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Full text of "Voyage d'exploration en Indo-Chine : effectué pendant les années 1866, 1867 et 1868 par une commission française présidée par M. le Capitaine de frégate, Doudart de Lagrée et publié par les ordres du Ministre de la marine sous la direction de M. le Lieutenant de vaisseau, Francis Garnier, avec le concours de M. Delaporte, Lieutenant de vaisseau et de MM. Joubert et Thorel, médecins de la marine, membres de la commission"

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VOYAGE D’EXPLORATION 


INDO-CHINE 


CORBEIL. — TYPOGRAPHIE ET STÉRÉOTYPIE DE CRÉTÉ FILS. 


VOYAGE D'EXPLORATION 


EFFECTUÉ 


PENDANT LES ANNÉES 1866, 1867 ET 1868 
PAR UNE COMMISSION FRANÇAISE 


PRÉSIDÉE PAR M. LE CAPITAINE DE FRÉGATE 


DOUDART DE LAGRÉE 


ET PUBLIÉ PAR LES ORDRES DU MINISTRE DE LA MARINE 


SOUS LA DIRECTION DE M. LE LIEUTENANT DE VAISSEAU 


FRANCIS GARNIER 


AVEC LE CONCOURS DE M. DELAPORTE, LIEUTENANT DE VAISSEAU 
Et de MM. JOUBERT et THOREL, médecins de la Marine 


MEMBRES DE LA COMMISSION 


OUVRAGE ILLUSTRÉ 


DE 250 GRAVURES SUR BOIS D'APRÈS LES CROQUIS DE M. DELAPORTE 


ET ACCOMPAGNÉ D UN ATLAS 


TOME SECOND 


© PARIS 
LIBRAIRIE HACHETTE ET C! 


719, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79 


Il € 7 & 


Droits de propriété et de traduction réservés. 


MCZ LIBRARY 
HARVARD UNIVERSITY 
CAMBRIDGE. MA USA 


OBSERVATIONS 


ASTRONOMIQUES ET MÉTÉOROLOGIQUES 


PAR M. FRANCIS GARNIER 


OBSERVATIONS 


ASTRONOMIQUES ET MÉTÉOROLOGIQUES 


PAR M. FRANCIS GARNIER 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


1° Positions déterminées astronomiquement. 


Les instruments dont disposait la Commission consistaient en un théodolite boussole, 
un cercle répéliteur, un horizon artificiel, un chronomètre et deux compteurs. Le 
dernier état absolu des montres a été calculé le {1 juillet 1866, à Cratieh (Sala du roi), 
dont la position prise sur la carte de Cochinchine 1867 (Manen, Vidalin, Héraud), 
est {7 LAN, N-4 de Paris. 

1. Sombor. Cour de la maison du gouverneur à la pointe même du fleuve. Position 
adoptée { 63 4 00N- }. La latitude de ce point n’a pu étre obtenue que par une observation 
d'étoile très-incertaine.'La longitude varierait en temps de — 15,3 pour + 1 de variation 
sur cette latitude. 

De Sombor, le relèvement astronomique de la petite colline dite Pnom Chi, le seul 
point saillant qu'offre l’horizon, a été trouvé au théodolite de N. 6%° 52 0". 

2. Stung Treng | 43 371% N° |. Les observations ont été faites à l'embouchure d’un petit 
arroyo situé à deux milles de la pointe rive gauche du confluent du grand fleuve et de 
la rivière d’Attopeu. L'étude de la marche des montres en ce point a révélé les varia- 
ons considérables causées par les trépidations et les chocs brusques d’une pénible 
navigation en barque, et par les orages et l’élévation de température ressentis pendant 
le trajet. Une seconde excursion faite de Bassac au mois de novembre a permis de 
recalculer avec plus de précision la longitude de Stung Treng et de rapporter ce point 
au méridien de Bassac. L’intervalle très-faible écoulé entre le départ de Bassac et l’ar- 
rivée à Stung Treng, l'égalité de la température, le courant favorable qui emportait la 


barque sans la soumettre à aucun choc, l'identité des marches calculées aux deux 
IL. 


2 ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


- 


extrémités du parcours permettent de considérer cette seconde détermination comme 
lrès-exacte. 

La latitude de Stung Treng est la moyenne des résultats obtenus par une hauteur 
méridienne de lune prise le 22 juillet, et par deux séries de circumméridiennes de 
soleil *, observées le 9 et le 10 novembre. Je la crois approchée à 10”. 

3. Khon {4535 0% à 1. Le point d'observation est situé sur la côte Nord-Ouest de l’île, 
au Sala construit près du village. La longitude a été déterminée comme la précé- 
dente en partant de Bassac pour redescendre le fleuve. La latitude a été obtenue 
par une série de cireumméridiennes du soleil prise le 6 novembre. 

4. Khong | er UE Sala sur le bord du fleuve, à 100 mètres au Sud du 
logement du gouverneur. Position déterminée comme la précédente. 

Il a de plus été fait sur le sommet d’une petite colline (Phou Hin Khong). 


située à deux milles au N. 62 19° O. du campement, une station au théodolite. 
Voici les données qui n’ont pu être encore utilisées, faute d’un second relèvement : 


Groupe des montagnes dites de Fer (province de 


Tonly Repou), arête Ouest. S. 20° 15’ 00” O. 
Coupure au milieu du groupe. SMS UNO? 
Même groupe, arête Est. S. 15 42 40 O. 
Piton en second plan et à l'Est des montagnes 

de Fer. Te S. 14 18 00 O. 
Sommet le plus élevé d’un autre groupe mon- 

tagneux dans le N.-0. du précédent. STD 20) Ce 
Mamelon isolé entre les deux chaînes. SSD MUUNUE 


5. Bassac | F5 N). Sala du roi sur les bords du fleuve, vis-à-vis le lo- 
gement du roi. 

A partir de Stung Treng, une longue maladie m'a empêché de suivre la marche des 
montres, et j'ai dü, en arrivant à Bassae, profiter du très-long séjour que la Commission 
a fait en ce point pour essayer de le déterminer directement à l’aide des distances 
lunaires. 

La moyenne de vingt-cinq distances ? orientales du soleil à la lune a donné pour 
longitude sur Paris 6" 53" 44; 

La moyenne de dix-neuf distances occidentales, 6° 53" 59° ; 

La moyenne de dix séries d'étoiles en nombre égal à l'Est et à l'Ouest, 6° 53" 47. 

Le chiffre définitivement adopté après discussion de ces différents résultats à été 
demo 0e 

J'estime cette longitude approchée à 6° en temps, c’est-à-dire à un mille et demi 
environ. Toute correction qui lui serait apportée devrait être faite également dans le 


! Les séries de cireumméridiennes que j’ai employées sont toutes de six hauteurs, chacune d'elles croisée 
trois fois au cercle, prises en nombre égal avant et après le passage au méridien. 
? Chaque distance a été croisée cinq fois au cercle. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 3 
même sens aux longitudes de Stung Treng, Khon et Khong, et aux positions qui vont 
suivre jusqu à Luang Prabang exclusivement. 

La latitude de Bassac a été déterminée par quinze Jours d'observations cireumméri- 
diennes solaires. Je l'estime approchée à moins de 5” de degré. 

Il a été fait à Bassac plusieurs stations azimutales et des calculs de hauteur des prin- 
cipaux sommets qui se trouvent à l'Ouest. 

6. Chutes du Se Don } 73% 5 À |. Le point d'observation est silué au milieu des 
rizières de la partie Sud-Ouest de lile des Chutes, assez près du bras Ouest de la 
rivière. Les éléments du calcul sont deux hauteurs horaires et l'intervalle. Le compteur 
apporté pour cette courte excursion a été comparé avec soin au départ et à l’arrivée au 
chronomètre laissé à Bassac, et dont la marche était rigoureusement connue. 

Le dernier état absolu des montres sur le temps moyen de Bassac a été pris le 
295 décembre 1866, jour du départ de l’Expédition de ce point. 

7. Étranglement du fleuve au Nord de Bassac 15° O1' 05" N. Il a été observé le 
26 décembre des circumméridiennes du soleil sur la rive droite du fleuve, au point où le 
pic dit Phou Phlong vient resserrer et réduire à 5 ou 600 mètres la largeur du fleuve. 

8. Phou Salao | 0 Ÿ |. Point culminant de la montagne. La latitude de ce 
sommet a été conclue par l'estime de la précédente. Pour + 1’ de variation, il faudrait 
corriger la longitude de — 2°, 9 en temps. Celle-ci a été conclue des hauteurs horaires 
qui ont servi à calculer les azimuts des points culminants relevés au théodolite sur 
le sommet de la montagne le 27 décembre. Voici les relèvements astronomiques qui 
pourraient servir à des déterminations ultérieures : 


Phou Toun cai. SAAOMOUEILOMUDE 

Phou Padang. S. 43 16 54 O. 

Phou Lôn. NOEL Mer 0 IS AU) 

Phou Phay (sommet le plus Sud). S. 19 09 49 O. en arrière-plan des mon- 
tagnes précédentes. 

RDOUREO RE ES SO 4200; id. 


Toutes ces montagnes paraissent être le prolongement dans l'Ouest du massif de 
Bassac. 

La hauteur de Phou Salao a été donnée par le baromètre; elle est de 251 mètres 
au-dessus du niveau du fleuve. 

9. Ban Heuong Sai {65 15058 ). Cour de la Pagode située sur les bords 
du fleuve. La détermination par hauteurs horaires est du 29 décembre, quaire jours 
après le départ de Bassae, et l'accord des montres reste parfait. La latitude à été donnée 
par une série de circumméridiennes solaires prise le même jour. 

10. Premier rapide du Se Moun ! 30. N 1. Même détermination que la pré- 
cédente, faite le 31 décembre. Le point d'observation est situé près de la rive gauche 
de la rivière, vis-à-vis la pointe Est de l'ile qui forme le rapide, et Nord et Sud avec la 
borne qui indique la limite des provinces de Bassac et d'Oubôn. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


= 


11. Oubon {IE À). La marche des montres calculée à l’arrivée a indiqué 
une légère accéléralion survenue depuis le départ de Bassac dont il a été tenu compte. 
La latitude a été donnée par des cireumméridiennes solaires observées le 7 et le 8 janvier. 

Le point d'observation est le logement de l’Expédition, situé dans la plaine qui 
entoure la ville au Nord, à trois-quarts de mille environ de la rive droite du Se Moun. 

12. Excursion d'Oubôn à Angcor. Dans cette excursion faite à pied, je n’ai disposé 
que d'une montre et d’une boussole. Les distances parcourues, estimées au pas et 
décomposées suivant la méridienne et la perpendiculaire, ont donné les coordonnées 
estimées de chacun de ces points par rapport à l’autre. D'un autre côté, ces coordonnées 
peuvent s’oblenir directement par le calcul, les deux positions d’Angcor et d’Oubôn 
étant déterminées par l’observation. Si j'appelle x et y ces coordonnées, L, L’, Z, 7, les 
latitudes et les longitudes des deux points extrèmes du parcours, », &’ les rayons de cour- 
bure de la méridienne et de la perpendiculaire à Angcor pris comme origine des 


coordonnées, J'aurai : 


x = (l — 1) cos L'p'sin 1”, (1) 
TD ele — (& = Dicos? Litg (L = ) (2) 
ou, sans erreur appréciable : 
sin 1” 


y = (L'—L)o sin 1” — (l — IP cos? L'tg L. 


A 


0h10 3 © o o æ 30 18  09/ N 
La position d'Angcor (citadelle) (carte de Cochinchine, 1867) est ! 469 3 5 à: 


En effectuant le calcul indiqué ci-dessus, on trouve pour les coordonnées vraies 
d'Oubôn sur Angcor NE = 3e die 

Les coordonnées estimées ont été trouvées de {L00:80> ” }. Les différences en 
moins qu'elles présentent sur les coordonnées vraies sont très-sensiblement propor- 
tionnelles, et on peut admettre qu'elles ne proviennent que d’une estimation trop 
faible de la vitesse de marche. En faisant subir une correction proportionnelle aux 
coordonnées eslimées des points intermédiaires du parcours,on pourra done en 
conclure assez exactement la latitude et la longitude de ces derniers. Les formules (1) 


et (2) donnent en effet : 


jantge EE SRE 
(- sin vd) cos L' 


, y sin 1” 2 J'\O ( y ) 
HE Ti 0 a bg RE RE qe Pt Ses 
on E- e sin 4” 2 (- sin r) 5 e sin 1” 


Le calcul du dernier terme de la latitude est toujours négligeable. 
C’est ainsi qu'il a été trouvé pour les chefs-lieux des cinq provinces traversées dans le 
cours de cette excursion, les positions suivantes, que j'estime approchées à l’environ en 


latitude et en longitude. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. à] 


4159 03’ 


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Ce mode de caleul à été employé dans la suite pour toutes les excursions dont les 
points extrêmes pouvaient être déterminés par l'observation. L’habitude d’un pas uni- 
forme et le choix de bons points de repère pour les directions lui ont donné quelquefois 
une précision remarquable. Ce calcul n’est plus applicable quand on revient au point 
même d’où l’on est parti, comme dans les excursions d’Attopeu et de M. Phong faites par 
le commandant de Lagrée. L'un des termes du rapport s’évanouit, etil n’est plus possible 
de connaitre la vitesse réelle de la marche. 

13. Pagode d'Angcor ! 15 5 Net. Tour centrale. Cette position déterminée au mois 
de juin pendant le premier séjour de la Commission repose sur les positions des sommets 
dmontBo EP dumontéroms) ES ECtdePn Coulent eme 
données par la carte de Cochinchine 1867, et relevées au théodolite de ce point. 

14. Kemarat | 45° 0 9 N. Ce point a été déterminé par M. Delaporte. La latitude 
résulte de trois séries circumméridiennes solaires, la longitude a été donnée par les 
montres sur Bassac. Le lieu d'observation était situé sur les bords du fleuve, près de l’extré- 
mité Est du village. 

15. Ban Mouk | 5% 5 |. Ce point a été déterminé comme le précédent par M. De- 
laporte. Le campement de l'Expédition était à l'extrémité Nord du village, près de l’em- 
bouchure du Huei Mouk. La longitude a été déterminée par les montres, la latitude par 
deux séries de circumméridiennes du soleil. 

16. Zakon } N° 2 UN. }.(M. Delaporte.) Le lieu d'observation était le campement, 
placé à l'extrémité Sud du village. La latitude a été obtenue par plusieurs séries de cir- 
cumméridiennes solaires. Longitude par les montres. 

17. Peunom 16° 56 O1" N. (M. Delaporte.) Une hauteur méridienne du soleil. Lieu 
d'observation situé près de la rive, sur la chaussée qui sert d’avenue au monument de 


Peunom. 
j 17034010" Ne.) noie.) Ga eur les ore re. vis-à-vis 
18. Houten \ ,9 10 30 5 }- (M. Delaporte.) Sala sur les bords du fleuve, vis-à-vis 
l'embouchure du Hin Boun. Latitude par deux séries de cireumméridiennes solaires. 
Longitude par les montres. 
ID 


19. Saniaboury { hi 5 0 N° !. Sala situé dans l’intérieur de l'angle du Soumkam 


et du grand fleuve. A partir de ce point (14 mars), l'élévation du soleil ne permet plus 
d'observer sa hauteur méridienne à l'horizon artificiel, et les latitudes n’ont plus en 
général la même précision. Celle de Saniaboury a été calculée par deux hauteurs 


horaires et l'intervalle. 
e j A8 01/00" N. ) à de x se 
20. Ponpissay À 199 39 00 € :- Sala sur les bords du fleuve, à 800 mètres en 
aval de l'embouchure du H. Leuong. La latitude à été obtenue par une bonne série de 


6 ELEMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


cireumméridiennes lunaires prise le 2% mars. La marche des montres est restée régulière 
et permet de compter sur la longitude. 

21. Nong Kay { 44 5 00 à |. Sala sur les bords du fleuve, à un kilomètre en aval 
de la demeure du gouverneur. La latitude à été calculée par deux hauteurs et l'intervalle. 
La marche des montres commence à accuser quelques perturbations. 

22. Xeng Cang 17° 54 00" N. Obtenue par une hauteur méridienne de Saturne. C’est 
la seule observation que le temps ait permis de faire en ce point. 

DSP Lay ONE) latitude repose sur une hauteur méridienne de lune, 
prise le 18 avril. Les difficultés de navigation rencontrées depuis Nong Kay ont amené des 
perturbations graves dans la marche des montres, et la longitude de Pak Lay doit être 
considérée comme l’une des plus incertaines de la carte. 

24. Luang Prabang À N° 54 20" N- |. La latitude résulte de trois hauteurs méridiennes 
de lune, la longitude de six séries de distances occidentales du soleil à la lune. Cette 
longitude est probablement trop faible. La durée du séjour de la Commission n’a pas 
permis d'observer des distances orientales et d'achever la triangulation commencée 
autour de la ville. La multiplicité des sommets qui l'entourent et la difficulté d’une 
désignation exacte enlèvent tout intérêt à la liste des nombreux relèvements astronomiques 
calculés en ce point. Le campement de la Commission était établi sur le versant 
Sud-Ouest du petit mamelon qui s'élève au centre de la ville. À Luang Prabang, les montres 
reprennent une assiette normale qu’elles conservent quelque temps, et les deux points 
suivants peuvent être considérés comme bien placés par rapport au méridien de cette 
ville. 

25. Pak Bén } 5 WN-).Point d'observation situé sur la berge du fleuve, à 
très-peu de distance en aval du confluent du Nam Bén. La latitude a été donnée par 
une hauteur méridienne de Saturne, la longitude par les montres sur Luang Prabang. 

26. Xieng Khong À %° 47 00 N° |. Sala sur les bords du fleuve, un peu en amont de 
l'embouchure de l’arroyo qui traverse le village. La latitude a été calculée par deux hau- 
teurs horaires et l'intervalle, la longitude par les montres sur Luang Prabang. 

27. Rapide Tang Din 20 3% 20" N. Rive droite du fleuve. Hauteur méridienne 
de lune prise le 17 juin. 

28. Muong Lim {39 45 20" N- }. Extrémité Sud du village. La latitude a été calculée 
par deux hauteurs horaires. La longitude a été donnée par une seule distance orientale 
du soleil à la lune, etest par suite très-incertaine. Le transport par terre des montres, par 
des chemins affreux, et le long temps écoulé depuis le départ de Xieng Khong ne 
permettent d’avoir aucune confiance dans leurs indications. 

29. Paléo {2 5 0 À). Pagode du village. Deux hauteurs et l'intervalle. Les 
difficultés de transport et de marche rendent {toujours assez incertains les résultats accusés 
par les montres, malgré le faible intervalle de temps écoulé depuis M. Lim. 

30. Siemlap | 2500 À]. Pagode du village. Deux hauteurs et l'intervalle. Même 
observation que ci-dessus. 


9 "ap! N 0 o 
31. B. Passang } 55% à |. Pagode du village. Deux hauteurs et l'intervalle. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 7 


Ce point a été déterminé en longitude sur M. Yong, dont il n’est séparé que par une très- 
faible distance. 

32. Muong Yong À HN MN 1. Sala à l'entrée du village. Le séjour fait en ce point 
a permis de prendre huit séries de distanees occidentales du soleil à la lune et de régler 
les montres avec le plus grand soin. La latitude a été obtenue par une hauteur 
méridienne de lune. 

33. Muong You {2° 0). Sala sur la rive droite du Nam Leui. Détermination 
par des hauteurs horaires. 

34. Muong Long | 4° 5%". |. Sala sur la rive gauche du Nam Nga, près du 
pont en pierre jeté sur ce cours d’eau. La latitude provient d’une hauteur méridienne 
du soleil prise le 27 septembre, premier jour où son observation à l'horizon artificiel est 
redevenue possible. Quatre séries de distances orientales ont été également calculées en 
ce point. La marche régulière constatée pour les montres depuis Muong Yong a permis de 
combiner ces distances orientales avec les distances occidentales observées dans ce 
dernier point. Ces dernières rapportées au méridien de Muong Long, à l’aide du change- 
ment en longitude fourni par les montres, ont pour moyenne 6" 33" 135; la moyenne 
des distances de Muong Long est de 6" 33" 45°. La longitude définitive de ce dernier 
point sera donc de 6" 33" 28, et c’est d'elle que l’on a conclu les longitudes de Muong 
Yong, Muong You et de B. Passang. 

Il à été fait une station azimutale au pied du 74 qui domine Muong Long. Pour les 
mêmes raisons qu'à Luang Prabang, il est inutile d’en donner les résultats. 

35. Xieng Hong | WI Ÿ |. Pagode dite Wat Tchien Lan, au Sud de la nouvelle 
ville. La latitude est le résultat de deux séries de circumméridiennes solaires prises le 2 et 
le 3 octobre. La longitude a été donnée par les montres dont les résultats restent très- 
concordants et dont la marche n’a pas varié. Mac Leod a donné pour le même point la posi- 
tion de { 95 5 À} Greenwich ou 98 19°E. Paris. Cette dernière longitude me paraît trop 
faible, mais la latitude reste très-exacte, car le point d'observation de Mac Leod était situé 
deux milles plus au Sud, sur l'emplacement aujourd’hui abandonné de l’ancienne ville. 

36. Xieng Neua 22% 28 15" N. Pagode du village. Observation de la hauteur 
méridienne du soleil le 12 octobre. 

37. Muong Pang 22 30 25" N. Centre du village. Hauteur méridienne solaire 
du 13 octobre. 

38. Nang Sang Ko 22 33° 40" N. Centre du village. Hauteur méridienne solaire 
du 14 octobre. 

39. Se-mao tong tche ‘| 5253 6 À |. Hauteur méridienne solaire ; longitude par les 
montres, dont la marche reste satisfaisante. Le lieu d'observation est la pagode dite Kouan 
in kong, située hors des murs, à 800 mètres dans le S.-S.-0. de la porte Sud de la ville. 

40. Pou-eul fou {2% 6 N 1, Hauteur méridienne solaire et montres. Le lieu 


| 98 4700 E. 
d'observation est la pagode dite Kouan chen kong, située dans la partie Nord de la 


‘ Les mots écrits en romain à la suite des noms des villes chinoises indiquent le rang ou le titre des 
mandarins qui les administrent. 


S ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


ville. Biot, dans son Dictionnaire des noms géographiques de l'empire chinois, donne 


oo o ; , < 07 0 930 02'N. 
pour la position de ce point caleulée d’après les cartes des jésuites | ne Le 


990 17! EU N 0 0:10 . 
41. Tong-kouan \ 5j 17 5 N |. Pagode du village. Hauteur méridienne du soleil, 
montres et distances lunaires. 


r 6 990 96’ UN ü ! . 
42. Yuen-kiang tcheou | #5 % MT 1. Pagode dite 7% tchang che où Temple de l'esprit 


; 
de la terre. Trois hauteurs méridiennes du soleil, montres et distances lunaires. Ce point a 
été déterminé par les pères Fridelli et Bonjour, et serait placé d’après eux par | 59 one 
La faible différence en longitude que présentent ces deux déterminations ne tarde 
malheureusement pas à s’accuser bien davantage dans les positions suivantes. Je ne puis 
donner qu'avec réserve des positions déterminées rapidement, dans des circonstances de 
marche et de séjour extrèmement défavorables, et qui ne sont presque toutes que des 
moyennes assez incertaines entre les résultats combinés de l'estime, des montres et des 
distances lunaires. Cependant les positions relatives des points rapprochés du parcours de 
la Commission présentent une certitude suffisante pour permettre de reconnaitre d'assez 
graves erreurs dans les déterminations des jésuites. La méthode des triangles dont ils 
se sont servis demande des précautions infinies et des instruments plus parfaits que 
ceux dont ils disposaient, et elle ne pouvait leur donner des résultats bien précis. Ils ont, 1l 
est vrai, rectifié parfois leur triangulation par l'observation directe des latitudes, et lon 
distingue bien vite les points qui ont été ainsi déterminés de ceux dont la latitude n’a été 
calculée que par la méthode générale ; mais les longitudes semblent ne reposer que sur 
de très-rares et très-incertaines observations d’éclipses, faites en des points très-éloignés 
les uns des autres. En résumé, dans les régions frontières comme le Yun-nan, où ces 
géographes consciencieux n'avaient pas, comme dans l’intérieur de la Chine, l’occasion de 
redéterminer plusieurs fois le même point par différents itinéraires, les résultats de leur 
triangulation ont dû être souvent très-médiocres. 

On comprendra par suite qu'il soit à peu près impossible d'appliquer aux déter- 
minations des jésuites une règle générale analogue à celle formulée déjà depuis 
longtemps par quelques cartographes, à savoir, que les longitudes orientales par rapport 
au méridien de Pékin sont trop fortes, et les longitudes occidentales trop faibles. Ce 
qui est vrai dans une région n’est plus vrai dans l’autre, et les cartes des différentes 
provinces de la Chiñe n’ont pas été dressées par les mêmes observateurs. Pour le 
Yun-nan, j'ai eru reconnaitre qu'à l’Est du 99° méridien, les longitudes des jésuites 
sont trop fortes, et que la différence peut même aller jusqu'à un demi-degré; qu'à 
l'Ouest de ce même méridien, elles deviennent trop faibles. Mais cette règle ne saurait 
avoir rien d’absolu, et il est tel point singulier qui pourra lui donner un flagrant 
démenti. Aussi, en dehors des points que j'ai pu déterminer moi-même, Je n’ai apporté 
de correction aux positions des jésuites dont j'ai eu à faire usage dans la rédaction des 
cartes que lorsque des renseignements précis sont venus m'indiquer le sens et la portée 
probable de l'erreur. 

43. Pa-kang 23° 23 20" N. Hauteur méridienne solaire prise sur la berge même du 
fleuve du Tong-king à peu de distance du point où j'ai dù m'arrêter en le redescendant. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 9 


Long-yen-tcho 23° 28 10" N. Hauteur méridienne solaire prise sur la route à 
une demi-lieue dans le S. 55° O0. de ce village, le 30 novembre. 


=! UN 
45. Lin-ngan fou { (à je 97 SN 1. Pagode hors murs nommée Ou fou se che où Temple 


des cinq sages. Deux hauteurs ne du soleil, DONNE et distances lunaires. La 
À ü 7 7 . DE MOUSNE 

même ville est placée par les jésuites par 100 4 30 p:- L'estime du chemin parcouru 

entre Yuen-kiang et Lin-ngan forcée dans les d re limites ne peut faire 


2 


admettre la différence de 55° en longitude qui résulterait de cette détermination et de 
celle de Yuen-kiang. 

46. Che-pin tcheou | ,69 #4 N . Pagode Zou ki kong che où Temple de l'esprit 
de la terre. Hauteur méridienne du soleil, et montres réglées sur Lin-ngan. 

47. Tong-hay hien } SU À |. Pagode Kouan chen Kiun che où Temple du saint 
roi Kiun. Hauteur méridienne du soleil, montres et distances lunaires. 

48. Long-tien-ouang 24 20' 56" N. Hauteur méridienne solaire prise le 17 décembre 
1867. 

49. Xiang-tchouen hien ! 56 242 Fo. Tribunal de la ville. Hauteur méridienne 
du soleil, montres et distances lunaires. 

+ Tou-é 2% 46 45" N. Hauteur méridienne solaire du 22 décembre. 

. Yun-nan fou { il. Palais des examinateurs pour le baccalauréat. Deux 
no méridiennes solaires, montres et huit séries de distances lunaires. Cette ville 
est placée par les jésuites par ! 66 51 %0 NL: 

52. Vang-kay 25° 26 57" N. Hauteur méridienne solaire prise le 11 janvier 1868 

53. Kon-tchang 25° 45° 00" N. Hauteur méridienne solaire du 14 janvier. 

54. Tong-tchouen fou { 955 5 à |. Pagode située dans l'angle N.-E. de l'enceinte. 
Hauteur méridienne solaire et montres. Redéterminé ensuite par les distances lunaires 
prises dans le point suivant à mon retour de Ta-ly. La même ville est placée par les 
Jésuites par aol SR !. L'erreur commise sur la latitude est assez sensible, et ne 
saurait s'expliquer par le choix d’un autre point d'observation, s'il est resté pris dans l’in- 
térieur de la ville. 

55. Mong-kou | 5 N !. Hauteurs méridiennes du soleil et distances lunaires 
occidentales. Le lieu d'observation était la cour de la principale auberge du village. 

56. Houey-ly icheou {25% 5 N ). Auberge près du logement du Mandarin. Hau- 
teur méridienne solaire et montres sur Mong-kou. Le mème point est placé par les Jésuites 
Dan 5 di p). La différence des deux déterminations est si considérable qu'elle ne 
semble devoir s'expliquer que par un déplacement du Teheou dont cette ville est le siége. 

DT. Forpanodeso |) 092002 Roue École du village. Hauteur méridienne solaire et 
montres sur Ma-chang. 

58. Ma-chang | SW SN). Centre du village. Hauteur méridienne solaire, el 
quatre distances orientales de la lune au soleil. 

D9. Tou-louy-tse 26° 07! N. Mission catholique. Hauteur méridienne solaire. 

60. Za-ly fou { 40 E}. Vamen à l'extrémité du faubourg Sud de la ville. Hau- 


. 0 2" 
teurs horaires. Les jésuites nn ie mie one 


IF. 2 


10 ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


61. Kay-tcha-t 26° O1 00" N. Centre du village. Hauteur méridienne solaire assez 
médiocre. Temps voilé. 

62: Nqa-da-ti 26° 09 00" N. Mème observation que ci-dessus. 

63, Can-tchou-tse À 5559 6 N° !. Hauteur méridienne solaire, et distances orientales 
de la lune au soleil. 

64. Soui-tcheou fou ou Soui fou ! 25 37 50 n°} Centre de la ville. Hauteurs horaires 
et l'intervalle pour la latitude, trois séries de distances occidentales du soleil à la lune 
par la longitude. La position donnée par les jésuites est {65 3 4 à). On voit quelle 
erreur en latitude la méthode de triangulation adoptée par eux a pu entrainer quel- 
quefois. Le capitaine Blakiston et M. Arrowsmith ont donné pour le même point 
sue pe. Leur point d'observation était situé sur la rive Sud du fleuve, vis-à-vis la 
ville, et rend un compte très-exact de la différence en latitude que présentent leur 
détermination et la mienne. Ce point était également situé un peu plus dans l'Est, mais 
la différence des deux longitudes n’en reste pas moins très-considérable, et prouve 


l'incertitude du procédé des distances lunaires, surtout avec des observateurs différents. 


2° Rédaction des cartes, 


La projection employée est celle de Mercator. 

Carte générale de l'Indo-Chine et de la Chine centrale. — Cette carte a pour but de ré- 
sumer l’état des connaissances géographiques sur cette partie de Asie avant le voyage de 
la Commission française. Les côles ont été tracées d’après les documents hydrographiques 
les plus récents publiés par les marines anglaise et française, notamment la carte 
du golfe de Siam, par le capitaine Richards, les travaux de M. Ploix dans le golfe du 
Tong-king, et ceux du commodore Brooker sur la côte Ouest de la presqu'ile de Malacca. 

Les documents qui ont servi à reproduire l’intérieur du continent sont : 

1° Pour la Chine, les travaux des jésuites, collationnés avec soin sur les cartes 
originales de lédition de 1735, et tenus au courant des changements politiques ou 
administratifs survenus depuis cette époque, le levé du fleuve Bleu fait en 1861 jusqu'à 
Ping-chan bien par le capitaine Blakiston, celui du Si Kiang ou fleuve de Canton fait 
en 1859 jusqu’à Ou-tcheou par le lieutenant Bullok : 

2° Pour la Cochinchine, la carte de Taberd et les travaux des ingénieurs hydrographes 
francais Manen, Vidalin, Héraud dans le delta du Cambodge ; 

3° Pour la Birmanie, la carte du capitaine H. Yule (1858) ; 

4 Pour le Siam et le Laos, les cartes de Mae Leod (1837), Richardson 
(1839), Parkes (1855) ; 

5° Pour le Tibet, les cartes des jésuites compilées par d’Anville, et les travaux du 
Pundit, envoyé, en 1865, par le capitaine Montgomerie dans l'Himalaya et à Lassa. J'ai 
laissé inachevé le raccordement du système fluvial du Tibet avec celui du versant Sud de 
l'Himalaya. | 

L'orthographe adoptée a été, pour la Chine, celle des jésuites; pour l'empire d'Annam, 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 11 


celle des missionnaires, quoiqu'elle ne repose pas sur les mêmes principes que la 
précédente ; et d’une manière générale, pour le reste de la carte, l'orthographe latine, à 
l'exception pourtant des noms consacrés déjà par l'usage, comme Shanghaï, Swatow, ete., 
et de ceux des lieux qui n'ont été visités que par un seul voyageur et que j'ai donnés tels 
qu'il les a écrits lui-même. 

Carte générale de l'Indo-Chine. — Cette carte qui est à une échelle double de la précé- 
dente, donne l'itinéraire d'ensemble de la Commission française, et réemploie tous les 
documents précédemment cités, mais discutés et rectifiés avec soin à l’aide des 
renseignements recueillis directement sur les lieux. Les modifications les plus notables 
portent surtout sur l'itinéraire de Mouhot, dont les notes ont été souvent mal comprises ou 
mal interprétées, malgré les plus conseiencieux efforts. Il n°y a qu’à lire attentivement dans 
l'édition anglaise de son voyage ”, le chapitre intitulé Directions and distances, pour aperce- 
voir les contradictions et les impossibilités qu'il contient à chaque page et qui proviennent 
sans doute d'erreurs de lecture, faciles à commettre dans la mise au net de notes de 
voyage. Celles-ci ne sont guère intelligibles, on le sait, que pour celui quiles a prises. 
L'interprète français de la Commission pour la langue siamoise, le nommé Séguin, a fait 
entre Nong Kay et Ban Kok un trajet dont les deux tiers coïncident avec l'itinéraire de 
Mouhot entre cette dernière ville et le fleuve le Cambodge. Ses indications intelligentes 
m'ont permis de retrouver une partie des erreurs commises dans la traduction des notes 
du malheureux voyageur; mais mon attention avait été éveillée surtout par la méprise 
capitale relative au cours du Nam Leui, que la carte de Mouhot fait couler vers le Sud, alors 
que nous avions rencontré son embouchure entre Xieng Cang et Pak Lav, c’est-à-dire 
dans une direction diamétralement opposée. 

Pour l’intérieur du Cambodge, j'ai utilisé dans cette seconde carte les itinéraires de 
Kennedy, King et Bastian, publiés successivement dans le Journal de la Société Géo- 
graphique de Londres en les rectifiant en certains points d’après les renseignements 
recueillis pendant mon excursion au Nord du Grand Lac. 

La région située au Nord de nos possessions de Cochinchine entre le fleuve le 
Cambodge à l'Ouest et la grande chaine de Cochinchine à l'Est, reste l’une des plus 
incertaines de la carte. J'ai porté dans cette zone, en dehors des renseignements recueillis 
par la Commission, les indications qui résultent d’une petite carte levée par le P. Arnoux, 
missionnaire français qui a longtemps résidé à Brelam, carte qui m'a éfé communiquée 
par le Dépôt de la marine; mais ce croquis contient de trop graves erreurs dans la partie 
qui lui est commune avec le trajet de la Commission pour inspirer une bien grande 
confiance dans le reste. Une récente exploration faite par M. Mourin d’Arfeuille, lieutenant 
de vaisseau, dans cette contrée permettra peut-être de combler cette lacune. 

Dans cetle carte comme dans les suivantes, lorthographe définitivement adoptée pour 
les noms cambodgiens, laotiens, siamois et birmans, a été l'orthographe latine légèrement 
modifiée. L’w français a été conservé avec sa prononciation, parce qu'il se retrouve dans 


1 Travelsin the Central parts of Indo-China. London. 1864. 


12 ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


toutes ces langues. Les seules diphthongues employées ont été ou pour le son latin de w, et eu 
pour le son dur de œw dans le mot français œuf ou l’& barbu de l'orthographe annamite. 
Toutes les autres voyelles doivent être prononcées séparément: ainsi, 67, o7, at ou ay doivent 
être lues comme s'il y avait un trémasur 17; le g après l’7 indique le son nasal; quand il 
n'existe pas, l’2 ou l’» doivent toujours sonner !. Pour les noms chinois et annamites, 
j'ai conservé, à peu d’exceptions près, l'orthographe des missionnaires. 

Carte itinéraire n° À. — La partie du fleuve comprise entre Sombor et Stung Treng est 
loin de présenter toute la rigueur qui serait nécessaire pour lui donner une valeur réelle. 
Dressée dans les plus mauvaises circonstances, en pleine inondation, alors que beaucoup 
d'iles étaient sabmergées, que beaucoup de points de repère avaient disparu, elle ne doit 
être considérée que comme un dessin approximatif qui appelle de nombreuses rectifica- 
tions. La rive gauche a été levée en remontant le fleuve, alors que la berge avait presque 
disparu sous la crue des eaux et que les barques naviguaient pour ainsi dire en pleine 
forêt. On n’a pu par suite recueillir de ce côté aucune indication de profondeur, ni démêler 
nettement la constitution de lPinextricable réseau d’îles qui obstrue dans cette région le lit 
du fleuve. La rive droite le long de laquelle j'ai redescendu en pirogue avec une vitesse 
qui m'a fait parcourir en douze heures la distance totale de Stung Treng à Sombor, m'est 
apparue peut-être plus nettement. Mais les inégalités énormes dans la force du courant, 
l'impossibilité de faire des stations ou des observations à terre, la difficulté de prendre 
de bons relèvements pendant une locomotion aussi rapide, laissent encore subsister sans 
doute dans son tracé de très-nombreuses erreurs. Ce ne sera que pendant la saison 
sèche, aux eaux basses et en disposant de moyens considérables, qu'il sera possible d’ob- 
tenir, en y consacrant plusieurs mois de travail, la représentation exacte de cette partie 
du fleuve. 

La carte des rapides du Khong, faite dans de meilleures conditions, est loin encore 
d’être parfaite : elle devra être complétée en beaucoup de points, notamment dans la partie 
de la rive gauche qui avoisine la chute de Papheng, où je n'ai pu déterminer les indi- 
gènes à me conduire. 

Carte itinéraire n° 2. — Les positions astronomiques de cette carte le long de la vallée 
du fleuve sont reliées entre elles de la façon la plus satisfaisante, et il n°v aura sans doute 
d’autres changements à leur faire subir que celui qui pourrait résulter du déplacement du 
méridien de Bassae, qui est le pivot de toute la carte. Malheureusement, à partir des chutes 
du Se Don, aucune observation directe ne vient contrôler l'itinéraire accompli par le com- 
mandant de Lagrée autour du massif volcanique qui sépare la vallée du Se Don de celle 
de Se Cong, et les positions importantes de Saravan et d’Attopeu présentent par suite 


1 Je ne me dissimule pas combien ce système d'orthographe est imparfait, mais il faudrait avoir une plus 
grande autorité que je n’en ai en ces matières, et surtout une connaissance plus approfondie des différentes 
langues de l’Indo-Chine pour oser en proposer un autre plus complet et plus général. Il est, dans tous les cas, 
bien vivement à désirer que l’on arrive à adopter un mode uniforme d'écriture pour les noms étrangers. 
N'’est-il pas déplorable que la même carte doive aujourd'hui contenir deux ou trois orthographes différentes, 
dès qu’elle embrasse une étendue de pays un peu considérable ? Les recherches, les travaux de toute nature 
en deviennent d’une difficulté extrème, et il en résulte parfois les confusions les plus étranges. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 18 


une légère incertitude. Tous les noms géographiques indigènes ont été soigneusement 
respectés. Mais là où ils n’existaient pas, j'ai eru pouvoir en proposer : c’est ainsi que j'ai 
donné le nom de Pic de Lagrée à la montagne très-remarquable, en forme de teton, qui 
limite au Sud-Ouest le massif volcanique dont je viens de parler. 

Cette carte et toutes les suivantes sont à une échelle uniforme, quadruple de celle de la 
carte générale de l’Indo-chine. 

Carte itinéraire n° 3.— Les parties de cette carte déterminées astronomiquement sont 
le bassin du Grand Lac au Sud et la vallée de Se Moun au Nord. Ces deux zones ne sont 
reliées entre elles que par l'itinéraire du voyage que j'ai accompli au travers des provinces 
cambodgiennes de Côcan, Souren, Sankea et Tchoncan. J'ai dit plus haut quel avait été le 
procédé employé pour le levé de cet itinéraire et pour le caleul de la position des principaux 
points du parcours. A l'Est d’Angcor, j'ai tracé la route approximative suivie par le com- 
mandant de Lagrée en février et mars 1866, c’est-à-dire antérieurement au voyage d’explo- 
ration lui-même. Mais je dois faire observer que ce tracé ne repose que sur des souvenirs et 
des appréciations de direction assez vagues. M. de Lagrée était dépourvu, pendant cette 
excursion qui avait plutôt un but archéologique que géographique, de tout instrument, 
même d’une boussole de poche. | 

Carte itinéraire n° 4. — La vallée du fleuve a été déterminée astronomiquement 
par M. Delaporte, depuis Pak Moun jusqu’à Houten. Les itinéraires de la rive gauche ont 
été tracés d’après l'estime du commandant de Lagrée; celui de la rive droite, d’Oubôn à 
Ban Mouk, d'après ma propre estime. J'ai également déterminé, après discussion des 
divers renseignements recueillis, la position des différents points placés en dehors des 
routes suivies par la Commission. La vue de montagnes annexée à cette carte et dessinée 
par M. Delaporte représente le panorama qui se déroule le long de la rive gauche du Cam- 
bodge, quand on remonte le fleuve de Lakon à Houten. 

Carte itinéraire n° 5. — Cette carte se réduit au tracé de la vallée du fleuve. Les 
quelques positions indiquées au Sud de Nong Kay sont placées sur les renseignements de 
l'interprète Séguin. Les vues de montagnes, dessinées par M. Delaporte, qui sont jointes 
à cette carte, ont été prises la première du campement de Houten, la seconde en route 
dans la matinée du 20 mars. 

Carte itinéraire n° 6. — En dehors du tracé du fleuve, cette carte contient quelques ren- 
seignements qui m'ont été communiqués sur la vallée du haut Menam par M. Duyshart 
dont la rencontre avec la Commission a été racontée dans le premier volume de cet ouvrage 
et un petit itinéraire accompli par le docteur Joubert et donné d’après ses indications. Le 
panorama de montagnes qu'elle contient est du à M. Delaporte, et représente l’aspect 
des rives du fleuve, le 29 avril dans la matinée. 

Carte itinéraire n° 7. — Le travail géographique dans la région du Laos Birman que 
représente cette carte a été d’une difficulté inouïe et présente quelques incertitudes. La 
saison des pluies, pendant laquelle cette partie du voyage a été effectuée, a rendu les 
observations difficiles, a nui à la bonne conservation des instruments et augmenté de 
beaucoup les chances d'erreurs dans l'estime journalière de la route faite. En dehors des 


14 ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. 


positions que j'ai déterminées directement, cette carte contient encore la position de Xieng 
Tong (Kiang Tung) donnée par Mac Leod et qui a servi à rectifier l’estime du com- 
mandant de Lagrée entre ce point et Muong Yong. Cette position est | 22748 Et 
Pour Muong Lem j'ai adopté 12° 1990" À } au lieu de { ## 29 20" N- | donné par les jé- 
suites pour ce point, qu'ils ont orthographié Wong Lien. Jai indiqué également la 
position de Suen-ouei-sse donnée par eux { #12 00 À: }; mais je n'ai pu reconnaitre si 
le point qu'ils désignent ainsi existe encore et l'identifier avec un nom laotien. Peut-être 
Suen-ouei-sse n'est-il autre que le 7che-li-tchuen-fou-sse de la carte du Yun-nan dressée 
par les mêmes missionnaires et qui se trouve sur les bords mêmes du fleuve. Dans ce cas 
la détermination en longitude de ce point serait très-défectueuse. Cette contrée a du reste 
été bouleversée si souvent etles déplacements des populations ontété si nombreux qu'il ne 
faut point espérer retrouver les lieux de toutes les dénominations anciennes, surtout quand 
ces dénominations sont chinoises et sont restées ignorées dans la contrée elle-même. 

Le panorama de montagnes que contient cette earte et qui est dù à M. Delaporte, 
est le dernier paysage pris sur les bords du Cambodge à Xieng Hong. 

Cartes itinéraires n° 8, 9, 10. — En dehors de la route de la Commission, les 
renseignements géographiques que contiennent ces cartes prennent une plus grande 
autorité des travaux des jésuites qui ont servi à les contrôler. Les renseignements politiques 
et administratifs sont tirés d’une carte chinoise du Yun-nan prise sur les lieux mêmes. Voici 
quelles ont été les modifications apportées aux positions observées, données par Îles 
Jésuites pour tout ce parcours. 


Positions adoptées. Positions des jésuites. 
Mong-tinq (SF A6ooon does vo Bi 
Long-han kouan | de és de F. } | ; EL 30 ë. 
Yn-yuei lcheou, aujourd'hui Teng-yue ünh ‘ . Se a Re va à Se 2 à À 
Tching-Kang tcheou, aujourd'hui, Long-ling tong tehe D Up 0 
Yun-tchang fou (D Door) 0% E) 
Mong-hoa tin M Oo ni 
Kiu-ising fou Liôt 10 00 1.) laoieo do  E 
Lo-ping tche che tcheou DUR De a à | jee a Ù 
Kouang-nan fou Lude 3000 E } (102 #55 B | 
Kai-hoa fou Lot 46 00 RE.) (102 0125 El 
Mong-se hien Do 0 com à cher 
Chun-ning fou (67 53 00 & | À 07 486 D 
King-tong Vou M ee un ail 
J “ ++ Dj à 
Ho-si hien SR ct die de 


1 ]1 y a une faute dansle journal de Mac-Leod, tel qu'il a été donné dans le sixième volume du Journal 
de la Société Asiatique du Bengale (äécembre 1837, p. 993). On y lit pour la latitude de Kiang Tung 21° AT 487. 
La carte qui est jointe à ce document rectifie d’ailleurs cette erreur. 


ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE 


Kouang-si icheou 


1014 15 00 


Telin-kiang tou _ : n 
Tchou-hiong tou Re 
Ta-tching kouan fer san 
Li-kiang tou Ress 
Yong-ning tou fou Qi ess 
Yun-pe ünh (Este 
Yao-ngan teheou ones 
Ou-ting tcheou er 
Ou-mong tou fou, aujourd'hui,  7chao-tong fou f si 2500 
Tchen-hiong tcheou Re 
Kieou-lan icheou gun 


Ma-hou fou, donné par les jésuites, n'existe plus aujourd’hui. 


N 
Ï 
N. 
E 
N 


N. 
E. 


E. 


HZ2n2m2m2E7EB2m2% 


{ 240 39 36/ N. ; 
E. 


j 


15 


f 24939! 36” N. ; 


L101 


( 24 


L 100 
f 211 
\ 99 


265 IS GAIN 


L181 


26 


27 
À 102 
{ 

\ 97 


29 50 
43 12 
44 30 
06 00 
13 10 


E 
N. 
E. 
N. 


A 


32 00 N. 


28 00 


07 20 
48 28 
27 10 
42 00 


39 10 


32 20 
09 50 


) 32 44 


S9R90 


7 20 24 


26 30 
18 00 
32 15 
32 00 
29 30 


DZO2H2N2E2E2EH252 1 


Dans la carte n° 8, l'ilinéraire de la Commission de Pou-pio à Che-pin, est tracé 


d'après l'estime de M. Delaporte, et l’excursion aux mines de cuivre de Sin-long d’après 


celle du docteur Joubert. Le panorama de montagnes est dù à M. Delaporte, et repré- 


sente la perspective du lac de Tehin-kiang, prise de l’extrémité Sud de ce lac. 


De Lao-oua-tan à Soui-tcheou fou, dans la carte n° 10, les détails et l'estime de la 


route faite sont très-incertains, un accident m'ayant fait perdre les notes prises pendant 


cette partie du trajet : je n'ai done pu contrôler rigoureusement par l'estime léeart 


en longitude que présentent mes déterminations avec celles des jésuites, entre Tchao- 


tong et Soui-tcheou fou. 


Ping-chan hien, dernier point du fleuve Bleu reconnu par le capitaine Blakiston en 


1861, a été placé, par rapport à Soui-tcheou fou, comme l'indique sa carte. 


, 
à 

> 

D 
! 
1 
L - 

à 

DT 


Lu 


Il 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES 


La commission ne disposait que d'instruments fort insuffisants pour les observations 
météorologiques. Un seul baromètre marin à cuvette à graduation insuffisante et 
quelques thermomètres à mercure étaient tout ce qu'avait pu lui fournir l’observatoire de 
Saigon. Une série d'instruments mieux appropriés aux exigences d’un voyage 

o) il ) yas 
d'exploration avait été demandée en France, mais ne nous parvinrent jamais. Tout 
ce que je pus rapporter plus tard de mon voyage à Pnompenh fut un Paromètre ho- 
lostérique, dont les indications laissèrent beaucoup à désirer à la fin du voyage. Il a été 

? P yas 
comparé avec soin, depuis mon retour en France, avec un baromètre à mercure, etce sont 
les résultats de cette comparaison que j'ai employés !. 

Je vais présenter sous forme de tableaux mensuels l’ensemble des observations quo- 
tidiennes faites pendant le voyage, en résumant ensuite pour chaque zone climatérique 
NS P 
les principaux faits météorologiques qui découlent de leur examen. La température est 
donnée dans les tableaux qui suivent en degrés centigrades et la hauteur du mercure 


dans le baromètre en millimètres. Cette hauteur est celle qui correspond à la tempé- 
rature observée au même moment. 


1 C’est à M. A. Thénard que je suis redevable de ce travail, sur lequel je donnerai en temps et lieu quelques 
détails, et je lui en adresse ici tous mes remerciements. 


TABLEAUX : 


IT 3 


TABLEAUX 


Ces tableaux embrassent une période de plus de vingt-trois mois, du 6 juillet 1866 
au 9 juin 1868 et une zone terrestre qui comprend 19° en latitude. J'ai partagé cette 


lSLAOS 
JUILLET 1866 
| = nr nr 
LIEUX s s 
, DATES THERWOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D'OBSERVATION 
BromIP EN EEE Les instruments sont encore emballés pendant ce trajet qui a été S.-0. 
En route. .... 7-9 | fait à bord de la canonnière 27. | Id. 
| Cratieh CCS 10-12 8h du matin. 2h du matin. midi 3h du soir. 5h du soir. Id. 
| | degrés. millim. degrés. millim. degrés. millin. degrés, anillim, degrés. millim. | 
[in Idem. 13 21,0 752,0 » » 30,0 » 31,0 » 30,0 » S.-0. 
En route. . ... 14 24,0 » » » 27,0 » 29,0 » 30,0 » Idem. | 
SOMbon ere) no 2 TO, » » 26,0 » 30,0  » AD » Idem. | 
En route. . . .. AGE 610) » » ES » SD » 200) Idem. 
Idem. ATOM 25 A0) » » 2HB 0) 30,0, » 28,0 » Idem. 
Idem. 18 | 24,0 » 23,0 » 25,5 » 26,0 » 25,0 » 0.-S.-0. 
Idem. 19 24,0 » » » 28,0 » 28,5 » 26,0 » S.-S.-0. 
Idem. 20 26,0 » » » 29,0 » 29,0 » 28,0 » 0.-S.-0. 
Idem. 21 | 26,0 » » » AD. » 30,0 » 28,0 -» 0. 
| Stung Treng..| 22 | 24,0 750,0 » » 28,0 750,0 | 30,0 751,0 | 28,0, 751,0 S.-0. 
| Idem. 23 25,0 750,0 » » 28,0 750,0 | 29,0 754,0 | 28,0 750,0 S.-S.-0. 
Idem. 24 » » » » 28,0 153,0 11270. 752,01 24,5 750,0 Idem. 
9h du matin 
Idem. 5 » DS TE ON 27 OT IE ON 25 0 ON 22 0 O0 Idem. 
Idem. 26 » DR 5 05008 STE NON TOO RON TE 072100) Idem. 
Idem. Pl » » 25,0 749,0 | 29,0 749,0] 30,0. 749;,011429;5. 749;0 Idem. 
Idem. 28 | » » |26,0 748,5 | 28,5 749,0 | 26,0 749,0 | 25,0 749,5 Idem. 
Idem. 29 » » 26,0 748,5 | 28,5 749,0 | 26,0: 749,0 | 25,0, 749,5 Idem. 
Idem. 30 » » 26,0 748,0 | 28,0 748,0 | 29,0 749,0 | 24,0 T48,0 S. | 
Idem. 31 » » 25,0 748,0 | 29,0 749,0 | 29,5 749,0 | 27,0 748,0 0.-S.-0. | 


MÉTÉOROLOGIQUES 


zone en quatre climats, le Laos méridional, le Laos septentrional, le Plateau du Yun-nan, 
la Vallée du Fleuve Bleu. 


MÉRIDIONAL 


JUILLET 1866 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 
Jolie brise pendant 
les grains. 
Petite brise. 


Jolie brise. 


Inégale, à grains. 


Petite brise. 
Idem. 
Inégale. 

Jolie brise inégale. 


Bonne brise. 
Petite brise. 


Idem. 
Jolie brise inégale. 


Petite brise inégale. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Jolie brise. 
Inégale. 


TEMPS 


Très-beau temps, légers nuages. 
Violents orages. Temps magnifique dans les | 


intervalles des grains. 
Assez beau temps. Quelques grenasses. 


Nuageux. 
Couvert jusqu'a 10" du matin. Nuageux 
l'après-midi. 


Légers nuages. 

Tres-beau. Se couvre le soir. 

Couvert et pluvieux jusqu'à midi. Se dégage 
le soir. 

Orage et pluie torrentielle jusqu'à 3° du ma- 
tin. Couvert et pluvieux le reste du jour. 

Couvert et pluvieux. 

Le temps se remet au beau. Quelques petits 
grains dans la journée. 

Temps couvert qui se dégage au milieu du 
jour. 

Orage et pluie de minuit à 4° du matin. 
Assez beau dans la journée. 

Assez beau, nuageux. Quelques petits grains. 

Pluie continuelle. 


La pluie ne s’interrompt que peu de temps 
vers midi. 

Le temps s’éclaireit un peu l'après-midi. 

Le temps reste couvert, mais la pluie cesse. 

Un peu de pluie au milieu de la journée. 
Temps assez beau le soir. 

Pluie continuelle. 

Le temps s’embellit un peu le soir. 

Temps à grains : la pluie reprend dans la 
soirée d’une facon continue. 


OBSERVATIONS 


La saison des pluies est définitivement 
établie. Depuis les premiers jours de 
juin, la crue du fleuve s’est vivement 
accusée, et des le 10 juin le courant 
du bras d'Oudongs’est prononcé vers 
le Grand Lac. 

Départ de Cratieh à 10". L'observation 
du baromètre cesse d’être possible 
en route, à cause des mouvements 
de la barque. 

Variations à Sombor, 2° 35’ N.-E. 


Arrivée à Stung Treng à 2° de l’après- 
midi. 


La rivière d’Attopeu monte pendant 
ces deux jours de plus de 2". 


La crue continue. 
Baisse de 0",30 pendant la nuit. 
La baisse continue. 


La rivière remonte de 0",40. 
La crue continue. 
La crue paraît s’arrèter. 


AOÛT 1866 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


Stung Trenqg.…. .. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


| Idem. 
| Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
En route. ..... 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Île de Khon. . .. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Enairoute tn 


| Idem. 


BODY à s so000 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


DATES 


9» du malin. 
degrés. millim. 
95,0 748,0 
27,0 750,0 
27,0 150,0 
25,0 750,0 
25,0 781,0 
26,0 150,5 
25,0 749,0 
26,0 749,0 
25,0 748,0 
24,5 747,0 
25.0 747,0 
25.0 748,0 


217,0 749,0 
26,5 749,0 
27,5 » 

2155 » 

27,5 748,0 
25,0 746,0 
24,5 747,0 
25,0 745,0 
25,0 745,0 
25,5 745, 

25,0 745,0 
25,5 745,0 
27,0 » 

28,5 748,0 
27,5 746,0 
27,0 745,0 
26,0 145,0 
25,0 745,0 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


midi. 3b du soir. 

degrés. millim. degrés. millim. 

28,0 748,0 | 29,3 749,0 
285 750,0 | 30,0 750.0 
29,5 750,0 | 30,0 (750,0 
28,0 731,0 | 30,0 750,0 
97.5 7514 | 280 751.0 
28,0 150,0 | 28,0 150,0 
30,0 749,0 | 34,0 749,0 
27,0 750,0 | 27,0 750,0 
978  UTAS ON NS ON TATAO 
940 7410 | 25,0 TUTO 
26,0 747,0 | 28,0 747,0 
97.0 748,0 | 27,0 747.0 
26,5 748,0 | 27,0 748,0 
29,5 » | 97.5 

28,0 » 30,0 » 

30,0 » 30,5 » 

30,5 » | 315 » 

30,0 748,0 | 30,0 748,0 
217,0 146,0 | 29,5 745,0 
26,0 746.0 | 290 745.0 
26,5 745,0 | 29,0 744,0 
97,0 744,0 | 28,0 744,0 
27,5 ‘745,0 | 29,0 745,0 
217,0 745,0 | 27,0 745,0 
290 745,0 | 25,0 S 

30,0 » 28,5 » 

30,5 748,0 | 30,5 148,0 
29,5 745,0 | 30,0 745,0 
26,5 743,0 | 215 745,0 
2105 746,0 | 28,5 745,0 
217,0 145,0 | 28,0 745,0 


bh du soir. 

degrés. millim. 

DOS TL SN0 
28,5 750,0 
21155 150,0 
21,5 150,0 
26,0 751,0 
27,0 750,0 
32,0 749,0 
25,0 750,0 
OT 0 
25,0 741,0 
217,0 747,0 
DÉS NUTAT A0 
27,5 748,0 
27,0 » 

31,0 » 

31,5 » 

30,0 » 

2 TLO 
30,0 745,0 
25.0 744,0 
SH 
26,0 744,0 
30,0 745,0 
24,0 744,0 
26,0 » 

29,0 747,0 
29,5 748,0 
28,0 745,0 
28,0 745,0 
28,5 745,0 
27,0 745,0 


DIRECTION DU VENT 


S.-0. 
0. 


S.-E. 


Idem. 


0. 
Idem. 
Idem. 

O.-S.-0. 

0. 

O., puis passe 
au S. le soir. 


Très-variable. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
E. 


Calme. 


0. 
Idem. 


N.-0. 
0. 
E.-N.-E. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 21 


Bonne brise. 

Petite brise. 

Jolie brise. 
Idem. 


Petite brise. 
Idem. 


Inégale. 


Idem. 
Très-inégale. 
Idem. 

» 
Presque calme. 
Très-légère. 


Inégale. 


Idem. 
Petite brise. 


Idem. 
Jolie brise. 
Petite brise. 


Presque calme. 
Trèes-inégale. 


» 


Très-petite brise. 
Inégale. 


Idem. 
Tres-variable. 
Petite brise. 


AOÛT 1866 
ne ru on JC | | 
FORGE DU VENT TEMPS OBSERVATIONS 
| 
| 
| 
Petite brise. Couvert et pluvieux. Le niveau de la rivière reste station- | | 
Idem. Se dégage au milieu du jour et devient naire. | 
tout à fait beau. | 
Jolie brise. Assez beau. — Petits grains dans l’après- | 
midi. | 
Petite brise. Beau. Nuageux. La rivière baisse de 0",30. 


Temps orageux et fortes ondées de pluie 

. à partir de 3° de l’après-midi. 

Eclaircie à midi. Le temps redevient plu- | Du 6 au 26 août, les observations mé- 
vieux le soir. téorologiques ont été faites par | | 

Le soleil se montre dans l'après-midi. Pluie M. Delaporte. 
et orage pendant la nuit. | 

Temps pluvieux. Quelques éclaircies dans 
la journée. 

Mème temps. 

Pluie torrentielle qui ne cesse que le soir. | Crue de 1",80. | 
Temps orageux. | 


Temps couvert et à grains. Nouvelle crue de 0,40. | 
Courte éclaireie le matin. Pluie le reste du | Même crue. 
jour. 


Temps orageux. La pluie cesse le matin et | Baisse de 0°,40. 
reprend à la nuit. 

Beau temps le matin. Grains à partir de | Départ de Stung Treng à 10° du ma- 
midi. tin. 

Très-beau temps. | 
Idem. 

Très-beau temps. Un petit grain pendant | Arrivée à l’île de Khon à 4 du soir. | 
la nuit. 

Beau temps. Quelques petits grains vers : | 
2» de l’après-midi. | 

Temps couvert. Pluie par intervalles. Le niveau du fleuve diminue. 

Brouillard le matin. Temps à grains, beau | 
par intervalles, l’après-midi. | | 

Assez beau temps. Quelques ondées dans 
l'après-midi. 

Temps orageux et à grains. Pluie torrentielle 

endant la nuit. 

Brume le matin. Beau temps le reste du | Le fleuve commence à remonter. 
jour. 

Temps orageux. Pluie presque continuelle. 

Belle matinée. À midi, grain d'Estquiramène | Départ de l’île de Khon à midi. | 


la pluie. 
Assez beau temps. Un peu de pluie dans | Arrivée à 4" à Khong. 
la soirée. 
Très-beau temps. Légers nuages. Le niveau du fleuve reste à peu près 
Quelques grains dans l’après-midi. La nuit, stationnaire, avec une légère ten- 
orage lointain. dance à monter. 


Temps couv. et pluv. Orage à l'horizon. 

Même temps. Quelques éclaircies. 

Temps couvert et brumeux. Pluie fine par 
intervalles. 


(© 
[AC 


SEPTEMBRE 186 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


Idem. 
En route. ..... 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


DATES 


Le) © = S © CRUE CES 


Er rkr US = = 
DC À Co [he] = eo 


> 
CN | 


29 


9h du matin. 

degrés. millim. 

26,0. 745.0 
25,0 745,0 
28.0 746,0 
DT 717,0 
DO TAT:0 
26,0 749.0 
27,0 749,0 
26.0 746,0 
24,5 746,0 
26,0 745,0 
26,0 744,0 
26,0 743,0 
25,0 744,0 
25.0 744,0 
25.0 744,0 
945  T45,0 
24,0 746,0 
94,0 745,0 


26,0 744,5 
25,0 744,5 
26,0 745,0 
26,0 745,0 
25,5 ‘744,0 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


midi. 


millim. 
745,0 
745,0 
746,0 
747,0 


747,0 
749,0 


749,0 
745,0 
746,0 
745,0 
744,0 
743,0 
Täk,0 
74,0 
7ä4,0 
745,0 
745,0 
745,0 
746,0 


746,0 
745,0 


745,0 


3h du soir. 
degrés. millin. 
28,5 TAB,0 
27,0 ‘145,0 
275 ‘746,0 
30,5 T4T ,0 
25,5 147,0 
290 748.0 

6h du matin. 
24,0 748,0 

3h du soir. 
29,0 745,0 
25,0 746,0 
97,0 745,0 
28,0 744,0 
28,0 743,0 
26,0 744,0 
25,0 744,0 
25,0 743,0 
25,5 743,0 
25,5 145,0 
26,0 745,0 
26,0 746,0 
28,0 746,0 
98,0 745,0 
28,5  7145,0 
97,0 144,5 
28,0 745,0 
27,0 744,0 
27,5 744,5 
97,0 744,0 
30,0 743,5 
30,0 744,0 


30,0 744,0 


oo 


5h du soir. 

degres. milliu. 

97,0 748,0 
27,0 743.0 
27,0 746.0 
28,5 746,0 
94,5 7TAT,0 
27,0 748.0 
27,0 749,0 
28,0 745,0 
93,3 746,0 
27,0 744,0 
27,0 744,0 
27.0) 742,0 
25,0 144,0 
26,0 744,0 
95.8 743,0 
25,5 143,0 
26,0 743,0 
217,0 744,5 


21,0 745,0 
28,0 743,0 
28,0 743,0 


DIRECTION DU VENT 


S.-E. 
S.-0., passe le soir 
au S.-E. 
S.-E. | 
N.-E., puis le soir 


0. 
Idem. 
Idem. 

Est. 


Calme, 
le soir S.-E. 
S.-S.-0. le m., S.- 
S.-E. le s.etlan. 


SES 
S.-S.-E. tournant 
à l'O. le soir. 


E. au N.-E. 
SESÉÈER 


S.-E. 
N.-E., puis N. 


N.-E. 
N.-E., puis S.-E. 


le soir. 
E.-N.-E., 
puis S.-E. le soir. 
N.-E. le matin, 
S.-E. le soir. 
Idem. 


N.-E. 
N.-N.-E. 


Idem. 
N.-E. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


SEPTEMBRE 1866 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 
Jolie brise. 
Idem. 


Inégale. 


Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Très-inégale. 


Idem. 


Petite brise. 
Jolie brise 
qui fraichit le soir. 
Inégale. 

Jolie brise. 
Petite brise. 
Bonne brise tombant 
beaucoup le soir. 
Petite brise. 


Bonne brise àrafales. 
Idem. 


Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Jolie brise. 


Idem. 


Presque calme. 
Idem. 


TEMPS 


Temps couvert et brumeux. Pluie à 4' du s. 

Mème temps. Averses plus fréquentes. 

La pluie augmente. 

Assez beau temps le matin. La pluie recom- 
mence le soir. 

Temps couvert. Pluie continue de3" à 7° du s. 

Assez beau temps. Quelques grains dans la 
journée. 

Temps couvert. Un peu de pluie vers midi. 


Temps couvert et pluvieux. Eclaircie dans 
l'après-midi. 

Temps orageux. Grains nombreux le soir 
et la nuit. Pluie torrentielle. 

Temps couvert très-orageux. Grains de l'Est. 
Une éclaircie vers 2" de l'après-midi. 

Temps couvert. Pluie fine par intervalles. 
Pendant la nuit, quelques grains du S.-E. 

Temps couvert qui se met à la pluie le soir. 
À minuit, fort orage. 

Pluie presque continue. 
Idem. 
Idem. 

La pluie cesse à 10" du m.,et le soleil paraît un 
instant à 2°. À 10° du s., la pl. recommence. 

La pluie cesse à la même heure que la veille. 
Temps couvert le reste du jour. 

Temps couvert. La pluie cesse entre 5" du 
matin et 8" du soir. 

Pluie presque continue. Le temps s’embellit 
un peu dans la soirée. 

Temps assez beau. Voilé. Orages dans le S.-E. 

Pluie le m. Le temps redevient très-beau par 
une petite brise du Nord. Eclairs dans l'Est. 

Beau temps nuageux. Un petit grain vers 
1° de l'après-midi. 

Temps couvert. Grains orageux donnant peu 
de pluie. 

Temps très-nuageux le matin; couvert et 
pluvieux dans la soirée. 

Beau temps le matin. Le soir, le temps se 
couvre. Pluie pendant la nuit. 

Même temps. 

Beau temps, nuageux. Grain orageux à 2° du 
soir, qui ne donne pas de pluie. 

Très-beau temps. Eclairs à lhorizon. Le 
temps se couvre la nuit. 

Mème temps. 

Pluie de minuit à 2°. Très-beau temps pen- 
dant le jour. L’horizon se charge à l'Est le 
soir. 


OBSERVATIONS 


Variation à Khong 2° 38’ N.-E. 


Le niveau du fleuve monte ; son cou- 


rant devient plus rapide. 


Départ de Khong à midi. Halte à 3". 


Arrivée à Bassac, à 9" 1/2 du matin. 


Variation à Bassac 2° 38’ N.-E. 


Le fleuve atteint son niveau maximum. 


Le fleuve commence à baisser sensi- 


blement. 


RO) 
EN 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


OCTOBRE 1866 


LIEUX ; ; 
DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D OBSERVATION 
9h du matin. midi. 3h du soir. 5h du soir. 
degrés. millim. degrés. millim, degrés. millim. degrés. millim. 
| | JAMES Loto oc { 25,5 745,0 | 27,0 744,0 | 28,0 744,0 | 28,0 144,0 N.-E. variable. 
Idem. DIN 746,0 | 27,5 746,0 | 29,0 745,0 | 29,0 144,5 | N.-E. le matin, 
S.-E. le soir. 
Idem. 3 26,0 147,0 | 28,0 747,0 | 29,0 TA IOT S 746,0 NE? 
Idem. 4 27,0 748,0 | 31,0 747,0 | 30,0 147,0 | 29,0 746,0 E., revient | 
au N.-N.-E. les. | 
Idem. 5 26,0 748,5 | 28,0 748,0 | 29,0 748,0 | 28,0 747,0 SES AR 
| Idem. 6 27,0 748,0 | 28,0 748,0 | 28,0 TE | STD HE OMES ER ESvar ane | 
Idem. 7 27,0 747,0 | 28,5 741,0 | 29,0 141,0 | 26,0 746,0 E=N°E; 
variable au N.-E. 
Idem. 8 26,0 HT NOT 747,5 | 28,0 741,0 | 26,0 741,0 E. variable. 
Idem. OM ON TT SNS OT EE TO TE ON 26 0 TE 0 E. qui passe 
au N.-E. le soir. 
Idem. 10 25,0 745,0 | 28,0 745,0 | 27,0 144,0 | 26,0 744,0 N.-E. 
variable au N. 
Idem. 11 27,0 746,0 | 29,0 146,0 | 29,5 141,0 | 29,8 741,0 
| Idem. 12 27,0 747,0 | 29,0 746,5 | 27,0 746,0 | 27,5 745,5 N.-E. 
Idem. 13 27,0 141,5 | 28,0 148,0 | 27,0 745,0 | 27,0 745,0 N.-E., puisS. 
le soir. 
| Idem. 1% 26,5 141,0 | 28,0 746,0 | 28,5 146,0 | 28,0 745,0 E., variable 
| au N.-E. 
| Idem. 15 27,0 141,0 | 29,0 746,5 | 29,5 745,0 | 24,5 745,0 Idem. 
| Idem. 16 25,0 748,0 | 28,0 TA1CO0N RS 072 147,0 | 30,2 746,0 N.-E. 
he | Idem. 17 26,0 748,0 | 28,5 741,0 | 29,0 747,0 | 28,0. 747,0 INFÉINEES 
Idem. 18 26,5 741,0 | 29,0 147,0 | 27,5 147,0 | 26,0 746,0 N. 
Idem. 19 25,0 746,0 | 27,0 745,0 | 28,0 144,0 | 26,0 744,0 N.-N.-0. 
Idem. 20 24,5 745,0 | 28,0 145,0 | 28,0 744,0 | 26,0 744,0 | E.-N.-E., hâlant 
le N. le soir. 
Idem. 21 19,0 145,0 | 24,0 745,0 | 27,0 144,0 | 26,0 744,0 N. 
Idem. 29 22,0 744,0 | 25,0 744,0 | 26,5 743,0 | 26,0 743,0 N.-E. 
Idem 23 22,5 746,0 | 25,0 746,0 | 26,5 745,0 | 26,0 144,0 Calme. 
Idem. 2, 23,0 146,0 | 26,0 146,0 | 27,0 745,0 | 26,5 745,0 Idem. 
Idem. 25 DD TATSOMNOTS OM UTAS 0 M2 810 TA O |N27T,5 746,0 S. 
Idem. 26 25,0 748,0 | 27,0 TA, 5 M28;5 741,0 | 28,0 746,0 S.-0. 
Idem. 27 24,0 741,0 | 27,0 747,0 | 29,0 746,0 | 28,0 746,0 | E., puis N. les. 
| Idem. 28 25,0 746,0 | 27,0 145,0 | 27,5 144,5 | 27,0 743,5 N.-N.-0. 
Idem. 29 25,0 A0 | AE 746,5 | 28,0 TE SNIRATIES) 144,5 RESF: 
Idem. 30 26,5 741,0 | 27,5 747,0 | 29,0 747,0 | 28,0 741,0 [Be 
Idem. | 31 27,0 147,0 | 30,0 747,0 | 30,0 746,5 | 28,0 745,0 Idem. 
l | 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


FORGE DU VENT 


Inégale. 
Jolie brise. 


Jolie brise, presq. €. le s. 
Jolie brise inégale. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Jolie brise. 
Petite brise. 
Jolie brise. 
Idem. 
Petite brise. 


Jolie brise. 


Petite brise. 


Inégale. 


Petite brise. 
Jolie brise. 


Bonnebriseàrafales. 
Idem. 
Petite brise qui frai- 
chit le soir. 
Jolie brise à rafales. 


Presque calme. 
» 


» 
Presque calme. 
Idem. 
Petite brise. 


Jolie brise à rafales. 
Jolie brise. 
Petite brise. 


Presque calme. 


OCTOBRE 1866 


TEMPS 


Temps à grains, couvert et pluvieux dans 
la matinée. Beau, nuageux le soir. 
Matinée pluvieuse. Belle après-midi. 


Temps orageux. Pluie le matin. 

Matinée brumeuse. Très-beau temps le reste 
du jour. Orages à l'horizon. 

Temps assez beau le matin. Couvert et ora- 
geux le soir et la nuit. 


| Môme temps. 


Mème temps. Fort grain de N.-E. à 6° du 
soir. 

Beau temps pendant le jour. Le soir, le 
temps se couvre après un grain du N.-E. 
Temps couvert. Brume le matin. Petite pluie 

le soir. 

Beau temps nuageux, qui se couvre vers 3" 
de l'après-midi. Horizon chargé au N.-E. 

Beau temps nuageux. Le soir, orage à l’ho- 
rizon et fort grain de l'Est à 10°. 

Grain vers 2" de l'après-midi. Temps voilé, 
mais beau le reste du jour. 

Fort grain de vent du Nord-Est vers 2°. Le 
vent passe le soir au Sud et le temps de- 
vient orageux et pluvieux. 

Très-beau temps. Quelques nuages. 


Grain violent du Nord-Est vers 4°. Très- 
beau temps le reste du jour. 

Très-beau temps. Légers nuages. 

Beau temps. Quelques nuages. Temps ora- 
geux le soir. 

Beau temps voilé.TUn peu de pluie le soir. 

Temps couvert. 

Beau temps. Quelques nuages. 


Très-beau temps. Nuit et matinée très-frai- 
ches. 

Beau temps légèrement voilé. 

Très-beau temps. Légères vapeurs au ciel. 
Strati à l'horizon. 

Mème temps. 
Idem. 
Idem. 

Le temps se couvre le soir. [Quelques gouttes 
de pluie. 

Temps couvert. Un peu de pluie vers 4". 

Temps très-nuageux. 

Orage et pluie de 2" à 4° du matin. Très- 
beau temps le reste du jour. 

Grain de vent du Nord-Est vers 4". Très-beau 
temps le reste du jour. 


OBSERVATIONS 


A 3", la même température de 29° était 
observée aux chutes du Se Don, dans 


l'île de Don Niaiï. 


La baisse des eaux du fleuve a atteint 


5",80 depuis le 20 septembre. 


Observé une couronne lunaire pendant 


la nuit. Diamètre : 3° 36°. 


Triple couronne lunaire qui persiste 
pendant la nuit jusqu'à ce que la 


lune atteigne le zénith. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


NOVEMBRE 1866 


LIEUX | : à 
: DATES THERMOMÈTRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D OBSERVATION 
| 9h du matin. | midi. | 3h du soir. 5h du soir. 
| degrés. tuillim, | degrés, millim, degrés. millim | degrés. millim, degrés. millim, 

BASSGC "AA » » |26,5 748,0 | 28,5 747,0 | 28,5 746,0 | 28,0 745,0 E.-N.-E. 
Idem. à | » St 27,0 748,0 | 28,5 747,0 | 28,5 746,0 | 27,5 745,0 | E. 
Idem. DL on ls DM MOT 074725 28 0MTATE ON 8 0 TETE ON 265 ET ZT ON N. 
Idem. IN 7 » MNT OMTATS ST TE 0 TT TES EE GO LTEO N.-N.-0. ou 

| N.-0. 
Idem. nn & » » |26,0 747,5 | 27,0 747,0 | 27,5 746,5 | 27,5 746,0 N.-N.-0 
| 
Idem. INC n D AE TT ET D LAS D RD MES TT N.-0 
Idem. |OpeT ) D PO OT NT OT ATEN D Se 2 9 I0TATES Idem 
Idem. 8 » » 25,5 747,5 | 27,5 147,0 | 28,0 747,0 | 27,5 747,0 Idem. 
| | 
Idem. IR » » |25,0 747,0 | 28,5 747,0 | 28,5 747,0 | 26,0 747,0 | Calme le matin, 
| N.-0. variable 
à partir de midi. 
Idem. | 410 ) » 25,0 748,5 | 27,5 748,5 | 26,0 748,5 | 26,0 748,5 — 
Idem. ETRIR » |22,0 748,5 | 25,0 748,5 [26,5 748,5 [26,0 748,5 | N.-0. dans l'a- 
| 5h du matin. près-midi. 
Idem. 12 |17,5 748,5 | 22,0 748,5 | 25,0 748,5 | 95,5 748,0 | 26,0 748,0 N°0? 
| î 6h du matin. 
Idem. | 13 17,0 749,5 | 24,5 749,5 | 25,0 749,5 | 96,0 749,5 | 25,5 749,5 Idem. 
Idem. | 14 |16,0 749,5 | 21,5 749,5 | 25,0 749,5 | 26,5 749,5 125,5 749,5 Idem. 
Idem. 15607495 4123 0.749,54 25 0749/5975 719 5 6572075 Idem. 
Idem. 16 |16,0 749,5 | 20,5 749,5 | 26,0 750,0 | 28,0 750,0 | 26,0 749,5 Idem. 
Idem. | 47 |16,0 749,5 | 25,0 750,0 | 27,5 150,0 | 298,5 750,0 | 28,0 750,0 Idem. 
Idem. LOMME OM 21 070 SL OO RTE OT ONE OETL0NS N.-N.-0. 
5h du matin. 
Idem. | 19 116,0 749,5 | 20,5 749,5 | 24,5 749,5 | 96,5, 749,5 | 26,5 749,5 N.-N.-0. 
Idem. 20 160.749;5 2100749522 /0749; 505 5 TL M6 574975 N.-0. 
Idem. 21 » D DD 04 NS OT A0 ME OT SOS ST N.-N.-0. 
Idem. 2210) » |22,0 749,5 | 26,0 749,0 | 26,0 748,0 | 25,5 749,5 Idem. 
Idem. SE) 0h 5 »  |23,5 748,5 | 26,5 748,5 | 97,5 748,0 | 28,0 747,0 N.-0. 
Idem. | 94 À, » |23,0 747,0 26,5 747,0 127,5 746,0 | 26,8 746,0 O.-N.-0. 
6h du matin. | 
Idem. 25 |18,0 747,0 | 22,0 748,0 | 25,0 748,0 | 25,5 747,0 | » » Calme. 
Idem. 26 | » » 22,0 746,5 | 25,0 746,0 | 26,5 746,0 | 24,5 746,0 N.-0. 
Idem. 2 | » |22,0 746,0 | 26,0 745,0 | 96,5 745,0 | 25,0 744,0 | Idem. 
Idem. 28 » » 22,0 748,0 | 25,2 747,5 | 25,5 747,0 |124:0, 746,5 | Idem. 
Idem. | 29 » » 22,0 749,0 | 25,0 748,0 | 27,0 747,0 | 25,5 747,0 Idem. 
Idem. 30 » » 22,0 748,0 | 26,0 747,0 | 28,0 746,5 | 26,0 746,0 N. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


NOVEMBRE 1866 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 


Idem. 
Jolie brise à rafales. 
Idem. 


Petite brise qui fraichit 
le soir. 

Jolie brise. 
Petite brisefraichissant 
vers 4! du soir. 
Petite brise inégale. 


Jolie brise inégale. 


Vent frais qui tombe à 
la nuit. 
Jolie brise. 


Bonne brise. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Petite brise. 


Idem. 
Légère brise. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


» 

Petite brise qui fraichit 
dans le jour et se met 
à violentes rafales. 
Bonne brise à rafales. 


Jolie brise qui mollit 
pendant la nuit. 
Jolie brise qui tombe 
le soir. 

Jolie brise. 


jour. 


| 
| 
| 
| 


TEMPS 


Pluie le matin. Beau temps le reste du 


Très-beau temps. Légers nuages. 
Le temps se couvre avec le vent du Nord. 
Temps couvert assez beau. 


Très-beau temps. 


Idem. 
Idem. 


Le temps se couvre dans l'après-midi. Quel- 
ques gouttes de pluie. 
Belle nuit. Grain de Nord-Est vers 5° du 


soir. 
Temps presque couvert. Assez beau. 


Temps calme et beau le matin; se couvre 
dans l’après-midi. 
Très-beau temps. Nuit calme. 


Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Le temps se couvre légèrement dans l’a- 
près-midi. 

Très-beau temps; ciel très-pur. Nuitcalme. 

Mème temps. 

Le ciel se couvre dans l'après-midi. 

Nuit calme et très-belle. Temps couvert 
dans l’après-midi. 

Très-beau temps. Nuit calme, pendant la- 
quelle le ciel se couvre. 

Beau temps nuageux le matin. Le soir, le 
temps se couvre dans le Sud-Est. Quelques 
gouttes de pluie. 

Très-beau temps. 

Beau temps le matin ; se voile dans l'après- 
midi. 


Temps couvert. Quelques gouttes de pluie 
vers 9" du malin. Ciel assez clair le reste du 
jour. 

Temps assez beau, nuageux. Un peu de 
pluie vers 1° du soir. 

Très-beau temps. Voilé pendant l’après- 
midi. 

Très-beau temps. Légers nuages. 


OBSERVATIONS 


Du 2 au 23, le journal météorolo- 
gique a été tenu à Bassac par M. Dela- 
porte. 


À midi, à Khong, j'observe le même 
jour une température de 29°. 

A Khon, j'observe à midi 28°; à 
3° 1/2 de l'après-midi, 29°,5. 


A Stung Treng, à 3 1/2 du soir, 
Oil 

A Stung Treng, à midi, 29°,5; à 
32 1/2, 31°. 


A Stung Treng, à midi, 27°,5 ; à 4?, 
28°. 


Les nuits deviennent très-fraiches. 


Le même jour, à 6° du matin, à Sa- 
ravan, le commandant de Lagrée ob- 
serve 12° de température. 


28 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
DÉCEMBRE 1866 
LIEUX 3 : 
DATES THERMOMETRE ET BAROMÈTRE DIRECTION DU VENT 
| D OBSERVATION 
9h du matin. midi. 3h du soir. 5h du soir. 
degrés. millin, degrés. millin. degrés.  millim. degrés. millim, degrés. millim. 
POSE 5 000000 1 » » 29 52950 | 25,0 749,0 |.26,0 749,0 | 25,0 748,5 N.E. 
Idem. 2 » » |92,5 749,0 | 25,0 749,0 | 27,0 749,0 | 26,8 749,0 E.-N.-E. 
7h 1/2 du matin. 
Idem. 3 |29,0 748,5 | 23,5 749,0 | 27,0 748,5 | 28,5 746,0 | 27,0 746,0 | N.-E., puis N.-O. 
dans l'après-midi. 
Idem. 4 | 21,0 748,0 | 23,0 748,5 | 25,0 749,0 | 26,0 748,5 | 25,0 748,5 N.-N.-E 
Idem. 5 » » |20,0 748,5 | 24,0 748,5 | 25.0 748,5 | 95,0 7485 | N. 
Idem. 6 » » |20,0 749,0 24,0 748,5 | 24,5 748,5 | 25,0 748,5 |  N.-N.-E 
6h du malin. 
Idem. 7 |15,2 748,0 | 19,5 748,0 | 24,0 748,0 | 26,5 748,0 | 26,8 748,0 N.-0. 
Idem. 8 » » |2292 7485 | 24,0 748,5 |250 748,5 | 24,5 748,5 N.-N.-0 
Sh du matin. ; | 
Idem. 9 |20,5 748,5 | 921,5 748,5 | 24,2 749,0 | 26,5 748,5 25,2 748,5 | S.-E., puis S.-0. 
7h 1/2 du malin 
Idem. 10 |20,0 750,0 | 24,0 750,0 | 24,8 749,5 | 26,0 749,0 | 26,4 749,0 | E. variable, passe 
au N.-0. le soir. 
Idem. 11 |20,5 749,5 | 21,5 750,5 | 25,0 749,5 | 27,1 749,5 | 26,0 749,5 N.-N.0. 
6h du matin. 
Idem. 12) | 45,5 750,0 | 19,5 750,5 123,5 749,51. 25,0"749;0112%,0 749,0 Idem. 
Idem. 13 | 14,0 "749,5 | 19,0 749,5 | 22,0 749,5 | 23,0 748,0 | 23,0 748,0 | Presque calme. 
Idem. 14 » » 19,5 749,0 | 22,8 748,0 | 24,0 748,0 ! 24,0 748,0 N.-N.-E. 
Idem. 15 » » |19,0 749,5 | 24,5 749,0 | 26,5 749,0 25,5 749,0 N.—E. 
Idem. 16 » » 19,0 754,5 | 23,0 750,5 | 25,0 750,0 | 25,0 750,0 Idem. 
Idem. 17 »  » 1220 732.0 | 24,5 151,5 25,0 750,0 | 24,0 750,0 N.-0. 
Idem. 18 » » |185 753.0| 22,5 752,0 | 23,5 151,0 | 22,5 750,0 Idem. 
Idem. 19 | 12,4 753,0 | 18,5 752,0 | 22,5 751,0 | 23,0 750,0 | 24,5 750,0 E. 
} 8h du matin. 
Idem. 20 | 17,5 782,0 | 18,5 752,0 | 21,0 752,0 | 23,0 750,0 | 24,0 750,0 N. 
Idem. 21 » » 18,5 752,0 | 22,0 752,0 | 23,5 750,0 | 25,0 749,0 Idem. 
Idem. 22 » » 18,5 752,0 | 22,0 750,0 | 24,5 749,0 | 24,8 749,0 Idem. 
Idem. 23 »  » |9240 751,0 24,5 750,0 | 28.0 749,5 | 25,2 749,5 | N.-N.-E., variable 
Sh du matin. 10ù du matin. au N.-E. 
Idem. | 24 | 94,0 751,0 | 22,0 752,0 | 26,0 749,5 | 27,0 749,0 | 27,0 749,5 N.-0. 
Enroute.…... 25 20,0 754,0 D) 25,0 » 24,5 » » » Idem. 
6h du matin. 9h du matin. s 
En route. . ZONE ON 20/00) 24,0 750,0 | 25,0 » » » N.-N.-0. 
5h 3/4 du matin. 1h 1/2 du matin. 9h du matin. £h du soir. 
PRounS Gao MOT M3 072005 MO SATA T 6 20/5752 022 072070 » » IN? 
6h du matin. 10h du matin. midi. 2h du soir. 4n du soir. 
Éniroute tee) SR PILES 20.0 751,0 | 24,0 750,5 | 24,0 Oo» 23,0 oo» E.-N.-E. 
9h du matin. 5h du soir. | 
Huong Sa. ...| 29 | 11,2 748,5 | 22,0 751,5 | 23,0 748,5 | » » 22,0 747,0 | Presque calme. 
3h du soir. 
Énrouter#? 30 |12,0 748,0 » ») 2510) 23,0 747,5 | 21,5 748,0 O.-N.-0. 
2h du soir. 
Idem. a AUD n 5 » » 28 D) 25 0) » » Presque calme. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


DÉCEMBRE 1866 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 


Petite brise qui tombe 
le soir. 
Presque calme le ma- 
tin. Bonne brise l’a- 

près-midi. 
Petite brise. 
Idem. 
Idem. 


Légère brise. 
Jolie brise. 


Petite brise. 
Idem. 


Jolie brise au milieu 
du jour. 
Idem. 
» 


Légère brise. 
Petite brise. 
Idem. 
Bonne brise. 
Idem. 
Petite brise. 


Idem. 
Légère brise. 


Idem. 
Petite brise. 


Idem. 
Idem. 


Petite brise qui fraichit | 
le soir. 
Légère brise. | 
Petite brise. 

» 


Petite brise. 


TEMPS 


Beau, nuageux. 
Très-beau, légers nuages. 


Très-beau. Ciel pur le matin; se couvre le 
soir. Quelques gouttes de pluie vers 6". 


Très-beau, ciel sans nuages. 
Très-beau, légers nuages. 
Idem. 


Idem. 

Se couvre dans l'après-midi. Quelques 
gouttes de pluie. 

Beau temps. Voilé. 


Très-beau temps. Légers nuages. 
Très-beau temps. Quelques cirrhi. 


Le temps se couvre le soir. 

Légère brume pendant la matinée. Temps 
légèrement voilé Le reste du jour. 

Même temps. 

Très-beau temps. Légers nuages. 

Idem. 

Beau temps, nuageux. 

Même temps, venteux. 

Très-beau temps. Légers nuages. 

Très-beau temps. Quelques strati. 

Très-beau temps. Horizon légèrement em- 
brumé. 

Idem. 

Très-beau temps, nuageux. 


Très-beau temps. Quelques strati. 
Très-beau temps. Légers nuages. 


Temps beau, nuageux. 


Très-beau temps. Brume légère le ma- 
tin. 


Temps couvert, mais beau. 
Très-beau temps. Légers nuages. 
Idem. 


Très-beau temps. Ciel pur. 


OBSERVATIONS 


Baisse des eaux du fleuve depuis le 
20 septembre, 8",80. 


Départ de Bassac à 1° de l’après- 
midi. 
Arrivée à Wat Saiï à 3! 


L'observation de 7° 1/2 du matin a 
été prise sur le sommet du mont Sa- 
lao, les autres sur les rives du fleuve. 


Séjour à B. Huong Sai où, l’on ar- 
rive à 8 3/4 du matin. 

Départ à 7° du matin. Arrivée à 
Pakmoun à 4" 1/2 du soir. 


30 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


JANVIER 1867 


LIEUX | | | 
DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D OBSERVATION 
| 6h du matin. 9h du matin. midi. | 3h du soir. | 5h du soir. | 
| degrés. millim. degrés. millim, degrés. millim. degrés. millim. degrés. millim. | 
En route (riviere! | {in du matin. | 
HOUR AMI ORNE 24 0 TE 0 NOTE SNS DOM SORT DA ON » Presque calme. 
| | 9h du malin, | | | | 
| | Idem. 2 |417,0 751,0 | 24,0 752,0 | 26,8 754,01| 27,0 750,01! » » | N.-0. 
| | 1ù du soir. 
Pimoun. . .. . 3 16,6 750,5 | 214,5 752,0 | 27,5 Oo» 24,5 750,0 » » NENEO! 
midi, | 
Idem. PR ECS » 260 M SE ON OR Idem. 
10h du matin, 2h du soit 
En route. ....| 5 ATÉOMIES 023 08553 012 6075270827 » 23,0 751,0 Idem. 
5h 3/4 du malin. 9h du matin. | 3h du soir 
Idem. 6 |13,0 749,0 | 19,0 752,0 |. » » 28,0 750,0 | 27,0 750,0 Presque calme. 
| 6h du matin. | 
| Ones 00000 li 17,0  » » » 25,0 750,0 | 24,0 749,5 | 23,0 750,0 N.-E. 
Idem. | 8 44,5 749,0 | 46,0 750,0 | 22,0 749,0 » » |24,0 749,0 Idem. 
8h du matin. 10 du matin. | 
Idem. 9 | 11,5 749,0 | 14,5 748,0 | 24,0 749,0 | 20,5 750,0 | 25,5 ‘747,0 | Calme lemat. Jolie 
| | brise de N.-E. 
10ù du matin, mdusor. | | dans l’après-midi. 
Idem. 10 |12,5 » 20,0 750,0 | 24,0 748,5 | 26,3 750,5 | » » | Calme le matin. 
| Petite brise de N. 
| 5 S ÉTEND 
| | | dans l'après-midi. 
Idem. | 411 | 13,5 749,5 | 93,0 750,5 | 24,0 750,0 | 26,0 748,5 » » Idem. 
| 7» du matin. 
Idem. | 42 |13,5 ‘749,5 | 21,0 749,0 | 25,0 748,0 | 29,5 747,0 » » | Dansl’après-midi, 
| | | rafalesdeS. Calme 
6h du matin. | | le reste du temps. 
| Idem. 143 | 13,5 748,0 | 21,0 749,0 | 27,0 748,0 » » » » | Calme. 
| Idem. 14 | 15,0 748,0 | 22,0 748,5 | 26,0 743,5 | DUPONT ON) » | Idem. 
| | | 3n du soir. | 
Idem. TS | > D » » » 33,0 746,0 | 25,0 746,0 Idem. 
Idem. | 46 |16,5 745,5 | 96,5 745,0 | 28,0 745,0 | 31,0 745,5 | 24,0 745,5 | Le soir et la nuit, | 
| N.-N.-E. 
Idem. 17 | 16,5 741,0 | 21,0 748,0 | 28,0 748,0 | 30,5 747,0 | 26,0 747,0 | N.-N.-E. 
Idem. 18 | 13,0 748,0 | 10150 0 P21F 00 ON 2 C0 ON 25 0872970 Calme. 
| Idem. 19 14,0 748,0 | 19,0 749,0 20,0 749,0 | » » » » Idem. 

En route. . ... 20 | » » | » » | » » » » » » | Idem. 
Idem. 9) » D | » Sn » » » ARR RE) » | Idem. 
Idem. 99) | » » | » » | » » » » | » » Idem. 
Idem. 23 » » » » » » » » » » Idem. 

PATATE CO 24 | 13,0 746,0 | 28,5 746,0 | 30,0 746,0 | 28,0 746,0 » » Idem. 
Idem. 25 17,0 746,0 | 24,0 746,0 | 28,0 746,0 | 29,0 746,0 » » N.-N.-E. 
Idem. | 26 |16,0 748,0 | 24,0 747,0 | 28,0 747,0 | 29,0 748,0 » » | Idem. 

| En route. . Sn | » » D RE) » | .5 » » » Idem. 
Idem. NS » » » » » » » » | Idem. 
Idem. | 929 » » » » » » » » | » » Idem. 

| Idem. 50 » » » » | » » » » » » Idem. 
| | Kemarat ..... 31 » » 27,0 748,0 29,0 747,0 | 30,0 747,0 | 29,0 747,0 N° 


OBSERVATIONS 


FORCE DU VENT 


» 


Petite brise. 
Jolie brise. 


Petite brise qui fraîchit | 
par rafales le soir. 
Jolie brise. 


» 


Jolie brise à rafales. 
Idem. 


D 


Idem. 
Idem. 
Jolie brise à rafales. 


Bonne brise à fortes 
rafales. 
» 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Jolie brise à rafales. 
Idem. 

Bonne brise. 
Petite brise. 
Idem. 
Très-légère brise. 
Petite brise qui tombe 
à la nuit. 


TEMPS 


Très-beau temps. Légère brume au lever 


du soleil. 

Même temps. 

Très-beau temps. Quelques nuages. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


| Très-beau temps. Ciel sans nuages. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


| Légère brume au lever et au coucher du so- | 


leil. 
Très-beau temps. Ciel très-clair. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Très-beau temps. Quelques nuages. 
Idem. 


| Temps beau, couvert. 


Temps beau. Quelques nuages. 
Temps beau. Ciel pur. 

Idem. 

Idem. 


MÉTÉOROLOGIQUES. 


JANVIER 1867 


OBSERVATIONS 


Arrivée à Pimoun à 1°. 


Départ de Pimoun à 11" 1/2 du matin. 


Arrivée à Oubôn à 7° du matin. 


Du 10 au 14, les observations météo- 
rologiques ont été faites par M. De- 
laporte ; à partir du 14, par le com- 
mandant de Lagrée. 


Départ d'Oubôn pour Amnat par terre 
à 2° de l'après-midi. Pas d’observa- 
tions barométriques et thermomé- 
triques, les instruments étant em- 
balles sur un char. 


Départ d’Amnat pour Kemarat à 7" 1/2 
du matin. 


Arrivée à Kemarat à 4" du soir. 


2 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
FÉVRIER 1867 
LIEUX , . 
. DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D'OBSERVATION 
6h du matin. 10h du matin. midi 3h du soir. 5h du soir. : 
degrés, millim. degrés. millim. degrés, millim. degrés. millim. degrés. millim. 
REMANCE CE l 15,0 746,0 23,0 747,0 | 27,0 747,0 21,0 747,0 1 25,0. 747,0 N. 
Idem 2 15,0 746,0 23,0 746,0 | 29,0 746,0 31,0 746,0 | 28,0 746,0 Idem. 
fdem. 3 |15,0 747,0 | 24,0 747,5 | 31,0 747,5 | 32,0 747,5 | 29,0 747,5 | N. variable au 
N.-E. 
Idem. 4 |15,5 746,0 | 25,0 746,0 | 30,0 746,0 | 31,0 746,0 | 29,0 746,0 N.E. 
idem. 3 |17,0 746,0 | 24,0 746,0 30,0 746,0 | 31,0 746,0 | 29,0 746,0 N. 
4h du soir. 
Idem. 6 |15,5 746,0 | 25,0 746,0 | 29,0 745,5 | 30,0 745,5 » » Idem. 
5h du soir. 
Idem. 7 |15,0 745,5] 24,0 745,5 | 29,0 745,5 | 31,0 745,5 | 27,0 745,5 NE. 
Idem. 6 AD 5» » » » » 32 080) » » Idem. 
Idem. 9 15,0 745,5 23,0 746,0 | 31,0 146,0 | 33,0 746.0 | 28,0 746,0 Idem. 
Idem. 10 | 15,0 746,0 | 95,0 746,0 | 32,0 746,0 | 35,0 746,5 | 29,0 746,5 Calme. 
Idem. 11 |15,0 746,0 | 28.0 746,0 | 31,0 746,0 | 36,0 746,0 | 30,0 746,0 Idem. 
Idem. 12 18,0 746,0 | 30,0 746,0 | 33,0 746,0 | 35,5 746,0 | 30,0 746,0 Idem. 
MÉniroute ser 13 » » » » » » » » » » N. 
Idem . 14 » » » » » » » » » » Idem. 
Idem. 15 » » » » » » » » » » Idem. 
Ban Mouc....| 16 » » » » » » » » 31,5 743,0 N. 
£h du matin. 
Idem. 17 |-22,5 743,0 | 95,0 743,0 | 28,0 743,0 | 31,5 743,0 | 29,5 743,0 Idem. 
10h du malin. 
Idem. 18 |23,0 744,0 | 22,5 745,0 | 29,0 743,5 | 32,5 744,0 | 28,0 744,0 Idem. 
Idem. 19 17,0 746,0 | 21,0 746,0 | 22,0 746,0 | 22,5 746,0 | 22,0 746,0 Idem. 
Idem. 20 |16,0 746,0 | 20,0 746,0 | 25,0 746,0 | 25,5 746,0 | 21,0 746,0 Idem. 
Enmoute "191 » » » » » » » » » » N. 
variable au N.-E. 
Idem. 22 » » » » » » » » » » è 
Peunom. . 23 | 15,8 746,0 | 23,0 746,0 | 26,0 746,0 | 28,0 746,0 | 25,0 746,0 | N. au N.-N.-E. 
Enaroute ter 24 » » » » » » » » » » N.-E., puis au 
N.-N.-0. dans le 
jour ; revenant le 
4h du soir. soir au N.-E. 
LAON EE 25 » » » » » » » » -28,0 750,0 | N.-E. à l'E.-N.-E. 
bh du soir. 
Idem. 26 17,0 746,0 | 25,0 746,0 | 28,0 746,0 | 30,0 746,0 | 28,5 745,0 E.-N.-E. 
Idem. 27 |16,5 746,0 | 22,0 746,0 | 25,0 ‘746,0 | 29,0 746,0 | 28,0 746,0 NE. 
| Idem. 28 |17,0 746,0 | 21,0 746,0 | 23,0 746,0 | 22,5 746,0 | 23,0 746,0 Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 33 


FEVRIER 1867 


| | 
| 
| | 
FORCE DU VENT TEMPS | OBSERVATIONS | 
| || 
| | 
| 
| 
| || 
Petite brise. | Très-beau temps. Calme la nuit. Les observations météorologiques du | | 
Idem. Même temps. mois de février ont été faites par 
Légère brise. | Nuit et matinée calmes. M. Delaporte. 
Bonne brise Très-beau temps. 
dans l'après-midi. | 
Petite brise Nuit et matinée calmes. Très-beau temps. | 
dans l'après-midi. | | 
Jolie brise Idem. 
dans l'après-midi. 
Idem. Idem. 
Légère brise. Idem. 
Idem. | Idem. 
» Très-beau temps. Ciel sans nuages. 
Idem. | Idem. 
Idem. Idem. | 
Légère brise | Idem. | Départ de Kemarat à 68° du matin. 
dans l'après-midi. 
Idem. Temps très-beau, mais légèrement embrumé. | 
Idem. Matinée légèrement brumeuse. Très-beau | | | 
temps le reste du jour. | ; | 
Idem. Légère brume qui persiste tout le jour. La Arrivée à Ban Mouc à 2° 1/2 du soir. 
nuit, un peu d'orage ; petite pluie. | 
Idem. |: Matinée brumeuse. Quelques gouttes de pluie. | | 
Très-beau le soir. | | 
Bonne brise le soir. | Temps brumeux et calme le matin. Très-beau | 
| le reste du jour. | 
Idem. | Mème temps. 
Brise très-inégale à ra- | Temps brumeux. Assez beau. 
fales assez fortes. | 
Idem. Idem. Départ de Ban Mouc à 9° 1/2 du matin. | 
| | 
Idem. Beau temps, nuageux. |: A 4% du soir, arrivée à Peunom. | 
Jolie brise à rafales Beau temps. Calme la nuit. | | 
dans l'après-midi. | ; | 
Petitebrisefraîchissant | Beau temps. Quelques nuages. Départ de Peunom à 7° du matin. | 
le soir pour tomber | 
tout à fait vers 10". | 


Bonne brise | Nuit et matinée calmes. Très-beau temps | Arrivée à Lakon à 1° du soir. 
dans l'après-midi. | pendant le jour. 
Petite brise Tres-beau temps. Légers nuages. | 
dans l'après-midi. 


Idem. Le temps devient brumeux le soir; quelques 
gouttes de pluie vers 10" du soir. | | 
Idem. | Temps couvert. Petite pluie par intervalles. 


| : 
| Orage au loin. 


IT. 5 


4 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
MARS 1867 
LIEUX ; | ee 
| DATES THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE | DIRECTION DU VENT 
D OBSERVATION : 
6h du matin. 10h du matin. midi. 3h du soir. 5h du soir. 
degrés. millim, degrés. millim. degrés. millim, degrés. millim, degrés. millim, 
Talon eee 1 |92,0 745,0 | 27,0 745,0 | 29,0 745,0 | 30,3 745,0 | 28,0 745,0 NE. 
Idem. | 2 |19,0 746,0 | 25,0 746,0 | 30,0 746,0 | 35,5 746,0 | 33,0 746,0! E., variable au 
Idem. 3 |20,0 746,5 | 27,0 746,0 | 31,0 746,0 | 34,5 746,0 | 32,5 746,0 Idem. 
Idem. | 4 |17,5 746,0 | 25,0 746,0 | 29,0 746,0 | 29,5 746,0 | 28,0 746,0 SE. 
(MEnirouter SES D NS » » » » » » » Idem. 
Idem. 6 » » » » » » | » » » » Idem. 
IMHOULEN EEE T 123,0 746,0 , 28,0 746,0 | 30,0 746,0 | 31,0 746,0 | 29,0 746,0 | Calme. 
Idem. | 8 |21,0 745,5 | 25,0 745,5 | 29,0 745,5 | 32,0 745,5 | 29,0 745,5 S.-S.-E. 
Idem. | 9 | 20,0 746,0 | 26,0 746,0 | 30,0 746,0 | 31,0 746,0 | 28,0 746,0 S.-E 
Iden. | 10 | 22,0 745,5 ,0 745,0 | 31,0 744,0 | 26,0 744,0 | 26,0 744,0 S 
| | 
| | 9h du matin, 
Idem. | 11 |21,0 744,5 | 23,0 745,0 | 28,0 746,0 | 29,0 744,5 | 26,0 745,0 Idem. 
Idem. | 42 | » » |93,0 747,0|27.0 746,5 | 28,0 745,0 24,5 745,5 N.-0. 
| Saniabouly 13 DE) » » |25,5 745,0 | 98,5 744,0 | 28,0 742,0 | SE 
10h du matin. | | 
| | Idem. 14 |920,0 743,0 | 25,5 745,0 | ‘31,0 745,0 | 32,0 743,0 | 33,0, 742,0) 0. | 
| | Idem. 4 15 22,0 743,0 29,0 744,0 33,0 743,0 | 35,5 749,0 | 32,5 740,5 0.-S.-0 | 
| | | | 8h du matin. | | 
En route . .... 16 | » » | 24,0 742,0 | » » » » » » | 0. 
| | | | 
Idem. | nt | » D | » ») | » » » » » » | Idem. 
Idem. | 18 » » | » » » » | » » » » J O., puis N.-N.-0. 
| Idem | 19 | » » | » ») | » » | » » » » N.=N.=0: 
Idem. 20 » » » » » » » » » » | N.-0. variable au 
| N-N-E 
Idem. 21 » 5 » » » » » » » » Idem. 
Idem. 122 » » ») » » » » » » » S.-0. 
| Idem. 23 | » » | » » | » » » » » » S. variab. au S.-0. 
PONDISS EEE NUE pou de » » 30,0 741,0 | 34,0 740,0 | 33,5 739,0 Idem. 
| | | ‘ 10h du matin 
Idem. | 25 |924,0 739,0 27,5 741,6 | 31,0 740,0 | 33,5 739,0 | 33,5 738,5 Idem. | 
| Emroute | 26 | » » » » » » » » » » N.-0., puis S.-0 | 
lNong Kay... | or a 30 0 0718 DT 5 TA ONE A 0 N.-N.-E | 
Idem. 28 | 21,0 742,0 | 25,0 744,0 | 28,5 743,0 3052. TAIL5 30,5 TEAO:S N.-0. 
Idem. | 29 |921,0 741,5 | 26,0 744,0 | 29,5 742,0 | 33,8 740,0! » » N.-N.-0 | 
Idem. 30 |24,2 743,0 | 23,8 743,5 | 27,0 742,0 | 34,0. 740,5 | 31,5 738,5 Idem. | 
Idem. | 31 |924,0 742,0 | 23,0 743,0 | 23,5 741,5 | 28,0 738,5 | 27,0 738,5 N.-0. | 
| | | | | 
| | | 1 


OBSERVATIONS 


FORCE DU VENT 


Presque calme. 
Légère brise. 


Légère brise dans l’a- 
près-midi. 
Petite brise dans l’a- 
près-midi. 

Jolie brise bien établie 
le soir. 

Tombe pendant la nuit. 
» 


Petite brise qui tombe 
à la nuit. 


Idem. 
Violent orage à 3". 


Petite brise inégale. 
Idem. 
Petite brise. 


Légère brise le soir. 
Idem. 


Petite brise. 


[dem. 
olie brise inégale. 
Jolie b gale 


Jolie brise. 
Idem, très-inégale. 


Idem. 
Jolie brise. 
Légère brise. 
Idem. 


Idem. 
Petite brise. 


Jolie brise. 
Idem. 
Petite brise. 
Vent frais. 


Idem. 


TEMPS 


Temps embrumé. Ciel couvert. 


Matinée brumeuse et calme. Très-beau temps 
le reste du jour. 

Temps très-beau, mais légèrement embrumé 
pendant tout le ; jour. 

La brume se dissipe au milieu du jour. 


Très-beau temps. 


Temps très-beau et très-clair. 

Brume qui s’épaissit dans la soirée. Le temps 
devient orageux. 

Légère brume pendant toute la journée. Quel- 
ques gouttes de pluie pendant la nuit. 
Temps orageux. 

Temps beau, légèrement brumeux. 

Temps brumeux et calme le matin. De 2" 1/2 
à 3" 1/2, pluie, grèle, tonnerres par des ra- 
fales du Sud. Soirée etnuit calmes et belles. 


Temps couvert. Orage à l'horizon. Après- 
midi pluvieuse. 
Beau temps nuageux le matin. Grain de 


Nord-Ouest et pluie à 4° du soir. 
Joue couvert, brumeux. Eclaircies dans 
l'après-midi. 
Très-beau temps. Légères vapeurs. 
Très-beau temps. Nuages. 


Très-beau temps, nuageux. Le soir, orage 
dans le Sud-Ouest. 

Mème temps. 

Violent orage de l'Ouest à 2" 1/2 du matin. 
Après-midi très-belle. 

Temps couvert. Pluie de 9* à midi. 

Matinée pluvieuse. Belle après-midi. 


Mème temps. 

Beau temps, nuageux. 

Très-beau temps. Horizon voilé. 
Idem. 


, 


Idem. 


. Mème temps. Le soir, orage dans le Sud- 


Ouest ; rafales de cette partie. 

Beau temps s, nuageux. 

Trèes-beau temps, nuageux. 
Idem. 

Temps couvert jusqu’à midi. Un peu de pluie 
vers 9" 1/2. Belle après-midi. 

Temps couvert et orageux ; pluie à midi. 


| 
| 
| 


MÉTÉOROLOGIQUES. 35 


MARS 1567 


BSERVATIONS 


M. Delaporte continue à faire j Jusqu'au 
10 mars les observations metéorolo- 
giques. 


Départ de Lakon à midi. 


Arrivée à Houten à 2° 1/2 du soir. 


Âu commencement du grain, à 2" 1/2, 
le thermomètre marquait 32°; à 
2" 3/4, il était descendu à 26°. 


Départ de Houten à 6" 1/2. Arrivée à | 
Saniabouly à 10" 1/2 du matin. | 
| 


-élevée. 


G- 
a 
&- 


Température tr 


La température se rafraichit sensible- 
ment. U | 


Arrivée à Ponpissay à midi. 


À 3" du matin, 24° - 739,0. 
Départ de Ponpissay à 7° 1/2 du mat. 


Arrivée à Nong Kay a 11" 1/4 du ma- 
tin. 


30 


AVRIL 1867 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


| En route de 
Nong Kay à 
Vienchang. 


Vienchang. . .…. 
Idem. 
INEniroute Pre 


Idem. 
Idem. 


ldem. 
Idem. 
po Idem. 


Idem. 
Idem. 


| Idem. 
| Xteng Cang ... 
En route ..... 


Idem. 


Idem. 


| DATES 


I 


6h du matin. 


degrés. millim. 
» » 
» » 
22,0 740,0 
| 
» ) 
») » 
» ) 
| 
» » | 
» » 
21,5 743,0 
» » 
» » 
>) » 
DDRO D) 
» » 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


8h du matin. 

degrés. millim, 
| 

21,8 743,0 | 

» » 

10h du matin. 
DE D OR 

» » | 

» » 

» » 

» » 

» » 
24,0 743,0(!) 


9h du matin. 


26,0 » 
| 

» » 

» » 

» » 


midi. 
degrés millin. 
» ) 

» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
27,5 740,5 
» » 
» » 
» » 
» » 
D » 
» » 
» » 


» ) 


3h du soir. 


degrés. millim, 
» » 
°h du soir. 
: Le 
33,5 740,0 
3h du soir. 


33,0 740,0 | 
| 


» » 
| ») )) 
IS) » 
| 
») » 
30,5 740,0 
» » 
» » 
» ») 
» » 
AMD » 1 | 
| 
» » 


5h du soir. 
degrés. millim. 
» » 


5h 1/2 du soir. 
30,0 739,0 


5h du soir. 


30,0 739,0 


» » 
» » 
» » 
» » 
» » 

» » 
» » 
LL ») 
» » 


DIRECTION DU VENT 


N.-0. 
S.-0. 
S.-0. variable. 
Idem. 


S. 
N.-0. le matin. 


0.-N.-0. 
NE 
Idem. 


Idem. 


Idem, très-variab. 


S.-0. 
Presque calme. 
E.-N.-E. 


Brises tres-var. en 
force et en direct. 
N.-E. dans l’inter- 
valle des grains ; 
ceux-ci montent 


du S.-0. 


On peut compléter les observations qui précèdent en ajoutant que dans la partie im- 
férieure de la vallée du fleuve, les saisons présentent le même aspect que dans la Basse- 
Cochinchine ; au début de la saison des pluies, ce sont des grains orageux qui varient de 
l’Ouest-Nord-Ouest au Sud-Sud-Ouest ; les intervalles entre les grains sont très-beaux et 


très-chauds, et le mauvais temps se prolonge rarement au delà de quelques heures ; à la fin 


de cette saison, au contraire, le temps devient brumeux, et les pluies moins torrentielles 


sont plus continues; en même temps les vents passent au Sud-Est et à l'Est. Si l’établisse- 


ment de la saison sèche a été prématuré en 1866, année du passage de la commission dans 


le Laos méridional, et s’il ne faut pas considérer le mois de septembre comme l'époque 


ordinaire de la fin des pluies dans cette zone, on peut admettre cependant que cette 


époque devance toujours l’époque correspondante en Basse-Cochinchine, l'influence de 


la descente du soleil vers le Sud devant se faire sentir beaucoup plus promptement. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


AVRIL 1867 


FORCE DU VENT 


Jolie brise. 
Joliebrise l'après-midi. 
Idem. 

Petite brisetrès-inégale 


Petite brise. 
Jolie brise. 
Petite brise. 
Idem. 
Jolie brise. 


Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
» 
Petite brise. 
2 t 


Jolie brise. 


TEMPS 


Violent orage à 4" du matin. Le temps rede- 
vient très-beau ensuite. 

Tres-beau temps, presque calme le matin. 
Orage et pluie du S.-0. à 3° de l'après-midi. 

Grains l'après-midi, qui sont peu pluvieux, 
mais très-orageux. 

Belle matinée. Après-midi orageuse. Soirée 
chaude et lourde. 

Matinée voilée. Chaude et belle après-midi. 

Orage et pluie du Nord-Ouest de 8° à 10° du 
matin. Belle après-midi. 

Temps couv., mais beau. Le cielse dégageles. 

Temps beau, couvert. 

Temps couvert le matin. Temps légèrement 
voilé, mais beau le soir. 

Très-beau temps. Quelques nuages. 

Temps voilé qui se couvre le soir ; quelques 
gouttes de pluie. 

Temps couvert et pluvieux par intervalles. 


Le temps se découvre dans l'après-midi et 
devient beau. 

Temps voilé, mais très-beau le matin. Petits 
grains dans l'après-midi. 

Temps beau, nuageux. 


Belle matinée. Temps orageux et à grains le 
soir. Pluie à 1° et à 5" de l'après-midi. 


OBSERVATIONS 


Départ de Nong Kay à 8" 1/2 du ma- 
tin. 
Arrivée à Vienchang à 1" du soir. 


(1) Ce sont les dernières observations 
faites avec le baromètre à mercure 
qui fut cassé par accident peu de 
jours après. Les observations sui- 
vantes sont faites avec un baro- 
mètre holostérique, qui, à ce mo- 
ment, présentait une différence de 
3"" en moins avec le baromètre à 
mercure. 

Arrivée à Xieng Cang à 2° du soir. 


Départ de Xieng Cang à 7° 1/4 du ma- 
tn. 
Température élevée. 


La direction générale de la vallée du fleuve et des montagnes qui l’encadrent parait 
influer sur celle de la mousson sèche qui, à Bassac notamment, souffle du Nord et du Nord- 
Nord-Ouest plutôt que du Nord-Est. La proximité des chaînes rend la brise inégale et à 


rafales. Elle atteint son maximum d'intensité vers 2? 


ou 3 heures de l'après-midi, et 


tombe en général pendant la nuit. Un peu de brume le matin, un temps très-beau et très-sec 


pendant le jour, un horizon toujours brouillé, quelques rares strati au ciel; tel est l'aspect 
de la saison sèche dans le Laos méridional. Dès le commencement du mois de mars, la 


lutte entre les deux moussons ramène des orages pendant lesquels 11 tombe parfois de la 


grêle. Ce phénomène, constaté à Houten (voyez l'observation du 10 mars), ne laisse pas de 
surprendre par une latitude de 17° et demi, par une température de 32°, et à une altitude 
très-inférieure à 200 mètres. 


La température, qui varie entre de si faibles limites dans tout le della du Cambodge, 


38 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


présente dans le Laos méridional des extrêmes beaucoup plus éloignés. Sur le plateau où 
se trouvent Oubon, Ban Mouk et Vien Chang, le maximum thermométrique doit être très- 
élevé, puisque, dès le 11 février, M. Delaporte a observé à Kemarat des températures de 35 
à 36°. Dans le Sud, le maximum est loin d'atteindre ce chiffre : la plus haute température 
observée a été de 34° à Stung Treng, qui me paraît être un point exceptionnellement chaud 
de la vallée du fleuve. Cette différence anormale doit tenir aux grandes plaines sablon- 
neuses qui s'étendent au Nord-Ouest du plateau de Ban Mouk et sur lesquelles la mousson 
se réchauffe. A Bassae et à Stung Treng, au contraire, le voisinage de hautes chaines dans 
cette direction rafraichit l'atmosphère. 

Le moment le plus chaud de l’année n’est pas, comme on pourrait le croire, le mois 
de juillet ou le mois d'août, époque où les pluies entretiennent dans l’atmosphère une 
humidité qui tempère les ardeurs du soleil et empêche l’échauffement continu du sol; il 
doit arriver un mois ou deux après l’équinoxe du printemps, en avril ou en mai, dans 
les intervalles des grains orageux qui préludent alors à la saison des pluies. Dans toute 
cette zone, il suffit d’un orage pour abaisser brusquement la température de 6 à 7°. 


DAMES 
AVRIL 1867 
LIEUX k s 
£ DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D'OBSERVATION 
6h du soir. {11h du matin midi: 4 1h 1/2 du soir. 3h 1/2 du soir. 
Paklay. ..: .….. 17 |22,0 734,0 | 31,5 733,5 | 34,5 183,5) 359 733,5 | 22,0 732,0 N.E. 
l'après-midi. 
6h du matin. 10h du malin. 3h du soir. 4h du soir. 
Idem. DO TS MA DATER A UE TD) 7.2 | 5.5 7875 S.-0. variable. 
En route. .... 19 » » » » » » » » » » Idem. 
Idem. 20 » » » » » » » » » » N.-E. 
dans l'après-midi. 
Idem. 21 » » » » » » » » » » N.-N.-E. à 
: 4h 1/2 du soir. 
Idem. 22 » » ) » » » » 130,0 » 132,5 | N., qui passe aus. 
vers 2° du soir. 
Idem. 23 » » » » » » » » » » N. ; 
Idem. 24 » » » » » » » » » » N.-N.-O. 
Idem. 25 » » » » » » » » » » N. pendantlejour, 
S. pendant la nuit. 
Idem. 26 » » » » » » » » » » S. très-variable. 
Idem. D » » » » » » » » » » S.-S.-0. 
Idem. 28 » » » » » » » » » » Diverses, très- 
| 3h du soir. faibles. 
| Luang Prabang| 29 » » » » » » 34,0 ‘122,0 » » Presque calme. 
| UTdem. 30 [23,0 724,0 | 28,6 726,8 | 32,0 725,0| 35,0 724,0 | 33,0 724,5 Îdem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 39 


Au Sud des cataractes, le minimum de température est à peu près le même qu’en Co- 
chinchine, c’est-à-dire de 18 à 20°, mais dès le 15° parallèle, il s’abaisse jusqu'à 11 ou 
10°. Ilne saurait être question iei du sommet des montagnes de cette zone, où la tempé- 
rature doit descendre beaucoup plus bas ; je n’entends parler que de la vallée du Cambodge 
et de celles de ses principaux affluents. 

L'heure du maximum thermométrique diurne varie, par un temps uniformément 
beau, de 3 à 6 heures de laprès-midi. Cette dernière limite a été observée à Bassae, 
où la fraicheur produite par l’humidité et les brumes des montagnes environnnantes ne 
se dissipe qu'après une longue journée de soleil. 

Il est assez difficile d'indiquer d’une manière générale l'influence de la direction du vent 
sur le baromètre. Dans le Sud de la zone que nous étudions, il baisse par les vents de 
l'Est et du Sud; il reste très-haut par calme et par les vents contraires. Sur le plateau de Ban 
Mouk, le role des vents de Sud et de Nord reste le même, mais celui des vents d’Est et 
varie de 9 à 10 heures du matin; 


d'Ouest est renversé. L'heure du maximum diurne 


l'heure du minimum, de 4 à 5 heures du soir. 


SEPTENTRIONAL 


AVRIL 1867 


| 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 


TEMPS 


Pluie et brume le matin. Très-beau temps au | 


Jolie brise. Arrivée à Paklay à 10° du matin. 


milieu du jour. De 2° 1/2 à 4h, violent | 
orage et forte pluie du Nord-Est. 
Temps couvert Jusqu'à 9° du matin. Très | 
beau le reste du jour. | 


Temps brum. le mat. Très-beau le reste du j. 


A minuit, 24° - 733,0. 


Idem. Départ de Paklay à 10° du matin. 


Jolie brise à rafales. 


Petite brise. 


Petite brise le matin ; 
fortes rafales le soir. 


Petite brise. 
Idem. 
Légcres brises. 


Idem. 
Petite brise. 


Même temps. 
Beau temps, légèrement voile. 


Beau temps jusqu'à 2°. Violent orage, avec 
pluie torrentielle et forte grèle, à 5" du soir. 

Temps couv. et pluv. le matin. Beau le soir. 

Même temps. 

Brume au lever du soleil ; 
reste du jour. 

Pluie lem.Orage dansleS.Journéeassezbelle. 

Très-beau temps. 

Beau temps voilé. 


beau nuageux le 


Beau temps nuageux. 
Beau temps voilé. 


| ‘Grèlons de forme-ovoïde et de la gros- 


) e 
seur d’une cerise. 


Arrivée à Luang Prabang à midi. 


40 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


MAI 1867 
LIEUX | 
DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT | 
D OBSERVATION 
6h du matin. 10h du matin. midi | 3h du soir. 5h du soir. 
degrés. millim. degres. millim. | degrés, millimu. | degrés. millim. degrés. millim. 
Luang Prabang| 1 |23,0 724,5 | 25526029 525 07 022 » » O.-N.-0. 
| 7h du matin. | : | €h 1/2 du soir. | 
Idem. 2/2 0012250029 0726 01852 022 5 6 023 2052/0237 08 0. 
Idem. SOS ND 0 0 ON OR POMPES » » | Idem. 
| 5h du soir. | 
Idem. ñ >> | 25,00724,8 020 00028,2 183 0722 Ne DES RE CINE 
Idem. 5 |94,0 722,8 [27,5 793,5 | 32,0 723,0 31,5 121,0 | 33,0 720,7 | E.le m., 0.S.-0. 
4n du soir. 6h du soir. l'après-midi. | 
| Idem. 6 » » |28,5 723,5 | 31,2 725,0) 32,5 720,4 | 26,0 720,2 DES LD 
| | 6h 1/2 du matin. | 3» du soir. 5h 1/2 du soir. | 
| Idem. 7 |21,2 721,0 | 24,5 723,2 | 27,6 722,8 | 31,0 724,6 |28,0 720,0 Idem. | 
| 6h du matin. | | 5h 3/1 du soir (1). | 
Idem. 8 |21,2 724,0 | 26,0 722,6 | 30,0. 722,0 | 33,2 720,9 | » 719,6 | O.-S.-0. l'apres- 
| 5n du soir. midi. | 
| Idem. 9 1220 721,0 [27,3 723,6 | 32,0 723,0 | 31,5 721,6 | 33,0 721.0 Idem. | 
| Idem. 10 » » » » » » 022575 34,0 722,2 S. | 
| | 6b du soir. 
Idem 11 » » 30,0 723,6 | 34,0 723,5 | 36,8 722,2 | 35,0 721,2 | O.-S.-0. ap. midi. 
Idem. 12 » » |26,0 723,1 | 29,0 724,0 32,2 722,5 | 30,5 720,5 | S.-O.l'ap.-midi. 
9h 1/2 du soir. | 
Idem. 13 922,5 722,5 | 28,0 724,2 | 32,2 124,0 | 35,0 122,5 | 31,0 721,3 | O. l'après-midi. 
3h du soir. 1h {/2 dusoir. 
Idem. 14 n 28,2 521,5 392,2 722,0 3150012145 3302085 Idem. 
; 5h du soir. | 
Idem. 15 » » 28,0 T2 SN MSI 2028 MARS 02186 266 72119 0.-S.-0. | 
Idem. 16 » » 255012024275, 722; 5128/0721; 0 » » 0. 
5h 1/2 du matin. | 
Idem. 17 1935 722,0 27,0 723,8 28,5 723,3 | 395 721,2 32,0 720.8 | Idem. 
41h du matin. 
Idem. JS UN  1517000723,5 052,0 0723, 1183 021 0 29 0 205 S.-O. | 
| 10h du matin. | 
Idem. 19 | » » |928,9 729,9 | 31,8 722,5 | 34,0 720,5 | 39,5 720,0 0.-S.-0. 
| | 5h 1/2 du soir. 
Idem. 20 » » EDP RDS 7818 l'ADN TA? ASS T2 Idem. 
| 1h du malin. 6h du soir. 
| Idem. 21 |25,0 723,5 |29,0 724,5 | 31,5 724,5 | 34,8 123,1 | 51,0 729,1 | Id. l'après-mid. 
| Idem. 22 » » 280721 08 1022 61 2522 0 ESS 072120) 0.-S.-0. 
| , 5h du soir. | 
Idem. 23 » » 21,0 123,0 131,2 722;5433;5 120; 26,2."749;8 Idem. | 
Sh du matin. | | | 
Idem. CN OS NT RO TR ON AT D 22,71 | SD Te, 2) AUS » | N.-0. | 
En route. . ... 2/50) » » » » » » » » » S.-0. | 
| Idem. 26 » » » » » » » » » » Idem. | 
Idem. 27 » » » » » » » » » » Idem 
Idem. 28 » » » » » » » » » » Idem. 
Idem. 29 » » ») » » » » ) » » 0.-S.-0 
10h du matin. 11h du matin (2). 
Pakbén......| 30 |21,2 749,8 | » 720,1 | 33,9 720,0 | 35,6 748,2 | 34,0 714,9 Idem. 
En route. ....| 31 » » » » » » » » » » 0.-S.-0. 
dans l’après-midi. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 41 


MAL 1867 


FORGE DU VENT 


Jolie brise. 


Petite brise. 
Idem, inégale. 


Petite brise. 
Petite brise qui fraichit 
le soir. 

Bonne brise. 
Jolie brise. 


Jolie brise. 


Bonne brise. 
Petite brise. 


Idem. 


Idem. 
Jolie brise. 


Idem. 


Idem. 


Légère brise. 
Idem. 
Bonne brise. 
Jolie brise. 
Petite brise. 
Jolie brise. 
Idem. 
Idem. 

Bonne brise. 
Jolie brise. 
Idem. 

Pet. brise fraîchis. le s. 
Id. ,rafales l'après-midi 


Idem. 


Petite brise. 
Idem. 


TEMPS 


Tempsàgrains. Très-beau dansles intervalles. 


Brume au lev. du sol. Très-beau le reste du j. 

Belle matinée. Orage et pluie à 3° de l’après- 
midi. 

Beau temps, nuageux. 

Temps beau, nuageux. Orage dans l’après- 
midi. 

Temps nuageux ; le soir, grains assez forts à 
3", à 5" et à minuit. 

Beau temps, nuageux. À 2° du soir, de l’o- 
rage et quelques gouttes de pluie. 

Beau nuageux. 


Idem. 
Très-beau temps. Quelques nuages. 


Idem. 

Temps couvert et menaçant le matin. Se dé- 
gage et devient très-beau le soir. 

Très-beau temps, légers nuages. Un peu d’o- 
rage vers 3°. 

Même journée. 


Belle matinée. Grains pluvieux etorageux le s. 

Temps couvert et pluvieux. Ondées intermit- 
tentes. Quelques éclaircies. 

Bancs de brume qui passent en donnant de 
petites averses. Soirée très-belle. 

Temps très-beau qui se couvre à 5° du soir. 
Un peu de pluie. 

Temps beau, nuageux. Quelques gouttes de 
pluie dans l'après-midi. 

Temps couvert et pluvieux. 


Temps couvert, mais beau. Le ciel se dégage 
tout à fait vers 4" du soir. 
Très-beau, nuageux. 


Tres-beau, nuageux; grains à 3" du matin et 
à 3" du soir. 

Temps couv. et brumeux. Pluie l'après-midi. 

Temps beau, très-nuag. Un grain à 1" dus. 

Temps couv., mais beau. Se découvre complé- 
tement le s. Eclairs dansle S. pendant lan. 

Très-beau temps. Quelques nuages. 

Brume légère le mat. Le reste du j. très-beau. 

Même temps. 


Idem. 
Très-beau temps. Le soir, orage lointain 
dans l'Ouest-Sud-Ouest. 


OBSERVATIONS | | 


Tous les grains, pendant cette période, | | 
sont très-orageux. 


(1) Heure exacte du minimum baro- | | 
métrique ; le maximum thermomé- 
trique (34°) avait eu lieu à 4». 


Départ de Luang Prabang à 8" du ma- 
tin. 


() Heure exacte du maximum baro- 
métrique; le minimum (716,6) a 
lieu à 6" le mème jour. 

Arrivée à Pakbén à 9° du matin. | 

Départ de Pakbén à 7° 1/2 du matin. 


IT. 


42 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
JUIN 1867 
LIEUX ; ; 
, DATES THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 
D'OBSERVATION 
6h du matin. 10h du matin. midi. 3h du soir. 5h du soir. 
Enroutede Pak- degrés. millim. degrés. millim, degrés. millim. degrés. millim. degrés. millim. 
bén à Xieng 
Khong..... { » » » » » » » » » » 
Idem. 2 » » » » » » » » » » 
Idem. 3 » » » » » » » » » » 
Idem. 4 » » » » » » » » » » 
; 5h 1/2 du soir. 
Xieng Khong . . 5 » » 26,574, 1 » » 30,5 715,0 | 26,0 744,5 
5h 1/2 du matin. 10h3/% du mat.(1). 3h 4/2 du soir. 5h du soir, 
Idem. 6 193,1 715,6 [27,8 717,2 | 28,8 746,7 | 30,9 745,1 | 93,2 714,5 
6h du matin. 9 du matin (1). 2h {/2 du soir (2). 5h {1/2 du soir. 
Idem. 7 |21,6 716,0 | 25,6 748,0 | 28,8 747,9 | 31,0 716,0 | 30,0 715,0 
10h1/2 du mat. (1). 6h du soir. 
Idem. 8 |22,5 715,7 | 29,0 747,6 | 30,2 718,0 | 32,0 743,7 | 29,0 745,1 
7h 1/2 du matin. 
Idem. JA OTAIG TND LS NT INTET » » » » » » 
9h du matin. midi. 4h du soir. 
Idem. 10 DONC ASE DEEE AS Tir 
Idem. 11 23,2 718,9 | 26,5 720,3 | 29,2 720,0 » » 28,6 716,8 
5h du soir. 
Idem. 12 |22,6 718,0 | 28,2 719,6 | 34,4 749,5 » » 28,8 716,6 
6h 1/2 du matin. 10h du matin. 3h du soir. 
Idem. 13 |25,0 718,0 | 31,0 720,0 | 31,4 749,5 | 32,5 717,0 | 29,2 746,0 
Envroute. 14 » » » » » » » » » » 
Idem. 15 » » » » » » » » » » 
Idem. 16 » » » » » » » » » » 
Idem. 17 » » » » » » » » » » 
Sala duT. ang ho| 18 » » » » » » 31,5 » » » 
7 du matin. 
Idem. 19 » 710,0 » 711,0 » 710,5 » » » 108,5 
1h 1/2 du matin. 
Idem. 20 » | 7725 » 713,2 » » » » » 712,1 
En ROULE EE 21 » » » » » » » ») » » 
: 9ù 4/2 du matin. 6h 1/2 du soir. 
LE po an 00 22 D » 14,5] » TLO| » T13,0| » 742,0 
6h 1/2 du matin. 9h du matin. 5h 4/2 du soir. 
Idem. 23 » 742,0 | » 713,0 | » ‘713,0 |27,0 741,6 |25,0 710,7 
6 3/4 du matin. 10h du matin. 6h 1/4 du soir. 
Idem. 24 |24,0 742,0 | 26,0 743,1 | 25,6 743,0 | "278 741,9 252 741,5 
6h du matin. 5h du soir. 
Idem. 25 |23,5 714,0 | » 715,5 [28,9 745,7 30,5 714,1 |29,8 743,7 
Idem. 26 |23,5 714,6 | 28,8 746,0 | 28,8 715,5 | 32,5 113,6 | 34,5 713,0 
Idem. 27 |24,5 712,5 129,2 713,5 | 31,8 713,3 | 31,6 711,2 | 30,6 709,5 
7h du matin. 5h {/4 du soir. 
Idem. 28 |24,0 709,5 | 28,5 710,6 | 32,0; 711,0 | 24,0 708,0 | 26,0 707,2 
Idem. 29 |24,0 710,9 | 97,2 714,5 | 29,8) 744,0 | 34,8 740,0 | »  » 
Idem. 30 » » » » » » » » » 


DIRECTION DU VENT 


0.-S.-0. 


E. à partir de 8° 


du matin. 


N.-N.-0. 
N.-N.-E. 


0. 


O. variable à 
l'O.-N.-0. 
E=NE°E: 


E. 
0. 


E.-N.-E. le mat. 
Idem, puis S.-E. 


Idem. 


E. 
E. puis N. à partir 
de 4° du soir. 


Presque calme. 


S. 
S. au S.-0. 
N.-0., puis S.-0. 


le soir. 
S.-S.-0. 
Idem. 


Idem. 
S. au S.-0. 


Idem. 


E. 
E.-S.-E.,etO. les. 
S. qui passe à 
l’O.-S.-0. le soir. 
S.-0. variable. 
Idem. 
S.-S.-0. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


JUIN 1867 


ES 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 
Idem. 
Jolie brise. 
Petite brise. 

Jolie brisetrès-inégale. 
Petite brise. 
Idem. 

Idem. 

Bonne brise. 

Pet. br.tomb.versmidi 
Petite brise. Calme à 
partir de 1" du soir. 
Petite brise. 


Pet. brise fraichis. les. 
Petite brise. 


Idem. 


» 


Jolie brise. 
Petite brise. 


Jolie brise. 


Bonne brise. 
Petite brise. 


Idem. 
Légère brise. 
Idem. 
Idem. 
Pet. brise tomb. le soir. 
Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


TEMPS 


Brume le mat. Très-beau temps le reste du j. 
La nuit, éclairs dans le Sud-Ouest. 

Pluie torrentielle jusqu’à 8° du mat., heure à 
partir de laquelle le temps devient beau. 
Quelques grains dans l'après-midi. 

Temps à grains. Nuit très-orageuse. 

Temps couv. et pluv. Eclaircie vers 1° du «. 
A 6" 1/2, violent orage de l'Ouest. La pluie 
continue jusqu'à minuit. 

Temps couvert, pluvieux et orageux ; quel- 
ques éclaircies. 

Temps couvert. Orage et pluie à partir de 4° 
du soir. 

Temps beau, nuageux. 


Brume au lev. du soleil. Très-beau temps le 
reste du jour. 
Temps couvert et orageux. Pluie fréquente. 


Mème temps. 

Matinée brumeuse. Grain du Sud-Est à midi. 
Très-beau le reste du jour. 

Très-beau temps le mat. Le temps se couvre 
à partir de 1° après un grain du Sud-Est. 

Très-beau temps, nuageux. 

Très-beau temps, quelques nuages. Un grain 
à 4" du soir. 

Beau tempsnuageux. Grenasses de 10" à midi. 

Très-beau temps, légers nuages. La nuit, 
éclairs dans le Sud-Sud-Ouest. 

Temps couv. et orag. jusqu'à midi. Beau les. 

Mème temps. 


Temps couvert. Le soir, orage et pluie. 


Temps couvert. Pluie le matin. 

Temps couvert. Pluie continue de 4" à 10° du 
matin. 

Temps couvert et pluvieux. 


Mème temps ; quelques éclaircies. 
Idem. 


Le temps redevient très-beau. 
Matin. légèrement brum. Très-belle journée. 
Mème temps. Un peu d'orage dans la nuit. 


Très-beau temps, nuag. Fortgrain d'O. à 3"s. 
Brume et pluie le mat. Beau le reste du jour. 


Mème temps. 
L] 


OBSERVATIONS 


Arrivée à Xieng Khong à 8° du matin. 

(t) Heure exacte du maximum baro- 
métrique. Le maximum thermomé- 
trique (31°) a lieu à 4" le 5. 

@) Heures exactes du maximum ther- 
mométrique le T et le 8. 


Variations barométriques et thermo- 
métriques très-irrégulières. 

Le maximum barométrique à lieu à 
40%: 720,1. 


Départ de Xieng Khong à 4° du soir. 


Latitude de la halte du soir : 20° 34. 

Arrivée à 10° du matin au Sala cons- 
truit sur les bords du fleuve près du 
Tang ho (rapide). 


Le fleuve monte de 3" pendant la nuit 
et la journée suivantes. 


A 9° du matin, 715,2 et 25°. 

Le min. barom. a lieuà 6": 712,7et30°. 

Le maximum thermométrique (33°) a 
lieu à 1°. 

Le maximum barométrique (714,1) a 
lieu à 11°. a 

Emballage des instr. en vue du départ. 


JUILLET 1867 


-OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


En 


route 


de 


M Lim à Paléo. 


DAÉO ee 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


En route. .. 


Siemlap. . . 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


En route 


Sop Fong.. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Entroute ner 


DATES 


& D 


Æ 


6h du matin. 


degrés. millim. 


23,2 713,0 


7h du matin. 


22,0 713,9 
6h du matin. 

23,0 714,0 
» » 
» » 
» » 

24,0 710,0 


» » 


22,9 710,2 
5h 1/2 du matin. 
23,5 109,0 
6h {/2du matins 


24,8 701,7 


6h du matin. 
23,5 709,0 
23.2 709,2 


708,2 
1h du matin. 


23,6 707,3 


29 9 


£) 


24,4 707,5 

» » 

» » 

» » 

» » 

» » 
1h 1/2 du matin. 
99.8 706,6 


22 8070105 
6h du matin. 


29,4 707,6 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


10h du matin. midi. 3b du soir. 
degrés. millim. degrés. millim. degrés. millim. 
» » » » » » 
» » » » » D 

26,5 713.6 | 28,0 713,5 | 27,5 742,0 
24,3 715,0 | 25,9 714,8 » » 

24,6 715,5 » » 24,8 714,0 
» » » » » » 

24,0 715,0 » » » 113,0 
» » » » » » 
» » )» » » » 
2h 1/2 du soir. 

» 711,71 98,3 710,9 | 29,0 709,5 
21E0NSTUUE CNRS OR » » 
é 3h du soir. 

DOUAI RS 01001 

DES SN SD OO 
27,0 708,4 | 28,2 708,4| »  » 
4h 1/2 du soir. 

» » » » » 705,9 
» » ») » » » 
2h du soir. 

aa) TD 2 » » 25,8 708,9 

DS 610 5 NN CO OS ST 0ONS 
3h du soir. 

DO TOS NE ST OTE2 

26,8 708,5 » » 30,2.0703;3 

» » 30,2 708,0 | 28,0 706,6 
2h du soir. 

» » » » 30,1 708,0 
» » » » » » 
4n 1/2 du soir. 

» » » » 26,5 104,4 
PES LORS TT) >  » 
» » » » » ) 
2h du soir. 

22,9 707,0 | 24,8 707,0 | 25,6 706,0 

24,8 708,0 » » 24,9 706,5 

26,0 709,1 » » 27,1 707,9 

9h 1/2 du matin. 

25,4 709,1 » » 25,8 708,0 

» » » » » » 


5k du soir. 
degrés. millim. 

» » 
25,2 740,9 
26,0 741,5 
21,0 713,3 

» » 

» » 

» » 

) » 

4h du soir. 
25,0 709,0 

5h du soir. 

» 108,4 


24,2 708,1 
29,0 708,4 


» » 


26,6 706,1 
) 
SRE 

91,2 708,1 

25,0 708,1 

28,2 706,3 

28,6 705,4 


28,2 706,2 


» » 
» » 
» » 
24,8 703,1 
» D) 
24,8 705,4 
26,0 705,9 
26,5 706,6 
23,9 707.5 
» » 


DIRECTION DU VENT 


0.-N.-0. 


O. variable. 
O.-S.-0. 


0. 
E. tres-variable. 


0. 
O.-S.-0. 


E.-N.-E. le mat. ; 
O. le soir. 


0.-S.-0. 
S. 
E. le soir. 


O., puis S. à 5° 


du soir. 


0. 
S.-0. 


O.-S.-0. 
S.-0. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Presque calme. 


S.-S.-0. 
Idem. 


S.-0. 


Calme. 
S.-0. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES 


JUILLET 1867 


FORCE DU VENT TEMPS OBSERVATIONS 


Petite brise. Temps couvert et pluvieux le matin. Beau, | Départ de M Lim à 8" du matin. 
nuageux l'après-midi. 
Idem. Temps couvert. Pluie à 4" et à 10° du soir. Arrivée à Paléo à 1" du soir. 
Idem. Temps couvert. Pluie continue à partir de 4" 
du soir. 
Idem. La pluie ne cesse que vers 5" du soir. Soirée 
assez belle. 
Idem. Pluie presque continuelle. 
Idem. Même temps. 
Jolie brise. Temps couvert qui s’éclaircit un peu au mi- 
lieu du jour. 
Petite brise. Temps assez beau au milieu du jour. Pluie et | Départ de Paléo à 7° du matin. 
orage le soir et le matin. 
Très-légère brise. Mème temps. Arrivée à Siemlap à 11° du matin. 
1 \ ù ; La station météorologique est à 10 me- 
Petite brise. Pluie le mat. Beau, nuageux le reste du jour. tres environ au dessus du niveau(du 
Idem. Belle matinée. Grain or ageux d'O.-S.-0. de fleuve. 
2° 1/2 à 4° 1/2 dus Le temps ee COUV. 
Idem. Temps assez beau au milieu du jour. Mati- 
née pluvieuse. 
Jolie brise. Temps beau, très-nuageux. 
Idem. Temps couvert. Pluie à partir de 6" du soir. 
Petite brise. La pluie cesse à 4° 1/2 du soir, et le ciel se 
nettoie un peu. 
Idem. Matinée pluvieuse. Eclaireie au milieu du 


jour. La pluie recommence après un grain 
du S. à 5" du soir. 


Idem. Temps couvert et pluvieux. 
Idem. Pluie presque continuelle. 
Idem. Le temps se découvre et devient beau à partir | Le fleuve à atteint son niveau maxi- 
de 10" du matin. mum de l’année précédente. 
Idem. Pluie de 3" à 5" du matin. Temps assez beau 
le reste du jour. 
Idem. Journée assez belle. Grain assez fort.à 2° 1/2 
du soir. 
Jolie brise. Pluie de 1" à 4" du matin. Beau temps, nua- 
geux le reste du jour. 
Petite brise. Pluie de 4" a 6° du matin. Beau temps pen- | Départ de Siemlap à 10°. 
dant le jour. 
Idem. Temps à grains ; beau par intervalles. Arrivée à Sop Yong à 1" du soir. 
Calme. Pluie presque continuelle. 
Petite brise. Même temps. 
Jolie brise. La pluie cesse à midi. Le temps reste couvert. 
Idem. Pluie continue jusqu'à 3" du soir. 
Idem. Temps couv. Courtes ondées pendant le jour. 
Idem. Temps couvert et pluvieux. 


Petite brise inégale. Même temps. Quelq. éclaircies l’après- -midi. | Départ de Sop Yong à midi. 


”_ 


AOÛT 1867 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D OBSERVATION 


PüSSan Tree 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


En route. ... 


LE FO do v0 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


5h 1/2 du matin. 
degrés, millim. 


» » 
29,0 701,5 
» » 

» » 

» » 

» » 

» » 

» » 


6h 1/2 du matin. 


22,5 695,8 


22,5 694,9 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 


) » 
7h du matin. 


23,5 697,5 


» » 


93,0 697,6 


» » 


» » 


» » 
6h 1/2 du matin. 


91,0 698,7 


» » 
7h du matin. 


25,5 697,0 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


9h 1/2 du matin. 


degres. millim. 
» » 
» » 


25,5 702,7 
26,5 702,6 


10h du matin. 


25,5 701.6 
25,7 700,7 


» ) 
» » 
9h 1/2 du matin. 
25,0 698,1 
24,0 696,4 
94,8 695,6 
23,5 696,8 
» » 


10h du matin. 


» 699,3 
26,0 697,2 


9h 1/2 du matin. 


25.0 697,6 
23.8 697,6 
25,0 698,1 
24,8 698,4 
225 698,1 
95.0 698,4 
26.0 699,4 

» DR 
93,5 699,4 
25,0 700,1 


9h du matin, 
26,5 699,5 
9h 1/2 du matin. 
25,8 698,7 
26,0 698,1 
698,9 


697,5 


25,5 
29,0 


25,4 696,4 


degrés. 
» 


29,9 


midi. 
millim. 
» 


703,1 


4h du soir. 
degres. millim. 
26500997 

2h du soir, 
30,2 702,0 

3h du soir. 
30,5 700,6 

2h du soir. 
29,0 701,1 

3h du soir. 
26,6 699,5 

» » 

» » 
2h 1/2 du soir. 
30,0 696,0 

» » 

3h du soir. 
23,0 694,5 

in du soir, 
28,0 694,4 

» » 

3h du soir. 
27,5 698,5 
28,0 696,2 
29,0 695,0 


3h {/2 du soir. 
29,0 695,7 


» » 


1n 1/2 du soir. 
25,0 697,0 
3h du soir. 


23,7 697,6 
» » 


30,5 697,5 
3h 1/2 du soir. 
31,2 693.8 
3h du soir. 


31,5 696,0 
2HPCMOIS ES 


3h 1/2 du soir. 
29,0 694,4 
3» du soir. 


28,8 694,2 


5h {1/2 du soir. 


degrés. millim. 
» » 
25,2 700,0 
5h du soir. 


29,5 699,5 


5h {/2 du soir. 


26,8 699,8 
6h du soir. 
24,6 699,2 
» » 

» » 
5h du soir. 

» 695,2 


25,2 695,3 


23,2 693,7 
24,5 693,5 


4h 1/2 du soir 


23,0 696,8 


» » 


5b du soir. 


27,0 695,3 
24,0 694,5 


5h {/2 du soir. 
28,0 695,4 
24,5 695,5 

5h du soir. 


25,0 696,1 
23,3 696,1 


» » 
28,5 696,1 
» » 

» » 


5h 1/2 du soir. 
23,8 697,7 
» » 
5h du soir. 
30,0 697,0 
5h 1/2 du soir. 


29,5 693,1 
695,5 


695,2 
25,8 694,0 


28,0 693,7 


DIRECTION DU VENT 


S.-0. 
0. 
Idem. 
0.-S.-0. 


Idem variable. 
Idem. 
Idem. 


S. 
0. 


Idem. 


Idem. 


S.-0. à l'O. 
N.-E. l'apr.-midi. 


0. 


N.-0. très-variab. 


Idem. 
S. très-variable. 


S.-E. 


Idem. 
N.-0. le soir. 


N.-0. p.S.-0. les. 
0.-S.-0. 


Idem. 


Presque calme. 
N.-E. 
Idem. 

S.-S.-E. 


Idem. 
puis N.-E. le soir. 
N.-N.-E. 


Idem. 
INo=18 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


 AOUT 1867 


D 


1 


FORCE DU VENT 


Jolie brise inégale. 
Jolie brise. 
Presque calme. 
Petite brise. 


Petite brise inégale. 
Idem. 
Idem. 


Bonne brise. 


Jolie brise inégale. 


Idem. 


Idem. 


Petite brise. 


Idem. 
Idem. 


Petite brisetrès-inégale 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Jolie brisetrès-inégale. 


Bonne brise. 
Idem. 


Jolie brise. 


» 
Petite brise. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


Id. qui fraichit beau- 
coup le soir. 


TEMPS 


Temps assez beau. Quelq. grains au mil. du j. 
Mème temps. 

Très-beau temps; légers nuages. 

Très-beau et très-nuageux. 


Temps couvert assez beau. Petit grain à midi. 

Le soir, orage dans le N.-E. 
as 

Beau temps nuag. Un peu de pluie à 9° du m. 
Le temps se couvre le s. Orage dans le N.-E. 

Très-beau temps. Grain orageux et pluvieux 
à 3° du soir. 

Temps à grains. Les. viol. orage dans le S.-E. 


Temps couvert. Grains orageux et pluvieux 
£ D 
presque continus. 
Mème temps. 


La pluie cesse pendant la matinée, reprend 
sans interruption à partir de 2° du soir. 
Pluie continue. 


Le temps redevient assez beau pendant l’a- 


près-midi. 

Temps beau nuageux. Petit grain de pluie 
vers 1" du soir. 

Même temps. Orage et pluie le soir. 


Matinée pluvieuse. Belle après-midi. 
Orage et pl. pendant la n. Journée ass. belle. 


Pluie presque continuelle. 


Mème temps. Une ou deux éclaircies. 

Temps couvert. Deux ou trois averses au mi- 
lieu du jour. 

Temps nuag. assez beau. Une ou deux ondées. 

Pluie le matin. Journée assez belle. 


Temps couvert et brumeux. Ondées qui se 
succèdent à de courts intervalles. 
Pluie continue qui ne cesse qu’à 4" du soir. 


Le temps redevient très-beau. 
Temps beau nuageux. 
Brume le matin. Très-belle journée. 


Petite pluie le matin. Belle journée. Le temps 
se couvre et devient orageux le soir. 
Matinée et nuit pluvieuses. Belle journée. 


La pluie cesse à 9" du matin. Très-beau 
temps ensuite. 
Beau temps. Le soir, orage dans le N.-0. 


OBSERVATIONS 


Arrivée à B Passang à 1° du soir. 


Départ de B Passang à 8* du matin. 
Arrivée à 1" à M Yong. 


48 


SEPTEMBRE 1867 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


IMBFONTEEN NN 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
| Idem. 


Idem. 


Entroute + 
| Idem. 


IEUPYOT ER 
| Idem. 
Idem. 
idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
En route. ... 
Idem. 
MELON 
| Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
En route. . ... 
Idem. 


Idem. 


Xieng Hong... 


DATES 


I 


EE Co 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


——_—_—Zp 


6h 1/2 du matin. 
degrés. millim. 


» » 


23,5 698,0 


9h du matin. 
24,3 700,9 

7h du matin. 
23,0 699,0 

6h du matin. 


23,2 697,4 


» » 

» » 

» » 

» » 
6h 1/2 du matin. 
23,0 702,6 


» » 
6h du matin. 
23,8 702,1 


» » 


S h du matin. 


26,0 694,2 


9h 1/2 du matin. 


degrés. millim, 
24,2 698,7 
26,5 699,6 
23,9 700,0 
21,7 699,8 
23,7 700,4 
24,4 701,0 
24,0 700,4 
» » 
» » 
40h du matin. 
24,2 704,3 


9h 1/2 du matin 
26,0 701,1 
41h du malin. 
28,0 706,5 
9h 1/2 du matin. 
26,0 703,5 
25,8 703,1 


26,3 
26,5 


703,5 
704,5 


27,0 705,5 


» » 
» » 


693,9 
694,7 
» 695,2 
» 695,2 
» 694,4 


10h du matin 


28,0 693,8 


» 694,6 
» » 
» » 
» » 


9h 1/2 du matin 


» 703,8 


midi. 


degrés. millim. 


10h du matin. 


23,8 700,1 
midi. 
25,8 700,0 
4h du soir. 
29,4 696,7 
» » 
» » 
» » 
midi. 


28,5 606,7 


» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
28,0 694,0 
» » 
» » 
» » 


5h 1/2 du soir. 


26,5 700,6 


3h du soir. 
degrés. millim. 
29,5 696,3 
27,5 697,1 
27,1 697,5 
25,0 697,4 


3h 1/2 du soir. 
24,8 697,5 
3h du soir. 


27,8 698,4 
28,3 697,0 


25,5 702,3 
3h 4/2 du soir. 
27,8 104,0 
30,8 703,3 


3h du soir. 


28,0 700,3 


28,8 700,8 
24,8 700,6 
» » 


31,8 702,5 


» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
5b du soir. 
29,0 692,5 
» » 
» » 
» » 
) » 
» » 
» » 


4h 1/2 du soir. 


25,8 700,5 


5h 1/2 du soir. 


degrés. millim, 


28,0 696,0 
27,0 696,7 


5h du soir. 
27,0 697,0 
5h 1/2 du soir, 


25,5 697,1 
25,2 697,9 


26,5 697,9 | 


7h du soir. 


2ONO ONE 


5h du soir. 
25,5 702,0 
5h {/2 du soir. 
26,8 703,5 
5h du soir. 
28,5 702,5 
5b 1/2 du soir. 


26,7 700,0 


27,3 700,5 
6h du soir. 
25,8 701,0 
» » 

4 1/2 du soir. 
51,5 701,9 
» ») 
5h du snir. 

» 691,5 
5h 1/2 du soir. 
» 692,0 


4h 1/2 (min.). 


» 692,9 


» 692,4 
5k (min.). 
» 692,4 
» » 


5h 1/2 du soir 


» 700,4 


DIRECTION DU VENT 


N.-0. à l'O. le m. 
S.-E. à partir 
de 10". 

SE. 

N.-E. à l'E.-N.-E. 
E. variable 
ANNE SCE; 

Idem. 
E. ‘variable. 
Sans -S.-0;: 


S.-S.-0. 
S.-0. 


Calme. 
N. variable 
au N.-E. 
INEINEE* 


N.-E. 


Idem. 


Idem. 
Passe au S.-0. 
le soir. 
N.-E. 
Idem. 


N.-N.-E. 


N.-E. qui passe 
au S. le soir. 
S.-S.-E. très-var. 


Calme. 


N.-E. le matin, 
.N.-N.-0. le soir. 
Calme. 


N.-N.-E. 
HEINÈSEr 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 19 


SEPTEMBRE 1867 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


» 
Petite brise. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Jolie brise inégale. 


Petite brise. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 

Jolie brise. 

» 

Petite brise. 

» 

Petite brise. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


TEMPS 


Grains de pluie le matin. Beau temps le soir 
et la nuit. 
Très-beau temps; nuageux. 


Série d’averses pendant toute la matinée. Le 
temps s’'embellit le soir. 
Même temps. 


Mème temps. 
Grain de pluie à 10° 1/2. Temps beau, nua- 
geux le reste du jour. 


Brume le matin. Beau temps le reste du jour. 


Très-beau temps ; légers nuages. 
Idem. 


Temps couvert et pluvieux. 

Le temps se remet graduellement au beau. 

Très-beau temps, 

Ondées de pluie intermittentes pendant tout 
le jour. 

Temps presque couvert; quelques petits 


grains. 
Temps couvert et à grains. 


| Le temps s’éclaireit vers 4° de l'après-midi. 


Très-beau temps ; légers nuages. 
Très-beau temps. Un petit grain vers midi. 
Très-beau temps: légers nuages. 


Matinée pluvieuse. Le temps reste à grains 
pendant le jour. Belle soirée. 

Pluie avant le lever du soleil. Beau temps le 
reste du j. Un petit grain du S.-0. vers 4". 

Brouillard qui ne se dissipe qu'à midi. Très- 
beau temps ensuite. Eclairs dans l'E. 

Orage et pluie torrentielle du N.-E. jusqu'à 
7° du matin. Beau le reste du jour. 

Beau temps légèrement voilé. 


Brouillard le matin. Très-beau le reste du 
jour. Légers nuages. 
Même temps. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


OBSERVATIONS 


Départ de M. Yong à 9° du matin. 
Arrivée à M. You à 8" du soir. 


La rivière de M. You grossit à vue 


d'œil. 


La rivière baisse aussi rapidement 
qu'elle avait monté. 


Départ de M. You à 8° du matin. 
Arrivée à M. Long à 4° du soir. 


Le Nam Kam inonde ses rives. 


Départ de M. Long à 7° du matin. 


Arrivée à Xieng Hong à 4" 1/2 du 
soir. 


En 


50 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
OCTOBRE 1867 
| LIEUX 1 
| - DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D'OBSERVATION 
| 5h 1/2 du matin. | 9h 1/2 du matin. midi. 3h du soir. 5h 1/2 du soir. 
degrés. millim. degrés. millim, degrés. millim. degrés. nillim. degrés. millim. 
Xieng Hong... il 16,8 701,5 | 18,5 702,2 | 21,0 701,5 | 25,0 700,8 » 699,4 | - E.-N.-E. 
6h du matin. 
Idem. 2 18,0 702,0 | 19,0 703,8 | 22,5 703,0 | 26,0 701,0 | 25,8 700,8 Idem. 
5h 1/2 du matin. 3h du soir. 
| Idem. 3 21,0 703,3 | 22,6 705,1 | 24,8 704,0 | 26,2 702,0 | 25,0 704,5 S.-S.-E. 
3h 1/2 du soir. | 
Idem. n » » » » 24,8 703,2 | 25,3 701,5 » » S.-0. | 
Idem. 5 » » » » » » » » » » Idem. 
7h du matin. 3» du soir. 
Idem. 6 22,0 703,5 24,5 704,2 » » 23,0 701,2 » » SEE 
INEnsroute + 7l » » » » » » » » » » un Ni 
2h du soir. 
Idem. 8 » » » » » » » 687,0 » » Idem. | 
3h du soir. | 
Idem. 9 » » » » » » » 647,0 » » Idem. | 
4» du soir. 
Idem. 10 » » » » °» » » 642,0 |: » » Idem. 
Idem. 11 » » » » » » » ) » » Idem. 
Xieng neua.. ..| 12 » » 21,0 670,5 | 24,5 669,5 » » » » Idem. 
MPG 153 » » » » 25,0 649,0 » » » » Très-variable. 
4h 1/2 du soir. 
Nang Sang Ko. .| 14 » » » » 24,0 646,0 » 643,8 » » S.-S.-0. 
10h 1/2 du matin. 
Envroutene.. 15 » » » 640,0 » » » » » » So 
Idem. 16 » » » » D  » » » » » S 
Idem. 17 » » » » » » » » » » Idem. 
Idem. 18 » » » » » » » » » » s 


Les tableaux qui précédent fournissent quelques exemples de variations locales dans la 
direction des moussons. C’est surtout sur les bords du fleuve, qui est profondément 
encaissé sur la presque totalité de son cours dans le Laos septentrional, que se rencontrent 
les plus grandes anomalies. Ainsi les vents de la partie du Nord et de l'Est paraissent 
dominer encore au mois de juin à Xieng Khong, alors que, dès la fin d’avril, la mousson 
souffle très-régulièrement à Luang Prabang de lO.-S.-0. Malgré ces exceptions, on peut 
dire que sur les plateaux du Laos septentrional, les deux moussons se succèdent avec ré- 
gularité en avril et en octobre et y conservent la direction qu’elles ont sur les côtes de 
l’Indo-Chine. 

Les températures moyennes de la nuit sont de 3 ou 4 degrés inférieures dans cette 
région aux températures correspondantes, observées à la même époque de l’année, dans le 
Laos méridional. Quoique les observations faites dans la partie Sud ne comprennent pas les 
mois de l’année supposés les plus chauds, avril et mai, et que la comparaison des tempé- 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


OCTOBRE 1867 


JT 


= 


FORCE DU VENT 


Petite brise. 
Idem. 
Jolie brise. 


Idem. 
Idem. 


Bonne brise. 
Petite brise. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Presque calme. 


Idem. . 
Petite brise. 


Jolie brise. 
Idem. 


Petite brise. 
Idem. 


TEMPS 


Léger brouillard le matin. Très-beau temps 
le reste du jour ; légers nuages. 
Même temps. Le soir, éclairs dans le Sud. 


Pluie d'orage avant le lever du soleil. Beau 
temps le reste du jour. 

Brume le matin ; beau nuageux le reste du j. 

Mème temps. Grain orag. et pl. vers 5° du s. 


Temps couvert et pluvieux. 

Temps couvert et brameux ; petite pluie par 
intervalles. 

Brouillard pluvieux qui se dissipe vers 9° du 
matin. Beau le reste du jour. 

Légère brume le mat., très-beau le reste du j. 


Mème temps. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Brouillard ; pluv. le matin. Beau le reste du j. 


Temps orageux ; quelq. gouttes de pl. le s. 

Orage et pluie torrentielle de 2° à 5° du mat. 
Temps assez beau le reste du jour. 

Grains de pl. qui se succèdent pend. tout le j. 

Très-beau temps nuageux. 


OBSERVATIONS 


Départ de Xieng Hong à midi. 


La hauteur barométrique a été prise à 
M. Yang. 

La hauteur barométrique est celle de 
la halte du soir. 

Idem, prise au village de Kon-han. 

Arrivée à Xieng neua à 3" 1/2 du soir. 

Départ de Xieng neua à 7° 1/2 du mat. ; 
arrivée à M. Pang à 10° 1/2. 


Départ de M. Pang à 8", arrivée à Nang 
Sang Ko à 11° du matin. 

Départ à 7° 1/2 du matin ; la hauteur 
barométrique est celle du village de 
Voumochou. 


Arrivée à Se-mao à 4! du soir. 


ralures maxima des deux zones reste par conséquent incomplète, 1} semble cependant 
qu’elles doivent atteindre dans le Nord des chiffres beaucoup plus élevés que dans le Sud, 
suftout dans la vallée du fleuve proprement .dite. L'espèce d’entonnoir que forment les 
chaines qui l'enserrent et les surfaces rocheuses qui y réfléchissent les rayons du soleil 
produisent parfois des chaleurs excessives. A Pak Lay, par 18° de latitude, le thermomètre 
dépasse, dès le mois d'avril, de près de 2° la plus forte température observée au mois d'août 
à Stung Treng par 13° et demi de latitude. À Luang Prabang, par le 29° parallèle, à une 
certaine distance même des rives du fleuve et en dehors de toute réverbération des rives, 
le thermomètre indique en mai une lempérature de 37°, qui, ramenée au niveau de la mer, 
équivaudrait à près de 39°. A la même époque, le lieutenant, aujourd’hui général Mac 
Leod, a observé dans la vallée du Me Ping, la branche la plus occidentale du Me Nam, par 
17° 30 de latitude, une température de 47°8. 

Les chiffres donnés par Mouhot pour la température de Luang Prabang au mois 


OT 


© 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


d'août la font osciller entre 33° 3 et 21° 6, chiffres dont le plus fort est supérieur de 1°8, 
et le plus faible inférieur de 2°9 aux températures correspondantes observées dans 


le Sud au même moment. Ces chiffres confirment pleinement les lois indiquées plus 


haut. Les températures extrêmes observées par Mouhot à Luang Prabang pendant le mois 
d'octobre sont 14° 4 et 32° 2. 


Dès que l’on quitte la vallée du fleuve, on s'élève rapidement à l'Est ou à l'Ouest jusqu’à 
atteindre des altitudes suffisantes pour modifier profondément les conditions climatériques. 
Cest ainsi que sur la rive droite on rencontre le plateau de Xieng Tong sur lequel, 
au mois de février, Mac Leod a trouvé que la température oscillait de 5° 5 à 28°, et dont 
l'altitude, d’après une observation de la température d’ébullition de l’eau, serait environ de 
900 mètres. Sur la rive gauche, à très-peu de distance du fleuve, les crêtes des chaines se- 
condaires qui forment les vallées de ses affluents s'élèvent de 13 à 1,400 mètres au-dessus 
du niveau de la mer, c’est-à-dire de 7 à 800 mètres au-dessus de la vallée principale. Il 


OCTOBRE 1867 


3 PLATEAU 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


DATES 


6h du matin. 


degrés. millim, 


640,8 
640,3 
642,0 
642,6 
642,0 


641,6 


degrés, 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


10h du matin 


millim. 


» 643,5 


» » 
9h du matin. 
17,0 642,5 


10h du matin. 


18,0 642,9 


9n 1/2 du matin 


17,5 644,3 


16,5 644,5 
10h du matin. 
16,5 644,0 
9h 1/2 du matin. 


17,5 643,0 
16,9 643,1 


9h du matin. 


16,8 642,8 


midi, 


degrés. 


millim, 


3h du soir. 
millim. 


642,5 


degres, 


21,0 


3h {/2 du soir. 


19,00 640,8 
» » 
» » 


0 


5h du soir. 


degrés. millim. 


19,8 640,0 
20,0 640,8 


5h 1/2 du soir, 
19,2 641,9 

5h du sair. 
18,5 642,0 
5h 1/2 du soir 


18,3 642,5 


» » 
4h 1/2 du soir. 


19,2 640,1 


» » 

6h du soir. 
14,5 640,3 

» 621,6 

» » 


DIRECTION DU VENT 


S.-0. 
N.-0. le matin, 
S.-0. le soir. 
E. 

ID 


E. qui passe au S. 
le soir. 


Idem. 


Idem. 
S. variable. 
Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


en résulte que la saison sèche, pendant laquelle les vents soufflent du N.-E., doit amener 


sur ces hauteurs des températures relativement très-froides. Quoique l’on soit encore ici 


sous les tropiques, la neige fait parfois alors une courte apparition sur les sommels et, si la 


végétalion des vallées reste presque exclusivement tropicale, celle des plateaux commence 


à fournir des spécimens des fruits de la zone tempérée. 


Les heures des maxima et des minima barométriques diurnes paraissent, dans la région 
que nous étudions, se rapprocher très-sensiblement de 11 heures du matin et de 6 heures 
du soir. Les vents de la partie de l'Est paraissent faire monter le baromètre; 1l descend 
au contraire par les vents de l'Ouest. L’amplitude des oscillations diurnes atteint fréquem- 
ment3 millimètres. 


La variation de l'aiguille aimantée a été trouvée à Luang Prabang de 3° O4 N.-E. et 


de 2° 50’ N.-E. à Xieng Khong, dernier point où elle ait pu être observée, un accident 
élant survenu depuis au théodolite boussole. 


DU YUN-NAN 


OCTOBRE 1867 


FORCE DU VENT 


Idem. 
Idem. 
Pet. br. puis jolie br. 
Petite brise. 
Légère brise. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


TEMPS 


Un grain de pl. vers 10° du matin. Beau temps 
nuageux le reste du jour. 

Beau temps moyen. 

Matinée pluvieuse. Beau temps le soir. 

Beau temps nuageux. 


Idem. 


Le temps se couvre au milieu du jour. 


. Un peu de pluie vers 2" du soir. Beau temps 


le reste du jour. 
Très-beau temps ; légers nuages. 


Beau temps ; très-nuageux. 
Temps beau, presque couvert. 
Mème temps. Quelq. gouttes de pl. à 1"dus. 


Très-beau temps nuageux. 
Idem. 


OBSERVATIONS 


Départ de Se-mao à 9° matin. La hau- 
teur barométrique est celle de la 
halte du soir. 


ESS 


NOVEMBRE 1867 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


Pou-eul. . ... 


Idem. 


Idem. 


En route. ... 


Idem. 


Tong Kouan . .. 


Idem. 


Eniroutee# 


Idem. 


L'EG 35 0 0 80 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Entroute, 
FORD: 35500 


Enéroute 


Idem. 


Idem. 


Vuen-kiang. . .. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


DATES 


30 


oh du matin. 


degrés. millim, 


» » 
13,5 638,1 
17,5 640,0 


» » 
» » 
» » 


6h 1/2 du matin. 


15,0 625,8 


6b du matin. 


14,0 642,0 


14,0 642,0 
13,0 642,0 


13,0 642,3 
» » 


6h 1/2 du matin, 


13,6 610,8 


5h 1/2 du matin. 


5,8 625,3 


4,2 » 
6h du malin. 
) » 


7) 


12,0 721,5 
12,5 722,0 


) » 
12 541250) 
7h du matin. 
12,0 723,9 
» D 
» » 

» » 


6h 1/2 du matin. 


11,0 623,0 ©) 


1,3 604,0 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


10 du matin. 
degrés, millim. 


» » 
18,0 641,5 


19,0 641,9 


» » 
» » 
» » 


9h 4/2 du matin. 


15,7 626,2 


15,0 643,5 
10h du matin. 
1L,1 643,0 
13,1 643,4 


14,0 643,6 


» » 
14,0 641,5 


» » 


9» du matin. 


8,5 625,5 


» » 
» » 
» » 


9 1/2 du matin, 
13,0 723,0 
15.0 724,0 


» » 


9h du matin. 


14,0 726,0 


14,0 724,5 


» » 


» » 


112 du matin. 


» 729,542 


fih 1/2 du matin. 
» 588,0 


» » 


midi 
degrés. millim, 


» » 


20,0 641,1 


19,1 640,8 
2h du soir. 

» 614,7 

» » 

» » 
midi. 
16,0 625,9 
1 du soir. 

» 689,5 

)) » 

» » 

» » 

» » 
midi. 
15,0 643,1 
») » 

» » 

» » 

» ) 

» » 

» » 

» » 
15,0 721,0 
16,0 721,5 
» » 

» » 


3h du soir. 
17,5 718,1 
» » 


midi. 
20,0 731,4 () 


» » 


» » 


14,1 603,5 


4h 1/2 du soir. 
degrés. millim. 
29,0 638,2 
5b du soir. 


22,0 639,2 
21,0 638,9 


6h du soir. 
» 647,0 
» 677,0 


£h 1/2 du soir. 
20,0 625,5 
3h {/2 du soir. 


18,0 625,5 
» 672,5 


» » 


17,6 640,5 
4n du soir. 
13,5 640,3 
13,9 640.6 
3h 1/2 du soir. 
15,8 641,9 
» » 
3h du soir. 
14,5 637,1 
4h 1/2 du soir. 

» 1H253,2 
3h 1/2 du soir. 
7,3 625,2 
in 1/2 du soir. 
9,0 641,5 

2h du soir. 

» 624,1 
3h du soir. 
16,0 717,5 
3h 1/2 du soir. 
17,0 717,7 
17,5 718,7 
9h 1/2 du soir. 
17,3 720,3 
4h du soir. 


11612122 


17,6 718.5 


4h 1/2 du soir. 


11,0 624,3 


10,0 598,7 
13,0 626,5 0 


DIRECTION DU VENT 


S.-0. 
N.-N.-E. 


S.-0. 
O.-S.-0. 


S.-0. 
N.-E. 


S. très-variable. 


S. au S.-S.-E. 


Idem. 


_ S.-0. 
S. variable. 


Idem. 


Idem. 


S.-S.-E. au N.-E. 


N.-E. 


N.auN.-N.-E. 


N: 


Presque calme. 


S'auS SEE; 


Calme. 


S.au S.-S:-E. 


S.-E. 
O. variable. 
Idem. 


Idem. 
Calme. 


OBSERVATIONS 


MÉTÉOROLOGIQUES. 


FORGE DU VENT 


Légère brise. 
Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Jolie brise. 
Idem. 


Légère brise. 


Petite brise. 
Idem. 


Jolie brise. 
Petite brise. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Assez jolie brise. 
Idem. 
Petite brise. 


» 
Légère brise. 


Jolie brise. 
» 


Petite brise. 
Jolie brise. 


Petite brise. 
Idem. 
Idem. 


» 


TEMPS 


Très-beau temps nuageux. 
Temps couvert. Un peu de pl. à 10" du matin. 
Même temps. 


Mème temps. 
Très-beau temps nuageux. 


Même temps. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Temps couvert; petite pluie vers 5" du soir. 


Temps couvert, brumeux et pluvieux. 
Même temps. 


Temps couvert assez beau. 
Temps couvert et pluvieux. 


Temps couvert ; s'embellit un peu le soir. 
Temps couvert et pluvieux. 

Pluie continue. 

Le temps s’embellit un peu. 

Temps nuageux assez beau. 

Très-beau temps, légers nuages. 


Temps magnifique, ciel sans nuages. 
Temps beau nuageux. 


Idem. 
Très-beau temps, ciel sans nuages. 


Très-beau temps, légers nuages. 
Idem. 


Brume le matin. Beau temps le reste du jour. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


OBSERVATIONS 


Arrivée à Pou-eul à 11" du matin. 


: 159 
Î h 
À 9! du matin. ... 610.3 
s 2(°1 
7h ; 2 
ACLTUNSOIr..... 638.5. 


La 1° hauteur barométrique est prise 
au point culminant de la route ; la 2° 
est prise à Mo-he, où l'on couche les. 

La hauteur barométrique a été prise 
sur les bords du Pa-pien Kiang. 

Arrivée à 1" du soir à Tong Kouan. 


Départ de Tong Kouan à 7" 1/2 du ma- 
12 Ô TI 
in ; Ja 4° hauteur barometrique a 
" # ? . 
été prise sur les bords du Pou-kou 
Kiang ; la 2° à Tchang-lou-pin. 
Arrivée à Ta-lan à 2° du soir. 


Départ de Ta-lan à 10" 1/2 du mat. La 
hauteur barom. est prise à Kien-so. 


Départ de Kien-so à 8" du matin. Halte 
à 4" du soir. 

La hauteur barométrique est prise à 
Mong-lang. 

Arrivée à Yuen-kiang, sur les bords du 
Song Coi à 11" 1/2 du matin. 


Départ de Yuen-kiang à 11° du matin. 

(1) Cette haut’ barométrique a été prise 
à Pa-kang sur les bords du fleuve que 
je descends depuis Yuen-kiang. 

(2) Cette haut” barométrique est prise 
au bord du fleuve ; la hauteur sui- 
vante presque au sommet du plateau 
qui le domine de tous côtes. 

(#) Cette hauteur barométriqueest prise 
à la halte de la veille; la suivante 
au point culminant de la route du 
jour ; la 3° à la halte du soir. 

(:) Cette haut" barométrique est prise 
au village de Long-ta. 


56 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
DÉCEMBRE 1867 
LIEUX À \ | 
: DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE DIRECTION DU VENT 
D OBSERVATION 
6h 1/2 du matin 9h 1/2 du matin. midi. 3h du soir, 
degrés. millim, degres. millim. degrés. millim. degres. millim. 
En route ..... l 7,5 630,2 » » | » » » » N.-E. 
6h du matin. 
Tinen Jan eee) 8,5 642,5 » 643,5 » » » » S. au S.-S.-E. 
Idem. 3 » » » 642,5 | 10,3 640,8 13,5 » Idem. 
6h 1/2 du matin. 9h du matin. | 
Idem. x 6,5 640,0 8,0. 641,6 10,2 638,9 14,5 635,6 Calme. 
9h 1/2 du matin. | 
Idem. à) 9,0 635,6 10,2 637,4 | » » 13,8 632,6 & 
9h du matin. | 3h 1/2 du soir. 
Idem. 6 9,5 634,8 10,0 636,1 > - » 14,0 630,6 S. au S.-0. 
Idem. 7 10,8 632,6 11,2 634,5 » » 15,0 630,1 S; 
10h du matin. 8h du soir. 3h du soir. 
Idem. 8 » » 11,5 636,3 12,0 631,8 14,0 633,0 Idem. 
En route . .... 9 » » » » » » » » N.-E 
5h du soir. 9h 1/2 du matin. midi. h 1/2 du soir. | 
CRE DEEE 10 10,0 626,2 11,5 629,3 12,0 627,6 12,5 625,9 | S.-0. 
En route..... 11 D 5 DR Du D | 313,0 626,9 Sau.S.-S.-0: 
4h du soir 
Idem. 12 » » » 602,2 (| » » 10,0 612,7 N.-E 
7h du matin. 3h du soir. 
Idem. 13 6,5 612,7 » » » » 14,0 631,8 © Idem. 
6h 1/2 du matin. 
Idem. 14 1,0 633,4 » » » » 11,0 612,7 E.-N.-E 
7 du matin. 40h du matin. 2h du soir. 4h du soir. 
Tong-hay. . ... 15 5,0 612,6 1,5 615,1 95018: 10,0 613,5 E. au S.-E 
Enrouter-2"# 16 » » » » » » +0,9 614,0 N.-E. 
6h 1/2 du matin. midi. 
Idem. 17 +4,0 611,2 » » 7,0 621,6 5,0 620,9 N. 
9h du matin. | 
Kiang-tchouen. .| 18 1,0 618,1 +4,0 620,9 6,0 618,8 9F0M62 0798) S+ 
6h du matin. 10h du matin. | 
Idem. 19 +2,0 618,8 BONG2D2E » » ”, » S.-0. 
6h 1/2 du matin, 4h 1/2 du soir. 
Eniroute 20 2,0 619,5 » » » 581,0 8,0 594,2 | Idem. 
4» du soir. 
Idem. 21 » » » » » » 12,0 600,1 N.-0. 
Idem. 22 » » » » 12,0 601,1 » » 0.-S.-0. 
Ide m. 23 » » » » » » » » 0 u 
è 3h 1/2 du soir. 
PANENAN EEE 24 » » 6,0 603,4 196029 10,5 602,9 Idem. 
Idem. 25 1,5 600,9 4,2 601,0 7,8 601,7 10,8 601,0 Le 
7h du matin. 9h 1/2 du matin 3h du soir. 
Idem. 26 22550075 4,5 600,1 » » IF 0M5 9975 Idem. 
Idem. 27 a HO) 4,6 600,1 » » 12,5 601,1 Idem. 
9h du matin. 4h du soir. 
Idem. 28 3,5 601,1 4,2 601,1 9,0 601,1 11,5 601,1 Idem. 
3h 1/2 du soir. 
Idem. 29 2,5 601,1 4,0 601,1 » » 11,0 601,7 Idem. 
8h du matin. 10h du matin. 4h 1/2 du soir. 
Idem. 30 2,5 601,1 6,0 601,7 D, 11,0 601,1 Idem. 
7h du matin. 4 du soir. 
Idem. 31 1,0 600,9 an ŒIL ne 14,5 599,5 Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉO ROLO GIQUES. 


DÉCEMBRE 1867 


FORCE DU VENT 


Légère brise. 


Idem. 
Idem. 


» 
Jolie brise. 


Idem. 
Bonne brise. 


Idem. 
Jolie brise. 


Petite brise. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. ; 
Id. qui fraichit le soir. 

Petite brise. 

Idem. 
Jolie brise dans l’après- 

midi. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 


Bonne brise. 


TEMPS 


Temps beau voilé. 


Très-beau temps. 
| Idem. 


Très-beau temps. Horizon embrumé, ciel sans 
nuages. 
Très-beau temps. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Beau temps, nuageux. 


Même temps. 
Temps très-nuageux. 


Temps couvert assez beau. 
Beau temps, nuageux. 
Brume épaisse le matin, beau le reste du jour. 


Le temps se couvre vers 11° du matin. 
Il neige d’une façon continue jusqu’à la nuit. 


Très-beau temps, quelques nuages. 
Ciel sans nuages. 
Beau temps, très-nuageux. 
Idem. 
Très-beau temps; ciel sans nuages. 


Idem. 
Très-beau temps, légers nuages. 


Idem. 
Temps magnifique, ciel sans nuages. Horizon 
légerement voilé. 
Même temps. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Même temps, quelques nuages. 


OBSERVATIONS 


La hauteur barométrique est prise à 
Long-ta. J'arrive à Lin-ngan à 2" s. 


Le minimum barométrique a lieu vers 


5'etest de 638,1. 


Départ de Lin-ngan à 8" 1/2 du mat. 
Arrivée à Che-pin à 5" 1/2 du soir. 


Départ de Che-pin à 9" du matin. 
L'observation barométrique est prise 


à la halte du soir. 


(1) Cette haut” barométrique est prise 
au point culminant de la route; la 
suivante et celle du lendemain ma- 


tin à 7%, à la halte du soir. 


(?) Cette hauteur barométrique a été 


prise à la halte du soir. 


Le 14, arrivée à Tong-hay à 2° dus. 
Départ de Tong-hay le 16 à 9" du m. La 
hauteur barométrique est prise à la 
halte du soir, ainsi que celle du len- 


demain matin. 


La hauteur barométrique du midi est 
prise sur les bords du lac. Arrivée 


à Kiang-tchouen à 3° du soir. 


Départ à 8" 1/2. La hauteur baromé- 
trique de midi est prise au point 
‘ culminant de la route ; celle de 4" 1/2 


à la halte du soir. 


La hauteur barométrique est prise dans 


la plaine du lac de Yun-nan. 
Même observation. 
Arrivée à Yun-nan à {" du soir. 


oo 
À 5° 1/2 du soir. . .. \GoL A. 


IT. 


D8 


JANVIER 1868 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


Yun-nan 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
En route de Fun-nan 
à Tong-tchouen. ... 


Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
RON CRAN EERERCE 
Éniroute mere rre 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Tong-tchouen 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
En route de Tong- 
tchouen à Ta-ly.... 


Idem. 


DATES 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


7h du matin. 


degrés. millim, 


4,0 600,8 


8h du matin. 


4,0 601,0 
1h 1/2 du matin. 
4,0 601,0 
3,5 600,1 
4,8 597,5 


6h 1/2 du matin. 


5,5 597,5 
7h 4/2 du matin. 
6,5 597,5 
» » 
» » 
» » 
») » 
» » 
» » 
» » 
» » 
6h 1/2 du matin. 
DIM55 ON 
J0 LS 
» » 
» » 
» » 
7h1/ 1 matin. 
5,0 581,0 
» » 
6,0 578.5 
3,5 581,0 
Sh du matin, 
1,7 518,5 
7h {1/2 du matin. 
3,8 580,4 


6h {/? du matin, 


2,0 580,4 


» » 
7h 1/2 du matin. 


1,2 581,0 
» » 


» » 


10h du matin. 


degrés. millim. 


» » 
5,6 601,1 
5,0 601,1 


9h du matin. 


1,8 600,8 
10h du matin. 
1021 ET 
9,2 597,5 
9h du matin. 
HR ONE 

») » 

» » 

» » 

» » 

» » 

» » 


10h du matin. 


7,5 605,6 


» » 
» » 
» » 
» ) 
10h du matin. 
8,0 581,7 
» » 
6,0 582,3 
7,5 579,2 
» » 


655 81871 
10h 1/2 du matin. 


6,0 379,2 


10h du matin. 


1,0 580,4 
5,2 518,5 


1) » 
» » 
» » 


9h du soir. 


degrés. millim, 
10,8 600,1 
» » 

» » 

» D 
» » 

» » 
41h du matin. 

re Qù 
Pb) Ris 

» » 

» » 


1h 1/2 du soir. 
5,5 398,1 
midi. 


10,0 599,5 


» » 
10,0 605,6 
11,2 604,2 

» » 

» » 

» 532,9 

» » 

» » 

» » 


» » 
— 
CL BC, 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 
» » 


4h du soir. 


degrés, millim. 

12,0 600,1 

12,0 600,1 

10,8 601,0 
3h du soir. 


10,8 599,5 


3h 1/2 du soir. 


12,0 593.5 
oh du soir. 
13,9 596,8 


4 du soir. 


13,0 594,9 


» » 
4h 1/2 du soir. 
12,8 594,9 
» » 


4h du soir. 
L 
13,2 598,8 
5h du soir. 


13,0 594,2 


» » 
3h 1/2 du soir. 
14,9 601,7 
5h du soir. 
12,0 552,0 
4n 1/2 du soir. 


12,0 358,6 


4 du soir. 
13,5 566,8 
» ) 
10,0 379,8 
90 378,5 
10/0.579;2 
3h 1/2 du soir. 
11,5 571,3 
4» du soir. 
12,0 577,9 
5h du soir 
10,4 5 


=1 
n @©) 
10 


4h du soir. 
10/0 571019 
3h du soir. 


10,0 577,3 


» » 

4h du soir. 

9 Las 
15,0 593,6 

5h du soir. 


20,0 665,9 


DIRECTION DU VENT 


0.-S.-0. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 

. à l'O.-S.-0. 
Idem. 


Idem. 
N.-E. 


S.-0. le matin, N.-E. 
l’après-midi. 


RENE 
S. au S.-S.-0. le soir. 


S.-S.-0. 


Idem. | 

S. au S.-S.-0. 
S.-0. variable. 
S.-S.-0. | 
S.-0. 


Idem. 


Idem. 
S.-0. à l'O0.-S.-0. 


S.-S.-0. 
Idem. 
Idem. 


Calme le matin, S.-0. 
le soir. 


S.-0. 


Calme. 


S.-S.-0. à part. de midi. 
S.-S.-0. 
Calmele matin, S.-S.-0. 
à partir de 11°. 
S.-0. 


Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 59 


JANVIER 1868 


| 
| 
, 
| 


FORCE DU VENT TEMPS OBSERVATIONS 
s | 
| 
| 
Bonne brise. Très-beau temps. Quelques nuages. 
Idem. Mème temps. 
Idem. Idem. 
Idem. Idem. 
Très-bonne brise. Ciel un peu plus nuageux. 
Idem. Ciel sans nuages. 
Idem. Idem. 
Petite brise. Le temps se couvre le soir. Départ de Yun-nan à 41° 1/2 du matin. 
Jolie brise le matin. Le ciel se découvre vers midi, mais se charge | La hauteur barométrique est prise à 
de nouv. les. sous l’infl. des vents de N.-E. Yang-lin. 
Petite brise. Temps froid et couv. Qques éclaire. l’ap.-m. | La haut. baromét. est prise à Keou-kay. 
Jolie brise. Le temps, très-nuageux le mat., devient très | Les hauteurs barométriques sont pri- 
beau le soir. ses à Yang-kay. 
Jolie brise. Brume lég. le mat. Très-beau temps le reste 
du jour. 
Jolie brise à rafales. Mème temps. La hauteur barométrique est prise à 
à Ne Kon-tchang. 
Idem. Mème temps. Quelques cirrhi. “4 

Jolie brise mollissant. | Très-beau temps. Quelques nuages. La haut. baromét. de Set celle du len- 

gun À demain mat. sont prises à Te-tchang- 
Jolie brise. Mème temps. à 
tang: 

Bonne brise à rafales. | Ciel sans nuages. La haut. baromét. de midi est prise au 
Idem. Idem. \passage d’un col, point culminant 
tes es de la route suivie. 

ee es Arrivée à Tong-tchouen à 6" du soir. 
Vent frais. Temps très-nuageux. 
Jolie brise à rafales. Ciel sans nuages. 
Bonne brise à rafales. Idem. 
Idem. Idem. 
Petite brise. Brume au lever du soleil. Temps beau, nua- 
geux le reste du jour. 
Jolie brise. Tres-beau temps. Quelques nuages. 
» Temps couvert le matin ; se dégage vers 10". 


Tres-beau le reste du jour. | 
Mème temps. 


Jolie brise. 


Idem. Très-beau temps sans nuages. 
o . . . | 
Petite brise. Matin. brum. Beau temps le reste du jour. | 
| 
Jolie brise. Très-beau temps sans nuages. | Dép. de Tong-tchouen à 11° 1/2 dumat. 
Idem. Idem. | La hauteur baromét. est prise à Mong- 


| kou (vallée du Kin-cha Kiang). 


60 


TÉVRIER 1868 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


Houey-ly 


Idem. 


Hong-por 


Idem. 


Idem. 
En route 


Idem. 


Idem. 


En route 
Idem. 
Idem. 


| Idem. 
Idem. 


| Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


En route. 


Ma-chany 


| LIEUX 
D'OBSERVATION 

En route de 7Zong- 
tchouen à Ta-ly... 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


LESC 


Tou-tsouy-tse . 


DATES 


(o2] 


THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE 


sh {1/2 du matin. 
degres, millim. 


16,0 682,2 


» » 

| 
» » 

| 
» » | 


üh 1/2 du matin. 


6,0 604,2 


“h du matin. 
3,5 601,1 

» » 

» » 


8h 4/2 du matin. 


14,0 643,2 


7h du matin. 


12,5 643,6 
11,0 642,1 


Sh 1/2 du matin. 


12,0 642,3 


» » 


» » 
Sh du matin. 


11,5 657,9 
» » 


» » 
8h 1/2 du malin. 


» 604,9) 


» » 
» » 
» » 


Sh 1/2 du matin. 


3,5 538,90) 


» » 
» » 
» » 
» ) 
» » 
» » 
» )) 


degrés. millim. 


» » 


9h35 du matin. 


» 558,6 


» » 
» » 
» » 


10h du matin, 


5,0 603,5 


9h 1/2 du matin. 


15,0 643,4 


» » 
» » 
» ) 


» 663,20) 


» » 
5h 1/2 du soir, 
19,0 633.0 
» » 
» » 
» » 
) » 
» » 
» ) 
» » 


41h du matin. 


11,0 360,7 


» » 
» » 
» » 
» ») 
» » 
» » 


midi 


» 524,91) 


» » 
» » 

» » 

» » 

» » 
17,5 641,5 
» » 
17,0 643,6 
» » 

» » 

» » 


1h du soir 
15,0 589,30) 
» » 


3h {1/2 du soir. 


17,0 604,2 


midi. 
» 586,4 
» » 
» » 


6,0 547,96) 
9,2 561,4 


3h 1/2 dusoir. 


9,2 550,0 0 


midi. 
13,7 592,9 
» » 

» » 


3h du soir. 
degres. millim. 


14,0 602,3 
5h du soir. 
16,0 604,2 
6h du soir. 
13,8 612,6 
5h du soir. 


8,8 604,2 
12,0 604,1 


4h du soir, 
14,7 604,2 
4h 1/2 du soir. 
15,0 590,8 
6n du soir. 
24,5 041,5 
4h du soir. 


19,0 640,4 


6h du soir. 


18,0 638,7 


D D 

5h du soir. 
18,0 659,0 

6h du soir. 


12,0 650,7 


4 du soir. 
15,2 654,4 


3h {1/2 du soir. 
17,0 652,9 
5h 4/2 du soir. 
15,0 606,3 
4h 1/2 du soir, 
19,0 627,0 
3h 1/2 du soir. 
15,5 618.8 
. 6h du soir. 
17,0 622,7 
5h du soir. 


15,0 604,9 


4h du soir. 


an : M) le 
2h 1/2 du soir. 
10,7 590,8 


4h 1/2 du soir. 


15,0 622,6 


13,0 600,1 
9» du soir. 
15,5 629,8 


5h 1/2 du soir. 


14,0 592,3 


» » 

6h du soir. 
17,5 606,3 

3h du soir. 


16,5 589,3 


DIRECTION DU VENT 


S.-0. Var. à l'O.-S.-0. 


Idem. 
S.-0. 
S.-0. 

Variables. 
Presque calme. 
SD) 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Presque calme. 
Idem. 
N.-E. 


0.-S.-0. au S.-0. 


S.-0. 
Idem. : 
Idem. 
Idem. 
S.-S.-0. 
O.-S.-0. 
S.-0. 
S.-0. 


Calme le matin, S.-0. 


l'après-midi. 


S'au S.-S-0; 
SESEO: 


S.-E. qui passe au S.-0. | 


le soir. 


S.-0. 
Presque calme. 


Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


FÉVRIER 1868 


61 


| 


FORGE DU VENT 


Jolie brise. 
Idem. 


Bonne brise. 


Petite brise. 
Très-faible. 
» 
Assez jolie brise. 
Idem. 


Ass. jol. br. qui fraich. 
le s., puis tombe pend. 
la nuit. 

Brise ass. fraîche l’ap.- 
midi et la nuit. 

» 


on 


Vent frais. 


3 


Légère brise. 
Presque calme. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Jolie brise. 
Bonne brise à rafales. 


Jolie brise. 
Grande brise à rafales. 


Jolie brise à rafales. 
Jolie brise. 
Grande brise. 
Assez jolie brise. 
Petite brise. 


» 


Idem. 


TEMPS 


Temps très-nuageux. Vers 2", 
grain à l'horizon du vent. 
Beau temps nuageux. 


apparence de 


Beau temps. Très-nuageux le matin. 


Pluie et neige pendant toute la matinée. A 
partir de 4°, le temps s'embellit. 
Temps voilé assez beau. Petit grain de pluie 


à 5! du soir. 


Ciel sans nuäges. 
Très-beau temps ; légers nuages. 
Idem. 


Temps très-nuageux l'après-midi. 


Beau temps nuageux. 


Très-beau temps; quelques nuages le soir. 
Même temps. 


Temps couv. et pluv. pendant le jour. Orage 
et forte pluie à l'entrée de la nuit. Le temps 
redevient beau à 8" du soir. 

Beau temps nuageux. 


Même temps. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Temps très-pur le matin; ciel légèrement 
voile l'après-midi. 

Un peu de pluie le matin après une forte ra- 
fale. Le temps reste très-nuageux. 

Pluie continue pendant tout le jour. 


Temps assez beau, nuageux. 


Même temps; quelques grenasses. 


Temps couvert ; pluie par intervalles. 
Temps beau, nuageux. 


Très-beau temps ; quelques nuages. 


Beau temps, très-nuageux. 
Beau temps légèrement voilé. 


Mème temps. 


OBSERVATIONS 


La haut. baromét. du matin est prise 
au niveau même du Fleuve Bleu ; 
celle du soir, au sommet des hau- 
teurs qui encaissent le fleuve. 

La hauteur du 2 au matin est prise au 
point culminant de la route suivie ; 
celle du soir à Ta-tchio. 

(1) Cette hauteur est prise sur la ligne 
de faîte d’une chaîne neigeuse que 
nous traversons. 

La hauteur barométrique du 4 au soir 
est prise au village de Tchang-tchou. 

Arrivée à Houey-lv-tcheou le5à4"dus. 

Départd'Houey-Ilyle7à8"1/2 du matin. 

Arrivée à Hong-pou-s0 à 4" du soir. 


Départ de Hong-pou-so à midi. 


(?) Cette hauteur est prise au confluent 
même du Pe-chouy Kiang et du 
Kin-cha Kiang. 

Arrivée à Ma-chang à 1° du soir (vallée 
du Kin-cha kiang). 


La hauteur barométrique du soir est 
prise du sommet des crêtes qui do- 
minent Ja rive droite du fleuve. 


(#) Ces hauteurs barométriques sont 
prises aux lignes de partage des eaux 
des vallées que l’on traverse. 

Les haut. barométr. sont prises à par- 
ür du 21 le long des rives d’un cours 
d’eau que l’on remonte. La haut. (") 
a été observ. sur le col qui fermecette 
vall., aux sources mêmes de la riv. 

(5) Hauteur de la ligne de partage des 
eaux entre la riviere de Pe-yen-tsin 
et celle de Pin-tchouen, où l’on ar- 
rive le soir à 4°. 

On repasse à 1" par une haut. de 548"®,9 
(ligne de partage entre la vallée de 
Pin-tchouen et celle de Pien-kio). 

(s) Cette hauteur est celle de la chaine 
ouest de la vallée de Pien-kio. Ar- 
rivée à Tou-tsouy-tse à 5° du soir. 

Départ de Tou-tsouy-tse à 8" du matin. 

Arrivée à Hiang Kouan (bords du lac 
de Ta-ly) à 1° du soir. 


MARS 1868 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


LIEUX 


D'OBSERVATION 


ENS 06 does 

En route de Ta-ly à 
Tong-tchouen. . ... 
Idem. 


Tou-tsouy-tse. . . .... 
Idem. 


JB} MOMIE) 6 » 0 00 va 0 
Idem. 
Idem. 


Khay-tcha-ti. . ..... 
[Dj HOUSE 6m acacoc 


Idem. 


NoG- dati INC ER 
Nioung-poun-tse. .... 
En route 


Can-tchou-tse. . . . . . 
Idem. 


[Din TOME oc o0o0cas 


Idem. 
Hong-pou-s0....... 
Idem. 


EMATOUtE SERRE 
Idem. 


HOMMES sacocooocal 


Idem. 
I FOUSo pooovdgooc 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 


DATES 


THERMOMETRE 
degrés. millim, degrés. millim, 
) » » » 
» » » » 
8h 1/2 du matin. 1h 1/2 du soir. 
13,1 587,8 | 16,0 586.4 
» » » » 
» » » » 
midi, 
» » 18,3 598,1 
Sh du matin, 10h du matin, 
12,5 589,3 | 15,0 593,5 
» » » » 
» » » » 
» ) » » 
» » 14,0 626,1 
» » )) » 
» » » » 
midi. 
» » 20,0 601,1 
» » 21,4 621,6 
1 1/2 du soir. 
D» | 16-60 571908 
midi. 2h du soir. 


16,0 564,8 


7h du matin. 


9,8 560,0 
» » 
» » 


20,0 643,4 
» » 
» » 
» » 


7h du malin. 


15,8 604,2 


» » 
» » 
» ) 
» » 


9h 1/2 du matin. 


» 684,4 


16,5 562,8 
9n 1/2 du matin 
12,8 561,4 


9h du matin. 

» 606,3 
8h 1/2 du matin. 

D 029% 
9h 4/2 du matin. 


29,3 640,8 


Lo] 


29 643,5 


» » 
10h 1/2 du matin. 
» 564,1 


10h du malin. 


20,0 607,7 
19,8 604,9 
» » 

» » 
{1h du matin. 
10,4343,40) 
» » 


40h 1/2 du malin. 


22,0 669,1 


ET BAROMÈTRE 


degrés. millim, 
» » 

» » 
3» du soir, 
17,2 584,1 
» » 

» » 
19,1 596,2 
midi, 


16,0 393,6 


» » 
» » 
» » 


15,0 625,9 


» » 


2h 1/2 du soir. 


22,0 602,3 


» » 
3h du soir. 
AHDAMOOSS 
4n du soir. 
16,4 B61,4 
midi. 


15,3 560,7 


» 634,8 

1h du soir. 

» 660,8 
midi. 


94,0 639,3 


» » 
3h 1/2 du soir. 


» 574,70) 


) » 
midi. 
21,0 605,6 
» » 

» » 


2h du soir. 


17,0 613,3 


2h du-soir. 


26,0 666,2 


3h du soir. 
degrés. millim. 
14,0 589,3 
» » 


5h du soir, 


16,5 583,5 


» » 
23,0 624,5 


18,2 593,6 
5h du soir. 
15,0 592,9 
4h du soir. 

» (4 

» » 

» » 

3h du soir. 
16,0 624,8 
AO Se 


6h du soir. 

» 584,8 
4h du soir. 
21,0 602,3 
3h 1/2 du soir. 
239 620,9 
6h du soir. 
ASSOMES TOP 


6h du soir. 


12,8 561,4 
3h du soir. 
17,0: 538,6 


3h 1/2 du soir. 


28,0 646,0 


» » 
3h 1/2 du soir. 
28,0 635,1 
4h 1/2 du soir. 
Max. Min. 
26,0 634,4 
4h 1/2 du soir. 


21,0 589,3 


» » 
3h 1/2 du soir. 


21,5 604,2 


21,5 604,2 
4h 1/2 du soir 
23,0 604,9 
» » 
4n 1/2 du soir. 
18,6 397,5 
6h du soir. 
17,2 581,0 
4 du soir. 


28,0 664,9 


DIRECTION DU VENT 


S. au S.-0. 
Idem. 


Presque calme le matin, 
S.-0. le soir. 
Idem. 

Idem. 


Idem. 


SauS:-S.-H: 


Idem. 
0.-S.-0. à l'O.-N.-0 
0. à l'O.-N.-0. 

S. au S.-S.-0.l’ap.-mid. 


S.-S.-0. le soir. 
O. Variable le soir. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 


N.-0. le mat. à l'O.-S.-0. | 


le soir. 


S.-0. 


O. variable. 


Idem 
O.-S.-0. l'après-midi. 


S.-S.-0. l'après-midi. 
S.-0. le soir. 
Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

N.-E. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


MARS 1868 


FORCE DU VENT 


Jolie brise à rafales. 
Bonne brise à rafales. 


Vent frais à rafales. | 


Bonne brise à rafales. 
Idem. 


Idem. 
Presque calme. 


Petite brise. 
Jolie br.à part. demidi. | 
Bonne brise. 


Jolie brise. 
Idem. 


Bonne brise. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 


Jolie brise. 


Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Bonne brise à rafales 
qui tombe le soir. 
Jolie brise. 
Idem. 


Idem. 


TEMPS 


Temps beau, couvert. , 

Très-beau temps ; nuages sur la chaine nei- 
geuse à l'Ouest du Lac. 

Mème temps. 


Idem. 
Idem. 


Idem. 
Temps couv. Un peu de pluie vers 2? du soir. 


PI. et brume jusq. mid. Ass. beau temps le s. 
Temps beau, nuageux le soir. Nuit fraiche. 
Très-beau temps. Légers nuages. 


Temps couvert; un peu de pluie le matin. 

Très-beau temps; calme le matin; légers 
nuages le soir. 

Mème temps. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 


Très-beau temps ; légers nuages. 
Même temps. 


Mème temps. 


Mème temps. 


Très-beau temps sans nuages. 


Beau temps, voilé. 
Beau temps, nuageux. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Temps couvert et froid; un peu de pluie 
vers 3" du soir. 
Très-beau temps ; ciel sans nuages. Horizon 


légèrement embrumeé. 
Même temps; ciel légèrem. voilé Pap.-midi. 


Très-beau temps, nuageux. 


OBSERVATIONS 


Arrivée à Ta-ly à 4" du soir. 


Départ de Ta-ly à 6" du matin. 

La haut. barométrique de 5" est prise 
à Kouan-tia-pin. 

Arrivée à Tou-tsouy-tse à 10" du mat. 


Arrivée à Pien-kio à 3" du soir. 

Dans cette route de retour, les hauteurs 
barométriquesdes points culminants 
ont été vérifiées avec soin. 

Repos sur les bords de la rivière de 
Pe-yen-tsin. 


Arrivée à Nga-da-ti à 10" du matin. 
Arriv. à Nioung-poun-tse à 11" du m. 


Nous quittons la route suivie en allant 
à Ta-ly p' prendre une route plus S. 
Arrivée à Can-tchou-tse à 1120 du m. 


Nous descendons des hauteurs de Can- 
tchou-tse dans la plaine de Jen-0 
Kay, où nous arrivons à 3". 

Traversé à 1° le Kin-cha Kiang ; arri- 
vée à Hong-pou-so à 5" du soir. 


(:) Cette hauteur est celle du col for- 
ülié par lequel nous rentrons dans la 
vallée d'Houey-ly tcheou. 

Arrivée à Houey-ly à 4" 1/2 du soir. 


Départ de Houey-ly à 7° 1/2 du matin. 
(2) Cette hauteur barométrique est prise 
à Li-tse-chou, village situé un peu 
au-dessous de la ligne de faîte fran- 
chie au voyage d’aller, le 3 février. 
Arrivée le soir au sommet des hauteurs 
qui bordent le Fleuve Bleu. 
Traversée le Fleuve Bleu à 9" 1/2 du 
mat. Arrivée à Mong-kou à 10" 1/2. 


GA OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


AVRIL 1868 


——_—_———_—_—_——_—_——_—_—_—__—_—_—_—_—_———————— 


7 Il 
Ÿ 
que DATES THERMOMÈTRE ET BAROMÈTRE DIRECTION DU VENT 
| D'OBSERVATION 
| —— 
b | $b du matin. midi. 4h du soir. 4h 1/2 du soir. 
| degrés. millim, degrés. millim. degres. millim. degrés. millim. 
Max. Min. Max. 
MONTE LOURREMNETE 1 29,0 671,6 | 24,0 668,2 | 27,2 666,5 | 28,0 667,2 0.-S.-0. à l'O. 
Idem. 2 21,0 675,0 » » 27,0 667,2 » » N.-0. 
| Braroia ooousotoe 3 » » » » » » » » O.-S.-0. 
5h 1/2 du soir. 
Tong-tchouen . . ....) 4 » » » » » » AFASMSTIORS Idem. 
6h {1/2 du matin. 40h du matin, midi. 4h du soir. 
fée, 5 | 78 581,7 | 14,0 589,9 | 17,5 881,7 | 18,0 582,3 0. variable. | 
7h du matin. 3h 1/2 du soir. 
Idem. (f 9,8 582,9 | 13,8 584,8 | 14,2 583,5 | 14,5 581,7 N.-N.-E. 
| En route de Tong- 
tchouen à Siu-tcheou fl » » » » » » » » Presque calme. 
9h du matin. 5b du soir. 
Idem. 8 » » » 562,0 1 » » 19,0 605,6 | Calme le mat., N.-N.-E. 
| 5h 1/2 du soir. le soir. | 
4h du soir. Min. 
Idem. 9 n » » » 24,2 1635,1.122,5. 633; N.-N.-E. 
1» du soir. 
Idem. 10 » » ».568,80 | 14,0 595,5 » » Presque calme. 
Idem. 11 » » » » 14,0 592,9 » » Idem. 
10h du matin. 1h du soir. 4 du soir. 
| | Tchao-tong . ....... 12 112,5 591,5 | 15,0 593,6 | 15,0 593,6 | 18,0 592,9 S.-0. 
9b du matin. midi. 
Idem. 13 » » 11,0 596,2 | 11,7 596,8 | 14,5 594,9 N.-N.-E. | 
6h du malin. 
Enirouterter 0e NULL HE5M5I871 » » » » 14,0 596,8 Idem. 
| Idem. - 15 » » » » » » » » 0.-S.-0. 


L'ensemble des hauteurs barométriques contenues dans les tableaux qui précèdent 
montre que l'altitude moyenne de toute la région lacustre qui occupe l’espace angulaire 
compris entre le Cambodge à l’ouest, le Kin-cha Kiang au nord, le fleuve du Tong-king 
au sud et la partie supérieure du fleuve de Canton à l’est est à peu près de 2,000 
mètres. Tous les lacs de cette zone sont à un niveau supérieur de plus de 1,000 mè- 
tres à celui de ces grands fleuves dans lesquels ils se déversent. 

Sur ce plateau, comparable par son élévation et son étendue à celui du Mexique, le 
régime des vents subit une transformation complète : alors que sur la côte de l'Indo-Chine 
règne la mousson du N.-E., des vents réguliers du S.-0. à l'0.-S-0. soufflent avec foree et 
régularité sur toute la partie plane et culminante de ce grand massif, qui sert de 
premier et gigantesque échelon aux énormes ondulations du système tibétain. Cette 
direction de vent maintient pendant les trois premiers mois de l’année environ un beau 
temps invariable, et avant comme après cetle période, ce sont les vents du nord et de l’est 
qui amènent la neige ou la pluie. 


Grâce aux vallées profondes qui sillonnent le plateau du Yun-nan, on est ici en pré- 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 65 


AVRIL 1868 


FORCE DU VENT TEMPS OBSERVATIONS 


Bonne brise. Très-beau temps, nuageux. 
Petite brise. Idem. 

Jolie brise. | Idem. Départ de Mong-kou à 6" 1/2 du mat. 
Idem. Idem. Arrivée à Tong-tchouen à 10° du mat. 
Idem. Idem. | 

Petite brise. Temps couv. le matin. Un peu de pluie vers 

midi. Eclaircies le soir. 
» Très-beau temps, légers nuages. Départ de Tong-tchouen à 9° du mat. 

Petite brise. Le temps se couvre vers 7" du soir. Orage et | {!) Point culminant de la route. 

pluie de 8° à minuit. 
Idem. Belle journée ; le temps se couvre un peu plus | Arrivée à 2" 1/2 à Kiang-ti, sur les 

tôt que la’ veille, etil pleut sans interrup- à bords du Ngieou-nan Kiang. 
tion à partir de 7° du soir. (2) Point culminant des hauteurs de 

» Temps couvert, pluie intermittente. la rive droite de cette rivière. 

» Idem. Arrivée à Tchao-tong à 2" du soir. 

Pet. br. quifraich. les. | Beau temps voilé le mat. Se couvre le soir ; de 
en passant au S.-E. la pluie vers 4°. 

Petite brise. Temps couvert et pluvieux. 

Idem. Temps couvert assez beau. Départ de Tchao-tong à 8° du matin. 
Assez jolie brise. Beau temps, très-nuageux. Arrivée à Ta-kouan à 4° du soir, 


sence de deux climats bien tranchés, l’un tropical, l’autre absolument tempéré et ne 
différant du climat de l'Europe moyenne qu’en ce que les températures extrêmes de froid 
et de chaud y atteignent peut-être des chiffres moins élevés. 

Dans cette partie du voyage, l'observation de mon baromètre holostérique dont la 
graduation s’arrêtait à 610 millimètres, est devenue fort délicate. Je n’ai pas tardé à m'aper- 
cevoir qu'au delà d’un certain point, situé aux environs de 625 millimètres, il cessait de 
varier proportionnellement à la hauteur et qu'il fallait un changement de niveau de près 
d’une centaine de mètres pour produire un abaissement d’un millimètre. À partir de ce 
moment, j'ai mis le plus grand soin à lire les dixièmes de millimètre sur l'instrument, 
et j'ai observé aux points les plus élevés de la route des températures d’ébullition de l’eau, 
afin de comparer plus tard les résultats fournis par ces deux genres d'observations. Comme 
je lai dit au début de ces notes météorologiques, M. A. Thénard à bien voulu, à mon 
retour en France, comparer mon baromètre holostérique avec le baromètre à mercure. 
L'expérience, conduite avec le plus grand soin el faite dans des conditions de tempé- 


rature identiques à celles où l'instrument avait été placé pendant celle partie du voyage, a 
Il. 9 


66 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


donné des résultats confirmant entièrement mes prévisions : de 760 à 625, la différence 
entre l’holostérique et le baromètre à mercure, lue avec un cathélomètre, est restée 
constante et égale à celle que j'ai déjà signalée page 37 ; à partir de 625 au contraire, voici 
quelles ont été les hauteurs correspondantes des deux instruments : 


PRESSION DiFFÉRENCE. Haureur du ba- DIFFÉRENCE. 
baromélrique vraie. romètre holostérique. 
622.40 . 625.25 Ë 
d90/ Co 0nDo dat tatin a Ron De .10 à Dobonbécocvesoto ‘oddon 1e 
615.20 te MEN) €: DE 
A Ar ooddovdtacmoobe onde dan ; 15 6929 ED “"ctereeersesessrsrsee 1.60 
604.15 11.85 622.50 1.90 
HGDEND | © POS C06 DDR ne Nono aBnE D se 620.60 ‘7 * “tresses... ne 
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557.90 615.55 É 
Fr LV 6H 080 que 00e 00 10:00, PO Mr RE Rata ete tte aise le 0 1.50 
547.90 14.95 14.05 2.05 
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AT NS ONSo MAO ns A DEA HO ON 9 6.: X — aoondbvdo0a0on00de0agaue 1.00 
226.65 6 25 611.09 0.95 
EN 20e AO OP TUE DN OCEAN CO LC Le EL EE-EPELEE 5 


Ces termes de comparaison m'ont permis de construire un tableau donnant tou- 
tes les hauteurs barométriques vraies correspondant à chaque dixième du baromètre 
holostérique compris entre 626 et 610. Ces hauteurs se sont trouvées concorder d’une 
manière satisfaisante avec celles qui résultaient des températures d’ébullition de l'eau. 


4° VALLÉE 
AVRIL 1868 


| LIEUX ù 
DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE | DIRECTION DU VENT 
D’OBSERVATION | 
| 
a 
6h du matin. 10h du matin. midi 3h du soir. 
ë degrés, millim. degrés, millim. degrés. millim. degrés. millim. | 
TA OU CE RENE 46 |13,0 647,0 |‘45,5 647,9 | 20,0 647,0 | 22,55 645,1 S.-0. | 
| | 
IMEHMOULE ER EEE 0) NET » D EE) » » » 25,0 666,5 Idem. 
| | l'OAUVE du soir. 
| Idem. 18 » » | » » » » 26,0 675,9 | N.-E. | 
Idem. 19 » » » » » » 20,5 696,0 Idem. | 
4h du soir. 
Idem. 20 » » » » » » 27,9 107,4 Sh=0) 
9h 1/2 du matin. 
IMLanouatan et 0 57076 22 388708 005507 » » O.-S.-0. 
(NIQUE 400 00 00 00 29 » » » » » » » » Idem. 
Long - LAN TETE Pet 23 » » » » » » | » ” » 
| | En ROBES & à 8 v 0 0 o’à 24-26 » » » » » » » » | N.-N.=E. 
| SUTEUONADMNS 20 0 a10 à al 2 » » » » » » 26,0 715,0 | Idem. 
L | 3h 1/2 du soir. | 
Idem. 38 |22,0 716,0 » » » » 30,0 713,7 | Idem. | 
d 10h 1/2 du matin. | 
| | 9h 1/2 du matin. Max. 
Idem. 2), MAC HAS, 7 DOI Un » » BHO) E.-N.-E. 
\ 6h du matin. 10h du matin. 3h 1/2 du soir. 8h 1/2 du soir. 
Idem. 30 |21,5 TAT,9 | 24,6 719,0 | 25,0 717,7 | 25,0 749,7 Idem. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 67 


Sans pouvoir espérer d'observations aussi imparfaites une rigueur bien grande, je crois 
cependant que l'on peut admettre que les hauteurs barométriques ainsi obtenues sont 
exactes à { ou 2 millimètres près. J'ai ealculé les altitudes des différents points du parcours, 
en prenant pour hauteur barométrique inférieure la hauteur barométrique moyenne de 
Macao à l’époque correspondante de l’année, telle que la donne Kaemtz dans son 7raité 
de météorologie, c’est-à-dire que j'ai pris 768 pour la hauteur du baromètre au niveau de 
lamer en décembre et janvier, 767 en février, 766 en mars, 762 en avril. 

Les observations (hermométriques qui ont été faites par M. l’abbé Desgodins, à Yerkalo, 
dans la partie supérieure de la vallée du Cambodge, par le 29° parallèle environ, et dont j'ai 
donné un résumé dans le Bulletin de la Société de Géographie du mois de novembre 1871, 
confirment l'opinion que j'ai émise plus haut de la modération relative du froid et du 
chaud dans cette zone. A Yerkalo, le thermomètre n’a oseillé en effet, du mois de sep- 
tembre 1870 au mois de janvier 1871, qu'entre + 28° et — 4°. Les vents dominants pen- 
dant cette période ont été ceux du Sud au S.-0. La direction pluvieuse a été celle du Nord. 

Sur le plateau du Yun-nan, le baromètre est surtout haut par temps calme. Les vents 
de la partie de l’est semblent le faire baisser plus que les, vents de la partie de l’ouest. 


DU FLEUVE BLEU. 
AVRIL 1868 


| 
FORCE DU VENT TEMPS OBSERVATIONS 
Petite brise. Belle mat. Orages et grains de pluie presque | 
continus à partir de 3° du soir. | 
Idem. Temps beau, nuageux. Départ de Ta-kouan à 6" 1/2 du matin. 
Jolie brise. Temps couvert, assez beau jusqu'à 6" du soir ; 
pluie et orages pendant toute la nuit. 
Petite brise. . | Temps couvert et pluvieux. 
| 
Légère brise. Beau temps, quelques nuages. Arrivée à Lao-oua tan à 1" du soir. 
Petite brise. Temps beau, presque couvert. 
Idem. Idem. | Départ de Lao-oua tan en barque à 6" 
» Brouillard pluvieux le matin; assez beau | du matin. Arrivée à Long-ki vers 
temps le reste du jour. 5" du soir. 
Petite brise. Temps beau, nuageux. Le soir du 26, orage | Départ de Long-ki à 9 du matin. 
et pluie de 6 à 9. Arrivée à Siu-tcheou le 26 à midi et 
Idem. Très-beau temps, légers nuages. demi. 
Idem. Mème temps. 
Idem. Temps couv. le mat. ; beau au milieu du jour. 
2 
À Jdu soir, orage et pluie. | 
Idem. Même temps que la veille. 


GS OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


MAT-JUIN 1868 


LIEUX < : 
| DATES THERMOMETRE ET BAROMETRE | DIRECTION DU VENT 
D'OBSERVATION 
———— mm, 
6h du matin. 9h 1/2 du matin. » » 9h 4/2 du soir. | 
: degrés. millim, degrés. milimee degrés. millim. degrés. millim | 
SUUSLCREOUE ER EN AE 22 0 RTS » » 24,2 720,2 N.-E. 
10h du matin, 4h 1/2 du soir, ; 
Idem. 2 » » 192 87207 » » 18,8 719,8 N. 
| 4h du soir. | 
Idem. 3 » » 19,0 720,2 » » 19,5 718,4 Calme. 
_3h 1/2.du soir. | 
Idem. 4 » » 19,5 731,8 » » 20,6 729,4 | O. variable. 
9h 1/2 du matin. 3h du soir. 6h du soir. 
Idem. DM 2 0X 072 840 » » 29225 525 0270 S.-0. 
8h du matin, 4h 1/2 du soir. | 
Idem. 6 |20,0 723,0 » » » » 2 TA Presque calme. 
gh 1/2 du matin. | , 
Idem. fl » » 21,0 721,2 » » 24,0, 749,9 0.-S.-0. 
k 4 du soir. | : 
| Idem. à » » 21,2 725,5 » » 25,0 .123 0h) S.-0. 
En route (descente du 10ù du matin. midi. | 
fleuverBleu) eee 9 » » DOS ON T2 D 0 2102252 E.-N.-E. 
Ë 8h du matin. 3h du soir. 
Enéroutcrrr ete ere 10 |24,5 722,0 » » 22 RS 082072 Idem. 
5h 1/2 du matin, 4h du soir. | 
Idem. 11 125,5 719,5 | 28,0 720,24 » » 31,1 747,5 Calme. 
Idem. ue » » 202200 » » » » Idem. 
Idem. 13 » » 23,0 731,0 » » » » 0. 
15 mar. 
L. x | 14 mar. 6 du soir. N 
Tchong-kin........|1445| » » 20,8 730,9 » » 21,8 728,6 | ,N.-E. à l'E.-N.-E 
17 mar. 
16 mar. 3h 1/2 Aost 
Idem. 16-17 » » 24,0 735,1 » ÿ 29073210 0.-S.-0. 
18 rar. 
ain TEA 19 mar. 
Éniroute EEE 18-19! » 738,00 » » 24,0 737,0 » » N.-E. 
21 mar. 20 rar. 
3b du soir, 4 du soir. 
Idem. 20-21 » » » 31,0.734,5 | 28,0. 732,0 Idem. 
Idem. 22 » » ? » 91,0 736,0 » » E.-N.-E. 
Idem. 23 » » ù » 30,0 138,8 » » ; E. 
ÿ» 2% MAI 
3h 1/2 du soir. 25 MAI. 
Idem. 24-25 » » » » 30,0 746,0 | 28,0 747,5 Idem. 
LE 27 mar. 
Idem. 26-27| » » » » » » 28,0 749,0 S.-E. à l’'E.-N.-E. 
28 mar. 
3h 1/2 du soir, 29 mar. 
Idem. 28-29 » » » » 27,0 745,6 | 27,0 743,6 S.-0. 
$h {1/2 du soir. 
Idem. 30 » » » » » » 27,2 TA D S. au S.-0. 
Idem. 31 » » » » DURS 743,5 » » 0. 
Idem. LT Juin » » l » » » » 25,5 741,4 N.-E. à l'E. 
9 N. 
| | 5h 4/2 due 3 JUIN. 
Idem. DS ns » »n  |26,0 745,0 | 28,5 TLL,3 S.-0. aus. 
5h du soir, : 
Idem. k » » » » » » 30,0 747,0 | E.-S.-E. le matin, N.-E. 
5 JIN. ir 
| nai pe le soir. 
| Idem. 5-6 » » » » 32,0 746,4 » » E. variable. 
| 7 JUIN. 
Han- keou he Pen te 1-9 » » » » 34,0 749,0 » » N.-E. variable. 


OBSERVATIONS 


FORCE DU VENT 


Très-var. d'intensité. 
Petite brise. 
y» 
Petite brise. 
Idem. 


» 
Presque calme. 
Petite brise. 


Petite brise qui fraîchit 
le soir. 
Petite brise. 


» 
» 


Petite brise. 
Idem. 
Idem. 


Jolie brise. 
Faible brise. 
Jolie brise. 
Idem. 


Jolie br. à fortes raf. qui 
mollit beaucoup le 25. 
Petite brise. 


Petite brise qui fraichit 
beaucoup le 29. 
Bonne brise à rafales. 
Petite brise qui fraichit 
en hälant le N. 


Petite brise. 


Idem; fraichit beau- 
coup au milieu du jour 
le2 juin pour netomber 
que le 3 au soir. 
Faible brise le matin; 
jolie brise le soir. 
Petite brise. * 


Jolie brise. 


TEMPS" 


Temps couv. et pluv. Orage et forte pluiele s. 
Mème temps. 

Temps couvert. 

Temps beau, presque couvert. 

Très-beau temps ; légers nuages. 

Temps beau, presque couvert. 

Mème temps. Orage et pluie à 10" du soir. 


Temps voilé, assez beau. 
Très-beau temps. Légers nuages. 


Mème temps. 


Très-beau temps sans nuages. 
Temps nuageux; un grain de pluie à midi. 
Temps couv. et pluv. Grains de pluie la nuit. 


Mème temps. 

Très-beau temps ; légers nuages. 

Temps qui se couvre le 19 et devient pluvieux. 
Beau temps voilé. Orages dans le S.-0. 
Très-beau temps. Légers nuages. 


Temps couvert, orageux. Quelques gouttes 
de pluie le soir. 


| Très-beau temps qui se couvre un peu le 25. 


Beau temps, nuageux. 

Très-beau temps, voilé. 

Mème temps. 

Beau temps, nuageux. 

Très-beau temps. Légers nuages. 


Très-beau temps; ciel sans nuages. Horizon 
embrumé. 


Très-beau temps. Ciel légèrement voilé. 


Mème temps. 


Temps lourd et orag. Pluies d’or. par interv. 


MÉTÉOROLOGIQUES. 


MAT-JUIN 1868 


OBSERVATIONS 


Dép. en barque de Siu-tcheou à 11"40. 
Arrèt le soir à 6" 1/2 à Nan-ki hien. 

A 10" du soir (Lou tcheou), Le thermo- 
mètre marque +29°,0. 


Arrivée à Tchong-kin fou à 11" du 
matin. 

Le lieu d'observation est à une qua- 
rantaine de mètres au-dessus du 
niveau du fleuve. 

(1) Prise à Tchong-kin au niveau du 
fleuve. Départ de ce point le 18 à 
1" 1/2 du soir. 


Arr. à Koui-tcheou fou à 8" 1/2 du s. 
Départ de Koui-tcheou à 3" du soir. 


Arrivée à V-tchang fou le 25 à 10" du 
soir. 

Départ de Y-tchang le 26 à 4° 1/2 du 
soir. 


Avr. à Han-keou le 6 juin à 7° du m. 


70 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 


En descendant la vallée du Fleuve Bleu, nous avons définitivement abandonné la zone 
des vents réguliers et des saisons alternativement sèches et pluvieuses, pour entrer dans 
la région tempérée à vents et à temps variables. L’amplitude des oscillations accidentelles 
du baromètre atteint des proportions inconnttes sous les tropiques. À Siu-tcheou, quoi- 
qu'on ne soit encore que par le 28° parallèle, le tableau qui précède accuse, dans une 
période d’une douzaine de jours, un écart de 18 millimètres (714-732). Les observations 
faites devant la même ville par le capitaine Blakiston t, fin mai et commencement de 
juin 1861, semblent donner pour le même point une moyenne barométrique plus élevée 
et oscillent pendant une période de 7 jours entre 727 et 738 millimètres. 

En raison même de la situation continentale de la Chine et à l'inverse de ce qui a lieu 
en Europe, les vents du N.-E. ou de l'Est amènent la pluie, et les vents du S.-0, ou de 
l'Ouest amènent le beau temps dans la vallée du Fleuve Bleu. Les vents d'Ouest font 
très-sensiblement monter le baromètre. Il baisse par calme et par les vents d’Est. 

D'après les renseignements recueillis sur les lieux et quelques observations du 
P. David faites à Kieou-kiang, pendant une année exceptionnelle il est vrai, tes vents du 
N.-E. paraissent dominer dans le Kiang-si et le Hou-pe pendant les mois de juillet et 
d'août, c’est-à-dire au moment même où règne sur la côte la mousson de S.-0. 

On connait les froids extrêmes et les chaleurs excessives auxquels est sujette une certaine 
partie de la Chine et qui tiennent à sa position géographique par rapport aux grandes 
steppes de la Mongolie, et je n’insisterai pas davantage sur une question elimatérique à 
laquelle je n'apporte qu'un trop faible contingent d'observations. 


1 Consultez les lableaux météorologiques insérés à la fin de son ouvrage : five months on the Yang-tsze. 
London, 1862. é 


GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE 


M. ze Docreur E. JOUBERT 


OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR. 


dus 


GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE 


PAR 


M. Eucène JOUBERT 


INTRODUCTION 


Qu'il nous soit permis, au début de ce travail, d'évoquer le souvenir de celui qui fut 
notre chef et l’âme du voyage et qui était en même temps notre compatriote. 

La direction toute paternelle du commandant Doudart de La Grée rendit notre tâche 
plus facile et plus agréable, et nous fit souvent oublier les souffrances, les fatigues et les 
privations de toutes sortes que nous dumes subir pendant ce long et périlleux voyage qui 
restera son œuvre. 

Son expérience et ses connaissances étendues en faisaient un conseiller précieux, à qui, 
pour notre part, nous eùmes souvent recours. 

Il était gai, bienveillant et sympathique ; partout il sut convaincre, se faire aimer el 
respecter. À un caractère doux et conciliant 1l ajoutait une rare énergie, et celte persévé- 
rance raisonnée qui use les obstacles. 

Nul mieux que notre regretté chef ne sut à propos employer la douceur, les promesses 
ou les menaces. Il pressentait les difficultés, et longtemps il ne vécut que du besoin d’en 
triompher. 

Lorsque ce feu sacré, qui fait oublier les souffrances physiques, n’eut plus d’aliment, 
lorsque nous touchions au port, à une journée de marche de ce fleuve Bleu tant désiré, la 
mort vint le ravir à ses compagnons de voyage. 

Resté seul auprès du malade jusqu'à sa dernière heure, il nous a été donné, mieux 
qu’à personne, d'apprécier les hautes qualités et les sentiments généreux du commandant 
Doudart de La Grée. 

Les quelques lignes qui précèdent ne sont qu'un bien faible témoignage de notre 
sympathique admiration. 

Nous avions été spécialement chargé dela partie géologique du voyage, et nous devions 
étudier surtout les gisements métallifères sur lesquels on n'avait que quelques vagues 


indications. La géologie n’est pas seulement une science purement spéculative, elle a 
IT. 10 


74 INTRODUCTION. 


aussi un immense intérêt pratique, et bien des fois en permettant de reconnaitre avec 
précision telle ou telle couche de terrain , elle fournit ainsi d'excellents points de repère 
pour la recherche des métaux ou des combustibles. 

Entrainé en avant, perdu au milieu de peuples inconnus, méfiants, bien des choses 
nous ont sans doute échappé, ou n’ont pu être étudiées qu'à la hâte. Nous n’avons guère 
pu, on le conçoit sans peine, tracer qu'à grands traits la géologie de l'immense étendue 
de pays qui s'étend du 10° au 30° degré de latitude Nord, depuis l'embouchure du Me- 
kong jusqu'aux bords du Yang-tse Kiang, et des frontières du Tibet aux mers de Chine 
entre le 96° et le 119° degré de longitude Est du méridien de Paris. Notre but unique est 
de pouvoir être utile à ceux qui, après nous, parcourront ces riches contrées. 

Nous avons consigné dans ce travail le résultat de nos recherches ; nous parlerons de 
ce qu'il nous a été possible d'observer par nous-même, de ce que nous avons appris par 
les indigènes, des indications éparses dans les auteurs, de manière à présenter en un 
seul tout ce que nous savons sur les richesses métallurgiques et la géologie du pays que 
nous avons parcouru. 

Un premier chapitre en donnera lorographie et indiquera les principaux reliefs de la 
contrée. Dans un second, nous ferons l'itinéraire du voyage; nous indiquerons les choses 
telles que nous les avons observées, jour par jour, localité par localité. Tous ces faits 
seront ensuite rapprochés, groupés , discutés de manière à faire connaitre la géologie 
du pays, et à permettre d'en étudier chaque formation. Un quatrième chapitre sera con- 
sacré à la métallurgie et à la minéralogie; nous y indiquerons les gisements et leur 
mode d'exploitation. 

Nous sommes heureux de pouvoir iei exprimer nos remereiments et notre reconnais 
sance à M. le professeur Daubrée, membre de l’Institut, qui pour faciliter notre travail a 
mis à notre disposition toutes les richesses géologiques et minéralogiques du Muséum, 
à MM. L. Lartet, E. Sauvages, et Ch. Friedel, dont les conseils éclairés nous ont été si 
utiles pour la détermination , la classification et l'analyse des divers échantillons géologi- 
ques et minéralogiques que nous avons pu rapporter. 

Nous regrettons de n'avoir pas su rendre ce travail plus intéressant et plus complet. 


Eucixe JOUBERT. 


OROGRAPHIE 


Nous allons rappeler qu’au centre du plateau tibétain, dans les massifs montagneux 
qui séparent, au Sud, les chaînes de l'Himalaya, et, au Nord, celles du Kouen-lun, cinq 
grands fleuves prennent naissance : Le Brahmapoutre, l’Iraouady, la Salouen, le Mekong 
et le Yang-tse Kiang. 

Ces divers fleuves, partant de points fort éloignés les uns des autres, convergent vers 
l'Est jusqu’au 36° degré de longitude du méridien de Paris, par 27° ou 28° de latitude 
Nord; arrivés vers cette ligne, ils coupent une chaîne de montagnes, s’éloignent ensuile 
les uns des autres et se distribuent en éventail, ceux-ci dans le golfe du Bengale, ceux-là 
dans les mers de Chine. 

L’étranglement par où s’échappent ces fleuves est produit, nous le supposons du 
moins, par le rapprochement des extrémités orientales des deux grandes chaines que 
nous désignons plus haut : l'Himalaya et le Kouen-lun. 

En cet endroit les fleuves sont très-rapprochés les uns des autres (de 40 à 50 lieues, 
selon le témoignage des indigènes), mais séparés par des montagnes très-élevées, infran- 
chissables et taillées à pie par les eaux jusqu'à une profondeur de 1,500 à 1,800 mètres. 
Ces érosions énormes peuvent paraître invraisemblables, cependant la commission à vu 
à Mong-kou, près de Tong-chouen fou, le Yang-tse Kiang couler à une profondeur d’en- 
viron 850 mètres, entre deux murailles de calcaire coupées par le courant. 

Les montagnes de séparation vont en s’élargissant et en se multipliant, à mesure que 
les fleuves se rapprochent de la mer, et forment des groupes au milieu desquels prennent 


76 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


naissance un grand nombre de cours d’eau considérables, quoique de moindre impor- 
tance que les premiers; nous citerons la rivière d’Aracan, le Sitang, le Ténassérim 
qui arrosent la Birmanie et quelques districts des Indes anglaises, le Menam, principale 
rivière du Siam, le Donaï ou rivière de Saïgon, dans la Cochinchine française; le Song 
Koi qui prend ses sources au centre d’un pays d’une richesse minérale incaleulable, pour 
venir verser ses eaux dans le golfe du Tong-king, enfin la rivière de Canton. 

Il existe encore un grand nombre de rivières provenant des mêmes régions que les 
précédentes, mais elles sont d’une importance relativement peu considérable. 

Les grands fleuves dont nous avons parlé en commençant, peuvent être placés au 
nombre de ceux qui sont le plus profondément encaissés, dont l’étendue est la plus grande 
et dont le débit est le plus considérable. 

Ces fleuves arrosent pendant la première partie de leur cours des contrées monta- 
oneuses des plus accidentées et peu propres à la culture, partant presque désertes; mais 
leurs deltas sont les pays les plus riches et souvent les plus peuplés et les mieux cultivés 
du globe. Nous eroyons qu'il est difficile de trouver une surface de terre aussi vaste et 
aussi riche que les plaines alluviales du Vang-tse Kiang. 

La divergence du cours des grands fleuves de l’Indo-Chine, qui, partis à peu près 
d’un même point et sur une même pente, ont leurs embouchures dans des régions tout 
à fait opposées, est un fait assez étrange pour qu'on le fasse remarquer. Le Brahmapoutre 
est celui de ces cours d’eau qui étonne le plus; il coule- d’abord directement de l'Ouest à 
l'Est et reçoit les affluents de la pente Nord de la crête Himalayenne, puis, contournant 
brusquement l'extrémité de cette chaîne, il prend une direction diamétralement opposée à 
la première, reçoit cette fois les rivières et torrents qui descendent du versant Sud de 
l'Himalaya, et va confondre ses bouches avec celles du Gange. 

Les autres fleuves sont moins irréguliers dans leur cours que le précédent; ils s’irra- 
dient en éventail, limitent les saillies montagneuses qui forment la patte d’oie, et vont se 
jeter dans la mer au fond des golfes qu'ils fertilisent et comblent petit à petit. Le Yang-tse 
Kiang en sortant du Tibet prend une direction générale vers le Nord-Est, traverse la 
Chine dans son plus grand diamètre, et vient par des arroyos donner la main au Hoang Ho 
ou fleuve Jaune. 

Nous n'avons que peu à dire sur les chaines de montagnes qui séparent le Brahma- 
poutre de l’Iraouady et ce dernier de la Salouen ; la ligne de partage entre les eaux de la 
Salouen et celles du Menam nous occupera aussi très-peu; nous ne connaissons ces 
contrées que par les descriptions données par les voyageurs. 

La chaine qui sépare l'empire Birman du Bengale et des plaines de Chittagong 
s’abaisse de plus en plus en traversant la province d’Aracan jusqu'au cap Négrais et 
semble se continuer par les iles Andaman et Nicobar jusqu'aux iles de Sumatra et de Java. 
On connait peu celle qui court entre la vallée d’Ava et le bassin de la Salouen ; on sait 
seulement que cette chaine est d’abord formée de collines espacées et basses qui se rappro- 
chent les unes des autres et s'élèvent à mesure que l’on remonte vers le Nord, où elle va 
se perdre dans les hautes montagnes de l'Himalaya. 


OROGRAPHIE. ai 


Une des chaînes principales servant de contre-fort au Tibet est la ligne de partage 
entre les eaux de la Salouen et celles du Mekong, si on peut désigner sous le nom de 
chaine un massif montagneux formé d’un amas de cônes et de pics irrégulièrement 
disposés. 

Sur un des sommets culminants de la contrée est bâtie la ville de Xieng Tong, capi- 
tale des Shans Birmans; de ce point l’œil plonge, dans un espace sans horizon, sur une 
mer de pics et de dômes pressés les uns contre les autres, couvrant le Laos Birman tout 
entier et la majeure partie du Laos Siamois; c’est de ce massif que se dégagent les deux 
chaînes qui vont, l’une vers Malaca en séparant l'empire Birman de la vallée du Menam et 
l’autre vers le cap Lyant en formant les montagnes de Battambang et de Pursat, limites 
naturelles entre Siam et le Cambodge. 

La distribution des eaux au Nord et au Sud indique assez que l’arête principale du 
prolongement de l'Himalaya se dirige vers l'Est à travers le Yun-nan, le Kouang-si, ete., 
jusqu'à la mer. Les montagnes de cette région s'élèvent rapidement à mesure qu’on se rap- 
proche du Tibet et sont couvertes de neige pendant une partie de l’année; les indigè- 
nes prétendent même que; sur le pic qui domine Ta-ly Fou à l'Ouest, les neiges dis- 
paraissent à peine pendant deux mois de l’année : elles sont éternelles sur la montagne 
de Li-kiang. 

La physionomie générale du grand triangle formé par le Vang-tse Kiang et le Me- 
kong est assez semblable à celle du pays de la rive droite du Mekong; cependant les 
montagnes du Yun-nan sont plus élevées et nous avons cru remarquer qu’elles ont une 
direction sensible vers l'Est, orientation que nous n'avons pas constatée aussi marquée 
dans les autres montagnes. On rencontre aussi dans le Vun-nan, surtout dans la région 
Sud-Est, un grand nombre de beaux et vastes lacs qui n’ont pas leurs analogues dans le 
pays habité par les Shans. Les deux promontoires qui terminent ce triangle embrassent le 
golfe du Tong-king tout entier pour former, au Nord, la côte de Canton à Shang-haï, et, 
au Sud, la petite chaîne qui traverse la Cochinchine dans toute sa longueur pour aller 
mourir au cap Saint-Jacques et à l'ile de Poulo-Condor. 

Sur la rive gauche du Yang-tse Kiang les montagnes ne se prolongent pas au- 
tant vers la mer que du côté de la rive droite; elles semblent s'arrêter au bassin de la 
rivière de Souy Fou. 

Quand on jette un coup d'œil sur l’ensemble des contrées Indo-Chinoises, sur 
les traits principaux des reliefs du pays et sur la distribution des fleuves qui s’y 
rattachent, on aperçoit immédiatement deux grands systèmes : l’un, celui du Ti- 
bet et de la Chine, est orienté, d’une manière générale, de l'Ouest à l'Est; le Yang- 
tse Kiang se dirige suivant cette direction, qui est aussi celle des îles de la Sonde; 
l'autre, allant suivant la méridienne, se prolonge à travers la presqu'ile de Ma- 
laca jusqu'à Sumatra, les montagnes de Corée, l'ile Formose, l’archipel des Philip- 
pines, et s’étend depuis l'extrémité des Ghattes jusqu’à la mer Glaciale. A cette grande 
faille méridienne « correspondent dans l'Inde extérieure ou transgangétique, les failles mé- 
« ridiennes qui marquent dans le Haut-Assam le croisement des différents systè- 


78 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


« mes... Ce croisement donne naissance aux chaines parallèles de la Cochinchine, 
« de Siam et de Malaca, d’Ava et d’Aracan. Elles aboutissent toutes dans leurs cours 
« d’inégale longueur aux golfes de Siam, de Martaban et du Bengale *. » Pompelly * 
admet une ligne anticlinale et une ligne synelinale dirigée exactement N.-E.-S.-0., 
traversant la Chine et une partie de l’Indo-Chine, passant par le golfe de Bengale, 
le milieu du cours du Yang-tse Kiang, le golfe de Pe-tehe-li, la rivière Amour, la mer 
d'Okhotsk; les monts Khing-ghan, la chaine qui, au Nord-Ouest, limite la presqu'ile 
de Corée, le cours inférieur de l'Amour, les îles de l’empire du Japon, suivent cette 
direction générale. Une partie de cette longue chaîne, celle qui correspond à l'endroit 
où le fleuve Bleu coupe la frontière du Se-tchouen et du Hou-pé, est formée d’un axe gra- 
nitique de 600 à 1,000 pieds anglais au-dessus de la rivière, flanqué de chaque côté par 
une immense épaisseur de caleaire et de roches à charbon, dont les couches sont ici di- 
rigées au N.-E. Une ligne tirée près de Canton et allant à travers l'archipel Chusan repré- 
sentera, comme le fait encore remarquer Pompelly, la principale direction des côtes, et, si 
on la prolonge au N.-E., elle coupera la péninsule de Corée près de son extrémité 
méridionale; dans l’autre direction elle passera par l’île de Hai-nan dont les grandes 
et majestueuses montagnes sont des membres de la même série. 

Le grand relief du pays que nous avons parcouru jusqu'aux bords du Yang-tse Kiang, 
et qui doit nous occuper tout spécialement, a été en grande partie occasionné par le 
soulèvement des montagnes dévoniennes qui a eu lieu à une époque que nous ne pou- 
vons préciser, mais qui est certainement postérieure au dépôt des couches épaisses du 
trias qui viennent s'appuyer contre le calcaire. L’éruption des porphyres a contribué 
aussi à modifier ce relief. Ajoutons les dégradations post-triasiques, le ereusement des 
vallées par les grands fleuves, les dépôts alluviaux. D’après les anciens auteurs chinois, 
certains de ces changements apportés dans l’orographie et le régime des eaux dateraient 
de l’époque actuelle. Un historien qui donne quelques détails sur le royaume du Cam- 
bodge, du temps que la ville d’Angcor était dans toute sa splendeur, parle de deux lacs 
que nous ne trouvons plus aujourd’hui, ne mentionne pas le grand lac, et semble placer 
la ville d’Angcor sur les bords d’une grande rivière; cette grande rivière est sans 
doute laffluent qui vient rejoindre le Mekong près de Pnom Penh. Dans tous les cas 
on sait que vers 3550 ans avant Jésus-Christ, sous l’empereur Fo-hi, eut lieu un 
soulèvement qui modifia le relief de l'Empire du Milieu, et changea le cours du fleuve 
Jaune. Une secousse analogue à celle-ci arriva mille ans plus tard; ïei les historiens 
sont plus préeis et indiquent que le mouvement eut lieu suivant une ligne dirigée du S.-0. 
au N.-E., dans la direction de l’axe anticlinal par conséquent, et passant entre la mer 
et la province de Yun-nan. 

En résumé, un immense contre-fort hérissé de montagnes irrégulièrement dis- 
posées, vient s’arc-bouter contre l’extrémité orientale de l'Himalaya ; il s’abaisse 


1 A. de Humboldt, Asie centrale. Rech. sur les chaînes de montagnes et la climatologie comparée, t. I, p. 217. 
2 Geological Researches in China, Mongolia, and Japan, p. 4 et pl. VIE, ap. Smithsonian Contributions to lnow- 
ledge, in-4°. Washington, 1867. 


OROGRAPHIE. 79 


progressivement en s’'épanouissant sous une triple pente vers les mers des Indes et 
de la Chine dans lesquelles il s’'avance sous forme de chaînes montagneuses parfaitement 
distinctes, embrassant des golfes enrichis par les alluvions des gigantesques fleuves que 
déverse le Tibet. 

Nous ne parlerons que d'un seul de ces golfes, qui aujourd’hui à presque entièrement 
disparu par l’apport des eaux du Mekong et de ses tributaires; celui-là seul nous inté- 
resse particulièrement ; les autres lui sont assez semblables pour que nous soyons dis- 
pensé de parler des plaines alluvionnaires qu'arrosent l'Iraouady, le Menam, la Salouen. 

IL fut un temps, relativement récent, où la mer s’avançait au loin dans les terres, en- 
tre les monfagnes du cap Saint-Jacques et celles de Pursat et de Battambang, et cou- 
vrait l’espace occupé aujourd'hui par la Basse-Cochinchine et le Cambodge. 

Cette immense plaine, le grenier de Hué et de Canton, est sillonnée dans tous les 
sens par un grand nombre de canaux naturels, connus sous le nom d’Arroyos, qui 
relient entre eux les cours d’eau de la contrée, et dont la plupart peuvent recevoir des 
bateaux à vapeur qui, en quelques heures, portent d’une extrémité à l’autre de notre co- 
lonie, nos soldats ou nos commercants. 

Les marées, établissant dans les arroyos et les rivières, des courants alternativement 
contraires, rendent les transports faciles et peu coûteux par ces voies de communication : 
trois hommes peuvent aisément conduire une barque de vingt à trente tonnes. Tant que 
le courant est favorable, ils n’ont qu'à diriger leur bateau, et lorsqu'il devient contraire, 
ils jettent l’ancre et attendent le retour de la marée qui doit les entrainer de nouveau 
vers le but. 

Au Nord du Cambodge existent les plaines non moins vastes et non moins fertiles du 
bas Laos et du Laos moyen. Élevées de quelques mètres seulement au-dessus des pre- 
mières plaines, elles ne sont pas sillonnées d’arroyos, mais de nombreux cours d’eau, 
descendant de l’inextricable massif montagneux qui va de l'Inde à la Chine, les arrosent 
et les fertilisent. Ce pays est moins uniforme que le précédent; des collines, des mon- 
tagnes de grès et de caleaire relient la chaîne de Pursat à celle de la Cochinchine. Les 
cultures y peuvent être aussi plus variées. 

L'espace dont nous venons de parler a, en moyenne, 75 lieues de largeur sur 200 
de profondeur. Au delà et de chaque côté les montagnes sont pressées les unes contre 
les autres et offrent un grand intérêt au point de vue de leurs richesses minérales. 

A l’époque des pluies, en juillet, août, septembre et octobre, tous les fleuves et 
rivières de la contrée sont sujets à une crue périodique. Les vallées des pays élevés et les 
plaines dans le voisinage de la mer, sont inondées et reçoivent un vaste dépôt allu- 
vionnaire. Ce phénomène est semblable à celui que le Nil nous offre chaque année. 

Dans un avenir qui n’est peut-être pas bien éloigné de nous, la Cochinchine et le 
Cambodge pourront donner une idée de la fertilité extraordinaire de ces plaines 
alluviales. 


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ITINÉRAIRE 


Partis de Saigon le 5 juin 1866, pendant cinq jours nous avons navigué dans le 
grand Delta formé par le Cambodge, et plusieurs autres fleuves ou rivières qui descen- 
dent, les uns, des montagnes de la Cochinchine, les autres, des montagnes de Pursat, 
de Battambang ou de plus loin. 

Les alluvions sont de formation récente, et varient de composition selon la prove- 
nance des eaux qui les formèrent. Mais il est une roche qui semble s'étendre sur une 
grande partie du Delta : nous voulons parler d’une limonite ou minerai des marais ana- 
logue au bog-ore, connue en Cochinchine sous le nom de Pierre de Bien-hoa. 

Cette roche n’est le plus souvent employée que dans les ouvrages de peu d'importance, 
tels que murs d'enceinte, ou comme pierre de moyen appareil. Son faible rendement en 
métal fait qu’elle n’est pas exploitée comme minerai par les indigènes, surtout depuis 
que les nombreuses communications avec les Européens leur ont permis de se procurer 
le fer si facilement et à bien meilleur marché. 

Pendant notre séjour à Compong Luong sur la rivière du Cambodge, près de la capi- 
tale de ce royaume, au delà de Pnom Penh, nous avons rencontré cette roche en divers 
points. En creusant un puits entre Oudong et les monticules situés tout près de cette ville, 
les indigènes ont trouvé la pierre de Bien-hoa à 3",50 au-dessous du niveau du sol; 
nous-même nous avons constaté, en outre, que cette roche forme un collier à la base des 
collines dont nous venons de parler, avec des affleurements nombreux du côté du village 


de Phsar Dei. 
IH 11 


82 GÉOLOGIE ET MINERALOGIE. 


Ces faits prouvent que le banc ferrugineux s’est formé longtemps après le soulève 
ment qui à produit les collines de Oudong, et qu'il s’étend autour de ces massifs sur une 
grande surface s’enfonçant à diverses profondeurs selon les ondulations du sol à l’époque 
de son dépôt. 

Ce minerai de fer est d’ailleurs de formation récente et se trouve intercalé dans les 
alluvions. Les ouvrages de maçonnerie qui sont presque exclusivement en pierre de Bien- 
hoa, quel que soit le lieu où ils aient été construits, indiquent assez que cette roche est 
très-répandue et très-abondante. 

En parcourant la province d’Angcor, nous avons trouvé partout la pierre de 
Bien-hoa qui a servi à la construction des nombreux monuments dispersés dans le 
pays. Les carrières que nous n'avons pu visiter sont très-éloignées de l’ancienne ville ; 
elles sont situées au pied des montagnes qui entourent une partie de la province. Ce 
lieu d'extraction a sans doute été choisi à cause des affleurements superficiels de la 
roche qui parait se trouver beaucoup plus profondément dans les environs de la ville. 
Enfin, nous avons encore rencontré cette limonite sur les bords du grand fleuve (Mekong) 
à 40 milles environ au-dessous des rapides de Sombor. La hauteur des eaux ne nous a 
pas permis d’en suivre la couche. 

Pour nous résumer, nous dirons que tout porte à croire que le banc de roche de 
Bien-hoa couvre une grande partie de la Cochinchine française et du Cambodge, entre 
les montagnes de Bien-hoa et de Baria, à Est, et celles de Pursat et de Battambang, 
à l'Ouest. 

. Les 16 et 17 juin, nous avons parcouru les collines qui sont situées à 6 kilomètres 
Sud-Ouest de Compong Luong, et que lon désigne habituellement sous le nom de 
montagnes de Oudong. 

L’altitude de ces montagnes au-dessus de la plaine est d'environ 140 mètres; elles se 
dirigent du Sud-Est au Nord-Ouest vers les montagnes de Battambang, au soulèvement 
desquelles elles semblent appartenir. Les divers points culminants sont couronnés de 
pagodes et de tombeaux d'anciens rois du Cambodge. Ces monticules couverts d’une fort 
petite quantité de terre végétale sont formés de Quartzite dont les blocs superficiels ont 
élé détériorés par les influences atmosphériques et les incendies annuels des herbes 
et des arbrisseaux qui croissent sur ces collines. | 

Les indigènes du Cambodge nous ont remis de la limonite des marais, du fer car- 
bonaté venant de la partie Nord-Est des montagnes de Compong Soai, et diverses 
roches, telles que porphyres, granites, grès, albâtre, calcaire, provenant des montagnes 
de Pursat et du haut de la rivière de Oudong. 

La plaine d'Angcor offre peu d'intérêt au géologue ; c’est une grande plaine d’allu- 
vion, tantôt marécageuse, lantôt couverte de forêts, bornée à l'Ouest et au Nord par des 
montagnes, à l'Est, par la province de Compong Soai, et au Sud par le grand lac. Le 
sable des forêts est fin, fortement mélangé de mica; il parait contenir aussi quelques 
parcelles d’or, car on le trouve fouillé en plusieurs endroits, surtout dans l'enceinte de 
la vieille ville. Nous ignorons la quantité d’or que peut recueillir en un jour une personne 


ITINÉRAIRE. 83 


habituée à ces lavages ; ce métal précieux ne doit toutefois pas être très-considérable, puis- 
qu’on ne le recherche qu'à l'époque où tous les travaux de l’agriculture sont suspendus. 

Nous avons déjà parlé du bane de roche ferrugineuse que nous supposons couvrir 
la province à une certaine profondeur. 

Une rivière courant du Nord au Sud, et allant se jeter dans le grand lac traverse cette 
province ; elle roule une grande quantité de galets de poudingue siliceux et un gravier de 
quartz blanc avec nombreuses paillettes de mica. Les indigènes ne lavent pas le sable 
de cette rivière. 

Entre la pagode et l’ancienne ville d’Angcor, il existe un petit monticule en pain de 
sucre, appelé Mont Bakeng, composé de poudinques polygéniques : c’est un grès jaunätre 
empâtant de gros galets si/iceux, des blocs de quartz, de la pegmatite dont les cristaux de 
feldspath sont décomposés, et plusieurs autres roches. Le sommet du Mont Bakeng ayant 
été rasé pour l'établissement d’une pagode autour de l'empreinte sacrée d’un pied de 
Bouddha, il nous a été facile de bien étudier ce poudingue. 

Les nombreux monuments anciens de la province d’Angecor sont bâtis, quelques-uns 
en briques encore fort belles, et ayant admirablement résisté aux intempéries des saisons, 
d’autres, et ils sont les plus nombreux, en grès variant beaucoup quant à leur couleur 
et à la finesse de leurs grains, mais, tous appartenant à la même époque; ils sont géné- 
ralement très-propres aux constructions. On compte quatre sortes de grès, tous micacés, 
le jaune, le bleuâtre, le vert et le rouge. Les trois derniers ont le grain très-fin et très- 
adhérent, et sont susceptibles d’être polis : aussi les sculpteurs les ont-ils choisis de 
préférence au grès jaune pour les statues, les bas-reliefs et les riches et originales 
sculptures qui ornent les pagodes et les palais d’Angcor. Nous n'avons pu visiter les 
carrières d’où ces grès étaient retirés ; nous savons seulement qu'elles sont au Nord et à 
environ 10 lieues de la vieille ville. 

Après avoir visité la province et les monuments d’Angcor, nous revenons sur nos 
pas pour reprendre le Mekong à Pnom Penh. 

En remontant ce fleuve à 35 milles environ au-dessous de Cratieh, l’on voit, sur la 
rive droite, des berges à pic de 12 à 15 mètres d’élévation, blanches le plus souvent, mais 
quelquefois colorées superficiellement en rouge par le lavage des terres ferrugineuses qui 
les recouvrent. Cette matière blanche n’est autre que du kaolin renfermant une certaine 
quantité de quartz en grains de petites dimensions. Le kaolin semble constituer à lui seul 
plusieurs collines en fer à cheval dont les deux extrémités viennent aboutir au fleuve qui 
les coupe et forme les falaises-dont nous venons de parler. Une couche de terre végétale 
de quelques mètres d'épaisseur recouvre ces amas de kaolin, et fournit une riche végé- 
tation de grands arbres, qui pourront être utilisés, si un jour l’industrie vient exploiter 
cette roche si précieuse pour la fabrication de la porcelaine. La quantité de kaolin est 
assez considérable pour qu'on puisse bâtir des villes avec cette matière devenue inalté- 
rable par la cuisson. Des briques provenant de la tour de Nankin que nous avons vues 
et possédées sont dans un état de conservation aussi parfait que le jour où elles sont sorties 
du four. 


84 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Au Nord-Est du village de Cratieh, il existe des carrières d’un calcaire compacte très- 
propre à la fabrication de la chaux; c’est de là que le roi du Cambodge tire toute la chaux 
employée à la construction de son palais de Pnom Penh. 

Entre Cratieh et Stung Treng, l’eau du Mekong ayant entrainé les terres alluviales 
a mis à nu des bancs de roches qui embarrassent le lit du fleuve, et déterminent des 
rapides dangereux. L'époque à laquelle nous les avons franchis n’était pas favorable pour 
étudier les roches qui forment barrage et occasionnent ces rapides (du 13 au 20 juilllet 
1866). L'eau couvrait à peu près tous les obstacles, et le courant était si puissant, que les 
indigènes refusaient de nous faire traverser le fleuve dans leurs barques; de sorte que nous 
n'avons pu examiner que quelques roches sur la rive gauche, encore n’a-t-il pas été pos- 
sible, le plus souvent, de savoir si elles avaient été apportées par les eaux. Nous sommes 
persuadé que bien des choses nous ont échappé pendant ee long trajet, que nous n’avons 
pu faire que fermé dans une embarcation à l'abri du soleil et de la pluie. Nous nous bor- 
nerons, en conséquence , à donner la nomenclature simple des roches que nous avons 
vues et recueillies : 

1° Des débris de Syénite à petits grains. Cette roche paraît être en place au niveau de 
Cratieh ; 

2° Des galets roulés de porphyre pyroxénique noir à nombreux cristaux d’augite 

3° De l’ophite formant des bancs épais au travers du fleuve; 

4° Des cailloux roulés siliceux ; 

9° Des débris de plusieurs variétés de grès qui proviennent vraisemblablement de 
bancs assez considérables que nous avons déjà vus un peu au-dessous de Stung Treng. 

En cet endroit la roche est de couleur bleuatre, très-dure et à grains fins. Les couches 
semblent traverser le fleuve, s'étendent de l'Est à l'Ouest, et sont inclinées de 15 à 
20° environ vers le Nord. 

Il existe encore deux grès moins répandus, un jaune, micacé, de désagrégation facile, 
un autre rougeûtre, grossier, passant au poudingue, très-résistant, formé de quartz et de 
mica réunis par un ciment ferrugineux. 

Près de ces banes l’on rencontre souvent d'énormes blocs de poudingues polygéni- 
ques, qui semblent se rattacher à la formation précédente dont ils seraient la partie supé- 
rieure. 

Du 22 juillet au 14 août, nous avons séjourné à Stung Treng, village Laotien situé 
au confluent du Mekong et de la rivière d’Attopeu ou Se Cong, sur la rive gauche de 
ce dernier cours d’eau. 

Le pays est plat et alluvionnaire au-dessus comme au-dessous des rapides; on ne voit 
aucune montagne à l'horizon. Quelques collines à cheval sur le fleuve, de 12 à 15 mètres 
au-dessus du niveau des eaux, entourent le village au Sud et à l'Est, et semblent se pro- 
longer assez loin vers les montagnes de la Cochinchine , parallèlement à la rivière d'At- 
topeu; sur la rive droite du fleuve, elles vont probablement rejoindre les montagnes de 
Compong Soai dans le Cambodge. Les pentes sont douces, couvertes de forêts ; la couche 
d'humus formée d'argile, de sable noiratre et de débris végétaux, est assez épaisse pour ne 


ITINÉRAIRE. ep) 


laisser apparaitre à sa surface ni aspérité de bancs, ni blocs de roche; mais l’on ren- 
contre en grande abondance, sur la crête de toutes ces collines, des cailloux roulés de 
quartz de diverses couleurs, dont les plus gros n’atteignent pas le volume du poing. 

A l'extrémité Est de Stung Treng, dans le lit d’un torrent qui vient se jeter dans la 
rivière d’Attopeu, nous avons observé, à 5 kilomètres environ de son embouchure, des 
ophites renfermant des filons d’eurite, et présentant de nombreux cristaux de pyrite jaune. 
Cette roche paraît avoir subi un soulèvement postérieur à sa formation. Les dislocations 
qui en ont résulté ont occasionné dans la masse de nombreuses fissures, s’entre-croisant 
irrégulièrement et dans lesquelles ont été injectés du quartz et autres matières. 

Le gisement a la même direction que les collines, et la crête en est relevée de 45° vers 
le Sud. N'ayant trouvé aucun autre endroit où celte roche füt dénudée, 1lne nous a pas 
été permis de contrôler nos premières observations. 

Les collines de la rive gauche et celles de la rive droite sont reliées, au dire des mdi- 
cènes, par des rochers qui oceupent le lit du fleuve et qui étaient complétement couverts 
par les eaux à l’époque où nous nous trouvions à Stung Treng. 

Au-dessous de ce village, sur la rive droite du fleuve, une colline d'environ 45 mètres 
de hauteur, Pnom Combor, est formée de calcaire avee nombreux points spathiques. 

Entre Sieng Pang et Attopeu , sur la rive droite du Se Cong, 
nommée Mai-pai Phou (montagne des Bambous), d’où descend une rivière du même 


il existe une montagne 


nom, qui à mis à découvert un gisement de galène; les indigènes qui l’exploitent le 
disent inépuisable. Nous ne savons rien des procédés d'extraction employés, si ce n’est 
que le minerai est mélangé à du fer venant de Compong Soai. La navigabilité de la rivière 
d'Attopeu et la proximité de notre colonie de la Cochinchine rendent cette mine d’une 
exploitation possible et lucrative. 

Sur la rive droite du fleuve, entre Stung Treng et l’ile de Khon, mais beaucoup plus 
près de ce dernier point, se trouvent de beaux marbres à nombreux fragments spathiques. 
Ils forment la berge du fleuve pendant un espace assez long, ce qui en rendrait l’extraetion 
facile et le transport peu couteux. Les échantillons rapportés par M. Garnier, bien que de 
petites dimensions, sont suffisants pour en faire apprécier les qualités et les riches 
couleurs. 

À Khon la physionomie du pays change un peu. Un soulèvement allant de l'Est à 
l'Ouest a barré le fleuve, et a formé un grand lac qui a été comblé petit à petit par les ma- 
tières que les eaux ont apportées : il a donné lieu en outre à des rapides infranchissables 
pour les bateaux et les barques de toutes dimensions. Sur lemplacement du lac le fleuve 
est encore très-large, et entoure une multitude d’iles dont les indigènes ne connaissent 
pas le nombre. La différence du niveau des eaux entre le plan supérieur et le plan 
inférieur est d'environ 20 à 25 mètres, et la distance qui sépare ces deux niveaux ne 
dépasse pas 2,000 mètres. 

Le fleuve, au moment où il s'engage dans les rapides, est divisé en huit bras prinei- 
paux plus ou moins gros, qui viennent, les uns en torrents, les autres en cascades mul- 
liples et partielles, se réunir comme les rayons d’un éventail au pied de lile de Khon. 


50 | GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


La ligne de soulèvement qui forme barrage au fleuve, à peine sensible dans son pro- 
longement du eôté de la Cochinchine , se caractérise subitement au point où le fleuve 
franchit pour s’effacer ensuite petit’ à petit en s’avançant vers l’Ouest. L'effet s’est done 
surtout fait sentir à l'endroit des rapides. Cinq mamelons, dont le plus haut peut avoir de 
4 à 500 mètres d’élévation au-dessus du niveau des eaux, forment un cercle à peu près 
complet autour d’une immense cavité dans laquelle passe le principal bras du fleuve. 
Quatre de ces monticules se trouvent en dehors, à l’Ouest du fleuve, le cinquième est 
dans la partie Sud de l’île de Khon; tous sont couverts d’une riche végétation. Les cre- 
vasses de dislocation ayant été en cet endroit nécessairement plus profondes que partout 
ailleurs offrirent à l’écoulement des eaux des lits tout préparés, et le fleuve, qui avait d’a- 
bord de la tendance à se diriger vers le Sud-Ouest, ne trouvant pas d’issue, déerivit une 
courbe en se rapprochant du Sud et vint se perdre au milieu des collines dont nous parlons. 

Les 22, 23 et 24 août, nous avons exploré l’ile de Khon et les parties du fleuve qui 
nous étaient accessibles. Le lit et les bords des bras principaux sont formés d’une roche 
métamorphique à texture granitoïde, contenant des débris d’ophite et de quartz. Les cou- 
ches sont relevées verticalement et courent E. et O.; par intervalles l’on rencontre, 
ayant la même direction, des filons de quartz, tantôt compacte, tantôt granulaire, tantôt 
cristallin ; lorsque le filon est épais, il arrive que les parties en contact avec les murailles, 
sont compactes et que le centre renferme des cristaux perpendiculaires aux murailles, 
et ayant leur sommet tourné vers la partie centrale du filon. L'on voit souvent dans un 
même filon des couches de kaolin alterner avec des couches de quartz compact. Le lit du 
fleuve parait être complétement formé par cette roche métamorphique et par des 
schistes polygéniques également métamorphiques:; nous les avons rencontrés dans tous 
les points des rapides et toujours par couches puissantes; quelques échantillons ont été 
pris dans le lit même du grand bras, sur des blocs que les eaux ne couvraient pas encore. 
Le ciment de ces schistes renferme du carbonate de chaux, car au contact de l'acide 
chlorhydrique, il se fait une légère effervescence sans désagrégation sensible de la 
masse. 

Sur les bords de la rive gauche du grand bras, à la partie inférieure de l'ile de 
Khon, nous avons trouvé, mais n’appartenant pas à un gisement régulier, des bloes de 
poudingues ferro-siliceux, des morceaux de carbonate de chaux à l'état fibro-lamellaire, 
et un débris de schiste noir, tabulaire, à grains très-fins. Le sable est gris-brun et forte- 
ment micacé. 

L’exploration du monticule de l'ile de Khon a offert peu d'intérêt. Sur le versant Sud 
et au deuxième tiers de la hauteur, nous avons rencontré des blocs de calcaire dolomi- 
lique avec cristaux de carbonate de chaux, couverts en grande partie par la terre végétale, 
ce qui ne nous a pas permis de prendre l’épaisseur des couches ni leur direction. Sur 
le sommet nous avons trouvé une roche argileuse en couches bien stratifiées : cette roche 
se transforme en argile jaune brunâtre par une exposition prolongée à l'air et aux agents 
atmosphériques et se couvre d’une végétation excessive qui rend l'accès de la montagne 
très-difficile. De cette argile, au moment des pluies, sort un nombre incaleulable de 


ITINÉRAIRE. 87 
petites sangsues dont on est bientôt couvert et qui parviennent à mordre, quelques pré- 
cautions que l’on prenne. 

Nous n'avons pu explorer les autres monticules à cause de l’inondafion. 

A 10 ou 12 milles au-dessus des rapides de Khon, au milieu d’alluvions, il 
existe une chaine de collines à cheval sur le fleuve et se prolongeant fort loin de chaque 
côté. Elle est formé d’une série de dômes à peu près de même hauteur, 200 à 300 mètres 
au-dessus du niveau des eaux du fleuve, courant E. et O0. et reliés entre eux par des 
cols ayant généralement à peu près la moitié de l'élévation générale. Le fleuve, en cet 
endroit, se divise en deux bras qui enlacent l’île de Khong dans laquelle se trouve le 
village du même nom, résidence du Mandarin gouverneur de la province. Les obstacles 
que cette chaine, lors de sa formation, dut opposer au libre écoulement des eaux, ont 
entièrement disparu : le fleuve n’est pas sensiblement plus rapide en cet endroit que 
dans les autres points, du moins pendant la saison des hautes eaux. 

L'ile de Khong, au niveau de la chaîne, peut avoir de 6 à 8,000 mètres de largeur ; 
elle renferme cinq dômes distincts, dont quatre sur une même ligne ; le cinquième est 
sur un second plan plus Nord et touche au monticule le plus rapproché du village. 
Nous avons plusieurs fois parcouru les collines de l’île de Khong et celles de la rive 
gauche du fleuve; elles sont toutes de composition identique; partout nous avons 
rencontré un porphyre noir rougeatre, composé d’une pâte feldspathique renfermant 
du feldspath vitreux, des cristaux de feldspath albite souvent détériorés et du quartz. 

Dans l’île et sur le versant Sud du dôme placé au second plan, cette roche forme 
une saillie arrondie considérable qui n’a pas moins de 40 mètres de puissance. Au- 
dessus du porphyre existe un poudingue formé de blocs de porphyre quartzifère, de 
débris de quartz et d’arkose silicifiée; ces matériaux sont reliés entre eux par un grès 
verdätre qui fait l'office de ciment; la couche est de plusieurs mètres d’épaisseur par- 
tout où nous l'avons rencontrée. Les galets ramassés dans les torrents qui descendent 
des collines sont absolument de même composition que les roches que nous venons 
de désigner; l’eau et les influences atmosphériques en ont seulement changé l'aspect 
extérieur et modifié la couleur des matières composantes. Au pied des collines et dans le lit 
de ces mêmes torrents, l’on trouve un ciment argilo-ferrugineux formant avec les débris des 
roches supérieures une nouvelle roche très-tendre qui participe à la fois de la composition 
d’une limonite et d’un poudingue. Des filons très-étroits d’une matière terreuse et blan- 
châtre, que nous croyons être du kaolin montent en dykes à peu près verticaux à travers 
la roche porphyrique et sont quelquefois accompagnés de pyrite de fer en très-petite 
quantité. Il existe des filons analogues de quartzite et de quartz compacte; souvent des 
couches de quartz blanc alternant avec des couches de quartz d’un rouge de corail donnent 
à ces filons un aspect rubané. Les agents atmosphériques ont une action destructive 
très-prononcée sur la roche des montagnes de Khong, le porphyre prend d’abord une - 
couleur gris de cendre, puis se désagrége pour devenir terre végétale. 

De Khong à Bassac le fleuve coule au milieu d’alluvions. 

Le village de Bassac, chef-lieu de la province de ce nom, est situé sur la rive droite du 


88 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Mekong, au pied des montagnes qui l'entourent de l'Ouest au Nord. Le fleuve en creu- 
sant son lit a isolé ces montagnes des grands massifs qu'il laisse à gauche et dontelles fai- 
saient partie dans le principe. Les formes générales sont les mêmes et les grès qui en cons- 
lituent la masse apparente sont identiques des deux côtés du fleuve à en juger par les 
échantillons recueillis sur les bords du Se Don. Nous n'avons exploré que les montagnes 
de Bassac, encore ne sommes-nous pas arrivé à leurs sommets qui n’atteignent cepen- 
dant pas 1,500 mètres. Les bambous, les lianes et des arbres épineux de toute sorte en 
interdisent l’accès. 

La composition en est bien simple : à Wat Phou (Pagode de la montagne), au S.-0. du 
village, un schiste argileux brunâtre d’une très-grande puissance, dont on voit plu- 
sieurs centaines de mètres au-dessus du niveau du fleuve, supporte un grès psammite 
fortement micacé à grains de quartz un peu gros mais bien liés. L'épaisseur de cette 
seconde roche est aussi de plusieurs centaines de mètres. Les couches sont stratifiées, 
sensiblement horizontales et d’épaisseurs diverses. Ce grès est fréquemment employé 
dans les constructions et résiste bien aux influences atmosphériques. 

A 600 ou 700 mètres au-dessus de la plaine, dans le contre-fort N.-E. du pic sur- 
monté d’un téton, nous avons trouvé le même schiste qu'à Wat Phou, seulement nous 
n'avons pu constater s'il descendait jusqu'au niveau du premier; le lit du torrent 
que nous avons suivi pour arriver à cette hauteur est tellement encombré de blocs de 


] 


grès qu'on ne peut pas suivre la continuité des roches, mais nous certifions que le 
grès qui surmonte les schistes est semblable dans les deux cas. Telle est la com- 
position des montagnes de Bassae; jusqu'à présent nous n'avons trouvé aucun fossile 
qui caractérise l’époque géologique de leur formation. 

En remontant le torrent dont nous venons de parler nous avons rencontré des 
blocs de grès imprégnés de sel de cuivre et nous avons pu les suivre jusqu'au gise- 
ment. Le minerai se trouve immédiatement au-dessous des grès, auxquels il est sou- 
vent adhérent, mélangé à une couche de calschistes de 0",50 à 1 mètre d'épaisseur qui 
sépare les schistes des grès; au milieu de ces calschistes l’on voit des empreintes végé- 
tales très-frustes et des filons de charbon de 0",001 à 0,01 d'épaisseur. Nous reparle- 
rons de ce gisement au chapitre de la Minéralogie. 

Du 2 novembre au 4 décembre nous avons accompagné le chef de lexpédition 
dans une excursion pour explorer le triangle formé par le Mekong et le Se Don. De 
Bassac nous sommes allés rejoindre le Se Don dont nous avons remonté le bassin Jusqu'à 
deux journées de marche au delà de Saravan; puis franchissant les collines et les cols 
qui séparent ce bassin de celui du Se Cong ou rivière d’Attopeu, nous sommes descendus 
pendant cinq jours, soit par éléphants, soit par embarcations, jusqu'à Tapae, à 30 milles 
au-dessous du village d’Attopeu. Là nous avons quitté le Se Cong pour nous diriger à 
‘peu près directement vers l'Ouest à travers les forêts. Le 4 décembre, à 10 heures du 
matin, nous étions à Paktuey sur le petit bras du Mekong en face de Bassac ? 


1 Voir la carte itinéraire n° 2, Atlas, planche VI. 


ITINÉRAIRE. 89 


Cette excursion promettait d’être intéressante au point de vue géologique et mi- 
néralogique et l’aurait été en effet sans le mauvais vouloir que nous avons rencontré 
chez les indigènes. Nous savions d'avance, par des renseignements et par des 
échantillons qui nous avaient été remis à Bassac, qu'il existait en divers endroits, 
dans les massifs de la rive gauche, des gisements de minerais de fer oligiste et carbo- 
naté, de plomb, d’antimoine, d’or et d'argent. Il n’a pas été possible de visiter un 
seul de ces gisements. Les gens de la province de Kamtong noi nous disaient que 
les métaux se trouvaient sur Saravan; ceux de Saravan les mettaient sur Atlopeu et 
vice versd. Patience, promesses, menaces, tout fut inutile. Nos observations se sont 
donc bornées à l'étude des terrains que nous avons traversés. Nous indiquerons aussi 
les groupes de montagnes, qui, au dire de quelques indigènes plus confiants, renfer- 
meraient des minerais. A l'extrémité Nord de Bassac nous recucillimes dans une pagode 
deux échantillons de minerais de cuivre et de fer qu’on nous dit venir du massif mon- 
tagneux de la rive gauche. Nous connaissions déjà la présence du fer en cet endroit, 
mais non celle du cuivre. Cette indication peut avoir une grande importance à cause 
de la présence du cuivre déjà constatée près de Bassac, mais elle a besoin d’être 
vérifiée. 

Un peu avant d'entrer dans le Se Don, sur la rive gauche du fleuve, il existe de 
nombreux débris et des colonnes encore debout de wacke à retraits bolaires ; les colonnes 
sont pentagonales, mais petit à petit les angles s’'émoussent, et il arrive un moment où la 
colonne n’est plus formée que par la superposition d’un certain nombre de blocs sphé- 
roïdaux de 30 à 40 centimètres de diamètre. Les colonnes non encore entamées par le 
courant du fleuve conservent leur forme pentagonale, bien qu’elles soient déjà détériorées 
dans leur composition. 

De l'embouchure du Se Don jusqu'au village de Solo niai nous n’avons rien vu de par- 
ticulier. Les berges hautes de 10 à 12 mètres sont formées d'argile jaunâtre et de terre végé- 
tale au-dessous desquelles on trouve quelquefois une marne rougeätre très-carbonatée. Le 
lit contient des cailloux roulés de psammites, du sable provenant de la désagrégation de 
ces dernières roches et des débris voleaniques, principalement des laves. Plusieurs bancs 
de grès micacés forment des barrages à travers le lit de la rivière et rendent la navigation 
impossible pendant la saison des basses eaux. 

Le massif montagneux que nous avons déjà indiqué comme contenant divers métaux 
fournit aussi un calcaire employé par les indigènes; mais ce qu'il renferme de plus pré- 
cieux, ce sont des mines d'argent qu’on à refusé de nous montrer après nous en avoir parlé, 
des gisements de galène, et des minerais de fer oligiste. Tous ces métaux, l'argent excepté, 
avaient déjà été indiqués à H. Mouhot. 

. En nous rendant par terre du village de Solo niai à la cataracte du Se Don, qui se trouve 
à quelques milles au-dessus à la tête de l’île Don niai !, nous avons rencontré, sur la rive 
gauche, des scories volcaniques en abondance et des blocs basaltiques surgissant à travers la 


! Don veut dire île, et Niai grande. 
IT. 12 


90 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


terre végétale. Il existe une multitude de montieules, souvent près les uns des autres, 
exclusivement constitués de débris volcaniques. Ces montieules sont quelquefois disposés 
en cercle de manière à former comme les bords d’un cratère dont le centre aurait été com- 
blé par la terre végétale; mais le plus souvent ils suivent des lignes diverses, comme si les 
éruptions s'étaient faites par des crevasses. La constitution géologique paraît être analogue 
Jusqu'au pied des montagnes. 

La cataracte du Se Don comprend toute la largeur de la rivière et forme un croissant 
ayant sa convexité tournée contre le courant. La chute est perpendiculaire et peut avoir 
de 14 à 15 mètres de hauteur; les eaux tombent d'un seul jet à chaque extrémité du 
croissant, mais au centre un premier jet de 6 à 7 mètres vient se briser sur une plate- 
forme de lave pour rejaillir ensuite dans la masse du courant. Sur la rive gauche, au-dessous 
de la cataracte, il existe une chaussée basaltique assez analogue à la chaussée basaltique du 
Volant dans l’Ardèche; elle a 200 mètres de longueur et plusieurs mètres de largeur. 
Les colonnes pentagonales, quoique fortement pressées les unes contre les autres, sont 
bien indiquées. Au moment où nous avons visité cette chaussée, les colonnes dépas- 
saient de 0",75 le niveau des eaux (6 novembre 1866). Une couche de lave de 6 mètres 
de puissance est superposée à ce plan basaltique ; cette lave est bien moins dure et moins 
dense que le basalte, elle est finement poreuse et se laisse facilement attaquer par le 
ciseau. La coulée, qui n'appartient point à la même éruption que le plan basaltique, 
a précédé elle-même une troisième éruption dont la lave est descendue dans les Jomts 
de retrait de la précédente et est venue sur le plan basaltique, en formant des cônes 
aplatis et ondulés, comme le ferait une matière asphaltique à moitié liquide. Cette der- 
mère couche est plus dure et plus dense que la seconde; elle est fendillée irrégulière- 
ment dans toute son épaisseur, de manière à former de petits blocs, s’enchevétrant les 
uns dans les autres, que l’on peut difficilement détacher de la masse; elle constitue le 
lit de la rivière au-dessus de la cataracte. La partie en contact avec les eaux courantes 
est noire et luisante comme l’obsidienne. L’étendue occupée par ces matières volcaniques 
est considérable ; nous avons suivi la couche plusieurs centaines de mètres au-dessus des 
chutes, et l'avons vue s’enfoncer et disparaître sous les eaux et la terre végétale des rives. 
L'île est formée de scories volcaniques sur lesquelles est un dépôt de terre végétale. 

Au-dessus des chutes jusqu’au petit village de Knoiï, le Se Don est analogue à la 
partie que nous avons déjà parcourue; les rapides sont plus fréquents et les bancs de 
marne rougeatre plus nombreux. On remarque que ces derniers sont surtout apparents 
lorsque le lit de la rivière se rapproche davantage des montagnes. Entre Smia et Knoï, 
mais plus près de ce dernier village, il existe une cascade fort originale. Une série d’as- 
sises de grès psammites disposées en gradins horizontaux occupe toute la largeur de la 
rivière; la différence des deux niveaux extrêmes est d'environ 10 mètres. L’eau coule et 
tombe en larges nappes sur ces gradins comme sur un immense escalier. 

De Knoï à Saravan nous suivons la corde de la portion de cercle que décrit le Se Don 
pour relier ces deux points. Dans le trajet nous rencontrons les mêmes accidents volea- 
niques qu'aux environs de Solo niai : tantôt ce sont des monticules de scories, tantôt des 


ITINÉRAIRE. 91 


excavations ou bassins naturels, où l’eau des pluies séjourne d’une année à l’autre dans 
d'immenses euvettes de lave. Ces bassins sont probablement les cratères des anciens 
volcans qui ont vomi toutes ces roches. 

Saravan est un grand village, chef-lieu de la province de ce nom, agréablement situé 
sur les bords du Se Don et environné, excepté à l’Ouest, de hautes montagnes que l’on 
dit très-riches en métaux; l’antimoine est surtout abondant. Les indigènes connaissent 
son emploi en médecine et s’en servent aussi pour falsifier les monnaies de cuivre. 

Pendant deux jours encore, après avoir quitté Saravan, nous marchons au milieu 
de débris volcaniques; ils ne disparaissent que le troisième jour au moment où nous 
franchissons un plateau élevé et des collines de grès qui séparent le bassin du Se Don de 
celui du Se Cong. A peine étions-nous au bas du versant opposé que nous retrouvions de 
nouveau les mêmes roches volcaniques. Dans le lit d’un torrent, qui se Jette dans le Se Cong, 
et sur les bords duquel nous campames, la lave est brusquement interrompue et détermine 
une chute de 12 à 15 mètres de hauteur. L’épaisseur de ce produit volcanique est de 
8 mètres environ, et parait appartenir à une seule coulée. Cette lave repose sur un lit 
de 0",50 à 1 mètre d'épaisseur de cailloux roulés , quarizeux et sur un schiste analogue à 
celui que nous trouvons au-dessous des grès de Bassac. Par l'influence de la chaleur la couche 
supérieure de schiste s’est divisée en plaques losangiques très-régulières, ce qui donne aux 
plates-formes découvertes l'aspect d’un parquet. Une couche volcanique analogue à celle-ei 
couvre toute la plaine au Nord des montagnes de Luong jusque sur les bords du Se Cong. 

Cette rivière, de Coumkang à Tapac, roule une grande quantité de cailloux et de sables 
quartzeux qui s’amoncellent en certains endroits et forment de nombreux bancs, découverts 
seulement aux basses eaux, sur lesquels les habitants des montagnes voisines, appelées 
Khas ou sauvages, descendent à l’époque des basses eaux pour laver les sables et en retirer 
la poudre d'or dite d’Attopeu. Les chercheurs d’or reconnaissent la présence de ce précieux 
métal à certains graviers et galets; puis ils installent des huttes sur le banc qu'ils ont 
choisi et travaillent à l'extraction de l’or pendant toute la saison sèche. Ils lavent de 
préférence les sables qui s’amoncellent autour des toutfes de broussailles. La poudre 
recueillie est mise dans des tubes ou tuyaux de plumes d'oiseau et livrée ainsi au com- 
merce. Nous n'avons pas vu pratiquer l’amalgame. Nous ne supposons pas non plus 
qu'ils broient les cailloux volumineux qui pourraient contenir des paillettes; rien dans 
le petit campement que nous avons visité ne le fait supposer; un vase en bois très- 
évasé et peu profond est le seul ustensile dont ils se servent. Nous sommes porté à croire 
que ce travail est peu lucratif, et serait abandonné, si la cour de Siam n’exigeait des Khas 
que les impôts soient payés avec de la poudre d’or. 

Au dire des indigènes, l'exploitation se bornerait au lavage des sables de la rivière, 
aucun d'eux n'aurait cherché à remonter aux gisements; il faut ajouter peu de foi sur tout 
ce qu'ils racontent, mais principalement en pareille matière. Ils sont d'autant plus défiants 
que nous avons la réputation de voir dans les entrailles de la terre les trésors qui y sont 
cachés. 

A quelques milles au-dessous de Tapac se trouvent les mines de plomb de Mai-paï, 


92 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


dont des échantillons de galène nous ont été donnés à Stung Treng, nous aurions pu fa- 
cilement les visiter pendant notre court séjour à Tapac, mais on s’est bien gardé de nous 
en instruire, ce n’est que deux jours après notre départ que nous avons appris que nous 
étions si près des mines. 

De Tapac à Paktuey, sur les bords du Mekong, nous ne rencontrons partout que 
produits volcaniques, scories, laves, basaltes, etc.; les lits des torrents et des rivières sont 
encombrés de ces roches. Dans le lit du Compho quelques cailloux roulés de porphyre 
étaient inclus dans les masses basaltiques. 

Sur les bords d’un ruisseau, le Se Keua (rivière de sel), des indigènes faisaient éva- 
porer de l’eau salée qu'ils retiraient de puits peu profonds, creusés à peu de distance du 
ruisseau. 

Pour résumer nous concluons qu’à une époque que nous ne pouvons déterminer, des 
volcans ont couvert de leurs épanchements une grande portion du triangle formé par le 
fleuve et le Se Cong, jusques et y compris le bassin du Se Don; en outre, nous sommes 
persuadé que les métaux utiles et précieux sont en très-grande abondance dans le massif 
montagneux dont nous avons fait le {our complet; mais il est bien difficile, pour le moment 
du moins, d’en découvrir les gisements. On ne rencontre partout que crainte et mauvais 
vouloir de la part des indigènes. 

La roche dominante de cette montagne, singulièrement isolée au milieu de plaines 
de lave, paraît être le grès psammite, e’est lui que nous avons trouvé à Tapac où nous 
avons pu approcher de la montagne; du côté du Mekong, en face de Bassac, elle 
forme une grande coupe absolument analogue à celle des montagnes de Bassac et présen- 
tant la même physionomie et les mêmes stratifications. Nous n'avons pu approcher de cet 
endroit, les indigènes refusent d'y conduire à cause des forêts inextricables et des bêtes 
fauves qu’elles abritent. 

En remontant le fleuve de Bassac à Pak Moun, l’on ne rencontre partout qu'un grès 
gris quartzeux, à grains un peu gros, mais bien liés, avec nombreuses parcelles de mica 
blanc et jaune (Psamimites). Cette roche constitue les montagnes et les monticules de 
cette partie du Laos, et forme le lit du fleuve qu’elle encombre souvent d’ilots et d’écueils 
recouverts à l’époque des hautes eaux. Le courant est parfois resserré entre deux mu- 
railles de grès, et il est un point, entre Pak Moun et Kemarat, où la largeur du fleuve 
n’est que d’une cinquantaine de mêtres. Un débris d’obsidienne a été trouvé sur la rive 
gauche du fleuve, un peu au-dessus de l'embouchure du Se Don, au milieu d’un grand 
nombre de morceaux de pierre ponce roulés. 

À Pak Moun, le Mekong recoit un affluent considérable, le Se Moun, qui vient de 
l’Ouest et traverse la province d’Oubôn. Près du point de jonction des deux rivières, le 
lit du Se Moun est barré de part en part par des couches de grès qui donnent lieu à des 
rapides et à plusieurs chutes d’eau qui rendent cette rivière impraticable à la naviga- 
tion. Ces barrages se renouvellent douze à quinze fois sur un parcours d'environ 20 milles, 
entre les villages de Pak Moun et Pi Moun; les grès qui les forment sont de deux sortes : 
l’un sous-jacent, gris, quartzeux et très-dur, est semblable à celui des bords du fleuve ; 


ITINÉRAIRE. 05 


l’autre, placé tout à fait à la surface, et manquant bien souvent, passe au poudingue; il 
est très-grossier, à grains quartzeux de volumes très-variables, à angles à peine émoussés, 
avec de grosses paillettes de mica. On peut dire que c’est un conglomérat psammite lié 
par un ciment argilo-ferrugineux. Le contact de l’eau courante laisse à la surface de 
cette dernière roche un vernis brunätre, ferro-limoneux, qui ferait supposer de prime 
abord dans l'agrégation des parties constituantes une certaine ténacité qui disparait dès 
que la première enveloppe a été brisée. Nous avons aussi rencontré dans les premiers 
rapides, sur la rive gauche, un beau grès jaune très-fin et facile à travailler, mais il était 
par blocs isolés, ne se reliant à aucun gisement voisin. Les eaux de la rivière creusent 
dans ces divers grès des trous et de petites anses où viennent se déposer des cailloux 
roulés siliceux : les indigènes recueillent comme pierres précieuses ceux de ces cailloux 
qui sont translucides ou colorés, qui descendent sans doute de fort loin, car jusqu'à 
Oubôn nous n'avons vu aucune roche analogue. 

Un vaste plateau, élevé au-dessus du fleuve de la hauteur de tous les rapides qu'il 
nous à fallu franchir pour arriver à Pi Moun (de 25 à 30 mètres), commence à ce dernier 
village, et, au dire des indigènes, s'étend très-loin vers lOuest de chaque côté du 
Se Moyn. Il est limité à l'Est par les collines de grès qui forment les rapides. De ce point, 
les collines se dirigent, les unes, vers le Sud et les montagnes de la province de Bassae, 
les autres, vers le Nord parallèlement à la rive droite du fleuve. Le soulèvement qui pro- 
duisit ces collines opposa une barrière à l'écoulement des eaux, et retint en même temps 
toutes les matières charriées et autres qui comblèrent ce grand bassin qui forme aujour- 
d'hui une immense plaine sans autres accidents que les ravines qui reçoivent les eaux 
à l’époque des pluies. La rivière s’est creusé sur ce plateau un lit si uniforme et si régu- 
lier qu'on le croirait fait de main d'homme. Une argile jaunâtre veinée de blane, sur- 
montée d’une couche de sable de 3 mètres d'épaisseur en moyenne, constitue les berges 
d’Oubôn et au-dessous. Des débris de fer limoneux que l’on rencontre souvent dans ces 
couches de dépôts indiquent assez, à défaut de fossiles, que ce terrain est de formation 
relativement récente, et qu'il peut être considéré comme l’analogue des vastes dépôts 
alluviaux de toute la partie basse de la Cochinchine. 

Il se fait à Oubôn un commerce important de sel dont une grande quantité est exportée 
au Cambodge pour saler les poissons, lors de la pêche du lac d’Angcor. Ce produit est: 
répandu sur une vaste étendue à la surface du sol, dans la partie du plateau d'Oubôn qui 
se trouve sur la rive gauche de la rivière. En traversant la plaine pour nous rendre de 
Oubôn à Kemarat, par Amnat, nous avons marché environ 80 kilomètres sur des 
terrains salés, et au dire des indigènes, la surface salée serait bien plus considérable de 
l'Est à l'Ouest !. 

Dans la grande plaine qui sépare Oubôn de Kemarat, on rencontre encore, dispersé 
irrégulièrement à la surface du sol, un fer limoneux assez riche en métal pour être 
exploité pour les besoins du pays. Il abonde surtout dans les environs du village de 


1 Voir la quatrième partie (Minéralogie). 


94 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Amnat, où 1l forme plusieurs amas en exploitation. Une minière que nous avons 
visitée à 4 kilomètres Est-Nord-Est de Amnat, près du petit village de Thuey, renferme 
deux variétés de limonite également utilisées; lune scoriacée analogue à celle de 
Bien-hoa, mais bien plus riche en métal : Fautre compacte, plus grise que la précé- 
dente, en morceaux du volume d’une noix ou plus petits, faciles à réduire en poudre. Ce 
dernier minerai ne se trouve pas à la surface du sol. d 

Les environs de Kemarat offrent de nombreuses ondulations de terrain exelusive- 
ment formées par un grès rose-rouge dans ses couches supérieures, fin, de ténacité 
moyenne, et divisé par plaques fabulaires horizontales variant beaucoup dans leur épais- 
seur. Habituellement il est recouvert de terre végétale et n’est apparent que dans les ravins 
creusés par l'écoulement des eaux. Ce grès parait constituer la roche principale de la 
contrée, 1l existe sur les bords du fleuve et dans les terres; nous l’avons vu à 45 kilomè- 
tres au Sud-Ouest de Kemarat sur la route de Amnat en contact avec du fer limoneux. 

Quelques échantillons des roches qui bordent le fleuve entre Pak Moun et Kemarat 
ont été recueillis par M. Delaporte pendant que nous suivions la route intérieure; ce sont 
des grès semblables à ceux que l’on trouve plus bas, mais moins micacés, et peut-être de 
texture plus fine; l’un d'eux surtout, gris-vert, est remarquable par la beauté de son 
grain; certaines parties passent au grès feldspathique. 

A 12 kilomètres environ au Sud-Ouest de Kemarat, près du petit village de 
Nà tan, sur le Se Bang Koï, il existe un gisement de pyrite de fer non exploité qui vient 
affleurer dans le lit du ruisseau que nous venons de nommer, à 70 ou 80 mètres, au Nord 
de la route actuelle de Kemarat à Amnat. 

Le transport de nos bagages étant plus facile par eau que par tout autre moyen, à Ke- 
marat nous reprenons le fleuve pour ne plus le quitter, s'il est possible, jusqu'à Luang 
Prabang. A 10 milles environ au-dessus de Kemarat, un immense barrage que nous avons 
mis deux jours à franchir (15 et 16 février), occupe tout le lit du fleuve sur une longueur 
considérable. L'eau coule tantôt en nappes très-minces sur un fond de roche, tantôt à 
travers des fissures et des sillons étroits qu’elle s’est creusés. Bien que la différence des 
niveaux séparés par le barrage soit grande, Peau ne tombe nulle part en cascade, mais en 
revanche le courant est d’une violence extraordinaire, surtout dans les endroits resserrés. 
Le barrage est formé par un grès quartzeux à grains bien liés, et par un autre grès rouge- 
brique, qui lui est superposé, analogue à celui si abondamment répandu dans toute la 
contrée. 

Une chaine de monticules et de collines, se dirigeant vers le Sud-Sud-Ouest, com- 
mence à 4 kilomètres au Sud de Ban Mouk. Les points les plus élevés n’atteignent pas 
350 mètres au-dessus du niveau du fleuve. Cette chaine est constituée tout entière par le 
grès rouge dont nous avons déjà parlé ; sur la crète on rencontre un poudingue quartzeux 
à grains de quartz blanc de diverses grosseurs, souvent anguleux et liés entre eux par un 
ciment argilo-ferrugineux Jjaunâtre. Cette roche a beaucoup d’analogie avec une de celles 
que nous avons rencontrées au premier rapide du Se Moun. 

Au pied des collines, dans les endroits bas et humides, l’on trouve le fer limoneux 


ITINÉRAIRE. 95 


si répandu dans tout le bassin du Mekong; mais celui-ei semble si pauvre qu'il n’est 
pas exploité, malgré la cherté excessive de ce métal dans le pays. 

Pendant notre court séjour à Ban Mouk un vieillard est venu mystérieusement nous 
offrir deux coquilles fossiles recueillies dans le lit d’un ruisseau dont nous ignorons le 
nom, à deux petites journées de marche vers l'Est deBan Mouk, sur la route du village 
de Lomnou. Ces fossiles se trouvent par bancs, mélangés à d’autres espèces qui ne leur 
seraient pas semblables. Ces fossiles dont nous avons rapporté deux échantillons n’ont pas 
encore pu être déterminés; ils n’ont pas d’analogues dans les collections du muséum. 
Ce sont là tous les renseignements que nous avons pu obtenir, et le temps ne nous a pas 
permis d'aller vérifier les faits par nous-même; nous le regrettons vivement, et cela d’au- 
tant plus que c’est la première fois depuis notre départ qu'il nous a été donné de voir des 
fossiles. À en juger par la physionomie générale du pays, les terrains de la rive gauche 
du fleuve seraient en cet endroit composés, comme ceux de la rive droite, d’une couche 
argilo-végétale recouvrant des grès rouges et des grès calcarifères. Nous tenons du même 
vieillard des renseignements vagues sur la présence fort douteuse d’un minerai d'argent à 
l'Ouest et loin de Ban Mouk, mais toujours sur le territoire de la province ; il a ajouté qu'il 
ne pouvait donner des renseignements précis ne connaissant pas lui-même le gisement, 
que d’ailleurs il était défendu aux indigènes d'approcher des mines. Ce récit nous paraît 
peu vraisemblable : s’il existait en effet des mines d'argent sur la rive droite du fleuve, le 
Gouvernement de Siam en serait instruit et des tentatives d'exploitation auraient été faites. 

Dès que les grès disparaissent, on ne voit plus sur les bords et dans le lit du fleuve que 
de la terre végétale, de l'argile transportée et des sables ; quelquefois en février et mars 
les eaux en se relirant découvrent des banes de graviers soudés par un ciment argileux. 

Près d’un monument religieux en grande vénération à Peunom nous avons trouvé des 
débris d’une roche fusible au chalumeau en verre verdâtre. Cette roche éruptive, composée 
de feldspath labrador, et que nous croyons être de l’Aarmophanite, n'a pas d’analogue dans 
les environs ; elle vient sans doute de plus haut. ; 

En arrivant à Lakon on voit, sur la rive gauche du fleuve , à 18 ou 20 kilomètres au 
Nord-Est du village, une Jolie chaîne de montagnes à pies multiples, bien découpés et 
isolés les uns des autres. Ces montagnes, dont nous n'avons visité qu'une faible partie, 
courent du Nord-Ouest au Sud-Est et se composent de masses séparées de 800 à 2,000 
mètres d'altitude ; leurs flancs à pie et dépourvus de végétation en rendent l’ascension dif- 
ficile, sinon impossible. Un calcaire compacte bleuatre, avec des veines cristallines, et 
un caleaire gris cristallin, également très-commun, au milieu duquel on voit souvent 
des filons de calcaire à cristaux spathiques, constituent ces montagnes et la plaine qui 
les entoure. Ces calcaires sont légèrement dolomitiques. Plusieurs kilomètres avant d’ar- 
river au pied des montagnes, le plan calcaire est parfaitement horizontal, recouvert d’une 
légère couche de terre végétale et parsemé de blocs noirâtres de quartzites qui font abso- 
lument corps avec lui. 

Près du village de Nan ho, il existe une magnifique grotte, de forme ogivale, ayant 
plus de 300 mètres de longueur et d’une grande hauteur, qu'il faut traverser pour pé- 


96 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


nétrer au centre des montagnes qui sont au Nord de Houten et qui appartiennent toujours 
à la même chaine. Cette grotte est creusée dans une montagne formée de couches alter- 
nantes de marbre jaunâtre, qui n’est autre chose que le calcaire ordinaire de toute la 
chaîne, de marbre blane et noir, et enfin d’un beau marbre noir à grains fins veiné de 
minces lignes blanches. Ce marbre, d’une exploitation facile, est très-répandu. 

Les eaux ont creusé dans les flancs de ces montagnes, et à toutes les hauteurs, de 
nombreuses grottes de toutes dimensions ; celles que nous avons pu visiter ne nous ont 
rien fourni d'intéressant, aucun fossile, aucun débris animal ; nous avons pris seule- 
ment des échantillons de calcaire eristallin spathique à la lèvre de l'ouverture d'une 
petite grotte, des échantillons de stalactite ordinaire que l’on voit par blocs énormes de 
plusieurs mètres cubes et affectant des formes bizarres pendus aux voütes des grottes et 
aux flancs des rochers à pic, et des rognons plus blancs de la même roche. Autour du 
calcaire, et soulevé par lui, on trouve un grès rouge, très-dur et très-dense, à grains très- 
fins, avec des paillettes de mica blanc. Il occupe tout le demi-cerele qui comprend 
l'extrémité occidentale de la chaîne calcaire; nous l'avons suivi depuis le village de Na- 
Muong jusque sur les bords des rivières de Hin Boun et le Pak Kan. Il est impossible 
d'étudier les rapports des masses de grès rouges que nous avons vus; ils sont trop forte- 
ment dérangés, et nulle part ils ne présentent une coupe nette. 

Mélangé et généralement superposé à ce premier est un grès moins rouge que les 
précédents, plus friable, contenant des cailloux roulés, blancs, quartzeux et passant au 
poudingue. En dehors de la zone des grès rouges, on rencontre un grès jaune assez fin, 
également très-répandu ; il est surtout apparent entre les villages de Lakon et de Houten. 

Dans le lit de la jolie petite rivière Hin Boun, à 4 ou 5 milles de son embouchure, 
les couches de grès ont été violemment redressées dans la direction de la chaine de 
montagnes. Des murailles parallèles, de 4 à 5 mètres d'épaisseur, traversent la rivière 
en cinq endroits et ne laissent passer l’eau que par des brèches que celle-ci s’est ouvertes. 
Ces murailles forment avec l’horizon un angle de 70° à 80° ouvert au Sud et se dirigent 
au N. 47° 0. 

Le grès en cet endroit est tantôt cristallin, tantôt gris jaunâtre, tantôt coloré en jaune 
brun par la présence d’un sel de fer. Une roche schisto-argileuse jaunätre se voit aussi 
dans le voisinage de ces grès. 

Le Hin Boun, au-dessus de l'embouchure du Pak Kan, est souvent encombré de 
blocs calcaires analogues à ceux des montagnes ; dans quelques endroits on rencontre 
encore des calschistes verdatres, ou noir verdatre, à feuilles le plus souvent contournées. 
Près de ces calschistes se trouve une roche éruptive verte, qui est de l’euritine. 

Du village de Houten nous sommes allés visiter une exploitation de plomb qui se fait 
dans les montagnes de Lakon, à leur extrémité Nord-Ouest. La route à suivre pour se 
rendre aux mines est des plus faciles : on remonte le Hin Boun jusqu'à Thà Kho; là. 
laissant la rivière, on se dirige successivement vers les villages de Nan Ho, Na Muong, 
Na Han, Na Hi, Phon et Nua, en tout 31 kilomètres : c’est dans le dernier de ces 
villages que l’on exploite la roche minérale (voir le chapitre qui traite de la Minéralogie). 


ITINÉRAIRE. 97 


A l'extrémité opposée de la chaine calcaire de Lakon, c’est-à-dire du côté de la 
Cochinchine, il existe, nous a-t-on dit, de riches mines de cuivre exploitées par des 
Annamites, qui font avee ce métal des marmites très-estimées et très-répandues. Nous 
n'avons sur ces mines aucun autre renseignement. 

Dans le lit du fleuve, à quelques milles au-dessous de Nong Kav, au pied du petit 
village de Ho Kham, le courant découvre tous les ans un grand banc de graviers formé 
de galets de toutes natures, au milieu desquels se trouve un sable aurifère exploité par 
les habitants. Nous supposons l’or moins abondant en cet endroit que dans la rivière 
d’Attopeu; les paillettes sont, dans tous les cas, bien plus petites, presque microscopi- 
ques, et ne peuvent être facilement séparées des matières étrangères par le simple 
lavage. On élimine par des lavages successifs les matières les plus grossières qui accom- 
pagnent le précieux métal, puis on soumet le résidu à l’action du mereure qui absorbe 
petit à petit les paillettes d’or amenées à son contact par un mouvement oscillatoire. Le 
mercure une fois saturé est passé à travers une peau ou un linge très-serré, et la partie 
restée dans le linge est ensuite débarrassée du mercure par la volatilisation. Le résidu 
soumis au mercure est composé d’un sable gris-brun excessivement fin au milieu duquel 
sont disséminées les paillettes d’or. 

Sur la rive droite du fleuve entre Saniaboury et Nong Kav, il existe un certain nom- 
bre de villages, à quelques kilomètres dans l’intérieur du pays, qui se livrent à la fabri- 
cation de la poterie commune. Les habilants tirent d’une colline qui court parallèlement 
au fleuve, une terre argileuse, blanchätre, très-propre à cette industrie. Cette argile 
n’est autre chose que du kaolin impur veiné de rouge par des sels de fer. Nous avons 
visité les fabriques de poteries du village de Houn Ho, à huit kilomètres Ouest-Nord-Ouest 
de Saniaboury. Des femmes vont prendre aux carrières de la colline la terre argileuse 
pour l’apporter au village; là elles la concassent et l’exposent dans des aires au soleil 
pour en faire évaporer l’eau qu’elle contient, puis la réduisent en une poudre très-fine 
qu’elles tamisent avec soin pour en séparer les grumeaux échappés au pilon. Cette 
première opération terminée, on ajoute une faible proportion de sable de rivière, et lon 
recueille le mélange dans de grands vases en terre où pendant plusieurs jours il est 
soumis à une infiltration d’eau lente et graduelle. Lorsque la terre est bien imbibée d’eau, 
on la pétrit longtemps et avec soin pour la mettre ensuite en grosses meules sous les 
hangars de travail. Si elle ne doit pas être immédiatement employée, on la recouvre d’un 
linge mouillé. 

Les manipulations et les instruments employés pour la fabrication de ces poteries 
sont, à peu de chose près, les mêmes que ceux dont on se sert en Europe pour la 
poterie commune. Les diverses palettes sont en bois au lieu d’être en fer ou en acier, 
et le tour consiste en une forte planchette horizontale qu’un enfant fait tourner sur un 
pivot central, pendant que l’ouvrier faconne son vase et lui donne les formes appropriées. 
Le vase achevé est mis à l'ombre sous un grand hangar pendant quelques jours, puis 
exposé au soleil avant d’être soumis à la cuisson. 


Les fours se composent d’une grande ealotte semisphérique recouvrant une surface 
If. 13 


98 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


cireulaire dont les deux tiers sont occupés par des gradins plus ou moins nombreux de 
0",50 de hauteur; sur la plate-forme de ces gradins sont posés les vases que lon veut 
faire cuire. Le feu se fait le long de la base du gradin inférieur, et par le courant qui 
s’établit de la gueule du four à la cheminée placée tout à fait au côté opposé, la chaleur 
dégagée est assez intense pour produire la cuisson voulue et faire fondre le vernis vert 
noiratre dont les vases sont enduits extérieurement. Les dessins qui accompagnent ce 
ce texte représentent la coupe antéro-postérieure de deux de ces fours. 

De Nong Kay à Vien Chang on voit contre les berges du fleuve plusieurs banes de 
roche limono-ferrugineuse, employée par les indigènes pour la construction des pagodes 
et autres travaux de maçonnerie ; mais il est fort probable que depuis la chute du royaume 
de Vien Chang ces carrières n’ont pas été exploitées. 

Vien Chang, dont il ne reste aujourd’hui que des ruines, était la capitale du royaume 
de ce nom, détruit et absorbé par les Siamois, il y a environ un demi-siècle. La ville pou- 


LD 
, 09 


FOURS SERVANT AU LAOS A LA CUISSON DES POTERIES COMMUNES. — COUPE ANTÉRO-POSTÉRIEURE. 


vait contenir dans son enceinte de 35 à 40,000 habitants : elle avait eu ses jours de splen- 
deur. La résidence royale était construite en grès, en limonite et en briques, chose rare 
pour la contrée, et couvrait une surface considérable. On peut encore voir assez bien 
conservées des galeries en briques découpées à jour et divers reliefs faits en mortier de 
chaux, qui, outre l'originalité du dessin, ont un réel mérite d'exécution. 

A Vien Chang, comme dans toutes les villes riches, où il est d’usage que chaque 
puissant personnage, devenu vieux, fasse construire une pagode pour le rachat de ses 
fautes, les pagodes sont très-nombreuses et quelques-unes richement ornées. Les statues 
de Bouddha, que partout ailleurs nous avons vues en bois, en grès ou en simple mortier, 
sont 1ci en cuivre rouge ou en bronze : on les comple par milliers. Les pagodes aban- 
données sont remplies de statues de toutes dimensions, avant depuis 0",10 jusqu’à 5 et 
6 mètres de hauteur. Le fleuve, chaque année, en engloutit quelques-unes avec une por- 


ITINÉRAIRE. 99 


üon de la berge, et les banians et les brousses en couvrent des centaines, qui disparais- 
sent petit à petit sous des lits de feuilles et autres détritus. Les indigènes ne font rien 
pour conserver loutes ces choses ; il est d'usage chez eux de laisser à Bouddha le soin des 
objets qui lui ont été consacrés. Ce grand nombre de statues ‘en cuivre a naturellement 
attiré notre attention ; nous aurions voulu savoir d’où l’on retirait tout ce métal ; mais nous 
n'avons obtenu aucun renseignement à ce sujet. Quand les indigènes ne vous répondent 
pas que ce sont les anges qui ont fait à la fois et les statues et les pagodes, ils disent qu'ils 
ne savent pas. Nous ne pensons pas qu’il y ait des mines de cuivre près de Vien Chang; 
les plus rapprochées seraient à l’Est des montagnes de Lakon, sur les frontières de la 
Cochinchine, ou bien, sur la rive droite du fleuve près de Pou Kieo, mines encore 
exploitées aujourd’hui. 

Le métal des statues n’est pas toujours pur ; Le plus souvent même le cuivre est allié 
à un autre corps, sans doute l’antimoine, qui rend l’alliage très-cassant et donne à la sur- 
face polie extérieure une couleur brunâtre. Les statues se faisaient et se font encore de la 
manière suivante : on construit en terre glaise un modèle que l’on recouvre d’une couche 
de cire de l’épaisseur de la paroi que l’on désire donner à la statue, puis par-dessus la 
couche de cire l’on ajoute une épaisse couche de terre glaise que l’on laisse sécher. Ceci 
fait, le métal fondu est introduit par des ouvertures pratiquées dans les parties supérieures 
du moule et prend la place de la cire qui s'écoule inférieurement. 

Deux collines de grès gris quartzeux à grains grossiers et mal liés encaissent le fleuve 
pendant quelques milles au-dessus de Vien Chang. Ces collines sont peu élevées, mais 
assez rapprochées l’une de l’autre pour se confondre avec la berge en bien des points. 
Les couches de grès qui les forment sont légèrement relevées vers le Nord. Elles sont sui- 
vies par des arkoses à grains de quartz nombreux et à cristaux roulés de feldspath rose. 

Ces arkoses ont éprouvé des décompositions diverses par suite de l’action des agents 
atmosphériques. En certains endroits on observe des bandes de quartzites formant une 
roche dense très-compacte. En quittant ces collines on entre dans une région extrème- 
ment tourmentée ; les couches sont violemment dérangées par place ; les unes relevées 
de 45°, les autres verticales ; celles-ci courant à l'Est, celles-là au Nord, d’autres s’irradiant 
comme les rayons d’une roue. Les talschistes sont surtout fortement plissés en zigzag. 
De Vien Chang à Luang Prabang, pendant plus de 150 milles, nous avons observé les 
mêmes dislocations des couches, qui ont été fortement déplacées, bouleversées et recour- 
bées en divers sens. Dans un carré de 500 mètres de côté nous avons pu compter vingt 
et trente directions et inelinaisons différentes. Il s’est produit de nombreuses surfaces de 
glissement dont les grès surtout ont conservé les traces : nous avons vu des petites failles 
ainsi produites entre deux couches voisines. 

En contact avec des grès phylladifères à très-fins grains, nous avons trouvé des phyl- 
lades lustrées, noiratres et brillantes. Le capitaine Blakiston ! a remarqué que « lorsque 
« du charbon se trouve près des grès, certaines parties de la roche, comme si elles 
« avaient été exposées à l’action de l’eau et de l'atmosphère. étaient lustrées à la sur- 
« face et polies comme avec une substance grasse... Partout où l’on trouve cette appa- 


100 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


« rence du grès dans le Yang-tse supérieur, on est sûr de rencontrer du charbon. » Cette 
opinion de Blakiston semble recevoir iei une confirmation, car nous avons trouvé un 
morceau d’anthracite dans la pagode du village de Coksay où Muong Nan. Nous n’avons 
pu savoir d’où provenait ce combustible ; les indigènes, comme toujours, n’ont rien voulu 
dire; mais fout nous porte à croire qu’il en existe des gisements dans le pays. 

Ici, comme dans toutes les contrées métamorphiques, les métaux sont très-abondants. 
Dans la province de Muong Leui il existe des gisements de minerais de cuivre, de 
plomb, d’étain, d’antimoine, de cuivre argentifère et de magnétite : le premier et le der- 
nier de ces métaux sont seuls exploités. Le plomb n’est nulle part l'objet d’extractions 
considérables ; le pêcheur des bords du fleuve va lui-même à la mine extraire le plomb 
nécessaire pour garnir ses filets. Les deux gisements de cuivre les plus renommés sont 
celui de Pou Kieo, au Sud de Muong Leui, et celui dont nous avons déjà parlé sur les 
confins du Laos et de la Cochinchine. On üre aussi du Tong-king du soufre cristallisé, 
dont nous avons vu des échantillons sur le marché de Luang Prabang. 

Revenons aux roches que nous avons observées sur les bords du fleuve. Les grès dont 
nous avons parlé plus haut sont supportés par des schistes phylladiens calcarifères ver- 
dâtres, jaunätres, rougeatres, formant dans le lit du fleuve de grandes surfaces rubanées : 
ces schistes reposent à leur tour sur des schistes argileux fissiles plus ou moins épais. Du 
porphyre quartzifère rougeatre compose une partie des collines qui encadrent le cours 
d’eau que nous suivons. Le lit du Mekong est formé souvent presque exclusivement 
de talschistes plissés et contournés, au milieu desquels nous avons observé de nombreux 
bancs de phtanite et de lydienne : les couches de cette dernière roche presque verticales 
courent du Sud-Ouestau Nord-Est. En relation avec ces talschistes, sont des couches d’eu- 
ritine plus ou moins feuilletées, dont plusieurs parties renferment de petites parcelles 
roulées d’une substance d’un vert jaunätre, paraissant se rapprocher beaucoup du 7ade. 
Une roche verte, translucide sur les bords, rayée très-difficilement par l'acier, à cassure 
esquilleuse, parait subordonnée à l’euritine. Elle est légèrement fusible au chalumeau. 

De nombreux filons de quartz traversent les talschistes et les euritines. 

Après avoir quitté ces roches métamorphiques, nous retrouvons des grès gris bruns, 
stratifiés par couches tabulaires de 0",10 à 0",15 d'épaisseur, alternant avec des phyl- 
lades ; puis viennent des calschistes violets et verdatres reposant eux-mêmes sur des 
calcaires. D'autres roches ont encore été observées dans le lit du fleuve, mais roulées et 
ne pouvant se rattacher sûrement à aucune des formations dont nous venons de parler : 
ce sont des cailloux de jaspe rougeûtre veiné de blanc, de la pegmatite rosée, des quartz 
cariés, des quartzites rougeàtres, des fragments d’un poudingue phylladien à pâte ser- 
pentineuse renfermant des nodules calcaires, du porphyre à pâte rouge contenant de 
beaux et grands cristaux blancs de feldspath et un porphyre moins beau d’un violet 
foncé. Ces porphyres ont été recueillis dans le lit d’un torrent un peu au-dessus de 
Luang Prabang. 


1 Five months on the Yang-Tse, p. 133, in-8, avec carte et pl. London, 1862. 


ITINÉRAIRE. 101 


Le calcaire constitue à lui seul toutes les montagnes un peu élevées de la contrée, 
et elles sont nombreuses. Elles forment une multitude de cônes à sommets escarpés don- 
nant au pays une physionomie toute particulière. La texture du calcaire n’est pas partout 
la même : de semi-cristalline elle devient grenue, lamellaire, fibreuse quelquefois, et 
souvent elle est coupée par des veines de cristaux de carbonate de chaux spathique assez 
volumineux. Les couleurs sont aussi très-variées et donnent lieu à des marbres qui 
seraient estimés si le grain de la roche était plus fin et plus uniforme. Il y a des marbres 
noirs, des marbres violets, jaunätres, verts-imon, blancs-fumés, roses, etc., et un 
grand nombre de bigarrés par le mélange de deux ou de plusieurs des couleurs précé- 
dentes. Soit pendant le cours du voyage, soit pendant notre séjour à Luang Prabang, nous 
avons visité un grand nombre de belles et spacieuses cavernes ou grottes très-abondantes 
dans les rochers calcaires ; mais jamais nous n’y avons trouvé des débris fossiles de quel- 
que nature que ce soit. Il est utile de dire que jamais il ne nous a été possible de fouiller 
le sol de ces cavernes. 

Jusqu'à ce jour, 25 mai 1867, il nous a été permis de recueillir des échantillons 
des roches que nous avons vues; ces échantillons sont petits, il est vrai, mais cepen- 
dant assez gros pour en faire l'analyse et contrôler notre appréciation qui pourrait être 
erronée. Désormais la chose ne sera plus possible ; les transports deviennent de plus 
en plus difficiles et fort coùteux pour notre petite bourse. Nous abandonnons une partie 
de nos vêtements. 

Dans les collines en face de Luang Prabang, à 10 ou 12 kilomètres de la rive droite 
du fleuve, on rencontre, traversant des schistes, de nombreuses veines de quartz conte- 
nant souvent des cristaux de cette dernière roche d’une grande Himpidité à leur extrémité 
libre, que les indigènes ont jadis recherchés comme objet d'ornement et de luxe; au- 
Jjourd’hui ils n’y attachent aucune valeur. On trouverait aussi dans les environs, mais plus 
au Nord, des rognons de calcédoine. 

Le 25 mai 1867 nous quittions Luang Prabang pour reprendre le fleuve et remonter 
vers le Nord. Les eaux avaient grossi un peu, mais ne couvraient pas encore les nom- 
breux bancs de roches dans lesquels elles sont complétement encaissées pendant la 
saison sèche. La physionomie du pays reste la même que plus bas ; on ne voit que mon- 
lagnes et collines plus ou moins élevées s’avançant jusque dans le Mekong. La nature 
des roches n’est pas changée non plus ; ce sont toujours des calcaires, des schistes, des 
grés, etc., etc. Les poudingues sont en plus grande abondance et plus grossiers ; ils 
renferment souvent des blocs d’un mètre cube. 

Six Jours après notre départ de Luang Prabang M. de Carné et moi fumes détachés 
momentanément de la Commission pour aller visiter, à quelques lieues de la rive droite 
du fleuve des phénomènes volcaniques qui, au dire des iudigènes, semblaient devoir 


être fort curieux. 
Le 31 mars nous partimes de Ban Tanoun à 5 heures 1/2 du matin. Nous remon- 


lames d’abord vers le Sud-Ouest, en suivant le lit du Nam Noun ; puis, tournant vers le 
Sud et franchissant une petite chaine de montagnes, nous descendimes vers le Nam 


102 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Tap que nous remontimes au Sud-Ouest, pendant plus de deux heures. En quittant 
cette dernière rivière, nous nous dirigeames au Sud-Sud-Ouest, et franchimes une pre- 
mière série de montagnes qui nous séparait du Nam Tong, puis une seconde chaîne plus 
élevée que la précédente, d’où nous descendimes dans la jolie vallée de Muong Luoc, 
terme de notre première journée. (Voir la carte itinéraire n° 6.) 

En résumé nous avons marché huit heures dans la direction générale Sud-Sud- 
Ouest, franchi trois petites chaînes de montagnes, et nous nous sommes élevés sur la 
dernière à 4,000 mètres environ au-dessus du niveau du fleuve. 

Pendant ce parcours nous n'avons rien vu de parüculier à noter ; la couche exté- 
rieure des montagnes est constituée par de l'argile, de la marne rougeûtre et un grès 


crossier de désagrégation facile, le tout recouvert par une épaisse couche de terre 


d 


a 2 


végétale où poussent, entr'autres arbres, des pins d'assez grandes dimensions. 

I est fâcheux que les habitants de ces contrées montagneuses incendient annuel- 
lement une partie de ces forêts pour la culture du riz. Le pin, qui par sa nature rési- 
neuse est facilement inflammable, ne résiste pas à ce mode de destruction; aussi ne le 
voit-on en grande quantité que sur les crêtes des montagnes. 

Les torrents et les rivières roulent les mêmes roches que le fleuve, des schistes plus 
ou moins cristallins, des grès et des débris de quartz. Nous n'avons pas vu le calcaire 
apparaitre à la surface du sol, si ce n’est près de l'embouchure du Nam Tap. 

Le 1* juin nous nous acheminämes de bonne heure vers les montagnes de feu 
(phou fai), comme les appellent les indigènes. A peine avions-nous marché deux heures 
que nous étions sur le prineipal emplacement du phénomène, désappointés de ne voir que 
des fumarolles là où nous comptions rencontrer de vastes voleans en pleine activité. Ceci 
nous prouve une fois encore qu'on ne peut nullement se fier aux renseignements fournis 
par les Laotiens ; les uns amoindrissent les faits, les autres les exagèrent, etle plus grand 
nombre les nie pour ne pas être invité à les montrer. 

Les fumarolles sont au nombre de deux, distantes Fune de l’autre de quatre à cinq 
kilomètres, toutes deux situées au milieu de collines argileuses jaunâtres. La plus grande 
court Nord et Sud, et oceupe actuellement une surface de 700 à 800 mètres de long 
sur 300 mètres de large. Elle n’est point fixe ; elle chemine lentement vers le Sud 
et a déjà parcouru plusieurs kilomètres. Les feux s’éteignent à mesure que la fumarolle 
avance ; les crevasses se comblent, et la végétation, un moment disparue, reprend son 
activité ordinaire. Sous l'influence du feu souterrain les arbres meurent, la terre argileuse 
de jaune devient blanchätre, se fendille en une multitude de erevasses très-rapprochées 
les unes des autres, par lesquelles s’échappent des vapeurs et des gaz, puis s'effondre 
d’une dizaine de mètres, comme si un vide se produisait par une combustion intérieure. 
La fumarolle laisse un vallon après elle. Les produits qui se dégagent par les fissures 
se composent en grande partie de vapeur d’eau, d’acides sulfureux, carbonique et peut- 
être sulfhydrique. Un morceau de bois plongé dans l’une de ces crevasses s’enflamme 
rapidement. On ne peut séjourner longtemps sur le lieu du phénomène sans ressentir 
un malaise vague. Diverses substances entrainées ou sublimées viennent se déposer 


ITINÉRAIRE. 103 
aux lèvres et contre les parois des crevasses et des anfractuosités ; les indigènes y 
recueillent du soufre en assez grande quantité, et une poudre blanche fine que nous 
croyons être un sel de plomb. Le sol est chaud et résonne sous le pied comme si une 
voüte existait au-dessous. En approchant l'oreille du sol et en prétant une grande 
attention, l’on entend dans l’intérieur de la terre un bruit sourd très-éloigné. Ce bruit 
serait souvent plus sensible qu'au moment où nous lavons entendu. Les jours où il 
vente un peu, l’odorat perçoit à plusieurs kilomètres, sous le vent de la fumarolle, une 
odeur carbono-sulfureuse absolument analogue à celle qui se dégage des hauts-four- 
neaux alimentés par la houille; deux kilomètres avant d'arriver aux fumarolles, ces 
vapeurs nous en ont annoncé la présence. 

Le seconde fumarolle est plus petite que la première, mais elle présente les 
mêmes phénomènes ; placée sur le versant Sud-Ouest d’une colline. elle court dans la 
direction du Nord-Est. 

Du village de Muong Luoc on relève la grande fumarolle (phou fai niai) ‘au $S. 80° 0. 
et la petite fumarolle (phou fai noï) au N. 35° O0. La première est à neuf kilomètres du 
village ; quand à la seconde, nous n’en avons pas estimé la distance : pour en déterminer 
la position, nous l'avons relevée au N. 35° E. de la grande fumarolle. 

Revenons au fleuve au point où nous l’avons quitté. De Ban Tanoun à Xieng Khong 
il existe des intervalles considérables où les grès ont entièrement disparu, mais en 
revanche les filons quartzeux se sont multipliés et coupent les schistes en tous sens. 
L’épaisseur de ces filons est généralement- très-mince et ne dépasse pas 0",10. Le 
calcaire aussi devient plus rare à mesure que l’on remonte le fleuve. Il forme à 
lui seul des montagnes et des pies escarpés surgissant au milieu des schistes et 
des grès, aux environs de Luang Prabang jusqu'au Nam Hou ; mais à partir de cette 
rivière, il disparait peu à peu de la surface du sol: les sommets des montagnes, qui 
avec le caleaire étaient nus et anguleux, deviennent arrondis et se couvrent de vé- 
gétation. 

Au pied du village de Xieng Khong nous avons observé, adossé à la berge du fleuve, 
un monticule de lave de 50 à 60 mètres de diamètre à sa base apparente, et dont le 
sommet n’atteint pas la hauteur de la berge qui en cet endroit était de 11 mètres au-dessus 
des eaux, au moment de notre passage (10 juin). La lave est noire et très-compacte, 
quoique fendillée à la surface. Elle ne paraît pas avoir coulé. 

Les collines et les montagnes environnant Xieng Khong sont constituées par des grès 
psammites à mica blanc et par des roches schisto-argileuses traversées par des veines de 
quartz. Dans les lits des divers torrents on rencontre une grande quantité de débris d’ar- 
gilophyre, ce qui nous porte à croire que, outre les grès, des roches porphyriques 
forment des collines entières dont nous ne voyons que la couche extérieure de terre 
argilo-végétale provenant de leur décomposition. 

A quelques milles au-dessus de Xieng Khong, encore dans le lit du fleuve, lon trouve 


1 Phou fai niai veut dire montagne du grand feu ; phou fai noi veul dire montagne du petit feu. 


104 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


deux monticules de lave, peu éloignés l’un de l’autre, analogues à celui dont nous venons 
de parler. Ces amas semisphériques sont enveloppés de toutes parts par des schistes 
métamorphiques diversement colorés. 

Le fleuve conserve toujours la même physionomie ; son lit est tortueux, encombré de 
blocs de grès ou d’autres roches, resserré entre une mulütude de collines qui semblent 
se le renvoyer l’une à l’autre. Cependant, à 20 milles au-dessus de Xieng Khong, il tra- 
verse une belle et riche vallée d’alluvions où fut autrefois Xieng Sèn; mais on ne 
tarde pas à le retrouver encaissé comme précédemment. De la plaine de Xieng Sèn 
jusqu'au moment où nous quittons le fleuve, 25 milles plus haut, les grès, devenus rares 
un moment, sont en grande abondance; ils encombrent le lit du fleuve; ils sont grossiers, 
quartzeux, avec de nombreuses et larges paillettes de mica noirûtre. 

A 100 mètres environ en aval du débarcadère de Muong Lim, sur la rive droite du 
fleuve, nous avons vu un filon de roche verdatre, finement poreuse, que nous pensons être 
du trapp. Ce filon monte verticalement à travers les grès qu'il dépasse, court E. et 0. et 
mesure 0,38 dépaisseur. Nous n’en avons pas rencontré de semblable dans les environs. 

Les difficultés de navigation devenant de plus en plus grandes, nous abandonnons le 
fleuve au débarcadère de Muong Lim, pour suivre désormais la voie de terre. 

Notre première étape a été de nous rendre à Muong Lim, situé à 16 ou 18 kilomètres 
du débarcadère, dans une vallée séparée du fleuve par une chaine de collines de 500 
à 600 mètres d’élevation. Ces collines sont constituées par des schistes phylladiens ealca- 
rifères, que l’on ne trouve qu'à leur base dans le lit des torrents, et par un grès psammite 
grossier, à mica blanc, très-abondant, et dont les grains sont mal liés par un ciment argi- 
leux. Une épaisse couche de terre argilo-végétale recouvre les roches que nous venons de 
nommer. 

De Muong Lim nous suivons une vallée étroite à peu près parallèle au fleuve, bordée 
de montagnes et de collines semblables, quant à leur forme et quant à leur constitution, 
à celles que nous avons déjà vues. On rencontre sur la route de nombreux villages, dont 
les plus importants sont Paléo et Siemlap. Près de ce dernier, nous rejoignons le fleuve 
que nous ne perdons plus de vue jusqu’à Sop Yong, c’est-à-dire pendant 40 kilomètres. 
Entre Siemlap et Sop Yong, à 10 kilomètres du premier village, on rencontre, traversant 
le chemin pour se jeter dans le fleuve, un courant d’eau chaude fortement sulfureuse. 
La température est de + 86° à la source ; celle-ci sourd à 300 mètres environ de la rive 
droite du fleuve, au milieu de blocs de grès détachés de la montagne voisine. 

Ces sources thermales sont très-nombreuses dans la contrée. Des indigènes prétendent 
qu'il en existe dont l’eau serait jaillissante à la manière des geysers d'Islande; les noms 
qu'ils leur donnent semblent indiquer ce fait. 

A Sop Yong, nous nous éloignons de nouveau du fleuve pour nous rendre à Ban Pas- 
sang et à Muong Vong, deux villages situés aux extrémités opposées d’une vaste et riche 
vallée d’alluvions. Près du second de ces villages nous trouvons encore dans un bourg, 
appelé Ban B6, des sources thermales analogues aux précédentes. L'eau surgit en très- 
petite quantité par une multitude de points sur une surface de 1,500 à 2,000 mètres car- 


ITINÉRAIRE. 105 


rés. La température varie selon les sourees entre + 74° et + 82°. Les indigènes utilisent 
les propriétés thermales de ces eaux pour combaltre les rhumatismes et les affections cu- 
fanées, et en séparent une portion du soufre qu'elles contiennent. 

Le 8 septembre, nous quittons Muong Yong pour continuer notre marche à travers le 
Laos Birman et rejoindre le Yun-nan à Se-mao. Nous traversons les territoires de Muong 
You, de Muong Long et de Xieng Hong avant d'atteindre le Mekong que nous avions 
laissé à Sop Yong. L'intérêt géologique reste le même; nous voyons de belles et fertiles 
vallées d’alluvions séparées par des chaînes montagneuses plus ou moins élevées et en 
général formées, comme les précédentes, de minces couches de grès quartzeux et de 
schistes de couleurs variées facilement décomposés par les influences atmosphériques en 
une terre argileuse jaune ou rougeätre qui rend les chemins glissants et impraticables 
les jours de pluie. Le quartz en cristaux ou en veines grenues est très-répandu au milieu 
des schistes; on le rencontre parfois en blocs volumineux liés par un ciment siliceux 
et formant des brèches. 

Entre Muong You et Muong Long nous avons revu, sur les bords du Nam Leu, le 
calcaire cristallin où compacte si abondant dans les environs de Luang Prabang et au- 
dessous; il est là à l’état de marbre noir veiné de blanc, de marbre jaunätre, et de marbre 
blanc fumé moucheté de noir. 

A Muong Long et dans la plupart des villages que nous avons traversés jusqu’à Xieng 
Hong, on trouve dans les pagodes et chez les particuliers de belles plaques d’ardoise que 
les indigènes utilisent pour les inscriptions et le dallage des pagodes et des tombeaux. Les 
plaques sont assez grandes; nous en avons mesuré plusieurs qui taillées en rectangle 
avaient 1,40 de hauteur, sur 0",55 de largeur et 0,05 à 0",08 d'épaisseur. Nous ne 
connaissons pas les carrières d’où on les retire ; seulement, nous avons souvent rencontré 
dans le fleuve et les rivières des gisements qui peuvent facilement être exploités. La cou- 
leur de ces phyllades varie du cendré au noir en passant par toutes les nuances intermé- 
diaires. 

Pendant le court séjour que nous avons fait à Muong You, le roi de cette province 
a mis à notre disposition un certain nombre de roches et de minerais qui se trouvent 
dans le pays qu'il administre. Le fer est surtout abondant. Ce métal se présente sous trois 
formes principales : le fer pyriteux, le fer carbonaté et l’oxyde de fer hydraté en roche. 
Les deux derniers minerais renferment le métal en très-forte proportion, et sont très- 
répandus. 

Il existe aussi des minerais de cuivre ordinaire, de cuivre argentifère, d’antimoine, 
de plomb et probablement d’étain. On recueille l'or dans le lit des rivières et des tor- 
rents. La plupart de ces minerais sont extraits pour les besoins du pays, à l’exception de celui 
d'argent que l’on semble devoir tenir secret à cause des exigences de la cour d’Ava pour 
l'exploitation des métaux précieux. On nous a montré, en outre, des grains de grenat, qui 
ne sont pas rares au milieu de ces terrains, et diverses roches siliceuses, quartz, cal- 
cédoines, agates, de nulle valeur. 


La région que nous avons traversée de Muong Lim à Xieng Hong est dominée par un 
Il. 14 


106 GEOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


plateau central élevé de 1,200 à 1,300 mètres au-dessus du niveau des mers; c’est le 
plateau de Xieng Tong sur lequel est batie la ville de ce nom, résidence habituelle du 
chef principal des Shans. 

Des points culminants des montagnes de Xieng Tong l'œil découvre une mer de 
sommets mamelonnés, à physionomie uniforme, s'étendant sans limite vers tous les points 
de l'horizon. La constitution géologique est la même que plus bas : grès, schistes et cal- 
caires cristallins composant le sous-sol. A Xieng Tong, comme dans tous les endroits 
où nous avons vu des montagnes élevées, les calcaires soutiennent et traversent les 
grès; ils forment généralement des pies ou des crêtes escarpées d’où l’on tire de la pierre 
à chaux et des marbres divers dont le plus commun est de couleur bleuâtre. On ren- 
contre aussi dans la même région une stéalite verdaltre, très-onctueuse au toucher, em- 
ployée par les indigènes pour écrire sur les ardoises et les planchettes. 

Le pays est très-riche en métaux. Les sourees chaudes sulfureuses y sont très-abon- 
dantes et très-nombreuses. Outre leur utilité au point de vue médical, on en retire du 
soufre en faisant passer l’eau par une multitude de tubes en bambou ou à travers des 
branchages : l’eau en se refroidissant abandonne une partie de son soufre sur les 
parois des tubes ou des branchages. Le fer est exploité en plusieurs endroits pour les 
besoins ordinaires de l’agriculture; mais il existe une peuplade de montagnards qui 
s’est livrée à une industrie particulière que l'on s'étonne de rencontrer en pareils lieux 
et chez des gens à peu près sauvages. Nous voulons parler de la fabrication d'armes à feu. 
Ces sauvages imitent assez fidèlement les longs et grossiers fusils à silex que les Anglais 
vendent en si grande quantité dans l'Afrique centrale et dans l’Indo-Chine. Le calibre 
du canon est d’un petit diamètre, foré au moyen d’une mèche en fer; les diverses pièces 
de la platine sont en fer forgé, les garnitures en cuivre ; le bois est la pièce de l’arme la 
mieux faite: ils la colorent en rouge brique. Tous ces fusils sont à un seul canon et 
valent dans le pays de 10 à 12 francs. 

Le 7 octobre 1867 nous franchissons le Mekong à Xieng Hong pour nous rendre à 
Se-mao, première ville absolument chinoise que nous devons atteindre. 

Le sol de la rive gauche du fleuve est peut-être plus tourmenté, s’il est possible, que 
celui de la rive droite ; les pics, plus nombreux et plus rapprochés que de l’autre côté du 
fleuve, sont séparés par d’étroits et profonds ravins que les eaux ont creusés dans des 
schistes et des grès variés, facilement désagrégés et entraînés par les courants pour former 
les immenses alluvions des embouchures du Mekong. Cette disposition du sol, ces 
ascensions pénibles suivies de descentes non moins fatigantes, par des chemins à peine 
tracés et souvent dangereux, rendent les communications difficiles et la majeure partie 
de la contrée peu habitable. Les vallons et les vallées sont bien rares; sur la route suivie 
nous n'avons rencontré avant Se-mao que les petites vallées de Muong Yang et de Xieng 
Neua et le bas-fond de Muong Pang. 

De distance en distance, on aperçoit quelques montagnes calcaires nues et escarpées. 
Ces calcaires sont en général bleuätres, compactes ou eristallins. Entre le fleuve et 
Muong Vang les schistes sont gris de cendre et talqueux, difficilement creusés par les 


ITINÉRAIRE. 107 


eaux; partout ailleurs ils sont de couleurs très-variées, le plus souvent bruns, ou rubanés, 
jaunes, rouges, violets, facilement désagrégés par les influences atmosphériques, ce 
qui rend les routes non empierrées à peu près impraticables pendant la saison des pluies : 
le sol devient boueux dans la plaine, et l'argile des pentes glissante comme la glace. 
Nous en avons fait la triste expérience pendant quatre mois. 

Les grès sont de deux sortes : l’un, jaune, grossier, mal lié; l’autre, rougetre, dense. 
à grains fins et uniformes, très-propre aux constructions des maisons et des pagodes : 
nous en avons vu des morceaux qui mesuraient jusqu'à 5 et 6 mètres de longueur : il 
sert surtout à faire des colonnes supportant le chien symbolique préposé à la garde des 
tombeaux chinois ; les champs des morts en sont pleins. 

Autour de Se-mao le grès rouge et le calcaire sont les deux roches dominantes. 

Les fossiles sont toujours très-rares; nous n'avons rien trouvé dans les grès, ni les 
schistes; nous n'avons remarqué qu'une portion de coquille dans le socle en calcaire 
compacte d’un monstre sculpté. L’empreinte comparée de ce fossile nous porte à croire 
que c’est le spirigerina reticularis de la couche dévonienne superficielle. 

La chaudronnerie est la seule industrie métallurgique de Se-mao ; le martelage est 
peu uniforme et les divers ustensiles grossièrement faits; mais ils suffisent aux besoins 
de la population. Le cuivre employé n’est point extrait dans les environs; il vient tantôt 
de Sin-long Tehang, tantôt d’un autre point, selon que l’état de guerre dans lequel se 
trouve aujourd'hui la province laisse libre la route de telle ou telle des nombreuses 
mines de cuivre que possède le Yun-nan. 

Nous avons trouvé dans les pharmacies chinoises des échantillons de cinabre qu’on 
nous à dit venir de Ta-ly fou. Nous n’avons pu savoir si on le recueillait près de Ta-lv, ou 
bien s’il était apporté d’une autre contrée sur le grand marché de cette ville. 

Au delà de Se-mao, en se rapprochant du Song Koi, les montagnes sont plus élevées 
que précédemment et se présentent sous forme de chaines avant la direction Est et Ouest 
assez bien indiquée. Les schistes deviennent rares, les grès, le rouge surtout, persistent 
et le calcaire est de plus en plus abondant. Cette portion de notre route, v compris notre 
séjour à Ta-lan, nous a particulièrement intéressés. 

Le lendemain de notre départ de Se-mao nous visitimes entre Na-cou-ly et Ho-boung un 
gisement carbonifère anthraciteux qui parait être très-abondant. Dans les mouvements du 
sol les couches carbonifères ont été redressées à peu près verticalement, de sorte que’Iles 
présentent leurs tranches en  affleurement. À 6 kilomètres de là sont les salines de 
Ho-boung et à deux journées de marche plus loin celles de Mo-he. Nous parlerons de ces 
gisements dans le chapitre qui traitera des minéraux utiles. 

Entre les deux salines se trouve la ville fortifiée de Pou-eul fou, bâtie dans une belle 
vallée d’alluvions entourée de hautes montagnes argileuses ou calcaires, sur lesquelles 
on cultive le thé réputé le meilleur de la Chine. 

Avant d'atteindre le Song Koi nous traversons deux de ses principaux affluents très- 
profondément encaissés et séparés par un plateau argileux jaunâtre, percé par de nom- 
breuses pointes calcaires, sur lequel nous trouvons. pour la première fois, à peu prés 


108 GEÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


toutes les productions des pays tempérés. L’altitude moyenne de ce plateau est estimée 
à 1,400 mètres. 

Jusqu'à Yuen-kiang, sur les bords du Song Koiï, nous n’avons rien vu de bien 
important, si ce n'est les mines d’or argentifère situées à environ 30 kilomètres au 
nord de Ta-lan. Les précieux métaux se trouvent dans de la serpentine injectée dans 
des failles calcaires, tout à fait sur la crête d’une haute montagne. (Voir le chapitre IV.) 

La constitution géologique de l’espace parcouru entre Pou-eul fou est la même que 
précédemment : les calcaires dominent, puis viennent les grès et les schistes. La route 
a été des plus accidentées et des plus fatigantes ; les montagnes sont élevées et froides, 
les ravins fréquents et d’une profondeur considérable ; les eaux des torrents et des 
rivières coulent étroitement encaissées entre deux murailles de roches taillées à pic et 
d’un accès difficile. On peut en donner une idée par le temps que nous avons mis pour 
descendre du village de Mong-lang à Yuen-kiang : il a fallu six heures de marche pour 
atteindre cette dernière ville que le matin nous voyions à nos pieds. La différence de 
niveau entre ces deux points est d'environ 1,000 mètres seulement ; mais la différence 
de température est immense. En haut, les arbres rabougris de la zone tempérée; sur 
les bords du Song Koiï, le bananier, les palmiers et tout ce qui accompagne la luxu- 
riante végétation des tropiques. 

Trois Jours de séjour à Yuen-kiang nous ont permis d'aller visiter le vaste gisement 
de cuivre de Sin-long tchang, à 25 kilomètres au Nord de Yuen-kiang, et les mines de 
fer de Kang-houa, près de Kang-tchong-pa. Ces dernières sont très-abondantes et 
riches en métal. Leur proximité du Song Koi qui est la grande voie commerciale entre 
l'intérieur du Yun-nan et les ports du Tong-king donne à ces mines une valeur relative- 
ment importante. LA ÉTSTRUSES 

La ville de Yuen-kiang est bâtie sur les bords du Song Koi au milieu d'une plaine 
qui fut autrefois le fond d’un lac. Chaque torrent qui se versait dans ce lac avait 
amoncelé à son embouchure un amas d’alluvions considérables, qui aujourd’hui coupées 
par le Song Koi forment des berges taillées à pic de 30 à 40 mètres de hauteur sur le 
flanc desquelles on peut lire le nombre des inondations par les couches périodiques de 
marnes et de galets amoncelées les unes au-dessus des autres. En aval de Yuen-kiang le 
fleuve coule entre deux rochers à pie, ancienne digue du lac usée par les eaux qui 
se sont frayé un passage. : 

Le calcaire bleuâtre, qui partout ailleurs était le calcaire dominant, est remplacé, sur les 
bords du Song Koï, par des marbres blancs légèrement fumés, d’un beau grain, par des 
marbres blancs et roses, et surtout par des brèches d’une très-grande beauté : ce sont des 
morceaux de marbres de couleurs, de formes et de grandeurs variées, noyés dans une pâte 
passant du rose tendre au rouge de sang. Cette dernière roche encombre le lit du fleuve 
el forme presque exclusivement la chaîne de la rive gauche de Yuen-Kiang au Tong-king. 

Si la descente de Mong-lang sur les bords du Song Koi a été longue et pénible, les 
ascensions qu'il nous à fallu faire sur la rive opposée pour sortir de ee bassin n’ont pas 
élé moins fatigantes ; mais nous avons été grandement dédommagés de nos fatigues 


ITINÉRAIRE. 109 


par la vue d’un pays à physionomie nouvelle. La chaîne qui nous a coûté tant de peine 
à gravir présente de ce côté une pente douce ; les montagnes, qui nous paraissaient si 
hautes vues des bords du fleuve, semblent s'être aplanies : nous sommes sur un vaste 
plateau semé de nombreux lacs autour desquels s’est groupée une population douce et la- 
borieuse. La ville principale de cette portion de province est Lin-ngan fou, bâtie comme 
Yuen-kiang sur l'emplacement d’un ancien lac, et adossée à des collines d’alluvions qui 
recouvrent un abondant gisement de lignite. lei la digue du lac a élé coupée par la main 
des hommes. Les seules exploitations importantes dont nous ayons entendu parler dans 
les environs, sont les mines de plomb argentifère de Mong-tse à quatre ou cinq journées 
de marche à l'Est de Lin-ngan fou. Le gisement serait considérable et d’une exploitation 
très-facile ; il est cité dans toute la Chine pour la richesse de son minerai. 

En quittant Lin-ngan fou nous traversons le beau lac de Che-pin, de 15 kilomètres 
de diamètre, encadré au Nord par des montagnes calcaires, et au Sud par des collines 
schisteuses d’où l’on retire d’assez grandes plaques d’ardoise violette. Dans la ville même 
de Che-pin plusieurs sources fortement chargées d'acide carbonique viennent sourdre 
dans l'enceinte d’une riche pagode élevée sans doute aux divinités protectrices de ces 
eaux médicinales. 

De Che-pin nous marchons le plus directement possible vers la capitale du Yun- 
nan où nous arrivons quinze Jours après. Cette route a été beaucoup moins fatigante 
qu'aucune de celles que nous avons suivies depuis que nous avons quitté le Mekong ; 
les collines et les montagnes sont relativement beaucoup moins élevées que précédem- 
ment, les pentes sont douces, les chemins meilleurs, et nulle part nous ne rencontrons 
des rivières encaissées comme le Song Koi et ses affluents. Le calcaire compacte 
bleuätre est la roche dominante : il forme exclusivement les hautes montagnes et retient 
les eaux des lacs de Tong-hay, de Kiang-tchouen, de Tehing-kiang fou et de Yun-nan : 
les grès et les schistes n'apparaissent que sur les flancs des montagnes où ils sont d’ail- 
leurs recouverts d’une épaisse couche de terre végétale. 

Entre Che-pin et Tong-hay nous visitons en passant les fonderies et les forges de 
Lou-nan et de Lang-pong-ly. Les riches minerais de fer que l’on y exploite sont en grande 
abondance et à peu de distance de ces deux points. 

Les lacs que nous venons de nommer, placés à un niveau supérieur à celui 
de Che-pin, sont tous plus grands que ce dernier lac, ceux de Tehing-kiang fou et 
de Yun-nan mesurent de 50 à 60 kilomètres dans leur plus grande dimension. Ces lacs 
sont très-rapprochés les uns des autres, deux d’entre eux, celui de Kiang-tchouen et celui 
de Tehing-kiang fou, communiquent même par un canal artificiel de 1,700 mètres de 
long à travers une colline de grès quartzeux. Ces deux derniers lacs n'auraient, dit-on, 
pas d’issue, les eaux qu'ils reçoivent ne dépasseraient pas un certain niveau et filtreraient 
à travers les roches calcaires qui les retiennent. 

Des terres alluviales de grande étendue et d’une fertilité remarquable entourent les 
lacs que nous venons de voir et nourriraient une population bien plus considérable 
que celle que nous avons rencontrée. La plaine de Yun-nan peut, à elle seule, recevoir 


110 GEÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


plusieurs millions de Chinois : les eaux du lac la couvraient en partie autrefois, mais un 
canal creusé pour déverser les eaux dans le Yang-tse Kiang a livré aux cultivateurs une 
surface immense de riches terres. 

Nous trouvons à Yun-nan un missionnaire français qui nous a donné des renseigne- 
ments précieux sur les richesses minérales de cette province etde la partie du Se-tchouen 
qui luiest contiguë ; nous en parlerons longuement au chapitre qui traitera de ces matières. 
La principale roche minérale est la houille que l’on rencontre à chaque instant et dont 
le bassin connu s'étend depuis les montagnes de Li-kiang, sur les frontières du Tibet, 
jusqu'à Nankin près de l'embouchure de l'immense Yang-tse Kiang, c’est-à-dire sur 
une surface de 800 à 900 lieues de diamètre. 

Entre la capitale du Yun-nan et le Yang-tse Kiang le sol est aussi tourmenté que sur 
les bords du Song Koï. Les chemins sont montueux et horriblement mauvais, les cours 
d'eau profondément encaissés, et pour comble de nos misères nous traversons cette 
contrée au moment le plus rigouréux de la saison d'hiver, luttant contre un vent violent 
du Nord-Est, qui nous jette au visage des flocons de neige ou une pluie glacée. 

La constitution géologique des lieux que nous avons observés à Yun-nan, à Tong- 
tchouen et dans les divers endroits qui séparent ces points de Souy-tcheou fou, est partout 
identique, nous ne trouvons jamais que trois roches : des calcaires compactes ou eris- 
lallins, des schistes bruns qui manquent quelquefois et des grès variant du rouge au jaune. 
Les couches carbonifères se trouvent habituellement entre les schistes et un grès gris 
semblable à celui qui forme le toit de la couche carbono-cuivreuse de Bassae. Sur les 
plateaux élevés il n'existe aucun cours d’eau, l’eau des pluies disparaît dans un nombre 
incalculable d’entonnoirs sans que l’on sache le plus souvent où elle va sortir. 

Les quatre mois que nous avons mis à parcourir la contrée dont nous venons de 
tracer le tableau géologique (janvier, février, mars el avril), ont surtout été consacrés à 
visiter des gisements et des exploitations minérales et à nous renseigner sur les mines 
que nous n'avons pu voir. Les renseignements qui nous ont été communiqués par 
M. Thorel sur l’excursion de Ta-ly nous prouvent que les formations de la partie Ouest 
de la province sont de même nature que celles que nous avons déjà décrites. 

Nos observations personnelles s'arrêtent à Souy-tcheou fou sur les bords du Yang-tse 
Kiang : là nous entrions dans une région déjà connue et explorée. Nous nous embar- 
quâmes sur le fleuve jusqu'à Shang-haï, ne descendant à terre que pour renouveler 
nos provisions de bouche ; nos observations ont donc été très-incomplètes dans cette 
partie de notre voyage, aussi nous contenterons-nous d'analyser le travail du capitaine 
Blakiston et celui de l'Américain Pumpelly. 

Le premier de ces voyageurs à remonté le fleuve jusqu'à Pin-chan hien et a parfai- 
tement étudié le cours supérieur du Yang-tse Kiang ; le géologue américain a en parte 
contrôlé par lui-même les observations de Blakiston, mais, son travail étant incomplet, 
nous apprenons avec plaisir qu’un géologue allemand, M. Richtofen, est en ce moment 
occupé à faire la géologie de cette partie intéressante de la Chine. 

De Pin-chan hien à Souy-tcheou fou les bords du fleuve sont formés de grès grisâtres 


ITINÉRAIRE. 111 


devenant micacés et pourprés dans cette dernière localité. Blakiston a observé dans la 
gorge profonde de Lotu de nombreuses extractions de houille ; le combustible, retiré par 
des galeries creusées à une assez grande hauteur sur le flanc des collines, est descendu 
jusqu'à l’eau au moyen de paniers que l’on fait glisser le long des cables en bambou. 
Le panier plein en descendant fait monter celui qui vient d’être vidé. Tout ce pays est 
montagneux ; les escarpements des rapides de Pa-tan-pa atteignent jusqu’à 500 pieds an- 
glais de hauteur. 

Le charbon bitumineux se retrouve à Pa-ka-chou. Six milles en aval de Souy-tcheou fou 
on exploite un charbon meilleur que la plupart de ceux des provinces arrosées par le 
Yang-tse supérieur. Ce charbon est retiré par gros bloes d’un grès micacé pourpre; du 
fer existe dans le voisinage. Les mêmes grès s’observent à Ma-teh1 et à Ching-pa-cha. 

Une rangée de collines, courant dans la direction du Sud, se trouve en face du Yang- 
tse. Les noms des deux villages Lo-wan-tehe et Pe-cha-dô (Terre-Noire et Terre-Blanche) 
indiquent la présence du charbon et de la pierre à chaux dans le voisinage de cette der- 
nière localité. 

De nombreux lavages d’or existent à Lou-tcheou et à Tehong-kin fou. Autour de cette 
ville seraient, d’après Pumpelly, des puits artésiens salifères et des exploitations de cuivre 
et de cinabre ; nous croyons que cet auteur a été mal renseigné, à moins qu'il ne confonde 
le réalgar avec le cinabre. Blakiston à reconnu que les montagnes qui bornent le district 
dont nous parlons, sont formées de caleaires et de grès dont les couches courant Nord- 
Est et Sud-Ouest plongent de 75° à 80° vers l’Ouest. 

De Fou-teheou à Ouan le lit du fleuve est encaissé entre des grès caleaires, grossiers, 
micacés ou siliceux à strates dirigées Nord-Est et Sud-Ouest à Tehong-kin, et Ouest-Nord- 
Ouest à Fou ; près de cette dernière localité les couches plongent de 30° environ vers le 
Nord-Nord-Est. Le fond de la rivière, formé de sables siliceux avec parcelles de fer, paillettes 
de mica blane et jaune, conglomérat à demi solidifié, roule de l'or. Dans toute cette région, 
beaucoup d'habitants, quoique le rendement soit très-faible, sont occupés à laver les sables 
aurifères. Pour séparer le métal précieux on se sert de berceuses ou corbeilles en bambou 
peu profondes reposant sur un pied articulé et pouvant être mises facilement en mouve- 
ment. Cinq personnes sont attachées au service d’une berceuse ; deux des hommes 
extraient le gravier, un autre est chargé de fournir l’eau nécessaire, un quatrième lave 
le sable, qu'un dernier individu recueille. Chaque ouvrier dépose sa charge dans la cor- 
beille ; on v verse de l’eau, puis le mélange est agité un certain temps jusqu'à ce qu'une 
grande partie des matières étrangères se soient séparées. Le sable aurifère est alors jeté 
sur un plan incliné en bois où le métal plus dense se sépare des autres matières. 

De Ouan à Koui-tcheou fou nous n'avons à noter que la présence de puits salés et 
de quelques couches d’anthracite. 

A la frontière du Se-tchouen et de la partie Ouest du Hou-pé le fleuve traverse, pen- 
dant environ 80 milles, du calcaire, de minces couches de schistes métamorphiques et 
des granites ; des grès grisätres grossiers, avec veines de carbonate de chaux spathique 
en couches presque horizontales couronnent ces diverses formations. Ces grès renferment 


112 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


de nombreuses couches de charbon que l’on extrait par galeries ; le combustible n’est pas 
de bonne qualité et on ne prend aucun souci pour lextraire en gros blocs ; il est pul- 
vérisé, mélangé avec de l’eau et de l'argile et façonné en briquettes. 

Nous sommes étonné que les auteurs que nous analysons, n’aient ni l’un ni l’autre 
signalé l’immense cratère que traverse le fleuve au moment où il pénètre dans les gorges 
que nous venons de décrire. Un pilier de lave de 20 à 27 mètres de hauteur surgit au mi- 
lieu des eaux à peu près vers le centre du cratère. 

Le village de Kouan-du-ko, qui se trouve à quelques milles au-dessus de Koue tcheou 
est bati sur un calcaire finement grenu dont les couches sont fortement bouleversées. 
À partir de ce point, on entre dans les champs de Koue, si riches en minerais d'argent, de 
plomb, d’or et d’autres métaux. De l’anthracite se trouve en abondance au milieu de grès à 
surfaces brillantes avec des débris végétaux dont nous parlerons plusbas. A Koue même 
les couches courent Nord-Nord-Ouest et Sud-Sud-Est, plongeant de 75° environ vers Est- 
Nord-Est. A deux milles de la ville le grès est siliceux grisätre ou marneux pourpré ; de 
minces lits de calcaire et d’argilite alternent avec ces grès qui reposent eux-mêmes sur des 
grès calcareux finement grenus, supportés à leur tour par des calcaires ; les couches sont 
fortement plissées en certains points. 

La gorge de Mi-tan est formée de strates qui s’inclinent au Nord-Ouest: les escarpe- 
ments ont environ 900 pieds anglais de haut. Suivant Pumpelly, en descendant vers Chan- 
to-pien les deux côtés du fleuve seraient constitués par des granites à petits grains, et du 
granite syénitique composé de feldspath blanc, de quartz, de larges lames de mica blane, 
de cristaux d’hornblende, avec de petits octaèdres de fer magnétique. Nous n'avons pas pu 
vérifier les observations de Pumpelly, n'étant pas descendu à terre pendant le temps que 
nous avons mis à franchir cette distance, la plus grande partie de ce parcours a d’ailleurs 
été faite pendant la nuit. 

Près d’'I-tchang, et à 15 milles environ en amont de cette ville, le fleuve est très-en- 
caissé et présente de nombreux rapides; il roule des cailloux de granite et de gneiss. 
Les bords du Yang-tse sont formés de calcaires à lits dirigés Nord-Est et plongeant Sud- 
Est 8°. Au-dessus viennent des grès grisàtres finement grenus passant à un conglo- 
mérat grossier; les strates presque verticales et penchant vers le Nord-Ouest s'élèvent 
à la hauteur de 800 à 900 pieds. Aux environs, Pumpelly indique du charbon, du nitre 
et des agates. Le même conglomérat, en relation avec le grès micacé rouge, se retrouve 
à IHou et vers King-tcheou. 

«Le lit de la rivière est par places rocheux ; le sol de la contrée adjacente est de nature 
« argileuse ou graveleuse; près du village de Yang-chi on retire de la pierre à chaux; 


= 


« à l'opposé de Chi-kiang, à l'Est du fleuve, dans les couches inférieures se voit un cal- 


A 


«caire moucheté. De ce point à I-tchang, le Yang-tse longe une montagneuse contrée, 


cet, avant d'atteindre cette dernière ville, on passe entre deux murailles verticales de 
«conglomérat grossier renfermant des cailloux de quaïtz, de limonite et de jaspe (1). » 
Sur les bords de la rivière en face d’I-tchang un grès légèrement poreux et calcarifère 


1 Blakiston. 


ITINÉRAIRE. 115 


est associé à ce poudingue. À Han-keou et à Ou-tchang nous voyons les mêmes grès plus 
ou moins argileux avee des quartzites compactes. Le calcaire reparait autour du lac 
Poyang ; il est, comme toujours, surmonté par les grès. À lEst sont les collines gra- 
nitiques de King-tching ou King-te-tching qui fournissent le célèbre kaolin pour la 
fabrication des plus belles porcelaines. Sur les rives et sur les collines qui bordent le lac 
à l'Est, l'Américain Abel a mentionné des granites et des schistes micacés. 

A partir de ce point, on entre dans une vallée d’alluvions jusque près de Nankin. 
Dans les environs immédiats de cette ville, surtout vers l'Est, on extrait du calcaire et du 
charbon. Sur la rive gauche du fleuve le grès rougeàtre reparait; ses couches courent 
O.-S.-0. et plongent de 40°E.-S.-E. Après Nankin le fleuve coule jusqu’à son embouchure 
dans un vaste delta. 


IT. 15 


[11 


GÉOLOGIE 


Jusqu'à l’arrivée de l'expédition du Mekong les études géologiques sur le Cambodge 
et la Cochinchine ont été à peu près nulles. Quelques vagues renseignements donnés 
par Crawfurd *, Mouhot *, Mac Culloch *, sont les seuls documents que nous ayons sur 
cette vaste étendue de pays. E. Cortambert, qui a rédigé la première partie de l'ouvrage 
publié par lui et par Léon de Rosny sur la Cochinchine, se borne à dire : « Les montagnes 
« principales, du cap Saint-Jacques à Hué, paraissent composées de granite et de syénite; 
« le quartz et le calcaire forment les montagnes inférieures. Les alluvions constituent la 
« plus grande partie de la Basse-Cochinchine *. » De nombreuses roches ont été 
rapportées par Îtier, par Chevalier, par l'expédition de la Bonite, et tout dernièrement 
par M. Le Mesle. Ces séries si précieuses pour nous ont pu être étudiées avec tout le soin 
désirable, grâce à l’extrème bienveillance de monsieur le professeur Daubrée, du Muséum 
d'histoire naturelle. D’après Barbié du Bocage *, M. Le Mesle aurait l'intention de faire 
connaître le résultat de ses recherches ; du moins lisons-nous au n° 403 de la Biblio- 
graphie Annamite que «le travail de M. Le Mesle traite en grand détail des produits du 
« Cambodge, flore, faune, géologie, » et qu'il sera prochainement « publié dans le 
« Bulletin de la Société de Géographie de Paris. » 


1 Journ. of an embassy to the courts of Siam and Cochin-China. In-4°, London, 1828. 

2 Voyages aux royaumes de Siam, de Cambodge et de Laos, de 1858 à 1861. Zn : Tour du Monde. 

3 Dictionary geographical, statistical and historical, 9° édit., 4 vol. in-8°. London, 1864, t. 1, p. 115. 
4 Tableau de la Cochinchine. In-8, Paris, 1862. 

5 Rev. maritime et coloniale, t. XVI et XVIII. 


116 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


L'ordre naturel voudrait que nous commençassions cette troisième partie de notre ou 
vrage par la géologie du bassin du Mékong depuis son embouchure jusqu'aux frontières de 
la Chine. En présence de la pénurie des renseignements nous devons chercher nos points 
de comparaison dans l'empire du Milieu qui à été beaucoup mieux étudié, dans certaines 
de ses parties du moins. Pour ce travail nous nous aiderons des mémoires de Bonny ?, 
de Ritter *, d'Iüier*, d'Imbert *, de Blakiston 5, d’Abel , de Davis, de Williams, etc., 
et de nos observations propres; les deux derniers auteurs que nous venons de citer se 
sont surtout occupés des métaux, aussi parlerons-nous plus loin de leurs ouvrages. Toul 
récemment R. Pumpelly a publié dans le tome XV des Srithsonian Contributions des 
recherches sur la géologie de la Chine, de la Mongolie et du Japon. 

Nous chercherons quelques-uns de nos points de comparaison dans les autres provinces 
de Chine, en Mongolie, dans le Thibet et surtout dans l'Inde, cette vaste région qui a déjà 
été si bien étudiée par les géologues anglais, et qui, grace aux nombreuses recherches 
de ces patients et savants investigateurs, a relevé tant de faits intéressants pour la strati- 
graphie, a fait connaître des faunes, depuis celle des terrains anciens jusqu'à l’ossuaire 
des monts Sewalik, si instructives pour le naturaliste philosophe. 

Quand à l’aide de ces divers matériaux nous connaïtrons l’âge des différentes couches 
qui composent le sous-sol du Céleste Empire, nous pourrons plus sûrement paralléliser 
ces formations avec celles que nous avons rencontrées le long du cours du Mekong, et 
arriver ainsi à leur assigner une place dans la série des terrains. Nous verrons, en effet, 
que les formations de Cochinchine, celles du Laos, peuvent, sauf pour quelques 
points de détail, être comparées à celles de Chine. 


1° Chine. 


Si on jette les veux sur L « Aypothetical map » donnée par Pumpelly 7, on voit que 
le sous-sol de la Chine, dans toute la partie située au Sud-Est du Yang-tse Kiang, seule 
région dont nous ayons à nous occuper, se compose de quatre massifs de granite et de 
roches métamorphiques sur lesquelles s'appuient de chaque côté du calcaire dévonien, 
supportant à son tour le terrain désigné par l’auteur sous le nom de « Chinese coal 
measures, » formation du charbon, rapportée au trias. Telle serait d’une manière 
générale aussi la composition de toute la Chine; ajoutons qu'une grande partie des 
provinces du Nord-Est, Ngan-hoei, Pe-tche-ly, Kiang-sou, est formée de terrains post- 
tertiaires. La section faite le long du fleuve Bleu, depuis les côtes du Pacifique jusqu’à 
Pin-chan hien dans l'Ouest du Se-tchouen, montre la même succession du granite, des 

LA Trip from Canton to Shanghaï. Shanghaï, 1861. 

2 Asten. T. III. 

3 Journal d'un voyage en Chine en 1843, 44, 45 et 46. 3 vol. in-8°, Paris, 1853. 

* Annales de la Propagation de la foi. In-8°, Paris, t. IT, 1828-1829. 

5 Five months on the Yang-tse. In-8°, London, 1862. 


6 Narrative of a journey in the interior of China. London, 1818. 
DO ACTE pl VITE 


GÉOLOGIE. 117 
roches métamorphiques, du calcaire dévonien et du frias, ce dernier composé de trois 
parties, qui sont de bas en haut : des conglomérats, des schistes argileux, des grès. 

Kingsmill, qui a vu les principales formations de la côte orientale de la Chine, admet 
un autre ordre de succession des couches qui serait le suivant : 1° Granite, 2° Roches 
gneisiques, 3° Grès rouges à conglomérats, 4° Calcaire, 5° Grès micacé alternant avec 
des minerais de fer, 6° Couches houillères, 7° Caleaire. L'âge assigné par l'auteur à ces 
différentes couches n’est pas celui indiqué par R. Pumpelly. Laissons parler Laugel qui 
a analysé le mémoire de Kingsmill : « C'est le granite qui supporte les roches sédimen- 
« taires probablement siluriennes, qui se montrent dans l'ile de Hong-kong *. « J. Iüer, 
qui a étudié avec soin une partie de la Chine, n’a guère, à notre avis, fait appel qu’à 
des souvenirs éloignés lorsqu'il a admis le silurien comme constituant une partie du 
sous-sol de la Chine et de la Cochinchine. « Dans le massif des collines situées 
« derrière la baie Tourane, dit-il, sont des grauwackes... au-dessus desquelles sont 
« des calcaires... Le marbre veiné de noir répand, quand on le casse, une odeur 
« d'hydrogène sulfuré due à la grande quantité de débris organiques... Nous y avons 
« trouvé une grosse érébratule..…. et un corps rond dont la eristallisation spathique 
« rappelle assez la forme des Orthocères du calcaire de transition de Villefranche 
« (Pyrénées-Orientales)..… En rapprochant les caractères généraux des roches que nous 
« venons de décrire, des observations faites non loin de là, sur les côtes de Chine, on 
« serait fondé, jusqu'à un certain point, à rapporter ces roches au système silurien ?. » 
Il se pourrait donc que les deux formations dévonienne et silurienne existassent en 
Chine et en Cochinchine, d'autant plus que dans cette dernière région sont, comme 
nous le verrons plus loin, des schistes métamorphiques, inférieurs au calcaire dévonien, 
et qui se rattachent très-probablement au silurien. 

Cet aperçu général sur la géologie de la Chine donné, chacune des formations dont 
nous venons de parler va nous occuper plus en détail. Nous étudierons successivement 
les roches cristallines, les roches métlamorphiques, la grande formation calcaire, le 
système du Chinise coal measures, les dépôts post-tertiarres, les formations actuelles. 


S Ier, — Roches cristullines. 


À. Granite et Syénite. — Les collines qui entourent la rade de Macao sont composées 
de granite à grains fins où à grains moyens, variant du gris bleuàtre au jaunätre, renfer- 
mant des filons de quartz hyalin souvent chargés de feldspath ; certains de ces granites dé- 
composés forment des sommets d'environ 100 mètres au-dessus du niveau de la mer. La 
grotte de Camoëns renferme des blocs de la même roche. Nous trouvons aussi des syénites 
à grains moyens grisatres ou gris-verdatres, passant à la svénite porphyroïde, et contenant 
du quartz en filons, des cristaux de fluorure de chaux, de sphène, des enduits d’hydrate de 
fer mêlé de manganèse, des veines verticales de basanite amygdalaire passant à la wacke, 


! Delesse et Laugel, Rev. de Géologie, t. I, p. 368, et The Geologist, 1863. 
2 Op. cit., p. AM ct 142. 


118 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


de basanite celluleuse avec carbonate de chaux lamellaire. Ces mêmes roches, granite por- 
phyroïde avec quartz et syénite, se retrouvent près de Canton. Des pegmatites rougeätres, 
à grains fins ou à gros grains, souvent avec enduits talqueux et pyrites, surchargées de 
quartz en certains points, forment au Nord de Macao desfilons au milieu de la syénite. L'ile 
de Xee-Ow, à l'entrée du Teheou Kiang qui mène à Canton, l'ile de Lappa, à l'Ouest 
de Macao, l'ile Verte, l'ile de Jy-coek-tow, à VOuest de Bocea Tigris, rivière Tcheou 
Kiang, sont formées des mêmes roches : granite, svénite ordinaire, granite porphyroïde 
blanc-violätre, syénite porphyroïde, porphyre pétro-siliceux quartzifère et talcifère ”. 
« Dans les îles qui bordent la côte, les rochers consistent seulement en granite à gros 
«grains, traversés par quelques veines de quartz ?. » Cette première bande de roches 
anciennes s'étend jusqu'aux environs de Fo-hing-low, à travers la province de Fo-kien. 
Une seconde bande beaucoup moins longue, parallèle à la précédente, s'étend dans la 
province de Kouang-tong, de Lien-tcheou vers Tehao-tcheou. Sensiblement parallèle à 
ces deux dernières, dans sa partie N.-E. du moins. est une longue bande granitique com- 
mençant aux iles Chusan, passant à Ning-po fou, se trouvant à la séparation des pro- 
vinces de Fo-kien et de Kiang-si, et allant jusqu'à Ping-lo fou. Cette zone, d’abord cou- 
rant sensiblement au N.-E., prend vers Kan-tcheou fou, la direction E.-N.-E. Près du lac 
Poyang, non loin de Nan-teheou fou, le granite forme quelques sommets. La quatrième 
bande granito-métamorphique occuperait sur la carte VIT de l'ouvrage de Pumpelly, une 
grande partie du Yun-nan, du Kouang-si, et remonterait jusque près de la séparation des 
provinces de Se-tchouen et de Hou-pé; le vaste massif autour de la ville de Yun-nan fou 
se prolongerait dans trois directions : une de ces bandes orientée O0.-N.-0. à E.-S.-E., irait 
presque rejoindre la zone du Kouang-tong, à la hauteur du milieu du golfe du Tong- 
king ; une seconde, formant surtout le sous-sol du Kouang-si, irait E.-0. dans la direc- 
lion de Koueï-lin fou ; une troisième enfin se dirigerait vers le Hou-pé, suivant une ligne 
S.-S.-0. N.-N.-E. jusque vers les bords du Yang-tse Kiang, près de Kin-tcheou fou. 
«Lorsque le Yang-tse coupe l'axe central anticlinal d’élévation, dans l'Est du Se-tchouen 
Cet l'Ouest du Hou-pé.…. les schistes métamorphiques reposent sur le granite... celui-ci, 
«<immédiatement après les premiers rapides, consiste en feldspath ériclinic et orthoclase, 
«en mica noir brillant et en quartz, avec de petits cristaux de sphène dans la masse. Au- 
«tour de Chan-to-pien le granite devient finement grenu ; peu après la rivière, il est suivi 
«d'un granite syénitique, formé de feldspath blanctriclinie, de quartz, de larges lames de 
«mica brun, de cristaux d’hornblende et de petits cristaux de fer magnétique®. » Les roches 
granito-métamorphiques sont loin d’être aussi développées dans cette région de la Chine 
que l'indique Pumpelly, à qui nous venons d'emprunter ces lignes ; nous n'avons pas vu 
de granite dans toute la partie du Yun-nan et du Se-tchouen que nous avons parcourue. 

B. Roches feldspathiques. — « L'absence totale, en apparence du moins, dit Pumpelly. 

! Cf. au Mus. d’hist. nat., Géologie, les collections Itier (cat. 9, L). Voyage de la Bonite (cat.6, G, arm. 3, b). 
Voyage de la Thétis (cat. 4, Z, ete). 


? Davis, a Chine, trad. A. Pichard Append., par Bazin, 2 vol. in-8. Paris, 1837, €. I, p. 261. 
3 R. Pumpelly, Op. cit, p. 4. 


GÉOLOGIE. 119 


de porphyre éruptif, de trachytes et de basaltes, paraît indiquer une absence correspon- 
dante de bouleversement subséquent à travers une large partie de la contrée. » Les por- 
phyres, en effet, n'existent pas, du moins n’en avons-nous pas observé dans le cours de 
notre voyage. Quant aux roches du groupe des basaltes, elles ont fait certainement érup- 
tion sur les bords du Yang-tse Kiang, car à 6 milles environ au-dessous de Koui-tcheou 
fou, le fleuve traverse un vaste cratère au centre et sur le pourtour duquel sont des débris 
basaltiques. De plus, Callery à rapporté de la provinee de Canton les roches feldspathiques 
suivantes que nous avons pu étudier dans les collections du Muséum d'Histoire naturelle !: 
des trachytes porphyroïdes altérés rougetres avec «cavités nombreuses dues à des cristaux 
de feldspath décomposés, » du trachyte grisätre, légèrement porphyroïde, de la phonolite 
porphyroïde altérée, de la leucostine brunâtre à grains fins avec cristaux blanchatres de 
feldspath altéré, un poudingue porphyroïde à grains movens infiltré de matière siliceuse ; 
de la pegmatite talcifère, blanche, avec enduits talqueux vert jaunâtre. Le même voyageur 
a trouvé dans la province de Canton diverses autres roches dont nous ne connaissons pas la 
provenance exacte; ce sont une brèche de quartz compacte, en partie ferrugineuse, à 
grains moyens, cellulaire, des quartzites gris-violâtre à grains fins, très-agrégés, des 
quartz compactes, gris, schistoïdes, contenant du tale, du quartz jaunätre. Ces deux roches 
se rattachent très-probablement aux terrains métamorphiques. 

C. Serpentines. — Des serpentines de couleurs variées se trouvent près de Ta-lan, 
dans le Yun-nan. Elles renferment des cristaux de pyrite et, fait bien plus important, des 
parcelles d’or. Elles sont accompagnées de quartzite grenu un peu micacé, ressemblant 
beaucoup à la roche connue sous le nom d’/facolumite, et qui au Brésil accompagne aussi 
l'or. Quelques filons d'amiante traversent ces serpentines. 

D. Ophites. — Nous avons trouvé ces roches en un seul point, dans le lit d’un tor- 
rent qui vient se rendre dans la rivière d’Attopeu, à environ 5 kilomètres de Stung 
Treng. Ces ophites renferment de petits points calcaires et des cristaux de pyrite. Elles 
prennent par places une texture granitoide. Nous venons de voir que des filons d’eurite 
les traversaient. Ces ophites ont été relevées de 45° environ vers le Sud ; leur soulèvement 
est subordonné vraisemblablement à l'apparition des porphyres de Khong. 

Aux dépens des ophites, ont été formés des schistes polygéniques métamorphiques que 
nous avons observés dans le lit du fleuve au bas de l’île de Khôn. Ces schistes ont été, 
en cet endroit, relevés presque verticalement et courent Est et Ouest; ils sont fréquemment 
coupés par des filons quartzeux. 


S IL. — Roches métamorphiques. 


Dans la province de Canton ces roches consistent en talcite phylladiforme gris foncé 
avec hydrate de fer et en falcites quartzifères schistoïdes verdâtres et rougetres (col. Cal- 
lery). L'expédition de la Thétis (eat. 4, Z, n° 128 à 132) a rapporté des iles d’Anambas. 
archipel de la mer de Chine, des talcites feldspathiques, de la phonolite et un trachyte por- 


1 303, arm. 3, d. 


120 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


phyroïde amphibilifère d'apparence bréchiforme. « Près de Chan-to-pien, sur les rives 
« du fleuve Bleu, le granite supporte des couches de roches métamorphiques ; celles du 
« versant E. paraissent être de gneiss dont les strates se dirigent E.-0. et plongent de 30° 
« du S. à lO.; sur le granite, les couches consistent en schistes hornblendies et chloriti- 
« ques ; cette dernière forme contenant souvent des masses lenticulaires et des veines sé- 
« cantes de quartz, de feldspath et de chlorite.. Près du contact avec le granite, les cou- 
« ches tendent N.-N.-E., et plongent d'environ 85° à E.-S.-E., pendant que, peu après 
« Ja rivière, leur direction se change en celle d'E.-N.-E., et que le pendage se fait vers 
« N.=N.-0... Juste avant d'entrer dans l'ouverture E. de la gorge de Lou-kan.…. les schis- 
tes courent E.-N.-E, et plongent N.-N.-0. !. » 

Certains de ces schistes cristallins sont antérieurs aux éruptions du granite syénitique, 
dans certaines parties de la Mongolie du moins, car au village de Sirjin’sz, près de Kal- 
gan, cette dernière roche traverserait en dykes des couches métamorphiques *. 


S II. — Terrain dévonien. 


Des couches de quartzites compactes , atteignant 40 à 50 pieds d'épaisseur dans la 
gorge de Lou-kan, ou, au même point, un lit de grès grisatre, finement grenu, micacé, 
allant N.-N.-0. ef pendant 25° à 30° vers 0.-5.-0., séparent les roches métamorphiques de 
la grande formation calcaire de la Chine *, si abondamment répandue le long et au S.-E. 
du fleuve Bleu, et ayant, d’après Pumpelly, plus de 11,600 pieds anglais d'épaisseur. 

La couleur de ce calcaire varie du blane au noir, en passant par le gris, le rosé, le 
rougeatre, le bleuatre, le brun. Il est en général un peu dolomitique, et contient de nom- 
breux points spathiques blancs, formés de débris d’encrines. Il fournit près de Canton, à 
la gorge d’I-tchang, à Nankin, sur les bords du Yang-tse Kiang, dans la province deYun- 
nan, des marbres estimés, de teintes très-variées et souvent fort agréables ; les variétés 
grisätres, mouchetées de rouge, de noir et de blanc, porphyritiques et cristallines, sont 
surtout recherchées. En maints endroits, 1l donne aussi d'excellente pierre à chaux. 

Indiquer les points où ce calcaire se trouve dans le Yun-nan et sur les bords du Yang- 
tse Kiang, serait répéter ici ce que nous avons dit dans la seconde partie de ce travail, et 
reproduire la plus grande partie de ce que Pumpelly a écrit sur la géologie des bords du 
fleuve Bleu. En effet, sur la carte donnée par le voyageur américain, on voit le caleaire 
flanquer de chaque côté les quatre axes granito-métamorphiques, dont nous venons de 
parler. Deux de ces bandes, celles du Kiang-si et celle du Kouang-si et du Yun-nan se con- 
Hüinuent et ne forment qu'une seule zone qui envoie deux prolongements au travers des 
grès; l’une de ces bandes, des deux la plus étroite, va près de Nan-ngan et se continue de 
l’autre côté jusque vers Ning-koué, en traversant la province de Kiang-si; l’autre, située 
dans le Hou-nan, passe à Tehang-tcha, traverse le fleuve Bleu à la hauteur de Hoang-teheou 

1 R. Pumpelly, Op. cit., p. 4 et 6. 


DES nb af 
ENTTPAD 16: 


GÉOLOGIE. 121 


fou et de Kieou-kiang fou, et va se terminer au lac de Lu-tcheou, dans le Ngan-hoeï. Ce 
même massif du Yun-nan, plus à l'O., donne aussi deux prolorgements; lun, entourant 
les roches granitico-métamorphiques, ayant une orientation générale N.-N.-E., S.-S.-0., 
va Jusqu'au Yang-tse; l’autre, dirigé N.-E., N.-0., traverse tout le massif de grès du 
Se-tchouen, encadré d’ailleurs partout par le calcaire, qui, sur la carte de Pumpelly, que 
nous analvsons, forme quelques petits massifs surgissant au milieu du Chinese coal mea- 
sures. D'après Wells Williams et Itier, le calcaire est abondant aux environs de Canton et 
de Nankin. Partout sur les bords du Yang-tse Kiang, ce calcaire forme les sommets les 
plus élevés et constitue des pitons qui ont été comparés par Davis à des pyramides naturelles. 
Ce calcaire surgit au milieu des calschistes, des grès, des psammites, couches à 
charbon de la Chine, fortement relevés dans sa direction. Il en est de même dans la pro- 
vince du Yun-nan, et nous avons vu le calcaire constituant les points les plus hauts à Se- 
mao, à Pou-eul, sur les rives du Song Koï, à Lin-ngan-fou, à Tong-hay, à Yun-nan, etc. 
Les directions des strates varient suivant les localités. Ainsi à la gorge de Lou- 
kan elles sont orientées N.-N.-0. et plongent de 25 à 30° vers FO.-S.-0. Près 
d'I-tchang elles vont vers le N.-E., et leur pendage est d'environ 8° au S.-E. A 30 
milles de Hoang-chan les collines de calcaire, qui en ce point ont de 800 à 900 pieds 
anglais de haut, forment le côté sud de la rivière ; là les lits sont dirigés de l'O. au 
S.-0. et inclinés d'environ 40° du S. au S.-E. Aux bords du Yang-tse Kiang, sur les 
flanes « de l’axe granitique, les couches se dirigent uniformément N.-E.,S.-0., plongeant 
«de 8 au S.-E. » Sur le flanc O., au contact des roches métamorphiques la direction 
est N. E., puis dans la partie supérieure de la formation elle devient N.-E.-5.-0. !. 
Ce caleaire contient quelques débris organiques qui en fixent l'âge et qui ont d’abord 
été signalés par Itier. « On trouve ces débris, dit ce géologue, dans les couches plus argi- 
« leuses qui l’avoisinent ; ce sont des Sprrifer, des Térébratules et des Serpules. » Exa- 
minés par de Koninek, ces fossiles ont paru appartenir au dévonien. « Ce sont les Spr- 
« rifer chechiel de Kon. qui se rapprochent tellement du S. specrosus Schloth, que M. de 
« Koninek a hésité longtemps à en faire une espèce distincte ; or ce dernier étant ea- 
« ractéristique du système dévonien de l'Eifel et de la Belgique, il est très-probable 
«que son analogue de la Chine se trouve dans le même cas. Il existe adhérent à la 
« surface du Spirifer une petite espèce de Serpule, dont M. de Koninck a constaté l'identité 
« avec les S. omphaloides Goldfuss… L'autre fossile est une Zérébratule plissée, la T. Yue- 
«namensis de Kon. ?. » M. Davidson est arrivé aux mêmes conclusions en examinant 
une collection de fossiles du calcaire de Chine envoyée au British Museum par M. Lock- 
hart. « Les exemplaires, écrit le savant brachiopodiste anglais, appartiennent à huit 
« espèces dévoniennes, dont sept sont communes à la plupart des localités européennes, 
« au nombre desquelles nous citerons Ferques et Néhou en France, la Belgique et l'Er- 
« fel, mais ne se retrouvent pas toutes dans une de ces localités. Elles paraissent ressem- 
« bler plus aux espèces de Ferques, où cependant on n'a encore trouvé ni la Cyrtia 
! Pumpelly, Op. cit., p. 5,6, 7. 


2 Le Glis de Pile 
IF. 16 


122 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


« Murchisoniana, ni la Rhynchonella Hamburi”. » Les espèces déterminées par M. Da- 
vidson sont : Spirifer disjunctus, Sow., Cyrtia Murchisoniana de Kon., Rhynchonella 
Hamburi, Vavid., Crania obsoleta, Goldf., Aulopora tubæformis, Goldf., Spirorbis om- 
phaloïides, Goldf.? Cornulites epithonia, Goldf.? À Ferques, près de Boulogne-sur-mer, 
le Spirifer disjunctus est caractéristique du dévonien supérieur, zones du caleaire de 
Ferques et des schistes de Beaulieu ?. « Des brachiopodes venant de Gouchone, à 30 
« lieues 0.-S.-0. de Patang, surle Kin-cha Kiang, et près de la frontière du Tibet, ont 
« été, écrit Pumpelly, déterminés par M. Guverdet comme les suivants : Zerebratula cu- 
« boïdes, Sow., du carbonifère et du dévonien... Terebratula reticularis, Lin., du dévo- 
« men... Zerebratula pugnus, Martin. M. Woodward a décrit un Orthoceras de Chine. 
« Sir R. Murchison dit en parlant de quelques fossiles du dévonien supérieur, venant du 
« Se-lchouen, et qui lui avaient été donnés par le docteur W. Lockhart, qu'ils sont iden- 
« tiques comme espèces aux Syprrifer Verneuil, S. Archiaci, Productus subaculeatus, 
« et à d’autres formes européennes *. » 

D'après la faune, la vaste formation calcaire de Chine appartient done au système 
dévonien, et probablement à la partie supérieure de ce terrain. 


SIV. — Terrain triasique. 


Selon l'expression de Pumpelly, le dévonien sert de plancher, « floor » aux couches à 
charbon, qui constituent le sous-sol d’une grande partie de la Chine, en exceptant toute- 
fois les provinces du Nord-Nord-Est occupées par des terrains post-tertiaires. Selon le 
véologue que nous venons de nommer, les trois membres du Chinese coal measures sont 
de bas en haut : 1° Des conglomérats; 2° des schistes argileux ; 3° des grès. Des lits de 
composition différente peuvent venir s’interealer entre ces couches, comme des argilites 
rouges et grises, des brèches quartzeuses, des quartzites, de lanthracite ou de la 
houille. Nous allons étudier successivement chacune de ces assises. 

A. Conglomérats. — Les conglomérats porphyriques signalés par Pumpelly dans la 
province du Tehe-li, ne paraissent pas exister le long du cours du Yang-tse Kiang. Mais à 
Ltchang, s'appuyant vers l'Ouest sur le dévonien, suivis vers FEst par les grès, sont des con- 
glomérats grossiers; des conglomérats quartzeux existent à Chi-chan hien. Ce sont là les 
seuls points où les conglomérats soient indiqués dans les Geological Researches. Nous n’en 
avons pas observé dans la province du Yun-nan. 

B. Schistes et psammmites. — Les schistes, dans le diagramme donné par Pumpelly, 
sont indiqués en quatre endroits, du lae de Tong-ting à Han-keou, où seraient des quartzites 
pouvant se rattacher au coa/ series. Les collines qui sont autour de Han-keou sont formées 
de couches argileuses et de grès argileux. À Ma-chang, à la limite des provinces du Yun- 
nan et du Se-tchouen, près de l'angle formé par la rencontre du Kin-cha Kiang et du 


! Quart. Journ. Geol. Soc., L. IX, p. 353. 
? Rigaux, Norice stratigraphique sur le Bas-Boulonnas, p. 3, in Bull. Soc. Acad. de Boulogne-sur-mer, 1865. 


Se 


3 Op. cit., p. 55. 


GEÉOLOGIE. 123 


Pé-chouy Kiang, la base de la formation carbonifère est formée des mêmes schistes, ou, 
plus exactement, des mêmes grès psammites micacés avec quelques traces de charbon , 
absolument semblables à ceux que nous verrons aux mines de cuivre de Bassac, dans 
le Laos. Ces psammites schistoïdes existent au-dessous des grès de tout le cours du 
Yang-ise Kiang et dans la province du Yun-nan. De couleurs variées, ces psammites 
passent au jaune, au gris, au violet, au rouge, au brun, au noir ; ces schistes sont plus ou 
moins durs, plus ou moins marneux, et se laissent, en général, facilement altérer par les 
agents atmosphériques. Au-dessous de ces psammites sont des calschistes grisätres, ap- 
partenant aussi au système des couches à charbon. 

Nous donnons (page 143), une coupe ! prise dans la province du Yun-nan, et passant 
par le Song Koï et le lac de Che-pin. On voit le calcaire dévonien 4, former les grands 
massifs, les points élevés ; sur lui s'appuient, en se relevant dans sa direction, d’abord les 
schistes bruns et violets b, au-dessus desquels sont les grès psammites «: ceux-ci, courbés 
en bateau, reposent au Nord sur les schistes et au Sud sur le calcaire; sur le flanc de la 
colline Sud, sont des brèches calcaires formées de fragments de cette roche englobés dans 
une pâte d’un rose rouge d ; des alluvions e constituent le fond du lae de Che-pin et de la 
rivière. 

C. Grès. — Les grès terminent la formation. Ils sont souvent polygéniques et passent 
à des poudingues quartzeux, phylladiens, calcarifères, ete., à éléments plus où moins 
gros. Ces grès, à texture plus ou moins grossière, à grains plus ou moins fins, sont de 
couleurs assez variées, le plus souvent grisätre, jaunätre, rougeätre. Si l’on consulte nos 
notes de voyage, l’on verra que ces grès se présentent avec les mêmes caractères, et dans 
la province du Yun-nan et tout le long des bords du fleuve Bleu. Décrire ici en détail 
chaque gisement serait répéter ce que nous avons dit plus haut en parlant de chaque 
localité. 

D. Charbon et anthracite. — Ces combustibles font partie de la vaste formation tria- 
sique, et sont généralement compris entre les couches de psammites et les schistes ou les 
grès. Dans le Yun-nan, près de Pou-eul fou, les couches presque verticales d’anthracite 
sont séparées entre elles par un schiste brun micacé qui s'appuie d’un côté contre du grès 
rouge, et de l’autre contre des schistes analogues à celui des couches de séparation, 
comme le montre la coupe n° ? de la figure, page 143; les diverses couches sont coupées 
par d'étroites fissures remplies de carbonate de chaux eristallisé *. 

Entre Tchao-tong et Souy fou le charbon est tantôt compris dans des schistes, tantôt 
dans du grès rouge. « 

Blakiston a rapporté aussi des grès rougeätres ou pourpres, siliceux ou calcaires, de 
Koui fou, de Tchong-kin, de Po-ko-chan près de Sou-chong, de Quai-chow près de Ouan, 
au milieu desquels on extrait l’anthracite ou le charbon *. D'après Pumpelly, «il parait 
« que dans le Se-tchouen, qui semble occupé par un immense bassin houiller, les couches 


1 N° f de la figure. 
2 Op. cit, p. 353. 


124 GEÉOLOGIE ET MINERALOGIE. 


« à charbon acquièrent une plus grande épaisseur que dans les champs de Koue, où 
« les membres inférieurs de la série paraissent seuls représentés. » 

E. Puits salés. — Blakiston à considéré les sources qui alimentent ces puits comme 
prenant naissance dans les couches triasiques, et pouvant être rapportées à cette forma- 
tion. « Dans le Se-tchouen et le Hou-nan, dit-1l, presque tous ces puits... sont dans le voi- 
« sinage de mines abondantes de charbon. D’épaisses couches de cette roche semblent 
« être traversées pendant la recherche du sel”. » Ce dernier fait avait été antérieurement 
signalé par Imbert?, que les divers auteurs négligent trop de citer : « quelquefois, tout 
« n'est pas roche jusqu'à la fin; mais il se rencontre des lits de charbon de terre. » Et plus 
loin : « En ouvrant des puits de sel, ils trouvent quelquefois, à plusieurs centaines de pieds 
« de profondeur, des couches de charbon fort épaisses. » «Ces puits, » dit Pumpellv, « se 
« voient en divers endroits le long du Yang-tse comme à Washan hien, à Ching-king fou, 
« à Song-tcheou fou ; en tous ces endroits ils sont très-près des rivages du calcaire, mais 
« au-dessus de cette formation. À Tchong-kin fou et à Kia-ting fou, ils sont aussi près de 
« semblables rivages. Ce fait que des lits épais de charbon sont percés par ces puits, et la 
« remarque de Blakiston que toutes les roches du Se-tchouen ressemblent à celles des 
« champs houillers de Koue, fait croire, je le pense, que le charbon et les dépôts salins 
« appartiennent au Chinese coal measures. » Nous sommes tout à fait de l’avis de Pum- 
pelly, et lorsque nous parlerons des vastes plaines salées qui entourent Kémarat, près de 
Bassac, dans le Laos, nous verrons que le sel se trouve presque à fleur de terre, au mi- 
lieu d’un grès rouge qui fait partie de la formation à charbon. 

F. — Reste à déterminer maintenant l'age de ces couches. Pumpelly va nous servir 
encore de guide. Ce géologue a trouvé dans les couches à charbon du bassin de Koue, 
sur les bords du Yang-tse kiang, province du Hou-pé, et dans le bassin de Chaïtang , à 
Sanyu, à l’ouest de Pékin, des plantes qui ont été soumises à l'examen de J.-S. New- 
berrv. Ce paléontologiste, prenant en considération l'entière absence de plantes propres à 
l’époque carbonifère, et remarquant dans la série rapportée par Pumpelly, la présence 
certaine de Cycadées appartenant aux genres Podozamites et Pterozamites, très-voisines 
d'espèces d'Europe et d'Amérique, si elles ne leur sont pas identiques, ce paléontologiste, 
disons-nous, est arrivé à celte conclusion que la grande formation houillère de la Chine 
est d'âge Mésozoïc. Venant de Koue, sont de nombreuses pinnules d’une espèce de Podo- 
zamites (P. Enunonst, Newb. *), que l’on peut difficilement séparer d’une espèce trouvée 
par le professeur Emmons, dans le Nord de la Caroline au milieu des couches regardées 
comme triasiques; ces couches contiennent, en effet, en abondance dans leurs lits supé- 
rieurs, plusieurs espèces identiques à certaines des formes du trias (Keuher) d'Europe, 
telles que Pecopteris Stutyardtensis, Laccopteris germinans, ete.; cependant il n'est pas 
certain qu'il n'y ait avec cette flore quelques plantes du jurassique d'Europe ; une étude 
plus approfondie de la question la résoudra sans doute; quoi qu'il en soit, les couches 


MOp Ci pr 64% 
2? Ann. propagation de la for, &. I, p. 371 el 374. 
% Ap. Pumpelly, Op. cit., p. 124, pl. IX, fig. 3. 


GEOLOGIE. 125 


caractérisées par le Podozamites découvert par Emmons, représentent le trias d'Europe : 
les couches du bassin de Hou-pé, renfermant la même espèce, doivent leur être assi- 
milées. 

Un autre Podozamites venant de Kout fou à été provisoirement rapporté par Newberry 
au Podozamites (Zamia) lanceolatus, Lindl., sp. !, qui serait une forme jurassique 
d'Europe; mais il faut complétement réserver son opinion quant à celte espèce qui n’a 
été déterminée qu'avec des matériaux insuffisants. 

Provenant des environs de Pékin, Newberry à examiné un P{erozamites nommé 
P. Sinensis ?, qui ressemble au P{. linearis Emm. du trias de la Caroline. Le Sphe- 
nopteris ortentalis Newb. *, tout en étant voisin de certaines formes carbonifériennes, 
telles que les S. Schlottheïmi, S. tridactylites, ele., ou de certaines espèces jurassiques, 
ressemble davantage à une espèce friasique, le S. dichotorna, Alth., et à une autre espèce, 
non encore décrite, venant de Baltimore. Les deux autres espèces figurées par Newberrv 
et qui proviennent, l’une des schistes plombagineux de Pivunsz, et l’autre des schistes 
sableux jaunäâtres de la mine de Futau à Chailang, sont les Æymenophyllites tenellus 
Newb., et Taxites spathulatus Newb. *. 

Les grès et psammites que nous avons pu observer dans notre voyage en Chine sont 
de même àâge que ceux que nous avons rapportés de Cochinchine et du Laos. Il nous a 
été possible de voir une série de roches venant de l'Inde, et nous avons pu constater la 
parfaite ressemblance de ces roches avec les nôtres. Or, voici ce qu’en 1861 écrivait 
M. J. Marcou : « Les publications faites en 1859, en 1860 et en 1861, tant à Calcutta qu’à 
« Londres, par la commission géologique de l'Inde et la société géologique d'Angleterre, 
« ont confirmé pleinement les déterminations des plantes fossiles recueillies dans 
« la formation des grès rouges de l’'Hindoustan par le docteur Mac Clelland et que 
« M. Heer a reconnues comme appartenant à la flore triasique, ce qui a permis, 
« dès février 1859, de placer dans sa vétritable position stratigraphique la grande et 
« vaste formation du nouveau grès rouge du centre de linde, qui, jusqu'alors, était 
< regardée comme de l’époque jurassique 5 ». 


_ 


A 


S V. — Terrain post-tertiaire. 


Toutes les formations charbonneuses ou anthracifères de Chine n’appartiennent cer- 
tainement pas au terrain triasique, et Pumpelly a signalé quelques gisements intercalés 
entre des couches tertiaires, et pouvant être assimilés aux dépôts tertiaires à charbon de 
l'Amérique du Nord. 


Probablement d'âge encore plus récent sont les lignites de Lin-ngan fou, dans la 


ODACTHPALTSENIE 

2/d,p-420;pl.1X, fig 3" 

2 Je pe 122,06 1e AG 

2 Jd, p. 129, 193, pl. IX, fig: 4et 5. 

5 Lettre sur les roches jurassiques hors d'Europe (Bull. Soc. Géol. de Fr., 2° sér., t. XIX, p. 9). 


126 GÉOLOGIE ET MINERALOGIE. 


province du Yun-nan. La ville est adossée à des collines marneuses qui recouvrent un fort 
dépôt de lignites. La couche actuellement exploitée est située à 5 kilomètres à l'Ouest 
de la ville; elle se trouve à une profondeur de 8 à 10 mètres et l'épaisseur varie entre 
1,75 et 0,50. On retire le combustible au moyen de treuils manœuvrés par deux 
hommes. Les galeries sont plus larges et plus commodes que celles que nous avons vues 
près de Ho-boung et dans les mines d'or de Ta-lan, et de cuivre de Sin-long tchang. 
Les puits sont par paires; par l’un on retire le lignite, par l’autre les terres et autres 
déblais. Ce lignite est de bonne qualité ; il brule facilement en plein air et donne une forte 
chaleur dans les fourneaux ; les indigènes ne consomment pas d'autre combustible pour 
leurs besoins journaliers. 

Les arbres fossiles à peine altérés existent en quantité dans la couche de lignite. La 
couche charbonneuse, qui s’amineit en allant vers la ville, est comprise entre deux 
épaisses couches d'argile brunâtre où nous avons vainement cherché des fossiles. Ce 
dépôt est postérieur aux alluvions qui recouvrent toute la plaine comme le montre la coupe 
n° 3 !; le calcaire forme les deux sommets élevés, sur lesquels s'appuient d’un côté ces 
alluvions, de l’autre le dépôt à lignites. 

n’y a plus en Chine de volcans en activité ; mais des éruptions volcaniques paraissent 
avoir eu lieu à l’époque historique d’après les récits des historiens chinois qui nous en ont 
conservé le souvenir. Ainsi, le volcan de « Pé-chan, situé dans la grande chaine du 
« Thian-chan, ou montagnes Célestes, au Nord de Koutsche, a eu des éruptions de lave 
« successives, durant une période bien connue historiquement, depuis l'an 89 de notre 
« ère Jusqu'au commencement du vu siècle * ». De plus, M. Stanislas Julien, étudiant 
les sources de l’ancienne géographie chinoise, a trouvé « qu'il est dit d’une manière 
« expresse dans l’histoire de la dynastie des Thang que sur une des pentes du Pé-chan, 
« qui rejette continuellement des flammes et de la fumée, les pierres s’enflamment, 
« fondent et coulent sur une étendue de plusieurs /, comme de la graisse liquide ; cette 
« masse molle se durcit en se refroidissant *. » 


4 


D'après J. F. Davis * le côté oriental de l'empire, depuis le Yun-nan jusqu'aux 
environs de Pékin, renferme des puits de pétrole, des sources d’eau chaude et salée, des 
émanations gazeuses, « traces de volcans assoupis, dit-il. » De la Bèche * avait déjà remar- 
qué la connexité des exhalaisons gazeuses avec les sources salées, fait observé en Europe et 
en Amérique et qui se voit aussi dans la province du Se-tchouen. Aussi, avec toute l’au- 
torité qui s'attache à son nom, A. de Humboldt a-t-1l pu écrire : «Au Nord et au Sud de la 
« longue chaîne du Thian-chan, de même que dans le Caucase, il existe une connexion 


« géologique très-étroite entre l’activité volcanique et les limites des cercles d’ébranle- 


U Voir la figure page 143. 

2? A. de Humboldt, Cosmos, L. IV, p. 390. 
3 Id. p. 394. 

4 Op. cit., p. 262. 


5 Géologie, p. 132. 


GÉOLOGIE. 1277 


« ment, les sources chaudes, les solfatares, les failles d’où s'échappe de l'ammoniaque 
« et les dépôts de sel gemme !. » 

La merveille du Se-tchouen, on peut dire de toute la Chine, c’est ce que les Chinois 
nomment ŸYen-tsin et Ho-isin, ou « puits de sel» et« puits de feu » ; ces puits existent à 
Ou-tong-kiao, à 4 lieues de Kia-ting fou et à Tsé-lieou-tsin. Signalés d’abord dans les 
Nouvelles Lettres édifiantes par l’évèque de Tabracca, ils ont été décrits en détail par 
M. Imbert dans le tome IT des Annales de la propagation de la for. 

Les puits de sel se trouvent dans la première des localités que nous venons de nommer ; 
selon M. Imbert, ces puits auraient de 15 à 1,800 pieds français de profondeur, 
sur 5 ou 6 pouces seulement de largeur, et sont complétement perpendieulaires, 
ereusés dans le rocher. On se sert pour cela d'une tête d'acier, de 3 ou 400 livres. 
pesant, crénelée en couronne, un peu concave par-dessus et ronde par-dessous, 
qui est mise en mouvement au moyen d’une bascule qui soulève l’éperon à 2 pieds de 
haut et le laisse tomber de son poids; « on jette de temps en temps quelques seaux d’eau 
« dans le trou pour pétrir les matières du rocher et les réduire en bouillie... Quand on à 
« creusé 3 pouces, on lire cet éperon avec toutes les matières dont il est surchargé.…. 
« on reste au moins trois ans pour creuser un puits. » L'eau retirée de ces puits est très- 
saumatre et contient un cinquième, quelquefois un quart de sel que l’on obtient par l’éva- 
poration dans de grandes marmites en fonte chauffées par la houille qu'on trouve en 
abondance dans les environs. L'air qui sort des puits est très-inflammable. Les puits de feu 
existent à Tsé-lieou-tsin ; le feu est employé pour la fabrication du sel : un seul puits, dit 
Imbert, peut faire cuire plus de trois cents chaudières, et l’eau évaporée en vingt-quatre 
heures forme un paté de sel pesant environ 300 livres. « La surface du terrain est 
« entièrement chaude et brüle sous les pieds... Ce feu ne produit presque pas de fumée, 
« mais une vapeur très-forte de bitume que je sentis à deux lieues loin du pays; la 
« flamme est rougeätre comme celle du charbon ?. » Il est probable que ce gaz est un 
hydrogène carboné, sans doute du grisou, d'autant plus que les mines de charbon des 
environs contiennent, suivant les paroles d’Imbert, « beaucoup d'air inflammable. et 
« qu'on ne peut pas y allumer de lampes. » 

D’après les textes chinois anciens, commentés par Klaproth et M. Stanislas Julien, un 
puits de feu ou o-tsin très-célèbre existait autrefois dans le Se-tchouen à 80 li au S.-0. 
de Khioung-tcheou ; de ce puits coulaient aussi deux sources salées donnant jusqu’à 30 
pour 100 de sel. Le feu du puits a brûlé du n° au xmr siècle de notre ère. 

Un autre phénomène est connu dans la province du Se-tchouen sous le nom de 
Ho-chan ou « montagne de feu ». Au mont Py-kia on aperçoit pendant la nuit une 
grande lueur peut-être produite par des gaz venant d’une houillère embrasée. De 
semblables Æo-chan existent dans la province de Kouang-si, par 108° 25' long. E. de Paris 
et 23° 27 lat. N.; dans celle de Chan-si, par 108° 14 long. E. et 39° 14 lat. N., par 


L Cosmos, t. IV, p. 396. 
? Luc. cit., p. 380. 


128 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


1114° 50° long. E. et 40° 5° 42’ lat. N. ; etenfin par 108 3’ long. E. et 38° 12’ lat. N. :. 
Dans cette dernière localité la montagne est remplie de couches de charbon qui brulent 
en partie. Des puits de feu ont été signalés par le P. Martini dans la même province. 

Tout le long des rives du Yang-tse Kiang on rencontre des dépôts alluviaux. Dans la 
partie de notre travail où nous parlons de l'itinéraire du voyage, nous avons, et à plu- 
sieurs reprises, signalé d'anciens lacs qui ont couvert le pays de leurs couches fertiles à 
Lin-ngan fou, à Yen-tcheu et en d’autres endroits. Nous avons dit aussi plus haut que 
le desséchement de certains de ces lacs pouvait dater de l'époque historique. ‘ 

Mais des formations plus anciennes existent le long des bords du fleuve Bleu. Elles 
ontété bien étudiées par Pumpelly, et d’après ses propres observations, et d’après celles 
de Blakiston. Ces alluvions sont formées de dépôts de graviers et d'argile, généralement 
stratifiéesencouches horizontales, garnissant les collines qui forment les flancs des vallées. 
« Différentes? en hauteur et en composition, ces alluvions semblent d’âges différents. La 
« plaine étendue, autrefois oceupée par le lac Tong-ting est garnie de ces terrasses. . . 
« formant une ceinture qui s'étend sur plusieurs milles au Sud, et occupe presque tout 
« l’espace situé entre les rivières de Siang et de Vuen... À Tung'siz le dépôt est formé 
« de cailloux roulés de quartz, de calcaire cimentés par une argile dure, et il conserve ce 
« caractère à la jonction de la rivière Siang avec le lac et le long de la rive Est. Mais la 
«composition générale est celle d’une argile bleue dure, avec des mouchetures irrégu- 
«lières blanchätres. Près de Tung’siz les terrasses paraissent avoir de 70 à 90 pieds de 


«haut... Blakiston mentionne des terrasses semblables comme se rencontrant en dif- 


= 


«férents points du Yang-tse dans le Se-tchouen. Le village de Tsing-tan à l'entrée Est de la 


A 


<gorge de Mi-tan, dans l'Ouest du Hou-pé, est bâti sur une terrasse de conglomérat bré- 


2 


<chiforme formé de fragments arrondis ou anguleux de calcaire, de silex, de gneiss et 


«d’autres roches métamorphiques, cimentées par un tuf calcaire. Cette formation emplis- 


= 


< sait primitivement la vallée d’un bout à l’autre, et ses amas s'élèvent de 40 à 50 pieds au- 


« dessus de la ligne des hautes eaux. » Ces terrasses latérales des vallées sont le résul- 
lat d'un déblai produit par « labaissement de la barrière liquide ou solide qui soutenait à 
« l'aval le cours d’eau déposant, à l'altitude correspondant aux altitudes du bord des ter- 
« rasses; et aulant il y a d’élages de ces terrasses, autant, à coup sur, il y a eu de ces 
« abaissements distinets*. » Bien différentes sont les terrasses lacustres qui sont au 
contraire le résultat d’un remblai, par l'apport suecessif de matériaux déposés peu à peu 
par les eaux qui, coulant sur une plus grande surface, ont perdu considérablement de leur 
vitesse, et laissent se précipiter d'abord les parties les plus grossières, puis des matériaux 
de plus en plus ténus. C’est ce que l’on voit, par exemple, pour le lae Tong-ting; cette 
grande masse d’eau qui occupait toule la plaine du Hou-pé et du Hou-nan, a été remplacée 
par des dépôts alluviaux, dont les débris forment maintenant les berges. Ces terrasses des 
lacs peuvent être, en effet, affouillées postérieurement à leur formation, et il ne reste 


A. de Humboldt. Asie centrale, &. IT, p. 531. 
MOD CMD AS 10: 


3 Dausse, Nouvelle Note sur les terrasses alluviales, Bull., Soc. géol. de Fr., 2 série, € XXV, 1868, p. 754. 


GEOLOGIE. 129 


. alors que des amas ressemblant fout à fait aux terrasses latérales des vallées et flanquant 
des deux côtés les anciennes rives. Le lac Tong-ting nous présente un exemple de ce 
fait: une grande partie de l’alluvion a été déblayée par les rivières « Yang-tse, Han, Siang 
«et Yuen... Dans le courant rapide qui a balayé les portions étroites de la vallée du 
« Yang-{se, les matériaux les plus gros résistèrent seuls au mouvement en avant; el lors- 
«qu'un accroissement dans la vitesse du courant arriva, seulement ces parties du dépôt 
« furent respectées, qui avaient été formées assez près du caleaire pour pouvoir être cimen- 
« lées en une masse dure par les eaux qui en descendaient. » (Pumpelly.) 

De semblables dépôts alluviaux se forment dans le Vang-tse Kiang et en rétrécissent le 
cours en bien des endroits. L’embouchure du fleuve Bleu, comme d’ailleurs celle de 
tous les grands cours d’eau, est obstruée par des alluvions de toute espèce, qui forment 
un vaste delta compris entre Tong-tcheou et la baie de Hang-tcheou, se continuant vers 
le Nord-Est avec la grande surface alluviale qui occupe une partie des provinces du Pe- 
tche-li, du Ngan-hoeï et le côté Sud-Ouest du Chan-tong. 

Pour résumer la géologie de la partie de la Chine située au Sud du cours du Yang-tse 
Kiang, nous dirons que les terrains qui composent le sous-sol de cette vaste contrée sont 
l° les roches granito-porphyriques ; 2°les roches métamorphiques ; 3° le dévonien ; 4° le trias; 
5° les dépôts quaternaires et modernes : le silurien peut exister dans certaines parties. 

Des formations semblables occupent une grande partie de l’Asie. Dans la tribu des 
Kali, par exemple, au pied de l'Himalaya, Stachey * a trouvé des roches anciennes 
devant avoir plus de 14,006 pieds d'épaisseur, formées de couches métamorphiques, de 
schistes cristallins ou conglomérats le plus souvent stratifiés N.-N.-0.; suivant cette 
direction paraissent coincider toutes les grandes lignes des roches éruptives. Au-dessus 
viennent des couches n’appartenant plus au dévonien, mais au silurien, et qui semblent 
se terminer le long d’une ligne de section d’une grande faille, à laquelle succèdent des 
couches fossilifères ayant tous les caractères du Muschelkalk. 

Nous avons dit plus haut l'assimilation du Trias de Chine avec celui de l’Indoustan et 
d'Amérique. : 

Les mêmes formations existent en Mongolie d’après M. Armand David ?. Le granit est 
très-abondamment répandu ; ilsupporte des micaschistes ou des gneiss, au-dessus desquels 
est un calcaire compacte, bleuâtre, couronné par des schistes gris ou noiratres, des 
grès jaunes plus ou moins grossiers en couches épaisses plus ou moins contournées ou 
soulevées. De nombreuses mais très-confuses empreintes végétales observées sur ces 
schistes appartiendraient à des frondes de fougères ou à des calamites. 


20 Cochinchine et Laos. 


En Cochinchine, dans le Cambodge, dans le Laos jusqu'aux frontières de la 


1 Quart. Journ. geol. Soc. of London, t. VIT, 1852, p.ret v. 


? Journ. d'un voyage en Mongolie fait en 1866. Nouv. Archev. du Musée d'hist. nat. de Paris, 1868. Bull., p.62. 
HI. 17 


130 GEÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Chine, nous retrouverons les mêmes formations que celles que nous venons d'étudier 
dans Empire du Milieu. Nous allons voir que les terrains que nous avons observés le 
long du cours du Mékong peuvent complétement être parallélisés avec ceux des bords 
du Yang-tse Kiang. 


S 107, — Z'oches cristallines. 


A. Granile et Syénite. — Vu cap Saint-Jacques part une chaine de montagnes qui 
se dirige d’abord S.-0., N.-E., et qui, arrivée à la hauteur du 16°, court S.-E., N.-0., 
sépare la Cochinchine du bassin du Mékong, traverse le royaume de Xieng Mai et la 
province chinoise du Vun-nan, au Nord de la Birmanie. D'un autre côté si, par 
Hué, nous menons une ligne orientée S.-0., N.-E., elle passera par l'ile d’Haï-nan, 
par Macao, l'archipel des Chusan, et aura la même direction que la bande granito-méta- 
morphique indiquée sur la carte géologique de Pumpelly. Or cette ligne que nous venons 
de tracer passe par les points où le granite et la syénite abondent. « Depuis l'ile d'Haï-nan 
« jusqu'à l'archipel des Chusan, dit Kingsmill, une rangée de montagnes granitiques de 
« 1,000 mètres d'altitude court à peu de distance de la mer. » Nous avons parlé plus haut 
des roches granitiques de la partie de la côte chinoise orientée suivant cette direction. 
De Tourane, qui se trouve situé sur la ligne tracée tout à l'heure, Chevalier, Guilbert !, 
l'expédition de la 7héfis, ont rapporté du granite et de la syénite. Les granites, qui, du 
cap Saint-Jacques, s'étendent jusqu’à Hué, ont été dès 1828 signalés par J. Crawfurd ?. 
De Poulo-Condor, Germain et Le Mesle ont envoyé au Muséum de Paris des syénites 
verdâtres renfermant du fer oxydulé et de la pyrite. Dans le lit du Mékong, à Cratieh, nous 
avons trouvé des morceaux de syénite paraissant provenir des roches qui forment le fond 
du fleuve. Les principales chaines de montagnes du royaume d’Annam sont composées 
de granite et de syénite d’après le dictionnaire de M’Culloch *. Le petit massif de mon- 
tagnes de Pursat doit aussi renfermer des roches granitiques dont des échantillons nous 
ont été donnés à Oudong. 

B. Pegmatite. — En relation avec le granite on voit à Tourane des pegmatites rouges à 
grains moyens, avec parties chargées de mica verdatre , et des pegmatites micacées blan- 
chatres. De la pegmatite rosée a été trouvée entre Vien Chang et Luang Prabang ; la roche 
élait roulée de sorte que nous ne connaissons pas ses relations avec les roches voisines. 

C. Eurite. — De la montagne de Pnom Krecht, à 40 kilomètres à l'Ouest de 
Oudong, Germain et Le Mesle ont rapporté de l’eurite grisätre avec cristaux d’amphi- 
bole. Dans le lit d’un torrent situé à l'Est et près du village de Stung Treng, sur les 
bords du Grand Fleuve, nous avons observé des eurites grisätres formant des filons 
dans l’ophite; l’éruption de ces eurites est par conséquent postérieure aux ophites et 
nous verrons qu'elle se place entre la formation de cette roche et le dépot des talschistes. 


1 Coll. du Muséum, cat. 3, O, 66. 
2 JE: Ben do 2e 


Pocvcit.,p.1UG: 


GEOLOGIE. 131 

D. Labradorite. — Nous n'avons vu cette roche qu'en un seul point, près du village 
de Peunom ; elle était roulée dans le fleuve. 

E. Porphyres et Mélaphyres. — Des porphvres quartzifères forment les collines qui 
s'étendent depuis l’île de Khong jusque près d’Atiopeu ; en ce point cette roche est d’un 
noir rougeûtre. Du porphyre non quartzifère se trouve aussi au même endroit. Le 
même porphyre quartzifère rougeatre compose une partie des collines qui bordent le 
Mékong entre Vien Chang et Luang Prabang. Dans cette dernière localité la roche à 
paru après le dépôt des grès triasiques qui ont été soulevés dans la direction des mon- 
tagnes porphyriques comme le montre la coupe n° 4. En allant du Sud au Nord, on voit 
successivement les montagnes de calcaire, les schistes métamorphiques supportant les 
grès, les porphyres formant des pitons relevant vers eux les schistes etles grès, puis les 
mêmes couches placées dans l’ordre inverse, grès, schistes, calcaires. 

D'un autre côté, à Khong, le porphyre est recouvert d’un conglomérat polygénique 
renfermant des débris, parfois considérables, de ce même porphyre, de quartz, de 
pegmatite, des fragments d’arkoses silicifiées, le tout lié et réuni par un eiment de grès 
quartzeux verdatre; cette couche, qui, en ee point, atteint plusieurs mètres d'épaisseur, 
est contemporaine des amas de poudingue quartzeux qui se relient si intimement à la 
partie supérieure du trias. Nous pouvons done établir que c’est vers la fin de cette période 
que le porphyre a surgi. Cette éruption doit être contemporaine de celle des plus récents 
porphyres quartzifères de Si-chan en Chine, qui, d’après Pumpelly, a eu lieu après le dépôt 
du «Chinese coal measures, » et qui a coïncidé avec l'émergence de toute la Chine propre. 

La partie supérieure est, à Khong, plus ou moins décomposée et passe à l'argilophyre, 
la roche est coupée en divers sens de veines de quartz blane ou rosé, de quartz compacte 
avec cristaux de pyrite de fer, formant au milieu de la masse de minces filons, comme on 
le voit par la coupe n° 5. (Voir la figure de la page 143.) 

Le kaolin, qui, par sa composition, se rattache au porphyre, se retrouve en différents 
points du cours de Mékong. Un dépôt considérable de cette précieuse terre se voit entre 
le Mékong et la rivière du Grand Lac, dans une coupe qui, passant au niveau de 
Cratieh, vers 12°, irait du côté de la chaîne de Pursat. Le kaolin existe aussi en abondance 
entre Samabouli et Nong Kai, sur la rive droite du fleuve, dans une colline qui court 
parallèlement au Mékong; cette terre est plus ou moins veinée en rouge par un sel de 
fer et renferme quelques parties quartzeuses. Le kaolin se retrouve aussi à Moun-hô, un 
peu au-dessous de Vien Chang. 

Les argilophyres se voient encore abondamment dans le lit du Mékong, près de Xieng 
Khong, dans la province de Muong Nan. Ces roches composent une partie des collines de 
Poulo-Condor, où Germain a observé des porphyres quartzifères en partie décomposés 
avec veines de quartz blane, des porphyres rubannés, des porphyres passant à l'eurite. 
Les indigènes nous ont donné des porphvyres venant du haut de la rivière de Oudong. 

A Cratieh le fond du fleuve est formé de porphyres pyroxéniques d'un noir foncé avec 
nombreux cristaux de pyroxène augite et des points blanchâtres de quartz; un peu de 
calcaire remplit les cavités de la roche, aussi en certains endroits se fait-il. une légère 


132 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


effervescence avec les acides. Ce mélaphyre est près des ophites, avec lesquels il est 
peut-être en relation. 
Quelques cailloux roulés de très-beau porphyre vert antique ont été trouvés dans le lit 


du fleuve au-dessus de Luang Prabang. 


S Il — Roches métamorphiques. 


A. Gneiss. — À Tourane, Îtier a observé du gneiss granitoïde, passant à un conglo- 
méral composé de grains de quartz, de feldspath, de mica vert et de fragments de 
roches granitiques. La stratification de ce gneiss est très-tourmentée ; il est traversé par 
de larges filons de quartz compacte avec fer hydraté blanchâtre ou grisätre, surtout à la 
montée du fort de Non-nay ; en ce point certains dykes sont orientés Nord-Est. Ce gneiss 
forme les hautes montagnes qui à l'Est bordent la baie de Tourane. Au contact du granite, 
le gneiss est leptynoïde, ainsi qu'on le voit à l'ile de l'Observatoire. Au côté oriental 
de la baie sont des gneiss sur-micacés rougeûtres, fortement contournés. A File de Mo-kot, 
Itier a signalé des fragments de roches de sédiment empatés dans le gneiss, et, à la pres- 
qu'ile de Thein-tha, Chevalier a vu du granite entourant des fragments de gneiss. Le 
granite a done fait éruption à deux époques différentes : d’abord avant la formation du 
gneiss qui repose sur ce granite plus ancien et aux dépens des matériaux duquel il a été 
formé, puis à une époque postérieure, après le dépôt du gneiss que ce granite a traversé. 

B. Euritine. — Cette roche, remaniement de l’eurite, a été trouvée par Le Mesle 
dans les montagnes de Pursat. En relation avec les talschistes, et plus récents que ceux- 
ci, puisqu'ils les surmontent, sont dans le lit du Mékong, entre Vien Chang et Luang 
Prabang, 
ques nodules calcaires; en certains points le lit du fleuve est encombré de gros blocs 


de nombreuses couches d’euritine plus ou moins feuilletée, renfermant quel- 


d’une roche fusible en vert au chalumeau, qui est de l’eurifine à grains très-fins; ces 
blocs sont subordonnés à l’euritine schistoïde. 

C. Talschistes. — Les lalschistes forment dans le lit du fleuve, entre Vien Chang et 
Luang Prabang, de grandes surfaces plissées et contournées parfois en zigzag dans tous 
les sens, coupées par de nombreux bancs de phthanite et de lydienne, souvent verticaux, 
courant surtout au Nord-Est. Ces talschistes sont par places phylladiformes, et renfer- 
ment des veines calcaires. 


S IT. — Schistes anciens et grauwacke. 


A l'ile de Khôn on voit au-dessous du calcaire dévonien des schistes brunâtres, plus 
ou moins fissiles dont nous ne pouvons préciser l’âge; il se pourrait pourtant qu'ils ap- 
partinssent au terrain silurien ou à la partie la plus inférieure du dévonien; du moins 
ressemblent-ils singulièrement aux schistes qu'on trouve dans ces deux formations. 

Près de Bien-hoa, dans le lit même de la rivière, ils reposent sur le granite et sont 
recouverts parles alluvions et la limonite ; ici ces schistes passent aux phyllades tégulaires. 


GEOLOGIE. 133 


Entre Vien Chang et Luang Prabang on voit le contact de ces schistes, qui en ce point 
sont plus ou moins fissiles, et des phyllades calcarifères verdâtres, jaunâtres, rubanées 
avec le grès du trias; le calcaire manque entre les deux formations. 

Le lit du fleuve et des rivières qui s’y déversent présente, près de Muong Long, de 
nombreux gisements de phyllades tégulaires dont la couleur varie du cendré au noir, en 
passant par le brun, le rose, le vert, ete. 

Dans la baie de Tourane, du côté Est, Itier a signalé, au-dessus du gneiss et au- 
dessous du calcaire dévonien, de la grauwacke rouge: «tantôt à grains fins se rappro- 
« chant du psammite, tantôt à gros grains et analogue, dans ce cas, à un poudingue gros- 
« sier, composé de morceaux informes de roches siliceuses, dont les arètes sont à peine 


« arrondies, et que réunit un ciment arénacé très-fin *. » 


S IV. — Terrain dévonien. 


Près de Tourane, au-dessus de la grauwake, comme nous venons de le dire, se 
montre le calcaire qui forme, en cet endroit, les roches de Non-nuoc, roches de marbre 
à nombreuses grottes «où sont les immenses pagodes que le roi Minh-mang éleva au 
dieu Foo*.» En ce point de minces lits parallèles de schiste noir traversent la roche. En 
d’autres endroits le calcaire est saccharoïde ou compacte, bleuâtre ou rosé, veiné de 
rouge (Voy. de la Thétis), surtout sur la côte orientale de la baie (Voy. de la Favorite); 
là le calcaire est noiratre, et forme des couches de 80 pieds environ d'épaisseur dirigées 
vers le Nord; dans certaines parties le calcaire est phylladien, laminaire. D’après le 
Voyage de la Thétis, du calcaire fibreux, aragonile, s'élève au milieu d’une plaine de sable 
située le long de la côte, à 2 lieues de Tourane; ce calcaire est frès-célèbre dans tout le 
royaume d’Annam par ses pagodes souterraines. 

Dans toute la région que nous avons parcourue le calcaire est très-abondamment 
répandu ; il supporte presque partout la vaste formation triasique dans la plupart des 
coupes suivantes. Ce calcaire est plus ou moins dolomitique, à Khôn, à Peunom, près de 
Vien Chang principalement. Sa couleur varie du blanc au noir (Bassac, Peunom, montagne 
de Ban Sôm près Luang Prabang, etce.), en passant par le brun (Pakmoun, Peunom, Ban 
Sôm), le rose (île de Khong, Vien Chang, Luang Prabang), le violet et le verdâtre (entre 
Luang Prabang et Vien Chang, etc.), le gris (mêmes localités). De nombreuses veines de 
carbonate de chaux spathique le traversent. À Peunom, Vien Chang, il renferme quelques 
cristaux de pyrite et des filons de quartz. 

Les principales chaines calcaires sont orientées N.-0., S.-E., comme on le voit, par 
exemple, à Lakon, sur la rive gauche du fleuve. Le calcaire constitue tous les sommets 
les plus élevés, pouvant atteindre jusqu’à 1,000 et 2,000 mètres d'altitude. Les sommets 
forment souvent, comme à Lakon, des pitons complétement isolés au milieu des psam- 


1 Loc. cit., p. 109. 
2/1d-,0p. 140: 


134 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


miles et des grès triasiques relevés et dérangés; des pics isolés surgissant au milieu du trias 
se voient aussi à Xieng Tong entre Muong You et Muong Long, et en bien d’autres en 
droits. À Lakon toute la plaine est composée de calcaires surmontés, par places, de blocs de 
quartz; celte plaine est parsemée de pitons calcaires. Les quartzites de Oudonget de Pnom 
Penh doivent aussi appartenir à la formation dévonienne et être inférieures au calcaire. 

La coupe n° 6 va obliquement de l'Est à l'Ouest en passant par Saïgon, Oudong, la 
plaine de Cambodge et Pursat. Elle montre de l'Est à l’Ouest l'axe granito-syénitique al- 
teignant environ 400 mètres d'altitude, le contact des phvyllades et des granites dans la ri- 
vière de Bien-hoa, la plaine d’alluvion, avec limonite, du Mékong le massif de 
quartzites ayant 150 mètres, la plaine alluviale du Cambodge, et les montagnes calcaires 
de Pursat, élevées de 300 mètres. 

Les eaux et les influences atmosphériques ont formé de nombreuses cavernes dans le 
calcaire. À Nan-hô, on observe une caverne creusée dans un marbre blanc et noir veiné 
de lignes blanchâtres. 

Le calcaire présente partout de nombreuses parties spathiques, qui sont des débris 
d'enerines. Nulle part nous n’y avons vu d’autres débris organiques. En un seul endroit 
nous avons trouvé, dans le lit d’un torrent, des morceaux roulés d’un calcaire grisätre 
pétri d'avicules, malheureusement en trop mauvais état de conservation pour être déter- 
minées spécifiquement. Nous n'oserions affirmer que ce calcaire appartint à la formation 
que nous éludions en ce moment; il est beaucoup plus argileux et ne renferme aucune 
des parties spathiques ou encrinitiques qui caractérisent, partout, le long du Mékong 
comme dans les provinces de Chine que nous avons parcourues, le caleaire dévonien. Il 
se pourrait que ce calcaire à avicules appartint à une autre formation; il nous est complé- 
tement impossible de déterminer son âge géologique, ne le connaissant que par quelques 
fragments 1sol6s. 

Nous venons de dire que dans tout le cours de notre voyage nous n'avions trouvé, 
dans le dévonien, aucun débris organique, mais Le Mesle a rapporté de la chaine de 
Pursat un calcaire rosé avec débris d’encrines et des montagnes de Pnom Krecht, près 
de Battambang, à l'Ouest du Grand Lac, un ealcaire avec Encrines, Hémithiris, qui a été 
reconnu comme paléozoïque par d’Archiae. Le calcaire grenu serait, en ce point, direc- 
tement en contact avec les roches plutoniques. Ces calcaires des montagnes de Pursat res- 
semblent tout à fait à ceux que nous avons observés le long du cours du fleuve, dans 
le Laos et en Cochinchine; ceux-ci à leur tour sont complétement identiques au 
calcaire de la province du Vun-nan (Lin-ngan fou, Che-pin, Yun-nan, rives du 
Song Koï, ete.), et de tout le cours du Yang-tse Kiang, qui, comme nous l'avons dit 
plus haut, à été déterminé comme dévonien, d’après les fossiles qui y ont été trouvés. 
Nous paralléliserons complétement le calcaire de Chine avec celui du Laos, et nous de- 
vrons considérer aussi ce dernier comme appartenant à la grande formation dévonienne, 
probablement à la partie supérieure de ce terrain. 


GEOLOGIE. 159 


S V. — Terrain triasique. 


Cette formation, qui est si abondamment représentée dans toute la région que nous 
avons parcourue, en Chine comme dans le Laos, se compose de plusieurs couches 
se reliant les unes aux autres. De bas en haut on a 1° des schistes bruns très-légère- 
ment micacés; 2° des calschistes; 3° des psammites; 4° des grès; 5° des psammiles ; 
6° des grès ; 7° des poudingues. Des anthracites et du charbon, du minerai de cuivre 
peuvent venir s’intercaler entre ces diverses assises. À l'étude du trias se rattache aussi 
celle des puits salins et des extractions de sel de la plaine de Oubon et de Kemarat. 

Une coupe” faite vers le 15° et allant jusqu'à Bassac, en passant par Attopeu, et la 
plaine volcanique du Sé Don, orientée E.-0., nous montre d’abord les montagnes 
de granite pouvant en ce point atteindre environ 800 mètres d'altitude. Contre cette 
roche s'appuient des grès triasiques atteignant 700 mètres de haut et suivis par les pro- 
duits volcaniques de la plaine dont nous venons de parler. Au-dessous de ces grès sont 
des schistes brunätres s’élevant jusqu’à la hauteur de 500 mètres. À Bassac les grès ont 
environ 200 mètres de haut; le tout est couronné par 200 mètres de psammites. Les al- 
luvions forment le fond et les bords de la rivière d’Attopeu et du Mékong. 

La coupe plus détaillée du terrain à Bassac, à l’endroit où sont les mines de euivre, 
donne de bas en haut : 

1° Schistes bruns, avec quelques parcelles très-petites de mica blanc; 

2° Calschistes grisätres et noirâtres, argileux par places, avec parties siliceuses, pas- 
sant au conglomérat. Quelques empreintes végétales très-frustes et fragments de char- 
bon vers la partie supérieure. 

3° Les couches supérieures sont imprégnées de carbonate de cuivre bleu et vert, elles 
atteignent de 0,50 à 1 mètre de puissance. Des filons de charbon de 0",005 à 0",03 
d'épaisseur s’intercalent entre ces couches. 

4° Grès jaunatre micacé. 

5° Psammites d’un jaune verdätre, à paillettes nombreuses de mica, contenant quel- 
ques fragments de charbon. 

6° Psammites rosés à grains plus ou moins fins, à nombreuses et petites paillettes 
de mica. 

7° Psammites rouges avec parties entièrement siliceuses. 

Tous ces psammites sont par couches plus ou moins épaisses, horizontalement stra- 
ufiés. 

Nous allons décrire en détail chacune des couches de la formation, confondant dans 
une même étude les grès supérieurs et inférieurs, les psammites placés au-dessous et 

au-dessus du grès. 
A. Calschistes et Schistes. — Entre Vien Chang et Luang Prabang on voit le contact du 
dévonien et du trias. En remontant le fleuve, on a d’abord des schistes phylladiens calea- 


! Voir la coupe n° 7 de la figure page 143. 


136 GEOLOGIE ET MINERALOGIE. 


rifères supportant des grès qui se divisent par couches tabulaires; puis viennent les 
roches métamorphiques dont nous avons parlé plus haut. On rencontre ensuite des grès 
gris-brun alternant avec des phyllades ; ces grès dont les couches sont fortement relevées 
sont supportés par des calschistes violets et verdâtres reposant eux-mêmes sur des calcaires. 

Des schistes phylladiens calcarifères se voient à la base des collines de Muong Lim, dont 
le sommet (500 à 600 mètres au-dessus de la plaine) est couronné par un grès grossier. 

Dans le Se Hinboun, près de Houten, les calschistes sont verdàätres ou noirâtres, 
feuilletées et contiennent quelques traces de carbonate de cuivre; ils sont absolument 
semblables à ceux qui forment la base des montagnes de Bassac. Dans la même rivière, au- 
dessus de Pakkan les couches sont contournées; les psammites se voient un peu plus haut. 

Nous ne pouvons préciser l'épaisseur de la couche des schistes et des calschistes. A la 
vieille pagode de Bassac (Wat Phou), ils atteignent 100 mètres au-dessus du niveau du 
fleuve ; dans le contre-fort Nord-Est de cette même chaine de montagnes 1ls s'élèvent à 
400 à 500 mètres au-dessus de la plaine. 

B. Psanumites. — À Lakôn les psammiles rouges reposent directement sur le cal- 
caire dévonien et se relèvent fortement vers lui, comme le montre la coupe n° 8. 

A Luang Prabang, les psammites sont aussi supportés par le calcaire ; ils sont recou- 
verts par les grès ; ces deux couches sont relevées vers le calcaire. (Coupe n° 9.) 

La couleur et la consistance des psammites varient beaucoup. La couleur passe par le 
gris, le gris rosé, le gris verdätre, le jaunätre, le jaune-rougeätre, le rouge vif. Certaines 
couches renferment des parties calcaires et font plus ou moins effervescence avec l'acide 
chlorhydrique. Le mica est plus ou moins abondant, et les paillettes, très-pelites ici, sont 
plus loin très-grandes. Le grain de la roche diffère aussi; en certains endroits elle est 
presque friable, en d’autres elle est très-cohérente. Les psammites rouges forment la vaste 
étendue de pays comprise entre le cours du Mékong, celui du Sé Moun et des rivières tri- 
butaires au Sud, jusqu’à Houten au Nord, et, suivant les indigènes, s’étendraient dans toute 
la région Ouest. À ces psammites se rattache l'étude des exploitations de sel de la contrée. 
Nous indiquerons, au quatrième chapitre de cel ouvrage, la manière dont on extravait le sel. 

La plaine basse dont nous venons de tracer les limites est entourée, mais à de grandes 
distances, de montagnes de grès, reposant sur des psammites rouges, qui, avec des argiles 
bleuatres et blanchätres, en forment le sous-sol. Chaque année, cette plaine est cultivée et 
couverte de belles rizières ; faisons remarquer que le riz vient fort mal dans les endroits 
salés où à eaux saumâtres, de sorte qu'il est très-probable que les premières pluies, qui 
sont si abondantes dans ces régions, lavent les terres superficielles et les débarrassent du 
sel qu’elles peuvent contenir. Un dépôt de chlorure de sodium ou une nappe salée doit 
exister entre les psammiles et l'argile. Quand viennent les fortes chaleurs, le sol est for- 
tement échauffé et desséché ; l’eau salée monte par capillarité à travers les couches super- 
ficielles qui sont un peu sablonneuses, et, en s’évaporant à la surface, ce qui doit arriver 
promplement, grâce à un soleil de feu, laisse déposer le sel sous forme d’efflorescences 
ou de croutes légères. Les pluies torrentielles de la mauvaise saison entrainent une partie 
de ces petits amas de sel, et à la saison sèche le même phénomène d’évaporation se re- 


GÉOLOGIE. 137 


produisant, on comprend que la surface ne soit salée que pendant une partie de l'année. 

Nous avons vu précédemment en parlant de la géologie de la Chine, que Pumpellv 
rattachait les nombreux puits salés du Se-tchouen, à la formation du trias, d’après ses 
propres observations et celles d’'Imbert ; la présence du sel au milieu des psammites d’Ou- 
bon, de Kémarat, vient corroborer cette opinion. 

Des grès psammites semblables existent aux environs de Singapore(Voy. de la Bonate); 
ils ressemblent tout à la fois à ceux des couches supérieures d’Amnat, de Kémarat, de Bassac. 

D’après Ilier, des psammites rougeatres se trouvent aux îles Chusan et du Tigre 
dans la baie de Tourane. 

Faisons remarquer en terminant que les psammites que nous avons observés dans 
notre voyage, présentent la plus grande similitude avec ceux qui, en Europe, constituent 


les grès bigarrés. 


C. Grès et poudinques.— Une coupe orientée E.-0. l, et passant au niveau de Stung 
| x EU a) 
Treng, donnera le contact des grès et des calcaires du dévonien. Cette coupe montrera 


les collines granitiques, hautes de 500 mètres environ, une vaste plaine d’alluvions avec 
dépôts de fer limoneux ou bog-ore, un mamelon d’ophites élevé de 15 à 20 mètres au- 
dessus de la plaine, une seconde plaine alluviale au milieu de laquelle coule le Mékong. 
puis les calcaires supportant environ 100 mètres de grès. 

Les grès de la formation du trias sont de trois espèces : grès arkose, grès quartzeux, 
grès polygénique, ce dernier passant souvent au poudingue. 

Entre Pakmoun et Kémarat, certaines parties de la roche passent aux grès feldspa- 
thiques. Des grès arkoses se voient aussi entre Vien Chan et Luang Prabang; ce sont là les 
deux seuls points où nous ayons trouvé des arkoses se rapportant au frias. 

Des conglomérals avec porphyre quartzeux, quartzites, quartz, le tout relié par une pâte 
de grès micacé, se voient, avons-nous dit plus haut, à Khong, et sont synchroniques de 
ces poudingues qui forment la partie supérieure de la formation triasique du Laos. 

Le sommet du mont Bakheng, près des ruines d’Angcor, au Nord-Est du Grand Lac, est 
formé de conglomérats polygéniques à gros blocs de quartz, à fragments de pegmatite , 
liés par un ciment de grès micacé; ces poudingues, superposés aux grès, sont du même 
âge que les précédents. 

Entre Samboc et Stung Treng, sur la rive Est du Mékong, les bancs de grès gris 
bleuätre inelinés de 15° à 20° N., sont recouverts aussi de poudingues avec parties 
calcaires et quartzeuses. Aux rapides du Sé Moun, à Pakmoun et Pimoun, de même 
qu'entre Lakon et Houten, le grès gris verdâtre passe aussi à un poudingue renfermant 
des cailloux de quartz et de calcaire ; à Pakmoun ces divers matériaux sont noyés dans une 
pâte argilo-ferrugineuse rose jaunâtre ; en ce dernier endroit, le poudingue couronne des 
collines de 500 à 600 mètres de hauteur. 

Au-dessus de Luang Prabang, le conglomérat contient des blocs qui ont jusqu’à 0,50 
et0",60 de diamètre, et qui sont à peine roulés. 

Ricketts à rapporté de la Birmanie, et le voyage d'expédition de la Bontte de Singa- 


! Voir la coupe n° 10 de la figure page 143. 
II. 18 


158 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


pore, dans l’Indoustan, des grès quartzeux à gros grains ferrugineux avec galets de quartz 
tout à fait semblables à ceux que nous avons pu observer. Chevalier a trouvé aux environs 
de Tourane un poudingue quartzeux, et un grès siliceux noiratre à gros grains avec nom- 
breux cailloux de quartz. 

Les grès forment deux couches séparées entre elles par une assise de psammites. La 
couche inférieure ne se voit qu'à Bassac et à Muong Lim; partout ailleurs les psammites 
sont inférieurs aux grès. 

Comme nous l'avons dit dans notre itinéraire, la couleur et la texture des grès varient 
beaucoup. Lei gris, là rougeätres ou noirâtres, 1ls sont en certains endroits rosés ou jau- 
natres, et en d’autres verdatres, bleuâtres ou blanchatres. Renfermant en certains points 
des parties calcaires, ils sont complétement siliceux en d’autres. Tantôt très-fins, et alors 
utilisés pour les ouvrages qui demandent du fini, tantôt grossiers et passant au poudingue, 
comme nous venons de le dire, ils présentent tous les degrés de cohésion. Ainsi ils peu- 
vent être très-compactes, comme entre Lakon et Houten, ou très-friables, comme à Luang 
Prabang. De Vien Chan à Luang Prabang, au milieu des grès sont intercalées des phyl- 
lades. En un mot les grès présentent presque toutes les variétés, et sont, selon les endroits, 
grès friables ou cohérents, fins ou grossiers, schisteux ou phylladiens, compactes ou fis- 
siles, ferrugineux, calearifères ou siliceux. 

D. Charbon et anthracite. — Nous avons dit que ces précieux combustibles se trou- 
vent en Chine dans la formation triasique, et sont tantôt intercalés dans des couches de 
grès, tantôt entre ces roches et les schistes. Près de Ma-chang, près du confluent du Pe- 
chouy kiang et du Kin-cha kiang, le charbon est compris entre les grès et des schistes 
brunâtres qui s'appuient sur un massif caleaire (voy. Coupe n° 11). Ce schiste est exacte, 
ment semblable à celui qui, aux mines de Bassac, forme la partie inférieure de la coupe 
ét qui, en ce même endroit, renferme de minces couches de charbon‘. Les mines de 
houille de la tribu des Kouys à l'Est du Grand Lae, signalées par Gellev ?, celles qui doivent 
exister aux environs de Luang Prabang, sont sans doute dans les mêmes relations. 

E. — Les grès, psammites, schistes, poudingues que nous avons pu voir dans le Laos 
sont absolument semblables, et situés dans les mêmes relations que les couches que nous 
avons observées, dans le Vun-nan, et celles-ci sont identiques aux roches étudiées par 
Blakiston, Pumpelly et d’autres géologues. Nous pouvons donc rapporter aussi au trias 
les strates comprises entre les schistes inférieurs de Bassac et les poudingues porphyriques 
de l'ile de Khong. Vers la fin de la période triasique, ont fait irruption les porphyres quar- 
(zeux du massif compris entre le Mékong, la rivière d’Attopeu et le Sé Don, ceux de Luang 
Prabang et de Xieng Khong, qui de leurs débris ont formé des poudingues polygéniques 
comme ceux de l'ile de Khong. C’est vers la même époque qu'a eu lieu le soulèvement 
des montagnes calcaires. Ce soulèvement est certainement postérieur au dépôt du trias, 
dont les couches sont relevées dans la direction du calcaire, comme l’ont montré les coupes 
prises à Khong, à Lakon, à Luang Prabang, à Xieng Tong, pour ne citer que ces points. 


1 Cf., le 4° chapitre. 
2PPoc- cie pie 


GEÉOLOGIE. 139 


S VI. — Roches volcaniques. 


Les roches volcaniques de la Cochinchine et du Laos appartiennent à six espèces : ce sont 
des Wimosites, des Basalles etdes Wackes basaltiques, des Laves, del’Obsidienne, des Ponces. 

A. Ponces. — Nous ne connaissons cette roche que par les débris trouvés roulés sur 
le sable de la baie de Tourane (Chevalier). 

B. Obsidienne. — Un seul fragment d’obsidienne a été observé par nous sur la rive 
gauche du Mékong, un peu au-dessus de l'embouchure du Sé Don. 

C. Mémosite. — Au débarcadère de Muong Lim, au milieu des couches d'un grès 
altéré monte un filon de mimosite, mesurant 38 centimètres d'épaisseur, et dirigé E.-0. 
Ce dyke dépasse de quelques centimètres les grès qui, plus tendres, n’ont pas autant ré- 
sisté aux influences atmosphériques. Cette Dolérite mimosite est tout à fait semblable au 
trapp en filon, vu par Rickett à Seconderabad *. 

D. Basalles et wackes. — Nous avons déjà dit que le vaste friangle formé par le Mé- 
kong, le Sé Cong ou rivière d’Attopeu et le Sé Don, était occupé, dans sa plus grande éten- 
due, par des produits volcaniques, au milieu desquels se trouve isolé un massif de grès. 

Vis-à-vis de Bassac, à l'embouchure du Sé Don, sont des colonnes de wacke à retrait 
bolaire. Les basaltes forment une série de colonnes prismatiques, très-serrées, un peu 
au-dessous de la cataracte du Sé Don. 

E. Laves.— Les laves appartiennent à deux époques, comme le montre la coupe n° 13 
que nous avons prise au même endroit. Là le plan basaltique est recouvert d’une première 
couche de lave de 6 mètres d'épaisseur, dans les retraits de laquelle une autre coulée est 
venue s’épancher et s’étaler sur ie basalte qu’elle a atteint en plusieurs points, à travers la 
lave la plus ancienne fendillée. Ces laves ont englobé des fragments de granite et des cail- 
Joux roulés. Les cratères par où ont été vomies ces laves basaltiques ont eu leurs bords 
peu à peu dégradés par les agents atmosphériques, de sorte qu'ils servent aujourd’hui de 
réservoir à de petits lacs circulaires. Entre le lit du Sé Don et les montagnes on voit aussi 
de nombreux monticules exclusivement formés de débris volcaniques ; ces monticules 
disposés en cercle sont les restes d'anciens cratères peu à peu comblés par les tufas et la 
terre végétale. Dans le lit d'un torrent qui se jette dans le Sé Cong. 10 mètres de lave 
reposent sur un mince lit de cailloux roulés quartzeux, et sur un calschiste, qui par l'effet 
de la chaleur s’est divisé en morceaux losangiques figurant tout à fait un parquet. 

Un autre point volcanique a été signalé par H. Mouhot?, à Petchabourvy, aux montagnes 
de Deng, où existe un ancien cratère entouré de basaltes et de laves. 

Après Luang Prabang, on retrouve des produits volcaniques. A Xieng Khong, nous 
avons vu un monticule arrondi de lave de 50 à 60 mètres de diamètre. A une demi- 
Journée de marche de là, dans les berges du fleuve, sont deux autres montieules semi- 
sphériques de lave entourés de schistes métamorphiques soulevés. La lave en ces points 


1 Cf. l'échantillon au Muséum d'histoire naturelle et la coupe n° 42 de la figure page 143. 
2/P0C CU., p.135. 


140 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


n’a pas coulé el n’est pas arrivée au jour; elle a seulement redressé et dérangé ces schistes, 
et n’a été découverte que par l'érosion des eaux qui ont entamé les roches plus ten- 
dres (voy. la Coupe n° 14 de la figure page 143). 

Nous devons signaler ici la proximité des roches porphyriques ; même chose se voit 
entre Khong et Bassae. Il est intéressant de noter que dans les deux points où se trouvent 
les produits volcaniques, là aussi existent des massifs porphvriques. La roche qui a 
dérangé si violemment les couches entre Vien Chan et Luang Prabang, est aussi du por- 
phyre quartzeux, et près de là, coïncidence encore, nous avons trouvé des schistes dé- 
composés, ressemblant à des {4ermantides. 

F. Tufas. — Par suite de l’action des agents atmosphériques, les roches volcaniques 
ont subi des altérations diverses. Nous venons de signaler la présence des wackes. Depuis 
l'embouchure du Sé Don jusqu'au village de Soloniaï, les berges de la rivière, hautes de 


10 à 12 mètres, sont composées de marne jaunatre, produit de la décomposition des laves. 


S VIL. — Terrain tertiuire. 


Itier ! a signalé à Tourane, au pied des collines qui au Sud-Ouest bordent la baie, 
des couches horizontales de molasse. Ces observations du géologue français n'ayant pas été 
confirmées par d'autres observateurs, nous n’admettrons qu'avec réserve l'existence du 
tertiaire dans le royaume de Cochinchine. Dans tout le cours de notre voyage nous n'a- 


vons pas observé de formations pouvant être rapportées à ce terrain. 


S VITE, — Terrain post-tertiaire. 


Le Mékong et la rivière de Saïgon, comme tous les grands cours d’eau, sont encom- 
brés à leur embouchure par les matériaux charriés de plus haut et versés par les affluents 
qui descendent des montagnes ; les sables aurifères du Sé Cong et d’autres points appar- 
tiennent à ces formations récentes, à ces terrains meubles, formés aux dépens des roches 
voisines auxquelles l’eau a arraché le précieux métal. Nous ne trouvons pas le long du Mé- 
kong des terrasses analogues à celles qui ont été signalées sur le cours du Yang-tse Kiang. 
Mais les alluvions constituent la plus grande partie de la basse Cochinchine et du Cam- 
bodge. D’après M'Culloch * les plaines du Tong-king sont aussi alluviales et très-fertiles. 

Les alluvions déposées par le Mékong et les autres rivières qui descendent les unes 
des montagnes de Pursat, de Battambang, les autres de la chaine qui partant du eap 
Saint-Jacques traverse tout le royaume d’An-nam varient de composition sui- 
vant les points. Mais partout, soit presque superficiellement, soit, comme près de 
Oudong, à 3,50 de la surface, on rencontre un fer limoneux, véritable bog-ore, formant 
banc, et exploité par les indigènes comme matériaux de construclion, et en certains points 
comme minerai, quoique la roche soit peu riche en métal. 


1 Op. cit., L. II, p. 142. 
2 Loc. cit., p. 116. 


GÉOLOGIE. 141 


Une coupe (n° 15 de la figure, page 143) commençant au massif du cap Saint-Jacques 
et allant vers la rivière du Grand Lac, en passant un peu au-dessous de Cratieh, montre les 
rapports de cette roche avee le calcaire, le kaolin et le granite. La pierre de Bien-hoa se 
trouve comprise entre les alluvions. Nous donnons encore une autre coupe (n° 16 de la 
mème figure) allant de 10° 30° E. vers 11° 0. en passant par Vinh-long et Pursat. 
Cette coupe nous fera voir le terrain granito-syénitique, le calcaire dévonien s'appuyant 
sur lui et formant les sommets de Vinh-long et de Pursat, les alluvions couvrant les 
plaines de Cochinchine et du Cambodge et le banc de fer limoneux. 


En terminant cette troisième partie de notre travail consacré à la géologie nous allons 
nous résumer en présentant le tableau suivant de la succession des couches et de l’ordre 
d'apparition des diverses roches. En partant des formations les plus anciennes on a : 

1° Éruptions des granttes et des syénites. 

2° Gnerss (Tourane). 

3° Deuxième éruption du granite (Tourane). 

4 Oplites. 

Mélaphyres, porphyre pyroxénique (Uratieh). La place de cette roche est incertaine. 
6° Éruption des ewrites. 
Talschistes. 

8° Euritines. 

9 Schistes anciens. Pyllades. (Ces roches appartiennent au Silurien ou au Dévonien 
inférieur.) 

10° Dévonien comprenant : 

a. Calcaires ; b. Quartzites; c. Brèches calcaires. 

11° 7rias composé de : 

a. Schistes bruns légèrement micacés ; fragments de charbon; 4. Calschistes avec mi- 
nerais de cuivre et charbon; c. Grès: d. Psammites; e. Grès; Charbons et anthracites 
entre ces couches, ou entre le grès et les schistes ou les psammites; / Poudingues sili- 
ceux, arkoses polygéniques. 

12 Éruption des porphyres. 

13° Soulèvement des montagnes de calcaire dévonien, relevant les couches du 7rius 
dans leur direction. 

14 Éruption des basaltes. 

15° Éruption des dolérites mimosites. 

16° Première éruption des Zaves. 

17° Deuxième éruption des Zaves. L’instant de ces éruptions est inconnu. 

18° Molasse de Tourane (?). 

19° Terrasses du Yang-tse Kiang. Terrasses fluviales et lacustres. Affouillement des 
vallées, remplissage des lacs ; affouillement de ces derniers. — Cavernes à ossements de 
la Chine. 

20° Formation des al/luvions et de la prerre de Bien-hoa. 


142 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


21° Éruption de /aves en Chine, à l’époque historique. Soulèvements racontés par les 


historiens chinois. 


22° Phénomènes actuels (Fumarolles, sources d'eaux chaudes et sulfureuses, puits de 


sel et de feu du Se-tchouen, se/ de la plaine d’Oubon, sables aurifères, atterrissements des 


fleuves et des rivières, dellas, ete.). 


Pumpelly ! a dressé pour la Chine un fableau de l’ordre de succession des diverses 


formations et a mis en regard les soulèvements. Nous donnons ici le tableau qu'a indiqué 


le géologue américain : 


B. 


ZT 


Dépôt et métamorphisme des plus anciennes 
F P Soulève nents de divers âges et de différentes 


couches métamorphiques de Chine. è ; ie. 
ET directions, dont les effets à la surface sont les plus 


Dépôt des strates métamorphiques de Mon- 


à effacés. 
golie. 
Dépôt de la grande formation du calcaire 
dévonien. 
Éruption des plus anciens porphyres de Révolution du Sinian formant le système 
Si-chan, à l'Ouest de Pékin. N.-E.-S.-0. de soulèvement. 
Dépôt du Chinese coal measures. 
Éruption des plus jeunes porphyres de Émergence de la Chine propre. 


Si-chan. 
Submersion de la Mongolie. 


. Éruption des porphyres trachytiques de Kal- 


gan et du désert de Gobi. 

Éruption des roches volcaniques du S. de la 
Mongolie et de la région du Baïkal. 

Dépôt des steppes du désert de Gobi. 


Commencement de l'émergence du plateau. 
Formation de la grande dislocation le long de la 
rive Sud du plateau. 
Changement supposé dans le cours du Hoang- 
ho, et formation de la chaîne des lacs du Nord. 
Dépôt du «/ake loan», lœss des lacs, des 
lacs du Nord. Commencement de la for- 
mation du delta du Hoang-ho. 
Commencement du creusement du lit du Hoang 
ho, entre le Chan-si et le Chen-si, et de la gorge 
Yang-ho, et drainage subséquent des lacs du Nord. 


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DU 


XPLORATION 


IV 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE 


Deux choses concourent puissamment à la prospérité d’un peuple, s’ils ne la font, 
l’agriculture et l’industrie. Les exploitations métallurgiques aident aussi à cette richesse. 
Que seraient, en effet, nos industries dont nous sommes, et à bon fitre, si fiers, sans les 
métaux, sans le fer surtout, cette commune substance, qui est à elle seule un des leviers 
les plus puissants de notre civilisation, sans la houille ; ce reste plusieurs milliers de fois 
séculaire d’antiques forêts, qui a condensé, pour nous le rendre aujourd’hui en force et 
en mouvement, le calorique émis pendant une longue et longue suite de siècles? La pro- 
duction métallurgique d’un pays marque le niveau de son bien-être matériel. Richesses mi- 
nérales, accroissement de l’industrie sont deux facteurs qui varient toujours dans un 
même sens. 

Mais les amas de matières combustibles, si abondants qu'ils soient, doivent finir par 
s’épuiser, et on s’est déjà préoccupé de la disparition de la houille. Les mines de notre 
Europe, d’après plusieurs caleuls, doivent être épuisées dans deux cents ans au plus tard. 
On s’est mis à l’œuvre, on a cherché partout de nouvelles houillères. Les puissantes 
couches de l'Amérique, celles si riches d'Australie, ont été trouvées et sont maintenant 
en plein rapport. L’antique Asie est non moins bien pourvue, et le Céleste Empire regorge 
de trésors minéraux d’une exploitation des plus faciles. Les montagnes des royaumes du 
Cambodge, de Siam et de la Cochinchine sont remplies de métaux qui ajouteraient tant à 


la prospérité de notre jeune colonie de Saïgon. 
I. 19 


146 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Dans cette quatrième partie de notre travail nous allons indiquer ces richesses miné- 
rales. Nous parlerons d’abord de la partie méridionale de lndo-Chine, puis des provinces 
chinoises du bassin du Yang-lse Kiang. Nous étudierons nécessairement les exploitations 
de sel, de marbre, de gypse, de fer, d’antimoine, de cuivre, de mercure, de plomb, 
d'argent, d’étain, de zine, d’or; nous nous occuperons enfin de la houille, sans laquelle 


il n'est pas de métallurgie possible. 


1° Cochinchine et Laos. 


Pour tout voyageur qui ne fait qu'y séjourner peu de temps, le royaume d’An-nam 
passe généralement pour très-pauvre en métaux. Si par hasard vous trouvez une mine, les 
indigènes vous en interdisent l’accès; le plus souvent encore, par crainte des autorités, 
ils ne veulent vous donner aucun renseignement; qu’on joigne à cela la difficulté de con- 
verser au moyen d'un interprète, et l’on comprendra facilement qu’on puisse n'avoir que 
des notions tout à fait inexactes sur les richesses métallurgiques d’un pays. 

C'est ce qui est arrivé à J. Crawfurd et à M’Culloch. Le premier de ces auteurs n’a 
vu que le Cambodge, et il a dit de ce pays ce qu'il eùt pu écrire d’ailleurs de toutes 
les plaines alluviales, qu'il « est remarquablement pauvre en produits minéraux, et que 
« le fer est le seul métal qui existe en quantité !. » 

M’Culloch, dans son excellent dictionnaire, n’a pu résumer que ce que les autres avaient 
observé : aussi écrit-il que «le Tong-king est la seule partie de l'empire d’An-nam qui soit 
«riche en métaux; il y a beaucoup d’or, d'argent, de cuivre, de fer. La Cochinchine n'a 
« pas de richesses minérales. L'argent seul est dit se trouver au cap Avarella. Le Cam- 
«bodge est pauvre en métaux; il produit du fer, mais pas assez pour sa consommation et 
«en recoit des provinces de l’Ouest ?. » 

A ces deux auteurs opposons Cortambert et Gelley, qui ont eu des renseignements 
beaucoup plus précis. Selon E. Cortambert, « le Tong-king est la partie la plus riche en mé- 
«taux; on y trouve, dans les montagnes occidentales, de l'or, de l'argent et du fer. Les 


= 


«mines d'or et d'argent sont à environ douze journées à l'Ouest de Ké-cho; celles de fer, 


«à six Journées seulement. Toutes ces mines sont exploitées par les Chinois. Beaucoup 
«de rivières et de ruisseaux sont aurifères. 11 y a du cuivre, du zine et de Pétain dans 
«le même pays; c'est du Tong-king que viennent ces tam-tams si renommés dont la 


= 
= 


fabrication est encore un secret pour les Européens. 
« Dans la Cochinchine propre, il y à aussi quelques richesses minérales; on re- 
«eueille de Por dans la province de Kouang-ngaï ; celle de Kouang-nam est riche en 


marbre. Celle de Phu-ven a de l'or, de l'argent et du euivre. Il y a du zine et du cuivre 


«dans plusieurs parties de la Haute-Cochinchine. On croit que le charbon de terre se 


= 


clrouve sur plusieurs points. Des pierres précieuses, particulièrement les rubis et les to- 


1 Op. cit., p. 472. 
2PD0C CU D MC: 


MÉTALLURGIE ET MINEÉRALOGIE. 147 


« pazes, se rencontrent dans le pays des Laos. La Basse-Cochinchine est la moins riche 
« en minéraux ‘. » 

Laissons parler Gelley. «On trouve au Cambodge, dit-il, de l’antimoine, des carrières 
« d’albâtre, de l’ocre, de l’alumine, du kaolin et de la chaux... Les montagnes de Battam- 
« bang (frontières de Siam) renferment de l'or en quantité, et celles de la tribu des Kouys, 


A 


« situées à l'Est du Grand Lac, abondent en houille et en fer remarquable qui parait être 
« un acier naturel... En remontant le grand fleuve jusqu'à Samboc, au-dessus des pre- 
« mières cascades, on entre dans le pays des Penongs (Bas-Laos), où l’on trouve des mines 
« d’or, de cuivre, de houille, de fer; puis un peu plus haut de l'argent, du platine, du 
« plomb, de l’étain et des pierres précieuses, particulièrement les rubis et les topazes ?. » 

M. Pallegoix qui a, en sa qualité de missionnaire apostolique, longtemps résidé dans 
le royaume de Siam, et qui a été plus que qui que ce soit à même d’avoir des indications 
exactes, a dit de la richesse du royaume Thaï que «l'or se trouve à Ban Taphan, dans la 
province de Xampon, qu'on y trouvait aussi de l'argent combiné au cuivre, de lanti- 
moine, du plomb, de l’arsenic. Le carbonate de cuivre donne Jusqu'à 30 pour 100 de 
métal; l’étain est très-abondant, ainsi que le zinc et le carbonate de fer. On trouve de 
nombreuses pierres précieuses, comme cristal de roche, æils-de-chat, topazes, hyacinthes, 
ogrenats, rubis, saphirs bleus *. » 

Les indications que nous allons donner à notre tour confirmeront ce qu'ont écrit les 
trois auteurs que nous venons de citer. 

A. Gypse. — De très-beaux échantillons de gypse saccharoïde nous ont été montrés 
comme venant des montagnes de Battambang près du Grand Lac. Nous n'avons que cette 
seule indication de la présence de cette roche. 

B. Marbres. — Presque tous les calcaires de la formation dévonienne, d’une texture 
compacte, pourraient fournir d'excellents matériaux de construction. Nous uous bor- 
nerons iei à signaler d’une manière toute spéciale les marbres situés sur la rive droite du 
fleuve, un peu au-dessous des chutes de Khon. Leur proximité de notre colonie, leur trans- 
port si facile par le Mékong, en rendraient l'exploitation très-avantageuse. Ces marbres 
sont fort beaux ; d’une nuance généralement rosée ou jaunatre, ils renferment de nom- 
breux fragments d’encrines, qui tranchent très-agréablement sur le fond. 

C. Alun.— Nous avons, pendant toutle cours de notre voyage, vu de l’alun chez les 
indigènes, mais nous n'avons pu savoir comment ls se le procuraient. Près des fumarol- 
les ou des sources sulfureuses existe peut-être de l’alun tout formé qui peut dès lors être 
extrait au moyen d’un simple lavage à l’eau chaude. Peut-être aussi cet alun vient-il de la 
Chine où nous verrons qu’il existe abondamment. 

D. Pétrole. — Des puits de pétrole existeraient, d’après ce qu'on nous a rapporté, entre 
le Laos supérieur et le Tong-king. Ce fait n’a rien d’invraisemblable, car on sait que de 


1 Tableau de la Cochinchine par E. Cortambert et Léon de Rosny; /atrod. par P. de Bourgoing. { vol. in-8?, 
carte, plans et grav. Paris, 1862. 1°° partie par E. Cortambert, p. 25. 

2 Op. cit., p. 1 et 12. 

3 Description du royaume Thaï ou de Siam. 2 vol. in-19, avec carte etgrav. Paris, 1854, {. I, p. 18 et sui. 


148 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


nombreuses sources d'huile minérale se trouvent échelonnées le long d’une ligne qui va 
de la Perse au Tong-king. 

E. Se/. — Dans la partie de cet ouvrage qui traite de l'itinéraire du voyage, nous avons 
dit qu'il existait de vastes surfaces salées dans le triangle compris entre le Mékong et le 
Sé Moun, vers Oubon, Amnat, ete. Nous entrerons ici dans quelques détails relativement 
à l’exploitation. 

On choisit de préférence, pour la récolte du sel, les dépressions du terrain, et particuliè- 
rement les rizières. La récolte du riz étant faite et l’eau complétement évaporée, ilse forme 
à la surface du sol, dans les endroits les plus riches, une croûte de chlorure de sodium en 
cristaux fibreux, que les indigènes recueillent et lavent pour en séparer les matières terreuses 
et végétales. Ce travail est habituellement abandonné aux femmes. Après avoir réuni en une 
multitude de tas la poussière salée, elles la portent à proximité d’un puits, généralement 
près des villages, à l'ombre d’un gros arbre ; là, sont disposés sur des tréteaux des troncs 
d'arbres creusés en bassins, ou bien, des paniers enduits d’une couche de résine qui les 
rend imperméables. Ces vases sont d’abord remplis de la terre recueillie, puis on ajoute 
une quantité d’eau suffisante pour délayer la masse, et l’on agite la bouillie avec des baguettes 
en bois. Lorsque l’on suppose que l’eau s’est emparée de tout le sel contenu, on débouche 
une petite ouverture pratiquée au fond du vase et on laisse s’écouler lentement et comme 
filtrer l’eau salée. Cette eau est conduite, au moyen d’un bambou, dans des vases en- 
foncés en terre, ou bien dans des bassins cimentés construits près des foyers d’éva- 
poration. 

Les femmes ajoutent de l’eau dans les vases qui contiennent la terre salée tant que 
le liquide qui provient de ce lavage renferme une certaine quantité de sel, ce dont elles 
s’assurent au moyen d’un petit instrument fort simple, qui leur sert de pèse-sel. Cet 
instrument est basé sur la différence de densité de l’eau douce et de l’eau salée; il se 
compose d’une petite boule faite de terre et de résine, retenue à l'extrémité d’un fil, et dont 
le poids spécifique est un peu supérieur à celui de l’eau douce. Tant que l’eau provenant 
des. lavages est suffisamment salée, la boule reste à la surface, et le liquide est versé 
dans des chaudières à évaporation qui sont à proximité; lorsque la boule descend au 
fond du vase, la personne préposée au travail détourne le bambou conducteur de l’eau, 
rejette la terre sur laquelle on vient d'opérer et la remplace par une nouvelle quantité. 
L'opération recommence et se poursuit de la même manière. 

L’évaporation du liquide des chaudières étant finie, le sel est d’abord ramassé en gre- 
niers sous un abri quelconque, puis mis par quantité de dix livres cambodgiennes (6 kilog.) 
dans des paniers cylindriques tapissés de feuilles, et livré ainsi au commerce. Ce sel est 
de bonne qualité, en poudre fine et d’un blanc grisâtre. L’on nous a dit que les pêcheurs 
le préféraient au sel marin de la Cochinchine ; on le recherche probablement à cause de 
son état pulvérulent. 

Les moyens d'exploitation sont, comme on vient de le voir, d'une grande simplieité et 
peuvent être facilement améliorés, mais la modicité du prix de revient n’en a pas encore 
fait sentir le besoin. Au mois de janvier, à Oubôn, nous avons payé le sel à raison de 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 149 


40 centimes le panier de 6 kilogrammes. Ce bon marché tient à trois causes : à la facilité 
d'exploitation, au peu de valeur de la main-d'œuvre et enfin à l'absence de travaux agricoles 
au moment où l’on exploite les salines. 

D’après les renseignements que nous ont donnés les indigènes, du sel gemme se 
trouverait à M. Phong, sur le Nam La, non loin de Xieng Hong, dans le royaume de ce 
nom, près de la limite, par conséquent, du Vun-nan et du Laos Birman. 

F. Antimoine. — Ce métal est très-répandu depuis la Cochinchine jusqu’au Yun-nan ; 
nous n’en avons pas vu dans celte province chinoise. Partout dans le Laos on nous a pré- 
senté des échantillons de sulfure d’antimoine. 

Les deux gisements les plus importants sont, l’un dans le Laos inférieur, près de 
Saravan, l’autre aux environs de Xieng Khong, à la frontière du Laos Siamois et du 
Laos Birman. La navigabilité de la rivière d’Attopeu, la proximité de notre colonie, ren- 
draient le premier gisement très-facilement exploitable. 

Les indigènes se servent, disent-ils du moins, de l’antimoine pour faciliter la fusion 
du fer; nous donnons ce fait sous toute réserve. Il est surtout utilisé pour falsifier la 
monnaie de cuivre du pays. Par économie ils allient ce métal au bronze, ce qui donne 
au mélange une couleur brunätre, et le rend cassant. Les nombreuses statues de Bouddha 
que nous avons vues dans la ville ruinée de Vien Chang (voir l'itinéraire) étaient en grande 
partie faites avec un semblable alliage. 

G. Zinc. — D'après lüer ‘ les montagnes de Tourane et celles de la province de Hué, 
renferment d’abondantes exploitations de zine. Ce métal doit être dans le royaume de Siam 
très-abondamment répandu, car sa valeur est à peu près nulle. A Hué, par exemple, 
toute la monnaie de billon est en zine, et la ligature, qui comprend 600 pièces, ne 
vaut que 1 franc. 

Les indigènes affirment que le zine existe aussi dans le Tong-king et dans la Haute- 
Cochinchine. 

H. Fer. — Le fer, soit à l’état de limonite, d'oligiste ou de carbonate, est très-abondant 
dans l’Indo-Chine. Nous avons vu plus haut que les alluvionsde la plaine du Cambodge ren- 
fermaient, à des profondeurs variables, de la limonite des marais ou bog-ore, générale- 
ment exploitée pour servir comme pierre de moyen appareil, mais qui, en certains 
points, est assez riche en métal pour pouvoir être traitée avec avantage. 

Aux environs d’'Amnat la limonite abonde; elle forme plusieurs buttes. Une extrac- 
tion que nous avions visitée à 4 kilomètres E.-N.-E. d’Amna, près du petit village de 
Thuey, renferme deux variétés de minerai, l’une analogue à la pierre de Bien-hoa, 
mais plus riche en métal; l’autre compacte, plus grise, en morceaux du volume d’une noix 
ou plus petits, faciles à réduire en poudre. Ce dernier minerai ne se trouve qu’à la surface 
du sol, comme le précédent. Le mode d'exploitation est tout à fait primitif. Le fourneau 
n'a que 0°,75 de hauteur sur 0®,15 de diamètre; il sert de cheminée au foyer d’un petit 
four en terre glaise. On charge des couches alternatives de charbon de bois et de mi- 


L Op. cit., p. 112 et 113 


150 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 

nerai. Au moyen d’un soufflet fait d’un cylindre de bambou dans lequel se meut un pis- 
ton, on active la combustion. Le soufflet est placé à la partie qui est opposée à la gueule 
du four. Lorsque le métal est en fusion, on opère la coulée par une étroite ouverture 
pratiquée du côté où est placé le soufflet, et aboutissant à la partie la plus déclive du foyer. 
Le produit est ensuite chauffé à la forge et martelé ; les coups de marteau font sortir la 
scorie, les cavités se resserrent, et le fer est ainsi forgé. 

Ces moyens imparfaits font qu'une grande portion du métal reste dans les scories ; 
aussi ne retire-t-on qu’une livre de fer par opération. 

Les fourneaux sont généralement par paires et disposés de facon qu’un seul homme 
puisse en même temps faire manœuvrer les deux soufflets. 

Cette méthode est tout à fait l'enfance de la méthode catalane et ne peut s'appliquer 
qu'à des minerais frès-riches. Il est probable qu'elle fut jadis la seule employée. Il est 
intéressant de noter que dans l’Inde, à Veragutty, B. Heynne a vu en 1814 des fourneaux 
très-semblables à ceux dont se servent les Laotiens!. 

Des mines de fer, déjà indiquées par M. Mouhot, se trouvent sur la rive droite du fleuve, 
entre le Grand Lac et les tribus Kouys soumises à Siam, dans les provinces de Compong 
Soai et de Tonly Repou. Le minerai, carbonate de fer, est très-riche; il est traité par ces 
sauvages, au moyen du charbon de bois, dans de petits fourneaux, à la manière catalane. 
On obtient ainsi un fer assez pur, mais il est évident qu’une grande partie du métal, par 
ce procédé, est perdue et passe dans les laitiers. C’est dans ces montagnes que se fabrique 
la monnaie de fer en usage dans le pays et dans une partie du Laos. 

D'après les indigènes, les montagnes de Battambang et de Pursat seraient riches en 
minerais de fer. 

Itier* a signalé de nombreuses mines dans la Cochinchine et le Tong-king, et J. Craw- 
furd * en indique d’autres à six journées de marche de Cachaeiï. 

Les Shans exploitent autour de Muong You un fer hydraté en roche abondant et 
riche. 

De la limonite se trouve aussi en quantité à Nua, village situé à 30 kilomètres de 
Houten, à l’extrémité Nord des montagnes calcaires de Lakon. Le fer est exploité et 
sert à extraire le plomb dont la gangue est probablement très-siliceuse ; on sait que 
cetle méthode est fondée sur l’affinité du fer pour le soufre ; on obtient ainsi une scorie 
siliceuse, du sulfure de fer et du plomb métallique. Comme les indigènes ont refusé de 
nous montrer les exploitations de ce dernier métal, nous parlerons iei de l'extraction du 
fer, qui se trouve irrégulièrement disséminé en petits morceaux au milieu d’une terre 
argileuse rougeàtre qui forme plusieurs collines de 200 à 300 mètres de hauteur. Le 
minerai ne forme ni couches ni filon; il est en rognons ou petits blocs isolés les uns des 
autres et noyés dans cette terre. Les collines que nous avons parcourues pendant le peu 
de temps que nous sommes restés sur les lieux d'exploitation sont forées d’un grand nom- 

1 Tracts on India, in-4°. London, 1814, pl. IV. 


2 Opcit.,t. Il, p.113: 
3 Loc. cit., p. 413. 


METALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 151 


bre de puits de diverses dimensions, mais dont le plus grand peut avoir 25 mètres de 
profondeur sur # à 5 de diamètre. Les indigènes ne font pas de galeries. Au fur et à 
mesure qu'ils creusent, ils rejettent au dehors la terre qui est sur-le-champ criblée à 
travers un panier à larges mailles pour en séparer les fragments de minerai qui n’ont pas 
été vus d’abord; les morceaux un peu volumineux sont directement recueillis dans des 
corbeilles et rassemblés en tas autour des puits, jusqu’au jour où, jugeant la quantité suffi- 
sante, les travailleurs les emportent au lieu choisi pour opérer l’extraction du métal. Cette 
opération se fait en général dans le village même. 

Nous avons ramassé aux mines un certain nombre d'échantillons des formes diverses 
qu'affecte le minerai. Le minerai le plus abondant, et, disent les indigènes, un des 
plus riches, est une roche rougeatre cellulo-fibreuse avec quelques petits cristaux de 
quartz ; vient ensuite une roche de même couleur, mais plus dense et ne contenant pas 
de quartz, enfin un agglomérat de limonite et de petits cristaux de quartz très-irrégulière- 
ment disposés; la quantité du métal contenue dans cette dernière roche serait très-faible, 
aussi n’est-elle pas exploitée. 

Les minerais de fer doivent être très-abondants aux environs de Saravan; on nous 
a donné, à Bassac, des échantillons de limonite, d’oligiste, de sidérose provenant du 
massif montagneux situé près du Sé Don. Le mauvais vouloir des habitants ne nous a 
pas permis de visiter un seul de ces gisements. Ce fer est très-abondamment répandu 
dans toute cette région ; 1l serait exploitable avec le plus grand profit à cause de la faei- 
lité des moyens de transport et de la proximité probable des gisements de combustible. 

Un filon très-riche de fer magnétique a été découvert par M. Garnier dans le lit de 
la petite rivière Camcaboua, qui se jette dans le Banghi et à 8 kilomètres de la Jonction 
des deux cours d’eau. Ce gisement est à 30 kilomètres S.-0. de Ban Mouk. Il est 
probablement inconnu des habitants; l’exploitation en serait bien plus avantageuse que 
celle de la limonite des environs d’Amnat. 

A Muong You le roi nous a donné un certain nombre de minéraux qui se trouvent 
dans la province qu'il administre; le fer est surtout commun. Ce métal se présente sous 
trois formes : la pyrite, la sidérose et l’oligiste ; les deux derniers renferment le fer en 
très-forte proportion et sont très-répandus. 

Dans les montagnes de Xieng Tong, dans le Laos Birman, ce dernier métal est aussi fort 
commun. 

Dans la même partie du Laos et près de Muong You, une tribu sauvage, celle des 
Doé, a une industrie qu’on s'étonne de trouver entre de telles mains. A Samtao elle 
fabrique des fusils. Le procédé employé est assez primitif pour que nous en parlions 
ici. Une barre de fer, d’un diamètre plus ou moins fort, selon le calibre que l’on 
désire donner à l’arme, est solidement fixée sur un plan horizontal. Une mèche de 
fer, plus résistante, ayant une de ses extrémités placée dans l'axe de la barre et l’autre 


engagée par une douille pratiquée dans une poutre verticale, mobile, susceptible d’être 
avancée ou reculée à volonté, sert à perforer le canon. Une lanière solide en cuir de 


buffle fait deux ou trois tours autour de la mèche. À chaque extrémité de cette lanière 


152 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


est placée une pédale. Quatre hommes, et plus, pèsent alternativement sur chacune de 
ces pédales, et impriment ainsi au foret des mouvements de va-et-vient plus ou moins ra- 
pides. On creuse, de cette manière, dans une certaine étendue, puis on fait avancer le 
madrier qui porte la mèche, et on recommence jusqu’à ce que tout le canon soit évidé. On 
conçoit que, par un semblable moyen, on ne fasse pas beaucoup de besogne, aussi les ou- 
vriers mettent-ils souvent plus d’un mois pour forer un canon d’un mètre de longueur". 

I. Cuivre. — Les montagnes de Tourane et les trois provinces de Hué, celle de Phu- 
yen surtout, abondent, selon Îtier, en minerais de euivre. D’après le même voyageur du 
cuivre blanc et rouge existe dans les environs de Saïgon, dans la province de Kouang-nam, 
et dans celle de Kouang-due ou Hué-phu. 

Ces indications générales données, précisons davantage. 

H. Mouhot a marqué dans sa deuxième carte une mine de cuivre près de Nokhien, 
non loin de Chenobote, sur la rivière Leuie. 

Le métal à l’état de carbonate bleu et vert existe abondamment au milieu du terrain 
triasique de Bassac. Les exploitations sont situées non loin du village, à 700 mètres envi- 
ron au-dessus du niveau du fleuve, dans la chaine de collines qui court presque parallèle- 
ment à lui du Nord au Sud. La surface occupée par le gisement métallifère parait être 
considérable; on suit le filon pendant plus de 150 mètres, le long de la face E. du contre- 
fort; puis il disparait derrière des éboulements, mais tout fait présumer qu'il reparait plus 
loin, car, à peu près à la même hauteur, dans une autre partie de la montagne, on trouve 
des traces de fouilles qui permettent de retrouver la ligne de contactdes calschistes et des 
grès qui forme un excellent point de repère. La couche minéralogique est horizontale : elle 
pourrait avoir 0w,50 au minimum et 1 mètre au maximum à l’endroit où nous avons pu 
l’étudier. Nous avons donné plus haut, au chapitre traitant de la géologie, la coupe détaillée 
de ce gisement. 

Si ces mines étaient riches, l'exploitation en serait des plus faciles ; quelques travaux de 
déblais mettraient la couche métallifère à nu sur une grande étendue. Le fleuve coule au 
pied de la montagne; le transport des produits serait dès lors des moins coùteux. 

Le carbonate de cuivre se retrouve, et bien plus abondamment, en face de Bassac, dans 
le massif montagneux que nous avons plusieurs fois indiqué. Ce gisement avait été si- 
gnalé à H. Mouhot. Qu'il nous soit permis d'appeler de nouveau toute l'attention sur les 
montagnes de Saravan. Elles abondent en métaux, cuivre, fer, plomb argentifère, anti- 
moine. La navigabilité de la rivière d’Attopeu, la facilité des moyens de transport, la proxi- 
mité de la colonie, rendraient l'exploitation de ces mines très-facile et très-avantageuse. 

Avec le cuivre extrait des environs de Bassac, on fabrique, dans cette ville, beaucoup 
de petits lingots appelés /a/, qui, avec les lingots de fer dont nous avons parlé plus haut, 
sont la monnaie courante du pays. 

Dans le Laos Birman le cuivre est aussi très-abondamment répandu. Les montagnes 
de Xieng Hong renferment le métal à profusion. Aux environs de Muong You sont des 


! Ces renseignements sont dus à la visite faite par MM. de Lagrée et Thorel aux lieux de fabrication. F. G. 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 153 


minerais de cuivre ordinaire et de cuivre argentifère. Chez les Shans le cuivre est si com- 
mun qu'on s’en sert à la place du fer pour les socs de charrue. 

J. Plomb. — De la galène à petites facettes, probablement très-argentifère, existe à 
gauche du Mékong, en face de Bassac, dans le grand massif. Mouhot a eu connaissance 
de ce gisement. Il serait très-riche, mais 1l nous à été impossible de vérifier ce fait, les 
indigènes ayant refusé de nous montrer les exploitations. La galène est aussi fort abon- 
dante sur les rives de la petite rivière de Mai pai (rivière des Bambous), à 40 milles au- 
dessus d’Attopeu. 

Le minerai de plomb est aussi exploité, avec le fer, qui sert à le réduire, à Nua, vil- 
lage situé à l'extrémité des montagnes de Lakon. Nous n'avons pu voir les gisements de 
plomb, mais nous pouvons donner quelques renseignements sur la manière dont procè- 
dent les indigènes pour séparer le métal. Ils pilent d’abord le minerai dans des mortiers en 
bois, puis le lavent avec soin pour en séparer les matières terreuses et plus légères ; ce la- 
vage se fait dans des sébiles, comme celui des sables aurifères. Ces deux opérations préli- 
minaires achevées, on creuse en terre un trou de 0,20 de profondeur et de 0",30 de 
diamètre que l'on remplit de charbon de bois concassé ;par-dessus on ajoute un mélange 
de minerai et de charbon. Le tout est recouvert d’une cheminée en terre glaise assez sem- 
blable à la cheminée dont on se sert dans les laboratoires de chimie pour activer la com- 
bustion. Le feu étant allumé dans cette’ espèce de fourneau à réverbère, au moyen d’un 
double soufflet formé de deux troncs d'arbres creux dans lesquels se meuvent des pistons 
garnis de chiffons, on obtient une température assez élevée pour opérer la réduction du 
métal qui vient se déposer en culot au fond du fourneau. Par chaque opération on obtient 
au plus quelques grammes de plomb. 

Au moment où nous étions à Nua, 1l y avait chômage dans les divers travaux d’exploi- 
tation à cause de la mort d’un des travailleurs. Les coliques de plomb font tous les ans 
de nombreuses victimes parmi les indigènes qui attribuent cette terrible maladie à un 
mauvais génie gardien des mines dont ils tâächent cependant de détourner la colère par 
des prières et des offrandes à Bouddha et à ses prêtres. Ils ne prennent en conséquence 
aucune précaution. 


La galène est aussi très-abondante aux environs de Xieng Tong et de Muong You, dans 
le Laos Birman. 

K. Argent. — Les galènes dont nous avons indiqué les gisements sont argentifères, 
mais les indigènes, ne connaissant pas la coupellalion, laissent perdre l'argent. Dans le 
Tong-king, par exemple, des Chinois achètent les saumons de plomb et les traitent pour 
en extraire le métal précieux, dont la quantité serait, dit-on, suffisante pour couvrir et les 
frais d'achat et ceux des divers traitements, de sorte que le plomb leur resterait comme 
bénéfice net. 

Hué et le Tong-king seraient surtout riches en argent. Itier a signalé d’abondantes 
mines de ce métal à Phu-yen ‘. D’après J. Crawfurd ? les Cochinchinois prétendent 

1 Op. cit., t. III, p. 112. 


2 Loc. cit., p. 412 et 473. 
II. 


154 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


que l'argent s’extrait dans les montagnes du cap Varela. Selon le même auteur, le mi- 
nerai d'argent est exploité à 12 milles de Crachaeï; il donne 216,600 onces par an; ces 
mines, qui ont commencé à être en exploitation vers 1625 ou 1630, rapportaient autrefois 
bien davantage, d’après le P. Marini. Elles sont situées dans les provinces de Boa et de 
lC'incangle. Des mines d’or et d'argent sont à dix ou douze journées de marche de Kécho; 
on estime le produit annuel des mines d'argent à 6,000 kilog.; nous ne savons quel est le 
rendement des mines d’or. Trois mille Chinois travailleraient à ces diverses exploitations 
du Tong-king. 

L. Or. — Le Mékong et ses affluents sont, en beaucoup de poinis, aurifères. L'or 
charrié par les cours d’eau doit provenir de filons existant, sans doute, dans les chaînes 
de montagnes qui séparent la Cochinchine du Laos, et qui, nous l'avons vu, sont 
constituées par des terrains primitifs, granite, syénite, ete. A. de Humboldt ! a, dans son 
ouvrage sur l’Asie centrale, rapporté les opinions de deux auteurs du seizième sièele, 
Oviedo et d’Anghiera, sur la présence des pépites et des parcelles d’or au milieu des sables 
de l'ile d'Haïti et d'Amérique. Les arguments géologiques de ces deux observateurs sont 
tellement remarquables et diffèrent, comme le fait remarquer de Humboldt, si peu de nos 
théories actuelles, que nous ne pouvons résister au plaisir de citer ici quelques lignes de 
leurs ouvrages, de Rebus oceanicis, et Relacion sumaria de la historia natural de Indias : 
«I ne faut pas croire que l’or ait pris naissance à l'endroit où nous le voyons mêlé à la 


A 


«terre. Il appartient originairement aux hautes montagnes, et les eaux des pluies le font 
« descendre... Les alluvions aurifères sont dues à la destruction des filons qui traver- 
« sent les roches restées sur place dans les hautes montagnes... Les atterrissements s’enri- 
« chissent par la décomposition des filons, » et ces gites primitifs « sont des arbres vivaces 


A 


« qui ont leurs racines dans les profondeurs de la terre, et qui poussent leurs rameaux 
« pour atteindre la surface du sol, et développer leurs fruits d’or à l'extrémité des bran- 
« ches. » 

Revenons au Laos. Mouhot? a indiqué des mines d’or à Ban Makam, au N.-0. de Bat- 
tambang. Nous avons vu laver les sables dans l'enceinte de l'ancienne ville d’Angcor. 
Ces sables gris, quartzeux, fortement micacés, sont peu riches en métal, et le lavage 
qui se fait au moyen de sébiles en bois, ne parait pas rapporter plus d’un france par jour. 
Il est vrai de dire que les indigènes ne recherchent le métal qu’à leurs moments perdus, et 
lorsque les travaux de la moisson sont terminés. D’après les renseignements qui nous ont 
été fournis dans la province, l'or serait aussi extrait du lit des rivières qui descendent de 
Battambang. Un voyageur anglais a récemment signalé des exploitations aurifères de 
l’autre côté de la chaîne de Pursat. 

Dans la rivière d'Atlopeu nous avons vu des sauvages laver les sables aurifères. 
Ils se servent pour tout ustensile d’une sébile peu profonde, qu'ils agitent avec de l’eau 
de manière à ce que celle-ci entraine une partie des matières étrangères plus légères. 
On traite le résidu par une série de semblables opérations successives, car les Khas ne 


1T. I, pp. 535 et 537. 
(De ie toile 0 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 155 


paraissent pas pratiquer lamalgamation. On arrive à ne plus laisser au fond de la 
sébile que la poudre d’or, qui est mise dans des tuyaux de plumes d'oiseaux ou des cornes 
de gazelles, et qui est connue dans le commerce sous le nom de poudre d’Attopeu. Nous 
regrettons vivement qu'on ait égaré environ 10 grammes de cette poudre que nous avions 
expédiés à Saigon. L'or en cet endroit doit être abondant et se trouver en parcelles volu- 
mineuses ou en pépites, pour être ainsi isolé par des procédés aussi imparfaits. 

Plus haut, sur le cours du Mékong, au-dessus de Lakon, existe un banc de gravier 
quartzeux, de 10 mètres d'épaisseur environ, qui découvre chaque année. Au moment fa- 
vorable les habitants du voisinage viennent laver ces sables qui ne semblent pas être très- 
riches. 

Sur tout le parcours du fleuve, de Vien chang à Xieng khong, mais surtout près de ce 
village et de Paklay, on lave les sables qui paraissent très-riches, principalement dans les 
remous que forme la rivière. Le sable recueilli est lavé plusieurs fois à la sébile par des 
mouvements de va-et-vient ondulatoires. Ce sable, débarrassé ainsi, autant que possible, 
des matières étrangères, est mis dans de grands réservoirs en bambou. A la fin de la 
campagne, on reprend avec de l’eau et du mercure une certaine quantité du sable très- 
enrichi, et on le traite dans la sébile, comme s’il s'agissait de le laver. L’amalgame et le 
mercure, plus lourds, restent au fond du vase; les matières terreuses sont entrainées par 
l’eau. Le tout est placé dans une toile très-forte et à tissu très-serré. Le mercure non utilisé 
passe par expression et est recueilli pour une opération postérieure. L’amalgame resté au 
fond de la toile est chauffé; le mercure se volatilise et l'or reste au fond du vase distilla- 
toire sous forme d’une petite boule grosse à peu près comme un pois chiche. Dans cette opé- 
ration, une grande quantité de mercure est perdue, et cependant ce métal coûte fort cher 
dans le pays; 1l doit très-probablement venir des provinces chinoises du Sud, peut-être du 
Se-tchouen. La plus grande partie de cet or sert à payer les tributs au chef de la province. 

Sur les bords du Mékong nous signalerons un autre gisement aurifère, un peu au- 
dessusde Nongkay, en face du petit village de Ha kham. 

Au versant Est de la chaîne de montagnes d’où doivent provenir ces sables aurifères, 
le métal précieux existe aussi. Dans la baie de Tourane, et à une lieue au-dessous de 
cette ville, se jette une rivière, réunion de deux petits cours d’eau qui viennent du N.-0.; 
à 4 lieues plus haut que le confluent de ces deux rivières existe, d’après Itier', une exploi- 
tation considérable d’or charrié, sans doute, des mojfagnes voisines. L'or existerait d’ail- 
leurs en abondance dans tout le Tong-king ; nous avons vu précédemment que Crawfurd 
indiquait des mines d’or et d'argent à dix ou douze journées de Kécho. 

M. Houille. — Dans la partie de cet ouvrage qui traite plus spécialement de la géo 
logie, nous avons dit que dans le Yun-nan et sur: les bords du Yang-tse Kiang, les eou- 
ches de houille se trouvaient intercalées au mili eu des grès et des calschistes de la for- 
mation triasique. Nous avons vu aussi que le gisement si riche de Ma-chang, à la jonction 


du Kin-cha Kiang et du Pe-chouv Kiang, se trot wait exactement dans les mêmes conditions 


MODACTATAIPDAUE? 


156 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


stratigraphiques et pétrographiques que l’exploilation cuprifère de Bassae, dans le Bas- 
Laos. Or, dans cette dernière localité, au niveau où l’on devrait trouver le charbon, nous 
avons vu effectivement de minces lits de houille. Nous sommes restés sur les lieux évi- 
demment trop peu de temps pour avoir pu étudier avec tout le soin désirable ce gisement 
de Bassac. Nous nous bornons ici à appeler à nouveau toute l'attention sur ce point. Nous 
sommes persuadés, et toutes les inductions nous permettent d'affirmer le fait, que des 
couches de charbon doivent exister aux environs de Bassac, dans les grès ou les calschistes. 
En suivant avec soin ces points de repère, on trouvera certainement des affleurements. 

Gelley a signalé des mines de houille dans la tribu des Kouys, à l'E. du Grand Lac. 
Des gisements d’anthracite se trouvent près de Luang Prabang. Ces diverses couches doi- 
vent être des prolongements du grand bassin houiller du Yang-tse et du Yun-nan. 

La découverte de charbon aux environs de Bassac donnerait un nouvel essor à la pros- 
périté de notre colonie de Cochinchine en permettant d'exploiter facilement les nombreux 
minerais d'argent, de plomb, de fer, d’antimoine, de cuivre, ete., si abondamment répan- 
dus dans le massif de Saravan. A un autre point de vue encore, le combustible pourrait 
ètre très-précieux pour la France, si, dans un moment de guerre, sa marine de l'Indo- 
Chine ne pouvait recevoir ses approvisionnements du dehors. 


2 Chine. 


Nous allons étudier successivement, pour mettre plus d'ordre dans notre travail et pour 
éviter surtout toute confusion, les provinces du Yun-nan et du Se-tchouen ; nous parle- 
rons ensuite collectivement de celles qui sont situées au S. du Yang-tse Kiang, c’est-à- 
dire du Kouy-tcheou, du Hou-nan, du Kouang-si, du Kouang-tong, du Fo-kien, du 
Kiang-si, du Tche-kiang. Nous devrons surtout porter toute notre attention sur les loca- 
lités voisines du fleuve Bleu. Le Yang-tse est, en effet, navigable jusqu’à plus de 700 lieues 
de son embouchure, de sorte que les moyens de transport sont des plus faciles. L’extrac- 
tion des minerais est d’autant moins dispendieuse qu'à côté des métaux se trouve presque 
partout le combustible, et celui-ci est répandu à profusion tout le long du fleuve. 

L'ouvrage de Pumpelly nous donnera pour plusieurs des provinces du bassin du Yang- 
tse, des renseignements utiles. L'auteur américain les a puisés dans la Géographie offi- 
cielle de la dynastie impériale actuellement régnante, le Ta-{sinq-y-tong-che. 


SI, — Province du Yun-nan. 


Cette province est une des plus riches de l'empire, en métaux, or, argent, cuivre, 
charbon, ete. L'état de guerre dans lequel elle se trouve depuis quelques années a fait 
abandonner la plupart de ces exploitations. Nous avons pu cependant en visiter un grand 
nombre dont nous parlerons en détail après avoir indiqué d’une manière générale, pour 
éviter toute répétition, les points où se trouvent les métaux. 

A. Marbre. — Près des rives du Song Koï sont de beaux marbres blanes légèrement 
fumés et des marbres roses et jaunätres, fort employés pour les tombeaux. Au-dessus et 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 157 


au-dessous de Yuen-kiang existent en abondance des brèches calcaires qui polies seraient 
du plus bel effet dans l’ornementation ; elles sont formées de fragments de marbres de 


couleurs variées novés dans une pâte rose tendre ou rouge de sang. 


B. A/un. — Pumpelly a signalé de l’alun à Yuen-mong dans le département de Ou- 
ting *. 
C. Sel. — Des puits salés ont été indiqués par le même auteur dans les districts de 


Ngan-ning, Yun-long, Lang-kiong, Teng-yue, Kouang-thong, Yao, Zsauchitsing, 
Yuen-mong, Ving-cul. Dans le pays on nous a indiqué des exploitations de sel à Ho-boung 
et à Pa-ken près de Pou-eul, et à Hé-tsin, Lang-tsin, Pé-tsin près de la capitale; le prix 
moyen du sel est de 0',15 le kilogramme. 

Ho-boung, grand village, non loin de Pou-eul, tire son importance de la présence 
des salines. Autant que nous avons pu en juger par quelques heures de séjour, l’eau salée 
n'est point à l’état de nappe; elle suinte à travers des calcaires eristallins et des schistes 
jaunâtres pour s’amasser dans le fond de puits creusés ad Aoc et d’où on la retire à l’aide 
de pompes en bambous quand cela est possible, ou bien au moven de treuils manœuvrés 
par des hommes. 

Les puits sont de deux sortes, les uns inclinés ayant la forme et la construction de ga- 
leries, les autres verticaux. Les puits inclinés sont, en général, au bas de la montagne, et 
les verticaux sur les flancs et les points les plus élevés : il n’est pas possible de se servir 
de la pompe pour extraire l’eau de ces derniers, la profondeur de quelques-uns atteignant 
jusqu’à 90 brasses. 

Le forage des puits est souvent très-difficile à cause des roches que l’on rencontre et 
des faibles moyens dont disposent les travailleurs pour les creuser ; l'outillage est le même 
que celui dont on se sert pour faire les galeries dans le gisement d’anthracite dont nous 
parlerons un peu plus bas. 

À mesure que l’eau est retirée des puits on l’amène par des conduits dans de grands 
bassins en maçonnerie où elle s’évapore en partie sous la double action de la chaleur et du 
vent; puis de ces bassins, partent de nombreux petits conduits qui déversent cette eau 
déjà concentrée dans des bassines en fonte d’un mètre de diamètre ou plus petites, où se 
complète l’évaporation par le feu. Les fourneaux sur lesquels reposent les bassines, plus 
ou moins nombreux selon l'importance de l'exploitation, sont sur une même ligne, les uns 
à côté des autres et dans un plan un peu inférieur aux réservoirs en maçonnerie. [ls sont 
de forme rectangulaire, divisés en deux compartiments superposés, séparés par des barres 
en fonte sur lesquelles est Le foyer. Il n'existe aucun tirage ; l’ouverture du foyer sert à la fois 
de cheminée et de bouche à alimentation. Le bois seul (pin et chêne), ou le bois et l’anthra- 
cite mélangés, sont les combustibles employés. La chaleur produite ne doit pas être trop 
forte, mais uniforme, de façon à maintenir le liquide de la bassine en évaporation cons- 
tante, sans ébullition bien marquée. Un conduit d'alimentation venant des réservoirs supé- 
rieurs remplace au fur et à mesure l’eau évaporée, jusqu’à ce que le dépôt salin remplisse 


1 Jd., p. 58. 


158 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


la bassine. Nous n'avons pu déterminer le degré de salure de l’eau au moment où elle sort 
des puits; son titre d’ailleurs doit varier selon qu’on le prend pendant ou après la saison 
des pluies ; celle que nous avons goutée ne nous a pas semblé très-salée. La quantité de 
sel extrait de cette facon est plus grande qu'on ne pourrait le croire et suffit à une population 
considérable placée entre ces salines et le Mékong et même au delà; nous ne pouvons 
malheureusement donner de chiffres exacts à ce sujet. Le prix moyen de la vente sur les 
lieux d'exploitation est de 0°,15 à 0,20 le kilogramme de sel. 

D. Jade. — « On rapporte, dit Davis, que c'est dans le Yun-nan que le jade ou yu 
est Le plus abondant, et qu'on le trouve dans le lit des torrents ". » Selon le témoignage 
des missionnaires, celte roche se trouverait sur les confins du Yun-nan et de la Birmanie, 
au S.-0. de Ta-ly fou, près de Teng-vue tcheou. En ce point, le jade serait de la 
plus belle qualité et tellement abondant que dans une ville les individus riches feraient 
parqueter leurs maisons avee du jade de qualité inférieure. Chacun sait le prix que les 
Chinois attachent au jade, symbole pour eux d'immortalité, et indice de dignité. 

Pumpelly?a indiqué du jade bleu à Zungsan, dans le distriet de Ou-ting, des jades vert et 
bleu au mont Mo-pe près de Li-kiang, et du jade noir à Maumotosz, près de Yun-tehang. 

E. Pierres précieuses. — « Les montagnes du Sud du Yun-nan semblent abonder en 
pierres précieuses. lopazes, aigues-marines, tourmalines mouchetées, saphirs opaques, 
jadéites, lapis-lazuli, turquoises, cristal de roche, grenats,.… corindons bleus ;... les rubis 
sont très-communs,.… les saphirs sont fréquents, et souvent de belle eau et de bonne 
taille. De l’ambre existe à Teng-vue, des agates au mont Wanau près de Pao-chan, 
des topazes dans le même district *. » 

F. Zinc. — Selon W. Williams les mines de zine doivent être très-riches dans la pro- 
vince dont nous parlons *. 

Les mines de zine et d'étain sont abondantes près de Tong-tchouen fou; les deux 
métaux se vendent sur les lieux à raisonde 0',15 à 0',20 le kilogramme. Nous signalerons 
encore du zine à Ping-v hien au S.-E. de Tong-tchouen, à 250 lis de cette même ville; 
ce zinc renfermerait, au dire des indigènes, de l'argent dans la proportion d’une once de 
ce dernier métal pour 100 livres de zine, où 1/1600. M. Friedel, de l'École des Mines, 
qui a bien voulu analyser du zine et de l'étain rapportés de cette localité, n’a pu y cons- 
tater la présence de l'argent. Sur les lieux d'exploitation le zine ne vaut que 0,15 à 
0!,20 le kilogramme ; comme des mines de houille existent dans le vôisinage, une exploi- 
tation régulière donnerait de grands bénéfices. 

2 C)no Gen to 1h Do AB 


? Pumpelly, Loc. cit., p. 118. 
3 Pumpelly, loc. cit., p. 118. 


4 Sur les richesses métallurgiques du Yun-nan, on trouvera un ensemble de renseignements beaucoup 
plus complets et beaucoup plus précis que tous ceux que l’on peut recueillir dans les divers auteurs, dans 
l'ouvrage de métallurgie chinoise dont la traduction est donnée à la suite de la géologie. Consultez pour l’'em- 
placement des gisements cités par M. Joubert dans le Yun-nan, les cartes itinéraires 8, 9 et 10, Atlas 1"° partie, 
pl.XI, XII, XIII. Les noms des localités indiquées dans le texte d'après des autorités étrangères et dont la position 
n’a pu être reconnue, sont écrits en italique et leur orthographe a été scrupuleusement respectée. F.G. 


MÉTALLURGIE ET MINEÉRALOGIE. 159 


G. Étain. — Dans les mêmes localités, l’élain est très-abondant; signalons les mines de 
Ouien-tehang à 12 ou 14 lieues à l'E.-N.-E. de Tong-tchouen, et à Tchè-kai, à 12 lieues E. 
de la même ville. Le métal en saumons ne vaut que 0',15 le kilogramme. 

H. Fer. — Les exploitations les plus riches sont celles qui existent à Kang-tchong-pa; 
d’autres minéraux également riches et abondants sont traités aux forges de Lang-pong-h. 
Les fourneaux, beaucoup mieux construits que partout ailleurs, ont au moins 10 mètres 
cubes de capacité; on réduit le minerai, carbonate de fer, au moyen du charbon de bois 
et de la dolomie employée comme fondant; chaque opération donne une barre de fer de 
40 cent. de long, en movenne, sur 10 cent. d'épaisseur ; la coulée est ramassée en boule 
et fortement martelée de suite, de manière à faire sortir les scories, et souder les parti- 
cules les unes aux autres. Le métal est vendu assez bon marché sur les lieux d’exploita- 
tion; on en fait des chaudières, des socs de charrue, des canons de fusil. 

Du minerai de fer se trouve à Siao-tsao-pa, sur les bords de la rivière de Kokui. 

À Ho-boung, l'exploitation des salines a fait naître une petite fonderie pour la fabrica- 
tion des bassines; elle se compose d’un fourneau à réverbère de faible dimension, pouvant 
contenir 25 à 30 kilogrammes de métal, et d’un soufflet hydraulique. Les moules des bas- 
sines sont deux blocs de torchis, ayant une apparence fort grossière, mais dont les sur- 
faces qui doivent être en contact avec les matières fondues sont polies avec soin. 

Quand la fusion est arrivée au point convenable, on rapproche du fourneau les deux 
parties du moule, on les chauffe avec de la braise, puis on opère la coulée et le transva- 
sement qui se fait au moyen de cuillers en fonte longuement emmanchées. 

On n’emploie pas de minerai pour obtenir le fer; on utilise des débris d'anciennes 
bassines, de mauvais socs de charrue, et des morceaux de fer jetés pêle-méle dans le 
fourneau au milieu d’un feu de charbon de bois. 

Dans ce petit atelier de fonderie, on ne fabrique exclusivement que des bassines et des 
soes de charrue. 

l. Mercure. — On nous a donné à Se-mao un morceau de einabre qu'on nous a dit 
venir de Ta-ly fou. Nous n'avons pas d'autres renseignements. 

J. Cuivre. — Ce métal est abondamment répandu de chaque côté du Yang-tse Kiang 
dans le Yun-nan et le Se-tchouen occidental. 

D’après Davis *, le cuivre ordinaire avee « lequel on fabrique la basse monnaie du 
pays vient du Yun-nan et du Kouy-tcheou; on donne à ce cuivre le nom de 7sé-lai ou 
naturel, parce qu on le trouve dans le lit des torrents. » 

Autour de Tchao-tong sont plusieurs gisements peu considérables. Une ligne de mines 
de cuivre s'étend de Houy-litcheou à Soui fou. 

Cest à Houy-hi tcheou, sur les frontières du Yun-nan et du Se-tchouen que se fabrique 
en partie le fameux euivre blanc ou petong, si célèbre en Chine, et dont tous les voyageurs 
ont parlé. Les minerais sont exploités comme pour obtenir le cuivre rouge ; on obtient un 
métal dont la couleur tient le milieu entre celle du laiton et de l'argent. Un des mission- 
naires de Pékin rapporte que le petong du Yun-nan fondu, refondu, réduit en feuilles, 


1 Loc. cit., p. 265. 


160  : GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


coulé en lingots, battu à chaud et à froid plusieurs fois, chauffé et rechauffé, conserve tou- 
Jours sa couleur blane jaunâtre; il raconte avoir lui-même fait ces essais !. Les indigènes 
nous ont dit la même chose; ils ont ajouté que le cuivre blanc qui vient du Hou-pé et du 
Kouy-tcheou, deviendrait rouge après plusieurs chauffes, ce qui fait supposer que ce n’est 
qu'un alliage de cuivre et d’étain, et que ce dernier métal, bien plus fusible, finit par se 
séparer. Le petong du Yun-nan, qui ne s’altère pas, est extrêmement estimé. Nous croyons 
que le petong s'obtient par le mélange direct des minerais, et non par celui des métaux. 

Avant la guerre des musulmans, les mines de cuivre de Sin-long étaient l’objet d’une 
sérieuse exploitation. Ces mines se trouvent à 28 ou 30 kilomètres au N.-N.-E. de 
Yuen-kiang. Pour nous y rendre, nous avons d’abord remonté le fleuve de Yuen-kiang 
pendant une heure 30 minutes vers le N. 30° O., puis, nous rapprochant du N., nous 
avons marché pendant une heure directement au N., 2 heures 15 minutes vers le N. 35°E., 
dans la petite vallée de Kang-tchong-pa, et 2 heures vers le N.-N.-E., en tout un peu plus 
de 6 heures et demie, la moitié du temps en plaine, et l’autre moitié dans les montagnes. 

A Sin-long tchang, comme tous les endroits où nous avons trouvé des minerais, les 
montagnes sont élevées et fortement tourmentées; celles-ci sont presque exclusivement 
constituées par des calcaires cristallins qui se sont fait jour à travers d’épaisses couches de 
schistes argileux violemment redressés, et que les eaux et les influences atmosphériques 
désagrégent et entrainent petit à petit. 

Le minerai de cuivre est certainement très-abondant dans cette contrée, et se trouve 
répandu dans une circonférence qui n’a pas moins de 10 à 12 kilomètres de diamètre dans 
tous les sens. Les moyens d'exploitation sont insuffisants; on ne se sert que d’un poinçon 
en fer et d'un pic; nous n’avons vu nulle part de traces de roches enlevées à la mine. Le 
minerai est injecté dans les fentes et les crevasses du calcaire dolomitique ; les filons en 
sont parfois puissants et traversent le calcaire ou des schistes jaunâtres. Le minerai en 
roche est souvent accompagné de plaques de sels de cuivre d’un beau vert noyées dans 
une terre noiratre ; ce dernier est de beaucoup le plus riche. 

Les nombreuses galeries jadis exploitées autour du village de Sin-long tchang, sont 
aujourd'hui complétement abandonnées ; on n’exploite plus que sur un seul point, situé 
à 10 kilomètres N.-N.-E. du village, et l'exploitation est insignifiante. Des enfants vont 
dans les galeries extraire le minerai qu'ils rapportent à la maison paternelle ; après avoir 
été concassé ce minerai est traité dans de petits fourneaux analogues à ceux dont on se sert 
dans les cabinets de chimie. Le seul fourneau un peu grand que nous ayons vu, était un 
cylindre de terre glaise, de 2 mètres de hauteur, qui ne pouvait certainement pas contenir 
2 hectolitres de matières, combustible compris. Au-dessus d’un premier lit un peu épais 
de charbon de bois, l’on met une couche de minerai, puis une nouvelle couche de charbon, 
et ainsi de suite jusqu'à ce que le fourneau soit rempli; on allume ensuite et l’on active 
la fusion au moyen d’un soufflet cylindrique dont le piston est mü par six hommes. Le 
cuivre descend au fond du fourneau, où il forme un eulot. On conçoit aisément qu'avec 
de pareils moyens, une grande quantité du métal doive rester dans les scories. On nous a dit 


1 Mém. concernant les Chinois, par les missionnaires de Pékin, t, XI, 1786. 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 161 


que pour faciliter la séparation du cuivre des matières qui accompagnent on ajoutait une 
certaine quantité de minerai de fer, que l’on fait venir de Kang-tchong-pa, situé à 12 kilo 
mètres au Sud-Sud-Est de Sin-long tchang. 

K. Plomb. — Des mines de plomb argentifère très-abondantes existent à Sin-kai- 
tse, à 6 lieues de Co-kouy sur les bords de la rivière de ce nom. La quantité d'argent 
serait assez grande pour couvrir et les frais d'exploitation et le transport du plomb sur le 
marché de Tchong-kin, à 100 lieues de là, sur les bords du Yang-tse Kiang. 

Des mines de galène argentifère, très-riches et d'exploitation facile, sont près de Tong- 
tchouen, et de Mong-tse, à 5 journées à l'Ouest de Lin-ngan. Les gisements considérables 
qui seraient le plus facilement exploitables sont ceux qui se trouvent autour de la ville de 
Koui fou, sur les bords du Yang-tse Kiang. 

L. Argent. — W. Williams * signale des mines d’argent dans le Vun-nan, aux 
confins de cette province et de la Cochinchine. Selon Hue * ce métal serait abondant 
dans toutes les provinces de l'Ouest et du Sud de l'Empire chinois. Les exploitations 
d'argent du Yun-nan sont aussi indiquées par Davis’. Nous venons de voir que toutes les 
galènes sont très-argentifères. Dans le paragraphe suivant nous parlerons des mines de 
Ta-lang, en décrivant les exploitations d’or. 

M. Or. — Toutes les rivières du Yun-nan et du Se-tchouen roulent de l'or, et le 
Kiang, dans cette partie de son trajet, est nommé à cause de l'abondance du précieux mé- 
tal, Kin-cha kiang, ou rivière aux sables d'or. W. Williams, Pallegoix, Hue, Pumpelly, 
Blakiston, et tous les auteurs qui ont écrit sur la Chine, ont parlé des richesses de cette 
vieille Californie. L'état de guerre dans lequel se trouve le Yun-nan depuis quelques années 
a fait abandonner la plus grande partie des exploitations. Au siècle dernier Por était 
exporté jusqu’en « France et dans les autres pays d'Europe » selon Osbeck *. 

Les missionnaires nous ont indiqué des mines d’or et de cuivre à Té-kô-tchang, village 
situé à sept journées de marche à l’Ouest de Ta-ly fou. A 4 lieues à l'Est de cette même 
localité sont des mines que l'expédition n’a pu visiter. 

Il existe d’autres mines d’or et d’argent, dans un petit cours d’eau qui vient se rendre 
dans la rivière de Lao-oua-tan, près de Long-ki. Le gisement serait considérable, et chaque 
année pendant la saison sèche, de décembre à avril, 2,000 à 3,000 hommes se rendraient 
aux mines. Celles-ci se trouvent en contre-bas de larivière, de sorte que plus de 1,200 indivi- 
dus sont obligés de se débarrasser de l’eau, au moyen de pompes de bambous superposées. 
Du fer et du charbon se trouvent en abondance dans le voisinage. On retirerait 25 livres 
d'or et autant d'argent de 300,000 kilogrammes de matières extraites ; les indigènes pré- 
tendent que les deux métaux se trouvent dans les mêmes filons. 

Les mines les plus exploitées jadis, avant la révolte des musulmans, sont celles des 
environs de Ta-lang. 


1 Zoc. cit., p. 244. 

2 Loc. cit., p. 139. 

ÉPDOC NC Ip 205: È 

* À voyage to China and the East Indies, trad. par J. Reinhold Forster. 2 vol. in-8, London, 1771, t. I, p. 243. 
TE 21 


166 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


P.25. Ya tcheou. — Mines de cuivre très-abondantes, autrefois exploitées. gypse très-blanc….; 
p. 26. Pierres blanches comme la neige. or. 
27. Kia-ting fou. — Plusieurs montagnes ont du sel... mines de fer. ; p.28. Or. 
28. Tong-teheou fou. — Mines de cuivre, grottes. ; p. 29. Argent, cuivre, fer, sel. 
30. Ouei tcheou. — Or; sel, salpètre. 
31. King tcheou. — Mines de fer, de cuivre et de sel. 
. Lou tcheou. — Or, sel, pierre à teindre. 
35. Tse tcheou. — Or, fer. 
37. Kien tcheou. — Or, argent, fer, sel. 
38. Mao tcheou. — Or, cinabre 
39. Ta tcheou. — Or... source qui fournit du sel. 
. 4. Tchoung tcheou. — Or... sel. ; p. 40. Fontaine volante qui jaillit avec le bruit du tonnerre ; 
autre fontaine volante, la plus extraordinaire de l'univers, s'élève à une très-grande hauteur, et retombe 


ch che oh) 
C2 
Co 


en rosée. 

P. 42. Si-yang tcheou. — Or, cinabre, mercure. 

P.44. Sang-fou tin. — Pierre qui brille comme le miroir... le salpètre brille sur une montagne 
comme de l’argent. 

P. 45. Chi-tcheou tin. — Plomb. » 


A. Fer. — Pumpelly (Loc. cit., p. 111), indique les départements suivants comme 
possédant des extractions de minerai de fer : 


Tchen-tou fou, dans le district de Tsing-tsing hien. 

Tse tcheou. 

Ning-yuen fou, dans les districts d'Houy-ly tcheou, Mien-ning hien et Yen-yuen hien. 

Pao-ning fou, dans le district de Kouang-yuen hien. 

Tchong-kin fou. 

Chun-king fou, au mont Tie, à 80 ZS.E. de Yun-tsang hien, dans les districts de Ho tcheou et de 
Tong-yang hien. 

Tchoung tcheou dans le district de Fong-tou hien. 

Koui-tcheou fou, dans les districts de Ou-chang hien et de Yung-yang ion 

Choui-ting tcheou, dans les districts de Ku hien et de Ta-tchou hien. 

Long-ngan fou, dans les districts de Yen-ting hien et de Che-hong hien. 

Kia-ting, à 40 li N. de Oui-yuen hienet à 100 li N. de Yun hien. 

Kong-chan fou, au mont Kousang, à 10 li de la ville, dans le voisinage de minerais de cuivre. 


B. Cuivre. — Depuis Houi-li tcheou jusqu’à Souy-tcheou, des deux côtés du fleuve, 
sont de nombreuses exploitations de cuivre. IL serait trop long de citer chaque mine en 
particulier; celles de Houi-li tcheou sont surtout importantes ; on y extrait le cuivre blanc 
si renommé dans toute la Chine. 

C. Arsenie. — Il y a dans les environs de Tchong-kin, sur les bords du fleuve Bleu, 
un minerai d'arsenic dont les indigènes extraient le réalgar. 

D. Plomb. — Un missionnaire nous a donné à Koui-tcheou fou de la galène à petites 
facettes, très-argentifère, provenant de gisements exploités dans les environs de cette 
ville. 

E. Or. — Les alluvions de la plupart des rivières sont lavées et contiennent de 
l'or. Le procédé employé est absolument le même que dans le Yun-nan. 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 167 


Nous relevons sur la carte de Blakiston les points où ce voyageur a vu laver les sables 
aurifères ; ce sont : Lou tcheou et Ouan. 

Pumpelly (/oc. cit., p. 60) indique des exploitations dans les districts de Kien, Ouang- 
kiang, Tsong-King, Pung, Ngan, Yen-vuen, Kouang-yuen, Pa, Kien ‘, Yun-tchang, Ho, 
Fou, Pong-choui, Ouan, Ta-tchou, Ping-hou, et aux rivières de Tsong et de Fi-kia choui, 
dans les départements de Lou cheou et de Va tcheou. 

F. Charbon. — Des deux côtés du Yang-tse Kiang sont de riches houillères. Le 
bassin s'étend depuis le Tibet jusqu'à Nankin. Parmi les points les plus importants 
nous pouvons citer : Lo tou, Souy-tcheou, Pa-tong, Koui fou. Tout porte à croire que la 
province entière du Se-tchouen n’est qu'un vaste bassin houiller, dont les couches se 
retrouvent à une très-faible profondeur. Ce bassin aurait plusieurs centaines de lieues de 
diamètre, et égalerait en richesse ceux de l’Australie et de l'Amérique. 

G. Pétrole. — Nous avons dit, dans la partie géologique, que souvent en ereusant un 
puits de sel, on tombait sur une source de pétrole. « Ayant atteint 1,000 pieds de profon- 
deur, dit Imbert ?, ils trouvent ordinairement une huile bitumineuse qui brûle dans l’eau. 
On en recueille par jour jusqu’à quatre ou cinq jarres, de 100 livres chacune. Cette huile 
est très-puante.. Les mandarins, par ordre du prince, en achètent souvent des milliers de 
jarres pour calciner sous l’eau les rochers qui rendent le cours des fleuves périlleux. » 
Nous citons textuellement Imbert sans nous rendre garants de l'exactitude de ses obser- 


vations. 
S IT. Provinces au Sud du fleuve Bleu. 


A la province du Se-tchouen s’arrêtent nos observations personnelles. Le trajet depuis 
Souy fou a été fait en bateau; nous ne sommes descendus à terre que pour ravitailler, 
aussi nous n'avons pu faire aucune recherche. Pour les provinces situées au Sud du 
Yang-ise Kiang, nous nous bornerons, afin d’éviter toute répétition, à donner collective- 
ment la liste des principaux gisements signalés par les divers auteurs qui ont étudié cette 
partie de la Chine avec le plus de soin. 

A. Marbres. — Toutes les montagnes appartenant au système dévonien doivent ren- 
fermer des marbres. Nous citerons dans la province de Kouang-si les marbres blancs de 
Hoai-tse hien et de Chang-che tcheou, les marbres blancs, roses, noirs des environs de 
Canton, signalés par Itier, W. Williams, Davis, le marbre blanc du mont Tsang près de 
Tai-tcheou fou, le marbre de Su-tcheou fou, dans le Kiang-sou. 

B. Alun. — Nous nous contenterons d'indiquer l’alun dans les provinces de Hou-nan, 
de Kiang-si, de Hou-pé, de Ngan-hoei. 

C. Gypse. — D’après Williams, le gypse cristallin est commun à Canton. Pumpelly le 
signale à Hang-tcheon fou. 


1 Cette ville n’est pas la même que celle qui commence la liste. L'une est au Nord de Pao-ning fou, l’autre 
est sur le Tsong kiang, à peu de distance de Tchen-tou. Voyez la carte, Atlas, 4° partie, pl. I. RAC 
2 Loc. cit., p. 314. 


164 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Les houilles que nous avons rapportées du Yun-nan et du Se-tchouen sont sèches 
et se transforment en un coke très-dense, finement poreux, donnant 72 0/0, d'après l’a- 
nalyse faite à l'École des Mines par M. Friedel. Le charbon est, près des lieux mêmes 
de l'exploitation, converti en coke, au moyen du procédé suivant. On creuse un grand trou 
de 18 à 15 mètres cubes de capacité ; on le remplit de charbon en ménageant une che- 
minée au milieu. On couvre la meule de terre et on y metle feu en jetant par l’ouverture 


centrale du bois enflammé. On opère done, comme pour la carbonisation du bois, par le 
procédé dit des forêts. Le charbon de mauvaise qualité et le poussier sont réduits en poudre, 


mélangés avec un peu d’eau et d'argile, et façconnés en briquettes, que l’on trouve partout 
à très-bon compte. 

Après avoir donné ces renseignements généraux, nous allons indiquer les principaux 
gisements, et les étudier un peu plus en détail. 

Près de Se-mao, entre Na-cou-ly et Ho-boung, existe un abondant gisement d’anthracite 
que l’on exploite, quoiqu'il soit de mauvaise qualité et brüle difficilement, pourles salines de 
Ho-boung. Les couches courent N. et $.; elles sont nombreuses, rapprochées les unes 
des autres, mais peu épaisses ; sur un emplacement de 12 mètres, nous avons pu en 
compter jusqu'à cinq. La puissance des bandes du combustible varie entre 0",03 et 0",32. 
Quant à l'étendue du gisement en longueur, nous ne pouvons la connaître, même approxi- 
mativement; nous savons seulement qu’on extrait le combustible en deux points, distants 
l'un de l’autre de 6 kilomètres, et que l’on n’est pas aux limites du bassin. 

Le mode d'exploitation des couches carbonifères est des plussimples. Les mineurs choï- 
sissent une couche et la poursuivent en construisant des galeries dans la montagne, les 
unes horizontales, les autres un peu en pente, jusqu’à ce que la veine soit épuisée, ou, 
qu'à cause de la profondeur, il devienne préférable de recommencer sur un autre 
point. Les galeries sont bien faites et solides, quoiqu’elles ne soient construites qu'avec 
des branches de pin et de bambous; seulement elles sont trop petites, ne mesurant que 
1,10 de haut sur 0",60 de largeur. L’outillage se compose d’un marteau-pique de 0,30 
à 0,40 de long, d’un petit panier en forme de van; les mains du mineur font l'office de 
pelles. Des enfants sortent le charbon à l’ouverture des galeries, d’où il est chargé sur 
des bêtes de somme, ou des hommes, pour être transporté aux salines de Ho-boung dont 
nous avons parlé plus haut. 

Sin-hing tcheou, à deux journées S. de la capitale, possède des couches d’anthraeite 
et de houille de mauvaise qualité. | 

Sur la route de Yun-nan à Tong-tchouen fou, près de Yang-lin, à 19 lieues de la 
capitale, on exploite un gisement de houille avec lequel on fabrique du coke de belle 
apparence, dont on se sert à Yun-nan el dans les environs pour travailler les métaux. 
Ce gisement de houille serait considérable et s’étendrait jusque dans la plaine de Kiu- 
{sing fou, à quatre journées de là. 

Au dire des missionnaires, la houille serait très-commune dans le bassin du Kin-cha 
kiang, depuis Souy-tchéou fou jusqu'à Li-kiang, principalement un peu au-dessus de la 
réunion du Kin-cha kiang et du Va-loung kiang. La mine de Tai-ping, à 10 lieues au 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 165 


delà de la réunion de ces rivières, est surtout renommée et estimée. La houille qui en 
provient est placée au-dessus de toutes les autres par les forgerons, qui donnent deux me- 
sures de charbon ordinaire contre une seule de charbon de la mine que nous venons de citer. 
L'expédition à trouvé des couches affleurant sur les bords du fleuve, et qui avaient plus 
de 2,20 de puissance ; placé debout et le bras étendu, on ne pouvait atteindre le toit. 

Tcho-ka, à 3 lieues de Tong-tchouen, possède des mines de houille sèche et d’anthracite. 

Entre Tong-tchouen et Souy fou les gisements de houille et d’anthracite sont très- 
abondants ; chaque jour nous en rencontrions sur notre route. Les lieux d'exploitation sont 
si nombreux que nous nous contenterons de citer les principaux : Tehao-tong, Tehin-ouan, 
Ma-{sao-cou, Pou-eul tou, Ta-kouan, ete., ete. La mine de Ke-hi, sur les bords de la rivière 
de Lao-oua-tan, à 3 lieues en aval de Teou-hiang kouan, fournit un charbon d'excellente 
qualité. Ces houilles sont généralement sèches. On peut dire que le charbon extrait du 
milieu des grès rouges ou des schistes est de qualité supérieure à celui que l’on trouve 
près des calcaires cristallins du dévonien: avec le premier on peut fabriquer du coke ; 
le second tombe facilement en poussière, et doit être converti en briquettes, pour pou- 
voir être utilisé. 

En présence d'une telle abondance de gisements houillers, on ne comprend pas que 
R. Pumpelly, dans sa Géologie générale de la Chine, n'ait pas eu connaissance d’une 
seule des exploitations de houille ou d’anthracite du Yun-nan, alors qu’il avait des ren- 
seignements relalivement nombreux sur les puits de sel, les lavages d’or, ete. 


S IL. Province du Se-tchouen. 


Cette province est tout aussi riche, si ce n’est plus riche encore, en métaux que le Yun- 
nan; les houilles et les anthracites surtout abondent. Nous avons déjà, dans le troisième 
chapitre de cet ouvrage, parlé des puits de feu et de sel; nous n’y reviendrons pas ici. 

Louis Lamiot a traduit et résumé la description de la province du Se-tchouen, du 
Ta-tsing-y-tong-che. Nous lui emprunterons les indications métallurgiques !. 


« P. 11. Tchong-kin fou. — Puits d’où on tire du sel... un d’où sortent des nappes d’eau jaillis- 
sant à 30 pieds. mines defer ; une montagne dont les pierres ressemblent au cuivre. rivière d’où on 
tire un fer qui supplée à l’acier. 

P. 13. Pao-ning fou. — Mines de cuivre... beaucoup de grottes souvent précieuses ou curieuses. 
p- 14. Or, fer. 

P. 45. Chun-king fou. —- Mines de fer. 

P.19. Koui-tcheou fou. — Montagnes. il y en a de très-hautes, dont une ne produit rien, à toutes 
ses pierres rouges, et contient du sel... pierres qui ressemblent au sel blanc. fontaines de sel. p.24" 
Or, fer, étain. 

P.21. Long-ngan fou. — Montagnes. une terre rouge, qui au soleil brille comme de l'or... mines 
d’étain…; p. 22. Pierres blanches comme l’agate.…. or, fer, élain, mercure. 

P. 23. Ning-yuen fou. — Mines d’or, d'argent, de cuivre blanc, de cuivre rouge, avec des particules 


d'argent ; sable blanc ; pierres à teindre ; d’autres de diverses couleurs. ; p. 25. Argent, cuivre, fer, sel, 
alun. 


! Description de la province chinoise de Se-tchouen, in-8. et Bull. Soc. de Géographie. 


162 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


Au Nord de cette ville, existe une portion de chaine de montagnes courant E. et 0., 
un peu plus élevée que ses voisines, sur la crête de laquelle est assis un village dont la 
population ne se compose que de mineurs exclusivement occupés à l'extraction de l'or 
et de l'argent. Le village est à 1,700 ou 1,800 mètres au-dessus du niveau de la mer, au 
N. 10° E. de Ta-lang età 18 kilomètres environ de cette ville, dont il relève. 

Au pied et sur les flancs de la montagne on rencontre un grès rougeâtre fortement 
tourmenté, altéré et disloqué; vers la crête surgit un calcaire compacte, légèrement cris- 
tallin, traversé et soulevé par des dykes de serpentine, qui viennent affleurer au centre. 
Cette dernière roche est très-abondamment répandue, et traversée par des filons de quartz, 
étroits, mais nombreux en certains endroits. La partie fouillée pour la recherche des pré- 
cieux métaux est concentrée autour du village, mais comprend cependant une assez grande 
surface. La montagne est attaquée par sa partie supérieure et par ses deux côtés, mais 
principalement sur son versant sud. Celui-ci ayant une pente plus forte offre plus de facilité 
aux mineurs. On peut estimer à 4 kilomètres la ligne horizontale où l’on voit des galeries 
et des déblais sur ce versant. 

Il n’est pas possible, par ce que nous avons observé, d’avoir une opinion fondée sur 
la richesse plus ou moins grande des mines que nous avons visitées; la population qui y 
travaille est des plus misérables, et rien chez elle ne fait soupconner une forte rémunéra- 
tion de ses pénibles labeurs; mais, d'autre part, les moyens d'exploitation sont si imparfaits 
que les points métallifères les plus riches peuvent échapper. 

L'opinion des indigènes est que l'or est assez abondant pour donner à ceux qui le 
recherchent de beaux bénéfices, quant à l'argent, il ne mériterait pas d’être recueilli, 
s’il ne se trouvait mélangé à l'or. Ces deux métaux sont à l’état natif et dispersés irrégu- 
lièrement dans la roche serpentineuse sous forme de lamelles ou de grains très-fins; on 
ne le rencontre d’une manière constante que dans les interstices des filons de quartz ou 
autres roches qui traversent ou avoisinent la serpentine, aussi ces points sont-ils par- 
ticulièrement recherchés des mineurs. L'argent n’est pas partout associé à l'or; on ne le 
trouve que dans un espace assez restreint à l'Ouest du village. 

Lorsque le mineur à fait choix de l’endroit où doivent porter ses recherches, il creuse, 
selon la direction de la couche, des puils verticaux, ou des galeries soit horizontales, soit 
inclinées. Les déblais sont dispersés autour de l'ouverture de la galerie jusqu'au moment 
où l’on reconnait la présence du métal cherché ; alors la galerie se poursuit dans la direc- 
tion du filon aurifère; les terres et les roches retirées sont amoncelées par catégories sur 
une plate-forme construite près de l'entrée de la galerie. Il arrive souvent que les premiers 
travaux de déblai sont faits en pure perte, et qu’on est obligé de les suspendre après 
plusieurs mois de recherches infructueuses. 

Les matières extraites des galeries sont réduites en poudre et lavées dans un panier 
en bambou, mobile, véritable berceuse, que l’on fait osciller au-dessus d’un plan ineliné 
en bois, strié transversalement. On élimine par ce premier lavage une partie des matières 
les plus légères; le sable qui s’est rendu dans un bassin situé au bas du plan incliné, et 
les parties restées dans les cannelures, sont lavés une seconde fois dans une sébille peu 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 163 


profonde, très-évasée, de près d’un mètre de diamètre. On imprime à l'appareil une 
série de mouvements de gyration qui permettent aux substances les moins lourdes d’être 
entraînées. Ce deuxième résidu, très-enrichi, est traité au moyen du mercure, qui, vola- 
tilisé, laisse au fond du vase une petite boule d’or. 

L'outillage employé pour creuser les galeries estdes plus simples ; ilse compose d’un 
marteau pointu à l’une de ses extrémités, et d’un poincon en fer de 0",25 de long ; les 
mains font l'office de pelles pour ramasser les débris dans un panier qu’un enfant porte 
vider à l’extérieur. 

Les galeries les plus spacieuses que nous ayons vues ne mesurent pas plus de 1 mè- 
tre de hauteur sur 0",50 à 0",70 de largeur ; souvent même, lorsque la roche est un peu 
dure, ou qu'il se présente un étranglement, on ne pratique qu’une ouverture suflisante 
pour permettre au mineur de passer. Si l’on ne tient pas compte de leur étroitesse, les 
galeries sont généralement bien faites et sûres ; les cadres en sont solides, rapprochés et 
reliés entre eux par des branches de pin refendues qui arrêtent les éboulements du toit el 
des murailles. 

La recherche de l'or n’est pas bornée au lieu que nous venons d'indiquer. De la mon- 
tagne descendent plusieurs torrents dont on retient les sables au moyen de barrages en 
pierres ; ces sables sont ensuite lavés et traités par le procédé que nous venons d'indiquer. 

Les habitants des villages situés sur les bords des torrents qui descendent des mines, 
se livrent particulièrement à ce genre de travail ; s’il n’est pas aussi lucratif que l’exploi- 
tation des gisements, il a l'avantage immense de se faire à temps perdu, au moment où 
les travaux des champs n’absorbent pas tous les bras. 

Actuellement 400 à 500 hommes sont occupés à ces mines, qui, dit-on, rapportent 
de 50 à 60 taëls d’or par mois, ce qui ferait environ 2? kilogrammes ou 6,000 francs; 1l est 
vrai de dire que les travaux sont très-irréguliers ; la guerre, qui, depuis 1855, désole cette 
province, a fait disparaitre et les mineurs et la nombreuse population groupée autour 
de l'exploitation ; les villages sont abandonnés et les maisons envahies par les broussailles. 
Autrefois le revenu des mines aurait été de 1,000 taëls par mois ou de plus de 1,300,000 
francs par an; on trouvait fréquemment des pépites. 

Aux limites du Yun-nan et du Kouy-tcheou, à dix journées de marche au Sud de 
Soui-tcheou fou, les missionnaires nous ont indiqué des mines d’or extrêmement 
riches. 

N. Combustibles. — La tourbe est très-abondante dans les endroits bas ; elle est uti- 
lisée. 

Depuis la frontière du Yun-nan et du Laos Birman jusqu'aux bords du Yang-tse 
Kiang, on rencontre des gisements de houille et d’anthracite ; mais c’est à partir de la capi- 
tale de la province, dans tout le bassin du fleuve Bleu, que les exploitations sont très-abon- 
dantes. On rencontre partout de la houille ; certaines couches ont plus de 2 mètres de 
hauteur. Comprises entre les strates du trias, elles affleurent le plus souvent dans les 
berges du fleuve, ou se trouvent à une faible profondeur lorsqu'elles sont exploitées en 
plaine. | 


168 GEOLOGIE ET MINÉRALOGIE. 


D. Nitre. — Ce sel est abondamment répandu dans toutes les cavernes du calcaire 
dévonien. Citons les provinces de Hou-nan, de Hou-pé, de Kiang-sou, ete. 

E. Lapis-lazuli. — Cette substance parait ne pas être rare dans la province de Tche- 
kiang (rivière de Lo-tsing hien; mont Nien près de Tchang-chan hien. W. Williams l’a 
indiquée dans le Hou-nan. 

F. Ambre. — Pumpelly donne les gisements suivants : Tong-hoei hien dans le Kouang- 
tong, Liang-chan hien, Ou-chang hien, Tai-ning hien, Ta hien ou Ta-tchou hien, dans le 
Se-tchouen. 

G. Réalyar. — Nous emprunterons encore à Pumpelly la liste des localités suivantes, 
où l’on trouverait le réalgar : 1° Se-tching fou dans le Kouang-si, mont Lecnghkung au 
Sud-Ouest de Min tcheou, et à Kiai tcheou dans le Kan-sou. 

H. Jade. — Nous avons dit que le jade le plus estimé venait des confins de Yun-nan 
et de la Birmanie; cette substance a encore été signalée dans la province centrale de 
Chen-si. 

I. Charbon et anthracite. — Le bassin houiller s'étend à travers la Chine depuis le 
Tibet jusqu’à Nankin, des deux côtés des rives du Yang-tse Kiang. Rappelons quelques 
exploitations. A Canton, Davis mentionne un charbon légèrement bitumineux, mais 
n'étant pas de bonne qualité. Pumpelly signale des exploitations à Azko et à Hing-hoa fou 
dans le Fo-kien, à Tchao-tcheou fou dans le Kouang-tong, à Sin-ngan hien et à Siang- 
chan hien, dans le Tche-kiang, à Fong-sin hien, à Kouang-sin fou et à Pin-yang hien 
* dans le Kiang-si, à Heng-chan, Lai-yang et Sin-hing dans le Hou-nan, Koue et Pa-tong, 
dans le Hou-pé. 

J. Fer. —Le fer est si abondamment répandu partout que nous ne ferons qu'indiquer 
seulement quelques gisements. Ce sont : les provinces de Kouang-si, de Kouang-tong 
(à Lien-tcheou, Tchao-tcheou fou, Lo-tching tcheou, ete.), de Fo-kien (à Yen-pin fou, 
Fou-ning teheou, Fou-tcheou fou, etc.), de Tche-kiang (à Tai-tcheou fou, Ouen-tcheou 
fou, etc.), de Hou-nan (partout), de Hou-pé (Ou-tchang fou, Hoang-tcheou fou), etc. 

K. Zinc. — Ce métal a été signalé dans le Hou-pé par Davis. 

L. Cuivre. — Pumpelly a indiqué les localités suivantes : le mont Ku à 35 li Nord- 
Est de Ho (Kouang-si), Kiong-tcheou fou (ile d'Hai-nan), Yen-pin fou (Fo-kien); 
abondamment répandu dans le Tehe-kiang, et le Ngan-hoei. 

M. Étain. — Dans le Kouang-si (King-vuen fou, Ping-lo fou), le Kouang-tong 
(Kia-ing tcheou, Hoei-tcheou fou, Yang-chan hien), le Tche-kiang (Ning-po fou, Chao- 
hing-fou), le Hou-nan (Thing-tcheou, Yong-tcheou fou, Tchang-tcha fou), le Hou-pé (mont 
Sièh à 5 li Sud de Fong-tchong hien). 

N. Mercure. — Du vif-argent est signalé par Davis dans le Kouvy-tcheou, et du cina- 
bre par Williams dans le Chan-si. Dans cette même province les missionnaires de Pékin 
mentionnent de nombreux puits de cinabre. Ces puits étaient « de simples trous creusés 
«en terre dans lesquels on faisait du feu de broussailles ; comme ces puits étaient sans 
« revêtement, la chaleur et la flamme ayant desséché, fait fendre et entr'ouvrir la terre des 
« parois, le cinabre s’y montrait de tous côtés, et pour peu qu’on grattât et qu'on fit ébouler 


MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE. 169 


« la terre, on trouvait dans le fond'une grande quantité de cinabre !. » Dans le même ou- 
vrage nous lisons qu'il y avait aussi en Chine des gisements de vikargent, mais les locali- 
lés précises ne sont pas indiquées. Nous donnerons 1ct, d’après l'ouvrage tant de fois cité 
de Pumpelly, quelques-unes de ces localités. Ce sont : Mont Zurgshr à 15 li Est de 
Pe-liou hien, Kouei-lin fou, le mont Hi au Nord de I-chan hien et le mont Xusih près 
de Se-ngan hien (Kouang-si); Yang-chan hien (Kouang-tong); le mont Zungkien près 
de Lou-ki hien (Tche-kiang); rivière près de Tching-tcheou fou, Tehang-tcha, Ou-kang 
hien, Hu-yao (Hou-nan) ; Tai-ho (Ngan-hoei). 

O. Plomb et argent. — Comme ces deux métaux sont le plus souvent réunis, pour 
éviter de trop nombreuses répétitions, nous les comprendrons dans un même chapitre. 
Indiquons comme gisements : Kouei-lin, Lieou-tcheou, mont Wongin à 35 Li N.-0. 
de Ho-tchi tcheou, Ping-lo, Ho hien, Kouei hien (Kouang-si); Kao-ming, Yai tcheou, 
Lien-techeou fou (Kouang-tong); Kien-nhing fou, Ta-ting, Ting-tcheou fou (Fo-kién);: 
mont Tien-tai et mont Tse-nien près de Tien-tai hien ; mont Yn-kong près de Tchang-chan 
hien (cette mine donne 300 livres à la tonne), mont Yn près de Ouen-tcheou fou, rivière 
Chauchi près de Tai-chun hien (Fehe-kiang); Tehang-tcha fou, Heng-tcheou fou, Tehin, 
Koue-vang tcheou, ete. (Hou-nan); mont Yng, près de Jao-tcheou fou, Nan-fong hien, 
Ko-yang hien (Kiang-si); mont Hoang-ko à 2 li Ouest de Hing-koue (Hou-pé); Ouei- 
tcheou fou (Ngan-hoei). 

P. Or. — La plupart des rivières de Chine sont aurifères ; toutes les provinces situées 
au Sud du Yang-tse Kiang, à part celles de Ngan-hoei et de Kiang-sou, sont indiquées 
dans le tableau tracé par Pumpelly, à qui nous avons, du reste, emprunté la plupart des 
renseignements que nous venons de donner ?. 


Arrivés au terme de notre travail, nous appellerons encore à nouveau l'attention sur 
les richesses minérales du pays que nous avons parcouru. Trois fleuves, le Yang-tse, 
le Song Kot, le Mékong, conduisent au milieu de pays où abondent les métaux. La rivière 
du Tong-king donnerait un débouehé facile aux productions du Yun-nan; tout le long du 
fleuve Bleu les berges renferment d’abondantes couches de charbon d’une extraction 
avantageuse; par le Mékong, on pénètre dans le Laos, cette contrée qui nous intéresse 
tout spécialement. 

Qu'on maintienne, par une sage et bienveillante administration, une paix profonde 
parmi les populations du Laos si laborieuses, qu'on donne toutes facilités aux colons, qu’on 
aide puissamment à la création de sociétés francaises d'exploitation, et alors on nous aura 
donné un joyau en plus, car, selon expression de Gelley, « si le Laos était connu des 
Européens, 1l deviendrait nécessairement une nouvelle Californie. » 


1 Mém. concernant les Chinois par les missionnaires de Pékin, &. XI, 1786. 
? Nous avons tenu à donner à titre d'indications, tous les renseignements trouvés épars dans les différents 


auteurs; comme nous n'avons pas vu par nous-mêmes beaucoup de ces mines, nous n’en pouvons affirmer la 
presence. 


IL. 


19 
19 


TIEN NAN KOUANG TCHANG TOU LIO 


OÙ 


TRAITÉ DÉTAILLE 


DES MINERAIS ET DES MINES 


DU ROYAUME DE TIEN 
AUJOURD'HUI PROVINCE DE YUN-NAN 


Trapuir PAR M. THomas KO, LETTRÉ CHiNois 


ANNOTÉ PAR M. Francis GARNIER 


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J'ai cru devoir donner ici, à peu près ## extenso, la traduction faite par M. Thomas Ko 
d’un ouvrage de métallurgie chinois acheté par la commission dans le Vun-nan. Je me 
suis contenté de mettre en français son texte latin, en supprimant quelques longueurs eten 
éclairant de quelques notes la lecture de cet ouvrage diffus et ennuyeux. Peut-être trouvera- 
t-on que je n'ai pas assez fait de suppressions et qu'il eût mieux valu condenser davantage 
un exposé qui revient sans cesse sur lui-même et ne s’épargne mi les redites mi les con- 
tradictions. Peut-être trouvera-t-on aussi que j'ai eu tort de ne pas faire grace au lecteur 
des théories niaises, des pratiques superstitieuses et des puériles croyances sur lesquelles 
s'étendent souvent, avec tant de complaisance, les auteurs chinois. Mais j'ai préféré laisser 
aux métallurgistes le soin de démêler au milieu de tant de procédés empiriques ceux qui 
peuvent avoir réellement quelque valeur, aux moralistes le plaisir de retrouver, même 
au milieu d’une nation éclairée et polie, les préjugés et les erreurs qui subsistent encore 
au bas de toutes les échelles sociales. 

Pour donner à cet ouvrage toute la valeur qu'il peut avoir comme traité de métallurgie 
indigène, j'ai conservé dans la traduction toutes les dénominations chinoises qui ne pou- 
vaient se traduire en français d’une manière identique : des expressions simplement 
équivalentes auraient pu souvent induire en erreur et donner au texte un sens el une por- 
tée tout différents. À part les noms de lieux et les noms d'hommes qui ont toujours été 
imprimés en romain, J'ai écrit toutes ces dénominations, la première fois en italique, les 
fois suivantes en romain, afin que le lecteur puisse distinguer facilement les expressions 
nouvelles de celles qui se sont déjà présentées et dont la signification à été donnée. J'ai 
toujours placé entre guillemets les mots que j'ai cru devoir ajouter au texte soit pour le 
rendre intelligible, soit pour indiquer le sens des expressions chinoises les plus importantes 


174 AVANT-PROPOS. 


et diminuer ainsi le nombre des notes. A l'exception des noms géographiques que J'ai 
laissés tels qu'ils avaient été déjà écrits dans le cours de Fouvrage, j'ai conservé l’ortho- 
graphe adoptée par M. Thomas Ko pour les mots chinois, quoiqu'elle diffère parfois de 
celle généralement adoptée. Il ne m'a pas semblé nécessaire de la compliquer par l'em- 
ploi des accents qui servent à noter les différents tons de la langue chinoise. 

Les dernières parties de ce travail contiennent des renseignements administratifs, 
statistiques et géographiques, très-préeis et très-minutieux sur la situation métallurgique 
du Yun-nan et j'appelle sur eux toute l'attention des lecteurs. Ils permettent de se faire 
une idée exacte des richesses inouïes que renferme cette province et de la prospérité à 
laquelle elle peut prétendre dès qu’elle aura des débouchés suffisants et une administration 
forte et honnête. 

Des cartes et des dessins accompagnent l’ouvrage original ; mais leur reproduction ici 
n'aurait rien ajouté à la clarté du texte. Je me contente de renvoyer aux cartes itinéraires 
n° 8,9 et 10 et aux deux cartes générales de l’Indo-Chine et de la Chine où l’on retrouvera 
toutes les localités importantes mentionnées dans l'ouvrage. 

Ce traité de métallurgie a été écrit vers 1850, sous Tao-Kouang, le grand père de l’em- 
pereur de Chine actuel, par les lettrés Ou Ki-tche et Hu Kin-sen ; le premier du grade 
de 75e (sin tse ou docteur, a été vice-roi du Yun-nan avec le litre de Pin pou che lang, 
c’est-à-dire de commandant en chef de toutes les forces militaires ; le second, du grade 
de Ain jen ou licencié, a été che fou ou préfet de la ville de Tong-tchouen fou dans la 
même province. Un exemplaire de l'ouvrage a été déposé par mes soins à la bibliothèque 
impériale où les sinologues pourront le consulter et corriger les erreurs qui ont pu 
échapper à l’inexpérience du traducteur. 

Francis GARNIER. 


TIEN NAN KOUANG TCHANG TOU LIO 


TrRaDuiT PAR M. Tomas KO, LETTRÉ cHiNois 


ANNOTÉ PAR M. Francis GARNIER 


NOTIONS GÉNÉRALES. 


Le souffle et la respiration même de l'or et de l’argent sont les premiers indices qui 
puissent faire découvrir dans les montagnes la présence de ces métaux. Il importe ensuite 
de faire le choix du lieu où l’on devra creuser la mine et de réunir les outils nécessaires; 
il faut enfin éprouver à l’aide du feu le minerai extrait pour en reconnaître la nature et 
savoir si c’est de l'or, de l'argent, du cuivre, de l’étan ou du plomb qu'il contient. Pour 
cela, 1l faut construire des fourneaux et se procurer les ustensiles appropriés à ces essais. 
Les creusets spécialement affectés au diagnostic des minerais se nomment 7sao". 

Après ces premiers préparatifs, il ne faut négliger aucune dépense pour réunir de 
toutes les parties de l'empire les nombreux ouvriers nécessaires au travail de la mine. 
On les distribuera sous des chefs particuliers et on édictera des règlements indiquant 
les préceptes à suivre et les défenses à observer, afin de prévenir les abus et de garantir 
autant que possible les travailleurs de tout accident ou de toute infortune. Dans ce but 
il conviendra de faire plusieurs sacrifices par an. Comme la plupart des accidents pro- 
viennent de l’intempérance du langage et de la licence des paroles, il faudra s'attacher à 
prescrire des règles à cet égard en tenant compte des temps, des lieux et des cireonstances. 
Mais si, en dépit de l’observance rigoureuse de toutes ces règles, le malheur continue 


! Pour éviter toute confusion, j'ai toujours employé les mêmes mots français pour traduire les mêmes 
expressions chinoises. Ainsi le mot « four » répond toujours au mot chinois t@o, le mot « foyer » au mot 
chinois lou, le mot « creuset » au mot chinois fsao, sans que je prétende pour cela indiquer la nuance 
métallurgique exacte qui sépare ces trois catégories de fourneaux. Il suffit que le lecteur soit prévenu. 
J’emploie aussi le mot « fourneau » dans un sens tout à fait général et indéfini. 


176 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


à s'attacher aux travailleurs, il faudra en faire remonter la cause aux mauvais esprits el 
chercher à apaiser leur colère par des sacrifices. 


S 10. Des indices révélateurs. 


Quand les montagnes revélent une couleur bleuätre, on doit s'attendre à y trouver de 
l'argent ; si elles contiennent de laimant ou de la porcelaine, leurs couches inférieures 
renferment certamement du cuivre. En effet, quoique les éléments des métaux soient 
d'ordinaire profondément enfouis dans le sol, 1 se manifeste toujours à la surface un signe 
particulier appelé Mao, qui a reçu pour ce motif le nom de Trait indicateur !. Un écri- 
vain, nommé Jen, traitant de cette matière, s'exprime ainsi : Si une montagne contient 
des métaux, on trouvera le signe révélateur en mille endroits de sa surface et de même 
que la citrouille pousse d’abord sa tige, puis ses feuilles, et porte enfin des fruits, ainsi 
partout où se montre le trait indicateur, on doit juger qu'il est la tige, dont les parcelles 
légères du métal, éparpillées çà et là, sont les feuilles et dont les masses plus grosses, 
réunies en un mème point, sont les fruits. — C’est pourquoi quand le Trait indicateur est 
d'origine récente, on ne trouvera que rarement des métaux et toujours en frès-pelite quan- 
tilé, tandis que là où il estancien, le minerai se rencontre abondamment. 

Ce n’est que par la tradition et une longue expérience que l’on peut arriver à faire 
ces distinctions. Voici les observations faites à ce sujet: 

Le trait indicateur dit Z/an houan ? est ténu ; quand il ne se trouve que dans des endroits 
arides, au milieu d’un sol léger, 11 n'indique qu'un gisement nul ou de peu de valeur. 

Le Pou chan * houan se rencontre disséminé dans toute la montagne et à sa superficie, 
comme s'il n’y avait pas de racine. Il a la même signification que le précédent. 

Le Chou sen houan est droit comme un arbre sans rameaux et on doit en conclure que 
le gisement est très-pauvre. 

Le Mo pan houan quand il est très-répandu et enfoui peu profondément, présage 
une inondation dans un délai de quelques années. 

Le Koua tao * houan est un signe qui se divise et s’interrompt parfois pour reparaitre 
un peu plus loin à la surface de la montagne. Il indique toujours que l’on trouvera le 
métal directement en dessous, soit en petite quantité, soit comme l'expérience en a été 
souvent faite, en masses considérables. 

Il va enfin le 7a houan ou « grand trait indicateur ». Quand il est répandu avec profu- 
sion, qu'il atteint une grande épaisseur et qu'il s'étend en largeur sur un espace de plu- 
sieurs dizaines de che Ÿ, 11 faut s'attendre à de grandes difficultés d'extraction provenant 


1 Jn houan, littéralement «verrou de la direction » à «conduire», kouan «verrou ». Miao signifie «plante ». 

2 Han veut dire littéralement « discontinu ». 

3 Pou chan veut dire « épars dans la montagne ». A l'avenir je ne donnerai le sens de ces expressions que 
quand il ne résultera pas du texte lui-même et qu'il présentera un intérêt suffisant. 

4 Littéralement « épée à moitié tirée ». 

5 Le pied chinois ou /che vaut environ 31 centimètres; dix éche font un échang; le tche se subdivise 
lui-même en dix fsen. 


NOTIONS GENERALES. A 
de la dureté des roches, mais espérer trouver successivement et pendant longtemps de 
grandes masses de métaux accumulées. 


S 2. — Des galeries de mines. 


Quand, après l'examen de tous ces indices, apparaît l'espoir d’une exploitation lucrative, 
il importe de régler les fouilles à faire dans les montagnes, surtout dans les régions infé- 
rieures, de façon que personne n’empiète sur les limites de son voisin et que chacun suive 
bien le filon qui lui est propre. C’est pourquoi nous allons parler maintenant de la con- 
struction des galeries de mine. 

L'ouverture même en est appelée 7%ao ". Si le métal se rencontre à l'entrée même de 
la galerie, on y établit avec des troncs d'arbres une sorte de porte incomplète qui prend le 
nom de /ang tsao men. Au-dessus, on établit une voûte, nommée Po, à laquelle on donne 
une forme élégante de montagne et dont la ligne de faite s’appelle Zien houa tin. 

La voie au milieu de la galerie se nomme Æouang ou « fénestrale » ; le sol même est dit 
Song houang de ce qu'il est fragile. Si la galerie est pavée en pierre, elle est dite Gen hia, 
ou «vallée de pierre remarquable par sa dureté». Si l'accès de la voie fénestrale est hori- 
zontal, elle est appelée Pin touy ; S'il est un peu incliné, on la nomme Gieou tche chouy : 
s’il est presque à pie, Trou touy, parce qu'elle épuise les forces des jambes ; s’il est tout à 
fait vertical, Zéao tsin ; si l’on y pénètre par des échelles de bois, Pay y ti; enfin, si le 
sol va en s’élevant, on l'appelle Zsan pong. 

La partie gauche de la mine est celle du forgeron ; c’est là qu’on manie le marteau. 

La partie droite est celle du mineur ; c’est là que l’on travaille à l'aide du coin. 

La vote qui maintient les terres supérieures est dite 7er pong ou «toit céleste ». 

Le plancher inférieur s'appelle 77 pan. 

Le lieu même où l'on creuse s'appelle sen : le travail de la mine prend le nom de 
Hin isien, où opération de creuser la terre?. On partage les lieux des travaux en parties 
inégales. Ceux qui louent ces différentes parties s'appellent Æee {sien ; celui qui les divise 
et les numérote se nomme Se sien. 


S3. — Des outils. 


1° Le marteau employé ordinairement est un fer d’une longueur de sept à huit Tsen*, et 
son manche est en bois. L’ouvrier tient ce marteau d’une main et le coin de l’autre, et 
travaille sans aide. L’ouvrier empioyé à la fonte des métaux manie au contraire à deux 
mains une barre de fer demi-carrée du poids de quatre ou cinq A? *, qui est emmanchée 


1 Ce n’est pas le même caractère que celui qui signifie « creuset ». 

? Littéralement « exercice du coin ». 

3% Voir la note 5 de la page précédente. 

# La livre chinoise ou kën est variable de poids suivant les objets qu’elle doit servir à évaluer. Il y a la livre 
de 16 onces pour l’argent et les objets précieux, la livre de 20 onces pour le riz et les comestibles, la livre de 
24 onces pour les objets encombrants et grossiers, tels que le charbon. C’est la livre de 16 onces qui est 


employée dans tout le cours de cet ouvrage. L’once, qui est le poids du tael, l'unité de compte monétaire 
Il. - 23 


178 TIEN NAN KOUANG TOCHANG. 
d'un bambou. Près de lui se tiennent pour l'aider deux hommes armés l’un du coin. 
l’autre du marteau. 

2° Le coin est en fer et a quatre ou cinq tsen de longueur ; son tranchant est défendu 
par une sorte de bourrelet circulaire, qui facilite le maniement de l'outil et sert à protéger 
la main. 

3° Il y a un autre coin de dimension moindre, qui a un manche en bois d’un tche 
de long et qui sert de levier. 

4° Les sacs dont on se sert pour le transport des minerais sont en chanvre et d'une 
longueur de quatre ou cinq tche. On les porte sous le bras par une extrémité et sur l'épaule 
par l’autre extrémité. 

5° On installe dans la partie postérieure des galeries une sorte de coffre ventilateur, 
analogue à un vase, destiné à renouveler l'air autour des travailleurs. La voie sou- 
terraine est en effet longue et profonde, le vent ne peut atteindre jusqu’à ses extrémités 
où il serait souvent impossible pour ce motif d'allumer du feu. Le travail des mineurs de- 
viendrait alors trop pénible, ou trop malsain, soit, quand, après la pluie, l'humidité a pénétré 
le fond de la mine, soit, quand, après la sécheresse, la chaleur y est devenue trop grande. 

6° On appelle Wen /eang, « lumière triste», celle qui sert à guider les ouvriers jusqu’à 
ce qu'on ait ouvert une voie nouvelle par où l'air et le jour puissent pénétrer dans les 
parties intérieures de la mine. 

Les lampes sont en fer et leur réservoir peut contenir une demi-livre d'huile. Elles ont 
une poignée longue d’un demi-tche, terminée par un crochet qui sert à les suspendre à 
une tige en fer d’un tche environ de long. La mèche est faite avec du coton. Il y a une 
lampe par atelier de quatre ou cinq hommes. 

7° Les conduits d’eau sont en bambou ou en bois et la longueur de chaque tronçon 
peut varier de huit à seize tche. Les tronçons sont réunis les uns aux autres à l’aide d’une 
pièce de bois ou de fer qui vient s'engager dans une entaille de deux tsen environ de 
diamètre pratiquée aux extrémités et que l’on garnit de peau, de façon à ne pas empêcher 
l’ascension de l’eau. Il y a un homme par atelier chargé de surveiller le fonctionnement 
de chaque fraction de ce tube, et cet homme est régulièrement relevé à de certains in- 
tervalles. Trois ateliers doivent fournir dans ce but six hommes par jour. À chaque portion 
de tube correspond un récipient qui permet de juger la quantité d’eau retirée et de voir 
s'il est nécessaire d’en augmenter le nombre. On peut superposer en hauteur de ein- 
quante à soixante tubes de ce genre, et ils peuvent oceuper horizontalement un espace de 
soixante-dix tehe. Mais il serait difficile de leur donner une plus grande étendue. 


chinoise, est invariable et vaut 38 grammes environ. Quoique les mots once et ael soient identiques en chi- 
nois-(/ang), je me servirai toujours du premier pour indiquer un poids, toujours du second pour indiquer 
la valeur argent de ce poids. On sait que le tael vaut à peu près 7 fr. 75 de notre monnaie et qu'il a été adopté, 
comme unité de compte fictive, par le commerce européen dans ses transactions avec les Chinois. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 179 


$ 4. — Des minerais. 


Le poids de l'argent s’est estimé successivement de plusieurs manières. Dans les monts 
Hy-tin !, selon la balance chou 4, 11 fallait huit onces pour faire un Æeou, qui représen- 


2 


fait quinze cent quatre-vingls /r * d'aujourd'hui. Maintenant le lieou vaut mille fen. 
Ainsi qu'on le lit dans les livres du royaume Houi *, pour le poids de deux an * du mi- 
nerai d'argent extrait de la montagne Li, on devait payer une redevance de sept taels. On 
pouvait extraire au contraire huit tan de minerai du mont Pee-ten pour le même prix ; 
les qualités des minerais peuvent donc varier dans d'énormes proportions. 

Dans la province de Tien, on pèse le cuivre avec la balance Zeou : 100 livres de cuivre 
doivent 10 livres de redevance, perception que l’on appelle aussi /eou du nom de la « ba- 
lance ». Le minerai de cuivre qui n’a pas besoin de manipulations s'appelle YŸ Lo tchen tong. 
Celui au contraire qui doit être remis au feu huit ou neuf fois, se nomme A7 pin et Ky tsao. 

On appelle Pey {se le minerai de cuivre, qui, sur une livre brute, contient un centième 
de fen d'argent pur. L’affinage par le feu de ce minerai se nomme 76e kouang®. On com- 
mence par lui faire subir une première cuisson qui lagglomère en une masse appelée 
Kien tiao, puis on le soumet à des feux plus vifs dits 7a ho « grands feux ». Après cette 
dernière opération, on peut trouver le métal, soit en menues parcelles nommées 7? mou’, 
soit aggloméré en une seule masse, que l’on désigne sous le nom de 7cheou touan. C'est 
à ce résultat que l’on peut juger du succès de l'opération, des dépenses et des travaux 
qu'il reste encore à faire et de la bonne ou mauvaise qualité du métal. 

Il est nécessaire d'apprendre à reconnaitre la qualité des minerais de cuivre, ce 
à quoi l’on parvient surtout par la coloration. Les teintes violette et couleur de feu, la 
couleur appelée Lao ya lin *, qui est cette dernière teinte mélangée d’une nuance bleue, 


1 Les monts Hy-tin sont situés près de la ville de Kao hien aux confins du Se-tchouen et du Yun-nan et 
étaient très-abondants autrefois en argent et en étain. La balance Tchou ti est un mode de compte usité sous 
les Han (202 av. J.-C. à 220 après). 

? Le fen est la centième partie du tael, il se subdivise en 10 #, le li en 10 %ao : 10 fen font un fsten. 

3 L’un des trois royaumes en lesquels se partagea la monarchie chinoise à la fin des Han. Il comprenait la 
province du Ho-nan et la partie méridionale de la province du Chan-si. Il est orthographié d'ordinaire Wei. 

* Le tan dont il s’agit ici vaut 400 livres chinoises de 20 onces chacune. Il se subdivise en 10 feou, le 
teou en 10 chen, le chen en 10 ko. Le tan du commerce vaut 100 livres de 16 onces ou environ 61 kilogram- 
mes. C’est l’unité que les Européens connaissent en Chine sous le nom de picul. 

5 Située dans le Chen-si, au N.-0. de Si-ngan fou. 

6 Ce Zeou n’est pas le même mot que le précédent. Le premier est le caractère « couler », le second le 
caractère « grenade. » 

7 Ces expressions sont la traduction du fait lui-même, la première signifie littéralement « un feu devenir 
cuivre », les deux autres «plusieurs fois refroidir, plusieurs fois creuset ». 

8 Le sens du mot kouang, que l’on retrouvera très-fréquemment dans la suite, est « minerai, matière mé- 
tallique » ; {se veut dire « affiner par le feu » ; nous allons voir cette expression employée plus loin dans un 
sens figuré pour désigner une espèce particulière de minerai. 

° Littéralement « base, fondement femelle ». Cette expression va revenir très-souvent dans la suite et avec 
des sens différents. 

19 «Plume de corbeau ». 


180 TIEN NAN KOUANG TCOHANG. 


doivent être préférées avant tout. Ces qualités de minerai donnent quelquefois 50 pour 100 
de cuivre, et dans ce cas on les désigne sous le nom de a teou tse. 

On trouve parfois un minerai de cuivre qui contient 70 ou 80 pour 100 de mé- 
tal, mais cela n'arrive que bien rarement; aussi lappelle-t-on Houang kin pe*; Veau 
est comme la nourrice de ce métal, et c’est elle qui le transforme sans aucune opé- 
ration en Sen tong, métal lui-même à l’état natif. Sa qualité pour les différents usages de 
l'industrie est très-supérieure, surtout s’il a été trouvé en grande masse et non en menus 
fragments. 

Les minerais d'argent sont également très-divers. Le meilleur est de couleur noire; 
il est préférable à celui qui a la couleur appelée Yen cha ?. On peut retirer une once d’ar- 
gent de sept ou huit onces du métal appelé Houan 1se dont ce dernier minerai est une 
variété. Il faut citer encore le minerai dit Houan ho iuo sou, qui est très-inférieur aux pré- 
cédents; tous ces minerais inférieurs sont compris sous l'appellation générale de Tse 
kouang. 

Le métal dit Aie kouang n'est autre que du plomb noir; 1l s'appelle aussi Wing kouang, 
«minerai éclatant ». Il y a deux espèces de Ming Kouang, l’une appelée Ta houa, « grande 
fleur», l’autre S7 houa,« petite fleur ». La nature du bois employé pour la réduction de ces 
minerais fait une différence de quelques fen dans la valeur du métal. 

Il y a ‘une autre espèce de minerai appelée Tong kay yn° qui est noir, et présente en 
même temps la couleur yen-cha ; il contient du cuivre, mais aussi de l'argent, ce que l’on 
reconnait à l'apparence brillante qu'il revêt dans ee cas. Grillé à un 7a lou, «grand foyer», 
il prend l'aspect du fer, mais traité dans un second, puis dans un troisième foyer, ceux que 
l’on nomme Zouy lou et Kin lou, puis à un quatrième, le Siao lou, « petit foyer », où le 
cuivre entre en fusion, il est enfin passé à un dernier creuset où l’on recueille l'argent pur. 

Le minerai Yn kay tong, « argent revêtu de la couleur du cuivre », est d’une couleur 
verte et offre à sa surface l’apparence des dents d’un cheval. Fondu à un grand foyer, 
puis successivement grillé dans des fours, il se convertit en cuivre. 

Le minerai Pe yuen, « plomb blane », fondu dans un vase en terre, se convertit en 
plomb. On pense qu’il contient aussi un peu d'argent. Les habitants du royaume de Kiao- 
tche * connaissent seuls le procédé de séparation qui permet d'obtenir ce dernier métal. 


1 « Jaune, or, blanc ». Les Chinois appellent ainsi trois petits oiseaux qui revêtent chacun une de ces cou- 
leurs; il est du plus heureux augure de les voir tous trois réunis. Ces oiseaux pondent toujours trois œufs à la 
fois et de chaque nichée sortent des rejetons présentant chacun l’une des trois couleurs. L'expression ouang 
kin pe indique, comme notre mot phénix, une chose excessivement rare. | 

? Littéralement « sel sable ». 

3 « Cuivre revêtu de la couleur de l'argent ». J'écris avec un y le mot yn qui signifie argent, pour le 
distinguer du mot à qui signifie conduire et que l’on rencontrera souvent dans le cours de l'ouvrage. 

# Les Annamites, ou, d’une manière plus précise, les Tongkinois, très-réputés, comme on le sait, pour leur 
habileté métallurgique. Les mots Ævao tche que les Annamites prononcent geao chi, veulent dire « qui a le gros 
orteil séparé », sorte de particularité spéciale à cette race. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 181 


S$ 5. — Des foyers. 


L'or est fondu par le feu, purifié par le nitre, et recoit enfin de lhabileté de louvrier sa 
forme dernière. La terre jaune est comme la mère de l'or; aussi est-ce avec cette terre 
que l’on construit les fourneaux qui servent à reconnaitre la présence de l'or et à opérer sa 
difficile préparation. Nous allons les décrire. 

Les foyers sont faits en terre argileuse. Ils présentent à la base la forme d’un pa- 
rallélipipède oblong de deux tche d'épaisseur et d’un tche de largeur, qui va en s’arrondis- 
sant au sommet et dont la hauteur atteint huit tche. Intérieurement est un vide ayant la 
forme d’une cucurbite. Latéralement sont deux portes, l’une pour l'introduction du com- 
bustible, l’autre pour l'introduction du minerai, et on doit luter celle-ei avee soin. Dans la 
partie inférieure du foyer sont disposées des ouvertures que l’on peut ouvrir ou fermer à 
volonté pour laisser échapper les gaz, et l’on ménage en dessous un vide pour établir le 
tirage. Dans les foyers destinés aux minerais de cuivre, il v a dans la partie supérieure 
un autre vide, sorte de fenêtre qui permet de suivre la marche de l'opération. La base des 
foyers employés pour le traitement des minerais d'argent est plane, celle des foyers 
employés pour les minerais de cuivre est en forme de marmite. 

On lute les foyers avec de la terre humectée d’eau salée et l’on doit apporter le 
plus grand soin à garantir toute la périphérie du creuset ; Le foyer ainsi préparé s’appelle 
tang lou; on allume ensuite du charbon pilé assez fin que l’on nomme Chao tuo tse 
et qui doit durer de deux à quatre heures”, on ajoute au bout de ce temps du charbon 
de bois plus gros, et l’on commence à faire agir le soufflet pour que les flammes pénètrent 
la masse du minerai. On ajoute successivement de nouveau combustible. Quand le charbon 
et le minerai paraissent ne plus former qu’une seule masse en fusion, on introduit une 
sorte de ringard nommé ZSsour {se. S'il ressort noir, on devra conclure que le foyer 
lui-même est porté au rouge. D’heure en heure, trois hommes se relèveront au soufflet 
et l’on veillera à ce qu'ils ne ralentissent ou n’accélèrent pas trop ce travail. Le ringard 
ne doit jamais prendre la couleur rouge. On enduit de poix ou d’une sorte de colle les 
parois du foyer, opération qui se nomme Sex pang. La conduite des fourneaux de cuivre 
se divise en périodes de six heures ; la seconde période est dite « heure du feu correspon- 
dant»; la troisième est dite Tir kouay ho, « heure du feu dispersé et ne donnant de flammes 
qu'au sommet»; la quatrième s'appelle Liang touy che ho, « feu des deux heures correspon- 
dantes *»; la cinquième, Eul sse ho, «second feu quatrième ». Ces opérations achevées, 
on ouvre la porte du fourneau dite «porte d’or * », et à l’aide d’une sorte de râteau nommé 
Pa, on retire le charbon et les scories. avant d’enlever le euivre lui-même. À ce moment, 


1 Les heures chinoises sont le double des nôtres. 
? On appelle heures correspondantes en Chine les heures séparées par un intervalle complet de douze 


heures ou d’un jour. 
3 Ain men, ce qui pourrait se traduire aussi et plus logiquement « porte du métal », le mot {x en chinois 
ayant les deux sens. 


182 TIEN NAN KOUANG TOHANG. 


celui-ci recoit le nom de Pix tong ou «cuivre froid, » parce qu'il se refroidit aussitôt et 
redevient solide. Avec une seconde barre de fer, on achève d’expurger minutieusement 
le métal de toute matière étrangère, opération qui se nomme Xay mien. Enfin, on re- 
froidit le cuivre soit avec de l’eau pure, soit avec de l'argile détrempée, soit même avec 
de l’eau de riz, afin de pouvoir le retirer. 

Si le feu n’a pas été assez ardent, on peut trouver le minerai agglutiné en une seule 
masse; ce que l’on appelle vulgairement : « avoir porté la tête des bonzes à une noce, » en 
d’autres termes, avoir fait une chose intempestive. Si la porte d’or se rompt pendant l’o- 
pération, le métal se répand au dehors, et il en résulte souvent des accidents très-graves, 
tels que la mort des ouvriers. Cet accident est heureusement assez rare et provient de 
la manière dont aura été conduit le feu. 

L'opération par laquelle on retire l'argent du plomb * demande que les travailleurs se 
relèvent soixante-dix ou quatre-vingts fois; ils se relèvent ensuite une ou deux fois 
pour le traitement des résidus. 


S 6. — Accessoires des foyers. 


Le soufflet est de forme ronde et en bois, le tuyau a un tche et demi de long ; sa lon- 
gueur totale peut atteindre douze tche. Si on ne peut trouver de pièce de bois assez 
crande pour le fabriquer, on peut le composer de morceaux rapportés, tout en lui conser- 
vant sa forme ronde. Trois hommes sont nécessaires pour en ürer tout ce qu'il peut don- 
ner ; mais si l’on n'a besoin que d’une faible ventilation, un seul homme peut suffire. 

On se sert d’une pelle plate en bois pour alimenter le feu de charbon. 

Le Po tiao est une barre de fer de huit à neuf tche de long, ayant une poignée de bois 
d'un tche environ ; elle sert à retirer le cuivre et les scories ; dans les fourneaux destinés 
au minerai d'argent, l'instrument qui sert à retirer les scories s'appelle an tsao. On se 
sert aussi de eisailles en fer pour retirer le cuivre des fourneaux. 

Le râteau est de forme carrée, large d’un tche, haut d’un sixième de tche, épais d’un 
tsen, il est fixé à l'extrémité d’un manche en bois de dix tehe de long. Pour le cuivre, 
le bois employé doit être récemment coupé, et non trop desséché ou trop vieux. 

Le Po hr est une sorte de crible fait en bambou et de forme ronde qui sert à laver 
le métal. 


ST. — Des instruments et des vases en terre. 


À 


L'épuration de l'argent se nomme 75ao *. Sa fusion se nomme Y che, ce qui veut 
dire «vide profond ».—11 faut se servir pour l’épuration de l'argent de cendres amassées 
depuis plusieurs années. 


1 C’est celle de la coupellation connue depuis très-longtemps en Chine et qui est toujours assez longue, 
même avec les procédés perfectionnés de l’Europe. Par la méthode allemande, par exemple, une charge de 
10 tonneaux de plomb d'œuvre se coupelle en soixante-dix heures. On va trouver le procédé chinois exposé un 
peu confusément dans la deuxième partie de l'ouvrage. 

2 Du nom du genre de fourneau que l’on emploie. On se rappelle que /sav veut dire creuset. 


NOTIONS GENERALES. 183 


Il y a deux sortes de creusets pour l’épuration de l'argent : lune est de petite dimen- 
sion et s'appelle ia ma tsao, de ce que sa forme offre une certaine ressemblance avec celle 
d'une grenouille. L’autel de ce creuset est en terre glaise, d’une longueur de {rois à quatre 
tche, et d’une largeur d’un {che ; il est entouré d’un mur en terre glaise d’une hauteur d’un 
tche, dont le sommet est arrondi en dos de poisson. Deux ouvertures y sont pratiquées, 
l’une au dessus, qui sert à l'introduction du combustible ; l'autre placée au dessous, qui 
sert à diriger le feu. On place dans ce creuset le minerai entre deux couches de char- 
bon et on recouvre le tout de sable. Ces dispositions une fois prises et le «feu allumé», on 
voit au bout d’une heure l’argent suinter en gouttelettes et tomber au-dessous du foyer dans 
un vase en terre cuite ; alors on couvre ce vase et on jette de l'eau qui solidifie l'argent et 
entraine les cendres et les résidus que l’on appelle {# #rou. Après que l’on a recueilli Par 
gent, on détruit le fourneau, qui doit être reconstruit à neuf chaque fois. 

La seconde espèce de creuset est de plus grande dimension et s'appelle Ts? sin /sao, 
« creuset des sept étoiles » ; comme il ressemble aussi à un tombeau, on l'appelle égale- 
ment Mo men, « porte du tombeau». L’autel de ce creuset, de forme rectangulaire 
comme le précédent, a six tche de long et deux tche de large. La muraille en terre qui 
l'entoure est percée de sept ouvertures ou trous de chauffe, et c’est de là qu'il tire son 
nom. Elle a deux tche de hauteur. Au dessus est l'ouverture par laquelle on introduit d’a- 
bord le combustible que l’on fait reposer sur une couche de sable, puis le minerai. 
Au dessous est l'ouverture appelée «porte d’or», que l'on tient fermée avec une brique. 
Après deux heures de feu, on ouvre la porte d’or pour s'assurer, par l'introduction d’un 
ringard, de la marche de Fopération. On referme de nouveau, et après deux ou quatre 
heures, l'argent vient se ramasser en culot à la partie inférieure du fourneau. 

A mesure que l'extraction de l'argent s'opère, on peut alimenter le creuset de 
combustible et de minerai, et ainsi rendre l'opération indéfinie, jusqu’à ce que le four- 
neau devienne impropre à la euisson du minerai et que l’on doive l’abandonner pour en 
construire un nouveau. C’est pour cela qu'on appelle encore ce genre de fourneau Ouan 
gien Isao, « creuset des dix mille ans ». 


S8.— Des dépenses. 


Pour l'exploitation d’un gisement métallifère, il est nécessaire d’avoir un grand appro- 
visionnement en riz et en huile. Il faut par conséquent pouvoir disposer de capitaux con- 
sidérables, parce que si l’on ne rencontre pas dès le début un gisement assez riche, il 
sera difficile de retenir les ouvriers que l’on aura rassemblés de toutes parts, leurs dépenses 
étant supérieures aux produits de leurs travaux. Ÿ aurait-il cent mille hommes réunis 
dans le même lieu pour travailler, s'ils n’y trouvent point les choses nécessaires à la 
vie, ils se disperseront bientôt dans toutes les directions. Celui qui veut rassembler des 
travailleurs doit donc pourvoir d’abord le plus largement possible aux premiers frais. 
C’est pour cela que nous allons mentionner ces dépenses, afin qu'on n’entreprenne pas 
trop précipitamment et sans réflexion les travaux de ce genre. 


184 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


Dans un chantier d'exploitation on doit toujours trouver la nourriture de chaque Jour ; 
car les ouvriers qui travaillent le jour et la nuit sentent souvent le besoin de manger; il 
faut done avoir sans cesse des aliments préparés. Si vous avez dix mille ouvriers réunis dans 
une mine, vous devrez avoir une réserve de cent {an de riz pour la dépense quotidienne. 

Les galeries d'exploitation étant en général très-obseures, il faut un grand nombre de 
lampes, parce que sans lumière il est impossible de travailler et même de cireuler dans 
la mine. Une lampe dépense huit onces d'huile par jour, et il faut une lampe par série 
de quatre travailleurs. 

Le minerai une fois extrait, il faut se procurer le charbon nécessaire pour l'entretien 
des fourneaux employés au traitement de ce minerai. Or, pour chaque fourneau pouvant 
contenir dix mille livres de minerai, il faut une quantité égale de charbon et souvent même 
davantage. Quelquefois il faut plus de charbon que de minerai, d’autres fois c’est le con- 
traire et, quand les fourneaux sont allumés depuis longtemps et les feux bien entretenus, 
deux ou trois mille livres de charbon suffisent souvent pour traiter dix mille livres de mi- 
nerai. Dans les mines d'argent, chaque foyer dépense six à sept cents livres de charbon en 
six heures ; il arrive même que chacun de ces foyers dépense par heure trois ou quatre cents 
livres de combustible. Le charbon de bois sec se consume rapidement, le charbon humide 
au contraire produit beaucoup de fumée et vaut moins que le premier pour l'extraction 
de l'argent. Pour traiter les minerais d'argent, il faut toujours se servir de charbon de 
bois, en ne se servant du charbon commun, «le charbon de terre », que pour allumer les 
feux. Il est en effet deux sortes de charbon, l’un très-léger, le charbon de bois, l’autre 
très-lourd, le charbon de terre; le premier est employé pour l'extraction de largent, le 
second pour l'extraction du cuivre. Afin que ce dernier charbon soit propre au traitement 
des métaux, on le brüle en lieux fermés, pour le débarrasser de la famée et de l’humi- 
dité ; on le retire ensuite en gros blocs, et au moment de s’en servir, on le casse en 
morceaux plus petits ! En effet, le minerai a horreur de l'humidité et se réjouit de la 
siccité. 

Pour prévenir les éboulements, on doit soutenir les galeries à l’aide de colonnes 
placées à deux ou trois tche des parois. Elles ont une hauteur de cinq tche, un diamètre 
d’un huitième de tche, et sont placées deux à droite et deux à gauche. Il faut ajouter en outre 
des cadres appelés Æouan. Quand ils sont distants les uns des autres d’un tche, la construc-. 
tion porte le nom de Tseou ma jan, «galerie pour pas de cheval»; si la distance est moin- 
dre, elle prendle nom de Tsen pou jan, «galerie à petits pas ». Il faut approvisionner la mine 
de barres de fer pointues pour les fouilles, et de solides pinces en fer pour les fourneaux. 
Ces instruments s’émoussent par un fréquent usage; il faut alors les faire réparer afin 
qu'ils soient toujours propres au travail. L'opération qui consiste à réparer les instru 
ments porte le nom de Aiuen tsien, et elle est faite par les ouvriers de la mine. 

Il faut avoir aussi l’eau nécessaire pour la préparation des mets, pour le lavage 
du minerai, et enfin pour humecter le charbon des fourneaux. 


1 C’est la préparation du coke qui se trouve indiquée ici en quelques mots. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 185 
Il faut également une certaine quantité de sel pour la préparation des aliments 
et pour mélanger à la terre qui sert à la confection des fourneaux. 

On désigne par le nom de A7 a les souches et les racines d'arbres dont on se sert 
dans les mines pour aviver la flamme des fourneaux au moment où le métal entre en 
fusion. Ce n’est point comme combustible qu’on les emploie, mais parce que leur fumée 
est d’un certain avantage pour la coloration du métal. Si ces racines sont trop sèches 
et arrachées depuis trop longtemps, elles deviennent inutiles; aussi faut-il ne s’en 


approvisionner qu'au fur et à mesure des besoins, pour éviter d'en perdre une partie. 


S 9. — Des ouvriers des mines. 


Ceux qui travaillent à creuser les mines sont appelés Cha tin". C'est de leur nombre 
plus ou moins grand que dépend le succès de l'exploitation. Si leur arrivée peut être 
comparée à l’inondation des eaux, leur départ est aussi rapide que les étoiles filantes. 
Quand l'exploitation est heureuse, ils ne veulent point quitter la mine, les en repousserait- 
on; si au contraire l'exploitation ne donne pas un bon résultat, ils ne viennent pas, 
quoi qu'on fasse pour les attirer. Aussi n'est-ce pas tant le manque de métaux que la dis- 
persion des ouvriers qu'il faut craindre dans les mines. 

La Société formée pour l'exploitation d’une mine porte le nom de Tan fen ; les ouvriers 
désignent leurs patrons sous le nom de Xo teou*, « chefs de la marmite», parce qu'ils en 
reçoivent la nourriture ; les patrons appellentà leur tour les ouvriers 77 Aiongou «frères» : 
mais la dénomination générale de ceux-ci est 7x, « soldats ». Ceux qui sont préposés aux 
dépenses et aux approvisionnements de toute nature, huile, riz, ele., sontappelés Xouan se 
où «procureurs ». Dans chaque mine il v a un homme chargé des achats et des ventes des 
métaux. Il doit noter avec soin les quantités extraites et fait la répartition des bénéfices. 
Ceux qui remplissent ces fonctions prennent le nom de Chou ki, « secrétaire », ou de Xour 
chou, «porte-clefs », ou bien encore de Xien pan, « secrétaire ». 

.Jang teou est la désignation de celui qui, dans une mine, est chargé de l'examen du 
trait indicateur et de la couleur du sol. Il fait rechercher à l'aide du coin le filon métal- 
lique, disposer les bois qui doivent soutenir les galeries, préparer les lumières, les venti- 
lateurs, placer les réservoirs pour recevoir les eaux, s’il y en a, et fixer le prix de la vente 
du minerai que l’on rencontre. C’est à l'ingénieur qu'il faut avoir trouvé tout d’abord, si 
l’on veut réussir dans une exploitation. Les ouvriers sont répartis en ateliers dont les chefs 
s'appellent Zin pan. 11 y a un homme par atelier destiné à placer, sous les ordres du Jang- 
teou, les cadres des galeries. 

On appelle 7chouï cheou ceux qui doivent choisir et diriger les ouvriers mineurs 
chargés de manier le marteau et le coin. Dans chaque atelier il y a deux hommes pré- 
posés spécialement à chacun de ces instruments. Ils peuvent alterner ensemble et 


! Litléralement « soldats des pierres sablonneuses ». 
? Teou signifie « tête », au figuré «celui qui dirige », de même #hang veut dire «supérieur » : de là les 
mots lou teou, lou tchang, « chefs des foyers », ete., que l’on va rencontrer dans la suite. 
IT. 9% 


186 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


prendre suecessivement tantôt Fun, tantôt l’autre de ces deux outils. Ce changement 
s'appelle Chouang houan cheou. Pour ce travail, il faut choisir des jeunes gens forts el 
VIgOureux. 

Le nombre des hommes destinés à transporter le minerai est indéterminé. En effet, 
il en faudra beaucoup, si l’exploilation est considérable, si les galeries sont profondes 
et les blocs de minerai très-lourds. 

Les ouvriers qui travaillent sans salaire fixe et dont le bénéfice est proportionné aux 
résultats de l'exploitation s'appellent Zsirchen chang che"; ceux qui sont payés à raison d’une 
somme fixe par mois, quels que soient ces résultats, s'appellent Yue 20, « qui vit au mois ». 

Le Lou teou est celui qui reconnait la nature des divers minerais, qui distingue leur 
richesse et choisit les meilleurs, qui‘dirige le feu pendant le traitement du minerai; c’est 
principalement de lui que dépendent l'augmentation ou la diminution des bénéfices de 
l'exploitation, son succès ou son insuecès; il tient dans sa main les bénéfices ou les 
perles des sociétaires. Dans le creusement de la mine, le Jang-teou joue le rôle le plus 
important. Le Lou-teou est à son tour indispensable pour la conduite des fourneaux. 

Le nom de 7sao pi ho s'applique aux ouvriers qui sont attachés, en dehors du travail de 
la mine, à diverses fonctions ; ils sont classés parmi ceux qui travaillent pour une somme 


fixe par mois. 


S 10. — Des fonctionnaires. 


Selon les règles de la dynastie Tcheou ?, dès qu'il y a quarante hommes réunis, ils 
doivent avoir pour chef un Aouan jen ou « mandarin », auquel obéissent des satellites et qui 
a sous ses ordres deux che *, quatre fou * et deux 47%. Le nombre des satellites varie d’après 
les besoins du Kouan. Les mandarins ne doivent pas prendre pour satellites les pre- 
miers venus, mais bien des hommes intelligents et droits en qui ils puissent avoir 
confiance. Si l’agglomération d'hommes est considérable, il faut nommer des Pe tchang, 
« chefs pour 100 personnes », et des sien tchang «chefs pour 1,000 personnes », pour 
empêcher le vol et la débauche. Ces chefs peuvent prendre le titre de Jeow kiao. Cette 
organisation permet de réprimer les abus que les hommes perdus de mœurs ne manquent 
pas de commettre dans les marchés. | 

Les Chou-ki, qu'on appelle aussi 47 /i, sont des écrivains qui tiennent la comptabilité. 
Ceux qui sont employés dans les mines de cuivre s'appellent A?n chou, de ce qu'ils sont 
chargés de veiller à l'argent et au cuivre et d'inscrire les quantités de métal reçues, vendues 
ou emmagasinées. Ceux qui sont préposés aux mines d'argent se nomment Xo chou, 
de ce qu'ils sont chargés de prélever l'impôt pour l’empereur. Us inserivent les sommes 


1 Traduction littérale : Zpsum corpus semper adest. 

? Troisième dynastie chinoise qui à régné de 1134 à 256 avant J.-C. 

# Secrétaires qui sont chargés d’apposer le cachet noir, celui sur lequel est gravé le caractère tchen, « ob- 
Servetur ». 5 

* Scribes. 


# Secrétaires qui sont chargés d’apposer le cachet rouge. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 187 


qui ont été payées et celles qui sont mises en réserve ; ils doivent chaque mois faire 
transcrire sur des registres et promulguer les édits de l’empereur et des mandarins qui on 
rapport à l'exploitation des mines. Pour remplir toutes ces fonctions, il faut des hommes 
intelligents, ayant des connaissances étendues en géométrie et en arithmétique. Ils seront 
toujours désignés par les mandarins, et jamais choisis ou préposés par les propriétaires des 
mines. | 

On appelle Séun ou les gardiens des mines de cuivre, dont la principale fonction est 
de discerner la qualité du minerai et de pourvoir à l’approvisionnement en charbon. 
Ceux qui sont chargés de prélever la part de minerai qui revient au gouvernement se 
tiennent surtout sur les lieux d'exploitation ; ceux au contraire qui sont chargés de recevoir 
le métal épuré, surveillent les fourneaux où 1l est élaboré. Ils signalent le zèle ou ia 
fraude et provoquent, selon les mérites de chacun, des récompenses ou des châtiments. 

Les Æo tchang sont préposés aux balances, aux trésors, aux coffres et à leurs clefs, à 
la paye des salaires aux ouvriers des mines, à l'administration du capital de la mire, à la 
perception du métal dans les mines d'argent, à toute valeur en un mot payée ou reçue. Il 
leur est adjoint des aides auxquels ils peuvent déléguer certaines fonctions. Les Ko-tcharg 
sont honorés et respectés dans toute la mine comme les premiers fonctionnaires. 

Les Xee tchang sont des juges de paix, chinois pour les Chinois, mahométans pour 
les Mahométans, choisis parmi les gens de même langue et de même nationalité, pour 
maintenir l’ordre dans chacune de ces catégories d'ouvriers et prononcer sur les querelles 
qui s'élèvent. Leur choix est d’une grande importance. 

Le Tan tchang a l'office du charbon; ce fonctionnaire n’est pas absolument indispen- 
sable dans les mines d'argent, mais 1l l’est dans celles de cuivre, qui doivent être appro- 
visionnées avec exactitude de ce combustible. Il veille à l'exécution des marchés passés 
dans ce but et ne se préoccupe pas trop des avances à faire aux fournisseurs, s'ils sont 
riches ou ont des cautions suffisantes ; mais il exige avant tout qu'ils aient une grande 
quantité de charbon en réserve et des bêtes de somme pour le transport. 

Le Lou ichang a soin des fourneaux et des feux en l'absence des ouvriers. IL est peu 
nécessaire dans une exploitation de cuivre; mais sa présence est importante dans une 
exploitation d'argent, pour veiller à l'impôt qui doit être payé à l'État. 

Les Xay tchang sont préposés aux marchés et fixent le prix des diverses denrées et 
les conditions auxquelles elles doivent être livrées par les fournisseurs. 

Le directeur général d’une mine d'argent prend le titre de Zsong jang ou Tsong kong. 
Il est presque égal au Tong tchang ou premier directeur des mines. Il faut choisir pour 
ces fonctions des hommes experts dans la science des indices et du trait indicateur. 

Le Tong-tchang a autorité sur toutes les mines. Il décide où l’on peut en ouvrir de 
nouvelles, et quand s'élèvent entre deux mines voismes des différends sur leurs limites. 
il envoie des inspecteurs pour examiner le cas. 

Les satellites chargés d’arrèter les voleurs et les criminels s'appellent Lier you. 


! Gardes locaux, sortes de sergents de ville, 


188 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


On peut se dispenser d'entretenir dans une mine de cuivre les Tchouang lien ou 
« soldats proprement dits », mais leur présence est indispensable dans les mines d’ar- 
gent, où se trouvent parfois réunis plus de dix mille hommes, pour assurer le payement 


de l'impôt dû au gouvernement et maintenir le bon ordre. 
[e] 


S 11. — Des réylements. 


C’est la loi elle-même qui règle la conduite des hommes haut placés; mais pour le 
peuple, il est nécessaire de compléter la loi par des règlements. Nous allons donc parler 
maintenant de ceux qu'il convient d'établir pour prévenir les abus, chaque fois que s’or- 
ganise une nouvelle réunion d'hommes. 

Dès que quelqu'un croit avoir découvert dans la montagne un endroit propre à une 
exploitation minière, 11 doit en prévenir le gouvernement. Le Tong-tchang, après avoir 
fait examiner les lieux, accorde, s'il le juge utile, l'autorisation d'ouvrir la mine, autorisation 
que l’on grave sur une tablette en bois. Puis, à un jour choisi, on commence les fouilles. 

« Comme nous l'avons déjà vu, » Tan-fen est le nom de la société formée par ceux qui 
fournissent le capital nécessaire pour couvrir les frais de l'exploitation. Le gain et la perte 
sont partagés entre eux proportionnellement à la part de ee capital qu'ils auront souserite. 
Les choses dont il faut tout d'abord pourvoir la mine sont le riz et l'huile; de là le nom 
de tan ?, l'argent fourni devant être en rapport avec la quantité de riz et d'huile nécessaire. 
Pour éviter toute discussion dans l'avenir, les sociétaires doivent rédiger à lavance un 
contrat qui détermine les conditions auxquelles ils pourront se retirer de l'affaire, et aux- 
quelles d’autres pourront les y remplacer. 

Tao tsien, « demander le coin », est la demande de location de là mine. On appelle 
Kee-tsien le propriétaire qui loue la mine en s’en réservant une certaine partie. Mais 
on peut aussi en louer la totalité, en s’assurant par un contrat en règle, signé des chefs 
de l’exploitation, un ou deux dixièmes des métaux extraits. Quelquefoisles propriétaires se 
contentent d’un prix de location fixe, sans aucune part dans les résultats de l'exploitation. 

On appelle Æong tchang? la perception des recettes. Avant que leur répartition soit 
faite entre les associés du Tan-fen, on doit attendre que l’on connaisse le prix de vente 
des métaux et ce qu'il en reste en magasin, On défalquera ensuite toutes les dépenses 
communes, telles que les frais du culte, des satellites, le payement de la location du ter- 
rain, les indemnités que l’on peut avoir à payer pour les eaux que l’on va prendre dans 
les propriétés environnantes. Il peut se faire que la montagne où se trouve la mine soit 
territoire commun et qu'il n’y ait rien à débourser pour ces deux dernières causes. 


1 Voir la note 4 de la page 179; fen veut dire ici «division, partage ». 

2 Tehang n’est pas le même mot que le tchang déjà rencontré, qui signifie «supérieur », où que tchang 
qui signifie « mine ». Il veut dire ici «règlement », et hong, « bénéfice ». Pendant le premier mois de l’an- 
née, tous les marchands chinois s’abordent avec cette locution à la bouche : Æ% nien souan hong tchang, «com- 
bien de bénéfices cette année » ? car c’est à cette époque que tous les comptes se règlent. On voit par les détails 
qui suivent que la propriété est investie en Chine des mêmes droits et entourée des mêmes garanties qu'en 
Europe. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 189 


On appelle Fey tong * les mines abandonnées et hors feu. On devra les désigner au 
gouvernement, qui après examen fera placer à l'entrée une tablette constatant le fait. Si, 
au bout de deux ou trois mois, personne n’est venu réclamer la propriété de la mine, 
le premier venu aura le droit de reprendre le travail interrompu. Si la cessation des tra- 
vaux a une cause légitime, on pourra accorder un délai d’un mois ou deux au proprié- 
taire pour augmenter son capital. 

Le procureur général de la mine, de qui dépend le Jang-teou lui-même, est désigné 
sous le nom de 7che pin ou de Kouan-se. Après lui vient le Jang-teou, sous les ordres 
duquel sont les Lin-pan, qui dirigent tous les ouvriers. Tel est l’ordre établi pour que 
la confusion ne règne pas au milieu de cette multitude de travailleurs. Le caleul des 
salaires s'appelle Aou kia; leur distribution se nomme 7che. Elle n’a lieu qu'à trois 


0 


époques de l’année, au Zouan ou?, au 7chong kieou * et au Tchong qien ‘. A ces mo- 
ments, les ouvriers s’en vont et d’autres les remplacent. En dehors de ces époques, il serait 
difficile d’enrôler de nouveaux travailleurs, si le besoin s’en faisait sentir. 

On appelle Æo piao la charte qui autorise à allumer les feux et sans laquelle on ne 
peut procéder à cette opération. Au moment où l'on retire le métal des fourneaux, les man- 
darins doivent noter avee soin les quantités extraites. Dans les mines d'argent, ils doivent 
même, pour plus de sécurité, faire saisir à ce moment l'argent dù au gouvernement. On 
appelle la redevance en métal pur Chou ko. La redevance en minerai s'appelle 7cha tchong. 
Dans les mines d'argent, il faut inscrire heure par heure la production en métal, de ma- 
nière à connaitre toujours d’une façon certaine, à un moment quelconque, la perception à 
opérer. Dans les mines de cuivre, le métal extrait doit être immédiatement vendu. Si les 
propriétaires de la mine se refusent à opérer celte vente au prix ordinaire, ils doivent au 
gouvernement un impôt supplémentaire appelé F eul {sien ÿ, qui est la dixième ou la 
neuvième partie de l'impôt habituel. 

Quand deux mines voisines convergent l’une vers l’autre, elles sont dites Za tin tse, et 
il faut les limiter par des poteaux ou par des pierres. La dernière venue doit toujours céder 
la place à l’autre. Si l’une en ereusant en ligne droite, l’autre en creusant latéralement 
atteignent le même point de la montagne, on placera un poteau et on établira une servitude 
de passage soit par le pied, soit par le sommet de la montagne. Pour tous ces cas litigieux, il 
conviendra d'envoyer des inspecteurs qui décideront suivant les règles de la justice et pré- 
viendront tout tumulte. Si deux mines se rencontrent en un lieu où se trouve la grande 


L Fey signifie « hors d'usage ». 

? Solennité du cinquième jour du cinquième mois, appelée aussi Fête du Dragon, instituée en l'honneur 
de Kiei-tse-toue ou Kiue-yen, ministre célèbre qui, désespéré d’avoir été calomnié auprès de son maître, 
le roi de Tsou, se jeta dans les eaux du fleuve Bleu sous le règne du dernier empereur des Tcheou 
(290 av. J.-C.). Le peuple, qui le chérissait pour ses vertus, voulut perpétuer son souvenir en venant chaque 
année faire des offrandes sur le fleuve. C’est là une des fêtes navales les plus pittoresques et les plus animées 
de la Chine. 

3 Fête du quinzième jour du huitième mois en l'honneur du commerce et de l’agriculture. 

Fête nationale du jour de l'an. 
Littéralement «un second tsien. » Le tsien est, comme nous l’avons déjà dit, la dixième partie du tael. 


> 


ce 


190 .TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


agglomération de minerai que l’on nomme Yang kouang « grande maison de minerai», 
on la partage également entre elles, en laissant au milieu une ligne de séparation d’un tche 
de large. 


S 12 .— Des défenses. 


Toute richesse dont l'accès est permis à tous suscite toujours de nombreux différends 
au milieu d’une foule de plusieurs milliers d'hommes. Il est done nécessaire d'établir 
et de faire strictement observer, sous peine de certains châtiments, les prohibitions indis- 
pensables au bon ordre. 

Quand les ouvriers de deux mines se disputent le même bloc de minerai, il y a /sen 
tsien to ti. Il faut dans ce cas veiller à ce qu'aucun ouvrier n'apporte avec lui un fer ou 
un glaive, où ne se fabrique un instrument ferré avee lequel 1l puisse blesser. IT faut 
empêcher aussi la formation de ligues défensives, qui s'organisent parfois sous une ap- 
parencee de fraternité par la cérémonie des Aiang *. Un écrivai nnommé Gien s’est exprimé 
en ces termes sur ces associations : « [l est rare qu'il n’y ait pas dans une mine une con- 
juration de cette nature. Les mines sont souvent ainsi le lieu de refuge de malfaiteurs qui, 
sous prétexte d'amitié, se sont déjà liés ensemble, et sont obligés de se cacher à cause de 
leurs crimes. » C’est là ce qu'il faut défendre dès le début avec le plus grand soin, si l'on 
veut éviter de grands malheurs. 


S 13. — Des malheurs. 


Les incommodités et les maux se trouvent toujours à côté des avantages et des ri- 
chesses. En recherchant ce que la nature a caché dans les entrailles de la terre, les 
hommes ne vont-ils pas en effet contre une sorte de défense”? Aussi en résulte-t1l souvent 
pour eux des déceptions, par exemple, quand les eaux recouvrent l’objet de leurs recher- 
ches ; il faut alors d'énormes dépenses pour arriver à le retirer. Quand on ne peut réussir 
à introduire et à renouveler l'air dans l’intérieur des mines, les ouvriers courent le 
risque d’être suffoqués; et qui peut imaginer une calamité plus effroyable que celle qui 
arrive quand, en raison du long temps écoulé depuis l'ouverture de la mine, les galeries 
s’affaissent et s’écroulent ? 

La nature des métaux est certainement double, ou YA iang?. Quand le métal peut 
s’extraire facilement du minerai, il est appelé Chou ti : quand au contraire, en raison de 
sa nature, on ne peut réussir à réunir en un tout ses diverses parcelles, elles sont dites 
Eul kouang. Une longue expérience des mines peut seule apprendre à distinguer ces deux 
espèces. 

On appelle Men-leang les mines récemment ouvertes qui n’ont qu'une seule entrée 

1 Sortes de baguettes faites avec la poudre de plantes odoriférantes, et que l’on brûle dans les temples. 


2 Yn iang est une locution chinoise (rès-usitée qui exprime la lutte de deux idées ou de deux principes 
opposés, tels que mâle et femelle, soleil et lune, rond et carré, ete. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 191 


nommée /u0 lou, « route souterraine ». La ventilation intérieure en est difficile et les lampes 
ne peuvent y brüler qu'avec peine. Il faudra se hâter d'ouvrir de nouvelles galeries qui re- 
joignent la voie Iuo-lou. Le carrefour de jonction senomme Yong fongq, et c’est là qu'on doit 
disposer un ventilateur. Si la voie Iuo-lou est très-profonde, ce qui arrive après une longue 
exploitation, la chaleur et l'humidité v deviendront presque intolérables après quelques 
jours chauds ou pluvieux. Cet inconvénient est à peu près impossible à éviter; aussi faut-il 
se fixer chaque année une période d'exploitation, que l’on ne devra pas dépasser. 

La nature des eaux des mines est également double. On appelle /ang chouy celle qui 
provient des ruisseaux voisins et pénètre dans la mine par l'extérieur ; Ya chouy, celle 
qui à au contraire sa source à l'intérieur. On prétend que les minerais du milieu des- 
quels sourd l’eau sont de qualité meilleure. Quand Feau est en petite quantité, on la 
reçoit dans des outres ; sielle vient trop abondamment, on l’épuise à l’aide de tubes dis- 
posés comme il a été dit précédemment. L'augmentation du nombre d'ouvriers que rend 
nécessaire ce travail d'épuisement, absorbe parfois tout le bénéfice de l'opération et en- 
lame même le capital de la mine. Aussi faut-il beaucoup d’habileté dans le choix des 
lieux et la disposition des tubes pour diminuer le plus possible la dépense. 

Si des règlements n'étaient établis dès l'origine, on voit combien de malheurs pourraient 
provenir de la précipitation avec laquelle chacun se précipiterait pour enlever le minerai, 
une fois la galerie ouverte, surtout si elle est étroite. Le danger est moindre quand le 
chemin de la mine est dur et pierreux. 


S 1%. — De l'emploi de certaines locutions. 


On croit que l'emploi de certains mots dans les mines peut attirer des malheurs, et 
qu'il convient par suite de les remplacer par d’autres expressions. Nous allons les indi- 
quer. 

Il ne faut pas se servir du mot /ong, «fermer», mais bien le remplacer par /ong, 
« abondance ». Au lieu de ex, nom vulgaire des lampes, il faut employer l'expression 
liang tse ”, et désigner la mèche par les mots ang houa?, au lieu de l'expression ordi- 
naire de yeou gien *. 

Le mot che, «pierre », doit être remplacé par Ata *, de peur qu’on n’entende, à cause 
de la ressemblance de son, le mot che, « perdre ». De même fou, «terre », doit être dit 
houang, pour qu'on ne puisse confondre avee tou, «vomir » * 

Mong, « sommeil», doit être dit Aowen, parce qu'il rappelle l’idée de vision vaine. De 
même ceux dont le nom de famille est Hong doivent être appelés Houen. 


= 


-Q Fils de la lumière ». T'en est rejeté parce qu'il signifie aussi « monter avec peine ». 
? «Fleur de la lumière ». 
3 Parce qu’elle contient le sens de «fil, lien, attache », ce qui est d’un mauvais présage. 
«Pierre dure ». 
Houang veut dire « herbe, ce qui pousse sur la terre ». 
5 Caractère différent de mong, « sommeil ». Æouen, qui est le mot que l’on substitue à mong, veut dire 
«troublé, obscur ». 


= 


ce 


192 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


Hao, « manière, mode », doit être remplacé par {che, pour que l’on ne puisse com- 
prendre Lao, «rat». 


S15. — Des transmutations de substance. 


Ce serait un grand avantage si quelqu'un parvenait à trouver la pluie qui se convertit 
en or. On rapporte que parfois l'argent trouvé dans les mines s’est envolé, qu'il s’est 
changé en une autre substance, et beaucoup d’autres faits analogues. Sous le roi Lieou du 
royaume Tan !, fous les fourneaux d'argent de la partie médiane du Sud de la province 
furent convertis en cuivre. On dit aussi que l’on peut prédire, d’après les éléphants, les évé- 
nements heureux ou malheureux de l'empire. L'air du mont Lin aurait la propriété de pou- 
voir être converti à l’aide du feu en or et en argent. Sur cette même montagne, on rapporte 
qu'un cadavre enseveli a ressuscité, et que dans la mine qu'elle contient, les os des 
morts reviennent à la vie. Quelques-uns prétendent qu'il y a une espèce d’air qui, comme 
les perles, a la propriété de conserver ce qu'il entoure, et qui peut préserver les corps 
de la corruption. Les âmes à qui ils ont appartenu ne transmigrent pas et restent 
errantes. 

Nous aurons à citer encore quelques exemples de ces transmutations de substance. 

On dit que les montagnes résonnent parfois. Quand le bruit est entendu à l'intérieur 
de la montagne, il ressemble au bourdonnement du tonnerre; quand on l’entend du 
dehors, au bourdonnement d’un essaim d’abeilles. On ajoute que quand ce bruit paraît 
venir de l’intérieur de la montagne, il présage un malheur; si au contraire il vient du 
dehors, 1l est d’un heureux augure. 

Dans les nuits profondes, à la clarté de la lune, on voit quelquefois les métaux répandre 
de vives clartés et projeter des rayons qui sont tantôt réunis en faisceau, tantôt disséminés, 
tantôt dirigés en sens contraire. Dans ce cas, il est hors de doute que l’on trouvera des 
métaux enfouis dans la montagne qui répond à cette lueur, et, si un fleuve est interposé, 
il faudra le traverser pour les rencontrer. 

L'écrivain Kien Ki-tse rapporte que des ouvriers, morts dans des mines et enterrés 
au milieu des galeries, ont été retrouvés après de longues années desséchés et sans la 
moindre corruption. Quelques-uns même étaient assez vivants pour pouvoir fumer le 


tabac qui leur était offert par les passants, mais aucun ne pouvait parler. 


S 16. — Des sacrifices. 


Si les peuples veulent obtenir la richesse, ils doivent offrir des sacrifices. Les dieux 
protégent ceux qui vivent du travail des mines et qui les honorent. On a coutume de 
sacrifier au printemps et à l'automne. Mais ce n’est pas tant l'hommage des biens de 
la terre qui plait aux dieux, que la piété et la vraie religion des hommes. 


! Ce roi estle fameux Lieou-pang, fondateur de la dynastie des Han, qui établit sa cour à Si-ngan fou, capi- 
tale du Chen-si, et régna sous le nom d’Han Kao-tsou, de 203 à 194 av. J.-C. 


NOTIONS GÉNÉRALES. 193 


On honore en général la montagne comme le dieu même des métaux ; on y construit 
un autel, au second et au huitième mois de chaque année, et les chefs et les procureurs 
tant de la mine que des fourneaux viennent v exprimer leur reconnaissance pour les 
biens reçus. 


Sur le mont Si-you 


, 11 y à également un temple affecté au même usage. 

La divinité appelée Kin-ho-giang-giang ? à un temple consacré à l'or et au feu, et 
l’on y fait des sacrifices aux mêmes époques. 

On fait aussi, le 2 et le 16 de chaque mois *, trois sortes de sacrifices à Tsay-chen ‘, le 
génie des richesses, à savoir : des cochons, des bœufs et des moutons. Après l’of- 
frande, le personnel de la mine se réunit pour manger l’holocauste. C’est pourquoi ce 
enre de sacrifice est appelé Ya /sy ou « sacrifice des dents ». 

La société chargée des superstitions et des sacrifices s'appelle Tchong iuen hour. 

IL y a enfin une autre catégorie de temples appelés Hour kouan ”, où se réunissent 
les hommes de chaque province pour faire leurs dévotions particulières. Autant il y aura 
de provinces différentes représentées dans la mine, autant s’élèveront de temples de 


celle espèce. 


1 Cette montagne, une des plus élevées de la Chine, aurait, d’après la Géographie impériale, plus de 4 
lieues de hauteur; il ne s’agit bien entendu ici que de la distance non verticale que l’on parcourt pour par- 
venir de la base au sommet. Le mont Si-you ou You de l’Ouest est situé dans le Chen-si à une lieue au Sud 
de Houa-in hien et s'appelle aussi Houa Chan. C'était un des quatre You ou montagnes sacrées sur lesquelles 
les empereurs des deux premières dynasties devaient venir sacrifier au commencement de chaque saison. Le 
You du Nord était le mont Tchang dans le Chan-si; celui de l'Est, le mont Tay dans le Chan-tong; celui du 
Sud, le mont Heng dans le Hou nan. La troisième dynastie, celle des Tcheou, ajouta un cinquième You, celui 
du milieu. C’élait le mont Soung dans le Hou-pe. 

2 «Déesse qui préside au feu de l'or. » Ce culte n’est connu que dans les mines. 

3 C'est-à-dire à la nouvelle et à la pleine lune. On sait que les Chinois comptent par mois lunaires. 

* Cette divinité est très-honorée dans tout l'empire, surtout par les commercants. Les lettrés seuls dédai- 
enent son culte. 

5 oui «réunion », Aouan « temple ou collége ». 


= 
19 
ot 


IT 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 


S 107, — Du traitement des minerais d'urgent. 


La production en argent de la province du Yun-nan est la plus considérable de toute 
la Chine. Le Tche-kiang et huit autres provinces possèdent, 1ilest vrai, des mines d’ar- 
gent, mais elles ne fournissent pas, à elles toutes, la moitié de ce que produit le Yun- 
nan. Aussi est-ce toujours vers cette province que se sont portés tous les efforts des 
mineurs, etils ne sont jamais parvenus à épuiser ses richesses. Les départements de Tsou- 
hiong, de Yun-tchang, de Ta-ly ', abondent en mines d'argent; après eux viennent les 
districts de Yao-ngan, et Tchen-yuen ?. 

Quand se trouve dans une montagne le minerai Kouang cha, il est hors de doute que 
Von rencontrera à sa surface l'espèce de pierre que l’on appelle Lour. Ces pierres ontune 
couleur cendrée, désignée sous le nom de Lo see, et indiquent la direction et l'étendue du 
gisement, de telle sorte qu’en creusant dix ou vingt £chang * on est sur de le rencontrer. 

Celui qui trouve le signe indicateur de l'argent, in-miao ‘, trouve aussi le lieu 
du minerai d'argent dit Zsiao cha. Si le minerai est enfoui profondément, les 
mineurs n'auront pour y arriver qu'à suivre les traces de l’in-miao, qui sont de 
forme ronde et indiquent pour ainsi dire les nerfs de la terre. Pour éviter la ruine de la 


1 Fou ou « Préfectures » du Yun-nan. Voir la carte générale de l’Indo-Chine, atlas, {'partie, pl. II. 

? Ces deux dernières villes sont des écheou, c’est-à-dire des villes de deuxième ordre. La première ne porte 
plus que le nom de Yao tcheou. 

3 Voir la note 5 de la page 176. 

4 On se rappelle que miao veut dire «plante » et in « conduire, diriger ». 


951 
Len 


196 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


mine, il faut soutenir les terres au fur et à mesure des travaux à l’aide de cadres en 
bois. Quand l’in-miao est d’une couleur jaune, ou lorsque les fentes des rochers ou des 
cavernes de la montagne affectent la forme que l’on désigne sous le nom de #4 out 
se, c'est-à-dire « linéaments'en forme de queue de cheval», il faut en conclure que le 
gisement est proche. 

Le minerai qui devient de l'argent par le traitement du feu s'appelle 7siao; on ajoute 
le mot cha « sable », par ce qu'il est en très-petits fragments. Il revêt diverses apparences 
qui servent à en reconnaitre la qualité. Quand il présente à la surface comme la figure de 
rameaux, il est appelé Kouang: s'il est enveloppé d’une gangue pierreuse, c’est alors le 
Kouang * d'où provient la pierre précieuse appelée Yu *. C'est une pierre très-dure, 
dont la masse atleint parfois la dimension de la mesure appelée tou? ; quand elle n’est 
pas plus grande que la main, son utilité est assez faible. On trouve parfois aussi un 
minerai d'argent qui à la couleur du charbon et que lon appelle aujourd'hui #0 iuo sou, 
«noir poudre à canon ». Une autre espèce de pierre, dite autrefois 77 {sin et aujourd'hui 
Pong tse*, est d’une couleur presque noire et d’une qualité admirable. Le prix en est va- 
riable. Quand, dans les fouilles d’une mine, on rencontre de ces pierres, on ne doit pas 
continuer sans prévenir le magistrat du lieu, qui, après examen, fixe le droit à payer au 
gouvernement. Ce droitfixé, on mesure les pierres à l'aide d’un teou. Selon leur abon- 
dance et leur qualité, il pourra y avoir par teou de un à sept taels à payer à FÉtat. Ces 
pierres ont quelquefois un éelat extraordinaire qui les rend très-précieuses, et on les 
appelle dans ce cas Ming kouang. Cependant, quoique plus fines et plus belles que la 
malière appelée Tsiao-cha, elles ont une valeur moindre, parce qu'elles ne contiennent 
qu'une infime quantité d'argent. 

Avant d'introduire le minerai Tsiao-cha dans le foyer, il faut nettoyer celui-ci avec 
soin. Sur tout son pourtour règne un mur d'argile de einq tehe de hauteur; au fond, on 
place du charbon et des cendres. Chaque fourneau doit recevoir, pour deux tan de mi- 
nerai, deux cents livres de charbon de bois de poirier. On aura eu soin de construire un 
mur en briques de dix tche et plus d’élévation, derrière lequel on dispose le soufflet que 
deux ou trois hommes doivent faire mouvoir. Ce mur sert à garantir les ouvriers de la 
chaleur et de la fumée. On alimente le fover de charbon à l’aide d’un instrument en 
fer, approprié à cet usage. L’argentet le plomb se liquéfient en une seule masse et for- 
ment un poids égal à la moitié du minerai introduit. On porte cette masse refroidie 
au foyer appelé Kin lou, pour achever de la purifier. Il y a aussi l’espèce de foyer 
nommé Hia-ma lou, où l’on n'emploie que le charbon de bois de pin, ce qui permet de 

1 Caractère différent du précédent quoique ayant lamême signification, « métal, minerai » ; ilest employé 
souvent par extension pour désigner toutes les matières ou pierres précieuses. 

? Jade. C’est une des substances les plus appréciées des Chinois, mais qui est loin d’avoir en Europe la va- 
leur qu’on lui attribue en Chine. Les Chinois lui supposent des propriétés merveilleuses. D'après eux, quand 
un morceau de jade a été porté exclusivement par des hommes pendant un siècle et demi, il devient lu- 
mineux et préserve les corps de la corruption. 

3 Le dixième du tan. Voir la note 4 de la page 179. 


4 Ilest inutile de chercher à donner des identifications précises de ces diverses roches sur les indications 
plus que vagues de l’auteur chinois. 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 41917 


mieux régler la chaleur. Dans cette nouvelle opération le plomb se sépare de la masse 
métallique et descend au fond du foyer. On l’en retire pour le purifier de nouveau. 
Pour cette troisième cuisson, il faut employer de préférence du bois de saule, qui a la 
propriété de donner au plomb une nouvelle nature dite pao gr, véritablement ad- 
mirable. 

L'argent extrait ainsi du minerai est appelé argent eru ou « pur » de ce que, fondu en 
petits eulots appelés #n, on ne voit à leur surface aucune de ces lignes que l’on appelle Se 
ouen. On soumet ces culots à une nouvelle épuration, et ils se couvrent de petites étoiles 
rondes que les habitants de la province de Tien appellent 7cha kin ti: on ajoute alors du 
cuivre et du plomb en quantités égales ‘. Cet alliage est fondu une dernière fois et versé 
dans un creuset où se produisent les lignes appelées Se, et, sur quatre points de la masse, 
les signes appelés pao ki, qui permettent d’en déterminer la valeur. 

Le procédé d’affinage employé à Tsou-hiong diffère un peu du précédent, parce que le: 
minerai d'argent de cette localité contient une très-grande quantité de plomb; c’est 
pourquoi il est désigné sous le nom de Kien kouang. Il donne également moitié de son 
poids en métaux purs. Voici la méthode employée aujourd’hui. Après nne première 
fusion, on remet la masse métallique obtenue dans le foyer Hia-ma, afin que le plomb 
se sépare de l'argent et descende au fond du fourneau. Cette méthode est presque sem- 
blable à celle indiquée précédemment, et plus commune. On trouve encore d’autres mé- 
thodes d’affinage dans le livre Pen tsao *, mais ce ne sont que les vaines spéculations 
de cerveaux « malades », et elles ne reposent sur rien de sérieux. 

L'expérience a appris que là où il y avait de l'or, il ne pouvait y avoir de l'argent 
dans un rayon de trois cents 4 *, et réciproquement. Qui saura jamais quel a pu être le 
motif du créateur de l’argent et de l'or, en les séparant ainsi? II y a cependant des gens 
pauvres qui lavent les sables des rivières et trouvent parfois ainsi de minimes parcelles 
d’or ou d'argent. Cette opération, qui s'appelait autrefois {ao Li, porte aujourd’hui le nom 
de /ao houang. Les gens qui se livrent à cette besogne gagnent par jour trois fen ; avec 
beaucoup de travail, ils peuvent même gagner le double, ce qui leur suffit pour vivre. 
Quelquefois l'argent est mêlé à du cuivre rouge et à du plomb. On le fait fondre alors, 
en y ajoutant du sable, dans un vase en terre ; le cuivre et le plomb adhèrent au fond 
du vase : on les appelle yx hieou « écume d'argent » ; ce qui tombe dans les cendres, 
quand on forge la masse métallique, est appelé lou # «fond du feu ». Si ces deux ma- 
tières sont introduites ensuite dans le foyer dit Kin lou, ce qui est plomb se liquéfiera 

! Les culots dont il est parlé ici sont ceux qui sont employés couramment dans les transactions commer- 
ciales. Les Chinois ont une habileté merveilleuse pour en reconnaître le titre. Les traits ou les lignes qu'ils 
appellent Se-ouen leur indiquent une mauvaise qualité ; les étoiles Teha-kin-li, qui ne sont autres que de petits 
trous qui criblent la surface du lingot, sont au contraire un signe de pureté. La proportion de cuivre et de 
plomb que l’on ajoute en dernier ressort à l’argent complétement purifié est en général de 2 ou 3 pour 100. 
On obtient ainsi l’argent dit de première qualité qui est le seul en faveur dans le commerce. 

? Pen tsao cang mou, ouvrage célèbre sur les plantes et leurs usages, que l’on fait remonter à la dynastie 
Chang,c’est-à-dire à plus de douze siècles avant notre ère. 


5 Mesure itinéraire chinoise, assez variable selon les lieux et les temps, mais dont la valeur ici est d'environ 
400 mètres. 


198 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


d'abord, et l’on séparera le cuivre de l'argent à l’aide d’une barre en fer *. C’est ainsi 
que l’on fera la distinction entre l'ouvrage de l'homme et celui de Dieu. 


Nous allons citer «en terminant ce chapitre » ce qu'a dit l'écrivain Fou Lang-kiong * 
sur la minéralogie, sur les moyens de fondre les métaux et de les convertir en or : 

Tay Che-kong a dit qu'il y avait dans le cœur de tous les hommes comme une aspi- 
ration générale vers la passion de l'or et de l'argent, désir si violent qu’il pousse au vol 
les gens pauvres. Le genre humain entier sue pour gagner de lor. C’est ce que l’on 
voit surtout dans les mines. Parmi celles-ci, il v en à de considérables et de moindre 
importance. Les premières emploient dix mille hommes et au-dessus, les secondes 
quelques milliers d'hommes seulement. La soif de l'or seule peut produire l'union de 
tant d'hommes de mœurs et d'origines diverses. Quand, après s'être ainsi réunis, ils se 
séparent, c’est pour se disperser aux quatre coins des mers. C’est done avec justesse que 
lang Tse-iun a fait remarquer que, si la plus grande équité était nécessaire dans les mar- 
chés, à plus forte raison devait-elle régner dans les mines, situées en général dans les 
montagnes et loin des cités. Dans les mines de la province de Tien, il y a de grandes 
quantités d'argent et de cuivre, et je vais exposer les méthodes usitées pour leur extrac- 
üon. Il y a aussi de grandes quantités de la pierre précieuse Yu, et de celle nommée 
Pou tchou *. 

Les directeurs principaux d’une exploitation sont les Kouan-se: les actionnaires 
et ceux qui fournissent les fonds nécessaires se nomment Wo kong: enfin les ouvriers 
se nomment frères ou Siao Lo, c'est-à-dire « petits associés ». Les montagues choisies 
pour le lieu d’une mine reçoivent le nom de 74 tsao tse ou de Tao tong, et les 
travaux d'extraction sont à peu près les mêmes que ceux d’une exploitation de charbon. 
Les orifices de la mine, que l’on nomme Tsao ou Tong, sont de la dimension strictement 
nécessaire pour livrer passage aux travailleurs. Elles sont consolidées à l’aide de colonnes 
en bois nommées Aïa jang, ayant deux tche d’écartement. Bref, toutes les dispositions 
sont prises pour que les ouvriers puissent vaquer avec sécurité à leur besogne, de nuit 
comme de jour, sous la direction du 7ao teou, chef qui est chargé de l'éclairage, pour 
qu'ils soient approvisionnés de vivres et de combustibles, pour que la ventilation 
et l'épuisement des eaux à l’intérieur de la mine puissent s'effectuer facilement. 
Quand l’eau est trop abondante, on emploie pour l’épuiser la machine appelée 2che 


‘Il est intéressant de rapprocher de cette traduction, le passage suivant du Zen kong kay we, traduit par 
E. Biot, et inséré dans le cahier de la Société asiatique d'août 1835 : « Pour retirer l'argent des ustensiles 
« où il se trouve combiné avec le cuivre rouge et le plomb, on le met dans un vase en terre avec un peu de 
« nitre. On le fond, le cuivre et le plomb se séparent de l’argent et coulent au fond du vase. On reprend l’ar- 
« gent ainsi à demi purifié avec les parties de cuivre et de plomb qui semblent en contenir encore, et on les 
« meêt dans le milieu d’un creuset en terre dans le fourneau à séparer les métaux. Le plomb paraît le premier ; 
bientôt il s'écoule et le cuivre reste collé, comme enveloppe du résidu d’argent. On comprime cette masse 


avec des tiges de fer, et l’argent se répand et se sépare. » 

? Ce récit n’est qu’une répétition assez fastidieuse de ce qui a déjà été exposé dans la première partie. 
Comme çà et là il y a cependant quelques détails nouveaux, je le conserve en l’abrégeant un peu. 
3 L'ambre. 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 199 


long ou la long; celui qui en est chargé est dans la boue des pieds jusqu'à la tête... 

Deux hommes ne sauraient marcher côte à côte dans les galeries, tellement elles sont 
étroites et pleines de pierres et de boue. Il n’en est pas ainsi dans les mines des royaumes 
de Thsin et de Tsin ‘, qui sont si grandes et si spacieuses que l’on pourrait v construire 
une maison à l’intérieur, n'étaient les ténèbres qui les font appeler : région infernale. 

La présence du minerai est indiquée par le signe 2x hien « fil qui conduit » ou 
Kouang miao, où encore Xouang tse. Ceux qui, par une longue expérience des mines, 
ont appris à le reconnaitre, savent, en creusant soit en ligne droite, soit en ligne oblique, 
en allant du haut en bas, ou du bas en haut, parvenir au gisement de ces pierres. Quand 
on procède à ce travail, pour un homme qui enlève la terre, 1l en faut plusieurs qui 
entament le rocher. Celui qui se sert du marteau s'appelle Tchoui-cheou, et celui qui 
tient le coin Zchan cheou. Ceux qui enlèvent les déblais se nomment Pey houang 
ou plus généralement Cha-tin. On trouve quelquefois dans les entrailles de la terre de 
gros blocs appelés Zeou ta kouang tse, qui doivent être mis à part avec soin comme 
contenant les matériaux les plus précieux... 

Il est arrivé parfois que des hommes ont succombé faute d’air dans l’intérieur des 
mines, mais que leur corps a été préservé de la corruption. Ils conservent même alors 
une apparence de vie si frappante, qu'ils semblent encore demander à manger à ceux 
qui après eux pénètrent dans la mine. On appelle ceux qui meurent de ce genre de 
mort Aten kin tse, et on ne les retire pas des galeries. Mais on a coutume de continuer 
d’une autre facon l’ouvrage commencé et de choisir une voie plus commode. C’est ce 
que l’on désigne sous le nom de 7sen tse..……. 

Quand le minerai est à la surface même du sol, on le recueille parcelle par parcelle, 
ce qui se nomme Se ésien tse. Quand deux troupes d'ouvriers partis d’endroits différents 
se rencontrent au même point en suivant les signes indicateurs du minerai, on appelle 
un juge, le Kee-tchang, qui assigne à chacune d'elles la part qui lui revient et empêche 
toute querelle d’avoir lieu. Ce partage se nomme Pin (sien tse. 

On cherche souvent à s'emparer par fraude du minerai, en creusant des routes dé- 
tournées pour aboutir au point de la mine où on sait qu'il abonde; cette fraude se nomme 
Tchao tsien tsay ti tse py *..…… 

Quand on a obtenu le minerai, il faut l’affiner par le feu. Cette opération s'appelle Zsou 
lou ho, ou autrement #a tsao tse. On désigne sous le nom de 7Sseou tchang « marcher aux 
mines », la réunion d'hommes qu'attire l'exploitation d’une mine. Quand elle est considéra- 
ble, le gouverneur de la province doit envoyer un mandarin qui aura pour mission spéciale 
de l’administrer et de faire payer l'impôt au gouvernement. Ce chef suprème de la mine 
nomme aux différents emplois ..…. Certaines peines, telles que les fers ou le bambou, sont 


1 Le premier de ces royaumes était situé dans le Chen-si, et avait pour capitale Kouan-tchoung au 
N.-E. des monts Ngiao-chou; c’est aujourd’hui la ville de Si-ngan fou; le second était situé dans le Chan-si. 
Ils ont existé avec des fortunes politiques diverses du vrr° siècle av. J.-C. au 11° siècle après et ont fourni cha- 
cun une dynastie à la Chine. 

? Ce qui signifie : « action de déraciner la base par le sommet ». 


200 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 
appliquées aux délinquants. Il est aussi certaines expressions qu'il faut s’abstenir d’em- 
ployer dans les mines ..…. On appelle pao ho, essayer de vaincre par le feu la dureté des 
roches ; les petites parcelles de minerai se nomment Choua kouang tchang. Quand on ren- 
contre une roche trop dure pour parvenir à la percer, on la tourne par une autre voie, ce 
qui s'appelle Aouan. Tang où Ta tang* « grand étang » se dit d’une grande accumulation 
de métaux et de pierres précieuses. Le mélange d’un amas de terre et de pierres se nomme 
Song-houang, et est d’une exploitation facile ; mais il ne contient que fort peu de ma- 
tières précieuses. Il faut bien prendre garde que les galeries ou les autres parties inté- 
rieures de la mine ne soient lachées avec du sang de cheval, ces taches suffiraient 
pour faire disparaitre tout le métal. Il faut éviter aussi de sceller la charte de la mine 
du signe Fong *, cela ferait également disparaitre le trait indicateur. Quelquefois le 
métal se transforme en une autre substance, et cela est arrivé pour d'énormes masses 
de minerai déjà entassé et prèt à être jeté dans les fourneaux, qu'une seule goutte de 
sang de cheval à converti en un informe tas de pierres. H faut empêcher encore qu'aucune 
personne ayant sur elle des ornements en or, ou revêtue d’un grade ou d'une dignité 
quelconque, ne pénètre dans les galeries et qu'on ne frappe du fam-lam devant li mine. Des 
malheurs incaleulables pourraient être la suite de cette imprudence, car la divinité terrestre 
Kin-tsien-la-ty, pendant un sacrifice adressé au dieu des métaux, a manifesté combien elle 
craignait les dignités et leurs insignes. Quelle que soit la prospérité des mines, on ne 
devra jamais employer que des lattes en bois pour les toits, et du bambou pour les mu- 
railles des lieux d'habitation. À Fexception des vivres et des combustibles, tous les vête- 
ments et tous les objets qui servent au travail de la mine doivent être imbibés du sang 
des victimes, pour assurer le succès de l'entreprise. Cette pratique est aujourd'hui passée 
dans les usages. Si la renommée de prospérité de la mine s’est étendue au loin, il n'y 
aura pas à craindre pour son approvisionnement. Les marchands, les artisans, les bêtes 
de somme, les ustensiles de toute sorte y afflueront des régions les plus éloignées. Les 
théâtres, les jeux, les récréations de toute nature s’y trouveront comme dans une ville. 
On raconte qu'il arriva une fois que les Kouan-se ou « procureurs » d'une mine, qui 
s’adonnaient trop à la mollesse et aux plaisirs, manquèrent d'argent pour les besoins de l'ex- 
ploitation. Désespérés et ne sachant comment faire pour pourvoir le lendemain aux achats 
indispensables de riz, de sel, d'huile, de bois, ete., ils attendaient la mort au milieu 
de cette urgente nécessité. Mais pendant la nuit les mineurs découvrirent un trésor de 
- métaux. On annonce aussitôt cette nouvelle aux procureurs, et la renommée s’en répand 
partout. De toutes parts les cadeaux d’hommages et de félicitations leur arrivent, des 
soieries, des perles, des pierres précieuses. Il est difficile d'imaginer un changement 
plus brusque et de se figurer la joie de ces officiers. L'esprit lui-même, quand il se dégage 
des liens du corps, ne jouit pas d’une félicité plus grande que ne fut la leur à ce moment. 


* Ce caractère, quoique différent de étang « grande maison », est pris dans un sens figuré à peu près iden- 
tique. Je le distinguerai à l'avenir par un accent. 

? Caractère qui signifie « fermer », comme on l’a déjà vu et que les mandarins appliquent sur les caisses, 
livres, etc., que l’on doil laisser circuler sans les visiter ou les ouvrir. 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 201 


Ceux qui gagnent leur fortune dans les mines sont dits Fa tsay", « heureux en riches- 
ses ». Pour les uns, elle provient du travail même de la mine; pour d’autres, de celui des 
fourneaux; pour d’autres encore, du commerce ou d’autres occupations. Mais on n'a 
jamais oui dire que la fortune ait pu être amassée par le jeu, l’oisiveté et les plaisirs. Il ad- 
vient parfois que tel qui s’est enrichi dans les mines est bientot réduit par ce genre 
de vie au plus affreux dénüment el va périr misérablement sur les routes ou dans les 
égouts. 

Il faut conclure que la prospérité des mines dépend surtout de la vigilance des chefs 
et du zèle des ouvriers. Les lieux où vivaient heureusement plusieurs milliers de familles, 
sont redevenus déserts et le refuge des animaux sauvages, par la négligence de quel 


ques-uns. 


S 2. — De la facon de procéder aux fouilles dans les montagnes et du traitement des minerais de cuivre. 


On appelle Aong tsay l'opération qui consiste à extraire le minerai, et Zsien lien celle 
qui consiste à le traiter par le feu. 

On est guidé dans le choix important du lieu où l’on pratiquera les fouilles par la cou- 
leur des terres de la montagne qui est un indice précieux à consulter. Ainsi les montagnes 
qui revêtent les nuances appelées Pise ou Leou tay ? contiennent certainement du 
Kouang-cha, ou minerai de cuivre. La mesure de la profondeur verticale à laquelle on 
creuse à l’aide du coin, soit en haut, soit en bas, s'appelle Hin-fsien, ce qui est aussi le 
nom du coin lui-même. Tous les instruments de mineurs servant à creuser sont désignés 
par l'appellation générale de Pong tsien. Les petites pierres d'une nature fragile sont 
appelées Song kia, les dures, Gen kia ; les pierres debout formant murailles des deux côtés 
sont dites Aang py. Les couches rocheuses, vers lesquelles conduit le trait indicateur et 
au milieu desquelles se trouve le minerai, s'appellent Pong, «toit», dans leur partie supé- 
rieure, T1, « base », dans leur partie inférieure, Chan dans leurs parties latérales. Quand on 
aura bien pu déterminer toutes ces parties, l'exploitation sera sans aucun doute avantageuse. 

Là où sont de grandes masses de métaux, la roche est dure et les cache comme dans ses 
replis. C'est ce que l’on appelle £az men hia*. Cette première roche brisée, on en trouve 
une plus dure encore, le Houang lou tche*, et d’une valeur plus grande ; en continuant 
à pénétrer plus avant, et à force d’habileté ingénieuse, on rencontre une roche plus belle, 
dite Yong houa. Ces deux dernières espèces de pierres, que le vulgaire appelle Zouang 
nou hiang, annoncent toujours que les métaux sont proches. Si les indices apparais- 
sent alors répandus de tous côtés, le minerai que l’on va trouver prend le nom de 
Tang kouang, de ce qu'il sera très-abondant, et si ces indices sont non-seulement à la 
superficie, mais encore profondément incrustés, le minerai sera appelé Täng kouang. Ces 

! Encore un de ces nombreux saluts qui s'échangent en Chine et qui caractérisent bien ce peuple indus- 
trieux et âpre au gain : Æong si fa tsay! «soyez joyeux et riches ». 

? Gris foncé et jaune-gris. Il est très-difficile de donner des traductions exactes de toutes ces nuances. 


* Littéralement « pierre gisant devant la porte ». 


* Cette roche fournit une pierre verte qui sert à fabriquer une couleur propre à la peinture. 
IT. 26 


202 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


deux dénominations indiquent assez qu'un gisement de cette nature ne pourra être faci- 
lement épuisé. 

Si, au contraire, le minerai se trouve à la superficie de la montagne, le gisement sera 
pauvre, et le minerai dans ce cas s'appelle Z$ao pi kouang, de ce qu'ilest comme les herbes 
qui disparaissent une fois déracinées", L'espèce de minerai appelée A7 1sao « nid de la 
poule », est également d’une extraction facile, mais d’une pauvre teneur en métal. L'espèce 
nommée À? est épuisée après que l’on en a retiré quelques dizaines de mey?; aussi 
n'est-ce qu'à contre-cœur que toutes ces espèces sont exploitées. 

On trouve parfois une admirable espèce de minerai, analogue au A7 {Chao khouang* et 
que l’on estsür de rencontrer à un point quelconque du gisement. En ereusant même à une 
certaine profondeur, on arrive souvent à des masses métalliques énormes, appelées 
Ta kouang, « grand minerai », et presque impossibles à épuiser. Cette espèce se nomme 
Pay täng khouang, « élang spacieux de métal ». D'ailleurs, toute espèce de minerai qui 
se trouve isolée et homogène doit être prise en considération et peut ètre bonne à exploi- 
ter, surtout lorsque l’on n’apercevra rien autre de grande importance dans le voisinage. 
Le minerai prend alors le nom de Æo ko kouang où Tou kouangq, c’est-à-dire « métal 
unique ». Le métal unique que l’on trouve successivement en masses distinetes peut con- 
duire aux plus grands trésors, et les mineurs persévérants sont rarement dans ce cas dé- 
çus dans leurs recherches. 

I serait trop long d’énumérer ici toutes les variétés et tous les noms des minerais et 
des métaux: Il y a en effet encore le Aouang pan lou, le Teou tsin lou *. I y a un étain 
qui à la couleur extérieure de la cire, mais dont la substance est blanche et qui porte des 
linéaments d’une subtilité telle qu'ils ont l'apparence d’aiguilles. L’étain nommé Yeow a 
la même couleur, mais a un certain éclat. L'étain dit 75e kin si est d’une couleur rouge. 
I y a un élain extrémement noir, appelé Ho-iuo-sou ; une autre espèce s'appelle Song. 
Il y a enfin les espèces 7chay kouang, Ya tse kouang, Yen-cha kouang. Celle-ci est d’une 
couleur presque noire. Si elle a une nuance jaune ou verte, elle est d’une qualité inférieure: 
si elle est tout à fait verte, elle vaut encore moins. Il est une autre espèce « d’étain » com- 
plétement verte tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, d’une valeur presque nulle et qui ne 
sert qu'à fabriquer des couleurs. 

Nous arrivons maintenant au traitement des minerais : il faudra reconnaitre, avant de 
ies porter aux fourneaux, à quelle espèce ils appartiennent, car chacune demande une 
température différente. 

Les fours employés « pour le traitement des minerais de cuivre » doivent être rectan- 
gulaires, assez élevés, d’une construction solide, et aller en se rétrécissant vers le sommet. 
L'élévation atteint quinze tche, la largeur neuf, la profondeur deux. Sur la face antérieure 
est une ouverture pour introduction du combustible et du minerai. Au-dessous est l'ou- 


! Littéralement « herbe-peau », pour indiquer que le gisement n’est que superficiel. 

+ Le mey est une mesure usitée pour les minerais et qui vaut 60 livres de 24 onces. 

% Aïtchao, «pieds de la poule ». 

: Le premier, «d’une couleur verdâtre, analogue à la couleur des lentilles » ; le second, « d’une couleur 
de graine de moutarde ». 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 203 


verture appelée Porte d’or, qui sert à faire évacuer les résidus; derrière le four est 
une bouche à laquelle vient s'adapter le soufflet. Il faut toujours une quantité de charbon 
double de la quantité de minerai. Après une nuit entière de cuisson, on enlève les résidus 
par la porte d’or; le cuivre par l'effet de son poids descend au fond du fourneau. On l'en 
retire à l’aide des pinces, on le refroïdit avec de l’eau ou de l’eau de riz, et l'on obtient ainsi 
des sortes de galettes d'une couleur rougeätre, appelées 7se pan. Tant que le cuivre reste 
chaud, il est cassant, et sa cassure est d’une couleur verdâtre. Refroidi, il devient rouge 
à l'intérieur et beaucoup plus difficile à casser. Si le euivre ainsi retiré contient encore 
trop d’impuretés, on l'appelle Mao tong, « fil de cuivre », et on lui fait subir une seconde 
cuisson, après laquelle on le retire à l’état de Ain tong ou «cuivre pur ». 

Il arrive parfois que le minerai se prend en une seule masse dans le four, soit en raison 
de sa nature, soit que le feu ait été mal dirigé. 

Les fours, qui ont la forme nan cheou \, sont hauts de cinq à six tche; les plus petits 
n'ont que deux tche; leurs parois extérieures sont faites de cendres et d'argile ; au som- 
met est une ouverture pour la fumée. 

Les foyers se divisent en deux classes : l’une est appelée Fsang kiun lou, Vautre 
Cha mao lou? ; la première espèce est ronde à la partie inférieure, et pointue en haut ; la 
seconde est ronde à la partie inférieure et carrée dans la partie supérieure. Les di- 
mensions de ces deux espèces sont d’ailleurs les mêmes que celles des fovers dits 
Ta lou. Il y a un autre genre de foyer dit Hey keou lou, qui est carré à la base 
et arrondi au sommet; son élévation est de dix tche, sa largeur est la même que 
celle du Ta lou. C'est dans ces foyers qu'est afliné le cuivre. Après avoir subi une pre- 
mière cuisson dans les fours, une seconde dans les foyers, le minerai s’est bien transformé 
en cuivre, mais il garde une couleur noire. Si alors on Fintroduit dans le foyer Hiey- 
keou, il devient le cuivre appelé de ce nom. Le traitement par l’ancienne méthode, qui 
consistait en un premier grillage dans un four, puis en une seconde cuisson dans un 
loyer, et enfin une dernière dans un foyer plus petit, était plus difficile. On dépense 
un millier et quelques centaines de livres de charbon pour obtenir cent livres de 
cuivre. 

Quelques métallurgistes affirment qu'on peut retirer de l'argent du euivre. il faut 
pour cela que celui-ci soit d’une couleur noire comme le fer : il estalors appelé Min kouang. 
Ilest soumis dans un four à un premier grillage, et on l'en retire à l’état de Pin-tong. Puis 
on lui fait subir sept ou huit grillages successifs dans de plus petits fours. Il est introduit 
ensuite dans le foyer appelé Touy lou dont la forme est semblable à celle du vase Pey *. 
et où, à l’aide de plomb fondu, il devient du cuivre pur ; séparé du plomb, on le porte dans 
le foyer appelé Zsao lou, où il est divisé en pains ayant la forme d’une tortue et la di- 
mension d’un tche, et où il est soumis à un feu de flammes. Il passe alors dans le creuset 
dit Tsiang-kiun tsao où il reste un jour. Au bout de ce temps, le cuivre se sépare de l'ar- 


! On appelle ainsi en Chine un pain de forme semi-ovoide, fait avec du blé et cuit à la vapeur. 
? Cha mao est le nom d’un chapeau de soie dont la forme rappelle celle du foyer en question. 
% Vases en terre qui se trouvent dans toutes les habitations chinoises et qui servent à contenir des fleurs. 


204 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 

sent, qui coule au dehors par une ouverture appelée 7v0. Le euivre est remis ensuite 
dans le foyer Touy jusqu'à ce qu'il devienne noir, et porté enfin au foyer Hiey-keou où 
il se transforme en cuivre pur, et par une nouvelle addition de plomb revêt la nature de 
l'argent". Pour obtenir par cette méthode de 5 à 600 livres de cuivre et une vingtaine 
d’onces d'argent, il faut emplover 10,000 livres de minerai et 8 à 9,000 livres de charbon. 

La qualité de l’eau dont on se sert dans le traitement des métaux n’est pas indiffé- 
rente. Ainsi l’eau de source quivient des parties les plus élevées des montagnes vaut moins 
pour le lavage des minerais qu'une eau moins froide. On prétend aussi qu’une eau lim- 
pide donne au cuivre une moins belle couleur que l’eau qui a servi à laver le riz, qui lui 
donne la seule bonne teinte rouge. Ce fait était devenu très-célèbre dans la mine appelée 
Tang-tan ?. 

Le feu des fourneaux doit être allumé avec du bois. On ajoute ensuite du charbon 
pour le rendre durable. Quand l'élaboration du minerai est à moitié faite, il convient 
d'employer des charbons de bois de pin ou d’essences analogues. On emploie quelquefois 
aussi du charbon de bois de poirier, dont la chaleur, quoique suffisante, est plus douce. 
Mais dans le foyer Hiey-keou *, le charbon de bois de pin doit être préféré à tous les 
autres. Les hommes chargés de la conduite des feux s'appellent Lou fou: les marchands 
qui se rendent dans les mines, Chang min * 


ss... 


S 3. — Des modes d'extraction et de traitement des minerais usités dans la province. 


La terre est la mère de l'or, mais sans l'air qui l'entoure, elle ne pourrait en contenir. 
La province de Tien recèle abondamment les cinq espèces de métaux; mais comment 
parvint-on à l’origine à trouver les lieux qui les recèlent? Les mineurs apprirent, dit-on, à 
les reconnaitre, à la nature et à la position des montagnes et à certains signes particu- 
liers. Est-il pour cela une méthode d'investigation certaine ? 

Un préfet de la ville d’Y-men 5 nommé Ou Ta-va répond à cette question que si la 
nature ou l'esprit de l'or, de l'argent, du cuivre, du fer et de l’étain est en mouvement, 
ces mélaux se dissipent et passent dans un autre lieu; si, au contraire, il est immobile, 
les métaux se réunissent en une seule masse et s’emprisonnent dans une gangue terreuse. 

Si le dragon, esprit des richesses, parait correspondre aux veines de la mine ‘, il 


1 Quelque obscure que soit cette description, on peut y reconnaître cependant le procédé de la liquation 
qui est pratiqué en Europe pour séparer le cuivre de l’argent. Pour que ce procédé soit avantageux, il faut que 
le cuivre contienne 6 millièmes de son poids en argent. D’après les résultats qu'indique l’auteur, le cuivre argen- 
üfère du Yun-nan n’en contiendrait que 2 millièmes, ou du moins la méthode indigène ne saurait en retirer 
que 2 millièmes, 

? Située dans le Yun-nan entre Tong-tchouen et Tchao-tong. On trouvera de plus amples détails sur cette 
mine importante à la page 219. 

* Gelui où le cuivre subit le dernier affinage. 

Ici suit une nouvelle énumération des fonctionnaires de la mine. 

lien ou ville de troisième ordre, située dans le département de Yun-nan fou. 

Les Chinois s'imaginent que ce dragon se meut sous la terre, et que, comme la boussole qui indique 
toujours le midi, sa présence indique aussi toujours un trésor. 


4 
5 


6 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 205 


faudra se réjouir, car il y aura les plus grandes chances de trouver les métaux. Après la 
reconnaissance des lieux, il faudra apporter le plus grand soin à l'examen des signes in- 
dicateurs, et recueillir auprès des habitants tous les renseignements possibles sur leur 
apparition. Îls sont annoncés d'ordinaire par une sorte d’are lumineux semblable à 
l'aurore et que l’on nomme aujourd'hui Aouang ho. Un auteur nommé Tou, de l’ordre 
Kong pou ', à dit avec justesse : Celui qui ne se laissera pas trop aller au sommeil 
pourra facilement voir ce phénomène, qui est comme le souffle de lor, de l'argent et 
de toutes les choses précieuses, et qui indique leur présence dans le sein de la terre. 

Un mandarin de l’ordre Tong tche *, chargé de la mine Te-chen, dans un rapport 
adressé à ses supérieurs, dit qu'il est de la plus grande importance d’avoir choisi le lieu 
d'extraction de telle sorte que les couches du sol paraissent couper l'intervalle qui sépare 
deux montagnes et dominer le lieu d'écoulement des eaux; 1l faut également que la mon- 
lagne qui est vis-à-vis de celle de la mine soit de la même hauteur. 

L'étude du signe Miao-in aura dù révéler à l’origine à quelle espèce de minerai on a 
affaire, soit le Tsao-pi kouang, 
brille », ou le Tang kouang ou le Tang kouang. Les couleurs du minerai aideront à cette 


ou le Ki-tchao kouang, ou le 7che kouang, « minerai qui 


distinction, selon qu'elles seront vertes, vert foncé, de la nuance de l’étain, de la cire, 
ou noires comme la poudre à canon. Les minerais de cuivre sont parfois argentifères, 
et réciproquement. Le mode de lavage et de fusion des minerais sert à diagnostiquer 
toutes ces particularités. Dans ce but, on les mélangera soit avec du Ti-mou, soit avec 
du Zay che *. Cette étude permettra de déterminer quels seront les ustensiles néces- 
saires, les modes de traitement à emplover, la valeur et le rendement probables de la 
mine. 

Le mandarin de la mine de Ta-pao *, nommé Ouen, du rang de che tcheou ÿ, s'exprime 
ainsi : Là où se trouvent les éléments des métaux doit se rencontrer le signe Lou se miao 
in, qui apparaitra entre les pierres de la montagne tantôt comme une traînée, tantôt 
sous la forme d'un fil. I n'est pas facile de déterminer l’espace que cette trainée doit 
occuper. Quand les habitants ou les marchands rencontrent ce signe vert, que par expé- 
rience ils savent désigner un gisement métallique, ils rassemblent des ouvriers, en leur 
promettant un salaire, pour commencer des fouilles. Il arrive parfois qu'après de longues 
pluies, on aperçoit le « minerai» Kouang-cha à la surface du sol. 

Les métaux sont comme les citrouilles qui ont des racines. Le minerai qui a de pro- 
fondes racines est nommé pour cela Ta kouang. Si, à la superficie de la montagne, on 
trouve le signe appelé Song kong lou”, en creusant à deux che de profondeur, on ren- 


1 Officiers chargés de l’agriculture, des enterrements, de la construction des édifices, etc. 

? Celui qui administre un tcheou, mais qui ne relève que du fao tai ou sous-gouverneur de la province 
et non du fou ou préfet du département. 

3 Littéralement «pierre singulière ». 

# Située près de Ou-tin. Voyez la page 219, et la carte itinéraire n° 9, allas, [°° parte, pl. XII. 
Administrateur d’un tcheou. 
6 Littéralement « plante qui conduit à la couleur verte ». 
T Pierre vert clair qui sert à fabriquer une couleur employée en peinture. 


ce 


206 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


contrera le minerai Tsao-pi. Îl arrive quelquefois qu'après avoir découvert le signe indica- 
teur, on creuse au milieu des roches à plusieurs dizaines de tche de profondeur, et l’on 
ne trouve que très-peu de minerai. Cette espèce se nomme Ou ken tche kouang *, ou vul- 
gairement À? yuo, «le nid de la poule ». 

Le métal pur n'est point appelé À?» kouang, mais Tehe kouang, l'expression 
kin étant absolument interdite à cause de sa similitude avec x. «vide » ou « fin ». Quand 
on rencontre une grande quantité de minerai, de la grosseur d’une maison, dans le même 
endroit, on l'appelle Tang kouang ; quand le minerai est situé sous l’eau et qu'il faut épui- 
ser celle-ci pour obtenir, il est dit Täng kouang. 

Une autre espèce de minerai est appelée Song lou, « vert de pin», de ce qu'elle revêt la 
couleur verte intérieurement et extérieurement. Si, plongée dans l'eau, cette couleur se pro- 
nonce encore davantage, elle s'appelle Chen {sour. Cette espèce est de nulle valeur et ne sert 
qu'à fabriquer de la couleur. L'espèce appelée S? /a est de la couleur de la cire que l'on 
nomme Pe la?; concassée en menus morceaux, elle se divise en fragments aigus très-durs et 
très-lourds. L'espèce Ho-iuo-sou, qui est entièrement noire, n’est au contraire ni dure ni 
pesante; elle est fragile et d’une grande valeur. I y a un minerai qui contient de l'argent et 
du cuivreen quantités égales, el qui s'appelle pour ce moûf Tong tche yn ou Yn tche 
tong*. Ce minerai doit être débarrassé avec soin par le lavage de la terre et du sable 
qu'il contient, afin qu'il ne reste que les parcelles métalliques, que retient leur poids et 
que l’on porte ensuite aux fourneaux. | 

La matière Ti-mou n’est autre que du plomb que l’on a coutume d'ajouter pour 
extraire largent du euivre. La matière Tay-che est comme le sue des éléments que 
l’on ajoute à ceux-ci lorsqu'ils sont trop desséchés pour faciliter leur fusion. Aujour- 
d'hui, dans la mine déjà citée de Ta-pao, on frouve un minerai d’une couleur jaune 
rougeatre *, qui contient un métal d’une nature double, et dont le prix, après ce mélange, 
devient inestimable. Quand les minerais demandent un mélange de cette nature, il 
faut se servir de terre, d'argile ou de pierre extraites de la même partie de la mon- 
lagne que celle où se trouve la mine. 

Ou Ta-va, l'auteur déjà cilé, a encore enseigné que lorsqu'on trouve au milieu des 
roches une nuance verte ou violacée, elle indique la présence du «minerai» Ming kouang. 
Si, en creusant à quelque profondeur, on rencontre le minerai en petite quantité, c’est celui 
que nous avons nommé Tsao-pi kouang, et il faudra creuser de nouveau en plusieurs 
autres endroits pour le retrouver. L'espèce désignée sous le nom de Ki-vuo kouang se ren- 
contre à la surface, mais le gisement s’épuise en une demi-journée ou en un Jour au plus; 
on le retrouve de nouveau un peu au delà, mais 1l est toujours aussi vite épuisé. Quelque- 

1 Littéralement «minerai qui n’a pas de consistance ». 

2 Cette cire, connue en Europe depuis longtemps, est produite en grande quantité dans le Se-tchouen, où 
elle exsude d’un arbre particulier par la piqûre d’un insecte. Si je ne me trompe, M. Simon, aujourd'hui consul 
de France en Chine, à rapporté dernièrement en Europe quelques arbres à Pe-la. 

3 «Cuivre dont on extrait de l'argent », et réciproquement, « argent dont on extrait du cuivre ». 

# Les expressions littérales rendant cette nuance sont fse si la, «rouge, étain, cire », et Aouang cha, « jaune 


‘sable ». 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 207 


fois on parvient ainsi aux grandes masses de minerai que l’on désigne sous le nom de 
Pay-täng kouang. 

Le lieu des fouilles se nomme Hin-tsien. Les trous laissés par les fouilles se nomment 
Lao téng, «étang de limon et d’eau ».[Lest permis à tout le monde de recommencer à creuser 
ces trous abandonnés; c’est ce que l’on appelle Zsin ésien, « repasser le coin ». Si ces 
nouvelles recherches amènent la découverte d’un gisement métallique, 11y a des règlements 
qui partagent les bénéfices des fouilles entre les propriétaires et les mineurs. Ces premiers 
ont un ou deux dixièmes, suivant qu'il s’agit d’un minerai de cuivre ou d’un minerai 
d'argent. 2 

La meilleure qualité de minerai est le Tehe kouang. Elle se distingue par diverses 
nuances. 

Quand une mine est ouverte depuis longtemps, il arrive que l’on y rencontre des 
murs ; si les ouvriers poursuivant leur route pénètrent au delà, ils trouvent parfois d’énor- 
mes amas de minerais, dont le sommet est en forme de toit, et dont la base est plane, et 
oceupe l’espace de trois ou de cinq maisons : ce que l’on appelle Tang kouang. Lorsque 
dans une galerie ouverte de cette manière, les parois latérales sont très-difficiles à 
attaquer alors que le centre cède facilement, que les veines métalliques convergent 
vers le même point, et que le minerai affecte comme la forme d’un étang, étroit 
au sommet et s'élargissant par le bas, on a trouvé le Tang kouang. Il ne diffère pas 
beaucoup du minerai précédent quant à l'abondance ; il ne s’en distingue que par la 
forme et les couleurs. Il revêt en effet les nuances appelées Le lou et me lou, « noir-vertet 
encre-vert » ; quelquefois il est tout à fait noir, quelquefois aussi il a les teintes désignées 
par les noms de teou-tsin-lou, « vert-lentille », £chouan houa lou, « vert végétal », ta ya 
tse, « sorte de gris ». Les couleurs me-lou et teou-tsin-lou doivent être préférées aux autres. 

Quelquefois dans les gisements de Ya-tse kouang, on trouve des masses de minerai 
qui affectent la structure d’une muraille. Si on les brise, on trouve les nuances Si-la, 
pe si la, «mème nuance plus claire », yeou si la, «même nuance avec une transparence 
huileuse », ou {se kin si la, «teinte violacée », qui indiquent d'excellentes qualités. Le mi- 
nerai qui revêt la nuance ho-iuo-sou, est en petits fragments. 

Si les minerais désignés sous le nom de Ta-houa-ming kouang revétent des couleurs 
vertes, ou vert tirant sur le noir, on devra en conelure qu'ils contiennent de l'argent. 
Comme le Ming kouang contient du plomb, il sera très-facile de vérifier la présence de 
l’argent. Réciproquement, on peut extraire du euivre des minerais d'argent. Quand 
ceux-e1 sont soumis au feu, le cuivre vient à la surface, et par l’adjonction de plomb dans 
le foyer dit {che lou, il se sépare complétement de l'argent. En soumettant à une nouvelle 
cuisson le plomb, on obtient l'argent pur. On voit par là comment, par un travail intelli- 
gent, on parvient à séparer ce que la nature a réuni. 

Voici quelle est la méthode générale pour le traitement des minerais. S'ils sont de 
nature pierreuse, on les concasse en petits fragments; si au contraire leur nature est 
argileuse, on leur fera subir un lavage pour les séparer de toutes les matières étrangères. 
A un minerai d'argent on mélange du ti-mou; à un minerai de cuivre, du tav-che ; à un 


208 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


minerai d’étain, du #cheou kouang'. Quant à l'or, un simple lavage suffit pour l'obtenir pur. 

De tous les minerais « de cuivre », le plus riche est celui qui à la couleur teou-lou, 
ou qui est mélangé au minerai de la teinte jaunâtre appelée houang pang lou. Si ces 
minerais sont mêlés au minerai de la couleur {sa kin si la, « gris pailleté de points bril- 
lants de mica », ils n'auront plus grande valeur. Le minerai Houang-pang-lou doit étré 
mélangé avec le minerai dit échouan houa, et on doit y ajouter du tay-che. 

Tchao Hin-tsong, directeur de la mine de Hiang-chou-po, près de Nan-ngan tcheou *, 
mandarin de l’ordre {cheou pan, s'exprime ainsi sur les métaux : Les éléments métalli- 
ques prennent naissance dans les entrailles des montagnes comme dans le ventre « d’une 
mère», mais ils ont besoin d’un toit et de murailles pour conserver-le même gite pen- 
dant longtemps"... Si la masse métallique est ainsi enveloppée de murs de tous côtés, 
et qu’elle soit grande et large, elle s'appelle tang, «grande maison » ; si sa dimension laté- 
rale est la plus grande, elle prend le nom de #1en, « porte » ; si au contraire le mi- 
nerai est disséminé un peu partout, on le désigne sous le nom de Ki-tchao. Si, après 
avoir creusé une montagne à une profondeur de vingt ou de trente tche, on rencontre 
les pierres dites /ou mo, le sable appelé A? cha, et l'argile appelée #eou hoa gi *, on devra 
les considérer comme le trait indicateur miao-in. Si l’on rencontre le minerai avant d’avoir 
percé des roches dures, il prend le nom de tsao-pi, et 1l ne tarde pas à être épuisé. 
Pour trouver un gisement réellement abondant, il faut creuser pendant des dizaines ou 
même des milliers de iche, au travers des roches les plus dures et à l’aide des coms 
les plus puissants. Ce travail se nomme po ia. Quand on approche des murailles qui 
enelosent le minerai, il faut redoubler de persévérance. A ce moment, si l'on rencontre 
des pierres, les plus précieuses comme indices seront celles qui revêtent la nuance appe- 
lée Aouang lou tche lan, « jaune, vert, couleur de terre, couleur de cire» ; si l'on rencontre 
de l'argile, la couleur la plus heureuse est celle que l'on nomme yong si, « couleur de 
terre rougeûtre ». Ces indices s'appellent en général Houang-mou-hiang (voy. page 201). 
Quand leur présence est constatée, si l’on trouve le toit et la base du gisement, le 
minerai n'est plus éloigné. Par l’étude des indices, il ne sera pas difficile de juger de 
la durée de l'exploitation. 

Dans la mine Hiang-chou-po, existent les minerais /se kin hong lou, « violet, or, 
rouge, vert, » et s2 la chen lou, «étain, cire, masculin vert », qui, concassés, sont fondus 
ensuite par une méthode certaine. Les minerais qui ne contiennent ni sable, ni pierres, 
sont reconnus à ce signe être du Tche kouang. On les soumet à un premier grillage dans 


1 [| serait intéressant de reconnaître quelles sont ces substances dont on additionne les divers minerais poux 
faciliter leur fusion. Ce ne serait que par l'apport d'échantillons que l’on pourrait y parvenir. Les fondants 
employés en Europe sont nombreux et variables : ainsi pour le euivre on emploie selon la nature du miñe- 
rai, du quartz, du spath fluor, de la chaux, etc., etc. 

2 Ville du Yun-nan, située dans le département de Yun nan fou. Voyez la page 224. 

3 Inférieur au che lien où mandarin des villes de troisième ordre. Il ne peut condamner qu’à la prison. 

# Suivent quelques définitions déjà données plusieurs fois. 

> Lou mo, espèce de petite pierre verte qui sert à fabriquer une couleur ; Ai cha, sable excessivement fin 
ieou hoa gi, argile qui sert à raccommoder la porcelaine. 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 209 


un four, puis à une cuisson dans un foyer, pour reconnaitre leur qualité, d’après le degré 
de sécheresse dont ils font montre. S'ils fournissent un sue un peu clair appelé {sx hr, on 
les mélange avec de argile jaune. Si ce sue est couleur de rouille, il faudra ajouter du 
tay-che. Si les minerais sont d’une faible densité et mêlés avec les pierres appelées 
tchouan houa teou, ils sont d’une valeur moindre. Ils devront être grillés plusieurs fois, 
puis mélangés avec du pe che", et réduits à un foyer. Le lavage de ces minerais sera 
done de la plus grande importance. 

Il n’est pas facile d'indiquer une méthode générale pour diagnostiquer la valeur et la 
qualité des minerais. Pour ce qui est de leur traitement, deux ou trois, ou bien quatre 
ou cinq jours sont nécessaires, selon qu'ils apparaissent suffisamment cuits ou non. Il 
faudra avoir toujours du charbon en réserve dans le cas où on serait obligé de renouveler 
l'opération, ce qui s'appelle fan sen, « rendre cru », c’est-à-dire remettre le minerai dans 
l’état où il était avant d’être mis au feu une première fois. 

Qui pourra enseigner une méthode générale pour traiter les minerais de cuivre, 
décrire les foyers Ta, P? et Tsao tse, indiquer leurs dimensions, les proportions de 
minerai et de charbon, l’ordre et le nombre des cuissons successives, les espèces 
et les valeurs du euivre retiré, la perte de métal subie dans chaque opération, la quanuté 
de charbon consumée pour obtenir cent livres de cuivre, le prix du combustible? A toutes 
ces questions, une réponse nette serait vivement à désirer. 

Voici, sur tous ces points, ce qu'a écrit Fan Hiu-hio, mandarin de l’ordre tche-tcheou, 
administrant la ville de Yun-long ?, au sujet de la mine de Pe-iang. Il y a trois catégories 
de feux, le Ouy iao, «four aux flammes ardentes », le Ta lou et le Hiey-keou lou. On fait 
subir au minerai deux grillages dans le premier four, puis on le porte au Ta lou. Il va 
deux sortes de Ta lou : l’une qui est aiguë au sommet et ronde à la base, et que l’on appelle 
pour ce motif Tsiang-kiun lou, l’autre dite Cha-mao lou, qui est carrée au sommet et ronde 
à la base, d’une hauteur de quinze à seize tche, d’une largeur de emq à septetd’une pro- 
fondeur de trois (Voy. page 203). Chaque foyer peut contenir plus d’une vingtaine de long à 
de minerai, pour le traitement desquels il faut plus de mille livres de charbon de bois de 
pin. Après une cuisson d’un jour et d’une nuit, le cuivre en fusion se rend à un lieu particu- 
lier appelé 0, où il est coulé en gateaux qui ont une couleur noire. Ces gäteaux sont affinés 
au foyer Hiey-keou, d’où le cuivre sort tout à fait pur. Ce foyer est rond à la partie supé- 
rieure, carré au bas, d’une hauteur de huit ou neuf tche, d’une largeur de quatre ou cinq, 
d’une profondeur d’un tche. Il contient 40 livres de cuivre noir auxquelles on ajoute 
50 livres de charbon. On fait couler le cuivre dans le bassin de réception appelé O, où on 
le refroidit avec de l'eau déversée par une machine et où on lui donne la forme y yuen*. 
Dans la conversion du cuivre noir en cuivre Hiey-keou, 11 v à un déchet d’un dixième 
de la quantité de cuivre noir traitée. 


Littéralement « pierre blanche », sorte de silex. 

? Ville de second ordre située dans le département de Ta-ly. Voyez la page 223. 
Mesure de capacité qui contient 60 livres de minerai. 

4 Forme plate et ronde. 

IF. 


19 
ù 


210 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


IL est bon de faire remarquer, au milieu de tant de formes de fourneaux différentes, le 
Ouy ia0, le Ta lou, le Fouy lou, le Hiey-keou lou, le Tsao-tse lou, la manière de procéder 
usitée dans la mine Pe-iang « pour les minerais de cuivre argentifère ». Elle les grille 
d’abord au four Ouy, puis les jette au grand fover de la forme ésiung kiun kouy, au 
fond duquel on ajoute du plomb, Au bout d’un mois de cuisson, s'opère la séparation du 
cuivre et de l'argent; le premier va se mouler dans le lieu appelé 0; le second coule au 
dehors. Le cuivre est introduit ensuite dans le foyer Touy, où il se transforme en cuivre 
noir. Ce foyer a la forme d’une tuile; il a une hauteur de deux tche, une longueur de dix 
et une largeur de deux. De là le cuivre est affiné au foyer Tsao-tse, dont la hauteur est 
de trois tche, la largeur de deux, et la profondeur d’un peu plus d’un tsen. Chaque foyer 
de cette espèce contient 50 ou 60 livres d'argent; les résidus de cette dernière opération 
ont en outre une valeur d’un ou deux taels. 

Le Tehe-hien de la ville d'Ouen-chan hien, directeur de la mine de Tse-lang-kien-tsie, 
nous apprend que dans celte mine le foyer Pi n'existe pas et que l’on ne s’y sert que du 
Ta lou de l'espèce appelée Tsiang-kiun-kouy. La hauteur de ce foyer a sept tche, la lar- 
seur quatre et demi. La porte d’or a un tche et sept tsen, et la profondeur du bassin de 
réception 0 est de deux tche. Le soufflet est disposé derrière le foyer à une hauteur de trois 
isen au-dessus de la porte d’or. Les fours usités sont de deux sortes: le grand, qui a 
cinq tche de largeur, quatre de hauteur et autant de profondeur ; le petit, qui à un tche 
et demi de largeur et de hauteur, et quatre de profondeur. C’est dans le grand 
four que devront ètre tout d’abord grillés les minerais. Pour le grillage de 10,000 
livres de minerai, on doit employer 400 livres de charbon. Cette première opéra- 
lion amène une réduction de 3 à 400 livres sur le poids du minerai introduit. On ajoute 
alors la matière appelée Zsix pe tay che, et lon opère un second grillage qui élimine 
de 7,800 à 7,900 livres de minerai. Il reste 16 à 1700 livres de pin-tong ou « cuivre 
brut ». On fait griller ce cuivre sept ou huit fois de suite dans un petit four, ee qui réduit 
encore son poids de 200 livres environ. Les cuissons dans un foyer réduisent enfin cette 
masse à 6 ou 700 livres de cuivre pur. Les huit grillages et les deux cuissons qui sont en 
général nécessaires consomment 14 à 1500 livres de charbon pour 100 livres de cuivre 
pur obtenu. 

Dans la mine Kien-la, on emploie le foyer Cha-mao ; sa hauteur est de cinq à 
six tche, sa largeur de sept, la porte d’or a un tche et un tsen; le bassin de réception O 
est profond d’un pied et demi. Le soufflet est disposé derrière le foyer à deux tsen au-dessus 
de la porte d'or. On introduit le minerai à l'intérieur du foyer et on le recouvre de charbon. 
Pour 4 à 500 livres de minerai, il faudra 300 livres de combustible. Le grand four a einq 
tche de hauteur et de largeur, quatre de profondeur. Il peut contenir 10,000 livres de 
minerai, auxquelles on doit ajouter 400 livres de charbon. Le petit four, d'un tche et 
demi de hauteur et de largeur et de quatre tche de profondeur, contient 500 livres de pin- 
long 


D? 
lover appelée Touy est en forme de cercueil ; la hauteur à sa partie antérieure est de deux 


et pour huit grillages successifs consommera 600 livres de charbon. L'espèce de 


tche etdemi, à sa partie postérieure de deux tehe ; sa longueur est de six tche, sa largeur 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 211 


de deux tche et -deux tsen. La porte d’or a 7 ou 8 isen de large sur un demi-tche de haut. 
Ce foyer contient environ 50 livres de pin-tong, pour la cuisson desquels il faut mettre 70 
ou 80 livres de bois ou de racines. Un soufflet est disposé à la partie antérieure ; à la 
porte postérieure, sont des canaux en bambou destinés à recevoir le plomb fondu. Enfin 
les creusets ont la forme d’un demi-fover ; leur hauteur est d’un tche et deux tsen, 
leur largeur d’un tche et six tsen. Leur profondeur est de quatre tche. La porte d'or 
a un tche et un tsen. Ils peuvent recevoir 20 livres de plomb et 40 livres de charbon. 

« Comme dans le procédé précédent, » un premier grillage opéré dans le grand four 
fait perdre 400 livres sur 10,000 de minerai; on ajoute alors du Tsin-pe-tay-che et on 
erille dans le Ta lou jusqu’à ce qu'il ne reste plus environ que 16 ou 1700 livres de pin- 
tong. On grille le pin-tong six ou sept fois dans le petit four, ce qui amène une nouvelle 
déperdition de 200 livres. On ajoute ensuite la matière Ti-mou, «du plomb», eton cuit le 
mélange dans le foyer Touy. À la fin de toutes les opérations 1l ne reste plus que 5 à 600 
livres de cuivre pur. Le plomb est affiné à part dans les creusets et on en retire environ 
trente onces d'argent”. Les huit grillages et les trois cuissons dans le creuset, consom- 
ment 14 ou 1500 livres de charbon et 200 livres de bois pour cent livres de cuivre pur 
obtenu. 

Tehao Hin-tsong «que nous avons déjà cité » enseigne qu'il ne faut pas employer 
partout la même méthode, mais se conformer aux exigences et aux usages de chaque loca- 
lité. Mais il ajoute que quand on aura à extraire l’argent du plomb fondu, où quand on 
affine le cuivre noir qui provient d’un minerai d'argent, il convient d'employer le procédé 
suivi dans la mine de Hiang-tchou po. 

Dans cette mine, on extrait le cuivre par une seule opération, en employant 
le Ta lou ou « grand foyer ». On le construit directement sur le sol en lui donnant une 
largeur de neuf tche, qui va en diminuant un peu vers le sommet, une hauteur de 
quinze tche, et une profondeur à la base de deux tehe. À la partie antérieure est l’ou- 
verture par laquelle on introduit le minerai et le combustible; au-dessous se trouve 
la porte d’or par laquelle on retire les scories. Derrière est le soufflet. Si le minerai est de, 
première qualité, il faudra, pour chaque soufflet, 40 tongs de minerai el 3,000 livres de 
charbon. Si le minerai est de qualité moyenne, il faudra 70 ou 80 tongs, et 3,500 à 3,600 
livres de charbon ; s’il est de qualité très-inférieure, 100 tongs et 4,000 livres de combus- 
ble. Après un jour de feu on pourra retirer le euivre. Si le feu a été ou trop ardent ou 
trop faible, le métal ne sera pas d’un bon usage ; il arrive même que par suite de la pré- 
sence de matières étrangères, le minerai se prend en une seule masse et ne peut 
être réduit, ce que l’on appelle /cAe. 

Dans d’autres mines, au contraire, après six ou sept grillages, on immerge neuf fois le 
métal dans de l’eau acidulée, et on l’affine ensuite successivement dans des fovers et dans 
des creusets. On appelle ce traitement Æieou pin, kieou tsao, «neuf immersions, neuf 
cuissons ». Certaines mines ne font subir que deux cuissons aux minerais « de cuivre » ; 


1 La proportion d'argent contenue dans le cuivre serait ici de 3 à 4 millièmes. Comparez avec le mode de 
traitement indiqué pages 203-204. 


212 TIEN NAN KOUANG TCHANG-. 


mais aussi elles n'emploient que du charbon de bois de pin, qui donne une chaleur plus 
vive. Pendant que le métal tombe au fond du fourneau, les scories s’échappent par la porte 
d’or. A la fin de l’opération, on retire par celle-ci tous les résidus et tout le combustible, 
de manière à isoler complétement le cuivre. On jette par la même ouverture de l’eau qui 
a servi à laver le riz. Quand on juge le métal un peu refroidi, on le retire avec les 
pinces à l’état de gâteaux ronds de forme y-iuen, que l’on recouvre de rameaux de pin 
ou de paille de riz. On achève de les refroidir par une immersion complète dans 
l’eau, et on obtient ainsi le cuivre de première coulée appelé tse-pan. On retire de einq à 
sept gâteaux de chaque fourneau. Les deux premiers sont moins purs que les autres et 
contiennent encore beaucoup de matières étrangères que l’on nomme mao-tong. Aussi 
devront-ils être affinés de nouveau, Les autres auront à peine besoin d’un nouvel affinage. 
Cette seconde cuisson produit un déchet de 2 ou 3 livres sur 100 livres affinées, et fait 
consommer 150 à 160 livres de charbon, dont le prix variera de 26 à 30 fen selon que 
le temps sera sec ou humide. 

On se demande pourquoi il est indispensable, pour le traitement du minerai de 
cuivre, de se servir de charbon de bois de pin, alors qu'auparavant on se servait indif- 
féremment de charbon de bois de pin et de charbon de bois de poirier, et pourquoi les char- 
bons qui proviennent d’autres espèces d'arbres sont complétement impropres à cet usage. 
Aussi, dans les endroits où il y a beaucoup de mines, les bois des montagnes avoisinantes 
sont-ils rapidement épuisés, et faut-il faire venir le combustible de distances conside- 
rables. Le prix du charbon qu'il faut ainsi apporter est décuple du poids du minerai 
à traiter, et il faudra à son tour transporter le cuivre à l'endroit d’où vient le charbon. Ne 
vaudrait-il pas mieux, pour diminuer les frais de transport, apporter le minerai dans le 
lieu même où l’on produit le charbon ? Tel est le point que nous livrons aux méditations 
des commerçants jaloux d'augmenter leurs bénéfices. 

A ces questions, voiei ce que répond Hiu Hio-san : Les charbons à employer sont tels 
que l'exige la nature des minerais. Le minerai de Ta-kong tchang", par exemple, est naturel- 
lement dur et riche. Réduit avee du charbon de bois de poirier, qui fournit une très-grande 
chaleur, il fondra plus rapidement, mais il ne sera pas aisé de déterminer sa qualité et sa 
teneur. Le charbon de bois de pin a un effet moins brusque, n’opère la fusion que peu à 
peu, mais les résidus se séparent plus facilement du métal. Quant à l'économie à réaliser 
sur les transports, il faudrait d’abord que la route par laquelle on apporte le charbon 
füt la même que celle que doit suivre le cuivre, ce qui n’est pas ; ensuite 1l est nécessaire 
d'avoir pour le traitement du minerai une eau qui convienne à sa nature. La mine de 
Ta-koug tire ses charbons des montagnes de Li-kiang, qui sont fort éloignées de la route 
que doit suivre le cuivre, et dont les eaux, comme il arrive sur toutes les montagnes 
élevées, sont beaucoup trop froides pour être propres au traitement des minerais. Il 
vaut done mieux dans ce cas porter le charbon à la mine que le minerai au lieu de 
production du charbon. Il importe seulement que les habitants de la localité mettent le 


1 Mine située dans le département de Ta-ly. Voyez la page 293. 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 213 


plus grand soin à reboiser de pins les environs des mines et à assurer ainsi pour l'avenir 
leur approvisionnement de combustible. 

Tehao Hin-tsong, en écrivant sur le même sujet, dit qu'il y a en effet une grande dif- 
férence entre le charbon de bois de poirier etle charbon de bois de pin, quoique à l’origine 
on les mélangeñt ensemble. Le premier donne une flamme plus vive ; le second, plus 
de fumée. Celui-ci est indispensable pour la préparation du cuivre Hiey-keou, qu'il 
revêt d’une belle couleur. La mine Hiang-chou-po a l'habitude de transporter tous ses 
minerais au dépôt général de la capitale de la province. On à vu qu’elle obtient le cuivre 
par une seule cuisson et qu'il est admirablement préparé. On se sert dans cette mine d’un 
mélange de bois de poirier, de pin et d’autres espèces. Ces bois coùtaient d’abord 220 
ou 230 sapèques ‘les 100 livres pour être transportés au dépôt; ils en coûtent aujourd’hui 
300, à cause de la longueur de la route. La mine va cesser en conséquence de fabriquer du 
cuivre Hiey-keou, et pendant ce temps de repos, elle fera rechercher des bois de pin pour 
obtenir le combustible à meilleur marché et s'affranchir de la nécessité de transporter 
le minerai vers le bois. 

L’examinateur nommé Lien affirme que si les charbons de bois de pin sont indispen- 
sables pour la fabrication du cuivre Hiey-keou, ils sont inutiles pour les autres prépara- 
tions. Les mines Lang, Kié, Ta et deux autres ont la coutume, depuis plusieurs années, de 
transporter vers le bois le cuivre appelé Tse-pan. La distance n’est que de 90 li. 

Il résulte de là qu'il faut employer le charbon dans les fours, le bois dans les 
foyers, « puisque c’est dans ceux-ci seulement que l’on obtient le cuivre Hiey-keou. » 

On demande si l'or existe ou peut naître dans les eaux? Une mine riche en filons 
métalliques est souvent envahie par les eaux, et il faut payer des ouvriers pour les détour- 
ner. Les uns perforent la montagne pour leur donner une issue; les autres, ne pouvant 
y réussir, leur creusent un réservoir où elles se retirent. Combien faudra-t-il de canaux 
dans une mine de ce genre pour conduire l’eau et de quelle façon retirera-t-on le minerai? 
Tels sont les problèmes auxquels nous demandons maintenant une solution. 

Tehao Hin-{song assure que l'or est la mère, la cause première de l’eau. Sans eau, le 
feu consumerait l'or. Plus l’eau abonde dans une mine, plus elle est riche et difficile à 
épuiser. Les canaux d’épuisement doivent être installés suivant la nature des lieux. Si la 
mine est située sur les flancs de la montagne à une hauteur moyenne, il sera facile d’é- 
tablir un écoulement-vers le bas ; mais si la mine est dans un bas-fond, il faudra disposer 
des récipients appelés A%en, faits en nœuds de bambous choisis le plus long possible. Le 
nombre de ces récipients peut dépasser une trentaine, avant d'atteindre le sommet, et 1l 
arrive souvent que le gisement métallique s’étende de telle sorte qu'ils entrainent des frais 
que l’on ne peut couvrir. La mine de Hiang-chou-po n’est plus aujourd'hui gagnée par les 
eaux et elle est délivrée du souci de les épuiser ; elle faittous les jours de nouveaux progrès 
dans le sol. Il ne paraît pas exister une règle certaine au sujet des dépenses à faire pour 
l’écoulement des eaux. L'eau « stagnante » dont se nourrissent pour ainsi dire les métaux 


1 Monnaie divisionnaire en cuivre allié d’étain et de zine de la fabrication de laquelle il sera parlé plus loin 
et dont le taux par rapport au tael est assez variable (de 1,800 à 2,200 sapèques pour une once d'argent). 


214 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


peut s’'épuiser facilement, mais l’eau jaillissante qui coule comme une fontaine ne peut être 
arrêtée par aucune force humaine. 

On demande s'il existe quelques différences entre les habitants d’une mine. 

Il en est de considérables ; il y a les Ko-teou, les Ti-hiong, les Chain, les Lou min 
ou Lou-fou, « familles ou peuple des foyers », etc". 

Tchao Hin-tsong dit que chaque profession à son marché particulier et que la fidélité 
la plus stricte aux engagements pris est observée dans chaque catégorie d'individus. Au- 
jourd’hui, dans la mine Hiang, il n’y à que peu de travailleurs, mais ils se prêtent entre 
eux le concours le plus actif et le plus paternel. Les hommes du pays qui achètent 
les métaux pour les revendre et en retirer quelque bénéfice se nomment Lou ke, « hôtes 
des foyers». Les ouvriers qui ne reçoivent de salaire qu'après avoir découvert le minerai 
et qui partagent alors les bénéfices avec les propriétaires de la mine nommés Se lou, en 
leur en abandonnant les six dixièmes et en s’en réservant quatre, se nomment Tsin 
chen ti hong. Ceux qui travaillent à raison d’un salaire mensuel fixe, et qui sont libres 
de s’en aller ou de rester, se nomment 7chao mo cha tin, c’est-à-dire « ouvriers appelés 
pour un travail pressant, alors que les bras manquent ». Cette seconde catégorie d’ou- 
vriers est la seule qui existe dans la mine de Hiang-chou-po. Ils achètent souvent même le 
minerai pour en fabriquer du cuivre et vendent de l'huile et du riz. Ils viennent de Nan- 
ngan, d’Y-men, au nombre de plus d’un millier, et la plupart sont des criminels en 
fuite. Les Kee-tchang, les Tong-tchang sont institués pour veiller sur eux et leur inter- 
dire l'entrée des mines. Il est indispensable d’ailleurs d'observer des règles dans toute 
nouvelle mine pour la réception et la répartition en bon ordre de chaque catégorie 
d'ouvriers, afin que cette mine puisse devenir semblable à une ruche d’abeilles. 

Les mines déjà anciennes ont coutume d'emprunter ce qui leur manque à des mines 
récemment établies. Aussi entend-on dire que celles-ci ne sont guère riches et ne pros- 
pèrent pas. Dès qu'une nouvelle mine est déclarée ouverte, elle doit satisfaire à toutes 
les obligations des lois. Mais il arrive que les métaux extraits de la mine ne suffisent pas 
à en préserver le capital, en d’autres termes, que le gain retiré ne compense pas la perte 
et l’intérêt du capital engagé. Les mineurs se dispersent, et le mandarin du lieu, crai- 
gnant pour ses biens, garde le silence ?. C’est pourquoi, comme nous l'avons fait obser- 
ver, il faut se garder pendant quelque temps de déclarer publiquement une nouvelle mine, 
et attendre d’être fixé sur son rendement; de la sorte, les mandarins n'ont pas 
à craindre le fardeau auquel ils seraient exposés si on avait annoncé officiellement 
l'ouverture de la mine. Quelques-uns disent qu'il faut donner trois mois à une nouvelle 
mine à titre d’essai, d’autres qu’il faut la tenir secrète pendant le double de ce temps. 
Au bout de ce délai, s’il n’y a aucun résultat, il vaudra mieux fermer la mine que de la 
laisser ouverte. 

Les gens des mines, pour s’éviter des frais inutiles, ne déclarent pas l’ouverture de la 
mine tant qu'ils ne voient pas d'espoir de faire des bénéfices. Il y a aujourd’hui des 


1 Je supprime cette énumération déjà donnée page 185. 
2 C'est-à-dire craignant d’être obligé de payer de ses propres deniers la redevance due au gouvernement. 


DES MINERAIS ET DE LEUR TRAITEMENT. 215 


mines nouvelles qui, après deux années de travaux, n’ont pas encore présenté de spéei- 
mens des métaux obtenus, et qui cependant n’ont pas reçu l'ordre de cesser leur exploitation. 
Aussi n'hésite-t-on pas à essayer des fouilles dans les montagnes. On à dit qu'en raison 
de l’affluence des gens, le prix des vivres augmentait souvent près des mines, et que 
pour ce motif, les habitants les empêchaient de s'établir dans leur voisinage. Mais, après 
examen, on reconnait que cette augmentation de prix ne peut provenir de la présence 
de la mine, la production locale en blé, en riz ou en huile étant insuffisante pour la 
consommation. Les indigènes ne sauraient done raisonnablement empêcher une exploi- 
tation de ce genre. 

Tehao Hin-tsong dit que les nouvelles mines doivent être organisées de telle sorte 
qu’elles donnent de nouvelles forces à l’ancienne. Si elles se créent des cultures et des 
revenus qui puissent subvenir à fous leurs besoins, non-seulement les habitants ne s’op- 
poseront pas à leur création, mais encore ils s’en réjouiront. Il faudra se conformer à la 
nature et à la situation des lieux. Si les richesses de la montagne sont tellement abon- 
dantes, que le signe In-miao ait par sa splendeur frappé les habitants avant que les 
mandarins en aient connaissance, la renommée s’en répandra au loin, et une foule 
d'hommes de toute condition accourra de toutes parts, sans que les habitants puissent sv 
opposer. Mais si les travaux ne donnent aucun résultat, en raison de l’excessive durelé 
de la montagne, de grandes pertes en seront la conséquence. C’est que le signe indica- 
teur des métaux aura été fixé de telle sorte au sol, que plus on creusera, plus éloigné pa- 
raîtra le minerai; de façon qu'il sera bien difficile de juger s’il faut abandonner ou econti- 
nuer les recherches. La première résolution est douloureuse, la seconde exige souvent 
un temps trop long. D'un autre côté, il est à craindre qu'en changeant le directeur de la 
mine, le nouveau ne veuille emprunter une grande somme d'argent qu'il ne rendra 
jamais. Pour fous ces motifs, il est arrivé, et Tchao Hin-tsong en a été témoin, qu'un an 
ou deux se sont écoulés sans qu'aucun spécimen de métal ait été présenté, et par suite 
qu'aucune règle ait été établie pour le payement de limpôt au gouvernement, et cela 
non, comme le disent certaines gens, à cause de la résistance des habitants, mais à cause 
de la peur qu'ont les mandarins d’être obligés de payer eux-mêmes l'impôt, si les pro- 
priétaires de la mine ne peuvent le payer!. 

! Ce dernier chapitre, composé, comme la plus grande partie du livre, d'extraits décousus de différents 
auteurs, ne présente quelque intérêt que parce qu'il contient les modes de traitement des minerais de cuivre 
argentifère en usage dans diverses mines de la province. L'ignorance du traducteur sur ces questions spéciales 
a dù augmenter beaucoup pour lui la difficulté d'exprimer en latin le sens de l'ouvrage original. Malgré mon 
inexpérience des caractères chinois, j'ai pu m'’apercevoir qu'il ne rendait pas toujours exactement le texte placé 
entre ses mains et j'ai pu Corriger, grâce à ma connaissance pratique des lieux, de palpables contre-sens. 
Mais il est encore de nombreux passages qui appellent une révision et d'autres que j'ai dû supprimer entière- 
ment. Je crois cependant que rien d’essentiel au point de vue métallurgique n’a été omis ou insuffisamment 
compris, surtout si l’on tient compte de l’obscurité.et de l’empirisme qui résultent en pareille matière de l’é- 
criture hiéroglyphique et du degré d'avancement scientifique du peuple chinois. 


Dans ce qui va suivre au contraire, on retrouvera la netteté et la précision minutieuses qui lui sont particu- 
lières dans les questions administratives et statistiques. 


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DE LA PRODUCTION EN MÉTAUX DU YUN-—NAN. 


Dans la province de Tien, le cuivre est en quantités énormes, et c’est pourquoi nous 
nous occuperons en premier lieu de ce métal, pour lexploitation et le transport duquel le 
gouvernement perçoit plusieurs millions de taels. L'argent, au contraire, ne rapporte que 
quelques milliers de taels, et nous n’en parlerons qu'après. Ensuite viendront Por, l’étain, 
le plomb et le fer. Nous traiterons en dernier lieu des règlements et des moyens adoptés 
pour les transports. 


S 1. — Des mines de cuivre. 


Comme nous l'avons déjà dit, les mines les plus importantes du Yun-nan sont les mines 
de cuivre, et le dépôt de cuivre le plus célèbre est dans la ville capitale de la province. 
On accourt du Kouang-tong, du  Kouang-si, du Hou-pe, du Hou-nan, du Kouy-tcheou 
pour acheter le cuivre de Yun-nan. Le droit de transport dans ces seules provinces rap- 
porte au gouvernement plus de 9 millions de taels. Les marchands de l'Orient et de POc- 
cident viennent à Yun-nan de préférence, quoique dans les autres cités, tant de premier 
que de second ordre, il ne manque point de mines abondantes, surtout dans l'Est. Mais 
en comparant ces dernières mines à celles du Yun-nan, il semble qu'elles ne soient que 
de faibles ruisseaux dont la source commune est dans Yun-nan même. 


La loi exige que sur 400 livres de cuivre produit, les mines en payent 10 à l'État. Cet 
IL. 28 


218 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


impôt se nomme 7eheou ko ou Ko *. En second lieu, il est prélevé 4 livres et 2 onces 
pour les fonctionnaires qui surveillent la mine; cet impôt est appelé Kiuen hao ?; enfin 
les marchands payent pour le droit de transport 10 livres; cet impôt s'appelle Toxg chang *. 
De 100 livres, il ne reste done que 75 livres 14 onces; mais, si l’on veut conserver in- 
tactes les 100 livres de métal, on peut acquitter les droits en argent. Le premier impôt se 
nomme Âèn tong tchang, parce qu'il est entièrement percu pour l’empereur; le second, 
Kiou tong tchang, parce qu'il est dépensé pour la province; le troisième, 7say tong tchang *. 
parce qu'il est destiné à subvenir aux achats des autres provinces. 

Le cuivre n’est pas de qualité uniforme : il y a le tse-pan et le hiey-keou qui se partagent 
en huit espèces, subdivisées elles-mêmes en neuf variétés. Quand les anciennes mines, 
après une longue période d'extraction, ne fournissent plus qu’une quantité de métal insuf- 
fisante, on en fait ouvrir de nouvelles qui suppléent à la production des anciennes. 

Les mines sont dirigées par les administrateurs des villes de deuxième et de troisième 
ordre, sous la surveillance des préfets des villes de premier ordre, les tche-fou. En outre 
des tche-fou, {che li tcheou, ou tong pan *, elles sont encore inspectées par les 440 tay”. 

A. Mines du département de Yun-nan *. — La mine Ouan-pao est à 50 li au N -0. 
d’Y-men, dans un lieu appelé autrefois Tsao-li-chou et aujourd'hui Ouan-pao-chen. Elle 
est administrée par le tche-hien-d'Y-men. Les veines s'étendent au loin, et embrassent 
les montagnes avoisinantes à plusieurs dizaines de li. Ouverte la 37° année du règne de 
l’empereur Kien-long *, cette mine, en vertu d’un édit de la 43° année du même 
empereur, dut payer 300,000 livres de cuivre par an, plus 25,000 livres par chaque mois 
intercalaire *. Elle ne paye que les impôts Ko et T'ong-chang. Le prix du cuivre qui reste 


1 L'impôl Æo est l'impôt toujours obligatoire qui doit parvenir à Pékin et que les mandarins eux- 
mêmes sont tenus de payer, s’il fait défaut. 

? L'impôt Auen hao est un impôt temporaire levé surtout dans les temps de troubles etappliqué à l'entretien 
des fonctionnaires et des édifices de la province. Les vice-rois peuvent l’établir avec l’autorisation de l’empe- 
reur. Cet impôt, souvent volontaire de la part des marchands, comme l’indiquent les mots Æiuen hao, « donner 
volontairement un peu», leur vaut souvent des marques distinetives honorifiques; aussi le peuple l’appelle- 
t-il quelquefois : acheter des décorations. 

$ « Unité du commerce. » Impôt pour le droit de transport en dehors de la province à un lieu qui doit être 
soigneusement désigné sur le reçu des mandarins. 

# Kin, «royal », kiou, €municipalité », (say, (acheter ». Chaque ville chinoise est administrée par un con- 
seil élu appelé Æiou que le mandarin du lieu doit consulter et qui est en même temps une sorte d'association 
commerciale prenant à ferme certaines des exploitations de la province. Atow se dit aussi par extension des 
magasins de cette association. 

5 Ces deux derniers grades sont équivalents à celui de tche-fou, mais ils comportent une juridiction 
moindre : le {che li tcheou n’a que trois ou quatre villes sous sa dépendance, le {ong pan n’en a qu'une. 

5 Sous-gouverneurs de province qui réunissent plusieurs fou ou départements sous leur juridiction. Il y 
a dans la province du Yun-nan trois {ao ou subdivisions de cette nature; le Si-tao ou Tao de l'Ouest, chef-lieu 
Ta-ly ; le Tong-tao ou Tao de l'Est, chef-lieu Tchao-tong, le Nan-tao ou Tao du Sud, chef-lieu Yun-nan. 

7 Voir la carte itinéraire n° 9, Atlas 1"° partie, pl. XII. 

BAT. 

C'est-à-dire un douzième en sus de l'impôt annuel. Ces mois intercalaires, destinés à ramener l’année 
civile en coïncidence avec la période solaire, se représentent à peu près tous les trois ans. Je renvoie le lecteur 
à l’exposition très-claire et très-simple que Biot a donnée des règles suivies par les Chinois pour cette interca- 
lation. (Études sur l'Astronomie Indienne et sur l'Astronomie Chinoïse. Paris, 1862, pag. 330 à 340.) 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 219 


est fixé à 6.987 les 100 livres. Cette mine fournit aujourd’hui à la province 271,500 li- 
vres de cuivre (impôt Tsay-tong-tchang). 

La mine Ta-mey est située à 30 li au N. de Lo-tse; elle étend ses filons sous les 
monts Kouan-yn et Tchao-pi. Près d’elle coule le ruisseau appelé Len-chouy-keou dont 
l’eau fraiche sert au lavage des minerais et aux usages des fourneaux. Ouverte la 
28° année de Kien-long, sa redevance fut fixée la 44° année à 24,000 livres de cuivre 
par an, plus 15,000 pour les mois intercalaires. La mine acquitte les trois impôts. 
Les 100 livres de cuivre valent 6.987. La quantité de ce métal fournie aujourd’hui à la 
province est de 32,400 livres. De cette mine est sortie la suivante. 

B. Mines du département d'Ou-ting. — La mine Se-tse-ouy est plus de 200 li au N. de 
Lo-kiuen, dans la montagne appelée Yuen-pao. Son nom vient de ce que cette monta- 
gne est semblable à un lion et que la mine, assise à ses pieds, parait être comme sur la 
queue du lion. La montagne elle-même est au delà du Kin-cha kiang ; mais la mine est 
en decà. Elle est sous la direction du préfet de Tong-tchouen en raison de la proximité 
de cette dernière ville. Ouverte d’abord sous les Ming *, elle fut fermée dans la suite, puis 
rouverte la 37° année de Kien-long. La 43° année du même empereur, elle fut imposée 
à 2,400 livres de cuivre. Deux ans après, cet impôt fut porté à 3,600 livres. 2,900 livres 
durent être ajoutées en outre dans les années à mois interealaires. La mine ne paye que 
les impôts Ko et Tong-chang. Le prix de 100 livres est de 6'.987. L’impôt actuelie- 
ment envoyé à Pékin est de 5,400 livres. 

La mine de Ta-pao-chan est à 120 li à l'O. de Ou-ting, près des limites 
du Zow se Ke-pin-tien?, à l'E. de la rivière Yuen-ma; elle est placée sous la direction 
du Tche-li-tcheou d'Ou-ting*, ses veines sont courtes et ne fournissent pas une grande 
quantité de minerai. Elle a été ouverte la 30° année de Kien-long et s'appelait à cette 
époque, tantôt Ta-pao-chan, tantôt Se-tse-chan, tantôt Se-kien-chan; elle prit ensuite le 
nom de Houa-tsin-chan. La 43° année du même empereur, elle fut taxée à 7,200 livres 
de cuivre par an, plus 800 livres pour les mois intercalaires. Le prix d'achat de 100 li- 
vres fut fixé à 6 taels. Aujourd’hui cette mine fournit à la province 8,640 livres de eui- 
vre. À cet impôt contribuent de nouvelles petites mines dont voici les noms : Ti tchang, 
Lou-se-tse tchang, Ma-in-chan tchang. 

C. Mines du département de Tong-tchouen*. — La mine de Tang-tan est située au N.- 
O. au milieu des Kiao-kia. La montagne Tang-tan est à 160 li de Tong-tchouen. A sa 
gauche, s'élève le mont In-tien-po ; à sa droite, le mont Se-tse-po qui est riche en charbon. 
Ils occupent un espace de plus de 70 Li et sont d’une très-grande hauteur. Il en est fait 


1 Dynastie qui a précédé la dynastie actuelle et qui a régné en Chine de 1368 à 1616. 

2 Les Zou se sont de petits chefs indigènes soumis aux Chinois et administrant les tribus sauvages qui se 
trouvent encore disséminées dans les montagnes du Yun-nan. 

3 Je me dispenserai à l'avenir de cette mention quand la mine relèvera directement du préfet du départe- 
ment dans lequel elle se trouve. 

# Voir la carte itinéraire, n° 10, Atlas 4'° partie, pl. XIII. 

5 Groupe de tribus Man-tse soumises, nommé aussi Hiang-houa. 


220 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


mention dans les livres che chou‘. Ceux-ci rapportent que la montagne Ta-siue, 
« grande neige », située au milieu des tribus Hiang-houa, produit le minerai appelé 
Kouang-ouang qui est le premier de tous. 

La mine de Tang-tan, quoique ouverte sous les Ming, n’a commencé à produire 
abondamment que sous Kien-long ; à ce moment elle donna d’admirables résultats. La 
44° année du règne de cet empereur, une loi fixa à plus de 3,160,000 livres ? sa re- 
devance en cuivre; la 7° année de Kia-kin *, cette quantité fut réduite à 2,300,000, 
plus 191,669 livres pour les mois intercalaires. Cette mine paye les trois impôts et la 
valeur des 100 livres de cuivre est fixée à 7°.452. Aujourd’hui Tang-lan envoie annuelle- 
ment à Pékin 2,081,499 livres 15 onces et 6 (sien. Les nouvelles mines de Kieou-long- 
tsin et de Tsiu-pao-chan, situées sur le versant ouest de la montagne Kouan-in, de Tu- 
yuen, de Teha-ho près de Heou-tin, dépendent de la précédente et ont été ouvertes, la 
première, la 16° année, la seconde, la 23° année, la troisième , la 18° année, la dernière 
la 47° année de l’empereur Kien-long. Celle-ci a été fermée depuis. 

La mine de Lou-lou est à 160 li à l'Ouest de la ville de Houy-y hien. Elle est auprès 
d’un mont très-élevé où le froid est si rigoureux que, même en été, il faut porter d’épais 
vêtements de coton, etqu’en hiver la neige y recouvre souvent la terre. Cette mine dépend 
du Tche-fou de Tong-tchouen depuis la 4 année de Yong-tchen *, époque où elle fut 
détachée du Se-tchouen et ajoutée à la province du Yun-nan. Sous la 43° année de Kien- 
long, son impôt annuel fut fixé à 1,240,040 livres de cuivre. Mais, trois ans après, elle 
obtint une diminution et n'eut plus à payer que 823,992 livres. La 7° année de Kia-kin, cet 
impôt fut de nouveau réduit à 620,000 livres de cuivre, auxquelles on dut ajouter 51,666 
livres pour les mois intercalaires. La quantité de cuivre envoyée aujourd'hui à Pékin 
s'élève à 561,100 livres. De cette mine sont issues les mines récentes de Long-pao, Hin- 
tong, To-pao et Siao-mi-chan. 

La mine Ta-chang-keou est au milieu des tribus Kiao au S.-0. Elle existait dès la 
4° année de Yong-tchen, mais ne fut imposée d’une manière régulière qu'à la 43° année 
de Kien-long où elle dut payer 512,222 livres de euivre, chiffre qui fut réduit sous Kia- 
kin à 480,000 auxquelles il fallait ajouter 33,330 livres pour les mois intercalaires. 
L'impôt actuellement envoyé à Pékin est de 361,999 livres 15 onces. De cette mine sont 
issues deux filles, Lien-hin tchang et Tsiu-yuen tehang. 

La mine de Ta-fong-lin est au milieu des Kiao-kia à l'O. au delà du Kin-cha kiang. 
Là sont des montagnes exposées aux plus violentes tempêtes, au moment de l'équi- 
noxe du printemps. Cette mine a été ouverte la 15° année de Kien-long, mais ne fut 
imposée d’une façon régulière qu'à la 43° année de cet empereur; à ce moment elle 

4 Annales officielles qu’édite chaque dynastie. 

2 C'est-à-dire près de deux millions de kilogrammes de cuivre pour l'impôt dù à l’empereur par cette seule 
mine ! J'ai vérifié avec soin sur l'ouvrage original tous ces chiffres qui semblent presque fabuleux. En adop- 
tant 71.75 pour la valeur du tael, on voit que le prix officiel du cuivre de l'espèce hiey-keou varie dans le Yun- 
nan de 0".94 à 0'.77 le kilogramme. On verra plus loin que le cuivre tse-pan ne vaut que 0°.65 environ. 


3 4803. 
TETE 


NO] 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 222 


dut payer 80,000 livres de cuivre, chiffre qui est réduit aujourd’hui à 72,000 livres en- 
voyées à Pékin. Deux autres mines, Ta-tchay et Tchan-mou-tsin, sont issues de celle-là. 

La mine de Meou-lou est au N.-0. des Kiao-kia près du Kin-cha kiang; l'air y est 
tellement actif que la chaleur y est très-grande !. Ouverte la 33° année de Kien-long, elle fut 
imposée dix ans après à 280,000 livres de cuivre auxquelles on dut ajouter 23,330 livres 
dans les années à mois intercalaires. L'impôt actuellement envoyé à Pékin est de 
253,395 livres 15 onces et 6 tsien. De cette mine est sortie celle de Tsin-eul-chan. 

Dans les quatre mines qui précèdent, les impôts et le prix du cuivre sont les mêmes 
qu'à Tang-tan. 

La mine de Tse-ngieou-po est à l'O. dans le pays des Kiao-kia. Ouverte dès la 
45° année de Kien-long, sa redevance fut fixée, trois ans après, à 33,000 livres de cuivre, 
plus 2,750 livres pour les mois intercalaires. Les impôts sont les mêmes qu’à Tang-tan. 
Le prix des 100 livres de cuivre est de 6'.987. Aujourd'hui cette mine envoie à Pékin 
29,700 livres de cuivre. 

D. Mines du département de Tchao-tong. — La mine Jen-lao-chan est à 490 li au 
N.-0. de Ta-kouan; elle est séparée de Tehen-hiong par une chaîne excessivement éle- 
vée. Elle est sous la direction du mandarin de Ta-kouan tinh qui a le grade de Tong-tche *. 
Elle a été ouverte la 17° année de Kien-long et fut imposée la 43° année du même règne 
à 4,200 livres de cuivre, plus 350 dans les années à mois interealaires. Les 100 livres 
valent 6 taels. On envoie aujourd’hui à Pékin 3,780 livres. 

La mine de Tsien-tchou-tang est à 230 li au N.-0. de Ta-kouan, près du lieu nommé 
Tin-mou-chou ou Pa-li-hiang. Ses filons s'étendent si loin qu'ils atteignent les limites de la 
mine de Kin-cha* et embrassent un espace de 6 à 7 li. Elle est sous la direction du Tong- 
tche de Ta-kouan. Ouverte la 19° année de Kien-long, elle fut taxée la 43° année du même 
empereur à 4,200 livres de cuivre, plus 355 livres pour les mois intercalaires. Le prix des 
100 livres est fixé à 6 taels. Aujourd’hui l'impôt envoyé à Pékin est de 3,780 livres. 

La mine de Lo-ma est située près de Lou tien à l'O. de la montagne Long-teou. Le 
cuivre que l’on en extrait contient de l'argent. Elle est sous la direction du Tong-pan de 
Lou tien. La 43° année de Kien-long, elle fut imposée à 36,000 livres de cuivre. La 12° an- 
née de Kia-kin, ce chiffre fut réduit à 10,000, plus 833 livres pour les mois interealaires. 
Le prix des 100 livres est de 6 taels. Aujourd’hui l'impôt envoyé à Pékin est de 9,000 livres. 

La mine de Mey-tse-to est au S.-E. de Yun-chang hien, sous la juridiction du tche-fou 
de Tchao-tong, qui doit veiller à ce que l’on y transforme en cuivre les minerais résidus 
de la mine d'argent de Kin-cha. La 43° année de Kien-long, cette mine fut imposée à 
40,000 livres de cuivre, mais la 12° année de Kia-kin, ce chiffre fut réduit de moitié. 
Quand l'année avait un mois intercalaire, il fallait ajouter 1,666 livres de cuivre. Les 
100 livres coùtent 6°.987. L'impôt actuellement envoyé à Pékin est de 18,000 livres. 


1 Ceci fait allusion au brusque changement de température que l’on éprouve dès que l’on quitte le plateau 
du Yun-nan pour descendre sur les bords du fleuve. 

2 Aujourd'hui Ta-kouan n’est plus régie que par un Tche-hien. 

3 Mine d’argent située sur les bords du Kin-cha Kiang. Voyez page 227. 


222 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


La mine Tchang-fa-po est au N.-0. de Tchen-hiong près de To-kong ; à l'E. sont 
les montagnes Lin-keou, Hong-ngay, Ou-ten-po, Hiang-chouy, Pe-mou-pa, O-ta-lin; au 
S. est le pont Houa, jeté sur le fleuve Fa-lou, les montagnes San-iang, La-pa, Ta- 
vu-kin ; au N., le canal Mou-tchong, les endroits nommés Eul-tao-lin, Tong-tchang- 
keou, Ma-kou-tsin, compris entre les montagnes Pa-mao-po et Tchang-fa-po. Cette 
mine est sous la direction du Tche-tcheou de Tchen-hiong. Ouverte la 10° année de 
Kien-long, elle fut imposée la 43° année à 13,000 livres, auxquelles on ajoutait pour 
les mois intercalaires 1,083 livres. Le prix de 100 livres est de 6 taels. L’impôt actuel- 
lement envoyé à Pékin est de 11,700 livres. 

La mine Siao-ngay-fang est au N. de Yun-chang, à plus de 400 li, sur les bords 
d'un ruisseau appelé Si-cha-ki. Elle est sous la direction du tche-hien de Yun-chang. 
Ouverte la 25° année de Kien-long, elle fut imposée, la 43° année du même règne, à 
22,000 livres de cuivre, plus 1,833 livres pour les mois intercalaires. Le prix des 100 livres 
est de 6'.987. L’impôt actuellement envoyé à Pékin est de 19,800 livres 

E. Mines du département de Tchin-kiang. — La mine Fong-houang-po est à 60 li de 
Lou-nan tcheou. Elle a été réouverte la 6° année de Kien-long et imposée, la 43° année, 
à 12,000 livres de cuivre; 1,000 livres sont ajoutées pour les mois intercalaires. Elle 
paye les trois impôts. Le prix des 100 livres de cuivre est de 6 taels. Aujourd’hui l'impôt 
envoyé à Pékin est de 10,800 livres. 

La mine Hong-che-ngay est à 60 li à l'E. de Lou-nan au pied du mont Mo-po. 
Son ancien nom était Long-pao tchang. Ouverte la 6° année de Kien-long, elle fut imposée, 
la 43° année du même règne, à 12,000 livres de cuivre, avec 1,000 livres de supplément 
pour les mois intercalaires. Le prix de 100 livres est de 6 taels. L'impôt Ko actuel est de 
10,800 livres. 

La mine Hong-po est située à l'E. et à 15 li de Lou-nan tcheou. Elle a été ouverte 
la 25° année de Kien-long. La mine Ta-sin est également sur le territoire de Lou-nan 
à 30 li de cette ville. Elle a été ouverte la 23° année de Kien-long; de cette mine est 
issue celle de Ten-tse-tsin. La mine de Fa-kou est située dans la montagne de ce nom, 
que l’on appelle aussi Kouy-kan chan. Elle a été ouverte la 37° année de Kien-long. Ces 
trois mines furent imposées, la 43° année du même règne, chacune à 48,000 livres, 
avec addition de 4,000 pour les mois intercalaires. Le prix de 100 livres fut fixé à 6°.987. 
Elles envoient aujourd’hui au Kiou de Pékin 43,200 livres de cuivre chacune. 

Toutes les mines du département de Tehin-kiang sont sous la juridiction du Tehe- 
tcheou de Lou-nan. 

F. Mines du département de Kiu-tsing. — La mine Chouang-long est à 95 li au N. de 
Siun tien, dont le mandarin la régit et à 245 li du chef-lieu. Elle à été ouverte la 
46° année de l’empereur Kien-long et imposée deux ans après à 13,500 livres de cui- 
vre, plus 1,125 livres pour les mois intercalaires. L’impôt Tong-chang est de 20 livres 
sur 100". I n’y a pas d'impôt Kiuen-hao. II ne reste donc que 70 livres sur 100. Le prix 


1 C’est-à-dire le double de son taux habituel et de l'impôt dû au gouvernement. 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 293 


du cuivre est le même que ci-dessus. La quantité de cuivre actuellement envoyée à Pékin 
est de 10,800 livres. À cette mine est venue s’annexer la mine Tse-in. 

G. Mines du département de Chun-ning. — La mine Ning-tay est à 520 li au N.-E. 
de Chun-ning. A l’origine elle était de peu d'importance, mais la découverte de filons 
de cuivre s'étendant jusqu’à la montagne Pao-tay vint subitement l’enrichir. À sa gauche. 
on aperçut un lion ; à sa droite, un éléphant, comme si les autres montagnes la reconnais- 
saient comme souveraine. L’eau de petites rivières coulait auprès d'elle. Comme sa pros- 
périté augmentait chaque jour, on préposa un délégué du mandarin pour lPadministrer. 
La 46° année de Kien-long, sa redevance fut fixée à 2,900,000 livres de cuivre; 240,000 
livres doivent être ajoutées pour les mois intercalaires. Sur cette quantité, il doit v 
avoir 900,000 livres de cuivre de l'espèce Tse-pan, qui vaut 5'.152 les 100 livres, et 
2 millions de livres de cuivre Hiey-keou dont le prix est de 6.987. Les trois impôts sont 
en vigueur dans la mine. Elle envoie aujourd’hui à Pékin 2,900,000 livres de cuivre et 
elle fournit à la province 589,537 livres 7 onces. Le long des ruisseaux qui coulent 
près de cette mine, se sont établies les mines de Chouy-hiue-ti-ma, Tsiuen-ma-lin. 


Lo-han et Ti-ma-kou. 
H. Mine du département de Yun-pe. — La mine de Te-pao-pin est au S. de Yunpe, 


au N. du lac Lin-tsao près de la douane de la montagne de l'Ouest. Elle est placée 
sous l’administration du Tehe-li tinh ‘de l’ordre Tong-tche de Yun-pe. Elle fut ouverte la 
58° année de Kien-long et, la 3° année de Kia-kin, elle fut taxée à 1,200,000 livres de 
cuivre. La 14° année de Tao-kouang?, cet impôt fut réduit à 600,000 livres, puis à 
300,000. Pour les mois intercalaires on dut ajouter 25,000 livres. Cette mine ne paye 
que les impôts Ko et Tong-chang. Le prix de 100 livres de cuivre est de 6.987. La 
quantité de cuivre actuellement envoyée à Pékin est de 270,000 livres. 

L. Mines du département de Ta-ly. — La mine de Pe-iang est au N.-0. de Yun-long 
tcheou, au pied des fameuses montagnes de Pe-iang et de Long-teou; à gauche sont les 
monts Houang-song, à droite le mont Siao-chouy-ki qui appartient à la chaine de Pe- 
tsay-luen. En un mot, cette mine est admirablement située. C'était d’abord une mine 
d'argent, mais le traitement du pin-tsao ou « résidus », l’a fait qualifier mine de cuivre. 
Elle est sous la direction du Tche-tcheou de Yun-long. Elle fut ouverte la 35° année de 
Kien-long et, la 45° année du même règne, elle dut payer annuellement 108,000 livres 
de cuivre plus 9,000 livres pour les mois intercalaires. Les impôts Ko et Kiuen-hao sont 
les seuls en vigueur. On paie 6 taels pour cent livres de métal. Aujourd'hui cette 
mine fournit à la province 97,200 livres de cuivre. 

La mine Ta-kong est dans la montagne de ce nom près de Yun-long. Le versant de 
droite de cette montagne est appelée Hiang chan, « mont de l'Éléphant » ; vis-à-vis se 
trouve le mont Siao-tchou-tchang ou « montagne des Petits Bambous, » qui a la forme 
d’une chaise; les veines de la mine sont nombreuses et étendues. Elle fut ouverte la 38° 
année de Kien-long et imposée, la 43° année, à 400,000 livres auxquelles on en ajoutait 


! Le tinh n’a de juridiction que sur les hommes, mais l’addition des mots tche-li en fait l’égal du fou. 
2 1835. 


224 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


33,333 dans les années à mois intercalaires. Celle mine ne paye pas l'impôt Kiuen-hao. 
Le prix des 100 livres est de 6.987. La quantité de cuivre envoyée aujourd’hui à Pékin 
est de 361,999 livres 15 onces et 7 tsien. De nouvelles mines se sont établies dans le 
voisinage de celle-ci; ee sont : Tien tchang dans le mont Lo-y, Man-lang tchang dans la 
montagne de ce nom, Hu-tao-pin tehang et Cha-ho tchang. 

J. Mines du département de Tchou-hiong. — La mine Tchay-chouy-tsin est au N.-E. 
de Nan-ngan et à plus de 300 Ni. La 36° année de Kien-long, elle fut ouverte près de 
l'étang Yang-kieou, mais elle fut transférée ensuite dans la montagne Ou-tay. Au N. 
est le mont San-tsien, à VE. le mont Tehao-pi, à l'O. le mont Ma-hay, au S. le 
mont Hiang-chouy. Toutes ces montagnes sont comme les protectrices de la mine. La 
43° année de Kien-long, elle fut imposée à 11,200 livres, plus 933 pour les mois inter- 
calaires. Elle fournit aujourd’hui à la province 10,080 livres de cuivre. 

La mine Ma-long est située au S.-0. de Nan-ngan à 250 li. On extrait le cuivre des 
résidus du minerai d'argent. Elle fut ouverte la 7° année de Yong-tchen, et, la 43° année 
de Kien-long, elle fut imposée à 4,400 livres de cuivre, avec addition de 366 pour les 
mois intercalaires. Les 100 livres de euivre valent 6 taels. Cette mine fournit aujourd'hui 
à la province 3,960 livres de cuivre. 

La mine de Hiang-chou-po est au S.-E. de Nan-ngan à 215 li. Elle s'appelait au- 
trefois la mine du mont Fong-houang qui est en face du lieu d’exploitation actuel. Sous 
l'empereur Khang-h1 ‘, on transportait tout le minerai à l'endroit où l’on creuse mainte- 
nant. Cette mine était la propriété de trois familles, et on l'avait appelée pour cela San- 
kia techang. Mais cette première exploitation ne fut pas heureuse. La 9° année de l’empe- 
reur Kien-long, on retrouva de nouveau des minerais. Le directeur de la mine était alors 
le Tche-hien d’Y-men. La 48° année de Kien-long, la redevance en fut fixée à 7,200 li- 
vres, plus 600 pour les mois intercalaires. Les impôts Ko et Tong-chang furent les seuls 
établis. Le prix de 100 livres était de 6 taels. La 52° année de Kien-long, on porta la re- 
devance à 100,000 livres et le prix des 100 livres à 6'.987. Aujourd’hui, l'impôt de 
l'empereur est de 100,500 livres et l'impôt de la province 24,240 livres 9 onces 6 tsien. 

La mine Hieou-tchouen, appelée aussi Noan-fong-tse, est située à 130 li au S. de Ting- 
. vuen. Là est une montagne au pied de laquelle coule le fleuve Mong-kang. L’adminis- 
trateur de la mine est le Tche-hien de Ting-yuen. Elle fut ouverte la 46° année de Kien- 
long, et, la 50° année du même empereur, elle fut taxée à 4,500 livres, plus 375 pour les 
mois intercalaires. En outre de l'impôt perçu pour l’empereur, on prélève 20 livres sur 100 
pour l'impôt Tong-chang. Le prix de 100 livres est de 6.987. L'impôt percu par la 
province est de 3,600 livres. 

K. Mines du département de Li-kiang:— La mine d'Houy-long est située à PO. et à 
plus de 300 li de Li-kiang, dans la montagne du même nom. Elle étend ses fibres depuis 
le mont Ta-siue jusqu’à Tchang-fong-ouan-tsong-che. Derrière est Lao-chan-touan ; en 
face estle mont Kouang, et des deux côtés les monts Houy et He. La mine est done protégée 


1 L'un des princes les plus célèbres de la dynastie actuelle et celui sous lequel les jésuites avaient pris une 
si grande influence à la cour de Pékin. Il a régné de 1662 à 1723. 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 295 


dans toutes les directions par la nature des lieux et les roches escarpées qui l'entourent. 
Elle fut ouverte la 38° année de Kien-long et sa redevance fut fixée sept ans après à 
70,000 livres de cuivre, plus 5,833 livres pour les années à mois intercalaires. Cette mine 
pave les impôts Ko et Tong-chang; mais elle est dispensée de l'impôt Kiuen-hao. Elle 
doit envoyer chaque année 20,000 livres à Pékin, jusqu'à ce qu'il soit statué sur l'impôt 
Ko d’une manière définitive. Le prix de 100 livres de la qualité Tse-pan vaut 6 taels, et 
le même poids de la qualité Hiey-keou, 6.987. L'impôt perçu aujourd’hui par la pro- 
vince est de 63,000 livres. Les mines de Tchou, à 150 li dans le S.-0., et Hay-long à 
120 li dans le S.-E., dépendent de la mine précédente. 

L. Mines du département de Lin-nqan*. — La mine Gi-tou est à 150 li à l'O. de 
Lin-ngan et à 100 li au S.-0. d’V-men. Elle est près d’une grande montagne appelée Tsong- 
long et sous la juridiction du Tehe-hien d’Y-men. Ouverte la 23° année de l’empereur 
Kien-long, elle fut taxée la 43° année de son règne à 80,000 livres de cuivre; on dut 
ajouter en outre 6,666 livres pour les années à mois intercalaires. Cette mine acquitte 
les trois impôts. Le minerai n’est point d’une qualité excellente et le cuivre qui en pro- 
vient a, par sulle, une valeur moins grande. Le prix des 100 livres est de 6.987. A 
ses débuts, cette mine a rapporté des quantités de euivre très-considérables, 1,500 ou 
1,600,000 livres par an; mais son rendement a beaucoup diminué depuis. L'impôt perçu 
aujourd’hui par la province est de 72,000 livres. 

La mine Kin-icha est sur le territoire de Mong-tse, à 90 li au S.-0. de cette ville dont 
le Tehe-hien la régit. Elle fut ouverte la 44° année de Kang-hi ? et, à partir de la 43° an- 
née de Kien-long, elle dut fournir 900,000 livres de cuivre, plus 70,000 livres pour les 
mois intercalaires; mais elle fut dispensée de tout impôt. Cetie mine produit du cuivre 
qui est mélangé à du plomb noir et s'appelle 7% tong: il vaut 4°.6 les 100 livres. Quand 
le plomb est trouvé contenir de l'argent, on doit payer à l'État 0.1 par 100 livres : 
cest ce que l’on appelle le petit impôt Ko. Aujourd’hui, cet impôt n’est pas en vigueur 
et l’état achète 450,000 livres de cuivre au prix ci-dessus. De cette mine sont issues 
celles de Lao-tong-pin, Kien-chouy-mong, Fse-tchang-tchay. A partir de la 13° année 
de Tao-kouang, on a commencé à exiger les impôts Ko et Tong-chang dans cette mine. 
La quantité de cuivre envoyée annuellement à Pékin est de 400,000 livres. 

La mine de Lou-kouang-tong est située au nord de Ning tcheou, dont le mandarin 
la régit. Elle a été ouverte la 11° année de Kia-kin et, deux ans après, elle fut taxée à 
12,000 livres de cuivre, plus 1,000 livres pour les mois intercalaires. L’impôt Ko est le 
même qu'ailleurs, mais l’impôt Tong-chang est de 20 pour 100, de sorte que de 100 Hi 
vres il en reste 70. Le prix des 100 livres est 6".987. La mine fournit aujourd'hui à la 
province 9,700 livres de cuivre. 

M. Mines du département de Yuen-kiang. — La mine de Sin-long est au N.-E. de 
Yuen-kiang à 70 li. Elle étend ses filons jusqu'aux montagnes de Sin-pin. Elle a été 


1 Voir la carte itinéraire n° 8, Atlas, 1'° partie, pl. XI. 
2 1706. 
IT 99 


1 


26 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


ouverte sous l’empereur Kang-hi et, la 43° année de Kien-long, elle a été taxée à 
60,000 livres de cuivre, plus 5,000 livres pour les mois intercalaires. Le prix des 
100 livres de cuivre est de 6 taels. Sim-long tchang fournit aujourd’hui à la province 
54,000 livres de cuivre‘. Près de cette mine est celle de Mong-giang qui en dépend. 
En résumant, la loi exige de toutes les mines réunies plus de 7,645,650 livres de cuivre 
pour Pékin, et 1,700,710 pour l'achat des provinces; en tout, plus de 9,346,370 livres ?. 
C’est la ville de Ning-yuen fou de la province du Se-tchouen qui est chargée de faire 
parvenir l’impôt destiné à l'empereur. Le magistrat chargé de la mine de Ou-po, après 
avoir pourvu à la quantité de cuivre exigée dans sa province, doit compléter l'impôt du 
Yun-nan, lorsque cette dernière province n'aura pu le fournir en totalité. Celle-ci peut 
déléguer un Ouy uen * avec les fonds nécessaires, et cet officier, assisté du préfet de 
Ning-vuen, achètera le cuivre qui manque. Ce dernier peut se faire remplacer par un 
mandarin inférieur. Tous les achats seront inscrits sur un registre qui sera communiqué 
chaque fois au coadjuteur du mandarin de Yun-chang hien. Les magistrats de Ning-vuen 
et de Yun-chang établiront chaque mois, pour les gouverneurs des provinces du Yun- 
nan et du Se-tchouen le compte du cuivre reçu. Le prix pour 100 livres de cuivre est 
lixé à 9'.2, à condition que le métal soit apporté de la mine « Ou-po » jusqu’à Houang- 


A 


tsao-pin. La distance est de 415 li et demi. Les porteurs devront recevoir 1.475 par 100 
livres, payement auquel devra veiller le délégué de la province du Yun-nan. D'Houang- 
isao-pin à Lou tcheou *, la dépense de transport pour 100 livres sera de 0°.973, dépense 
à laquelle pourvoira le préfet de Yun-chang. Dans le premier trajet, 5 livres sur 100 
et dans le second une demi-livre sur 100 seront transportées gratuitement. Le délégué 
du Yun-nan résidant à Houang-tsao-pin recevra 10 taels par mois pour son entretien, 
2 taels pour ses frais de bureau, autant pour son secrétaire. Il lui sera accordé quatre 
satellites qui recevront chacun un tael et demi par mois; cette dépense sera comprise dans 
les frais de transport. 

Il y avait autrefois 21 villes, fou, üinh, tcheou ou hien dans le Yun-nan où l'on trouvait 
une quantité de cuivre plus considérable que celle qu'exigeait la loi. Mais aujourd’hui, au 
contraire, la production a tellement diminué qu'on ne trouve pas le nécessaire et qu'il est 
indispensable d'ouvrir de nouvelles mines. Cet état de choses est certainement regrettable. 


1 D’après l'estime du docteur Joubert, la distance de Yuen-kiang au lieu d'exploitation actuel serait de 
35 kilomètres. Je renvoie pour plus amples détails sur cette mine, que le docteur Joubert a visitée, à la Géo- 
logie, page 163. 

2 Le total exact, tel qu'il résulte des chiffres donnés pour chaque mine, est 7,645,659 Livres 13 onces 9 tsien 
pour le cuivre à fournir à Pékin, et 1,239,358 livres 6 tsien pour le cuivre à fournir à la province ; mais cette 
dernière redevance n’a pas été indiquée pour toutes les mines. En admettant, ce qui est certainement exa- 
géré, que ces impôts représentent la moitié de la production totale, on voit que la production annuelle 
en cuivre de la seule province du Yun-nan s'élevait en 1850 à plus de onze millions quatre cent mille Kkiloyrammes. 
Quand arrivera-t-on à avoir une idée exacte des richesses de la Chine ? 

% Sorte d'officiers recevant une mission temporaire et n'ayant d'autorité que pendant le cours de cette 
mission. 

* Ville importante du Se-tchouen située sur le fleuve Bleu à 60 milles de Siu-tcheou fou. Voyez la carte 
générale de l’Indo-Chine, Atlas, 1" partie, pl. IT. 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 227 


S 2, — Des mines d'argent. 


L'argent est desa nature un métal tellement secret qu'on ne parvient à le trouver que 
par de grands travaux. Chacun le recherche avec zèle, mais tous ne parviennent pas à faire 
fructifier leurs efforts, soit qu'ils périssent avant d’avoir atteint la profondeur où git le 
métal, soit pour tout autre motif. Un petit nombre seulement voient leurs labeurs couron- 
nés de succès. 

A. Mines du département de Lin-ngan. — La mine de Mo-he est près du château de 
Mong-tchay, sur le territoire de Kien-chouy, et dépend du Tche-hien de cette dernière 
ville. Elle a été ouverte la 7° année de Kien-long. Sur chaque once d'argent, l'État perçoit 
au titre Ko, 0'.15. Trois fen sont prélevés en outre à divers titres !, L’impôt Ko rapporte 
annuellement 51 taels. 

La mine Ko-kieou est au sud de Mong-tse, près des confins du Yue-nan ?. Elle dépend 
du Tche-hien de Mong-tse. Elle à été ouverte la 46° année de Kang-hi. Elle paye les 
mêmes impôls que la précédente. L'impôt Ko s'élève par an à plus de 2,306 taels. La 
mine de Long-tchou est issue de celle-là et lui paye pour la location du terrain plus de 
70 taels par an. 

B. Mines du département de Tong-tchouen. — La mine Mien-hoa-ti est sise au N.-0. 
du territoire des Kiao-kia près du Kin-cha Kiang sur les confins du Se-tchouen. Elle a été 

ouverte la 59° année de Kien-long. Elle paye les mêmes impôts que les précédentes. L’im- 
pôt Ko rapporte par an plus de 5,106 taels. 

La mine Kin-ngieou est au S.-0. de la ville de Houy-v et sous la dépendance du tche- 
hien de cette ville. Elle a été ouverte la 60° année de Kien-long, et estsoumise aux mêmes 
impôts que les précédentes. L’impôt Ko y rapporte plus de 289 taels. 

C. Mines du département de Tchao-tong. — La mine Lo-ma est à 80 li au $. 
de Lou tien à FO. du mont Long-teou près du fleuve Ngieou-nan. Le tong-pan de 
Lou tien est chargé de son administration. Ouverte la 7° année de Kien-long, elle 
est soumise aux mêmes impôts que les précédentes et rapporte au titre Ko plus de 
6,353 taels par an. 

La mine Kin-cha est située au S.-0. de Yun-chang, sur les bords du Kin-cha kiang ; 
elle est sous les ordres du tche-hien de Yun-chang. Au S. de cette mine est située celle de 
Lo-ma. Elle a été ouverte la 7° année de Kien-long et paye les mêmes impôts que les 
autres mines. L’impôt Ko s'élève à plus de 1,199 taels. 

La mine Tong-tchang-po est à l'O. et à plus de 300 li de Tchen-hiong; elle est 
au S.-0. du marché de Ngieou près du mont Tchang-fa-po, entre les anciennes 
mines d'argent, de cuivre et de fer. Elle dépend du Tche-tcheou de Tehen-hiong. 
Ouverte la 59° année de l’empereur Kien-long, elle rapporte par an au titre Ko plus 
de 1,119 faels. 


1 En d’autres termes, l’État prélève 18 pour 400 de la quantité d’argent produite. 
? Tong-king. 


228 TIEN NAN KOUANG TOHANCG. 


D. Mines du département de Li-kiang. — La mine Houy-long est à l'Ouest de Li-kiang 
près du Lan-tsang kiang. Au delà est le Lou kiang. Ouverte la 41° année de Kien-long. 
elle paye au titre Ko plus de 3,894 taels. 

La mine Nogan-nan est très-ancienne et s’appelait autrefois Kou-hio; elle est sise au 
S.-E. de Tchong tien, etle Tin-tong-tche de cette ville la régit. Réouverte la 16° année de 
Kien long, elle paye au titre Ko plus de 2,522 taels. 

E. Mine du département de Yun-tchang. — La mine San-tao-keou est sur le territoire de 
Yun-pin hien dont le Tehe-hien la régit. Ouverte la 7° année de Kien-long, sur 100 livres 
de 7cheou cha, elle doit en payer 10 livres au litre Tcheou-ko ; cet impôt perçu en 
argent rapporte aujourd’hui 40 taels. 

F. Mine du département de Chun-ninqg.—La mine de Yong-kin, appelée aussi Li-se-ki, 
est située au S.-0. de Chun-ning. Le Tehe-hien de cette ville en est l'administrateur. 
Ouverte la 46° année de Kien long, elle paye les mêmes impôts que la mine de Mo-he. 
L'impôt Ko s’élève par an à 560 taels. 

G. Mines du département de Tchou-hiong.. — La mine de Yun-chen est située au 
Sud de Tehen-hiong, près du mont Kieou-tay. Elle a été ouverte la 46° année de Kang- 
hi. Le gouvernement perçoit le tiers du minerai pour l'impôt Teheou-ko. La valeur 
de cet impôt s'élève à plus de 217 taels par an. Le gouvernement perçoit sur la mine 
nouvelle de Sin-long 0'.18 par once d'argent au titre Ko pour suppléer à l'impôt de l’an- 
cienne. 

La mine de Tou-ka est sise sur le territoire de Ngo-kia et dépend du mandarin de 
Nan-ngan teheou; elle a été ouverte la 44° année de Kang-hi et paye 0°. 18 par once d'argent, 
ce qui donne plus de 20 taels par an pour l'impôt Ko. 

La mine Che-iang est à l'O. de Ngo-kia et est régie par le Tche-tcheou de Nan- 
ngan. Elle a été ouverte la 24° année de Kang-h1; le gouvernement perçoit 0'.2 par once 
d'argent pour l'impôt Ko, plus 0'.1 pour les résidus. La perception à ce dernier titre 
s’élève à un peu plus de 5 taels par an. 

La mine Ma-long est au S.-0. de Nan-ngan près de l'étang Tehou-vuen. Elle fut 
ouverte la 46° année de Kang-hi. Sur un tan de minerai, elle paye à l’État 2 teou et 
2 chen, et sur 10 tsi du minerai appelé Kouang tou, 2 tsi et 2 ho° au titre Tcheou-ko. 
La valeur en sera estimée après l’élaboration et payée au gouvernement en argent. Cet 
impôt s'élève à plus de 516 taels par an. 

Ces quinze mines payent annuellement depuis la 16° année de Kia-kin un total de 
24,114:.3 au litre Tcheou-ko *. 

H. Mine du département de Ta-ly. — La mine de Pe-iang est sise sur le territoire 
de Yun-long et régie par le Tehe-tcheou de cette ville. Ouverte la 38° année de Kien- 


! Cinabre; très-employé dans la médecine chinoise contre les maladies du cœur. 

? Voyez la note 4, page 179. 

% Le total qui résulle des chiffres donnés pour chaque mine est 24,197 taels, représentant les 1 cen- 
tièmes de la production totale en argent. Cette production s’élèverait done à 161,300 taels, c’est-à-dire à 
1,250,000 francs, et à deux millions environ si l’on tenait compte des mines suivantes. 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 229 


long, elle paye sur une once d'argent un sien et demi pour l'impôt tcheou-ko et trois fen 
à divers autres titres. 

1. Mine du département de Yuen-kiang. — La mine de Tay-ho est sur le territoire de 
Sin-pin, au S.-0. de cette ville dont le Tehe-hien la régit. Elle a été ouverte la 17° année 
de Kia-kin. Son impot est réglé comme celui de Pe-iang tchang. 

J. Mine du département de Tonq-tchouen.—La mine de Kio-lien est à VE. de Houy-v, 
près de Ouei-ning tcheou. Elle est régie par le tche-hien de la première ville. Ouverte la 
16° année de Kien-long, elle paye les mêmes impôts que les précédentes. 

Ces trois mines rapportent au titre Ko 5 à 600 taels par an au gouvernement. 

K. Mine sur le territoire de Chun-ning\. — La mine Hi-ngi est au lieu appelé Ken-ma, 
et dépend du Tou-se. Elle a été ouverte la 48° année de Kien-long. Elle doit payer par an 
au titre Ko 800 taels d'argent et ajouter à cette somme un peu plus de 66: taels les années 
à mois intercalaires. 

L. Mines récemment ouvertes. — La mine Tong-chen sur le territoire de Yun-pe est sise 
au lieu nommé Lang-kiou-tou et dépend du tong-tche de Yun-pe tinh. Elle a été ouverte la 
11° année de Tao-kouang. Le gouvernement perçoit au titre Teheou-ko 0°.135 par once 
d'argent. On retire indistinetement du cuivre et de l'argent de cette mine. Au bout de 
quinze années d'exploitation, elle s’est réunie à la mine de cuivre de Pao-pin. 

La mine Kouang-chan sur le territoire de Tong-tchouen est à l'E. de Houy-y, au N. de 
la mine Hay-iuen et à ’O. de la mine Kio-lien. Elle dépend du tche-fou de Tong-tchouen. 
Elle a été ouverte la 24° année de Kia-kin et vend son minerai. Sur 1,000 sapèques du prix 
de vente, le gouvernement en perçoit 180 au titre Tcheou-ko. Cet impôt se transforme 
ensuite en argent pour que le transport en soit plus facile. La 15° année de Tao-kouang, 
cette mine a été réunie à celle de Mien-hoa-ti. 

La mine Ta-mou sur le territoire de Yuen-kiang est sise près de Sin-pin dont le Tehe- 
hien la régit. Ouverte la 12° année de Tao-kouang, elle dut payer à l’empereur au titre 
Tcheou-ko un {sien et demi par once d'argent, plus trois fen à divers autres titres. La 
15° année du même règne, elle a été réunie à la mine de Tay-ho. 

La mine Sin-long est sur le territoire de Tchen-yuen dont le tinh-tong-tche la régit. Elle 
a été ouverte la 17° année de Tao-kouang, et doit payer au litre Teheou-ko 0°.135 par 
once d'argent. 

La mine de Pe-ma est sur le territoire de Ho-kin dont le tche-tcheou la régit. Elle a été 
ouverte la 20° année de Kia-kin et doit payer, par once d’argent, 0'.144 pour l’impôt 
Tcheou-ko. 

La mine Sin-in est sur le territoire de Ouen-chan dont le tche-hien la régit. Elle a été 
ouverte la 21° année de Tao-kouang et paye au titre Tcheou-ko un dixième de son produit 
en argent. 

La mine Hang-sin est sur le territoire de Nan-ngan et sous la direction du délégué 


1 Voir la carte générale de l’Indo-Chine, Atlas, 4° partie, pl. IL. La partie Sud du territoire de Chun-ning 
est encore complétement habitée par des Shans ou Laotiens du Nord. 


230 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


du préfet d'Ouy-yuen. Elle à été ouverte la 23° année de Tao-kouang et doit payer au titre 
Tcheou-ko un tsien et deini par once d'argent et trois fen à divers autres titres. 

Le produit de ces sept mines est employé à subvenir au déficit des autres mines 
d'argent de la province. 


72) 


3, — Des mines d'or, d’étain, de plomb et de fer. 


L'or le plus estimé était celui des trois premières générations !. On ne commenca 
que sous les Yuen ? à prélever un impôt sur ce métal; cet impôt s'élevait à plus de 180 
Pao *; sous les Ming, 1,000 onces d’or valaient 8,000 taels d'argent. C’est ce que 
l’on appelait l’or houe, c’est-à-dire lor au titre légal. Dans la suite, or prit une valeur 
plus grande et on offrit une augmentation de 1,000 taels d'argent au titre Kong*. Mais 
elle ne fut pas admise et l’on porta cet impôt kong à 3.000 taels *. Le gouvernement rece- 
vait plus de 70 onces d’or au titre Ko. Ensuite cet impôt fut diminué jusqu’à un peu plus 
de 28 onces. La justice et la bienveillance des gouvernants pour le peuple étaient grandes 
à l’origine des choses. Maïs, aujourd’hui, il est prélevé un tribut sur chaque métal, or, 
élain, fer, plomb ; aussi le gain du peuple est-il peu considérable. 

A. Mines d'or. — Les quatre mines d’or «suivantes» doivent payer, d’après la loi éditée 
la 15° année de Kia-kin, 28°.8653 d’or et, quand il y a un mois intercalaire, elles doivent 
ajouter 1°.4629. Cet impôt est perçu par le Fou pou. 

La mine Ma-kou est située au S.-0. du mont Ouen sur les limites du Yue-nan et du 
territoire de Lin-ngan; elle est sous la direction du tche-fou de Kay-hoa. Elle à été 
ouverte la 8% année de l’empereur Yong-tchen. L'impôt Ko exigé est de 13 fen d’or par 
atelier de laveurs et par mois. Cet impôt est diminué de moitié le premier et le dernier 
mois de l’année 7. L’impôt annuel total est de 10°.01 auquel on ajoute 0',91 quand il y a un 
mois intercalaire. 

La mine Kin-cha-kiang est au S.-0. de Yun-pe sur les bords du fleuve, aux limites 
du territoire de Tsie-pin-tchouen. Elle est sous la direction du tinh-tong-tche de la première 
ville. Ouverte la 24% année de Kang-hi, elle paye par atelier de laveurs et par mois un tsien 
d’or pour l'impôt Ko. L’impôt annuel total est de 7°.26 d’or. Il n’est rien ajouté pour les 
mois intercalaires. 


! C'est-à-dire des trois premières dynasties, Hia, Chang, Tcheou. Elles régnèrent en Chine de 2205 à 256 
av. J.-C. | 

? Dynastie mongole qui a occupé le trône de 1260 à 1268 après J.-C. 

* Boule d’or qui vaut 50 taels d'argent. 

* Kong se dit des dons offerts volontairement à l’empereur. 

$ Ce qui donne + pour le rapport de la valeur de l'or à celle de l'argent, qui en Europe est de ++ Nous 
avons trouvé à notre passage dans le Yun-nan que ce rapport variait aujourd’hui de + à &- 

5 Ministère des finances. Cet impôt, qui équivaut environ à 1,140 grammes d'or, ne donne pas une bien haute 
idée de la production aurifère de la province. 

7 Sans doute parce que les travaux s’arrètent à cause des fêtes. 


PRODUCTION EN MÉTAUX. 231 


La mine Ma-kang est située au $S. de Tchong tien ; à l'E. est la mine d’ar- 
sent de Ngan-nan. Ma-kang est administrée par le tinh-tong-tche de Tchong tien. Elle 
a été ouverte la 19"° année de Kien-long. Elle doit payer au gouvernement un cinquième 
de sa production en or. L’impôt annuel est de 11.2. On ajoute pour les mois inter- 
calaires 0°.5. 

La mine Houang-tsao-pa est à l’O. de Teng-yue; à l'O. de cette mine est le Ta-in 
kiang qui coule sur le territoire d’un Tou-se. Elle est administrée par le tinh-tong-tche 
de Teng-yue et a été ouverte la 5° année de Kia-kin. Les veines de cette mine ont 
trois valeurs différentes. La première sorte paye 0°.15, la seconde 0'.08, la troisième 0".04 
par once d’or pour l'impôt Tcheou-ko. L’impôt annuel total est de 0°.3953 auxquels on 
ajoute 0'.0329 pour les mois interealaires. 

B. Mines d'étain. — La mine Ko-kieou est sise près du château de Mong-tsiun, sur le 
territoire de Mong-tse dont le tche-hien la régit. Elle a été ouverte la 36"° année de Kang- 
hi. Le gouvernement prélève 19 livres sur 100 livres d’étain dont le prix est fixé 
à 4.036. II est fourni à l'Etat chaque année pour 4,000 taels d’étain. Il faut une permis- 
sion du Pou tchen se! pour vendre le reste du métal. 99 livres d’étain forment ce que 
lon appelle un kÆoway; 24 kouay forment un ko. Il est perçu par ko, au titre Ko, 
4.5; plus, pour les soldats de la province, 3.578. A ces deux titres, la mine paye à l’État 
3,186 taels par an. 

C. Mines de plomb. — Dans les quatre mines de plomb on distingue le plomb blanc * 
que l’on appelle ouy yuen. Il est réduit dans un foyer entièrement construit en argile 
et de la forme d’une grande jarre d’où le foyer a pris le nom de Oua kouan lou. Le 
minerai est entouré de charbon de tous côtés, de facon à ce qu'il ne puisse être en 
contact avec l'air. Il est placé dans des vases en terre et introduit dans le foyer où 
quatre de ces vases, suivant la capacité du foyer, forment un ktao. Il y a aussi le plomb 
noir que l’on appelle Ti-mou, pour lequel on se sert des mêmes foyers que dans les mines 
d'argent. Sur 100 livres de ces deux métaux on en prélève 15 pour l'impôt Tcheou- 
ko, 5 pour l'impôt 7chong kong* et 10 pour l'impôt Tong-chang. Ces impôts peuvent 
être payés en argent. Ce qui est payé au titre Tchong-kong est consacré à l'entretien des 
travailleurs, ce qui représente une dépense de 1.82 à plus de 2 taels par 100 livres de 
métal produit. Pour le plomb blane, il faut dépenser de 1'.28 à 2 taels; pour le plomb 
noir, 1‘.450 à 1.684. Sur 100 taels du capital de la mine, 1l est retenu encore pour 
la balance 1°.5. Cet argent sera dépensé pour l'usage commun et le compte devra en être 
rendu chaque année. 


! L'un des trois membres de la direction des finances attachée à la province du Yun-nan. Ces trois mem- 
bres, nommés San ta chen, sont le Fan tay, le Pou tchen et le Gan cha. Ils composent un tribunal dont le 
pouvoir est supérieur même à celui du vice-roi. Ils peuvent différer l’exécution des ordres de l’empereur. 
Tous les mandarins nommés dans la province doivent se présenter à eux et ils peuvent changer leur destina- 
tion. Ils communiquent avec l’empereur comme tribunal, mais jamais isolément. On fait appel devant eux 
des causes successivement jugées par les hien, les fou et les tao. 

? Ce plomb blanc n’est autre que du zine. 

# Impôt laissé à la disposition des mandarins pour les usages publics. 


232 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


La mine Pey-tche est située sur le territoire de Lo-ping; celle de Kouay-v, sur le 
territoire de Ping-tche, et toutes deux sont régies par le tche-hien de cette dernière ville. 
Elles ont été ouvertes la 7 année de Yong-tchen et envoient annuellement aux magasins 
de la province plus de 219,769 livres de plomb blanc qui sont affectées à différents usages. 
L'impôt Ko équivaut environ à 399°.98 ; l'impôt Kong, à 199°.902; l'impôt de la balance, à 
67.886 ; l'impôt Tong-chang donne 135'.772 ; on doitaffecter 67.886 de l'impôt Kong au 
transport. Quand il y a un mois intercalaire, les mines doivent ajouter 19,114 livres, et 
augmenter proportionnellement tous les autres impôts. Elles doivent aussi envoyer 
33,415 livres de plomb noir et payer 64°.5 pour les impôts Ko et Kong. 

La mine Tse-hay est au S.-E. de Houy-y. Le minerai de plomb se retire du mont 
Kouang, près de la mine d'argent qui s’y trouve, et on le porte au lieu où se trouve le 
charbon. Le tche-hien d’Houy-y est chargé de cette mine qui a été ouverte la 2"° année 
de kien-long. Son exploitation s’est interrompue plusieurs fois par suite de la fermeture 
des magasins de métaux de Tong-tchouen. Elle a été rouverte la 8" année de Kia-kin et 
mise sous la dépendance du tche-hien de Kien-chouy avec la mine de Pin-ma. Elle dut 
envoyer alors annuellement aux magasins de Yun-nan 219,769 livres de plomb blanc et 
payer pour les autres impôts comme les deux mines précédentes; mais le prix des 100 li- 
vres de métal ne fut fixé qu'à 2 taels. La 22" année du même empereur, les magasins de 
Tong-tchouen furent rouverts et durent recevoir de cette mine 156,977 livres de plomb 
blane, plus 13,080 livres pour les mois interealaires. Les mêmes redevances continuèrent 
à être payées aux magasins de la province. 

La mine O-la-lo est sous la direction du tche-hien de la ville d'Houy-y. Elle envoie 
aux magasins de Tong-tchouen 11,933 livres de plomb noir. Sur 100 livres, il en est pré- 
levé 10 pour l'impôt Ko. On ajoute pour les mois intercalaires 994 livres. Le plomb est 
acheté par le gouvernement au même prix que le plomb blane. 

La mine To-to est au N.-0. de Siun tien ; à l'O. est la mine de cuivre de Chouang- 
long. Elle est administrée par le tche-tcheou de Siun tien et a été ouverte la 13"° année 
de Kien-long. Son revenu est dépensé pour la province. Elle donne par an 33,415 
livres de plomb noir; le prix du transport de 100 livres à la capitale de la province 
est fixé à 2.1. Pour les mois intercalaires on ajoute 20,000 livres. 

D. Mines de fer. — Le gouvernement perçoit au titre Ko, dans les quatorze mines sui- 
vantes, 296.158 dans les années à mois intercalaires, et 281.536 dans les années ordi- 
naires. 

La mine de Che-iang est sous la juridiction du tehe-tcheou de Nan-ngan; la mine 
de O-kan, sous celle de Tchen-nan ; la mine de San-chan dépend de Lou-liang; celle de 
Hong-lou-keou, de Ma-long ; celle de Kong-ming-ly, de Che-pin; celle de Siao-chouy, de 
Lou-nan: celle de Ho-ti, de Ho-kin; les trois mines de Ngo-sin, Cha-tse, Chouy-tsin, du 
ünh-tong-tche de Teng-vue; celle de Lan-gi-tsin, du Teheou-pan de Ngo-kia; celle de Kiao= 
ise-pa, du tinh-tong-tche de Ta-kouan ; celle de Lao-ou-chan, du tehe-hien d’Y-men:; enfin 
celle de Mong-lie, du tong-tche d'Ouy-yuen. 


PRODUCTION EN MEÉTAUX. 233 


E. Droits divers. — Pour le droit de vente de 110 livres de cuivre blanc! pris au 
magasin de la capitale de la province, le gouvernement perçoit une livre de cuivre ou 
trois tsien d'argent. 

Les marchands qui transportent le cuivre blanc de la mine Li-=ma-ho à la capitale du 
Se-tchouen doivent faire marquer le métal en acquittant les droits; de même ceux qui 
transportent le cuivre blanc pris à la mine Ta-mong-lin de Ning-yuen à Tehen-tou * paye- 
ront l'impôt tel qu'il est exigé dans les mines du Se-tchouen. (Ces deux mines qui s’appe- 
lient autrefois Mo-mi et Tsi-ngieou ne produisent aujourd’hui presque plus rien, et Von a 
du en informer le gouvernement.) Sous Tao-kouang, 23° année, cet impot rapportait 420 
laels. Dans la mine de Ta-mong-lin on paye un petit impôt particulier pour l'extraction du 
métal des fourneaux; cet impôt rapporte 17°.7 par an. 

Les marchands qui apportent le cuivre blane de la mine Li-ma-ho au marché nommé 
Ma-kay situé près de Yuen-mong hien payent 0'.7 par chaque caisse appelée na. 

Les marchands qui apportent le cuivre blane des mines du Se-tchouen à Houy-v doi- 
vent prouver qu'ils ont acquitté les droits au préfet de Ning-vuen et payent en sus un tael 
par 100 livres. S'ils n'ont pas de recu, ils payeront au gouvernement 10 livres par 110 li- 
vres. Elles seront évaluées en argent au prix de 0°.3 la livre. 

La 22° année de Fao-kouang, il a été ainsi transporté 4,899 livres de cuivre blanc qui 


ont rapporté à l'État 481.99. 


! Voyez sur la production du cuivre blanc, Géologie, pages 159-160 
? Capitale du Se-tchouen. 


I. co 


IV 


DES DÉPENSES DU TRÉSOR PUBLIC. 


Les habitants de la province de Tien sont d'une nature telle qu'on ne trouve pas facr- 
lement parmi eux des gens qui s'occupent de commerce. Ils se plaisent à habiter les lieux 
déserts, à la recherche des pierres précieuses, notamment de celles qui ont une belle couleur 
verte. Les bois, le coton, les matières médicales abondent cependant dans cette contrée et 
pourraient être vendus avec de grands bénéfices. 

Il arrive souvent que les mines qui produisent les métaux ruinent leurs propriétaires, 
comme ces oiseaux impies, qui, après avoir grandi, crèvent le ventre de leur mère. Aussi, 
quand les minerais de cuivre viennent à manquer, les ouvriers se dispersent, et chacun 
cherche à gagner sa vie au détriment même du propriétaire auquel ils dérobent tout ce 
qu'ils peuvent. 

La province de Tien fournit chaque année plus de 9 millions de livres de cuivre, qui 
valent environ 6 taels les 100 livres, et 50 à 60 mille livres d'argent; il faut défalquer 
de cette valeur le prix du transport. Il est arrivé souvent que les marchands ne puis- 
sent payer le tribut et l’apporter au trésor. C’est pourquoi, il y a deux ans, le mi- 
nistre de l’agriculture parlait d'aider avee le trésor public, le trésor de la province, pour 
qu'il püt subventionner les mines et pourvoir aux besoins des milliers d'hommes qui y 
travaillent. À ce moment, en effet, neuf préfectures n'avaient eu qu’un subside insufti- 
sant. On sent de quelle importance il est « pour le gouvernement », de venir en 


236 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


aide aux exploitations minières. Nous allons donc parler maintenant des charges du 
trésor publie. 


S 1. — Avances pour l'achat et le transport du cuivre. 


La province du Yun-nan doit chaque année envoyer-à Pekin une quantité de cuivre 
en échange de laquelle elle recoit 1 million de taels. Le ministère des finances et celui 
des travaux publics doivent d’après la loi retenir sur ce erédit 64,455".2 pour la nourriture 
des hommes chargés du transport. Cette somme doit être augmentée de 2,301".8%4 « dans 
les années à mois intercalaires » où 1l est envoyé une quantité supplémentaire de métal. 

A Tien-tsin', le trésor doit fournir 2,800 taels; Tso-leang tinh* donne 4,970°.18, 
plus 199°98% S'il y à un apport de cuivre supérieur à ce que lon a coutume d’en- 
voyer. Tous les mandarins des provinces traversées fournissent en outre d’une manière 
générale pour les frais de transport 8,400 faels. Le Se kou ou « trésorier » du Tche-Iv 
fait La répartiion de cette somme. Pour le transport de Han-keou à Y-tchen, le trésor 
de la province du Hou-pe devra payer 10,434 taels ; pour le transport de Y-tchen à 
Tong tcheou *, la province du Kiang-sou paiera 16,206 faels. Ces deux provinces prètent 
en outre 13,000 taels pour les frais de transport pendant toute la route depuis le Yun-nan. 
(I a été décidé la 8° année de Tao-kouang, que cette dernière somme serait rendue aux 
trésors du Hou-pe etde Kiang-ning * chaque année en quatre pavements de 2,500 et deux 
de 1,500 taels.) Les provinces du Tehe-ly, du Hou-pe et Kiang-ning suppléent au reste 
des dépenses. Sur le crédit d’un million qui lui est affecté, la province du Yun-nan recoit 
en définitive 837,252!.792 dont elle doit rendre un eompte exact. Chaque année le 
lrésorier doit établir ce qui a été dépensé de ce capital, ce qui reste, et quel en est le 
bénéfice en tenant compte du cuivre en magasin et de tous les frais. 

Les autres provinces doivent faire livrer par des délégués à la province du Sue -nan 
deux ans à l'avance le capital nécessaire à l'exploitation des mines de cuivre; si l’on n'en- 
voyait cet argent que l’année Kia, par exemple, le Yun-nan ne pourrait dans l’année Y? en- 
voyer le cuivre qu'il doit avant l'automne pour éviter les orages et les pluies, sans con- 
tracter des dettes. (Dans la 18° année de Kia-kin il y a eu un déficit de 4,000 taels dans le 
capital avancé, mais celte somme a été recouvrée la 19° année de Tao-kouang.) 


! Ville importante située à la jonction du Grand Canal et du Pe Ho. Elle a été occupée en 1858 par l'amiral 
Rigault de Genouilly, et en 1860 par l’armée expéditionnaire anglo-française. Un consul francais y réside 
depuis cette époque. 

? Située dans le Pe-tche-ly aux environs de Pékin. 

3 Y-tchen est située sur le Yang-tse kiang à l'entrée du Grand Canal; Tong tcheou est sur le Pe Ho,à l'E. el 
à très-peu de distance de Pekin. C’est la dernière étape de la route. 

# Plus connue sous le nom de Nankin : capitale de l’ancienne province de Kiang-nan qui est aujourd'hui 
divisée en deux, le Kiang-sou et le Ngan-hoei. 

5 Les Chinois ont pour désigner les heures du jour douze caractères qu'ils appliquent aussi à la désignation 
des années. Ces douze caractères appelés 74 tchi, combinés avec dix autres appelés Tien kan, servent à dénom- 
mer les soixante années du cycle de Hoang-ti. Ce calendrier se retrouve en Cochinchine, à Siam, au Cam- 
bodge, etc. L’année Kia est la première du cycle de dix ; l’année Y est la seconde. 


DÉPENSES DU TRÉSOR PUBLIC. 237 


Dans la province de Tien après dix ans d'exploitation, alors que la mine est devenue 
plus profonde et d’un plus grand rapport, 1l est permis de prèler aux Lou-fou, « familles 
chargées des foyers », une somme d'argent qui sera remboursée en euivre après 40 mois. 
Si ces familles manquent à leurs engagements, les directeurs de la mine devront payer 
pour elles. 

Toutes les mines du Yun-nan ne sont point à une égale distance de la capitale de 
la province, et ne peuvent en recevoir à temps l'argent nécessaire; c’est pourquoi, pour 
éviter des transports inutiles, 80,000 taels sont déposés chez le gouverneur du Tong-tao 
et 4,000 chez celui du Si-tao, afin que cet argent soit plus facilement à la portée des ex- 
ploitateurs. Pour quelques-unes des mines du Nan-tao ‘, le chemin à faire pour venir 
à la capitale serait également trop long, et elles peuvent être autorisées par des lettres don- 
nées par le Fan-se * et signées par le Tao-tay à recevoir l'argent à un lieu moins éloi- 
gné. [l en devra être rendu compte mois par mois, et si, par la négligence du Tao-tav. 
l'argent réellement recu est moindre que l'argent qui aura été donné pour cet emploi, 
ce fonctionnaire devra payer la différence de ses propres deniers. Si la mine est sous la 
direction d’un tche-fou, qui aura agi d’après les ordres du Tao, ces deux fonctionnaires 
seront solidairement responsables. Enfin, si le Fan-se lui-même a donné plus d'argent 
qu'il n'aurait dùü, de telle sorte qu'il soit difficile de recouvrer la totalité de la somme 
avancée, il sera dégradé de sa dignité et obligé de réparer le dommage causé au trésor. 
En même temps, les mines qui doivent à l’État sont soigneusement notées el jugées d'a- 
près la même loi que ceux qui doivent l'impôt du sel. 

La valeur du capital avancé aux mines sera recouvrée peu à peu, mensuellement, en 
cuivre. Si au bout de trois mois l'argent avancé n’est pas rendu, le Tao et le Fou veille- 
ront à ce que les directeurs de la mine indemnisent complétement le gouvernement 
avant la fin de l’année, dussent-ils mème pour cela vendre leur matériel. Si une année 
entière s'écoule, les directeurs de la mine devront dédommager l'État de leurs propres 
deniers, et les habitants mêmes pourront être condamnés à une réparation. 

Si une fraude ou une erreur n'est découverte qu'après un temps très-long, les auto- 
rités de la province condamneront comme voleurs les directeurs de la mine. Si les ou- 
vriers de la mine sont en fuite et que les directeurs en préviennent aussitôt, le Tao et le 
Fou examinent si le fait est vrai, et peuvent, dans ce cas, réparer le tort commis avec les 
deniers publics (Pargent employé à cet usage provient de la retenue de un pour cent faite 
sur l'argent avancé aux mines); mais il ne sera permis en aucune manière d'attribuer ce 
tort à la négligence des ouvriers. Le fardeau imposé aux directeurs des mines est considé- 
rable, etil convient de ne choisir pour ces fonctions que des hommes probes, actifs, en uu 
mot, à la hauteur de leur position. Si lon choisit imprudemment des gens qui n'ont aucun 
bien, ceux quiles auront choisis en auront la responsabilité et devront en rester les eautions. 


1 Voyez la note 6 de la page 218. 

? Supérieur judiciaire de toute la province, chargé de l'installation des fonctionnaires nommés par Pékin, 
qu'il doit présenter au San-ta. Il prend rang immédiatement après les trois fonctionnaires qui composent 
ce tribunal (Voy. la note { de la page 231). 


238 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


Lorsque les mines de cuivre, loin de rapporter un bénéfice, n’occasionnent que des 
dépenses, 1l faudra en rechercher soigneusement la cause. Si elle réside dans la pauvreté 
du minerai, résultant d’une trop longue exploitation, et qui fait que l’on ne peut trouver 
des Lou-fou, le Tao et le Fou dénonceront le fait et attendront une décision. Si la chose 
n’est pas telle qu'on l'avait exposé, tous ceux qui ont mission de veiller sur la mine, 
depuis le Tao et le Fou’, devront payer le dommage. (Ces hauts fonctionnaires parta- 
geront la perte avec le Fan-se, et devront indemniser de leurs deniers le trésor public. 
Si la mine est sous la direction d’un Tehe-fou ou d’un Tche-li-tcheou, ceux-ci partageront 
la somme à payer avee le Tao qui est chargé de veiller sur eux. Si elle dépend d’un Teheou 
ou d’un Hien, ceux-ci partageront la somme à payer avec leurs supérieurs, le Tehe-fou ou 
le Tehe-li-tcheou. Les directeurs particuliers de la mine payeront toujours la sixième partie 
de la perte.) 


S2. — Traitements des mandarins et employés des mines. 


Dans chaque mine où les ouvriers font secrètement de grands bénéfices, il faut veiller 
avee soin sur la fraude ou le vol. Les directeurs ou les secrétaires, soit dans les mines, 
soit dans les entrepôts, doivent retirer un bénéfice certain de l'exploitation du cuivre, 
pour qu'ils ne soient pas tentés de prévariquer et de faire des gains illicites avec les mar- 
chands et les ouvriers. S'ils ne s'occupent que de bien remplir leur office, le gouverne- 
mentobtiendra un revenu presque incroyable. C’est pourquoi nous allons parler maintenant 
des salaires. 

Le préfet de Tong-tchouen doit recevoir par mois pour la mine de Tang-tan 21 taels, 
plus 54.6 pour ses domestiques; pour la mine de Ta-chang-keou, 7 taels pour lui et 
43.4 pour ses domestiques ; pour la mine de Mong-lou, 10 taels pour lui et 41 pour ses 
domestiques ; enfin, pour la mine de Ta-fong-lin, 10 taels pour lui et 52 pour ses do- 
mestiques. 

Le mandarin de Ta-kouan ne reçoit que 5 taels par satellite employé dans les mines 
de Jen-lao-chan et Tehou-lang. 

Le mandarin de Ouy-yuen recoit par mois pour la mine de Ning-tay 15 taels, et ses 
satellites 148 taels. 

Le mandarin de Yun-long recoit par mois pour la mine de Ta-kong 15 taels pour lui 
et 48 pour ses domestiques. 

Le mandarin de Yun-pe reçoit par mois pour la mine de Pao-pin 3°.75 pour lui et 
13.85 pour ses domestiques. 

Le mandarin de Y-men reçoit par mois pour la mine de Hiang-chou-po 15 taels pour 
lui et 55'.4 pour ses domestiques. 


Le mandarin de Lou-nan ne reçoit pour sa surveillance sur les deux mines de Fong- 


! Ce n’est pas le même caractère que Fou qui signifie « préfet d’un département ». Il désigne ici le premier 
fonctionnaire de la province après le Tsong-tou ou « vice-roi ». 


DÉPENSES DU TRÉSOR PUBLIC. 239 
houang-po et Hong-che-ngay que 5'.7 par mois et par domestique employé ; pour les deux 
mines de Ta-sin et de Hong-po, il n’y a également qu'une somme mensuelle de 13°.3 al- 
louée à ses satellites ; ce n’est que pour la mine de Fa-kou qu'il reçoit par mois 10 taels 
pour luiet 13 pour ses domestiques. 

Pour les mines de Hong-long, Lo-ma, Chouang-long, Tehang-fa-po, Siao-ngay-fang, 
Kin-cha, Mey-tse-to, Tse-ngieou-po, Se-tse-ouy, Lao-tong-pin, il n’est rien alloué, 
même pour les satellites. 

IL est affecté par an au directeur de l’entrepôt du Si-tao 186 taels pour son entretien 
et 696 taels pour les frais d'emmagasinement du cuivre. 

Le directeur de l’entrepôt du Tong-tao reçoit 480 taels par an pour son usage et 
528 taels pour les autres dépenses. 

Le mandarin de Ouei-ning, « préposé aux transports», reçoit par an 300 taels pour son 
usage et 276 taels pour les autres dépenses. | 

Le mandarin de Tchen-hiong, « préposé aux transports », recoit par an 900 taels pour 
lui et 475'.6 pour les autres dépenses. 

Le mandarin de Tong-tchouen,: « préposé aux transports », reçoit par an 720 faels 
pour lui et 627t. 36 pour les autres dépenses. 

Le mandarin de Tehao-tong reçoit par an 720 taels pour son usage et 180 faels 
comme frais de voyage pour presser la rentrée du cuivre. 

Le mandarin de Ta-kouan reçoit par an pour la mine Tsin 360 taels pour lui et 
187°.2 pour les autres dépenses de la mine. 

Le mandarin de Yun-chang reçoit par an pour les magasins d’Houang-tsao-pin 300 
taels pour lui et 211 pour les secrétaires et autres employés. 

Les directeurs des magasins de Lou tien recoivent par an pour leur traitement, 200taels: 
les seribes et autres employés, 320. 

Le directeur de la mine de Tang-tan reçoit par mois pour son traitement 30 taels ; 
chacun des directeurs des mines Lou-lou, Tsien-chan, Gi-tou, Ning-tay 15 taels; ceux 
des mines de Ta-chouy-keou, Ta-fong-lin, Sin-long, Kin-teha et Mong-lo, 10 taels; celui 
de la mine de Pe-iang-chan et les délégués des mandarins à Hia-kouan, Tehou-hiong et 
Yun-nan, 8 taels par mois chacun; le directeur de la mine de Tay-tse reçoit 6 taels. Pour 
les employés de tous ces directeurs, l'usage est, à Tong-tchouan et dans le Tong-tao, de 
donner 80 taels; les fous de Lin-ngan, Tehin-kiang, Chun-ning recevront 20 taels; celui 
de Yun-nan, 19*.2. 

Le chou-ki ou « secrétaire » attaché à la mine de Ma-long, reçoit par mois 1°.5; ce- 
lui de la mine de Je-kien-siun, 2 taels; ceux des mines de Tsin-long, Kin-tcha, Pe-iang- 
chan, Ta-sin, Hong-po, les trois scribes de la mine de Ning-tay, les deux de celle de Gi- 
tou, celui de la mine Mong-mi, celui de Ma-kay reçoivent chacun 2'.5 par mois. Les deux 
scribes de la mine de Tsien-chan, ceux des mines de Ta-chouy-keou, Sin-long, Long-pao, 
Ta-fong-lin, Jen-lao-chan, Tsien-tchou-tang, Len-chouy-keou, Chan-mou-tsin, Mong- 
lou, Tsay-tse-tsin ; ceux des entrepôts de Yun-chang, Siun tien, Tong-tchouen, les deux 
secrétaires affectés à Hia-kouan, Tehou-hiong, Yun-nan, reçoivent chacun par mois 3 taels. 


240 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


Les deux kao-kin, « secrétaires », du vice-roi, les quatre {song li, « administrateurs des 
étrangers », reçoivent chacun par mois 2°. 7; les trois chou souan, « calculateurs » ,du vice- 
roi, les quatorze autres (song recoivent par mois 2°,2:les pan tong rhou gi tchany. 
« secrétaires qui notent les quantités de cuivre produites », ceux qui le pèsent dans les 
entrepôts de la province « au nombre de quatorze » reçoivent par an 800 taels. 

Le secrétaire chargé de noter les quantités de cuivre achetées dans chacune des mines 
de Tsay-tse-chan, Jen-lao-chan, Tsien-tchou-tang, Je-kien-siun; les deux secrétaires 
affectés au même emploi dans chacune des mines de Tsin-long et Pe-iang-chan, les 
quatre de la mine de Kin-teha, reçoivent chacun par mois un tael; les quatre secrétaires 
de chacune des mines de Ta-chouy-keou et Tsien-chan, les trois secrétaires de Ta-fong- 
lin et de Mong-mi, les deux secrétaires de Sin-long, Long-pao, San-mou-tsin, le secré- 
taire de Len-chouy-keou, reçoivent chacun par mois 2 taels. 

Le Ko-tchang de Tsay-tse-tsin reçoit 2 taels par mois; les six Ko-tchang de Gi-tou, 
les quatre de Ning-tav, les deux de Hong-po, Ta-sin, ete., celui de Fong-houang-po et 
celui de Hong-che-ngay reçoivent un fael par mois. 

Les gardiens des bureaux de l'administration centrale au nombre de huit, les deux gar- 
diens des bureaux du Tong-tao, les deux des bureaux de Tong-tehouen fou, les huit de 
Tsin-long, les six attachés à chacune des mines de Kin-teha et de Pe-iang-chan, les quatre 
attachés à chacune des mines Hong-po et Ta-sin reçoivent chacun 1°9 ; les quatorze 
gardiens de la mine de Ta-chang-keou, les quinze de Mong-mi, les seize de Tsien-chan, 
les dix affectés à l’entrepôt de Siun-lien, les huit affectés aux magasins de Tong-kouan et 
à la mine de Ta-fong-lin ; les six de Cha-mou-tsin, les quatre attachés à chacune des 
mines de Sin-long et de Long-pao, les deux de la mine de Len-chouy-keou reçoivent 
2 taels par mois. Les vingt-deux satellites de Ning-tay, les vingt-quatre de Gi-tou, le satellite 
affecté à chacune des mines de Hong-che-ngay, Fong-houang-po, Ma-kay. reçoivent par 
mois chacun 1°.7. Les troissatellites de Mong-mi recoivent le mème salaire. Les vingt-cinq 
satellites affectés à Hia-kouan, Tchou-hiong et Yun-nan, un tael seulement. Les 
deux Siun-iou affectés aux mêmes lieux, 1'.5. Le Siun-iou affecté à chacune des mines de 
Jen-lao-chan et Tsien-tchou-tang, un tael; celui de la mine de Je-kien-siun, 1°.2; celui 
de la mine de Tsay-tse-chan, 0‘.7; les deux de Ta-fong-lin, ? faels; les deux de Kin- 
tcha, 11.9; les cinq fouwlien, « gardes élus par les habitants », de cette mine reçoivent par 
mois 0'.6 ; les six tou-lien de Gi-tou, les six de Tsin-long reçoivent le même salaire; les 
deux affectés à chacune des mines d'Hong-po et de Ta-sin reçoivent également 0.6. 

Le tsin-iou, garde de la mine de Ma-long, recoit par mois 1°.7; le chef des fourneaux 
de cette même mine, 3 faels; les deux #chang kong, « chefs des ouvriers », 1°.5. 

Les deux bateliers attachés à la mine de Ta-fong-lin ont 2 taels par mois. 

Les deux chefs de cuisin? de la mine de Ta-chouy-keou, celui de la mine de Tsien- 
chan, celui de la mine de Mong-mi recoivent 2 taels; ceux des mines Tsin-long, Ning- 
tay, Pe-iang-chan, un tael. 

Les dix portefaix attachés aux magasins de Tong-tehouen, celui des magasins de Tehou- 
hiong. les deux de Ta-kouan lien, près de Ta-ly fou, recoivent chacun 2 taels. 


DÉPENSES DU TRESOR PUBLIC. 241 


Le kia-lin ou « chef des mineurs » de chacune des mines de Fong-houang-po, Hong- 
che-ngay, et celui qui est attaché aux magasins de Siun-tien reçoivent chacun 3 taels: 
celui de la mine Tsay-tse-chan n’a qu'un tael. 

Les chefs des satellites des mines, les chou-siun du ministère Tsong-li reçoivent 
par an #46 taels ; pour diverses dépenses, pour l'éclairage, les fournitures de bureau, ils 
reçoivent par mois 10 taels; les mêmes dépenses dans les mines de Ta-chouy-keou et 
Mong-mi, et dans la mine de Tsien-chan, sont mensuellement de 8 taels ; à Sin-long et 
Long-pao, de 5 taels; à Gi-tou, 4 taels; à Kin-tcha, 3 taels; à Tsin-long, Hong-po, Ta- 
sin, 2'.5; à Pe-iang-chan, Tsay-tse-tsin, Ning-tay, Tsin-yang-lin, Ta-fong-lin, 1 tael; 
à Tsay-tse-chan, Je-kien-chan, Ma-long, Jen-lao-chan, Tsien-tehou-tang, Len-chouy- 
keou, Mong-mi, Ma-kay, 5 tsien; à Fong-houang-po, Hong-che-ngay, 0'.3; à Siun- 
tien, 0°.2; à Tong-tchouen par an, 159.36. Dans ce salaire sont comprises les dépenses 
des satellites. 

Le tou et le fou, « vice-roi et second vice-roi», reçoivent par mois, pour leur prétoire, 
chacun 15 taels; le tsong-li-ya-men, 30 taels. 

Pour les sacrifices, Ta-chouy-keou donne par an 38 taels ; Tsien-chan, 24; Sin-long et 
Long-pao, 16 taels chacun; Ta-fong-lin, 12; Gi-tou, 8 ; Ma-long, 0'.4. 

Pour la location des terrains, Yun-tchang fou paye par mois 0.5 ; chaque mine 
paye pour le transport de l'argent qu’elle recoit, par journée de marche et par mille 
taels, 0‘.134. 

La mine de Tang-tan entretient à Yun-nan 4 gardiens et 5 préposés à la vente des 
métaux, qui reçoivent par mois 2? taels:; le gardien du pont Kan reçoit 0°.5. Dans le 
second mois, on sacrifie deux fois aux montagnes, et l’on dépose 8 taels pour l'achat des 
pores et des moutons. Les soldats chargés de protéger les transports de l'argent destiné à 
la mine reçoivent comme gratification 2'.4. 

Le Ke-ko de Hong-hoa-vuen reçoit 3.2 par mois; les deux Tong-tchang résidant 
en cette localité reçoivent par mois 11.2; les six Ke-ko de Lou-lou reçoivent 1 tael par 
mois; les deux gardiens de cette mine, 1'.4; le tong-tchang de Ta-siue-chan, 1°.2. 
Chaque mine, en envoyant les métaux aux entrepôts, peut ajouter 5 livres par 100 livres 
sans augmentation dans le prix du transport. Les deux mines de Tang-tan et de Lou- 
lou payent par an 533'.703 pour l'entretien des satellites et des soldats. 


S3. — Surveillance et contrôle des opérations des mines. 


Il faudra mensuellement et au besoin journalièrement inspecter les comptes des scribes 
pour éviter tout abus et chercher constamment le meilleur moyen de tenir ces employés 
en éveil et de les exeiter à bien faire. Le minerai ne s’obuent qu'à force de travail, et les 
employés ont l'obligation de remplir toujours et conseiencieusement leur devoir. S'ils 
montrent de l’habileté et du zèle à remplir leur besogne, ils devront être récompensés, 


punis dans le cas contraire. C’est ainsi que le trésor publie s’enrichira et deviendra inépui- 
IL. 31 


242 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


sable. Nous ne savons comment, sans récompenses ou sans châtiments, on pourrait rete- 
nir les hommes dans le devoir. Aussi les sages ont-ils de tout temps proposé d'agir ainsi, et 
le Tong tchen' ne manque pas de remplir ce précepte. Nous allons done traiter mainte- 
nant des inspections. 

Les mines dans la province du Yun-nan ne sont point confiées à des mandarins spé- 
claux, mais bien aux préfets des villes, qui, ne pouvant en raison des distances les sur- 
veiller en personne, délèguent cette fonction à des hommes capables. Si de l’action de 
ceux-ci résulte soit une augmentation, soit une diminution notable dans le revenu de la 
mine, le fait devra être aussitôt signalé au gouvernement. 

Les directeurs des mines doivent pourvoir chaque mois à la quantité de caivre que la 
province est tenue de fournir et suppléer au deuxième mois à ce qui peut avoir manqué 
antérieurement. Si le déficit se renouvelle au mois suivant, on rappellera le délégué du 
mandarin pour en délibérer avec lui eton le remplacera sur les lieux. Si son successeur ob- 
lient une augmentation considérable dans la production de la mine, le fait doit être noté et 
signalé afin que l’on procède à une nouvelle nomination. Si, comme il est souvent arrivé 
dans la province de Tien, l’augmentation dépasse beaucoup la quantité exigée, 11 faudra le 
signaler exactement afin que l'impôt soit fixé en conséquence. Si la quantité de métal as- 
signée comme production de la mine vient à manquer par suite de la pauvreté du gise- 
ment, la chose sera portée par les directeurs de l'exploitation devant l'autorité supérieure 
qui décidera s'il v a lieu de diminuer l'impôt ou même de faire complétement cesser les tra- 
vaux. Mais si ce manque ne vient que de la négligence des directeurs, ceux-ci seront con- 
damnés à réparer le dommage. 

Quand les métaux exigés manquent complétement, les mandarins qui sont chargés 
de lexploitation seront condamnés à l'exil sur la frontière, de même que ceux qui, char- 
gés du transport des métaux, y apporteraient quelque retard. Là, ils seront chargés de 
veiller à ce que les barbares ne fassent pas irruption dans l'empire. S'il a manqué seule- 
ment la huitième partie des métaux exigés, le mandarin, chargé du transport, veillera 
aux travaux de la mine pendant un an avee le directeur. Si sa présence ne change en rien 
cet élat de choses, le directeur et lui seront envoyés en exil. 

Avant que le cuivre soit transporté hors de la province, il doit être soumis à l’exa- 
men du Tao et du Fou, dont la mission spéciale est de veiller à ee qu'il soit suffisamment 
épuré. Ils s’assureront qu'il est de bonne qualité, disposé en la forme ordinaire, et qu'il 
ne contient pas des parties moins pures, mélangées au reste par petits fragments. On 
inserira avec soin le poids et le nombre des morceaux contenus dans chaque Mou tong ou 
«caisse en bois», et le nom de la mine dont elle provient, afin que si une fraude est cons- 
latée, on puisse en retrouver aussitôt l’auteur. Ces indications seront consignées sur 
un registre et présentées à chaque mandarin inspecteur. 

On notera, en outre, le nombre et le poids des tablettes ou briques de cuivre et le nom 
des Lou-fou qui les auront produites, afin que si la qualité en est inférieure à ce qui 
était stipulé on puisse exiger une réparation. Si, par suite de la négligence des inspec- 


! Mandarin qui a la direction générale de toutes les mines. 


DÉPENSES DU TRÉSOR PUBLIC. 243 


leurs, on mélange au cuivre des matières plus lourdes, ceux-ci et les auteurs de la fraude 
seront mis en jugement. 


A 


S 4. — Tarif des transports. 


Le transport des métaux par terre dans l'intérieur de la province n’entraine que des 
frais insignifiants à côté de ceux qu'il faut faire pour les transporter ensuite par eau jusqu'à 
Pékin. Dans le premier cas, en effet, les habitants convoqués pour cette corvée ne doivent 
recevoir pour tout salaire que la nourriture. Mais à partir de la province de Kien et de 
celle de Chou, il est d'usage d'employer la voie fluviale, ear 11 y a là des rivières navi- 
sables jusqu’au Lou Kiang*. Aussi un grand nombre de gens de ces deux provinces 
gagnent-ils leur vie comme bateliers, et il est aisé de comprendre par là avec quelle diffi- 
culté les pauvres arrivent à gagner de l'argent. 

Il doit être envoyé, chaque année, à Pékin 6,331,440 livres de euivre. Cette quantité 
est fournie par les mines récemment ouvertes, surtout celles qui sont plus particulière- 
ment désignées à Pékin. Les directeurs des mines ont l'obligation de faire transporter le 
minerai des grands magasins appelés Tien jusqu'aux foyers où il est traité. Les directeurs 
de ceux-ci doivent ensuite faire transporter le métaljusqu'à Tong teheou. A partir de 
cette ville, la charge du transport soit vers la métropole de la province, soit vers d’autres 
lieux se répartit entre divers mandarins. 

Nous allons résumer dans le tableau suivant le prix du transport de 100 livres de 
cuivre des diverses mines de la province aux entrepôts qui leur sont assignés. Les mines 
marquées d’un astérisque sont récemment ouvertes et dépendent de celle qui les précède 
immédiatement. Les distances sont indiquées en nombre de stations ou journées de 
marche. 


1 Anciens noms du Kouy-tcheou et du Se-tchouen. Le royaume de Chou est célèbre, comme on sait, dans 


l’histoire chinoise. 
? L'un des noms que porte le fleuve Bleu depuis Lou tcheou jusque vers Tehong-kin fou. 


TABLEAU : 


244 


TIEN NAN 


KOUANG TCHANG. 


JURIDICTION 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 


Li-kiang fou. . . . 


Kiu-tsing fou. . . .. 
Tong-tchouen fou. . 


Ta-kouan tong-tche. 


Lou-tien tong-tche. .| 
Tchao-tong fou. . . 

Yun-chang hien. . .| 
Tchen-hiong tcheou. 
Lou-nan tcheou. . . . 


Yun-long tcheou. . . 


Yun-pe tong-tche. . . 


Y-men hien.. ... 
Mong-tse hien. . . 


NOMS DES MINES 


Chouan-long. 
Tang-tan. 
* Kieou-long-tsin. 
|“ Tsin-pao ct Kouan-in chan. 
* Ta-kouan. 
* Tcha-ho. 
Lou-lou. 
© To-pao. 
* Siao-mi chan. 
Ta-chouy-keou. 
* Lien-sin. 
| * Tsin-iuen. 
Mong-lo. 
* Pou-eul. 
Ta-fong-lin. 
 Ta-tsey. 
Tse-ngieou-po. 
| Se-tse-ouy. 
Jen-lao-chan. 
Tsien-tchou-tang. 
Lo-ma. 
Kin-cha et Mey-tse-to. 
Siao-ngay-fong. 
Tchang-fa-po. 
Fong-houang-po. 
Hong-che-ngay. 
Hong-po et Ta-sin. 
Fa-kou. 
Ning-tay et Ta-kong. 
* Ning-tay et Le canal qui con- 
duit à la mine de Kou-yn. 

* Tsiuen-ma-lin. 

* Lo-han chan. 
Te-pao-pin. 
Houy-long. 

Hiang-chou-po. 

Lao-tong-pin. 


| 
| 


NOMS DES ENTREPOTS 


Siun tien. 
Tong tien. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 


Idem. 


Ta-chouy-keou. 


Idem. 
Tong tien. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Lou tien. 
Idem. 
Tchao tien. 
Lou tien. 
Idem. 


Naieou-kay tien !. 


Siun tien. 
Idem. 
Ouey tien. 
Idem. 
Kouan tien. 
Idem. 


Idem. 
Idem. 
Idem. 
Idem. 
Siun tien. 


Idem. 


DISTANCES 


9,5 (var eau) 
{A (ü) 


» 
10,5 
16,5 
14,5 
21,5 


PRIX DU TRANSPORT 


lael 

0,2000 
0,2500 
0,1870 
0,1250 
0,6875 
0,6250 
0,4000 
0,6875 
0,6250 
0,4000 
0,8125 
1,4375 
0,4500 
0,5625 
0,7500 
0,3750 
0,1250 
1,2920 
0,6180 
1,0990 
0,2580 
0,1645 
0,6590 
0,3000 
0,6460 
0,7750 
1,1870 
1,6790 
1,5360 
0,3000 


0,9000 
0,7000 
1,3560 
1,6500 
1,8730 
SON | 


1 De là le minerai est envoyé à Lo-sin, éloigné de 4 stations de Ngieou-kay tien, au prix de 0t.516 les cent livres. 


Le gouverneur du Si-fao transmettra à Siun tien tout le cuivre déposé à Kouan tien 
moyennant 2°.1318 les 100 livres. La distance à franchir est de seize stations et demie. 
Le gouverneur du Tong-tao recevra tout ce qui lui sera ainsi envoyé par son collègue, 
chargera sur des chars tout le cuivre déposé à Siun tien et à Ouey tien et l’expédiera à 
Ouey-ning tcheou, ville distante de‘quinze stations, moyennant 0°.933 les 100 livres 
Le préfet de Ouey-ning enverra ce cuivre à Tchen-hiong tcheou, ville distante de cinq 
stations, au prix de 0°.645 les 100 livres. Le préfet de cette dernière ville devra enfin le 
faire porter à Lou tcheou. La distance est de treize stations, et Le transport sera fait par eau 


moyennant 0.956 Les 100 livres. 


Le préfet de Tong 


-tchouen enverra à Tchao-tong, 


située à cinq stations el demie, le 


DÉPENSES DU TRÉSOR PUBLIC. 245 


cuivre déposé dans le Tong tien, « magasin oriental. » Le prix du transport est de 0*.709. 
Le préfet de Tchao-tong transmet ce cuivre et celui qu'il reçoit de la mine Lo-ma, par 
Takouan à Teou-cha kouan ou aujourd’hui à Yen-tsin tou. La distance est de six stations, 
et le prix du transport de 0'.774 les 100 livres. 

Le mandarin de Yun-chang fait transporter le cuivre qu'il reçoit de Siao-ngay-fang à 
Houang-tsao-pin, située à trois stations et demie, pour 0'.451 les 100 livres. 

Le mandarin de Ta-kouan joint au cuivre qu’il recoit de Tchao-tong celui des mines de 
Jen-lao-chan et Tsien-tchou-tang. Le tout va s'emmagasiner à Ven-tsin tou. Le prix du 
transport par eau de ce dernier point à Lou-tcheou est de 0'.858. 

C’est à Teou-cha-kouan que l’on prépare aujourd’hui les barques pour le transport du 
cuivre. On paye O'.018 pour le transport de 100 livres de métal du magasin à la barque. 
Le transport du même poids entre les rapides Long-kong-to et Tchou-kiuen-keou coûte 
0'.02; il faut ajouter encore 0'.0f pour le transport jusqu’à Yen-tsin-tou. C’est à ce der- 
nier point qu'on pèse et qu'on lie les gueuses de cuivre. Ce travail est fait à raison de 0'.01 
par 100 livres. L’embarquement coûte 0'.03 pour le même poids. A Tchang-kia-o, on 
paye, en outre, 0'.03 pour le passage du rapide Kieou-long, à l'époque des eaux basses, et 
0'.03 pour le réembarquement du cuivre. La dépense totale pour 100 livres sera done 
entre Yen-tsin-tou et Techang-kia-o 0.046. De Kieou-long tan, où les «nouvelles» barques 
viennent charger, à So-ien-tsin tou, le prix est de 0'.335; on y ajoute une distribution de 
viande pour les bateliers, distribution que l’on appelle Chen fou. 

Si les barques louées pour le transport entre Yen-tsin tou et Kieou-long tan ne sont 
que des barques de passagers ou si elles ne sont destinées qu’au transport du riz et du sel, 
on les payera à raison de 0.28, en ajoutant toujours le Chen-fou. Si l’on est obligé de 
louer à Siu-tcheou fou, à Nan-ky ou à Kiang-ngan des barques pour le transport du 
cuivre entre Tehiang-kia-o et Lou tcheou, le prix par 100 livres transportées sera de 
0.22; on ne payerait que 0°.2 si les barques étaient des barques de riz, de sel ou de pas- 
sagers. 

Comme nous l'avons déjà dit, le mandarin de Yun-chang fait porter le cuivre qu'il 
reçoit à Houang-tsao-pin. De ce point (vulgairement appelé Pin tien) à Lou tien, le prix du 
transport par eau pour 100 livres est de 0‘.9242. 

( Ce prix se décompose ainsi qu'il suit: du rapide Ta-ou-ky au rapide O-kiuen-ngav 
où l’on trouve des barques disposées pour le transport du cuivre, deux stations : le port 
de 100 livres coute 0'.144; on distribue, en outre, 1 chen et 7 ho de riz. Du rapide 
O-kiuen-ngay au rapide Ta-han-tsao, deux stations : le prix estle même, moins la dis- 
tribution de riz. A cette dernière station, on loue des barques qui iront jusqu'à Lou 
tcheou, au prix de 0'.6 ; on y ajoutera trois chen de riz. S'il fallait un transbordement au 
rapide Sin-kay, on le payerait à raison de 0'.1; mais le riz serait supprimé.) 

Il y a annuellement quatre principaux envois de cuivre, et à chacun d’eux le préfet de 
Lou tcheou doit recevoir 1,104,450 livres de cuivre. Le tao-tay de Yun-ning, dans la pro- 
vince du Se-tchouen, payera sur le trésor public pour les frais de transport de Lou tcheou 
à Han-keou, 3,063".6 auquel la coutume veut qu'il ajoute 273°.6 pour les gratifications 


240 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


et les vivres entre Tchong-kin et Han-keou. Le préfet de Kouy-tcheou, dans la province du 
Hou-pe, avancera pour le passage du célèbre rapide Sin 182°.301. Le Fan-kou, «coadjuteur 
du trésorier », de la province du Hou-pe devra ensuite payer pour le transport de Han-keou 
à Y-tchen 2,688'.5 ; le Fan-kou de Kiang-ning devra payer 4,051°.5 pour le transport de 
Y-tchen jusqu'à Tong tcheou; 1l sera enfin ajouté par le tao de Tien-tsin 500 taels; le 
total de ces sommes est 10,679°.501 ; il y a encore pour diverses dépenses 1,617 taels; 
pour les vivres, 1,226".2485. 

Il y a, en outre, deux envois supplémentaires faits par le Yun-nan, de 940,991 livres de 
cuivre chacun, au préfet de Lou tcheou. Le tao-tay de Yun-ning payera sur le Trésor publie 
pour les frais de transport de chacun de ces envois entre Lou tcheou et Han-keou 
261".187, auxquels il ajoute pour les gratifications entre Tchong-kin et Han-keou 234.4. 
Le mandarin de Kouy-tcheou, dans la province du Hou-pe, versera pour le passage du 
Sin tan 155.378 ; il ajoutera pour les frais de transport par terre « aux passages des 
rapides » 500 taels. Le tao-tay de la ville de Tien-tsin, dans la province de Tche-ly, payera 
100 taels. En tout 3,899". 965. Pour diverses dépenses, il faut ajouter encore 1,416°.25. II 
est alloué pour les dépenses des mandarins chargés d'accompagner les barques 817°.499. 

Voici maintenant les prix du transport de 100 livres de cuivre au Kiou de la capitale 


de la province pour les mines qui doivent acquitter là leur redevance : 


NOMS DES MINES DISTANCES |PRIX DU TRANSPORT NOMS DES MINES DISTANCES | PRIX DU TRANSPORT 
ASIN lon EEE 6 0,377 Ra KOUSET EE 6 0,150 
HÉHEAOE 60 6 5 à 5 0,500 Hiang-chou-po.. . 10,5 1,050 
ame eee 3,9 0,350 Gi-tou et Ouan-pao 6 0,600 
Lou-kouang-tong. 6 0,600 Ma-long. . . . . .| 11 1,100 
Sieou-tchouan. . . 10 1,000 Tsay-tse-tsin. . . . 13 1,300 
Hong-po et Ta-sin. n 0,400 


V 


DES TRANSPORTS DES MÉTAUX A PÉKIN. 


Les montagnes de la province de Tien sont habitées par de nombreuses tribus barbares 
qui sont souvent un obstacle à la libre circulation des marchands. Les montagnes qui con- 
tiennent les métaux dans leurs profondeurs ne sauraient livrer passage aux chars et aux 
chevaux, et les hommes doivent transporter eux-mêmes sur leurs épaules et avec les plus 
grandes fatigues les produits de l’exploitation. S'ils se blessent, aucun médecin ne se 
trouve auprès d'eux pour les soigner. Il serait done vivement à désirer que cet état de 
choses, qui dure depuis plus de cent ans, vint à changer et que les routes pussent permettre 
aux chars et aux chevaux de faire les transports. Alors, comme l’eau qui descendavee impé- 
tuosité du sommet d’une montagne, le trésor public verrait ses ricl esses et ses revenus 
s’accroitre rapidement. 


Nous allons parler maintenant des distances à parcourir et des itinéraires à suivre pour 
le transport des métaux. 


S 1%, — Distancesset téinérarres. 


Toutes les mines du Si-tao transmettent le cuivre destiné à Pékin à Siun tien. 
La mine de Ning-tay est à 730 li de l’entrepôt de Ta-ly, qui se nomme Kouan tien. 
Cette distance se décompose ainsi qu'il suit': de la mine à Lao-ngieou kay, 50 hi; de ce 


- ! Pour que ces itinéraires, dans lesquels j'ai puisé d'excellents renseignements géographiques et qui peu- 
vent être fort utiles aux voyageurs européens futurs, paraissent moins arides, je rappelle ici le sens des mots 


248 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


dernier point à O-mang kay, 60; de là à Chun-te, 70; de Chun-te à Lao-in po, 55 ; de 
Lao-in po à Vuen-iang tang, 60; de là à la forteresse des Mahométans (territoire de 
Chun-ning hien), 55; de cette forteresse au château d’O-mey, 70 ; d'O-mey à Teha-lou 
(territoire de Yun-pin hien), 60; de Teha-lou au fort de Ly-mi, 55; de Ly-mi à Kiao- 
teou, 60 li; de Kiao-teou à Che-pin tsen (territoire de Mong-hoa tinh), 50 ; de Che-pin 
à Ta-ly fou, 55 (territoire de Tay-ho hien); de Ta-ly à Kouan tien « l’entrepôt » (ter- 
riloire de Tchao tcheou), 30 li. 

La mine de Ta-kong est à 635 li du même entrepôt; de la mine à Pe-iang, il v a 
50 li; de Pe-iang à Se-tsin, 40; de Se-tsin à Ki-tsen, 45; de Ki-tsen à Tang-ten (terri- 
toire de Yun-long tcheou), 40 ; de Tang-ten à Ko-lang (territoire de Yun-pin hien), 45 ; de 
Ko-lang à Yun-long tcheou, 40 ; de Yun-long à Kouan-pin, 60; de Kouan-pin à Pey-v, 50; 
de Pey-y à Kiang-pang (territoire de Yun-long tcheou), 60 ; de Kiang-pang à Fong-vu 
(territoire de Lang-kiong hien), 50 ; de Fong-vu à Cha-pin (territoire de Teng-tchouen 
tcheou), 55 ; de Cha-pin à Ta-ly fou, 70 ; de cette dernière ville à l'entrepôt, 30 li. 

La mine de Te-pao-pin est à 690 li de l’entrepôt; de la mine à Pin-ho, il y a 55 li: 
de Pin-ho à He-ou, 60; de He-ou à Man-kouan sen, 65 ; de Man-kouan à Tchen-hay, 60: 
de Tchen-hay à Yun-pe tinh, 60; de Yun-pe à Tsin-chouy-v, 70; de Tsin-chouvy-v à 
Kin-kiang (territoire de Vun-pe), 70; de Kin-kiang à Pin-te tsen, 75; de Pin-te à Cha- 
pin (territoire de Teng-tchouen), 75; de Cha-pin à l’entrepôt, comme ci-dessus. 

La mine d'Houy-long est à 985 li de l’entrepôt ; de la mine à Yang-tchang, ilvy à 
45 li; de Yang-tchang à Mou-ki-pa, autant; de Mou-ki-pa à Fe-chouy-tan, 55; de Fe- 
chouy-tan à Yang-chan, 50; de Yang-chan à Pey-tse-keou, 50 ; de Pey-tse-keou à Tong- 
tien, 50; de Tong-tien à Lu-tsin, 70; de Lu-tsin à Hiang-to, 60 ; de Hiang-to à Chaso, 
55; de Cha-tso à Mong-kou, 55 ; de Mong-kou à Li-kiang fou, 50; de Li-kiang à Ho-kin 
tcheou, 80; de Ho-kin à San-tchong-pe (territoire de Ho-kin tcheou), 75; de San- 
tchong-pe à San-in (territoire de Lang-kiong hien), 55; de San-in à Cha-pin, 90 ; de 
Cha-pin à l’entrepôt, comme ci-dessus. 

Kouan tien est situé à 1,180 Hi de Siun-tien ; de Kouan tien à Tchao tcheou, il v 
a 30 li; de Techao tcheou à Hong-ngay (territoire de Tehao teheou), 60 ; de là à Yun-nan-v 
(territoire de Yun-nan-hien), 95 ; de là à Pou-pong (territoire de Yao-tchou), 70 ; 
de Pou-pong à Cha-kiao (territoire de Tehen-nan tcheou), 90 ; de Cha-kiao à Lu-ho, 60: 
de Lu-ho à Tchou-hiong fou, 60; de Tchou-hiong à Kouang-tong hien, 70 ; de Kouang- 
tong à Che-tse (territoire de Kouang-tong hien), 70; de Che-tse à Lo-fong hien, 90: 
de Lo-fong à Lao-ia kouan (territoire de Lo-fong hien), 70 ; de La o-ia à Ngan-ning 


qui terminent le plus fréquemment les noms de dieux cités, et qui donnent une idée de leur importance 
ou de la physionomie du pays: kay indique un marché, tang, che ou hay le voisinage d’un étang ou d’un lac; 
tsin signifie puits ou lieu d’extraction d'eaux salines, éou un port, en un entrepôl; po, qui veut dire pente, 
versant, indique que le village est construit à un col; keou, qu'il se trouve à l'embouchure d’une rivière ; ‘an, 
sur les bords d’une rivière auprès d’un rapide ; ésen indique un poste fortifié, kouan une forteresse, kiao un 
pont ou lieu de passage sur une rivière, hou le point d'établissement d'un bac, etc., etc. Il faut surtout 
donner le sens ci-dessus à celles de ces expressions qui ne sont pas réunies par un trait d'union au reste du 


nom de la localité. 


TRANSPORT DES MÉTAUX 249 


tcheou, 95; de Nogan-ning à la capitale de la province, 75; de là à Pan-kiao (territoire 
de Kouen-ming hien”), 40 ; de Pan-kiao à Yang-lin (territoire de Song-ming tcheou), 60 ; 
de Yang-lin à Y-long (territoire de Siun tien), 75 ; de Y-long à l’entrepôt Siun, 70. 

Ce dernier entrepôt est à 15 stations ou 15 journées de marche de l’entrepôt d'Ouei- 
ning. De la porte Est de la ville au fleuve Mien-eul par Ou-long-tan jusqu’à Fa-ta-teou, 
une station ; de ce dernier point par Leang-chouy-tsin, Hay-tong-tsin, et Me-ti jusqu’à Pa- 
te, une seconde ; de Pa-te par Pe-tou-ke-cho à Te-ouy, une troisième; de Te-ouy par 
Hoang-long-tong et Siao-fa-tou, jusqu'à Tehe-tchang, une quatrième ; de Tche-tchang 
par Ta-po chan, Tsi-tao-ouan-touy chan, Ki-chouy tang, « étang d’eau potable », et Fey- 
song-lin à Kay-v, une cinquième; de Kay-y par O-ouang po à San-chouy tang, une sixième; 
de San-chouy tang par Kiou-tsong po et Lieou-chou tsen à Hoang-tou-tchong, une sep- 
tième ; de là par Kan-hay-tse, Siao-ouan ho et Tehang-lin-tse à Siuen-ouei tcheou, une hui- 
tième ; on sort de Siuen-ouei par la porte de l’Est et par Ouang-kia-hay-tse, Mo-tsouy po, 
Tsong-fong-lin, Liang-hoang-tchong, Ta-pin-ty; on arrive à Lay-pin-pou, neuvième sta- 
tion; de là par Ngieou-gi tang, Tchang-po et Tong-chang-pou à Kiaou-pao-tse, dixième 
station ; de Kiaou- pao-tse par Mou-koua-tsin, Tsi-litien et Lao-va-lin à Teheou-fou kiao, 
onzième station ; de Tcheou-fou kiao par Mou-koua-siao, San-tchouan-ouan, Tsiun-kia- 
che, Chouy-tang-pou, Louan-che-ouan à Ko-tou kiao, douzième. (I y a la un pont en bois 
jeté sur le Ko- tou ho.) De là par Yang-kiao-ouan à Tsin-teou-pou, treizième station ; de 
Tsin-teou-pou par Hong-che-ngay à Fev-lay-che, quatorzième; de Fey-lay-che par Kang- 
hia hay, Che-kiao-ti et Po-ky-ouan, on arrive enfin à Ouei-ning tcheou. Il y a là une route 
pavée sur laquelle peuvent circuler les chars à bœufs. Si cette route n’était pas empierrée, 
la cireulation y serait presque impossible pour les chars, surtout après les pluies. Aussi 


doit-on la refaire tous les einq ou six ans. La dix-neuvième année de Tao-kouang, 1l à 
été dépensé pour réparer celte route, 2,100 taels. 


Du magasin d'Ouei-ning à Tchen-hiong tcheou, il y a cinq stations : la première, à 
ù () D  LY ? 
partir d'Ouei-ning, est Kao-gien-tsao ; la seconde, O-ki-tche; la troisième, Pou-sa tang ; 
la quatrième, Tao-iuen ; la cinquième, Tchen-hiong tcheou. De ce point à Lo-sin tou 

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lieu d'embarquement, il y a également cinq stations. On arrive à la première, Kou-mong- 
po par Pan-kiao et Choua-pou-lin; de là, par Lou-tsin-tang, He-gi-kong et Tehou-tong 
au fleuve Yu-gi, seconde station ; de Yu-gi ho par Hoang-tou-po et Gen-ko-tsoui à Hoa- 
che-lin, troisième station; de Hoa-che-lin par Lien-san po et San-tcha-lou à Tehong- 
tsen, quatrième station; de là on arrive à Lo-sin tou par Lo-hav. 

De Lo-sin tou aux magasins de Lou tcheou, la route se fait par eau en huit étapes : 
(e] ? 
le rapide Mou est la première, le rapide Tsan la seconde, Nan-kouang” la troisième. Les 
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cinq autres stations sont entre Nan-kouang et Lou tcheou. Pour que le cuivre soit trans- 
porté avec plus de sécurité, on travaille chaque année à élargir les parties étroites et torren- 


1 Nom de l'arrondissement dont Yun-nan fou est le chef-lieu. 
2? Aujourd'hui Khing-fou hien, ville du Se-tchouen, située sur le Yun-nan ho, affluent du Fleuve Bleu. Le 
nom de Nan-kouang est celui que portait celte ville sous la dynastie des Han, il y a plus de dix-huit siècles. 


Cette antiquité est la principale raison qui le fait préférer par l’auteur au nom moderne. 
II. 92 


250 TIEN NAN KOUANG TOCHANCG. 


tueuses de la rivière. La dixième année de Kien-long, le passage dans les rapides suivants, 
entre Lo-sin tou et Nan-kouang, fut rendu facile *.... Ces rapides proviennent des pierres 
et des sables qu’entrainent les grandes pluies dans le lit du fleuve; aussi doivent-ils être 
examinés chaque année, et la province consacre à leur amélioration une somme de 
300 taels. 

Des magasins de Tong-tchouen à ceux de Tehao-tong, il y a cinq stations et demie : 
Hong-che-ngay est la première. Tien-chen tang est à une demi-journée de là; de cet étang 
à Y-iche-siun, il y a une journée entière; Kiang-ti, Ta-chouy tang et Tchao-tong sont les 
trois dernières étapes. 

La mine de Tang-tan est à deux journées de Tong-tehouen ; l'étape intermédiaire, Siao- 
kiang, est à 85 li de la mine et à 70 de Tong-tchouen. 

De la mine de Lou-lou à cette dernière ville, il ya trois journées et demie; de la mine à 
Hoang-tsao-pin, on compte 35 li; de là à Siao-tien-pa, 55; de Siao-tien-pa à Tsien- 
chan tang, 60; ce dernier point est à 65 li de Tong-tchouen. 

La mine de Ta-choui-keou est à trois journées et demie de cette ville; de la mine à 
Hoang-tsao-pin, on compte 35 li; la route se continue ensuite comme ci-dessus. 

De Meou-lou à Tong-tchouen, il y a sept journées et demie ; de cette mine à Tao-chou- 
pin, on compte 60 li; de Tao-chou-pin à Chou-kie, 60; de Chou-kie à Miao-tse tsen, 50 ; de 
Miao-tse à Ta-chouy-keou, 50 ; on connaît la routede cette dernière ville à Tong-tchouen. 

De Ta-fong-lin à Tong-tchouen, il y a six étapes : de la mine à Chou-kie tou, il y a 
60 li; de ce point, la route se continue par le Kin-cha kiang jusqu'à Leang-chouy-tsin, 
situé à65 li; de là à lao-tien-tse, 60 li ; de Tao-tien-tse à Lao-isen-tse, 60 ; de là à Tsien- 
chan tang, où l’on retrouve la route déjà indiquée pour la mine Lou-lou, 65 li. 

Tse-ngieou-po est à deux journées et demie de Tong-tchouen ; de cette mine à Tse- 
tou-tsin, il y a 30 li; ce dernier point est à 60 li de Tsien-chan tang. 

Se-tse-ouy est à dix étapes de Tong-tchouen. La première est Ma-lou tang (territoire de 
Lo-kiuen hien) à 60 li de la mine ; la seconde, Sa-sa tchang, à 55 li au delà; la troisième 
Fong-mao-lin, à 55 li; la quatrième, Fa-o à 70 ; la cinquième, Houey-ly tsen, à 60; la 
sixième, Siao-tong tchang, à 50; la septième, Ki-tchao-ka (territoire du Se-tchouen et de 
la ville d'Houey-ly tcheou), à 60 ; la huitième, Mong-kou (territoire d'Houey-y hien), 
à 65 ; la neuvième, San-tao-keou, à 60; ce dernier village est à 60 li de Tong-tchouen. 

De Tehao-tong à Teou-cha kouan, il y a six journées : la première station est Ou 
tche-pou ; la seconde, Y-ouan-chouy; la troisième, Hiong-chouy-siun ; la quatrième, 
Kien-hay-tse ; la cinquième et dernière avant Teou-cha Kouan est Tsi-ly-pou. 

De Teou-cha Kouan (l'embarquement se faisant à Yen-tsin-tou, l’entrepôt se nomme 
aujourd'hui Tsin tien) à Lou teheou, il y a par eau 1,405 li (la route par eau abrége le 
voyage d’un jour). De Teou-cha Kouan à Yen-tsin-tou on franchit les rapides appelés Long- 
hong-to, Pan et Tchou-kiuen-keou. De Yen-tsin-tou à Siu-tcheou fou, on rencontre 
ceux de Hoang-ko, Ta-pa-to, Tsin-tsay, Sin, Hoa-tang, Pe-long, Kieou-long, Tchang- 


1 Suit une liste de 57 rapides, dont les noms seraient peu intéressants à transcrire. 


TRANSPORT DES MÉTAUNX. 251 


kia et Kao. De Siu-tcheou fou on se rend par Mou-teou-hao à Kiang-ngan hien ; de là à Na- 
| ky hien, et enfin à Lou tcheou. Au-dessous de Yen-tsin-tou, « port de Lou tcheou », il y a 
encore les rapides de Tin-chan-tsy, Hoang-ko-tsao, Men-lan, Tou-t1, Ming, Mey-tse-stuen 
et Long-men-che. Il faut chaque année dégager ces rapides de l’accumulation de pierres 
et de sable produite par les pluies. 300 taels sont consacrés par la province à ce travail. 

De Hoang-{sao-pin à Lou tcheou il y a huit journées de marche par eau. La première 
étape est Ta-ou-ky distante de 137 Hi:il y a 16 rapides à franchir dans l'intervalle; la seconde 
est Ko-kiuen-ngay, à 139 li : ily a 21 rapides; la troisième est Han-tsao, la quatrième Sin- 
kaytan ; de ce point à Lou tcheouil y a cinq étapes, pendant lesquelles on franchit sur le Kin— 
cha kiang 50 rapides. 1,000 taels sontaffectés annuellement au déblaiement de ces rapides. 

La mine de Lo-ma est à 60 li de Lou-tien, ville qui est elle-même à 60 Ni de Tchao-tong. 

La mine de Chouan-long est à 50 li de Hong-ko-in, qui est à 50 li de Siun tien. 

La mine de Mey-tse-to sur le Kin-cha kiang est par le fleuve à 250 Hi de Ngan-pien ; 
de ce dernier point à Siu-tcheou-fou, il y a 100 Li; de Siu-tcheou à Nan-ki, 11 y en a 190; 
enfin Nan-ki est à 150 li de Lou tcheou. 

De la mine de Jen-lao-chan à Lou teheou, il v a par la route fluviale neuf étapes; de la 
mine à Lo-chouy-tsen il y a 80 li; de là à He-tao-pa il y a 90 li; de He-tao-pa à Miao— 
keou, 40 ; de Miao-keou à Lou tcheou, il y a par eau 1,045 Ii. 

De Tsien-tchou-lang à Lou tcheou il y a onze stations ; la première est Choua-pou à 
75 li; la seconde To-che-tsen, à la même distance; la troisième est Teou-cha kouan à 85 li. 
De ce dernier point à Lou tcheou il y a 1,462 li. 

De Tehang-fa-po à Lou tcheou il y a quinze stations; la première est Leang-leou- 
keou, à 45 li; la seconde est Eul-ten-po, à 50 li; la troisième, Ngieou-kay-tien, à 45 li; la 
quatrième, Hoang-chouy, à 70 li; la cinquième, Hoa-kia-pa, à 80 li; la sixième, Che- 
tsao-kong, à 70 li; la septième, Lo-sin-tou, à 50 li. On connait les huit étapes navales de 
ce point à Lou tcheou. 

De Siao-ngay-fang à Lou tcheou il y a huit jours de route. La première étape est Si- 
cha-ki, à 40 li; la seconde, Kiang-keou, à 70; la troisième, Ta-han-tsao, à 140 ; de ce 
dernier point à Lou tcheou il y a par eau 979 li. 

De Lao-tong-pin à Siun tien, la route passe d’abord à Kiey-pay, situé à 50 li de la 
mine, puis à Ta-pin-tse, à 60 li de là; à Lao-lin-tsin (territoire d’un poste frontière qui re- 
lève de Kien-chouy hien‘), à 55 li, à Fong-tchouen-li (territoire de Mong-tse hien), à 60 Hi; 
à Kao-ou-ka (territoire du Tou-pa-tsong), à 55 li; à Hoa-kou-pe, à 60 Hi; à Ye-tou-ti, à 
60 li; à Ko-kieou-tchang (territoire de Mong-tse hien), à 55 li; à Mong-tse hien, à 60 li; 
à Ta-ten, à 30 li; à Ki-kay, à 60 li; à Pan-tse-hoa (territoire de Kien-chouy hien), à 70 li: 
à Sin-fan-y, à 70 li; à Kouan-y, à 80 li; à Tong-hay hien, à 60 li; à Kiang-tchouen hien, 
à 70 li; à Tsin-ning tcheou, à 80 li; à Tchen-kong hien, à 50 li; à Pan-kiao (territoire de 
Kouen-ming hien), à 55 Li; à Vang-lin, à 60 li; à Y-long, à 70 hi; Siun tien est à 50 lide 
ce dernier point. 


1 Nom de l'arrondissement dont la ville de Lin-ngan fou est le chef lieu. 


259 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


Pour se rendre de Hiang-chou-po à ce même entrepôt, on passe à Fa-piao, situé à 90: 
li de la mine; à Yu-kien, à 30 hi; à To-tien, à 60 li ; à Nan-ngan tcheou, à 70 li; à Tchou- 
hiong fou, à la même distance ; on rejoint là la route déjà indiquée entre Kouan-tien et 
Siun fien. 

De Fong-houang-po à Siun lien, on passe par O-iuo-pou, situé à 50 Ji de la mine, puis 
à Lou-leang tcheou, à la même distance; à Tao-tchang-pou, à 45 li; à Ma-long tcheou, à 
43 li; cette dernière ville est à 45 li de Siun tien. 

De Hong-che-ngay à Siun tien, les étapes sont Ta-me-ti, à 60 li; O-iuo-pou, à 50 ; 
les autres comme ci-dessus. 

De Hong-po et Ta-sin à Siun tien, les étapes sont : Lou-nan tcheou, à 50 li; Kou- 
tchen, à 70; Y-che hien, à 65; Y-long, à 60; Siun tien, à 50. 

De Fa-kou à Ouei tien, les étapes sont : Sin-tsen, à 50 Li; Tse-tsin, à 55; Tien-cha, 
à 50; Ouang-kia-tchouang, à 50 ; Ma-long teheou, à 47; He-kiao, à 60; Tsen-hoa-pou, 
à 55; Yun-ngan-pou, à 70; Che-ia-keou, à 90; Ko-tou, à 95 ; Tsin-teou-pou , à 40; 
Fey-lay-che, à 45; enfin, Ouei-ning tcheou, à 40. 

Voici enfin l'itinéraire de Lou tcheou à Pékin : de Lou teheou à Ho-kiang hien, il y a 
630 li par le fleuve. On a à franchir le rapide Che-pi-tse. De Ho-kiang à Kiang-kin hien, on 
compte 360 li ; il y a deux rapides. De Kiang-kin à Pa hien, 240 li; il y a dix rapides. De 
Pa hien à Tchang-tcheou hien, 180 li. De Tehang-tcheou à Fou tcheou, 220 li; deux ra- 
pides. De Fou teheou à Fong-tou hien par le rapide Tsang-pey-leang, 90 li. De Fong- 
tou à Tchoung tcheou, 120 li ; deux rapides. De Tehoung tcheou, par le rapide Ta-hou- 
ang, à Ouan hien, 120 li. De Ouan hien à Yun-yang hien, 120 Li; cinq rapides. De Yun- 
vang à Fong-tsie hien", 130 li; einq rapides. De Fong-tsie à Ou-chan hien, 30 li; huit 
rapides. De Ou-chan à Pa-tong hien dans la province du Hou-pe, 150 li; sept rapides. 
De Pa-tong à Koue tcheou, 90 li; trente rapides dans l'intervalle, « parmi lesquels le 
fameux rapide Sin. » De Koue tcheou à Tong-fou hien *, 90 li; treize rapides. De Tong- 
fou à Y-tchen hien, 90 li. De Y-tchen à Tche-kiang hien, 90; trois rapides. De Tche- 
kiang par le rapide Tsay-li-keou à Song-tche hien, 90 Hi. De Song-tche à Kiang-lin hien, 
120 li; quatre rapides. De Kiang-lin à Kong-ngan hien, 160 li. De Kong-ngan à Che-cheou 
hien, 120 li. De Che-cheou à Kien-ly hien, 120 li. De Kien-ly par le rapide Kieou-long 
et en remontant par Fan-tsouy à Pa-lin hien, 130 Hi. De Pa-lin par Fan-tsouy * à Kia-iu 
hien, 100 li. De Kia-iu par Kou-koua teheou à Han-iang hien*, 250 li. De Han-iang 
à Hoang-kang hien, 240 li. De Hoang-kang jusqu'à Ta-ie hien, 270 li. De Taie hien 
jusqu’à Te-hoa hien dans la province du Kiang-si, 180 li. De Te-hoa, où est la douane, 
on continuera jusqu'à Hou-keou hien, distant de 60 li. De Hou-keou à Pen-y hien, 90 li: 


! Nom de l’arrondissement dont Koui-tcheou fou est le chef-lieu. 

? Nom de l'arrondissement d'Y-tchang fou. J’abrége cette énumération très-minutieuse, et je ne conserve 
que les noms de lieux nécessaires pour suivre cet ilinéraire sur la carte. 

% Nom différent du Fan-tsouy précédent ; le premier est écrit avec le caractère fan « retourner, » le se- 
cond avec le caractère fan « étranger. » 

4 Nom de l'arrondissement de Han-iang fou, ville située vis-à-vis de Han-keou et Ou-tchang. 


TRANSPORT DES METAUX. 253 
de Pen-y à Tong-lieou hien de la province du Ngan-hoeï, 90 li; de Tong-lieou à Houay- 
ning hien, 80 li ; d'Houay-ning à Kouei-tche hien, 160 li; de Kouei-tche à Tong-liu 
hien, 100 li; de Tong-lin à Fan-tchang hien, 90; de Fan-tchang à Ou-fou hien, 90; de 
Ou-fou, où 11 y à une douane, à Tang-tou hien, 70 li; de Tang-tou à la douane Long-kiang 

? ? O ? ? O O D 
kouan de Kiang-ning fou (Nankin), 120 li; de Kiang-ning à Y-{chen hien « ou mieux Ngi- 
tchen, » 120; de là on remonte le Houay ho pendant 70 li jusqu'à Yang-tcheou fou; de ce 
point à Kao tcheou, 120 li ; de Kao à Pao—in hien, 120 li ; de Pao-in à Houay-ngan fou, dont 
le nom d'arrondissement est Chan-iang hien, 80li ; de la douane de ce point à Tsin-ho hien, 
40 li; de là au Pe-iang ho, 157 li; de là au pont Ou-hoa de la ville de Kou-tchen, 15 li; 

2? O 2 2 Î 
de ce pont à Siou-kien hien, 40 ; de Siou-kien à Su-tcheou fou, 95 ; de à à Y hien, 121: 
de Y hien à Ten hien, 186; de Ten à Pey hien, 155; de Pev à lu-tay hien, 37; de lu- 
? 2 \} ? ? J f 2? y 
lay à Tsi-ning fou, 30; de Tsi-ning à Kiu-ie hien, 70; de Kiu-ie à Kia-hiang hien, près 
de la bouche du Yuen-kia, 45 li; de Kia-hiang à Ouen-chang hien, 60 li ; à Cheou-tchang 
hien, 78 ; à Licou-tchenhien, 30; à Lin-tsin tcheou, 134; à Ou-tching hien, 75 ; de là à Se- 
ngiu che, «temple des Quatre-Vierges », sur la frontière de la province du Pe-tche-ly, 181 li; 
de là à Ou-kiao hien, 110 ; à Fan-pv hien, 130; de ce point par le Tehouan ho à Tsang 
tcheou, 70 li; de Tsang tcheou à Tien-tsin, où il y a une douane, 268 li; de là à Ou-tsin 
hien, 180 li; de Ou-tsin à Tong tcheou, 140; de là au pont Ta-tong «de Pékin », 40 li. 


Exposé des raisons données par tous les admünistrateurs de la province pour obtenir le transport du cuivre 
de Siun tien à Po-ngay. 

Comme, dans le transport du cuivre à Pékin, on est obligé de s’exposer à une navigation 
dangereuse sur les fleuves du Se-tchouen, et que ce transport doit se faire en général à partir 
du second et du troisième mois de l’année, moment où les neiges fondent sur les mon- 
tagnes, où la pluie tombe abondamment et où l’inondation se prononce, 1l arrive que de 
fréquents naufrages engloutissent les barques et leurs chargements : la rapidité exigée sur 
la route ne permet pas que lon s’arrête pour tenter de sauver le euivre perdu, et le gou- 
vernement ne reconnaissant pas cette perte, 1l faut acheter de nouveau du cuivre dans 
le Yun-nan. La province s’épuise ainsi à remplacer chaque année le cuivre englouti 
dans les eaux. Ne serait-il pas plus sage de choisir une époque ou une route plus favorable 
et moins féconde en malheurs ? Si l’on examine ce qui se passe dans les achats de cuivre 
faits par les autres provinces, on trouvera qu'il n’est jamais arrivé d'accident au métal qui 
a été transporté par les rivières et les fleuves du Liao-si. La 37° année de Kien-long, le 
Tao-tong de Tong-tchouen tint conseil avec tous les hommes sages de la province, et 
il fut décidé que l’on demanderait que le transport du cuivre à Pékin eùt lieu par Po- 
ngay, qui donne accès aux fleuves du Liao-si *. Le Vie se ?, nommé Su, ayant assemblé le 


1 Ancien nom des provinces de Kouang-si et de Kouang-tong. Po-ngay est une petite ville située sur le 
Hong Kiang ou Fleuve de Canton. Ce fleuve communique par un de ses affluents, canalisé dans sa partie su- 
périeure, avec le Siang Kiang, grande rivière qui traverse le Hou-nan et va se jeter dans le lac Tong-ting, 

_qui se déverse lui même dans le Yang-tse Kiang. 

? Titre de pro-vice-roi. ù 


254 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


conseil de la province et soigneusement discuté toutes les circonstances de temps, de lieux 
et de distances, arriva à cette conclusion, que le transport du euivre de Yun-nan à Pékin 
par Po-ngay et Han-keou était de 0.04 par 100 livres plus cher que le transport par Siun 
tien, Lou tcheou et Han keou ; que sur les deux millions de livres de cuivre que Yun-nan 
recevait directement des mines, plus de 1,900,000 pouvaient être envoyées par Tchou- 
yuen {sen à Po-ngay, moyennant un surcroît insignifiant de dépense de 770 et quelques 
taëls; que cet argent pouvait être pris sur le prix du transport de cette même quantité de 
cuivre de Yun-nan à Siun-tien et Tehao-tong, qui s'élevait à sept cent et quelques dizaines 
de taëls; que c'était à d’ailleurs le prix de 8 à 9,000 livres de cuivre perdues dans le 
fleuve, perte qui peut se renouveler jusqu’à deux ou trois fois dans le cours d’un voyage. 
Il en résultait donc que comme dépense, ces deux routes étaient à peu près équivalentes, 
et qu'il valait mieux choisir une route plus sûre, quoique plus longue, pour que le cuivre 
arrivat dans toute son intégrité à destination. 

Le conseil décida donc que tout le cuivre qui venait se réunir dans les magasins de Siun 
tien, serait transporté, par la route de PEst, de cette ville à Po-ngay, et qu’on se servirait 
des deux routes pour accélérer le transport. Pour la route du Sud, « celle de Yun-nan à 
Po-ngay», on arrêta que le cuivre séjournerait à Kouang-nan fou pendant l'été et l'automne, 
pour éviter les maladies qui déciment pendant les chaleurs les bêtes de somme. L'hiver, 
on lui ferait continuer sa route sur Po-ngay, et là, tout le cuivre de l'impôt réuni serait expé- 
dié en une seule fois à Pékin. 

Quant au cuivre de Ning-tay et des autres mines du Si-{ao, qui est d’une qualité in- 
férieure, il faudrait inscrire sur chaque Kouay le nom de la mine, afin qu'on ne puisse 
altérer par des mélanges les différentes espèces. Le cuivre de cette partie de la province 
est transporté directement à la capitale de Ning tay et du magasin de Hia-kouan; il fau- 
drait que de Yun-nan, par les soins des mandarins de Kouang-si tcheou et de Kouang-nan 
fou, il füt transporté à Pe-see, d’où les Ouy-yuen l’accompagneraient à Pékin. 

Pour ce qui est de la route de terre à l'Est de Siun tien, il faudrait disposer des stations ; 
l'huile, Le papier, les pinceaux nécessaires seraient fournis par Siun tien et Ouei-ning, pro- 
portionnellement à la quantité de cuivre. La 47° annéede Kien-long, on a placé sur cette route 
des postes de gardiens : ils pourraient servir à protéger et à hâter le transport du cuivre. 

Cette décision ne fut pas mise en vigueur, quoique l’argent nécessaire eùt été versé. 
Seule, la route de Yun-nan à Po-ngay est suivie aujourd’hui pour le cuivre à destination du 
Liso-si, malgré l'accélération qui résulterait de la division par Siun tien. On économise- 
rait en effet le temps que met le cuivre à venir de Tehen-hiong et d'Ouei-ning à Yun-nan. 
On invoque, il est vrai, les difficultés de la route de terre à l'Est de Siun tien. Mais si la 
décision relative à cette route était prise, on pourrait se servir de chars et de bœufs comme 
pour le cuivre qui vient du Sud de la province. Il serait à craindre, il est vrai, que le nom- 
bre de barques dont dispose Po-ngay ne fût insuffisant; mais le préfet de Kouang-nan pour- 
rait s’occuper de les faire rassembler très-longtemps à l'avance. Telle est la décision que 
le Tsong-tou et le Hiun-fou de la province pourraient soumettre à l'approbation de l’em- 
pereur. Dans ce cas, le trésorier du Kiang-si n'aurait plus à s'occuper du transport. Le 


TRANSPORT DES MÉTAUNX. 55 


ie 


Tche-kiang et les autres provinces au delà du Hou-nan feraient continuer la route flu- 
viale en faisant passer le cuivre par le lac Tong-ting. 


S 2. — Des barques affectées aux transports. 


IL faut maintenant donner quelques indications relatives aux dimensions et à la capa- 
cité des barques qui, soit dans la province de Tien, soit dans celle de Chou, sont affec- 
tées au transport du cuivre. Ce service demande les gens les plus fidèles et les plus 
minutieux, car la moindre négligence peut entrainer les plus grands malheurs en raison 
des difficultés et des dangers de la navigation. 

Chaque fois qu'il y a lieu de faire un envoi de euivre des provinces du Yun-nan et du 
Kouv-tcheou à Pekin, le tao de Yun-ning, assisté du tehe-hien de la même ville et du 
tche-tcheou de Lou tcheou, doit prendre toutesles mesures nécessaires pour que le trans- 
port se fasse en toute sécurité jusqu’à Tehong-kin. Le tao de cette dernière ville et le tong- 
tche de Kiang-pe disposeront tout pour le transport de Tchong-kin à Han-keou ; enfin le tao 
de Hoang-te, le tong-tche de Han-iang s’occuperont du transport jusqu’à Kiang-ning. A 
partir de ce point, le tao de Yen-siun et le tche-hien de Ngi-tchen feront transporter le 
cuivre jusqu'à Pékin. Si en route un détournement est constaté, le chef du convoi devra 
indemniser l'État sur ses propres deniers, en sus de la peine à laquelle il pourra être 
condamné. 

Le choix le plus attentif devra présider à la désignation des mandarins chargés d’ac- 
compagner les barques. Les barques elles-mêmes doivent être choisies parmi les plus 
grandes. Elles seront inspectées par le préfet de Lou teheou, assisté du Zcheou mou ‘. 1 
exige de chacun des patrons un écrit par lequel il accepte la responsabilité et se porte 
caution des objets qui lui seront confiés. Le tao de Tehong-kin, assisté du préfet de Kiang- 
pe, examinera ces contrats et payera à chaque patron un prix de location proportionnel au 
temps écoulé. Ce soin ne devra être confié par eux à aucun de leurs subordonnés. A partir 
de Tehong-kin, ce sont les mêmes barques qui effectuent le transport soit jusqu'à Tong- 
tcheou, soit jusqu’à Han-keou ou Kiang-ning, suivant le temps, les circonstances et la 
décision des autorités que cela concerne. 

Dans le passage des rapides dangereux, les mandarins préposés au transport veillent à 
ce que les barques se prêtent une aide mutuelle et ils président au travail revêtus de leurs 
insignes, pour éviter qu'on ne soit obligé d'appeler à l’aide des ouvriers ou des mariniers 
étrangers : ces mandarins ont le titre de Jeou ki ou de Tou se ?. 

Pour le passage de chaque rapide, on engage comme pilotes quatre ou einq hommes 
habiles de la localité, à qui l’on donne une récompense suffisante, s'ils conduisent sûre- 
ment les barques, mais qui peuvent au contraire être punis s'ils occasionnent quelque 


1 Inspecteur des charpentes, mandarin qui a la juridiction d’un Tcheou, tout en lui étant inférieur comme 
grade. 

? Mandarins militaires ; le premier à une dignité équivalente à celle de Tao-tay ; le second, à celle de 
Tche-fou. 


256 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


dommage. Les préfets de chaque ville devront veiller à ce que des gens expérimentés seuls 
acceptent ces fonctions. 

À Tchong-kin, il faudra ajouter toujours quatre barques au convoi, pour le prix de 
location desquelles il est alloué 182 ‘.2, plus 13 taels pour différents ustensiles dont il faut 
les munir. Si la quantité de cuivre transportée était plus grande que de coutume, il faudra 
ajouter une cinquième barque, ee qui portera le prix de location à 234 ‘.4, et à 16 ‘.95 le 
prix des dépenses supplémentaires. Tout ce qui est relatif au euivre de l'impôt devra être 
soigneusement inscrit sur des registres. 

On ne devra jamais mettre sur chaque barque plus des huit dixièmes de ce qu’elle 
peut porter en totalité et les mandarins s’assureront en personne de son contenu et de son 
tonnage. Si l’on doit transborder le cuivre dans de plus petites barques, les mandarins qui 
ont accompli litinéraire précédent fixeront la quantité dont on doit diminuer chaque 
chargement et inscriront soigneusement ce chargement sur les registres. S'ils décou- 
vrent une fraude, ils feront décharger de la barque toutes les marchandises autres que le 
cuivre !, et baître de verges le propriétaire. En outre, celui qui aura été assez hardi pour 
vendre en secret le cuivre, sera condamné à une peine. 

De Tchong-kin à Y-tehang, les rapides sont nombreux et dangereux ; aussi devra-t-on 
veiller avec le plus grand soin que, dans l'espèce de barque appelée Ava tseou ?, il n'y ait 
que 10,000 livres de cuivre, et que les autres barques n’en contiennent que 50,000. S'il y 
a un excédant de poids de vingt et quelques mille livres. on pourra le répartir entre toutes 
les barques; mais si cet excédant atteint 30,000 livres, il faudra louer une barque de plus. 
La même règle, pour l’excédant, s’appliquera proportionnellement au chargement des plus 
petites barques. 

Quand le cuivre est parvenu à Han-keou, il doit être entièrement chargé dans dix 
barques de la province de Hou-nan, contenant chacune 32,000 livres, et dans trente-deux 
jonques du Hou-pe, de l'espèce appelée Zchouw tchouan, qui peuvent porter chacune 
40,000 livres de cuivre. A Kiang-ning, on les remplacera par vingt-six grandes barques 
de l'espèce appelée Kieou tchouan, dont le chargement est de 55,000 livres, auxquelles 
on ajoutera treize barques de même espèce, mais plus petites, qui prendront chacune 
30,000 livres de métal. | 

Sur le passage du convoi du cuivre ou du plomb du gouvernement, les mandarins 
disposent à l'avance des gardiens et des soldats pour le protéger. À chacun des envois ré 
glementaires de cuivre, chacun des mandarins des lieux de passage envoie sept gardiens 
et treize soldats; dans les envois supplémentaires, ce nombre est. élevé à huit gardiens et 
seize soldats. Dans la province du Se-tchouen particulièrement, où abondent les dangers 
de navigation,"on devra tenir toujours prêts des soldats et des mariniers adroits. 

1 Il est toléré que les Ouy-iuen ou mandarins chargés du transport embarquent avec eux des marchan- 
dises dont ils commercent et qui passent en franchise aux douanes. Mais ils ne doivent pas, par amour du gain, 
charger les barques au delà des 8/10 réglementaires. C’est contre cette tentation que les prémunit le texte de 
l’ouvrage, en leur indiquant les pénalités qu'ils encourent. 


2 Barques fortifiées latéralement par d'énormes défenses en bois et spécialement appropriées à la naviga- 
tion dans les rapides. 


TRANSPORT DES MÉTAUNX. 291 


Le chef du convoi recoit, avant son départ, du vice-roi ou de son suppléant, le fou pay 
ou « passeport » qui servira à constater sa mission auprès de tous les mandarins de la 
route. Il devra prévenir ceux-ci de son passage, afin qu'ils puissent être prêts à exa- 
miner si les barques ne contiennent que ce qui est écrit dans le fou-pay. Après avoir 
inspecté les barques, ils noteront la date précise du passage et le temps qu'il fait, 
informeront leurs supérieurs de toutes ces circonstances, préviendront les préfets des 
villes suivantes de l’arrivée des barques, et apposeront leur signature au bas du fou-pay, 
afin que le chef du convoi puisse faire constater quel a été son itinéraire à son arrivée à 
Pékin. 

Le tao-tay de Yun-ning, aidé dutehe-tcheou de Lou tcheou et du chef du convoi, pèsera 
avec soin le cuivre envoyé, et préviendrà le préfet de Tehong-kin du mode de pesage 
employé. Celui-ci, avec le concours du mandarin de Kiang-pe et du chef du convoi, con- 
trôlera le poids du euivre, inscrira le résultat de son inspection et enjoindra la même véri- 
fication au mandarin de Koui-tcheou fou. 

Comme après Tchong-kin, le vent s'élève souvent « et sépare les barques », le chef du 
convoi inserit soigneusement sur un registre le nombre des barques, le nom de leurs 
patrons, la quantité de cuivre qu'elles portent, leur tirant d’eau, de telle sorte que si une 
barque s'arrête au milieu de la route, il puisse rendre compte des motifs de ce retard. 

Quand des mandarins remplissent pour la première fois la mission de conduire un 
convoi de cuivre à Pékin, ils enjoindront à tous les gardiens, à tous les satellites et à tous 
les soldats qui sont préposés sur le passage du convoi, de surveiller les bateliers qui sont 
toujours tentés de tromper de nouveaux chefs. 

A l’arrivée à Han-keou et à Ngi-tchen, où l’on change les barques, les vice-rois du Hou- 
kouang « Hou-pe et Hou-nan » et du Kiang-nan délégueront des mandarins d’un rang plus 
élevé pour constater le poids du cuivre; s’il est trouvé le même, ils signeront le registre 
et préviendront les ministres du palais de l’inspection faite et de l’arrivée des barques. 

Si, en raison de la baisse des eaux, les barques ne pouvaient continuer leur route, les 
chefs du convoi en délibéreront avec le mandarin du lieu, et feront transporter le cuivre 
par terre, mais ils devront prendre garde que la chose ne puisse se renouveler plus de huit 
fois. De Tien-tsin à Tong tcheou, ce transbordement est prévu, et le prix du transport 
de cent livres est fixé à 0.069; pour les autres transports qui pourraient survenir, il est 
accordé un crédit principal de 1,800 taëls, plus 240 taëls pour le salaire des ouvriers em- 
ployés à lier les fardeaux; le erédit affecté pour le même motif aux transports supplé- 
mentaires n’est que de 1,600 taëls, etle salaire ci-dessus de 210. Pour le plomb, la dépense 
des transports par terre ne devra pas dépasser 2,000 taëls, et le salaire des ouvriers em- 
plovés à lier les fardeaux 270 ; si les préfets des localités traversées dépensent au delà de 
cette somme, ils payeront le surplus de leurs deniers. 

Si les barques qui portent le cuivre ou le plomb du gouvernement ne peuvent, à Tien- 
tsin, continuer leur route à cause du manque d’eau, elles seront allégées des six dixièmes 
de leur chargement. Si elles ont des avaries et ne peuvent en aucune façon continuer leur 


route, les chefs du convoi iront trouver le préfet de Tien-{sin, qui préviendra le palais de 
IL. 33 


258 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


cet élat de choses et fournira les fonds nécessaires pour faire transporter le chargement 
des barques ; mais celles-ci devront rendre le prix de leur location en proportion de la 
distance qui reste à parcourir. De Tien-tsin à Tong tcheou il y a 320 li, qui seront 
parcourues en raison de 1)'.037 par 100 livres si c’est du cuivre, et de 0'.046 par 
100 livres si c’est du plomb. Cest sur ce prix que sera calculée la restitution que 
devront faire les barques. 

Si le cuivre était apporté par terre à Tien-tsin, le prix total du transport serait de 
2,800 taëls. (Ce prix sera payé en six fois : par chacun des quatre transports réglementaires, 
500 taëls; par chacun des deux transports supplémentaires, 400.) Le trésorier du Tehe-ly 
fera payer cette somme par le trésor de Tien-tsin, après vérification du cuivre et des dé- 
penses faites par les mandarins chargés du transport, qui pourront à ce moment recou- 


vrer les avances qu'ils auront faites. 


S 3. Des pertes subies pendant les transports. 


De même que les habits n’ont plus le même poids que la matière qui a servi à les faire, 
ou qu'une maison pèse moins que les matériaux apportés pour la construire ; de même le 
cuivre, dans tous les transports successifs, doit-il perdre une partie de son poids. Nous 
allons done parler maintenant des tolérances admises à cet égard, tolérances qui ne sau- 
raient être dépassées sans que ceux qui en sont responsables soient condamnés à une 
réparation où à un chatiment. 

La première cause de perte est le transport du cuivre des mines aux entrepôts; de là à 
Lou tcheou, les chocs inévitables de la route lui font encore perdre une partie de son poids; 
il est permis d'inscrire cette déperdition sur les registres. En outre des pertes occasion- 
nées par le transport, on admet encore qu'il v ait annuellement une diminution de poids de 
24,000 livres. (Les magasins d'Ouey et de Kouan remplacent chacun 4,000 livres; ceux de 
Tchao et de Tchen, 6,000.) 

Ce cuivre sera payé à raison de 11 taels les 100 livres, par les directeurs des muga- 
sins, aux directeurs des mines à qui ils s’adresseront pour obtenir la quantité de cuivre 
nécessaire. En outre, ils ajouteront toujours 3 livres sur 100 pour compenser les pertes 
occasionnées par le transport. Sur ce poids, 8 onces seront affectées aux pertes subies 
dans le transport jusqu'à Lou tcheou; si le déficit dépasse cette quantité, les mandarins 
chargés de présider au transport devront rembourser la différence aux directeurs des 
mines. Les deux livres et demie qui restent serviront à compenser les pertes subies pendant 
la route de Lou tcheou à Pékin. L’excédant, s’il y en a, pourra être affecté par les chefs du 
convoi, lors de l’arrivée à la douane de Tsong-ouen-men !, à acquitter les droits de douane. 
Si les mandarins chargés du transport ont dérobé quelque chose sur ces droits de douane, 
à leur retour à la capitale de la province, le Siun-fou, « pro-vice-roi », leur retiendra sur 


leur propre salaire, ce dont ils auront ainsi fait tort au domaine. 


l L'une des-portes de Pékin. 


TRANSPORT DES MÉTAUNX. 209 


Le mandarin de Tso-leang tinh, assisté du Tsien-kiou, « association qui fabrique les 
Sapèques », fait une recette exacle à sa balance du poids de cuivre exigé. Sile déchet du 
cuivre est supérieur à la quantité prévue, il y est suppléé à laide d’une réserve de métal 
spécialement destinée à cet usage. Le Tsien-kiou a le droit de retenir pour son usage le 
cuivre en excès, mais dans ce cas, celle association est responsable au lieu et place des 
chefs du convoi des payements auxquels ce cuivre devait être affecté. Il arrive que la 
réserve de cuivre, destinée à combler les déficits survenus pendant le transport, manque 
aussi. Dans ce cas, le prix de restitution est fixé à 15.137 les 100 livres et ordre est 
donné au mandarin chargé des mines de faire acheter dans le Vun-nan la quantité de cuivre 
qui manque et que l’on joint au convoi suivant. Quand le fait est déclaré à l’empereur, 
celui-ci dispense souvent de cette obligation. 

Quand, à la suite du naufrage d’une barque chargée de cuivre, d’habiles nageurs ont 
4 par 100 livres de cuivre 
ainsi relrées de l’eau, si la profondenr dépasse 40 tche; 0!,3, si la profondeur est moindre 


pu sauver {out ou partie de son chargement , il leur est payé 0°. 


«que 40 tche et plus grande que 10 »; 0f.1, si elle ne dépasse pas 10 tehe; il leur sera 
donné en outre par jour de travail 0".04 pour leur nourriture. S'il y a des difficultés trop 
grandes à opérer ce sauvetage, 1l faudra y renoncer pour ne pas exposer inutilement des 
hommes à la mort. Les chefs du convoi tiendront conseil avec les autorités locales, et si, 
après dix jours d'attente, rien n’a pu être sauvé du cuivre perdu, ils continueront leur 
route en laissant auprès du mandarin du lieu des satellites dévoués qui pourront surveiller 
les recherches; mais ils auront eu soin de noter le nom du rapide où à eu lieu le naufrage, 
et de demander à tous les chefs civils et militaires leur témoignage par écrit, pour qu'il soit 
ajouté foi plus tard à leur propre déclaration. Si la perte n’est pas totale, et qu'il ait été 
sauvé une partie du cuivre perdu, ils devront payer les sept dixièmes de ce qui reste à re- 
couvrer, et les mandarins du lieu les trois autres dixièmes. Si, dans un naufrage, les chefs 
du convoi font procéder au sauvetage du cuivre de leur propre autorité, sans avoir pré- 
venu les autorités locales, tous les frais de ce sauvetage, même s'il à complétement 
réussi, restent à leur charge. 


S 4. — Des atténuations de dépense. 


Les dépenses qu'occasionne le transport du cuivre, quoique divisées en très-petites 
sommes, finissent par atteindre un chiffre considérable; aussi importe-t11 de ne rien 
épargner pour abréger les distances et atténuer ainsi les dépenses du trésor public. 

De Siun lien à Ouei-ning, 
et le transport de 300 livres de cuivre coùtait 3 taels; aujourd'hui, il y a une sfation de 


avant l'amélioration de la route, il ÿ avait quinze stations 


moins, et le prix du transport pour le même poids est réduit à 2°.8. 300 livres forment 
à peu près le chargement d’une voiture. Il est résulté de cette réduction une économie 
annuelle de 10,759:.121. D'Ouei-ning au port de Lo-sin, il a été fait également une dimi- 
nution de 0'.187 sur le prix du transport de 100 livres. Autrefois, en effet, d'Ouei- 
ning à Yun-ning il y avait treize stations, et le prix des porteurs était de OC5168 les 


260 TIEN NAN KOUANG TCOHANCG. 


100 livres; aujourd’hui il n°y a plus que dix stations, et ce salaire est réduit à 0°.1292, 
d’où une diminution de 0'.3876. Mais il faut en déduire le prix du transport de Lo-sin tou 
à Nan-kouang-tong qui, quoiqu'il se fasse par eau, coûte 0!.2; l'économie n’est donc plus 
que de 0',1876 qui produit par an une somme de 5919194. 

De Tong-tchouen à Lou tcheou par Teou-cha kouan et Yen-{sin tou, il a été fait éga- 
lement une réduction de 0.33; autrefois, en effet, le chemin se faisait par terre, et au- 
jourd’hui il se fait par eau. L'économie totale qui en résulte est de 5,203".85. Si, en outre, 
on profite pour transporter le cuivre de barques portant d’autres marchandises, on obtient 
encore une réduction de 0°.09% par 100 livres. 

De Yun-chang hien à Lou tcheou par Hoang-tsao-pin, on a pu réduire le prix du 
transport de 0'.682 les 100 livres en se servant de bateaux au lieu de prendre la voie de 
terre. L'économie totale qui en est résultée s’est élevée à 10,759'.121 ; elle pourra être 
plus grande encore si l’on se sert de barques faisant en même temps un service de voya- 
geurs ou de marchandises. Néanmoins, la somme d'argent fixée par les lois antérieures 
devra êlre toujours livrée intégralementà ceux qui accompagnent le cuivre, quelles que 
soient les abréviations ou les économies qui peuvent être réalisées dans le cours du trajet. 
A l’arrivée à Pékin, il en sera rendu un compte exact. 

Il sera transporté gratuitement soit des mines aux magasins, soit des magasins à Lou 
tcheou 5 pour 100 en sus du poids de euivre exigé, et le prix de ce cuivre sera affecté aux 
usages communs. 


VI 


DE? LA FABRICATION DES SAPÈQUES!. 


Comme le cuivre que produit la provinee de Yun-nan est répulé dans tout l'empire, on 
a concédé à cette province le droit de fabriquer des sapèques dans les mêmes conditions 
qu'à Tong tcheou « près de Pékin. » Des fourneaux particuliers ont été créés en consé- 
quence à Tong-tchouen et à Ning-tay tchang. Le métal dont se composent les sapèques est 
un alliage de cuivre, de zine * et de plomb. 

On avait commencé à fabriquer des sapèques à Yun-nan, la dix-septième année de 
l’empereur Chun-tche * ; mais l'association formée dans ce but fut dissoute peu après. La 
vingt et unième année de Khang-hi, on reprit de nouveau ce travail et beaucoup d’autres 
villes se mirent aussi à battre monnaie. Les provinces voisines consentirent à recevoir les 
sapèques ainsi frappés à Ta-ly, Lin-ngan, Kiu-tsing, Kouang-si, Tong-tchouen, Chun- 
ning, et dans quelques autres tcheou ; des hien même en fabriquèrent, Lo-sing et Mong- 
ise, par exemple. Mais au bout de quelque temps cette fabrication fut restreinte aux 


! La traduction de ce chapitre et du chapitre suivant a été omise par Thomas Ko, et j'ai dù me conten- 
ter d'extraire du texte chinois les données les plus importantes relatives à cette fabrication intéressante et aux 
quantités de cuivre fournies par le Yun-nan aux autres provinces de l’empire. Je laisse à de plus compétents 
que moi le soin de donner une traduction complète de cette partie de louvrage. 

2 J’emploie pour plus de clarté les mots zinc et plomb aulieu des expressions littérales « plomb blanc » ct 
« plomb noir ». 

3 Le premier empercur de la dynastie tartare qui ait été véritablement maitre de la Chine. C’est le père du 
célèbre Khang-hi. La 17° année de son règne répond à 1661. 


262 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


villes de Yun-nan, Lin-ngan, Ta-ly et Tong-tchouen. La 4° année de Kia-kin, on éta- 
blit de nouveaux fourneaux à Lin-ngan, Kouang-nan, Tong-tchouen, Techou-hiong et 
Yun-{chang pour refondre les sapèques hors d'usage. 

La 6° année de Kia-kin il fut réglé que pour 100 livres de sapèques on emploierait 
54 livres de cuivre, 42 livres 12 onces de zine, et 3 livres 4 onces de plomb, et chaque 
mine de cuivre dut fournir pour cette fabrication 10 livres 4 onces par 100 livres de 
cuivre produit. La 9° année du même empereur, la mine de Ning-tay fut imposée d’une 
facon spéciale à ce sujet. Un prélèvement de 9 livres sur 100 fut également fait dans le 
même but dans les mines de plomb et de zine. Le poids de chaque sapèque fut fixé aux 
12 centièmes d’une once !. 

Une coulée de sapèques demande environ dix jours pour s'effectuer. On met en œuvre 
à la fois 857 livres 2 onces 285 millièmes d’alliage. Il y a un déchet de 77 livres 2 onces 
285 millièmes, et il ne reste en définitive que 780 livres de métal, à l’aide desquelles on 
peut frapper 104,000 sapèques. 

Il y a 28 fourneaux qui, trois fois par mois, opèrent chacun une fonte de sapèques. On 
oblient ainsi par an 1,008 coulées, pour lesquelles on emploie 623,570 livres, 15 onces 
825 millièmes de cuivre, dont 72,657 livres 4 onces 45 sont fournies par la seule mine 
de Ning-tay, et le reste par les mines du Nan-tao et du Si-tao, 439,538 livres 5 onces 
224 de zine, et 33,415 livres 3 onces 142 de plomb. On produit ainsi annuellement 
101,095,344 sapèques qui représentent, au taux légal de 1,200 pour un tael, une valeur 
totale de 84,246".12?, dans laquelle le cuivre entre pour 51,078'.98 (en le comptant à 
raison de 9.2 les 100 livres), le zine pour 10,768.68, le plomb noir pour 701,71, et 
la main-d'œuvre pour 21,696°.74. 

A Tong-ichouen, on emploie chaque année à la même fabrication 198,287 livres de 
cuivre provenant principalement de la mine de Tang-tan, 156,977 livres de zinc et 
11,933 livres de plomb. On produit ainsi 35,005,070 sapèques qui, au taux de 1,200 
pour un tael, valent 30,087".055, ainsi décomposés : cuivre, 14,825 taels (il est complé à 
raison de 7!.4765 les 100 livres; zine, 3,6101.493 (il est compté à raison de 2!.3 les 100 
livres); plomb 262,257 (il est compté à raison de 2!.2 les 100 livres); main-d'œuvre 
11538951" 

Les ateliers actuels de Tong-tchouen ont été ouverts la 22° année de Kia-kin el sont 
sous la surveillance du Tehe-fou de cette ville *. 

1 Un peu plus de 4 grammes et demi. 

2 650,000 francs environ. Le chiffre des sapèques produits est moins considérable que celui qui résulterait 
des quantités de métal employées, même en tenant compte du déchet indiqué plus haut. D’après la valeur 
du cuivre qui entre définitivement dans la composition des 401 millions de sapèques obtenus, les 620,006 li - 
vres de ce métal, fournies par cette fabrication, se réduiraient, après leur mise en œuvre, à 555,000. 

3 La fabrication actuelle des sapèques dans le Yun-nan est loin de présenter l’eniformité qui semblerait 
résulter des détails qui précèdent. Depuis la révolte des Mahométans et le relâchement des liens de la pro- 
vince avec le pouvoir central, chaque ville s’est mise à fabriquer de la monnaie en en allérant le plus possible 
la composition légale. Aussi rencontre-t-on la plus grande diversité en matière de monnaie courante. Les sapè- 


ques de Tong-tchouen conservent encore cependant la faveur publique. et on ne peut souvent les obtenir 
qu'à un laux supérieur au taux légal. 


VIT 


DE LA FOURNITURE DU CUIVRE AUX AUTRES PROVINCES, 


Dans toutes les provinces, des ateliers analogues à ceux du Yun-nan ont été créés pour 
la fabrication des sapèques, et le Yun-nan fournit à la plupart d’entre elles le cuivre né- 
cessaire. 

Le tableau suivant donne les quantités en livres chinoises, et le prix des différentes 
qualités de cuivre envoyées par le Yun-nan dans le reste de l'empire. La dernière 
colonne indique, sous le titre de bonification, la quantité de cuivre ajoutée gratuitement 


pour subvenir aux déchets qui peuvent se produire pendant la route. 


; | PRIX | ; BONIFICATION 
NOMS DES PROVINCES. QUANTITÉ DE QUIVRE. | | PERIODE D'ENVOI. 
DES 100 LIVRES. PAR 100 LIVRES. 
Kiang-sou ....... | 170,000 livres. 1! taels. Triennale. 11e (QE 
Idem. 520,000 — 9 — Idem. 23 0 
KIANCES EEE 53,680 — 11 — Tous les 18 mois. 1 0 
Idem. 234,320 — 9 — Idem. 23 (0 
Hchekiancee"" 260,000 — A1 — Annuelle. 4 6 
Idem. 140,000 — 9 — Idem. 2) 
Hokieneeerrere 420,000 — 11 — Triennale. L 6 
Idem. 180,000 — 9 — Idem. 2 ( 
HQE e 8 c06 bob 0 224,308 — IL — Annuelle. 3 0 
Hot, 00 000 0 135,000 — A1 — Idem. o À 
Idem. 65,000 — 9 — Idem. 28) () 
Chem 0000000 245,000 — 11 — Tous les 48 mois. 4 O0 
Idem. 15,000 — 9 — Idem. | 23 (|) 
Kouang-tong. . . .. | 101,221 — 1 — Annuelle. 5 0 
Idem. 5O,A13 — 9 — Idem. 2300) 
Kouang-si....... | 212,550 — = Idem. 5 0 
Kouy-tcheou. . . ... 303,867 jonc 62 SAGE 2) Idem. HE (0) 


264 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


Des règlements spéciaux fixent les mines qui doivent fournir ces quantités de cuivre 
aux différentes provinces, les itinéraires suivis, le temps employé à les parcourir, les 
moyens de transport adoptés, le détail de toutes les dépenses nécessaires à l'entretien des 
officiers charges d'accompagner le métal, et à l’achat des sacs et des liens qui serviront à 
l’'emballer, les avances de fonds qu’en certaines circonstances la province du Yun-nan 
pourra faire aux autres provinces, le mode de remboursement de ces avances , enfin les 
indemnités qui pourront être dues en cas de retard dans la livraison des métaux. Dans ce 
dernier cas, la province du Vun-nan ne pourra se refuser à payer les suppléments de dé- 
pense qu'entrainerait, pour les officiers envoyés par les provinces voisines, la prolonga- 
lion de leur séjour et que l'allocation affectée à leur voyage et aux frais de transport du 
cuivre serait insuffisante à couvrir. 


VIII 


MÉMOIRE SUR LES AVANTAGES ET LES INCONVÉNIENTS DU SYSTÈME ACTUELLEMENT ADOPTÉ POUR 
L EXPLOITATION DU CUIVRE. DANS LE YUN—NAN PAR OUANG TA-IO. 


Au 8° mois de la 40° année de l’empereur Kien-long, le trésorier du Yun-nan, 
nommé Ouang Ta-i0, écrivit le discours qui suit sur le cuivre : 

« Autant que je puis en juger, la production du cuivre occupe la première place dans 
cette contrée, car partout les terrains y sont stériles, et l'on ne voit pas quel avantage on 
pourrait retirer de l’agriculture *. Quand, il y à à peine soixante années, les mandarins 
durent s'occuper des mines ?, le peuple et eux-mêmes eurent à souffrir de maux tels que 
lon dut se demander si l’on pouvait en continuer l'exploitation. Ef pour ma part, je ne 
vois pas comment on pouvait échapper à la faim. 

La difficulté de la production du euivre réside en quatre points principaux: Le pre- 
mier est que les frais de transport sont tels qu'il est impossible d'ajouter quoi que ce soit 
au prix du cuivre. La 19° année de Kien-long, le Siun-fou de la province nommé Ngeay 
Pi-ta, fit respectueusement observer que le prix du cuivre de la mine de Tang-tan était 
de0'.8 inférieur à celui des autres mines, et obtint de la bonté de l’empereur une augmenta- 
tion de 0'.4236, qui était la moitié environ de cette différence. Deux années après, le Siun- 
fou Ko Y-iu demanda et obtint une augmentation nouvelle de 0°.4236 pour que la ville 


1 Le labeur opiniâtre des Chinois a triomphé des difficultés que présentait le défrichement de cette région 
montagneuse et l’appréciation de Ouang Ta-io n’est exacte aujourd’hui que pour certaines parties très-res- 
treintes de la province dont le sol se refuse en effet à toute culture. 

? Cette indication fait remonter à 1716 l’organisation définitive de l'exploitation du cuivre au Yun-nan. 

34 


266 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


de Tong-tchouen püt recouvrer le capital engagé dans la mine. Six années après, le 
Tsong-tou Ou-ta, voyant se mulliplier les associations Kiou pour la fabrication des sa- 
pèques, fit décréter une nouvelle augmentation dans le prix du cuivre de 0°.4. Six an- 
nées après, une autre augmentation de 0'.6 fut obtenue par le Siun-fou. Trois ans après, 
il fut décidé que pour les mines de Tang-tan, Ta-chouy et Lou-lou le prix du cuivre 
ne dépasserait pas 6".4 «les 100 livres» et l'augmentation s’arrêta là. La 24° année de 
Kien-long, sur la requête du Siun-fou Liou-tao, on concéda à la mine de Tsin-long- 
chan et à plus de vingt autres petites mines, où le prix du cuivre n’était autrefois que 
de 318 à 41.2, le prix de 5.15; quant au cuivre de dernière qualité qui se vendait 
4 taels les 100 livres, son prix fut élevé à 4.6. 

La bonté de l’empereur est inépuisable, et cependant, au bout de quelques années, le 
mal de la pauvreté prévalut de nouveau, et chacun put se plaindre qu'à l’origine le prix 
du cuivre ait été fixé de telle sorte, que même après plusieurs augmentations, il restat 
insuffisant. Pourquoi le prix de 100 livres de cuivre est-il fixé dans le Se-tchouen à 9 ou 
10 taels, dans le Kouang-si à 13 taels les 100 livres, alors qu'il est si bas dans le Yun- 
nan? Yang-ouen de la ville de Kiang-in ‘, gouverneur de la province de Tien, sous 
l’empereur Tin-kong, adressa à ce sujet les plaintes suivantes à l’empereur : Alors que 
le capital des différentes mines était inégal, le prix du cuivre lui-même était invariable 
et fixé à 9°.2; tout le monde l’adoptait quand il s'agissait de le vendre. Mais, pour 
acheter le euivre, il a été décidé que l'on payerait par 100 livres de 4 à 6 taels au plus; en 
oulre, le cuivre est donné au gouvernement à litre d'impôt; les dépenses publiques des 
vivres et des transports ainsi que celles affectées aux travaux de la navigation sur le 
Kin-cha kiang sont prélevés sur la valeur du métal, d’où il résulte que, sur un prix fixé à 
6 taels, il ne reste guère que 5'.1, prix qui n’est point comparable à celui du cuivre dans les 
provinces de Chou et de Liao. On voit done clairement que le prix fixé jadis est trop petit. 

On pourra s'étonner que des réclamations à ce sujet ne se soient pas élevées dès 
l’origine. La raison en est qu’autrefois, dans la province de Tien, chacun pouvait à son 
gré exporter le cuivre, et qu'aujourd'hui cela n’est plus permis. La #4° année de l’empe- 
reur Khang-hi « 1705 », les mandarins reçurent l’ordre d’avoir à faire payer régu- 
lièrement l'impôt chaque année. Après avoir fourni le capital nécessaire à l’exploitation, 
ceux-ci, quand le remboursement en était incomplet, eurent coutume d’exiger le paye- 
ment de ce qui restait, en cuivre qu'ils n’acceplaient qu'à un taux très-bas, alors qu'ils 
le revendaient le plus cher possible. Sous l’empereur Yong-tchen « 1723-1736 » se forma 
l'association Kiou pour le transport du euivre à Pékin où l’on vérifiait son poids. A 
ce moment le cuivre de l'impôt ne s'élevait qu'à 80 ou 100 mille livres; au bout de 
quelques années ce chiffre s’éleva à 2 ou 3 millions de livres ; aujourd’hui il a presque 


! Kiang-in est une ville de troisième ordre ou hien située dans le département de Tchang-tcheou fou, pro- 
vince du Kiang-sou, sur la rive droite du fleuve Bleu. Ce même nom était porté sous les Tcheou postérieurs 
(de 950 à 960 ap. J.-C.), par un arrondissement établi au sud de Ou-chan dans le département de Koui- 
tcheou fou (Setchouen) (Biot, Dictionnaire des noms géographiques de l'empire chinois). C’est probablement 
de cette dernière ville qu'il est ici question. 


MEMOIRE DE OUANG TA-10. 267 


07 
décuplé, et on ne laisse aux mineurs que les deux tiers ou la moitié du cuivre qu'ils pro- 
duisent. L’exiguïté du prix que payent les mandarins est l’origine de toutes les fraudes et 
de tous les vols des mineurs qui ne pourraient sans cela retirer le moindre bénéfice de 
leur travail. Petit à petit, les mines s’établissent dans des endroits plus éloignés, pour se 
rapprocher des forêts et obtenir le combustible à meilleur marché, et en même temps pour 
échapper à l’avarice toujours plus grande des gouvernants et éviter les exigences des pro- 
priétaires des terrains et les vexations des satellites. En supputant intérêt du capital, les 
frais de transport, les salaires des employés et toutes les autres dépenses de la mine, 
100 livres de cuivre arrivent à coûter 9'.2. Comme les mineurs ne reçoivent pour ce 
poids que 6.4, ils sont donc obligés de dépenser de leurs deniers 1°.8. On se demande 
où ils peuvent prendre cet argent. Nulle part, si ce n’est en l’inserivant dans le registre 
des dépenses et des recettes, et en portant vendue une quantité de cuivre assez grande 
pour réparer cette perte. Il serait long d’énumérer tout ce que souffrent ainsi les habi- 
tants des mines. Mais puisque le prix du cuivre est si insuffisant, pourquoi personne d’entre 
eux n'a-t-1l demandé une augmentation de prix? C'est qu'ils seraient difficilement écou- 
tés, et l'augmentation de 4 ou 6 tsien qu'ils pourraient obtenir serait bien peu de chose 
pour une aussi grande misère. 

Pour des raisons analogues, le commerce du cuivre est des plus difficiles, puisqu'on 
ne peut ni diminuer ni parler de diminuer l'impôt sur le transport. I a cependant été 
question une ou deux fois de diminution. La 32° année de Kien-long, le gouverneur de la 
province de Pordre Siun-fou , nommé O, préféra acheter directement le euivre dans cha- 
que mine et en obtint ainsi plus de einq millions de livres, mais il n’en resta plus à ven- 
dre aux acheteurs qui étaient venus de tous les côtés. Le gouverneur obtint alors du 
ministre des finances l'autorisation de différer la remise du cuivre que l’on devait trans- 
porter à Pékin, afin que les acheteurs pussent trouver à s’approvisionner. Il en résulta 
un allégement de plus 2,600,000 livres pour la province. Trois ans après, le Tsong-tou, 
gouverneur des deux provinces du Kouy-tcheou et du Yun-nan, fit reprendre les transports 
interrompus pour Pékin. Il fut envoyé ainsi, ou consommé dans la province pour la fabri- 
cation des sapèques, une dizaine de millions de livres de cuivre, et il ne resta de disponi- 
ble que 1,300,000 livres. Dans les années suivantes, malgré une production annuelle 
de plus de 9,200,000 livres, on ne put satisfaire aux demandes des acheteurs. Le Tsong- 
tou demanda à ce que le commerce füt interrompu et à ce que le ministère des finances 
püt recevoir ce qui lui était du. Le Kiang-nan et le Kiang-si durent s'abstenir d'acheter 
du euivre dans le Yun-nan, et celte dernière province fut dispensée de fournir au delà 
de 500,000 livres de cuivre «aux autres provinces. » Dans l’espace de six mois, le vice- 
roi Ming-tée fit envoyer des officiers pour recevoir 4,100,000 livres de cuivre : il y avait 
eu un surcroit annuel d’un million de livres pendant quatre années, el on devait 
espérer qu'au bout de cette période, on pourrait subvenir à tout ce qui avait manqué. Mais 
rien n'avait été réservé, et on put à peine suffire à acquitter l’impôt, quoique par la sup- 
pression pendant cet intervalle de temps de la fourniture du cuivre aux autres provinces, 
qui s'élève chaque année à plus de deux millions de livres, on eût économisé environ 8 ou 


268 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 

9 millions de livres. On dut en conséquence demander une nouvelle diminution «de l’im- 
pôt» et un délai pour la fabrication des sapèques dans le Yun-nan, et pour la fourniture du 
cuivre aux autres provinces. Le ministre des finances soumit à l'approbation de l'empereur 
un décret par lequel les villes de Lin-ngan, Ta-ly, Kouang-nan et l'association récem- 
ment formée à Tong-tchouen pussent cesser de fabriquer de la monnaie, et par lequel 
on diminuait le poids de cuivre exigé annuellement pour les provinces du Chen-si, du 
Kouy-tcheou et du Hou-pe. Ce poids est de 630,000 livres. 

La province fut ainsi dispensée temporairement d’une fourniture de plus de deux mil- 
lions de livres. L’allégement qui en résulta pour les mineurs s’éleva à plus de 
5,000,000 de livres, et ils reprirent courage; l’achat du cuivre cessait d’être, comme à 
l’origine, complétement à la discrétion des mandarins. 

On frappait autrefois annuellement dans le Vun-nan plus de 90,000 ligatures (la li- 
galure se compose de mille sapèques), dont 40,000 devaient être transportées dans le 
Hou-kouang etle Kiang-si; cette fabrication employait 1,100,000 livres de cuivre. 

Jusqu'à la 5° année de Yong-tchen, les mines du Yun-nan produisaient an- 
nuellement trois millions et quelques centaines de mille livres de cuivre, dont plus de 
un million était envoyé à Han-keou et autant à Tehin-kiang pour la consommation des pro- 
vinces du Kiang-nan, du Hou-nan et du Hou-pe. Les choses se passèrent ainsi jusqu’à la 
10° année de Yong-tchen. À ce moment, on commença à envoyer annuellement au 
Kouang-si 62,000 ligatures auxquelles on dut employer plus de 400,000 livres de cuivre 
par an. 

L'année suivante, le Kouang-si dut, par décision de l’empereur, fabriquer lui-même 
et envoyer à Pékin 344,062 ligatures pour lesquelles plus de 1,663,000 livres de cuivre 
furent reconnues nécessaires. La 2° année de Kien-long, le Tsong-tou Yun Ouen-touan 
obtint, au grand bénéfice du trésor, que les étrangers pussent venir acheter du cuivre 
dans le Tehe-kiang et demanda que pour ce motif 4,000,000 de livres fussent envoyées 
dans cette province, dont 2,000,000 seraient achetés dans le Yun-nan et le reste dans les 
provinces occidentales. Le Yun-nan consentit à cette demande et ajouta, en sus des sapè- 
ques envoyés au trésor, plus de 300,000 livres de cuivre qui complétèrent les 2,000,000 
de livres demandés. 

Le Tsong-tou de la province de Tche-ly, nommé Ly-hen, se trouvant trop éloigné du 
Yun-nan pour envoyer y acheter du cuivre, demanda à acheter directement de l’asso- 
lation Kiou de la ville de Pékin le cuivre qui lui était nécessaire, en le prélevant sur 
l’envoir annuel fait à cette association par le Yun-nan. Ainsi, non-seulement la province 
de Vun-nan eut à fournir le cuivre que devaient toutes les autres provinces, mais 
encore à ajouter ce que chacune d'elles désirait en sus de la quantité fixée. Elle ar- 
riva ainsi à fournir annuellement 4,440,000 livres de cuivre. Peu après cependant, on 
reconnut qu'il valait mieux accorder certains répits, pour que lon püt fabriquer de la 
monnaie, et lon ne maintint en vigueur que l'obligation ordinaire de porter à Pékin 
1,890,000 livres environ de cuivre. Le Fo-kien demanda ensuite à acheter plus de 
200,000 livres; le Tche-kiang, une quantité égale; le Kouy-tcheou, plus de 480,000 


MEMOIRE DE OUANG TA-I10. 269 


livres ; le Kiang-si. plus de 300,000 livres ; le Kouang-si, 460,000 (cette dernière pro- 
vince peut échanger 160,000 livres contre du sel) ; le Chen-si, qui auparavant ache- 
fait son cuivre dans le Se-tchouen, 350,000, puis 400,000 livres. Le Yun-nan eut 
donc chaque année à livrer 9 millions de livres et il ne resta rien en réserve dans 
ses Magasins. 

Ce que l’on trouve dans la terre peut cependant se conserver indéfiniment et 
rien ne saurait en être anéanti, de telle sorte qu’on doit pouvoir le retrouver lorsque 
le besoin s’en fait sentir. Il est done vraiment merveilleux que le produit annuel en 
cuivre du Yun-nan suffise à peine à la consommation annuelle et qu'il n’en reste rien 
pour l'avenir. Il semble que plus la quantité extraite est considérable, plus il s’en dé- 
pense. Que devait-on faire à l’origine alors que la production n’était que de 1 à 
2 millions de livres par an? A partir de la 4° ou de la 8° année de Kien-long, cette 
production s’est élevée successivement de 6 à 7 millions de livres à 12 ou 13 qu’elle 
atteint aujourd’hui dans la 38° et la 39° année de ce même empereur. Le nombre de 
ceux qui demandent du cuivre s’est accru en proportion et on n’arrive point encore à 
les satisfaire. Les royaumes voisins ont envoyé acheter du cuivre dans le Yun-nan au lieu 
de l’acheter dans les provinces occidentales ; de là une nouvelle cause d'insuffisance. 
Pour y remédier, le Tehe-kiang et le Kiang-sou ont recu l’ordre d'acheter leur cuivre dans 
les provinces occidentales ; de la sorte on a pu acheter du cuivre pour Pékin et pour le 
Hou-kouang. Il fut accordé en outre que si le cuivre venait à manquer dans le Yun-nan, 
on enverrait immédiatement acheter ailleurs ce qui manque. 

C'est ainsi que les choses se sont passées pendant les trente dernières années. 

Aujourd’hui, le cuivre que l’on doit envoyer ne saurait manquer sans de grands incon- 
vénients. À l’exception du Kiang-nan et du Kiang-si, toutes les provinces, Tse-min, Tsien, 
Liao, Tsin, Tsou ?, ont commencé à frapper des sapèques pour l'usage du peuple et le 
salaire des soldats. Celui-ci ne peut jamais être différé; aussi la fabrication de la monnaie 
ne doit-elle pas s’interrompre. 

Ainsi la production du cuivre dans le Yun-nan éveille une sollicitude continuelle, et, 
alors qu'elle est à peine suffisante pour les besoins propres de la province, il faut qu’elle 
subvienne encore à la fabrication de la monnaie dans toutes les autres parties de empire. 
Toutes les provinces qui reçoivent leur cuivre du Yun-nan, en retirent avantage et profit: 
le Yun-nan seul souffre et peut se plaindre. Tang-ouen, gouverneur de la province, avait 
donc bien raison de déclarer à l’empereur que la production du cuivre soulevait de 
grandes difficultés. 

Les habitants à qui incombe la charge du transport, se livrent souvent à la chasse, 
-et pendant ce temps, les voleurs qui profitent de toutes les occasions que leur offre un 
pays montagneux et accidenté, enlèvent le cuivre ; d’autres fois, les bêtes de somme meu- 


1 Le sel consommé dans les provinces intérieures de la Chine provient en grande partie des puits salins du 
Yun-nan et du Se-tchouen, dont l’exploitation est également monopolisée par l’état. 
2 Anciens noms du Tche-kiang, du Kouy-tcheou, du Kouang-tong et du Kouang-si, du Hou-nan cet du 


Hou-pe. 


270 TIEN NAN KOUANG TOCHANG. 


rent de maladie et laissent leur fardeau en route. Quelquelois aussi, on à affaire à des 
gens de mauvaise foi qui vendent le cuivre qu'ils sont chargés de porter et qui échap- 
pent à tout châtiment. Il arrive encore telles circonstances malheureuses qui font que 
les mineurs ne peuvent rembourser le capital qui leur à été avancé, tombent dans la 
misère, et pour y échapper vendent en cachette le cuivre qu'ils recueillent ou bien déser- 
tent le lieu de l'exploitation. 

Dans les mines du gouvernement, après un grand nombre de désertions de ce genre, 
on obtient facilement que la mine désertée soit confiée à d’autres, sous condition de 
payer annuellement une quantité de cuivre qui compense celle dont les déserteurs 
ont fait tort au trésor. Les habitants contractent ainsi des dettes considérables, dont 
les directeurs de la mine dissimulent souvent une partie aux mandarins, et il arrive 
qu'au bout de quelques années, on arrive à reconnaitre et à constater des déficits 
tellement grands qu'il est impossible d’en accorder dispense. Les mandarins qui ont cru 
assuré le recouvrement de celte dette, ne peuvent admettre qu’elle s’évanouisse sans rien 
produire, et l'obligation de la payer retombe injustement sur des innocents. La 23° année 
de Kien-long, il fut demandé à l’empereur lautorisation d'ajouter 125,000 taels au ca- 
pital de la mine de Tang-tan et des autres mines, pour payer les dettes ainsi contractées. 
La 33° année du même empereur, les directeurs et les officiers des mines furent condamnés 
à payer 75,000 tfaels. La dixième partie du revenu des mines ayant fait défaut, on 
accorda quatre ans après, un délai pour payer les dettes faites, mais on retint 1 pour 100 sur 
le prix du cuivre, ce qui produisit à peu près annuellement 7,000 taels qui furent réservés 
par Le trésor, pour se prémunir contre la désertion des mineurs et réparer les pertes subies. 
En résumé, si l’on songe au long temps nécessaire pour ereuser les mines et aux dépenses 
que cela entraîne, on trouve que le capital fourni par l'État est fort insuffisant, ce que per- 
sonne jusqu'à présent n’a fait remarquer, et c’est pour cela qu’au bout de très-peu de temps, 
les mines finissent toujours par s’endetter. La 37° année de Kien-long, après examen 
des comptes des mines, on reconnut qu’elles étaient débitrices de 130,000 taels, dont 
rien ne put être recouvré et dont la bonté de l'empereur ordonna la remise. 

Il a été enfin accordé que les mines puissent vendre la onzième partie du cuivre pro- 
duit, et décidé que le bénéfice ainsi fait soit appliqué au payement des dettes. Le Kiou 
de Tong-tchouen doit, avec le cuivre ainsi vendu, fabriquer de la monnaie et appliquer 
à l'extinction des dettes de la mine de « Tang-tan » les gains de cette fabrication. Quant 
au capital, que l'on a du fournir une seconde fois, on ne voit pas comment il pourra être 
remboursé. Ainsi, à peine une dette est-elle acquittée, qu'il s’en produit de nouvelles, et 
deux années se sont à peine écoulées qu'il faut les constater à nouveau. On a exigé qu'à 
la fin de chaque année, chaque directeur s'engage par écrit à ne contracter aucune dette. 
Mais si l'argent manque, comment les travailleurs pourront-ils, les mains vides et le 
ventre affamé, continuer leur rude besogne? Leur prêterez-vous l'huile, les vivres et le 
charbon nécessaires? mais dès qu'ils auront trouvé un peu de cuivre, il ira entre les 
mains du gouvernement, et ils seront ainsi éternellement retenus à leur tâche. Aussi en- 
tendez-vous ces paroles dans leur bouche : Qui nous donnera assez de forces pour suffire 


MÉMOIRE DE OUANG TA-I0. oral 


au travail de la mine ? Heureusement que le gouvernement nous donne de quoi manger 
pour que nous puissions racheter par notre labeur les dettes contractées avant nous"! 

Ainsi, quand, dans le système employé, il n’y a de tous côtés que déception, com- 
ment parviendrait-on à trouver d’abondantes sources de minerai? On ne veut tolérer 
aucun déficit dans le cuivre que doivent les mines, mais il se crée chaque jour des dettes 
presque incroyables, tellement elles sont considérables. L'huile, le riz, le charbon 
prêtés ne sont jamais rendus; les ouvriers ne se livrent qu'avec négligence et dégout à 
un travail qui ne leur rapporte aucun salaire ; ils ne sauraient être excités à mieux faire par 
le sentiment du devoir et de l'honnêteté, qui n’agit pas sur les gens de basse condi- 
tion, et, comme tous les esclaves, ils n’appliquent leur zèle qu'à la fraude. Il n’en 
serait pas ainsi, s'ils étaient attachés à leur travail par l'espoir du gain. C’est ainsi que 
la situation des mines de cuivre devient tous les jours plus mauvaise. 

Parmi les anciennes mines du Yun-nan, les plus grandes sont Tang-tan, Lou-lou, Ta- 
chouy, Meou-lou ; les plus petites Ning-tay, Kin-teha, Gi-lou; parmi les nouvelles mines, les 
plusgrandes sontSe-tche-chou, Ta-kong ; les plus petites sont Fa-kou-chan, Kiou-tou,Ouan- 
pao, Ouan-hiang, etc. Pour ce qui regarde Tsin-long-chan, Je-kien-hiun, Fong-houang-po, 
Hong-che-ngay,Ta-fong-lin, ce sont des mines placées dans leslieux les plus éloignés, au mi- 
lieu des solitudes des forêts, comme aussi Ta-ten-pée, Lao-tsien-tchou, Kin-cha, Siao-gao et 
les mines que l’on sait exister sur les frontières des provinces de Kien et de Chou, qui méritent 
à peine ce nom et sont exploitées par des gens sans aveu, qui cherchent le gain par tous les 
moyens, et fabriquent de la monnaie en cachette. C’est pour cela qu'ils choisissent les mon- 
tagnes élevées et désertes, afin d'échapper plus facilement aux recherches des soldats envoyés 
par les mandarins. Comme ils n’ont pas le capital nécessaire pour creuser profondément 
la terre, et qu'ils se contentent de chercher le minerai à la superficie de la montagne, on 
appelle leur exploitation Ki-o « nid de la poule » et Tsao-pi le minerai qu'ils recueillent. Ils 
se déplacent du reste avec la plus grande facilité. Aussi, dans des mines de cette espèce, 
y a-t-il plusieurs catégories de travailleurs, à chacune desquelles est assignée une zone 
particulière qui peut embrasser un espace de plusieurs dizaines de li, de telle sorte que 
les mandarins, même après un examen attentif, ne peuvent découvrir le lieu précis de 
l'exploitation. Ces mines ne reçoivent aucun capital du gouvernement; libres et sans rè- 
glements, elles cessent ou continuent leur exploitation et changent de place à leur volonté, 
bravant ainsi les lois et privant l'État de ce qui lui est dù. En raison de cet état de choses, 
quel gain peuvent obtenir ceux qui travaillent dans les mines de l'État, à l'exception des 
chefs tels que les Ko-teou et les Ke-tchang ? 

Ceux qui font le commerce du euivre le reçoivent d’après la répartition que font les 
Ke-tchang. Les Ko-teou et les Lou-fong qui président aux diverses opérations du traite - 


1 On sent la douloureuse ironie contenue dans ces mots. Tout ce plaidoyer éclaire certains côtés de l’ex- 
ploitation des mines restés obscurs dans l'exposé de leur organisation. On voit que le mal vient surtout du 
défaut de contrôle exercé sur les mandarins, à qui le gouvernement se contente de donner une certaine 
somme d'argent en retour d’une quantité fixe de cuivre, et qui cherchent à gagner le plus possible sur les 
mines elles-mêmes. 


272 TIEN NAN KOUANG TOCHANG. 


ment du minerai, retiennent sur chaque fonte environ 20 ou 30 livres de cuivre pour leur 
propre salaire, et partagent ensuite le reste. Mais tout le cuivre ainsi réparti n’atteint pas 
la centième partie de celui que produit la mine de Tang-tan. D'ailleurs, autant de mines, 
autant de qualités différentes de cuivre. Si l’on veut bien considérer l’affluence des acheteurs 
qui accourent de partout, il n’y a guère que les trois ou quatre grandes mines qui puis- 
sent subvenir aux demandes d'achat, et il n’y a rien d'étonnant à ce que celles-e1, que 
n’aident en rien plusieurs dizaines de mines plus petites, où le gaspillage et la dissi- 
pation sont incroyables, s’épuisent bientôt. 

Une autre difficulté que rencontre le commerce est celle du transport. Dans la pro- 
vince de Tien, manquent les routes pavées, et la charge du transport du cuivre incomibe à 
plus de 400,000 familles réparties en huit cités. Parmi ces familles, il n’y en a que 110 
ou 120,000 qui entretiennent des bêtes de somme. En définitive, comme on loue ou 
on prête ces bêtes de somme d’une ville à l’autre, il n’y a en tout dans la province que 
60 à 70,000 bœufs ou chevaux, dont 20 à 30,000 sont employés réellement à porter le 
cuivre. Or, il faut annuellement envoyer 6,300,000 livres de cuivre à Pékin; si l'on 
ajoute à ce chiffre ce qui se vend aux autres provinces, ce qui est transporté aux lieux 
où l’on fabrique les monnaies, on arrive au chiffre total de 12 millions de livres de 
cuivre à déplacer. La charge ordinaire d’un bœuf est de 80 livres; celle d’un cheval est 
le double. Il faudrait donc avoir environ 100,000 bêtes de somme pour effectuer ces 
transports au lieu de 20 ou 30,000 ; mais la pauvreté des habitants ne leur permet pas 
d’en nourrir un aussi grand nombre. La 3° année de Kien-long, il fut décidé que l’asso- 
clation Kiou de la ville de Kouang-si fournirait pour le transport des sapèques à Pékin 
14,000 bœufs, 9,000 chevaux et 3,000 barques. Cette décision ne fut pas mise en 
vigueur ; il était à craindre en effetqu’on ne püt réunir dans un court délai de tels moyens 
de transport. Il veut donc interruption dans la fabrication des sapèques. Le vice-roi du Yun- 
nan demanda à l’empereur à renvoyer à l’année suivante le transport de 2 millions de 
livres de cuivre qui restaient à envoyer à Pékin, et qui étaient déposés à Kiang-ngan 
et à Min-tche. 

Ce délai fut accordé à condition que, dans le prochain envoi, il serait tenu compte de la 
quantité totale de cuivre due par suite du retard. On admit cependant que le ministère des 
finances comblerait une partie du déficit à l’aide des 3 millions de livres qu'il avait donnés 
au ministère des travaux publics. 

La 35° année de Kien-long, les deux associations Kiou du ministère des finances, 
ayant par devers elles une réserve de 4 millions et demi de livres de cuivre, et le cuivre 
du Yun-nan ayant été conservé pendant deux années consécutives, l'État se trouva disposer 
de plus de 8 millions de livres de euivre. Il fut décidé, en outre, pour éviter tout nou 
veau déficit, qu'on ne différerait jamais les transports du euivre dù par le Yun-nan au 
Kiou de Pékin, où on frappe la monnaie, et que si cette fabrication arrivait à s’interrom- 
pre, le Yun-nan serait redevable de 3 millions et demi de livres de cuivre, que la elé- 
mence de l’empereur pourrait seule remettre. 

Aujourd’hui association Kiou de Pékin dispose de 2 millions et demi de euivre, ou 


MÉMOIRE DE OUANG TA-I0. 


(O 


fes) 
19 


de 3 à 4 millions si l’on ajoute ce que lui doit le ministère des travaux publics. La pro- 
vince de Yun-nan exporte annuellement une dizaine de millions de livres, et lon peut ju- 
ser par là combien peu autrefois il avait été question de diminution. On ne témoigne pas 
la moindre inquiétude que le cuivre exigé vienne à manquer. Le nouvel impôt oblige 
cependant le Yun-nan à donner par an 800,000 livres de euivre pour payer les dettes con- 
tractées auparavant; de sorte que Fimpôt total s'élève à plus de 7,100,000 livres de 
cuivre que la province s’épuise à fournir. 

Quant à ce qui concerne les règlements du transport, ils ont été jusqu’à présent très- 
fidèlement observés !.… La 2° année de Yong-tchen, l'usage prévalait encore de dégrader de 
leur rang les mandarins qui dépassaient le temps voulu pour le transport. On rendait 
également responsables de toute fraude les mandarins supérieurs qui les avaient désignés, 
de telle sorte que s’il y avait, par suite de vol ou de vente clandestine, un déficit dans le 
cuivre, ceux-ci devaient rembourser une partie de la perte. Dans la suite, on changea le 
délai fixé pour le transport et on accorda neuf mois pour le transport de Yuu-ning à 
Tong tcheou. En effet, à Han-keou et à Ngi-tchen, soixante jours furent reconnus néces- 
saires pour changer les paniers qui contiennent le euivre. Dans ce délai furent compris 
les retards qui proviennent du temps, de la crue des eaux, ete. De même les provinces 
de Tien et de Chou s’accordèrent entre elles un délai de cinquante-cinq jours pour lier 
et emballer le cuivre à Yun-ning et à Lou tcheou. 

De Yun-ning à Ho-kiang, et de Tehong-kin fou à Kiang-tsin, le temps à employer 
fut laissé à l'arbitre des mandarins qui président à la route; mais les mandarins supé- 
rieurs du grade de Tchen et de Tao durent envoyer des délégués pour activer la marche 
du convoi, ou même pour en changer les chefs, si ces derniers occasionnaient des retards 
par leur négligence. Les mandarins des lieux de passage, qui, par ménagements ou par 
complaisance, dissimulaient les faits relatifs au transport, furent bâtonnés comme com- 
plices. Le Tao-lay dut envoyer un mandarin militaire du grade yeou kie lou se° pour 
protéger le transport. Après le passage à Nei-tchen, cet officier dut veiller sur la route, 
afin qu'aucune cause de retard ne püt désormais être invoquée. 

Malgré toutes ces précautions, on découvrit encore des fraudes ; le ministère des 
finances exigea alors une plus grande surveillance et la rendit pour ainsi dire journa- 
lière. Le Vice-roi et le Pou-tchen augmentèrent l'impôt des mines, les obligèrent à 
pourvoir au transport du tribut, et forcèrent le Tao-tay à montrer plus de sévérité et à 
exiger des préfets et des agents inférieurs une activité de tous les instants. Aussi la 
seconde année de Kien-long 


D? 
qu'après avoir pourvu à tous les besoins, il en resta encore 3,470,000 livres. Il fut donc 


on recueillit par ces moyens une telle quantité de cuivre, 


possible de réserver fout le cuivre acheté dans les provinces occidentales, ce qui, au bout 
de dix-sept années, produisit 18 ou 19 millions de livres à l’aide desquels il devint facile 
de satisfaire aux demandes des acheteurs. Au bout de vingt-quatre années, on avait re- 

! Suit l’énumération des principales dispositions de ces règlements, déjà indiquées dans le chapitre : 
Transport des métaux. 


? Grade équivalant à peu près dans la hiérarchie militaire chinoise à notre grade de chef de bataillon. . 
Il. 35 


274 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


cueilli des deux mines de Ta-sin et de Ta-tong plus de 4 millions de livres de cuivre 
en sus de la production ordinaire, de telle sorte que l'impôt annuel dù à Pékin fut perçu 
sans difficulté. Les choses continuèrent à se passer ainsi pendant plusieurs années , 
sans que se produisit le moindre déficit. 

Mais une eau, dont la source n’est pas très-abondante, s’épuise bientôt, si chaque 
jour on en puise une quantité considérable ; ainsi en est-il pour le cuivre. Aujourd’hui 
les mandarins, qui craignent d’être obligés de payer eux-mêmes les déficits, ont aug- 
menté l'impôt de toutes les mines et exigent des hommes le travail des animaux. Les seribes 
et les satellites font à leur tour peser sur le peuple le joug qui pèse sur eux, et en exlor- 
quent, par la force et par les coups, tout ce qu'ils peuvent. De là, une grande misère. 
Ainsi le corps de l'empire est ravagé et ses forces diminuent peu à peu. 

La cause de cette insuffisance de production, qui ne permet pas de satisfaire aux besoins 
du commerce, parait être surtout la diminution du capital des mines et le taux du prix du 
cuivre. Sion augmentait le capital de façon à pourvoir aux besoins des mines et à les munir 
de tout ce qui est nécessaire pour l'exploitation, sans doute l’état des choses s’améliorerait, 
et la production du cuivre deviendrait abondante. C’est ainsi que le Siun-fou Ngay Pi-ta l’a- 
vait annoncé pour les mines de Tang-tan etde Ta-chouy. A l’origine, elles ne produisaient 
pas une grande quantité de cuivre, mais au bout de quelques années elles donnèrent 6, 7, 
puis 8 ou 9 millions de livres de cuivre par an. Aujourd’hui, après trente années, plu- 
sieurs millions sont prélevés par an pour le tribut; mais le minerai est devenu moins 
abondant, les galeries plus longues et plus profondes, le prix des vivres, du bois et du 
charbon a augmenté, et cependant on exige chaque année, soit pour Pékin, soit pour les 
autres parties de la province, plus de 10 millions de livres de cuivre pour la fabrication 
des sapèques. On est obligé de recourir avec de grandes difficultés aux provinces ocei- 
dentales. Le Siun-fou Lieou-tsao obtint, à la suite de deux demandes à l’empereur, que 
le prix du cuivre des mines de Tang-tan et de Ta-tou füt augmenté, ce dont les mineurs 
lui furent très-reconnaissants.… 

La 18° année de Kien-long, on augmenta de plus de cinquante le nombre des associa- 
tions chargées, à Tong-tchouen, de la fabrication des sapèques. Elles frappèrent plus 
de 229,000 ligatures au delà du chiffre accoutumé, et firent plus de 45,000 taels de bé- 
néfices nets. Dans l’espace de neuf années, les bénéfices s’élevèrent à plus de 400,000 
taels. L'argent afflua alors dans les trésors de la province, et l’on put augmenter le capital 
des mines les plus nécessiteuses. Pendant une période de plus de vingt ans, la ville de 
Tong-tchouen augmenta de plus de moitié la fabrication de la monnaie, et fit annuelle- 
ment de ce chef plus de 37,000 taels de bénéfices, qu’elle employa à accroître le capital 
des mines de Tang-tan, de Ta-chouy et de deux autres. La 25° année, cette ressource 
devint insuffisante, et l'on accorda une augmentation du prix du euivre. De plus, les asso- 
cations de Lin-ngan furent invitées à augmenter également de moitié la fabrication de la 
monnaie. La 28° année, on dut demander de nouveau une autre augmentation, et il fut 
permis à toutes les associations de Tong-tchouen d'augmenter de moitié la production 
mensuelle des sapèques pendant les trois mois d'hiver. La 30° année, comme la production 


MÉMOIRE DE OUANG TA-I0. 


LRO] 


75 
du cuivre dans les mines avait été très-abondante, le prix en fut trouvé trop élevé et le 
gain de Tong-tchouen trop faible, et il fut permis de nouveau d'augmenter de moitié la 
production annuelle totale des sapèques. 

De plus, des associations se formèrent aussi à Ta-Iy fou, pour frapper de la monnaie; 
elles firent un gain annuel de plus de 8,000 taels, qui furent employés à secourir les mines 
de Ta-sin, Ta-tong et Gi-tou. Dans l'intervalle de douze années, cinq ou six associations se 
formèrent ainsi, sans cependant que la fabrication des sapèques dans la province de Tien 
répondit à sa production en cuivre. Il y avait déjà longtemps que les mineurs avaient com- 
mencé à frapper des sapèques pour subvenir en partie aux dépenses d'exploitation. 

Aujourd’hui, plusieurs dizaines de mines et des centaines de mille de travailleurs, ac- 
courus de tous côtés pour gagner leur vie, tombent dans la pauvreté. La production du 
cuivre diminue chaque jour. Ce n’est pas que la direction de l'exploitation du cuivre 
par l'État n'offre certains avantages ; le mal réside dans l'impossibilité de diminuer les dé- 
penses auxquelles on s’est accoutumé, et surtout dans les exigences des autres provinces. Il 
ne faut pas oublier que le Kiang-nan, le Kiang-si, le Tehe-kiang, le Fo-kien, le Chen-si, le 
Hou-pe, le Kouang-tong, le Kouang-si, le Kouy-tcheou viennent s’approvisionner de 
cuivre dans le Vun-nan qui est ainsi toujours occupé pour les autres. 

La sainte dynastie actuelle, qui réunit tout l'empire sous sa domination, le considère 
comme une seule et même famille : c’est pourquoi, quelque éloignées que soient les pro- 
vinces les unes des autres, elles jouissent des mêmes biens qué si elles étaient situées dans 
le Yun-nan même, et on leur concède les mêmes quantités de cuivre qu'à la province 
de Tien elle-même. J'ai vu le diplôme par lequel la provinee du Chen-si, l’année passée, 
a obtenu la permission d'ouvrir la mine de Ning-kiang-kouang-tong; 1l en a été retiré 
en l’espace de deux mois 2,400 livres de cuivre bien épuré, provenant de 5 à 6,000 livres 
de minerai. Il n’est donc pas douteux qu'en poussant l'exploitation plus avant, on n'arrive 
à une production fort considérable ; ce résultat serait d’une grande importance. J'ai en- 
tendu dire également que dans le Hou-pe, à Han-fong et Siuen-ngen!, on venait d'ouvrir 
deux mines qui avaient déjà fourni plus de 15,000 livres de euivre; il ya là également un 
heureux indice d’une fructueuse et prochaine exploitation. De même les provinces de 
Tsin et de Tsou ont commencé depuis quelques années à ouvrir des mines, et je crois 
qu'elles ont déjà obtenu quelques dizaines de mille livres de cuivre. Néanmoins, toutes ces 
provinces continuent à acheter au Yun-nan la même quantité de cuivre que par le passé. 
Je voudrais qu’elles n’achetassent que ce qui est nécessaire pour compléter leur propre pro- 
duction. Ainsi le Kouy-tcheou qui avait vingt-six fourneaux de cuivre avait diminué sa de- 
mande au Yun-nan de 23 mao, c’est-à-dire d’une centaine de mille livres de métal. Peu 
d'années après, cinq feux furent éteints dans cette province, et il fut décidé qu’elle fournirait 
«à Pékin » suivant l'usage 447,000 livres de euivre, dont 390,660 seraient achetées dans le 
Yun-nan. I] y eut en définitive une diminution de 70,000 livres sur ce que fournissait au- 
paravant cette dernière province. Ce sont là de faibles allégements qui ne nous dispensent 


1 Villes situées au sud de Che-nan fou dans la région montagneuse qui se trouve aux frontières du Se- 
tchouen, du Hou-nan et du Hou-pe. 


276 TIEN NAN KOUANG TOHANG. 


encore m de travail ni d’inquiétudes. Cette année-ei, le Chen-si a annoncé à l’empereur 
que l'association Kiou avait une réserve de 251,400 livres de cuivre, ou de plus de 
300,000 livres en y joignant le cuivre provenant des provinces occidentales. Malgré cela, 
celle province a envoyé recevoir dans le VYun-nan 626,200 livres de cuivre, ce qui forme 
un total de plus de 900,000 livres dont elle va pouvoir disposer, sans compter ce que vont 
produire ses mines propres. Je ne puis done qu'insister pour qu’on diminue les quantités 
que le Yun-nan doit fournir aux autres provinces. 

Parlerai-je des provinces de Hou-pe, Kiang-nan, Kiang-si? Elles achetaient autrefois 
le cuivre occidental, au prix de 17°.5 les 100 livres; elles ne le payent que 11 dans le 
Yun-nan; mais elles dépensent pour le transport de 5 à 6 laels; ce cuivre leur revient 
done à 16 ou 17 faels, par conséquent, à bien peu de chose près, au même prix que le 
cuivre occidental, surtout si l’on ajoute les frais que doivent faire les préfets des villes 
situées sur la route pour les mandarins qui président au transport. 

Il serait donc plus avantageux que les provinces ci-dessus désignées s’abstiennent d’a- 
cheter leur cuivre dans le Yun-nan, et envoient chaque année un mandarin demander le 
cuivre occidental qui leur est nécessaire. De la sorte, on diminuerait de 1 ou ? millions de 
livres le cuivre exigé du Yun-nan, la production s’accroitrait rapidement, et les mines 
cesseraient de manquer du nécessaire, comme l'avait constaté Yang Ouen-ting, qui s'était 
beaucoup occupé de cette question. « De son temps, » les dettes avaient crû dans une 
telle proportion que l’on avait dù renvoyer les débiteurs des mines. Ceux-ci, ne pouvant 
acheter le cuivre à crédit pour s'acquitter, s'étaient enfuis et avaient quitté leur profes- 
sion; il fut alors décidé, la 16° année de Kien-long, que le trésor public ferait des avances 
pour acquitter ainsi les dettes contractées dans les mines. Les mandarins furent privés 
de leur traitement jusqu'à parfait payement. Ces dettes avaient atteint un chiffre tel que 
tous les officiers chargés des mines furent condamnés à rembourser 130,000 faels, et que 
l'on dut emprunter pour les envoyer à Pékin, plus de 2,600,000 livres de cuivre dont le 
prix ne fut pas payé « par l’état, » mais bien inserit en diminution de la dette. Les direc- 
teurs des mines durent payer ainsi près de 140,000 faels d’or. Plus les dettes augmentent, 
plus les châtiments sont sévères. Mais on exige plus de euivre qu'il n’en est produit, et 
par crainte, les mandarins accusent aux douanes une quantité de cuivre supérieure à la 
quantité réelle. Si la loi était sévèrement appliquée, ce mensonge devrait être puni de la 
peine de mort. 

Les mines et les fourneaux occupent environ 10 millions de travailleurs, dont le sort 
est à la merci des directeurs des mines et qui, placés entre une double nécessité, ne savent 
s'ils doivent rester ou s'enfuir. Chaque année le cuivre dù à titre d'impôt s’accumule de 
facon à atteindre bientôt 11,000,000 de livres. 

L'office des mandarins n’est facile à remplir que dans les grandes mines. Le règle- 
ment de l’année présente exige qu'ils rendent mensuellement des comptes exacts à leurs 
supérieurs. Aussi n’osent-ils pas payer le cuivre d'avance, afin d'éviter de contracter 


! C'est à-dire le cuivre importé en Chine par mer. 


MÉMOIRE DE OUANG TA-10. 277 


de nouvelles dettes. Mais leurs supérieurs ne veulent accepter aucune responsabilité, et, 
craignant d’être obligés de payer de leur poche sil vient à manquer quelque chose, 
ils retiennent 1.8 par 100 livres sur le prix du cuivre acheté. Ilen résulte que les mi- 
neurs qui ne reçoivent pas un salaire suffisant pour leurs travaux se retirent : telle 
est la difficulté de la situation actuelle. Cependant, comme la produelion de lFannée 
est d'environ 11,000,000 de livres de cuivre, on peut mieux augurer de l'avenir, el 
espérer que les mines pourraient rendre le capital et les vivres qui leur seraient prètés. La 
23° année de Kien-long, la mine de Tang-lan avait reçu 50,000 faels qui devaient être 
remboursés au bout de cinq ans ; de même celles de Ta-chouy et de Lou-lou avaient em 
prunté pour dix ans 75,000 faels. En outre de cette addition à leur capital, les mines 
avaient reçu des seecurs en argent pour les trar ‘leurs. Leur production s’est accrue de 
facon, non-seulement à payer toutes ces delte:. mais encore à faire un gain considé- 
rable. La 36° année, il fut également accordé à titre de prêt une subvention aux habi- 
tants des mines. Aujourd’hui, contre des prêts d'argent plus faibles, on relient des quantités 
de cuivre d’une valeur plus grande comme gage, et on exige le remboursement dans un 
délai de trois années. Il en résulte les plus grandes pertes pour !es habitants des 
mines. 

Aussi devons-nous nous jeter aux pieds de sa Très-sainte Majesté, qu. de son palais jette 
de cléments regards à des milliers de li de distance, pour lui demander de se montrer 
bienveillante envers ses fidèles esclaves. Autrefois, je l'avoue, par suite d’un excès d’in- 
dulgence, les débiteurs de Etat ont pu s'enfuir, mais le nouvel état de choses, qui n’ad- 
met qu'un délai de deux mois, entraine une solhcitude extraordinare. On prête, il'est vrai, 
plus de 70,000 faels, mais ils doivent être rendus entièrement au bout de trois ou quatre 
années. Cette manière de fane est mo as favorable au peuple que l’ancienne. Dans la 34° 
et la 37° année du règne, il fu’ ordonne que les propriétaires des mines fussent abondam- 
ment pourvus de vivres et de corbushble, et ceux-ci, qui recevaient mensuellement le 
prix du cuivre, pouvaient rembourser avec intérêt ces denrées et payer le salaire des 
travailleurs. Aussi lPouvrage étailal activer ent poussé. Aujourd'hui, au contraire, le 
cuivre est retenu comme gage «es emprunts, les vivres que lon fournit sont comptés à 
un intérêt énorme et payés sur le cuivre. Si quelque retard est apporté dans le règlement, 
on le reporte à l’année suivante en accumulant l'intérêt. Les mandarins supérieurs en 
font sans examen supporter 1 peine aux directeurs des mines. 

Cette année, il a été ouvert sept nouvelles mines. Le ministre des finances a décrété 
que le trésor publie ferait aux Lou-fou et aux Cha-tin lavance indispensable aux pre- 
mières fouilles. Il est certain alors qu'en admettant même qu'ils ne trouvent pas une 
énorme quantité de minerai, ils ne songeront plus à fuir et qu'ils pourront payer la 
redevance exigée. Trop de rigueur dans l’observation des règlements et dans la réclama-. 
tion des sommes prêtées engendre la fraude et le découragement. 

Quant à un projet d'organisation générale, embrassant toutes les mines, c’est un sujet 
qui demanderait de plus longs développements. Jai vu, là 25° année de l'empereur Kien- 
long, Le rapport adressé à Pékin par mon prédécesseur, le Siun-fou Lieou-tsao; il contient 


278 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


ce passage : Tant en Chine que sur les frontières de l’empire, on fabrique de la monnaie 
avec le cuivre des mines de Tang-tan et de Ta-lou, qui doivent subvenir ainsi à toutes 
les demandes, en ne recevant des autres mines qu'une aide insuffisante. Les entrailles de la 
terre s’épuisent déjà d’une façon sensible. Dans les nouvelles mines, il est vrai, sont encore 
des sources abondantes de minerai, mais rien n’est réservé pour l'avenir. Dans leur voi- 
sinage, des indices de gisement ne manquent pas; mais il faut des mois et des années 
pour arriver au gisement lui-même; il faut réunir des milliers de travailleurs, et quand, 
après s'être prêté une aide mutuelle, les mineurs arrivent enfin à produire du euivre, ils 
doivent le livrer aux mandarins contre un prix insuffisant. 11 fut exposé à l’empereur que 
la mine de Tsin-long et quelques autres, pendant la 24° année de son règne, qui conte- 
nait un mois intercalaire, c’est-à-dire pendant treize mois, n'avaient produit que 480,000 
livres de cuivre. L'année suivante, au 2° mois, on augmenta le prix du cuivre; la 
26° année, au 3° mois, la production s’était élevée à plus de 1,000,000 de livres. Le bénéfice 
augmenta, en dehors même de l'accroissement du prix du cuivre, de 29 mille et quelques 
centaines de taels, c’est-à-dire fut de 10,000 faels plus considérable que celui de la 
9 


9 
cel 


4 année. De plus, chaque mine recut encore, en raison de l’augmentation du prix, 
12,000 taels. Tel est le bénéfice qu'elles durent à la bonté paternelle de l’empereur. 

De même dans l’année 35°, le Siun-fou Min-tse exposa à l’empereur qu'il y a dans le 
Yun-nan de hautes montagnes contenant de profonds filons métalliques. Leur habile 
exploitation produirait non-seulement des dizaines de millions de livres de cuivre, mais 
encore donnerait la richesse à une innombrable population. Les petites mines elles- 
mêmes pourraient facilement faire des bénéfices. Aujourd'hui, elles ne gagnent rien 
parce qu'elles manquent de bras pour atteindre les métaux qui sont trop éloignés dans 
l'intérieur de la terre; mais dans les montagnes récemment ouvertes, 1l n’est plus néces- 
saire d'aller si avant et de faire ainsi des dépenses considérables; si dans ces lieux 
retirés, les bras ne sont point nombreux, les bois et le charbon abondent : c’est ainsi 
que les petites mines pourraient faire d'aussi gros bénéfices que les grandes. 

Aujourd'hui, les mineurs espèrent sans travail trouver de grandes masses de métaux, 
imilant en cela les officiers préposés aux mines, qui vivent dans l’oisiveté, attendant que 
le cuivre soit obtenu pour en faire la répartition. Si le métal n’est pas trouvé, ce n’est 
point qu'il n'existe pas, c'est que l’on ne travaille pas suffisamment pour l'obtenir. Com- 
bien y a-t-il de gens qui vendent du cuivre ou qui fabriquent de la monnaie en cachette! 

C'est certainement cette négligence qui est cause que la production de toutes les petites 
mines n’atteint pas la onzième partie de celle de Tang-tan et de Ta-chouy. D'ailleurs les 
mines sont trop près des villes. S'il en était autrement, que l’on accueillit bien ceux qui 
viennent de loin, en assignant à chacun un travail approprié à ses facultés; si l’on dési- 
gnait pour commander aux autres des gens au cœur droit et aux mœurs pures, qui ap- 
porteraient une partie du capital et fourniraient le riz, l'huile, le bois, le charbon néces- 
saires, la prospérité ne tarderait pas sans doute à renaître. Les travailleurs, confiants 
dans leurs chefs, réuniraient tous leurs efforts, sauraient vaincre toutes les difficultés, éviter 
toutes les dépenses inutiles, et les pertes deviendraient plus rares. Si association Kiou 


MEMOIRE DE OUANG TA-10. 279 


de Kouang-si fabriquait de nouveau de la monnaie, et que le gain füt appliqué à aug- 
menter le prix du cuivre, ilne serait plus nécessaire de transporter le cuivre d’Ouy-yuen, de 
Tchan-y et des autres montagnes dans la province de Kien «Kouy-tcheou; » de même que 
celui des mines de Lou-nan,Kien-chouy et Mong-tse n'aurait plus à être dirigé vers le Liao. 

En somme, on voit que tout le monde est d'avis qu'il faut augmenter le capital des 
petites mines. 

Dans la province de Tien, les bêtes de somme manquent pour le transport des métaux, 
etil n°ya point de réserve de cuivre assez considérable pour que l'association Kiou, chargée 
de la fonte des monnaies, ne soit sans cesse obligée de presser le transport el de ne lisser 
aucun répit. Les réclamations devaneent la production elle-même. En outre, le Kiou de 
Pékin à fabriqué des sapèques sans relâche jusqu'au 5° ou 6° mois de l’année actuelle. 
Aussi, en deux ans, la province du Yun-nan a-t-elle dû faire huit envois de cuivre à Pékin 
pour satisfaire aux demandes des deux associations chargées de fabriquer les sapèques, 
et les approvisionner de cuivre jusqu'au 7° mois environ de la 42° année. À l'automne 
et à l’hiver de l’année prochaine, jusqu'au printemps et à l'été de l’année suivante, il y 
aura encore à transporter plus de 6,300,000 livres pour l'association Kiou de Pékin, qui 
sera ainsi munie jusqu'à l'automne de l’année 43°. 

J'ai souvent examiné comment autrefois on transportait à Pékin la monnaie fabriquée 
dans le Yun-nan. J'ai trouvé qu'en suivant la route de terre, par Kouang-si fou et 
Kouang-nan, jusqu'à ce qu'on atteignit les fleuves du Liao-si, il y avait dans l'intervalle, 
19 ünh, tcheou ou hien, dont lesmandarins s’occupaient à rassembler, proportionnellement 
à l'autorité dont ils disposent et à la longueur de la route à parcourir, les bêtes de 
somme nécessaires. Les petits mandarins fournissaient quelques dizaines de bœufs et de 
chevaux; les grands, au moins 300, et quelquefois jusqu'à 1,200 bêtes de somme. Ils 
payaient d'avance le prix de location. Malheureusement, pendant les chaleurs, les bêtes 
de somme et ceux qui les conduisaient tombaient souvent malades et ne pouvaient conti- 
nuer leur route. Les mandarins avaient acheté 378 bœufs, autant de chars, répartis en 
9 stations, et 588 chevaux répartis en 7 autres stations. 

Mais cet état de choses fut changé ; on ordonna de cesser la fabrication des sapèques à 
Kouang-si, et en même temps les provinces de Kiang-nan, Tse-min, Hou-pe, Hou-nan, 
Kouang-tong, cessèrent d'apporter du cuivre à Pékin ; ee fut le Yun-nan qui dut acheter et 
apporter à Pékin une quantité de cuivre équivalant à leur impôt. Il en résulta pour cette 
dernière province l'obligation d'envoyer chaque année à Yun-ning plus de 4,400,000 livres 
de cuivre, dont moitié par la route de Tong-tchouen et Tehao-tong, et moitié par celle de 
Siun-tien et Ouei-ning; elle dut y ajouter 1,891,440 livres de cuivre pour l'équivalent 
des sapèques qui se frappaient avant à Kouang-si. La 7° année de Kien-long, on com- 
mença à ouvrir le port de Yen-tsin à la navigation, et le cuivre fut alors dirigé mi- 
partie sur Vun-ning par la route de terre, mi-partie sur Lou tcheou par la route fluviale. 
La 10° année du mème empereur, le port de Lo-sin près de Ouei-ning s’ouvrit aussi à 
la navigation, et le cuivre de Siun-tien, qui suivait jusque-là la route de terre, put à son 
tour être envoyé par eau à Lou tcheou. La 14° année du même empereur, la navigation 


280 TIEN NAN KOUANG TCHANG. 


du Kin-cha kiang fut améliorée de telle sorte que de Yun-chang et de Hoang-tsao-pin 
tous les transports purent également se fai:e par eau. De Tong-tchouen et de Tchao- 
tong, le euivre fut done transporté à Ven-isin et à Hoang-tsao-pin, d’où il put être 
transporté par barques jusqu'à Lou tcheou. Tong-tchoue et Tehao-tong se procurent 
les bêtes de somme nécessaires dans le Kouy-teheou, le Se-ichouen et à Pang-kiun hien. 
L'usage veut que les préfets de ces deux villes marc ent au fer rouge les bœufs et les che- 
vaux qu'ils louent pour cet usage, et avancent aux propriétaires le prix d'achat, qui est de 
7 taels pour un cheval, el de 6 taels pour quatre bœufs et un char. Cette somme est 
remboursée ensuite à FEtat par des retenues faites sur le payement des transports succes- 
sifs. Îl existe d’ailleurs des familles connues ou des associations qui acceptent la respon- 
sabilité du trans; ? pou un délai déterminé, douze ans par exemple, et il y a des lois 
spéciales qui les punissen: dans le cas de manquement à leurs engagements. Du reste, au 
bout de quelque iemps, ‘à confiance s'établit entre les mandarins et le peuple, de telle 
sorte qu'il n'y a plus rien à craindre. 

Les préfets d'Ouei-ning et de Siun-tien emploient aujourd’hui le même moyen pour les 
transports etavancent de l'argent à certaines familles pour qu'elles puissent acheter des bêles 
de somme. Quelque difficulté s'élève j:: 'ois de ce que, les chevaux et les bœufs une fois 
achetés, 11 y a souvent du retard dans l’éposue des transports, et par suit- dans les payements; 
aussi a-{-il été décidé cette année que pendant Fhiver et l'automne il serait fait des envois 
réguliers de cuivre, et que les mines grandes ou petites devraient fournir des métaux pour 
ces envois, même en en achetant aux mines voisines si elles en manquent elles-mêmes. 
Les mandarins envoyés pour ces achats perdent souvent en route un temps inutile et se 
détournent à droite et à gauche pour ne laisser échapper aueune occasion de commereer et 
de faire du gain. Aussi le même règlement dispose-t-il que les mines de Te-chen, Je- 
kien, Pe-iang etles autres mines plus éloignées enverront leur cuivre à Hia-kouan, et que 
de là, le préfet de Ta-ly fera parvenir directement aux provinces de Kien et de Liao le cuivre 
que celles-ci auront acheté. La route est en effet plus directe. Les mines de Gi-tou, de 
Tsin-long et les autres plus rapprochées de Yun-nan fou livrent leur cuivre aux manda- 
rins envoyés à cet effet, et ceux-ci doivent en hâter le transport jusqu'aux points d’em- 
barquement, car les chevaux et les bœufs ne peuvent être détournés longtemps des tra- 
vaux agricoles, et être exposés trop longtemps aux maladies qui atteignent souvent les 
bestiaux en été. 

Autrefois, tout le cuivre des villes de Lin-ngan et de Lou-nan était entièrement 
transporté à Mi-kee hien, au bourg de Tehou-iuen, où attendaient les mandarins chargés 
du transport. Dans la suite, ceux-ci pour n'avoir pas à attendre, allèrent directement aux 
mines; mais, à ce moment, la province manquait de cuivre, et l'on ne put acheter tout ce 
qui était demandé. 

Aussi, de même que l'on à établi un dépôt du euivre de toutes les mines de l'Ouest à 
Yun-nan fou, dans lequel les mandarins peuvent puiser, en cas de déficit temporaire, 
pour assurer loujours le service des transports; ainsi en a-t-il été pour le cuivre 


de Lin-ngan et de Eou-nan, qui est aujourd'hui emmagasiné à Tehou-iuen tsen. 


MÉMOIRE DE OUANG TA-10. 81 


où un mandarin de l’ordre Æiun-kien en à la garde. Les choses étant ainsi, les envoyés 
des préfets peuvent acheter sans perte de temps et faire transporter rapidement tout le cuivre 
qui leur est nécessaire. Si on observait de plus en plus strictement les règlements des 
transports, si les payements et les mesures à prendre étaient répartüs intelligemment entre 
les différents préfets des lieux de passage, si enfin, pendant les chaleurs, on interrompait 
ce service de façon à laisser les chevaux et les bœufs libres pour les travaux des champs 
et à éviter les maladies de cette saison, on faciliterait beaucoup la tâche des mandarins. 
D'un autre côté, Siun-tien pourrait délivrer une partie du euivre qui serait transportée 
par Kouang-si, Kouang-nan et Pee-see, comme l'étaient autrefois les monnaies, et l’on y 
gagnerait une accélération sensible dans le transport de l'impôt dû à Pékin. Ainsi, d’un 
seul changement, adviendraient de nombreux avantages. Il ne resterait plus qu'à choisir 
l'administrateur habile qui serait chargé de faire fonctionner tout le système. 

Un homme d’une sagesse profonde, Ouang-Tchang, pensait qu'il était nécessaire 
d’avoir à la tête de l'administration des métaux, un homme qui en connaisse à fond toutes 
les particularités. Les vicissitudes des temps font que telle chose, bonne autrefois, est aujour- 
d’hui nuisible. En résumé, l'augmentation de la fabrication des sapèques et celles du prix 
du cuivre dans le Yun-nan, me paraissent les remèdes à apporter à la situation précaire du 
peuple des mines; on devrait aussi provoquer de la part des provinces un achat col- 
lectif de tout le cuivre qui leur est nécessaire. 

Je soumets ce travail à l’empereur, pour qu'il décide ce qu'il conviendrait de 


changer dans l’état de choses actuel. 


NOTES ANTHROPOLOGIQUES 


SUR L'INDO-CHINE 


Par M. 1e Doctreur THOREL, 


CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR. 


VOYAGE EN INDO-CHINE. PL.I 


de la parle de 


L'INDO = CHINE 


située sur liUnéraire de la commission d'exploration 


par le DRE.JOUBERT 
completée pour les regions VOISINES 
par le D® H.E.SAUVAGE. 


SIGNES CONVENTIONNELS 


Crarite et Sierite 


Gneiss 


Zorphyres »7/2 laphyres 
Tadschastes et£iritines 


Jchistes anciens 


Devonien ’ 


Trtas 


_Alluvions et pierre de Fienr-hoa))}; 


Oplites 


foches J olcariques. 


,B°de Touran 


rave chez Erhard 12r. Dusuay -Trowun HACHETTE et C£ Paris, Ip. Fraillers 
On J à 


AVANT-PROPOS 


I nya pas de branche de l’histoire naturelle plus intéressante, sans doute, que celle 
qui comprend létude de l'homme ; mais il n’en est peut-être pas en même temps de plus 
difficile à étudier avee soin en voyage. Ce qu'il faudrait, au point où en est arrivée l’anthro- 
pologie, et à une époque de précision scientifique comme la nôtre, ce serait beaucoup 
plus des mensurations prises sur le vivant à l’aide d'instruments convenables et des sque- 
lettes pouvant servir à ceux qui font en Europe une étude spéciale de cette science, que des 
observalions générales faites de visu. Mais, obligé d'organiser notre voyage en moins de 
quinze jours avec les ressources encore presque nulles de la Cochinchine, nous avons dù 
partir sans aucun instrument, et même, nous devons le dire, sans les renseignements suf- 
fisants pour tirer le meilleur parti possible de tout ce que nous allions voir. Aurions-nous 
eu du reste ces moyens, qu'il nous eût été très-difficile, dans un voyage aussi rapide el 
dans lequel la distance parcourue et les difficultés ont été aussi grandes que dans celui du 
Mékong, de recueillir des pièces anatomiques et même beaucoup de mesures. Nos res- 
sources péeuniaires étaient d’ailleurs très-restreintes. Toutes ces difficultés se sont” 
trouvées encore augmentées de ce qu'une très-grande partie de notre route s’est faite 
à pied à travers les forêts. Ajoutons enfin qu'étant chargés de plusieurs autres travaux, il 
nous restait Infäniment trop peu de temps, en arrivant aux étapes, pour faire nos recher- 
ches anthropologiques avec tout le soin et la conscience qu'elles réclament. Nous devions 
nous borner, la plupart du temps, à noter le soir les principaux faits qui s’étaient offerts à 
nous dans la journée *. 

Malgré les difficultés qu'on rencontre partout pour recueillir des pièces anatomiques, 


1 Déjà dans nos Votes médicales du voyage d'expiration du Mékong et de la Cochinchme, nous avons traité très- 
sommairement l'anthropologie du voyage. Ce sont les conclusions que nous avons données dans ce travail que 
nous développerons ici, et auxquelles nous ajouterons tout ce qu’il nous a été possible de recueillir sur ce 


sujet. 


286 AVANT-PROPOS. 


difficultés qui sont plus grandes en Indo-Chine que partout ailleurs, à cause de la pratique 
de lincinération des morts qui est en usage dans la plus grande partie du pays, et du culte 
dont les morts sont l'objet dans l’autre partie, il nous est arrivé plusieurs fois, cependant, de 
rencontrer des squelettes dans les campagnes. Mais comme ces trouvailles ont eu lieu en 
Chine dans des régions où existent quatre ou cinq races distinctes, et que nous ignorions 
celle à laquelle appartenaient ces ossements, nous avons préféré les abandonner. D’ail- 
leurs, à cette période du voyage, non-seulement nous ne pouvions rien recueillir, mais 
encore nous étions dans la nécessité de réduire nos bagages, en raison des difficultés du 
transport el de l’exiguité de nos ressources, à nos notes et aux quelques instruments de 
travail les plus indispensables. 

Après ce préambule, destiné à justifier la grande imperfection des notes suivantes que 
nous devions cependant rédiger, ne serait-ce qu'afin de montrer tout ce qu'il reste à faire 
dans cette branche en Indo-Chine, on comprendra que nous nous bornions à traiter la 
matière d’une façon générale. Nous laissons à d’autres, mieux préparés et placés dans de 
meilleures conditions, le soin d'étudier plus complétement et d’une façon plus scientifique 
les races si intéressantes de lndo-Chine. Nous traiterons notre sujeten nous plaçant exelu- 
sivement au point de vue des caractères naturels de ces peuples, renvoyant à la partie des- 
criplive du voyage pour les renseignements historiques et ethnographiques qui peuvent 
compléter ou confirmer nos conelusions. 

Pour la collection des types de ces races, nous renvoyons aux nombreux dessins qui 
ont été exécutés par notre compagnon, M. L. Delaporte, et qui sont contenus dans le 
eurieux et riche album du voyage qu'il s’est donné tant de peine pour recueillir. Parmi ces 
nombreux dessins, beaucoup ont été faits en vue du costume des différentes populations, el 
un grand nombre d’autres ont été pris à peu près indistinctement sur les individus que 
l’on rencontrait aux haltes et que l’on décidait, non sans difficulté parfois, à se prêter à 
celte opération. On conçoit done que beaucoup ne présentent pas les traits dominants 
de chacun des rameaux indo-chinois ou des divers groupes de populations mixtes. Aussi, ne 
renverrons-nous qu'à ceux qui offrent les traits caractéristiques de ces rameaux ou de ces 
groupes !. 

Nous avons adopté pour ce travail la classification de Cuvier, modifiée par Omallius 
d'Halloy ?, qui divise l’espèce humaine en cinq races : la blanche, la jaune, la brune, la 
noire et la rouge; les trois premières correspondent à trois types bien distinets admis par- 
tout, le Caucasique, le Mongolique, et F'Éthiopien ou Nègre. Malgré les incertitudes, les 
défectuosités de cette classification, qui suppose résolue la question à peu près insoluble 
et inabordable dans l’état actuel de la science, de Funité de l'espèce humaine, nous avons 
dû la conserver, faute d’une meilleure : ellé suffit du reste parfaitement pour ce que nous 
avons à dire. Toutefois, faisons remarquer qu'il nous est impossible de faire rentrer les 
indo-Chinois dans la race brune, comme l’a fait d'Omalius d’'Halloy, tout en reconnaissant 
qu'ils se ratlachaient davantage à la race jaune. Pour nous, la somme des caractères qui 


! Voyez surtout Atlas, 2° partie, planches 1, II, X, XXIX, XXXII, XXX V, XXXIX, XUIII, XL VIT. 
? Des races humaines, éléments d'ethnographie, 5° édition, 1869. 


AVANT-PROPOS. 287 


rapprochent les Indo-Chinois de la race jaune, aussi bien au point de vue de leurs carac- 
tères physiques que de leur organisation cérébro-mentale, est infiniment plus considé- 
rable que celle en têfe desquels se place la couleur de leur peau et qui les relie à la race 
brune. Cette teinte brune n'existe chez eux qu'à l’état exceptionnel, la couleur franche- 
ment jaune étant celle qui existe toujours sur les types purs, et elle ne saurait les ca- 
ractériser. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce fait en parlant des Indo-Chinois en 
général. 

Disons, en terminant cette introduction, dans quel sens il faudra entendre plusieurs 
expressions dont la signification ne peut être définie complétement dans l’état présent de la 
science, parce qu’elle varie selon qu’on est monogéniste ou polygéniste : nous nous bor- 
nerons à employer le mot type dans le sens purement descriptif, afin de caractériser un 
ensemble de caractères. Quant au mot race, qui implique l'unité de l’espèce et équivaut 
au mot espèce pour les polygénistes, nous nous en servirons également dans le même 
sens ; mais il faudra, selon le point de vue auquel on se placera, sous-entendre le mot 
rameau où variété, où mème espèce. Cette absence d’une nomenclature anthropologique 
bien définie, ou du moins uniforme, rend difficiles toutes les recherches sur les races 
humaines, et contribuera pendant longtemps encore à jeter de la confusion dans tous les 
travaux qui se feront sur cette science. 

Quant à la marche que nous avons adoptée dans ce travail, elle est conforme à celle 
que nous avons suivie en explorant la vallée du Mékong. Après avoir tracé très-suecine- 
tement les caractères physiques particuliers des différents rameaux de la race mongole qui 
habitent le sud de l’Indo-Chine, nous étudierons les caractères généraux communs à tous 
ces peuples. Ce n’est qu'en second lieu que nous déerirons les nombreux sauvages de cette 
partie de l'Asie, lesquels, au point de vue ethnologique, devraient être placés les premiers, 
puisqu'ils sont les véritables aborigènes, mais à qui leur nombre moins grand et l’état 
rudimentaire de leur civilisation, assignent une place moins importante. Nous termine- 
rons ces notes en disant quelques mots des Chinois : le rôle considérable qu'ils sont 
appelés à jouer dans l’économie générale du globe est digne de toute Pattention de 
Tobservateur. 


D' THOREL. 


NOTES ANTHROPOLOGIQUES 


SUR L'INDO-CHINE 


PAR 


M. Le D' THOREL 


DIVISION DES RACES DE L'INDO-CHINE. 


Les rameaux humains que nous avons eu l’occasion d'observer pendant notre 
voyage, sont nombreux et d'origine très-différente. Les uns, très-civilisés relative- 
ment, se rattachent au type mongolique ou à la race Jaune, non-seulement par leurs 
caractères naturels, mais aussi par leur civilisation et par leur langue; ce sont les ra- 
meaux annamite, cambodgien, laotien, auxquels il faut joindre les rameaux siamois 
et birman, dont nous avons pu observer un certain nombre de sujets, et qui forment, avec 
les précédents, le faisceau presque entier des populations indo-chinoises. Les autres habi- 
tants de l’Indo-Chine vivent dans un état de sauvagerie plus ou moins complet, et sont 
composés de nombreuses tribus ou peuplades sauvages, habitant exclusivement les forêts 
et les régions montagneuses. Ces sauvages se rattachent à deux races distinctes ; dans le 
sud, ils présentent le type océanien ou australien, et appartiennent au groupe des Alfou- 
rous des auteurs, et dans le nord ils se relient à la race caucasique, ou plus exactement 
aux peuples indo-européens. 

Afin que l’on puisse mieux apprécier les races que nous avons à passer en revue, nous 
les avons groupées dans le tableau suivant, qui permet de les envisager d’un seul coup 
d'œil. Nous les-avons placées dans l’ordre où nous les avons observées en parcourant l’Indo- 
Chine; ordre qui est, sauf pour les Chinois, celui de leur importance relative. 


| 4° RamEaü ANNamiTe, habitant toute la partie orientale et le sud de la presqu'île 
Indo-Chinoise. 
2° Rameau CAMBODGIEN, habitant le royaume de Cambodge, qui est compris entre 


RACE MONGOLIQUE / la Cochinchine française et le Laos. 
OU JAUNE. 3° Rameau LAOTIEN, habitant le centre de la vallée du Mékong. 
4° Rameau Sramois, habitant la vallée du Ménam. 
5° Rameau Biruaw, habitant les vallées de la Salouen et de l’Iraouady. 
6° Rameau Cuiois, habitant l'empire chinois. 


IT. 37 


290 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL | Sages du sud de la presqu'ile Indo Chinoise et du sud de la Chine, 
OU MALAYO-POLYNÉSIEN. | analogues aux Alfourous. 
RACE BRUNE OÙ RAMEAU NOIR ( 


Sa ‘AUS es Né S € à suc ra hine Ï 'S). 
DE LA RACE CAUCASIQUE. Sauvages des hautes montagnes du sud de la Chine (Lolos noirs) 


S L. Race Mongolique ou juune. 


A. Rameau Annamite. — L'Annamite, dont la présence dans le nord du pays qu'il 
occupe, remonte à une époque qui aurait suivi de très-peu d'années le déluge, d’après 
le P. Legrand de la Liraye !, est le plus mal bâti et le plus laid des Indo-Chinois de 
souche mongolique. Il est de taille moyenne, un peu plus petit et moins vigoureux que les 
individus provenant des races qui l'entourent. Son teint est jaunatre sale, plus foncé 
que celui du Chinois et du Laotien, mais plus clair que celui du Cambodgien; sa peau 
parait épaisse, et parmi tous les Indo-Chinois, c’est la sienne qui est ordinairement la 
plus grossière. Son crane est dolichocéphale, légèrement aplati à son sommet, mais 
très-développé latéralement, surtout en arrière. Sa face est plate, osseuse, anguleuse et 
losangique, autrement dit eurygnathe; ce caractère existe chez lui à son smum. Son 
front est bas, à peine proéminent, large inférieurement, mais étroit à sa partie supé- 
rieure et légèrement fuyant. Ses veux sont moyennement obliques, avec la paupière 
supérieure assez large et bridée dans l'angle interne; leur ouverture est petite. Son nez 
estnon-seulement le plus écrasé, mais aussi le plus petit des nez des Indo-Chinois ; il est 
large et enfoncé à sa racine, épaté inférieurement et mousse à son extrémité, avec les 
narines souvent dirigées en avant et lrès-écartées. Ses pommettes sont très-saillantes, 
avec contours arrondis et plus élevés que chez les autres peuples. Ses arcades zygo- 
matiques sont très-accusées; sa bouche est grande; ses lèvres sont assez épaisses, char- 
nues, mais placées au même niveau, à l'inverse des Chinois, chez qui la supérieure 
déborde presque toujours un peu sur linférieure. Son cou est plutôt court que long; 
ses épaules sont très-effacées, et on ne rencontre presque jamais d’Annamite vouté. 
Son corps est trapu, large et tout d’une venue; sa faille est à peine indiquée ; aussi 
est-il sans souplesse dans les mouvements. Son bassin est très-large et détermine à la 
partie supérieure des fémurs un écartement considérable, qui existe chez les femmes 
de toutes les races, et qui occasionne un dandinement singulier dans sa démarche, 
qui à fait dire, non sans raison, qu'elle était théâtrale. Ce dandinement bizarre, qui peut 
suflire à lui seul pour distinguer la majorité des Annamites de tous les autres peuples 
de l’Indo-Chine sans exception, se compose à chaque pas d'un double mouvement de 
rotation en demi-cercle à droite et à gauche de chaque membre inférieur, qui fait que le 
talon pivote à chaque pas et que la pointe du pied déerit un are de cerele. Les jambes d’un 
Annamile sont presque toujours arquées : en un mot il est bancal, et ses tibias paraissent 
sur le vivant légèrement courbés en dedans. Mais ce qui le distingue plus particulièrement 


U Notes lustoriques sur la nation annamite. Saïgon, 1865. 


SÈRRES 


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IDANT 


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: RÉFUGIÉS 


TYPES ANNAMITES 


HiLoiegato 


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RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. 293 


des autres rameaux indo-chinois, c’est l’écartement en dedans du gros orteil, qui fait que cet 
orteil n’est pas accolé ou du moins est plus écarté du deuxième que sur toutes les autres 
races marchant nu-pieds, chez lesquelles il s’écarte toujours un peu. Cette disposition sin- 
gulière, suffisamment générale pour caractériser cette race, ne lui est pourtant pas compléte- 
ment particulière, car nous l’avons fréquemment observée chez les sauvages du sud de la 
presqu'ile, à Bassae, et sur les populations de race jaune de la province du Yun-nan, parti- 
culièrement sur les Pen-ti. Seulement, comme cette disposition est moms prononcée et 
plus exceptionnelle chez ces peuples, nous croyons qu'elle leur a été communiquée par 
des croisements avec les Annamites. 

On voit que nous ne partageons pas l’opinion assez répandue que les Annamites pro- 
viennent du mélange des sauvages avec les Chinois. Cette opinion est en contradiction for- 
melle avec leur histoire, et, parmi les nombreux métis que nous avons observés de Chinois 
etde sauvages, nous n'avons jamais trouvé un seul individu rappelant le type annamite. La 
conformation du pied prouve que les Annamites sont constitués à l’état de race distincte 
depuis un temps très-long; d’après l’auteur précédemment cité (le P. Legrand de la 
Liraye), ce signe bizarre servait dès l’an 2285 avant J.-C., c’est-à-dire 63 ans après le 
déluge biblique, à désigner le peuple annamite. On lui donnait dès cette époque le nom de 
Giao chi, mot qui veut dire que le gros orteil est écarté du second. Ce fait, puisé dans les 
annales chinoises, indique qu'ils n’ont pu recevoir ce caractère de leurs voisins, et il est 
très-eurieux de constater qu’il se soit transmis à la population actuelle, malgré le nombre 
considérable d’alliances qui ont eu nécessairement lieu pendant eette période de qua- 
rante siècles. 

En déerivant plus haut le caractère des Annamites, nous nous sommes placé à un point 
de vue général; mais outre qu'ils offrent de grandes variations individuelles, il est né- 
cessaire de distinguer parmi eux, ceux qui habitent la basse Cochinchine de ceux qui sont 
originaires du Tong-king. Ceux de la basse Cochinchine ou du sud sont sensiblement 
plus faibles et de plus petite taille que ceux du nord; différences qui tiennent, selon 
toute vraisemblance, à leur genre de vie au milieu de rizières marécageuses, qui favo- 
risent beaucoup moins le développement physique que la vie des régions montagneuses, 
et surtout à l’action permanente de l’impaludisme, lequel, sans avoir chez eux les graves 
conséquences qu'il a sur les Européens, agit néanmoins fortement. Ceux du sud pré- 
sentent peut-être aussi un type plus uniforme, et leur peau est moins colorée, ce qui 
résulte de leur plus grand éloignement des sauvages au teint noir, et de croisements 
moins fréquents avec eux. 

Quelques-uns des principaux caractères de la race annamite, tels que les jambes ar- 
quées, le nez très-écrasé, la grande proéminence des pommettes, caractérisent certaines 
familles de la race jaune, habitant le nord de l'Asie, et particulièrement les Mongols pro- 
prement dits. De tous les Indo-Chinois, les Annamites sont les seuls qui permettent ce 
rapprochement, et, dans le Vun-nan, qu'on assigne comme ayant été le berceau des di- 
vers rameaux indo-chinois, et par conséquent celui des Annamites, nous n’avons ren- 
contré aucun habitant présentant réunies toutes les particularités qui les distinguent. 


294 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


Il faut done, croyons-nous, reporter beaucoup plus haut dans le nord l'origine de cette 
race, et admettre que loin de venir du Yun-nan, elle n’a fait qu'y stationner. 

Nous avons omis de donner les caractères de la femme annamite, mais nous devons 
dire qu’elle est en rapport de tulle et de constitution avec l'homme du même rameau. 
Ses épaules sont très-effacées, son corps est même très-souvent courbé en arrière ; 
sa démarche est aussi caractéristique que celle de l’homme; elle y joint ordinairement 
à chaque pas un balancement exagéré des bras qui lui est tout à fait spécial, et qu’elle 
accentue davantage lorsqu'elle est en toilette ou lorsqu'elle appartient à une classe élevée 
de la société. 


TYPE CAMBODGIEN : LE SECOND ROI DU CAMBODGE. 
B. liameau Cambodqien. — Le Cambodgien est plus grand et surtout plus robuste 


que lPAnnamite; c’est le plus vigoureux des Indo-Chinois. Son corps est carré, ses 
épaules sont larges, son système musculaire est bien développé; cependant on ne 
voit que très-rarement ses muscles se dessiner à l'extérieur par des contours arrêtés, 
comme chez les Européens. Son crane est ovoïdal (dolichocéphale), ses yeux sont très- 
peu ou à peine obliques; néanmoins la paupière supérieure est toujours bridée dans 
l’angle interne de l'œil. Son nez est un peu plus proéminent et ses narines moins écar- 
tées et moins béantes que celles de l'Annamite. Ses pommettes sont movennement sail- 
lantes et moins élevées que chez le peuple précédent, son bassin est également moins 
élargi transversalement; aussi ses jambes sont-elles bien droites et parfaitement arti- 


RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. 205 


culées sur le bassin. Ses mollets sont bien placés et très-développés, et sous ce rapport 
il est le mieux doté des Indo-Chinois. Son teint est jaunätre comme celui de tous les ra- 
meaux de la race mongole; après celui du Birman, c’est le plus foncé, et il rappelle sou- 
vent celui de beaucoup de Malais, race avec laquelle le Cambodgien a beaucoup d’autres 
points de ressemblance dus au voisinage de la presqu'île de Malacea et à l'établissement au 
Cambodge à une époque déjà ancienne d’un certain nombre de Malais. Nous croyons 
qu'en outre de cette légère infusion de sang malais, les Cambodgiens possèdent aussi 
une notable proportion de sang sauvage, qui a également contribué à foncer leur teint, et 
qui se décèle fréquemment par quelques autres caractères. Fixés depuis des siècles dans 
le delta du Cambodge, ils se sont mélangés peut-être plus que les peuples voisins aux 
aborigènes, grace surtout à l'habitude ancienne qu'ils ont conservée de les prendre comme 


TYPE LAOTIEN : FEMME DES ENVIRONS DE PETCHABOURY. 


esclaves. Faut-il attribuer à cette infusion graduelle de sang sauvage chez les Cambod- 
giens une part d'influence dans l’état de décadence dans lequel ils sont tombés, et qui 
tend à les ramener à l’état sauvage ? Nous le croyons, et la facilité avec laquelle les Cam- 
bodgiens vont se réfugier et vivre dans les forêts à la facon des sauvages, semble jus- 
tifier cette manière de voir. 

C. Rameau Laotien. — Le Laotien nous a paru le mieux proportionné des rameaux 
indo-chinois. Il offre de très-grandes ressemblances avec le Siamois, qui est du reste la 
seconde branche sortie originairement du même tronc. Sa stature est la même que celle 
du Cambodgien, mais il est moins large des épaules, et en même temps un peu moins vi- 
goureux. Comme les deux peuples précédents, 1l présente quelques-uns des caractères 
des peuples limitrophes; il tient du Chinois, du Birman, de lAnnamilé, mais surtout du 
Cambodgien et peut-être de l’Hindou. Parmi les Indo-Chinois, sa démarche est celle 


296 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


qui rappelle le plus celle de l'Hindou. Il est élancé, souple dans ses mouvements. Son 
teint, ordinairement plus pâle que celui des peuples circonvoisins, se rapproche beaucoup 
de celui du Chinois. Sa physionomie est douce et intelligente, son front est généralement 
bien découvert, la ligne d’implanfation des cheveux qui le limite supérieurement, con- 
trairement à ce qui a lieu chez les autres Indo-Chinois, offre une convexité au milieu, 
et deux concavités très-prononcées latéralement. Son visage est moins losangique que 
celui de lAnnamite; cependant sa face est toujours plate, avec un profil complétement 
droit, provenant surtout de ce que son nez ne proémine presque pas. Cet organe est plus 
saillant, plus développé que chez les Annamites et moins épaté. L'ouverture des narines 
n'est plus dirigée en avant comme chez beaucoup d’Annamites, souvent même le lobule 
terminal du nez, qui est loujours mousse dans la race jaune, est aminci et légèrement 
pendant. Chez un certain nombre d'individus, on observe même des nez droits, comme 
celui qu'ils donnent à la statue de leur Bouddha, et qui ressemblerait, d’après la tradition, 
à celui de leurs ancêtres *. | 

Cette conformation du nez coïncide toujours avec des pommettes moins saillantes et 
un visage se rapprochant de l’ovale; ce qui, en leur donnant quelque ressemblance avee 
les Européens, fait conclure à première vue qu’ils possèdent une certaine proportion de 
sang de cette race. Quant aux yeux des Laotiens, ils sont peu obliques et peu bridés dans 
l'angle interne; ils sont également moins petits que ceux des Annamites et des Chinois. 
Mais ce qui distingue surtout ce rameau mongolique, e’est l’allongement vertical de la 
boîte cranienne, qui parait oblongue et non ovoidale comme chez leurs voisins. Elle 
offre un type parfait de crâne brachycéphale, qui rend leur front moins étroit et moins 
fuyant à sa partie supérieure que chez les autres mongoliques. Nous devons noter que 
celte brachycéphalie est un caractère de race ne se justifiant par aucune pratique partieu- 
lière sur la tête des enfants, comme cela a lieu chez certains sauvages. 

Il ressort de la description précédente et de tout ce que nous venons de dire du ra- 
meau laotien, qu'ainsi que tous les autres rameaux humains, il n’est pas pur. A nos 
veux, beaucoup d'individus de cette race possèdent une certaine quantité de sang blanc. 
Pour justifier cette opinion, à défaut des caractères anatomiques et en particulier de eeux 
du nez, nous invoquerons leurs caractères moraux et intellectuels, qui les rapprochent 
plus de la race blanche que tous les autres Indo-Chinois, y compris même les Bir- 
mans, qui sont cependant plus rapprochés de l’Inde. S'il nous était permis de faire 
une hypothèse sur la source de cette légère proportion de sang blane, nous dirions qu'ils 
la tiennent des sauvages à type caucasique qui habitent le Yun-nan, lieu d’où l’on 


1 Le type de toutes les statues du Bouddha, aussi bien au Laos qu’à Siam et parfois même en Chine et en 
Cochinchine, est certainement arien ou caucasique. Ce fait ne saurait étonner, puisque le bouddhisme a pris 
naissance dans l’Inde, au milieu de populations d’origine arienne, et que depuis, toutes les statues de Bouddha 
sont faites d’après des mesures toujours les mêmes, inscrites dans les livres religieux et sur des tables déposées 
dans certaines pagodes. Parmi les caractères qui distinguent ces statues, nous signalerons la proéminence 
du nez, dont le lobule terminal est mince et toujours légèrement pendant, ce qui lui donne une forme qui 
contraste singulièrement avec celle du nez de la plupart des Indo-Chinois. Les pommettes de ces statues 
sont également très-peu proéminentes et souvent abaissées. 


RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. AT 


suppose que les Laotiens, ainsi que les autres rameaux indo-chinoiïs, sont venus (Prichard) 
et où ils ont bien certainement stationné avant de descendre vers le sud. Cette opinion 
est d'autant plus vraisemblable que, parmi les populations du Yun-nan, le type laotien 
est encore très-répandu partout. 

La femme laotienne ne présente rien de bien particulier. Tous ses caractères ana 


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TYPES SIAMOIS : LE FEU-ROI ET LA REINE DE SIAM. 


tomiques, physiognomoniques et physiologiques, sont absolument identiques et en re- 
lation avec ceux de l’homme du même rameau. Les différences de taille et de vigueur 
qu’elle présente avec lui ne sont pas plus grandes que dans les races européennes. Ses 
seins sont uniformément développés, et jamais ils n’offrent ces différences considéra- 


bles de volume qu’on observe si communément en Europe. Quoique ces organes de- 
IL. 38 


298 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


viennent assez pendants avec l’âge, ce qui tient au grand nombre d'enfants qu'elles ont, 
et surtout à l'absence de tout soutien artificiel, ils peuvent être considérés comme n’é- 
tant pas plus pendants que chez les femmes caucasiques. Leur forme, ainsi que dans toute 
la race jaune, est subeonique, jamais hémisphérique ; ils sont larges à la base, avec un 
mamelon toujours proéminent. Quant à la physionomie des Laoliennes, elle n’est ni moins 
douce ni moins intelligente que celle de l'homme ; elle peut être considérée, à notre avis, 


comme la plus jolie des divers rameaux indo-chinois. , 
D. Rameau Siamois. — Les Siamois sont, comme nous l'avons dit, une branche prove- 


nant du même rameau que les Laotiens. Ces deux peuples présentent par conséquent les 
plus grandes ressemblances entre eux, au point qu'il est extremement difficile de les dis- 
linguer et de tracer les caractères qui les différencient. Bien que nous n’ayons vu qu'un 
nombre restreint de Siamois, néanmoins nous avons eru reconnaitre les quelques diffe- 
rences suivantes : la brachycéphalie est moins aceusée que chez les Laotiens ; leurs traits 
sont plus fins, moins grossiers el en même temps moins doux. En somme, les Siamois 
semblent tenir davantage, par leurs traits, des Birmans et des Hindous, dont ils sont du 
reste plus rapprochés par leur position géographique. 

E. Rameaux Birman et Péqouan. — Quoique n'étant pas allé en Birmanie, ni dans 
le Pégou, il nous à été pourtant possible, pendant notre voyage, de voir de nombreux in- 
dividus appartenant aux races de ces deux pays, qui parcourent l’Indo-Chine comme 
colporteurs ou résident comme délégués du roi de Birmanie chez plusieurs petits rois, 
ses vassaux. Nous tracerons donc, non pas les caractères particuliers de ces peuples 
qui offrent entre eux la plus grande ressemblance, mais ceux que nous avons notés et 
qui les différencient de leurs voisins. Comme ces derniers, ils ne sont qu'un rameau 
de la race mongolique. Leur taille est peut-être la plus élevée des rameaux indo-chi- 
nois. Leur teint est également plus foncé, ce qui provient vraisemblablement de ce 
qu'ils sont plus rapprochés géographiquement des Hindous, et qu'en même temps il 
existe dans leur pays un assez grand nombre de peuplades sauvages au teint noir, avec 
lesquelles ils ont du se fusionner. Leurs veux nous ont paru petits et bridés assez for- 
tement, plus que chez les Laoliens et les Siamois et autant que chez les Annamites. Ils 
ont, du reste, avec ce dernier peuple, d’autres traits de ressemblance, aussi bien phy- 
siques que moraux. Leur nez est également très-épaté el petit; mais leurs pommettes, 
tout en élant lrès-proéminentes, sont peu élevées, et leur machoire inférieure parait 
moins forte sur les côtés. Leurs lèvres sont peu épaisses et entourent une bouche qui 
n'est pas très-grande. Comme vigueur et comme stature, ils se rangent à côté des 
Cambodgiens ; toutefois ils sont plus grands et moins trapus qu'eux. Ils sont très-bien pro- 
portionnés, leurs jambes ne sont jamais arquées comme chez les Cochinchinois; ce qui, 
malgré les analogies qu'ils présentent entre eux et que nous venons de signaler, permet 
d'affirmer que, quoique originaires de la même souche, ils s’en sont détachés les uns et 
les autres depuis très-longtemps. Parmi les Birmans, surtout chez les femmes, nous avons 
trouvé plusieurs types rappelant manifestement le type hindou : les femmes présentant ce 
type sont très-appréciées et passent pour plus jolies que les indigènes. 


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AKANAIS, 


TYPES AR 


RAMEAU BIRMAN 


RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. 301 


: Nous ajouterons, pour terminer ce qui est relatif à ce peuple, que, comme caractère 
‘moral, les Birmans nous ont paru moins doux que les Laotiens. Leur physionomie est 
plus dure et présente une analogie assez grande avec celle des peuplades guerrières qu’on 
rencontre dans le nord de l'Inde et de leur pays. 

F. Caractères généraux des Indo-Chinois de race mongolique. — Aux caractères 
particuliers des races précédentes, nous ajouterons ceux qui sont communs à toutes et 
que nous n'avons pas mentionnés dans les descriptions qui précèdent. Mais auparavant, 
nous devons faire observer que les traits particuliers de chacun de ces peuples sont 
loin de se rencontrer sur tous les sujets du même rameau. Sur les frontières, où des 
croisements ont nécessairement eu lieu, 1l est souvent difficile de préciser à quelle 
race appartiennent beaucoup d'individus : ainsi, dans le sud du Laos, les Laotiens res- 
semblent très-souvent aux Cambodgiens, et dans le nord, il est fréquemment impossible 
de les distinguer des Chinois. On rencontre communément au milieu de tous ces peuples, 
des individus à peau brune et présentant quelques autres caractères d’après lesquels il 
est facile de reconnaitre qu'ils ont eu des sauvages parmi leurs ancêtres. En Indo-Chine, 
les peuples envahisseurs, Annamites, Cambodgiens et Laotiens, quoique placés au point 
de vue de la civilisation à un degré comparativement aussi élevé, par rapport aux peu- 
plades sauvages, que le sont les Européens relativement à eux, n’éprouvent cependant 
aucune répugnance à s'unir avec les sauvages autochthones. Ces sauvages ne leur sont 
guère inférieurs comme beauté physique, du moins à notre point de vue d'Européens ; 
leurs femmes supportent souvent la comparaison avec la femme laotienne, et ne parais- 
sent pas tomber, comme chez la plupart des autres races sauvages, telles que les Aus- 
traliennes, par exemple, dans un état d’abjection plus grand que les hommes. 

Ces cinq races indo-chinoises sont sensiblement moins robustes et de faille moins 
haute que les Européens et que les Chinois. Les variations locales et individuelles qui peu- 
vent offrir des exceptions à cette règle sont moins grandes qu’en Europe; en d’autres termes 
ces races sont plus uniformes. Leur système musculaire est médiocrement développé, et ja- 
mais les museles ne s’accusent à l'extérieur par ces saillies arrondies qui les dessinent, ex 
cepté toutefois chez quelques Cambodgiens. Mais, même chez ces derniers, les muscles- 
n'acquièrent jamais celte dureté qu’on constate chez nos lutteurs. Il en résulte que les 
Indo-Chinois ne sont pas capables d'efforts aussi violents que les Européens. Mais, par 
contre, ils peuvent, à un moment donné, travailler peut-être plus longtemps sans éprou- 
ver la même fatigue, et on est toujours étonné de voir que, malgré la faiblesse de leurs 
jambes, ils peuvent accomplir, en portant des fardeaux, de longs et pénibles trajets, aux- 
quels ne résisterait aucun Européen. | 

Le tissu adipeux n’est jamais très-abondant chez ces peuples de l’Indo-Chine ; chez les 
quelques individus gros que lon rencontre, il est réparti très-uniformément dans toute 
l’économie, à l'exception toutefois du ventre qui proémine assez souvent. On n’observe 
presque jamais chez eux cette extrême maigreur et ces énormes obésités si fréquentes en 

: Europe, difformités qui, avec l'habitude qu'ils ont de garder leur corps à moitié nu, ren- 
draient toute réunion d'hommes si choquante. Leur peau est assez grossière ; jamais elle 


302 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


ne présente ce degré de finesse qui est ordinaire chez les races indo-européennes el 
même chez quelques rameaux de la race noire ; elle est souvent moins fine que celle des 
sauvages. Sa couleur est jaunâtre, olivatre, montrant parfois quelques reflets verdà- 
tres, rougeûtres et surtout noirâtres. Quoi que cette teinte jaunâtre soit la-couleur natu- 
relle et caractéristique de leur race, ils apprécient presque lous la blancheur de la 
peau, et ils la considèrent, surtout au Laos, comme un signe de beauté. Faut-il attribuer 
ce fait à ce que le teint plus ou moins brun rappelle chez ceux qui le présentent l’exis- 
tence de sauvages parmi leurs ascendants? Nous serions tenté de le croire, et ce senli- 
ment offre quelque analogie avec celui qui, dans tous les pays où les blanes et les noirs 
se trouvent en présence, classe ces derniers dans une infériorité qui se trouve d’ailleurs 
parfaitement justifiée. 

Sur loutes ces races à peau jaune ou d’un noir très-imparfait, les parties du corps 
non couvertes par les vêtements sont bien plus foncées que les parties qui restent cou- 
vertes. On ne saurait cependant considérer ce fait comme une preuve venant à l’appui 
de la théorie de l'influence du milieu sur le degré de noireeur de la peau, car cette 
teinte foncée disparait dès qu'ils se couvrent et ne se transmet pas par voie de génération. 

Le système pileux est très-peu développé sur tous ces rameaux mongoliques : la 
barbe n'apparait pas avant trente-cinq ans, souvent même avant quarante, et elle est li- 
mitée à la lèvre supérieure et au menton, où elle reste toujours très-clair-semée. Elle 
présente en outre ce caractère, d'être toujours parfaitement droite, mi frisée, ni on- 
dulée; sa couleur est d’un noir parfait; on trouve exceptionnellement quelques poils 
roux. Dans ce dernier cas et aussi lorsqu'on trouve des favoris naissants, on constate pres- 
que toujours un changement de type de l'individu qui offre ces particularités, changement 
qui provient d’un mélange de sang caucasique ou océanien. Sur le corps, à l'exception du 
pubis et des aisselles, les Indo-Chinois n’ont que très-rarement des poils ; quand ils en 
ont, c’est surtout à la région sternale. Leurs cheveux sont uniformément noirs, épais et 
roides, parfaitement lisses et plats; jamais ils n’offrent la moindre ondulation ou des 
reflets jaunätres; quoique très-abondants, leur longueur ne dépasse jamais la ceinture, 
et atteint ordinairement que le milieu du dos. Leur chevelure présente cet heureux 
privilége, ainsi que ieurs dents, de ne jamais tomber, à moins d’affections parasitaires 
du cuir chevelu. 

Le crane des Indo-Chinois présente les deux types extrêmes : la dolichocéphalie 
(Annamites et Cambodgiens) et la brachycéphalie (Laotiens); mais entre ces deux formes de 
crane, on en trouve de mixtes. Excepté chez les Laotiens, cette boite osseuse est, comme 
chez les principaux rameaux de la race jaune, très-développée postérieurement et sur les 
cotés. Quant au front, il est toujours large inférieurement, et, par contre, étroit supérieu- 
rement et légèrement fuyant; les bosses frontales sont très-peu accusées, ainsi que les 
arcades sourcilières. Les oreilles sont sensiblement plus larges et plus écartées en dehors 
que chez les races caucasiques ; l'augmentation de grandeur de ces organes porte surtout 
sur le lobule inférieur qui est ordinairement très-pendant. 

Les veux surtout sont caractéristiques : ils sont très-peu enfoncés, souvent même ils 


RAMEAU PÉGOUAN : TYPES MONS OU TALAINS. 


LOTS 


RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. 305 


effleurent les arcades orbitaires ou sont à peine dépassés par elles. L'ouverture des paupiè- 
res est petite et ovale, plus ou moins oblique en haut. La paupière supérieure est large et 
bridée dans l’angle interne. Les sourcils sont haut placés au-dessus des veux, peu fournis, 
droits, non arqués et relevés en dehors. Les cils sont très-courts. La conjoncetive est 
d’un blanc mat, jamais légèrement bleuâtre comme chez tant d'Européens; souvent 
même elle est faiblement ictérique, comme chez tous les peuples et même les Européens 
qui habitent les pays chauds. L'iris est d’un brun foncé presque uniforme. L'espace sé- 
parant les deux yeux est large et presque plat, par suite du peu de proéminence de la 
racine du nez. Cette disposition, ainsi que la conformation extérieure des yeux, sem- 
ble être le résultat de la grande saillie des pommettes, lesquelles auraient entrainé 
les paupières en dehors et en haut en les tendant dans l'angle interne et en même temps 
en affaissant la racine du nez. Cette explication, surtout en ce qui concerne les paupières, 
est d'autant plus vraie, qu'il est démontré que les cavités orbitaires des cranes indo-chinois 
ne présentent rien justifiant la conformation particulière des parties molles des yeux. 

Le nez de tous ces peuples, relativement à celui des Européens, est petit comme 
volume et comme longueur; inférieurement, il est épalé, mousse à son extrémité, avee les 
narines écartées et très-souvent dirigées un peu en avant, ce qui a fait dire plaisamment 
qu'il pouvait pleuvoir dans leur nez. Leurs lèvres sont assez épaisses, charnues et légère- 
ment retroussées. 

Le prognathisme est à peu près nul chez tous ces rameaux ; toutefois on le rencontre 
assez souvent développé à un faible degré, comme chez beaucoup de Chinois. Il résulte 
de cette conformation des mächoires, que les dents sont presque verticales ou à peine 
proelives, mais elles le deviennent ordinairement avec l’âge, par suite de l'usage du bétel 
qui les déchausse prématurément. 

De même que chez tous les peuples des pays chauds, les dents des Iudo-Chinois ne 
se carient pas. Ce qui démontre l'influence du elimat sur la production de cette maladie, 
c’est que sur les mêmes races, particulièrement sur le Chinois, on l’observe quelquefois, 
et de plus en plus fréquemment en s’avançant vers le nord. Les dents sont réguliè- 
rement plantées, égales, peu grandes ; pourtant on observe fréquemment des incisives 
médianes d’une longueur dépassant celles des Européens. La mâchoire inférieure 
est surtout forte en arrière, au-dessous des arcades zygomatiques, lesquelles sont très- 
développées pour loger les muscles masticateurs qui sont très-puissants. 

C'est cette dernière disposition surtout qui rend carrée la face des Indo-Chinois et 
fait paraître leur menton étroit. Il est également un peu fuyant comme chez les Chinois. 
Mais le caractère prédominant du visage des Indo-Chinois est l’écartement, la proé- 
minence et la hauteur des joues, ce qui lui donne une forme losangique non ovale comme 
chez les Européens, et lui a valu le nom d’eurygnathe. Cette conformation, jointe au peu de 
saillie du nez qui est petit, non-seulement dans ses parties molles, mais aussi dans son 
squelette, rend leur face plate et leur profil droit. 

La disproportion dans les différentes parties constitutives du visage de ces peuples, 


rend tous leurs traits grossiers, diminue encore le peu de mobilité de leur physionc- 
IT. 39 


306 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


mie qui est d'autant moins expressive, qu'ils cherchent presque constamment à dissi- 
muler leurs impressions. Leurs joues sont toujours de couleur mate, comme le reste de 
leur peau; elles n’offrent pas, même chez les jeunes gens, ce vif incarnat qui em- 
bellit tant le visage des Européens et qu’eux-mêmes apprécient beaucoup chez les 
quelques individus qui le présentent. Dans la colère, elles ne se colorent pas plus que 
le reste de leur visage, qui devient d’un rouge uniforme assez semblable à la couleur de la 
brique. 

Les membres de ces Indo-Chinois offrent quelques particularités à signaler. Leurs 
bras nous ont paru, ainsi qu'à tous ceux qui les ont observés et mesurés, plus longs que 
chez les peuples indo-européens. Ils sonten même temps moins gros et moins bien muselés, 
proportionnellement, que leurs jambes. Leurs mains sont toujours plus petites que chezles 
Européens, mais par contre elles sont plus osseuses et plus sèches. Les articulations des 
doigts sont toujours très-accusées et donnent à ces organes une apparence noueuse qui 
rappelle involontairement la main des singes. Leurs ongles sont peut-être plus déve- 
loppés et plus forts que chez les Européens, et les gens riches leur laissent atteindre 
une longueur démesurée sans qu'ils se cassent. La peau de la partie dorsale des mains 
et des pieds offre toujours une feinte légèrement brune, qui contraste avec la paleur 
de celle de la face palmaire de ces organes. Les pieds offrent la plupart des caractères 
qui distinguent la main. Le talon est bien saillant en arrière, la voute du pied est bien 
accentuée, et on ne rencontre presque jamais de pieds plats. Les orteils sont courts, sou- 
vent un peu écartés les uns des autres, comme chez tous ceux qui marchent ordinairement 


nu-pieds !. 


S 2. Remarques générales sur les Indo-Chinois de race mongolique. 


Déjà nous avons fait remarquer plusieurs fois que l’obliquité des yeux était inégale- 
ment prononcée chez les différents rameaux de la race jaune. Elle atteint son maximum 
chez les Chinois du littoral de la Chine et les Mongols, et son minimum chez les Cam- 
bodgiens et les Malais. Les Annamites et les Laotiens tiennent le milieu entre ces deux 
extrèmes. Il en est de même pour les différences qu'offre la coloration de la peau, mais 
elles se produisent dans un ordre inverse. Le Cambodgien offre le teint le plus foncé, et 
le Chinois présente le plus pâle. On peut même observer des teints presque blancs sur les 
Jeunes Chinois habitant les villes. Mais on aurait tort, comme cela a été dit et écrit souvent, de 
comparer celte blancheur à eelle des individus de la race blanche : toujours elle est mate, 
non transparente, et diffère complétement de la nôtre pour un observateur attentif. Leurs 


! Les dessins qui accompagnent la fin de ce paragraphe et le paragraphe suivant complètent la description 
des différents types mongols de la péninsule. Je dois les photographies originales dont ils sont la reproduction 
à la bienveillance du général A. Fytche, gouverneur des possessions anglaises en Birmanie, à qui M.le co- 
lonel H. Yule à bien voulu les demander pour moi. Les Arakanais et les Talains sont les populations qui ont 
le plus fortement ressenti l'influence du voisinage de l'Inde. Les Karens paraissent au contraire être restés 
purs de tout alliage et se rapprocher davantage du rameau chinois de la race mongole. 16 (Be 


s 


RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. 307 
conjonctives présentent toujours des différences de coloration analogues, ainsi que la peau 
des mains et des pieds. 

On peut conclure de ces modifications que les races du sud offrent une moins grande 
proportion de sang mongol et une plus forte de sang sauvage et hindou. Les yeux 
droits de ces derniers peuples ont corrigé l’obliquité des yeux des Mongols, et le teint 
noir a foncé leur peau. Au fur et à mesure qu’on s'éloigne de la Chine, les caractères 
distinctifs des Chinois s’atténuent graduellement et le Cambodgien qui, placé au sud de 
l'Indo-Chine, est le dernier terme de cette progression décroissante, sert à lier les peu- 
ples indo-chinois aux Malais de la presqu'ile de Malacca et à ceux de l'archipel des îles 
de la Sonde, des Philippines et à certains Polynésiens dont l’affinité avec les Malais a été 
admise par M. de Humboldt. Tous ces peuples forment done une chaîne ininterrompue 
depuis le nord de la Chine jusqu’en Australie, sans qu'il soit possible de tracer la ligne 
de démareation qui les sépare. 

Si maintenant on divise les Indo-Chinois en orientaux et en occidentaux, on constate 
que les Annamites, qui sont placés à lorient, possèdent au plus haut degré les caractères 
physiques, moraux et sociaux des Chinois, et que les Laotiens, les Siamois et les Birmans 
se rattachent davantage au contraire aux populations de l'Inde. Ce résultat, qu’aurait pu 
faire soupconner la position géographique de ces peuples, n’en est pas moins remar- 
quable en ce qu'il fait ressortir avec évidence les modifications imprimées à ces diffé- 
rentes populations par les croisements résultant nécessairement du contact et des rela- 
lions. 

A l'égard des sauvages de lPIndo-Chine, l'observation conduit à des résultats exacte 
ment analogues, aussi bien en ce qui concerne l’obliquité des yeux que la couleur fon- 
cée de la peau. Dans le sud, ils sont bien plus rapprochés des Océaniens par tous leurs 
caractères que dans le nord, où ils se confondent presque avee les Chinois et les Lao- 
üens. À l’est ils se relient aux Annamiles, et à l’ouest ils ont des liens nombreux avec les 
populations de l'Inde (Sauvages Does). 

La proéminence des pommettes, ou l’eurygnathisme, donne lieu également à des re- 
marques très-importantes. Les Annamites sont ceux qui le présentent ordinairement à 
son plus haut degré de développement, les Laotiens et les Cambodgiens à son plus faible. 

Le crâne de ces peuples présente des différences que nous avons signalées déjà dans 
plusieurs occasions, mais sur lesquelles nous croyons devoir revenir. Quoique les Laotiens 
soient un rameau de la race mongolique, comme les Annamites et les Cambodgiens, il est 
curieux de voir qu'à l'inverse de ces derniers peuples, leur crâne soit brachycéphale. Ce 
fait, qui existe déjà dans la race blanche où les Teutons font exception par la dolichocéphalie 
avec les Slaves et les peuples gréco-latins, montre une fois de plus que ce caractère ne suffit 
pas pour caractériser une race et qu'il est également insuffisant pour apprécier le degré 
d'intelligence, puisque les Laotiens sont loin d’être les moins intelligents parmi les ra 
meaux mongoliques. 

Faisons remarquer que la brachycéphalie des Laotiens les rapproche des Kalmoucks 
qui occupent le nord de Asie et qui sont considérés comme le type le plus pur de la race 


308 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


mongolique ; sans prétendre tirer aucune conclusion de ce rapprochement, nous devions 
cependant signaler cette aflinité de race. 

Il semble résulter de l'examen de ces changements progressifs de la couleur du teint, 
de l’obliquité des yeux et de plusieurs autres caractères, que les populations noires 
ou sauvages habitaient primitivement le sud de l’Indo-Chine, que les jaunes étaient fixées 
au nord, et que c’est de leur mélange, et non des influences elimatériques, que sont 


TYPE KAREN (HOMME). 


résultées les modifications que nous avons constatées sur les types des différents rameaux 
indo-chinois. Si l’on peut soutenir que la notreeur du teint, qui augmente en marchant 
vers l'équateur, provient de l'effet du soleil, on ne peut appliquer le même raisonne- 
ment au changement dans la conformation particulière de l'œil, qui ne peut évidemment 
provenir que du mélange des races. 

D’après les nombreux caractères connus qu'offrent les rameaux indo-chinois, pré- 
cédemment décrits, on ne peut douter de leur communauté d’origine. Tous ne sont 
que des branches de la race jaune, qui se sont séparées du tronc à des époques difficiles à 
préciser, mais dans tous les cas fort anciennes. Les modifications qu’elles présentent nous 


RACE MONGOLIQUE OÙ JAUNE. 309 


paraissent être le résultat d’une sélection naturelle, ou plutôt de relations avec des po- 
pulations primitives de races différentes. 

Quel est le lieu de leur origine ? viennent-ils du centre de l’Asie centrale, qu’on con- 
sidère comme ayant été le berceau de tout le genre humain ? Sans prétendre trancher 
celte question qui fournira longtemps matière à controverse, cette origine nous parait 
cependant assez probable quant aux Indo-Chinois de race mongolique. Nés au centre de 
l'Asie, comme les fleuves qui baignent la région qu'ils habitent, Brahmapoutre, 


TYPE KAREN (FEMME). 


Iraouady, Salouen, Cambodge et fleuve Bleu, repoussés à l’est par l'immense barrière de 
l'Himalaya, comme les eaux de ces fleuves, puis, comme elles, réunis un instant dans 
la région montagneuse qui s'étend au nord-ouest du Yun-nan, ils ont suivi les vallées de 
ces fleuves pour se répandre dans l’Indo-Chine, repoussant les sauvages noirs, qui sont 
les aborigènes proprement dits, ou se mêlant avec eux. 

Nous avons négligé jusqu'à présent de parler des aptitudes physiologiques etdes facultés 
psychologiques des Indo-Chinois; sans vouloir nous étendre longuement sur ces questions 


310 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


délicates et qui sont peu du domaine de l'anthropologie, nous en dirons néanmoins quel- 
ques mots. 

Les Cambodgiens, les Laotiens, les Siamois et probablement les Birmans se rangent 
dans le même groupe et présentent des qualités intellectuelles presque également déve 
loppées. Ils ont le sentiment religieux plus développé que les Chinois. 

Dans l’ordre physiologique, on constate plus de similitude entre les chants des Cam 
bodgiens et des Laoliens et ceux des races indo-européennes, et une aptitude plus grande 
pour apprécier et reproduire nos chants. Au contraire, les Annamites et surtout les Chinois 
n'apprécient aucunement notre musique, et il leur est à peu près impossible de chanter 
le plus simple de nos airs. Ce n’est qu'après mille peines qu’on arrive à leur faire psal- 
modier d'une façon uniforme quelques chants religieux; encore celte manière simple 
ne produit-elle ordinairement pour des oreilles européennes qu’une eacophonie horrible. 

Tous ces peuples possèdent une véritable civilisation, presque également avancée chez 
chacun d’eux, uniformément calquée sur la eivilisation chinoise et présentant, mais à 
un moins haut degré que cette dernière, le caractère stationnaire. Cet immobilisme de 
leur civilisation, en harmonie avec celui de leur physionomie, parait être le résultat de 
leur organisation psychique, très-différente de celle des Européens. 

Au point de vue moral et des sentiments élevés venant du cœur, les Cambodgiens et 
les Laotiens sont ceux qui se placent en première ligne. Les Annamites et surtout les 
Chinois leur sont très-inférieurs. 

Cette différence tient peut-être à ce que les premiers peuples possèdent une plus forte 
proportion de sang indo-européen, mais aussi et surtout à l'influence du bouddhisme, 
qui est plus fidèlement pratiqué au Laos et au Cambodge qu’en Chine et qu’en Cochin 
chine, et qui contribue à développer les sentiments élevés. 

Aux remarques qui précèdent sur les Indo-Chinois, nous devons ajouter quelques 
renseignements sur leur fécondité, leur longévité, leur parturition, leurs enfants, afin de 
compléter autant que possible tout ce que nous avons pu recueillir et observer sur eux. 

Comme fécondité, les Chinois et les Annamites doivent être placés en première ligne. 
Cette grande fécondité est due bien plutôt à leur organisation sociale et politique et à 
leurs mœurs, qu'à une propriété naturelle. La polygamie, qui est pratiquée au Laos et au 
Cambodge et qui est partout un obstacle à l'accroissement de la population, n’est qu’une 
exception en Cochinchine et en Chine. Dans ces deux derniers pays, le mariage est sinon 
obligatoire, du moins nécessaire, excessivement facile sous tous les rapports, et il s’effee- 
tue chez les deux sexes souvent même avant l’époque de la puberté. L’extrème pauvreté 
est la seule cause qui puisse forcer les habitants au célibat. Toutes les femmes sont done 
mariées et ont au moins huit à dix enfants avant d'atteindre l’époque de la ménopause. 
Aussi, n'était l’excessive mortalité qui pèse sur les nouveau-nés dans ces pays où le bien- 
être et laisance sont bien plus faibles que dans les pays civilisés, on constalerait un 
accroissement énorme de la population. Il ne faudrait pas s’imaginer que cette excessive 
mortalité des enfants tient, aussi bien en Chine qu’en Cochinchine, au peu de soins qu’en 
ont leurs parents, et à l'habitude de les jeter dans les fleuves ou aux pourceaux comme 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OU MALAYO-POLYNÉSIEN. 311 


cela a été dit et écrit tant de fois. Rien n’est plus faux et plus absurde que cette accusa- 
tion contre les Chinois, et la commission du Mékong tout entière peut témoigner n'avoir 
rien vu ni rien recueilli de semblable pendant les huit mois qu’elle a passés dans l’in- 
térieur de la Chine. Sans doute l’infantieide s'y observe, mais rien ne prouve qu'il y soit 
plus fréquent qu’en Europe. On peut affirmer qu'il n'existe peut-être aucun homme aimant 
plus ses enfants que le Chinois, et à défaut d’autres preuves, il suffirait de citer l’accrois- 
sement considérable et exceptionnel de la population chinoise depuis quelques siècles. 

La longévité de tous ces rameaux indo-chinois ne nous à pas paru différer considé- 
rablement de celle des Européens. Si elle est moindre de quelques années, crovons-nous, 
cela tient au peu de ressources médicales du pays, à l'absence de toute hygiène, à une ali- 
mentation souvent malsaine. On rencontre cependant quelquefois des octogénaires et même 
des nonagénaires en Indo-Chine. 

La parturition, par suite, eroyons-nous, du plus petit volume de l'enfant, parait s'ac- 
complir plus facilement que chez les Européens. Néanmoins, un grand nombre de femmes 
sucecombent pendant et surtout après le travail de l’accouchement, particulièrement au Laos. 
Cette mortalité nous paraît devoir être attribuée à la pratique en usage dans tout le sud de 
la vallée du Mékong, pratique qui consiste à établir pendant plusieurs jours un feu per- 
manent et actif sous le fit des femmes qui viennent d’accoucher. Cette chaleur, jointe à 
l'absence à peu près complète de soins de propreté, favorise le développement de métro- 
péritonites et d’autres graves maladies. 

La peau des enfants dans les races indo-chinoises est presque aussi päle que celle des 
Européens ; mais cette blancheur est mate et n'offre jamais cet incarnat si vif et si joli des 
enfants européens. Leurs cheveux sont presque toujours châtains jusqu’à l’âge de quatre 
à cinq ans, parfois même ils offrent quelques reflets blond-foncé. Ce n’est que plus tard. 
vers sept à huit ans, qu'ils prennent cette teinte noire de jais, et en même temps cette roi- 
deur qui persiste ensuite plus ou moins longtemps, jusqu'au moment où ils deviennent 
blancs, c’est-à-dire vers cinquante ans environ. Comme nous l'avons déjà dit, la calvitie 
est presque inconnue chez eux. 
= Les enfants indo-chinois sont beaucoup moins fapageurs, bien plus faciles à élever, 
et d’une intelligence et d’un jugement plus précoces que les enfants européens. Mais, 
plus tard, au moment de la puberté, c’est-à-dire à l’époque où le jugement et les 
facultés intellectuelles se fortifient tant chez les Européens, ces qualités sont restées chez 
les Indo-Chinois ce qu’elles étaient quelques années auparavant, et paraissent parfois 
amoindries. En un mot leur intelligence, après s’être développée très-vite, semble, vers 
quinze à dix-huit ans, frappée tout à coup de ce caractère stationnaire et uniforme qui est 
particulier à la civilisation chinoise. 


S 3. Race notre, rameau oriental ou malayo-polynésien. 


Par leur nombre et leur variété, les sauvages de l’Indo-Chine constituent un des grou- 
pes humains de l'Asie les plus intéressants à étudier, et l'explorateur qui pourrait leur 


312 NOTES ANTHRO POLOGIQUES. 


consacrer le temps et les moyens nécessaires, ne manquerait pas de recueillir les docu- 
ments anthropologiques, ethnographiques et même philologiques les plus curieux. Ces 
sauvages sont partout de mœurs assez douces et vivent en tribus presque isolées les unes 
des autres, n’avant à peu près de commun que les mœurs et la langue, laquelle encore 
n’est pas absolument identique chez tous. Chaque tribu se décompose en un certain 
nombre de villages, avee un chef dont le rôle est celui d’un père de famille. Leur orga- 
nisation peut être comparée sous les principaux rapports au socialisme, et les habita- 
tions d’un certain nombre de tribus sont de véritables phalanstères (Stiengs). Contraire- 
ment à beaucoup d’autres peuplades sauvages, ils restent à peu près fixés dans le même 


TAN) 
A Ki 
NN 


TFRICHON L 


TYPE DE SAUVAGE OCÉANIEN : STIENG. 


lieu, guerroient très-peu entre eux et cultivent, quoique d’une manière très-défectueuse, 
le soldes forêts, surtout de celles qui couvrent les montagnes et les monticules. 

Nous ne pensons pas, comme on la écrit bien des fois, que toutes ces tribus aient été 
chassées des vallées et des plaines et refoulées dans les forêts et sur les montagnes par les 
Annamites et les Laotiens. Nous croyons au contraire que quelques-unes, que nous consi- 
dérons comme représentant le mieux le type de la race, ont toujours habité les régions 
très-boisées et surtout celles qui sont élevées ; d’abord parce que dans toute lIndo-Chine, 
les parties élevées sont partout couvertes d’une épaisse couche d'argile beaucoup plus fer- 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OU MALAYO-POLYNÉSIEN. 313 


tile que les terres alluvionnaires des vallées et des plaines ; ensuite parce que, même ac- 
tuellement, les terres inhabitées dns les vallées et les plaines qui entourent les forêts 
qu'elles occupent, sont assez abondantes autour d'elles, pour qu’elles puissent Sy fixer, si 
elles n'avaient apprécié les avantages nombreux que présentent les terres des forêts et 
des montagnes. Pour se procurer leur nourriture dans ces régions, eiles n’ont besoin pour 
* {out instrument que d’une hache. Elles coupent d’abord toute la forêt, y compris la basse 
et haute futaie. Six semaines après, lorsque tous les branchages sont secs, elles y mettent 
le feu, puis, après quelques jours de pluie, elles plantent le riz avec un bâton dans la 
légère couche de cendre qui recouvre le sol. Malgré l'absence de tout labour et d'irriga- 
tion, la première récolte est très-abondante et surpasse en produit les meilleures rizières 
inondées. La deuxième récolte est passable, parfois même on en fait une troisième dans 


UN CHEF DE VILLAGE STIENG. 


les terres très-riches. Ce système barbare de eulture, qui amènerait rapidement la des- 
truction des forêts dans les pays tempérés, ne les détruit nullement sous ces climats 
chauds et fertiles, où croissent de si nombreuses espèces d'arbres et d'arbustes aux 
racines profondes et vivaces. Dix à douze ans après, les arbres sont redevenus assez gros 
et les broussailles assez épaisses pour permettre de recommencer une nouvelle série de 
culture. Les forêts habitées par les sauvages subissent donc un assolement décennal ou 
quinto-décennal. Ce genre de culture n’est pas particulier aux sauvages : les Annamites, les 
Cambodgiens et les Laotiens le pratiquent également dans les forêts qui couvrent les plaines. 
Mais, en raison de la moindre fertilité du sol, l’assolement doit être à plus long terme, et 
les récoltes y sont moins abondantes. Dans les plaines herbeuses et peu boisées qu’on ren- 
contre si abondamment dans le fond des vallées et à l'embouchure des rivières et des 


fleuves, il est totalement impraticable. Les arbres v sont trop peu abondants pour produire 
Ile 40 


314 | NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


une couche de cendre suffisante, et en même temps il y croit plusieurs graminées et cypéra 
cées qui s'opposent totalement à ce genre de culture. Ces terres, pour produire du riz, 
doivent être défrichées, labourées et de plus entourées de talus, travaux longs et difficiles. 
Autant elles sont riches et productives entre les mains des Annamites, race laborieuse et 
persévérante, autant elles sont pauvres pour des sauvages indolents et paresseux. Ce que 
nous venons de dire permet de comprendre pourquoi tous ces sauvages sont fixés dans 
les forêts des montagnes et des monticules, et pourquoi ils ont dù toujours y rester. Car, 
outre l'avantage de se passer de charrue, de bestiaux et d'installation pour lirrigation, 
ce système agricole convient beaucoup mieux à leurs instinets destructeurs et à leur peu 
de prévoyance. Ils peuvent ainsi se déplacer à volonté et ne se fixer nulle part d’une façon 
définitive. 

Si simple que soit un procédé, qui n’exige qu'une hache en fer pour couper les arbres, 
il n'a pu commodément être pratiqué qu'à une époque de la vie de ces sauvages où ils 
savaient extraire et fabriquer le fer, ou du moins il leur était possible de s’en procurer par 
voie d'échange, comme cela a lieu actuellement. Avant cette époque, sans être impossible, 
il devait être très-pénible et très-défectueux. 

La culture du riz, telle que nous venons de la décrire, et entremélée de quelques 
pieds de maïs, de citrouilles et de quelques autres cueurbitacées, de tabac et de coton ou 
d’orlie de Chine pour fabriquer les lambeaux de vêtements qu'ils portent, est la seule que 
pratiquent les sauvages. Dès que ces cultures, qui demandent à peine trois mois d’un 
travail facile, sont accomplies et que la récolte est faite, leur vie s'écoule à ne rien faire, 
à manger et trop souvent à boire et à s’enivrer avec de leau-de-vie ou du vin de riz. 
Pendant quelques mois ils engraissent très-sensiblement, tant que leurs provisions sont 
abondantes; mais dès qu’elles s’épuisent, ils commencent à maigrir et parcourent alors 
les forêts avec un are sur l'épaule pour chasser les différents animaux, et en particulier 
les cerfs qui sont si abondants dans leurs forèts. Ils n’oublient jamais d'apporter la hache 
qui leur sert à se frayer un chemin et à tailler des bâtons pour déterrer les racines co- 
meslibles si abondantes dans ces climats, particulièrement certaines espèces d’ignames. 
Quelque temps avant la récolte, il leur arrive souvent de ne plus avoir absolument rien à 
manger; réduits alors à des insectes et à une foule d’autres animaux ignobles, tels que les 
lézards, les erapauds, les rats, ete., ete., comme nourriture, ils maigrissent beaucoup. 
C'est surtout à ce moment qu'ils guerroient entre eux, afin d'essayer de voler aux autres tri- 
bus les vivres qui leur restent. | 

Comme civilisation, ces sauvages confinent presque au dernier rang de l'humanité : ils 
sont cependant moins bas placés que les Australiens, qui en occupent Le dernier échelon. 
Leurs mœurs, leurs personnes n’ont rien d'absolument repoussant. Leur état social el 
leur organisation que nous avons signalés plus haut comme présentant des analogies avec 
le socialisme, sont tels qu’ils n’inspirent pas trop de pitié et qu’ils ne parraisent pas trop 
malheureux, malgré leur profonde ignorance. Leur costume se réduit ordinairement, dans 
tout le sud de l’Indo-Chine, à une simple bande de toile large environ comme les deux 
mains, et suflisant à peine pour leur conserver les apparences de la décence. Leur 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OU MALAYO-POLYNÉSIEN. 315 


ignorance est telle (Stiengs), qu'ils ne savent pas leur âge et qu’ils ne peuvent compter 
au delà de dix, sans avoir recours à des pierres ou à d’autres objets. Et pourtant ils 
vivent depuis des siècles à côté de peuples relativement civilisés, comme les Annamites, 
les Cambodgiens et les Laotiens. Ceux-ci les traitent avec une certaine bienveillance, 
surtout ceux qu'ils prennent comme esclaves. 

Les quelques pratiques superstilieuses auxquelles les sauvages se livrent ne peuvent 
être considérées comme l'expression d’une idée religieuse bien définie. Hs sont néanmoins 
susceptibles d'instruction, et nous avons pu voir par nous-même chez un missionnaire, le 
P. Arnoux, mort depuis, qui était établi à Brelam chez une tribu des plus barbares, les Stiengs, 
un certain nombre d'enfants auxquels il était parvenu à apprendre à lire et à écrire leur 
langue en caractères latins. Après avoir reçu ce commencement d'instruction, le féconde- 
raient-ils et se le transmettraient-ils ? Ce brave prêtre, après avoir passé dix ans parmi 
eux, paraissait en douter lui-même, etil eraignait qu'étant abandonnés à eux-mêmes ils ne 
retombassent rapidement dans la barbarie la plus grossière, comme cela s’est présenté tant 
de fois et à peu près sans exception chez les Australiens et même chez les nègres. Ces 
deux races ont été jusqu'à présent réfractaires à toute civilisation, excepté en employant 
la voie détournée du croisement avec les races supérieures. Encore l'excellence des résul- 
tats oblenus dans ce cas est-elle très-diseutable, surtout lorsqu'il s’agit de croisements 
de la race blanche avec la noire. Nous ne croyons pas pourtant qu’on doive conclure de 
ce qui se passe avec ces deux races à ce qui doit se passer dans les croisements de la 
race jaune avec la brune et la noire. Nous estimons que les individus qui proviennent 
du mélange des races indo-chinoises, retournent plus lentement au type primitif que la 
descendance du blanc et de la négresse, et que les métis indo-chinois ne sont pas frap- 
pés de stérilité comme les mulätres de nos colonies. La fusion parait s’opérer plus 
complétement, plus intimement, que dans le mélange de lélément blanc avec le noir. 
D'ailleurs, comme tous les croisements de ces sauvages ont lieu avec des rameaux de la 
race jaune, dont les principaux caractères se transmettent comme on sait d’une façon si 
durable à leurs descendants, il en résulte qu'après plusieurs générations, comme les ca- 
ractères mongols se sont maintenus, et qu'au contraire ceux de ces sauvages se sont atté- 
nués, il en résulle, disons-nous, un retour plus intense vers le type mongolique. Ce 
résultat, qui se passe dans toute l’Indo-Chine, est d'autant plus grand, que ces mélanges 
se font ordinairement au milieu de villages dont les habitants sont d’origine mongo- 
lique et dans lesquels, à l’inverse de ceux des sauvages, la population est continuellement 
en voie d’aceroissement; seule, la teinte brune de ces sauvages fait exception, et se transmet 
fortement et longuement à leurs descendants. 

A. Caractères des sauvages Alfourous de l'Indo-Chine. — Nous devons faire remar- 
quer, avant de donner les caractères de ces sauvages, que la plupart des mots dont nous 
nous servirons pour les désigner sont de deux sortes : 1° les noms génériques signifiant 
sauvages dans les diverses langues indo-chinoises, et qui sont par conséquent uniques 
dans chacune d'elles, tels que Moïs en annamile, Penongs en cambodgien, Khas en 
laotien, et Lolos en chinois ; 2° les noms de tribus qui sont très-nombreux et que nous 


316 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


citerons quelquefois, mais qu’en raison de leur grand nombre et de leur signification 
très-restreinte nous laisserons généralement de côté. 

Nous devons ajouter en outre que nous avons employé la dénomination de sauvages 
océaniens pour désigner ces sauvages Alfourous, afin de bien indiquer qu'il faut les 
assimiler à ceux du même genre, beaucoup mieux connus jusqu'à présent, qui habitent 
le centre de beaucoup d'îles de l'Océanie, et en particulier de l'Australie. Mais il ne faudrait 
pas les confondre avec les Océaniens ou Polynésiens, ou Micronésiens, qui habitent le 
pourtour de beaucoup d'îles, dont quelques auteurs ont fait une race distincte, mais qui 
proviennent pour d’autres, d’émigrations indiennes parties autrefois de l'Indo-Chine *. 

Les caractères communs à toutes ces tribus sauvages, qui offrent d’ailleurs d'assez 
grandes dissemblances, sont : une taille moyenne, un teint brun foncé, jamais tout à fait 
noir et plus pale que celui de l'Hindou et du nègre. Leur crane est déprimé, dolichocéphale. 
Leur front est large et bas, à peine bombé, la ligne d'implantation des cheveux qui le 
limite supérieurement décrit un are de cercle. Leurs cheveux sont plats, noirs, épais, 
mais jamais crépus ni ondulés. Leurs oreilles sont généralement très-grandes et fortement 
tournées en dehors avec le lobule très-développé, mème lorsqu'il n’est pas percé d’un 
large trou, comme eela est général chez eux. Leur face est arrondie et presque plate, 
moins pourtant que chez les mongoliques ; souvent elle est plus large que haute. Leur 
profil est presque droit et décèle souvent un léger prognathisme. Leur nez est peu déve- 
loppé, néanmoins il est plus grand que celui des Indo-Chinois et moins large à sa 
racine ; inférieurement, il est assez épaté avee les narines assez écartées, et toujours 
ouvertes en bas. Leurs veux sont droits, horizontaux, assez grands, rarement un peu 
obliques ; ils sont enfoncés, contrairement à ceux des divers rameaux mongoliques, el 
protégés par des arcades sourcilières bien saillantes qui partent des soureils à peine 
arqués, bien fournis et peu écartés de l'ouverture des yeux. Leurs paupières sont assez 
ouvertes et peu bridées dans l’angle interne. Leurs pommettes ne sont pas aussi proémi- 
nentes et surtout aussi relevées que dans la race jaune, mais leurs arcades zygomatiques 
sont très-saillantes, très-développées, afin de loger leurs muscles masticateurs qui sont 
très-puissants. C’est cette disposition qui contribue tant à élargir leur visage. Leur bouche 
est très-grande, avec des lèvres épaisses, charnues et ordinairement retroussées un peu 
en dehors. Leurs mächoires sont à peine prognathes et portent des dents verticales, ou 
très-peu proclives, de grandeur moyenne, bien rangées et régulières. Leurs ineisives 
médianes sont souvent un peu larges. Nous n'avons pas pu vérifier si le nombre des 
tubercules des molaires est de quatre comme chez toutes les races, ou de cinq comme 
cela à été vu sur les mächoires de quelques Australiens. Leur barbe est généralement 
plus fournie et se montre plus tôt que chez les peuples d’origine mongolique ; souvent elle 
est frisée; presque toujours elle est ondulée ; jamais elle n’est localisée exclusivement au 
menton et à la lèvre supérieure, comme chez tous les Mongols de race pure, et elle se 
développe aussi sur les côtés du visage. Le système pileux du corps est également assez 


1 R. P. Lesson, Voyage médical autour du monde, sur la corvette a Coquille. Paris, 1829. 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OÙ MALAYO-POLYNÉSIEN. 317 


abondant. Les hommes au torse velu, particulièrement dans la région sternale, ne sont 
pas rares. Quant à la physionomie de ces sauvages, elle ‘est douce et craintive comme 
celle de tous les sauvages. Leur regard est fixe. Le sourire n'apparait presque Jamais sur 
leur visage ; lorsqu'ils veulent manifester leur joie, ils ouvrent largement la bouche. Leurs 
sens sont excessivement développés, particulièrement Vouïe et la vue. Presque tous sont 
d’une adresse extrême à l’are. 

Les femmes de ces sauvages Alfourous n’offrent rien de bien remarquable ; elles sont 
en parfaite harmonie de taille et de conformation avec l'homme de la même race. Leurs 
formes seulement sont, ainsi que chez toutes les femmes, plus arrondies. Leurs seins 
sont d’une grosseur moyenne, sub-coniques, avec le mamelon très-saillant. Jamais ces 
organes ne deviennent démesurément pendants, comme cela s’observe si fréquemment sur 
les femmes de plusieurs rameaux de la race noire, particulièrement sur les négresses. 


SAUVAGES DES ENVIRONS DE STUNG TRENG 


Comme aspect, elles n’ont rien de repoussant, et sont peu inférieures aux femmes de race 
jaune. Elles sont seulement beaucoup plus eraintives, avec une physionomie n'’indiquant 
que très-peu d'intelligence. Sans être l’égale de l’homme, elles sont plutôt leur com- 
pagne que leur domestique. Toujours elles sont plus vêtues que l'homme ; contraire- 
ment à la plupart des Laotiennes, leur poitrine est toujours couverte. 

Les caractères descriptifs de ces sauvages s'appliquent surtout aux sauvages du Sud 
de la presqu'ile indo-chinoise, Moïs, Penongs et Khas, qui sont aussi grands mais plus 
grèles que ceux du Nord et qui vivent en même temps dans un état de sauvagerie beaucoup 
plus complet. Leurs membres sont remarquablement longs et grêles, surtout les jambes. 
Leur tronc est court et carré, avec la taille peu ou point dessinée. Leur système muscu- 
laire est très-faible. Leurs mollets sont très-peu développés et toujours placés haut. 

Malgré la maigreur ordinaire de ces sauvages, leur ventre est souvent proéminent, et 


318 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


dans tous les cas il n’est jamais aussi plat que chez les races voisines, qui Font cependant 
plus saillant que la movenne des Européens. Ce qui lient, selon toute probabilité, à la 
nourriture grossière dont ils font usage, et en particulier au riz qui constitue presque leur 
unique aliment, et dont il faut prendre une quantité double environ de celle de la plupart 
des céréales pour se nourrir. Ils peuvent du reste facilement engraisser, et il n’est pas rare 
d'en rencontrer de très-gros parmi ceux qui sont esclaves chez les Laotiens et qui ont une 
nourriture abondante. 

Comme nous l'avons déjà dit, les types purs de ces sauvages existent surtout dans le 
Sud de l’Indo-Chine ; leurs caractères, dans celte région, sont plus constants et plus uni- 
formes ; ils paraissent avoir subi très-peu l'influence des populations voisines. Il n’en est 
pas de même dans le Nord de l’Indo-Chine, l'uniformité de tvpe n'existe plus d’une manière 


SAUVAGES DES ENVIRONS DE TA-LAN (YUX-NAN MÉRIDIONAL). 


aussi complète, etils commencent à présenter les variations qu’on observe toujours sur les 
peuples civilisés qui ont beaucoup de relations avec d’autres tvpes que lesleurs. En même 
temps que leur physionomie perd l'air d’abrutissement et la fixité dans le regard de ceux 
du Sud, leurs veux deviennent souvent légèrement obliques, et leurs paupières supérieures 
se brident comme dans la race jaune. Leur intelligence et leur industrie sont aussi beau- 
coup plus développées. Nous citerons parmi ces sauvages mixtes, la grande tribu des 
Does, qui habitent la plupart des montagnes du royaume de Xieng Tong, dans le Laos 
supérieur, et qui est composée d'hommes trapus, aux épaules larges et aux mollets très- 
développés et bien placés. Ces Does, d’après les renseignements recueillis auprès d'eux 
par le commandant de Lagrée, seraient issus d’émigrants des frontières de la Birmanie, 
et sont plus civilisés que les autres sauvages. Loin de produire exclusivement ce qui est 
nécessaire à leur consommation, comme ceux du Sud, ils eultivent différents produits, par- 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OÙ MALAYO-POLYNÉSIEN. 319 


ticulièrement du colon que viennent leur acheter les Chinois du Yun-nan. Ils pratiquent le 
bouddhisme avec autant de ferveur que les Laotiens. Quelle est l'origine précise de ces 
tribus intelligentes et industrieuses”? Elles offrent à nos veux les principaux caractères des 
sauvages à types océaniens, et nous croyons que les modifications qu’elles présentent, résul- 
tent de ce qu'elles possèdent une forte proportion de sang de sauvage à type caucasique, 
qu'on rencontre dans le Nord de linde et de la Birmanie et jusqu'en Chine, et que nous 
déerirons en parlant des sauvages du Yun-nan. 


De ces Does il serait peut-être possible de rapprocher, comme avantla même origine, 


SAUVAGES DES ENVIRONS DE MUONG LIM. 


les Kouys, qui habitent les montagnes du Cambodge. Ces Kouys ne sont pas assimilables 
aux sauvages océaniens : d’après tous ceux qui les ont observés, ils sont relativement eivi- 
lisés, et exploitent les minerais de fer qui existent dans leurs montagnes. Ne les ayant pas 
vus, il nous est impossible de trancher complétement la question, mais l'aptitude qu'ils ont 
pour travailler les métaux et la description de leurs caractères physiques qui nous fut faite 
par le commandant de Lagrée, donnent de fortes présomptions à cetle opinion. 

Pour en revenir aux sauvages du Laos supérieur, nous dirons qu'ils présentent des va- 
riélés, mais qu’elles résultent évidemment de croisements avec les races qui les entourent. 
Si c'est un Chinois qui s’est uni à eux, on constate que les yeux sont petits, obliques, et 


320 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


que la paupière supérieure est bridée; si c’est un Laotien, on observe une modification 
dans la boîte crâänienne qui tend à devenir brachycéphale. Lorsque ces sauvages de race 
noire s’allient avec les sauvages à type caucasique, leurs traits s’accentuent, leur vigueur 
s’accroit. Mais comme les uns et les autres ont le teint brun foncé, on ne constate aucune 
modification dans la couleur de la peau. Les différences de type que présentent ces sau- 
vages s’observent souvent sur des individus isolés dans les tribus, mais ordinairement 
ils se constatent sur la tribu tout entière. Ce qui ne saurait élonner, car une fois que 
du sang jaune ou caucasique s’est infusé chez eux, il tend à se répartir également sur 
toute la tribu, par suite de la vie commune qu'ils mènent et de leur petit nombre. 

En rattachant ces sauvages aux Océaniens, et plus particulièrement aux Alfourous des 
auteurs, qui sont considérés, sinon comme indigènes en Océanie, du moins comme les 
premiers occupants, nous n'avons fait que confirmer l'opinion qui a déjà été émise sur 
eux. D'ailleurs, la description précédente et les nombreux dessins qu’on trouve dans 
l'album de M. Delaporte, viennent suffisamment à l’appui de ce fait. I suffit de comparer 
ces dessins, qui sont d'une consciencieuse fidélité, à ceux si nombreux qui ont été recueillis 

en Océanie, pour être frappé de la ressemblance qu'ils offrent, et par conséquent pour 
conclure que l'origine des races qu'ils représentent est commune. Le complément de notre 
démonstration doit être cherché dans l'histoire et la philologie, que Fanthropologiste doit 
toujours appeler à son aide pour élucider ces questions, et qui semblent indiquer que lO- 
céanie à élé peuplée par des migrations venues de l’Asie eten particulier du golfe de Siam ?. 
Il sera probablement possible d’en avoir de nouvelles preuves dans le langage articulé de 
ces Alfourous et dans l’examen comparatif de leur ethnographie. Quoi qu'il en soit, pour 
comprendre comment ces sauvages océaniens ont pu quitter lIndo-Chine pour s’avancer 
vers l'Océanie, en admettant qu'ils ne soient pas véritablementindigènes dans toutes les îles 
où ils ont été rencontrés, il suffit de jeter un coup d'œil sur une mappemonde. Par la pres- 
qu'ile de Malacea, l'archipel des iles de la Sonde et des Moluques, lIndo-Chine se relie 
directement à l'Australie et à la plupart des îles de l'Océanie. Avec une simple pirogue, ils 
ont pu franchjr tous les bras de mer intermédiaires entre chaque ile, et s'avancer ainsi suc- 
cessivement jusqu'à l'extrémité Sud de l'Océanie. Ces migrations ont dù avoir lieu à une 
époque où ils étaient très-nombreux en Indo-Chine, ou plutôt au moment où les différents 
rameaux de la race jaune ont envahi l’Indo-Chine, et les ont par conséquent refoulés vers 
le Sud. Cette époque a dù précéder également celle d’envahissement de toutes les îles de 
l'Océanie par les Océaniens proprement dits et par les Malais, tous les deux d’origine 
asiatique, et aussi celle des Mongols pélagiens qui peuplent particulièrement les Phi- 
lippines. Tous ces peuples envahisseurs, en occupant le littoral et le pourtour des iles, les 
ont refoulés dans l’intérieur où on les retrouve encore dans la plupart, quoiqu'ils aient 
beaucoup diminué depuis quelques siècles. 

B. Sauvages à type océanien du Sud: de la Chine. — Si, dans le Laos, la diversité des 
sauvages est déjà grande, elle Fest bien plus encore dans le Sud de la Chine. Dans Îles 


IR. P. Lesson, Voyage médical autour du monde, sur la corvette la Coquille. Paris, 1829, p. 166. 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OU MALAYO-POLYNÉSIEN. 321 


provinces du Yun-nan, du Se-tchouen et du Kouy-tchéou, on ne compte pas moins de 
quarante tribus différentes éparses au milieu de Laotiens, de Tibétains, de Tonkinois, de 
Mandehoux, de Chinois divers, et même d’Arabes musulmans, appelés autrefois par le 
gouvernement de Pékin pour soumettre ces sauvages montagnards. 

Nous diviserons ces sauvages indigènes en deux races : l°ceux qui ont le teint jaunatre, 
et que nous appellerons Lolos blancs : 1s serattachent aux Laotiens presque exclusivement : 
2% ceux dont le teint est plus ou moins foncé, que nous appellerons Lolos noirs où Sau- 
vages noirs, el qui sont probablement les peuples véritablement autochthones du Yun-nan. 
Ils se subdivisent en deux classes : 1° les sauvages à type océanien, semblables à ceux 
du Laos supérieur et que nous allons étudier; 2°les sauvages à tvpe caucasique, Man- 
tse, Miao-tse, Lissous, ete., ete. 

Toutes ces races humaines qui habitent le Sud de la Chine ne sont pas disposées 
indifféremment dans les différentes parties du pays. Elles se sont échelonnées depuis Le 
fond des innombrables vallées qui jouissent d’un climat tropical, jusqu'au sommet des 
montagnes où règne le froid. Chacune d'elles s’est installée dans la zone climatérique 
qui convient aux aptitudes qu'elle tient de son origine. Dans le fond des vallées se trouvent 
les Chinois, les Laotiens et les populations mixtes qui en descendent. Au milieu des 
montagnes, vivent les sauvages à {ype océanien, etles Chinois encore qui ne eraignent pas 
davantage le froid, et qui sont avec les Israélites et les Bohémiens, les seules races vrai- 
ment cosmopolites ; dans cette même zone intermédiaire, se trouvent encore des popu- 
lations mixtes, provenant des croisements des races qui lhabitent. Enfin, tout à fait au 
sommet, vivent les sauvages à type caucasique, qui ne peuvent vivre dans les parties chaudes 
et marécageuses du pied des montagnes, ainsi du reste que la plupart des rameaux de 
la race blanche. 

Les cultures pratiquées par ces différentes races varient avee le lieu qu’elles occupent. 
Les habitants du fond des vallées cultiventle riz, la canne, les patates, le coton, ete., ete. : 
ceux du milieu des montagnes pratiquent en élé les cultures des pays chauds, et en hiver 
celles des pays froids ; ceux du sommet ne possèdent plus que les plantes des climats tem- 
pérés, c'est-à-dire le blé, Pavoine, le sarrasin, le chanvre, le pavot à optum, ete. 

Remarquons en passant que les habitants des vallées chaudes sont 1e1 ceux qui ont 
le teint le moins foncé. Cette coloration relative des peuples du Yun-nan, générale dans 
tout le Sud de la Chine et du Laos, n’est pas, comme on le voit, favorable à la théorie qui 
fait jouer un rôle si considérable aux #/ieux, et qui explique la noirceur du nègre par son 
long séjour sous les tropiques, et la paleur du blanc par l'influence du froid. Cette théorie, 
qui est démentie par les faits sur de nombreux points du globe, parait d'autant plus 
inexacte dans le Sud de la Chine, que, d’après les traditions chinoises, ces sauvages à peau 
bistrée sont les véritables autochthones, et ont fowjours habité les montagnes. Les Chinois, 
en faisant la conquête de ce pays, n’ont fait que prendre possession du fond des val- 
lées, qui conviennent parfaitement à leur agriculture, à leurs aptitudes de races, et 
qui étaient délaissées par ces sauvages qui ne peuvent les habiter, à cause de la fièvre 
paludéenne et des autres maladies des pays chauds qui y règnent. Il n’est done pas dou- 

IL. 41 


322 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


ieux pour nous que c'est à l'hérédité qu'il faut attribuer les différents degrés de colora- 
tion de la peau que nous avons observés sur toutes les populations indo-chinoises. Nous 
ne prétendons cependant pas nier complétement l'influence du climat sur le teint des 
races; bien certainement le soleil et la chaleur des pays chauds provoquent un dépôt de 
pigment sous l’épiderme humain plus abondant que dans les pays froids. Mais rien ne 
prouve Jusqu'à présent que ce changement, qui varie avec les individus et qui est du 
reste momentané et limité à la durée du séjour dans les pays chauds, se transmette par 
voie de génération. S'il en étail ainsi, nous aurions dù constater, entre les sauvages 
océaniens du Sud de Findo-Chine, qui vont entièrement nus, et ceux du Nord qui sont 
presque complétement vêtus, une différence de coloration. Il n’en est rien : les uns et les 
autres sont également noirs. 

Avant déerit précédemment les sauvages à tvpe océanien du Sud de lIndo-Chine, 


FEMME SAUVAGE DE BAN KON-HAN (FRONTIÈRE SUD DE YUN-NAN) 


nous n'avons plus à le faire pour ceux de la Chine; mais nous devons faire ‘observer 
que les sauvages de cette partie Nord de lindo-Chine diffèrent fortement de ceux du 
Sud. Plus en contact avec les autres races voisines qui sont en même temps bien plus 
nombreuses et plus différentes que dans le Sud, il en est résulté pour eux de nom- 
breux croisements, qui donnent très-souvent à leur type quelque chose d'indécis qui ne 
manque pas d’embarrasser l'observateur. Leurs traits caractéristiques ont été mitigés pres- 
que partout ; {rès-souvent ils présentent des caractères mongoliques, particulièrement la 
conformation des paupières qui s'impose si fortement, comme on sait, à tous les des- 
cendants de la race jaune. D'autrefois leur physionomie ressemble à celle des Laotiens 
et des sauvages à type caucasique. Ils vivent également dans un état de sauvagerie beau- 
coup moins grand que ceux du Sud de la presqu'ile indo-chinoise, qui paraissent si enelins 
à la vie des forêts. Un contact séculaire avec la civilisation de leurs voisins. mais surtout 


RACE NOIRE, RAMEAU ORIENTAL OU MALAYO-POLYNÉSIEN. 323 


l'effet d’une légère infusion de sang des races supérieures qui élève si promptement les 
races inférieures, à paru les ürer de l’état de profonde barbarie dans laquelle devaient 
vivre leurs ancêtres et qu’on observe encore dans le Sud. Ils ont perdu presque tous leurs 
instincts sauvages : ils sont sédentaires, assez laborieux pour cultiver d’une façon continue 
comme le Chinois et le Laotien; leur organisation sociale est relativement avancée. On 


SAUVAGE DE BAN KON-HAN (FRONTIÈRE SUD DU YUN-NAN). 


ne saurait pas, à notre avis, concevoir la moindre crainte sur leur disparition, comme 
cela semble se passer si souvent dans le contact de la race blanche avec toutes les races 
sauvages. Modifiés ainsi qu'ils le sont, ils paraissent tolérer parfaitement le contact de 
leurs voisins de race jaune, mais surtout celui des sauvages à type caucasique avec lesquels 
ils nous ont paru se mêler très-souvent, au point qu'il est totalement impossible de tracer 
la ligne de démarcation qui les sépare dans une foule de montagnes. Les Chinois qui 


3 


1 


4 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


envahissent leur pays, loin de les refouler, se mélangent à eux et se les assimilent en les 
faisant profiter des avantages de leur civilisation, ainsi que le veulent les principes de 
l'humanité. Ne doit-on pas convenir, en voyant ces faits si en désaccord avec notre ma 
nière de procéder à l'égard de tous les sauvages, que les Chinois ont sous ce rapport une 
grande supériorité sur les Européens, si fiers de leur civilisation, et qui, en dépit des prin- 
cipes religieux et philanthropiques qu'ils professent et imposent souvent par la force, chas- 
sentet dépossèdent, partout où ils s’établissent, les premiers et légitimes possesseurs du 
sol. C’est certainement à celte aptitude précieuse d’assimilation que possèdent les Chinois, 
qu'ils doivent d’avoir créé leur colossal empire et en même temps d’être aussi uniformes 


quoique aussi nombreux. 


S 4. Race brune ou rameau noù' de la race Cuucasique. 


A. Sauvages à type caucasique du Sud de la Chine. — Les Lolos noirs à type cau-- 
casique, exclusivement fixés au sommet des hautes montagnes de la Chine, ressem— 
blent non-seulement aux races indo-européeunes par les trails, mais encore par leur 
manière de se vêur tout à fait différente de celle des femmes des Indo-Chinois qui les 
entourent. Tout d'abord, on est frappé de la ressemblance qu'ils ont avec les Bohé- 
miens, lesquels sont, comme on sait, originaires de l'Inde. Mais, à l'inverse des Bohé- 
miens, ils sont presque complétement sédentaires et se livrent à peu près exelusive- 
ment aux travaux agricoles. Ils sont grands et vigoureux, avec les formes accusées et les 
muscles assez bien dessinés. Leurs épaules sont larges, leur tronc n’est plus carré et tout 
d’une venue comme celui de la plupart des Indo-Chinois. Leur taille est dessinée, surtout 
chez les femmes, et donne à leurs mouvements une souplesse qu'on ne s'explique pas 
toujours à première vue, mais qui frappe l'observateur. Leurs membres sont bien propor- 
lionnés et parfaitement articulés. Leurs jambes sont très-droites, avec les mollets bien placés 
et très-développés. Leur teint est bistré, moins noir que chez les Hindous et que chez les 
sauvages océaniens de type pur; néanmoins, si on s’en tenait au teint, il serait souvent im- 
possible de les distinguer les uns des autres. 

Leur physionomie est assez énergique, sans férocité ni dureté pourtant; elle est beau- 
coup plus expressive que celle des Mongoliques. Les traits de leur visage sont accentués, 
leur profil est droit, leur visage est ovale et surmonté d'un front assez haut, droit, peu 
fuyant supérieurement, avec les bosses frontales assez accusées. Ils ont souvent une 
barbe noire bien fournie; elle est toujours frisée ou au moins ondulée; elle est moins 
tardive que chez les Chinois, et lorsqu'elle existe, on en observe sur les côtés du visage, ce 
qui est tout à fait exceptionnel dans la race mongolique. 

Leurs yeux sont horizontaux, bien ouverts; il s'en faut pourtant qu'ils soient entiè- 
rement comparables à ceux des Européens; ordinairement même ils sont un peu bridés 
dans l'angle interne. Au lieu d’affleurer comme chez les Mongols, ils sont plus enfoncés 
et mieux protégés par les bosses sus-orbitaires qui proéminent davantage et qui portent 
des soureils mieux fournis. Leur nez n'est ni large ni plat à la racine. Cet organe est pres- 


RACE BRUNE OÙ RAMEAU NOIR DE LA RACE CAUCASIQUE. 325 


que toujours droit, parfois même il est busqué ; rarement pourtant, il devient entièrement 
comparable à celui des Européens pour son développement, sa minceur et la petitesse 
du lobule terminal. Les pommettes sont très-peu proéminentes et peu élevées. La 
bouche est de grandeur mov°nne, parfois même elle est petite, avec des lèvres peu épaisses; 
jamais cependant elle n’atteimt un degré de minceur très-grand. Les mächoires ne sont 
jamais prognathes et portent de belles dents, bien rangées, verticales et d’une grandeur 
ordinaire. Le menton paraît le plus souvent assez large et proémine, contrairement à celui 
des Chinois. L’angle formé par la branche montante du maxillaire inférieur avec le corps 
de l'os, parait sur le vivant se rapprocher beaucoup de l'angle droit; caractère qui permet 
de les distinguer très-facilement de tous les rameaux mongoliques chez lesquels cet angle 
parait ordinairement très-ouvert. 


Les femmes de ces sauvages sont les mieux proportionnées de toute l'Indo-Chine; elles 


HOMME ET FEMME LISSON (MONTAGNES DU NORD DU YUN-NAN). 


sont en parfaite relation de grandeur, de forme et de vigueur avec les hommes de la 
même famille. Elles sont par conséquent grandes et fortes, avee la taille parfaitement 
indiquée, ce qui fait différer très-notablement leur démarche de eelle des femmes ap- 
partenant aux races qui les entourent. 

A limitation des Chinois qui emploient, comme on sait, l’épithète de sauvages ou d’é- 
trangers à l'égard de tous les peuples, nous avons appelés sauvages ces indigènes à type 
caucasique; mais ils ont atteint un certain degré de civilisation qui rend cette appellation 
complétement inexacte. 

L'énergie de ces robustes montagnards, qui n’habitent presque exclusivement que les 
sommets des hautes montagnes, à une altitude comprise entre 2,200 et 3,500 mètres, les 
a rendus très-redoutables pour les Chinois. Quoique formant un assez grand nombre de 
tribus distinctes, avant peu de relations les unes avec les autres à cause de la difficulté 


326 | NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


des communications d’un groupe de montagnes à l’autre, ils forment pourtant une famille 
unique, composée de nombreux faisceaux plus ou moins ressemblants. En réunissant toutes 
les tribus qui en font partie, on peut les considérer comme assez nombreux. On en trouve 
à peu près sur toutes les hautes montagnes de l'Ouest et du Sud de la Chine, depuis le 
Yun-nan jusqu'en Mongolie, où il en existe également (d'Omallius d'Halloy). C’est 
sans doute à ces sauvages qu'il faut attribuer ce fait admis depuis longtemps par tous 
les écrivains et tous les naturalistes, que les Chinois sont une race mélangée de sang blanc 


Il 


et de sang jaune *. Cette opinion devient une certitude après la constatation de l'existence 


KR 

NS 

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At 


v 


TYPES DE MAN-TSE (MONTAGNES DU YUN-NAN ET DU SE-TCHOUEN). 


de cette race. Pour l’appuyer, nous dirons que dans le voisinage des montagnes qu'elle 
habite, on constate sans peine que le type Chinois se modifie sensiblement et présente 
quelques-uns des caractères de ces Lolos noirs. 

Les tribus qui offrent le moins de mélange et qui ont gardé les traits les plus purs de la 
race, habitent le Nord du Yun-nan, et le Sud-ouest du Se-tchouen, près de Houey-ly tcheou, 
où se trouvent en même temps les montagnes les plus hautes et les plus inaccessibles que 
nous avons vues. Partout ailleurs, leurs caractères nous ont paru plus ou moins mitigés. 


1 Bonté, Bulletin de la Société d'anthropologie, t. VI, p. 46. 1865. 


POPULATIONS MIXTES DU SUD DE LA CHINE. 397 


Ces Lolos noirs à type indo-européen, sont-ils véritablement indigènes dans le sens 
le plus absolu du mot? Sont-ils venus de l’Asie centrale, qu'on assigne comme ayant 
été le berceau des races arvennes? Viennent-ils de lInde comme les Bohémiens 
avec lesquels nous les avons comparés ? Il nous est complétement impossible de répondre 
à ces questions. L'histoire chinoise et la philologie de ces peuples permettront peut-être 


de les résoudre et de constater qu'ils sont d’origine arvenne *. 


S D. Populations mixtes du Sud de la Chine. 


En rappelant ee que nous avons dit précédemment sur le grand nombre de rameaux 
se rattachant aux quatre races humaines qui existent dans le Sud de la Chine, on conçoit sans 
peine que des croisements innombrables aient eu lieu entre ces diverses races, si rappro- 
chées les unes des autres. Les mélanges ont dù être d'autant plus fréquents, qu'il 
n'existe en Chine ni préjugés de caste comme dans l'Inde, ni noblesse comme dans 
beaucoup d’autres pays. Nous devons ajouter qu'il n°y a pas non plus de répugnancee ou 
d'antipathie de race bien prononcée. D'après cela, on conçoit facilement que si, en parcou- 
rant le pays, on trouve dans certains points isolés les types purs, par contre, dans beaucoup 
d’autres, surtout dans les villes, il est impossible de rapporter les individus qu'on rencontre 
à aucune race distincte. La recherche des types est d'autant plus difficile, qu'outre les 
variations individuelles qu'on constate chez tous les peuples, les variations des races au- 
tochthones nous ont paru osciller dans des limites assez étendues, plus larges que chez 
les populations d’origine mongolique pure. Est-ce le résultat de l'immense diversité des 
climats du Sud de la Chine, ou bien de croisements nombreux avec les races voisines ? 
C'est sans doute celte dernière cause. Au milieu de ces populations bigarrées, on ne saisit 
les traits caractéristiques des types purs qu'en prenant ses points de comparaison 
assez loin les uns des autres. 

Malgré toutes ces causes tendant à embrouiller le type, 1l s’est néanmoins créé des 
populations mixtes ou hybrides très-nombreuses, provenant de ces mélanges, et dont 
les caractères sont suffisamment constants pour qu'on puisse les distinguer et même 
les décrire. Tels sont les Zong-tchouen jen, où habitants de Tong-tchouen ; les Win-/ra, 
de la plaine de Ta-ly ; les Che-pin jen qui habitent les environs du lac de Che-pin, et les 
Pen-ti, sur chacun desquels nous allons dire quelques mots. 

Les Tong-tchouen jen, quoique issus de Chinois et de sauvages, se distinguentassez 
difficilement du Chinois pour un œil qui n’est pas exercé. Les quelques caractères qui 


1 Plusieurs observations que nous avons pu faire sur leurs coutumes, laissent espérer que l’on trouverait 
de nombreuses preuves à l'appui de cette opinion. Nous citerons entre autres : 1° la manière de tricoter qui 
est totalement inconnue des Chinois, ou du moins qui n’est jamais pratiquée par eux, et que connaissent ces 
sauvages ; 2° l'habitude de traire les femelles des bestiaux et en même temps de faire du fromage avec le lait, 
que les Chinois ignorent complétement. Nous nous bornons à rapporter ces deux faits, mais il n’est pas 
douteux qu’on ne puisse recueillir beaucoup d’observations établissant d’une façon indiscutable que les Lolos 
noirs ont eu des relations avec d’autres peuples que les Chinois, probablement avec les populations de Finde. 


328 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


les différencient du Chinois pur, sont : les pommettes moins saillantes et moins relevées, 
le visage moins losangique et se rapprochant de lovale, les veux moins obliques et 
moins bridés dans l'angle interne, un teint naturellement plus foncé, une taille moins 
grande et une vigueur physique plus faible. Quant à leur eivilisation, elle est complé- 
tement semblable et égale à celle des Chinois. En un mot, ils ont été complétement 


assimilés par ces derniers. 


£, 


HOMME ET FEMME 1-KIA (MONTAGNES DU NORD DU YUN-NAN). 


Malgré leur grande proportion de sang chinois, les Tong-tchouen jen ne possèdent 
pas, comme ceux-ci, la faculté de vivre dans le fond des vallées chaudes. Ceux d’entre eux 
qui vont travailler chez les Chinois dans le fond des vallées ne peuvent y résister. Ils 
contractent dans ces régions chaudes les maladies des marais, s'y anémient et sont forcés 
de remonter sur les plateaux élevés pour se guérir. Les sauvages à {ype caucasique sont 


POPULATIONS MIXTES DU SUD DE LA CHINE. 329 


encore plus sensibles à ce changement de climat; aussi la théorie de l’acclimatement de 
l’homme sous tous les climats jouit-elle de très-peu de crédit parmi eux. 

Les Min-kia de la plaine de Ta-ly et les Che-pin jen doivent être réunis comme ayant la 
mème origine et les principaux traits communs. Ils ne sont cependant pas absolument 
identiques, mais les uns et les autres résultent du croisement des Laotiens avec les sauva- 
ges à type caucasique, additionné probablement d’un peu de sang de sauvages océaniens. 
Ils forment incontestablement le groupe le plus intéressant et le plus nombreux parmi ces 
populations croisées. Leur eivilisation est parfaitement distinete de celle des Chinois ; elle 


& REA CHA RD: fc 


TYPES DE MIN-KIA (ENVIRONS DE TA-LY). 


est relativement très-avancée surtout chez les Min-kia, et présente de grandes analogies 
avec celle des Laotiens. Les caractères distinctifs des Min-kia sont d’être trapus, vigou= 
reux et très-bien proportionnés. Leurs membres, surtout les jambes, sont forts et les 
mollets bien développés. Leur tronc est assez court, pourtant la taille commence à se des- 
siner. Leur peau est ordinairement peu colorée ; presque toujours pourtant, elle offre une 
légère teinte brune et paraît quelque peu enfumée. Leur tête est sphérique, le visage arron- 
di ou légèrement ovale. Leurs traits sont réguliers, ramassés le plus souvent. Leur nez 
est assez prononcé, mais épaté inférieurement et moins large à la racine que celui des Indo- 


‘Chinois ; pourtant il est encore mousse à son extrémité. Leurs lèvres sont assez épaisses, 
Il. 12 


330 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


leurs yeux sont horizontaux, plus ouverts et moins bridés que ceux des Chinois. Leur barbe 
est sensiblement plus abondante que chez les individus de race mongole; elle est frisée et 
se montre loujours sur les côtés du visage. En résumé, l'impression qu’on éprouve à la 
vue des Min-kia, c’est qu'ils présentent une grande ressemblance avee les Laotiens: el 
certains {ypes caucasiques, et peu d’analogie avec les Chinois. 

Les Pen-li sont formés comme les Min-kia du mélange des Laotiens avec les sauvages 
à type caucasique, mais avec une grande prédominance de sang jaune ou laotien. 

ILexiste encore beaucoup d’autres groupes de ces populations hybrides, répandues dans 
tout le Sud de la Chine. Mais nous devions nous borner à signaler celles qui se sont trou- 


MUSULMAN CHINOIS. 


vées sur notre route et que nous avons pu observer par nous-même. Du reste, la plupart 
des autres, quoique portant des noms différents, doivent très-probablement se rattacher 
aux précédentes ou du moins s’en rapprocher tellement qu'il serait très-difficile de les 
distinguer et par conséquent de les décrire. 

A côté de ces populations hybrides, se placent les musulmans chinois dont nous dirons 
quelques mots. Ces musulmans, d'origine Arabe, sont assez nombreux et constituent un 
danger sérieux pour la Chine. Quoiqu'ils possèdent tous une très-forte proportion de 
sang chinois, ils ont cependant conservé presque toutes les qualités guerrières de leurs 
ancêtres et n'ont pas pris la poltronnerie proverbiale des Chinois. Quant à leurs caractères 
physiques. si on en rencontre encore beaucoup montrant très-distinctement les prinei- 


CHINOIS. 391 


paux traits des Arabes, et même quelques-uns ayant encore le type arabe assez pur, la 
plupart sont assez difficiles à distinguer des Chinois pour un œil qui n’est pas exercé. Ce 
résultat n’est pas étonnant; car, quoiquene s’alliant qu'entre eux et ne mariant jamais leurs 
filles qu'à des musulmans, ils prennent cependant aussi des Chinoises comme eoncubines. 
Les modifications principales qui leur ont été imprimées par le sang chinois sont un teint 
aussi jaune que celui des Chinois et des yeux presque aussi bridés dans l’angle interne. 
Ces deux caractères sont donc complétement insuffisants pour les reconnaître. On ne peut 
les distinguer ordinairement qu'à leur physionomie plus énergique, à leurs traits plus 
accentués, à leur taille plus élevée et à leur vigueur physique plus grande. Assez souvent 
pourtant, leur nez ressemble à celui des Arabes, il est aquilin ; presque toujours il est plus 
mince et plus développé que le nez des Chinois. Dans ce cas, les pommettes sont moins 
saillantes et le visage devient ovale, en vertu dé cette loi de balancement organique que 
nous avons plusieurs fois énoncée, que plus le nez est saillant, moins les pommettes le 
sont, et réciproquement. Le menton de ces musulmans est presque toujours proéminent 
au lieu d’être fuyant comme dans la race mongolique. Leur barbe est quelquefois assez 
développée, mais on peut dire que c’est un des caractères les plus fortement modifiés par 
le sang jaune. 

On voit que, bien qu'il y ait plusieurs sièeles que ces musulmans sont en Chine, 
le moment de leur fusion complète avec la population chinoise est encore assez éloigné. 
Leur religion est bien certainement le prineipal obstacle qui s'oppose à cette fusion ; sans 
elle ils se seraient noyés depuis longtemps dans le sang chinois, sans le modifier d’une 


facon appréciable, en raison de leur petit nombre relatif. 


S 6. Chinois. 


Nous terminerons ces notes anthropologiques en disant quelques mots du Chinois qui 
est le prototype de la race jaune. Cette étrange race est loin d’être parfaitement identique 
dans toutes les parties de la Chine. Déjà, sur le littoral, on constate des différences 
suffisamment appréciables entre les Chinois du Sud et ceux du Nord. Ceux du Nord 
ressemblent plus à leurs voisins les Mongols et les Mandchoux, que ceux du Sud, les- 
quels, étant frès-éloignés de ces deux rameaux de la race jaune, n’ont pu par conséquent 
acquérir, en se croisant avec eux, quelques-uns de leurs caractères. Les traits des Chinois 
du Nord de la Chine sont généralement plus grossiers et leur faille est moins élevée que 
celle des habitants de la province de Canton, qui ont les traits plus fins et qui sont aussi plus 
robustes. Des différences beaucoup plus considérables existent entre les Chinois du lit- 
toral et ceux de l’intérieur, particulièrement avec les populations des provinces éloi- 
gnées, comme celles du Yun-nan et du Se-tchouen. On reconnait facilement que les 
Chinois de ces deux provinces offrent une certaine ressemblance avec les sauvages abori- 
gènes ; ils ont les yeux moins obliques et moins bridés, la face moins losangique; souvent 
mème elle devient ovale, et alors les pommettes sont moins proéminentes. Leur teint est 
plus foncé, leur nez est moins épaté, plus saillant et plus mince ; leur barbe est plus abon- 


332 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


dante, souvent elle est frisée et contient fréquemment quelques poils roux, ce qui est ex- 
trèmement rare chez les Chinois purs. Sans prendre même des points de comparaison 
aussi éloignés, on trouve souvent dans la même province de notables différences entre les 
populations chinoises voisines. A côté de populations rappelant les sauvages par le type 
et d’autres caractères, on en trouve d’autres à la physionomie franchement chinoise. Les 
premières sont ordinairement moins robustes que les secondes qui présentent parfois une 
très-haute taille contrastant singulièrement avec celle de leurs voisins, comme nous 
l'avons observé dans la ville de Lin-ngan. Parmi les variations qu'offrent les Chinois, nous 
devons mentionner l'existence, surtout dans le Yun-nan, d'individus aux cheveux roussâtres. 


UN CHARLATAN CHINOIS. 


Ce fait, qui est très-rare même dans cette dernière province, ne se présente jamais dans 
lIndo-Chine tant chez les rameaux de la race mongole que chez les sauvages. Les barbes 
contenant des poils roux sont beaucoup moins rares et peuvent se rencontrer. Mais lors- 
qu'on observe avec soin, ilest rare qu'on ne constate pas en même temps quelques modi- 
fications dans les traits du visage qui éloignent les individus du type mongolique pur et 
les rapprochent du type caucasique. 

Quoique les varialions de types que présentent les Chinois soient assez grandes et assez 
nombreuses, on ne saurait méconnailre néanmoins que la nation chinoise offre, rela- 
livement aux nations européennes, une uniformité de type remarquable, surtout si 
on considère l'immense étendue de l'empire chinois. Cette uniformité de type est due : 


CHINOIS. 333 


1° à sa position géographique à l'extrémité orientale de l'Asie, loin de tous les pays habités 
par des races très-différentes, et dans une situation telle, qu'il est très-difficile d'y 
arriver par terre, à cause des nombreuses et hautes montagnes qui forment une véritable 
barrière sur toute sa frontière occidentale; 2 à son organisation politique el sociale, 
laquelle est essentiellement égalitaire et démocratique, et n'offre aucune trace de caste 
ou de noblesse s’opposant au mélange des divers groupes de la nation. En outre, tous 
les rameaux de la race jaune présentent une plus grande fixité dans leurs principaux 
caractères, et ils oscillent dans des limites bien moins étendues que les rameaux 
européens. Et cependant, en admettant la théorie de l’influence des milieux, la Chine, 
avec ses températures extrêmes, son climat si varié, ses immenses plaines à l’embou- 
chure des fleuves et ses innombrables montagnes près de leurs sources, devrait offrir 
parmi ses habitants des variétés beaucoup plus nombreuses qu'aucune autre région du 
vlobe. | 

Ajoutons enfin quelques mots sur le cosmopolilisme dont jouit cette race, cosmopolitisme 
que nous avons déjà eu l’occasion de faire remarquer, mais sur lequel nous désirons revenir à 
cause du haut intérêt qu'offre cette question si importante pour l'avenir de l'humanité. 
Boudin, dans son 7raité de géographie médicale, et M. Bertillon dans son article si remar- 
quable sur l’acclimatement (Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, t. 1), après 
avoir démontré par des faits nombreux le non-acclimatement de la plupart des familles 
européennes sous les tropiques, et même au delà du 55° degré de latitude environ, font 
remarquer que, contrairement aux Européens, les Israélites et les Bohémiens peuvent 
vivre et se multiplier sous tous les climats. Aux deux familles précédentes ces auteurs 
auraient pu ajouter le Chinois, dont le cosmopolitisme n'est pas moins complet et est 
beaucoup plus important au point de vue des progrès futurs de la civilisation dans les 
régions tropicales. 

Pour habiter la Chine, l’homme devait être essentiellement cosmopolite et jouir d'un 
tempérament extrêmement flexible, capable de se plier aux variations les plus extrêmes 
de température, d'humidité et d'altitude. Ces variations atteignent des limites beaucoup 
plus étendues en Chine que dans aucun autre pays du monde. L'été est souvent plus 
chaud à Pékin, — qui est pourtant situé dans le Nord de la Chine, — qu’en Égypte, et le 
thermomètre y dépasse quelquefois 49° centigrades. L'hiver au contraire, on y observe des 
froids de 29° au-dessous de zéro. De ces différences extrêmes, il résulte pour le Chinois 
l'obligation de se couvrir de fourrures tout l'hiver, et l’été de vivre presque nu comme la 
plupart des habitants des pays chauds. 

En parcourant la province du Yun-nan, qui, en raison de ses nombreuses mon- 
tagnes et de ses profondes vallées, présente tous les climats, de très-chauds comme de 
très-froids, de très-secs comme de très-humides, des altitudes très-basses et d’autres 
dépassant 3,500 mètres, nous avons pu voir plus facilement que partout ailleurs, combien 
cette aptitude des Chinois à vivre partout était réelle. Nous les avons rencontrés dans toutes 
ces conditions climatériques, également vigoureux et aussi riches en enfants. Ils sont 
cependant moins nombreux au sommet des montagnes et dans les zones froides, mais 


334 NOTES ANTHROPOLOGIQUES. 


c’est beaucoup moins à cause du froid qu'en raison de Pimpossibilité d'y cultiver le riz : 
un Chinois sans riz est comme un Européen sans pain. 

A l'appui de ces observations recueillies en Chine, et démontrant le cosmopolitisme 
du Chinois, nous citerons, comme ayant encore bien plus de valeur, ce qu'on observe dans 
tous les pays où les Chinois sont emmenés comme coolies et dans ceux où ils vont pour 
trafiquer. Nous avons pu les voir en Cochinchine, pays excessivement chaud, y vivre et y 
travailler comme chez eux, s'y mulliplier comme en Chine, soit en s’unissant à des 
femmes annamites pour lesquelles ils n’ont aucune répugnance !, soit, dans quelques 
cas exceplionnels, avec des femmes qu'ils amènent de Chine. À Batavia, à Manille, à 
Singapour et dans beaucoup d’autres colonies européennes, situées sous les tropiques, 
des observations analogues ont été faites. Dans tous ces lieux ils supportent la chaleur 
aussi facilement que les indigènes. Par contre, ils supportent facilement les climats de la 
Californie et du Sud de FAustralie, qui sont tempérés et même assez froids en hiver. 

Si l'organisme du Chinois est essentiellement flexible, ses habitudes, ses mœurs, ses 
passions, ses gouts, tout ce qui dépend enfin de son organisation cérébrale et de son 
éducation, ne subit, partout où il va, que des modifications insignifiantes. Singulier an- 
tagonisme entre le corps et l'intelligence ! N’est-il pas curieux de voir la nation la plus 
fixe dans sa civilisation montrer autant de souplesse dans son organisme ! 

C'est à ce cosmopolitisme des Chinois, bien plus qu’à leurs vertus militaires, qu'a élé 
due l’immense expansion de leur race. Cette faculté a dù agir d'autant plus puissamment 
que les régions qu'ils ont envahies étaient habitées par des peuples qui en étaient 
plus dépourvus. 

Malgré toutes les difficultés, ils s’avancent chaque jour vers le Sud, particulièrement 
dans le Yun-nan, vers les frontières du Laos. La malaria, qui est si meurtrière dans ces 
régions, les frappe, il est vrai, presque aussi cruellement que les Européens, et il n'est 
pas douteux qu'ils n’eussent déjà peuplé le Laos sans elle. La végétation de ees régions, 
grace à l'abondance des pluies et à la richesse du sol, est d’une puissance colossale; il faut 
longtemps pour s’en rendre maitre, pour défricher et assainir les terres, pour substituer 
les émanations des rizières permanentes auxquelles les Chinois résistent facilement, à celles 
des marécages et des forêts. Il n’est certes pas trop hardi de prédire, d’après tout ce que 
nous avons vu, qu'ils arriveront à coloniser cette partie de l’Indo-Chine puisqu'ils ont 
éprouvé toutes ces difficultés pour les parties basses du Sud du Yun-nan dont ils sont en 
pleine possession maintenant. 

! Ces métis de Chinois et de femmes annamites, qui forment une corporation particulière appelée Minh- 
huong, sont remarquables par leur vigueur sensiblement plus grande que celle des Annamites et presque égale 
à celle des Chinois. Les caractères de leur visage nous ont paru participer également des deux rameaux. Comme 
ils s’allient ordinairement ensuite avec des femmes annamites de type pur, vers la troisième ou quatrième 
génération le type annamite prédomine à peu près complétement. Rien ne prouve que ces métis deviennent 
stériles, ni que cette influence de sang chinois ait le moindre inconvénient pour ceux qui la possèdent. Le 


contraire nous à paru probable, et les Annamites paraissent bénéficier, sous tous les rapports, de l’addition de 
sang chinois. 


AGRICULTURE ET HORTICULTURE 


DE L'INDO-CHINE 


Par M.1Ee Docreur C. THOREL. 


CHEVALIER DE La LÉGION D'IIONNEUR. 


INTRODUCTION 


Nous nous proposons dans ee travail de faire connaitre l’état de l’agriculture etde l'hor- 
ticulture des différentes parties de la vallée du Mékong, ainsi que tout ce qui est relatif aux 
diverses plantes utiles qu’on y rencontre et qui sont en très-grand nombre, en raison de 
l'extrême variété des climats de l’Indo-Chine. Comme c’est en vue de l'avenir de notre 
nouvelle colonie que notre voyage a été fait, nous décrirons, non-seulement les cultures 
des indigènes au moment de notre passage, mais aussi toutes celles, si nombreuses, qu'il 
serait possible d'étendre ou de faire dans l’avenir, et qui sont appelées, comme dans d’au- 
tres colonies européennes, à changer la face du pays. C’est surtout sous ce dernier rap- 
port que les notes suivantes auront une certaine importance, l’état actuel de l’agriculture 
en Indo-Chine étant, sauf sur quelques points de la Basse-Cochinchine, de peu d'intérêt. 
Après donc avoir établi le bilan de ce qui existe, nous montrerons tout ce qu'il y aura à 
faire le jour où l'influence commerciale, industrielle et scientifique des Européens s'é- 
tendra sur cet immense et riche bassin du Mékong. Il ne faut pas s'attendre, ainsi que 
nous venons de le dire, à trouver chez les indigènes uu grand nombre de procédés agri- 
coles dignes d’être imités en Europe; au contraire, tous ces peuples, y compris même 
les Chinois, qui ont cependant des pratiques agricoles très-remarquables, ont beaucoup 
plus à profiter de la connaissance de nos méthodes, que nous des leurs. Ce fait, un peu 
en contradiction avec l’opinion répandue en Europe, en ce qui concerne les Chinois, 
s'explique facilement. Pour que les procédés agricoles se perfectionnent dans un pays, il 
faut que les habitants y soient suffisamment agglomérés, afin que, poussés par le besoin, 
ils s’efforcent de faire produire au sol une plus grande quantité de produits alimentaires. 
On conçoit done que, dans les régions où la plupart des terres sont encore couvertes de 
forêts, comme dans le Cambodge et le Laos, où un cinquantième seulement des terres 
eultivables est habité, les procédés de culture soient très-défectueux. Malgré la fertilité 


de ces terres, et surtout malgré les avantages du climat qui rend la bonne qualité du sol 
IL. 43 


338 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


bien moins importante que dans les régions froides, et qui permet toutes les cultures dans 
les terres les plus maigres, les habitants n'arrivent que difficilement à vivre. Dans le 
sud de l’Indo-Chine surtout, tout est à perfectionner, et l'influence européenne, ou seule- 
ment celle des Annamites et des Chinois, aura les plus heureuses conséquences. Cette in- 
fluence étrangère devranon-seulement s'exercer sur les procédés de culture des indigènes, 
mais aussi sur leur organisation sociale et territoriale, qui est pour beaucoup dans l’état 
défectueux de l’agriculture. Le défaut d'organisation du sol sur des bases solides, facili- 
tant la vente des terres, et assurant la transmissibilité au fils des champs améliorés par 
le travail du père est, à notre avis, la grande cause de linfériorité agricole de ces 
peuples. Pourquoi le père se donnerait-il beaucoup de peine pour défricher, planter 
et cultiver son héritage, si le caprice ou le bon plaisir des gouvernements peut l'en dé- 
posséder en un moment? Ce fait est la plus éclatante condamnation des doctrines commu 
nistes ; et si les classes élevées, au lieu de condamner sans examen les théories sociales 
des classes inférieures, comme cela se passe malheureusement en Europe, voulaient 
parfois jeter un regard au delà de nos frontières et analyser à la façon des naturalistes des 
faits aussi concluants que celui-ci, elles y trouveraient souvent des arguments qui porte- 
raient la lumière dans leurs propres esprits et dans celui des prolétaires que lon cherche 
à égarer. Les pauvres verraient que la terre doit être possédée individuellement pour pro- 
duire beaucoup, et les riches, qu'elle doit l'être par celui qui la cultive pour être l’objet 
d'une amélioration sérieuse, constante, augmentant progressivement sa production. Un 
autre fait n’est pas moins concluant pour justifier la possession des terres non cultivées, 
et en particulier des bois et des forêts, qui ont essentiellement besoin d’être protégés 
contre l'instinet destructeur de l’homme. Cet instinct a amené, dans les parties mon- 
tagneuses de la Chine, un déboisement des plus inquiétants pour l'avenir. Dans d'im- 
menses régions du Se-tchouen et du Yun-nan, il alteint des proportions telles que 
les habitants en sont réduits à faire cuire leurs aliments avec de l'herbe ou avee de la bouse 
de vache séchée. Le bois manque pour la construction des maisons ou la fabrication des 
instruments aratoires les plus indispensables. Ce ne sont pas là les seuls inconvénients du 
déboisement. Au moment des pluies, de grandes inondations viennent empècher la cul- 
ture de: vallées entières, et à l’époque des sécheresses, l’asséchement de torrents qui 
autrefois avaient toujours de l’eau, compromet gravement l'irrigation des rizières. Le 
déboisement est donc une grande cause de misère pour la population et s'oppose très- 
sérieusement à son accroissement. Le chiffre des habitants de ces régions parait avoir 
atteint son maximum, et cependant, si le sommet des montagnes était reboisé, le pays 
pourrail facilement en nourrir quatre ou cinq fois plus, en permettant d’irriguer sur le 
flanc de ces montagnes de grandes surfaces de terres actuellement arides et sèches. 

En résumé, si la terre doit être possédée par celui qui la cultive pour produire beau- 
coup, les forêts et les bois doivent l'être bien plus encore, car leur non-possession amène 
des inconvénients plus graves que pour la terre, puisqu'ils ne peuvent disparaitre 
qu'après le reboisement, qui présente toujours beaucoup de difficultés et exige un 
temps très-long. 


INTRODUCTION. 399 


Si, comme nous l'avons fait remarquer précédemment, nous avons peu à emprunter 
aux pratiques agricoles des Indo-Chinois, nous aurions au contraire beaucoup à profiter 
de l'introduction de plusieurs plantes utiles qu'ils cultivent ou qui croissent spontanément 
chez eux. Quelques-unes pourront être introduites en Europe, mais la plupart devraient 
être multipliées dans le pays même, ou dans les colonies jouissant d’un climat ana- 
logue à celui de ces contrées. Comme nous aurons occasion, à propos de chacune 
d'elles, d'y revenir dans la suite, nous nous dispenserons de les indiquer en ce 
moment. | 

IL eût été sans doute très-désirable de placer, à côté des noms scientifiques, les 
noms indigènes de toutes les plantes dont nous aurons à parler; malheureusement ce 
travail est d’une extrême difficulté en voyage : il faudrait pour cela pouvoir trouver dans 
chaque pays des indigènes connaissant toutes les plantes, ce qui est très-rare en Indo- 
Chine, en raison de la grande richesse de la flore. D'autre part, l'orthographe de toutes 
ces langues est loin d’être fixée, et la plupart des auteurs sont encore en désaccord entre 
eux. La chose serait encore assez facile dans la langue cambodgienne, dont la phonation 
est sensiblement analogue à celle des langues européennes, mais elle serait d’une très- 
grande difficulté pour les langues annamite et chinoise, qui ont une prononciation si dif- 
ficile à saisir. Nous n’indiquerons donc que très-peu de noms indigènes, dans la crainte 
d'augmenter la confusion qui règne déjà pour quelques-uns, surtout en Cochinchine. 
Nous laisserons à d’autres, avant plus de temps, et mieux doués que nous pour 
les langues, cette tâche difficile. D'ailleurs, avec le temps, l'orthographe de ces langues 
se fixera, se simplifiera peut-être, el cette lacune sera plus facilement comblée. 

Malgré toute l’étendue que nous donnerons à ce travail, nous devons cependant faire 
remarquer qu'il sera irès-incomplet et très-imparfait. Il s’y trouvera de nombreuses lacu- 
nes, et tout au plus pourra-t-il servir de point de départ à des études plus complètes, ou 
plutôt de cadre dans lequel viendra se placer chacun des faits revus et étudiés isolément 
plus tard. Si, pendant notre séjour de sept années en Indo-Chine, nous avons pu observer 
beaucoup de faits, nous sommes cependant loin d’avoir pu étudier tout ce qui intéressait 
notre sujet. Bien des régions restent encore à explorer, et dans toutes celles que nous avons 
traversées, nous avons rarement séjourné assez longtemps pour bien observer. Néanmoins, 
en raison de la grande ressemblance et de l’extrème uniformité de toutes ces régions, nos 
observations restent suffisamment exactes et applicables à la presque totalité du pays. Si 
sous ces climats l’'Européen pouvait impunément prolonger son séjour, sans doute nous 
tenterions plus tard d’alier nous-même achever ce travail ; mais, outre que notre voyage a 
laissé notre santé dans un état tel, qu'il faut nous résigner à ne plus quitter l'Europe, bien 
des difficultés viennent contrarier ce genre de recherches, qui exige une liberté d'action 
difficile à obtenir et des ressources pécumaires assez considérables. 

Nous laisserons done à d’autres le soin de compléter et de reviser notre travail. 
Tout défectueux qu'il est, il rendra, croyons-nous, quelques services à ceux qui iront dans 
ces contrées si intéressantes et si pleines d'avenir. 


Disons maintenant, en terminant cette introduction, quelques mots du plan que nous 
IL. | 43* 


340 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


avons adoplé, et qui se trouvait à peu près tout tracé d'avance par la mission que nous 
avions de rendre compte de tout ce qui peut intéresser notre nouvelle colonie. Dans un pre- 
nier chapitre, nous parlerons de la configuration du sol, de la climatologie agricole, du 
labourage, des instruments d'agriculture, des animaux domestiques, des fourrages, des 
paturages, des engrais, de l’organisation de la propriété, que nous ferons suivre d’un coup 
d'œil comparatif sur l’état de l’agriculture des différentes parties de lIndo-Chine. 

Dans un deuxième chapitre intitulé Agriculture, précédé nécessairement de quelques 
considérations générales, nous parlerons de chaque genre de culture, et tout d’abord de 
la culture des céréales, dont le nombre est si grand dans le bassin du Mékong. Dans 
ce même chapitre, nous traiterons de toutes les cultures industrielles, se subdivisant en 
cultures des plantes textiles, des plantes oléagineuses, des plantes tinctoriales, des plantes 
saccharifères, des plantes féculentes, et enfin des plantes coloniales, dont l’importance 
deviendra si grande dans l'avenir. Quelques-unes des plantes dont nous aurons à parler 
ne sont pas cultivées, et croissent spontanément dans les forêts ; néanmoins nous les 
mentionnerons à la suite des plantes cultivées fournissant des produits du même genre. 

Dans un troisième chapitre, nous nous occuperons de l’horticulture, qui comprend 
la culture des arbres fruitiers, des fruits et des légumes. En Chine surtout, la culture des 
légumes esl très-avancée, et nos horticulteurs auraient à imiter quelques-uns des pro- 
cédés qui y sont employés ; mais il est loin d’en être ainsi pour la culture des arbres et 
des fruits, qui est partout défectueuse. Cette différence s'explique aisément ; lous ces 
peuples, vivant presque sans luxe, sont bien plus préoccupés de tirer du sol les aliments 
indispensables à leur existence, que les fruits qui ne sont souvent que des aliments 
superflus. Sauf quelques-uns qui sont originairement exquis, la plupart ont besoin d’être 
longuement améliorés pour devenir bons, et exigent une culture très-soignée; ils ne se 
trouvent nécessairement pas dans ces pays où les habitants aiment peu la fable et appré- 
cient peu les bons fruits, qu’ils mangent du reste presque toujours verts. Si la qualité des 
fruits est en général médiocre, en revanche leur nombre est considérable. La variété 
des climats de l’Indo-Chine est telle que tous les fruits du globe pourraient y croître. I 
n'est pas douteux pour nous que, dans un avenir prochain, tous ne s’y trouvent réunis, 
lorsque ces pays seront amenés à avoir des relations commerciales plus complètes avec 
les peuples de l’Europe. L'introduction de quelques-uns et l'extension donnée à d’au- 
tres pourront même changer la face du pays, en fournissant des aliments d’une autre 
nature et en plus grande abondance. En parlant de chacun d’eux, nous ne manquerons 
pas d'indiquer ceux qui sont appelés à opérer cet immense résultat. 

Dans un quatrième chapitre, nous énumérerons les plantes des forêts, dont quelques- 
unes, comme le teck, l’ébène, ete., ontune si grande importance. Les essences forestières, 
dont le nombre dépasse quatre cents, occuperont une très-grande place, car si, présen- 
tement, très-peu encore ont été exportées, nous pouvons espérer qu'il n'en sera pas 
toujours ainsi, et que bientôt on saura utiliser les richesses forestières que renferme 
l’Indo-Chine. En les faisant connaître, nous espérons hâter ce moment, que nous vou- 
drions voir très-proche pour l'avenir de notre nouvelle colonie. Le jour où ces essences 


INTRODUCTION. 341 


seront utilisées, les gouvernements s’opposeront à la dévastation des forêts, que pratiquent 
les indigènes avec tant d'acharnement et qu'il serait bientôt temps d'arrêter si on ne veut 
voir ces richesses sérieusement compromises pour longtemps. 

A ce travail, afin de rendre plus intelligible ce que nous aurons dit, nous joindrons une 
carte de l’Indo-Chine. Cette carte, que nous devons à l’obligeance de notre compagnon de 
voyage, M. Francis Garnier, donnera une idée suffisamment exacte de la configuration du 
sol et permettra d'embrasser d’un seul coup d'œil Pimmensité des plaines alluvionnaires 
de l'embouchure du Mékong, et le nombre considérable et indéfini des montagnes qui se 
trouvent au-dessus. Elle indiquera en même temps que la division géographique du pays, 
la zone de végétation des principales plantes cultivées et spontanées. On y trouvera éga- 
lement les points remarquables où eroissent plusieurs plantes rares, comme la cannelle. 
l'arbre à benjoin, le teck, l’anis étoilé, le thé, ete. Une ligne ponctuée montrera approxi- 
mativement la limite sud des plantes des régions tempérées, qui est à la fois la limite nord 
de la plupart des plantes des tropiques. Cette ligne coïncide assez exactement avec la 
ligne frontière séparant le Laos et le Tong-king de la Chine; elle traverse la zone où 
se trouvent en ce moment entremélées les populations appartenant à ces différents pays. 
Dans l'avenir, on peut assurer que cette zone ferlile sera une des plus riches de l’Indo- 
Chine et qu'elle finira, comme tous les pays de l’Inde jouissant d’un climat analogue, 
par être très-peuplée et par produire beaucoup. C’est sur ceile zone que devront surtout 
s'étendre les cultures du thé, du café, de la canne, et celle des quinquinas, si on la tente 
comme on l’a fail à Java et dans l'Inde. Elle se prête merveilleusement, par l’extrème 
variété des climats: l'abondance des pluies et la richesse du sol, à tous les genres de 
culture. 

C. THOREL. 


AGRICULTURE ET HORTICULTURE 


DE L'INDO-CHINE 


PAR 


M. LE D, THOREL 


CONFIGURATION ET NATURE DU SOL CULTIVABLE DES DIFFÉRENTES CONTRÉES DE L'INDO-CHINE. — 
CLIMATOLOGIE. — INSTRUMENTS AGRICOLES. — BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. — FOUR- 
RAGES, PATURAGES, ENGRAIS. 


S 1. — Configuration et nature du sol cultivable de l’Indo-Chine. 


Pour l’étude complète de la géologie, nous renvoyons au travail de notre compagnon 
le docteur Joubert. On y trouvera les renseignements géologiques, qui servent ordinai- 
rement de base ou de prélude à une étude générale sur la culture et la végétation d’un 
pays. Quant à nous, nous nous bornerons ici à envisager les différents sols cultivables de 
l'Indo-Chine à un point de vue moins élevé, mais plus pratique, et qui est nécessaire pour 
se rendre compte des cultures qui y sont faites, et de celles que l’on pourra y faire dans 
avenir. Nous considérerons seulement la couche superficielle du sol, ainsi que le sous- 
sol, qui sont les seules parties de la terre préoccupant ordinairement le cultivateur. 
quoique la couche profonde ait parfois une sérieuse importance. 

Il est naturel, lorsqu'on veut étudier le sol cultivable d’un pays, de le comparer à 
celui des contrées où on a été élevé. C’est ainsi que nous avons voulu procéder à l'égard 
de la vallée du Mékong, mais nous n'avons pas tardé à constater que non-seulement 
la topographie, mais encore la nature du sol de l’Indo-Chine étaient très-différentes de 
ce qui existe en France. Dans cette région asiatique tout est taillé dans des propor- 
tions gigantesques, qui empêchent toute comparaison avec nos pays, où tout est 
réduit à l’état de miniature. Les fleuves et les rivières y ont des largeurs colossales, 
les plaines y sont immenses ou d’une petitesse excessive, les deltas des fleuves et 


344 AGRICULTURE ET HORTICULTURE 


des rivières y sont considérables. Les montagnes ne dépassent pas en dimension, il est vrai, 
celles qui se trouvent en Europe: mais leur nombre y est si grand que les trois quarts 
de la surface du nord de lIndo-Chine ne sont constitués que par des montagnes, sé- 
parées à peine les unes des autres par d’étroits ruisseaux formant à chaque pas des 
rapides et des chutes. Au milieu de ces régions montagneuses, se trouvent à peine quinze 
ou vingt plaines larges de quelques lieues seulement, formant sur une carte de géogra- 
phie des points insignifiants et au centre desquelles se trouve souvent un petit lac. 

Le sol du bassin du Mékong se divise done en deux parties : la première, placée à 
l'embouchure des fleuves, est composée d'immenses plaines alluvionnaires, au milieu 
desquelles apparaissent çà et 1à quelques montagnes isolées ou groupées sans ordre; la 
seconde est composée uniquement de montagnes de grès, de granite, de marbres dolomi- 
tiques ou de schistes, dont les débris entraînés par les eaux ont formé toutes les plaines 
alluvionnaires de l'embouchure. Dans le voisinage des alluvions, se trouvent bien quel- 
ques monticules; mais ils sont en nombre très-restreint. Telle est en quelques mots la 
configuration de lIndo-Chine. Quant à la couche cultivable dont nous devons spécialement 
nous occuper, elle se décompose en quatre portions bien distinctes : 

1° Les terres alluvionnaires, qui se composent d'argile et de sable en proportions dif- 
férentes, dans lesquelles on trouve quelques particules de carbonate de chaux et de ma- 
gnésie, débris du marbre dolomitique ; 

2 Les monticules, qui sont principalement sablonneux et qui renferment toujours de 
l'argile en plus ou moins grande quantité ; 

3° Les terres des montagnes ou terres rocheuses, formées presque en entier de blocs 
de granite, de grès, de marbres ou de schistes entre lesquels se trouve souvent trop peu de 
terre pour permettre aux cullivateurs d’en tirer parti; 

4° Les terres argileuses, que l’on rencontre surtout au sommet des collines ou sur le 
flanc des montagnes servant de ligne de partage des eaux. Comme étendue, ces dernières 
terres viennent après les terres alluvionnaires; comme richesse, elles sont les premières. 
C'est sur ces terres rouges que croissent les forêts les plus puissantes et sur elles 
s’établissent exclusivement les tribus sauvages, depuis la Basse-Cochinchine jusqu'au 
centre de la Chine. Par leur fertilité, elles sont appelées dans l'avenir à jouer un grand 
rôle, le jour où les cultures coloniales, excitées par l'influence des Européens, se feront en 
Indo-Chine. 

A la suite de ces quatre espèces de terres, constituant le sol cultivable de tous 
les pays, nous ne devons pas passer sous silence une cinquième espèce particu- 
lière aux pays chauds, et qui présente en Indo-Chine une énorme importance, résul- 
tant de son étendue et de son excessive fertilité. Nous voulons parler des berges des 
fleuves et des rivières, lorsqu'elles se trouvent découvertes par suite de l’abaissement des 
eaux. En raison du grand nombre des fleuves et des rivières du bassin du Mékong et de 
l'énorme abaissement des eaux qui dépasse souvent dix-huit mètres dans certaines parties, 
leur surface est considérable et permet pendant les six mois qu’elles sont découvertes d'y 
faire de nombreuses cultures maraïchères. C'est même presque exclusivement sur elles 


CONFIGURATION ET NATURE DU SOL. 345 


que les Cambodgiens et les Laotiens surtout récoltent le tabac et la plupart de leurs 
légumes. La nature de la vase qui les couvre est presque en entier argileuse, et possède 
une si grande fertilité qu'il est inutile d'employer des engrais, même pour la culture du 
tabac. 

D'après ce qui précède, on voit qu'il n'existe nulle part de terres crayeuses, ou caillou- 
teuses, si nombreuses en Europe. L'absence de pierres de petite grosseur est même si 
grande, qu'on peut parcourir des centaines de lieues sans en trouver une seule, si ce n’est 
parfois quelques rares morceaux de grès ou de granite arrachés aux montagnes, ou quel- 
ques petits galets de même nature dans le lit des fleuves. On ne trouve done ni silex, ni 
calcaire, et les cultivateurs, dans les régions d’alluvions, n’éprouvent aucune difficulté 
pour le labourage. La couleur même des terres offre de notables différences avec celle 
des terres d'Europe; les terres noires v sont rares, presque jamais on ne trouve de 
terre de bruyère, et‘dans quelques points seulement de la région des alluvions, on 
trouve de petites valiées, ayant un sol noir rappelant le sol tourbeux de nos ma- 
rais. En Chine seulement, sur les montagnes élevées jouissant d’une température 
froide et couvertes de rhododendrons, on trouve une couche de terre noire assez 
ressemblante à la terre de bruyère. Dans la même région, on rencontre dans le fond 
des vallées placées à une altitude suffisamment élevée pour jouir d’un climat froid, 
des couches tourbeuses, assez épaisses pour être exploitées comme combustible. I semble 
donc que la couleur noire des terres résulte de l’incomplète décomposition des végétaux, el 
qu'elle ne peut se produire qu'exceptionnellement dans le sud, où la désorganisation des 
plantes se fait avec une trop grande puissance par suite de l'élévation de la température. 
Sous ce climat, la décomposition imparfaile des végétaux amenant la coloration noire de la 
terre, ne peut se produire à l'air libre et ne se voit que dans des terrains humides et sub- 
mergés, c'est-à-dire à l'abri du contact de l'air. 

Pour nous résumer, nous dirons que dans le sol arable de lIndo-Chine existent deux 
éléments principaux, l'argile et le sable. On trouve bien du carbonate de chaux et de ma- 
gnésie provenant de la décomposition des montagnes de marbre dolomitique du nord de 
l’Indo-Chine; mais ces deux substances, en raison de la grande dureté et de l'homogénéité 
de ces montagnes, sont toujours en très-petite quantité et en particules très-ténues. 

Nous devons mentionner à la suite de ces éléments constitutifs du sol cultivable 
de l’Indo-Chine, le fer qui donne la coloration rouge aux terres, et qui se trouve parfois en 
si grande abondance dans les argiles, qu’il forme des pierres poreuses souvent assez riches 
pour permettre lexploitation de ce métal. 

Le sous-sol, contrairement à ce qui se passe en Europe, ne doit en Indo-Chine que 
médiocrement préoccuper le cultivateur. Dans ce pays, les cultures en terres sèches 
étant (rès-rares et celles en terres irriguées très-communes, il en résulle que la non-per- 
méabilité du sol, loin d’être un inconvénient qui oblige, comme en Europe, à drainer ou à 
canaliser, devient un avantage, en retenant les eaux nécessaires à la croissance du riz qui 
conslütue la culture dominante. Même dans les contrées où se pratiquent les cultures sè- 


ches, comme en Europe, l’imperméabilité du sous-sol n’est point défavorable à la eul- 
IT. 5 44 


346 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


ture. Ce résullat, en contradiction avee ce qui se passe dans nos pays, s'explique en ce 
que les cultures sèches ne se font que dans la saison où il ne tombe aucune pluie, de telle 
sorte que les racines des plantes ne risquent jamais de se pourrir par l'excès d'humidité du 
sous-sol provenant de l'accumulation de l’eau. Ce n’est que sur quelques points très-rares 
de l’Indo-Chine, où les pluies tombent comme en Europe presque toute l’année, que le 
sous-sol présente les mêmes inconvénients que sous nos climats et pourrait donner lieu à 
des travaux de drainage et de canalisation. 

Si maintenant nous essayons d'apprécier la richesse agricole relative des différentes 


D? 
que l’on s'éloigne de l'embouchure des fleuves. En première ligne, se place donc la 


portions du bassin du Mékong, nous trouvons que la fertilité des terres diminue à mesure 


Basse-Cochinchine avec ses immenses marais et ses alluvions modernes en voie d’acerois- 
sement quotidien. En seconde ligne, vient le Cambodge, qui possède beaucoup de terres 
alluvionnaires ; mais elles sont moins riches, parce qu'elles sont plus anciennes et 
plus élevées au-dessus du niveau de l’eau des fleuves et des rivières. En troisième ligne, 
vient le Laos inférieur, lequel, quoique offrant entore beaucoup de plaines alluvionnaires 
élevées, présente déjà beaucoup plus de monticules et de montagnes que les pays précé- 
dents. 

Le Laos supérieur et la Chine méridionale, formés presque en entier de montagnes, 
viennent en dernier lieu comme richesse. Ce n'est pas qu’on ne trouve dans ces deux der- 
niers pays des parties très-riches, mais elles sont toujours d’une très-faible étendue et 
n'occupent que d’étroits espaces entre les montagnes ou le long des fleuves. 

IL nous resterait bien des renseignements à donner sur la distribution, la composition 
el la valeur de loutes ces terres; mais, comme nous aurons occasion d'y revenir et que 
nous devrons même entrer dans de grands détails à propos des principales cultures, 


nous ne nous étendrons pas davantage en ce moment sur ce sujet intéressant. 


S 2. — Climato/oyie agürcole de l'Indo-Chine. 


Pour l'étude complète de la climatologie de l’Indo-Chine, nous renvoyons au travail 
qui a élé fait sur ce sujet par notre compagnon, M. Francis Garnier. On y trouvera des 
renseignements météorologiques très-nombreux sur les différentes portions du bassin du 
Mékong. Quant à nous, nous allons seulement essayer d'indiquer en quelques mots les 
principales particularités de ces climats, intéressant spécialement-le cultivateur et le 
botaniste. 

Les saisons de PIndo-Chine, au lieu de se diviser en quatre comme en Europe, se di- 
visent en deux seulement : la saison des pluies et la saison sèche. La saison sèche corres- 
pond à notre hiver, et la saison humide à notre été. Ces deux saisons durent à peu près 
un temps égal; pourtant la saison sèche a une durée un peu plus longue, et dépasse sou- 
vent sept mois; elle commence en octobre et finit en avril. Pendant les sept mois de sé- 
cheresse, 1l tombe à peine cinq ou six pluies; aussi est-il impossible, sans arrosage ou 
sans irrigation, de faire croître aucune plante. A la fin surtout de cette saison, la terre est 


CLIMATOLOGIE AGRICOLE DE L'INDO-CHINE. 347 


desséchée à une très-grande profondeur; sa surface se fendille, se crevasse, et il est pres- 
que impossible de la labourer, excepté dans les portions où elle est très-sablonneuse. II 
n'y à que les terres couvertes de forêts qui résistent à cette chaleur torride et conser- 
vent assez d'humidité pour permettre à quelques plantes herbacées de continuer à végéter. 
Cette sécheresse est si grande, qu'elle arrête la végétation, comme le fait le froid 
dans les régions tempérées. Les arbres et quelques grands arbustes ayant des ra 
eines profondes résistent seuls à cette dessiecation du sol et continuent à fleurir. C’est pen- 
dant la saison sèche que le thermomètre descend le plus bas ; le matin, vers 4 heures, 
il s’abaisse assez souvent jusqu'à 20 degrés au-dessus de zéro en Cochinchine, et 
au Laos inférieur jusqu'à 11 degrés. Dans le Laos supérieur et la Chine méridionale, 
il descend plus bas encore et se rapproche assez souvent de zéro pour qu'il soit pos- 
sible de donner le nom d'hiver à cette saison. Cet abaissement de température de la sai- 
son sèche, naturellement d'autant plus prononcé qu’on s’avance davantage vers le Nord, 
rend possible la culture des plantes des régions tem pérées dans les endroits où les arrosages 
et l'irrigation sont faciles. En Cochinchine, quoique cet abaissement du thermomètre soil 
très-faible, il suffit cependant pour permettre la culture de plusieurs de nos légumes. 
Dans le Laos supérieur et la Chine méridionale, 1l devient assez grand pour rendre pra- 
ticable la culture de toutes les plantes des pays froids, y compris les céréales. Il en résulte 
même que ces pays possèdent deux saisons agricoles : la chaude pour les plantes tropi- 
cales, et la froide pour lès végétaux des pays froids. Ces dernières contrées sont done les 
portions les plus favorisés du bassin du Mékong, non-seulement par la variété, mais encore 
par la quantité des produits qu'on y peut obtenir, puisqu'on a chaque année deux récoltes 
dans le même champ. Toutes les cultures de la saison sèche ou froide ne peuvent se faire 
dans cette région privilégiée, sans arrosage ni irrigation, que sur la berge des fleuves et 
des rivières, dans la vase qui reste toujours humide par suite du suintement des terres 
environnantes. Dans tous les autres lieux, ces cultures ne se font que dans les endroits 
assez bas pour qu'on puisse facilement y creuser des puits et y installer des systèmes élé- 
vatoires de l’eau, ou dans les régions montagneuses possédant de nombreux torrents, qui 
se prêtent si merveilleusement à l’installation de canaux d'irrigation. Dans quelques rares 
régions, ces cultures acquièrent une importance très-grande, égalant parfois celle des 
cultures de la saison humide. Ces localités sont rares sans doute et d’une petite éten- 
due, relativement à l’immense surface du pays; mais il n’est pas douteux que dans l’ave- 
nir elles ne se multiplient beaucoup. 

Bien des régions incultes, même dans le sud, se préteraient admirablement 
à l'installation économique de bassins surélevés au pied des montagnes et au 
creusement de canaux d'irrigation allant distribuer l’eau dans les plaines environ- 
nantes. C’est à coup sûr la question qui doit dès à présent préoccuper les gouver- 
nements de ces pays, et notre plus grand désir est d'attirer dès à présent leur attention sur 
des travaux appelés à transformer d'immenses plaines stériles en champs fertiles et pro- 
ductifs. On ne doit pas oublier que lorsque l'irrigation des terres est facile sous ces cli- 
mats, les récoltes présentent cet important avantage d’être constamment abondantes ; 


318 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 
elles n’offrent pas ces différences, souvent considérables, qu'on observe d’une année à 
l’autre dans les terres arrosées seulement par les pluies du ciel. Les cultures irriguées 
sont les cultures vraiment industrielles; ce sont celles de l’avenir et des populations in- 
dustrieuses. On les trouve donc surtout en Chine. Espérons que bientôt les Annamites, 
qui en pratiquent déjà quelques-unes, les multiplieront davantage. Dans le voisinage 
de plusieurs de leurs montagnes, où se trouvent des torrents qui conservent de l’eau jus- 
qu'à la fin des sécheresses, il serait très-facile d'installer des bassins assez grands et assez 
élevés, comme d’ailleurs cela se pratique dans le Laos supérieur, pour pouvoir irriguer 
facilement des centaines d'hectares de terre situés à un niveau inférieur. En faisant des 
barrages dans les vallées, on pourrait obtenir le même résultat. Dans beaucoup d’autres 
points ne se prêtant ni à l’une ni à l’autre de ces installations, on aurait encore la res- 
source d'installer des machines élévatoires à vapeur ; l'abondance des eaux douces, le 
nivellement naturel des terres, et la grande quantité des bois aux environs, pouvant 
fournir le combustible nécessaire pour le chauffage des machines, rendraient ces instal- 
lations beaucoup plus commodes qu’en Égypte, où cependant elles sont très-répandues. 
A défaut de machines à vapeur, on pourrait se contenter de simples norias mues par les 
buffles, qui sont précisément inoccupés pendant toute la saison sèche. Dans le Laos infé- 
rieur surtout, certaines portions du Cambodge et même plusieurs points situés dans les 
forêts de la Cochinchine, où les récoltes manquent souvent faute d’un peu d'eau, ces in- 
stallations rendraient d'immenses services à la fin de lhivernage. Ce n’est qu'avec 
l'emploi de ces moyens, que beaucoup de ces points deviendront eultivables et pourront 
nourrir une nombreuse population. Les terres y sont ou trop maigres, ou trop perméa- 
bles, ou trop élevées au-dessus du niveau des cours d’eau pour conserver l'eau du ciel qui 
suffit toujours, dans les endroits bas comme les alluvions de la Basse-Cochinchine, pour 
assurer les récoltes. L'avenir est done dans ces installations, et à ce prix seulement on peut 
espérer voir la population de ces pays continuer à s’accroitre avec une rapidité en rapport 
avee les progrès de notre siècle. Sans doute la nécessité, le besoin de vivre, finiraient bien 
par forcer les indigènes à trouver ces installations d'eux-mêmes ; mais il serait préférable 
de hâter ce moment en leur montrant dès à présent les nombreux avantages qui en 
résulleraient. L'expérience est toujours longue à acquérir et les méthodes nouvelles, surtout 
chez des peuples routiniers, sont trop difficiles à introniser pour qu'on doive tarder long- 
temps à les leur montrer. 
Nous devons ajouter que dans certaines portions de lndo-Chine, les populations sont 
disposées à bien accueillir ces innovations : ainsi nous eiterons les mandarins d'Oubôn, dans 
le Laos inférieur, qui nous ont demandé le moven d'assurer l'irrigation de leurs rizières à 
la fin de la saison des pluies ; il arrive souvent dans cette province que d'immenses 
rizières restent improduelives, faute d’eau qui permette au riz d'arriver à maturation. 
Pour rentrer dans le sujet dont nous nous étions écartés un instant, nous dirons 
que l’abondance, mais surtout le mode de répartition des pluies dans les pays chauds, 
sont les conditions qui influent le plus sur la croissance des végétaux. Les variations de 
température, d’ailieurs peu considérables sous ces elimats, ont si peu d'importance 


CLIMATOLOGIE AGRICOLE DE L'INDO-CHINE. 349 


sur les plantes indigènes, qu'avec de l'eau elles peuvent être cultivées indifféremment 
dans l’une ou l'autre saison. Les arbres mêmes, fleurissant, comme on sait, en Eu- 
rope à des époques peu variables de l’année réglées surtout par la température, ont, 
sous ce climat, l’époque de leur floraison réglée principalement par Fhumidité. Dans 
les lieux élevés et les sols légers, où la terre se dessèche vite, ils fleurissent plus tôt. 
Au contraire, dans les terres argileuses gardant longtemps l'humidité et dans les lieux bas 
longtemps imprégnés' d’eau, leur floraison est retardée, si retardée même que, sur les 
bords des fleuves et des rivières, certains arbres ne fleurissent qu'à la fin de la saison 
sèche, trois ou quatre mois plus tard que les mêmes espèces dans les forêts. L'étude de 
l'influence de l’humidité du sol sur les arbres fruitiers est si importante, qu'elle doit 
autant servir à l'horticulleur des tropiques, que celle du choix des espèces tardives ou 
hatives, à lhorticulteur des pays froids et tempérés. On comprendra facilement le rôle 
considérable que joue l'humidité, en disant qu'à de certaines époques les orages se suc- 
cèdent si rapidement et déversent une telle quantité d’eau, que les plantes sont comme 
noyées et qu'elles cessent momentanément de croître. Dans l'intervalle de ees orages, 
les feuilles et les ramuscules continuent seules à se développer; les fleurs attendent des 
époques moins pluvieuses pour paraitre, beaucoup même n’éelosent qu'à la fin des 
pluies. C’est à cette époque de l’hivernage que les plantes étrangères à ces climats souf- 
frent le plus. La plupart de celles qui ont pu résister à la haute température de la fin de 
la saison sèche succombent fatalement à l'excès de humidité. 

Ce que nous venons de dire s'applique particulièrement à l'extrême sud de l'Indo- 
Chine, où la saison humide est beaucoup plus tranchée que dans le nord. En Chine 
encore, quoiqu'il existe une saison sèche el une saison humide, lune et l’autre sont 
moins accentuées; aussi les inconvénients de la sécheresse et de l'humidité sont-ils très- 
alténués. 

La température du bassin du Mékong, présente des oscillations de plus en plus 
grandes à mesure que l’on s’avance vers le Nord. Dans le Laos supérieur, sur beaucoup 
de montagnes élevées, on constate de grandes différences entre la température du fond 
des vallées et celle du sommet des montagnes. En Chine, où les plateaux et les monta- 
gnes sont plus élevés, les variations sont encore plus considérables. A chaque pas, on 
trouve des montagnes jouissant d’une température tropicale à leur pied, et de froids in- 
lenses à leur sommet. 

Dans le sud, le thermomètre oscille entre 19 et 36 degrés au-dessus de zéro. La 
moyenne thermométrique de la Basse-Cochinchine est d'environ 28 degrés. Cette 
température élevée s'oppose, non-seulement à la culture de beaucoup de plantes des 
pays tempérés, mais encore à leur fructification. Beaucoup ne parviennent même pas 
à fleurir et ne poussent pour ainsi dire qu'en herbe. Un grand nombre n'y germent 
pas; celles qui germent accomplissent ce phénomène deux fois plus rapidement 
qu'en Europe, et cessent ensuite tout d’un coup de croître. Il faudrait, pour culüiver 
sous ce climat les plantes des régions tempérées, obtenir un abaissement de tempé- 
rature artificiel, résultat presque impossible à atteindre. Ce que nous pouvons faire en 


390 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 

Europe, avec des serres et des couches pour cultiver les plantes des pays chauds, est 
impossible dans ces pays à l'égard de nos plantes. Les indigènes des pays chauds doivent 
donc se contenter des fruits et des fleurs de leur pays, qui sont d’ailleurs bien plus 
nombreux que les nôtres. 

Ce n’est qu'en s’avançant graduellement vers le Nord et lorsque la température de 
l'hiver s’abaisse assez, que la culture des plantes des régions tempérées devient possible. 
Vers le 18° degré, c'est-à-dire au milieu du Laos, les indigènes profitent chaque 
année de l’abaissement de température de l'hiver, pour planter la plupart de nos légumes 
qui poussent avec vigueur el facilité, soit à l’aide d’arrosages, soit le plus souvent sans 
le secours de ce moyen, sur les berges des fleuves, dans la vase limoneuse qui se dé- 
pose chaque année au moment où le niveau des eaux s’abaisse. 

Ces cultures des pays tempérés qui ne sont qu'à l’état exceptionnel dans le Laos supé- 
rieur, acquièrent brusquement une très-grande importance dès qu'on a franchi le tropique 
et que l’on estentré en Chine. Elles se substituent alors en hiver dans les champs à presque 
toutes les cultures d’été ou des pays chauds. Ce dernier pays possède donc deux saisons 
agricoles entièrement distinctes, permettant de cultiver alternativement les plantes des pays 
chauds et celles des pays tempérés. C’est même sous ce rapport unpays unique au monde 
et excessivement curieux. Dans le fond des vallées, on trouve la canne à sucre, le palmier 
aréquier, le bananier et la plupart des autres plantes tropicales. À un étage au-dessus, 
sur le flanc des montagnes, on cultive encore le riz et quelques plantes des pays chauds, 
en élé; mais on y rencontre déjà, spontanés et cultivés, beaucoup de végétaux des 
pays tempérés. Plus haut, près du sommet, on se trouve exclusivement au milieu de 
plantes des pays tempérés: aux chênes, aux pins, aux aulnes, aux bouleaux, aux érables, 
aux peupliers, et aux rhododendrons constituant presque en entier les essences forestières, 
se trouvent mêlés la plupart de nos arbres fruitiers spontanés. Nous y avons observé plu- 
sieurs espèces de poiriers, de cognassiers, de cerisiers, de pruniers, de châtaigniers, de 
noisetiers et de vignes à l’état sauvage. Quelques-unes de ces espèces, améliorées faible- 
ment par la sélection, sont cultivées. Les sauvages, qui habitent presque partout cette 
dernière zone à lexelusion des Chinois, cultivent en hiver le blé, les colzas, le radis 
oléifère, le pavot à opium ; en été, l’avoine, le chanvre, le sarrasin et la pomme de terre. 
Le voyageur qui parcourt ces contrées peut donc voir, en moins d’une journée, des spé- 
cimens des principales cultures du monde, ainsi que cela nous est arrivé cent fois. Pour 
le naturaliste qui habilerait ces contrées heureuses, que d'observations il y aurait à faire 
sur les lois de la distribution des plantes et des animaux dans ces montagnes, qui repré- 
sentent chacune un monde en miniature ! On y trouve non-seulement les végétaux ré- 
paris de la façon que nous avons indiquée, mais encore la plupart des animaux éche- 
lonnés selon les aptitudes qu'ils tiennent de leur origine. Si l’acclimatation était un fait 
aussi réel que le suppose la théorie de Darwin, on se demande pourquoi les arbres du 
sommet des montagnes ne se seraient pas acclimatés vers le bas, et pourquoi ceux du bas 
n'auraient pas monté vers le sommet. On se demande surtout pourquoi les sauvages 
d’origine caucasique restent confinés, depuis des siècles, sur les sommets froids et peu 


CLIMATOLOGIE AGRICOLE DE L’INDO-CHINE. 391 


fertiles des montagnes, continuant à délaisser le fond des vallées toujours chaudes et 
fertiles. En réalité, les plantes meurent ou deviennent stériles dès qu'elles franchissent 
une certaine hauteur, et les sauvages, dès qu’ils descendent, meurent, comme ils nous 
l'ont assuré, ne pouvant s’acclimater. Plusieurs années passées par eux dans les vallées, 
les obligent toujours à regrimper sur leurs montagnes pour se rétablir. Ce fait, constant 
pour eux depuis des siècles, encore discuté tous les jours par nous, est à notre avis un 
des plus grands arguments que nous ayons rencontrés dans nos voyages contre la 
théorie erronée de l’acclimatation. Car il n’est pas douteux que ces sauvages autochthones 
ont du, depuis des milliers d'années qu'ils sont fixés sur ces montagnes, tenter sans cesse 
de s'établir dans le fond des vallées, où les attirait la fertilité des terres et du climat; s’ils 
n'ont pu y réussir, c’est que le problème est insoluble. 

Rôle de la lumière. — Nous devons dire maintenant quelques mots du rôle de la lu- 
mière sur la végétation, rôle qu'on est trop souvent tenté de négliger et qui est cependant si 
considérable. Sous les tropiques, les jours et les nuits ayant une durée presque égale toute 
l’année, la lumière exerce son action bienfaisante avec une égale intensité pendant les 
différentes saisons. Au moment des pluies, comme le ciel est très-souvent obseurei par 
les nuages, elle est moins abondante ; aussi celte saison est-elle à proprement parler celle 
de la feuillaison et produit-elle peu de fleurs. 

Il semblerait que sous les tropiques, en raison de l'abondance de la lumière, l'ombre 
des arbres doit être moins nuisible aux plantes. Il n’en est absolument rien. Comme en 
Europe, c’est en vain qu'on essayerait de faire croitre la plupart des légumes à l'ombre 
de l'arbre le moins touffu. Presque (ous exigent pour prospérer d’être plantés en plein 
soleil. Quel que soit le degré d'intensité des rayons solaires, ils sont moins nuisibles à la 
plupart des plantes cultivées, que l'ombrage le plus faible lorsqu'il est permanent. 

I faut done, pour installer un potager destiné à produire les radis, les laitues, les choux 
et la plupart des autres légumes, tant indigènes qu’étrangers, le placer dans un endroit 
complétement découvert, à la condition toutefois qu'on protégera avec des paillassons 
pendant le milieu du jour les repiquages, les transplantations et quelques semis. 

Neige. — À partir du 18% degré de latitude, les sommets des montagnes de 2,000 mè- 
tres d'altitude sont souvent couverts de neige pendant quelques heures le soir et le matin ; 
au delà du tropique, en Chine, sur les montagnes élevées, elle résiste à la température 
du milieu du jour. Sur quelques pies seulement avoisinant le Tibet, elle est éternelle. 
Nulle part, en Chine cependant, elle ne tombe en suffisante quantité pour que son rôle sur 
la végétation et l’agriculture vaille la peine que nous nous y arrêtions. 

Grele. — Nous ne saurions en dire autant de la grêle. Sous des latitudes très-méridio- 
nales, il est assez fréquent d’en observer au début des orages de l’hivernage. Souvent, 
d’après le témoignage des indigènes, les grélons sont assez gros et assez abondants pour 
causer de sérieux ravages. Notre interprète laotien, natif du 22° degré, nous a rapporté 
avoir vu dans sa Jeunesse son pays ravagé par la grèle : les arbres avaient été dépouillés 
de leurs feuilles et de leurs fleurs, et beaucoup d'animaux des forêts avaient été tués. 
Nous devons faire remarquer toutefois que la chute de grèlons ayant lieu surtout au 


3)2 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


début de la saison des pluies, alors que les champs et les potagers sont presque nus, elle 
ne cause d'ordinaire aucun ravage sérieux. 

Gelée. — La gelée, qui ne se montre que sur le sommet des hautes montagnes du 
Laos, s’observe très-fréquemment sur les hauts plateaux de la Chine, au nord du tropique, 
pendant plusieurs mois. Malgré sa fréquence, comme le thermomètre ne descend pres- 
que jamais à plus d’un ou deux degrés au-dessous de zéro, elle ne parvient jamais 
à arrêter complétement la végétalion des cultures de l'hiver. Suspendue pour un instant 
le matin, la croissance des plantes reprend vers 9 ou 10 heures et continue toute la jour- 
née, grâce à la chaleur du milieu du jour. Ces gelées sont dues surtout au ravonnement. 
A ces altitudes élevées, le ciel est ordinairement la nuit d’une pureté incomparable, et le 
phénomène du rayonnement se produit avec une intensité que nous ne connaissons pas 
en Europe. De toutes les plantes, les fèves sont celles qui paraissent le matin avoir le plus 
souffert du froid de la nuit ; au lever du soleil, on trouve en hiver leurs feuilles flétries et 
leurs tiges inclinées vers le sol. À cette époque de l’année, 1l serait souvent utile de pro- 
téger la nuit les légumes et les arbres fruitiers tels que le pêcher et l’abricotier. Les indi- 
oènes n'ont presque jamais recours à ce moyen, qui est cependant bien plus indispensable 
dans leur pays que dans le nôtre. 


S 3. — Labourage. 


On distingue en Indo-Chine trois sortes de labourage que nous classerons suivant 
leur importance : 

1° Labourage en terre inondée ; 

2° Labourage en terre humide ; 

3° Labourage en terre sèche. 

Le premier mode est le plus employé, le deuxième l'est assez fréquemment ; quant 
au troisième, qui est en général celui de l’Europe, on ne l’observe guère que sur quel- 
ques hauts plateaux du sud de la Chine, dans les régions où les pluies sont trop peu 
abondantes pour permettre aux laboureurs d'attendre que le sol soit suffisamment imbibé 
d’eau avant d’y mettre la charrue. 

Le labourage en terre inondée non-seulement est le plus facile, mais aussi le plus 
important, la culture du riz étant la première de toute lIndo-Chine. On ne pratique ce 
mode de labourage que lorsque la rizière est inondée depuis quelques jours et que la 
terre est assez imbibée d’eau pour que les buffles aient le moins d'efforts possible à faire. 
Un seul de ces labours, suivi d’un hersage soigné qui entraine toutes les mauvaises herbes 
avec leurs racines dans un coin du champ et transforme toute la couche de terre arable 
en une bouillie homogène, suffit toujours pour transplanter le riz. A l'exception de quel- 
ques rares points du sud du bassin du Mékong, ce mode de labourage ne commence qu’en 
juin et juillet, quand les pluies sont devenues suffisamment rapprochées et assez abon- 
dantes pour que l’eau du ciel puisse s’amasser dans les rizières. Dans le nord de l’Indo- 


LABOURAGE. 353 


Chine, grâce aux réservoirs d’eau et aux canaux d'irrigation que les habitants ont con- 
struits, on le pratique toute l’année. Là où ces installations manquent, les Chinois ont 
recours à des norias, ou bien se servent, ainsi que les Laotiens, d’un panier que ma- 
nœuvrent deux hommes et qui leur permet souvent d'élever l’eau à plus d’un mètre. La 
moindre machine élévatoire, mue par les buffles ou la vapeur, remplacerait avec avantage 
ce travail, toujours long et pénible, qui ne permet d’inonder que de petites rizières. Pour 
que le labourage en terre inondée soit facile, il faut que la rizière contienne au moins un 
décimètre d’eau. 

On conçoit que ce genre de labour, qui exige que le laboureur soit constamment dans 
l’eau jusqu'aux genoux, n'offre que peu d'inconvénients pour lui dans le Sud, où la chaleur 
est toujours trop grande ; il n’en est pas de même dans le Nord, sur les montagnes, où il 
gèle fréquemment en hiver. A cette époque, le conducteur souffre beaucoup et contracte 
souvent des plaies ulcéreuses aux jambes et des douleurs rhumatismales. Nous devons 
ajouter pourtant que les Asiatiques en souffrent bien moins que n’en souffriraient des 
Européens. 

Le deuxième mode de labour, ou labour en terre humide, ne se pratique également 
qu’un mois ou deux après le début des pluies, alors que la terre, dureie pendant la saison 
sèche, s’est ramollie et est devenue attaquable par le soc de la charrue. On le trouve em- 
ployé sur toutes les éminences, les collines et les montagnes, depuis Saïgon jusque dans 
le Sud de la Chine, pour les cultures d’arachides, de canne, de coton, de haricots, d’ortie 
de Chine, et dans le Nord, pour cultiver l’avoine, le pavot, le blé, et surtout le sarrasin. 
Ce second mode doit se faire à l’aide de buffles dans les terres fortes, et même dans les 
terres légères, lorsqu'on veut y planter des plantes exigeant un labour profond, comme 
la canne. Pour les autres cultures réclamant un labourage léger, les bœufs peuvent 
très-bien suffire, et on s’en sert fréquemment au Laos et au Cambodge. Ces animaux sont 
mème préférables, comme étant plus actifs et plus aptes à vivre dans ces régions. 

Quant au troisième mode de labour, ou labour en terre sèche, si rare sous ces climats, on 
ne l’emploie que pour cultiver l’avoine, les radis oléifères, les pommes de terre et les colzas. 
C'est le mode offrant le plus de difficultés, exigeant le plus grand effort de traction et en 
même temps les instruments les plus perfectionnés. On conçoit donc que chez ces peuples 
peu avancés il soit très-défectueux. De même que les modes précédents, les indigènes, 
sauf dans quelques points exceptionnels, ne le pratiquent qu'une fois et peu de temps 
avant l’ensemencement. Jamais on n’observe, comme en Europe, deux ou trois labours 
préparatoires, à un ou deux mois de distance, dans le but de détruire les mauvaises herbes, 
d’ameublir la terre et de permettre à l'air de s’y infiltrer plus aisément et d'exercer son 
action fertilisante. 

Les animaux employés pour ce labourage sont ordinairement les bœufs. A défaut de 
ces animaux, les Chinois se servent parfois d’anes, de mulets et de chevaux. 

Quel que soit le mode de labourage, on peut dire que, dans ces pays privilégiés, il 
est beaucoup plus facile que sous nos climats. La plus mauvaise charrue suffit presque 


foujours ; car jamais on ne rencontre de pierres, et nulle part on ne trouve de sous-sols 
Il. 13 


304 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


résistants et durs. L'absence ou du moins la grande rareté de mauvaises herbes aux fortes 
racines vient encore ajouter à la facilité qu'offre le labourage. 

En affirmant donc que le travail préparatoire qu’exige le sol pour produire la même 
quantité de récoltes est le tiers de ce qu'il est en Europe, nous sommes incontestable- 
ment au-dessous de la vérité. Est-ce à dire que si ce travail était augmenté, la richesse des 
récoltes n’en augmenterait pas? Assurément non ; en l’élevant seulement à la moitié de 
ce qu'il est chez nous, on accroitrait beaucoup la production du sol. L'augmentation en 
profondeur, en offrant aux racines des plantes une couche de terre arable plus considérable, 
nous parait surtout, comme en Europe, appelée à réaliser ce progrès. Nous en avons 
trouvé la preuve en Cochinchine et en Chine, où les récoltes sont constamment meil- 
leures que dans les pays intermédiaires où le labour est moins profond et moins par- 
fait. Ce qui confirme celte opinion, c’est l’avantage que les Chinois paraissent avoir 
trouvé dans le défonçage du sol à 2 ou 3 décimètres de profondeur. Ils pratiquent 
ce genre de travail en hiver, à l’époque où les champs sont nus ; si onéreux qu'il soit, les 
cultivateurs riches et prévoyants n'hésitent pas, en raison de l’augmentation de produit 
qu'il provoque, à l’employer périodiquement lous les dix à quinze ans. Nous l'avons sur- 
tout observé dans les nombreuses et étroites vallées du Yun-nan, où la population, très- 
dense, cherche à produire le plus de riz possible. 

Le labourage à la charrue n’est pas le seul que pratiquent les Indo-Chinoiïs : souvent ils 
se servent de la houe pour remuer la terre des champs de très-pelites dimensions 
et pour les coins de rizières où la charrue ne peut passer. 

Les cultivateurs pauvres, n'ayant ni charrues ni buffles, sont souvent obligés de se ser- 
vir du même instrument pour des champs d’une certaine étendue. Pour les rizières nou- 
vellement défrichées, renfermant des trones d'arbres, d’arbustes, des lianes ou de nom- 
breuses racines de plantes aquatiques, cet outil est le seul employé ; il sert aussi exclusi- 
vement à défricher les terres, à construire et réparer les talus des rizières. Dans quelques 
points de la Chine, au lieu de houe, les cultivateurs emploient souvent un trident assez 
solide pour qu'il soit possible de remuer la terre à plus de 20 centimètres de profon- 
deur ; il sert plus particulièrement au défonçage des rizières pendant la saison sèche. 


$ 4. — Instruments agricoles. 


Ainsi qu'on doit le supposer, les instruments agricoles employés par les Indo-Chinois 
sont aussi simples dans leur forme que dans leur construction. Leur nombre est également 
très-restreint et se réduit au strict indispensable. Une charrue, une herse, une houe et une 
faucille constituent à peu près tout le matériel agricole. Ce n’est qu’exceptionnelle ment 
qu'on se sert de voitures ou de traineaux grossiers pour rentrer les récoltes. 

La charrue, construite en bois dur du pays, est dépourvue de roues; elle est formée 
d’un soc muni d’un versoir taillé dans le même morceau de bois, et auquel on adapte une 
pointe en fer forgé ou en fonte afin d'empêcher l’usure du bois. A ce soc, est soudée obli- 
quement, comme en Europe, une longue pièce de bois à l'extrémité de laquelle est atta- 


INSTRUMENTS AGRICOLES. 355 


chée une barre transversale sur laquelle on attelle les buffles ou les bœufs. Si simple que 
soit cette charrue, elle permet cependant, lorsque le versoir est suffisamment grand, de 
faire un bon labourage dans les terres inondées et humides. Le fer est le métal employé 
presque partout pour garnir la pointe du soc; pourtant, dans quelques parties du Laos 
supérieur, les indigènes ont recours au bronze, avec lequel ils confectionnent mème le 
soc et le versoir tout entier. Cette charrue, quoique à peu près semblable dans son en- 
semble chez tous les peuples indo-chinois, présente pourtant quelques différences, selon 
les pays et suivant le genre de terre auxquels elle est destinée. En Cochinchine, où le la- 
bourage en terre inondée est presque la règle et où en même temps la culture est assez 
soignée, le soc est presque toujours épais et son versoir très-ouvert de façon à permettre 
un labour profond et à bien retourner la terre. Au Cambodge et au Laos, où la culture est 
généralement mal faite, la charrue est plus petite dans toutes ses parties, surtout le ver- 
soir. En Chine, où on trouve à côté des cultures lés plus parfaites des cultures déplora- 
bles, elle présente des variations en rapport avec la qualité des cultures. Nous avons vu 
de ces instruments n'ayant pas de versoir et permettant à peine de tracer un étroit sillon; 
d’autres fois, nous en avons remarqué pouvant presque rivaliser avee les nôtres. 

Nous devons dire qu’en général le versoir est trop petit, trop peu tordu, de telle sorte 
que le laboureur est obligé d’incliner la charrue pour arriver à retourner complétement 
la terre. On conçoit qu'à ces différences, qu'on constate dans les diverses parties du 
bassin du Mékong, viennent s’ajouter des variations suivant les laboureurs. 

Quelle que soit la forme de leur charrue, comme elle n’a qu’un unique versoir, ils 
sont obligés partout, pour labourer, de procéder en cercle, c'est-à-dire de tourner 
autour du champ, de façon qu'il reste toujours un large sillon au milieu. Cette charrue 
primitive et simple, que beaucoup de cultivateurs construisent eux-mêmes, pendant 
les mois de loisirs, est trainée ordinairement par des buffles. En Cochinchine, où 
ces animaux sont nombreux et très-vigoureux, les cultivateurs en mettent toujours deux 
sur la même charrue, ce qui leur permet de labourer plus profondément. Au contraire, 
au Laos et en Chine où les buffles sont rares, et peut-être moins robustes, les indigènes 
n'en mettent le plus souvent qu'un seul. 

Les bœufs, surtout en Chine, au Laos et au Cambodge, sont employés aussi pour le 
labourage, seuls ou accouplés aux buffles; malgré leur petite taille, comme ils sont très- 
vifs et de mœurs beaucoup plus douces que ceux d'Europe, ils rendent de grands services 
pour labourer les terres légères des collines, et il est regrettable que les Annamites s’obsti- 
nent généralement à ne pas s’en servir dans ces conditions. Il est bien entendu que les 
bœufs ne peuvent être employés pour le travail des rizières inondées, qui revient complé- 
tement aux buffles. L'obligation où sont les animaux, ainsi que les hommes qui les con- 
duisent, de travailler avec de l’eau jusqu'au ventre, ne convient nullement aux bœufs. 

L'emploi pour le labourage des chevaux, des ânes et des mulets, n’est jamais prati- 
qué dans le Sud. En Chine seulement, dans les contrées où les buffles sont devenus 
très-rares par suite de la guerre et de plusieurs autres causes que nous aurons occasion 
d'expliquer dans la suite, les habitants emploient souvent ces divers animaux. 


396 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


La herse est ordinairement construite, comme en Europe, en triangle équilatéral; elle 
est munie de 12 à 1 8 dents en bois, longues d’un décimètre au moins, disposées sur 
deux ou trois barres transversales, de façon à tracer chacune un sillon différent. Dans 
quelques cas, nous l'avons trouvée bâtie en bois dur, mais presque toujours elle est en 
bois mou et même en bambou; elle est ordinairement si légère que le laboureur est 
obligé de monter dessus pour faire entrer les dents dans la terre. Cette légèreté n’est pas 
un inconvénient, car elle lui permet de franchir presque tous les obstacles, le cultivateur 
n'ayant pour cela qu'à descendre de dessus lorsqu'il les aperçoit, et à remonter ensuite. 

Pour rendre ces mouvements plus faciles au laboureur et en même temps pour qu'il se 
üenne plus commodément sur l'instrument, les Chinois ajoutent souvent sur la barre mé- 
diane deux montants, réunis à leur partie supérieure par une traverse. Cet instrument est 
trainé comme la charrue, par un ou deux buffles. Pour les rizières bien tenues et labourées 
profondément, il en faut toujours deux, afin que le conducteur puisse rester constam- 
ment sur la herse et que les dents, pénétrant de toute leur longueur, entraînent toutes 
les racines des herbes aquatiques et transforment complétement la terre en une bouillie 
claire absolument nécessaire au repiquage du riz. En Cochinchine, où le travail des rizières 
est généralement très-bien fait, souvent même mieux qu’en Chine, les habitants se servent 
toujours de deux buffles pour le hersäge; au Laos, ils n’en emploient généralement 
qu'un seul, aussi leurs champs sont-ils toujours mal labourés el constamment envahis par 
les herbes aquatiques dont ils ont laissé presque toutes les racines. 

La Aoue est l'instrument le plus employé par les Indo-Chinois tant en agriculture qu’en 
horticulture. Sa forme et sa laille varient très-peu; généralement elle est lourde et massive ; 
elle se compose d’une plaque de fer parallélogrammique et plate, percée supérieurement 
d’un trou servant à fixer un manche long de 1,50 environ. Cet instrument est très- 
employé pour la culture des rizières, et en particulier pour la construelion et la réparation 
des talus. Pour le jardinage, c'est à peu près le seul outil employé; il remplace notre 
bêche, qui n’est pas inconnue, mais qui ne sert que pour les terres très-humides et qu’on 
confectionne en bois dur. 

La faucille est, comme tous les instruments précédents, de forme très-grossière ; elle 
est formée d’un grand couteau légèrement arqué, pointu à son extrémité, auquel on fait, 
comme à notre faucille, des crans sur le bord de la face inférieure. Au Laos et en Chine, 
le manche de cet instrument est analogue à celui du nôtre ; mais en Cochinchine il en 
diffère sensiblement ; il est plus long et muni à son origine d’un crochet servant à ras- 
sembler un certain nombre de chaumes avant de les couper. Cette addition nous a paru 
ingénieuse et assez ulile. 

Aux instruments précédents, nous ajouterons le Zarare, qui est presque en entier 
semblable au nôtre, et qu'on ne trouve qu'en Cochinchine et en Chine. D'après divers 
renseignements, c’est aux Européens que ces peuples doivent de connaître eet utile 
instrument. Dans les régions où il ne s’est pas encore propagé, comme au Laos, le 
travail de séparation du grain d'avec la paille se fait souvent sur le lieu de la récolte 
même, à l’aide d’un grand éventail en bambou qu'un individu agite pendant qu'un autre 


INSTRUMENTS AGRICOLES. 37 


fait tomber les grains de sa hauteur. Autant que possible, on profite, pour faciliter cette 
opération, d’un jour où il fait du vent. Si le vent est fort, on peut se passer d'éventail, La 
forme de notre van à mains servant à vanner les petites quantités, n'est pas connue; 
pour ce genre de travail, on se sert de vans circulaires en bambou tressé sans manches, 
bien moins commodes que le nôtre. 

Les voitures usitées par les Indo-Chinois sont de deux sortes : 1° Les voitures à 
buffles, 2° les voitures à bœufs. Les premières, lourdes et solides, servent au transport 


USTENSILES ARATOIRES ET TEXTILES DU LAOS. 


. Dévidoir pour le coton. — 2. Panier et arc servant à carder le coton. — 8. Rouet à filer le coton. — 4, 5. — Quenouille et fuseau 
pour le chanvre. — 6. Dévidoir pour la soie. — 7. Herse, longueur : 1,30. — 8. Charrue, longueur: 1m,80 : e, soc en fer; à, bât et 
traits pour un buffle. — 9. Faucille, longueur : 0m,20. — 10. Houe, longueur : 1,20. 


= 


de tous les objets pesants, comme les grains, le bois, les pierres, ete. Les secondes ne ser- 
vent que pour les voyages; aussi sont-elles très-légères. Les roues de ces dernières sont 
composées, comme les nôtres, de rais, de jantes, et d’un moyeu mince et allongé. Ces 
roues ne sont presque jamais ferrées cireulairement; elles ont chacune un essieu indé- 
pendant, formé d'un bâton que l’on coupe dans les forêts et que l’on remplace en voyage 
dès qu'il s’use ou se casse. Ces essieux sont fixés entre deux pièces de bois réunies à leur 
extrémité par une barre, et dont l’interne forme une des deux pièces principales de toutes 


358 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


les voitures. Ce système ingénieux ne manque pas d'utilité pour circuler dans les forêts ; 
il empêche les essieux de s’accrocher aux arbres et prévient le versement des voitures 
dans les endroits trop en pente. Les voitures à bœufs ont une forme variable, qui est 
en général celle d’une capote arrondie, très-basse, en rotin tressé ou en bambous recou- 
verts de feuilles diverses et imprégnées d’oléo-résine de dipterocarpus. Sous cette capote, 
qui est mobile et dont on se passe souvent, deux hommes peuvent à peine se tenir ac- 
Croupis. 

Les voitures à buffles sont plus grandes, plus solides et munies parfois de ridelles 
basses de chaque côté. Leurs roues, au lieu d’être comme les nôtres, sont formées d’une 
seule rondelle de bois de deux mètres de diamètre au moins. Ces rondelles proviennent 
de différentes espèces d'arbres, appartenant à la famille des Légumineuses et des La- 
gerstræmiées, dont les troncs présentent de larges expansions correspondant aux fortes 
racines. Le même arbre, lorsqu'il est très-vieux et d’une forte grosseur, en produit sou- 
vent plusieurs. Ces deux roues sont unies par un essieu, analogue à celui de nos voitures, 
confectionné en bois dur. 

Quel que soit le système des roues, les indigènes ne se servent jamais de graisse pour 
les essieux : aussi les voitures, à buffles surtout, grincent-elles continuellement en marche ; 
on les entend parfois à plusieurs kilomètres de distance. On prétend que c’est dans le but 
d'effrayer le tigre, que le bruit intimide très-facilement, que les habitants évitent d’em- 
ployer de la graisse; tout en croyant cette opinion parfaitement juste, nous avons pu 
constater plusieurs fois que ce moyen n’était pas toujours suffisant pour l'empêcher d’at- 
taquer les attelages. 

Ces deux sortes de voitures sont toujours trainées par deux animaux que l’on attelle de 
front à l’extrémité du timon, sur une barre transversale qui s’appuie à la naissance de leur 
cou et qui est maintenue par un anneau l’entourant complétement. Chez les bœufs zébus 
de l’Indo-Chine, possédant une bosse souvent très-grosse au-dessus des épaules antérieu- 
res, ce genre d’attelage est plus simple que celui de l'Europe, qui consiste à fixer le joug 
sur le front. Pour les buffles, qui sont au contraire dépourvus de bosse, ce joug les 
oblige à pencher fortement la tête en bas, ce qui contribue encore à augmenter leur lour- 
deur et à gèner leur marche. Ce mode d’attelage n’a qu’un avantage, c’est de permettre 
à ces animaux d'employer plus facilement toute leur force. 

Pour mémoire, nous mentionnerons l'usage, dans quelques rares points du Laos su- 
périeur, de petites voitures analogues à celles que construisent eux-mêmes les enfants en 
Europe, et dont les roues ont à peine un mètre de diamètre. Ces voitures portent une caisse 
carrée faite en bambous tressés, servant à ramener le riz en grain des cultures éloignées. 

Selon la configuration du pays, l'usage des voitures est plus ou moins répandu. Dans 
la partie alluvionnaire de la Basse-Cochinchine, sillonnée de fleuves et de nombreux ar- 
royos lrès-défavorables à la construction des routes, on ne rencontre pour ainsi dire au- 
cune voiture : les bateaux les remplacent avec avantage. De même, dans le Laos supé- 
rieur et la Chine méridionale, pays montagneux, où les routes se réduisent la plupart du 
temps à des sentiers étroits souvent en escalier, on n’en trouve pas non plus. Dans quel- 


INSTRUMENTS AGRICOLES. 399 


ques grandes plaines seulement, les habitants en ont construit de petites, de formes 
très-grossières, servant exclusivement pour ces plaines. Les pays où les voitures sont le 
plus nombreuses, se trouvent done être les parties hautes de la Cochinchine, le Cambodge 
et le Laos inférieur. Dans cette partie moyenne de l’Indo-Chine, peu peuplée généralement 
et en grande partie encore couverte de forèts, elles servent non-seulement pour rentrer 
les récoltes, mais aussi pour les relations commerciales des différents villages qui sont 
éloignés les uns des autres et pour les échanges avec les sauvages. 

Il nous reste encore à indiquer l'usage des traineaux tant en Cochinchine qu'au Cam- 
bodge. Cet instrument, formé de quatre pièces de bois, dont deux latérales plus fortes rele- 
vées à leurs extrémités, sert à transporter le riz que l’on doit repiquer, d’un champ dans un 
autre. Ce traineau est tiré par un seul buffle, et ne sert que pour les grandes cultures. 

Partout ailleurs, les Indo-Chinois transportent le riz, ainsi que la plupart des autres 
objets, à l’aide d’un bambou élastique en forme de balancier, qu'ils placent sur l’une ou 
l’autre épaule, et aux extrémités duquel pendent deux paniers. 

Dans un pays où les trois quarts des cultures ont lieu en terres inondées, on pourrait 
croire que les machines hydrauliques destinées à élever l’eau sont nombreuses. Il n’en est 
cependant rien, et ce n’est qu'en Chine que l’on trouve des norias. Depuis quelques an- 
nées, plusieurs de ces instruments en bois ont bien été importés en Cochinchine par 
les Chinois, mais ils sont loin de s’y être généralisés. Partout où cette noria manque, les 
cultivateurs comptent sur les pluies du ciel pour permettre au riz d'achever sa croissance. 
Dans quelques cas, les habitants se servent d’un panier en bambou tressé, en forme de 
nid d’hirondelle, suspendu par deux cordes à trois perches réunies à leur sommet, 
et mis en mouvement par deux hommes. Mais ce système est insuffisant pour de 
grandes rizières, et ne s'emploie que pour des champs restreints ou pour les semis 
de riz. 

La noria chinoise, qui est identique dans tout l'empire, est entièrement construite en 
bois; elle se compose d’une gouttière formée de trois planches, ouverte à sa partie supé- 
rieure, longue de 4 à 5 mètres, dans laquelle glisse une chaîne sans fin articulée, tournant 
à chaque extrémité sur un très-petit tambour et munie entre chaque articulation d’une plan- 
chette tenant lieu de godet. Ces plancheltes, au nombre de vingt à trente, doivent être très- 
exactement de la grandeur de la gouttière, pour ne pas laisser retomber l’eau. Cette noria 
est mise en mouvement à l’aide de deux manivelles placées de chaque côté supérieurement, 
et que deux hommes font tourner. Dans quelques cas, au lieu de se servir de manivelles, 
on adapte une roue double d’un mètre de diamètre au moins, et munie d’échelons sur les- 
quels un homme monte constamment. Ce système, en permettant à l’homme d'agir par son 
poids, permet d'élever l’eau à une grande hauteur et est surtout employé pour irriguer les 
rizières disposées en amphithéätre sur le flane des montagnes. Après avoir élevé l’eau des 
canaux sur le premier gradin, on l'élève ensuite sur le second, puis successivement jus- 
qu’au dernier. Dans quelques cas assez rares, nous avons observé un autre genre de noria, 
mü par l’eau des fleuves et des rivières. Il se compose d’une immense roue en bambou, 
munie à sa circonférence de quinze à vingt tuyaux de même nature, placés obliquement 


360 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


et tenant lieu de godets, qui s’emplissent inférieurement en traversant l'eau et qui se 
vident lorsqu'ils sont arrivés en haut. Ces roues mises en mouvement par le courant, 
déversent leur eau dans une auge qui la distribue dans les canaux d'irrigation. Ce genre 
de noria, s’il était plus solidement établi et placé dans des rivières munies de barrages, 
pourrait rendre de grands services. 

Nous déerirons les diverses machines à décortiquer le riz, les moulins à farine, les 
presses à huile, les instruments à broyer la canne et à fabriquer le sucre, les machines 
à distiller les eaux-de-vie et à égrener le coton, etc., en parlant des plantes auxquelles 
elles sont destinées. 

Tant appropriés que soient les instruments agricoles des Indo-Chinois à leur sol et à 
leur genre de culture, 11 y aurait lieu cependant de doter les indigènes de quelques-uns 
de nos instruments perfectionnés. Nous signalerons en première ligne la charrue en fer, 
à double versoir mobile et sans roues, qui pourrait se substituer presque dans tous les cas à 
la leur et qui exige moins d'efforts de traction et permet un labour plus profond. Nous in- 
diquerons ensuite une bonne machine à décortiquer le riz et notre faux pourla récolte des 
herbes fourragères. Notre bêche serait également des plus utiles aux jardiniers et per- 
meltrait de bien mieux remuer la terre que la houe. Les machines à élever l’eau, ainsi que 
nous l'avons déjà fait remarquer, rendraient d'immenses services. Les machines distil- 
latoires, celles qui servent à fabriquer le sucre, seraient d’une immense utilité, autant 
pour les indigènes eux-mêmes que pour les Européens voulant se livrer à l'extraction 


de ce produit pour l'exportation. 


S 5. — Bestiaux et animaux domestiques. 


En raison de la diversité des climats de l’Indo-Chine, on y trouve la plupart des ani- 
maux domestiques : le buffle, le bœuf, le cochon, l’äne, le mulet, l'éléphant, la chèvre et 
le mouton, auxquels nous devons ajouter les poules, les paons, les faisans, les oies, les 
canards, les pigeons, les lapins, les dindons et les abeilles. 

Ces bestiaux sont dans toutes les fermes indo-chinoises en nombre proportionné 
à la production de fumier qui serait nécessaire. A l'exception des cochons, qui sont 
nombreux partout, on ne trouve dans toutes les fermes que quelques buffles et parfois 
une paire de bœufs pour les voyages. Ces buffles et ces bœufs sont toujours élevés comme 
animaux de trait et on ne les tue que lorsqu'ils sont malades ou trop vieux pour faire 
un bon service. Jamais ces animaux ne sont élevés pour le lait qu'ils fournissent, les 
Indo-Chinois ayant en général une grande répugnance pour ce précieux aliment. Quel- 
ques {ribus sauvages seulement, habitant les montagnes du Yun-nan, apprécient le lait 
et fabriquent avec celui de chèvre des fromages que nous avons trouvés excellents. Ces 
tribus, appartenant aux Miao-tse, sont de race caucasique, et tiennent peut-être cette 
habitude de leurs ancêtres. Nous sommes tentés de croire qu'ils l’ont apportée du centre 
de Asie en la quittant il y a des milliers de siècles. On ne trouve aucun mouton dans les 
fermes indo-chinoises, sauf dans quelques-unes situées sur les hauts plateaux de la Chine. 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 361 


Les chevaux sont partout très-rares et sont employés par les gens riches comme monture, 
ou par les voyageurs pour circuler ou pour transporter des marchandises. Ils ne sont 
employés aux travaux agricoles que dans un très-petit nombre de localités en Chine. Nous 
en dirons autant des ànes et des mulets qu’on ne rencontre qu’en Chine. En Cochinchine 
on trouve bien des ânes et des mulets, mais ils y ont été amenés récemment par les Euro- 
péens et ils y sont encore en très-petit nombre. 

Nulle part en définitive on ne rencontre ces fermes riches en bestiaux comme en 
Europe, possédant à la fois des animaux de trait pour le labour et les charrois et des 
bestiaux pour l'élevage ou l’engraissement, les uns et les autres consommant les fourra- 
ges et transformant la paille en fumier. 

A l'exception du cochon, les élevages de bestiaux se font presque toujours en dehors 
des fermes, dans les localités élevées entourées de plaines, telles que certaines régions du 
Cambodge et les parties hautes de la Cochinchine. Les buffles et les bœufs, que l’on y 
réunit en petits troupeaux, doivent y trouver toute l'année leur nourriture, car les Indo- 
Chinois ne récoltent pas de fourrages, et presque partout ils brülent leur paille de riz. 
Ce manque de prévoyance compromet souvent la vie des bestiaux et favorise le dévelop- 
pement des épizooties qui règnent fréquemment pendant la saison sèche. Les animaux se 
nourrissent alors d'herbes sèches couvertes de poussière ou ayant échappé à l’incendie, 
ou de quelques rares plantes vertes qu’on rencontre çà et là dans les endroits humides, et 
ils maigrissent beaucoup. Dans quelques points du Laos, mais plus souvent en Chine, 
on leur donne bien en ce moment un peu de paille de riz mise de côté, mais en quantité 
insuffisante, et, en Chine, où les herbes manquent complétement à la fin de la saison 
sèche, ces animaux deviennent des squelettes. 

Les Indo-Chinois n’ont pour les animaux domestiques ni soins ni attachement. Ils 
paraissent absolument ignorer à l’aide de quels ménagements ou de quelles précautions 
on parvient à dresser les individus ou à améliorer les races. Presque toujours leurs bes- 
tiaux se multiplient sans l'intervention des propriétaires : ils se reproduisent, comme ils 
se nourrissent, à la facon de leurs congénères à l’état sauvage. Cette omission de tous les 
soins qu'ailleurs on donne aux animaux fait que, comme chez les hommes, on observe 
fréquemment des différences individuelles, et que rarement on trouve des caractères 
constituant des groupes. Dans presque toute l'étendue de l’Indo-Chine, les bestiaux sem- 
blent done appartenir à la même race. Seul, le cochon, plus favorisé, est l’objet de toute 
la sollicitude des indigènes, sinon dans sa reproduction, du moins dans sa nourriture. 
Chaque ménagère s’en occupe constamment, et, si elle ne le caresse pas, elle s’en 
oceupe du moins avee une aflention qui contraste singuliérement avec l'espèce d’aban- 
don dans lequel vivent les bœufs et les buffles. Cette sollicitude atteint souvent un degré 
invraisemblable. On nous croira sans doute difficilement, lorsque nous affirmerons avoir 
vu plusieurs fois des femmes annamites allaiter elles-mêmes de petits cochons venant 
de naître. 

Un second animal, l'éléphant, est également l’objet de soins particuliers de la part des 


Laotiens et des Cambodgiens. Nous n’expliquons ce fait, en désaccord avec les précédents, 
I. 46 


302 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


que parce que cet animal est rare et qu'il sert exclusivement aux mandarins, qui obligent 
les cornacs à beaucoup s’en occuper. En Cochinchine, où l'éléphant n’est pas réservé pour 
le monde officiel, on ne s’en occupe pas plus et peut-être moins que des autres animaux. 

Ce que nous venons de dire ne s'applique en aucune façon aux pelits animaux de 
basse-cour, comme les poules, les canards, ete. Ces oiseaux domestiques ne sont pas 
souvent soignés moins bien que les nôtres, et dans les contrées où les habitants aiment 
les combats de coqs, ces volatiles sont souvent mieux soignés qu'en Europe. 

L'opération de la castration est pratiquée en Indo-Chine sur presque tous les animaux 
domestiques. Les buffles surtout sont fréquemment châtrés, les taureaux le sont quelque- 
fois ; les chevaux le sont moins souvent. Les cochons subissent généralement cetle opé- 
ration, aussi bien les truies que les verrats. Le chaponnage est également usité partout, 
particulièrement en Chine et en Cochinchine. 

Buffles.— Comme importance, le buffle vient en première ligne. Il sert presque exclu- 
sivement au labourage et au charroï de toutes les matières pesantes. L'amour de cet animal 
pour l’eau explique son importance en Indo-Chine. Tout autre que lui ne pourrait servir 
à labourer ces rizières où la bête de trait a de l’eau jusqu'au poitrail. Lui seul peut, en 
traversant les fleuves et les rivières, aller chercher sa nourriture dans les marais incultes, 
trop profonds pour établir des rizières, et dans lesquels croissent ces nombreuses plantes 
aquatiques qui répugnent tant aux bœufs. Un animal comme le buffle qui est semi- 
amphibie, convenait seul à ces contrées tropicales. Il présente d’ailleurs comme force 
une supériorité considérable sur les bœufs de ces pays, peut-être même est-il plus gros 
et plus robuste que les buffles d'Europe. La race qu’on trouve en Indo-Chine est à peu 
près uniforme. C’est au Cambodge et au Laos, dans les régions forestières, que les buffles 
deviennent le plus gros, c’est en Chine qu'ils sont le plus chétifs. La raison de ces 
différences lient moins à des variétés de race qu'aux différences des conditions d’alimen- 
tation dans lesquelles ils sont placés. Au Cambodge et au Laos, où existent de nombreuses 
plaines herbeuses, ces animaux ne manquent jamais de nourriture, et à la fin de 
la saison sèche, alors que tout est grillé, ils trouvent encore dans les bambous et les 
herbes desséchées de quoi se maintenir en assez bon état. Dans le della du Cambodge, qui 
est très-cultivé, et où il ne reste plus assez d'herbes sèches pour leur permettre de vivre, 
on est oblige, à cette époque, de les envoyer dans les régions forestières situées 
dans le haut du pays. En Chine, surtout dans la province du Yun-nan, les buffles souffrent 
beaucoup pendant la saison sèche. 

Comme animal de trait, la force du buffle est très-grande, mais ses allures sont très- 
lentes. Il est d’une excessive douceur avec les indigènes, et un enfant peut parfaitement le 
mener. [n’en est pas de même avec les Européens : leur vue l’effraye beaucoup, le 
rend même souvent furieux, et ce n’est qu'avec le plus grand sang-froid qu’on évite d’en 
être blessé. Ne pas en avoir peur et foncer sur un buffle lorsqu'il vous charge est un 
moyen qui nous à réussi plusieurs fois, mais nous n’oserions le conseiller dans tous les 
cas, et il est toujours plus prudent d'éviter cet animal lorsqu'on le peut. Nous avons pu 
faire la remarque singulière que les buffles deviennent plus doux à l'égard des Européens, 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 303 


à mesure que l’on s’avance vers le nord. Au Laos, ils sont déjà assez pacifiques, et en 
Chine ils ne sont plus à craindre. 

Ces animaux ne sont presque jamais placés dans des étables : on les réunit la nuit dans 
des pares non couverts, légèrement excavés, entourés de barrières et dans lesquels leurs 
excréments s’amoncellent, de facon qu'ils s’y trouvent plongés parfois jusqu'au ventre. 
Cette double condition est très-défectueuse et entraine souvent, au moment des pluies, 
la mort par suite de pneumonie de plusieurs de ces animaux; car, quoiqu’ils aiment beau- 
coup l’eau et qu’il soit même nécessaire qu'ils s’y plongent plusieurs heures dans le milieu 
de la journée, 1ls souffrent des nuits pluvieuses. Les pares couverts sont donc nécessaires 
pour eux comme pour les bœufs. C’est à tort que l’on s’appuie, pour défendre linstalla- 
tion actuelle, sur ce que, à l’état sauvage, les buffles couchent en plein air, car ils choi- 
sissent alors presque toujours des arbres pour s’abriter, et dans tous les cas ils recher- 
chent des endroits secs qui sont nécessairement propres, puisqu'ils en changent toutes 
les nuits. L'exemple de ces animaux à l’état sauvage devrait done éclairer les cultivateurs 
et leur faire installer des pares couverts, dallés ou pavés, et disposés en pente légère, de 
façon à favoriser l'écoulement des urines. Ils devraient également leur fournir de la litière, 
puisqu’à l’état sauvage les buffles choisissent pour camper les plaines couvertes d'herbes. 

D’après le témoignage des indigènes de la partie sud du bassin du Mékong, seul 
endroit où l’on rencontre des buffles à l’état sauvage, ceux-ci ne différeraient aucunement 
de l’espèce domestique. Il est en effet avéré que ces buffles proviennent de buffles domes- 
tiques redevenus sauvages. En reprenant leur vie des forêts, ces animaux auraient perdu 
entièrement leurs mœurs douces ; ils passent pour très-dangereux, etles indigènes évitent 
autant que possible de s'approcher des troupeaux. 

Le système servant à attacher et surtout à diriger les buffles et les bœufs, est identique 
dans toute l’Indo-Chine; il consiste en un anneau en rotin qu'on passe, dans leur jeu- 
nesse, à travers la cloison des fosses nasales, et auquel on attache des guides à droite et à 
gauche. Cest là le meilleur moyen de rendre dociles ees animaux. 

Bœufs. — Le bœuf qu'on rencontre en indo-Chine, appartient à l'espèce dite bœuf à 
bosse ou zébu (Bos indicus). Sa taille est environ moitié moindre que celle de nos bœufs 
d'Europe. Cette espèce existe abondamment à l’état sauvage dans toutes les forêts du 
sud du bassin du Mékong, où on la chasse pour sa chair ou pour la réduire en captivité. 
Comme tous les animaux sauvages, son type est uniforme et sa vigueur plus grande que 
celle des bœufs domestiqués depuis de longues années. Elle vit en bandes assez nom- 
breuses, dans les plaines herbeuses ou dans les forêts. Continuellement aux aguets, 
autant par crainte des tigres que des chasseurs, elle est très-difficile à approcher. On par- 
vient cependant à prendre de jeunes veaux, qui forment plus tard les meilleurs bœufs trot- 
teurs. Quoique parfaitement apprivoisables, ces bœufs sauvages se multiplient très-peu 
en captivité. 

Les troupeaux de bœufs domestiques ou sauvages, lorsqu'ils vont paître dans les fo- 
rêts hantées par les tigres, inspirés par l’instinet de leur conservation, se choisissent toujours 
un chef qui veille constamment l’approche du tigre, et qui, à la moindre alerte, donne le 


304 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


signal de la retraite. Plusieurs fois, nous avons aussi épouvanté des troupeaux de bœufs do- 
mestiques, au moment où nous sortions des taillis où nous étions entrés pour herboriser. 
Souvent, avant que nous ne les eussions aperçus, le chef, le nez au vent, fuyait, entraînant 
tout le troupeau à sa suite. Cette surveillance, que pratiquent également les buffles, domes- 
tiques et sauvages, n’a lieu que dans les endroits où le tigre existe; dès qu'il disparaît, 
comme en Chine, les animaux, n'ayant plus de crainte, vont paitre çà et là et s’éparpillent 
volontiers. : 

Quoique l’espèce domestique présente des variations assez notables, consistant 
surtout dans la couleur de la robe, le plus ou moins de développement de la bosse et une 
taille assez variable, il est assez difficile de distinguer différentes races. On trouve donc 
depuis Saïgon jusque dans le sud de la Chine la même race de bœuf. Dans le centre de 
la Chine seulement, nous avons trouvé une race bien distincte, à bosse peu développée, 
mais beaucoup plus robuste que celle du sud. 

Les formes de ces bœufs sont très-élégantes, et comme agilité, ils sont bien supérieurs. 
à nos bœufs d'Europe. C’est surtout avec eux que les indigènes font leurs voyages à travers 
les forêts. Accouplés et attelés à une voiture légère, ils peuvent faire dix et même quinze 
lieues par jour, si l’on a la précaution de faire une partie dela route la nuit. Ils marchent con- 
ünuellement au trot, et sur une route en bon état, ils peuvent tenir tête à bien des chevaux ; 
dans tous les cas, ils marchent plus longtemps et exigent infiniment moins de soins. Ces. 
bœufs sont remarquables par leur douceur et leur docilité, et ceux même qui n’ont pas 
subi la castration, ne présentent aucun des dangers de nos taureaux. Les Européens et les 
indigènes peuvent les approcher, les caresser, les atteler sans qu'ils cherchent à fuir. 
Lorsqu on les emploie fréquemment pour trainer sur des routes macadamisées, il est né- 
cessaire de les ferrer, mais presque toujours les indigènes négligent cette précaution, ne 
les faisant pas travailler assez la plupart du temps pour qu'ils usent leur corne. 

Le mode d’attelage est partout le même; on les attelle sur une traverse, munie 
à chacun de ses bouts d’une échancrure garnie d’un coussin qui s’appuie sur le cou, en 
avant de la bosse qui surmonte le garrot. Cette installation, qui laisse la tête complétement 

libre, est plus avantageuse, plus commode et moins disgracieuse que celle qui est usitée en 
| Europe. 

Ces bœufs ne sont pas utilisés seulement comme bœufs coureurs : on les emploie 
aussi pour porter, surtout dans les régions très-boisées du Laos, et dans les montagnes 
du sud de la Chine. Assez rarement on les utilise pour le labourage. En Cochinchire, 
particulièrement dans les parties hautes, il est permis d'espérer qu'on les utilisera davan- 
lage lorsque les cultures industrielles prendront plus d’extension. Moins fort que le 
buffle, le bœuf coûte moins cher; il est plus facile à élever, à nourrir, moins sujet aux 
épizooties ; il pourrait done rendre les plus grands services, si on lui faisait trainer des 
charrues plus légères. Nos charrues en fer, telles qu’on les fait actuellement, à double 
versoir, lui conviendraient parfaitement. 

Le bœuf n’est äbondant que dans l'immense province cambodoienne de Compong Soaï, 
située sur un plateau assez sec; partout ailleurs il est rare : dans le Laos inférieur et 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 305 


supérieur, où existent des plaines analogues se prêtant pourtant merveilleusement à cet 
élevage, les dernières guerres soutenues contre les Siamois en ont détruit une quantité 
considérable et on en trouve à peine quelques-uns. En Chine même, on en trouve très- 
peu ; les Chinois, ainsi du reste que les Annamites, n'aiment pas les animaux et, sauf le 
pore, ils ne s'occupent ni d'améliorer ni de multiplier des bestiaux dont ils n’apprécient 
ni la chair ni le lait. 

Le préjugé des Indo-Chinois contre le lait, assez inexplicable puisqu'ils mangent à 
peu près tous les animaux, même les plus immondes, tels que des vers, des sauterelles, 
des lézards, les prive d’une alimentation aussi facile qu'abondante. Dans une région 
aussi humide que l’Indo-Chine, où les graminées fourragères croissent avec profusion, 
en Chine, surtout, dans les régions montagneuses jouissant d’un climat brumeux, dont 
la superficie est aux trois quarts déboisée, inculte et couverte d'herbes, on peut affirmer 
que l'élevage du bétail permettrait sans peine de vivre à une population double. Aussi 
avons-nous éprouvé, en descendant le fleuve Bleu et en voyant ces innombrables surfaces 
couvertes d'herbes, que les habitants brülent à la fin de l'été, le plus grand désenchan- 
tement sur l’agriculture chinoise. De pareilles montagnes, en Europe, seraient fréquentées 
par d'immenses troupeaux de bœufs et de moutons, fournissant en abondance aux habi- 
tants des plaines de la viande, du lait, du beurre, du fromage, de la laine. C’est à notre avis 
le plus grand progrès à réaliser en Indo-Chine; aussi serions-nous heureux de pouvoir 
attirer sur ce fait l'attention de ses différents gouvernements. En multipliant le bétail, on 
favorisera le développement de la population et on augmentera son bien-être. En Cochin- 
chine, le gouvernement doit dès à présent encourager les Indiens, qui y sont venus depuis 
l'occupation, à continuer à s'occuper des vaches laitières. Leur exemple finira par être 
imité des Annamites et par vaincre leur préjugé contre le laitage. Les vaches indigènes 
fournissent un excellent lait, très-riche en beurre et souvent abondant; on pourrait im- 
porter des vaches en produisant encore plus et, par la sélection, chercher à améliorer la 
vache du pays. 

Avant de finir ce que nous avions à dire sur les bœufs, nous tenons à mentionner 
l'existence en Indo-Chine d’une très-grande espèce, plusforte peut-être que la plupart de 
celles de l’Europe et qu'on trouve parfois à l’état domestique au Cambodge. Cette espèce 
aux cornes très-grandes, dont nous n'avons vu personnellement aucun spécimen, exis- 
terait d’après divers renseignements dans les forêts, mais elle y serait très-rare. Les quel- 
ques sujets de cette race qui existent au Cambodge, sont employés aux mêmes usages que 
les buffles !. 

Cochons. — Les cochons, sans être complétement semblables dans toute l’Indo-Chine, 


1 Les Cambodgiens distinguent en tout cinq espèces ou variétés de bœufs sauvages. La plus commune, 
qu'ils appellent Æou prey ou « bœuf de forêt », est de couleur grise et a les cornes recourbées en arrière. C’est 
celle dont provient le bœuf domestique commun. Les autres espèces sont : le Æhting et le Ahting cha dont 
la robe est noire, et dont les cornes, chez le Xhting cha au moins, sont contournées en spire ; le Xéhëng pos 
ou «Khting à serpents » ainsi nommé parce que, au dire des indigènes, il se nourrit de serpents qu’il transperce 
de ses cornes très-longues, très aiguës et recourbées comme celles du buffle; enfin l’Ansong, bœuf sauvage rouge 
dont les cornes sont recourbées en avant. Je crois que c’est là la grande espèce dont parle M. Thorel. — F. G. 


366 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


offrent cependant peu de différences. La race se rattache à celle qui est connue en 
Europe sous le nom de race du Tong-king; elle est très-courte de paltes, avec 
le groin court, le front proéminent et les soies presque toujours entièrement noires, très- 
rarement blanches. Nous devons cependant indiquer l'existence en Chine d’une race 
particulière, remarquable surtout par ses soies grises, semblables à celles des sangliers 
dont elle pourrait bien provenir ; sa forme diffère peu de celle de l'espèce vulgaire. La 
race commune, très-appréeiée en Europe pour la rapidité de son engraissement et de son 
développement, n’est pas moins estimée en Indo-Chine. Sa chair présente pourtant plu- 
sieurs inconvénients sérieux : elle est trop grasse et la graisse est trop huileuse. Ces in- 
convénients sont reconnus par les Annamites, qui, depuis l'occupation française, essayent 
de croiser la race indigène avee les grandes races européennes. Ces tentatives nous pa- 
raissent devoir être favorisées, puisqu'elles doivent apporter une amélioration dans la 
qualité de la chair, et qu'en même temps elles peuvent créer des races croisées plus 
appropriées aux grandes fermes. 

Les cochons sont, comme en Europe, placés dans des étables très-sales et très-basses, 
adossées presque toujours aux maisons, comme en Cochinchine, ou placées en dessous 
entre les colonnes qui les soutiennent, comme au Laos et au Cambodge. Dans tout le sud, 
ces étables, ordinairement élevées au-dessus du sol, sont construites en forme de cage 
avec de grosses perches. En Chine, ces cages sont presque toujours placées au-dessus de 
la fosse d’aisance, ce qui dispense de tout nettoiement : les excréments et les urines des 
cochons tombent dans la fosse à travers les barreaux du fond. Ces animaux ne nous ont 
pas paru souffrir sensiblement de ce voisinage; cependant nous sommes loin d'affirmer 
qu'il n'ait pas d’inconvénients pour eux. 

Pendant la nuit, les cochons sont renfermés dans leurs étables, d’où le tigre vient 
souvent les enlever en écartant les perches, quand le village n’est pas entouré de bar- 
rières. Le jour, les habitants les laissent presque toujours courir autour des maisons 
où ils mangent les débris d'aliments et de légumes. Cette habitude n’est pas sans inconvé- 
nient : il arrive que ces animaux mangent les excréments des indigènes, lesquels, étant 
souvent atteints de ténia, leur donnent ensuite la ladrerie. Au Cambodge, chez les sau- 
vages du sud et surtout dans le Laos inférieur où ces animaux font réellement la vidange, 
et suivent même les hommes dès qu'ils les voient se diriger vers les broussailles, le tiers 
est atteint de cysticerques, et l’on est obligé de les tuer dès qu’on s’en aperçoit. Les habi- 
tants mangent la chair de ces animaux ladres sans répugnance ; comme ils ont l’habitade 
de la couper en morceaux et de la faire bouillir, ils ne sont pas trop sujets au ténia. Nous 
ne saurions trop recommander aux Européens qui fréquentent ces contrées de ne pas 
prendre moins de précautions que les indigènes et de ne manger la chair de pore qu ss 
s'être assurés qu'elle est parfaitement cuite. 

La nourriture des pores se compose en grande partie, dans toute l’Indo-Chine, des 
débris provenant du pilage du riz ; comme dans tous les pays, on y ajoute les restes d’ali- 
ments, les épluchures de légumes et les légumes de rebut. Le riz, ainsi que plusieurs 
autres céréales que l’on fait fermenter pour en extraire l'alcool, entrent après leur distil- 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 367 


lation pour une grande part dans leur nourriture en raison de l'énorme quantité de riz 
que consacrent à cette fabrication les indigènes. Il en résulte que les plus gros porcs du 
pays se rencontrent dans les distilleries ; on en trouve là souvent qui atteignent des poids 
énormes, qui sont devenus trop gros pour pouvoir marcher et qui peuvent soutenir la 
comparaison avec ceux qu'on prime dans nos concours. 

Avant de procéder à l’engraissement des pores, les indigènes commencent, comme en 
Europe, par assurer leur développement. A cette période de l'élevage, on les nourrit, 
dans tout le sud de l'Indo-Chine, avec le centre des tiges des bananiers ayant donné des 
fruits, découpé en tranches très-minces. Dans toutes les régions où manque le bana- 
nier, comme dans presque toute la Chine, les ménagères les nourrissent en partie avec 
les tiges des fèves et des pois, récoltées avant la maturité des graines, et réduites en poudre 
à l’aide d’un fléau, après avoir été parfaitement séchées au soleil. Cette manière de tirer 
parti des tiges de ces plantes nous paraît mériter l'attention de nos cultivateurs. On arri- 
verait sans doute moins facilement en Europe à réduire ces plantes en poudre, vu 
qu’elles ne croissent pas, comme en Chine, dans les champs inondés, et en hiver, à 
l’époque de l’année où les fibres ligneuses s'organisent très-lentement et sont tou- 
jours tendres et fragiles. Afin d'augmenter la valeur nutritive de ces plantes, les Chi- 
nois ont la précaution de laisser atlachées à la tige les gousses avec leurs graines, qui 
ne sont d’ailleurs arrivées pour la plupart qu’à la moitié de leur développement. Nulle 
part, en Indo-Chine, nous n'avons vu faire usage de viande de rebut pour la nourriture des 
pores; dans quelques cas pourtant, au Cambodge, on leur donne des débris de poissons. 
Dans aucun cas non plus, nous ne les avons vu conduire aux champs pour chercher les 
racines des plantes tuberculeuses échappées à l’arrachage, ni dans les bois pour manger 
les graines des arbres et en particulier les glands du chêne. 

Enfin, le porc, en Indo-Chine, n’est pas seulement élevé dans les villages par les paysans , 
il l’est aussi dans les villes. Dans presque toutes les maisons on en élève au moins un. Cette 
habitude, mauvaise sans doute pour l'hygiène des villes, présente Le plus grand avantage 
pour l’utilisation des débris de toutes sortes provenant de la nourrilure de l’homme et 
contribue à accroitre la production de viande du pays. 

Chevaux. — La race chevaline, de même que les animaux précédents, est presque 
semblable dans toute l’Indo-Chine. Nous devons cependant noter qu'elle devient de plus 
en plus forte en s’avançant vers le nord, et en Chine, on trouve déjà des chevaux assez 
robustes, surtout dans les régions montagneuses où ces animaux sont employés comme 
bêtes de somme. Nulle part le cheval ne se trouve à l’état sauvage, ce qui confirme lopi- 
nion qui veut que cel animal ait été introduit en Indo-Chine. Les indigènes n’en entre- 
tiennent qu’un très-pelit nombre. Cet animal est impropre, en effet, à traverser les marais 
que produisent les pluies de l’hivernage, et cela diminue beaucoup l'intérêt qu'ont les ha- 
bitants à l'élever. Sa reproduction est peu soignée; la plupart du temps, elle est aban- 
donnée au hasard, de sorte que les plus mauvais étalons servent souvent de reproducteurs. 
Cet abandon a produit la petitesse de la race et l’uniformité du type. Cette espèce ne 
manque cependant pas de qualités; quoique petite et presque moitié moins forte que 


368 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


les espèces européennes, elle est pleine d’ardeur et d’un entretien très-facile. Ses formes, 
sans être élégantes, sont assez fines et bien proportionnées. Comme chez tous les animaux 
domestiqués depuis longtemps, la couleur de la robe est variable, avec prédominance de 
la couleur rouge. 

Dans tout le sud, les chevaux, comme les buffles et les bœufs, ont à pourvoir eux-mêmes 
à leur nourriture. Jamais les indigènes ne récoltent de fourrages et, sauf en Chine, dans 
quelques points très-secs, ils ne gardent même pas la paille du riz. Dans les rares localités 
où on donne aux chevaux de la paille de riz, on a la précaution de la hacher, à l’aide d’un 
instrument, plus grand, mais entièrement semblable au coupe-racine de nos pharmaciens. 
A cette paille hachée, on ajoute, lorsque ces animaux travaillent, du riz non décortiqué. 
Ce grain nous a paru tenir lieu d'avoine avec avantage; les animaux le recherchent et se 
tiennent en très-bon état lorsqu'on leur en donne une quantité suffisante. Dans les régions 
de la Chine où le riz manque, on le remplace par du blé et du maïs. Ces derniers grains 
ne paraissent que plaire médiocrement aux chevaux. Ce n’est qu'exceptionnellement que 
les Indo-Chinois leur donnent des tiges d’arachides, que ces animaux aiment beaucoup. 
Ces tiges sont cependant fort abondantes, et il vaudrait mieux les leur donner que de les 
bruler. Cette légumineuse pourrait remplacer en partie les plantes de la même famille, 
telles que la luzerne, le sainfoin et le trèfle, qui rendent tant de services pour la nour- 
riture des bestiaux en Europe. 

Comme nous l'avons dit, le cheval est rare partout, mais plus particulièrement dans 
le centre et le sud de l’Indo-Chine où les pluies transforment pendant les six mois d’hi- 
vernage la plupart des plaines en marécages, et où, par conséquent, son usage est limité 
à la saison sèche. Il n’y aura intérêt à le multiplier que le jour où les gouvernements fe- 
ront des routes. C’est ainsi qu'en Cochinchine, depuis notre occupation, le nombre des 
chevaux est devenu beaucoup plus considérable et qu'il s’accroitra encore par la nécessité 
que le elimat impose aux Européens de ne circuler qu’à cheval ou en voiture. 

Comme les chevaux indo-chinois sont trop faibles pour porter la plupart des Euro- 
péens, il serait bon de chercher à les forlifier par des croisements. C’est ce qui a déjà été 
essayé depuis l'occupation de la Cochinchine et l’intérèt des éleveurs indigènes accélérera 
ce résultat si désirable. 

Les indigènes, lorsqu'ils doivent se servir longtemps de leurs chevaux, surtout dans 
des chemins caillouteux, ont recours au ferrage. En Chine, presque tous ces animaux sont 
ferrés. Le fer des Indo-Chinois diffère principalement du nôtre en ce qu'il est muni sur 
sa face inférieure d’une rainure au fond de laquelle sont les trous. Cette rainure sert 
à rabattre les clous, qui, à l’inverse des nôtres, sont dépourvus de tête. 

La bride des chevaux est loin d’être identique dans toute l’Indo-Chine, le mors 
offre ce point remarquable, qu'il est souvent articulé en son milieu. Cette articulation 
présente l'inconvénient de permettre aux deux parties du mors d’excorier souvent la com- 
missure des lèvres des chevaux et ne nous à pas paru rendre plus facile leur conduite. 
Quant à la selle, elle offre des différences très-grandes, quoique se rapprochant en général 
beaucoup comme forme des selles dont on fait usage en Europe. Les étriers sont en géné- 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 369 


ral très-petits dans le sud, où les cavaliers sont pieds nus et n°y mettent parfois que le gros 
orteil; en Chine, ces accessoires de la selle sont généralement plus larges, les habitants 
portant de larges et épaisses chaussures. 

Anes. — L’äne ne se trouve qu'en Chine, dans les régions montagneuses où les 
animaux de transport sont indispensables aux échanges commerciaux. Il est du reste assez 
rare dans cette région, et parait moins apprécié pour lui-même, en raison de sa petite 
faille, que parce qu'il permet d'obtenir des mulets. I n’est pas plus soigné que les autres 
animaux, et, sous ce rapport, il est aussi déshérité que le sont les ànes de France. Il n’est 
pas douteux qu’une plus grande race rendrait de grands services dans les montagnes 
élevées de la Chine. Dans le sud, sa multiplication parait moins désirable, les bœufs du 
pays pouvant le remplacer presque partout avec avantage, aussi bien pour porter des far- 
deaux que pour traîner les voitures. Nous ne croyons done pas que les ânes qui ont été 
importés en Cochinchine depuis la conquête, s’y multiplient jamais beaucoup. Néanmoins 
dans les parties hautes où de nombreuses routes ont été construites, ils pourraient devenir 
utiles, comme en Europe, aux femmes et aux enfants qui craignent les chevaux. Si l'usage 
des voitures se répandait, l’ane présenterait pour cet usage un avantage sur le bœuf, qui 
ne peut s’atteler que par paire. 

Mulets. — Dans toutes les contrées de la Chine où l’on trouve à la fois l’âne et le che- 
val, on voit aussi le mulet. Cet animal hybride est souvent plus nombreux que ceux 
dont il dérive. Ce fait s'explique par les qualités qu’il possède comme bête de somme et 
qui le rendent si précieux dans les pays de montagnes. Dans le sud de la Chine, la taille 
des mulets est naturellement petite et en rapport de grandeur avec celle des juments et 
des ànes qui les produisent. La plupart sont moitié moins grands que les nôtres et quel- 
ques-uns sont aussi petits que nos plus petits ânes. Il est étonnant que les Chinois n'aient 
pas encore cherché à améliorer ces animaux, en amenant dans le sud les ânes de grande 
taille que possède le nord de la Chine. 

Depuis l'occupation de la Cochinchine, des mulets y ont été importés d'Égypte. Ils nous 
ont paru mieux s’habituer au climat que les chevaux provenant du même pays. Malgré 
cette plus grande aptitude à vivre dans cette région, nous ne pensons pas qu'ils y devien- 
nent jamais nombreux; notre colonie est un pays de plaines où, au fur et à mesure de la 
construction des routes, les transports par voitures seront toujours préférés aux trans- 
ports à dos d'animaux. 

Éléphants. — L'éléphant sauvage est très-commun dans toutes les parties tropicales 
de l’Indo-Chine. Il est surtout très-abondant dans la partie moyenne où existent de grandes 
plaines herbeuses et d'immenses forêts-clairières entremêlées de petites montagnes. Ils 
vivent en troupeaux. Au Laos, au Cambodge et dans le Siam, on les chasse pour leur ivoire 
ou pour les domestiquer. En Cochinchine, chez les sauvages et dans quelques points 
des pays précédents, on les chasse aussi, mais uniquement pour les détruire; car ils 
causent de grands ravages dans les champs de riz, et détruisent parfois en une nuit la 
récolte de tout un champ. Les villages annamites situés sur la lisière des forêts, ont des 


chasseurs atlitrés, dont l’unique occupation est de suivre les troupeaux afin de tächer de les 
IL. 41 


370 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


détruire. En outre de l’ivoire que recueillent ces chasseurs, ils reçoivent pour chaque 
animal tué une prime qui leur est offerte par cotisation. 

De telles mesures doivent faire penser que l'éléphant n’est peut-être pas aussi utile 
qu'on le croit en Europe. A notre avis, c’est un animal de luxe coûtant vingt fois le prix et 
l'entretien d’un cheval ou d’un bœuf, par lesquels il peut être remplacé dans les trois quarts 
des circonstances. Au moment des grandes pluies seulement, alors que le pays est trans- 
formé en marécages, il présente un avantage réel sur tous les autres animaux pour les 
longs voyages, car il permet de passer partout à travers les marais, les ruisseaux et les 
forêts. Même dans ce cas, ses services ont été exagérés, puisqu'il n’est guère possible à 
plus de deux hommes de se tenir dans la cage qu'on adapte sur son dos. Pour s’y trouver 
bien, il faut y être seul. Nous ajouterons que cet animal ne peut guère parcourir plus de 
six à dix lieues dans la même journée, et encore est-il indispensable qn’on trouve plu- 
sieurs fois de l’eau sur la route, non-seulement pour le faire boire, mais aussi pour le 
faire baigner, ou au moins pour lui jeter huit à dix seaux d’eau sur le corps. Aussi, dans 
les plaines manquant de rivières, les mandarins ont la précaution d'établir de distance 
en distance des caravansérails possédant des puits. L’éléphant est donc, avant tout, la 
monture des gens riches. En dehors de son usage bien connu pour les voyages, la guerre 
ou la chasse, il est assez rarement employé à traîner des fardeaux, et on ne s’en sert 
jamais pour le hersage et le labourage. 

La plupart des éléphants domestiques qu'on voit en Indo-Chine sont des éléphants 
sauvages qu'on à pris en les attirant, à l’aide d’éléphants apprivoisés, dans des parcs con- 
struits exprès dans les régions forestières où ils vivent. Les autres sont nés d’éléphants 
domestiques, qui se reproduisent, quoi qu’on en ait dit, très-facilement dans cette condition. 
Sans avoir pu le vérifier d’une façon certaine, nous croyons que les récits des naturalistes 
sur la pudeur des éléphants sont inexacts et que l’homme peut très-bien assister à leur 
rapprochement. 

La nourriture de prédilection de l’éléphant est le feuillage du bambou. A défaut de 
feuilles de bambou, il mange les feuilles de quelques arbres appartenant à toutes les fa- 
milles. Les graminées à graines riches en principes nutritifs, et en particulier les céréales, 
lui plaisent beaucoup. 

L'éléphant est un animal précieux à cause de l’ivoire qu'il produit. Tous sont loin ce- 
pendant de posséder des défenses, surtout ceux qui sont eaptifs; souvent ils les brisent, les 
déplantent, et les perdent; d'autres fois, elles deviennent malades et présentent des bos- 
selures fort originales. En résumé, la moitié seulement des éléphants a des défenses, et dans 
cette moilié, on en trouve untrès-petit nombre en possédant de vraiment belles et longues de 
1°,50 à 2 mètres. Les défenses de l'éléphantne sont pas les seules parties utiles de son corps. 
La peau, découpée en lanières séchées ensuite au soleil, est emportée en Chine pour fabri- 
quer ces mets gélalineux que recherchent tant les Chinois. La plupart de ses os sont aussi 
recueillis pour être expédiés dans le même pays, où l’on s’en sert pour différents usages, 
en particulier pour fabriquer des boîtes de fantaisie de toute espèce. Sa chair est peu re- 
cherchée, ses fibres musculaires étant trop grosses. La trompe est excellente, surtout 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. al 


cuite sous la cendre; elle n’est pas moins bonne qu’une langue de bœuf, à laquelle elle 
ressemble à s'y méprendre comme texture. 

Moutons. — Nous n’avons rencontré des moutons que sur les hauts plateaux du 
Yun-nan, à une altitude de 1,800 mètres environ, c’est-à-dire dans une région jouissant à 
la fois d’un climat see et tempéré. Plus au sud, les indigènes ne les connaissent même pas. 
La chaleur des régions tropicales n’est pas sans doute la seule cause qui amène la dispa- 
rition totale de ces animaux. Il faut l’attribuer aussi : 1° à l’extrème humidité de l’hiver- 
nage qui convient très-peu, comme on sait, aux moutons ; 2° à la difficulté de les préserver 
des bêtes féroces, et principalement du tigre ; 3° à l'existence de plantes qui leur sont nui- 
sibles et en particulier de l’andropogon acicularis, qui provoque souvent des affections de 
la peau, amenant la mort consécutivement. Ces causes ne constitueraient pas d’ailleurs des 
obstacles insurmontables à l'introduction du mouton en Indo-Chine, le jour où l’augmen- 
tation de la population et le besoin d'accroître la production de viande en feraient recon- 
naître l'utilité. Le tigre est destiné à disparaître peu à peu devant le défrichement du pays. 
ILexiste au centre de l'Afrique des races qui supportent très-bien l'humidité. Enfin, la race 
de moutons à poils courts et droits, comme il y en a au Sénégal et dans plusieurs autres 
pays, ne souffre pas de l’andropogon, plante que la nature vivace et rampante de ses racines 
rend malheureusement impossible à détruire. Dans toutes les régions où elle existe, il ne 
faut donc introduire que des races à laine courte. L'expérience en a déjà été faite avec 
succès. Depuis l’occupation de la Cochinchine, des moutons d’Aden, à poil court et à 
grosse queue, y ont vécu plusieurs années et s’y sont multipliés sans paraître souffrir de 
cette plante malfaisante. 

11 existe deux races de moutons dans le Yun-nan, peu nombreuses l’une et l’autre. 
La première, très-rare, a la laine fine et frisée, presque semblable à celle des moutons 
mérinos. La deuxième a la laine droite et courte, assez semblable au poil de la chèvre, 
mais plus fine. Les deux races sont fortes, surtout la deuxième, et dépassent souvent d’un 
tiers en dimension nos moutons d'Europe. Nous n'avons jamais vu de races plus robustes. 
Elles ont toutes deux le nez busqué et sont généralement de couleur blanche. On rencontre 
cependant des robes noires, et très-rarement des robes tachetées de rouge, ce qui les fait 
ressembler à des chiens épagneuls. La chair de ces deux races est excellente et peut ri= 
valiser avec celle de nos meilleurs moutons. La laine des moutons de Chine n’est généra- 
lement pas tissée pour faire des étoffes ; on la laisse attachée aux peaux que l’on prépare 
pour faire des vêtements fourrés dont l’usage est très-répandu en Chine pendant l'hiver. 
Dans quelques rares endroits seulement, nous avons trouvé des sauvages sachant s’en servir 
pour tricoter. Ce fait est si rare dans l’Indo-Chine que nous tenons à le faire remarquer; 
il montre jusqu’à l'évidence que ces sauvages ont dù venir de l’ouest, ou qu'ils tiennent 
cette industrie des peuples occidentaux, car elle est totalement inconnue des Chinois. Les 
musulmans, en venant s'établir en Chine, sont peut-être ceux qui ont appris aux sauvages 
à tricoter, en même temps qu'ils ont dù introduire les moutons, pour éviter lusage 
de la chair du pore. Aujourd’hui encore, presque tous les troupeaux de moutons appar- 
tiennent aux musulmans. Ces troupeaux sont gardés par des bergers, avec des chiens du 


372 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 

pays, presque à la façon des nôtres. Toutefois, nous devons ajouter que leurs chiens leur 
sont de peu d'utilité, car ils sont très-peu intelligents et très-peu dociles. L'introduction de 
quelques bons chiens de berger serait un service à leur rendre ; aussi le signalons-nous 
aux voyageurs qui s’y rendront après nous. Les bergers musulmans placent, comme les 
nôtres, des sonnettes au cou de quelques bêtes de leur troupeau afin d’en rendre la garde 
plus facile le soir. Ils pratiquent également, comme les nôtres, l'opération de la eastra- 
tion sur les jeunes béliers. 

Chèvres. — Les chèvres sont peu communes en Cochinchine, très-rares au Laos, mais 
assez abondantes dans tout le sud de la Chine. La race qu’on trouve dans toute l'étendue 
du pays, sans être identique partout, présente pourtant peu de différences et ressemble as- 
sez à la race commune de France. Comme cette dernière, elle a les poils assez courts et 
de couleur généralement noire. Le pis est peu développé : les indigènes, ne faisant presque 
jamais usage de lait, n’ont pas cherché à créer des races laitières. Dans tout le sud du 
bassin du Cambodge, la chèvre est un animal de luxe ou de curiosité et les indi- 

gènes n’en apprécient que peu la chair. Dans le nord, au contraire, c’est presque exclu- 
sivement pour sa chair que les mahométans chinois l’élèvent. Seuls, les sauvages de race 
caucasique les traient et font des fromages avec leur lait. Partout, dans le bassin du 
Mékong, les chèvres pourraient devenir très-abondantes, sans que pour cela la végétation 
arborescente en souffrit sérieusement, comme cela s’est observé dans certaines iles, parti 
culièrement à l'ile de Sainte-Hélène, où presque tous les arbustes ont été tués par elles. 
En Indo-Chine, la végétation est si puissante et les arbustes croissent avec tant de vigueur, 
que ces animaux seraient utiles dans bien des endroits en détruisant les broussailles. 

A l'inverse des moutons, les chèvres supportent frès-aisément les diverses conditions 
chimatériques de l’Indo-Chine; on les trouve aussi vigoureuses au milieu des rizières 
marécageuses de la Basse-Cochinchine que sur les montagnes sèches du Yun-nan. Le 
jour donc où la chair de ces animaux, plus saine sous ces climats que celle des moutons, 
puisqu'elle est toujours moins grasse, sera plus appréciée, 1l n’est pas douteux qu'ils ne 
s’y multiplient rapidement. 

Dans les régions montagneuses de la Chine on réunit les chèvres en troupeaux souvent 
mélangés de moutons pour les mener dans les champs. Les Indo-Chinois pratiquent la 
castration sur la plupart des jeunes boues et n’en réservent qu'un petit nombre pour la 
reproduction. Pas plus que le mouton, la chèvre n’est indigène en Indo-Chine. Dans le 
nord, ce sont sans doute les musulmans qui l’ont amenée ou du moins très-multipliée ; 
dans le sud, elle a dü arriver par les voyageurs. 

Poules. — Les poules existent à l’état sauvage dans toutes les forêts du sud de l’Indo= 
Chine. Dans l'extrême sud surtout;elles sonttrès-communes, particulièrement dans les forêts 
entrecoupées de champs de riz où elles trouvent plus facilement leur nourriture. De même 
que tous les autres animaux sauvages, leur plumage et leur taille sont uniformes. La 
poule est gris-lacheté, et le coq est rouge avec une belle queue bien arquée et une grande 
crête simple. Ces poules sauvages différent peu des nôtres par la taille et la grosseur. 
Les œufs pourtant sont presque moitié moins gros que ceux de la poule domestique € 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 373 


sont toujours de couleur jaunätre. Ces gallinacés sauvages sont souvent représentés dans 
les basses-cours indo-chinoises, car il est très-fréquent de voir les coqs sauvages venir se 
mêler pour quelques instants aux poules domestiques. On reconnait les métis à leur 
plumage gris-tacheté et à leurs œufs qui sont plus petits et plus jaunes. Il y aurait 
certainement lieu d'étudier la domestication de ces poules sauvages. Sans avoir été 
complétement à même de faire cette étude, nous inclinons à penser que la domestication 
de ces animaux se fait d'emblée. 

En temps ordinaire, les poules sauvages se réunissent et vivent en petites bandes; à 
l’époque des couvées, elles se séparent pour aller pondre par terre dans les broussailles. 
Leurs mœurs sont à peu près identiques à celles des perdrix, dont elles sont voisines 
d’ailleurs au point de vue zoologique. Quant à leur chair, elle est excellente. 

A côté de la race commune domestique, se trouvent souvent des races très-différentes. 
Nous mentionnerons en premier lieu la grande race dite cochinchinoise, qui n’est pas 
très-commune, et qui n’est guère élevée que pour obtenir des coqs de combat. Sa chair 
n’est pas très-délicate et les œufs ne sont ni nombreux ni en relation de grosseur avec la 
taille des poules. Il y a encore une autre race, très-remarquable par la couleur noire 
de ses os, de sa peau et de son plumage qui est d’un noir de corbeau. La taille de cette 
race curieuse est assez semblable à celle de la poule commune, mais sa chair, qui est 
bien moins délicate au palais, plait également très-peu aux yeux. Il existe enfin une qua- 
trième race très-pelite ayant des plumes jusqu’à la naissance des phalanges. Cette race, 
qu'on trouve souvent en Europe, n’est élevée que par curiosité. 

Le chaponnage est connu et pratiqué par tous les Indo-Chinois. Nous devons même 
dire que nulle part nous n’avons mangé d’aussi beaux et d'aussi bons chapons. Dans 
le Yun-nan surtout, nous avons vu de ces animaux atteignant la grosseur d’une dinde 
et ayant une chair aussi bonne. 

Les poules sont également abondantes dans tout le bassin du Mékong et leur présence 
partout est d’une bien grande ressource pour les voyageurs. Le plus souvent, il serait 
impossible de se procurer d’autre viande. Quoique les poules soient dans leur pays d’o- 
rigine, elles sont sujettes à des épizooties, et assez souvent, en Cochinchine, on voit des 
basses-cours dépeuplées en quelques jours. 

Comme en Europe, les Indo-Chinois construisent des poulaillers fermés, où les 
poules se perchent la nuit. Cet abri leur est indispensable contre les orages, le tigre qui, à 
défaut d'autre gibier, les mange quelquefois, et le serpent boa, heureusement très-rare, qui 
détruit souvent en une nuit toutes les poules d’un poulailler. 

En raison de la constance des hautes températures, les poules pondent et couvent 
presque toute l’année. Nous devons dire cependant qu’elles pondent et couvent de préfé- 
rence à la fin de la saison sèche , de facon que les petits poussins éclosent avee les pre- 
mières pluies et trouvent facilement les insectes dont ils sont très-friands. Les poules sau- 
vages ne couvent guère qu'à cette époque, c’est-à-dire en avril, presque au même moment 
que nos poules d'Europe. : 

Cünards. — Après la poule, c’est, comme en Europe, le canard qui est l'oiseau de 


374 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


basse-cour le plus répandu en Indo-Chine. Cela ne doit pas surprendre, puisque lIndo- 
Chine est sillonnée de fleuves et de rivières, et que la principale culture, le riz, se fait dans 
des champs inondés. Dans les parties alluvionnaires surtout, comme la Basse-Cochinchine 
et les plaines de la Chine, les canards sont très-nombreux. Chaque cultivateur en possède 
une petile bande, qui vit dans les rizières et les marécages entourant sa maison. En 
Chine, on trouve des gens qui en élèvent des troupeaux de plusieurs milliers, qu'ils con- 
duisent de rizière en rizière, et même de village en village, à l’aide de chiens et de 
longues perches. Ces immenses bandes purgent en quelques instants les plus grandes 
rizières de tous les poissons et insectes qu’elles renferment. Cette industrie assez pé- 
nible, puisqu'elle exige que les gardiens restent constamment avec les canards et cam- 
pent la nuit avec eux, est très-lucrative, et pourrait être imitée ailleurs avec avantage, 
particulièrement en Basse-Cochinchine, dans les rizières éloignées des maisons où les 
canards des fermes et des villages ne vont jamais. Les canards domestiques de l’Indo- 
Chine ne diffèrent en aucune façon de notre race commune; ils présentent comme elle de 
grandes variétés dans leur plumage; leur chair est excellente et même supérieure, 
croyons-nous, à celle des nôtres. L'époque des couvées, au lieu d’être subordonnée au 
début du printemps comme dans les pays froids, est répartie presque également sur toute 
l’année; ces animaux choisissent cependant de préférence le début des pluies, c’est-à-dire 
l'époque où pullulent en grand nombre les poissons et les insectes. 

Le canard existe-t-il à l'état indigène en Indo-Chine? On peut répondre négativement 
pour le sud de cette région; mais dans le nord, sur les lacs des hautes montagnes, il 
pourrait bien être indigène, car on y voit de nombreuses espèces de canards dont quel- 
ques-unes ont un plumage des plus remarquables. Nous avons remarqué que le canard 
domestique et quelques autres oiseaux aquatiques, tels que les sarcelles, s’abstiennent de 
nager sur les eaux qui renferment des crocodiles. 

Oies. — Les oies ne sont pas très-communes en Indo-Chine; on en trouve seulement 
dans le sud de la Basse-Cochinchine et dans le nord en Chine, c’est-à-dire dans les deux 
portions du Mékong où l’aisance des habitants est la plus grande. Dans la zone intermé- 
diaire, au Laos, nous n’en avons pas observé. La rareté de ces utiles animaux ne s’explique 
guère, car ils sont tout aussi faciles à élever que les canards et non moins commodes à 
conduire en troupeaux dans les champs. 

L'oie qu'on rencontre en Cochinchine nous a paru entiérement semblable à l'espèce 
commune de France. Celle qu’on trouve en Chine est plus grosse et présente une forte 
callosité noire au-dessus et à la naissance du bec. La chair des oïes de l’Indo-Chine est 
(out aussi grasse que celle des oies d'Europe; aussi les Européens doivent-ils s'abstenir 
d'en manger souvent, afin d'éviter la surcharge biliaïre qu’amènent les corps gras, et qui 
produit à la longue la plupart des hypérémies du foie qu’on observe sous les tropiques. 

Dindons. — Le dindon a été récemment importé en Cochinchine par les Européens, 
et on ne parvient que difficilement à l’élever dans les parties alluvionnaires. Dans les 
parties élevées avoisinant les forêts, où on trouve facilement des œufs de termites à 
donner aux jeunes dindons, leur élevage est assez facile. Cette nourriture est indispen- 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. 375 


sable à leur développement. En raison de cette nécessité et des soins qu'il réclame, cet 
oiseau sera longtemps en Indo-Chine un oiseau de luxe. 

Paons. — Quoique le paon n'existe guère en Indo-Chine qu’à l’élat sauvage, nous 
croyons utile d’en dire quelques mots. L'espèce particulière qu’on y trouve se distingue du 
paon commun par la couleur rousse des plumes de la partie inférieure des ailes. Elle 
est très-abondante dans les régions forestières du sud, en Cochinchine, au Cambodge et 
dans le Laos inférieur. Au-dessus de ces pays, à partir du 19° degré, elle devient très-rare 
et disparait vers le 20°. Cette belle espèce, plus grosse que nos dindons, constitue le 
meilleur gibier de ces pays et peut-être du monde. Sa chair est supérieure à celle de la 
dinde à laquelle elle ressemble. Les paons indo-chinois vivent en bandes et se tiennent 
le plus souvent dans les forêts avoisinant les champs de riz où ils viennent manger les 
grains le matin et le soir. Ils pondent à la fin de la saison sèche, c’est-à-dire en avril et 
en mars, de façon que léclosion arrive avec les pluies au moment où les insectes com- 
mencent à pulluler. Les couvées se tiennent principalement dans les bois où elles trouvent 
constamment des fourmis blanches ou termites, dont elles paraissent, ainsi que les din- 
dons et les faisans, avoir un besoin essentiel pour se développer. Ce n’est que lorsque les 
couvées ont grandi qu'elles s’aventurent dans les champs cultivés. Toutes les tentatives 
faites jusqu’à présent pour obtenir que le paon de l’Indo-Chine se multiplie dans les 
basses-cours ont été infructueuses. On arrive facilement à élever les jeunes paons pris 
dans les forêts, mais jamais les paonnes ne pondent une fois adultes. 

Faisans.— Comme en Europe toutes les espèces de faisans qu’ontrouve en Indo-Chine 
vivent à l’état sauvage dans les forêts, et nous n’en parlerons qu’en raison de l'intérêt 
considérable qu’elles présentent comme gibiers de pare en Europe. 

[n’y a, dans toute la partie tropicale de l’Indo-Chine, qu'un seul faisan, que les Anna- 
mites nomment Ga-loi. Son plumage bleu-clair-tacheté en fait un des plus jolis oiseaux du 
monde. Une deuxième espèce de faisans, tout aussi rare que la première, ne se trouve 
que dans les montagnes du Laos supérieur. Comme la précédente, elle s'élève très-bien 
dans les basses-cours, lorsqu'on la prend jeune, mais elle ne s’y reproduit pas. Son plu- 
mage est blanc, tacheté uniformément de noir. Ce n’est qu'au-dessus du tropique, dans 
les régions brumeuses, que les faisans deviennent vraiment nombreux et que les espèces 
se multiplient. Chaque province, outre plusieurs espèces communes à toutes les autres, 
possède la sienne propre. A côté de lespèce commune, introduite en Europe depuis 
longtemps, on en trouve d’autres aussi belles, parmi lesquelles il faut citer le magnifique 
oiseau connu sous le nom de poule du Yun-nan ou faisan de lady Amherst. 

Les faisans ne causent en Chine aucun dégât sérieux dans les champs cultivés, et les 
indigènes ne les chassent que pour leur chair. 

Pigeons. — Le dernier des oiseaux de basse-cour dont nous avons à parler est le 
pigeon; on ne le rencontre guère qu'en Cochinchine et en Chine; au Cambodge et au 
Laos, il est d’une rareté extrême. 11 présente beaucoup de variétés dont la plus commune 
est la bleue, appelée vulgairement biset en France. En général, les races de pigeons indo- 
chinoises sont plus petites que les nôtres et ont une chair moins délicate. Dans toutes les 


370 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


régions où nous les avons observées, elles nous ont paru supporter également bien le 
climat et sy multiplier avec la même rapidité. Dans le sud, où la chaleur est toujours 
élevée, leur multiplication est incessante ; elle subit un ralentissement au commence- 
ment de la saison sèche; dans le nord, elle cesse en hiver. Comme en Europe, les Indo- 
Chinois construisent des pigeonniers élevés, munis de trous extérieurs et de comparti- 
ments intérieurs. Afin de les préserver des rats, plus nombreux encore sous ces climats que 
sous les nôtres, et des serpents, ils dressent ces pigeonniers sur quatre colonnes en bois, 
hautes de plusieurs mètres. En Chine, où 1l existe des oiseaux de proie en assez grand 
nombre, les habitants attachent à la queue des pigeons un petit appareil en bambou creux, 
muni d'une fente, qui produit un sifflement aigu pendant tout le temps qu’ils volent, et 
qui parait suffire pour éloigner les oiseaux de proie. Le sifflement de cet appareil est 
désagréable et s'entend de fort loin. 

Lapins.— Le lapin domestique n’est pas inconnu dans le sud de l’Indo-Chine, mais il 
est si rare qu'il peut être considéré comme n’y existant pas. En Chine, quoique moins 
introuvable, il est encore une rareté. La race à laquelle il appartient est sensiblement plus 
petite que celle d'Europe. Elle est généralement blanche. 

Quant au lapin de garenne, nous ne l'avons trouvé nulle part, et, contrairement à ce 
qu'on pourrait croire, cela est à regretter. Avec l’extrème fécondité que présente cet ani- 
mal et le peu d’inconvénients qu'il offrirait, sous ces climats, pour les récoltes et les bois, 
il serait d’une grande ressouree pour les habitants par sa chair sinon délicate, du moins 
très-saine. 

Abeilles. — Les abeilles se rencontrent à l’état sauvage dans toute l’Indo-Chine, sur- 
tout dans le Laos supérieur. Dans ce dernier pays et en Chine, les habitants recueillent 
les essaims et les placent dans des ruches. Ces ruches se composent d’un troncon d’arbre 
évidé intérieurement, fermé à ses extrémités et que l’on suspend contre les maisons, à 
l'abri de la pluie. L’abeille de l’Indo-Chine nous a paru plus petite que celle de nos pays. 
A l’état sauvage, elle vit surtout dans les montagnes où elle établit ses rayons dans les 
trous des rochers. C’est vers les mois de juin et de juillet que les essaims s’envolent et que 
les habitants vont recueillir la cire qui a une très-grande valeur dans ces pays, en raison 
de la grande quantité de cierges qu’on brüle dans les pagodes en l'honneur de Bouddha. 
Les indigènes recueillent assez souvent le miel en asphyxiant les essaims ; mais cetle pra- 
tique n’a lieu ordinairement qu'à l'égard des abeilles placées dans des ruches. La cire est 
aussi belle que celle qu'on obtient en Europe ; les indigènes la retirent en chauffant les 
rayons dans des chaudières et en les pressant dans des sacs. Dans le sud de l’Indo-Chine, 
on emploie cette cire sans la décolorer; dans le nord, particulièrement en Chine, on la 
blanchit en l’exposant à la rosée, comme cela se fait chez nous. 

Le miel de ces abeilles est loin d’être aussi bon que celui de nos pays; outre qu'il est 
souvent mal purifié, il retient des fleurs dont il à été formé une odeur et une saveur 
trop fortes. En raison de la chaleur du climat, le miel est presque toujours liquide et sa 
couleur est ordinairement jaune foncé, semblable à eelle du miel commun de Bretagne. 
Parfois les habitants font fermenter leur miel pour fabriquer de l’'hydromel, mais cette 


BESTIAUX ET ANIMAUX DOMESTIQUES. | DM 


pratique est très-rare. Il y a quelque temps, les abeilles étaient beaucoup plus communes 
qu'aujourd'hui dans le Yun-nan. Leur diminution est attribuée par les indigènes à l’exten- 
sion de la culture du pavot à opium. Ils prétendent que, à la suite de la floraison des pavots, 
les abeilles périssent en grand nombre, faute de ne pouvoir s’habituer à une autre nour- 
riture. Sans vouloir nier l'influence de cette privation, nous croyons devoir attribuer aussi 
cette mortalité au déboisement qui a produit la dessiceation du sol et diminué la quantité de 
fleurs que ces animaux avaient précédemment à butiner. Quelle qu’en soit la cause, le fait 
n’en est pas moins certain ; aussi, depuis quelques années, la cire a-t-elle acquis un prix 
exorbitant. Si, comme en Europe, les Chinois cultivaient des légumineuses fourragères 
telles que la luzerne-et les trèfles, qui sont si riches en fleurs, nous pensons que le nombre 
des abeilles pourrait s’accroître de nouveau. 

Animaux divers. — A la suite des animaux domestiques, nous tenons à dire quelques 
mots des animaux sauvages présentant, soit des avantages, soit des inconvénients pour 
l'agriculture. 

En Indo-Chine, comme en Europe, les rats font de sérieux ravages dans les greniers; 
on est obligé fort souvent de leur donner la chasse. Par contre, la souris est très-rare et le 
mulot presque absent des champs. La taupe n'existe pas. L'absence de ces ani- 
maux nuisibles est largement compensée par la présence des courtilières et d’une foule 
d’autres insectes,avant parfois des larves aussi grosses et aussi malfaisantes pour les plantes 
que celles des hannetons. Les fourmis surtout, en nombre prodigieux, sont un fléau dans 
les jardins, et les horticulteurs doivent prendre une foule de précautions pour les empêcher 
d’emporter les graines qu'ils viennent de semer et même celles qui sont déjà entrées en 
germination. Rien n’égale la persévérance de ces petits animaux à franchir les obstacles 
qu'on leur oppose. Si on élève un talus avec des cendres, ou toute autre matière désagréable 
pour eux, ils creusent une galerie au-dessous. Si on enterre profondément les graines, 
ils creusent des réseaux de galeries innombrables qui leur permettent en une nuit de dé- 
pouiller toute une planche de semis. L’emploi de caisses, placées sur quatre pieux plongés 
dans des vases toujours pleins d’eau, peut seul préserver les semis de graines précieuses. 
Une seule espèce de fourmis, excessivement commune sur tous les arbres de l’Indo-Chine 
et connue sous le nom de fourmi rouge, rend des services. Cette espèce, transportée sur 
les arbres fruitiers et en particulier sur les orangers au moment de la floraison, permet 
aux fruits de se nouer et de se développer sans accident, en mangeant les chenilles au 
fur et à mesure qu'elles se montrent. Les fourmis rouges sont d’ailleurs excessivement 
désagréables par leurs piqures et ne laissent pas que d’incommoder sérieusement celui 
qui veut se livrer à des recherches botaniques. Les termites ou fourmis blanches sont 
d’une abondance extrême en Indo-Chine jusqu'au 24° degré de latitude. Si elles sont peu 
nuisibles aux récoltes, en revanche, elles sont un fléau pour les maisons en bois qu'elles 
minent et qu'elles détruisent souvent en quelques jours en dévorant l’intérieur des co= 
lonnes et des cloisons où elles se construisent des galeries souterraines qui leur permettent 
de circuler à l'abri de la lumière. 


Les crapauds sont très-nombreux en Indo-Chine et leur goût pour les insectes nui- 
IL. 48 


378 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


sibles les rend très-précieux. Ils détruisent, non-seulement les termites lorsque par 
hasard leurs galeries sont ouvertes, mais encore toutes les autres espèces de fourmis et 
les limaces qui sont assez communes. Les grenouilles sont très-communes et d'espèces 
très-diverses; elles n’offrent pas d’inconvénients au point de vue agricole et leur chair 
est un aliment très-apprécié de tous ces peuples. 

Les vers de terre sont nombreux en Indo-Chine; ils sont des plus nuisibles, en remuant 
constamment la terre des jardins et des prairies, et en formant à la surface du sol des tas 
de terre. 

Le moineau commun, qu’on trouve en Cochinchine, au Cambodge et en Chine, c’est- 
à-dire dans les régions où les habitants sont nombreux, a les mêmes inconvénients et les 
mêmes avantages qu’en Europe. Partout ailleurs, comme au Laos et dans les forêts, 1l 
n'existe pas; il attend que la population soit plus dense pour arriver. S'il s'attaque 
aux riz murs, il détruit aussi beaucoup d'insectes nuisibles. Les perruches sont très- 
nombreuses dans le sud de lIndo-Chine et s’attaquent surtout au riz. Comme oiseaux 
utiles, nous citerons le corbeau, les merles d'espèces si variées et les nombreux oiseaux 
aquatiques qui dévorent les vers et les innombrables insectes des rizières et des marécages. 

La pie, l’alouette, ne se rencontrent qu'en Chine sur les hauts plateaux où rè- 
gne un climat tempéré; l’une et l’autre sont sans avantages ni inconvénients pour lagri- 
culture. 


$ 6. — Paturages, prairies et plantes fourragéres. 


Les päturages restant toujours verts, tels qu'ils existent dans les pays constamment bru- 
meux, ne sauraient exister en Indo-Chine, car, à l'humidité excessive de l’hivernage qui 
donne tant de vigueur à la végétation herbacée, succède une période de plusieurs mois de 
sécheresse qui l’arrèête bien plus complétement que ne le fait le froid sous nos climats. On 
ne peut done, sauf sur quelques rares points de la Chine, trouver en Indo-Chine ces pà- 
turages permanents, dans lesquels se font nos élevages de bestiaux. En revanche, les patu- 
rages temporaires donnant de l'herbe verte pendant six à sept mois, y sont très-nombreux 
au moment des pluies. Nous devons toutefois ajouter que ces pälurages temporaires peu- 
vent, jusqu’à un certain point, être considérés comme permanents, car, dès que les pluies 
cessent, les herbes se sèchent, mais sans se pourrir sur pied, comme cela aurait nécessai- 
rement lieu sous nos climats, de telle sorte que les bestiaux, à défaut d'herbes vertes, se 
contentent de ces herbes sèches et se maintiennent en assez bon état. Les prairies ou pätu- 
rages naturels de l’Indo-Chine, se divisent en quatre classes distinctes : 

1° Les pâturages ou prairies situés dans les excavations humides des plaines élevées 
et entourées de forêts, dont le nombre et l'étendue sont restreints et qui sont surtout abon- 
dants dans le sud de la vallée du Mékong, particulièrement en Cochinchine , 

2° Les päturages ou prairies des forêts-clairières des bords du Cambodge et de ses 
grands affluents, qui sont souvent très-étendus, et qui, quoique parsemés de grands arbres, 
sopt très-riches en herbes. Ces pâturages disparaitront avec laccroissement de la popu- 


PATURAGES, PRAIRIES ET PLANTES FOURRAGÈRES. 379 


lation, car c’est surtout sur eux, en raison de la richesse de leur sol alluvionnaire, que se 
fixeront les habitants, avant d’envahir les éminences où la terre est généralement moins 
fertile. Les graminées qui croissent dans ces prairies sont d’ailleurs trop fortes et à feuilles 
trop larges pour être recherchées des bestiaux ; 

3° Les pâturages des forêts-clairières situés sur les collines et les plateaux sablonneux 
du sud, dont le nombre et l’étendue sont considérables, particulièrement au Cambodge 
et au Laos. Ces derniers pâturages, quoique parsemés d'arbres nombreux, sont cependant 
fort riches et nous paraissent appelés à rendre les plus grands services pour les élevages, 
comme cela du reste a déjà lieu au Cambodge. Les arbres qui les couvrent appartiennent 
presque exclusivement aux genres Shorea, Dipterocarpus, Terminalia, Randia, Xylia et 
Blackwellia, qui, réunis ensemble, semblent s'opposer à la croissance des broussailles au 
tour d’eux dans un certain périmètre. Les herbes qui couvrent ces plaines sont ordinaire- 
ment fines, variées, très-appréciées des bestiaux eten même temps très-propres à faire 
des foins. 

4° En dernier lieu viennent les paturages des montagnes, qu’on ne commence à rencon- 
trer qu’en s’approchant du tropique, c’est-à-dire dans le Laos supérieur et en Chine où ils 
sont les seuls paturages existant. Leur étendue est toujours restreinte et leur surface par- 
semée d’arbustes ou d'arbres dont la plupart appartiennent à la famille des cupulifères. Les 
herbes qu’on y trouve sont ordinairement excellentes et assez variées; dans les endroits 
humides, elles sont grandes avec des feuilles larges; dans les régions sèches, elles sont 
fines et très-courtes. 

Comme partout, les graminées dominent dans ces quatre classes de prairies, mais 
plus cependant que sous les climats tempérés. Un certain nombre de ces graminées 
deviennent très-aromatiques après la fanaison, au moins autant que l’anthozanthum odo- 
ratum ou flouve des pays tempérés; elles exhalent, comme cette dernière plante, une odeur 
d'acide benzoïque très-prononcée qu’elles communiquent aux foins. Dans ces prairies, 
on trouve aussi quelques légumineuses appartenant aux genres Desmodium et Crotalaria, 
quelques synanthérées du genre Pluchea et beaucoup d’euphorbiacées; mais ces diverses 
plantes sont en nombre insuffisant pour constituer des foins aussi variés que les nôtres. 
Dans les prairies des forêts-clairières des bords des fleuves, on trouve, en outre des gra- 
minées, un nombre exagéré de grandes cypéracées à feuilles larges, dures et coupantes. 

Si toutes les prairies naturelles de l’Indo-Chine sont inférieures à celles des climats tem- 
pérés sous le rapportde la qualité des herbes et à cause de leur caractère temporaire, elles 
sont en revanche beaucoup plus productives. En raison de la vigueur extrème de la végé- 
tation herbacée sous les tropiques à l’époque de l’hivernage, on peut couper les foins toutes 
les six semaines ou au moins tous les deux mois. Il est même préférable de faire des coupes 
très-rapprochées, si on veut avoir des foins tendres, ne contenant que très-peu de tiges 
ligneuses. Des fauchages rapprochés offrent encore l'avantage de s'opposer à la floraison 
ou du moins à la fructification complète des herbes des prairies où on les pratique, de faire 
disparaitre toutes les plantes annuelles et bisannuelles qui ne se multiplient que par graines, 
et de ne laisser subsister que les plantes vivaces, bien préférables pour la plupart comme 


380 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


plantes fourragères. Ce système, mis en pratique pendant deux à trois ans dans la même 
prairie, l’améliore done beaucoup. 

Dans les lieux bas et humides, où les herbes deviennent très-grandes en peu de 
temps, on peut faire toutes les six’semaines des fauchages ; dans les lieux élevés et secs, 
où les herbes sont plus petites et croissent moins vite, ils ne sont possibles que tous les 
deux mois. 

Quelle que soit la zone de l’Indo-Chine où existent les prairies, la fanaison est partout 
très-facile, et l’on parvient sans trop de peine, malgré les fortes pluies de l’hivernage, à 
faire sécher les herbes, pourvu que l’on aitle soin de profiter des quelques heures de soleil 
qui précèdent presque toujours l’orage quotidien. Il est toutefois nécessaire de réunir 
ces herbes en meules ou mieux de les placer sous des abris en bambou, couverts avec des 
feuilles. 

Les Européens sont les seuls qui, en Indo-Chine, font parfois faner des foins pour 
nourrir leurs chevaux. 

Quoique sous les tropiques la récolte des foins soit bien moins essentielle que sous nos 
climats où règne un hiver pendant lequel les bestiaux ne trouvent presque plus de quoi 
vivre dans les champs, elle serait cependant très-utile pour obtenir des bestiaux leur 
maximum de travail. On pourrait économiser ainsi le temps qu'il faut pour les conduire 
aux champs et celui qu'ils mettent à chercher et à païtre leur nourriture; ce qui équivaut 
environ à la moitié de la journée. Cette perte de temps oblige les cultivateurs, au mo- 
ment où on laboure les rizières, à posséder un nombre double de buffles. 

Les prairies des plateaux du sud, qui sont si communes au Cambodge, se placent en 
première ligne, et celles des montagnes du nord de l’Indo-Chine en deuxième ligne, pour 
les élevages des bestiaux. Dans les unes et les autres, des élevages considérables pourraient 
avoir lieu. Déjà au Cambodge il en existe quelques-uns fournissant dès à présent les bœufs 
nécessaires aux usages des habitants et de la colonie française. Il faut espérer que plus 
tard, ces prairies et ces élevages se multiplieront beaucoup. Les habitants, sollicités par 
l’appät du gain, prendront sans doute plus de soin de leurs bestiaux, et conserveront les 
vaches exclusivement pour la reproduction, au lieu de les vendre pour la boucherie. 

Quant aux prairies du nord de lIndo-Chine, elles sont en ce moment presque sans 
aucune utilité. Nous avons été étonnés du peu de parti qu’en tirent les Chinois, même 
dans les régions où le trop-plein de la population aurait dû amener leur utilisation. 
Nous avons déjà appelé l'attention sur la quantité de laitage et de viande qu’elles pour- 
raient fournir; c’est à peu près d’ailleurs, le seul moyen d'utiliser les sommets de ces 
montagnes, dont le sol est presque toujours trop rocailleux ou trop see pour être dé- 
friché et planté de céréales. 

Serait-il utile d'introduire en Indo-Chine quelques-unes des plantes fourragères 
qu’on trouve en Europe? Pour le sud nous n’oserions le conseiller : la plupart de nos 
plantes ne pourraient y croître et les plantes indigènes sont assez nombreuses et assez 
bonnes. Nous signalons en particulier plusieurs espèces à tiges dressées du genre Desmo- 
dium, qu'on trouve si abondamment sous ces climats. Pour le nord de lIndo-Chine la 


ENGRAIS ET AMENDEMENTS. 381 


réponse ne saurait être douteuse et l'introduction de la luzerne nous parait appelée à 
rendre de très-grands services, le jour où les indigènes se décideront à multiplier leurs 
bestiaux. Sur les flancs des montagnes, à la hauteur où la culture des céréales devient im- 
possible, cette plante croitrait sans doute avec vigueur. Ce qui pour nous rend le succès 
de la luzerne certain dans le nord de l’Indo-Chine, c’est la présence dans toutes les cul- 
tures de l'espèce de luzerne appelée lupuline (Wedicago lupulina, L.). Quoique cette der- 
nière plante n’y soit pas indigène, elle s’est cependant naturalisée partout et constitue une 
mauvaise herbe pour les rizières des régions élevées. 

Les graminées de l’Indo-Chine qu'on trouve le plus communément dans les prairies 
appartiennent aux genres suivants : Azdropogon, — Eriochloa, — Paspalum, — Eleu- 
sine, — Cynodon, — Rottboellia, — Cenchrus, — Isachne, — Poa, — Oryza, — 
Anthistiria, — Panicum, — Dimeria, — Coix, — Arundo, — Imperata. — Ce dernier 
genre domine partout dans les prairies du sud, et contribue beaucoup à les rendre mau- 
vaises en éliminant, par sa grande vigueur, les autres graminées généralement moins ro- 


bustes que lui. 


$ 7. — Engrais et amendements. 


La fabrication et l’utilisation des engrais sont en Indo-Chine, comme en Europe, assez 
en rapport avec le degré de civilisation de chaque pays et la densité de la population. C'est 
donc en Chine,où la population est le plus nombreuse que les engrais sont le plus utilisés 
et au Laos, où elle est le moins dense, qu’ils le sont le moins. A côté de cette distinction, 
nous devons établir également celle non moins importante qui est due au climat. Dans le 
sud, où les plantes eroissent avec vigueur et où elles semblent puiser plus que dans le nord 
leurs éléments constitutifs dans l'atmosphère, les engrais sont moins appréciés des agri- 
culteurs ; mais si les récoltes exigent moins d'engrais pour se développer complétement, 
elles acquièrent, lorsqu'on leur en donne, un surplus de vigueur qu’on ne pourrait jamais 
leur donner avec la même quantité d'engrais dans les climats moins chauds, etce résultat de- 
vrait encourager les cultivateurs du sud de l’Indo-Chine à fumer davantage leurs terres, au 
lieu de laisser perdre la plupart de leurs engrais. En Europe, nous utilisons presque tous 
les engrais, à l'exception de l’engrais humain, qui est le plus riche de tous. Au contraire, 
les Indo-Chinois, et en particulier les Chinois, tirent la plus grande partie de leur fumier 
de ce dernier engrais; mais, par contre, ils n’utilisent presque jamais leur paille. 
Nous devrions imiter les Chinois dans l'emploi des engrais humains et ils devraient nous 
imiter pour l’utilisation de la paille. Dans le sud du bassin du Mékong, ainsi que nous 
l'avons dit plus haut, les indigènes n’emploient pour ainsi dire aucun engrais, excepté 
pour la culture de quelques plantes maraichères et en particulier pour celle du tabae. 
Mais en Cochinchine, où la population est assez dense, les horticulteurs commencent à 
employer les engrais, surtout sur les points de notre colonie où la population tend à 
devenir trop serrée. À Saïgon, où se trouvent beaucoup de cultivateurs chinois, on 
fabrique une poudrette composée d’excréments de buffles, de bœufs, de chevaux qu'on 


382 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


fait pourrir en les arrosant et auxquels on mêle des cendres ou des tourteaux d’arachides. 
Le mélange, réduit en poudre, est déposé dans un trou pratiqué au pied du tabac. 
Pour la culture des légumes, les Annamites préfèrent de beaucoup les engrais humains. 
Avant de s’en servir, ils les réunissent dans une fosse creusée au milieu de leur jardin, y 
ajoutent de l’eau, puis les brassent plusieurs fois par jour pendant quelque temps, et enfin 
répandent cet engrais liquide, à l’aide d’une grande cuillère, au pied des légumes. 

Comme en Europe, les Indo-Chinois ont classé les excréments d’après leur propriété 
fertilisante, et quoique absolument dépourvus de connaissances chimiques, ils sont arrivés 
aux mêmes conclusions que nos plus célèbres agriculteurs. Ils placent en première ligne 
les excréments de chien, si riches en phosphate de chaux par suite du grand nombre 
d'os qui entre dans la nourriture habituelle de cet animal. Les excréments de chien se 
vendent quatre ou cinq fois plus cher que les autres. En seconde ligne, viennent ceux des 
oiseaux de basse-cour, puis ceux du cheval, de l’ane, des moutons, des chèvres et de l’é- 
léphant.Tout à fait en dernière ligne, viennent ceux des pores, quisont également les moins 
estimés en Europe. La grande valeur que les Chinois accordent aux exeréments du chien, 
doit faire penser qu’ils apprécient beaucoup les os. En effet, ils les recueillent partout avec 
soin, et, après les avoir grillés et pulvérisés, ils les répandent sur leurs champs. 

La récolte des exeréments humains sur les routes ou dans les rues des villes, qui com- 
mence à être pratiquée en Cochinchine depuis quelques années, se fait partout en Chine. 
Le matin, c’est à qui se lèvera le plus tôt afin d’en recueillir le plus. Danses villes, toutes 
les maisons possèdent une petite fosse dontles paysans viennent presque chaque semaine 
acheter et enlever le contenu, à l’aide de deux seaux suspendus aux extrémités d’un ba- 
lancier, qu'ils portent sur les épaules ou qu'ils placent sur le dos des bœufs ou des ânes. 

Ce système de vidange, le seul employé en Chine, fonctionne toute la journée, et ne 
contribue pas peu à rendre désagréable la circulation des rues : à chaque instant on se 
croise ou plutôt on se heurte, en raison de l’étroitesse des rues, à des vidangeurs dont les 
seaux ne sont couverts que lorsqu'ils les font porter par des animaux. 

Dans les villages, au contraire, les fosses sont très-grandes et construites avec le plus 
grand soin. Leurs murs sont en briques avec les joints bien cimentés, de façon à rete- 
nir complétement les liquides. Au-dessus, on établit très-souvent les porcheries. Les 
habitants vont autour de cette fosse qui est toujours plus large que la cage qui 
est dessus, et ils y déposent tous les exeréments liquides et solides qu'ils recueil- 
lent ailleurs, et qui forment, avec le temps, une bouillie liquide qu’ils enlèvent deux 
fois par an, à l'automne et au printemps. La partie liquide de ces fosses sert surtout pour 
les cultures maraichères. Quant à la partie solide, après avoir été séchée et bien pulvérisée 
à l’aide de fléaux, elle est employée pour les grandes cultures. Ordinairement la pou- 
drette qu’elle fournit est déposée au pied des plantes à la main ; rarement on la sème à 
la volée. Ces diverses opérations sont faites aveë des soins très-minutieux, qui montrent 
toute la valeur qu'accordent les Chinois à ces engrais, mais qui contrastent beaucoup avec 
la négligence qu'ils apportent dans beaucoup d’autres pratiques agricoles presque aussi 
importantes, telles que le labourage. Les fosses destinées à fabriquer des engrais liquides 


ASSOLEMENT ET JACHÈRES. 389 


et solides, n'existent pas exclusivement dans les maisons ; on en trouve aussi très-souvent 
à la sortie des villes et des villages. Afin d’engager les passants à entrer dans ces lieux 
publics, construits loujours par les particuliers, on raconte que, dans certaines villes du nord 
de la Chine, les propriétaires y mettent du papier et qu'ils vont même jusqu'à donner 
une pièce de monnaie de petite valeur à chaque personne qui en sort. Cette pratique chi- 
noise est bien différente de la nôtre où il faut toujours payer. 

Les Chinois apprécient aussi beaucoup les cendres, soit qu’elles proviennent des bois, 
des herbes, de la tourbe, du charbon de terre et du lignite. Elles sont mêlées aux engrais 
des fosses, ou, plus souvent, à la poudrette qui en provient. Les débris de peaux venant des 
tanneries et des corroieries, et la plupart des résidus de beaucoup d’autres industries ne 
sont pas moins recherchés. 

La pratique du marnage nous parait complétement inconnue des Chinois; cette pratique 
serait d’ailleurs impossible, ainsi que celle du plätrage, les deux matières servant à les 
faire n’existant pas dans le sol de l’Indo-Chine. En revanche, l'usage de la chaux, qui peut 
les remplacer jusqu’à un certain point, est assez fréquent. Cette chaux provient du seul 
calcaire qui existe si abondamment dans tout le pays, le marbre dolomitique, qu’on caleine 
dans des fours. 

Parmi les divers procédés destinés à augmenter la fertilité des terres sans engrais 
ni amendement, il faut citer l’écobuage. Ce grillage de la couche arable des champs 
est assez souvent employé en Chine sur les montagnes après le défrichage desterres. Il 
sert moins dans ce cas à modifier la nature de la couche arable, qu’à détruire les nom- 
breuses racines ligneuses qu’elle renferme. 

Une pratique, qui se rattache à l’écobuage et que nous ne connaissons presque pas en 
Europe, est encore plus fréquemment employée : c’est l’incendie des forêts. Ce procédé 
barbare qui n’est pratiqué que parce que le bois n’a que très-peu de valeur dans les pays 
chauds, produit une couche de cendres qui assure les récoltes pour deux ou trois ans. 
Un autre avantage non moins grand de ce procédé, c’est de dispenser si complétement 
du labourage, que les agriculteurs qui le pratiquent, se bornent à creuser avec un baton 
un trou dans lequel ils déposent quelques graines de la plante qu’ils veulent cultiver. 


$ 8. — Assolement et jachéres. 


L'assolement des diverses plantes cultivées, tel qu’on le pratique dans les régions 
tempérées, ne se rencontre qu’exceptionnellement en Indo-Chine. Ce n’est pas que cette 
pratique, qui a pour but d’accroitre la quantité de produits qu'on peut tirer du même 
champ dans une période de plusieurs années, ne soit aussi féconde, appliquée dans les 
mêmes conditions ; mais les cultures inondées, qui sont, en Indo-Chine, les cultures 
dominantes, ne paraissent pas l’exiger. Le riz, qui occupe plus des neuf dixièmes 
de la surface totale des terres cultivées, jouit de la singulière propriété de croître 
chaque année dans le même champ sans l’épuiser. Les indigènes prétendent même 
que les meilleures rizières sont celles que lon cultive depuis le plus longtemps. 


384 AGRICULTURE ET HORTICULTUR E. 

Le riz parait en effet tirer de l’eau d'inondation la majeure partie de ses prin- 
cipes nutritifs. Il serait impossible de cultiver cette céréale plus de trois années de suite 
dans des terres non irriguées; mais, cultivée dans l’eau, elle paraît laisser intacts les 
principes fertilisants de la couche arable, pour puiser sa nourriture dans l’atmosphère 
et surtout dans l’eau. L'eau nous semble tenir son influence fécondante des nombreux 
insectes qu'elle attire et dont la plus grande partie périt après l'enlèvement du riz, par 
suite de la dessiccation de la couche de vase qui forme le sol des rizières. Ces insectes, qui 
sont en nombre prodigieux, viennent annuellement dans les rizières pour s’y multiplier, 
et apportent des bois, des marais et des rivières où ils ont vécu, les éléments fertilisants 
qu'ils y ont puisés et en particulier les phosphates dont est formée leur enveloppe, et 
dont le riz, ainsi que toutes les céréales, a un si grand besoin. Les poissons, qui sont si 
nombreux dans les rizières, contribuent aussi pour une forte part à leur fertilité, en y pé- 
rissant pour la plupart à la facon des insectes. Il résulte done de l’émigration de ces 
divers animaux un courant indépendant de l’homme, qui apporte chaque année des forêts 
et des rivières dans les rizières, les principes organiques nécessaires au riz. En s’avan- 
çcant vers le nord, ce courant d'animaux est de moins en moins énergique ; aussi arrive-t-il 
un point où les engrais deviennent indispensables à la croissance annuelle du riz dans le 
même champ. Ainsi les Chinois emploient très-souvent des engrais; parfois aussi ils pra-- 
tiquent la pisciculture dans leurs rizières, ce qui en augmente à la fois la fertilité et le 
rendement. 

L’assolement n’est pratiqué dans le sud de l’Indo-Chine que pour les plantes secon- 
daires, telles que la canne, le coton, l’arachide, le tabac, le maïs, l’ortie de Chine et les ha- 
ricots. Selon les plantes, il est biennal ou triennal ; rarement il est à plus long terme, Dans 
le nord, la pratique de l’assolement est plus répandue et s'applique au riz lui-même, mais 
dans ce cas, elle est semi-annuelle. Ainsi, à la fin de l'été, après avoir enlevé le riz, on 
laboure aussitôt les champs et on y sème le blé qui parcourt facilement en hiver, sous ces 
climats privilégiés, ses diverses périodes de végétation. D’après ce que nous avons vu et 
ce que nous ont affirmé les Chinois, ce procédé, tout en étant très-favorable à la quantité 
de produits qu'on peut tirer du sol, est nuisible à la qualité des grains. Les grappes de riz 
et les épis de blé sont plus petits et plus maigres. A côté de cet assolement semi-annuel, 
praticable seulement dans les terres irrigables à cause de l’extrème sécheresse de l'hiver, on 
observe, sur les terres sèches des montagnes ou des plateaux élevés, l’assolement ordinaire 
d'Europe, biennal, triennal, ou quadriennal. Ainsi, au sarrasin succèdent le maïs, la 
pomme de terre, l’avoine ou l’éleusine ; aux pavots à opium succèdent le sorgho ou le riz 
imondé, ete. Dans ces divers cas, il est biennal seulement. Rien ne serait cependant plus 
facile que de le pratiquer à plus long terme en raison du grand nombre de plantes cul- 
livées qu'on trouve partout et qui comprend presque toutes celles des pays chauds et 
froids. Ce progrès sérieux ne s’observera pas de longtemps en Chine, les cultivateurs de 
ce pays n'ayant pour ainsi dire qu’un but, faire produire à leurs champs le plus de céréales 
possible. Cette préoccupation constante des eultivateurs chinois vient de ce que l’on 
consomme dans toute la Chine une quantité exagérée de céréales. On y use des grains, 


ASSOLEMENT ET JACHÈRES. 389 


non-seulement pour la nourriture ordinaire de l’homme, mais encore pour la fabrication 
des alcools et d’une foule d’autres produits alimentaires. I ne faut espérer d’assolement bien 
entendu et à long terme en Chine, que le jour où les habitants, au lieu de se nourrir pres- 
que entièrement de céréales, chercheront à se servir davantage de viande. Alors le besoin 
de fourrages se fera sentir pour nourrir les bestiaux qui devront fournir cette viande et on 
cultivera un certain nombre de plantes fourragères qui s’intercaleront avec avantage entre 
les récoltes de céréales. 

Jachères. — La pratique des jachères, basée comme on sait sur le besoin de repos 
qu'ont les terres après une ou plusieurs années de culture, est encore moins commune 
en Indo-Chine que celle de l’assolement, à moins toutefois qu’on n’applique cette déno- 
mination aux cultures de forêts qui se font deux ou trois années de suite dans le même 
endroit, et qu’on ne recommence que quinze ou vingt ans après, lorsque la couche 
d’humus s’est reformée et que la forêt est redevenue assez puissante pour qu’en la coupant, 
elle forme après l'incendie une couche de cendres fertilisantes assez épaisse. 

La fertilité du climat, l’inondation des terres, la longue durée et l’extrème sécheresse 
de la saison sèche, qui laissent la terre dans un repos complet de six mois environ, sont 
les principales causes qui rendent inutile en Indo-Chine la pratique de la jachère. Les 
Indo-Chinois, malgré ce concours de conditions favorables, laissent cependant, et assez 
inutilement à notre avis, reposer les rizières des régions élevées qui sont d’une irrigation 
difficile et incertaine ; mais ce cas est assez rare. 

Mauvaises herbes. — Un des faits les plus remarquables de l’agriculture indo-chinoise 
est, sans contredit, le nombre restreint de mauvaises herbes que l’on rencontre dans les 
champs eultivés. Dans le nord surtout, où les terres sèches, placées dans les mêmes con- 
ditions climatologiques que celles de l'Europe, sont nombreuses, ce fail saute aux yeux et 
on n’est pas peu étonné de ne trouver parmi les herbes vulgaires mêlées au blé, à l’avoine 
el au sorgho, que le mélilot, la lupuline, le mouron des oiseaux et quelques autres herbes 
particulières au pays. Dans le sud, ce fait surprend moins, parce que la plupart des eul- 
tures ne se faisant que dans les champs inondés, il en résulte que toutes les plantes vul- 
gaires des terres sèches d’une si facile propagation en sont forcément exelues, el qu'on ne 
trouve que les genres de plantes aquatiques, bien moins nombreux comme on sait que 
ceux des terres sèches. Ce résultat favorable se trouve encore accru par le mode de labou- 
rage en terre inondée, qui permet, ainsi que nous l'avons fait remarquer précédemment, 
une extirpation bien plus complète des mauvaises herbes. 

Le petit nombre des mauvaises herbes dans les terres sèches de l’Indo-Chine parait 
tenir à l'isolement dans lequel cette partie du monde est restée jusqu'iei, à la longueur 
et à l'extrême sécheresse de la saison sèche, qui arrête complétement la végétation et 
oblige les mauvaises herbes à parcourir leurs diverses phases de croissance en même 
temps que les plantes cultivées, qui les étouftent ; enfin, à la configuration montagneuse 
du sud de la Chine qui s’oppose à la propagation des plantes de proche en proche. Dans 
celte région, les vallées chaudes et profondes, qui séparent les chaînes de montagnes, sont 


un obstacle infranchissable pour les plantes des climats tempérés. Les plantes qui ont des 
IL. | 49 


380 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


graines à aigrelles pouvant être entrainées par le vent, ou celles à crochets qui s’atta- 
chent aux animaux, peuvent seules se propager rapidement. 

Non-seulement les mauvaises herbes, qu’on trouve dans les champs cultivés de l’Indo- 
Chine sont moins nombreuses, mais elles sont également moins nuisibles qu’en Europe. 
A l'exception de quelques seirpes, de plusieurs souchets qu’on trouve dans les terres hu- 
mides et inondées, de quatre ou cinq espèces d’amarantes qui empoisonnent les jardins, 
de dix à quinze espèces d’andropogons, communs partout, nulle part on ne trouve de 
plantes aussi nuisibles que notre chardon, notre chiendent, notre sirapis arvensis, ete. 


S9. Eaux et canaux d'irrigation. 


On distingue trois sortes d'eaux employées en agriculture et en horticulture : 1° les 
eaux de pluies; 2° les eaux de sources et de puits; 3° les eaux des fleuves et des ri- 
vières. 

Les eaux de pluies, en raison du grand nombre d’orages qui se succèdent presque 
d’une façon ininterrompue pendant l’hivernage, paraissent être les plus riches en principes 
fertilisants. Les décharges électriques continuelles qui précèdent et accompagnent ces ora- 
ges, en déterminant la combinaison d’une certaine portion des deux éléments qui forment 
l'air, l’azote et l'oxygène, fournissent aux plantes une partie de l'azote dont elles ont 
besoin. A cette cause de supériorité des eaux de pluies, on doit ajouter l'influence de 
toutes les particules organiques voltigeant dans l'air, elen particulier les insectes, que ces 
pluies tuent et entrainent avec elles. Les eaux pluviales sont done les meilleures pour l'ir- 
rigation: les rizières les plus fertiles sont celles qui sont disposées de façon à ce que ces eaux 
puissent s'y amasser en assez grande quantité pour qu'il ne soit pas nécessaire d’en amener 
d’autres. Cette condition est réalisée dans tout l'extrême sud du bassin du Mékong, où les 
pluies sont un peu plus abondantes et mieux réparties que dans le nord, où le sous-sol 
est imperméable, et où les rizières sont au niveau de l’eau des fleuves et même un peu 
en dessous, de façon que l’eau s’y accumule forcément. 

Les eaux de sources doivent être mises en dernière ligne comme propriété fertili= 
sante ; elles sont peu abondantes dans le bassin du Mékong et ne donnent en général des 
quantités d’eau importantes que pendant la saison des pluies. Un grand nombre tarissent 
même complétement pendant la saison sèche. La plupart de ces eaux de sources; n’attei= 
gnant pas les couches profondes du sol, et ne traversant que des terres alluvionnaires, des 
grès ou des granils, sont très-pauvres en principes minéraux. 

I n’en est pas cependant toujours ainsi, surtout dans les montagnes du nord du bassin 
du Mékong. Les eaux de cette partie de l’Indo-Chine, filtrant souvent à travers des marbres, 
contiennent alors une si grande quantité de sels calcaires qu’on ne peut les conduire 
dans les rizières : Les sels de chaux forment des tuyaux inextensibles qui s'opposent au 
développement des chaumes du riz. 

Nous devons mentionner tout particulièrement dans le Laos, l'existence de sel marin 
dans l’eau des rizières situées au centre de quelques plateaux. Ce sel, provenant sans doute 


EAUX ET CANAUX D'IRRIGATION. 387 


de dépôts de sel gemme dans le sous-sol de ces régions, quoiqu'en assez grande quantité 
pour qu’il soit possible d'exploiter les efflorescences qu'il forme à la surface des rizières 
après leur desséchement, ne paraît cependant pas nuire sensiblement à la croissance du 
riz. Nous savons cependant qu'il n’en est pas toujours ainsi, et que, lorsque la proportion 
de sel dépasse un certain chiffre, le riz est non-seulement tué, mais encore la rizière 
devient impropre pendant plusieurs années à la culture de toute espèce de plantes. Ce fait 
se passe souvent en Cochinchine à l'embouchure des fleuves, lorsqu'on laisse aceidentel- 
lement pénétrer dans les rizières l’eau fortement salée des cours d’eau. 

Il y aurait certainement lieu de rechercher quelle est la proportion de sel marin que 
peut contenir l’eau d'irrigation sans nuire au riz. Nous signalons ce point intéressant de 
chimie agricole à l'attention des chimistes. 

Les eaux de puits ne valent guère mieux que les eaux de sources et de filtrations:; 
elles sont également très-peu chargées en principes minéraux, excepté pourtant dans 
quelques points du Laos et de la Chine où elles contiennent des sels calcaires, mais sur- 
tout du sel gemme, en si grande quantité, qu'on les exploite pour les recueillir. 

A l'exception des localités situées trop près de la mer ou des fleuves à eau saumätre, 
on fore partout des puits en Indo-Chine. Dans les plaines alluvionnaires du sud, où la 
nappe d’eau souterraine est très-près de la surface du sol, les horticulteurs et parfois les 
cultivateurs en creusent de nombreux au milieu de leurs champs. Pour la culture du tabac 
en particulier, ils y ont souvent recours et il est très-curieux d’apercevoir de loin les im- 
menses balanciers qu’ils adaptent au-dessus pour en extraire plus facilement l’eau. 

Quant aux eaux des fleuves, des rivières et des torrents, elles sont de valeur très- 
différente selon les saisons, selon leur origine et souvent aussi selon le point des cours 
d’eau où on les observe. Dans la saison sèche, alors que les eaux proviennent des rares 
sources du pays, des suintements des berges et de la fonte des neiges, elles sont très- 
pauvres en principes fertilisants, organiques et terreux. Dans la saison humide au con- 
traire, alors qu'elles proviennent des nombreux torrents qui sillonnent les montagnes 
après chaque orage, de l’inondation des plaines, et du débordement des marais et des ri- 
zières, elles sont très-riches en débris organiques et en particules terreuses qui les ren- 
dent excellentes pour l'irrigation et les arrosages. 

Quoiqu’on puisse dire, qu’en général l’eau agit bien plus par elle-même que par ses 
qualités, il y a cependant lieu de tenir un compte sérieux des variations dans sa composi- 
tion que nous venons de signaler. Le cultivateur doit savoir discerner la meilleure, quand 
il a le choix, et chercher à s’en servir de façon à accroître ses récolles. 

La construction des canaux destinés à utiliser ces diverses eaux d'irrigation est très-ar- 
riérée dans le sud où ils sont à peu-près inutiles, et assez avancée dans le nord où ils sont 
indispensables. Dans le sud, on ne trouve de canaux que dans les parties élevées, et ils 
sont ordinairement très-mal construits avec des berges en terre, sans barrages et sans 
vannes. Dans le nord au contraire, les canaux sont souvent très-bien bâtis ; ils ont des 
murailles en pierre et des vannes en bois assez bien installées pour régler le niveau de 
l'eau et faciliter son déversement dans les rizières qui les bordent. En Chine, il n’est pas 


388 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


rare d'observer de ces canaux, amenant à travers tous les obstacles l’eau des sommets des 
montagnes sur les pentes douces situées à leur pied et dans les plaines. Ils sont souvent 
creusés dans le roc, et il faut toute la patience chinoise pour les exécuter avec les moyens 
défectueux que possèdent les habitants. Ces travaux ne se font d’ailleurs que par le con- 
cours de tous les ecultivateurs de la même commune, et, tout admirables qu’ils sont, 
ils sont loin d'approcher de ceux qui s'exécutent en Europe. Presque partout, il y 
aurait lieu d'y apporter des améliorations sérieuses, telles que l’adjonction d’aquedues et 
de grands bassins de réserve situés au pied des montagnes, comme ceux qu'on observe 
déjà dans le Laos supérieur, et qui rendent de si grands services lorsque les pluies dimi- 
nuent accidentellement pendant l’hivernage, ou lorsqu'elles ont cessé entièrement. 


S 10. — Organisation de lu propriété. 


En Cochinchine, la propriété est à peu près organisée suivant les mêmes principes 
qu'en Europe, c’est-à-dire dans les conditions les plus favorables, selon nous, au dévelop- 
pement de l’agriculture. Les terres, qui se transmettent par voie d’héritage, se vendent 
et s’achètent comme en Europe. Les petits propriétaires possèdent la plus grande partie 
du sol. La location des terres à bail est par suite peu commune, et en général la terre est 
cultivée par son possesseur, qu'il en ait peu ou.beaucoup. Les terres qui appartiennent 
aux communes ou à l’État, sont presque toujours d’une acquisition très-facile et les terres 
récemment défrichées sont exemptes d'impôt pendant plusieurs années. 

Les impôts sont proportionnels à la qualité des terres; celles-ci sont divisées en géné- 
ral en trois classes, d’après leur degré de fertilité. 

Au Cambodge et au Laos, la propriété est constituée d’une façon plus arbitraire et 
moins personnelle. La plupart du temps, la terre est considérée comme une partie inalié- 
nable du domaine royal, queles habitants ne détiennent qu'à titre de fermiers. Le taux sou- 
vent exorbitant de l'impôt et les vexations des mandarins contribuent à restreindre l'essor 
de la culture et les efforts des agriculteurs. 

En Chine, l’organisation est semblable à celle de la Cochinchine, et l’agriculture 
est très-prospère. Nous devons toutefois faire remarquer, que les terres incultes, possédées 
par l'Etat et les communes, sont à peu près abandonnées. Nous avons déjà insisté 
sur les effets fâächeux de cette négligence. L'opinion chinoise, qui veut que tout ce 
qui vient sans beaucoup de peines, comme les arbres et les arbustes fruitiers, ne soit 
pas à respecter à légal des autres récoltes, a les conséquences les plus déplorables pour 
l’arboriculture. Elle a amené le déboisement de presque tout le pays, et elle est un obstacle 
presque absolu à la eulture des arbres fruitiers en dehors des jardins. Le premier venu 
étant censé autorisé à prendre les fruits qu'il trouve sur sa route, il en résulte que per- 
sonne n'ose en cultiver en dehors des propriétés closes. Tel est sans doute l’une des causes 


du peu de développement de la culture de la vigne en Chine. 


COUP D’OŒIL GÉNÉRAL SUR L'AGRICULTURE. 389 


S 11. — Coup d'œil général sur l'agriculture indo-chinoise. 


L'agriculture chinoise est la seule qui puisse être comparée à l’agriculture européenne. 
Partout ailleurs, l’art de la culture est trop arriéré, et les conditions elimatologiques sont 
trop différentes pour qu'il soit utile de faire des comparaisons. L'agriculture chinoise, 
considérée dans son ensemble, est inférieure à la nôtre; envisagée dans ses détails, elle 
lui est souvent supérieure. Pour les cultures inondées, l'avantage reste souvent aux 
Chinois et ils sont toujours nos égaux dans ce cas. Pour les cultures en terres humides 
ou sèches au contraire, leur infériorité est des plus manifestes et ils sont à peine plus 
avancés que les peuples les plus barbares. Des Chinois, transportés en Europe dans nos 
terres sèches, et qui garderaient entièrement leurs procédés de culture, y végéteraient 
et ne pourraient nourrir une population aussi nombreuse que la nôtre. Rien n'offre 
un plus frappant contraste que les soins et la patience que les Chinois mettent à cultiver leur 
riz et leurs légumes, et la négligence et l’ignorance qu'ils montrent dans les cultures des 
zones sèches. Dans le fond des vallées, on peut comparer les cultures chinoises à des jardins, 
tellement tout y est soigné; surles montagnes où l'irrigation est impraticable, leurs procédés 
ne sont pas plus avancés que ceux des sauvages qui habitent à côté. A quoi tient cette in- 
fériorité déplorable des cultures sèches ? Si les cultures en terres inondées sont très-soi- 
onées, c’est qu’elles sont plus productives, plus faciles, mais surtout plus sûres, et qu’elles 
exigent, pour être faites, bien moins de calcul et de prévoyance. Dans un champ inondé 
un homme seul peut, presque comme dans un Jardin, pratiquer lui-même les diverses 
opérations de la culture, sans avoir recours aux moyens auxiliaires qui sont toujours indis- 
pensables dans les terres sèches. Une houe, à défaut de buffles et de charrues, peut lui 
suffire pour produire de quoi nourrir sa famille. Les cultures en terres sèches ou hu- 
mides, demandent au contraire un matériel compliqué et des bestiaux en grand nombre. 
Nous avons enfin signalé les préjugés qui s’attachent aux cultures arborescentes et qui 
contribuent puissamment à les maintenir dans un élat d’infériorité. 


Il 


PRINCIPALES CULTURES PRATIQUÉES EN INDO-CHINE. — CÉRÉALES. — PLANTES TEXTILES. — PLANTES 
OLÉAGINEUSES. — PLANTES TINCTORIALES. — PLANTES FÉCULENTES. — PLANTES COLONIALES. 


S 1. — Céréales. 


Riz. — Pour la plupart des peuples indo-chinois, le riz joue un rôle bien plus grand 
que Le blé dans les pays tempérés. Ce rôle tient non-seulement à l'abondance de sesgraines, 
à la facilité de sa culture et à l'avantage qu’il présente de remplacer presque toutes les autres 
céréales dans leurs différents usages, mais surtout à l'impossibilité de cultiver, sous ces 
climats chauds et humides, une plante douée d'autant de qualités. En même temps qu’il 
est la base de la nourriture de l’homme et de la plupart des bestiaux, il sert à extraire 
une foule de produits. Ainsi c’est avec lui qu’on fabrique presque toutes les liqueurs 
fermentées, l'alcool et la plupart des pâtes alimentaires. Il tient donc lieu de blé, d'avoine, 
d'orge, de betterave, de pomme de terre et même de raisin. Sans doute, dans ces diffé- 
rents cas, il est loin d’égaler les produits de nos plantes, mais les indigènes doivent s’en 
contenter, puisque nos diverses plantes ne peuvent croître dans leur pays. Si les graines 
de riz contiennent environ moitié moins de gluten que le blé et moins que la plupart des 
autres céréales, cela ne présente que peu d’inconvénients, car il ne faut pas oublier que; 
sous les climats chauds, l'organisme de l’homme et des animaux n’en réclame pas autant 
que sous les nôtres, et que le riz leur suffit très-bien, à la condition toutefois qu’ils en 
mangent un peu plus que de blé. 

Be riz (Oryza sativa; Lin.) est une plante essentiellement asiatique, Nous avons trouvé 


392 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


six espèces du même genre croissant spontanément dans le sud de la vallée du Mékong. 
Trois de ces espèces végètent dans les forêts humides parmi les graminées croissant sous 
les arbres; deux s’observent dans les fossés, les marécages et sur les bords des rivières ; 
la sixième se rencontre sur les montagnes de grès du Laos inférieur. Aucune de ces 
espèces ne nous a paru devoir être assimilée à l’espèce cultivée, et n’a pu par consé- 
quent lui servir de souche. Les graines fournies par ces six espèces ne sont recueillies par 
les habitants que dans les années de grande disette. Nulle part, d’ailleurs, ces diverses 
espèces de riz ne se rencontrent en assez grande quantité pour devenir une ressource 
sérieuse; leur récolte serait très-difficile, car leurs graines présentent la particularité sin- 
gulière de se détacher très-facilement, avant leur complète maturité. 

L'espèce de riz cultivée, quoique non indigène en Indo-Chine, se reproduit cependant 
avec la plus grande facilité autour des cultures. Partout on en trouve quelques pieds éga- 
rés; nulle part pourtant elle ne se reproduit indéfiniment sans le secours de l'homme. 
Cette espèce a produit plusieurs .centaines de variétés, très-intéressantes, mais d’une 
étude excessivement difficile, en raison des caractères différentiels peu tranchés qu'elles 
présentent. La couleur de l'enveloppe des graines, qui varie du violet noir au blanc Jjau- 
nâtre, en passant par le rouge, le rose, le jaune et le roux, sert surtout à les distinguer. 
Leur grosseur et leur forme, quoiqu'offrant ordinairement très-peu de variations, sont 
cependant très-utiles, combinées aux caractères précédents, pour reconnaitre les variétés. 
Les caractères de l’intérieur des graines servent surtout à indiquer la qualité, et ont 
servi de base à une division très-importante du riz en deux sortes principales. Ainsi on 
divise les riz, d'après leur qualité, en riz blane et en riz gluant ou glutineux. Les graines 
des riz blancs ont, avant leur cuisson, la cassure presque translucide et lisse comme celle 
des blés durs. Les graines des riz gluants, au contraire, ont la cassure terne étant secs, et 
deviennent transparents et gluants après la cuisson. Les Chinois, les Annamites et les 
Européens préfèrent les riz blancs qui sont du reste plus riches en gluten; mais les 
Laotiens et les sauvages choisissent les riz gluants comme étant plus commodes à manger 
et un peu plus sucrés. Ces derniers riz sont surtout recherchés pour la fabrication des 
eaux-de-vie, des liqueurs fermentées et des pâtes alimentaires. En même temps qu'ils sont 
plus faciles à cultiver, moins difficiles sur le choix du sol et bien plus précoces, ils se prè- 
tent beaucoup mieux à une production d’aleool en raison de leur pauvreté en gluten et de 
leur richesse en amidon. 

On a voulu distinguer le riz en riz inondé et en riz sec ou de montagne, suivant les 
lieux où il est cultivé. Cette distinction n’est qu’apparente. Le riz ne peut être cultivé sur 
les montagnes de l’Indo-Chine, où tonte inondation est impossible, qu’à cause de l'extrême 
abondance des pluies sous ce climat et de leur répartition pendant quelques mois seule- 
ment, conditions qui font que la terre, quelle que soit sa situation, reste constamment im 
bibée d’eau pendant une période de plusieurs mois. Cette période d’imbibition du sol 
est assez longue pour que le riz, quoique plante aquatique, puisse parcourir ses diverses 
phases de végétation, lorsqu'on a le soin de le planter dans un sol riche en principes orga- 
ques et facilement assimilables. On réalise cette dernière et indispensable condition en ne 


CÉRÉALES. 393 


J 
pratiquant ce mode de culture que dans les bois et les forêts que l’on vient de brüler et 
dont le sol est nécessairement très-riche en humus et en cendre. 

Quoique toutes les variétés de riz puissent être cultivées de cette façon, il en est quel- 
ques-unes qui s'accommodent mieux de cette culture, et que l’on préfère généralement. 
Ces variétés appartiennent presque toutes au groupe des riz gluants, hätifs pour la plupart, 
et qui ont les enveloppes plus ou moins colorées. 

Comme nous l'avons déjà indiqué plusieurs fois, il existe trois manières de cultiver 
le riz en Indo-Chine ; les voici par ordre d'importance : 1° la culture du riz dans les 
champs inondés ; 2° la culture du riz dans les terres humides, qui est analogue à celle du 
blé dans nos pays ; 3° la culture du riz pendant la saison sèche, sur le bord des lacs et 
dans le lit à demi desséché des fleuves et des rivières, qui est presque assimilable à la cul- 
ture du riz inondé. 

La culture du riz dans les champs inondés est presque complétement identique dans 
les différentes portions de la vallée du Mékong. On commence d’abord par entourer et au 
besoin par diviser, lorsqu'il est très-étendu, le champ que l’on veut planter en riz, par 
des talus en terre hauts de 3 à 6 décimètres. Dans les plaines que l’on vient de défricher, 
dont le sol est rempli de souches et de racines, ces talus se construisent en entier à la 
houe. Dans les plaines défrichées depuis longtemps, on combine avec avantage l’action de 
la charrue à celle de la houe. Ainsi les cultivateurs, après avoir tracé trois ou quatre sillons 
parallèlement à la direction que doivent avoir les talus, ramènent en dessus, avec la houe. 
la terre remuée de chaque côté par la charrue. En avant la précaution de pratiquer cette 
opération après quelques fortes pluies, alors que la terre est transformée en boue, ces 
talus prennent très-vite de la consistance et s'opposent presque aussitôt à l'écoulement des 
eaux de la rizière. Cette installation de talus, qui n’est ni difficile ni couteuse, ne de- 
mande que peu d'entretien, L’adjonction d’une vanne destinée à laisser entrer ou écouler 
l’eau, serait sans doute une bonne chose, mais la plupart du temps les cultivateurs indo- 
chinois s’en dispensent et trouvent plus commode de faire une petite tranchée à la houe, 
qu'ils ouvrent et bouchent à volonté avec quelques mottes de terre. Entre les talus, on 
ménage ordinairement de distance-en distance de petits canaux, destinés, dans les rizières 
des plaines basses et alluvionnaires, à laisser écouler l'excès d’eau, et à l’amener au 
contraire dans les rizières situées dans les parties plus élevées, où l’eau des pluies est 
presque toujours insuffisante. 

Le riz qu’on cultive dans lés champs inondés, ne se sème nullement à la volée comme 
lé blé en Europe, et ne se plante pas davantage à la main comme la plupart de nos lé- 
gumes. On commence d’abord par le semer dans un endroit spécial, puis on le repique. 
Cet endroit spécial, qui est le plus souvent le coin d’une rizière rapprochée des habitations, 
doit toujours se trouver à portée de l’eau, de façon à pouvoir être irriguée à volonté lorsque 
les pluies font défaut, circonstance assez commune au début de l’hivernage qui est le mo- 
ment de ces semis. La terre doit être également très-fertile, de façon à ce que les jeunes 
pieds de riz acquièrent le plus de vigueur possible. Pour obtenir ce résultat, les Chinois 
ont l'habitude d'employer des engrais liquides ou solides; il est à regretter que les An- 

IT. d0: 


394 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


namites et les Laotiens n’en fassent pas autant. L'époque des semailles est de plus en 
plus précoce à mesure que l’on s’avance vers le nord ; elles ont lieu en Chine, deux mois 
plus tôt que dans le sud et sont comprises entre les premiers jours de mars et le com- 
mencement de juin; elles précèdent de six semaines environ le repiquage, qui se fait de 
mai à octobre, selon les pays, la qualité des terres et la variété du riz. Avant de semer le 
riz, on laboure et on herse avec soin de façon à transformer toute la terre en une bouillie 
claire. Puis on sème le r1z à la volée, et on irrigue. En attendant que le riz ait germé, ce 
qui à lieu trois à quatre jours après, on le veille avec soin, surtout pendant le jour, de 
facon à éloigner les oiseaux, qui sont à ce moment nombreux et affames. Dès que la 
germination est commencée, on laisse écouler la plus grande partie de l’eau, afin d'éviter 
la pourriture des graines et de permettre aux premières feuilles d'atteindre l'air. Les 
Jours suivants, au fur et à mesure que ces feuilles grandissent, on laisse entrer un peu 
plus d’eau. A l’aide de ces soins, on obtient, en cinq ou six semaines, du riz bon 
à repiquer, haut de 40 centimètres au moins, et qu’on arrache très-facilement à la 
main. 

Au fur et à mesure qu'on procède à l’arrachage du riz, on le réunit en petites 
bottes pouvant tenir dans la main et qu'on lie avec un brin de paille mouillée ou le 
plus souvent avec une tige de scirpe. Avant d'enlever ces petites bottes du champ, ce qui 
se fait en traineaux dans les grandes plaines, en bateau le long des cours d’eau, et à l’aide 
de paniers portés sur les épaules dans les autres lieux, on tranche d’un seul coup de 
serpe sur un billot leur tiers supérieur, de façon à les rendre moins lourdes, mais surtout 
afin d'éviter que les brins de riz ne s’entremélent ou ne se cassent, ce qui rendrait le re- 
piquage bien plus difficile. 

L'opération du repiquage doit être précédée d’un labour profond, destiné à extirper les 
mauvaises herbes, et surtout à retourner et à ameublir la terre. Ce labourage, qui n'a 
lieu que lorsqu'il y a au moins 10 à 20 centimètres d’eau depuis plusieurs Jours dans 
la rizière, est suivi d’un ou plusieurs hersages soignés, ayant pour but d’entrainer toutes 
les racines des herbes, et de transformer la couche arable en une bouillie semi-fluide, 
épaisse de 20 à 30 centimètres au moins, dans laquelle on plante presque aussitôt le 
riz en l’enfonçant avec la main. Cette opération, aussi simple que facile et qui assure 
toujours la reprise du riz, doit être faite très-rapidement avant que la terre soit déposée 
et lassée. Aussi toute la famille du cultivateur, femmes et enfants, y prête-t-elle son con- 
cours ; il n’est pas rare de voir plusieurs familles se réunir et s’aider pour assurer la ra- 
pidité de cette opération. Les grands cultivateurs ont recours aux familles pauvres qui 
parcourent ordinairement les campagnes à cette époque, et qui se louent successivement 
à ceux qui ont besoin de leurs services. 

Les travailleurs repiquant le riz, sont nécessairement plongés dans l’eau jusqu'aux 
genoux. De la main gauche, ils tiennent une bottelette et de la droite ils enfoncent succes- 
sivement un certain nombre de brins de riz réunis en faisceaux ; ce nombre varie entre 
quatre et huit, selon la fertilité des terres. Les faisceaux, espacés de 10 à 15 centi- 
mètres, sont disposés en lignes régulières placées à la même distance que les faisceaux. 


CÉRÉALES. 305 


A la suite du repiquage du riz, on laisse pendant deux ou trois jours une couche 
d’eau assez épaisse dans la rizière, afin d'assurer sa reprise. Cette période passée, on 
fait sortir la plus grande partie de l’eau, afin d’aérer la terre et de donner de la vigueur 
aux tiges. Cette opération est répétée deux fois pendant la période de la croissance du riz ; à 
l'approche de la maturité, on laisse l’eau s’écouler afin de rendre le moissonnage plus 
facile. 

La floraison du riz est, comme celle de toutes nos céréales, très-sensible aux fortes 
pluies et se trouve frès-compromise dans les années pluvieuses. Quelques pluies légères, 
se produisant par intervalles, assurent la fécondation. Le versage du riz se produit assez 
fréquemment dans les années pluvieuses, surtout dans les parties profondes des rizières, 
où l’eau s’amasse. Les points où il se produit font en général exception et l’on peut 
presque toujours conclure de ce symptôme que la récolte sera ailleurs très-abondante. 

Dans l’extrème sud, le moissonnage commence en novembre et finit à la fin de janvier 
ou au commencement de février. Dans le nord, 1l débute et finit un ou deux mois plus tôt. 
Comme pour le repiquage, on réunit le plus de monde possible, de façon à éviter que les 
grains ne se détachent, ce qui se produit lorsqu'on attend quelques jours trop tard. 

On se sert, pour couper le riz, d’une pelite faucille très-grossièrement faite, dentée 
sur la face inférieure comme celle d'Europe. Au Laos et en Chine, le manche de la fau- 
cille est court el n'offre rien de remarquable. En Cochinchine, au contraire, les indigènes 
y ont adapté un grand crochet qui facilite la réunion des ehaumes dans la main. 

Le riz est toujours coupé vers le milieu de sa longueur, de façon à laisser en terre la 
partie inférieure des tiges, que l’inondation a revètue d’une couche de matière terreuse. 
Au fur et à mesure qu’on le coupe, on le réunit en bottes qu’on transporte dans l’em- 
placement choisi pour le battage et que l’on dispose en tas ou en meules, au-dessus 
desquels on élève un toit pour les préserver des pluies tardives. L'usage de ces toits, très- 
rare dans le sud, est presque général dans le Laos, où les pluies sont très-fréquentes à 
l’époque de la moisson. L’égrenage du riz se fait à côté de la meule, sur une aire dont 
le sol est pétri avec de la fiente de buffle. On se borne, après le pétrissage, à lisser sa sur- 
face et à la laisser sécher. L’égrenage se pratique différemment suivant les pays et selon 
l'importance des exploitations agricoles. Les petits eultivateurs battent le riz le plus sou- 
vent en piétinant dessus, ou en frappant les bottes sur des planches lisses ou garnies 
de dents. Les grands cultivateurs, surtout ceux de la Cochinchine, le font piétiner par 
leurs buffles. 

L'usage du fléau n’est connu que sur quelques rares points de la Chine. Les Lao- 
tiens se servent très-souvent de deux bambous croisés et réunis par une corde à leur 
extrémité, entre lesquels ils serrent une bottelette qu'ils frappent à tour de bras sur le sol 
ou sur une planche. Si ingénieux que soit ce procédé, il est à notre avis le plus pénible. 

Le vannage se fait presque toujours avec le tarare en Cochinchine et en Chine. Au 
Laos et chez les sauvages, cette opération se pratique de la manière la plus simple du 
monde. Pendant qu'un individu, à l’aide d’un van à main cireulaire, laisse tomber de sa 
hauteur le riz mélangé aux balles et à la poussière, un autre agite l'air avec un grand éven- 


396 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 
tail en bambou, de façon à faire tomber celte poussière et ces balles plus loin que les 
grains. On peut profiter pour ce travail d’un jour où règne de la brise. 

Le battage et le vannage achevés, le riz est emmagasiné dans des greniers en bambou 
ou en planches en forme de grandes caisses, placées dans l’intérieur des maisons en Co- 
chinchine, et en dehors au Laos, dans de petits bâtiments spéciaux. Dans l’un et l’autre 
pays, ces greniers sont toujours élevés au-dessus du sol et bien dégagés, afin de surveil- 
ler les rats et les autres animaux qui chercheraient à s’y introduire. Non décortiqué, tel 
qu’on le place dans ces greniers, le riz se conserve à peu près indéfiniment et n’est que 
très-peu atteint par les insectes. Décortiqué, au contraire, ils’ y conserve mal ; aussi les 
cultivateurs ne lui font-ils subir l'opération du décortiquage qu'au fur et à mesure des be- 
soins de la consommation ou de la vente. 

Dans le sud, en Cochinchine et au Cambodge, le décortiquage se fait à l’aide d’un ap- 
pareilassez analogue, comme principe et comme fonctionnement, à la paire de meules de 
nos moulins. Cet appareil se compose de deux paniers en forme de trone de cône, super- 
posés par leur petit bout et lutés intérieurement de terre glaise, dans lesquels on fixe 
verticalement de nombreuses lames de bambous faisant saillie d’un centimètre. Le 
panier supérieur est percé près de son centre d’un trou par lequel on introduit le riz à 
décortiquer ; il est mis en mouvement par une bielle que l’on manœuvre à la main. Le 
riz, entrainé au dehors par le mouvement de rotation, se décortique en passant entre les 
diverses lames de bambou ; malheureusement beaucoup de grains se brisent, et le riz 
perd ainsi une grande partie de sa valeur commerciale. Cet instrument si simple, et que 
chaque cultivateur peut confectionner lui-même, ne se trouve Jamais au Laos. Les indi- 
scènes décortiquent le riz en le pilant dans un grand mortier. En Chine dans les régions 
où existent beaucoup de pelites rivières et de ruisseaux se prêtant facilement à l’installa- 
tion de moteurs hydrauliques, on décortique le riz à l’aide de grandes meules en grès, 
munies comme les nôtres à leur face inférieure de sillons plus ou moins obliques, et mises 
en mouvement par des roues horizontales. 

A la suite du décortiquage, le riz est vanné, et il ne reste plus qu’à le piler. Cette opé- 
ration, destinée à lisser le riz et à le débarrasser de la poussière et des restes d’enveloppes 
échappées au décortiquage, s'exécute partout à l’aide d’un mortier en bois, ou quelquefois 
en pierre. À ce mortier pouvant contenir 25 à 50 litres de riz, est adapté un gros pilon en 
bois qui est mis en mouvement, tantôt avec les bras, très-rarement avec une roue hydrau- 
lique et le plus souvent avec le poids du corps. Dans ce dernier cas, on fixe au pilon un 
levier horizontal, prenant un point d'appui vers le milieu de sa longueur et à l'extrémité 
duquel une ou deux personnes pèsent de tout leur poids avec un pied, de façon à le sou- 
lever et à le laisser retomber aussitôt. Ilne reste plus ensuite qu'à vanner une dernière fois 
le riz, avant de le consommer. 

Le deuxième mode de culture du riz, qui est pratiqué dans les forêts, est un procédé 
barbare, transitoire, et destiné à disparaitre avec les progrès de la civilisation. Il consiste 
à brüler les forêts pour faire deux ou trois récoltes de riz consécutives. Cetle opération 
ne peut se renouveler dans le même endroit, comme nous l’avons déjà dit, qu’à quinze ou 


CÉRÉALES. 307 


vingt ans d'intervalle. Elle se pratique depuis Saigon jusqu'en Chine, mais plus fréquem- 
ment au Cambodge et au Laos, où la civilisation est plus arriérée et où les forêts sont plus 
étendues. Dans ces deux pays, ce mode de culture convient mieux que le premier aux 
habitudes semi-nomades d’une partie des habitants, à leur imprévoyance, à leur apathie 
et à leur état social qui ne les encourage que très-peu à exécuter les travaux pénibles que 
nécessite l'installation des rizières inondées ou permanentes. 11 peut avoir lieu tout aussi 
bien sur les pentes les plus‘abruptes, où les roches affleurent à chaque pas, que dans 
les plaines douées d’un sol profond. Pour qu'il soit praticable, 11 suffit que la forêt soil 
assez épaisse pour que, après son incinération, la terre ou les interstices des pierres déjà 
riches en humus, soient couverts d’une couche de cendre assez considérable. L'aba- 
lage des arbres se fait à la hache; on n’épargne que ceux qui sont trop gros ou dont le 
bois est trop dur. Cette opération se fait pendant la saison sèche, alors que les habitants 
ont des loisirs et de facon que les branches et les feuilles des arbres aient le temps de 
sécher avant l’'hivernage. Lorsque les cultivateurs jugent que la dessiccalion est suffisante, 
ils allument les feuillages, et grâce à la précaution qu'ils ont prise d’amonceler les bran- 
ches coupées sur les troncs des arbres, ils arrivent à les brüler en entier. Lorsque les 
forèts sont très-épaisses, ils ne brülent souvent, la première année, que la moitié des 
arbres de facon à pouvoir recommencer cet embrasement l’année suivante, et à obtenir 
une nouvelle quantité de cendre qui rend la deuxième récolte aussi belle que la pre- 
mière.Après l'incinération et avant de planter le riz, ils ont le soin de répandre la cendre 
le plus uniformément possible à la surface du champ. On plante le riz sans donner 
le moindre labour à la terre. Avec un bâton chez les sauvages et une houe légère chez 
les populations plus civilisées, un individu perce des trous de distance en distance, 
dans lesquels un autre, qui le suit, met trois à dix graines de riz qu'il recouvre aussitôt 
de terre. Suivant la fertilité du sol et selon qu'on plante ce riz la première ou la se- 
conde année de l'incendie, on rapproche les trous plus ou moins et on y met plus 
de grains. Ce n’est qu'après les premières pluies et alors que la terre est devenue 
suffisamment humide, qu'a lieu l’ensemencement du riz de forêt. Grâce aux pluies 
abondantes qui se succèdent presque chaque jour dans ces pays pendant l'hivernage, 
et aux principes organiques facilement assimilables que l’incendie accumule dans le sol, 
la germination et la croissance du riz planté dans ces conditions s’accomplissent très- 
facilement. On voit ce phénomène d’une plante aquatique croissant dans les terres sèches 
avec une aussi grande vigueur que dans l’eau. Nous n'avons jamais vu de touffes de riz 
plus belles que celles qu’on trouve parfois dans ces rizières aux endroits où un gros arbre 
a été brülé. Pendant toute sa période de croissance, le riz de forêt ne réclame aucun soin : 
mais dès que la maturité approche, on doit exercer à l’entour une surveillance des plus 
actives, pour le préserver des ravages des oiseaux, des cerfs et des éléphants. À cet 
effet, les cultivateurs installent au milieu des champs de riz un belvédère juché sur quatre 
immenses perches ; un homme y veille nuit et jour et éloigne les animaux par ses cris, 
en frappant sur un fam tam, ou en tirant sur des rotins à l'extrémité desquels est adapté 
un objet quelconque faisant du bruit. Ces rotins vont du belvédère aux extrémités des 


398 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


champs, comme les fils télégraphiques d’une station, et les vibrations qu'ils produisent 
éloignent les oiseaux. 

Nous avons dit plus haut que le sol des rizières de forêts ne subissait aucun labour : en 
Chine, il n’en est pas toujours ainsi : on le laboure souvent soit à la houe, soit parfois à la 
charrue dans les endroits défrichés depuis longtemps. Cette modification importante, né- 
cessaire dans un pays où n'existent plus de puissantes forêts, devrait être imitée par les 
populations du sud pour la culture du riz dans les forêts maigres. 

Au point de vue chronologique, le troisième mode de culture du riz devrait être placé 
en première ligne, car c’est celui qu'ont dù pratiquer les premiers habitants de l’Indo- 
Chine, quand ils n'avaient pas encore les outils nécessaires pour détruire les forêts et 
labourer le sol. Ils ont dù forcément faire leurs premiers essais d'agriculture dans les 
seuls points découverts du pays, sur les berges des fleuves et des lacs, dans le limon fer- 
tile qui les recouvre après le retrait des eaux. [ls pouvaient sur ces berges, vers lesquelles 
la pêche devait également les attirer, cultiver avec les mains seulement, et sans même 
avoir besoin d’un bäton. 

Pour ce genre de culture, on choisit les points des berges où l’eau forme une cou- 
che de 10 à 15 centimètres, et qui présentent une assez grande surface pour pro- 
duire une notable quantité de riz. Cette culture n'offre pas toutes les chances de succès 
de la culture en terre inondée, car si l’eau du fleuve descend plus bas qu'on ne l’a 
prévu, une partie du riz se trouve à see, et si elle ne descend pas assez, il est trop 
inondé. Aussi, ne cultive-t-on le riz de cette façon que lorsque les riz inondés ou de 
forêts ont manqué pendant l’hivernage, ou pour suppléer aux mauvaises récoltes. La 
culture du riz sur les berges se pratique dans toute l’Indo-Chine, mais surtout au Cam- 
bodge sur les bords du Grand Lac, où elle prend une importance exceptionnelle, et au 
Laos, où les points qui s’y prêtent sont nombreux et où la culture du riz en terre inondée 
est moins facile et plus aléatoire qu'en Cochinchine et en Chine. 

Le rendement des rizières varie avec les années, la richesse de leur sol, et le soin 
qu'on à apporté à leur culture. Ordinairement, dans une panicule de riz de moyenne 
grosseur, on compte cent grains, et dans beaucoup, le nombre des grains atteint cent cin- 
quante. L'emploi des engrais permet d'obtenir des panicules contenant jusqu'à deux 
cents grains. On considère comme excellente une récolte qui donne quatre-vingt-dix pour 
un, et comme très-mauvaise celle qui produit moins de trente. 

* Zea mays, Lin. — Comme importance, le maïs est la céréale qui vient immédiatement 
après le riz dans les cultures indo-chinoises. On le cultive dans toutes Les parties de la pres- 
qu'ile, mais plus particulièrement dans les points des montagnes de la Chine où la sé- 
cheresse et le froid rendent la culture du riz impossible. Cette plante est là, comme partout, 
la céréale des pays pauvres. Dans le sud, le maïs n’est cultivé qu’en très-petits carrés et 
ne sert guère qu'à la nourriture des animaux. Dans le nord, au contraire, où il est la base 
de la nourriture de beaucoup de populations des montagnes, des chevaux et des mulets, 
et où il sert à fabriquer de l’eau-de-vie, on en voit des champs d’une étendue considé- 
rable. Nulle part, il n’est cultivé comme plante fourragère, Cette plante se prèterait ce- 


CÉRÉALES. 399 


pendant merveilleusement à cet usage, en raison de l’extrème rapidité de sa croissance, 
sous ces climats. On pourrait obtenir, dans des champs différents, jusqu’à quatre récoltes 
consécutives dans le même hivernage. 

Comme partout, le maïs offre en Indo-Chine d'assez nombreuses variétés, différant par 
la taille des tiges, la grosseur des graines, mais surtout par leur couleur, qui varie du 
blane presque parfait au violet noir en passant par le jaune, le rose et le rouge. Les variétés 
jaunes sont, ainsi qu’en Europe, les plus communes età peu près les seules qu’on trouve 
dans les grandes cultures. Il existe aussi des variétés hatives et tardives que l’on choisit 
de préférence, suivant le plus ou moins de rapidité des besoins. Dans la saison hu- 
mide, la culture du maïs se fait comme celle du riz. Il n’est pas rare d'observer de petits 
champs de cette graminée pendant la saison sèche, sur les berges des fleuves et des 
lacs après le retrait des eaux, et dans les rizières irrigables en toute saison. Dans les 
années où le riz manque, ce dernier mode est pratiqué souvent sur une grande échelle. 
Malgré la possibilité qu'ont les indigènes, surtout ceux du sud, d'obtenir plusieurs ré- 
coltes pendant la même saison, ils n’en font le plus souvent qu'une seule au début des 
pluies. C’est ordinairement la première culture de l’année agricole. Dès que quelques 
pluies sont tombées et que la germination des graines est possible, ce qui à lieu en avril 
dans le nord et en mai dans le sud, on procède à la plantation du maïs. Sauf en Chine, 
la terre n’est jamais labourée pour cette culture. Les indigènes se bornent ordinairement 
à nettoyer la terre en bruülant les herbes et les broussailles qui la recouvrent; puis, à 
l’aide d’une houe ou d’un bâton, ils plantent quatre cinq ou graines de maïs dans des 
trous distants de 50 centimètres au plus et disposés en lignes placées à la même distance. 
Il n’est pas rare pourtant de les voir remuer légèrement la terre à la houe avant et même 
après la plantation. Ces semis, que tous les Indo-Chinois font toujours beaucoup trop drus, 
dans la fausse idée qu'ils tireront plus de produits du sol, ne reçoivent d'engrais qu’en 
Chine. Malgré cette absence d'engrais, le maïs croît avec une si grande rapidité sous ces 
climats privilégiés, qu'en moins de quatre mois sa végétation est achevée, et que six se- 
maines suffisent pour obtenir des épis ayant les graines assez développées pour pouvoir 
être mangées cuites à l’eau. 

La culture du maïs peut se faire dans tous les terrains; dans le sud, on la pratique 
pourtant de préférence dans les jardins ou dans les broussailles qui les entourent. Au 
Laos et au Cambodge, où cette plante est plus recherchée, on la plante le plus souvent 
dans les terres alluvionnaires couvertes d'herbes et de broussailles qui bordent les ri- 
vières et les fleuves. Dans ces derniers pays, on en trouve souvent sur les montagnes après 
que les forêts qui les couvrent ont été brülées. Ce n’est qu'en Chine qu’on le eultive 
dans des champs labourés comme en Europe. 

Les champs de maïs ne reçoivent pour ainsi dire aucun soin, et les Chinois seulement 
ont parfois la précaution de les biner pour détruire les quelques mauvaises herbes qui 
essayent de croitre, et qui sont d'ailleurs presque toujours étouffées par la vigueur de 
cette plante. 

La paille du maïs est toujours abandonnée sur le sol, ou, si on la récolte, c’est pour là 


400 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


bruler. Les épis sont coupés un peu avant leur maturité. Après les avoir fait sécher sur 
des nattes, ou suspendus sous des hangars, on détache les graines à la main ou au fléau. 
Dans les pays comme la Chine, où le maïs entre pour une part notable dans la nourriture 
des habitants, on mange ses graines de différentes facons : tantôt on les grille et on les 
fait cuire à l’eau; le plus souvent on les réduit en farine pour en faire une pâte sans levain 
qu'on fait euire au bain-marie ou sur le gril. Sans en avoir acquis la certitude absolue, 
nous croyons que les populations qui font un trop fréquent usage du maïs, contractent 
la pellagre comme en Europe. Cette raison, mais surtout sa sapidité peu recherchée, 
font qu'il constitue la nourriture des pauvres et des paysans. Les eaux-de-vie qu'il sert à 
fabriquer ont un goût et une odeur désagréables à cause de l’énorme proportion d'huile 
empyreumalique qu'elles contiennent. Elles produisent chez ceux qui en abusent des 
accidents nerveux que nous n'avons pas pu bien étudier, mais qui sont assez graves pour 
avoir été remarqués des Chinois. 

Triticum sativum, Vax. æstivum, Lin. — La variété de blé qu’on rencontre dans tout le 
sud et le centre de la Chine, quoique cultivée exclusivement en hiver, appartient au 
groupe des blés de printemps ou de mars. On ne lobserve qu'à partir du 21° degré 
de latitude et à une altitude de 1,200 mètres au moins. La température de lhiver 
de cette région est assez semblable à celle de notre printemps. Au sud de cette limite, 
nous pensons qu'on pourrait le cultiver avec avantage dans plus d’un endroit, en parüi- 
eulier dans le Laos supérieur. On cultive le blé de deux manières en Indo-Chine. Dans 
le sud de la Chine, où les pluies font à peu près complétement défaut pendant l'hiver, on 
ue le cultive guère que dans les champs que l’on peut inonder, tels que les rizières ou 
les berges des fleuves après l’abaissement des eaux. Dans le centre de la Chine, où la 
sécheresse de l'hiver est moins grande, on le cultive en terre sèche comme en Europe. 
Dans l’un comme dans l’autre cas, cette culture n’est toujours qu’accessoire, et la pri- 
mauté, malgré les sérieuses qualités du blé, reste toujours au riz qui est du reste sous ces 
climats beaucoup plus productif qu'aucune autre plante. Au sud comme au centre de la 
Chine, le blé n’est cultivé qu’en hiver; la température du printemps et de l’été de ces 
pays y est trop élevée et les pluies y sont trop abondantes, Cultivé à la même époque quë 
notre blé de printemps sous ces climats, il croïtrait tout en herbe, et s’il y fleurissait; 
il n’y fructifierait assurément pas. 

Quelles que soient les conditions de la culture du blé, la terre n’est presque Jamais 
fumée. On laboure quelques jours avant les semis et on herse ensuite. Les semis de 
blé ont Heu d'octobre à décembre, suivant les localités, et se font le plus souvent à la 
volée; il est très-commun cependant de les voir faire à la main, à l’aide d’un piquet. 
Dans ce dernier cas, lensemencement se fait en lignes. Ce mode de plantation au piquet, 
pratiqué seulement par les petits cultivateurs, offre en Chine les mêmes avantages et les 
mêmes inconvénients qu'en Europe : il économise la quantité de semences, produit du 
blé plus vigoureux, mais est beaucoup plus long et plus coùteux, ce qui s'oppose à sa 
généralisation. 


Dans les terres non irrigables, les champs de blé sont, comme en Europe; à peu près 


CÉRÉALES. 101 


abandonnés à eux-mêmes. Dans les champs où l'irrigation est possible, les cultivateurs 
ont le soin de faire de temps en temps entrer l’eau. Cette pratique, répétée cinq ou six 
fois jusqu’à la croissance complète du blé, assure sa beauté. La récolte se fait partout plus 
tôt qu’en Europe. Dans certaines régions du sud, on moissonne dès la fin de février ; 
dans d’autres, situées plus au nord, cette opération ne se pratique qu’en juin et juillet. 
Les chaumes, dont plus de la moitié reste dans le champ, sont coupés à laide d’une 
mauvaise faucille, réunis en bottes et transportés près des habitations. Le battage, qui 
a toujours lieu peu de jours après la récolte, se fait à l’aide de fléaux en bambou ou en 
faisant piétiner les buffles sur les épis. Le vannage se fait, comme celui du riz, soit avec 
le farare, soit avec le van à main. Ces diverses opérations terminées, le blé est con- 
servé dans des caisses et réduit en farine au fur et à mesure des besoins. On moud 
le blé à l’aide de deux meules en grès, disposées et faillées comme les nôtres, qui sont 
presque toujours mises en mouyement par les hommes. Dans quelques rares points de 
la Chine, on a recours aux moteurs hydrauliques. Le blutage se fait avec des tamis de 
plus en plus fins que l’on meut à la main. Malgré la défectuosité de tous ces moyens, 
les Chinois arrivent à obtenir d'assez belle farine. L'usage du pain étant sinon in- 
connu, du moins négligé des Chinois, cette farine est employée à faire les pâtisseries 
et à fabriquer des galettes que l’on euit sur le gril, dans des fours, ou le plus souvent 
à la vapeur d’eau dans des marmites. 

Le plus beau champ de blé chinois ne produit guère, comme rendement, que la 
moilié de ce qu'on obtient en Europe dans un champ de blé d'hiver. Ce résultat tient 
surtout à la variété de blé qu’on eultive qui est moins robuste et moins productive que 
nos blés d'hiver; il tient aussi à ce que cette céréale, succédant aux cultures d’été, trouve 
toujours le sol épuisé. 

La richesse nutritive du blé de Chine est également moins grande que celle de nos 
blés durs. Plusieurs analyses de farine, provenant de blé de Chine, faites en Cochinchine, 
ont démontré qu’elle ne contenait que 7 à 8 p. 100 de gluten au lieu de 12 à 14 que 
fournissent nos farines d'Europe. Cette pauvreté en gluten fait que la farine de Chine 
se prête mal à la panificalion. 

Avena nuda, L., var. chinensis, Kunth. — Cette variété d'avoine, remarquable par ses 
graines dépourvues de l’enveloppe noire et coriace des nôtres, n’est cultivée que sur les 
montagnes et les hauts plateaux du sud de la Chine, à une altitude de 2,500 mètres au 
moins, là où le climat est trop sec et trop froid pour permettre aux autres céréales de 
croître. C’est ordinairement la seule plante, avec les pommes de terre et les radis oléi- 
fères, qu’on cultive dans ces endroits. La saison chaude est celle de sa culture; rien 
cependant ne serait plus facile que de la cultiver en hiver comme le blé, dans les ré- 
gions suffisamment humides et là où l'irrigation du sol est possible. Cela s’observe d’ail- 
leurs quelquefois dans quelques localités humides du sud de la Chine. 

L'époque du semis de l’avoine est le début du printemps. Les semis se font à la volée 
dans les champs que lon vient de labourer et qu'on herse ensuite pour enterrer les 


graines. Contrairement à ce qui a lieu pour les autres cultures, les champs d’avoine 
Il. 5 


51 


402 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


reçoivent souvent deux labours : un au milieu de l’hiver et le second avant les semailles. 
Nous n’avons jamais vu fumer les champs destinés à la culture de cette céréale. Elle 
croit cependant avec une grande vigueur. La récolte se fait, comme dans toutes les ré- 
gions tempérées, en août et septembre. | 

Pour enlever aux graines les poils blanes et soyeux qui les recouvrent et qui sont plus 
nombreux el plus roides dans cette espèce que dans les autres, on les mouille avant de 
les moudre et on les place dans des sacs que l’on presse et que l’on roule entre les mains. 
Les quelques poils qui, après cette opération, adhèrent encore aux graines, sont retenus, 
après la mouture, par les tamis dont on se sert pour bluter la farine. La farine d'avoine 
est employée à faire des galettes sans levain que l’on cuit sur le gril, ou à confectionner des 
crêpes grossières qui conslituent, avec les galettes, la principale nourriture des habi- 
tants des hauts plateaux. Une portion des graines et la paille de cette céréale servent, 
comme en Europe, à nourrir les chevaux et les mulets, qui s'en montrent très-friands. 

Polygonum tataricum, L. — Le sarrasin n’est communément cultivé que dans la 
zone du Laos supérieur et du Yun-nan, où le terrain cesse d’être favorable à la culture du 
riz des montagnes et ne l’est pas encore à celle du blé et de l’avoine. Cette zone, située 
entre le 19° et le 22"° degré de latitude, offre des montagnes d’une altitude de 12 à 1,500 
mètres. Son climat est mixte; dans le fond des vallées, on trouve les plantes des pays 
chauds; au sommet des montagnes, commencent à croître celles des pays tempérés. L’es- 
pèce de blé noir qu’on y cultive et qu’on trouve dans toute la moitié septentrionale de 
l'Asie, a produit, comme toutes les plantes cultivées, deux ou trois variétés assez difficiles 
à distinguer entre elles. Elle diffère de celle qui est cultivée en Europe (Polygonum fago- 
pyrum) par plusieurs caractères faciles à reconnaître : la plante est plus grêle, les fleurs 
sont plus petites, les graines sont moins grosses et leur surface est rugueuse. C’est sur 
les pentes des montagnes qu’on établit les champs de blé noir; leur étendue est souvent 
considérable. La culture de cette céréale, qui parcourt en très-peu de temps ses diverses 
phases de végétation, a lieu comme en Europe à la fin de l’été, avant la chute des der- 
nières pluies. On fait les semis à la volée, en août, dans les champs que l’on vient de 
labourer et qu’on herse aussitôt. La floraison à lieu en septembre et la maturité en 
octobre ou au commencement de novembre. Les graines müres se détachant facilement, 
on a soin de faucher les tiges quelque temps avant la maturité. Avant de procéder à 
l'égrenage, qui se fait à l’aide de bâtons, de fléaux ou par le piétinement, on expose les 
bottes au soleil sur des nattes pour les faire sécher. 

Les populations pauvres utilisent les graines pour se nourrir; on fait avec la farine 
des galettes que lon cuit sur le gril; mais, en général, le sarrasin n’est employé qu'à nour- 
rir les oiseaux de basse-cour, ou à fabriquer une eau-de-vie assez estimée. 

Eleusine caracana, Gaertn. — Cette petite graminée est cultivée très-fréquemment 
par les montagnards des frontières de la Chine pour en fabriquer de l’eau-de-vie. Elle à 
produit un certain nombre de variétés différant par la grosseur et la couleur des graines, 
qui sont ou complétement blanches, ou rose violet, ou presque noires. Les chaumes ne 
dépassent jamais 40 centimètres de hauteur et sont souvent beaucoup plus petits. Les 


CÉRÉALES. 103 


champs d’éleusine sont très-souvent mêlés à ceux de sarrasin sur les mêmes montagnes ; 
ordinairement pourtant ils se font dans des endroits moins élevés, cetle plante s’accom- 
modant mieux des températures chaudes. 

Les semis se font en août, après que la terre a été labourée et purgée avec soin des 
mauvaises herbes, à la main, dans des trous percés à la houe et placés à 2 ou 3 déci- 
mètres de distance. Dans chaque trou, on dépose de 2 à 5 graines suivant la richesse du 
sol, et on les recouvre aussitôt d’un peu de terre. La récolte se fait en octobre ou en no- 
vembre, un peu avant l’entière maturité des épis, que l’on fait sécher sur des nattes avant 
de les battre. L’eau-de-vie que l’on fabrique avec les graines est une des plus estimées. 

Andropogon sorghum, Brot. (Sorghum vulqare, Pers.), — Plusieurs espèces et va- 
riétés de sorgho sont cultivées dans toutes les parties de lIndo-Chine. Les principales 
espèces sont : l’andropogon sorghum, ou sorgho vulgaire, l’andropogon bicolor, Yan- 
dropogon cernuus, Roxb., l’andropogon saccharatus, Kunth. Les trois premières es- 
pèces, avec leurs variétés, sont cultivées exelusivement pour leurs graines; la quatrième 
l’est aussi pour ses tiges qui contiennent du sucre, que l’on peut extraire de la même façon 
que celui de la canne. Ces divers sorghos, très-peu cultivés dans le sud, sont cullivés au 
contraire sur une très-grande échelle dans le nord. Dans le sud, les graines de sorgho ne 
sont guère utilisées que pour nourrir les volailles; dans le nord, elles servent à fabri- 
quer la plus grande partie des eaux-de-vie qu’on y consomme. Les Chinois se servent par- 
fois des tiges de sorgho comme combustible. 

Quoique tous les terrains conviennent à cette céréale, elle préfère pourtant ceux qui 
sont profonds et de nature argileuse. Les semailles de sorgho ont lieu au début de l’hiver- 
nage dans des terres bien labourées auparavant. Elles se font à la volée ou plus souvent à 
la main. On plante, dans des trous distants de 20 centimètres environ, de une à trois 
graines. On fume ordinairement le sorgho en Chine avec des engrais en poudre, qu'on 
dépose sur chaque pied quelque temps avant la germination. Les plantations ne re- 
coivent presque aucun soin, et il est bien rare qu’on leur accorde un léger binage pour 
détruire les mauvaises herbes. La récolte, qui a lieu depuis la fin de septembre jusqu’en 
décembre, suivant les régions, se fait à l’aide de la faucille. Les panicules seules sont 
coupées et emportées du champ dans des sacs ou des paniers. On les expose, avant de 
les battre, au soleil sur des nattes. Le battage se fait à l’aide de batons, de fléaux ou par 
le piétinement. 

Dans les parties centrales de la Chine, où la température ne permet pas aussi facile- 
ment que dans le sud, de faire dans le même champ deux récoltes de céréales, les cul- 
tivateurs sèment le sorgho dès le commencement d'avril, au milieu du blé et de l’orge 
et avant que ces plantes soient arrivées à maturité. Ce procédé fait gagner six semaines et 
permet au sorgho, dont la croissance est lente, d'atteindre facilement sa maturité avant 
l'hiver, mais il a inconvénient de ne donner qu’une récolte médiocre. Malgré le binage 
qu’on donne aussitôt après l'enlèvement du blé, on parvient difficilement à détruire les 
mauvaises herbes et à ameublir suffisamment la terre, pour que le sogho acquière la 
même vigueur que dans les conditions ordinaires. Ajoutons que le blé et l'orge en 


40% AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


souffrent toujours un peu, et qu'ils doivent être très-clair-semés, en vue de cette planta- 
tion. 

Hordeum vulgare, L. — La seule espèce d’orge que nous ayons trouvée en Chine, est 
l'orge vulgaire. Nous ne l'avons vu cultiver que dans les parties centrales du bassin du 
fleuve Bleu. Elle croîtrait cependant avec une grande vigueur dansles régions montagneu- 
ses du Yun-nan et du Se-tchouen, particulièrement dans les zones où l’on cultive l’avoine. 
L’espèee connue sous le nom de pamelle (/ordeum distichum, L.), rendrait assurément 
les plus grands services dans ces régions, autant à cause de sa croissance rapide que de la 
possibilité qu’elle offre d’être cultivée en été pendant l’hivernage. L'espèce vulgaire est 
cultivée par les Chinois en hiver dans les plaines des parties basses. On la sème vers le 
mois d'octobre, dans les terres que l’on vient de labourer. Malgré la fertilité du elimat et 
la richesse du sol, comme le labourage est presque toujours très-mal fait et qu'on ne 
fume presque jamais, nous n'avons Jamais vu de cultures d’orge comparables à celles 
d'Europe. L'orge est employée en Chine, en médecine, à la fabrication de l’eau-de-vie, 
et surtout à nourrir les habitants. On fabrique avec la farine des galettes que l’on cuit sur 
le gril ou qu’on expose à la vapeur d’eau. Ce dernier mode de cuisson, qui ne permet 
d'obtenir qu'un aliment päteux, est très-aimé des Chinois, sans doute parce qu'il se 
rapproche davantage du riz cuit à l'eau qui forme leur nourriture habituelle et préférée. 

Paspalum frumentaceum, Rotl. (Paspalum serobiculatum, L.). — Cette petite gra- 
minée n'est cultivée pendant l’hivernage que sur les hauts plateaux de la Chine, qui 
possèdent un climat trop sec pour permettre la culture des autres céréales, tels que les 
parties du Yun-nan et du Se-tchouen avoisinant le Tibet. Les semis, qui se font à la 
volée dans des champs bien labourés auparavant, ont lieu en avril. La récolte a lieu en 
août. Les graines qui sont petites et restent toujours enveloppées de la glumelle, même 
après le batlage, ne sont presque jamais utilisées pour la nourriture de l’homme; elles 
sont employées à fabriquer de l’eau-de-vie ou à nourrir les animaux. 

Panicum miliaceum, L., Panicum italicum, L. — Ces deux espèces de millet se ren- 
contrent fréquemment dans toute lIndo-Chine. Dans le nord surtout, où les habitants 
utilisent leurs graines pour se nourrir et pour fabriquer de l’eau-de-vie, on en voit des 
champs d’une notable étendue. Dans le sud, où les graines ne servent guère qu’à nourrir 
les oiseaux, les habitants se bornent le plus souvent à en planter quelques pieds dans leurs 
jardins. Comme toutes les plantes des pays chauds cultivées sous les tropiques, ces deux 
millets sont plantés pendant l’hivernage. On les sème au début des pluies et on les ré- 
colte à l'approche de la saison sèche. 

Phalaris canariensis, L. — On ne trouve ordinairement que quelques pieds de cette 
graminée dans les jardins ou parmi les cultures de riz de forêt. Ainsi qu’en Europe, les 
graines de cet alpiste servent exclusivement à nourrir les petits oiseaux. 

Coix agrestis, L. ou Coix arundinacea, Kœnig. — Deux espèces de cette singulière 
graminée croissent spontanément dans les parties humides de la basse Cochinchine ; 
l’une d'elles, le coëx arundinacea, croit sur le bord des arroyos, dans la vase ; l’autre croit 
dans les parties non inondées, mais très-humides. Ces deux espèces, qui ne sont très-pro- 


CÉRÉALES. 405 


bablement que deux variétés du Coëx lacryma, L., ont une extrême tendance au poly- 
morphisme. Aucune d'elles n’est cultivée ni utilisée par les indigènes des contrées où 
elles croissent à l’état sauvage, mais il n’en est pas de même d’une variété de l'espèce 
terrestre dont les fruits sont moins pierreux et renferment plus de substances nutri- 
lives ; elle est, rarement, 1l est vrai, cultivée en Chine. Les Chinois la plantent près 
du sommet des montagnes trop humides pour Le blé et trop sèches pour le riz. Is la sèment 
à la volée dans des terres labourées auparavant. La récolte à lieu vers le mois de sep- 
tembre. Les graines réduites en farine grossière, sont employées presque exclusivement à 
nourrir les pores. Les Chinois les utilisent aussi en médecine, ainsi du reste que la plu- 
part des céréales. 

Pisum satioum, L., Pisum arveum, L. — Ces deux espèces de pois, principalement une 
variété robuste de la première, tiennent une place considérable dans les grandes cultures 
du Vun-nan et des régions limitrophes jouissant d’un climat tempéré. Les pois, la‘ fève, 
le blé et le pavot sont les quatre plantes principales que l’on cultive en hiver dans les 
rizières inondées de ces régions. La plantation des pois se fait en novembre, alors que le 
riz est enlevé et qu’on a eu le temps de bien labourer et de bien herser la terre. Les semis 
se font à la volée, ou à la main, à l’aide d’un piquet ou d’une houe. Comme les pluies 
manquent souvent à l’époque de cette culture, il est presque toujours nécessaire de faire 
de temps en temps arriver de l’eau dans les champs de pois. 

Malgré les petites gelées nocturnes, la végétation des pois se fait convenablement à 
toutes les altitudes qui ne dépassent pas 2,300 à 2,400 mètres. 

La maturité des pois s’accomplit en avril et en mai; on les récolte alors que la 
floraison commence à peine à diminuer et que les gousses sont encore vertes. Celte 
manière de procéder a deux buts : d’abord de débarrasser le champ pour pouvoir 
labourer la terre et planter le riz, et ensuite d'obtenir des tiges tendres et vertes pou- 
vant se pulvériser facilement après la dessication. Cette pulvérisation, qui se fait à l’aide 
de fléaux en bambou sur un sol bien aplani et très-dur, s’accomplit au fur et à mesure 
des besoins, de façon à éviter que la poudre ne s’altère. Cette poudre est employée à 
la facon du son en Europe, pour nourrir les porcs; elle est mêlée ordinairement à 
une certaine quantité de débris de riz ou de légumes quelconques, qui la font manger 
plus facilement par ces animaux. Les graines, dont la plupart sont petites, incompléte- 
ment müres et par conséquent très-tendres, sont mangées par les hommes après avoir 
été réduites en farine. Quelques champs sont réservés pour produire des graines müres, 
devant servir de semis pour l’année suivante. Le plus souvent, les Chinois plantent en- 
semble dans le même champ des pois et des fèves, ou des pois et du blé, ou enfin des fèves 
et du blé. Dans ces deux derniers cas, ils plantent les fèves, lorsque le blé est compléte- 
ment germé, dans les endroits où les semis ont manqué, ou sont trop elair-semés. 

Faba vulgaris, Mœnch (Vicia faba, L.). — La fève serait au nombre des cinq graines 
dont l’empereur Chin-nong aurait introduit la culture en Chine l’an 2822 avant notre 
ère. Depuis cette époque, elle est cultivée dans tout le nord et le sud-ouest de la Chine, 
qui possèdent le climat see qui lui est le plus favorable. Dans le Yun-nan, elle fait partie 


406 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


des cultures d’hiver dans toutes les vallées élevées d’au moins 1,200 mètres. Au-dessous 
de cette altitude, ainsi que dans toules les régions très-brumeuses et humides, sa culture, 
sans être impossible, ne présente plus assez d'avantages pour être admise dans les grandes 
cultures, et ce n’est plus alors, ainsi que les pois, qu’une plante de jardin. De même que 
toutes les plantes d'hiver du Yun-nan, on ne peut planter les fèves que dans les terres 
que l’on peut inonder. On les cultive done exelusivement dans les rizières. 

Les semis se font à la volée dans le champ que l’on vient de labourer, ou le plus sou- 
vent à la main, dans les champs de blé qu’on établit dans les rizières. Le mélange des fèves 
et du blé se fait bien plus fréquemment que celui des pois et du blé. La récolte, qui a lieu 
en avril ou en mai, selon l'altitude, se fait bien avant la maturité des graines. On récolte la 
plante, soit en l’arrachant, soit en la coupant ; on réunit les tiges en tas et on les fait sécher 
au soleil afin de pouvoir les réduire facilement en poudre. Cette poudre, qui se compose 
de débris de tiges, de feuilles et de graines, sert à nourrir les pores comme celle des pois. 
Les graines sont utilisées par les Chinois, soit cuites à l’eau, soit grillées pour être man- 
gées à la main, soit, mais plus rarement, pour nourrir les chevaux, après les avoir fait 
tremper quelque temps dans l'eau. 

Ervum lens, L. (Vicia lens, Germloss). — La lentille commune est cultivée dans quel- 
ques points du Yun-nan jouissant d’un climat tempéré analogue à celui d'Europe. De 
même qu'en France, cette plante est rarement cultivée seule, le plus souvent les cultiva- 
teurs chinois la mélangent au blé et aux pois. Les semis se font en automne, en même 
temps que ceux des plantes précédentes, etla récolte a lieu en mai et juin. L’unique variété 
que nous ayons observée avait des graines assez petites et un peu moins volumineuses 
que celles de la lentille commune de France. Ces graines, séparées de celles du blé ou des 
pois au moment du battage, sont mangées parfois cuites, mais le plus souvent elles sont 
réduites en farine et mangées en purée. Les tiges de la lentille, malgré leurs bonnes qua- 
lités fourragères, ne sont pas utilisées pour nourrir les bestiaux. 


S2. — Plantes textiles. 


Depuis quelques années, la demande du commerce chinois et européen tend à dévelop- 
per la culture des textiles, jusqu’à présent assez négligée en Cochinchine, au Cambodge 
et dans le Laos birman. 

Gossypium herbaceum, L. — Le coton est le plus important des textiles indo-chinois. 
I! sert à confectionner la plus grande partie des vêtements des habitants et tous les objets 
de literie, tels que les couvertures, les matelas, les oreillers, ete. C’est également le 
textile dont l’exportation est le plus développée. 

Plusieurs espèces et variétés de coton sont cultivées en Indo-Chine. Dans le sud, on 
trouve principalement le gossypium herbaceum et ses variétés; dans le nord, le gossy- 
pium  religiosum prédomine. Presque partout on trouve ces deux espèces associées 
dans la même culture. Lorsque les cultivateurs ont en vue l’abondance de la récolte, ils 
plantent davantage la première, ets’ils recherchent surtout la beauté et la largeur de la soie, 


PLANTES TEXTILES. 407 


ils plantent la seconde. Nulle part nous n’avons observé la variété jaune qui sert à fabri- 
quer l’étoffe connue sous le nom de nankin. Dans le sud, on trouve souvent une trei- 
sième espèce, le gossypium arboreum, dont la hauteur dépasse quatre mètres, mais dont 
la soie est trop courte et la récolte, à cause de la hauteur de la plante, trop pénible. Les 
habitants se bornent le plus souvent à en semer quelques pieds pour former les haies qui 
entourent leurs jardins; ils en récoltent les capsules pour confectionner des matelas et des 
couvertures. Ce cotonnier, transporté dans des régions plus froides, cesse, comme le ricin, 
d’être arborescent et devient annuel et herbacé. 

La culture des deux premières espèces de coton, ou coton herbacé, est presque partout 
pratiquée dans des conditions déplorables. Outre que les terres destinées à recevoir le 
coton ne sont presque jamais fumées, le labour qu’on leur fait subir est toujours trop peu 
profond. Jamais on ne défonce le sol d’une façon suffisante, les semis se font toujours 
trop drus. Quoique le coton herbacé soit une plante vivace pouvant vivre quatre à cinq 
ans, on le cultive presque toujours dans les zones fertiles et humides, comme s'il était 
annuel, c’est-à-dire qu'on détruit chaque année les champs après la récolte. Dans les 
zones sèches, comme on en trouve tant en Chine, dans le Yun-nan, la plantation ne 
peut acquérir une vigueur suffisante la première année, et on la laisse subsister trois et 
quatre ans ; dans ce cas, on a la précaution de biner avec soin le champ à l’approche des 
pluies, et de retrancher toutes les tiges mortes. Ge mode de culture étant sans impor- 
tance, nous le laisserons de côté pour nous occuper du coton annuel. 

On le cultive de deux façons. Le premier procédé, qui est celui des peuples civilisés, se 
pratique dans les plaines défrichées que lon vient de labourer soit à la charrue, soit à la 
houe; il est employé au Cambodge et en Cochinchine ; le second, qui est plus barbare, se 
fait sur les montagnes après l'incendie des forêts; c’est à peu près le seul usité au Laos dans 
les zones couvertes de forêts. Les plus belles plantations, celles que l’on fait en vue de la 
vente, se voient surtout dans les terres rouges situées sur les montagnes habitées par les 
sauvages et dans les terres alluvionnaires des îles du Cambodge. Dans ces terres, le coton 
acquiert plus de 15 décimètres de hauteur et n’est pas arrêté brusquement dans sa végéta- 
tion à l’arrivée de la saison sèche, comme dans les terres maigres. 

L'époque la plus favorable à la plantation du coton est le début de la saison humide, 
Il n’est pas rare pourtant de voir les petits cultivateurs attendre la fin des pluies; dans 
ce cas beaucoup de pieds ne donnent que quelques fleurs ou n'arrivent même pas à 
fleurir. 

Les semis de coton se font presque toujours à la main. Dans les terres préalablement 
labourées, binées ou nettoyées par le feu, on plante trois à cinq graines, dans des trous dis- 
tants de 30 à 50 centimètres et disposés en lignes placées aux mêmes distances. Les Indo- 
Chinois ne réduisent pas, au moment du binage, les touffes de coton à un seul pied, 
comme cela se fait dans les pays où l’on cultive cette plante avec soin. Aussi, arrive-{-il sou- 
vent que certains pieds sont étouffés par la vigueur de leurs voisins, ne donnent ni fleurs 
ni capsules, etépuisent le sol en pure perte. En même temps qu'on pratique le binage et le 
sarclage, on butte les pieds comme nous le faisons en Europe pour les pommes de terre. 


408 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Suivant la richesse de la terre, on répète cette opération une ou deux fois, et, du soin qu'on 
met à la faire, dépend en grande partie la beauté de la récolte. 

En Basse-Cochinchine, sur les collines habitées par les sauvages, dont les terres sont 
fortes et riches, on mélange souvent au coton du riz ou des haricots que l’on plante peu 
de temps après. En Chine, dans les provinces du littoral, il est presque de règle que les 
Chinois plantent en automne des fèves ou des pois dans les champs de coton, avant la 
fin de la récolte des capsules. Ces fèves ou ces pois s'appuient sur les tiges de coton, 
comme sur des tuteurs, végètent tout l'hiver etarrivent à maturité à l’époque de la culture 
du riz. En procédant ainsi, les Chinois obtiennent trois récoltes dans le même champ et 
dans la même année. La dernière est très-faible el 1l est impossible de répéter deux 
années de suite ce mode de culture sans épuiser la terre pour longtemps. Aussi, n'est-il 
employé que de temps en temps et toujours après une forte fumure. 

La récolte du coton se fait, comme on sait, au fur et à mesure de la maturité des cap- 
sules. À parüir du moment où elles commencent à s’entr'ouvrir pour laisser échapper leur 
soie, une personne passe dans le champ tous les deux ou trois jours et en fait la cueillette. 
Les Indo-Chinois mettent souvent de la négligence dans ce travail, de sorte que s’il survient 
une pluie, la soie du coton se salit et perd une grande partie de sa valeur. Dès que les 
capsules sont cueillies, les cultivateurs les font sécher à l'abri, puis les amassent dans des 
caisses ou dans des magasins couverts spéciaux. L’égrenage se pratique ensuite au fur et 
à mesure des besoins ou de la vente, après qu’on a séparé à la main les enveloppes de la 
soie. On emploie, dans toute l’Indo-Chine, pour cette opération, un instrument composé 
de deux petits cylindres superposés en bois dur, à l’extrémité de l’un desquels est adaptée 
une petite manivelle que l’on meut d’une main, pendant qu'avec l’autre on présente le co- 
ton, de façon à le faire passer entre les deux cylindres. Cet égrenoir, si simple, que chaque 
cultivateur peut le confectionner lui-même, sépare parfaitement la soie des graines; mais il 
dépense beaucoup de force, ne permet d’égrener qu'une quantité insignifiante de coton et 
ne convient nullement à des exploitations agricoles un peu grandes. Dans le Laos supé- 
rieur, les indigènes adaptent à cet instrument un volant circulaire qu'ils mettent en mou- 
vement à l’aide de deux pédales. 

Pour carder le coton, les Indo-Chinois se servent d’un are dont ils font vibrer la 
corde au milieu du coton, qui est placé sur une table ou dans un grand panier. En Chine, 
cet arc est plus grand qu’au Laos, et on adapte dans la corde plusieurs anneaux en laiton 
destinés à accroitre les vibrations. Ce procédé de cardage donne d’excellents résultats et 
suffit parfaitement pour filer le coton. 

Triodendron anfractuosum, D. C. (Bombax pentandra, L.). — Cet arbre, d’origine 
américaine, connu sous le nom vulgaire de cotonnier arbre, se rencontre dans toute la 
partie tropicale de la vallée du Mékong. On le trouve autour de tous les villages, en parti- 
culier dans les haies, où on le reconnait de loin à la rareté de son feuillage et à sa ramifi- 
cation horizontale, disposée en étages ou en verticilles. Le coton qu'il fournit est très-abon- 
dant, mais il est trop court pour être filé et il ne sert qu’à confectionner des matelas, des 
oreillers et des couvertures piquées. Il faut l’égrener avant de employer, si l’on veut que 


PLANTES TEXTILES. 109 


ces objets soient doux, légers et qu’ils ne soient pas attaqués par les insectes. L'huile que 
renferment les graines est rarement utilisée pour l'éclairage. 

Bombax, L. — Ce genre est représenté, dans les parties tropicales de l’Indo-Chine, 
par cinq espèces croissant spontanément. Les deux plus importantes sont le Bombax 
malabaricum, D. C., que l’on trouve à l’état sauvage dans les terres alluvionnaires du 
Laos, et qui est parfois cultivé dans ce dernier pays, ainsi que dans le fond des profondes 
vallées du sud de la Chine, etle Bombax albiflorum (nobis), qui est le seul qu'on ren- 
contre en Cochinchine. Des trois autres espèces, deux au moins ne sont très-probable- 
ment que des hybrides des deux espèces précédentes. Leurs fleurs varient du blanc au 
rouge pale. Toutes ces espèces el variétés produisent un coton entièrement semblable à 
celui de l’£Eriodendron, et employé aux mêmes usages. Il est recueilli par les habitants, 
avec d'autant plus de soin qu’on s’avance plus avant vers le nord, et que le froid devient 
plus sensible. La récolte se fait en mai et juin, époques où les capsules tombent naturel- 
lement des arbres. Les Chinois du sud font souvent confire les fleurs du Bombax mala- 
baricum ou en fabriquent des mucilages qu’ils aiment beaucoup. L’écorce sert, comme 
celle du tilleul en Europe, à faire des cordes grossières, des liens, ete. 

Bœlhmeria nivea, Mook et Arn. (Urtica nivea, L.). — L'ortie de Chine ou Bæœhmérie, 
nommée ai et {chou-ma par les Chinois et cay-gai par les Annamites, est, après Le coton, 
la plante textile la plus cultivée dans toute l’Indo-Chine. On la trouve dans toutes les zones 
chaudes, où le chanvre, dont la plus grande solidité est reconnue et appréciée des Chinois 
eux-mêmes, ne peut être cultivé. L'ortie de Chine, qui n’est préférable au chanvre que 
pour la fabrication des vêtements, croit à l’état spontané dans toutes les forêts clairières du 
Laos supérieur, entre le 18° et le 21° degré de latitude, mais les habitants de cette zone 
ne la récoltent pas et préfèrent les variétés améliorées par la culture. Partout ailleurs en 
Indo-Chine, cette plante n’est pas spontanée, mais elle croit avec une très-grande vigueur 
et montreune telle tendance à se naturaliser qu'il esttrès-fréquent de voir d'anciennes cul- 
tures abandonnées, persister pendant de longues années dans le même endroit et parfois 
même s'étendre. 

Il y a en Indo-Chine trois variétés principales d’ortie de Chine. La plus commune a 
les tiges et surtout le dessous des feuilles légèrement argentés. La deuxième a les mêmes 
parties complétement blanc d'argent et les feuilles plus grandes. La troisième, qui 
est la plus rare, à ses feuilles violettes en dessous et les tiges plus ou moins violacées. 
Ces trois variétés sont plus charnues, moins rameuses et présentent par conséquent beau- 
coup plus de facilité que la plante sauvage, pour la séparation de l'écorce et de la tige. 

Un climat assez chaud, mais surtout humide, des terres argileuses profondes sont les 
conditions dans lesquelles l’ortie de Chine prospère le mieux. Les petits cultivateurs choi- 
sissent toujours, pour la planter, les bords des ruisseaux ou des rivières ou les environs des 
puits et des sources. La multiplication de l'ortie de Chine a lieu au début des pluies, d’avril 
à juin suivant les régions. Elle se fait toujours par des boutures provenant de touffes de 
racines qu'on divise et qu’on éclate à l’aide d’un couteau. Lorsqu'on manque de souches, 


il faut recourir à la multiplication par graines, qui est longue et délicate : on choisit des 
IL. 52 


410 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


graines parfaitement mures, et qui, jetées dans l’eau, ne surnagent point. La terre des- 
tinée aux semis doit être bien labourée, parfaitement fumée et disposée en plates-bandes 
d'un mètre de largeur environ ; on sème à la volée. Comme les graines pourrissent très- 
facilement, on ne les recouvre point de terre et on les abrite pendant le jour avec des 
naltes. Il faut enfin pendant un ou deux mois arroser très-fréquemment. 

Dans la plantation par boutures, la terre doit être bien labourée, bien hersée et 
fumée ; les trous, percés à la houe, sont distants d'environ deux décimètres et placés sur 
des lignes séparées par un intervalle égal. On doit mettre autant que possible un peu de 
fumier autour des boulures, et en l’absence de pluie, il faut les arroser plusieurs fois. 

La première année, les champs d’ortie de Chine ne produisent guère qu'une récolte, mais 
à partir de la seconde et pendant deux à trois ans, ils en fournissent régulièrement trois. 
Les fibres provenant des tiges de la première année et de la première récolte des années 
suivantes, sont toujours grossières à cause de la lenteur que la plante a mise à se développer: 
mais celles qui proviennent des secondes et des troisièmes récoltes, sont plus fines et 
conviennent surtout pour la confection des vêtements. Pour donner trois récoltes annuelles, 
les champs d’ortie doivent être très-soignés ; entre deux récoltes consécutives, il faut 
purger la terre de toutes les mauvaises herbes, et chaque année, il est nécessaire de lui 
donner une bonne fumure. Les engrais liquides sont ceux qui conviennent le mieux, et 
ceux que les Chinois préfèrent. La récolte de l’ortie de Chine se fait à l’aide de couteaux. 
Les liges, longues de 5 à 18 décimètres, sont coupées aussi bas que possible, puis, 
sur le champ même et avant l’évaporation de la sève, on procède à l'enlèvement de l’é- 
corce. Celle opération, qui exige une cerlaine habitude, se fait en cassant et tordant les 
tiges vers leur tiers inférieur, de façon à pouvoir introduire l'index sous lécorce et à 
l'enlever. Deux procédés sont ensuite employés pour isoler les fibres de lépiderme ou 
teiller cette écorce. Le premier consiste, alors que l'écorce est encore fraiche, à l’étirer 
plusieurs fois entre la cuisse et la paume de la main. Le second, qui donne de plus 
beaux produits et sert surtout à préparer les fibres destinées au tissage, est analogue au 
rouissage du lin ou du chanvre. Après avoir enlevé les écorces, on les réunit en paquets, 
on les étale sur le sol, ou mieux encore sur les toits ou sur des nattes, et on les mouille 
cinq ou six fois par aspersion. Pour achever de désagréger les fibres, on les frotte par 
petites poignées sut le dos d’un couteau. Quand on tient à les avoir entièrement blan- 
ches avant le tissage, on les expose de nouveau à la rosée de la nuit sur les toits ou sur 
l'herbe. Mais, la plupart du temps, on préfère achever leur blanchiment, d’après les 
mêmes procédés, après qu’elles sont tissées, ou en les plongeant dans l’eau de chaux à 
plusieurs reprises. 

En Cochinchine et au Laos, l’ortie de Chine sert exclusivement à la fabrication des 
cordes et des filets. 

En Chine, on l’emploie en outre à confectionner des étoffes qui tiennent, par leur 
brillant, le milieu entre les étoffes de soie et de lin. 

Cannabis sativa, L., var. sinensis. — Cette variété chinoise du chanvre cultivé n’en 
diffère guère que par ses folioles plus étroites, qui sont au nombre de 5 au lieu de 7. Au 


PLANTES TEXTILES. Al 


Laos, on la fume à la façon du tabac et on en fait des préparations analogues au 
haschich; en Chine, on la cultive, pour ses fibres, dans les régions montagneuses et 
tempérées. On sait que le chanvre n’acquiert ses propriétés exhilarantes que dans les 
pays chauds, où il se modifie considérablement. Sa taille diminue et arrive à ne 
plus dépasser un mètre, ses feuilles se frisent, se erispent et se couvrent à leur sur- 
face d’un nombre beaucoup plus considérable de glandules jaunâtres exhalant l'odeur 
très-forte qu’on retrouve à un moindre degré sur la plante cultivée dans les climats 
tempérés. Les modifications s’accentuent d'autant plus que la plante est cultivée dans 
des régions plus chaudes et que les graines proviennent de souches importées depuis 
plus longtemps ; elles amènent promptement son infécondité : après cinq ou six ans, d’a- 
près ce qui nous à été dit, les fleurs avortent et on est obligé de faire venir des graines 
des régions plus septentrionales. 

Dans le Laos, les plantations de chanvre se font pendant la saison sèche, en novem- 
bre, sans aucun engrais, dans la vase des berges des fleuves ; on récolte en février. 
En Chine, les semis se font au début de la saison des pluies, en avril et mai. Les 
terres sont d’abord labourées à la charrue, et, si elles sont trop pierreuses ou trop en 
pente, remuées à la houe. Dès qu'il, commence à pleuvoir, on sème à la volée et on 
enterre les graines en hersant le champ. Quoique les habitants n’emploient jamais d’en- 
grais pour cette plante, elle croit très-bien et les tiges arrivent, assez souvent, à plus 
de trois mètres de haut. Après la récolte, on réunit les tiges en bottes et on les fait rouir 
en les plongeant pendant plusieurs semaines dans l’eau des ruisseaux. Lorsqu'on Juge 
que les fibres sont suffisamment désagrégées, on procède au teillage. Cette opération 
se pratique comme chez nous, en plaçant les tiges sur un billot, et en frappant avec un 
maillet, de façon à isoler les tiges de l'écorce. 

Les fibres du chanvre servent surtout en Chine à confectionner les cordes etles filets. 
Néanmoins, dans les régions montagneuses où manquent le coton et l’ortie de Chine, les 
habitants fabriquent avec le chanvre des étoffes grossières. Pour filer les fibres, ils se 
servent de la quenouille ou d’un rouet assez analogue au nôtre. Les graines de chanvre 
servent comme en Europe à nourrir les petits oiseaux et à fabriquer de l'huile. 

Linum usitatissimum, L. — Le lin est cultivé en Chine pour lhuile que renfer- 
ment ses graines et surtout pour le mucilage que donne leur enveloppe. Dans la plaine de 
Yun-nan, dont l'altitude est de 2,000 mètres et dont le climat est sec et assez analogue à 
celui de l'Europe méridionale, on le sème en mai et juin; on le récolte en août et sep- 
tembre. 

Crotalaria juncea, L. — Cette légumineuse, qui fournit la matière textile connue dans 
le commerce européen sous le nom de jute, est cultivée au Cambodge et au Laos. Bien que 
le climat de la Basse-Cochinchine lui soit favorable, on lui préfère presque partout l’ortie de 
Chine. Les fibres de cette plante, trop grossières pour être employées à la confection des 
vêtements, pourraient être avantageusement utilisées, à cause de leur bas prix, à la fabri- 
cation de toiles communes. Jusqu’à présent, la culture de cette plante ne se fait guère au 
Cambodge et au Laos que pendant la saison sèche, dans le limon déposé par les eaux sur 


412 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


les berges des fleuves et des rivières ; il faudrait la pratiquer sur une plus grande échelle 
et pendant l’hivernage pour qu'elle puisse fournir, comme dans l'Inde, un aliment suffi- 
sant à l'exportation. Les semis se font à la volée et, quelle que soit la saison choisie pour 
la culture, la croissance de cette plante demande à peine deux mois. Les terres les plus 
maigres et le labour le plus léger lui suffisent. Les tiges, rameuses seulement au som- 
met, atteignent au plus un mêtre de hauteur et ne dépassent guère la grosseur d’une 
plume d’oie. Leur récolte se fait par arrachement, après la floraison. On les laisse ex- 
posées pendant quelque temps à la surface du sol, puis on les fait sécher, et, à l’aide d’un 
maillet, on les bat sur un billot. Ces diverses opérations sont extrêmement faciles, et ex- 
pliquent le bas prix de ce textile que les indigènes n’emploient qu’à la confection des 
cordes et des filets. 

Corchorus capsularis, L. — Cette tihacée annuelle, et deux autres espèces très-voisines, 
le corchorus acutanqulus, L. et le corchorus tridens, L. fournissent une matière textile 
qui porte dans le commerce, comme la précédente, le nom de jute, mais qui est moins 
précieuse. Elles eroissent dans tout l'extrême sud de l’Indo-Chine, dans les endroits hu- 
mides et découverts, près des villages et des routes : nulle part les indigènes ne les utili- 
sent. 

Sida acuta, Burm., Sida scoparia, Lou. — Cette petite malvacée est naturalisée dans 
toutes les régions tropicales, près des villages, des routes, dans tous les lieux fréquentés 
par l’homme. On fait quelquefois des balais avec les tiges, et des cordes grossières avee 
les fibres. 

Hibiscus (cannabinus, L. ?). — Cette plante, dont nous n'avons pas encore déter- 
miné le nom spécifique avec certitude, est cultivée dans tout le Laos inférieur. Chaque 
cullivateur en plante un certain nombre de pieds autour de son habitation ou dans les 
champs de riz de forêts, et fabrique avec ses fibres les cordes qui lui sont nécessaires. 
Cette plante est très-vigoureuse, les tiges atteignent facilement trois mètres de hauteur, 
dépassent le pouce en grosseur, et sont très-riches en matière fibreuse. Les fibres sont 
grossières, mais très-résistantes et très-propres à la fabrication de cordages. On plante 
cet hibiscus pendant l'hivernage et on le récolte au début de la saison sèche. L’écorce 
est détachée à la main au moment où l’on vient de couper les tiges. Le teillage se fait en 
les frottant plusieurs fois, comme l’ortie de Chine, sur une lame de fer non coupante. 

Chamcærops excelsa, Thunli. — Ce joli palmier est cultivé dans presque toute la Chine 
pour les fibres textiles que fournit la gaine de ses feuilles. Il ne dépasse pas le tropique 
au sud, et ne s’avance pas vers le nord au delà des points où le thermomètre descend 
longtemps au-dessous de zéro. Il supporte facilement l’action de la neige. Il aime surtout 
les lieux humides des montagnes, situés près des torrents et des ruisseaux. Les pieds fe- 
melles fournissent une quantité innombrable de graines qui mürissent en novembre et 
décembre. La floraison a lieu en avril. On détache les feuilles au fur et à mesure qu'elles 
menacent de tomber. Leur limbe sert à fabriquer de nombreux objets, tels que des éven- 
fails, des chapeaux, des paniers. Les expansions latérales des pétioles entourant le stipe 
sont formées de fibres brunes intriquées, très- nombreuses et très -solides ; e’est sur- 


PLANTES TEXTILES. 113 


tout la partie de l'arbre que l’on utilise. En cousant ensemble quelques-unes de ces 
gaines, les sauvages font des manteaux imperméables à la pluie. Les Chinois en font 
des malles, des chapeaux et des sacs d'emballage. Après avoir désagrégé les fibres à l’aide 
d’un peigne, on en fait des cordes assez solides et très-bon marché.-En résumé, ce pal- 
mier est une des plantes les plus utiles de la Chine, en même temps qu'un arbre d'or- 
nement d’un bel effet et il se propagera sans doute rapidement dans le midi de la France, 
où il a été introduit. 

Bromelia ananas, L. — Les feuilles de l’ananas cultivé renferment des fibres avec 
lesquelles on fabrique à Manille des tissus d’une souplesse ef d’une finesse remarquables. 
Il est à regretter que les Indo-Chinois ne tirent aucun parti de ce textile, qui n'es! 
utilisé que très-rarement en Cochinchine. 

Musa paradisiaca, L. — Sauf de très-rares exceptions, les Indo-Chinois ne tirent au- 
cun parti des fibres contenues dans les pétioles du bananier; cet arbre est cependant très- 
abondant dans le Laos supérieur; le bananier sauvage couvre la plupart des montagnes 
qui bordent les fleuves et les rivières. 

Morus indica, L., Morus atropurpurea (Morus rubra, Lou.), Morus alba, L. — 
Quoique les müriers ne soient pas des plantes textiles, comme ils servent à produire 
le textile le plus précieux de tous, la soie, leur étude trouve naturellement place iei. 

Il y a trois principales espèces de murier cullivées en Indo-Chine; la plus commune 
est le murier nain de l'Inde. On la trouve depuis la Basse-Cochinchine, jusque dans 
le Laos supérieur. Abandonnée à elle-même, elle atteint quatre mètres de hauteur : 
cullivée, elle dépasse rarement deux mètres. Cette espèce a produit plusieurs variétés 
assez difficiles à distinguer par leurs feuilles plus ou moins grandes et plus ou moins 
découpées'. La seconde espèce de murier, dont les caractères spécifiques nous paraissent 
mal tranchés, est arborescente et ne se rencontre guère que dans quelques localités de la 
Cochinchine. Quant à la troisième espèce, le muürier blane où commun, on ne la trouve 
que dans le nord de lIndo-Chine, et en Chine dans les régions basses et chaudes. 

La culture du muürier n'offre presque pas de difficultés en Indo-Chine, particulièrement 
celle des deux espèces arborescentes. Elles n’ont besoin d'aucun soin, et c'est à peine 
si les cultivateurs enlèvent les branches mortes. Dans quelques endroits, on met un 
peu de fumier au pied, et l’on a la précaution de couvrir le sol qui les entoure d’une forte 
couche de paille. Dans ces conditions, lorsque les müriers sont plantés dans des endroits 
humides, 1ls donnent deux ou trois récoltes de feuilles. La multiplication de ces deux es- 
pèces se fait de boutures, de marcottes ou de graines. Les deux premiers procédés sont 
les plus communs. 

La culture de l'espèce naine exige plus de travail, mais en revanche elle donne plus de 
feuilles, et en raison de sa hauteur, qui ne dépasse pas celle de l’homme, la cueillette en 
est plus commode. Dans des endroits suffisamment humides et lorsqu'on peut avoir recours 
à l'irrigation, cette espèce produit jusqu’à cinq feuillaisons par année et permet pour ainsi 

1 Parmi ces variétés, nous signalerons le mürier multicaule (Morus multicaulis, Perr.) qui a été élevé au 
rang d’espèce par certains auteurs. 


114 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


dire un élevage ininterrompu du ver à soie. On la multiplie exelusivement par des 
boutures, qui se font presque aussi facilement que celles du saule. En moins de deux 
mois, elles produisent des rameaux assez longs et assez garnis de feuilles pour permettre 
une récolte. Ces boutures, longues ordinairement de trois décimètres, coupées en sifflet 
à leur extrémité et faites avec des rameaux de deux ans, gros comme le doigt environ, sont 
enfoncées dans le sol aux deux tiers de leur longueur et inelinées de façon à pouvoir en - 
suite être enterrées, après qu'elles ont fourni des pousses assez longues. En général, elles 
sont plantées beaucoup trop dru, à quelques centimètres seulement les unes des au- 
tres, et en lignes distantes de trois à quatre décimètres. Il en résulte que les muriers ne 
se développent qu'incomplétement et que leurs racines, trop peu profondes, ne trouvent 
plus, au début de la saison sèche, l’eau nécessaire pour entretenir la foliation. Une partie 
des tiges se dessèche, et il devient nécessaire de les recéper à l'approche des pluies. 
Aussi choisit-on souvent pour l’emplacement de cette culture, les berges des cours 
d'eau ou les vallées humides. 

Le ver à soie indo-chinois est plus petit que celui des régions tempérées, et il peut se 
reproduire toute l’année. Moins de deux mois suffisent pour une évolution complète; aussi 
les tentatives d'exportation de cette espèce en Europe ont-elles échoué. Les graines 
éclosent en roule ou au moment de leur arrivée. La soie n’est pas inférieure à celle de 
l’espèce des pays tempérés, lorsqu'elle est bien dévidée. Malheureusement cette opéra- 
lion est faite d’une façon très-défectueuse, qui a jusqu’à présent déprécié toutes les soies 
de provenance indo-chinoise. 

Araignée à soie. — À la suite des plantes textiles, nous devons dire quelques mots 
d'une araignée qu’on trouve abondamment dans les broussailles du sud du Yun-nan. Elle 
produit une soie comparable à la soie ordinaire. Celte araignée, rougeatre, de grosseur 
moyenne, se mulfiplie seule dans les basses futaies des montagnes; c’est vers le mois de 
novembre ou de décembre qu’elle est le plus abondante et que son abdomen est le mieux 
rempli. Nous n'avons pu assister à l’opération du dévidage, on nous à dit qu'il était très- 
facile. La soie est très-résistante, un peu moins fine et d’un jaune tout à fait semblable à 
la soie ordinaire. On en fabrique des étoffes. Dans le Yun-nan, près de Ta-lan où nous 
en avons vu de très-beaux échantillons, cette soie valait environ 2°,50 les 500 grammes. 
Il y a, dans le sud de l’Indo-Chine, d’autres espèces d’araignée, produisant de la soie; 
mais elles ne sont nulle part assez abondantes pour qu’on se donne la peine de les re- 


cueillir. 


S 3. — Plantes oléagineuses. 


Un trouve en Indo-Chine presque toutes les plantes oléagineuses des tropiques et des 
pays tempérés: dans le sud, se trouvent le cocotier, la sésame, l’arachide, etc. ; dans le 
nord, le colza, le pavot, le chanvre, le lin, ete. 

Les Indo-Chinois consomment très-peu d'huile dans leur alimentation, ainsi que le 
demande le climat qu'ils habitent. 


PLANTES OLÉAGINEUSES. 415 


Leurs procédés d'extraction sont aussi simples qu'imparfaits. Après avoir brové les 
oraines dans un mortier, ou avec des meules, comme cela se voit parfois en Chine, on 
presse la pulpe dans des arbres creusés en forme de goullière, inclinés légèrement et 
frelfés presque toujours à leurs extrémités pour résister à la pression. Celle-ei se fait avec 
un long levier, ou le plus souvent à l’aide de coins qu’on enfonce successivement à l’ex- 
trémité la plus élevée de l'arbre; l'écoulement de l'huile a lieu par une rigole percée de 
trous, creusée au fond de la gouttière. 

Avant de soumettre la pulpe à la pression, on l’enferme dans des sacs, ou l’on en fait 
des rondelles qu’on entoure avec des liens. Malgré cette précaution, comme l'huile de 
certaines pulpes ne s’écoulerait pas à la température ordinaire, on les chauffe préalable- 
ment dans des bassines, ou on les soumet à l’action de la vapeur d’eau. Avec ce procédé, 
les fabricants d'huile n’obtiennent qu'une faible portion de l'huile contenue dans la pulpe. 

Certaines graines, comme celles du riein, ne sont point comprimées : on les soumet à 
l’ébullition dans l’eau, après qu’elles ont été réduites en pulpe, et on recueille l'huile qui 
surnage à la surface. Ce procédé présente l'inconvénient d’altérer les huiles. La elarifica- 
tion se fait le. plus souvent par le repos et la décantalion; aussi la plupart des huiles sont- 
elles impropres à l'usage de nos lampes perfectionnées. En Chine, on les clarifie avee plus 
de soin, soit en les exposant au soleil, soit en faisant intervenir l’action de certaines plantes, 
soit, ce qui vaut mieux, en les filtrant. 

Les tourteaux provenant de l'extraction des huiles sont partout utilisés. Si les graines 
dont ils proviennentsont comestibles, on les donne aux animaux, en particulier aux pores: 
dans le cas contraire, ils servent d'engrais, après avoir été mélangés à de la cendre ou à 
du fumier. 

Cocos nucifera, L. 


Le cocotier constitue la principale plante oléagineuse de l’ex- 
trème sud de l’Indo-Chine. I n’est cultivé sur une grande échelle que sur le littoral, à 
une distance de quelques kilomètres seulement de la côte. Quoique cet arbre paraisse 
prospérer près de la mer, on en trouve de fort beaux dans le Laos supérieur, au centre 
même de l’Indo-Chine; il croit même en Chine par le 21° degré, au fond des vallées 
chaudes du VYun-nan. Le cocotier n’est cultivé comme plante oléagineuse qu’en Cochin- 
chine. Le bois, les feuilles, le fruit et ses enveloppes, sont utilisés ailleurs à des usages que 
tout le monde connait. 

Sur le littoral, on plante le cocotier sans ordre à trois ou quatre mètres de distance envi- 
ron; dans les terres alluvionnaires du delta des rivières, on le plante presque toujours en 
lignes entre lesquelles on creuse souvent des rigoles ou des fossés. La multiplication se 
fait de semis, comme celle de tous les palmiers ; on plante les graines dans des trous peu 
profonds, après les avoir fait germer auparavant. Pendant la première année, il faut les 
protéger contre les animaux ; ensuite on les abandonne à elles-mêmes. Sept ans après, les 
Jeunes plants commencent à fleurir et à fructifier. Pendant une période qui atteint proba- 
blement soixante ou soixante-dix ans, ils donnent chaque année une ou deux récoltes. La 
floraison a lieu toute l'année ; elle est plus active au début de l'hivernage. La fructification 
n’a lieu que plusieurs mois après l’apparition des fleurs et en général pendant la saison 


116 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


sèche. En raison de l'irrégularité de la floraison, il arrive presque toujours qu'on trouve 
sur le même pied des fleurs, des fruits jeunes et des fruits presque murs. 

1} existe d'assez nombreuses variétés de cocotiers différant par la couleur, la grosseur, 
la qualité de leurs fruits. Comme arbres fruitiers, on préfère les espèces dont le fruit est gros 
et qui contiennent le lait le plus sucré et le plus abondant. Comme plantes oléagineuses, 
on préfère les variétés rustiques qui fleurissent et fructifient presque à la même époque, de 
façon à pouvoir faire l'extraction de l’huile une seule fois par an. Avant de soumettre les 
oraines au pilon, on les sépare de leur enveloppe à l’aide d’une hachette qui sert à les ouvrir 
et à les briser. La pulpe doit être chauffée avant d’être pressée, car l’huile de coco 
est peu fluide et se solidifie à la température de 24 degrés centigrades. 

Arachis hypogea, L. — L’arachide ou pistache de terre est cultivée depuis Saigon 
jusqu'au centre de la Chine. Plusieurs variétés se succèdent dans cet espace ; aucune n'est 
comparable aux belles et grosses variétés qu’on trouve en Afrique, particulièrement au Sé- 
négal. 

L’arachide est cultivée pendant la saison chaude et humide. On la sème en mai, dans 
les terres sablonneuses les plus pauvres et à peu près impropres aux autres cultures. Dans 
les terres argileuses riches, elle donne moins de graines, et la récolte est plus difficile. 
La plantation a lieu après que la terre a été bien labourée, bien hersée et disposée en 
billons larges d’un mètre, séparés par d’étroits sillons, construits en partie à la houe et 
qui servent à l'écoulement des eaux. Les graines sont plantées, à l’aide d’un piquet, sur 
trois lignes distantes de 20 à 30 centimètres environ. 

La récolte se fait vers le milieu de la saison sèche lorsque les tiges commencent à se 
laner et que la terre est desséchée ; ce travail long, mais peu pénible, est fait ordinaire- 
ment par les femmes et les enfants. Après que les tiges ont élé arrachées à la main, on se 
met à récolter les gousses qui se sont enterrées dans le sol après la fructification. Un 
homme retourne la terre avec une houe, pendant que la femme et les enfants accroupis 
la pulvérisent à l’aide d’un sareloir ou de tout autre instrument, et recueillent les grai- 
nes une à une. Comme ce travail est très-long et qu'il se pratique en plein soleil, les 
moissonneurs s’abritent ordinairement sous un toit en paille qu’ils déplacent avec eux. 
La récolte d’un hectare d’arachide demande plus d’un mois de travail à toute une famille. 

Une partie des graines d’arachide sont grillées et mangées. Une plus grande 
quantité est employée à faire des pâtisseries, surtout des nougats. Le reste sert à fabri- 
quer de lhuile qui est surtout employée à l’éclairage. L’extraction de l'huile doit se 
faire peu de temps après la récolte, afin d'éviter le rancissement des graines. Avant de les 
livrer au pilon, on les débarrasse de leurenveloppe en les soumettant à un léger grillage qui 
en facilite l'enlèvement à la main. 

Sesamum indicum, D. C. (Sesamum orientale, L.).— Les deux variétés de cette plante 
oléagineuse, lune à graines brunes, l’autre à graines blanches, sont cultivées depuis 
Saigon jusqu'au centre de la Chine. L'une et l’autre se naturalisent avee la plus grande 
facilité. Nulle part, pourtant, elles ne se reproduiraient indéfiniment une fois abandonnées 
à elles-mêmes, La culture en est excessivement facile, et, si les indigènes possédaient des 


PLANTES OLÉAGINEUSES. 417 


pressoirs à huile suffisamment énergiques pour des graines aussi petites, il est probable 
qu'elle serait plus répandue. 

L'huile est employée pour l'alimentation et les graines servent à confectionner des pätis- 
series très-estimées. La culture se fait dans la saison humide, soit dans des champs spéciaux, 
soit, ce qui est plus fréquent, dans les champs de riz de forêt. Dans ce dernier cas, on sème 
la plante, quelque temps après la plantation du riz, dans les lieux où celui-ci a manqué. Les 
semis se font de mai à juillet; on gratte très-légèrement la terre après avoir répandu quel- 
ques graines à sa surface. Quelle que soit la nature du sol, le sésame croît toujours facile- 
ment. La récolte a lieu vers le mois de septembre et doit se faire avant la maturité parfaite 
des capsules. On coupe les tiges et on les expose au soleil sur des nattes, afin d'achever 
leur maturité et de déterminer l'ouverture des capsules. Le sésame, en raison de l’extrème 
facilité de sa culture et des étendues considérables de terrain sablonneux qui y sont propres, 
est assurément une des plantes oléagineuses de l’Indo-Chine qui pourraient fournir le plus 
de produits à l'exportation. 

Ricinus communis, L. — Le ricin ou palmna-Christi est naturalisé à peu près dans 
toute l’Indo-Chine. Il est vivace et arborescent. Dans les terres qui restent suffisamment 
humides, il dépasse souvent trois mètres de hauteur, et ses ramuscules ne meurent pas. 
Dans les terrains secs, les ramuscules périssent chaque année comme chez les plantes 
sous-frutescentes. 

On observe deux variétés ou plutôt deux types principaux de riein en Indo-Chine, l’une à 
feuilles violettes et grandes, l’autre à feuilles petites et d’un vert tendre. Entre ces deux types 
extrêmes, se trouvent beaucoup de variétés intermédiaires. Le ricin n’est utilisé qu’en 
Chine où sa culture à pris quelque extension depuis les demandes du commerce eu- 
ropéen pour le graissage des machines à vapeur. Cette culture a surtout lieu sur les 
montagnes du centre de la Chine bordant les fleuves, dans les endroits trop pierreux et trop 
en pente pour permettre la eulture de la plupart des autres plantes. Dans ces régions suffi- 
samment chaudes pour que le ricin reste vivace, il n’est presque l’objet d'aucun soin ; les 
habitants se bornent, après l'avoir semé, à l’'émonder chaque année au printemps et à empé- 
cher les herbes de se multiplier en trop grande abondance à son pied. Vers le mois de 
septembre ou d'octobre, ils vont cueillir les fruits à la main, puisilsles réunissent en tas 
qu'ils arrosent légèrement afin de faciliter la décomposition des enveloppes et la récolte des 
_ graines. L’extraction de l'huile se fait soit en chauffant la pulpe avant de la soumettre. 
à la presse, soit en la soumettant à l’ébullition dans l’eau. Son peu de fluidité la rend im- 
propre à l'éclairage et les Chinois ne l'utilisent guère que pour la peinture. 

Elæcocca vernicia, Ad. Juss. (Vernicia montana, Lou.). — Trois espèces appartenant 
à ce genre sont cultivées dans la partie nord de l’Indo-Chine, pour l'huile particulière 
que l’on extrait de leurs graines. Deux d’entre elles, dont nous n’avons pas encore déter- 
miné le nom spécifique, sont représentées par un pétit nombre de pieds autour des villages, 
sur les montagnes du Laos supérieur, à partir du point où les Dipterocarpus ne peuvent 
plus croître et où les habitants manquent par conséquent de la précieuse oléo-résine qu'ils 


fournissent. Quant à la troisième espèce, on la trouve abondamment en Chine et au Japon 
IL. 53 


418 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


dans toutes les zones jouissant d’un climat presque tempéré. On la sème au printemps sur 
lés flancs des montagnes, dans tous les points où la culture des céréales est impossible 
ou du moins très-difficile. Sa croissance est assez rapide, et en moins de einq à six ans 
elle donne des graines. La floraison a lieu de février à mars et la maturité des fruits en 
octobre et novembre. Pour séparer les graines de l’enveloppe, on met les fruits en tas que 
l’on arrose pour faire pourrir les coques. L’extraction de l’huile se fait à la presse ordi- 
naire. Les hommes qui sont chargés de cette opération, ainsi que la plupart de ceux qui se 
servent de cette huile, sont souvent atteints d’une éruption de la peau, plus douloureuse 
encore que celle que produit l'huile de eroton. Les Chinois prétendent qu'après un certain 
temps on finit par ne plus y être sensible. Cette huile, bouillie avec de la litharge, de l’alun 
et de la stéatite, forme un vernis très-précieux, qu'on emploie beaucoup en peinture, 
mais qui sert surtout, mélangé à de la résine, à calfater les barques. Ce vernis est également 
très-employé pour fabriquer des papiers huilés servant à l'emballage. 

Aleurites triloba, Forst. (Juglans camirium, Lou.). — Cet arbre, dont les fruits sont 
connus sous le nom de noix de Bancoul ou des Moluques, est cultivé dans toute la partie 
tropicale de l’Indo-Chine. Ilse multiplie de graines, fleurit en mars et avril, et fructifie en 
novembre. Ses fruits, de la grosseur d’une noix, contiennent deux ou trois graines. L'huile 
qu'elles fournissent est épaisse, et sert exclusivement en peinture. 

Raphanus sativus, L., var. Rap. oleifera. — Ce radis, connu sous le nom de radis 
oléifère, a les racines très-petites et fibreuses ; il est cultivé dans les parties hautes du Yun- 
nan et du Se-tchouen qui confinent au Thibet. Dans les régions froides, on le cultive en été; 
dans les régions relativement chaudes et humides, on le cultive en hiver. Les semis se 
font à la volée dans les terres labourées, on herse pour enterrer les graines. En moins de 
trois mois, ce radis parcourt toutes les phases de sa végétation. On arrache les pieds après 
maturation et on les réunit en {as que l’on arrose pour favoriser la décomposition des 
enveloppes du fruit. Au bout de quelques mois, elle est suffisamment avancée et l’on pro- 
cède au battage. L'huile qu’on extrait des graines de radis, est très-fluide, passable pour 
l'alimentation et excellente pour l'éclairage. 

Stillingia sebifera, À. Juss. (Croton sebiferum, Lin.). — L'arbre à suif est très-répandu 
dans toutes les régions du sud et du centre de la Chine qui jouissent d’un climat 
tempéré. Il atteint souvent plus de 10 mètres de hauteur, et n’est pas cultivé ; les 
habitants se bornent à protéger les sujets qui se développent naturellement autour des 
maisons. Sa reproduction se fait de graines ; il fleurit au printemps etses graines mürissent 
en novembre et décembre. Elles sont grosses comme un petit pois, et enveloppées d’une 
couche blanche ciro-graisseuse formée par l’arille, qui constitue, avec l'huile contenue 
dans leur intérieur, les parties exploitées de la plante. Pour extraire la couche graisseuse, 
on pile les graines et on les fait dissoudre dans de l’eau bouillante à la surface de laquelle 
la graisse vient surnager. Eile est très-blanche, lorsqu'elle est bien préparée, et possède 
une assez grande fermeté pour qu’on puisse lui associer dans la fabrication des bougies 
une certaine quantité d'huile d’arachide, de colza ou de radis. Quant à l'huile contenue 
dans l’albumen et l'embryon, on ne l’obtient qu'après avoir, à l’aide de meules chauffées, 


PLANTES OLÉAGINEUSES. 419 


réduit les graines en une pulpe fine qu'on soumet encore chaude à l’action de la 
presse. 

Celastrus paniculatus, Wild. — Cette liane ligneuse, qu’on rencontre à l’état spon- 
tané dans l'Inde et depuis Saïgon jusqu’au sud de la Chine, produit des graines riches en 
huile. Nulle part elle n’est cultivée ; on la trouve dans toutes les haies et dans toutes les 
broussailles. Elle fleurit en mai et Juin et fructifie en octobre. Les fruits, composés de 
trois coques s’ouvrant facilement pour laisser échapper la graine qu’elles contiennent, 
sont recueillis un peu avant leur parfaite maturité. On les expose au soleil sur des claies 
et on isole les graines à l’aide d’un van à main. Ces graines sont grosses comme des pois, 
et entourées d’une arille rouge rayée ; on les pile et on les soumet à la presse. L'huile 
qui provient de l’arille, de l’albumine et de embryon, a une odeur vireuse, qui la rend 
impropre aux usages culinaires ; on l’emploie pour l'éclairage. 

Brassica napus, L., var. Br. oleifera. — Une variété de colza différant très-peu de 
celle d'Europe, est très-répandue dans le sud de la Chine et dans le nord du Laos, sur les 
hautes montagnes. On la trouve cultivée en {rès-petits carrés, souvent même par pieds 
isolés, entre les pierres du lit des torrents. Parfois on la mélange à d’autres plantes, telles 
que le blé, les fèves, les pois. Les semis se font à la main, vers le mois de septembre ou 
d'octobre, la récolte a lieu vers le mois de mai. L'huile est une des plus estimées pour l’é- 
clairage; mélangée à la cire de Chine et à celle de l'arbre à suif, elle se solidifie facilement, 
et sert à faire des bougies que l’on colore ordinairement en rouge avec du cinabre; la mè- 
che est formée d’une tige d’ombellifère, autour de laquelle est enroulé en spirale un fil de 
coton ; cette huile est brülée quelquefois seule dans de petits vases en terre, en porcelaine 
ou en métal, servant de lampe, au moyen de mèches poreuses, faites avec la moelle de 
plantes aquatiques. | 

Calophyllum inophyllum, L. (Balsamaria inophyllum, Lou.) — Cay-mun des Anna- 
mites. — Ce bel arbre, répandu à peu près sur tout le littoral des parties tropicales de l'Asie 
et de l'Océanie, est souvent cultivé en Cochinchine dans les régions où l’eau saumätre 
des rivières empêche la plupart des autres arbres de croître. La présence du sel dans le 
sol ne lui est cependant pas indispensable comme aux palétuviers. Son bois dur et rou- 
geàtre est employé en charronnage et en menuiserie. La multiplication de cet arbre se fait 
très-facilement de graines. Il fleurit vers les mois de mars, d'avril et de mai, ses fruits 
muürissent et tombent en octobre et novembre. Leur récolte se fait sur les routes avec un 
panier, et sur le bord des rivières et des arroyos, avec de petites pirogues. Ces fruits, qui 
surnagent, contiennent une huile verte très-abondante qui sert à peindre les boiseries 
placées près du sol; elle les préserve assez bien des termites. 

Olea europæa, L. — Sur les flancs des montagnes, dans les vallées des affluents du 
Tong-king et du fleuve Bleu, nous avons trouvé une espèce d’olivier très-voisine de loli- 
vier sauvage. Elle atteint facilement la grosseur d’un poirier en plein vent. On pourrait 
l'utiliser pour propager, par greffe, l'espèce cultivée, qui trouverait dans le sol pierreux 
des montagnes du sud de la Chine un terrain très-favorable. 

Jatropha curcas, L. (Curcas purgans, Baill.). — Le pignon d'Inde est cultivé depuis 


420 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Saïgon jusqu'en Chine pour clôturer les jardins, en raison de la facilité avec laquelle cet 
arbriseau prend racine de bouture. Ce n’est qu’exceptionnellement que les habitants en 
recueillent les graines pour extraire l'huile qu'elles renferment; elle est douée, comme 
son nom l'indique, de propriétés éminemment purgatives. Cinq ou six de ces graines 
mangées en entier, — comme nous l’avons observé une fois, — provoquent des accidents 
gastro-intestinaux, simulant le choléra, et pouvant amener la mort lorsqu'elles ne sont pas 
vomies rapidement. L'huile qu’on en extrait, et qui est quelquefois usitée dans la méde- 
cine européenne, sert exclusivement, en Indo-Chine, à l’éclairage. La floraison de cet 
arbrisseau a lieu en mai et juin, et la maturation des graines en novembre et décembre. 
Pour séparer les graines de leurs enveloppes, on est obligé de réunir les fruits en tas 
dans des endroits humides, jusqu'au moment où l’on juge que les enveloppes sont assez 
décomposées. L’extraction de l'huile se fait, comme celle du riein, à la presse, après avoir 
soumis la pulpe à l’action de l’eau bouillante ou de la vapeur. 

Helianthus annuus, L. — Cette plante, vulgairement connue sous le nom de grand 
soleil ou de tournesol, s’accommode très-bien des différents climats de l’Indo-Chine. On 
la rencontre aussi bien à Saïgon qu'en Chine. Partout les habitants en cultivent quelques 
pieds et mangent ses graines légèrement grillées. 

Moringa polygona, D. C. (Anoma moringa, Lou.). — Cet arbrisseau arborescent est 
cultivé comme plante d'ornement dans presque tous les jardins de l'extrême sud de l’Indo- 
Chine. On mange ses fruits verts à la facon des haricots. L'huile qu’on extrait de ses 
oraines jouit de propriétés précieuses pour l’horlogerie, mais à un degré moindre que 
celle de sa congénère, le Moringa aptera. 

Thea oleosa, Lou. — Cet arbre diffère du thé ordinaire par sa taille deux ou trois 
fois plus grande et ses feuilles plus petites; 11 croît spontanément dans les parties du Yun- 
nan et du Se-tchouen jouissant d’un climat chaud et humide. On en recueille les graines 
en octobre et novembre. Elles contiennent une huile comestible excellente. 

Cire végétale, dite de Chine. — Nous n'avons pu assister qu'à la multiplication de 
l'insecte (Coccus sinensis, Westw.) qui la produit. Elle se fait sur un troëne (Zigustrum 
lucidum. Aït.), qui croît dans une région différant, comme elimat, du pays de production 
de la cire elle-même. Les plantations destinées à cette éducation se font dans le nord du 
Vun-nan et le sud-ouest du Se-tchouen, au pied des montagnes, dans des endroits abrités 
contre les grands vents, où la terre reste to ujours humide. Le ZLigustrum lucidum se pro- 
page de graines, et sa culture est des plus faciles; une fois planté, on peut l’abandonner 
à lui-même. Il est préférable cependant de biner chaque année le sol à son pied, de lui 
fournir quelques engrais, de retrancher les branches mortes et de le laisser reposer une 
année sur deux; ce repos est nécessité par la taille des petits rameaux qui portent les nids. 
On doit également, lorsque les pieds sont vieux et ont perdu de leur vigueur, les ébrancher 
complétement, afin de leur faire produire de jeunes rameaux, qui se prêtent mieux à lé- 
ducation des insectes. 

Vers le mois d'avril ou celui de mai, trois semaines environ avant l’époque présumée de 
l’éclosion, on coupe les branches portant les nids, on les dépouille de leurs feuilles, on les 


PLANTES OLÉAGINEUSES. 421 


divise en fragments portant quatre à cinq groupes d'insectes eton les enveloppe dans de la 
paille de riz, de manière à former des bouchons longs de 20 à 30 centimètres; on attache 
huit ou dix bouchons à la base des branches des arbres choisis pour la multiplication. 
Quelques jours après, les insectes, qui sont très-pelits et presque blanes, éclosent, perforent 
leurs coques, se répandent dans la paille, puis grimpent sur les branches et gagnent les 
petits rameaux sur lesquels ils se groupent, en oceupant rarement une surface de plus de 
deux centimètres carrés. Presque immédiatement après leur groupement, ils s’entourent 
d’une coque eiro-mucilagineuse, qui va en augmentant de grosseur, mais qui ne devient 
vraiment volumineuse qu’au printemps suivant; ces coques ressemblent alors à des pa- 
quets de mousse blanchätre. Cette mousse, de nature cireuse, se solidifie légèrement avant 
l'éclosion, pour s’affaisser ensuite. C’est ce moment qu'il faut choisir pour faire une nou- 
velle multiplication sur d’autres arbres, et c’est en même temps celui où les cultivateurs 
des plaines viennent acheter les insectes pour les emporter dans leur pays. Ils se servent 
de grands paniers en bambou, divisés en huit ou dix compartiments par des cloisons ho- 
rizontales, sur lesquelles ils placent les rameaux à côté les uns des autres, sans les 
superposer. Les paniers sont recouverts de papier huilé et percés latéralement de nom- 
breux trous destinés à permettre la cireulation de l'air. Les porteurs doivent, sous peine 
de perdre les insectes, arriver trois ou quatre jours après l’éclosion, qui se fait dès qu'ils 
parviennent dans les vallées et les plaines chaudes. Aussi font-ils souvent la route au pas 
gymnastique. Une fois l’insecte arrivé dans les plantations d’arbres destinés à la produc- 
tion de la cire, commence la phase de cette culture que nous n'avons pu observer !. Ces 
arbres appartiennent sans doute à plusieurs espèces. L'arbre le plus communément dési- 
oné est le Rhus succedaneum, L. On indique également un frêne (Fraxinus sinensis) et 
un hibiscus (Æibiscus syriacus). 

Divers. procédés sont employés pour séparer la cire des matières étrangères qu'elle 
renferme. Dans certains pays, on la met dans des sacs en toile de soie qu’on maintient 
dans le fond d’une bassine pleine d’eau bouillante ; après un certain temps d’ébullition, 
la cire vient surnager à la surface ; on la laisse refroidir et on l’enlève avec facilité. Dans 
d’autres pays, on la place sur une toile tendue sur un vase de terre vide, qu'on plonge 
dans un chaudron d’eau bouillante, la eire fond et filtre à travers la toile. Dans les deux 
procédés, la eire se trouve assez bien purifiée pour pouvoir être employée immédiatement. 
Comme les tourteaux contiennent encore une certaine quantité de cire, on les soumet, 
après les avoir fait sécher, à l’action de l'huile bouillante en les placant dans des sacs de 
soie. L'huile dissout alors tout ce qui reste de cire. Cette cire est très-blanche, solide et 
à cassure lamelleuse, comme le blanc de baleine; elle est employée parfois en médecine ; 
le plus souvent, elle sert à fabriquer des bougies, après qu’elle a été mélangée à une cer- 
taine quantité d'huile. La propriété qu'elle a de solidifier les huiles, permet, malgré son 


prix élevé, de fabriquer des bougies d’un prix assez bas. Seule, cette cire brûle mal et n’est 
jamais employée pour l'éclairage. 


1 Elle a été décrite par M. Simon, consul de France en Chine, qui a rapporté, je crois, en Europe quelques 
arbres à pe-la. Tel est le nom chinois de la cire dont il est question ici. EG 


422 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


S 4. — Plantes tinctoriales. 


Les plantes tinctoriales sont très-nombreuses en Indo-Chine. Outre celles qui sont 
communes à tous les pays chauds, telles que le rocou, l’indigo, le sappan, on y trouve cer- 
taines plantes particulières, telles que le Auellia indigotica et la gomme- laque. 

Gomme-laque. — La gomme-laque est produite par le Coccus lacca, Kerr. qui est un 
petit insecte rouge comparable à la cochenille. Cet animal se reproduit sur des arbres ap- 
partenant à des familles très-différentes et qui sont: le Focus religiosa, L., le Ficus indica, 
Lamk. des Ficées; le Butea frondosa, Roxb., un A/bizzia, Durazz., deux A/fzelia, 
Smith, etle Xylia dolabriformis (?) des légumineuses; deux Z#zyphus des Rhamnacées; un 
Combretum" etun Terminalia des combretacées ; un Randia, Houst. des rubiacées et le 
Croton lacciferum, L. des euphorbiacées. Tous ces arbres croissent en grand nombre 
dans les forêts du Laos inférieur et sur le bord des rizières. On les trouve aussi dans le 
Cambodge et en Cochinchine. La variété des arbres propres à l'élevage du Coccus lacca 
semble prouver que la gomme-laque n’est pas un produit d’exsudation des arbres, mais 
qu'elle est élaborée par l’insecte même. La culture de cet insecte se résume presque 
entièrement au transport de l’insecte sur des arbres choisis à l'avance. 

Au moment de la récolte précédente, on a eu soin d’enfermer dans de la paille de 
riz les fragments de gomme qui doivent servir à la reproduction; on les tient à l'abri du 
soleil. Dès que les insectes,contenus dans la gomme, éelosent et se répandent sur la paille, 
on se hâte d'aller fixer les paquets de gomme à la base des branches. Les insectes grim- 
pent et vont se grouper sur les rameaux de deux ou trois ans, moins gros que le doigt. Ils 
sécrètent aussitôt de la gomme-laque, dans le but de se protéger. Très-active pendant 
le premier mois, cette sécrétion se ralentit ensuite et reste à peu près stationnaire à l’é- 
poque des grandes pluies. Ce n’est guère qu’en automne, à l’approche de l’éclosion, qu’elle 
reprend une grande énergie. Pendant qu'elle se produit, les feuilles et les parties des ra- 
meaux, situées au-dessous des nids, se couvrent d’une matière noire abondante, analogue 
comme aspect au noir de fumée et qui n’est autre chose que la fiente que ces insectes 
laissent échapper parle petit trou que chacun d’eux à ménagé dans sa loge, à la surface de 
la coque commune de gomme-laque. A distance, cette matière noire permet de reconnaitre 
les arbres consacrés à l'éducation de ces animaux. 

La récolte de la gomme-laque se fait en automne vers la fin d'octobre ou au commen- 
cementde novembre, un mois environ avant l’époque présumée de la sortie des insectes. 
Plus tôt, on n'obtiendrait qu'une gomme pauvre en matière colorante. Cette récolte se fait 
en coupant les branches couvertes de gomme. Dès que la gomme est délachée des ra- 
meaux, on l’expose pendant plusieurs jours au soleil sur des claies, afin de tuer les in- 
sectes qu'elle renferme et d’assurer en même temps sa conservation. Cette opération 
achevée, il n’y a plus qu’à la mettre dans des sacs ou des paniers pour la conserver et 


1 Peut-être est-ce un Z'erminalia à fleurs tétramères. 


PLANTES TINCTORIALES. 423 


l'exporter. Les rognons de laque au centre desquels existe encore le rameau de larbre 
prennent dans le commerce le nom de laque en bâton ; brisés grossièrement et débar- 
rassés du bois, ils s'appellent laque en sortes ; brisés finement et lavés à l’eau bouillante, 
laque en grains. 

On peut estimer à 25 kilogrammes le poids moyen de gomme-laque que peut fournir 
un arbre suffisamment branchu et gros comme un poirier de plein vent. 

Le Combretum semi-aquatique et arborescent, préféré des Laotiens, qui produit à lui 
seul plus des neuf dixièmes de la laque de l’Indo-Chine, croit en Cochinchine comme au 
Laos, dans les plaines peu boisées, à demi inondées pendant l’hivernage, qui bordent 
les rivières. On le trouve sur les talus des rizières où parmi les broussailles qui les 
entourent. 

Les Indo-Chinois n’utilisent guère dans la gomme-laque que la matière tinctoriale 
qu'elle renferme. Ils emploient seule pour teindre en rouge, ou mélangée à l’indigo, 
pour teindre en violet. Ils se servent comme mordant d’une décoction de feuilles d’un 
Symplocos, additionnée d’alun. La gomme-résine est sans usage dans le pays. 

La cochenille-laque n’est pas la seule espèce qu'on trouve dans le bassin du Cam- 
bodge : nous en avons observé une autre, se développant naturellement sur une euphor- 
biacée de la tribu des antidesmées, croissant près des berges du fleuve, dans le Laos 
supérieur. Cette cochenille sauvage, moitié plus petite que l'espèce commune, produit de 
la gomme-laque en moins grande quantité et d’un rouge plus pâle. Nous ne croyons pas 
qu’elle soit récoltée. 

Indigofera tinctoria, L. — La culture de l’indigo est surtout praliquée en Basse- 
Cochinchine, au Cambodge, et dans le Laos inférieur. Dans le Laos supérieur eten Chine, 
le Auellia indigotica qui fournit une substance tinctoriale bleue analogue, le remplace avec 
avantage. 

Les cultures d’indigo en Basse-Cochinchine, se font dans les terrains sablonneux qui 
couvrent les monticules; à partir du Cambodge jusqu'en Chine, ces cultures se font dans 
la vase qui couvre les berges des fleuves. Sur les monticules, on laboure la terre soit 
à la charrue, soit à la houe, et on sème à la volée de mai à août, pour récolter en novem- 
bre ou en janvier. Sur les berges des cours d’eau, où le labour est inutile, on plante 
les graines à la main vers les mois d'octobre ou de novembre, et on récolte en mars ou 
en avril. Presque partout, les plantations ne fournissent qu'une seule récolte et ne durent 
qu'une année ; il ne serait cependant pas plus difficile que dans la plupart des pays 
chauds, de faire deux et même trois récoltes, en installant les cultures d’indigo dans 
les champs irrigables et en particulier dans les rizières, comme cela se fait dans l’Inde. 
Au fur et à mesure qu'on coupe la plante, on la fait macérer dans l’eau, on la tient im- 
mergée avec des pierres au fond de cuves, de grandes jarres en terre, ou, le plus souvent, 
d'arbres creusés. Au bout de deux à quatre jours, toutes les folioles sont complétement 
détachées et l’eau de macération prend de l'odeur, on la déeante et on verse dedans un lait 
de chaux, qui précipite l’indigo sous forme de pate. C'est dans cet état, après une nou- 
velle décantation, que l’indigo est livré au commerce. 


424 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


liuellia (?) indigotica *. — Cette plante, à peu près la seule de la famille des acan- 
thacées qui fournisse un produit utile, croit spontanément à l’ombre des grands arbres 
dans les lieux frais et humides des montagnes. Elle est cultivée depuis Luang Prabang 
Jusqu'au centre de la Chine, où on en rencontre de très-grandes plantations, et où elle 
constitue assurément la plante tinctoriale la plus importante. Sa multiplication se fait 
exclusivement de boutures prises dans la partie inférieure des tiges, et longues de 20 cen- 
timèlres environ. Elles sont plongées aux trois quarts dans l’eau pendant une à deux 
semaines. Dès qu’elles commencent à émettre des racines, on les plante au piquet, soit 
au début, soit au milieu de l’hivernage, suivant les régions et le mode de culture. Dans 
le Laos supérieur, où la plante est spontanée, les habitants en font au début des pluies 
de petites plantations à l’ombre des grands arbres, et en particulier des banians. Après 
avoir nettoyé le sol, ils remuent la terre à la houe et plantent les boutures à la distance 
de 30 à 40 centimètres. On récolte, sans autres soins, au bout de quatre à cinq 
mois. Dans l'extrème sud de la Chine, où les conditions d'humidité et d’ombrage ne 
sont plus aussi favorables qu’au Laos, les habitants du fond des vallées chaudes, et en 
particulier de la vallée du fleuve du Tong-king, font à l’ombre des aréquiers d'immenses 
plantations. Elles sont coupées de nombreux canaux, distancés d’un mètre cinquante 
environ. 

Ce genre de plantation, bien exécuté, donne d’abondants produits pendant de longues 
années ; la plante disposée en lignes le long des canaux, au-dessous des aréquiers, trouve 
constamment l’eau et ombre qui lui sont nécessaires. Dans les régions plus froides, 
on plante les boutures en très-petits carrés irrigables, au-dessus desquels on élève sur 
des piquets hauts de deux mètres environ des toits en feuillage. 

Dans le nord du Yun-nan et le reste de la Chine, on cultive le Ruellia dans les ri= 
zières. On les divise, vers la fin d'octobre, en plates-bandes larges d’un mètre environ, 
séparées entre elles par d’étroites et profondes rigoles. On plante ensuite à l’aide d’un 
piquet les boutures sur l’angle des plates-bandes, à une distance de 10 à 15 centimètres 
au plus, dans une direction presque horizontale et enterrées de telle sorte qu’on aper- 
coive à peine le nœud supérieur.- Pour prévenir l'effet des gelées, on couvre la terre 
d’une épaisse couche de paille de riz qui conserve pendant l'été, l'humidité du sol. 

Dès que le printemps arrive, la plante se développe rapidement, et, afin de lui créer 
un ombrage pour l'été, on plante à ce moment deux ou trois rangées de maïs ou de sorgho 
entre chaque rigole. On coupe la plante à la fin de l'été. 

L’extraction de la matière tinctoriale bleue se fait d’une façon complétement identi- 
que à celle de l’indigo. En Chine, où les plantations de liuellia dépassent souvent plusieurs 
hectares, les habitants installent dans le voisinage six à huit grandes fosses en pierres €i- 
mentées, d’une capacité de 10 à 20 hectolitres, communiquant entre elles et avec une 
prise d’eau. Dans la moitié de ces fosses, on fait macérer la plante ; dans l’autre moitié; 
on purifie la substance provenant des macérations en la passant à travers un tamis, 


111 ne nous a pas encore été possible de déterminer avec exactitude le genre auquel appartient cette plante 
intéressante. Fe 


PLANTES TINCTORIALES. 425 


puis à travers une loile, et enfin, en la lavant deux ou trois fois avec de l’eau qu'on 
sépare par décantation. Le procédé, employé dans l'Inde pour obtenir l’indigo sec, est 
ignoré en Indo-Chine et la matière tinctoriale du ruellia est, comme lindiso lui-même, 
conservée, vendue et transportée à l’état pâteux, après avoir été renfermée dans de petites 
cuves en bois cerclées. 

Le bleu du ruellia est plus foncé et nous a paru plus résistant que celui de l’indigo. 

La culture du ruellia serait, croyons-nous, très-facile en Algérie et pourrait donner 
lieu à une production très-fructueuse; peut-être même pourrait-on l’introduire avec 
succès dans le midi de la France. 

Bixa orellana, L. — Le rocouyer est cultivé dans foutes les régions tropicales de 
l’Indo-Chine. Ce bel arbre offre en Cochinchine une variété à fleurs roses, dont les fruits, 
comme qualité tinctoriale, ne diffèrent pas sensiblement de l'espèce mère. Les habitants 
se bornent à en semer quelques pieds dans les haies, ou dans leurs jardins ; souvent cet 
arbre est naturalisé aux environs des villages. Quel que soit le terrain où on le sème, 
il pousse avec vigueur et donne des fruits abondants. Leur récolte a lieu en octobre ou no- 
vembre. On en coupe les grappes, et on les expose au soleil afin qu’elles achèvent de mürir. 
La substance tinctoriale rouge qui entoure les graines, est conservée dans des pots sans 
aucune préparation ; on la sépare des graines par macération dans l’eau, et on l’emploie 
soit en teinture, soit, et plus souvent, pour colorer la cire et différentes autres matières. 

Carthamus tinctoria, Li. — Le carthame ou safran de l'Inde, est cultivé depuis le Laos 
inférieur Jusqu'en Chine. On n'en trouve que de très-pelits champs, installés le plus sou- 
vent sur les berges des cours d’eau. Les semis ont lieu en octobre ou novembre, soit à la 
volée, soit à la main. 

Les fleurs doivent être récoltées de décembre à février, au fur et à mesure de leur 
épanouissement. Tous les jours pendant la floraison, avant le lever du soleil, on coupe les 
capitules et on sépare les fleurs. On réunit celles-ei en masse et on les presse dans un sac 
de façon à exprimer le sue jaune qu'elles renferment, on les fait macérer dans un liquide 
vinaigré pendant un jour ou deux, puis on les pétrit en une pâte qu’on fait sécher à l'ombre 
après l’avoir divisée en très-petits pains. Ces pains de carthame sont vendus aux tein- 
turiers, qui les emploient pour la teinture en rouge, après avoir séparé par digestion à 
froid le reste du principe jaune. 

Outre leur usage en teinture, ces pains entrent, unis à la céruse, dans la composition 
des fards chinois. On les emploie aussi pour colorer les papiers en rouge. Dans le Laos, les 
fleurs de carthame servent avec le bois de jacquier (Arfocarpus integrifolia) à tendre en 
jaune les vêtements des bonzes. La couleur que donne le carthame s’altère rapidement. 

Cæsalpinia sappan, L. — Cet arbrisseau arborescent est cultivé depuis Saïgon jusqu’en 
Chine, et il s’est naturalisé autour des villages. Pour obtenir des troncs ayant une grosseur 
suffisante et d’une exploitation avantageuse, le sappan doit être planté dans les terres ar- 
gileuses riches et profondes. Partout ailleurs les troncs restent trop petits, et lorsqu'on a 
enlevé l’épaisse couche d’aubier de couleur blanche qui couvre la partie centrale rouge 
ou duramen, il ne reste que des büches sans valeur. 

IL. 


o# 


426 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


La multiplication de cet arbre se fait exclusivement de graines, on le plante presque 
toujours en haie autour des jardins. L'exploitation du sappan n’a lieu que lorsqu'il a au 
moins une dizaine d'années. A partir de cette époque, on abat les branches, à mesure 
qu’elles atteignent une grosseur suffisante pour être exploitées. 

Curcuma tinctoria, L. — Le cureuma est cultivé sur une petite échelle en Indo-Chine, 
dans tous les points jouissant d’un climat tropical. Ce n’est qu'en Basse-Cochinchine, 
qu'on en voit de véritables plantations, cette plante préfère les terres légères. C’est en mai 
el sur les monticules sablonneux, que les Annamites établissent les plantations. Après 
avoir labouré la terre et l'avoir disposée en billons de façon à faciliter l'écoulement 
des eaux d'orage, ils plantent, en lignes distantes de 30 à 40 centimètres, les extré- 
mités des rhizomes provenant de la récolte précédente. Ils se bornent ensuite à dé- 
lruire les mauvaises herbes, et à biner le champ une ou deux fois par an. La récolte n'a 
lieu qu'à la fin de la seconde année en ectobre ou novembre, lorsque les feuilles sont 
complétement fanées, Les racines provenant de cette récolte sont simplement lavées, 
lorsqu'elles doivent être vendues dans le pays et consommées immédiatement; mais 
lorsqu'on doit les conserver ou les exporter, on les divise, avant de les faire sécher, en 
fragments longs de quelques centimètres, auxquels on enlève l’épiderme, afin de faci- 
liter leur dessiccation. Outre leur usage en teinture, ces racines servent aussi dans la mé- 
decine et la cuisine des indigènes. Au Laos ainsi qu’à Siam, les femmes en font un usage 
tout spécial. Les jours de fête, elles se frottent tout le corps avee une racine fraiche, 
de façon à changer le jaune sale de leur peau en jaune éelatant. 

Orcanette. — Nous n'avons vu que la racine de cette plante, et il nous est impossible 
de dire si c’est la véritable orcanette d'Europe (A/kanna tinctoria, Tausch., Lithosper- 
mum tinctorium, L.), ou si c’est une espèce voisine. Cette racine, longue de 6 à 12 cen- 
limètres, un peu plus grosse qu’une plume et couverte supérieurement de quelques poils, 
est récoltée en automne en très-grande quantité dans les hautes montagnes du Yun-nan 
et du Se-tchouen, avoisinant le Tibet. On l’exporte, après l'avoir nettoyée et séchée avec 
soin. La matière tinctoriale rouge qui en provient sert à teindre les étoffes et à colorer les 
bougies et certains mets. On trempe les étoffes que l’on veut teindre dans une déeoction de 
celte racine, puis dans une lessive faite avee la cendre de différents arbres, en particulier 
avec celle de l’'£urya japonica. 

Basella rubra, L. — Cette plante volubile, dont les feuilles demi-charnues son 
mangées en guise d’épinards par tous les Asiatiques, est cultivée parfois pour la matière 
tincloriale rouge que renferment ses pelites baies. Les indigènes en sèment ordinairement 
au printemps quelques pieds près des haies sèches qui entourent leur jardin. Partout elle 
croitavee vigueur, souvent même elle se naturalise sur les bords des rivières et des fleuves. 

Morinda. — Trois espèces de morinda eroissent dans les régions tropicales de lIndo= 
Chine; deux, de petite taille, sont spontanées et très-communes dans les terres alluvion- 
naires semi-inondées du haut Cambodge et du Laos inférieur ; la troisième (Worinda citri- 
folia, L.), n’est pas spontanée, mais elle est partout propagée par l’homme et s’est natu- 
ralisée autour des villages. Elle produit un fruit agrégé, gros comme une pomme, à la 


PLANTES TINCTORIALES. 427 


pulpe acide, très-peu recherché des indigènes. Les trois espèces ont le centre de leur tige 
ou le duramen d’un rouge jaunâtre, contenant un principe colorant que les indigènes uti- 
lisent parfois en teinture, 

Botllera kamala, Roxb. — Six espèces appartenant à ce genre d’euphorbiacées 
croissent dans la partie tropicale de l'Indo-Chine. Une seule, qu’on trouve plus particu- 
lièrement dans les régions forestières de la Cochinchine, estutilisée. Les fruits tricoques de 
celle espèce sont couverts d’une couche épaisse de glandes contenant un principe tincto- 
rial rouge, qu’on emploie parfois pour teindre les vêtements. Cette couche de matière ré- 
sinoïde, connue sous le nom de Kamala, en Europe, brüle facilement et jouit, à la dose 
de 4 à 6 grammes, de propriétés téniafuges qu'on utilise dans l'Inde et qui paraissent 
inconnues des Annamites. 

Coriaria nepalensis, Wall. — Cette espèce de redoul croît à partir du 24° degré 
de latitude sur tous les points des montagnes du Yun-nan, du Se-tchouen et des 
provinces voisines, jouissant d’un climat tempéré et humide. Les teinturiers se servent 
de ses feuilles pour teindre les étoffes en noir, après les avoir plongées dans un bain 
de sulfate de fer. On les utilise aussi pour tanner les peaux. Les Chinois fabriquent 
parfois, avec les petites baies de cette plante, une liqueur fermentée; ils ont la pré- 
caution d'en extraire les graines, qui contiennent le principe vénéneux en très-grande 
quantité. 

F'ibraurea tinctoria, Lou. — On rencontre cette liane sur les plus grands arbres des 
forêts du sud de l’Indo-Chine. 11 nous a été impossible de l’observer en fleur, et nous ne 
pouvons affirmer que sa détermination soit exacte. Ses tiges, dont la grosseur dépasse sou- 
vent celle du pouce, sont cannelées, striées à leur surface et formées d’un bois très-poreux, 
renfermant une matière tinctoriale jaune, très-appréciée pour teindre la soie. 

Symplocos (racemosa, Roxb.)? — Parmi les sept espèces de symplocos qu'on rencontre 
croissant spontanément dans la partie tropicale de l’Indo-Chine, plusieurs sont utilisées en 
teinture. L'une d’elles surtout, le Symplocos racemosa, croissant dans les provinces cen- 
trales de l'empire annamite, est très-employée par les teinturiers cochinchinois et cambod- 
giens pour le principe jaune qu'elle contient et qui sert, comme celui de la gaude (/eseda 
luteola, L.), à modifier les autres couleurs. En outre de son action colorante, la décoction 
des feuilles de cet arbre possède, d’après les indigènes, la propriété de rendre les couleurs 
bien moins altérables. Les feuilles et les ramuseules terminaux sont les parties employées 
en teinture, après avoir été séchées. 

Gardenia grandiflora, Lou. — Ce bel arbrisseau, qui a produit une variété à fleurs 
doubles que l’on cultive comme plante d'ornement dans les jardins indo-chinois, croît 
à l’état spontané dans toutes les parties basses et inondées du delta du Cambodge. 
Ses fruits, charnus, pentagonaux, allongés, d’un jaune rougeätre, sont recueillis par les 
indigènes et utilisés dans la teinture pour la matière colorante jaune qu'ils renferment. 
On les recueille dans la saison sèche, c’est-à-dire en novembre, et on les dessèche en les 
exposant au soleil sur des claies, pour assurer leur conservation. 

Gledüschia fera, D. C. (Mümosa fera, Lou.). — Cet arbre, sans être précisément cul- 


428 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


tivé, se rençontre autour de tous les villages depuis Saïgon jusque dans le nord de la Chi- 
ne, où il semble avoir été propagé par l’homme. Il présente plusieurs variétés, essentiel- 
lement polymorphes. Ses feuilles et ses fruits contiennent un principe astringent qu’on 
utilise pour la teinture en noir en les mélangeant à du sulfate de fer. Ces gousses contien- 
nent en plus un principe mucilagineux qu’on emploie en guise de savon. 

Sophora japonica, L. — Cet arbre, ainsi que les diverses variétés qu'il a fournis, est 
cultivé en Chine dans les régions jouissant d’un climat tempéré. On le trouve, par pieds 
isolés, autour des villages, dans les jardins et près des pagodes. Les habitants recueillent 
ses fleurs au moment où elles vont s'épanouir, et après les avoir soumises à l’ébullition 
dans l’eau, en fontune pâte qui sert à teindre en jaune. 

Citons pour terminer cette énumération des plantes tinctoriales de l’Indo-Chine, les 
fruits de divers Buchanania, des Elæocarpus, des Diospyros, des Randia, des Zizyphus, 
employés avant leur maturité, pour les principes astringents qu'ils renferment. Notons 
encore le Pterocarpus flavus, el quatre ou cinq Berberis dont les écorces, qui contiennent 
un principe colorant jaune, sont utilisées en Chine. Nous ne saurions omettre les divers 
Nerpruns dont les écorces servent à fabriquer le vert de Chine. 


$S 5. — Plantes sacchariféres. 


Les plantes saccharifères se réduisent à quatre en Indo-Chine : la canne, deux pal- 
miers à sucre et le sorgho. La betterave n’est cultivée que dans les montagnes du Yun-nan, 
et seulement en très-petite quantité comme légume. 

Saccharum officinarum, L. — Nulle part nous n’avons trouvé la canne croissant à 
l’état spontané en Indo-Chine, et parmi les nombreux exemplaires que nous avons exami- 
nés après la floraison, aucun ne nous a présenté des graines fertiles. 

On rencontre la canne depuis Saïgon jusqu’au centre de la Chine. Par le 32° degré de 
latitude elle croit encore, mais seulement dans le fond des vallées très-peu élevées au- 
dessus du niveau de la mer. Elle est cultivée en Indo-Chine pour deux usages princi- 
paux : 1° pour l'extraction du sucre; 2 pour être mangée à la main. Pour le premier 
usage, les variétés de canne sont en général très-minces, ligneuses, et fournissent très- 
peu de jus; pour le deuxième, elles sont au contraire presque toujours grosses et charnues. 
Dans le nord, la variété dite canne de Chine (Saccharum Sinense, Roxb.), a fourni 
quelques belles sous-variélés très-rustiques, qui supportent facilement des températures 
voisines de zéro, et qui peuvent être comparées aux espèces de Bourbon, de Java, de 
Taïti, etc. 

Dans le sud, la mauvaise qualité des cannes nous a paru tenir bien moins à leur 
nature qu'au mode défectueux de culture. Rien ne serait plus facile que d'améliorer 
les espèces dégénérées, en leur prodiguant pendant quelques années des soins intel= 
ligents, elen particulier en les plantant moins serrées. 

Ces diverses variétés, principalement les cannes minces et ligneuses cultivées dans le 
sud, nous ont paru fréquemment atteintes de la maladie du noir produite par un cham- 


PLANTES SACCHARIFÈRES. 429 


pignon, surtout lorsqu'elles étaient plantées trop drues dans des terres maigres. Certains 
papillons causent fréquemment aussi des ravages dans les champs de cannes, jamais 
cependant au point de compromettre sérieusement les récoltes. 

Les procédés de culture sont des plus défectueux, sauf sur quelques points de la 
Chine. Les indigènes choisissent ordinairement les terres alluvionnaires argileuses qui 
bordent les fleuves et les rivières. Ce choix est moins déterminé par la richesse habituelle 
de ces terres, que par leur humidité qui facilite la reprise des boutures. 

IL y a deux procédés principaux de culture de la canne usités en Indo-Chine. Le pre- 
mier mode, ou culture en terre sèche, est le plus mauvais des deux. Il est employé pres- 
qu’exelusivement en Annam, au Laos, et souvent même en Chine. Il consiste, après un 
premier labour très-superficiel, à herser la terre, puis à tracer à la charrue d’étroits sillons 
au fond desquels la canne est immédiatement plantée. On n’emploie que très-rarement 
des engrais. Les sillons destinés à recevoir la canne sont distants de 3 à 4 décimètres. 
Les boutures sont plantées à la distance de 20 centimètres environ et inclinées à 45 degrés. 
Ces boutures, longues de 3 décimètres, proviennent des extrémités supérieures des 
cannes. Entre l’époque de la préparation de ces boutures et celle de leur plantation, on 
les réunit en bottes d’une cinquantaine que l’on maintient aux trois quarts dans l’eau. 
On assure ainsi leur conservation, et on favorise la naissance aux nœuds des racines adven- 
üives qui rendent la reprise de la canne très-prompte. La plantation terminée, le champ 
est presque complétement abandonné à lui-même jusqu'au moment de la récolle, qui a 
lieu l’année suivante à la même époque. 

Le deuxième mode, ou eulture en terre irriguée, nécessite une installation particulière. 
En Basse-Cochinchine, on le voit pratiqué dans les rizières situées hors d’atteinte des eaux 
saumatres. Les rizières destinées à cette plantation sont entourées d’un fossé profond, 
et divisées en plates-bandes par d’étroites rigoles. Des vannes facilitent l’écoulement ou 
l'introduction de l’eau. Les cannes doivent être plantées au centre des plates-bandes, dans 
un sillon moins profond que les rigoles, de façon que leurs pieds ne soient pas baignés 
par l’eau. On emploie surtout ce mode de culture pour produire les cannes destinées à 
être mangées à la main, mais il serait tout aussi avantageux, appliqué à la culture des 
cannes destinées à produire le sucre. 

Dans le sud de la Chine, comme on n’a pas à se préoccuper des eaux saumätres, toutes 
les rizières sont propres à cette culture; il n’est pas nécessaire de faire un fossé cireulaire 
destiné à laisser écouler l’excès d'humidité ; on se borne à établir des rigoles entre chaque 
rangée de cannes, on creuse plus profondément les sillons que l’on comble en partie, 
lorsque les cannes grandissent, pour qu’elles résistent mieux au vent. 

Ce dernier procédé reçoit parfois, des Chinois de la vallée du Tong-king, des modifica- 
tions importantes qu le font ressembler à la culture connue à Bourbon sous le nom de 
culture Desbassayns. Au lieu de creuser des sillons entre les rigoles d'irrigation, pour 
planter la canne, on fait, de distance en distance et en ligne, des fosses rectangulaires, pro- 
fondes de 15 à 20 centimètres, au fond desquelles on place, en les croisant et en les in- 
clinant à 70 degrés, deux boutures qu’on enterre à peine et qu’on recouvre presque entiè- 


430 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


rement de paille. Plantées ainsi, les cannes deviennent très-belles et durent pendant dix 
à quinze ans, lorsqu'on a la précaution de nettoyer les fosses, d’y mettre des engrais et de 
bien biner la terre qui les sépare. Quel que soit le mode de culture employé, la plantation 
des cannes se fait, en Indo-Chine, vers les mois de janvier et de février, au plus tard 
en mars. La récolte se fait quand la canne est en pleine floraison, ce qui a lieu, dans le sud, 
dix à onze mois après la plantation, et en Chine, dans le fond des vallées élevées, du quin- 
zième au dix-huitième mois. 

La durée d’une plantation de cannes varie avec la qualité du sol, son degré d’humi- 
dité et le mode de plantation. Dans les terres riches, humides et sans irrigation, elle dure 
Lrois à cinq ans ; dans les terres maigres et dans les plantations serrées comme celles de 
Cochinchine et du Cambodge, le désouchage doit se faire après la troisième année. Lorsque 
les pieds sont très-espacés, comme cela a lieu dans les plantations irriguées, la durée est 
beaucoup plus longue, et elle peut parfois dépasser quinze ans, ce qui compense ample- 
ment le surcroît de dépenses qu’occasionne cette installation spéciale. L'emploi des en- 
grais et des sarclages soignés contribue beaucoup à prolonger la durée d’une plan- 
lation. 

On récolte les cannes en les coupant à l’aide d’une petite serpe aussi près que possi- 
ble des racines. On les débarrasse des feuilles mortes et on les transporte au pressoir, soit 
à dos d'homme, comme en Chine, soit avec des voitures à buffles, comme en Cochinchine 
el au Laos. Avant de soumettre les cannes à la presse, on en retranche toujours la partie 
supérieure qui renferme très-peu de sucre et qui doit servir à la multiplication. Le pres- 
sage se fait d'une façon défectueuse et presque identique dans toutes les parties de la pénin- 
sule. La presse se compose, en Cochinchine, de trois rouleaux de bois dur, etau Laos, de 
deux seulement; ils sont maintenus verticalement à côté les uns des autres par un cadre 
en bois, haut de 1 mètre et épais de 5 décimètres environ. A leur partie supérieure 
existent des dents d’engrenage dont la forme est le plus souvent, au Laos, celle d’un 
- horizontal; le mouvement est donné par un buffle attelé à une pièce de bois longue de 4 
ou 5 mètres, encastrée par l’une de ses extrémités dans l’un des cylindres. La planche 
inférieure du cadre est fixée solidement dans le sol; elle est creusée de façon à re- 
cueillir le vesou, qui se déverse ensuite par un bec dans un grand vase enterré dans le 
sol. On fait cuire immédiatement le vesou, afin d'éviter la fermentation qui se produit 
très-rapidement dans les pays chauds. Il est nécessaire de soumettre deux fois les cannes à 
la presse. Avec le système à trois cylindres, on y parvient facilement, en plaçant deux 
hommes, l’un en avant de la presse pour faire entrer les cannes, et l’autre en arrière pour 
les faire repasser. Dans le système à deux cylindres, il faut recommencer entièrement 
l'opération. 

Les presses à sucre, que tout indigène armé d’une hache parvient à fabriquer lui-même 
en quelques semaines, sont ordinairement établies sous un hangar provisoire, à côté duquel 
un loit plus solidement construit recouvre les appareils évaporatoires. Ils se compo- 
sent en général de deux ou trois grandes bassines en fer, en forme de calotte, pouvant 
contenir environ un hectolitre de jus. Ces bassines, installées sur un grand fourneau en 


PLANTES SACCHARIFÈRES. 431 


maçonnerie ou en terre, sont chauffées avec des broussailles ou avec la bagasse. Au Laos, 
on se contente souvent d’une simple marmite en terre qu’on dispose au-dessus d’un four- 
neau creusé dans la terre. 

Quand le vesou entre en ébullition, on enlève l’écume abondante qui monte à la surface ; 
mais un peu plus tard on ajoute une faible quantité de lait de chaux, destiné à achever la 
coagulation des matières albuminoïdes et à précipiler les matières terreuses qu'il tient 
toujours en suspension. A la suite de cette opération, on décante ordinairement le vesou, 
et on continue à l’évaporer dans la bassine voisine, après l'avoir filtré sur un linge ou sur 
un tamis. Au Laos et au Cambodge, on s’épargne une grande partie de ces soins, et on se 
borne à évaporer le vesou jusqu’au moment où il a atteint une consistance sirupeuse sufli- 
sante pour se solidifier par le refroidissement. Comme on peut s’y attendre, le sucre ainsi 
obtenu est plein d’impuretés. En Cochinchine et en Chine le sucreest un peu moins noir, 
mais il est encore inférieur à la plus mauvaise cassonade d'Europe. 

Dès que le vesou est suffisamment concentré, on le verse dans des pots en terre, ou 
dans de pelits vases d’égale grandeur, en forme de galettes, faits en feuilles de bananier, 
qui lui servent d’enveloppe quand il est refroidi et solide. Ce sucre en galettes est ordi- 
nairement supérieur à celui qu'on met dans les pots. C’est sous ces deux formes que le 
sucre est vendu sur les marchés indigènes. 

Les Annamites fabriquent en outre une assez belle cassonade par le procédé sui- 
vant : ils prennent un certain nombre d'appareils en terre cuite, de forme conique, 
ouverts aux deux extrémités, et pouvant contenir une cinquantaine de kilogrammes de 
sirop. Ces appareils, bouchés à leur sommet à l’aide d’un tampon de paille, sont remplis 
de sirop, et placés comme des filtres sur une table percée de trous. Dès que le sirop est 
cristallisé, on dépose à sa partie supérieure une couche d’argile humide, épaisse de 5 à 
6 centimètres, sur laquelle on verse de l’eau. Celle-ei s’écoule par l'ouverture inférieure 
de l'appareil et entraine la plus grande partie de la mélasse que contient le sirop. En 
prolongeant cette opération, on arrive à produire une cassonade assez pure, qui est 
employée par les gens riches; jamais pourtant elle n’est complétement blanche. Cette 
opération du terrage est également employée en Chine. 

Nulle part la canne n’est employée à fabriquer du rhum. Cette boisson serait cepen- 
dant plus saine que les liqueurs alcooliques que les Indo-Chinois extraient des céréales. 

Borassus flabelliformis, L. — Ce beau palmier ne nous à pas paru indigène en Indo- 
Chine ; il croit cependant avec la plus grande vigueur depuis Saïgon jusqu'aux frontières 
de la Chine. Il est propagé par les habitants qui sèment la graine dans un trou très-peu 
profond ; cet arbre n’exige aucun soin et croit à peu près dans tous les lieux, mais plus 
vigoureusement peut-être sur les monticules sablonneux et sans valeur comme sol. Sa 
croissance est lente, ce n’est guère qu'à l’âge de quinze à vingt ans qu'il commence à 
fleurir et qu’on peut l’exploiter. Il atteint alors 4 à 5 mètres de hauteur. La récolte 
de la liqueur sucrée qu'il fournit, se fait pendant la floraison, de décembre à mars. 
On applique sur les trones d'arbres des tiges de bambou auxquelles on conserve une 
partie des branches latérales en guise d’échelons. On monte ainsi facilement au sommet: 


432 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


et on fait une ou deux entailles sur les pédoncules floraux, et on suspend au-dessous un 
vase en bambou d’une capacité d’un à deux litres. La sécrétion ayant surtout lieu la 
nuit, on enlève les vases pleins, chaque matin avant la chaleur. Pendant un à deux mois 
chaque palmier fournit quotidiennement de un à quatre litres de liqueur; on en boit im- 
médiatement une partie et on fait fermenter le reste. Le rapport de cet arbre est assez 
considérable pour que chaque pied soit frappé au Cambodge d’un impôt annuel de 
50 centimes. 

Arenga saccharifera, Labill. — Ce palmier n’est pas cultivé en Indo-Chine, et on ne 
recueille son suc que lorsque le palmier précédent manque absolument. L’Arenga ne se 
trouve d’ailleurs que dans des endroits peu accessibles, près des sommets des montagnes 
ou dans le fond des ravins humides tournés vers l’orient et le midi. La récolte du suc se 
fait exactement comme celle du Borassus et à la même époque. 

Andropogon saccharatus, Roxb. — Il n’est cultivé qu’en Chine. Le procédé employé 
pour extraire le sucre est identique à celui de la canne. 


$S 6. — Plantes tuberculeuses et féculentes. 


On observe en Indo-Chine à peu près toutes les plantes tubereuleuses ou féculentes 
du globe, soit spontanées, soit cullivées. Malgré leur nombre et les fréquents usages aux- 
quels les populations de cette partie du monde les appliquent, leur rôle est bien moins 
important que sous les climats tempérés. 

Batatas edulis, Choisy (Convolvulus batatas, L.). — La patale douce est la pomme 
de terre des pays chauds. Elle est cultivée dans toute l'Indo-Chine, mais en petite quan- 
lité. La plupart des tribus sauvages du sud Ja remplacent par les racines sanvages qu'ils 
trouvent dans les forêts. Quoique non indigène en Indo-Chine, la patate y croit cepen- 
dant avee une très-grande vigueur. Toutes les terres lui conviennent, surtout les terres 
sablonneuses. Elle se plante presque partout au début de la saison des pluies ; elle peut 
être cultivée aussi pendant la saison sèche à l’aide d'arrosage ou d'irrigation, ou bien, comme 
au Laos et au Cambodge, dans la vase qui couvre les berges des fleuves après le retrait 
des eaux. La culture des patates pendant la saison sèche permet d'obtenir deux récoltes 
annuelles dans le même champ : une de riz pendant l’hivernage, et une de patates pen- 
dant la saison sèche. Ce mode d’assolement n’est pas inconnu des Indo-Chinois, mais 
il est peu pratiqué. La multiplication de la patate se fait par boutures que l’on plante sur 
les billons. Cette disposition de la terre permet l'écoulement des eaux si les orages sont 
fréquents, ou une irrigation facile si les pluies viennent à manquer. 

La récolte se fait environ six mois après la plantation. Les tubercules de la patate se 
conservent mal ; aussi ne les récolte-t-on qu'au fur et à mesure des besoins. Ce défaut de 
conservation, dû à la promple fermentation du sucre qu'ils renferment, oblige les eulti- 
vateurs à échelonner l’époque des plantations. Les indigènes utilisent de différentes façons 
les patates dans leur cuisine ; le plus souvent ils les mangent cuites dans l’eau. Les jeunes 
feuilles se cuisent comme nos épinards. 


PLANTES TUBERCULEUSES ET FÉCULENTES. 433 


D’assez nombreuses variétés de patates existent en Indo-Chine. Les unes ont les 
feuilles cordiformes presque entières, et les autres les ont profondément pentalobées. 
Certaines espèces ont le feuillage très-päle et d’autres le feuillage très-foncé, presque 
violet. Les tubercules diffèrent de grosseur, de forme, de qualité et de couleur. Les 
plus gros tubercules proviennent des qualités médiocres, et servent à nourrir les animaux ; 
les plus farineux et les plus sucrés sont moins fertiles et servent à la nourriture de l’homme. 

La même maladie qui sévit sur la pomme de terre en Europe s’observe sur la patate 
douce, ainsi que nous avons pu fréquemment le constater dans le Yun-nan. Nous ne pen- 
sons pas qu'aucun moyen préservatif soit connu des indigènes. 

Spomæa mamonosa, Choisy (Convolvulus mammosus, Lour.). — Cette espèce diffère de 
la précédente non-seulement par ses caractères botaniques, mais aussi par ses tubercules, 
inférieurs en qualité à ceux de la patate commune. D’après Loureiro, cette patate serait 
cultivée en Cochinchine assez communément. Mais toutes nos recherches pour la rencon- 
trer ont été infructueuses. 

lolanum tuberosum, L.—Plusieurs variétés de pommes de terre, à tubercules de formes 
et de couleurs variables, sont cultivées dans les montagnes élevées du sud de la Chine, 
jouissant d’un climat franchement tempéré. Sous le tropique, la limite inférieure de sa 
culture est 1,800 mètres, et, même à celle grande hauteur, les tubercules sont petits 
etde médiocre qualité. Ce n’est, sous cette latitude, qu'à la hauteur de 2,500 mètres 
qu’elle donne des produits entièrement comparables à ceux des régions tempérées. Culti- 
vée dans les pays intertropicaux, même pendant la saison la moins chaude, à peine ob- 
lient-on la première année un poids de tubercules égal à celui qu'on a planté. Aussi, sa 
cullure sous les tropiques ne se pratique que pour obtenir de jeunes pommes de terre à 
la place des vieilles qu'on a importées. 

La culture de cette plante se fait d’une façon presque identique à celle d'Europe. 

La maladie de la pomme de terre, quoique assez rare, existe en Chine ; elle y a causé 
dans ces dernières années des ravages assez sérieux. 

Les tubercules de la pomme de terre sont surtout consommés par les sauvages ; les 
Chinois préfèrent la patate. 

Dioscorea alata, L. — Douze à quinze espèces d’ignames croissent spontanément dans 

les forêts de l’Indo-Chine. Presque toutes fournissent des racines que les sauvages et les 
autres Indo-Chinois pauvres utilisent dans les moments de disette. La plupart ont la chair 
fibreuse et d’un noir violacé. Deux de ces espèces seulement sont cultivées depuis Saïgon 
jusqu’au centre de la Chine. Ces deux esièces types, Droscorea alata el Diascorea sativa, 
ont fourni plusieurs variétés d’une distinction assez difficile et qui ont été, à tort selon 
nous, élevées au rang d'espèces. 

La culture de ces ignames se fait presque toujours dans les jardins ou aux environs 
des villages, dans des terres profondes et faciles à remuer. On propage l’igname en plan- 
tant soit le collet de la racine surmonté des débris de la tige, soit des fragments de tuber- 
cules portant des bourgeons ou enfin les bulbilles qui naissent à l’aisselle des feuilles de 


certaines variétés. La plantation se fait au début des pluies, vers le mois de mai. On a soin 
I. 53 


434 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


de ramer les tiges si elles n’ont pas près d’ellesune haie pour s'appuyer. La récolte peutavoir 
lieu un an après, mais le plus souvent on attend que les plantes aient dix-huit mois. A cette 
époque, les racines ont acquis une grosseur passable, sans être devenues fibreuses. L’ar- 
rachage est assez pénible: il se fait soit à la houe, soit à l’aide d’un bambou creux, denté à 
son extrémité inférieure, qu'on enfonce autour des racines pour enlever la terre. Celle 
plante n’est que peu cultivée, on lui préfère la pomme de terre ou la patate. 

Manihot aipi, Pohl. — Manihot utilissima, Pohl. — De ces deux espèces de manioes, 
considérées autrefois comme deux variétés dérivées du Jatropha Manihot, L., la première 
est la plus répandue en Indo-Chine. Elle est cultivée dans toute la vallée du Mékong, de- 
puis l'embouchure du fleuve jusqu’au 25° degré de latitude. Cette plante a des feuilles géné- 
ralement à cinq lobes. Son suce n’est pas vénéneux. Reproduite de boutures depuis long- 
temps, elle ne fleurit presque jamais en Indo-Chine. Une fois seulement, dans le Laos 
supérieur, nous avons trouvé quelques sujets en fleur, portant des fruits fertiles. 

Le manioc se cultive ordinairement dans les jardins, près des haies. La plantation se 
fait au début de l’hivernage. La plante n’exige que très-peu de soins ; on se borne à en- 
lever les mauvaises herbes, qui sont du reste bientôt couvertes par la plante, qui est douée 
d’une grande vigueur. Souvent pourtant les Annamites les buttent, pour obtenir des 
racines plus grosses et plus nombreuses. L’arrachage des racines a lieu généralement 
pendant la deuxième année, quand les tubercules ont acquis tout leur développement. 
Les Indo-Chinois n’utilisent presque jamais cette plante pour nourrir les animaux. Ils ne 
cultivent le manioc que pour en extraire la fécule qui est surtout employée, comme en 
Europe, pour l'alimentation, après avoir été granulée à la suite d’une légère torréfaction. 

Maranta arundinacea, L. — Parmi les plantes de la famille des Amomacées, plu- 
sieurs espèces appartenant au genre Waranta où à d’autres de la même famille, telles que 
le Thalia, V'Alpinia el le Curcurna, fournissent la fécule connue sous le nom d’arrow-root. 
Le maranta est la seule espèce cultivée en Indo-Chine, et encore ne l’est-elle qu'au Cam- 
bodge et en petite quantité. Les terres qui conviennent le mieux à cette plante sont celles 
de nature alluvionnaire, assez riches en argile et exemptes complétement de sel marin. Elle 
ne pourrait done croître dans la plupart des parties basses du delta du Cambodge. La multi- 
plication se fait par bouture en plantant les bourgeons terminaux des rhizomes. Le maranta 
est planté enlignes, à la distance de deux à trois décimètres, au début de lhivernage, vers 
le mois de mai. La récolte a lieu dix-huit mois après, lorsque les rhizomes ont acquis 
leur plus grand développement. Les racines sont extirpées à l’aide d’une houe, puis 
lavées et râpées aussitôt pour en extraire la fécule. 

Cycas circinalis, L. — Cycas inermis, Lour.— Cycas pectinata, L. —Trois espèces de 
cycas fournissant la fécule connue sous le nom de sagou, croissent spontanément depuis 
Saïgon jusque dans le sud dela Chine. On les trouve surtout dans les îles du Laos inférieur 
et dans les dunes des provinces annamites, sur le littoral. Les habitants les cultivent quel- 
quelois, plutôt comme arbre d'ornement que pour la fécule qu’ils en retirent. Dans les ilots 
des calaractes de Khon, nous avons vu un grand nombre de eycas appartenant au cycas 
circinalis (?), dont le tronc dépassait dix mètres. Ces arbres n'avaient certainement pas moins 


PLANTES TUBERCULEUSES ET FÉCULENTES. 435 


de deux ou trois cents ans. Les cycas se trouvent presque toujours dans les terres sablon- 
neuses, couvertes de forêts. Leur multiplication se fait de graines, à l'exception toutefois 
du cércinalis qu’on peut multiplier de boutures. Les graines, plus grosses que des mar- 
rons, mürissent en mai el juin. On peut les manger après les avoir fait griller pour enle- 
ver leur amertume. La fécule que contient la base des troncs s'obtient très-facilement en 
lavant et broyant la partie médullaire. Cette fécule peut être mangée sans autre prépara- 
lion que la cuisson, mais le plus souvent on la granule, après l'avoir grillée légèrement, 
pour augmenter sa sapidité. 

Nelumbium speciosum, Wild. — Cette belle plante aquatique etune variété à fleurs pres- 
que blanches qu’elle a produite, sont très-communes en Indo-Chine. Dans les étangs et les 
marais, elles sont souvent spontanées, mais souvent aussi propagées par semis, en jetant 
les graines à la surface de l’eau. Dans les bassins des pagodes, elles sont eultivées par 
pieuse tradition. La récolte des graines a lieu de septembre à octobre, et plus tôt si l’on veut 
les manger vertes. Ces graines ont la forme et la grosseur des glands du chêne; leur 
goût rappelle celui de la noisette. On les recueille en grande quantité en Cochinchine et 
au Cambodge pour les exporter en Chine. 

Les racines ont souvent plusieurs mètres de longueur, et leur grosseur atteint celle du 
poignet. Leur extraction offre d’assez sérieuses difficultés. Elle se fait en automne, moment 
où, la végétation élantsuspendue, les racines sont le plus riches en fécule. On divise succes- 
sivement les marais en petits carrés qu’on rend étanches et que l’on vide avec une noria 
ou des seaux. Les racines se mangent cuites à l’eau. Elles ont une chair assez fade et 
manquant un peu de fermeté. 

Sagitaria chinensis, Sims. — La sagittaire de Chine est cultivée dans les mêmes 
lieux, de la même façon que le Nelumbium ou lis rose du Nil. Ses racines sont charnues, 
anguleuses, longues de un à trois décimètres, et leur grosseur atteint souvent celle du 
poignet. Intérieurement elles sont percées de sept trous, dont un central plus grand. Leur 
chair est légère, très-peu fibreuse, et remplace facilement celle de la pomme de terre. 

Tacca pinnatifida, Forst. — Cette plante a des racines tuberculeuses qui atteignent 
la grosseur du poing; elles contiennent un principe àcre qui disparait par la cuisson. On 
les récolte de septembre à octobre, à l’époque où elles ont atteint leur plus grande gros- 
seur. Comme qualité, elles sont assez semblables à celles du taro (Colocasia esculenta). 
Loureiro indique cette plante comme cultivée en Cochinchine et même dans le sud de la 
Chine. Nous ne l'avons trouvée que dans les forêts du Cambodge, près des ruines d’Angcor 
où elle croit spontanément. 

Trapa bicornis, Li. — Deux ou trois variétés de macres ou châtaignes d’eau sont cul- 
livées en Indo-Chine, à partir du 14° degré de latitude jusque dans le nord de la 
Chine. Elles croissent partout avec la plus grande facilité. Les indigènes les cultivent dans 
les bassins des pagodes, dans ceux de leurs jardins, où aux environs des villages. Leur 
culture consiste à empêcher le desséchement des bassins et à ésherber. Les variétés de ces 
fruits ne diffèrent que par leur longueur, le nombre des pointes qui les couvrent et par 
leur couleur. Leur goùt est comparable à celui des marrons. 


436 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Cyperus rotundus, L. Cette espèce de souchet et plusieurs autres croissent spontané- 
ment en Indo-Chine dans les marais et les endroits humides. Elles produisent des tuber- 
cules très-appréciés des indigènes. La récolte a lieu généralement en automne, époque où 
les tubercules atteignent leur complet développement et où les marais sont à moitié dessé- 
chés. Les tubercules de ces différentes espèces, dont la grosseur varie entre celle d’unenoi- 
sette et celle d’une noix, sont allongés à leur partie supérieure, souvent un peu arqués et 
marqués de deux ou trois eicatrices circulaires, obliques, laissées par les feuilles. La chair 
est féculente, blanche ou légèrement rosée, elle contient chez certaines espèces un prin- 
cipe huileux qui lui donne un goût assez analogue à celui des amandes, et qui permet d'en 
faire des émulsions. Ces tubereules sont ordinairement mangés crus par les indigènes, 
les Européens les préfèrent grillés. 

Pachyrrhizus angulatus, Rich. (Dolichos bulbosus, L.). — Cette légumineuse volubile, 
à fleurs bleues, croit spontanément dans toutes les broussailles des parties de lIndo- 
Chine jouissant d’un climat tropical humide. En Cochinchine et au Laos, les pieds se 
multiplient spontanément et suffisent presque toujours aux besoins des habitants; en 
Chine on la cultive très-souvent. Cette culture se fait ordinairement dans les haies, afin 
que la tige ait un appui. La propagation se fait de graines que l’on sème au début des 
pluies vers le mois de mai. La récolte n’a lieu qu'après la deuxième année, au second 
automne qui suit la plantation. Le tubercule unique que produit cette plante est blane, 
court, déprimé en forme de toupie. Sa grosseur dépasse rarement celle du poing; sa chair 
est blanche, non fibreuse, à peine sucrée et très-peu sapide. Ce tubercule peut être mangé 
cuit, mais le plus souvent les indigènes le mangent cru et en guise de fruit, quoique 
d’après leur dire il puisse occasionner des dérangements intestinaux sérieux. 

Colocasia, L. — Les différentes espèces de taro sont, après la patate, les plantes 
tuberculeuses les plus utiles et les plus fréquemment cultivées par les Indo-Chinois. On 
les trouve dans toutes les parties humides semi-inondées et jouissant d’une température 
élevée. On cultive, soit dans les jardins, soit dans les champs qui entourent les villages, 
quatre ou einq espèces et plusieurs variétés (Colocasia esculenta, Schott; Colocasia 
antiquorum, Schott ; Colocasia indica, L.; Colocasia odora, Brong.). Les deux premières 
espèces sont les plus communes. Elles ont des tubercules ovoïdes, variant de la grosseur 
d'un œuf à celui du poing. Les deux autres espèces ont leurs tubercules caulescents, 
en forme de tige pouvant dépasser un mètre de longueur. Elles sont cultivées pour 
nourrir les animaux où comme ornement pour leurs immenses feuilles. Ces différents 
tubercules ont la chair peu farineuse et souvent un peu fibreuse; ils renferment un 
principe àcre, presque caustique, que la cuisson fait disparaitre. La multiplication de 
ces colocasia se fait au début de l’hivernage, soit avec la partie supérieure des tubereules 
portant les feuilles qu'on retranche, soit avec de petits tubercules nés latéralement, 
soit enfin avec des bulbilles naissant sur des stolons comme en possède une espèce à 
feuillage violet. On récolte un an après. Dans les terres seulement humides, ces tuber- 
cules acquièrent une grosseur moyenne, mais dans celles que l’on peut irriguer, 1ls de- 
viennent très-gros. Dans certains pays; on utilise les feuilles comme légume, ce qui a 


PLANTES COLONIALES. 437 


fait donner au Colocasia esculenta le nom de chou-caraïbe. En Indo-Chine, cet usage 


nous à paru inconnu. 


S7. — Plantes coloniales. 


Nous avons rangé, sous le nom de plantes coloniales, un certain nombre de plantes 
ne se rattachant à aucun des groupes précédents et qui sont cultivées dans les colonies en 
vue de l'exportation. 

Thea chinensis, L. — Ce précieux arbuste croît à partir du 21° degré de latitude sur 
les montagnes du Laos supérieur Jusqu'au 31° degré. Malgré le grand nombre de sujets 
que nous avons trouvés disséminés dans les forêts du Laos supérieur et du sud du Yun-nan, 
il nous est resté des doutes sur sa spontanéité dans ces régions; il pourrait bien n’y être 
que naturalisé. 

Nous n’admetlons avec plusieurs auteurs qu'une seule espèce botanique de thé, d’où 
sont dérivées plusieurs variétés dont les deux principales sont : Le Thea vrridis, L. et le Thea 
bohea, L. Entre ces deux variétés typiques et la variété pubescente du Laos, il existe un 
grand nombre de formes intermédiaires et il est à peu près impossible de tracer la ligne 
de démarcation qui sépare une variété d’une autre. Le thé, abandonné à lui-même, 
atteint facilement quatre à cinq mètres de hauteur; cultivé, on s’oppose à son élévation 
afin de cueillir plus facilement les feuilles, et il dépasse rarement un mètre. Le climat qui 
parait lui être le plus favorable, ne doit être ni trop chaud, ni surtout trop sec. Le thé ne 
supporte pas les gelées ; comme la plupart des plantes des montagnes, il pousse mal au 
niveau de la mer. Il peut cependant y être cultivé, puisqu’en Basse-Cochinchine on en fait, 
à l'ombre des aréquiers, de fort belles plantations qui donnent des feuilles abondantes, 
plus grandes, mais moins parfumées qu'en Chine. 

Le sol que préfère cet arbuste, est le sol argilo-ferrugineux rouge, qu’on rencontre si 
abondamment en Indo-Chine autour des montagnes de marbre, ou sur les monticules ar- 
gilo-schisteux ; 1l croît souvent entre les rochers qui émergent à leur surface. C’est même 
très-souvent dans les parties de ces lieux trop en pente et trop pierreux pour la culture des 
céréales, que les Chinois établissent de préférence leur plantation. 

La culture du thé n’est, dans les régions que nous avons parcourues, l’objet que de 
bien peu de soins de la part des Chinois. Une fois les sujets plantés, on se borne à em- 
pêcher les broussailles d’envahir la plantation, en binant grossièrement là terre une ou 
deux fois par an. Rarement on emploie des engrais et plus rarement encore on taille les 
arbres, Les pieds sont plantés à des distances très-irrégulières, ordinairement à un ou 
deux mètres. La récolte des feuilles se fait trois ou quatre fois par année, suivant la vigueur 
de la plantation. De l’âge des feuilles dépend en partie la qualité du thé; les plus vieilles 
fournissent des thés médiocres, et les plus jeunes, surtout celles qu’on a à l'ouverture des 
bourgeons, donnent les meilleurs. 

On soumet toujours les feuilles de thé à une température de 60 à 70 degrés centi- 
grades, Dès qu’elles commencent à se crisper, on les brasse sans cesse jusqu'au moment; 


438 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


variable suivant les pays, où l’on juge la dessiceation suffisante. A Pou-eul, district qui 
fournit un thé très-renommé, on les retire lorsqu’elles sont encore imprégnées d'humidité, 
puis on en forme des couronnes ou des pains que l’on fait sécher à l'air. Sur la plupart des 
autres points de la Chine, on pousse plus loin la dessiccation dans les bassines, et on la 
termine en étalant chaque feuille isolément sur des nattes. Ce sont là les thés verts tels que 
les consomment les Chinois. On les mélange souvent à des feuilles ou à des fleurs odorifé- 
rantes, telles que celles du jasmin, Jasminum sambac, Aït., de la rose, du CAloranthus 
inconspicuus, du Camalia sasanqua, Thunb., du Magnolia Yulan, L, de l'Olea fragrans, 
L., du Gardenia floribunda, ete. Les thés verts destinés à l'exportation, sont chauffés plus 
longtemps et on les dessèche presque complétement avant de les enlever des bassines. Pour 
corriger la teinte noire produite par ce surcroiït de cuisson, on ajoute, soit de l’indigo, du 
platre, de la chaux éteinte, soit ces trois substances réunies. En roulant les feuilles une à 
une entre les mains, ces substances adhèrent autour et donnent la teinte verte que lon 
désire. 

Les feuilles de thé destinées à la fabrication des thés noirs, dont le gout est si différent 
des thés verts, sont soumises également à l’action de la chaleur. Seulement, au lieu de les 
trailer aussitôt après la cueillette, on les fait fermenter pendant plusieurs jours dans des 
caisses fermées, afin de développer leur saveur particulière. Dans certaines provinces de 
la Chine, on fabrique du thé en briques, en comprimant les débris de feuilles dans des 
moules. Au Laos on trouve du thé, qu'on a fait fermenter avec du sel marin et qu'on 
mange à la main. 

Coffea arabica, L. Quelques essais de plantation de café ont été faits récemment au Cam- 
bodge et en Cochinchine et paraissent devoir réussir. 

Cinnamomum cassia, Blum. Ce cannellier fournissant la cannelle dite de Chine, croit 
spontanément dans les forêts situées vers le 19° degré de latitude: On le rencontre surtout 
dans la vallée du Se Ngum, affluent de la rive gauche du Mékong, il n’y est l'objet d'aucun 
soin. Les habitants se bornent à récolter l'écorce des arbres croissant spontanément dans les 
forêts. 

Au lieu de ne recueillir que l’écorce des jeunes rameaux de deux ans, comme cela se 
pratique à Ceylan, les Indo-Chinois détachent toute celle de l'arbre entier. L’écorce des 
rameaux, grosse comme le pouce, parait être sinon la plus recherchée, du moins la plus 
commune. L’écorce des grosses branches est enlevée en larges plaques rectangulaires 
et expédiée aux pharmaciens chinois, non moins charlatans que ceux d'Europe, qui 
l’ornent de brillantes étiquettes dorées et la vendent à un prix excessif, comme douées 
de propriétés merveilleuses que rien ne justifie. Quant à l'écorce des ramuseules, qu’il se- 
rail trop long d'enlever, on lutilise en réunissant ces ramuseules en petits fagots que l’on 
exporte. Quelle que soit l'écorce, il est très-rare qu'on enlève l’épiderme, comme pour la 
cannelle de Ceylan. Cette cannelle à un goût piquant et son odeur rappelle celle de la 
punaise, elle est {rès-peu recherchée des Européens. 

Vanilla aromatica, L. — Les quelques pieds de vanille importés en Cochinehine de- 
puis notre occupation sont restés stériles; la longueur et l'extrême sécheresse de l'hiver 


PLANTES COLONIALES. 439 


en sont sans doute la cause. Il faudrait, croyons-nous, choisir pour celte culture les par 
ties montagneuses et qui sont couvertes de brumes même dans la saison sèche. L’exis- 
tence sur les montagnes de Cochinchine d’une vanille ( Vanilla aphylla), qui croit spon- 
tanément dans les ravins humides, justifie cette opinion. Plus au nord, dans le Laos supé- 
rieur, les localités propres à la culture de la vanille deviennent nombreuses. 

[licium anisatum, Li. — Deux espèces appartenant à ce genre de la famille des 
magnoliacées, croissent en Indo-Chine : lune à fleurs pourpres, se rencontre dans 
les montagnes du Laos supérieur, et produit des fruits peu aromatiques qui ne sont 
pas utilisés ; l’autre croit en Chine, et ses fruits sont très-estimés. Cette dernière espèce, 
connue sous le nom d’anis étoilé ou de badiane, croit à l’état sauvage sur les montagnes 
du nord-ouest de ia province du Vun-nan, à 2,500 mètres d'altitude et au-dessus, dans 
les endroits humides. Sa hauteur dépasse souvent 4 à 5 mètres. Ses fleurs, d’un jaune 
très-päle et assez grandes, apparaissent en février et en mars; ses fruits muürissent en 
août et septembre. Cest à cette époque qu'on les recueille et qu’on les exporte après les 
avoir fait sécher. Cet arbre aromatique se multiplie de lui-même ; son bois est utilisé en 
ébénisterie. 

Piper nigra, L. — Le poivrier n’est cultivé qu’en Basse-Cochinchine et au Cambodge, 
quoique le Laos offre à sa culture des terrains beaucoup plus favorables. Cette plante n'exige 
aueun soin. Les habitants se bornent ordinairement à planter au pied des arbres fruitiers 
de leurs jardins un ou plusieurs sujets provenant d'anciennes souches ou de marcottes. 
Cette opération a lieu dans la saison humide, cependant il est quelquefois nécessaire 
d’arroser pour assurer la reprise des plants. A l’aide des crochets qui naissent des nœuds, 
les sarments se fixent à l’écorce des arbres, enlacent leur trone et s'élèvent souvent à plus 
de 10 mètres de hauteur. Vers la troisième et la quatrième année, des rameaux latéraux 
naissent, deviennent arborescents comme ceux des lierres et fleurissent ensuite chaque 
année au printemps. La récolte à lieu en novembre, un peu avant la parfaite maturité. 
Elle se fait à la main; on expose les baies au soleil afin de bien les dessécher pour assurer 
leur conservation. 

Chavica belle, Miq. (Piper betle, L.). — Le bétel est cultivé depuis Saïgon jusqu’en 
Chine, dans la vallée du fleuve du Tong-king. Sa culture est admirablement soignée. On lui 
consacre les meilleures terres, on emploie pour les fumer les engrais les plus parfaits et 
l'irrigation des champs est disposée d’une façon remarquable. Les terres les plus propres 
pour la culture de cette plante, sont les terres alluvionnaires; les plantations faites dans les 
lieux élevés sont peu productives, et les arrosages doivent être bien plus abondants. Les 
plantations sont souvent ombragées par de grands arbres; on choisit l’aréquier de préfé- 
rence. 

La multiplication de ce poivrier se fait de marcottes obtenues par le couchage, que l’on 
plante dans la saison humide au pied d’un gros piquet en bois haut de 2 à 3 mètres, sur 
lequel il grimpe. Parfois on le plante au pied des arbres, comme les aréquiers, mais dans 
ce cas il produit peu, car la fumure profite en partie aux tuteurs. D’autres fois, on le plante 
le long des murailles, contre lesquelles il vient très-bien lorsqu'il n’est pas trop exposé au 


440 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


soleil. Dès la seconde année le poivrier bétel donne quelques feuilles que lon peut ré- 
colter, mais il n'entre réellement en production qu'à la troisième année. Il devient alors 
arborescent comme le lierre, et fournit des feuilles toutes les cinq à six semaines. 

Zanthoxzylum piperitum, D. C. (Fragaria piperita, L.). — Le zanthoxylon ou poivre 
du Japon, est cultivé dans le Laos supérieur et le sud de la Chine, pour ses fruits aroma- 
tiques, qui remplacent le poivre noir dans les usages culinaires. Les climats humides et 
brumeux sont ceux qui paraissent le mieux lui convenir. Par le 20° degré de latitude, il ne 
croît pas à une altitude dépassant 8 à 900 mètres. Ordinairement il est planté dans les jar- 
dins ou autour des pagodes. La floraison a lieu en août et la maturité de ses fruits en no- 
vembre et décembre ; les habitants eueillent les grandes panicules que forment ses fruits 
et les font sécher au soleil. L’essence aromatique qui fait rechercher ces fruits, existe sur- 
tout dans les petites glandes pellueides recouvrant le péricarpe. 

Areca catechu, L. — L'aréquier est une plante essentiellement tropicale. On ne le 
rencontre pas en Indo-Chine au delà du 24° degré de latitude, et encore n’existe-t-il sous 
celte limite que dans le fond des vallées très-profondes. Indigène des îles de la Sonde, 
l'aréquier n'existe que cultivé en Indo-Chine. On le plante ordinairement dans un sol allu- 
vionnaire humide, en lignes rapprochées de 2 à 3 mètres sur des talus séparés par d’étroits 
fossés dans lesquels l’eau peut pénétrer. Il peut croître cependant sur les monticules où 
toute irrigation est impossible, mais il y donne peu de fruits et y dure peu. L’aréquier a 
fourni un grand nombre de variétés différentes par la forme et la couleur des fruits, 
mais qui n'offrent que peu d'intérêt, leur qualité étant à peu près toujours la même. La 
floraison des aréquiers a lieu de mars à mai, suivant les terrains et les variélés. La fruc- 
lification offre les mêmes écarts et se fait neuf à dix mois après, d'octobre à janvier. 
On récolte souvent les fruits pour les consommer verts. Lorsqu'on les laisse mürir, 
c'est presque toujours pour les faire sécher, afin de les conserver et de pouvoir les 
exporter. 

La dessiccation des noix, se fait en enlevant d’abord leur enveloppe extérieure fibreuse 
qu'on emploie souvent à calfater les bateaux, puis en les divisant en morceaux ou en 
rondelles, que l'on fait sécher au soleil sur des nattes. Nulle part nous n’avons vu traiter 
ces noix pour obtenir l'extrait astringent que l’on connaît sous le nom de cachou. 

Nicotiana tabacum, Li. — Nicotiana chinensis, L. — Toutes les populations indo-chi- 
noises sans distinction, cultivent l’une de ces deux espèces de tabac. La première, qui est 
l'espèce commune, estla plus répandue; la seconde, malgré son nom spécifique, s’observe 
lrès-rarement en Chine, mais par contre prédomine en Cochinchine. 

Le tabae, dans toutes les régions tropicales, est cultivé pendant la saison sèche; au con- 
traire dans les régions jouissant d’un climat tempéré, il est planté pendant la saison hu- 
mide. Partout la culture du tabac est l’objet de soins spéciaux, et plus indispensables sous 
ces climats qu’en Europe. Cest, en Cochinchine et au Laos, à peu près la seule plante 
pour laquelle on recueille des engrais. Les Annamites préparent même très-souvent pour 
sa culture un fumier spécial qui se compose de fiente d'animaux, de lourteaux de plantes 
oléagineuses, et de cendres de bois, qu'ils mélangent et qu'ils font fermenter. Chaque 


PLANTES COLONIALES. 441 


cultivateur produisant généralement son tabac, cette plante se trouve cultivée dans toute 
espèce de terrains, mais ses feuilles varient de qualité, bien qu’elles acquièrent à peu 
près partout la même laille. Le tabac est ordinairement très-mauvais dans les terres sablon- 
neuses, et très-bon dans les terres argileuses. Les tabacs cambodgiens et laotiens cultivés 
sur les berges du Cambodge, dans le limon argileux déposé par les eaux, sont bons, et ceux 
qui sont cultivés sur les monticules au sol argilo-ferrugineux, habités par les sauvages, sont 
très-bons. En général les tabacs indo-chinois brülent mal et paraissent contenir une trop 
faible proportion de nitre. En Chine seulement, dans les terres argileuses rouges situées 
autour des montagnes de marbre de la province du Yun-nan et du Se-tchouen, on trouve 
des tabacs pouvant être comparés à ceux de la Havane et de Manille. Leur parfum est exces- 
. sivement remarquable ; ils brülent très-facilement, et nous ne doutons pas qu'exportés en 
Europe, ils n’acquièrent une grande réputation. 

Pour multiplier le tabac, on commence par le semer dans un peu de terreau et on 
le repique lorsque les plantes ont atteint une taille suffisante. Ces semis se font dans 
les jardins et souvent sous de petits toits en feuillage pour les préserver du soleil et des 
pluies d'orage. Pour assurer le repiquage, les Indo-Chinois ont souvent le soin de mettre, 
sept à huit jours auparavant, chaque pied dans un petit pot en feuilles de bambou qu'ils 
enlèvent au moment de les mettre en terre, ce qui rend leur reprise infaillible. Excepté 
sur les berges des fleuves, partoutils ont recours à des arrosages, surtout au début de la 
plantation. Les Annamites inslallent très-souvent, dans ce but, des puits de distance en 
distance dans leurs champs de tabac. 

L’étêtage du tabac est assez généralement pratiqué par les Indo-Chinois qui laissent à la 
plante de dix à douze feuilles. Dans de très-rares endroits les feuilles de tabac subissent 
des préparations spéciales. Après les avoir fait sécher à l’ombre, placées sur des claies ou 
suspendues à des ficelles, on les réunit en paquels qu'on hache au fur et à mesure des 
besoins ou de la vente. 

Papaver somniferum, L. — Le pavot à opium, nommé ordinairement pavot blanc à 
cause de la couleur blanche de sa graine, est cultivé sur une très-vaste échelle dans toute 
la partie sud-ouest de la Chine avoisinant le Tibet et le Laos. Depuis quelques années 
surtout cette culture s’est beaucoup accrue, et a envahi graduellement les plaines des 
régions élevées jouissant d’un elimat see presque tempéré. Sous le tropique, l'altitude 
des terres doit être d'au moins 1,500 mètres, pour que le pavot prospère. 

Cette culture a lieu en hiver, dans les meilleures rizières des vallées. Dans un pays où 
la terre à riz est si peu abondante relativement aux terres pauvres des montagnes, et où 
les habitants ont beaucoup de peine à se procurer les céréales nécessaires à leur nourri- 
ture, ce n’est pas sans regret que l'on voit celte culture se substituer à celle du blé et des 
autres céréales d'hiver. D’après les indigènes, la culture du pavot aurait déjà amené une 
assez notable perturbation dans les conditions d'existence des habitants. 

La terre que l’on destine à cette culture doit être bien fumée. Cette opération se pra- 
tique parfois avant le labourage, mais le plus souvent elle à lieu après, en déposant un 


peu de terreau à chaque pied de pavot lorsqu'ils sont encore très-petits, ou, ce qui est 
Il 36 


442 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


plus ordinaire, en semant les graines sur ce terreau déposé auparavant dans un petit trou 
creusé à la main ou avec une houe. Dans d’autres cas, ils arrosent chaque pied avec le 
purin provenant de leur fosse à fumier. Les semis se font en octobre et novembre, le 
plus souvent à la volée, dans le champ préalablement hersé, après que toutes les mottes 
de terre ont été pulvérisées. On sème beaucoup plus de graines que n’en pourrait nourrir 
la terre ; plus tard, en binant les champs, on retranche Les pieds superflus et on les espace 
aussi régulièrement que possible. L'opération du binage se fait deux ou trois fois, à 
quinze ou vingt jours d'intervalle. 

La récolte de l’opium a lieu de mars à avril. L'opération se fait avec un couteau à 
trois lames courtes, à l’aide duquel on trace de trois à cinq séries d’incisions verticales sur 
chaque capsule en commençant par leur partie inférieure. Le sue s'écoule immédiate- 
ment et forme une série de gouttelettes dont l'inférieure est toujours la plus grosse. Ces 
gouttelettes sont recueillies quelques instants après, en raclant la capsule de bas en haut 
à l’aide de la lame d’un couteau ordinaire ou avec le manche de celui qui a servi à tracer 
les incisions. Les personnes qui font le raclage sont munies d’un petit pot fixé à leur 
ceinture, dans lequel elles déposent l’opium qu'elles récoltent. L’opium ainsi recueilli est 
mou, assez semblable à l'extrait d’opium des pharmacies. Pour être bon à fumer, 1l doit être 
trailé comme les opiums secs, c’est-à-dire dissous dans l’eau, passé à travers un feutre, 
puis évaporé en consistance d'extrait mou. Celle opération est faite presque toujours par 
des individus spéciaux, dans les lieux mêmes où l’opium doit être consommé. C’est sous 
la première forme qu'il est exporté dans les pays avoisinants. 

Les graines du pavot à opium sont utilisées par les Chinois pour faire de l'huile, mais 
cette huile ne doit être employée pour l’usage culinaire qu'avec la plus grande pru- 
dence. Souvent en effet, à la suite d’incisions trop profondes, une partie du suc du pavot 
s'écoule en dedans de la capsule sur les graines ; cette huile, comme les tourteaux qu’elle 
fournit, peut done contenir une certaine proportion des principes stupéfiants de l’opium, fait 
que nous n'avons pu vérifier par nous-même, mais qui nous à été affirmé par des Chinois. 


III 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. — LÉGUMES ET CULTURES MARAICHÈRES. 
$ 107. — Arbres fruitiers et plantes à fruits. 


En Cochinchine et en Chine seulement, les arbres fruitiers reçoivent quelques soins. 
On trouve parfois de véritables vergers, mais jamais ces plantalions ne sont soignées 
comme en Europe. La taille des arbres est inconnue et la greffe à peu près impraticable 
dans le sud, autant à cause de l'extrême sécheresse que de l’extrème humidité qui lui 
succède ; elle ne se pratique guère que dans le nord, en Chine. La multiplication se fait 
surtout par graines; le marcottage, sous ses diverses formes, ne s'emploie guère que pour 
reproduire les variétés. Le bouturage est rare, sauf pour les plantes. La plupart des 
arbres fruitiers ont produit des variétés nombreuses, assez imparfaites et que l'application 
de nos procédés de sélection rendrait bien supérieures. 

L’extrêème variété de climat de l’Indo-Chine fait qu’on y trouve des représentants 
de presque tous les fruits du monde, et assurément ceux qui manquent pourront y pros- 
pérer en choisissant les zones climatériques qui leur conviennent. 

Mangifera india, L. — Le manguier croit à l’étal franchement spontané dans les 
forêis de l'extrême sud de l’Indo-Chine, particulièrement dans celles de la Basse-Cochin- 
chine. Cette espèce, qu'il faut bien se garder de confondre avec les variétés cultivées 
qui se sont naturalisées dans presque toutes Les forêts indo-chinoises, présente des carac- 
tères particuliers dans ses feuilles, ses fleurs et ses fruits. Elle diffère suffisamment 
des variétés qui en sont issues pour que notre première pensée ait été d’en faire une 
espèce dislincte sous le nom de Mangifera emarginata, à cause de ses feuilles légère- 
ment échancrées à leur sommet. Ses fruits sont aplatis comme ceux de l'espèce cultivée, 


444 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


mais ils sont beaucoup plus petits, d’un jaune plus franc, et ordinairement pointillés de 
rouge. Ils exhalent une forte odeur térébenthinée, et comme goût ne sont pas inférieurs 
à bien des espèces cultivées. 

Le manguier est un arbre essentiellement tropical; dès qu’on approche de cette limite, 
on ne le trouve plus que dans le fond des vallées profondes comme celles du Tong-king, 
où il ne donne plus que des fruits très-médiocres. Toutes les terres conviennent au 
manguier, même les terres alluvionnaires et légèrement salines de la Basse-Cochinchine. 
Multiplié de graines, cet arbre présente beaucoup de variétés souvent peu dissemblables 
dans leur feuillage, mais très-différentes par leurs fruits. Ce mode de reproduction est 
exclusivement employé au Laos. s 

En Cochinchine, les belles espèces sont reproduites par le marcottage qui se pratique 
en entourant la base d’une branche d’une natte remplie de terre qu’on arrose chaque 
jour. On coupe la branche cinq ou six mois après, lorsque les racines sont nées. La greffe 
par approche, usitée dans beaucoup de colonies, est complétement inconnue en Indo- 
Chine. Le manguier fleurit en janvier et mars, et fructifie en mai et juin. 

Bonea oppositifolia, Roxb. (Cambessedea, Wight et Arn.). — Cet arbre peu connu 
des Européens est cultivé dans quelques jardins du Laos inférieur (Bassac et Oubon). Il 
est originaire de l'Inde. C'est un des plus beaux arbres fruitiers de l'Asie et il en 
exisle peu ayant un feuillage plus abondant et d’un plus beau vert. Ses fruits d’un jaune 
d’or, moins gros que la mangue, sont, comme elle, ovoïdo-aplatis et pourvus d'un 
seul noyau ligneux entouré d’une chair jaune entremêlée de quelques fibres. Leur 
qualité varie beaucoup; on en trouve d'excellents et d’autres très-acides. 

Cet arbre nous a paru croître avec beaucoup de facilité, dans les terres les plus riches 
comme dans les plus pauvres. 11 préfère cependant les terres alluvionnaires profondes el 
argileuses qui bordent les fleuves et les rivières. Il fleurit en janvier et mars, et fructifie 
en mai el juin. On ne le multiplie que de graines. 

Garcinia mangostana, L. — Cet arbre au feuillage si ornemental et aux fruils si 
jolis est originaire des îles de la Malaisie ; il a été importé en Cochinchine par les 
missionnaires il y à soixante ans environ. On trouve encore à La-thien près de Saigon 
les premiers sujels introduits. Cet arbre a été beaucoup multiplié par les Annamites ; le 
prix de ses fruits est cependant encore très-élevé. 

Le mangoustanier est un arbre essentiellement tropical ; déjà, par le 19° degré, à la 
Jamaïque, il ne donne plus que des fruits médiocres *. Il aime les terrains très-humides ; 
en Cochinchine, il ne croit convenablement que dans le fond des petites vallées tourbeuses 
du haut de la rivière de Saigon. L'ombre lui est favorable, aussi les Annamites le 
plantent-ils au milieu des aréquiers et des cocotiers. Sa multiplication, qui se fait exelu- 
sivement de graines, n’est pas sans difficultés. Même en semant les graines dans du terreau 
et dans des endroits bien ombragés et humides, on perd, à la fin de la première et de la 
seconde année, une grande partie des sujets qui ont levé: Ce n’est guère que lorsqu'ils 


1 De Candolle, Géographie botanique, page 872 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 445 


ont atteint l’âge de trois à quatre ans qu'ils résistent et qu’on peut les transplanter sans dan- 
ger. Cette opération ayant réussi, si le lieu a été bien choisi, cet arbre croît sans aucun soin, 
el il n’est nécessaire n1 de le tailler n1 de le fumer. La floraison a lieu en mars et avril, 
el la maturité des fruits de juillet à septembre. Quoique toujours mulliplié de graines et 
dans des pays très-différents, cet arbre n’a produit aucune variété. 

Parmi les douze espèces de Garcinia croissant spontanément en Indo-Chine, plusieurs, 
et en particulier le Garcinia cochinchinensis (Oxycarpus cochinchinensis, Lou.), four- 
nissent des fruits comestibles qu’on trouve fréquemment sur les marchés indigènes ; man- 
geables pour la plupart, leurs fruits sont trop acides pour être appréciés des Européens 
el même pour être très-recherchés des indigènes. 

Anacardium occidentale, L. — Le pommier d’acajou originaire d'Amérique, dont 
le bois ne rappelle en rien celui du véritable acajou, se rencontre dans toute la partie 
tropicale de l’Indo-Chine. Partoutil s’est naturalisé autour des villages, et le plus souvent 
il se multiplie seul. Sans sa mulliplication si facile, il est probable qu'il serait peu 
abondant, car les deux fruits qu’il fournit, un pédoncule charnu et une noix à graines 
huileuses comestibles, sont assez médiocres. 

Le pommier d’acajou présente une certaine tendance au polymorphisme ; sans qu’il 
se soit conslitué des variétés très-distinctes, on trouve assez souvent des exemplaires dont 
les feuilles diffèrent de grandeur ou de forme de celles de l'espèce type. Les fruits 
présentent également des variations de couleurs et de formes; tantôt ils sont très- 
colorés en rouge, d’autres fois ils sont très-pales. Le pommier d’acajou croit dans tous 
les terrains. C’est cependant sur les monticules les plus secs qu’il devient le plus vigou- 
reux et qu'il donne les plus beaux fruits. La floraison a lieu en février, et la maturité des 
fruits en juin et juillet; mais ces deux phénomènes s’accomplissent à des époques qui 
varient selon le degré d'humidité et la latitude des lieux. 

Durio zebethinus, L. — Cet arbre est très-rare en Indo-Chine. On le trouve seu- 
lement à Siam et sur les quelques points du Cambodge qui l’avoisinent, comme Compot. 
Dansle Laos, à Oubon, nous en avons vu quelques exemplaires autour d’une pagode. Ils 
étaient plantés dans un endroit frais et humide et ombragés par quelques aréquiers. 

La multiplication se fait exclusivement de graines, que l'on doit planter dès que le 
fruit est mür, car elles perdent rapidement leur faculté germinative. Pour les conserver 
et les transporter, on les dépose dans une caisse remplie de sable frais. Les fruits, pen- 
tagonaux, allongés et amincis à chaque extrémité, acquièrent la dimension de la moitié 
de la tête ; dès qu'ils sont murs, ils s'ouvrent à cinq valves et laissent voir intérieurement 
de grosses graines entourées d’une pulpe abondante exhalant une odeur alliacée et puante, 
qui répugne aux Européens. « Ils sont très-estimés des Asiatiques qui les ont nommés 
« fruits des Dieux ». 

Averrhoa carambola, L. — Cet arbre, connu sous le nom de Carambolier, s’est natu- 
lisé dans toute la partie de l’Indo-Chine située au sud du 20° degré de latitude. Partout, 
dans cette zone chaude, on en rencontre quelques exemplaires dans les Jardins et autour 
des villages. Ses fruits charnus, à cinq côtes, servent à faire des compotes lorsqu'ils ont 


446 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


atteint leur complète maturité et perdu en grande partie leur extrême acidité. Ils sont 
d’un goût assez médiocre, et il faut en user avec prudence à cause de l'acide oxalique 
qu'ils contiennent. La culture de cet arbre est probablement due beaucoup plus à la 
grande facilité de le multiplier et à la beauté de ses fleurs roses, qu'à la qualité de 
ses fruits. 

Nous devons signaler l’absence, dans loutes les régions que nous avons explorées, de 
l'Averrhoa bilimbi, L., qu'on rencontre ordinairement dans toutes les colonies et dont 
les fruits diffèrent très-peu par leur qualité de ceux de l’espèce précédente. 

Artocarpus incisifolia, L. — L'arbre à pain est très-rare en Indo-Chine. Originaire 
de la Malaisie où les chaleurs ne sont jamais excessives, et où les pluies se répartissent 
presque également dans les différents mois de l’année, ils’accommode très-mal d’un cli- 
mat où six mois de sécheresse excessive succèdent à six mois de pluies torrentielles. Quel 
que soit le terrain où il ait été planté, il périt souvent à la suite d’une de ces saisons 
trop accentuées. Il ne donne qu'une seule récolte au lieu de plusieurs successives comme 
en Océanie. C’est donc à tort que plusieurs personnes cherchent à développer sa culture 
en Cochinchine et particulièrement à Poulo-Condore. 

La variété de cet arbre qu’on rencontre en Indo-Chine a, ainsi que toutes celles de 
l'Océanie, des fruits dépourvus de graines ; aussi ne la mulüplie-t-on que de boutures 
provenant des drageons qui se développent fréquemment à son pied. Les Annamiles con- 
somment ces fruits après les avoir fait cuire. 

Artocarpus integrifolia, L. (Polyphema jaca, Lou.). — Cet arbre, vulgairemeni 
nommé Jacquier, est originaire de Ceylan. I croît en Indo-Chine avec une très-grande 
vigueur et montre une grande tendance à s’y naluraliser. On le rencontre dans toutes 
les parties chaudes de la presqu’ile, jusque dans le Laos supérieur. C’est en Cochinchine 
qu'il atteint la plus forte taille et qu'il produit des fruits entièrement comparables à 
ceux de Ceylan. Il croit partout, même dans les terres alluvionnaires, mais il préfère un 
sol sec et sablonneux. Ses fruits sont énormes, beaucoup plus gros en moyenne que la 
tèle d’un homme; ils contiennent une chair pulpo-fibreuse assez délicate, mais qui 
exhale une odeur désagréable. Ils naissent sur les grosses branches, sur le tronc, parfois 
même jusqu’au pied de l'arbre. Leurs graines, grosses environ comme le bout du pouce, 
sont mangées par les indigènes après avoir été grillées ou cuites sous la cendre. 

La multiplication du jacquier se fait de graines avec la plus grande facilité. La floraison 
se répartit dans les différents mois de l’hivernage, et la fructification a lieu pendant la 
saison sèche. Le cœur du bois de cet arbre est d’un beau jaune renfermant une substance 
ünctoriale. Trois autres espèces d’Ar/ocarpus croissent en Indo-Chine. Toutes produisent 
des fruits sphéroïdaux, gros au plus comme une pomme, que les indigènes vont recueillir 
dans les forêts. 

Baccaurea ramiflora, Lou. — Cet arbre, de la famille des euphorbiacées à fruits 
comestibles, point ou peu connu en Europe, mérite d'attirer l’attention; il croît spon- 
tanément sur toutes les montagnes indo-chinoises, depuis Saigon jusqu'aux frontières 
de la Chine ; on le rencontre assez souvent dans les jardins annamites et laotiens. Sa taille 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 447 


est petite, ses fleurs sont dioïques. Même dans les forêts où il est spontané, cet arbre 
présente plusieurs variétés se distinguant surtout par les fruits, dont la couleur varie du 
jaune presque blanc au violet foncé, aussi bien à l'extérieur qu’à l’intérieur. Ses fruits 
naissent sur le trone et les gros rameaux, en grappes pendantes. Ils sont ovoïdes, gros 
comme des noix, pourvus d’une enveloppe coriace, trivalves, s’ouvrant à la maturité, 
pour laisser voir intérieurement quatre à six graines, disposées comme les quartiers d’une 
orange, entourées d’une pulpe abondante qui est la partie comestible. Cette pulpe, à 
peu près sans parfum, très-acide d’abord, devient sucrée avec la maturité des fruits. La 
sélection appliquée à cet arbre amènerait sans aucun doute la créalion de meilleures 
variétés. Dans le Laos supérieur, les habitants emploient parfois les fruits à faire une 
liqueur fermentée. 

Cet arbre aime l'ombre et l'humidité; sa culture ne nous à paru offrir aucune dif- 
ficulté. Sa floraison a lieu en janvier et février, et sa fruclification en juin et juillet. 

Anona squammosa, L. — Le pommier-cannellier, originaire d'Amérique comme 
toutes Les espèces du même genre, est très-répandu dans toutes les parties de l’Indo- 
Chine jouissant d’un climat tropical. Il aime la chaleur et le soleil. Il fournit d'excellents 
fruits ; s’'accommodant à peu près de tous les.terrains, il se multiplie très-facilement, le 
plus souvent de lui-même. Lorsque les indigènes le sèment, ils le mettent en place, ear 
sa {ransplantation échoue presque toujours. Ainsi que tous les genres de la famille des 
anonacées, le pommier-cannellier présente la plus grande fixité dans ses caractères. 
Bien qu'il soit cultivé depuis un temps très-long et dans des pays différents, il n’a pro- 
duit aucune variété. Sa floraison a lieu d’avril à mai, suivant Le degré d'humidité des 
terres, et ses fruits muürissent de juillet à octobre. 

Anona reticulata, L. (Anona asiatica, Lou.). — Cet arbre produit des fruits 
connus sous le nom de Cœurs-de-bœuf. Il s’avance plus au nord que le pommier-cannellier 
et on le trouve encore dans le sud de la Chine, au delà du tropique, dans le fond de 
vallées assez élevées ; 1l est moins répandu que le pommier-cannellier, ce qui tient à ce 
que ses gros fruits rougeatres ont une crème bien moins délicate que la pomme-can- 
nelle. [se multiplie presque toujours seul de graines ; il croît à peu près partout, mais 
préfère les endroits frais el peu ombragés. Ses fleurs apparaissent un peu plus tôt que 
celles des espèces du même genre et se montrent dès février. Ses fruits mürissent égale- 
ment plus tôt et peuvent être cueillis en mai. 

Anona muricata, L. — Le corrosol ou cachiman a dü être introduit tout récem- 
ment en Indo-Chine, car on en lrouve à peine quelques exemplaires en Basse-Cochin- 
chine. Les fruits qu'il produit sont inférieurs en qualité à ceux du pommier-cannellier. 
Le climat de l’Indo-Chine paraît lui convenir. Sa multiplication se fait à l’aide des 
uombreuses graines que renferment ses gros fruits verts, allongés, couverts de pointes 
et pleins d’une crème laiteuse excellente. Les phénomènes de la floraison et de la ma- 
turité ont lieu aux mêmes époques que ceux du pommier-cannellier. 

Tamarindus indica, L. — Quoique le tamarin ne soit probablement pas spontané en 
Indo-Chine, il y croit avec une vigueur exceptionnelle, surtout dans Le sud de la presqu'ile, 


448 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


en Basse-Cochinchine, où il atteint d'énormes dimensions. Contrairement à la plupart 
des autres arbres qui y végètent, il y vit très-longtemps et les sujets séculaires n’y sont 
pas rares. C’est donc avec raison qu'il a été adopté pour les promenades de Saigon. 

La limite nord qu’il nous à paru atteindre, est le 27° degré de latitude. Ses fruits 
sont recherchés des indigènes, qui les mangent indifféremment verts ou complétement 
murs. La maturité a lieu en novembre et rarement les habitants en conservent pour 
le reste de l’année. 

Le tamarin est naturalisé à peu près partout, il croît dans tous les sols, même ceux qui sont 
légèrement salins ; quoique cultivé depuis un temps très-long et dans des conditions très- 
diverses, ses caractères ont très-peu varié. Indiquons cependant l'existence d’une variété 
pleureuse fort belle, qu’on trouve dans quelques parties basses de la Cochinchine. Mal- 
gré cette variation dans les caractères des ramuscules, les fleurs et les fruits ont conservé 
leurs formes. 

Nephelium litchi, L. (Dimocarpus litchi, Lou.). — En dehors de la zone comprise 
entre le 20° et le 30° degré de latitude, le litchi ne produit que des fruits trop acides 
pour qu’on le cultive. On ne le rencontre donc que dans le Laos supérieur, le Tong-king 
et le sud de la Chine, encore ne croiït-il dans ces différents pays que dans les zones 
chaudes jouissant d’un climat humide et brumeux. Il présente plusieurs variétés se dis- 
tinguant entre elles par les feuilles, mais surtout par les fruits, qui sont tous plus ou 
moins tuberculeux et d’un rouge plus ou moins foncé. La multiplication du litchi se fait 
de graines que l'on plante dans les terres alluvionnaires, qu'il paraît préférer et qui 
sont celles où on le trouve croissant spontanément. Sa floraison a lieu en mars et avril, 
et la maturité de ses fruits en juillet et août. Ces fruits sont mangés frais ou secs; frais, 
ils sont vraiment exquis, quoique ayant un parfum rappelant l’ail ; séchés au four, comme 
les préparent les Chinois pour les conserver et les exporter, ils sont médiocres. 

Nephelium longanum, Camb. (Dünocarpus longan., Lou.). — Ce litchi se trouve 
depuis Saigon, où il est cullivé assez fréquemment dans les jardins, jusqu’en Chine, au 
delà du tropique. La zone où il parait croître avec le plus de vigueur et où il est, sinon 
spontané, du moins naturalisé, est le Laos supérieur. Ses fruits, inférieurs en qualité à 
ceux de l’espèce précédente, en diffèrent par leur forme qui est sphérique, leur couleur 
Jjaune-fauve et la surface de leur péricarpe qui est presque lisse. Sa multiplication se 
fait de graines; sa floraison a lieu en mars et avril, et sa fruclification en juillet et 
août. 

Nephelium crinitum (Dimocarpus crinita, Lou.).— Quoique ce litehi ne soit pas cultivé 
en Indo-Chine, nous tenons à le mentionner à cause de la bonté de ses fruits, qui ne sont 
guère inférieurs à ceux du litchi longan. Il croît spontanément dans les forêts habitées 
par les sauvages du sud, Stiengs et Moïs. On le reconnaît facilement à ses fruits couverts 
de pointes molles, longues d’un centimètre environ. 

Schleichera edulis, Nobis. — Cet arbre, voisin des espèces précédentes et que nous 
croyons inconnu, croit spontanément dans les forêts du Cambodge et du Laos inférieur. 
Dans ces deux pays, il est quelquefois cultivé dans les haies et dans les jardins. Quoique 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 449 


ses fruits soient assez bons et très-abondants, cet arbre n’a pas élé introduit en Cochin- 
chine. Il fleurit en janvier et en février, et fructifie en juin et juillet avec les premières 
pluies. Ses fruits,'en grappes, gros environ comme des prunes, ont une enveloppe coriace, 
d’un blanc jaunätre, assez analogue à celle du litchi; ils contiennent à l’intérieur une 
grosse graine entourée d’une abondante pulpe jaune et sucrée, lorsque le fruit est bien 
mür. Il se reproduit de graines, et les fruits des différents sujets sont loin d’être iden- 
liques. 

Psidium quajaca, Raddi. — Avec plusieurs botanistes (Martins, Harskarl et Blume), 
nous n’admettons pas la distinction qui a été faite autrefois de deux espèces de goyavier, 
l’une à fruit sphérique (Psidium pomiferum), et l'autre à fruit pyriforme (Psidium pyri- 
ferum). Si l’on rencontre, en effet, ces deux formes différentes de fruits en Indo-Chine, 
on y trouve aussi de nombreuses variéiés, intermédiaires entre ces deux types extrêmes, 
qu'il est complétement impossible de rattacher à l’une ou à l’autre espèce. À notre avis, 
ce ne sont que des variétés qui ne suffisent pas plus que la couleur rouge ou blanche de 
la chair, pour créer deux espèces distinctes. Le goyavier n’est pas indigène en Indo-Chine, 
comme l’a indiqué Loureiro; il a dù être importé d'Amérique, son pays d’origine. Il se 
naturalise avec facilité, et partout on le trouve dans les bois autour des villages, à l’excep- 
tion toutefois de la plupart de ceux habités par les sauvages. 

Au milieu des nombreuses variétés qu’on rencontre en Indo-Chine et qu'il est difficile 
de classer, une d’elles pourtant (le Psidium pumilium, Vahl.), remarquable par sa petite 
taille, est très-facile à distinguer. 

L’aire de végétation du goyavier est assez considérable, on le rencontre depuis l'équa- 
teur jusqu'au delà du 25° degré de latitude. Quoiqu'il s’accommode très-bien de la 
chaleur, ses fruits n’acquièrent toute leur sapidité que dans des pays modérément chauds. 
C’est done dans le Laos supérieur et dans le sud de la Chine que nous avons trouvé les 
meilleures goyaves. La floraison a lieu en mai et juin au début des pluies, et la maturité 
des fruits en septembre et octobre. 

Diospyros kaki, L. — Parmi les vingt-cinq espèces d’ébéniers qu'on rencontre 
croissant spontanément en Indo-Chine, nous n’en avons observé que deux cultivées pour 
leurs fruits. L'une (le Déospyros decandra, Lou.) est cultivée en Cochinchine et fournit 
des fruits assez médiocres, très-peu estimés même des indigènes. L'autre, au contraire, 
(le Diospyros kaki, L.), qui fournit les fruits connus sous le nom de kaki ou de figues caques 
du Japon, est très-digne d'intérêt. C'est peut-être un des arbres fruitiers les plus cultivés 
dans la partie de la Chine jouissant du climat méditerranéen. C’est un arbre assez rustique, 
s'accommodant facilement des différents climats et des différents terrains. On le cultive 
aussi bien sur les montagnes que dans les vallées. Sa multiplication se fait de graines qui 
doivent être semées dès que le fruit est mûr. Sa floraison a lieu de mai à juillet, selon la 
température des localités, et aussi selon les variétés très-nombreuses et assez difficiles à 
distinguer, Ainsi que tous les ébéniers, il présente une grande tendance au polymor- 
phisme ; les feuilles varient beaucoup de grandeur, de forme et surtout dans leur degré 


de pubescence. Les fruits présentent également d’assez grandes variations. Leur malu- 
Il: 57 


450 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


ration a lieu de septembre à novembre, et ils deviennent meilleurs lorsqu'ils ont subi 
quelques nuits très-froides. Frais, avec leur épiderme transparent et leur chair d’un jaune 
rougeälre, ils ressemblent assez à une tomate. Ordinairement les habitants n’en mangent 
que très-peu à l’état frais, ils préfèrent les sécher pour les manger en hiver. 

Jambosa malaccensis, Wight. el Arn. (Eugenia malaccensis, L.). — Cet arbre, origi- 
naire de l'archipel des îles de la Sonde, est cultivé dans toutes les parties tropicales de 
l’Indo-Chine. Il nous à paru planté autant pour la beauté de ses fleurs que pour ses fruits 
dont la chair est insipide et spongieuse. Cet arbre se reconnait aisément à ses fleurs roses, 
naissant sur les gros rameaux, et à ses fruits rouges, pyriformes, gros comme des poires; 
il fleurit en avril et mai, et fructifie en juin et juillet. 

Jambosa vulgaris, D. C.(Eugenia jambos, L.). — Cet arbre intéressant, qui croît spon- 
tanément sur les bords du Cambodge, dans le Laos supérieur, est cultivé dans tout le Laos. 
Dans le reste de l'Indo-Chine nous ne l'avons rencontré ni spontané ni cultivé. Ses fruits 
contiennent une ou deux graines. Ils sont d’un blanc rose, gros environ comme uñe noix. 
Ils ont un goût de rose très-prononcé qui rappelle trop celui de la parfumerie; ils n’en 
sont pas moins excellents el très-sains. Cultivé dans les jardins laotiens, cet arbre acquiert 
une bien plus grande dimension qu’au pied des montagnes de grès qui bordent le fleuve, 
mais il y est moins fertile el ses fruits sont moins savoureux. Cette espèce diffère de la 
précédente par son feuillage plus pelit, ses fleurs blanches terminales et ses fruits sphé- 
riques et non pyriformes. 

Rhodomyrtus tomentosa, Aït. (Myrtus canescens, Lou.). — Ce bel arbrisseau, spontané 
dans les forêts du sud de l’Indo-Chine, n’est cultivé nulle part; l’excellence de ses fruits 
et la beauté de ses fleurs nous le font mentionner. Il croit exclusivement dans les forêts 
maigres situées sur les monticules sablonneux. Ses fruits, gros comme une cerise, d’un 
rouge violacé foncé, sont très-sucrés et ont un parfum très-agréable, qui les fait rechercher 
beaucoup des indigènes. 

Sonneratia alba. — Ce petit arbre, originaire des îles Philippines, est cultivé parfois 
dans les jardins de la partie basse de la Cochinchine. Il diffère par la couleur pâle de toutes 
ses parties du Sonneratia acida, L., dont les fruits sont également comestibles et qui est si 
commun sur le bord de toutes les rivières saumâtres. Ses fruits verts, gros comme des 
pommes, ont une chair acide assez médiocre, qui n’est guère appréciée que des indi- 
gènes. Sa culture ne peut être faite que sur le littoral, là où la terre contient des principes 
salins. 11 fleurit assez irrégulièrement d'avril à juin, et ses fruits mürissent d'août à sep- 
tembre. 

Punica granatum, L. — Le grenadier est cultivé depuis Saigon jusque dans le nord 
de la Chine et fournit partout des fruits mangeables; il préfère cependant les régions 
jouissant d’un climat se rapprochant de celui de l'Algérie, son pays d’origine. Dans les 
provinces du Yun-nan et du Se-tchouen, sa grosseur et sa hauteur sont exceptionnelles el ses 
fruits excellents. IL s’y naturalise très-souvent aux environs des villages. Plusieurs variétés 
de grenadiers existent en Indo-Chine. Les deux principales sont : 1° la variété commune 
à fleurs ponceau et à feuillage d’un vert foncé, dont les fruits ont la pulpe rose ou ronge; 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 451 


2° la variété à fleurs jaunâtres, parfois presque blanches, à feuillage d’un vert pâle et à 
fruits ayant une pulpe blanche ; 3° deux sous-variélés naines provenant des précédentes ; 
4° quatre variétés à fleurs doubles, dérivées des quatre précédentes, qu'on ne cultive 
que pour ornement. 

La floraison a lieu en mai et juin, au début de l'hivernage, et la maturation des fruits 
en décembre et janvier. 

Citrus aurantium, Riss. — L'oranger est cultivé depuis Saigon jusqu’au delà du 
centre de la Chine par le 35° degré de latitude environ. Son elimat de prédilection est 
le climat méditerranéen. C’est donc en Chine seulement, dans les montagnes où les pluies 
sont médiocrement abondantes et la chaleur modérée, qu'il trouve réunies les conditions 
les plus favorables à sa végétation ; ses fruits, quoique excellents, ne sont cependant ja- 
mais entièrement comparables à ceux de l'Algérie ou des îles Baléares, ce qui tient à ce 
que ces montagnes sont en général très-brumeuses pendant l'été. 

L'oranger est-il spontané en Chine, comme le pense de Candolle (1) ? Nous en 
doutons. Quoiqu'il se naturalise assez facilement autour des villages, on ne le rencontre, 
dans les forêts, qu’à l’état de pieds isolés. 

L’oranger présente en Indo-Chine trois variétés principales : 

La première, ou oranger commun, fournit les fruits les moins bons. Dans le sud 
surtout, ses fruits sont presque loujours immangeables, et malgré la chaleur, ils attei- 
gnent rarement une malurité parfaite. L’écorce de cette variété d'oranger reste verte ou 
ne devient qu'imparfaitement jaune. Le parfum qu’elle exhale est également moins 
agréable qu'en Europe. 

La deuxième variété d'oranger se distingue des deux autres par les dimensions moins 
grandes de toutes ses parties. Ses fruits, connus sous le nom de mandarines, sont fortement 
déprimés et même souvent excavés supérieurement. Leur écorce est très-mince et très-peu 
adhérente ; souvent elle devient jaune dans le sud, mais leur chair reste toujours assez 
acide, excepté dans le nord. 

La éroisième variété est celle connue en Cochinchine sous le nom de cambodgienne 
et qui a élé élevée au rang d'espèce par Loureiro (Citrus nobilis). Cest la variété qui 
s’accommode le mieux des climats chauds; ses fruits sont sphériques, assez gros, à écorce 
verte, épaisse, fortement tuberculeuse et se détachant assez facilement. La pulpe est re- 
marquable par l’abondance et le peu d’acidité du sue qu'elle renferme. En Chine, on 
trouve une sous-variété de cet oranger produisant des fruits non moins bons, dont l'écorce 
est encore plus fortement tuberculeuse et exhale une odeur désagréable. La culture de 
ces diverses variétés se pratique différemment, selon les pays. Dans le sud, les Annamites 
les plantent dans les lieux bas, au fond des vallées, dans des vergers sillonnés de canaux 
communiquant avec les rivières et à l'ombre des arbres, particulièrement des aréquiers. 
Dans le nord, les plantations ne sont plus abritées, et quoiqu'on choisisse un sol frais, 
comme les gorges et le pied des montagnes, on évite le fond des vallées trop humides. La: 


1 De Candolle, Géographie botanique, page 869. 


452 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


multiplication de l’oranger se fait presque toujours de graines; pourtant, en Cochinchine, 
le marcottage est employé et permet d'obtenir de beaux pieds d'oranger dans l’espace 
d’une saison humide. 

Une pratique très-curieuse estemployée par les Annamites pour augmenter le nom- 
bre des fruits et les préserver des ravages des insectes et en particulier des chenilles; ils 
transportent sur les orangers une espèce de grosse fourmi rouge très-commune dans toute 
l'Indo-Chine. Cette fourmi ne vit que sur les arbres; en parcourant les fleurs, elle parait 
faciliter leur fécondation, et, en détruisant les insectes, elle empêche les fruits de tomber 
prématurément. 

Citrus decumana, Wild. — Ce bel arbre, connu sous le nom de Shadeckier ou de 
Pamplemousier, est très-commun dans toute l’Indo-Chine, surtout dans le sud. C’est, 
parmi les arbres du même genre, celui qui atteint les plus fortes dimensions. 

Bien que croissant dans les lieux humides et les terres alluvionnaires qui bordent les 
fleuves, 1l s’accommode aussi parfaitement des terres élevées. IT se mulliplie de graines. 
Quelques sujets produisent des fruits dépassant en grosseur fa tête d’un homme, d’autres 
en produisent qui sont à peine plus gros qu’une orange. Leur chair est tantôt blanche, 
tantôt rose ou rouge. Jamais la partie comestible n’est en rapport avec la grosseur du 
fruit, et les plus gros, une fois dépouillés de leur énorme enveloppe, sont parfois les 
plus petits. Comme qualité, c’est un fruit assez médiocre, bien plus curieux que bon ; 
plusieurs races sont cependant passables, surtout en Chine. 

Citrus medica, Risso. — Le cédrat, très-rare dans tout le sud de l’Indo-Chine, est 
très-commun dans le nord, surtout dans le Laos supérieur, où il s’est même naluralisé 
dans le fond des vallées humides, au sol alluvionnaire, inondé en partie pendant la saison 
pluvieuse. Ses fruits y atteignent une grosseur exceptionnelle, et, contrairement à ceux 
des autres espèces du genre Citrus, leur écorce devient toujours parfaitement jaune sous 
ce climat cependantencore chaud. Les fruits sont à peu près identiques, sur tous les sujets 
du Laos ; ils sont ovoïdaux et gros comme les deux poings. En Chine on trouve fré- 
quemment la variété si remarquable dont les fruits présentent à leur sommet une ou plu- 
sieurs expansions digitiformes d’inégale longueur. La floraison de cet arbrisseau a lieu 
en juillet et août, la maturation des fruits en novembre et décembre. Les indigènes les em- 
ploient soit confits dans du sucre, soit découpés en tranches dans leur cuisine, à la façon de 
nos citrons. 

Citrus limonum, Risso. — Le vérilable citronnier d'Europe ne se rencontre que 
dans le nord, en Chine; dans le sud de la presqu'île, on trouve une variété distincte de 
cet arbre. Cetle variélé, remarquable par ses épines nombreuses, sa forme en buisson, 
sa taille ne dépassant pas un à deux mètres, se naturalise facilement autour des villages. 
Elle produit des fruits petits, acides et excellents, dont l'écorce, à peu près sans parfum, 
reste presque toujours verte, sauf dans le Laos supérieur et en Chine. La culture de ce 
citronnier se fait dans les jardins. 1 fleurit à la fin de la saison sèche et fructifie pendant 
l’hivernage. 


Œyle marmelos, Corr. — Cet arbre, de la famille des aurantiacées, est cultivé, mais en 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 453 


lrès-petite quantité, depuis Saigon jusque dans le Laos supérieur. Dans cette région il 
montre la plus grande tendance à se naturaliser, et on le rencontre fréquemment dans les 
bois qui entourent les villages. Ses fruits, qu'on dit utiles dans la diarrhée et la dyssenterie 
. chronique, sont très-peu appréciés comme fruits comestibles. Leur odeur fade, leur pulpe 
glutino-résineuse, les poils qui entourent les graines, les rendent peu appétissants. Ces 
fruits n’ont de comparable à l'orange, à laquelle ils ressemblent, que leur grosseur et la 
nature de leur écorce. On cullive surtout cel arbre comme ornement, pour son feuillage 
et ses fleurs verdatres très-odoriférantes. [l croit partout, mais les terres sablonneuses qui 
couvrent les parties élevées de l’'Indo-Chine paraissent surtout lui convenir. 

Ferronia elephantum, Corr. (Ferronia pellucida, Roth.). — On rencontre cet arbre 
dans les mêmes régions que le précédent. Comme lui, il est cultivé en petite quantité et 
présente une assez grande tendance à se disperser autour des endroils habités. Ses fruits 
sphériques, gros comme des pommes, sont aussi très-peu recherchés, etil n’est réellement 
cultivé que pour son port original, ses nombreuses épines el ses fleurs trés-odoriférantes. 
Nous avons observé au Cambodge une variété différant notablement de l'espèce type; ses 
rameaux élaient fasligiés au lieu d’être horizontaux, sa taille était plus grande etses fruits 
deux fois plus gros. La floraison de cet arbre a lieu en janvier et la maturité des fruits en 
juillet. 

Triphasia trifoliata, D. C. (Triphasia aurantiola, Lou.). — Ce petit arbuste épi- 
neux, de la famille des aurantiacées, est cultivé dans toute la zone tropicale de l’Indo- 
Chine. Quoique ses petits fruits rougeûtres soient assez bons et très-propres à êlre confits 
avant leur complète maturilé, il est assez rare cependant qu’on le cultive pour cet usage, 
et presque toujours il est planté comme ornement et pour ses fleurs dont l’odeur fine 
est assez analogue à celle des fleurs de l’oranger. 

Phœnix dactylifera, L. — Nous n'avons rencontré qu'une vingtaine d'exemplaires 
de palmier-dailier dans tout le Laos. A l'exception d’un seul, tous n'avaient pas plus de 
dix années d'existence el ne dépassaient pas un mètre de hauteur. Nous avions conçu 
l'espoir d’en rencontrer un plus grand nombre en Chine, un peu au delà du tropique 
qui est la zone climatérique lui convenant le mieux, mais notre espoir fut complétement 
déçu. Le seul de ces palmiers que nous ayons vu dépassant un mètre, croissait à Slung- 
treng dans un jardin. Pendant notre séjour dans cette ville, il fut renversé par le vent; 
ses racines élaient presque toules pourries. Cet exemplaire avait déjà fleuri plusieurs fois ; 
c'était un pied male, et nous n'avons pu vérifier s’il avait produit des fruits sous ce climat 
humide. Originaire de la zone tropicale sèche de l'Afrique, le daltier redoute les pluies 
équaloriales, et trouverait seulement en Chine, dans la moitié sud-ouest du Yun-nan 
avoisinant le Tibet, le climat sec qui lui convient. 

Opuntia Dillenii, Haw.— Ce cactus croit dans toute l’Indo-Chine. On le trouve depuis 
la base du delta du Cambodge, dans les terres à rizières, jusqu’au centre de la Chine. Il est 
cultivé pour ses fruits et comme plante originale. Dans la vallée du Tong-king, il s’est 
répandu sur les montagnes les plus inaccessibles, au point qu'on pourrait le prendre 
pour une plante spontanée. Il a produit une variété qu'on trouve dans le Laos, 


454 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Ficus carica, L. — D'après plusieurs missionnaires, le figuier existerait dans diffé- 
rentes parties de la Chine, particulièrement dans la province du Se-tchouen; nous en 
avons vu un exemplaire dans un jardin de Shang-haï. Ce qui doit étonner, c’est qu’exis- 
tant en Chine depuis longtemps, puisque Loureiro mentionne son existence, il ne s’y soit 
pas multiplié davantage, surtout dans les provinces du Yun-nan et du Se-tchouen, où 
abondent les endroits jouissant d’un climat méditerranéen fui convenant parfaitement. 

Papaya vulgaris, D. C. (Carica papaya, L.). — Cet arbre américain est cultivé dans 
toutes les parties de l’Indo-Chine jouissant d’un climat tropical, et même beaucoup plus 
froid, puisque nous l’avons trouvé donnant encore d'excellents fruits à 1,000 mètres d’al- 
titude par le 22° degré. Partout 1! croît avec la plus grande vigueur et présente une telle 
tendance à se naturaliser aux environs des villages, que les habitants se donnent rarement 
la peine de le semer etse bornent ordinairement à protéger les jeunes pieds qui se sont 
développés seuls. Tous les terrains lui conviennent, mais c’est dans les lieux frais qu'il 
donne les plus gros fruits. Cet arbre entre en fructification vers la troisième année et périt 
vers la quinzième. Souvent les grands vents brisent son tronc charnu et il meurt; mais 
parfois deux ou plusieurs rameaux se développent laléralement et permettent à la plante 
de survivre. 

Passiflora cerulea, L. — Cette liane d'Amérique, si remarquable par ses fleurs et qui 
fournit des fruits charnus assez estimés, est très-rare en Indo-Chine. Nous l’avons trouvée 
seulement dans une ville du Laos supérieur (Stieng-Tung), cultivée dans un jardin où elle 
avait été importée récemment de l'Inde anglaise par la Birmanie. Elle croissait dans cette 
région avec une telle vigueur, qu'on pourrait la propager rapidement dans le pays. Ilserait 
du reste à désirer que d’autres espèces cullivées en Amérique pour leurs fruits, comme les 
Passiflora maliformis, L.; Passiflora edulis, L. ; Passiflora laurifolia, L.; Passiflora 
quadrangularis, L., soient introduites dans le pays, car elles n’y eroîtraient certainement 
pas moins bien. | 

Musa paradisiaca, L. — On rencontre le bananier à l’état sauvage dans quelques 
montagnes du Laos inférieur et du Cambodge, mais il n’est réellement très-abondant que 
dans celles du Laos supérieur, entre le 18° et le 21° degré de latitude. Dans celte zone, 
souvent le pied et le flanc des montagnes sont complétement couverts de celte plante. 
Les fruits de ce bananier spontané sont à peu près immangeables; ils renferment une 
énorme quantité de graines, et le peu de chair qu'ils possèdent est âpre et fibreuse. Ce 
bananier présente de notables variations, suivant les points où il croit. Dans les montagnes 
du sud de la Chine, près de Bassac, ses feuilles sont petites et le tronc que forment leurs 
gaines n'atteint souvent pas un mètre. Dans le Laos supérieur, où le climat est plus hu- 
mide et plus brumeux, son tronc atteint ordinairement deux mètres. Ces différences déno- 
tent une grande tendance au polymorphisme, ce qui nous porte à n’admettre, avec beau- 
coup d'auteurs, qu’une seule espèce de bananier : le Musa paradisiaca, qui serait l'espèce 
mère. La distinction que l’on fail en bromatologie des fruits en figues bananes et en ba- 
nanes vertes ou grosses bananes serait done inexacte; il ne s’agit que de variétés. 

De nombreuses variétés de bananier sont cultivées en Indo-Chine. Parmi les variélés 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 455 


remarquables du nord, se trouve le bananier de Chine (Wusa sinensis), lrès-pelit de taille, 
dont les fruits sont très-médiocres, mais qui croit dans les régions presque froides ; nous 
l'avons trouvé par le 27° degré de latitude à plus de 2,000 mètres de hauteur dans les plaines 
de Houey-ly teheou, où il gèle fréquemment. 

Le bananier, en raison de sa grande vigueur, peut croitre à peu près partout ; il préfère 
les terres humides et il aime le voisinage de quelques arbres. Les bonnes variétés cultivées 
ne produisent pas de graines ; on multiplie le bananier par les rejelons qui naissent 
abondamment à son pied. Leur plantation se fait pendant l’hivernage, dans des trous 
distants de deux mètres au moins et d'autant plus profonds que la terre est plus sèche. 
Au delà de quatre à cinq ans, la plupart des bananiers ne fructifient plus. 

La floraison et la fructification du bananier s’accomplissent un peu toute l’année, 
suivant les variétés et le degré d'humidité des lieux où on le cultive. Ces deux phénomènes 
s’accomplissent cependant davantage à certaines époques. La floraison a surtout lieu 
pendant l’hivernage, et la fructification pendant la saison sèche. 

Bromeliaananas, L. (Ananassa vulgaris, Lindi.). — L’ananas est originaire d’Amé- 
rique; sauf chez les sauvages, on le cultive dans toute la partie de l’Indo-Chine jouissant 
d’un climat tropical. Il a produit un certain nombre de variétés ayant des fruits de grosseur 
et surtout de couleur très-variables. 

Dans le Laos supérieur etle sud de la Chine, on le plante dans les jardins à l'ombre des 
arbres, à la façon des légumes. Dans le Sud, en Cochinchine, on enlève les broussailles, on 
éclaireit les bois qui entourent les villages, et on le plante sous leur ombrage au début de 
l’hivernage, sans labourer ni remuer la terre. Quelle que soit la nature du sol, les 
ananas croissent sans autres soins, envahissent la surface de la terre, et deux ans après ils 
fournissent chaque année une récolte abondante. Ce genre de plantation dure indéfini- 
ment, mais donne des fruits moins délicats que ceux obtenus dans Le Nord. 

La multiplication de l'ananas se fait avec le bouquet de feuilles qui termine le fruit 
ou avec de jeunes tiges que l’on coupe. Ces boutures prennent racine avec une telle 
facilité, qu'on pourrait pour ainsi dire se contenter de les déposer à la surface du sol. La 
maturité des ananas a lieu à la fin de l’hivernage et au début de la saison sèche, de sep- 
tembre à novembre. 

Fragaria vesca, Lou. — Cette espèce de fraisier croit à l’état spontané sur les som- 
mets des montagnes élevées du Yun-nan et du Se-tchouen. Par le 26° degré de latitude, 
nous ne l’avons pas rencontré croissant au-dessous de 2,500 mètres. Il est probable cepen- 
dant qu’on pourrait le culüiver à de moindres hauteurs. Loureiro indique qu'il est cultivé 
en Chine et en Cochinchine; cela doit être très-rare, nous ne l'avons jamais vu. Les indi- 
gènes se bornent à recueillir les fruits de ceux qui croissent seuls sur leurs montagnes. 

Il ne faut pas confondre ce fraisier avec Le fraisier des Indes (Duchesnea fragarioides, 
Smith.), qui s’avance bien plus au Sud, jusque dans le fond des vallées humides du Laos 
supérieur ef qui ne donne que des fruits complétement insipides. Les indigènes prétendent 
même qu'ils sont malfaisants; nous avons pu cependant en manger plusieurs fois sans 
éprouver aucun malaise. Ce faux fraisier se dislingue surtout du vrai par ses fleurs jaunes. 


456 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Elæagnus scandens, Nobis. — Trois espèces appartenant au genre £læagnus croissent 
en Indo-Chine. Les trois fournissent des fruits comestibles utilisés par les indigènes. L'une 
surtout, croissant jusque dans le Laos inférieur, en produit qui ne sont pas sans valeur. 
Ces fruits oblongs, d’un jaune d’or, gros environ comme des prunes, ont une chair 
pulpeuse, abondante, légèrement acide, assez agréable. Les Laotiens ne cultivent pas pré- 
cisément celte espèce grimpante, mais 1ls respectent les pieds qui se développent sponta- 
nément près des villages et qui, en s’appuyant sur les arbres, peuvent atteindre parfois 
plus de 20 mètres de hauteur. La floraison de cette liane a lieu de novembre à décembre, 
selon la latitude, et la maturité des fruits en mars et en avril. 

Sterculia fœtida, L.— Ce bel arbre, spontané dans le sud de l’Indo-Chine, est parfois 
cultivé aux environs des villages pour ses graines assez semblables aux glands du chêne et 
que l’on mange conime les noisettes, soit vertes, soit après qu’elles sont entièrement sèches. 

Sterculia platanifolia, L. -— Cet arbre, aux feuilles de platane et connu en Europe 
sous le nom vulgaire de Puparili, est souvent cultivé dans le centre de la Chine pour ses 
craines huileuses semblables à celles de l'arbre précédent et servant aux mêmes usages. 

Flacourtia jangomas, L. (Stigmarota jangomas, Lou.). — Cet arbre fruitier, qui 
rappelle beaucoup le prunier sauvage, par son port, ses épines et ses fruits, est cultivé 
depuis le sud de l’Indo-Chine jusqu’au tropique. On le rencontre dans les jardins et 
autour des villages, où il se naturalise facilement. Les habitants le multiplient de graines. 
Vers la dixième année, il entre en fructification et donne sans aucun soin de nombreux 
fruits sphériques d’un violet noirâtre, gros comme une petite prune, contenant un noyau 
osseux à cinq loges entourées d’une pulpe qui reste souvent apre même lorsque ces fruits 
ont atteint leur parfaite maturité. 

Cicca racemosa, Lou. — Cet arbre, de la famille des euphorbiacées, s’observe dans 
tout le sud de l’Indo-Chine, particulièrement en Cochinchine. Sans êlre précisément 
cultivé, il est toujours propagé par les habitants, soit dans leurs jardins, soit dans les bois 
qui entourent les villages, dans lesquels il se naturalise assez souvent. Sa floraison a lieu 
en mars etavril. Ses nombreux petits fruits charnus, presque pentagonaux, d’un blanc de 
cire à la maturité, sont très-acides, et il n° a guère que les enfants qui les recherchent; 
ils mürissent en juillet et août. Les Européens ne les utilisent guère que pour les faire 
confire dans du vinaigre en guise de cornichons. 

Pyrus (espèce?).— Cette espèce de poirier, que nous n'avons pas encore déterminée, 
croit à l’état spontané sur toutes les hautes montagnes de l'Indo-Chine. Dans le Sud, sur 
les montagnes du Pursat, notre ami M. Pierre, directeur du jardin botanique de Saigon, 
l’a trouvé à partir de 1,800 mètres d'altitude. Plus au nord, par le 21° degré, nous l'avons 
observé à 1,200 mètres de hauteur seulement et même beaucoup plus bas, près du fond 
de certaines vallées humides. 

Ce poirier n’est pas arborescent, c’est un arbrisseau de 3 mètres de hauteur environ, se 
ramiliant dès sa base et possédant presque la forme d’un espalier. Ses ramuscules sont 
épineux pour la plupart el très-courts. Ses fruits sont pierreux ordinairement, à peine gros 
comme une noix; ils ont une chair trop äpre pour être mangés. Nous avons cependant 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 457 


rencontré quelques exemplaires ayant des fruits plus gros et moins mauvais, montrant 
qu’il est possible de les améliorer par la culture et la sélection. Nous signalons cet arbre 
à l'attention des horliculteurs des pays chauds. 

Pyrus malus, L. — Le poirier ordinaire est cultivé, à partir du Laos supérieur, sur les 
montagnes assez élevées pour posséder un elimat presque tempéré. Dans le Laos, on 
n'en lrouve guère que quelques exemplaires autour de chaque village, mais en Chine, 
on en voit parfois, sur les hauts plateaux, de grandes plantations dans lesquelles ces 
arbres reçoivent des soins assez intelligents. Quel que soit Le pays, jamais les poiriers ne 
sont taillés ni dressés en espalier. Le nombre des bonnes espèces existant dans ces diverses 
contrées, nous a paru très-restreint. Pour les multiplier, les indigènes ont recours à la 
greffe en fente, telle que nous la pratiquons en Europe. 

Cydonia tetrasperma, Nobis. — Cette espèce intéressante de cognassier se rencontre 
à l’élat sauvage sur les montagnes du Laos supérieur à partir du 21° degré de latitude, 
à une hauteur de 1,200 mètres au moins. Plus au nord il croît dans les vallées placées à 
une altitude moins élevée. Sa taille, beaucoup plus grande que celle du cognassier ordi- 
naire, atteint presque celle des pommiers cultivés en plein vent en Europe. Ses fruits 
globuleux, gros comme de petites pommes, sont presque aussi âpres que ceux du coing ; 
pourtant Les habitants mangent ceux provenant de quelques variétés qu’ils sont parvenus 
à améliorer légèrement. 

Nous rapportons cet arbre au genre Cydonia, mais, comme aspect et comme caractère 
botanique, il tient complétement le milieu entre le cognassier et Le poirier. Les loges de 
ses fruits renferment quatre graines au lieu d'en renfermer deux. comme celles du poi- 
rier, etquinze à vingt, comme celles du coing ordivaire. Son feuillage et ses fleursprésentent 
des affinités et des différences analogues, qui les rapprochent et les éloignent de ces deux 
genres. Ces circonstances, mais en particulier sa vigueur, nous font présumer que cet ar- 
bre, introduit en Europe dans les pépinières, rendrait de grands services comme sujel à 
greffer. Grâce à sa grosseur, il supporterait beaucoup mieux la greffe que Le cognassier, et 
grace à ses racines non pivotantes qui lui permettent de croitre sur les montagnes entre 
les rochers, il s’accommoderait beaucoup mieux que le poirier des terres sans profondeur. 

Cydonia vulgaris, L. — Quoique en très-petite quantité, le cognassier commun est 
cullivé sur toutes les hautes montagnes du Laos supérieur et de la Chine méridionale. 
Bien qu'il ne soit pas spontané dans ces contrées et qu’il y ail été apporté de l'Asie occi- 
dentale et de l'Europe dont il est originaire, il y donne cependant des fruits excellents 
dépassant presque en qualité et en grosseur ceux qu’on récolte en France. 

Pyrus communis, L. — Le pommier commun n’est pas indigène en Chine. Quoiqu'il 
y existe depuis longtemps, il ne paraîl pas s’y être propagé beaucoup et nous ne l’avons 
guère {trouvé que däns la grande plaine de Tchao-lung, qui jouit d’un climat froid et 
humide. Sans être l’objet de grands soins, il est cependant mieux soigné que la plupart 
des autres arbres fruitiers. Les Chinois le plantent dans les jardins et lui appliquent ia 
greffe en fente pour multiplier les quelques variétés qu'ils possèdent et qui appartiennent 
à la classe des fruits dits à couteau. 

IT. 58 


458 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Eriobotrya japonica, Lindi. (Cratæqus bibas, Lou.). — Le bibassier ou néflier du 
Japon est cultivé autour des villages dans presque toutes les parties de la Chine jouissant 
d'un climat mixte. Ses fruits trop acides sont peu recherchés. Quelques sujets en pro- 
duisent pourtant d’assez bons. Sa reproduction se fait de graines. 

Mespilus pyracantha, Lou. — Ce bel arbre, qui atteint souvent la taille d’un poirier, 
est spontané et cultivé sur toutes les montagnes du sud de la Chine ayant au moins 
1,500 mètres de hauteur. Il aime les climats secs et les terres élevées, et c’est assurément 
un des arbres de la Chine qui résisterait le mieux au climat de l’Europe. Ses fruits, qui 
atteignent la grosseur d’une petite pomme, sont très-déprimés et contiennent cinq petits 
noyaux osseux entourés d’une chair acidulée assez agréable. Ordinairement les indigènes 
les font sécher pour les consommer à la façon des pruneaux. 

Prunus persica, Li. — Le pêcher est, parmi tous les arbres fruitiers appartenant à la 
famille des rosacées, celui qui s’avance le plus au sud en Indo-Chine. IL croit presque sous 
l'équateur et au niveau de la mer comme à Saigon, mais il n’y donne pas de fruits. Ce 
n’est guère qu'à partir du 20° degré de latitude et à la hauteur de 400 mètres environ 
qu’il commence à être cultivé avec avantage; plus au nord, dans le Yun-nan, il croît dans 
toute sa force. Dans cette dernière province, nous en avons observé de nombreux sujets 
dispersés dans les forêts, nous ne croyons pas cependant qu'il y soit spontané. Vient-il 
de la Perse, ainsi que le fait présumer son nom, ou plutôt de la Chine, ainsi que le pense 
de Candolle? Nous croyons avec cet auteur qu'on le trouvera vraiment spontané, dans 
les montagnes du Se-tchouen si riches en plantes intéressantes peu connues. Les Indo- 
Chinois propagent toujours le pêcher par semis; aussi, ses fruits sont médiocres et sont 
loin d’être comparables à ceux d'Europe, malgré les avantages du climat. 

Prunus armeniaca, L. — L’abricotier est un des arbres fruitiers les plus abondam- 
ment cultivés en Chine. On le rencontre dans les zones où le elimat n’est ni trop humide, 
nisurtout trop chaud. Dans les montagnes sèches et élevées du Yun-nan et du Se-tchouen, 
où ces conditions sont fréquemment réunies, on en trouve souvent de grandes planta- 
tions. Les Chinois le reproduisent exclusivement de graines ; on en trouve d’assez nom- 
breuses variétés. Quoique passables pour la plupart, aucune ne nous a paru égaler nos 
bonnes espèces d'Europe. 

Amygdalus communis, L.— Nous n’avons pas rencontré l’amandier dans les parties 
des provinces du Yun-nan et du Se-tchouen que nous avons explorées. Pourtant, les points 
favorables à sa culture y sont innombrables, et cet arbre existe en Chine. 

Prunus, L.— Six à sept espèces et variétés de pruniers se rencontrent en Indo-Chine. 
Une seule à fruits pubescents est spontanée dans les montagnes élevées du Yun-nan. Les 
autres, qui ont toutes été introduites, sont cultivées depuis le fond des vallées du Laos su- 
périeur, par le 21° degré, jusque dans le nord de la Chine. Ces diverses variétés cultivées, 
que les indigènes multiplient toujours de graines, donnent des fruits assez médiocres. 

Prunus cerasus, L. (Cerasus vulgaris, Mill.). — Plusieurs espèces de cerisiers CrOIs— 
sent à l’état spontané danstoutes les montagnes du nord du Yun-nan et dans le Se-tchouen 
méridional. On les rencontre surtout dans les forêts, bordant le lit des torrents et des 


ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. 459 


pebtes rivières descendant des montagnes. Leur taille est en général petite et ne dé- 
passe Jamais celle du cerisier cultivé en Europe. Ces espèces ont produit un certain nom- 
bre de variétés dont la distinction est assez difficile. Toutes produisent des fruits assez 
médiocres, très-peu dissemblables, d’un rouge peu foncé, de petite grosseur et à chair 
acide peu sucrée en général. 

Vitis vinifera, L. — Sept espèces de vignes croissent spontanément en Indo-Chine, 
l’une (Vétis cochinchinensis, Lou.) produit des grains trop äpres et lrop acides pour 
être mangés. Une autre espèce, qui croit près du sommet des montagnes du Laos supé- 
rieur, fournit un raisin assez sucré quoique un peu âpre. Cette vigne n’est nullement 
cultivée, les sauvages habitant les forêts où elle croit se bornent à ne pas la détruire 
lorsqu'ils brülent leurs forêts. Cette espèce possède des sarments ligneux analogues 
à ceux de la vigne commune, ce qui permettrait de lui appliquer complétement les 
mêmes procédés de multiplication et de taille. Ses grains sont rouges, sphériques et 
aussi gros que ceux de la vigne d'Europe. 

Dans les provinces du Yun-nan et du Se-tchouen, qui jouissent sur beaucoup de points 
d’un climat analogue à celui de la France, la vigne commune se trouve si rarement que 
nous n’en avons pas vu plus d’une vingtaine de pieds en les traversant. Les flancs incultes 
des montagnes sont pourtant merveilleusement disposés pour l'installation de vignobles, 
qui fourniraient aux indigènes le vin et l’alcool qu'ils extraient à grand’peine des céréales. 

Juglans regia, L. — Le noyer est cultivé en Indo-Chine à partir du 21° degré de 
latitude, sur les montagnes élevées d’au moins 1,500 mètres. A cette limite, la plus 
méridionale qu'il puisse atteindre, il croît avec vigueur et produit des noix qui ne sont 
guère inférieures à la plupart des nôtres. Il a du être introduit du sud-ouest de la Chine, 
où il est, sinon spontané, du moins naturalisé depuis longtemps près du lit des torrents qui 
descendent des sommets des montagnes brumeuses. 

Corylus, Tournef. — Deux espèces de noisetier croissent à l’état spontané sur les 
hautes montagnes du sud de la Chine. L’une et l’autre sont de très-petite taille et dé- 
passent rarement deux mètres de hauteur. Elles fournissent des fruits aussi bons que les 
nôtres. Les indigènes ne les cultivent pas, sans doute parce qu’elles sont très-petites et 
peu productives. 

Castanea chinensis, L.(Faqus castanea, Lou.). — Des dix-sept espèces de châtaigniers 
croissant spontanément dans le nord de l’Indo-Chine, cette espèce est la seule cultivée ; 
elle ne croit qu’à partir du 24° degré de latitude, sur les montagnes et les plateaux élevés 
d’au moins 2,000 mètres, jouissant d’un climat sec. Ce châtaignier, comme grosseur, 
égale presque celui d'Europe (Castanea vulgaris, Lamk.), mais il est en général moins 
élevé. Parmi les quelques variétés qu'il a produites, aucune ne fournit des fruits compa- 
rables à ceux d'Europe. Sa multiplication se fait de semis, et jamais les Chinois n’ont 
recours à la greffe pour propager les bonnes variétés. 

Zizyphus vulgaris, Lamk. — Le jujubier commun est cultivé à partir du 21° degré de 
latitude sur les montagnes élevées d’au moins 1,500 mètres. La zone qui paraît le mieux 
lui convenir est comprise entre le 25° et le 35° degré de latitude. On le cultive ordinairement 


460 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


au pied des montagnes, parmi les pierres, dans les endroits trop en pente pour per- 
mettre la culture des céréales. Il y vient avec assez de vigueur et donne dans ces lieux 
des fruits abondants, plus sucrés que dans les plaines. On en trouve souvent des plan- 
talions très-étendues. 

On rencontre plusieurs variétés de jujubier, différant surtout par la forme des 
fruits qui sont ovoidaux ou oblongs, rouges ou jaunes, gros comme des cerises ou comme 
des noix. 


S 2. — Légumes et cultures maraichères. 


Au Laos et au Cambodge, la culture des légumes est faite avec une extrême négligence 
et ne saurait donner lieu à aucune remarque intéressante. En Cochinchine et en Chine, 
sur la plupart des points il en est de même, mais sur d’autres, près des grandes villes 
surtout, elle y est faite d’une façon très-remarquable et avec autant de soins peut-être 
qu’en Europe. Dans ces deux derniers pays, l'emploi des engrais dans le jardinage est très- 
fréquent, et l’on trouve même, au centre des cultures maraïîchères entourant les villes, des 
fosses pour la fabrication des engraisliquides que nous aurions avantage à imiter en Europe. 
Nulle part dans le jardinage, la fabrication de couches pour les semis et les boutures n’est 
pratiquée, la chaleur du climat, sauf en quelques points de la Chine, ne l’exigeant pas. 
La confection du terreau, destiné à faire ces semis et à planter certains légumes déli- 
cals, n’est pas inconnue; mais au lieu de le placer, comme nous le faisons ordinairement, 
sur du fumier frais destiné en se décomposant à produire de la chaleur, on le met dans des 
vases, ou plus souvent sur un lreillage fixé sur quatre pieux à un mètre au-dessus du sol. 
Cette installation à un double avantage : elle préserve les semis de l'excès d'humidité 
pendant l’hivernage, et les défend des fourmis qui causent, dans le Sud, le désespoir des 
horticulteurs.. Ces insectes dont les espèces et le nombre sont très-grands en Indo-Chine, 
enlèvent souvent en une nuit, malgré cette installation, toutes les graines qu’on à semées la 
veille, et parfois on est obligé de mettre les pieux de ces couches aériennes dans des vases 
pleins d’eau, lorsqu'il s’agit de graines délicates ou de semences qu’on serait dans l’impos- 
sibilité de remplacer. Le verre n’étant pas fabriqué par les Indo-Chinois, l’usage des 
cloches et des châssis y est inconnu. L'emploi de ces appareils rendrait cependant de 
grands services, dans le Sud, pour préserver les boutures de la dessiccation, et dans le 
Nord, pour concentrer la chaleur. L'abondance de l’eau étant, plus encore en Indo-Chine 
qu'en Europe, une condition pour obtenir des légumes abondants, les horticulteurs ont 
le soin d'installer les cultures maraïchères dans des lieux bas et humides. Les terrains 
les plus favorables à ces cultures se trouvent dans certaines vallées et particulièrement dans 
celles dont le sol est tourbeux. Ce genre de terrain se rencontre en Cochinchine dans les 
régions forestières, et dans le Yun-nan autour des lacs et dans quelques vallées. La qualité 
de l’eau qui doit servir aux arrosages n'est pas négligée et les indigènes se gardent bien 
d'installer des jardins maraîchers dans les lieux où les eaux du sous-sol et des rivières avoi- 
sinantes sont saumâtres. Non-seulement les légumes végètent mal dans ces endroits, mais 


LÉGUMES ET CULTURES MARAICHÈRES. 461 


ils périssent même si on les arrose avec Les eaux qu’on y trouve. Les arrosages sont souvent 
assez soignés, ainsi que les installations destinées à les favoriser, comme les canaux, les 
puits, les norias, etc. Le choix des saisons pour la culture des légumes n’est pas indiffé- 
rent; pour ceux d’origine tropicale, les horticulteurs adoptent en général la saison humide, 
mais pour ceux des pays tempérés, ils choisissent loujours la saison sèche, qui est plus 
froide et n’offre pas ces grands orages qui déracinent les semis, brisent les feuilles et ra- 
lentissent plutôt qu'ils n’accélèrent la croissance des plantes. La saison sèche est même, 
dans le Sud, la saison des légumes par excellence ; ear il est possible, à l’aide d’arrosages, 
de culliver même ceux qui sont originaires des tropiques. Cette préférence de la saison 
sèche pour la culture des légumes cesse, bien entendu, sur les montagnes du Yun-nan et 
du Se-tchouen, et là, comme en Europe, leur culture se fait surtout au printemps et en élé. : 

Si puissante que soit la lumière sous ces climats, on ne peut pas plus qu’en Europe, 
cultiver les légumes à l'ombre des arbres. Tous à peu près réclament le plein soleil, pour 
bien se développer. IL est cependant plus utile que sous nos climats de préserver du soleil 
pendant le milieu du jour les jeunes plants que l’on vient de repiquer, à l’aide de 
feuillage ou de paillassons. 

Dans le Sud, la récolte des graines potagères originaires des tropiques et croissantpen- 
dant l’hivernage, se fait dans le pays même sur des sujets que l’on garde exprès et que l’on 
cultive avec un peu plus de soins que les autres. Quant aux graines des plantes des régions 
tempérées qu’on y cultive, elles doivent être sans cesse importées des pays étrangers; car 
ces plantes n’en donnent pas pour la plupart sous ce climat, ou si elles en fournissent, elles 
ne produisent que des plantes dégénérées. 

Brassica oleracea, L. ; Var. Br. capitata, D. C. (vulgairement : chou commun d’Eu- 
rope). — Cultivé dans le Sud par les Européens seulement, qui parviennent avec 
beaucoup de soins à le faire pousser. Les Chinois du Yun-nan et du Se-tchouen cultivent 
quelquefois des variétés dégénérées importées d'Europe; — aucune ne fleurit et ne 
fructifie dans la zone tropicale. 

Brassica oleracea, L. ; Var. Br. caulorapa, D. C. (vulgairement : chou-rave). — Cultivé 
par les Européens à Saigon, et en Chine sur les montagnes; — c’est la variété de chou 


qui s’'accommode le mieux de la chaleur; — ne fleurit cependant pas dans la zone 
tropicale. 
Brassica napus, L. (vulgairement : navet). — N'est jamais cultivé par les Indo- 


Chinois. Les Européens le sèment parfois à Saigon; — c’est la crucifère cultivée s’accom- 
modant le moins bien des climats tropicaux. 

Brassica chinensis, L. (vulgairement : pet-saï). — Cultivé dans toute l’Indo-Chine, 
surtout dans le Nord; — constitue, avec la plante suivante, le légume le plus important 
des Indo-Chinois ; — a produit d’assez nombreuses variétés, l’une surtout connue sous le 
nom de Pak-choï, remarquable par la grosseur et la largeur des côtes de ses feuilles ; ap- 
précié seulement des Asiatiques ; — ne croit, dans le Sud, que dans la saison sèche. 

Sinapis pekinensis, L. (vulgairement : moutarde de Pékin). — Cultivé par tous les 
Indo-Chinois, excepté par les sauvages ; — présente plusieurs variélés, l’une entre autres 


462 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


avec les feuilles fortement découpées, laciniées; — ne croit pas dans le Sud pendant 
l’hivernage, et n’y fructifie pas. 

Nasturtium officinale, L. (vulgairement : cresson). — Cultivé seulement par les 
Européens ; — croit facilement dans le Sud, à la surface du sol et à l'ombre d’un grand 
arbre, à l’aide d’un arrosage matin et soir; — cultivé de cette façon, croit mieux que 
dans l’eau et donne une récolle tous les mois lorsqu'on a le soin de le fumer fréquem- 
ment; — multiplication par boutures; — ne fleurit jamais en Cochinchine. 

Raphanus sativus, L.; Var. Raph. radicula, Pers. (vulgairement : radis). — Cultivé 
dans le Sud par les Européens et dans le Nord par les Chinois. C’est un des légumes d’Eu- 
rope supportant le mieux le elimat de la Cochinchine ; — n’y fleurit et n’y fructifie cepen- 
dant jamais; — croit trèes-difficilement pendant l’hivernage. 

Cucurbita maxima, Vuchesn. (vulgairement : potiron, courge, citrouille). — Cultivé 
très-abondamment par les Indo-Chinois, surtout par ceux qui habitent les forêts, comme les 
Cambodgiens, les Laotiens et les sauvages; — semé pendant l’hivernage, dans les jardins, 
mais surtout parmi les riz de forêt ; — à l’aide d’arrosages, peut croître pendant la saison 
sèche; — a produit plusieurs variétés. 

Cucurbita pepo, L. (vulgairement : giraumont). — Cullivé par les mêmes peuples et 
dans les mêmes condilions que la plante précédente; — y donne également des fruits 
excellents très-sucrés. 

Cucumis sativus, L. (vulgairement : concombre). — Cultivé fréquemment dans 
toute l’Indo-Chine pendant l’hivernage ; — présente plusieurs variétés. 

Benincasa cerifera, Savi. — Cultivé près des maisons et dans les haies dans toute 
l'Indo-Chine, pendant l’hivernage ; — ses gros fruits verts oblongs, se couvrant d’une 
matière cireuse à la maturité, sont très-peu estimés, même des indigènes. 

Lagenaria vulgaris, Ser. (vulgairement : gourde, calebasse). — Cultivé dans toute 
l'Indo-Chine près des maisons, des haies ou sur des berceaux, pendant l’hivernage; — 
ses fruits sont parfois mangés; — ordinairement ils servent à fabriquer des vases, des 
bouteilles et divers ustensiles de ménage ; — a produit plusieurs variétés de formes très- 
différentes. 

Citrullus vulgaris, Schrad. (vulgairement : pastèque). — Cultivé dans toute l’Indo- 
Chine, dans les terres sablonneuses, pendant la saison des pluies; — ne produit dans le 
Sud que desfruils aqueux peu sucrés, peu parfumés; — dans le Nord, fruits bien meilleurs. 

Cucumis melo, L. (vulgairement: melon). — Cultivé depuis Saigon jusqu’en Chine 
pendant l'hivernage. — Peut être cultivé pendant la saison sèche à l’aide d’arrosages; — 
ne produit dans le Sud que des fruits aqueux, sans saveur, à peu près immangeables ; — 
dans le Nord, à partir du Laos supérieur, fruits souvent excellents. 

Trichosanthes anquina, L. (vulgairement : herbe-aux-serpents). — Se rencontre 
dans toute l’Indo-Chine ; — cultivé dans les haies ou contre les maisons; — ses longs fruits 
cylindriques sont assez estimés des indigènes. 

Momordica charantia, L. (vulgairement : pandipave). — Cultivé dans tous les jardins 
du sud de l’Indo-Chine, en très-petite quantité; — son fruit tuberculeux est mangé avant 


LÉGUMES ET CULTURES MARAICHÈRES. 463 


sa complète maturité, après avoir été soumis à une coction préalable dans le but de lui 
enlever son amertume. 

Dolchos sinensis, L. (vulgairement : dolic). — Les variétés de cette plante et de 
plusieurs autres espèces voisines, sont eullivées abondamment, dans toute l’Indo-Chine, 
pendant l’hivernage. — Chez les populations du Sud, ces plantes remplacent nos haricots, 
mais leur sont bien inférieures. — La plupart sont cultivées pour leurs graines ; quelques- 
unes pourlant, fournissent des gousses assez tendres pour pouvoir êlre mangées vertes. 

C'est avec les graines de plusieurs variétés de dolics contenant une certaine quantité 
d'huile, qu’on fabrique ce fameux fromage de pois qui joue un rôle si importani dans 
l'alimentation des Chinois et des Japonais. Après avoir fait tremper les graines dans l’eau 
pendant vingt-quatre heures, on les réduit à la meule en une bouillie claire qu’on 
transforme ensuite, après l’avoir soumise plusieurs fois à la filtration, à la coction et y 
avoir ajouté certains sels (du chlorure de magnésium, d’après Champion ”), en une 
matière assez analogue au fromage, qu’on mange fraiche ou après qu’elle a élé conservée 
quelque temps. Lorsqu'on assiste aux nombreux détails de cette fabrication et qu'on 
goûte ensuite de ce fromage, qui n'a guère du nôtre que l'aspect, on reste convaincu que 
les herbes du pays, en passant par les mâchoires des vaches et ensuite sous forme de lait 
par leur pis, produiraient, avec cent fois moins de peine, un fromage bien meilleur et 
à bien plus bas prix. 

Psophocarpus tetragonolobus, D. C. — Ce genre de haricot, aux fruits longs de 2 à 
3 décimètires et à quatre ailes, est cultivé par tous les Indo-Chinois du Sud, en très-petite 
quantité; — ils le plantent pendant l’hivernage près des haies. 

Lablab vulgaris, Savi (Dolichos albus, Lou.). — Cultivé dans les haies depuis 
Saigon jusque dans la vallée du fleuve Bleu ;— naturalisé dans le Sud ; —peut vivre cinq 
à six ans et devient alors arborescent comme le lierre ; — plante polymorphe présentant 
plusieurs variétés à feuilles, à fleurs et à fruits de couleurs variables. 

Canavalia gladiata, D. C. Dolichos ensiformis, Lou. ; (vulgairement : haricot-sabre). — 
Ce haricot, si remarquable par les grandes dimensions de ses fruits, est cultivé et spon- 
tané dans le sud de l’Indo-Chine ; — on le plante dans les haïes pendant la saison humides; 
— ses énormes graines sont peu estimées ; — a produit plusieurs variétés. 

Phaseolus vulgaris, L. (vulgairement: haricot). — A l'exception de deux variélés 
importées depuis longtemps, les haricots d'Europe croissent difficilement dans la partie 
tropicale, même dans la saison sèche. — Dans le Nord, en Chine, ils croissent très-bien 
et ont produit un assez grand nombre de variétés inférieures cependant aux nôtres en 
qualités. 

Phaseolus radiatus, L. (vulgairement : haricot).— Ce haricot à fleurs jaunes, spontané 
et cultivé dans le sud de l’Indo-Chine, croit pendant la saison humide. 

Phaseolus mungo, L.— Cultivé dans toute la partie tropicale de l’Indo-Chine, pendant 
l'hivernage, pour ses graines. 


1 Stanislas Julien et Paul Champion, /ndustries anciennes et modernes de l'Empire chinois. Paris (Eugène 
Lacroix). 


464 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Pisum satioum, L. (vulgairement : pois).— Croît très-difficilement dans le Sud, même 
dans la saison sèche ;— vient très-bien, au contraire, dans le Laos supérieur et en Chine, 
où les indigènes le cultivent fréquemment; — plusieurs variétés peu remarquables. 

Sesbania grandiflora, Pers.; Agati grandiflora, Desv. (vulgairement : fayotier). 
— Cultivé en Cochinchine, au Cambodge et même au Laos autant pour ornement que 
pour ses gousses que l’on peut manger vertes. — Ce petit arbre, qui croît si rapidement, 
a produit une variété à fleurs rouges.— Les Annamites le cultivent parfois pour ombrager 
cerlaines plantations. 

Cajanus bicolor, L. (vulgairement : cajan ou pois d'Ancole). — Cet arbrisseau est 
planté dans tous les jardins de la partie tropicale, en petite quantité ; —ses graines sont 
peu estimées. 

Solanum esculentum, Dun. (vulgairement : aubergine, mélongène). — Cultivée 
depuis Saigon jusqu’au centre de la Chine ; —c’est un des rares légumes croissant avec la 
même vigueur sous des climats très-différents et donnant partout des graines fécondes ; 
— le Sud est cependant son climat de prédilection, et elle tend souvent à s’y naturaliser. 

Solanum ovigerum, Dun. (vulgairement : pondeuse). — Cultivée comme l'espèce 
précédente dans toute l’Indo-Chine, mais en plus petite quantité. — L’hivernage est, 
comme pour l’aubergine vulgaire, la saison de sa culture ; — à l’aide d’arrosages, elle 
vient très-bien dans le Sud, pendant la saison sèche. 

Lycopersicum esculentum, Mill. (vulgairement : tomate). — Cultivée dans le Sud par 
les Européens, et depuis quelques années par les indigènes pendant la saison sèche. — 
Dans le Nord, au Laos supérieur et dans le sud de la Chine, où elle est plantée depuis 
plus longtemps, elle s’est nataralisée le long des fleuves ; — la plante naturalisée a des 
fruits très-petits, que nous soupconnons ne pas êlre sans inconvénients pour ceux qui 
en mangent beaucoup. 

Beta vulgaris, L. (vulgairement : betterave). — Cultivée dans Le Nord par les Chinois 
comme légume, et dans le Sud, à Saigon, par les Européens au même titre, — résiste 
assez bien aux chaleurs tropicales, qui s'opposent cependant à sa fructification. 

Daucus carota, L. (vulgairement : carotte). — Croit difficilement dans le Sud, même 
pendant la saison sèche ; — elle y fleurit pourtant quelquefois, mais n’y fructifie jamais ; 
— cultivée fréquemment dansle Yun-nan où elle s’est naturalisée sur Les talus des rizières; 
elle a produit dans ce pays plusieurs variétés remarquables, une entre autres que nous 
avons trouvée autour des plaines tourbeuses de la capitale du Yun-nan, qui a des racines 
longues de plus d’un mètre, grosses seulement de 4 à 5 centimètres de circonférence, 
avant une chair excellente, sucrée et nullement fibreuse. 

Portulacca oleracea, L. (vulgairement: pourpier). — Cultivé surtout dans le Sud 
par les Annamites pendant l'hivernage ; —se naturalise fréquemment aulour des jardins ; 
souvent les indigènes ne le cultivent pas : ils récoltent la plante sauvage qui existe partout 
et que l’on reconnait à ses tiges et à ses feuilles rougeñtres. 

Basellarubra,L. ; Basella nigra, Lou. ; Basella alba, Linn. (vulgairement : baselle). — 
Ces deux plantes, que nous considérons comme deux variélés, sont cultivées dans toute 


LÉGUMES ET CULTURES MARAICHÈRES. 465 


l'Indo-Chine, près des haies, pour leurs feuilles que les indigènes mangent en guise de 
salade. 


Spinacia oleracea, L. (vulgairement : épinards). — Cultivé seulement en Chine sur 
les montagnes élevées ; — ne peut croître dans le Sud. 
Rumex crispus, L. (vulgairement : patience), — Cultivé en Cochinchine à l'ombre 


des arbres, bien moins pour ses feuilles, qui sont très-peu acides, que pour ses racines 
amères qui sont employées en médecine. 

Trouvé cultivé au Laos supérieur, pendant la saison sèche, une espèce d’oseille que 
nous n’avons pas encore déterminée, à feuilles glauques, cordiformes, presque charnues, 
très-acides. 

Neptunia oleracea, Lou.; Desmanthus natans, Wild. (vulgairement : sensitive aqua- 
lique). — Croît spontanément sur les eaux dormantes de toute la partie tropicale de l'In- 
do-Chine ; — cultivé souvent avec la plante suivante, dans des bassins spéciaux ou dans 
les marais avoisinant les villages ; — on la multiplie, au début de l'hivernage, en jetant à 
la surface de l’eau des fragments de tige; — jeunes pousses el feuilles recherchées pour 
leur légère acidité. 

Ipomea reptans, L.; Convolvulus reptans, Lou. (vulgairement : liseron aquatique). 
— Cette plante également spontanée en Indo-Chine, est cultivée dans les mêmes lieux, 
de la même façon et à la même époque que la plante précédente ; — jeunes pousses et 
feuilles mangées en guise d'épinards. 

Jussiæa repens, L. (Cubospermum palustre, Lou.). — Plante également spontanée 
en Indo-Chine, servant aux mêmes usages et cultivée de la même manière que les deux 
précédentes. 

Amarantus melancholicus, Moq. (vulgairement : amarante tricolore). — Plusieurs 
espèces d’amarantes croissant spontanément en Indo-Chine, parmi lesquelles nous cite- 
rons l'Amarantus repens el l’'Amarantus spinosus, sont utilisées par les Indo-Chinoiïs, en 
guise d’épinards. — L’amarante tricolore, cultivée en Chine et en Cochinchine pour le 
même usage ; ne croit que pendant la saison humide. 

Cichorium intybus, L. (vulgairement : chicorée). — C’est, parmi les plantes d’origine 
européenne, celle qui résiste le mieux aux chaleurs équatoriales et aux pluies de l’hiver- 
nage; — c'est la seule de cette origine qui donne des graines fécondes sous ce climat ; 
— cultivée en Cochinchine par les Européens pour ses feuilles, et en Chine pour ses ra- 
cines, qu'on emploie en médecine. 

Cichorium endivia, L. (vulgairement : chicorée frisée et scarole). — Ces deux chi- 
corées croissent, comme la chicorée sauvage, en Cochinchine pendant l'hivernage, mais 
elles y donnent rarement des graines fécondes ; — non rencontrées en Chine. 

Lactuca sativa, L. (vulgairement : laitue). — Se cultive assez facilement, pendant la 
saison sèche, en Cochinchine, et y produit fréquemment des graines, mais la plupart sont 
stériles ou ne donnent naissance qu'à des plantes dégénérées. 

Les Laotiens du Nord et les Chinois du Sud eultivent plusieurs variétés de laitue se 


ratlachant au groupe des laitues dites romaines; — l’une d’elles, qu’on trouve en Chine, 
IL. 39 


466 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


est très-remarquable par ses tiges charnues, énormes, pour lesquelles on la cultive et que 
l’on mange cuites à la facon des carottes. 

Asparaqus officinalis, L. (vulgairement : asperge). — Croît en Cochinchine malgré 
l'extrême chaleur et y donne des graines fécondes; dès le sixième mois de sa plantation 
elle y produit des turions assez gros pour être mangés, lorsqu'on l’a plantée au début de 
l’hivernage, dans une terre bien fumée et à une profondeur de 15 cent. seulement ; — 
n’est cullivée que par les Européens; — en Chine, où elle n’existe pas, elle croîtrait très- 
facilement sur les montagnes. 

Andropogon Schœnanthus, L. (vulgairement : citronnelle). — Cultivée dans tous les 
jardins des régions tropicales, à litre de condiment, pour ses feuilles qui ont un parfum de 
citron ; — les indigènes ne mangent que la base renflée des jeunes chaumes qu'ils dé- 
pouillent des deux ou trois feuilles extérieures qui les entourent ; — multiplication par 
éclats pendant l’hivernage. 

Polygonum odorum, L. — Cultivé par tous les Indo-Chinois qui habitent les régions 
tropicales, comme plante condimentaire ; — elle aime beaucoup l'humidité; — multi- 
plication par boutures pendant l’hivernage. 

Pyrethrum, Gærtn. (vulgairement : pyrèthre). — Ce pyrèthre annuel, dont nous 
n'avons pas encore déterminé l'espèce, est cultivé à titre de condiment par les Anna- 
mites et les Laotiens, pendant la saison sèche, à l’aide d’arrosages ; — sa taille est très- 
petite ; —1l est très-odoriférant dans toutes ses parties ; — les Chinois le cultivent éga- 
lement, mais en été. 

Acorus calamus, L. (vulgairement: acore). — Celte plante croit spontanément dans 
les lieux marécageux des hauts plateaux de la Chine; — cultivée en Indo-Chine, ainsi 
que l’Acorus gramineus, Aït., sur le bord des eaux ou dans les lieux très-humides, 
au même titre que les plantes précédentes ; — les indigènes les préfèrent aux deux es- 
pèces suivantes : Acorus terrestris, Rumph. et Acorus cochinchinensis, Schott, qui 
croissent à l’état spontané dans le Laos supérieur. 

Curcuma longa, L.— Cette plante, spontanée au Laos, aux racines moins aromatiques 
que le gingembre et moins colorées que le eurcuma, est cultivée, dans tous les jardins 
de l’Indo-Chine, comme condiments; — croît pendant l’hivernage, dans les lieux hu- 
mides et ombragés ; — on la multiplie en plantant les bourgeons qui terminent les 
rhizomes. 

Zingiber officinale, Roscoë (vulgairement : gingembre). — Cultivé dans les mêmes 
régions, les mêmes lieux, à la même époque et de la même facon que la plante précé- 
dente ; — employé comme elle à titre de condiment dans la cuisine ou pour la fabri- 
calion des confitures. 

Capsicum annuum, L. (vulgairement : piment). — Cette espèce, ainsi que trois ou 
quatre autres, est cullivée par tous les Indo-Chinois, y compris les sauvages ; — croit 
très-facilement, pendant l’hivernage; — se naturalise parfois aux environs des villages 
et le long des fleuves, surtout l’espèce sous-frutescente. 

Coriandrum sativum, L, (vulgairement: coriandre). — Cultivée dans les jardins co- 


LÉGUMES ET CULTURES MARAICHÈRES. 467 


chinchinois, pendant la saison sèche, pour être mangée verte comme le cerfeuil, ou pour 
ses graines qu'on emploie soit en médecine, soit dans les pâtisseries. 

Anthriscus cerefolium, Hoff.; Chœrophyllum sativum. Lamk. (vulgairement : cer- 
feuil). — Ne croît pas facilement dans le Sud, même pendant la saison sèche; — n’y 
fleurit et n’y fructifie pas. — Dans le Nord, en Chine, où cette plante croîtrait facilement, 
nous ne l'avons pas observée. 

Petroselinum sativum, Moff.; Apuun petroselinum, L. (vulgairement : persil). — 
Ne croit pas mieux que le cerfeuil en Cochinchine. Nous ne l’avons pas rencontré en 
Chine. 

Fœniculum vulgare, Gærln.; Anethum fæniculum, L. (vulgairement : fenouil). — 
Le fenouil est la seule ombellifère originaire des pays tempérés croissant avec vigueur 
sous les tropiques et s’y multipliant de graines ; — cultivé dans tous les jardins indo-chi- 
nois ; — se naturalise fréquemment dans le sud de la Chine. 

Apium graveolens, L. (vulgairement : céleri). — Ainsi que toutes les plantes semi-aqua- 
liques originaires des pays tempérés, le céleri croît assez facilement dans le sud de l’Indo- 
Chine, sur le bord des eaux. Pour le faire fructifier, on Le plante dans un pot qu’on expose 
au soleil; — sous ce climat, il reste petit, acquiert une odeur forte et des propriétés vé- 
néneuses qui font qu'on ne doit l’employer qu’en très-pelite quantité, comme condiment; 
— dans le sud de la Chine, sur les hauts plateaux, où il est fréquemment cultivé, il croit 
aussi vigoureusement qu'en Europe et ne possède aucune propriété malfaisante. 

Houttuynia cordata, Thunb. (Polypara cochinchinensis, Lou.) — Plante propagée de 
boutures près des fossés, des bassins, ou dans les endroits très-humides du Laos supérieur, 
où elle est spontanée; — jeunes tiges et feuilles mangées cuites. 

_ Allium sativum, L. (vulgairement : ail). — Ainsi que tous les peuples des pays chauds, 
les Indo-Chinois recherchant extrêmement l'ail, ils Le cultivent avec plus de soins qu'aucun 
autre légume. Quoiqu'originaire de l'Asie centrale, l'ail croît près de l'équateur, à Saigon, 
mais 11 n’y fournit pas de graines fécondes el doit être multiplié de caïeux ; — on le plante 
pendant l’hivernage. 

Allium porrum, L. (vulgairement : poireau). — Cultivé seulement par les Chinois qui 
habitent les hauts plateaux du Yun-nan : — ne croit pas dans le Sud. 

Allium cepa, L. (vulgairement: oignon). — Cultivé dans les mêmes régions que le 
poireau, où il a produit plusieurs variétés se rattachant aux deux types d'Europe, le blane 
et le rouge ; — quoique très-apprécié, dans le Sud, par toutes les populations, comme ses 
graines n’y germent pas et qu'il ne produit pas de caïeux, on ne peut l'y cultiver. 

Allium Ascalonicum, L.; Var. À. Chinense (vulgairement : échalote). — Plante potagère 
cullivée partout, même chez les sauvages ; — comme elle ne produit jamais de graines 
dans le Sud, on la multiplie toujours de caïeux ; — cultivée avec Le plus grand soin, dans 
du terreau disposé en plates-bandes, ou placée dans des caisses en clayonnage, perchées 
sur des pieux. 

Ocymum basilicum, L. (vulgairement : basilic). — Ce basilic, ainsi que les suivants : 
Ocymum suave, Ocymum canum, Ocumum minimum, L., Ocymum gratissimum. Lou. 


468 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


avec deux ou trois autres espèces et variétés, est cultivé dans toute l’Indo-Chine, au même 
titre que le thym chez nous. Ces diverses plantes sont souvent cullivées dans des pots. 

Mentha javanica, Blum. (vulgairement : menthe). — Cette menthe, ainsi que deux 
ou trois autres espèces et variétés, est cultivée dans toute l’Indo-Chine, pour le même 
usage que la plante précédente; — plantée dans les lieux humides. 

Peziza auricula, L. Exidia auricula Judæ, Fries). — Ce champignon membraneux, 
sessile, creux, brun et large de 5 à 8 centimètres de diamètre, est le seul que nous 
ayons vu cultiver en Indo-Chine. Les sauvages du Vun-nan pratiquent en grand sa culture, 
dans les forêts de pins avoisinant leurs villages. Pour tout soin, ils se bornent à abattre 
les pins pendant l'hiver et à les laisser étendus sur La terre. Lorsque vient ensuite l'été, 
l'écorce à demi pourrie de ces arbres se couvre de champignons qu’on récolte dès qu'ils 
ont acquis tout leur développement et qu'on fait sécher ensuite. Ce champignon est 
exporté dans toute la Chine où il s’en consomme de très-grandes quantités. Sa chair est 
assez délicate quoique sans aucun parfum. 

Agaricus edulis, C. D.; Var. Ag. campestris, L. — Cetle variété de champignon se 
rencontre, au début des pluies, dans toute l’Indo-Chine. Nulle part la variété dite de 
couche n’est cultivée ; cela est regrettable, car sa culture y serait sans doute aussi facile 
qu'en Europe. 

A la suite de ce champignon comestible, mentionnons les suivants qu’on observe éga- 
lement en Indo-Chine : Agaricus colubrinus, Bull. (vulgairement : agaric élevé), qu’on 
trouve près de Saigon, et la morille commune, Morchella esculenta, Pers., qu'on ren- 
contre dans le Vun-nan et le Se-tchouen. 


FORÊTS. — ESSENCES FORESTIÈRES ET PRODUITS UTILES DES FORÊTS. — PLANTES MÉDICINALES. 


$S 1. — Foréts. 


En fait de sylviculture tous les peuples de l’Indo-Chine, y compris les Chinois, ne 
connaissent guère que les moyens de détruire les forêts. Partout ils Les brülent, soit pour 
cultiver Le riz de forêt, le maïs et le colon, soit pour nettoyer la terre afin de rendre plus 
facile la circulation, soit pour chasser les bêtes, soitenfin, comme nous l’avons vu tant de 
fois, pour se distraire. Cette coutume barbare est générale et l’on peut affirmer que chaque 
année la moitié de la surface totale des forêts de l'Indo-Chine, même celle de beaucoup 
de montagnes, est ravagée par le feu. A l'inverse de ce qui se passe sous les climats 
froids et tempérés, celle pratique pleine d’inconvénients sérieux n’amène cependant 
pas la destruction complète des forêts; et à moins que les arbres ne soient vieux et 
creux, ils ne périssent, généralement, que lorsque les indigènes attisent le feu. La 
flamme rase seulement le sol en brülant les broussailles, les herbes sèches et la légère 
couche de feuilles mortes qui se trouvent à sa surface. Cette pratique des incendies à 
outrance a amené ce résultal qu’on ne cesse de déplorer en traversant le pays, c’est de 
s'opposer à la conservalion, sauf dans quelques rares endroits éloignés des populations, 
de forêts vraiment vierges, offrant le caractère de puissance et de grandeur si admirable 
qu’elles acquièrent si facilement sous ces climats. Partout, dans les terres riches propres 
aux cultures, on ne trouve que des forêts plus ou moins récentes. et partout, dans les terres 


470 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


maigres impropres aux cultures, on ne rencontre que des forêts dont le développement a 
été entravé par ces incendies périodiques. Un des grands inconvénients, selon nous, de 
ces incendies, c’est de s'opposer à la croissance des plantes annuelles dans les plaines, en 
brülant leurs graines, et à celle des jeunes arbres, dans les forêts, en les brülant chaque 
année quelques mois après leur germination. Par contre, ces incendies favorisent la 
mulüplication, en les isolant et leur laissant le champ libre, de plusieurs mauvaises 
plantes aux racines souterraines et vivaces que le feu ne peut détruire. Parmi ces plantes 
envahissantes et inuliles nous citerons plusieurs bambous épineux et une graminée, 
l'Imperata arundinacea, Cyril. 

Au point de vue des essences forestières, si celte pratique n’a que peu d’inconvénients 
au Cambodge et au Laos, pays très-peu peuplés et jusqu'ici sans communications assez 
faciles avec le littoral pour qu'on puisse en exploiter les forêts, iln’en est pas de même 
en Chine et en Basse-Cochinchine. En Chine surtout, cette habitude a eu des conséquences 
très-graves. Le pays manque maintenant de bois dans un grand nombre de contrées, 
des inondations fréquentes s’y produisent depuis à la suite des orages, les flancs des mon- 
tagnes se ravinent de plus en plus, se dénudent et deviennent d’une stérilité qui s'oppose 
au développement des populations. 

Au point de vue de leur aspect, les forêts de l’Indo-Chine se divisent en deux classes 
principales. Dans la première se placent les forêts telles qu’elles existent en Europe avec 
de grands arbres et un taillis plus ou moins serré à leur pied, formé d’arbrisseaux el 
d'herbes. Dans la seconde, se placent les forêts clairières où 11 n’existe que des arbres courts, 
rabougris, clair-semés, entremêlés çà et là seulement de quelques broussailles et dont 
le sol est couvert principalement de graminées. Les premières forêts, beaucoup plus 
nombreuses et plus riches que les secondes, ne croissent que sur les éminences, les 
collines, les montagnes, en un mot dans tous les endroits ne s’imbibant pas complétement 
d’eau pendant l’hivernage, ot où les racines des arbres peuvent s’enfoncer profondément 
dans le sol. Les secondes sont celles au contraire qui eroissent dans les excavations du sol, 
les vallons et les grandes plaines, en résumé dans tous les lieux où l’eau s’accumule 
pendant les mois de pluies et qui se trouvent momentanément transformées en marécages. 
En outre de la taille différente qu'acquièrent les arbres dans ces deux genres de forêts, 
les essences y sont presque totalement distinctes et réparties d’une tout autre façon. 
Dans les grandes forêts, le nombre des essences est considérable et elles sont toujours mê- 
lées les unes aux autres de façon qu'aucune ne parait y dominer. Dans les forêls clai- 
rières, au contraire, le nombre est restreint et une ou plusieurs essences prédominent 
toujours beaucoup sur les autres. 


A ces règles il y a très-peu d’exceptions, et la nature du sol, riche ou pauvre, ne les 
modifie presque pas. 


82. — Essences forestières et produits utiles des foréts. 


Les essences forestières de l’Indo-Chine sont, comme dans tous les pays chauds, en 
nombre considérable. On n’en comple pas moins de cinq cents espèces se répartissant dans 


ESSENCES FORESTIÈRES. 471 


plus de deux cents genres, qui appartiennent à presque toutes les familles du règne vé- 
gétal. Toutes ne sont pas des essences précieuses, mais la plupart fournissent des bois 
uliles à l’industrie. Beaucoup, sans doule, pourraient êlre exportées pour l'Europe, si les 
forêts où elles croissent élaient facilement accessibles par les fleuves, par les rivières ou par 
des routes. Devant, à propos de chaque essence, donner des renseignements sur les lieux 
où elles croissent, sur les quantités qui s’y trouvent, sur la possibilité de les exploiter et 
sur leur valeur, nous nous abstiendrons de plus longs détails. 


Famille des Verbénacées. 


Tectonia grandis, L. — Le teck, dont le bois est si recherché pour les construc- 
tions navales, tant pour sa légèreté, sa flexibilité, que pour son incorruptibilité supé- 
rieure même à celle du chêne, croît dans le Laos supérieur, entre le 18° et 19° de- 
gré de latitude. Cette zone de végétation du teck, qui s'étend, comme on sait, à l’ouest 
dans le royaume de Siam et jusque dans l'Inde, en passant par la Birmanie, atteint, 
selon toute probabilité, le Tong-king à l’est. Au sud de cette zone, à 8 ou 900 mètres d’al- 
titude environ, les quelques sujets que nous avons observés avaient été importés par les 
voyageurs ou les pèlerins bouddhistes. C’est donc complétement à tort que Loureïro a si- 
onalé l’existence de cette essence précieuse entre les frontières du Cambodge et de la 
Basse-Cochinchine, vers le 10° degré de latitude !. D’après ce que nous avons vu etselon les 
renseignements que nous avons recueillis, 1l n'existe assurément aucune forêt de cet arbre 
par cette latitude équatoriale, et nous ne nous exphiquons la fausse indication donnée par 
cet auteur, qu’en admettant qu’il a donné la description de celle plante, comme beaucoup 
d’autres d’ailleurs, d’après des renseignements vagues, et non d’après des échantillons 
qu'il a observés lui-même. 

Si l'aire de végétation de cet arbre précieux est comprise entre des limites nord et 
sud très-restreintes, 1l ne s'ensuit pourtant pas qu'il ne puisse croître et même se mulüi- 
plier facilement en dehors. Nous sommes même convaincu qu'il peut pousser avec une 
vigueur presque égale à celle de son pays d’origine dans toutes Les régions situées plus au 
sud. À l'appui de cette opinion, nous citerons les petits bois de teck en voie de formation, 
que nous avons observés dans le Laos inférieur, par une latitude beaucoup plus sud et 
dans lesquels cet arbre montre une tendance si remarquable à se propager spontanément. 
Ces petits bois situés autour de tombeaux ou de pagodes, provenant de quelques exem- 
plaires importés 1l y a une trentaine d'années, se composent actuellement de plusieurs 
centaines d'arbres de tout äge, issus de graines qui ont germé et grandi naturellement 
parmi les herbes et les broussailles. 

Ces bois en miniature, qui n’ont nullement été protégés contre les ravages de l’homme 
et des animaux domestiques, sont des plus beaux pourtant, et, en les voyant, nous 
avons acquis la certitude que s'ils ne s'étaient trouvés isolés des forêts voisines par des 


! Loureïro, Flora Cochinchinensis, page 170. 


472 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


plaines cultivées faisant obstacle à leur propagation, ils les eussent gagnées et envahies 
depuis longtemps. 

: Un autre exemple montre beaucoup mieux encore combien est grande la puissance 
de propagation de cet arbre. Dans Îles plaines immenses de Xieng-kan, autrefois si 
peuplées, mais abandonnées depuis une cinquantaine d'années par suite des guerres que 
s'y livrent sans cesse les Siamois et les Laotiens-Birmans, nous avons traversé des 
forêts de teck qui en couvrent presque entièrement l'étendue et qui ont envahi jusqu’à 
l'emplacement des villes et des villages. Ces forêts, fort belles déjà, quoiqu'’elles ne soient 
qu'à moitié environ de leur croissance, se sont développées dans ces plaines, sans aucune 
intervention humaine et en concurrence avec toutes les autres essences indigènes, 
très-robustes pour la plupart. IL est bon d’ajouter que ces plaines sont situées par 
le 19° degré, c’est-à-dire au centre de l'aire de végétation de cet arbre et sur un sol 
argilo-sablonneux alluvionnaire, humide et profond, qui parait être celui qui lui con- 
vient le mieux. Ce fait remarquable de multiplication nous autorise à penser que, dans 
l'avenir, celle précieuse essence se subslituera facilement aux autres arbres dans toutes 
les plaines où on la transportera. Si jusqu'alors ce résultat ne s’est pas produit davan- 
tage, cela tient sans doule à ce que la configuration excessivement montagneuse du 
nord de l’indo-Chine s’y est opposée. Cet arbre, ne croissant jamais sur les lieux 
élevés et en pente et ne s’élevant que très-rarement sur les collines les plus basses, n’a 
pu, malgré l'enveloppe vésiculeuse de ses graines et les poils roides, presque accrochants, 
dont elles sont couvertes, franchir facilement le sommet des montagnes pour gagner les 
plaines. IL est vrai que ses graines sont lourdes et ne donnent pas assez de prise au 
vent pour se transporter au loin. Il reste donc confiné dans les vallées, attendant, 
pour se propager, qu'une cause accidentelle emporte ses graines; ce qui doit arriver 
lrès-rarement dans ces pays très-peu peuplés et ayant peu de relations entre eux. 
Ces raisons expliquent l’apparente contradiction qui semble exister entre la puissance 
de dissémination de cet arbre et sa localisation, jusqu'alors, dans une région très-res- 
treinte. Cette localisation, selon nous, n’est que passagère et disparaîtra vraisemblable- 
ment le jour où celte essence aura gagné les immenses plaines qui commencent à l'o- 
rigine du della des fleuves et des rivières. Ce résultat qui semble, s'être produit depuis 
longtemps dans les bassins de l'fraouaddy, de la Salouen et du Meïnam, où ces arbres 
sont lrès-avancés et disséminés vers l’équateur, semble dù à la configuration de ces 
bassins qui ne sont pas barrés vers le sud par d'aussi hautes montagnes que celui 
du Mékong. En Cochinchine et au Cambodge, pour häter) cetle propagation au sud, 
qui serait d’ailleurs très-lente à se produire par elle-même, il serait bon, dès à présent, 
de planter ces arbres de distance en distance, dans toutes les plaines incultes propres 
à sa croissance. Nous signalons comme remplissant ces conditions, les plaines alluvion- 
naires qui bordent les rivières et les fleuves de Cochinchine dans la zone forestière 
située au-dessus des eaux saumâtres. Ces plaines, au sol et au sous-sol argilo-sa- 
blonneux profond, non marécageux quoique assez humide pour s'opposer à ce que 
beaucoup d'arbres y croissent, nous paraissent devoir lui convenir. Ce qui nous confirme 


ESSENCES FORESTIÈRES. AT3 


dans cette opinion, c’est la présence parmi les forêts de teck que nous avons vues, de 
plusieurs arbres qui se trouvent également dans les plaines de Cochinchine et parmi 
lesquels nous citerons le Butea frondosa, Roxb., le Careyaar borea, Roxb., les Strychnos et 
les Vauclea arborescents. Quelques sujels plantés çà et là dans ces plaines, arriveraient 
sans doute, en moins d’un demi-siècle, à constituer des forêts exploitables. A notre avis, 
il serait bien préférable d’agir ainsi, que de tenter l'exploitation des forêts du Laos 
supérieur à travers les nombreuses difficultés dont elles sont entourées. 

La première de ces difficultés est l’énorme distance qui sépare ces forêts du littoral. Cette 
distance est quatre ou cinq fois plus considérable dans la vallée du Mékong que dans les 
bassins des trois fleuves dont nous venons de parler. A cette première difficulté, se joignent 
l'innavigabilité du Mé kong, le peu de population qu’on trouve actuellement dans ces 
forêts de teck, ainsi que l’insalubrité extrême qui y règne. Vaincrait-on toutes ces dif- 
ficultés, ainsi que celles suscitées par les gouvernements de ces contrées, que le résul- 
lat serait encore médiocre; car les forêts de teck bordant les fleuves et les rivières, qui 
sont à peu près les seules exploitables, sont dans un état déplorable pour la plupart. L’habi- 
tude qu'ont les populations qui les habitent de les brüler périodiquement, fait qu'on n’y 
trouve que des sujets ayant rarement plus de trente à quarante ans d'âge et ne dépassant 
presque jamais 70 centimètres de diamètre. Quelques rares sujets seulement, ayant 
échappé à cette déplorable dévastation, possèdent seuls, ence moment, les fortes dimen- 
sions nécessaires aux construclions navales et à la plupart de nos usages. Si nous ajoutons 
que ces sujets sont disséminés çà et là dans les forêts et très-éloignés les uns des autres la 
plupart du temps, de facon qu’il faudrait en général construire des chemins d'exploitation 
pour chaque arbre, on comprendra que nous ne conseillions pas d’exploiter ces forêts. 
Cette exploitation ne pourrait du reste avoir lieu que dans quinze à vingt ans, si toutefois 
d'ici là, 1l était possible de protéger ces forêts contre les habitudes dévastatrices des 
indigènes. Ce résultat nous parait presque impossible à atteindre; car en Cochinchine, où 
le gouvernement possède pourtant de nombreux moyens d'action, 1l n’est pas encore 
parvenu à enrayer celte barbare habitude. Notre avis est donc, qu'il faut renoncer pour 
toujours à exploiter ces forêts et qu’il est préférable de chercher à en créer, dans les 
régions rapprochées du littoral, en plantant des tecks dans les plaines ou mieux encore 
le long des routes. 

Joignons à ces divers renseignements sur le teck, quelques détails descriptifs sur son 
mode de croissance, sa forme, ses dimensions et même sur Les terrains qui lui conviennent. 
Une des particularités les plus remarquables du teck, qui explique sa puissance de mul- 
tiplication, est l'extrême rapidité avec laquelle il se développe dans ses premières années. 
IL est, sous ce rapport, sans rival dans le pays. Dès la première année, les graines de teck 
fournissent des sujets de 5 à 15 décimètres de hauteur et assez robustes déjà, pour être 
à l’abri des nombreuses causes de destruction dont les jeunes arbres sont généralement 
entourés. Pendant une période assez longue, cette croissance rapide se maintient, et 
chaque année on voit les jeunes sujets grandir d’au moins un mètre. Ce n’est guère 


que vers l’âge de trente ans que cette végétation étonnante se ralentit; vers soixante-dix 
I, 60 


474 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


ou cent, elle ne se continue plus qu’en grosseur. Avant la fin de celte période, qui est 
ordinairement la plus longue pendant laquelle la plupart des arbres des pays chauds 
puissent vivre, le tronc se creuse souvent à la base, de sorte que le moment le plus 
propice pour l’exploiter nous paraît être vers cinquante ou soixante ans. À ce moment 
les sujets ne sont pas très-gros, puisqu'ils n’ont en général que 69 à 80 centimètres de 
diamètre, mais l’intérieur de leur tronc est parfaitement sain. 

Le teck n'offre jamais, en hauteur, de grandes différences. En général, comme il croît 
dans des forêts peu serrées, son tronc dépasse rarement 25 mètres. Ce tronc est cylindri- 
que, très-droit, légèrement plus gros à la base et dépourvu de branches jusqu’au-dessous 
de la tête qui est globuleuse. 

Si le teck croît particulièrement avec vigueur dans les terres argilo-sablonneuses de 
nature alluvionnaire, plutôt pauvres que riches, il se contente très-bien, comme toutes 
les essences vigoureuses, d’un sol maigre et d’une autre nature. Nous avons observé des 
sujets très-beaux, sur des éminences au sol légèrement pierreux, tout à fait dépourvu 
d'humidité pendant la saison sèche. Mais ces sujets avaient été plantés par la main de 
l'homme et nous n’avons pas constaté qu’ils se soient multipliés aux alentours, comme 
cela a toujours lieu dans les plaines basses et humides, habitat de prédilection de cet arbre. 

Vitex, L. (Càay bin-lin des Annamites). — Huit espèces d’arbres appartenant à ce 
genre, croissent disséminées dans toutes les forêts de la partie tropicale de l'Indo-Chine. 
La plupart fournissent un bois blanchätre, élastique, plus dense que l’eau, très-apprécié 
pour le charronnage et la construction des barques. 


Famille des Diptérocarpées. 


Dipterocarpus, Gærtn. (Cày Dàau des Annamites). — Ce genre est représenté en Indo- 
Chine par huit espèces réparties entre le sud de la Cochinchine et le 22° degré de 
latitude. Dans le sud, surtout, ces arbres sont très-abondants et dominent partout 
dans les forêts par leur nombre etles gigantesques dimensions de quelques espèces. Ce 
sont les rois de ces forêts où ils jouent le rôle du chêne, du hêtre et du châtaignier en 
Europe. Ces arbres au bois rougeûtre, dense, servent à fabriquer presque toutes les 
planches employées dans le pays, ainsi que les bateaux et les pirogues d’une seule pièce, 
dont quelques-unes ont parfois 30 mètres de longueur. Ils fournissent, en outre, une 
oléo-résine très-précieuse qui, chez ces peuples, tient lieu, pour la peinture, de l’essence 
de térébenthine, de l'huile de lin et du goudron chez nous. 

Toutes les espèces fournissent de l’oléo-résine, mais quelques-unes, comme le Dipte- 
rocarpus alatus, Roxb., en produisent beaucoup, et d’autres, comme le Dipterocarpus 
magnifolius?, en produisent peu. Selon les espèces, elle est plus ou moins limpide et 
renferme des proportions d'essence et de résine variables. 

La récolte de ce produit commence en décembre, lorsque les arbres vont fleurir, et 
finit en Juillet et août. Le procédé d'extraction, analogue partout, offre quelques différences 
suivant les pays. En Cochinchine, où il est pratiqué avec le plus de soin, il consiste à creuser, 


ESSENCES FORESTIÈRES. 475 


à un mètre environ au-dessus du sol, une excavation dans le tronc ayant les formes d’un 
bénitier; c’est-à-dire oblique à la partie supérieure et excavée à sa partie inférieure, de 
façon à recevoir l’oléo-résine au fur et à mesure qu’elle s’écoule. Cette excavation, qui 
s'étend au sixième du diamètre du tronc environ et pénètre jusqu'aux deux tiers de son 
centre, est unique sur les petits arbres et double sur les gros. Chaque année, à l’appro- 
che de la récolte, les Annamites rafraichissent, avec la hache, la partie supérieure de 
lexcavation, dans le but d'enlever la couche superficielle du bois dont les pores sont 
bouchés. Souvent même, tous les cinq à six ans, ils creusent de nouvelles excavations, 
sur le côté ou au-dessus des anciennes dans le but de les empêcher de devenir 
trop grandes. Au Cambodge et au Laos, les habitants ne se donnent pas cette peine 
et ils n’en creusent toujours qu'une seule, raais cela entraîne souvent la mort préma- 
turée des arbres. L'obligation dans laquelle on est chaque fois, après avoir enlevé 
l'huile du bois, de flamber la partie supérieure de l’excavation, afin de brüler la résine 
qui obstrue la partie extérieure des pores, finit par agrandir tellement l’excavation, 
qu'elle occupe la moitié du trone et qu’au moindre coup de vent l'arbre est renversé. L’en- 
lèvement de l'huile, qui est presque toujours suivi de l'opération du flambage, se fait 
tous les deux ou trois jours au début de la récolte; mais plus tard, pendant les pluies, le 
suintement se ralentissant, la récolte n’a plus lieu que tous les cinq ou six jours. Pendant 
cette saison, il est nécessaire de boucher l'entrée des excavations avec quelques grandes 
feuilles, afin d'empêcher l’eau d'y pénétrer et de se mêler à l’oléo-résine. 

La plupart des espèces de Dipterocarpus commencent à pouvoir être exploitées à 
l'âge de quinze à vingt ans et peuvent rester en exploitation jusqu’à leur mort qui paraît 
avoir lieu à l’âge de cent cinquante ans environ. 

Chaque année, un arbre de moyenne grosseur fournit 20 à 30 Litres d’oléo- 
résine, ce qui, au prix moyen de 50 centimes, auquel se vend ce produit dans le 
pays, constitue un revenu suffisant pour que le gouvernement cambodgien puisse taxer 
chaque arbre en exploitation d’un franc d'impôt. 

Contrairement à ce que l’on pourrait supposer, le bois des arbres exploités est 
meilleur ; contenant moins de résine, il est plus facile à travailler. 

Hopea, Roxb. (Cäy sao des Annamites). — Cinq espèces de ce genre croissent en 
Indo-Chine, depuis le sud jusqu’au milieu du Laos supérieur, par le 21° degré. Deux 
de ces arbres croissant au Laos sont de trop petite taille pour être utilisés. Quant 
aux trois autres qui acquièrent de fortes dimensions, ils sont fort employés, car ils 
fournissent, après le teck, le bois le plus précieux et le plus estimé, dans le pays, pour 
sa durée, sa flexibilité et sa légèreté, qui surpassent celles de la plupart des autres essences 
de l’Indo-Chine. Deux de ces trois Æopea estimés croissent dans toutes les plaines du Sud, 
où ils sont disséminés partout en petite quantité ; l’autre, qui ne pousse que sur les mon- 
tagnes, est beaucoup plus nombreux, et, quoique n’acquérant qu’une grosseur moyenne, 
il est tellement abondant, surtout dans le Laos inférieur, au-dessus et au-dessous 
de Bassac, près du fleuve, qu'il y aurait certainement lieu d'aller l’exploiler, si les cata- 
ractes du Mé kong n'étaient un obstacle à cette opération. La plupart de ces Æopea, 


476 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


lorsqu'on blesse leur écorce, laissent écouler une résine presque blanche, fort belle, 
mais trop peu abondante en général pour qu'il y ait avantage à l’exploiter. 

Anisoptera, Korth (Cäy vin-vinh des Annamites). — Deux espèces appartenant à ce 
senre croissent abondamment dans foules les plaines alluvionnaires non inondées qui 
bordent les rivières depuis la Basse-Cochinchine jusqu’au centre du Laos. L'une et l’au- 
tre acquièrent des dimensions énormes, et l’on rencontre souvent des sujets dont les troncs, 
droits comme des mâls et nus sur une longueur de plus de 30 mètres, ont un diamètre 
de 1 mètre 80 à leur base. Leur bois, lourd, d’un blanc jaunâtre ou verdâtre, plus cor- 
ruptible que celur des Ppterocarpus, sert en menuiserie et dans la charpente, mais 
il est surtout employé à fabriquer des cercueils chez les Annamiles. Ces deux espèces 
produisent une résine jaunatre, peu abondante. 

Shorea, Roxb. — Sept espèces appartenant à ce genre se rencontrent entre le sud 
de la Cochinchine et le Laos supérieur par le 20° degré. Parmi ces arbres qui croissent, 
pour la plupart, dans les forêts clairières et dans les terres maigres, deux seulement 
offrent un intérêt sérieux : le Shorea robusta, Roth. (Cäy ca-chàc des Annamites), estimé 
pour son bois corné assez analogue au gayac etle Shorearubriflora”? (Cày chaï des Annamiles), 
estimé pour son bois également, mais surtout pour la résine qu’il sécrète. Ces deux arbres 
sont très-abondants en Cochinchine, au Cambodge et au Laos inférieur; mais le premier 
ne croît que dans les forêts elairières et Le second que dans les forêts puissantes, qu’on ren- 
contre particulièrement sur les monticules argileux. Un seul de ces arbres à résine, de la 
orosseur d'un chêne, peut sécréter dans une saison, 20 à 80 kilogrammes de résine. 
La sécrétion se fait souvent d'elle-même, aux nœuds, mais, la plupart du temps, on la fa- 
vorise en faisant de légères entailles à l'écorce, vers le mois de mars; elle a lieu surtout 
à la fin de la saison sèche, en avril. 

Si la résine de cet arbre est beaucoup plus abondante que celle des autres espèces du 
même genre, ainsi que des Æopea, des Anisoptera el des Vatica, en revanche elle est moins 
belle, plus jaune et plus cassante. Unie à la chaux et à l’oléo-résine des Diprerocarpus, 
celte résine est employée surtout à calfater les bateaux. 

Vatica, L. (Cay läu-tâo des Annamites). — On rencontre trois espèces de ce genre 
croissant dans toutes les forêts de la Cochinchine, du Cambodge et du Laos inférieur. 
Quoique leur bois soit utilisé, il est peu estimé ; car il est très-corruptible et n'’atteint 
jamais de grandes dimensions. 

Vateria, L.— Cet arbre croît par le 21° degré environ, sur la frontière du Laos supé- 
rieur el du Yun-nan. C’est de toute la famille des Diptérocarpées, celui qui se rapproche 
le plus de la zone tempérée. Il est rare, de petite taille et peu recherché dans ces régions, 
où les chênes et les chätaigniers sont très-abondants. 


Famille des Légumineuses. 


ia dolabriformis, Roxb. (Cày cam-xe des Annamiles). — Cet arbre, au bois 
rouge, dense, rès-propre à l’ébénisterie, est très-abondant depuis le nord de la Basse- 


ESSENCES FORESTIÈRES. 477 


Cochinchine jusqu’au centre du Laos inférieur. Il eroitsurtout, dans cette immense zone, sur 
les terres alluvionnaires, basses, non inondées pendant l’hivernage, qui bordent les 
fleuves et les rivières. Nulle part il n’est plus abondant et il n’atteint de plus fortes di- 
meusions qu'au-dessous des cataractes du Cambodge où il serait très-facile de l’exploiter. 

Afzeha, Sm. (Cay-Sôai des Annamiles). — Cet arbre, dont le trone dépasse souvent 
1 mètre 50 de diamètre à la base, est rare au Cambodge et au Laos, et plus rare encore 
en Cochinchine. Son bois, très-dense, très-dur et à peu près blanc lorsqu'il vient d’être 
coupé, devient, ainsi que celui de l'espèce suivante, presque d’un noir d’ébène en 
vieillissant. On l’emploie en ébénisterie et pour les charpentes qui exigent une grande 
solidité. C’est avec lui qu’on confectionne les cylindres des moulins à sucre. 

Sorinda, Miq. (Cay-gô des Annamiles). — Cel arbre croissant abondamment dans 
toutes les forêts de la Cochinchine, du Cambodge et du Laos inférieur, atteint ordinaire- 
ment de très-fortes dimensions. Son bois à peu près incorruptible devient d’une belle 
couleur noire en vieillissant. Il sert à faire la plupart des petits meubles incrustés des 
Annamiles, mais surtout ces belles tables d’une seule pièce qui leur servent de lit. Pour 
la confection des jonques, c'est le bois que l’on préfère. 

Dalbergia, L. — Trois ou quatre espèces appartenant à ce genre, qui fournit le bois 
de palissandre, croissent disséminées dans toutes les forêts indo-chinoises, depuis Saigon 
Jusque dans le Laos supérieur. Toutes n’alteignent que de faibles dimensions et four- 
nissent des bois assez estimés pour leur couleur rouge ou brune. 

Pongamia, Vent. (Cày-trac des Annamiles). — On rencontre trois espèces apparte- 
nant à ce genre dans les forêts comprises entre Saigon et le Laos supérieur. Ces trois es- 
pèces sont rares et fournissent un bois dont le cœur est d’un beau rouge veiné de noir, qui 
le fait rechercher beaucoup pour la confection des objets de tabletterie et d’ébénisterie. 

Albizzia, Durazz. — Douze espèces d’arbres appartenant à ce genre sont réparties dans 
les diverses parties de l’Indo-Chine, qui jouissent d'un elimat tropical. Quelques-unes 
fournissent des bois assez estimés. 

Pterocarpus, L. — Deux espèces d'arbres appartenant à ce genre croissent disséminées 
dans les forêts clairières de la Cochinchine, du Cambodge et du Laos. Partout elles sont 
rares. Leur bois rougeätre est assez recherché. 

A la suite de ces divers genres de légumineuses fournissant des bois utiles, mention- 
nons les suivants, qui sont bien moins importants : Euchresta, Benn. — Parkia, Br. — 
Crudia, Schreb. — Sophora, L. — Gleditschia, L, — Cassia, L. — Adenanthera, L. — 


Saraca, L. 


Farille des Guttifères. 


Mesua ferrea, L. (Cäy-viap des Annamites). — Cet arbre au bois rouge très-dur, 
formé de fibres intriquées et à peu près incorruptible, croît sur toutes les petites mon- 
tagnes, depuis Saigon jusque dans le Laos supérieur (Xieng-tung.) Partout il est assez 
rare ; il sert surtout à faire des pilotis pour les ponts. 


478 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Famille des Ébénacées. 


Maba,Forst. (Ebenoxylum verum, Lou. ou Cäy-mun des Annamites). — Nous n'avons 
rencontré cet arbre, qui fournit le plus bel ébène de l’Indo-Chine, que dans les forêts de 
Stung-treng dans le Laos inférieur. D’après nos renseignements, il serait assez commun 
au Cambodge et on le trouverait même en Cochinchine. Les sujets que nous avons observés 
étaient d'une grosseur médiocre et n’auraient fourni, après l’enlèvement de l’aubier, que 
des büches fort petites. 

Diospyros, L. (Cày-thi des Annamites). — Parmi les vingt-cinq espèces de Diospyros 
qui croissent dans les diverses parties de l’Indo-Chine, deux ou trois, poussant surtout 
sur les montagnes du Cambodge, fournissent de l’ébène que les indigènes exploitent et 
apportent dans les ports du lilloral. 


Famille des Cupulifères. 


Quercus, L. (Cay-dé-se des Annamites). — Vingt-sept espèces de chênes sont réparties 
dans les diverses contrées de l’Indo-Chine. Dans le Sud, en Cochinchine, au Cambodge et 
au Laos, les espèces qu’on y trouve sont en général de petites dimensions et peu abon- 
dantes ; mais dans le Nord, à partir du Laos supérieur, plusieurs espèces atteignent de 
fortes grosseurs, et souvent leur tête domine dans les forêts comme en Europe. Aucune 
cependant de celles qu’on trouve dans ce dernier pays, n’est comparable à nos chênes 
d'Europe pour la taille et la qualité du bois. Nulle part nous n’avons vu employer l'écorce 
de ces divers chênes pour le tannage. 

Castanea, Tournef. — Sept espèces de châtaigniers croissent sur les montagnes indo- 
chinoises, à partir du 21° degré, dans Le Laos supérieur, jusque dans le centre de la 
Chine. La plupart acquièrent de fortes dimensions el rendent des services comme bois de 
construction. 

Carpinus, L. — Deux espèces de charmes croissent sur les montagnes élevées du 
Laos supérieur et de la Chine. L'une et l’autre n’atteignent pas une taille suffisante pour 
être très-utiles. 


Famille des Juglandées. 


Engelhardtia, Leschn. — On trouve six espèces d’arbres appartenant à ce genre en 
Indo-Chine. Cinq eroissent dans le sud : les unes sur les montagnes, les autres sur les 
bords des cours d’eau, la sixième croit près du sommet des hautes montagnes du Yun-nan, 
sous un climat froid. Toutes ces espèces acquièrent des dimensions assez fortes et four- 
nissent un bois assez estimé, quoique très-corruptible. 


Famille des Lythrariées. 


Lagerstræmia, L. (Cây-ban-lang des Annamites). — Douze espèces d'arbres apparte- 
nant à ce genre croissent en Indo-Chine. La plupart se trouvent dans les forêts comprises 


ESSENCES FORESTIÈRES. 479 


entre la Basse-Cochinchine et le centre du Laos inférieur. Plusieurs atteignent des di- 
mensions énormes, et ont un bois plus ou moins rouge, qui n’est pas moins élastique 
que celui du frêne, el sert comme lui à de nombreux usages. 

Crypteronia, Blum. — On rencontre une seule espèce de ce genre croissant dans 
les forêts clairières de l'extrême sud de l’Indo-Chine. Son trone n’atteint qu’une moyenne 
grosseur et son bois tendre est peu usité. 

Duabanga, Ham. — Nous avons rencontré cet arbre dans le Laos inférieur, croissant 
dans les plaines bordant les fleuves, où il acquiert de fortes dimensions. Son bois assez 
tendre est peu recherché. 


Famille des Rosacées. 


_ Parinarium, Yuss. (Cay-cam des Annamites). — Arbre très-commun dans toutes les 
plaines de la Cochinchine, du Cambodge et même du Laos inférieur. Il atteint de très- 
fortes dimensions. mais son bois est trop lourd, trop corruptible et a des fibres trop courtes 
pour être lrès-recherché. 


Famille des Ulmacées. 


Ulmus, L.— Une seule espèce d’orme croit dans la Basse-Cochinchine et dans le Laos 
inférieur ; son tronc, qui acquiert de très-belles dimensions, fournit un bois très-estimé : 
malheureusement cet arbre est très-rare. 


Famille des Celtidées. 


Sponia, Commers. — Cinq espèces appartenant à ce genre croissent depuis le Laos 
supérieur jusqu'au centre de la Chine. Plusieurs acquérant de fortes dimensions sont 
cultivées en Chine, autour des pagodes. Toutes fournissent un bois très-estimé. 


Famille des Conifères, 


Pinus massoniana (Pinus sylvestris, Lou.) (Cay-thong, ou des Annamites). — Get arbre 
est Le seul de cette intéressante famille, qui croisse abondamment dans le sud de l’Indo- 
Chine. On le trouve sur le plateau compris entre l’ancienne ville d’Angcor, la ville sia- 
moise de Korat et la ville laotienne de Bassac. Après s'être montré en grand nombre sur 
ce plateau, il cesse de croitre et ne redevient abondant que 150 lieues plus loin, sur les 
montagnes du Laos supérieur et de la Chine. C’est un arbre de moyenne taille, n’attei- 
gnant jamais les dimensions suffisantes pour servir à faire des mâls de vaisseau. Son bois 
ne peut guère’servir que pour la charpente et la menuiserie. 

A la suite de cet arbre, mentionnons deux autres espèces de pin croissant spontané- 
ment en Chine, sur les montagnes, et dont le bois sert aussi aux constructions. L'une, de 
forte taille, ressemble au pin pignon, et fournit comme lui des graines oléagineuses ali- 
menlaires, pour lesquelles on le cultive souvent. L'autre, moins élevée, qu’on prend pour 
un sapin à première vue, fournit un bois recherché, et laisse suinter une résine translu- 
cide, presque blanche, qu'on recueille avec soin. Quant aux autres espèces de conifères 


480 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


que nous avons trouvées en Chine, elles ne comptent toutes, dans ce pays, qu’un petit 
nombre de sujets. Elles appartiennent aux genres : 

Salisburia, Smith. — Cunninghamia, R. Br. — Cryptomeria, Don. — Biota, Don. 
— Cupressus, Tournef. — Dacrydium, Sol. — Taxus, Tournef. 


Famille des Combrétacées. 


Terminalia, L. (Cäy Tièu-lièu des Annamites). — Quinze espèces d’arbres appar- 
tenant à ce genre croissent entre Saigon et le sud de la Chine. Plusieurs alteignent des 
dimensions très-grandes et fournissent des bois qu'on utilise, quoiqu'ils soient en géné- 
ral très-corruptibles. 

Anogeissus acuminatus, Roxb. (Cäy-ram des Annamites. — Cet arbre croît 
abondamment dans tous les endroits humides et à demi inondés, qui bordent les 
fleuves et les rivières de toutes les zones très-chaudes de l’Indo-Chine. Son tronc de 


moyenne taille fournit un bois qu'on utilise, mais qui est peu estimé. 


Famille des Méliacées. 


Cedrela toona, Roxb. — Cet arbre croit depuis le sud de la Cochinchine jusqu’en 
Chine, dans la vallée profonde du fleuve du Tong-king. Partout il est assez rare. Son 
bois rougealre, assez léger, comme tous ceux qui appartiennent à celle famille, est recher- 
ché pour la menuiserie et l’ébénisterie. 

Chickrassia, À. Juss. — Trois espèces d'arbres appartenant à ce genre croissent dans 
les forêts du Laos inférieur et supérieur. Leur bois sert aux mêmes usages que le pré- 
cédent. 

Sandoricum indicum, Cav. — Cet arbre aux fruits charnus, comestibles, qui s’est na- 
turalisé dans tout le Sud, est souvent cultivé dans les jardins indo-chinois. Son tronc, qui 
atteint une très-forte grosseur, fournit un bois assez recherché. 

A la suite de ces trois genres de Méliacées, mentionnons les suivants de la même 
famille, qu'on rencontre également dans la zone tropicale et qui fournissent des bois 
très-appréciés; quelques-uns de ces bois répandent une odeur qui rappelle celle du 
san{al. \ 

Amoora, Roxb. — Heynea, Roxb. — Dysoxylum, Blum. — Chisocheton, Blum. — 
Carapa, Aubl. — Melia, L. 


Famille des Anacardiacées. 


Melanorrhæa usitata (Cay-son des Annamites). — Cet arbre au bois rouge, dense, 
très-recherché pour la fabrication des meubles, croît depuis le nord de la Cochinchine 
jusque dans le Laos inférieur. Partout on le rencontre dans les forêts clairières, dissé- 
miné parmi les Shorea. 

Buchanania, Roxb. (Cäy-cäy des Annamites). — Cinq espèces d'arbres appartenant à 


ESSENCES FORESTIÈRES. 481 


ce genre croissent dans les forêts de l’Indo-Chine, entre le 9° et le 15° degré de latitude. 
Plusieurs acquièrent des dimensions considérables et fournissent un bois blanchâtre assez 
estimé malgré sa lourdeur. 

Dracontomelon, Blum. — Cet arbre croît dans les terres alluvionnaires du Laos su- 
périeur, près des fleuves et des rivières. Son tronc est de moyenne grosseur et fournit 
un bois blanc peu recherché. 

Rhus verni, L. — Nous avons rencontré dans les régions montagneuses du Yun-nan 
rapprochées du Se-tchouen, ce sumac qui fournit le suc végétal dont on fait Les laques 
de Chine et du Japon. Dans ces endroits qui jouissent d’un climat pluvieux, presque 
tempéré, il croissait à une altitudé de 1,700 mètres environ. Son tronc ne dépassait 
pas 3 à 4 mètres de hauleur. Ceux que nous avons observés avaient élé exploités la 
saison précédente et paraissaient avoir dix à quinze années. Sur leurs troncs et sur quel- 
ques-unes de leurs grosses branches, on avait enlevé à des hauteurs différentes des 
bandes d’écorce transversales larges de la moitié de la circonférence du tronc, qui est 
de 10 à 12 centimètres. A la suite de cette opération que l’on pratique en juin, à l’épo- 
que où cet arbre entre en végétalion, le sue s'écoule, s’amasse sur les bords des incisions 
d’où on l’enlève tous les trois ou quatre jours en le raclant. Ce suc émettant des éma- 
nations malfaisantes qui occasionnent des affections de la peau, les indigènes qui le ré- 
coltent, sont obligés de se couvrir le visage et les mains. 


Famille des Rubiacées. 


Nauclea, L.(Cày-gao des Annamites). — Six espèces d'arbres appartenant à ce genre, se 
rencontrent en Indo-Chine, entre le 9° et le 17° degré de latitude. Toutes croissent dans 
les endroits humides, sur le bord des fleuves et des rivières, ou dans les plaines inondées 
pendant l’hivernage. Leur taille est en général médiocre et leur bois assez peu estimé. 

Canthium, L. (Cày-Traï des Annamites). — Cet arbre de taille médiocre appar- 
lenant à un genre composé d’arbrisseaux, croit abondamment dans toutes les forêts de 
la Cochinchine et du Cambodge. Son tronc, dont le bois est à peu près incorruptible, est 
très-recherché pour construire les palissades que font les habitants des forêts autour 
de leurs maisons et de leur village pour se préserver des tigres. 


Famille des Apocynées. 


Wrightia mollissima ? (Cäy-long-müc des Annamites). — Ce petit arbre croit abon- 
damment dans toutes les forêts clairières de l’extrême sud de l’Indo-Chine. Son bois, 
d’un jaune clair, sans pores ni veines bien marquées, très-facile à sculpter, est très- 
recherché pour la confection des cachets et des planches d'imprimerie des Annamites. 


Famille des Burséracées. 


Garuga,Roxb.—On trouve cinq espèces appartenant à ce genre, croissant depuis le sud de 


la Cochinchine, jusqu’en Chine, sur les montagnes qui bordent Le fleuve Bleu. Toutes n’at- 
IL. 6l 


482 : AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


teignent que de moyennes grosseurs, sont rares, et fournissent des bois peu recherchés. 
Les genres Canarium, L., Bursera, L. et Protium, Wight et Arn., représentés en 
Indo-Chine, par plusieurs espèces, fournissent également des bois utiles aux constructions. 


Famille des Bignoniacées. 


Spathodea, Palis. — Trois espèces d'arbres appartenant à ce genre, croissent dans 
toule la zone tropicale de l’Indo-Chine. Elles fournissent toutes des bois qu'on utilise, 
quoiqu'ils soient médiocres. IL en est de même des genres voisins, Pignonia, Juss. — Ca- 
losanthes, Blum, et Millingtonia, L., qu’on trouve également dans les diverses parties de 
l’Indo-Chine. 


Famille des Hypéricées. 


Cratoxylon, Blum. (Cày Ngang-ngang des Annamites.). — A ce genre, appartien- 
nent six espèces d'arbres réparties dans les forêts de la Cochinchine, du Cambodge et du 
Laos. Deux de ces espèces atteignent d’assez fortes dimensions et sont utilisées en ébénis- 
terie. Leur bois a le cœur dur, noueux, veiné de vert et de rose autour des nœuds. 


Famille des Bétulacées. 


Alnus, Tournef.— Trois espèces d’aulnes croissent dans les lieux humides des mon- 
tagnes élevées du Laos supérieur et de la Chine. Leur bois est utilisé dans le pays. 

PBetulus, Tournef. — On rencontre deux espèces de bouleau croissant sur les hautes 
montagnes du Laos supérieur et de la Chine méridionale. L’une et l’autre fournissent 
un bois qui est employé dans les constructions. 


Famille des Célastrinées. 


Kokoona, Thw. — Une seule espèce de ce genre croît en Indo-Chine, dans la par- 
tie comprise entre le sud de la Cochinchine et le centre du Laos supérieur. On la 
rencontre dans les forêts clairières à demi inondées pendant l’hivernage. Son tronc, de 
taille médiocre, est peu recherché. 


Famille des Cornées. 


Cornus, Tournef. — Un cornouiller arborescent dont la taille n’est pas moindre que 
celle de nos érables, croit sur les montagnes brumeuses du Yun-nan et du Se-tchouen. Son 
bois flexible est très-apprécié. Le tronc droit et lisse de cet arbre, sa tête arrondie, ses 
feuilles larges et ses grandes panicules de fleurs blanches, en font un très-bel arbre d’or- 
nement qu'il ÿ aurait avantage à introduire en Europe où il croîtrait certainement. 


Famille des Datiscées. 


Tetranmeles, R. Br. (Cäy-chiam des Annamites). — Cet arbre, remarquable par son 


ESSENCES FORESTIÈRES. 483 


écorce lisse et ses énormes dimensions, ne croît que sur les montagnes. On le trouve en 
Cochinchine, au Cambodge et au Laos. Avec les fortes cannelures en forme d’arc-boutant 
qu’il présente à sa base, les Annamites et les Cambodgiens font des roues de voiture d’une 
seule pièce, qui n’ont pas moins de 1 mètre 75 cent. de diamètre. 


Famille des Dilléniacées. 


Dillenia. L. (Cay so’ des Annamites). — Trois espèces d'arbres appartenant à ce 
genre, croissent dans foute la zone tropicale de l’Indo-Chine. Elles fournissent un bois 
blanc d’une densité moyenne, qu’on emploie parfois dans la charpente. 


Famille des Euphorbiacées. 


Putranjiva, Wall. ; Briedelia, Wild. ; Microelus, W. et Arn. — Les genres pré- 
cédents, croissant en Indo-Chine fournissent des bois qu’on utilise souvent pour la cons- 
truction. 


Famille des Bixinées. 


Hydnocarpus, Gærtn.— La seule espèce d'arbre de ce genre qu’on trouve en Indo- 
Chine, ne croit que sur le bord des rivières. Très-commun en Cochinchine, dans les par- 
ties hautes du pays, cet arbre est très-rare au Cambodge et au Laos. Son trone court est 
parfois employé dans la charpente. 


Famille des Samidacées. 


Homalium, Jacq. — Cinq espèces d'arbres appartenant à ce genre, se rencontrent de- 
puis le sud de la Cochinchine jusque dans le Laos supérieur. Plusieurs fournissent des 
bois assez estimés. Une espèce au tronc très-élevé est lrès-remarquable par son écorce 


lisse presque semblable à celle du platane. 


Famille des Jasminées. 


Schrebera, Roxb. — Deux espèces d'arbres, appartenant à ce genre, l’une glabre et 
l’autre pubescente, croissent dans les forêts du Laos. Elles ont un tronc court et fournis- 


sent un bois assez apprécié. 


Famille des Tiliacées. 


Elæocapus, L. — Neuf espèces d’arbres appartenant à ce genre croissent dans la moitié 
sud de l’Indo-Chine, Plusieurs atteignent des dimensions assez fortes, pour qu’on puisse 
les employer avec avantage dans la charpente. Leur bois est assez corruptible en général. 

Schoutenia, Korth. — Cet arbre ne croît que dans l’extrème sud de l’Indo-Chine, 


484 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


en Cochinchine, au Cambodge et au Laos inférieur. Il pousse presque exclusivement sur 
les montagnes. Son tronc est parfois utilisé. 


Famille des Lauracées. 


Tetranthera, Jacq.; Litsæa, Juss. ; Machilus, Nees; Cryptocarya, R.B.; Persea, 
Gærln. ; A/seodaphne, Nees; Dehaasia, Blum. — Les genres d’arbres précédents, re- 
présentés par plusieurs espèces croissant dans toutes les parties tropicales de l’Indo-Chine, 
fournissent pour la plupart des bois de construction et de menuiserie, quoique leur 
taille soit généralement médiocre. 


Famille des Morées. 


Ficus, Tournef. — Plus de trente espèces de figuiers (nommé vulgairement Banians 
par les Européens) croissent dans les différentes parties de l’Indo-Chine. Plusieurs attei- 
gnent des dimensions énormes, mais toutes produisent un bois léger, blanc, cassant, 
qu'on ne peut employer que pour le chauffage. 

Broussonetia papyrifera, Vent. (vulgairement: mürier à papier).—Cet arbre, originaire 
de la Chine, s’est propagé de graines entrainées par les eaux, le long des berges du Cam- 
bodge, jusqu'au centre du Laos inférieur. Dans tous les pays indo-chinois où il croit, 
son liber abondant formé de fibres fines intriquées, est employé à confectionner les papiers 
blancs usités par les indigènes pour écrire. 

Aralia papyrifera?. — Nous avons rencontré cet arbre spontané et cultivé au centre 
de la Chine, dans les régions brumeuses jouissant d’une lempérature méditerranéenne. 
C'est avec la moelle de son tronc, qui atleint souvent 5 à 6 mètres de hauteur et plus de 
deux décimètres de diamètre, que les Chinois fabriquent le papier remarquable par son 
apparence veloutée et par ses nervures régulières, dont ils composent les albums aux 
brillantes couleurs qui sont si répandus aujourd’hui en Europe. Ils obtiennent ce pa- 
pier en découpant adroitement en feuilles minces les cylindres de moelle qu'ils retirent 
de ces arbres. 


Famille des Myricacées. 


Casuarina equisetifolia, L. (vulgairement : filao). — Cet arbre exotique est cultivé en 
Cochinchine pour ornement, pour son bois, mais surtout pour son écorce que les Anna- 
mites emploient au tannage de préférence à l’écorce de palétuvier et de chêne. 


Famille des Rhizophorées. 


Carallia, Roxb.; Diatoma, Lou. (Cày sang-mà des Annamites). — Deux espèces 
d'arbres appartenant à ce genre croissent en Indo-Chine, l’une en Cochinchine et l’autre 
au Laos. On les trouve dans les forêts où elles atteignent des dimensions assez fortes. 
Leur bois jaunâtre, d’une densité assez faible, sert à faire des planches et des charpentes 


ESSENCES FORESTIÈRES. à ; 485 


Bruguiera gymnorhiza, Lamk. — On ne rencontre cet arbre que sur le littoral du 
sud de l’Indo-Chine, dans tous les lieux baignés par les eaux saumätres. Avec l’âge, il 
atteint une assez grande hauteur et son bois peut être utilisé dans la charpente. 


Famille des Myrtacées. 


Eugenia, L. (Cay-tram des Annamites). — On ne rencontre pas moins de quinze 
espèces d'arbres apparlenant à ce genre, dans les diverses parties de l’Indo-Chine. Elles 
se répartissent dans les trois sous-genres suivants : Syzygqium, Jambosa et Eugenra. 
La plupart ne fournissent qu’un bois médiocre qu'on utilise pourtant dans la construction. 

Careya arborea, Roxb. (Cäy vông des Annamiles). — On rencontre cet arbre dans 
toutes les forêts clairières à demi inondées, depuis Saigon jusqu’au centre du Laos 
supérieur. Son tronc gros et court fournit un bois blanchâtre assez dur, qu’on emploie 
souvent dans la charpente ou pour faire des planches. 


Famille des Salicinées. 


Salix, Tournef. — Onze espèces de saules croissent dans les lieux humides, depuis le 
Laos inférieur jusqu'au centre de la Chine. Plusieurs atteignent une taille suffisante 
pour qu'on puisse utiliser leur bois dans la charpente. Quelques-uns de ces saules servent, 
comme en Europe, à maintenir les terres des digues que l’on construit Le long des rivières. 
Citons parmi ces saules Le Salix babylonica, L., dont on ne trouve que des pieds mâles, à 
l'inverse de ce qui existe en Europe, où l’on ne possède que des sujels femelles. 

Populus, Tournef. — Trois espèces de peupliers parmi lesquels se trouve le peuplier 
tremble (Populus tremula,L.) eroissent spontanément sur les montagnes élevées du Yun-nan 
et du Se-tchouen. Toutes atteignent de trop faibles dimensions pour être très-utiles. 
Les habitants de ces provinces préfèrent cultiver une variété du Populus angulata d'ori- 
gine exotique, qui donne de plus forts sujets et fournit un bois meilleur. 


Famille des Oléacées. 


Fraxinus, Tournef. — Trois espèces de frênes croissent dans les montagnes élevées 
duYun-nan et du Se-tchouen. Les trois sont de moyenne taille et fournissent un bois élas- 
tique que les Chinois utilisent aux mêmes usages qu’en Europe. 


Famille des Sapindacées. 


Nephelium, L. — En outre des espèces de Vephelium que nous avons mentionnées 
aux arbres fruitiers, il en existe en Indo-Chine cinq autres dont les troncs sont très-gros et 
qui fournissent un bois de construction assez estimé. Leur bois est en général rougeûtre 
et d’une densité moyenne. 


Dittelasma, Hook, Î. — Cetarbre croît depuis Bassac, dans le Laos inférieur, jusqu’au 


486 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


centre de la Chine. Partout son tronc acquiert une forte grosseur et fournit un bois blan- 
châtre qu'on utilise dans Les constructions. 

Pometia, Forst. — Cet arbre que nous avons vu croître sur les hautes montagnes du 
Laos supérieur, est celui de cette famille dont Le tronc acquiert les plus fortes dimensions. 
Son bois est employé, comme celui des précédents, dans la charpente. 

Acer, L.— Quatre espèces d’érables eroissent sur les hautes montagnes du Yun-nan et 
du Se-tchouen. Toutes atteignent de faibles hauteurs et fournissent un bois qu’on uti- 
lise souvent pour la construction des maisons. Parmi ces érables se trouve une espèce à 
feuillage persistant et coriace, la seule, croyons-nous, qu'on ait rencontrée jusqu’alors 
ayant ces caractères, que l’on pourrait introduire avec avantage en Europe pour ornement. 


Famille des Sapotacées. 


Siderozylon, L.— Nous avons rencontré deux espèces d’arbres appartenant à ce genre 
dans les montagnes du Laos. L'une et l’autre fournissent un bois noiratre estimé. 

Les genres Mimusops, L., — Palaquium, Blanc, — Azaola, Blanc, — de la même 
famille, qu'on trouve dans les mêmes régions, fournissent également un bois utile. Le 
dernier est parfois cultivé pour ses fruits comestibles. 


Famille des Sterculiacées. 


Pterospermum, Schreb. — Cinq espèces d’arbres appartenant à ce genre se rencon- 
trent depuis la Cochinchine jusque dans le sud de la Chine. Plusieurs de ces arbres ac- 
quièrent d'assez fortes dimensions pour être utilisés dans la charpente. 


Famille des Ternstræmiacées. 


Schima, Reinw. — Depuis le sud de la Cochinchine jusqu’au centre de la Chine, on 
rencontre trois espèces d'arbres appartenant à ce genre. Leurs troncs, qui ne deviennent 
jamais très-gros, fournissent un bois blanchätre qu’on emploie souvent dans la charpente. 

Pyrenaria, Blum. — La seule espèce de ce genre qu’on trouve en Indo-Chine, croit 
au centre du Laos inférieur, près des montagnes de marbres. Son trone,qui devient très- 
gros, est souvent utilisé pour la construction des cases. 

On trouve en Indo-Chine plusieurs autres arbres appartenant à des genres voisins des 
précédents qui fournissent également des bois utiles ; mais, en général, ils sont trop rares 

* dans les forêts et leurs trones sont de trop petite laille, pour être d’une grande importance. 
Ces genres sont : l’Anneslea, Wall, — l’Adinandra, Jack, — et plusieurs Camellia, L. 


Famille des Palmiers: 


. 


Calamus, L. — Sept espèces de rotins croissent dans la zone tropicale de lIndo- 
Chine comprise entre le 9° et le 22° degré de latitude. Quoique communs partout, ces 
rotins ne sont cependant pas assez abondants nulle part, pour qu'il y ait lieu de les 


ESSENCES FORESTIÈRES. 487 


exploiter pour les exporter en Europe comme cela se fait dans la presqu'île de Malacca et 
certaines parties de l'Inde. La quantité qui s’y trouve, suffit à peine aux besoins des habi- 
tants. L’incendie annuel des forêts, l'exploitation déréglée qu’en font les indigènes et la 
récolte des extrémités supérieures des jeunes stipes qu'ils mangent comme celles de la 
plupart des autres palmiers, expliquent en grande partie ce résultat. Nous devons cepen- 
dant ajouter que le elimat de l’Indo-Chine avec ses six mois de sécheresse extrême, ne 
leur convient pas aussi bien que celui des pays précédents. Parmi ces sept espèces de ro- 
tins, deux seulement atteignent la grosseur du pouce, ce sont le Calamus rudentum, Lou., 
et le Calamus verus, Lou.; les autres sont plus peliis que les doigts. Ces rotins croissent dans 
tous les lieux, dans les plaines comme sur les montagnes. Placés dans des conditions à 
ne pas être détruits prématurément, ils atteignent depuis 25 jusqu’à 100 mètres de 
hauteur en s'appuyant sur les arbres. D’aussi longs sujets sont très-rares en Indo-Chine, 
les indigènes les coupant toujours avant qu’ils aient acquis un pareil développement. 
Nous n’entrerons pas dans le détail des services que rendent ces rotins aux indigènes, il 
nous suffira de dire qu’ils sont très-grands et que peu d’autres plantes leur sont com- 
parables. 


Famille des Graminées. 


Bambusa, Schreb. — Quinze espèces de bambous, dont plusieurs appartiennent à des 
cenres voisins du Bambusa, croissent dans les différentes parties de l’Indo-Chine. Sur ce 
nombre, qui comprend des bambous énormes pouvant atteindre 30 mètres de hau- 
teur et 15 centimètres de diamètre, et d’autres ne dépassant pas deux mètres et étant 
moins gros que le doigt, plusieurs espèces sont cullivées. Quoique ces plantes ne 
manquent nulle part, les habitants préfèrent souvent planter, dans leurs jardins ou dans 
les haïes qui les entourent, certaines espèces douées de qualités spéciales, de façon à les 
avoir toujours sous la main lorsqu'ils en ont besoin. Au Laos surtout, cette habitude 
existe partout et on trouve dans chaque jardin deux espèces de bambou. L'une, très- 
grande et très-forte, sert dans la construction des maisons et à disposer les pirogues pour 
les voyages, en plaçant sur chacun de leurs côtés quatre à cinq de ces bambous dans le 
but de les empêcher de chavirer et de pouvoir les charger davantage. L'autre plus petite 
remarquable par ses chaumes nus jusqu’au tiers supérieur et parfaitement droits, sert à 
faire des avirons excellents. 

En Chine nous avons trouvé également deux espèces de bambous cultivées : l’une 
remarquable par la grosseur du chaume, qu'on emploie pour confectionner les pots à 
tabac et l’autre beaucoup plus petite servant à fabriquer presque toute la vannerie du 
pays. Cette dernière espèce croit à plus de 2,000 mètres de hauteur dans le Yun-nan, 
dans les régions où le thermomètre descend souvent au-dessous de zéro. 

Ces divers bambous reçoivent beaucoup d’autres usages; en même temps qu'ils ser- 
vent à fabriquer presque tous les ustensiles dont ces peuples ont besoin, tels que vases, 
bouteilles, chaises, paniers et même au besoin des marmites pour cuire les aliments, ils 


488 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


peuvent servir à construire toute une maison depuis la base jusqu’au toit sans qu'il y 
entre aucune autre matière. Leurs jeunes pousses sont mangées presque partout en 
guise d’asperges. 


S 3. — Plantes médicinales remarquables de l’Indo-Chine. 


Le nombre des plantes employées dans la médecine indo-chinoise est très-con- 
sidérable ; mais comme chez tous les peuples où la médecine n’est qu'un grossier 
empirisme, beaucoup de plantes inertes sont répulées jouir de propriétés merveilleuses 
et beaucoup d’autres très-aclives sont presque délaissées. L'étude des propriétés des plantes 
d’après les renseignements des indigènes, serait done très-difficile et ne mènerait très- 
souvent, comme nous avons pu nous en convaincre bien des fois, qu'à recueillir des 
données exagérées ou fausses sur leurs propriétés. Est-ce à dire qu’on ne trouverait pas 
chez ces populations qui, à part les Chinois, ne possèdent aucun livre sur les propriétés 
des plantes, des renseignements utiles sur celles qui peuvent être employées en médecine. 
Nous pensons, au contraire, qu’on pourrait en recueillir. 

IL n’est pas possible que dans le nombre considérablé de végétaux qu’on trouve en 
Indo-Chine, il ne s’en trouve pas quisoient doués de propriétés spéciales connues depuis 
longtemps des populations et qu'on parviendrait à connaître en s'adressant dans différentes 
_ localités aux quelques personnes qui s'occupent de médecine. Pour atteindre ce résultat, 
“il faudrait séjourner longtemps chez ces peuples, connaître leur langue parfaitement, 
contrôler l’assertion des uns par le dire des autres et au besoin faire soi-même des expé- 
riences. N'ayant pu procéder ainsi, nous nous bornerons à signaler celles de ces plantes 
qui croissent en Indo-Chine, dont les propriétés sont bien connues. 

Strychnos, L. — Deux Strychnos arborescents dont nous n’avons pu encore déterminer 
l'espèce et qui diffèrent notablement du S#ychnos nux-vomica fournissent en Indo-Chine 
les graines de noix vomique que les Cambodgiens exporlent en si grande quantité en 
Chine par Saigon. L'un de ces arbres, épineux, atteignant souvent plus de 30 mètres de 
hauteur, ne croit que dans le Sud, en Cochinchine et au Cambodge ; l’autre, plus petit, 
croît depuis la Cochinchine jusque dans le Laos supérieur, dans loutes les forêts clairières. 
Les indigènes ne cultivent jamais ces arbres, ils sont assez nombreux partout pour qu'ils 
n'aient, au moment de la maturité des fruits, en avril, qu’à aller dans les bois et les forêts, 
pour recueillir à peu près autant de graines qu’ils en veulent. 

Les graines de ces strychnos, si puissamment vénéneuses lorsqu'elles sont arrivées à 
malurité, ne le sont pas à toutes les périodes de leur développement. Nous avons vu nous- 
même un Laotien manger trois de ces graines encore à l’état charnu et non cornées comme 
elles le deviennent plus tard, sans en éprouver le moindre inconvénient. 

Antiaris toxicaria, Lesch.— Cet arbre, dont le sue laileux sert à composer le terrible 
poison des Javanais connu sous le nom d’upas antiar, croit dans l'extrême sud de l'Indo- 
Chine, dans les régions habitées par les sauvages Moïs de la province de Bariah. Sans 


PLANTES MÉDICINALES. 489 


que nous puissions l’affirmer complétement, nous croyons que c’est avec son suc que 
les sauvages empoisonnent leurs flèches, dont les blessures ne déterminent que (rès- 
rarement la mort, bien qu’elles occasionnent souvent des accidents sérieux d’empoison- 
nement. La réputation comme puissance {oxique dont jouit cet arbre nous a paru très- 
exagérée, et on peut, contrairement à ce qui a été affirmé, toucher impunément son sue, 
et même vivre près de son ombrage ; car nous en avons plusieurs au milieu de villages 
annamiles. Tout ce que l’on a dit, sur la fameuse vallée de la mort à l’île de Java, où péris- 
sent tous ceux qui y séjournent, et dont le sol serait couvert d’ossements d'hommes el 
d'animaux, est une pure invention. L’ombrage de cet arbre n’est pas plus dangereux que 
celui du fameux mancenillier. 

Ruta angustifolia, Pers. — Celte espèce de rue n'est pas indigène en Indo-Chine, 
partout elle est cultivée dans les jardins ou plus souvent dans des pols, pour être employée 
en médecine comme emménagogue el aborlif. 

Dichroa febrifuga, Lou. — Ce bel arbrisseau aux fleurs bleues croit sur le bord des 
torrents des montagnes du Laos supérieur et du sud de la Chine. D’après Loureiro, ses 
feuilles et ses racines seraient douées de propriétés fébrifuges contre les fièvres tierces et 
quartes rebelles. Nos renseignements recueillis près des habitants des régions où il croît,ne 
justifient aucunement celte assertion ; nous croyons que c’est une de ces nombreuses plan- 
tes fébrifuges qui, sans être dénuées d'efficacité, ne peuventen aucune façon être comparées 
au quinquina. Au lieu donc de chercher à utiliser cette plante comme antipériodique, 
il serait bien préférable d'introduire, dans les régions montagneuses où elle croit, le quin- 
quina qui y trouverait les conditions Les plus favorables à sa propagation. Ce serait assuré- 
ment rendre un immense service aux populations ; car toutes souffrent beaucoup de la 
maladie des marais, tellement que le nombre des habitants, malgré la fertilité du sol, n°y 
augmente pas et qu'elle a été jusqu'ici, le plus grand obstacle au peuplement de ces 
contrées par le trop-plein de la population chinoise. 

Croton tiglium, L. — Cet arbrisseau aux graines si puissamment purgalives est très- 
rare en Indo-Chine. C’est à peine si dans toute la vallée du Mékong nous avons pu en 
compter dix sujets cultivés dans les jardins. C’est pour les usages médicinaux que les indi- 
gènes de l'Indo-Chine cultivent cet arbrisseau. Les pharmaciens chinois extraient l'huile 
que renferment ces graines et l’emploient à pelite dose comme purgatif et emménagogue. 

Garcinia cambodqia, Desr. — Quoique nous ayons traversé Le Cambodge qu'on donne 
comme la patrie du gultier, nous n’avons,pu l’observer. D’après les renseignements que 
nous avons recueillis, il croitrait dans la partie nord-ouest de ce royaume qui confine à 
la province siamoise de Korat. Dans cette région, on le trouve dans les forêts qui couvrent 
les plateaux, où les habitants vont l’exploiter. Ce gultier appartient-il au genre Garcia, 
comme le pensaient les auteurs anciens, ou au genre Xanfhochymus — qui a des fleurs 
pentamères — comme le veulent certains auteurs modernes? Nous l’ignorons. En nous 
basant sur ce désaccord des auteurs et sur ce que la plupart des Garcinia laissent écouler 
une gomme-résine, nous supposons que la gomme-gulte pourrait bien être fournie par 


plusieurs espèces d'arbres. 
fi, 62 


490 AGRICULTURE ET HORTICULTURE. 


Cassia jistula, L. (vulgairement : canéficier). — Cet arbre, qui pourrait bien n'être 
que naluralisé dans le Laos, est parfois cultivé près des villages du centre de ce pays. 
Ses longs fruits, connus sous le nom de casse, parfois utilisés par Les habitants de ce pays, 
sont en grande partie exportés pour la Chine où cet arbre serait cultivé dans quelques 
endroits, d’après divers renseignements, mais où nous ne l’avons pas rencontré. La pulpe 
contenue dans les gousses que nous avons recueillies au Laos, est très-purgative, comme 
nous avons pu le vérifier sur nous-même, el est bien plus énergique que celle des casses 
qu'on trouve ordinairement en Europe. 

Rheum palmatum, L. — Le point le plus sud où on trouve la rhubarbe est la mon- 
lagne de Likiang, haute de 5,000 mètres au moins el située par le 27° degré de latitude 
environ. Sur cette montagne ou plulôt ce pic avoisinant le Thibet que nous avons aperçu, 
mais que nous n'avons pu atteindre par suite des difficultés que nous avons rencontrées 
chez les révoltés musulmans, elle eroiît près de la limite des neiges éternelles. Est-ce, 
comme on le prétendait autrefois, le Rhewm palmalum, ou, comme on le pense maintenant, 
une espèce à feuilles de même forme mais beaucoup plus grande, qui produit la racine 
qu’on exporte de ce point et de beaucoup d’autres situés plus au Nord ? nous l’ignorons. 

Styrax benjoin, Drya. — A notre grand regret, il nous a été impossible de voir l’ar- 
bre intéressant el encore imparfaitement connu, qui fournit le benjoin si estimé de Siam. 
Son lieu de végétation est silué, ainsi que celui de la cannelle, sur les montagnes qui 
séparent le Tong-king du Laos supérieur, vers le 19° degré de latitude. Pour récolter le 
benjoin, d’après ce qui nous a été dit, on ferait en janvier, au moment où les arbres en- 
trent en végétation, des incisions longitudinales sur la partie inférieure des troncs, en 
ayant soin de soulever l'écorce de chaque côté. A la suite de cette opération, le benjoin 
s’'écoulerait au-dessous des portions d’écorces soulevées et même à travers les incisions 
lorsque l’espace vide, laissé par le soulèvement de l’écorce, serait comblé. L’écoulement 
durerait environ deux mois; lorsqu'il serait entièrement terminé, on enlèverait le ben- 
join en détachant les portions d’écorce soulevées auxquelles il adhère. Dès qu'il est ré- 
collé, sans aulre préparation, les sauvages, qui habitent les régions où croît cet arbre, 
l’exportent en partie vers la Chine, à travers les montagnes, et en partie vers Bang-kok ; 
on le transporte dans cette ville en descendant d'abord le Se-ngum, rivière qui prend 
naissance dans les montagnes où croît cet arbre, puis en franchissant par terre la distance 
qui sépare Nong-cay de Bang-kok. La route la plus commode serait, sans aucun doute, 
celle du Mékong jusqu’à la capitale du Cambodge (Pnom-peng); mais les droits excessifs 
et arbitraires qu'on perçoit aux frontières de ce royaume s’y sont opposés jusqu'ici. Ce 
benjoin, composé en partie de grosses larmes et de blocs agglomérés, d'un blanc jaunâtre, 
encore adhérents à l'écorce, est connu dans le commerce sous le nom de benjoin amyg- 
daloïde. 

Alstonia scholaris, R. Br. — Cet arbre, si remarquable par ses feuilles el ses ra- 
meaux en verlicille, croît aux environs des villages de la moitié sud de l'Indo-Chine. Les 
indigènes ulilisent son écorce, douée d’un principe amer, dans le traitement des dys- 
pepsies, de la diarrhée, et dans la convalescence de la dyssenterie. D’après la réputation 


PLANTES MÉDICINALES. 491 


dont cette écorce jouit chez eux et dans d’autres parties de l’Asie, il y aurait lieu de l’em- 
ployer dans le traitement de ces maladies chez les Européens. 

Melaleuca cajeputi, Roxb. — Cet arbrisseau, devenant souvent arborescent avec l’âge, 
croit sur tout le littoral de la Basse-Cochinchine et même dans certains marais de l’inté- 
rieur du delta du Cambodge, où les eaux sont saumätres. Les différences de taille et de 
forme qu'il présente, suivant son âge et les différents lieux où il croit, ont fait admettre 
plusieurs espèces par les auteurs : Melaleuca minor, Sm. — Melaleuca trinervis, Hamilt. 
— Melaleuca leucodendron, Lamk. 

Nulle part ses feuilles et ses jeunes pousses ne sont soumises à la distillation, comme 
à Java et à Amboine, pour fabriquer l'huile ou essence de cajeput, qui est utilisée en mé- 
decine à l’intérieur et à l'extérieur. Il serait à souhaiter que les indigènes, qui savent 
tous distiller le riz, aient l’idée de soumettre ces feuilles à la même opération pour en ex- 
traire l'essence qu’elles contiennent. Ce serait le moyen de tirer parti des grandes forêts 
de Melaleuca qui se trouvent en Cochinchine. 

Camphora officinarum, Nees (Laurus camphora, L.). — Le camphrier, si commun en 
Chine, ne s’est trouvé cependant sur aucun des points de la route que nous avons parcou- 
rue à travers le Yunnan et le Se-(chouen. Le climat de ces provinces est trop sec générale- 
ment pour convenir à cel arbre. 

Amomum, L. — Nous avons trouvé quatre espèces de cardamome croissant dans les 
forêts de l’Indo-Chine. En tête, comme étant le plus estimé, se place l'Amomum villo- 
sum, Lou., remarquable par ses fruits en épis serrés, couverts de poils grisätres. qu’on 
rencontre au Cambodge, sur les hautes montagnes. Les trois autres qu’on trouve dans le 
Laos supérieur el même dans le sud de la Chine, quoique recueillies avec soin, sont 
bien moins appréciées. Tous ces cardamomes croissent à l'ombre des arbres, dans les lieux 
frais des montagnes. Aucun n’est cultivé. Dans les pharmacies chinoises, on trouve 
plusieurs autres espèces de cardamomes provenant des mêmes pays el servant comme 
elles en pharmacie et à parfumer certains aliments, maise Iles appartiennent aux genres : 
Eletaria, Rheed. — Alpinia, L. — Hellenia, Wild. 


Ici se termine la partie pratique et utile de l’histoire des plantes indo-chinoises ; il 
nous reste maintenant à trailer le côté scientifique, en un mot la botanique pure de 
l’Indo-Chine. Ce travail considérable, qui exige de grandes et patientes recherches et des 
condilions qui nous ont fait défaut jusqu'à présent, sera traité par nous en collabora- 
boralion avec M. Pierre, directeur du Jardin botanique de Saigon, à son retour d’un 
grand voyage dans le Tong-king et le sud de la Chine, qu’il entreprend en ce moment 
dans le but d'accroître et de compléter nos collections. En joignant ses matériaux aux 
nôtres, nous nous proposons de publier la Flore de l’Indo-Chine. Afin qu'on juge de la 
richesse de la Flore de cette partie du monde, nous dirons qu'elle ne possède pas moins 
de 8,000 espèces de plantes, sur lesquelles 6,000 sont déjà recueillies tant par nous que 
par M. Pierre. 


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CARTE BOTANIQUE 
d'une partie de 
L'INDO CHINE 


dressée par 


le Docteur C.THOREL 


l'antie tie en vert :_ Climat tropical 

Pi 74 ” en r'ouge:-Cimat mixte, tropical 
dans Les vallées profèndes tempéré sur Les 
MONLAGNeES 


3 7, en, jaune: rat te mpire à roeple 
dans quelques vallées. 

k Zimites nord et sud, du Teck’ 

5 Linie nord des Diplerocarpus. 

6 Région ow se recolte Le Benjoin. 

7 ’ ” n. La cannelle de (lune 

8 2 » La Comme gutte: 

9 Montagne 0714 CEE croi la var damome 


10 n 2 » la Rhubarbe. 
11 Zone der Pire 


12 Montagnes et monticules habités par les fauDages, 

œuverts de terre argüeuse rouge: (T6: pour. 

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VOCABULATRES INDO-CHINOIS 


MM. DOUDART DE LAGRÉE ET FRANCIS GARNIER 


" 


VOCABULAIRES INDO-CHINOIS 


PAR 


MM. DOUDART DE LAGRÉE ET FRANCIS GARNIER 


INTRODUCTION 


Quatre langues principales dominent dans la vallée du Cambodge et la partie orien- 
tale de lIndo-Chine; lAnnamite, le Chinois, le Laotien et le Cambodgien. Les deux 
premières ont été l’objet de travaux considérables et accessibles aujourd’hui à la science 
européenne. Le Laotien, dont le Commandant de Lagrée avait fait une étude spéciale, et 
dont on diseutait encore avant le voyage de la Commission française le plus ou moins d’af- 
finité avee le Siamois est identique à cette dernière langue. En comparant le dictionnaire 
laotien fait par M. de Lagrée, avec le grand travail de Mgr Pallegoix sur le Siamois, 
je n'ai trouvé que des différences résultant surtout du système d'orthographe adopté. 
Telles expressions sont employées de préférence au Laos et inusitées à Siam et récipro- 
quement ; mais ces différences ne me semblent pas suffisantes pour constituer plusieurs 
dialectes dans toute l’étendue du territoire occupé par la race Thaï. Un Siamois se fera 
comprendre sans peine partout où l’on parle Lu ou Laotien et réciproquement ; nous en 
avons eu des preuves fréquentes pendant tout notre voyage. 

Le Cambodgien appartient à une famille de langues absolument différente des trois 
précédentes. Si son importance politique et commerciale est aujourd’hui à peu près nulle, 
son importance historique et philologique est considérable. Il est profondément re- 
grettable que la mort soit venue interrompre les travaux si assidus et si consciencieux de 
M. Janneau sur cette langue, qui a laissé une profonde empreinte sur la plupart des 
dialectes des tribus sauvages de l’intérieur de la péninsule. Il serait du plus grand intérêt 
que ces travaux fussent continués et qu’un dictionnaire cambodgien püt être enfin publié. 

Je donne en tête des vocabulaires qui suivent, un vocabulaire cambodgien dont les élé- 
ments ont élé tirés des livres de M. Janneau et de mes propres notes. Il servira, ainsi que les 
mots annamites correspondants, qui m'ont été fourmis par M. Luro, de terme de compa- 


496 VOCABULAIRES INDO-CHINOIS. 


raison pour les dialectes des tribus sauvages. Ceux de ces dialectes qui ont été recueillis 
par M. de Lagrée sont marqués d’un astérisque. À l'exception des mots annamites qui 
sont écrits dans le système d'orthographe des missionnaires !, tous les vocabulaires 
sont écrits dans le système d'orthographe déjà exposé page 11-12 de ce volume. J’ajoute- 
rai seulement que l’x suivie d’une 4 à le son du ? espagnol ou du g», dans le mot français 
gagner. Le ch devant l’a, lo ou le suivi d’une voyelle, revêt un son intermédiaire entre 
kr et ti. Ex. : Chao doit être prononcé : Tsiao, Chams, se prononce 7siams, el Cheo, fseo. 

On peut reconnaitre dans les transcriptions de mots cambodgiens données par lambas- 
sadeur chinois du x siècle ?, la plupart des mots cambodgiens modernes. Il y a cepen- 
dant des mots tels que Sin-nou, barque, Phi-lan, canot, quine trouvent d’équivalent dans 
aucune des langues dont nous donnons des spécimens et d’autres mots qui semblent con- 
sacrer une forme disparue, que l’on ne retrouve que dans les dialectes des tribus sau- 
vages. Ainsi Pou-se, cheval, parait venir plutôt de Pe-se, qui a la même signilicalion en 
slieng, que de se cheval, en cambodgien. 

Le mot Bra qui a le sens assez vague de divinité dans le stieng et l’ancien cambod- 
gien, n'est sans doute que l'équivalent du mot Pre, qui précède le nom de Bouddha, et 
des grands personnages en cambodgien et qui vient du sanserit Phrabout, « saint, divin, 
sacré ». 

Les dialectes des races sauvages de l’Indo-Chine offrent peu de fixité, et dans la même 
tribu, 1l n’est pas rare de trouver, à peu de distance, des variantes nombreuses pour le 
même mot. Il en est loujours ainsi pour des langues que ne fixe aucune littérature et 
dont la plupart ne s’écrivent pas. Aussi m'a-t-il paru utile de désigner la localité où avait 
été noté le vocabulaire. Dans le tableau n° 1, on trouvera un exemple des variations dont 
je viens de parler. Les mots placés à gauche, dans la colonne relative aux Soué, sont ceux 
qui ont été donnés par les Soué de Saravan ; ceux qui sont à droite appartiennent aux Soué 
de Muong P hong. Dans le tableau n° 11, la même division a été établie pour la langue 
Lémet; la colonne de gauche renferme les mots particuliers aux Lemet de Luang Prabang, 
et la colonne de droite, ceux qui sont usités par les Lemet de Pak Ta. Les Does parlent une 
langue trop voisine de celle des Khmous et surtout de celle des Lemet pour qu'il m'ait 
paru utile d’en donner un vocabulaire à part. Je me contenterai de citer leurs neuf 
premiers nombres qui diffèrent beaucoup des mots employés dans toutes les langues voi- 
sines: Ati, lahan, doc, pon, pan, les, ares, conti, sitim. 

1 DR 5 eu 7 8 9 
Peut-être e üt-il été curieux, comme je l’ai fait pour les Soué et pour les Lemet, d’in- 
diquer quelques variantes du langage Man-lse : car dans un rayon de trente ou quarante 
lieues, les tribus de cette famille m'ont quelquefois donné jusqu’à trois ou quatre mots 
pour désigner le même objet, mais je n’ai pas cru que ce fût indispensable. 
Francis GARNIER. 
! Avec cette exception que le d conserve sa valeur habituelle, au lieu d’avoir ce son mouillé que M. Luro, 


suivant en cela l'exemple du père Legrand de la Liraye, représente par 4. 
? Rémusat, Description du royaume du Cambodge, p. 62. 


IL. 


TABLEAUX : 


C3 


VOCABULAIRES DU 


TABLEAU 


| s 3 
Grand'mbere 


PE a sas ronengane 
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TEMp IEEE EEE _ 
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Montagne....... or 
Forêt 


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EMENCCOTLLI MEET ERES 
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CREED c00000 0 
Pelif=fis. 
AG 00000 00 


CAMBODGIEN 
TE nnaee NS 
MODERNE ANCIEN 
» bra 
neac ta nac {a 
areak 
kmoi (%£é. les morts) kamoiï 
vat bra sarok 
mek » 
prea atit prea atil 
thngay 
khe sum 
phkai » 
tchnam nhum 
khe kang 
thngay » 
youp » 
dey » 
touc trak 
phlung bleo 
acos » 
sremot » 
phnôm nong 
prey bri 
tonly krong 
khial » 
popok » 
phlieng » 
kedau » 
rongeer » 
phkor, rontea » 
menus rasum 
nang » 
Kon » 
apouk ou 
meday pe 
kon pros ken 
kon srey De 
bong » 
pon » 
bong ou pon srey » 
chi ta ta 
chi don nang 
chao pros chao 
phdey » 
prepon » 


SAÏRE 


» 
nac ta 


kamoiï 
tong nak ta 
» 
tne 


pieng 


rasum 


» 

) 
kon 
min 
ken 

» 

chaling 
mot 

) 

ta 
don 
saling 

» 

» 


XONG 


rasum 


cham kam 
» 
koun 
ming 
ken 
» 
taling 
mot 
» 
namong 
nang kun 
xou 


STIENG 


» 
trok (paradis) 
nar 


ke: 


selmenh 
snam 


beni (seus génér..) 
bou clao 
dou our 
con clao 
mom 
mey 
D) 
con dou our 
iem 
oh 
) 
caou (aïeul) 
» 
kon sao 


BANAR 


plenh 
mat mar 


kei 


sunglong 
sanam 
keï 
nar 
mang 
) 
dak 
ounh 
» 
dexi 
kong 
bri 


to ngiet 
torok 


bo ngai (g) 


drang co, kodrang 
drakan, kodri 


» 
ba 
me 
todam 
adrou 
nhong da 
oh 


mo mai da oh 


bok 
ya 
chao 


N° 1 


SUD DE L'INDO-CHINE 


CEDANG 


kei 


| hung long 


» 


menoui(q) 
kedrang 
kedri 


HUEI * 


(ATTOPEU) 


nac Clao 


nac tre 

‘kouon 
bop 
mai 


CAT 


(ATTOPEU) 


» 
matnay 


cai 


boun calo 


boun keti 
con 
ba 
hou 


SOUC * 


(ATTOPEU) 


SOUE * 


(SARAVAN-PHONG) 


mat menang 


kaosai 


cothe 
do 
ouidj 
» 
» 
ko 
crouong 
tonle 
» 
ma 
khtô | 
chngeat | 


» 


kato 
sngeat 


countoua | pontoue 


khpai 
con 
mpou | 
mpe ! 


apou 
aneou 


) 
kheja 
khndel 


» 


HIN * 


(SARAVAN) 


metaang 


cachai 


to 
achoc 


PROONS 


kai 


ANNAMITE 


ông tro 'i, but 
thân 


ma qui 
chüa, nhà tho’ 
trù’i | 
m'ittro’i, matnbu't | 


mat trang, nguyêt 
ngo et 
sa0 
nam 
thäng, ngoat 
ngày 
dèm 
dà’t, dia, 
nu’6’c, thuy 
lua 
khr 
bièn 
nui 
rù ng 
sông 
g10 
my 
mua 
nong 
lanh 
sù'm ran 


ngu’ù’i 
nu’ 
con 
cha 
me 
con trai 
con gäi 
anh | 
em | 
chi | 
Ong nôi, ông ngoai | 
Bà nôi, Bà ngoai | 
(chäu, neveu) 
chèng 
VO 


thân 


900 


VOCABULAIRES DU SUD DE L’'INDO-CHINE. 


CGAMBODGIEN 
Re SAMRE XONG STIENG BANAR 
MODERNE. ANCIEN. 
MÉTRO ne st kbal Los prebane Los bok keul 
Brass . day » » » kon ti kon ti 
OO ER TORERIURE smang cheung D » » choung pinh 
PCR RE NAME cheung sang ) » choung giong giong, cheun 
1 PDO RASE day ti » ti kon ti | ti 
DOG RE NERO meream day chart » » englac soodrang ti(branche 
de la main) 
FIQURELS IR TEE mouc » » » » » 
OPERA E phnak » » mat pe mat mat 
BOUChE PERMANENTE mal » » » niem bor 
PSS EE en chremos » » » tremouh mouh 
ORA sc osaoaesovece trachiek ) » » tour dou 
(CEE: dû 5 sovenao sac souk » » tioc x0C 
CŒUTSINPNIEECEREEES » ) » ) » ple moui (fruit du sem) 
Ventre RER po » » » kondoul, poul klac 
JUDITE SEL SERRE RE » » » » » » 
OS ET eee chaang » » khong » » 
DOTE, 365 :po000c tchu, choumnga » » » » » 
IRD oo eoaooce » Ù ) » n xa 
DUPARE AM OQNE bee € amnar Û » ù » chot 
HOME b 90 à 00 80080 » » | » » » phiel 
| 
MAC » » » n kouang tono 
eme LEP EEE » » | » » bang akan 
CRIER RATER tchké tcho |. » tcho pe sou ko, cho 
CROSS NRA tchmar » » ) pe meo meo 
BOUT REA ER ÉSEEE kou » kou » pe gaou romo 
PS 0002000 € krebey | Ù | krapo kapo pe krepou kapo 
CO 566 an cata c se SC | » » pe se osse 
PROCHES SRE cherouc » x. » » nhoung, kiour 
INC CT ER RIRE PRE pros » » » pe gioum iouey 
pe zil 
UPDATE à 10 an où à domrey knaï knaï kanaï pe roei roei 
TURN T : khla ) raouay lououay pe khla khla 
RANOCEROS EE romeas » » rama » » 
RSS GS don ne à condor kon » » pe keneg kone 
Caïman, crocodile. …. crepeu » » korr crebu biahengs 
Ce s 58 aoogo0c sat » » chiem pe chum chim 
CHE 00005000 tea » » da pe da a da 
PGO 66 800000 ; män lek » lek peier ir 
SERA © 6 200 pos » » » bi bi 
POISSON EE EL trey » » mei ca Ca 
Œuf. 02.000 09 06 db » » ) )» » )» 
ANORCE EN ERRET dom temni ngit temne tom long 
LB OISE EENEREE » | » » » tomtchu » | 
Compos css cocoooe » | » | » » » » 
IEP o con o0pc0000 0 phnhi | » | » pang ne kao » 
HEDEE  0 oo 000000. slac | » | » » la la 
HRUUEERE RER phle | D | » phle nich » » 
CAES LOIRET » | Û » » » | 
I ÉGOEPES 4 8 000000 - chec » | D » prit » 
| Jiz (non décortiqué). sro » | » » » ba : 
oo 00 0080800 » » » » » » 
Riz (décortiqué)..... angca plong | b » » phe 
| 


VOCABULAIRES DU SUD DE L’INDO-CHINE 


)01 


CEDANG 


HUEI * 


(ATTOPEU) 


CAT * 


(ATTOPEU) 


SOUC * 


(ATTOPEU) 


» 
cho 
» 
croc 
khpeu 
tche 
chourou 


yer 
» 
threu 


SOUE 


(SARAVAN-PHONG) 


sankal 
» 


ti (malade) 


nrouey 


ca 


tea 

| ntoué 
kanai 

| aka 
ntrel 


» 


caalong (à bräler) 


touong 
piel 
» 

h 
ntrang 
preal 
rangCao 
chrong 
doi ? 


HN * 


SARAVAN 
( ) 


ntrouy 
» 


pe 


» 


PROONS 


toui 
) 
)) 
young 
ti 


y 


» 
mouk 
pouar 


ANNAMITE 


dàù 
canh tày 
ông chon 

chon 

tày 
ngôn {ay 


mat, 
con mal 
miêng 
mui 
tai 
LOe 
long 
bung 
dza 


xu'o’ng 


nam. {rai 


cäi, nù’, gäi 


hu’o’u, nai 


voi 
cop 
tây 
chuôt 
shàu 


Cay 
CU 
dzua 

ông 
là 
trai 
shäp 
chuôi 
lua 
tre 
840 


(xs 


D£ VOCABULAIRES DU SUD DE L’INDO-CHINE. 


CAMBODGIEN 
EE 

MODERNE ANCIEN 
CRC sos os000 10 » » 
(RE Gi 008000 À bay plong 
TAEPOs vous ose sre » 
COLOR AR RN  RRRN krebas » 
BEL RS EEE RATES » » 
ODA CARRE RE ETES thnam » 
APECHRE SLR CRT PAR TES » » 
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PART RE T di EE DE dek » 

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ROM RTE » » 
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SO ttes see ambel » 
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POTÉC I ET RL » » 
CORTE ARE » » 
VOTES s6000a0000n0 role » 
COMM o00a80e 000 kombet » 
BEN 0 20000000 ü ao » 
(CIITAT 00 08000000 0 mouok » 
SONRPS 000006000086 sbek cheung » 
PBORQUE EE ECO touk » 
LÉOSTS RER à bontcay, nocor » 
POS ocscosst ace phoum » 
ITS RAIDE à à 6 0 00 à srok » 
ROUEN ES ER khnol » 
IAE 800 aoccocva reas » 
DÉHRAROANE as DAS » * » 
PRÉITE NRSNRESE neac bouos nac yung 
louk sang 

SO eo coavaonvgac tahean » 
UTC RER ER chaukram » 
(CPGE 00000 080 000 thom tac 
AA pa no eo toch keitch 
LONGER RES » » 
BON RE RE laa » 
IRD 5000000800 chrou » 
WG S 08 aoa0an0ea kloch » 
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MAP 0 0 porouosuva » » 
HAS 400 povvoc » gnorr 
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s 


SAURE 


STIENG 


BANAR 


» 
» 
Ihabar 


lang, liem 
» 
koni 


VOCABULAIRES DU SUD DE L’INDO-CHINE. 


503 


GEDANG 


HUEI * 


(ATTOPEU) 


yang 
prang 


CAT * 


(ATTOPEU) 


D 


SOUC * 


(ATTOPEU) 


SOUE * 


(SARAVAN-PHONG) 


out 


palea (médecine) 


D] 
» 
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tamao 
» 


Chpon 


couha 
yeng 
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» 


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ket 
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» 
trou 


HN * 


(SARAVAN) 


yeng 
pra 
» 


PROONS ANNAMITE 
» com 
» ruông 
» bôns 
» trau 
» thuô'c 
» cau 
» lua 
» ru’o°u 
» vu’on 
» dä 
» n20C 
» shät 
D dûng 

À 
» chi 
» vàng 
» bac 
» mu 
» nhà 
» xe 
» dzao 
» 40 
» nôn 
D) giày 
» ghe 
h thành 
» lèns 
» XU 
du'ong 
dzàn 
banana 
» linh 
» xét 
» lon 
» nhô 
dzài 
» tôt 
shâu 
» ac, xau 
» lontuôûi 
» nhô,tuûi 
» do 
» trang 
» den 


004 VOCABULAIRES DU SUD DE L’'INDO-CHINE. 
| 
CAMBODGIEN 
| ne SAMRE XONG STIENG BANAR 
MODERNE ANCIEN | 
| 
| Des 20 RS | 
LL Boss sotordnse TOS » » » » eri 
| l'IEP, 204550 000 si hob » hob sa (mächer) tcha (por) 
| soum pien | 
BOIRE RER RER EE phak » » » nlouet et 
| Dormir … LU dek tekla » teklan bou tep 
INTER EEE » dang Ù lang sa0 bo 
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IMIPECOU CREER eee D » » » » teung 
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DRAONNCEERAEENE » » » » » atai, anbha 
Oérssose eoccseit cho » » » Ù ngoua, chiou 
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AUCTÉRR RER EEE tou » cheo chea han nam 
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Le AMEMREPS 3 0 560 » » » » » » 
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VOCABULAIRES DU SUD DE L’'INDO-CHINE. 


505 


CEDANG 


HUEI * 


(ATTOPEU). 


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(ATTOPEU). 


SOUC * 


(ATTOPEU). 


SOUE ” 


(SARAVAN-PHONG). 


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» 
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sè 
so 
seng 
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Il. 


| 
HIN * 
PROONS ANNAMITE 
SARAVAN). 
» » sûng 
» tching pouar an | 
| 
» » uong | 
» » no | 
» tai thà'y 
» » nghe 
» mang nôi, la 
» » quên 
» » nh6? 
» » yêu, thu’o’ng 
» » SO? 
» » thô'i, rûi | 
» » ghè't 
» » hièu 
» » bièu 
» » chiu, vu’ng 
» » ban 
» » mua 
» di, chèo (ramer) 
n pranau vè 
» » di 
» » cu’o’i 
» » kh6c 
» cho 
» » l'y, câm 
kèu 
» » te 
» » bé 
» » dänh,dàm 
» » chi 
» » chèt 
» » àm 
» » mo’, vàao 
» » xin 
» » lên 
» » xu0ng 
. » bay gid’ 
» » luôn 
» » lâäu 
» » XUa 
» dok hôm qua 
» tang dèn mAy 
» » không 
» » nhièu 
» » gân 
» » Xa 
» » dày 
» » dû 
=") 


64 


906 VOCABULAIRES DU SUD DE L’INDO-CHINE. 
CAMBODGIEN 
| a SAMRE XONG STIENG BANAR 
MODERNE. ANCIEN. 

(CHE E TERRE eu » » » » » 

AUDE ac UE MORTE pnoum » » ko pou ouch 
IMIROUTQUON PEER PEEECE OY » » topimo » ke kia 
MES EGEUETEREEET CRE reu {a (ap. le verbe) | laï(ap.leverbe) 
| 

(DRE RER À à br » moua y moe moi mou oi moin ming 

(DÉUHRS Se Gene o saute » bar pea pra bar bar 

TTOIS RES EEEe » peh pe pe pey peng 

QUOLTEN AE EEE » pon pon pôn pouôn pouûn 

CENT ERIC » pram pram pram pram podam 

SR SANS me re » krong kadon dam prao totrou 

SODE RER » groul kanoul kanoul po topo 

lERTiS cos véoodacene ) kati katai kati pam tongam 

INC és Sion coment » kansar katea kasa sen to xin 
AUDI TERRE EE » ouai rai rai giemat ming jit 
IMVIONZOES REP Ee » ouai moui » » giemat ming jit moin 

ou(avec) moui 

Vingt. ) barkse » » bargiet bar jit jiet 

Coran » meschous ) » die (un) riang ming horieng 
MEME RERr EEE CET » moi pan » » ban robau 
I UE HO sacs 000e00 » » » » meum mouing Jit robau 


Cr GA, à © 5000000 


) 


» 


» 


VOCABULAIRES DU SUD DE L’INDO-CHINE. 


CEDANG 


HUEI * 


(ATTOPEU) 


moui 
bar 
pe 
pouôn 
soung 
treou 
pha 
tam 
kin 
chit 
chit moui 


barchit 
moui bani 


CAT * 


(ATTOPEU) 


SOUC ” 


(ATTOPEU) 


moui 
bar 
pe 
pouon 
soung 
troou 
pho 
tam 
kin 
chit 
chit moui 


barchit 
moui bam 


SOUE * 


(SARAVAN-PHONG) 


» 
» 
koun ana ? | 


moue 
bar 
pei 
pouon 
soung 
thpat 
thpol 
thkol 
thke 
mouchit 
mouchit moui 


barchit 
mokse 


HIN * 


(SARAVAN) 


moui 
bar 
pe 
pouûn 
choung 
pat 
thpol 
thkol 
thkie 
ndjit 
ndjit moui 


bardjit 
mo clam 


PROONS 


ANNAMITE 


dza 
không 

shäo 
chäng 


môt 
haiï 
ba 
bôn 
näm 
säu 
bay 
tam 
chin 
mu’o’i 
muoi mot 


hai mu’oi 
mot tram 
mot ngàn 
mot muûn 
mot veo 


VOCABULAIRES DU 


TABLEAU 


UN CERN 
Etoile. 


ANR 00 20 0 


Mois. 


EEE SS 


Forét.. 
Lee En 
Ven CAN 
NOM ooos 
PROS 56 0.4 0 0 
Chemie ss 
PROS ao 0 + o00 
Tonnerre... 
ÆEclawr. 


Oaess 0400. 


HonniceReeee 
Femme 
Enfant 
RTC TEE 


frère aîné. . 
Frère cadet... 


| BB 0 oo 0 


JB HOT 00 0 0 2 
Neveu. . 


| Grand-père: . | 


Grard'mère.…. 
Petit-fils. ..... 
Oncle 


S0 * 


(LAKON) 


D 
melong 
menang 
mechiai 
mandor 

ngmo 
tjai 
) 


aniou 0) | 
[koh 


krum 
melong 
phou xau 
krum ema 


hikong 
khpai 
côûn 
mpa 
mpi 
kon rakong 
CON rapai 
XemM sai 


euh 
nai 
cheo 


NANHANG* 
(SANG KON) 


vrës KEMARAT 


do 


chroung 
tonly 


| 
| 
| 


M1* 


(XIENG CANG) 


) 

)) 
mat pri 
mong 
selmenh 


kemro 


. Cham kun 


LL] 
yong 
mit 
con 
») 

JO 
poung 
ele 
compra 


KHMOUS * 


(LUANG PRABANG 


mal 
pout 
matpri 
mong 
salmenh 


posouom 
yopa 
petté 
hom 


phloua 


rna 
tenkeuan 
mpri 
hom nam 
okour 
nkerr 
) 
ouar 
cat 


chompro 
chom keun 
) 
yong 
ya 
con neum 
A] 
tai 
hem 
khlé 
compra 
nché 
ta 
va 
teng 
ao 
}) 


lo 
ompong 
li 


LEMET * 


= 


==) 


XIENG KHONG PAK TA 


khpou 
mplinh 
ngay pri 
khe 
cremenh 


nompa hepo 
dissem tessem 
ketté 
hom 
ngal 
» 
moi 
ntiré 
keun hom 
Ha 
pehem 
) 
pouc 
tap 


selong lé 
pri 
hom lé 


ahounh 
a li 


con me 
con peun 
» 
ounh 
ni 
con ounh 
con ni 


ne 
con me 

con peun 
hec 
10 
khmé 
khpon 

CONSO - 
ai ta keun 
, nha yakeun 


houinh 
nl 


ounh pleo 
pi peya 
takeun 


ahi - 
RO TN) 
ü 


MOU-TSE * 


(MUONG LIM: 


choha » 
mo. ountoung na 
moni noma 
hapa bala 
meukeu a ghou 
muloko 
mupheu 
migheu mitha 
ika ouchou 
ami | : n mita 
khna » 
ko kada 
apeuko toma 
ika heu |ouchouyoheu 
mouho | » 
mono ountoung plo 
» » 
hoa YO sassaya 
ka yo caya 
ho ka ka ji ya 
ya mi ha la mi nou 
» » 
apa ada 
ame ama 
» ya yo 
ya à nhi 
ho vi à you 
ho noi a mhi 
ho pa ka ti ya 
ho mi ma mi da 
» apho 
» aphi 
» » 
oto 
okhou oudou 
lakha ala 


KHOS * 


(PALEO) 


NON 


NORD DE L'INDO-CHINE 


KOUYS * 


(SIEMLAP) 


hoka 
ya mi 
» 
apa 
aye 
na ya 
» 
avi 
anbha 
nga phong 
nga mi 


LOLOS * 


(YUEN-KIANG) 


» 
ano 
atso 

obomo 

) 


miko 
idjé 
mato 


» 


boté 


lamo 
missé 
)) 
akoké 
)) 
» 


{samo 


nkeu 


KATO * 


(YUEN-KIANG) 


)) 
neki 
nimo 
polo 
») 


metso 
atso 


mitso 


» 
kata 


chemo 
tsachi 
ÿ 
ES 
O&0O 
aloualou 
also atso 


thanzeu 
Jami 
» 


tchouamo 


houke 


(] 


HO-NHI” . 


(YUEN-KIANG) 


» 
ountoung 
nouma 
basa 
» 


metsa 
hotcho 


midsa 


dema 
kata 


» 
tchali 
) 


tou 
houcakaheum 


kou 
yomi 
» 
apa 
ama 
yado 


OSama 


abou 


houtou 
) 


Y-KIA 


(MA-CHANG) 


)) 
D] 
cato 


(prendre du feu) 


MIN-KIA 


(TA-1Y) 


MAN-TSE 


(JEN-0 KAY) 


to 


niesseu 
loubo 
tchouho 


nhe 
itcheu 


mto 


lou 


najimo 
to 
na 


{so 
djo 


draptzeu 
amztseu 
» 
ata 
ama 
dzeu 
am 
1) 


» 


MIAO-TSE 
(LOXG-R1) 


NORD DU YUN-NAN 


tchan to 
ka ly 


heou tao 


na lé 


isy né 
po 
to 


{sy 
na 


ku 
Ly 


10 VOCABULAIRES DU NORD DE L’'INDO-CHINE. 
\ \ * # 
so* |NANEANG"| jy: RHMOUS * LEE MOU-TSE * | KHOS 
, (SANG KON) AR 
(LAKON) Lo (XIENG CANG) | (LUANG PRABANG) (MUONG LIM) (PALEO) 
PRÈS KEMARAT XIENG KHONG| PAK TA 
Jambe..…. » » » mphlou chelou | yang pro akou 
RER TEN » » » nchông chieng kepou sen0 
Main » » » » » » » 
Doigt » » » sang te tiseng | chicoul lano laneu 
Dent ere » » » » » » » 
CHA S 8000800 » » » mot ngai mechi mianu 
Boucher » » » thno mom - mokho melou 
NE aotado mat » » » mo mous nakho name 
CURE » » » » tem 
Oreille... » » » remeui yoc napho nabo 
Gheveurireere » » » khleu ol kinh dseké chekou 
IDORDEEEPEEE » » » coul tremouinh mouc keup patseu memo 
Ventre etre » » ” loui khtoul vophi ouma 
OST » » » cheang siengang omoucou 
Peau “ » » » mpour nkou oghecou chakou 
IDANQUE ER » » » ntac » hathé mela 
Droite eee » » » ham kaoué lacha ama 
Gaucher » » » oué kasam Jamé acha 
Malade" tit » » chou s0 | ml na ‘nayo 
Chien eee achor achor SO sO so phou akou 
Ca daess da » » Ù meo meo mimi ami 
BŒUIERR EEE ntro takeng mpo mpo mpou ngou moné 
Buffle triac tharia tharat thalat thrac kouéca anho 
CREVALIE NN ché ache brang mprang mrang mgou mong 
PORC CES alic ali suhong suhong lit li oua ala 
CErf MERE » » » tejac kehac pos koutseu anho 
Eléphant.. .….. thiang achang sang sechang kesang ho 
IPS 5 one » » » revai revai la kala 
Bhinocéros. ….. » » » ret het mehé nea 
Can arAeere ta » » pat » » » 
POULE RENE ntrouey ntoue yer yer er mouha achi 
| Poisson... ... chia tea pat ka ka nga acba 
| 
(IN MCE TER ER ntoué nhet cadong catitong ntam nga hou hahou 
CORPS to 0 0 » touong 
Bananier. .... reat preat » tout taloi pretté apo oloi 
| Bambou... .... la chrong n rahang smin ouako masa 
(BRUT » » » la sohong la ké so pa apo apa 
AVABo 0 00000 0 » calalong » tout sohong keum ké soché apo 
JPURTPS 68000 » » » rang sohong phlay ké so vi ayé 
PUB 0 og ac » » » phlé sohong phli ké ichi asi 
Bois à brûler... » » ) À che ke so mi da 
Jèiz (non décor- : 
IMAqUE) EEE » acho » ngo ngo kang cha chi checoung 
| Jiz (décortiq.). » » » rongco ngo sin cha ca chepou 
I EHES once » » » » » » » 
Cotonseeneres » » » sai ouai sabe sapho 
Etoffe. » CE » ming tong » » 
labacereeeee out out » va soyan chou yako 
SU 20400 06 » » » yang yang » » 
Pizière » » » rna na ti mi » 
Crete. rang ntrang » trahou pbor |  nhou peho n 
| Thé. » » » » » » » 
| DRE CRE » » » » » » » 
IRAUTIERR EEE » moei preng cha chou » 


VOCABULAIRES DU NORD DE L’INDO-CHINE. »11 


| 
L Ve x 
h KOUYS * LOLOS * KATO * HO-NHI* |,  Y-KIA MIN-KIA Mes (| “AGEN 
Ë (SIEMLAP) | (YUEN-ranc) | (YUEN-KranG) |  (YUEN-KIANG) (MA-CHANG) (TA=LY) (JEN-0 KAY) EE 
ë NORD DU YUN-NAN | 
| 
» » » » | » | » tixeu 
kouako go. aki okheu » » tixeu 
» leche lagni lagni » | ) lie 
) lanho lemo lamo lamo » | » litchesseu | 
» D » » » | » djeu 
mesi nisseu masi matsi » | » niesseu 
| niémo (sourcils) 
mounha nepi am € ame » » | couipeu | 
| nako moko nato name » » papi | | 
apoutchi lopa napo nabo » » nogou | 
dsake nsse tsékeu tsekou | 
metso | 
ouphi ape | heutou ouma » | ù houpé 
| | | | fl 
oghou djipe aso yougou 
ha | lope aho » | » » klo 
ladso | ajo lamo layé | » ÿ - sipa | 
lafai afe | la po | laba | » » foupa | 
na no polou | anana » Len no 
| | | 
phou {si keuou | keu » » chi 
moné méné tsami agni | » » amé 
niou ni ounhou | ounou | ) » nhi 
hocica hein minhou |  noupeu » » hounhi 
mo mo mo | » | » » mou 
oua oué oua | aya | 
che | 
| 
chemé 
meno 
» heu pe | » | » » be 
nra ye ka aha » » nga 
nga ng0z0 ngossou acha » » ngo 
| 
lahou khon ho | ho | » » | to | 
Il 
» sipe tale pala | » » sipa 
soche sitzeu sotzeu soutsou | » » | ssO 
soué » » | » | » » | vilo 
sosi si seu asseu » » + mo 
ami té su miso asi | | 
| | | 
techi tchidseu {si tche si » | » tche 
NLCHACA | tsito tsipou tchefou » ) | dzoko ; 
» » » » » | » | » kia 
| | | a kia (cuire le riz) 
sala solo salo sala » | » | solo 
» solopé po kapa | 
chou ye ya yaka » » payé 
» » » » » | » boucbheu 
te mo 
pehong 
» lokhe Japo 
» » » » » » djé 
sachou » » soutsi 


VOCABULAIRES DU NORD DE L’'INDO-CHINE. 


ne , 
NO * : : 
| so” | NANHANG M1 * KHMOUS * LEMET MOU-TSE * KHOS * 
(SANG KON) TT Pie 
(LAKON) (XIENG CANG) | (LUANG PRABANG) (MUONG LIN (PALEO) 
| PRÈS KEMARAT XIENG KHONG| PAK TA 
[Ie . 
Chanvre » pai » 
BEL LEE » » » phlé mac phlé » » 
Pierre col tamao » khlang prehou cahang apeu Û 
CRAULAEEEE » » » poun » toung » 
Penser » » » tientro rngang chou chieng 
MEUIDRERN AE » chpon » » » » » 
IMIPPIOMDCEErEE » couha » chouon leveun 10 heuchi 
IMMO EREECEEE yeng yeng » sril seke chi chu 
APTE S 05e 60 prac pra » kmoul kmoul phou plou 
ISERE EE » » » mar pelou » sadeu 
Soufre » » » mat » » mida 
Core sono chanh chai » tchmeu phsé acha acha 
O8 sovove » » » lagang phlang yeu kecheu 
JB 0 - 00 0 ptong ktong » nkerr mpoung hi-mi houkhé 
Maison tre vil dong » gang nha ye young 
ARC Eee à » » rahang ac ka ka 
BB cave à » » » kam tai katié chaheu 
ONE 00 a ee » » » senat senat » mibeu 
Couteau ee » » » » » » » 
SOUre rer » » » » simchac ato toma 
IR 0 0 6 00 8 » » » » selam ghé beu 
Veste » » » tep tong ti | tang ké akong pakong 
Pantalon. .... » » » mouar theo adiji lati 
Chapeau. o ou a ») » » » » n » 
Soulier..…. » » D » » » » 
Bonquerer » toua » tchelong tchelong ho pheu 
Colonne. -. » » » chentrang che ye koudo kodseu 
Mulla serrer » vil 
Pays, région. » » » » » ” » 
1H 6 do où » » » » » » » 
1BROSeS ace ae » » » » » » » 
RO EE » » » atnha 
Médecin. ..... » n » sohong ya » » » 
| Chef ou noble. ) » » kouan » chao koung yoba 
Long. » ntoung kouti ouang leng ù SOMME 
JDE 00 aseve » » » nchoung leng » loco 
Grand...... phout » » nam hom le houa yo houa 
Peter re koue » » né. toi petch apie yo da 
Bon s » » » leu loc 
Mauvais... » » » rai kiac 
ANCIEN EE » » » mang prim ho pi » 
Nouveau... » » » me ma | bo ho so 
ILE use No » » ) nchal yeng » > 
IBAariqucrerteee » » ÿ houat kcheum cha yo kong 
MES con » » » plia leu keum da meu 
LES 06 dos « » » » ntcheu hel couloc ma da » 
| liouge. pousao » n » » » » 
Blanchet klok » » » » » » 
| Noir... … Bus trum » » » » » » 
| Profond...... chrou 
(FRONT R EEE » ï » clom mel | mon » yo long 
IUCGRES 0 00 2 0 » » » selem » à hou pho 
| 
| Mangene-esre » » » ma som | peu ho cha cha yo 
L 


VOCABULAIRES DU NORD DE L’'INDO-CHINE. 


KOUYS * 


(SIEMLAP) 


)) 

O mea cou 
D] 
choc 
» 
cheun 
kang 
phou 
aké 


chache 
dso 
lami 
ye 
» 


0] 
| chao koung 


LOLOS * 


(YUEN-KIANG) 


ché 
louben 
kozi 
ché 
thong 

se 
cheu 
thou 
iso ye 


che 


chôuang teu | 


loko 
hé 
tsé 
djo 

baba 


» 


)) 
üitcheu 


» 
jouma 


t 


guegueu 
atsio 


chou kola 


apapai 


loué madoua | 


no 
mano 


veuleuleu 
seufang 


zozole 


KATO * 


(YUEN-KIANG) 


SiSsO 
lomo 
koui 
sé 
thong 
si 
seu 
phou 
isa yi 


SissO 
kong 
hoke 
hé ko 
ka 
matcheu 
tsoung 
» 


kache 


kako 
olong 
Dr 
10 
yeu 


aki 


» 
makouo 
mai 
mamai 


atso 
seufang 


koutzo 


HO-NH1* 


(YUEN-KIANG) 


touma 
kouli 
choung 


{si 
fou-chou 
fou chi 
sateu 


acha 
iounhi 
voukhé 
okou 
ka 


mi peu 
» 


ako 


taoua 
outsou 
» 


thou 
chounchou 


metso 


natsi 
tsimoung 


tchakeu 
moun 


paou 
didi 
moung 
ma moung 


loulili 
lifang 


aoudsa 


Y-KIA 


(MA-CHANG) 


tcho tcho 


MIN-KIA MAN-TSE 
(TA-LY) (JEN-0 KaAY) | 
» brmo 
) VAE] 
» batou 
» he 
» tcha 
» tompa 
h meto 
» odo (manteau, 
mi (veste) 

» houtzou 
» xné 
» 10 
D kotseu 
» » 
» koutsi 
» vouo 
» 1Z0 
» chamipo 
» bayipo 
» nadsOpo 
» veve 
» tidje 
ù djeu 


MIAO-TSE 
(LONG-Ki) 


NORD DU YUN-NAN 


-  tchué 


lao (kia) 


IL. 


[SE] 
© 


PCs 0 geo 
Dormir 
HORS 
Ecouter... . 
IATREPS à 5000 0 
Comprendre... 
Chercher. . ... 
Envoyer. ..... 
Craindre. 
AUIIEPo 00 ses a à 
Demander... 
Répondre... 
Vendre. ...... 
Acheter. 
Marcher... .... 
AT TPAEEREE 
CournareeRe 
Ventre 
Appeler. 
S'asseoir. .. 
SF Pa oO ac uco 
JDDRGPR 688 600 
RINCASNNERSS 
Pleurerrentnee 


| Donner. 


Prendre. 


IRD pe) MEET 
IRTUCTEERRE 


NGPOs à à o a0c 
Monter Eee 
Descendre... 
Mourir 
Construire. ... 
Se battre... 


IMERERE 0 000 0 
Lancer des flè- 


CRÉES EEE 
VO Pa 0 0 à 20 0 


IHÉREPas noooe 


Maintenant. …. 
NOR ASE 
Aujourd'hui... 
Matin... 
SP ae 000000 
Demain... .. 
Ie 600 00080 
Après - demain . 
VITCR EE RRRS 
A prés. 00 à 
PTESRR EE PE 
Bones 
Devant 


| Derrière... 
Ce cûté-cr. 


| l'e côté-là 


Non.enre. 


» 
cachang 
nham 
» 
it 
tenh 


chou 
cheng 


mi, Mai mi 
ngouat 


dji naï 
) 
(ja ngai naï 
)) 
» 
mahaï 


pan ro 


NANHANG * 


(SANG KON) 


| prÈs KEMARAT 


+ 
& 
Fe 


mout d 
cachang 
nham 


| » | 
cho | 
cheng 

» 
| ) 
retao | 
| ) 


» 
ebeun 


ngoi ka 


) | 
che 
young 


kon trou 


MI * 


(XIENG CANG) 


VOCABUÜLAIRES DU NORD DE L’INDO-CHINE. 


KHMOUS * 


(LUANG PRABANG) 


heuochom 
| si 
yengs 


» 
neung 
| SOC 
pnieu 
n'g0 
gou 
kro 
meuet 
tet 
ouet 


nai 
keui 
D) 
lien 
cout 
clai 
yam 
houon 
mot 
mac 
pan 
» 
nca 
chour 
hon 
heu 
poc nio 
pit 


ping 


pommel 
séki 
slouot 
yo bouar 
pomki 
D) 
pommuey 
nsang 
» 
le 
ntcha 
tacal 
khenni 
ta ho 
| ta ki 


| LEMET * 


= —= 


XIENG KHONG| PAK TA 


mi sang dé 
ouac ar 
crepo |  khpi 

lat 
keuss | 


ham 
manh kha 
| tei 

ouei 


hol | 


ouac 
ouor | 
D 
li 
lei 
knhas 
yam 
tica 


ti 
ti 


ess 
ouel | 
piam 
» 
| saoué 
chour 
yam 
rou 
hop 
ti 


pra 


ping 


me 
| snghé 
sachao 
| arpour 
tnghep 

» 

| moussi 
al ich 

1) 

nte 
sngay 

po 

me 


asa 
pouo 


sinmos 


MOU-TSE * 


MUONG LIM) 


icado 
dsehé 
ho pe 


» 
si 
chiai 
» 
koua 
mo 
achi lo 


ho 
oueu 
» 
kaï 
)) 
kola 
khou 
D] 
toué 
lou lo 
hgou 
ho 
ayeyé 
you 


tai 
yai 
sé 
» 
ti da 
koua 


hani 
yani 
ya cho 

» 

chopo 

» 

phaui 
goueo 

D 

ma voua 
youa 

» 

» 
choupa 
choupo 

» 


KILOS * 


(PALEO) 


» 
youca 


lama 
koui 
D] 
yo 
layo 
houa 


minons 
hounong 
pe ya no 
nako 
noucho 


yo mong kale 
dape 
» 


D) 
heu po 
koi po 


» 


VOCABULAIRES DU NORD DE L’INDO-CHINE. 


KOUYS * 


(SIEMLAP) 


youveu 
you 
doe 


| 


LOLOS ” 


(YUEN-KIANG) 


1) 
ito 
ngoua do 


talejedo 
djou 


ngouabé 
veutilé 
» 
leto 
» 
lé 


» 
naleuzako 
hounazaklé 


noulabé 
keutchelé 
deu 
sié 
» 
tiyeu 
toulé 
chi kola 
hégou 
deusé 
piho 


mousé 
ta ji 
ko né né 
moutsi 
ase 
nelouka 


mco yé 
penie 
anezo 
veu 
avita 

adoda 


ma 


KATO * 


YUEN-KIANG) | 


pi 
kale 
teu 
sébo 
» 
tala 
yayé 
chivo 
ikotso 
sahateu 
kepibo 


inhé 
yanhi 
sanana 
moupsi 
neso 
nimo 


» 
sapa 
atsé 
kheu 
akouva 
anova 


|  HO-NHI * 


(YUEN-KIANG) 


D) 
houchamou 
nhicha 


» 

si 
tahimoa 

1 


tgoui 
sré 
» 
talimoa 
kohimoa 
chia 
akoutso 
mecouba 
poudsago 


mino 
yanon 
lamana 

ho ki 
nachou 
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Y-KIA 


(NA-CHANG) 


MIN-KIA 


(TA-LY) 


MAN-TSE 


(JEN-0 KAY) 


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(LONG-KI) 


NORD DU Yux-NAN 


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tchao tchang 
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15 


16 VOCABULAIRES DU NORD DE L’'INDO-CHINE. 
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| pe RME pis RHMOUS * MOU-TSE* | KHOS* 
(LAKON) GÉRGIEON) (XIENG CANG) | (LUANG PRABANG) | (MUONG LI") (PALEO) 
| PRÈS KEMARAT XIENG KHONG| PAK TA 
| 
DRASS mouei mouei moue mou mous | mos te ma ti 
| Deux bar bar bar bar ar ni ma nhi 
HÉROS DRE pei pei pe pe lohe che lé soung 
| Quatre. ..... pouôn pouôn si pouôn poun |  pon ho le he 
CRTESEEETE soung choung ha pfouong pan nga ma nga 
ISLE Re thpat thpac oc tol tal ko ma ko 
IN ÉGsoroarte thpouol thpol chet koul poul seu ma si 
LM sac thkol thkol pet ti ta hi ma hie 
NÉ arcade thke thke kao kash tim ho ma hueu 
| Dix. mechit mouchit Sip kan kel te chi che 
IMRONZEETEE chit mouei » sip het » kel mous te chi te ma » 
VENTRE barehit » sa0 » p ni tchi » 
CENT mo clam » hoy » » te ha » 
pie ne » » pôn » » pan » 
1x MILLC.... » » meun 
Cent mille... » » sen 
Million. ..... ») ») lan 
| Empan.. : :.. » ) ) sanda sitha te tou ti to 
Goudecemeeee » » » sac soi te ya ti cha 
Brasse... ... » » » tang top te lou ti long 
Livre (poids)... » » » » pan » » 
Cinorseercee » » » ) » » » 
Annamites . 0:08 n » » » )) » » 
Laotiens. . D»: » » » » » » 


VOCABULAIRES DU NORD DE L’'INDO-CHINE. 


KOUYS * 


(SIENLAP) 


LOLOS * 


(YUEN-KIANG) 


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fé leu 
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tchou leu 
che leu 
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titché 
titein 


KATO * 


(YUEN-KIANG) 


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li ko 
ngo ko 
tcho ko 
se ko 
he ko 
ki ko 
tse ko 
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metseu 
teko 


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HO-NHI * 


(YUEN-KIANG) 


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ti che 
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Y-KIA 


(MA-CHANG) 


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ngou mo 
tchou mo 
seumo 
ha mo 
kou leu 
iseu mo 


MIN-KIA MAN-TSE 
(TA-LY) (JEN-0 KAY) 

ape {si ma 
ope niéma 

sa pe soma 

si pe brema 
hou pe ngeu ma 
you pe kho ma 
tchepe sseu ma 
pia pe khé ma 
kioupe brou ma 
tcheupe tchi ma 
» tchi tsi 

apeu 0 akiou tsé 
asi où atsi tseulo 


MIAO-TSE 
(LONG-K1) 


NOND DU YUN-HAN 


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TABLE 


DES GRAVURES ET CARTE: 


CONTENUES DANS LE DEUXIÈME VOLUME 


Fours servant au Laos à la cuisson des poteries communes. — Coupe antéro-postérieure ........... 
BplorationAuMEÉkRONEM(COUPESRSÉDIOSIQUES) ARE PETER CPC EC CE TC TC ECC TETE TE 
CARTE GÉOLOGIQUE, par M. le docteur Joubert 

Types annamites : réfugiés de la province de Nghe-an, résidant à Lakon, dessin de Janet-Lange d’après 
un dessin de M. Delaporte 


Type cambodgien : le second roi du Cambodge, dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Dela- 
pOTe ARS IO EE 


Rameau birman : types arakanais, dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Delaporte. 


Rameau pégouan : types mons ou talains, dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Delaporte. ... 
Type karen (homme), dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Delaporte 
Type karen (femme), dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Delaporte................:.. 
Type de sauvage océanien : Stieng, dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Delaporte........ 
Un chef de village stieng, dessin de Janet-Lange, d’après un dessin de M. Delaporte.. 

Sauvage des environs de Stung-Treng, dessin de Janet-Lange, d’après un croquis de M. Delaport te. 


Sauvage des environs de Ta-lan (Yun-nan méridional), dessin de Janet-Lange, d’après un croquis . 
M. Delaporte 


Sauvages des environs de Muong Lim, dessin de A. de Neuville, d’après un croquis de M. Delaporte..…. 


Femme sauvage des environs de Ban kon Han (frontière sud du Yun-nan, dessin de A.de Neuville, d'après 
un croquis de M. Delaporte 


Sauvage de Ban-kon Han (frontière sud du Yun-nan), dessin de A. de Neuville, d’après un croquis de 
M. Delaporte 


Homme et femme lissou (montagnes du nord du Yun-nan), dessin de A. de Neuville, d’après un croquis 
de M. Delaporte 


Types de Man:tse (montagnes du Yun-nan et du Se-tchouen), dessin de A. de Neuville, d’après un cro- 
quis de M. Delaporte 


Homme et femme Y-kia (montagnes du nord du Yun-nan), dessin de À. de Neuville, d’après un croquis 
de M. Delaporte... 


Types de Min-kia'(environs de Ta-ly), dessin de A. de Neuville, d’après un croquis de M. Delaporte.... 
Musulman chinois, dessin de A. de Neuville, d’après un croquis de M. Delaporte.......,.......... 
Un charlatan chinois, dessin de A. de Neuville, d’après un croquis de M. Delaporte. .............. 
Ustensiles aratoires et textiles du Laos, dessin de B. Bonnafoux, d’après un croquis de M. Delaporte…. 

CARTE BOTANIQUE, par M. le docteur Thorel 


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TABLE DES MATIÈRES 


CONTENUES DANS LE DEUXIÈME VOLUME 


OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES ET MÉTÉOROLOGIQUES 


I Il 
ÉLÉMENTS DU TRAVAIL GÉOGRAPHIQUE. OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES. 
1° Positions déterminées astronomiquement...... 1 OLA mÉGNomEll osoobooccancoscogobv5000000 18 
DIR EON CES CESDoodosctonootocobonpccue 10 Doaossseptentrionaleectrerrrr-ecere- crc 38 
40 Bac coudamemanoocoucococoocvoscoconose 32 
4° Vallée du fleuve Bleu..................,... 66 


GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE 


INTRODUCDION ee Reel ein ni nee 73 20Cochinchineretel anse cercreecrrereccreie 129 
S Ier. — Roches cristallines.................... 130 
I $S II. — Roches métamorphiques............... 132 
; Re S III. — Schistes anciens et grauwacke.......... 132 
OROGRAPHIE. ............, Ooodcocoocee 000000000000 15 : 
S IV. — Terrain dévonien............. 60600000 133 
II $ M. — Terrain triasique...................... 135 
$ VI. — Roches volcaniques.................... 139 
NINÉRAIRERE ere eRR rc C-cCLeccre 000000000000000 SNS VITE Terraintertiailes--e-ee-rr--e-r-rrce 140 
$ VIII. — Terrain post-terliaire.................. 140 
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GÉOLOGIE. ......, DDosocOb00coobAb000Seu0 0000600 ba 115 y 
ACRiIN EEE eee Ib een e see de 116 | MÉTALLURGIE ET MINÉRALOGIE ....................... 145 
& Ier. — Roches cristallines...... sanalne ss tente 117 4ACochinchinetetea0se-Eeeeeeereckrehececte 146 
$ IT. — Roches métamorphiques.............. HO M (Dmnaeoocvonvooc bonosoovanasa0odvo sudo 156 
& III. — Terrain dévonien.......... ne sels cle 420] S$ Ier. — Province du Yun-nan.................. 156 
S IV. — Terrain triasique....... 000000000000000 122| S II. — Province du Se-tchouen................ 165 
$ V. Fi post-tertiaire........,.,..... . 1251 $S II. — Provinces au sud du fleuve Bleu........ 167 
IT. 66 


D22 TABLE DES MATIÈRES. 


TRAITÉ DES MINERAIS ET DES MINES 


[ SN SDesimines diargenteeceeeecbereeeecrre 227 
AVANT-PROPOS. ..... bacbaobobosco00s du one ondpone 173 SE ts nes dlon, Gé, (Dee @f Ge 
NOTIONS GÉNÉRALES. « +. eieio omis o eee oies = = = sisi elles ee 175 fers. "ee"; "CUC 0 230 
S Ier, — Des indices révélateurs................. 176 1V 
$S IL. — Des galeries de mines......... ........ 371 
MIE = HE On odsocccosoncobocoodoncouoc 177 DES DÉPENSES DU TRÉSOR PUBLIC. 
$& IV. — Des minerais.......................:.. 179 : 
SV Destfoyers-eecree-el tee LE Cire 1 RS RES Fans pour l'achat et le transport du D 
8 VI. — Accessoires des foyers.................. 182 a Pal s US ARR " nr 1 DA 256 
8& VII. — Des instruments et des vases enterre.... 182] * RE AE CHSOP'OPES re 
$ VIII. — Des dépenses........ nt career 183 RE LENS NOR SAR RAS 
; e : .| $ I. — Surveillance et contrôle des opérations 
S IX. — Des ouvriers des mines................ 185 AS M Ne D Ne A7. ou 
S X.— Des fonctionnaires... . .... HARAS 186$ 1V. — Tarif des ÉPANSPOTIS Pere Reese cree 243 
8 XI. — Des règlements........................ 188 
SX == Des défenses eee e-cccrecrerece 190 Y 
SXIT = Des malheurs ee -rerree-ce-rrcrcec.e 190 : : 
SXIV. — De l'emploi de certaines locutions........ 191 DES TRANSPORTS DES MÉTAUX À PÉKIN. 
$ XV. — Des CORTE de substance..." ne S Ier, — Distances etitinéraires.....,....... oo00 NA 
SXVI. — Des sacrifices. ......................... 192 8 II. — Des barques affectées aux transports. .…. 955 
Il $S IT. — Des pertes subies pendant les transports. 258 
DRE TON Ge 06 AE NE ENR, $ IV. — Des atténuations de dépense............ 259 
S [er — Du traitement du minerai d’argent...... 195 VI 
5 NE MG Ie pin 60 Fhoies SA pos ce DE LA FABRICATION DES SAPÈQUES. . c.sessneessosvensee 20 
les montagnes et du traitement des mi- 
Merals TeCUIVTERereelelteeeerlere 201 VII 
& II, — Des modes d'extraction et de traitement : Len 
a QE AA ù DE LA FOURNITURE DU CUIVRE AUX AUTRES PROVINCES. . ... 263 
des minerais usités dans la province... 204 
III VII 
à MÉMOIRE SUR LES AVANTAGES ET LES INCONVÉNIENTS DU SYS- 
DE LA PRODUCTION EN MÉTAUX DU YUN-NANe « 2 a Nes 
TÈME ACTUELLEMENT ADOPTÉ POUR L'EXPLOITATION DU CUI- 
SMIE = Des mines de CUIVre ere eme ec rc ee 217| VRE DANS LE ŸUN-NAN, PAR OUANG TA-I0.... 0. 0 0» « .. 265 
ANTHROPOLOGIE 
AVANT-PROPOS. « ee» » + booooudodbdooansaocouv6co6o 285, S III. — Race noire, rameau oriental ou malayo- 
Division des races de l’Indo-Chine................. 287 polynésiens. Re booodboon . 31 
& Ier, — Race mongolique ou jaune.........,.... 290| S IV. — Race brune ou rameau noir de la race 
$& IT. — Remarques générales sur les Indo-Chinois CAUCASIQUEE EEE eee LE 0000000006 324 
de race mongolique,.......... 000000 306| SV. — Populations mixtes du sud de la Chine... 327 
SONT = (DnmTOEbocooocagoocouvaocoucodoodovos 1331 
AGRICULTURE ET HORTICULTURE 
IRdmBriEbHoocucooosdoooconodossadoovcoooosooo 337] S IT. — Climatologie agricole de l’Indo-Chine.... 346 
I & III. — Labourage..................... sos JD 
CONFIGURATION ET NATURE DU SOL CULTIVABLE DES DIFFÉ- SONG LNEETAONS CEE none aus AÉE a 
RENTES CONTRÉES DE L'INDO-CHINE. — CLIMATOLOGIE. — $ V.— Bestiaux et animaux domestiques....... 360 
INSTRUMENTS AGRICOLES. — BESTIAUX ET ANIMAUX DOMES- $. VI. — Pâturages, prairies et plantes fourragères. 378 
TIQUES. — FOURRAGES, PATURAGES, ENGRAIS. $ VII. — Engrais et amendements............... 381 
& Ir, — Configuration et nature du sol cultivable S VIII. — Assolement et jachères................ . 383 


denliIndo=Chineer eee CCE CCC R CE 3431 S IX. — Eaux et canaux d'irrigation............. 386 


TABLE DES MATIÈRES. 523 


SX. — Orgauisalion de la propriété......... ... 388 
ë ; à Ê à II 
S XI. — Coup d’œil général sur l’agriculture indo- 
chinoise......,..................... 389 ARBRES FRUITIERS ET PLANTES A FRUITS. — LÉGUMES 
II ET CULTURES MARAICHÈRES. 
; $ Ier. — Arbres fruitiers et plantes à fruits. ..... 443 
PRINCIPALES CULTURES PRATIQUÉES EN INpo-CHINE. — Cé- te : 
à 3 $ IL — Légumes et cultures maraichères....... 460 
RÉALES. —— PLANTES TEXTILES. — PLANTES OLÉAGINEUSES. 
— PLANTES TINCTORIALES. — PLANTES FÉCULENTES. — IV 


PLANTES COLONIALES. 


FORÊTS. — ESSENCES FORESTIÈRES ET PRODUITS UTILES 


S Ier. — Céréales... DO0HVOn0bo0d AG 000006OE 391 DES FORTE PLAN ee ES ral 
SAT Plantes textiles. sentence ere r ere ere 406 
S III. — Plantes oléagineuses.................., BA]. 18 1 SM te ooocooccacoocdeodouvoovovuoaoac 469 
SMIVA=Plantesitinclonialesse. te mer een 4221 S Il. — Essences forestières. — Produits utiles 
SV — Plantes SACCHATITÈLES =. eme es 428 destorctsheerrreceetre-cere Jacobca 470 
S VI. — Plantes tuberculeuses et féculentes...... 432| $S IT.— Plantes médicinales remarquables de 
ENIEENES Cons o00000v00a0a0000000 437 l'Indo-Chine..... AO UU 0000000 E 488 
VOCABULAIRES INDO-CHINOIS 
INDRODUCDIONE eee cena bilans nie els 05 S Il. — Vocabulaires du nord de l’Indo-Chinc... 508 


$S Ier. — Vocabulaires du sud de l’Indo-Chine.... 498 


HAE PHRDESMGRAVURESIEDIC A RDES etes emtele sbieee elle eee ui sil as cles se nide eee ce ne eee 519 


FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES DU SECOND VOLUME. 


Consez, typ. et stér. de CRÉTS Fies. 


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