. 

Monjoios,  le  Heu  oà  je  fis  halte,  est  une  espèce  de  petit 
hameau  composé  de  quelques  maisonnettes  éparses  dans  un 
fond,  sur  le  bord  d'un  misseau,  et  habité  par  des  nègres 
créoles  et  libres. 

P  l.cs  M onj oins  sont  une  tribu  de  oègru  âftjcaios. 


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DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  .  .      2H 

Le  jour  suivant,  entre  ModjoIos  et  McAnho,  je  auivîsune 
plaine  étroite  et  allongée,  bordée  d'un  c6té  par  la  Serra 
dos  Moojolos,  et  de  l'autre  par  celle  de  Capitmga,  qui 
toutes  deux  ont  peu  d'élévation.  À  1  lieue  de  Mointio,  le 
terrain  devient  plus  iaégal. 

De  loin  je  vis ,  dans  la  Serra  de  Capitinga  [1],  l'endroit 
on  commence  un  canal  qui ,  t^rès  avoir  parcouru  un  pspace 
d'environ  6  legoai,  portait  autrefois  de  l'eau  À  une  des 
mines  des  environs  de  Paracatû.  Ce  canal  avait  été  ouvert, 
dans  le  courant  du  siècle  dernier,  par  une  société  de  mi- 
neurs qui  ne  put  en  retirer  aucun  avantage.  Comptant  sur 
de  grands  soccès,  elle  avait  fait  des  avances  considérables, 
mus  la  loi  de  ta  capitation  [capitaçào]  fut  rendue  avant 
qu'elle  eût  uHnmeocé  h  rentrer  dans  ses  fonds.  Cette  loi 
exigeait  que  l'on  payât  annuellement  5  oitoKos  d'or  (3)  par 
esclave  ;  la  société,  déjà  obérée,  ne  put  résistera  une  charge 
aussi  énonoe  ;  ses  esclaves  furent  saisis  pour  le  compte  du 
fisc  {fazettda  reatj,  et  elle  se  sépara  sans  avoir  obtenu  aucun 
résultat.  Il  j  avait  longtemps,  lors  de  mon  voyage,  que  la 
capitation  avait  été  su{^rimée  ;  mais  il  parall  que,  pendant 


(1)  Dam  le  chapitre  iotilnlé,  SuiU  du  eoyage  aux  lourets  dn 
S.  Franeiico,  etc.,  j'ai  parlé  d'une  faienda  aussi  appelée  Capitinga, 
et  j'ai  donné  rétjriuologie  de  m  Dom. 

(S)  La  Taleor  intriosèqne  d'un  oUaim  d'or  est  1,500  rais.  DédnctMQ 
hite  de  300  reis  qae  l'oD  retient,  dans  les  inteadances  el  les  maisons 
d'échange  {eaioê  de  permuta),  poar  le  cinquième  ou  impAt  du  quiat 
(fNintO)  dA  au  fisc,  il  reste  1,100  reis:  aussi  compte -t-on  (année  1819 
k  IS22),  dans  la  protiocedea  Mines,  par  oUaooa  de  1,M0  reis.  Comme 
je  crois,  pour  des  raisoiia  qu'il  serait  trop  long  e(  asset  inutile  de  dé- 
duire, <|De,  dans  le  pajerneul  de  la  capitation,  l'oitava  s'évaluait  sur  le 
pied  de  1,500  reis,  l'iuipAt  perfu  annuellement  sur  rhaquc  nj-gre  s'éle- 
vait à  la  somme  Morbitaote  de  7,500  reis  on  46  fr.  B7c. 


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am      *  VOYAGE  AUX  SODBCES 

le  peu  d'années  qu'on  l'a  maintenue,  elle  a  porté  un  coup 
f\ine8te  aux  pays  aurifères. 

Dans  le  courant  dé  la  même  journée,  je  traversai  trois 
ruîsseaui  bordés,  à  droite  et  k  gauche,  d' une  lisière  de  bois, 
et,  près  de  chacun  d'eux,  je  vis  une  maisonnette  :  ce  fu- 
rent les  seules  que  j'aperçus  ce  jour-lè. 

Moioho  (moulin],  où  je  passai  ta  nuit,  est  une  petite /à- 
zenda  qui  appartenait  au  taryento  mâr  Alexandre  Pereira 
e  Castro  et  où  l'on  m'établît  sous  le  toit  qui  couvrait  la 
manjola. 

Avant  d'arriver  à  Paracatù ,  j'avais  éprouvé  une  chaleur 
très-forte.  Pendant  que  je  restai  dans  cette  ville,  et  le  pre- 
mier jour  de  mon  voyage,  il  avait  fait  encore  fort  chaud 
dans  le  milieu  de  la  journée»  mais  les  soirées  étaient  déli- 
cieuses. La  nuit  que  je  passai  k  Moinho  fut  froide,  ce  qui 
tenait  sans  doute  non-seulement  à  ce  que  je  m'étais  rap- 
proché de  la  grande  chaîne ,  mais  encore  k  ce  qae  je  me 
trouvais  alors  dans  un  fond,  sur  le  bord  d'un  ruisseau. 

Après  avoir  quitté  Moinho,  je  traversai  la  plaine  dont  j'ai 
parlé  plus  haut,  et  ayant  monté  la  Serra  dos  Monjolos,  qui 
n'est  qu'un  des  contre-forts  de  la  grande  chaîne,  je  suivis, 
jusqu'à  Tapera  (maison  ruinée),  un  plateau  interrompu  seu- 
lement par  quelques  inégalités. 

A  2  lieues  de  Moinho,  je  passai  près  de  la  Faxenda  do 
Carapina  {faxenda  du  charpentier),  plus  considérable  que 
celles  que  je  voyais  depuis  longtemps.  Elle  est  située  sur  le 
bord  du  ift6erào(ie5.Pedroquej'avais  déjà  traversée  peu 
de  distance  de  Moinho. 

Je  fis  halte  k  la  ftamda  de  Tapera ,  où  je  fus  parTaitement 
reçu  et  où  l'on  m'indiqua  les  noms  et  les  propriétés  de  plu  ■ 
sieurs  espèces  de  plantes  dont  on  fait  usage  dans  le  pays. 


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DD  RIO  DE  S.  FRAnCiSCO.  301 

Les  terres  de  ce  cunton  sont  bonnes  et  rendent  de  dis 
à  tieize  chars  de  maïs  par  alqueire  ;  elles  mot  également 
très-fBV(H«bles  à  la  culture  du  manioc  et  de  la  canne  À 
sucre. 

A  Tapera,  je  me  trouvais  pour  la  seconde  fois  sur  le  pla- 
teau qui  couronne  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Parana- 
hyba,  et  je  le  suivis  dans  un  espace  d'environ  i6  legoas, 
jusque  vers  le  Begislro  dos  Arrependidos.  D'après  ce  que 
j'ai  dit  plus  haut,  il  est  évident  que  le  plateau  de  la  Serra 
dos  Monjolos  vient  se  confondre  avec  celui  de  la  grande 
chaîne,  et  je  ne  saurais  même  préciser  le  point  où  la  sépa- 
rallpn  s'opère. 

Je  vais  jeter  sur  ce  dernier  un  coup  d'œit  général,  puis 
je  continuerai  le  récit  de  mon  voyage. 

Il  peut  avoir  environ  6  ïegooâ  de  largeur.  Dans  les  lieux 
les  moins  élevés,  on  y  voit  des  bouquets  de  bois;  allleuni 
ce  sont  des  pâturages  composés  seulement  de  Graminées , 
et  d'autres  où,  au  milieu  des  herbes,  se  montrent  çk  et  1& 
des  arbres  rabougris  d'autant  plus  rapprochés  et  plus  vi- 
goureux que  le  tefrain  prend  une  teinte  plus  rouge(l).  Quel- 
ques fonds  sont  marécageux  et  couverts  d'une  herbe  épaisse 
au  milieu  de  laquelle  s'élèvent  de  petits  bouquets  d'arbres 
'serrés,  d'un  vert  foncé,  à  tige  grèle  et  rameuse  dès  la  base; 
ces  marais  deviennent  probablement  des  espèces  de  lacs 
dODB  la  saison  des  pluies  et  portent  dans  le  pays  le  nom  de 
lagoas. 

D'après  les  renseignements  que  j'ai  pris,  les  bois  du  pla- 
teau, comme  aussi  'ceux  des  environs  de  Paracatû,  ne  se  dé- 
pouillent point  entièrement  de  leurs  feuilles,  ainsi  que  cela 

1,1)  Tojuplus  haul. 


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301  TOYAGE  AUX  SOURCES 

a  lieu  dans  les  eatmgat  de  Miaas  Novas  et  celles  des  bords 
du  S.  Francisco. 

Le  plateau  produit  le  maïs ,  les  haricots  et  le  rii  ;  mais  la 
température  y  est  trop  fratcbe  pour  le  coton  et  la  canne  h 
sucre.  Du  cAté  de  Tapera ,  les  terres  sont  assez  bonnes ,  et 
l'on  peut  même  cultirer  c^les  dont  le  capân  gordura  s'est 
emparé  ;  mais  il  n'en  est  pas  ainsi 'du  reste  du  plateau  :  A 
peine  y  a-tH)n  ensemencé  un  champ  une  ou  deux  fois ,  que 
le  eapim  gordura  le  couvre  entièrement,  et  il  ne  s'élève 
pas  assez  ponr  qu'on  puisse  le  brûler  et  planter  dans  ses 
cendres. 

Sur  le  plateau,  on  est  obligé  de  donner  du  sel  aut  bes- 
tiaux; mais,  du  càté  de  l'est,  à  peu  de  distance  de  la 
chaîne ,  il  y  a  déjà  assez  de  terres  salpètrées  pour  remplacer 
cette  substance. 

Depuis  Tapera  jusqu'à  SobradùAo,  je  vis  quelques  petites 
chaumières  ;  mais ,  après  cette  dernière  fazenda ,  dans  un 
espace  de  4  4  Ugoas,  je  ne  rencontrai  qu'  une  chétive  cabane, 
el  cependant  ce  chemin  est  un  de  ceux  qui  vont  de  Minas  h 
Goyaz.  En  plnsieurs  endroits  ,  on  décofivre  une  vue  fort 
étendue,  mais  on  n'aperçoit  aucune  habitatioa  ni  aucune 
trace  de  culture. 

On  m'avait  dit  que  je  trouverais ,  sur  ce  plateau  désert, 
un  grand  nombre  de  bètes  sauvages ,  mais  je  n'en  vis  au- 
cune; je  vis  également  peu  d'oiseaux.  Depuis  longtMnps 
la  saison  des  insectes  était  passée  (4);  je  ne  trouvais  que 
quelques  espèces  à  ailes  nues,  des  punaises,  un  petit  nom- 
bre de  papillons  ti  de  souter^les.  Je  n'étais  pas  beaucoup 

(1)  Le  lempe  des  pluiM  est ,  dons  la  partie  du  Brésil  située  eoire  les 
'OiHaiies.  celle  où  l'oo  tronrc  le  rlos  d'insectes. 


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DU  110  DE  S.  FRANCISCO.  SOS 

pins  heureux  pour  les  {daotes;  il  n'y  en  avait  alors  presque 
point  eu  fleur. 

Le  cbemÎD  ,  sur  le  plateau  ,  n'a  souvent  que  la  largeur 
d'un  Bottier;  mais  il  est  parfaitement  égal. 

Je  rais  à  présent  entra*  dans  quelques  détails. 

Entre  Tapera  «t  Sobradinho ,  qui  en  est  éloigné  de 
4  lieues  et  demie ,  -quelques  mouveinents  de  terrains  em- 
pêchent, presque  toujours,  de  jouir,  sar  la  droite,  d'une 
vue  étendue;  mais,  à  gauclie,  oo  découvre  une  {riaine  im- 
mense. 

Ce  fat  entre  les  mêmes  fazertdas,  à  l'endroit  appelé  La- 
goa  Torta  (  te  lac  tortu) ,  dans  un  de  ces  fonds  marécageui 
décrits  |rius  haut ,  que  je  vis  les  petites  cbanmières  dont  j'ai 
d^  parlé.  D'ailleurs  une  solitude  profonde;  quelque  loin 
que  la  vue  puisse  s'étendre,  on  ne  découvre  ni  habitation 
ni  cnltnre,  et  je  ne  rencontrai  personne  dans  le  chemin. 
Firmiano  et  José  Marianne  prétendirent  avoir  aperçu  l'un 
QD  ema  (l'autruche  d'Amérique  ou  nandn,  rhea  ameneana), 
l'autre  un  dut  sauvage  ;  mais  je  ne  vis  aucun  de  ces  ani- 
nanx. 

La  fasenda  de  Scdiradinho  (petite  maison  &  un  étage] , 
oà  je  fis  halte ,  le  jour  que  je  quittai  Tapera ,  est  située  sur 
le  bord  d'tm  petit  bois  arrosé  par  on  niiss«in  d'une  eau 
limpide.  Lorsque  fj  demandai  l'hospitalité,  une  femme 
Manche,  jeune  encore  et  assez  jolie,  se  présenta ,  et  me 
permit  de  très-bonne  grAce  de  passer  la  nnit  chee  elle.  Au 
lieu  de  prendre  la  fuite,  comme  font  les  femmes  de  ce  pays 
à  la  vue  d'un  étranger,  die  causa  avec  moi  et  me  fit  beau- 
coupde  politesses.  Elle  me  parut  très-contente  de  son  sort 
et  me  raconta  avec  indignation  qu'un  voyageur  lui  avait 
parlé  avec  horreur  du  désert  qu'elle  habitait.  Cette  femme 


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301  VOYAGE  AUX  SOURCES 

n'allait  jamais  à  Paracatû,  isème  à  l'époque  des  grandes 
(%tes  ;  elle  ne  connaissait  dans  le  inonde  que  sa  maison  et 
son  ménage,  comment  aurait-elle  pu  ne  pas  les  aimer? 
Elle  et  le  propriétaire  de  Tapera  avaient  même  la  vanité  de 
prétendre  que  ce  pays  n'appartenait  pas  au  Sertào;  le  dé- 
sert ,  disaient-ils ,  ne  commence  qu'au  delà  de  certaines 
n)ontagnes  qui  se  trouvent  entre  cette  contrée  et  te  S.  Fran- 
cisco. 

La  nuit  qne  je  passai  à  Sobradinbo  fiit  trës-Troide  ;  le  len- 
demain, vers  les  dix  ou  onze  heures  du  matin,  le  soleil  était 
brûlant  ;  mais  pendant  tout  le  reste  de  la  journée  nous 
eûmes  de  la  fratcbeur. 

Au  delà  de  Sobradinbo,  dans  un  endroit  où  les  arbres 
rabougris  étaient  plus  serrés  qu'ailleurs,  je  revis  ces  bam- 
bous nains  qne  f  avais  tant  de  fois  observés  dans  le  cours  de 
mon  premier  voyage;  je  les  avais  déjà  retrouvés  entre  le 
Paranabyba  et  le  lien  appelé  Moquem. 

Après  avoir  passé  une  petite  chaumière  ,  celle  de  Cy- 
priano ,  la  seule  que  j'aperçus  dans  toute  la  journée ,  je  vis 
deux  de  ces  marais  dont  j' ai  déjà  parlé  ;  le  premi^'  s'appelle 
Lagoa  doi  Poreo*  (lac  des  cochons),  et  le  second  Lagoa 
ii(>rmoM(lebeaulac}  (Ij. 

Lorsque  Faracatû  était  plus  peuplée  et  cette  route  moins 
solitaire,  on  voyait  une  maison  sur  le  bord  de  chacun  de 
ces  marais.  Elles  ont  été  abandonnées  à  cause  de  la  rareté 
des  terrains  couverts  de  bois  et  susceptibles  de  culture,  et, 
lors  de  mon  passage,  il  en  existait  à  peine  quelques  lég»? 
débris.  C'est  la  nature  qui  avait  pris  soin  de  conserver  ici 

(I)  Je  n'M  pas  besoio  de  dire  qu'il  ne  faut  pu  confondre  ce  marais 
avec  le  Lagna  Formata,  d'où  le  Rio  MaraDhto  lire  soo  origine  (vojei 
Caiu,  Corog.,  I,  SU). 


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DD  BIO  DE  5.  FKANCISCO.  Sff, 

ks  traces  les  |dus  duraldes  de  la  présence  de  l'honime.  Où 
étneat  ceshd)itations,  je  retrouvais  les  plantes  qui  sem- 
blent suivre  notre  espèce;  des  Orangers  et  des  Bananiers 
{^raient  encore  leurs  fruits  au  voyageur,  et  le  Cucurbita 
lagenaria  (gourde]  serpentait  au  milieu  des  Graminées 
sauvages. 

Après  avoir  fait  6  legoa»  depuis  Sobradinho ,  je  m'arrè- 
lai ,  pour  y  passer  la  nuit ,  dans  un  petit  bois,  sur  le  bord 
d'un  ruisseau,  au  lien  appelé  Caceira  (crâne).  Il  y  avait  eu 
une  maison  dans  cet  endroit;  mais,  À  l'époque  de  mon 
voyage,  elle  était  complètement  détruite.  Mes  gens  formè- 
rent un  abri  avec  des  bAlons  enfoncés  dans  la  terre  el  les 
cuirs  destinés  à  recouvrir  la  charge  de  mes  mulets.  Sous 
cette  espèce  de  toit  furent  placés  mes  malles  et  mon  lit ,  et 
mes  domestiques  s'étendirent  par  terre  sur  des  cuirs  au- 
tour d'un  grand  feu.  J'écrivais  mon  journal  i  la  lumière 
d'une  bougie  ;  la  nature  était  ensevelie  dans  tioe  obscurité 
profonde  ;  le  plus  grand  calme  régnait  autour  de  moi;  je 
n'entendais  que  le  murmure  du  ruisseau  et  le  coassement 
de  quelques  petites  espèces  de  batraciens. 

A  â  lieues  de  Caveira  est  un  fond  marécageux  où  des 
.bouquets  de  bois  serrés  et  des  boritys  (Mauritia  mmfera, 
Mart.}  s'élèvent  au  milieu  d'une  herbe  épaisse.  Là  se  trouve 
une  petite  source  d'eau  limpide  qui  a  fait  donner  à  ce  lieu 
le  nom  d'OIAo  d'agiM  (source).  On  appelle  Chapada  de 
S.  Mareoê  (plateau  de  S.  Marc)  (1)  la  partie  du  plateau  où 

(1)  Va  TojtgeoT  ijai  ■  parlé  des  ehapadat  de  MiDU  Fiovas  les  in- 
dique aussi  tris-bieo  eomme  tWA  des  plaleaui  (Sde.,  Sowo.,  343)  ;  mais 
je  di»s  prévenir  les  ornithologistes  qu'ils  cbercheruent  Tiinemeut ,  snr 
MS  chapadoM,  un  oiseau  appeli!  coupy.  Ces  deux  syllabes  peignent,  par 
l'otlhographcftantaisc,  la  pronODciation  du  mot  iitpim,  que  les  BrM- 
I.  SU 


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306  V0YA6E  AUX  SOURCES 

Qatt  cette  petite  Toataioe,  parce  qu'elle  est  ud  des  commen- 
cements  du  Bîo  de  S.  Msrcoa,  qui  s'écoule  sur  le  venait 
occidental  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paraoshyba  et 
va  se  réunir  bu  dernier  de  ces  fleuves. 

Après  avoir  fait  environ  5  Ugoai  depuis  Gaveira,  je  des- 
cendis le  plateau  [1]  par  une  pente  d'où  j'apercevais  déji  la 
maison  du  Registre  doi  ^rr«pmdùio«  (douane  des  repen- 
tants}. Arrivé  dans  un  fond,  je  passai  sur  un  pont  en  bob 
le  Rio  dot  Arrependidûs ,  qui  divise  la  province  des  Mines 
de  celle  de  Goyaz ,  et  j'arrivai  au  regittro. 

tiens  ont  emprunté  à  la  langue  des  Indiens  et  qui  désigne  les  termts  en 
fonrniia  hlaucbes.  Lm  pToimineDMs  nu  terre,  colleta  contre  le  tronc  de* 
■rbrea ,  san»  itre  des  nids  d'oiwaut,  comme  l't  cru  le  vojagear  cité, 
sont  bien  réellement  des  b«bit«tioDS  de  ciq^im.  (h»D<l  l'arbre  est  d'une 
grosseur  notable,  U  proéminence,  ainsi  que  l'a  dit  le  même  écrivain,  est 
simplement  appUqnée  contie  un  cAlé  dn  Irone  ;  elle  Ait  le  tonr  de  cehiî-ei 
lonqv'il  n'a  qu'une  circonférence  médiocre.  Les  ibormis  arnreni  k  lenr 
habitation  par  dd  chemin  couvert  qui  commence  an  pied  de  l'arbn;  ea 
chemin  n'a  guère  qu'un  pouce  de  large  sur  quelques  pouces  de  bautear, 
et  la  Toflle  dont  il  est  abrité  est  constniiie  en  terre ,  comme  l'habitation 
dle-mËDte. 

(1)  Un  Gullivatenr  dn  pajs  avec  lequel  je  fis  route  sur  la  Chapada  de 
S.  Harcos  m'assura  que  ce  plateau  oc  se  termine  point  A  la  descente  des 
Arrependidos ,  mais  qu'il  se  continue  jusqu'au  village  de  Cotiro*,  situé  k 
12  lègoat  de  celte  descente,  et  peutr^tre  même  beaucoup  pins  Iran.  D'an 
antre  cAié,  H.  Uartins  dit  (  Reitt,  Il .  570) ,  d'après  des  retueignemenia 
pris  anprb  des  habitants  de  1*  province  de  Gojai,  que  le  plateau  de 
Couros  (  Chapada  dot  Cowoi  )  s'étend  au  loin  *ers  le  nord  ;  donc  on 
peut  considérer  comme  un  fwt  à  pen  pris  certain  qu'il  n'eiisle  absolu- 
ment ancuoe  interruption  entre  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paraoa- 
bjba  et  celle  du  S.  Francisco  e  do  Tocantins.  Ceci  achève  de  montrer 
combien  il  serait  étrange  de  faire,  comme  te  propose  Escbwege,  une 
seule  cbalne  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paranahjba  et  de  la  Serra 
da  Corumbà  e  do  Tocantina,  tandis  que  la  Serra  do  S.  Francisco  e  do 
Tocantins,  parhitement  continue  arec  la  première,  n'en  seraitqu'nne 
swle  de  contre-fort  ou  passerait  inaperçue  (voyei  le  « 
chap.  XI). 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  307 

Au  point  OÙ  je  descendis  le  plateau ,  j'étais  à  l'ertrémité 
septentrionale  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Faranahyba, 
que  j'avais  suivie  dans  toute  sa  longueur.  Au  bas  de  la 
chaîne  je  me  retrouvai  pour  la  seconde  fois  daos  le  bassin 
du  Faranahyba  auquel  appartient  le  Rio  dos  Arrependidos 
qui ,  probablement ,  se  jette  dans  le  S.  Bartholomçn. 


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308  VOYAGE  AUX  SOURCES 

CHAPITRE  XVI. 

TABLBAD  GÉNÉRAL   DE  LA   PROVINCE  DE  flOTAZ   (1). 

S  I.  Autonv. 

Idée  géoénle  de  rhialoire  de  Goju.  —  Harob.  Coki»  déMnrre  ce 
pif  s.  —  U  est  déeoDTert  nne  Mcoade  foie  per  Bimtiolokiii  Bomo 
Di  SUiV*.  Slratagèroe  employé  pu  cet  ireaUirier.—  Le  aecood  Bimo, 
son  fils,  tAcbe  de  retrovTeT  le  pays  des  Indiens  Geyû:  son  eipédiiion 
réunit  nul  ;  il  retourne  k  S.  Paul.  —  Il  pert  uoe  wcmide  fois  et  recon- 
■wlt  le  lien  où  l'était  arrêté  son  pire. —  Les  Indiens  Gojài  entièrement 
détrailB.  —  Une  fonle  d'aveotarien  fondent  tni  le  pays  de  Gojaz.  — 
t^rté  dea  denrées.  —  La  nouvelle  colonie  livrée  k  Ions  les  crinwi.  — 
Le  paye  de  Gof  ai  érigé  en  capilaiiterie.  —  L'ordre  rétabli  par  l'eiéoi- 
lioii.des  riglemeots  rigoareut  du  marquis  de  Pombal.  —  Décadence. 
ComparaiMn  da  rerena  des  mines  d'or  pendvit  plnsieora  années.  — 
tiui  actuel. 

Des  mines  d'or  découvertes  par  quelques  hommes  auda- 
cieux et  entreprenants  ;  un  essaim  d'aventuriers  se  précipi- 
tant sur  des  richesses  annoncées  avec  l'exagération  de  l'es- 
pérance et  de  la  cupidité  ;  une  société  qui  se  forme  an  mi- 
lieu de  tous  les  crimes,  qui  s'accoutume  h  un  peu  d'ordre 
sous  les  rigueurs  du  despotisme  militaire  et  dont  les  mœurs 
ne  tardent  pas  à  être  adoucies  par  un  climat  br&Iant  et  une 

(1)  Comme  ce  chapitre  est  fort  éteoda ,  je  crois  devoir  le  diviser  en 
plusieurs  paragraphes. 


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DU  UO  DE  S.  FBANCISCO.  300 

molle  oisiveté  ;  quelques  instants  de  ^lendeur  et  de  pro- 
digalité; une  triste  décadence  et  des  ruines  :  telle  est,  en 
deux  mots,  l'histoire  de  la  prorince  de  Goyas;  tdie  est  à 
peu  près  celle  de  tous  les  pays  aurifères. 

Les  anciens  Paulistes  se  répandaient  dans  l'intérieur  du 
Brésil  pour  faire  la  chasse  aux  indigènes.  Ceus-ci,  réduits 
en  esclarage ,  formaient  une  des  richesses  des  habitants  de 
S.  Paul,  et  plus  d'une  maison  puissante  possédait,  dans 
cette rille,  jusqu'à  six  cents  Indiens  (1).  Un  Faulîste  qui  s'é- 
tait ainsi  enfonce  dans  les  déserts  pour  y  faire  des  esclaves, 
Manosl  Corkea,  pénétra,  avant  l'année  1670,  jusqu'à  une 
rivière  appelée  Rio  dos  Araet  {%),  dans  le  pays,  qui  forme 
«ojourd'hai  la  province  de  Goyaz,  et  il  revint  dans  sa  patrie 
avec  de  l'or  et  des  Indiens  enchaînés.  Correa,  en  mourant, 
laissa  l'itinéraire  d^  contrées  qu'il  avait  parcourues;  mais 
son  ignorance  était  telle  qu'il  fut  impossible  de  profiter  de 
ses  manuscrits. 

Vers  l'année  d680,  un  autre  Pauliste,  Baktbolohed 
BcBNO  DA  SiLTA,  arriva  au  lieu  où  est  actuellement  situé 
Villa  Boa ,  et  qui ,  alors ,  était  occupé  par  les  pacifiques 
Indiens  de  la  nation  gotA.  Les  parcelles  d'or  dont  s'or- 
naient les  femmes  de  ces  sauvages  trahirent  la  richesse  du 
pays.  Pouren  soumettre  les  habitants,  Bueno  eut  recours  au 
stratagème,  en  apparence,  le  plus  puéril  ;  il  alluma  un  vase 
plein  d'eau-de-vie  devant  les  Indiens  étonnés,  et  les  me- 
naça de  briller  de  la  même  façon  eux  et  leurs  rivières  s'ils 
osaient  lui  résister.  Les  Indiens  se  soumirent,  et  Bueno, 
après  avoir  laissé  quelques  plantations  dans  leur  pays,  re- 

(I)  La  loi  Qe  permeUait  de  reudrc  csriarea  que  l«s  iadigène!)  faits  pri- 
soooiers  dans  une  guerre  li'gLtime  :  mais  relie  loi  ^lait  stns  ers»-  i'liid?p. 
(t)  Les  Araet  ou  Ararfi  Hairnt  tino  peuplade  indii-iiiir. 


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310  VOYAGE  MX  SOETRCES 

vint  i  s.  Paul  avec  de  l'or  et  an  si  grand  nombre  de  capUb 
que  l'on  aurait  pu  en  peupler  une  rille.'Les  coupables  ruses 
auxquelles  cet  bomme  aventureux  dut  de  tels  succès  Itd 
firent  donner  par  les  Goyis  le  nom  d'AnHANUDESA  qui  si- 
gnifie vieux  diable  (1),  nom  que  ses  descendants  ont  con- 
sfflvé  jusqu'à  nos  jours. 

L'ardeur  avec  laquelle  les  Faulistes  se  précipitèrent  dans 
la  province  de  Miuas  Geraes  leur  fit  oublier  pendant  long- 
temps les  parties  plus  occidentales  du  désert.  Cependant  la 
découverte  des  mines  de  Cuyi^â  rappela  celles  de  Goyaz. 
et  HoDHiGO  Cesak  de  Mknezes,  gouvernenrde  S.  Paul, 
excita  $es,  administrés  à  retourner  dans  ce  pays,  exaltant 
leur  imagination  et  leur  offrant  l'appAt  lointain  des  plus 
belles  récompenses. 

Lorsqu'il  avait  pénétré  cbez  les  Indiens  Goyàs,  Bueno 
était  accompagné  d'un  Gis,  âgé  de  12  ans,  du  même  nom 
que  lui .  Cet  enfant  avait  vieilli ,  mais  il  n'avait  point  perdu 
le  souvenir  du  voyage  de  son  père,  et  il  alla  offrir  ses  ser- 
vices à  Menezes  :  celui-ci  les  accepta;  il  fournit  des  secours 
à  Bueno  et  lui  promit  que ,  si  son  entreprise  réussissait ,  il 
aurait  pour  récompense  le  péage  de  plusieurs  rivières. 

(1)  CeU  U  dn  moins  ce  que  diseot  les  bistoriew  dn  Dom  d'^tiAan- 
Overa  ;  mais  il  n'est  nallemcQt  vrtiseiDblable  que  I«b  Gojte  parlassent 
le  gaanoi,  et  le  mot  Anltançuera  appartient  bien  cerUinemeot  Ji  cette 
langue.  Le  sobriquet  qui  est  resté  aui  descendants  de  Bueno  lui  avait 
sans  doute  été  donné  par  des  Indiens  de  la  cAte  ou  par  les  Piulistea  eai- 
mimes,  qui,  comme  oa  sait,  parlaieul  la  tingoa  gérai,  dialecte  du 
guarani.  Anhang,  en  guarani.  signiSe  Ime,  démon  (Roit  m  Hontoti, 
Tei.  Unt-  guar.)  ;  j'ai  euiendu  un  Indien  dn  Paragu*}  se  eerrii  du  mot 
anhangiu ,  en  parlant  du  cauchemar  on  d'un  étouffemenl  ;  enfin  ra  est 
une  eipression  qui  indique  la  ressemblance  (  1.  c).  Anbangnera,  au  lieu 
de  cinix  diable,  signifierait  donc  Ctiiomme  *«wiJilabU  ou  tMUMOit  eipril 
qHi  produit  U  canthemar. 


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DU  UO  DE  8.  FRANCISGO.  311 

A  la  Hd  de  l'aonée  4791,  le  second  Bueno  part  de 
S.  Pan]  avec  son  gendre,  JoÂo  Leite  da  Sn.vk  Hoktiz, 
emmenant  deox  religieux  et  une  mite  nombrease.  Après 
avoir  longtemps  erré,  ces  hommes  aventureux  dépassèrent 
le  bnt  qu'ils  voulaient  atteindre  et  rencontrèrent  une  rivière 
assez  lai^  qui  re^t  d'eux  le  nom  de  Rio  do»  PUôei  qu'eHe 
porte  encore  aujourd'hui  (!].  Comme  cette  rivière  coule  sur 
un  sable  aurifère,  Leite  t^oigna  le  désir  de  se  Bxer  snr  ses 
bords  ;  mais  Bueno  s'y  opposa,  assarant  que  ce  n'était  point 
li  le  véritable  pays  de  la  nation  goyi,  ^  l'on  en  serait 
venu  aux  mains  sans  les  efforts  des  deux  eccté^astiques  qui 
accompagnaient  la  troupe. 

S'étant  remis  en  route,  on  passa,  sans  le  savoir,  an  lieu 
que  l'on  ch«t;hait,  et  l'on  arriva  sur  le  bord  d'une  autre 
rivière  qu'on  nomma  Rio  da  Pêrdi^o  (rivière  de  la  perte}, 
pour  rappeler  sans  doute  le  malheur  qu'on  avait  eu  de  s'être 
égaré  au  milieu  des  déserts.  Cependant  l'or  que  nos  aven- 
turiers découvrirent  bieutât  dans  un  bras  de  rivière  qu'ils 
nommèrent  Rû)  Rico  St  naître  parmi  eux  de  nouvelles 
disputes.  (^  n'a  pu  retrouver,  avec  une  entière  certitude, 
ce  Rio  Rico  ;  mais  il  est  indiqué  dans  de  vieux  itinérairos 
comme  renf^mant  les  plus  grandes  richesses.  Bueno  vou- 
lut s'arrêter  en  cet  endroit,  mais  Leite  s'y  opposa  k  son 
tour,  piqué  d'avoir  été  forcé  de  céder  i  son  beau-père  snr 
les  bords  du  Rio  dos  Pilôes.  On  prit  les  armes,  et  le  sang 
aurait  coulé  si  les  deux  prêtres  ne  fussent  interv^us  pour 
la  seconde  fois. 

Obligé  de  renoncer  h  son  proj^  d'établissement,  Bueno 
se  remit  en  marche,  cherchant  toujours  les  plantations  que 

(1)  Je  dois  dire  qne  Cual  pcDH  que  ce  sont  deui  riviirca  difeenUa. 


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313  VOYAGE  ADX  SOUICES 

son  père  avait  faites  dans  le  pays  des  Goyàs.  Enfln,  après 
avoir  surmonté  des  dilBeitttés  sans  nombre ,  la  troupe  arriva 
sur  leb<vdduitù>Partmnan(1]  et  alla  même  Jusqu'à  l'en- 
droit où  est  aujourd'hui  le  village  de  S.  Felis  ;  mais  les  forces 
et  le  courage  de  ces  aventuriers  étaient  épuisés.  Dans  leur 
désespoir,  ils  refiisérent  d'entendre  la  voix  de  leurs  dtt^ 
et  ils  se  séparèrent.  Les  uns,  ayant  construit  des  radeaux, 
s'raibarquèrent  sur  le  Rio  do  IVicantins,  et  étant  arrivés 
au  Pari,  ils  furent  mis  en  prison  ;  d'antres  tombèrent 
entre  les  mains  des  Indiens,  et  Bueno,  presque  senl ,  rentra 
A  S.  Paul  au  bout  de  trois  années,  honteux  et  fuyant  les 
regards  du  gonvernear. 

Mais  celui-ci  savait  ce  qu'on  pouvait  attendre  de  la  con- 
stance et  de  l'intrépidité  de  Bueno;  il  le  décida  k  entre- 
prendre  un  second  voyage  et  lui  accorda  les  secours  néces- 
saires. Notre  Pauliste  se  mit  eo  marche  l'année  17S8,  Agé 
alors  de  55  ans,  et  traversa  encore  une  fois  des  déserts  où 
il  n'y  avait  point  de  chemins  et  où  de  nombreux  torrents 
s'opposaient  sans  cesse  k  ses  progrès.  Enfin,  après  plusieurs 
mois  de  courses  et  de  fatigues  incroyables ,  il  trouva  dans 
on  défilé  les  restes  d'un  mors  de  cheval  et  d'autres  débris 
que  des  Européens  pouvaient  seuls  y  avoir  laissés.  Il  prit 
la  résolution  de  s'arrêter  en  cet  endroit  et  envoya  k  la  dé- 
couverte quelques  hommes  qui ,  ayant  rencontré  deux  vieil- 
lards de  la  nation  goyâ,  les  conduisirent  k  leur  chef. 
Celuî-cî  demanda  è  ces  Indiens  s'ils  connaissaient  le  lieu  où 


(1)  Par  UDe  de  cm  coofiuiotu  nulbmteiisemMii  ti  commnnea  dius 
son  prédeni  oavrage,  Piarro  ipm{Mem.,  IX,  14S)c«Ua  riTiire,  l'iin 
des  irOuBDis  du  TouBtiDS,  poor  le  Parannà,  ri*ière  foriaée  de  li  rra- 
niondn  PiruialiilM  et  dn  Kio  Grande,  et  dont  les  MUi,  unies  k  Mlies 
du  PtragniT,  abonLJHeut  «n  Rio  de  U  PU 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  S13 

des  blancs  aTaient  séjoarné  autrerois  ;  les  deux  sauvages 
répondirent  i  Bueno  qu'il  en  était  tout  près  :  ils  lui  firent 
foire  environ  Hegoaa,  etrheureniPauliste  reconnut  enfin 
Tendroit  où,  dans  son  enfance,  il  s'était  arrêté  avec  son 
père.  C'est  ik  que  l'on  voit  aujourd'hui  le  village  de  Per- 
reiro,  situé  A  i  lieue  de  Villa  Boa. 

Bueno  retourna  dans  sa  patrie  arec  8,000  oittmas  d'or 
(75,000  fr.},  et  annonça  qu'il  avait  enfin  retrouvé  le  riche 
territoire  habité  par  la  nation  goyi.  Le  gouverneur  de 
S.  Paul  le  chargea  d'administrer  ce  pays  en  qualité  de  ea- 
pitào  môr  régente  ;  il  lui  confia  le  soin  de  distribuer  des  «m- 
mariat  [i)  aux  nouveaux  colons,  et  renouvela  ses  anciennes 
promesses.  £n  même  temps  on  envoya  des  troapes  h  Goyaz 
pour  assurer  les  droits  dus  sur  l'or  au  trésor  royal  et  éta- 
blir des  péages  sur  les  rivières. 

Le  nouveau  eapitào  m6r,  de  retour  dans  cette  contrée , 
chercha,  par  de  bons  traitements,  à  se  concilier  les  Indiens 
et  è  les  empêcher  de  porter  le  trouble  au  milieu  de  la  colo- 
nie naissante.  Mais  ceux-ci  sentant  bien  que  tdt  ou  tard  on 
les  réduirait  en  esclavage,  ou  qu'on  tes  chasserait  de  leur 
pays,  firent  tons  leurs  efforts  pour  éloigner  les  nouveaux 
venus.  La  guerre,  ayant  commencé,  fut  fotale  aux  indi- 
gènes. Les  malheureux  Goyàs  finirent  par  être  obligés  d'a- 
bandonner entièrement  le  pays  dont  ils  étaient  les  maîtres 
légitimes  ;  ils  disparurent  peu  k  peu ,  et  aujourd'hui  il  ne 
reste  plus  d'eux  que  leur  nom. 

Cependant  la  renommée  ifs  richesses  de  Goyaz  y  attira 
bientêt'un  nombre  prodigieux  d'aventuriers,  et  l'on  fonda 
les  villages  de  Barra,  Santa  Cruz,  Meiaponte,  Crixi,  Nativi- 


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311  VOYAGE  AUX  SOUBCES 

dade,  etc.  Alors  on  tirait  sans  peine  des  quantités  d'or  coa* 
sidérables  des  rivières  et  des  ruisseaux,  mais  on  ne  songeait 
point  A  cultiver  la  terre.  Il  fallait  que  les  vivres  vinssent  de 
S.  Paul  i  travers  le  désert,  et  il  n'en  arrivait  point  assez 
pour  la  population  qui  déjà  couvrait  le  pays.  Les  douées 
les  plus  communes  se  vendaient  à  des  prix  exorbitants. 
Pour  1  aîquev-e  de  maïs,  on  obtenait  6  ou  7  oitava*  d'w 
(54  fr.  32  c.  ou  65  fr.  59  c]  ;  pour  1  alqtuve  de  farine  de 
manioc,  10  oitavas,  â  de  I  livre  de  sucre ,  et  l'on  alla  jus- 
qu'à donner  80  oitamu  pour  un  cochon ,  et  pour  une  vache 
â  livres  d'or  (1). 

£n  même  temps  qu'une  population  nombreuse  s'était, 
conune  par  magie,  rendue  dans  le  pays  de  Goyai,  les  vi- 
ces les  plus  affreux  s'y  étaient  précipités  avec  elle.  Des 
nuées  de  criminels  avaient  trouvé  dans  ces  déserts  des  ri- 
chesses avec  l'impunité,  et,  au  milieu  d'une  société  nais- 
sante, où  aucune  police  n'existait  encore,  ils  pouvaient  sans 
crainte  continuer  dtt  se  livrer  à  tous  les  débordements.  En 
vain  les  magistrats  eussent  élevé  la  voix  pour  réprimer  de 
tels  désordres  ;  aussi  corrompus  que  ceux  qu'ils  auraient  dâ 
punir,  ils  en  étaient  méprisés.  Des  rixes  se  renouvelaient 
sans  cesse;  aucun  homme  n'osait  rencontrer  un  autre 
homme  sans  porter  des  armes ,  et  on  ne  les  quittait  nième 
pas  pour  se  présenter  dans  les  églises. 

Alors  Goyai  faisait  partie  de  la  province  de  S.  Paul.  Le 
gouvernement  sentit  enBn  que  l'autorité  des  capitaines  gé- 
néraux de  cette  province  se  trouvait  paralysée  par  l'éioigne- 

(1)  ValguHre  de  Rio  de  jAneiro  éqaivAat ,  selon  Frejciaet,  à  40  ij- 
trefl  :  It  lÎTre  A  4  bectogrammeti  S  décAgrAmines.  ~~  Aujourd'hui  Val- 
ÇHeireie  Goyu  est  pluB  fou  que  cfluide  Miois,  qui  lui-même  l'esl 
plus  (|uc  celui  de  !■  eapilalc. 


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DU  RIO  DE  S.  FUNCISCO.  819 

ment  où  ils  étaient  de  leurs  administrés,  et  Goyaz  devint 
une  capitainerie.  Son  premier  gouvwneur,  D.  Habcos  de 
NoRONHA,  COUTE  DOS  ÀBcos,  S'y  in^la  le  8  de  novem- 
bre 1749,  et  il  en  fiia  les  limiter.  Il  fit  quelque  bien,  sans 
doute,  mais  l'esécution  des  ordres  rigoureux  du  marquis 
de  Pombal  put  seule  tirer  la  province  de  Goyai  de  l'état 
affreux  d'anarcbîe  où  elle  était  plongée,  et  la  crainte  des 
chAtiments,  il  est  afDigeaat  de  le  dire,  opéra  un  change- 
ment que  ni  les  lois  de  la  morale  ni  l'intérêt  bien  entendu 
de  tous  n'avaient  pu  produire  depuis  tant  d'années  (1). 

Cependant  l'époque  de  la  décadence  et  de  la  misère  allait 
bientAt  suivre  celle  de  la  richesse  et  de  la  prodigalité. 

D.  Marcos  de  Noronha  avait  fondé  deux  hôtels  destinés  à 
lafontedel'or  (c(U(ud«/undtj^];  l'un,  pour  la  partie  mé- 
ridionale de  la  province,  à  Villa  Boa  la  capitale,  et  l'autre, 
pour  la  partie  septentrionale,  dans  le  village  de  S.  Felis. 

Le  produit  de  l'impôt  du  quint  perçu  dans  ces  deux  ^• 
blissements  ne  saurait  nousdonner  une  idée  exacte  desquan- 
titésd'orqu'à  successivement  fournies  la  province  de  Goyaz  ; 
car,  dans  un  pays  aussi  désert  et  anssi  vaste ,  une  grande 
partie  du  revenu  des  minières  échappait  facilement  aux 
droits.  Mais,  en  comparant  les  résultats  de  l'impAt  à  diffé- 
rentes époques,  nous  pourrons  du  moins  savoir,  à  peu  près, 
combien,  dans  on  temps  fort  court,  l'extraction  de  l'or  a 
diminué  d'importance.  En  1755,  le  quint  rendit,  à  Villa 
Boa ,  169,080  oitams  (1 ,268,100  fr.)  (3) ,  et.  en  1 7S5,  il 

(1)  Ldiz  AHtONio  D4  SiL*i  I  Socsi ,  Memoria  lobre  o  deteobri- 
mento,  etc.,  da  CapUania  de  Gonai-—  Cii.,  Corog.  Brax.,  I.—  Sodth.,  - 
llUt.,  m,  30a,eic.  —  Pu.,  If«m.  kUL.lX,  Ht.—  M*bt.,  ReUe,  U, 
586.  —  Luu  d'Auncoubt,  Htm.,  9*.  —  Pobl,  Beite,  l ,  325. 

(3)  Ici  jecalcnlt  !■  valeur  de  l'ntfaM  snrie  pied  de  1,300  reis,  pircC 


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3IG  VOVAât  AUX.  SOURCKS 

rendit  59,569 oi'lai-M  (440,767  tr.)  à  S.  Felis;  en  I80ri,  il 
n'en  produisit  plus  que  5,300  (34,790  fr.]  à  S.  Pelis,  cl, 
en  1807,  12,308  (92,3iO  fr.)  k  Villa  Boa  (1);  enfin,  en 
1819,  on  ne  tira  en  tout  guère  plus  de  56  marcs  d'or. 

Lors  de  mon  voyage,  les  minières  étaient  épuisées  ou  ne 
pouvaient  dre  exploitées  qu'avec  un  grand  nombre  de  bras, 
et  l'éloignement  de  la  cAte,  qui  rend  les  exportations  très- 
coftteoses  et  presque  impossibles,  ne  permettait  pas  aux 
habitants  de  Goyaz  de  trouver  auïsi  facilement  que  les  Mi- 
neiros  une  autre  source  de  richesse  dans  la  culture  des 
terres.  Ne  pouvant  payer  l'impAt^  ils  abandonnaient  leurs 
habitations,  se  retiraient  dans  les  déserts,  et  ils  y  perdaient 
jusqu'aux  éléments  de  la  civilisation  ;  les  idées  religieuses, 
l'habitude  de  former  des  liens  légitimes,  la  connaissance  de 
la  monnaie  et  l'usage  du  sel.  Un  pa)*»  plus  grand  que  la 
France  s'épuisait  en  faveur  de  quelques  employés  indolents, 
et  les  environs  mêmes  de  Villa  Boa ,  cette  capitale  naguère 
si  riche  et  si  florissante,  n'offraient  plus  que  des  ruines  sans 
souvenirs  (S). 

qiM,  h  l'ïfoqne  dont  il  s'agit,  elle  aveil  iti  Eiée  ■  ce  uni  par  D.  Huns 
de  Norouha,  comle  dos  Arcos  (Piz.,  item.,  IX,  161). 

il)  South.,  IIUI.  Bra^.,  IIl,  837. 

yl)  yojti  Vlnlroduclion  qui  prfcède  Vlliiloirt  dei  planle*  Ui  pltu 
remarqùnbUi  du  Brésil  el  d«  Paraguay,  p.  xxxiv. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  317 

5(11.  Etemfut;  limite»;  mrfaff. 

Ëteuduc  de  b  prtiviuce  de  Goj^u. — LJniit«s  de  cetle  province.— Lt  Rgure 
qu'elle  représcDlc.  —  Son  élévation.  —  La  Serra  do  Corambn  et  do 
Torant'DS.  —  Surrace  du  paj«  qui  s'i'iead  au  nord  de  cetle  ehitne. 
La  Serra  do  S.  FriDcisco  e  do  TocaoUns. 

I.a  province  de  Goyaz  est  l'une  des  plus  considérables  de 
l'empire  brésilien;  elle  en  forme  le  centre  et  est  étoif^néc 
de  S  et  300  legoas  des  ports  de  mer  (1).  PobI  dit  (3]  qu'elle 
s'étend  de  5"  î*  lat.  sud  jusqu'à  as*,  et  de  40"  3'  longit. 
jusqu'à  51*,  et  qu'elle  a  4,260  milles  allemands  de  cir- 
conférence ;  mais,  comme  le  voisinage  des  Indiens  ennemis 
n'a  pu  permettre  de  fixer  partout  des  limites  certaines,  je 
me  garderai  bien  d'indiquer  ces  chifiï^  comme  parfaite- 
ment exacts  (ô). 

Au  nord ,  la  province  de  Goyaz  est  séparée  du  Pari  par 
une  ligne  imaginaire  qui  s'étendrait  depuis  le  conOuent  du 
Tocantins  et  de  VAragvaya  jusqu'à  la  Serra  do  S.  Fran- 
cisco e  do  Tocantins  ;  elle  a  pour  limite  orientale  cette  même 
Serra  et  celle  do  S.  Francisco  e  da  Paranahyba  qui  la  sé- 
pare, celle-ci  de  Minas  Geraes,  celle-là  de  la  même  pro- 

(11  Pu-,  j;ew.,IX,l53. 

et)  Poil.  Rtite,  316.  ^ 

(.3)  Ce  qui  prouve  combien  il  faut  s'en  di'flcr,  c'est  qnc  Caul ,  i|tri  ost 
à  peu  près  d'accord  rvpc  l^ohl  tMT  l'/lcndue  eu  latitude  de  la  protioce 
de  Gojai ,  ne  lai  dDyie  pourlaot  (Coron.,  1 ,  319)  qa'enviran  !U0  legoat 
de  longueur,  ■■i:d[s  que  Piiarro  dit  qu'elle  a  331  Irgoai  du  uord  an 
midi ,  cl  ïlli  du  l'csl  à  l'ouest.  ScbalTer  lui  attribue  11,032  milles  carri'H 
Réograpbiqura  \  Brai..  12ri]  :  da  Cunba  Mallos,  |)robab)emeiil  beaucoup 
inirui  initlruil,  l'ialac  sa  surface  de  '2rl  à  !j,<IUU  livurs  rarr.'cs  portu- 
)cai»cs. 


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318  VOYAGE  AUX  S 

vince  et,  en  outre,  de  Pemambouc,  de  Piauby  et  de  Ma- 
raDbâo;  au  midi,  elle  est  bornée  par  le  Paranahyba  et  le 
Rio  Grande,  au  delà  desquels  on  trouve  une  petite  partie 
de  la  province  de  Minas  et  celle  de  S.  Paul  ;  enfin,  du  cAté 
de  l'ouest,  elle  est  séparée  de  la  province  de  Matogrosso 
par  l'Àraguaya,  qui ,  à  l'endroit  où  le  traverse  le  chemin  de 
Villa  Boa  à  Cuyabà,  porte  aussi  le  nom  de  Rio  Grande. 

Beaucoup  moins  large  de  l'est  à  l'ouest  qu'elle  n'est  lon- 
gue du  nord  au  sud,  fort  irrégulière,  rétrécie  ii  s^  deux 
extrémités,  changeant  bruâquemeut  de  direction  et  s^  avan- 
çant vers  l'occident  un  peu  au-dessous  de  ses  limites  mài- 
dionales,  la  province  de  Goyaz  présente  k  peu  près  la  forme 
d'une  botte  à  l'écuyère. 

Ce  pays  doit  nécessairement  être  fort  élevé,  du  moins 
dans  une  partie  de  son  étendue,  puisqu'  il  donne  naissance , 
d'un  côté,  à  l'Àraguaya  et  au  Tocantins,  et,  d'un  autre 
cMé,  aux  affluents  les  plus  septentrionaux  du  Paranahyba  ; 
or  l'on  sait  que  les  deux  premiers  de  ces  Deuves  parcou- 
rent un  espace  immense  en  coulant  vers  le  nord,  et  que 
le  Paranahyba,  qui,  au  contraire,  se  dirige  vers  le  sud, 
contribue  i  former  le  Rio  de  la  Plata. 

ConformémentàlaoomenclBturequej'aiétablie(chap.XI, 
p.  313],  la  chaîne  qui  divise  ces  eaux  s'appellera  Serra  do 
Cortanbâ  e  do  Tocantint;  elle  se  rattache  &  l'extrémité 
de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paranahyba,  vers  le  lieu 
appelé  Os  Àrrependidos,  où  la  route  de  Mioas  pénètre  dans 
la  province  de  Goyaz;  elle  forme  un  angle |vec  cette  Swra, 
se  dirige  vers  l'ouest,  s'abaisse  en  inclinant  vers  le  snd,  et 
forme  la  limite  méridionale  du  bassin  de  l'Araguaya  et  du 
Tocantins,  comme  aussi  la  limite  septentrionale  de  celui 
du  Corumbâ.  Il  ne  faut  pas  croire  que  cette  chaîne  pré- 


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MJ  WO  DE  s.  FRAHCISCO.  319 

aeate  une  suite  de  pics  gigantesques  comme  la  Serrs  da 
Caraça,  l'Itacolnmi,  la  Serra  do  Pspagayo,  dans  la  pro- 
vince de  Minas;  elle  forme  plutôt,  avec  ses  dépendances  et 
jies  contre-forts ,  une  sorte  de  large  réseau  de  petites  moQ- 
tagnes  et  de  vastes  plateaux  séparés  par  des  vallées  où  cou- 
lent des  ruisseaui  et  des  rivières.  Les  Montes  Pyreneos  et  la 
Serra  Dourada ,  que  l'on  elle  comme  les  deux  sommets  les 
plus  élevés,  sont  bien  loin  d'être  de  hautes  montagnes.  On 
peut  dire,  cependant,  que  la  partie  méridionale  de  la  pro- 
vince de  Goyaz,  celle  où  j'ai  voyagé  et  qui  se  trouve  au  sud 
de  la  Serra  do  Conunbi  e  do  Tocantins,  est  généralement 
montueuse. 

Je  n'ai  point  parcouru  leterritoirequi  s'étend  au  nord  de 
la  même  chaîne,  et  est  double  jk  peu  près  de  la  partie  méri- 
dionale ;  mais  on  sait  que,  quoique  la  Serra  do  Conimbà  e 
do  Tocantins  y  jette  des  contre-forts  {i  ),  il  est  générale- 
ment assez  égal ,  et  que  le  diviseur  des  eaux  du  Tocantins 
et  de  l'Araguaya,  fleuves  qui  finissent  par  se  réunir,  n'est 
guère  qu'une  croupe  peu  sensible.  Sur  la  grande  cbalne 
qui ,  après  avoir  séparé  la  province  de  Goyaz  de  Minas  Ge- 
raes,  se  prolonge,  au  nord,  pour  séparer  cette  province  de 
Maranhâo,  de  Piauhy,  de  Fernambouc,  je  ne  me  suirpas 
avanié  au  delà  de  l'extrémité  septentrionale  de  la  Serra  do 
S.  Francisco  e  da  Paranahyba  ;  s'il  faut  en  croire  CazaI  (S) , 
la  Serra  do  S.  Francisco  e  do  Tocantins  qui  continue  cette 
dernière  est  plus  élevée  qu'elle,  pierreuse  et  dépourvue  de 
verdure. 

(I)  Ldiz  Antonio  da  Sii.v*  e  Soi;si,  Memoria  etIalUtira  da  pniviti- 
riadeGo^ax. 
0)  C(V09.,  l.^lli. 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


S  in.   Végétation, 

La  partie  scptpotnonilc  de  la  prorintp  de  Gojii  plus  aride  n  plas  df- 
coavenc  que  la  piriie  mi<ridiODale.  —  Cette  deraitre  bien  arrosée.  — 
Elle  prt^sente  une  illemalive  de  bois  et  de  eampol.  —  Les  campM 
semblables  à  ceux  du  di'scri  oriental  du  S.  Francisco.  —  Vo  Vellotia 
remarquable  dans  le»  plus  i<lcv^s.  —  Description  de*  bois.  —  Marais; 
le  borily. 


D'après  ce  que  j'ai  dit  plus  haut ,  il  est  facile  de  con(%- 
voir  que  la  portion  de  la  province  de  Goyai  qui  s'étend 
au  nord  de  la  Serra  do  Conimbé  e  do  Tocantins  doit  £tre 
moins  arrosée,  plus  aride,  plus  découverte  que  la  partie 
méridionale. 

Celle-ci ,  qui  a  l'avautage  de  posséder  des  eaui  aussi 
abondantes  et  aussi  bonnes  que  le  centre  de  la  province  de 
Minas,  présente  une  alternative  de  bouquets  de  bois  et  de 
campoi,  les  uns  uniquement  couverts  de  plantes  herba- 
cées {Ud)olnro$  descohertos) ,  les  autres  parsemés  d'arbres 
tortueux  et  rabougris,  À  écorce  subéreose,  aux  feailles  sou- 
vent dures  et  cassantes  {taboleiros  cobertoa].  L'aspect  de  ces 
derniers  campoê  est  celui  des  pâturages  de  même  nature 
que  j'avais  traversés,  en  1817,  dans  le  désert  oriental  da 
S.  Francisco  (1),  et  qui  se  retrouvent  dans  la  comarca  de 
Peracatû  ;  les  plantes  ligneuses  éparses  au  milieu  des  her- 
bes appartiennent  aux  mêmes  espèces,  è  Goyaz  et  k  Minas. 
Quelques-uns  des  campos  les  plus  élevés  de  la  première  de 

(1)  Tojei  raon  TabUau  géographique  de  la  végélalim  primiUM 
daM(  la  provinre  de  Ulnai  f.eran  (SouvelUt  annaUt  4a  v^^^fa, 
IH). 


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DU  UO  OK  S.  nuKOSGO.  »1 

ces  deux  prodoces  diffèreat  cepoodant  beaucoup  de  cens 
de  Minas  par  la  présence  d'une  Monocotylédfme  ligoeuae, 
haute  de  plusimira  pieds,  extràmemeot  pittoresque,  qui  tan- 
tAt  se  montre  seule  an  milieu  des  Graminées  et  des  autres 
bwbes ,  et  tantôt  se  m61e  aux  arbres  tortueux  et  rabougris. 
C'est  UQ  Vellotia  qui ,  entièrement  couvert  d'écaillés ,  se  bi- 
furque plusieurs  fois;  dout  la  tige,  excesEÎvement  roide,  est 
partout  d'une  égale  grosseur;  dont  les  rameaux*  aussi  roides 
que  la  tige,  se  terminent  par  une  touffe  lâche  de  feuillet 
linéaires  et  pendantes;  dont  les  fleurs  d'un  bien  pAld,  aussi 
grandes  que  nos  lis ,  sortent  du  milieu  des  touffes  de  feuilles 
qui  semblent  les  protéger. 

Les  bois  ne  sont  point  également  répartis  entre  les  di- 
vers cantons  que  j'ai  parcourus.  Dans  la  partie  la  plus  orien- 
tale, celle  qui  avoislne  Santa  Luiia,  S.  Antonio  dos  Hon- 
tes Claros,  etc.,  et  est  très-élevée,  ils  sont  bien  moins  com- 
muns que  dans  le  pays  de  Minas;  la  partie  occidentale  et 
beaucoup  plus  basse,  que  l'on  traverse  av^nt  d'arriver  au 
Rio  Qaro,  ei)  se  rapprochant  de  la  frontière  de  la  province 
de  Matogrosso,  est  au  contraire  fort  boisée.  C'est  surtout 
dans  les  fonds,  sur  le  bord  des  rivières»  la  pente  des  mornes, 
dans  les  terrains  meubles  que  l'on  trouve  des  bois.  Chaque 
bouquet  {capSo)  [1]  a  généralement  peu  d'étendue;  mais  il 
existe,  entre  Meiaponte  et  Villa  Bob,  une  forêt  appdée 
Jfoto  Groaso  (le  grand  bois),  qui  a  9  legoas  de  l'est  à 
l'ouest  et  dont  les  limites,  du  cAté  du  nord  et  du  cdté  du 
sud,  ne  sont  pas  encore  bien  connues  {2}. 

(t)  Le  mot  eapào,  conuH  je  l'ai  dit  aiUeara,  t  pour  it^mologie  un 
mot  iodien  qui  Bignifie  ife. 

(S)  Selon  Ciul ,  le  Heto  Orouo  s'étendrait ,  dmi  m  plus  f  reade  lon- 
gueur, du  fiio  du  &lmu  juaqa'eu  centre  du  paje  des  Co}<pciB  [Çorog., 
I.  21 


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m  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Les  bois  que  j'ai  traversés  daos  la  province  d*  Goyac,  sans 
perdre  entièrement  lenrs  feailles.  pendant  la  sécheresse, 
comme  ieicatingai  de  Minas  NoTa8[1 },  ne  ressemblent  point 
aui  forêts  vierges  de  Rio  de  Janeiro  ni  même  i  celles  de 
Minas  Geraes ,  et  n'en  ont  nullemeat  la  majesté  ;  cependant 
on  peut  aussi  y  admiru'  de  très-beanx  arbres.  Ceux-ci ,  il  est 
vrai,  sont  écartés  les  uns  des  autres,  mais  les  ioterralles 
qu'ils  laissent  entre  eux  sont  remplis  par  de  grands  arbriS' 
seaux  qui  se  pressent,  confondent  leurs  branches  et  sous 
■  lesquels  on  trouve  de  la  fraîcheur  et  un  ombrage  délideux. 
Ici  de  petits  bambous  aux  tiges  grêles  et  légères,  ailleurs 
diverses  sortes  de  Palmiers  jettent  de  la  variété  dans  le» 
masses  de  verdure  qui  les  entourent;  souvent  de  grandes 
lianes  enlacent  tontes  ces  plantes,  et  sans  cesse  le  voyageur 
est  récréé  par  des  accidents  de  végétation,  des  différences 
de  forme  et  de  feuillage  anxquds  l'Européen  n'est  point 
accoutumé  (2). 

I,  31»).  PUirro  dit  d'oDe  maoièfe  ffaénk  (Jf«m.  kUt.,  Ot,  115)  qoc 
Mlle  forêt  est  citrEmenient  étendoi  du  ebU  du  nord ,  et  qn'on  ne  lai 
eonnatt  pas  de  fin  du  cAté  du  midi.  Je  crois  «voir  ouï  dire  qu'elle  se  rat- 
tache i  celles  de  l'Amérique  espagnole.  Si  ces  diterses  ossertioiis  ont 
quelque  chose  de  Tiai ,  je  n'aorais  pas  dû  dotmer,  cornue  je  l'ai  but 
{Aperçu  (fun  voyagé  dan$  FinUrievr  du  Ar^ril,  daoa  les  ir^moirM 
du  Ihuéum  a'hUloire  naturelle,  roi.  [X],  0  lieues  an  Malo  Grwso,  daw 
•a  plus  grande  longueur. 

(1)  roinif  ff  dant  U$  provituet  Oe  Mo  d»  Janeiro  et  de  Uintu  Ge- 
rut,  11,08. 

(2)  On  voit ,  d'après  tout  ce  qui  précède,  qu'on  a  trompé  l'abbé  Catal 
lorsqn'oD  lui  a  «Muré  que  presque  toute  la  surface  de  Goju  i^iait  coa- 
verte  de  ealingat  (  Corog.,  1 ,  319).  Je  dois  d'autant  plus  relever  cette 
erreur  qu'elle  a  été  répétée  pat  les  écrivains  qai  sont  venus  après  l'esli- 
mable  auteur  de  la  CoroffraHa  BraUiica.  Je  suis  bien  loin  de  dire  qu'il 
n'y  a  ai  vérllablee  cattueiu,  ni  carrtuqugiiioê  dans  la  raite  prorioce  de 
Goyai  :  mais  il  D'en  ciiste  pas  dan*  la  partie  que  j'ai  visita. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  323 

Lors  même  que  l'berbe  des  eampos  esl  enUèremeot  des- 
séchée pir  l'ardeur  du  soleil,  on  trouve  toujours,  dans  les 
fonds  niaréci^eux,  Is  plus  belle  verdure  et  souvent  qudques 
flenrs.  Là,  aussi  bien  que  dans  les  marais  du  Sertâo  de 
Minas,  s'élève  majestueusement  l'élégant  6or%  (Mattrilia 
vimfera,  Hart.)  dont  l'imposante  immobilité  est  si  bien  ea 
harmonie  avec  le  calme  du  désert  (4). 

S  IV.  Climat;  $alitbrité. 


L'umée  purugée  ea  deux  saisons.  —  £ut  de  l'atmosphère  dn  37  mii  (i 
i  septembre.  —  Les  miUdieB  les  pins  commiuies. 


Comme  dans  l'intérieur  de  la  province  des  Mines,  l'an- 
née se  partage  &  Goyai  en  deux  saisons  parfaitement  dis- 
tinctes; celle  des  pluies  qui  commence  en  septembre,  celle 
de  la  sécheresse  qui  commence  en  avril. 

J'ai  passé  un  peu  plus  de  trois  mois  à  parcourir  le  midi 
de  cette  province,  depuis  le  27  de  mai  jusqu'au  5  de  sep- 
tembre ;  dans  tout  cet  intervalle ,  il  ne  tomba  pas  une  seule 
goutte  d'eau;  le  thermomètre  marquait,  généralement,  i 
5  heures  du  soir,  de  20  à  26  degrés  R.,  et,  au  lever  du  so- 
leil, il  variait  de  3  degrés  à  il  degrés  et  demi  A  peu  prés 
jusqu'au  32  dumoisd'aoi^t,  le  ciel  resta  sans  nuages  et  du 
plus  bel  azur;  la  sécheresse  était  extrême,  l'herbe  des 
champs  était  brûlée  ;  dans  le  cours  de  la  journée ,  une  cha- 
leur excessive  se  faisait  sentir ,  mais ,  sur  le  soir ,  une  brise 
délicieuse  venait  rafraîchir  l'atmosphère.  Vers  le  iO  du 

(I)  J'ai  décrit  ce  beau  Palmier  dans  ma  premiirfrêkUiim'yoX.  II, 


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3M  V0TA6B  AUX  SODRGES 

mois  4*11061,  lorsque  j'étais  encore  prèi  du  village  de  Mela- 
ponte  (par  1S*  SO"),  la  brise  commença  à  se  faire  sentir 
pendant  toute  la  durée  dn  jour ,  et  l'oo  m'assura ,  dana  le 

pays,  que  le  même  vmt  soulRait,  ehaqoe  année,  àpeuprès 
depuis  la  fin  de  juillet  jusqu'à  la  saison  des  pluies.  Le  3S  dn 
mois  d'août,  tandis  que  jeparconrais  les  environs  du  vil- 
lage de  Santa  Gniz,  situé  par  17*  M',  le  ciel  perdit  te  bril- 
lant éclat  que  j'avais  admiré  tant  de  fois;  alors  il  offrait 
&  peu  près  ces  teintes  qu'il  a  en  France  au  commencement 
d'une  belle  matinée  d'automne;  k  la  vérité,  on  ne  voyait 
point  de  nuages,  mais  l'atmosphère  était  chargée  de  va- 
peurs qui  dérobaient  la  vue  des  objets  éloignés  :  si,  vers 
midi ,  le  temps  s'écleircissait  un  peu,  bientAt  se  formait  un 
nouveau  brouillard,  et,  depuis  quatre  heures  jusqu'à  la  fin 
du  jour,  le  disque  du  soleil ,  d'un  rouge  foncé,  pouvait  tstn 
regardé  fixement.  Suivent  les  habitants  du  pays,  ce  chan- 
gement atmosphérique  devait  être  considéré  comme  le  pré- 
curseur des  pluies  ;  cependant  elles  ne  commencèrent 
qu'an  mois  plus  tard,  lorsque  je  n'étais  plus  dans  la  pro- 
vince de  Goyaz. 

Les  maladies  les  plus  communes  dans  la  partie  méri- 
dionale de  cette  province  sont  la  syphilis,  l'hydropisie  et 
l'espèce  d'éléphantîasis  que  les  Brésiliens  appellent  tnor^ 
fea  (1).  Cependant,  malgré  les  longues  et  excessives  séche- 
resses dont  j'ai  parlé  et  les  interminables  pluies  qui  leur 
succèdent  pour  faire  place  à  d'autres  sécheresses ,  ce  pays 
ne  saurait  être  considéré  comme  insalubre,  et  il  te  devien- 
dra moins  encore  lorsque  par  des  travaux  on  aura  assaini 
'les  lieux  marécageux. 

<l)  Tojci  mon  Vofoge  «latu  le*  proMnen  d*  aïo  d*  Jmuir»,  «le., 
voi.  1.185.  Mil,  370. 


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Ml  UO  DE  s.  FUNCISCO. 


S  V.   PoptiIolMMt. 


DifBeollés  d'avoir  des  reoMigiiemgDts  eiacte  sar  )■  popaUiîoD  de  Goju. 
—  Chiflres  indiquas  par  divers  écrivains  ;  celui  qgi  a  été  commnniqaé 
k  Tantcar.  — Résultats  de  ces  chiffre».  —  Canses  qui  s'oppoairent, 
pendant  on  certain  temps,  t  nu  aoeToisMment  de  pc^mlation.  —  Les 
choses  reprennent  lenr  conra  Daturel.  —  Comparaison  du  chiffre  de  la 
population  de  Goyai  avec  celui  de  la  population  de  Minas ,  d'Espirito 
Santo,  eteosnlte  de  la  France.  —  Moins  d'augmoitatioD  dans  le  i>om- 
bre  des  blancs  qne  dans  crini  de*  noirs  et  des  malltres  libres.  —  Om 
nombre  des  esclaves.  —  Kapport  numérique  des  deux  sexes.  —  Non- 
bre  des  Indiens.  —  Renonvellement  de  la  chasse  aux  indigènes. 


On  D'est  poiat  d'accord  sur  la  popalation  qui  s'est  ré- 
pandue sur  le  territoire  de  cette  raste  provioce ,  et  l'on  sent, 
en  effet,  combien  un  recengemeot  exact  serait  difficile  i 
faire  dans  un  pays  aussi  désert  et  aussi  peu  civilisé.  Quel-  . 
ques  écrivains  ont  compris  les  Indiens  dans  le  chiffre  qu'ils 
ont  pnblié  ;  mais  c'est  seulement  au  hasard  qu'on  a  pu  in- 
diquer le  nombre  des  indigènes,  car  une  partie  d'entre  eux 
n'est  point  soumise  à  l'autorité  brésilienne. 

Suivant  Luiz  Antonio  da  Sîlva  e  Sousa,  la  population  de 
la  province  de  Goyaz  s'élevait,  en  1804,  h  30,13S  indivi- 
dus, dont  7,275  blancs,  H,4i7  nègres  esclaves  et  7,868 
négresses  également  privées  de  la  liberté.  Le  journal  bré- 
silien O  patnota  admet,  pour  les  années  1808  et  1809, 
50,365  individos  sur  lesquels  il  compte  6,930  blancs  et 
20,037  esclaves  (I).  A  peine  quelques  années  plus  tard, 

(1)  Pou,  Rtim^illt.  —  L'mtMiT  aMeaaBd,  à  quelques  lignes  de 
l'eodroit  où  il  cite  le  chiffre  de  50,at»,  iodiqm  H,S60  ;  mtis  il  est  évi- 
dent que  ce  dernier  nombre  est  erroné,  car  ce  n'est  pas  celui  qui  résulta 


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3a«  VOTiOE  AUX  SODSGES 

Fizarro,  s' appuyant  sur  des  documents  ofBciels,  bisail 
monter  la  population  de  GoyazÀ53,4ââ  Ames  (1).  En  181 9, 
lorsque  j'étais  dans  le  pays ,  on  la  portait  h  80,000  indivi- 
dus sur  lesquels  il  y  avait,  disait-on,  environ  8,000  blancs 
et  27,000  esclaves.  Enfin,  d'après  le  projet  de  constitution 
proposé  le50  ao(kt  1823,  le  major Schsffer  l'indique  comme 
8* élevant  à  ISO.OOOâmes  (3). 

Si  tous  ces  chiffres  étaient  également  exacts,  la  popula- 
tion de  Goyaz.  qui  n'aurait  augmenté  que  de  250  indivi- 
dus de  1804  à  1809,  se  serait  accrue  à  peu  près  des  4  sep- 
tièmes de  1809  è  1819,  et  ensuite  de  près  de  moitié,  de 
1819  à  1823  :  de  tels  accroissements  sont  évidemment  im- 
possibles ;  donc  on  peut  soupçonner,  d'un  cAté,  que,  en 
1804  et  1809,  la  crainte  du  rétablissement  de  la  capita- 
tion  aura  fait  faire  aux  propriétaires  recensés  des  déclara- 
tions inférieures  à  la  vérité  ;  d'un  autre  cAté,  il  faut  néces- 
sairement croire  que  le  nombre  indiqué  par  ScbœfTer  a  été 
singulièrement  grossi,  soif  par  des  motifs  politiques,  sott 
par  une  vanité  puérile  ;  enfin  il  est  vraisemblable  que, 
dans  l'évaluation  qui  m'a  été  communiquée ,  lors  de  mon 

de  l'additioD  des  somiDes  partielles  doDt  on  le  forme  :  d'ailleurs  c'est 
sur  50,363  et  doq  sur  54,500  que  le  mtme  écriTiio  éublit  )a  comparû- 
MD  qa'il  fait  des  chiiTres  da  Palriola  arec  ceux  des  étais  de  L.  A.  da 
Silva  e  Sousa  pour  1804.  11  y  a  encore  pins  de  négligence  dans  l'indica- 
tion dn  nombre  de  feni  empraaté  aai  deux  auteurs  ;  ainsi  tl  D'est  per- 
sonne qui  ne  seule  que,  poar  50,135  iodividas,  il  ne  ponrait  j  avoir 
Sl.STO  maisons.  Les  détails  des  étaU  empruntés  par  Pohl  k  L.  A.  da  Silva 
e  Sonsa  et  an  Palriola  sont  aussi  trop  peu  pn'cis  pour  que  j'aie  pu  en 
hire  usage. 

(1)  Mem.  hitt,,  IX,  182.  On  voit,  par  cette  citation  eiacte,  qu'au  a  in- 
duit H.  Hartias  eu  erreur,  quand  ou  loi  a  dll  que  Piiarro  Taisait  mouler 
i  37,250  Imea  la  population  de  Gojai. 

(3)  Brtu..  î»5. 


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ou  MO  BE  S.  FIANCaSCO.  3ST 

voyage,  on  a  porté  beaucoup  trop  haut  le  nombre  des  es- 
claves, peut-^tre  pour  ue  pas  tomber  dans  le  défaut  des 
évaluations  plus  anciennes  qui ,  sans  doute,  étaient  Uop 
faibles. 

Un  état  de  population  dont  je  n'ai  pas  encore  parlé  et  qui 
semble  mériter  plus  de  confiance  que  tous  les  autres,  parce 
qu'il  est  plus  conforme  à  la  nature  des  choses,  est  celui  qu'a 
publié,  pour  l'année  1824,  M.  da  Cuaha  Mattos,  ancien 
gouverneiumilitaire  de  ta  province  (<)iovemadord(W  omku]; 
je  le  traduis  ici  d'autant  plus  volontiers  qu'il  se  rapporte 
A  une  époque  extrêmement  rapprochée  de  celle  de  mon 
voyage ,  et  que ,  de  1819  à  1834 ,  il  est  impossible  qu'il  y 
ait  eu  aucun  changement  notable. 


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Il  II   : 


5- 
1^ 


(1)  Le  (eite  originil ,  qai  porte  portoat  hommt  et  nutthtreê  (bommcs, 
femnies),  m'iTait  fait  croire  un  inatant  que  les  eohiDts  D'éUiont  pas  coid- 
}tria  dans  cet  état  de  popalation  ;  mais  j'ai  été  détrompé  par  mw  titre  ainsi 
coDïu  :  £m  o  anno  de  1824  exiiHàa  ot  Fogot  t  Àlona*  ipM  m  wpiMi. 
Il  est  «Tidenl,  c«  me  semble,  que  le  mot  .lliiuu  (imes)oompc«iid  twu 
les  iDdividos  de  Dolre  espèce,  qoels  qoe  soient  lear  seie  et  leur  ûgt. 


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DU  UO  Dfe  S.  nURGISCO.  sw 

Le  Dombre  total  Indiqué  Uà  n'offre  pas  une  augmenta- 
tioD  de  beaacoup  plus  de  1  cinquième  sur  le  chiffre  de 
l'aDiiéelSOé;  malfl  Pdhl  était  ri  loin  de  croire  à  un  accrois- 
sèment  dans  la  population  de  Goysz,  qu'il  cite  le  deml^ 
chiRîre  comme  s'élant  encore  reproduit  en  1819  (1).  U  est 
incontestable  qa'il  y  eut  un  moment  où  la  population  de 
la  prorioce  qui  noua  occupe  dut  nécessairement  subir- une 
diminution  soisïble,  celui  où  les  minières  commencèrent  k 
s'épuiser.  Une  foule  de  blancs,  des  Européens  surtout, 
étaient  venus  dans  le  pa^s  ponr  s'y  enrichir  ;  ils  se  retirè- 
rent aussitôt  qu'ils  ne  purent  remplir  ce  but,  et  ne  Rirent 
pirint  remplacés  ;  d'autres  furent. surpris  par  la  mort  avant 
d'avoir  pu  retourner  dans  leur  patrie,  mais,  conservant  tou- 
jours l'espérance  de  la  revoir,  ils  n'avaient  point  formé 
d'établissement  fixe,  ne  s'étaient  pas  mariés  et  ne  laissèrent 
personne  après  eux.  La  diminution  fut  plus  sensible  encore 
parmi  les  noirs.  Vers  le  milieu  du  siècle  dernier,  il  y  eut  i 
Goyaz  jusqu'à  54,800  esclaves  employés  k  l'extraction  de 
l'or  (â)  ;  mais  on  ne  disait  point  venir  de  négresses  dans  la 
même  proportion ,  parce  que  le  service  des  mines  ne  con- 
vient pas  aux  femmes  ;  les  hommes  mouraient  donc .  pour 
ta  plupart,  sans  postérité,  et  souvait  après  avoir  hAté  la  fin 
de  leur  existence  par  nu  libertinage  énervant.  Lorsque  en- 

(1)  IMte,  I,  SI7,  B7S. 

(2)  Oa  coniutt  m  chiffre  pu  le  maiiUiit  de  l'impM  ippelf  eapUaUon 
{eapilaçào)  dont  j'ai  parlé  ailleurs ,  et  qui  ■  été  supprimé  il  j  a  déjà 
loBftcsipa  (Toyei  Mur.,  Heiie,  U ,  WT).  SnhuitH.  daCiuiht  Kaitoa,  il  y 
annit  eu  jadia  ptaa  de  ceal  nilk  taàmm  emplojéa  i  J'eipMttfloii  Am 
iiiiiiiiM9de807u(/Kii.,  n,SlS);  inaiaM  itunbTeeat  tellement  eon»< 
dérable  qn'îl  est  «sncile  de  le  oomidénr  autrenwDt  que  coiame  me 
aorte  4e  Bffnre  deetinM  k  Mre  reaaortir  twite  IlmporUnee  des  aoeiens 
trarani  des  misears  gojaiiais. 


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380  VOYAGE  AUX  SOUBCES 

suite  arriva  l'époque  de  la  décadence  etde  la  misère,  on 
ne  Gt  presque  plus  d'acbate,  et  les  états  de  Luii  Antonio 
daSilvae  Sousa,  cités  plus  haut,  montrent  qae,j^aas  l'es- 
pace d'uD  demi-siècle,  le  nombre  des  esclaves  du  sexe  mas- 
culin avait  diminué  des  deux  tiers. 

Cependant  il  s'était  formé  une  population  permanente 
composée  de  blancs  que  diverses  circonstances  avaient  atta- 
cltés  au  pays,  et  d'un  nombre  bien  plus  considérable  de 
métis  qui  n'avaient  jamais  pu  songer  h  en  sortir;  les  émi- 
grations eurent  un  terme  et  les  choses  prirent  à  peu  près 
leur  cours  naturel.  Si  l'habitude  du  concubinage,  que  les 
premiers  colons  avaient  fait  passer  dans  les  mœurs,  nuit 
aux  pn^rès  de  la  population,  ils  sont ,  d'un  autre  cdté,  fa- 
vorisés par  un  climat  généralement  salubre  et  par  la  fécon- 
dité des  femmes,  qui  ne  peut  pas  être,  à  tioyaz,  moins 
grande  que  dans  les  Mines.  Sur  la  vaste  paroisse  de  Santa 
Luzia ,  on  ne  comptait  annuellement ,  à  l'époque  de  mon 
voyi^e,  que  quarante  décès  sur  cent  et  tant  de  naissan- 
ces (1).  Toutes  les  parties  de  la  province  de  Goyaz  ne  parti- 
cipent pas,  sans  doute,  aux  avantages  dont  jouissait  la  pa- 
roisse de  Santa  Luzia,  celui  d'une  incontestable  salubrité, 
celui  plus  grand  encore  d'6tre  dirigée  par  un  pasteur  ver- 
tueux dont  les  discours  et  les  exemples  excitaient  les  colons 
au  travail  et  qui  faisait  tous  ses  efforts  pour  les  amener  k 
ne  contracter  que  des  unions  légitimes  ;  entendant  il  serait 


(I)  Je  criMB  ^M  le*  chiffre*  indiqute  ici  mirilcat  umU«  la  ceufitncr 
qne  l'oa  peut  Accorder  aui  éUU  da  popaUtiM  faits  m  Brésil ,  et  paul- 
ttre  eu  mériteot-iU  ploa  qne  U  plupart  d'cnin  mi-,  mais  je  dois  ^ouut 
que  M .  d'Eacbwege  donne  de  uMmiums  raiaoos  pMr  faire  peuer  que . 
dans  IX»  étata,  le  oombre  daa  dicèa  rwte  gtaéralenaot  au-daa>ons  de  U 


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DU  RIO  DE  S.  nUNClSGO.  S31 

absolument  impossible  d''admettre  que,  h  l'époque  même 
où  S.  Luzia  éprouvait  dans  sa  population  ud  accroissement 
aussi  notable,  il  y  eût  diminution  dans  celle  de  toutes  les 
autres. 

Quoi  qu'il  en  soit,  malgré  l'extrême  incertitude  où  nous 
sommes  relativement  au  nombre  exact  des  habitants  de  la 
province  de  Goyaz,  il  est  clair  que,  proportion  gardée,  cette 
province  est  infiniment  moins  peu)dée  que  les  provinces  de 
Minas  Geraes  et  d'Espirîto  Santo,  qui  pourtant  le  sont  si 
peu  par  rapport  à  l'Europe  (1);  il  est  clair  encore  que ,  sur 
une  surface  qui  d'  est  certainement  pas  moindre  que  cel  le  de 
la  France,  il  n'y  avait  pas,  en  i819 ,  la  quatre  cent  vingt- 
cinquième  partie  de  la  population  de  notre  pays ,  ou  bien, 
si  l'on  aime  mieux,  dans  une  étendue  où,  terme  moyen,  il 
y  a,  en  France ,  425  individus ,  il  y  en  aurait  à  peine  eu  un 
seul  i  Goyai.  Je  base  cette  comparaison  sur  le  chiffre  cer- 
tainement très-eiagéré  de  80,000  qui  m'a  été  communi- 
qué, comme  je  l'ai  dit,  dans  le  cours  de  mon  voyage;  que 
serait-ce  si  je  l'établissais  sur  celui  de  Gi.^iS,  indiqué 
par  da  Cunha  Mattosl 

Les  détails  de  l'état  de  population  publié  par  cet  auteur, 
quoiqu'  ils  ne  soient  point  parfaitement  complets,  pourront 
cependant  nous  fournir  quelques  réenltats  assez  importants. 

1'  Le  nombre  des  blancs  ne  formait,  en  1824,  que  le 
sixième  environ  de  la  population  totale  de  la  province  de 
Goyaz ,  tandis  que ,  dans  celle  des  Mines ,  il  y  avait ,  vers  la 
même  époque,  presque  un  quart  de  blancs,  différence  qui 


(1)  Tojez,  poDr  la  popalttîon  de  Minas  Gcraeô  et  d'Espirilo  Saoto,  ce 
que  j'ii  ^rit  dus  le  rodage  âatu  l€t  proofncef  de  Rio  de  Janeiro,  etc., 
vol.  1 ,  80,  et  dus  le  Vof/age  dam  le  dittrirt  de$  BUananlt,  toI.  I ,  itu. 


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U<  TOYAOE  UJX  SOmCES 

s'eiiplfqufl  par  la  facilité  de  communicatloiu  de  NiiMS  avec 

la  odte  et  l'éloigoetnent  beaucoup  moindre  de  ce  dernier 

pays. 

2*  La  comparaison  des  chiffres  admis  parMattos  avec  ceui 
des  années  1804  et  1809  montrerait  qne  les  progrès  de  la 
population  se  sont  fait  beauconp  moins  sentir  parmi  tes 
blancs  qne  cbes  les  noirs  ti,  les  mulâtres  libres ,  ce  qui  ten- 
drait i  prouver ,  comme  tout  me  porte  i  le  croire ,  que  le 
climat  de  l'Amérique  tropicale  convient  mieui  aax  hmnmes 
de  coolenr  qa'à  la  race  caucasique. 

3*  Le  chiffre  des  esclaves  pour  1834,  comparé  avec  celui 
de  1609,  indiquerait  une  diminution  qui  n'irait  pas  k  moins 
de  la  moitié  ;  mais  cette  diminution  n'a  rien  qui  doive  sur- 
prendre. Il  y  avait  Aé^k  longtemps,  à  l'époque  de  mon 
voyage,  qu'on  n'amenait  plus,  comme  autrefois,  des  con- 
vois de  nègres  africains  dans  la  province  de  Goyez  ;  il  ne 
pouvait  même  plus  en  venir,  car  il  aurait  fallu  que,  après 
avoir  payé  ces  hommes  au  comptant,  à  Bahia  ou  à  Rio  de 
Janeiro,  les  négociants  les  revendissent  à  des  termes  trèa- 
éloignés  et  s'exposassent  i  ne  jamais  rentrer  dans  leurs 
fonds.  Si ,  par  hasard ,  il  arrivait  k  Goyai  quelques  nègres 
de  la  céte  d'Afrique,  c'étaient  des  individus  isolés,  achetés 
par  des  personnes  que  leurs  «foires  avaient  attirées  k  Rio  de 
Janeiro.  Il  n'y  avait  plos  guère,  dans  le  pays,  que  des 
esclaves  créoles,  noirs  ou  mulAtres,  nés  pour  la  plupart 
d'anions  passagères  et  illégitimes.  Jusqu'alors,  les  Brési- 
liens, en  général ,  avaient  malheureosement  peu  songé  k 
marier  leurs  esclaves,  et  conunent  y  auraient  pensé  les 
Goyanais  qui,  eux-mêmes,  vivaient  dans  le  concubinage I 

Si  les  chiffres  publiés  par  da  Cunha  Maltos,  pour  1834, 
nous  ont  fourni  quelques  données  utiles,  ils  m'en  laissent 


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DU  BIO  DE  9.  mUfCISCO.  333 

dérirerd'aatresencore  :  ainsi  iisne  aous  apprennent  rien  sur 
le  rapport  numérique  des  dens  seses  aui  différents  Ages  de 
la  vie.  Je  Bais  cependant  que,  à  l'époque  de  mon  voyage,  le 
nombre  des  jeunes  gens  était  infinint^t  moindre  sur  la  pa- 
roisse de  Santa  Luzia,  k  Villa  Boa  et  dans  tous  les  villages 
du  midi  de  la  province,  que  cdui  des  jeunes  6lles,  ce  que 
confirme,  eu  reste,  le  tableau  spécial  que  PohI  a  donné  pour 
l'année  1812  de  la  population  de  Santa  Lozia  (Reise, 

I,  seo). 

La  province  de  Gojat  était  une  de  celles  où,  à  l'époque 
de  mon  voyage,  il  y  avait  encore  le  plus  d'Indiens  ;  la  popu- 
lation portugaise  qui  s'était  jetée  sur  cette  province  n'avait 
jamais  été  assez  forte  pourles  faire  disparaître  tous.  A  grands 
frais,  on  en  avait  réuni  un  certain  nombre  dans  des  aideat; 
les  autres  vivaient  entièrement  sauvages  dans  les  bois  et  les 
lieux  les  plus  déserts.  D'après  les  lois  portugaises,  tous  de- 
vaient être  libres  comme  les  blancs  eux-mêmes  ;  mais,  de- 
puis peu  d'années,  ud  décret  barbare,  rendu  sous  le  mi- 
nistère da  comte  de  Linhares,  avait  fhit  renouveler  à  Goyaz 
les  anciennes  chasses  aux  Indiens.  Ce  décret  permettait  de 
réduire  en  esclavage,  pour  dix  ans,  ceux  de  ces  infortunés 
qui  seraient  pris  les  armes  k  la  main.  On  prétendit  alors 
que  tous  ceux  qu'on  saisissait  étalent  armés,  et  réellement 
ces  honmies  le  sont  presque  toujours,  parce  que  leurs  armes 
seules  assurent  l^r  subsistance.  De  oe  qu'on  pouvait  les 
rendre  esclaves,  on  avait  concln  que  l'on  pouvait  les  ven- 
dre, et  U  s'était  établi  un  commerce  d'Indiens  entre  la  pro- 
vincedeGoyazet  celle  du  Paré.  Fbbhando  DsLâAoo  Fbbise 
DC  CAsriLHO,  qui  gouvernait  tioyaz  à  l'^Mqne  de  mon 
voyage,  s'était  entendu  avec  le  gouverneur  du  Para,  afin 
d'arrêter,  autant  qu'il  était  possible,  ce  commerce  égale- 


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334  VOYAGE  AUX  SOURCES 

mentïMlieus  et  illégal.  Il  avait  aussi  écrit  au  ministère  pour 
l'eogagerA  rappuler  le  décret  du  comte  de  Liohares;  mais 
le  gouvernement  central  s'iaquiétait  peu  des  Indiens  de 
fîoyax  et  n'avait  fait  aucune  réponse  (1). 

5  VI.  Administration  générale. 

La  prorince  de  Goju  diTisfe  ta  deni  tomareat.—  CapiUinM  géoénu  ; 
leiir  aotorité.  —  Le  goBTememeDt  central  étranger  t  ce  qui  M  pasait 
dans  les  proTiDces.  Ud  exemple  de  «m  ignorance. 

Pendant  longtemps,  la  province  de  Goyaz  n'eut  tout  en- 
tière qu'un  owidor,  et,  par  conséquent,  ne  forma  qu'une 
comarca  qui  comprenait  plusieurs  justices  [julgaâog)  (8). 

(1)  Je  n'ai  pas  cru  devoir  citer  dans  ce  paragraphe  les  chj&es  beau- 
coup trop  vagues  indiqués  par  Antonio  Rodrignei  Veloso  de  Oliveira, 
dans  les  AtMoti  Fhàminenêet,  pour  la  population  de  Goju,  et ,  par  une 
raison  semblable ,  je  n'ai  &il  non  plus  aucune  mention  de  ceux  qui  ont 
été  admis  par  notre  saranl  marin,  M.  de  Prejcinet  (Vouait  dt  rvranU). 
Dans  un  livre  imprimé  en  1845  {Sketehei  ofreiidtnee  in  Bratil,  I, 
350),  M.  Eidder  porte  k  97,592  individus  la  population  de  Gojai.  Si  ce 
chibe  était  eiact  pour  1M9,  et  que  celui  que  j'ai  indiqué  pour  1819  le 
nt  également ,  il  en  résulterait  qu'il  y  a  eu,  pendant  un  quart  de  siicle, 
une  augmeatelion  de  près  d'un  qnart  dans  la  popnlatiwi  de  cette  pro- 
vince :  mais  H.  Kidder  ne  dit  pas  ï  quelle  année  se  rapporte  son  indica- 
tion: il  ajoute  même,  et  sans  doute  arec  beaucoup  de  raison,  que  le* 
rapports  ministériels  et  pronneiani  n'ont  d'autres  rondements  que  des 
coDJectures  et  les  états  vagues  de  ceriaines  paroisses. 

(!)  Avant  le  révolution  qui  a  changé  le  gouvernement  du  Brésil ,  cM 
empire  était  partagé  en  prorioces  de  premier  rang  on  capitaineries  (ea- 
|ttM»i(U)  M  en  provinces  de  second  ordre  (provfncfo*).  LespremièMs 
se  divisaient,  pour  la  plupart,  en  eonareat,  où  résidait  nn  OHeidor, 
magistratquiétailà  laroisjngeetadmiDistrateor.  Les  frmiof  étaient  les 
divisiwu  des  eotnarrat.  Les  julga4ot  représentaient  ces  divisions  dans 


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On  sentit  enân  qu'un  homme  seul  était  incapable  de  main- 
tenir le  bon  ordre  dans  un  pays  aussi  ¥aste,  de  rendre  k 
tous  les  habitants  le  jastice  en  seconde  instance,  et  de  sur- 
reiiler  les  juges  ordinaires  qui,  choisis  parmi  les  colons 
eux-iuèmes  et  participant  à  leurs  vices,  étaient  souvrat  les 
premiers  à  violer  les  lois.  Le  gouvernement  rendit  donc , 
en  1809,  un  décret  par  lequel  la  province  Tut  divisée  en 
deux  eomarcas  :  celle  du  sud  [eomarca  do  ml) ,  qui  com- 
prend (1819}  les  six  justice?  de  Villa  Boa,  Crixâ,  Ptlar, 
Meiaponte,  SarUa  Luzia  et  Santa  Cruz  ;  celle  du  nord  (eo- 
marca do  norte) ,  formée  des  huit  justices  de  Porto  Real , 
Nalividade,  Conceiçao,  Arraîas,  S.  Felit,  Caimkante, 
Flores  et  Trahiras  (1  ) .  Le  chef-iieu  de  la  première  est  Villa 
Boa,  capitale  de  toute  la  province  :  celui  de  la  seconde  était 
originairanent  S.  Jmo  da»  duag  Barrât,  sntué  au  confluent 
de  l'Aragnaya  et  du  Tocantins  ;  mais,  comme  les  barques 
arrivaient  difficilement  jusqu'à  cet  endroit,  il  (ut  décrété, 
en  1814,  qu'une  ville  nouvelle  serait  fondée  au  lieu  appelé 
S.  Joào  da  Palma,  et  qu'elle  deviendrait  la  résidence  de 
Vomiidor  de  la  comarea. 

La  principale  autorité  de  la  province  ou,  pour  parler 
d'une  manière  plus  exacte,  la  capitainerie  de  Goyax  était, 
comme  à  Minas,  i  8.  Paul  et  ailleurs,  le  gouverneur  ou 
capitaine  général  [capitao  gênerai). 

Sous  le  système  colonial ,  les  capitaines  généraux  jouis- 
les  pays  les  moins  peuplés  et  o'aTaieDl  jimais,  ponr  magistrats,  que  des 
Juge*  ordinairei  (juitei  ordinarioi) ,  ilas  par  le  peuple,  tandis  qu'il 
poavaii  j  avoir  k  la  ttu  d'an  termo  ou  ud  jitix  de  fora,  Dommé  et  jMjé 
parle  roi,  oaieaxjitiwet  or dinariitiivoj ex  Voyage daiu  lei  province» 
de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  I,  359et  soiv.:  Il,  fOS). 

(t)  Ed  1832,  les  choses D'avaieut  pas encere  duDg^ :  pluBUrd,la  pto- 
rinco  de  Goyai  a  été  divisée  en  4  eomarcai. 


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sas  voTiM  ADx  soimces 

saient  île  l'autorité  la  plas  absolue  ;  ma»,  lonqneJean  VI  eut 
fixé  sa  cour  à  Rio  d«  Janeiro,  leor  despotisme  codouI  ei^ 
des  bornes  L'opprimé  pouvait  aller  se  Jeter  aux  pieds  de  sod 
souverain,  et  les  gouverneurs  a'auraieot  plus  ϑ  entre- 
prendre rien  de  très-important  sans  en  rérérer  aux  mi- 
nistres. Mais  il  arrivait  trop  souvent,  ou  qvttm  ne  leur  ré- 
pondait pas,  soit  par  ignorance,  soit  par  une  noDchalance 
coupable,  ou  qu'on  leur  donnait  des  ordres  qui  n'étaient 
point  en  hannooie  arec  les  besoins  du  pays  et  set  res- 
sources. 

Un  des  plus  grands  malheurs  qn'^mtuvèrent  les  Bré^ 
liens,  après  l'arrivée  de  ledr  roi  au  milieu  feux,  fut  d'Atre 
gouvernés  par  des  hommes  qui  ne  connaissaimt  nuJIemmt 
l'Amérique.  Parmi  les  ministres  qu'eut  Jean  VI,  k  Rio  de 
Janeiro,  il  se  trouva  des  hommes  éclairés,  nuis  c'^ait  en 
Portugal  qu'il»  s'étaient  formés  aux  affaires  ;  ils  n'avaient 
vu  du  Brésil  que  la  capitale,  et  ils  voulurent  appliquer  des 
idées  qui  ne  convenaient  qu'A  l'Europe  à  un  pays  qui  dif- 
fère entièrement  de  l'Europe.  Us  se  trompèrent  Clément 
sur  les  personnes  et  sur  les  choses  :  ils  crurent  le  pays  riche 
et  il  est  pauvre  ;  ils  crurent  ses  habitants  stupides,  et  ils 
sont  intelligents  et  susceptibles  de  tout  apprendre. 

Pendant  mon  séjour  i  Villa  Boa,  le  capitaine  général  de 
Goyaz  me  cita  un  exemple  très-récent  de  l'ignorance  des 
ministres.  Les  (rfflces  publics,  t^  que  ceux  de  greffiers  des 
oundora,  de  tabellions,  etc.,  se  mettaient,  è  Goyaz  comme 
i  Minas  (1),  tous  les  trois  ans,  à  l'enchère,  et,  eu  cas  de 
voyage  ou  de  maladie,  les  titulaires  étaient  remplacés  par 
des  adjudants  {adjudaatêt)  qui,  pendant  longtemps,  n'en- 

(1)  Vonaçe  dant  lu  provi»eâê  é*  Rio  d«  Jmn»iro,  etc.,  1 ,  301. 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  S3T 

rent  besoin  que  de  la  confirmation  du  capitaine  général 
pour exenm leur  emploi.  Tout  nouvellement,  le  ministère 
avait  prétendu  changer  cet  état  de  choses,  et  11  avait  fait 
rendre  un  décret  portant  qu'à  l'avenir  le  choix  des  adju- 
dants serait  directement  confirmé  par  le  roi.  Ce  décret  avait, 
sans  doute,  pour  but  de  centraliser  davantage  le  pouvoir  et 
de  diminuer  l'autorité  des  capitaines  généraux;  mais  on 
n'avait  nullement  songé  i  la  distance  qu'il  y  a  de  la  capi- 
tale à  Goyaz  ou  À  Matogrosso.  Il  est  évident  que  la  confir- 
niation  royale  sers  souvent  arrivée  dans  ces  provinces,  long- 
temps après  que  l'office  pour  lequel  on  l'avait  demandée 
sera  retourné  à  son  titulaire,  et  que,  dans  l'intervalle,  une 
foule  de  gens  auront  pu  mourir,  privées  des  moyens  de 
foire  leur  testament. 


S  Vn.  Fmancei. 


ComineDt  est  tompos^e  radniDîstntion  des  fliuDces.  —  Des  diverses 
sortes  d'tmpdts.  —  ChiOrrs  qui  montrent  avec  quelle  rapiditi'  la  pro- 
rince  de  Gojsz  i  perdn  m  première  splendeur. —  Recettes  cl  dépenses 
^gAlement  arriérées.  —  Goyu  obligé  d'abandonner  k  Matogrosso  une 
partie  de  ses  revenus.  —  Différence  entre  la  compani^on  des  prodoils 
du  quint  pendant  plasienrs  années  et  celle  des  revenas  des  droits 
d'entrée.  Les  droits  d'entrée  indiquent  ï  pen  près  la  valeur  des  îm- 
porlalions;  le  quint  n'indiqne  point  le  véritable  résultat  da  produit 
des  minières.  Hôtels  pour  la  foute  de  l'or.  Contrebande.  Erreur  dans 
laquelle  était  tombé  le  gonvemenr  Fernando  Delgado. 


Les  finances  de  la  province  de  Goyaz  sont  (1819),  comme 
celles  de  Minas,  de  S.  Paul,  etc.,  administrées  par  une 
junte  du  trésor  royal  [junta  da  fazmda  real)  dont  la  com- 


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33B  TOTAGE  AUX  SODItCES 

position  a  été  souvent  modifiée  [i]  et  dont  le  gouveroeur 
est  le  président.  On  ne  compte  pas  moins  de  onze  à  doaze 
employés  chargés,  sous  son  inspectioD,  de  mettre  les  écri- 
tures en  r^le;  et  cependant,  è  l'époque  de  mon  voyage, 
la  tenue  des  livres  était  fort  arriérée. 

Je  vais  indiquer  les  divers  impAts  que  les  labilaDts 
avaient  à  payer  en  1819  (2).  C'étaient 

i"  Un  droit  sur  les  marchandises  qui  entrent  dans  la  pro- 
vince (cfUroda*); 

2°  La  dtme  des  productions  du  sol  (dizimo»),  qui ,  par  un 
arrangement  conclu  jadis  entre  le  clergé  et  le  gouverne- 
ment, avait  passé  entre  les  mains  de  ce  dernier  [S); 

3*  Le  passage  des  rivières  affermé  par  l'adminirtraticH) 
[passagent  dot  rios)  ; 

4*  La  ferme  des  offices  (arranataçao  dos  offUsios)  ; 

5°  Un  droit  sur  la  vente  de  la  viande  fraîche  [carwt 
verdei); 

6°  Droits  de  vente  sur  les  immeubles  [décimai,  êelloi  e 
siza*]; 

7*  Le  quint  [quinio) ,  c'est-i-dire  le  cinquième  que  l'on 
prélève  sur  l'or  en  poudre  avant  de  le  mettre  en  lingot  (4); 

8*  Un  droit  desUné  au  payement  des  instituteurs  [eci- 
lectai); 

(f }  Il  M  têul  pu  B'^touner,  par  conBéqnent ,  que  Quai  porte  le  nom- 
bre des  membres  de  cetie  jonu  h  cinq ,  et  que  PohI  eo  compte  m\.  — 
H.  da  Cnnha  Mittosditqiie,  lajunbt  da  faimila  ajant  été  supprimée, 
OD  cHi,  de  1826  à  1836,  nn  iospecteur  de  U  trésorerie  (tfupvctor  da 
Ihetouraria)  (/Un.,  U,  339). 

(2)  POBL,  Retie,  I. 

(3)  To;ei  moa  7o%ag«  dan*  U*  ftrwitteet  de  Itiodt  Janeiro,  etc., 
I,  169;  II.  250. 

(4)  royale  dant  Iti  protHneei  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  i ,  338. 


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DU  no  DE  s.  PBANCISCO.  ug 

9*  13d  droit  mis  sur  les  boutiques  au  profit  de  la  banque 
de  Rio  de  JtDNro. 

Qoelq^ues  chifires  empruntés  au  docteur  PoM  (1)  mon- 
treront avec  quelle  promptitude  ce  pays,  si  riche  pendant 
qnelqaes  aunées ,  a  perdu  sa  splendeur  première,  k  mesure 
que  l'or  est  devenu  moins  commun  ou  plus  difBcile  k 
extraire.  Avant  1758,  les  entrées  produisaient,  tous  les 
trois  ans,  8  arrobes d'or; de  1763  à  1765,  elles  rendirent 
40,400,000reia{252,500f.);del765à  1774,  96,760,762 
reis  (604,754  t.  70  c.)  ;  de  1774  à  178â,  26,529,000  reis 
(165,806  f.  25  c);  de  1783  à  1788,  22,624,000  reis 
(141 ,400  f.)  ;  enfin ,  dans  ces  derniers  temps ,  elles  n'ont 
plus  produit  que  14,000,000  de  reis  (87,300  f.}. 

Je  tiens  du  greCBer  de  la  junte  du  trésor  royal  {e$crnâo 
da  juHta  da  faxenda  reall  que  les  dépenses  de  la  province 
s'élevaient,  annuellement,  à  plus  de  50  contoi  de  reis 
(512,500  f.)  Ce  magistrat  convenait  que  le  trésor  était  fort 
endetté,  et  il  ajoutait  qu'un  grand  nombre  de  créances  ne 
seraient  jamais  payées.  Il  disait  aussi  que  la  recette  n'était 
pas  moins  arriérée  que  la  d^nse,  ce  qui  prouve  combien 
il  y  avait  peu  d'argent  dans  le  pays  ;  et  cependant  cette  pro- 
vince, si  pauvre,  était  obligée  d'abandonner  une  partie  de 
ses  revenus  à  celle  de  Matogrosso,  qui  la  limite,  et  ^it  en- 
core plus  panvre  qu'elle  (2). 

Commeonradéjàvu(p.  315],  la  comparaison  des  produits 


(1)  R«ùt,[.  3b*. 

\iy  Ce  hit  en  I7M  que  l'on  coiomciKa  ï  obliger  li  pn)*iiice  de  Gofu 
de  pajer  i  celle  de  Hatogroaeo  nue  aubreiitiDii,  qui  Ait  d'abord  de 
513  mares  d'or  pris  snr  TimpAt  da  quint.  Eo  ITT9,  on  rédnJBil  cette  tob- 
Tcaiion  k  300  aitrcs  :  pniB ,  ea  1761 ,  an  j  ajouta  30  amM  de  rel*.  Ed 
lîSA,  l'augmentatioD  fntsnpprimëe,  et  od  en  TcTiutani;  300  oMm; 


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340  VOYAGE  AUX  SOURCES 

du  quint,  de  1 740  h  i830,  nous  fournit,  aussi  bien  que  celle 
des  revenus  des  droits  d'entréependant  le  mènie  temps,  une 
preuve  frappante  de  la  rapidité  avec  laquelle  la  province  de 
Goyaz  est  tombée  en  décadence.  Mais  ici  se  présente  une 
différence  sensible.  Le  chiflire  du  produit  des  entrées  indi- 
que réellement  la  quantité  de  marchandises  que  le  pays  a 
reçue  h  telle  ou  telle  époque,  parce  que  ces  marchandises, 
qui ,  ayant  un  volume  plus  ou  moins  considérable ,  ne  peu- 
vent arriver  qu'à  dos  de  mulets  et  par  caravanes,  ne  sup- 
porteraient pas  les  frais  qu'il  faudrait  faire  pour  les  intro- 
duire en  contrebande  ;  mais,  comme  on  va  le  voir,  il  n'en 
est  pas  de  même  de  la  poudre  d'or. 

Lorsque  sous  le  gouvernement  de  D.  Marcos  de  Noronha, 
comte  dos  Arcos,  la  capitation  fiit  aboHe  et  remplacée  par 
le  quint,  on  fonda,  enl750[1],  deux  hôtels  pour  la  fonte 
de  l'or  {casas  de  fundiçao],  l'un,  dit  du  sud  {do  *ul),  k  Villa 
Boa,  l'autre,  du  nord  (do  twrte),  àS.  Pelis.  Ce  dernier, 
après  avoir  été  d'abord  transporté  A  Cavalcante,  fut  sup- 
primé en  1807,  à  cause  des  dépenses  qu'il  nécessitait,  et, 
depuis  cette  époque,  il  n'y  en  eut  pfus  qu'un,  celui  de  Villa 
Boa  (2).  Comme  la  province  de  Goyaz  est  immense  et  ne  sau- 
rait être  gardée  que  sur  un  très-petit  nombre  de  points ,  il 
est  évidemment  très-facile  d' y  faire  la  contrebande  de  l' or  en 
poudre,  et  il  n'y  a  qu'un  scrupule  de  conscience  qui  puisse 

mais,  comme  le  quoi  arail  tlni  par  ne  plus  produire  celle  quantité  d'or, 
on  pril  le  parti,  après  l'arrÏTée  du  roi  au  Brésil,  d'appliquer  aui  dé- 
penses de  Malogrosso  le  montant  des  droite  perçus,  à  Gojai,  sur  les 
biene  immeubles  (dactntaa,  Hflo*  e  <<(a«)  (Pib.,  Mem.hitl.,  DE,  136). 

(1)  Pli.,  Mem.  hUt.,  W ,  336. 

(2)  J'ai  donné  ailleurs  de  très-longs  détails  sur  la  manière  dont  on 
fond  l'or  dans  les  cotoa  dt  {tmdiçao  (vof «  moh  fo^Oft  dont  U»  pr»- 
vi»ea  de  Rio  lie  Janeiro ,  «te.,  I). 


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DU  RIO  DB  S.  FRANCISCO.  Ml 

encore  engaf^er  quelque  personnes  k  se  soumettre  à  l'im- 
pAt.  Depuis  la  suppression  de  l'établissement  qu'il  avait 
formé  pour  la  fonte  À  S.  Pdis,  le  gouvernement  a  été  pres- 
que entièrement  frustré  du  quint  de  l'or  fourni  par  les  mi- 
nières de  la  Comarca  do  Korte.  Les  mineurs  de  celte  co- 
marca  sont,  en  effet,  escités  à  Eaire  la  contrebande,  non- 
seulement  par  les  bénéfices  qu'elle  leur  procure,  mais  en- 
core par  la  crainte  des  frais  et  des  lenteurs  qu'entraînerait 
le  long  voyage  de  chez  eux  Â  Villa  Boa. 

En  i818  ou  1849,  le  fisc  reçut  de  la  Comarca  do  Norte 
de  l'argent  monnayé,  et  non  de  l'or  en  poudre,  en  payement 
de  la  dtme  et  des  autres  impAts  :  le  gouverneur  Fernando  Del- 
gado  en  conclut  que  cette  province  faisait  un  commerce  con- 
sidérable avec  le  Paré,  province  limitrophe  et  maritime  où, 
jusqu'alor8,lesGoyanaisavaient  pénétré  difficilement;  mais 
des  personnes  bien  instruites  assuraient  que  cet  argent  était 
tout  simplement  le  résultat  des  échanges  frauduleux  que 
les  habitants  du  nord  faisaient  de  leur  or  en  poudre  avec 
les  négociants  de  Bahia  [Ij. 

(1)  Je  M  sais  en  quel  eut  sont  aajoiird'hiii  les  Goaacea  de  Goju; 
■nais,  pendant  les  premitrea  années  qui  baifitent  celle  où  je  voyageais 
dans  ce  pays ,  elles  se  dâtériorèrenl  encore.  En  ISS-t ,  les  revenus  ne 
s'ùlevËreol  qu'ï  31,(KK),[>00  reis.  tandis  qoe  tes  dispenses  moatèreoL  ■ 
53,080,333.  Pour  couvrir  le  déCcit ,  on  imagina  de  A-apper  une  quantité 
énorme  de  monnaie  de  cuivre ,  k  laquelle  on  donna  une  valeur  imagi- 
aaire  fort  exagérée.  •  L'homme  le  plus  ignorant,  dit  da  Cunlia  Mattos, 
aurait  compris  qu'il  i^tail  d'une  mauvaise  administration  de  répandre 
toute  cette  monnaie  ;  mais  on  n'avait  pas  d'autre  mojen  de  faire  face 
aux  dépenses  [Itin.,  II ,  31T)  »  C'est  une  bien  triste  ndcessil^  que  celle 
de  recourir  k  un  remède  qui ,  en  défluitivc,  augmente  encore  le  mal.  Le 
gouvernement  de  Gojaz  a  toujours  stcriiiË  l'avenir  au  pr^seul  ;  mais,  en 
agiMaot  liusi ,  on  Ruil  par  n'avoir  plus  rien  a  sacrifier. 


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VOYAGE  ACX  SOURCES 


S  VIII.  Résultats  de  ta  dtme. 


Les  produite  do  qatnt  et  ks  revenas  de  la  dîme  ont  dimioiié  dins  !■ 
même  proportion.  —  La  dtme ,  impAt  trte-onér«ai.  —  On  U  perçoit 
en  valeurs  métalItiiQeB.  —  Les  décimaleurs  rainent  les  colons.  — 
Ccai-ci,eiproprirs,  AticDtdans  les  déserLi  et  perdent  juaqa'ani  ju- 
ments de  la  civiliMiioa.  ^  Ce  que  fait  le  fisc  dans  les  caotont  où  per- 
sonne ne  veut  aflèrmer  la  dlme. —  La  culture  restreinte  p«r  cet  impAt. 


Si  l'on  ne  savait  quelle  est  la  positioD  géographique  de 
Goyaz  et  combien  les  transports  sont  difficiles  dans  l'inté- 
rieur de  rAmérique,  on  pourrait  s'imaginer  que  les  Goya- 
nais,  ne  tirant  plus  rien  de  leurs  minières,  ont  dirigé  tous 
leurs  efforts  vers  l'agriculture,  et  que  les  revenus  de  la 
dlme  ont  augmenté  à  mesure  que  ceui  du  quint  allaient 
en  diminuant.  Mais  il  n'en  a  pas  été  ainsi  ;  les  produits  de 
l'un  et  de  l'autre  impdt  se  sont  amoindris  à  peu  près  dans 
la  même  proportion.  La  dtme,  qui  a  fait  tant  de  mal  à  la 
province  de  Minas  [1],  a  été  bien  plus  funeste  encore  à  r^lle 
de  Goyaz.  Dans  un  pays  oîi  les  produits  de  la  terre  trou- 
vent un  débit  facile,  le  dixième  du  revenu  serait  un  impAt 
léger  ;  mais  cette  province  n'a,  pour  ainsi  dire,  aucun 
Gommerce,  ses  exportations  sont  insignifiantes,  et  en  beau- 
coup d'endroits  il  serait  impossible  de  rien  vendre. 

Si  le  gouvernement  percevait  les  dîmes  en  nature,  cet 
impAt  n'aurait  aucun  inconvénient;  mais>  comme  il  ne 
pourrait  rien  faire  du  maïs  ou  du  manioc  qu'on  lui  livre- 
rait, ît  exige  des  valeurs  métalliques;  et  comment  en  four- 

(1)  V«jeziDon  Voyage  dani  te*  provinctt  dt  Bio  d»  Janeiro,  Me., 
l,3tU;ll,44». 


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DU  RIO  l>£  S.  FIUNCIS€0.  343 

Diraient  des  hommes  qui  ne  peuvent  se  défaire  de  leur^ 
deurées? 

La  dime,  levée  en  argent,  serait  déjà,  pour  la  plupart  des 
Goyanaia,  une  charge  exorbitante;  elle  devient  tout  à  fait 
ruineuse  par  le  mode  de  perception  qui ,  comme  on  va  le 
voir,  permet  k  celui  qui  reçoit  l' impAt  de  l' élever  à  peii  près 
i  sa  guise. 

Comme  dans  les  Mines,  la  dlme  s'afierme  ici  tous  les  trois 
ans.  Le  décinuteur  [dizimeiro) ,  au  commencement  de  ces 
trois  années,  se  présente  (1819),  avec  un  expert,  chez  le 
colon  ;  il  estime  le  revenu  de  la  terre  beaucoup  au-dessus 
de  sa  valeur  véritable,  et  il  exige  du  cultivateur  qu'il  signe 
l'engagement  de  payer,  pendant  trois  ans,  le  dixième  de  la 
somme  évaluée.  A  la  vérité,  la  loi  donne  au  propriétaire  le 
droit  de  choisir  un  homme  qui  fasse  l'évaluation  des  pro- 
duits du  sol  conjointement  avec  celui  qui  a  la  confiance  du 
décimateur  ;  mais  cdui-ci  est  presque. toujours  un  homme 
riche,  soutenu  par  de  nombreux  amis  ;  il  se  présente  chez 
le  cultivateur  qui  vit  dans  l'isolement  et  la  pauvreté,  loin 
de  la  ville  ou  des  villages ,  qui  n'a  aucune  connaissance  des 
affaires,  aucun  protecteur,  aucun  appui.  La  seule  vue  du 
décimateur  répand  l'épouvante  dans  la  famille,  et,  dans  la 
crainte  de  plus  grands  maux,  on  se  soumet  à  toutes  s» 
exigences;  on  gagne  ainsi  un  peu  de  temps.  Cependant  lu 
triste  époijue  des  payements  arrive;  le  propriétaire,  n'ayant 
rien  vendu,  ne  saurait  satisfaire  son  créancier;  on  saisit  le 
peu  qu'il  possède,  et  il  quitte  sa  maison,  qui  bientôt  tombe 
en  ruines  (1). 

(1)  José  de  Almeicb  de  Vasconcellos  de  Sovenl  e  Ccrrtlha,  qui  prit 
le  gouveraemeat  de  Gojw  eo  1773,  s'était  déjà  tu  forc^,  dit  Piiarro,  de 
réprimer  les  «iolences  iuoulrâ  dta  diiimeiroi ,  qui  ne  teDdeient  »  rien 


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344  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Les  halHtaDte  de  cetle  contrée  n'ont  même  pas  la  res- 
source qui  s'offre  toujours  aux  Mioeiros  mécontents  de  leur 
sort,  cdle  de  changer  de  place,  avec  l'espoir  d'un  avenir 
meilleur.  Ces  derniers,  moius  pauvres,  sont  en  état  de  sup- 
porter les  frais  d'un  déplacement,  et,  en  allant  plus  loin , 
ils  trouvent  des  terres  neuves  dont  ils  peuvent  vendre  les 
produits.  Ceux  qui  se  sont  retirés  à  Minas  Novas  s'enri- 
ctiissent  par  la  culture  du  coton.  Les  colons  d'Araii  et  de 
Desemboque  (v.  plus  haut,  p.  345}  vendent  leurs  bestiaux  i 
des  marchands  qui  viennent  les  chercher  jusque  chez  eux  ; 
enfin  les  planteurs  de  Pomba  transportent  facilement  leurs 
denrées  jusqu'à  Rio  de  Janeiro.  Il  n'en  est  pas  de  m£me 
des  cultivateurs  goyanais;  en  revenant  sur  leurs  pas,  ils 
trouveraient  les  meilleurs  points  déjà  occupés;  en  allant 
plus  loin,  ils  empireraient  leur  sort,  puisqu'ils  auraient  en- 
core plus  de  peine  à  placer  leurs  denrées.  Ne  communi- 
quant point  les  uns  avec  les  autres,  éloignés  des  chefe-lieux 
de  paroisse  où  ils  pourraient  s'entretenir  encore  dans  quel- 
ques idées  de  morale  et  de  religion,  s'abandonnent  de  plus 
en  plus  à  cette  apathie  à  laquelle  les  invite  la  chaleur  du 
climat,  vivant  de  leur  chasse,  d'un  peu  de  laitage,  à  peine 
vêtus,  se  livrant  à  l'inceste  faute  de  trouver  d'autres  femmes 
que  celles  qui  les  entourent,  les  malheureux  campagnarde 
goyanais  finiront  par  apprendre  à  se  passer  même  de  ce 
strict  nécessaire  dont  la  recherche  rattache  encore  les 
hommes  à  la  vie  civilisée,  et,  à  l'état  de  choses  actuel  ne 

inoùis  qa'i  miner  la  provioce.  Didg  uu  mémoire  soumis  à  la  Becrt;tai- 
rerie  d'ÉUt,  le  detembargador  AnUiuia  Luti  de  Souu  Leal  mODlra, 
ajoute  le  même  lUlear,  que  la  dccadeuce  de  Goju  ^tait  due  ani  eicès 
et  à  11  cupidité  des  décJDialeurs  et  des  autres  fermiers  de  l'impAt  qui , 
daug  re  pajs  comme  dans  les  autres  prorinces,  s'enrichisseni  rapide- 
ment am  dCpcu»  du  peuple  et  eicilcut  les  plus  justes  plainteb. 


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DO  RIO  DE  S.  FIANCISGO.  H» 

s'améliore  pas  (1819),  cette  population,  issuedes  Portugais, 
tombera  nécessairement  dans  une  barbarie  à  peu  près  sem- 
blable &  celle  des  Indiens  eux-mêmes. 

U  y  a ,  en  beaucoup  d'endroits,  si  peu  d'argent  i  espérer 
des  colons  que  personne  ne  se  présente  pour  affermer  la 
dîme  et  les  autres  impAts.  Dans  ce  cas ,  la  junte  du  trésor 
royal  {junta  da  fazettda  real  )  les  bit  recouvrer  par  des 
administrateurs  qui  Tont  ce  service  sans  aucune  rétribution. 
Ainsi  il  ne  serait  pas  absolument  impossible  qu'après  avoir 
accablé  le  cultivateur  de  vexations,  après  avoir  détruit  plus 
d'habitations  que  n'eût  fait  une  armée  ennemie ,  le  fisc  fbt 
entièrement  obligé  de  renoncer  â  prélever  l'impdt. 

Outre  les  maux  dont  j'ai  tout  à  l'heure  esquissé  le  ta- 
bleau ,  la  nécessité  de  payer  la  dhne  en  valeurs  métalliques 
entraîne  encore  avec  elle  un  inconvénient  excessivement 
grave,  celui  de  restreindre  la  culture,  que  l'on  devrait  en- 
courager comme  le  seul  moyen  de  sauver  ce  pays.  Le  colon 
est  certain  qu'on  exigera  la  dtme  de  toutes  ses  récoltes; 
mais  il  s'en  faut  qu'il  le  soit  également  de  vendre  tout  ce 
qu'il  peut  recueillir  :  il  se  borne  donc  à  cultiver  autant 
qu'il  est  strictement  nécessaire  pour  sa  famille  et  un  débit 
bien  assuré.  Il  résulte  de  laque,  si,  par  hasard,  un  étran- 
ger se  présente  dans  le  pays,  il  a  souvent  de  la  peine  à  se 
procurer,  même  à  des  prix  élevés ,  les  denrées  les  plus  né- 
cessaires à  la  vie,  et  que,  dans  une  mauvaise  année  comme 
celle  où  je  voyageais,  l'agriculteur,  qui  n'a  songé  qu'à  ses 
besoins  ordinaires  et  ne  possède  point  d'argent,  est  réduit 
à  endurer  la  faim  ;  et  cela  se  passe  dans  une  contrée  où  par- 
tout il  y  a  des  terres  excellentes  et  sans  maître,  qui  nour- 
rirait saas  peine  20  millions  d'habitants  et  n'en  contient 
que  60  À  80,000! 


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VOYAGE  AUX  SOURCE:» 


§  IX.  Clergé;  instruction  pttblique. 


Le  bien  que  pourrait  faire  le  clergé  goitoais —  Boa  exemple  donné  par 
Jolo  Teiicira  Alvarei,  curédeSaota  Luiia.— Leseccléuisiiques  KOfs- 
nais ,  seuls  hommes  de  la  province  qal  possUent  qaelqaea  connns- 
MQcet,d'ailleiineDdeboriiileUHileslesrègle*. —  Eisioire  deTËflite 
de  Goju.  —  Ëcoles. 


En  rappelant  les  colons  autour  des  villages,  en  les  in- 
stmisant  de  leurs  devoirs,  en  ranimantdanslears  âmes  des 

sentiments  religieux  qui  ne  sont  qu'assoupis,  en  les  enga- 
geant à  contracter  des  unions  légitimes  et  à  fiiir  l'oisiveté, 
en  leur  enseignant  des  procédés  de  culture  moins  bar- 
bares que  ceux  qu'ils  suivent,  en  leur  montrant  que  cer- 
taines denrées  peuvent  être  exportées  de  leur  pays  avecquel- 
que  avantage,  le  clergé  goyanais  parviendrait  à  a^iblir  la 
fBcheuse  influence  d'une  administration  ignorante  et  dé- 
vastatrice. Telle  était  la  conduite  que  tenait ,  lors  de  mon 
voyage,  le  pasteur  respectable  (1)  d'une  des  paroisses,  beau- 
coup trop  étendues,  dont  se  compose  la  province  de  Goyaz  ; 
mais,  malheureusement,  son  exemple  n'était  suivi  peut- 
être  par  aucun  de  ses  confrères. 

Il  Je  vais  signaler,  ai-je  dit  ailleurs ,  des  abus  dont  le 
n  chrétien  aura  à  gémir;  mais  il  est  une  idée  élevée  qui 
«  doit  lui  servir  de  consolation.  Comment  ne  serait-il  pas 
«  soutenu  par  un  pouvoir  supérieur  le  vaisseau  qui ,  na- 
«  viguant  sur  une  mer  orageuse,  sous  la  conduite  de  pi- 

(fi  M.  Joâo  Teiirira  Alvarei,  coré  de  SanU  Luila,  doat  je  parlerai 
rlu:,  lard. 


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DD  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  U^ 

«  lotes  Diligents  ou  malhabiles ,  résiste  pourtant  aux 
«  plus  affreuses  tempêtes?  Les  torts  des  mioistres  de  la 
«  religion  n'appartiennent  point  à  elle,  et  il  est  utile  de 
«  (aire  connaître  ce  qui  est,  parce  que  la  publicité  oblige 
a  le  coupable  à  rougir,  et  qu'elle  excite  l'homme  de  bien 
«  à  chercher  un  remède  aux  abus.  » 

Les  ecclésiastiques  sont,  il  est  vrai,  les  seuls  hommes 
de  cette  province  qui  possèdent  quelques  connaissances  ; 
d'ailleurs  on  jfeut  dire  qu'ils  vivent  en  dehors  de  toutes  les 
règles,  négligeant  l'instruction  des  fidèles,  s' abandonnant 
&  l'oisiveté  ou  disant  le  commerce,  pratiquant  la  simonie, 
donnant  l'exemple  du  concubinage;  enfin  ne  connaissant 
guère  d'autre  devoir  que  celui  de  dire  une  messe  basse  tous 
les  dinunches  et  de  confesser  les  fidèles  au  temps  de  Pâ- 
ques, moyennant  la  rétribution  de  300  reis  (1  fi*.  87  c.) 
qu'on  leur  accorde  ici  comme  à  Minas  (1). 

Les  prêtres  qui ,  les  premiers ,  vinrent  h  Goyaz  n'avaient 
sous  les  yeux  que  des  vices;  il  était  difficile  qu'ils  ne  cé- 
dassent pas  au  torrent  du  mauvais  exemple,  éloignés  qu'ils 
étaient  de  leurs  supérieurs  et  n'ayant  sur  la  terre  personne 
pour  les  guider  et  les  reprendre.  La  discipline^  déjà  si  négli- 
gée dans  tout  le  r^te  du  Brésil ,  le  fut  entièrement  à  Goyaz, 
et  le  clergé  finit ,  en  quelque  sorte,  par  oublier  qu'il  appar- 
tenait à  la  communion  chrétienne. 

Pendant  de  longues  années,  le  territoire  de  la  province 
de  Goyaz  dépendit  des  évéchés  de  Rio  de  Janeiro  et  du 
Paré,  c'est-à-dire  que  les  évèques  n'auraient  pu  arliver 
dans  ce  pays  qu'après  plusieurs  mois  d'un  voyage  extré- 

H)  Vojezie  cbapilre  VllI,  iutitaU  De  la  reUgion  et  du  eUrgé ,  dans 
aiuu  Voyage  dant  le*  prortnrM  rfe  Rio  de  Janeim,  ete.,  vol.  [. 


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348  VOYAGE  AUX  SOURCES 

mement  pénible  i  travers  les  déserts,  ou,  pour  parler  d'une 
manière  plus  exacte,  Goyaz  était  sans  évéque.  En  174€,  la 
partie  du  pays  qui  dépendait  de  l'évèctié  de  Rio  de  Janeiro, 
et,  plus  lard,  la  province  tout  entière,  fut  érigée  en  pré- 
lature  ;  mais  le  premier  prélat  ne  fut  nommé  qu'en  1 783  (1). 
Depuis  cette  époque  jusqu'en  1832,  Goyaz  n'avait  en- 
core vu  aucun  de  ses  prélats  ;  tous,  par  la  fatalité  la  plus 
étrange,  étaient  morts  ou  avant  de  partir  pour  leur  rési- 
dence ou  pédant  le  voyage ,  et  le  dernier  nommé  languis- 
sait, malade,  à  Rio  de  Janeiro  (3). 
A  l'époque  où  la  province  de  Goyaz  était  encore  dans  un 


(1)  Les  préUts  de  Goju  ne  devaical  porter  que  la  soDtaae  noire  :  il 
leur  était  interdit  de  conférer  le  ucrement  de  l'ordre;  nuis,  d'uUenra, 
ils  pouvaient  exercer  tontes  ks  nitrea  fonctions  épiscopcles.  On  peut 
voir  le  teite  même  de  la  bulle  de  cn^aiion  dans  les  Memoriai  hUloiHcat 
dePiiarro.  vol.  OL.iiS. 

(2)  Voici  comment  s'exprime,  sut  le  clergii  de  Gojaz,  monsegnor  Pî- 
nrro,  qui  «tait  revètn  des  digoitée  ecclésiastiques  les  plus  imporUDlas 
et  qui  se  montre  toujours  catholique  aussi  zélé  que  siocère  :  •  Comme 
a  le  territoire  qui  forme  aujourd'hui  la  prélature  de  Gojai  était  jadis 
<  réparti  entre  l'évfché  de  Rio  de  Janeiro,  doot  le  chef-lien  eo  est  élot- 

■  gné  de  3t3  Itgoaa,  et  celui  dn  Part  distant  de  380,  il  est  aisé  de  croire 

■  que  le  clergé  de  celte  prélature  observait  peu  la  discipline,  qu'il  n'élQ- 
•>  diail  point  la  morale ,  et  qne ,  vivant  dans  uo  pajs  où  o'étaienl  jamais 

■  venDs  sej  premiers  pasteurs  et  où ,  par  conséquent ,  il  jouissait  d'une 
9  libertii  eolière,  il  était  loin  d'avoir  conservé  des  mcenrs  irréprochables. 

■  Les  prËtres  de  Gojai  sont  ignorants,  le  peuple  l'est  bien  davantage 
<c  encore  ;  et  de  11  vieul  que  toutes  sortes  d'abus  se  soal  introduits  dans 
0  ce  pays ,  qu'on  j  est  imbu  d'absurdes  pn'jng es ,  que  l'on  s'y  livre  au 
>  sacrilège  et  k  la  superstition,  euBn  que  les  lois  de  l'Ëglise  et  celles  de 

■  l'Ëtat  j  sont  violées  sans  aucune  retenue  (  Jlem.  hiU.,  IX,  3581.  •  — 
J'ajouterai  ici ,  pour  compléter  l'histoire  de  l'Église  de  Gojai ,  qu'une 
bulle  de  Léon  Xlt ,  approuvée  par  l'assemblée  légiidative  du  Bn'sil,  le 
3  de  novembre  (837.  a  élevé  la  prélature  de  Gojaz  au  rang  des  cvécbés 


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DU  KO  DE  S.  PRAHCISCO.  31» 

état  prospère ,  on  n'avait  pas  négKgé  l'instruction  de  la 
jeunesse  :  on  avait  créé  à  Villa  Boa  une  chaire  de  philoso- 
ptiie  et  de  morale,  une  de  rhétorique,  une  troisième  de 
grammaire  latine;  enfin  on  y  avait  placé  un  maître  d'en- 
seignement primaire.  Vers  le  commencement  de  ce  siècle, 
le  comte  de  Palma ,  gouverneur  de  la  province,  eut  l'idée 
de  faire  des  économies  ;  il  comprit  dans  sa  réforme  plu- 
sieurs des  professeurs,  et ,  à  l'époque  àë  mon  voyage,  il  n'  y 
avait  plus,  pour  toute  la  province,  qu'un  professeur  de 
grammaire  à  Meiaponte,  un  autre  k  Villa  Boa,  et  un  maî- 
tre d'école  dans  cliacun  des  principaux  villages  (1  ). 


§  X.  Forces  militairet. 


Garde  nationale.  Compagnie  d«  dragons.  Peûetlreê,  —  Solde  det  dra- 
gons. A  quoi  on  les  emploie.  Confiance  méritée  que  l'on  a  en  eux.  —  A 
quoi  on  emploie  les  ptietlm.  Leur  solde.  . 

A  Goyaz  comme  dans  les  autres  provinces  du  Brésil ,  la 
garde  nationale  ou  milice  (nti/i'cùt)  a  été  régulièrement  or- 
ganisée (2)  ;  d'ailleurs  une  seule  compagnie  de  dragons  de 

(1)  Poil,  Reite,  1 ,  3ST.—  H.  Kidder,  qui  éUit  an  BrésU  en  1830,  dit, 
d'qiris  les  rapports  des  pn^udents  de  la  province  de  Gojai  (  Skatektt , 
II ,  339),  qae  le  nombre  des  écoles  primaires  a'élère,  dans  celte  prorince, 
à  60  poDT  les  garçons ,  3  poar  les  filles ,  et  qu'il  j  eiiste  5  k  6  écoles 
d'un  ordre  plos  élevé. — An  moment  de  lirrer  ce  chapitre  à  rimpression, 
je  lis,  dans  le  rapport  dn  ministre  de  l'iatérienr  de  l'empire  du  Bn>sil 
k  l'assemblée  législaUTe  de  1646,  qa'alors  les  écoles  primaires  de  la  pro- 
vince de  Go;ai  (taieol  rtéqnentées  par  1 ,137  garçons  et  \W  Biles,  et  que 
les  trois  proresseors  de  latin  établis  dani  la  province  avaient  ensemble 
SI  élèves.  (Tojei  le  chapitre  de  ce  livre  ioUtolé,.  La  cité  de  Coikm.) 

(t)  On  trouvera .  sur  la  milice,  des  di'tails  fort  étendus  dans  mou 


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350  VOYAGE  AUX  SOURCES 

70  hommes ,  non  compris  les  officiers,  et  une  de  pédestres 
de  80  hommes,  composent  toute  la  force  militaire  de  cettL> 
vaste  province  (iSlQ). 

Cest  l'administration  qui  fournit  aux  dr^ons  leurs  che- 
vaux et  leur  équipement  :  elle  les  <^lige  de  pourvoir  à  leur 
nourriture  ;  mais  elle  lear  accorde  une  solde  de  6  vintmt 
d'or  par  jour  (  i  fr.  40  c.  ) .  leur  donne  de  la  brine  et 
nourrit  leurs  chevaux.  Pour  qu'ils  puissent  entretenir  et 
renouveler  leurs  uniformes,  on  retient ,  chaque  jour,  3  twi- 
lent  (AS  centimes)  sur  leur  solde,  et  tous  les  deux  ans  on 
leur  remet  le  montant  des  retenues  accumulées. 

Une  partie  de  ces  hommes  reste  à  .Villa  Boa,  la  capitale  ; 
les  autres  sont  détachés  dans  les  différents  postes  dissémi- 
nés sur  la  frontière  de  la  province.  C'est  aux  soldats  du  ré- 
giment de  dragons  qu'il  appartient  de  maintenir  le  bon 
ordre,  d'empêcher  la  contrebande,  de  faire  payer  les  droits 
d'entrée;  enfin  ce  sont  eux  qui  transportent  à  la  capitale 
les  sommes  reçues ,  pour  les  impositions ,  dam  les  diverses 
parties  de  la  province. 

Voaage  dont  let  provintu  dt  Bio  de  Janeiro ,  ete.,  I,3TS;  n,  132, 
145. —  D'après  c«  qui  a  été  dit  au  doctear  Pohl,  la  milice  d«  Go^ax 
s'élevait,  ea  181B,  t  10,300  hommes,  j  compris  2,160  ordenançat , 
milice  inférieure  composée  de  maUlreB,  et  900  henriques ,  autre  milice 
composée  de  oégrea  libres.  H  est  éridect  que  ce  chiffre,  comme  le  re- 
marque le  même  écriTain,  n'est  point  eu  harmonie  net  c«lw  qu'il  • 
adopté  pour  la  population  générale  :  il  le  serait  dsTaDlage  avec  celui  que 
j'ai  admis  comme  approiimalif  (Toyei  le  chapitre  préeédcnt].  —  J'ajou- 
terai que ,  par  une  loi  du  ISaoût  ISai.lenoDTMu  gonTemement  a  dé- 
truit les  milieUu  et  les  ordtnattçai ,  pour  les  réorganiser  sons  le  nom 
de  gnarda  nacional;  mais  cette  loi,  dit  H.  le  général  José  Inacio 
Abren  e  Lima,  a  été  tellement  altérée  par  une  infinité  de  décrets  éma- 
nés tant  de  l'aDtcrité  centrale  que  des  administrations  prorinciaies , 
qu'on  ferait  an  gros  Tolnme  des  modilcations  qu'elle  a  snbiës  (Sfwo^ff  m 
da  hUloTia  da  araiil ,  356,  imprimé  en  1845). 


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DU  RIO  DE  S.  FHAItaSCO.  Mi 

Un  dragon  chargé  de  valeurs  très-considérables  traverse, 
sOQveot  seul,  une  grande  étendue  de  pays,  et  il  est  sans 
exemple  qu'aucun  ait  jamais  été  attaqué  par  des  voleurs 
ou  ait  abusé  de  la  confiance  qu'on  avait  mise  en  lui.  Ces 
soldats,  presque  tous  blancs,  appartiennent,  en  général,  Â 
des  familles  qui  possèdent  quelque  chose  ;  quoique  aussi  in- 
rérieurs  à  ceux  du  régiment  de  Minas  (1  ]  que  Goyaz  l'est  à 
cette  dernière  province,  ils  sont  beaucoup  plus  considérés 
que  nos  soldats  européens  ou  ceux  de  Rio  de  Janeiro,  et  ils 
méritent  effectivement  de  l'être  davantage.  Et  cependant  la 
solde  de  ces  hommes  si  recommandables  et  si  utiles  était, 
lors  de  mon  voyage,  arriérée  de  plusieurs  années,  tandis 
que  des  employés  oisifs  s'enrichissaient  aux  dépens  et  du 
trésor  royal  et  des  infortunés  cultivateurs  I 

Quant  aux  pedtsiret  [piétons)  qui  complètent  la  force  mi- 
litaire de  Goyaz,  ce  sont  des  hommes  de  couleur  marchant 
à  pied  et  formant  une  troupe  d'un  ordre  inférieur.  On  les 
répartit  avec  les  dragons  dans  les  différents  postes  ;  ils  veil- 
lent, avec  eux,  au  maintien  de  la  tranquillité  publique  et 
sont  chargés  de  porter  les  ordres  de  l'administration.  Ils 
reçoivent  pour  solde  3  vintens  d' or  par  jour  (  69  centimes  ) , 
et,  de  plus,  on  leur  donne  de  la  farine;  mais  ils  sont  tenus 
de  pourvoir  à  leur  entretien  et  à  leur  nourriture  (2). 

\t)  Vojei  mMi  FoyiKr*  dant  Ut  produeei  de  Rio  dt  Jatuiro ,  etc., 
1,380. 

(2)  Oepnis  la  révoluiiou  qoi  i  assuré  l'indépendanee  da  firdsil,  l'or- 
gaaigtlion  des  foittu  mibuirea  de  Goju  4  subi  diTerset  modifications. 
£n  1825 ,  U  troope  de  ligne  M  composait  d'aoe  compagnie  de  cavalerie 
de  83  bommw  et  d'une  d'iofïulerie  de  80.  Ces  troupea  et  la  milice  étaient 
soDs  les  ordres  d'mi  gODTernenr  militaire  (govcrnador  dru  armât)  qui 
avait  deoi  aides  de  camp  ;  l'emplojd  qn'on  appelait  Mcrétaire  militaire 
(  tecretario  mtUlar  )  était ,  à  oe  qu'il  paraît ,  chargé  de  la  partie  adini- 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


$  XI.  Extraction  de  for. 


Modes  d'eilrtction  totrefois  «n  OMge  k  Q^jax.  —  Mode  adael.  Joiirii<« 
du  mineur.  —  On  ne  doit  pis  renoncer  à  eiploiter  les  minières.  —  Il 
hudroil  l«s  coDcéder  k  des  compagnies.  —  Obstacles  qui  s'oppose- 
raient k  la  formation  de  wUefl-ci.  —  HojeDS  d'eo  triompher. 


Après  avoir  parlé  des  principales  branches  de  l'adminis- 
tration dans  la  province  de  Goyaz,  je  dirai  quelque  chose 
des  ressources  qui  lui  restent  encore,  l'extraction  de  l'or  et 
la  culture  des  terres. 

Il  paratt  que,  tnënie  à  l'époque  où  le  sol  prodiguait  aui 
mineurs  goyanais,  peu  soucieux  de  l'avenir,  des  richesses 
presque  fabuleuses,  ils  n'exploitèrent  presque  aucune  mine 
à  ciel  ouvert  [talho  aberlo],  et  encore  moins  par  galeries 
[mineraçJio  de  mina).  Ils  ne  connaissaient  guère  que  l'ex- 
ploitation du  lit  des  rivières  ou  de  leurs  bords  {lavrat  de 
veyo  de  rio),  et  celle  des  terrains  en  pente  qui  s'étendent 
du  pied  des  montagnes  vers  les  cours  d'eau  (lavra»  de  gu- 
piara)  [1);  mais,  si  leurs  modes  d'extraction  étaient  peu  va- 
riés, du  moins  pouvaient-ils,  employant  des  troupes  con- 
sidérables de  nègres,  combiner  lès  travaux  de  ces  hommes 

nistraliTe.  De  183A  ï  1836,  ces  diverses  places  rorenl  sapprimées  ;  on  oe 
conserra  pas  même  celle  de  chirargien  militaire,  et  les  forces  de  la  pro- 
fince  furent  réduites  k  presque  rien  (  ot  CtiNHi  HiTTOS ,  lUn.,  U,  3IT, 
330).  163  horames  ne  pouraient  ni  défendre  U  proTince,  ni  même  j  maiih 
tenir  la  police  :  ea  les  liceneiiat ,  on  aura  retranebé  nue  dépense  k  pea 
près  inutile. 

(1)  Toyaz  ce  que  j'ai  dit  sur  le  IraTail  des  mines  d'or  <fu  Irftil , 
l'ovale  dam  le»  priminret  de  Mo  d«  Janeiro,  etc.,  I ,  Ml. 


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dc  RIO  ne  s.  pRAnasco.  sss 

d'QDe  manière  régulière.  Actuellement  (1819)  il  n'en  sau- 
rait être  ainsi. 

Les  habitants  les  phis  aisés  de  la  capitale  elle-même  ne 
possèdent  qu'nn  petit  nombre  de  nègres  ;  quand  ils  les  em- 
ploient à  l'extraction  de  l'or,  c'est  toujours  isolément ,  et  ■ 
probablement  il  en  est  ainsi  dans  toute  la  partie  méridio- 
nale de  la  province  (1).  Un  particulier  de  Villa  Boa  euTOîe 
son  nègre  chercher  de  l'or  dans  le  lit  du  Rio  Vermelho,  qui 
frarerse  la  ville  ;  l'esclave  est  obligé  d'apporter  k  son  mat- 
in 900  reis  (5  Tr.  63  c.)  à  la  fin  de  ta  semaine  :  tout  ce 
qu'il  retire  de  plus  est  A  lui ,  et  il  est  obligé  de  se  nourrir. 
Mais  on  sent  qn'il  peut  y  avoir  des  temps  où  l'extraction 
devient  impossible  ou  moins  fiructueuse  :  Pizarro  n'estime 
la  semaine  du  nègre  mineur,  terme  moyen,  qu'à  600  reis 
(3  fir.  7K  c),  dont  il  faut  encore  déduire  la  nourriture  et 
les  autres  dépenses  indispensables,  et  il  est  à  ma  connais- 
sance que  les  hommes  qui  vont  chercher  de  l'or  dans  le 
ruisseau  de  S.  Luzia,  au  village  du  même  nora,  ne  font  pas 
des  journées  de  plus  de  4  vintens  [93 12/16  centimes)  dans 
la  saison  des  pluies,  et  de  1  seul  vintem  (23  7/16  centimes) 
dans  celle  de  la  sécheresse.  Tel  est  le  triste  état  où  se  trouve 
réduit ,  dans  la  province  de  Goyaz ,  le  travail ,  jadis  si  pro- 
ductif, de  l'extraction  de  l'or. 

On  a  demandées!  ce  ne  serait  pas  un  avantage,  pogr  le 
pays,  de  renoncer  entièrement  à  ce  genre  de  travail.  I.'or 
est  une  richesse;  par  conséquent,  il  y  aurait  de  l'extrava- 

(1)  1  l'fpoque  de  moi)  lojage ,  il  fallait  pourtant  excepter  les  mines 

■  du  village  d'AiMiewu,  qui  étaient  exploitées ,  depuis  plusieurs  année» , 

par  une  compagnie,  et  qui ,  après  avoir  d'abord  fbarni  dV'uormes  quaa- 

lilés  d'u,  commençaient  i  rendre  beaucoup  moins.  Anoicnns  est  situé  k 

II  lêgooê  de  Villa  Boa. 


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354  VÛYAfiE  AUX  SOUKCES 

gance  &  vouloir  le  laiits^r  i  jamais  enfioui  dasa  li|  terre  :  il 
faudrait  donc  seulement  remédier  aui  incoDvéniiinta  artuels 
■  de  l'eitractioD.  Ils  résultent  de  l'igiioraBce  des  mineurs, 
qui ,  dana  l'opération  du  lavage,  laissent  échan^  une 
grande  quantité  d'or;  de  Irar  pauvreté,  qui  pe  Iqut  permet 
pas  d'entreprendre  des  travaux  considérables  ;  de  leur  cu- 
pidité, qui  leur  fait  souvent  tout  sacrifier  i  des  espérances 
chimériques;  en&i  de  la  facilité  avec  laquelle  ils  dépensent 
des  valeurs  qu'ils  devraient  cousidéter  cpmqie  up  fonda  et 
non  comme  un  revenu  (l). 

Le  gouvernement  n'est  pas  assez  riche  pour  exploitqr  les 
mines  d'or  à  son  propre  compte;  il  doit  donc  les  abaodoa- 
tier  aux  particuliers.  Pour  obvier  aux  iscouvénleats  que 
j'ai  exposés  toutà  l'beure,  il  n'y  aurait  pas  d'autre  moyen, 
ce  me  semble,  que  d'établir  des  compagnies  sous  l'inspee- 
Uon  d'hommes  choisis  par  le  gouvernement,  et  de  défendre 
entièrement  l'extraction  de  l'or  aux  particuliers  isolés.  L^ 
compagnies  réunissant  des  capitaux  considérables  papr- 
raient  entreprendre  des  travaux  importants.  Il  est  impossi- 
ble de  forcer  une  multitude  d'hommes  isolés  à  suivre  Ips 
règles  de  l'art  ;  on  peut  y  obliger  des  compagnies.  Un  par- 
ticulier confiera  quelques  fonds  à  une  société  ;  mais  il  ne 
risquera  jamais  sa  fortune  tout  entière  dans  des  opér«tipDS 
qu'il  ne  peut  diriger  lui-même  :  ainsi  personne  ne  se  rui- 
nerait plus  dans  l'exploitation  des  minières.  Comme,  en- 
fin, les  compagnies  ne  payent  leurs  dividendes  qu'à  des 
époques  éloignées,  le  mineur  serait  moins  tenté  de  man- 
ger ses  fonds  en  détail.  A  la  vérité ,  le  gouvernement  a 


(I)  Pour  de  plus  grands  diiuils  sur  cette  (Ichcuse  erreur,  Yoyci  n 
Voyage  dan*  les  province»  de  Rio  de  Janeiro,  elc.,  I ,  ISW. 


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DC  RIO  SE  s.  FRAHCISCO.  3U 

adppté  (1817)>  pour  la  province  de  Hiqas,  un  pUn  d'ex- 
f^itatioii  par  compagnies,  et  il  paraît  qu'il  s'est  (Iréseaté 
peu  d'«ctiiMinaires  ;  puis  il  n'en  pouvait  être  autrement , 
puisque,  d'ailleurs,  ob  laiese,  i  Hiqas,  chacun  libre  de 
trjivailler  comme  bon  lai  sentble.  Cette  liberté  ne  pourrait 
être  enlevée  aux  habitants  de  Minas  sans  violer  le  droit  sa- 
cré fie  propriété;  car  plusieurs  d'entre  eux  exploitent  des 
'  terrains  aurifères  qu'ils  ont  achetés  comme  tels,  et  où  i|s 
aalt  comm^icé  des  travaux  dMit  l'intatTuption  causerait 
leur  ruine.  Maip  il  n'en  est  pas  de  même  de  la  province  de 
Goyai  :  DO  n'y  cherche  de  )'or  qae  dans  le  (itdes  riviènBs; 
chacun  travaille  oîi  bon  lui  semble,  et  le  gouvememeat 
peut  considérer  les  terrains  aurifères  comme  lui  apparte- 
nant encore. 

Les  plus  grands  obstacles  que  l'on  rencontrerait  dans 
rétablissement  et  la  consolidation  des  copipagnies  seraient 
l'antipathie  des  Brésiliens  pour  les  associations,  le  despo- 
tisme des  autorités  locales ,.  la  difficulté  de  mettre  i  la  tète  - 
des  travaiix  des  honupes  véritablement  éclairés.  Il  est  bîea 
évident  que  l'on  ne  pourrait  tout  d'un  coup  trionfpher  de 
ces  cbaltacles  ;  il  faudrait  s'y  préparer  de  loIllgu^^lain,  et, 
pour  y  parvepir,  il  serait  indispensable  de  Cfées  uo^  école 
de  mmeurs.  A  une  certai|ie  époque,  le  ginfveiTiefneDt  du 
Brésil  a  fait  venir,  à  grands  frais,  des  artistes  européens 
pour  établir  à  Aio  de  Janeiro  une  école  de  pâture,  de 
gravure,  etc.;  ils  n'ont  pas  eu  un  seul  ^ève.  Plus  récem- 
ment ,  il  a  envoyé  en  France  une  nuée  de  jeunes  gens ,  en 
leur  disant  vaguement  :  Instruisez-vous  ;  ils  se  sont  amu- 
sés. Le  Maraobâo  a  payé,  à  Paris,  la  pension  d'un  agricul- 
teur; Minas,  de  deux  arpenteurs,  etc.  Toutes  ces  dépenses 
n'ont  abouti  i  i-ien  ou  k  bien  peu  de  chose,  parce  qu'elles 


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3K  rOYAGE  AVX  SOURCES 

étaient  mal  combinées  ou  n'avaient  qu'un  but  ridicale  :  en 
'  formant,  à  l'aide  de  professeurs  européens,  une  école  de 
mineurs ,  soit  dans  une  des  provinces  aurifères ,  soit  à  Paris 
ou  en  Allemagne,  en  mettant  les  places  au  concours  et  ca- 
semant  les  jeunes  mineurs  comme  le  sont  les  élèves  de  no- 
tre école  polytechnique,  on  serait  bientôt  amplement  dé- 
dommagé des  frais  que  l' on  aurait  été  forcé  de  faire.  BientAt 
on  aurait  des  bommes  capables  d'exploiter  régulièrement 
les  minières  les  plus  difficiles;  leur  savoir  et  leur  intelli- 
gence imposeraient  aux  autorités  locales;  inspirant  de  la 
confiance  aui  capitalistes,  ils  rendraient  plus  facile  l'éta- 
blissement des  compagnies  qu'ils  seraient  chargés  de  diri- 
ger on  de  surveiller,  et  de  nouvelles  sources  de  richesses 
s'ouvriraient  pour  la  province  de  Goyas,  aujourd'hui  si 
pauvre  et  si  malheureuse. 

Cette  province  ne  restera  pas  toujours  inconnue  comme 
elle  l'est  aujourd'hui,  et,  si  le  gouvernement  ne  prend* 
quelques  mesures  pour  assurer  aux  nationanx  la  possession 
de  leurs  richesses,  des  étrangers  viendront  les  exploiter  ;  ils 
amèneront  avec  eux  des  machines  et  des  esclaves,  ^  les 
Goyanais ,  tristes  témoins  des  succès  d'autrui ,  verront  leur 
or  sortir  de  chez  eux  pour  aller,  à  Londres,  augmenter  la 
fortune  de  quelques  capitalistes  (1). 

(1)  On  s«it  ce  qni  est  armé  k  Minas  Qence  poar  plnaienre  des  prin- 
cipales mines  da  puj». 


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DU  UO  DE  S.  PUNGISCO. 


S  Xri.  CuUwe  des  terres. 


Le  ajUioH  <r*gricullare  «doplé  k  Goju  el  celai  tpii  l'a  iU  k  Midu,  etc. 
—  Fertilité  da  terrain.  —  Les  plaotts  qu'on  j  caltive.  Bétail ,  che- 
raai,  moatons,  pontceaai.  —  Denrées  qni  ne  peaTent  ttre  eiportées 
et  troarent  k  peine  quelque  déUi  daiM  le  paj*  mtoM.  —  CeDes  que 
I'mi  peut  eiporler.  Le  sni^e,  le  tabac,  le  bU,  le  eotuD.  —  Plantes 
dont  les  prodaits  représentent,  sons  no  petit. volome,  des  valears  con- 
sidérables etqui  seraient  cnllivéesavecavanlage.  Le  tbé,  l'indigotier,  le 
mArier,  la  TJgne.  —  Augmentation  taiHt  da  nombre  des  bètes  k  cor- 
nes ,  des  tlieraoi ,  des  paurceani ,  des  brebis.  —  KojCDi  que  h  gon- 
vememenl  detrail  prendre  ponr  enconrager  l'agricultare,  favoriser  U 
multiplication  des  Iroapeaui  et  décider  les  colons  à  renoncer  k  leurs 
habitudes  destractricee.  —  nécessité  de  conserver  les  bois.  —  Encou- 
ragements qu'il  flmdrait  accorder  à  l'e^tloltation  des  mineB  de  Ter. 


Recherchons  à  présent  qud  parti  les  habitants  de  Goyai 
ou ,  pour  mieux  dire ,  ceux  de  la  comarca  du  sud ,  la  seule 
que  j'aie  parcourue ,  peuvent  tirer  de  la  culture  de  leurs 
terres. 

Le  système  d'agriculture  en  usage  à  Goyaz  est  celui  qui , 
malheureosemeot,  a  été  adopté  dans  presque  tout  le  Brésil. 
On  brûle  les  bois  ^  on  sème  dans  leurs  cendres  ;  après 
quelques  récoltes,  on  laisse  repousser  de  nouveaux  bois, 
que  l'on  coupe  à  leur  tour;  on  continue  ainsi  jusqu'à  ce 
que  la  terre  ne  produise  plus  que  des  herbes,  et  alors  on 
l'abandonne  (1).  I2i ,  comme  dans  les  environs  de  Villa  do 
Principe  (2) ,  le  eaptm  gordura  [Melinit  minuii/lora)  fiait 

«  )  Vojes,  sor  l'agrienltare  des  Brésiliens,  mon  Voi/ag»  dtnu  le*  pro- 
vineeê  de  Mo  de  Janeiro,  etc.,  f ,  IVl. 
{3)  L.  c,  1,  lOf. 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


par  s'emparer  des  terraios  qui  ont  été  longtemps  en  cul- 
ture, et  il  en  chasse  entièremeat  les  autres  végétaux. 

n  est  bien  évident  que  toutes  les  terres  d'une  province 
aussi  grande  qne  Cioyaz  ne  sauraient  être  d'une  égale  fé- 
condité ;  mais ,  sans  parler  de  la  amtarca  du  nord ,  où  je 
n'ai  point  voyagé,  il  est  incontestable  que,  dans  celle  da 
midi ,  il  existe  des  terrain>  d'une  qudilé  excdleote  :  je 
puis  citer  pour  exemple  ceux  du  Mato  Grosso,  oà  le  maïs 
rapporte  200  pour  1 ,  et  les  haricots  de  40  à  SO'.  Suivant 
les  localités,  cette  même  cotnarea  produit,  arec  plus  ou 
moins  d'abondance,  le  maïs,  le  manioc,  le  rii ,  le  sucre,  le 
TWton,  le  café  (i),  le  tabac,  les  haricots  et  d'autres  légumes. 
Le  froment  réussit  très-bien  dans  les  endroits  élevés,  tels 
que  5an(aiMua.  La  Vigne,  comme  à  Sabcrà  et  ailleun  (â), 
produit  deux  fois  l'année,  lorsqu'on  a  soin  de  la  couper 
après  la  première  cueillette  qui  se  fait  en  février.  Enfin  les 
pâturages  naturels ,  qui  couvrent  une  immense  partie  de  la 
province,  peuvent  nourrir  d'innombrables  troupeaux  de 
bètes  à  cornes,  de  moutons,  de  chevaux,  et  certains  can- 
tons montagneux  sont  très-favorables  à  l'éducation  des 
pourceaux. 

Mais,  pour  qu'un  pays  soit  véritablement  riche,  il  ne 
lui  EufBt  pas  d'être  fertile;  il  faut  encore  qu'il  puisse  of- 
frir des  objets  d'échange  pour  obtenir  ce  qu'il  ne  possède 
pas.  La  distance  énorme  de  Goyaz  aux  grandes  villes  et  aux 
ports  de  mer  ne  permet  point  aux  colons  d'exporter  des 

(1]  La  culture  du  ciréier,  dios  k  province  de  Goyu,  est  très-nou- 
velle (1819)  :  il  }  réussit  à  merveille  et  produit  des  graing  d'nu  très-boa 
BoAt. 

[îi  Voyage  dans  te*  prwi«et$  de  Bio  dt  Jantiro,  ete.—  Poyagi 
<fant  le  dltlricl  iet  MamanU,  etc. 


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W  KO  DE  S.  FRANCBCO.  330 

prodniU  qnl,  soUs  on  votame  considérable,  ont  une  fafMe 
valeur;  il  y  aplus,  le  maïs  oq  le  mBsioc.le  rii,  les  haricots,  le 
café  ne  sanraient  tronver  de  débit  dans  le  pa^  même ,  car  fh 
Groiueat  à  peu  près  partout  ;  les  Goyanais ,  étant  générale^ 
mentdeB  agricbltctorg,  peuvent  tous  tés  rëcueiOlrégàlement, 
et  il  o'etiste  Cbéz  eux  d'autre  ville  que  la  capitale,  dont 
la  popirfitim  ne  8' élevé  pas  an  delà  de  9  è  10,000  Ames  ; 
il  est  donc  évident  qde ,  h  pArt  même  les  considérations  qui 
.  nalBseirt  dH  mode  abtii^  de  péroaroir  la  dbne,  chacun  ne 
doit  guère  cultiver  les  div»ses  plantes  que  je  tiens  d'énu- 
mérer,  plue  qu'il  n'tet  nécessAire-Bux  besoins  de  sA  funille. 
La  culture  de  la  canhié  i  sucre  promet  plus  d'avantages, 
cat-  des  hommes  encore  un  peu  als^  peuvent  seuls  <y  livrer; 
pAr  conséquent,  ils  trouvent ,  dans  le  pays  même,  le  déUt 
de  leur  sucre  et  de  leur  tafia  [eaehaça],  et,  d'ailleurs,  ces 
produits  sortent  aUasl  de  la  province,  caries  habitants  de 
Santa  Luzia  les  éehangent  è  S.  Rumâo,  dans  la  province  de 
Min»  (f  ) ,  contre  le  Bel-de  Pilâo  Arcado,  nécessaire  pour  te 
bétail .  Le  tabac,  qui  ne  réussit  bien  que  dans  certaines  loca- 
lités, Meiaponte,  par  exemple,  peot  aussi  être  cultivé  avec 
quelque  pr<^t.  A  Santa  Luzia  et  à  Meiaponte,  lieux  fort  éle- 
vés dont  le  climat  n'  est  pas  extrêmement  chaud,  on  recueille 
du  blé  avec  lequel  on  fait,  h  Villa  Boa,  du  pain  excellent; 
jusqu'ici  c^te  culture  ne  paraît  pas  avoir  eu  beaucoup  d'im>- 

(1)  Comine  je  l'ti  dit  aiUenn  IVottoft  ému  1m  prfloAKM  dt  itfo.eta., 
U,428),  le  vlllase  de  S.  Ramâo  est  Bîtaé  sur  U  rive  gauche  da  S.  Fran- 
cisco. Des  barques  et  des  pirogues  chargées  de  sel  remoatent  le  fleuve 
depoia  ks  saliMS  de  Baliia  et  de  Femstoboac  jusqu'il  S.  Bami« ,  et  des 
caravanes  y  preuneat  cette  dentée  ponr  la  répandre  dm»  les  provinces 
de  Minas  et  de  ùojaz.  S.  Luia  est  le  village  de  ceUr  dernière  province 
le  plus  voisin  de  celui  de  S.  Humia ,  et ,  par  coiist'f|nejtt ,  le  mieui  placù 
pour  hire  quelque  cominerce  avec  ses  habitants. 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


3«0  TOYAfiE  AUX  SOCOCBS 

portance,  mais  il  est  TratsemblaUe  qae ,  si  les  habibuits  s'y 
lÎTraieat  davantage,  ils  trouveraieot  Gacilement  des  débou- 
chés à  Paracatù  et  eur  les  bords  du  Rio  S.  Francisco,  où 
rextréme  chaleur  ne  permet  guère  de  semer  le  fromeot. 

Jusque  vers  1811 ,  on  cultiva  à  peine  assez  de  coton  pour 
subvenir  aux  besoins  du  pays  ;  mais,  â  cette  époque,  on 
commença  à  faire  quelques  eiportations  :  les  mul^iers 
chargés  par  les  oégociants  de  Goyai  d'aller  prendre  des 
marchandises  à  Bio  de  Janeiro  furent  d'abord  les  seuls  qui, 
pour  ne  pas  voyager  à  vide,  emportaient  de  la  province, 
pour  leur  propre  compte,  de  la  (oîle  de  coton  et  du  coton 
en  laine.  Cependant  les  cotons  de  l'intérieur  du  Brésil  ne 
tardèrent  pas  à  être  recherchés  par  les  Européens  ;  on  re- 
connut que  cdui  de  Meiaponte,  de  Corombé,  et  probable- 
ment d'autres  cantons,  était  d'une  qualité  eiceltente  ;  le 
commandant  de  Meiaponte,  Joaqeih  àlves  de  Oliveiha, 
en  fit  avec  succès  des  envois  à  Bahia  et  à  Rio  de  Janeiro; 
son  exemple  fiit  suivi  par  d' autres  personnes,  et ,  si  les  ex- 
portations ont  pu  continuer,  quelque  aisance  n'aura  pas 
tardé  à  se  répandre  dans  cette  partie  de  la  eomarca  du  sud. 

Le  peu  que  je  viens  de  dire  montre  que  l'habitant  de 
Goyaz  ne  doit  pas  désespérer  de  sa  positim ,  quand  même 
il  se  bornerait  à  ses  cultures  accoutumées.  Et  pourquoi  ne 
chercherait-il  pas  à  sortir  de  sa  routine?  pourquoi  ne  de- 
manderait-il pas  à  la  terre  des  produits  qui,  nouveaux 
pour  le  pays,  représentent,  sous  un  petit  volume,  des  valeurs 
plus  importantes  encore  que  le  taba'*,  le  sucre  et  le  coton? 
Le  thé  a  réussi  à  Bio  de  Janeiro  ;  il  se  plairait  sans  doute 
dans  les  cantons  élevés  de  la  province  de  Goyaz,  et,  si  la 
manière  de  cultiver  cette  plante  n'était  pas  susceptible 
d'6tre  modifiée  et  mise  en  rapport  avec  la  faible  popula- 


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DQ  MO  DE  S.  nuNCtSCO.  361 

tion  de  la  province ,  on  tronverait  dans  l'indigo  une  res- 
source du  même  genre,  bien  pins  certaine  encore.  L'indi- 
gotier crott  natureltement  k  Goyaz  et  pourrait  être  avan- 
tageusement cultivé,  comme  il  l'a  été  jadis,  dans  d'autres 
parties  du  Brésil  (1).  Il  est  vraisemblable  que,  dans  les  can- 
tons montagnenx,  tels  que  Santa  Luzia,  Cùnmbâ,  S.  An- 
tonio dos  Monte»  Claroi  et  tout  le  voisinage  des  monts  ap- 
pelés Pyreneo»,  on  parviendrait  à  cultiver  le  mûrier  et 
qu'on  y  élèverait  des  vers  h  soie.  Rio  de  Janeiro  expédie  i 
Villa  Boa  des  vins  d'Europe,  et  probablement  la  province 
de  Goyaz  pourrait  en  recueillir  sur  son  propre  sot  et  les 
expédier  à  la  capitale  (3)  :  quelques  personnes  ont  essayé 
de  faire  du  vin  avec  le  raisin  délicieux  du  t«mps  de  la  sé- 
cheresse et  du  vinaigre  avec  celui  des  [rfuies;  elles  ont  ob- 
tenu d'assez  heureux  succès,  et  il  est  A  croire  que  l'on  réus- 
sira mieux  encore  lorsqu'on  aura  acquis  plus  d'expérience 
dans  cette  fabrication,  et  qne,  plantant  davantage,  on  tra^ 
vaillera  en  grand.  La  vigne,  il  est  vrai ,  trouve  un  ennemi 
redoutable  dans  la  grande  fourmi,  qui,  fort  commune,  dé- 


(1)  Vers  le  milien  do  siècle  dernier,  U  fabrieatioa  de  l'iadifo,  lan- 
risée  par  le  vice-roi ,  marquis  de  Lavradio ,  eut  ua  grand  succès  daii>  la 
prevince  de  Rio  de  Janeiro,  principalement  le  voisinage  da  cap  Frloi 
mais  il  parait  qoe  les  ralsificatiooB  des  plantcars  dégoàlèrent  de  rindigo 
du  Brésil  les  négociants  étrangers  [Vofiag»  dant  U  ditiriei  det  Dia- 
manif  ,I,3S5),  et  l'on  fut  obligé  de  renonceri  la  caltnre  de  l'indi- 
golîer. 

(3)  Dae  forte  chaleur  ne  nuit  point  k  la  Tigne  ;  mais ,  dans  les  lieux 
où,  comme  i  Hio  de  JaDeiro,  une  température  tris-élerée  est  accompa- 
gnée d'une  grande  humidité,  le  raisin  n'atteint  point  une  parfaite  matu- 
rité. Telle  est  la  eau»  de  la  supériorité  remarquable  dn  raiiin  de  la 
téekgreue  (  «m  <ta  mto  ) ,  daits  les  provinces  de  l'intrriitur,  sur  t'elui 
qu'on  remeillc  t  l'époqite  des  pluies. 


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302  VOTASB  AUX  SODKBS 

pouilk)  en  peu  d'instants  les  treilleg  de  leurs  feuilles  (4)  : 
mais' chaque  genre  de  culture  »  ses  enoenus  ;  il  faut  que 
l'agriculteur  ait  assez  de  courage  pour  lutter  contre  eux  tit 
qu'irtâcbed'en  triomidier. 

La  comarca  du  nord,  qui  possède  d'immeDsés  pâturages 
et  est  plus  rqiprochée  de  la  cAte  que  celle  du  sud,  Aùt,  cha- 
que ftaoée,  partir  pour  Behia  des  troupeaux  considérables 
de  Mtes  à  cornes.  Celle  du  and,  quoique  moins  avastageu- 
seinent  située,  enroie  aussi  des  bestiaux  hors  de  la  pro- 
Tince,  eL  pourrait  probabletnmt  en  fournir  davantage,-  si  . 
elle  profitait  mieux  de  ses  riches  herbages.  A  la  vérité, 
lorsque  j'étais  au  nord  de  la  comarca  du  sud,  sur  la  pa- 
roisse de  Santa  Lu»a,  où  il  existe  de  vastes  pAtnrages  na- 
turels, les  habitants  se  plaignaient  de  ne  pouvoir  se  dé> 
faire  de  leur  bétail  qu'en  le  conduisant  à  Bentbidiy  ou  i 
Formiga,  éloignés  d'environ  iSO  et  146  legoat  (2)  et, 
par  conséquent  >  de  ne  retirer  que  des  bénéfices  insigni- 
fianb.  Mais,  comme  je  l'ai  dit  ailleurs,  les  marchands  de 
S.  Joâo  d'Ël  Rei  vont,  chaque  année,  k  Araxé,  acheter  les 
bestiaux  des  colons;  d'un  autre  cAté,  pendant  que  je  voya- 
geais entre  Bom  Fim  et  Santa  Crus,  les  village  les  plus 
méridionaux  de  la  province  de  Goyat,  je  rencontrai  des 
howmes  d'Araiâ  qui  parcouraient  le  pays,  en  échangeant 
diverses  marchandises  contre  des  bètes  à  cornes  qu'ils  de- 
vaient .emmener  chez  eux  pour  les  engraisser  dans  leurs  pâ- 
ti) Alla  eéphaloUâ,  Fab-,  on  peuL4ire  qa«lqiiM  vpieea  loiûttt. 
lojti  mon  Vofog»  ttmu  U  dbfriel  d*«  BiamanU,  elc.  Il ,  160. 

(S)  Ne  m'éUnl  pu  rendu  direciement  de  Formiga  i  S.  Lniia ,  je  ne 
puis  iDdiquer  qne  d'une  Muuère  trie-ipproiitiMlh'e  ]■  diitauce  d'un  de 
ces  village!  k  l'aDirc.  Da  Conha  Halles,  qBi  a  passé  par  Formiga  H  |Mr 
Dambohy,  dit  qu'il  y  a  rntre  ces  deui  «ndroita  IS  leçeat  et  demie. 


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W  UO  DB  9.  ntANOSGO.  3» 

toi^tes,  jnsqn'i  ce  qve  leots  voJH»)  TînsBCait  1«  7  cberdwr. 
Pourquoi  les  deux  villages  qoe  je  viens  de  citer,  B<mb  Fin  et 
Saota  Crue,  qui  ne  peuvent  pas  être  à  t)eattcoup  {dus  de  41  ^ 
56  legoas  de  Santa  Luzia  et  18  et  26  de  Meiapoute,  nedevieo- 
draient-ils  pas  des  lieux  d'entrepAt  pour  le  bétail  du  nord 
de  la  comarea?  Pourquoi  le  gouvernement  ne  chercherait- 
il  pas  à  y  établir  des  espèces  de  foires?  pourquoi  eofin  ne 
se  formerait-il  pas  entre  S.  Joàod'El  Bel,  d'un  cMé,  Santa 
Luzia,  Meiapoate,  etc.,  de  l'antre,  une  Sorte  d'échelle  dont 
ÂraxÂ,  Bom  Fim  ou  Santa  Cnu  seraient  les  échelons,  et 
au  moyen  de  laquelle  les  cultivateurs  s'argueraient  des 
voyages  excessivement  longs,  tandis  qpe  le  bétail  aurait 
des  points  de  repos  qui  l'empêcheraient  de  maigrir  et  de 
perdre  de  sa  valeur? 

Les  pourceaux,  dont  le  lard  est,  pour  les  Brésîlieiis,  ce 
que  sont  chez  nous  le  beurre  ou  l'huile,  peuvent  être  éle- 
vés avec  succès  dans  les  parties  hautes  de  la  comarea  du 
sud.  Tout  cette  comarea  serait  probaUonent  fevorable  à 
l'élève  des  chevaux  ;  enfin,  dans  lee  cantons  les  plus  mon- 
tagneux, les  biebis  multiplient  focileraent  et  n'exigent, 
pour  ainsi  dire,  aucun  soin;  leur  laine  est,  à  la  vérité, 
commune,  mais  elle  peut  servir  k  fabriquer  des  chapeaux 
et  des  couvertures  dont  on  obtiendrait  faoilemrat  le  dé- 
bit, non-seulement  dans  l'iat^ieut  de  la  province,  mais  à 
Paracatû  et  sur  les  bords  du  Rio  de  S.  Francisco  (1). 

Mais  de  simples  conseils,  des  exhwtations,  peut-être 
même  quelques  bons  exemples  ne  sufBront  probablement 
jamais  pour  arracher  les  cullivateurs  goyanais  à  la  pro- 

(1)  Od  rerra  plus  Urd  qne  le  caré  de  Santa  Luzia  D'avait  aucune 
peine  à  se  deftire  des  thapeaui  de  lainp  qui  se  rabriquaieul  daos  sa 


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3M  yOT48e  AUX  SOtmCES 

fonde  apatbîe  où  ilit  sont  plongés.  Il  faudrait  que  l'admi- 
nistration, qui  a  tant  contribué  i4es  amener  à  ce  triste 
état,  les  «idAt  à  en  sortir,  en  les  stimulaot  par  un  puissant 
intérêt;  il  faudrait  qu'elle  sAt  faire  quelques  sacriHces  mo- 
mentanés, pour  en  retirer  de  grands  avantages  dans  l'a- 
venir. Tout  culUvateor  qui  eicporterait  une  certaine  quan- 
tité de  colon,- qui  élèverait  un  certain  nombre  de  bètes  à 
contes,  de  cochons,  de  chevaux,  qui  cultiverait  une  étendue 
de  terre  déterminée,  en  indigo,  en  thé,  en  froment,  qui 
fierait  du  vin  ou  du  vinaigre,  qui  élèverait  des  vers  à 
soie,  etc.,  devrait  être  esempt  d'une  partie  ou  de  la  tota- 
lité de  la  dtme.  ettifwur  que  les  pauvres  profitassent  de  ce 
règlement  comme  les  riches,  pour  que  l'amélioration  de- 
vint générale,  il  faudrait  que  la  portion  de  terre  ense- 
mencée en  froment,  par  exemple,  fût  proportionnée  au 
nombre  de  bras  qu'aurait  à  sa  disposition  chaque  père  de 
.  famille. 

n  ne  sufBrait  pas  d'encourager  les  cultures  les  plus  pro- 
fitables, il  serait  an  moins  aussi  important  d'attaquer  le 
système  destructeur  qu'ont  adopté,  pour  l'exploitatton  de 
leurs  terres,  les  colons  goyanais,  comme  ceux  de  S.  Paul, 
de  Minas,  etc.,  triste  système  qui  ne  permet  pas  de  planter 
ailleurs  que  dans  les  bois,  et  qui  amène  la  prompte  destruc- 
tion des  plus  belles  forêts.  Sur  la  paroisse  de  Santa  Luiia, 
où  jamais  les  bois  n'ont  été  fort  communs ,  une  population 
excessivement  faible  suffisait,  lors  de  mon  voyage,  pour 
les  rendre,  chaque  jour,  plus  rares.  Le  curé  de  cette  paroisse 
avait  déjà  montré  aux  cultivateurs  le  parti  que  l'on  peut 
tirer  de  la  charrue  :  que  le  gouvernement  récompense  ceu\ 
qui,  dans  toute  la  province,  suivront  cet  exemple;  alors 
on  utilisera  mieux  les  eampos  et  les  terrains  dont  le  e^àn 


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,  DV  UO  DE  S.  FRANCISCO.  SU 

gordura  s'est  eniparé,  et  l'on  conservera  les  bois  pour  la 
constructioa ,  la  mentiisefie ,  les  besoins  des  ménages. 

On  a  encore  un  motif  bien  puissant  pour  ne  point  les 
détruire  :  la  province  de  Goyaz  possède  des  mines  de  fer; 
it  faut  ménager  soigneusement  le  seul  combustible  h  l'aide 
duquel  on  puisse  les  exploiter.  Actuellement  on  cherche- 
rait en  vain  une  seule  forge  dans  toute  la  eomarca  du  sud 
(1819)  ;  il  ne  s'y  consomme  pas  un  clou,  pas  un  fer  de 
cheval  qui  ne  soit  venu,  it  dos  de  mulet ,  de  Rio  de  Janeiro, 
après  plusieurs  mois  de  voyage,  à  travers  lès  déserts.  Mais 
il  est  Impossible  qu'un  tel  état  de  choses  ne  change  pas  : 
l'homme  dissipe  souvent  sens  prévoyance  les  trésors  qui  luf 
ont  été  prodigués  ;  il  n'est  pas  dans  sa  nature  de  les  dédai- 
gner toujours.  L'expérience  a  montré  que  les  hauts  four- 
neaux ne  conviennent  point  i  l'intérieur  du  Brésil  ;  mais, 
avec  les  plus  faibles  capitaux ,  on  pourrait  établir  h  Goyaz 
des  fourneaux  à  la  catalane.  C'est  ici  que  l'intervention  du 
gouvernement  serait  encore  d'un  grand  secours;  qu'il  pro- 
mcMe  des  avantages  pécuniaires  ou  simplement  des  décora- 
tions h  ceux  qui ,  les  premiers ,  feront  construire  des  usines 
pour  fondre  le  fer,  si  peu  importantes  qu'elles  soient  (1),  et 
bientôt  la  province  se  vetn  affranchie  d'un  tribut  que, 
pauvre  comme  elle  est ,  elle  paye  pourtant ,  chaque  année , 
aux  fabricants  européens  (1819)  (2). 

(1)  Pliiaienrs  pUnienn  d«  Hioat  out  fitit  construire  dani  lenn  mai- 
Mwfl  de  petits  foanwini  oà  ils  m  (bndent  le  Ter  que  pour  lent  auge 
{Jotagt  âOM  Ut  provinMi  (te  Rio  de  Janeiro,  etc.,  1 ,  290). 

(S]  D'apris  ce  qn'i  écrit  H.  da  Cunba  Hatioe  pour  l'année  1SS3  k 
1816 ,  et  ce  qu'a  vu  pins  récemmeot  H.  Qardner  (  IBM)  dam  ane  partie 
de  ta  comarea  du  nord ,  il  est  évident  qne  l'igHcaltnre  est  bien  loin 
d'anrir  fait  des  progrès  dans  Ii  prorioee  de  Gofai  depuis  qne  j'en  sni*. 
sorti.  Les  choses  a'onl  point  change;  l'apathii  des  cuitiralenra  est  lou- 


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TOTAGE  ACX  SOOICES 


S  XTII.   Valeurs  représmtatxvet. 

Comme  la  proTinc*  de  Goyai  n'esporte  qu'une  très-fai- 
ble quantité  de  marchandises,  elle  ae  re^it  point  de  oumé- 
laire ,  et  la  seule  valeur  représentative  qui  y  circule  est  la 
poudre  d'or  [1].  Uya'si  peu  de  monnaie  dans  ce  pays  que, 
parmi  les  gens  du  commun,  personne  ne  sait  compter  par 
reis,  comme  on  fait  en  Portugal  et  dans  le  reste  du  Brésil  ; 
tous  comptent  par  vmtmu  d'ouro,  oitavtu,  dtmi-oiiamu, 
quarts  (fottava,  erusadat  d'ouro,  patacat  d'(mro,dani'pth 
tacas  (2),  qui  sont  les  poids  employés  dans  le  pesage  de  l'or. 

L'emploi  de  la  poudre  d'or,  comme  monnaie,  fi  un  io- 
coovénient  immense ,  c'est  que  tout  le  monde  peut  la  fal- 
sifier en  un  instant,  même  les  nègres,  môme  les  plas  pe- 
tits enfanta  ;  aQssi  a-t-on  dit  que,  pour  faire  de  l'argent ,  il 
sufGt,  à  Goyaz,  de  gratter  la  muraille  (batla  rocpor  a 
parede). 

Tentée  d'abord  par  la  mauvaise  foi  des  acheteurs ,  la  M- 

joars  1»  rnCoM ,  et  il  ne  partit  pu  que  le  gonveraeiiieiit  provhidil.iK- 
cnpé  if  ibord  k  se  constituer  et  probablement  ensuite  A  di>joiier  des  ia- 
ti^es  loaJDurs  renaissantes ,  ait  pu  beancoup  songer  aai  grands  inté- 
rêts du  pays.  Les  éléments  d'une  immense  prospérité  existent ,  et  il  est 
bien  rare  qu'on  trésor  reste  toujours  enfoui  ;  ne  désespérons  pas  de 
l'arenir. 

(1)  La  dreuktioH  de  l'or  en  pondre  Ait  ausni  adMiise  auteefois  das 
la  province  de  Minas  ;  mais ,  à  l'irrirée  da  roi  Jean  Tl  au  Irtsil ,  o|t  b 
prohiba  eotiiramHil  (  voyei  mon  roffMçe  datti  le$  provAUM  de  Rio  de 
JoMtro, etc.,  I,  Ml). 

(3)  Le  vMem  d'or  équiranl ,  coEame  j'ai  déjk  en  ocaasi«i  da  le  dire , 
à  3T  i  reis  (33  ^  centimes)  ;  roibM»  k  1,100  reis  (T  fr.  tlOc.}.  h  d«^- 
pataque  d'or  k  300  reis ,  la  ervade  d'or  k  T50  reis. 


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DD  RIO  DE  S.  FHANClSrO.  30T 

sifloalion  a  été  ravoriaée  peu  à  pai  par  la  rivalité  qui  existe 
entre  les  marchands  et  la  nécessité  où  ils  sont  de  vendre. 
L'or  qur  circule  anjourd'hui  {iM9)  dans  la  capitale  de  la 
proTiDce  est  tellement  mêlé  de  sable,  de  poussière  et  de  ce 
fer  en  poudre  au  milieu  daquel  on  le  trouve  dans  les  mis- 
seaui  (emuriî),  que  sa  couleur  semble  noirâtre  et  qu'il 
perd,  i  la  fonte,  de  IS  A  âS  pour  100.  L'administration 
du  fisc  {faxmda  real)  n'a  pas  peu  contribué  À  encourager 
l'tltération  par  son  exem^e;  car,  tandis  qu'elle  n'adnet 
dans  ses  coffires  (18i9)  que  de  l'or  parfaitement  pur,  il 
n'en  wrt  que  de  l'or  altéré  :  il  parait  certain  que  cette  in- 
digne friponnerie  appartenait  uniquement  è  l'on  des  ém- 
isés; mais,  quel  qu'en  fflt  l'autenr,  elle  devait  nécessai- 
ranent  avoir  l'influence  la  |rfus  fâcheuse  sur  la  prospérité 
du  commerce  et  la  morale  publique.  Quoi  qu'il  en  soît,  i 
mesure  que  l'altération  augmente,  les  marchands  propor- 
tionnent leurs  prix  à  la  perte ,  et ,  lors  de  mon  voyage ,  tous 
accordaient  une  remise  de  12  pour  100  pour  le  plus  petit 
objet,  lorsqu'on  le  payait  en  numéraire.  Quand  tes  valeurs 
qui  circulent  sont  arrivées  au  même  degré  d'altération,  il 
est  bien  clair  qu'il  n'y  a  plus  de  bénéfice  pour  personne  ; 
donc  celle-ci  fera  toujours  des  progrès,  jusqu'à  ce  qu'enfin 
la  grandeur  du  mal  oblige  à  y  apporter  le  seul  remède  con- 
v^fable  peut-^,  qi^  ser^i^  la  d^eQse  absolue  d^  rec^ 
voir  l'or  «1  ppudre  coipme  monnaie  colorante.  Il  est  évi- 
4{iot  qifçiJntiQductioQ  ^  billets,  qi^'on  poorffùt,  çoame 
A  Minas  (1),  se  procurer  en  échange  de  très-petites  quan- 
tité de  poudre  d'or,  aurtft  beaucoup  moins  d'inconvé- 
nients que  la  circulation  de  cette  dernière;  car  il  serait  im- 

(1^  Foyapt  dam  Ui  .proeititei  de  Rio  de  Jantiro,  etc.,'.  Ml< 


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368  VOYlflK.AUX  SOURCES 

posnblede  folsiRer  ces  billets  avec  autant  île  facilité  que 
l'or  en  poudre.  L'idtératioii  n'a  pas  été  toat  à  Gut  aussi  sen> 
sible  dans  la  campagne  ou  les  villages  qa'h  Villa  Boa,  parce 
que  peu  de  peraonues  ont  à  y  recevoir  quelque  choiie  du 
lise,  que  les  marchands  y  stHit  moins  nombreux,  qu'il  y  a 
entre  eux  moins  de  concurrence  et  qu'ils  peuvent  être  plus 
difDciles  sur  les  valeurs  qu'on  leur  apporte. 

Mais,  pour  faire  rejeter  l'admission  de  l'or  en  pondre 
comme  monnaie  courante,  on  trouverait ,  indépendamment 
de  l'altération ,  des  motifs  bien  suffisants  dans  le  facilité 
avec  laquelle  il  se  perd,  dans  la  nécessité  d'avoir  tonjoars 
avec  soi  des  balances,  la  fraude  que  l'on  peut  faire  sur  le« 
poids,  le  t^nps  que  l'on  consume  dans  ropération  du  pe- 
sage; enfin  le  préjudice  notable  qui  résulte,  pour  le  payeur, 
de  la  division  d'une  quantité  quelconque  de  poudre  d'or  en 
quantités  plus  petites  (1). 

$  XIV.  Moyeru  de  commumcatûm. 

|4  province  de  Goju  traversée  par  des  routes.  —  Les  quatre  princi- 
pales. —  NaTigaiioo  iniMenre.  —  Celle  da  sud.  —  Celle  du  nonl. 

La  distance  énorme  de  la  province  de  Goyai  aux  ports 
de  mer  est,  sans  doute,  la  principale  source  de  ses  mi- 
sères ;  mais ,  du  moins ,  on  a  ouvert  des  routes  qni  permet- 
tent anx  habitants  de  ne  pas  rester  sans  communications 

(1)  A  l'époque  de  mou  voyage,  ralUniion  des  valeurs  représenta- 
lives  ^ptrttoait  k  tout  le  iDoode  :  em  (kisant  frapper,  comoie  Je  lu 
dit  (  page  341) ,  une  éDorme  quantité  de  DHHiiiaie  de  cuivre  d'une  valeur 
nagérée ,  le  gouvememenl  proriucUl  ê  pris  h  son  coinpi 
de  cette  «lliTBtioti. 


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DD  110  DE  S.  nuNCISCO-  369 

avec  la  cAte  et  de  péDétrer  dans  les  parties  les  plos  recalées 
de  i'ÎDtérieur.  Sans  parler  d'une  foule  de  chemins  de  moin- 
dre importaace,  il  part  (1819)  de  Villa  Boa  quatre  roates 
principales  :  l'une,  que  j'ai  déjà  Tait  connaître  et  qui,  se 
dirigeant  rers  l'est,  puis  vers  le  sud,  conduit  à  Faracatû, 
et  de  là  dans  toutes  les  parties  de  Minas  et  k  Rio  de  Ja- 
neiro; la  seconde,  qui  s'étend  vers  l'ouest  et  va  k  la  pro- 
vince de  MatogroBso;  la  troisième,  par  laquelle  on  se  rend 
à  S.  Paul,  dans  la  direction  du  sud-sad-est;  la  quatrième 
enfin,  qui  mène  à  tous  les  villages  de  la  comarta  du  nord. 
Ces  routes,  comme  la  plupart  de  celles  du  Brésil,  ont  été 
tracées  sans  aucun  arl ,  et  ensuite  è  peu  près  abandonnées 
aux  caprices  des  saisons  et  aux  pieds  des  mulets  ;  cepen- 
dant, telles  qu'elles  sont,  elles  paraissent  suffire  aox  be- 
soins actuels  de  la  province. 

Mais  la  nature  elle-même  semble  avoir  ménagé  à  la 
province  de  Goyaz  des  moyens  de  commanicalion  qui 
n'attendent  qu'une  population  plus  nombreuse  pour  faire 
Deurir  son  commerce  et  pour  lui  permettre  d'envoyer  ses 
produits  aui  deni  extrémités  du  Brésil.  La  Serra  da  Pare- 
nahyba  e  do  Tocantins,  divisant  les  eaax  du  nord  de  celles 
du  sud,  e^t  le  point  intermédiaire  entre  deux  des  naviga- 
tions intérieures  les  plus  gigantesques  qu'il  y  ait  au  monde. 
S'emtMrquant  sur  le  Rio  dos  Boit ,  au  village  d'Atmicuns , 
situé  k  12  Itgoas  environ  ouest-sùd-ouest  de  la  capitale,  se 
dirigeant  vers  le  sud  et  passant  successivranent  sur  le  Rio 
TwTO,  sur  le  Paranahyba  (1)  et  sur  le  Paranné,  on  finira  par 

(1)  H.  Rumiuido  Joe£  da  Cnntu  Hatlos,  h  qui  l'on  doit,  sur  cette  oi- 
TigatioD,  dwdétiiladnplaBluatiDt«rêi(/flii.,  n,  191),  pensa  qnele 
CornaU,  a^OTttot ,  daM  M  Téanioa  STec  le  Paranahjba,  aaTolnme 
dVan  plus  considérable  que  ce  dernier,  doit  conserver  son  nom  jusqu'ï 


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3TU  VOYAGE  AUX  SOURCES 

arriver  au  Rio  de  la  Plata ,  ou  bien ,  remontant  le  Tieté ,  on 
parviendra  jusque  vers  la  capitale  de  la  province  de  S.  Paul. 
Cette  navigation  est ,  sans  doute ,  extrèmem^t  difficile  au- 
jourd'hui, à  cause  des  catadupes  que  l'on  rencontre,  de  la 
rapidité  de  oertains  courants,  des  hostilités  que  les  Indiens 
exercent  contre  les  blancs;  mais,  vers  1816,  des  botnmes 
d'un  courage  remarquable,  JoÂo  Caetano  da  Silta  et 
José  Pinto  da  Fonseca,  ont  déjà  su  triompher  de  ces  ob- 
stacles, et  le  premier  est  parvenu,  par  le  Tieté,  jusqu'à  la 
paroisse  de  Persicaba,  dans  la  province  de  S.  Paul  (1).  Les 
indigènes  disparaîtront  de  ces  contrées,  actuellement'^ 

ce  qu'il  se  conroode  arec  le  Rio  Grande.  Des  qoestions  de  ce  genre  oot 
déjï  ^1^ ,  si  je  De  me  trompe ,  igltées  par  les  géographes  ;  il  me  Bcmble 
que  c'est  k  l'uMge  qu'il  appartient  de  les  trancher. 

(1)  Ce  que  raconte  daCunhiHatiosde  cette  expédition  serrîra  à  édiir- 
circe  qu'ont  Écrit  sar  José  Pinlo  MH.  Spiiet  Hartius  (a«j«e,  I,  313).  ]) 
ne  faut  pis  croire,  an  reste,  que  cet  bomme  et  son  cbef,  Joào  Caetano 
da  Silva,  soient  les  premiers  qui  aient  tent<  de  se  rendre  t  S.  Paul  par 
les  riTÎères.  Dè«  l'unée  1808,  ajoute  Matlos,  Estanisitoda  SUreiraGut- 
tieres  s'embarqna  sut  le  Rio  dos  Bois ,  avec  le  projet  de  remonter  le 
Tieté.  BicQtAt  il  Tut  abandonné  par  quatre  de  ses  hommes  qoi  ne  purent 
supporter  les  fatigues  du  voyage.  Entraîné  par  la  violence  des  courants, 
il  se  précipita ,  pendant  la  nuit ,  an  milieu  de  la  famense  caladope  de 
Guaira,  et  sa  pirogue  (ùt  mise  en  pièces.  Alors  it  coostruiait  un  radeau; 
mais  celui-ci ,  emporté  par  les  eaux  rapides  du  Paraunù ,  alla  se  briser 
contre  un  rocber,  et  quatre  hommes  de  l'expédition  se  nojèreut.  Esta- 
ni^ao  et  les  deux  compagnons  qui  lui  restaient  se  réfugièrent  daoi  les 
forêts  désertes  qui  couvrent  la  rive  gauche  du  Par*iui>< ,  et,  n'ayant  au- 
cun mojen  de  pécber  ni  de  chasser,  ils  se  nourrirent  pendant  Iingtempa 
d'herbe,  de  racines  et  de  quelques  fruits  sauvages.  La  santé  d'Eistanislao 
ne  put  résister  i  tant  de  misères  ;  se  laissant  aller  au  désespoir,  il  s'as- 
sit an  pied  d'un  arbre  et  fut  abandonné  presque  mourant  par  ses  com- 
pagnaoB.  Après  avoir  enduré  d'incroyables  souA'anccs  et  traversé  des 
déserts  oà  aucun  homme  n'avait  pénétré  avant  eux ,  ces  hommes  arrivè- 
rent enfin  k  Curitiba,  vers  reilrémîté  snd  de  la  province  de  S.  Paul.  Va 
d'eux  s'était  marié  dans  la  ville  de  Jondiabj  et  vivait  encore  ea  iS17. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  3T1 

sauvages,  comme  ils  ont  disparu  ailleurs  (1),  et  l'art  finira 
par  aplanir  les  difficultés  qu'oppose  la  nature.  Au  reste ,  si 
cette  navigation  ne  peut  être  encore  utilisée,  celle  du  nord 
est  déjà  praticable  depuis  un  certain  nombre  d'années,  et, 
lorsqu'on  a  de  la  persévérance,  qu'on  sait  braver  les  ftti- 
gues  et  le  danger,  on  peut,  en  s' embarquant  h  Porto  do 
Rio  Grande,  situé  à  37  legoas  de  Villa  Boa ,  arriver,  dans 
toutes  les  saisons,  à  la  cité  du  Paré,  après  un  voyage  d'en- 
viron 420  legoas  sur  l'Araguaya  et  le  Tocantins  (2).  On 
pourrait  même,  dans  le  temps  des  pluies,  commencer  sa 
navigation  sur  le  Rio  Vermeibo,  è  une  demi-lieue  de  la 
capitale  de  la  province. 

'  (1)  Dans  M  pérQlease  MvigatioQ,  dit  Hatlos  (1.  c],  s  Joio  CacUno 
Il  da  Silva  trarem,  sans  tronver  la  pins  ch^tivc  cabane,  une  étendue 

■  de  106  legocu  et  demie,  snr  une  terre  t(ae  possédait  autrefois  la  nom- 
<  breoae  nation  des  Cojapiis  ;  tout  avait  été  détroit,  an  nùlieQ  dn  siècle 

■  dernier,  par  les  aTenluriers  Joie  de  Godoj  et  Antenio  Pins  de  Campos 

■  Bdcdo.  Qa'anrail  dit  Las  Casas  s'il  eAl,  à  cette  époque,  traversé  la 

•  partie  méridionale  de  la  province  de  GojazT  Ea  égard  1  la  dilérMKe 

■  dn  DMobre  d'hommes  cIki  les  deui  peuples,  les  massMrea  par  tes- 

•  quels  se  signalèrent  les  Espagnob  dans  les  Iles  d'Haïti  et  de  Cuba ,  au 
u  Mexique  et  au  Pérou  ,  ne  furent  rien ,  si  an  les  compare  avec  la  bou- 
•I  cberie  générale  que  firent  des  Indiens- Goyapés  dans  les  déserls  de 

■  Goyai,  les  Godoj  et  lesBueuo,  «a  cnids  dévtstatenre  pènlistes.  • 
(2]  Ce  chiffre,  emprunté  k  da  Cunba  Uattos,  est  bien  inférieur  à  celui 

qu'on  tronTCdang  Piiarro,  et  qui  ne  s'élève  pas  è  moins  de  730  legoai. 
Je  croîs  qu'en  ceci  on  doit  accorder  pins  de  confiance  au  premier  de  ces 
auteurs ,  qui  a  été  dans  le  pajs  même  et  parait  avoir  mis  tous  ses  soins 
t  connaître  la  térilé.  11  est  fort  i  regretter  que  mon  ami  U.  Burcbell , 
qui  s'est  rendu ,  par  les  rivières ,  de  la  cité  de  Gof  ai  au  Pari,  n'ait  point 
publié  la  relation  de  son  vojage  -,  ce  qu'il  a  écrit  sur  le  cap  de  Boune- 
Espérance  est  une  garantie  de  la  science  et  de  l'intérêt  qu'il  aurait  su  j 
répandre.  Espérons  beaucoup  de  H.  de  Caslelnau ,  qui  a  aussi  navigué 
sur  les  Oeures  de  Goju  et  dont  tout  Paris  coimall  déjk  les  ii 
coUectioos. 


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372  VOYAGE  AUX  SOURCES 

$  XV.  Maun. 

Le*  hommes  de  l'iotérieiir  oée  itsc  d'benreoaes  dûpositioiw,  edub  ia£' 
gaiement  fnoruéa  par  lee  ârcoDstuMC*.  —  Le*  Gojaaait  moin  poli* 
et  moins  hospitaliers  qbe  les  Mineiros.  —  Leur  iDlelligaxe.  —  Lear 
ignorance  en  matière  de  religioD.  —  Ce  que  Mot ,  chei  em ,  les  eo- 
ÂdIs  ,  les  jeuMB  geos  et  les  bomnies  thîu.  —  Le  «tncobinage'eitrt- 
mement  coaunuo  ;  qndles  en  sont  les  causes.  —  Les  Immiims  qoalitts 
dn  Goyanaii. —  Les  causes  des  meurtres. —  LeTolfMtnire. —  Hdjh» 
de  réformer  les  mœurs  des  habilaoïs  de  Gotsi.  —  Voiu  de  l'aotenr. 

J'ai  tiché  de  donner  ane  idée  de  la  province  de  Goyaz, 
de  ses  misères  et  de  ses  ressources;  j'ai  même  déjà  indiqué 
quelques-ans  des  traits  da  caractère  de  ses  habitants  ;  f  en 
ajouterai  ici  quelques  autrra  encore,  afin  de  rendre  ce  ta- 
bleau moins  incomplet. 

Les  hommes  de  l'intérieur  naissent  généralement  avec 
des  dispositions  heureuses  ;  mais  les  circonstances  ne  les 
ont  pas  égalemoit  favorisés. 

La  province  de  Minas  Geraes  est  placée  à  peu  près  sous 
les  mêmes  influences  que  celle  de  Goyaz,  et  elle  a  com- 
mencé comme  elle  ;  mais,  si  les  prraniers  Mineiros  furent 
des  hommes  grossiers  comme  les  premiers  Goyanais,  les 
richesses  qu'ils  acquirent  et  qu'ils  conservèrent  assez  long- 
tempe  leur  procurèrent  les  moyens  de  donner  de  l'éduca- 
tion à  leurs  enfants  :  poi  k  peu  la  politesse  s'est  commu- 
niquée aux  hommes  les  moins  riches ,  et  elle  est  devenue 
presque  générale.  La  province  de  Goyaz  n'a  point  passé 
par  les  mêmes  périodes }  une  décadence  complète  y  a  suc- 
cédé brusquement  à  l'époque  de  la  richesse  et  de  la  splen- 
deur; l'excessive  chaleur  du  climat  a  fait  perdre  aui  babi- 


,.,  Google 


DU  MO  DE  S.  FBANaSGO.  S73 

tante  leur  rnâesse  primitive  :  on  ne  peut  pas  dire  même 
qu'ils  soient  grossiers ,  mais,  &  l'eiceplîon  des  fazendeiro» 
aisés,  qui  sont  peu  nombreux,  ils  n'ont  acquis  aucune  po- 
litesse. Le  dernier  Hineiro  sait  causer,  et  le  fait  souvent 
avec  esprit  et  amabilité  :  les  colons  goyaaais  gardent  un 
silence  atupide  ;  ils  ont  un  air  d'indolence,  une  sorte  de 
niaiserie  qui  les  fait  reconnaître  sans  aucune  peine.  A  Mi- 
nas, j'étais  accueilli  partout  avec  hospitalité;  les  hommes 
les  plus  pauvres  semblaient  me  voir  avec  plaisir  et  m'enga- 
geaient à  partager  leur  repas  :  è  tioyai,  on  m'indiquait 
nondialammeot  le  triste  réduit  qui  devait  m'abriter,  et, 
excepté  ceux  à  qui  j'étais  recommandé,  personne  ne  m'of- 
frait la  moindre  chose. 

Malgré  tout  ce  qui  précède,  il  ne  faudrait  point  s'ima- 
giner que  ces  hommes  sont  dépourvus  d'intelligence.  On 
trouve  à  Villa  Boa  des  ouvriers  extrêmement  habiles  qui 
imitent  avec  une  grande  perfection  ce  qu'on  leur  montre, 
et  qui  pourtant  n'ont  point  eu  de  maîtres.  Mais ,  comme 
j'ai  d^'à  eu  occasion  de  le  dire,  les  Goyanais  n'oot ,  eu  géné- 
ral, aucune  occasion  de  cultiver  leurs  facultés  intellectuelles 
et  leur  aptitude  pour  l'industrie;  ils  vivent  isolés,  dans 
l'indigence,  et,  si  quelque  chose  doit  étonner,  c'est  qne 
plusieurs  d'entre  eux  ne  soient  pas  tombés  dans  on  état 
plus  voisin  encore  de  celui  des  sauvages. 

Je  crois  que  les  Goyanais,  cMnme  les  Mineiros,  devien- 
draient'facilement  religieux,  si  on  les  instruisait  des  vérités 
du  christianisme  et  qu'on  leur  fit  goûter  ses  înefiâbles  con- 
solations; mais  ils  restent  sans  gnide,  on  les  laisse  croupir 
dans  une  honteuse  ignorance,  et  ils  remplacent  la  religion 
par  des  superstitions  absurdes.  Comme  la  plupart  des  autres 
Brésiliens  de  l'intérieur,  ils  croient  aux  sorciers,  aux  rêve- 


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374  VOYAGE  AUX  SODKCES 

Dants,  aux  loups-garoas,  aux  démons  fkmîliers  dont  ils  ra- 
content mille  extravagances;  ils  portent  au  cou  des  amu- 
lettes et  des  préservatirs,  et ,  quand  ils  sont  malades,  ils  ont 
recoars  à  des  remèdes  sympathiques  et  A  des  paroles. 

Élevés  dans  cette  absence  presque  totale  de  sentiments 
religieux ,  alwndonnés,  pour  ainsi  dire,  à  leurs  instincts  ou 
n'ayant  sous  les  yeux  que  de  mauvais  exemples,  les  enfants 
se  livrent ,  dès  l'âge  le  plus  tendre,  à  des  plaisirs  énervants  ; 
on  ne  les  voit  point  jouer  entre  eut,  ils  sont  sans  gatté 
comme  sans  innocence  (!].  La  jeunesse  est  plus  triste  en- 
core et  ne  connaît  que  des  jouissances  impures  ;  enfin  la 
plupart  des  hommes  faits  ont  en  partage  l'engourdissement, 
l'ennui,  le  goClt  de  l' eau-de-vie  de  sucre. 

On  verra,  par  la  suite,  combien  les  unions  légitimes  sont 
rares  dans  la  capitale  de  la  province  :  on  se  marie  un  peu 
davantage  dans  les  campagnes  ;  cependant  le  concubinage 
y  est  aussi  très-commun.  Il  ne  fout  pas  s'en  prendre  seu- 
lement au  goût  du  libertinage  et  à  l'entraînement  du  mau- 
vais exemple  ;  beaucoup  de  gens  se  trouvent  réellement  dans 
l'impossibilité  absolue  de  se  marier.  En  effet,  on  ne  peut 
contracter  d'alliance  légitime  sans  l'approbation  du  vigario 
da  vara  (3),  qui  ne  l'accorde  qu'au  prix  de  10, 15  et  même 
18  oitavaa  (75  fr.,  ~  112  fr.  50,  —  135  fr.).  La  plupart 
des  cultivateurs,  dont  l'indigence  est  extrême,  ne  peuvent 
payer  une  somme  aussi  forte  et  passent  leur  vie  dans  le 
désordre.  C'est  ainsi  que  des  membres  du  clergé>  qui ,  s'ils 

(1)  Ce  portrait  coDTÎeut  raaUKUTeaseiiMDt  k  bien  d'attirés  enfiDt* 
brésiliens  qu'à  udi  de  Gojai. 

(!)  J'ai  fait  coonaltre  ailleurs  les  fooctions  fort  étranges  da  magistrat 
ecciésia» tique  appeli  vigario  da  vara  (vojei  mon  Voyage  dont  Ut 
province*  de  Bio  de  Jatteiro,  eic.,  I,  lïH). 


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DO  110  DE  S.  FaANCISCO.  375 

étaient  vraiment  chrétiens,  devraient  encourager  les  unions 
légitimes,  y  mettent  des  obstacles  par  leur  cupidité. 

Au  milieu  des  défauts  qu'il  doit  à  de  fâcheuses  circon- 
stances et  à  une  administration  coupable,  le  peuple  de 
Goyaz  m'a  paru  bon  et  montre  habituellement  des  mœurs 
douces.  A  la  vérité,  des  passions  exaltées,  la  jalousie,  le  dé- 
sir de  la  vengeance,  le  portent  assez  facilement  au  meurtre; 
mais  il  n'est  peut-être  jamais  arrivé  que  l'on  ait  assassiné 
quelqu'un  dans  le  but  de  le  dépouiller. 

Dans  ce  pays,  comme  à  Minas,  on  ne  paye  point  ses 
dettes;  il  s'en  faut  qu'une  parfaite  délicatesse  préside  tou- 
jours aux  transactions,  et  l'habitude  de  faire  la  contrebande 
de  l'or  ou  des  diamants,  celle  de  falsifier  l'or  en  poudre 
doivent  nécessairement  encore  entretenir  la  mauvaitte  foi. 
Hais  il  est  sans  exemple  qu'on  soit  jamais  entré  dans  une 
maison  pour  la  pîller.et  cependant  il  y  en  a  qui  relent,  piHir 
ainsi  dire,  toujours  ouvertes  ;  on  ne  dévalise  point  les  voya- 
geurs sur  les  chemins,  et  mille  fois  mes  effets  ont  été  en- 
tourés de  gens  de  toutes  les  classes  sans  que  jamais  la  moin- 
dre chose  ait  été  détournée. 

Il  en  est  des  Goyanais  comme  de  leur  sol  :  presque  partout 
il  ne  donne  naissance  aujourd'hui  qu'à  des  plantes  stériles; 
la  culture  et  quelques  soius  intelligents  suffiraient  pour  lui 
faire  produire  d'abondantes  récoltes.  L'administration  a 
conduit  i  une  véritable  dégradation  les  malheureux  colons 
de  la  province  de  Goyaz  ;  î)  est  temps  qu'elle  fasse  des  efforts 
pour  les  rendre  à  la  dignité  d'hommes  et  de  chrétiens; 
d'heureux  germes  existent  encore  chez  eux,  il  ne  faut  que 
les  féconder.  J'ai  montré  combien  il  serait  facile  de  faire 
fleurir  l'agriculture  dans  ce  pays  et  d'en  tirer  des  produits 
qui  puissent  être  exportés  avec  avantage  ;  que  l'on  fasse 


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3TD  VOYAGE  AUX  SODUCES 

quelques  efforts  pour  atteindre  ce  bnt  ^  que  l'on  change  en- 
tièrement le  mode  de  percevoir  l'impAt,  enfin  que  le  colon 
ait  uo  grand  intérètàcultiver,  il  sortira  de  l'apathie oà  l'a 
plongé  l'extrême  difficulté,  je  dirai  presque,  l'Impossibilité 
d'améliorer  son  sort.  A  mesure  que  l'agriculture  commen- 
cera A  fleurir  et  que  l'on  recueillera  des  produits  suscepti- 
bles d'être  exportés ,  la  nécessité  d'admettre  l'or  en  poudre 
comme  monnaie  deviendra  moindre,  on  pourra  en  restrein- 
dre, puis  en  défendre  entiër^nent  la  circulation  ;  alors  la  fol- 
sillcation  des  valeurs  représentatives  ne  sera  plus  une  habi- 
tude universelle,  et  peu  &  peu  la  bonne  foi  pourra  renaître. 
Que  les  unions  légitimes  soient  honorées,  que  l'on  admette 
seulementdes  hommes  mariés  dans  les  emploispubUcs,  qu'on 
supprime  l'impôt  aussi  immoral  qu'exorbitant  prélevé  sur 
les  mariages  par  le  vigario  da  vara ,  le  concubinage  devien- 
dra moins  commun ,  la  population  augmentera  (4),  et  elle  ne 
sera  plus  embarrassée  de  cette  fonle  d'enfants  qui ,  dès  l'in- 
stant de  leur  naissance,  n'ont  sous  les  yeux  que  de  mauvais 
exemples,  qu'un  caprice  de  leur  père  peut  plonger  dans  la 
misère,  qui  ne  connaissent  ni  les  liens  de  la  famille  ni  ceux 
de  la  société ,  et  qui ,  dans  un  pays  où  tant  de  ressources 
existent,  passent  leur  vie  à  mendier.  Il  serait  nécessaire  en- 
core de  diviser  les  paroisses,  de  mettre  un  terme  à  la  simo- 
□ie,  d'exiger  des  pasteurs  qu'ils  fissent  des  instructioDS  tous 
les  dimandies  et  qu'ils  catéchisassent  les  enfants;  mais,  il  est 
triste  de  le  dire,  il  y  a  bien  peu  à  espérer  du  clergé  goyanais 

(I)  La  coDtmence  publique  wt  DthireUeiiieiit  joîate  1  U  propaBatioD 

de  l'espèce Qm  pourrait  se  Uire  contra  le  c^lilMtqn'a  formé  le  libcr- 

tJDige,  celui  où  les  deai  Mies...  fuient  dm  union  qni  doit  les  rcftdra 
meilleurs,  pour  rÎTre  dans  celle  qui  les  raud  toujours  pires  (  Hontis- 
ODiiD ,  Eapril  du  loi* ,  liv.  XXm ,  chap.  u  et  xxi]  T 


^d:,;.  Google 


DU  RIO  DE  S.  FEUnciSCO-  3TT 

pour  la  régéoéretiOD  du  peuple  qu'il  devrait  être  jaloux  de 
tirer  de  son  abrutissement.  J'ai  été  témoin  de  l'heureuse 
influence  qu'exerça  sur  les  habitants  de  Goyaz  un  prêtre 
étranger  (1)  qui,  en  lenr  donnant  d'utiles  conseils  sur  la 
manière  de  cultiver  leurs  terres,  les  édifia,  quelques  in- 
stants, par  ses  sages  exhortations  et  par  l'exemple  de  ses 
vertus.  Qu'on  repousse  des  préjugés  absurdes  de  nationa- 
lité et  des  préjugés  philosophiques  qui,  aujourd'hui  mépri- 
sés en  Europe,  mais  nouveaux  chex  les  Brésiliens,  passent 
encore  parmi  eux  pour  de  la  force  d'esprit  (2)  ;  qne  l'on 
fasse  venir  à  Goyaz  quelques  ecclésiastiques  étrangers,  afin 
de  rappeler  ce  peuple  à  lui-même  et  de  le  rendre  à  la  dignité 
d'hommes;  qu'on  renouvelle  de  temps  en  temps  ces  mis- 
sionnaires, pour  qu'ils  ne  se  laissentpoint  amollir  par  la  cha- 

(1)  Le  F.  Josepb,  dont  je  parlerai  bienlAt. 

(2)  Daasan  ouvrage  imprimé  en  1845,  U.  Kidder.  après  aToir  dit  qu'il 
se  fait  soarcDt,  i  Rio  de  Janeiro,  des  ventes  de  livres,  gémit  de  ce  qne 
les  tente  âéUittes ,  c'est  ainsi  qa'it  s'exprime ,  des  prétendas  philoso- 
phes français  se  trouvent  toujours  en  grand  nombre  dans  ces  biblioibè- 
qnes  et  ne  manquent  jamais  d'obtenir  des  acheteurs.  On  envoie  dans  les 
colonies  les  modes  de  l'an  passé ,  et  elles  j  sont  prises  ponr  celles  dn 
jonri  c'est  ainsi  que  les  écrivains  frantais  de  l'antre  siècle  eicitenl 
anjonrd'hui ,  dans  les  villes  dn  Brésil,  cet  enthousiasme  qu'ils  ins- 
pirirenl,  de  leur  vivant,  k  nne  génération  licencieuse  dont  ils  cares- 
saient l'immortalité.  Les  bahitanis  de  l'Amérique  du  Sud  ne  savent 
point  encore  que,  chez  nous,  croyants  et  incrédules  ont  réduit  k  lear 
véritable  valenr  les  livres  des  sopbiates  contemporains  de  Lonis  XV  ;  il» 
ne  savent  pas  qne  la  science  moderue  a  fait  justice  de  tonte  celte  érudi- 
tion de  mauvais  aloi ,  qui  fiil  jadis  un  moyen  facile  de  succès  et  dont  on 
se  servait  comme  d'une  arme  pour  attaquer  ce  qu'il  j  a  de  pins  respec- 
table. Au  reste;  de  nobles  pages,  qne  j'ai  lues  avec  bonheur  dans  l'eicel  ' 
lent  recueil  intitulé  Mirterva  Braiitime  (Rio  de  Janeiro,  IIJ43-15), 
prouvent  sninsamment  que,  parmi  les  Brésiliens,  des  esprits  élevés 

it  la  vérité  tont  entière  et  savent  dignement  lui  rendre  hom- 

I.  U 


D,g,l,.,.d.i.  Google 


STB  VOYAGE  AUX  SOOIICES  D0  KO  DE  S.  RUNaSCO. 

leur  duclimatetentraloer  par  les  mauvais  exemples;  qa'oD 
établisse  an  séminaire  pour  former  les  jeunes  prêtres  à  la 
science  et  au<  bonnes  moeurs  (1  )  ;  enfin  que  l'on  conBe  les 
enfants  à  ces  hommes  dévoués  qui,  depuis  qu'un  génie  puis- 
sant les  rappela  sur  le  sol  de  la  France,  ont  rendu  tant  de 
services  au  fils  du  pauvre,  l'on  verra  le  pmple  goyanais  se 
relever,  acquérir  des  vertus  et  prendre  place  dans  la  société 

civilisée Et  moi,  si  j'apprenais  que  ma  foible  voixa  pu 

être  entendue,  que  qiielques-uns  des  conseils  que  je  donne 
ici  avec  timidité  ont  porté  leur  fruit ,  je  ne  regrett«ais  plus 
d'avoir  passé  dans  des  déserts,  au  milieu  de  privations  tou- 
jours renaissantes,  loin  de  ma  famille  et  de  ma  patrie,  les 
plus  beaux  jours  de  mon  existence  ;  je  ne  pleurerais  plus  la 
perte  de  ma  santé  ;  je  pourrais  médire  :  J'ai  payé  la  d^te  de 
l'hospitalité,  et  mon  passage  sur  la  terre  n'a  pas  été  inutile. 

(I)  Je  traiterai  ailleurs  ce  point  important,  sur  lequel  a  déjt  bean- 
mnp  ÏDsistt!  Monierthor  Piurro  dans  son  précieni  ouvrage.  —  An  mn- 
meut  de  livrer  ce  qai  précède  i  l'iropressioD,  je  lis,  dans  le  rapport  fait  11 
rassemblée  législaliTe  géni^rale  du  Brésil ,  le  7  mai  lSf6,  par  le  ministre 
de  la  justice,  H.  José  Joaquim  Torres,  les  paroles  suivantes,  que  je  suis 
benreai  de  pouvoir  encore  ajouter  ici  ;<>...  LcmaDqned'ecclésiasUqnes 

■  doaés  des  qualités  nécessaires  pour  remplir  leur  ministère  sacré  est, 

■  k  mes  jeui,  la  principale  source  du  mal  ;  poni  j  remédier,  il  me  parait 

■  Gouvcnable  d'établir  des  séminaires  dol^  de  fonds  suffisants,  où  puis- 

■  sent  £tre  élevés,  dès  leur  jeune  tge,  ceux  qui  veulent  se  consacrer  au 

■  sacerdoce.  Je  ue  puis  m'empécher  d'insister  sur  ce  point  et  de  le  re- 
•  commander  k  toute  votre  attentiou(j4nnuario,  1846, 133).  •  Je  vois 
avec  grand  plaisir,  dans  le  même  rapport,  que  le  gonvemeniMit  brési- 
lien a  appelé  de  Rome  33  missionnaires  pour  les  répandre  «n  diverses 
provinces.  Celle  de  Goyai  n'est  malbeuteusement  pas  comprise  dans  le 
nombre. 

PIN  DU  TOME  PREMIER. 


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TABLE    DES    CHAPITRES 


DANS  LE  TOME  PREMIER. 


CHAPITRE  PftEHIKR.    , 

Tojage  de  Rio  de  Janeiro  k  Obi 1 

CHAPITRE  0. 
Le  cbemio  do  Rio  Prelo.  —  La  fille  de  Tal«nca  el  les  Corocdos.  .      H 

CHAPITRE  m. 
Enlrte  de  la  pronDce  de  Hinw  Geraes  |iat  le  Rio  Prêta.  —  Le  tU- 
lage  de  ce  nom.  —  La  Sern  Hegra 46 

CHAPITRE  IV. 
Les  csmpos.  —  TeUean  général  da  eantoa  de  Rio  teande 58 

CHAPITRE  T. 
Voyage  dans  le  eanloD  de  Rio  Grande Sri 

CHAPITRE  Ti. 
Séjour  t  S.  Joie  d'ElRei K 

CHAPITRE  TH. 
Tableau  géninl  du  pafs  éleré  et  disert  compris  eatre  S.  Joao  d'El 
Rei  et  la  Serra  da  Canaatra IIH 

CHAPITRE  vm. 
CommeDceineot  dn  vo;ige  de  S.  Joio  d'BI  Rei  ani  aonrces  da 
S.  Fraacisw.  —  Les  tillages  de  Conceicio  et  d'CHinira.  —  La 
Tille  de  Tamandaà 1Ï9 

CHAPITRE  K, 

.Snilc  dn  tojage  de  S.  Joto  d'El  Rei  i  la  sonrce  da  S.  Franrisco.  — 
Les  rillages  de  Forraiga  el  de  Piumbj l'in 


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TABLE  DES  f;HiPlT8ES. 
CHAPITRE  X. 


f.ii  Serra  da  Cinastri  el  la  casait  appelée  Cachoeira  da  Ctsta 

d'Anla ,  sunree  du  Rio  de  S.  Fraocisco 1T9 

CHAPITRE  XI. 

Coup  d'œil  général  sur  la  ïomar;»  de  Paracalù 304 

CHAPITRE  XU. 

Ariiâ  cl  ses  eaux  miui^ralesi 3)3 

CHAPITRE  XIII. 

Voyage  d'Anii  a  Paracatii 3S1 

CHAPITRE  XIT. 

Paracalù 28Î 

CHAPITRE  XV. 

Voyage  de  Paracalù  i  la  froutière  de  Gojai î9G 

CHAPITRE  XTI. 
T^lean  général  de  la  province  de  Go|u. 

!  1".      Hisloire 308 

li  II.      Étendue  ;  limiles  ;  earface 317 

S  m.     Vi'gélation 3» 

t  IV.      Climat;  salubriU! 333 

i  V,      Populalion 33S 

i  VI.      AdministratioD  générale 3:<4 

!  Vil.    Finances 337 

S  VUI.  Résultats  de  k  dlme 312 

i  IX.     Clergé;  iustractioD  publique 34$ 

jl  X.      Forces  militaires 349 

i  XI.     EilracUon  de  l'or 35! 

5  XII.  Culture  des  terres 357 

jj  XII.   Valeurs  représemativcs 36li 

i  XIV.  Mojeas  de  cominnnicalion 3U8 

j  XV.    Hffiurs 373 

FIX   DE  U  TABl.ii  DBS  CHAPITRE»  DU   TOUS  PBEVI&B. 


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VOYAGES 
L'INTÉRIEUR    OV    BRÉSIL. 


TROISIÈME   PARTIE. 


,.;.  Google 


Tontes  les  fois  que  l'image  de  ce  nomieMi  monde  ipie  Dwn  m'a  bii 
Toir  se  repréMDte  denaol  mea  jevi ,  et  que  je  cOaidèreB  la  aereniié  de 
l'air,  la  diuersitédes  animaui,  la  variété  des  ojseani,  U  beauté  des 
arbres  et  des  plantes ,  l'eiceileDce  des  fruicis  et ,  brief  ea  général ,  les 
richesses  dont  ceste  terre  du  Brésil  est  décorée ,  inccnliiiet  teste  etrla- 
matioado  Prophète,  au  Psau,  104,  me  Tienl  eo  mémoire  ; 

O  Seigiwiir  Diea  ,  que  tes  œnores  diuer* 
Sont  merueilleDi  par  le  monde  uniaers! 
O  que  tu  as  tout  Tût  par  grand'  sagesse  ! 
Kref  la  terre  est  pleine  de  ta  largesse. 

{tni.Hitt.,  3'édit.,lM.) 


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VOYAGE 

AUX  Min 

nu   RIO   DE    s.    FRANCISCO 

PROVINCE    DE   GOYAZ 

M.    AUGUSTE    DE    SAINT-HILAIRE, 


«•m:  8B€0]Sd. 


P.ft3lIS, 

ARTHU8    BERTRAND,   LIBRAIRE-ÉDITEUR 

RUK     HADTEFËDiLLE  ,     25. 
'  18*8 


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VOYAGE 

m  somœ 

DD 

RIO  DE  S.  FRANCISCO 

rr 

DANS  LA  PROVINCE  DE  GOYAZ. 
CHAPITRE  XVII. 

COHHENCEHENT   DU   VOYAGE    DJUfS   LA'  PKOVIIIGE    D8 
OOYAZ.    —    LK  VILLAGE   DB  SANTA  LDZIA, 


L'utMT  ptaw  sur  li  Serra  do  Cominbk  e  do  Tocamiiis.  —  Rtriitro 
itot  Arrtptndidot.  PergoDoel  do  regittro.  Si  deatiDitioD.  La  wlde 
dea  militaires  da  posU  eilrémcment  airiérte.  CirconsUace  qoi  prooTe 
GVmbieD  peu  Vaa  yojtgt  dans  ce  paja.  —  Platean  de  9  Ugoa$.  — 
T^pa.  —  Fatenda  do  Rtaeho  Frio.  —  Le  miMcau  da  mime  nom. — 
Korro  do  Altcrim.  —  SUiodtGarapa.  Moutons  i  tiasui  de  laine. — 

—  Arrivée  an  rillage  de  Santa  Lutia.  —  Pètes  célébrées  h  roeusion 
de  la  Peotecdte.  —  De  quelle  manière  les  femmes  marchent  dan^  les 
mes.  —  Portrait  de  H.  Jolo  Tnuiu  Altibiz  ,  cnré  de  Santa  Lniia. 

—  ^lendoe  de  la  paroitie  dont  ce  village  est  le  chef-lien.  —  Position 
de  Santa  Luiia.  Place  publique.  Églises.  Rues;  maisons. —  Histoire  de 
cCTillage;  abandon  dea  mines;  l'agricatture,  ressonrce  des  babitaots; 
triste  éttl  du  pays.  —  S.  Joào  Evangelitta ,  maison  de  campagne  dn 
curé  de  S.  Lbiû.  Détails  sar  des  essais  de  cnlHire.  Projet  dn  proprié- 
taire. 

J'bî  dit  que,  après  avoir  suivi  k  peu  près  depuis  Para- 


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X  V0TA6E  AUX  SODRCK 

catû  un  plateau  qui  couronne  la  Serra  do  8.  Frandaco  e  da 
Paranabyba,  j'en  étais  descendu  pour  me  rendre  au  Régi»- 
tro  dos  Arrependidos ,  sur  la  limite  de  Minas  et  de  Goyaz. 
En  entrant  dans  une  nouvelle  prorince,  j'allais  aussi  ftaser 
sur  un  autre  diriseur  d'eau ,  la  Serra  do  Gorumbé  e  do 
Tocantins,  que  déjà  J'at  bit  connaître  (p.  SI  8],  et  qui  fome 
un  angle  avec  la  Serra  do  S.  Francisco  e  da  Paranahyba. 

La  maison  du  regittro,  située  à  peu  près  à  la  jonction 
des  deux  chaînes,  est  assez  grande  et  n'a  qu'un  étage;  elle 
se  compose,  i  la  manière  bréeilienbd,  d'un  bAtimênt  prin- 
cipal et  de  deui  ailes  fort  courtes,  entre  lesquelles  est  une 
sorte  de  galerie  [varanda),  que  couvre  le  toit  prolongé  du 
corps  de  logis  (f  ).  Devant  cette  maison ,  on  voit  un  raacho 
fort  vaste  et  ouvert  de  tous  les  citét ,  comme  ceux  de  la 
route  de  Rio  de  Janeiro  i  Minas  ;  c'est  là  que  les  voyageurs 
et  les  caravanes  trouvent  ud  abri. 

Le  pereonoel  du  ngittro  se  cwnpose  uniqoement  (1819) 
d'un  commandant,  qui  est  alftre»  (sous-lieutenant),  et  d'un 
soldat,  appartenant  tous  les  deux  à  la  compagnie  de  dra- 
gons ,  d'un  pédestre  {v.  p.  549]  et  d'un  employé  civil  {fiel). 
Ceux  qui  viennent  de  Rio  de  Janeiro  avec  des  manjun- 
dises  prennent  un  passe-debout  au  Registro  de  Mattaias 
Barbosa  (2)  et  le  présentent  ici;  on  pèse  les  ballots  pour 
savoir  si  rien  n'en  a  été  distrait,  et  les  droits  s'acquittent 
à  Villa  Boa  ou  tout  autre  endroit  de  la  inroTiDce.  Pour  s'as- 
surer si  les  voyageurs  qui  sortent  de  Goyax  n'eitoportent  pas 
des  diamants  et  de  l'or  en  poudre ,  on  les  visite  également 

(1)  Vonag*  4ant  U$  prooineeê  ê»  Bio  dt  Janeiro,  «te.,  I,  90. 

(2)  Le  regiilro  de  Hathiu  BarboM  est  le  bureau  de  douine  plut 
Bur  l«  chemia  de  Rio  de  Janeiro  k  tiitua ,  snr  la  limite  des  deai  pro- 
TiiMw(ray«0«(tatM  tei  provineénU  Hlo  de  Janeiro,  ttc,  1, 111). 


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VO  UO  DE  S.  FRinCISCO.  S 

an  Regiitro  dos  Arrependidos ;  formalité  bleii  absurde, 
pnfsque  les  contrebaadierB  y  échapperaient  en  faisant  quel- 
qoes  pu  à  droite  oa  i  gauche  du  bureau  de  douanes.  Les 
marchandises  qui ,  venant  originairement  de  Rio  de  Ja- 
neiro ,  ont  eu  d'abord  la  destination  de  Minas ,  et  qui ,  par 
quelque  drconsta»c%,  sont  ensuite  envoyées  de  cette  pro- 
vince h  Goyai,  payent  les  droits  au  Registro  dos  Arrepea- 
dldoB,  comme  si  elles  ne  les  avaient  pas  déjà  payés  à  ren- 
trée de  Minas. 

En  arrivant  au  Registro ,  je  présentai  mon  passe-port  au 
commandant.  Il  ne  visita  point  mes  malles  ;  mais,  lorsqu'il 
aurait  pu  m'offrir  une  place  dans  sa  varanda,  il  me  laissa 
aller  bomblement  sous  le  rancho  des  voyageurs,  où  je  fbs 
dévoré  par  les  puces  pénétrantes. 

Le  lendemain,  au  matin ,  il  me  remit  une  lettre  pour  le 
gouverneur  de  la  province,  et  me  pria  d'appuyer  la  de- 
mande qu'il  lui  faisait.  Il  y  avait  trois  ans  que  ce  vieillard, 
son  soldat  et  son  pédestre  n'avalent  reçu  de  solde,  et  il  sup- 
pliait le  général  de  ne  pas  laisser  mourir  de  faim  lui  et  ses 
camarades. 

Avant  mon  départ  [28  mai],  il  inscrivit  mon  nom  sur 
son  registre;  J'y  jetai  les  yeux  et  je  vis  que,  depuis  le  i9  de 
février,  11  n'était  entré  personne  dans  la  province  de  Goyai, 
et  cependant  cette  route  est  celle  qui  conduit  ici  de  Rio  de 
Janeiro etd' une  grande  partie  de  la  province  de  M)nas(181 9). 

Après  avoir  quitta  le  Registro  dos  Arrependidos ,  je  com- 
mençai k  voyager  dans  la  Serra  do  Corumbâ  e  do  Tocan- 
tins ,  suivant  à  peu  près  la  direction  de  l'est ,  pour  me  ren- 
dre ,  par  les  villages  de  S.  Lama  et  MeiaponU ,  i  Villa  Boa, 
la  capitale  de  la  province  (1). 

{It  Itm^Ttire  ■pproiintatif  du  Registro  dos  Arrependidos  lu  village 


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4  VOYAGE  ADX  SOURCES 

Ayant  monté  un  instant,  je  me  trouvai  sur  un  [dateau 
immense,  désert,  généralement  égal,  couvert  t«ntAt  de  pA- 
lurages  naturels  parsemés  d'arbres  rabougris,  tantAt  seu- 
lement de  Graminées,  de  quelques  autres  h^bes  et  de  sous- 
arbrisseaui.  Parmi  les  arbres ,  je  signalerai  seulement  le 
SoUmum  h  fruits  gros  comme  une  pomme  de  calville ,  que 
l'on  appelle  frula  de  lobo  [SoUumm  lyeocarpum,  Aug.  de 
S.  Hil.],  et  plusieurs  Apocynées  ,  entre  autres  celle  qu'on 
emploie  dans  le  pays  comme  purgatif,  sous  le  nom  de  ta'- 
6orn«  {Pîumiera  drastica,  Mart.).  Tous  les  végéUui,  alors 
desséchés  par  l'ardeur  du  soleil,  avaient  une  teinte  jaune  on 
pisâtre  qui  attristait  les  regards  ;  les  fleurs  avaient  disparu, 
et  l'aspect  du  pays  rappelait  celui  de  laBeauce,  quelque 
temps  après  qu'on  a  fait  la  moisson.  L'élégant  et  majestueux 
bority,  qui  s'élève  dans  les  fonds  marécageux,  détruisait 
seul  l'illusion.  Tout  le  monde  s'accorde  à  dire  qu'il  y  a  sur 
ce  plateau  un  grand  nombre  de  bëtes  fauves,  mais  qu'à 
cette  époque  de  l'année  elles  se  cachent  dans  les  fonds,  où 
l'herbe  est  encore  fraîche.  Les  oiseaux  étaient,  lors  de  mon 
voyage,  également  fort  rares  sur  le  plateau ,  car  mes  gens , 
qui  chassèrent  toute  une  journée,  n'en  tuèrent  que  trois. 

Je  fis  9  îegoas  en  deux  jours  sur  cette  immense  plaine; 
mais  je  ne  saurais  dire  si  ce  fiit  dans  sa  plas  grande  lon- 
gueur que  je  la  parcourus. 

de  Santa  Lniia  : 

Du  Registro  dos  Arrepcodidos  h  Ttipi,  cbnunièrc 4  legou. 

Pucndado  Biacho  Frio.lia- 

bittlion S 

Sitiode  Girapa,  maisoDDeUM.    i 

Santa  Luiia,  village 4 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  5 

A  la  fin  du  premier  jour  de  mon  voyage ,  je  m'arrêtai  à 
UD  sitio  appelé  Taipa  [pisé]  ou  Sîtio  Novo,  bâti  dans  un 
fond  marécageux ,  sur  le  bord  d'une  lisière  de  bois  que  tra- 
verse un  ruisseau.  Ce  titio,  habité  par  deux  ou  trois  fa- 
milles ,  se  compose  de  quelques  chaumières  construites  en 
terre  grise  et  couvertes,  les  unes  en  chaume,  les  autres  avec 
des  feuilles  de  bority  (1819).  Aucune  n'a  de  fenêtre;  les 
portes  qui  en  ferment  l'entrée ,  légères  et  sans  la  moindre 
soUdité,  ressemblent  è  nos  jalousies,  et  sont  faites  avec  des 
pétioles  de  feuilles  de  bority,  placés  verticalement,  rappro- 
chés les  uns  des  autres  et  attachés  avec  des  lianes. 

Fatigué  par  plusieurs  longues  marches,  je  passai  un  jour 
à  Taipa  pour  me  reposer  et  mettre  de  l'ordre  dans  mescol- 
lections.  Il  s'en  fallait  pourtant  que  j'y  fusse  à  mon  aise.  Je 
partageais  avec  deux  caravanes  un  rancho  ouvert  de  tous 
les  cAtés,  et,  pendant  que  je  changeais  mes  plantes  de  pa- 
pier, j'étais  singuliéronent  incommodé  par  un  vent  très- 
fcvt  qui,  depuis  plusieurs  jours,  régnait  dans  ce  pays  élevé. 
Ce  fut  le  jour  suivant  que  je  descendis  le  plateau.  Lors- 
qu'on y  a  fait  près  de  K  legoas,  le  terrain  commence  à  s'in- 
cliner; mais,  un  peu  auparavant,  il  devient  caillouteux  et 
d'un  rouge  obscur  :  des  arbres  rabougris ,  très-différents 
les  uns  des  autres  par  leur  feuillage ,  se  rapprochent,  con- 
fondent leurs  branches,  et  le  chemin  parfaitement  uni,  qui 
serpente  au  milieu  d'eux,  ressenfble  è  une  allée  de  jardin 
anglais.  Du  plateau  on  descend,  par  une  pente  caillouteuse 
et  assez  roide ,  dans  un  pays  plus  bas ,  mais  pourtant  mon- 
tueux,  et  bientAt  on  arrive  à  une  fazenda  agréablement  si- 
tuée au-dessus  du  Riacho  Frio,  ruisseau  bordé  de  bois  :  ce 
fut  là  que  je  fis  halte. 

Im  Fazenda  do  Rtacko  Frio  {fazenda  du  ruisseau  froid) 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


«  VOr&fiE  AUX  s 

est  assez  coasidérabte  pour  le  pays;  entendant  la  nmisoii 
du  maître,  couverte  eo  chaume,  diffère  à  peine  de  celle  des 
esclaves.  C'étaient  alors  de  jeunes  personnes  et  un  très- 
jeune  homme  qui  la  possédaient  en  commun.  Mon  mule- 
tier, José  Marianno,  vendit  aux  dames  quelques  bagatdles  ; 
mais,  conformément  à  l'usage  établi  parmi  les  femmes  hon- 
nêtes, elles  ne  parurent  point.  Le  frère  servait  d'intermé- 
diaire ;  il  portait  les  marchandises  pour  les  faire  voir,  rap- 
portait celles  dont  on  ne  voulait  pas,  et  répétait  les  propo- 
sitions des  achetenses.  Nous  n'étions  encore  qu'à  9  tegoas 
de  la  ft-ontière,  et  d^à  José  Marianno  fut  payé  en  partie 
avec  de  la  poudre  d'or  {vol.  I,  366). 

Le  Riacho  Frio  prend  sa  source  à  peu  de  distance  de  le 
fazmda  du  même  nom,  et  se  jette  dans  le  Rio  de  S.  Bartho- 
lomeu ,  que  je  passai  k  environ  1  lieue  de  cette  fasenda.  Le 
S.  Bartholomeu ,  peu  large  et  guéable  au  temps  de  la  sé- 
cheresse ,  ne  peut  étr«  travosé  qu'avec  dea  pirognes  dans 
la  saison  des  pluies ,  et  souve&t  alors  ses  eaux  causent  des 
fièvres  intermittentes,  probablement  parce  qi^'ayant  beau- 
coiip  gro^i  elles  entraînent  avec  dles  les  eaux  stagnantes 
de  quelques  marais. 

Un  peu  au  delà  de  cette  rivière  est  un  petit  poste  mill> 
taire  où  jadis  on  percevait  des  droits  sur  les  chevaux  ei  les 
bëtes  à  cornes  qui  entraient  dans  la  province.  On  payait 
l,â00reis(8  fr,  37  c.)  pour  chaque  bœuf;  mais  cet  impât 
exorbitant ,  eu  égacd  i  la  pauvreté  du  pays,  a  été  supprimé» 
et,  lors  de  mon  voyage,  le  poste  n'avait  plus  d'autre  utilité 
que  de  servir  d'asile  k  un  vieux  soldat  qui  comptait  quarante 
ans  de  services. 

Un  peu  plus  loin,  je  montai  sur  un  morne  élevé,  aride  et 
caillouteux,  qui  porte  le  nom  de  MorrodoAleanm  (le  morne 


^d:,;.  Google 


DD  tl«  BB  S.  HtAHOSaO.  7 

du  romarin).  Le  pays  que  l'on  découvre  de  bdd  sommet  est 
montueux,  sens  Habitaots,  sans  culture,  et  alors  toute  la 
campagne  était  desséchée  par  l'ardeur  du  so)^. 

Commeje  voulais,  ce  jour-lè.  veille  du  1"  de  juin,  celé- 
tH«r,  avec  mapetitecaravane,  l'anniversaire  de  mon  arrivée 
au  Brésil ,  je  ne  fis  que  3  lieues.  Je  m'arrêtai  au  SiUù  de 
Garapa  (1),  qui  se  compose  d'une  réunion  de  chétires  mai- 
sonnettes. Le  propriétaire  était  allé  an  village  de  Santa 
Luzia  pour  les  f%tes  de  la  Pentecdte;  mais  je  Aïs  très-lnen 
reçu  par  sa  femme.  Qoand  il  arriva,  il  trouva  toute  sa 
cbambre  occupée  par  mes  effets ,  et  cependant  il  me  fit  nn 
fort  bon  accueil.  Comme  les  propriétaires  de  Riacho  Frio, 
cet  homine  possédait  un  petit  tronpeau  de  moutons  ;  mais 
c'était  uniquement  pour  en  avoir  la  laine,  car  ici  on  ne 
mange  point  la  i^ir  de  ces  animaus.  Je  vis  chei  mes  hAtes 
des  couvertures  qui  avaient  été  faites  avec  cette  laine ,  et  je 
les  trouvai  assez  flnes. 

Quant  à  la  petite  Eète  que  î  Avais  voulu  célébrer,  quelques 
poulets  ci  du  pundi  en  firent  tous  les  frais  ;  je  n'  avais  point 
alors  à  me  plaindre  de  mes  gens  ;  ils  paraissaient  contents, 
il  n'eo  fallait  pas  davantage  pour  me  rendre  aussi  heureux 
que  je  pouvais  l'èb^. 

Au  delà  de  Garapa,  je  montai  sur  un  petit  morne  ;  en- 
suite le  chemin  fut  toujours  parfaitement  plat ,  quoique  de 

(1)  Le  mot  garapa  désigne  anjourd'hai  la  jas  de  la  canne  k  autre; 
mais  il  est  cerlaiDement  indieD,  et  il  parait  qae  les  indigèiMS  l'appli- 
qnaieiit  jadis  aai  boissons  douces  qa'ils  faisaient  avec  du  miel.  Toici, 
en  ellét,  comment  s'eiprime  Ranloi  Barm  dans  soa  Vof/age  av  Bri- 
(II,  tfadoil  par  Horean  en  IMT  :  •  Les  plus  gaillards  des  Tapuies  fu- 
rent cbercber  du  miel  saarage  et  des  fruits,  dont  ils  firent  un  breuvage 
qu'on  iwmme  de  la  giappe.  >  (Vojrei  mcm  UUIçirt  de»  pUinlei  iet  plus 
TemarqmHei,etic.,  1, 1B0.> 


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8  VOrA«E  AVX  SOUICBS 

droilp  et  de  gauche  je  visse  de  petites  montagnes.  La  végé- 
tation était  tonjours  la  même,  le  pays  également  désert,  les 
campagnes  également  incultes.  Je  passai  pluslears  ruis- 
seaux tardés  d'une  lisière  très-étroite  de  bois  qui  conser- 
vaient une  agréable  verdure;  ailleurs  tout  était  sec,  et  il 
n'y  avait  qu'un  petit  nombre  de  plantes  qui  eussent  encore 
des  Qeurs.  Enfin,  après  une  journée  fort  longue  et  fort  en- 
nuyeuse, j'aperçus  Santa  Ltaia  de  Goym ,  village  (1)  vers 
lequel  je  me  dirigeais. 

J'avais  une  lettre  de  recommandation  pour  le  curé  ;  je  la 
lui  envoyai  d'avance  par  José  Harianno,  qui  bientAt  revint 
'  me  dire  que  l'on  me  préparait  la  meilleure  réception.  On 
achevait  de  célébrer  à  Santa  Luzia  les  f%tes  de  la  PentecAte. 
Tous  les  cultivateurs  des  alentours  étaient  réunis  au  village, 
et,  au  moment  où  j'arrivai  sur  la  place  publique,  des  exer- 
cices de  chevaux  [eavalhada]  allaient  avoir  lieu.  Le  curé, 
M .  JoÂo  Teixbiba  Alvarez,  vint  au-devant  de  moi ,  et  me 
fit  un  excellent  accueil.  Sa  maison,  située  sur  la  place, 
était  pleine  d'hommes  qui  attendaient  que  les  courses  com- 
mençassent. On  servit  du  café  et  des  confitures,  et  l'on  se 
mit  aux  fenêtres.  BientAt  arrivèrent  une  douzaine  de  dames  ; 
on  les  fit  passer  dans  le  salon  [sala]  qui ,  Ji  l'instant  même, 
fut  évacué  par  les  honmies,  et  ceux-ci  restèrent  tous  dans 
un  petit  vestibule.  Cependant  les  courses  de  chevaux  ne  tar- 
dèrent pas  à  commencer.  On  avait  tracé  sur  la  place,  avec 
de  la  terre  blanche,  un  grand  carré  autour  duquel  étaient 
rangés  les  spectateurs  debout  ou  assis  sur  des  baucs.  Les 
cavaliers  portaient  l'uniforme  de  la  garde  nationale  [miVt- 

(I)  Poil  (ileiK,  [,  3TS)  donoe  è  SaaU  Loiia  le  titre  de  petite  ville. 
Ce  n'était  certainement  qn'nn  village  (  arratal  )  lonqn'il  y  passa  :  c'en 
était  encore  an  en  1833,  mais  on  en  a  fait  nne  ville  de  1832  à  1836. 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DU  RIO  DE  S.  PtUNcnCO.  9 

eû)  ;  ils  STuient  un  casque  de  carton  sur  la  t£te,  et  étaient 
montés  sur  des  chevaux  ornés  de  rubaos;  ils  se  bornèrent 
à  parcourir  la  place  en  différents  sens,  et,  dans  le  même 
temps,  des  hommes  également  à  cheval,  masqués  et  d^pii- 
sés  de  miHe  mnnières ,  faisaient  des  farces  à  peu  près  sem- 
blables à  celles  de  nos  paillasses.  Pendant  ce  spectacle  assez 
monotone,  je  causais  avec  le  curé,  et  je  ne  tardai  pas  k 
reconnaître  qu'il  réanissaK  de  l'instruction  à  beaucoup 
d'amabilité.  Quand  les  exerdces  furent  finis,  cbacDD  se  re- 
tira, et  les  dames  rentrèrent  chet  ^les.  Sons  une  circon- 
stance extnu>rdinaîre,  des  Brésiliennes  de  l'intérieur  ne  se- 
raient certainement  pas  sorties  de  jour  pour  aller  ailleurs 
qu'à  l'église.  A  peu  près  comme  celles  de  Minas  (1),  ces 
femmes  s'avançaient  aussi  lentement  qu'il  était  possible , 
enveloppées  dans  leurs  longues  capotes  d'étoffe  de  laine , 
an  chapeau  de  feub«  sur  la  tète,  toujours  à  la  file,  jamais 
deni  ensemble,  roîdes  comme  des  piquets ,  levant  k  peine 
les  pieds,  no  regardant  ni  à  droite  ni  à  gauche,  et  répon- 
dant tout  au  plus  par  un  signe  de  tète  bien  léger  aux  saints 
qu'on  leut  faisait. 

Le  lendemain,  le  curé  tat  très-occupé  ;  il  confessa  une 
foule  de  cultivateurs  qui  appartenaient  à  sa  paroisse ,  mais 
qui  demeuraient  à  plusieurs  journées  da  village.  Ces  hom- 
mes n'y  venaient  qu'une  fois  l'année,  et,  pour  se  confesser 
et  foire  leurs  pâques,  ils  proRtaientde  l'occasion  des  fêtes 
de  la  Pentecôte,  qui  se  célèbrent,  dans  le  Brésil ,  par  des 
réjouissantes  et  avec  beaucoup  de  solennité.  J'aurais  pu  me 
remettre  en  route  presque  aussitôt  après  mon  arrivée  ;  mais 
depuis  si  longtemps  j'étais  privé  du  plaisir  de  causer  avec 

■  Il  Vayatt  ditni  Ut  provinret  de  Mo  de  Janeiro,  ett.,  t,  133. 


Dy  Google 


10  rorA«  AUX  souMZS 

un  bomrae  iasbuit,  que  je  me  décidai  i  prolonger  moa  sé- 
jour è  Santa  Ltuia  pour  jouir  de  la  société  du  curé.  M.  Joâo 
Teiieira  Alvarez  entendait  le  latin,  le  françab,  l'italien  et 
l'espagnol  ;  il  connaisuit  la  plupart  de  nos  boas  autenn 
du  siècle  de  Louis  7CIV  et  possédait  une  bibliothèque  choi- 
sie de  plusieurs  centaines  de  rtriumes,  ce  qui ,  dans  ce  pays, 
était  une  grande  rareté.  Non-seulement  il  avait  des  con- 
Daissaoces,  il  était  bon  et  aimable,  mais  il  offrait,  dans  le 
cler^  brésilien,  une  exception  remarquable;  il  était  pé- 
néb^  du  véritable  esprit  de  ses  devoirs.  Il  avait  coutume 
de  Taire  des  prânes  tous  les  dimanches;  il  s'attachait  sur- 
tout h  inspirer  à  ses  paroissleos  l'amour  du  travail  et  usait 
de  tonte  son  influence  pour  les  déterminer  k  abanddimer 
leurs  pratiques  ncieuses  d'agriculture.  Un  missionnaire 
capucin,  dont  je  parlerai  plus  tard,  avait  passé  quelque 
temps  avant  moi  par  Santa  Lnxia.  Le  curé  l'avait  retenu 
trois  mois  chez  lui  ;  il  lui  avait  fait  faire  une  misaioD  et 
l'avait  engagé  à  prêcher  surtout  contre  l'oisiveté.  Le  mis- 
sionnaire était  entré  dans  les  vues  du  pasteur;  il  avait  été 
extrêmement  goûté  des  habitants  du  pays,  et  leur  avait 
donné  plusieurs  idées  utiles  sur  la  culture  des  terres  et  quel- 
ques arts  indispensables.  Les  travaux  apostoliquesdeH .  Joâo 
Teixeira  Alvarei  ne  restaient  point  sans  fruit ,  car  il  y  avait , 
assurait-on,  plus  d'union  et  de  bonne  foi  à  Santa  Luzia  que 
dans  les  autres  parties  de  la  province  de  Goyaz  ;  les  mœurs 
y  étaient  meilleures  et  le  concubinage  moins  ordinaire  (1). 

(1)  L«  géoéral  dâ  Cnatw  HattoB  dit  qoe,  lorsqu'il  Ti«iu  S.  Luiit  ea 
IS33,  pour  y  passer  uoe  revue,  il  eu  trouva  les  babilants  beaucoup  plut 
civilisa  qne  lente  la  popnUlioo  qu'il  avait  vue  depuis  Barbacens,  et  il 
•Uribne  h  leur  eicelleni  pasteur  cette  heureuse  différence.  Ce  deraier 
lui  rommuniqua,  ajonte-i-il,  un  trts-boa  mémoife  sur  11  justire  de 


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DU  RIO  DE  S.  mncasco.  ti 

La  psroîsM  doDt  Santa  Liizia  de  Goyai  (i)  (arraiiU  tU 
Santa  lMiia)ea  le  cheF-lieu- comprend  (1819}  une  popu- 
lation de  3  à  4,000  Ames  dissémio^  sur  une  surface  de 
50  legoas  de  longueur  et  30  dans  la  plus  grande  largeur  (3). 
De  cette  paroisse  dépendent  deux  succursales,  S.  Antonio 
dot  Monte!  CUtros ,  dont  je  parlerai  bientAt ,  et  Notta  Se- 
nhora  da  Ahhadia,  au  village  de  Couroi  (3). 

Tré»-agréableinent  situé  sur  le  penchant  d'un  coteau, 
au-dessus  d'un  vallon  asseï  large,  Santa  Luiia  s'étend  pa- 
rallèlement i  la  rive  droite  d'un  ruisseau  appelé  f^orr»;* 
de  Santa  Luxia  [4],  qui  ooule  au  fond  du  vallon.  Dans  sa 
largeur,  ce  village  est  divisé,  en  deux  parties  inégales,  par 
un  autre  ruisseau,  qui,  beaucoup  OKiins  considérable  que 
le  premier,  le  grossit  de  ses  eaui. 

Ettrémenient  étroit,  la  viUage  de  Santa  Loua  s'tiarglt 
pourtant  vers  le  milieu  de  sa  longueur.  Là  se  trouve  une 
place  presque  carrée,  où  a  été  bfltie  l'égliae  paroissiale, 
assez  grande,  isolée  comme  le  sont,  en  général,  les  édi- 


S.  LndtdMN.,  1,  IM;  0,159).  Il  n'est  pu  i  ma  eomiaiasance  qne  cet 
écrit  ajt  éU  puUié. 

(1)  Le  nom  de  Santa  Uuia  se  retrooTe  dans  plusienn  pirtùs  dn 
firéail.  Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  qu'il  ne  fknt  pas,  avec  an  toarisl«  Tran- 
çais,  écrire  Sa»-L*eia  (Snz.,  Smm.,  3T3). 

(2)  Uiii  Aoiooio  da  SUva  e  Soom  dit  qme  le  district  de  S.  Lniia  sst 
borné,  au  leraat,  par  le  Julgado  de  S.  Bomio,  qni  dépend  de  Hinaa; 
an  coachani ,  par  celui  de  Meiaptmte  ;  au  midi ,  par  la  justice  de  SlDta 
Cniz,  éloigné  de  10  fe^ooidn  chef-liea  du  district;  au  nord,  endn,  par 
celle  de  TraUras ,  distante  de  34  Itgoai ,  égalemenl  k  partir  du  TÎUage 
de  S.  Lozia  {Mm.  uUx(.,  36). 

i3]  Ce  village,  fort  miBérable,  a  été  blti  sur  le  plat«aa  qni  lermine  le 
rommencemeat  de  la  Serra  do  S.  Francisco  e  do  Tocantins. 
^4)  PohI  ne  parle  que  d'an  ruisseau  el  lui  donne  le  nom  de  Rio  Vtr- 


i„siiirr.d,i.  Google 


It  VOYAGE  AUX  SOURCES 

flces  religieux  dans  ce  pays  et  à  Minas,  passablemenl  ornée 
à  l'intérieur,  mais  sans  plafond.  Outre  l'église  paroissiale 
(Santa  Rita),  il  en  existe  encore  une  è  chacune  des  deux 
eitrémités  du  village.  L'une ,  celle  de  Noêta  Serthora  do 
Roiario  (ISotre-Dame  du  Rosaire],  avait  été  construite  par 
les  nègres,  dans  le  temps  où  l'on  trouvait  de  l'or  en  abon- 
dance aux  alentours  du  village  ;  at^jourd'hui  que  le  nom- 
bre des  noirs  a  beaucoup  diminué  et  que  tous  ceux  qui 
restent  encore,  libres  ou  esclaves,  passent  leur  vie  dans 
l'indigence,  leur  église  tombe  en  ruines.  La  seconde  église 
avait  été  commencée  peu  de  temps  avant  mon  passage,  et 
on  la  continuait  malgré  la  pauvreté  extrême  Â  laquelle 
^ient  réduits  les  habitants  de  Santa  Luria  (1);  tant  les 
Brésiliens  de  l'intérieur  sont  entichés  (1819)  de  la  manie 
de  construire  des  temples  inutiles,  manie  qui,  de  l'aveu 
même  des  prêtres  éclairés,  n'a  d'autre  fondement  qu'une 
vanité  puérile. 

Il  ne  Enut  pas  juger  des  villages  du  Brésil  par  les  nôtres, 
qui,  en  général,  n'offrent  qu'une  triste  réunion  de  chau- 
mières et  des  rues  fangeuses.  La  plupart  des  villages  de  Mi- 
nas et  de  Goyaz,  qui  doivent  leur  origine  à  des  mines  d'or, 
ont  dA  être  charmants  dans  le  temps  de  leur  splendeur,  et 
Santa  Luiia  a  certainement  été  l'un  des  plus  agréables  :  ses 
rues  sont  fort  larges  et  assez  régulières;  ses  maisons,  au 
nombre  d'environ  trois  cents ,  sont ,  à  la  vérité ,  construites 
en  bois  et  en  terre,  et  plus  petites,  plus  basses  que  celles 
des  villages  que  j'avais  traversés  jusqu'alors;  mais  toutes 
sont  couvertes  eu  tuiles,  crépies  avec  cette  terre  blanche 
qu'on  nomme  tabalinga  dans  l'intérieur  du  Brésil ,  et  quel- 

n  LllcDViaiipiscDcoreai'hevi-eeB  ISUiNat.,  /(in.,  I,  IWiK 


^d:,;.  Google 


DU  RIO  DE  5.  FRANCISCO.  13 

ques-unes  ont  à  leurs  fenêtres  des  carreaux  faits  avec  du 
talc  au»si  transparent  que  le  verre  (1). 

Des  mioeurs  de  Paracatù  fureot,  À  ce  qu'il  parait,  les 
premiers  qui  vinrent  s'établir  (1746)  i  Santa  Lazia  (2);  ils 
y  trouvèrent  en  abondance  de  l'or  d'nne  très-belle  couleur 
an  titre  de  23  carats  et  même  davautege  :  bientât  il  se  forma, 
dans  cet  endroit,  une  réunion  considérable  d'habitants,  et 
le  village  de  Santa  Luzia  devint  (1 7K7j  non-seulement  le 
chef-lieu  d'une  paroisse,  mais  celui  d'une  des  justices  [^tii- 
gados)  de  la  eomarca  du  ^d.  Les  travaux  des  premiers  co- 
lons sont  suffisamment  attestés  par  les  terrains  bouleversés 
qu'on  voit  sur  le  bord  des  deux  ruisseaux  et  tout  autour  du 
village.  Cependant  il  arriva  ici  la  même  chose  que  dans  une 
foule  d'autres  lieux.  D'abord  on  tira  de  la  terre  toot  l'or  que 
l'on  pouvait  extraire  sans  pdoe  ;  mais  les  mineurs  dissi- 
paient sans  prévoyance  le  résultat  de  leurs  recherches,  et 
lorsqne  des  travaux  plus  considérables  devinrent  néces- 
saires, lorsque  l'on  commença  k  éprouver  le  besoin  d'ësu 
et  de  machines,  les  fonds  et  les  esclaves  manquèrent  i  la 
fois  :  un  grand  nombre  d'habitants  s'éloignèrent,  et  leurs 
maisons  aujourd'hui  désertes  tombent  en  raines.  A  l'épo- 
que de  mon  voyage,  il  n'y  avait  pas  à  Santa  Luzia  une  saite 
personne  qui  s'occupét  en  grand  du  travail  des  mines,  et 
c'est  i  peine  si  quatre  &  cinq  nègres  créoles  allaient  encore 
chercher  des  paillettes  d'or  dans  les  ruisseaux.  Ces  hommes 
en  ramassent ,  au  temps  des  pluies ,  pour  environ  4  vintens 
(93  3/4  cent.)  par  jour;  mais,  pendant  la  sécheresse,  ils 

11)  Ce  Ulc  M  trouve  Mir  la  paroisse  de  S.  JiM ,  l'nne  de  celles  de  la 

(3)  PiuTTo  et  Pohl  s'aecordeol  k  iudiqaer  le  Dommé  iitooio  Bmtno 
de  Aievedo  comme  le  Toodateur  de  Santa  Liuia. 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


U  VOYAQE  AUX  SOURCES 

ont  quelquefois  de  la  peine  à  en  réunir  pour  4  otntem 

(25  7/16  cent.)-  Aujourd'hui,  k  l'exception  d'un  petit 
nombre  d'ouvriers  et  de  marchands,  tous  les  habitante 
de  Santa  Luzia  cultivent  la  terre  et  ne  viennent  au  village 
que  ies  dimanches  et  les  jours  de  K(e  ;  aussi ,  pendant  la 
semaine,  ne  voit-on  personne  dans  les  maisons  ni  dans  les 
rues.  La  découverte  dés  mines  d'or  a  eu  l'inconvénient  de 
jeter,  loin  des  cAtes  et  de  la  capitale,  une  population  con- 
sidérable qui ,  maintenant  que  les  mines  sont  épuisées  ou 
ne  poniraient  plus  être  exploitées  sans  des  avances  consi- 
dérables, tombe  dans  la  plus  grande  Indigence  (1). 

Comme  Santa  Luzia  est  situé  dans  un  pays  élevé,  ses 
alentours  sont  favorables  nou-seulement  aux  divers  genres 
de  culture  usités  cbes  les  Brésiliens  de  l'intérieur,  mais  en- 
core à  celle  des  plantes  d'origine  cancasique,  telles  que  le 
froment  (â)  et  surtout  les  cognassiers.  Hais  il  serait  inutile 
que  les  colons  plantassent  du  mais ,  des  haricots ,  du  riz 
plus  qu'il  ne  faut  pour  nourrir  leur  famille  ;  car,  excepté 
pendant  les  années  de  disette,  comme  celle  oîi  je  voyageais 
dans  le  pays,  ces  denrées  ne  peuvent  trouver  aucun  ache- 
teur. Les  principaux  articles  qu'exporteat  les  habitants  de 
Santa  Luzia  sont  des  peaux  de  bétes  sauvages,  quelques 

(1)  ■  Suta  LniM Ti  eo déeliuiit,  dit Hattog  (/Hn.,  1, 166],  depuis qve 
I  le*  cararaueg  ont  ttasé  àt  jwsaer  pir  ht  rttiUro*  doB  Arrcpeodidaa 
■  et  de  S.  MarcM  >  (poarprmdre  lacbenuDappeUPicadidoCorreïo  de 
Ooju  ).  Ce  village  était  t«mb«  dans  la  pins  tmia  décadence  bien  loiig- 
leinpa  avant  qa'on  eût  aoogi  h  tain  le  noanan  chemin  ;  mais  «es  misèrea 
doivent  avoir  augmenté  encore,  s'il  est  possible,  k  présent  que  les  cata' 
vanes  Qc  le  traversent  plus. 

(!)  H.  Pobl  dit  que  l'on  ne  cultive  pas  le  froment  i  S.  Laiia  ;  il  aura 
pndMblemeot  maotif,  k  Tiila  Boa,  dn  pain  bit  avec  dn  Ué  recueilli  sur 
le  lerriloire  de  cette  paroiMe. 


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DU  UO  DE  S.  FIANCISCO.  IS 

cuirs,  et  surtout  des  conBtures  de  coings  excelleDtes  qui 
vont  jusqu'à  Kio  de  JaQeiro.  C'est  l'éducatioD  du  bétail  qui 
fait  actueUeoieDt  la  ressource  la  plus  sAre  des  cultivateurs 
de  Santa  Luzia,  et  ils  n'eu  t^tireot  pas  nou  plus  de  grands 
avantages,  ooD-seulemeat  parce  qu'ib  ne  peuvent  se  dis- 
penser de  donner  du  sel  A  leurs  t>ëte8  A  come«  s'ils  veulent 
les  conserver  (f),  mais  bien  plus  encore  paixe  qu'ils  sont 
trop  éloignés  des  marctiands  pour  que  ceux-ci  viennent  les 
leur  acheter.  Ils  les  conduisent  à  Bambuhy  et  k  Formiga  (â) 
où,  si  loin  de  leur  pays,  ils  sont  forcés  de  vendre  aux  prix 
qui  leur  sont  offerts  »  et  il  est  facile  de  Sentir  que  de  tels 
voyages  ne  peuvent  être  entrepris  que  par  les  propriétaires 
qui  jouissent  encwe  de  quelque  aisance. 

A  la  vérîté ,  la  terre  fournit  abondamment  tout  ce  qui  est 
nécessaireàlaiourritureAiigaledescultivateurs;  ils  se  vêtent 
habituellement  avec  Ibs  tissus  grossiers  de  coton  et  de  laine 
qui  se  fabriquent  dans  leurs  maisons  ;  le  sel  mètne  leur  coAte 
peu  de  chose,  parce  qu'ils  l'échangent  à  S.  Rumâo  contre 
le  sucre  et  le  tafia  de  leur  pays  ;  ils  ne  connaissent  aucune 
de  ces  commodités  qui,  pour  nous,  sont  devenues  des  be- 
soins, et  leurs  maisons,  mdme  les  plus  soignées,  n'offrent 
guère  d'autres  meubles  que  des  benca  de  bois  et  des  ta- 
bourets couverts  avec  un  cuir.  Cqiendant,  quoiqn'fl  y  ait 
des  mines  de  fer  dâoi  leur  voisinage ,  ils  achètent  tout  ce^ 
lai  dont  ils  ont  besoin;  il  n'est  aucun  homme  qui  ne 

(1)  Cest  c«  qu'on  est  également  obligé  de  Ttiit  k  Minas,  k  moins  que 
le  terrain  ne  soit  ulpêlré  (yoja  mes  deux  Relalioni  de  vojage  déjk 
pablitea). 

(3)  Comme  on  l'a  ru  ta  ebapitre  intitaté,  SMê  du  voyopt  à  la 
toitree  d*  S.  Franeiico.  —  Le»  villages  de  Formiga  et  de  Piwtthjf, 
Formiga  est  sitôt  dans  le  Urmû  de  Tamandui ,  province  de  Blioas  Ge- 
raM.  Bambnhf  eit  peo  éloigtié  de  Formiga. 


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16  VOYAGE  AUX  SOURCES 

veuHle  avoir  un  vét«neiit  propre  pour  les  Jours  de  ftte,  au- 
cune femme  qui  ne  désire  porter  une  robe  d'indienne,  un 
collier,  des  pendants  d'oreilles,  an  mouchoir  de  mousse- 
line ,  une  capote  de  laine,  un  chapeau  de  feutre,  et  la  vente 
de  ces  objets ,  qui  sont  ici  à  des  prix  exorbitants ,  suffit 
pour  tirer  du  pays  le  peu  d'or  et  de  numéraire  qui  y  circule 
encore.  Déjà  il  n'y  a  plus  i  Santa  Luzia  qu'un  très-petit 
nombre  de  boutiques  mal  garnies;  tout  s'achète  à  crédit. 
Les  journaliers  ont  la  plus  grande  peine  à  se  faire  payer, 
quoique  leur  salaire  ne  soit  que  de  600  reis  [3  f.  75  c.)  par 
semaine;  et  des  nègres  créoles  me  disaient  qu'ils  aimaient 
mieux  recueillir  dans  le  ruisseau  de  Santa  Luzia  un  seul 
vintem  d'or  (0  f.  33  i  /2)  par  jour  que  de  se  louer  pour  4  vin- 
têtu  (94  cent-)  chez  les  cultivateurs,  qui  s'acquittent  en 
denrées  dont  il  est  impossible  de  se  défure.  Certains  colons 
sont  tombés  dans  use  si  grande  indigence,  qu'ils  restent 
des  mois  entiu^  sans  pouvoir  saler  leurs  aliments,  et,  quand 
le  curé  fait  sa  tournée  pour  la  confession  pascale,  il  arrive 
souvent  que  toutes  les  femmes  d'une  même  famille  se  pré- 
sentent l'une  après  l'autre  vêtues  du  même  habillement. 
La  paresse  a  beaucoup  contribué  à  faire  tomber  dans  la 
misère  les  cultivateurs  de  cette  contrée;  mais  la  misère  qui 
les  abrutit  et  les  décourage  doit  nécessairement,  à  son  tour, 
augmenter  leur  apathie  :  celle-ci  est  arrivée,  chez  plusieurs 
d'entre  eux,  à  un  tel  degré,  que,  pouvant  disposer  A  peu 
près  de  toute  la  terre  qui  leur  convient,  ils  n'en  cultivent 
pas  même  assez  pour  leurs  besoins.  J'ai  tracé  la  peinture 
fidèle  des  maux  de  ce  pays;  dans  le  chapitre  précédent, 
j'ai  indiqué  ies  remèdes  qui  m'oht  paru  les  moins  ineffi- 
caces :  puisse  ma  faible  voix  être  entendue  et  l'administra- 
tion s'occuper  enfin,  avec  quelque  bienveillance,  d'un 


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DO  IIO.DKS.  FUKCISCO.  17 

peupledontelIeneseinb]es'£tresouTenue,jUBqu'ici(1819), 
que  ponr  le  pressurer! 

Quand  je  voulus  partir  de  Santa  Luzia ,  pour  me  rendre 
au  village  de  Meiaponte,  et  de  là  à  Villa  Boa,  le  bon  curé 
ne  dit  qu'il  pouvait  y  avoir  environ  6  Je^otu  d;  demie  da 
chef-lieu  de  sa  paroisse  i  la  balte  la  plus  voisine,  et,  comme 
cette  marche  eût  été  extrêmement  longue  pour  un  seul 
jour,  il  me  décida  k  me  rapprocher  de  i  lieue  et  demie,  en 
allant  coucher  à  sa  maison  de  campagne  (1). 

Depuis  la  ville  de  S.  Joâo  del  Rei,  je  n'avais  vu  que  des 
fasendas  presque  toutes  mal  tenues  ou  des  itftof  plus  mi- 
sà^les  encore  ;  la  ckaeara  (3)  de  S.  Joâo  Evangelista  était 
véritablement  une  maison  de  campagne.  Située  sur  une 
pente  douce,  au  milieu  d'un  eompo,  elle  se  composait  d'un 
bétiment  commode  et  d'un  vaste  jardin  arrosé  par  un  ruis- 
seau. Ce  jardin  contenait  principalement  une  plantation  de 
cotonniers,  une  autre  de  bananiers,  un  petit  champ  de  can- 
nes i  sucre  et  des  caféiers  qui,  contre  l'usage  du  pays, 
éiaïeot  alignés  avec  une  parfaite  régularité.  J'y  vis  aussi  des 

(1)  Itinéraire  approiimatif  da  Tillage  de  Saoïa  Luzia  t  celui  de  Heia- 
P0Dt«: 

De  S.  Lniia  à  S.  Joào  EraDgeliaU,  maison  de  campagne.  1  1/!  legoa. 

—  PODle  ilta,  habitalion 5 

—  S.  AdIooio  dos  Hontes  Claros ,  village.  .  .  3  1/S 

—  Fazenda  dos  Hacacoa,  habitalioa 3 

—  Lige ,  ta  plein  air,  sdt  le  bord  d'un  niis- 

—  Cornmbà ,  village 3 

—  HeiapoDte,  village 3 


(3)  Le  mot  etuwara  indiqaait,  chef  les  Indiens,  leurs  mesquines 
plantati«i> ,  et ,  par  une  sii^^ère  eiteodon ,  les  Portugais-Brdsilieu 
l'ont  trinspoTté  aui  maisona  de  campagne  les  pins  éléganles. 


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18  VOTieR  ADX  SOORCBS 

cognassiers,  des  pommes  de  terre  qai  réossiasaient  fort 
bien  et  des  melons  presque  aussi  bons  que  ceux  de  France. 
A  l'aide  du  Traité  de  la  euUure  des  terret  de  Dnharoel,  le 
curé  avait  Tait  foire  une  charme  dont  il  se  servait  pour  cul- 
tiver des  terres  dont  s'était  emparé  le  capim  gordura.  les 
colons  du  voisinage  avaient  tous  prétendu  que  la  canne  h 
sucre  neviendrait  point  dans  l'endroit  découvert  où  il  l'avait 
plantée  ;  mais  sa  terre  avait  été  préparée  avec  la  charrue, 
il  y  avait  fait  mettre  an  peu  de  fumier,  et  la  canne  était  de- 
venue superbe.  Le  curé  avait  aussi  fait  faire  un  joug  diffé- 
rent de  ceux  du  pays  et  des  herses  ;  eoBn  il  élevait  des  bétes 
à  cornes,  et  avec  la  laine  d'un  troupeau  de  moutons  assez 
considérable  on  fabriquait,  dans  sa  maison ,  des  chapeaux 
dont  il  trouvait  un  facile  débit  (i). 

Sa  femille,  qu'il  soutenait,  était  fort  nombreuse  :  outre 
sa  mère,  il  avait  encore  chez  lui  des  sœurs,  plusieurs  niè- 
ces, un  frère  estropié,  et  sa  maison  de  campagne  était  un 
a^le  qu'il  voulait  leur  laisser;  mais  son  plan  avait  encore 
une  utilité  plus  générale.  Ainsi  que  j'ai  déjà  eu  occasion  de 
le  dire ,  le  nombre  des  jeunes  gens  est,  dans  ce  canton, 
beaucoup  moindre  que  celui  des  jeunes  filles ,  et  celles-ci 

(1)  Si  l'on  paavait  décider  les  mendianls  valides  (TOfei  le  chapitK 
■niTaot)  et  les  Tifabonds  (txutiot)  h  iraTtiller,  le  cintoa  de  SaoU  Lniia 
serait  très-propre  k  l'établissement  de  quelques  fabriques  ;  car,  dans  les 
années  coininnnes,  les  vivres  ;  sont  i  des  prix  tTès-modiqaes,  ce  qui  (M 
la  cnoséqneoce  Décessaire  dn  peu  de  rapports  qu'entretient  ce  pays  avec 
les  antres  contrées,  de  la  Terlilité  du  sol  et  de  la  rareté  de  l'argent.  La 
farine,  le  ni,  le  ricin  s'y  vendent  (1819)  eOO  reis  (3  fr.  75)  l'alqaeire ,  et 
l'alqueire  de  ce  pays  eat  d'un  tiers  plus  grand  que  celui  de  Hlnas ,  qni 
lui-mime  est  pins  grand  que  celui  de  Rio  de  Janeiro  ;  le  mais  se  paye 
3M  reia  (1  fr.  87)  l'alqniere,  le  sucre  1,MW  reis  (B  fr.  37)  l'ambc 
(Ukilog.  7  heciog.),  le  lard  l.BOO  rets  (11  fr.  23)  l'arrobe,  la  viaadelrat- 
cbe  600  reia  <3  fr.  73),  la  sècbe  l.SOO  reis  (9  fr.  37). 


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DO  UP  DE  S.  FURCISCO.  19 

se  trouvent  eiposées  &  toos  les  dangers  de  la  misère  et  de  la 
séduction.  M.  Joâo  Teixeira  avait  le  projet  de  hire  de  sa 
chaeara  one  maison  de  retraite  non-seulement  pour  ses 
nièces  et  ses  sœurs ,  mais  encore  pour  les  jeunes  personnes 
bien  nées  qui  voudraient  se  joindre  à  elles.  On  devait  y 
mener  une  vie  commune  en  suivant  une  règle  fixe,  mais 
sans  prononcer  aucun  vœu  ;  les  exercices  devaient  être  très- 
variés  et  le  travail  en  Taire  la  base  principale. 

n  y  a  d^&  longtemps  que  mon  ami  le  docteur  PdU  a 
payé  un  juste  tribut  d'éloges  au  curé  de  Santa  Luiia.  J'au- 
rais été  heureux  de  m'nnir  plus  tAt  à  lui  ;  de  triâtes  circon- 
stances ne  me  l'ont  pas  permis.  Si  ces  feuilles  peuvent  tom- 
ber entre  les  mains  de  M.  Joâo  Teixeira  Alvarez,  il  verra  que 
les  deux  étrangers  qu'il  a  reçus  sous  son  toit  ont  conservé 
le  souvenir  de  ses  vertns,  et  que  les  hommes  honnêtes  de 
toutes  les  nations,  unis  par  les  liens  d'une  douce  fraternité, 
savent  se  comprendre,  s'estima-  et  ^aimn*.  Si  la  Provi- 
dence a  enlevé  ce  digne  pasteur  à  son  troupeau ,  que  nos 
louanges,  après  des  motifs  pins  élevés,  excitent  ses  cou- 
frères  et  ses  successenrs  i  suivre  son  exemple  I 


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VOYAGE  AVX  SOURCES 


CHAPITRE  XVni. 

s.  Airroino  dos  iioirTBS  claros.    —   lb  viixaoe  du 

COHIJHBÂ.   —   LKS   HONTES  PYBENE08.   —   LK  VILLAGE 
DE   HEIAFOHTB. 


le  payB  situé  sa  d«1i  de  S.  Joio  EtiDgeHsia.  —  Les  gwùitada*.  Gnie 
de  U  OoraiMn  Utire  des  pUuloi  qui  j  croisseot. — Faximla  de  Ponte 
illla.  ~  Pays  situé  ta  delà  de  cetle  fasmda.  Va  r«llo«<a  fort  remtr- 
quble.  —  Morro  do  Tifoo.  —  Le  village  de  S.  Antonio  doê  Monte» 
Clarot.  Sa  chapelle.  Son  nniqae  maiscm.  —  Pays  ritné  au  deU  de 
S.  Antonio.—  jHMrôo  do*  Maeacoi.  PaorreU.  La  manière  dont  s'ac- 
quitta on  acbetenr.  —  PajB  simé  an  deU  de  Hacacoa.  L«  PaUniCT  ap- 
pelé andaid.  TégéUtioD.  —  Une  halle  en  plein  air.  —  Longnenr  des 
lienes.  —  Le  village  de  CorvmbA.  Ti»ite  de  deui  ecdésiastjqaes.  — 
Eieurslon  aux  Montât  Pyrentot.  Oœrîftiou  détaillée  de  ces  menta' 
gaes.  —  L'aoteor  s'égare.  H  Terient  ï  Conimbi.  —  Pafs  aitné  mtr* 
CoromU  et  le  village  de  Meiap<mte.—  Ce  village.  Tiaîle  au  commao' 
daot,  puis  an  curé.  Situation  de  Heiaponte.  La  paroisse  dont  U  est  le 
chef-lien.  Ses  maisons  :  ses  mes  ;  se*  églises.  Tae  que  l'on  déconnc 
de  la  place  publique.  Écoles.  Hospice  des  frères  du  tiers  ordre  de 
S.  Frantois.  Salubrité.  —  Bîsicire  du  village  de  Meiaponte.  —  Les  ha- 
bitants actuels,  ponr  la  plnpart  agriculteurs.  Le  tabac  et  le  lard  objets 
d'eipluilation.  Culture  dn  cotonnier.  Raisins  eicellenU.  —  Mendicité. 
—  Chaleur  eiccasive.  —  l'abbé  Lniz  Gonu&i  db  CiMiaco  Fuc». 


Entre  la  chacara  de  S.  Joâo  Evangelista  et  la  fazenda  de 
Ponte  Alta,  qui  en  est  éloignée  de  5  legoaa.  et  où  je  fis 
halte,  je  traversai,  comme  entre  Garapa  et  Santa  Liuia 
(v.  le  chapitre  précédent),  un  pays  parfaitement  plat,  ayant. 


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DU  110  DE  S.  FUNCISCO.  31 

A  droite  et  k  gauche,  de  petites  montagnes.  Celles-ci  sont 
des  contre-forts  des  Montes  Clarot,  dont  je  parlerai  bien- 
tôt, comme  ces  deroiers  sont  eux-mèmea  des  contre-forts 
des  Monta  Pyreneoa  [i]  ;  ou  ,  pour  mieux  dire  ,  dans  ces 
hauteurs  plus  ou  moins  reijaarqnables ,  on  ne  doit  voir  qae 
des  portions  du  grand  diviseur  des  eaux  du  nord  et  du  sud, 
la  Serra  do  Gorumbâ  et  do  Tocantins. 

A  l'exception  d'une  maisonnette  qui  me  parut  désale,  je 
Devis,  dans  toute  ma  journée,  aucune  habitation,  je  ne 
rencontrai  aucun  voyageur,  je  n'aperçus  aucune  trace  de 
culture,  ni  même  une  seule  bète  à  cornes.  Le  pays  offre' tou- 
jours la  mtoke  alternative  de  campos,  à  peu  près  unique- 
ment couverts  d'herbes ,  et  d'autres  catnpoj  où ,  au  milieu 
des  Graminées,  s'élèvent  des  arbres  rabougris  et  tortueux 
(taboleiros  eoberUu,  taboUiroi  deteobertog).  Depuis  long- 
temps je  ne  voyais  plus  le  coptm  frecha,  cdte  Graminée 
qui  caractérise  les  gros  piturages  du  midi  de  la  province  de 
Minas;  cependant  ceux  du  canton  que  je  parcourais  alors 
sont  aussi  très-bons,  et,  malgré  la  sécheresse  qu'il  faisait 
depuis  si  longtemps  ,  l'herbe  y  conservait  une  assez  belle 
verdure.  Les  fleurs  étaient  toujours  aussi  rares;  cependant 
j'en  trouvai  un  assez  grand  nombre  dans  une  qveimada, 
nom  que  l'on  donne,  comme  je  l'ai  dit  ailleurs  (3),  aux  pi- 
turages récemment  incendiés. 

À  peine  l'herbe  d'un  campo  naturel  a-t-elle  été  brûlée , 
qu'au  milieu  des  cendres  noires  dont  la  terre  est  couverte 
il  parait  ci  et  li  des  plantes  naines,  souvent  velues,  dont  les 
feailles  sont  sessiles  et  mal  développées,  et  qui  bienlAt 


(1)  Poil,  Acite,  [,  ZSS. 

{2)  Vojiaçe  dam  lei  provinrei  àc  Rif)  de  Jantiro,  t 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


tt  VOYAOB  ADX  SOOICES 

donnent  des  fleurs.  Pendant  longtemps,  j'ai  cru  que  ces 
plantes  étaient  des  espèces  distinctes ,  particulières  aux 
queimadat,  comme  d'autres  appartiennent  excltisirement 
aux  taillis  qui  remplacent  les  forêts  vierges  ;  mais  un 
examen  attentif  m'a  convaimiu  que  ces  prétendues  espèces 
ne  sont  que  deB  individus  avortés  d'espèces  naturellement 
beaucoup  plus  grandes  et  destinées  À  fleurir  dans  une  saison 
différente.  Pendant  la  sécheresse,  époque  de  l'incendie  des 
campos ,  la  végétation  de  la  plupart  des  plantes  qui  les 
composent  est,  en  quelque  sorte,  suspendue,  et  cellesH:i 
a'oRÏ'ent  que  des  tiges  languissantes  ou  desséchées.  Cepen- 
dant il  doit  arriver  ici  la  même  chose  que  dans  nos  climala; 
durant  cet  intervalle  de  repos,  les  racines  doivent  se  forti- 
fier et  se  remplir  de  sucs  destinés  à  alimenter  des  pousses 
nouvelles,  comme  on  en  voit  un  exemple  frappant  cbet  la 
Colchique  et  chez  nos  Orchidées.  Dans  les  queimadeu,  l'in- 
cendie des  tiges  anciennes  détermine  le  développement  des 
germes;  mais,  comme  les  nouvelles  pousses  paraissent 
avant  le  temps ,  et  que  les  réservoirs  de  sacs  destinés  à  les 
nourrir  ne  sont  pas  encore'  snfBsamment  remplis ,  les 
feuilles  se  développent  mal  ;  le  passage  de  celles-ci  i  la 
Qeur  se  fait  rapidement ,  et  cette  dernière  met  bientM  un 
terme  i  l'accroissement  de  la  tige  [i).  Comme  je  l'ai  déjà 
fkit  ailleurs,  fengagerai  les  botanistes  qui  décrivent  les 
plantes  du  Brésil  d'après  des  herbiers  à  faire  des  efforts 
pour  rapprocher  des  véritables  espèces  les  avortons  singu- 
liers que  produisent  les  ipieimadas ,  et  à  ne  pas  céder  A  ta 

(1)  Voju  moo  Introduction  d  {Hiiloire  dei  pUmla  let  pbu  rrawr- 
gttabtei  du  Brétil  et  du  Paraguay,  et  mou  Tableau  géographique  de 
la  végélation  primitive  dan*  la  prooinfe  de  Minai  Geratt  (NameltM 
amnaUi  det  vofoget,  1837). 


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DO  UO  DE  S.  nUNCISCO.  t3 

puMIe  vanité  de  les  indiquer  avec  des  noms  nouvuui 
comme  espèces  distinctes  (!]. 

La  faxenda  de  Ponte  Alla  (pont  élevé]  (3)  où  je  Ss  halte, 
ainsi  qu'on  l'a  vu  tout  i  l'heure,  estsituéesur  le  bord  d'un 
niissean  qui  porte  le  même  nom  qu'elle  :  comme  tant  d'au- 
très  habitations,  elle  tombait  alors  en  ruine. 

Le  pays  que  je  parcourus,  après  l'avoir  quittée,  est 
encore  désert;  mais  il  cesse  d'être  plat  et  devient  mon- 
tueai  :  ce  sont  tà.  (3)  les  Montes  Claros  (montagnes  dairee), 
dont  j'ai  déjà  dit  quelques  mots. 

Ce  fut  dans  ces  lieux  élevés  que,  pour  la  première  fois, 
je  vis,  parmi  les  plantes,  des  campoi  cobertoi  et  des  campo» 
detcoberlos,  cette  monocotylédone  arborescente  si  pitto- 
resque, si  caractéristique  dont  j'ai  parlé  dans  le  tableau 
général  de  la  province,  ce  singulier  ViAloùa  qui  se  bifurque 
plusieurs  fois,  et  dont  les  rameaux,  revêtus  d'écaillés ,  se 
terminent  par  une  belle  fleur  que  [H-otége  une  touffe  de 
foiilles  linéaires,  courbées  comme  les  branches  des  saules 
pleureurs  et  agitées  par  le  plus  léger  vent. 

Du  haut  d'un  morne  assez  élevé  qu'on  nomme  Jforro  do 
7î^âo{le  morne  du  tison),  j'aperçus,  dans  le  lointain,  les 
deux  pics  qui  couronnent  les  Montes  Pyraieos.  Sur  le  même 
mome ,  j' aperçus  aussi  la  i^pelle  de  S.  Antonio  dot  Moa- 
tet  Claros,  qui  en  est  éloignée  d'environ  un  quart  de  lieue  ; 
et,  après  avoir  passé  un  ruisseau  qui  porte  le  même  nom 
que  cette  chapelle ,  je  fis  halte  h  une  maison  qui  en  est  peu 
éloignée. 
Le  Rio  de  S.  Anlonù^do»  Montes  Claros,  qui  prend  sa 

(1)  Voyage  dam  le*  province*  de  Rio  de  Janeiro,  etc..  1 .  2TT, 
lat  Ce  n'est  poioi  Ponte  Alto,  comme  a  écrit  le  docteur  Polil. 
i3)  Po».  Btiit,  I. 


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M  rOTAGB  AUX  SOimCES 

8oarc«  i  8  legoas  de  la  chapelle  et  se  jette  dans  le  Conmbà, 
arrose  des  terrains  aurifères.  Autrefois  on  tira  beaucoup 
d'or  des  environs  de  S.  Antonio  (1)  ;  mais,  foute  de  bru, 
les  lavages  ont  été  abandonnés,  et  le  village  de  S.  Antonio 
doi  Monte*  Claroi  se  trouve  réduit  aqjoQrd'haî  i  l'expres- 
sion la  plus  simple,  à  la  chapelle  et  la  maison  dont  j'ai  parié 
tout  i  l'heure  (2). 

Cette  chapelle  est  fort  petite,  et  pourtant  elle  est  une  des 
trois  succursales  qui  dépendent  de  rimmense  paroisse  dont 
le  village  de  Santa  Luzia  est  le  ch^-lieu.  Le  curé  y  venait 
dire  la  messe  deux  fois  dans  l'année,  i  l'époque  de  la  fSte 
du  patron,  et  lorsqu'il  faisait  sa  tournée  pour  confesser  ses 


Le  propriétaire  de  la  maison  où  je  fis  halte ,  et  qui  con- 
stitae  tout  le  village,  avait  autrefois  une  boutique;  mais 
il  avait  été  obligé  de  renoncer  à  son  commerce,  parce 
que  personne  ne  le  payait,  et,  lors  de  mon  voyage,  il  w 
bornait  à  vendre  aux  caravanes  le  maïs  dont  elles  avalait 
besoin. 

An  delà  de  S .  A  ntonio  dos  Hontes  Clan» ,  je  continuai  i 
traverser  un  pays  montueux ,  inculte  et  désert,  où  des  li- 
sières de  bois  fort  étroites  bordent  les  ruisseaux,  et  où  le 
même  Vellotia  se  montre  encore  dans  les  deux  sortes  de 
pAturages  naturels  qui  se  partagent  la  campagne. 

<1)  PiuTTo  dit  (jrm.,  IX,  213),  d'apTès  les  habîUnts  de  ce  caoloa. 
<tiie  l'on  troare  des  ptrcelles  d'or  dans  les  ealraille»  de  tons  les  animiai 
qui  ;  ODt  été  Dourria.  Si  1«  (ïiteslTrai,  il  Tant  supposer  qu'il  eiiste  dira 
la  psfs  des  terains  tont  k  )a  Tais  solptlr^a  et  annftrea;  car  l'or  ne  peat 
passer  dans  les  liges  et  les  Tciiilles  des  plantes ,  et  l'on  sait  que  le  béui) 
inu^e  avec  délice  la  terre  imprégnée  de  salpêtre. 

(i)  s.  AdIodio  u'a  pas  plus  que  S.  Lona  (I81B)  le  tilre  de  TiUe  dont 
l'honore  le  docteur  Pohl. 


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DO  BIO  DE  S.  nUHCSCO.  » 

Sar  plusiears  montes  assez  élevés,  j'eus  le  plaisir  d'ad- 
mirer une  vue  fort  étendue ,  principalement  but  celai  qui 
porte  le  nom  de  Morro  da  Pedra  Branea,  parce  qu'il  est 
couvert  de  fragments  de  pierres  blanches. 

Après  avwr  descendu  ce  morne,  je  passai  bientôt  un  ruis- 
seau qui  porte  le  nom  de  Bibeirâo  da  Âtitmha  {torrent  du 
petit  tapir)  (i),  sur  le  bord  duquel  je  vis  quelques  misé- 
rables chaumières  qui  tombaient  en  ruine. 

A  environ  1  liaue  de  cet  endroit,  je  fis  balte  près  d'nn 
autre  ruisseau  appelé  Rtbeirào  dos  Macaeot  [  torrent  des 
sioges),  qui  prend  sa  source  à  5  lieues  de  là,  plus  ou  moins, 
et  est  on  des  affluents  du  Rio  CorumbA.  Ici,  comme  au  Ri- 
beirâo  du  petit  tapir,  il  yavait  quelques  chaumières  eu  ruine 
que  l'on  décorait  du  nom  de  Fasenda  dos  Macacot,  et  dont 
aujourd'hui  il  n'existe  probablement  plus  de  vestige.  José 
Marianno  ofiHt  ses  marchandises  au  maître  de  la  maison  ; 
mais  on  lui  répondit  qu'on  n'avait  pas  d* aident  :  la  i^upart 
des  habitants  de  la  paroisse  de  Santa  Lnzia  auraient  pu , 
avec  vérité,  faire  la  même  réponse. 

Le  propriétaire  de  Macacos  fut ,  du  moins,  plus  discret 
que  celui  d'une  autre  maison  où  je  fis  halte  dans  ce  voyage. 
Ce  dernier  m'avait  offert  ses  poules,  du  papier,  son  déjd^- 
oer;  il  voulut  absolument  m'accompagner  une  partie  du 
chemin  :  il  me  faisait  toute  sorte  d'offres ,  il  devait  m' en- 
voyer des  plantes ,  des  peaux  de  serpent,  je  ne  sais  quoi 
encore .  Tant  de  politesses  m 'avaient  d' abord  étonné  ;  mais 
elles  cessèrent  de  me, surprendre,  quand  je  sus  que  cet 
homme  avait  eu  l'adresse  de  se  faire  vendre  quelques  mar- 
chandises à  crédit  par  José  Marianne.  Ayant  aussi  peu 

(1)  ■>■  Cuulu  Hatlos  écrilM((N.,1,  l«S)  RUMtrào  diu  Antinba». 


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»  VOYAGE  AUX  SWICES 

d'agent  que  le  reste  de  ses  compatriotes,  il  avait  cherché  à 
s'acquitter  en  complJineDts;  nous  n'enteadlines  plus  parlef 
de  lui,  ni  de  ses  plantes,  ni  de  ses  peaux  de  serpent. 

Nous  étions  alors  au  mois  de  juin  et  dans  nn  pays  fort 
élevé;  la  nuit  que  nous  passâmes  à  Macacos  fut  extrême- 
ment froide,  et,  à  six  heures  du  piatin,  le  thermomètre 
n'indiquait  encore  que  &  d^rés  1/2  R. 

Au  deli  de  Macacos,  le  pays  continue  k  être  montueax, 
désert,  sans  bestiaux  et  sans  culture. 

A.  environ  1  lieue  de  cette  chétive  faxmda,  je  vis  qaà- 
ques  cliaumières  à  demi  ruinées  sur  le  bord  d'un  ruisseau, 
qui  porte  le  nom  de  Biimrào  da  PotUe  Âîta  (torrent  du 
pont  élevé)  ;  ensuite,  pendant  toute  la  journée,  je  n'aperçus 
pas  le  plus  léger  vestige  du  travail  de  l'homme. 

Depuis  \n  frontière  jusqu'ici,  les  bouquets  de  bois  (ca- 
pôei]  avaient  été  beaucoup  plus  rares  dans  les  eampoê  qu'ils 
ne  le  sont  dans  ceux  de  la  province  des  Mines;  au  delà  de 
Macacos,  ils  deviennratpluscommons,  probablement  parce 
que  les  enfoncements  où  ils  ont  coutume  de  croître  sont  plus 
nombreux,  plus  profonds,  mieux  abrités  ^  plus  humides. 
J'eus  le  plaisir  de  retrouver,  dans  ces  bois,  le  palmier  élé- 
gant appelé  atidttiâ  ,  que  j'avais  d^à  vu  en  commencaot 
mes  voyages  et  que  j'ai  décrit  ailleurs  (i);  ce  palmier  dont 
la  tige,  en  grande  partie  couverte  d'écaillés,  sonble  s'évaser 
de  la  base  au  sommet,  dont  les  longues  feuilles  ailées,  vertes 
d'un  cAté,  blancbAtres  de  l'autre,  se  recourbent  comme  un 
immense  plumet,  et,  ne  présentant  qu'un  de  leurs  bords  à 
l'épaisseur  du  tronc,  vacillent  au  moindre  veut;  dont  les 
cocos,  gros  comme  des  pommes,  pendent  en  longs  r^imes. 

(1)  Vouagedan*  U$  prwineu  <U  Rio  de  Janeiro,  tU.,  i ,  IM. 


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DU  BIO  DE  S.  FRANCISCO.  J7 

accompagnés  d'une  spathe  qui  r^semble  à  une  nacelle. 

Ailleurs  que  dans  les  bois,  la  végétatioD  oOre  toujours  la 
même  alternative,  et  dans  an  très-grand  nombre  de  cam- 
pât se  montre  encore  le  VelUma  artioresœnt  que  j'ai  si- 
gnalé déjà  comme  caractérisant  ces  lieux  élevés.  TantAt  il 
occupe  à  loi  seul  des  espaces  considérables  ;  tantAt  quelques 
arbres  rabougris  poussent  de  loin  en  loin ,  au  milieu  des 
tiges  de  cette  singulière  monocotylédone;  ailleuni,  les  ar- 
bres raboogris  ne  luiiaissentplus  qu'une  faible  place  ;  c'est 
cette  plante  qui,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  établit  la  plus 
grande  différence  entre  les  campas  de  ce  canton  et  ceux  de 
la  province  des  Mines.  D'ailleurs,  on  retroave  ici  les  mêmes 
Qualea  qu'à  Minas ,  le  Vockysia  a'  502 ,  la  Gentianée 
n*  206,  si  commune  dans  tous  les  mmpot,  VHyptis  ti°  1S7, 
la  Composée  453,  le  Liseron  si  connu  comme  purgatif, 
sons  le  nom  de  velame,  le  pequi  (Caryoear  bratHietuù, 
Ang.  deS.  Hil.,Juss.,  Camb.)(l},le  tani&oriI,qu'onai^lle 
ici  vmAoltco  do  campo,  le  barba  Umào,  l'Aurantiacée? 
n"  632,  le  pacari  [Lafomtia  Pacari,  Ang.  de  S.  Hil.), 
l' Acanthée  n"  612,  le  qyina  do  campo  [Stryehnot  ptettdo- 
guitta,  Aug.  de  S.  Hil.,  PI.  tu.),  etc. 

A  peu  de  distance  de  Mecacos.  je  passai  une  petite  rivière 
qui  coule  parfaitement  limpide  sur  nu  lit  de  sable,  et  qu'on 
aj^lle  pour  cette  raison  ittbetrOo  dat  Areat  (torrent  des 
sables);  c'est  cette  rivière,  l'un  des  afDaentsduCorumbâ, 
qui  sépare  la  paroisse  de  Santa  Luzia  de  celle  de  Meiaponte. 


(1)  J'écris  ici  le  nom  Tulgiire  de  ce  petit  «bre  ramme  il  l'a  iii , 
d'après  mes  notée,  dans  le  Flora  araïUfiK  meridionatii  ;  mais  je  ne 
sais  trop  si,  d'après  la  manière  dont  on  le  prononce ,  il  oe  serait  pas 
mieui  d'^rrire  pf7«j.  C'est  reTtaioement  le  nidne  arbre  qui:  rtzal  a  in- 
diqué sons  leooiudc  Pi^ihà  (Cfyr.,  I,  III). 


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»  VOTIGE  AUX  SOtntCES 

11  est  vraisemblable  que  le  Ribeirâo  des  Areas  et  les  trois 
ruisseaux  que  j'avais  passés  auparavant  grossissent  au 
temps  des  pluies  d'une  manière  très-seosible ,  et  c'est  là  ce 
qui ,  sans  doute,  leur  a  fait  appliquer  le  nom  de  torrent  [ri- 
beirSo)  (1). 

Comme  il  n'existe  pas  une  seule  chaumière  dans  un  es- 
pace de  6  à  7  legooi,  depuis  le  Ribeirâo  da  Ponte  Alta,  dont 
j'ai  d^À  dit  deux  mots,  jusqu'au  village  de  Conunb&,  je  pris 
le  parti,  après  une  marche  de  4  legoag,  de  faire  halte  dans 
uD  bois,  sur  le  bord  d'un  ruisseau,  au  lieu  appelé  Loge 
(  pierre  mince}.  Mes  malles  furent  placées  dans  une  espèce 
de  salle  couverte  de  gazon  et  entourée  de  grands  arbres; 
le  temps  était  si  beau ,  que  nous  ne  fîmes  pas  même  de  ba- 
raques pour  nous  garantir  pendant  la  nuit. 

On  ne  compte  que  3  legoag  de  Lage  au  village  de  Co- 
rnmbâ,  oà  je  fis  halte;  mais,  si  j'en  juge  par  le  temps  que 
je  mis  k  les  parcourir,  il  doit  y  avoir  bien  davantage.  En 
général,  les  lieues  de  ce  pays  sont  d'une  longueur  extrême, 
comme  cela  arrive  toujours  pour  les  mesures  de  distance 
dans  les  contrées  désertes,  où  l'on  est  accoutumé  à  parcou- 
rir des  espaces  considérables  pour  la  plus  petite  affaire. 

Entre  Lage  et  Corumhâ,  le  pays  ne  change  point,  si  ce 
n'est  que  l'ou  voit  sur  le  flanc  des  mornes  un  assez  grand 
nombredebouqu^debois.  Nulle  part  on n'aperçoitun  pied 
de  maïs,  de  riz  ou  de  coton ,  et  les  alentours  du  village  de 


(1)  PohI,  qui  a  travcTté  ce  caoUn^dang  la  mIsoii  descaai.  ditposi- 
lîTemenl  (RtUe,  I ,  S8(}  que  sonvent  le  Ribeirâo  daa  Areos  grossit  tout  k 
coup  de  telle  façon,  qu'il  deTient  impossible  de  le  passer.  D'ailleurs  1m 
tMHns  de  Hio  de  Areat  et  Hio  Areat ,  que  le  même  anletlr  demie  i  U 
rivière  dont  il  s'agit ,  soot  évidemment  erronés ,  car  la  langue  portugaiae 
repousse  leur  composition. 


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DD  MO  tu  S.  FRANCISCO.  19 

Corambà  ne  paraissent  pas  moins  incultes  que  les  lieai  les 
plus  éloignés  de  tonte  habitation.  Le  cheiDÏn  est  si  peu  fré- 
quenté, que,  sur  le  bord  des  ruisseaux,  le  capimgordura 
en  a  fait  presque  entièrement  disparaitre  la  trace. 

Avant  d'arriver  k  Corumbà,  j'envoyai  José  Marianno 
demander  un  g!te  au  desserrant,  qui  lui  indiqua  une  mai- 
son inhabitée ,  comme  il  y  en  a  tant  dans  tous  les  villages 
qui  ont  été  peuplés  par  des  mineurs.  J'avais  à  peine  pris  le 
tbé,  que  je  reçus  la  visite  du  curé  de  Meiaponte  et  d'un 
autre  ecclésiastique  qni  étaient  venus  se  promener  i  Co- 
rumbé.  Comme  tous  les  habitants  du  pays,  ces  messieurs 
se  plaignaient  amèrement  de  la  falsification  de  l'or,  de  la 
dhne  et  de  l'abandon  dans  lequel  le  gouvernement  laissait 
cette  malheureuse  province. 

Le  peUt  village  de  CorumbA  a  la  forme  d'un  triangle  et 
est  situé  sur  le  penchant  d'uue  colline,  au-dessus  de  la  ri- 
vière qui  lui  donne  son  nom.  Ses  mes  sont  larges,  ses  mai- 
sons petites  et  extrêmement  basses. 

Des  mineurs  s'étaient  fixés  dans  cet  endroit  pour  exploi- 
ter les  bords  aurifères  du  CorumbA.  Après  leur  mort  et 
celle  de  leurs  esclaves,  le  travail  des  mines,  devenu  pro- 
bablement plus  difficile,  Ait  entièrement  abandonné,  et  les 
habitants  du  village  tombèrent  dans  l'indigence.  La  plupart 
de  ceux  d'aujourd'hui  sont  des  ouvriers  qui  travaillent  pour 
les  cultivateurs  du  voisinage,  et  ordinairement  ne  sont 
payés  qu'en  denrées.  Les  femmes  filent  du  coton,  et,  pour 
salaire,  ne  reçoivent  non  plus  que  les  produits  du  sol.  Co- 
rumbfi  jouit  cependant  d'un  très-grand  avantage  ;  on  estime 
beaucoup  le  tabac  de  ses  alentours,  qui  sont  fort  élevas ,  et 
on  le  porte  dans  plusieurs  des  villages  de  la  province. 

Corumbé  est  une  succursale  [capella)  qui  dépend  de  la 


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30  T0TA6E  ADX  SOURCES 

paroisse  de  Meiapcmte,  dont,  le  chef-lieu  eo  est  éloigné  de 
5  legoas.  Ici  je  donne  i  ce  chétif  village  son  nom  en  quel 
que  sorte  légal;  mais,  dans  le  pays,  on  ne  le  connaît  qoe 
BOUS  celui  de  Cailla,  et  l'on  réserve  le  nom  SArraial  pour 
le  village  de  Meiapoote. 

Le  Rio  Conimb&  est  ici  très-près  de  sa  source,  et  on  poit 
le  passer  k  gué  ;  mais  il  devient  bientôt  une  des  rivières  les 
pins  considérables  de  la  province,  et,  après  avoir  coulé  du 
nord  au  sud-ouest,  il  va  se  réunir  au  Paranahyba. 

J'ai  déjà  dit  que  du  Morro  do  Tiçâo  j'avais  aper^  les 
deux  sommets  des  Montes  Pyreneos  (1],  montagnes  qui  for- 
ment la  partie  la  plus  élevée  de  la  Serra  do  Conunbà  e  do 
Tocantins,  et  où  naissent  plusieurs  rivières  importantes , 
entre  autres  le  Corumbà  et  les  premiers  affluents  du  gigan- 
tesque Tocantins.  Depuis  le  Morro  do  Ticâo,  je  m'étais  tou- 
jours rapprodié  de  ces  montagnes;  àCorombâ,  je  n'en  étais 
plus  qu'à  2  legoOB  :  je  voulus  y  aller  herboriser.  Je  pris 
dans  le  village  un  n^re  pour  me  servir  de  guide,  et  je  me 
mis  en  route  accompagné  de  Marcellino,  mon  tocaâor. 

Le  pays  que  nous  traversâmes  jusqu'aux  Pyreneos  est 
montueux  et  ne  diffère  point ,  pour  la  végétation ,  de  celui 
que  j'avais  parcouru  les  jours  précédents. 

(I)  Je  Bnia  ici  l'orthographe  de  Uns  écriTains  dnit  raolorit^  est  fiKt 
respectable ,  Caul ,  HirtiiiB  et  Hitlos  ;  mais  je  crois  qn'il  Mrait  mieai 
d'écrire  Piriiuoi,  comme  Fiiano,  on  Ptrintoi,  comme  Lnii  Antonio  da 
Silra  e  Sonai;  parce  qae  c'eat  ainsi  qa'oa  prouMice  dans  le  pays,  et  que  le 
Toyagear  doit  snrtont  consnlter  l*astge  qoand  il  indique  des  noms  qoi, 
jnsqa'i  lui ,  avaient  été  ftirt  pea  6^ts  on  ne  l'avaient  pMnl  éié  eneon. 
Eat-îl  bien  vraiseniUalile,  d'aiUenn,  qoe  lea  ancienfl  Panbatea,  qai  anient 
lont  an  pliu  qnelqne  légère  idée  de  U  géographie  dn  Portagal ,  «ifol 
réellement  *ouId  appliquer  le  nom  At  Pyri^n^f  k  des  moDtagiKai  da 
pai'Sde  GojaiTll  est  évident  que,  dans  tous  les  cas,  on  ne  doit  point, 
avec  TM ,  écrire  P^rtnatot. 


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DD  RIO  DE  9.  FRAZIOSCO.  31 

Kous  fîmes  environ  S  legoM,  et,  après  avoir  passé  plu- 
sieurs ruisseaux ,  nous  parvînmes  au  pied  de  ces  mon- 
tagnes. 

Il  ne  fant  pas  se  les  représenter  telles  que  ces  pics  majes- 
tueux si  communs  dans  quelques  parties  de  l'Europe ,  oi 
jnème  i'Itacolumi,  le  Pepagaio  ou  la  Serra  da  Caraça;  elles 
sont  fort  élevées,  sans  doute,  mais  elles  doivent  une  partie 
-  de  leur  hauteur  au  pays,  déjà  très-élevé  Ini-méme,  oà  elles 
sont  situées,  et,  depuis  leur  base  jusqu'à  leur  sommet,  leur 
élévation  est  réellement  peu  considérable. 

Vues  de  leur  pied ,  lorsqu'on  vient  de  Commbi ,  elles 
présentent  deux  terrasses  qui  s'élèvent  l'une  au-dessus  de 
l'autre ,  et  dont  la  supérieure  semble  soutenue  par  des  ro- 
chers. I4ons  montâmes  sur  la  première,  où,  dans  un  terrain 
sablonneux  tSt  uniquement  couvert  d'herbes ,  je  recueillis 
qudques  plantes  intéressantes.  Bientât  nous  revîmes  les 
deux  sommets  que  j'avais  déjà  aperçus  sur  le  Morro  do  Ti- 
^,  et  qui,  dquis  quelque  temps,  avaient  cessé  de  se  mon- 
trer. Nous  traversâmes  des  pâturages  naturels ,  où  le  ter- 
rain est  tantât  sablonneux  et  tantôt  d'une  qualité  très- 
bonne  ;  dans  quelques  endroits  élevés,  des  arbres  rabougris 
se  montrent  au  milieu  des  roches,  et  le  majestueux  bority, 
fidèle  à  sa  localité  favorite,  orne  encore  ici  les  fonds  maré- 
cageux. 

Biratàt  nous  passâmes  le  {Lio  Corumbà ,  qui ,  en  cet  en- 
droit ,  a  fort  pea  de  largeur,  et  nous  trouvâmes  sur  ses 
bords  quelques  restes  d'une  maison;  celle-ci  avait  appar- 
tenu à  OD  mineur  qui  employait  ses  esclaves  à  chercher  de 
l'or  dans  le  lit  de  la  rivière,  mais  on  avait  fini  par  l'aban- 
donner. Autour  des  ruines  de  celte  maison,  croissait  en 
abondance  le  capim  gordura,  que  l'on  peut  mettre  au  rang 


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n  yOTA^  AUX  SOURCES 

de  ces  plantes  qai  s'attachent  aux  pas  de  l'homme  ;  entre 
Macacos  et  Lage,  je  l'avais  vu  sar  le  bord  des  ruisseaux, 
partout  où  s'arrêtent  les  voyageurs. 

Après  avoir  passé  le  Corumbé,  nous  trouvâmes  un  petit 
ruisseau  qui  s'y  jette  ei  qu'on  appelle  Coeâ.  Son  lit  était 
embarrassé  par  des  amas  de  cailloux,  triste  reste  du  travail 
des  premiers  chercheurs  d'or. 

Mon  guide  m'avertit  que  les  earrapatos  étaient  extrê- 
mement communs  dans  cet  endroit  et  m'engagea  à  mon- 
ter à  cheval  afin  de  les  éviter.  Malgré  cette  précaution,  mon 
pantalon  fut  couvert  en  un  instant  de  ces  odieux  insectes; 
mais  je  m'en  débarrassai  bienUVt  en  donnairi  de  petits 
coups  sur  mes  vêtements  avec  une  baguette  couverte  de 
feuilles  (1).  Probablement  on  avait  fait  pattre  jadis,  dansctf 
endroit,  des  mulets  ou  des  chevaux,  car  c'est  principale- 
ment dans  les  lieux  où  vivent  ces  animaux  et  dans  le  voi- 
sinage des  habitations  que  se  trouvent  les  earrapatoi. 

De  l'autre  cdté  du  GocÂ,  nous  trouvâmes  une  pauvre 

(I)  C'est  le  moyen  qae  j'ai  indiqué  lorsqoe,  pour  k  première  fois,  j'ii 
parlé  des  earrapatot,  dont  la  piqûre  est,  comme  je  l'ai  dit,  eitrème- 
ment  donlonreoM  {Voyage  dam  let  prooineet  de  Rio  de  Janeiro,  etc., 
1,323;U,  396,  450). 

J'ai  ajonlé  qne  les  earrapaloi  {irand^t  et  les  earrapatot  mtttdoi  dee 
Brésiliens  me  paraissaient  ne  former  qu'une  espèce  dans  deni  étals  dif- 
férents.  Pohl  a  indiqué  deui  Borles  de  earrapalot ,  Ixiodei  ameriea- 
mu  et  Ixiodet  eollar  :  la  première  eorrespondrait-elle  ani  earrapatoi 
grandet ,  et  la  seconde  aai  mftulot ,  on  ;  aurait-il  réellement  deui  es- 
pèceti  distinctes  comprenant  chacune  des  irrandet  et  des  m<tido«,  c'est- 
k-dire  des  individus  qne  leur  ége  rend  différents  surtoni  par  la  gron- 
deurl  C'est  ce  qu'on  apprendra  difficiiemeat  peut-être  par  les  coUee- 
tions  ;  des  obsemtenrs  sédentaires  édaircirant  sans  doute  un  jour  ce 
point  d'iiisioire  naturelle.  Qnoi  qu'il  en  soit,  H.  Gardner,  bon  obserra- 
tenr,  pense  qu'il  n'y  a,  comme  je  l'ai  icrit  moi-mtme,  qu'une  espèce  de 
rorrapotof  {TraneU,  393). 


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DO  UO  DE  5.  nUNasCO.  3.1 

ciiBainière,  et  je  m'y  arrêtai  aflo  d'av<dr,  le  Imdeiiiaio , 
tout  le  temps  nécessaire  pour  monter  jusqu'au  point  le  pins 
élevé  de  la  montagne  ;  cette  chaumière  était  habitée  par  un 
vieux  nègre  libre,  qui  y  vivait  seul  et  allait  chercher,  pour 
subsister,  un  peu  de  poudre  d'or  dans  le  ruisseau  voisin.  «  Il 
y  a ,  me  disait-il ,  d'excellentes  terres  dans  la  montagne  ; 
pinsieors  campas  seraient  même  favorables  à  la  culture  du 
manioc,  mais  je  oe  suis  plus  assez  Jeune  pour  me  mettre  i 
bédier  la  terre.  »  Sa  cbétive  demeure  annonçait  une  extrême 
misère. 

Mon  guide  m'avait  quitté  lorsque  nous  étions  arrivés 
chez  le  vieux  nègre,  mais  il  m'avait  promis  de  revenir  le 
lendemain  ;  il  arriva  effectivement  après  s'être  fait  long- 
temps attendre,  et  nous  nous  remîmes  en  marche.  Bientôt, 
cependant,  je  m'aperçus  que  cet  homme  ne  connaissait  pas 
la  partie  de  la  montagne  où  nous  étions ,  et  nous  fOmes 
obligés  de  nous  diriger  vers  les  sommets  les  plus  élevés, 
sans  suivre  de  route  certaine. 

Pendant  longtemps,  nous  côtoyâmes  le  ruisseau  de  CocA, 
dont  les  bords  ont  été  autrefois  fouillés  par  les  mineurs  et 
offrent  partout  des  moDceaut  de  cailloux  ,  résidu  des  la- 
vages. 

A  l'exception  de  quelques  sommets  couverts  de  rochers 
anguleux  qui  semblent  brisés  artiâciellement  et  sont  en- 
tassés sans  ordre,  toute  la  partie  des  Montes  Pyreneos  que 
je  parcourus  offre  un  terrain  assez  égal.  On  voit  tantAt  des 
pâturages  sablonneux  où  ne  croissent  que  des  herbes,  tantôt 
des  bouquets  de  bois ,  et  dans  les  fonds,  qui  sont  toujours 
marécageux,  Yéléf^uthorùy. 

Enfin  nous  parvînmes  au  pied  des  pics  les  plus  élevés  ;  il 
y  en  a  deux  principaux,  ceux  que  j'avais  déjà  aperçus  du 


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34  VOTAOE  ADX  SOUICCS 

Morro  do  Tiçâo.  Presque  éganx  en  hauteur,  ils  présentent 
chacuD  un  cdne  dont  l'arête  est  fort  oblique,  et  sont  en- 
tièrement couTerts  de  pierres  et  de  rochers  anguleux  jetés 
sans  ordre ,  et  entre  lesquels  croissent  un  grand  nombre 
d'arbrisseaux  et  d'arbres  rabougris.  Il  me  fallnt  environ  un 
qoart  d'heure  pour  parvenir  au  sommet  de  l'un  des  deux: 
U  une  immense  étendue  de  pays  désert  et  inenite  s'offrit  i 
mes  r^ards;  mais  malheureusement  le  nègre  chargé  de 
me  guider  était  trop  ignorant  pour  me  dire  le  nom  des 
montagnes  que  f  apercevais  et  des  points  les  plus  remar- 
quables. Des  rochers  de  peu  de  largeur  terminent  ce  pic,  et 
au  milieu  d'eux  s'élèvent  des  taneia  d!Etna{  FeUomii)iidemi 
desséchés  et  couverts  de  lichens. 

Dans  toute  cette  excursion,  je  ne  recudllis  qu'un  petit 
nombre  de  plantes  que  je  n'eusse  point  encore,  ^  je  ne  vis 
aucun  oiseau,  si  j'en  excepte  deux  très-grands  qui  planaient 
au-dessus  des  rochers,  comme  pour  tAcher  de  découvrir 
leur  proie. 

Après  être  descendus  de  la  montagne  (1) ,  nous  nous 
mîmes  en  route  et  parcourûmes,  pour  retourner  k  Conunbé, 
un  terrain  asseï  égal .  Au  milieu  des  herbes  qui  le  couvrent, 
croît  en  abondance  une  Mimosée(n''715},  dont  la  tige,  un 
peu  farineuse  et  d'un  roux  blanchAtre ,  est  haute  de  4  à 
5  pieds,  et  dont  les  rameaux  nombreux,  diargés  de  fleurs 
roses,  forment  une  tète  hémisphérique. 

(1)  D'après  tout  <x  que  j«  viens  de  dire  car  )es  Meutes  PfreiKos,  oa 
voit  qae  Fod  ■  rempIdeOMUt  troiapé  le  doctettr  PaU  ^lôd  on  loi  ■ 
persuade  qne  des  forêts  vierges  readiioit  ces  moulafoes  inaccessibles  ; 
je  sois  sûr  aueti  que,  si  le  géaéral  da  Canlia  Mattos  avait  eu  occasioo  de 
les  gravir,  il  a'anriit  pas  écrit  {Ilin.,  1, 170)  qu'une  vëgéiatioii  nujtA- 
toeuse  aVKvp  jns^'t  leur  sommet. 


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DU  RIO  DE  S.  Funasco.  3-j 

Occupé  à  chercher  des  plaoteç,  je  ne  m'apercevais  pa 
que  Dous  nous  écartioDs  de  la  direction  du  village.  Cepen- 
dant, comme  le  jour  commençait  k  baisser,  je  m'avisai  de 
demander  â  mon  guide  i  quelle  dislance  nous  étions  de 
G)ruiQbi.  Probablement  k  3  legoas,  me  répondit-il  ;  mais 
nous  allons  bientôt  trouver  nue  maison.  Je  ne  pns  m'empé- 
cher  de  faire  à  cet  homme  quelques  reproches,  car  il  était 
évident  qu'il  nous  avait  égarés.  Nous  continuâmes  à  mar- 
cher, et  bientôt  nous  aperçûmes  Is  petite  habitation  qui 
m'avait  été  annoncée.  Une  négresse  se  présenta  à  la  porte, 
et,  n'ayant  nulle  envie  de  nous  recevoir,  elle  m'assura  qu'il 
n'y  avait  que  1  lieue  de  là  jusqu'au  village.  Honteux  de 
s'être  trompé  de  chemin,  le  guide,  avec  cette  inconsis- 
tance qui  est  le  partage  des  hommes  de  sa  couleur,  se  ré- 
tracta aussitôt  de  ce  qu'il  m'avait  dit  d'abord,  et  se  mit  k 
appuyer  la  négresse;  une  discussion  s'engagea  entre  nous, 
mais  j'y  mis  bientôt  Bn  en  disant  au  nègre  :  Je  veux  bien 
qu'il  n'y  ait  que  1  lieue  d'ici  à  Corumbà;  mais,  pour  faire 
1  lieue,  il  ne  faut  pas  plus  de  deux  heures  ;  je  consens  à  me 
mettre  en  route,  et,  si  dans  deux  heures  nous  ne  sommes 
pas  arrivés,  je  vous  préviens  que  je  ne  vous  donnerai  pas  la 
moindre  clwse.  Mon  homme  se  rétracta  alors  une  seconde 
fois;  il  convint  qu'il  pouvait  bien  y  avoir  plus  de  1  lieue 
jusqu'au  village ,  et  je  me  décidai  à  ne  pas  aller  plus  loin. 
La  négresse,  que  je  priai  de  me  laisser  coucher  dans  la 
maison,  me  répondit  que  sou  maître  ne  l'avait  pas  autorisée 
à  accorder  cette  permission.  Eh  bien ,  je  vais  la  prendre , 
repartis-je,  et  j'entrai  sans  cérémonie.  He  um  bomem  mem- 
dfuto  (c'est  un  envoyé  du  gouvernement],  s'écria  le  nègre; 
ces  paroles,  suivant  l'usage,  produisirent  un  effet  magique, 
on  ne  fit  plus  une  seule  objection. 


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3S  VOYAGE  AUX  SOUBCES 

Le  lendemain  maliD,  nous  nous  reiotmes  en  route,  et, 
au  bout  de  quelques  instants,  nous  découvrîmes  Meiaponte; 
ce  qui  prouva  que  j'étais  fort  loin  de  Commbé,  puisqu'il  ; 
a,  comme  je  l'ai  dit,  3  îegoat  de  distance  du  premier  de  ces 
villages  au  second,  et,  par  conséquent,  favais  très-bien 
fait,  la  veille,  de  oe  pas  me  mettre  en  route  à  l'approche  de 
la  nuit.  Noustravergflmes  un  pays  montagneus,  et,  descen- 
dant toujours,  nous  arrivâmes  à  Cocumbi. 

Entre  ce  village  et  celui  de  Meiaponte,  je  marchai  ton- 
jours  parallèlement  aux  Montes  Pyreneos  que  j'avais  à  ma 
droite.  Le  pays  est  encore  montagneux,  mais  plus  boisé  que 
celui  où  j'avais  voyagé  avant  d'arriver  à  Corumbi.  Au  mi- 
lieu des  pierres  qui  couvrent  le  sol,  il  n'offrait  alors  qu'une 
berbe  desséchée,  et  nulle  part  on  ne  voyait  une  fleur;  dans 
les  bouquets  de  bois ,  beaucoup  d'arbres  avaient  conservé 
leur  feuillage,  mais  d'autres  avaient  presque  entièrement 
perdu  le  leur;  la  terre  était  surtout  jonchée  des  folioles 
délicates  des  Mimoses. 

Je  marchai  pendant  quelque  temps  sur  un  plateau  qui 
termine  un  morne  élevé  ;  c'est  là  que  la  route  de  Babia  se 
réunit  à  celle  de  Minas  et  de  Rio  de  Janeiro  que  je  venais 
de  suivre.  La  descente  du  morne  est  pavée,  ce  qui,  dans  ce 
pays,  est  une  véritable  merveille.  Toute  la  journée  nous 
avions  descendu;  la  chaleur,  surtout  au  bas  du  morne  dont 
je  viens  de  parler,  fut  plus  forte  que  les  jours  précédents. 

Avant  d'arriver  à  Meiaponte  ,  j'envoyai  José  Marianno 
chez  le  curé  du  village,  pour  le  prier  de  me  procurer  une 
maison  inhabitée  où  je  pusse  m'établir;  le  curé  lui  en  in- 
diqua une  qui  était  fort  commode ,  et  j'en  pris  possession. 

A  jKÀne  installé,  j'allai  présenter  mon  passe-port  royal 
[portaria]  au  commandant  du  village,  dont  j'aurai  occasion 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  37 

de  parier  plus  tard.  Il  habitait  une  très-jolie  maison  et  me 
reçut  dans  un  salon  bien  meilblé,  d'une  propreté  ettrëme. 
Les  murs  étaient  peints  à  hauteur  d'appui,  blanchis  ensuite 
jusqu'au  plafond  et  ornés  de  gravures;  une  petite  glace, 
qudques  tables ,  des  chaises  bien  rangées  composaient 
l'amenhlement  de  cette  pièce. 

J'allai  ensuite  faire  mes  remerctments  au  curé  et  trou- 
vai sa  maison  aussi  jolie  et  aussi  bien  meublée  que  celle  du 
commaadant  :  ce  qui  surtout  la  rendait  remarquaUe,  c'était 
une  propreté  véritablement  hollandaise.  En  général,  c'est 
U  une  des  qualités  qui  distinguent  les  Brésiliens;  quelque 
pauvres  qu'ils  soient ,  leurs  diaumières  ne  sont  presque  ja- 
mais sales,  et,  s'ils  ne  possèdent  que  deux  chemises,  celle 
qu'ils  portent  est  toujours  blanche. 

Le  charmant  vijiage  de  Meiaponte  est  tout  à  la  fois  le 
chef-lieu  d'une  justice  et  txAxû  d'une  paroisse  (1).  Situé  par 
les  IS*  30'  lat.  S.,  dans  un  pays  très-sain,  au  point  de  jonc- 
tion des  routes  de  Rio  de  Janeiro,  de  Bahia,  de  Matogrosso 
et  de  S.  Paul,  éloigné  de  Villa  Boa  tout  au  plus  de  27  le- 
goas,  entouré  des  terres  les  plus  fertiles,  ce  village  ne  pou- 
vait manquer  d'être  un  des  moins  malheureui  de  la  pro- 
vince, et  il  en  est  le  plus  peuplé. 

La  paroisse  tout  entière  de  Meiaponte  a  environ  53  Uqqos 
du  nord  au  sud,  et 30 de  l'est  à  l'ouest;  et,  quoique  moins 


(I)  Le*iUagede  HNoponle  ■  été  érigé  en  vUle  par  une  loi  dulOd« 
jaiUel  1833  (Mittos  ,  /((n.,  II ,  33T  ).  —  inii  d'Alinconn  dit  que ,  cii 
173T,  ou  avait  eu  l'idée  d'ea  Taire  te  chef'Iien  de  la  proriace  {M«m.,  S5)  ; 
mais  je  croie  qu'il  se  trompe  sur  le  nom  du  go arerneur  auquel  ilaUribne 
««  projet,  ffaoi  qu'il  ta  soit ,  il  est  incoalestablo  que ,  sous  une  foule  de 
ri^ports ,  HeiapoDle  méritait  mieui  que  Villa  Boa  de  devenir  la  capitale 
dg  pays  de  Gojaz. 


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38  VOYAGE  AUX  SOUROES 

étendue  que  celle  de  Saota  Liuia,  elle  est  pourtant  beeu- 
.  coup  plus  peuplée,  puisqu'on  y  compte  7,000  commu- 
niants; elle  comprend  (1819)  deux  succursales  {ct^ellai), 
celle  de  Corambi ,  dont  j'ai  déjà  parlé,  et  celle  du  Corrego 
de  Jaraguâ,  que  je  ferai  bientAt  conoattre.  ' 

On  a  bâti  le  village  de  Meiaponte  dans  une  espèce  de 
petite  plaine  entourée  de  montagnes  et  couverte  de  bois  peu 
élevés;  il  s'étend  ,  par  une  pente  très-douce,  sur  la  rive 
gauche  du  Rio  das  Aimas,  et  fait  face  à  la  continuation  des 
Montes  Pyreneos.  liak  peu  près  la  forme  d'un  carré.  On 
y  compte  trois  cents  et  quelques  maisons  qui  sont  très-pro- 
pres, Migneusement  blanchies,  couvertes  en  tuiles  et  assez 
hautes  pour  le  pays  ;  chacune,  comme  cela  a  lieu  dans  tous 
les  villages  de  l'intérieur,  possède  un  jardin  ou  plutât  une 
sorte  de  coor  {quintat},  où  l'on  voit  des  bananiers,  des  oran- 
gers, des  caféiers  plantés  sans  aucun  ordre.  Les  rues  sont 
larges,  parfaitement  droites  et  pavées  sur  les  cdtés.  Cinq 
^lises  (1),  parmi  lesquelles  on  en  compte  trois  principales, 
contribuent  k  l'ornement  du  village.  L'église  paroissiale, 
dédiée  à  Notre-Dame-du-Rosaire,  est  asseï  grande  et 
s'élève  sur  une  place  carrée;  ses  mun,  construits  en  pisé, 
ont  12  palmes  (9  pieds]  d'épaisseur  (3]  et  portent  sur  des 
fondements  en  pierre;  k  l'intérieur,  elle  est  passablement 
ornée,  mais  elle  n'a  pas  de  plafond. 

De  la  place  où  est  située  l'église  paroissiale,  on  découvre 


(1)  Ed  1S13,  daCnobi  Hattofl  en  comptait  ^aJeflieot  cinq  (ftfn.,  I, 
ISl).  Suiviat  Laii  AnUmie  da  SîIti  e  Soqm,  il  y  en  inrait  cd  nae  de 
plos  CD  1833  (Km.  Ml.,  2T). 

(1)  Dfl  Silva  e  Sousa  les  iodiqiie  (Mmh.  «tlat.,  TT)  comme  étant  épais 
sesieneot  de  T  pilmea.  Je  ae  saorais  Are  avec  assoraïKe  lequel  des 
deui  chiffres  esl  le  plus  euct. 


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DU  RIO  DE  S.  FKAMCISCO.  30 

la  voe  la  plus  agréable  peuUAtreqaeJ' eusse  admirée  depuis 
que  je  vorageais  dans  l'iatérieur  du  Brésil.  Cette  place 
présente  nn  plan  iocliné;  au-dessous  d'elle,  sont  des  jar- 
dins où  se  présentent  des  groupes  de  caféiers  »  d'orangers , 
de  bananiers  aui  larges  feuilles;  une  église  qui  s'élève  un 
peu  plus  loin  contraste,  par  la  blancheur  de  ses  murs,  avec 
le  vert  foncé  de  ces  différents  végétaux;  à  droite  sont  des 
jardins  et  des  maisons  au  delà  desquels  la  vue  s'arrête  sur 
Qoe  autre  ^Hse;  sur  la  gaache,  on  aperçoit  un  pont  à 
demi  miné  avec  one  petite  portion  du  Rio  das  Aimas  qui 
conle  entre  des  arbres  ;  de  l'autre  cAté  de  la  rivière,  se  voit 
une  petite  église  entourée  de  taillis  ;  au  delà  de  ces  det- 
nkrs,  sont  des  arbres  rabougris  qui  se  confondent  aver. 
eux  ;  enfin,  à  environ  1  demi-^oa  du  village,  l'iiorizon  se 
trouve  borné,  an  nord ,  par  la  chaîne  pen  élevée  qui  con- 
tinue les  Hontes  Pyreneos,  et  an  milieu  de  laqn^le  on  dis- 
tingue le  sommet  arrondi  appelé  Frota,  plus  élevé  que  les 
sommets  voisins  (1). 

Tandis  que  dans  les  autres  villages  on  trouve  tout  au  plus 
un  maltred' école,  Nmpontea(lM9)un  professeurde  gram- 
maire latine  payé  par  le  gouvernement;  mate  je  doute  fort 
qu'il  ait  un  grand  nombre  d'élèves  et  que  son  eoseigne- 
meot  amène  des  résultats  bien  utiles. 

Comme  à  Tijuco,  dans  le  district  des  Diamants  (â),  il 
exi^  k  Meiaponte  nn  hospice  de  frères  du  tiers  ordre  de 


(1)  Je  n'ai  pas  boamo  de  dire  qae  cea  monugnee  appartieDneat  tou- 
jonrs  k  U  Serra  do  Gominbii  e  do  TocvitioB.  —  Le  Horra  do  Froti ,  sai- 
Tant  da  Siln  e  Soum  (  Mtm.  eit.,  18  ) ,  comprendrait  plnsieure  petites 
neatagoes  ;  il  s'étendrait  dans  la  direction  de  l'occident  et  aurait  3  Ugoaf 
deleofoear. 

i2l  Voffage  doM  te  éfttriet  àei  Diamant»,  etc.,  i ,  <i. 


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40  VOyiOB  AUX  s 

s.  François,  diargés  de  recneillir  les  anmAQes  des  fidèles 
pour  l'entretien  du  S.  Sépulcre.  Lora  de  mon  voyage,  cet 
hospice  ne  comptait  qu'un  seul  frère.  Les  sommes  qu'il 
réunissait  étaient  d^iosées  par  lui ,  dans  le  pays  même, 
entre  les  mains  d'un  syndic  {iarticulier,  et  celui-ci  les  en- 
voyait à  Rio  de  Janeiro,  aa  syndic  général ,  qui ,  comme 
lui ,  était  an  laïque.  11  est  bien  difficile  de  croire  que ,  pas- 
sant  par  tant  de  mains,  ces  aumânes  arrivassent  dans  leur 
Intégrité  de  Meiapoute  à  Jérusalem. 

Comme  je  l'ai  dit,  le  climat  de  Meiaponte  parait  fort 
sain  (i  ).  A  l'époque  des  grandes  chaleurs,  tous  les  habitants, 
hommes  et  femmes ,  se  baignent  sans  cesse  dans  le  Rio  du 
Aimas ,  ce  qui  contribue  i  les  entretenir  dans  une  bonne 
santé.  La  maladie  la  plus  commune  parmi  eux  est  l'hydro- 
pisie  ;  l'espèce  d'éléphantiasis  apppeléemor^  n'est  pas  non 
plus  très-rare  dans  ce  pays. 

Le  lieu  où  est  aujourd'hui  situé  le  vill^e  de  Meiaponte 
fut  découvert,  en  1731 ,  par  un  nommé  Mamokl  Rodbi- 
6IIES  Thohab  (â).  Les  premiers  qui  s'y  Rtèreot  furent  des 
•:hercheurs  d'or  qui  voulaient  exploiter  les  bords  du  Rio 
das  Aimas.  Cependant,  comme  le  village  qu'ils  bétirent 
se  trouve  placé  à  la  jonction  des  principales  routes  de  la 
province  et  qu'il  y  passait  autrefois  un  grand  nombre  de 

(1)  Da  SiWa  e  Sousa  dit,(H«m.  »(..  14)  qne  le  vuA  d'est  7  eonrBe  cou- 
stammeat  de4  heuns  da  malin  ï  11  henrei,  depuis  le  mois  de  inii  ju»- 
qa'an  mois  de  septembre. 

(!)  Piiarro  raconte  qne,  dans  l'origine,  on  avait  jetti  sur  la  rivière  un 
poot  formé  de  deui  pièces  de  boia,  que  l'ooe  des  deoi  tut  emporta  par 
les  eani ,  qa'alOTS  oa  m  cootenta  de  celle  qui  restait ,  et  que ,  pour  cette 
raison,  on  donna  au  village  le  oom  de  MeiaponU  (moitii:  de  pont) 
(Mem.,  IX,  313).  Da  Cunha  Hallos  contredit  celte  histoire  et  prrieitd  que 
MeiapoDie  doit  son  non  *  une  pierre  qui  se  troan ,  anprto  da  village . 


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DD  BIO  DE  S.  nUNCISCO.  41 

caravanes,  ses  habitants ,  sârs  de  vendre  avantageusement 
les  produits  du  sol ,  renoncèrent  bientôt  à  leurs  lavages 
dont  on  ne  voit  aujourd'hui  que  de  faibles  traces,  et  ils  fu- 
rent ,  à  ce  qu'il  paraît,  les  premiers  de  tonte  la  capitainerie 
qai  eurent  la  gloire  de  s'occuper  de  la  culture  des  terres. 
Les  bois,  communs  dans  les  environs  du  village,  favorisèrent 
le  travail  des  agriculteurs  ;  ces  taillis,  dont  j'ai  parlé  un  peu 
plos  haut ,  étaient  jadis  de  grands  bois  que  l'on  mit  en  cul- 
ture, et  des  capoiem,  actuellement  abandonnés,  ont  rem- 
placé les  haricots  et  le  mais  des  anciens  colons. 

Encore  aujourd'hui,  la  plupart  des  habitants  de  Heia- 
ponte  sont  des  agriculteurs ,  et,  comme  ils  ne  viennent  au 
village  que  le  dimanche,  les  maisons  restent  désertes  pen- 
dant le  reste  de  la  semaine.  Les  terres  de  la  paroisse  de 
Heiaponte  sont  propres  a  tous  les  genres  de  culture,  même 
à  celle  du  froment;  mais  c'est  principalement  à  l'élève  des 
pourceaux  et  à  la  culture  du  tabac  que  se  livrent  les  colons 
de  ce  pays,  et  ils  envoient  leur  tabac  en  corde  et  leur 
lard,  non-seulement  à  Villa  Boa,  mais  encore  dans  {dn- 
«enrs  villages  du  nord  de  la  province. 

Comme  j'ai  déjA  eu  occasion  de  le  dire,  le  coton  de  ce 
pays  est  d'une  très-belle  qualité.  Un  homme  seul  peut  cul- 
tiver, en  cotonniers,  l'étendue  de  terre  que  l'on  ensemen- 
covit  avec  1  alqueire  de  maïs.  Dans  ce  pays,  les  cotonniers 

dans  le  Rio  de  Heiaponte  el  représente  la  moitié  d'âne  ircbe  [Itin.,  I . 
153).  Suivant  Loii  d'iliucourt,  Bartholomen  Bueno,  ne  ponrant  pasier 
t  gaé  un  torrent  profond ,  6t  jeter  un  pont  sur  une  pierre  plate  et  fort 
grande,  qui  s'avançait  jusqu'au  milien  des  eiu),  et  de  U  le  nom  de 
Heiaponle  qn'on  donna  au  torrent,  el  ensuite  au  village  que  l'on  eon- 
Btmisii  tout  auprès  (Mtm.,  8!).  Je  ne  pnis  dire  laquelle  de  ces  Iroia  ver- 
siDos  est  la  rénUUe ,  ni  mèrae  s'il  ;  eo  a  «ne  d'entre  elle*  <pii  mérite 
toute  confiance. 


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a  VOYAGE  AUX  SOVtCëS 

donoent  des  graines  dè«  la  preiqière  année,  et  il  aufflt  que 
l'on  sarcle  une  Toîa  tous  les  ans  la  terre  où  ils  végètent. 
Pendant  cinq  années,  on  n'enlève  à  ces  arbrisseaux  au> 
ciine  de  leurs  branches;  mais,  au  bout  de  ce  temps,  (m  a 
soin  de  les  couper  un  peu  au-dessous  du  pied ,  et  l'on  re- 
tniDcbe  une  partie  des  rejeta.  Après  cinq  ans,  on  coupe  les 
secondes  tiges,  et.  traités  tonjours  de  la  même  manière,  les 
cotonniers  peuvent  donner  une  longue  suite  de  récoltes  (I). 
Un  alqueire  planté  en  cotonniers  rend  400  arrobes  de 
coton  avec  les  semences,  et  Varrobe,  dépouillée  de  ses  gtai- 
aes,  produit  8  livres  net. 

Il  est  trè^-vraisemblable  que  les  environs  de  Meiaponte 
pourraient  aussi  fournir  uo  vin  excellent,  car,  pendant 
mon  séjour  dans  ce  village,  je  mangeai  des  raisins  déli- 
deui  que  le  curé  m'avait  envoyés  en  présent;  ils  apparte- 
naient k  la  variété  que  les  Portugais  appellent  um  ferrai. 
J'ai  à  peine  besoin  de  dire  qu'ici  comme  à  Minas,  et  pro- 
bablement dans  tout  le  Brésil,  c'est  en  berceau  que  l'on 
fait  venir  la  vigne. 

Quoique  chacun  puisse  trouver  dans  les  environs  de  M^- 
poote  plus  de  terre  qu'il  n'en  saurait  cultiver,  qu'il  y  ait 
,  partout  des  ruisseaux  aurifères  où  il  est  facile  de  recueillir 
un  peu  d'or,que  les  bras  soient  rares  et  que,  par  conséquent, 
tout  homme  valide  puisse  eq)érer  trouver  du  travail,  an 
moins  pour  sa  nourriture,  on  ne  saurait  faire  un  pas  dans 

(1^  Je  dois  les  renseignEnteDtB  que  je  doBne  id  smr  la  caltore  da  e*- 
tonnier  dans  les  environs  de  Hnaponle  k  aa  de*  meiUears  agrîcnlMn 
du  Brésil ,  M.  Joiqaim  Alves  de  Olireira.  Dans  dim  dent  relatioiu  déjà 
'  paUiées ,  on  troaTera  des  dtuilG  tori  «tendus  aur  la  caltnre  de  ce  prê- 
dent  arbrisseau  à  Minas  nom  et  dans  plasienre  antres  endroits,  (foja 
la  table  dn  Vofoçt  danâ  Ut  pnvincéi  de  Rio  de  JomHto,  etc.,  et  ceik 
du  Vfiyaçe  dam  le  dittriel  des  DiamanU,  etc.) 


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DD  UO  PB  $.  nuNClSCO.  fS 

Meiaponte sans  reacontrer des  mendiaots.  Plusienrs  d'entre 
enx,  atta<inég  de  l'éléphantiasia,  méritent  sans  doute  d'être 
secounu;  les  antres  sont  des  enftnts  naturels  qui  pourraient 
traraîller.  Des  propriétaires  aisés  de  Heiaponte  se  plai- 
gnaient devant  moi  du  nombre  prodigienz  de  mendiants 
que  l'on  voit  errer  dans  leur  rillage.  La  plupart  de  ces 
hmnmes,  disaient-ils,  sont  en  état  de  gagner  leur  vie  en 
se  rendant  utiles;  mais,  comme  ils  demandent  l'aumAne 
pùtir  ratnour  de  Dieu  (por  amor  de  Deos) ,  il  est  impos- 
sible de  leur  rehiser,  et  c'est  ainsi  que  se  fortifie  chez  eux 
l'habitude  de  la  paresse.  Il  y  a  dans  ce  sentimeat,  sans 
doute,  quelque  chose  de  touchant ,  et  il  ne  mériterait  que 
des  éloges,  s'il  avait  seulement  pour  objet  ces  infortunés 
qo'nne  maladie  hideuse  éloigne  de  leurs  semblables;  mais 
comment  les  excellentes  gens  qui  causaient  en  ma  pré- 
sence de  toutes  ces  choses,  poavafent-ils  s'imaginer  qu'en- 
courager le  vice ,  c'était  donner  à  Dieu  une  marqoe  de  leur 
amour? 

J'ai  dit  que  j'avais  beaucoup  descendu  avant  d'arriver  k 
Meiaponte.  Pendant  que  j'étais  dans  ce  village,  la  chaleur 
fut  extrêmement  forte,  et  j'éprouvai  des  maux  de  ner^, 
augmentés  encore  par  la  faim  que  je  souffris  pendant  mes 
différentes  promenades.  L'excessive  chaleur  agît  probable- 
ment aussi  sur  mes  gens,  car  ils  étaient  d'une  humeur  in- 
suj^rtable. 

Avant  de  quitter  le  village  (le  17  juin],  j'allai  faire  mes 
adieux  au  curé  et  au  jeune  prêtre  Lniz  Gonzaga  de  Ca- 
HAiGO  FLBDBr  (1),  que  j'avais  déjà  vu  avec  lui  à  Corumbé. 


(1)  On  lui  doit  un  pelîl  itinériire  de  Porto  Rea)  k  Carolina,  inséré 
dicLi  l'ourrage  de  Nallos,  inlilulé  Itintrario  (II,  2iS'. 


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44  VOTAGB  AUX  SPUICES 

Pendant  mon  séjour  à  Heiaponte ,  tous  les  deux  m'aviient 
comMé  de  politesse  ;  ils  étaient  venus  me  voir  fort  sou- 
vent, et  nous  avions  beaucoup  causé.  Louis  Gonugue  était 
d'origine  française,  comme  l'indiquait  son  nom  de  famille. 
Il  n'ignorait  point  quels  sont  les  devoirs  de  son  état,  et,  en 
général ,  je  le  trouvai  fort  instruit;  il  connaissait  nos  Imhis 
auteurs  français,  lisait  beaucoup  une  de  nos  histoires  ecclé- 
siastiques et  avait  quelque  idée  de  la  langue  anglaise.  Le 
curé,  qui  était  en  même  temps  vigario  da  vara  (1) ,  ne 
s'était  réservé  que  le  dernier  de  ces  emplois;  il  avait  par- 
tagé le  soin  de  conduire  ses  ouailles  entre  le  desservant 
[eapellâo]  de  Corumbé,  celui  du  Corrego  de  Jaragu&>  enfin 
Luin  Gonzaga,  qui  était  chargé  de  Heîaponte,  et  chacun  des 
trois  vicaires  lui  payait  une  certaine  redevance.  Cet  arran- 
gement n'était  probablement  pas  fort  régulier;  mais,  pour 
ce  qui  concerne  la  religion,  le  Brésil,  en  général,  et  la  pro- 
vince de  Goyaz ,  en  particulier,  sont  hors  de  toutes  les 
règles. 

(1)  Voyei  ce  que  j'ai  dit  de  ccUe  charge  dau  ma  première  relatioa  de 
vojage. 


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DU  MO  I»  S.  nuNasco. 


CHAPITRE  XIX. 


LES  VILLAGES  DE  JASAQDA  ,   D  OUHO  PINO  ,    DE  FEBHEl&O. 


Pajs  titné  an  deU  de  Heiaponte.  —  Foienda  4e  S.  AtUotiio.  Dispnle 
■TK  le  proprîéUire.  L'intérfear  des  musons  interdit  ani  élruigers. 

—  Temps  où  TOyagent  les  caravanes.  ~  Pajs  sitoé  au  delt  de  S.  in- 
tooio.  Grands  bois. —  LeCi>rrefiod«Jarad>ud,  viUage.  Sa  position.  Son 
histoire.  Ses  mines.  Guitare  des  terres  environnantM.  Maladies.  Fait 
médical  intéressant.  —  Serra  de  Jarauvà ,-  sa  TégétatioD.  —  Portrait 
ia  desaerrant  de  Jar^ini.  Les  mnUire*.  —  Politeaae  des  habitants  de 
rinlérienr  envers  les  étrangers.  —  ^lise  de  Jarsgni.  Singalier  ns^e 
des  femmes.  Bon  goût  et  habileté  des  Gojanais.  —  Le  HoJo  Grouo. 

—  Pa;s  moins  désert  ani  approches  de  la  capitale  de  la  prorince.  — 
Baneio  da  Goyabtirv.  —  Rencontre  d'ane  caraTaoe.  —  Sanelto  da$ 
Artat.  Set  habitants.  —  Désagréments  qne  le  muletier  de  l'anteor  lui 
bit  éprouver.  Lea  muletiers  brésiliens.  Eonni  qne  l'on  éprouve  k  être 
toujours  avec  les  mêmes  personnes  dans  les  voyages.  ~  Silio  da 
Loge.  Le  missionnaire  capndn.  Les  voleurs  ne  sont  point  k  craindre. 

—  OhligeuK«  des  Bréeiliëns  de  l'intérieuT.  —  Mandmga.  La  fEl«  de 
S.  Jean.  —  Le  Rio  Vrvhu.  —  Le  village  d'Ouro  Fino,  Son  rancho.  Sa 
position.  Sa  pauvreté. —  Mauvais  chemins.  —  PcMtoÀUo.  —  Le  village 
de  Ferreiro.  —  RecommandationB  du  cokoel  Fbihcisco  Luti. 


Pour  me  rendre  de  Heiaponte  (1)  à  S.  Antonio,  où  je  fis 
halte,  je  suiyîs  une  vallée  assez  lai^e  ,  bordée  par  deux 
chaînes  de  montagnes  peu  élevées.  La  plus  septentrionale 
n'est  que  la  continnation  des  Pyreneos  et  prend  le  nom  de 
StrradtS.AiOonia.  Des  sons-arbrisseaux  et  des  arbres  ra- 

(1)  Itinéraire approiimatirde  Heiapaatcl  TillaBoa  : 


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M  TOYAOB  ADX  aOUBÇBS 

bougris  croissent  assez  rapprochés  les  uns  des  autres  au  mi- 
lieu des  pâturages  qui  couvrent  la  vallée  et  les  moDtagnes, 
et  appartien  neot  encore  à  ces  mêmes  espèces,  que  je  retron- 
vais  dans  tous  les  campo4.  Partout  l'herbe  était  desséchée; 
je  n'apercevais  aucune  fleur.  Je  traversai  pendant  la  journée 
plusieurs  ruisseaux  bordés  d'une  étroite  lisière  de  bois;  U, 
je  jouissais  d'une  fraîcheur  délicieuse,  mais,  ailleurs,  la 
chaleur  se  faisait  assez  fortement  sentir. 

La  fazenda  de  S.  Antonio  où  je  fis  halte,  comme  je  viens 
de  le  dire,  était  autrefois  très-importante.  Dans  ce  temps- 
là  ,  on  tirait  de  l'or  de  la  Serra  du  même  nom  ;  mais  la 
mine  s'est  épuisée,  on  a  cessé  d'entretenir  les  bâtiments  de 
l'habitation,  et  presque  tous  ne  sont  aujourd'hui  que  des 
ruines.  C'estcependanlàpeine  ai  cetétablissementapatté 
è  la  troisième  génération  :  tels  sont  les  tristes  résultats  de  la 
recherche  de  l'or  et  de  la  prodigalité  des  mineurs.  Étant  à 
MeiapoDte,  j'avais  vil,  de  l'autre  câté  du  Bio  das  Âlmas,  une 
maison  qui  produit  un  effet  fort  agréable  dans  le  paysage 
et  paraissait  avoir  été  très-jolîe  autrefois  ;  elle  avait  été  bâtie 
par  un  hMnme  puissamment  riche,  qui  possédait  un  grand 
nombre  d'aeclaves  :  c'était  un  mineur;  ses  filles,  lors  de 
mon  voyage,  ne  vivaient  que  d'aumAnes. 

h  s.  Antonio ,  fiuen<U 3       Icgoas. 

Jmtgnà.Yilljg» 3  Ifl 

tejïbeira ,  rucbo s 

RaDcho  du  Ams,  rateatU 3 

Sitio  da  Ltge ,  diiumière ,  9 

Mandinga,  petite  habitalkn 3 

Onro  Fioo,  rillàge 4 

Ponso  NoTO,  TiDcbo it/t 

vaia  Boa H/i 

97  1/llegoM. 


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DU  MO  DE  8.  FUNOnCO.  47 

Jmé  MarisDDO ,  qai  m'arait  précédé ,  avait  demandé 
rhospitalité  à  la  porte  de  TkaMUtion  de  S,  Antonio,  et  une 
négresse  lui  avait  indiqué  un  petit  bAtimeot  qui  n'était 
point  occupé.  Qnand  j'arrivai ,  je  troavai  c^  bomme  de 
fort  mauTaise  humeur,  parce  que,  disait-il,  on  vonlait  nons 
It^er  dans  un  endroit  rempli  de  puces  et  de  cliiqnes  [bidMM 
de  fi,  puUx  penetraas).  J'étais  si  malheureni  quand  je 
Toyais  le  mécontentement  peint  sur  la  flgnre  de  ceax  qni 
m'accompagnaieat ,  que  j'allai  demander  un  meilleur  gîte. 
Une  mulâtresse  rae  soutint  qu'on  n'en  avait  pas  d'autre  à 
me  donner,  et,  poussé  par  José  Marianno,  je  commençais 
i  m'édiauffer,  lorsque  arriva  le  maître  dé  l'habitation.  Sa 
bonhcKnie  me  désarma  ;  il  fit  balayer  la  maisonnette  que 
l'on  nous  avait  offerte ,  et  j'en  pris  possession. 

Au  milieu  de  la  petite  dispute  que  nous  avions  eue 
d'abord,  ce  brave  homme  s'était  écrié  :  On  me  tuerait  plutAt 
que  de  toucher  du  pied  la  chambre  bsbilée  par  mes  Slles) 
Dans  cette  province ,  où  tant  de  femmes  se  prostituent ,  un 
pè%  de  famille  honnête  doit  naturellement  teair  ce  lan- 
gage ,  puisque  l'usage  exige  qu'une  personne  dn  sexe  qui 
veut  se  respecter  reste  à  l'écart  et  n'ait  aucune  communi- 
cation avec  les  honunes. 

Je  demandai  à  nvm  hôte  si ,  cette  année^i ,  il  avait  passé 
beauoMip  de  grandes  caravanes  venant  de  Rio  de  Jaseiro, 
de  Bafaia  ou  de  S.  Paul;  il  me  répondit  qu'il  n'en  avait 
encore  vu  wcune,  et  que,  en  général,  elles  n'arrivent 
guère  qu'après  la  S.-Jean  :  elles  ne  sauraient  atteindre 
plus  tôt  le  terme  de  leur  voyage,  car  elles  ne  peuvent  rai- 
sonnablement se  mettre  en  route  avant  la  fin  de  la  saison 
des  pluies. 

Jusqu'au  Rio  das  Aimas,  que  l'on  retrouve  à  environ 


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48  VOTIOE  AUX  SODICES 

1  lieue  de  S.  Antonio,  je  suivis  la  rallée  où  j'avais  voyagé 
la  Yeille  et  qui  souvent  devùot  asseï  étroite  ;  mais ,  au  ddà 
du  Rio  das  Aimas ,  je  ne  fis  plus  de  moutagnes  que  sur  la 
gauche.  Jadis  il  existait  un  pont  sur  cette  rivière;  mais , 
comme  il  est  tombé,  on  suit  actudlemeot  une  antre  route; 
alors, cependant,  la  sécheresse  était  si  grande,  que  la  rivière 
était  guéable ,  et  je  ne  fus  point  obligé  de  me  détourner  : 
on  voit  qu'il  eo  est  ici  comme  à  Minas,  on  l'on  construit 
des  ponts,  mais  où  on  ne  les  répare  point  (1). 

Entre  le  Rio  das  Aimas  et  le  Corrego  de  Jaragui,  c'est- 
i-dire  dans  un  espace  de  3  legoat  et  demie,  de  courts  inter- 
valles offrent  encore  des  arbres  rabougris  ;  partout  ailleurs 
on  ne  voit  que  de  grands  bois.  La  végétation  de  ces  der- 
niers est  beaucoup  moins  vigoureuse  que  celle  des  tarèla 
primitives  de  Minas  et  de  Rio  de  Janeiro  ;  cependant  j'y  re- 
trouvai plusieurs  beaux  arbres  :  les  lianes  n'y  sont  point 
rares ,  mais  elles  ne  produisent  aucun  de  ces  grands  effets 
que  j'avais  admirés  tant  de  fois  dans  ie  voisinage  de  la  ca- 
pitale du  Brésil  ;  les  bambous,  qui  croissent  ici  parmi  les 
autres  végétaux,  ne  s'élancent  point,  comme  ceux  du  litto- 
ral, k  une  hauteur  prodigieuse  pour  former  d'élé^ntes  ar- 
cades, leurs  tiges  restent  grêles  et  ont  peu  d'élévation.  Les 
seules  plantes  en  fleur  que  j'aperçus  au  milieu  de  ces  bois 
étalait  des  Acantbées,  famille  qni,  dans  ce  pays,  appartient 
presque  exclusivement  aux  (ortHa. 

Après  avcHr  traversé  le  ruisseau  appelé  Corrego  de  Jara- 
guâ,  j'arrivai  au  village  du  même  nom  [arraial  do  Corrego 
4eJaraguà]{^). 

(1)  Celai  doot  il  s'agit  ici ,  qaoiqiie  fart  oécusùre,  n'était  point  «KOre 
ttpué  eu  18!3  (HiTTOs.  /Un.,  1 ,  150). 
(31  11  M  ftal  pu  écrira,  ■vec  PoU,  Cargo  do  Jarnfvd ,  et  encore 


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DU  UO  DE  S.  FRANCISCO.  4» 

J'avais  ravoyé  José  Marianoo  en  avant,  avec  deux  l^res 
de  recommandation  que  l'on  m'avait  données  pour  le  des- 
servant ilu  village  (capellâo};  celni-ci  m'accueillit  parfai- 
tement bien,  me  i<^^  dans  ane  maison  fort  commode,  me 
fit  apporter  de  l'ean  et  du  bois  par  ses  esdaves,  et  m'engagea 
i  souper  avec  lui. 

Corrego  de  Jaraguà,  on  simplement  JamgvA,  comme 
l'on  dit  habituellement  dans  le  pays ,  est  une  succursale 
[eapella  filial]  de  Meiaponte,  comprenant  dans  son  ressort 
environ  2,000  Ames.  Ce  village,  situé  dans  une  vaste  plaine 
couverte  de  bois,  est  entouré  de  montagnes  plus  ou  moins 
hautes,  dont  les  pins  rapprochées  s'élèvent  presque  à  pic  et 
produisent  un  bel  effet  dans  le  paysage.  JaraguA  me  parut 
presque  aussi  grand  que  Meiaponte;  mais  ses  mes  sont 
moins  régulières ,  ses  maisons  moins  grandes  (1)  et  moins 
jolies,  et  l'on  n'y  voit  que  deux  églises. 

Des  nègres  qui  allaient  chercher  quelques  parcelles  d'or 
dans  les  ruisseaux  découvrirent,  en  1 736  (3),  le  pays  oà  est 
aujourd'hui  situé  Jaraguâ.  Les  richesses  que  l'on  trouva  en 
cet  endroit  ne  tardèrent  pas  à  y  attirer  des  habitants ,  et 
bientAt  un  village  se  forma  oti ,  peu  de  temps  auparavant . 
on  ne  voyait  qu'un  désert. 

Ici  les  minières  ne  sont  pas  entièrement  épuisées  (1 819)  ; 

moins  Corrego  da  Jarag^ioy,  ivet  Luii  d'AliucogrL.  Lu  ddius  de  Car- 
reço  dt  Jeraguà  et  Jaguara  qn'oD  Iroare  duu  le  PJuto  brcuiUentU  de 
TOn  Escbvege  wnt  anasi  peu  eucU  qae  les  prtcédeoU.  —  Girdiier  io- 
dique ,  dios  le  nord  du  Brésil ,  un  tien  ippelé  égileneal  Jarofi'iKi.  — 
Ce  mot,  eu  gurooi ,  sigoiOe  eau  qui  murmure 

(1)  ta  1823,  elles  étaient,  mIod  da  Cuaba  HKlos ,  m  nombre  de  300 
(IHm.,  1,147;. 

(S)  Cette  dite  est  celle  qu'idioet  Pinrro  :  da  Cuahi  HaUos  et  d'Alin- 
conrt  iadiqueot  l'année  1T?IT. 

11.  4 


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M  VOYAGE  AUX  SOURCES 

on  compte  une  quamntaine  de  persoaneB,  libres  ou  esdives, 
qui  travaillent  encore  à  l'eitraction  de  l'or,  et  le  village  est 
beaucoup  moios  désert  qoe  celui  de  Heiaponte.  L'agricul- 
ture occupe  aussi  plusieurs  des  habitants  de  Jaraguâ  ;  quel- 
ques-uns d'entre  eux  s'8iq)liquent  spécialement  k  éleva" 
des  bestiaui ,  et  il  existe ,  dans  les  environt  de  ce  village , 
plnsîem^  guo^ries  de  trente  à  quarante  esclaves,  dont  les 
IHiMlnits  se  vendent  principalement  dans  la  capitale' de  la 
province  (1). 

La  mdadie  la  plus  commune  k  Jaraguà,  coibbk  ji  Meia- 
ponte,  est  l 'hydropiate  ;  la  morfta  n'  y  est  pas  non  plus  fort 
rare.  En  1795,  il  y  avait  eu  dans  ce  village  une  épidémie 
dont  le  Bouvenïr  ne  s'était  point  encore  effacé  k  l'époque  de 
mon  voyage ,  et  que  l'on  altrlbnail  aux  réservoirs  d'eau 
très-nombreux  qu'avaient  faits  les  mineurs.  U  paral^it, 
d'après  ce  que  dit  le  docteur  PobI  [â] ,  que ,  dans  la  saison 
des  pluies  ,  l'eau  du  ruisseau ,  souillée  sans  doute  par  le 
travail  des  lavages,  n'est  presque  plus  potable,  ce  qui  doit 
nécessairement  nuire  k  la  santé  des  habitants. 
.  Ici  je  consignerai  un  Tait  médical  qui  paraîtra  sons  doute 
fort  remarquable.  Lorsque  je  me  trouvais  à  JaraguA ,  il  y 
avait,  dans  ce  village,  une  femme  blanche  qui,  quoique 
atteinte  de  le  mor|^,  l'une  des  maladies  les  plus  hideuses 
qui  existent ,  était  devenue  enceinte ,  et  elle  avait  mis  au 
monde  un  enfant  blanc  parfaitement  sain. 

[1)  Di  Cnnba  HiUos  peose  que  l'onverlare  da  nonTMD  cbeniiii  ippel^, 
comme  je  l'ai  dit,  Picada  do  Coireio  de  Goju  fera  perdre  ■□  TilUge  de 
Jaragnà  quelque  chose  de  Taisancc  dont  il  a  joui  peudtot  longtemps  , 
mais  que ,  les  muletiers  n'j  apportant  plus  leurs  ticm  ,  il  fagnera  sons 
le  rapport  de  la  moralité.  Ce  lillage  i  été  érigé  ta  ville  par  un  décret  du 
10  de  juillet  1833  (/tfn.,  T,  149  :  n ,  337). 

<3)  Ueite.  1,393. 


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DU  RIO  DB  8.  FRANOSCO.  M 

ip  pit^tai  de  mon  séjour  h  Jaragui  pour  aller  herboriser 
sur  une  montage  taillée  presque  à  pic ,  qui  est  fort  rap- 
prochée du  village ,  et  qu'on  appelle  iSerra  de  Jaraguâ  : 
cette  montagne  a  peu  d'élévation  et  se  termine  par  un  pla- 
teau étroit  et  allongé,  fort  pierreux,  mais  assez  égal.  t« 
végétation  y  est  i  peu  près  la  même  que  dans  tous  les  cam- 
poa  parsemés  d'arbres  rabougris;  cependant  j'y  trouvai  un 
grand  nombre  d'individus  d'une  espèce  d'acajou  {Àncuiar- 
dium  cvrateliifolium,Xag.  deS.Hil.){l)  que  je  ne  me  rap- 
pdeis  pas  d'avoir  vue  jusqu'alors.  Le  fruit  de  ce  petit  arbre 
est  d'uD  goftt  agréable;  il  devient  mûr  à  l'époqoe  des  pluies, 
et  attire  alors  sur  la  montagne  beaucoup  de  geis  pauvres 
qui  7  trouvent  aussi  une  grande  quantité  de  bacaparis , 
Sqiotée  h  fruit  également  comestible. 

Pendant  le  temps  que  je  passai  k  Jaraguâ,  le  chapelain 
ou  desservant  (eapêllÔo)  voulut  quejeprisse  mes  repas  chez 
lui  ;  il  eut  pour  moi  mille  attentions  et  me  combla  de  poli- 
tesdea.  J'avais  déjA  entendu  parler  de  lui  k  Rio  de  Janeiro, 
où  l'on  connaissait  son  goût  pour  les  mathématiques;  il 
avait  fait  ses  études  dans  cette  ville,  et,  outre  sa  science  fa- 
vorite, il  f  avait  appris  un  peu  de  grec  et  de  philosophie; 
il  enteodait  «issi  le  frantats,  et  avait  dans  sa  bibliothèque 
quelques-uns  de  nos  livres.  En  géuéral ,  les  personnes  de 
l'intérieur  qui ,  à  l'époque  de  mon  voyage ,  n'étaient  pas 
sans  iostrucUon,  l'avaient  puisée  dans  les  ouvrages  frao- 
vaîs,  et  la  plupart  ne  parlaient  de  notre  nation  qu'avec  en- 
thousiasme; il  n'eu  était  pas  ainsi  à  Rio  de  Janeiro,  où  l'on 
savait  mieux  ce  qui  s'était  passé  en  Europe  depuis  viugt-cinq 


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as  VOYAGE  AUX  SOURCES 

ans ,  et  où  plusieurs  de  nos  compatriotes ,  misérables  aven- 
turiers ,  avaient  achevé  de  débiiire  ce  qui  restait  encore  de 
notre  antique  réputation. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  personnes  de  ce  pays  qni  ont  fait 
quelques  études,  comme  le  chapelain  de  Jaragui ,  les  né- 
gligent bientôt,  parce  qu'elles  sont  en  nombre  infiniment 
petit.  Qu'un  homme  instruit  soit  jeté  dans  un  des  villages 
de  la  province  de  Goyaz,  il  ne  trouvera  personne  avec  qui 
il  puisse  s'entretenir  de  ses  goûts  et  de  ses  occupations  &- 
vorites  ;  s'il  rencontre  des  difficultés,  personne  ne  pourra 
l'aider  à  les  surmonter,  et  jamais  l'émulation  ne  soutiendra 
son  courage;  il  se  dégoûtera  peu  à  peu  des  études  qui  fuî- 
saient  son  bonheur;  il  les  abandonnera  enlièrement,  et 
finira  par  mener  une  vie  aussi  végétative  que  tous  ceux  qui 
l'entourent. 

Le  chapelain  de  Jaragué  était  un  mulAtre  :  j'ai  déjà  fait 
l'éloge  de  sa  politesse;  mais  elle  avait  quelque  diose 
d'humble  qui  tenait  à  cet  état  d'infériorité  dans  lequel  la 
société  brésilienne  retient  les  hommes  de  sang  mélangé 
(18i9),  et  qu'ils  n'oublient  guère  quand  ils  sont  avec  des 
blancs.  Cette  infériorité  n'existe  réellement  pHS,  si  l'on 
jwend  pour  objet  de  comparaison  l'intelligence  des  uns  et 
des  autres;  peut-être  même  pourrait-on  assurer  que  les 
mulâtres  ont  plus  de  vivacité  dans  l'esprit  et  de  facilité  pour 
apprendre  que  les  hommes  de  pure  race  caucasique  ;  mais 
ils  participent  à  tonte  l'inconsistance  de  la  race  africaine, 
et.  Bis  ou  petit-fils  d'esclaves,  ils  ont  des  sentiments  moins 
élevés  que  les  blancs,  sur  lesquels  pourtant  ne  réagissent 
que  trop  les  vices  de  l'esclavage. 

Le  chapelain  de  Jaraguâ  ne  fut  pas  la  seule  personne  no- 
table que  je  vis  dans  ce  lieu;  je  reçus  la  visite  d'un  autre 


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DO  RIO  DE  S.  PUNCISCO.  53 

ecclésiastique  qui ,  avant  lui ,  avait  été  desservaot,  et  celle 
de  l'ancien  commandant  du  village.  Dans  ce  pays,  comme 
à  Minas,  on  va  complimenter  l'étranger  qui  arrive,  et  lui 
se  contente  de  rendre  les  visites  qui  lui  ont  été  taites. 

Avant  de  quitter  Jaraguà,  j'entendis  la  messe  dans  l'é- 
glise principale  que  je  trouvai  jolie  et  ornée  avec  goAt.  Sui- 
vant l'usage,  les  femmes  étaient  accroupies  dans  la  nef, 
toutes  enveloppées  dans  des  capotes  de  laine  avec  un  fichu 
simplement  posé  sur  la  tête.  Je  remarquai  que,  après  avoir 
pris  leurs  places,  plusieurs  d'entre  elles  Ataient  leurs  pan- 
toufles et  restaient  les  pieds  nus.  74'étant  probablement 
pas  accoutumées  à  porter  des  chaussures  dans  l'intérieur 
de  leurs  maisons ,  elles  se  hâtaient  de  s'en  débarrasser. 

Ce  n'est  pas  seulement  l'église  de  Jaraguâ  qui  témoigne 
en  faveur  du  goât  et  de  l'habileté  des  Goyanais.  J'avais  vu , 
à  S.  Luzia  et  à  Meiaponte,  des  meubles  et  de  l'argenterie  qui 
avaient  été  faits  dans  le  pays  et  étaient  bien  travaillés.  Plu- 
sieurs tableaux  de  fleurs,  qui  n'auraient  point  été  désavoués 
par  nos  bons  dessinateurs  d'histoire  naturelle,  ornaient  le 
salon  dn  curé  de  Meiaponte,  et  étaient  dus  à  un  homme  qui 
n'était  jamais  sorti  de  Villa  Boa. 

Après  avoir  quitté  Jaraguâ,  je  traversai  un  terrain  de 
peu  d'étendue ,  parsemé  d'arbres  rabougris ,  et  ensuite  j'en- 
trai dans  de  grands  bois.  C'était  le  fameux  Mato  Grosso 
(bois  épais)  dont  j'ai  déjà  eu  occasion  de  parler  au  Tableau 
génial  de  la  province,  et  que  la  roule  parcourt  de  l'est  Â 
l'ouest,  dans  un  espace  de  9  Ugoas.  Pendant  les  sis  pre- 
mières, ces  bois  me  parurent  i  peu  près  semblables  à  ceux 
que  j'avais  vus  avant  d'arriver  à  Jaraguâ  ;  les  grands  arbris- 
seaux y  sont  plus  communs  et  plus  serrés  que  dans  les  forêts 
vierges  proprement  dites ,  et  l'on  dirait  un  immense  taillis 


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M  VOYAGE  AUX  SOUICES 

déjà  Agé,  au  milieu  duquel  on  aurait  laissé  ud  grand  nom- 
bre de  baliveaux.  Des  Àcaatbées  et  une  couple  d'Amaran- 
tacées  furent  à  peu  près  les  seules  herbes  que  je  trouvai  en 
fleur  en  parcourant  les  six  premières  lieues  du  Hato  Grosso. 
La  deruière  partie  de  ce  bois  offre  une  végétation  beaucoup 
plus  belle  que  la  première;  là  des  arbres,  la  plupart  vigou- 
reux, assez  rapprochés  les  uns  des  autres,  sont  liés  entre  eux 
par  un  épais  fourré  d'arbrisseaux  et  de  lianes,  et,  en  certains 
endroits,  des  bambous  fort  différents  de  ceux  que  j'avais  vus 
au-dessus  de  Jaragué,  à  tiges  plus  grandes  et  moins  grêles , 
forment  d'épais  berceaux.  Au  milieu  du  Mato  (ïrosso,  il 
existe  de  grandes  clairières  où  croît  uniquement  du  capim 
gordura,  Graminée  qu'à  cause  de  son  odeur  fétide  on 
Domme  ici  capim  catmgueiroon  simplement caJinjfu«ù-o(l]  : 
ces  lacunes  étaient  autrefois  couvertes  de  bois  ;  od  mit  le  ter- 
rain en  culture,  et  le  capim  gordwai  fini  par  s'en  emparer. 
Malgré  la  sécheresse ,  la  verdure  du  Hato  Grosso  était  en- 
core extrêmement  fraîche  (20  juin),  et  des  feuilles  nombreu- 
ses couvraient  la  plupart  des  arbres,  bien  différents,  en  cela, 
de  ceux  des  catingai  de  Minas  .\ovas  (S)  qui ,  i  la  même  épo- 
que de  l'année,  sont  presque  ausù  nus  que  tes  forêts  de 
l'Europeaucœurdel'biver.Jesuispersuadéque,  lorsqu'on   ' 


(1)  Dn  mot  ealingtt,  omiituu  odenr.  edie,  ea  particulier,  qui  rtoilte 
de  U  (ruispiratioiii. 

(!)  Les  catingai  soDt  des  fortls  qui  perdeol  Imrt  reuilles  duqne 
umée  et  tant  moins  vigonreuRes  qne  lei  bob  riergH  propremeui  dits 
(*o}ei  moo  Voyage  dant  la  pmiticti  lU  Rio  de  Jaméiro,  elc,  U, 
M,  101,  et  moaTableangéonTaphUiveiU  lavégélationprimitiw,  etc., 
d4ns  les  Nouvelle*  Annalet  det  Voyagei,  vol.  UI).  Pris  dans  ce  sens,  le 
mot  eatinga  n'eppartinit  pas  k  la  langue  portngaise  :  il  tm  àémi  des 
deni  mots  ùidieas  caa ,  Unta,  boia  blanc  (  Foirafe  dant  I*  itùlrici  4*» 
IMamaHU,  etc.,  U,36(t). 


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DQ  HO  K  6.  FIAHOSOO.  Si 

étildieni  wee  ■ttentioD  les  arbres  du  Mato  Grosso,  od  en 
tronToii  fort  peu  qui  croissent  également  dan»  les  bois  voi- 
sins de  la  ca^tale  du  Brésil.  Je  n'en  trouvai  que  deui 
espèces  qui  fussent  en  fleur,  et  on  lea  chercherait  inutile- 
inent  au  aaliea  des  forêts  primitires  du  littoral  :  le  pre- 
mier, le  Matomba  ou  Mutombo  {Guamtma  ulmifoUa ,  A.ng. 
de  S.  Uil.)(l),  dontlefhilt,  quoique  ligoeui,  idsse  échap- 
per un  suc  qui  rappelle  le  goût  de  la  Sgne  grasae  ;  le  se- 
cond, le  dtichâ  {Stercuha  chichâ,  Aug.  de  S.  Hil.),  dont 
les  semences  sont  trèfl-bonnes  à  manger,  et  que  l'on  ferait 
bien  d'introduire  dans  les  jardins  de  la  cAte. 

Je  reviens  aux  détails  de  mon  vofage. 

SientAt ,  après  avoir  quitté  Jartgué,  je  commençai  à  m'a- 
percevoir  que  je  m'af^rochais  de  la  capitale  de  la  iffovince. 
Le  pays  devient  beaacoup  moins  désert;  je  rencontrai  {rio- 
neurs  personnes  dans  le  chemin ,  et  je  passai  devant  trois 
maisonnettes  habitées,  dont  nne  avait  dn  raneho  ou  han- 
gar destiné  pour  les  voyageurs  et  ouvert  de  tous  les  cAtés, 
eoomie  ceux  de  la  route  de  Rio  de  Janeiro  k  Minas. 

De  la  maison  où  Je  fis  halte  dépendait  également  un 
raneho  {Rancko  da  Goyidteira,  le  raneho  dn  goyavier),  sous 
lequel  je  m'établis. 

Le  jour  suivant,  je  trouvai  heureusement  de  l'ombrage 
dans  le  Mato  Grosso  ;  partout  où  le  soleil  dardait  ses  rayons 
la  chaleur  était  excessive  et  ^ssait  sur  mes  nerfs  de  la 
oiaDtère  la  p\aa  pénible  (3).  Les  nuits,  au  contraire,  étaient 

(1)  Flora  Bratiliœ  m«riiiio»atit,  I,  IH;  —  Btmie  ii«  ta  Flore  dn 
Brétil  miriiHonal ,  par  Ang.  de  S.  Hilaîre  et  Ch.  Nindiii ,  dias  les  An- 
naUt  dn  teieneti  naturelle» ,  iaHhi  IMl. 

(S)  A  eofilieira,  le  thariiiomttre  indiquait,  à  3  tfaree  aprts  midi, 
!f  degrfs  R««amar,  et  IS  dcgréa  k  6  beure»  du  soir. 


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3S  TOTAOE  AUX  SOUICES 

(oiqours  ftatches  et  la  rosée  d'une  eiUéme  aboodance. 

Au  delà  de  Goyabeira,  je  rencontrai  une  grande  cara- 
vane; ce  n'était  que  la  seconde  depuis  Formiga,  ce  qui 
prouve  combien ,  dans  ce  pays,  le  commerce  a  peu  d'ac- 
tivité. Celle-ci  était  partie  de  S.  Paul;  elle  avait  fait  le 
voyage  de  Cuyabi  ;  de  là  elle  était  venue  à  Goyaz  pour  se 
renike  à  Bahia,  mais  ie  propriétaire,  ayant  appris  que  les 
pâturages  du  sertâo  (désert]  de  Bahia  étaient  entièrement 
desséchés  et  n'offriraient  aucune  nourriture  à  ses  mulets, 
avait  pris  le  parti  de  retourner  à  S.  Paul.  Des  voyages 
aussi  gigantesques  étonnent  l'imagination,  quand  on  songe 
que  les  marches  sont  tout  au  plus  de  3  à  4  lieues,  que  l'on 
est  souvent  obligé  de  séjourner  en  plein  air  ou  sous  un 
triste  nmcho,  qu'il  faut  se  condamner  aux  plus  rudes  pri- 
vations et  presque  toujours  traverser  des  déserts. 

L'habitation  oii  je  Rs  halte,  à  3  legoat  deGoyatieîra, 
porte  le  nom  de  Rancho  dat  Areat  {le  rancAo  des  sables). 
et  me  parut  considérable,  à  en  juger  non  par  le  logement 
du  maître,  mais  par  les  terres  en  culture  que  je  vis  dans  les 
alentours  et  le  grand  nombre  de  bestiaux  qui  erraient  au- 
près de  la  maison. 

Je  m'établis  sous  un  rancho  très-grand  et  bien  entretenu 
qui  dépendait  de  œtte  habitation.  Il  était  entouré  d'énor- 
mes pieux  serrés  les  uns  contre  les  autres,  qui,  à  la  vé- 
rité, ne  s'élevaient  pas  jusqu'au  toit,  mais  qui,  du  moins, 
garantissairat  de  la  voracité  des  pourceaux  les  etTets  (dacés 
sous  le  hangar. 

A  peine  mes  malles  furent-elles  déchargées,  que  les  gens 
de  la  maison  entrèrent  dans  le  rancho  pour  admirer  les 
marchandises  de  José  Harianno,  et  je  fyis  tout  étonné  de 
voir  une  troupe  de  femmes  bu  nombre  des  curieux.  Toutes, 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  SU 

blsDcfaes  et  nml&tresses,  avaient  une  assez  mauvaise  tour- 
nure ;  elles  arrivèrent  sans  faire  le  moindre  compliment, 
et  s'en  allèrent  de  même.  Les  hommes  n'étaient  pas  beau- 
coup pins  polis  ;  ils  avaient  un  air  niais  et  des  manières 
rustiques.  En  général,  cepeodant,  je  trouvais,  je  dois  le 
dire,  beaucoup  plus  de  bonté  et  de  politesse  chez  les  habi- 
tants de  la  province  de  Goyai  que  dans  toute  la  partie  occi- 
dentale de  celle  de  Minas,  si  différente  du  voisinage  de 
Tijuco  et  de  Villa  Kiea  (Dlamantina,  Ouro  Preto). 

Avant  mon  départ  du  rancho  das  Areas,  il  fallut  se  que- 
reller avec  José  Marianno,  ce  qui  était  déji  arrivé  plusieurs 
fois.  Cet  bomme,  si  partit  dans  les  commencements  du 
voyage,  s'abandonnait  à  l'excessive  biiarrerie  de  son  carac- 
tère; il  savait  que  je  ne  pouvais  le  remplacer,  et  quoique 
je  le  payasse  plus  cher  que  n'aurait  fait  aucun  Brésilien, 
qu'il  fât  traité  avec  les  plus  grands  égards,  il  me  manquait 
sans  cesse  et  devenait  insupportable.  Il  avait  une  adresse 
r»narquable,  beaucoup  d'intelligence,  et  je  pouvais  causer 
quelques  instants  avec  lui ,  ce  qui ,  au  milieu  des  déserts 
monotones  que  je  parcourais  seul ,  était  à  mes  yeux  d'un 
très-grand  prix.  J'avais  <odçu  de  l'affection  pour  lui,  il 
m'était  pénible  d'y  renoncer.  Mais  peut-être  est-il  impos- 
sible de  trouver  un  muletier  brésilien  qui  s'attache  à  son 
maître.  Ces  hommes,  toujonrs  ou  presque  toujours  des  mé- 
tis, ont  à  peu  près  toute  l'inconsistance  des  nègres  et  des 
Indiens;  ils  sont  sans  principes,  la  plupart  sans  famille; 
accoutumés  è  une  vie  nomade,  ils  ne  peuvent  s'assujettir  A 
la  dépendance  que  pour  un  court  espace  de  temps,  et  il 
fout  nécessairement  qu'ils  cliangent,  lors  même  qu'ils  sont 
presque  s&rs  d'être  plus  mal.  D'ailleurs,  durant  les  longs 
voyages  des  caravanes,  l'inférieur  se  trouve,  dans  tous  les 


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H  VOYAGE  AUX  SOURCES 

iastaotsde  Mvie,  bous  les  yeux  de  sod  supérieur,  et  l'hooune 
aime  taot  la  diversité,  que ,  en  géoéra),  il  se  dégofltte  d'Âtre 
cootinuellement  svec  la  même  personne,  surtout  lorsque 
la  présence  de  cette  dernière  lui  rappelle  des  devoirs  dont 
il  voudrait  s'affrancbir.  U  est  rare  que,  dans  un  voyage  de 
long  cours,  les  psssagwï  ne  se  querellent  pas  sans  cesse, 
■oit  entre  eus ,  soit  avec  leur  cfq>itaine;  et  une  femme  cé- 
lèbre (1  )  disait  que ,  pour  guérir  deoi  amants  de  leur  pas- 
sion, il  faudrait  les  faire  voyager  en  litière. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  tracasseries  que  j'essuyais  dans 
mon  iolérienr,  et  dont  rien  ne  voiait  me  distraire,  ren- 
daient insupportable  ce  voyage  déji  si  ennuyeux  par  Ini- 
méme,  et  qui  était,  è  cause  de  la  sécherewe,  si  peu  froc- 
tuenxpoor  l'histoire  natorelle. 

Ajffès  avoir  quitté  le  Rancbo  das  Areas,  je  fis  encore  3  lê- 
0D<u  dans  le  Mato  Grosso,  et  tout  àcoup  j'entrai  dans  on 
etm^  parsemé  d'arbres  rabougris,  changement  qui  se  fait 
brusquement,  sans  intermédiaire,  conune  celui  d'une  dé- 
coration de  théAtre  ;  et  cependant  il  ne  me  parut  pas  qu'il 
y  eût  la  moindre  différeace  ni  duts  la  nature  ni  dans  l'élé- 
vation du  sol. 

Je  passai  la  nuit  dans  une  petite  chaumière  appdée  le 
Sitio  da  Loge  (le  litio  de  la  pierre  mince] ,  qui  était  habitée 
pv  d«s  femmes  seules.  La  maîtresse  de  !a  maison  ne  se 
cacha  poiut  i  mon  arrivée  ;  elle  me  regut  très-bien  et  causa 
beaucoup  avec  moi.  Elle  avait  vu  le  missionnaire  capoci* 
dont  j'ai  déjà  parlé,  il  lui  avait  donné  des  instructioDs  et 
des  conseils,  et  elle  paraissait  enchantée  de  son  lèle  â  de  sa 
charité. 

(I)  M""  deSévigné. 


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DD  UO  DE  S.  nUHCISCO.  S9 

Les  femmes  qui  habitaient  Lage  n'étaient  point  dans  l'in- 
digeoce;  la  principale  d'entre  elles  portait  même  des  bi- 
joux d'or,  et  cependant  sa  maison  n'avait  pas  même  de 
porte.  Dans  ce  pays,  comme  on  l'a  déjà  vu,  la  bonne  foi  ne 
préside  pas  toujours  aux  b'ansactiong,  mais  il  est  sans 
exemple  qu'on  entre  dans  une  maison  pour  y  prendre  quel- 
que chose  (4819). 

Au  deiè  de  Lage  le  pays  ett  plat;  on  continue  à  parcourir 
des  eampos  parsemés  d'arbres  rabougris,  mais  des  lisières 
de  bcHs  bordent  tous  les  ruisseanx.  La  sécheresse  était  toa- 
Jours  extrême  et  les  plantes  sans  fleurs. 

Comme  on  m'avait  prévenu  qu'en  suivant  la  grande 
route  je  serais  obligé  de  passer  le  Rio  Unihià  sur  un  pont 
qui  était  sur  le  point  de  tomber,  je  me  décidai  k  prendre 
un  ch^nin  de  traverse  pour  aller  gagner  un  ^utre  pont.  La 
nultresse  d'une  petKe  habitation  m'ofijrit  très-poliment  de 
me  donner  son  fils  pour  me  guider  ;  j'acceptai  sa  proposl- 
tiaa,  et,  sans  ce  jeune  homme,  je  me  serois  probablement 
égaré.  II  est  à  remarquer  que ,  dans  l' intérieur  du  BrésU , 
oà  l'en  voit  peu  d'étrangers  et  où  l'on  est  naturellement 
bon  et  obligeant,  cas  petits  services  se  rendent  sans  aucune 
eqiérance  de  rétribution. 

À  3  letfofu  de  Lage,  je  Gs  balte  à  l'habitation  de  Man- 
àinga  (sorcellerie]  (1 },  à  peu  près  aussi  chétive  que  le  sont 
ordinairement  celles  de  ce  pays. 

Ce  soir-là  (35  juin),  on  y  célébrait  une  grande  f%te,  celle 
de  S,  Jean.  Chaque  année,  les  cultivateurs  du  voisinage  ti- 
rent au  sort  pour  savoir  chez  qui  se  fera  la  fête;  c'était  le 
tour  de  nxm  hâte.  Ou  commença  par  planter  un  grand  mAt 

\  i\  ht  mot  maHtJinga  est  arricain. 


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fl»  VOYAGE  AUX  S 

surmonté  d'un  petit  drapeau  sur  lequel  étaK  l'image  du 
saint.  La  cour  de  l'habitation  Ait  illumioée  ;  on  fit  un  grand 
feu,  et  on  tira  des  coups  de  pistolet  en  criant  :  Vive  S.  Jeunl 
Pendant  ce  temps,  un  joueur  de  guitare  [viola]  chantait  du 
nei  et  de  la  gorge  des  tnoditJuu  (1)  bien  niaises  sur  un  ton 
lamentable,  en  s' accompagnant  de  son  instrument.  En  gé- 
néral ,  c'est,  comme  je  viens  de  le  dire,  que  les  gens  du 
peuple  diantent  les  ntodinluu  ;  les  paroles  en  sont  beaucoup 
trop  gaies,  et  si  l'on  n'entendait  que  l'air,  on  croirait  que 
c'est  celui  d'une  complainte.  Bientôt  cependant  commen- 
cèrent les  batuques,  ces  danses  obscènes  que  les  habitants 
du  Brésil  ont  empruntées  aux  Africains;  ils  ne  furent  dan- 
sés d'abord  que  par  des  hommes  :  presque  tous  étaient  des 
blancs;  ils  n'auraient  pas  voulu  aller  chercher  de  l'eau  ou 
du  bois  comme  leurs  n^res,  et  ils  ne  croyaient  point 
s'abaisser  en  imitant  les  ridicules  et  barbares  contorsions 
de  ces  derniers.  Les  Brésiliens  doivent  bien  quelque  indul- 
gence â  leurs  esclaves,  auxquels  ils  se  sont  mêlés  si  souvent, 
qui  peut-être  ont  contribué  à  leur  enseigner  le  système 
d'agriculture  qu'ils  suivent,  la  manière  de  tirer  for  des 
ruisseaux ,  et  qui ,  de  plus ,  furent  leurs  maîtres  à  danser. 
Après  les  batu^tet .  mes  bAtes ,  sans  aucune  transition , 
s'agenouillèrent  devant  un  de  ces  petits  oratoires  portatifs 
que  l'on  voit  dans  toutes  les  maisons ,  et  chantèrent  la 
prière  du  soir.  Cet  acte  de  dévotion  dura  fort  longtemps; 
quand  il  fut  terminé ,  on  se  mît  à  table  et  l'on  porta  des 
santés.Tontelanuit,  on  chanta  et  l'on  dansa  des  frotuçtte*; 
les  femmes  finirent  par  s'en  mêler,  et  le  lendemain,  au  mo- 
ment où  je  partis  ,  on  dansait  encore.  C'est  ainsi  que  fiit 

11)  Le«  niodr'nhof  sont  des  chiusoniiettes  ptrticulières  •□  Brésil. 


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m  MO  DE  s.  FUNCISCO.  SI 

Châtrée  à  Mandioga  la  fête  de  S.  Jean ,  et  partout  ailleurij 
on  la  célébra  de  la  même  manière.  Devant  la  porte  de  la 
plupart  des  sitios,  (m  voit  le  grand  arbre  desséché  qui  a  été 
planté  le  jour  de  cette  fËte,  et  qui  porte  i  son  extrémité  un 
petit  drapeau  Uanc  sur  lequel  un  saint  est  représenté. 

BientM,  après  avoir  quitté  Mandinga,  je  passai  sur  un 
pont  en  bois  le  Rio  Uruhû.  Cette  rivière,  que  l'on  regarde, 
dans  le  pays,  comme  l'origine  du  Tocantins,  et  qui  en  forme 
réellement  la  branche  la  plus  méridionale  et,  par  consé- 
quent ,  la  plus  éloignée  de  l'emboudiure,  n'est  encore,  en 
cet  endroit,  qu'un  faible  ruisseau  ;  elle  prend  sa  source  dans 
la  Sara  Dowada,  dont  je  parlerai  plus  tard ,  et,  après  un 
cours  d'environ  30  legooâf  elle  perd  son  nom  en  se  réunis- 
sant au  Rio  das  Aimas  (i). 

An  ddà  de  l'Cruhà,  je  continuai,  pendant  Icngtemps,  à 
parcourir  des  eampoi  dont  la  végétation  est  toujours  la 
même,  et  enfin  j'entrai  dans  un  bois  très-épais,  qui  res- 
semble h  nos  taillis  de  douze  k  quinze  ans,  tant  les  arbres 
y  ont  peu  de  hauteur.  Avant  d'arriver  à  ce  bois,  on  voit  seu- 
tonoit  de  petites  montagnes  dans  le  lointain  ;  mais,  quand 
on  est  sorti  du  bois,  tout  le  pays  devient  noontueux,  le  che- 
min est  alors  couvert  de  pierres ,  et,  immédiatement  ^piès 
avair  passé  le  ruisseau  qui  porte  le  nom  de  Rio  Vermdho 
(Ifl  rivière  rouge)  (9),  on  arrive  au  village  d'Oitro  /!no  (or 
fia). 

J'y  Bs  lulle  sons  un  roneho  <»ivert ,  où  étaient  déjà  éta- 
blis d'autres  voyageurs.  On  voyait  dispersés  çà  et  li  des 
malles,  des  cuirs  écrus,  des  bAts  et  tout  l'attiraîl  des  mu- 


(1)  CuiL,  Corog.,  1,333. 

(3)  Yojet  ce  que  jt  dis  gar  cctu  rivière  dans  k  chapitre  HiTUt. 


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63  TOTAGB  AUX  SODtCBS 

lets;  des  hamacs  araiait  été  guipendm  aox  poteaux  qui  sou- 
tenaient le  rancAo;  les  muletiers  étaient  accroupis  autour 
du  feu  qui  avait  serri  à  faire  cuire  leurs  haricots. 

Onro  Fino  est  situé  sur  une  hauteur  aD-deseus  du  Rio 
Termelho ,  et  fait  face  aux  petites  montagnes  appelées 
Morro  âo  Sot  (morne  du  Soleil) ,  que  l'on  Toit  de  Tantre 
cAté  du  ruisseau.  Ce  village,  qui  n'a  jamais  été  bien  consi- 
dér^le,  doit  son  origine  i  l'or  que  l'on  tirait  autrefois  du 
Rio  Termelho ,  et  son  nom  à  la  belle  qualité  de  cet  or  (1). 
Comme  aujourd'hui  il  n'existe  des  mines  que  dans  les 
mornes  voisins ,  et  que,  foute  d'eau ,  on  ne  peut  les  exploi- 
ter (2),  Ouro  Fino  n'oBre  plus  qu'une  triste  décadence. 
Toutes  les  maisons  sont  à  demi  minéfls;  plusienn  d'entre 
elles  restent  sans  habitants,  et  l'église  qai  dépend  de  la  pa- 
roisse de  Villa  Boa  n'est  pas  en  meilleur  état  que  les  mai- 
soDS  eiles-m^es.  Le  peu  de  personnes  que  l'on  compte 
encore  dans  ce  pauvre  village  (3)  vivent  d'un  petit  com- 
merce de  pourceaux  et  dn  maigre  produit  de  quelques  mi- 
sérables tavernes. 

Le  lendemain  dn  jour  on  je  couchai  k  Ouro  Fino ,  Je  ne 
fis  que  1  lieue  et  demie,  afin  de  pouvoir  envoyer  José  Ma- 
rianno  à  Villa  Boa,  avec  une  lettre  de  recommandation  qui 
m'avait  été  donnée ,  pour  un  eoloml  de  milice ,  par  son  pa- 
rent, le  curé  die  S.  Joâo  d'EI  Rei.  Je  m'arrêtai  à  l'endrott 
appelé  Potiêo  Xovo  [la  halte  neuve] ,  sous  un  mauvais  ron- 
eho  qui  dépendiit  d'une  maison  presque  détruite,  habitée 
par  de  pauvres  nègres. 


(1)  F».,  Mem.  ktil.,  IX,  »1. 

(S)  L.  c. 

(3)  Oan  FiM  n'a  janm  ea  le  ti 


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DO  RIO  DE  S.  PRARCtSCO.  03 

Eotre  Ouro  Fino  et  Poaso  Noto,  la  ronte,  qni  trarerse  des 
bois,  est  en  très-mauTais  état,  et  doit  devenir  totalement 
impraticable  dans  la  saison  des  pluies.  On  ne  répare  point 
les  chemins;  fis  doivent  être  nécessairement  moins  bons 
dans  le  voisinage  des  villes ,  parce  que  là  ils  sont  ploa  fré- 
quentés. 

Etant  arrivés  de  très-bonne  heure  è  Ponso  Noto,  je  pro- 
fitai du  temps  qui  me  restait  pour  faire  une  longue  herbo- 
risation; et,  cootinuant  à  suivre  le  chemin  de  Villa  Boa, 
j'arrivai  i  an  petit  faameau  qui  se  compose  d'une  chapelle 
et  de  quelques  maisons  i  demi  ruinées . 

Ce  hameau  porte  le  nom  de  Ferreiro  (serrurier)  (1),  et 
est  célèbre  dans  l'histoire  de  Goyax,  parce  que  les  Paulistes 
qui  découvrirent  le  pays  formèrent  en  cet  endroit  leur  pre- 
mier établissement.  Les  colons  qui  s'y  étaient  d'abord  fixés 
se  retirèrent  bientôt  pour  aller  cbercber  fortune  ailleurs; 
un  serrurier,  compagnon  de  ces  aventuriers,  ne  voulut 
point  suivre  leur  exemple,  et  on  donna  au  village  le  nom 
de  sa  profession  (SJ. 

José  Marianno  arriva  de  Villa  Boa  enchanté  de  l'accueil 
que  lui  avaitfait  le  colonel  Francisco  Leite,  auquel  j'étais 
recommandé.  Le  colonel  l'avait  chargé  de  me  dire  qu'il  ne 
fallait  pas  que  j'arrivasse  h  la  ville  avant  le  lendemain  au 
soir,  parce  qu'il  voulait  avoir  le  temps  de  me  chercher  une 
maison;  il  avait  ajouté  que  je  devais  descendre  au  palais  du 

(1)  Da  Cnnlui  Hallos  dit  que  les  TillagM  d'Ouro  Fino  et  de  Ferreiro 
ODt  perdo  leur  importance  depnia  qae  les  carivines  passent  p«r  le  che- 
min appelé  Picada  do  CoTreio  de  Gojai  (  Itin.,  H ,  87).  Ils  aTuent  certes 
bien  pen  de  cho.e  h  perdra. 

(ï)  Je  mit  ici  la  TersioD  de  Caial  de  préférence  k  celle  de  Piiarro, 
qui ,  snr  ce  point ,  n'est  pas  parbitemeat  d'accord  arec  lai-mene. 


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M  VOYAGE  àVX  SOUBGES 

général  et  accepter  toutes  leftofftestfuecelui-cipoorraitnie 
fiiire. 

Je  suivis  eiactement  les  prescriptions  du  colonel  Leite, 
et  partis  (36  juin)  fort  tard  de  Fouso  Novo  pour  me  rendre 
i  Villa  Boa. 


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DD  UO  PB  S.  nUNCISGO. 


CHAPITRE  XX. 


VUXA   BOA  OU   U  CITÉ  DE   GOTAZ. 


Biatoin  de  Filla  Èoa.  —  BJeavinUges  et  agr^meais  de  m  positioa.  — 
Le  Rio  Tcnnelbo  la  trarer^  e  ;  pools.  —  ÉglUes.  —  Kua  ;^uiKiiiB.  — 
Plafes  pabUqucs, —  Palais  da  goovcnicur.—  HdUl  des  finances  (cota 
da  etmtaâoria).  —  HAtel  de  ville.  —  BAUl  poar  la  TOate  de  For.  — 
Popalation.  —  HaUdies  ;  gottre.  Atoence  de  «MOara  nMicani.  —  Oc- 
capatiooB  des  habiUoU  de  Tilla  Boa.  —  BontiqDes.  —  Onniers.  — 
Nonrritare.  —  Aacnne  ressource  poar  la  KteHÛ.  —  Mariages  rang. 
Qaelle  eo  est  la  canse.  Hanraia  eiemples  donnés  an  penple  par  eeni 
qui  dcTraient  le  guider  et  IVclurar.  —  Les  femmes  de  Gojai.  —  Goût 
pour  le  lafla.  —  Hangae  de  délicatesse.  —  Va  dtaer  an  palais.  —  Des- 
cription de  l'int^rienr  de  cet  édifice.  —  Portrait  et  histoire  du  capi- 
taine général  Firiundo  Delcim)  FBCrai  ni  CiSTiLio.  —  Portrait  de 
Riiammo  HoniTO  HTicnrrao.  DescripliOD  de  sa  maison.  —  Le  P.  Jo> 


Bartholomea  Bueno,  qui  déconvrit  la  province  de  Goyoz, 
jeta  aussi  les  premiers  fondementa  de  sa  capitale.  Après 
avoir  quitté  le  lieu  appelé  Ferreiro ,  il  bitit  une  maison  sur 
)e  bord  du  Rio  Vermelbo ,  et  celle-ci  devint  le  noyau  d'un 
village  auquel  on  donna  le  nom  de  Santa  Anna.  Les  auto- 
rités du  pays  établirent  leur  résidence  daas  cet  endroit , 
qai  bientM  acquît  une  grande  importance,  et  Santa  Anna 
t^t  érigé  en  ville  par  une  ordonnance  royale  de  Tévrier 
4756.  Alors  le  pays  ne  formait  point  encore  une  province 
séparée;  le  gouverneur  de  S.  Paul,  de  qui  il  dépendait. 
11.  i 


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00  VOYAGE  AUX  SOOKCES 

D.  Luu  DB  Mascakbnbas,  coktb  de  Sabzedas,  ne  mil 
l'ordumance  &  eiécution  qu'au  mois  de  juillet  1739,  et  il 
doDoa  à  la  nouvelle  ville  le  nom  de  Villa  Boa  de  Goyaz,  en 
mémorre  de  Bueno ,  gui  en  avait  été  le  Tmidatear  (1).  Un 
décret,  rendu  par  le  roi  Jfeao  VI,  le  t8  septembre  1S18  ^), 
éleva  au  rang  de  àié  (c^ade)  la  capitale  de  la  province; 
mais,  au  Ueu  de  l'appeler  Ctdaàe  Boa ,  ce  qui  eût  été  natu- 
rel, on  lui  donna  le  nom  de  Cidade  de  Goyat ,  qui  a 
rextr£me  inconvénient  d'être  la  répétition  de  celui  de  tout 
le  pays,  et  semble  imaginé  pour  faire  oublier  un  homme 
dont  l'intrépide  persévérance  avait  ajouté  k  la  monarchie 
portugaise  une  province  plus  grande  que  la  France  et 
qu'on  avait  laÎMé  miHirir  dans  l' iodigenoe  (3). 

(1)  eu.,  Cor.,  1,393.  — Pis,,  ifem.  Mit,  a,lU«lMii*.  —  PoB, 
««fM,  1,333. 

(1)  J'emprunte  cette  dite  à  Piurro,  oéceasuremeot  lujeai  iiwtaBit 
que  )e  docliar  Pobl.  et  qui,  d'aillenn,  met,  lUas  md  iodieatÛKi,  me 
précision  plus  grude. 

(3)  Barlholomen  Baeuo,  qui  STUt  pouÉ4é  d'imnenaes  ncbemtm,  M 
sut  poiDt  le»  cODserrer,  et  ibandoDii*  mime  k  sod  B1*  les  direrp  piaf* 
qni  lui  iTuent  étt  accordés  pour  u  récompense.  Qnuid  il  fat  derena 
panire ,  le  gwiTenieiir  de  S.  Paul  vint  t  md  «ecoors  et  lui  donna  1  ar- 
robe  d'or  sur  le  trésor  rojal  ;  am  ce  don  ne  fol  puinl  conflmi  par  le 
roi ,  et ,  pour  pouvoir  rendre  ce  qu'il  ayait  retn ,  Bueno  fat  Migé  de 
meUreàreucoa  sa  maison,  ses  eeclaTea  et  les  bijoux  de  sa  femme  (.POSL, 
JMm,  1 ,  SSai .—  M.  le  général  Baimmido  José  da  Cunha  Hattos  raconte 
qse,  au  paasage  dn  lUo  Corumbi ,  pris  le  villap  de  Santa  Crai,  Il  ftit 
reta,  eu  1833,  par  les  arrière^til»-eDraats  de  Bactbolomea  Bneno,  dam 
jeunes  personnes  dont  il  fait  an  grand  éloge,  et  nu  jenite  boauue  de 
17  ans  qui  n'avait  poîat  reçu  d'éducation,  mais  se  comportait  honnête- 
ment ,  wiw  oublier  son  origine.  Cett«  fkanllle  habitait  une  pauvre  mai- 
BomMtte  mal  menblée  et  était  à  pen  près  réduite  k  l'indigence,  c  Qoelle 

■  nit  madoateut.dit  Hattos,  eu  TOjoot  le  prince  de  la  noblesse  go^a* 
«  naise  forcé  de  se  livrer  i  des  traTaui  manuels,  et  ses  amrs  condam- 

■  nées  k  teatei  les  priralions—  Tel  est  le  sort  des  descendanls  dn  invid 


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DU  UO  DE  &  FIAHOSCO.  07 

La  présence  de  l'or  avait  pu  seule  détenniner  la  fonda- 
tion de  Villa  Boa;  car  cette  ville,  située  (1]  par ,16*  40' 
lat.  S. ,  à  300  legoas  de  la  cAte,  dans  un  caotoo  stérile,  loin 
de  toutes  les  rivières  aujourd'hui  narigaUes,  communique 
difficilement  avec  les  autres  parties  de  l'empire  brésilien  : 
elle  n'a  pas  même  l'avantage  d'une  grande  salubrité ,  et  on 
l'abandooDerait  bientôt  si  elle  n'était  la  résidence  de  tontes 
les  edministretHUs  de  ta  province. 

Elle  a  été  bAlie  dans  une  sorte  d'entonnoir  et  est  en- 
tourée, de  tous  les  cAtés,  par  des  mornes  de  hauteur  iné- 
gale qui  font  partie  de  la  Serra  do  Corumb  e  do  Tocan- 

■  ButholomeaBiisiiOfditiabaiigiUM,  qoi,  le  premier,  décoonitGvju, 
•  l'un  des  plus  illostres  eveoluriers  de  la  piovince  de  S.  Peul  i  Tel  est 

■  le  sort  des  (rrière-pelits-flls  da  second  BarUtolomeii  Bneno,  cet  homme 

■  etilbre  qui ,  aprto  ■toit  eooqab  et  penpU  le  mênie  prorinee,  pos- 

■  eéda,  qnelqaes  instaole,  des  monceanx  d'or  (/(tm.,  1, 114).  >  Deux 
ans  plus  Urd ,  HitLos  repaast  par  le  mtme  endroit,  et  il  j*U  encore  U 
hmille  des  Bneiio  :  le  président  de  la  proTince,  pour  les  empêcher  de 
moarir  de  ftitn ,  leur  «rut  fait  donner  h  recette  dn  péage  da  Corumbi, 
dent  le  produit  aiait  entitreraent  apparteon  à  leur  père  (I.  o.,  n,  70)1 
n  n'est  personoe  qui,  apris  tTOii  la  ce  qui  précMe,  m  s'écrie,  avec 
moi ,  qa'il  est  de  l'honaenr,  de  la  dignité  du  gouTernement  de  Go  jai  de 
M  pas  permettre  qne  tout  Toysfenr  qni  entre  dans  le  paja  ait  sons  les 
Tmi  un  si  triste  eiample  de  l'iastabUilé  des  cboacs  d'ici-bas  et  anrtmt 
de  l'ingratitude  des  hommes.  Espérons  qn«  quelque  pertoaae  bieateii- 
laute  fera  coooattre  à  S.  H.  l'empereur  du  Brésil  la  situation  déplorable 
où  H  tTOQTent  les  Anhangnera,  rejetons  d'une  hmille  qui  a  ajouté  i 
Fempire  qu'il  gourerne  une  prorinee  aussi  « aste  que  riUem^ne. 

(1)  Citle  position  a  été  déterminée  par  1m  PP.  Dioga  Soares  et  Do- 
minfos  Cbapaci ,  jésnltet  et  matfaémtlieiens  habiles  qui  araient  été  ehar^ 
gés,  par  le  roi  Jean  T,  de  lerer  la  carte  dn  BréMi  (  Pu.,  Htm.,  IX,  lU). 
C'est  Traisemblablemenl  i  eu  qu'est  due  la  déleratinaliiHi  du  positions 
indiquées  par  Piiairo ,  Esdtwege  et  «aires ,  ou  au  taaiot  d'une  partie 
d'entre  elles.  —  Esclnege  écrit,  pour  TilU  Boa,  16*  19'  :  il  ;  aura  sans 
doute  m  une  bute  de  « 
dePiiarro. 


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«8  VOYAGE  iUX  SODRCES 

tins.  Sa  position  n'a  cependant  rien  de  triste.  Les  mornes 
dont  ette  est  environnée  ont  peu  d'élévation  -,  ils  sont  cou- 
verts de  bots  qui  conservent  toujours  une  belle  verdure  et 
qui,  ayant  peu  de  vignenr,  ne  sauraient  donner  au  paysage 
l'aspect  sévère  des  pays  de  forêts  vierges  ;  enfin ,  m&ne  au 
mois  de  juin,  la  couleur  du  ciel,  moins  belle  ailleurs,  avait 
encore  ici  le  pins  brillant  éclat.  Vers  le  sud  ,  les  cdlines 
sont  assez  basses  et  laissent  voir  à  l'horizon  la  Serra  Dou- 
rada,  dont  le  sommet,  pour  ainsi  dire  nivelé,  et  les  flancs 
nus  et  grisâtres  produisent  dans  le  paysage  un  effet  |Htto- 
resque. 

La  cité  de  Goyaz  a  une  forme  allongée  et  est  divisée,  en 
deux  parties  presque  égales ,  par  la  petite  rivière  appdée 
Rio  Venneibo,  qui,  après  avoir  pris  sa  source  dans  les 
montagnes  voisines  du  village  d'Ouro  Fino,  coule  de  l'est 
à  l'ouest  et  va  se  jeter  dans  l'Araguaya  {i).  Trois  ponts  en 
bois  et  à  une  seule  arche  établissent  une  communication 
entre  les  deux  parties  de  la  ville. 

Il  y  a  dans  Villa  Boa  un  grand  nombre  d'églises  (9)  ;  mais 
elles  sont  petites,  et  aucune  d'elles  n'a  d'ornements  à  l'ex- 
térieur. L'église  paroissiale ,  la  seule  où  je  sois  entré ,  est 
consacrée  à  Ste.  Anne  (Santa  Atma)  ;  die  n'a  point  de  pla- 
fond, mais  le  mattre-autel  et  quelques  autres  que  l'on  voit, 
en  outre,  de  chaque  c^té  de  la  nef,  sont  enrichis  de  dorures 

(1)  J«  n'ai  pri8  dus  le  piTs  ■nenn*  note  Mt  le  ecnra  da  lio  Trr- 
melbo ,  et  j'emprante  au  doH^tir  Pohl  ce  qae  je  dis  ici  de  cette  Tnrtèrc. 
Piiarro  ne  la  oomme  mtine  pas. 

(S)  Ed  I81B ,  Laiz  d'Alincaarl  en  complaît  huit.  Da  Slrt  e  Soosa  ta 
admet  le  même  nombre  en  1833,  saroir  .*  Santa  Anna ,  qui ,  i  cette  ^po- 
qne,  arait  le  titre  de  eaihjdrile  et  dont  je  parlerai  tout  i  rbeare;  Rou- 
rio,  Boa  Horla,  Canna,  S.  Pranciwo  de  Pauka,  Senboradalbbadia,  Se- 
ubora  di  Lapa  et  S.  Barbira ,  qni  nons  occnpere  un  peu  plas  tard. 


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et  ornés  avec  assez  de  goût.  A  un  demi-quart  de  lieue  de 
Villa  Boa,  du  cAté  du  nord,  s'élève,  sur  le  sommet  d'une 
colline,  une  petite  chapelle  dédiée  à  sainte  Barbe  (Santa 
Barbara);  de  là  on  découvre  la  ville,  les  campagnes  envi- 
ronnantes, et  plus  loin  la  Serra  Doursda  :  un  chemin  large 
et  bien  battu  conduit  à  cet  endroit  et  forme,  pour  les  habi- 
tants, une  sqrte  de  promenade. 

Les  rues  de  la  cité  de  tioyaz ,  larges  et  en  général  assez 
droites,  sont  presque  toutes  pavées  ;  mais  elles  le  sont  mal. 
On  compte  dans  cette  ville  environ  900  maisons  (1)  bâties 
en  terre  et  en  bois,  assez  élevées  pour  le  pays,  mais  petites, 
tontes  blanchies  sur  le  devant  et  couvertes  en  toiles;  plu- 
sieurs d'entre  elles  ont  un  étage,  outre  le  rez-de-chaussée, 
et  qudqueft-unes  des  fenêtres  garnies  de  carreaux  faits  avec 
du  talc  ;  la  plupart  sont  bien  entretenues ,  et  je  trouvai 
celles  des  principaui  habitants  passablement  meublées  et 
d'une  propreté  eitréme.  Il  n'en  est  pas  de  Villa  Boa  comme 
de  la  capitale  de  la  province  des  Mines,  où  l'on  voit  des  rues 
entières  presque  abandonnées  [2)  ;  on  a  cessé  ici,  beaucoup 
[dus  promptement  qu'à  Villa  Rica,  de  s'occuper  de  la  re- 
cherche de  l'or,  et  le  nombre  des  maisons  s'est  trouvé  en 
rapport  avec  celui  des  «nployés  civils  et  militaires,  des 
marchands  et  des  ouvriers  que  ces  employés  nécessitent. 

Il  existe  à  Villa  Boa  deui  places  assez  considérables  qui 

(1)  Pohl  en  indiqoe  700 ,  Luti  d'Alincoart  quelques-unes  de  plus ,  Pi- 
urro  690  oa  on  pen  plus  de  730.  Selon  le  généT»!  Raimundo  Soai  da 
CuiiKa  Hatlos ,  U  j  ea  avait  740  en  1813.  Le  mime  auteur  ajoute  que  la 
popalalioD  d«  la  citj  de  Goju  s'ékrait ,  à  la  mèiM  époque,  14,000  Imes; 
niai«  je  ne  paia  m'empJcher  de  considérer  ce  chtSre  comme  étant  îaté- 
rieur  h  la  Téritj. 

Il)  Voyei  mon  Vojfagt  àatu  (m  pTminees  de  Rio  île  Janeiro  et  de 
MiHtuGeraet.l,  134t. 


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7t  VOYAGE  AUX  SOmCES 

Mit  la  forme  d'an  triaDgIe  irrégolier.  nosienn  édifices  pn- 
Mlca,  le  palais  du  gonTernenr,  l'hAtel  des  finances  {casa  da 
eontadoria),  celui  de  la  fonte  de  l'or  [cota  âa  fundiçao), 
l'église  parolBsiale,  une  autre  église  beaucoup  moins  im- 
portante, ornent  la  première  de  ces  deux  places  que  I'mi 
appelle  terreiro  do  paço.  La  seconde,  qui  est  la  plus  grande, 
est  située  à  l'une  des  extrémités  de  la  rille.  L'bAtel  de  ville 
{eoBa  da  camara)  et  la  caserne  donnent  sur  cette  place,  yers 
le  milieu  de  laquelle  s'élève  une  fontaine.  Celle-ci  me  parut 
Atre  d'une  architecture  pins  qne  médiocre,  mais,  du  moins, 
elle  n'otfire  rien  de  ridicnle. 

Lorsque  je  parle  des  édifices  publics  de  ce  pays,  il  ne 
faut  pas  se  représenter  des  bâtiments  immenses  comme 
ceux  que  l'on  voit  en  Europe  :  Ici  tout  est  petit,  tout  est 
mesquin,  sans  élégance  et  mCme,  dit-on ,  sans  solidité  (1). 

Quuit  &  la  grandeur,  le  palais  du  capitaine  général  fait 
pént-Mre  exception,  surtout  pour  le  pays  ;  d'ailleurs  il  n'a 
que  le  rez-de-chaussée  et  est  sans  ornemenls  extérieurs. 
Gomme  il  se  trouve  un  peu  élevé  au-dessus  du  sol,  on 
monte,  pour  y  arriver,  un  perron  mesquin  de  quelques 
marches;  mais,  auparavant,  on  passe  par  un  portail  qni 
s'avance  sur  la  place  de  la  manière  la  plus  disgracieuse  et 
qui  sert  de  corps  de  garde. 

Outre  le  rez-de-cbaussée,  l'bAtel  des  finances  a  encore 
UD  étage.  Les  employés  sont  réunis  dans  une  salle  allongée 
où  se  trouvent  deux  rangs  de  bureaux  placés  vis-Jk-vis  l'un 
de  l'autre,  et  à  l'une  des  extrémités  de  la  salle  est  un  bu- 
reau plus  élevé  oà  travaille  l'employé  principal  ;  disposition 
qui  me  rappela ,  de  la  manière  la  plus  exacte ,  celle  de  la 

m  VnjM  CiztL,  CoTog.  Brat..  I,  334. 


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I>D  110  M  8.  PftAHOnCO.  71 

plupirt  des  classes  de  nos  collèges,  h»  salle  où  s'assemble 
la  juDte  du  trésor  royal  {junta  da  fazenda  reoTj  est  ornée 
de  bateaib  et  de  rideaax  de  damas  ronge.  Cest  là  qoe  l'on 
pèse  Yor  qai  entre  dans  les  cfdFres,  comme  celui  qui  en 
sort;  mais  les  balances  consacrées  à  cet  usage  sont  habi- 
tnellement  cachées  par  des  rideaux  de  même  étoffe  que  le 
reste  de  l'ameublement. 

L'tiMel  de  Tille  et  celui  de  la  fonte  de  l'or  ont  aussi  un 
étage.  Comme  c'est  la  coutume  dans  toutes  les  villes  de 
fiDtérieur,  le  rez-de-chaussée  du  premier  de  ces  bAtimenta 
a  été  rtservé  pour  la  prison. 

Sous  le  portail  de  la  caserne  se  voient  denx  petites  pièces 
de  canon  (1),  ce  qui,  à  la  distance  où Goyai  est  delà  cMe, 
et  avec  l'extrême  difficulté  des  transpOTts,  peut  être  con* 
sidéré  comme  une  merveille. 

Les  nègres  et  les  molAtres  forment  la  majeure  partie  de 
la  population  de  Goyai  (S).  Cette  ville,  bâtie  dans  un  fond, 
oîi  l'air  ne  circule  point  comme  sur  tes  montagnes  et  dans 
la  plaine,  où  les  eaux  paraissent  peu  salubres,  où  la  cha- 
leur est  souvent  excessive  pendant  la  sécheresse,  où  l'humi- 
dité doit  être  très-graode  dt^s  la  saison  des  ptaita,  ne  sau- 
rait être  favorable  aux  hommes  de  notre  race-;  aussi  les 
blancs  de  Villa  Boa  sont-ils  bien  loin  d'offrir  dans  leurs 

(1)  C'ot  «au  diwie  U  ce  qn«  Ctul  appeUa  on  petit  fort. 

(2)  ■  ReUtÎTenMnt  au  nombre  des  nigraa  et  des  moUtrsi ,  je  toIs  ici 
•  beneoap  de  jeraonnes  bUochc*.  ■  lUiBiniMlo  Joaé  di  Cunbt  HiUas 
imrtit  cette  phrue  le  jour  mËme  de  aoa  irriTéc  dus  U  capitale  de  la 
pnmnca  de  Go;ai ,  le  15  jnia  1B33  (  Itin.,  l ,  136].  11  était  rerttn  de  la 
plaa  haate  dignité  ;  les  blaoca  durent  naturellemeat  se  raisembler  au- 
tour délai;  pent-ètn  même  airint'il  des  localités  Totsiaes  ponisatis' 
taire  knr  curiosité  ou  pour  lui  faire  boonenr.  Par  la  suite ,  il  se  sera 

Q  qu'ils  M  sont  pas  aosri  oombreni  qu'il  l'aTail  cm  d'abord. 


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TS  V0TA6B  AUX  SODRCES 

pereounes  les  caractères  de  la  santé,  de  la  Tfgueur  et  de 

ractivité{1). 

Les  différentes  sortes  d'hydropisie,  et  principolemeot 
l'hydropisie  de  poitrioe,  sont  les  maladies  qui  enlèvent  à 
Goyaz  le  plus  grand  nombre  de  personnes.  Presque  tous  les 
habitants  de  cette  ville  et  ceux  des  environs  oat  un  gottie, 
et  souvent  cette  difformité,  devenue  énorme,  empècbe  de 
parler  ceiu  qui  en  sont  affligée. 

A  l'époque  de  mon  voyage,  il  n'y  avait  à  Villa  Boa  au- 
cun médecin  ;  il  ne  s'y  trouvait  d'autre  chirurgien  que  ce- 
lui de  la  compagnie  de  dragons,  qui  réunissait,  assurait-on, 
i  une  nonchalance  extrême  l'ignorance  la  plus  complète. 
Les  marchands  d'étoffes  et  de  quincaillerie  vendaient  quel- 
ques remèdes  qu'ils  recevaient  de  Rio  de  Janeiro,  mais 
personne  n'avait  la  moindre  idée  de  pharmacie.  Le  capi- 
taine général  avait  fait  au  gouvernement  central  des  re- 
présentations sur  l'absence  totale  de  secours  médicaux, 
elles  n'avaient  point  été  écoutées  ;  l'administration  de  Rio 
de  Janeiro  était  alors  i  peu  près  aussi  insouciante  qu'on 
l'était  à  Goyaz  (â). 

La  nourriture  des  habitants  de  Villa  Boa  est  celle  de  tous 
les  Brésiliens  de  l'intérieur;  la  farine  de  maïs  ou  de  manioc 


(1)  Pohi  dit  qne  les  blancs  de  la  dtd  de  Goju  sont  d'nnecooatltotMD 
délicate ,  Uodig  qne  Ie«  nègres  et  les  malltres  sont  fort  robasics  {Beûe, 
1,  aas).  Cette  obMTVitiOD  contriboerait  k  confirmer  te  que  j'ai  insÎDné 
aiUeura  {Voyage  dan*  Iw  provincei  OtRiùie  iOMiro,  etc.,  l],  que  U 
rsM  eaaeasiqae  leod  k  a'iltérer  dans  l'Aménqae  du  Snd  et  la  rac«  •(H- 
caine  t  s';  perfeelioiiiier. 

(S)  ■  En  1831,  dit  H.  le  docteur  Slgaod  [Dti  Climat ,  etc.,  H6),  Goyat 
et  Matogrosso  étaient  encore  sang  médecins  :  le  président  d«  Gojai  ré- 
clanu.i celte  époqne.aapria  du  gODTeraenr central ,  et  la  sodéléde 
médecine  de  Rio  de  Janeiro  appnya  cette  juste  di 


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DU  UO  W.S.  FUSdSCO.  73 

ra  karmt  le  fondement  (1).  Cependant  on  peut  ici  se  pro- 
curer quelques  doucears  que  l'on  ne  trouverait  pati  dans 
les  fazettda»;  je  citerai,  en  particulier,  d'excellent  paie 
que  l'on  fait  avec  de  la  farine  de  froment  qui  vient  de  Santa 
Lntia,  de  Meiaponte  et  de  Cavalcante,  village  plus  septen- 
trional que  Villa  Boa,  mais  qui  est  probablement  plus  élevé 
et  dont  les  environs  sont,  dit-on,  très-favorables  à  la  cul- 
ture du  blé. 

Les  emplois  publics  occupent,  autant  du  moins  que  l'on 
s'occupe  dans  ce  pays,  une  bonne  partie  des  habitante  de 
Goyaz.  D'autres  sont  des  marchands,  quelques-uns  vivent 
du  produit  de  leurs  terres;  un  petit  nombre  de  personnes, 
comme  je  l'ai  dit  dans  le  Tableau  général  de  la  province, 
emploient  encore  leurs  nègres  à  chercher  isolément  un  peu 
d'or  dans  le  Rio  Vermelho. 

Il  eiiste  à  Villa  Boa  (4819]  un  assez  grand  nombre  de 
boutiques  fort  bien  garnies  où,  comme  dans  toutes  celles 


(1)  Hon  Voyage  tlant  Ut  prooineet  de  Bio  de  Janeiro  et  de  MUmu 
Geraet  a  fut  coDniltre  net  déUîl  l'ihmeiiUtioD  prindpakmeDl  régi- 
Ule  des  hibiuntt  de  la  partie  aad  da  firfeil  liopical.  Va  tonriste  qai  a 
parcouru  la  proviacé  des  Mines  du  midi  an  Dord  dit  que  les  BrisUieus 
mangent  de  la  viande  talée  ordinairement  {iltdê  (Suzih.,  Soam.,  306). 
Je  présume  qu'il  aura  voalu  parler  de  la  naude  sèche  (carn<  wnt)  que 
Rio  Graude  do  Sul  expédie  sot  le  litioral  du  Br^îl  et  qu'on  lui  aura  Ber- 
ne dans  quelque  Hnda  de  la  proTince  de  Rio  de  Janeiro.  11  n'est  pu  k 
■ni  connaissance  que  Spii  et  Hartius,  Pobl  et  Oardoer  se  soient  plaints 
qu'on  leur  ait  fait  manger  de  la  viande  fétide,  et  je  ne  me  rappelle  pas 
qn'ï  Uiois  et  à  Goju  personne  m'en  ait  présenté  de  semblable.  •  Les 
Toiaseurs,  dit  H.  Sigaud,  qui  parcourent  le  pajs  en  s'aTTtlanL...  dans 
les  vendat  ne  lardent  pas  k  TOir  qne  tont  j  manque ;  mais  ils  revien- 
nent de  leur  premier  jugement  lorsqu'ils  ont  reçu  l'hospiialiié  dans  les 
faiendat Hawe,  Spii  et  Harlins,  iug.  de  S.  H.,  Kostcr  peuvent  attes- 
ter ia  Térité  de  ce  que  je  dis  ici  (Ou  f  limai ,  03).  ■ 


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T4  VOTASB  AUX  SOOKBS 

de  l'intérieur,  on  troure  rénnis  la  mercerie,  la  qulncall' 
lerie  et  tous  tes  genres  d'étoffes.  C'eit  à  Rio  de  Janeiro  que 
se  foaniissent  la  plupart  des  marchands  de  cette  ville;  ib 
D'envoient  que  de  l'or  en  échange  des  objets  qu'ils  reçoi- 
vent. Le  nombre  des  tavernes  {vendat)  est  également  id 
très-considérable;  il  s';  débite  une  quantité  prodigieuse 
d'eau-de-»ie  de  sucre  {eachapa)  (i). 

On  trouve  dans  Goyaz  des  ouvriers  très-babiles  et  qui, 
'  pourtant,  ne  sont  pas  sortis  de  leur  pays.  Us  n'imaginent 
point,  il  est  vrai,  mais  ils  imitent  avec  une  facilité  extrême 
et  mettent  beaucoup  de  fini  dans  leurs  oavrages.  Comme  k 
Minas,  U  est  fort  commun  qu'un  ouvrier  ait  à  la  fois  plu- 
sieurs métiers.  J'ai  vu  le  même  homme  raccommoder  les 
montres,  faire  de  la  bougie,  des  fusils,  des  crayons,  etc.  (2). 

Goyaz  n'offre  absolument  aucune  ressource  pour  la  so- 
ciété ;  chacun  y  vit  dans  son  intérieur  et  ne  communique, 
pour  ainsi  dire,  avec  personne. 

Ptulle  part  peut-être  il  n'y  a  aussi  peu  de  gens  mariés 
que  dans  cette  ville  (1819).  Jusqu'au  dernier  ouvrier,  il 


(1)  Da  Siha  e  Soom  dit  «jne,  en  1SS3,  il  j  iT«il,  k  Oofu,  H  boni!- 
qaes  de  mutluDdises  «èdiet  et  IM  cabarets.  Hittos  arrinit  à  peina 
dans  cette  ville  quand  il  a  ^crit  (/tfn.,  1 ,  130)  qu'il  7  TOjait  pea  de  ca- 
barets et  peu  de  boutiques  ;  i)  aura  certaiDemeat  recoQDU  plus  tard  qu'A 
en  existait  nu  iwmbre  bien  suffisant  pour  une  popnlatioD  qn'il  ae  fidt 
monter  qu'A  4,000  Iraes.  Saruue  populatioD  de  4S,SB4  iDdindos,  la  ville 
ifOrl^aas  n'a,  eo  1B4T,  que  104  cabarets  :  la  âli  de  Ooyu  est ,  par  md- 
sJquent,  sous  ce  rapport,  dix  fois  micai  partagée.  Je  m'abstiendrai  de 
ftire  nue  ccmparaisea  semblsble  pour  l'iiisrrnctioD  publique. 

(3)  Je  ne  suis  point  id  d'accord  avec  H.  Pohl ,  qui  parle  des  ouvrieis 
de  G07U  atec  nn  mépris  qu'ils  ae  méritent  certainement  pas.  Je  n'ai  pas 
remarqDé  non  plus  que  les  marcbandises  qu'on  rend  dans  celte  ville 
fassent  pins  maaTaiaee  que  dans  tout  le  reste  dn  BrésS  :  camme  partent , 
il  j  en  iTait  sans  doute  de  manfaises  et  de  bonnes. 


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DD  RIO  DE  S.  FRAKCISGO.  IS 

n'est  persoDne  qui  n'ait  une  maltresse;  on  l'entretient 
dans  sa  propre  maison,  on  élève  autour  de  soi  les  enfants 
qui  naissent  de  ces  unions  illégitimes,  dont  on  rougit  aussi 
peu  que  d'au  lien  sacré,  et,  si  par  hasard  quelqu'un  se  ma- 
rie, il  devient  aussitAt  l'objet  du  ridicule.  Ce  relâchement 
dans  les  mœurs  date  du  temps  où  le  pays  fut  découvert. 
Si  les  aventuriers  qui ,  tes  premiers,  s'enfoncèrent  dans  ces 
déserts  avaient  avec  eus  quelques  femmes,  c'étaient  des 
négresses  avec  lesquelles  leur  orgueil  ne  leur  permettait 
pas  de  s'unir  par  le  mariage;  la  même  raison  les  empêcha 
d'épouser  des  femmes  indigènes  :  ils  ii' eurent  que  des  con- 
cubines. Dans  l'origine,  il  dut  en  être  de  même  de  la  pro- 
vince des  Mines  ;  mais  comme  elle  est  moins  éloignée  des 
cAtes,  qu'elle  s'est  peuplée  davantage,  que  sa  splendeurn'a 
pas  été  aussi  éphémère,  les  femmes honnétesdurent  y  arriver 
en  plus  grand  nombre.  Aujourd'hui  même  qu'il  y  a  par- 
tout, dans  celle  de  Goyaz,  des  établissements  fiies,  quelle 
femme  ne  serait  pas  effrayée  par  la  distance  des  ports  de 
mer  ii  ce  pays  central  et  par  les  fatigues  d'un  voyage  de 
plusieurs  mois  i  travers  des  déserts  où  l'on  manque  sou- 
vent des  choses  les  plus  nécessaires?  Les  descendants  des 
premiers  colons  goyanais  ont  d6  nécessairement  marcher 
sur  les  traces  de  leurs  pères  ;  le  libertinage  est  devenu  une 
coutume,  et  le  peuple  est  continuellement  encouragé  h  s'y 
livrer  par  l'exemple  de  ceux  qui  le  gouvernent. 

n  est  rare  que  les  employés  qui  se  résignent  à  s'enfoncer 
aussi  loin  dans  l'intérieur  soient  mariés.  Ils  arrivent  dans 
un  pays  où  le  concubinage  public  est  général  ;  ils  trouvent 
commode  de  se  conformer  à  l'usage,  et ,  en  le  suivant,  ils 
l'autorisent.  Parmi  les  capitaines  généraux  qui  gouver- 
nèrent la  province  de  Goyaz  jnsqn'en  18â0,  i)  n'y  en  eut 


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TS  VOYAGE  AUX  SOURCES 

pas  un  seul  qui  fut  marié,  et  tous  eurent  des  maîtresses  avec 
lesquelles  ils  vivaient  publiquement.  L'arrivée  d'un  géné- 
ral à  Villa  Boa  répandait  la  terreur  parmi  les  hommes  et 
mettait  en  eSen'eacence  l'ambition  de  toutes  les  femmes. 
On  savait  que  bientât  il  choisirait  une  maîtresse,  et,  jusqu'à 
ce  qu'il  eût  jeté  le  gant ,  chacun  tremblait  pour  la  sienne. 
Hais  les  magistrats  et  les  employés  de  Yilla  Boa  ne  sont 
pas  les  seuls  dont  l'inconduite  semble  justifier  celle  du 
peuple.  Des  hommes  dont  la  vie  devrait  être  une  protesta- 
tion incessante  contre  des  dérèglements  tout  à  la  fois  con- 
traires aux  lois  de  la  religion  et  de  la  morale,  aux  progrès 
de  la  civilisation,  au  maintien  de  la  famille  et  de  la  société, 
les  prêtres  eux-mêmes,  par  leurs  coupables  déportements, 
autorisent  les  désordres  des  fidèles  qui  leur  ont  été  confiés. 
Leurs  concubines  demeurent  avec  eux  ;  des  enfants  crois- 
sent sous  les  yeux  du  père  et  de  la  mère,  et  souvent  (1849), 
je  dois  le  dire  la  rougeur  sur  le  front ,  le  prêtre ,  quand  il 
se  rend  è  l'église,  est  accompagné  par  sa  maîtresse.  Si  ces 
abus  déplorables  n'ont  pas  entièrement  di^ru  au  moment 
où  j'écris,  puisse  la  publicité  que  je  leur  donne  attirer  l'at- 
tention de  ceux  qui  sont  appelés  à  en  connaître,  et  les 
exciter  a  faire  rentrer  dans  les  voies  du  christianisme  et 
d'une  véritable  civilisation  un  peuple  qui,  lors  de  mon 
voyage,  tendait,  chaque  jour,  à  s'en  éloigner  davantage  (1). 

(1)  Nous  MTODs,  par  le  Hemoria  ettalittica  de  Lau  Antonio  da  Siln 
e  SonM,  quel  élajt  encore ,  en  1B3!,  le  triste  éUt  de  rénseigtieiUCQt  du» 
la  capitale  de  la  province  de  Goru.  •  Les  arts  libérani,  dît  cet  écrirain, 
*  sont  actnellenient  peu  cultiTés  dans  le  ressort  de  la  justice  de  cetk 
'  ville,  et  il  en  est  de  mtme  des  scie'D<:eB  pour  l'eiueigneDieQt  desquelles 
<•  le  conseil  général  a  cependant  proposé  la  création  de  plusieurs  chaires. 
«  Il  n'eiisle  actuellement  à  Gojax  qu'un  professenr  de  grammaire  latine, 
-  une  école  laocaslrienQe  et  quelques  écoles  privées  où  l'on  sait  Tas- 


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OD  BIO  DE  S.  rRANCESCO.  TT 

Pendant  le  jour  on  ne  rencontre  que  des  hommes  dans 
les  niea  de  Goyaz;  mais,  aussitôt  que  la  nuit  vient,  des 
femmes  de  toutes  les  couleurs  sortent  de  leurs  maisons  et 
se  répandent  dans  la  ville.  Elles  se  promènent  ordinaire- 
ment plusieurs  ensemble,  très-rarement  avec  des  hommes. 
Tout  tenr  corps  est  enveloppé  dans  de  longues  capotes  de 
lajoe;  leur  tête  est  couverte  d'un  mouchoir  ou  d'un  cha- 
peau de  feub-e  :  ici  encore,  elles  vont  à  la  suite  les  unes 
deS'Autres;  elles  se  traînent  plutAt  qu'elles  ne'  marchent, 
ne  remuent  ni  la  tète,  ni  les  hrts,  et  semblent  des  ombres 
qui  se  glissent  dans  le  silence  de  la  nuit.  Les  unes  sortent 
pour  leurs  affaires,  d'autres  pour  rendre  des  visites,  le  plus 
grand  nombre  va  i  la  recherche  des  bonnes  fortunes. 

L'œil  noir  et  brillant  des  femmes  de  Goyaz  trahit  les  pas- 
sions qui  les  dominent;  mais  leurs  traits  n'ont  aucune  dé- 
licatesse, leurs  mouvements  n'ont  aucune  grflce ,  leur  voix 

■  deoDC  m^lhcHle.  Des  pirticDliera  ont  voulu  donner  gratuitem«at  des 

■  Icfoufl  de  géométrie,  d'ariihmétiqne,  de  français  et  de  mDsiqae  ;  mais 

■  ila  oat  CD  peu  d'élèves  ■  Par  ce  passage ,  tiré  d'un  écrit  qai  a  od  ea- 
ractire  k  p«a  près  oniciel ,  on  peut  jagcr  de  l'état  de  l'inatroction  daoa 
les  parties  recalées  de  U  province.  Gardaer  dit  d'an  des  villages  du  nord 
oA  il  passa  eo  1840,  qae  Fécole  n'était  nnllemrat  snjvie  et  qu'on  était 
privé  de  livres.  Je  aoe  rappelle,  k  ce  sujet ,  que,  aae  utnivint ,  tm  ISlfi,  due 
la  province  de  Minas  Geraea ,  je  passai  plusieurs  jours  chei  nu  tris-boD 
homme ,  qui  tenait  tout  k  la  rois  nne  twnda  et  one  école.  Cet  bonime  ne 
quittait  guire  son  comptoir  ;  mais ,  comme  la  petite  pièce  oà  étaient  les 
enhole  restai!  ouverte,  il  poavut  les  eateodre  et  vmr  ce  qu'ils  Usaienl. 
Ceui-ci  n'avaient  aucun  livre  ;  ils  s'eiertiient  sar  une  baille  de  papier, 
éternellement  la  même,  oà  Ton  avait  écrit  k  U  main  les  tristes  doléances 
tUD  panne  prisonnier.  Ils  passaient  leur  vie  k  lire  et  k  relire  tout  hiul 
ta  lettre  dn  captif,  on,  pont  mienidirc,  ib  devaient  la  réciter;  car, 
aivés  tant  d'années ,  je  n'en  ai  point  encore  oublié  la  dernière  phrase  : 
Hunea  wrei  mai»  o  arraiat  de  5.  BarOiobm4it  (  je  ne  verrai  jdns  ja- 
mais le  village  d«  S.  Barthélemj  ]  '. 


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78  '      VOYAGE  AUX  SOOSCES 

est  sans  douceur.  Coiuine  elles  ne  reçoivent  poiot  d'éduca- 
tion, lebr  entretien  est  entièrement  dépourvu  de  cbannes  ; 
elles  se  montrent  embarrassées,  stupides  et  sont  descendues 
à  n'être  à  peu  près  que  les  femelles  des  hommes  (1819). 

Il  est  facile  de  concevoir  que  ceux-ci,  étrangers  aux 
douceurs  de  la  société ,  menant  une  vie  oisive  entre  de* 
femmes  sans  principes  et  sans  la  plus  légère  instruction, 
doivent  être  peu  délicats  dans  tous  leurs  goûts;  aussi  celui 
du  tafia  (eaehaça)  est-i)  général  chez  les  hnbitants  de  Villa 
Boa.  Enervés  par  le  libertinage,  fatigués  de  leur  noncha- 
lance, ils  trouvent  dans  Feau-de-vie  un  stimulant  qui,  ponr 
quelques  instants,  les  arrache  à  leur  apathie  et  les  empêche 
de  sentir  la  monotonie  de  leur  existence. 

Il  ne  faut  pas  croire  cependant  que  le  goût  de  ces  hommes 
pour  le  tafia  les  conduise  fréquemment  h  l'ivresse.  Je  dois 
m'empresser  dédire  à  la  louange  non-seulement  des  Goya- 
nais,  mais  encore  des  habitants  du  Brésil  en  général ,  que 
je  ne  me  rappelle  pas  d'avoir  vu,  dans  le  cours  de  mes  longs 
voyages,  un  seul  homme  qui  fût  ivre,  et  celte  obswatiao 
H  trouve  confirmée  par  un  voyageur  moderne  entièrement 
digne  de  foi.  Voici,  en  effet,  de  quelle  manière  s'exprime 
M.  George  Gardner  (1)  :  «  En  venant  du  Brésil,  je  débar- 
quai un  dimanche  matin  à  Liverpool ,  et  dans  ce  seul  jour 
je  vis  pins  d'ivrognes,  an  milieu  des  rues  de  cette  ville,  que 
je  n'en  avais  aperçu,  parmi  les  Brésiliens,  blancs  ou  De- 
grés, pendant  toute  la  durée  de  mon  fëjonr  dans  leur  pays, 
qui  fut  de  cinq  années.  » 

En  tout  pays,  les  petites  villes  sont  jalouses  des  grandes, 
où  l'on  ne  songe  point  à  dlee.  Personne,  iVillaBoa,ne 

(1)  TrawJf.eW. 


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M  MO  BE  s.  FURCNCO.  n 

me  perla  de  Santa  Lueù  et  de  Meisponte,  et  dans  ces  deux 
villages  tout  l«  monde  se  récrie  contre  la  mauTaise  Toi  des 
habitants  de  Villa  Boa.  La  province  des  Mines  inspire  i 
celle  de  Goyan  une  semblable  jalousie.  Les  Mineiros  ont 
à  peine  l'air  de  goupçooner  l'existence  de  Go;ac,  et  les 
Goyanais  ne  cessent  de  déclamer  contre  les  Mineiros.  Ils 
convienoeiit  que  ceui-ci  ont  beaucoup  d'intelligence,  ils 
leur  accordent  plus  d'activité  qu'ils  n'en  ont  euxHotmes 
[tout  est  relatif  dan»  ee  monde]  ;  mais  ils  les  accusent  de 
manquer  de  délicatesse.  Ce  reproche  est,  an  reste,  si  géné- 
ral, d'une  ville  à  l'autre,  d'une  province  à  une  autre  pro* 
vince,  qu'on  senît  ]H%sque  tenté  de  croire  que  tons  le  mé- 
ritent. Quant  an  pays  de  Goyat,  en  particulier,  le  défiiut  de 
bonne  foi  y  est  le  résultat  nécessaire  de  l'altération  conti- 
nuelle des  valeurs  représentatives  et  de  l'habitude  de  faire 
lacontrebande;  et,  comme  la  falsification  de  l'or  en  poudre 
est,  ainsi  que  Je  l'ai  Ait  aa  Tableau  général  de  la  provinct, 
pins  fMqiientu  à  Villa  Boa  que  dans  les  villages,  il  est  clair 
que  les  habitants  de  Meiaponte  et  de  Santa  Luzia  ont  quel- 
que droit  de  faire  &  ceux  de  la  capitale  les  reproches  qu'ils 
leur  adressent  (1). 

(1)  Cens  qnî  nront  In  la  duUon  d«  Piurro ,  que  j'ai  inséra  an  Ta- 
Umh  fAirfpaJ  Ht  la  fmvtnM,  Tcrront  qm  je  snta  loin  de  me  permettre, 
du*  tiMt  ce  qui  préqUe,  quelque  eu§éntf«Mi.  V«ici  encore  de  quelle  ma- 
Diin  s'eifnme  Luîi  d'AlîDcenrt  :  ■  Le*  Myaiuia  sont  pen  iDduslrieai  ; 

■  mais  m  D*  MDt  pas  )«■  mojK»  naWnls  (fAi  leur  manqneDl  ;  ils  se  lais- 

■  sent  domincTiMT  ta  parease  et  se  lirrent,  San*  attcUDfVefD,  aux  plaisirs 

■  deaaRit(Jf«M.,  9S).  >  Aprte  arrar  tlit,  dans  plusienre  endroits  de  son 
Une,  un  lablaan  hîdeai  des  kaUtanta  du  pa  ja  qui  s'étend;  en  droite  lipie, 
de  BartMceoa  k  la  frontière  de  Ootu,  Hattos  ajeule  ce  qui  suit  en  parlant 
da  la  populatian  de  cette  dinMre  prorfam  :  ■  Ca  sont  les  tutmes  mœnra, 
«  la  inhiie  paresae,  la  mStae  indt^oKe ,  d«  maisons  et  des  jardina  ansri 
•  peu  Boignta,  nue  agricaltare  iftalenwnt  presque  nulle,  la  mtineten- 


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M  TOTAQE  AUX  SOUICES 

Lorsque  j'arrivai  i  Vilia  Boa ,  je  desceDdis  su  palais  et  je 
préseolai  an  gonveroeor,  M.  Fesnando  Delgado  Pheue 
DE  Castilho,  mes  pesse-poris  et  les  lettres  de  recommanda- 
tion que  j'avais  pour  lui.  J'en  fus  parfaitement  aocueilli  ;  il 
m'engagea  beaucoup  i  dloer  tous  les  jours  chez  )ui ,  pen- 
dant le  temps  que  je  resterais  k  Villa  Boa,  et  me  fit  toutes 
les  offres  possibles  de  service.  Du  palais  je  me  rendis  chez 
le  colonel  Francisco  Lrite,  qui  me  reçut  très-bien  et  me  fit 
conduire  à  ta  maison  qu'il  me  destinait. 

Le  lendemain,  d'après  l'invitation  que  m'avait  foile  le 
gouverneur,  je  me  rendis  en  palais  à  l'heure  du  dîner. 
Après  avoir  traversé  le  portail  dont  j'ai  parié  plus  haut  et 
qui  sert  de  corps  de  garde ,  je  montai  le  perron  et  j'entrai 
dans  un  vestibule  que  le  corps  de  garde  prive  de  lumière 
et  où  se  tient  une  sentinelle.  Une  porte,  fermée,  suivant 
l'ancien  usage,  par  une  pièce  de  drap  vert  aux  armes  de 
Portugal  >  ouvre  sur  une  antichambre  entourée  de  bancs  de 
bois  à  grands  dossiers.  J'y  trouvai  réunies  les  principales 

■  dresse,  les  mimes  complais«Dces  pour  les  Tagabondsjoaenn  de  gniure 

■  (Itin.,  1 ,  13S].  D  Cet  intenr  se  montre,  k  U  Térilé,  pins  iudolgeat  poor 
la  cité  de  Goju  eD.ptrtJculier;  maïs  ou  doit  sentir  que  sa  position  lui 
imposait  quelque  rfeerre.  Quant  an  Aoctenr  PoU ,  quoiqu'il  u'eiitrt  pas 
datw  beaucoup  de  détails ,  il  n'est  gutre  moins  êévkn  que  Piami.  Ou 
peut  même  )ui  repi^cber  de  dereoir  iigusie  quand  li  s'exprime  *■■■ 
qu'il  soit  :  ■  C'est  une  dis  parlicalaritéa  de  ce  pays  que  k»  habitanli 

•  s'empressent  autour  de  l'étranger  et  loi  témoignent  de  l'amitié .  ala 

•  de  s'assurer  de  loi  et  de  lui  Elire  pajer  le*  moindres  wrTicw  de  la 
«  maniiTe  la  plu*  bonteuae  (  A«iM ,  1 ,  364).  •  PohI  a  pu  rencontiv,  h 
Gojat ,  des  homioes  de  cette  taempe,  UHnme  il  s'en  trouve  dans  ton*  les 
pays  ;  niais  je  ne  me  rappelle  pas  que  rien  de  semblable  me  soil  arrivé 
pendant  les  sii  ans  que  j'ai  mis  à  parcoDrir  le  Brésil  ;  j'ai  irouvé  presque 
partout  rboepitalitt  k  plus  aimaUe  cootme  la  plus  généreuse,  et  je 
crois  qu'il  o'j  a  rien  dans  le  caractère  des  Brésiliens  en  général  qui 
justifie  l'accusation  que  l'auteur  autrichien  porte  contre  les  Gofauii. 


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DU  MO  DK  S.  FRANCISCO.  81 

autorités  du  pays,  et  bientAt  parut  te  capitaine  général.  La 
première  chose  qu'il  fit,  après  avoir  salué  tout  le  monde, 
fut  de  me  présenter  deui  eufaots  de  sept  à  huit  ans,  un 
garçon  et  une  fille,  en  me  disant  :  Ce  sont  deui  petits 
Goyanais,  des  enfonts  de  la  nature;  mais  Sa  Majesté  a 
eu  la  bonté  de  les  reconnaître  pour  tes  miens  et  de  les  lé- 
gitimer (!].  On  vint  annoncer  que  le  dîner  était  sur  la  table. 
Nous  passâmes,  par  une  galerie  fort  large,  dans  un  grand 
salon  assez  triste,  mais  bien  meublé.  Le  dtner  avait  été 
servi  dans  une  salle  un  peu  obscure  et  d'une  grandeur  mé- 
diocre. L^  mets  étaient  abondants  et  bien  préparés;  de 
le  porcelaine  et  de  fwt  belle  ai^enterie  brillaient  sur  la 
table.  Il  était  impossible  de  ne  pas  être  émerveillé  de  ce 
laie,  en  pensent  que  rien  ne  vient  k  Villa  Boa  qu'à  dos  de 
mulets  et  que  nous  étions  i  300  lieues  de  la  cAte. 

On  voyait  sur  la  table  plusieurs  carafes  de  vin  ;  te  gou- 
verneur m'en  donna  un  verre  pour  que  je  busse  à  la  santé 
de  notreamicommun,  JoâoRodriguesPereira  deÂlmeida, 
qui  m'avait  donné  une  lettre  pour  lui  (âj;  mais  personne 
n'y  goûta  que  nous  deux.  Fendant  mon  séjour  à  Villa  Boa, 
le  vin  reparut  tous  les  jours  sur  la  table,  mais  il  était  là  à 
peu  près  pour  la  montre;  le  gouverneur  s'en  versait,  je 
crois,  un  petit  verre  ;  je  ne  buvais  que  de  l'eau.  Le  vin  est  ici 
extrêmement  cher  ;  on  n'en  vend  pas  à  moins  de  i  .SOO  reis 
(9  f.  37  c.)  la  bouteille,  et,  lors  de  mon  voyage,  les  ca- 


(1)  Onsailqn'aalr^is.eaFnLce,  lalégitimatioQdeseiiruiUiHtd- 
Teb  ■ppirlccMÎt  également  am  roii. 

(3)  J'ai  fait  connaître  H.  Joio  Rodrignez  Pereira  de  Almeida  dans  plu- 
«etin  parties  de  mes  ouTrafea,  et  en  parlicalier  au  commeDcemeat  de 
raoD  Voyage  dont  Im  pnntneei  àt  Rio  de  Janeiro,  etc. 


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M  TOYAOE  AUX  SODICES 

ravanes  qui  devaient  en  apporter  n'étaient  point  encore 
arrivées. 

Dans  le  premier  dtner  que  je  fi»  aa  palais,  une  assiette  de 
superbes  raisins  muscats  oe  fut,  comme  le  via,  qu'un  objti 
d'envie  pour  la  plupart  des  convives;  jehuphu  favwi8é,et 
je  les  trouvai  excellents,  tjuoiqae  la  vigoe  produise  id  de 
b^-bons  fruits  et  que  les  essais  qui  ont  été  tentés  pour 
faire  du  vin  aient  été  assez  heureux,  on  plat  de  raisin  est 
encore  un  objet  de  luxe ,  tant  il  y  a  dans  ce  pays  de  n^li- 
geace  et  de  paresse. 

Le  surlendemain  de  moa  arrivée ,  le  capitaine  général 
me  montra  tout  l'intérienr  du  palais,  nom  pompeux  qui 
n'est  guère  mérité  par  le  bâtiment  qui  le  porte.  Les  appar- 
tements en  sont  vastes,  mais  tristes  et  obscurs.  L'anmble- 
ment  a  été  fait  dans  le  pays  mAme.  Un  petit  janfin  ,  assez 
n^ligé,  dépend  du  palais.  <fo  en  a  pavé  les  allées,  comme 
le  sont,  en  général,  cdies  de  tons  les  jaidios  un  peu  soignés 
de  ce  pays,  ce  qui  leur  donne  un  air  guindé  et  les  rend 
extrêmement  tristes.  Un  Jet  d'eau  ornait  autrefois  le  jardin 
du  palais;  mais  les  tuyaux  étaient  en  bois,  ils  n'ont  pas 
tardé  à  pourrir  et  on  ne  les  a  pas  renouvelés. 

Fernando  Delgado,  qui  gouvernait  Goyaz  à  l'époque  de 
mon  voyage,  y  était  arrivé  le  36  novembre  1809.  C'était 
un  homme  froid  ;  il  avait  de  l'eqtrit,  quelque  instruction, 
un  ton  exc^lent ,  une  parfaite  intégrité,  et  connaissait  le 
monde.  Il  désirait  sincèrement  faire  le  bien;  mais  il  avait 
trouvé  partout  la  résistance  passive  la  plus  décourageante, 
résultat  de  l'apathiç  des  habitants  et  de  rinspudance.du 
gouvernement  central.  Voyant,  dès  le  moment  de  son  ar- 
rivée, que  la  province  de  Goyaz  ne  trouvait  presque  plus  de 
ressources  dans  l'exploitation  de  ses  mines,  il  sentit  qu'il 


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DU  RIO  BE  S.  nunasGO.  ss 

fallait  diriger  les  eflbrta  des  habitants  vers  l'agricullnre  et 
le  commerce  ;  il  tAcha  donc  d'ouTrir  des  débouchés  mn  pro- 
duits de  leurs  terres,  et  s'attacha  à  faciliter  la  navigation  de 
l'An^uaya  et  du  Tocaotios.  Il  fnt  parfaitement  secondé  par 
l'outndor  de  la  Comarca  do  Norte  JoAQmH  TasToino  Ss- 
6UBAD0,  et  d'heureux  succès  couronnèrent  les  tentatives 
de  ce  magistrat;  mais,  pour  donner  qudques  suites  à 
d'aussi  grandeft  entreprises,  il  aurait  fallu  plus  de  persévé- 
rance et  d'activité  que  n'en  ont  aujourd'hui  les  Goyanais , 
et  les  glorieux  efforts  de  Fernando  Delgado  sont,  en  défi' 
nitive,  restés  juaqn'i  ce  joOr  (1819-1833]  à  peu  près  sans 
résultat  (1). 

Dans  un  des  dfaiers  que  je  fis  au  pairis,  un  jeune  magis- 
trat, nouvellement  arrivé,  témoigna  sa  surprise  de  l'étran- 
geté  des  mœurs  du  pays,  et  fit  observer  qu'il  était  incon- 
cevable que  les  habitants  de  Villa  Boa ,  ayant  leurs  maî- 
tresses dans  leurs  maisons  et  vivant  avec  elles  comme  si 
à\e»  étaient  leurs  femmes,  ne  les  épousassent  pas.  Voulez- 
vous  ,  s'écria  le  gouverneur  en  montrant  son  fils  et  sa  fille , 
quef  épouse  la  mère  de  ces  enfeuts,  la  flile  d'un  charpeiV' 
tierl  Ces  pindes,  qui  mûreot  fin  à  la  conversation  ,  iodi- 
qutieot  d^i  les  sentiments  qui  amenèrent  la  déplorable  fin 
de  finfovtnné  Fernando  Detgadoi  n  quitta  son  gouverne- 
ment, au  mois  d'aolU  1890,  pour  retourner  en  Portugal,  et 
partitds  Villa  Boa  avec  se» enteits  et  sa  maîtresse.  Arrivé 
à  Rio  de  Janeiro ,  celle-ci  lui  déclara  qu'elle  consentirait 
à  le  suivre  en  Europe,  mais  comme  sa  femme  et  non  comme 
sa  concubine.  Fernando  Delgado,.  anqu^  des  souffrances 
étaient;  dft-oo,  uneparfoHe  lucidité  d'esprit,  ne  put  sup- 

(1)  PIB.,  Mem.  kUt.,  Dt,  ns.  —  Pcwt,  flfÎM,  1.  35Ï  et  sniv. 


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81  VOYAGE  AUX  SOURCES 

porter  )'nltennalivi!  où  il  se  Iroavait  d'épooser  la  fille  du 
charpentier  oa  de  la  laissa-  au  Brésil  et  mit  fin  à  sa  propre 
existence  (1). 

J'étais  à  peine  arrivé  à  Villa  Boa  ,  que  je  refus  la  visite 
des  principaux  fcBctionnaires  publics.  Je  leur  trouvai  des 
manières  très-honnétes  ;  tous  étaient  bien  mis  et  avec  une 
propreté  extr^e. 

Celui  d'entre  eux  qui  me  fit  le  plusd'avancesfbtRAiiitniDo 
NoiTATo  Htacintuo  ,  greffier  de  la  junte  du  trésor  royal 
{etcrivào  da  junta  da  fazenda  reàl).  Dès  le  surleademain 
de  mon  arrivée ,  il  m'envoya  chercher  pour  déjeuner  avec 
lui,  et  il  me  dit  qu'il  voulait  que  je  prisse  mes  repas  dans 
sa  maison,  toutes  les  fois  que  je  ne  mangerais  point  au 
palais.  Raimundo  était  né  en  Europe;  il  avait  voyagé,  avait 
eu  des  aventures  et  se  plaisait  à  les  conter  (3).  H  aimait 
ses  aises  et  possédait  i  Goyaz  une  maison  charmante  qu'il 
avait  hit  bètir  et  qui  réunissait  à  une  très-grande  propreté 
toutes  les  commodités  des  maisons  européennes.  Ce  qu'il 
y  a  de  remarquable ,  c'est  que  ses  meubles  et  son  argen- 
terie avaient  été  faits  à  Villa  Boa.  A  la  vérité,  il  en  avait 
donné  les  dessins,  mais  l'exécution  montrait  combien  les 
'  ouvriers  goyanais  ont  naturellement  d'Iiabileté  et  d'intel- 
ligence. Lui  seul  les  avait  formés,  et  sous  sa  direction  ils 
avaient  appris  à  exécuter  une  foule  d'ouvrages  qui,  à  ta 
même  époque,  étaient  inconnus  à  Minas.  RAimundo  me 


(1)  Le  81s  de  FertUDdo  Delgado  est  mort ,  à  Paris ,  tTJ»-jeniie  «wore, 
■tUclté  à  11  légjlioD  brésilieniM. 

[2)  Aprte  la  réTolatioo  qui  a  pour  jamais  aifité  le  Bréfil  du  Portn- 
gal,  RaimuDdo  Nonaio  HjacÎDtbD  fat  nommt  membre  du  gonrememeot 
proTiBoiredeGo;az;ilest  mort  de  183S  à  1836  (Hiv  ,  ilfM..  1, 13S: 
n,33«]. 


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DU  HO  DE  S.  FRANCISCO.  85 

montra,  entre  autres  choses,  une  litière  qu'il  avait  fait 
Taire  à  Villa  Boa,  et  qui  offrait  toutes  les  petiteff  recherches 
de  nos  voitures  de  voyage  les  mieux  soignées  (l). 

Qnand  j'arrivai  i  Villa  Boa ,  j'y  trouvai  le  missionnaire 
italien  dont  j'ai  parlé.  Il  appartenait ,  comme  je  l'ai  dit ,  h 
l'ordre  des  Capucins,  et  avait  été  envoyé  par  le  gouverne- 
ment portugais  à  Albuquerqtie,  dans  ta  province  de  Mato- 
grosso,  pour  diriger  un  aldea  d'Indiens.  Villa  Boa  se  trou- 
vait sur  sa  route  ;  il  y  avait  séjourné,  retenu  parles  instances 
du  peuple  et  celles  du  capitaine  général ,  et  avait  excité  on 
enthousiasme  extraordinaire.  On  venait  se  confesser  à  lui 
de  15  i  30  lieues  à  la  ronde;  lee  batuquet  avaient  ceasé; 
l'église  paroissiale  était  entièrement  pleine  lorsqu'il  prë- 

(1)  U  paraîtrait  que ,  depaia  celle  épocp» ,  les  ouvriers  de  Go jai  a'oai 
plus  tronré  personne  pour  les  diriger  ;  car  voici ,  selon  H.  Kiddcr,  com- 
ment s'eiprime  le  ministre  de  l'empire  dans  son  rapport  de  l'aDDéelMl  : 

■  U  est  i  peim  possible  de  démovrir,  h  Gojai ,  quelques  persooues  qni 

■  possMeot  ou  peu  d'babilelé  dans  les  arls  mécaniqoes ,  eu  égard ,  sur- 

•  tout,  ani  besoins  de  cette  rasie  contrée.  Huit  ouvriers  frautais  se  diri- 

■  geaieut  récemment  vers  Hatogrosso  :  lorsqu'ils  passèrent  par  Go^ai , 

■  le  goavememeul  provincial  décida  (rois  d'entre  eux,  un  charpentier,  un 

•  menuisier,  un  forgeron .  à  rester  dans  l(  pajs ,  el  cet  événement  parai 

■  asseï  important  pour  être  ofGdellenieDt  relaie  dans  le  message  adressé, 

•  par  le  président,  k  U  plus  prochaine  assemblée  provinciale...  >—Luii 
Antonio  da  Silva  c  Sousa  dit  que ,  en  1832 ,  ou  comptail ,  dans  la  cité  de 
Gof  ai ,  14  serrariers  avec  6  apprentis ,  27  charpentiers  et  quelques  éM- 
vM,15cordonnier8avecTapprentis,Sorfévres,4chandroni)iers,  10  po- 
tiers, et  il  ajoute  qae  ce  qui  nnit  singulièrement  aui  progrès  des  ou- 
vriers, c'est  que  tous  veulent  travailler  poor  leur  propre  compte  anssitAt 
qu'ils  savent  quelque  petite  chose  (Jfem.  eilat.,  11).  On  remédierait  faci- 
lement 1  ce  grave  inconvénient  en  obligeant  les  apprentis  k  passer  des 
traités  avec  leurs  maîtres,  et  en  créant ,  pour  faire  respecter  les  engage- 
ments réciproques,  un  tribunal  d'hommes  notables,  qui,  comme  nos 
prud'hODimes,  régleraient  les  aOaires  saus  pouvoir  ciiger  aucune  rétci- 


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VOYMB  AUX  SODKES 


cbalt;  on  lai  amenaft  les  enGuita  malades  pour  qu'A  les 
béott,  et,  quand  il  passait  dans  les  rues,  on  s'emprenait 
autour  de  lui  pour  baiser  ses  maios  et  ses  habita.  L'amoar 
de  la  nouveauté  avait  certainement  sa  part  dans  cet  enthou- 
Biasme;  cependant  elle  n'en  était  pojnt  l'unique  cause. 

Je  mangeais  tous  les  jours  au  palais  avec  le. père  Joaeph  ; 
ce  n'était  ai  un  homme  instruit  ni  un  homnie  d'esprit, 
mats,  ce  qui  vaut  mieux ,  il  était  régulier,  charitable, 
'  plein  de  douceur  et  de  patience ,  gai,  d'un  caractère  égal , 
fit,  comme  le  peuple  ne  trouvait  malheureusement  que  des 
vices  dans  les  prêtres  qu'il  avait  tous  les  joura  sous  les 
yeux,  il  n'avait  pu  voir,  sans  noe  admiration  profonde,  un 
homme  véritablemoit  chrétien.  Tdie  est  l'impression  que 
durent  produire  sur  les  païens  les  exemples  des  premien 
Qdèles. 


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DU  MO  DB  s.  FBANGISCO. 


CHAPITRE  XXI. 

LES  INDIENS  COTAPÔS. 


Départ  de  Tilla  Boa.  —  Pajs  «tné  an  delà  de  celte  ville.  —  Halle  en 
{Mil  air  an  Uen  appelé  At  Areai.  Carrapalot.  —  Pays  titui  an  deit 
d'Asinas.  Do  Palmier  t  hoilleaMiéTealatl. — Gur^lho. —  La5«rra 
DotÊrada.  Anore  do  PnfMl.  —  Pa;s  sitnd  «n  dell  de  Qnrgnlho.  — 
Àldea  de  S.  Joté. —  Soa  histoire. —  DeecriptioD  de  cet  aldea. —  Régime 
anqnel  soal  soninis  les  Indteoa  Co;ap6a.  —  Comparaison  de  ce  régfme 
avec  celnl  qne  sniTaieiit  les  jésailes  poor  les  Indiens  de  la  côte.  — 
Vitite  ani  Cojapas  doua  leurs  planlalioiii.  ~  Leurs  maisaDi.  --  Levra 
danses.  —  Leurs  ooms,  —  Lear  langne.  Voeabalaire.  —  Lear  carac- 
Ure.  —  Triïte  avenir  de  l' Aldea  de  S,  José.  —  Maladies  des  Cojapos. 

—  Leur  Inatmctioa  religieuse.  Observation  sur  les  deroirs  de  leor 
taré. —Lear  indaatrle  dons  l'état  HOTOge  et  dans  l'état  demi-elTilisé. 

—  Comment  ils  foDt  les  corbeilles  qa'iU  nomment  JunmtM. —  Ceqoi, 
chezeni,  remplace  les  lits.  — Les  femmes  chargées  de  porteries  far* 
deaai.  —  Commeat  ellea  (bnt  caire  la  viande.  —  Boisson  forte.  — 
OsagnanmB  lors  des  décis,  des  noitsances  et  des  mariages.  —  tas 
dn  lotiro.  —  Visite  i  Don  Dimuda. 


Pendant  le  temps  que  je  passai  à  Villa  Boa ,  tcms  les 
habitants  me  comblèrent  d'honnêtetés,  et  mon  séjour  dans 
cette  ville  fut  très-agréable.  Je  déjeunais  et  je  soupais  chez 
Raimundo,  et  je  dînais  chez  le  capitaine  général.  L'arran- 
gement  des  objets  d'histoire  naturelle  que  j'avais  déjà  re- 
cneillîs,  la  conversation,  les  devoirs  qu'il  fallait  que  je 
rendisse  remplissaient  la  plus  grande  partie  de  mes  in- 
stants. 


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88  VOYAGE  kUX.  SODBCES 

Je  partis  le  3  de  juillet  avec  le  projet  de  monter  sur  la 
Serra  Dourada,  de  visiter  l'Aldea  de  S.  José,  habité  par  des 
Indiens  de  la  nation  des  Coyapôs,  enfin  d'aller,  vers  l'ouest, 
jusqu'au  Rio  Claro,  où  l'on  trouve  des  diamants,  et  même 
jusqu'à  la  frontière  de  la  province  de  Matogrosso,  si  je 
pouvais  espérer  quelque  fruit  de  ce  voyage. 

Après  être  sorU  de  la  ville,  je  montai  un  peu  et  traversai 
une  certaine  étendue  de  terrain  couvert  d'arbrisseaux  qui, 
rameux  dès  la  base  et  rapprodiés  les  uns  des  autres,  me 
rappelèrent  les  carrascos  de  Minas  Novas  (1).  Les  liges, 
cependant ,  étaient  plus  grosses,  les  rameaux  plus  tortueux, 
les  feuilles  plus  grandes,  et  un  examen  nn  peu  attentif  me 
St  reconnaître,  dans  ces  arbrisseaux,  la  plupart  des  arbres 
des  eampos  ordinaires ,  qui  doivent,  sans  doute,  cet  état  de 
«légénération  non-seuiemont  à  la  nature  du  sol  pierreux  et 
sablonneux ,  mais  bien  plus  encore  à  ce  qu'ils  ont  été  cent 
fois  coupés  par  les  nègres  de  la  ville  et  à  ce  que  les  jeunes 
pousses  sont  souvent  consumées  par  le  feu  lorsqu'on  brIUe 
les  pAturages  ;  ce  seraient,  en  quelque  sorte,  des  t»illis  de 
ces  arbres  nains  dont  les  can^os  sont  parsemés.  Ce  qui 
prouve  évidemment  que  la  nature  du  sol  n'a  pas  seule  in- 
flué sur  la  dégénération  de  ces  arbres,  c'est  que,  à  quel- 
que distance  de  la  ville,  je  retrouvai  toutes  les  formes 
de  la  végétation  ordinaire  des  eampos,  quoique  le  terrain 
fût  peut-être  encore  plus  sablonneux  et  plus  pierreux.  le 


(I)  Oa  appelle  carratcot  des  espèces  de  forfts  niioes  composte 
d'irbrùficau  de  3  on  4  pieds,  dont  les  tiges  et  les  nmeani  sont  grêla, 
et  qai  sont,  en  géacnl,  rapprocha  les  uns  des  autres  (TOjei  non 
Voyage  dant  let  provincei  de  Bio  de  Janeiro  el  de  Uinat  Ceraei,  U, 
21,  el  mon  Toltleau  de  la  végétation  primitive  dant  ta  province  de 
Hintu  Ceraei,  dans  les  NouvelUt  Annalet  de»  voyagei,  183TJ. 


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DU  nrO  DE  s.  FRAnOSCO.  8« 

vis  qndques  eqtècea  que  je  ne  connaiBsais  pas,  et  je  ne 
doute  point  que,  dans  nne  autre  saison,  je  n'eusse  fait  une 
abondante  récotte. 

Depuis  la  ville  jusqu'à  l'endroit  où  je  fis  halte,  dans  un 
espace  de  1  lieue  environ,  le  pays  est  montoeux,  «i  j'eus 
presque  toujours  devant  moi  l'eitrémité  de  la  Serra  Don- 
rada,  montagne  éloignée  d'environ  5  lieues  de  la  cité  de 
Goyaz,  du  cAté  du  sud.  Cette  Serra,  qui,  comme  je  Tai 
déjà  dit ,  sonble  nivelée  i  son  sommet  et  dont  le  flanc  pré- 
sente des  rochers  nus  et  à  pic,  communique  un  caractère 
de  grandeur  i  ces  solitudes  sauvages  et  stériles.  Ainsi  qu'on 
l'a  déjà  vu,  elle  Eut  partie  de  la  Serra  do  Corumbà  et  do 
Tocantins,  qui,  au  delà  de  Villa  Boa,  s'avance  vers  le  sud, 
pour  ensuite  se  prolonger  plus  ou  moins  directement  vers 
le  sud-ouest  (1). 

Je  ne  vis  dans  cette  courte  marche  absolument  aucune 
maison,  ce  qu'explique  facilement  la  mauvaise  qualité  du 

(1)  Da  Siha  e  Soau ,  Pohl  et  HaUos  disenl  qae  U  portion  de  li  Serra 
do  Conunbfl  e  do  ToMnUns ,  k  Itqnelle  on  donne ,  dans  le  pajs ,  le  Dom 
de  Serra  Dowada ,  s'étend  jnsqu'i  la  province  de  Halogrouo ,  et  je  ne 
trouve  rien  dans  mes  notes  qui  contredise  cette  opinion;  cependant  il 
cet  clair  qne  Caul ,  qni  possédait  tontes  les  anciennes  traditions,  plaçait 
entre  la  Serra  Donrada  et  le  Rio  Clara  d'abord  la  Serra  Eicatvaàa,  pais 
la  Serra  de  Santa  Martha ,  qne ,  plus  récemment ,  on  a  cru  retrourer 
dans  les  déserts  desCoyapds.  —  Selon  Pizarro  {Mem.,  IX,  330],  la  Serra 
Donrada  couperait  tout  le  terrlteire  de  Goyaz ,  elle  s'étendrait  jusqu'à 
HatogrosM,  et  les  Pjreneos  ne  seraient  qne  cette  même  Serra  Donrada. 
L'aatenrdes  Memoria*  a  évidemment  eu  l'idée  d'une  cbalne  contintie 
depuis  la  frontière  de  Minas  jusqu'à  celle  de  Hatogrosso  ;  mais  il  a  en  le 
tort  d'appliquer  k  tonte  cette  chaîne  un  nom  que  les  habitants  ne  don< 
oent  qu'ft  une  de  ses  parties  les  ptns  élevées ,  ce  qui  peut  devenir  une 
source  de  confusion.  La  nomenclature  qne  j'ai  Ctablie  (cbap.  XI)  remt'die 
unt  k  fait  h  cet  inconvénient ,  en  établissant  des  noms  génériques  pour 
les  chaînes  continues  et  cotiservaui  siiigneusemcnt  ù  leurs  diverses  por- 
liooB  les  noms  que  doaoeni  k  celles-ci  les  babitatitâ  du  pays. 


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M  VOTAGE  AUX  SOUBCES 

terrain  :  c'est  tout  ao  ^m  si  l'on  rencontre  quetqnes  rares 

hatntants  dans  les  cantons  les  plus  fertttes. 

J'étais  parti  fort  tard  de  la  ville  ;  je  ne  fls,  comme  je 
viens  de  le  dire,  que  3  iieoet  environ,  et  je  m'arrêtai  sur 
le  bord  d'sD  ruisBeau,  dans  nne  espèce  de  salle  formée  par 
des  arbres  louQias.  Ce  llea  porte  le  nom  A'Àê  Areat  (les 
sables),  qn'll  emprunte  au  missean  qui  l'arrose  (Comgo 
dai  AreoM], 

Depnis  qndque  tempe,  les  carrapatoi  devenaient  hisop- 
portables  :  aimi  qu'on  l'a  vu,  j'en  avais  défi  été  assailli 
dans  les  Montes  Pjreneos  ;  à  Mandinga ,  ils  étaient  eices- 
sfrement  multiplia  ;  h  Aicas ,  il  n'y  avait  peat-étre  pas  on 
brin  d'berbe  qui  n'en  At  couvert. 

Au  Mh  d'As  Areas,  le  sol  continue  h  offrir  un  mélange 
de  pierres  et  de  sables;  des  groupes  d'arbres  tortueux  et 
rabougris  sont  dispersés  çà  et  là  ;  les  Vellona  (vulgairement 
can^d'ema),  amis  des  lieux  élevés  et  des  terrains  sté- 
riles, se  montrent  en  asseï  grande  abondance.  Juiqu'almv, 
je  n'avais  trouvé  d'autre  espèce  de  Palmier  h  feuilles  digl- 
tées  que  le  bority;  en  deçà  et  au  delà  d'As  Areas,  j'en  vis 
une  seconde  espèce  (n"  763],  que  je  ne  crois  pas  avoir  ren- 
contrée depuis. 

La  veille,  j'avais  commencé  à  tourner  l'extrémité  de  la 
Serra  Dourada  ;  au  delà  d' Areas,  je  marchai ,  dans  une  par- 
tie du  chemin,  i  peu  près  parallèlement  au  côté  méridîwMl 
de  ces  montagnes. 

Après  avoir  fait  1  lieue,  j'arrivai  à  une  maison  qui  alors 
tombait  en  mine,  mais  qui  avait  dû  être  fort  jidie.  Elle 
était  entre  les  mains  du  fisc  [fasenda  reaî),  et,  comme  on 
l'a  vu ,  il  laisse  détruire  ici  et  h  Minas  toutes  les  propriétés 
dont  il  s'empare. 


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DD  BIO  DE  S.  FRANOSCO.  ftl 

Depuis  cette  maisoa  josqu'au  lieu  où  je  fis  halte,  dsos 
l'espace  de  1  lieue,  le  cbemiD  est  très-beau  et  bordé  de 
campoi  d'art»«s  rabougris.  I^un  c6té,  on  découvre  uoe 
vaste  plaÎDe  ;  du  câté  opposé ,  le  commencemeDt  de  la  Serra 
Dourada.  Après  avoir  traversé  un  ruisseau  limpide,  j'arrivai 
à  une  maison  assez  grande  et  fort  commode,  appelée  Gur- 
gulho  [i),  qui  a  eu  le  sort  de  celle  dont  j'ai  parlé  tout  à 
l'heure;  la  fasendareal  l'a  ausi  laissée  tomber  en  ruine. 

Je  n'avais  fait  qae  3  legoat  quand  j'arrivai  à  Gui^lho  ; 
mais  je  ne  voulus  pas  aller  plus  loin ,  pour  être ,  le  lende- 
mais,  très-rapprocbé  de  la  Serra  Dourada  (2)  (la  monta- 
gne dorée),  oà  je  voulais  foire  une  excursion. 

Je  pris  avec  moi  José  Marianoo.  Afrès  avoir  traverséquel- 
qoes  qwimadas  et  des  campot,  où  les  arbres  rabougris  sont 
très-éloignés  les  luis  des  autres,  comme  cela  arrive  toujours 
daos  les  mauvais  terrains,  nous  attacbflmee  nos  mulets  sur 
te  bord  d'un  ruiseau  et  nous  commentâmes  à  monter  :  si 
nous  n'avions  foit  plusieurs  pauses ,  il  ne  nous  aurait  pro- 
boUanent  pas  fallu  plus  d'une  demi-heure  pour  arriver  an 
sommet  de  la  Serra.  Elle  n'offre  aucune  anfractuosité  re- 
marquable; mais,  dans  la  partie  peu  considérable  oii  je  la 
parcourus ,  je  la  trouvai  couverte  de  grosses  pierres  entas- 
sées, entre  lesquelles  croisemt  des  arbres  rabougris.  Comme 
le  terrain  est  sans  eau  et ,  ainsi  que  je  viens  de  le  dire,  ex- 
trêmement pierreux,  la  plupart  des  plantes  étaient  dessé- 


(1)  Les  miiMura  twésilims  dônaeiit  le  aoin  de  gurfullto  ■□!  dfbrie 
it  roche  encore  ugnlevi  an  Miilien  dcaqMb  on  troore  Voi  duu  les  ex- 
^oiUlMM  de  miaiènt  dUet  lom-M  4«  riipiara  (Poyiipvdau  tetpro- 
tOneet  d»  Rio  4»  Jtuteito  et  Û9  Mina»  Gtratt ,  t ,  SSi). 

(3)  Pobl  écrit  S«rraifO«ra(fa;  nuroda  n'rst  pu  ud  mot  portugais; 
dtmraio  est  le  participe  du  verbe  tfouror. 


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91  VOYAGE  AUX  SOUflCES 

chées,  et  je  n'en  trouvai  qu'un  petit  nombre  en  fleur. 

Pamni  les  arbres  rabougris  que  l'on  voit  au  milieu  des 
pierres  amoncelées ,  il  en  est  un  qui  doit  être  dté ,  celui 
qu'on  nomme,  dans  le  pays,  Arvore  do  Papel  (arbre  au 
papier],  parce  que  son  écorce,  parfaitement  blanche,  se 
compose  de  plosîeurs  couches  séparables  et  fort  minces  [i], 
qui  ont  la  consistance  du  papier  de  la  Chine  ;  il  s'élève  i 
peu  près  de  K  à  8  pieds  ;  sa  tige  est  tortueuse,  ses  rameaux, 
qui  le  sont  également,  commencent  k  peu  de  distance  de 
la  base  du  tronc  ;  ils  ont  une  position  presque  verticale  et 
se  terminent  par  un  grand  nombre  de  ramnies  courts  et 
menus.  A  l'époque  de  mon  voyage,  cet  arbre  était  malheo- 
reusement  dépouillé  de  ses  feuilles,  et  je  ne  pus  savoir  è 
quel  genre  il  appartient  ;  mais ,  plus  tard ,  malgré  la  difll- 
culté  des  communications,  M.  l'obbé  Luie  ArrroNio  pa 
SiLVA  E  SonsA  (2),  l'auteucde  l'écrit  intitulé,  Memoriasobrt 
0  descobrimento ,  etc.,  de  Goyaz,  m'en  fit  parvenir  h  Rio 
de  Janeiro  un  échantillon  en  fleur.  Je  reconntis  que  V Ar- 
vore do  Papel  est  une  Mélastomée,  et,  depuis,  il  a  été  dé- 
crit par  le  docteur  PohI ,  sous  le  nom  de  Latùmdra  Papij- 
nu  (3).  Je  n'ai  trouvé  cet  arbre  remarquable  que  dans  la 
SerraDourada,etH.Pohl  ditaussiqu'ilnel'apasvnailleurs. 

Parvenu  au  sommet  de  la  montagne,  je  découvris  une 
étendue  considérable  de  pays;  je  distinguais  très-bien  Villa 

(1)  PohI,  qui  éuit  in  moi>  de  mars  sur  la  Serra  Donrada,  parati 
croire  que  le  seul  épiderme  est  séparable.  Sa  mémoire  l'aura  mal  servi , 
on  bien  la  séparalioD  oe  se  Ml  pas ,  dans  le  temps  oà  la  plante  est  «i 
pleine  végétation ,  comme  dans  celui  de  la  sécheresse. 

(2)  Je  n'écris  point  Souro  comme  PohI  et  Hatios,  parce  qne  l'autenr 
lui-même  a  signé  dn  nom  de  Scmta  son  écrit  intitulé  Memoria  ttU- 
liêtiea, 

{3}  lieiie,  I,  39T. 


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DD  BIO  DE  S.  FRANCISCO.  M 

Boa,  qui  semUe  une  oasis  ou  mitiea  d'un  désert,  et ,  beau- 
coup plus  loin ,  je  reconoos  tes  deux  sommets  des  Montes 
Pyreneos. 

A  la  hauteur  de  la  Fazenda  da  Cotteeifào,  dont  je  par- 
lerai tout  i  l'heure,  il  existe,  m'a-t-on  dit,  dans  la  Serre 
Dourada ,  une  galerie  creusée  par  un  des  capitaines  géné- 
raux de  (lOyaz ,  qui  en  tira  de  l'or  pour  une  valeur  de 
80,000  crozades.  Tout  le  inonde  s'accorde  à  dire  que  le 
précieux  métal  abonde  dans  ces  montagnes  ;  mais  le  man- 
que de  capitaux,  de  bras  et  probablement  d'eau  ne  per- 
met pas  qu'on  puisse  l'extraire. 

Dès  le  bas  de  la  montagne,  nous  avions  commencé  à 
être  tourmentés  par  une  espèce  d'abeille  noire,  extrême- 
ment petite,  dont  l'odeur  est  celle  de  l'ambre,  et  qui  se 
plaisait  dans  dos  cheveux ,  se  posait  sur  nos  visages ,  entrait 
dans  nos  yeux ,  pénétrait  dans  nos  oreilles  ;  au  sommet  de 
la  montagne,  l'air  était  rempli  de  ces  insectes  :  ils  devin- 
rent tellement  insupportables  et  je  trouvais  si  peu  de  plan- 
tes que  je  pris  le  parti  de  retourner  à  Gurgulho. 

Le  lendemain,  je  marchai  toute  la  journée  parallèle- 
ment à  la  Serra  Dourada. 

K  1  lieue  de  Gui^Iho ,  je  passai  devant  une  fazenda 
considérable,  celle  de  la  Cùnceiçao  (conception],  qui  ap- 
partenait au  curé  de  l'Âldea  de  S.  José  :  c'était  la  première 
maison  habitée  que  je  voyais  depuis  que  j'avais  quitté  la 
capitale  de  la  province ,  et  cependant  j'avais  fait  S  legoat. 

Entre  la  Conceiçâo  et  l'aldea,  le  pays  est  montueui  et 
boisé.  Lea  arbres  avaient  encore  toute  leur  verdure ,  ce  qui 
prouve  qu'ils  la  conservent  toujours;  car,  dans  la  saison  oîi 
l'on  était  alors,  ils  auraient  dû  en  être  entièrement  dépouil- 
lés, s'ils  eussent  été  desUnés  i  la  perdre.  Dans  des  espaces 


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t4  -TOTASB  ADX  SODACEB 

conHidérablos,  les  bois  ont  Aé  brûlés,  le  n^wt  gordurs  a 
pris  leur  place,  et  il  ne  reste  plus  des  arbres  qai  jadis  ma- 
brageaient  la  terre  que  quelques  troncs  noircis  et  à  demi 
coDiumés. 

Avant  d'arriver  k  l'Aldea  de  S.  José ,  on  le  découvre  de 
loin,  et,  fatigué  d'une  triste  monotonie,  on  jouit  avec  dé- 
lices de  l'effi^  channant  qoe  produisent,  dans  le  paysage, 
des  bâtiments  réguliers  coatrastant  avec  l'aspect  sauvage 
des  déserts  qni  les  environnent. 

Cet  aldea,  occupé  par  des  Indiens  Cayapôi  ob,  comme 
l'on  dit  généralement  dans  le  pays,  Coyapés,  n'était  pmnt 
origiaairement  destiné  k  des  hommes  de  cette  nation. 

Dès  les  premiers  moments  de  la  découverte  de  Goyaz,  les 
aventuriers  qui  se  répandirent  dans  ce  pays  exercèrent  snr 
les  indigèiMs  les  plus  efihtyables  cruautés ,  et  ceui-ci  se 
vengèrent  plus  d'une  fois  par  des  représailles  non  moins 
horriblea.  Le  gouTernement  pMrtngais,  presque  toujours 
généreux  envers  les  Indiens,  les  prit  sons  ta  [votection  ;  il 
ordonna  qu'il»  fussent  traités  avec  douceur,  que  les  jésuites 
fussent  appelés  pour  les  rendre  chrétiens  et  les  civiliser, 
qu'on  n'épargnât  aucune  dépense  et  que  l'on  fît  une  en- 
quête contre  teun  bourreaux.  Il  y  a  loin  de  Lisbcmne  k 
Goyai  :  ce»  mesures  bienfelsantes  restèrent  sans  résultat. 

Quelques  aldeai  furent  cependant  fondés  à  grands  frais, 
et,  entre  autres,  ceux  de  Douro  et  de  Formiga  (4749), 
près  le  village  éag  Alnuu,  dans  la  partie  sqttoiMorule 
de  la  province.  D'abord  on  confia  la  direction  de  ces  deux 
aidées  aux  jésuites,  qui  bientM  exercèrent  sur  les  Aeroéa  (1  ) 

(1)  Ce  D'est  ceHaiaement  ni  Coro&t  ni  AUiea  do  Dwo ,  comme  écrit 
H.  Gardoer.  Je  dois  dire  ccpendiot  que  l'orthographe  du  dernier  de  c« 
non»  est  «elle  qa'a  adopUe  Heth». 


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DO  RIO  DE  s.  PatH|:i8C0.  K> 

qu'on  y  avait  réunis  uae  tr^-graode  influence.  Mois,  cinq 
ans  plus  tard ,  on  plaça  une  garnison  de  soldats  chez  ces 
Indiens;  ceux-ci  se  révoltèrent  et  la  plupart  furent  mas-- 
sacrés  (1  ). 

Sous  le  capitaine  général  José  ob  âlmbida,  barok  de 
MossAMEDES  (3) ,  vers  1773  ou  1774,  ils  se  révoltèrent  en- 
core ;  on  exécuta  les  chefs,  on  transplanta  dans  le  voisiuage 

ii)  Seloo  le  docteur  PohI ,  ce  Eertient  lua  jésuites  qui  iDraient  poussé 
les  lodieus  k  la  révolle.  J'ai  montré  ailleurs  (Vof/age  dartt  U  dùlrfrl 
dM  DiamattU  et  mr  le  lilloral  du  BréiU ,  vol.  II  )  que  le  goUTerne- 
meut  des  pères  de  la  compagnie  de  Jésus  était  le  seul  qai  (Ut  compatible 
avec  le  caractère  de  ces  bommes-eufaDts,  et  que  ce  gonveraemeDt  eii- 
feait  DécesMifpiueat  que  I«8  blancs  Auseat  éloignés  des  aident ,  ce 
qui,  d'ailleurs,  était  conforoM  ani  lois  dn  roi  Pedro  n.  Les  jésuites 
préposés  aai  aidées  de  Donro  et  de  Formiga  durent  douo  voir  avec 
donUnr  arriver  chez  eui  des  hommes  qui  allaient  détraire  leur  ou- 
vrage ;  ils  dnreal  prémuoir  les  Acroàs  contre  les  mauvais  exemples  des 
soldais,  et  les  Indiens,  traita,  sans  doute,  par  eeni-d  arec  cette 
tjrannie  que  les  iTenturiers  gojaoois  eier^aieut  alors  coatre  le«r  race, 
u'aaront  pn  supporter  an  joag  qui  contrastait  avec  la.donceur  d*  leurs 
premiers  maîtres.  Hais  il  était  bien  évident  qu'une  poignée  d'Indiens 
ne  remporterait  pas  sar  la  puissance  portugaise,  et  qae  leur  révolte 
amènenit  leur  destfaetion  et  l'eipuhion  des  jésuites  eni-mèmes.  Pré- 
tendis queceui-cî  fureat  In  insligtlMirs  directs  de  celte  révolte,  c'est 
lef  accnaer  d'une  stupidité  grossie ,  et  jnsqu'i  présent  on  pe  leur  a 
guère  bit  nu  semblaUe  reproche.  Soalhef,  qni  paratt  avoir  puisé  ses 
renseiguemeiits  dans  le  journal  intitulé  Patrlola,  n'a  pas  rapporté  d'une 
mani^  tnto-MtÎBbisante  les  faits  qni  précèdent  ;  mais  il  finît  par  s'é- 
crier :  ■  [4  ccudllitt  dc&  Inditos ,  dans  celte  cbconstance ,  n'avait  rien 

■  quedf  bianD«liiretiODnniDaM|uapMde  l'attribuer  aux  mochinatfons 

■  des  jéqnife>(MM.,Ul,aW)t  >  Cm  rsligiem  ont  été  chassés  de  l'ftldea 
&  Douro  :  a/mt  alkne  voir  ce  qu'il  tal  aujonrd^tanl.  9es  habitants ,  dR 
H.  Gatdner qai  l'a  nsité  en  1839,  bout  h  peki  près  abandonAés  k  eut- 
mèmes,  stiu  pwlsor  depais  dix  aât,  sans  mattfe  d'école,  h  peine  abriiÀ 
par  des  maiaon^iivii  tomfcfQt  eu  nliM,  ae  nourrissant  du  produit  de  leur 
chasse  et  des  huits  qu'ils  troovent  dans  le  dèsot ,  n'ayant  que  quelqnes 
mauvaises  armes  pour  HdéfeadiwacaitK  l«s  sauvages  {Traitelt,  éh.  IX). 

(!)  Son  nom  tout  entier  était  José  h  Alhdji  be  Viscongulos  bb 

SOHIBU  I  ClRVlLIO,  BIHON  DE  HOMÀtmOS. 


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M  VOTAGE  AUX  SODRCES 

de  la  capitale  les  autres  prisonniers,  et  on  leur  donua  une 
aidée  qai  avait  été  construite  en  175S  (1),  è  5  lieues  de 
Villa  Boa.  C'était  celle  de  S.  Joté  de  Mouameât*  ou, 
comme  l'on  dit  simplement  dans  le  pays,  S.  José,  nom  em- 
prunté an  capitaÏDe  général  (2). 

Lee  Acroâs  ne  tardèrent  pas  à  s'éteindre  ou  i  se  disper- 
ser, et,  vers  1781 ,  ils  furent  remplacés  par  des  Javaes  A 
des  Caraj&s  [3)  que  l'on  fit  venir  de  ÏAldea  da  Nùva  Bàra, 
situé  dans  le  nord  de  la  province,  et  qui  bientôt  disparu- 
rent à  leur  tour. 

Pendant  que  ces  événements  se  succédaient,  d'autres  se 
passaient  ailleun.  ^ 

A  peine  la  province  de  Goyaz  avait-elle  été  découverte, 
que  la  guerre  avait  commencé  entre  les  aventuriers  pau- 
listes  et  les  Indiens  Coyap6s  qui  errent  au  sud-ouest  de  la 
province  dans  de  vastes  solitudes  ^core  presque  inconnues. 
Des  deux  cAtés  cdte  guerre  se  luisait  avec  une  égale 
cruauté.  Les  Coyap6s  tombaient  i  l'improviste  sur  les  c«- 

(1)  Caul  et  Piurro  iDdiqaent  U  date  de  ITU.  Je  donna  fd  edie  qin 
m'a  été  commoiiiqaée  daos  le  pajs  mtine  et  qui  ■  été  adopta  pir  le 
docteur  Pohl.  —  Oa  ittribne  U  fondation  de  l'aJdea  i  ioat  de  AlnMkU: 
mtie  oa  la  date  de  1TS9  est  emmie,  on  ce  m  fdt  pas  loi  qui  Util  S.  JOié, 
car  il  ne  gouvernail  pas  Gojazeo  ITU. 

(!)  L'Aldea  de  S.  José  n'a  point,  i  la  T^riit,  d'article  spécial  dan 
l'Dtile  tHecionario  gtographieo  do  Bnull  ;  nuis  i)  ;  est  indiqué  phi- 
Bteors  Tois ,  sons  )e  nom  de  Mo$tamtttn  (vd.  I ,  pag.  SBB,  518  ;  n ,  ST4). 
Ce  nom ,  ainsi  isolé ,  n'était  certainement  point  en  usage  k  l'époqae  di 
séjour  du  doelenr  Pohl  et  dn  mien  dans  l'aUea  des  Cofapôs  :  on  ne  le 
l»nT<  pas  noD  plus  dans  les  écrits  de  Cazal ,  de  Pinrro,  de  Hattos  et  de 
L.  A.  da  SilvB  e  Sonsa  :  il  anra  peulnétre  été  conMcié  par  quelque  décret 
proviDcial  poslérienri  1832,  celui  de  1833 ,  par  eiemple ,  qni  ■  créé  le 
nouTUU  district  de  Jangnâ. 

<3)  J'écris  ce  nom  tel  qu'on  le  prononce  dans  le  pajs.  Ciial  désigne 
ansai  cette  mime  peuplade  sous  le  nom  de  Carajoê  ;  mais  on  troHi« 
Caro/ot  dans  les  Jfmnoriiw  de  Piiarro. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  9T 

ravanes  qui  se  rendaient  à  S.  Paul  o.u  qui  venaient  de  cette 
ville,  et  ils  forcèrent  les  Portugais  d'abandonner  plusieurs 
établissements  formés  par  ceux-ci  dans  la  partie  septen- 
trionale de  la  province  du  même  nom.  Les  hostilités  du- 
raient encore  en  1780,  lorsqu'un  simple  soldat  appelé 
Luiz ,  qui  avait  déjà  fait  partie  de  plusieurs  expéditions 
contre  les  Indiens,  entreprit,  sous  la  protection  du  capi- 
taine général,  Luiz  da  Cuhiia.  Menezes,  de  réduire  les 
Coyapàs  qui  passaient  pour  indomptables.  Accompagné 
seulement  de  cinquante  Portugais  et  de  trois  Indiens,  il  se 
mit  en  marche,  le  iS  février  1780,  et  s' enfonça  dans  les  dé- 
serts des  CoyapÔB.  Pendant  plusieurs  mois,  ces  hardis  aven- 
turiers ne  vécurent  que  de  leur  chasse  et  de  miel  sauvage  ; 
ils  allaient,  avec  des  signes  d'amitié,  au-devant  de  tous  les 
Goyapés  qu'ils  rencontraient,  s'entretenaient  avec  eui  à 
l'aide  des  trois  interprètes,  ne  leur  témoignaient  que  de  la 
bienveillance,  leur  faisaient  des  présents  et  finirent  par  dé- 
cider un  certain  nombre  d'entre  eux  i  les  accompagner 
jusqu'à  Villa  Boa ,  pour  faire  connaissance  avec  le  grand 
eapitame,  nom  que  les  Indiens  donnent  au  chef  qui  com- 
mande à  tous  les  autres  (1).  Une  troupe  d'environ  qua- 


(I)  Lorsque  j'étais  k  Rio  de  JuKÎro,  an  retour  de  mon  Tojagei  Miuu, 
j'allai ,  aite  Firmiuio,  k  Copocabana,  k  quelque  distance  de  la  fille.  Nous 
nKatimes  sur  une  colline  :  le  ciel  était  d'an  bleu  d'uar  adOiirable; 
devant  Doua,  iwua  découvrions  la  haute  mer;  derrière  nous  s'éleraient 
de  majestueuses  (brêts  ;  de  tooa  cAléa ,  lea  monremenls  de  terrain  les 
plus  piltOTcsques.  Je  n'avais  jamais  rien  ru  de  pins  beau  ;  l'Indien  eipri- 
mailaoa  admiratioaparnne  joie  enfantine.  Plein  d'enthousiasme,  je  pro- 
fitai de  ce  moment  pour  lui  parler  de  Dieu.  Le  lendemain,  je  lui  deman- 
dai s'il  se  rappelait  ce  que  je  lui  avais  dit  i  Copocabani.  Il  se  mit  alors 
i  (aire  l'énumération  de  ce  que  le  Créitenr  ■  Tait  pour  les  hommes,  et  U 
termina  par  cette  eiclimation  :  O.hêum  rapuào  muilo  grandi  I 
II.  T 


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08  VOYAGE  ADX  SODRCES 

ranle  individus,  coihposée  d'un  vieilianl,  de  six  guerria^, 
de  femmes  et  d'enfants,  arrivs  &  la  capitale  de  la  province 
avec  te  soldat  Luiz  et  fat  reçue  avec  toute  la  maguiâcence 
qu'il  fat  possible  de  déployer  :  on  fit  des  (%tes ,  on  tira  le 
canon ,  on  cfaanta  an  Te  Deum  et  Ton  baptisa  les  enhnts. 
Levieillard,  enchanté  de  cet  accueil,  déclara  qu'il  ne  retour- 
nerait plus  dans  ses  forêts  ;  il  resta  à  Goyat  avec  les  enlïnts 
et  les  femmes,  et  renvoya  les  sii  guerriers  en  leur  recom- 
mandant de  revenir ,  après  six  lunes ,  avec  une  troupe  pins 
considérable.  Au  mois  de  mai  17^1 ,  dent  cent  trènte-sept 
Coyapôs  firent  lenr  entrée  h  Villa  Boa  sous  la  conduite  de 
deux  caciques  et  ne  furent  pas  reçus  moins  bien  que  ks 
premiers.  Le  capitaine  général  fit  construire  pour  tous  ces 
Indiens,  àH  lieues  de  lli  capitale,  une  nouvelle  aidée  qu'il 
appela  aldm  Maria,  du  nom  de  Doiïa  Mabia  I,  reine  de 
Portugal,  et  Fon  y  installa  une  population  de  600  Ck>yB- 
p6s.  Il  ne  parait  pas  que,  depuis  cette  heureuse  époque,  les 
caravanes  aient  jamais  été  attaquées  par  les  Indiens  sur  la 
route  de  S.  Paul  (1). 

Cependant,  depuis  que  les  Javaes  et  les  Car^jis  s'étaient 
éteints,  l'Aldea  de  S.  José  était  resté  vacant.  Comme  H  est 
un  peu  moins  éloigné  de  la  capitale  que  l'Aldea  Maria,  on 
crut  vraisemblablement  qu'il  serait  plus  économique  d'a- 
bandonner ce  dernier  village,  et,  presque  de  nos  Jours, 
on  a  transplanté  les  Coyap^  i  S.  José,  malgré  l'attache- 


(t)  PitaTTo  ■  TippoTlé  ta  temps  présent  de  trts-aDciens  mémoires, 
lorsqu'il  I  écrit  {Mem.,  DL ,  33S]  que,  tous  les  4ds,  les  Cojapds  commet- 
(«Dt  des  hostilités  coulre  les  liabitAUts  dé  Saatj  Cmi  et  «lendeat  leurs 
Tarages  jusqu'à  S.  Luiia.  Il  est  asseï  vraisemblable  que ,  sur  cette  der- 
oière  paroisse ,  ua  grand  nombre  de  colons  n'ont  jamaïa  eoteudu  parler 
des  Cojapàs. 


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DU  KIO  DE  s.  FRANCISCO.  IHI 

meot  qu'ils  avaient  pour  lears  preiuières  demeures  (1). 

Ce  village,  situé  sur  le  sommet  d'une  colline,  est  dominé 
parla  Serra  Uourada  et  environné  pardes  mornes  qui  ne  sont 
guère  plus  élevé»  que  la  colline  elle-même  ;  les  bAtiments 
qui  te  composent  sont  disposés  autour  d'uoe  vasie  cour  de 
145  pas  de  long  sur  il  2  de  large  et  présentent  un  ensemble 
4f  une  roulante  parfaite.  L'église,  édifice  simple  et  d'un  bon 
go&t ,  occupe  le  milieu  d'un  des  petits  cAtés  de  ce  carré  long. 
A  chacun  des  angles  du  carré  est  un  pavillon  à  un  étage  ; 
les  autres  bAtiments  n'ont  que  le  rez-de-chaussée.  Ces  der- 
niers servent  en  partie  de  demeure  aux  soldats  cbai^  de 
la  conduite  des  Coyapés;  le  général  y  a  aussi  un  logemrait 
très-agréable ,  et  derrière  ce  logement  est  un  jardin  assez 
grand,  arrosé  par  un  ruisseau  que  l'on  a  détourné  pour  le 
service  de  Valdea;  enfin  une  autre  portion  est  employée 
comme  magasin,  et  l'on  y  dépose  la  récolte  des  plantations 
communes.  Le  reste  des  bàtimenU,  originairement  réservé 
pour  les  Indiens,  est  aujourd'hui  (1819)  en  partie  vacant  et 
en  partie  occupé  par  une  cinquantaine  d'agregados  dont 
je  parierai  tout  à  l'heure. 

Accoutumés,  dans  les  forêts,  i  coucher  sous  des  huttes 
oii  l'on  ne  peut  entrer  sans  se  baisser,  les  Indiens  trouve- 
rait beaucoup  trop  froides  les  maisons  assez  élevées  et  cou- 
vertes en  tuiles  où  on  avait  voulu  les  Ic^er,  et  eux-mêmes 
en  coDStniisirfflit  d'autres  beaucoup  plus  basses,  à  quelques 
pas  de  Valdea.  Le  toit  de  ces  dernières  est  couvert  en 

(1)  tQjDt  Ut  écrits  de  Hanoel  Ajrw  de  Caial ,  de  piurro  et  de  Pobl. 
—  Ibtioa ,  daoi  le  peu  qu'il  dit  des  Cojipùs ,  n'est  point  d'accord  Itcc 
les  frares  antoriUs  qne  je  die  ici  :  maie  il  ne  prétendait  point  écrire 
rMiUire  de  fiO|aii  il  arait  pour  bat  d'en  tracer  l'flfti^air«,  et,<?ebot, 
il  l'a  parbitement  rempli. 


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ion  VOYAGE  AUX  SOURCES 

chaume;  la  carcasse  est  faite  k  la  manière  des  maisons 
des  Portugais-Brésiliens ,  avec  des  perches  verticales  en- 
Toncées  dans  la  terre  et  de  longs  bambous  attachés  trans- 
versalement à  ces  perches  è  l'aide  d'écorces  fleiibles;  mais, 
tandis  que  les  Portugais  ont  contume  de  remplir,  avec 
de  la  terre  glaise  battue ,  les  intervalles  qui  restent  vides 
entre  ces  bâtons  croisés ,  les  Coyapôs  se  sont  contentés  d'y 
passer  des  Teuilles  de  Palmier,  comme  le  pratiquent  d'au- 
tres Indiens  qui  ont  cherché  à  imiter  les  constructions  eu- 
ropéennes. Les  chaumières  que  les  Coyap6s  ont  bâties  près 
de  \'<Udea  ne  sont  qu'au  nombre  de  huit  à  dix;  c'est  Jt 
1  lieue  de  S.  José,  dans  leurs  plantations,  que  se  trouve  la 
plus  grande  partie  de  leurs  demeures. 

Les  agregados  {i]  qui  ont  pris  leur  place  dans  les  bâti- 
ments de  i'aldea  sont  des  mulAtres  pauvres  auxquels  le 
gouverneur  a  permis  de  s'établir  parmi  les  Indiens  ;  ils 
■trouvent  A  S.  José  non-seulement  un  logement  qui  ne  iem 
coûte  rien,  mais  encore  des  vivres  à  bon  marché,  et  ils 
peuvent  faire  des  plantations  sur  les  terres  des  Coyapt^s. 

Le  régime  auquel  ceux-ci  ont  été  soumis  par  les  Portu- 
gais a  été  modifié  plusieurs  fois;  je  vais  le  faire  connaître 
tel  qu'il  était  à  l'époque  de  mon  voyage. 

Le  gouvernement  général  de  I'aldea  est  confié  è  un  co- 
lonel qui  réside  à  Villa  Boa  et  qui  est  directeur  de  tous  les 
aldeai  de  la  province.  Les  Coyapds  sont,  k  S.  José,  sonsh 
conduite  immédiate  d'un  détachement  militaire  qui  se  com- 
pose d'un  caporal  ayant  le  titre  de  commandant,  d'un 
simple  dragon,  tous  les  deux  de  la  compagnie  de  Villa  Boa, 


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DU  UO  DE  S.  FIAHCISCO.  101 

et  de  quinze  pedutra,  dont  deux  sont  des  officiers  infé- 
rieurs. Parmi  les  simples  pedestrei  se  trouvent  un  serrurier 
et  un  cliarpentler  ;  le  premier  chargé  de  réparer  les  outils 
des  Coyapôs,  ie  second  d'entretenir  les  bâtiments  de  Valdea. 
Le  caporal  commandant  a  Je  pouvoir  de  cMtier  les  Indiens 
en  mettant  les  hommes  au  tnmeo  (i)  et  en  donnant  des  të- 
rales  aux  femmes  et  aux  enfants.  Les  Coyapôs  travaillent  la 
terre  en  commun  pendant  cinq  jours  de  la  semaine,  sous 
rinspectiondesjMdMtrei/ondépose  la  récoltedes  plantations 
communes  dans  les  magasins  de  Vaidea,  et  ensuite  elle  est 
répartie,  par  le  caporal  commandant,  entre  les  familles  in- 
diennes, suivant  les  besoins  de  chacune.  L'excéda«t  est 
vendu ,  soit  à  la  ville ,  soit  aux  pedMtre* ,  qui  sont  obligés 
de  se  nourrir  à  leurs  frais,  et,  avec  l'argent  qui  résulte  de 
cette  vente,  le  directeur  général  achète  dn  sel ,  du  tabac, 
de  la  toile  de  coton,  des  instruments  de  fer  qu'il  envoie  au 
caporal  commaudant  pour  les  distribuer  aux  Indiens.  Il  y 
a  dans  l'aidta  un  moulin  i  eau  qui  fait  mouvoir  à  la  fois 
une  meule  destinée  à  moudre  le  maïs,  une  machine  à  dé- 
pouiller le  coton  de  ses  semences  et  enfin  vingt-quatre  f\i- 
seaus;  une  mulAtresse  reçoit,  chaque  année,  50,000>rGis 


(1)  Toici  de  qaeUe  mamère  j'ai  fkil  cMiiultre  aillanrs  (Voyage  itont 
U$  provinett  de  RUkU  Janeiro ,  etc.,  11 ,  42)  cet  instrameDl  de  sup- 
plice :  '  Entre  quatre  pieux  sont  placées,  l'ane  sur  l'autre,  hariiontal«- 
ment  et  de  champ,  deux  graades  plaaches  eitrémement  épaisses  et  d'uD 
poids  énorme.  Chaque  planche  présente ,  dans  nn  de  ses  bords ,  des  ea- 
tailles  demi-circDlaires ,  faites  de  manière  qoe  les  entaillea  de  l'oDe  ré- 
pondent k  celles  de  l'autre  et  forment  uu  rond  parfait.  Lorsqu'on  veut 
punir  un  homme ,  on  lève  la  planche  supérieure  ;  le  coupable  passe  ses 
jambes  dans  deui  des  entailles  de  la  planche  inférieure ,  et  sur  celle-ci 
on  laisse  tomber  la  première.  Si  la  faute  a  été  grave,  l'est  le  cou  que  l'on 
fait  mettre  ainsi  entre  deui  planches.  » 


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103  V0TA81  ADX  8001CES 

(312  f.  SO  c.)  pour  eoseigner  buz  fenuiies  coyapAs  à  Wer  <t 
à  faire  de  la  toite  de  coton ,  et  le  résultat  de  leurs  trannz 
appartient  à  la  communauté  comme  les  produits  de  la  terre.  ■ 
Les  deui  jours  de  la  semaine  dont  les  Indiens  peuvent  dis- 
poser soat  le  dimanche  et  le  lundi;  ils  les  emploient  à 
chasser  ou  i  soigner  de  petites  plantations  particulières 
d'igiiames((7(U(uiium  ewulentum)et  de  patates  (Conm/mi^ 
Batata$). 

La  forme  de  gonremement  que  je  viens  de  faire  con- 
oattre  a  été  calquée  sur  celle  qu'avaient  adoptée  les  jé> 
suites  (1) ,  et  il  faut  avouer  qu'elle  convient  aux  Indiens 
qui,  manquant  totalement  de  prévoyance,  sont  incapaMes 
de  se  gouverner  eux-mêmes.  Mais  les  meillenres  règles  ae 
suffisent  pas;  il  faut  encore  des  hommes  capables  de  les 
faire  observer,  ei  il  n'est  certainement  personne  qui  ne 
sente  qu'il  est  absurde  de  prétendre  obtenir  avec  des  sol- 
dats  le  même  résultat  qu'avec  des  misatonnaîres.  Les  jé- 
«lites  étairat  vans  par  les  deux  mobiles  qui  font  faire  les 
plus  grandes  choses,  la  religion  et  l'honneur:  ils  auraient 
réussi,  quand  même  ils  eussent  choisi,  pour  le»  Indieiis,nne 
forme  de  gouvernement  plus  imparfaite.  Nais  que  peot-on 
attendre  d'hommes  comme  les  pédestres,  qui ,  tirés  de  la 
dernière  classe  de  la  société  et  tous  mulâtres,  sont  accou- 
tumés au  mépris,  qui  ne  sauraient  même  tire  excités  par  la 
crainte,  puisqu'ils  vivent  éloignés  de  leurs  supérieurs ,  et 
qui ,  mal  payés ,  n'ont  d'autre  but  que  de  tirer  parti  des 
Coyapds  pour  leurs  propres  intérêts.  Ceux-ci  sont  méeoo- 

(1)  Tof  ei  ce  que  j'ai  écrit  bu  demiime  Tolnme  de  mon  Voj/age  dani 
UditlrMdet  Diamant*  et  iw  lelittoralduBréfil,  reialÎTcmeat  mi 
M6ts  d«  la  câu  et  k  )■  condiiite  des  pères  de  !■  Minpagnie  de  Jttoi 
eavers  les  [udietu. 


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DU  UO  DB  S.  FIANCiSCÔ.  103 

toits,  ils  fuient  dans  las  bois  ;  od  va  à  leur  poursuite,  ou  les 
reprend  et  ils  fuient  encore.  Un  seul  religieui  de  la  com- 
pagnie de  Jésus  conduisait  souvent  plusieurs  milliers  d'In- 
diens, et  avec  dix-sept  soldats  on  a  de  la  peine  à  retenir 
deux  cents  Coyapàs  réunis  sans  utilité  pour  l'Etat  et  sans 
une  grande  utilité  pour  eux-mtoies. 

L' écrit  intitulé,  Memoria  sobre  o  detcobrmenio  da  caipi- 
tania  de  Goyas  [A  ),  prouve  que  le  gouvernement  portugais 
a  dépensé  des  sommes  énormes  pour  les  aldeas  de  cette 
province  :  celui  de  S.  José  co4la  i  lui  seul  67,346,066  reis 
(430,912  fr.)  pour  frais  de  construction  et  d'établiss«neat. 
Cela  &it  voir  que  r«n  a  eu  de  bonnes  intentions  ;  mais  l'on 
a  )vis  de  mauvais  moyens,  et,  parmi  les  dépenses  qui  ont 
été  faites ,  il  en  est  dont  l'inutilité  frappe  dès  le  premier 
instant.  Pourquoi ,  par  exemple ,  une  maison  de  plaisance 
pour  les  gouverneurs  de  la  capitainerie  dans  l'Âldea  de 
S.  José  et  dans  l'Aldeà  Maria?  Pourquoi,  dans  des  aidecu 
d'Indiens,  cette  foule  de  bitiments  qui  ne  devaient  jamais 
être  balHtés  par  des  Indiens?  Des  chaumières  disposées  avec 
régularité,  comme  dans  l'Aldea  de  S.  Pedro  et  la  Villa  dos 
Reis  Magos  (3),  ensseot  produit,  dans  le  paysage,  un  effet 
aussi  agréable  que  les  maisons  couvertes  en  tuiles  de 
S.  José;  elles  auraient coftté  beaocoup  moins  d'argent;  les 
Indiens,  bien  dirigés,  auraient  pu  les  construire  eux-mêmes, 
comme  faisaient  ceux  que  gouvernèrent  autrefois  les  jé- 
suites, et  ils  n'auraient  eu  aucune  peine  à  les  habiter. 


(1)  Je  parlerai  plus  lard  de  ce  mémoire  et  de  bod  tuteur,  l'ibbé  Luii 
Antonio  <U  Silva  e  Soqh  ,  que  j'ai  Aé\l  âtt. 

(1)  Voiei  niDa  Voyage  4an$  U  dMrict  de»  Diantant*  el  tw  U  lil- 
toratduBràil,a,lt\iBi. 


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(M  TOTAGE  ADX  SOURCES 

J'avais  apporté  k  S.  José  une  lettre  da  colond  ,  direc- 
teur (général  des  Indiens ,  pour  le  caporal  qni  commandait 
dans  Valdea.  Je  trouvai  un  homme  d'un  certain  âge,  tout 
écloppé,  dont  le  costume  ne  rappelait  en  rien  l'état  mili- 
taire ,  mais  dont  la  figure  était  assez  agréable  et  les  ma- 
nières honnêtes.  A  mon  arrivée ,  il  me  donna  un  logement 
fort  propre  et  me  fit  voir  tout  i'aldea.  Je  Ini  exprimai  le 
désir  d'aller  visiter  les  Indiens  dans  leurs  plantations  ;  il  me 
témoigna  beaucoup  de  regrets  de  ne  pouvoir  m'y  accom- 
pagner et  me  fit  conduire  par  le  soldat  qui  lui  servait  de 
second. 

Après  avoir  fait  f  lieue  en  traversant  presque  toujours 
des  bois  peu  élevés  et  peu  vigoureui,  nous  arrivAmes  h  une 
petite  éminence  qui  fait  face  k  la  Serra  Dourada,  et  sur  la- 
quelle croissent  ç  et  \h  des  arbres  rabougris  :  c'est  là  qne 
les  Coyap6s  ont  construit  leurs  maisons.  Elles  sont  disper- 
sées entre  les  arbres,  couvertes  en  chaume,  petites,  basses, 
et  bAties,  comme  celles  de  I'aldea,  avec  des  perches  enfon- 
cées dans  la  terre,  des  bambous  qui,  attachés  horizontale- 
ment, se  croisent  avec  ces  perches ,  et  des  feuilles  de  pal- 
mier qui  remplissent  les  intervalles;  elles  n'ont  point  de 
fenêtres  :  feutrée  est  fort  étroite  et  se  ferme  avec  des 
feuilles  de  palmier.  Dans  l'intérieur,  on  voit  quelques 
pierres  qui  servent  de  foyer,  des  corbeilles  d'une  forme 
particulière  appelées /iMuntif,  et  quelquefois  des  j^Vooi  qui 
ont  à  peine  la  largeur  du  corps  :  tel  est  l'unique  amaible- 
ment  de  ces  chaumières. 

Après  les  avoir  visitées,  nous  nous  rendîmes  aux  planta- 
tions. Nous  vîmes  d'abord  plusieurs  femmes  qui,  sous  l'in- 
speclion  de  deux  ou  trois  pede»tres,  détachaient  des  épis  de 
maïs  de  leurs  tiges.  Nous  allions  passer  dans  la  pièce  dp 


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DV  mO  DE  s.  FRANCISCO.  109 

terre  où  travaillaient  les  hommes,  lorsque  nous  les  aper- 
çâines  venant  vers  nous.  On  les  avait  appelés  poar  les  faire 
danser  devant  moi.  Zlous  retournâmes  donc,  le  dragon  et 
moi,  au  lieu  où  sont  les  babitaUons;  les  Indi«is  y  arri- 
vèrent quelques  instants  après  nous,  et  bieutât  la  danse 
commença. 

Les  hommes  dansèrent  seuls,  parce  qu'on  n'avait  pas 
songé  i  appeler  les  femmes.  Ils  formèrent  un  rond,  mais 
sans  se  donner  la  main ,  et  se  mirent  à  chanter.  Leurs  airs 
sont  d'une  monotonie  extrême,  mats  ils  n'ont  rien  de  bar- 
bare et  d'effrayant  comme  ceux  des  Botocudos  (i).  Ils  chan- 
tèrent d'abord  très-lentement  et  ne  faisaient  alors  que 
battre  la  mesure  avec  leurs  pieds  sans  changer  de  place.  Peu 
à  peu  le  chant  s'anima  et  les  danseurs  se  mirent  à  tourner, 
toujours  dans  te  même  sens ,  indiquant  parfaitement  la 
mesure ,  mais  sans  aucune  vivacité ,  !e  jarret  un  peu  plié  , 
le  corps  courbé  en  avant  et  sautillant  à  peine.  Il  y  avait 
déjà  longtemps  que  le  cercle  tournait  ainsi,  et  je  commen- 
tais k  être  fatigué  d'une  telle  uniformité,  lorsque  commença 
la  daùse  de  Vurubtï,  le  vautour  appelé  par  tes  naturalistes 
Vultur  aura. 

Un  des  danseurs  se  plaça  au  milieu  du  cercle,  et,  con- 
tiBuant  toujours  i  faire  les  mêmes  pas,  il  se  baissa,  et,  avec 
les  trois  doigts  d'une  main  qu'il  tenait  réunis,  il  donnait 
des  coups  répétés  sur  la  terre  ;  ensuite  il  se  redressa  i  demi, 
et,  se  mettant  devant  les  autres  danseurs,  il  faisait  des  con- 
torsions et  feignait  de  vouloir  les  frapper  de  ses  doigts  qu'il 
tenait  toujours  rapprochés,  prétendant  ainsi  imiter  l'action 
de  l'urubu,  qui  déchire  les  viandes  mortes. 


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Il»  VOYACB  AUX  SOUECES 

CepeDdaat  on  corameoca  à  GboDter  ua  autre  air,  et  la 
danse  de  l'once  succéda  à  celle  de  l'urubu.  Le  mtoie  don- 
seur  se  plaça  encore  au  milieu  du  rood  et  se  mit  à  dauser, 
le  dos  courbé,  les  deux  bras  étendus  avec  roideur  vers  la 
terre,  les  doigts  écartés  et  à  demi  plies  comme  dee  griffes. 
Après  avoir  fait  plusieurs  tours  dans  cette  position ,  fxA 
homme  sortit  du  cercle  ;  se  tenant  toujours  courbé,  il  se 
mît  à  courir  après  un  enfoat,  le  cbargea  sur  son  dos,  rentra 
dans  le  rond  et  continua  à  danser  :  il  avait  imité  le  jaguar 
cherchant  sa  proie,  s'en  emparant  et  l'emportant  dans  son 
repaire. 

Pendant  tout  ce  temps-lÀ ,  ces  bonnes  gens  avaient  un 
air  de  contentement  et  de  gaité  qu'on  ne  voit  jamais  cbex 
les  tristes  Goyanais. 

Les  Portugais  ont  donné,  je  ne  sais  pourquoi,  ie  nom  de 
Co^rapôs  ou  Cayapâs  i  ces  Indiens.  D'après  ce  qui  m'a  été 
dit,  il  pwatt  que  ceux  d'entre  eux  qui  vivent  encore  dans 
les  bois,  n'ayant  dans  leur  voisinage  aucune  autre  peuplade 
indienne,  u'uit  point  de  nom  de  nation ,  maie  qu'ils  se  ser- 
vent du  mot  panariâ  pour  se  distingua,  comme  race,  des 
nègres  et  des  blancs  :  d'où  il  faut  conclure,  ce  me  semble, 
que  ce  mot  est  postérieur  à  la  découverte  très-récente  du 
pays,  et  qu'avant  cette  époque  les  Coyapés  se  croyaient  pro- 
bablement seuls  dans  l'univers. 

On  retrouve  chee  ces  Indiens  tous  les  Uaits  caractéris- 
tiques de  la  race  américaine  :  une  grosse  tète  enfoncée 
dans  les  épaules,  des  cheveux  plats,  noirs,  rudes  et  touffus, 
une  poitrine  large,  une  peau  bistrée,  des  jambes  fluettes; 
comme  nation,  ils  se  distinguent ,  particulièrement,  par  la 
rondeur  de  leur  tète ,  par  leur  Ggure  ouverte  et  spirituelle, 
par  leur  haute  stature  ,  par  le  peu  de  divergence  de  leurs 


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DU  UO  DE  S.  FUnOSCO.  tffl 

feux  et  la  teinte  foncée  de  leur  peau  (1)  :  les  Coyapàs  sont 
de  beaux  Indiens  (S). 

Parmi  ceux  de  S.  Joeé ,  Je  vis  quelques  enfants  nés  de 
femmes  de  leur  nation  mariées  «vec  des  mulitres.  Leurs 
yeux  étaient  moins  longs  et  moins  étroits  que  ceux  des 
Coyapôs;  ils  n'avaient  ni  la  grosse  tête  ni  la  large  poitrine 
de  ces  derniers,  mais  ils  se  distinguaient  entièrement  des 
mulâtres  par  leurs  cheveux  qui  n'étaient  nullement  crépus, 
sans  être  cependant  noirs  et  durs  comme  ceux  des  véri- 
tables indigènes. 

J'ai  dit  ailleurs  qu'il  y  a  dans  la  prononciation  des  lan- 
gues IndieDues  des  caractères  qui  appartiennent  à  toute  le 
race  indigène  et  qui  peuvent  contribuer  i  la  faire  distin- 
guer [3].  Comme  les  diverses  nations  indienoes  que  j'avais 
vues  jusqu'alors,  les  Coyapés  parlent  du  gosier  et  la  bouche 
presque  fermée  (4).  D'ailleurs,  leur  langue  ne  parait  pas 
avoir  de  rapports  avec  les  idiomes  des  peuplades  que  j'avais 
visitées  jusqu'alors.  J'en  transcris  ici  plusieurs  mots  que 
j'écrivis  sous  la  dictée  d'un  Coyapé  très-intelligent  qui  sa- 


(1)  Dms  mes  deni  preDiièrcs  rtlatioiu ,  j'ai  snccessiTemeDt  tracé  le 
portrait  de*  Ceroadea,  de*  UsUlls,  des  Hacvala,  des  Botacodos,  des  la- 
(lieus  ciTilisi^s  de  S.  Pedro ,  et  j'ai  comparé  la  phjBiODomie  àea  iaiàri- 
cains  indigènes  arec  celle  des  Mongols.  —  Je  ferai  remarquer,  en  pas- 
saot,  qae,  «  I'od  vent  se  ccaforiDer  i  la  pronoDciation  actneltement 
usitée  dans  le  pajs,  on  ne  doit  pas  écrire  Hocuanli,  eorame  ont  fkit  les 
saranis  Spii ,  Harttas  et  d'Orbignj,  ai  Penhanu ,  mais  PanhontM  on 
bien  Pinhamii. 

(3)  H.  PohI  trooTC  les  hommes  laids  et  les  femmes  fort  laides.  Les 
Cojapos  élaieat  les  premiers  Indiens  qn'il  voyait  ;  il  les  comparait  arec 


{3}  FotfNI*  ^fu  l*  dittricl  de$  Diamanti  il  nir  le  llUoral,  II.  30. 

(4)  La  mémoire  du  doclenr  PobI  l'a  cerlaioement  mal  servi  quand  il 

a  dit  le  « 


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m  VOYAGE  ADX  SOWCES 

vait  fort  bien  le  portugais  et  faisait  partie  de  la  compagnie 

des  pédestres.  Suivant  mon  usage,  après  avoir  écrit  ces 

mots,  je  les  Ins  è  celui  qui  me  les  avait  dictés,  afin  de  savoir 

s'il  les  entendait,  et  si,  par  conséquent,  je  ne  m'étab  pcnnt 

trompé  : 

Dieu,  puhancâ. 

Soleil ,  imputi. 

Lune,  puturuà. 

Étoiles,  amtiti. 

Terre,  cupa. 

L'w,  dans  ce  mot,  pirticipe  de  U  proDoadattiHi  i'iou  ftaotui. 


Homme, 

ttnpwim. 

Femme, 

intitra. 

EDbnt  à  la  mamelle. 

nhotuuâra. 

Garçon, 

.p™<»f. 

Fille, 

Un  blanc, 

caeatéta. 

tapanho. 

tapatihocua. 

Cn  Indien, 

panariâ. 

Tête, 

Vr  M  proQonca  U  boaebe  fermée  et  participe  du  a»  de  tl. 

Cheveux,  t^tiùn. 

Yeux,  inl6. 

Nez,  chacari. 

Bouche,  cKapé. 

Dents,  chuâ. 

Oreilles,  ehiccré. 

Cou,  impudé. 

Poitrine,  ehucâto. 

Ventre,  itû. 


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DU  IIO  DE  S.  FRANOSCO. 

Bns, 

ipd. 

Mains, 

chùria. 

Cnixe, 

icria. 

Jambes, 

iU, 

Pied, 

ipad. 

Morceau  de  bois , 

por<. 

LV  participe  dnai 

«del'I. 

Fmille, 

parachô. 

FIroH, 

potto. 

Choral, 

ipiitmM. 

Tapir, 

ierite. 

Cerf, 

m,6. 

Oiseau, 

itckune. 

Plumes, 

impantsa. 

Chique  (Pulex  pénétrons] , 

pM. 

Are, 

itse. 

Flèche, 

tngoM. 

L'<  M  fait  k  peine 

enteedn 

Eau, 

tlMi. 

Rivière, 

jrapli. 

VioDde, 

jibo. 

Poisson, 

Ufo. 

BOD, 

impéimparé. 

Mi, 

intompéipâré. 

Laid, 

intomarea. 

Blanc, 

maeécâ. 

Hoir, 

cota. 

Rouge, 

Petit, 

ipânré. 

An  ton  Umg. 

Je  danse. 

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110  T0TA6I IDX  80UMXS 

Comme  pour  les  divers  vocabulaires  (i)  que  l'on  trou- 
vera dans  mes  deux  relations  précédentes,  je  me  conforme 
ici  à  l'orthographe  portugaise,  qui  généralement  est  beau- 
coup plus  d'accord  que  la  nAtre  avec  la  manière  dont  on 
prononce  ,  qui  admet  uoe  accentuation  prosodique  (9]  ci 
peut  indiquer  des  voyelles  nasales. 

Il  est  impossible  de  tirer  des  conchisiona  générales  du 
court  vocabulaire  que  je  viens  de  donner  ;  cependant  je  poil 
croire  que  la  langue  des  Co]fBp6s  admet  une  certaine  simi- 
litede  dans  des  mots  qui  représentent  des  choses  oa  des 


<lj  J'ai  pnbbi  wccewiTemeiil,  (Uni  dmo  rofog»  dattâ  le*  provUtem 
(1«  Rio  d«  Janeiro  H  de  JflntM  Geraet,  ni)  petit  Tocabaltire  de  la  lan- 
gue des  Coroados  (I,  46),  de  celle  des  HaUlis  (I,  4STj,  de*  H 
(id.),  dea  HacDiiiatn,  47),  dM  ■oiocndoa  {U,  114), 
(n,313).  HoD  rtfyapa  dani  U  dUMet  det  DiamanU  et ew  le  UUoral 
(fu  Bréeil  présente  (Il ,  393),  pour  oa  certain  Dombre  de  mots,  les  dlBï- 
KDces  qui  eiisteat  entre  le  dialecte  acioel  de  S.  Pedro  dos  Indîoa,  cehri 
deVilIanovadeilmeidaeila  linçoa  ferai,  uM^tlt»jé»atte^Vém- 
Tirent  dans  lenr  dictionnaire ,  onnage  wmpoaé  probablancnl  dans  le 

(S)  L'h  se  prODOBce  oh  ;  nh,  gn  ;  l'acceDt  tombe  généralement  sur  la 
pAaaltième  ajUabe ,  k  moins  ^e  le  signe  '  n'indique  nne  on  plorieiin 
gjUabes  accentates  ;  quand  l'actMit  est  indiqué  svr  la  lettre  o ,  elle  ae 
prononce  ccMume  dans  notre  mot  or,-  \'e  accentné  a  le  ion  de  notre  /; 
<m  final  eat  an  i  très-nûal;  ôo  un  ON  également  fort  nasal.  — Pour 
aToir  Tonln  snirre  l'ortbograplw  allemande,  H.  Pobl,  dans  son  TocalM- 
laire,  a  été  forcé  de  coTODetlrvphiaienrs  erreurs;  ainsi,  ne  trooTantpai^ 
dan*  sa  langue,  de  lettre  qvicorrespaode  anodes  Portugais  et  des  Fratt- 
cais.ilaécritnuhoHrf  poar  «(ifoit4,«l,  M  poonni  peindre  le  son  da 
nA  portugais  on  jn  frûfais,  il  a  admis  tajMMfo  pour  ta|Nmfto.  Je  ne 
puis  m'emptcher  de  croire,  d'alllears,  que,  fan  te  d'avoir  en  me  «n- 
naissanee  snlEsante  de  la  langne  portugaise,  il  ne  lui  soit  échappé  qwl- 
qnes  méprises.  Si ,  par  exemple,  ilpé  Tent  dire  nn  fcomme  bbtne,  il  n'est 
guère  naisemblable  qn'ttp^.prt ,  éridemmant  un  composé  iTilpé,  st- 
gniBe  on  e»fant  en  général. 


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DD  RH)  DE  S.  PRAIfCISCO.  111 

qualités  othunt  qaelqae  analogie.  Ainsi  impéimpâré  vent 
dire  bon;  ùtivmpeipâré,  joli;  impuaria  signifie  homme,  et 
^>ronhiarùi,  fille;  ckicria,  matns,  icria,  cuisse. 

Tons  les  PortugBis-Brésillens  s'accordent  à  dire  que  les 
Coyapôs  ont  un  caractère  fort  doux  (1).  Ces  Indiens,  il  est 
vrai,  se  qaerellent  quelquefois  les  uns  avec  les  autres ,  âiais 
ce  n'est  jamais  qu'à  cause  des  femmes.  Le  seul  tort  qiielear 
reprochent  les  Portugais  est  cette  propension  qn'ils  ont  è 
^enfuir  dans  leurs  forêts  :  or  on  sent  que  ce  reproche  tombe 
sur  les  Portugais  eux-mêmes;  si  les  Goyapàs  n'avaient  pas 
à  se  plaindre  de  leur  condition  présente  ,  ils  ne  retourne- 
raient pas  k  leur  ancienne  manière  de  vivre,  dont  ils  sentent 
bien  les  graves  InconTéntents.  Ces  Indiens  sont,  d'ailleurs, 
comme  tons  les  aubres,  insouciants  et  entièment  dépourvus 
de  préToyance.  Four  faire  la  récolle  des  légumes  qu'ils  cul- 
tivent dans  leurs  plantations  particulières,  ils  en  attendent 
rarement  la  maturité  parfaite  ;  ils  ne  songent  point  an  len- 
demain, n'amassent  jamais,  ne  vivent  que  dans  le  présent 
et  sont  souverainement  heureux  quand  ils  peuvent  satls- 

(1)  Un  homme  fort  Hêtitigaé ,  qae  je  vis  ï  Vbi  en  1816  cl  qui  veuit 
de  Ooju ,  «vait  amené  avec  lai  deux  CojapiSs  doot  il  avait  flùt  m»  de- 
■ntetiqoei.  Cea  Indiens  parlaient  portugais  ei  n'étaient  guère  moina  ciri- 
lisés  que  les  malitres  d'une  classe  inférieure.  L'nn  d'eui  avait  une  saga- 
ellé  étomilDte  peur  tetttni'rtt  les  liommes  et  les  Mtea  de  sommé  égarés 
dans  les  forêts  :  il  ne  lai  fallut,  poar  le  gnider,  qae  les  restes  d'une 
fénilte  broutée  par  un  mulet  on  ane  herbe  courbée  par  les  pied»  d'an 
IwwB.  Cw  deoi  Gofapàe  oa  vobIdtcM  point  Toir  les  Ceroadoe,  encore 
sauvages,  qai  m  traoTaient  k  Ubi  w  nène  temps  qa'«M  (  l*«||Bffa  daM 
Im  prmtneaê  d4  Rto  d*  Jaiuiro,  etc.,  l,  37  et  soît.)  ,  soit  h  musc  de 
l'éleignameat  i|k  les  diTcnes  penpUdcs  eut  sonTsnt  les  nues  pour  les 
antres,  soit  plutAt  parce  qne  la  vue  d'nn  sauvage  est ,  favr  l'tndiea  «irt- 
liai ,  H  sujet  d'buniliatton ,  lui  j-appetant  l'éUt  oà  il  a  été  toi-mêne , 
celai,  dn  moins,  où  étaient  ses  ancttres. 


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113  TOÏAGE  AUX  SOURCES 

faire  \eaT  goAt  pour  la  viande ,  poor  l'eau-de-vie  et  le 
Ubac  (1). 

Les  Coyap6s  possèdent  donc  aussi  peu  que  les  antres  In- 
diens les  qualités  nécessaires  pour  vivre  au  milieu  de  notre 
àvilisation  toute  fondée  sur  l'idée  de  l'avenir  :  il  leur  ba- 
drait  des  tuteurs  bienfaisants ,  comme  ceux  qui  firent  fleu- 
rir les  aldeas  de  la  cAle  et  les  réductions  du  Paraguay  ;  ces 
tuteurs,  on  les  a  pour  jamais  enlevés  aux  Indiens,  et  bientAt 
il  ne  restera  plus  rien  des  anciennes  peuplades  indigènes 
qui  couvraient  jadis  la  terre  du  Brésil  (3).  Dans  ce  même  lim 
qu'habitaient  les  Coyapôs,  lorg  de  mon  voyage,  avaient 
vécu,  comme  on  le  sait  déjà,  d'antres  Indiens ,  les  Acroas, 
puis  les  Carajâs  et  les  Javaes;  cinquante  ans  ont  suffi  pour 
les  faire  disparaître  tous  ,et  en  trente  années  les  Coyap6fi 
eux-mêmes  ont  été  réduits  i  deux  cents  de  six  cents  qu'ils 
étaient  d'abord.  De  nouvelles  immigrations  d'individus  en- 
tièrement sauvages,  si  elles  ont  eu  lieu,  ce  qui  n'est  pas 
absolument  impossible ,  comme  on  le  verra  tout  k  ï  heure , 
auront  pu  prolonger  l'existence  de  l'Aldea  de  S.  José;  mais 
elles  auront  accéléré  l'anéantissement  de  la  peuplade  en- 
tière, et  bientôt  le  voyageur  qui  cherchera  cet  aldea  ne 
trouvera  pins  qne  des  ruines  et  la  continuation  d'un  désert. 

Les  Portugais  ont  communiqué  les  maladies  vénériennes 
aux  Coyap6s,  et,  comme  ceux-ci  n'ont  aucun  moyen  de  s'en 


(1)  Uidooerar,  qoi.eaiiiiwoDniit,  «tt.efagflHCorvoa.awqiH- 
bté  nitorelle,  Hnd  1  prouver  que  )m  croanUs  npiocMn  à  Iran  «Kt- 
ITM  n'tloiait  que  dM  représailles.  Si ,  dte  l'origiiie ,  on  s'éuic  condiril 
arec  teê  uavageB  eomiiie  le  fit  depok  le  MiUit  Lait ,  oa  «trait  certii- 
wiMWil  driona  des  rteohaU  icaïUaUei. 

{X)  Tojet  ce  que  fai  éoit  aw  Ih  iodieiie  Stm  nesdeai  prwiilni 


r„s,i,.,x,.i.CoOc^lc 


DU  RIO  DE  S.  nUHCiSCO.  113 

^érir,  il  paratt  qu'elles  contribuent  beaucoup  à  les  dé- 
truire. Ces  hommes -enfhnts,  n'ayant  point  de  guide, 
se  livrent  à  toas  leurs  caprices  et  h&tent  fort  souvent 
la  8n  de  leur  existence  :  presque  tous  furent,  il  y  a 
quelques  années,  attaqués  de  la  rougeole;  au  milieu  de  la 
fièvre,  ils  allaient  se  baigner  dans  l'eau  Aroide,  et  il  en 
périt  plus  de  quatre-vingts.  D'ailleurs,  je  n'en  ai  pas  vu  un 
seul  qui  «ût  un  goitre,  difformité  qui  défigure  tous  lesjw- 
liestres,  leurs  surveillants,  et  qui,  comme  on  l'a  vu,  est 
presque  générale  à  Ville  Boa. 

D'après  les  renseignements  que  J'ai  pris ,  il  parait  que 
non-seulement  les  Coyapés  encore  sauvages  n'ont  point  de 
culte,  mais  encore  qu'ils  n'ont  aucune  idée  de  la  Divinité. 
Pour  dire  Dieu,  ceux  deVàldea  se  servent,  il  est  vrai,  du 
mot  pukanca,  qui  n'est  certainement  emprunté  ni  du  por- 
tugais ni  de  la  lingoa  gérai  (1  )  parlée  jadis  parles  Portugaîs- 
Paulistes;  mais  le  terme  par  lequel  ils  désignent  le  cheval 
n'a  aucun  rapport  non  plus  avec  le  mot  portugais  coeallo 
'  ou  le  mot  de  la  lingoa  g«ral,  caharâ,  et  cependant  ils  ne 
connaissent  cet  animal  que  depuis  l'arrivée  des  Portugais 
dans  leur  pays  [S).  A  l'exception  d'un  petit  nombre  de  vieil- 
lards auxquels  on  n'a  pu  apprendre  les  prières  les  plus 

1,1)  La  liniroa  çeral  était  celle  des  Indiens  de  U  tAlt.  Les  jésnitea  «D 
tvoieot  compost  la  grammaire  el  le  dictioaaaire,  et  elle  avait  ité  adop- 
tée par  les  Paaiisles  qni  viraieDt  au  milieu  des  indigèoes.  La  lingoa  gé- 
rai et  le  gnaraai  des  réductions  du  Paragnaj  sont  des  dialectes  do  même 
idiome  (voyez  diod  Voyage  datu  le  ditlrtet  dot  Diamattli  et  ntr  le  lit- 
loraldiàBrMt.U,  11). 

(3)  Araot  la  découverte ,  les  Co^apos  n'avaient  également  vu  ancuu 
jtrricain  ;  mais  ils  o'ont  pas  totgi  de  terme  pour  désigner  na  atpe  :  leur 
mot  lapanho  vient  évidemment  de  tapanhûna,  qui.  dans  la  lingoa 
gérai,  signifie  noir. 


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114  TOlTAGE  AUX  SODRCES 

courtes  et  qudqnes  réponses  du  catéchisme,  tons  tes  In- 
diens de  l'aldea  ont  reçu  le  baptême  :  ils  se  marient  derant 
leur  curé  (1),  et  quelqaes-uns  même  vont  à  coufesse.  On 
peot  croire  cependant  qne  les  idées  qu'ils  ont  da  chriUia- 
oisme  sont  bien  superflcidles ,  car  le  curé  de  Valdea  se 
contentait  (1819)  d'y  aller  dire  la  tnesse  Ions  les  dimanches 
et  passait  le  reste  du  temps  à  sa  sucrerfe  de  la  ConceftÂo, 
située  À  S  lejoof  de  S.  José,  onioriledeS.  /ndro,  qui  est 
beaucoup  plus  éloignée  encore.  Personne,  dans  le  pays,  ne 
trouvait  cette  conduite  condamnable,  parce  que  perMBne 
ne  s'imagine  qo'un  curé  ait  d'autres  devoirs  k  rem|riir  que 
'd<e  dire  une  messe  basse  chaque  dimanche  et  de  confeBRr 
-ceux  qni  se  présentent.  Et  cependant,  qn'dte  était  belle  la 
missiota  da  curé  de  Y-aldeal  il  pouvait  PâOdre'cbrétletis  ces 
hommes-enfants  si  donx  et  si  dociles ,  les  protéger  contre 
leur  propre  imprévoyance  et  contre  les  vwatioos  4e  leors 
surveillants,  prolonger  leur  existence  par  de  bons  consens, 
lés  civiliser  autant  qu'ils  sont  susceptibles  de  l'être,  deve- 
nir ponr  eux  une  seconde  providence  :  il  bisait  du  sucre I 
Ceux  des  Coyap6s  qiâ  vivent  encore  dans  les  bol&  sont 
Mumis  k  un  cacique  fénéni  qui  a  sous  lui  jdosieurs  ca- 
pitaines :  dans  Valdea,  les  Portugais  ont  donné  les  tHres 
de  colonel,  de  capitaine,  d'alferet  (sous-lieutenant)  aux  in- 
dividus les  plus  considérés  de  leurs  compatriotes.  C'est  no 
moyen  fort  ioDOcent  et  peu  coûteux  d'exciter  Témulation 
de  ces  Indiens. 


(1)  Jnsqo'en  1B33  iochiuvciaeiit,  l'Aldu  de  S.  José  «  formé  nitt  f*- 
roisK  qui  dépendail  du  district  de  la  cité  de  Goju  (Da  Siln  e  Soosi, 
Mem.  ettat;  3);  mais,  en  1833,  od  l'a  compris  dus  le  district  de  k 
Dontelle  ville  d«  Jaragui  (  MiLun  et  Lofes  m  Hoom,  Diee.  Brat.,  i , 

517). 


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DU  110  DE  s.  FRANCISCO.  lia 

Les  Coya^  de  S.  José  ont  appris  des  Portugais  &  con- 
struire des  DuiisofHi,  i  cultiver  la  teire,  h  Gler  le  coton,  etc.  ; 
mais  ceux  de  la  méoie  nation  qui  vivent  encore  au  milieu 
des  bois  ae  connaissent  4'n(tTe  industrie  que  celle  de  faire 
des  arcs,  des  flèches  et  l'espècse  de  panier  qu'ils  appellent 
jiêeuim  (1),  dont  l'mage,  oonimeon  l'a  vu,  s'est  conservé 
dans  l'aMaa. 

On  fait  ces  jueunus  en  preuaut  deus  feuilles  de  bority 
(Mauritia  viitiftra)  ;  on  iÏTise  en  lanières  étroites  les  fo- 
lioles qui  les  composent  et  forment  l'éventail;  on  tresse  les 
lanières  d'une  feuille  avec  celles  d'uoe  autre  feuille,  eA  il  en 
résulte  une  sorte  de  corbeille  elliptique  ouverte  sur  les 
cAtés,  i  laquelle  on  ajoute  pour  anse  one  longue  tresse 
flexible  faite  également  de  bority.  Pour  se  servir  de  ces 
corbeilles,  on  y  introduit  une  natte  mince  et  elliptique 
roulée -en  cylindre;  quand  celle-ci  est  presque  pleine,  on 
y  passe  une  seconde  natte  roulée  comme  la  première,  et, 
de  cette  bçon ,  on  peut  élever  ces  espèces  de  paniers  jus- 
qu'à la  hauteur  de  i  pieds  et  même  davantage.  Los 
nattes  dont  je  viens  de  parler  goat  laites  diacune  avec  une 
feuîUe  de  fron'fy  dont  les  folioles,  également  partagées  en 
lanières  étroites  et  tressées  les  unes  avec  les  autres,  sont 
Dénués  par  l'extrémîté  du  pétiole  qui  forme  un  des  bouts 
de  la  natte. 

Les  Coyapés  se  couchent  sur  des  ^00*  quand  ils  en  ont, 
DBaig  plus  souvent  ils  dorment  étendus  par  terre  et  sans 
oreillers  sur  les  nattes  minces  et  extrëatement  étroites  dont 
je  viens  de  décrire  la  fabrication . 


(1)  Ja  «mis  qnc  le  do«lear  PoU  w  trMnpe  qund  il  arpelk  ces  pu- 
■Hcn  piapa.  « 


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Ilfi  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Chez  ces  Indiens,  comme  chez  toutes  les  peuplades  que 
j'avab  visitées  jusqu'alors,  ce  sont  les  femmes  qui  trans- 
portent les  fardeaux.  J'ai  vu  sur  le  dos  de  ces  pauvres 
créatures  d'énormes  faisceaux  de  bois  ou  desyticuntw  pleins 
de  mandubis  (Arachiê  hypogea]  qui  descendaient  jusqu'au 
milieu  de  leurs  jambes ,  et  étaient  simplement  retenus  par 
l'anse,  passée  comme  un  bandeau  sur  le  sommet  de  leur 
tète. 

C'est  de  la  même  manière  que  ces  femmes  portent  leurs 
enfants  lorsqu'elles  vont  au  travail  et  qu'elles  veulent  con- 
server le  libre  usage  de  leurs  bras.  L'enfant  est  assis  sur 
une  liane  retenue  par  le  front  de  sa  mère  ;  il  a  les  jambes 
appuyées  sur  les  hanches  de  celle-ci,  et  il  se  cramponne  k 
ses  épaules  avec  les  mains. 

Tant  qu'il  y  a  quelqu'un  dans  la  chaumière  des  Coya- 
p6s,  on  y  conserve  du  feu,  et  les  hommes  comme  les  femmes 
sont  ordinairement  accroupis  tout  autour. 

Ce  n'est  cependant  point  dans  l'intérieur  de  la  maison 
que  l'on  fait  cuire  la  viande.  Les  femmes,  qui  sont  char- 
gées de  ce  soin,  creusent  des  trous  dans  le  terre;  elles  met- 
tent des  pierres  au  fond,  et  par-dessus  elles  allument  du 
feu  qu'elles  retirent  lorsque  les  pierres  sont  rouges.  Alors 
elles  arrangent  sur  celles-ci  les  morceaux  de  viande  qu'elles 
veulent  faire  cuire;  puis  vient  un  lit  de  feuilles,  et  de  la 
terre  achève  de  remplir  le  trou.  De  cette  manière,  la  viande 
cuit  inégalement  ;  mais  j'ai  ouï  dire  i  des  Portugais  qu'elle 
avait  on  fort  bon  goût  [i). 

(1)  CeUe  miDïère  de  faire  cuire  la  viande  était  eo  nsage  chei  [es  pin» 
•DcieoDes  peuplades  bri<silieiiiies ,  les  Tupinambw  et  les  Tipajaa,  et 
die  se  Kironve  daos  les  lies  de  la  mer  du  Snd  (Fekmnind  Denis,  Bri- 
tH.  18}.  • 


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DU  RIO  DE  S.  PHANCISCO.  117 

Les  Coyapôs  faisaient  autrefois  une  boisson  forte  avec 
des  piments;  coais  ils  y  ont  presque  entièrement  renoncé 
dcpais  qu'ils  connaissent  le  tafla  [cackaça]. 

Dans  l'état  de  demi-civilisation  où  ils  sont  actuellement, 
ces  Indiens  ont  conservé  plusieurs  de  leurs  anciens  usages. 
Ainsi,  lorsqu'il  meurt  parmi  eus  quelqu'un  de  considéré, 
ils  se  font  eux-mêmes  des  blessures  à  la  poitrine  avec  de 
petites  flèches ,  ou  bien  ils  se  donnent  de  grands  coups  sur 
la  tHe,  pour  en  faire  sortir  le  sang. 

S'il  leur  naît  un  enfant,  ils  ne  se  contentent  point  du 
nom  de  baptême  portugais  ;  un  des  anciens  de  la  peuplade 
&i  donne  encore  un  autre  au  nouveau-né ,  et  c'est  ordinai- 
rement celui  de  quelque  animal. 

Les  mariages  se  célèbrent  par  un  grand  repas  et  par  des 
danses  pendant  lesquelles  la  mariée  tient  une  corde  atta- 
chée à  la  t£te  de  l'époux  ;  usage  emblématique  qui  n'a  be- 
soin d'aucune  explication. 

Devant  presque  toutes  les  maisons  des  Coyap6s,  je  vis  des 
morceaux  de  gros  troncs  d'arbres ,  de  2  à  3  pieds  de  lon- 
gueur, qui,  évidés  aux  deux  bouts  dans  leur  milieu,  se  ter- 
minent, à  chaque  extrémité,  par  un  bord  épais,  long  de 
2à3  pouces.  Ces  morceaux  de  bois,  appelés  (oi(ro(1}, 
servent  à  leur  jeu  favori.  Un  Indien  prend  l'énorme  mor- 
ceau de  bois  par  les  deux  bouts,  le  charge  sur  ses  épaules 
et  se  met  à  courir  de  toutes  ses  forces  ;  un  second  Indien 
court  après  le  premier,  et,  quand  il  l'a  attrapé,  il  lui  enlève 
le  morceau  de  bois,  le  place  à  son  tour  sur  son  dos ,  sans 
interrompre  sa  course,  la  continue  tant  qu'il  n'est  pas  rem- 


(I)  Ce  mot,  en  portugais,  siguiBeoj 
(ksCoi'apôs,  Ui,  comme  on  voit,  an 


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ll«  VOYAGE  *EX  SOUICES 

placé  par  nn  troiaième,  et  ainsi  de  suite  jusqu'à  ce  qne  l'on 
arrive  à  un  but  désigné  {!).  C'est  au  temps  de  Pftques  que 
ces  Indiens  se  livrent  principalement  k  leurs  réjouifiBances. 

Avant  de  quitter  S.  José,  j'allai  rendre  visite,  avec  le 
caporal  coaimandant,  à  la  personne  de  tout  l'ridea  poot  la- 
quelle les  Cofap4^  avaient  le  phu  de  considératitm  :  c'était 
une  femme  de  lem  nation,  que  l'on  appelût  Dova  Da- 
MUNA,  petite-fille  d'un  cacique  et  veuve  d'un  sergent  de 
pedeslrei  auquel  le  gouvernement  de  Valdea  avait  été  confié 
pendant  longtemps.  Dona  Damiana  parlait  assez  bien  le 
portugais  ;  elle  était  polie  et  avait  un  air  gai ,  ouvert  et  spi- 
rituel. Elle  me  cooBnna  ce  qui  m'avait  déjà  été  dit  par 
d'autres  Coyap6s,  que  ceux  de  la  peuplade  qui  vivent  dans 
l'état  sauvage  n'ont  aucune  idée  de  Dieu  (2). 

Dona  Damiana  avait  formé  le  deeeeàn  d'allercbercber  dans 
les  bois  ceux  des  Coyapôs  de  l'aldea  qui  avaient  pris  la  fuite, 
et  d' amener  en  même  temps  un  grand  nombre  de  ses  coift- 

{!)  Lei  «Dciens  Tapujru  ivaieal  on  jeu  k  pen  près  senbUble.  >  Du 
<■  usage  forl  remBrqusble ,  dit  M.  FerdioaDiI  Denis,  diatioguail  ce  peu- 
«  pie  des  aulres  habitants  du  Brésil.  Lorsqne  les  devins  iTaient  ordonné 
ce  de  changer  le  liea  du  rampenetil,  on  mèine  lorsque  les  jeui  coma- 

■  créa  Mmmençaieiit  aprfis  le  repas  du  soir,  des  JeDDes  gens  se  saiiia- 

■  aaient  d'une  poalre  pesante  et  la  portaient,  en  courant  avec  une  pro- 

•  digiense  rapidité ,  jnsqu'i  ce  que  la  fatigue  les  obligeit  à  déposer  ce 
>  hrdean  eotre  les  mains  d'an  autre  guerrier.  La  victoire  apparltoail 

•  i  celui  qui  avait  fourni  la  plu»  longue  carrier*  {Bréiil,  7).  ■  Nou 
avons  déjà  tu  que  les  Coyapds  font  cuire  la  viaode  de  la  raème  manière 
que  les  anciens  Tapuyas.  De  cette  ressemblance  dans  quelques  usages, 
il  serait  pourtant ,  ce  me  semble,  téméraire  de  conclure  que  les  Coyapôa 
dcecendeot  nécessaire  ment  des  Taperas.  On  trouve  des  coulumea  qai 
ont  entre  elles  beaucoup  d'analogie  chei  des  peuples  qui  certainement 
n'ont  en  aucun  rapport  les  uns  avec  les  autres. 

(S)  Ce  serait  dooe  à  tort  qu'au  a  prétendu  qv'ils  atloraieat  le  saleil  et 
la  tune,  et  snrtoat  qu'ils  sacriiîaieni  des*ictinre  bumaines. 


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DD  UO  m  8.  PUNGISCO.  119 

patriotes  encore  sauvages.  Elle  avait  obtenu  du  capitaine 
général  la  permission  de  s'absenter  pour  trois  mois  et  elle 
comptait  bientôt  partir.  Je  lui  témoignai  quelques  doutes 
sur  la  réussite  de  ses  projets  :  Ils  me  respectent  trop ,  me 
répondit-elle,  pour  ne  pas  faire  ce  que  je  leur  ordonnerai. 
D'après  ce  que  me  dit  cette  femme,  elle  entreprenait  ce 
voyage  dans  la  persuasion  que  ses  compatriotes  seraient 
plus  beureui  dans  Valdea  qu'au  milieu  de  leurs  forêts.  Les 
notions  de  christianisme  que  les  Coyapés  reçoivent  chei 
les  Portugais ,  toutes  faibles  qu'elles  sont ,  les  élèvent  réel- 
louent  beaucoup  au-dessus  de  leurs  compatriotes  encore 
sauvages  dont  l'existence  est  purement  animale;  ces  der- 
niers sont  plus  libres  pent-étre,  mais  les  autres  goûtent 
quelques-unes  des  douceurs  de  la  civilisation ,  leur  nourri- 
ture est  assurée  et  ils  ne  sont  point  exposés  à  toutes  les  in- 
tanpéries  des  saisons.  Avec  des  hommes  tels  que  ceux  qui 
civilisèrent  les  Indiens  de  la  cAte,  les  Goyapôs  de  S.  José 
eussent  été  parfaitement  heureux. 


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VOYAGE  AUX  SODRCES 


CHAPITRE  XXII. 


L  OB    BT   LES   DIAMANTS   DU   BIO   CLABO. 


Départ  de  S.  José,  —  La  Fatenda  iTEl  Rei.  Ses  bestiani.  Sa  destiDalion. 
—  Un  lodien  ehavatUê.  —  Idée  g£n£rale  du  paj's  qui  s'étend  df  la 
Foienda  d'El  Rei  au  Rio  doi  PUèti.  —  Halte  en  plein  air  h  Tapera.  - 
L'Aldea  Maria.  —  Halle  eo  plein  air  sot  le  bord  do  Rio  Fartwa. 
Carmpafoi.  Tfails  froides, —  Halteeu  plein  air  iPorcoJforto. — Jour- 
née  enDDjeuse.  La  Torri  deBtAel.  Campo*  ineendiés. — Halte  sur  le 
bord  dn  Rio  àoi  Pilàe».  —  Détails  sur  cette  mière.  Dissertation  sur 
le  minhoMO  des  Goyanaîs.  —  Le  bamean  dot  Pilseê.  Il  est  situé  sur 
le  Rio  Claro.  Ses  moisoDg  ;  son  église-  Son  histoire  et  celle  de  l'ei- 
ploitatiOD  des  diamants  du  Rio  Claro.  —  Les  habitants  uniquement 
occupés  de  la  recherche  de  l'or  et  des  diamanls.  —  âTautages  qu'ils 
annieiit  k  cnltiTer  la  terre.  —  Bijoui  d'or  des  femmes.  —  Cbercfaenr» 
nomades  d'or  et  de  diamants.  —  Les  trois  manlËres  d'eiiraire  lea  dia- 
mants et  l'or  du  Rio  Claro.  —  Les  etclama  clei  diamqnU.  —  Le  déta- 
chement de  militaires  cantonnés  au  hamun  dos  PilSés.  Combien  il  est 
facile  an  c<Hitrebandiers  et  ani  criminela  de  se  soustraire  à  leurs 
recherches.  —  Hou  petit  diamant.  —  Détails  snr  le  Rio  Claro.  Insectes 
malfaisants.  —  Tentatives  inutiles  pour  former  one  collection  de 


Après  avoir  pris  congé  de  Dona  Damiana  (le  8  juillet] ,  je 
me  mis  en  route  avec  ma  petite  caravane  et  un  pédestre  que 
le  caporal  commandant  me  donna  pour  guide.  Je  voulais 
me  rendre  au  vîlluge  de  PilÔeg,  situé  sur  la  route  de  Villn 


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DU  RIO  DE  S.  nUHCISCO.  t!l 

Boa  i  Hatogrosso,  et  de  là  au  Rio  Claro,  riche  en  or  et  en 
diamants  (1). 

Dans  an  espace  (te  S  legoaa  nous  trouvâmes  des  bois  peu 
élevés,  marcbant  toujours  parallèlement  à  la  continuation 
de  la  Serra  Dourada ,  et  nous  anivAmes  à  la  Faienda  d' El 
Rei  (ferme  royale),  où  je  passai  la  nuit. 

Cette  /(U«nda appartient  au  roi,  ainsi  que  son  nom  l'in- 
dique, et  elle  est  située  sur  les  terres  de  Valdea.  On  n'y  voit 
d'autres  bâtiments  que  deui  maisonnettes;  mais,  comme 
00  se  borse  à  y  élever  des  bestiaux  et  que,  dans  les  contrées 
tropicales,  des  étables  seraient  plus  nuisibles  qu'utiles,  on 
n'a  besoin  ici  que  d'un  logement  pour  les  hommes  anx- 

(1)  Itinéraire  approximatif  de  l'Aldea  de  5.  José  an  TJIlage  d«  PilSes  : 
De  l'AJdea  de  5.  ioai  à  )a  Faieuda  d'il  Rei X       lefoas. 

—  Tapera,  lien  désert  sans  habitalicD 3 

—  Bords  du  Rio  Fartara,  lieu  désert  sans  ha- 

bitation   3  l/S 

—  Porco  Morlo ,  lieu  désert  saas  habitation.  .  b 

—  Bords  du  Bio  dgs  PilSes,  en  plein  air.  ...  31/3 

—  Arraial  dos  Pilites,  village 1 

30  lesoas. 
L.  A.  da  Silva  e  Sonsa  avait  ittdiqoé  la  distance  de  la  cité  de  Gojoi  an 
fillagede  PilSes  comnieétaDi  de  IStcflouJ,'  MatiDg(f(in.,n,  130)  admet 
reiaclitnde  de  et  chiffre  ponr  le  chemin  qni  passe  par  S.  José  ;  mais , 
quand  il  arrive  aux  détails ,  il  compte  31  Ugoai  :  S  de  la  cité  de  Gojai 
h  S.  José,  e  de  S.  José  k  l'Aldea  Maria,  7  de  l'Aldea  Maria  i  l'Arraial  dos 
PiliSes.  Il  m'est  impossible  d'admettre  qu'il  j  ait  8  l«|rO(U  de  Gojai  à 
S.  José,  par  Areas.  Gnrgniho  et  Cooceifâo  :  je  suis  d'accord  avec  l'esti- 
mable autenr  de  r/lin«rario  sur  la  distaoce  de  S.  José  à  l'Aldea  Maria; 
mais  Dons  diffërous  de  moitié  pour  celle  de  l'AJdea  Maria  ao  village  de 
PilBes  ou,  si  l'on  veut,  da  Rio  Claro.  Eiisie-l-il  no  chemin  plus  court 
et  également  abandonnét  Mattos,  qni  ne  parait  pas  avoir  visité  ce  can- 
ton, aoiait-il  été  indnit  en  erreur  par  les  renseignements  qu'il  a  reçus  T 
C'est  ce  que  je  dc  saurais  d^idcr. 


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m  TOYAOH  AttX  sauMXS 

quek  sont  coulés  Pa  garde  et  le  soin  du  troapeau  :  c'étajeat, 

lors  de  mon  passage,  deux  pedatrei  et  un  Indien  de  la  peu- 
plade des  ChavanUi  qui  bibite  le  nord  de  la  provioce  de 
Goyaz.  Oo  conptait ,  k  cette  époque,  400  bâtes  à  cornes 
sur  les  terrée  de  la  Fazenda  d'EI  Rei.  Les  pâturages  de  cette 
ferme  sont  excellents ,  les  bestiaux  y  multiplient  beaucoup, 
et  l'on  n'est  point  obligé  de  leur  donner  du  sel ,  parce  qu'il 
existe  dans  le  pays  comme  dans  le  Sertâo  de  Minas  (1)  des 
terrains  salpMrés. 

Quand  le  gouverneur  de  la  province  pasaaK  quelques 
jours  parmi  les  Indiens  de  ïaiàta,  ce  qu'il  faisait  quelque- 
fois, la  Fazenda  d'EI  Rei  lui  fournissait  le  bétail  nécessaire 
pour  sa  consommation.  De  temps  en  temps,  on  envoyait 
aussi  im  bœuf  aux  Coyapôs;  mais,  comme  ces  Indiens  ont 
pour  la  viande  la  même  passion  que  toutes  les  peuplades 
de  leur  race,  ils  se  plaignaient  beaucoup  de  ce  qu'on  leur 
économisait  ce  mets  favori. 

Si  tous  les  Cbavanl«s  tessembleat  à  celui  qui  soignait  les 
troupeaux  de  la  Faienda  d'EI  Rei,  cette  nation  doit  être 
plus  belle  encore  que  celle  des  Coyapés.  Ce  jeune  boaune 
était  grand,  sa  tête  n'était  pas  extrêmement  grosse;  il  avait 
de  beaux  yeux,  une  figure  oaverte  et  agréable  (3).  Duis 


il)  Vo^foçe  dont  lei  proçimeei  de  Ato  de  Jaunira  et  Hmhw  Ctrau, 
U,  317. 

(»  Db  amnl  •n^el  o>  doit  d'imotoBes  rtebcrebce  »ar  ane  |mNn 
de  l'Aménquii  asiMgnsIe,  nais  qai  ■  HOleineDt  ralàché  qadqoM  imluM 
à  Hts  de  Jiaeiro  et  a'a  pu  vur  qu'an  ImUcd  appartefleat  an  Brésil  (11, 
b'Obb.,  VofOfe,  m,  349),  a  été  «atralat,  par  »oa  Mjet.  à  cUuer  lec 
tndieèaes  de  ce  tuIb  empire,  et,  aprta  les  BToir  rangée  toui  wxrf  k 
litre  de  race  tn-tuilio-onaraniennê .  il  divise  eeiU  tu»  en  deux  u- 
lions,  fmaront  et  boloeudo,  OEieadaiit  par  le  mot  Moltow  (ohIb  rtfimwii 
(Thiimmei  qui  parlenl  hhe  taitgvt  émanant  duiu  umrta  » 


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DU  UO  DB  S.  FBAIICISCO.  lU 

leur  langue,  tes  Chavantes  ne  penYent  se  faire  comprendre 
des  Coyap6s  ;  mais  ib  entendent ,  m' a-t-on  dît ,  plusieurs 
autres  nations  qui,  comme  eus,  habitent  le  nord  de  la  pro- 
TÎnce. 
J'aî  tâché  de  résoudre  le  problème  de  l'origine  des 


(L'fiomtRe  amérieain ,  1 ,  V  ;  n ,  349).  Les  Bolocados ,  d'an  cA(é ,  et ,  de 
l'antre,  Im  Gaarinii  arw  lei  Indiem  de  la  cAie,  ewi  qoe  j'ti  appelés  la 
totu-ract  tt9i  {ranagt  dant  iMproofnM«d«R{o  de  Janeiro,  etc.,  D), 
Torment  ce rUi Dément  deai  groopes  distincts  et  bien  trancbés;  nuis, 
ensniie ,  je  ne  vois  plus  de  classificatiOD  possible.  D'après  U  déOaiiion 
dtéephw  htot,  DMiR  pourrons  mettre  enscoible  lesMilaiis,  les  H*ca- 
nig  el  les  HKhaeul<:i ,  qui ,  évidemxienl ,  pirlepi  des  dialectes  d'sne 
même  langue  ;  mais  nous  aerona  obligea  de  séparer  d'eai  les  Uonochds 
et  les  Coroados ,  et  cependant ,  selon  les  traditions  des  Malal  s ,  toutes 
ces  peuplades  ont  une  origine  commone  :  les  MalaKs ,  les  Macunis  et  les 
HaehaeHlie,  «gui  vont  ensemble,  apparlieDd raient  ausei  pea  aui  Gnarani* 
qu'aux  Botocudos ,  et  il  en  sérail  de  mime  des  Coroados ,  des  MonochoS 
et  des  Coyapùs,  également  diatincld  entre  eui  (vo^ei  les  vocabulaires 
qae  j'ai  doonés  dans  nwa  Voyage  àant  te*  provittcei  de  mo  de  Joi- 
Mtro.  «te.,  ( .  M,  «7 .  U ,  47.  IH ,  SIS ,  et  mon  Voyage  imr  le  littoral 
d/itBTitH,  U,  293).  Si,  à  présent,  mus  prMniu pour  ba^e  delaelassi- 
fiMtion  les  carMlèias  eitéritucs,  il  est  incoDlMtoUe  que  nuua  trouve- 
rw  deux  «oUoim  biea  distiucles  dans  les  ftatocudoe  el  les  Indiens  de  la 
cAte  :  ï  la  rigueur,  nous  pouvons  rapporter  k  cea  derniers  les  UsUii,  les 
Hacunfs,  lesUacbacnliaimaisnouanedevonspas,  j*  crois,  en  rapprocbei 
les  C4)fwdeq,  Barques  d^uue  empreinte  particuli^  de  laideur,  et  eueore 
aaoins  fcrotts-sous  d'eui  du  BoWx.'Kdaa.  Peeannoe  n'aurait  certaineaMot 
au  l'idée  de  prendre  pour  un  Belecnde  on  peur  u»  Gnarani  ee  Panbimc 
que  j'ai  w  k  PasMOb»  el  qoi  rtMenblsit  laM  k  naa  pajaBos  français, 
et  il  m'est  tout  aussi  impossible  de  conlbodre  avec  ces  deni  nations  le* 
Coyapos  et  ce  beau  Chavante  dont  Je  *ieas  de  parler.  Le  savant«utenr 
que  j'ai  eité  plus  haut  s'est  vu  forctï ,  je  le  répète ,  de  faire  mirer  dans 
sa  classification  générale  des  peuplades  qa'il  ne  connaissait  pas  :  s'il 
avait  parcouru  le  Brésil  comme  l'Autériqae  espagnole,  il  aurait  recounn 
qae  la  classification  qu'il  admet  ^ur  s»  race  hTmilio-gvia'rmttiewiu  est 
loin  de  comprendre  taules  les  peuplades  du  Brésil  :  il  aurait  reconnu 
que ,  si  les  caractères  qu'il  atlribue  à  celte  rare  entière  conviennent  ad- 


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114  VOYAGE  AUX  SOURCES 

idiomes  de  l'Amérique  (1)  ;  ces  hommes-enfants  disparais- 
seot  devant  notre  race  prévoyante  et  usurpatrice,  et  bien- 
tôt il  ne  restera  de  leurs  langues  que  des  vocabulaires  tou- 
jours incomplets,  presque  toujours  très-inexacts. 

De  la  Fazeada  d'£l  Rei  jusqu'à  l'endroit  où  nous  rejoi- 
gnîmes la  route  de  Villa  Boa  à  la  province  de  Matogrosso,  il 
faut  compter  environ  16  à  47  legoas.  Nous  mimes  quatre 
jours  dans  ce  voyage  :  quelques  personnes  le  faisaient  sans 
doute,  lorsque  VAldea  Maria,  dont  je  parlerai  bientfit, 
était  encore  habité;  mais,  à  l'époque  de  mon  passage,  qui 
que  ce  fût  n'avait  t>esoin  de  traverser  ce  canton.  Depuis  que 
l'avais  quitté  Rio  de  Janeiro,  je  n'avais  pas  vu  un  pays 
aussi  désert;  si  l'on  excepte  les  ruines  de  l'Àldea  Maria, 
je  ne  découvris,  pendant  ces  quatre  jours,  aucun  vestige 
d'habitation,  je  n'aperçus  aucune  créature  humaine  (3).  En 


mirablemeot  bien  mii  Goaranis  de  la  proTinee  de  MissSes,  ils  soat  loia 
de  s'tppliipier  anasi  eiactement  aai  antres  peuplades ,  ce  que  proaTcat 
les  descriptions  ^cialea  que  j'ai  doDoées  de  plunenrs  d'entre  elles  et 
cette  seule  pbrase ,  par  laquelle  Gardneriadique  comment,  dans  l'Aldea 
do  Donro  (et  uon  Doro),  oa  peut  disliofaer  les  Téritables  lodiensde» 
lioiDiiiea  de  sang  mélangé  :  <■  Il  U  verj  easr  to  Teeognize  tbe  pare  ladiaa 
b;  Ms  reddUh  coloor,  long  atraighl  bair,  high  cheek  bonei  and  the 
peculiar  obbqaitjofhisejes  {Traveli,  316).  ■  Déji  Lerj  avait  dit  de  ses 
TououpinambaoulU ,  babiUnts  de  la  cAte  qni  se  rapprochaient  tant  des 
véritables  Gnaratus,  «  n'eatans  pas  autrement  noirs,  ils  sont  senleroent 
basanéi,  comme  vous  diriei  les  Espagnob  ou  Proaençaoi  (f/i«l.,  V  édi- 
tion, 95).  " 

(1)  Chap.  U  du  1"'  volame  de  cet  oorrige. 

(2)  Mallos  dit  (Jltn-,  Il ,  13T)  qce  la  roate  de  GotU  an  RIg  Claro,  par 
S.  José ,  a  cessé  d'être  fréquentée  noa-sealement  i  cause  de  l'abandoa 
de  l'Aldea  Maria ,  nuia  parce  que  les  pltnniges  n'y  sont  pas  aossi  bons 
que  SOT  l'autre  roate ,  et  que  l'on  a  peur  d'Aire  attaqué  par  les  Indins 
Cejapda  du  village  de  5.  José  :  personne,  i  l'époque  de  mon  voy^e,  nr 
parabsait  avoir  une  semblable  crainte. 


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DD  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  125 

certains  endroits,  les  traces  du  sentier  que  nous  suivions 
avaient  presque  entièrement  disparu  ;  dam  d'autres,  il  était 
extrêmement  pierreux  et  embarrassé  par  des  troncs  d'ar- 
bres, des  branchages,  des  lianes  qui  fermaient  le  passage; 
ailleurs  il  devenait  d'une  roideur  extrême,  et  il  nous  sem- 
blait que  nous  allions  nous  précipiter  au  fond  d'un  ravin 
obscur.  Le  pays  est  quelquefois  égal ,  plus  souvent  il  est 
montueux.  En  général ,  il  présente  de  grands  bois  ;  de 
temps  en  temps,  on  y  voit  aussi  des  campas  parsemés  d'ar- 
bres rabougris  ;  la  sécheresse  continuait  i>  être  excessive  ; 
je  ne  trouvais  aucune  plante  en  fleur.  Des  myriades  d'in- 
sectes malfaisants  de  toutes  les  espèces  ne  nous  laissaient 
pas  un  seul  instant  de  repos.  Quand  le  soir  approchait,  nous 
faisions  halte  sur  le  bord  de  quelque  ruisseau,  et  nous  cou- 
chions en  plein  air.  Pendant  le  jour,  la  chaleur  avait  sou- 
vent été  insupportable;  la  nuit,  j'étais  transi  de  froid,  et 
souvent  je  soupirais  en  vain  après  un  peu  de  sommeil. 

Querques  détails  achèveront  de  faire  connaître  ces  dé- 
serts. 

Le  jour  où  je  quittai  la  Fazenda  d'EI  Rei,  je  continuai  è 
marcher  parallèlement  à  la  continuation  de  la  Serra  Don- 
rada;  cependant  le  pays  que  je  parcourus  est  assez  égal.  Il 
offre  un  mélange  de  forêts  et  de  campos  où  dominent  les 
premières;  mais  ce  sont  des  pâturages  que  le  chemin  tra- 
verse presque  toujours.  II  semblerait  que  les  eampos  d'un 
pays  généralement  boisé  doivent  offrir  plus  d'arbres  que 
ceux  des  contrées  où  il  existe  peu  de  bois  ;  mais  il  n'en  est 
pas  ainsi  dans  ce  canton  ;  les  arbres  des  pâturages  y  sont , 
au  contraire,  je  ne  sais  par  quelle  cause,  fort  éloignés  les 
uns  des  autres. 

Après  avoir  fait  3  legoas,  nous  nous  arrêtâmes,  pour  y 


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U6  V0YA6K  AOX  SOWCBS 

passer  là  nuit ,  dam  un  eampo,  sur  le  bord  d'uae  petite  ri- 
vière, au  lieu  agspelé  Tapera  [maiaoa  rainée).  Hes  effets 
furent  {4acés  sous  des  borityt;  mais ,  comme  oes  Palmiers 
donnent  peu  d'ombrage  et  que  le  soleil  était  encore  exces- 
sivement ardent,  ttes  gens  tne  firent  OM  petite  baraque 
avec  des  bâtons  et  les  cuin  destinés  à  recouvrir  la  chai^ 
des  mulets. 

Pendant  toute  la  noit,  te  froid  fut  etoessivement  vif  «t 
m'empêcha  de  dormir;  le  lendemain,  comme  cela  était  d^ 
arrivé  la  veille ,  la  chaleur  ocmimeOça  vers  dii  heures  da 
matin  et  devint  bîentAt  insupportable.  Cette  Blt«niative  de 
froid  et  de  obaud  agissait  fortement  sur  mes  nerfs  et  tea- 
dait  jt  diminuer  mes  forces.  Ce  jour-là,  nous  continuâmes 
à  avoir  à  notre  gaaobe  le  prolongemeat  de  la  &erra  Douradi, 
qui  n'a  kî  qu'une 'hauteur  peu  considérable.  Q««ique  le 
pays  soit  toujours  ti^-boisé ,  le  chemin  traverse ,  presque 
sans  interruption,  des  eampos  dont  les  teintes  grisâtres 
attrit^aient  dos  regards. 

A  une  demi-lieue  de  l'endroit  où  nous  Hmes  halte,  nons 
passAnes  par  VAldea  Maria,  qui,  comme  je  l'ai  dit,  fut  au- 
trefois habité  par  les  Coyapés,  et  qui ,  alors  entièreoMat 
abandonné,  servait  de  repaire  aux  chanves-sonru  et  aux 
insectes  maHaisaHls  (4).  Les  bâtiments  qu'on  y  voyait  en- 
core, la  maison  du  gouverneur,  la  caserne  et  te  ma^saà 
étaient  graiuls  et  d'un  joli  aspect,  mais  disposés  sans  an- 
eone  sytaétoie.  C'était 'dvrière  ces  édifices  qu'avaknt  été 

(t)  Selon  HaUos  (/lin.,  □,  139),  l'Aldea  IfarU  aurait  éU  foodËipcMiT  d» 
iDdieos  Coyapus  qu'on  j  aurait  eavojés  da  village  de  S.  José.  D'après  Us 
aatoritésles  plus  graves,  c'est,  au  cootraite,  de  l'Aldea  Maria,  wmiiie 
on  l'a  TU  plus  haut  [page  99) ,  que  les  Coj«pùs  ont  élé  mmpmU»  i 
S.  José  poor  floccMer  am  Jartes  et  aai  Carajis,  qui  s'riuient  (Uipan^ 


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Mj  MO  DE  'S.  nacaco.  \rt 

construites  l«s  chautnières  des  Indiens.  Ces  bomises  visi- 
tent souvent  leurs  anciennes  âtmenres  (i)  ;  its  n'y  pensent 
pont  sans  chagrin  ,  et  je  ne  pus  m' empêcher  de  partager 
leurs  regrets.  Si  l'Aldea  Maria  n'a  pas  la  régularité  de 
S.  José,  il  est  sitsé  plus  agréablenient,  et  le  Serra  Dourada, 
assez  éloignée,  Jette  de  la  variété  dons  le  paysage,  sais 
masquer  la  vue  (ï). 

Nous  avions  Mt  S  legùo»  et  demie  qaand  note  mtmes 
pied  À  terre  sur  le  bord  de  Rio  Fm-tura  (rivière  ab«B- 
dance),  que  nous  avions  passé  «vent  d'arriver  à  S.  José, 
mais  qoi  o'eA  là  qu'un  raissean  et  forme  déjà  ici  une  pe- 
tite rivière.  T^ous  nous  dtaMtnteB  dons  une  espèce  de  saHe 
formée  par  des  arbres  toufita,  rt  j'aarais  trouvé  ce  lien  fort 
agréable  si  nous  n'eussions  été  Aèvorés  par  d' innombrables 
earrapatat  îet  forcés  de  nous  vifiter  le  oorps  è  chatfue  rai- 
irate,  ce  qai  me  liisait  perdre  an  temps  considérabte. 

La  nuit  fut  encore  extrèmement-froide,  et,  quoique  mon 
lit  eût  été  placé  Mprèe  du  feu,  je  restai  trèe-Iongtemps  sans 
poUYoir  fermer  l'oeil.  Dans  cette  saison-,  la  Tosée  est  fort 
abondante;  à  la  fin  de  la  nuit,  les  feuilles  des  arbres  sont 
presque  aussi  mouillées -que  s'il  était  tonri>é  de  ta  pluie,  et, 
qoand  je  me  levais,  ma  couverture  était  presque  buhiectée. 

(3)  Lieithnble -MleartaHùliin  «ta  OmIm  JtottosdJtdKn.,  B,  UO) 
«  qa'ih'MjBte  eOMTe  dAu  ce  lieu  (Ncete  lugar  aioda  hoje  periot- 
<<  œce,  etc.)  une  fasenda  qui  appartient  k  la  itatiOD ,  et  où  l'oa  élève 

■  du  MUn.  Cetftsbliasttnedt,  jjdute  le  iMbfe  VcriVïin,  Wtdotiileiles 

■  MaOces  q«'à  mo  •dmioMnlenT  et  mix  penDOMt  qu'il  est  biaa  aiu 
•  d'obliger.  ■  Il  est  évident  qu'il  est  ici  question  de  la  Faieada  d'£l  Rei , 
gai ,  après  le  changement  de  gouTcniement ,  sera  deTenne  dm  propriété 
DktioDtle  i  mais  cette  ftuttula  n'est  point  Bitaée  an  lieu  ai  était  l'Aldea 
Harii ,  elle  l'en  *  3  letoarM  demie  de  eatle  aidée  et  2  de  S.  Joaé. 


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138  T0TA6B  AUX  SOUICBS 

Le  pays  que  je  parcourus  au  delà  du  Bio  Fartura,  dans 
une  longue  journée  de  5  legoas,  est  rnootagneui,  couvert 
de  forêts,  et  n'offre  que  de  très-petits  iatervalles,  parsonés 
seulement  d'arbres  rabougris.  Les  bois,  comme  tous  ceui 
que  j'avais  vus  jusqu'alors  dans  cette  province,  sont  loin 
d'avoir  la  majesté  des  forêts  vierges  de  Rio  de  Janeiro  oo 
même  de  Hinas  ;  néanmoins,  dans  les  endroits  bas  et  hu- 
mides. Ils  se  font  aussi  remarquer  par  leur  vigueur,  et  par- 
tout ils  présentent  un  épais  fourré  d'arbrisseaux  qui  don- 
nent beaucoup  d'ombrage  et  de  fraîcheur. 

Tfous  fîmes  halte  au  lieu  appelé  Porco  Morto  (cochon 
mort],  sur  le  bord  d'un  très-petit  ruisseau,  dans  une  val- 
lée profonde  et  fort  étroite,  entourée  de  montagnes  cou- 
vertes de  forêts.  De  grands  arbres  formaient  au-dessus  de 
nos  têtes  une  voûte  épaisse  :  cette  solitude  semblait  séparée 
du  reste  de  l'univers  ;  cependant  il  était  impossible  de  jouir 
de  la  beauté  de  ce  lieu ,  à  cause  des  milliers  d'insectes  de 
toute  espèce  qui  nous  y  dévoraient.  De  petites  abeilles 
noires  entraient  dans  nos  yeux  et  nos  oreilles  ;  des  borra- 
ckwioi  (i)  nous  piquaient  le  visage  et  les  mains  ;  nous  ne 
pouvions  foire  un  pas  sans  être  couverts  de  earraptuos  de 
toutes  les  grandeurs-,  enfln  nous  n'étions  pas  mêroeexenqtls 
de  moustiques  et  de  puces  pénétrantes. 

Mes  gens,  au  commenc«nent  de  la  nuit,  jetèrent  dam 
notre  (ea  le  tronc  tout  entier  d' un  gros  arbre  mort  ;  mon  lit 
fiit  dressé  tout  auprès  ;  fêtais  gelé  d'un  c6té,  je  brûlais  de 
l'autre  et  ne  pouvais  dormir.  Tout  k  coup,  des  cris  frayants 
frappent  mes  oreilles  :  a  onça,  a  oaça  (le  jaguar,  le  jaguar)! 
Je  me  jette  en  bas  de  mon  lit  et  me  dirige  du  c6té  où  ces 

(1)  rai  décrit  cet  insecte  du» 


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Dv  Hio  M  S.  nuncisco.  isg 

clameurs,  venaient  de  se  Taire  entendre.  C'était  le  bon  La- 
ruottequi  les  avait  poussées.  Qu'avez-vous,  mon  ainî?m'é- 
criai-je.  Ahl  monsieur,  me  rendit-il ,  je  rêvais  que  l'once 
me  mangeait.  Pendant  la  journée,  nos  mulets  avaient  sou- 
vent donné  tous  les  signes  de  la  terreur,  et  mes  gens  avaient 
6ni  par  voir  sur  le  sable  les  traces  d'un  jaguar.  1)  n'avait 
été  question  que  du  jaguar  dans  ma  petite  caravane,  et 
l'imagination  effrayée  du  pauvre  Laniotte  lui  avait  montré, 
pendant  son  sommeil,  ce  féroce  animal  occupé  à  déchirer 
ses  membres. 

La  journée  suivante  fut  peut-être  la  plus  ennuyeuse  de 
tout  mon  voyage.  Nous  traversAmes  d'abord  des  bois  où 
nous  avions  de  l'ombre  et  de  la  fraîcheur;  mais,  ensuite, 
nous  entrâmes  dans  des  eompot  où  la  chaleur  était  insup- 
portable. Quelquefois  le  chemin  est  montueux,  plus  sou- 
vent il  est  égal  ;  presqne  toujours  il  suit  une  vallée  fort 
large  ou,  pour  mieux  dire,  une  plaine  allongée,  bordée  de 
montagnes  couvertes  de  bois.  Celles  de  la  droite  sont  les 
plus  élevées:  en  qu^ques  endroits,  elles  s'élancent  presque 
è  pic;  là,  par  conséquent,  elles  doivent  être  fort  sèches  : 
aussi  les  arbres  qui  y  croissent  étaient-ils,  lors  de  mon 
voyage,  presque  entièrement  dépouillés  de  leurs  feuilles. 
Le  sommet  de  ces  montagnes  est ,  en  général ,  assez  égal  ; 
néanmoins,  en  deui  endroits  différents,  elles  sont  couron- 
nées par  des  éminences  qui  ressemblent  à  un  château  fort 
accompagné  de  ses  tourelles  et  ajoutent  A  l'austérité  du 
paysage  :  c'est  peut-être  à  l'une  de  ces  montagnes  que  les 
premiers  aventuriers  coureurs  de  déserts  (sertanislas)  don- 
nèrent le  nom  de  Tour  de  Babel  (Torre  de  Babel  j  (4).  Dans 

(I)  ce  Sous  le  goaverneineDl  d'Antonio  FurUdo  de  Hcadonta,  eo  ITTO 


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13U  TOTAOE  ACX  SODHCBS 

piusiears  fonds  marécageux,  je  retrouvai  l'immobile  ^  ma- 
jestueui  bority,  qui  s'harmonise  si  bien  avec  le  calme  du 
désert.  Partout  les  campoi  avaient  été  récemment  bridés  et 
les  moucherons  y  étaient  insupportables  ;  ils  se  jetaient 
dans  mes  yeux ,  pénétraient  dans  mes  oreilles.  »e  coo- 
vraient  le  visage  et  les  mains,  et,  pour  m'en  débarrasser, 
j'étais  obligé  d'agiter  sans  cesse  mon  raoucb<^r.  Je  m  poa- 
vais  deviner  qui  avait  pris  la  peine  de  briller  ces  pâturages 
sans  maître  et  éloignés  de  toute  hésitation  ;  mais,  ^ug 
tard ,  on  me  donna  l'explicaUon  de  cette  espèce  d'énigme. 
Une  femme  qui  habitatt  tes  environs  du  Rio  Orande,  limite 
de  la  province  de  Matogrosso,  et  possédait  no  tronpean 
nombreux  de  bètes  à  cornes,  était  alors  sur  le  point  de 
quitter  sa  demeure  pour  aller  s'établir  an  village  d'Annî- 
cuns.  et,  d'avance,  elle  avait  envoyé  mettre  le  feu  aux  pâ- 
turages qui  avoisinent  la  roate,  afln  que  ses  bestiaux  y 


«  ou  1771,  dit  Ptiarro  (JInn.  hUl..  TH.  164], 

■  SMres  BdUiIm  sortit  de  Jaragnn  itm  nue  Jinada  d'aï 

■  guidé  pir  QD  itinértire  que  lui  irait  iaaùt  UrlMno  d«  Qnito,  ru 

■  des  campagQOOS  de  Bartholonea  Baeno ,  il  se  mit  i  ptrcoarir  de 
«  Tistes  Toriu  et  des  eampoi.  Parmi  les  derniers ,  BulhSes  m  troora 

■  nn  qui  attira  particulière  me  ut  sou  atteotion  :  an  miliea  était  tm 

■  montagne  formée  de  pierres  qui  «eiobUieiii  avoir  été  amnféea  aree 

•  art  el  h  laqaelle  les  plus  anciens  terlaniitoM  avaient  donné  le  imhb 
X  de  Torre  de  Babel.  Après  de  longs  traviai  et  beauconp  de  fotignes, 
s  nosaventoriersarriTèreat  k  unmisseaa  rJcbeenpaîIletlesd'OT;iiiav, 

•  ayant  reconno  qu«  ce  canton  fu'uit  (Ariie  da  ptfsoù  les  alMamli 
«  dn  Bio  Clara  prennent  leur  source,  el  qu'il  était  compris  dans  les 

■  limite!!  des  terres  diamaatioes  interdites  aui  chercheurs  d'or,  ils  *e 

■  retirèrent.  >  Pour  parrenir  an  Rio  Claro,  BuIhSes  et  ses  Merloitt$lat, 
partant  de  Jaragn^î ,  avaient  Ml  probablement  le  mfine  dieailn  qae 
moi  ;  ce  Tut  iTaut  d'arriver  au  Rio  Cliro  qu'ils  Tirent  U  Toar  de  Babel  : 
ain^i  il  est  asseï  vraisemblable  que  celle  oionlagne  rsl  une  de  celles 
dont  je  parle  ici. 


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DU  110  DE  5.  FRANOSGO.  ISI 

trouvassent,  à  leur  passage,  nue  meilleure  nourriture. 

Noos  «Tions  fait  5  Ugoaa  et  demie,  c'était  une  journée 
iDtennînable,  kmque  enfin  le  bruit  altematiTement  sourd 
et  criard  de  la  manjola  nous  avertit  du  voisinage  d'une 
habitation,  et  bientôt  qoub  arrivâmes  auprès  de  quelque^ 
misérableschaumièraB.  J'y  demandai  l'hospitalité,  matsoo 
me  la  refusa  en  me  disant  qu'il  n'y  avait  de  place  nulle 
part,  que  la  grange,  seul  endroit  que  l'on  pût  m'offrîr, 
était  remplie  de  puces  pénétrantes,  et  que  je  serais  beau- 
coup mieux  sur  le  bord  de  la  rivière.  La  petitesse  de  ces 
chenmièrea  me  fit  croire  que  l'on  ne  m'avait  pas  trompé  ; 
cependant  ce  ne  Ait  point  sans  humeur  que  je  me  résignai 
à  coucher  encore  une  fois  à  la  belle  étoile. 

Nous  passâmes  h  gué  le  Rio  dos  PilOes  et  nous  nous  éta- 
Utmes  sur  la  rive  gauche ,  sous  de  grands  arbres  qui ,  ordi- 
nairement, servent  d'abri  aux  caravanes;  alors  nous  eo- 
trioDS  dans  le  véritable  chemin  de  Villa  Boa  k  la  province 
de  Mat(^;ros80 

Le  Rio  dos  PilÔes  prend  sa  source  dans  les  environs  d'An- 
nicuns,  coule  du  sud  au  nord  (1)  et  se  jette  dans  le  Rio 
Qaro.  Pendant  la  sécheresse,  il  a  fort  peu  de  largeur  ;  mais, 

<l)  Ce  qoe  je  dis  ici  d«  la  sonrte  et  dn  coars  du  Rio  dos  Pilles  est 
emprunté  m  dActear  Pohl  (Reitt,  I,  430);  mais  je  dois  ajouter  que 
Lirii  iDlMilo  di  Silva  «  Souse  iMure  que  cette  rivière  prend  naissance 
rnr  le  plateau  appelé  Ettreilo  el  qu'elle  se  dirige  vers  l'est  {iiem.  ett., 
T).  Je  ne  préleiMU  pas  décider  entre  ces  deux  auteurs;  eepeudant  je 
MraU  porté  h  noire  qu'il  j  a  quelque  erreur  dans  l'iodication  dn  der- 
nier. Luiz  d'Aliucourl ,  Uilliet  et  Lopes  de  Moura  TaDt  naître  le  Rio  dos 
PilOes  dans  la  Serra  I>ODrada(jr«m.t>f(i0.,  lli.  —  Diee.  Bra*.,  H,  303). 
—  J'ai  dit  aiUeuT\'<TOl.  1,  311)  que  cette  rifière  avait  ilt  dïcouferte  par 
le  weand  Bueno  feodant  m  première  eipéditioa ,  mais  que,  selon  l'eiact 
Cuti,  la  Rio  doa  Pil5ea  de  Bmdo  n'était  pat  la  riri^  k  laquelle  ou 
donne  aujourd'hui  m  noni. 


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132  VOYAGE  AUX  SODRCES 

dans  le  temps  des  pluies,  il  ai^meote  d'une  manière  sen- 
sible ,  et  alors  ou  ne  peut  le  passer  que  dans  des  pinces. 
Od  assure  que  cette  rivière  n'est  guère  moins  riche  en  or 
et  en  diamants  que  le  Rio  Garo  Ini-mtoie,  dont  je  par< 
lerai  bientôt  ;  mais ,  pour  profiler  de  ces  tréson,  il  faudrait 
des  travaui  considérables,  incompatibles  avec  la  pauvreté 
des  habitants  du  pays. 

Luiz  Antonio  da  Silva  e  Sousa  dit  (1),  en  parlant  du  lac 
du  Padre  Aranda,  situé  dans  la  province  de  Goyaz,  qu'il 
est  habité  par  des  minhocôtt  (2},  et  il  ajoute  que  ces  mons- 
tres, c'est  ainsi  qu'il  s'exprime,  ont  souvent  entraîné  au 
fond  de  l'eau,  on  ils  se  tiennent  ordinaireroeot,  des  die- 
vaux  et  des  bètes  k  cornes  ;  Pizarro  répète  è  peu  près  la 
même  chose  (3)  et  indique  le  lac  Feia,  qui  appartient  égale- 
ment è  Goyaz,  comme  servant  aussi  d'habitation  aux  mm- 
hocoei  (4).  J'avais  déjà  entendu  parler  plusieurs  fois  de  ces 
animaux  et  je  les  regardais  encore  comme  fabuleux,  lorsque 
ces  disparitions  de  chevaux ,  de  mulets  et  Je  bestiaux  aux 
passages  des  rivières  me  furent  attestées  par  tant  de  gens, 
qu'il  me parutàpeu près  impossiblede les  révoqueren doute. 
Lorsque  j'étais  au  Rio  dos  PilÔes,  on  me  parla  aussi  beau- 
coup des  minhoeôes;  on  me  dit  qu'il  en  existait  dans  cette 
rivière  et  que,  Jl  l'époque  des  grandes  eaux,  ils  avaient 
souvent  emporté  des  chevaux  et  des  mulets  pendant  que 


.  (i)  Kemoria  te^e o  deieobrintenlo,  etc.,  da  rapitatHa  de  Cofoi, 
(Uns  le  Palriota,  1614. 

(2)  Plunel  de  minhocîlo. 

(3)  Mm.  hUt.,  LX. 

It)  U  lac  FeU  est  situé  dons  la  DODTelle  eomarca  \h  Pdna  et  imt 
le  VMsincge  da  TilUge  de  ConroB  (MiLurr  et  Lopis  N  Moou,  Biee. 
«rw.,  1,363).  "  f 


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DD  MO  DE  S.  FRANCISCO.  133 

ceui-ci  passaient  la  rivière  à  la  nage.  Le  mot  mtnftocâo 
est  un  augmentatif  de  celui  de  minhoca,  qui ,  en  portugais, 
signifie  wr  déterre,  et,  en  ^et,  on  prétend  que  le  mons- 
tre dont  il  s'agit  ressemble  absolument  à  ces  vers,  avec  la 
différence  qa'il  a  une  boudie  visible;  ou  ajoute  qu'il  est 
noir,  conrt,  d'une  grosseur  énorme;  qu'il  ne  s'élève  point 
i  la  surface  de  l'eau,  mais  qu'il  fait  disparattre  les  bestiaui 
en  les  saisissant  par-dessous  le  ventre.  Lorsque,  vingt  jours 
environ  après  avoir  quitté  la  rivière  et  le  village  de  PilJies, 
je  séjournai ,  comme  on  le  verra ,  chez  le  commandant  de 
Meiaponte,  M.  Joaquih  Alvbs  de  OuvmKA,  l'un  des 
hommes  les  plus  recommandablesque  j'aie  jamais  rencon- 
trés, je  le  questionnai  sur  les  mifAocoéê;  il  me  confirma  ce 
qui  m'avait  déjà  été  ^it ,  me  cita  plusieurs  exemples  récents 
de  malheurs  causés  par  ces  monstres,  et  m'assura  en  même 
temps,  d'après  le  rapport  de  quelques  pécheurs,  qae  le 
tninAorâo,  malgré  sa  forme  très-arrondie ,  était  un  vérita- 
ble poisson  pourvu  de  nageoires.  J'avais  d'abord  pensé  que 
le  tmnhoeào  pouvait  être  le  Gymnote»  Carapa  qui ,  suivant 
Pohl  (1),  se  trouve  dans  le  Bio  Vermelbo;  mais  il  parait, 
d'après  cet  auteur,  que  ce  dernier  poisson  porte  dans  le  pays 
le  nom  de  ferma  termi,  et  d'ailleurs  tes  effets  produits  par 
les  Gymnotes  ou  anguilles  électriques,  bien  connus,  toujours 
selon  Pohl ,  des  mulâtres  et  des  nègres  du  pays  qui  les  ont 
souvent  éprouvés,  n'ont  rien  de  commun  avec  ce  qu'on 
raconte  do  minhoeào.  M.  le  professeur  Gervais ,  à  qui  j'ai 
communiqué  mes  doutes,  a  porté  mon  attention  sur  la  des- 
cription que  P.  L.  Bi8chofi'adonnéeduZ^'(ioJirm[2};et, 

(I)  KtUe,  I,  360.— Vojexaussi.sar  lel«nnalfrmiou(«rm«tenn«, 
G*M>Nra,  Travelt,  SU. 
(!)  ÀnnaUt  dit  $ei»*rtinalwretlei,  3<  série,  vol.  XIV,  116. 


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1*4  VOYAOB  AUX  SODKCES 

en  réalité ,  le  peu  que  nous  savona  du  mmAoeSe  coïncide 
assez  bien  avec  ce  que  l'on  dit  de  l'animal  rare  et  singulier 
découvert  par  M.  Hatterer.  Ce  naturaliste  a  trouvé  son  i>- 
pidonren  dans  des  eaux  stagnantes  près  du  Rio  da  Madein 
et  de  l'Amazone;  on  indique  le  mùiftocôo  non-seuleoianl 
dans  des  rivières ,  mais  encore  dans  des  lacs.  Il  7  a  mdi 
doute  bien  loin  du  lac  Feia  aux  deux  localités  indiquées  par 
le  voyageur  autrichien;  mais  on  sait  que  les  chaleurs  sont 
excessives  è  Goyaz.  La  Serra  do  Corumbà  e  do  Tocantim, 
qui  traverse  cette  province,  est  un  des  diviseurs  les  plus  re- 
marquables des  eanx  gigaDtesqnca  du  nord  du  Brésil  et  de 
celles  du  midi  :  te  Rio  dos  Pilôes  appartient  aux  premières 
comme  le  Rio  da  Hadeira.  Le  Lepidotirm  paradêxa  de 
H.  Natterer  a  absolument  la  Tonne  d'njjr  ver  somme  le  mw- 
hoéào.  Tous  les  deux  ont  des  nageoires  ;  mais  il  n'est  point 
étonnant  qu'on  ne  les  ait  pas  toujours  reconnues  dans  le 
minhocào ,  si ,  comme  chez  le  L^pidonrm ,  elles  sont  dans 
l'animal  du  Rio  dos  Pildes  réduites  i  de  simples  rudiments. 
«  Les  dents  du  LepidoiireH,  ditBiscboff,  sont  irès-propret 
«  à  saisir  et  i  déchirer  une  proie,  et,  i  en  juger  d'après  leur 
«  structure  et  d'après  les  muscles  de  leurs  mAchoires,  elles 
«  doivent  être  mues  avec  une  force  considérable.  »  Ces  ca- 
ractères s'accordent  d'nne  manière  merveiUeose  avec  ceux 
qu'il  faut  nécessairement  admettre  dans  le  minhoeào,  puis- 
qu'il saisit  fortement  de  très-gros  animaux  et  les  entraloe 
pour  les  dévorer.  Il  est  donc  vraisemblable  que  le  mtnJMKÔo 
est  une  puissante  espèce  de  Lepidimrm,  et  l'on  pourra,  si 
cette  conjecture  se  changeait  en  certitude,  appeler  Le^4o~ 
«ûvnffltnAocào  l'animal  du  lacFeiaetduRiodosPilôes.Les 
zoologistes  qui  parcourront  ces  contrées  lointaines  feront 
bien  de  séjourner  sur  les  bords  du  lac  Feia,  du  lac  du  Padre 


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DU  SH)  DE  a.  FUNOSCO.  135 

Aranda  OU  duRiodosPiI6ea,pour  arriver  i  une  cooDaixsaiice 
parfaite  de  la  vérité,  pour  savoir  d'une  manière  précise  ce 
qu'est  ibmmhoeâo,  ou  si,  malgré  le  témoignage  de  tant  de 
geo9 ,  même  des  hommes  les  plus  éclairés,  son  existence 
doit  être,  ce  qui  est  peu  vraisemblable,  rejetée  parmi  les 
fables  (1). 

Au  bord  du  Rio  dos  Pilôes,  moa  lit  avait  été  fait  près  du 
feu;  cependant  j'éprouvai  encore,  toute  la  nuit,  un  froid 
très-vif  qui  m'eropèc^a  de  dormir. 

Du  Rio  dm  Pitôes  au  village  du  même  nom  (Arrmal  dos 
Piloei)  (2),  il  n'y  a  que  1  lieue.  Le  chemin  qui  y  conduit 
traverse  ub  large  eanpo  parsemé  d'arbres  rabougris  et  en- 
caissé entre  deux  rangées  de  collines. 

(t)  H.  legéDérdRaimaDdo  JosédaCaaballaUMDecniitpoiat,  pour 
le  préaeal ,  c'eet  liasi  qu'il  s'etprime,  ï  l'eiigtence  dea  minhoetei  ;  ce- 
pCDdant  il  tKOat  que  plosieurs  persoiuies  lai  oot  affirmé  qne  ce  n'Ëtoieal 
point  des  animaui  imaginaires  ;  i)  ajoute  mtoie  qa'uD  soldat  lui  a  dit  en 
■TOIT  TU  on  dans  le  Rio  Grande ,  i  la  fVvatière  de  Hatogroaeo ,  «I  lui  en 
n  bit  U  deseriplion.  Selon  ce  militaire,  le  mintute&o  anrail  qm  h>n- 
gueor  prodigieuse,  mais  serait  aosceptible  de  se  coottacleri  «a  peau 
serait  lisse ,  sa  bouche  fort  petite  et  garnie  d'une  eaptce  de  barbe  (  Ili~ 
ntrario,  U  ). 

(2)  Od  poDTrait  écrire  Rio  dfw  Pihiem  et  ^rratal  dot  Pilomt,  wtûe 
Doa  Rio  Pilomt,  Arrayal  Pilûent,  comme  a  hit  le  docteur  Pohl.  —  Je 
De  me  «oaTiens  point  d'avoir  enlenda  appeler  le  village  dool  il  s'agit  ici 
■DtTementqa'^rrafaldoj  Pileei,  et  c'est  anssi  te  seul  nom  qu'admette 
L.  A.  di  SlTa  e  Sonia  dans  son  Mtmoria  tibUiitUta.  h  dois  dire  cepen- 
dant qu'on  ne  trouve  qn'Jrraiol  do  Bio  Clara  dans  le  mémoire  de  Lnii 
d'Aliuconn  (Mtm.'viat-,  119),  et  qo'on  lit  l'un  et  l'autre  nom  dans  l'/li- 
luraHo  de  Mattos.  On  sentira  que  de  cette  application  de  deui  noms 
différents  m  mtme  lien  il  peut  résulter  facilement  des  erreurs  ;  ainsi , 
dans  nn  livre  absolument  indispensable  k  ceui  qui  veulent  connaître  U 
géographie  générale  du  Brésil ,  le  Mcclonario  o^ograpltico  hiilorieo  s 
dMcrtpMw  d»Br«(il ,  ou  a  consioré  deoi  articles  sa  village  sitné  entre 
l«liodos  riBes^  )»RioClaro;  te  premier  (U,  3ISK80hb  le  nom  de 
PiUet  i  le  second  («M),  sons  c«iDi  de  Mo  Clara. 


D,g,l,.,.d.i.  Google 


13fi  TOTIGE  lEJX  SODBCES 

En  arrivant  au  village,  ou  plulAt  au  hameau  de  Pildcs, 
je  présentai  au  commandant  du  poste  qui  y  était  cantonné 
une  lettre  que  le  gouverneur  m'avait  donnée  pour  lui;  il 
me  reçut  fort  bien  et  me  procura  une  petite  maison  asseï 
commode.  Aprèa  avoir  couché  quatre  jours  de  suite  i  la 
belle  étoile,  gdant  de  froid  et  dévoré  par  les  insectes, 
je  trouvais  bien  doux  de  pouvoir  enfin  dormir  sous  un 
toit. 

Le  hameau  de  PilOes  se  compose  d'une  vingtaine  de  mai- 
sons aussi  misérables ,  pour  la  plupart ,  que  celles  des 
Coyap6s  (1).  Toutes  ont  été  bities  sur  les  deux  cAtés  du 
chemin  qui  mène  i  Matogrosso,  et,  comme  elles  sont  fort 
écartées  les  unes  des  autres,  elles  occupent,  dans  la  direction 
de  l'est  k  l'ouest,  une  étendue  assez  considérable.  Immé- 
diatement au-dessous  du  village,  coule  le  Rio  Claro,  rivière 
d'une  largeur  médiocre  qui  ne  pouvait  recevoir  un  nom 
plus  convenable  que  le  sien  (la  rivière  claire],  car  ses  eaux, 
d'une  limpidité  sans  égale,  laissent  distinguer  (juillet)  tous 
les  cailloux  et  les  grains  de  sable  dont  est  formé  son  lit.  On 
avait  commencé  è  construire  k  Pildes  une  église  assez 
grande;  mais  elle  n'a  pas  été  continuée,  et  l'on  n'a ,  pour 
célébrer  la  messe  dans  le  hameau ,  qu'une  très-petite  cha- 
pelle sous  l'invocation  de  Notre-Seigneur  bon  Jésus  [Senhor 
Bomjetut),  qui  n'est  pas  non  plus  entièrement  achevée  et 
dépend  de  ta  paroisse  de  Villa  Boa. 

Il  parait  que,  presque  à  l'époque  de  la  découverte  de 
Goyaz ,  on  reconnut  déjà  qu'il  existait  des  diamants  dans 
le  Rio  dos  Pil6es  et  le  Rio  Claro.  Lorsque,  en  1749  ,  les 

(1)  B-J-di  Canhi  MaUoacfl  indique  43  {llin.,ll,  99);  mais  ioi- 
mtme  D'arait  pu  iU  aar  les  lieni ,  et  il  ne  dil  point  k  quelle  »nat«  m 
rapporte  ce  chiffre  :  ce  serait  probahlement  t  I82S. 


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DU  RIO  DE  S.  FRANaSCO.  131 

Trèrés  Joaquim  et  Felisberto  Caldeira  Brant  prirent  la  ferme 
des  diamants  de  Tijuco  dans  la  province  de  Minas  Geraes  (1), 
on  leur  imposa  la  condition  de  fournir  un  service  [lemiço 
diamantino)  de  deni  cents  nègres  (2)  pour  exploiter  les 
deux  rivières  diamantines  de  la  province  de  Goyaz  ;  401ieues 
de  terrain  furent  réservées  aux  fermiers  dans  le  district  de 
Pîldes,  et  un  village  se  foima  sous  le  nom  de  Bom  Pim,  sur 
les  bords  du  Bîo  Claro.  Malheureusement  les  résultats  ne 
répondirent  point  aux  espérances  que  les  fermiers  avaient 
conçues;  ils  se  retirèrent  bientôt  (3),  et  le  village  de  Bom 
Flmfiit  détruit  par  les  Coyapés  (4).  Cependant  une  étendue 
de  40  lieues  continua  i  être  interdite  aux  mineurs;  on  la 


(1)  C'est  k  celle  Taniille  qu'appartenait  le  Taineut  marqais  de  Bartu- 
tea*,  dont  j'ai  parlé  dans  le  Pr^cK  kUInrique  det  révohaiont  du  Bré- 
«tl  (TOjei  inOD  Voyage  dam  te  diitricl  det  D\amatU$,  etc.,  U,  378). 

(!)  Oo  appelle  services  {ttrviçot)  les  endroits  oà  l'on  eitriit  des  dia- 
iiMDls  et  où  l'on  a  plicé  nne  troupe  de  nègres  paar  faire  ce  travail 
(tfopa)  (vojei  mon  Voyage  dant  U  ditlrtet  dei  IHamanlt ,  etc.,  I,  9). 

(3)  D'après  tout  ce  qu'eu  sait,  il  est  bien  évident  qna  l'administralioD 
dea  frères  Caldeira  Brant  oe  dura  pas  cloquante  ans,  c'est-i-dire  jtis- 
qa'en  1799,  comme  paraîtraient  le  croire  les  anteurs  de  l'ouvrage  imi' 
neaimeat  utUe,  intitula  oiccionario  geograpkico  do  Bratil  (article  Pi- 
l6e$).  Il  se  passa  no  temps  coDsidérable  entre  la  retraite  des  Termiers 
mineurs  et  l'époque  où  la  permission  Tut  donnée  à  tous  (ISOI)  de  cher- 
cher de  l'or  dans  le  Rio  Claro,  et  c'est  dans  cet  intervalle  qu'eut  lien  la 
destruction  de  Bom  Fim  par  les  Cojapus ,  comme  auni  l'espèce  de  dé- 
couverte que  Francisco  Soares  de  DulbSes  fit ,  en  1T73 ,  des  terres  dii- 
maDlines  du  Rio  Claro,  déjà  connues  depuis  longtemps  (voyez  pins  haut, 
p.  130  ).  Ju  reste ,  les  deux  auteurs  du  Ditciortario  confirment  eux- 
mêmes  tout  ce  que  je  dis  ici  dans  leur  article  intitulé  Rio  Clan. 

(i)  Je  n'ai  pn  découvrir  ai  ee  village  était  situé  sur  l'emplacemeol  «ù 
se  iTOove  aujourd'hui  celui  de  Pilôes.  Quoi  qu'il  en  soit ,  i)  fïut  se  don- 
oer  de  garde  de  confondre  le  village  de  Bom  Fim ,  dont  il  est  ici  ques- 
tioD ,  avec  celui  dn  ni^me  nom ,  dont  je  parlerai  bienUtt ,  et  par  lequel 
oo  passe  pour  se  rendre  de  Gojrai  i  S.  Paul. 


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138  VOYAGE  AUX  SOURCES 

garda  avec  autant  de  soin  qae  peuvent  l'être  des  déserts  (1), 
et  alors  il  n'y  avait  à  PilOes  que  )e  détachement  militaire 
chai^  d' empêcher  que  les  défenses  du  gouvernanent  ne 
Tuasenl  violées.  Les  habitants  de  Goyai  se  plaignirent  long- 
temps de  ce  que,  sans  utilité  pour  personne,  on  les  privait, 
eux  si  pauvres,  des  ressources  que  leur  avait  accordées  La 
nature;  on  Bt  enfin  droit  à  leurs  réclametions,  et  en  1801, 
sous  l'administration  de  JoÂo  Manoel  dk  Mbitezbs,  le  gou- 
vernement permit  à  tous  de  chercher  de  l'or  et  des  dïa- 
OMDts  dans  le  Rio  Claro  ;  nuis,  en  même  temps,  il  ordonna 
que  ces  derniers  fussent  portés  i  la  caisse  du  trésor  royal 
ifazeada  real],  où  l'on  devait  en  payer  la  valeur  d'après  un 
certain  tarif.  Comme  la  réputation  des  trésors  o'u  Rio  Claro 
avait  été  fort  exagérée ,  une  foule  de  gens  accoururent  sur 
les  bords  de  cette  rivière ,  persuadés  qu'ils  allaient  y  ftire 
une  fortune  rapide;  mais ,  voyant  leurs  espérances  trom- 
pées, ils  se  ^étirèrent  au  village  d'Annicuns,  où,  dans  l'in- 
tervalle.  on  avait  découvert  des  mines  fort  riches,  et  ac- 
tneNement  (1819)  on  compte  à  peine  au  hameau  de  laides 
une  itopulation  sédentaire  de  200  individus  [2], 

(1)  Ldu  Ant«iuo  u  SiLTi  ■  SoDU ,  Mtmoria  Kkr»  o  éeteabri' 
menlo.  etc.  —  Piiauio,  Mnmtiriat  kMorieat,  etc.  —  Pobl,  Btit»,  ele. 
—  Esisw.,  Pbtto  Bratilieiuit,  etc. 

(2)  •  L'Arruel  do  Rio  Ckro ,  aa^goi  oa  don&e  «hw  k  nom  d'Ans*! 

•  de  PUSm,  dit  Hiito* (ilfM.,  II,  m),  fct  foodi  en  l'uDta  ITM^ 

•  MUS  le  DOBi  d'Arrsiel  do  Seuhor  Jesns  ds  Bom  Fim  ;  H  fnt  détruit  pir 
I  oa  ordre  du  roi  de  1749 ,  et  réMiOé  pir  un  lutre  ordra  de  1T89.  >  Ce 
{MBsige  wmble  «'aceordw  fort  imI  evec  les  récits  des  griTee  hisioriea* 
que  j'ai  ciléa  loat  t  l'bean  ;  oepeudMl  on  pest,  jniqv'i  on  cerlAÎn  point, 
les  concilier.  Conune  «o  vivait  qn'il  «liste  des  diunant»  dans  le  lu 
Clua,  quelques  ■venloriers  durent ,  dès  les  premiers  tenpi,  t'Uàb^ 
•ur  ses  bords  :  ce  eereit  lA  celle  première  raiidalioD  dont  pvle  HaUO*  et 
dout  il  flie  IVpoqae  k  1T4G.  Ces  hommes  farMt  ntanMiremeal  sipnl- 


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DU  MO  DE  S.  FKAMOSCO.  ISS 

I)  est  très-vrai,  cepeadant,  que  te  Kio  Claro,  les  rivières 
qai  s'y  jettent  ^  les  terraÎDS  les  plus  proches  sont  abon- 
diatsenor;  mais,  pour  eitraire  celui  qui  se  trouve  enfoui 
dans  la  terre,  il  faudrait  faire  venir  de  l'eau  de  fort  loin  et 
entr^rendre  des  travaux  qui  surpassent  les  forcesd' hommes 
pauvres^  ignorants  et  isolés  qui  n'ont  à  leur  dispositioo  que 
leurs  bw-  C'est  presque  uniquenoent  dans  le  Rio  Qaro 
qu'ils  peuvent  se  livrer  à  des  redierches  qui  les  dédomma- 
gent de  leurs  peines;  et,  pour  cela,  ils  sont  obligés  d'at- 
tendre le  temps  de  la  sécheresse.  Avant  cette  époque,  ils 
font,  en  travaillant  beaucoup,  des  journées  de  160  à 
300  reis;  mais,  dans  les  mois  de  juillet,  d'août  et  septem- 
bre, les  journées  vont  jusqu'à  1,300  et  1,500  reis  (1  tr., 
i  tr.  87—7  fr.  50,  9  fr.  37)  (1).        ' 

Ainsi  qu'on  l'a  déjà  vu,  le  précieux  métal  n'est  pas  la 
seule  richesse  du  Kio  Claro  :  cette  rivière  (ournit,  chaque 
année,  des  diamants  d'une  très-belle  eau  et  d'un  poids 
considérable.  Comme  les  premiers,  qui ,  conformément  à  la 


ses  qniDd  on  aObrma  les  terres  du  district  ani  Caldeiri  Braot  :  ce  se- 
rait !■  doBtnictiOD  da  1749.  Enfin ,  lorsqu'il  fsi  permis  k  tont  le  monde 
â'eiploiler  k  district  prÎTilégié ,  90  ajonta  saos  donte  qnelqacs  maisons 
à  celles  qui  élsient  occupées  par  les  soldats  du  poste  :  ce  serait  la  n!i^dî- 
BcatioD  du  Tillage.  Au  reste ,  je  le  répète ,  Mattos  o'a  pas  touIu  traiter 
rkisbûre  de  la  prorince  de  Go;r*i<  '"^^  senleDKDt  aa  topographie,  et, 
MO»  ce  rapport,  i)  mérite  la  plus  grande  estime. 

(1)  Hatlos  dit  (riin.,  il,  99) ,  d'après  les  reoseignements  qui  lui  ont 
fté  commaDiqués,  que  •  le  Tillage  de  PilSes  reste  presque  tonjour.1  saus 
>  kabitauta ,  mais  qu'il  est  trèft-fréquenlé  à  l'époque  où  il  y  ■  le  moins 
■  d'etu  dans  le  lio  Claro,  le  Cojapd  et  la  PilSes.  ■  PoU,  qui  était, 
eu  février  18)8,  au  village  de  PilSes,  ne  le  troura  nullement  désert,  et 
Lniï  d'Alincoart,  qui  j  passa  dans  la  même  anoée,  s'eiprime  comme  il 
soit  :  •  Dans  les  mois  autres  que  ceux  de  ta  sf cheresse ,  les  heUtanls 
se  lirreot  k  l'oisiTeté  [Mem.  tobre  a  viag..  etc.,  lïO).  • 


^toi,.,.d.:,  Google 


UO  TOTAOE  KVX  SOURCES 

loi ,  nirenl  portés'  au  coffre  de  la  fasenda  real ,  n'ont  jamais 
été  payés  faute  (l'argent,  il  y  a  longtempsque  l'on  n'en  porte 
plus-  Les  travailleurs  qui  en  trouvent  les  vendent  i  des  mar- 
chands de  Villa  Boa,  et  plus  souvent  encore  aux  c&rsvanes 
qui  se  rendent  de  Matogrosso  &  la  ville  de  Bahia  et  ont 
nécessairement  l'habitade  de  ce  commerce,  parce  que  la 
province  de  Matt^roaso  fonmit  aussi  beaucoup  de  diamants. 
L'administration  ferme  les  yeux  sur  la  contrebande  (1819], 
et  le  gouverneur  lui-même  semblait  vouloir  ignorer  qu'il 
y  eCkt  des  trésors  dans  le  Rio  Claro.  Tout  ce  qu'on  paraît 
demander  aux  contrebandiers,  c'est  un  peu  de  prudence. 
L'extraction  de  l'or  est  entièrement  permise;  mais,  en 
cherchant  de  l'or,  les  travailleurs  trouvent  des  diamants  : 
il  serait  par  trop  absurde,  comme  le  fait  observer  le  docteur 
Pobl,  d'exiger  qu'ils  les  rejetassent  dans  la  rivière  [i). 

Les  habitants  du  hameau  dos  Pilôes,  tous  mulAtres  et 
nègres  libres  (2),  ne  cultivent  point  la  terre;  comme  les 
premiers  aventuriers  paulist^  qui  arrivèrent  à  Goyax,  ils 
ne  songent  qu'aux  diamants  et  à  l'or.  Les  vivres  que  l'on 
consomme  dans  ce  hameau  viennent  de  Villa  Boa  et  sont 
communément  apportés  par  des  marchands  de  cette  ville, 
qui  les  revendent  avec  un  bénéfice  de  plus  de  100  pour  1. 
Dans  la  saison  des  pluies ,  oîi  les  chemins  sont  impratica- 
bles, on  ne  trouve  ici  rien  à  acheter  (5].  Si,  comme  les  ha- 
bitants de  Meiaponte  en  donnèrent  l'exemple  à  l'époque  de 
la  découverte ,  quelques-uns  de  ceux  de  Pilôes  se  livraient  k 
l'agriculture,  non-seulement  ils  rendraient  leur  existence 
nwins  précaire,  mais  encore  ils  assureraient  leur  fortune  ea 

II)  Pou,,  IMm,  i,<21. 

m  L.  c. 

(3>  POHL,  RtiU,  438. 


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DU  MO  DE  S.  FRANasCO.  141 

vendant  des  denrées  aus  caravanes  qui,  en  deçà  et  au  delà 
du  village,  ne  troavent  que  des  déserts.  Mais  la  culture  des 
terres  ne  convient  point  à  ces  bommes ,  non  moins  impré- 
voyants  que  les  Indiens  enz-mèmes  ;  ils  vivent  au  jour  le 
jour,  jouissent  de  la  vie  et  se  reposent  quand  leur  rivière 
loir  a  donné  un  peu  d'or;  ils  lai  en  redemandent  lorsqu'ils 
n'ont  plus  rien ,  n'amassent  jamais  et ,  au  milieu  de  leurs 
trésors,  restent  toujours  misérables.  Souvent  pour  un  mou- 
choir, une  bouteille  de  tafla ,  la  moindre  bagatelle  qui  loi 
fera  envie,  un  chercheur  de  diamants  abandonne  une  pierre 
d'une  valeur  considérable  :  en  plongeant  ma  sébile  [batea\ 
dans  la  rivière,  disent  ces  hommes  insouciants,  je  puis  re- 
trouver demain  ce  que  j'ai  perdu  aujourd'hui  (1). 

Dans  tous  les  pays  qui  fournissent  de  l'or,  les  femmes 
les  moins  riches  portent  des  colliers  et  des  pendants  d'o- 
reilles fort  pesants  faits  avec  ce  métal.  Je  fus  frappé  surtout 
de  la  quantité  d'or  qu'avaient  sur  elles,  au  hameau  de 
Pildes,  des  malheureuses  dont  l'accoutrement  annonçait 
une  extrême  indigence.  Les  travailleurs,  qui  souvent,  pour 
une  bouteille  de  tafla ,  donnent  on  diamant  précieux ,  ne 
peuvent  refuser  de  l'or  k  leurs  femmes  ou  &  leurs  maîtres- 
ses. Cest  le  seul  capital  que  l'on  tienne  en  réserve.  Lors- 
qu'on a  besoin  d' aident,  on  ne  vend  point  ses  bijoux,  on 
les  brise,  et  il  est  assez  ordinaire  de  trouver,  an  milieu  de 
l'or  en  poudre  qui  circule  dans  le  commerce,  de  petits  mor- 
ceaux de  ce  métal  qui  ont  été  travaillés. 

Les  habitants  de  PiiÔes  ne  profîteDl  point  seuls  des  ri- 

(1)  Do  décret  du  I"  juillet  IBSSiJUbliDDe  école  primaire  an  village 
de  PiBes  on ,  »  Von  aime  mieux,  du  Rio  Claro  (  Htu..  et  Lop.  MooB., 
Diee.  BrvM;  n,  401).  Si  celte  ëeok  peal  éUe  eonUée  t  un  maître  ii]é  et 
rcligicDi,  elle  produira  cerlaioeinfDl  quelque  bien. 


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tiS  VOYAGE  AUX  SODIGES 

chesBis  dn  Rio  Qaro.  A.u  temps  de  la  sécheresse,  pendant 
les  mois  de  juillet ,  aoât  et  septembre,  des  hommes  de  Meia- 
ponte,  de  Villa  Boa,  ^.,  viennent  s'établir  è  qudqoes 
lieues  du  village  sur  le  bord  de  la  rivière;  ils  apportent  avec 
eui  les  vivres  qui  lear  sont  nécessaires  et  coostrulsent  des 
baraques  pour  y  dormir  i  c'est  bien  moina  l'or  qullesaltire 
que  l'espérance  de  trouver  des  (Marnants.  Parmi  les  hcumnes 
qui  exf^itent  les  sables  da  Rio  Claro ,  0  «  est  même  qui , 
pins  ambitieux  que  les  autres  et  ne  voulant  pas  perdre  un 
temps  court  et  précieux,  dédaignent  entièrement  l'or.  Pen- 
dant que  j'étais  i  PilÔes,  je  vis  arriver  une  troupe  de  ces 
travailleurs  omnades;  ils  ne  restèrent  poiot  au  village,  mus 
s'empressèrent  d'aller  s'établir  à  8  lieues  plus  loin ,  ^^rèt  le 
confluent  de  la  rivière.  D'autres  avaient  formé  le  projet  de 
suivre  celle-ci  jusqu'à  sa  source,  que  l'on  ne  coanafasait 
point  encore  (1819).  Ces  honmies  emportaient  arec  ait 
quelques  provisions;  mais,  comme  elles  ne  pouvaimt  leiu' 
suffire  pour  tout  le  temps  qu'ils  comptairat  passer  dans  le 
pays,  ils  se  proposaient  de  recourir  à  leur  chaase.  Le  ha- 
meau de  PilÔes  m'offrit  ainsi  l'intage  de  ce  que  dut  toe 
l'intérieur  du  Brésil,  lorsque  l'on  commença  iy  découvrir 
des  mines  d'or  (1j. 

Ilyatrois  manières  différeotesd' extraire  l'or  du  RioQaro. 

CeUe  dite  de  eanea  consiste  A  faire  tomber  uo  filet  d'eau, 
tiré  de  la  rivière,  dans  le  conduit  ouvert  appelé  eanea  «h 
l'on  a  rassemblé  le  eaêealho  (3),  et  à  ronner  cdui-ei  en  le 

(I)  TojM  [DOB  Inlroduclion  à  Phitloire  dê$  plantef  bt  ptai  fV- 
margwAUt  du  Brétil  tt  du  FaraçMay. 

{2}  Sous  ce  nom ,  les  mioeura  dé«igi»Dt,  camine  je  l'ai  dit  •ilku», 
QD  mélaage  de  caillODi  et  de  wble  qui  nâferme  dn  ptrcellçi  d'w  m 
des  diemanL-. 


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DO  MO  DE  S.  PRAltClSCO.  )fS 

rsmeiiant  sans  cesse  fers  l'endroit  où  l'eau  tombe  :  l'or  s« 
rassemble  au-dessous  de  la  chute  d'eau;  les  parties  ter- 
reuses délayées  s'écoulent,  et  les  dittmants  restent  parmE 
les  cailloux,  au  milieu  desquels  ob  les  distingue  facilement. 
Ce  mode  d'eitraction  est  A  peu  près  celui  qui  est  généra- 
lement en  usage  à  Minas  dons  les  grands  lavages  [lavrat] 
d'or  et  dans  ceux  de  diamants  (1), 

D'autres  personnes  se  contentent  de  faire  ce  qu'on  appdic 
un  euyaeâ;  c'est  une  espèce  de  trapèze  fort  étroit,  d'en- 
viron 9  palmes  de  longneùr  snr  3  pieds  de  haut,  que  Ton 
forme  sur  le  bord  de  la  rivière  avec  des  morceaux  de  bois, 
de  fofon  que  le  c6té  le  plus  étroit  du  trapète ,  qu'on  laisse 
OBvert,  soit  le  plus  voisin  de  l'eau  et  lu!  soit  parallèle.  On 
remplit  le  cuyaeà  de  easealho,  on  ;  jette  ensuite  de  l'eau 
qu'on  prend  dans  la  rivière  ;  on  remue  le  easealho  avec  les 
mains,  en  \e  repoussant  vers  la  base  du  trapèce  ;  l'eau,  char- 
gée de  parties  terreuses,  s'écoule  par  le  côté  ouvert  du  tre- 
pète ,  et  l'on  continue  la  même  opération,  jusqu'à  ce  que  le 
«oMoIAo  ait  été  bien  lavé. 

La  troisième  manière,  dite  de  bûtêa  (2),  se  rédflàt  à  pren- 
dre le  sable  de  la  rivière  et  à  le  laver  sur  place  dans  la  sé- 
bile (btUea)' qui  a  servi  à  le  puiser.  Ce  mode  est  le  même 
qn'erai^oieat  généralement  ces  hommes  appelés  faÙK»- 
demt  q«i  voftt  isûMnient  laver  te  sable  dm  niift^efliAx  {S). 

GeA  dans  les  «ndroiti  les  pitts  profomls  et  sons  les  r»- 

(I)  T«j«t  MOU  Foyaffe  éaiu  tet  jn-otHnetÊ  (M  iHa  d»  MiMïra  èi  dt 
tiwu  GmMt ,  I ,  M7,  el  mea  Totagi  dOM  Ht  dmrict  du  Oiamantê 
et  tw  te  HO&rttl  dv  BrHil ,  I ,  «8. 

(S)  Ce  n'est  point  potM,  comne  oot  écrit  les  snuta  vorigeura  PeU 
et  Iterttns.  Il  se  IMt  p«  ihd  plM ,  me  le  premier  d'entre  eai  a  av«c 
■aire,  écrira  ecumlhào. 

(.1)  Voyage  daru  U*  fromnrei  dt  Mo  dt  Janeiro,  etc.,  I,  t39. 


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144  VOYAGE  AUX  SOURCES 

chers  qui ,  peDdant  la  sécheresse,  se  montrent  au-dessus  de 
l'eau,  que  l'on  trouve  le  plus  de  diamants.  Les  hommes  qui 
se  contentent  du  mode  d'extraction  Je  plus  facile,  celui  de 
batea,  vont,  généralement,  puiser  le  catcalho  dans  ces 
trous.  Le  chercheur  de  diamants  un  peu  eiipérimenté  de- 
vine la  présence  de  cette  précieuse  pierre  à  celle  de  certains 
cailloux  qui  l'accompagnent  ordinairement  et  que  l'on  ap- 
pelle etcUnes  dei  diamants  (têcravoâ  dot  dianumlei], 
goutus  d'eau  (piagot  dagoa)  (1). 

Si  quelque  police  peut  être  maintenue  parmi  les  cher- 
cheurs de  diamants,  les  uns  sédentaires,  les  autres  étran- 
gers, appartenant  &  des  populatioas  différentes,  ce  n'est 
qu'à  l'aide  du  détachement  cantonné,  comme  je  l'ai  dit, 
au  hameau  de  PilÔes.  Ce  détachement  se  compose  de  quatre 
pedettru  et  d'un  commandant  qui  est  adjudant  de  la  com- 
pagnie de  dragons  (4819).  Ces  militaires  sont  chargés  de 
visiter  les  passe-ports,  d'aller  à  la  poursuite  des  déserteurs 
et  des  criminels  qui  cherchent  i  s'enfuir  dans  la  province 
de  Matogrosso,  eoBn  d'empêcher  que  des  marchands,  ai 
se  rendant  de  Goyaz  à  cette  dernière  province,  n'empor- 
tent plus  d'or  en  poudre  qu'il  n'est  nécessaire  pour  la  con- 
sommation de  leur  voyage.  Voici  dans  quel  but  avait  été 
prise  cette  dernière  mesure.  L'or  en  poudre  a  cours  à  Mato- 
grosso [i  81 9)  aussi  bien  qu'à  Goyaz  et  semblerait  pouvoir  être 
transporté  sans  inconvénient  d'une  province  dans  l'antre; 

(1)  Cm  dodu  h  m'onl  poiDt  été  donnés  sur  les  lin»  ;  je  les  emprante 
an  doctenr  Fohl,  ipâ  rapporte  les  «tcracoi  àoi  diomanle*  an  MoMi- 
(etwteifi  (suiTSDt  y.  OeUfosBe  ,  la  wiHi  compacte  de  la  limoaiie  de 
BendaDi  oa  da  ferotïdé  hidraUd'Haii}),  élit  dit  que  lespiMfMff  Q^oa 
sont  des  morceau  <le  quarii.  Le  même  suleur  ajoute  que  ces  pierres 
sont  regardées,  dans  lepajs,  comme  la  matrice  des  diamsiits  et  dt  I'm 
(()mM,l,4!l]. 


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J 


DU  RrO  DE  S.  nuNClSGO.  HS 

cepeDdant,  comme  chaque  capitainerie  prélève  ses  dé- 
penses sur  ses  revenus,  le  gouverneur  deGoyaz,  Fernando 
Delgado,  avait  restreint  l'exportation  de  l'or  par  cette  fron- 
tière (1),  aSn  que  le  quint  fût  plus  considérable  dans  son 
gouvernement.  Mais  les  localités  rendaient  sa  défense  en- 
tièrement illusoire ,  car  le  Rio  Claro ,  qui  est  guéable  sur 
tons  les  points,  dans  le  temps  de  sa  géclieresse,  n'est  gardé 
que  sur  un  seul ,  et ,  lorsqn'un  marchand  voulait  se  rendre 
è  Matogrosso  avec  une  quantité  d'or  plus  considérable  qu'il 
ne  lui  était  permis,  il  passait  par  la  route  tracée  et  envoyait 
□n  de  ses  gens  un  peu  plus  haut  ou  un  peu  plus  bas,  avec 
la  somme  qui  devait  passer  en  contrebande.  Les  criminels 
qui  cherchent  à  se  soustraire  à  la  justice,  en  fuyant  d'une 
provincedansune  autre, rencontrent  aussi  peu dedifGcultés. 
A  la  vérité,  le  Bio  Grande,  qui  se  trouve  à  environ  â5  Ie> 
goas  de  Pilôes  et  sert  de  limites  aux  provinces  de  Goyai  et 
de  Matogrosso,  n'oit  jamais  guéable;  mais  les  fugitifs  con- 
struisent des  radeaux  avec  des  morceaux  de  bois  secs  ou 
des  tiges  de  bority,  et  ils  passent  la  rivière  au-dessus  ou  au- 
dessous  du  grand  chemin ,  à  l'entrée  duquel  est  cantonné, 
du  c6té  de  Matogrosso,  un  détachement  de  soldats  qui  dé- 
pend de  cette  dernière  province. 

Pendant  que  j'étais  au  hameau  de  Ptlôes,  on  vint  m'offrir 
quelques  diamants  ;  mais  je  ne  crus  point  que ,  prot^  par 
le  gouvernement  brésilien ,  je  dusse  me  permettre  ce  qu'il 
avait  déclaré  illicite.  Cette  délicatesse  avait  peut  être  quel- 
que mérite,  car  je  suis  sûr  que,  dans  le  pays,  personne 
n'aurait  voulu  y  croire.  Au  reste,  je  ne  puis  pas  non  plus 


(1)  Comme  ou  Ft  to,  roren  poudre  ne  peut,  «n  aacnDe  maniiTe, 
ptuer  dua  les  prOTioces,  où  il  ne  circule  point  comme  momuie. 


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lis  VOYAGE  AUX  SOUICES 

me  vanta:  d'avoir  été  entièrement  exempt  du  péché  de 
contrebande.  Un  pauvre  enfont  de  six  à  sept  ans,  fwt  ipal 
vêtu ,  entra  un  joar  dans  ma  chambre  et  me  dit  bien  tùm- 
dement  :  Mfmsieur,  voulez-vous  m'acheter  mon  petit  dia- 
mant? —  Et  combien  vaut-il ,  ton  petit  diamant?  —  Quatre 
«ùttms  (93  cent.),  me  répondit  l'enfant.  Je  lui  donnai  les 
i  vintmt  et  il  me  remit  une  toute  petite  étincelle.  Au  reste, 
cet  essai  de  contrebande  me  réussit  assez  mal  ;  je  mis  le 
diamant  dans  mon  portefeuille,  et  quelques  instants  après 
il  était  perdu. 

On  voulut  v^dre  k  Joaé  Marianoo,  pour  40,000  reis 
(250  fr.),  UD  diamant  du  poids  d'une  demi-pataque  (9  dé- 
cigrammes),  qu'il  me  dit  être  d'nne  très-belle  eau. 

Comme  on  l'a  déjà  tu  ,  Je  Rio  Claro  dont  j'ai  tant  parlé 
dans  ce  chapitre  n'est  point  encore  parfaitement  connu 
(1819)  ;  on  ignore  &  peu  près  quelles  sont  ses  sources  (1). 
Cette  rivière  coule  à  peu  près  du  sud-est  au  nord-ouest  ; 
elle  reçoit  dans  son  lit  les  eaux  de  plusieurs  afDuents ,  en- 
tre autres  du  Bio  Fartura  (2)  et  du  Rio  dos  Pilôes,  et,  après 
un  cours  qui  n'est  pas  d'une  étendue  très-couaidérable, 
elle  se  réunit  au  Rio  Grande.  Dans  le  temps  de  la  sécheresse, 
le  Rio  Claro  est  guéable  au-dessous  du  hameau  de  Pilâet 
et  probablement  dans  une  très-grande  partie  de  m  lon- 

(1)  Pobl  dit  qu'il  commeace  dans  l«  Serra  dot  Coyapùi  ;  mais  celle 
Serra  dos  Cayap'^'s  est  également  h  peu  près  incoiiaue.  Plus  rjceramcnt, 
MaUoe  a  ^crit  (flfN,,  II,  13S)  qn'il  naissait  des  montagnes  appelées  a«- 
jonrd'hui  Serra  dai  OftriJMf ,  doat  il  parait  qn'oa  saii  rawi  Ibrt  pea  de 
chose.  HH.  Hllliet  et  Lopes  de  Houra  placent  aa  toarce  dons  la  5«rrii 
de  Santa  Martha  (Diee.  Brax.,  1 ,  276;,  snr  laquelle  il  règne  égaleoml 
bien  des  iocertitndes ,  mais  qai,  pour  Hitioa,  serait  la  mtmeqaela 
Serra  da«  DiTia5œ. 

(3>  Uzu.,Coror-,  1,  31S- 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  14T 

guenr;  mais,  k  l'époque  des  pluies  et  même  quelque  temps 
après,  i)  augmente,  devient  rapide,  très-profond,  et  on  ne 
le  traverge  plus  qu'avec  des  pirogues.  Alors  le  passage  n'est 
point  libre,  il  est  affermé  pour  le  compte  du  fisc  (  fazenda 
real].  Le  Rio  Grande,  dans  leqoel  se  jette  le  Rio  Ctaro,  est 
un  fleuve  gigantesque  qui  divise  la  province  de  Goyaz  de 
celle  de  Matogrosso,  et  a  presque  autant  de  longueur  que 
la  première  de  ces  provinces.  Il  paraîtrait  qu'à  son  origine 
OD  l'appelle  ^to  Bonilo  (la  rivière  jolie)  ;  après  avoir  reçu 
les  eaui  da  ilw  Coyoptf  et  du  Ko  dox  Barreiros  (la  rivière 
des  glaïsières)  (4),  il  prend  le  nom  de  Rio  Grande,  le  quitte 
ensuite  pour  celui  i'Araguaya  (2),  et,  grossi  par  les  eaux 
d'un  grand  nombre  de  rnisseanx  et  de  rivières,  il  se  réanit 
au  Tocaotins. 


(I)  Ces  détails  sont  empraol^s  i  Cuti  (  Corog.,  I ,  SSS  ).  MM.  Uilliel 
de  S.  llpbome  el  Cieiano  Lop«s  de  Hoara  se  montrent  d'accord  arec  ce 
gtegraphe  k  l'article  Bonilo  de  lear  dictionnaire ,  avec  cette  difKrence 
qu'ils  pliceut  le  Rio  dos  Barreiroe  plus  pris  d«  la  sowrce  du  Boaito  qne 
laHioCojapn  {Diee.  Brai.,  1,  ISG):  moi»,  lorsqu'ils  parlent  de  l'Ara- 
gnaja  (  1.  c,  70),  ils  dirent  ■  que  ce  dernier  doit  soa  origine  an  AiMro 
Caiapéi ,  qui  ult  dana  la  Sena  aussi  appelée  Catapo* ,  et  qn'il  prend 
le  non  d'^roftuiya  lorsque,  groeei  par  les  caut  du  Bonito  et  du  Barrei- 
ros, il  derient  uarigalile.  °  De  tout  ceci ,  il  résulte  claireoMBl  que  le  Rio 
Grande  de  Gojaiou,  si  l'aoTeat,  l'iraguaia,  est  formé,  ksoo  orifioe, 
par  les  RÎm  Bonilo,  Cojapd,  Barreiros  :  mais  qu'on  ne  sait  pas  bieo  daita 
quel  ordre  ces  rivières  sont  placées.  Cette  incertitude,  au  reete,  n'a  rieo 
qui  doive  surprendre;  car  les  pajs  oit  elles  coulent  ne  sont  encore  ha- 
bités que  par  dee  Indiens  sauvage». 

(1)  On  peut,  sans  ioconvéoient,  adopter  le  nom  à'Araguav  au  lien 
A'Aratvajia  ;  maie  il  fkut  bien  se  donner  de  garde,  comme  l'a  déji  dit 
k  savant  tilbi  (Géotraphit  vnivn-Klle) ,  d'écrire  Vraguajf  ou  Vm- 
gvay,  ainsi  qn'on  l'a  hit  cent  fois  :  YVmipiay  est  ii  rivière  qui ,  rénm'e 
an  Porofitaïf,  forme  le  RU)  <te  ta  Plata.  Il  faut  tlcber  aussi  de  ne  pas 
confondre  le  Bio  Grande,  conuBencement  de  l'Aragnaja,  avec  cette  foule 


..d%i.Googlc 


148  VOYAOB  UIX.  SOURCES 

J'avais  souvent  eu  à  me  plaiodre  des  iosectes  niaUai- 
ssDts;  mais,  nulle  part,  ils  ne  m'avaient  fait  souffrir  autant 
qu'au  Rio  Claro.  J'étais  allé  me  baigner  dans  celte  rivière  : 
tant  que  le  soleil  resta  assez  haut ,  je  fus  peu  tourmenté; 
mais,  auBsitàt  que  le  jour  commença  A  baisser,  des  myriades 
de  borraehudos  me  mirent  le  corps  en  feu.  Je  m'étais 
éloigné  de  mes  habits  et  ne  me  possédais  plus  lorsque  j'ar- 
rivai au  lieu  où  je  les  avais  laissés. 

Je  désirais  faire  une  collection  de  poissons  dans  la  pro- 
vince de  Goyaz,  et  l'on  m'avait  dit  à  Villa  Boa  qu'aucune 
rivière  n'en  contient  autant  que  le  Rio  Claro.  Au  moment 
de  mon  arrivée  au  hameau  de  Fildes,  je  témoignai  au  com- 
mandant le  désir  d'en  réunir  le  plus  qu'il  me  serait  possible. 
Il  mit  aussitôt  des  pécheurs  en  campagne  ;  mais,  comme 
aucun  ne  reparut  et  que  je  ne  trouvais  presque  aucune 
plante  dans  les  environs  du  hameau ,  je  me  décidai  &  n'y 
pas  prolonger  mon  séjour. 

de  Aio  Grandi  qu'on  troDTe  dins  les  diTereea  proriDces  dti  Brésil,  M 
■nrloat  »m  celui  qai  prend  m  warce  duu  II  amarea  de  S.  Jmo  d'il 
Sei  el  Bnit  ptr  porter  ses  mu  ï  la  PUu.  Piurro  ■  prooTé ,  pu  A'é- 
traneti  quiproqaae ,  combien  il  est  à  regretter  que  le  mêmeiniii  wlfU 
«ppliqné  k  des  rîTières  si  difiërenlM  (to;m  ITmt.  kut.,  IX ,  53).  L'u- 
Mlleat  H.  Wirden  i  lassi  été  iodoil ,  par  une  ressemblance  de  ihibs, 
k  confondre  une  riritre  de  Minas  Iftffas  avec  la  pTOTÎDoe  de  Pianh;. 


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DO  UO  DE  s.  FIANCISGO. 


CHAPITRE  XXIII. 


■BTOna  A  VILLA   BOA. 


L'aaicnr  reUrama  k  Villi  Bm  par  U  route  dinde.  —  PirmiaDO  rendu 
malade  par  du  miel  aanvage.  —  Aperçu  giaéral  du  rojage  do  Hio  doa 
PitSes  k  Villa  Boa.  —  Comment  ou  recoanatt  les  lieux  où  s'arrtteut 
lea  caravanes  qnand  il  a'j  a  point  d'habitaiioD.  —  Hiiio  en  pleiu  air  i 
jramiMircw.  —  Pays  situé  entre  Mamoeiros  et  le  raneho  de  Guarâa 
ffldr.  Les  traces  d'un  jaguar.  —  Le  raneho  de  Guarda  mdr.  —  Pajs 
situé  an  doit  de  ce  raneho.  Singulière  végétaiioa,  —  Halte  en  plein 
air  dans  du  lien  très-pittoresque.  —  Conversation  arec  Pirmiano  bot 
sou  grand  pou.  —  Faienda  île  Jacû.  —  Paya  Toisiu  de  Villa  Bot 
tout  k  Aul  désert;  pourquoi.  —  Vne  dont  on  jouit  anprès  de  celte 
ville.  —  L'auteur  y  arrive.  —  Le  gouverneur  de  la  province  feint  de 
ne  pas  croire  k  la  contrebande  des  diamants  du  Rio  Clara.  —  Visite  an 
missionnaire.  On  veut  le  retenir  k  Gojai  malgré  lui.  —  L'abbé  Lou 
Antohio  u  Siivâ  e  Sousi.--  Manière  de  blanchir  la  cire  indigène.  Le 
comte  m  Babu.— Température. —  Tableau  de  l'incendie  des  campa*. 

J'avais  commencé  le  voyage  du  Rio  Glaro  avec  l'inten 
tioD  de  le  contiauer  jusqu'au  Rio  Grande,  qui ,  comme  je 
l'ai  dit,  Foime  la  limite  des  provinces  de  Gojaz  et  de  Mato- 
grosso;  mais,  comme  il  eût  fallu,  pour  aller  et  revenir,  tra- 
verser eucore,  pendant  une  quinzaine  de  jours,  des  eam- 
pot  entièrement  déserts,  où  je  ne  pouvais  rien  espérer'de 
plus  que  dans  ceui  que  j'avais  déjà  parcourus,  je  renonçai 
entièrement  à  ma  première  résolution.  Je  quittai  doDC 
(15  juillet  181!>)  te  hameau  de  PilÔes  pour  retourner  à  Villa 


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ISO  VOYtQE  AUX  SOOKCES 

Boa;  mais,  au  lieu  de  repasser  par  S.  José,  je  pris  la  ronle 
directe  que  je  ne  connaissais  point  encore  ,  celle  que  sui- 
vent les  caravanes  qui  se  rendent  de  Matogrosso  à  Goyai  [1). 
Comme,  avant  le  départ,  on  avait  été  très-longtemps  saos 
pouvoir  découvrir  Icb  mulets,  Finniano,  suivant  sa  cou- 
tume, était  allé  chercher  du  miel  sauvage  dans  les  campo$. 
Il  avait  trouvé  dans  la  terre  on  nid  d'abeilles  noires ,  et  il 
était  revenu  à  la  maison  avec  un  grand  vase  rempli  de  miel 

(I)  lliD^rùre  approiimitif  du  buoMa  de  PilSes  t  Villa  Boa ,  par  la 
Toute  de  Matogrosso  ; 

Dn  hameau  de  PilSes  au  Rio  dos  Pilites i  kgw. 

—  —       k  Marnooeiras,  eu  pleio  air 3 

—  —  Gnarda  mor,  raudio A 

—  —  Doua  Aaloaia 4 

—  —  Jacù,  habitalioD * 

—  —  Cité  de  Goyai i 

31  legcMS. 
HaUos,  qni  a  étudié  avec  tant  de  lèle  et  de  saccès  la  topograpUe  de 
Oo;ai,  a  Nigneustmeiil  comparé  pluuenrs  itinéraires  roacoscriti,  de 
Villa  Boa  an  Rio  Claro,  et  a  tronré  entre  eni  des  diSéreuces  uoiables.  11 
ne  fanl  pas  s'en  étonner;  car  la  présence  de  l'homnie  peut  seule  tmener 
la  conbaissince  parhite  des  disianees  et  filer  les  noms  des  liaui.  Qat , 
dans  UD  pajs  habité ,  le  voyageur  se  trompe  sur  celui  d'noe  ville  on 
d'une  ririire,  il  tronrera  bieolAt  quelqu'un  qui  le  fera  revenir  de  soa 
erreur  ;  mais ,  s'il  parcourt  an  pays  désert  et  qu'il  retienne  mal  ou  con- 
fonde les  DOms  qui  lui  auront  été  indiqués  d'avdoce,  il  persistera  néces- 
uirement  daos  ses  méprises  et  en  fera  commeltre  d'autres  à  ccni  qui 
viendront  après  lui.  Je  trouve  Boa  VUla,  Manwngiriu,  qni  peai-étre 
serait  pluUt  Mamoeiroi,  et  Guarda  môr  dans  l'itinéraire  de  Laii  d'Alin- 
Conrl(Jfa»i.fiiaD.,14!})et  dans  celui  d'Ant,  Selto  de  Brilo,  copié  par  HaUos 
(II.,  Il,  H);  mais  je  n'j  li^pointJcKÛ,  qni  fait  également  partie  du  mien. 
U  est  donc  vraisemlilable  qu'an  delà  de  Guarda  mur  j'aurai  pris  quelque 
cbemio  de  traverse  :  car,  si  une  faxenda  habitée  et  aussi  importante  que 
Jacù  se  fùl  trouvée  sur  la  route  des  hommes  que  je  viens  de  citer  el  qui 
n'ont  pas  omis  le  plus  petit  missean,  ils  n'aoraient  pas  manqné  de  l'in- 


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DD  UO  DE  S.  FRANCISCO.  ISl 

d'uD  goût  aigre  et  détestable.  Il  paraît  qu'il  en  avait  beau- 
coup  mangé  ;  î!  éprouva  des  vomissements,  et,  quand  nous 
arrivAmes  au  Rio  dos  Pilôes,  qui ,  comme  on  l'a  déjà  vh  , 
traverse  la  route ,  il  était  pile  et  dans  l'impossibilité  d'aller 
plus  loin.  Nous  nous  arrètAmes  donc  pour  la  seconde  fois 
sar  le  bord  de  la  rivière  de  Pildes,  et  quelques  tasses  de  thé 
eurent  bienlAt  guéri  le  malade. 

Du  Rio  dos  Pilôes  à  Villa  Boa ,  il  faut  compter  20  h- 
gotu;  je  ne  mis  pas  moins  de  cinq  jours  pour  faire  ce 
voyage,  dont  je  donnerai  d'abord  un  aperçu  général.  Le 
pays,  toujours  montueux,  offre  tantôt  des  bois  et  tantôt 
des  campot  :  les  premiers  ont  plus  d'étendue  du  côté  de  Pi- 
Ides;  vers  Villa  Boa,  où  le  sol  est  fort  pierreux,  ce  sont,  au 
contraire,  les  eampog  qui  dominent.  Dans  ces  derniers,  les 
arbres  sont  plus  élevés  et  disposés  moins  régulièrement  que 
dans  ceux  des  pays  plats  ;  tantôt  ils  sont  fort  rapprochés ,  et 
tantôt  ils  laissent  entre  enx  une  distance  considérable;  au 
milieu  d'eux  croit  un  petit  Palmier,  dont  la  tige,  couverte 
d'écaillés  épaisses,  se  termine  par  un  panache  de  feuilles,  du 
centre  desquelles  un  bourgeon  s'élance  comme  une  (lèche 
aiguë,  à  la  hauteur  de  5  à  6  pieds  (1)  ;  d'aUleurs,  je  re- 
connus dans  ces  campox  la  plupart  des  arbres  que  j'étais 
accoutumé  à  voir  dans  des  localités  semblables,  des  Qua- 
iea,  le  Rotala  n°  820,  le  pao  d'arco,  les  mêmes  Malpi- 
ghiacées,  etc.  À  l'époque  de  mon  voyage,  la  plupart  de  ces 
arbres  n'avaient  que  deâ  feuilles  jaunes  et  desséchées  ;  quel- 
ques-uns ,  entièrement  dépouillés  de  leur  feuillage,  tels 
que  le  elaraiba  et  le  pao  d'arco,  étaient  cependant  cou- 


(1)  les  habitants  do  piys  ippetleDi  «  Palmier  maeauba.  Vojez  a 
que  j'en  dis  daiiï  le  cliapilre  suivaiil 


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1»  TOTAGE  iVX  SOORCES 

verts  de  fleurs  ;  les  paineirax  do  campo  (  Paehira  mar- 
ginata)  étaient  déjà  en  fruit  et  n'avaient  pas  encore  de 
feuilles.  La  verdure  des  bois  était,  au  contraire,  fort  belle, 
et  en  quelques  endroits  ils  ont  ane  vigueur  remarquable; 
un  nombre  considérable  d'arbrisseaui  forment,  ealre  les 
arbres ,  un  fourré  épais .  et  souvent  de  grandes  lianes  en- 
lacent ces  différents  végétaus  :  ces  bois  sont  encore  em- 
bellis par  une  foule  de  Palmiers  de  différentes  espèces , 
mais  qui  malheureusement  n'avaient,  lors  de  mon  voyage, 
ni  fleurs  ni  fruits.  Au  milieu  des  eampos,  la  chaleur  était 
insuf^rtable  ;  dans  les  bois,  je  trouvais  de  l'ombrage,  et 
une  foule  de  ruisseaux  limpides  y  entretenaient  la  plus 
agréable  fraîcheur.  Le  chemin,  très-pierreux,  souvent  em- 
barrassé par  des  branchages  et  des  troncs  renversés,  n'est , 
dans  la  forêt,  qu'un  sentier  fort  étroit,  et  doit  être  impra- 
ticable lorsque  les  pluies  ont  délayé  la  terre  et  que  les 
nombreux  ruisseaux  sont  devenus  des  torrents  [1];  et,  ce- 
pendant, c'est  le  seul  par  lequel  la  province  de  Matogrosso 
r^nununique,  par  terre,  avec  les  autres  provinces;  et  si, 
en  partant  des  environs  de  Porto  Felis,  dans  la  capitainerie 

(1)  H.  le  docteur  Poh)  a  en  le  coange  eitrime  de  faire  ce  rojage  in 
mois  de  février;  niais  lui  et  ses  gens  reviDrent  ITiUi  Boa  arec  lafi^Tre. 
De  telles  (kligaes  aaroni  probableineat  coatribné  k  abréger  l'eiialeiKC 
d«  cet  eicelleot  bamme.  Des  persopiies  que  des  circoostaoces  tmmiAa 
ont  placées  dus  la  position  la  plus  heureaae,  sans  qu'elles  aient  eu  lie- 
soiû  de  se  donner  aucune  peine ,  ont  dit  cependant  qne  les  naturalistes 
voyageurs  étaient  assez  dédommagés  par  le  plaisir  qu'ils  araieDt  goAté! 
a  Hessiears  les  délicats,  dit  naïvement  le  bon  Lery...,  roalei-voos  JVU 
<  embarquer  pour  vivre  de  telle  façon  T  Comme  ie  ne  vous  le  conseille 

•  pas! Aussi  vous  vondrai9~ie  bien  prier  qne,  qnanil  ou  parle  de  la 

■  mer,  et  surlont  de  tels  vojiges ,  vous  deOérissiei  un  peu  et  lais- 

•  sissJM  discourir  ceni  qui  en  eodurans  tels  trauani  ont  été  è  la  pra- 
«  tique  des  choses.  >  (Ilitl.,  3*  édil.,  34.1 


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DO  RIO  DE  S.  PUMCISCO.  1S3 

de  S.  Paul ,  on  peut  arriver  à  Matogrosso  par  les  rivières , 
il  est  très-peu  de  gens  qui  aient  assez  de  persévérance  et 
de  courage  pour  tenter  ane  navigation  aussi  difficile.  Tou- 
tes les  terres  que  j'avais  traversées  depuis  la  Fazenda  d'EI 
Rei  jusqu'au  Rio  dos  Pilôes  sont  sans  propriétaires  ;  le  pays 
qui  s'étend  de  cette  rivière  à  l'habitation  de  Jaeû,  située  à 
5  legooi  de  Villa  Boa,  n'a  pas  non  plus  de  maître  (1819), 
et  pourtant  il  se  trouve,  dans  ce  long  espace  de  15  legoas, 
des  terrains  qui ,  couverts  de  bois  et  d'une  qualité  excel- 
lente, pourraient  être  cultivés  avec  facilité  et  avec  avan- 
tage. Entre  Jacû  et  le  chef-lieu  de  la  province ,  je  vis  deut 
maisons  à  demi  ruinées  ;  mais,  entre  le  Rio  dos  Pildes  et 
Jacû,  il  n'en  existe  aucune  (1819),  et,  quoique  marchant 
sur  une  des  routes  les  plus  importantes  du  Brésil ,  je  fus 
obligé  de  coucher  dehors  quatre  nuits  de  suite.  J'étais  as- 
sailli par  des  nuées  d'insectes  malfaisants  qui ,  surtout  aux 
haltes ,  pendant  que  je  travaillais,  ne  me  laissaient  aucun 
repos ,  par  des  botraehudos ,  des  moustiques ,  des  carra- 
patos,  par  les  gros  taons  appelés  mutueas,  et  deux  ou  trois 
espèces  d'abeilles  qui  me  couvraient  le  visage  et  les  mains, 
et  entraient  dans  mes  yeux  et  dans  mes  oreilles  :  ces  in- 
sectes ne  se  montraient  cependant  pas  tous  ensemble;  à 
peine  le  soleil  était-il  levé,  que  les  mittucas  venaient  nous 
tourmenter;  vers  le  soir,  ils  faisaient  place  aux  abeilles, 
aux  moustiques  et  aux  borraekudos  ;  aussitôt  que  le  soleil 
était  couché ,  on  n'apercevait  ni  un  borrachudo ,  ni  une 
seule  abeille,  mais  alors  restaient  les  moustiques  et  les 
carrafatoê.  Le  premier  jour,  je  rencontrai  un  homme  qui 
se  rendait  au  Rio  Claro  ;  le  second ,  je  ne  vis  absolument 
personne;  le  troisième,  je  fus  croisé  par  un  jeune  officier 
qui  avait  été  envoyé  à  Villa  Rica,  dans  la  province  de  Mi- 


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154  TOTAOE  iUX  SOURCES 

ma,  par  le  gouverneur  de  Matogroaso,  et  qoi  retoornait  i 
sa  résidence  habituette.  Je  n'aperçus  aucune  cararaue,  et, 
ce  qui  prouve  combien  les  rapp(Hls  de  Hatt^rosso  et  de 
Goyaz  sont  peu  multipliés,  c'est  que,  depuis  Meiaponte,  je 
n'avais  encore  rencontré  que  celle  dont  j'ai  déjà  parié ,  et 
il  n'en  arriva  aucune  pendant  que  j'étais  à  Villa  Boa  {!}. 

Je  vais  i  présent  entrer  dans  quelqaes  détails. 

Au  delà  da  Rio  dos  Pildes,  dans  un  espace  de  3  tegoa», 
je  ■  traversai  tantât  des  canvpos  et  tantAt  des  b(Hi  ;  mais  je 
ne  trouvai  aucune  plante  en  fteur. 

Je  reconDus  l'endroit  appelé  Boa  Vista  (belle  vue}  ponr 
un  de  ceux  où  les  caravanes  ont  coutume  de  faire  halte  : 
ces  lieui  sont  assex  indiqués  par  la  trace  des  feux  qu'on  y 
a  faits  et  par  les  grands  bâtons,  plantés  en  terre,  qoi  ont 
servi  à  attacher  les  mulets.  C'est  toujours  sur  le  bord  des 
ruisseaux  et  ordinairement  sous  des  arbres  touffus  que  l'on 
foit  halte ,  et ,  en  plusieurs  endroits ,  je  retronvai  des  ba- 
raques de  feuilles  de  palmier  qu'avaient  laissées  des  voya- 
geurs. 

Comme  Boa  Vista  n'est  qu'A  2  legoa»  du  Rio  dos  PilOea, 
j'allai  jusqu'à  un  autre  pou«o  :  c'est  ainsi  que  l'on  appdie 

<1)  MUlos  dit  que,  sur  U  route  de  Pildea  t  U  cité  de  Gojaz,  on  canrt 
le  risque  d'ttre  ilUqué  par  les  Cojapôs  de  S.  José,  qui  se  dégniseat  eo 
saavt^.  Ceci  se  serait  passé  en  l'année  182&  on  i  peu  prèsj  mais ,  ni' 
Tant  le  même  écriraio ,  il  oe  m  trooTait  plus ,  k  la  même  époque ,  que 
liO  Indiens  dans  le  village  de  S.  José;  or,  sur  ce  Donlire,  il  ne  ponTait 
guère  j  avoir  que  30  hommes  capables  de  faire  de  pareilles  eipëditîoDS, 
et  il  me  semble  que  ces  30  hommes  pouvaient  bien  facilement  être  coa- 
icnus  par  leurs  sorveillaDts.  Il  est  doue  vraisemblable  que  le  récit  de 
Matlos  n'est  qu'une  fable  inveDlïe,  dam  le  pafs,  en  haîua  des  Cojap<«. 
Lors  de  mon  vojage  dons  la  province  d'Espirilo  Sanlo ,  on  y  prétendait 
aussi  que  les  Indiens,  amis  des  Portugais  k  Minas,  se  présentaient  comme 
ennemis  sur  le  Uiioral  (f  0}ei  ma  $ttimde  re^atit»^^. 


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DD  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  ISÏ 

les  lieux  oà  Von  a  coutume  de  s'arrêter.  Celai  de  Mamo- 
neirat,  où  je  Os  halte  (1) ,  offre  au  voyageur  une  espèce  de 
salle  ombragée  par  des  arbres  touBùs  qui  s'élèvent  sur  le 
bord  d'un  ruisseau. 

J'ai  dit  que  le  cheiniD  de  l'Aldea  de  S.  José  au  Rio  dos 
PilOes  parcourt,  depuis  Porco  Morto,  une  plaine  ellongée, 
bordée  de  deux  rangées  de  montagnes  ;  entre  Mamoneiras 
et  le  rancho  de  Guarda  m6r,  où  je  fis  halte,  la  route  se 
prolonge  à  mi-c6te  sur  l'une  de  ces  rangées  de  montagnes, 
et  je  reconnus  cette  éminence  qui  ,  comme  on  l'a  vu, 
s'élève ,  semblable  à  une  forteresse ,  sur  les  monts  opposés 
i  ceux  où  je  marchais.  Pas  la  plus  chétive  cabane,  point  de 
bestiaux,  pas  un  chasseur,  et  cependant  on. ne  peut  pas 
dire  que  ces  déserta  aient  rien  d'affreux  :  le  ciel  de  ce  pays 
pourrait  tout  embellir.  Puis,  d'ailleurs,  dans  les  bois,  le 
voyageur  est  récréé  sans  cesse  par  des  accidents  singoliers 
de  végétation  ou  des  différences  merveilleuses  de  forme  et 
de  feuillage;  dans  les  endroits  découverts,  le  terrain  bas  et 
humide  est  ordinairement  parsemé  de  boritya  qui  majes- 
tueusement s'élèvent  à  des  hauteurs  plus  ou  moins  gran- 
des ;  enfin  les  montagnes  voisines ,  dont  les  flancs  offrent 
ou  des  bois  ou  des  rochers  à  pic,  modifient  à  chaque  mo- 
ment l'aspect  du  paysage. 

J'avais  souvent  été  surpris  de  rencontra  aussi  pen  de 
mammifères  dans  les  vastes  solitudes  que  je  parcourais  ; 
mais,  quelques  jours  avant  mon  arrivée  à  Guarda  m6r, 
mes  gens  virent  plusieurs  cerfs  ;  ils  tnèrent  un  singe  dont 
nous  mangeâmes  la  chair,  que  je  trouvai  fort  bon  ne;  enfin, 
pendant  une  grande  partie  de  la  nuit  que  nous  passâmes  & 

(Il  Penl-«tre  plutftt,  corome  je  l'ii  déjà  dit,  Mamoeiriit  ou  Mamoeira». 


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156  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Mamoneiras,  dous  entendimes  les  hurlemeoU  du  guari 
(Canis  campeslrù,  iNeu*.  ei  Gervais).  Avant  d'arriver  k 
cette  dernière  balte,  mes  mulets  faisaient  difficulté  d'avan- 
cer; ils  flairaient  à  droite,  à  gauche,  et  paraissaient  inquiète 
et  effrayés.  Mes  gens  m'assurèrent  que  ces  signes  de  frajeur 
indiquaient  qu'un  Jaguar  [Feïis  Onça]  nous  avait  précédés; 
ils  ne  s'étaient  point  trompés,  car,  le  lendemain,  avant 
d'arriver  à  Guarda  màr,  nous  reconnûmes  sur  le  sable  les 
traces  du  féroce  animal. 

Nous  troavéroes  à  Guarda  môr  un  petit  raacho  couvert 
de  feuilles  de  Palmier,  qui  avait  été  construit  pour  rece- 
voir un  personnage  très-distingué,  Joâo  Cablos  Adgusto 
d'Oyenuausen,  lorsque,  peu  de  temps  auparavant,  il  avait 
quitté  le  gouvernement  de  la  province  de  Matogrosso  pour 
prendre  celui  de  S.  Paul,  où  je  le  vis  plus  tard.  C'était  une 
bonne  fortune  que  de  pouvoir  coucher  sous  ce  hangar,  qui , 
pourtant ,  était  ouvert  de  tous  cAtés ,  et  où  les  insectes  fu- 
rent encore  très-importuns. 

Le  lendemain,  nous  ne  traversâmes  plus  autant  de  bois, 
et  dans  les  campos  la  chaleur  était  insupportable  ;  nous 
avions  à  notre  droite  la  Serra  Dourada,  qui  souvent  produit 
un  fort  bel  effet  dans  le  paysage. 

Ce  jour-là ,  je  passai  encore  plusieurs  ruisseaiit  de  l'eaa 
la  plus  limpide.  En  général ,  j'avais  trouvé  jusqu'alors, 
dans  la  province  de  Goyaz ,  des  eaux  aussi  abondantes  et 
aussi  bonnes  que  dans  celle  de  Minas. 

Au  milieu  d'un  des  bois  que  je  parcourus ,  j'observai  un 
effet  de  végétation  assez  singulier.  Dans  ces  bois  croit  abon- 
damment on  Palmier  dent  la  tige,  grosse,  fort  courte  et 
chargée  de  la  base  des  feuilles  anciennes,  se  l«-mine  par 
une  superbe  touffe  de  longues  feuilles  ailées  et  d'un  beau 


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DV  KIO  DE  S.  FRANCISCO.  l&T 

vert  :  je  vis  nn  art>re  qui ,  après  avoir  fait  trois  ou  quatre 
tours  de  spire  autour  d'un  de  ces  Palmiers ,  devenait  par- 
ftitement  droit  et  élevait  assez  haut  sa  tige  grMe,  divisée, 
au  sommet,  en  rameaux  nombreux. 

A  4  legoas  de  Gaarda  tafir,  nous  Rmes  halte  dans  un 
endroit  qui  probablement  n'avait  point  encore  reçu  de 
nom,  et  que  j'appelle  Pouto  de  Dona  AtUonia  (4).  Nous 
plaçâmes  nos  effets  sur  le  penchant  d'une  colline,  sous  des 
arbres  toaffus  ;  au  bas  de  la  colline  coulait  un  ruisseau 
d'eau  limpide,  et  au  delà  s'étendait  une  vaste  plaine  cou- 
verte de  bois  ;  près  de  nous  un  groupe  de  borùyt  s'élevait 


(I)  Ce  nom  éUit  celni  de  m»  «onir,  Anloinette  de  Sdfert,  Dée  de  5.  Hi- 
liire,  doDt  od  m'avait  iDuoncé  la  perte  an  mODKiit  où  j'étais  parti  de  Rio 
de  Janeiro.  Madame  de  Salvert  réDuiwait  ani  plus  hautes  vertus  nue 
galle  douce,  une  parfaite  égalité  d'hamenr,  no  esprit  caltivé,  la  mé- 
moire lapliuheaTeiue;  quoique  fort  jeune,  elle  ae  répandait  p«a,  elle 
faisait  le  bonheur  de  ceux  qui  l'entouraicot  et  était  adorée  des  paysaos 
de  £00  village  :  j'avais  contribué  k  Mm  éducation  ;  jamais  au  Trtre  ne  fut 

aimé  plus  tMidrement  que  je  ae  l'étais  par  elle Sans  les  oceupatioi» 

toujours  reaaissanleti  qui  m'arraehaieal  k  moi-m£me,  je  n'aurais  pu  ré- 
sister à  ma  douleur.  J'avais  ardemment  désiré  de  passer  le  reste  de  mes 
jours  auprès  de  ma  saur;  quand  je  sus  qu'elle  m'avait  été  enlevée,  je 
ne  formai  plus  de  désirs ,  je  n'eus  plus  d'espérance  ;  la  vie  avait  perdu 
tons  ses  cbannes  pour  moi.  Dans  mon  voyage  k  Htuas,  ma  sceur  était 
Bans  ceSM  présente  i  mon  esprit;  k  chaque  événement  qui  m'arrivait.  Je 
me  réjouissais  de  pouvoir  le  lui  raconter  nu  jonr  ;  je  oe  vivais  que  par 
elle  et  pour  elle  :  quand  je  l'eus  perdue,  il  me  sembla  que  j'étais  seul  au 
monde  ;  le  présent  était  triste  et  Taligaat ,  l'avenir  m'elh'afait  ;  je  redou- 
tais de  retoornercn  FraDct,OÙ  je  ne  devais  plus  la  retrouver.  ...  S  j'avais 
pu  construire  nn  hangar  pour  les  caravanes  an  lien  que  je  décris  ici  et 
que  j'appelle  Powo  de  Doua  Anlo»ia ,  ce  nom  eût  été  adopté  par  les 
habitants  du  pajs;  il  restera  perdn  dans  ces  (touilles  ;  cependant  je  ne 
pense  point .  ïids  quelque  douceur,  que,  si  jamais  un  voyageur  qui  les 
aara  parcourues  l'arrtte  dans  le  même  lien ,  le  nom  de  Dona  Antonio 
se  présentera  peut-être  à  son  se 


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IW  VOYAGE  ADX  SOURCES 

majestueusement  au-dessus  d'un  pAturage  humide,  et  tout 
le  paysage  était  dominé  par  la  Serra  Dourada  que  couroone 
une  masse  de  rochers  à  pic,  dont  le  sommet  présente  uoe 
espèce  de  plate-forme  :  c'était  une  magnifique  solitude. 

Dans  ce  vojsge,  je  demandai  un  jour  au  Botocudo  Fir- 
miano  pourquoi  il  était  alors  si  gai,  tandis  qu'il  avait  été 
presque  toujours  triste  lorsque  doqs  parcourions  le  litto- 
ral. C'est,  me  dît-il,  parce  que,  pendant  le  voyage  du  Rio 
Doce,  mon  grand  pou  était  resté  à  Rio  de  Janeiro,  et  il 
m'a  accompagné  dans  celui  ci.  —  Qu'est-ce  que  ton  grand 
pou?  —  C'est  un  pou  grog  comme  un  rat,  qui  me  suit  paiv 
tout;  mais  je  ne  le  vois  que  pendant  la  nuit,  lorsque  je 
dors,  et  encore  est-il  souvent  plusieurs  nuits  sans  se  mon- 
trer. Quand  il  veut  causer  avec  moi ,  il  s'attache  à  mes  che- 
veux et  me  parle  à  l'oreille.  —  Que  te  dit-il?  —  Il  me  dit 
ce  que  je  dois  faire  et  me  gronde  quand  je  le  mérite.  Pn 
exemple,  il  me  Eaisait  souvent  des  reproches  à  Rio  de  Ja- 
neiro, lorsque  je  cassais  tant  de  plats  et  tant  d'assiettes. — 
Ta-t-il  quelquefois  parlé  de  moi? —  Fort  souvent ,  rt  il  m'a 
dit  que  vous  étiez  très-bon.  —  Tous  les  hommes  de  ta  na- 
tion ont-ils,  comme  loi,  un  grand  pou?  —  Quelques-UDs 
en  ont  on,  d'autres  n'en  ont  pas.  Mon  père  n'en  t  point, 
mais  ma  tante  en  a  un.  Cette  conversation,  que  j'eus  le 
soin  d'écrire,  prouve  que,  si  les  Botocudoa  n'ont  aucune 
idée  de  Dieu ,  ils  ont  au  ntoiiu  quelque  idée  de*  es- 
ptiUd). 

(1)  S'il  n'est  permis  de  contiDuer  dhs  travatu ,  je  donnerai  aillenn , 
arec  ^elqne  détail ,  U  Sa  de  l'histoire  de  Firmiano.  Je  dirai  aenleiDWl 
ici  que,  vonUat  rendre  bommage  à  la  liberté  dM  Indiens ,  j'alAù  k  te 
jeniK  homme,  avant  mon  départ  poar  l'Europe,  on  de  s'embarquer  me 
moi ,  on  de  relonmer  dans  son  pafs.  Il  préféra  oe  deraier  ^rti ,  el  ji 


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DU  UO  DE  5.  FRANCISCO.  IM) 

Après  avoir  quitté  la  belle  solitude  que  j'si  décrite  tout  à 
l'heure ,  nous  parcouri^mes  encore  des  boi»  et  des  amtpos. 
£dGd  des  traces  de  bestiaux  nous  annoncèrent  que  nous 
nous  rapprochions  des  habitations,  et  effectivement  nous 
arrivâmes  à  une  fazenda,  celle  de  Jae^,  où  nous  fAmes 
trés-bîen  reçus.  On  nous  établit  dans  uo  grand  bâtiment  où 
se  faisait  la  farine  de  manioc.  C'était  un  gîte  peu  magnifi- 
que, mais  je  me  trouvais  heureux  de  pouvoir  travailler  sans 
être  dévoré  par  les  insectes ,  ni  brûlé  par  le  soleil ,  et  de 
penser  que  je  ne  serais  pas  obligé  de  m'enfumer  pendant  la 
Duit,  pour  ne  pas  geler  de  froid. 

Entre  la  fazmda  de  Jacù  et  Villa  Boa ,  dans  on  espace  de 
K  Ugoat,  nous  traversâmes  presque  toujours  des  campoa 
où  la  chaleur  ne  pouvait  se  supporter.  Ce  jour-là,  et  surtout 
la  veiUe ,  nous  vîmes  plusieurs  de  ces  fonds  marécageux  où 
croit  le  bority,  asile  de  deux  magnifiques  espèces  d'fu-as, 
ceux  dont  le  plumage  est  entièrement  bleu  et  ceux  qui  ont 
le  manteau  bleu  et  le  ventre  jaune  {Ptittaeus  hyacinthinus 
et  P.  Anawata]  (1). 

ehargeti  le  bon  Laniotte  de  raccompagner.  Le  Botoeodo  lombi  malade 
k  fanlriiai.  dans  le  Sertia,  cbei  mm  digne  ami  le  curé  Antonio  Nogodra 
Dnarte.  La  mUod  des  pluies  approchait  ;  H.  Nogneira  conseilla  à  La- 
moU«  de  ^rlir,  et  Ini  promit  de  renvoyer  le  Bolocndo  dans  son  paya, 
le  n'aTaisploasDleoda  parler  de  celui-ci,  lorsqae  j'ai  appris,  par  les  - 
Semmirt  de  H.  le  comlt  de  Swanaet,  qu'il  ^Uil  mort  de  U  rovg;eole 
an  nilien  de  u  peapUda.  Si  cet  OQTrage  parrient  duis  le  Sertio  comme 
ma  prfmUre  relatUm ,  H.  Kogueira  Oiurle  muta  que  j'ai  éié  aussi 
itracbd  que  rscomuissant  de  U  marque  d'anitij  qa'il  a  bien  tduIii  me 
donner  tu  renpliswnt  fldèUmiaal  sa  promesw. 

(1}  J'ai  iéji  iit  tiUenn  qae  ces  deux  espèces  d'aras  rivent  au  milieu 
dae  iorUft  et  en  mtnueat  les  (raitsj  j'ai  aussi  fait  connaître  l'erreur 
MOgnli^dans  laquelle  sont  tambés  l'illustre  Harcgraff  et,  depuis  loi, 
tons  loe  natnralisles,  relatiTcmast  an  nom  de  ces  oiaeaui  <,VoifaBe  ttan* 
lêt  proottua  dt  Rio  lit  Janeiro  tt  de  Uituu  Geraet,  M ,  .176). 


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t60  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Parmi  les  arbres  rabougris  des  campos,  il  en  est  dont  les 
rsmutes  sont  très-épais,  peu  nombreux  et  obtus.  Je  remar- 
quai ,  dans  ce  voyage,  qu'il  n'existait  point  de  bourgeons  k 
l'aisselle  des  feuilles  de  ces  ramules,  et  que  ceux-ci  se  con- 
tinuaient  senlement  par  des  boui^eons  terminaux.  Le  petit 
nombre  de  ces  ramules  et  l'épaisseur  de  leur  écorce,  pres- 
que semblable  à  du  liège,  rendent  l'exactitude  de  cette 
observation  très-vraisemblable  ;  pour  plus  de  certitude, 
cependant,  les  botanistes  qui  parcourront  ces  campot  fe- 
ront bien  de  la  vérifier  (4). 

Entre  la  faxenda  de  Jacâ  et  la  cité  de  Goyaz,  nous  ne 
vtmes ,  comme  je  l'ai  dit,  que  deux  maisons,  et  elles  tom- 
baient en  ruine.  Partout,  en  Europe,  le  voisinage  des 
villes  est  annoncé  par  des  habitations  plus  nombreuses,  par 
des  cultures  mieui  soignées  ;  et  il  en  est  de  même  des  villes 
de  la  cAte  du  Brésil  qui  ont  été  fondées ,  dans  tel  ou  tel 
lieu,  parce  que  la  position  était  favorable  au  commerce  on 
k  l'agriculture.  Dans  les  pays  aurifères,  les  villages  et  les 
villes  ont  été  bâtis  là  où  l'on  trouvait  le  plus  d'or;  on  n's 
été  déterminé  que  par  cette  cousidération,  et,  sous  d'autres 
rapports,  le  local  choisi  s'est  trouvé  souvent,  comme  i 


(1)  Celi  est  (TautaDt  pins  esseotîd  que  d'aalres  obserntïooa  m'oal 
coDdnit  k  Écrire  ce  qui  suit  :  ■  Si  le  bourfcon  db  m  dériloppe  pas  Um- 

■  janre.  peut-ttre  au  moins  en  eiiste-i-il  toujours  aue  lég^  ébauche  ; 

•  j'ai ,  da  moias ,  retrouvé  cette  ébanche  toutes  les  fois  que  je  l'ai  cber- 

•  cMe  avec  quelque  aiteotiou.  Les  Gramioées  qui  naissent  sous  les  tni- 

■  piquea ,  doutes  d'une  grande  énergie  vitale ,  sont  le  plus  souvent  ra- 

•  meugesi  celles  de  nos  climats,  grêles  et  débiles,  sont  presque  tonjouit 

■  simples  ;  mais  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que ,  k  l'aisseUe  de  la  feniUe 

■  des  plus  humbles  de  ces  plantes,  comme,  par  exemple,  du  Poaan- 

■  ntta ,  j'ai  toujours  apercn  un  bourgeon,  auquel  il  n'eût  (kllu,  poar  se 

■  développer,  qu'on  pan  plus  de  vigueur  (JVorpItolof  «  végétait,  tn\  ■ 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  ISt 

Villa  Rica  [Cidade  d'Ouro  Preto]  et  k  Villa  Boa,  le  plus 
déravorable  possible.  Le  système  d'agriculture  adopté  par 
les  Brésiliens  ne  leur  permet  pas  de  cultiver  d'autres  ter- 
rains que  ceux  qui  sont  boisés  ;  par  conséquent,  les  eampos 
voisins  de  Villa  Boa,  près  la  route  de  Matogrosso,  ont  dû 
rester  déserts. 

Il  ne  faudrait  pas  s'imaginer,  cependant,  que,  même  dans 
l'état  actuel  des  choses ,  on  ne  puisse  tirer  absolument  au- 
cun parti  des  euvironn  de  cette  ville.  Il  s'y  trouve  des  ter- 
rains salpêtres,  très-favorables,  par  conséquent,  à  l'éduca- 
tion du  bétail  ;  et ,  si ,  dans  le  petit  nombre  d'habitations  qui 
etistent,  on  donne  de  loin  en  loin  un  peu  de  sel  aui  bètes 
i  cornes,  c'est  pour  qu'elles  apprennent  à  connaître  la  mai- 
son de  leur  maître. 

Des  collines  les  plus  rapprochées  de  cette  ville,  on  la  dé- 
couvre tout  entière  :  on  voit  qu'elle  a,  dans  son  eosraible, 
une  forme  allongée,-  qu'elle  est  située  dans  un  fond  et 
adossée  À  des  montagnes  ;  enfin  que ,  du  cAté  opposé  i  ces 
dernières,  jusqu'à  la  Serra  Dourada ,  le  terrain  est  inégal , 
mais  beaucoup  moins  élevé. 

Avant  mon  départ  de  la  cité  de  Goyai,  j'avais  prié  le  co- 
lonel Francisco  Leite,  dont  j'ai  déjà  parlé,  de  me  garder  la 
maison  où  j'avais  demeuré  à  mon  premier  passage.  Je  n'eus 
donc,  pourm'iostaller,  aucun  de  ces  embarras  que  j'éprou- 
vais toutes  les  fois  que  j'arrivais  dans  nne  ville. 

Presque  aussitôt  après  être  descendu  de  cheval,  j'allai 
voir  Baimundo  Nonato  Hyacinthe,  qui  fiit  pour  moi  aussi 
aimable  qu'à  mon  premier  passage. 

De  chez  lui,  je  me  rendis  chez  le  gouverneur,  et  je  fus 
égalanent  bien  reçu.  Ce  dernier  avait  l'air  de  ne  pas  croire 
à  la  contrebande  des  diamants  du  Rio  Qaro,  probablement 


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lat  T0TA6E  AUX  SOUKCES 

parce  qu'il  sealait  qu'il  serait  absurde  de  la  puDir;oD  con- 
çoit, au  reste,  que  je  pouvais  Â  peine  me  pennettre  de 
glisser  sur  un  sujet  aussi  délicat.  H.  Fernando  Ddgado  pré- 
tendait aussi  qu'il  était  Taux  que  les  cherdienrs  A'or  du  Rio 
Claro  fissent  des  journées  de  13  à  1 ,500  reis  ( 7  f.  SO  c. — 
9  f.  37],  et  il  croyait  le  prouver  en  ajoutant  que  tous  sont 
extrêmement  pauvres.  Il  les  jugeait  comme  s'ils  eussent  été 
des  Européens,  et  ne  savait  pas  queces  hommes  imprévoyants 
dépensent  leur  argent  aussilAt  qu'ils  le  gagnent;  que,  par 
conséquent ,  ils  n'ont  rien  quand  la  mauvaise  saison  arrive. 

Lorsque  je  sortis  du  palais,  il  fusait  déjà  nuit;  c'^t 
l'heure  à  laquelle  des  femmes  de  toutes  les  couleurs  se  ré- 
pandaient dans  la  ville;  j'allai  voir  le  missionnaire,  et  je 
trouvai  sa  chambre  remplie  de  pauvres  mares  qui  venaient 
lui  faire  bénir  leurs  enfants  malades.  Dans  les  oxnmeDoe- 
ments,  me  dit-il ,  je  trouvais  ces  viûtes  nocturnes  peu  con- 
formes à  la  bienséance,  mais  le  gonveroear  m'a  anoré  qat 
personne  n'y  trouverait  i  redire;  il  a  même  «jouté  que,  si  je 
refusais  de  recevoir  les  femmes  à  la  nuit,  aucune  ne  viea- 
drait  chez  moi  et  que,  par  conséquent,  je  les  priverais 
d'une  const^tioD  que  la  charité  ne  fait  un  devoir  de  leur 
accorder. 

Le  père  Joseph  devait  quitter  la  ville  huit  jours  {dus  tard. 
La  veille,  nous  sortions  ensemble  du  palais,  lorsque  nom 
vbnes  la  place  entoorée  de  moiule  ;  bientAt  l'on  s'empresM 
autour  du  missionnaire,  et  je  m'échappai  avant  que  la  foule 
m'e&t  fermé  le  passage.  Je  sus  plus  tard  que  le  peuple  et 
le  corps  municipal  {camara}  voulaient  absolument  garder  le 
p^e  Joseph  ;  mais  il  leur  avait  répondu  que,  ayant  foit  vœu 
d't^issance,  il  ne  ponvait,  sans  manquer  i  ses  devoirs  les 
[dus  sacrés  et  se  rendre  indigne  de  leur  estime,  se  dis- 


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DU  RIO  DE  S.  FBAHCISCO.  l&t 

peDser  de  se  rendre  à  sa  destination.  On  gagna  encore  un 
jour  oa  deux  en  ca^nt  ses  mulets. 

Lorsque  que  j'étais  à  Villa  Boa ,  je  fis  connaissance  avec 
l'abbé  Luiz  ÂNToino  da  Sa. va  e  Sotisa  [4)  qui,  en  atten- 
dant l'arrivée  du  prélat  nommé ,  gouvernait  le  diocèse  de 
Goyaz  avec  le  titre  de  vicaire  général.  C'était  un  homme 
poli  et  modeste  auquel  sont. dus  les  prraniers  reos^gne- 
ments  que  l'on  possède  sur  rhi8toii:e  et  la  statistique  de 
Goyaz.  Il  me  prêta  le  mBDUicrit  de  son  important  travail 
intitulé,  Memoria  sobre  o  descobritnaito,  populaçàù,  go- 
vemo  et  cousat  moit  notaveU  da  Capitania  de  Goyaz ,  tra- 
vail qui ,  sans  le  consentement  de  l'auteur,  avait  déjà  paru 
à  Rio  de  Janeiro,  dans  le  journal  brésilien  O  Palriota 
(1814).  Cazal  a  eu  le  même  manuscrit  aitre  les  mains,  il 
Kl  a  profité  et  n'a  point  cité  l'auteur;  Pizarro  ne  l'a  pas 
cité  davantage,  mais  Pohl  s'est  empressé  de  lui  rendre  toute 
justice.  En  rédigeant  cette  relation  de  voyage ,  je  u'ai  mal- 
heureusement sous  les  yeiu  qu'une  petite  partie  de  l' extrait 
que  j'ai  fait  du  mémoire  de  H.  Luiz  Antonio  da  Silva  e 
Sonsa,  mais  je  crois  que  c'est  à  lui  qu'il  faut  rradre  la  plu- 
part des  dtations  relatives  à  l'histoire  et  à  la  statistique 
de  Goyaz,  que  j'ai  empruntées  i  Pizarro  et  an  docteur 
Pohl  {2). 

Poidant  moD  séjour  dans  la  dté  de  Goyaz  on  vint  en- 


(1)  J'écris  consUunmenl  Souta,  «(  oon  Sotua ,  pirce  que  c'est  aUui 
que  lui'^Dème  a  signé  l'écril  intilnlé  Mtmoria  eiUUirtiea,  etc. 

(3)  En  I83S,  H.  l'abbé  Lnii  Aolonio  da  Siln  e  Sonsa  a  eature  publié 
an  petit  éciii  pleiii  de  liitt  et  qoe  j'ai  sonveot  en  l'occasion  de  dler  dans 
cd  onviage  ;  cal  écrit  est  intitalé ,  Mewmriâ  ttlaUttiea  da  Provineia 
de  601KU  ilMâid»  peUM  Julpfldw  «  na  foma  do  ElmeKo  etwiad» 
ptia  Stertiaria  do  Imperio,  eu. 


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in4  VOYAGE  AUX  SOURCES 

core  m' offrir  des  diamants  du  Rio  Claro.  Je  les  trouvai  «fane 
eau  très-belle;  peut-être  même  étaient-ils  supérieurs  i 
ceux  de  Tijuco(l),  mais  si  un  sentiment  de  délicatesse  ne 
m'eût  p&s  empêché,  comme  je  l'ai  dit,  de  prendre  part  k 
la  contrebande  de  ces  précieuses  pierres,  il  est  bien  clair 
que  c'est  sur  les  lieux  mêmes  que  j'aurais  fait  mes  achats, 
et  non  i  Villa  Boa,  où  je  n'aurais  pu  les  recevoir  que  de 
la  seconde  ou  de  la  troisième  main. 

Le  couTK  DA  Barca  ,  ministre  du  roi  Jean  VI  [S) ,  avait 
fait  faire  beaucoup  d'expériences  pour  blanchir  la  cire  in- 
digène et  aucune  n'avait  eu  de  succès  Je  vis  dans  la  cité 
de  Goyaz  un  ouvrier  qui  ta  blanchissait  très-bien  et  dont 
tout  le  secret  consistait  à  la  faire  fondre,  à  l'écumer,  la  di- 
viser par  petits  morceaux  et  l'eiposer  su  soleil.  Il  répétait 
cette  opération  jusqu'à  seize  fois,  ce  qui  prenait  deux  Ji 
trois  mois ,  et  au  bout  de  ce  temps  la  cire  était  presque 
aussi  blanche  que  celle  de  nos  abeilles  domestiques.  Je  fis 
usage  de  bougies  faites  avec  cette  cire  et  j'en  fus  content; 
néanmoins  je  trouvai  que  leur  lumière  était  beaucoup  phis 
rougeque  celle  des  excellentes  bougiesque  l'on  vendait  alors 
à  Rio  de  Janeiro,  qu'elle  donnait  beaucoup  plus  de  fumée e( 
fondait  plus  facilement  ;  je  dois  ajouter  que  la  cire  indigène. 


(1)  Voyez  mOD  Voyage  dai^i  te  diilricl  det  Biamanlt ,  etc.,  I ,  t  H 

(2)  A  mon  arriTée  â  Rio  de  Janeiro ,  je  las  parbilemetil  ■ccveilli  pu 
le  comte  ài  Birci.  C'était  un  bomme  do  mérite  dont  les  maaièm  étMol 
eilrèmement  distinguées,  et  qui  s'exprimait  en  français  avec  noe  grands 
^lOgBDce.  11  (^tait  arrJTi^  aa  Brésil  avec  le  roi  :  lorsqu'il  parrint  an  ininia- 
lère ,  il  arait  m  al  heureuse  ment  aiteial  qd  ège  asseï  afaocé ,  il  ne  jonis- 
swt  plus  d'une  bonne  liante ,  et  il  n'avait  peu  eu  le  temps  d'apprendre  I 
ronnattre  le  pays  qu'il  devait  adminislirr. 


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IHI  UO  DE  S.  FBAtfClSCO.  I6i 

quoique  purifiée,  conservait  un  goût  amer.  Il  me  serait 
impossible  de  dire  à  quelles  abeilles  appartenait  la  cire  de 
Goyaz(l],  mais  je  présume  qu'elle  n'était  pas  due  à  une  es- 
pèce unique.  Quant  à  celle  qu'à  cette  époque  on  employait 
dans  tout  le  Brésil ,  elle  venait  d' Afrique  ;  les  bougies  faites 
avec  cette  dernière  étaient  mai  moulées  et  avaient  une  con- 
leur  jaunfltre,  mais  elles  offraient  une  extrême  dureté  et 
elles  ne  coulaient  point,  lors  même  que  je  travaillais  dehors 
ou  sous  des  ranchos  ouverts. 

Lorsque  je  passai  pour  la  seconde  fois  à  Villa  Boa  [du  30 
au  27  juillet),  les  matinées  étaient  encore  fraicbes  et  les 
soirées  délicieuses,  mais,  dans  le  milieu  du  jour,  la  cha- 
leur devenait  insupportable.  Cette  température  si  élevée 
n'avait,  au  reste,  rien  d'étonnant,  car  les  mornes  dont  la 
ville  est  entourée  arrêtent  les  vents  qui  pourraient  rafraî- 
chir l'air  et  ils  reflètent  les  rayons  du  soleil. 

On  commençait  alors  à  mettre  le  feu  aux  campas  voisins 


(1)  IJ  est  didicile  de  croire  que  les  abeilles  de  la  partie  mt'ridioualu 
4e  GojBz  ne  scieut  pas,  du  inoios  pour  la  plapart,  le»  nièincs  que  celtes 
du  Sertie  de  Miuas  {Voyage  dati*  la  province»  de  Rio  de  Janeiro 
et  Jlinat  Gcraet,  H,  371  et  suiv.).  M.  Garduer,  qui,  eu  se  reudant  de 
Pianhy  aui  Miucs,  a  passé  par  le  uord-est  de  la  proviDCC  de  Gojai.  dit 
que  les  abeilles  sauvages  j  soal  eitrèmemeut  cominuues ,  et  il  indique, 
par  leurs  noms  vulgaires,  dii-huit  espèces  de  ces  animaux,  dont  ta  plu- 
part appartieuueal ,  dit-il,  au  genre  Mellipona,  111  i g.  Parmi  les  noms 
qu'il  elle,  cinq  seulement ,  à  la  vitAi,  se  reiroiiveat  dans  la  liste  que  j'ai 
doooée  des  abeilles  du  Serlio  orieulal  de  Minas  :  mais  la  partie  de  Gojaf 
traversée  par  M.  Gardner  est  beaucoup  plus  :eptcQlrionale  que  celle  du 
Sertie  de  Uinas  où  j'ai  voyagù  ;  la  vi'gi'tatioti  u'y  c^t  pa^  la  oiâine, 
comme  le  prouvent  les  ccbautillous  de  piaules  qu'a  «uvojés  en  Europe  le 
oaloralisle  anglais ,  et  il  n'est  pas  impossible,  d'ailleurs,  que,  dans  des 
lieux  aussi  iloigois  les  uns  des  autres,  les  mêmes  iuscetcs  portent  des 
uoins  difli'reuis  ^Gihon.,  Traveli,  S'^j. 


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lU  TOTAGE  ADX  SODRCBS 

de  Is  cité  de  Goyai.  Comme  j'ai  déjà  ea  occasion  de  le  dire, 
la  flamme  qni  consume  l'herbe  des  pâturages  a  une  cod- 
leur  rougeâtre  et  s'étend,  pom*  l'ordinaire,  en  lignes  que 
l'on  voit  serpenter  de  direrses  manièrea,  laissant  entre 
elles  de  petites  interruptions  déterminées  par  la  distance 
d'une  touffe  d'herbe  k  une  autre  touffe.  Les  nHHves  qni 
enTÏronnent  la  ville  m'trfnrirent  un  soir  un  spectacle  ma- 
gnifique ;  ils  semblaient  illuminés  par  des  rangées  de  lam- 
pions déposés  en  différents  sens  ;  quelqnes  parties  res- 
taient encore  dana  une  obscurité  proronde,  d'autres  étaient 
éclairées  par  aoe  vive  lumière  qui  se  reflétait  sur  la  ville. 
Le  lendemain  f  tout  changea  dès  que  le  jour  parut  :  une 
ftamée  rougeAtre  remplissait  l'atmosphère,  le  ciel  avait 
pa'da  son  brillant  éclat  et  Ton  respirait  un  air  étouffant. 
Jusqu'alors  on  n'avait  encore  mis  le  feu  qu'à  une  trèï- 
petite  partie  des  eampos;  mais  tout  le  monde  assure  que, 
lorsqu'il  y  en  a  nne  plus  grande  étendue  d'enflammés,  la 
chaleur,  déjà  si  forte  à  Tilla  Boa,  ne  peut  plus  se  supporter. 
Je  fus  forcé  de  rester  huit  jours  dans  cette  ville  pour  y 
faire  faire  différents  ouvrages.  Pendant  tout  ce  tonpa, 
comme  k  mon  premier  voyage,  je  dtnai  chee  le  gouvemenr, 
Jesoupai  et  je  déjeunai  chez  Raimundo,  toujours  comblé 
par  eui  de  politesses  et  de  marques  d'égards  (1). 

(1)  A  Unit  ee  qne  j'ti  dit  de  U  cité  de  Qtrjtx  dus  ce  diipitre  et  dait 
le  vingtième ,  j'ajouterai  qu'elle  est  ■njoard'hDi  U  résidence  de  FéTèqM 
du  diocèse,  comme  elle  devait  être  aatrefoia  celle  des  prélats  ;  qne  Tm- 
sembli'e  législatire  prorinciale,  composée  de  vingt  membres,  y  lient  us 
sessions:  que  celle  de  1835  a  décrété  des  fonds  poar  j  établir  an  b6^- 
tal;  que  la  comarca,  aujourd'hui  fort  restreiate,  doDt  elle  est  le  dief' 
lieu,  porte  le  nom  de  Comarca  de  Coyai  ;  enfin  que  cette  eomarca  coat- 
prend ,  outre  le  district  propre  de  la  cité ,  les  andens  villages  de  Criii . 
Pilar ,  Meiaponte  et  Jaragni ,  qui  ont  été  érigés  en  villes  a jsut  dncmie 


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DU  RIO  DE  S.  niANC[SCO.  167 

lenrdiatrictdtai..  et  Lop.  ra  Hom.,  DUc.  Brai.,  1,  4M,  407),  mais 
qui ,  t  ce  chiagemeDt,  ne  se  sont  prabablunent  pas  beaucoup  «richij. 
—  Ja  dois  faire  otMarrer  qne  la  Tille  do  Jaragui  oe  m  Iroare  pas  au 
nombre  de  ceUes  qne  lOf.  HUUet  et  Lopea  de  Hoara  indiquent,  k  l'ar- 
UdeGoyaide  leurdietionDure,  omme  faisant  partie  de  la  eomarea 
dont  la  capitale  de  la  prarince  est  le  cfaef-liea  ;  cependant  je  n'hésite 
pu  à  la  citer  arec  les  aaires ,  parce  que ,  dans  l'article  Jaragvâ  iDiee., 
1,  SïT),  ees  messieurs  disent  positiremeol  que  ce  lieu  appartient  k  la 
coMoroa  de  G«Tti. 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  XXIV. 

COHHBMCBHENT  DD  VOYAGE  DE  LA  CITÉ  DE  GOTAZ  A  S.  PADL. 
—  LE  HATO  GKOSSO.  —  UNE  HABITATION  MODÈLE.  —  LE 
VILLAGE  DE  BOH  PIM. 

Tablua  général  du  rodage  de  Gof  ai  h  S.  Paul.  —  L'aatenr  prend ,  pour 
H  rendre  de  Villa  Boi  k  Heiaponte ,  noe  int»  roule  qiM  celle  qu'il 
iviit  diyt  suivie.  —  Pays  situé  an  deU  d'As  *re»S.  —  Sitio  do*  Co- 
queiroi.  Le  Palmier  macauba.  —  Paj^s  situé  au  delk  de  Coqueiro*. 
Franco,  —  Peintura  gioéraie  du  Hil«  Grosso.  —  Manjoltnito.  —  Ai 
Caoeirai.  Températura. — Les  féics  de  la  Penlecdie, — Lagoa  Grande. 
Sécheresse.  —  Siiio  de  Gontalo  Marqvei.  —  Une  troupe  de  bohé- 
miens. —  La  fatenda  de  H.  Joiqdih  Altes  oï  Ouviist.  Portrait  da 
propriétaire.  Descriptioa  de  sa  maison.  Comment  il  conduisait  ses  oé- 
gres.  La  sucrerie.  Les  machines  k  séparer  le  coton  de  ses  semences. 
Celle  k  râper  le  manioc.  Excellent  mode  de  culture-  Débit  des  prodojls 
dn  soi.  Exportation  du  coton.  L'idée  d'une  monnaie  provinciale  entiè- 
rement absurde.  L'auteur  quitte  la  fasendu  de  Joaquim  Alves. —  Idée 
générale  du  pajs  situé  entre  Heiaponte  et  le  village  de  Bom  Fim.  — 
SilUt  dai  Fumai.  Négociation  arec  la  maîtresse  de  la  maison.  Si 
grange.  —  Pays  situé  au  deU  de  Furoas.  —  SUio  da  Fcrquilha. 
Ostentation  d'argenterie. -'Pays  situé  an  deU  de  Forquilha.  —  Fa- 
tenda  dai  AnUu.  Marchands  d'Araxi.  Le  missionnaire.  —  Pays  situé 
au  delà  de  la  Faieoda  daa  Antas.  —  Changement  de  température.  —  Le 
hameau  de  Pyracanjuba.—  Pays  situé  plus  loin.—  Le  village  de  Bom 
Fim.  Sa  position.  Ses  rues;  sa  place:  son  église:  se$  maiaoos.  Ses 
minières.  Culture  des  terres.  Débit  Tacile  des  produite  du  sol.  Pous- 
sière ronge.  —  La  Rte  de  Notre-Dame  de  l'AUtaye. 

Je  partis  de  Villa  Boa  avec  l'ÏDlention  d'aller  à  S.  Paul 
et  de  visiter  ensuite  les  parties  les  plus  méridionales  du 


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m  MO  DE  s.  FRANCISCO.  IG» 

Brésil,  ta  capitale  de  la  province  de  tioyaz  est  située , 
coname  je  l'ai  dit,  par  16*  W  (i),  et  S.  Paul  l'est  par 
âS'  33'  30"  (2)  de  latJt.  sud  et  331'  25'  de  longit. ,  i  comp- 
ter du  premier  méridien  de  l'Ile  de  Fer  :  or  il  peut  y  avoir 
approximativemeot  1  degré  et  demi,  de  l'oaest  vers  l'est, 
entre  le  méridien  de  la  première  de  ces  deux  villes  et  celui 
de  la  seconde;  par  conséquent,  pour  me  rendre  de  l'une  à 
l'aatre,  je  dus  me  diriger  vers  le  sud,  en  inclinant  ducâté 
de  l'orient.  Je  mis  trois  mois  à  faire  ce  voyage,  me  détour- 
nant presque  uniquement  pour  aller,  du  villagedefiotnfïm, 
visiter  les  eaux  thermales  appelées  Caldas  Novat  et  Caldas 
Vtlhai.  Je  ne  puis  pas  compta*  moins  de  242  Ugoas  (3)  pour 
ce  voyage,  y  compris  le  détour  dont  je  viens  de  parler  ;  je 
m'arrêtai  vingt-trois  jours  et  cheminai  soiiante-dii ,  ce  qui 
fait,  terme  moyen,  un  peu  plus  de  3  Ugoas  et  demie  par 
jour,  marche  ordinaire  des  mulets  chargés.  Il  me  fallut 
trente-deux  jours,  en  y  comprenant  la  petite  course  de  Cal- 
das, pour  sortir  de  la  province  de  Goyaz.  En  quittant  cette 
dernière,  j'entrai  dans  la  province  de  Minas  Geraes,  sur  le 
territoire  de  laquelle  je  voyageai  pendant  douze  jours,  et 
enfin  j'arrivai  à  celle  de  S.  Paul.  Je  traversai,  dans  la  pro- 
vince de  Goyaz,  les  trois  villages  de  Meiaponte,  de  Bom  Fim 
et  de  Santa  Cruz  (4)  ;  dans  celle  de  Minas,  les  quatre  aideas 
d'as  Pedras,  da  Estiva,  de  Boa  Vista,  de  Santa  Anna,  et 

(I)  Vojet  le  clupitre  iotilulé  Villa  Boa  ou  ta  cité  de  Goga*. 

(S)  S«loD  d'aatr«s,  24'  30'  ou  23*  5'. 

<3)  Lnii  d'Aliuconrt  corapM  31!  Ugoai  par  h  rooie  directt  (Jf^tn. 
viaç.,  lia). 

(4)  Comme  oa  l'a  iiik  vu,  Heiapoale  n  été  hoDoré  du  nom  de  ville  par 
une  loi  proTinciole  du  10  juillet  1332,  et ,  comme  on  te  verra  plus  tard , 
SuilaCruzraiiâparUDelaidelS3),  etDom  Pim  par  une  autre  de  ltt30 
.MiLL.  et.LopBS  DB  Movni,  Dice.  Bras.). 


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1»  TOYAGB  AUX  SODftCES 

le  village  de  Farinha  Podrt;  enfio,  dans  la  province  de 
S.  Paul ,  les  trois  villi^es  de  Fronça ,  Ctua  Branca  ti 
Mogiguaçu  (1),  puis  les  trois  villes  de  Mogimirim,  de 
S.  Carlos  et  de  Jundiahy.  La  route  a  été  tracée  p«i  de 
temps  «près  la  découverte  de  Goyaz  (auDée  1736)  (3),  et, 
par  conséquent,  elle  date  déjà  de  plus  d'un  siècle  ;  auni 
est-on  sAr  de  trouver  un  abri  à  la  fin  de  chaque  marche  : 
cependant,  insqu'i  la  ville  de  M<^,  les  campagnes  sont 
désertes,  sans  culture,  et.  à  la  fin  d'une  journée  fatigante, 
je  n'avais  pas,  comme  à  Minas,  la  cotw^tion  de  pouvoir 
m' entretenir  avec  un  hdte  bospitalier;  car  les  colons  chei 
lesquels  on  fait  halte  sont,  pour  la  plupart,  des  hommes 
grossiers  que  le  passage  des  caravanes  met  en  défiance  con- 
tre les  voyageurs.  Jusqu'au  mois  d'octobre,  époque  à  la- 
quelle j'entrai  dans  la  province  de  S.  Paul,  la  sécheresse 
tôt  excessive  ;  je  passai  souvent  des  jours  entiers  sans  aper- 
cevoir plus  de  deux  ou  trois  fleurs ,  appartenant  à  des  es- 
pèces communes  ;  les  coléoptères  avaient  disparu ,  les  d- 
seaux  devenaient  rares  ;  j'étais  dévoré  par  des  nuées  d'in- 
sectes malfaisants,  et,  forcé  quelquefois  de  séjourner  sur 
les  bords  d'une  rivière  malsaine,  tdleque  le  Rio  Grande. 
Au  mois  d'octobre,  les  pluies  commencèrent  &  tomber,  les 
pftturoges  i  reverdir  et  i  se  couvrir  de  fleurs  (3);  mais 
olors  je  me  rapprochais  du  tropique,  et  la  végétation  n'é' 

(1)  PraBetestdsmiu  ancTille,  mu  la  Dom  de  ViUaFraneadolwtpt- 
rador,  pir  no  décret  de  l'issemblé*  tégialative  proriacUle  de  $.  P««l  de 
1889  :  anjoiinrhiii  Cim  Br«Bca  est  amsi  ane  viUe  (Miu.  et  Lopr  m 
HocBi,  IUcc.  Braf.)  ;  MogigniçQ  «tapire  eaccre  «pris  le  mène  bw- 
heuT. 

^2)  \ojtt  le'TOjage  de  MH.  Spii  et  Hertiiis  (toI.  1  ) ,  onf rige  n  pkù 
de  MieDce  et  où  les  confeoinees  sont  si  biea  rwpectéet. 

(3)  Vojettuna  Aperçu  awnw)tafe^nërinUn«itt4uBr«til,4aÊ* 


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DU  RIO  DE  S.  nunasco.  iti 

tait  plus  aussi  variée  qbe  celle  de  Mimb  Geraes.  Jfe  n'af 
pas  besoin  de  dire  que,  dans  une  étendue  de  pins  de 
7  degrés,  passant  des  régicms  équiuoiiales  à  un  pays  situé 
hors  des  tropiques ,  je  dus  trouver  de  grandes  différences 
dans  les  détails  de  la  végétation.  Pendant  très-longtemps, 
□éanmoins,  son  ensemble  ne  m'en  offrit  auciHte  :  c'é- 
taient toujours  des  bonqnets  de  bois  et  des  eâmpos  par- 
semés d'arbres  Rabougris  ;  mais ,  parmi  ces  derniers ,  se 
montrent  d^à,  sur  le  territoire  de  Minas,  d'autres  campos 
seulement  composés  d'herbes.  BientAt  je  passai  la  limite 
des  boritys;  le  eapim  frecha  reparut  pour  caractériser  de 
gras  pttnrages  ;  je  inis  par  ne  voir  dans  oes  derniers  abso- 
lument aucun  arbre,  et  enfin,  à  une  distance  peu  considé- 
rable de  la  ville  de  S.  Paul ,  je  rentrai  dans  la  régùm  des 
foritt  :  la  Flore  des  aertÔet  du  S.  Francisco  et  du  midi  de 
Goyaz  avait  Eait  place  à  une  autre  Flore. 

J'ai  dit,  au  chapitre  intitulé.  Le  village  de  Contmbâ,  les 
Monte»  Pyreneos,  etc.,  que  la  route  de  S.  Paul  traterse 
Heiaponte;  par  conséquent,  j'étais  obligé  de  passer  une 
seconde  fois  par  ce  village  pour  aller  plus  loin.  Mais  le  che- 
min que  j'avais  suivi  de  Heiaponte  h  TîHa  Boa  n'est  pas  le 
seul  qui  mène  de  l'un  de  ces  lieux  à  l'autre  ;  il  en  existe 
encore  un  moins  firéquenté  :  ce  fut  celui  que  je  choisis  à 
mon  retour,  afin  de  voir  on  canton  que  je  ne  connaissais 
point  encore  (1). 

Il  était  déjà  fort  tard  quand  mes  préparatifii  furent  ache- 
vés ;  cependant  je  ne  voulus  point  remetb%  au  lendemain 

les  Mémotreê  du  jftwAmi,  vol.  IX,  et  Vlnlrodtielion  de  mon  onrrage 
intitulé  HUtoiré  dé*  plantei  let  plut  remargaablet,  etc. 

(1)  Itioéraire  (pproiimalir  de  Villi  Boa  ■  HeîiponU  par  le  chemin  ]r. 
iMiDi  fréquenté  : 


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I7ï  VOYAGE  AUX  SOURCES 

mon  départ  de  Villa  Boa,  pour  qu'on  n'eût  pas  une  seconde 
fois  l'embarras  d'aller  fort  loin  chercher  les  mulets.  Je 
pris  d'abord  la  route  que  j'avais  suivie  pour  me  rendre  i 
S.  José  et  au  Rio  Claro,  et  j'arrivai,  par  un  beau  clair  de 
lune,  au  lieu  appelé  As  Areas,  où  je  couchai  encore  ea 
pleia  air. 

Après  avoir  fait  environ  3  lej/oof  depuis  Villa  Boa,  je  quit- 
tai ,  h.  Gurgulho,  le  chemin  de  TAIdea  de  8.  José,  et ,  ayant 
doublé  l'extrémité  de  la  Serra  Dourada  opposée  à  la  ville,  je 
traversai ,  dans  une  direction  différente,  une  vaste  plaine. 
Là  s'offrit  A  mes  regards  une  agréable  alternative  de  bou- 
quets de  bois,  de  cantpo<  parsemés  d'arbres  rabougris  et 
d'autres  camfot  où,  ce  qui  est  fort  rare  dans  ce  pays,  il  ne 
croît  que  des  herbes  ;  je  laissais  derrière  moi  la  Serra  Dou- 
rada, et,  vers  ma  droite,  je  découvrais  les  collines  qui  boi^ 
nent  ta  plaine. 

J'avais  fait  3  lieues  depuis  Areas  lorsque  j'arrivai  sur 
les  bords  de  la  rivière  Urohû,  que  j'ai  déji  fait  connaître 
(p.  61]  ;  je  la  traversai  sur  un  poot  en  bois  fort  mal  enU^ 
tenu,  comme  le  sont  tous  ceux  de  l'intérieur  du  Brésil. 

A  peu  de  distance  de  ce  pont,  je  rencontrai  une  cara- 
vane qui  se  rendait  de  S.  Paul  à  Matogrosso  ;  elle  était  com- 

Da  U  ciU  de  Gojaz  k  Are*»,  eu  pleia  ■ir 1       legot. 

—  Sitio  dos  Coquetros,  petite  babitalioa.  .  .  31/2 

—  Hiodiaga,  petite  habititioa 4 

—  HâDJoliDha,  chaumière 3 

—  As  Civeiras,  chaumiire 1 

—  Lagoa  Grande,  maisoa 3  1/! 

—  Sitio  de  GoDsalo  Marques 3 

—  Fueuda  de  Joaquim  Alvea,  habilatioii.  .  .  S 

—  MeiapODtf,  village. .  .  .  .' 1 

Ti       tecoa». 


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DU  WO  DE  S.  FRANCISCO.  17a 

posée  de  pins  de  cent  malets  chaînés  de  diverses  mar- 
chandises. C'était  la  première  qui ,  cette  année-là ,  vttit  di- 
rectement de  la  Tille  de  S.  Paul  :  on  était  alors  au  S8  de 
juillet. 

Tous  les  campos  que  je  traversai  avaient  été  brâlés  ré- 
cemment ;  le  feu  avait  desséché  les  feuilles  des  arbres;  une 
cendre  noire  couvrait  la  terre  et,  encepté  dans  les  bou- 
quets de  bois,  on  n'apercevait  pas  la  moindre  rerdure  : 
cependant  le  ciel  est ,  dans  cette  contrée,  d'un  azur  si  écla- 
tant ,  la  lumière  du  soleil  est  si  brillante,  que  la  navire 
semblait  encore  belle  malgré  sa  nudité. 

Ce  jour-là ,  nous  fîmes  balte  an  Sitio  do$  Coqueirog  (la 
chaumière  des  cocotiers),  situé  sur  le  bord  d'un  raisseau, 
au  milieu  d'une'  multitude  de  Palmiers.  Ces  derniers  ne 
différent  point  de  ceux  que  j'avais  déjà  vus  dans  les  bois 
voisins  du  Rio  dos  Pilôes,  et  dont  j'ai  déjà  parlé  au  chapi- 
tre précédent.  Comme  je  l'ai  dit,  on  les  nomme,  dans  le 
pays,  macauba  :  ma  description  prouve  qu'ils  ressemblent 
beaucoup  à  une  espèce  du  même  nom  qui  croît  dans  le 
Sertâo  du  S.  Francisco ,  VAerocomia  scïeroearpa ,  de  Mar- 
tius  (1);  cependant  je  ne  saurais  croire  que  les  deux  arbres 
soient  identiques. 

Au  delà  du  Sitio  dos  Coqueiros,  je  traversai  un  pays 
plat  qui,  jusqu'au  lieu  appelé  Fronça  (France),  présente 
un  vaste  pâturage  parsemé  d'arbres  rabougris,  maîsoà, 
plus  loin,  s'élèvent  quelques  bouquets  de  bois.  La  chaleur 
était  excessive,  et,  dans  les  cmnpos  qui  n'avaient  pas  en- 
core été  inceodiés,  on  ne  voyait  qu'une  herbe  entièrement 
desséchée,  d'une  couleur  grisâtre. 


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174  VOYAGE  AUX  SODICES 

Je  De  sais  si  Fraoça  peut  esfétei  la  destinée  brillante 
que  non  uMn  semble  ennoocer;  mais,  lors  de  oion  voyage, 
ce  n'était  encore  qu'une  réunioa  de  qudques  diaumièns. 
Nous  y  demandâmes  le  chemin ,  on  nous  l'enseigna  mal  ; 
nous  nous  égarâmes  et  fCunes  fort  étonnés  d'amver  k  Mn- 
diuga,  cette  chaumière  où  enviriMi  un  mois  plus  tAt  j'avais 
vu  célébrer  la  ffile  de  S.  Jean  (1).  J'y  couchai  encore  une 
fois. 

Le  lendemain ,  je  rentrai  dans  la  route  qne  j'avais  quit- 
tée.  Après  avoir  foît  environ  3  îegoat,  parcourant  un  pays 
très-plat,  où  le  chemin  est  superbe,  comme  il  l'avait  été 
,  la  veille ,  j'arrivai  au  Mato  Grosso  que  j'ai  déjà  fait  goudbI- 
tre  (3).  Jusque-li  j'avais  traversé  des  eampot  parsemés  d'ar- 
bres rabougris.  Uo  peu  avant  la  forèt,  les  arbres  du  etanpo 
sont  un  peu  plus  élevés  et  plus  rapprodiés  les  uns  des  an- 
tres ;  cependant  la  transition  d'un  genre  de  végétation  i 
l'autre  est  ici  presque  aussi  brusque  que  vers  le  ^tïo  de 
Lage,  autrement  de  Dona  Maria  (3). 

Je  marchai  dans  le  Mato  Grosso  pendant  cinq  jours,  eo 
y  cMnprenant  celui  où  j'y  entrai,  et  f  y  fis  1S  Ugooê  et 
demie.  Le  chemin ,  si  beau  Auparavant,  devint,  daos  cette 
forêt,  extrêmement  diEBcile;  ce  n'était  plus  qu'un  sentier 
étroit,  sans  cesse  embarrassé  par  des  branchages  vX  des 
tntncs  renversés.  Toute  la  partie  de  la  forêt  que  je  parooB- 
nis  dans  ce  second  voyage  présente  une  végétation  beau- 
coup moins  vigoureuse  que  celle  du  voisinage  de  Loge.  Dn 
reste,  les  terres  du  Mato  Grosso  ressemblent,  en  betnooop 

(1)  Tofei  le  chipitrc  iDtitnlé,  u»  eMa§ti  it  Jarat*à.  tO^rt 
Fino,  d«  Ftrrtiro. 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  175 

(fendroite ,  à  celles  qai,  dans  les  Minas  ï(ovb8,  produisent 
DD  coton  d'une  qualité  si  fine  (1);  elles  sont  meubles,  très- 
fevorables  à  la  caltnro,  et,  comme  je  l'ai  dit  ailleurs,  le 
maïs  y  rend  300  pour  1  ;  les  haricots  de  40  à  50.  Il  parait 
qu'on  a  comm«icé  depuis  longtemps  &  faire  des  planta- 
tions dans  cette  forêt  ;  car,  en  plusieurs  endroits ,  on  voit 
de  grands  espaces,  oniquement  couverts  de  eapim  gor- 
dwra,  plante  qui,  comme  on  sait,  est  l' indice  certain  d'an- 
ciens défrichements.  Il  s'est  établi  an  milieu  du  Mato  Grosso 
an  grand  nombre  de  colons  qui  vendent  leurs  denrées  jk 
Villa  Boa,  mats  qui,  ayant  sang  doute  commencé  sans  pos- 
séder la  moindre  chose  et  n'étant  aucunement  favorisés  par 
l'administration,  restent  extrêmement  pauvres.  Le  troi- 
sième jour  de  mon  voyage  dans  ces  bois,  je  passai ,  an  lieu 
appelé  Potwo  Alto  on  PouMoi  (batte  élevée),  devant nne 
maison  qui  méritait  ce  nom  ;  mais,  jusqu'alors.  Je  n'avais 
TU  qu'une  demi-doozaine  de  chaumières  qui ,  pins  miséra- 
Mes  que  les  cabanes  des  Coyap6s,  n'avaient  pour  murailles 
que  de  longs  bAtous  rapprochés  les  uns  des  autres,  entre 
lesquels  devaient  nécessairenient  pénétrer  le  vent  et  la 
ploie.  Lors  de  mon  voyage,  une  partie  des  arbres  de  la  forêt 
avaient  presque  entièrement  perdu  leurs  feuilles,  et,  ex- 
cqité,  je  crois,  quatre  espèces  d'Acauthées  et  la  Composée 
^pelée  vnlgairement  assa  peiae  branoo,  toutes  les  plantes 
étaient  sans  fleurs  ;  les  tiges  du  eapim  gwdura  étaient 
complétHnent  desséchées,  et ,  comme  l'air  oe  circule  point 
dans  les  endroits  découverts  et  tout  entourés  de  bois  oà 
croît  cette  plante ,  on  y  ressentait  nne  chalenr  insupporta- 


(1)  Vo^te  daiu  Ut  provtneei  de  Rio  de  Janeiro  et  de  Minât  Ge- 
riM*,  II,  106. 


r„s,i,.,.d.i.  Google 


ITfi  TOYAOE  AUX  SOURCES 

ble.  La  terre  était  restée  si  longtemps  sans  être  humectée, 
que  les  pourceaux  et  les  bêtes  h  comes  ne  marchaient  point 
autour  des  habitations  sans  faire  voler  des  tourbillons  de 
poussière  :  partout  on  se  plaignait  de  manquer  d'eau  ;  plu- 
sieurs niisseaux étaient  à  sec,  et  dans  beaucoup deodroits 
on  ne  pouvait  faire  mouvoir  la  tnanjola  pour  avoir  de  la 
farine. 

De  Mandinga,  j'allai  coudierà  ManjolàAo,  l'ane  de  ces 
chaumières  dont  j'ai  parlé  tout  à  l'heure.  Le  propriétaire 
de  cette  misérable  demeure  ne  portait  que  des  haillons  ; 
mais  il  fut  pour  moi  d'une  politesse  extrême. 

La  chaumière  i'As  Caveiras,  où  je  devais  faire  halte,  à 
4  legoas  de  Manjolinbo,  n'avait  également  que  des  percbei 
pour  murailles,  et  elle  était  si  petite,  que  tout  mon  bagage 
n'aurait  pu  y  tenir  :  il  fallut  donc  me  résigner  à  coucher 
encore  une  fois  dehors,  la  nuit  fut  extrêmement  froide, 
la  rosée  fort  abondante,  et,  quoique  j'eusse  fait  placer 
mon  lit  auprès  du  feu ,  il  me  fut  presque  impossible  de 
dormir.  Au  lever  du  soleil,  le  thermomètre  n'indiquait 
que  ■+■  5°  Réaamur;  mais  presque  aussitAt  nous,  éprouvâ- 
mes une  chaleur  excessive,  ^,  à  5  heures  après  midi,  nous 
avions  encore  ■+■  26". 

Nous  étant  remis  en  marche,  nous  passâmes  devant  l'ha- 
bitation de  Pousoal  ou  Pouso  Alto ,  dont  j' ai  d^à  parlé,  et 
près  de  laquelle  une  grande  étendue  de  terrain  couvert  de 
capitn  gordura  indiquait  de  très-anciennes  cultures.  Cette 
habitation  appartenait  sans  doute  k  un  homme  aisé,  car  il 
me  6t  servir  de  l'eau,  que  j'avais  demandée  A  sa  porte,  dans 
un  de  ces  grands  gobelets  d'argent  attachés  k  une  cbaloe 
de  même  métal ,  qui  sont  un  objet  de  luxe  dans  l'intériMir 
du  Brésil. 


r„siiirrx,.i.  Google 


DO  RIO  DE  S.  nunCISCO.  ITT 

Ce  jour-là ,  je  rencontrai  dans  la  forêt  une  troupe  de 
gens  i  cheval,  conduisant  des  mulets  cbargés  de  provi- 
sions ;  parmi  eux ,  l'un  portait  un  drapeau,  un  autre  triait 
an  violon ,  un  troisième  un  tambour.  Ayant  demandé  ce 
que  tout  cela  signifiait,  j'appris  que  c'était  une  fblia,  mot 
dont  je  vais  donner  l'explication. 

J'ai  déjà  eu  occasion  de  dire  ailleurs  que  la  fête  de  la  Pen- 
tecôte se  célèbre  dans  tout  le  Brésil  avec  beaucoup  de  zèle  et 
des  cérémonies  bizarres  (1).  On  tire  au  sort,  à  la  fin  de  cha- 
que fête,  pour  savoir  qui  fera  les  principaux  frais  de  celle  de 
l'année  suivante,  et  celai  qui  est  élu  porte  le  nom  A'Empe- 
reur  [Itnperadùr].  Four  pouvoir  célébrer  la  fftte  avec  plus  de 
pompe  et  rendre  plus  splendide  le  banquetqui  en  est  la  suite 
indispensable,  l'Empereur  va  recueillir  des  ofiirandes  dans 
tout  le  pays,  on  bien  il  choisit  quelqu'un  pour  le  remjda- 
cer.  Mais  il  n'est  jamais  seul  quand  il  fait  cette  quête  ;  il  a 
avec  lui  des  musiciens  et  des  chanteurs,  et,  lorsque  la 
troupe  arrive  à  quelque  habitation,  elle  fait  sa  demande  en 
diantant  des  cantiques  où  se  trouvent  toujours  mêlées  les 
louanges  du  St.-Esprit.  Les  chant^irs  et  les  musiciens  sont 
ordinairement  payés  par  l'Empereur;  mais  très-souvent 
aussi  ce  sont  des  hommes  qui  accomplissent  un  voeu,  et, 
lors  même  qu'ils  reçoivent  une  rétribution,  elle  est  toujours 
fort  modique,  parce  qu'il  n'est  personne  qui  ne  croie  faire 
une  œuvre  très-méritoire  en  servant  ainsi  l'Esprit-Saiot. 
Ces  quêtes  durent  quelquefois  plusieurs  mois,  et  c'est  aux 
troupes  d'hommes  chargés  de  les  faire  que  l'on  donne  le 
nom  de  foUa.  Comme  chaque  paroisse,  chaque  succursale 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


ITS  TOT  AGI  AUX  SOCBCES 

est  bien  aise  d'atUrer  beaucoup  de  monde,  Ië  fèt6  ne  se 
célèbre  pas  le  même  jour  partout  :  aiasi  It  faiia  que  je 
reocoBtrai  dans  le  Mato  Grosso  appnrtenait  à  la  petite  ehs- 
peDe  de  Cwralùtho,  près  de  Villa  Bol ,  dont  la  fête  ne  de- 
vait se  faire  que  le  IS  du  moû  d'aoAt. 

An  ddà  du  Pousoa),  je  passai  le  ruisseau  de  Lagamba 
(petit  lac),  qui  sépare  la  paroilse  et  la  justice  de  ViUt  Boa 
de  la  juridiclion  de  HeiMpoote.  Je  recooDOs,  dans  le  lon- 
taln ,  la  Stats  de  Jaragu ,  qoe  f  ai  déjà  folt  connalUv. 

Tout  près  du  ruisseaude  Lagoinba ,  je  fis  balle ,  tu  lien 
appelé  iLo^oa  Grtmde  (grand  lac)«  diez  un  serrurier  qui  me 
permit  de  placer  mes  efiUs  dans  sou  atelier.  Auiffàs  de  la 
maison  est  le  lac  auqud  die  doit  son  non)  mais  alors  on 
n'y  voyait  pas  une  senle  goutte  d'eau,  tant  les  pluies,  cette 
année-là,  araieot  été  peu  abondantes. 

À  5  legoa»  et  demie  de  Lagoa  Grande,  je  fia  bulté  i  it 
chaumière  âppdée  Sitiv  4o  Gonmlo  Marquêt  (non 
d'homBK). 

Le  lendemain,  je  commentai  k  apercermr,  dans  le  loin- 
tain, les  montagnes  Totslnes  6e  Melkponte.  Je  conlinuali 
toujours  h  tiarconrir  le  Mato  Grauof  maisi  sur  une  cMe 
aride  st  péerreose ,  je  ne  tb  plus  que  des  «rbre»  nbougris 
dispersée  au  milieu  des  herbes,  absolument  ooMikedns 
les  plus  vastes  GaMfi».  Cette  sorte  de  véf^tion  indicpie 
toujours  des  terrains  moins  bons,  i^os  secs  ou  phn  exposés 
À  l'action  des  venti. 

Au  delà  de  Gonaalo  Marques,  je  Vis  dans  la  forêt  pta- 
sieurs  troupes  d'hommes  qui ,  dès  le  pr«oaier  moment,  me 
parurent  appartenir  è  une  autre  sous-race  qne  les  descen- 
dants des  Portugais.  Tous  avaient  les  cheveux  longs,  tan- 
dis que  les  Brésiliens  portent  des  cheveux  coupés;  leur 


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De  HIO  B£  s.  nUNCISGO.  1?9 

figure  était  plus  roede  qac  celle  d«  ces  demins,  et  leurs 
yeux  plus  grands;  leur  teint  était  basané,  sans  eRnr  cette 
DuaBce  de  jaune  qui  se  fait  remerciueT  ch^  les  mulâtres.  Je 
leur  adressai  la  parole;  ils  me  répondirent  avec  un  accent 
traînant  et  nasillard,  me  débitant  des  phrases  d'une  poli- 
tesse senrile,  qui  ne  sont  point  en  usage  ches  les  Putugais  : 
c'étaient  des  bohémiens.  QuMtiue  le  gouvernement  ait 
rendu  des  ordonnances  contre  les  hommes  de  cette  caste  [i], 
il  y  eo  a  encore  beaucoup  qui  errent  par  troupes  dans  l'in- 
térieur du  Brésil,  volant,  par  où  ils  passeot,  des  cocIkms 
et  des  poules  ;  choxhant  i  faire  des  échanges,  principale- 
ment de  chevaux  et  de  mulets,  et  trompant  cenx  qui  traitent 
avec  eux.  Quand  il  leur  naît  on  enfiint ,  ils  invitent  un  cul- 
tivateur aisé  à  6tre  parrain  et  ne  manquent  pas  de  tirer  de 
lui  quelque  aident;  ils  vont  ensuite,  plus  loin,  foire  la 
même  invitation  k  un  antre  colon ,  et  répètent  le  bapttoe 
autant  de  fois  qu'ils  trouvent  des  parrains  généreux.  Quel- 
ques-uns, cependant,  ont  formé  des  établissements  dnra- 
Ues  et  cultivent  la  tene.  Il  en  était  ainsi  de  ceux  que  je  reu- 
contrai  dans  le  Mato  Grosso;  il  y  avùt  déjà  plusieurs  aunées 
qu'ils  s'étaient  fixés  dans  ce  canton  ;  le  commandant  de 
Heiaponte,  de  qui  ils  détendaient,  m'assura,  plus  tard, 


(1)  ■  Pir  nue  biufrerie  iaconcevable ,  dU  H.  d«  Frejcinet,  le  gon- 
vernemeul  portagiis  tolère  cctie  peste  publique  {Voyage,  Uranit,  hii- 
loriqve,  I,  iVt).  •  L'administritioD  fran^iw  oe  repoasse  pu  Don  pins 
kt  bobémiMiB;  or,  defraisbien  deaManfcs,  iteoeiisle,  k  MontpeUier, 
un  ceitUB  nombie ,  et  il  «si  difficile  de  deviner  ce  qu'il  ;  ■  de  biiure 
dans  cette  lolérince.  Oa  doit  fure  des  efforts  pour  incorporer  ces  boni- 
mes  dsns  ta  société  chrétienne  et  les  punir  quand  ils  violent  les  lois; 
miii,  puisqu'ils  «ist»t,  M  tmt  bien  qa'ib  Mient  quelle  part,  el 
pourquoi  ne  les  soulTrirail-VD  pas  eonuoe  on  sonffre  les  Jaifsl 


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180  TOTAOE  AUX  «ODBCIS 

qa'ils  se  conduisaient  bien ,  qu'ils  remplissaient  leurs  de- 
voirs de  chrétiens ,  mais  que,  malgré  ses  défenses ,  ils  reve- 
naient encore  de  temps  en  temps  à  leur  goût  pour  les 
échanges. 

A  5  legotfs  de  Gonsalo  Marques,  je  fis  hall«  i  la  fazenâa 
du  commandant  de  Meiaponte,  M.  Joaquih  Alves  db  Oli- 
vEiBA,  ponr  lequel  le  gouverneur  de  la  province  m'avait 
donné  une  lettre  de  recommandation,  et  dont  il  m'avait  fait 
un  grand  él(^e.  Je  ftis  parfaitement  reçu  de  lui ,  et  Je  pas- 
sai quelques  jours  dons  son  habitation. 

M.  Joaqnim  Alves  de  OliVeira  était  Vartisan  de  sa  fortune 
et  en  possédait  une  considérable.  Il  avait  été  élevé  par  un 
jésuite,  et  il  parait  qu'il  avait  puisé  à  cette  école  cet  esprit 
d'ordre  et  de  discrétion  qui  le  distinguait  si  essentiellement 
parmi  ses  compatriotes.  Il  fit  d'abord  le  commerce;  mais. 
comme  il  avait  plus  de  goût  pour  l'agriculture,  il  finit  par 
renoncer  presque  entièrement  aux  affïiires  mercantiles  : 
cependant  il  se  livrait  encore  à  des  spéculations  commer- 
ciales qaand  il  en  espérait  un  bénéflce  [de  quelque  impor- 
tance; ainsi,  lors  de  mon  voyage,  il  venait  d'envojer  son 
gendre  h  Cuyabé,  avec  une  caravane  très-considérable, 
chargée  de  diverses  marchandises.  Mais  le  commandant  de 
Meiaponte  ne  parlait  jamais  de  ses  affaires  à  qui  que  ce  filt , 
et  personne  ne  savait  s'il  avait  gagné  ou  perdu  dans  ses 
entreprises.  De  tous  les  Brésiliens  que  j'ai  connus,  c'est 
peut-être  celui  duquel  j'ai  trouvé  le  plus  de  haine  pour  l'oi- 
siveté :  j'accorde  À  mes  hAtes,  me  disait-il  en  riant ,  trois 
jours  de  repos  ;  mais,  au  bout  de  ce  temps,  je  me  décharge 
sur  eui  d'une  partie  de  la  surveillance  de  ma  maison.  La 
conversatton  de  Joaquim  Alves  annonçait  un  grand  amour 
pour  la  justice  et  de  la  religion  sans  petitesse  ;  c'était  un 


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DD  RIO  DE  S.  FKARCISCO.  ISl 

e  de  beaucoup  de  sens,  d'une  simplicité  parfaite  et 
d'uoe  bonté  extrême. 

La  faunàa  de  Joaqnim  Alves,  créée  par  son  pnH>r>é- 
laire,  d' avait  d'autre  oom  que  le  sien  (1);  c'était  bien  cer- 
tainement le  )das  bel  établissement  qui  existât  dans  toute 
la  partie  de  Goyaz  que  j'ai  parcourue.  Il  y  régnait  une  pro- 
preté et  un  ordre  que  je  n'ai  vus  nulle  part.  La  maison  du 
maître  n'avait. que  le  rez-de-chaussée;  on  n'y  voyait  rien 
de  magnifique,  mais  elle  était  très-vaste  et  parfaitement 
entretenue.  Une  longue  varaitda  (2)  s'étendait  devant  les 
bâtiments  et  procurait,  à  tous  les  instants  du  jour,  de  l'om- 
bre et  un  air  libre.  La  sucrerie,  qui  tenait  à  la  maison  du 
maitre,  était  disposée  de  manière  que,  de  la  salle  À  manger, 
ùa  pût  voir  ce  qui  se  faisait  dans  le  bâtiment  où  étaient  les 
chaudi^es ,  et  de  la  varanda ,  ce  qui  se  passait  dans  le 
moulin  à  sucre.  Cette  dernière  donnait  sur  une  cour  carrée. 
Une  suite  de  pièces,  la  sellerie,  l'atelier  du  cordonnier,  ce- 
lui du  serrurier,  l'endroit  où  l'on  mettait  tout  ce  qui  est 
nécessaire  aux  mulets,  enfin  les  écuries  prolongeaient  les 
bâtiments  du  maître  et  donnant,  comme  ces  derniers,  sur 
la  cour,  rormai,ent  un  de  ses  câtés.  Un  autre  cAté  était 
t<ycmé  par  les  cases  des  nègres  mariés,  séparées  les  unes  des 
autres  par  des  murs,  mais  placées  sous  un  même  toit  qui 
était  couvert  en  tuiles.  Des  murs  en  pisé  fermaient  la  cour 
des  deux  autres  cAtés. 

Toute  cette  maison  avait  été,  dans  l'origine,  si  parfaite- 
ment montée,  que  le  maître  n'avait ,  pour  ainsi  dire,  plus 

(1)  Hittot  appelle  cette  belle  hibititioD  Engenho  (sucrerie^  de  S.  Jotx- 
q*im  ;  elle  aura  Mue  donte  reta  ce  nom  postérieurement  h  l'époque  de 
mon  vojage. 

i2)  J'ai  décrit  ailleurs  ces  espèces  de  galeries  ouveites  sur  le  deviiut. 


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18S  VOYA«E  AUX  SOURCES  > 

besoin  de  donner  aucao«rdre  :  diacun  savait  ce  qu'il  avait 
à  faire  et  se  rangeait  de  lui-même  à  la  place  qu'il  devnt 
occuper.  Tour  se  fUre  comprendre,  le  commaBdant  de 
Heiapont«  pouvait  se  cetflenter  -de  'dire  nue  seule  parole 
ou  m£me  de  faire  Tia  geste.  Aa  milieu  de  cent  esclaiTee,  on 
n'aitendait  pas  un  seul  cri  ;  on  oe  Toyait  point  de  ces 
hommes  empressée  qui  vont,  qui  viennent,  «t  dont  les 
mouvements,  sons  l'apparence  de  l'activité,  n'iadiquenl 
réefleiAent  qoe  l'embarras  de  savoir  à  quoi  s'occuper  ;  par- 
tout le  silence,  l'ordre  et  une  sorte  de  tranquillîté  en  har- 
monie avec  celle  qui  règne  dans  la  natare  sous  ces  beHreoi 
dimals.  On  auraitdit  qu'un  génie  invisible  gouvernait  cette 
maison;  le  maître  restait  tranquillement  assis  sous  sa  va- 
ranâa ,  mais  il  était  aisé  de  voir  que  rien  ne  liïi  écbappaK, 
et  qu'un  coup  d'œil  rapide  lui  suffisait  pour  tout  aper- 
cevoir. 

La  r^e  que  s'était  Taite  Joaqnîm  Alves dans  la  condolle 
de  ses  esclaves  était  de  les  nomrir  abondamment,  de  les 
Iiabiller  d'une  mani^  convenable,  d'avoir  le  plus  grand 
soin  d'eus  qnand  ils  étaient  malades  et  de  ne  jamais  le»t 
laisser  oisib.  Tous  les  ans,  il  en  mariait  quelques-uns  ;  les 
mères  n'allaient  travailler  dans  les  plantetiom  que  quand 
les  enfants  pouvaient  se  passer  d'elles,  et  alOTs  ils  étaient 
confiés  à  une  seule  femme  qui  prenait  soin  de  tous.  Une 
sage  précaution  avait  été  prise  pour  prévenir,  autant  qne 
possible,  les  jriousies,  le  désordre  et  les  rixes;  c'était  d'é- 
loigner beaucoup  les  cases  des  nègres  célibataires  de  celles 
des  tiommes  mariés. 

La  journée  du  dimanche  appartenait  aux  esclaves;  it 
leur  était  défendu  d'aller  chercher  de  l'or,  mais  on  leur 
donnait  des  terres  qu'ils  pouvaient  cuKirer  à  leur  profit. 


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DP  KUt  DE  s.  PRUfCISCO.  ISS 

Joaquin)  Aivee  «vait  établi,  éaas  sa  profwe  inaisoD,  une 
vmia  où  ses  nègres  trouvueat  les  difféE^ts  objets  qui  sont 
ordinaireineiit  àa  goût  des  Africaios,  ot  c'était  le  cotoo  qni 
servait  de  moDuaie  ;  par  ce  Doofen  ,  il  éloignait  de  ces 
hommes  la  teutt^ioa  du  vol  ;  il  les  excitait  au  traTail  en 
teuf  damnant  w  grand  «Btéritt  à  cuttiver,  il  les  attachait  au 
pays  et  i  leur  oiallxe,  et  e»  même  temps  il  ao^neptait' 
les  produits  de  sa  terre. 

Pendairt  que  j'étais. dtes  le  commandant 4e  Usiapoote, 
je  visitai  les  différentes  parties  de  sou  ^bUsaement;  re- 
table à  porc,  les  granges,  le  moulin  à  farine,  l'endroit  où 
l'«B  lApait  les  racines  4e  manioc,  celui  où  était  placée  la 
macbiae  4eBUaée  i  e^rer  le.cotoii  de  ses  graines,  la  fila- 
ture, etc. ,  et  partout  je  trouw  un  ordre  et  une  propreté 
remarquables.  Les  fourneaux  de  la  sucrerie  n'avaiest  polot 
Éijk  constnuts  d'après  les  principes  de  la  science  medwne, 
«Mis  oïD  les  chauffait  par  le  .dehors,  ce  qui  rend  moiDS  pé- 
JDJUe,  pour  las  travailleurs,  l'opération  de  la  ouUe.  Un 
tambour  borûoatal  que  l'eau  mettait  en  mouvement  faisait 
toweer  d«UK  de  ces  petites  macbÎDes  appdées  diKoroça- 
doTH,  qui  servent  à  séparer  Je  coton  de  ses  aemenoes  (1). 
Cétait  légalement  l'eau  qui  faisait  mouvoir  k  macbiae  è 
r^ter  Je  mastioc  dojit  je  vais  doiuier  la  description.  Le  bâ- 
timent où  était  pjaoée  la  rJipe  .s'élevait  s«r  des  poteaux;  au- 
4easouBdesoD  plaoober,  entre  les  poteaux,  l'eau,  apportée 
par  un  conduit  incJÏDé ,  frappait  une  roue  borixcuitaie  et 
lafusaitMnvneriJ'vedela  roue  Uaversalt  le  plancher  de 


(1)  Vo]^  1«  dcMiiptioa  <k  ces  petites  rnseliiiies  et  des  tambours  dont 
je  parie  ici ,  dtna  mon  yçnage  datu  Ut  provincei  île  Bio  de  Janeiro  ri 
Ile  Minai Ctraet.  io\  l.we.ll,»!. 


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184  VOYAGE  AUX  SODHCES 

la  pièce  supérieure  et  s'y  élevait  jusqu'à  hauteur  d'appui  ; 
à  son  extrémité  était  Siée  uae  autre  roue  borizoutale  doat 
le  bord  était  revêtu  d'une  râpe  en  fer-blaoc  ;  l'axe  et  la  se- 
conde roue  étaient  encaissés  entre  des  planches  qui  for-, 
niaient  un  prisme  quadrangulaire,  dont  chaque  cMé  oflirait 
une  échancrure  répondant  À  la  ripe;  quand  la  roue  tour- 
nait, quatre  personnes  à  la  Tois  présentaient  des  racine»  de 
manioc  à  la  r&pe,  et,  comme  elles  les  appuyaient  dans  les 
échancrures  des  {^anches  du  prisme,  learg  bras  ue  pou- 
vaient les  foire  vaciller,  et  l'action  de  la  machine  n'était 
jamais  interrompue. 

Le  commandant  de  Meiaponte  avait  renoncé,  pour  une 
partie  de  ses  plantations,  à  la  manière  barbare  de  cultiver 
la  terre  qu'ont  généralement  adoptée  les  Brésiliens;  il  bï- 
sait  usage  de  la  charrue  et  fumait  son  terrain  avec  de  la 
bagasse  (1)  :  par  ce  moyen,  il  n'était  point  obligé  d'incen- 
dier, chaque  année,  de  nouveaux  bois  ;  il  replantait  la  canne 
dans  la  même  terre  et  conservait  ses  plantations  près  de  sa 
maison,  ce  qui  rendait  sa  surveillance  plus  facile  et  écono- 
misait le  temps  de  ses  esclaves.  Il  vendait  i  Meiaponte  et  i 
Villa  Boa  son  sucre  et  son  eau-de-vie  ;  mais  il  cultivait  le 
coton  pour  en  foire  des  envois  à  Rio  de  Janeiro  et  k  Bahia. 
C'est  lui  qui,  le  premier,  avait  donné,  comme  je  l'ai  déji 
dit ,  l'utile  exemple  de  ces  exportations ,  et  cet  exemple 
avait  été  suivi  par  plusieurs  autres  colons.  Lors  de  mon 
voyage ,  il  avait  le  projet  d'étendre  encore  davantage  la  cul- 
ture du  cotonnier  sur  son  habitation,  et  il  voulait 'établir, 
dans  le  village  même  de  Meiaponte,  une  machine  pour  sé- 


(1)  La  bagatse  est  [■  ciDoet  sucre  qai  ■  passé  cnlr«  IneflindresM 
dont  la  jas  a  été  eiprimé. 


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DO  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  189 

parer  le  cotoo  de  ses  graioes,  ainsi  qu'une  filature  où  il 
comptait  employer  les  femmes  et  les  eafants  sans  ouvrage. 
Déponilié  de  ses  semences,  le  coton  du  pays,  dont  la  qua- 
lité est  fort  bdle,  s'achetait  alors,  sur  les  lieux,  5,000  reia 
(f  8fr.  75  c.}  l'arrobe  (1)  ;  le  transport  de  Meiapocte  k  BahlB 
éUitde  1,800  reis  (11  rr.âKc.)pararrobe,oude3,000reis 
(13  fr.  50  c.)  jusqu'à  Rio  de  Janeiro  (2},  et  il  y  avait  un 
bénéfice  si  assuré  à  foire  des  eorois  à  ces  prix,  que  Joa- 
quîm  Alves  avait  offert  sans  bésitatiou  k  tous  les  cultivateurs 
du  pays  de  leur  prendre  leur  coton  k  raison  de  5,000  reis. 
En  signalant  une  denrée  que  l'on  pouvait  exporter  avec 
avantage,  le  commandant  de  Meiapoute  faisait  entrer  ses 
compatriotes  dans  use  voie  nouvelle;  il  montrait  ce  qu'il 
fallait  faire  pour  arracher  son  malheureux  pays  à  l'état  de 
miaè^  ou  l'a  plongé  l'extraction  de  l'or  mal  dirigée.  Tan- 
dis qu'il  agissait,  plusieurs  de  ses  concitoyens  soutenaient 
qu'il  n'y  avait  de  salut,  pour  la  province,  que  dans  la  réa- 
lisation d'une  idée  absurde  émise  par  Luiz  Antonio  da  Silra 
e  Sousa  (3)  :  pour  arrêter  la  décadence  qui ,  chaque  jour, 
foisait  des  progrès,  il  fallait,  disaient-ils,  empêcher  l'or  de 


(1)  L'uTobe  de  Rio  de  Janeiro,  selon  l'évalnitiOD  de  H  de  Frejcinet 
et  de  M.  Verdier,  raut  14  kilog.  T4M0. 

(J)  Si  JMqaîm  Aires  troavut  i  eipédierkde  si  baspiii,  c'est  qa'il 
n'j  arftit  lucaue  deaunde  de  chargeioeiit  de  Qoju  pour  Rio  de  JaDciro  ; 
le  prin  de  Rio  de  Janeiro  h  Goyu  était  bien  plus  élevé,  comme  ou  peal  le 
voir  au  chapitre  de  cet  ouvrage  intitulé  ,  Voyage  iTAriLxà  à  ParacatA 
(vol.  I,  S59J.  L'augmentalioa  de  la  quautilé  de  coton  i  eipédier  aura  Tait 
sans  doute  hausser  les  tttis  de  traosport  ;  mais  ils  D'auTout  pu  dépasser 
certaines  limites,  parce  qu'alors  il  n'j  aurait  pas  en  d'eiporutions  pos' 
siblea,  et  que  les  nnletiers  eut-m£mes  Claieni  fortement  inl^ress^a  k  ce 
qu'elles  coatinnasseot.' 

l3]  llernoria  toàre  o  dttrobrimtnUi,  etc.,  da  rapilania  de  Gnyas. 


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sortir  dy  pays,  eD créant  une  taoBniie  proviaciale.  «  Haïs, 
pouvait-on  leur  r^wndre,  n  cette  stonasie  o'eit  point  iwe 
valeur  métallique,  ou  n'est  paséchuigeableii  voloatâ  caatre 
une  valeur  jnétallique,  il  o'eit  ^8  de  puHHBce  humÙDe 
qui  puisse  (ui  «iMiaer  quel^pie  crédit.  Si ,  au  ctwtraîre,  la 
moonwe  est  de  oaivre,  d'or  ou  d'argent,  elle  sortira  de 
votre  province,  malgré  les  ptusrigour^isea  défeoBCs,  coaune 
IW  en  poudre  ea  sert  tous  les  jours;  mais  bh  delà  ie  vos 
limites  on  la  prendra  setdement  pour  sa  T«le«r  intriMè' 
que ,  et  les  négocianta  4t  rotre  pays  Tesdueot  leurs  mar- 
chanéiiesà  des  prix  ^lU  lesdédonmageroetdelapMlell]. 
L'or  altéré  qui  circirie  à  Goyaz  peut  déji  6tre  ^oosid^ 
comme  une  sorte  de  monnaie  prorJDCùle,  puisqu'il  ne  peut 
«voir  cours  ailleurs,  et,  quand  le  commerçaat  l'eiporte,  il 
est  obligé  de  le  réduire  i  sa  véritable  valeur  en  le  oettoymt, 
pois  il  proportionne  ses  pris  k  la  diminution  qu'il  a 
éprouvée.  » 

Après  tant  de  Journées  aussi  eMiuyeuses  que  fatigantes, 
passées  au  milieu  de84éeerts,  j'étais  heoreux  de  me  truner 
dans  une  maison  qui  réunissait  toutes  Les  commodités  qoe 
,  le  pays  peut  offrir,  où  je  jouissais  d'une  entière  liberté,  et 
dont  le  propriétaire,  homme  éclairé,  était  pour  moi  plein 
de  bienveillance.  Le  temps  que  >e  passai  cbez  Joaqiùip 
Alves  fut-empioyé  tFàs-Btil«ment.  Mes  geae  fireut  une  sd- 
pertte  cfaasse  sur  les  bords  d'un  petH  lac  voisin  de  l'iMbita- 
tion  ;  moi ,  je  rédigeai  une  partie  des  renseignements  que 


(I)  Cest  c«  qai  ■  dA  oéetsMircneM  arrivef  ponr  la  ntonoaic  de  tm- 
vre  que  le  gonrcraeineot  proviDoiil  «  Hiirodaiu  dana  l«  p«;i  de  fiofv, 
et  k  laquelle  aa  a  donné  une  valear  liclive  (voj«i  le  cbap^re  iDiilvIé, 
l'aNtoH  générât  de  la  provlnn  àt  Got/as.Yoi.  I,  341). 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  18T 

j'avais  pris  sur  plusieurs  sujets,  et  j'en  puisai  de  nouveaux 
dans  la  conversation  de  mon  bâte  (1). 

Je  quittai  la  Faienda  de  Joaquîm  Aires  plein  de  recon- 
naissaoce  pour  l'exceHent  accueil  qae  m'avait  fiiït  le  pro- 
priétaire, et  me  dirigeai  vers  Meiaponte,  Soigné  d'environ 
.1  lieue. 

Je  parcourus,  jusqn'an  village,  un  pays  montueux  par- 
semé d'ai1>res  rabougris,  et  ne  revis  plus  le  Mato  Grosso. 

A  partir  de  Meiaponte,  je  rentrai  dans  le  véritable  che- 
min de  Goyaz  à  S.  Paul.  Le  premier  village  où  je  passai  est 
celui  de  BomPim,  sitoé  à  16 1ego<a  de  Meiaponte.  Dans  tont 
cet  espace,  le  cbemin  est  gupert»;  le  pays,  d'abord  monta- 
gneui,  finit  pas  devenir  simplement  ondulé.  La  campagne 
nlhe  toujours  une  alternative  de  bois  et  de  cmvpos  parsemés 
d'arbres  rabongris ,  les  mtoies  qui  croissent  dans  le  Sertâo 
de  Minas.  Amesurequela  saison  avançait,  la  sécheresse'deve- 
nait  plus  grande  et  la  rue  des  campos  était  d'une  tristesse 
mort^le.  Dans  ceux  que  l'on  avait  nouvellement  inoendiés 
(quemadas),  on  n'apercevait  sur  la  terre  qu'une  cendre 
noire,  et  les  feuilles  qui  restaient  aux  arbres  étaient  complè- 
tement desséchées  ;  partout  où  on  n'avait  pas  encore  mis  le 
feu,  l'herbe  avait  une  couleur  grise,  et  les  arbres  épars  su 
milieu  d'elle,  ou  étaient  entièrement  -dépouillés,  ou  n'a- 
vaient plus  qu'un  feuillage  jaunissant. 

(I)  tapais  U  révolution  qui  a  chaagé  la  bwia  Brésil ,  Joiquim  Al- 
ves  de  Oliveira  ■  été  uommé  député  ï  l'asseinbMe  légisUtivc  génértie  du 
Brésil  ;  mois  il  n'a  point  accepté  est  bouueur.  Non-sealement  cet  bomme 
généreux  a  formé  uoe  pbarmarie  pour  ks  pauvres  de  aou  district,  mais 
encore  il  a  doté  la  rille  de  Meiaponte  d'une  bibliothèque  publique  et  d'une 
imprimerie.  U  lui  avait  été  prédit  qu'on  se  servirait  de  cette  deruière  con- 
tre lui-même,  et ,  effectivement ,  on  n'a  pas  tardé  h  chercher  i  le  noircir 
dans  un  libelle  plein  de  ciloronice  tMtTTOS,  Itin.,  1, 129,  151;  11,341^. 


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ISa  VOïAGE  AUX  SOURCES 

J'aurais  vaineinent  cherché  i  découvrir  quelque  trace  de 
culture;  ici  comme  ailleurs,  c'est  dans  les  fonds  que  l'on 
a  coutume  de  planter,  et  les  seules  queimadas  m'aDDon- 
çaientle  voisinage  de»  habitations  (1). 

A  3  legoat  de  Meiaponte,  je  fis  halte  au  Sitùt  dat  Funuu 
(la  chaumière  des  cavernes] ,  qui  se  composait  de  quelques 
petits  bfltiments  épars  et  à  demi  ruinés,  construits  dans  nu 
fond. 

Avant  que  j'arrivasse,  la  maîtresse  de  la  maison,  dont  le 
mari  était  absent,  avait  voulu  donner  à  mes  gens  une  cham- 
bre fort  petite  et  d'une  saleté  extrême.  Ils  avaient  demandé 
qu'on  leur  permit  de  s'installer  dans  la  grange;  cette  lé- 
gère faveur  ne  leur  avait  pas  été  accordée.  A  mon  arri- 
vée, je  réitérai  la  même  demande;  mais,  si  j'obtins  ce  que 
je  sollicitais ,  ce  fut  seulement  après  bien  des  prières  et  des 
pourparlers.  Je  ne  vis  cependant  point  celle  à  qui  j'avais 
affaire;  elle  envoyait  sa  négresse  me  porter  ses  réponses, 
mais  je  l'entendais  jeter  les  hauts  cris  au  fond  de  sa  maiscn, 
et,  à  chaque  fois  que  l'esclave  paraissait,  elle  ne  manquait 
pas  de  me  dire  que  sa  maîtresse  voulait  que  je  susse  qu'elle 
était  bien  légitimement  mariée  et  méritait  toute  sorte  d'é- 

(1)  llin^raiTe  «pproiimatiT  de  Heiaponte  an  village  de  Bom  Fim  : 
De  Ueiaponle  au  Sitia  dis  Faroas,  maisODaetles 3        legoas. 

—  Sitio  di  Forquilha,  maisonoette.  ...      41/3 

—  Faienda  dasAnUi,  babiUtiim 3 

—  Pyracanjnbt,  hameau 4  1/t 

—  Bom  Fini,  village 3 

"Is        iegoti. 

HaltoB  n'éTilue  qu'k  17  Uçoa*  la  disUoce  de  Heiipoate  à  Bora  t'iat, 

et  i.uii  d'Aliucourt  ne  la  porte  qu'à  15  Ce  UerDier  chiffre  esi ,  eaiu  ib 

CUD  doate,  ioeiact  ;  car  il  j  a  cerUinement  plus  de  1  lieue  de  Heiapnole 

à  Furnas,  ftd'AlincouTtn'eD  admet  qu'une  (Mehi.  Viag.,  111). 


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DU  UO  DE  S.  FRANCISCO.  189 

gards.  Cette  recommandation,  tant  de  Tois  répétée,  indi- 
quait assez  ce  que  sont  les  mœurs  de  ce  pays  ;  il  Taut  que  le 
mariage  y  soit  bien  rare,  puisqu'on  s'en  fait  ainsi  un  titre 
d'honneur. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  faveur  de  coucher  dans  la  grange  ne 
Diëritait  assurément  pas  qu'on  ta  fît  valoir  autant,  car  nous 
y  étions  horriblement  mal.  A  chaque  pas  que  nous  faisions, 
les  épis  de  maïs ,  répandus  sur  la  terre ,  roulaient  sous  nos 
pieds  et  amenaient  quelque  chute  ;  tes  malles  qui  nous  ser- 
vaient, à  toutes  les  haltes ,  de  tables  et  de  sièges  étaient  si 
mal  assurées,  que  nous  ne  pouvions  nous  asseoir  dessus,  et, 
si  quelque  objet  nous  échappait  des  mains,  il  fallait  perdre 
an  temps  infini  à  le  chercher  au  milieu  du  maïs. 

En  quittant  le  Sitîo  das  Fumas,  nous  traversâmes  un 
trais,  et,  montant  toujours,  nous  finîmes  par  nous  trou- 
ver sur  un  plateau  élevé,  couvert  d'herbes  et  d'arbres  ra- 
bougris. Dans  cet  endroit,  une  vue  d'une  immense  éten- 
due s'offrit  à  nos  regards  :  nous  distinguions,  d'un  cdté,  la 
Serra  Dourada,et,de  l'autre,  les  Montes  Pyreneos  avec  leurs 
pointes  pyramidales.  Ce  plateau  se  continue,  dans  un  espace 
de  2  îegoas  et  demie,  jusqu'au  Sitio  dos  Abrantes. 

Là  est  une  vallée  couverte  de  bois  où  coule  le  Rio  Capi- 
ixirfty  (riwè-e  des  Cabiais)  (4),  sur  le  bord  duquel  je  vis  une 
sucrerie  assez  considérable  pour  le  pays.  Le  Rio  Capivarhy 
est  un  des  affluents  de  la  rive  droite  du  Rio  Corumbâ  dont 
j'ai  déjà  parlé  (3). 

(1)  Il  ciisl«  des  rivières  du  même  nom  dans  1»  proTinces  de  Rio 
Gnode.deS.  Paul,  d«  Sainte-Catherine .  de  Minas  Geraes,  etc.,  ceqni 
proave  que  les  cabiais  étaienl  jadis  trèa-cammana  dans  le  Brésil.  Ou 
peut  écrire  aussi  Capibarky. 

(S)  NH.  Hilliel  et  Lopes  de  Houra  disent  que  les  voyageurs  traver- 


se! r^iGoOglc 


190  TOYiUÎE  AUX  SOUKGCS 

Un  peu  BTBDt  d'arriver  aux  Àbrantes,  je  me  trompai  de 
chemin;  mais  beureusemeet  j'aperçus  ud  tKHsme  (pii  me 
remit,  avec  une  extrême  coD^issoce,  dai»  la  vérttable 
route.  Durant  toute  cette  Journée,  qui  fiit  de  4  Ugotu  ist 
demie,  je  ne  rencontrai  pas  d'autre  personne,  et  cependant 
je  suivais  le  dtemin  le  plus  fréquenté  de  la  province  de 
Gojai. 

Ce  jour-là  nous  flmee  halte  i  une  maison  qui ,  o^ime 
toutes  celles  de  ce  pays,  était  en  asseï  mauvais  état ,  d  qui 
portait  le  nom  de  Sitio  da  ForquUha  (pedte  habïtatioa  de 
la  fourche).  Cette  maison,  près  de  laquelle  je  retrouvai  le 
Rio  Capivarhy,  appartenait  k  des  femmes  blanches;  die  ne 
se  cachèrent  point  i  notre  aq>ect  et  furent  beaucoup  plus 
polies  que  celle  de  Fumas. 

Peu  de  temps  après  moi  arrivèrent  à  Forquilha  deux 
propriétaires  aisés  de  Heiaponte  qui  se  readaient  à  Btm 
Fim  pour  assister  k  une  fête  qu'os  était  sur  le  point  d'y  cé- 
lébrer. Suivant  l'usage  généralement  adopté  par  les  gens 
riches,  ils  étaient  luîvis  d'un  négrillon  qai,  k  cheval  comme 
eux,  portait  k  son  cou  ud  grand  gobelet  d'argent  suspendu 
â  une  chaîne  de  même  métal;  leurs  éperons  étaient  d'ar- 
gent i  des  bandes  d'argent  serraient  les  retreussis  de  leurs 
bottes^  des  plaques  d' aident  gamissaieut  les  brides  de  lean 
chevaux  ;  enfin  un  grand  couteau  à  manche  d'argent  ^it 
enfoncé  dans  une  de  leurs  bottes.  Cette  ostentation  d'ar- 
genterie est  générale,  et,  laplnpart  du  temps,  les  gens  qui 
étalent  tout  ce  luxe,  quand  ils  font  une  visite  k  cheval  ou 
vont  en  voyage,  n'ont  pas  un  seul  meuble  dans  leur  maison. 

KDtle  Rio  Cipivarli]'  dans  des  pirogues  (Dire,  1,  i38).  Ce  sera  potf- 
#Ue  dans  il  saitou  des  pluieii. 


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DU  MO  M.  9.  FUNCISCO.  IM 

Au  delàde  Forquilba,  dam  quelque»  endroits  oà  I»  terre 
était  moins  ronge  qu'ailleurs,  ks.péturages  ne  se  compo- 
ïaientqued'berbesetdesoUB-arbrisdeaux,  ce  qui,  à  Goyaz 
est  une  véritable  rareté.  Dans  uu  e^iace  de  7  à  S  lego€u,  de- 
puis Forquilba  jusqu'ao  hameau  de  Pjfractmjuba,  dont  je 
parlerai  tout  à  l'beure,  la  campagne,  brâlée  par  l'ardeor  du 
soleil ,  avait  à  peu  prè»  l'aspect  que  présente  le  Gatidais 
vers  la  mi-octobre,  lorsque  toutes  les  récoltes  ont  été  faites 
et  que  la  mauvaise  saison  a|>procbe. 

A  5  kgoat  de  Forquilba,  je  fis  halte  à  la  F<amda  dot 
ArUas  (des  tapirs),  située  au-dessus  de  le  rivière  du  même 
nom  (Rio  dm  Anta») ,  encore  un  des  afSuents  du  Rio  Co- 
ruœbi.  Cette  feamda  était  une  sucrerie  qui  me  parut  en 
fort  mauvais  état,  maisd'où4épendait  un  raneAo  très-pro- 
pre et  fort  grand ,  sous  lequel  nous  nous  étaUtnles. 

Comme  celui  d'Areas,  dont  j'ai  parlé  dans  un  des  cha- 
pitres précédents  (1),  ce  raneho  était  entouré  de  gros  pieux 
de  la  hauteur  d'un  homme,  n\û  formaient  une  espèce  de 
muraille  et  |Ȏservaietit  les  voyageurs  de  la  visite  fort 
importune  des  chiens  et  des  poutcceux. 

Ce  fut  sous  ce  hangar  que  je  trouvai  ces  marchands 
d'AraxÀ  dont  j'ai  déjà  eu  occasion  de  dire  quelques  mots 
ailleors  (3}.  Ces  hommes  parcouraient  les  fcatnda»  avec  des 
couvertures,  du  plomb  pour  la  clusse  et  d'antres  obj^ 
qu'ils  échangeaient  contra  des  Mtek  i  CorAes.  Us  devaient 
emmener  ces  beetiaui,  les  laisser  engifaitser  dans  les  excel- 
lents pâturages  de  leur  pays,  et  ensuite  les  vendre  aux  mar- 
chands de  la  comorca  de  8.  Joào  d'EI  Hei  qui ,  comme  on 

(1)  Voiei  le  chapitre  inlitolé  ,  Lt  village  de  Jaraguâ  ;  celui  ^Ouro 
Fino ,  cttiU  de  Ferrtiro  ;  vol.  U ,  M. 
\,$)  Chspiirc  îDtilnlé,  T<auau  génital  dt  la  provine*  :  t'A.  1,  303. 


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IH  TOTAGE  AUX  SOOICES 

l'a  d^i  vu  (Ij,  se  tniDsportent,  tous  les  ans,  dans  le  can- 
ton d'Ârai6  pour  y  acheter  du  bétail. 

Le  propriétaire  de  la  Fazenda  d'Antas  me  parla  beaucoup 
du  missionnaire  capucin  qui  faisait  alors  le  sujet  de  toutes 
les  conversations.  Quelques  ecclésiastiques  s'étaient  vive- 
ment élevés  contre  l'em^ffvssement  que  le  peuple  meltait  à 
suivre  le  P.  Jose{^ ,  à  se  confesser  à  lui ,  à  écouter  ses  ex- 
hortations. Il  est  très-vrai  que  les  prêtres  du  pays,  quand  il 
leur  arrivait  de  monter  en  chaire,  prêchaient  la  même  doc- 
trine que  lui ,  mais  il  s'en  fallait  qu'ils  eussent  la  même 
conduite.  La  comparaison  avait  fait  faire  de  ce  digne  reli* 
gieux  un  prophète  et  un  saiut  opérant  des  miracles.  On  as- 
surait qu'il  avait  prédit  qu'il  pleuvrait  dans  le  courant  dn 
mois  d'août,  et  il  me  fut  impossible  de  persuader  k  mon 
hôte  que  je  connaissais  assez  le  missionnaire,  avec  lequel 
j'avais  passé  plusieurs  jours,  pour  être  bien  assuré  qu'il 
n'avait  pas  tenu  ce  langage. 

Après  avoir  quitté  la  Fazenda  das  Antas,  je  vis  quelques 
comjMM  où  la  terre,  d'un  gris  jaunâtre,  ne  produit  que  des 
arbres  peu  nombreui  qui  appartiennent  aut  espèces  ordi- 
naires et  atteignent  à  peine  la  moitié  de  leur  hauteur  accou- 
tumée, d^à  pourtant  fort  peu  considérable. 

Je  fus  bien  plus  surpris  d'apercevoir  des  bouquets  de 
bois  sar  quelques  hauteurs,  car  on  n'en  trouve  ordinaire- 
ment que  dans  les  fonds.  Mais,  si,  en  général,  il  existe, dans 
le  Brésil,  une  coïncidence  entre  la  natnre  dn  sol,  l'expo- 
sition des  lieux,  les  mouvements  de  terrain  et  telle  ou  telle 
sorte  de  végétation,  on  rencontre  pourtant  des  exceptions 
dont  il  est  impossible  de  se  rendre  cfunpte  (2). 

(I)  Vojci  le  chipitre  intitulé,  Araxi  »t  ttt  eaux  mln^alet. 

(S]  Voyez  ce  que  j'ai  écrit  h  ce  Bajet  dus  mon  Vojfoçe  dan*  Uâ  pro- 


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M  MO  DE  S.  FRANCISCO.  VU 

Entre  la  Fazeoda  das  Antas  et  P^aeanjviba,  dans  on  es- 
pace de  A  Itgoas  et  demie ,  je  passai  devant  n'oe  petite  su- 
crerie dont  le  moulin  n'était  pas  même  abrité  par  un  toit; 
mais  je  ne  vis  aucune  autre  habitation  durant  toute  la 
journée. 

Depuis  trois  jours,  c'est-à-dire  depuis  le  iO  du  mois 
d'août,  la  température  avait  i^angé  d'une  manière  éton- 
nante; l'air  était  rafraîchi  par  une  brise  continuelle,  et  il 
semblait  que  le  soleil  eût  perdu  de  sa  force.  On  m'assura, 
dans  le  pays ,  que  le  vent  se  fait  sentir  régulièrement,  cha- 
que année,  vers  la  fin  de  juillet  et  dure  jusqu'aux  pluies, 
qui  commencent  en  septembre. 

Pyraeanjvba  (1),  dont  j'ai  d^à  parlé,  et  où  je  fis  halte  le 
jour  de  mon  départ  d'Antas ,  est  une  espèce  de  petit  ha- 
meau qui  se  compose  de  quelques  chaumières  éparses  elt 
«tuées  sur  le  bord  d'un  ruisseau,  dans  une  vallée  couverte 
de  bois.  Le  mattre  de  la  maison  où  je  m'arrêtai  me  reçut 
fort  bien  et  me  Bt  présent  d'une. jatte  de  lait. 

A  1  lieue  de  Pyracanjuba ,  je  passai  le  Rio  de  Jurvba- 
tuba  (2) ,  qui  sert  de  limite  à  la  paroisse,  ainsi  qu'A  la  jus- 
tice {julgado)  de  Meiaponte,  et  au  delà  duquel  commence 
la  juridiction  de  Santa  Cruz. 

Tandis  que,  dn  dtté  d'Antas ,  te  terrain,  d'un  gris  jau- 
nâtre, ne  produit  plus  que  des  arbres  nains  fort  peu  nom- 
breux, et  que,  dans  un  espace  de  2  legoat,  au  delà  de  Pyra- 


vinfM  <le  Rio  dt  Janeiro  tt  Uina*  Geratt,  et  moa  Tt^Uau  de  ta  vigé- 
tatio»  primitive  dont  lu  province  de  Ulnat  Geraei. 

(1)  Poar  Paraedjvba,  qui,  en  gaDraai,  sisnifie  téU  taehelé*  de 
Jaune. 

(3)  Ce  uoDt  viriitdts  mois  goaraDis  jj/nta  et  fiba,  léumoa  de  Pal- 
miers. 

II.  13 


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194  VOYAGE  AUX  SOURCES 

canjuba,  une  régélation  semblable  se  retrouve  dans  un  sol 
mêlé  de  sable  et  de  petites  pierres,  les  term,  d'uD  rooge 
foncé,  que  l'on  comiaeDce  à  voir  à  1  lieue  du  village  de 
Bom  Fim,  donnent  naissance  à  des  arbres  qui ,  quoique  ap- 
partenant encore  aux  espèces  communes, 'sont  Irès-rap- 
prochés  les  uns  des  autres,  ce  qui  fait  prendre  aux  campoi 
un  aspect  qu'ils  n'ont  pas  ordinairement. 

Quelque  temps  avant  d'arriver  à  Bom  Vim,  où  je  fis  batte, 
on  descend  par  une  pente  douce  et  l'on  arrive  i  la  petite 
rivière  appelée  Rio  Vemulho  (rivière  rouge),  qui  coule  au- 
dessous  dn  village.  -^^ 

Bom  Fim,  dont  la  fondation  remontée  Fann^  1774(1), 
est  nne  succursale  de  la  paroisse  de  Santa  Cmz  et  dépend 
de  la  justice  [jvlgado)  du  même  lieu  (3).  Sons  le  rapport  de 
la  position,  ce  village  est  du  petit  nombre  de  ceux  qui  ont 
été  bien  servis  par  la  présence  de  l'or.  Il  a  été  bAti  A  l'extré- 
mité d'une  plaine  qui  se  termine  au  Rio  Verroellio,  et  qni  est 
un  peu  moins  ^evée  que  te  pays  que  Ton  a  parcouru  en  ve> 
nant  de  Melaponte  ;  une  lisi^ede  bois  se  prolongeant  sor  les 
bords  du  Rio  Vermelho  en  dessine  les  sinuosités;  les  campa- 
gnes environnantes  n'offrent  que  des  ondulations,  elles  sont 
riantes  et  agréablement  coupées  de  bois  tA  de  pâturages  (3). 

(l)Piz.,  Jf«m.,  IX,216. 

(3)  i  Un  décret  de  rassemblée  géoérale  du  29  itHI  183S  ■  érigé  ai 

■  paroissiale  l'église  ift  Bom  Fim  et  a  détaché  le  territoire  qni  ea  dé- 
•■  |KDd  de  celui  de  .la  fille  de  Santa  Crui Par  nne  loi  prorinciale  de 

■  183S,  Bom^im  a  été  hoDorédu  titre  derille Le  district  qui  ea 

■  dépead  est  borné  par  les  misaeaox  de  Paasa-qaalra,  Peiie,  Pjracao- 

■  jniiaet  les  ririéresd'ADtasct  CoTanibti(lliLLBreiLopUDillDinu, 

■  Diecionario  do  BraM,  1,  iU).  ■ 

(3)  D'Eschirege  place  (  Plulo  Brai.,  fiS  )  anprèa  de  Bom  Fim  la  iietitc 
riTiire  de  HeiapoDle  et  le  Uea  où  tat  coiistrvit,  par  Boeno,  le  pont  qui 
donna  ion  nom  i  cette  ririire  ;  nais  la  carte  da  mime  éerirain  mIGi 


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DO  MO  DE  S.  FRANCISCO.  I» 

IXaiUenrs  le  village  de  Bom  Fim  est  peu  considérable. 
U  se  compose  de  quelques  rues  assez  courtes  et  d'une 
place  triangulaire  è  une  des  extrémités  de  laquelle  est  l'é- 
glise dédiée  à  Notre  Seigneur  Jésus  du  bon  dessein  (Nosso 
Senhor  Bom  Jetm  de  Bom  Fàn)  (1).  Cette  église  est  fort 
petite  (S),  mais,  à  l'époque  de  mon  voyage,  on  en  construi- 
sait une  seconde.  Les  maisons  qui  bordent  les  nies  sont  éga- 
lement petites,  mais  assez  bien  entretenues  ;  elles  sont  écar- 
tées les  unes  des  autres,  et  toutes  ont  un  quintal  [espèce  de' 
cour)  planté  principalement  de  Bananiers  et  de  Papayers. 
Une  étendue  de  terrain  très-considérable,  creusé  à  la 
{wofondeur  d'environ  2  mètres  et  demi  à  3  mètres,  sillonné, 
bouleversé  de  tontes  les  manières,  annonce  assez,  lorsqu'on 
arrive  â  Bom  Fim ,  quelles  furent  les  occupations  des  pre- 
miers qni  s'établirent  dans  ce  pays.  On  a  jadis  tiré  beau- 
coup d'or  des  minières  qu'on  voit  de  tous  les  cdtés  ;  mais 
aujourd'hui  elles  sont  à  peu  près  abandonnées  :  la  plupart 
drâ  habitants  de  Bom  Fim  sont  devenus  des  cultirateurs. 
Quelques-uns,  cependant,  envoient  leurs  esclaves  cher- 
cher de  l'or;  mais  ce  travail  se  fait  isolément  et  sans  mé- 
thode, comme  i  la  cité  de  Goyas.  Chaque  nè^  mineur 

pour  montrer  qae  c'est  bien  réelleroeni ,  muudm  je  l'ai  dit ,  dans  le  TOisi- 
nage  de  la  ville  ictnelli  de  Heiaponle  qoe  uak  le  raisseau  dont  il  a'igil, 
et  Doo  pris  de  le  nouvelle  ville  de  Bom  Fim. 

{1)  Pu.,  Mm.,  IX,  2U. 

(3)  ■  CoBOH  l'égliae  de  Bom  Fim  se  trouvait  enlièremeut  niin^  et 

■  que  lea  revenus  mntiicipaiii  étaieut  iosafGuDt»  pour  couvrir  les  dé- 
>  peoses  nécessaires  à  sa  reconstraction,  uo  décret  de  rassemblée  pro- 
•r  vindale  de  1830  ordonna  que  les  réparations  ftuBeni  faites  ani  frais 

■  de  la  province  (  HiLL.  et  Lop.  m  Moun.,  Dtee.  Brat^  1,  151).  ■  Ce 
fait  De  prouve  point  que  le  titre  de  ville  ait  beancooi»  ajouté  à  la  pros- 
périté de  iom  Fim. 


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19b  ruYAGE  AVX  SOUIXES 

prend  des  terres  dans  les  endroits  où  l'<»i  sait  qoe  le  méta^ 
précieux  se  trouve  encore  ;  il  les  amoncelle  sur  les  bords  du 
Rio  Vernaelho,  il  les  lave  et,  à  la  fio  de  chaque  semaine, 
il  est  obligé  de  porter  à  sou  maître  900  &  1 ,000  reîs  (3  ïr. 
6â  c.  à  6  Tr.  25],  se  nourrissant,  comme  il  peut,  sur  Fexcé- 
dant  qu'il  est  toujours  censé  recueillir. 

Quant  aux  agriculteurs,  ils  trouvent  le  débit  de  leurs 
denrées  à  Heiaponte,  à  la  cité  de  Goyaz  et  dans  le  village 
même,  où  passent  nécessairement  les  caravanes  qui  se 
rendent  de  S.  Paul  i  Goyaz  et  à  Matogrosso.  Non-seulement 
Bom  Fim.  mais  tout  le  pays  que  je  parcourais  alors  est, 
par  sa  position  sur  une  roule  assez  fréquentée,  beaucoup 
moins  malheureux  que  la  contrée  qui  s'étend  depuis  la 
Trontière  de  Minas  jusqu'au  village  de  Corambà  (1).  Les  ha- 
bitations, sans  annoncer  l'opulence,  sont  en  meilleur  état 
que  du  cAté  d'Arrependidos  (â)  et  de  Santa  Lutta;  entre 
Meiaponte  et  Bom  Ftm  (3),  je  comptai  quatre  sucreries,  et 
on  m'assura  qu'il  y  en  avait  trente  dans  tout  le  julgado  de 


(1)  Tojei  le  chapitre  intilalé,  Commeneement  chi  voyage  dont  la 
provîntt  de  Goyiu. —  Le  village  de  S.  Luxia. 

(ï)  Les  auteurs  de  l'utile  Dicrionario  geograpkiro  placent  le  Rcfis- 
tro  doj  Arrepeadidos  dans  la  province  de  Minas  Gerafs.  Lors  de  mOD 
voyage,  il  appartenait  bien  cerlaioement  k  celle  de  Goyu,  et  il  paraîtrait, 
par  lea  écrits  de  Matloa  et  de  Luii  Aoiouki  da  Silva  e  Sousa ,  que ,  jus- 
qu'cu  1836.  rien  n'avait  illé  change  à  cet(''gard.  Les  mêmes  auteurs  don- 
DCDt  h  jtrrependidos  le  oom  de  povoafSn  icodroit  peuplé,  hameau,  rll- 
lage].  De  mon  temps ,  il  n'y  avait  k  Arrependidos  que  le  regUtro,  et  je 
■n'Étonnerais  <iu'il  ne  fût  formé  un  village  dans  ce  lien  désert,  btsqu'oo 
abaDdonoait  Conros  et  S.  Lnzia,  situéa  dans  soa  voisinage. 

\3)  J'ai  Toit  sentir  aillenrs  combien  présente  d'inconvénients  la  fré- 
qnenic  répéiitiou  des  mtnies  noms  dans  les  dilKrenlea  parties  du  Brésil. 
Caque  dit  Piiarro  de  l'ancien  village  de  BomFim,  jadis  sitné  sur  le 
|)ord  du  Rio  CUro  et  aujourd'hui  détrail ,  m'avait  d'abord  paru  devoir 


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DU  MO  DE  S.  FRAHCISCO.  tffT 

Meiaponle,  ce  qui  suppose  des  esclaves  et ,  par  consc^iiiiuitt , 
fiaelqDeaisaoce.  Indépendamment  des  avantages  que  leur 
procure  la  position  de  leur  village,  les  colons  de  Bom-  Fim 
en  trouvent  encore  un  très-grand  dans  la  nature  de  leurs 
terres;  tout  leur  pays  en  offre  de  salpêtrées,  et,  par  con- 
séquent, ils  n'ont  point  à  faire  la  dépense  considérable  d'à- 
di^r  do  ati  pour  le  donner  au  bétail. 

J'ai  déjà  parlé  de  la  couleur  très-rouge  des  terrains  qui 
avoistnent  Bom  Fim  ;  ceux  où  a  été  bAti  le  village  ont  abso- 
lument la  même  teinte,  et  de  là  résulte,  pour  les  habitants, 
un  inconvénient  assez  grave  qui ,  au  reste,  comme  j'ai  déjà 
eu  occasion  de  le  dire  ailleurs*  se  reproduit  dans  d'autres 
parties  du  Brésil.  Au  temps  de  la  sécheresse,  la  terre  se  ré- 
duit en  une  poussière  trèi-fine  qui  salit  le  linge  et  les  ha- 
bits, et,  par  les  pluies,  elle  forme  une  boue  tenace  peut- 
être  encore  plus  salissante. 

Eo  arrivant  h  Bom  Fim,  j'envoyai  José  Marianno  remet- 
Ire  une  lettre  de  recommandation  du  gouverneur  de  la  pro- 
vince au  commandant  du  village,  qui  était  en  même  temps 
juge  ordinaire  (/uts  ordmario)  de  tout  \ejulgado  de  S.  Cruz. 
Ce  dernier  dit  à  José  que.  comme  il  y  avait  alors  à  Bom 
Fim  un  grand  concours  d'étrangers  h  l'occasion  d'une  fétc 
qu'on  devait  bientM  célébrer,  il  aurait  beaucoup  de  peine 
à  me  trouver  une  maison,  et  je  me  décidai  à  me  loger  sous 

être  ippliqué  ï  la  ville  BctDclle  de  £0M  Ftni,  près  Sonia  Crus,  et  j'iu- 
rais  peut-être  persiste  daus  moa  errear  si  je  n'avais  moî-aième  visilt', 
les  deui  endroits.  On  ne  doit  donc  pas  s'i'tonner  de  la  retrouver  daiL» 
UD  livre  qui  n'embrasse  pas  nue  proviace  unique ,  mais  le  Brésil  tout 
euiier,  le  Diceionario  do  Bra»ii.  Une  di^uvette  de  diamaais  dans  un 
ruisseau  voisin  de  Bom  Fini ,  et  la  di'frusc  ik  clicrclirr  de  l'or  dons  le 
ptjs,  Taite  en  1749,  sont  des  Taitsqui  apparlieniiciil  rerlaiurmenl  k  t'hiï- 
loire  du  villag*  de  Bom  V'm,  pr^s  le  Hi"  C.lnrn. 


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IM  TOTiOE  AUX  SOOSCES 

un  raacho  fort  commode  qui  se  trouvait  &  l'entrée  du  vil- 
lage, et  oà  j'avais  l'agrément  d'être  seul  et  psifaitement 
libre. 

Le  commaudant  vint  me  voir  peu  d'instants  après  mon 
arrivée  et  me  fît  beaucoup  d'ofiïes  de  services.  BientAt 
après,  il  Tut  suivi  du  curé  de  Meiaponte  et  du  jeane  prêtre 
Luiz  Gonzage  Fieury,  qui  étaient  venus  pour  assister  h  la 
fSte  de  Notre-Dame  de  l'AldMye  (NotsaSenkora  da  Abba- 
dia),  que  l'on  fait  tous  les  ans,  avec  beaucoup  de  soiennilé, 
à  Bom  Fim  et  &  Trahiras,  village  de  la  eomarca  du  nord. 

Celte  EËte  a  pour  objet  de  rappeler  un  miracle  opéré  par 
l'intercession  de  la  Vierge,  dans  je  ne  sais  quelle  abbaye 
de  France  ;  mais ,  ce  qui  est  assez  singulier,  c'est  que,  tm- 
dis  qu'on  la  c^èbre  avec  beaucoup  de  pompe  dans  des  vil- 
lages fort  reculés  du  Brésil ,  il  n'en  soit  nullemnit  question 
parmi  les  catholiques  de  France,  pays  où,  dit-on,  a  eu  lieu 
le  prodige.  Quoi  qu'il  en  »oit ,  un  grand  nombre  de  per- 
sonnes se  rendant  i  Bom  Fim  de  S.  Luzia ,  de  Meiaponte 
et  de  beaucoup  plus  loin  ;  mais  c'est  bien  moins  la  dévo- 
tion qui  attire  ce  concours  de  monde  que  le  désir  d'assister 
aux  réjouissances  qui  accompagnent  toujours  la  ffite  (1)  ; 
en  effet,  on  la  célèbre  non-seulement  par  une  messe  en 
musique  et  un  sermon,  mais  par  des  fusées,  des  pétards, 
un  opéra  et  le  simulacre  d'un  tournoi ,  divertissonents  pro- 
fanes que  l'on  mêle  à  la  solennité  religieuse,  comme  cela 
a  lieu  pour  la  f£te  de  la  Peotecdte.  Les  acteurs  du  tournoi 
et  de  l'opéra  sont  ordinairement  les  gens  les  plus  aisés  du 
voisinage  ;  le  tournoi  ne  manque  presque  jamais  de  re- 
présenter quelque  histoire  du  vieui  roman  de  Charlemagne 

(1)  Ou  pourrtil  ta  dire  loui  taUiil  de  nos  Htei  <le  village. 


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DU  RIO  DE  s.  FRANOSCO.  IM 

et  des  douze  pairs  de  France,  qui  est  encore  fort  goûté  des 
Brésiliens  de  l'intérieur. 

Si,  pour  voir  la  fôte  de  Bom  Fim,  il  n'avait  fallu  rester 
qu'un  jour  dans  ce  village,  j'aurais  peut-être  fait  ce  sacri- 
fice; mais  je  ne  pus  me  résigner  à  perdre  an  temps  plus 
considérable.  Je  croîs,  au  reste,  qu'on  ne  fat  pas  fort  affligé 
de  mon  départ  ;  je  soupçonnai  certaine  personne  de  crain- 
dre que  je  ne  fusse  un  peu  surpris  de  quelques  inconve- 
aances  qu'on  n'était  pas  fïdié  de  se  permettre  et  dont  on 
avait  le  sentiment,  ce  qui  était  déjà  beaucoup. 

Le  soir  du  jour  de  mon  arrivée  k  Bom  Fim,  j'allai  rai- 
dre  visite  au  commandant  du  village;  j'entendis,  chez  lui , 
les  musiciens  qui  devaient  jouer  dans  l'opéra  que  l'on  se 
proposait  de  rqtrésenter,  et  cette  fois  encore  j'admirai  le 
goût  naturel  des  Brésiliens  pour  la  musique. 


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VOYAGE  AUX  SOURCES 


CHAPITRE  XXV. 


LES  KAnZ  TBEB1UJ.BS  DITES  CALDAS  NOVAS ,   CALDAS  VE- 
LHAS,   CALDAS  DB   PTEAPITINGA. 


.  Uée  gteérale  da  TOfigs  d«  Bom  Fim  mi  Coldoi,  —  SMo  do  Pari, 
Eteniple  de  longévité.  Réïaltat  des  croisements  de  U  nce  bUoche 
STec  U  race  nègre.  —  Tableau  de  l'iaceadie  des  eampot.  ~  Silio  de 
Joaquim  Diai.  Haisons  rarement  isolées.  —  Silio  de  Gregorio  Nv- 
nw.  Oa  TieilUrd;  ks  boauDcs  d'autrefois  et  ceux  d'aajanTd'hul.  — 
Lea  arbres  qui  fleurissent  avant  d'avoir  des  fenilles. —  Silio  de  Fram- 
eiteo  Àlvet.  HbIsods  n'maoDïoat  que  la  misère.  Costume  des  hibi- 
lanls. —  Pafs  situé  au  deU  de  Fraucisco  Alves.  lusecies,  oiswui, 
nuuomiftres.  —  Sapeial,  —  Arrivée  aux  Caldai  «mat.  Bonne  réccp- 
tioD.  —  EicuraiOD  aui  Caldai  Yelhat.  La  Serra  dut  Caldat.  Le  Ri- 
beirâo  d'Agoa  Quenlt.  Les  trois  principales  sources  d'eau  mioérale. 
Histoire  des  Caldas  Velhas.  La  Yéritable  source  du  RibeirSo  d'Agoa 
Queute.  L'anlcar  monte  sur  la  Serra  das  Caldas;  description  de  son 
sommet. —  Description  des  Caldat  ffovat.  Le  Corrego  dot  Caldat. 
Chaleur.  Terraios  aarifères.  —  Caldat  de  P}/rapUinga.  —  Départ 
des  Caldu.  —  La  fête  de  la  S.-Louis.— Arrivée  k  âatUa  Cnu. 


£n  quittant  le  village  de  Bom  Fim,  je  me  détournai  de 
la  route  de  5.  Paul  pour  aller  visiter  des  eaux  minérales 
dont  OD  vantait  beaucoup  l'efBcacité,  surtout  dans  les  ma- 
ladies de  la  peau,  et  que  l'on  connaît  sous  les  noms  de 
Catàa*  Velka*  et  Caldas  Novas  (1). 

(1)  ttini'rairc  approtimatir  du  village  de  Bom  Fîm  aux  Caldas  Novat  : 


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DU  UO  JIE  S.  FRANCISCO.  SOI 

Marchant  avec  toute  ma  caravane,  je  fus  obligé  de  met- 
tre six  jours  à  faire  les  22  legoas  et  demie  qu'il  faut  compter 
de  Bom  Fim  aux  Caldas  Novas.  Grâce  aux  voyages  que  le 
gouverneur  avait  faits  plusieurs  fois  à  ces  mui,  je  trouvai 
le  cb^niu  superbe  et  très-large.  Le  pays ,  presque  désert 
(1819),  est  quelquefois  plat  ou  ondulé,  plus  souvent  moQ- 
tueux  et  s'élève  graduellement.  Tantôt  on  fait  plusieurs 
legoas  sans  voir  autre  chose  que  des  eampos  parsemés  d'ar- 
bres  rabougris  ;  tantAt  la  campagne  présente  une  alterna- 
tive de  bois  et  de  campos  qui,  dans  le  voisinage  des  Cal- 
das, sont  souvent  couverts  uniquement  de  Graminées  et 
de  sous-arbrisseaux.  Dans  des  espaces  considérables,  je  re- 
trouvai ce  beau  VelloHa  que  j'avais  déjà  observé  entre  Ar- 
rependidos  et  le  village  de  Santa  Lnzia,  et  qui  caractérise 
les  lieux  élevés'(l).  Comme  ailleurs,  la  sécheresse  était  ex- 
cessive :  point  de  Deurs,  point  d'oiseaux,  point  d'insectes, 
si  ce  n'est  les  espèces  malfaisantes  qui  venaient  nous  assail- 
lir par  myriades;  aucune  trace  de  culture,  point  de  voya- 
geurs dans  le  chemin,  une  monotonie  sans  égale,  une  soli- 
tude profonde;  rien  qui  pût  me  distraire  un  instant  de 
mon  ennui. 

La  première  maison  que  nous  vimes  en  sortant  de  fiom 
Fim  en  est  éloignée  de  5  legoas;  elle  porte  le  nom  de  Sitto 

De  Bom  Fim  tn  Sitio  do  Pari 3       legou. 

—  Silio  de  Joaqnim  Dits.  ...  3 

—  Sitio  de  Gregorio  naoes.  .  .  '  4  1/2 

—  Sitio  de  Francisco  AItbs.  .  .  3 

—  Stptsol * 

—  GeldnNoru 3 


Sl/ïlc 


\l)  Voyci  le  rhapitre 


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un  VOYAGE  AUX  SODRCES 

do  Pari  (1)  et  est  agréablement  située  auprès  du  Rio  doi 
Bois  (la  ririère  des  bœol^},  qui,  m'a-t-on  dit,  se  jette 
dans  le  CommbA  :  ce  fut  là  que  nous  rtines  halte.  Cette 
maison  était  originairement  un  rancho  que  le  gouverneur 
de  la  prorinoe  avait  fait  construire  auprès  d'une  chau- 
mière ruinée ,  pour  s'7  abriter  dans  ses  voyages.  Les  habi- 
tants de  la  dtaamière  firent  du  rancho  une  maison  et  s'y 
établirent. 

Le  cb^  de  la  femille  était  un  vieillard  centenaire  qui 
avait  conservé  tonte  son  intelligence,  et ,  comme  le  pays  est 
parfaitement  sain,  je  ne  serais  point  étonné  qu'il  offrit  d'an- 
tres exemples  d'une  telle  longévité  (2). 

Parmi  les  nombreux  habitants  du  Sitio  do  Pari,  tous 
frères  ou  cousins,  il  y  en  avait  de  parftitement  blancs, 
avec  de»  cheveux  blonds  et  des  joues  couleur  de  rose;  d'au- 
tres dont  le  teint  jaunâtre  et  les  cheveux  crépus  trahis- 
saient nne  origine  africaine.  Malgré  le  peu  de  sympathie 
qui,  en  général,  existe  entre  les  blancs  et  les  mulâtres, 
ces  mélanges  ne  sont  pas  fort  rares  dans  les  familles  pau- 
vres, qui  ne  peuvent  être  très-délicates  dans  leurs  alliances. 
Souvent  aussi ,  des  familles  où  le  sang  a  été  mélangé  rede- 
viennent blanches  par  de  nouveaux  croisements  ;  ainsi  un 
des  habitants  de  Pari  était  évidemment  quarteron  ;  il  avait 
épousé  une  blanche  ;  les  cheveux  de  son  fils  étaient  lisses 


(1)  Les  paris  Mat  des  eofiDsi  prcadre  le  poiasou,  que  j'ii  décrits  au 
!■  Tolnme  de  mon  Voyage  diau  Itt  provitteti  dt  Rio  d«  Janeiro  <(  d' 
MHuu  Gerae*. 

(2)  Lorsque,  eo  1816,  H.  d'Esehwege  visita  l«  village  de  Desemboqoc, 
qui  jasqo'alors  avait  appartena  k  la  proviace  de  Goju  et  n'Clait  com- 
posé que  de  Boiiante-cioqmaisoDS,  on  lai  présenta  deux  vieUlards  bien 
portaaisri  pleios  de  vigueur,  dont  l'un  avait  iOB  ans  et  l'aulra  115. 


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DD  tio  DE  S.  nunasco.  ns 

et  d'uD  beau  blond.  De  tant  de  croïsements  divers  il  rémile 
que  souvent  il  est  difficile  de  décider  si  un  homme  est  réel- 
lement blanc  ou  s'il  doit  être  rangé  parmi  les  métis. 

Avant  que  j'arrivasse  au  Sitio  do  Pari,  l'atmophère  était 
cliargée  de  vapeurs  rougeàtres  qui  me  pvnrent  Atre  le  ré- 
sultat du  brûlement  des  campot  du  voisinage.  Ceux  que  nous 
parcourûmes  le  lendemain  venaient  éfidemmentde  subir 
l'action  du  feu  ;  nous  marchâmes  longtemps  sang  voir  autre 
cbose  que  des  cendres  noirâtres  et  des  arbre*  dépouillés  de 
verdure  ;  enfin  oons  atteignîmes  l'incendie  qui  avançait 
devant  nous.  Une  flamme  rouge  et  petilluite,  poussée  par 
le  vent,  s'étendait  avec  rapidité  sur  une  longue  ligne,  et  des 
tourbillonsde  fumées'élevaientdans  l'air.  Des  nuéesd*  hiron- 
delles et  un  assez  grand  nombre  d'oiseaux  de  proie  volaient 
au  milieu  de  la  fumée,  tantAt  s' abaissant  avec  une  extrême 
vitesse,  tantôt  s'élevant  par  des  balancenients  répétés,  s'é- 
loignant  quelquefois  et  reparaissant  bientôt.  Mes  gens  me 
dirent  qu'il  en  est  ainsi  toutes  les  fois  que  l'on  met  le  feu 
aux  campa»;  que  les  oiseaux  de  proie  se  rassemUent  pour 
déT<M«r  les  perdize»  et  les  eadornas  (1)  poorsuivies  par  l'in- 
ceodie,  tandis  que  les  hirondelles  cherchent  à  saisir  les 
moucherons  et  les  autres  insectes  qui  s'élèvent  de  la  terre 
a6n  d'éviter  la  flamme. 

Dans  toute  la  Journée,  nous  ne  traversâmes  que  deux 

(!)  Pohl  rapporte  la  perdit  des  Brésiliens  aa  linatmu  rufeteent  et 
leur  codornis  ta  Jinomui  brnfpei.  Je  ocapcoEine  que  la  eadoma  est 
idenliqae  «Tec  la  eodomU.  Si  la  colloction  (Taiseeni  qw  j'avais  formée 
iTec  UDt  de  peine  n'avait  pas  été  dispersée  et  que  les  étiqiiettea  eiuMnt 
été  conservées,  od  aurait  penl4lre  en  les  majens  de  résoudre  cette  qnes- 
tiou.  Je  n'ii  pas.  besoin  de  dire  que  les  noms  de  pcrdix  et  eodomit  ont 
iU  transportés  par  les  Portugais  i  des  espèces  américaines  difKrenles 
de  celles  qui  1rs  portent  en  Europe. 


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VOYAGE  ADX  SOUBCES 

X ,  le  Rio  Preto  (la  ririère  noire)  et  le  Passa  qtta- 
Uv  (passe-quatre).  Cette  partie  du  Brésil  est,  comme  Mi- 
nas, si  bien  arrosée,  que  voir  uniquement  deux  ruisseaai 
dam  un  jour  de  marche  est  une  espèce  de  rareté  (1).  Je  fis 
balte  à  Qoe  petite  cbaumière  nouvellement  construite, 
blancbie  en  dedans  et  en  dehors,  et  d'une  eitréme  pro- 
preté; cette  chaumière,  appelée  Silio  de  Jotufutm  Dias, 
probablement  du  nom  de  son  propriétaire ,  est  située  à 
quelques  pas  du  Posta  quatro,  qui  est  bordé  d'une  lisière 
de  bois  et  se  jette  dans  le  Rio  do  Peixe  (S)  [la  rivière  du 
poisson),  l'uD  des  afTluents  de  la  rive  droite  de  0)rumb8. 
Devant  la  maison  est  un  lai^e  espace  de  teirain  découvert , 
qui  s'étend  par  une  pente  douce;  au  delà  sont  des  bou- 
quets de  bois ,  et ,  de  tous  les  cètés ,  s'élèvent  des  mornes 
d'une  hauteur  inégale. 

La  chaumière  de  Joaquim  Dias  n'était  point  isolée;  près 
d'elle,  il  f  en  avait  encore  deui  autres.  Dans  les  lieux  peu 
habités,  il  est  rare  qu'une  maison  ne  soit  pas  accompagnée 
de  qu^ques  autres.  Le  premier  qui  s'établit  est  bien  aise 
d'avoir  des  voisms;  il  décide  des  compères  [3),  des  amis, 
des  parents  à  se  fîicer  près  de  lui ,  et  le  pauvre,  de  son  cèté, 
cherche  à  se  rapprocher  de  celui  dont  l' indigence  est  moin- 
dre que  la  sienne. 

Ayant  quitté  le  Sitio  de  Joaquim  Dias,  nous  montâmes 
et  desc^dimes  quelques  mornes  élevés  et  pierreux,  et,  de 

(1)  Od  peni  voir,  par  nOD  Voyagé  dant  ht  provlneet  de  Rio  de  Ja- 
ntiroetd»  Minas  Geratt,  toi.  H,  que  le  SeriSi  de  Minas  prSenlc  de 
trictca  eiccpUoiu. 

(3)  U  «i3t«  (Uns  h  sealc  prevUtce  de  Gojaz  plnsJears  rtnèr»  du  coDi 
de  Rio  do  Peire,  qni  M  retrouve  t  Hitogrosso,  h  ^inas,  à  S.  Paul ,  eW. 

(3)  J'ai  mollir-  ailleuTS  fOBibJrn  sont  puissants,  dans  l'iiilrrlour  du 
Br^il.  les  liens  du  romp'/rage. 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


DU  KIO  DE  S.  FBANOSCO.  J05 

là,  nous  passAmes  sur  un  plateau  parfbilement  uni,  qui  se 
continue  dans  un  espace  d'au  moins  â  Ugoas  et  demie ,  au 
delà  duquel  le  paya  devieot  nwios  égal. 

Le  propriétaire  du  SiHo  de  Gregorio  Nvneg  (nom 
d'homme),  où  je  passai  la  nait  après  la  journée  la  plus 
monotone  et  la  plus  ennuyeuse,  était  an  vieillard  octt^- 
naire  qui  jouissait  de  toutes  ses  focultés.  Fils  de  l'un  des 
premiers  Paulistes  qui  étaient  venus  chercher  de  l'or  dans 
lii  province  de  Goyaz,  il  avait  ru  commencer  les  étatriisse- 
ments  les  plus  anciens.  Il  y  avait  vingt-quatre  ans ,  lors  de 
mon  voyage,  qu'il  s'était  fixé  dans  la  chaumière  qu'il  hahi- 
tait  alors  ;  en  y  entrant,  il  planta  devant  sa  grange  deux 
figuiers  sauvages  [gamelUirat),  et  d^à,  d^uis  un  grand 
nomhre  d'années,  il  pouvait  Jouir  de  leur  ombrage.  Les 
hommes  d'aujourd'hui  ne  ressemblent  plus  à  ceux  d'aub«- 
fois,  me  disait  ce  vieillard,  et,  pour  ce  pays,  il  avait  rai- 
son. Les  habitants  actuels  de  la  province  de  Goyaz,  amollis 
par  la  chaleur  et  par  l'oisiveté,  ne  se  montrent  guère  les 
descendants  de  ces  intrépides  Paulistes  qui  traversaient 
des  déserts  encore  inconnus,  s'exposaient  k  toutes  les  foti- 
gues  et  à  toutes  les  privations,  bravaient  tous  les  dangers  et 
semUaient,  par  leur  courage,  au-dessus  des  autres  hommes. 

Au  delà  du  Sitio  .de  Gregorio  IVunes ,  le  pays  ,  qui  est 
montueux  ,  m'offrit  tour  à  tour,  non-seulement  des  bou- 
quets de  bois  et  des  eampoi  parsemés  d'arbres  rabmigrls , 
mais  encore  d'autres  eamfot  entièrement  découverts ,  et 
d'autres  enfin  où ,  comme  dans  le  voisin^e  d'Antaa  et  de 
Pyracanjuba  (1) ,  les  arbres  restent  tout  à  fait  nains  et  sont 
fort  éloignés  les  uns  des  autres. 

(1|  Voïci  le  rbipitre  pttet'deot. 


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JOS  TOTAGS  lUX  SODECES 

Au  milieu  de  deux  ou  trois  bouquets  de  bois  que  je  (ra- 
versai ,  je  vis  qndques  plantes  ligueuses  qui ,  après  avoir 
perdu  leur  feuillage ,  se  convraiait  de  Beurs  avant  d'avoir 
des  feuilles  nouvelles;  c'étaient  des  Bîgnosées ,  une  Mal- 
pighiée  et  le  Sebastiào  de  Ârruda  (Pkyioealtfmna  florida, 
Pohl  ) ,  dont  le  bois  est  cooleor  de  rose  [  1  ).  Parmi  ces 
arbres  croît  avec  abondance  le  mutombo  (  Gtumtma  tihû- 
folia,  Aug.  St.-Hil.} ,  qui ,  après  être  resté  quelque  tanpi 
dépouillé  de  verdure,  (dirait  alors  (17  août),  tout  à  la  fois, 
des  fleurs  et  des  feuilles  naissantes,  et  en  même  temps  était 
chargé  de  fruits  mûrs,  dernier  résultat  de  la  pousse  précé- 
dente. Ce  n'est  pas  la  chute  des  pluies  qui  détermine,  ches 
tous  ces  végétaux  ligneux ,  le  renouvellement  de  la  v^éti- 
lion ,  car  il  ne  tombe  point  d'eau  dans  la  saison  où  nous 
éti(Hisalors;<ily  avait  i^nsieurs  mois  qu'il  n'en  était  tombé, 
et  les  vieillards  eux-mêmes  ne  se  rappelaient  pas  d'avoir 
vu  une  aussi  grande  aécbereasé  que  celle  de  1819  eu  par- 
ticulier; ce  n'est  pas  non  plus  ,  du  moins  pour  toutes  les 
eq)èce8  ,  le  retour  de  la  plus  grande  chaleur,  puisque  les 
pameira$  do  eampo  [Padùra  mm'ymata)  et  le  earaiba 
avaient  fleuri  dés  les  mms  de  juin  et  de  juillet ,  après  avoir 
perdu  leors  feuilles.  C^iendant  il  n'y  a  pas  de  végétation 
sans  quelque  humidité;  il  fout  donc  croire  que  les  ari>res 
dont  il  s'agit  sont  de  nature  À  pouvoir  se  contenter,  pour 
le  développement  de  leurs  bourgeons  i  fleurs  ,  du  -pea  de 
socs  qu'ils  puisent  encore  dans  le  sol ,  aidés  par  la  rosée 
des  nuits  toujours  extrêmement  abondante.  Ces  bourgeons, 
d'ailleurs  ,  n'ont  pas  besoin  de  secours  »xu»i  puissants  que 


(t)  Ane.  S.  Hii..,  Flora  Bra$ilia  mtriilimMlit,  m ,  140. 


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ou  MO  DE  S.  FRAKC1SC0.  WT 

les  autres ,  puisqu'il  n'en  résulte  que  des  organe»  altérés 
portés  par  des  aies  extrêmement  raccourcis  {{). 

Cette  époque  de  moa  voyage  fat  certainemeot  une  des 
plus  heureuses.  D^uis  le  Rio  dos  Pilôes ,  je  n'avais  pas  eu 
le  plus  léger  reproche  i  foire  à  mes  gens  ;  je  jouissais  d'une 
santé  parfaite ,  et  m'accoutnmais  de  plus  en  plus  aux  fa- 
^ues  et  aux  privations  de  chaque  jour.  J'étais  presque  fft- 
ché  de  songer  que  ce  genre  de  vie  devait  bientAt  avoir  un 
terme.  La  paix  et  la  liberté  dont  je  jouis  dans  ces  dé- 
serts ,  me  disais-je  ,  feront  certainement  un  jour  l'objet  de 
mesregr^;  si  je  vois  des  hommes  ,  ce  n'est  que  pour  peu 

d'instants,  ils  me  montrent  seulaneot  leur  beau  cété , 

et  je  me  sentais  presque  épouvanté  à  l'idée  de  me  retrou- 
ver au  milieu  d'une  société  où  l'on  est  si  près  les  uns  des 
autres  que ,  quelque  chose  qu'on  fasse ,  il  fout  sans  cesse  se 
heurter,  où  les  passions  sont  parvenues  à  leur  dernier  de- 
gré d'exaltation  et  où  l'on  semble  être  sans  cesse  ea  pré- 
sence pour  se  chercher  des  torts  et  pour  se  nuire. 

Après  avoir  fait  4  legoa» ,  k  partir  du  Sitio  de  Gregorio 
Nunes ,  je  m'arréfoi  h.  l'endroit  appelé  Sitio  de  Frandaco 
Alvei  (nom  d'homme).  On  y  voyait  un  moulin  à  sucre  dé- 
couvert:, comme  le  sont  ordinairement  ceux  des  colons  peu 
riches ,  et  une  douzaine  de  maisonnettes  éparses  (à  et  là. 
L'une  était  habitée  par  le  principal  propriétaire,  \es  autres 
par  des  nègres  et  des  agrtgadot;  mais  toutes  paraissaient 
égalimient  misérables,  et  il  était  impottible  de  distinguer 
celle  du  maître.  Le  costume  des  babitanb  de  ces  chétives 


(I)  VDja  U  tb^rie  que  j'ai  développée  dus  d 
tlorpholofit  végétait . 


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908  TOYiOB  AUX  SODftCBS 

demeures  répondait  parfaitement  à  l'indigence  qu'elles  an- 
nonçaient. I«  mieux  habillé  d'entre  eox  n'avait  qu'an  ca- 
leçon de  coton  et  une  chemise  de  même  étoffe  passée  par- 
dessus le  caleçon,  manière  de  se  vêtir  qui  est  celle  des  plus 
pauvres  habitants  de  l'intérieur  du  Brésil. 

Le  Sitio  de  Francisco  Âlves  n'est  qu'A  2  îagoat  de  Santa 
Crut ,  et ,  pour  se  rendre  de  Bom  Fim  à  ce  village ,  plu- 
sieurs personnes  préfèrent  le  chemin  que  j'avais  aiivi  i  la 
route  directe,  qui,  dit-on,  est  très-pierreuse. 

Depuis  Francisco  Àlves  jusqu'aux  eaux  thermales ,  dans 
an  espace  de  9  legoai ,  le  pays ,  lors  de  mon  voyage ,  était 
encore  entièrement  inhabité. 

Pendant  les  4  ou  5  premières  lieues ,  je  vis  un  asseï 
grand  nombre  de  ces  fonds  marécageux,  où  croit  le  bority, 
et  dont  j'ai  eu  occasion  de  parler  plusieurs  fbis.  Il  y  avait, 
dans  ces  marais  ,  des  nuées  d'insectes  malfaisants  ,  et ,  en 
général ,  nous  fûmes  cmellanent  tourmentés  par  ces  ani- 
maux entre  le  Sitio  de  Francisco  Alves  et  l'endroit  où  nous 
fîmes  balte.  C'étaient,  dans  le  courant  du  jour,  des  5or- 
raehudos  et  des  abeilles  odorantes  de  plusieurs  e^ièces  ; 
vers  le  soir,  des  moustiques  les  remplaçaient.  Les  insectes 
sont  toujours  beaucoup  plus  nombreux  dans  les  cantons 
encore  inhabités  qu'ils  ne  le  sont  ailleurs;  je  (vésume  que 
l'incendie  souvent  répété  des  bois  et  des  pAturages  contri- 
bue A  les  détruire.  En  revanche ,  on  trouve  extrêmement 
peu  d'oiseaux  dans  tes  déserts  et  beaucoup  auprès  des  habi- 
tations, où  ils  sont  attirés,  ceux  de  proie,  par  ta  présence  des 
volailles ,  les  autres  par  les  fleurs  et  par  les  fruits  des  oran- 
gers, parles  plantations  de  riz  et  de  maïs,  parles  semences 
qui  s' échappent  des  granges.  C'est  dons  les  désertsque  l'on 
voit  le  plus  de  bètes  fauves  ;  au  delà  de  Francisco  Alves , 


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pu  RIO  DE  S,  FRANCISCO.  SM 

mes  gens  apercarent  quelques  cerf^  et  les  traces  d'un 
jagiuir. 

Je  dus  ani  voyages  que  Fernando  Delgado  avait  faits 
aux  Caldas  de  ne  point  coucher  en  plein  air.  En  l'honneur 
du  capitaine  général ,  on  avait  élevé  un  rancho  couvert  de 
feuilles  de  palmier,  sur  le  bord  d'un  ruisseau;  ce  fut  le 
que  je  fis  halte.  Cet  endroit  porte  le  nom  de  Sapetal ,  qui 
signifie  lieu  où  crott  le  sapé,  graminée  qu'on  emploie  pour 
remplacer  le  chaume  (Saccharum  Sapé,  Aug.  de  St.-Hfl.) . 

Au  delà  de  Sapesal ,  nous  apercevions  devant  nous ,  i 
l'horizon  ,  la  Serra  dos  Caldas  [  montagne  des  eaux  ther- 
males), dont  le  sommet,  qui  semble  tronqué,  est  parfaite- 
ment égal  dans  toute  sa  longueur.  Nous  nous  trompâmes 
de  chemin  ;  mais  nous  fftmes  bien  servis  par  le  hasard,  car 
il  nous  conduisit  au  ruisseau  sur  le  bord  duquel  se  trou- 
vent les  eaux  minérales  dites  Caldas  Novas  [les  nouveaux 
bains  ). 

J'avais  une  lettre  de  recommandation  du  ca|HtaJne  géné- 
ral pour  le  propriétaire  d'une  petite  fazenda  {Fazenda  das 
Caldas)  située  h  quelques  pas  des  eaux  thermales.  Cet 
homme  n'était  pas  chez  lui  quand  j'arrivai  :  sa  femme  me 
plaça  dans  une  pièce  qui  faisait  partie  d'un  bAtiment  où 
logeait  le  général  quand  il  venait  prendre  les  eaux;  cette 
pièce  était  fort  petite  ,  et ,  lorsque  le  maître  de  la  maison 
rentra  ,  il  me  fit  beaucoup  d'excuses  de  ce  qu'on  ne  m'a- 
vait pas  mieux  hébergé  [i].  Nous  convînmes  que  j'irais  le 
lendemain  an  lieu  appelé  Caldas  Velhas  { les  vieux  bains  ] , 

(1)  J'ai  eu  le  tort  d<  m  pu  m'informer  sur  I«b  lieni  du  nom  de  cet 

eicellent  homme  ;  miis,  comme  il  itait  cncarB  jfane  k  l'époque  de  mon 

TO}age  et  qae  H.  le  doctear  Faine  dit  (Anatfti  ûtt  taux  thermales  ût 

CaUas  Notas,  p.  1)  que  M.  le  lieutcaaat  Coeibo,  propriétaire,  en  1M3, 

II.  '  H 


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310  VOYAGE  AUX  SOURCES    - 

OÙ  sont  des  eaux  chaudes  plus  ancienDemeot  découvertes 
qae  les  Caldas  Novas.  On  devait  me  dooner  ud  guide,  et  je 
me  proposais  d'emmeoer  José  MariaDuo  seul  avec  uo  mu- 
let de  charge. 

Au  moment  de  partir,  José  Marianno  prit  de  l'humenr. 
et  ce  fut  Marcellino  qui  m'accompagna.  Quand  je  m'arrê- 
tais quelque  part  pour  y  faire  un  séjour,  chacun  était  em- 
barrassé de  se  personne.  C'était  un  genre  de  vie  souveau 
qu'on  allait  mener;  on  serait  moins  libre,  peut-être  même 
aurait-on  à  se  plaindre  des  gens  chez  lesquels  on  était  refu; 
on  s'ennuyait,  on  s'attristait,  on  devenait  mécontent. 

Le  propriétaire  de  la  Faxenda  das  Caldas  ,  plein  d'atten- 
tions pour  moi ,  voulait  absolument  me  guid«  dans  la 
course  que  lallais  faire;  mais  j'eugeai  qu'il  restât  cbei 
lui,  et  il  me  donna  son  frère. 

La  Serra  das  Caldas  n'est  pas  à  plus  de  trois  quarts  de 
lieue  portugaise  de  la  fasmda;  elle  n'a  qu'une  élévatioD 
médiocre ,  et,  de  loin ,  elle  se  présente  sous  la  forme  d'un 
prisme  trapézoïdal  et  allongé ,  parùitament  égal  à  st» 
SMnmet.  Mous  nous  avançâmes  vers  cette  montagne  en 
suivant  un  sentier  peu  fréquenté,  et,  parvenus  presque  an 
pied  ,  nous  changeâmes  de  direction  :  alors  le  sentier  de- 
vint pierreux  et  souvent  très -difficile.  Nous  doubUme» 
l'un  des  deux  certes  les  plus  étrobs  de  la  nwntagoe  ,  et , 
pendant  quelque  temps,  nous  cheminâmes  parallèlement  k 
l'un  des  grands  cAtés.  Ce  dernier,  beaucoup  plus  irréguiier 
qne  le  Qanc  qui  lui  est  opposé ,  oSïe  tour  à  tour  des  en- 


d«  U  FuMtda  dos  C«U« ,  éUit  fib  de  tUnialw  CmUm  igû ,  ta  1T77.  lit 
U  décourerte  dee,  noanllM  eaui  t)KriiMle« ,  il  a*  bien  éndnt  que  ce 
fut  le  lieuitUDt  qui  n'accocillit  net  tant  de  MenTeilUBce. 


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DD  BIO  DE  S.  nUIfClSCO.  111 

foncements  profonds  et  des  saillies  jipic;  l'uutre  ,  au  con* 
traire ,  s'étend  par  une  pente  asseï  douce  et  ne  présente 
aucune  anfractuosité;  on  y  voit  seulement  des  ravins  par 
lesquels  s'écoutent  les  eaux  ^  qui  le  sillonnent  en  serpen- 
tant. 

Dans  cette  excursion,  nous  traversâmes  presque  toujours 
des  tampot  desséchés ,  comme  tons  l'étaient  alors ,  mais 
où  cependant  je  reconnus  quelques  plantes  des  lieux  éle- 
vés ,  particultèrement  la  Myrtée  n"  881  *'. 

Enfin,  après  avoir  fait  environ  3  legoa»,  nous  entrâmes 
dans  UB  bois ,  et  bientôt  nous  arrivâmes  sur  le  bord  d'une 
rivière  asset  large,  mais  peu  prcrfbnde,  qui  roule  avec  ra- 
pidité, sur  un  lit  très^ierrenx ,  des  eaux  dont  la  limpidité 
surpasse  tout  ce  qu'on  pourrait  imaginer.  Je  descendis  de 
cbeval,  pour  me  désaltérer,  et  fds  très-surpris  de  trouver  les 
eaax  de  la  rivïÀre  tati  chaudes.  «  Cert  ici ,  me  dit  mon 
guide,  leiIti«irâo  d'AgoaQumte  (torrent  d'eau  chaude); 
il  est  fourni  par  les  sources  des  Caldas  Telhas ,  dont  nous 
Botmnes  actuellement  tout  près,  et,  dans  aucune  saison.  Il 
n'augmente  ni  ne  diminue  d'une  manière  sensible.  »  Je 
m'empressai  de  le  mesurer  ,  et  lui  trouvai  34  pas  de  large 
sur  9  palmes  et  demie  de  profondeur  (environ  44  centi- 
mètres); ses  eaux,  dans  lesquelles  je  plongeai  !e  thermo- 
mètre de  Réaumur,  le  firent  monter  à  28*  (  90  du  mois 
d'aoât). 

Après  avoir  passé  la  rivière,  nous  continuâmes  à  mar- 
cher dtois  le  bois  ,  et  nous  arrivâmes  ,  au  bout  de  quelques 
minutes  ,  à  l'^odroit  oà  sont  les  bains.  Là  nous  retrou- 
vâmes la  rivière,  qui  n'avait  plus  que  2  ou  5  pas  de  largeur. 
D'un  cMé,  les  bois  s'étendent  jusque  sur  ses  bords  ;  l'autre 
rive  présente  un  espace  étroit ,  convert  de  tapm  gordura, 


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2t3  VOYAGE  AUX  SOURCES 

BU  delà  duquel  la  monlagoe  s'élève  presque  à  pic.  Daos  ce 
lieu  sombre  et  sauvage,  de  l'aspect  le  plus  romantique,  se 
voyaient  deux  cabaues  de  feuilles  de  palmier  conslniites 
pour  les  baigneurs.  Du  même  cAté  sont  les  trois  sources 
d'eaux  thermales  qui  avaient  été  élargies  et  creusées  pour 
qu'on  pût  s'y  baigner.  On  avait  donné  une  forme  orale  à 
la  plus  élevée ,  qui  est  très-voisine  des  deux  cabanes  dont 
je  viens  de  parler,  et,  pour  l'abriter,  on  avait  construit  au- 
dessus  d'elle  un  petit  toit  de  feuilles  de  palmier. 

Cette  source,  qui ,  à  cette  époque  de  l'année,  fournit  le 
commencement  du  Ribeirâo  d'Agoa  Queute,  porte  le  nom 
de  Poço  da  Gamelleira  (le  puits  de  l'arbre  aux  gamelles , 
espèce  de  âguier  ).  Elle  est  d'une  extrême  limpidité  ei 
fournit,  en  bouillonnant  avec  lenteur,  une  très-grande 
quantité  d'eau.  Le  tbennomètre  de  Réaumur  y  montai 
30°;  ses  eaux  n'ont  absolument  aucun  goût;  elles  font 
mousser  le  savon  et  oc  noircissent  point  l'argent.  J'en  bus 
une  très-grande  quantité  avant  de  manger  et  en  man- 
geant; je  ne  les  avais  pas  laissées  refroidir,  et  cependant  je 
n'en  fus  point  incommodé  comme  on  l'est  ordineirement 
lorsqu'on  boit  de  l'eau  chaude,  ie  m'y  baignai  et  y  restai 
fort  longtemps  sans  éprouver  non  plus  la  moindre  incom- 
modité; pendant  que  j'étais  dans  l'eau  ,  une  multitude  de 
petits  poissons  nageaient  autour  de  moi  avec  une  vivacité 
extrême.  La  deuiième  source  ,  appelée  Poço  do  lÂmoan 
[le  puits  de  l'endroit  vaseux],  naît  a  quelques  paa  de  l'au- 
tre, sur  le  bord  de  la  rivière,  et  réunit  ses  eaux  k  celles 
de  celte  dernière;  comme  le  Popo  da  GamelUù^,  elle 
fit  monter  le  thermomètre  i  30°  Réaumur.  Plus  chaude 
que  les  deux  précédentes,  la  troisième,  qu'on  nomme 
i'ofo  do  Gmeral  (le  puits  du  général],  le  porta  à  31*. 


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DD  RIO  DE  S.  FRAHCISCO.  313 

Mon  guide  m'assura  que,  outre  ces  trois  sources,  il  y  en 
avait  plus  de  cent  autres ,  tant  sur  le  bord  de  la  rivière 
que  dans  son  lit ,  depuis  son  origine  jusqu'à  Tendroit 
oà  le  chemin  la  traverse.  J'aurais  été  bien  aise  de  les 
compter  moi-mém^;  mais  cela  ne  me  fut  pas  possible, 
parce  que ,  au  delà  du  Poço  do  General ,  les  bois ,  d'une 
épaisseur  extrême,  ne  permettent  plus  d'avancer  ;  au  reste, 
la  largeur  de  la  rivière,  à  l'endroit  peu  éloigné  de  la  soiirce 
où  je  l'avais  passée,  et  la  chaleur  de  ses  eaui,  me  semblent 
prouver  que  mon  guide  ne  s'écartait  point  de  la  vérité. 

U  y  a  très-longtemps  que  les  eaux  thermales  appelées 
Caldas  Velhas  ont  été  découvertes.  Le  fameus  Aoha&guera 
(Bartholomeu  Bueno)  passa,  dit-on  ,  le  Ribeîrâo  d'Agoa 
Quente,  lorsqu'il  pénétra  dans  le  pays  de  Goyaz,  et  le  che- 
min, aujourd'hui  abandonné,  qu'on  ouvrit  sur  ses  traces, 
traversait  cette  rivière  un  peu  au-dessous  de  l'endroit  où 
on  lapasse  actuell«nent  (1849)  pour  se  rendre  aux  bains. 
.  Il  y  a  douze  ou  quinze  ans  (1819),  il  y  avait  encore,  dans 
le  voisinage  des  Caldas  Velhas,  un  sitio  dont  j'ai  vu  te  pro- 
priétaire ,  mais  aujourd'hui  il  n'en  existe  plus  aucun  ves- 
tige ,  et  la  découverte  des  eaux  plus  chaudes  et  moins  éloi- 
gnées dites  Caldas  Novas  a  fait  entièrement  abandonner  les 
anciennes  sources.  Comme  aux  Caldas  Novas ,  on  leur  at- 
tribue ,  dans  le  pays  ,  la  propriété  de  gnérir  les  maladies 
cutanées  ,  surtout  les  douleurs  rhumatismales  et  celles  qui 
proviennent  des  afTections  vénériennes ,  et  l'on  assure  que 
TsisTÂo  DA  CuimA  Menrzks,  qui  gouverna  Goyaz  de  1785 
k  1800,  y  recouvra  une  vigueur  nouvelle  [1]. 

Dans   les   temps  de   sécheresse,   le   Ribcirâo  d'Agoa 

ill  Pk.,  Slem.hitl.,\Ji. 


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tu  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Qn«ite  commence ,  comme  je  L'ai  dit ,  au  Poço  da  Gaad- 
leira  ;  mats  ce  n'est  point  U  sa  véritable  somx».  Cette  der- 
nière se  trouve  dans  la  montagne  ,  à  un  demi-quart  de 
lieue  des  bains ,  et ,  comme  ses  eaux  s(Hit  entièrement 
froides,  celles  de  la  rivière ,  mitigées  par  elles ,  deviennent 
un  peu  moins  chaudes  i  l'époque  des  pluies.  Après  un 
cours  d'enviroQ  3  legms ,  le  Bibeirâo  d'Agoa  Quente  se 
jette  dans  Le  Pyracanjuba  (nom  d'un  poisson),  qui  se  réunit 
au  CorumbA  (1).  Jusqu'à  son  cottAnent ,  il  conserve ,  dans 
toutes  les  saisons ,  une  ctialeur  sensible  (3) .  et  ccfendant  il 
est  souvent  remonté  ,  m'assura  mon  guide ,  par  de  très- 
grands  poissons. 

Comme  ma  visite  aux  Caldas  Veltias  m'avait  pris  beau- 
coup de  temps ,  je  ne  pus  retourner  le  jour  même  aux 
Caldas  Novas.  Mon  guide  craignait  que,  dans  l'endroit  ex- 
trèoonnent  sauvage  où  se  trouvent  les  eaux  thermales  et  à 
près  delà  montagne,  nous  n'eussions,  peadant  la  nuit,  la 
visite  de  quelque  jaguar,  et  il  voulait  que  nous  relouma»- 
sioQs  sur  nos  pas  pour  aller  coucher  au  milieu  du  tsanip9 
le  plus  voisin.  Hais  alors  je  me  portais  bien ,  j'étais 
plein  d'ardeur,  je  ne  croyais  pas  au  danger  ;  j'insistai  pour 
passer  la  nuit  dans  une  des  deux  cabanes  voisines  des  bains; 
nous  attadtAmes  nos  molets  près  de  nous  ,  au  milieu  du 
eapûn  gordwa,  et  il  ae  nous  arriva  rien  de  fâcheux.  Pea- 
dant la  nuit,  la  chaleur  fut  extrême,  et,  au  lever  du  soleil, 
le  thermomètre  indiquait  IS*. 

En  retournant  aux  Caldas  Novas ,  nous  suivîmes  le  che- 


H)  El  DOD  CwTombà. 

{2)  Od  TOil  que  Piiarro  se  Irorape  qoand  il  dit  {Hem.,  IX,  3If)  que  It 
Ribeitio  d'Agoa  QaeoU  ne  cooserve  sa  cfaalcar  que  dans  «ne  pelilc  par- 


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DO  RIO  DE  S.  FRilfCISCO.  215 

min  qae  nous  «vions  pris  pour  nous  rendre  aux  anciens 
batns  ;  mais  je  ne  roulus  pas  m'éloigner  de  la  Serra  sans  y 
aller  herfoorfser. 

Nous  montAmes  par  celui  des  deui  grands  cAt^  de  la 
montagne  qui  est  le  moins  escarpé  et  ne  tOmes  obligés  de  ■ 
descendre  de  nos  mulets  qu'un  peu  au-dessous  du  sommet. 
Dans  toute  sa  hauteur,  ce  cAté  ne  présente,  comme  je  l'ai 
dit ,  aucune  anfractuosité  ;  il  est  aride  et  pierreux  :  les 
plantes  y  étaient ,  À  l'époque  de  mon  voyage ,  entièrement 
desséchées  ;  mais ,  au  milieu  d'elles  ,  les  ravins  par  les- 
quels les  eaux  s'écoulent ,  au  temps  dé  rhiremage  ,  se 
dessinaient  en  IwDdes  ondulées  d'nne  assez  belle  verdure. 
Le  plateau  qui  termine  la  montagne  peut  avoir,  me  dit 
mon  guide,  environ  5  legoas  de  longueur  sur  i  de  lai^e; 
il  est  très-égal  et  rouvert  d'arbres  rabougris  qui  appartien- 
aeot  aux  mêmes  espèces  que  ceux  de  tous  les  eampot  :  on 
Y  trouve  en  grande  abondance  le  mangabeira  ,  petit  arbre 
dont  les  fruits  devenus  mous  ,  comme  ceux  du  néflier  ou 
du  cormier,  sont  d'un  goût  agréable,  et  dont  le  suc  laiteux 
fournit ,  d'après  les  expériences  de  l'abbé  Vellozo ,  d'excel- 
lent caoutcbcKic  (1).  Dans  quelques  parties  nn  peu  basses', 
le  terrain  est  humide  et  marécageux  (3] ,  et  le  majestaeax 


(1)  U  existe  deui  espèces  de  tnangabeirtu  qui  ont  entre  elles  les  plus 
grands  nppotts,  ouis  qui  poortânl  doîyeut  6tre  distiogaées  par  les  bo- 
tanistes, TBancorn  fa  ipeeiota,  Gomes,  qnl  croti  dans  plasicurs  par- 
ties du  Brfsil  tropical,  et  l'Haneornia  pubeiceru ,  Nfes  et  Harlius,  k 
(Imre  an  peu  plus  grandes ,  qu'on  n'a  trouvé  jasqo'k  présent  que  dans 
la  prorioee  de  Goyai. 

(2)  Il  est  très-possible  que,  dans  la  saison  des  plaies,  ces  endroits  bas 
et  marécageni  soient  couverts  d'eau,  et  c'est  là  ce  qui  aura  Tait  dire  qu'il 
etistait  un  on  plusieurs  lacs  au  somuel  de  la  montagne  (d*  SIlva  e 
.Sousi,  ilein.  Gou-;  — MiLL.  elMotn..  Dirr.,  1,20r. 


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Sl«  VOYAGE  AUX  SOURCES 

bority  y  crott  au  milieu  d'une  herbe  épaisse  ;  cependant , 
ni  I&  ni  ailleurs,  je  ne  trouvai  aucune  plante  en  fleur.  Nous 
reconnûmes  sur  ce  plateau  les  traces  de  plusieurs  cerfs  et 
d'autres  animaux,  et  mon  guide  me  dit  que  les  bétes  sau- 
vages, chassées  seulement  par  son  frère,  y  étaient  fort  com- 
munes (1). 

À  mon  arrivée  aux  Caldas  Novas,  je  trouvai  tous  mes 
effets  installés  dans  la  chambre  qu'occupait  le  gouvem^ir 
de  Goyaz  quand  il  prenait  les  eaux.  Mon  hâte,  toujoius 
complaisant  et  attentif,  avait  fait  ce  petit  déménag^nent 
pendant  mon  absence. 

Ce  fiit  Mabtuiho  Coblho  qui,  en  1777,  découvrit  les 
bains  d'eaux  thennales  dits  Caldas  Nonas  (S)  ;  mais,  pen- 
dant une  longue  suite  d'années ,  ils  restèrent  tellement 
ioconntis,  que  Cazal,  qui  écrivait  en  1817,  et  Pizarroen 
182â,  ne  font  mention  que  des  Caldas  Yelhas  ,  et  ce  fut 
seulement  après  les  voyages  qu'y  Bt  le  capitaine  général 
Fernando  Delgado,  que  quelques  personnes  commencerait 
A  les  fréquenter. 

(1)  Caul  aUribne ,  eomme  moi ,  k  la  Serra  dos  Calda*  nne  (brme  cat- 
ttt  ;  mais  il  semble  croire  que  ses  cdtés  soot  f  gani ,  et  il  i^onte  qu'il* 
mt  A  legoat  (Cotoq,  Brat.,  I,  301).  Luii  Antonio  da  Silra  e  Soosa  w 
dit  riea  de  la  loognevr  da  plalcan  ;  mais  il  Ini  donne,  ainsi  qoe  nn 
guide,  1  Ugoa  eu  largeur. 

(2)  FiivHE,  Anal.,  1.  —  Après  avoir  rapporté  ces  faits,  M.  Faim 
ajoute  qoe  Martinho  Coelho  fut,  pendant  son  séjour  k  Caldas  Noras, 
inquiété  par  les  iocursions  des  Co]>ap<is  et  des  CbaTauies  ;  mais  je  ne 
puis  m'empéL'her  de  considérer  les  traditions  d'après  lesquelles  il  parle 
de  ces  attaques  comme  n'étant  pas  parfaitement  euctes  en  ce  qui  coa- 
ceme  les  derniers  de  ces  Indiens.  Eu  effet,  comme  on  l'a  vu  au  cha- 
pitre un ,  p.  132,  les  Cbarantes  habîteut  le  nord  de  la  province,  et  c'est 
iiur  1rs  terres  do  village  de  Pilar  qu'ils  eiertaieat  leurs  ravages  <  Cii., 
Coroff.,  I  :  —  P».,  Mem.,  IX ,  197,  339). 


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DO  UO  DE  s.  FBAKdSCO.  aiT 

Les  Doaveaai  baiDs  d'enu  thermale,  diti  Caldas  Novas, 
sont  situés  dans  un  vallon  étroit  sur  le  bord  d'un  ruisseau 
d'eau  froide  qui  descend  de  la  moutagne.  Tant  sur  le  bord 
du  ruisseau  que  dans  son  lit  se  trouvent  un  assez  grand 
nombre  de  sources  d'eau  chaude  ;  mais,  jusqu'à  l'époque 
de  mon  voyage ,  on  n'en  avait  encore  arrangé  que  quatre. 
On  en  avait  fait  des  espèces  de  baignoires  de  \'  à  l'.M  de 
profondeur,  et  par-dessus  on  avait  élevé ,  comme  aux  Cal- 
das Velhas,  un  petit  toit  de  feuilles  de  palmier;  c'était  & 
mon  hAte  qu'était  dû  ce  travail.  La  source  appelée  Poço 
Quente  [le  puits  chaud]  fit  monter  le  thermomètre  de  Réau- 
mur  i  35°  ;  celle  qu'on  nomme  Poço  d'Agoa  Moma  (puits 
d'eau  tiède],  à  3V;  le  Poço  do  Meto  (puits  du  milieu], 
à  33',  et  le  Poço  da  Pedra  (puits  de  ia  pierre),  à  32° 
(SI  août).  Les  eaui  de  ces  sources,  refroidies  ou  chaudes, 
n'ont  absolument  aucun  goût  et  m'ont  paru  très-légères; 
comme  cd\es  des  Caîdag  Veîhas ,  elles  font  mousser  le  sa- 
von et  ne  noircissent  point  l'argent.  Elles  jouissent,  dans 
la  province  deGoyaz,  d'une  très-grande  réputation  pour 
les  maladies  cutanées  et  toutes  sortes  de  douleurs  (4).  Lors 

<1)  H.  Faivre ,  dans  iOD  méinoire  fort  remarquable  sur  U  morfea  et 
les  Caldas  Novas,  «mflrme  entièrement  ce  qne  je  dis  de  ces  eani  ;  car  il 
les  a  troVTéea  o  limpide^,  uns  couleur,  mds  odeur  ni  saveur  apprécia- 
bl»  {Anal.,  8).  ■  L'analyse,  ajoute-t-il,  donoe,  en  rrsuinf,  de  l'aiote, 
trais  addes,  le  chloriqae,  le  carbonique,  le  Biliciqae,  et,  etifiu,  de  la  po' 
lasse ,  de  la  sonde ,  des  traces  de  cbanx ,  de  la  magnésie  et  des  (races 
d'alnmioe.  ■  Emploiées  contre  la  morfea ,  elles  n'ont ,  dit-il  encore , 
déterminé  aucun  effet  curaiif.....;  prises  iaUrieuremerit,  leur  action  sur 
l'économie  doit  être  très-faible  ;  mais ,  appliquées  en  bains ,  elles  seront 

nu  excitant  de  la  peau Aidées  de  la  température,  elles  guériront  les 

rhumatismes  chroniques  et  certains  ulcères.  »  J'ai  communiqué  le  faible 
résultat  de  mes  observatioas  sur  les  eaui  de  Caldas  ttovas  et  l'eitrait  du 
méoMiredeM.  ïaivre,  publié  par  M.  Sigaod  (Du  climat,  50S\  i  H.  Pou- 


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Ïl8  VOrâGB  AUX  SODRCES 

de  mon  voyage ,  une  douzaine  de  malades  prenaient  des 
bains  aux  Caldas  Nôvas  ;  tous  étalent  des  hommes  pauvres 
de  Meiaponte,  de  S.  Lnzia,  de  Bom  Fim;  mais  on  y  avait 
TU  quelquefois  des  malades  de  Matogrosso,  et  m£me  un  de 
Rio  de  Janeiro.  Quelques  cabanes  de  feuilles  de  palmier 
serraient  d'habitation  aux  baigneurs  [i]. 

Le  ruisseau  près  duquel  se  trouvent  les  bains  porte  le 
nom  de  Corrego  dos  Calda».  Quoique  les  sources  d'eau 
chaude  se  réoniSBent  A  lui ,  et  que  quelques-unes  même 
sortent  de  son  lit,  elles  ne  sont  pas  assez  abondantes  poor 
échauffer  la  masse  de  ses  eaux.  Après  un  cours  de  1  liene, 
ce  ruisseau  se  jette  dans  la  rivière  de  Pyrapitinga  (nom  d'un 


lin ,  [HofesMiir  i  l'école  de  phirinieie  de  Montpellier,  qae  ses  études 
rendent  on  jage  perfkilement  compëtenl.  Après  nn  eumea  attentif,  il 
lut  a  para  qne  les  eau  dont  il  l'agit  De  dUBranI  réelleoMiit  dei  eau 
ordinairea  que  par  l'éltratioB  de  la  températarg,  et  il  croit  qu'il  tiU  ie* 
rangtr  parmi  les  eam  ttaermalcs  simples.  J'ai  fait  plus  :  j'ai  conunn- 
oiqné  rvul^se  mtme  de  M.  Fairre  k  H.  Felou»,  saraol  chimiste,  mmi- 
br«  de  rinsUtu  de  Fraace ,  qoi  l'a  tromée  parfidtemeirt  eoafbnue  am 
rè|jea  de  la  aeience  tt  partage  enltèruMBt  l'optoiOB  d*  H.  Poazin.  U  «t 
donc  rrÙKmblable  qne ,  ponr  la  ggérisao  des  maladies  catanées ,  on 
tirerait  on  meilleur  parti  des  eaui  sulfureuses  d'Araii,  de  Salitre,  de  la 
Serra  Negra  de  Paracat'i,  de  Farinha  Podre  que  de  celles  des  Caldas 
ITofas  et  Telhas  ;  il  est  i  croire,  rnfln,  qu'on  ferait  bien  aussi  de  leur 
préfïrer  tes  eaux  de  Rio  Psrdo ,  dont  je  dirai  quelque  chose  ailleore  et 
qai  se  trourent  h  l  lieue  de  la  roule  de  Goju ,  dans  le  dis^ci  de  Casa 
Branca.  province  de  S.  Paul. 

(1)  D'aprts  le  mémoire  de  M.  Faivre,  cité  plus  haut,  il  j  arait  ni 
Caldas  noras,  en  1M3,  un  tilUge  temporaire  d'une  doquaniaine  de  mai- 
sons. On  sali  avec  quelle  promptitude  les  lieux  où  se  tronveot  des  soar- 
tet  d'ean  minérale  changent  de  hce  lorsqu'elles  prennent  de  la  rogne. 
Vers  1811  ou  1813 ,  Il  u'ciistail ,  aux  baJas  du  Hout-d'Or,  qne  des  ca- 
banes en  btÀB;  tout  j  était  sauvage  :  quelques  aunées  plus  lard ,  on  y 
Tojait  des  promenades  et  de  beani  hôtels.  En  IS19,  moo  ami  le  docteur 
rallemant,  sa  famille  et  moi,  irouTàmes  n  peine  k  nous  loger  tu  Ter- 


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DU  UO  DE  5.  FUHGISCO.  91!) 

poisson]  (1],  qui  est  encore  ud  des  aCBuanta  du  Conimbâ. 

Comme  me  l'avait  annoncé  le  gouveroeor  de  la  pro- 
vince (3),  qui  avait  séjmirRéaurCaldas,  je  trouvai  la  chaleur 
extrêmement  forte  pendant  tout  le  temps  que  j'y  restai. 
Le  20  août,  le  thermomètre  de  Réaumur  iodÂQHait,  i  Caldas 
NovBs,  10*  au  lever  du  soleil  ;  le  SI ,  à  la  même  heure,  fl 
s'éleva,  comme  je  l'ai  dit,  à  IS"  aux  Caldas  Velbas. 

Les  terratosqui  avoisioent  les  baiits  soit  tous  uuifires, 
et  la  principale  occupation  du  propriétaire  de  la  Faieada 
das  Caldas  était  de  faire  chercher  de  l'or  par  les  quatre  i 
cinq  esclaves  qu'il  possédait  (3). 

JequitUilesbainspourniereDdreBuvillBgcdeS.Cnu(4), 
obligé,  comme  je  l'ai  dit,  de  suivre  jusqu'à  Francisco  Alvet 
le  chemin  que  je  connaissais  déjà.  J'envoyai  ma  caravane 
en  avant,  et,  accompagné  de  mon  h6te,  je  me  détournai  un 
peu  de  la  route  pour  aller  visiter  une  sourca  d'oau  ther- 
male qui  se  trouve  dans  un  bois  près  de  la  rivière  de  Pyra- 
pitiuga,  dont  elle  prend  le  nom  [Caldas  de  Pyn^linga). 

■Kl,  OÙ  cependant  il  n'j  avait  que  uoos;  depuis  s'y  sont  élevéa,  comme 
par  magie,  d'inuneiiacs  ^lablUsemenlt.  Je  ne  tais  donc  point  étonoé  que, 
■ulfTé  l'extrtBO  lentear  a**:  laquelle  s'opèrent  de  hjblw  dungeiMoM 
dan*  les  conirfes  désertes ,  les  Coldu  aient  éprouvé  quelques  améliora- 
tions ;  je  ne  serais  pas  étooné  non  plus  que  le  pajs  qui  s'étend  de  ces 
boius  k  Bom  Fim  et  k  SanU  Crni  fût  moins  inhabité ,  et  que  ce  dernier 
TÎlIafe  eût  pris  an  peu  de  Tie  ;  je  ne  serais  pas  étomé,  enfin,  que  quel- 
ques noms  eussent  été  changés  depuis  l'épaqae  de  mon  TOjage  :  nous 
aTODS  va  les  bains  d'Arles  devenir  les  baios  d'Amélie,  et  le  Saut  iTAn- 
«Utal,  qui  an  est  voisin,  \i  Saut  4»  CatUllant. 

(1)  Pyra,  poisson  i  pUfunga,  qui  «eut  maarais,  indion. 

(3)  11  est  asaei  Traiaemblable  que  ce  fat  dans  la  oaiaoD  de  la  sé^- 
luae  qne  H.  Fernando  Delgado  aUa  aui  Caldas ,  et  peut4tre  s'y  Inmn- 
tril,  comme  moi,  an  mois  d'août. 

(3)  U  en  était  encore  ainsi  en  1M3  (Fàivu,  Anal.). 

(1)  Itinéraire  approtinulif  des  Caldas  k  Sauta  Crui  : 


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330  T0TA6E  AUX  SOURCES 

Celle-ci,  beaucoup  plus  cbaude  que  toutes  c^les  que  j'avai* 
vues  aux  Caldos  Telhas  et  Novas,  fit  monter  le  thermo- 
mètre à  39°  Réaumur  ;  d'ailleurs,'  rien,  dans  son  voisinage, 
n'attira  mon  attention  (1). 

ie  pris  enfin  congé  de  mon  hâte,  qui,  pendant  mon  sé- 
jour aux  Caldas,  avait  été,  pour  moi ,  plein  d'égards,  et 
j'allai  rqoiodre  mes  gens  (2). 

Ce  jour-là  était  la  veille  de  la  Saint-Louis  ;  c'était  alors  la 
Ate  de  la  France ,  je  voulus  la  célébrer  avec  mes  gens  an 
milieu  du  désert.  La  vie  que  je  menais  au  Brésil,  malgré 
les  fatigues  et  les  privations  dont  elle  était  accompagnée, 
me  plaisait  chaque  jour  davantage  et,  comme  je  l'ai  dit, 
je  ne  pensais  point  sans  qnelque  effroi  à  mon  retour  en 
France;  mais  la  France  est  ma  patrie;  c'est  là  qu'étaient 
réunis  tous  les  objets  de  mes  affections,  je  devais  la  revoir 
on  jour  ;  comment  aurais-je  pu  ne  pas  m'intéresser  plus 
vivement  i  sou  bonheur  que  je  ne  m'intéressais  au  mien 
pn^re?  En  arrivant  à  Sapesal,  je  donnai  la  pièce  à  chacun 
de  mes  gens  :  à  la  chute  du  jour,  ils  mirent  le  feu  aux 
campoê  qui  bordent  les  deux  cdtés  du  ruisseau,  près  diH 
quel  avait  été  construit  le  roncho.  En  peu  d'instAnts,  une 

De  Ctlàat  NoTu  k  Sapesal i       legoaa. 

—  Sitio  do  Francisco  Alves.  .  .  -      4 

—  Santa  Crat,  village S  14 

Il  1/2  legoas. 

(I)  Il  paraît,  d'après  ce  qne  dit  H.  Fairre,  que  la  source  dont  je  puie 
id  n'est  pas  la  seale  qai  se  troDTe  près  de  Pyrapitinga  (.Anal.). 

(S)  H.  Faivre  rapporte  qne  le  boa  lieutenant  Coelho  ne  prend  pas  la 
moindre  chose  au^  malades  qai  Tiennent  s'établir  sar  son  terrain ,  pris 
des  soarces  d'eau  thermale.  En  Europe ,  on  leur  mesareraii  la  place  an 
millimtire,  el  chaque  milliniètre  aurait  son  prii.  On  voit  combieii  1m 
BrMIiens  sont  encore  éktignés  de  notre  dvilisalioii  arancée. 


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DU  UO  DE  S.  FRANCISCO.  »l 

flamme  brillante  s'étendit  en  ligne  droite  dans  les  deux 
campos;  chaque  tooffe  d'herbe  semblait  être  un  vase  en- 
flammé, et  nous  eûmes  le  spectacle  d'une  illumination 
vagabonde  plus  belle  cent  fois  que  toutes  celles  qu'on  pré- 
pare dans  les  villes  avec  tant  d'art  et  de  symétrie.  J'avais 
emporté  avec  moi,  de  Rio  de  Janeiro,  un  petit  baril  d'eau- 
de-rie  de  Portugal  ;  depuis  longtemps  j'en  gardais,  avec 
soin,  une  petite  portion  pour  célébrer  cette  fSte.  Le  punch  , 
excita  la  gatté.  Narcellino  joua  de  la  guitare  en  chantant 
des  modt'flAof,  accompagné  par  José  Marianno.  Laruotte 
les  fit  valser  tous  les  deux ,  et  la  soirée  se  tennina  par  les 
quatre  coins  et  la  main  chaude ,  jeux  que  mes  Brésiliens 
ne  connaissaient  point  encore  et  qui  parurent  les  amuser 
beaucoup.  Cet  instant  de  joie  fut  de  courte  durée  ;  d'insup- 
portables ennuis, des  contrariétés  sans  nombre, des  fatigues 
que  rien  ne  compensait  allaient  bientàt  lui  succéder. 

De  Sapesal,  je  me  rendis  au  Sitio  de  Francisco  Alves,  et, 
le  lendemain ,  je  partis  pour  S.  Cruz  qui  n'en  est  qu'A 

Kn  sortant  du  litio,  je  traversai  le  Rio  do  Peixe  dont  j'ai 
déjà  parlé.  Cette  rivière  était  alors  extrêmement  basse , 
d'une  très-grande  limpidité,  et  pouvait  avoir  enriron  la  lar- 
geur d'une  de  nos  rivières  de  quatrième  ordre  (25  août). 
On  m'assura  qu'on  trouvait  beaucoup  d'or  dans  son  lit, 
tant  au-dessus  qu'au-dessous  de  Francisco  Aires,  mais  qu'il 
n'y  en  avait  point  en  face  de  cette  petite  habitation;  ce 
qui  pouvait  tenir  à  la  nature  ou  plutAt  à  la  forme  des 
cailloux  qui ,  en  cet  endroit,  constituent  sans  doute  le  fond 
de  la  rivière. 

A  environ  4  lieue  1/2  portugaise  de  Francisco  Âlves,  le 
pays  devient  plus  montueux  et  en  même  temps  plus  boisé. 


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VOTAGE  AUX  500IGES 

e  cela  arrive  toujours.  Noos  eotrimei  dons  les  bois 
et  Boua  traveraénes  deux  miaaesax  doot  les  bords,  exploités 
autrefois  par  des  miimirs,  préseoteot  de  tous  cAtés  des 
ornas  de  cailloux,  résidus  de  leurs  langes.  BientM  aprte, 
DOus  arrivAmes  à  S.  Crus. 

J'arais  une  lettre  de  recommandation  pour  le  commaii- 
daut  du  village  ;  je  le  découvris  après  beaucoup  de  recher- 
chée inutiles,  et  il  m'installa  dans  une  maison  fort  grande 
et  très-commode,  mais  qui,  n'étant  pas  habitée  depuis  fort 
longtemps,  était  devenue  le  r^Mîre  des  puces  et  des  cM- 
ques  [pul<tr  jimelniiu). 


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DU  RIO  DE  S.  FRAHCISCO. 


CHAPITRE  XXVI. 


LB  VILLAGE   DE    SANTA  CBUZ.  —  UMB  BOtTTE  Tlts- 
PÉNIBLE. 


■itloiTe  do  ?ilUg«  de  Sanla  Cnu  de  Coyiu.  Ses  habiums  actnela.  S« 
misère.  Sa  posiiion/  Ses  minières.  Sm  rues  ;  ses  maisons  \  sei  églim. 
Limites  de  la  jnstiee  dont  Santa  Cnti  est  le  cbef-Iiea  ;  population.  — 
Stfio  ffom.  —  P*;*  silnè  entre  cette  habitalioa  et  le  Mo  Canmiad.— 
Cette  mière.  —  Doe  caravane.  —  SiMo  iU  Pttiro  4la  Roejui.  Des  mal- 
les et  nn  malet.  ~-  Tableau  géniral  du  pajg  situé  eatre  le  Conunbà  et 
le  PariHbjba.  ~  SUio  da  Potte.  Émigrés  geralUku.  —  État  de  l'at- 
mosphère.—  LeBropodo  Vari$itauy;  son  raiteho. —  Le5iHo  do  V»- 
riittÊM.  Cbtlear.  ioeommodiite.  — .  Du  journée  lrè«-fattgante.  — 
SUio  do  BjMrào.  Halle  désagriable.  Feriaité.  Difficulté  de  placer 
les  produite  de  la  terre.  — Insectes  malfaisants.  —  José  Harianoo.  — 
SUio  do  RiaeXo.  Lee  habitants  de  ee  pajs  prirés  d'instroction  et  de 
■ecoora  religieai:.  —  Faxtnda  de*  Catadot.  —  Incndie  dans  tue 
fiiTèt. 


Le  Tlltage  de  S.  Crus  de  Goyax  (Sainte  Croix  de  Goytu), 
ou  simplement  Santa  Crus,  situé  par  17*,K4'  latît.  nid, 
est  iiB  des  plo9  aocwiis  étaUiiseiDeDts  de  la  prorince  (1). 

(1)  Piiarra  racoqte  (JTfn.,  IX,  Slfl)  qne  le  nommé  HaDoel  Dits  dt 
SUti,  traversant  le  désert  ponr  se  rendre  h  Cnjibi,  découvrit,  vers  l'an- 
née 1720,  les  terrains  anrifïres  où  a  été  bâti  le  village  de  Sanla  Cnu,  et 
qo'U  j  éleva  une  croii  avec  celle  inscription  :  F(w  U  roi  de  PorivgaU 
Ô  ajoale  que  le  roi  d'Espagne  se  plaigm'l  de  c«(te  prise  de  possession, 
mais  <iu'on  ne  tint  nnl  compte  de  sa  réclamation,  et  qne  SMva  fnl  it- 


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314  TOTAGE  AUX  SOURCES 

On  a  tiré  beaucoup  d'or  des  terrains  qui  l'entourent;  i)  a 
été  habité  par  des  hommes  qui  possédaient  un  asseï  grand 
nombre  d'esclaves;  il  a  en  son  moment  de  splendeor; 
mais  il  a  fini  par  éprouver  le  même  sort  que  tous  les  autres 
établissements  dus  à  des  mînenrs.  L'or  a  été  dissipé;  les 
esclaves  sont  morts;  S.  Cnu  est  tombé  dans  un  état  de 
décadence  qui  surpasse  (1819)  celle  de  tous  les  antres  vil- 
lages que  j'avais  visités  jusqu'alors  (1).  et  le  mineur  qui, 
lors  de  mon  voyage,  passait  pour  le  plus  riche  du  canton, 
ne  travaillait  qu'avec  trois  esclaves.  La  route  de  tioyazà 
S.  Paul  a  passé,  pendant  longtemps,  i>ar  Santa  Cmz,  et 
alors  les  caravanes  y  laissaient  un  peu  d'argent  ;  mais  cette 
faible  ressource  a  encore  été  enlevée  à  ce  village;  car  an- 
jonrd'hui ,  en  sortant  de  Bom  Fim,  on  prend  un  Douveaa 
chemin  qui  abrège  de  4  legoat. 

La  plupart  des  habitants  de  S.  Ctuz  sont  aujourd'hui 
(1819)  de  pauvres  cultivateurs,  qui  n'y  viennent  que  le 
dimancbe.  Extrêmement  faible,  la  population  permanente 


coinpeiué  pir  son  goureraeineiit.  Je  tnU  loin  de  nier  ces  flÙU  ;  cepca- 
dut,  je  dds  ravancr,  je  m'eipliqae  difBcilement  comment  le  roi  iTE*- 
p«gae  put  bc  plaindre  de  h  pUnUliOD  de  ceUe  croix  (Uns  nu  déeertsi 
éloigné  de  «es  paetteàaoa,  on  même  comment  il  pnt  en  être  iustrait, 

(I)  Malgré  l'éUt  de  décadence  et  de  misère  dans  leqnel  il  est  tombé, 
le  village  de  SanU  Crnz  a  été  érigé  en  ville  par  l'assemblée  provînciak 
de  1B3S  et  est  devenn  le  cb^-Uea  d'une  des  eomarau  de  la  proviriee  de 
Gojai  (HiLL.  et  LOP.  Di  Houa.,  Dlec.  Brax.,  H,  488).  11  est  ineoalM- 
table  que,  vonlant  former  âne  comarea  cotre  celle  de  Gojai  et  la  fttn- 
lière  méridioDile  de  la  province,  on  ae  ponvait  mieni  hire  qne  de  cboi- 
sir  Santa  Cmt  pour  en  être  le  chef-liea  ;  mais ,  accoulvmé,  comme  jt 
Tétais,  à  ne  voir  pour  capitales  des  comarctu  que  des  villes  d'une  impor- 
tance notable,  telles  que  Sabarn,  Villa  do  Principe,  S.  Joio  d'El  Id, 
Hjtû,  etc.,  je  ne  puis  me  faire  k  l'idée  de  la  métamorphose  du  panne 
village  de  Santa  Crni  en  cbef-lieu  de  eomarea. 


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•  DU  RIO  BE  S.  FRANCLSCO-  3» 

de  ce  villf^e  se  compose  d'un  très-petit  nombre  d'ouvriers, 
de  femmes  de  mauvaise  vie,  de  deux  ou  trois  cabaretiers, 
enfin  de  quelques  molAtres  et  n^res  libres  qui  passent  la 
plus  grande  partie  de  leur  vie  à  ne  rien  faire.  Ce  sont  ces 
derniers  qui  vont  encore  è  la  recherdie  de  l'or.  Lorsque 
)a  sécheresse  a  mis  à  découvert  une  partie  du  lit  du  Rio 
Corumbi,  du  Rio  do  Peiie  et  de  quelques  autres  ruisseaux 
voisins,  ces  hommes  lavent  le  sable  et  les  cailloux  dans 
les  endroits  où  les  eaux  ont  déposé  la  poudre  d'or.  Ils  font 
souvent  de  très-bonnes  journées;  mais,  quand  Ils  se  voient 
ricbes  de  quelques  vintms,  ils  interrompent  leurs  travaux, 
boivent  le  ta6a  (cachapa)  et  savourent  l'oisiveté  à  cAté  de 
leurs  maîtresses. 

Quoique  Sanla  Cruz  soit  le  chef-lieu  d'une  justice  {jul- 
gado)  et  d'une  paroisse,  ce  village  est  si  pauvre  qu'on  y 
cher«berait  vainement  une  boutique,  et  qu'on  ne  trouve 
guère  que  du  taBa  dans  les  deux  ou  trois  misérables  vendas 
qu'on  y  voit  encore  (1).  J'avais  absolument  besoin  de  clous 
pour  ferrer  mes  mulets  ;  il  n'y  avait  qu'  un  serrurier  dans  le 
village,  et  n'ayant  ni  fer  ni  charbon ,  il  était  allé  à  la  cam- 
pagne. Les  colons  des  alentours  qui  n'ont  pas  l'espérance 
de  vendre  leurs  denrées,  et  payent  la  dlme  d'après  l'éten- 
due de  leurs  plantations,  cultivent  uniquement  pour  nour- 
rir leurs  familles  (2)  et  se  procurer,  par  échange,  du  sel  et 
du  fer;  ils  n'envoient  presque  rien  au  village,  et  les  objets 
de  première  nécessité  y  manquent  presque  entièrement;  il 


U)  Ainsi  que  je  l'ai  dit  ailleurs,  ou  a  couiumc  de  vendre  dais  les 
vetutat  Doa-seulcmeDt  du  taGa,  inai«  encore  divers  comestibles. 

(2j  Vo]ei,  plus  haut,  le  cha{jittc  ioliluli',  Tableau  général  de  laf.ro- 
vinet  de  Goyas,  paragraphe  MtuUalt  de  la  dlme.  ' 

a.  15 


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}H  VOYAGE  AUX  SOURCES 

me  fallnt  des  protections  pour  obtenir  une  quarte  (quarta) 
de  maïs  (1). 

Sant«  Cniz  est  entooré  de  bois  et  bkH  sur  une  plate- 
fonoe  allongée,  un  peu  au-dessus  d'un  tràs-petït  misseau 
qui  porte  le  nom  de  Corrego  Vermeiho  (ruisseau  ronge). 
Ud  esiwce  de  terrain  de  quelques  centaines  de  pas  s'étend , 
par  une  p«ite  insensible,  entre  le  village  et  le  ruisseau. 
Comme  ce  terrain  contenait  autrefois  beaucoup  d'or,  il  a 
été  retourné  de  toutes  les  mani^^  par  les  mineurs,  et, 
après  avoir  été  couvert  de  bois,  il  o'oflireplus  aqourd'bui 
que  des  broussailles.  Au  delà  du  Corrego  VermeDio  s' lèvent 
des  mornes  boisés  et  assez  roides  qui  dominent  le  vil- 
lage (2). 

Celui-ci  se  compose  de  deux  mes  larges  et  assez  Ineo 
alignées  qui  s'étendent  parallèlement  au  ruisseau.  Les  mai- 
sons qui  les  bordent  sont  très-petitee ,  en  mauvais  état,  et 
un  grand  nombre  d'entre  eiieft  sont  aujourd'hui  abandon- 
nées ;  on  voit  que  toutes  ont  jadis  été  Mandiies ,  mais  le 
crépi  est  presque  entièrement  tombé.  On  compte  deux 
églises  A  Santa  Cnu,  l'égliae  paroissiale  dédiée  à  Notre- 
Dame  de  la  Conc^>tion  (Noua  SmKora  da  Coaetiçèo)  et 

(1  )  Li  qvarla  de  Rio  de  Janeiro  équÎTant  i  1  décalitre ,  celle  de  Goju 
CM  plus  forU. 

(S)  Je  ne  me  suis  mallieiireustmeiit  pas  (Ut  indiquer  le  oom  dt  ce* 
momesi  c'eatf»iKmb1ablemeDtlelf(>rrodoCI«n«nle,oACualelPiM 
assurent  qu'il  eiiste  des  mines  tris-richefi,  qne  le  manque  d'ean  empfckc 
d'exploiter.  •  La  province  de  Gojtt,  dit  d'Eschwege,  est,  de  tout  le  Sri-    ' 

■  sil ,  une  des  pins  ricbes  en  or  ;  ses  maatagoes  n'ont  point  encore  Hé 

■  ToDillées  ;  c'est  tout  au  plus  si ,  en  quelques  ondroits,  oo  a  gratta  kar 
n  suthce Onud  la  population  sera  plus  considérable  et  que  les 

■  Brésiliens  sauront  eiploiter  lenrs  nûties  d'une  manière  régoUèit, 
0  on  eu  tirera  des  aTanUBes  qu'où  ne  se  pnNmrerait  pas  aujourdlim 
(  sans  faire  d'immenses  sacrifices  (Plvlo  Brat.,  78], ■ 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  337 

une  petite  chapelle  demi-ruiuée  consacrée  à  Notre-Dame 
du  Rosaire. 

La  justice  {jvlgado)  et  la  paroisse,  dont  Sauta  Crut  est 
le  chef-lieu,  s'étendent,  dans  une  longueur  d'environ 
40  Ugoas,  du  nord  au  midi,  depuis  le  Hio  Jurubatuba 
jusqu'au  Paranahyba,  frontière  de  la  province;  il  n'y  a 
point  encore  de  limites  Qies  du  c&té  de  l'ouest ,  où  est 
un  immense  pays  encore  inhabité  et  inconnu  (1].  On  ne 
compte  (1819),  dans  toute  la  paroisse  de  Santa  Crui,  que 
3,000  Ames,  en  y  comprenant  les  esclaves,  et  l'élise  pa- 
roissiale n'a  d'autre  succursale  que  cdie  de  Bom  Fim  (â). 

(1)  L'abbé  Luîi  Antonio  da  SjIts  e  Sonsa,  d'tccord  avec  moi  sur  l'étea- 
dae  de  U  justice  de  SauU  Crnz  da  septentrion  an  midi ,  ajoate  (  Item, 
mal.,  39-39)  qu'elle  ■  60  legoat  et  m^iiie  davantage  dîna  u  plaa  graixle 
longueur.  Suiranl  le  même  écrÎTiin,  il  j  avait,  en  1833,  sur  ce  terri- 
toire, à  pea  près  anssi  grand  qne  le  Portugal,  sans  les  AlgarTeg,S16plan- 
latioas  (ropat),  dont  19  sncreries,  387  métiers  i  faire  divers  tissns  de 
laine  et  de  colon ,  IS  potiers,  32  tuiliers,  33  taillenrt,  34  cordonniers, 
33  charpentiers,  3  nenuiaiers,  10  selliers,  3  matons,  16  serruriers,  8  or- 
fèvres, 13  boatiqnes  et  31  cabarets.  On  sera  mus  doute  étonné  de  trou- 
ver dans  cette  liste  quatre  fois  plnâ  d'orfèvres  que  de  maçons  :  les  fem- 
ines  des  cnltivatenrs  portent  toutes  quelques  bijoni  d'or,  et  l'on  lait  ai- 
sément soi-mènie  ou  i  l'aide  de  ses  esclaves  les  murs  en  terre  de  sa 
maison  et  les  chétifs  meubles  qu'elle  renferme.  Depuis  1833,  le  terri- 
toire de  Santa  Cnu  n'a  plus  la  même  étendoe ,  puisqu'on  en  a  séparé, 
coaum  ou  l'a  vu,  celui  de  la  nouvelle  ville  de  Bom  Fim  ;  par  consé- 
quent, il  7  aurait  beaucoup  à  retrancher  de  l'état  statistique  fourni 
par  Luit  Antonio  da  Silva  e  Sonsa ,  et  il  ne  faut  pas  croire  qu'il  j  ait  eu 
compensation  dans  un  état  plus  prospère  :  tes  choses  n'ont  malhenreu- 
semeot  pas  beaucoup  changé  ;  en  1844 ,  le  collège  électoral  de  Sauta 
Ctdi  ne  comptait  encore  que  14  membres  (Hiii.  rr  Lop.  ut  Houn., 
Diee.  Brax.,  II,  487). 

(3)  Postérieurement  i  mon  voyage,  on  a  qjoatè  k  cette  succursale 
celle  de  Madrt  dt  Dtot  (Hère  de  Dieu),  dans  le  village  de  Calalào  (Luik 
mSiltâ  s  Sooii,  Mtm.  «êL,  10),  dont  je  dirai  quelques  mots  pin  tard. 
En  183!  ,  on  a ,  CMnme  je  l'ai  dit ,  détaché  de  la  paroisse  de  Saoïa  Cnt 


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«e  VOYAGE  AUX  SOURCES 

Quoique,  dans  ce  voyage,  mes  récoltes  de  plantes  fassent 
loin  d'être  considérables,  mes  malles  s'étaient  peu  à  peir 
remplies,  et  il  m'en  fallait  de  nouvelles  avec  un  mulet  pour 
les  porter.  Le  commandant  de  Santa  Croz  se  donna  ionti- 
lement  beaucoup  de  peine  poiir  me  procurer  ces  objets;  je 
fus  obligé  de  partir  sans  qu'il  eût  rien  découvert  ;  mais  il 
m'indiqua  un  propriétaire  qui  demeurait  dans  le  roistnage 
du  Corumbà,  et  qui,  dïsait-il,  pourrait  me  vendre  le  muM 
et  les  malles. 

Au  delà  de  Santa  Crnz  (1),  je  parcourus  un  pays  passa- 
blement boisé  ;  à  une  lieue  dn  village,  je  passai  devant  une 
sucrerie  assez  belle  qui  appartenait  au  commandant  ;  je 
me  détournai  de  la  route  pour  éviter  un  mauvais  gtte,  et 
j'allai  coucher  au  Sttio  Novo,  habitation  qui  paraissait  avoir 
eu  jadis  de  l'importance,  mais  dont  les  bAtiments  à  demi 


Ta  snccnrsale  de  Bom  Fin  :  ainsi  cette  paroisse  sertit  encore  resUe 
arec  une  seale  succursale  ;  mais  il  paraîtrait  qa'actuelleineDl  elle  o'eo  a 
plus  da  tout,  car  MM.  Hilliet  et  Lopea  de  Hoara  doaaent  i  Catalào  le 
titre  de  paroisse  [frfguesia). 

(1}  Itinéraire  appraiimatif  da  village  de  Santa  Cmi  au  Bio  Pora- 
nahjba  : 
lieSanlaCnu  au  Sitio  NoTO,  babitalion.  .  .  .* 2']/3  legoas- 

—  Siiio  de  Pedro  da  Rocha,  chaumitre.  .      4 

—  Silio  da  Possc,  chaumière 3 

—  Sitio  do  Brsfo  do  Vcrissimo,  maison- 

■>«le 1  1/ï 

—  Silio  do  Verissimo,  maisonnette,  ...      i\/2 

—  Sitio  do  Hibeirào,  maisouneile h 

—  Silio  do  Riacbo,  chaumière 4 

—  Porlo  Real  da  Paranahyba 4 

91  \fl  legoas. 

On  T«it,  par  le  court  itinéraire  de  Lati  d'Alincourt,  qu'il  n'a  pas  pMat 
par  Sanu  Cru  et  ipi'il  a  suivi  nn  autre  cbenin  qne  moi. 


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DU  BIO  6E  S.  FRANCISCO.  21» 

ruinés  étaient  alors,  pour  la  plupart,  uoiquement  habités 
par  des  chauves-souris. 

Le  lendemain,  en  voulant  regagner  la  route,  je  m'égarai, 
et  Ûs  â  legoat  de  plus  qu'il  ne  fallait.  Pendant  cette  fati- 
gante journée  de  6  legooê,  je  ne  remarquai  aucun  change- 
ment dans  l'aspect  du  pays  ni  dans  sa  végétation.  Après 
avoir  fait  !2  legoat,  j'arrivai  au  Sitio  do  Brejo  (la  maison- 
aeUe  du  marais),  qui  se  composait  de  deux  ou  trois  misé^ 
râbles  chaumières  dont  les  murs ,  construits ,  suivant  la 
coutume,  avec  des  bitons  croisés,  n'avaient  pas  même  été 
enduits  de  terre.  A  quelque  distance  de  là ,  je  trouvai  un 
autre  silio  qui  n'était  pas  beaucoup  plus  magnifique  que 
le  premier,  et  enfin  j'arrivai  au  Rio  Corumbé,  sur  le  bord 
duquel  on  voyait  une  sucrerie  -qui  ne  me  parut  pas  en 
meilleur  état  que  les  deux  silios. 

Le  t>>ruDAà  que  j'avais  déjà  vu  au  village  du  même 
nom  (1)  prend  sa  source  près  des  Hontes  Pyreneos,  dans 
un  lieu  qui ,  m'a-t-on  dit ,  porte  le  nom  de  Curral;  et, 
après  avoir  retu  les  eaux  d'un  grand  nombre  de  rivières  et 
de  ruisseaux,  il  se  jette,  comme  on  l'a  vu,  dans  le  Paraoa- 
hyba.  A  l'endroit  où  on  le  traverse ,  il  pouvait  avoir,  lors 
de  mon  voyage ,  environ  la  même  largeur  que  le  Loir^ , 
quelques  centaines  de  pas  au-dessus  .du  pont  d'Olivet,  et  il 
doit  être  beaucoup  plus  large  au  temps  des  pluies.  Au-des- 
sus et  au-dessous  de  ce  même  endroit ,  son  lit  est  embar- 
rassé par  de  grosses  pierres  qui,  pendant  la  sécheresse,  pa- 
raissent au-dessus  des  eaux ,  mais  que  celles-ci  doivent 
recouvrir  dans  une  autre  saison.  Sur  ses  deux  bords  s'élè- 


(1)  Vojei  le  chapitre  iolilulé ,  S.  AnlOHio  éot  Monlei  Ctarai.  - 
village  de  Contmbd,  cU. 


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130  VOYAGE  AUX  SOURCES 

vent  de  grands  arbres  dont  la  verdure  Irès-fratche ,  que 
l'humidité  entretenait  sans  cesse ,  reposa  ,  pour  quelques 
instants,  ma  vue  fatiguée  par  les  teintes  grisâtres  des  coin- 
pM.  Le  CorumbA  était  une  des  rivière»  dont  le  péage  avait 
été  concédé ,  pour  la  dorée  de  trois  vies ,  à  la  Manille  de 
Bartholomeu  Baeno,  et,  à  l'époque  de  mon  voyage,  la 
troisième  vie  n'était  pas  encore  éteinte  (1).  Je  montrai  mon 
passfriwrt  royal  au  jeune  homme  chargé  de  recevoir  le 
péage  ,  et ,  après  quelques  difBcultés ,  il  me  dispenu  de 
paya*,  comme  on  avait  fait  partout  ailleurs.  On-  passe  dans 
des  pirogues  les  hommes  et  les  marchandises,  et  l'on  tient 
à  la  longe  les  chevaux  et  les  mulets ,  que  l'on  force  de  tra- 
verser la  rivière  à  la  nage.  Chaque  personne  paye  40  reis; 
les  animaux  chaînés ,  ISO  reis  ;  ceui  qui  ne  le  sont  pas,  80 
(Ofr.25,  Ofr.  75,0fr.  50). 

A  peu  de  distance  du  Corumbi  ,  j'avais  déjà  rencontré 
une  caravane  très-considérable  qui  se  rendait  i  Cuyabi; 
une  seconde  attendait,  sur  le  bord  de  le  rivière,  que  nous 
eussions  passé,  afin  d'avoir  son  tour.  Je  me  mis  à  causer  avec 
le  marchand  h  qui  elle  appartenait;  i)  me  dit  qu'elle  se 
composait  de  soiianle  bétes  de  somme ,  et  que,  en  outre,  il 
emmenait  une  dontaine  de  négritlons  de  la  cAte  d'Afrique. 
Il  venait  de  S.  Paul  et  allait  à  Cuyabi.  U  s'attendait  à  toe 
obligé  de  vendre  A  de  longs  termes  presque  toutes  ses  mar- 


(I)  Comme  ou  l'a  vu  au  diapitre  XIV  du  premier  TOlnme  de  cet  oa- 
vr*ge ,  l'honneur  d'avoir  d^touvert  la  prorince  de  Gojai  ipparlient  bi^ 
réellemenl  anx  étax  Buena  ;  maia  il  n'en  est  pas  nHii»  vrai  fne  Hanoe! 
Correa  j  avait  pénétré  «vaut  eai.  D'Escbwege  n'est  poiot  d'accord  avec 
les  bistorieiu  quand  il  place  {PltUo.Bra*iliett*(t,  54)  l'eipiditioD  ia 
premier  Baeno  ivaDt  celle  de  Muoel  Correa,  ei  qa'il  iirfiqae  relle^i. 
qui  remODlc  à  16T0,  comme  étant  de  IT19. 


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DO  UO  DE  S.  niANClSGO.  »1 

cbaDdises,  et  il  ne  croyait  pas  pouvoir  retourner  à  S.  Paul 
avant  deux  ans.  Des  affaires  de  ce  genre  sont  fort  lucra- 
tites,  sans  doute  ;  mais ,  si  elles  procurent  de  grands  béné- 
fices, Ils  sont,  certes,  achetés  bien  cher.  Les  Faalistesqui 
font  c«s  interminables  voyages  à  travers  les  déserts  oift  dâ 
nécessairein«)t  consener  quelque  chose  de  l'esprit  aven- 
tureux et  de  la  persévérance  de  leurs  ancéb«s. 

Après  avoir  passé  le  Corumbà ,  je  fis  encore  1  lieue  pour 
me  rendre  an  Sitio  de  Pedro  da  Rocha  [nom  d'homme),  on 
l'on  avait  &  vendre  des  malles  et  un  mulet.  J'avais  si  bien 
appris,  par  ma  propre  expérience ,  à  profiter  de  l'occasion, 
dans  ce  pays  où  manquent  les  choses  les  plus  nécessaires  à 
la  vie ,  que ,  craignant  de  ne  point  trouvn*  de  malles  Jus- 
qu'à Mogimirim ,  la  première  ville  de  la  province  de 
S.  Paul,  j'achetai  celles  que  l'on  m'offrait,  quoiqu'elles  fus- 
sent fort  chères ,  et ,  par  là ,  je  me  vis  fbrcé  d'acheter  nn 
mulet  qui  ne  l'était  pas  moins. 

Du  Corumbi  an  Paraaahyba  ,  on  ne  peut  pas  compter 
moins  de  95  legotu.  Dans  cet  espace,  le  pays,  tantAt  mon- 
tueux,  tantôt  simplement  ondulé,  continue  i  présenter  une 
alternative  de  bois  et  de  campox ,  les  proniers  dans  les 
fonds,  les  seconds  snr  les  hauteurs  et  sor  les  cAtes.  Le  ter- 
rain devient  très-souvent  pierreux  on  sablonneux  ,  et  alors 
les  arbres  des  can^os  ont  moins  de  vigueur  et  se  montrent 
pins  écartés  les  uns  des  autres  :  d'ailleurs  ce  sont  toujours  à 
peu  près  les  mêmes  espèces.  Aus^  loin  que  la  vue  peut 
s'étendre ,  on  ne  découvre  aucune  trace  de  culture ,  on  ne 
voit  point  de  bestiaux  dans  les  pAturages  ;  partout  une  pro- 
fonde solitude,  la  monotonie  la  plus  faUgante.  Dans  ce  pays, 
il  n'existe  aucune/iisenda(1819);  mais,  àquelqnes  lieues  de 
distance  les  uns  des  autres,  on  trouve,  sur  le  bord  de  la  route. 


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333  VOYAGE  AUX  SOUBCES 

demisérablesjùtMtoajoDrsaccompagiiésd'uDrancho  ouvert 
de  tous  le»  c6tés.  Les  propriétaires  font  construire  ces  ban- 
gars  auprès  de  leurs  draneures  pour  attirer  les  caravanes  et 
pour  pouvoir  débiter  leur  maïs;  mais ,  cette  anoée-Iè  ,  on 
ne  trouvait  de  grain  nulle  part ,  parce  qu'on  ne  plante  ab- 
solument que  pûur  obtenir  la  quantité  qu'on  est  assuré  de 
vendre,  et  la  sécheresse  svait  dérangé  toutes  les  plaisions. 
En  voyant  l'indolence  et  l'ennui  qui  se  peignent  sur  la 
figure  des  campagnards  voisins  de  la  route,  il  est  difficile 
de  se  défendre  d'un  sentiment  de  mépris.  Ces  hommes 
SMit  d'une  pauvreté  extrême  et  ne  font  rien  pour  en  sortir. 
Ainsi  on  voit  partont  d' excellents  pâturages ,  presque  par- 
tout il  existe  des  terrains  salpêtres  qui  dispenseraient  les 
propriétaires  de  donner  dn  sel  au  bétail ,  et  c'est  i  peine 
s'ils  possèdent  deux  ou  trois  vscbes  pour  avoir  un  peu  de 
lait.  Leur  costume  consiste ,  comme  celui  des  plus  pauvres 
^lineiros,  en  un  caleçon  de  grosse  toile  de  coton  et  une 
chemise  de  la  même  toile  passée  par-dessus  le  caleçon  en 
manière  de  blouse  ;  les  plus  riches  d'entre  eux  y  ajoutent 
un  gilet  d'élolïe  de  laine. 

Le  jour  où  je  quittai  le  Silio  de  Pedro  da  Bocha  ,  je  tas 
extrêmement  fatigué  par  le  mouvement  de  paupières  que 
je  faisais  sans  cesse  pour  empêcher  les  petites  abeilles  et 
les  botrachudot  de  se  précipiter  dans  mes  yeux  ;  j'en  fus 
principalement  lounnenté  sur  le  bord  d'un  petit  ruisseau 
marécageux  où  j'allai  herboriser;  si  je  cessais  un  instant 
d'agiter  mon  mouchoir  devant  ma  figure  ,  elle  était  aussi- 
tôt couverte  de  ces  insectes  malfaisants. 

A  1  lieue  de  Pedro  da  Bocha  ,  je  passai  devant  le  Silio 
doPalmital  ( inaisounellc  du  lieu  planté  de  Palmiers),  qui 
se  composait  de  quelques  chaumières  et  d'un  raucho;  en- 


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DD  RIO  DE  5.  FRANCISCO.  133 

suite  je  ne  vis  plus  d'habitation  jnsqu'jt  l'endroit  où  je  fis 
halle,  le  Sùm  da  Passe  (maisonnette  de  la  prise  de  posses- 
sion ]. 

Là  il  n'y  avait  qu'une  misérable  chaumière  à  demi  dé- 
couverte qu'habitait  le  propriétaire  ,  et  une  autre  presque 
détruite  dont  oo  avait  fait  une  espèce  de  rancko.  La  séche- 
resse était  alors  si  grande ,  que  ,  auprès  de  ce  triste  abri , 
nous  enfoncions  dans  la  poussière ,  et ,  à  chaque  instant , 
des  cochons  et  des  chevaux  en  faisaient  voler  des  tourbil- 
lons autour  de  nous. 

I^  Silio  da  Posse  était  occupé  par  un  homme  de  Minas 
Geraes  qui  s'y  était  fixé  tout  récemment.  J'avais  déjà  ren- 
contré beaucoup  de  Geraîistas  (1]  nouvellement  établis 
dans  la  province  de  Goyaz.  Ces  hommes  prétendaient  qu'ils 
avaient  quitté  leur  pays  parce  que  toutes  les  terres  y  étaient 
prises;  la  vérité  est  que,  en  émigrant ,  ils  avaient  cherché 
à  se  soustraire  aux  poursuites  de  la  justice  ou  à  celles  de 
leurs  créanciers. 

Dans  la  journée  qui  suivit  celle  où  nous  couchâmes  à 
Posse ,  nous  ne  vîmes  ,  jusqu'à  la  halte  ,  d'autre  habita- 
tion qu'une  pauvre  chaumière  accompagnée  d'un  rancho. 
D'un  morne  ossez  élevé  ,  nous  découvrîmes  une  vue  im- 
mense; mais  les  vapeurs  dont  le  ciel  était  chargé  ïious 
empêchaient  de  bien  distinguer  les  objets. 

Comme  je  l'ai  dit  ailleurs  (2j ,  le  ciel ,  depuis  le  ââ  du 
mois  d'août ,  avait  perdu  son  brillant  éclat  ;  un  brouillard 
blanchâtre  Atait  à  l'atmosphère  toute  sa  transparence  ,  et , 

(1)  Nom  qu'en  beaucoup  d'eudraits  ou  douoe  aui  habilauia  de  la 
prurincc  de  Minai  Geraes. 

l'J)  VojM  le  chapitre  iuiitulé,  Tableau  général  ilc  ia  province  de 
r^iyn: ,  paragraphe  Ctimal ,  lalubrilé. 


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334  TOYAOE  AUX  SOURCES 

dins  raprès-midî ,  on  pouvait  regarder  Siement  le  disque 
du  soleil  sans  être  incommodé.  Le  50 ,  jour  où  je  quittai 
Posse,  le  tonnerre  se  fit  entendre,  et  noua  vîmes  des  éclairs; 
mais  la  pluie  ne  tomba  point;  nous  étions  loin  encore  de 
l'époque  où  elle- devait  commencer. 

Nous  fîmes  halle  i  un  sitù>  composé  de  quelques  maison- 
nettes éparses  MUes  presque  sur  les  bords  d'une  petite  ri- 
vière qui  porte  le  omu  de  Braço  do  Verûtimo.  Cette  ri- 
vière a  été  ainsi  appdée  parée  qu'elle  se  jette  dans  le  Rio 
Verianmo  (1);  elle  prend  sa  source  à  environ  8  legoai  de 
cette  petite  habitation,  à  un  endroit  appelé,  m'a-t-on  dit, 
Imbiruçu,  et  n'a  pas  un  cours  de  plus  de  13  à  13  hgoat; 
elle  passe  pour  très-poissonneuse;  mais,  jusqa'i  présent 
(1819) ,  on  n'a  point  encore  trouvé  d'or  dans  son  lit. 

Une  caravane  qui  se  rendait  de  S.  Paul  à  CuyebA  se 
trouvait  avec  moi  au  Braço  do  Verissimo;  c'était  la  troi- 
sième que  je  rencontrais  depuis  Maaponte.  On  m'avait 
abandonné  une  petite  chambre  dont  le  devant ,  entière- 
ment ouvert,  servait  de  rancho.  Les  sacs  de  cuir  {broa- 
eat)  (â]  qui  renfermaient  les  marchandises  de  la  caravane 


(1)  J'écris  ce  mot  de  U  mime  miiûire  qae  Cuti  et  Luiz  d'Aliocoart, 
et  comme  od  le  pionoace  dîna  le  pays  ;  je  crois  qu'il  ue  faut  pas  admet- 
tre l'orthographe  de  Piiarro ,  qui  a  écrit  Virittinw. 

(2) 

E  por  gmpos  apidhoadoa , 
Em  sen  ceoiro  cstào  arreios , 
Sacos,  couros  e  brMeai. 
Fileiras  de  eslacu  toscas 
Ko  lerreiro  em  fremte  se  alfam, 
Em  que  estào  presas  as  bestas 
Sicudiudo  seus  boniaes. 

Bachbml  Teixe»!  (  iD  Minerva  Brat.,  59t), 


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DU  niO  DE  s.  FRiNClSCO.  135 

étaient  entassés  avec  ordre  entre  les  longs  Mtons  destinés 
è  attacher  les  mulets.  Notre  Feu  avait  été  ailutné  è  peu  de 
distance;  celui  de  ia  caravane  était  auprès,  et  les  nègres 
accroupis  rormaîent  un  cercle  tout  autour ,  tandis  que  leurs 
maîtres  s'étendaient  dans  des  hamacs  qu'ils  avaient  fait 
attacher  en  plein  air  aux  pieux  dont  était  formé  le  pafc  lu 
bétail  [curral). 

La  chétive  habitation  où  je  Qs  halte  le  lendemain  porte 
le  nom  de  Sitio  do  Veristimo ,  porce  qu'elle  est  bâtie  sur  le 
bord  du  Rio  Veriasimo.  Cette  petite  rivière,  qui  se  jette 
dans  le  Corumbé ,  était  alors  presque  à  sec  ;  mais  elle  de- 
vient fort  large  dans  la  saison  des  pluies. 

Quoique  les  vapeurs  dont  l'atmosphère  était  rwnplie  di- 
minuassent beaucoup  l'ardeur  du  soleil ,  l'air  était  alors 
plus  chaud  qu'il  n'avait  été  depuis  la  mi-mars,  et,  vers 
trois  heures  après  midi ,  le  thermomètre  indiquait  généra- 
lement de  25  à  26°  Réaumur  :  aussi,  quand  nous  aj-rivions, 
tout  le  monde  était  harassé,  et,  lorsque  nous  aurions  eu  si 
grand  besoin  d'un  abri  qui  pût  nous  garantir,  uous  ne 
trouvions  qu'un  misérablej-ancAo  ouvert  de  tous  les  cAtés, 
où  nous  étions  obligés  d'entasser  nos  effets  dans  la  pous- 
sière, taudis  que  les  mulets  et  les  pourceaux  en  faisaient 
\o\ex  des  nuages  autour  de  nous. 

Après  avoir  couché  au  Sitio  do  Yerissimo,  nous  nous  re- 
mîmes en  route.  Nous  avions  fait  5  Ugoas ,  et  il  y  avait 
déjà  plus  de  sept  heures  que  nous  mardiions  ,  par  une  af- 
freuse chaleur,  lorsque  nous  arrivâmes  au  5ifto  do  Ribetrâo 
[la  petite  habitation  du  torrent),  oiî  nous  devions  faire  halte 
et  qui  est  situé  tout  auprès  d'un  ruisseau,  ie  mourais  de 
faim;  j'avais  les  nerfs  dans  un  état  d'irritation  très-pénible; 


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2S6  VOYAGE  AUX  SODftCES 

je  me  sentais  incapable  d'aller  plus  loin.  Cependant, comme 
il  eiii  été  impossible  de  placer  mes  effela  dans  les  maison- 
nettes en  ruine  dont  se  composait  le  Sîtio  do  Rîbeirëo  , 
José  Marienno  voulait  absolument  me  faire  faire  3  legoOM 
de  plus  et  devint  fort  impertinent ,  ce  qu'il  était  toujours 
apràs  une  journée  fatigante;  j'insistai  pour  que  nous  res- 
tassions àRibeirào  en  nous  logeant  n'importe  où,  et  nous 
nous  plaçâmes  sur  les  bords  du  ruisseau ,  dans  un  endroit 
où  il  D'y  avait  pas  même  le  plus  petit  ombrage.  Le  pro- 
priétaire du  sùio  me  témoigna  beaucoup  de  r^p^ts  de  ne 
pouvoir  m' offrir  un  meilleur  gîte ,  et ,  dès  le  premier  in- 
stant, je  crus  reconnaître  à  ses  maaières  honnêtes  qu'il 
n'appartenait  pas  à  la  province  de  Goyai;  je  ne  me  trom- 
pais point,  c'était  un  Mineiro. 

Presque  partout  où  j'avais  passé  ce  jour-là  et  les  précé- 
dents ,  le  sol  est  pierreux  et  de  mauvaise  qualité;  cepen- 
dant il  existe ,  dans  les  fonds ,  des  terres  excellentes ,  et 
tous  les  colons  s'accordaient  à  dire  que  le  maïs  y  rend  or- 
dinairement 240  pour  1 .  C'est  à  Paracatù  que  les  cultiva- 
teurs de  ce  canton  trouvent  le  débit  le  plus  assuré  de  leurs 
récoltes;  mais  cette  ville  est  éloignée  de  50  legoa$;  il  ne 
faut  pas  moins  de  douze  jours  pour  s'y  rendre  avec  des 
chars  à  bœufs ,  seul  moyen  de  transport ,  et  très-souvent , 
après  un  si  long  voyage  ,  le  colon  a  beaucoup  de  peine  à 
vendre  ses  denrées. 

Au  delà  de  Ribeirâo ,  nous  fûmes ,  pendant  toute  la 
journée ,  horriblement  tourmentés  par  les  abeilles ,  les 
borracliudos,  les  moustiques,  et  une  eï^pècc  de  mouche  ex- 
trêmement petite  dont  la  piqûre ,  qui  ne  laisse  point  de 
traces ,  brûle  comme  une  bluetle  de  feu  ;  c'était ,  je  crois. 


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DU  RTO  DE  S.  FRANCISCO.  137 

c^le  que  ,  dans  les  environs  de  Rio  de  Janeiro ,  on  appelle 
mWTom  (I). 

Le  défaut  d'eau  se  faisait  sentJr  d'une  manière  déses- 
pérante. Le  rîet  était  toujours  chargé  de  vapeurs,  et,  mal- 
gré cela,  il  régtiait  une  chaleur  sèche  qui  faisait  un  mal 
affreux.  Sous  ces  tristes  influences,  José  Marianno  devenait 
insupportable  par  son  humeur  et  son  impertinence.  Je 
A' avais  jamais  cessé  d'être  plein  d'attentions  pour  lui  ;  mais 
il  était  absolument  impossible  de  deviner  ce  qui  le  mécon- 
tentait, ou,  pour  mieux  dire,  il  soulTrait  et  était  mécontent 
de  lui-même.  Le  besoin  indispensable  que  .j'avais  de  cet 
homme  au  milieu  des  déserts  que  je  parcourais  ,  et  où  il 
m'eût  été  absolument  impossible  de  trouver  un  autre  mu- 
letier, me  faisait  supporter  ses  caprices  avec  une  patience 
inaltérable;  mais  j'avais  peu  de  mérite ,  car  le  seul  motif 
de  cette  patience  était  une  nécessité  impérieuse.  L'homme 
qui  habite  les  villes  fait  peu  d'attention  à  la  mauvaise  hu- 
meur de  son  domestique,  parce  qu'il  a  mille  moyens  de  s'y 

(1)  Je  ne  crois  pas  qu'il  faille  écrire  mn'oK*.  — Lorsque,  en  1816,  je 
séjournai  à  tibà  pour  la  première  fois,  j'j  f\is  borriblemeDl  tourmenté 
par  UD  diptère  d'uuc  peljt«sse  extrême,  dont  je  ne  sus  pas  le  nom  et  qui, 
vraisemblablement ,  n'était  antre  qne  le  mtruim.  Voici  ce  que  j'écrivais 
alors  :  ■  Les  monchea,  eiirèmemeut  petites,  dont  il  s'agit  ne  pénètrent 

■  pas  dans  les  habitations  -,  mais ,  pour  peu  qu'on  reste  an  instant  dans 

■  nn  endroit  humide  sans  faire  de  mouvement,  on  est  bientôt  assailli 

•  par  des  nuées  de  ces  insectes ,  dont  la  piqdre  brûlante  se  fait  encore 

■  sentir  longtemps  ayris  qu'on  Va  éprouvée.  Le  jour  de  mon  arrivée 

■  ici ,  je  m'a&sis,  sur  le  bord  de  la  rivière ,  pour  décrire  une  plante  de 

■  la  fïmille  des  Violacées ,  et  aussitôt  une  multitade  de  ces  petits  ani- 

■  maux  Tint  me  mettre  en  fén.  Je  m'obstinai  k  ne  point  changer  de  place 
•<  avant  d'art^  terminé  ma  descriptioD.;  mais  je  puis  dire  que  je  souffris 
•>  on  véritable  martyre.  La  suenr  tombait  de  mon  visage  comme  si 

■  j'eusse  Ait  nn  violent  eiercice  :  ma  respiration  était  précipitée  ;  je 

•  quittai  la  place  pins  fatigué  qu'après  une  longue  coarsc.  >> 


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Z3S  VOYAGE  ADX  SOURCES 

soustraire;  mais  c'est  un  véritable  supplice  d'avoir  sous  les 
yeux  ,  dans  tous  les  instants  de  sa  vie ,  nu  visage  triste  el 
refrogné,  et  d'entendre  sans  cesse  des  paroles  dures ,  kvs- 
qu'on  n'en  adresse  que  de  douces  et  d'honnfttes. 

À  4  legoas  de  Kibeirâo  ,  nous  flmes  halte  au  Sitio  do 
Riaeho  (  la  maisonnette  du  misseBa } ,  composé  de  trois  ou 
quatre  dieumières  qui  appartenaient  h  des  propriétaiFes 
ditrérents.  Le  plus  recommandable  d'entre  eux  me  reçut 
chez  lui  avec  beaucoup  de  bonne. vc^onté  et  m'abandonna 
la  principale  pièce  de  sa  maison.  Je  passai  un  jour  i  Riaeho 
pour  laisser  reposer  mes  mulets ,  et  j'employai  ce  temps  i 
herboriser  et  &  mettre  de  l'ordre  dans  mes  malles .  qui 
étaient  pour  moi  un  musée,  une  bibliothèque  et  un  ménage 
ambulants. 

he  canton  où  je  me  trouvais  alors  n'était  pas  éloigné  de 
nioios  de  Si!  legom  de  Santa  Cruz;  cependant  il  dépendait 
de  cette  paroisse  ,  et ,  jusqu'au  Paraoahyba ,  qoi  forme  la 
limite  méridionale  de  cette  dernière,  comme  celle  de  toute 
la  province  ,  il  n'existait  absolument  aucune  succursale. 
Autrefois  le  curé  de  Santa  Cruz  faisait ,  chaque  année ,  le 
voyage  du  Paranahyba  pour  confesser  les  habitants  du 
voisinage;  mais  il  avait  fini  par  se  lasser  de  s'éloigner  au- 
tant de  chez  lui,  et  le  curé  deV  Aldea  de  Santa  Anrut,  qai, 
dans  les  premiers  temps  ,  l'avait  remplacé ,  s'était  éloigné 
depuis  deux  ans  (1).  Le  curé  de  Santa  Cruz  avait  bien  autre 
chose  à  faire  qu'à  songer  i  ses  paroissiens;  il  s'occupait  de 
commerce  ,  passait  pour  s'y  entendre  parfaitement ,  et , 
lorsque  je  lui  avais  fait  ma  visite ,  il  m'avait  entretenu  de 
wn  négoce  comme  d'une  chose  toute  naturelle.  Cet  homme 

(1)  Vojei  le  cbapitrc  suivant. 


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DU  UO  DE  S.  rSAHdSCO.  139 

se  conformait  aux  habitudes  de  son  pays  et  n'était  pas  {dus 
coupable  que  tant  d'autres;  il  serait  injuste  d'adresser, 
pour  des  faits  semblables ,  des  reproches  k  tel  ou  tel  indi- 
vidu en  particulier  ;  ce  sont  les  mœurs  générales  qu'  il  Eau- 
drait  ticber  de  réformer.  Quoi  qu'il  en  soit ,  les  habitants 
dece  canton  (1840)  ne  vont  jamais  à  la  messe;  ils  ne  re- 
çoivent point  les  sacrements  quand  ils  sont  malades;  ils 
sont  privés  de  toute  espèce  d'instmctimi  religieuse  et  mo- 
rale, et,  s'ils  ont  conservé  quelques  idées  de  christianisme, 
ce  ne  peut  être  que  par  des  traditions  de  famille  que  le 
temps  aura  certainement  obscurcies  (!].  La  niaiserie  et  le 
peu  de  politesse  de  ces  Infortunés  ne  doivent  done  pas 
snrprendre.  S'ils  communiquent  de  loin  en  loin  avec 
quelques  hommes,  ce  qui  n'a  lieu  qu'au  temps  de  la  sèche- 
resse  ,  ce  sont  ordinairement  les  conducteurs  des  cara- 
vanes ,  leurs  n^res  et  leurs  grossiers  serviteurs  [  eamara- 
dai);  rien  ne  réveille  leur  intelligence,  rien  ne  ranime 
leurs  sentiments  moraux,  rien,  pour  ainsi  dire,  ne  les  relie 
i  la  société  humaine. 

Au  delà  de  Riacho ,  les  terres  sont  très-bonnes ,  les  bou- 
quets de  hois  (  capôe»  )  très-multipliés ,  et ,  i  peu  près  à  ' 
i  lieue  duParaoahyba.'on  entre  dans  une  espèce  de  forêt 
qui  s'étend  jusqu'à  la  rivière  présentant  partout  une  végé- 
tation très-vigoureuse. 

Beaucoup  plus  près  de  Riacho ,  je  passai  devant  la  Fa- 
senda  dos  Casados  { les  mariés  ) ,  d'où  dépend  un  moulin  à 
sucre.  Autour  de  cette  habitation  sont  groupées  plusieurs 
maisons  A'agregados  qui  donnent  à  ce  lieu  l'apparence 

(1)  11  eat  I^cn  «Tfdent  qne  Téut  de  cbosM  qae  je  peins  ici  a  dA  diui- 
ger,  MHS  pluaienra  n^orts,  depais  qn'on  a  conttruit  one  église  i  Ct- 
lolio  on  dins  ms  environs,  et  qnt  ce  rillsge  ■  iU  irifi  ta  paroisse. 


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240  VOYAGE  AUX  SOURCES 

d'un  petit  hameau.  Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  qne  celle  dn 
principal  propriétaire  diffère  è  peine  des  autres:  elle  dif- 
fère même  fort  peu  des  cases  des  nègres  esclaves  :  et 
genre  d'i^gaiité  ,  général  dans  cette  partie  de  la  provuce, 
ne  prouve  autre  chose  qu'une  égaie  grossièreté  de  mœun. 
Ijfs  caravanes  trouvent  aux  Casados  les  provisions  dont 
elles  ont  besoin;  mais  un  débit  aussi  faible  n'aurait  pu 
suffi  À  l'importance  de  cette  fazenda  :  le  propriétaire  «i- 
voyait  au  village  d'Araiâ  son  sucre ,  son  tafia  et  ses  aulm 
denrées  À  dos  de  mnlet  ;  ce  voyage  ne  demandait  pas  moins 
de  douze  jours  (1). 

Les  Casados  sont  situés  à  1  lieue  seulement  du  Riacbci 
et  jusqu'au  Paranahyba,  c'est-à-dire  dans  un  espace  de 
3  îegoat,  je  trouvai  encore  une  habitation  de  lieue  en  liw. 
La  fertilité  du  sol  et  le  voisinage  de  la  rivière ,  sur  le  b«d 
de  laquelle  s'arrêtent  souvent  les  caravanes,  auront  engage 
un  certain  nombre  de  cultivateurs  à  se  fixer  dans  ce  caoUii. 

Au  milieu  du  bois  qui  bi»^e  le  Paranahyba  et  dont  j'ii 
parié  tout  à  l'heure,  on  avait  coupé  les  arbres,  dansua» 

(1)  Luiid'AliocourldJI  (.U^m.  >'ia0.,  71]  que,  de  18tS  à  1S3.1,  li/o- 
lenda  de  Casados  éprouva  une  augmenlalioD  srnslbU,  ptnt  qae  \rs  Bb 
et  leslillfsdu  propriéUJre,  aVIaat  mûries,  aviieat  construit  leurs dt- 
menKS  auprès  de  celle  de  leur  rieui  pèreclvÎTateat  eu  tr^bonoe  ioltl- 
ligeuce-  Daas  le  mCme  ÎDierralle  de  temps,  ajoute  cet  auteur,  la  popoli- 
IJOD  des  campagDcs  voisines  de  la  route  sï'tail  acerue  coDsidprableiocDl^ 
des  immigralioDS  de  Mioeiros.  —  C'est  h  A  lieues  de  Casados  qu'eal  si<w 
le  Tillage  de  Catalio  doot  J'ai  di^Jt  parlé  [roiei  note  3,  p.  220).  En  18»^, 
il  D*f  avail  eucore  en  cet  endroil  que  quelques  colons  j  ea  18S3,  Irs  ha- 
bitants du  TDisinagc  étaienl  di<jk  nombreui  et  avaient  bl(i  une  cbapdlt 
(d'Aunc,  Htm.,  73)1  plus  tard,  Calalâo  est  devcoaune  snccatsikdc 
SaDtaCn»,  et  il  paraîtrait,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  qu'on  a  6iu  paria 
fwre  «ne  pnoisse.  Il  ne  fkat  pas  s'imaginer  cependant  que  ces  cbmp- 
mentswienldas  Ji  une  augmen talion  véritable  de  population;  ils  K le 
sont  qu'à  des  déplaremeuts. 


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DU  RIO  DE  S.  FBINCISCO.  311 

pace  de  qa^nes  hectares,  pour  y  fiaîre  une  plantation. 
Suivant  l'usage,  on  avait  mis  le  ïeu  aux  troues  abattus,  et 
i)  s'était  communiqué  dans  la  for£t.  Je  vis  des  arbres  gigan- 
tesques, brûlés  par  le  pied,  tomber  avec  fracas  et  briser, 
dans  leur  chute,  ceux  que  le  feu  n'avait  pas  encore  atteints. 
Ainsi,  pour  quelques  làqueire»  de  maïs,  on  risque,  ftiute 
de  précautions,  de  perdre  une  forêt  tout  entière;  et  le 
temps  n'est  pas  certainement  éloigné  où  les  Brésiliens  se 
plaindront  de  n'avoir  pas  de  bois  (1). 

Je  ne  tardai  pas  h  arriver  sur  les  bords  du  Paranabjba, 
et  bientAt  je  quittai  pour  jamau  la  province  de  Goyaz. 


Lorsque  j'étais  à  Ub6 ,  en  1816,  le  propriétaire  de  cette 
belle  habitation,  M.  Joâo  Rodrigues  Pereira  de  Almeida, 

<  1  >  Hgm  dia  chegtri ,  incolR  iosano , 
Que  0  suor  de  lea  Blho  a  estrada  baohe, 
Qat  arqnejaDdo,  caosido,  em  loofos  diat 
Em  tIo  basque  hum  esWo,  que  lerante 
O  herdido  casai  cnrrado  em  niiDi  1 
Hnm  dia  cbegarâ  que  a  peso  d'onro 
Compre  o  moiMTcha  do  mu  raslo  iniperio 


B  os  lemplw  do  Senhor  o  pinbo  ioToqaem 
Para  o  allar  amparar  das  tempesladesl 

HlNOU.  DE  iBADJO  PoRTO-iLUni. 

J«  Me  snû  tlevé ,  d  y  a  déjà  longteoips  (Toyei  mon  royane  doni  U* 
frooinea  <h  Itiodt  Janeiro  <l  de  Miitai  Geraei) ,  contre  la  destmc- 
tion  intempevliTe  des  Tortls  ;  mais,  il  Ikut  bien  le  dire,  ce  n'est  pas  aeu- 
lemmt  an  Brtsiliois  qa'oa  doit  faire  on  rq>raclK  de  uégliger  la  eoo- 
serratHMi  des  bois  -,  ce  tort  grare  nt  le  rtanltat  de  l'imprivoiaiMe  et  de 
l'égoisme,  et  ptrioat  il  se  trouve  des  boromes  égttIsUs  et  impréTojanla. 
Hilgré  de  Hges  ordoaoaiMFS ,  malgré  les  eihorlalious  mille  fois  r^- 
II.  lô 


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HS  VOTAGB  AUX  SOORCBS 

reçoi  la  visite  d'un  colonel  qui  venait  de  Goyat,  oà  i)  avait 
occupé  un  poste  éinîoent,  et  se  roidait  k  Rio  de  Janeiro. 
C'était  un  honune  grave,  instruit,  plein  de  sens,  dont  les 
manières  étaient  cdles  de  la  meilleure  compagnie,  qui  avait 
voyagé,  possédait  plnalears  langues  et  parlait  admirable- 
ment le  flvn^aii.  Nous  passâmes  ensemble  une  diitioe  de 
jours  ;  U  me  parla  beaucoup  de  la  province  qu'il  venait  de 
quitter,  et  j'eus  soin  d'écrirelerésultatdenosconversatioos. 

Le  séjour  de  cet  officier  parmi  les  Goyanais  remontait 
probablement  anx  premières  années  de  notre  siècle  :  eu 
transcrivant  ses  récits  dans  cet  ouvrage,  je  rendrai  un  peo 
moins  incomplète  l'ébaucbe  que  j'ai  tâché  de  tracer  d'une 
monographie  de  la  province  de  Goyai;  ils  montreroal 
combien  sont  anciennes  les  misères  de  cette  province , 
comblra  on  s'en  occupait  peu  au  temps  du  système  ccia- 
nial,  et  combien  il  est  à  désirer  qu'une  administration 
sage  et  intelligente  fasse  sortir  enfin  les  habitants  de  leur 
apathie  et  les  excite  è  féconder,  par  le  travail,  les  germes 
de  prospérité  qu'une  nature  bienfaisante  a  semés  antonr 
d'enx. 

«  La  population  de  Goyaz,  me  disait  le  colonel  *", 
«  monte  à  peine  à  50,000  âmes,  y  compris  les  Degrés; 
«  Villa  Boa,qui  en  est  la  capitale,  n'a  pas  plus  de  3,000  ha- 
«  bitants.  Les  terres  de  ce  pays  sont  excellentes  et  prodni- 
«  sent  en  abondance  du  sucre,  du  café,  du  coton;  mais. 


lé«dn agronomes,  n»lgril«a  malbenra  qn'anèoeot  ha  d<iioii^Mals 
irc^  mnltiplite ,  on  cootiDae ,  en  Fruce,  h  tmeher  d«s  forèto  qn'il  tm- 
tirait  respecter.  Dei  eolUnes ,  B«gaèr«  contertes  de  piu ,  n'offrent  ptas 
■gjonrd'lnii ,  dene  les  P^Tinét» ,  «JM  dea  loaSes  d'bM'bes  tevtite  ke 
unes  det  entres ,  et  h  peine  quelques  brimMiUes  j  reptriiaMal'eUee . 
qu'elles  sont  inasitAt  irracliées. 


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DU  UO  DK  S.  FRANCISCO.  313 

;  on  ne  peut  exporter  aucune  denrée,  les  babi- 
tt  tanta  ne  cnUivent  qa'autunt  qu'il  est  Indïspensoble  pour 
«  ponrrmr  à  leurs  besoins.  Us  n'exercent  non  plus  aucune 
a  industrie  et ,  en  échange  des  objets  fabriqués  qu'on  leur 
a  apporte  à  dos  de  mulcAs,  ils  ne  peuvent  donner  que  de 
«  l'or. 

a  L'espérance  d'en  trouTer  a  seule  déterminé  des  hom- 
«c  mes  aventnrenix  à  s'enfoncer  aussi  avant  dans  l'intérlair 
n  des  terres ,  laissant  derrière  eux  de  vastes  contrées  dé- 
«  séries  et  incnltes.  La  faible  population  du  Brésil  s'est 
«  disséminée  sur  une  surface  immense,  tandis  que,  si  l'on 
«  s'était  écarté  do  littoral  à  mesure  seulement  que  les  ter- 
n  res  eussmt  manqué,  ce  royaume  serait  incontestaMe- 
a  ment  devenu  ricbe  et  florissant.  Étendue  dans  une 
«  grande  quantité  d'eau,  la  liqueur  la  plus  forte  se  bit 
«  k  peine  sentir. 

«  Les  anciens  cbereheurs  d'or  étaient  généralement  des 
«  hommes  sans  fortune,  et  ils  n'ont  pas  toujours  été  dé- 
«  dommages  de  leur  peine.  Souvent  oo  fait  encore  à  Goyaz 
«  des  dépenses  considérables  dans  l'espérance  de  trouver 
«  des  richesses,  et  souvent  aussi  il  arrive  que,  api^  bien 
«  des  recherches,  on  n'est  pas  ^os  avancé  ((u'auparàvant. 

a  Ce  sont  les  noirs  que  l'on  empliûe  A  ce  genre  de  ^- 
«  vail.  Un  nègre  coûte,  à  Gojai,  300,000  reis  (1  ,â50  li-.); 
«  mais  très-peu  de  gens  sont  en  ^at  de  fournir  cette 
«  SDitime  au  comptant  :  on  achète  resclave  è  crédit  ;  pen- 
u  dant  qu'on  s'occupe  k  le  former,  les  intérêts  de  l'argent 
«  conrent,  et,  lorsqu'il  faut  payer  le  capital,  le  nègre 
«  n'a  encore  presque  rien  rapporté;  on  vend  une  par- 
«  tie  de  ce  qu'on  possède,  et  chaque  jour  on  devient  plus 
a  pauvre. 


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i**  VOrAGE  AUX  SOURCES 

«  Une  des  cames  qui  contribuent  sartout  à  l'appau-' 
«  vrîssement  de  cette  capitainerie  est  le  m^ris  qu'on  y 
K  fait  des  liens  de  la  famille.  Les  mariages  y  sont  rares  et 
«  tournés  en  ridicule,  c£  qui  dérive,  sans  doute,  de  l'im- 
«  moralité  des  plus  anciens  colons.  Les  blancs  virent  dans 
«  le  désordre  avec  les  femmes  de  couleur  et  les  Indiennes; 
«  ils  s'intéressent  peu  aux  enfants  qui  naissent  de  ces 
«  unions  momentanées  et  négligent  d'augmenter  une  for- 
«  tune  qu'ils  doivent  laisser  k  des  collatéraux.  Leurs  mat- 
«  tresses,  sachant  qu'elles  ne  peuvent  compter  sur  on 
a  long  attachement,  se  bAtent  de  mettre  i  profit  fascen- 
«  dant  qu'elles  exercent  sur  enx  et  achèvent  de  les  ruiner. 

K  D'un  autre  cAté,  le  sang  s'altère  chaque  jour  davan- 
tt  tage.  et  déjà  l'on  ne  trouve  plus,  dans  la  capitainn'ie, 
a  assez  de  blancs  pour  remplir  les  emplois  publics. 

u  Les  enfants  nés  d'unions  illégitimes  et  passagères  ne 
u  reçoivent  aucune  éducation  ;  ils  prennent  de  bonne  heure 
«  l'habitude  du  vice,  croupissent  dans  l'ignorance,  ne  con- 
«  naissent  ni  famille,  ni  patrie,  et  refusent  de  travailler, 
«  sous  pr^exte  que  le  sang  des  blancs  coule  dans  leurs 
<(  veines. 

0  n  serait  essentiel  que  le  gouvernement  encourageât 
a  les  mariages  par  des  exemptions  d'impôts  et  dégoûtât 
«  du  célibat  par  une  augmentation  de  charges. 

«  La  capitainerie  de  Goyai  est  traversée  par  de  grandes 
M  rivières,  et  la  principale  d'entre  elles,  le  Tocantins,  est 
«  par  elle-même  d'une  navigation  facile.  Pour  donner  un 
«  déboudié  aux  denrées  du  pays,  il  suffirait  de  faire  cob- 
«  strnire  des  barques,  d'établir*  de  distance  k  autre,  sur 
K  les  bords  du  fleuve,  des  espèces  de  magasins  où  l'on 
«  pût  trouver  des  vivres,  et  de  placer,  dans  le  voisinage. 


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ou  MO  DE  S.  FRANCISCO.  !4S 

«  des  postes  militaires.  Le  gourernement  a  senti  les  avan- 
«  tages  de  ce  plan,  et  depuis  longtemps  il  a  engagé  les 
(t  habitants  de  Goyaz  i  se  cotiter  pour  rendre  le  fleuve 
«  navigable;  mais  ils  sont  si  pauvres,  qu'aucnn  action-' 
«  naire  ne  s'est  présenté  (1).  » 

A  quelques  nuances  près,  ce  triste  tableau  diffère  à  peine 
de  celui  que  j'ai  tracé  moi-même  avec  détail.  Ainsi,  de- 
puis un  grtind  nombre  d'années,  l'état  de  la  province  de 
Goyaz  était  déjà  à  peu  près  le  même  qu'en  1819,  et  les. 
écrits  de  Hattos  et  de  Gardoer  tendent  à  prouver  que,  de- 
puis, il  ne  s'est  pas  amélioré.  On  a  introduit  quelques  ré- 
formes, on  a  fait  quelque  bien  de  détail  ;  mais  il  n'est  pas 
è  ma  connaissance  qu'aucune  mesure  imputante  ait  été 
prise  pour  rétablir  les  finances,  faire  fleurir  l'agriculture 
et  le  commerce,  donner  aux  habitants  du  pays  un  peu 
(l'énergie ,  exciter  leur  émulation  et  épurer  leurs  mœnrs. 
Les  éléments  d'une  grande  prospérité  sont  là,  je  le  répète  ; 
espérons  quelque  chose  du  bon  sens  de  notre  espèce,  espé- 
rons davantage  encore  du  temps  ^  4e  I9  Providence  (2). 

(1)  Prabablement  sons  le  gouvememeut  de  Frauciaco  d'Assii  Hisu- 
renhas,  comte  de  Palma. 
{!)  «  La  proviDce  de  Goyaz  aurait  été ,  dit  d%schvege  (PHUo  Bra- 

■  tUietui»,  69),  udb  des  plas  prodactiTes  et  àes  plus  OaHuaDtes  du 
x  Brésil,  ai  md  admiaislration  n'aTiit  presqae  tonjoars  été  confiée  U 

■  des  hommea  peu  délicats  et  malhabiles.  Sous  i'ancien  gonvememeiit, 
«  chaque  employé  ne  soDgeail  qu'i  sod  iotértt  particatier,  et  trop  aon- 
•  TCDt  il  en  est  encore  ainsi  depuis  que  le  pays  est  goninis  k  une  aasem- 

■  blée  proTiikciale.  >  —  A  Fernaudo  Delgado ,  qaî  rut  ceriaÏDemeai  na 
homme  de  bien ,  succéda  HimOil  IcniIcio  de  Sakpaio,  anquel  on  a  Tait 
ÀK  teproehes  tellement  graves  (  ScBiarmi,  Brai.),  qu'il  est  imposaible 
de  H  pas  les  regarder  comme  calomoteai.  Après  la  revolniion  qui 
donna  au  Brésil  une  cniiéTC  iodépendaDce,  Sampaio  fut  obligé  de  quitter 
son  gouveroement ,  et  l'on  institua  uue  junte  aiminUlraUve  ;  bieutM 


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310  VOYAGE  «UX  SOURCES 

celle-ci  Gt  place  k  une  mm  yat*,  dile  jirotrfwlre,  deat  les  membres 
foretit  nommiïs  par  le  prince  régeat  D.  Pedro  1"^  et  eaBn ,  depvi»  1824, 
l'admiaistratiOD  de  Gojti  i  toajoars  dii  confiée,  comme  celle  des  autres 
proTÙKes  de  l'empire,  h  dd  prtndent  et  un  secréiaire  assistés  d'uD  «m- 
aeil  provincial  (  Hill.  et  Lop.  di  Hodb.,  Diee.  Brai.,  1 ,  401).  —  U  eU 
évident,  d'aprtsce  qacdit  Hattos  [ItVnerario,  1),  que,  At»  rorigine,  le 
|^uT«TiGmeQt  provincial  fut  fortement  entravé  par  des  menées  sourdes 
et  par  des  commérages.  L'intrigue  est  de  tons  les  paja,  mais  Burlont  de 
ceux  où  l'on  connaît  peu  le  travail  ;  c'est  l'occapatiM  des  fawnmts  «i- 
BÎDi  :  aussi  semble-1-elIe  avoir  établi  son  empire  parmi  les- Brésiliens. — 
Le  manque  d'hommes  capables  a  dû  être  aussi  un  grand  obstacle  il'éta-. 
bUssement  d'nn  gouvernement  sage  et  ri!galier  dans  la  province  de 
Cojai.  Les  habiianlB  de  ce  pajs,  je  le  réptte  encore,  sont  bira  loin  d'eue 
dépourvus  d'intelligence;  mais  cette  qualité  ne  suffit  pas  pour  faire  an 
bon  administrateur  ;  l'in^lruclion  n'est  pas  moins  essentielle,  et  ce  n'est 
pas  sons  le  système  colonial  que  les  Goyanais  pouvaient  en  acqucrir 
clKi  eni.  Un  des  nembrea  de  la  première  jnnte  était  un  ecclésiastiqu 
qni  Hiaugeait  souvent  cbei  le  gonvernenr  tt  loi  serrait  de  joneL  Cet 
bomme  me  parlait  un  jonr  d'une  transaction  qui  me  pamt  peu  licite  :  mois, 
monsieur  l'abbé,  Inidis-je,  ce  serait  une 'simonie;  non,  me  répondil-îl, 
vwu  allez  vair,  et  il  me  récita  en  taiio  la  série  des  emptebemenis  diri- 
maula  du  mariage.— Depuis  eetle  époque,  les  choses  ont  malbeurense- 
mcni  peu  changé.  J'ai  fait  conoatlre  ce  qu'était,  en  1833,  l'enseignement 
dans  le  pays  de  Coyaz  ;  il  parait  que ,  plus  récemment ,  je  dois  le  dire  à 
la  louange  du  gonveToement  provincial,  il  a  été  établi  k  Tilla  Boa  nue 
chaire  de  philosophie,  outre  celle  de  latin,  et  que,  de  plus,  on  enseigne 
la  géométrie  et  le  français  (Hill.  et  Lop.  HouBi  Diee.,  I,  106).  Hais 
une  insiTuction  aussi  élémentaire  ne  suffit  pas  pour  fomer  des  sojels 
capables,  et,  d'ailleurs,  il  est  permis  de  croire  que  ce  ne  sont  pas  les 
maîtres  les  plus  habiles  du  Brésil  qui  vwt  se  filer  è  Gojai ,  puisqu'on 
a  de  la  peine  à  trouver  des  hommes  qui  veuillent  s'enfoncer  dans  noe 
province  aussi  reculée  pour  occuper  des  fonctions  probablement  beau- 
coup mieui  rétribnées  que  celles  de  maître  de  français  ou  de  géomârie 
(voyex  le  rapport  fait  ï  l'assemblée  législative  générale  de  l'empire  pour 
l'année  \.>U&).  D'un  autre  cAté,  peo  lie  Goyanais  sont  assez  riches  pour 
envoyer  leurs  enfants  à  2  on  300  iegoat  de  ches  eui,  à  l'école  de  droit 
de  S.  Paul  ou  k  celles  de  la  capitale  du  Brésil,  et  il  faut  convenir  que 
tes  parents  doivent  aussi  répngnerè  mettre  outre  eui  et  leursenfants  Qoe 
élendue  si  immense  de  déserts.  D'api^  le  rapport  fait  par  le  minisue 
d'État  du  Bréal ,  Joaquim  Harcellino  de  Brito ,  à  l'assemblée  générrie 


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DO  RIO  DE  S.  mxasco. 


t  k  l'école  de  droit  d'Olindi ,  2  id  collège  de  Pedro  Segondo  de  Elio  de 
Janeiro.  De  tout  ceci  et  d«a  détails  qac  j'ai  doaoés  dans  le  coon  de  cet 
«UTrage,  il  but  ccDdure  que,  » ,  depuis  la  déconrerte  de  Oof  u  jusqu'à 
DOS  jsors,  les  direrscs  administraliaiis  qpi  se  sont  saecédt  daos  cette 
proviDce  «Di  soDTent  en  les  torts  Us  plus  grives,  si  oa  a  pu  les  accoser 
de  ntgligeiMe,  d'impiritie  et  même  de  malversalioii ,  il  ttut  ponrUnt 
reeoauttre  qoe  les  bomiDes  les  plos  habiles,  lea  plus  déaireni  de  hire 
le  Uen  rtacoatraroiil  des  obstacles,  sinon  inaurmontablee ,  an  moins 
fort  dilScUes  h  vaincre ,  dans  l'éloignemeot  de  la  province  d«  Qoju ,  sa 
pofralatMD  si  bible ,  rcicessîTe  dissémination  de  ses  habitants ,  lear 
eitrèoie  psnrnlé  et  rindoleoce  k  laqoalle  les  porte  U  cbalenr  do  climat. 


,.;.  Google 


VOYAGE  jtUX  SOURCES 


CHAPITRE  XXVII. 


EKCOBK  LA   PSOVINCB  DSS  MINES.   —   LES  1NDIKK5  UKHS 
DU  PARANAHVBA. 

Le  ParanaAiFba,  limite  de  U  province  de  Goju.  ~  DéUuls  snr  cetie  ri- 
vière.—  On  la  passe  an  Porjo  Reat  lia  Paraitah}fita.  Soldats  minci' 
TOe.  —  District  privilégié  concédé  ani  Indiens  métis.  —  Insectes  mal- 
fiisuils.  —  ÀUea  da  Riodai  Pedro*.  Sa  posilioa.  Ses  maisons.  Por- 
trait des  IndicDS  qui  l'habitent;  leor  capitaine;  lear  histoire;  leur» 
privilèges.  Tous  sont  cultivateara:  débit  des  produite  de  lenrs  terres. 
Ils  sont  privés  de  seconre  spiritaels  et  de  tout  mojen  d'instructioo. 
Leur  langue;  vocabulaire  comparatif  de  cette  langue,  de  la  lùtgoa 
ftral  et  du  dialecte  de  S.  Pedro  dos  Indiog  ;  orthi^rapbe ,  prononcia- 
tion ;  réfleiions  sur  les  alti^rationg  qu'a  subies  la  Ungoa  gérai.  —  ilf- 
dea  da  Etiiva.  Sa  posilioa.  Sou  histoire.  Détails  sur  ses  habilaïUB. 

—  Insectes  inalfusanis  innombrables  sur  les  bords  du  Rio  da  EtUva, 

—  Aldea  de  PitarrSo  abandonné.  —  AUta  da  Boa  YUta.  Ses  habi- 
tanis.  Une  ftte.  Réfleiioas  sur  la  manière  dont  les  hommes  de  noire 
race  se  conduisent  envers  les  Indieoa.  —  Bonheur  des  Indiens  mélb 
du  ParanahjbA.  —  Utilité  da  mélange  des  races.  Les  résultats  de  ces 
mélanges.  —  Pourquoi  l'anthropologie  est  encore  une  science  ri  eb- 


Autrefois,  la  province  de  Goyaz  s'éteadait  i  34  ou 
35  lieues  portugaises  de  sa  limite  actuelle,  c'est-è-dire 
jusqu'au  Rio  Grande;  mais,  comme  le  territoire  qui  se 
trouve  compris  entre  cette  rivière  et  le  Paranahyba  fait  par- 
tie de  la  justice  {julgado)  de  Desemboque  (1),  il  suivit  le 

(1)  Le  village  de  Desemboque,  situé  sur  la  rive  gauche  du  Rio  dai 


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DU  MO  DE  S.  FEUNCI6CO.  UE> 

sftrt  de  cette  justice  et  de  celle  d'AraxA,  lorsque,  au  mois 
d'avril  1816,  on  les  réunit  toutes  les  deux  à  la  province  de 
Minas  [1}  :  alors  le  Paranahyba  devint  la  limite  méridio- 
nale de  celle  de  Goyaz. 

Le  Paranahyba  prend  sa  source  dans  la  eomarca  de  Pa- 
racatâ  (3),  au  versant  occidental  de  la  chaîne  qui  divise  ses 
eaux  de  celles  du  S.  Francisco  (Serra  do  S.  Francisco  e  da 
Paranahyba).  Ses  principaui  affluents  sont  le  Rio  das  Te- 
Ibas,  le  S.  Marcos  et  le  Corumb&,  et ,  quoique  les  deux  der- 
niers viennent  de  beaucoup  plus  loin  que  lui ,  ils  perdent 
leur  nom  en  réunissant  leurs  eaux  aux  siennes.  De  grosses 
pierres  s'élèvent  du  lit  de  cette  rivière  comme  de  celui  du 
Paranahyba  (3]  et  empèchetit  malheureusement  qu'elle  ne 
soit  navigable.  Je  ne  sache  pas  qu'on  y  ait  trouvé  de  l'or, 
mais  elle  passe  pour  être  très-poissonneuse  ;  cependant  il 


Telbas,  doit  sa  fbndatioa  k  des  Mineiros  «t  est  plus  ancieD  qn'iraiJ.  Il 
parait  que  aes  haUlanta,  tïToriafe  par  ta  fertilité  fort  renommée  des 
terres  enrironDuitos ,  joniisent  d'une  certaine  aisance.  D'Eschwege  dit 
(0r(U.,  1,  99)que,  enlSie,  on  ne  Mmptait  encore,  k  Deaemboqne,  que 
65  maisDDa,  et  qu'il  j  avait  iSl  faxmda*  dtiis  tout  \tj*l^a4o,  dont  la 
population  s'élevait  approumativemenl  i  3,94S  individuE,  sur  ane  sar- 
tvx  d'eoriron  SOO  tegoat  carrées.—  On  est  étonné  qae  Piiarro,  qui  écri- 
vait en  1S3S,  ait  encore  placé  Dtsemboqae  dans  ta  province  de  Goyai  et 
ne  parle  que  dans  nite  note,  et  encore  occasionnellement,  de  U  rénnimi 
de  ce  village  à  Minas.  —  Desemboqne  a  été  érigé  en  Tille  et  comprend, 
avec  son  district ,  disent  Millet  et  Lopes  de  Hoora  (Mec,  3SS; ,  nne  po- 
pulation de  3,000  ftme« ,  qui  Ure  de  grands  avantage*  de  la  coltore  des 
terres.  Le  MaU  on  Conf  onAot  (  llex  Paraguarimgù ,  Ang.  de  S.  Hi- 
laire,  et  nan,commeona  écrit,  PdroiruavrMti)  est,  Content  les  mé- 
ines  anlears.  très-commno  tnpris  de  Desemboque. 

il)  Voyez  le  chapitre  intitulé,  Lt  village  ^Araxù,  etc. 

(3]  Poil,  Relu,  I,  312. 

t;i)  rnnagedant  te  aittriet  du  Diammlt  et  $wr  U  lilUtral  du  Bri- 
«il,  I,  lus. 


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3M  TOT  AGE  AUX  SOUICES 

est  à  remarquer  que ,  si  le  poisson  ;  mord  bien  à  l'hame- 
çon, c'est  uniquement  au  temps  des  pluies,  ce  qui,  au  reste, 
a  également  lieu  dans  toutes  les  rivi^es  de  ce  pays  (1). 

Comme  on  l'a  vu.  j'avais  déjà  passé  le  Paraudif  ba  eu  me 
rendant  d'Araxé  i  Goyaz.  A  l'endroit  où  oa  le  travraae  pour 
se  rendre  de  cette  province  à  S.  Paul ,  et  que  l'on  nomme 
Porto  Seal  da  Paranal^ba,  on  est  beaucoup  moins  près 
de  sa  source,  et  c'est  déjà  une  grande  rivière  ;  mais  l'ex- 
cessive sécheresse  qui  régnait  à  l'époque  de  mon  voyage 
l'avait  réduit  au  tiers  de  sa  largeur  ordinaire.  Ses  deux 
rives  ont  peu  d'élévation  au-dessus  du  niveau  de  Tean; 
mais  elles  sont  assez  escarpées  et  couvertes  l'une  et  l'autre 
de  bois  d'une  végétation  assex  vigoureuse.  On  passe  cette 

(I)  DtDS  uu  LvK  dont  ne  peaveot  se  passer  ceui  qui  Teulent  coaiud- 
ire  l'easemble  de  !■  féographie  du  Brésil,  le  Diedonario  geofpra- 
phico,  etc.,  les  anlenrs  ool  cra  devoir  changer  le  Dom  de  PartuibjlM  en 
ParatMiva  (U,  3S9),  parce  que,  disent-ils,  cette  riTiâre  «  été  appelée  tout 
k  It  fois  ParahOa,  ParatMfcyba,  et  mime  Parana.  Ani  deox  eodrods 
où  je  l'ai  iraverséc,  je  l'ai  euteDdu  oomitier  Pamahyba,  qui  est  éndEia- 
meai  une  corruption  de  ParanoAyba,  et,  comme  ce  dernier  mot  a  été 
adopté,  avec  la  «eole  variante  de  l'i  k  l'y,  par  des  hommes  qui  font  m- 
Urité,  HRQaclAjresdeCaial,PIi^TO,  Eschwege,  PohleiHattos,  il  m'a 
semblé  qae  je  devais  le  conserver  :  d'aiUenrs  les  auteurs  du  Dieeionario 
<n  ont  eai'^nimea  donné  l'eiemple  à  leor  article  Ci>r«Mbd.— Ces  géopa- 
phes  ajoutent  que  •  le  Paiaoaiva  n&tt  dans  les  montagnes  qui  se  trouvent 
•  m  sud  du  ruisseau  (HMro)  TocanlinB ,  afflneat  du  Rio  Haranhâo.»  Je 
n'ai  point  visité  U  «ource  du  Paranabjba  ;  mais  je  crois  devoir  préférer 
lavenionde  PohI,  citée  plus  haut,  parce  qu'elle  est  précise  et  cm- 
foiine  à  tout  ce  que  je  sais  de  la  rivière  dont  il  s'agit.  Luii  d'Aliacauri 
est  pins  précis  eocore  que  Poh) ,  car  il  dit  positivement  <iue  le  Sio  Pa- 
ranahjba  ■  s«  source  la  plus  élo^oée  au  nord  de  la  Serra  da  Harcella, 
près  de  celle  du  Rio  Pieto  (Jlem.  riaç.,  70)  ;  mais  je  n'ose  pas  admetUe 
celle  indication  sur  la  seule  autorité  de  ce  vojageur.  —  Le  mot  Pura- 
naàyba  vient  du  guaraDi  pararayba,  qui  signifia  rivUre  allant  tejtitr 
dana  «ne  ptUU  tn«r. 


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DD  KO  DE  S.  FRAHCISGO.  Ul 

rivière  sar  uoe  espèce  de  bac  Tait  avec  deux  pirogues  atta- 
chées ensemble  et  sur  lesquelles  on  a  ^bli  un  plandier; 
le  péage  est  reçu  par  deux  soldats  du  régiment  de  Minas, 
détachés  d'un  poste  cantonné  plus  loin,  au  bord  du  Rio  das 
Velbas  :  ces  hommes  occupent  une  petite  maison  bAtie  sur 
la  rive  gauche  du  Paranahyba  [i8i9}. 

L'un  d'eui  était  ea  .tournée;  je  fus  reçu  par  l'antre  avec 
cette  politesse  qui  distingue  les  Mineiros,  et  ea  particulier 
les  soldats  du  régiment  de  cette  province.  Il  voulut  absolu- 
ment me  faire  partager  son  souper,  et  nous  parlâmes  beau- 
coup de  son  pays,  que  je  ne  pouvais  me  rappeler  sans  un  sen- 
timent profond  de  reconnaissance.  Les  soldats  du  régimoit 
de  Minas  sont ,  comme  je  l'ai  dit  ailleurs,  des  hommes  choi- 
sis qui  appartiennent  À  des  familles  honnêtes,  ont  été  bien 
élevés  et  méritent  la  considération -qu'on  a  pour  eux. 

Le  pays  que  j'allais  traverser  avant  d'entrer  dans  la  pro- 
vince de  S.  Paul,  et  qui  se  trouve  compris  entre  le  Rio  Pa- 
ranahyt>a  ei  le  Rio  Grande,  a  près  de  30  legoat  d»loD- 
gueur.  Il  forme  un  district  privilégié  de  5  legoas  de  large, 
qui  a  été  concédé,  comme  ou  le  verra  tout  à  l'heure,  aui 
descendants  de  plasieuni  peuplades  indiennes  et  comprend 
des  terres  très-fertiles. 

Après  m'ètre  rerais  en  route  (1),  je  câtoyai  la  rivière 

(1)  UÎDénire  approiiiuaiif  du  Porto  Real  da  Pataoahvba  h  ta  FutDda 
das  Fumas  : 

Da  Porlo  Keal  h  l'ildca  do  Rio  das  Fedras.  ...      2       legoas. 

—  Aldea  da  Estîva 2 

—  Aldea  da  Boa  Vista 4 

—  Faieuda  das  Faraas,  ttabitation.      1  1/3 


9  1^  legoas. 
Je  àm  dire  que  Luii  d'ALncourl  compte  i  l/I  Ifffotu  d'Eslin  à  Soa 


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s»  VOYAGE  AUX  SODKCES 

pendant  qoelques  instants,  traversant  les  bois  qui  la  bor- 
dent. En  générai,  tont  le  pays  qui  s'étend  dans  l'espaee  de 
2  legoaa,  du  Paranahyba  à  l'AJdea  do  Rio  das  Pedrss,  est 
boisé  en  même  tanps  que  montueux. 

Depuis  Santa  Cruz,  nous  étions  martyrs  des  insectes. 
Quand  nous  eûmes  passé  la  rivière ,  les  abeilles  ne  nous 
tourmentèrent  plus  ;  mais  ,  ce  qui  était  bien  pis ,  nous 
fAmes  dévorés  par  des  moustiques  et  des  naées  de  borra- 
chudos.  Si  nous  étions  un  instant  sans  agiter  qnrique 
chose  devant  notre  visage,  il  était  Ëus«t6t  couvert  de  ces 
derniers  insectes.  Leur  piqûre  cause  des  enflures  et  des 
démangeaisons  cuisantes;  mais  ces  moucbes  n'ont  heureo- 
sement  pas  les  mêmes  habitudes  que  les  moustiques,  qui 
piquent  au  moment  où  elles  se  mettent  sur  la  peau  ;  elles, 
au  contraire,  s'y  promènent  longtemps  avant  de  piquer,  et 
on  a  le  plus  souvent  le  temps  de  les  chasser. 

L'Aldea  do  Rio  da»  Pedras,  où  je  Bs  halte,  après  avoir 
fait  2  legoas,  h  partir  du  Paranahyba ,  a  été  bâti  dans  un 
pays  boisé,  sur  le  penchant  d'une  colline ,  qui  s'étend ,  par 
une  pente  douce ,  jusqu'à  un  petit  ruisseau  dont  le  nom 
est  le  même  que  celui  de  l'ald^i  {Rio  das  Pedras,  le  ruis- 
seau des  pierres].  Ce  dernier  se  compose  d'une  trentaine  de 
maisons  dispersées  çà  et  là.  La  plupart  d'entre  elles,  cou- 
vertes en  chaume,  ne  difTèrent  point  de  celles  des  Portu- 
gais-Brésiliens, et  si  quelques-unes  ont  été  construites  et 
couvertes  avec  des  feuilles  de  palmier,  comme  les  cabanes 
des  Coyapâs  (1],  elles  sont  beaucoup  plus  grandes  et  plus 
élevées  que  ces  dernières. 

VisiteiSdnPtniMhrbikEalividrMi.  nof.,  113);  enfin  que  Jowtain 
4a  Coalt  Gtviào  (  îd  HiTriM,  lUnerario)  ta  «mple  fl  d'Euiva  k  Fumât. 
(I)  Vojei  le  ciMpHre  intitolé,  Ui  Indien»  CcpyopM. 


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DU  RIO  DE  8.  rBANCISCO.  SU 

A  l'eicepUon  d'un  ou  deux  individus,  je  ne  vis  point 
dans  i'aldea  du  Rio  das  Pedras  d'Indiens  de  race  pure.  A 
peu  près  tous  doivent  leor  origine  à  un  mélange  de  )a  race 
(unéricaine  avec  celle  des  nègres  [1].  Leur  peau,  beau- 
coup plus  foncée  que  celle  des  Indiens ,  est  d'un  bistre 
presque  noir;  ils  ont  les  épaules  et  la  poitrine  larges,  le 
cou  gros,  fort  court  et  le  plus  souvent  augmenté  d'un 
énorme  goitre  ;  leurs  jambes  ne  sont  point  fluettes  comme 
celles  des  Indiens;  leur  tète  est  très-grosse  et  anguleuse; 
leur  nez  est  démesurément  élargi  ;  leurs  yeux  sont  allongés. 
mais  moins  divergents  que  ceux  des  Indiens  de  race  pure  ; 
leurs  lèvres  ne  sont  pas  aussi  grosses  que  celles  des  nègres  ; 
ils  ont  de  la  barbe;  leurs  cheveux,  qu'ils  laissent  croître, 
soDt  très-touffus ,  fort  durs  et  cependant  crépus.  Tels  sont 
les  traits  généraux  de  ces  métis;  mais  on  observe  parmi 
eux  des  différences  individuelles  fort  remarquables  :  ainsi 
je  vis  deux  ou  trois  enfants  qui ,  quoique  presque  noirs , 
avaient  les  cheveux  entièrement  lisses.  Quoi  qu'il  en  soit, 


(1)  Ces  mitia  fuient  autrefois  désignés  pir  le  nom  de  cariboeat 
(Uauccr»»,  Hiit.  nat.  Brat.,  iSS).  Je  b'»\  entendii  proaoacer  ce  mot 
DHlIepart;  cependant  il  piraltnit  qu'il  ne  s'est  pas  eatièrement  perdu, 
car  Caul  dit  qne,  des  blancs  et  des  nègres  mêlés  avec  les  Paretis,  sont 
iasns  les  matnalMeoi  et  les  evriboctu  qni  forment  le  DO^aa  de  la  popa- 
totion  de  Ca  jabt.  Blarcgraff  applique  aasai  le  nom  de  eaboeUt  an  mtme 
■néluige,  et  tont  récemment  George  Gardner,  TOjagenr  très.distingué,  l'a 
pris  dans  le  mïme  sens  (Travett ,  22  )  i  mais  je  dms  dire  qae  les  mots 
eaboctoi  et  eabaeo»  m'ont  tonjonrs  paru  pris  dans  un  manviia  sens 
pear  détigner  loat  individu  qui  qtptrtient  h  la  raw  indienne  ;  ainsi  on 
appelait  mon  Botocade  an  caboeo,  et  il  était  bien  certaiaemcnt  de  race 
américaine  sans  aacun  méUage.  Ce  sont,  sans  doute,  les  earUtoeat  qne 
H.  le  comte  de  Suianet  indique  sons  le  nom  de  mnlllree  indiens  (  Stm- 
vtnirt,  230);  mais  ces  mots  me  semblent  impliquer  contradiction  : 
des  mnllires  indiens  ne  seraient  pas  des  mntltres. 


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3M  VOTiGE  AUX  SOURCES 

il  est  incontesUUe  que  les  habitants  de  I'oUm  se  rappro- 
chent moins  des  nègres  que  des  Américains  indigènes,  et 
i^estcommelndiensqii'ilssontconsidérésdang  tout  le  pays. 
Il  est  aisé  déjuger,  d'après  le  portrait  fidèle  qae  je  viens  de 
tracer,  que  ces  hommes  ont  une  extrême  laideur,  et  leurs 
ftmmes  ne  sont  pœ  plus  jolies  qu'eux  ;  cependant  ils  ont 
tous  un  air  de  douceur  qui  fait  bientôt  oublier  ce  qne  leor 
physionomie  offre  d'abord  de  repoussant.  Je  causal  avec 
plorïenrs  d'entre  eux  et  leor  trouvai  {rfâs  de  sens  et  de 
raison  que  n'en  montrent  communément  les  Indiens  de 
race  pure,  qui  ne  sont  que  des  enfants  spirituels.  Je  (iis 
surtout  trèt'Content  du  capitaine  de  Valdm  [1]  ;  il  resta 
longtemps  avec  moi ,  et  répondit  à  touteâ  mes  questions  avec 
beaucoup  de  politesse  et  de  complaisance. 

D'après  les  renseipiementa  qui  m'ont  été  donnés  par 
lui  et  par  d'autres  Indiens,  voici  quelle  a  été  l'origine  de 
l'oldea  du  Rio  daa  Pedras  :  A  l'époque  où  les  Paulistes  for- 
mèrent, dans  la  province  de  Goyat,  leurs  premiers  étaMis- 
sements,  les  Coyap6s,  exaspérés  sans  doute  par  la  cniauté 
de  quelques-uns  d'entre  eux,  se  mirait,  comme  je  l'ai  déj^ 
dit,  à  infester  la  route  de  S.  Paul  à  Villa  Boa  et  jetèrent 
F^uvante  dans  les  caravanes.  Antonio  Pires,  qui  avait 
réduit  plusieurs  nations  indiennes  dans  le  pays  de  Cuyabâ 
et  qui  était  connu  par  son  intrépidité,  fut  invité  i  donner 
des  secours  à  ta  colonie  naissante.  Déjà  avancé  en  Age,  il 
ne  put  se  mettre  lui-même  à  la  tète  de  l'expédîtioa  ;  mais, 
k  sa  fdace,  il  envoya  son  Sis,  le  colonel  Antonio  Pnss  m 

(1)  Je  ne  me  sais  malbenreiuemeiit  pu  inlbnué  dn  dddi  du  m  digne 
lodieii;  mais  il  paraît  éiident  qu'il  «tait  d^jk  i  la  i«ie  de  Valdea  lareqa'r 
païaa  d'EKhwoge  en  181A,  et,  par  eonséqnenl,  il  devait  s'appeler  La»- 
voiAO. 


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m  RIO  DE  s.  PUIfCMCO.  355 

CAiiPOS,aTec  une  troupe  d'Indiens  de  plusieurs  nations  dif- 
férentea,  principalemeot  des  Bororôs  et  des  Pareils  (1).  Les 
GoyopAs  furent  Taiucos  et  traités  avec  une  affreuse  barba- 
rie (2j  ;  la  route  devint  parfaitement  libre ,  et ,  pour  la  ga- 
rantir plus  sArement  de  nouvelles  attaques ,  on  donna  à 
Antonio  Pires,  pour  lai  et  poiir  sa  troupe,  le  territoire  qui 
s'étend  du  Rio  Paraoahyba  au  Rio  Grande,  avec  la  largeur 
de  i  lieue  1/3  portugaise  de  chaque  c6té  de  la  route.  Ce 
fut  le  local  où  est-anjourd'hui  l'Aldea  do  Rio  das  Pedras  que 
Pires  choisit  pour  s'y  fixer.  Le  village  fut  construit,  vers 
1741,  aux  dépens  du  trésor  royal  {fazmda  real] ,  et  Pires 
y  ent  une  maison.  Avant  cette  époque,  les  Jésuites  avaient 
déjÀ  formé  un  aldea,  composé  d'Indiens  de  ta  cAte,  à  l'en- 
droit appelé  S.  Anna  ;  ils  voulnrent  s'immiscer  dans  le  goa- 
vememeot  de  Valdea  d'Antonio  Pires;  celni-ci  s'opposa 
à  leurs  entreprises,  mais,  pour  les  satisfaire,  il  leur  sou- 
mit quelques  Indiens  du  nord  de  Goyai,  qui  forent  réunis 
k  Vaidea  de  S.  Anna.  Cependant,  après  avoir  jeté  les  fon- 
dements de  sa  petite  colonie.  Pires  retourna  i  Cuyabi  et  en 
ramena  avec  lui  les  femmes  et  les  enfants  de  ses  Indiens. 
D  paraH  qu'il  possédait  beaucoup  de  nègres ,  et  dans  ce 
temps-là  les  Brésiliens  n'étaient  point  en  usage  de  marier 
leurs  esclaves.  Ceux  d'Antonio  Pires  durent  naturellement 


(1)  Od  a  aassi  écrit  ParesU ,  Pariiiê ,  Pareeù  et  Pariey$  ;  je  con- 
forme mon  orthogTiphe  h  la  Itrononciition  nsitfe  dans  le  pa}s  (en  fran- 
tii«,  Pirechis).  Il  parait  qae  les  Pareils  formaient  ooe  des  plus  belles 
Mtioiis  da  par»  de  Cnjabâ,  mais  qa'aujonnl'hui  ils  soDt  à  pea  près 
détroits,  si  mime  ils  ne  le  sont  enlièreineut.  Les  Borords,  dirisés  en 
plDaiears  tribus,  rataient  plas  puissants  que  les  autres  IndieuB  et  en 
mtme  temps  pluaTaciles  h  civiliser  {(Uz.,  Cor.,  I,  303;  —  Pu.,  Jf«m., 
n,  104). 

(2)  Pool,  RdM,  1,349.  ' 


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156  VOYAGE  AUX  SOURCES 

rechercher  les  seules  femmes  avec  lesquelles  ils  pinaent 
avoir  quelques  rapports,  et  la  population  actuelle  de  Val- 
dea  prouve  suESsammeo  t  qu'  ils  ne  Turent  pas  mal  reçus  (1  ). 
Le  mélange,  une  fois  commencé,  dut  se  continuer  avec  plus 
de  facilité  encore  entre  des  n^res  créoles  et  des  filles  d'A- 
fricains et  d'Indiennes;  et  des  mariages  remplacèrent  les 
premières  unions  qui  n'avaient  été  que  passagères.  Aujour- 
d'hui même  (1819),  il  n'est  pas  très-rare  de  voir  des  crédes 
libres  ou  des  mulâtres  venir  chercher  des  femmes  dans  l'ai- 
dta,  où  le  mariage  les  fait  jouir,  comme  sur  la  c6te  (â),  des 
privilèges  des  Indiens  que  je  ferai  bientât.conna!tre.  Avant 
ta  réunion  des  justices  d'Araii  ei  de  Desemboque  à  la  pro- 
vince de  Minas,  l'Aldea  das  Pedras  faisait,  comme  on  sait , 
partie  de  la  province  de  tioyaz  ;  ses  liabitauts  tureat  souvent 
appelés  par  les  généraux  de  cette  province  pour  aller  eaïa- 
battre  des  nations  qui  n'étaient  point  encore  soumises,  et 
l'on  n'eut  jamais  qu'à  se  louer  de  leur  valeur  et  de  leur 
fidélité  (ô).  Cependant  le  gouvernement  de  Goyai  rec<unul 

(I)  Leslnditmies,  en  gftiént,  ont  m  foftt  irte-rif  ponr  ks  ntgrtt. 
J'ai  déjk  signala  ce  fait  ailleurs  (vojci  moa  Votiaçe  dam  Ut  proviMW 
de  RU) it  Janeiro  «(de  Jffmn  Cn-(U(,  11,49). 

(t)  Vorei  le  ToL  II  dn  Topant  dan*  U  dUlrUt  4a  DUuimnU  et  nu 
U  miorat  du  Bréiil. 

(3)  C«  récit  et  ce  que  je  dirai  plus  lard  de  l'origine  des  atdiat  voi- 
SIM  de  «lui  da  Rio  das  Vtàtts  D'est  pas  parraitemeut  conlornw  a«i 
indicatioDS  succiacles  domifee  par  Caul ,  Piiarro  et  Pohl  ;  mais  il  tliit 
difBcile  h  ces  teniûas  de  MTi»r  euclemeot  la  véiUé,  tandis  qae  les  Id- 
diens  qui  m'ont  communiqué  les  renseigaerneuls  consigna  ici  les  te- 
naient des  enrants  mêmes  des  plus  anciens  liabitants  :  d'ailleurs  Pohl 
n'est  pas  entiêremenl  d'accord  avec  Coul  et  Piurro,  et  ce  dernier  ne 
restpas  non  pins  avec  lui-mEme,  car  tantdiil  place  k  premier  fublts- 
sementdes  Boror/s  kune  demi'lieuedn  Rio  das  Velhas,  et  tanldt,  ce 
qui  est  bien  ceTtunement  nne  erreur,  sur  le*  bords  dn  Rio  Grande 


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nu  RIO  DE  s.  FRANCISCO,  557 

mol  leurs  services  ;  ils  Turent  confiés  h  des  directeurs  mé- 
chants et  oppresseurs,  et  comme  aucun  prôtre  ne  voulait, 
A  ce  qu'il  parstt,  passer  so  vie  au  milieu  d'eux,  ces  pauvres 
néophytes,  dît  l'abbé  Pizarro,  qui  avaient  embrassé  la  reli- 
gion caUiolique  sans  la  connaître,  n'eurent  d'autre  pasteur 
qu'un  homme  qu'on  avait  contraint  de  prendre  cette  chaire 
et  qui,  loin  de  pouvoir  les  édifier,  aurait  été  capable  de 
corrompre  mille  fois,  par  ses  mauvais  exemples,  les  hom- 
mes les  plus  vertueux  (1).  Ce  n'est  pas  tout  encore  :  en 
4809(2),  on  eut  la  barbare  idée  de  transporter  une  grande 
partie  de  la  population  du  Rio  das  Pedras,  h  plusieurs  cen- 
taines de  lieues,  sous  un  climat  brûlant,  dans  le  lieu  ap- 
pelé Nova  Beira,  où  l'on  voulait  établir  un  poste  militaire 
{pretidio).  Les  infortunés  que  l'on  avait  ainsi  enlevés  à 
leurs  familles  et  à  leur  patrie  périrent  tous  misérablement, 
et,  lors  de  mon  voyage,  il  ne  restait  plus  dans  l'alfa 

(Tojw  Caz.,  Corog.,  1,  3M.—  Pu,,  Jfnn.,  IX,  IM,  SM.  —  Poil, 
Mte,  I,  141). 

(1)  Mctu.  hiïl..  IX,  104.— EscBwKCï,  Brai.,l,  S2. 

(3)  Je  ne  pais  m'cmptcher  de  cousidi^rcr  comme  loul  à  fait  erroot'c 
l'indiulion  de  1796,  donnée  par  Eschwegc.  Quant  k  celle  de  1811,  qu'on 
trouve  dans  Gazai  et  dans  Piiarro,  elle  est  probablement  pins  eiacle  qae 
le  chilTre  de  1S09,  indiqué  plus  haut  et  admis  par  les  ludions,  qnt,  sa- 
chant nul  coropicr,  ponvatcnlbe  tromper  plus  aisément  sur  les  dalcsqac 
mrles  Riils.  Leur  InnsmJ|jration  se  rattache  étidcmment  aui  plans  de 
nayigaiim  dont  s'occupèrent  également  Fernando  Delgado  et  sou  prédf- 
cessenr,  le  comte  de  Palma  (Francisco  de  Assiz  Hascarcnhas];  mais  le 
premier  entra  dans  son  gouvernement  en  uovembre  18(n,  et  il  n'est  pas 
lri»-vraisemblableqae,  sar  le  point  de  se  retirer  de  6oyaz ,  il  ait  donna 
l'ordre  d'éloigner  tes  Indiens  de  leur  pays,  ut  que  FenuDdo  Delgado 
ail  commandé  cette  mesure  h  l'instant  même  de  sou  arriti^e.  Ces  deux 
gouverneurs  Tarent  des  hommes  de  bien  ;  mais  ils  ne  pouvaient  connaître 
l'immense  contrée  qu'ils  avaient  h  gouverner  :  personne  n'aurait  su  les 
guider,  et  ils  durent  nécessairement  commettre  des  erreurs. 


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K»  TOTAGE  ADX  SOUICES 

que  dii-huit  mteages.  Ud  évéDemeot  aussi  triste  sTtit  dû 
natureUement  inspirer  de  la  défiance  aux  Bororôs  :  torsqoe, 
en  1816,  d'Escbewege  ftit  envoyé  dans  le  pays  pour  fiier 
les  limites  de  Goyaz  et  de  Minas  Gérées,  les  pauvres  !«• 
dieDB  s'imaginèrent  qu'on  allait  les  réduire  en  esclavage; 
mais  le  colcmel  allemand,  les  ayant  rassurés,  leur  donna  une 
petite  fôte  qui  se  passa  joyeusranent,  et,  Iwsqu'il  partit, 
tous  les  iiabitants  du  village  lui  témoignèrent  lenr  recoo- 
connaissance  de  la  manière  la  plus  toncbante  (i). 

L'oMm  du  Rio  das  Pedras  passa,  avec  les  justices  de  De- 
semboque  et  d'Araxà,  sons  l'administration  de  la  pronnce 
de  Minas  Geraes,  et  voici  à  quel  régime  il  était  soumit  è 
l'époque  de  mon  voyage. 

Les  Indiens  métis  avaient  à  leur  léte  on  capitaine  et  dei 
officiers  subalternes  choies  parmi  eui,  et  ceux-ci  étaient 
subordonnés  au  commandant  du  Rio  das  Velbas,  directeur 
général  des  différents  aldeai  situés  entre  cette  rivière  e(  le 
Paranahyba.  Tous  les  habitants  du  village  étaient  exan}its 
de  la  dîme  ;  mais ,  en  cas  de  besoin ,  ils  devaient  servir 
d'auxiliaires  au  détachement  militaire  du  Rio  das  Velbu- 
Jusqu'en  18t9,  leur  service  tétait  borné  à  passer  le  bK 
d'un  bord  du  Paranahyba  k  l'autre  bord.  Chacun  était 
aj^é  à  son  tour  par  le  capitaine  de  Yaidea  et  faisait  nn 
mois  de  service.  La  rétribution  n'était  que  de  1,500  reis 
(9  fr.  37  e.)  pour  le  mois  tout  entier  ;  mais  eile  était  payée 
avec  exactitude. 

Les  terres  des  Indiens  étaient  inaliénables  comme  celks 
des  indigènes  du  littoral  (2);  cependant  les  Portngais-Bré- 

(1)  BratiUm  die  noie  WtU.  1,8».. 

(Z)  Y»]»  aiou  royof  «  itou  le  4Utrkt  dw  IHoaraïUi  titurUUt- 
(oraldtiSrAit.ll. 


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ÙV  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  259 

silKBS  pouvaient  s'y  établir  à  titre  à'agregados ,  avec  le 
consnrteiBenl  ries  vériUMes  pn^iétiires  ratifié  par  les 
supérieurs^  et  non-seulement  H  ne  ^eat  était  pas  permis  de 
vendre  le  fonds ,  mais  encore  ,  lorsqu'ils  venaient  A  se  re- 
tirer, ils  étaiest  obligés  d'abandonner  leurs  constructions 
(betufeitoria)  comme  un  dédommagement  pour  le  tort  que, 
dans  le  système  d'agriculture  brésilien,  ils  avaient  fait  aux 
terres  par  la  cnitare.  Jusqu'en  iS19,  le  nombre  des  ajrre- 
§ados  portngats  était  resté  très-petit,  parce  qu'on  trouvait 
dass  le  voisinage  de  faldea  des  terres  aussi  bonnes  que 
celles  qui  en  dépendaient  et  h  des  conditions  beaucoup 
plus  avantageuses. 

Tons  les  Indiens  métis  du  Rio  das  Pedras  étaient  agri- 
csHeurs.  Chacun  d'eux  feisait  sa  plantation  séparément; 
nnie  le  capitaine  était  tenu  de  ehfltier  les  paresseux,  et,  de 
temps  en  temps,  le  directeur,  commandant  du  Rio  das 
Vdlws,  envoyait  un  militaire  pour  visiter  les  plantations. 
t^wtme  I'oMm  était  sitné  sur  le  bord  de  ht  route,'les  habi- 
tants troovaient  un  débitasse!  facile  de  leurs  denrées,  et,  ce 
qm  proave  qu'ils  ciritivaient  et  qu'ils  vendaient,  c'est  que, 
ett  général,  ils  étalent  tnen  vAtus. 

Il  n'y  avait  point  parmi  eux  de  gens  de  métier;  on  ne 
voyait  non  plus  dans  l'aldea  ni  venda  ni  boutique.  Les  ha- 
bitants achetaient  des  conducteurs  de  caravanes  {tropeitvt) 
les  objets  dont  ils  avaient  besoin  ,  ou  bien  ils  faisaient  des 
échangea  avec  les  propriétaires  du  voisinage  en  fournissant 
du  fil  de  coton  filé  par  leurs  femmes  et  des  peaux  de 
cerfs. 

Les  Indiens  du  Rio  das  Pedras  dépendaient  de  la  paroisse 
de  Santa  Anma,  où,  comme  je  le  dirai  bientôt,  était  aussi 
un  tdtka.  On  a  vn  que  ,  dans  l'origine ,  on  avait  donné  à 


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IflO  VOYAGE  AUX  SODBCES 

ces  pauvres  gens  un  prêtre  scandaleux  pour  les  diriger;  à 
l'époque  de  mon  voyage  ,  ils  n'avaienl  plus  de  pasteur.  La 
province  de  Goyaz  était  si  pauvre ,  que,  en  lui  Atant  l'ad- 
ministration du  pays ,  on  avait  cru  devoir  lui  en  laisser  les 
revenus;  des  difGcultés  s'étaient  élevées  entre  cette  pro- 
vince et  celle  de  Minas  pour  le  payement  du  curé  de  Santa 
Anna  :  celui-ci  s'était  retiré  ,  et ,  depuis  deux  ans  ,  les  In- 
diens des  aidées  étaient  entièrement  privés  de  secours  qri- 
rituels  et  de  toute  espèce  d'instruction.  P«30nne,  daos 
Xaldea  du  Rio  das  Pedras,  ne  savait  lire,  et  il  me  parut 
que  l'on  n'y  comptait  pas  l'argent  avec  une  grande 
facilité. 

I.es  Indiens  métis  du  Rio  das  Pedras  n'avaient  OHisavé 
aucune  des  coutumes  de  leurs  ancêtres  et  vivaient  abscriu- 
ment  comme  les  Brésiliens;  cependant ,  lorsqu'ils  conver- 
saient entre  eux ,  ils  cessaient  de  parler  portugais ,  et ,  ce 
qui  est  assez  remarquable ,  l'idiome  dont  ils  se  serraïoit 
était,  sauf  quelques  légères  différences,  la  lingoa  gérai  des 
Indiens  de  la  cAte.  Il  n'est  pas  vraisemblable  que  cette 
langue  fât  celle  des  Bororôs  et  des  Pareils ,  et  le  capital 
de  ïaldea  me  dit  qu'effectivement  ceux-ci  en  avaient  une 
antre;  mais  les  anciens  Faulistes  parlaient  tous  la  lingoa 
gérai;  ils  savaient  prier  dans  cette  langue ,  et  les  Indiens 
d'Antonio  Pires  avaient  id  nécessairement  l'apprendre 
avec  lui  et  arec  ses  esclaves. 

Je  vais  donner  ici  un  court  vocabulaire  de  l'idiome  poilé 
dans  l'Aldea  do  Rio  das  Pedras  et  les  deux  aldeat  voisins . 
ceux  da  Estiva  et  de  Boa  Vista ,  en  mettant  en  regard  les 
mots  de  cet  idiome  avec  ceux  de  la  lingoa  gertU  telle  qu'on 
la  trouve  dans  le  dictionnaire  des  Jésuites  ,  et ,  de  plos , 
ceux  du  dialecte  de  cette  dernière  en  usage  diei  les  In- 


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m  RIO  BE  s.  FRANCISCO. 


diens  de  la  sous-race  tupi,  habitants  de  l'Aldca  de  S.  Pedro, 
daas  la  province  de  Rio  de  Janeiro  (1). 


Buucn 

MCnONHÂlBI 

DUUCTB 

rauiçiis. 

de  riidM 

des 

de 

doRiodaBPetlru. 

JfeDiI«a. 

S.  Pedro. 

Dieu. 

.  Tupana. 

Tupan. 

Soleil. 

Araçu. 

tune. 

Jaçu. 

Jacy. 

Jacy. 

Étoiles. 

Jaçntata. 

Jacitata. 

Jacitata. 

Terre. 

Uubu. 

Homme. 

Apùha. 

Apyaha. 

Apuava. 

Femme. 

Cunbâ. 

Cunbâ. 

Cunhà. 

Enraot  à 

la 

mamelle 

.     Pllaugeté. 

Mytauga. 

Pytang.. 

Gai^n. 

Curumim. 

Fille. 

Cunhatemhi. 

FUIe  igée. 

Cunhabuçn. 

Tète. 

Nhacanga. 

Acanga. 

Khacanga. 

Cheveux. 

Java. 

Ab'a. 

Jaia. 

ïeui. 

Teça. 

Ceça. 

Ceça. 

Ha. 

Inchim. 

Tim. 

Itcbl. 

Bouche. 

Jum. 

Juru. 

Jura. 

Dents. 

Hanba. 

Oieilles. 

Namby. 

Namby. 

Namby. 

ti)U. 

Jaura. 

AJuni. 

Jajiura. 

Poitrine. 

Putchia. 

Ventre. 

Chnhé. 

Cuisse. 

Juua. 

(I)  Voyei  moQ  Voyant  daiit  le  liittricl  lU*  Oîamanlt  el  )ur  le  lU- 
toral  dH  Br<fiH  ,  U,  S,  79^i. 


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3G2 

voYieE  mx  soincES 

Jamb«. 

Ituman. 

Cetjma. 

Celuno. 

PicJ. 

Ipuranga. 

ÏJ- 

IporoBsava 

Bras. 

Joa. 

Jyba. 

Juva. 

Mains. 

Ipo. 

Po. 

Ipo. 

Morceau 

de 

bois. 

Vira. 

Feuille. 

Urarova. 

Fruit. 

Ua. 

Clieval. 

Cavani. 

i:aliarù. 

Ca»arn. 

Mulet. 

Cavarù  tupichi. 

Tapir. 

Tapiraté. 

(M. 

Çnaçu. 

Petit  oiseau.    Ura  naînim. 

Chique. 

TuDga. 

Tumbyra. 

Tonga. 

Rivière. 

Vacn. 

Eau. 

Ug- 

Kg. 

ïg. 

Viande. 

ÇxkS. 

Poisson. 

Pyrà. 

Pyrâ. 

Pyrâ. 

Bon. 

btii. 

CMi. 

Maurois. 

lalié. 

Joli. 

Ponnlieté. 

Laid. 

ïejayeté. 

Rouge. 

Pyrangaçu. 

Pyrauga. 

Pyrao. 

Blanc. 

Manotclii. 

Morotinga. 

Morolchiia 

Noir. 

Ondigua. 

Uuia. 

Sun. 

Petit. 

Merim     clii 

quêté. 

Merim. 

Merim. 

Grand. 

Trucetè. 

Turuçu. 

TupicliavB. 

Pour  l'orthographe  des  mois  qui  prccèdent,  j'ai  suivi 
celle  qui  a  élè  adoptée  par  les  Jésuites  ou ,  si  l'on  veut . 


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DU  MO  DE  S.  FRANCISCO.  Kï 

celle  de  la  langue  portugaise,  en  me  conrormant  aax  prin- 
cipes énoncés  k  la  suite  da  Tocabulaire  de  l'idiome  des 
CoyapAs  (1).  J'ajouterai  que ,  dans  les  mots  Jaçu  et  Jaçu- 
tata,  la  prononciation  du  p  se  rapproche  du  (h  anglais; 
que  l'A  est  généralement  aspirée;  que  Yr  participe  du  soo 
de  ri;  que  la  prononciation  du  eh  allemand  se  retrourc 
dans  chtàtéf  tA  celle  du  g  allonand  dans  «g;  que  le  mot 
Mm  se  prononce  très-sourdement;  que  le  son  des  mots 
cAuA^et  iuka  est  paiement  sourd ,  et  qu'ils  sont  fort  dir- 
ficiles  k  représenter  par  dés  lettres;  enfin  qne  l'on  glisse 
légèrement  sur  le  b  dans  mtmfrt  vi  sur  l'a  dans  onàiqua. 
Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  que  la  lai^e  des  aldeas  est  très- 
gutturale  et  se  parle  la  bonche  presque  fermée  :  ce  mode  de 
prononciation  est,  comme  on  l'a  vu  ailleurs,  un  des  carac- 
tères de  la  race  américaine. 

La  plupart  des  mots  qui  précèdent  sont  tels  ou  i  peu 
près  tels  qu'on  les  lit  dans  le  dictionnaire  de  la  Ivngoti 
gérai  feit  par  les  Jésuites  [3] ,  et  dans  mon  vocabulaire  du 
dialecte  de  S.  Pedro  dos  Indios.  Ce  vocabulaire  ne  con- 
tient malheureuBonent  que  quelques  mots ,  et  le  dic- 
tionnaire de  la  lingoa  gérai  est  lui-même  assez  abrégé; 
cependant  on  peut  conjecturer  que  nhandinhara ,  chue , 
uira,  urarùva,  iahé  et  ondigua,  qui  ne  se  trouvent  ni  dans 
l'un  ni  dam  l'autre,  font  partie  de  la  langue  des  Bororâs  ou  ~ 
de  celle  des  Pareils;  le  capitaine  de  l'aldea  du  Rio  das  Pe- 
dras  me  l'assura,  en  particulier,  du  mot  nAandtttAara, 
Dieu,  si  différent  du  mot  lupan  des  Guaranis  et  des  Indiens 


(1)  Vo^ti  1c  ciupilrc  XXI  intitulf,  £«  Indiens  Coyapot. 
l2)  Dittionario  porluipui  e  bratiUano. 


D,g,l,.,.d.i.COOt^lC 


3G1  VOYAGE  AUX  SOURCES 

de  lii  càte,  qui  appartiennent  égalciDCnt  à  la  sous-rarc 
tupi  (1),  les  [ndiot  mausot  de  Vasconcellos. 

Je  crois  avoir  fait  remartiuer  ailleurs  combien  il  est  ei- 
traordinairc  que  la  langue  lupi  [Ungoa  gérai)  ou  ses  diOîé- 
rctits  dialectes  fiissent'parlt^  dans  une  immense  étendue 
de  cAte,  puis  qu'avec  des  modifications  cette  langue  s'é- 
tcodit,  sous  le  nom  de  guarani,  dans  les  missions  de  l' Uni- 
guoy,  et  enfin  jusqu'au  fond  du  haut  Paraguay  (2).  Si  l'on 
ne  savait  de  quelle  monière  elle  s'est  introduite  dans  les 
aldeas  du  Rio  dss  Velhas ,  on  serait  étonné  de  la  retrouver 
jetée ,  pour  ainsi  dire ,  comme  une  espèce  d'oasis  i  une 
trâs-grande  distance,  soit  du  littoral,  soit  du  pays  des 
Missions  ;  et  ce  qui ,  au  premier  abord ,  peut  surprendre 
aussi ,  c'est  qu'il  y  ait  bien  plus  de  dlETérence  entre  le 
dialecte  des  aldeas  et  la  langue  du  dictionoaire  des  Jé- 
suites qu'entre  ce  mfïme  dialecte  et  celui  que  l'on  parle 
à  une  énorme  dislance  du  Uio  das  Yclhas,  dans  l'Aldea 
de  S.  Pedro  dos  luJios.  Mais  il  faut  se  rappeler  que  le 
diclionoairc  de  la  Ungoa  gérai  a  été  composé  dans  le 

U)  Il  ne  faut  pas  anblier  que  le  nom  de  tupi  n'élût  yédleanenl  Mlai 
d'aucune  nation,  niais  ua  sobriquet  i^jurieui  par  lequel  les  Indiens 
sauvages,  Tapnjas,  disiguaiccil  ceux  de  la  càlc  [Voyage  dan*  It  ditlricl 
de*  Diamant*  et  fUr  1«  IMoral  da  Brésil,  II,  2K).  Par  le  mot  («pi. 
Ici  Tapu  jas  préleodaîeul  uns  doute  ridiculiser  les  adorateurs  de  iHpoii, 
c'eat-à-dirc,  selon  Vasconcetlos,  de  VtixceUenfe  terrifiante. 

{2)  Hcrvas  ditqu'îl  n'y  a  pas  plus  de  dilTurencE  cotre  le  lupI  et  le  gna- 
rani  qu'entre  le  portugais  et  le  castillan.  Depuis  le  temps  où  il  vivait, 
les  deui  dialectes  indiens  auront  peut-itrc  (prouvé  de  grands  cbange- 
meiils;  mais,  à  l'aide  du  portugais,  on  peut,  aans  aucune  |)cinc,  <aa- 
verscr  avec  les  Espagnols ,  comme  j'cu  ai  Tait  moi-niénie  l'i'prcute  pen- 
dant plusieurs  mois;  et  les  dcui  Guaranis  que  j'avais  ciniucui-s  avec 
moi  des  uiissiuiui  de  rUrugua)-  a  Rio  de  Janeiro  ne  poutaieul  pas  com- 
prendre un  seul  mol  Un  iirp.. 


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DU  RIO  DE  S.  FRAMOSCO.  36} 

xvi°  siècle ,  et,  si  le  temps  modifle  les  langues  que  d'im- 
mortels écrits  sembleraient  avoir  fixées  «ans  retour,  à  plus 
forte  roisoD  doit7i]  s'opérer  de  grands  changements  dans 
les  idiomes  qui  ne  sont  que  parlés  (1).  Ceux  qui  s'introdui- 
sirent peu  à  peu  dans  la  lingoa  geràl  de  la  cAte  étaient  né- 
cessairement colportés  par  les  Paulistes  et  surtout  par  les 
Jésuites  partout  où  elle  se  parlait ,  et  de  là  cette  ressem- 
blance beaucoup  plus  grande  que  j'ai  fait  remarquer  entre 
le  dialecte  du  Rio  das  Velhas  et  celui  de  S.  Pedro  dos  In- 
dios  qu'entre  ces  derniers  et  la  langue  du  dictionnaire,  en 
arrière  de  deux  siècles. 

Après  avoir  qnilté  le  Rio  das  Pedras ,  je  fis  S  lieues  por- 
tugaises et  m'arrêtai  à  un  autre  aldea,  celui  qu'on  nomme 
Aldea  da  Esliva.  Ce  dernier  se  compose  seulement  d'un 
Toneho,  ouvert  de  tous  les  cdtés,  destiné  aux  voyageurs,  et 
d'une  quinzaine  de  maisons  construites  sans  ordre  autour 
d'une  place  allongée.  Depuis  longtemps ,  je  n'avais  rien  vu 
d'aussi  joli  que  la  position  de  ce  hameau.  Le  terrain  sur 
lequel  il  a  été  bâti  s'étend  ,  par  nue  pente  insensible  ,  au- 
dessus  d'une  petite' rivière  appelée  également  Rio  da  Et- 
li'va,etsur  les  deux  bords  de  cette  dernière  est  un  p&turage 
humide  qui ,  après  en  avoir  dessiné  toutes  les  sinuosités , 
se  perd  avec  elle  dans  le  lointain.  La  sécheresse  excessive 
qu'il  fusait  depuis  plusieurs  mois  avait  permis  de  mettre  le 
feu  h  ce  pAturage;  déjà  il  s'était  couvert  d'une  herbe  nou- 
velle, et  il  présentait  un  large  ruban  ondulé  du  vert  le  plus 
tendre,  contrastante  la  fois  avec  les  teintes  grisâtres  des 
campot  voisins  et  le  vert  foncé  d'une  lisière  étroite  d'arbres 
et  d'arbrisseaux  qui  bordent  la  rivière. 

(Il  Vuy«i  le  rbopiirc -WU  de  «1  ouv»g<^  iotitulf,  L'or  d  lei  dia- 


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SW  VOYAGE  iUX  S 

L'Aides  da  Estiva  doit  son  origine  i  cdlai  das  Pedras. 
On  avait  détaché  ane  partie  des  habitants  de  ce  deraier 
village  pour  en  former  un  autre  au  lien  sppdlé  Pùarrào  et 
procurer  aux  voyageurs  une  halte  de  plus.  Les  nouveaux 
colons  ne  furent  pas  contents  de  leurs  terres;  l'Aldea  de 
Pisarrâo  ,  quoique  «tué*  sur  le  bord  de  la  route  ,  à  une 
journée  ou  4  legoas  du  Rio  das  Pedras ,  flit  bientAt  «ban- 
donné;  une  partie  de  ses  habitants  se  r^ira  i  Estiva  ,  où 
l'on  compte  aujourd'hui  (1849)  once  ménages,  et  l'antrel 
l'endroit  appelé  Boa  Vista,  dont  je  parferai  bientM. 

Le  capitaine  de  l'Aldea  da  &tiva  la'aTtK  reçu  dans  sa 
maison  ;  vers  le  soir,  les  habitante  du  vBlage  s'y  rassem- 
blant en  revenant  de  leurs  plantations,  et  je  pns  les  obser- 
ver h  mon  aise.  Comme  ceux  de  l'Aldea  das  Pedras ,  tous 
sont  des  métis  issus  de  nègres  et  d'Indi^ines  ;  ils  n'ont  pas 
une  plus  jolie  figure  que  Jears  voisins  ;  mais  j'avais  rare- 
ment vu  des  hommes  plus  grands  et  qui  annonçassent  plus 
de  vigueur.  Je  leur  trouvai  la  même  douceur,  )a  même  poli- 
tesse, le  même  jt^emenl  qu'aux  métis  du  Rio  das  Pedras. 
Ik  vivent  de  la  même  manière ,  parlent  aussi  la  lingoa  ge- 
nd  ,  cultivent  également  la  terre  et  montrent  asses  ,  par 
lears  vêtements,  qu'ils  ne  sont  anilement  dans  l'indigence. 
Pendant  qse  j'étais  au  milieu  d'eus  ,  arriva  un  cultivateur 
du  voisinage  avec  quelques  mulets  chargés  de  saucisses,  de 
cochon  salé,  detaOa,  denipadunM(l),  et  il  trouva  fincSe- 


(I)  Les  rapadurat,  dont  j'ai  eu  décision  de  parler  ptasienrs  rob, 
«ont  dei  espiees  de  t^lcUee  carrées  et  fisses  de  sucre  cail  net  atm 
sirop  (Voyage  dant  le$  provitue*  de  Rio  de  Janeiro,  etc.,  I  ).  Ce  n'cal 
pu  aDiqoemeDt  au  Brésil  qu'on  fabrique  des  rapadnrai  ;  od  en  Tiii 
éftalemeni  chez  les  PéruvicDs,  qui  le*  DDtnmGDt  rofpaiftirai  {Vonage  om 
Pértm,  Il ,  ao6). 


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DU  MO  DE  S.  FKANCI9C0.  M7 

ment  à  se  défaire  de  ses  denrées  ,  soit  ea  les  vendant,  soit 
CD  les  échangeant  oHitre  du  fil  de  cotoD  ou  des  peau  de 
cerb. 

Sur  le  soir,  j'allai  herboriser  sur  les  bords  du  Rio  da  Es- 
tiva.  Pendant  toute  la  journée ,  j'avais  été  fort  tourmenté 
par  les  borradmdot;  mais  ,  auprès  des  eaux  et  dans  les 
marais ,  ils  devinrent  tout  à  Ciît  insupportables.  Quand  je 
rentrai  à  la  maison  ,  j'avais  les  oiains  enflées ,  et,  qnoique 
je  ne  fosse  pas  resté  plus  d'une  demi-heure  deiwrs,  j'éU^ 
tellemeat  fatigué  des  mouvements  que  j'avais  hib  poor 
me  débarrasser  de  taut  d'ennemis  ,  j'avais  les  nerfe  telle- 
ment irrités  par  leurs  pi({(kre9  caisaates,  fus  je  posvais  A 
peine  respirer  ;  j'étais  comme  un  homme  ivre. 

Entre  Estiva  et  l'AIdea  de  Boa  Vista,  dans  un  e^ce  de 
4  Ugotu ,  je  traverui  un  pays  plat  ou  ondulé ,  et  toujours 
des  eampoi  brûlés  par  l'ardeur  du  soleil. 

A  9  Ifjrotud'Estiva,  je  passai  par  VAldeadePûarrào  (4)  : 
■  il  se  composait  de  quelques  maisons,  d'une  petite  chapeUe 
et  d'us  roÊÊcho  bdtî  dans  on  fond ,  sur  le  bord  d'un  mis- 
seau  qui  porte  le  m£me  nom  que  Valàea  ;  mais  toot  était 
désert.  Lorsque  les  hâtants ,  soiis  du  lUo  das  Pedras ,  se 
retirèreat,  comme  je  l'ai  dit,  les  uns  à  Esliva,  les  autres  i 
Boa  Vista,  qnelqBes^ns  resterait,  à  la  vérité,  dans  le  pays; 
mais  ccux-ii  même  renoncèrent  à  loir  aidêa  et  aUèreat 
s'établir  dans  le  voisinage. 

Après  être  sortis  de  Fisarrâo ,  noua  enMmes  dans  use 
grande  plaine  sablonneuse  dont  la  v^tation  se  compose 
uniquementd' une  herbe  peu  élevée.  Au  d^  de  cette  plaine, 

it)  Esi:hw^e  »  écrit  t  ton  Biiarrao  ■■  A  ne  faut  pu  naa  plue  Ë*iive 
{Brat.,  I ,  SA).  —  Eo  «doplaDl  Piiarrùo,  je  ne  conrormc  à  U  proDOO' 
l'ialiou  usitée;  pent-fire  vaudrail-il  micui  Piiiariûo. 


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3M  VOYAGE  AUX  SOURCES 

le  («rruD  devient  plus  rouge,  par  conséquent  meitlenr,  et 
les  afbres  raboagris  repanirent  dans  les  campoj. 

Le  lieu  où  je  Gs  balte  est  encore  une  petite  aidée ,  cdk 
de  Boa  Vùta  (belle  vue)  (1}  qui,  comme  je  l'ai  déjà  dit, 
doit  son  origine  à  une  partie  des  métis  que  l'on  avait  tirés 
du  Rio  das  Pedras,  pour  peupler  le  Pisarrâo.  Situé  h  i  U- 
goat  d'Estiva,  le  village  de  Boa  Vista  se  compose  de  huit  ou 
dix  chaumières  bities  dans  un  fond,  au  bord  d'un  ruis- 
seau très-rapide.  On  n'y  comptait,  en  1819,  que  huit  me- 
nées; mais  j'y  vis  no  très-grand  nombre  de  jeunes  gens 
et  d'enfants.  Je  ne  dois  pas  oublier  de  dire  que  les  femmes 
du  Rio  das  Pedras  ne  sont  pas  moins  fécondes  qne  celles 
de  Boa  Vista,  et,  comme  les  jmnes  gens  se  marient  aus- 
sitôt qu'ils  sont  en  Age ,  il  est  i  croire  que  le  vide  laisse 
dans  la  population  des  aidées  par  la  transmigraticm  du  7(ova 
Beira  aura  bientôt  été  comblé. 

Les  Indiens  métis  de  Boa  Vista  ne  sont  pas  d'aussi  beaux 
Sommes  que  ceux  de  l'Aldea  da  Estiva,  et  me  parurent 
moins  civilisés.  Aussitôt  que  l'on  eut  déchargé  mes  malles, 
le  rancho  du  village,  sous  lequel  je  m'étais  établi,  se  ran- 
plit  de  femmes  qui  m«idiaient  très-effrontément  des  col- 
iiers  et  des  bracelets,  tandis  que,  au  contraire,  celles  d'Es- 
tiva et  du  Rio  das  Pedras  restent  dans  leurs  maisons, 
comme  les  Portugaises-Brésiliennes.  La  cause  de  la  diffé- 
rence qui  existe  dans  les  formes  extérieures  des  habitants 
de  ces  aidées  échappa  à  mes  moyens  d'observation;  quant 
aux  différences  que  je  remarquai  entre  les  mueur>  des  ans 
et  des  autres,  elles  teuaicnt  très-probablement  à  ce  qne 

D  ccDt  ciutroitsdif- 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  sm 

Boa  Vista  n'avait  pas  l'avantage  d'être  dirigé  par  un  homme 
de  beaucoop  de  sens ,  comme  chacun  des  deux  autres  vil- 
lages. 

Les  Indiens  de  Boa  Vista  m'offrirent  toutes  les  denrées 
du  pays,  ce  qui  prouve  qu'ils  ne  négligent  point  la  culture 
de  lenrs  terres.  Ils  doivent  trouver  assez  facilement  le  débit 
de  leurs  récoltes,  car,  chei  eux,  comme  à  Estiva  et  au  Rio 
das  Fedras,  il  existe  un  ranch»  pour  les  voyi^eurs,  et  la 
roate  traverse  également  leur  village. 

J'étais  arrivé  Jt  Boa  Vista  un  jour  de  f%te.  Un  des  habi- 
tants venait  d'achever  de  couper  les  bois  qui ,  après  avoir 
été  brûlés,  devaient  feire  place  à  ses  plantations.  Chaque 
caltivateur,  k  son  tour,  invite  ses  voisins  à  l'aider  dans  ce 
genre  de  travail,  et  ensuite  il  les  convie  à  un  repas  dans 
lequel  on  boit  beaucoup  de  taHa  et  qui  se  termine  par 
des  batuques.  Les  Indiens  de  Boa  Vista  dansèrent  tonte 
la  nuit,  en  s' accompagnant  de  battements  de  mains  et  de 
chants  qui  les  réjouissaient  sans  donte,  mais  qui  pouvaient 
paraître  à  des  oreilles  européennes  plutdt  dignes  d'un  en- 
terrement que  d'une  réjouissance.  «  Les  habitants  primi- 
tif de  l'Amérique,  dit  Eschwege  (1),  en  parlant  des  In- 
diens d'Estiva,  saisissent  toutes  les  occasions  de  se  divertir, 
tandis  que  les  nouveaux  venus,  Européens,  s'abandonnent 
à  la  tristesse,  oppriment  ces  pauvres  gens  de  toutes  les  ma- 
nières et  leur  envient  le  peu  de  joie  qu'il  leur  est  permis  de 
goûter.  »  Amollis,  énervés  par  la  chaleur  des  contrées  tro- 
picales ,  les  hommes  de  race  caucasique  tombent  dans  la 
nonchalance  et  pwdent  leur  galté.  Quant  à  l'oppression 
dont  ils  se  rendent  trop  souvent  coupables  envers  les  In- 

^1)  Brai.,  I.M. 


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270  VOYAGE  tUX  SOURCES 

(lieDS,  c'est  la  force  substituée  au  droit;  c'est  ce  que  nous 
offre  partout  et  dans  tous  les  temps  l'histoire  de  notre  es- 
pèce ;  on  profite  de  la  faiblesse  de  riuflrme  et  du  vieillard, 
et,  si  la  loi  n'avait  entouré  de  protection  la  Ibrtune  de  l'or- 
(rikHin,  il  ne  larderait  pas  à  être  dépouillé. 

Cc8  réflexions,  au  re^,  ne  sont  point  apjdicables  aui 
Indiens  des  trois  ddéea  du  Rio  das  Velfaas  (1819).  U  est  i 
rtgretter  sans  doute  que,  sous  le  rappMt  religieux  et  m»- 
rai,  ils  fussent,  pour  ainsi  dire,  abandoaaés  à  eux-Bénies, 
coDune  le  sont  {dus  ou  mojna  tous  les  indigèBes  du  Brétil  ; 
mais,  d'ailleurs,  je  n'ai  point  vu  d'hommes  de  cdte  race 
qui  fusKQt  plus  heureux  qu'ils  ne  l'éttïeat  alors.  G'âaKi 
peioe  ai  qudques  Portugais  étaient  venns  s'établir  parvi 
eux  ;  poaoflae  ne  les  vexait,  persoane  ne  troublait  leur  re- 
pos; ils  ne  payaient  pas  mÊme  la  dîme.  Ils  avaleat  peu  de 
beaoùis,  point  de  tentatioDs.  Leurs  terres  étaiest  excel- 
lâtes, et  un  léger  travail  suffisait  pour  assurer  leur  s«b- 
aistaDce;  avec  le  coton  qu'ils  avaient  Fecoeilii,  ils  bbrf- 
qnaient  dans  leurs  musoBS  la  toite  dont  ils  se  couvraient; 
eax-mémes  faisaient  aussi  leur  poterie;  le  sel  et  le  fer 
étaient  les  seuls  objets  qu'ils  étaient  forcés  d'acheter,  et, 
pcMir  se  tes  procurer,  ils  retiraieut  de  la  vente  de  leurs  du- 
rées [rtos  d'argent  qu'il  ne  leur  était  nécessaire  d'eu  pos- 
séder. Ils  vivaient  dans  une  paix  profonde  et  ^aî«at  unis 
eBtre  eux,  comme  le  sent  généryement  les  Indiens  ;  con- 
oaiisant  les  avantages  les  plus  réels  de  la  civUisatitHi ,  àa 
tm  ignoraient  les  maux  ;  ils  étaîMit  étrangtss  au  luxe,  i  la 
«uftditéfà  l'ambilMia,  et  k  cette  prévoyance  qui  poursuit  les 
htwmes  de  noU«  race  et  empoisonne  le  présent  pour  un 
avenir  incertain.  Hélas  !  tant  de  bonheur,  comme  on  le 
verra,  devait  probablement  avoir  bientét  un  terme. 


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DU  RIO  DE  S.  PBANCI3C0.  2T1 

Ce  ipe  Je  viens  de  raconter  des  divers  métis  voisins  du  Rio 
dtsVelhM  prouve  qqe,  si  j'oi  engagé,  il  y  a  déjà  longtemps, 
l'administralion  brésilienne  à  encourager  de  tout  son  pou- 
voir les  sUiances  légitimes  des  Indiennes  avec  des  Africains, 
je  ne  me  suis  point  permis  de  le  faire  sans  de  valables  nto- 
tifô.  J'ai  pu  dire,  oo  le  voit,  que  par  ces  mariages  on  ob- 
tiendrait une  race  mixte  qui,  moins  défectueuse  que  la  race 
américaine  proprement  dite,  serait  plus  capable  que  cette 
dernière  de  résister  k  la  supériorité  des  blancs,  qui  serait 
moins  en  désaccord  avec  notre  état  de  civilisation,  et  s'a- 
matgamerait  peu  à  peu  avec  la  population  actuelle.  Par  ce 
moyen  seul,  je  le  répète,  on  empêchera  que  les  bibles 
reste»  des  nations  iadiennes  ne  soioot  entièrement  perdus 
pour  le  pays  dont  elles  étaient  jadis  aujtresses  et  qui  a  un 
si  grand  besoin  d'iKHiunes  (1). 

L'exemiile  des  métis  du  Faranahyba  achèverait  de  mon- 
trer, si  cela  était  nécessaire,  que,  chez  les  hommes  comme 
chez  le8anlmaui,le»raoe6,eD  se  croisant,  se  perfection- 
nent. Il  ^en  faut  que  le  métis  l'emporte  constamment  sur 
les  deux  races  dont  il  est  issu;  mais  il  est  toujours  supé- 
rieur à  l'une  d'elles  ,  et  il  paraîtrait  qu'il  l'est  â  toutes  les 
deux  quand  dles  sont  ^alraaent  d'un  ordre  inférieur.  Si 
les  mulAtres  ont  toute  l' inconsistance  de  la  race  africaÎBe  , 
Us  se  distinguent  d'dle,  hommes  et  femiMB ,  par  de  plus 
belles  formes ,  et  surtout  par  une  Qnesse  d'esprit  et  uw 
fadiilé  è  apprendre  qui  sont  A  peine  l'apanage  des  blancs. 
Les  Hamalucos  (3} ,  bien  inf^ieurs  ni  intelUgeoce  aux 

(1)  rovfv*  dant  Ui  prmitteet  dt  Sio  de  Janeiro  et  dt  Minai  Ge- 
fOM.H.Ol,  331. 

(S)  Voyez  c«  qae  j'ai  dil  des  Mamaluco»  dans  mon  Voyage  fw  le  lU- 
loraldHBrMt.tt,  IB.— Vojei  «qsbi  Fkrdimind  Dutis,  Bréiil,  4S,  cl 


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173  VOYACK  AUX  SODSCES 

hommes  de  race  cancasique,  l'emportent  sur  les  Indiens 
par  les  qunlilés  extérieures  :  souvent  les  femmes  sont 
charmantes ,  les  hommes  sont  bien  faits  ,  et  l'histoire  in 
Brésil  atteste  asseï  la  force  de  ces  derniers ,  leur  intrépi- 
dité ,  leur  audace  et  la  supériorité  qu'ils  eurent  toujours 
sur  leurs  ancêtres  maternels.  Descendants  de  nègres  el 
d'Indiennes,  les  Curibocas,  comme  on  vient  de  le  voir,  s'é- 
lèvent annilessus  desdeui  races  dont  ils  sont  issus,  parleur 
consistance,  leur  bon  sens  et  leur  aptitude  A  une  civilisntron 
plus  grande  que  celle  dont  leurs  parents  sont  susceptibles. 
Si  l'on  pouvait  étudier  d'une  manière  comparative  les 
mulâtres  nés  des  négresses  si  intelligentes  et  si  belles  de 
la  CAte  d'or,,  et  cenx  qui  descendent  des  femmes  stupides 
du  Congo  ou  de  Bengnela,  il  est  vraisemblable  qu'on  trou- 
verait quelques  différences;  mais  on  ne  saurait  les  décou- 
vrir BU  premier  coup  d'œil.  II  n'en  est  pas  de  même  des 
Curibocas  :  non-seulement  j'observai  parmi  eux  des  diffé- 
rences individuelles  très-remarquables,  mais  les  cheveut, 
toujours  crépus  chez  les  muléitres,  sont  quelquefois  lisses 
chez  des  Curibocas,  aussi  noirs  que  leurs  frères.  M.  A.d'Or- 
bignya  aussi  observé  [l]que  le-mélange  desdeus  races  ne 
produit  pas  toujours  des  changements  également  sensibles. 
Les  cheveux  des  enfants  des  n^res  et  des  femmes  guara- 
nis sont ,  suivant  le  même  auteur,  tanUH  crépus  ,  tanlAt 
fresque  plats ,  et  tandis  que ,  chez  les  mêmes  métis ,  le  nez 

looles  Tes  hjsioirce  du  BrMI. —  Je  n'ai  pis  besoin  d'ajoaur  qof  In  iis- 
cendints  des  oègreB  et  des  Indiennes  ne  s'appellent  pviotcobrM,  tMiiiiM 
l'a  cm  no  vojageur  français  (  Sde.,  Som.,  tZi).  Les  eiOras,  et  non  ca- 
brée ,  Honl  les  enrants  des  négresses  et  des  mnlltres  on  des  imiUiresM 
et  des  ntgrCH. 
(1)  Vhommt  amérieaiti,  I,  IM. 


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DU  MO  DE  S.  FlUnCISCO.  »S 

offre  à  peine  un  léger  oplatissement ,  celui  des  habitants 
du  Paranabytta  est,  comme  on  l'a  vu,  démesurément  large; 
les  uns  et  les  autres  sont  plus  Indiens  que  nègres  ;  mais 
le  mélange  a  embelli  les  Guaranis  et  il  a  enlaidi  les  Bo- 
ror6s. 

Notons  ces  faits  singuliers;  mais  attendons,  pour  cher- 
cher à  les  expliquer,  que  nous  en  ayons  encore. d'autres 
du  même  urdre.  Si  l'anthropologie  est  encore  si  (Aiecnre, 
c'est  peut-être  parce  qu'on  a  beaucoup  trop  raiecnné  sur 
celte  science  et  trop  peu  observé. 


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VOYAGE  AUX  SOUBCES 


CHAPITRE  XXVIII. 

LA  CASCARE  DB  FDBNAS.  -^  LB  BIO  BAS  VBLDAS  KT  L'ALDBA 
DE  SANTA  AHKA.  -^  LE  VILLAGE  DB  PABINHA  PODBB.  — 
PAMA«B  DU  BIO  OBANDB. 

Fattnda  dai  Fuma»;  liMsude  qui  l'a  voisine.— InsecUs  mairiisinls.— 
PoQBsièTe  roage.—^Lc  Rio  àat  VeUtat.  — Le  df  Urhemeiit  cantonné  «nr  le 
bord  de  celte  rivière.—  Droits  de  doaaoe. —  Ordre  dooDé  au  fommiD- 
dant  du  ditacheroeul  de  quitter  le  pars;  canséqneoces  de  cet  ordre.— 
On  petit  Ijnn.-  Aldea  de  Sanla  AtinO;  sa  position;  ses  maisons;  son 
histoire.  —  Portrait  des  vieilles  ludJeiiDes.  —  Apathie  des  IndieDS.  — 
Don*  Kuji  Bos>.  Dîffleulii  qu'a  l'auteur  poar  obtenir  qaetqaa 
mots  de  la  laoene  des  Chicriabis.  Vocabulaire  de  cette  laugae.  Elle  est 
éminemment  systématique.  Cn  certain  mode  de  pronoocialioD  carac- 
térise la  race  américaine.  —  Description  d'un  paysage.  —  Pwsage  du 
Rio  das  Velhas.  —  Pajs  sitoé  au  delï  de  celle  rivière.  —  SiUo  da  Ro- 
einha.  —  Changements  de  domicile.  ■~  Idées  religieuses  de  Harcel- 
litto.  —  Balle  eu  plein  air  sur  le  bord  de  VVberawi  Verdaàtlra.  Du 
vieillard.  —  Due  caravane.  Goiii  des  Brésiliens  pour  le  commerte.  — 
Journées  eitrèmement  chandes  succédant  h  des  anits  hoides.  —  Te- 
juco.  Inconvénient  de«  ranehoi.  —  Lanho$o.  —  Aspect  du  pays  situé 
an  deU  de  ce  lieu.  --  Le  tilbge  de  Farinha  Pùdrt.  Sa  position.  Ses 
maisons.  Son  église.  Son  histoire.  Les  terres  de  ses  alentours  lrès-&- 
vorables  i  la  culture  et  ani  troapeauK.  Son  avenir.  —  José  Harianno 
malade.  —  L'auteur  souffre  beaucoup  de  la  piqAre  des  chiques. — Les 
cultivateurs  de  Farinha  Podre.  —  Pajs  situé  au  deU  de  ce  village.  — 
Cuorda  da  Poste.  Moyens  eu raiifs, — Pays  charmant  situé  an  delà  de 
Posse.  —  Le  Bio  Grande.  Ses  bords.  Leur  insalubrité.  Comment  ou  le 
passe.  —  L'autear  entre  dans  la  province  de  S.  Paul. 

De  l'Aldea  de  Boa  Vista,  je  me  rendis  à  la  Fazmda  das 
Furnas  (l'habitation  des  grottes),  la  seule  depuis  Casados 


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DC  RIO  DE  &  FRANCISCO.  375 

qui  eût  quelque  importance  (1).  On  y  voysit-un  très-grand 
rancho;  elle  possédait  un  moulin  à  sucre,  et  là  se  fiibri- 
qnait  tont  le  taâa  {eat^iaça)  qui  se  dAitidt  dans  les  envi  - 
rons»  priocïpalemeDt  dans  les  aldeas. 

La  sucrerie  de  Furaas  est  située  au-dessus  dune  vdiée 
profonde  où  coule  le  ruisseau  qui  porte  son  nom  (Bibeirào 
das  Fumai  ]  et  qui  est  un  des  afSnents  du  Ddo  das  Ve- 
thas  (3)  ;  elle  n'est  qu'à  1  lieue  et  demie  portugaise  de  Boa 
Vista  ;  mais  je  n'avais  pas  voulu  faire  une  marche  plits  lon- 
gue, pour  avoir  le  temps  de  visiter  une  cascade  dont  on 
parlait  beaucoup  et  qui  tombe  à  quelques  centaines  de  pas 
de  rbabitatioQ. 

Je  pris  avec  moi  José  Marianno,  et,  traversant  des  bois 
touO^s,  embarrassés  d'épines,  nous  descendhnes  dans  le 
vallon.  Parvenus  au  pied  des  mornes  entre  lesquels  conte 
le  Ribeirâo  das  Pumas ,  nous  (teies  obligés  de  marcher 
dans  son  lit ,  afin  d'éviter  répais  fourré  qni  couvre  ses  deux 
rives.  Il  avait  fellu  que  je  me  déchaussasse;  mais,  peu  ac- 
contnmé  A  aller  pieds  nus,  j'avançais  sur  les  pierres  glis- 
santes et  anguleuses  du  ruisseau  avec  d'autant  plss  de  peine 

(t)  ItioéniraapproiiiDatirdeUFtieDdâdtsFDnMBaii  Rio  Grwde  : 
De  II  Fuenda  du  Farnia  an 

Registro  do  Rio  das  Velhas,  dDuane '.  3  legoas. 

Siiio  da  Rocinha,  marâonDMU 1 

llberava  Verdadeira,  rhaaraière 3 

Tejnco ,  batrilatioD S 

LanboM,  aldn  presque  abandmDf 3 

Fanoha  Podre,  village .1 

Gnarda  da  Posse,  poste  milKatre 4 

Rio  Grande ,  rirîère 3 

SSIcgoaâ. 
t3)  Cxziki.Corfiçrafia,  I,  334. 


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ne  VOYAGE  AUX  90UACES 

que  les  puces  pésétrantes  m' ivncnt  bms  les  doigts  des  pieds 
eii  trè»-nuniTaîs  état.  Après  ue  mardbe  de  quelques  rai- 
'  nutes,  nous  «rrivAmes  cependant  au  pied  de  ta  cascade. 

Là  est  une  espèce  de  sdle  formée,  d'en  tèté,  par  des 
rochers  è  pic  qui  s'éteudeot  en  héaicycle,  et,  de  l'antre, 
par  des  bois  serrés  et  touflte.  An  fond  de  rhénucyde,  en 
tirant  un  peu  vers  la  gauche,  le  rnissean  se  précipite  avec 
rapidité  d'une  hauteur  de  SO  braçat  (44  m^res)  (1),  «n 
prodaisant  un  bruit  qui  s'entend  de  très-knn.  Ses  eaux, 
dftoB  leur  chute,  fonneut  une  bdle  nsppe  blendie  et  écu- 
neuse,  et,  eo  outre,  trois  jeU  latéraux  motos  coasidén- 
bles  ;  elles  sont  reçues  dans  un  bassin  presque  circolaire, 
et  de  lA  elles  s'écoulent  rapidement  sur  un  lit  pierreui, 
encussées  entre  des  mûmes  presque  A  pic  et  couverts  de 
bois. 

Le  bassta  circulaire  o«  tombent  les  eaux  de  la  cascade 
est  eotouré  d'un  g«zon  épais  formé  de  mousses,  de  fougères 
et  de  Graminées,  dont  la  voduce  est  esaa  cesse  eetreteBue 
par  la  rosée  fine  et  abondante  qui  s'édu^pe  de  la  cascade. 
Des  Begomias  d'un  rose  tendfe ,  une  petite  espèce  de  Lo- 
bélie  à  longue  corolle  d'un  rouge  orangé,  un  Getneria  aux 
fleurs  brillantes  et  cramoisies  fleorissent  ci  et  lA  an  milieu 

(1>  N'ar«it  point  mesoré  ceUe  ci 
le  chiffre  qne  j'iodiqae  (Cor.,  350.  - 
Mnlement  50  pieds ,  et ,  comnH  il  m  acmii  du  pied  ughis ,  fai  ^t 
devenv  Due  mesure  brésilimoe,  ce  Mrait  sraleinait  lS",3Sft.  n  esi 
fort  possible  qoe  ce  nombre  soii  trop  Tiible  ;  atait ,  d'un  latra  tAti ,  je 
serais  teaté  de  croire  ipi'il  y  ■  qnelqae  eiagéntion  daiwcefaii  i|a'adDMl- 
tent  Ctial  c(  Pliarro.  An  reste ,  les  trois  aaieura  q»  je  viens  de  citer 
coDHcrent  Ji  pcioe  quelques  lignes  ï  la  jolie  cascade  de  Fumas ,  el  les 
dmi  derniers ,  qui  n'avaient  pas  eu  occasiou  de  la  visiter,  en  parlrni , 
coiniDe  on  le  verra  bienlM,  d'une  mtmirc  asset  pen  cuel«. 


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DO  RIO  D£  S.  nUnOSCO.  ZTT 

de  ces  gazoDB.  Les  arbres  qui  s'élèvent  {dus  loin  foraieut, 
comme  je  l'ai  dit,  un  <^pais  rourré  d'uae  rardare  qui  me 
diarma  d'autant  plus  que  partout  ailleun  les  végétaux 
ligneux  étaient  à  demi  dépouillés  de  leurs  reailles  et  que 
les  pAturages,  desséchés  par  l'ardeur  du  soleil,  n'ofiraient 
fdus  qu'uoe  couleur  grisAtre. 

Derrière  la  cascade,  les  rochers,  dans  le  tiaiB  de  leur 
hauteur,  à  partir  du  sommet,  sont  nus,  entièr^nent  à  pic 
et  laissent  apercevoir  leur  couleur  noirAtre  à  travers  la 
nappe  argentée  qui  tombe  avec  fracas.  Au  tiers  de  leur 
hauteur,  ils  se  creusent  pour  fonncr  une  gnAte  irrégu- 
lière et  peu  profonde,  tapissée  de  fougères  ;  plus  bas  en- 
fin, ils  sont  encore  nus  et  noirâtres  comne  au  stmimet.  La 
blancheur  éclatante  des  eaui  de  la  cascade  et  cette  zone 
■rrégulière  de  verdore  qu'on  découvre  derrière  elle,  entre 
des  rochtffs  noirs,  iHwluisent  l'effet  le  plus  agréable  et  le 
plus  pittoresque  (Ij. 

Les  rocfaers  noirs  fst  i  pic  de  la  cascade  s'étendent  à  sa 
gauche,  et  là,  au-dessous  d'eux,  le  terrain  s'incline  en  for- 
mant une  pente  rapide.  À  l'endroit  où  celle-ci  commence 
est  une  rangée  d'arbrisseaui  "erres  les  uns  contre  les  an- 
tres, qui  cachent  la  base  des  rochers,  et  du  milieu  de  ces 
arbrisseaux  s'^àvent  quelques  Palmiers  dont  la  tige,  aussi 


(1)  Cml  dit  que  des  ojseani  de  diTeracs  esptees  conslrniscat  leurs 
Dids  dans  les  cavilét  da  rocher  et  f  Kveat  leurs  petits  htrdiment  et  k  la 
vos  de  Knit  le  axnde ,  lulgré  te  fracM  (|IH  fait  t«  catcade  ep  m  ftM- 
piUnt.  Jl  n'en  ai  pw  apertv  un  seul,  et  je  d«ale  que  l'abondante  rnsde 
qui  tombe  mus  cesse  dans  la  grotte  permette  i  aucoo  animal  de  l'iubi- 
ler.  Ou  voit,  par  ma  descrîptiOB,  que  Piiarro  s'est  également  trompé 
qnand  il  assure  que  l'eau  disparaît  imm^diatemeot  après  m  chute,  poor 
se  fcuKHtlrer  à  quelle  distance. 


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3^9  VOYASe  AUX  SOURCES 

grêle  que  celle  des  Bambous,  se  teimine  par  un  panache 
élëgant  de  feuilles  recourbées. 

Nous  sortîmes  de  l'espèce  de  salle  où  tombe  la  cascade, 
en  grimpant,  à  droite,  au  milieu  des  arbres  qui  couvrent 
le  terrain  et  en  nous  accrochant  à  leurs  branches.  Ce  ne 
fut  pas  sans  beaucoup  de  peine  que  nous  parvînmes  è  l'en- 
droit où  le  torrent  se  précipite. 

Tant  que  nous  étions  restés  au  pied  de  la  cascade,  nous 
n'avions  été  tonnnaités  par  aucun  insecte  ;  mais ,  &  peine 
rentrés  au  raaeho,  neus  flknes  entourés  d'une  nuée  de 
borrachudos. 

Pour  pouvoir  rester  en  place  et  écrire,  Il  me  fallait  plus 
de  conrage  peut-Mre  que  pour  supporter  une  douleur  vive. 
Pendant  longtemps ,  nous  n'avions  pas  eu  &  nous  plaindre 
.  des  puces  pénétrantes;  mais,  depuis  Santa  Cniz,  nous  en 
étions  assaillis  presque  partout  où  nous  nous  arrêtions  : 
personne,  dans  ce  pays,  ne  se  donne  la  peine  de  balayer 
son  raneho,  et  ces  insectes,  comme  on  sait,  pullulent  dans 
la  poussière.     • 

La  route  descend  dans  le  valloii  oà  coule  le  Ribeirâo  das 
JFuraas,  et,  en  parlant  de  la  faxmda,  j'eus  encore  le  plaisir 
d'admirer  la  cascade. 

Au  deli  de  Furnas ,  comme  entre  Boa  Vista  et  cette  su- 
crerie, la  terre  est  d'un  rouge  foncé,  et,  &  mesure  que 
nous  avancions,  nous  faisions  voler  des  tourbillons  de  pons- 
»ère  qui  saUssaient  tous  dos  vêtements.  La  sécheresse 
continuait  i  être  excessive,  et,  k  l'exception  des  gabi- 
r6ba$  (1)  et  de  quelques  autres  Myrtées,  toutes  les  plantes 
des  campos  étaient  sans  [leurs  (9  septembre). 

it)  Toutes  Ifs  pplites  tsptcta  de  ptidium  k  baies  anondwii  porleol 


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DV  aïO  DE  s.  FRAKOSGO.  370 

K  2  legoat  de  Furnas,  nous  passâmes  par  VAtdea  de 
Santa  Anna.  Ayant  fait  encore  environ  1  lieue,  nous  en- 
irimes  dans  un  bois  assez  épais,  et,  après- être  descendus 
pendant  quelques  mioutes,  pous  arrivAmes  au  Rio  dos 
Velkoi  et  an  bnreau  de  douane  placé  sur  ses  bords  {Re^ 
giitro  do  A^  dai  ViUuu).  Cette  ritière,  qu'il  Gaut  bieya  se 
garder  de  confondre  avec  une  autre  du  même  nom,  l'un 
des  affluents  du  S.  Francisco,  prend  sa  source  au  versant 
occidental  de  la  Serra  do  S.  Francisco  et  da  Pjiranahyba, 
dans  le  Totainage  de  Deaemboque,  et  se  jette  dans  le  Para^ 
nahyba  (1). 

A  l'endroit  on  y  aboutît  ia  ronte  de  Goyaz,  die  peut 
avoir,  dans  les  grandes  eaux,  la  même  laideur  que  le  Loj- 
ret  quelques  centaines  de  pas  au-dessus  du  pont  d'Olivet ,  et 
on  la  voit  serpenter  et  fnir  entre  deux  coteaux  couverts  de 
b(^.  Lorsque  j'arrivai  sur  ses  bords,  de  longs  banes  de  ror 
cbers  plats  et  raboteux  s'élevaient  auntesuis  de  ses  eaux  et 
en  augmentaient  la  rapidité.  Sur  la  rive  droite  était  an 
petit  bâtiment  qui  servait  de  logement  aux  militai  res-dii 
poste  (quartel)  ;  on  voyait  autour  quelques  maisonnettes , 
et  jUaa  loin,  devant  l'endroit  où  l'on  s'embarque  (porto), 
se  tronrait  un  rancho  destiné  pour  les  caravanes.  De  l'au- 
tre càté  de  la  rivière,  on  avait  anssi  cMistruit  un  raneho, 
et  çà  et  là  s'élevaient  quelques  petites  maisons,  parmi  les- 
quelles on  distinguait  à  peine  celle  de  l'employé  civil  ifiel). 

le  Dom  de  gabirôtiai,  el  l'on  appelle  arofoi  celtes  doDt  le  tnût  a  la  Tonne 
d'oM  poire. 

(1)  Ldû  d'ilincooii  place  sa  source  dans  la  Serra  di  Canastra  [3lem. 
Viag.,  67),  Millict  et  Lop«s  de  Moura  daos  les  Serras  da  Fiadabiba  et 
da  Uirceria  {Diee.,\i,(fli).  La  Serra  da  Piodahiba serait ,  sans doule , 
une  portion  de  la  Serra  do  S,  Francisco  e  da  Paranaliiba. 


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380  VOYâGE  AUX  SOWCGS 

Lor«iiie  l'trriva) ,  le  commendsnt  du  détachement,  qoi 
avait  le  gnule  d'alfereê  (sons^ieutcnant),  était  de  l'antre 
ctAà  de  la  rivière.  J'allai  le  trouva*;  je  lui  présentai  nu 
porlaria  et  le  priai  de  me  donner  la  permÎBsion  de  faire 
décharger  mes  eSeti  au  qitartel.  Il  me  l'aceorda  de  la  meil- 
leure grftce  du  monde ,  «î  j'eus  enfin  le  bonheur  de  l<^Dr 
dans  une  mÏHm,  do  passer  queti|ue8  instants  sans  être 
tourmenté  par  les  borraeiiuiht  et  les  autres  insectes. 

T^  détachement  oantoBné  an  Rio  daa  Velhas  se  cMipo- 
!«ait  de  dii-sept  soldats  du  régiment  de  Htn«;  mais  11  n'en 
restait  guère  que  sit  i  huit  sur  le  bord  de  cette  rivière  :  les 
imtrcs  étaient  répartis  entre  les  différenls  postes  des  juî- 
yadoi  d'AraxA  et  de  Descmboque,  tels  que  le  raraaafairba, 
le  Rio  draDde,  etc.  Ceus  du  Rio  das  Velhas  étaient  cbwgét 
de  visiter  les  passe-ports  des  voyageurs,  de  Rassurer  à  les 
caravanes  venant  de  Goyai  n'emportaient  poiat  avec  àks 
de  I'otou  des  diamants,  et,  en  coj  de  besoin,  de  prêter 
main-forte  h  l'employé  civil  [^l].  Ce  deraier  recevait  le 
péage  qui  s'élevait  à  75  reis  (4ti  centimes)  par  personne  et 
10U  reis  (1  ftvnc}  par  cheval  ou  mulet.  C'était  aussi  lui 
qui  devait  toucher  les  droits  dus  sur  les  marchandises  qui 
allaient  de  S.  PanI  à  Goyaz  ;  mais,  pour  ftvuriser  les  négo- 
ciants qui  sont  si  longtemps  sens  vendre,  on  leur  permettait 
de  laisser  entre  les  mains  du  fiel  une  obligation  du  mon- 
tant de  la  somme  dont  ils  étaient  redevables  ;  ils  s'acquit- 
taient entre  les  mains  de  l'administrateur  du  lieu  oti  ils 
avaient  vendu;  ils  prenaient  un  reçu,  et,  quand  ils  repas- 
saient par  le  regislro  pour  retourner  à  S.  Paul ,  ils  présen- 
taient ce  reçu  et  reprenaient  leur  obligation.  On  ne  faisait 
payer  au  Rio  dus  Velhas  que  les  marclkanJs  dans  lesquels 
on  avait  peu  de  ronftance. 


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DU  MO  DE  S.  FUNOSCO.  Ml 

Avant  U  réuniOD  d«s  justices  d' Araxé  et  de  Oeeemboque 
à  la  proviBce  de  HisM,  le  pa;s  deGoyax  s'étendait,  comme 
on  sait,  ja9qR'au  Aio  Grande,  qui  BujeHrd'hui  sépare  la 
première  de  ces  provinces  de  celle  de  S.  Paul.  Ce  fut  donc 
sur  le  bord  du  Rio  Grande  que,  dans  l'origine,  fiit  placé 
le  bureau  des  douanes  ;  mais,  à  cette  ^Mxpte,  les  enviroBs 
de  ce  Seuve  étaient  pestilentiels  ei  sans  habitants,  A,  i 
re\oq>tion  d'un  soi) ,  tous  les  suldats  qu'on  y  avait  can- 
tonnés mounir^t.  Pour  cette  raison ,  on  transptNta  k 
douane  sur  les  bofds  du  Rio  das  Velhas;  cep«klant,  comme 
ceux  du  Rio  Graoée  éUient ,  lors  de  mon  voyage  ,  nuHus 
déserts  et  motos  mabau«  qu'autrefois,  iJ  paraiesait  qu'on 
avait  envie  de  rétablir  les  ctwses  dans  leur  état  primitif- 

11  y  avait  à  peine  quelques  mioutes  que  j'étais  lu  Quor- 
lel  lorsque  le  comroandani  reçut  l' ordre  de  partir  avec  ma 
détachement  pour  Villa  Rica  (Ouro  Preto] ,  et  de  remettre 
le  poste  k  des  aeHàÊti  de  la  garde  nationale  (mtficÙBMM)  qui 
dovaieot  venir  de  Paracatû.  Un  de  ces  derniers  était  d^ 
arrivé  et  rvait  annoncé  les  autres.  Le  conunandaoi  fut  dés- 
osp^  de  ce  cbaagem^t^  qui  n'avnt  d'autre  bloque  de 
(aire  portictper  sa  troupe  &  je  ne  sais  quels  esœices.  Les 
militaires  du  régiment  de  Minas,  aiosi  détachés  i  de  gran- 
des distances,  ne  sont  ordinairement  diangés  qu'an  bout 
de  quelques  années  (iSlif) ;  ils  Torment  des  eq>ècee  d'éta- 
blissonents,  et,  quand  on  les  remplace,  ils  oèdeat  k  leurs 
sucoesKun  leurs  provisions  et  les  objets  qui  rnmpnaainnt 
leur  ménaf^.  Se  flant  sur  cette  coutume,  le  commandant 
du  Rio  das  Velhas  avait  oppelé  auprès  de  lui  st  fandlle,  qui 
était  fiirt  nombreuse,  et,  après  avoir  formé  une  plantation, 
il  venait  d'en  récolter  les  produits  ;  il  trouvait  dur  d'être 
forcé  de  faife,  avant  le  tempo,  tes  frais  d'un  voyage  de  plus 


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18S  VOYAGB  AUX  SOURCES 

de  100  legoas  et  de  tout  abandonner  sans  pouvoir  tite  in- 
demnisé par  son  successeur,  car  il  allait  être  remplacé  par  . 
des  gardes  nationaax  qui ,  au  bout  de  trois  mois,  devaient 
eui-mtoies  l'èlre  par  d'autres. 

Ce  n'était  point  sans  quelque  raison  que  cet  ofScier  était 
mécontent;  mais  les  pauvres  gens  qui  allaient  prmdre  su 
plaee  avaient,  en  réalité,  bîoi  plus  de  motib  pour  se  plain- 
dre. Tous,  en  effet,  étaient  des  hommes  mariés,  gens  de 
métier  ou  agriculteurs,  qui  avaient  à  peine  de  quoi  vivre 
dans  leur  maison ,  et  pourtant ,  sans  leur  accorda  aucune 
ind«noité  de  voyage,  aucune  solde,  quoique  ce  soit  pour 
leur  nourriture,  on  les  obligeait  de  pasau*  trois  mois  h  plus 
de  40  legoas  de  cbec  eux  et  de  faire  un  service  auquel  ih 
n'étaient  nullemeirt  accoutumés!  Ces  paavres  gens  seront 
certainement  morts  de  bim,  s'ils  n'ont  pas  volé  on  si  les 
colons  du  voisinage  ne  sont  pas  vaius  à  leur  secours.  Ce- 
pendant la  soumission  des  Brésiliens  aux  ordres  supérieurs 
était  telle  h  cette  ^)oque,  qu'aucun  des  gardes  nationaux 
qui  avaient  été  désignés  par  leurs  chefe  n'aura  manqué, 
j'en  suis  bien  sâr,  de  se  rendre  i  son  poste. 
-  Mats  quelle  triste  influence  aura  eue  sur  les  Indiens  ce 
diangemeat  fMientt  Ils  devaient  naturellement  trouver 
des  protecteurs  dans  les  militaires  dti  régiment  de  Minas, 
gens  bien  élevés,  pleins  de  raison,  accoutumés  à  la  dis- 
cipline,  étrangers  au  pays.  Les  miliciens,  au  contraire, 
hommes  grossiers,  ignorants,  imbus  de  préjugés ,  comme 
le  sont,  en  g^éral,  les  colons  de  la  eomarcaie  Paracatû, 
et,  de  plus,  dépendants,  par  leur  triste  position,  des  culti- 
vateurs du  pays ,  auront  nécessairement  soutenu  ces  der- 
niers contre  les  habitants  des  aldeas. 

Dans  les  pays  déserts  où  la  police  devient  impossible, 


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DU  mO  BE  s.  FRANCISCO.  3(13 

OÙ  les  lots  n'ont  presque  plus  d'actioR ,  certaios  bommes, 
par  leur  audace,  leur  inlelligence  ou  leur  fortune,  pren- 
nent sur  leurs  voisins  un  grand  ascendant  et  deviennent  de 
véritables  tyrans.  Lorsque  d'£schwege  arriva,  en  1816, 
dans  les  aldeas,  un  de  ces  petits  souverains,  dont  les  mires 
avaient  souvent  plus  de  valeur  que  ceux  du  gouverneur 
lai-nièroe,  sonmit  au  colonel  allemand  un  plan  qui  ne  ten- 
dait ridn  moins  qu'à  chasser  peu  è  peu  les  Indiens  de  leur 
district,  a&n  qu'on  pût  partager  leurs  terres  entre  les  Por- 
tugais. D'Eschw^e  repoussa  avec  indignation  le  projet 
qu'on  lui  communiquait,  et  assura  l'auteur  qu'il  ferait  tout 
ce  qui  dépendrait  de  lui  pour  en  empêcher  l'exécution. 
Mais  le  départ  des  militaires  de  Minas  laissait  le  champ  li- 
bre à  ce  personnage,  et,  en  ISSl,  les  Indiens  de  la  partie 
du  district  privilégié,  située  entre  le  Rio  das  Velhas  et  le 
RioGraude,  adressèrent  une  requête  à  l'administration  pour 
se  plaindre  de  ce  que  les  Portugais,  à  la  tète  desquels  était 
l'homme  dont  je  viens  de  parier  tout  à  l'heure ,  les  chas- 
saient de  leurs  terres  (i). 

Conmie,  en  arrivant  au  Rio  das  Velhas ,  je  n'avais  fait 
que  passer  par  l'Aldea  de  S.  Anna,  j'y  r^urnai  le  len- 
demain. 

'  Cet  aldea  a  été  biti  dans  les  campos,  sur  une  colline  au 
bas  de  laquelle  coule  un  ruisseau  dont  les  eaux  vont  se 
réunir  an  Rio  das  Velhas  ;  il  se  compose  d'une  trentaine 
de  maisons  très-petites,  presque  carrées  et  couvertes  en 


(t)  firofiUefi  die  Neue  Well,  1 ,  04.—  Je  ne  Bcnis  pas  Tort  élngnéde 
frareqneroDiToaveriit,  dans  les  villages  de  Fraoce,  plus  d'un  maire 
■}aM  quriqae  reBsemMancD  avec  ks  petits  ijrua  des  contrées  disertes 
du  Brésil. 


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3«  VOYAGE  AOX  SOURCES 

cbaome.  Les  unes  sont  dispersées  sans  aucna  ordre  «r  la 
colline;  les  antres  bordent  nne  place  carrée  dont  l'iui  des 
cAtés  est  formé  par  l'église,  qui  est  trè»-peti(e  (4  ).  Les  mors 
dei  maisons  sont  construits  avec  de  la  terre  d'un  rouge 
ronce  ;  mais  celui  du  devant  est  revêtu  d'un  crépi  fett  avec 
une  autre  terre  d'uo  gris  l'oncé. 

Les  traditions  uniformes  des  Indieos-Bororàs  attribuait 
aux  jésuites  la  première  fondation  de  l'Aldea  de  Santa 
Anna  (3),  rt,  suivant  les  mêmes  traditions ,  ce  village  fut 
origiDairemrat  habité  par  des  Indiens  de  la  cAte.  A  oeux-d 
Antonio  Hres  de  Campos  réunit,  comme  on  l'a  vu  {dos 
haut,  quelques  Indiens  Carajàa  et  Tapirapés ,  habitants  des 
bords  de  l'Araguaya,  au  ncffd  de  la  profiaix  (5).  Cette  po- 

(1)  ki  Je  De  nia  paiiH  d'aceerd  avac  H.  d'Eednrasa ,  ur  il  k  dit 

■SMigmde. 

(2)  Il  est  impossible  qne  cette  tradition  ne  Mit  pu  Adèle.  Si,  en 
eOet,  les  jésaites  n'iTiictit  pu  hibit^  le  pays,  conineDt  ka  paarra 
Indiens  da  Pwuubjbi ,  ai  ignorante ,  si  Mrngen  à  m  qni  m  pmhU 
dana  le  monde,  anraient-ils  pu  aaroir  qn'il  artil  etatâ  des  jésnilcs* 
comment  se  seraient-ils  a?is^  d'imaginer  nne  Table  qui  leur  était  éti- 
demment  plus  nnisible  qn'ntHe ,  pnisqn'eHe  tendait  k  leur  Aler  toste 
ecpèce  de  droilc  snr  l'ildea  da  Santa  Anna. 

(3)  C'est  E»cbvrege  qui  donne  ces  noms  (itrtu.,  1, 83),  et  bien  certaine- 
ment il  les  tenait  des  Tadiens  -  car  il  a  imprimé  aon  journal  ;el  qu'il  Ta 
fcrit  sur  les  lieui ,  ei  il  est  évident  qu'il  n'a  hit  aneune  racberdie  biS' 
torique,  Ici ,  par  conséquent ,  je  tront  encore  nue  preure  de  la  lArHé 
des  badttiooo  da  pajs;  car  lîe»  babitants  n'auraient  certainement  pas 
connu  l'exisieuce  des  Carajàs  el  des  Tapirapés,  s=  ceni-ci  n'étaient  Tenus 
parmi  eui,  11  ne  Tant  pas,  sans  doute,  adopter  les  u-adiiions  sans  eiameni 
mais  II  f  a  des  cas  où  elles  méfileni  certainement  pins  do  coufianee  qng 
des  récils  écrits  lÉgèremrai  ou  atrec  partialité.  L'histoire  de  l'itKoM' 
deueia  (rCfolte)  de  Hinas,  qec  j'ai  tracée  d'après  les  traditions  don  Ni-, 
nciroa  les  plut  cclairés,  doit ,  je  crois,  éttc  considérée  comme  étant  plu 
digne  de  foi  <  Fomw e  ilaM  les  procintei  de  Rio  à*  Jantire ,  elc,  I , 
202)  que  celle  qu'a  imprimOc  Sonlbe)'  en  consultant  des  pièces  oS- 


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DIT  110  DE  S.  PtUNOSCO.  3U 

pulation  mélangée  mourut ,  se  dispersa  on  se  fon£t  parmi 
les  descendants  des  Boror6s,  et,  en  1775,  od  if  ."emplaça 
par  un  cntain  noiid>re  de  Cfaicriabés,  nation  qni  vivait 
dans  les  déserts  de  Parannân  et  s'était  étendue  jostfae  sar 
les  rives  do  S.  Francisco ,  dans  la  partie  septentrionale  de 
Min«(1). 

Lorsque  j'arrivai  è  Yaldea ,  les  hommes  étaient  tons  dans 
leurs  plantations  ;  je  n'y  vis  que  der  femnes.  La  plupart 
me  parurent  de  race  américaine  pure  on  presque  pure. 
Elles  ne  portaient  rien  sur  leur  tète  ;  tout  leur  TÊtement 
consistait  en  une  jupe  el  une  chemise  de  coton  fort  sale  : 
la  chenise  manquait  même  à  plusieurs  d'estre  elle».  Ces 
femmes  sont  trè»<fécondes  ;  mais  au  tris-graiid  nombre 
d'enfants  meurent  probablement  bote  de  soins. 

Rien  m'est  hideux,  à  mon  «vis,  comme  une  ladienne 
qaî  t  passé  le  temps  de  la  jeunesse.  Qu'on  se  figure  un  cou 

cielles  fiianiin  par  In  jogcs  Ae»  malheiirani  qui  Itarent  coudcmii^ 
dus  rsUe  eircoiwUBct.— J«  doit  faire  dMarrer,  «Ad  d'ériier  UiaU  era- 
ftuioii ,  qna,  ta  iodiqnanl  la  patrie  de  ces  deni  tribiis ,  Eschirege  «  écnt 
Uragnaj  pour  iragua^a. 

(1)  On  a  rn  ailleiirs  qoe  les  aTcaturien  paalisUs  qoi ,  nu  pen  arani 
1712,  H  rtpandireot  sm  les  borda  dn  Bio  de  S.  Ynadaim,  an^laMos  en 
■D-déaaons  da  Capio  do  Cleto,  k  «nrinm  11  Ugoat  dn  villaga  de  Cod- 
teodaa ,  dans  la  province  de  Minas,  j  trouvèrent  des  Indiens  qui  appar. 
lenaient  k  I*  nation  des  CMcrlabàs  on  Xicriabis  (vojei  mon  TOyagt 
àatu  Ut  provfMW  dit  tHa  de  Jantiro  et  Mtntu  Geraei ,  H ,  3W).  Pi- 
larro  tt  Caial  éerivtol  Chtcrialws  ;  je  ne  mis  si  ce  Don  a  été  usilé  aniia- 
fois  qoeiqae  part,  nuis  an  milien  de  ce  peuple  iDi-nième  on  dit  CAf- 
eriabàt,  et  c'est  ce  mïme  nom  qni  me  fut  donné,  sur  tes  bords  du 
S.  FraiMisco,  par  rneetlent  capitaine  Cleto,  dont  les  trtdillMiB  de  fïmille 
reBontaient  i  nn  siècle,  Eschvcge,  qui  a  visita  cobibc  ibm  l'Aldea  de 
Santa  Anna,  n'adopte  pa6  non  plus  le  mot  Cbacriabaa ,  et ,  s'il  ('rrit  :ïi- 
ffrioAd*,  cela  tient,  sans  doulc,  à  ce  qu'il  était  préoccupé  de Terrenrqu'il 
avail  coinniise  plus  uKienncnKiit ,  en  admettant  ûiyac  pour  Ccp|mu. 


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IM  VOTAGE  AUX  S 

très-court,  une  énorme  tête,  un  net  épaté,  une  grande 
bouche,  des  joues  creuses  dont  la  pommette  est  très-proé- 
minente t  un  tehit  enfumé ,  enfin  use  forêt  de  cheveux 
noirs  et  durs  qui ,  presque  hérissés  au-dessus  du  front ,  re- 
tombent en  longues  mèches  sur  le  derrière  et  les  cAtés  de 
la  tète ,  et  l'on  aura  à  peine  une  idée  de  la  laideur  de  res 
pauvres  créatures,  laidenr  que  ne  déguise  aucune  appa- 
rence de  parure. 

Beaucoup  moins  mélangés  que  les  habitants  du  Rio  das 
Pedras,  ceux  de  Santa  Anna  ont,  à  ce  qu'il  paratt,  con- 
servé tout  le  caractère  des  Indiens.  On  a,  me  disait  le  cran- 
mandant,  beaucoup  de  peine  &  les  faire  travailler,  et  sou- 
vent leur  ^thie  les  réduit  à  souffrir  de  la  faim.  La  cul- 
ture des  terres  est  un  travail  de  prévoyance,  et  les  Indiens 
n'en  ont  point  ;  leurs  dispositions  naturelles,  qui  les  por- 
tent à  vivre  au  jour  le  jour,  presque  comme  les  aDimanif 
en  font  nécessairement  des  chasseurs  ou  des  pécheurs. 

L'a  langue  des  CbicrîabAs  ne  se  parle  déjà  plus  dans  le 
villagede  Santa  Anna;  cependant,  lors  de  mon  voyage, die 
était  encore  sue  de  quelques-uns  de  ses  habitants.  Le  com- 
mandant du  Rio  das  Velhas,  auquel  je  témoignai  le  désir 
d'avoir  quelques  mots  de  cette  langue,  me  dit  que  je  ne 
pouvais  mieux  faire  que  de  m'adresser,  ponr  cela,  i  une 
femme  appelée  Dona  Maria  Bosa,  qui  surpassait  en  intel- 
ligence tous  ceux  de  sa  nation.  Lorsque  j'arrivai  à  Valdea, 
un  blanc  qui  y  demeurait  depuis  trois  mois  m'offtit  de  me 
conduire  chez  cette  femme  :  c'était  un  de  ces  vagabonds 
(vadios)  qui ,  pleins  de  jeunesse  et  de  force ,  passent  leur 
temps  dans  l'oisiveté  et  vivent  aux  dépens  des  antres.  Dans 
une  chaumière  qui  n'avait  pas  d'autres  meubles  que  quel- 
ques bancs  de  bois,  mais  qui,  d'ailleurs,  était  d'une  pro- 


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DU  RIO  DE  S.  FRANCISCO-  UT 

prêté  extrême,  je  trouvai  une  Indienne  d'une  quarantaine 
.  d'années ,  encore  fraîche ,  pleine  d'embonpoint  et  de  santé, 
(fui  DIait  du  coton.  Bien  différente  des  autres  femmes  de 
.VoUm,  Dona  Maria  Rosa  était  vêtue  très-proprement;  elle 
portait  une  jnpe  d'indienne,  ^  ses  cheveux  étaient  enve- 
loiq>é8  dans  un  mouchoir  de  madras.  Elle  me  reçut  avec 
beaucoup  de  politesse  ;  mais,  pendant  longtemps,  elle  s'ob- 
stina à  soutenir  qu'elle  avait  entièrement  oublié  sa  langue. 
Cela  n'est  pas  possible,  lui  dis-je;  car  vous  l'avez  parlée,  il 
n'y  a  pas  encore  trois  ans,  devant  le  lieutenant-colonel 
d'Eschwege.  —  Dans  ce  temps-là ,  je  me  rappelais  encore 
quelques  mots  i  mais,  aujourd'hui.j'ai  tout  oublié.  Comment 
savez-vous,  d'ailleurs,  que  j'ai  parlé  me  langue  devant  le 
lieutenant-colonel? — Parce  qu'il  l'a  raconté  à  plusieurs  per- 
sonnes. —  Voyex  comme  mon  nom  court  le  monde,  et,  s'il 
arrive  quelques  malheurs  à  l' aldea,  c'est  moi  que  lesaubres 
Indiens  en  accns^vnt.  Pourquoi  voulez-vous  donc  absolu- 
ment connaître  ma  langue? —  Cest  uniquement  par  curio- 
sité ;  c'est  par  le  motif  qui  vous  a  portée  vous-mémeà  me  faire 
des  questions  sur  différentes  choses  que  vous  ignoriez  en- 
core. —  Ce  sont  là  de  ces  raisons  par  lesquelles  les  blancs 
trempent  les  pauvres  gens  comme  nous.  Je  sais  la  vérité. 
I3n  de  mes  compères,  qui  était  hier  au  poste,  m'a  dit  qu'on 
y  avait  beaucoup  parlé  de  moi  et  que  l'on  voulait  s'asmrer 
si  je  parlais  encore  la  langue,  pour  ensuite  m'emmener 
bien  loin  ;  mais  je  ne  sais  rien  et  ne  dirai  rien.  —  Voyant 
qoe  tontes  mes  peines  étaient  inutiles,  je  montrai  un  col- 
lier de  fausses  p«les  et  je  promis  de  le  donner  si  l'on  con- 
sentait à  parler.  Le  collier  fut  trouvé  charmant,  et  jo  vis 
qu'on  en  avait  la  plus  grande  envie.  On  se  défendit  cepen- 
dant encore  pendant  quelques  minutes ,  et  ensuite  on  me 


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H8  VOYAGE  AUX  SOURCES 

denMnda  è  nté  parkv  en  perticnlier.  Nous  sorUnet  8«r  la 
place,  et  Dont«  Maria  Rosa  me  dit  qu'elle  voulait  Inen  m' ap7 
prendre  quelque»  mots  de  s»  langue,  mais  i  condition  que 
ce  ne  serait  pas  devant  le  PMtngais-BrMIien  qoi  n'avait 
conduit  et  que  personne  n'en  sMrait  rien.  Etant  rentnî 
dans  la  diaunière,  je  fls  tnicore  quelqufei  inMaoces  pour  la 
fonne  et  je  ttaie  par  dtre  que,  psieqa'ovr  ne  voulait  pas 
avoir  pour  mo)  !a  moindre  complaisance,  j'allais  m'en  aller 
et  que  j'emporterais  mon  cdlier.  Débarrassé  ds  Portugais 
par  cette  petite  supercherie,  je  retournai  chex  Dona  Maria 
Rosa ,  qui  me  témoigna  encore  les  mêmes  inquiétudes  et 
Ib  mène  déflance.  —  Mais,  hii  dis-je,  si  vous  avex  qoeiquc 
chose  à  craindre,  ce  n'est  pas  de  moi ,  qui  suis  encore  plii» 
étranger  ici  que  vous-mèsK.  Ma  proDoncistion,  mes  traits, 
la  conlear  de  mes  cheveux  voua  montrest  asseï  que  je  ne  suis 
point  portugais  :  que  païs-je  voua  hin  dans  un  pays  qui 
n'est  pas  k  inlen  ef  où  je  n*«i  aucune  autorité 'f  Dona  Maria 
Rosa  se  décid»  enfin  à  parl^;  mais  toBjount  A  conditioB 
que  je  n'en  dirais  rien  à  penonne,  et ,  lorsque  quelque  au- 
tre Indienne  s'approchaii  de  la  cbanmière,  elle  s'interrom- 
pait, afin,  inf  répétait-eHe,  que,  s'il  arrivait  qndque  mal- 
heur à  Valdea,  ses  compatriotes  ne  l'en  ocranssent  paàit. 
Cette  petite  scène,  que  je  rapporte  ici  avec  la  {Ans  grande 
fidélité,  prouve  combien  les  pauvres  Indiens  se  méient 
des  Portugais,  et  il  Tout  coBvenlr  que  tout  ce  qui  s'est  pas» 
dbpnis  trois  siècles  montre  qu'ils  sont.loin  d'avoir  tort. 

Aux  vocabulaires  indiens  que  j'ai  inaérés  dans  mes  dîM- 
rentes  relations,  j'ajouterai  encore  ici  celui  de  la  tangœ 
des  ChicriaMs  : 


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DU  RIO  DE  5.  FBANaSCO. 


Soleil, 

ilaerà. 

Lune, 

va. 

Étoiles, 

uaitmttri. 

Terre,, 

tiea. 

Eau, 

ku. 

(!.•« 

participe  un  peu  de 

l'eu  fraQîaU.) 

Homme, 

amU. 

(fo 

final  trte-wnrd.) 

Femme, 

piam. 

Enfant, 

àmU. 

Fille, 

debà. 

Gardon, 

Homme  Uanc, 

Nègre, 

Indien, 

oiprtdé. 

Tête, 

dacran. 

(An 

,  4uu  ce  mot  et  les  entres ,  a  nn  8( 

entre  « 

1  et  au  frençaÎB.) 

Cheveux, 

dajahi. 

Yeux, 

datoman. 

Nez, 

daicri. 

Bouche, 

d<Mam. 

Oreilles, 

iatpoeri. 

Poitrine, 

iarM. 

Ventre, 

dodu. 

Bras, 

dupa. 

Pied, 

dofri. 

Hains, 

dojifcra. 

Cheval, 

tmjari. 

Cerf, 

t6. 

(0  très-wiTept.) 

Tapir, 

euU., 

{Otrès-sonrd.) 

80D  Hord  iotermédiiire 


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3M                                  TOTAGE  ADX  SOURCES 

Chique, 

cracuti. 

PoijsoD, 

bpt. 

Flome, 

tidar^. 

Yiande, 

pormhi. 

{PrwwBCiB  comme  s'il  y  «wt,  en  ttut^ 

Arbre. 

odi. 

(PTiHMiicar«  comme 

r^rermé  français.) 

FetUDe, 

Af». 

Frail, 

docran. 

Écorce  d'arbre. 

o<M<. 

(EfCnnéetOMlong.) 

Grand. 

miMifU. 

Peut, 

i&Mi. 

Joli, 

dupMe. 

Bouge, 

mpredi. 

Après  avoir  écrit  ces  mots  soas  la  dictée  de  Dona  Maria 
Rosa,  je  les  lus  tous  devant  elle,  en  la  priant  de  m'indiquer 
ce  qu'ils  voulaientdire  en  portugais,  et,  comme  elle  m'en 
donna  la  signification  telle  que  je  l'avais  d'abord  écrite,  je 
ne  puis  avoir  aucun  doute  sur  leur  exactitude  (1). 

(I)  M.  d'EBChwegeaiiHéré,duiskSr(»ilfro(l(ett«u«  ifeU.nnpcUt 
ivcÛMiUire  qoî  lui  a  itt  égalemeiit  commaiûqné  ptr  Doua  Haila  Bom. 
Les  diKrtDCM  qoi  m  inniTetit  eotre  le  sieD  et  le  mien  ne  sont  a  partit 
qn'ep|MTcotesetproTienDeatcerUdjHiDen(dekiir«ioociMMDaIleiiiiBdg. 
Ainsi  H.  d'Eschwege  (xiitiAlpoori  et  itAiitrl,  an  lien  4e  dal^MTl 
et  doticrf ,  craignant,  sans  doate,  de  tomber  dana  la  fante  qu'il  anit  Mit 
en  écrÎTaot  Coilaeaxet  et  Coyax  poor  Goitacaies  et  Gojat  ;  s'il  rend  fu 
ang  les  tons  que  j'eiprime  par  ait,  c'est  qne  les  AUemands  n'ont  pas 
d'autre  moyen  ponr  peindre  la  prtMionciation  de  notre  an  ;  enfin,  eonuM 
Pohl ,  il  emploie  les  lettres  tek  quand  il  vent  eiprimer  on  m»  «m"Mi"i' 
an  j  Arancais  on  portugais ,  parte  que  ce  dernier  son  ne  se  retronre  pat 
dan»  la  langne  allemande,  etc.  Le  mot  atomong,  qne  d'Esdiwege  initi- 
qne  ponr  imifre,  dilRreMJignlièranent,  ilestrrai,  deda4tKqae  fad- 


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m  110  DE  s.  FRAKCISCO.  Ml 

Comme  pour  tous  les  autres  vocobulnlres  que  j'ai  pu- 
bliés Jusqu'à  présent,  je  me  sers  tci  de  l'orthographe  por- 
tugaise, plus  simple  que  la  nôtre,  plus  conforme  à  la  pro- 
nonciation et  qui  peint  mieux  certains  sons  appartenant 
aui  dialectes  indiens,  tels  que  les  voyelles  nasales  repré- 
sentées, en  portugais,  par  im,  um,  ào,  etc.  (1). 

La  langue  des  Chicriabis,  comme  celle  des  CoyapAs  et 
toutes  les  autres  langues  indiennes ,  se  prononce  de  la 
gorge,  la  bouche  presque  fermée  et  sans  remuer  sensible- 
ment les  lèvres.  Il  est  fort  remarquable  que  tant  d'idiomes, 
absolum«)t  différents  les  uns  des  autres,  se  prononcent 
tous,  sinon  dans  les  détails,  au  moins  dans  leur  ensemble, 
d'une  manière  uniforme.  Une  foule  de  circonstances  peu- 
vent avoir  déterminé  les  différences  qui  existent  entre  les 
langues  des  diverses  peuplades  indigènes,  et,  si  ces  mêmes 
circonstances  n'ont  point  également  influé  sur  ïa  pronon- 
ciation de  ces  langues ,  c'est  sans  doute  que  celle-ci  est, 
chez  la  race  indienne,  le  résultat  de  quelques  nuances  dans 
la  structure  des  organes  de  la  voix,  comme  d'autres  nuan- 
ces caractérisent  d'une  manière  générale  la  physionomie 
de  tonte  cette  race. 

On  ne  peut  juger  une  langue  par  une  quarantaine  de 
mots;  cependant  le  petit  nombre  de  ceux  de  Tidiome  chi- 
criabé.que  j'ai  transcrits  plus  haut  semblerait  prouver  qu'il 
e^  éminemment  systématique.  £n  effet,  les  expressions 
qui  représentent  des  idées  de  même  ordre  commencent  ou 

mets,  comme  i'AnhocMiû  diffire  ie  itapuH;  m«is  r^preim  qne  j'ai 
hite  et  que  j'ai  rapportée  plu  haat  oe  me  permet  guère  de  croire  qie 
j'ai  camroiB  qiHt<iae  erreur. 

(1)  Toyei  ce  qnc  j'ai  dii  k  re  sojtl  au  rhapiircXXI  ialitnli-,  Lt$  lu- 
diMi  Coupât. 


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tin  VOTAGE  AUX  SOURCES 

finissent  de  la  même  manière.  Les  mots  aieuté  et  ot- 
tnoaplé,  «)ui  indiquent  la  grandeur,  commencent  par  ai  et 
se  terminent  par  té;  ceui  qui  qualiflent  la  beauté  et  la  lai- 
deur finissent  par  dé;  les  mots  qui  r^résentent  les  parties 
du  corps  commencent  tous  par  da  {i).  Les  syllabes  orad 
sont  tout  à  la  fois  les  premières  du  terme  dont  on  se  sert 
pour  désigner  l'homme  blaoc  et  de  celui  qui  désigne  le  nè- 
gre; la  syllabe  dé  se  trouve  à  la  fin  du  mot  odé,  arbre,  et 
revient  dans  tous  les  mots  qui  expriment  les  diverses  par- 
lies  d'tin  arbre.  Le  mot  «attemurt ,  étoile,  est  évidemment 
on  composé  d'ua,  luoe;  la  syllabe  ku  revient  A  la  fin  des 
deux  mets  kupttdeu  et  ukui  qui,  dans  le  vocabulaire  de 
d'Escbwege,  désignent  de  grands  animaux,  le  premier  un 
bceuf,  le  second  an  jaguar;  enfin  les  mots  amiotiché  el 
noUché  du  même  vocabalaire  (ivobablement  pour  amiotjé 
et  notjé),  qui  fibisseat  également  par  ouehéon  plutàt  otjë, 
s'appliquent  i.deux  végétaux  comestibles,  le  premier  à  la 
banane,  le  second  au  maïs. 

Il  était  presque  nuit  lorsque,  après  avoir  quitté  Dona 
Maria  Rosa,  j'arrivai  à  la  douane.  J'allai  me  promener  sur 
le  bori  du  Rio  das  Veihas.  Je  pouvais  encore  découvrir  le 

(1)  M.  d'Escbwege  écrit  ces  mou  par  un  d  atcc  UM  apostrophe  sairie 
d'aoe  tnajnscalc ,  par  eietnple  iPApra ,  âASpogti ,  et,  par  coos^bcM, 
il  eat  clair  qu'il  a  considéré  comne  un  article  la  lettre  iaitiale.;  nuis , 
dans  ce  cas,  la  singularité  que  je  signale  eiisterait  toujonrs,  pnû- 
que  alors  les  mots  qui  désignent  les  diverses  parties  du  corps  coouiieQ- 
ceraieut  tous  par  a.  On  dira  peul-Ctre  que  c'est  la  sjllabe  da  lont  cfi- 
tière  qui  doit  être  l'article;  alors  je  demanderai  comment  il  se  faitqvc 
Dona  Blaria  Rosa  ait  dicté  avec  l'article  les  seuls  mots  qui  eipriment  les 
parties  dn  corps,  el  qu'elle  l'ait  uégLgé  pour  tous  les  antres;  eomneot 
il  se  fait ,  eoflu ,  qu'elle  ait  reproduit  ciactcmeut  la  mime  anomalie  en 
dictant  à  d'Escbwege,  et,  trois  ans  plus  tard,  ai  me  dictant  i  moi- 


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DO  RIO  DB  S.  ntiHClSCO.  »3 

payMge  que  j'ai  décrit  plus  haut  ;  le  temps  était  couvert , 
un  calme  parfait  i^nait  dans  la  oatnre ,  et  j'eus  le  plaisir 
d'entendre  encore  une  fois  cette  voix  confuse  du  désert 
qui  ne  résonne  que  dans  les  bois  vierges  et  sur  le  bord  des 
grandes  rivières.  L'eau  mugissait  avec  monotonie  en  s'é- 
chappant  entre  les  tiancs  de  rochers;  i  ce  bruit  de  nom- 
breuses cigales  mêlaient  leurs  chants  aigus ,  plusieurs  es- 
pèces de  batraciens  faisaient  entendre  à  la  fois  leurs  divers  ' 
coassements,  et,  au  milieu  de  ces  sms  variés  et  confon- 
dus, des  engoulevents  [caprimuiguê)  laissaient  distinguer 
bien  clairement  les  syllabes  atriangou,  qui  leur  ont  valu  le 
nom  qu'ils  portent  dans  le  pays  (eoriangû). 

Ayant  passé  un  jour  au  Rio  das  Velhos,  je  voulus  me 
remettre  en  route  ;  mais  il  fallait  d'abord  traverser  cette 
rivière  ;  les  hommes  la  passent  dans  d'étroites  pirogues,  et 
l'on  force  les  chevaux  et  les  mulets  de  se  mettre  à  la  nage. 
Cette  ennuyeuse  opération  me  prit  un  temps  considérable, 
et,  ce  jour-là,  je  ne  pus  faire  que  1  lieue  portugaise. 

Je  traversai  d'abord  l'étroite  lisière  de  bois  qui  borde  le 
Rio  das  Velhas,  puis  j'entrai  dans  des  eampo$  où  le  ter- 
rain, d'abord  montueux,  finît  par  n'être  plus  qu'ondulé. 
Tout  ce  canton  n'est  pas  fort  éloigné  de  deux  villages  im- 
portants, Arai  et  Desemboque;  les  pâturages  y  sont  ex- 
cellents, et  l'on  assure  que,  à  5  legoa»  du  lieu  où  je  fis 
halte ,  il  existe  des  eaux  minérales  semblables  k  celles 
d'Araxi  (1).  On  ne  doit  donc  pas  s'étonner  que  les  Portu- 
gais et  le  petit  tyran  dont  j'ai  parlé  enviassent  ce  coin  de 
terre  aux  Indiens  ;  mais  on  a  le  cœur  serré  quand  on  songe 


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»1  VOYAGE  AVX  SOURCES 

qu'on  ne  veut  pas  mAmc  laisser  quelques  lieues  à  ces  hom- 
mes qui  furent,  il  y  a  si  peu  de  temps  encore,  les  maîtres 
de  l'Amérique  entière. 

Pour  la  première  fois  depuis  piiuieurs  mois,  il  était 
tomtté  un  peu  de  pluie  la  veille  de  mon  départ  du  rej^ûlro 
(12  septembre]  ;  aussi ,  pendant  la  lieue  que  je  fis  au  delà 
de  cet  endroit,  je  fus  beaucoup  moins  incommodé  de  la 
poussière  que  je  ne  l'avais  été  les  jours  précédents. 

Je  fis  balle  à  une  peUte  maison  que  l'on  appelle  Sitio 
da  Boeinha  et  qui  est  située  dans  un  fond ,  au-dessus  d'un 
nusaMu  du  même  nom  (Ribeirào  da  RocinJta,  le  torrent 
de  la  petite  plantation]  (1).  Ce  ruisseau  prend  sa  source, 
m'a-t-on  dit,  k  peu  de  distance  du  titio  et  se  jette,  auprès 
de  la  douane,  dans  le  Rio  das  Velbas.  Aui  environs  du 
titio ,  on  le  voit  iMnber  successivement  sur  plusieurs  plans 
de  rochers;  il  forme  ainsi  une  très-joiie  cascade  qui  peut 
avoir,  par  approximation,  de  30  à  35  pieds  ;  ensuite  il  fuit, 
entre  des  bois,  dans  un  ravin  étroit  et  assez  profond. 

José  Marianno  était  arrivé  avant  moi  à  Rocinha  ;  on  lui 
avait  permis  de  s'installer  dans  la  grange,  et  je  Iroovai 
mes  malles  et  mes  effets  placés  sur  des  épis  de  maïs ,  où  le 
moindre  mouvement  les  faisait  remuer.  Je  ne  fus  pas 

(i)  Ce  DOm, comme OD  peut  le  voirdtna  tahpremiirt  Ttlotiak {l,tlt 
et  auiv.).  est  celui  de  pln&ieura  des  babilatioos,  vendat  ouratKbotde 
U  gruderoale  de  Rio  de  Janeiro  k  Minas  (Aoci'nAadaJVrBTd.AocinAa 
de  SimÙo  Ptretra,  Rocinba  de  QueiTOx.tlc.),  et  il  o'est  pas éloonant 
qufl  se  soit  multiplié,  car  nu  grand  nombre  d'élablissements  ont  é& 
DtcetBaircmeDt  comnencar  par  une  petite  plaqialion.  Ud  rojagenr  dm>- 
dcrae  a  retrouvé  (Sczanaet,  Souv.)  le  corn  de  Bociuba  k  Minas  Novas, 
près  la  Serra  do  Gram  llogol ,  sur  laqnelle  aucun  voyageur  u'avail,  si 
je  ue  me  trompe,  donné  do  détails  avant  lui  ;  mais,  au  lieu  de  Boetnka, 
il  a  écrit  AocinAia,  mot  qui  a'appariienl  pas  h  la  langue  jiortagaise. 


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DU  RIO  DE  S.  FBAKCISÛO.  305 

aussi  mal  )(^é  ;  le  propriétaire  du  iitio,  qui  était  fort  hon- 
nête, laissa  mettre  mon  lit  dans  sa  maison. 

Cet  bomme,  établi  peu  de  temps  auparavant  dans  les 
environs  du  village  de  Bora  I^lm ,  était  venu,  je  ne  sais  à 
que)  litre,  se  fixer  parmi  les  Indiens  ;  il  trouvait,  me  dit-i) , 
plus  avaDtageux  d'habiter  ce  canton ,  où  le  débit  des  den- 
rées est  plus  facile  qu'A  Bom  Fim,  le  sel  moins  cher  et  les 
pâturages  excellents.  Il  avait  eu  raison,  sans  doute,  de 
quitter  son  premier  domicile;  mais,  dans  l'intérieur,  il 
n'est  pas  un  très-grand  nombre  de  cultivateurs,  surtout 
parmi  les  pauvres,  qui,  pour  un  motif  quelconque,  n'aient 
transporté  leur  éteblissanent,  an  moins  une  fois,  d'un  en- 
droit dans  un  autre,  et  souvent  à  des  distances  considéra- 
bles. Cette  inconstance  n'est  point  particulière  aux  Brési- 
liens ;  tous  les  hommes  sont  mécontents  de  leur  sort ,  et,  si  ' 
ailleurs  on  ne  change  point  de  place  comme  au  Brésil ,  c'est 
qu'on  ne  peut  pas  changer,  parce  que  tontes  les  places 
sont  prises  (1). 

A  peine  étaia-je  arrivé  au  Sitio  da  Rocinha,  que  la  pluie 
commença  à  tomber;  elle  continua  le  lendemain,  et  je  ne 
pus  partir.  Nous  n'entrlmes  réellement  dans  l'hivernage 
qu'une  dizaine  de  jours  plus  tard  ;  mais  ces  pluies  étaient 
le  premier  signal  du  réveil  de  la  nature  :  les  oiseaux  et  les 


(1)  C'est  peal-élre  d»  c«s  cMngwnentf  de  doiqicdk,  4éjh  iodiqiits  dans 
mi  prentiire  ntalion,  que  vent  parler  du  Tojtgenr  fraotus  loTsqoe , 
dans  un  passage  de  son  lirre  éont  on  s'est  beaucoup  plaint  t  Kio  de  Ja- 
iieiio,  il  senible  cbotlwr  à  faire  croire  que  les  BfiMiros  mènent  nne  vie 
nomade,  i  pen  près  semblable  è  celle  des  BédomoB  oa  des  Tartares  (jrf- 
Mcrva,  lus,  TI8.  —  Sur.,  Soihi.,  180).  H.  d'Bschw^e,  en  gteéral  eiM- 
memeolsévère  ponr  les  BrMIiena,  l'est  oicore  ftu,  tat  ee  point  (Brof., 
I ,  11,  50),  foe  le  voragtor  Crancais. 


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3M  VOYAGE  AUX  SOUBCES 

ntammirères  allaieot  quitter  tes  fonds  où  ils  se  tenaient  ca- 
chés et  se  répandre  dans  toute  la  campagne;  des  insectes 
brillants  devaient  bientAt  oraw  les  forêts  ;  les  campot  gri- 
sâtres et  desséchés  allaient  reverdir,  les  arbres  échanger 
quelques  feuilles  rares  et  jaunâtres  contre  une  parure  nou- 
velle; j'allais  revoir  des  fleurs.  Mais  ce  voyage  devenait  si 
pénible,  il  était  accompagné  de  tant  de  tracasseries,  que 
je  restai  presque  insensible  à  la  certitude  du  changement 
qui  était  sur  le  point  de  s'opérer,  l'avais  cruellement  sonf- 
fert  de  la  sécheresse;  je  devais  souffrir  encore  davantage 
des  pluies  qui  augmentent  la  dilBculté  des  voyages. 

Pendant  la  journée  que  je  passai  au  Sitio  da  Rocinha, 
mes  gens  profitèrent ,  pour  chasser,  de  quelques  inXa- 
valles  de  beau  temps,  et  trouvèrent  beaucoup  de  perdrix 
et  une  grande  variété  de  petits  oiseaux.  Mon  tocador  Mar- 
c^Uno  avait  d^à  parcouru  tout  ce  pays  ;  il  faisait  alors 
partie  d'une  folia  (i)  qui  avait  quêté  pendant  huit  mois 
pour  une  fête  du  S.  Esprit.  Il  me  raconta  que  lui  et  ses 
compagnons  avaient  passé  un  jour  i  l'Aldea  de  Santa  Anna 
pour  faire  blanchir  leur  linge,  qu'un  soldat  du  poste  avait 
voulu  les  arrêta"  sous  prétexte  qu'ils  étaient  des  voleurs, 
mais  qu'il  s'était  noyé  deux  jours  après.  Le  divin  Esprit- 
Saint  ,  ajouta  très-judicieusement  Marcellino ,  est  un  saint 
qui  ne  pardonne  pas.  Ces  paroles  sufBraient  pour  montrer 
combien  est  étrange  l'idée  que  les  hommes  d'une  classe 
Inférieure  se  font  de  la  religion  catholique,  et  combien  il 
serait  nécessaire  qu'on  leur  donnât  quelque  instruction  (2). 

(1)  Voyei  h  chapitre  XXIV  intitulé,  Commtnetnuitt  dit  tM|nffe  da 
la  au  de  Coyoz  à  S.  Paul.  —  Le  Uato  Grotto,  Uc. 

(I)  PonoiuM,  CD  ftuux,  ne  tiendrait  le  même  langage  qna  le  bon 
Haicelliao.  Mais,  quoiqu'on  ;  répande  rinslroclioi)  avec  aaïaat  de  lèle 


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DO  UO  DE  S.  FRANCISCO.  307 

Le  pays  compris  eatre  Rocinba  et  la  halte  voisine  est 
plat  et  découvert.  En  le  traversant,  je  fus  frappé  du  pro- 
grès que  les  petites  pluies  des  trois  jours  précédents  avaient 
fait  faire  à  la  végétation  ;  la  plupart  des  arbres  disséminéft 
dans  les  eampot  commençaient  déjà  i  se  couvrir  de  feuilles. 

Les  insectes  malfaisants  furent,  ce  jour-li ,  beaucoup 
moins  incommodes  que  les  jours  qui  avaient  précédé  ; 
mais,  depuis  quelque  temps,  les  chiques  m'avaient  mis  les 
pieds  en  fort  mauvais  état,  et  je  ne  marchais  qu'avec  beau- 
coup de  peine. 

Nous  nous  arrétimes  sur  le  Imrd  du  ruisseau  d' fJberaca 
Verdadàra  (1)  qui  se  jette  dans  le  Rio  das  Telhas.  Il  y 
avait,  dans  cet  endroit,  une  petite  chaumttre  ;  mais,  comme 
le  vieillard  qui  l'occupait  était  atteint  d'une  maladie  .conta- 
gieuse, je  me  décidai  à  coucher  dehors. 

La  nuit  du  15  au  1 4  septembre  fut  extrêmement  froide 
et  la  rosée  très-abondante.  Au  lever  du  soleil ,  j'étais  transi  ; 
mais,  quelques  heures  après,  la  chaleur  devint  d'autant 
plus  insupportable  que  je  ne  trouvais  pas  le  moindre  om- 
brage. Il  fallut  cependant  passer  la  journée  entière  dans 

que  de  d£siiil£ ressemant,  il  j  eiiate  une  fouk  de  gens  qui ,  uoiqaeaieDt 
orcnpés,  depuis  lear  plus  (endre  enraoce,  ï  Mtisfaire  leurs  beM>iQset 
leurs  jouisuaces  maKrielles,  ne  coaotisseDt.eD  r^aliti,  pts  beaucoap 
mieux  Icar  rel[gion  que  le  locador  brtailleu. 

Il)  Je  couronne  ici  mon  ortbogripbe  t  celle  qui  ■  éU  idopl^e  par  C«- 
ul  et  i  la  prouoaciatioQ  usitve  dans  te  pays.  D'Eschwege  et  Piiarro  écri- 
TRUl  Vberaba ,-  mais  ou  sait  qu'on  a  soureut  coufoodu ,  dans  les  noms 
propres,  le  b  avec  le  o  ;  aiusi  oa  a  ('erit  capfbara,  et  j'ai  toujours  en- 
tendu prononter  rapivara. —  Au  lieu  d'Uberava  Verdadeira  et  Falta , 
IIM.  Hilliet  et  Lopes  de  Monra  ont  adopté  Vberaca  rerdadtiro,  Cbe- 
rava  Falio.  J'ai  vru  devoir  écrire  Verdadeira  el  Falta  arec  tous  les 
autres  auteurs,  parce  que  cette  ortbogrifAe  rend  eiarlemeul  U  prouou- 
ciation  des  bibitants  du  pajs. 


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39B  VOYAGE  IDX  SODICES 

cet  endroit,  parce  que  mes  mulets  areieat  pris  la  faite  et 

qu'on  ne  put  )es  découvrir  que  vers  le  soir. 

Je  causai  beaucoup  avec  le  vieil  habitant  de  la  chau- 
mière. On  ne  voyait  chex  lui  qne  des  gourdes  qui  lui  ser- 
vaient de  vases,  quelques  pots,  «t  une  petite  provision  de 
maïs  destinée  à  être  vendue  aux  voyageurs  ;  cependant  ce 
vieillard  paraissait  content.  Je  n'aime  pas  le  bruit,  me  di- 
aalt-il;  perscmne  netroaMe  mon  rqios,  et  je  salsoequi  se 
passe  dans  te  monde  par  les  caravanes  qui  s'arrêtent  ici. 
Cet  homme,  il  faut  le  dire,  avait  sous  les  yenz  bien  pea 
d'objets  d'envie  ;  car  il  y  a  une  foule  de  maisons,  dans  tout 
ce  pays,  qui  ne  sont  pas  plus  riches  que  la  sienne.  Il  était 
accoutumé  h  la  s4Hade,  et  peut-Mre  attendons^nons  notre 
journal,  dont  une  fête  nous  a  privés  pendant  un  jour,  avec 
plus  d'impatience  qu'il  n'en  éprouvait  lorsque,  après  une 
interruption  de  six  mois,  il  attendait  les  premières  cara- 
vanes. 

L'époque  af^rocbait  où  le  mauvais  temps  allait  les  em- 
pêcher de  marcher;  mais,  pendant  que  j'étais  i  Uboivi, 
il  en  arriva  une  qni  était  trés-considérable.  Qle  apparte- 
nait è  un  cadet  de  la  compagnie  des  dragons  de  Goyaz,  qui 
ta  conduisait  lui-même.  Le  goût  des  Brésiliens  de  l'inté- 
rieur pour  le  commerce  et  surtout  pour  le  brocaotage  est 
général  ;  ils  ignorent  qu'une  profession  ,  très-boi\orable 
sans  doute  lorsqu'elle  est  exercée  avec  intelligence  et  pro- 
bité, n'est  pourtant  pas  compatible  avec  d'autres  dont  le 
but  est  entièrement  différent  (1  ]  :  è  Goyaz,  en  particulier, 

(1)  Ntgnère  oa  avait,  en  France,  poar  loata  eea  chows,  un  MBliiiiMt 
eiqais  de  délicaletse.  Ce  qui  m  piHe  cbei  nom  depni*  six  od  sqtt  aM 
prouve  qac ,  «ons  cf  npfolt,  non*  toauBcntoiu  k  nous  ropprockw 
beaucoup  des  GojaMis. 


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DO  RIO  DE  S.  FUHCISCO.  t» 

OD  est  tout  k  la  fois  prêtre  et  marchand,  militaire  et  mar- 
uhand,  et  l'on  ne  gonpconne  point  qn'il  puisse  y  avoir  en 
cela  quelque  inconvenance. 

La  nuit  du  14  au  15  fiit  eno»^  plus  froide  que  )a 
précédente,  et,  quoique  mes  gens  m'eussent  construit 
une  petite  baraque ,  il  me  fut  presque  impossible  de 
dormir.  Q  était  fort  tard  lorsque  l'on  trouva  mes  mulete; 
il  y  avait  alors  trois  ou  quatre  heures  que  j'étais  exposé  à 
un  soleil  brûlant,  et,  lorsque  nous  partîmes,  je  souffrais 
déjà  beaucoup  des  nerfs.  Tout  le  reste  de  la  journée  fut 
trés-pénible ;  la  chaleur  était  excessive;  l'ardeur  du  soleil 
augmentait  mon  mal  de  pied  ;  je  souffrais  également  beau- 
coup de  la  main  gauche,  ou  une  chique  mal  extraite  avait 
prodoit  une  petite  plaie  ;  enfin  la  mauvaise  humeur  de  José 
Marianno  ajoutait  encore  k  ces  nusères. 

Entre  Uherava  et  Ttjtàeo,  dans  un  espace  de  &  Ugoas, 
nous  traversâmes  la  plaine  la  plus  égale  que  j'eusse  encore 
vue  depuis  que  j'étais  au  Brésil  :  la  terre  y  est  un  peu  sa- 
bloDDeuse ,  et  presque  partout  il  n'y  croU  qu'une  herbe 
peu  fournie. 

La  petite  fasmda  de  Tijueo  [i],  où  nous  fîmes  halle,  est 
Mme,  dans  un  fond,  sur  le  bord  d'un  ruisseau.  Auprès  de 

(1  )  Ce  Dom,  comme  je  l'u  dit  ailleurs ,  dirire  ia  mot  l^iiea  (  bow) , 
qui  apptnient  k  la  itnfoa  gtral.  D'Eschwega  et  Piurra  se  sont  doôc 
rapprocbés  de  l'orthographe  primitiTe  quand  ils  oot  écrit  TiJtKai  mais 
ce  n'est  pas  aÎDsi  qa'oo  proDOoce  dans  le  pajs  et  qu'a  écrit  Cazal.  L'étjt- 
ntologie  a  réellement  été  cooserv^e  daos  le  Dom  d'âne  montagne  Toialne 
de  Rio  de  Janeiro;  elle  s'est  altérée  dans  l'un  de  ceux  d'ao  de*  deui 
ruisseaai  qui  couleut  à  S.  Joâo  d'U  Rei  et  dans  l'ancien  nom  du  chef- 
lien  du  district  des  diamants  (aujourd'hui  Cidade  Diamiotina).  J'ai  à 
peine  besoin  de  dire  qu'il  ne  faal  pas ,  arec  un  moderne  (Sue.,  Souv  , 
33!>,  rurire  Fe^ucco. 


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300  VOYAGE  AUX  SOCtCES 

cette  habitation  se  trouvait  un  raneko,  où  nous  nous  éta- 
blîmes, mais  qui  était  déjà  presque  entièrement  occupe 
par  une  caravane  allant  de  S.  Paul  à  Cuyabi.  Cet  usage 
de  se  placer  aiosi  sous  un  hangar  sans  rien  dire  au  mattre 
de  la  maison  et  de  partir  eosnite,,  souvent  sans  l'avoir  vu, 
a  r  inconvénient  de  priver  de  renseignements  utiles  le  voya- 
geur qui  cherche  à  s'instruire,  et  de  le  laisser  i  la  fatigante 
société  des  camaradai  (nom  que  l'on  donne  aux  hommes 
d'uoe  classe  tout  à  fait  inférieure,  qu'on  loue  pour  fiiire, 
dans  les  voyages,  le  service  des  malels  ou  tout  autre  service). 

Mon  mal  de  doigt  m'empêcha  de  dormir  toute  la  nuit, 
et  j'étais  horriblement  fatigué  lorsque  nous  partîmes.  Je 
cheminais  tristement,  souffrant  des  nerfs,  du  pied,  de  la 
main  et  maudissant  les  voyages,  lorsque  José  Marianno  me 
rejoignit  et  me  déclara  fort  brusquement  qu'il  ne  voulait 
plus  chasser  ni  préparer  les  oiseaux,  et  qu'il  me  quitterait 
aussitôt  que  nous  serions  arrivés  à  S.  Paul.  J'ai  en  horreur 
les  changements  de  visage;  je  ne  pouvais  oublier  que  cet 
homme  avait  été  parfait  pendant  qndques  mois;  enBn  je 
savais  que,  dans  tout  le  Brésil,  je  ne  trouverais  peut-être 
personne  qui  me  lût  aussi  utile  pour  l'histoire  naturelle  et 
qui ,  en  même  temps,  soignAt  aussi  parfaitement  une  troupe 
de  douze  mulets.  Après  de  longs  pourparlers,  je  le  déter- 
minai en&n  à  rester  avec  moi  et  j'augmentai  la  rétribution. 
déjà  très-consid^ble,  que  je  lui  avais  accordée  jusqu'a- 
lors ;  je  prenais  le  meilleur  moyen  pour  le  rendre  plus  exi- 
geant et  plus  maussade. 

Au  delà  de  Tijuco,  le  terrain  n'est  point  égal  comme  au* 
paravant  (1  )  ;  il  devient  même  très-montueui,  et  partout  it 

\l)  Caul ,  diiis  k  livre  duquel  on  Iroure  Ua(  de  choKs,  parlcdc  h 


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DD  RIO  DE  S.  FRANCISCO.  »l 

«st  aemé  de  pierres  ;  les  hautenrs  et  le  flanc  des  morneii 
présentent  des  pAturages  où  s'élèvent  çjt  et  là  de  petits  ar- 
bres ;  les  vallées  sont  couvertes  <)e  bon  ;  dans  les  fonds 
marécageux ,  on  voit  des  borityi  s'élever  au  milieu  d'une 
herbe  épaisse. 

TVons  Rroes  halte  au  lieu  appdé  Lanhaso  (nom  d'homme), 
où,  ditron  (1),  il  existait  autreroisnne  aidée.  Je  n'y  vis  qu'un 
Ttmcho  et  deux  misérables  chaumières  habitées  par  des  In- 
diens descendant  des  Bororés;  mais  ces  bonnes  gens  me 
dirent  qu'ils  avaient  des  parents  établis  dans  le  voisi- 
nage. 

Au  delà  de  Lanhoso,  le  pays  redevient  plat  et  présente 
d'excellents  pâturages  presque  entièrement  découverts,  par- 
semés de  bouquets  de  bois.  L'ensemble  de  ce  pays  rappelle 
l'aspect  de  la  Beauce  telle  qu'elle  se  présente  après  la  mois- 
son; les  pâturages  où  l'on  n'a  pas  encore  mis  le  feu  res- 
SCTiblent  aux  guérets  couverts  de  chaume,  les  eapôat  aux 
peUts  bois  appelés  remises ,  les  queimadas  aux  pousses  nou- 
velles des  prairies  artificielles.  On  peut,  avec  plus  de  rai- 
son encore,  comparer  ce  canton  aux  campot  découverts 
du  Bio  Grande  (comarea  du  Rio  das  Mortes)  [2),  et  je  re- 
trouvai ici ,  pour  la  première  fois  depuis  la  Sam  da  Ca- 

pUine  Tort  remarquable  de  lUberna  (Corof.,  I,  3S1);  nuit  on  voit 
qu'elle  ne  s'étend  pu,  comme  il  le  dit,  de  VVberava  Vtrdadeira  à 
VVberava  FaUa ,  antre  ruisseau  dont  je  dirai  quelque  chose  tout  h 

(1)  Caiil,  Coroffra/toBroi,,!.  — Pie.,  Ifem.  hù(.,IX,932.— L'ori- 
gine  que  le  père  de  la  gtegraphie  brëailietnie  attribue  à  VAldea  4o  La- 
nhoto  ne  s'accorde  oollemeat  avec  les  iTidltions  UDirorraes  et  très-rj- 
ceulM  des  Indiens,  que  j'ai  reproduites  dans  le  chapitre  précédent. 

(2)  Tojei  le  chapitre  IV  de  cet  ouTrage  intitulé,  Lei  eampoi.  —  Ta- 
bleau général  du  eanUm  de  Rio  Grande. 


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au  TDTAW  Um  SOUKCES 

DBStra,  le  eapûn /îrcko  qui  fonne,  en  gmade  partie,  les 
excellents  pflturag^s  des  eavlrons  de  S.  Joâo  d'EI  Rei. 

Le  mtijestueux  borihf  s'élève  encore  dans  les  fonds  ma- 
récageux; mais  j'approchais  de  sa  limite  méridionale. 

A  peu  de  distance  du  village  de  Farinha  Podrt  (la  fa- 
rine pourrie],  où  je  Ss  halte,  je  passai  une  petite  rivière 
appelée  Ubtrma  Falia,  qui  cesse  d'être  guéable  dons  la 
saison  des  plaies  et  se  jette  dans  le  Rio  Grande. 

Farinha  Podre  est  situé,  au  milieu  des  eempos,  dans  un 
large  vallon  qti'arrose  un  très-petit  ruisseau.  Ce  village  se 
compose  d'ane  trentaine  de  maisons  éparses  çà  et  là  des 
deux  cAtéa  du  ruisseau;  toutes,  sans  exception,  sont  nou- 
vellement bAties  (i  819)  ;  quelques-unes  même,  lors  de  mon 
voyage,  n'étaient  pas  encore  achevées  ;  plusieurs  sont  gran- 
des pour  le  pays  et  construites  arec  soin. 

L'église  de  Farinha  Podre  est  extrêmement  petite,  basse, 
sans  ornements ,  comme  furent,  sans  doute,  les  premien 
oratoires  des  Portugais  qui  découvrirent  le  Brésil.  A  l'épo- 
que de  mon  voyage,  elle  n'était  encore  desservie  que  par 
un  chapelain  et  dépendait  de  la  paroisse  de  Deaemboque, 
qui  est  éloignée  de  âO  legoax;  mais  les  habitants  du  pays 
tAchaient  d'obtenir  du  gouvernement  central  qu'il  érigeât 
leur  village  en  chef-lieu  de  paroisse  (1). 

Ce  village  fut  fondé,  par  des  MIneiros,  vers  l'année  181S. 
S'avançant  toujours  du  cAté  de  l'ouest,  quelques  chasseurs 
de  Minas  Geraes  arrivèrent  dans  ce  canton ,  oij  ils  trouvè- 


(1)  CeUe  fiTcor  leur  •  ilé  accorda  depuis.  —  Il  tiot  bien  se  doa- 
DtT  de  garde  de  conToodre  )■  paToiiee  de  Farinha  Podre  arec  celle  de  la 
nouvelle  ville  d'Ubenra ,  comme  oo  pounait  j  itre  indaii  par  no  pu- 
sage  de  Piiarro.  Quoique  voisines,  elles  sont  bien  distinctes  rnne  de 
l'antre. 


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DV  MO  OB  S.  PfUHCISCO.  3ttt 

rent  des  pAlur^es  excellents,  des  sources  d'eaux  tniné- 
rales,  qui,  comme  celle  d'Araxé,  pouvaient  dispenser  le 
oultivatear  de  donner  du  sel  à  ses  bestiaux  ;  enfin  des  ea- 
pàtt  nombreux  et  d'une  étendue  considérable,  on  la  terre 
annoDçait  une  grande  fertilité.  La  renommée  de  ce  canttm 
se  répandit  bientôt  dans  les  comarcat  de  S.  Joeo  f  El  Bei 
et  de  Villa  Rica  (Onro  Preto);  des  hnnmes  qui,  cMome 
disent  les  Mineiros,  ne  trouvaient  plus  aseei  de  terre  cher 
eux  ou  dont  les  tores  étaient  épuisées  par  le  mauvais  sys^ 
tème  d'agriculture  généralement  en  isage,  prirent  des  te»- 
mariai  dans  ce  pays  :  on  bAtit  une  chapelle  près  du  ruis- 
seau, et  le  village  se  forma. 

Farinha  Podre  est  situé,  disent  les  habitants,  à  plus 
d'iuie  demi-lieue  portugaise  de  la  véritable  route  de  Goyu 
À  S.  PanI,  et,  par  conséquent,  hors  des  limites  du  terri- 
toire des  Indiens  ;  mais ,  depuis  la  fondation  de  ce  village, 
l'aDCien  chemin  a  été  tout  à  fait  abandonné  par  les  cara- 
vanes, et  actaellement  elles  passent  par  le  village  même , 
où  elles  trouvent  plus  de  facilité  pour  renouveler  leurs  pro- 
visions. 

Les  p&tnrages  des  environs' de  Farinha  Podre  sont  telle- 
ment bons,  que,  malgré  l'excessive  sécheresse  qu'il  foisalt 
encore  lorsque  j'étais  dans  ce  village,  les  gueimadas  étaient 
couvertes  d'une  herbe  abondante  et  du  v«t  le  plus  ten< 
dre.  Les  colons  du  pays  ont  su  mettre  è  profit  cet  immense 
avantage  ;  l'éducation  des  bétes  &  laine,  des  pourceaux  et 
surtout  du  gros  bétail  forme  leur  principale  occupation , 
et  plusieurs  d'entre  eux  possèdent  déjà  SOO  et  jusqu'à 
1,000  bfitesi  cornes  (1819).  Des  marchands  de  Formiga, 
village  dont  ils  ne  sont  pas  extrêmement  éloignés,  viuinent 
leur  acheter  leurs  élèves  et  les  envoient  ensuite  &  la  capi- 


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3M  VOYAGE  AGX  SOUHCBS 

taie  du  BiMI  (1).  Les  terres  de  Farinha  Podre  sont  ausri 
très-favorables  k  la  calture  du  maïs,  de  la  canne  à  sucre, 
des  haricots,  du  colon  ;  mais,  de  ces  divers  prodnits,  le 
dernier  est  le  seul  qui ,  à.caaae  de  la  distance  consïdérri>ie 
qu'il  y  a  encore  d'ici  aux  grandes  villes  et  k  la  mer,  sort  on 
objet  d'exportation  (S).  Lorsque  le  pays  ne  sera  plus  aussi 
désert,  les  habitants  d'antres  cantons  moins  favorisés  vien- 
dront s'y  pourvoir  des  denrées  qui  aujourd'hui  trouvent 
peu  de  débit,  et  l'on  peut  croire  que  l'heureuse  Enlilité 
des  alentours  de  Farinha  Podre  lui  assure,  dans  l'avenir, 
des  destinées  brillantes  (3). 

Lorsque  j'arrivai  dans  ce  village,  je  présentai  mes  pa- 
piers à  un  capitaine  de  milice  qui  remplaçait  le  comman- 
dant et  qui  m'installa  dans  une  maison  k  demi  bâtie  : 
elle  était  ouverte  de  tous  les  cAtés  et  k  peu  près  aussi  in- 
commode qu'un  raneho;  mais,  du  moins,  nous  avions 
l'avantage  de  ne  point  y  être  incommodés  par  les  puces 
pénétrantes. 

(1)  VoycE  le  chapitre  XU  intitulé,  Le  villag»  itÀTaxé,  etc. 

(3)  Il  paraîtrait ,  d'aprto  le  nppcri  hit  i  l'assemblée  générale  de» 
députés  dn  Brtail ,  au  mois  de  mai  1S4T,  par  le  miDUtre  d'Étal  Jûaqnin 
llarMllîiio  de  Brita  (  Beloforio  da  repartiçao  doi  iie§oeioë  do  Impi- 
rio,  3),  que  la  culture  de  la  rigne  a  été  essajée  dana  le  vusûHge  de  Fa- 
rinlu  Podre. 

(3)  Depuis  que  j'ai  écrit  ce  qui  précède ,  je  lis  le  passage  suivant  ihn» 
nue  noie  du  mémoire  de  Liue  d'Alinconrt  :  •  C'est  na  plaisir  de  roir 
«  combien  ce  rillage  s'est  accru  de  1818  k  18S3.  La  population  de  b 
1  paroisse  entière  s'élève  i  2,000  individus  en  Ige  de  se  eonresaer  :  on 
•  fait,  i  Farinha  Podre,  un  eommeree  considérable;  on  j  forme  dea 

■  mes;  les  maisoDS  sont  en  bien  plus  gTMd  nombre  et  {Moque  toatm 

■  conrertei  en  tuiles  ;  les  tUioa  et  les  fiuttidai  se  mnltiplteol  dans  k 

■  voisinage  ;  une  fonle  de  familles  sont  veoues  de  Ninas  s'établir  ■*—» 
>■  ce  canton  (Jtnn.  rtag.,  631.  •  On  ne  doit  voir  ici  qu'an  dépUMmenl 
de  population  ;  mais  rette  fois,  du  moins,  on  a  bien  choisi. 


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DU  RIO  DE  5.  FRANCISCO.  )0S 

A  peÎDe  étions-Dous  h  Farinba  Podre,  que  José  Marianne 
se  plaîgDit  d'un  violent  mal  de  tàte  ;  sa  langue  était  char- 
gée ;  il  ent  de  la  Serre  et  du  délire.  Je  n'avais  aucune  con 
naissance  médicale  ;  mais,  depuis  le  commencement  de  mes 
voyages,  j'avais  observé  que,  dans  des  cas  analogues,  un 
vomitif  |Ht)duisait  un  heureux  effet.  Mon  malade  en  prit 
un  et  se  trouva  soulagé. 

Je  sonnais  cet  homme  comme  bien  peu  de  domestiques 
soignent  leurs  maîtres  et  ne  recevais  de  lai  que  des  mar- 
ques de  mauvaise  humeur.  D'un  antre  cAté,  mes  pieds  gué-  . 
rissaient  mal  et  je  fus  trois  jours  sans  pouvoir  sortir.  La 
chaleur,  qui  était  excessive,  me  faisait  beaucoup  souffrir, 
^  mon  imagination  mesurait  avec  effroi  la  distance  que 
j'avais  encore  k  parcourir  avant  d'arriver  à  S.  Paul.  Je  pé- 
rissais d'ennui  ;  Fariuha  Podre  ne  m'<^rait  aucune  res- 
source non-seulement  pour  la  société ,  mais  encore  pour 
les  besoins  les  plus  ordinaires  de  la  vie  :  on  y  aurait  inuti- 
lement cherché  un  cordonnier  ou  un  tailleur. 
«  Je  me  trouvai  un  jour  de  dimanche  dans  ce  village  ;  le 
commandant  vint  i  la  messe,  et  sa  maison  se  remplit  des 
cultivateurs  tes  plus  aisés  du  voisinage.  Je  leur  trouvai  des 
manières  beaucoup  moins  honnêtes  qu'aux  fazendeirot  des 
alentours  de  Villa  Rica  ;  c'étaient  À  peu  près  celles  qu'a- 
vaient, &  la  même  époque,  nos  bourgeois  de  campagne  ou, 
si  l'on  veut,  les  cultivateurs  d'Araxâ,  de  Kormiga,  d'Oli- 
veira  (1).  Cette  dernière  ressemblance  n'avait,  au  reste, 
rien  d'extracHtIinaire  ;  car  c'était  principalement  de  ces 
lieux  qu'étaient  venus  les  colons  des  environs  de  Farinha 
Podre. 

(1)  ToïCi  les  ehap.  ni  el  Tin  dn  premier  Tolumeikret  oiiTrage. 


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aoe  VOYAGE  AUX  SOURCES 

HarcdliDO  me  quitta  dans  ce  TUlage ,  me  doonaot  pour 
toute  raison  qu'il  ne  vonlait  pas  aller  plus  loin  et  m'aronant 
qu'il  n'avait  pas  le  moindre  sujet  de  le  plaindre  de  moi. 
J'accusais  de  son  déport  l'inconstance  naturelle  anx  eama- 
radas;  mais  j'appris,  par  la  suite,  que  l'état  de  sa  santé  lui 
en  avait  Tait  une  nécessité.  La  si^esse  n'est  pas  ce  qui  dis- 
tingue cette  classe  d'hommes. 

Il  y  avait  quatre  jours  que  j'étais  à  Farinha  Fodre  lors- 
que José  Harianno ,  qui  s'ennuyait  autant  que  moi ,  vou- 
lut absolument  partir,  quoiqu'il  ne  fUt  pas  encore  entière- 
ment rétabli. 

Dans  un  espace  de  4  legoa$  de  Farinha  Podre  i  Guaria 
da  Potée,  où  je  fis  halte,  je  ne  rencontrai  absolomeat  per- 
sonne et  n'aperçus  qu'une  pauvre  chaumière  habitée  par 
des  Indiens.  Le  pays  est  ondulé,  et,  quoique  la  terre  soit 
d'mt  rouge  foncé,  la  végétation,  contre  l'ordinaire,  se  mon- 
tre fort  maigre.  La  poussière,  par  sa  couleur,  salît  horri- 
blement le  linge  et  les  habits.  Les  borraehudoi  conti- 
nuaient À  être  très-incommodes. 

Le  pequi  [  Caryocar  hTOtHimnt,  ASH.,  Juss.,  Camb. } 
oott  dans  presque  tous  les  caiapoê  que  je  parcourais  de- 
puis longtemps  ;  mais,  nulle  part ,  je  ne  l'avais  trouvé  en 
grande  abondance  :  entre  Farinha  Podre  et  Guarda  da 
Posse,  il  devient  très-commun;  en  revanche,  on  n'a^ier- 
coit  plus  de  Qualea.  Je  me  rapprochais  des  contrées  mé- 
ridionales; la  végétation  c(»nmençait  è  offrir  quelques  dif- 
férences. 

Gvarda  da  Poue  (la  garde  de  la  iHisedepossessitHi)  (1), 


(l)  Il  ne  Tint  pu  ronTowlre  c«  lica  arec  le  Silio  ia  Pou»  dont  fu 


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DU  RIO  DE  S.  FAANCISCO.  307      ' 

OÙ  je  m'arrêtai ,  comme  on  vient  de  le  voir,  est  un  poste 
militaire.  J'ai  déjà  dit  qne  la  douane  (regùtro)  avait  été 
placée  au  Rio  das  Velhas,  parce'  que  le  Rio  Grande,  vérita- 
ble limite  de  la  province  de  Minas,  est  eitrèmement  insa- 
lubre ;  cependant,  comme  il  y  a  encore  entre  ces  deux  ri- 
vières une  distance  trës-considérable  (17  îegoas),  on  avait 
établi  à  Posse  une  garde  qui  Veillait  à  ce  que  la  contre- 
bande ne  se  fît  pas  dans  l'intervalle.  On  y  donnait  aux  né- 
gociants na  état  {gwa)  des  marchandises  avec  lesquelles  ils 
passaient  de  la  province  de  S.  PanI  dans  celle  de  Minas, 
et  ils  étaient  obligés  de  le  fvésenter  plus  loin ,  «Bn  qu'il 
Kit  bien  constaté  qu'ils  n'avaient  rien  venda  d^ms  Posse 
jusqu'au  Rio  das  Velhas. 

Le  poste  se  composait  d'un  cadet  et  de  denx  soldats  dé- 
tachés de  la  garde  du  Rio  das  Velhas  :  ces  militaires  me 
reçurent  parfaitement  et  me  logèrent  aussi  bien  que  le 
peimettait  l'extrême  petitesse  du  local. 

Le  jour  de  mon  arrivée  à  Posse,  le  temps  était  couvert  ; 
le  lendemain  (35  septembre],  il  tomba  de  la  pluie,  et  je  ne 
pus  n»  remettre  en  route. 

J'ai  déjà  dit  que  les  Brésiliens  de  l'intérieur,  lorsqu'ils 
sont  malades ,  ont  souvent  recours  à  des  paroles  et  à  des 
remèdes  sympathiques .  Je  vais  en  donner  un  exemple.  Pen- 
dant que  nous  étions  à  Fosse,  José  Marianno  se  plaignît 
d'avoir  mal  aux  dents  ;  voici  le  remède  qu'on  employa  pour 
le  guérir.  On  demande  au  malade  :  Qu'est-ce  qui  vous  bit 
mal?  n  répond  :  La  tète,  la  main,  la  dent,  suivant  la  par- 
tie qui  est  affectée.  —  Eh  bien,  elle  ne  vous  fera  plus  de 


parlé  plus  hinl  Et  qai  se  troure  ji  qaelques  lieaes  dn  village  d«  Santt 
Crui- 


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308  VOTAGE  AUX  SOURCES 

mal  ;  et  ion  écrit  un  À  majascule.  On  répète  la  même 
question  ;  le  malade  Tait  la  même  réponse  :  on  réplique 
de  la  même  manière,  et  l'on  écrit  un  R  majuscule  après 
avoir  coupé  l'A  d'un  trait  (A).  En  continuant  toujours  ainsi, 
on  trace  successivement  les  lettres  ARTEFA ,  et  l'on  re- 
commence jusqu'à  ce  que  le  malade  dise  qu'il  ne  souffre 
plus.  Au  bout  d'un  certain  temps,  José  Marianno  le  dit 
par  politesse ,  mais  son  mal  ne  diminua  point  (4).  Je  ne 
serais  cependant  pas  étonné  que^  dans  certains  cas,  quel- 
ques malades  eussent  été  guéris,  au  moins  momentané- 
ment, par  le  pouvoir  de  l'imagination. 

Il  y  avait  k  Posse  un  nombre  prodigieux  de  puces  péné- 
trantes (cbiques,  biehos  do  f^,  et,  comme  j'avais  appris  i 
mes  dépens  combien  il  peut  résulter  de  mal  de  leurs  pi- 
qûres, fêtais  sans  cesse  occupé  à  visiter  mes  pieds,  afin 
d'en  arracberces  insectes  avant  qu'ils  s'y  enfonçassent  tout 
à  fait.  Mes  pieds  étaient  alors  presque  guéris  ;  mais  j'avais 
l'indei  de  la  main  gauche  en  fort  mauvais  état  :  une  chi- 
que s'était  enfoncée  entre  l'ongle  et  la  chair;  on  n'en  avait 
tiré  que  la  moitié,  et  il  s' était  formé  un  mal  blanc  tout  au- 
tour de  l'ongle.  A  Posse,  on  me  tira  avec  beaucoup  de 
peine  une  autre  chique  de  l'index  de  la  main  droite,  ti  je 


(I)  M.  Gardoer  raconte  qu'on  faiendetro  de  li  Serra  dos  Orgios,  près 
de  Rio  4e  Jaoeiio,  prétendait  goérirles  hommes  et  les  tnimani<)esiMr' 
garts  TeDimenses ,  en  leur  faisant  avaler  cinq  petits  morceani  de  pa^er 
TOaiés  comme  des  pilules ,  sur  chacun  desquels  était  écrit  no  des  mota 
magiqnes  bien  conons,  Salor,  Arepo,  Tenel,  Opéra,  Rolat  {TrawU, 
S3).  On  peut  assurer,  sans  coarir  le  risque  de  se  tromper,  que  les  ser- 
pents dont  la  morsare  arail  été  gaérie  par  ce  moyen  n'appartenaient  pas 
k  des  espèces  bien  dangerenses.  An  reste ,  il  n'est  pas  nécessaire  d'allv 
fP  Unitiunt  pour  trouver  des  exemples  de  pareilles  superstilions;  il 
surSt  de  parcourir  les  Tillagcs  de  France. 


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IHI  BIO  DE  s.  FRANCISCO.  309 

voyais  l'instant  où  j'allais  Mre  privé  de  pouvoir  écrire.  Tous 
les  désagréments  se  réuDissaieut  pour  rendre  ce  voyage  in- 
supportable :  souvent  je  manquais  des  clioses  les  plus  né* 
cessaires&la  vie;  je  ne  trouvais  point  de  plantes;  rien  ne 
venait  me  distraire;  je  sucoHnbais  sous  le  poids  de  l'ennui. 

Le  jour  de  mon  départ  de  Fosse  (24  septembre),  je  fus 
pourtant  moins  malheoreux  ;  je  traversai  un  charmant  pays, 
ce  qui  ne  m'était  pas  arrivé  d^ois  bien  longtemps. 

Après  avoir  quitté  le  poste,  j'entrai  dans  un  campo  où  la 
terre  est  très-btmne  et  d'un  ronge  foncé.  Là  se  trouvent  la 
plupart  des  arbres  qui  caractérisent  les  taboleiro»  mbertoi; 
mais  ils  ont  une  vigueur  inaccoutumée  ;  ils  sont  plus  éle- 
vés qu'aiUenrs,  plus  droits ,  moins  écartés  les  uns  des  au- 
tres, et  entre  eux  croissent  de  nombreux  sous-arbrisseaux. 
Les  pluies  qui  étaient  déjà  tombées,  quoique  peu  considé- 
râmes, avaient  agi  sur  la  végétation  de  la  plupart  de  ces 
arbres,  et  alors  ils  commençaient  &  se  couvrir  de  feuilles 
nouvelles  et  d'un  vert  tendre  :  parmi  eux ,  il  était  impossi- 
ble de  ne  pas  distingner  le  tocopà^ ,  légumineuse  k  feuilles 
aUées,  dont  les  Qeurs,  d'une  couleur  de  chair  chermante, 
sont  disposées  en  longues  panîcules.  Au  milieu  de  ce  joli 
amtpo,  le  chemin,  toujours  parfaitement  uni  et  assez  large, 
décrit  d'agréables  sinuosités;  le  voyageur  européen  croirait 
presque  qu'il  parcourt  un  jardin  anglais  où  l'on  se  serait 
plu  à  rassembler  une  foule  d'arbres  contrastant  entre  eux 
par  leur  forme  et  leur  feuillage. 

Quand  on  a  fait  1  lieue,  le  pays  change  d'aspect.  Tou- 
jours parfaitement  uni ,  il  offre  un  agréable  mélange  de 
pâturages,  de  petits  bouquets  de  bois  épars  çà  et  lÀ  et  très- 
multipliés  ;  enfin  de  terrains  marécageux  au  milieu  des- 
quels croissent  des  borUyi  {Mattritia  viniftra,  Mart.). 


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310  T0YA6B  AUX  SOOICES 

BientAt  on  parvient  aa  Rio  Grande;  nuis  les  bois  qni 
couvrent  ses  bords  ne  le  laissent  apercevoir  qae  par  échap- 
pée. A.  cette  époque,  celle  qui  précède  immédiatement  la 
saison  des  pluies,  cette  rivière  pouvait  avoir  la  même  lar- 
geur que  la  Seine,  k  Paris,  devant  le  jardin  des  plantes  ;  ses 
eaux  coulaient  avec  majesté,  et  des  hérons  blancs  comme 
la  neige  se  promenaient  avec  lenteur  sur  les  bancs  de  sablç 
qui  s'élevaient  de  son  lit.  Quoiqu'on  soit  arrivé  sur  le 
bord  du  Rio  Grande ,  on  est  encore  loin  de  l'endroit  ou  on 
le  passe.  D'abord,  on  traverse  pendant  quelque  temps  nn 
t^rain  marécageux  et  couvert  d'herbes  qui  s'étend,  paral- 
lèle au  fleuve,  entre  deux  lisières  de  bois,  dont  l'une  bwde 
ses  eaux.  Le  chemin  partage  ensuite  cette  dernière,  et  le 
voyageur  mardie  sous  un  berceau  de  verdure,  où,  de  temps 
en  temps,  il  aperçoit  le  fleuve  à.  travers  le  feuillage  des  ar- 
bres. Les  oiseaux,  si  rares  dans  les  eatnpos,  sont  ici  Tort 
communs  ;  des  colombes,  des  perroquets  et  une  foule  de 
petites  espèces  voltigent  entre  les  branches,  en  faisant  en- 
tendre leur  ramage  ;  le  fiira  olho ,  peu  timide,  ne  change 
pas  même  de  place  à  l'approdte  du  voyageur,  tendis  que 
les  oiseaux-mouches  passent  et  r^Kissenl  avec  rapidité , 
comme  s'ils  étaient  emportés  par  le  vent. 

On  suit  ce  joli  chemin  dans  un  espace  d'environ  1  lieœ 
portugaise ,  et  l'on  airive  à  l'endroit  oà  l'on  s'embarque 
pour  ta-averser  ie  fleuve.  Là  est  un  raneho  {1819)  couvât 
en  tuiles,  ce  qui  est  fort  extraordinaire  dans  ce  pays  où  les 
toits  des  hangars  destinés  au  voyageur  le  sont  ordinaire- 
ment avec  du  chaume  ou  des  feuilles  de  palmier.  Les  hom- 
mes traversent  la  rivière  dans  une  pirogue  ;  on  la  fait  pas- 
ser aux  animaux  et  aux  marchandises  sur  une  sorte  de 
plancherquî  recouvredeuxpirogues  réunies.  Le RioGrande 


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DU  RIO  DE  S.  FRANOSCO.  SU 

était  encore  une  des  rivières  dont  le  péage  avait  été  con- 
cédé, pour  trois  vies,  à  la  famille  de  Bartboiomeu  Bueno 
Anbanguera,  ou,  comme  l'on,  dit  à  tort  dans  le  pays ,  An- 
hangueta,  en  récompense  de  la  découverte  de  Goyaz. 

J'ai  déjà  parlé  de  l'insalubrité  du  Rio  Grande.  Les  ter- 
rains marécageux  qui  le  bordent  sont  entièrement  couverts 
d'eau  p«idant  la  saison  des  ploies  ;  ils  se  dessècbent  en- 
suite peu  à  peu,  et  vers  les  mois  d'avril,  mai  et  juin,  il 
s'en  exhale  des  vapeurs  pestilentielles  qui  causent  des  fiè- 
vres malignes  et  des  fièvres  intermittentes.  L'homme  qui 
recevait  le  péage  pour  la  famille  Anbanguera  et  habitait 
une  petite  maison  sar  la  rive  gauche  du  fleuve  me  dit  qu'il 
était  établi  dans  ce  pays  depuis  quinze  ans  et  avait  été  ma- 
lade dix  fois  :  cette  année-là,  en  particulier,  toutes  les  per- 
sonnes de  sa  maison  l'avaient  été,  et  elles  avaient  encore 
un  air  languissant  et  le  teint  b^jaune.  Il  s'est  cq)eudont 
opéré  quelque  amélioration  depuis  l'époque  de  ta  décou- 
verte :  alors  on  mourait  au  bout  de  peu  de  temps;  aujour- 
d'hui on  ne  meurt  plus ,  mais  on  est  malade  et  on  languit. 
Le  pajs  deviendra  de  moins  en  moins  malsain  k  mesure 
qu'on  y  introduira  quelque  culture  et  qu'on  le  dégarnira 
des  bois  qui  le  couvrent ,  ainsi  que  cda  est  d^à  arrivé  pour 
Je  Rio  das  Velbas,  ï'un  des  affluents  du  S.  Francisco. 

Je  traversai  la  rivière  le  jour  même  où  j 'arrivai  sur  ses  bords 
(34  septembre).  De  l'autre  cAté,  je  n'étais  plus  sur  le  terri- 
toire privilégié  des  Indiens  (1),  ni  même  dans  la  province 
de  Minas  Geraes  ;  j'avais  passé  dans  celle  de  S.  Paul. 


(1)  On  ttaart.iuiBhliyteûed'Eaàïwtge  (.Brtu.  âiineve  WtU,l, 
03,  S4),  deux  Ubieini  rclalib  i  la  popuUtion  des  Indiens  da  district 
privil^f  if  :  l'on  qui  fut  (ommaniqu^  k  l'anlenr  tn  1816  et  ne  comprend 


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313  VOTAGE  AOX  SOURCES 

que  les  habiuiilfl  dn  cwlon  siiaé  tain  le  Pvanahjbt  et  t«  Rio  das  T«- 
Ihas  ;  l'iatm  qui  embrosM  iwu  le»  habJUnls  da  district  el  fut  enrojt  à 
l'admiiiistritioD ,  par  les  ladieus  eai-mimes,  ea  1821.  Comme  j'ai  cm 
recmnaltre  daos  le  premier  des  indices  d'ineuctitade,  je  me  coDlenleni 
de  copier  ici  le  «ecoad  : 


Perauahjbe. .  .  . 
S.  Domingoe..  .  . 
Rio  du  Pedras.  . 
Estin 


Famu 14  9  11  3i 

S.  Anna 84  90  88  Ml 

Rio  des  Telhis 7  ï  6  » 

Sodnlu 3  3  ï  11 

DbMare 3  S  3  8 

Tijnco 8  8  7  33 

Laoboso 5  S  17  30 

Oberava  FatBt. Il  15  38  6B 

toldas. S  7  11  33 

Poue 1  3  4  8 

Espinhis 5  9  2t  35 

Rio  GraDde 3  3  4  10 

257  157  357  STI 

Oo  pourrait  croire,  d'après  no  passage  de  l'fifif  atro  (f  wn  Quadro  et- 
UUiitUo  da  Protineia  dt  S.  Paulo.  —  S.  Pauto  1839,  que  le  district 
priTilégié  des  Indiens  a  ét^,  depuis  qnelqoes  années,  réuni  ane  seconde 
(bis  k  Gojai  ;  car  il  y  est  dit  ■  qae  le  disirict  de  la  ville  de  Franca,  ap- 
parlMunt  ï  S.  Paul ,  conflue  avec  celai  d'Uberara ,  qui  fait  partie  de  ta 
proTince  de  Gojaz,  et  qae  le  Rio  Grande  sert  de  limite  h  cette  dernière 
prorince.  ■  Les  aotears  du  BiccUmario  geographico  do  Brasil,  qui 
ODt  conduit  l'histoire  très-abrégée  de  Goju  jusqu'en  1842,  disent  anssi 
que  l'Aldea  de  S.  Anna  ippartieai  k  ce  pajs  ;  mais ,  comme  ils  ajanlent 
en  même  temps  qne  le  Paranahj'ba  sert  de  limite  k  Gojai,  et  que  le 
Pisarrio  appartient  t  Hioas  Geraes,  il  ert  permis  de  regarder  la  ques- 
tion comme  dontente.  La  riunloi)  indiqnic  par  l'EMoyo  semblera  penl- 


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DU  MO  DB  S.  FRMOSCO.  313 

ttn  fort  uturella,  si  l'on  m cenaalte que  la  carte;  duh  je  m  sea- 
nia  m'eiiipécber  de  la  regarder  comme  no  TériUbk  malbenr,  à  cause 
de  l>loiguement  où  se  tronrent  le  Rio  das  Pedrai,  S.  Anna,  etc.,  dn 
cheF-liea  de  Goyei,  le  grand  nooibre  d'aHhires  dont  le  gouveruemenC  de 
celte  immeiue  prorince  est  Décessai  rement  accablé ,  le  pen  de  forces  et 
de  Tereniu  doDt  il  dispose  et  le  triste  état  diDS  lequel  MS  BuaDces. 
sans  doute ,  l'obligeot  de  laii»ar  les  villages  des  Indiens.  (Vojei  ce  que 
dit  le  véridiqne  Gtrduer  de  l'abandoQ  où  languit  l'Aldea  do  Poara, 
TroMlf,  p.  315-320.) 


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III  : 


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TABLE    DES    CHAPITRES 


DANS  LE  TOME  SECOND. 


CHAPITIIE  XVU. 

Coromeocemeiil  du  voyage  daos  la  proTÏoce  de  Goju.  —  Le  rïllage  de 

Santa  Luiia 1 

CHiPITKE  XYUl. 
S.  ADtonio  dos  HoDtes  Claros.  —  Le  village  de  CommU.  —  Les 
Hontes  Pjreueos.  —  Le  village  de  HciapoDle 30 

CHAPITBE  XIX. 
Les  villages  de  Jmgat,  d'Oaro  Fioo,  de  Ferreini k 

CHAPITRE  XX. 
Tilli  Bm  on  la  cilé  de  Go;u 6i 

CHAPITRE  XXI. 

Les  Indiens  CoyapiSs 87 

CHAPITRE  Xxn. 
L'or  «t  les  diamiDts  da  Rio  CUto 130 

CBAPinE  xxni. 

Heiour  à  Tillt  Boa 149 

CHAPITRE  XXIT. 
Commencement  da  voyage  de  la  dté  de  Goyai  à  S.  Paul.— Le  Halo 
Grosso.— Une  habitation  modèle.— Le  village  de  BoDiFim.    ...     168 


,.;.  Google 


TABLE  DES  CHAPITRES.  S19 

CHAPITRE  XXT. 
Les  caui  thermales   dites  Caldas  Notob,  Cildis  TeUus,  Caldas 
de  Pjnpitiaga 300 

CHAPITRE  XXTI. 

Le  village  de  Santa  Cnu.  —  Une  roale  très-pénilik 223 

CHAPITRE  XXTH. 
Encore  la  proTinee  des  Mines.— Les  Indiens  métis  dn  ParuiabylMi.    348 

CHAPITRE  XXVIII. 
La  cascade  de  Farnas.— Le  Rio  das  Velbaa  et  l'Aldea  de  Santa  Anna. 
—Le  village  de  Farinba  Podre.— Passage  du  Rio  Grande 374 


t  DB  LA  TABLE  DBS  CBAPtTRBB  DU  TOHB  SECORD, 


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TABLE  DES  MATIÈRES. 


Afe*UI«i,n,  S),i3s,  i&o,  ifis,  I6S, 30S,  332,  ne, 

AMWitiMe*,  famille  de  plintea,  II,  4B. 

Abimm,  natiOQ  iodiiniDe,  U,  B4-96, 113. 

AdH>lnls«imti«n,  I,  334-337,  364. 

AsreK»d*B ,  hommes  qui  s'établissent  sur  le  lerrain  d'aulrui , 

n,  »s,  100. 

AldMsa*  villages  dindieoa,  I,  883;  II,  94, 96, 103. 

A]«i«M.  r.  Yalbsc*- 

AMeA  THaurtMf  village  constrail  pour  les  lodiens  ^jipta.  II, 

n,  131,  134,  136. 
Alexandre  FevelMt  e  Caatr*  (  la  targ^Ho  mâr  ),  tai- 

neur  de  Paracaiû,  1, 380,  39i. 
AUmentatlM*  II,  13. 
AU^radvn  4le«  ««leuin  reprëaentotfreaj  I,  S4t, 

8ee-3es;n,  7s. 

Alto  d»  Serra,  cabane,  I,  67,  87. 

I,  famille  de  plantes,  I,  335. 
,  I,  80,  ST,  89,  133,  338  ;  II,  15,  69,  104. 
nUaaM  eurattUlfaliMai»  espèce  d'Acajou,  II,  51. 
4  espèce  de  Palmier,  n,  36. 
JkmguXUem  éleetoHiHe»,  II,  i33. 
ilMfcTiiifi-rrfi,  suTDoni  de  Bartbolomeu  Bueno  d>  Silva,  le  père, 

I,  >10. 
Aaaicww,  village,  I,  369  ;  U,  t3S. 
Aa«M«  ( /"azanda  doi  ),  habilatioD,  H,  IBI. 
Aa*hr«ip«lasle,  U,  318. 
AntABi*  l>ue»>  de  AMevede,  foadaieur  de  Sanb  Luiia 

deGoyaz,n,  IS. 
AntaMl*  ]f*cHHv»  9umKt9,  curé  de  Couteodas  dans  te 
Sertâo  de  Hinas,  n,  t&». 


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331  TABLE  DES  HlTfEilES. 

AmiMKl*  FnuMto»*  <le  AsevMl* ,  marchuid  de  béuil , 

1,54,81,90. 
Antenl*  Pires  de  "^ — itt-  Mumnm,  aTentnrier  destnic- 

leur  delà  nation  des Coyapôs, I,  3Ti;II,  3S4, 3B4. 
ApacTiiëes,  famille  de  plantes,  I,  bs^  iH. 
Jkrm»t  espèces  de  perroquets  (  Ainonu  kyoeâtiAmiu  et  ^ro- 

raiHui},n,  15». 
.  F.  PBroimi. 

tf  oiseau,  1, 14,  Sft. 

HUI«tf»l«,  Corifère,  I,  S4. 
Arsxfc,  village  en  1B|9,  m^urdlnri  ville,  I,  }ef,2i3,  :i8,  217, 

IlB.ïaa,  «5,136,  38»,  84*,  3«î,  W3;  n,  191. 
d  i-fiari  (  ^1  ) ,  nom  d'une  halte  près  la  cité  de  Goyaz,  Tl,  M. 
Arraiwa,  Tillageea  igi9,  aujourd'iiui  tHIe,  1,336. 
jbrrepeiMlldaa  (  RegUtro  dot  ),  douane  ,  I ,  Z)  5,  301  ;  TI,  ï, 

3il9ff. 
Arruém  (  Fazenda  do  ),  habitation,  I,  3«i . 
mtnrmwm  4*  PsV«l  (  LtuioHii'a  f<^sm },  espicc  <fe  Bfélïs- 

tomée ,  II,  SI. 


ri,  Sapolée  à  Tniits  comestibles,  U,  51. 
I,  I,  304;  II,  48. 

ige,  I,  )63;  U,  15. 
»T>«  TImO»,  ar^  «te  la  famille  des  lÀ^mimmiu,  U,  ». 
ltarJM(U  comte  «»],  II,  184. 
B«rn»,  village,  I,  313. 
■aarthvlmaeH  Buen»  die  flUva  r  pire*  atmiMiir  .^  éi' 

couvrit  Goyaz  apris  Haaoel  Correa,  I,  309;  II,  Mft. 
Barthrtvmeu  BiieiM  ds  HUv»,  fils,  celui  qui  i^Mta  le 

pays  de  Goyaz  aui  domaines  du  PorUigal,  1, 810;  U,  M^T. 
■wùuBda»,  gfiàn  de  l.éguniineuses,  1,  I59< 
BesmUlk,  genre  de  plantes,  II,  2TS.   . 

Bé««U,I,  31,  3S,11,67-Tt,  174,284,345,  3M,H8,a«*)U, 
15,131,181,191. 

W^w  *•  9*  (  cH"M,piiUK  wmmmirmmm  J.  !,»$■,  B, 

378,  397,  399,  308. 


D,g,t,.,.d.i.  Google 


tABLE  DBS  HATIÈHES.  32I 

I,  famille  de  piaules,  I,  36&,  2G3,  îTi. 
BU^Ats*  de  Pennut»,  pipieMoaoDniie ,  I,  41, 
B«a  Vlmtm ,  halte  sur  la  routé  de  Villa  Boa  au  Rio  Cliro ,  H 

150,  154. 
tfm  Tlata  (Mdeada],  village  d'Indicas  métis ,  H,  leo, 

3SS,263-ST1. 
B«»  Ttate  <■■  FMHpiilhB,  babiUUon  dans  la  province  dé 

Rio  de  Janeiro ,  I,  6.  i&. 
B«kéBileiiB,n,  ITB. 
Bo^  rUm,  village  de  la  pravlDce  de  Goyaz  près  Sanla  Cntz,  ville 

depuis  1836,1,  383;  II,  137,  IGO,  IBT,  191-109,127. 
B»wMt  FIhi,  village  autrefois  situé  auprès  du  Rio  dos  Piliîes  el 

qui,  aujourd'hui,  n'existe  [l'us,  It,  13T,  196. 
B*BB  JwrdlH,  babiUlioD,  f,  144. 
B»rltr  (Mauritiamnifera),  Palmier,  I,  îee,  !70,  ST4j30ôi 

II,  4,  SI,  lia,  126,  155,  159,  ITI,  301,  309. 
■•roré* ,  oatioa  iadieune,  II,  256. 
■•"••fciMl»»  { SimuUum  perlinaa!  ) ,  insectes  maibistutg,  I, 

203;  n,  lis,  U8,  153,  !08,  282,  236,  2G2,  267,  ITS. 
~  ~      ,  Dation  iudieiine,  II,  106,  132-134. 

■  ,  n,  164. 


,  rivière,  II,  334. 
Breja  [  SiHo  do  ] ,  chaumières,  Ii;  229. 
~  Mil ,  voyageur  anglais,  I,  3T 1 . 


»(7<qlfl,),I,T,33;II,  T8. 

Uni,  C«elMetr»  <•■  VuvnMi,  etc.  r.  C«waiw. 
CMliMtelBbJi,  babiialion  près  Tamandui  dans  la  eomareait 

S.  Jo'o  d'El  Rei,  1, 123,  I4e. 
C— fc— IriMlMi.  maisoDoelte  près  Arixii ,  dans  la  coMsrmrde 

Paraulli,  T,  3Si. 


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32t  TABLE  DBS  MATIERES. 

C»uli*ii*  «■•  — — p»,  mammifère  ctnussker  (  C<mU  eam- 

pMfHi,  Neuw.  es  Gerv.))  I.  ]37iII,  i68. 
CmMélw,  I,  a&S. 
Cid«Ml(Fasmda(  dfu],ll,  309. 
Cal^bM  MvTSa,  eaui  tbermilM,  n,  309-330. 

CïmUm  Telkaa,  eaui  Ibermales,  II,  309. 

C^Iunc»,  plaote  mëdicinale,  1, 164. 

CMMpMi«l«»éeB,  famille  de  piaules,  I,  2U. 

fanip»  AleC)  village,  1, 3fl3-2ST. 

raipaa .  pays  découvert,  T,  SS-G3,  se,  S8,  ii9, 13G,  i&&,  114- 

339,  233,354,304;  II,  88,  135,  l&l,  161,  171,  113,  193,  310. 
C»nel»4'MBK.  f.  Vellosu. 
C»Baekmere,I,  SSSi  ir,  i8. 
CbhIb  ewtapcBtrla.  T.  Cachorro  do  campo. 
C!R«utel>*iie,  II,  :i&. 
.CapAc  (  Ci^Sm  ) ,  bouquets  de  bois  épais  dans  les  pâlurages , 

I,8T. 

C^pS*  da*  Flore* ,  habitaiioQ,  I,  136. 

CMp«t»x  [  conducleur  de  bétail  ),  1 ,  35. 

Capluk  ratlacuelro.  F.  Cai'Ih  GOBOLnA. 

C^l^liift  (•rduFK  (  JUelinii  mittutifiora  ) ,  Gniiniate,  I,  333- 

I1&,  373,  39S,  398,  303,  351,  385;  II,  39,  31,  51,  176. 
OpiHi  Fre^a»,  Gramioée,  I,  ii9, 136,  358; II,  ni, 303. 
C»p<talBea  séiténti» ,  ancieu  nom  des  gouverneurs  de  pro- 

TillC«,  I,  335;  II,  78. 
C»pHXa  Peilr* ,  babilatioD,  1, 137. 
C^ltKtlvn  (  CApltofS*  ),  impôt,  1, 190, 339,  340. 
CapUlMSB,  habitation,  I,  lee. 
CMnabniulelIn.  F.  Cahpo  Albcrb. 

a,  Dation  indienne,  II,  98,  fis,  ii3,  138. 
[  Fastnia  do  J,  liabitation,  I,  300. 
CmrmmtDiQtcoreaa.es  bounisias,  I,  T3,  131. 
CmrrnnokK.  F.  Tbopa. 
CmirKkmwmm  ou  CMrVbmmmm.  F.  Métis  dr  Nëgrbs  kt  d'Jk- 

DIEBSKS. 

Cwrra»e*«,  forêts  n^iines,  I,  3&9;  II,  88. 


D,g,l,.,.d.i.  Google 


TABLE  >ES  MATIÉIES.  3» 

DM'y«M  ■■'■■lllwala  ( Tulgaireineiit  pe^ad),  arbre, 

II,  Ï7. 
Owmp«to>,  ÏDseclu  malfaisants  dugenre  Ixoia,  II,  31,  90, 

137,  138,  1&3. 

■  (  Faxmda  ioi  ),  hibilation,  II,  339. 

le  flWidIfS*.  ^.  HOTBM  POUR  LA  FOUTB  DB  l'oH. 

le)  celle  dile  Cachobih*  da  Casca  u'Ant»,  I,  iSfr-iss  ; 
—  uae  anire  dans  la  Serra  da  Canastra,  i93  ;  —  une  autre  qu'on 
veil  à  une  demi-lîeiie  de  la  Fizenda  do  Geraido ,  I9S;—  celle  dite 
CiVCHOBiiiA  DO  HoLLiM,  199;— une  autre  qu'où  voit  de  la  Fazenda 
da  HaBoel  Antouio  SiinSes,  loO  ;  —  celle  du  Retiro  da  Jabutica- 
beira,  !3&;  —  celle  dite  CAenosmA  das  Fubnas,  II,  315; — celle 
du  Riburio  da  Hociufaa,  394. 

itHdlertlIa.  f.  Arapokca. 
,  genre  de  Légumineuses,  1,  366. 
,  voyageur  français,  I,  371. 
village,  n,  33»,  339. 

village  en  1810,  ville  depuis  I83l ,  1,  3as,  34<i; 

n,T3. 

OKVRlhadwi.  F.  Exkhcicbs  de  chbvaox. 

CmvKirm,  nom  de  lieu  entre  Paracaiu  et  la  frontière  de  Gnyaz , 

I,  S0&. 
daTfilw  (ji*),  chaumière  dans  le  Mato  Grosso  de  Goya/  , 

U,  ne. 
VmtlmimM,  forêts  qui  perdent  leurs  feuilles  chaque  annéL',  1,  313; 

U,  U. 
C^ypéri.  F.  Covu^. 
C»7«e«é,  ville,!,  !M. 

■  (  maisons  de  campagne  ],  JI,  n. 

.  V.  Chicriabas. 
■,I,  43,89,367;  II,  13,  40,   135,  153,  iSO,   15»,  lOS, 
186,  173,  175,  170,  114,  119,  13S,  331. 
OluuiK«Hi«Bta  de  deaaiclle ,  II,  395. 
Chnpnde  *mm  Ceuvea .  plaleau,  I,  306. 

Bêle 8.  Haureee,  plaleau,  I,  li5,  305. 

,  grand  plateau  ;  celui  qui  termine  la  Serra  da  Canas- 
—  celui  qui  termine  une  autre  portion  de  la  Serra  do 


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3»  TABLE 'DES  tUTtiKS 

S.  FraociMoe  da Ptraïubyba,  pcèSik^MinsKdew  deniarJlM*^, 

21 t,  269. 
CAKraÀJtaBiifii,!,  n&,  i»i. 
Cbtvc* ,  habimion,  I,  01,03,  1S3. 
OukViuitoB,  Dation  iiidienoe,  II,  123,  34t. 
OteBalna,  I,  369;  — celui  du  Go3iiiE»OEi[D4MiwtOiiw  CnwMr»- 

cio  ) ,  3t  ;  —  de  Rio  os  jAHsino  k  Hikas  Geimbs  ,-»«4.i  — idu 

RioPbETO,  12,  J&,  29,  30;— -de  8.  GABnHLaïU'GuiPOfi,  M;— 

de  terre  [  cau.vho  da  tbrka  J  ,  3 ,  )  9 ,  S3  j  ~  de  f  Aj.dk*  db  S. 
JosB  iuBjoClaro,  II,  135j  —  du  Rio  m>E'PjlSbs il  AiiLLà  Boa, 
tài;  —  celui  de  Villa  Boa  k  6.  Paul,  .iSfriili; — .«Uns  le  Hat» 
Ghosso,  1T4. 
ChevMix,  I,  36*,  363. 

-  f',  Stbrcuua  Chicha. 

. ,  nalioD  iadjeane ,  H,  3S6-£01. 
I,  F.  BiCHOS  DO  p£. 
Ciiieli*!!»  CemmlBM» ,  et^e  de  qoiDquim,  I,  iitl.    ' 
Clpé  nuttMhr(li)uiemeurtri£fe],'I,  30. 
C»re,U,  164. 

Cl»r«llM,  DoiD  vulgaire  d'un  arbre  des  Oanipoa,'H,a&i, 
ClMaU«a*lan  ««•  IndAow,  II,  133. 
Clercé,!,  i:6,  133,318,  >48;  II,  44,  114,  l»2,  330. 
,  I,  HZ  ;  U,  40. 
I  (jtl),B(BKko,J,  43. 
CTocbVB»,  I,  34,  73,  130,  l&S,  a6S,«3,«64;II,  U. 
C««lh«[lelieuteDaalJ,propriëUiredelaFaiendadasCaldu^lT>09. 
CoBMvcwa ,  divisions  des  proviDces,  I,  334. 
CaHMtrc»  «le  Nsrte,  divisioD  de  U  proriDeede'ûayw,  I, 

33â,  341,  862,  366,  360. 
CTvmareA  de  P^racatii,  dlvisisD  de  la  pnwiMB'lkiiinÉs 

Geraea,  I,  304-331. 
Ceoukrc»  do  Sul, division  delà  provioeeidmGiojvz,  I, âSS, 

3&7, 363,  363,  366. 
Cïeauurc»  de  S.  Jofte  4'El  &aâ,JiviiiMiideia^nniBce 
de  Hinas  Geraes,  I,  Ti,  73,  TS,  tî,  16,  19,  122,  au,  116,30S, 
201,  343. 

M««,  I,  14T. 


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TABLE  DES  MATIÉBES.  3X1 

C —ijfgiilw  pour  l'eiptetuiion  dw  m'a»»  tf  or,  I,  !92, 36*  au. 
C— ip— é— ,  runille  de  plantes,  1, 131,  I70,  31 1  ;  U,  Jl . 
C:*neeifa»,  village  pris  S.  Joao  d'EI  Ilei,  1, 113. 
C<*iicelfS«  (  province  deGojazJ,  village  bd  1S19,  aujourd'hui 

ville,  I,  335, 
CsncelfS»  (  Fiamda  da  )\,  babiution  près  Villa  Boi  ,11,  »8, 
lU. 

,  I,  310,  341  i  n,  T»,  ItO,  I4&,  Ufl,  16!,  161. 
Mina,  lieu  voisin  de  Rio  de  Janeiro.  If,  07. 

■  (  Sitio  doi  ),  patîle  habiUttion,  II,  ^73. 
a,  Initiens,  I,  33,  tO-42  ;  II,  123. 
C)*v*««(rabbëJ,  cultivateur,  I,  H. 
C*pr«sa  4m  ilrrwa,  iiiinnii,  II,  30. 
C^rreca  <bM  CiRMaa,  ruisseait, II,  2}.s. 
Clives*  4e  J»ras<u>>  villi^  eu  1»1B ,  «ille  defuiU  1841 , 

n,  38,  48-63,  114,  I6S,  167. 
fjorresa  éImi  Haraaaa ,  ruisseau,  I,  288. 
Crânes*  4a  HeMta*  Illafca.  ^i  Goaiuco  Pm«> 
■a,  ruisseau,  I,  288. 
,  ruisseau,  I,  ISS,  388,  281. 

,  ruisseau,  II,  11. 
Correca  4e  8.  A>taaila,  ruisseau,  1, 281, 3S8. 

Vaa,  ruisseau,  I,  284,  288,  397. 
,  I,  384,  398. 
Carrée*  8«perlw.  f.  Coiuibgo  Pobhe. 
Can-^K»'  TenvMUha ,  misseia,  U,  XH. 
,  'VilUge,  I,  leo,  Ml  ;  II,  28. 
1,1,  87,98,  145,  I6«,  3il,Z&«;IJ,  t«e,  S33. 
Calan,  I,  lU,  US,  380, 384  ;  U,  42,  183,  184. 
CWHXM,  v)Uage,I,  106;  II,  il,  IIS. 
C*raSi*«,Mli<w  iadieiiDe,I,  3ll;IJ,  e7-li9,  122,  <2S,  I24, 

13«,  137,  164,  >U. 
CrUÂ,  TÎlUge,  I,  313, 336;  11,  166. 

,U,  271. 
a,  I,  18,  367,  364,  366;  II,  184. 
€jUwÈmmmm ,  bommes  qui ,  pv  goAt ,  «serceot  m»  mt^kr  ou  ci(db- 
vmtuD  arl  sus  en  faire  leur  profession,!,  104. 


...d:,;,  Google 


TABLE  DES  HtTIÉHES. 


,  eaclos  pour  le  b^il,  I,  us,  iio. 
,  hameiu,  r.  Me. 


■■■iw  (  Ftamda  ie  ),  babiuiion,  I,  2G7. 
ItaiHiiMi  [!>■■■  ].  rniiiTTiri  rnj  i|i^.  II,  lis. 

Wmtm,  âendua  de  terrain  aurirtrcque  ilistribue  le  Guirdi  Uôr, 

I,  aia. 
ll<'iitMi«HiMi«    f^.  Diziminos. 

»»—ifc»<W,  Tillage  en  iBie,  nQonrd'bui  ville,  I,  184,  lis, 
241,  344;  II,  149. 

,  f.  Sbitao. 

,1,101,  164. 

:,  lis,  ISO;  n,  las-Me,  \t\. 

e,I,13B,  341-t4&,>S4. 
,  I,  195. 

Btotrtot  prlvUé^é  4m  InAena,  II,  lâi-srs. 
~  ,  dédnuteurs,  1, 190, 143. 

«l»,  babitalion,  I,  ils,  ns. 
t  [Aldea  iJoJ,  village  d'Indiens,  II,  94,  95,  |34. 
•  { C«Bip««nte  *m  ),  I,  349. 


I,  Ml;  — celles  d'AiiAU,  1,  MS,  24T- 
14g;n,  118;  — celloi  deSiUTU,  I,  ibB-jn,  liB-.— celles  de 
USuraHegha  db  Paracatd,  I,  164;  II,  118;  — cellesqui 
iToiainent  l'habiution  de  Guauda  H6«,  près  Pakacatti,  1, 1T3  ; 
—  celles  des  Caldas  Novas  etTELHiis,II,  I09-:iS;  —  celles  de 
Farihha  Pitorb,  II,  118,  M3;  —  celtes  de  Rio  Pardo,  dans  Li 
proTÎnce  de  S.  Paul,  II,  1 1 8  ;  —  celles  qui  se  trouvent  k  3  lieues 
de  HoctKHA,  près  le  Hio  bas  Telhas,  roule  de  Goyu,  SVS. 
:,  celui  qui  préside  la  (Me  de  ta  PenlecMe,  II,  1 1T. 
Dorode  lieu,  1, 1,  19,13. 
!,  1.348;  11,  T8,  140. 

r«ii«i«ai.  T,  108-111. 


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TABLK  DES  lUTIEBBS.  3» 

I,  n,  io. 

Mte*  (esclaves  des  diamaots),  cailloux 
qui  accompagnent  les  diamants  dans  le  Rio  Claro,  n,  144. 

IDfMnnlrtn»  da  mv«lMa  6Mttlerc«i  Goyanais  qni 
s'embarqua  sur  les  rivières  pour  pénétrer  dans  la  prorince  de 
8.  Paul,  1, 370. 

BaMva  (jiUea  4a),  village  d'Indiens  m éli»,  n,  169,  36(>-3S7, 

âtyaavloslei  celte  de  Tamarati,  I,  i3;— de  Capitikca,  lee; 
i.  ^dePKRinTISCA,  138;  — d'ÀRAXa,  341;  — dePABACATc,  3t3; 

—  d'AMIANGUBIlA,  110  ;  —  de  CAPAO,  331  ;  —  de  CARAPA,  II,  7  ; 

—  decHACARA,  17  ;  —  de  Heiapohtb,  40;  —  de  Jaracda,  49; 

—  de  cATiRfiA,  sorte  de  bob,  64;  de  Capivarhv,  iB9;— 'dePA- 
RABAHTBA,  3&0;  — de  TiJOCO,  389. 

Eiq^la»rfcl— é »■ ,  ramille  de  plantes,  1, 355. 
Bmevcftces  de  «lacmMx  {caoalhada»),  II,  8. 
BztowcMMi  4erM>*T,  SGt-l&6. 


k,  sorte  defarine  dont  on  saupoudre  les  aliuMots,  1,  tji. 

dre,  village,  1,  33&  ;  II,  ITO,  S03-3M. 
a  ou  habitation,  1, 7, 75, 80,  133. 
AweBd»  4*el  K«l,  ferme  royale,  il,  131,  137. 
FasMndetrsB,  propriétaires  d'habiutlooa,  I,  TO,  78,  T6, 70, 77 , 

ST,  89,  131,  173,  17(i,  314. 
F«U«ber>«,  cultivateor,  i,  tS3. 

FeBUHeSfl,  78,  lS7;n,  e,  O,  47,  ai,  77,  1)«,  141,368,386. 
Fer,1, 140,  178,  310,386  ;!!,  15. 
FgiUMJ» DelsMl*  Frelre  4« GasMIba,  I,  333,  34 1  ; 

11,  80-84,  t45,  lei. 
Fcmrfor.  K  Arapohca. 
Ferreliro,  village,  I,  313;!!,  83. 
VcmIUcb  ((^ule  des),  1, 138,  301  ;  II,  38,  i75,  lOO. 
pê*M,  I,  lee,  176  ;  —  celle  de  la  S.  Jbah,  II,  5S-S1  ;  —  celle  de 

la  PsirrECOTB,  U,  177  ;  —  ceUe  de  Nossa  Senhora  da  Abbauii, 

198  ;  —celle  de  la  S.  Louis,  330. 


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TABLE  DES  HATIÂIBS. 

1,1,  33T-34I. 

Fleura  qui  paraissent  avant  lee  reuillas,  II,  tôi,  206. 
XlvrcM,  village  en  iSJ8v»1}<»'h''<1mù  viUe,  («  t36. 
nmrmlmom,l,  laa. 

V»lta,  r^uDiOD  d'hommes  qui  quêtent  pour  la  fête  de  la  PentecAle, 
U,il7,  2Bfl. 

1,1,  3t&-S&f. 
M,  I,  30,  3}  ;  II,  48,  63,  128. 

F»railS«  (  Jldea  ia  J,  village  «rindieuH ,  II,  S4,  Si. 
VanMlc»,  village,!,  119, 121,  i&7,  362;  II,  J&. 
Far^HlllHB  (  Silio  da  },  fxtiLe  babiiatit»  dans  la  prot'iace  de 

Goyai,  II,  tSO. 
FomulUu»,  habitation  (dana  la  proviiice  de  Rio  de  Janeim},  1, 3i. 
F*iacArc«,  I,  136. 
FoutmI»,  I3  2H,  383. 

Fnuif»,  nom  de  lieu  près  la  cité  de  Goyw,  II,  i  73. 
Fraaelac*  Alwmm  (  Sitio  de  ),  maisonnettes,  H,  301,  331. 
WrmmHmwm  J«ié  <le  TTf»f  (  faxenda  de  ) ,  babitMioo , 

I,  2Sà. 
Franc*—  Jbettm,  colonel  à  la  cité  de  Go;az,  U,  es,  Mi. 
Fnuwlaai»  g«ww  BiOMc*,  aveBtumr^^oMft,  li,  «a«. 


187. 


1,1,11. 

I,3M,M4;II,]t,  41, 1S. 
4e  lab«.  f.  SoLAKDii  LicocutniK. 
ftrine  de  maïs  simplement  moulue,  J,  121 . 
m  (  Sflio  iat  ),  chaumière,  n,  ise. 
m  (Faxenda  dat),  balnlaDon,  II,  216. 

«. 

1.  f^.  PsiniVM. 
(  SiHo  de  ),  maisoimettee,  U,  T. 

I,  fotniUe de  plantes,  I,  331,  231 ,  368 ;  il,  27. 
I,  33,  1S&. 

{Faxenia  io),  babitsiion,  I,  I03, 193. 

f^.  MlNBlROS. 


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TABLE  DES  UTliRES.  33t 

dMiaorto,  geoie  de  pluotca,  II,  nu. 

Ciiw,  liU,TU8tiquu,  I,  ma-,  H,  104,  II&. 

«•UscMie*,  lodiens  gtuvoges,  1, 4(M3. 

ClMUre,  11,73,  lis. 

<a«wl»  MAr^He*  ISilio  de),  cbaumière,  U,  ITS. 

Cl«7&,  lUlion  iDdienM,  I,  309,  810-313. 

CivTAxfprovinixde),!,  3as,24l,30S-37B;lI,  1-211, MS,  313. 

fil«yjiK  (la  cild  dej.  r .  Villa  £oa. 

Vramlnée*,  bmille  de  planleâ,  I,  333,  33&. 

Oresvrl»  Hummi  {Silio  de),  cbaumiËre,  II,  20^. 

Suantula,  oalioa  indienne,  II,  123. 

k  Bf  ér,  babilalion  près  la  ville  de  Paracatù,  1, 171. 

ir,  balte  sur  U  route  de  Villa  Boa  an  Rio  Glaro,  II , 

160,  lâ&,  IGH. 
StwArda»  Hwr,  nugUlnit.cbiCKÉ  (te  <la  UûliibuiiQD  des  teciaiw 

aurifères,  I,  383. 
CteaMto.dBPa«ae,  poslemitiUic^,l^,  307. 
ViiMBia^iB  ulmIfellM,  Aug.  de  S.  II.,  planle  du  grou|te  des 

BuLlaéri6e8,  II,  56, 106. 
Ciu^natfe*.  babililiOD,  II,  Oi. 

■  C»Kpa.  y,  A^(;UJLLLS  ÉLSCTIVIUUE:>. 


t.  F.  HalIGABElRA. 
I,  I,  M. 

Herv»  d'IIniMt,  pUnle  gui  prëserre,  dil-on,  de  la  morsure 
des  serpents,  I,  fts. 

Histoire  de  la  ville  de  Valshça,  I,  34-8T  ;  —  du  village  de  Rio 
Prkto,  48  ;  —  de  la  ville  de  Tamakdua,  14s  ;  —  du  village  de 
FonHiGa,  169  ;  —  de  Piuhuy,  i89;  —  de  la  ville  d'ÂRAXA,  sai- 
lli: —  de  la  province  de  GoYAZ,  308-316^11,  a4Si  —  de  Sauta 
LuziA  m  GovAZ,  aojourd'bui  ville,  II,  i  i  ;  —  du  village  de  Co- 
HUMBa ,  39  ;  —  de  Heiapoktb,  40  ;  —  de  JasACDA  ,  aujourd'bui 
ville,  49  ;  —  du  village  iI'Olro  Fjno,  63  j  —  du  village  de  Fer- 
HBiHO,  63  ;  —  de  la  Cité  de  Govaz,  S6  ;  —  des  Ihdibns  covai><)K 
et  de  I'Aldba  de  S.  Josfi  be  Hossambobs,  94;—  du  village  de 


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iU  TABLE  DES  MATIÈRES. 

PilSes,  136;  — de  BnH  Fni,  aiqaurd'bui  ville,  n,  r94;  —  dfs 
Calsis  Vblka8,  118;  —  desCAiiiAS  Noïas,  îie;^deS»«T* 
Grdz,  aujourd'hui  ville,  ISS;  —  de  I'Alde»  do  Rio  das  Pedras, 
364-IbS  ;  —  de  I'Aldka  da  Estiva  ,  288  ;  —  de  I'Auiba  DE  Pl- 
SAMIAO,  388,  367. 

»  du  tiers  ordre  de  S.  François,  II,  *0. 

lé,  1,46,  93,  HT,  125,  18S,  IlBïU,  80. 
«  pour  la  fonte  de  l'or  (eatai  de  ftmditào},  I,  ais,  t40. 
[,96,  151,  3It;n,  40,  SO,  73. 
>,  1,161. 
Wj^ttm,  geure  de  Labiées,  U,  31. 


I,  I,  318  ;  n,  8. 
¥f8l»  <e  S*UBft  WwnMch,  capiUbe,  1, 35. 
ImpréTvjHBce,  n,  m,  i4i,  laa. 

■  ■■■lia»,  n,  16S,  ITI,  203;  — des  forSTs, 

daa  IIEIa«i,  rérotle  h  Minas,  II,  384. 
1,1,96,309,313,333;  II,   94-119,  122-134,  I62-Î13, 
381-382,  183. 

>,  1,  167,  381,  SSt. 
Me,  Caladium eiculentum  des botauisles,  1,13,  lii. 
u»H<é,  II,  311. 
pae,  II,  348. 

e  de  Rio  de  Janeiro  k  Govemo,  I,  18. 
d'Ubà  au  village  de  Rio  Pr«io,  31. 
du  Rio  Prelo  k  la  sortie  des  forêts,  5o. 
d'Alto  da  Serra  àS.  Jnio  d'EI  Rei,  83. 
du  Rancho  do  Rio  das  Mortes  Pequeno  i  Tamandua, 

130. 
deTimanduià  laSorradaCaontra,  i53. 
de  Jolo  Dias  ]i  Araxt,  191. 
d'Araxi  h  Paracatû,  151. 
deParacatâau  Rc^stro  dos  Arrependidas,  3»7. 
du  RegisU'o  dos  Arrepeodidos  i  Saaia  Luzia ,  II,  4. 
de  Santi  Luzia  de Goyai i  Hàaponte,  il. 


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TABLE  DBS  IUTIÉU8. 

de  Meùponte  I  Vilii  Boa,  te. 

de  l'AldM  de  S.  José  ati  village  de  PilSn,  131. 

dubameiudePilSeskVillaBoi,  150. 

de  V3I>  Boa  à  Heiaponle  par  le  chemin  le  mi 

fréquenlé,  I73. 
de  HeiapoDie  au  rillagedeBomnin,  IS8. 
du  village  de  BoiD  Fîm  auSitio  do  Pari,  301. 
des  Caidu  à  Santa  Cniz,  320. 
de  Sania  Cruz  au  Rio  Pannabyba,  338. 
du  Paranahyba  i  la  Fazenda  das  Fumas,  351. 
de  la  FazeiHla  das  Fumas  an  Rio  Grande,  375. 

,  II,  18. 


JTiMM,  sorle  de  panier,  I,  72,  7S. 

Jacù,  hibiUlion,  II,  150,  1&3,  159. 

Jnciib»,  farine  délayée  dans  de  l'eau,  1, 370. 

jM^uement,  vt>yag''.urrranQais,I,iS3. 

JHPscuii.  f .  Conneco  de  Jaracda. 

SmrwmKm,  nation  indienne,  n,  90,  S8,  1 11, 116. 

Jé«ul(CS,  II,  94,  95,  103,  103.113,113,356,  184. 

«•â*  IHa«,  habiuiion,  1. 1T7, 190. 

'•S*  fÏMetaBS  dA  HllvR ,  Goyanais  qui  desceodit  )tar  les 

riTièras  jusque  dans  la  promce  de  S.  Paul,  1, 370,  37 1 . 
Smêm  CïnpiMi  Awgwf  J'Oj  eafcwM  e  ■ ,  goiiTenwur  de 

Matogroaso ,  pnIsdeS.  Paul,  n,  158. 
J«ft»  CtoMMi  {Fasenda  dé),  babiUtion,  1, 3T6. 
^mëm  IieHe  te  H1t«  Horlls ,  un  des  premiers  avenlu  • 

riers  qui  déoonTrireol  Goyai,  1, 1 1 1 . 
J«S«  TIIbtI  4e  n[«K«aeB,  capitaine  général  de  Gojaz, 

n,  lis. 

JaCa  KadrlgwM  IP«r«tna  de  AlMaeMe ,  négoetant , 

1,30;  n,  SI. 
J>eC«  ^(ûtatlae  de  mvelni ,  capiiio  môr  de  Ja  ville  do 

Ttmandii*,  I,  lis,  148. 
J«fte  Vexclvm  Alrapea,  curé  de  Santa  Lnxia,  I,  130,  Mt; 

n,  8-10,  17-19. 


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3M  TABLE  IffiS  RTATIÉltBS. 

JlM^iitHi  Alvea  de  Ollvelra,  commandant  de  Mdspooie, 

I,  360;  n,  133,  iso-iaT. 
^amtpalnk  Atwem  (Fazenda  de),  babJtation,  II,  ISO-IBT. 
^MmulmlHaa  {Sitio  de),  chimniëre,  Tt,  104. 
^•«qulnt  MftFB««  (babitatioD],  I,  33. 
J««4wlm  Thetonio  Hmgmrmdu,  omMor  de  la  Corurci 

doNorte  à  Goyaz,  II,  83i 
S»mé  de  AlnneMa  de-  fmmmtmtmUmm  de  S«licr*l  e 

CMTvalha,  iMraii  de  RIvwMunedes ,  capitaine  génâral 

de  Goyaz,  II,  95,  os. 
^amt  Fminrtsce  [hibitalion;,  I,  3?. 
Suaé  Maartenno,  miilelier,  I,  30,  lia,  116,  1*1;  H,  51,171, 

300,  30G. 
^••é  Perelnt  d«  Bllvn,  propriëlaire,  I,  104,  114, 139. 
J*aé  Plni*  d«  F«mscc«,  Goyanaia  qui  descendit  par  les 

rivières  jusque  dans  la  province  de  S.  Pïul,  I,  STO. 
^••é  B*drls«ieH  da  Cnu,  I,  33,  35. 
^•■é  RadrlcHea  Frwm ,  Pauliste  qd  fotfdi  Paracalù,  I, 

381. 
Jwieph  (le  père),  mistioDintre  cipuein,  H,  lo,  u,  S6,  t6},  103. 
Jiaeunù,  sorte  de  corbeille,  U,  104,  tlS,  lie. 
■Viurtftees  (  Julgado») ,  dlvisfoiu  des  provfncefl,  T,  334. 


piMie  eimi&Tt,  1, 331,  3&e. 

I.. 

(volgainmeM  paeari),  atbn  d«  1*  n 
dnSiHearMM,  U,  37. 
Imge  (  SiHo  da  ),  babitation,  II,  sa. 
!«■«,  Min dff Ksiis  1,  3fr,  n*. 
I,  lacB,I,  SOI. 
»Fel»,  lac,  II,  131,  ra>4. 

m,  marais,  I,  )04. 
Ib,Im,  U,n>. 

,,  lac,  II,  131. 


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TABLE  DES  HATliRES.  3S) 

p«*a,  miraie,  1,  304.  ■ 
I,  lieii  mircca^ux,  I,  W3. 
,  ri,  301. 
M,  I,  41  ;  H,  107  ,  HW-MS,  twnt. 
Itfuwqjelnw  (Faxenda  doi),  biUCMioii',  T,  «9. 
I«rdl,  r,  41,  73. 

e  (Antoine),  serviteur  de  l'auieur,  I,  6. 
k  [Fazenda  io),  habitatioD,  I,  363. 
Iiécuittlaeiiaoi,  faroillede plantes, I,  355,174. 
liCpMMrtrvM,  espèee  de  poisson.  II,  lis,  184. 
Ii1bb««  s«ml,laogne  dû  Indiens  de  la  cûte.H,  ii3,  !6i-365. 
UBharM  (le  comte  de},  ininislre  du  Brésil ,  I,  333. 
Iilsca«M,  plante,  II,  17. 
I4»belto,  genre  de  plantes,  n,  376. 
iMmméwUé,  U,  3W. 
Iiueevek,  voyageur  aof^iis,  1, 163. 
IiwIb,  NMat  qui  imèw  let^ktyapdBilWie  lïpririTec  les  GoTanais, 

n,  B7,  m. 
Iiirita  aii*«wlB  ém  MiVM  •  B«hu»  (L'abAéj-,  écrinia  goû- 
tais, II,  93,  les. 
bris  dft  VwêbIêê^  MmoÊmmm,  eapîMm  général  db  Dr  pn>- 
Tïnce  de  Goyaz,  n,  il. 

n,  43. 

iMâm  «< 

taiae  général  de  ta  province  de  S.  Paul,  n,  M. 


■  {Fautida  dêi),  dntMtiitwi,  U,  15. 
t,  espèce  de  palmier,  II,  i&i,  ITS. 
I,  peupMb  iwNemK',  R,  ri3^. 
B  fc  séparer  le  coton  de  ses  graines,  II,  1 S3  :  —  i  rjper  le 
manioc,  isi. 

I,  peuplade  indienne,  II,  lOf,  133. 
Ire  4e  Veee)  Nmteau,  t,  Of . 
to,  I,  T. 


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TABLE  DES  HATIEKES. 

«,  1,  89,  121,  311  ;  II,  S,  100, 104. 
la,  peuplade  indienne,  II,  I13. 

M,  famille  de  pliDle>,I,3GG,  314;  n,  l&i,  »•. 
I,  tnétiE  de  bUncB  el  d'Indienncf,  n,  ITi. 

.   V.  H&WlIElHAfl. 

1^  balte  Gur  la  route  de  Villa  Boa  an  Rio  Claro,  II, 
1&0,  1GG. 

«,  babitatioD,n,  U,  IT4. 
I,  faabiiatioD,  1, 7,8. 

t,  pidil arbre  de  la  famille  des  ApocjméM,  n ,  lis. 
BlKHKlIer,  1, 8. 
III»nl«c,  I,  313,111. 
Bb^lala,  macbine  i  l'aide  de  laquelle  on  commeDce  la  prépa«- 

tioD  de  la  farinhi,  1, 136. 
Hafl|]«Uiih«,  chaumifa«,  dans  le  Mata  Grosso  de  Goyai ,  B, 

176. 
nj>Ba«l  A«t«Hto  SHmSm  {FoMmia  da),  habitaiioa, 
r,  197-100. 

k,  celui  qui  découvrit  Goyai,  I,  aos;  □,  310. 
,  cultivateur,  I,  1S5. 
Haa*cl  B«drliFuea  Ttisauir,  celui  qui  découTrit  le  ban 
où  est  situé  HeiapoDle,  II,  40. 

,  Mrviieur  de  l'auteur,  1, 149, 168. 
■  (Ftae»da  de),  babitilion,  I,  ■&&. 


ir  de  Gofiz,  I,  sis,  340. 

Maaw  (Dona) ,  feninie  de  la  nation  dea  Clûcriabàs,  II, 
186. 

,  I,  S7t;II,  T4,  117,  189,344,  311. 

dha,  celui  qui  découvrit  les  Cddas  Hovaa,  fl, 
110,316. 
Ma**  CIrsMW,  forêt  voisine  de  Villa  Boa,  I,  SU,  3M;  II,  U- 

&6,  114-180. 
M»«T— — ,  province,  I,  lil,  »9}  11,1*0,  144, 147,  lU, 

I&4. 
Mafiwlw  ou  Wlmtmmahm.  F.  Giia«»a  uuuroux. 
lUem.  V.  BoRirr. 


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TABLE  DES  MATIÉIES.  337 

RlKwe,  voyageur  angliis,  I,  !63. 
HMeclBB,  I,  103;  II,  72. 

llei«p«»tg,  vilUge  en  1 81 9,  ville  depuis  IS8S,I,I1I,  816,349, 
3&9,  163;  II,  1 1,37,  SO,  16-44,  49,  73,  7S,  166, 169,  178,  193, 196. 
Tn^lmmtmmtiémm,  famille  de  plaoles,  t,  370, 397. 
SeUnts  itMMtlflim.  F.  Capim  cokocia. 
MCBMMltB,  II,  43. 
Ké«l»  de  aiulâtrMi  t4  d'ImUeiuie»,  I,  JO  ;  II,  107  ; 

—  DG  BËGRBS  KT  k'IrDIBIIUS,  2&3,  370,  371. 

Htol,  U,  ISO. 

BlIUee  imiHeia),  garde  nationale,  1, 349. 

WUrnêmmécMy  plantes,  II,  34. 

Mina»  [Fastnda  dat),  habilalton,  I,  364. 

SIliiMa  CI«rM«i,  province,  I,  S,  48-807  i  II,  i,  9,  il,  48,  63, 

74,  75,  348-313. 
Ifliw  STsTM,  pirlie  de  la  province  de  Minas  Geraes,  1,  314. 
BItai«lv««,  babitanlB  de  la  province  de  MinaaGeraes,!,  103,  I07, 
117,  134,  143,  145,  148,  319,  3I«,  344,  371,  873;  II,  79,  333, 
286,  351,  395. 
niMMam,  I,  77  ;  II,  13,  48. 

,  animal  d'une  existence  douteuse,  II,  I3t-i  35. 
ta,  I,  120,131,  148,131,316. 
i,  iniectes  malfaisanti,  n,  337. 
lÊmêkm'hmm,  chWMniieUes,  n,  60. 
naeimi,  I,  1T,  114,  317-313,  871-ST8;  U,  15,   16,  74-79,  83, 

Itt-)I8,140,  141,  161,  189,  190,283,338,340. 
ITlrtMfc».  petite  habitation,  I,  300. 
1I«^«1««,  hameau,  I,  19B. 

I,  peuplade  indienne,  U,  113. 
I,  montagnes,  II,  3 1 ,  13. 
■•■«••  PyreBeva,  I,  301,  309,313,319,  3ei;n,  !tt,  13, 

30-34,  45. 
ns^pacHB,  lieu  dësert,  1, 169, 304. 
]n«i4le«>,  sorte  de  lËpre,!,  i&i,  153;  n,  40,  5o,  3i7. 
n,  pelite  montagne,  II,  6. 
,  morne,  1, 140. 
Mmrrm  Aa  CTnaa  4*m  AImhm,  montagne,  I,  ïS7. 


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Table  des  matières. 

,  moalagne,  II,  19. 
Il,  petite  montigne  terrugioeuse,  I,  i  J9,i  49. 
atorr*  *m  P»dr«  ■>«m— ,  pelile  moDUgne,  II,  is. 
ni«rv«  d*  ■*■,  petilea  moaUgnes,  II,  8). 

•,  pelUe  montagne,  II,  I3,  ao. 

I.  f.  S.  J0S6  DB  HOSSAMBDBS. 

m,  I,  3;  II,  lis,  I&3,  33«,  153. 
Mmnfmm,  1, 73,  3t5, 163;  II,  s. 
Mmjeam  de  tmmummmUmiOmm,  I,  8W-37I. 
)«,II,5Î,7Ï,  107,ÏOÏ,I7l,ni. 
',  II,  ST. 
I,  I,  36  J. 

HTi^éMi,  fimille  de  pbotes,  II,  Il  1, 2TB. 
la,  espèce  de  laons,  D,  ■  U. 


Hattrldade,  village  eu  is  19,  aujourd'hui  ville,  t,  313,  33â. 
HècrMt,  I,  16,  IS,  lOS-li:,3S&,  339;n,  n,  182. 

Hr«BM,  n,  30,  in. 

Heu»  Senhsra  *»  Piedatde  «InhuBUrliMi,  1, 1 


Wmvrwmtimm»  tMmmmmmétrl^iiamm,  U,  3i4. 

•ncea  pMHiM,  I,  »6. 

Mil*  J'if .  nom  de  liea,  I,  S0B. 
Mlv«lMoaHMM«8«iAM«db»Mlvalm,  liUife,  I, 

119,  lt3. 
•r,  1,49,  66,  13S,  MB,  330,  !Bt,3S0,  ÎST,  StD,  SI  1,313,  31&, 

Sie,  339-341  ,  366-368  ;  U  ,  6 ,   13  ,  34,  39 ,  31-33,  40,  tC,  74, 

I8B-Ub,  186,  1»&,  aie,  330. 

9mwwimm,U,l*,M. 


F.  Lafoehhi  Pacâki. 

t  HUNTStaHM*»  Bombacâe,  ï,  3ii  ;  II,  its,  lOO. 


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TABLE  DES  MATIÈRES.  339 

tfbabiUtJon,  I,  i3. 
ammpm.  y.  Pachira  NARCiNAit. 
P»l«l  9uelMMtd«,  babiUtioi],  I,  SOI,  31!. 
ridiMler%  I,  fil,  335,  :t4;  II,  :s,  9o,  isi^  i&e,  111. 
I,  peuplade  indieDoe,  n,  107,  123. 
»d'»rMSDom  vulgaire  d'une  Bignonée,  II,  tsi. 
mtmtû.  Tille,  I,  3B1-19&,  397,  100,  301,  360. 
■exi*,  Dation  indienne,  II,  3  5&. 
■1  {SiHo  do),  petite  babiuiion,  II,  30i. 

»,  village  en  1SI9 ,  I,  lie,  HT  ,  336,  333-330,  343, 
248,  359,  2eJ. 
P«ull«««%  babilanls  de  la  province  de  Saint-Paul,  I,  107,382, 

tlO;  11,306. 
Péage  du  Rio  Grande,  I,  si;  —  du  Corunibi,  II,  230;  — du 

Rio  daa  Velhae,  280. 
P«4bMB  (Jldta  do  Rio  dot  ),  village  dlndiens  iDélis ,  II,  1G9, 

353-265,  ïflS,  370,313. 
Pedcatran»  troupe  d'un  ordre  inférieur,  I,  350,  351. 
Pe4r«<l»B«Hu»  (Alto  de),  petite  habitai  ion,  II,  2si. 
Peq[1ll.  V.  ClRTOCAH  dbasiliensis. 
P«rlplMaB«(  babiiation,  I,  238. 
PhywJyMMt  flArMa,  plante  de  la  rimtlte  des  Silicariées, 

n,  306. 
nôadii  d»  Carrela  de  «^«B,  chemin,  I,  268;  n,  M. 
PUS*  Areaaa,  ville,  I,  303,  s&s. 
niar,  village  en  1S13,  ville  depuis  issi,  I,  335;  II,  3(6. 
nUea(  Jrrmal  dot  ),  village  de  la  province  de  Goyaz,  II, 

115-148. 
rUémi  (Sitia  dot),  chaumière,  I,  370. 
nrunitm{Serra»alme  Piraya],  poisson,!,  ï6S. 
Piraiiarik,  chute  d'eau,  I,  313. 

■:  f.  AHADCARIA  BRASILIBKSIS. 

•  (^bb a  d«),  village  d'Indiens  métis,  II,  366, 167. 
Plaaaahr,  village,  I,  leo. 
Plulea,  I,  15,  334  ;  II,  193,  295. 
PlauHdnm  draMira,  plante  apocynée,  II,  4. 
Prtd,  voyageur  autrichien,  I,  361;  tl,  I9,  153. 


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340  TABLE  DES  MATIÈRES. 

PatMani,  1,  1B7;  II,  MB. 

roifcal  [le  loarquis  de),  miniElre  dePorliigal,!,  siS. 

FMmne*  de  terre,  II,  I8. 

P»Bt*,  I,  48. 

Ptmte  Altm,  baliiiaino  près  le  village  de  Formigt,  I,  leî-iee. 

P*Bte  AltM,  baliiiaiioD  près  Saoïa  Liuia  de  Goyai,  II,  33. 

PepulMtton,  t,  149,  no,  349,  m  ,  315-334  ;  II,  11,  38,  4», 

ae,  313. 

Psrco  n«rt*i  lieu  désert  dans  la  provioce  de  Goyai,  pris  l' Ai- 
des Maria.  II,  138. 

Parto  de  Beaerra,  1,  294. 

Part»  *»  EatrellM,  village,  I,  3,  4. 

Port*  Félix,  ville  de  la  province  de  Salat-Panl,  II,  !&!. 

Port*  d»  Plkndirb»,  I,  36,  3B,  31. 

Porto  *o  Quebr»-Auol,  I,  !54. 

Porto  Beat,  village ea  iBts,  ville  depuis  1831, 1,316. 

Porto  meol  «o  Poranmiirbo,  II,  3&o. 

Poase  {Sitio  da),  chaumière,  II,  338. 

Pouao,  nom  qu'on  donne  aux  haltes,  n,  1  &4 . 

Poiioo  Alto,  babiialioD,  II,  1T&,  iT6. 

Pauoo  de  Don»  AntoBlo*  halte  sur  la  roule  de  Villa  Bm 
au  Rio  Claro,  II,  l&T. 

PouMO  }f  ovo,  nom  de  lieu,  II,  63. 

Poiaao  Alesre.  f.  Cihfo  Alëgre. 
kl.  F.  PoDso  Alto. 

Bt(YvesJ,  serviteur  de  l'auteur,  1,  6,  99,  l03-ia&,  113, 
113. 
Prlxdeadenréoo,!,  314)  II,  ts. 

,  I,  98-101. 

■  terre*,  I,  i&,  3i,  83,  so,  i«,  i3S,  ne,  3», 

34ii,  371,301,  3&Bin,  ITS,  33S. 
Propreté,  11,37,  eo. 

PoldlMHB,  genre  de  la  famille  des  Hyrlées,  II,  373. 
Pjmkconjuba,  espèce  de  hameau,  II,  |93. 

~  ««Oa.  f.  HOHTES  PïRBHEOS. 


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TABLE  DES  MATIERES.  341 

9- 

^■uden,  genre  de  plantes  de  la  ramille  des  vochysifes,  I,  2&&  ; 

U,37,  151. 
9uebn»-Aiual,  babilatioo,  I,  ïS3. 

I,  pâturages  ràïemmeDl  incendiés,  II,  !i,  I3Q,  iB^, 

''.  GUCUONÀ  FKItBUGINI^A. 
Timpâldu),  T,3I3,33B,  310,  Ït3. 


MadléMi,  plantes  composées,  1, 137. 

■lui— umJ«  S*iwt»  Wlfm»tiÊthm,  greffier  de  la  junie  du 
trésor  royal.II,  84,  37,  i6i. 

Bandis,  hangar  poin- les  voyagenrs,  I,  s,  7,  143',  II,  ISl,  134, 
300,  3(0. 

■«n^ha  AiB  Armam,  habilalioD,  II,  66. 

M«Beh*  d>  C>*7iih«lr»,  habitation,  n,  55. 

■«■eh*  4*  B|«  Am  III*rt«s  Peqiien* ,  tntritalinn , 
I,  93. 

tdurMi,  tablettes  de  sucre  cuit  avec  son  sirop,  II,  186. 

■éftitettoui,  1,3,  5,  8,  13,  15,  18, 
38,31,  3S,  37,  41,  44,61,  71,  74,77,  70,81,00,413,111.130, 
144,  140,  160,  104,  lOa,  11!,  113,  114,  210,  335,  356,  :5B,  100, 
36S,!84,  388,305,311,  3:3,315,  369,370;  II.  Il,  14,  33,  34, 
38,  30,  34,49,  63,67,  71,73,  7  4,80,  88,01,  03,  04,  95,  9B,  OB, 
99,  107,  110,  115,  lis,  m,  113,  113,  114,  1»,  HT,  135,  136. 
137,  ISS,  130,  143,  140,  147,  164,  188,  188,  ISO,  194,  I9G,  197, 
114,316,  316,  IIS,  130,149,  150,  353,  356,367, 107,  170,177, 
384,  386,  390,  393,  394,  306,  309,  30O,  301,  301. 

■écl*ai  das  rnf¥ri.  1, 1 1 ,  34,  6B,  137. 

Bévton  «M  r»r«««,  I,  lO,  34. 

BcBlatrsjdauane,  1, 33,  3B,  48i  II,  307. 

WUmmè*eu  «raqMlliUiué»,  11, 307. 

Rettra,  espèce  de  chalet,  1,  68* 

Retira  A»  aafentlMdbèln»,  dtilel,  I,  333, 135. 

■dira  «•  TrMh«s-nan<c«>  cbalet,  1, 138. 


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34!  TABLE  DES  HATIVES. 

■ilicfc»  {Sitio  do),  chaïuDières,  II,  !38. 
Mlneho  Frio,  ruisseau.  II,  S. 

o  Frl*  (Fazenda  do),  babiuiion,  II,  &,  T. 
>,  rivière,  I,  îTS. 
BIbetrft*  [Sitio  do),  maisoDueltes,  IT,  :3S. 
Blbelrt*  d'AcsM  9u«Mte,  rivière,  n,  31 1,  ïl3. 
KlbelrS»  d»  Antlnlu»,  lorrent.  II,  15. 
Klhdi^to  d«a  ArMM,  torrent,  II,  37,  !S. 
■Ibel><*  do«  C»brestos,  I,  iTB. 

B  dwi  FiurauM,  ruisseau,  II,  !7&. 
»e»<i,  totrenl,  II,  35. 
mibelrS*  da  Paaite  Altn,  II,  38,  38. 
BlbelrS*  de  S.  r«lr»,  1, 38S,  300. 
■Ibelrito  mm  c:MplMBT«m,  I,  181  ■ 
Blb«lrS«  «■  Pntta,  I,  181 . 
mibelrft*  dta  ■oelmfeit,  ruisseau,  II,  I»4. 
Kl»  Almtté,  I,  205,  316. 
Bl«  Almlté  «•  Sul,  I,  306. 
1U«  du  AlBUW,  I,  31!;  n,  3S-«D,  4B,  61. 
Kl«  dMi  Aa«aa,II,  isi. 

Bln.Ar»su»7W,  1,817,318,  31»,  saS,  311;  II,  M,  83,  ItT. 
Blo d««  B«rrelr«B,  II,  itT. 
WUm  daa  B«Ui,  I,  369. 

m*  ov*TwAr»  n,  189. 

Kl»  CaruMhanluh  I,  30S. 

iUo  CnApa,  rivière,  II,  130,  131,  ISB-Ug. 

»  {Jrraial  do),  f.  PilSes  (.^rrotol  do*). 

,  I,  208,  313,  81S;  II,  36,  37,  30,219. 
Kl«  Co7»pÔ,  II,  HT. 
Klsltvec,  I,30e. 
Kl*  Eaeur*  Pequcn»,  1 ,  176. 
Blo  E«mrtt  Grwode,  I ,-  37fi. 

Blo  dK  EatlTK,  II,  385. 

lUo  d»  Gatrell»,  riviËre,  I,  1,3. 
Klo  FMrtura,  II,  U7,  M6. 

KlsSrsnde,  rivière  delà  pro*iDce  de  MitusGeraes,  I,  tu,  ht, 
01,305,  207,308,  311,  318  ;  II,  381,  30T,  310. 


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TABLE  DES  HATIËBES.  343 

Bla  Snuade  (canton  dej,  province  de  Minas  Geraes ,  comarea 

de  S.  Joio  (fEl  Rei,  I,  Bi-a,  234. 
Biv  Srande,  nom  qae  porte  dans  ses  commencements  l'Art' 

giuyi,  1, 318(11,  ite,  HT. 
Ki»  Indalft,  1, 215. 
mis  dlulnmlrlm.  K  Rio  dâ  ësthklla. 
Bto  d«  Ja«»ré»  I,  Ul. 
Blo  JnrabatHbM,  II,  tes. 
Kl*  «le  ]!I«l«pMi««,  n,  4  ) . 
IU«  d«B  ]II«rtMi  CInmAe,  I,  ST. 
Rio  d«sS*r««iP«quea«,1, 86,  07, 134, 163. 
Kl«  PMr«c»ta,  I,  304. 

iu«PMp»iciMr,ii,  UT. 

Bi«  PMMhrb»,  I,  le,  13-1&. 

Kl«PwrMMlirb*,I,S0&-3ll,  !!3,131,  231,  367,  313,  31t. 
ses;  n,  30,349. 

I,  64,  309. 
,1,  3t3. 

'•,n,204. 
,  II,  35!. 

Rie  dMB  PMinui.  F.  Aldu  do  Rio  das  Pemis. 
>,  U,  3D4,  331. 
>,  1,311. 
»fc«nlW)I,  13,  13. 
■  PUftea,!,  31i;n,  131,  134. 
I»  Ptakt»,  I,  84,  313,  370)  n,  I4T. 
•  (Jrraiàl  do),  Tillage,  I,  4&,  4B-50. 
RI*  Pr«t«»  1, 3SS. 
RI*  9ueA>nk-Aiiz«l,  I,  336,  3G3. 
RI*  RICtt,  1,311. 

Ris  «le  8a«t«  laahel ,  I ,  iTe. 

RIa  de  8.  A«t*»l«,  I,  199,  200. 

Rio  de  8.  Antonio  do«  Honte*  dar**,  XI,  23. 

Rio  de  9.  Rwrttoloineu,  I,  307  ;  n,  6. 

Rio  «le  8.  Franchteo,  I,  IBO-I8T,  193,  20S-313,  3:t,  33], 

375,  3S4,  304,  360. 
Rio  de  S.  Marcoa,  I,  30b,  314,  306. 


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m  TABLE  DES  MATIÈRES. 

RisTIcté,  i^;;3io. 

Blv  <•  TvcmiUbb,  I,  :di-310,  llï,  113,311,  StS,  SIS,  J3&, 

171;  n,  10,61,83,  14T. 
Ble  Turr*,  I,  309. 
m*  Aw  TellHM,  on  des  affluenis  da  Rio  Grande ,  I,  >S3  ;  II, 

2T»,  aoT. 
Ml*  dwi  TeUkwB,  un  des  alRuenls  du  S.  Frawtieo,  II,  81 1 . 
■UvVcrlBBlniSfniSai,  S3&. 
■ia  VcnuéUtUf  rivière  qui  passe  i  la  cité  de  Goyaz,  I,  3S3  . 

S1i;II,61,6&,e3,U3. 
Bl»  T«rai«lfea,  rivièni  qui  passe  au-dessous  du  village  de  Bonr 

Fim,II,  ist. 
RI*  VbeniTa  TmIs»,  II ,  303. 
Bto  Ilbei«Ta  Verdadelr»,  II,  3VT. 
Kl*  Vmliûi,  II,  59, 61,173. 
■Us  VniKuay,  II,  M7. 

K  {SiHo  da),  petile  maisoq,  II,  391. 

»  fl>a«r  d«  Mmmeamm,  gouverneur  de  S.  Pauf, 

1,310. 

»— ée,  n,  58,  137. 

Bvtala,  genre  de  plaiHM,  U,  15). 


1,  ville,  I,  3S6,  386. 

é. f.  SkPi. 
flaUx  HumbcUtlaBB,  Saule,  I,  9T. 
flMluhrlttf,  1,834;  U.  40. 

tmivmrt  (ÉLiÈÈmlnmttK  de),  steur  de  l'auteur,  II,  ibT. 
■■Bta  *— ™j  ancien  nom  de  la  cilé  de  Gofas,  n,  65. 
Muat*  Anms  (  Aldta  de  ),  vilbge  d'Indiens ,  n ,  169 ,  3$& . 

383-393,  813. 
Bwnte  1tmt*mr»t  chapelle.  II,  68. 
SMBt»  Cirua  4e  GoyitB,  village  en  1819,  ville  depuis  1836, 1, 

311,135,  363,  363;  II,  11,  169,  193,333,338. 
BMita  iMtbel,  poste  militaire,  I,  375-280. 

~  e  Oejas,  village  en  1819,  aujourd'hui  villt. 


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TABLB  DES  MATlteBS.  M» 

f,  III,  S33, 135,  358,  lei,  S6S,  B63,  364;  II,  8-16,  2&,  17,  18, 
73,79,166. 

fcipgBri,  halte,  II,  309. 

S.  Aatanli»  (Fazmda  de),  bi^iiUtioii,  U,  «fl. 

S.  Ant*Bto  «•■  ]IE*Bt«i  Ctmrmmf  vilbge,  I,  S3l,  Ml  t  ' 
11,11,». 

B.  Vdls,  Tjllage  eu  ISI9,  aujourd'hui  ville,  I,  siï,  li&,  336,340. 

>•  '•*•  daa  «luw  Bamw,  ville,  I,  sss. 

9.  Joâ*  EnacellM»  (C&»c«ro  de]^  maison  de  cam- 
pagne, n,  iT-19. 

S.  «•>•  dn  pMlm^  Tille,  I,  S36. 

8.  Jsftad'El  Bel,  *ille,  I,  9â-iiS,  190,  iflS. 

>•  '«MIHlm  {Bnjftnho  de],  F.  Joaqvim  Al?bs  {F<amia  de) 

>•  Jsaé  <e  M««— lea— ,  o/dca  (riodieiis  coyapAs,  II,  gt- 
119, 111,  lie. 

■t  Chrfm«l,  roMAo,  I,  50. 

I,  habliaiion,  1, 107. 
•  d'AIcKntwrm,  village,  I,  !t:. 
1,  village  en  iBig,  attiourd'hui  ville,  I,  3ie,  3lS,  3&ff; 

n,  11, 16. 

i.  Mmqimm,  chapelle,  I,  t». 

tafié  iSacchanm  Sapé),  &-aminée,  I,  a78. 

tapé,  nom  de  lieu,  I,  in». 

t  famille  de  plantes,  IT,  Si. 

I.  y.  PlITSOCU.TIIai  FLORlDt. 
,  I,   t&,  31,  BB,  lOJ,  138,  330,  39Sj  II ,  &S,  11&, 
n«,  181,301,233,  378. 
■el^I,  131,335,393,  S03;  II,  15,  133,  161. 
Serpenta,  I,  9B. 

•  «'Ataité,  1.313,  3U. 

»  «•  AnuA,  I,  338,  !3T,  167. 

k  Am  CWIdau,  II,  109,  !I0,  115. 

»  I,   lis,   IIB,  IBB,   lSO-180,  101,  193, 
197,  189-101,307,  308,310,  311,3)3. 
,  1, 199. 
,  I,  tst. 


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TABLE  DBS  HATltelS. 

!■  l'aCMBttM*,  I,  313,  3W,  318, 
818,330,  369;  n,  S,  31,30,68,89,  134. 
•cm»  *mm  f^ijwpêmt  II,  H6. 
Sevra  d««  Crlataea,  I.  lio,  su. 
■erra  *mm  Mrtaè— ,  H,  148. 
Snv«D«ur«da,  I,  SIB;  U,  6i,  68,  6l»,8».9S,»B,  HT,  ISS, 

tss. 
Serra  da  Saurais,  I,  236,  les,  28i. 
■erra  «mi  *»mi  IgM»— ,  I,  90. 
Bem»  d*  Faplwhwy,  T,  lO,  34,  se,  6o,  87,  I64,  180,  1», 

30e,  308,  313,  334. 


^I,  Î3e,  167. 
,  1,313. 
Sem» de  J«r»cwft,  n,  fil. 
■erra  Ai  Maatlquelra,  I,  ôe,  60, 307. 
■<j|i»  da  Blar,  cfaalne  marilime,  I,  lO,  306. 
Serra  d«  SlareeUs,  I,  3iO,  313. 
■erra  doc  IHai^olM,  I,  !9S,  301. 
Serra  de  naate  Alla,  I,  343. 
■erra  de  nustcua^u,  I,  30T. 

■eiia  Jffesra,  montagne  de  la  comarca  de  S.  Jo3o  d'El  Rei,  I,  &0. 
■eira  Hesra,  monUgne  de  la  comirca  de  Sabùrl,  I    210,  311. 
■erva  de  ParacaCù,  I,  337,  280. 
■erra  do«  PUftea,  I,  31S,  211. 
■erra  de  PlimUty,  I,  ise,  loe,  iSB. 
Serra da  Kla  Brande,  I,  I83i  188,307.  .      , 

Serra daSalItre,  1,238,  255,267. 
■erra  de  Banta  Hartha,  II,  I4e. 
■erra  de  S.  Antaala^  n,  45. 
mvrrm  de  8.  «aStf,  1, 95,  1 16. 

SeFrada8.Fraael«eoeda<llqultliiltaillia,I,  111. 
Serra  do  8.  Frandeea  edoBloDsee,  1, 111. 
■erra  de  S.  Fraael*eaedaRlaerande,1, 119,112. 
■evradaS.  FraBdaea  e  da  Paranahyfea»  1,  tso, 

305,  313-316,  233,  314,  328,  267,  169,  271 ,  373,  175,  SOI,  306, 

<0T    311,318;  11,3. 


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TABLE  DES  MATIÈRES.  MT 

tmtmmMmmt  I,  li!,  «M, 

311,  319. 
Sen«dnaV«rtMites,  1,180,  205,  SOS,  311. 
Sem>  *m  llnabù,  I,  lis. 
Btwtêm  ou  Désert,  I,  iio,  lis,  |3B  ,  l&e,  iss,  iM,  1I6 ,  17T, 

lt)l,ise,337-:i0,  3Se,  IST,301,  330;  n,  133,104. 
S«rrtv*f  lieu  où ,  pour  extraire  dea  diamants ,  od  a  Aabli  mw 

troupe  de  nègres,  I,  tBO. 
SMN^ArlMi ,  quantité  de  terraa  que  donne  radministralion  au 

particuliera  qui  en  dâniodenl,!,  m. 
Mttim,  babiiitioD  dau  le  canton  de  Hio  Grande,.!,  S7. 
81U*  BIsT*,  GiiaumiËrea   pria  la  douane  des  Arrependidos. 

f.  Taipa. 
Sm»  SImmt  habitation  près  S.  Cruz  de  Goyai,  n,  128. . 
8aMUbl«(  genre  de  plantes,  I,  33&. 
ttofcwMllMh»,  bablUlion,  1 ,  803, 
••«•pliWf  nom  vulgaire  d'une  plante  lëguniDeuse,  It,  30». 
HalaaaiaaM  ladil|:riiBruaa,  plante  indigorère,  1, 101. 
Halwiaa»  IjiianwipiaMi ,  Solanée,  II,  i. 
■  vésétalM,!,  Si. 

■  (Tulgairement  fwiwi  do  camfo), 

plante  de  U  Tamille  des  Apocynées,  II,  11. 
MemaUa  <a>i>fc»,  grand  irta-e  k  wmeaces  comeslibles,  U,  U. 
SiBCrerle,  n,  133. 

8n>uuihi.3ii;ii,  111. 

T. 
Tafcsc,  I,  359;n,18,41. 
TaUcMB  fénérml  «la  ••■«•■  deBtoSrandto,  I,  0»- 

83;— DD  PATS  ËLEVi  ET  DÉSERT  COHPIIIB  EITRB  5.  JOAO  B'El  REI 
BTL&SEHBADACANASTnA,  llS-lJa;— DE  LA  COURCA  DB  PAKA- 
CATU,  104,  131  ;  —  DE  LA  PROVIKCB  DS  GOVlt ,  808-S1S  ;  —  DE 
LA  ROUTE  DO  VILLAGE  DE  P1l9eS  A  VlLLA  BOA,  II ,  151-164  ;  — 
DU  TOYAGR  DE  GOYAZ  A  S.  PaDL  ,  IBS- 171  ;  —DO  PATS  SITUS 
EKTRS  Bon  FlH  ET  LES  GaLOAS,  101  ;—  DO  PAYS  SITUfi  ENTRE 
LE  CORDmi  BT  LE  PaRANAHTBA,  131. 

Taafta.  f .  Cacuaça. 

m,  chaumière,  n,  i. 


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su  TABLE  bBS  MITIÉRES. 

TiHHiBdiiâ,  *ille,  I,  ne,  ub. 
TanuuwH,  habitaiioD,  I,  il. 

TniftTll,  artire  de  li  famille  des  Ugnmiimises,  II,  11. 
I,  bibiUtioc,  1, 133. 

t,  hibilatioD  dus  1>  comarca  de  Paracalu,  près  la  frontière 
de  Goyaz,  1, 134,  aoo,  t03,  204. 
T>pBg»T  Km  déserl  près  l'Aldea  Hiria,  dans  la  prOTioee  de  Goyaz, 

U,  138. 
Tapir,  I,  1S6. 

Temui  TtiKMMi.  y.  Aiguilles  tLBCTiuQiKs. 

l^nvlBS  MapëtTM,  I,  316,393,  301,  334;  U,  113,  ISl, 

191,333, 
Tkéfl,  800,  304. 

I.  y.  Plukiera  DRASnCt. 
•  {Wfxum&a  At),  petite  habiUlkm»  H,  300. 
1,1,  13,14,1»;  n,  1,  15. 
r  (toucbeur  de  mulets  w  de  bœufs),  I,  T,  1 13. 
T«I*B,I,  61. 

Bidbel,  II,  13&. 

,  Tiltageeo  1818,  Tille  depuis  isii,  I,  335;  II,  il. 
Tnrite  dca  aèsr»«,  1, 18. 

R(canTatiederauleU),I,7, 95»;n, 4l,&e,  (71,330,334, 

genre  de  chltîment,  II,  lOi. 


VMk,  haliitation,  I,  is. 
IJfecnava»,  vilk  nouvelle,  II,  soi. 
Vmitii,  serpeDi,  I,  97. 


,  ville  (autrement  (ild«a),  I,  34-39. 
T«lnu«  rep>é—aii»ltTwsi,  I,  364-36B. 
~    ~    w,  oisifs,  vagabonds,  1, 117,  140,118,144,346, 160. 


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TABLE  DES  MATlÈftBS.  M» 

TaMwda  (galerie),  1, 36  ;  U,  2. 

TAcétftttMi,  1 ,  62, 59,  83,  I3t,  101,  ITT,  Il&-3:9,  13S,  !3fi, 
J&1,359,  370,  374,  SOI,  310-3131  H,  31,36,  17,  SS,  l&l,  170, 
176,191,  194,308. 
TstaaM.  F.  LiSB&OH. 
TellMil»  lamela  ffema),  genre  de  pilotes  monocolylédoDes, 

1,90,  116,  18G,  3t7,lTO,  371,  Ail  ;  II,  13,  14,90,101. 
Ten^M,  e8]>6ce  de  cabaret,  I,  T. 
TeM«,  I,  8e;n,  40, 193. 
TerlMlMs  [A'(io  do^  petite  bibitation,  II,  136. 
Terà«*l«>I,  361,364. 
VerMaaith  1, 333. 

é  {Fazaida  dot),  hibiiation,  1, 1 4 1 . 
1  [  Fazmda  dat  ) ,  habitation ,  I,  31, 
90. 
VlcarlsdaTBm,  dignitaire  ecdésiBRlitjue,  1,314,  ST6;  II,  44. 
TlpM,  1,868,  861,  364in,  41,  83. 
TUtoB**)  ciqiitale  de  la  proTÎnce  de  Goyaz,  I,  316,  316,  t8S, 

386,  849,  S&8,  368,  369;  II,  66-86,  160-167,  178. 
VUtaCM,  n,  13. 

T,  37;  11,78. 

.  f .  TjUUORIL. 

Vi«lto%  Q,  6S. 

T— fcwllrfgft  Je  1» iMgiiC  J«# CT»»é»,  n,  108;  — 

DBS  IiDUHS  mns  m  l'Aldu  do  Rio  bas  Pbdras,  36 1  ;  —  du 

Chickuus,  189. 
T*chTMl», genre  de  plantes,  1, 137, 366, 361  ;  II,  3T. 
T«I,I,  106,  118,386. 


riN  DE  LA  TABLE  DES  NATIÉEtES. 


^d:,;.  Google 


D,<j,i,.,.d.:,  Google 


ERRATA. 


Pa^     6,  ligne  39  (note  3),  ou  lieu  de  seconda,  Usez  m^dûi. 

Page   3S,  ligne  1 1,  ou  lieu  de  Conceçaio,  liiez  Coiueiçao. 

Page  3 T,  ligne   6,  ou  lieu  de  de  trouver  ce  qu'a  écril,  liêez  de 

trouver  ici  ce  qu'a  écrit. 
Page    89,  ligne  10,  ou  lieu  de  conservatrice,  Utes  conservatrices. 
I^ge    ta,  ligne  iL,  au  Heu  de  les,  lisex  des. 
Page  llB,  ligne  3  (noie  ij,  ou  lieu  de  Serra  do  Rio  Grande  e  do  S. 

Francisco,  liiez  Serra  do  S.  Francisco  e  do  Rio  tirande. 
Page  136,  ligne  i»,  au  lieude  Hatro  dento,  litez  Mato  deniro. 
Page  149,  ligne  16,  au  lieu  de  il  y  a,  Htes  il  a. 
P^e  IB&,  ligoe    7,  ou  lieu  de  beau-père,  lia «2  beau-frère. 
Page  i9&,  ligne  n,  ou  lieu  de  Fronça,  litez  Franco. 
Page206,  ligne   3  (noie  1),  ou  Ueu  de  Flumituet,  liiez  Flumi- 

nefuea. 
Page  373,  ligne  10,  ou  lieu  de  étant,  liiez  éiait. 
Page  106,  ligne  13  (note  i),  ou  Itew  dt  da  Corumbi,  (iiet  do  Co- 

nimbi. 
Page  113,  ligne  6  (note  i},  on  Ji«H  de  Rio  de  la  Pla,  Uiex  Rio  de  la 

PlaU. 
Pa^e  311,  ligne   1 ,  au  lieu  de  de  communicaiions ,  liiez  des  com- 
munications. 
Page  336,  ligne  33,  ou  tieu  de  plus  exacte,  la  capitainerie,  liiez  plus 

exacte,  de  la  capitainerie. 
Page  369,  ligne  30,  au  lieu  de  Serra  da  Paranabyba  e  do  TocaiH 

UnB,  litex  Serra  do  Commbi  e  do  TocanHas. 

V0LUK8  U. 
Page     3,  ligne   e,  ou  It«(<t«  (p.  31SJ,  Itaez  (vol.  I,  p.  31B}. 

Id.      ligne  30,  ou  iteu  de  [y.  p.  34Sj^  liaei  (f .  vol.  I,  p.  S4Sj. 
Page    1 1 ,  ligne    1  (note  3J,  ou  lieu  de  qui  termine ,  Hies  qui  cou-  . 

Page    34,  ligne    9,  <lu  heu  de  trois,  (iaea  deux. 

Page  137,  ligne   9,  au  Ueu  de  bord  de  Rio  Fartura,  UteM  bord  du 

Rio  Fartura. 
Page  M3,  ligne  13,  ou  lieu  de  d'exlraire  l'or  du  Rio  CUro ,  Uiez 

d'extrure  l'or  et  les  diamanis  du  Rio  Claro. 
Page  Mb,  ligne  7,  ou  lieude  dans  le  temps  de  sa  sécheresse,  liiez 

dans  le  temps  de  la  sécheresse. 
Page  l&S,  ligne  10,  au  lieu  de  Porto  Felis,  liiez  Porto  Feliz. 
Page  I9S,  ligne  19,  ou  lieu  de  Rio  de  Jurubutuba,  liiez  Rio  Juru- 

tuiuba. 


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