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VOYAGE
EN CALIFORNIE.
Y O Y
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EN CALIFORNIE
POUR L' OBSERVATION
D U
PASSAGE DE VÉNUS
SUR
LE DISQUE DU SOLEIL,
Le 3 Juin \'JC<)'^
Contenant les obfervations de ce phénomène , & la defcriptlon
hiftorique de la route de TAuteur à travers le Mexique.
Tar feu M. C H A P p E D A UTEROCHE, de. l'Académie Royale
des Sciences.
Rédigé & publié par M. deCassini fils, de la même Académie, Directeur en furvivance
de rObfervatoire R.oyal de Paris , &c.
UNiVLHSll
_/
A PARIS,
ÇhçzCHARlES.ANTOINE JOMBERT, Libraire du Roi pour l'Artillerie & le Génie;
rue Dauphine , à l'Image Notre Dame.
M. Dec. LXXII.
AVEC "APPROBATION^ ET PRIVJL EG E DU ROI.
A VA N T-P R O P O S.
X-^E Voyage de M. Chappe à la Californie fixoit de-
puis long-temps l'attention des Savants. L'obfervation
du paflage de Vénus fur le Soleil , faite dans cette partie
de la Mer du Sud, étoit fans doute une des plus impor-
tantes & des plus favorables pour la détermination de la
parallaxe du Soleil.
La nouvelle du fuccès complet des opérations de
M. Chappe arriva enfin ; mais les fentiments qu elle
devoir caufer furent bien altérés par celle de la mort de
cet Aftronome, que l'on apprit en même temps, & qui
avoit fuivi de près l'époque de l'obfervation.
Les papiers de M. Chappe ne parvinrent en France
que vers la fin de l'année 1770. M. Pauly, à qui
M. Chappe les avoit confiés en mourant , les remit
entre les mains de mon pcre le 7 Décembre , & le
même jour ils furent dépofés à l'Académie. L'impatience
du public à connoître le réfultac d'une obfervation fi
intéreffantc , ne permit pas de difi^érer plus long-temps
à l'en inftruire. M. de la Lande publia dans la Gazette
du 14 Décembre 1770 la parallaxe du Soleil déduite de
l'obfervation faite à San-Jofeph. Par cet emprefl^emcnc
àfatisfairelacurlofité du monde favant, l'Académie ne
fe crut point difpenfée de faire connoître 6c de mettre
fous les yeux du public les détails circonftanciés' d'une
obfervation fi Importance à difcuter. Je fus chargé en
nr
z AVANT-PROPOS.
conféquence de mettre en ordre , de rédiger 6c de cal-
culer toutes les obfervations que M. Chappe avoir faites
à San-Jofeph; enfin de tirer de Tes manufcrits originaux
tout ce qui méritoit d'être publié.
Ceft de cette commiffion que je m'acquitte aujour-
d'hui dans cet ouvrage.
Je l'ai divifé en deux parties.
La première contient la relation du voyage de l'Au-
teur. Ce que j'ai trouvé de relatif à cet objet dans les
papiers de M. Chappe qui m'ont été remis, étoit fi peu
de chofe, que jen'auroisguerepu donner ici qu'un Jour-
nal itinéraire très ftérile, fans le fecours de MM. Noël
& Pauly. J'ai donc fait ufage de ce qu'a pu me fournir
la mémoire de ces deux compagnons de voyage de
M. Chappe, qui ont eu de plus l'avantage de faire deux
fois la même route en allant Si en revenant ; mais, mal-
gré ce fecours, dont je n'ai dû même profiter qu'avec
beaucoup de difcrétion, je ne me flatte point de donner
ici une relation bien intéreflante : l'Auteur feul eût été
en état de ne rien îaifler à defirer, foit pour l'inftruc-
tion , foit pour l'agrément.
Cette relation efl fuivie des obfervations phyfiques
& des expériences qui ont été faites dans le courant du
voyage; elles ne font point aufficomplettes ni peut-être
en aufli grand nombre qu'elles auroient pu l'être fi elles
éufl^ent été rédigées par l'Auteur lui-même. J'ai- été
obligé d'en rejetter une grande partie faute de détails
afiez circonft:anciés qui pufient me faire juger de leur de-
AVANT-PROPOS. 3
gré de préciUon ; car je penfe qu'il vaut mieux ne don-
ner qu'une obfervation bien faite, que d'eu rapporter un
grand nombre de douteufes. Pour dédommager le public
de la perte qu'il a faite par la mort de M. Chappe , fur-
tout du côté de l'hifloire naturelle dont cet Académi-
cien eût pu faire la plus ample moiflon , j'ai joint ici
l'extrait d'une lettre de Don Jofeph Antoine de Alzatey
Ramirez , adreiïée à l'Académie , &: contenant des obfer-
vations très intéreflantcs fur l'hifloire naturelle des
environs de la ville de Mexico.
La féconde partie contient le détail le plus complet 5c
le plus circonftancié qu'il m'a été poffible de le donner,
des obfervations aftronomiquesque M. Chappe a faites à
San-Jofeph, relativement au pafiage de Vénus qui étoit
le principal objetdefon voyage. Je n'ai rien épargné pour
donner à cette partie, la plus importante de cet Ouvrage,
toute la clarté , la précifion, &c l'étendue que l'pn pou-
voit defirer ; j'ai calculé , difcuté , & rédigé plufieurs
fois chaque obfervation, que je me fuis fait une loi de
rapporter d'abord telle que je l'ai trouvée dans le regiftre
original : fi j'en ai quelquefois rejette quelqu'une, fi j'ai
changé quelque chofe au texte, ce n'a été qu'après avoir
reconnu très évidemment quelque erreur, par des com-
paraifons, des calculs , & une difcuflion très attentive.
C'efl ce qui a eu lieu, par exemple, à l'égard de plu-
fieurs hauteurs méridiennes dans lefquelles M. Chappe
s'efl trompé , par rapport au figne qui indique s'il faut
ajouter ou retrancher les parties du micromètre.
Aij
4 AVANT-PROPOS.
L'on trouvera d'abord, comme je viens de le dire, cha-
que obfervation telle que je l'ai tirée du regiftre original ,
enfuite telle que je l'ai réduite par mes calculs, avec fon
réfultat que l'on pourra par conféquent vérifier û on
le juge à propos.
J'ai terminé cet Ouvrage par un cxpofé des travaux
qu'a occafionné depuis deux fiecles la recherche de la
parallaxe du Soleil. Le Le£leur y verra peut-être avec
plaifir rafiemblés fous un même point de vue les réful-
tats des obfervations des deux derniers pafTages de Vénus
fur le Soleil , faites dans les différentes contrées. Ce Mé-
moire pourroit être regardé comme une introduction
ou le canevas d'une hiftoire complette de la parallaxe
du Soleil; ouvrage qui, entrepris par une plume habile,
ne manqueroit pas de devenir extrêmement intéreffant
pour les Savants , ce morceau formant une branche prin-
cipale de l'hiftoire de l'Aftronomie & des progrès de
l'efprit humain.
Le Le£leur aura lieu fans doute de regretter la main
de l'Auteur , auquel je n'ai fuppléé que bien imparfai-
tement de toute façon. Mais peut-on peindre l'objet que
l'on n'a pas vu, avec les mêmes couleurs que celui qui
l'a fous les yeux ? On ne difcute point les obfervations
que l'on n'a point faites, avec la même fagacité que peut
le faire l'Obfervateur même. Les Journaux les pluscir-
conftanciés ne comprennent fouvent pas la moitié de ce
qu'un étranger voudroit y trouver ; l'Auteur en réfervc
toujours une grande partie dans fa mémoire. M. Chappc ,
A V A N T-P R O P O S. 5
traverfant le Mexique pour gagner la Californie ou il
craignoit d'arriver trop tard, fe propofoic de faire en
repaflant, à fon retour, par la même route , une
moiflon abondante de remarques de d'obfervations
curieufes que fon premier coup d'oeil avoir pu faifir ,
mais dont il n'a pas cru devoir faire note dans fes Jour-
naux avant de les avoir vérifiées par un fécond examen
moins rapide. Combien n'avons-nous pas à regretter que
cet Académicien foit mort avant d'avoir pu nous don-
ner les moindres notions fur la Californie, pays li peu
connu , & par-là 11 digne de curiofité ! Car pouvons-
nous donner une entière confiance à des voyageurs peu
inftruits, ou à des miffionnaires quelquefois fi remplis
des objets de leur zele , qu'ils font incapables de donner
l'attention néceflaire à tout ce qui eft étranger à leur
but , quand ils auroient d'ailleurs toutes les connoif-
fances requifes pour fatisfaire la curiofité des lecteurs?
MM. Pauly & Noël, qui ont eu le bonheur d'échapper
à la maladie cruelle dont M. Chappe a été la victime,
n'ont pu me donner aucun éclairciflement fur la Cali-
fornie. Pénétrés de la perte affreufe qu'ils avoient faite,
ils n'ont guère pu s'occuper d'acquérir des connoiffances
fur un pays qui leur avoir été fi funefi:e , & dont mille
raifons les engageoient à s'éloigner, ce qu'ils firent le
plutôt qu'il leur fut pofîible. Il n'y a donc dans cet
Ouvrage que la partie des Obfervations Aftronomiques
qui pulfiTe être regardée comme complette. Quant aux
autres parties, foit HiftorJque, Phyfique, ou Géogra-
6 A V A N T-P R O P O S.
phique , on n'y trouvera que peu de chofe ; j'en préviens
le ledleur, 6c l'on ne peut en accufer qu'un événement
d'autant plus trifte pour moi, que j'ai d'une part à re-
gretter les mêmes pertes que le public , & de l'autre
celle d'un confrère 6c d'un ami.
V O Y A G
EN CALIFORNIE
POUR OBSERVER
LE PASSAGE DE VÉNUS
SUR LE DISQUE DU SOLEIL.
PREMIERE PARTIE.
RELATION DU VOYAGE DE L'AUTEUR.
E partis (i) de Paris le iS Scpceinbrc ii74'8 peurlVme Départ de
rendre au Havre-de-Grace. où je devois m'eiiijbajrqftter ; ^''^'
'ans.
^jVflj;; b'iljl •uJKj
"i.
fi) Le Journal de M. Cliappe hecommçBce qu'à fon dépai't.die
Cadix pour la Vera-Crux. Tous les faits que je rapporte ,au coiti-
mencement de cette Relation , antérieurs à cène époque ,_Qnt été
tirés en partie de différentes lettres que M. Cljappe a éttrte^ ,' & en
partie de ce que j'ai pu ralTembler dés différe'rrttespetfoHi-f^stjuIi'bnt
accompagné.- '..'■'''■ '■■-''' . c.'iv.. : ' >. ■ •■
s VOYAGE
j'étois accompagné d'un donieftiquc & de ttois autres
perfonnes qui s'étoienc engagées à me fuivre en Cali-
fornie , ôc à partager avec moi les travaux Se les dangers
^ d'un fî long voyage. M. Pauly, Ingénieur Géographe
du Roi , des talents duquel j'attendois les plus grands
fecours, devoit me féconder dans mes opérations aftro-
Bomiques èc géographiques : M. Noél , Elevé de l'Acadé-
mie de Peinture, étoitdeftiné aux ouvrages qui avoient
rapport à fon art ; deircins de vue de côtes , peintures
d'après nature de plantes, d'animaux ; en un mot, de
tout ce qui pouvoit fe rencontrer d'intérellant fur notre
route : enfin le fieur Dubois, Horloger, devoit veiller
à la conlervarion de mes inftruments, 5c réparer les
petits accidents qui ne font que trop fréquents dans un
voyage de long cours.
Lorfque, fe rcpréfentant l'étendue d'un trajet de plu-
fieurs milliers de lieues , tel que celui que j'allois entre-
prendre, l'on fongera qu'un leul malheureux inftant,
le moindre nuage, pouvoit en un jour rendre inutiles
tant de travaux &i de dépenlcs ; on ne trouvera pas fu-
perfluesfans doute les précautions que j'avois prifes pour
tirer de mon voyage d'autres fruirs, qui puflent, au cas
que je manquaflel'obfervation, dédommagcren partie de
cette perte : l'Adronomie, la Géographie, la Phylîque
& l'Hilloire Naturelle étoicnt les objets que je m'étois
propofés. Si le cortège d'inftrumcnts tic de matériaux né-
ceflaires pour les remplir avoit quelque choie d'embar-
ralTant pour moi, &: de difpendieux , j'en étois bien dé-
dommagé par l'efpérance de rendre mon voyage utile en
plu (leurs genres.
Anivée au J'arrivai au H.ivre-de-Grace le z i Septembre; je trouvai
Havie-de- îe bâtiment le Nouveau Mercure , commandé par le Ca-
Gracc. pic^jne le Clerc, prêt à mettre à la voile pour Cadix;
Je m'y embarquai le 17 avec toute ma fuite Se mes inf-
:trviments, §ç. le lendemain nous partîmes. La traverfée
fyt très dure : nous elfuyâmes un coup de vent au notd
du
EN CALIFORNIE. 9
du cap Finiftere, qui rendit la mer extrêmement agitée
pendant près de huit jours ; les vents d'ailleurs nous fu-
rent prefque toujours contraires; de forte que nous em-
ployâmes vingt-un jours à nous rendre du Havre-de-
Grace à Cadix , traverfée qui fe fait communément; en
moitié moins de temps.
Nous arrivâmes à Cadix le 1 7 Octobre. La Flotte Efpa- Anivcc
gnole, avec laquelle nous devions pafTer à la Vera-Crux, Cadii.
étoit déjà en rade depuis un mois, & paroifToit n'at-
tendre que le moment de mettre à la voile. Je m'en
félicitai d'abord; car j'ignorois combien ce départ, qui
me fembloit lî proche , étoit encore éloigné : je pré-
voyois encore moins les difficultés que j'allois éprouver,
& qui dévoient fe joindre aux défigrémcnts d'un retard
qui me fit mille fois défefpércr de pouvoir arriver afTez
à temps en Californie.
Dès le moment que je fus débarqué, je m'em-prefTai
d'aller rendre mes devoirs au Gouverneur de Cadix,
à l'Intendant de la Marine , & à M. le Marquis de
Tilly , Général de la flotte. Je reçus de ces Meffieurs l'ac-
cueil le plus favorable. M. de TiHy ayant bien voulu me
communiquer les ordres de fa Cour, qui lui enjoignoient
de m'embarquer fur la flotte avec un Horloger & un
Deffinateur feulement , je fus dans le plus grand éton-
nement de voir qu'il n'étoit point qucftion de M. Pauly,
mon fécond. Je repréfentai à M. de Tiliy que cette
omiffion , qui tomboit précifément fur le fujet de ma
fuite qui m'étoit le plus néceiîaire, ne pou voit être
qu'une méprife : il le fentit parfaitement, 6c m'aflura
que je n'éprouverois de fa part aucune difficulté à ce
lujet. Mais malheureufement l'embarquement despafla-
gers ne dépendoit pas ablolument de lui ; cela regardoit
principalement M. le Marquis de Rcal-Theloro , Préfi-
dent de In Contrarlation ^ ëc c'étoit à lui qu'il falloit
s'adrelîer. Ce fut alors que j'éprouvai de nouveaux ob-
ftacks.
B
lo VOYAGE
Dans les ordres de la Cour , communiqués par M. l'In-
tendant à M. le Prélldent de la Contraâ;aiion , il n'é-
toitqueftionquedemoi. Celui-ci, enconféquence ,bien
loin de permettre que M. Pauly m'accompagnât, ne
voulut expédier des ordres que pour moi feul, ôc un
unique inllrument.
L'on juge de ce que des difficultés fi inopinées me
firent routirir : elles m'avoient paru dans leur naiiTance
facilesàlever par de (impies explications; mais je vis bien-
tôt que je n'avois rien à efpérer par cette voie. Je pris
donc le parti de dépêcher un courier à M. le Marquis
d'Oilun, notre Ambafladeur, pour lui faire part de ma
fituation, 6c demander à la Cour d'Efpagne des ordres
clairs & précis qui ne donnaient plus fujet à de nou-
velles contcftations. Le courier revint au bout de huit
jours; ôc tout fut enfin concilié à ma fatisfadtion. Je fis
tranfporter mes inftruments à bord du vaifieau comman-
dant , ôc j'attendis avec la plus grande impatience le
moment de m'y embarquer moi-même avec toutes les
perfonnes de ma fuite.
Je comptoisdéjaun mois de féjourôc d'inquiétude de-
puis mon arrivée à Cadix, 6c le moment de notre départ
étoit encore incertain : calculant alors le temps nécef-
laire pour nous rendre à la Vera-Crux, celui que nous
emploierions à parcourir trois cents lieues de terre de-
puis la Vera-Crux jufqu'à San-Blas , &: à traverfer en-
fuite la Mer Vermeille pour gagner la Californie ; je
prévoyois uneimpofiibilité morale d'arriver aflez à temps
pour faire notre obfervation, pour peu que l'on tardât
encore à mettre à la voile. J'écrivis à ce fujet à M. le
Marquis d'Offun, demandant qu'au casque la flotte ne
partît pas fur le champ, il me fût permis de m'embarqucr
fur le premier bâtiment , quel qu'il fût , pourvu que fans
différer il pût nous tranfporter à la Vera-Crux, dans le
moins de temps poilible.
La Cour d'Efpagne, fentant la néceffité de prendre un
EN CALIFORNIE. n
tel parti , acquiefça à une demande que le zele feul
pouvoit di£ter. Il y eue ordre, en cas de retard de la
flotte, d'équiper fur l'heure une balandre ou petit bâti-
ment pour me tranfporter à la Vera-Crux avec MM.Doz
ôc Médina, Ofiiciers de Marine, èc Aftronomes de Sa
Majefté Catholique, deftinés à faire, de concert avec
moi & dans le même liêû , l'obfervation du paffage de
Vénus.
Ce nouvel ordre de la Cour chan2;e bientôt les chofes
de face ; je touche enfin à ce moment fi defiré 6c qui
fembloit me fuir depuis fi long-temps. Un bâtiment de
douze hommes d'équipage e 11: bientôt équipé ; je fuis en-
core moins de temps à y faire tranfporter mes infbru-
ments qui étoient à bord du vailfeau commandant de
la flotte. La fragilité du brigantin où j'allois m'exporcr,
& au fujet de laquelle quelques pcrfonnesvouloientm'in-
timider , n'étoit à mes yeux qu'un mérite de plus ; ju-
geantj par fa légèreté, de la vîtclfe de fa marche, je le pré-
férois au plus beau vaifleau de ligne. Nous partons enfin ,
& j'éprouve en ce moment un fcnriment de joie &c de
fatisfaftion qui ne devoit fe renouveller qu'à mon arri-
vée en Calitornie.
Je ne m'arrêterai pas à donner ici le Journal de rtotre Départ de
traverfée de Cadix à la Vera-Crux (i); elle n'oftrit que ^^'^'^"
des événements communs .à tous les voyages de long
cours fur mer : il n'eil: iortc de temps qu'on n'y éprouve ;
calme, tempêtes, vents, tantôt favorables, Se tantôt
contraires. Voilà en peu de mots l'hiftorique de la plu-
part des voyages des marins ; nous pouvons ajouter, par
rapport au nôtre, une agitation continuelle de la part
de notre petit bâtiment, que fa légèreté rendoit le jouet
de la moindre vague.
(i) C'eft i'.i que commence le Journal fuivi de M. Chappe. Je
crois devoir éxiargner au le£teur l'ennui des détails d'une longue
navigacion qui n'oiire rien de particulier.
Bij
li VOYAGE
Je m'occupai,pendant toute cette traverfée, de nombre
d'expériences &. d'obfer varions phyfiques & aftronomi-
ques ; telles que la comparaifon des hauteurs de différents
thermomètres , les uns plongés plus ou moins avant dans
la mer, les autres expoles à Tair libre (i): je déterminai,
fous différentes latitudes, la déclinaifon ôcTinclinaifon
de l'aiguille aimantée ; enfin je fis plufieurs oblervations
de la diilance de la Lune aux étoiles. Je ne cacherai point
les difficultés que j'éprouvai en voulant employer le mé-
gametre à ces ob(crvations(2). J'effayai plufieurs fois de
faire ufage de cet inflrument, je n'y pus réuffir que dans
une feule occafion où le vaiffeau n'éprouvant ni roulis
ni tangage, je vins à bout de conferver parfiitement la
Lune dans la lunette , ce qui étoit impoffible toutes les
fois que la mer étoit un peu forte ; peut-être n'éprou-
vai-je ces difficultés que par le défaut d'ufage; quoi qu'il
enfoit, je fus obligé d'avoir recours à l'oîtant, dont je
me fervis avec beaucoup plus de facilité & de fuccès. Je
tentai auffi inutilement l'obfervation des Satellites de Ju-
piter, avec la nouvelle lunette propofée à l'Académie par
M. l'Abbé Rochon. Cette lunette, il eft vrai, avoir un
champ un peu trop petit; j'y confervois d'ailleurs alfez
bien Jupiter , mais les Satellites m'échappoient.
Ces différents effais me donnèrent lieu de penferque
l'on réullîra difficilement à inventer des inftruments d'ua
ufage facile à la mer, fi on leur donne d'autre appui
que la main même de fObfervateur. Je ferai encore une
(i) On trouvera les détails de ces expériences à la fuite de lare-
lation.,
(z) Je dois avertir que toutes les réflexions fjivantes fur les
différents inftruments propres à obferver en mer & à déterminer les.
longitudes, font tiréesprefquemot àmotdu Journalde M. Chappe;
je ne me fuis jamais permis d'y rien ajouter dans les mr.rieresi qiu
peuvent avoir quelque importance , & fur-tout dans celles où. l'Ao-
teur a une façon de penfer q^ui lui eft propre.
E N C A L I F O R N I E. 13
remarque fur la détermination des longitudes par des dif-
tances de la Lune aux étoiles ; les longs calculs qu'exige
cette méthode, la précifion &: les attentions que demande
robfervation même, me font douter que l'on en faflc
jamais ufage fur les vaifleaux marchands. Il faut , je l'a-
voue , le plus grand zèle de la part des pcrfonnes même
les plus inftruites, pour ajouter aux fatigues de la mer
celle d'une obfervation délicate &: des longs calculs qui
Ja {uivent. C'eft ce qui me perfuade que l'ulage des mon-
tres fera, par fon extrême facilité, plus généralement
utile à la marine : il n'exige point d'autres inftruments
que ceux dont les marins fe font fervis jufqu'ici , Se qui
leur font familiers : l'obfervation ne demande aucune
délicatefTe : enfin le calcul en eft court Si. facile ; avantage
de la plus grande conféquencedans bien des cas, & fur-
tout à la mer.
Ces différentes opérations, auxquelles je me livrai
pendant toute la traverfée, abrégèrent pour moi les
loixante &; dix-fept jours qu'elle dura. Au refte , la vie
que l'on mené fur mer n'eft ennuyeufe &L uniforme que
pour ceux dont les yeux accoutumés à ne rien voir jet-
tent un regard indifférent fur toute la nature ; mais pour
tout autre, il eft fur mer des fpedtacles bien capables d'in-
téreirer l'efprit &: la raifon ; la nature a des beautés juf-
ques dans fcs horreurs, Se c'eft peut-être là même où elle
eft le plus admirable & le plus fublime. Le calme d'un^
beau jour eft en quelque forte moins inréreftant que ces
moments de trouble, oîi les Hors, foulevés par les vents,
femblent fe confondre avec le ciel. Des abîmes profonds
s'ouvrent à chaque inftant : l'homme frémit en ce mo-
ment à la vue du danger qu'il croit inévitable; mais,
voyant bientôt le calme fuccéder à la tempête, fon ad^
miration fe tourne alors fur lui-même, fur le vaifleau ,
fiir le pilote, reftés vainqueurs de l'élément le p!us ter-
rible. Un fentiment d'orgueil s'empare alors de lui, Sc il
fe dit à lui-même : Si 1 homme , par fon individu, n'eft:
14 VOYAGE
qu'un point au milieu de ce vafte univers ; il eft , par Ton
génie & par Ton audace, digne d'en embraflèr l'étendue,
&L d'en pénétrer les merveilles.
Rien en eiFet de plus capable de donner une haute
idée de la portée de l'efprit humain que cet art , au-
jourd'hui fi perfectionné , de fe guider avec fureté au
milieu d'une route inconnue, &: de traverfer, furunemai-
fon flottante, des clpaces immenfcs, en dépit de deux
éléments réunis. L'on ne peur fans doute réfléchir aux
dangers fans nombre que la mer nous oflre , fans s'écrier
avec Horace :
Illi robur & xs triplex
Circa pedlus erat , qui fragilem truci
Coitimifit pelago ratem.
C'efl:ceque je répétai mille fois pendant notre traverfée,
en fongeant aux Chriiliophe Colomb, aux Gryalva; en
un mot, à ces premiers navigateurs intrépides, qui, pour
chercher un nouveau monde, fur le feul foupçon que
leur génie leur fucîiîéroit de fon exiftence , oferent en-
trepYendre, il y a près de trois iiecles , ces mêmes voyages
que nousregardonsaujourd'hui comme dangereux, quoi-
qu'aidés de mille fecours dont la navigation étoit encore
privée du temps de ces grands hommes.
Arrivée à la Nous arrivâmes à la Vera-Crux le 6 Mai, vers deux
Vc.a-Crux. hcures après midi. Nous étant approchés delà côte juf-
qu'à la diftance d'une lieue Si demie, nous jettâmes
l'ancre, attendant au lendemain à doubler les brifants
qui défendent l'entrée du port; nous ne pûmes y parvenir
que le huitième jour, où nous entrâmes dans le canal :
ce fut alors que, nous trouvant environnés d'écueilsde
toutes parts, nous fîmes fîgnal à terre pour demander
un pilote côtier, & arborâmes pavillon François ; c'étoic
le véritable moyen de n'être point fecourus. MM. Doz
& Médina avoient confeillé avec raifon à notre Capi-
E N C A L I F O 11 N I E. 15
taine de fubfticuer pavillon Efpagnol au fien ; il ne le
voulue point , &c penla par là caufer notre perte. En effet,
l'entrée du port de la Vera-Crux étant défendue à tout
bâtiment étranger , on ne répondit à notre fignal que
par un coup de canon, pour nous obliger à mouiller dans
,1e canal même: c'étoit abfolument vouloir nous faire
périr. Ce canal conduit au port au milieu des rochers
qui refferrent tellement le paffage qu'il n'y a de place que
pour un feul vaiffcau. Il louffloit alors un vent de nord,
qui , portant fur ces rochers , rendoit le mouillage extrê-
mement dangereux dans une paffe aufîi étroite : il fallut
bien cependant fe réfoudre à y jetter l'ancre, fur l'ordre
exprès qu'on nous en fit fignifier par une chaloupe qui
vint à notre bord.
La polîtion où nous nous trouvâmes écoit alors telle-
ment critique, que, décent bâtiments dans le même cas,
il n'en échappe pas deux , comme nous l'apprîmes par la
fuite. Nous reftâmes ainfî dans l'attente cruelle de nous
voir à tout moment entraînés &c fracaffés contre les
ëcueils qui nous environnoient, jufqu'àce que le Gouver-
neur de laVera-Crux, apprenant que notre vaiffcau , quoi-
que François, venoit par ordre de la Cour d'Efpagne,
nous eût envoyé lapermiffion d'entrer: elle fut reçue avec
autant de joie qu'elle avoit été attendue avec impatience.
Nous levâmes l'ancre j Centrâmes enfin dans le port de la
Vera-Crux le 8 Mars 1769 , après une navigation de 77
jours, étant partis de Cadix le 21 Décembre de l'année
précédente. Il étoit temps que nous arrivaflions, n'ayant
plus, pour toute provifion, qu'un mou ton, cinq poules, &
de l'eau tout au plus pour huit jours. La précipitation avec
laquelle s'étoit fait notre embarquement à Cadix, ne
nous avoit pas permis de prendre toutes les précautions
néceffaires pour un fi long voyage : quinze jours , depuis
notre départ , s'étoient à peine écoulés , qu'une moitié
de nos moutons & de nos volailles étoit morte, &C
qu'une bonne partie de nos autres provillons avoit été
i6 VOYAGE
jettée à la mer. Notre traverfée, d'ailleurs, avoir été aflez
heureufe jufqu'à ces derniers moments, qui furent, à la
vérité , cruels à pafTer , nous voyant près de périr à l'en-
trée du port , ôc redevables de notre perte à notre pa-
villon , qui, par l'alliance des deux nations, fembloic
devoir au contraire intérelîcr en notre faveur.
MM. Doz Se Médina defcendirent les premiers à terre,
pour aller prévenir le Gouverneur ; deux heures après on
m'envoyaune chaloupe dans laquelle jem'embarquai avec
M.PauIy, mon fécond. Ce vent de nord qui nous avoit
fait trembler fi long-temps dans le canal, augmentoit
confidérablement à chaque inllant, &:. rendoit déjà le
débarquement aiTez difficile : nous atterrâmes cepen-
dant ians accident ; mais une autre chaloupé, qui nous
fuivoit, reçut un coup de vent fi violent, que quatre de
fes matelots furent jettes à l'eau, &c ne gagnèrent la rive
à la nage qu'avec la plus grande peine.
Je ne fus pas plutôt entré dans la ville qu'un ouragan,
furieux commença à fe déployer : toute communication
fut dès-lors interrompue entre la terre & notre bâtiment,
qui n'eut que le temps de fe réfugier derrière le château
de Sr. Jean d'Ulua, feul abri des vaifleaux contre les
vents du nord. Pendant trois jours entiers que dura cette
tourmente je fus dans la plus grande perplexité, ne pou-
vant faire débarquer mes inftruments ni les perfonnes de
ma fuite qui étoicnt reftées à bord ; je voyois avec frayeur
que leur falut ne dépendoit abfolument quedela bonté
des cables avec lefquels le vailTeau fe trouvoit amarré.
Ces cables venant à céder S<.à.[c rompre euirent fait périr
tout l'équipage fous nos yeux fans qu'il eut été poffible
de lui porter le moindre fecours. Chaque année n'ofFre
que trop d'exemiplesde pareils événements, qui rendent
le port de la Vera-Crux extrêmement redoutable ; nous
fûmes afiez heureux cependant pour ne point augmenter
le nombre des accidents funeftes. Le calme vint enfin,
& j'en faifis avec eppreflcment les infiants pour faire le
débarquement
E N C A L I F O R N I E. 17
débarquement de tous mes efFets ôc de toute ma fuite ;
ce fut alors que je commençai à fentir bien vivement le
pîaifir de nous voir tous réunis au port & délivrés des
inquiétudes dont on ne peut être exempt fur un élément
aulii inconftant que la mer. Le trajet que nous avions
encore à faire pour gagner la Californie, nous préparoit
à la vérité plus de fatigues, mais moins de dangers.
Le Gouverneur de la Vera-Crux venoit de mourir au
moment de notre arrivée ; en attendant que le Vice-Roi
eût nommé à cette place , le Commandant du château
en exerçoit les fondions : ce fut lui qui nous reçut ; il
nous combla de poIicclTes pendant tout le temps que nous
reliâmes dans cette ville. Notre féjour, au refte, n'y fut
pas long; il ne dura que le temps néceffaire pour les pré-
paratifs de notre nouveau voyage: nul objet intéreflant
n'étoit d'ailleurs capable de nous arrêter.
La Vera-Crux eft fituée dans la partie méridionale du Defcriptioa
Mexique &c fur le bord de la mer. Elle eft environnée delaVera-
au nord de fables arides , & à l'oueft de marais deffé-
chés, qui rendent fa pofition en même temps défagréable
&: mal-(aine. Ce que j'ai dit ci-defTus faitaffez connoître
combien fon port eft dangereux ; les coups de vent de
nord , fort communs dans le golfe du Mexique , y font
extrêmement à craindre. Ce port eft néanmoins très fré-
quenté, principalement tous les deux ans lorfque la flotte
Efpagnole vient s'y rendre, pour dépofer les marchan-
difes d'Europe qui doivent être vendues Se répandues
dans le Mexique, &C pour en recueillir cet argent dc ces
tréfors immenfes, dont la foif fit égorger tant de milliers
d'hommes, &l rendit les malheureux fujcts de Moté-
zuma la trifte victime de la cupidité des Européens.
La Vera-Crux ne renferme aucun bel édifice. Le pa-
lais du Gouverneur n'a rien qui le diftingue des autres
maifons , qui font bâties comme en Efpagne. Il y a une
églife & trois couvents de moines. Les rues font allez
droites, ôc d'une largeur ordinaire. Des murailles envi-
^ C
i8 VOYAGE
ronncnt la ville j d'oix l'on fort par quatre différentes
portes , flanquées chacune de deux tours : il y a deux
baftions aux deux extrémités des murs qui donnent fur
le rivage. Ces fortifications, au refte, font en très mau-
vais état : la meilleure défenfe eft celle de la fortereflTe
du château de St. Jean d'Ulua. Il eft bâti fur un rocher
qui s'élève au milieu du port en face &c à quelque dif-
rance de la ville. Un Lieutenant de Roi loge & commande
dans ce château, indépendamment du Gouverneur de
Vera-Crux qui commande dans la ville.
Dès le premier jour de notre débarquement le Subftitut
du Gouverneur avoir écrit au Vice- Roi du Mexique pour
lui faire part de notre arrivée : celui-ci envoya bientôt
des ordres pour faciliter le nouveau voyage que nous al-
lions entreprendre, ÔC nous fournir le nombre d'hommes
& de mulets dont nous avions befoin pour le tranfport
de nos inftruments & de nos bagages.
De la Vera-Crux à San Blas,où nousdevions nousem-
barquerpourpafferlaMerVermeille, nous avions environ
trois centslieues de terre'à parcourir , pays en partie défère
à traverfer, &; par les plus mauvais chemins du monde :.
on juge de l'embarras que nous cauferent les préparatifs
d'une route fi longue de fi incommode. Nous fûmes d'a-
bord obligés de déballer la plus grande partie de nos
équipages pour en faire des petites charges propres à être
portées par des mulets: il fallut en conféquence un grand
nombre de ces animaux , d'autant plus que nous fûmes
obligés d'emporter avec nous nos lits &C nos tentes, pour
pouvoir faire halte dans les endroits dénués d'habitations.
Le foin de nos provifions de bouche vint enfuite. On
nous prévint que nous trouverions peu de reflx)urccs
en fait de vivres le long de notre route. Les Indiens fe
nourriffent d'un alTez mauvais pain fait de farine de maïs,,
ou; bled de Turquie. Ils écrafent bien ou mal ce grain
entre deux pierres , 6c délayant dans un peu d'eau la fa-
rine groflîere qui en réfulte, ils en forment une pâte
E N C A L I F O R N I E. if
qu'ils applatilTent comme une galette, & qu'ils mettent
cuire fur une pierre plate, en la pofant au milieu d'un
grand feu. Ces pains s'appellent des tortillas ^ & ne font
guère préférables au bifcuit de mer, dontnous fîmesune
petite provifion. Quant aux autres ragoûts dont les In-
diens le régalent, ils y mettent tant de piment, & les
arrofent d'une fi mauvaife huile , qu'il eft impolîible, fur-
tout à un François, d'en goûter. Nous achetâmes donc
à la Vera-Crux une grande quantité de jambons ôc de
pampano falé. Je ne dois pas oublier de faire mention de
ce poiflon.
Le pampano eft fort commun dans la partie méridio- Pampano.
nale du golfe de Mexique : il fe prend depuis le mois de
Février jufqu'au mois d'Avril ; paire ce temps on n'y en
trouve plus. Ce pollFon a communément un pied &: demi'
delong, & environfixpoucesde largeur ; il n'a point d'é-
cailles: fa peau, parfaitement unie, eft de couleur gris
d'ardoife , tirant iur le blanc de perle , qui devient de plus
en plus jaunâtre en s'approchant du ventre. Le pampano
n'a point de dents ; fa chair eft de la plus grande délica-
teiTe ; les Efpagnols le mettent au deflus de tous les poif-
fons de mer. Nous le trouvâmes en effet excellent à man-
ger frais ; mais falé il perd toute fa qualité. Nous n'en
prîmes, pour notre route, que faute d'autre chofe ; nou?
n'en pûmes pas même conlerver long- temps à caufe des
grandes chaleurs.
L'on trouve encore dans les rivières qui font aux en-
virons de la Vera-Crux deux autres poiffons ; l'un que
l'on nommey7zr^o en Efpagnol, &.qui eft le même, à ce
qu'il m'a paru, que notre turbot ; l'autre eft appelle
corobo , qui fignifie en Efpagnol bojju. La forme de ce
dernier eft analogue à fon nom. Ces poiffons étant
fort communs , je n'en donnerai point la defcrip-
tion.
Les animaux quadrupèdes que l'on trouve à la Vera-
Crux 6c dans le Mexique, font les mêmes qu'en Europe;
y c ij
20 VOYAGE
\ mais , parmi les infedtes , il en eft un particulier qui mé-
rite d'être remarqué ; on l'appelle nigua.
Nigua ^^ nigua eft noire , & a quelque reiremblance avec la
puce, dont elle n'excède point lagrofleur. Elle s'attache
communément aux pieds ou aux mains , 6c s'infînue petit
à petit dans la chair , qu elle ronge , en caufant d'abord
des démangeaifons très vives. Elle s'enveloppe d'une
membrane ronde de la giofTeur d'un pois : elle y pond
fes œufs. Si on la lailTe trop long-temps féjourner dans
la plaie, ou qu'en l'arrachant on ait la mal-adrelfe de la
crever, la partie attaquée fc trouve remplie des œufs de
cet animal, &: l'on eft alors obligé de couper toutes les
chairs infectées de cette vermine. Mais ce qu'il y a de
plus dangereux, c'eft que la plaie devient, dit-on, mor-
telle fi l'on y laiffe couler de l'eau. Auflî le premier foin ,
après avoir arraché la nigua , doit être de boucher avec
dufuifle trou qu'elleafait en s'enfonçant dans la chair.
Cet infeifle eft très commun aux environs de la Vera-
Crux ; les Indiens en ont les pieds rongés &c tout difformes,
par les coupures & incifions qu'ils font obligés de fe faire
chaque fois quils font mordus d'une nigua : il paroît que
ce même animal fe trouve auflî dans une province du
Pérou. Frezier (i), dans fa relation du voyage de la mer
du Sud, en parle à-peu-près dans les mêmes termes,,
fous le nom de pico : mais celui-ci eft fans doute moins-
dangereux que la nigua de la Vera-Crux ; car ce voyageur
ne dit point que l'eau puifle rendre fa morfure mortelle.
Nous partîmes de la Vera-crux le i8 Mars au foir ,,
& prîmes la route de Mexico. Nous avions loué deux"
litières ; MM. Doz 6c Médina fe mirent enfemble dans
l'une , M. Pauly ôc moi dans l'autre : le refte des perfonnes
de notre fuite étoit monté fur des mulets , & nous pré-
( I ) Relation du Voyage de la Mer du Sud , aux côtes du Chili Se:
du Pérou, page 214,
EN CALIFORNIE. zr
cédoit avec nos bagages que conduiloicnc les Indiens.
Après avoir côtoyé la mer pendant deux heures en
tirant vers le nord-oueft , nous en «quittâmes les
bords pour nous avancer dans les terres à travers des bois
immenfes ; au bout de trois heures nous arrivâmes à
une rivière de l'autre côté de laquelle cft fitué un vil-
lage que l'on nomme F'ieja Kera-Crux. C'étoit effec-
tivement en cet endroit qu'écoit fituée anciennement
la Vera-Crux. La rivière qui pafle aux pieds de cette
ancienne Vera-Crux eft environ de la largeur de la Seine ;
on la traverfe dans un grand bac garni de garde-fous,
formés par des poutres de lo pieds environ de hauteur.
Nous ne vîmes rien de remarquable dans une ville à
moitié abandonnée, 6c qui n'eft même plus qu'un très
petit village , habité feulement par des Indiens; mais ce
qui nous rendit ce lieu recommandable,, ce fut la bonté
des rafraîchiflements que nous y trouvâmes , entre autres
du pain de froment infiniment fupérieur à celui que
nous avions mangé à la nouvelle Vera-Crux : nous ne
devions plus en trouver de femblable dans le refte de
notre route ; auflî en fîmes-nous provifion pour quatre
ou cinq jours : les bonnes fortunes de ce genre ne font
pas à négliger pour des voyageurs.
Nous partîmes de Vieja V^cra-Crux le lendemain
de notre arrivée pour nous rendre à Xalapa^ ville la plus
prochaine, éloignée d'environdcux journées de chemin;
nous ne rencontrâmes fur notre route que quelques petits
hameaux , compofés chacun de deux ou trois maifons ,
quelquefois d'une feule: le voyageur trouve à peine dans
ces endroits de l'eau pour fe défaltérer. Depuis V^icja
Vera-Crux jufqu'à Thermitage àc las Animas , c'eft-à-
dire dans un intervalle d'environ quinze lieues, on ne
rencontre ni fources ni ruifleaux où l'on puifle étaneher
la foif cruelle qu'excite une chaleur excelfve, & plus
encore la poufliere qui s'élève fous les pieds des mulets,
&. que l'on avale tout le long du chemin. On trouve
Il VOYAGE
quelquefois, à la venté, des femmes Indiennes établies
fur la route , qui vendent du lait aux voyageurs. Elles
ont coutume de fe tenir à quelque dillance du chemin,
èc ie cachent même derrière quelque arbre ou quelque
buiffbn : de forte qu'il faut être au faiç de leur manège
pour pouvoir profiter de leur fecours; car elles vous laif-
feroient pafîer , fur-tout les étrangers, ians offrir de leur
lait, mais les Indiens qui nous efcortoicnt nous avertif-
loient auffi-tôt qu'ils appercevoient quelqu'une de ces
femmes; nous les abordions ; elles nous conduiloient
alors à une petite cabane faite de broulTailles , où fe
trouvoit une vache dont elles nous donnoicnt le lait, pour
nous défaltérer, à un prix très modique. Ces rcncon-.
trcs étoient toujours trop rares pour nous.
Dans les belles contrées de l'f^urope, les commodités
de tout genre, répandues iur les grandes routes, ne laif-
fentappercevoir au ypy^gemr qu'il change de climat, que
par la variété des agién\encs qu'il rencontre. Il n'en étoit
pas de même dans le pays où nous nous trouvions alors;
une chaleur cxcelfivc, les chcmiîis les pais af}reux,&la
lenteur de la marche de nos mulets de charge , nous per-
mettoient à peine de faire dix lieues par jour, & ren-
doienc en même temps notre route longue ,ennuyeufe 6c
pénible. D'adUurs rien d'intéreiïant ne nous dédomma-
geoit de la fatiiiue; nous ne traverfions que des terres
incultes ou des bois ; nos regards ne rencontroient par-
tout qu'une nature fauvage; elle n'efl: pas fans beautés,
je l'avoue ; mais , à la longue , l'œil s'en rebute ; l'unifor-
mité porte en tout le dégoût , la variété feule a des
charmes, 6c c'eft elle que le voyageur va chercher de
pays en pays.
Nous arrivâmes à Xa/tz/Ji2 le zi Mars. Cette ville,
Xaiapa, adolfée à une montagne, ell: partagée en deux parties ;
l'une fituée au pied, 6c l'autre fur le penchant même de
Ja montagne. Les maifons font de pierres de taille 6c aflez
bien bâties; il n'y a, d'ailleurs, aucun édifice remar^
arrivée a
E N C A L I F O R N I E. 23
quable. Un commerce confidérable attire tous les deux
ans à Xalapa une grande quantité d'Efpagnols 6c d'In-
diens, qui s'y rendent vers le mois de Mars. C'eft alors
que, pendant l'efpace de fix lemaines, il s'y tient une
foire fameufe où fe débitent toutes les marchandifcs que
la flotte Efpagnole a apportées d'Europe à laVera-Crux,
& qui ont été de là tranfportés par terre à Xalapa , d'où
elles fe diftribuent dans tout le Mexique. Ces marchan-
difcs d'Europe confi fient en draps , foieries , mouflelines ,
toiles de toute efpece , & fur-tout des toiles de Bretagne
fines & claires, bijouteries tant en acier qu'en fer, 5:c.
\.ç.s Mexicains donnent en échange de la cochenille ou
de l'argent monnoyé. Je dis de l'argent monnoyé, car il
n'efl: permis à qui que ce foit d'avoir de l'argent ou de
Tor en lingot , dont l'exportation du Mexique eft abfolu-
ment défendue. La contravention aux règlements qui
regardent les mines eft le plus grand crime que l'on
puilTe faire au Mexique. Le faux monnoyeur eft pendu ;
l'afTaflin n'eft puni que de la prifon ou du banniftcment.
J'avois plufieurs lettres de recommandation que l'on
m'avoit données à Cadix pour quelques négociants éta-
blis à Xalapa ; mais étant arrivés fort tard , & defîrant
partir le lendemain de bonne heure, j'attendis à les re-
mettre à mon retour. Les environs de Xalapa nous of-
frirent ce que nous avions rarement vu depuis laVera-
Crux j des terres cultivées, des arbres de toutes efpeccs,
des bois touffus, ce qui annonçoit un fol aflez fertile;
en effet, il croît aux environs de Xalapa de très beau
maïs.
Au fortir de la ville nous trouvâmes une affez belle
chauftée, bordée de murs des deux côtés ^ qui nous
conduifit au haut de la montagne. Ce chemin eft ferré,
& feroit fort agréable s'il étoit moins roide ; la montagne ,
à la vérité, eft extrêmement élevée. Parvenus à fonfom-
mer,.nous jouîmes du coup d'œil le plus fingulier , nous
tarouvant, par notre élévation , avoir les nuages pour
24 VOYAGE
horizon. A quelque diftance de Xalapa , je commen-
çai à rencontrer le long de la route du fer difpofé par
couches noirâtres : bientôt après le terrein ne m'ofl-rit
plus que les vertiges de quelque volcan éteint aux envi-
rons; une moufTe légère couvroit à peine, dansquelques
endroits, des pierres arides ,& des laves qui traverfoient
le chemin ; ce qui me parut annoncer que ce volcan n'é-
toit pas éteint depuis fort long-temps , puifque ces laves
n'étoient point encore recouvertes de la moindre terre.
La nature, dans cet endroit, portoit l'empreinte du plus
grand défordre.
De Xalapa à las-Bigas , le plus prochain hameau,
éloigné d'environ fix lieues,, nous ne fîmes que monter
& defcendre , travcrfant une chaîne de montagnes dont
la largeur efb comprife entre ces deux lieux. Le hameau
de las-Bigas, ainiî que ceux que nous avions rencontrés
avant Xalapa, n'eftcompofé que d'une ou dcuxmaifons,
mais mieux bâties. Depuis laVera-Crux les habitations des
Lidiens ne font conffcruitesque de fimples rofeaux rangés
perpendiculairement 8c même à quelque diftance les uns
des autres ; de forte que l'on y ell peu à i'abri des in-
jures de l'air : il règne en outre le long de la maifon ,
entre le toit & le haut de la muraille qui le foutient,
un jour ou intervalle , pour laiffer un libre partage à la
fumée du feu que l'on fait au milieu de la chambre. Mais
parte Xalapa le terrein devenant de plus en plus élevé ,
& la température de l'air étant par conféquentplus froide,
les habitations font conftruitcs avec beaucoup plus de
de foin & mieux fermées ; les murailles font de pierres
de taille , 6c en plufieurs endroits de pierres volcanifécs
qui ne font point rares dans cette contrée.
Les habitants de las-Bigas font mulâtres ; les femmes y
vont à moitié nues , & laiflent voir la plus vilaine gorge
du monde. L'habillement ordinaire des femmes Indiennes
eftcompofé de deux pièces d'étoffe; l'une qui leur prend
à 1a ceinture ôc defcçnd à mi-jambe enferme de cotillon ;
U
EN CALIFORNIE. ^5
^l'autre, en forme de nappe, leur enveloppe les épaules,
& les couvre jufqu'à la ceinture. Cette elpece de man-
relet qu'elles appellent pagnorobos , ne leur fert commu-
nément que lorfqu'elles iortent : dans l'intérieur des
maifons elles l'ôtent ordinairement, & reftent ainfi à demi
nues. Quant aux hommes, ils portent une grande culotte
de toile, femblable à-peu-près à celles des matelots, Bc
par-deffus celle-ci ils en mettent une autre de peau : une
vefle fans manches leur couvre le corps ; ou bien une cou-
verture de laine, femblable au pagnorobos des femmes,
kur enveloppe les épaules ; quelquefois même ils vont
prefque abfolument nus, comme dans certains endroits
les plus écartés des villes.
L'Indien a le teint olivâtre , les yeux & les cheveux noirs,
la taille médiocre, la jambe grolFe & fortement deffinée,
lenez écrafé. Les femmes ont à-peu-prèslamemecouleur,
&: n'ont point la figure agréable: elles fe marient commu-
nément à 9 ou 10 ans, ëc ont des enfants jufqu'à 3 5 ou
40 ans; il cfl: rare néanmoins qu'elles en élèvent un grand
nombre. La petite vérole &. la rougeole font deux mala-
dies très communes dont il en réchappe très peu, fur-
, tout lorfque que pour les guérir les Indiens leur font
prendre des bains de fueur qui les font mourir prefque
au/lî-tôt.
Les mauvais traitements des maîtres de ces Indiens
contribuent autant que les maladies à détruire cette race ;
& les mines, à l'exploitation defquellcs on les emploie,
font tous les ans le tombeau d'un nombre infini de ces
malheureux. Les travaux immenfes que l'on a faits à
Mexico pour faire écouler les eaux du lac, en ont au ffi fait
périr plufieurs milliers ; de forte que le Mexique n'efl:
plus maintenant qu'un défert, en comparaifon de ce
qu'il étoitdu temps de Montézuma.
Le Gouverneur de la Vera-Crux avoit écrit au Vice-
Roi du Mexique avant notre départ, pour l'inftruirede
la route que nous devions tenir. Le Vice-Roi, en confé-
D
^6 VOYAGE
quence , avoit eu la bonté d'envoyer de Mexico des équi-
pages au-devant de nous. Nous les rencontrâmes à
Pérotic y hameau éloigné d'environ 40 lieues de la capi-
tale.
Nous employâmes quatre jours à nous rendre de Pé-
rotte à Mexico. La route eft agréable ; le chemin , prefque
toujours uni, eft pratiqué dans une gorge formée par
deux chaînes de montagnes, qui, tantôt fe rapprochant,
6c tantôt s'éloignant , donnent naiflance à de vaftes
plaines. A quelque diftance de Pérotte nous commen-
çâmes à appercevoir la fameufe montagne d'Orifaba^
qui pafle pour la plus haute du Mexique. Arrivés au ha-
meau de Sant'Yago, nous ne nous trouvâmes plus éloi-
gnés que de deux lieues de cette montagne ; elle nous
offrit alors le coup d'oeil le plus agréable. Son fommcc
étoit abfolument couvert de neige, tandis que le pied
ofFroir l'agréable verdure de terres parfaitement culti-
vées. Cette montagne d'Orifaba s'apperçoit de Mexico
même qui en eft éloigné de plus de vingt lieues.
11 fe trouve fur cette route de Pérotte à la capitale
du Mexique, une grande quantité de pierres volcanifées,
répandues en pluficurs endroits. Le village de //a^a prin-
cipalement en eft environné, & toutes fes maifons en
font bâties. Nous arrivâmes dans ce village le jour du
Vendredi-Saint au foir : ce jour de trifte folemnité pour
toute l'églife, n'eft pas moins reipe£lablc pour les Mexi-
cains que pour nous ; mais leur façon de le célébrer leur
eft particulière. En arrivant nous rencontrâmes une prc-
ceiiion fort nombrcufe; une ftatue de la Sainte Vierge
éccir à la tête, portée par des filles en mafques: un nom-
breux cortège de gens également mafqués les fuivoit ;
quelques-uns avec des guitares , d'autres avec des balTcs ,
exécutoient la mufique la plus grotefque ; de forte que
nous cuflions pris cette proceflion pour une mafcarade de
carnaval, plutôtquepour unecérémoniede religion, fans
la préfence des prêtres quil'accompagnoient, & dont la.
ce a
E N C A L I F O R N I E. 27
gravité faifoic le contrafte le plus ridicule. Faut-il s'en
étonner ? La force des armes n'a pu faire d« ces peu-
ples que de fort mauvais chrétiens ; 6c leur groffiéreté les
a fait enchérir fur l'ignorance & les abus fuperftiticux
qu'on reproche aux Moines Efpagnols qui delfervent le
plus fouvcnt les paroifles Indiennes.
Nous arrivâmes à Mexico le jour de Pâques i6 Mars à Arrivée
midi. Nous rencontrâmes, avant que d'arriver à la ville, Mexico.
M. le Marquis de la Torrc , Infpeclcur de l'infanterie. Sitôt
qu'il nous eut apperçus, il alla donner avis de notre arrivée
au Vice-Roi , qui envoya des ordres pour nouslailTer en-
trer dans la ville fans nous fouiller, & pour nous conduire
à la mailon des Jéfuitcs , oi^i notre logement écoit préparé.
Nous n'y eûmes pas plutôt m.is pied à terre , que qUiatre
Gentilshommes vinrent nous prendre pour nous conduire
dans le palais. Je manque d'expreffions pour peindre
l'amitié èc les politeffcs que nous reçûmes de M. le Mar-
quis de Croix, Vice-Roi du Mexique, ainfi que de toute
ia. Cour : il eut pour nous toutes les prévenances poiîî-
blcs, cherchant à nous procurer tout ce que nous pou-
vions defirer, & à nous rendre agréable notre féjour' à
Mexico. Nous n'eûmes point d'autre table quelalienne
pendant les quatre jours que nous reftâmes dans cette
ville : il eut la bonté d'envoyer un cuilînier ptiur traiter
à la françoife les perfonnes de notre fuite. Le lendemain
de notre arrivée il nous donna un de fes carrûires pour
parcourir la ville.
Mexico, capitale du Mexique, efb fitué fur le bord Defcription
d'un lac, 6c bâti fur un terrein marécageux traverfé d'un de Mexico.
grand nombre de canaux ; toutes les maifons, en cotifé-
quence, y font bâties fur pilotis. Le terrein s'aiTailîeen
plufieurs endroits, &: l'on y remarque plufieurs édifices
qui fe font enfoncés de plus de 6 pieds, fans que le corps
du bâtiment en ait été dérantré : de ce nombre efl: la
cathédrale dont nous parlerons tout à l'heure.
Les rues de Mexico font très larges, tirées au cordeau , "^07" %. i.
i8 VOYAGE
& fe coupent prefque toutes à angles droits. Les maifons^
y font afièz bien bâties , mais peu décorées tant à l'inté-
rieur qu'à l'extérieur ; leur forme, d'ailleurs , eft la même
qu'en Efpagne.
11 n'y j point à Mexico d'édifice fort remarquable. Le
palais du Vice-Pioi donne fur une grande place aflez ré-
gulière, au milieu de laquelle ell une fontaine. Ce palais
eft bâti très folidcment ; c'cft là fon feul mérite : il n'y
fautpoint chercher de décorations ; Ion enceinte renferme
trois cours aflez belles ; dans le milieu de chacune eft une
fontaine. L'hôtel delaMonnoie qui eft litué derrière ce
palais , eft un bâtiment fort coniidérable ; plus de cent
ouvriers y font occupés à convertir en piaftres, pour le
compte du Roi d'Efpagne, les lingots & mafl'cs énormes
d'argent que les particuliers polTefleu"S des mines vien-
nent y apporter 6c échanger contre de l'argent mon noyé.
On prétend qu'il fe fabrique dans cette monnoie environ
quatorze millions de piaftres par .in.
Ce qu'il y a de plus lupcrbementbâri font les égllfes,.
chapelles Se couvents. Il yen a beaucoup à Mexico qui
font fur-tout très richement ornées , entre autres la ca-
thédrale : on y remarque autour du maître autel uneba-
luftrade d'argent maflif ; 6c ce qui eft encore plus pré-
cieux, une lampe dont le corps d'argent eft d'une fi
grande forme qu'il y entre trois honmies pour la nettoyer:
cette lampe eft enrichie de figures, de têtes lion, &
d'autres différents ornements d'or pur. Les piliers de
l'intérieur de l'églife font tapifl^és d'un fuperbe velours
cramoifî bordé d'une large frange d'or. L'on eft moins
étonné de cette richefle des églifes de Mexico lorfqu'on
a vu le tréfor de la cathédrale de Cadix, qui renferme
des richefles immenfes; l'or èc les pierreries les plus pré-
cieufes y font prodigués fur les vafes ôc ornements facrés;
des ftatues de la Sainte Vierge, &c autres Saints, y font
ou d'argent maflif, ou revêtus des habillements les plus
riches.
EN CALIFORNIE. 19
L'extérieur de la cathédrale de Mexico n'eft: point fini;
on craint en l'achevant d'augmenter la malle du bâti-
ment, qui, comme je l'ai déjà dit, commence à s'afFaifTer.
Je ne parlerai point des autres églites; il y en a, je crois,
autant que de Saints dans le calendrier.
On remarque trois places principales dans la ville de
Mexico : la première eft la place Maïor , fur laquelle
donne la façade du palais; celle de la cathédrale; & le
marché, qui eft un double carré entouré de bâtiments.
Cette place eft au centre de la ville ; la féconde , immé-
diatement à coté de celle-ci, eft celle del l^olador^oxx
fc donnent les combats de taureaux ; la troilieme
eft celle del Santo-Domingo : ces places font alTez ré-
gulières ; au milieu de chacune eft une fontaine. Au nord
de la ville, vers les fauxbourgs , eft la promenade publique
ou YAlameda : un ruifleau règne tout autour, formant un
carré aiïez vafte , au milieu duquel eft un baffm à jet
d'eau, où viennent fe réunir en étoile huit allées d'arbres
qui font en fort mauvais état , le terrein de Mexico y
étant peu propre. Cette promenade eft la feule qu'il y aie
à Mexico ; tous les environs de la ville font marécageux
6c coupés d'un nombre infini de canaux. A quelques pas
& en face de l'Alameda, eft le Quemadero ; c'eft l'endroit
où l'on brûle les Juifs de autres malheureufes victimes
du redoutable tribunal de l'inquifition. Ce Quemadero
forme une enceinte de quatre murailles, qui renferment
des fours, & par-defTus lefquelles on jette ceux qui font
condamnés à être brûlés vifs par des Juges qui profeflenE
une religion dont la charité eft le premier précepte.
Le peu de temps que nous reftâmes à Mexico ne me
perm.it pas de prendre une plus ample connoifTance de
la ville. On me dit qu'il y avoit une Comédie Efpagnole,
mais je fus peu tenté d'y aller; macuriofité à cet égard
avoit été plus que fatisfaite pendant mon féjour à Cadix,
Je trouvai à Mexico un François oui parloir afTez biea
l'Efpagnol 6c le Mexicain, & qui avoit une connoilTance
yo V O Y A G E
parfaite de coûtée pays, qu'il habitoit depuis long- temps:
je le pris pour interprète, jugeant que îonfccours pour-
roic nous être tort nécellaire dans le relie de notre route ,
5c principalement eu Californie. A mefure que nous
allions avancer nous devions rencontrer desindiensplus
iauvages; M. le Vice-Roi crut même devoir nous donner
une eicortede trois foldacs pour nous mettre en éracde
nous défendre contre les voleurs, qui ne font que trop
communs fur les routes. Des troupes d'Indiens indomptés,
que les Efpagnols nomment Indlos bravos , attaquent
les voyageurs lorfqu'ils le fentenc les plus forts , les maf-
facrent, ou tout au moins, après les avoir dépouillés, les
attachent aux arbres voifms, s'emparent de leurs bagages
&: de leurs mulets , qu'ils détournent du chemin, & les
conduifent dans des lieux écartés & connus d'eux fculs ,
où ils partagent l'argent ëc cachent le relie du butin. 11
y a telle forêt 6c telle montagne, près defquelles nous
paiîâmes, que nos conducteurs nous ont aflùré renfer-
mer 6c receler les plus riches tiéfors, amafîes parées bri-
gands. On reconnoît ailement ces voleurs à un mou-
choir qu'ils tiennent entre leur dents pour fe cacher le
vifage 6c n'être pas reconnus. Quand on voit venir à foi
un Indien ainfi mafqué, le plus fur eft de le prévenir,
6c de le tuer s'il eft pollible : nous n'eûmes point heu-
reufement de ces mauvaifes rencontres. Après nous être
munis de vivres , 6c de ce qui étoit nécefî'aire pour notre
nouveau voyage,, nous partîmes de Mexico le 30 Avril
\-j6ç). MM. Doz 6c Médina avoienc loué une voiture à
roues; pour moi, prévenu delà difficulté des chemins,
je réfolus de faire le relie de la route à cheval : je n'en fus
pas, à la vérité, plus à mon aife ; niais j'évitai par-là
mille accidents qui ne manquèrent pas d'arriver à nos
deux officiers Efpagnols, ôc qui nous retardèrent plus
d'une fois.
De Mexico à San-Blas , oii nous allions nous rendre 6c
nous em.barquer pour traverfer la Mer Vermeille, l'on
EN CALIFORNIE. 31
compte environ 190 lieues; il y a fur cette route peu
d'endroits remarquables : à mefure qu'on s'éloigne de
Mexico, les habitations deviennent plus rares, &L le
chemin efl fouvent très mauvais, dangereux, & bordé
de précipices. La plupart du temps nous trouvions à peine
du pain dans les lieux où nous nous arrêtions ; tour porte
dans ces contrées l'empreinte de la plus grande mifere.
A quarante lieues de Mexico nous trouvâmes la pe-
tite ville de Queretaro , remarquable par une manufac-
ture de draps fort renommée. Cette ville eft allez bien
bâtie ; elle eft adoilée à une montagne jointe à une
autre plus éloignée &. plus élevée , par un iuperbe aque-
duc qui amené l'eau de l'une fur l'autre, d'où elle fe
répand dans la ville : cet aqueduc eft très folidement
conftruit. Ces fortes d'ouvrages, en général, font très
communs dans le Mexique, èL font les feuls remarqua-
bles en fait de bâtifle.
Ce fut aux environs de Queretaro que j'eus la fatis-
fadtion de voir &; de me convaincre, à différentes fois ^
de la vérification d'un phénomène que j'avois plus fou-
vent foupçonnéqu'obfervé^n France, cckii de la foudre
qui s'élève de la terre, au lieu départir du nuage félon
l'opinion commune.
Le 3 Mai au foir me trouvant proche de Molino , petit
hameau éloigné d'environ 36 lieues de Mexico , j'ap-
pcrçus,vcrs le fud , un gros nuage noir, élevé à une mé-
diocre hauteur au-deffus de l'horizon : tout le refte de
i'hémifphere paroiffoit enflammé autour de nous. Ce
nuage étoit foutenu par trois efpeces de colonnes, à
égale diftancc l'une de l'autre, dont la bafe touchoit
prefque l'horizon : tant qu'il refta dans cet état^ des éclairs
vifs ÔC fréquents paroiffoient en trois endroits du nuage
au-deffus de ces colonnes; ôc en même temps des traits
de lumière électrique partoient , comme dans une aurore
boréale, des points de l'horizon qui répondoicnt au-
deffous. Bientôt après le nuage s'affaiffa ; ce fut alors
31 VOYAGE
que nous vîmes la foudre s'élever à tout moment de la
terre, fous la forme de fufées, & aller éclater vers le
haut du nuage. Je craignis d'autant moins de me faire
illufion à moi-même, que, dans cette obfervation, toutes
les perfonnes de ma fuite, l'interprète, les foldats de
l'efcorte , qui n'étoient prévenus d'aucun efprit de fyf-
tême , furent les premiers à remarquer ce phénomène.
Une feule fois la foudre nous parut partir du nuage. Deux
jours après nous vîmes encore à-peu-près lemêmefpc£ba-
cle, ôc nous fîmes également la remarque de la foudre
qui s'élevoit de la terre aflbz lentement pour qu'on pût
diftinguer fon origine &i fa direcflion. On peut voir ce
que j'ai dit fur cette matière dans les Mémoires de l'A-
cadémie, année I7<î4, & dans mon Voyage de Sibérie.
Huit jouis après avoir quitté Mexico nous arrivâmes
à Guadalaxara. Cette ville eft confidérable ; c'eft le fiege
d'un Evêque. Nous reftâmes deux jours en cet endroit
pour nous y repofer ; j'en avois grand befoin , au bout
d'une route de loo lieues, faite fur de méchants mulets,
ôc durant laquelle nous avions efluyé les plus mauvais
temps par des chemins déteflables.
Nous partîmes le neuf de Guadalaxara, & allâmes
coucher à une fucrerie appellée Mutchitilté. Des mon-
tagnes, entaflees, pour ainfî dire, les unes fur lesautres,
dominent fur cet endroit , &. en rendent la fituation
afFrcufe : du milieu' d'un rocher fitué fur la plus haute
de ces élévations, fe précipite une fource, qui, tom-
bant 200 pieds plus bas fur un autre rocher, fait une
cafcade en forme de nappe , dont l'afpedl caufe en même
temps l'admiration 6c l'effroi. Il n'efi; pas poffible de trou-
ver un chemin plus affreux & plus dangereux que celui
que nous fuivîmes en fortant de Mutchitilté, pendant l'ef-
pace de près de cinq lieues ; ce chemin, qui , à peine , a qua-
tre pieds de largeur, eft taillé fur le penchant de la mon-
tagne, vers la moitié de fa hauteur , prefque à pic ; de
forte que l'on y eft, d'un côté, reflerré parla montagne
même.
siExr.oA nr. /-•( pied-id
■^B^U
SWNEO.i nu S-iXTOKIO .in.lD
DE MEXICO.
i&- £j irarJrfte ^fru^
EN CALIFORNIE. 33
même, & de l'autre fur le bord, par des précipices, & des
abîmes quelquefois lî profonds, que l'on apperçoit à
peine la cime des fapins les plus élevés qui croiflent
dans le fond du vallon. Pour furcroîcnous eîimes le mal-
heur de rencontrer dans ce paflage étroit une cara-
vane d'autres mulets qui venoient dans un fens con-
traire à nous; cette rencontre nous caufa le plus grand
embarras, & nous fit courir quelque danger, fur-tout
par rapport aux mulets qui portoient nos grands inftru-
ments. Au fortir de ce mauvais pas, nous trouvâmes un
alfez beau chemin jufqu'à la petite ville de Tep'ik , où
nous ne nous arrêtâmes que pour dîner , nous hâtant
d'arriver à San-Blas, où nous fumes rendus le lendemain
15 Avril, après avoir employé 28 jours à traverfer le
Mexique.
San-Blas eft un très petit hameau , fitué fur la côte
occidentale du Mexique , à l'embouchure de la liviere
de S. Pedro. Ce n'eft que depuis quelques années
qu'on a fait un établiflement dans ce lieu pour la com-
modité du tranfport des vivres & des troupes que les
Elpagnols envoient en Californie.
M. le Marquis de Croix , Vice-Roi du Mexique, avoit
prévenu depuis long- temps le Commandant de San-
Blas de faire en forte d'avoir un bâtiment prêt à nous
pafTer en Californie auiii-tôt que nous ferions arrivés.
Aucun des bateaux de paffage ne fe trouvoit alors dans le
port: le Commandant hâtoit la confi:ru(ftion d'un petit
paquebot, qui devoir être gréé ôc mis à flot dix jours
après notre arrivée; mais ce terme étoit encore trop
éloigné pour nous. Le trajet de San Blas au cap San-
Lucas n'eft, à la vérité, que d'environ (>q lieues; mais
les calmes & les courants que l'on éprouve fur la Mer
Vermeille, rendent quelquefois cette travcriée très diffi-
cile & très longue. Nous avions peu de temps de refte
jufqu'au moment de l'obfervation du 3 Juin. Hcureu-
iemcnt pour nous, il arriva lefoirmême un paquebot
£
34 VOYAGE
de Californie, lequel fût auffi-tôc deftiné à noustranf-
porter. Nous fixâmes le moment de notre départ à
quatre jours de là, ne prenant que le temps abfolu-
ment néceflaire pour taire nos provifions de vivres,
& de tout ce dont nous avions befoin dans un pays où
nous ne devions rien trouver. MelTieurs les Officiers El-
pagnols chargèrent fur le bâtiment de quoi conftruire
un obfervatoire complet; quant à moi, je pris feule-
ment des toiles de tentes, &L un gros pilier de bois de
cèdre pour fufpcndre ma pendule.
Le Pilote de notre bâtiment flattoit peu nosefpéran-
ces, en nous racontant que l'année précédente il avoit
employé vingt-un jours à palier de San Blasa San-Lucas,
quoique dans une faifon plus favorable que celle où
nous nous trouvions. J'héfitois alors fi jenemefixeroispas
fur le continent du Mexique , plutôt que de rifquer de
me trouver fur mer au moment de l'obfervation ; mais
je perdis bientôt de vue cette relFource lorfquc l'on m'eut
appris que des pluies réglées alloient commencer fur la
côte dès le mois de Mai, èc continuer prefque fans in-
terruption jufqu'à la fin du mois fuivant. Le meilleur
parti étoit donc de s'embarquer pour aller gagner l'autre
côté de la Mer Vermeille, où l'on avoit l'efpérance d'un
plus beau ciel.
Ce fut le I 9 Avril que nous fortîmes du port deSan-
Blas. Nous éprouvâmes bientôt ce que notre Pilote nous
avoit annoncé : en effet, pendant les quinze premiers
jours nous fûmes le jouet des calmes, des vents contraires
&des courants. Enfin, le 4 Mai nous mîmes , pour la pre-
mière fois, le cap en route portant vers le nord; mais le
vent éroit fi foible, Se par bouffées fi fouvent interrompues
de calmes, que nous fûmes près de 5 jours à nous élever
jufqu'au port de Mazatan , 35 lieues environ au nord de
San-Blas. Si nous avions gagné quelque chemin en lati-
tude, nous avions bien peu fait en longitude. Nous
commençâmes alors à défefpérer de pouvoir arriver affez
E N C A L I F O R N I E. 3^
à temps en Californie pour faire notre obfervation : on
juge du défefpoir où nous laiiloit cette penfée.
Notre Pilote croyoit expliquer parfaitement la caufe
de la contrariété des vents, en l'imputant au courroux
du ciel , qu'il prétcndoit appefanti lur nous à caufe de
nos péchés. Pour détourner la vengeance célefte il ex-
posa fur l'habitacle une oflrande qu'il tit à St. François
Xavier, en le priant bien de nous envoyer du bon vent.
Le remède du dévot Pilote ne fit pas fur le champ fon
effet; car les jours fuivants nous fumes en plein calme,
ou contrariés par le vent.
Notre fituation devint alors chaque jour plus affreufe:
les vivres commençoient à nous manquer, principale-
ment l'eau : il fallut fe réduire à la ration d'une pinte
par jour; encore cette eau étoit-elle déteftable_, ayant
été mife dans des tonneaux oùily avoit eu du vinaigre.
Tous ces petits défagrénients auroient été comptés pour
rien fî nous euilions pu en être dédommagés par quelque
lueur d'efpérance. Nous nous trouvions au vingt-cin-
quième jour de notre traverfée; il ne nous enrefloitque
dix-huit jufqu'au moment de l'obfervation, &: cependant
nous étions encore éloignés de l'endroit du débarque-
ment. Il eft vrai que nous étant élevés afTez avant vers
le nord, nous nous étions rendu déformais favorables
les courants & les vents les plus ordinaires. Mon dcffein
dès-lors fut de débarquer au premier endroic de la Cali-
fornie où nous pourrions aborder ; il m'importoit peu que
le lieu fut défert ou non, pourvu que j'y puiTe faire
l'obfervation.
Enfin , à l'aide de quelques rifées de vents favorables
6c des courants, nous parvînmes le 16 Mai au loir à
avoir connoiflance des terres de Californie , que nous
cftimâmes être celles du cap San-Lucas, éloignées de
nous d'environ 18 lieues ; nous nous en approchâmes
le lendemain par un vent foible. Le 18 au foir nous
pétions qu'à 5 lieues de terre. Je voulois ablolumenc
Eij
3fé VOYAGE
q.ue l'on débarquât fur la côte la plus voilîne ; mais je
fus feul de cet avis, & toute la journée fe paiFa en dif-
euiîions. Meilleurs les Eipagnols vouloient aller faire le
débarquement dans la baie de San-Barnabé, dont nous
étions encore éloignés de plus de i 5 lieues : c'étoit par
conféquent alonger notre voyage, peut-être même
de plufieurs jours i car pour gagner cette baie , nous
avions coiine nous les vents de nord & de nord-oueft
qui éioicnt les plus communs. Ces Meilleurs m'objec-
taient, à la vérité, qu'en débarquant fur la côte du cap
San-Lucas on rilqucroit le bâtiment : je répondis à
cela que j'étois convaincu que Sa Majefté Catholique
préféreroit de perdre un méchant petit bâtiment, plutôt
que les fruits d'une commiffion auffi importante que la
nôtre ^ d'ailleurs nous ne devions pas être les premiers
qui cuflcnt débarqué à la Million de San-Joieph, Le
patron, que nous fîmes appeller à ce fujet, fut de mon
avis ; il nous dit qu'à la vérité le débarquement feroit
plus difficile &plus longen cet endroit que dans la baie
de San-Barnabé, mais qu'au refte il croyoit pouvoir
répondre du bâtiment & de l'équipage. D'après cette dé-
eifion, qu'il nous donna même par écrit, il fut arrêté
que' nous débarquerions à San-Jofeph. En effet, nous
jetrâmes l'ancre le 19 Mai aune demi-lieue de la côte^
vis-à-vis de l'embouchure de la petite rivière qui paffe par
cette Million. Mais pour être à la fin de notre traverlée,
nous n'étions pas encore au terme de nos inquiétudes^
Il s'éleva de la partie de l'eft un veut qui fraîchit déplus
en plus. Ce vent i 5 jours plutôt nous eût été favorable;
mais dans la circonftance préfente il étoit infiniment à
craindre, & nous menaçoit d'un prochain naufrage en
nous faifant échouer fur la côte. MeffieursDoz&; Médina
commencèrent alors, ainfique le Pilote, à me reprocher
d'avoir voulu débarquer à San-Jofeph : ce vent d'eft ,
me difoient-ils, nous eût été favorable pour la baie de
San-Barnabé. Il eft toujours aifé de juger des chofes
EN CALIFORNIE. 37
d'après l'événement; d'ailleurs je n'avois donné la veille
que ;"non limple avis : ces Meilleurs, en y acquiefçant,
Tavoient (ans doute trouvé bon. L'événement me juftifia à
mon tour ; car le vent ayant commencé à calmer, nous
eûmes entin un moment favorable pour faire notre dé-
barquement, 6c nous en profitâmes avec emprelFemenr.
Le Pdote envoya d'abord le canot reconnoître la côte,
& tenter l'endroit oîi l'abordage feroit le plus facile. Je
n'ofai rifquer mes inftruments dans ce premier eflai ; je
mis leulement dans ce canot une partie de mes menus
effets. Le débarquement fe fit on ne peut pas plus hcu-
reufement. Je dilpolai alors mes inltrumcnts les plus
eflentiels à être tranfportés dans le fécond envoi, & je
deftinai MefFieurs Pauly èc Noël à les accompagner;
quant à moi, je me réfervaipourle troifieme voyage. Le
fécond débarquement ne fut pas fi heureux que le pre-
mier : M. Pauly m'écrivit du bord du rivage, qu'il avoic
couru beaucoup de danger, la chaloupe ayant été fubmer-
gée plufieurs fois parles lames; mais enfin ils en avoienc
été quittes pour la peur, dc pour être mouillés, ainfi que
toutes les caifTes. Cette dernière circonfbance me fie
prendre les plus grandes précautions pour le tranfporc
de ma pendule que j'avois gardée avec moi, & pour la-
quelle je craignois infiniment l'eau de la m.er ; je pris
donc le parti de m'afTeoir moi-même defTus après l'avoir
bien enveloppée, afin de la garantir des lames qui pou-
voient nous inonder.
Notre fort nè'dépendit plus alors que de l'adrelîe dit
patron de la chaloupe, & de l'cxaditude des matelots
à exécuter la manœuvre. On avoit tracé, dans les voyases
précédents, la route que nous devions tenir, par le
moyen d'une bouée, ou d'un tonneau qui fiottoit fur
l'eau: notre patron, l'œil fixé fur cette marque, y gou-
vernoit le bateau à travers une.jnultitude de vagues, qui,
avec un mugiflement affreux , alloient fe précipiter fur
38 VOYAGE
le rivage , Se fe brifer au milieu des rochers couverts
d'écume. Les matelots, de leur côté, attentifs au com-
mandement, tantôt forçoient de rames, tantôt reiloient
immobiles, foit pour éviter une lame prête à fondre èc
à fe brifer fur la chaloupe , foit pour s'abandonner à celle
qui pouvoir nous porter à terre & nous faire échouer
doucement fur la rive. C'cft par cette manœuvre , exé-
cutée avec toute l'adrcfle &: le bonheur poilible, que
nous nous trouvâmes enfin rendus fur la côte de la Cali-
fornie _, à l'entrée de la rivière de San-Jofeph. La nuit
étoit alors fort proche : réfolu de ne me rendre à San-
Jofcph que le lendemain , je me couchai fur le rivage.
Ce fut alors que, jettant les yeux fur mes inftruments
qui m'environnoient, 6c dont aucun n'avoir éprouvé le
moindre dommage, parcourant en idée les efpaccs de
terre ôc de mer que j'avois li heureufement traverfés,
fongeant fur-tout qu'il me reftoit encore un temps fuffi-
fant pour me difpofer parfaitement à mon obfervation,
j'éprouvois à chaque inftant une facisfadlion &. une joie
dont il m'eft impoffible de donner l'idée.
La nouvelle de notre arrivée fut portée en peu de temps
à la Million de San-Jofeph; on nous envoya aulli-tôc
des mulets : je pris donc le parti de m'y rendre, laifTanC
M. Pauly fur le rivage avec les bagages que je ne pus
emporter avec moi, mais qui furent transférés le lende-
main. Je me hâtai de m'établir à San-Jofeph Si. de me
mettre en état de commencer mes obfervations prélimi-
naires. J'étois logé avec tout mon mond»dans unevaftc
grange. Je fis enlever la moitié du toit du côté du midi
pour y mettre Amplement des toiles qui puflent s'é-
tendre & fe replier à volonté. Tous mes inftruments
furent bientôt drefles 8c établis dans l'état où ils dévoient
me fervir pour l'obfervation du paflage de Vénus. Le
temps me féconda parfaitement ; j'eus tout le loifir de
faire des obfervations exactes 6c multipliées pour régler
EN CALIFORNIE. 39
ma pendule. Enfin le trois Juin arriva, & j'eus lieu de
faire i'obfcrvacion la plus complecte , donc on va voir
les détails dans la féconde partie de cet Ouvrage^
Le Lecteur verra fans doute avec peine la rela-
tion du voyage de M. Chappefc terminer à l'endroit où
elle eût été la plus intérelîante, par les lumières &. les
connoiflances nouvelles qu'il eût pu nous donner fur la
Californie; mais,ainli que je l'ai dit dans l'avant-propos,
il m'a été impoUîble deVuppléer ici , non plus que dans
bien d'autres endroits de cette relation , au filence de
l'Auteur; les perlonnes qui l'ont accompagné n'ont pu
me donner à ce iujct aucune notion particulière. Le feul
reflouvenir qu'elles aient apporté de ce pays fi fatal,
€i\ celui du trille événement de la mort de Al. Chappe :
je vais tranfmettre ici le récit qu'elles m'en ont fait. Un
fujet aulfi touchant ne pourra manquer d'intéreller le
le£leur, ôc de renouveller des regrets bien mérités dc
bien flatteurs à la mémoire de Al. Chappe.
Il regnoit depuis quelque temps au village de San-
Jofeph une maladie contagieufe, qui avoit enlevé déjà
un tiers des habitants lovlque Al. Chappe y arriva. Il eût
peut-être été facile de fe fouftraire à la contagion en
fuyant de ce lieu , &: allant s'établir plus loin vers le cap
San-Lucas : c'eft ce que AlAl. les Officiers Efpagnols pro-
poferent d'abord ; mais il ne reftoit plus que peu de jours
jufqu'au mjomencde l'obfervationjS: l'on eût perdu, dans
un nouveau tranfport, desinftanrs infiniment précieux.
M. Chappe, moins fenfible au danger de fa vie qu'au
malheur de manquer fon obfcrvation ou de la faire
incompletre, fignifia qu'il refteroit à San-Joleph quoi
qu'il dût en arriver.
Chaque jour cependant, la morr_, moilTonnant autour
de lui, l'avertiffoit du danger qu'il couroit; mais chaque
jour l'approchoit du terme de fesvœux, & Al. Chappe
n'étoic fenfible qu'à cet objet. La joie qu'il eut de l'avoir
40 VOYAGE
rempli fut, à la vérité, bientôt altérée par la vue du
trifte fpe£lacle dont il commença à être le témoin.
Dès le 5 Jum, c'cft-à-dire deux jours après robfcrva-
tion du pairage de Vénus , Mcffieurs Doz, Médina, &
tous lesÊfpagnols de leur fuite, au nombre de onze pcr-
fonnes, tombèrent malades. Ce ne fut plus alors qu'une
confternation générale : les plaintes des mourants, le
défefpoir de ceux qui fe voyoient frappés à leur tour de
lamaladie, èi. qui n'efpéroicnt que Je fort commun, tout
confpiroit à rendre le village de San- Jofeph un lieu d'hor-
reur. Quiconque a connu particulièrement M. Chappe
n'a jamais remarqué en lui que deux fentiments; l'amour
de la gloire , 6c celui de l'humanité. Quelle fituation que
celle où il fe trouva alors , pour un cœur comme le fien î
Prefque feul , entre tous, que la contagion fembloitrcC-
pc£ter jufqu'à ce moment, il fe faifoit un bonheur de
partager fcs foins entre tous les malheureux qui l'envi-
ronnoient; mais bientôt il fut lui-même frappé de la
maladie. Réduit à avoir befoin de ces mêmes fccours qu'il
donnoit un moment auparavant aux autres, M. Chappe
ne trouva perfonne pour les lui adminiftrer. Meilleurs
Pauly & Noël écoient tombés malades avant lui , & fe
trouvoient à toute extrémité ; le feul domeftique de
confiance étoitdans le même état : tout le mondeenun
mot. Indiens, Efpagnols èc François, ou fe voyoit aux
portes de la mort, ou bien s'y fcntoit entraîné.
M. Chappe avoir apporté de France une petite phar-
macie èc des livres de Médecine. Devenu Médecin par
occafion , il avoir examiné les fymptomcs de lamaladie;
&C feuilletant enfuite dans ces livres , il y avoir cherché les
remèdes convenables. Mais il fe trouva bientôt dans le
même embarras que ceux qui confultoient autrefois les
Oracles, dont la réponfe obfcure renfermoit plufieurs
fens fouvent contraires, & ne les rendoir pas plus éclairés
qu'auparavant. En effet, M. Chappe fentant un point
de côté vii&lent, & ayant de temps en temps le tranfport
au
E N C A L I F O R N I E. 4,
au cerveau, les livres confultés ordonnoientla faignée;
mais ils la défendoient exprefTément, &c indiquoiencles
purgatifs , dans le cas où la maladie feroic produite par
un amas de bile : c'étoit précifément le plus difficile à
diftinguer. M. Chappe , à tout halard, fe décida pour
les purgatifs. Dans les moments de relâche que luilaif-
foient les accès, il étoit obligé de préparer lui-même fes
drogues : il n'oloit fe fier à la feule perlonne qui reftoit en
fanté, parceque quelques jours auparavant elle avoic
penfé empoifonner M. Noël, en prenant une drogue
pour une autre.
Telle étoit la fituation afFreufe de M. Chappe. Après
trois jours d'accès confécutifs, il prit deux médecines
qui lui firent les plus grands effets, & le foulagerent in-
finiment. Mais trop enhardi par ce fuccès, pouiïe d'ail-
leurs par un zèle que nous oierons blâmer ici,puifqu'il
étoit imprudent j M. Chappe voulut, le même jour de
fa féconde médecine, obferver l'éclipfe de lune du iS
Juin.
On ne pourra , fans admiration , jctter les yeux fur les Seconde Parc,
détails de cette obfcrvation. Il eft inconcevable com-
ment M. Chappe, languifîant, accablé parlcsloufirances ,
aff-oibli par les accès qu'il venoit d'ellbyer, a pu donner
à ce phénomène une attention fuivie , comme l'auroit pu
faire le plus habile Obfcrvateur dans la fanté la plus par-
f<\ite. M. Chappe, à la vérité, put à peine achever cette
obfcrvation. Il lui prit une foiblcire , ainfi qu'un mal de
tête qui ne le quitta plus ; fon tempérament robufte
combattit encore quelque temps , mais ne fit que pro-
longer fes foulFranccs: il voulut le faire faigner ;fon Inter-
prète, Chirurgien peu exercé, 6c d'ailleurs en mauvaife
lanté, le manqua; mais, encouragé par M. Chappe lui-
même, il réuîllt enfin à lui tirer quelques palettes de
fang. Cette faignée ne fit qu'augmenter le mal. Le foir
même M. Chappe crut fentir une obftruclion ; il elTiya
de monter à cheval , &C fut un peu foulage : mais bientôt
F
41 VOYAGE
les accès de fièvre le reprirent, & le réduifirent dans
l'état le plus fâcheux ; il louffiroit les douleurs les plus ai-
guës, ôc manquoit de tout adouciilement. Le village de
San-Jofeph n'étoit qu'un délert : les trois quarts des
habitants étoient morts, le relie avoit pris la fuite pour
aller chercher un air moins empefté ; mais la contagion
s'étoit déjà répandue au loin. C'efl: dans cet abandon
total que M. Chappe palTa les derniers moments de fa
vie. Il expira enfin le premier Août au milieu de Mellieurs
Pauly , Noël, £>c des autres perfonnes de fa fuite, qui
avoient à peine elles-mêmes la force de fe traîner auprès
de lui, de lui tendre les bras, ôc de recevoir (on dernier
foupir.
M. Chappe vit la mort s'approcher avec la fermeté
& la férénité d'un vrai Philofophe. Le but de fon voyage
étoit rempli , le fruit de fon obfervatîon ailuré ; il ne
vit plus rien à regretter , &. mourut content. Le public &C
{es amis furent les ieuls qui perdirent à fa mort. Leurs
regrets font aujourd'hui Ion plus digne éloge, èL laré-
compenle la plus flatteuiede les travaux.
MM. Doz &c Médina s'empreflerent de rendre à
M. l'Abbé Chappe les derniers devoirs. Le Curé ou
Millionnaire de San-Jofeph étoit déjà mort depuis long-
temps, ainfi que prefque tous les autres habitants.
Efpagnols, François, éc chacun des furvivants, raf-
femblant alors le peu de force qui lui reftoit, fe
vit obligé de prêter {es mains au plus trifte des mi-
nifteres, &c fentitrenouveller en ce cruel moment toutes
les craintes 6c les horreurs d'un fi malheureux fort. Parmi
les Efpagnols, M. Médina le trouvoit dans un état de
foiblelFe & de langueur qui lui laifloit peu d'efpérance de
furvivre long-temps à M. Chappe. Le fieur Dubois, parmi
lesFrançois, n'étoit pas moins dangereufement malade.
Quant à MM. Doz,Pauly & Noël, leur fanté fe rétablifloic
de jour en jour. Malgré l'impatience qu'ils avoient tous
de quitter San-Jofeph , ils furent obligés d'y relier encore
EN CALIFORNIE. 45
deux mois à accendre le bâtiment qu'on étoit convenu
avec M. Chappe de lui renvoyer de San-Blas pour le re-
paiîer au Mexique. Les malades mêmes nedefiroient pa^
retour de la fanté avec plus d'ardeur, que l'arrivée oe
ce bâtiment ; on apprit enfin qu'il venoit de m.ouiller
vis à-visdeSainte-Annejdansl'aniede Cer^/vo. MM. Doz
& Médina , avec les Efpagnols de leur fuite, à Tex-
ception de trois qui étoient morts, fe rendirent donc à
Sainte-Anne, ainii queMeflieursPauly , Noël, ôcledo-
meftique de M. Chappe. Quant à l'Horloger, il ne put
être tranfporté ; on le lailla à San-Jofeph, en le recom-
mandant à quelques Indiens qui reftoient encore dans
le pays, au cas qu'il pûten réchapper : cependant, quelques
jours avant de s'embarquer , M. Pauly l'envoya chercher
pour le faire tranfporter s'il étoit poffible à Sainte-Anne ,
& de là fur le vaifleau ; mais on ne rapporta que la nou-
velle de fil mort, que la douleur de fe voir abandonné
dans un pays inconnu avoit ians doute hâtée. Nos voya-
geurs n'eurent plus rien alors qui les arrêtât en Californie.
Ils s'embarquèrent fur la Mer Vermeille, &c y éprouvè-
rent de très gros temps , qui leur firent courir de vrais dan-
gers : il abordèrent enfin à San-Blas. Là, M. Médina fe
trouva dans l'état le pliis fâcheux. Depuis le moment où
il étoit tombé malade à San-Jofeph, il n'avoit fait que
languir. Le fpectacle de la mort de M. Chappe, la fa-
tigue du tranfport de San-Jofeph à Sainte- Anne, & princi-
palement de la traverfée de la Mer Vermeille , n'avoient
fait qu'aggraver fon mal , 6c le conduiiirent au tombeau.
Il mourut à San-Blas peu de temps après le départ de
M. Doz fon confrère, qui s'étoit trouvé obligé de le
quitter pour fe rendre à Mexico.
M. Médina, ayant partagé les dangers , les travaux , &
le malheureux fort de M. Chappe, mérite bien fans
doute d'avoir part, avec l'Aftronome François, aux
éloges & aux regrets du public. L'obfervation du
Fij
44 V O Y A G E, &c.
pafTage de Vénus ne fut pas faite avec moins de fuc-
cès de la part de MM. les Aftronomes Efpagnols que de
celle de M. Chappe. Ce dernier d'un côté. Meilleurs
Doz ôc Médina de l'autre, chacun apporta à i'envi tous
fes foins &. toute l'adrefTe dont il étoit capable à l'obfer-
vation de ce phénomène. Une noble émulation lesfépa-»
roit en ce moment, pour fe difputer unfuccès qui ne de-
voit tourner qu'à l'utilité du genre humain. Rivalité des
Nations ,, puifliez-vous n'avoir jamais d'autre but !
Obfcrvanon de la déclinai fon ù de V inclinai fou
de l'Aiguille aimantée.
J'a I raflcmblé ici , dans une Table particulière, toutes
les obfervations que M. Chappe a faites en diflerents
lieux fur la déclinaifon & fur rinclinaifon de l'aiguille
aimantée. Les deux bouirolcs qui y ont été employées,
font de la conftruclion du fieur Magny ; l'une & l'au-
tre exécutées avec tout le foin poflible.
M. Pauly , à fon retour, me remit entre les mains la
bouflble de déclinaifon; l'aiguille cft de fîx pouces de
longueur. J'en fis ufage pendant quelque temps , & je
déterminai fa déclinaifon à l'Obfervatoire Royal , le
25 Juillet 1771 , vers trois heures après midi, de 19°-^.
Depuis elle a palTé entre les mains de MM. Pingre &;
Borda qui l'ont emportée dans leur dernier voyage ;
ce qui nous procurera une fuite curieufe & intéreiranre
d'obfcrvations fur la déclinaifon de l'aiguille aimantée,
déterminée dans un grand nombre de lieux différents
avec la même bouffole.
Quant à la bouflole d'inelinaifon , elle n'a pas été
rapportée avec les autres effets de M. Chappe, &. nous
la regrettons d'autant plus , qu'il y en a peu de cette
efpece qui foient bien exécutées. M. le Marquis de Cour-
tenvaux, qui avoit vu & éprouvé celle de M. Chappe
avant fon départ , m'a affuré qu'elle étoic auffi parfaite
qu'elle pouvoir être,
C'eft communément par Tamplitude du foleil , foie
a fon lever, foit à fon coucher, que M. Chappe a dé-
terminé fur mer la déclinaifon de l'aiguille aimantée-
cette obfervation eft , comme l'on fait , beaucoup pfus-
facile ôc plus exacte que celle de l'azimut. Sur terre y.
comme au Havre , à Cadix, à la Vera-Crux , M. Chappe,,
au moyen d'une méridienne tracée, déterminoit dired:e-
ment cette déclinaifon. Quant à i'inclinaifon ^ il l'ob-
4S V O Y A G E, &c.
fervoit quelquefois dans tous fens : il plaçoic d'abord le
plan de la bouflole ou de l'aiguille dans le vrai méri-
dien ; enfuite dans le plan du méridien magnétique ;
& enfin dans un plan perpendiculaire , foit au méri-
dien du lieu , foit au méridien magnétique. Nous avons
eu foin d'indiquer ces diflerentcs diretlions dans la Ta-
ble fuivante.
JOUKS.
Longitude
par rapport
à Pans.
Latitude.
Dcclinaifon
de l'aiguille
aimantée
vers l'oued.
Inc
inaifon de l'aiguille aimantée
au dellous de l'iioiiion.
1768
Dcgt. Min.
Dcgr. Mia.
Oegr. Min.
Ucg.
Vlin. vcisle
Direftion.
Sept.
au Havre -
de-Grace.
au HavreO
de-Gcace. \
I? 41
71
14 Nord.
Méridien.
Odob.
f 66
jo Nord.
Méridien.
i?
à Cadix.
à Cadix.
i> Il
C8i
34 Nord.
7 Oueft.
l'ian magnétique,
l'erpend. au n;érid.
Dec.
19
53 II
II 13
1} 0
64
jo Noid.
Plan magnétique.
1769
Janvier
I
iS ;8
19 19
14 IÇ
î
17 6
17 4«
>4 7
60
I Nord.
Plan magnétique.
7
>7 47
17 17
14 1}
S
il 0
IS 16
15 57
60
t« Nord.
Plan magnétique.
M
jo î
2; Il
8 17
s?
; 1 Nord.
Pl,in magnétique.
17
Î5 •
i' 33
8 fo
18 4
S' î4
7 Nord.
Plan magnétique.
IS
44 4i
' >5
0 Ouert.
Peipend. pi. niagn.
14
4Î 47
17 13
I fO
iiv.
I
Î7 38
ij 11
l 3'
Ç48
5; Nord.
Plan magnétique.
1
ÎS '
'S >i
4 10
> 48
R4
^ Y Nord.
JO Oueft.
Plan magnétique.
Peipcnd. pi. magn.
«S 48
Ç 47
IÇ Nord.
10 Oueft.
Plan ni.ignctique.
7
IÇ II
^8«
Perpend. pi. magn.
8
64 50
7' ?
•4 n
ifi 45
4 7
17 30
i£
74 3*
17 11
18 0
«7
7Î îo
•7 47
4«
50 Nord.
Plan magnétique.
17
87 4«
11 18
vers l'eft.
49
0 Notd.
Plan magnétique.
Mars
Ç40
ç Nord.
Méridien.
»f
i Vcra-Crux.
à Vcia-Ctux.
< 18
ho
47 Nord.
Plan magnétique.
Perpcndiculane au
h»
} Oueft.
plan magnétique.
EXPERIENCES
Sur la pefanteur de différentes eaux _, & principalement
fur celte de mer ^ depuis Cad'x jujqucs aux côtes de
la Californie.
JVloNSiEUR Lavoifier lut en 1768 à l'Académie un
Mémoire lur une manière de déterminer la peiantcur
des fluides beaucoup plus exa£lement qu'on ne l'avoit
fait jufqu'alors. M. Chappe fentit aifément combien
cette méthode pouvoit avoir des applications heureufes
dans le voyage qu'il alloit entreprendre ; il pria en confé-
quence M. Lavoilier de lui remettre un mémoire inftruc-
tiFqui pût le guider dans ce genre d'expérience, &. de
lui faire conftruire un inftrument lemblable à celui dont
il s'étoit fervi.
L'inftrument qui futremisenconféquenceàM.l'Abbé
Chappe parM. Lavoifier , confiftoiten un cylindre creux
de laiton , de 4 pouces de diamètre , fur une hauteur de
8 pouces j ; le fond de cet inftrument étoit lefté avec un
culot d'étain , dont la pefanteur étoit telle que la tota-
lité du cylindre étoitprefqueéquipondérableà l'eau. La
partie fupérieure de cet inftrument étoit furmontée par
une tige, laquelle fupportoit un petit baflin de balance.
Cet aréomètre n'étoit autre chofe que celui décrit par
Farenhcit dans les T ranf actions Philofophiqucs , année
1724, n°. 384; à la différence feulement qu'au lieu d'être
exécuté en verre , il étoit conftruit en métal, que le
volume en étoit beaucoup plus confidérable , & qu'on
avoit cherché à lui donner une forme portative, ôc peu
embarraftante en voyage.
Cet aréomètre pefoit très exa(flement4 livres, i once,
4 gros , 40 grains.
Lorfqu'on le plongeoitdans de l'eau diftii'éeà 14 de-
grés-^ du thermomètre, on étoit obligé d'ajouter pour
48 VOYAGE
le faire enfoncer jufqu'à une marque gravée fur la tige ,
de le charger d'un poids de i gros 7 grains juftes ; c eft-
à-dire qu'il déplaçoic 4 livres, i once, 5 gros, 47 grains
d'eau diftillée à 14 degrés ^ du thermomètre de M. de
Réaumur.
Cet inftrument, tout exadb qu'il étoic, ne pouvoic
donner que le rapport des pclanteurs des difFérents flui-
des, ôc cette pefanteur relative ne luffifoitpas pour rem-
plir l'objet que M. l'Abbé Chappe avoit en vue; il étoit
nécefl'aire qu'il pût les rapporter à un volume confiant,
& c'eft à quoi il ne pouvoit parvenir qu'en déterminant
d'une manière cxa6le la pefanteur abfolue d'un fluide
quelconque. M. Lavoifier s'étoit occupé de cet objet
long-temps avant le départ de M. l'Abbé Chappe, Se il
lui avoit communiqué le réiultat de Tes expériences ; il
ne les a pas encore publiées. La pefanteur du pied cube
d'eau diftillée à 14 degrés-;^ du thermomètre, étoit, fui-
vant la note qu'il en avoit remife à M. Chappe, de
6^ livres, 15 onces, i gros, 13 grains.
Il n'étoit pas difficile, d'après cette détermination, de
calculer quel étoit le rapport de volume du pefe-liqueur
à celui du pied cube; il fut trouvé de 37847 à 644619,
d'où il fut conclu qu'un grain , fur le badin du pefe-
liqueur, répondoità 17, 0315 fur le pied cube ; en confé-
quencedequoi, M. Lavoifier conflruifit pour M. l'Abbé
Chappe une table pour rapporter au pied cube les difl?e-
renccs obfervées fur le pefe-liqueur.
Il reftoit encore une autre difficulté à vaincre , & ce
n'étoit pas la moins confidérable : on fait que l'eau
change de volume & de poids fuivant qu'elle ell plus ou
moins chaude ; mais ce que l'on ignoroit encore, c'efl
que la loi qu'elle fuit dans fa dilatation 6c dans facondcn-
fation n'a aucun rapport à ce qui s'obferve dans les au-
tres fluides , & notamment dans ceux que nous em^
ployons pour nos thermomètres.
JVI. Lavoifier avoic levé cette difficulté en calculant ,
pour
EN CALIFORNIE. 49
pour le volume du pefe-liqueur de M. TAbbé Chappe,
une table de correction, pour réduire toutes lespefanteurs
trouvées en celle qu'on auroit eue à 14 degrés -^ du ther-
momètre de M. de Réaumur. Cette table s'étendoit de-
puis douze degrés jufqu'à z} ; elle avoit été conftruite
d.'après des expériences très multipliées qui n'ont pas
encore été publiées, & qui feront partie de l'ouvrage
de M. Lavoilier fur cette matière.
Le iuccès des opérations de M. Chappe fuppofoic
encore qu'on n'emploieroit que des thermomètres très
exatfts, ou au moins dont la marche feroitparfiitemenc
connue : il s'étoit muni en conféquence de deux ther-
momètres portatifs , l'un conftruit par Gallonde, 6c
l'autre par Capy; ils avoient été l'un &; l'autre comparés
fur un troifieme deGallonde, qui étoit refté à Paris ^ &
qui eft encore entre les mains de M. Lavoificr. Enfin
comme il étoit poffible que dans le cours du voyage
i'inftrument éprouvât des chocs qui y produififlent des
enfoncements èc des boffes , Al. l'Abbé Chappe avoic
emporté avec lui de l'eau diftillée , afin d'être en étac
d'en vérifier fouvent le volume.
Nous ne ferons qu'effleurer ici ces différents objets,
parcequ'ils feront traités dans toute leur étendue dans
l'ouvrage que M. Lavoificr fe propofe de publier ; nous
ne nous fommes même déterminés à en parler ici qu'afin
que le public fût bien convaincu que M. l'Abbé Chappe
n'avoit rien négligé de ce qui pouvoir contribuer à met-
tre de l'exactitude dans les réfultats ; c'eft d'après ces
mêmes confidérations que nous avons cru devoir publier
dans tout leur détail les calculs 5c les expériences de
M. Chappe. Il eft bon, en fait de Phyfique,que le public
ait entre les mains toutes les pièces ; qu'il puifTc juger
par lui-même, & avec connoiiTance de caufe , indépen-
damment de toute hypothefe.
Il ne refte plus, après avoir indiqué les moyens que
G
50 VOYAGE
M. l'Abbé Chappe a employés , qu'à joindre ici quelques
réflexions fur le réfulcat de fes expériences.
On verra d'abord dans le commencement de la Table
que de deux épreuves qu'il avoir faites à Cadix fur de
l'eau diftiiléc, une donne une différence en moins de
I grain, l'autre une différence en plus de ~ de grain.
Ces différences font peu confidérables en elles-mêmes,
puifqu'elles ne forment qu'une erreur de 77— fur la
maiïe pefée ; elles font néanmoins beaucoup plus fortes
que la précifiondel'inftrument nedevroitle comporter.
II y a toute apparence qu'il s'eft glilfé quelque légère erreur
dans ladétcrminationde la température : une erreur d'un
fixieme de degré fur le thermomètre fufîîroit pour ex-
pliquer cette différence. Se il efl difficile de répondre
qu'il n'ell point arrivé un aufîi léger changement dans
la température pendant le temps même de l'expérience.
Au refîe, comme la pefanteur déterminée k Paris oc-
cupe précifément le milieu entre celles faites à Cadix
par M. l'Abbé Chappe, &C que d'ailleurs on a toutes
fortes de raifons de la croire plus exadle que les deux
autres, on s'en eft fervi dans toutes les opérations, &
on a fuppofé la quantité d'eau diftillée, déplacée par
l'aréomètre , à 1 4 degrés 1^ du thermomètre , de 4 livres ,
I once, 5 gros, 47 grains.
Indépendamment de ces premières réflexions, on pourra
conclure en parcourant les différentes colonnes de la
table ,
i**. Qu'en général l'eau de la mer diffère peu de pe-
fanteur dans rétendue que M. l'Abbé Chappe a par-
courue.
i^. Qu'à Cadix le pied cube de cette eau s'efl trouvé
de 4 à 5 gros moins pefant qu'en pleine mer, ce qui vient
fans doute de la petite portion d'eau douce que les fleuves
& les ruilfeaux mêlent à l'eau de la mer dans le voifi-
nage des côtes.
RÉSULTAT des Expériences de M. Chappe fur la pefanteur de l'eau douce ô de l'eau de mer.
Page 50.
Daces
des
expé-
riences,
Mois
&
Jours.
LongituJ,
Latitude.
Nature de l'eau
mife
en expérience.
1768
Dec.
6
M
«7«9
Janv.
5
17
»4
Fév. 1
4
4
f
J
6
7
Dcg. Min. Dcg. Min,
8 34
36 31
Expérience faite à
Paris fur de l'eau
diftiliéc.
Autre ezp. faite a
Cadix fur la même
eau didillée.
Troifieme expér.
faite à Cadix fur la
même eau.
Eau de pluie reçue
dcsgout & ramaf
dans une cit. à Cad.
Seconde expérien-
ce fur la même
eau.
Eau de Sainte-Ma-
rie à Cadix.
Eau de merpuifée
à Cadix.
Autre expérience
fur l'eau de mer
à Cadix.
I
0
30
0
357
1}
44
48
59
S'-
»4
54
I
61.
7
fit
7
«1
Î4
fil
J4
fi4
«5
6$
48
17
39
44
3«
II
8
8
15
»3
17
15
Eau de mer.
Eau de mer.
Eau de mer.
Eau de mer.
Eau de mer.
Tempéra-
ture de
l'eau mife
en expér.
,. r III Correélion
Pefanieur du volume !^^^^,j^;^
'l^'"""»^V"i"' la pefanteur
perience , déplace 1 ' /
f , r ,■ '^ trouvée en
par le pefe.hqueur ,1,11 u-o^
a la température m- ^^^ ^(^^^^
à i4deg î^
du therm.
température ...
diquéc par la colon,
précédente.
Degrés.
14
13 fô
14 ^
II
10 ïV
II
II T5
16 ii
19 rs
il -h
ij o
11 rs
Il 1^
Il Ti
15 -h
Il -ê,
14 o
IV. onc. gr. grams.
4 X 5 47 O
4 I 5 jS o
4 I j 51 8
4 J 5 fiO I
4 I j fil ;
4 1 j fi;? o
4 J 4 »7 o
4 3 4 13 o
4 3 4 11 o
4 3 4 fi4 o
4 3 3 fifi î
4 3
4 3
4 3
4 J
4 }
4 3
43 o
13 o
14 o
14 o
10 o
1 o
Pefant. du vol.
de l'eau mife en
expér. déplacé
par le pefe-liq
à I4degr^
du thermo-
mètre.
4 5 1 71 o
4 3 3 '4 o
Grains.
liv. onc gr. gr.
— 10 T
— 66
+ » 5
— Il 8
— 10 I
— 10 4
-h II 4
•+■ 17 P
4- 30 i
+ jy 4
-+-«14
4- 51 o
+ 54 9
+ J8 I
4- fil î
+ «7 9
4- 59 i
3
fi9 5 ' + 7) 7
Pefant. du vol.
d'eau dillillée ,
déplacé par le
même initrum,
également à 14
degrés — du
thermomètre.
DifTcrence.
liv.
4 I 5 47 o
4 ï y 47 9
4 I J 46 o
4 I 5 fil 4
4 I î fil 3
4 I î ;fi 1
4 3 4 « 9
4 3 4 1 fi
4 3 4 13 4
4 3 4 19 9
4 j 4 14 7
4 3 4 ifi 4
4 5 4 II 4
4 3 4 41 o
4 3 3 68 5
4 5 3 68 I
4 5 3 «4 5
4 3 3 fi6 J
43411
4 3 î 71 i
Différence
rapportée au
pied cube.
Pefanteur
du pied cube
de l'eau mife en
expérience 314
degrés 7^ du
thermomètre.
Circonftances des
expériences, & au-
tres obfervations.
onc. gr. gr. on. gr. grain. liv. onc. gr. gr. liv. onc. gr. gr.
4 ï 5 47 o
4 I 5 47 o
4 I ; 47 o
4 ï î 47 o
4 I 5 47 o
4 I ; 47 o
4 I J 47 o
4 I î 47 o
4 I 5 47 o
4 I ; 47 o
4 I 5 47 o
4 I 5 47 o
4 I 5 47 o
4 I 5 47 °
4 i ; 47 o
4 I J 47 o
41 5 47 o
14.4
14 3
9 l
16319
I 6 17 6
I fi 48 4
I fi 44 9
I fi 49 7
I fi 51 4
I fi 37 4
I fi 19 o
I fi II 9
I fi II I
I 6 17 5
I 6 ip 9
I 6 16 1
I 6 14 1
0 0 3 1J,|
3 17 7
X II 7
14 fi o I
14 4 71 6
IJ I 6J 1
15 I 5 5
iJ i li 4
69 IJ I 13,0
fi? IJ I 18 5
69 ij 0 68 o
Ces ex[i<iien(et ayim
^t^ faites ^ terre & avec
.des attentions très re
cherchées, ofi n'a pas
lieu d'y toup^onncr
d'uicui.
Cette em , 4'après le:
^ *. «..ertc eag , p-aprcs tes
*9 15 4 41 3 lcxp(!t. de M. Cliavpe,
# ix !cs tables de M. La-
^voifici » comenoit par
^livnc cnvit. d(.u.<< grains
y_ , - . ..^ -V'te fdUnlte , & autant
69 '5 4 40 7 J Je ici marin.
€9 15 3
71 13 7
71 13 fi
I
15 7 1
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V
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Ces expirionces lyam
été Jaitcs à ttire avec
'*■ toutes ks précautions
' néftlTaires, on A'.i p.is
lieu d'v foi'p^onni
d'citaur,
■
IJ
1
44
i
14
7
11
8
H
11
7
14
45
7
14
31
I
14
41
9
14
II
7
14
4
47
0
14
4
30
0
71 »4 3
71 14 1
71 '4 3
71 14 5
71 14 o
71 13 6
71 13 4
71 13 4
71 13 3
71 15 4
71 ï3 5
71 '3 5
'■
6
18
S
18
4
57
34
1
8
35
7
58
7
45
I
55
9
14
7
60
0
43
0
■Incfrtj'ude ct'onvïron
If grains fut le pied
cube , À caufe d'un peu
de Loulis.
Temps p:\rfaUeincnt
calme. Expér, cxadc
Expérience 4xaél«.
Vn peu deroulis. Tn-
ccrri udede iogtainsfui-
le pied cube.
Inccrtit. de lo grains
fur le pied cube.
Expérience «.^.iiîtc.
Expér knoe exaae.
Tnccrtitadftdc lo ;i 30
gr.iiiis à «auCe du roulis.
Inccr îtudeJc 10 5 îc
gritinsà caufcdu roulis.
Inccnt'-. de to grains
furl«: piijd ciib:.
Tnccriitunc.'.c 30.^ 40
gruins a cîulcdu rouli,
Suite du Rifuhat des Expériences de M. Chappe fur la pefanteur de l'eau douce & de l'eau de mer.
Dates
des
expé-
riences
Mois
&
Jours.
Longitud.
Latitude.
Nature de l'eau
mife
en expérience.
Tempéra-
ture de
l'eau mife
en expér.
Pefanteur du volume
de l'eau mife en ex-
périence , déplacé
par le pefe-liqueur,
a la température in-
diquée par la colon,
précédente.
Correélion
pourréduir
lapcfanteur
trouvée en
celle qu'on
aur. obten.
à 14 deg. -^
du therm.
Pefant. du vol.
de l'eau mife en
expér. déplacé
par le pefe-liq.
à 14 degrés^
du .thermo-
mètre.
Pefant. du vol.
d'eau diftillée,
déplacé par le
même inftrum.
également à 14
degrés — du
thermomètre.
Différence.
Différence
rapportée au
pied cube.
Pefanteur du
pied cube de
l'eau raife en ex-
périence à i4de-
grés rs <ltt ther-
momètre.
Circonftanccs des
expériences, & au-
tres obfeivations.
1-J69
Deg. Min.
Deg.
Min.
Degrés.
liv. onc. gr. grains.
Grains.
liv. onc. gt. gr.
liv. onc. gr. gr.
on.gr. giam.
liv. onc. gr. gr.
liv. onc. gr. gr.
Février
Eau de mer puifée
8
«4 51
14
H
après avoir palTé
les iries.
Eau de mer.
11
8
te
4 3 3 15 5
4- Î9. 1
43407
4 I î 47 0
I 6 iî,7
I 14 4 38, «
71 13 ; 51,6
Expérience exafte.
9
66 14
If
1
11
6
4 3 3 10 0
+ Î7 1
4 3 4 î I
4 I 5 47 0
I 6 30 I
I 14 J 41 4
71 13 6 j4 4
Tncertit. de 60 grains
fur le pied cube à caule
du roulis.
10
6i II
'î
17
« . .
11
s
JO
4 3 3 14 5
+ Î9 1
43417
4 I j 47 0
I tf 1« 7
I 14 4 55 6
71 13 5 *8 6
Incettit. de 10 à 50
grains fur le pied cube.
II
69 51
11$
II
. , .
11
_7_
1 0
4 3 5 it î
+ JS I
4 3 3 70 «
4 I î 47 0
r < 15 <
I 14 4 15
71 1} J ly j>
Inccrtit. de 10 â ii
grains fur le pied cube.
II
70 19
16
30
•
M ii
43370
+ tfi J
4 3 3 «9 J
4 I 7 47 0
I ^ 11 y
I 14 3 56 0
71 13 4 «9 0
Expérience tics exaae.
13
71 9
16
4î
Eau de mer.
13 -h
4 3 1 71 0
-h 66 S
4 3 5 «.f 8
4 I f 47 0
I £ 18 8
I 14 1 ^y 0
7r ij 4 60
Incertitude de }o à 40
grains à caufe du roulis.
14
71 14
'7
1
.
13 ^
4 3 3 00 0
+ 6, 7
4 3 3 <^5 7
4 I y 47 0
I « i8 7
I 14 1 65 3
7' 13 4 4 3
Obfcrvation exadc.
IJ
74 42-
'7
10
. 4 .
it -à
4 5 3 li 0
-t 46 0
4 3 3 ;8 0
4 I 5 47 0
I ^ II 0
I 14 I 4 I
71 13 1 17 I
Incertitude de lû à 50
gtains.
iC
74 3«
»7
11
Eau de mer puifée
à la vue des terres.
Eau de mer puifée
^3 -h
4 5 i 71 0
+ 70 0
4 3 i 69 0
4 I J 47 0
I tf 11 0
I 14 3 47 5
71 13 4 tfo y
t
Expciience tccsexaâe.
*
i8
^6 17
18
II
proche du cap Ti-
beron.
ij 0
4 3 5 II 0
+ 61 4
43414
4 I ; 47 0
i é i6 4
I 14 4 50 4
71 15 5 «3 4
Incertitude de 10 à ;o
gtains.
11
80 1/
ï?
40
" ^
4 3 3 ï5 0
-t- }8 I
4 } J 71 »
4 ' î 42 0
1 6 14 1
I 14 4 II 1
71 15 y 14 1
Incertitude «le jo à 40
gtains.
11
81 6
19
34
S . :
" i
4 5 3 13 0
+ 48 I
4 5 3 «I 1
4 I J 47 0
I 6 14 I
I 14 I ;j 9
71 13 1 69 9
Incertitude de 10 à S^
gtïins.
»7
87 4<
11
18
• • •
" Tï
4 3 3 10 0
-i- 41 6
4 3 3 61 é
4 I 5 47 0
1 6 is 6
t 14 1 10 (î
71 13 3 13 <
18
Mars
89 14
11
18
• • •
" 1^
4 3 î *3 o'
■+■ 48 I
4 5 5 7» »
4 I î 47 0
1 tf 14 I
I 14 4 II 1
71 13 y 14 i
Expct. exaSe. Le fond
à trente btaffcs.
X
« * ■
Eau de mer puifée
" -êé-.
4 3 ) 33 0
+ 46 1
43471
4 I î 47 0
I tf 31 1
I 14 6 J 1
71 13 7 18 t
Incertitude de jo ôu 40
gtains. Le fonda 14 br.
ru 0
14
0
dans la Mer Ver-
meille.
EaudeSan-Jofeph
enCalifornie.dela
131 0
4 j 1 50 0
+ 61 3
4 3 3 39 î
4 I i 47 0
I y «4 ;
I 13 4 4J 7
71 II y y8 7
Expérience très cxifte.
. Cette eau , d'aptes les
I evpcncnces tiues par
\m. l'Abbé Chappe, &
m I
»J
3
rivière la plus
près, que j'ap-
pelle A.
Eau de San-Jofeph
14 1^
4 I 4 <f? 0
+ 78 <î
4 I <f 3 6
4 I 5 47 0
18 6
^ 5S 5
°9 ') 7 "^ ) S fier , contient pJi chaque
M lÎTre 9 grains deux tiers
W de .ei marin, & quelques
V veltiges defel dcGIauter.
1 Cette csa , d'aptes I es
en Californie , de
la rivière la plus
^^
(
^ cxpcrien. de M. Chappe,
l Sx. les tables de M. La-
éloignée, que j'ap-
X4 -h
4 I 4 tfj 4
-f- 79 0
4 I <f 4 4
4 I J 47 0
19 4
6 6S 7
70 0 0 9 7^
1 voilier , contient par
livre d'eau neuf grains
pelle B, & qui
pafle pour la meil-
1 trois quarts de fcl marin.
(
" .>c quelques vertiges dc
..U'IdeGlaubcr, ^
leure.
f Cette esu contient fut
% grains trois quarts de fcl
tfo I f tf 4. 0< '""■'" P'f '^'^^l'": ''"T":.
^ -' ~ J & quelques vcfliiîcs de
V fcl de Glaubcr.
Eau de San-Jofeph
en Californie, de
la 5° rivière.
M -i^
4 I j 19
+ «J 7
41 5 «7 «
4 I î 47 0
10 6
4 «5 p
EN CALIFORNIE. 51
3°. Qu'à compter du 31 Odbobre, jour où M. Chappe
ëtoit par i degré de longitude &; 30 degrés de latitude,
jufqu'au 18 Février où il étoic par 89 degrés de longi-
tude & 21 de latitude, la pefanteur a toujours été arfez
uniformément en diminuant, &L que la différence de la
plus grande à la moindre a été environ d'une once fur
le pied cube.
4". Que le changement de pefanteur paroît plutôt
relatif à la différence en longitude qu'à la différence en
latitude, ce qui fembleroit annoncer que la pefanteur
de l'eau de la mer diminue en allant de l'eft à l'oueft.
5". Que M. l'Abbé Chappe n'ayant parcouru qu'une
médiocre étendue en latitude , on ne peut prononcer
encore d'une manière très pofitivefur l'augmentation ou
la diminution de falure de l'eau de la mer, en appro-
chant de l'équateur, mais qu'il paroît en général qu'elle
diminue plutôt qu'elle n'augmente, au moins dans les
parages que M. l'Abbé Chappe a parcourus,
6". Qu'à la vue des terres de la Californie la pefan-
teur à paru fenfiblement augmenter. Cette dernière ex-
périence eft affcz finguliere ; elle tient fans doute à la
difpofition des cotes qui fourniffent apparemment moins
d'eau douce que l'évaporation n'en enlevé; au refte cette
expérience eft unique , & M. l'Abbé Chappe n'a pas été
à portée de la répéter.
7". Enfin, que dans la Mer Vermeille l'eau eft fen-
fiblement plus légère que dans la partie de la Mer du
Nord que M. Chappe à parcourue ; ce qui s'explique
très naturellement à caufe des grands fleuves qui fe dé-
chargent dans cette efpece de golfe.
M. de Borda s'eft muni , dans le voyage qu'il a entre-
pris par ordre du Gouvernement relativement au prix
propofépar l'Académie pour les longitudes, d'un aréo-
mètre de même conftruclion que celui de M. l'Abbé
Chappe , à la différence feulement qu'il eft un peu moins
fenfible. Ses expériences fixeront probablement nos idées
Gij
5i VOYAGE
à cet égard ; elles auront l'avantage d'avoir été faites
dans une étendue beaucoup plus grande en latitude.
Il feroit à fbuhaiter que les Phyficiens s'attachafl'ent ,
dans les voyages de long cours , à enrichir la Phyfiquc
de nouveaux faits en ce genre; ils pourroient un jour
conduire à des conféquences importantes (i).
(i) C'eft M. Lavoifier qui a bien voulu rédiger lui-même cet ar-
ticle des expériences de M. Chappe fur la pefanteur des eaux ;
f eribnne ne pouvoi( mieux s'en acauiccei que lui.
EN CALIFORNIE.
53
Expériences des thermomètres plongés dans la mer,
J_iE 3 Janvier 17(39 , proche des ifles Canaries, par
17° 4' de longitude, ôc 17° 40' de latitude, on defcen-
dit dans la mer, à la profondeur de 100 bralTes , un
thermomètre enveloppé dans de la toile , un autre à la
profondeur feulement de quatre pieds, & un troifieme
rcfta à bord expofé à l'air libre.
Au bout d'une heure on retira les thermomètres
jîlongés ; celui qui n'étoit enfoncé que de 4 pieds à la
lurface de la mer, marquoit 17° , i; celui du fond ,
i3°i,&: celui du bord 18° {.
Le 5 Janvier, à-peu-près au même lieu, on retira
les thermomètres plongés au bout de deux heures.
Thermomètre du bord .... 18®.
Thermomètre de la furface. . 17—.
Thermomètre du fond 1 3 -îr-
Le 13 Janvier, par 30° 5' de longitude, &; 23° iz'de
latitude.
Thermomètre du bord . . . . i-j ^.
Thermomètre de la furface . . 1 8 4--
D'après ces expériences, nous voyons donc qu'à cent
brafles de profondeur la différence de la température de
la mer avec celle de l'air fupérieur eft d'environ 4° \.
Mais cette différence eft- elle la même dans tous les
temps, dans tous les lieux, à différentes profondeurs? Jul^
qu'à quel termel'air extérieur peut-il influer ? C'eft ce que
des expériences bien exactes , fuivies & répétées, auroienc
pu nous apprendre ; malheureufement celles-ci font en
trop petit nombre pour que l'on puiffe en rien conclure.
Je joins ici une autre expérience que fît encore
M. Chappe. 11 boucha parfaitement une bouteille, Se
après en avoir recouvert le bouchon avec de la poix , il
la defcendit à 500 pieds de profondeur dans la mer. Au
boutd'un quart d'heure, l'ayant retirée _, il trouva le bou-
chon abfolument enfoncé dans la bouteille»
54
VOYAGE
Extrait d'une lettre adrejjee de Mexico a l'Acadé-
mie Royale des Sciences , par Don Jofeph Antoine
de Al'iate y Ramyre^ , aujourd'hui Correfpondant de
ladite Académie , contenant des détails intérejj^ants fut
l'hifloire naturelle des environs de la ville de Mexico ( i ).
iVI. E s s I E U R s ,
Le départ de M. Pauly pour Paris me procure l'occa-
fion favorable de vous envoyer différentes curiofités de
ce pays (2), Je crois devoir y ajouter une explication
que je foumets toutefois à votre jugement &; à vos lu-
mières.
La mort de M. Chappe m'a été on ne peut pas plus
fenfible. La Nouvelle Elpagne a perdu en lui un fujec
dont les lumières euflent beaucoup contribué à faire
connoître mille curiofités naturelles enfevelies ici dans
(i) Cette lettre , écrite en Efpagnol, fut remife à rAcadèmie
par M. Pauly, en même temps que les papiers de M. Chappe :
M. Pingre fut chargé de la traduire en François pour en faire
letture dans une de nos alTemblées particulières. C'eft cette
traduârionque je fuivrai ici, à quelques changements près , qui ne
portent que fur l'ordre , le ftyle , & quelques tournures de phrafes ,
mais nullement fur le fond des chofes. J'ai cru auffi devoir fupprimer
tout ce qui fe trouve dans cette lettre d'étranger à l'hiftoire naturelle,
ou peu intérelTant pour le public.
(z) La caiiïe qui contenoit les différents m.orceaux d'hiftoire
naturelle que Don Alzate annonce ici , n'arriva que long-temps
après cette lettre. L'Académie alors nomma MM. de Juflîeu &
Fougeroux de Bondaroy pour en faire l'examen , & lui en rendre
compte. J'ai engagé M. de Fougeroux à me communiquer les ob-
fervations qu'il a faites fur les différent! morceaux d'hiftoire naturelle
dont il eft fait mention dans cette lettre ^ il a bien voulu me fournir
les notes fuivantes, & m'a permis de les inférer ici pour l'intelligence
de !a lettre de Don Akate.
EN CALIFORNIE. 5^
l'oubli. Les perfonnes les plus capables de les en tirer,
ou ne s'en occupent point , ou ne font point en étac
de les communiquer au public.
Selon ce que i'ai pu conclure du rapport de M. Paulv,
. Chappe doit être mort d une maladie epidemique que ju mad
nous appelions ici, en langue Mexicaine, Tnatla\ahualt ^ bualc
&qui fe nomme vomilTement noir àlaVéra-CruXjàCar-
thagene&ailleurs. Cette maladie eft le fléau du Mexique.
En 1736 5c 1737 elle enleva à Mexico plus du tiers de
fes habitants; Si en 1761 6c 1761 elle fit encore les plus
grands ravages, ôc dépeupla ce royaume. Il mourut au
moins vingt -cinq mille perfonnes dans l'enceinte de
cette ville; il eft vrai qu'à cette rcprife la maladie con-
tagieufe fut accompagnée de l'épidémie de la petite vé-
role, qui ne contribua pas peu à la dcflrruction.
Le matlazahualt n'a d'autre caufe , à ce qu'il me pa-
roît, que le mélange de la bile avec le fang. En effet, les
perfonnes qui en ibnt attaquées ont une couleur pâle,
& rendent, pour la plupart, le fang par le nez &: par l'a
bouche; accident qui arrive à l'approche des crifes (i).
La rechute eft plus dangereufe que la première attaque,
qui eft rarement feule. Dans l'épidémie de 1761 (la
feule que j'aie pu obferver, étant né dans le cours de la
première), j'ai remarqué que les purgatifs 6c Icsfaignées
ëtoient très dangereux , jufques-là même que les per-
fonnes qui fe failoientfaigner ou purger pour d'autres ma-
ladies , étoient auili-tôt attaquées du matlazahualt. Cette
maladie d'ailleurs s'attache principalement aux Indiens;
& c'eft toujours par eux qu'elle commence. En 17(31 &
17(32 j dans l'cfpace de douze mois feulcm.ent , il entra
dans l'hôpital royal ( qui ne fert qu'aux feuls Indiens )
(i) M. Chappe n'a point eu de vomiflemenrs Des accès de fièvre
violencs , de grands maux de tête , & une pefanteur à la poitrine ,
fju'il appelloit une obftrudtion ; voilà la maladie qui l'a enlevé, &
qui ne paroît pis reflembler à celle que Don Antoine de Alzate
dctrit ii.t.
Simples &
5^ VOYAGE
plus de neuf mille malades; il n'en réchappa qu'enviroa
deux mille.
Il n'eft guère de plante audî féconde en curiofités bo-
vége'crur! taniques que celle du mais. C'eft par elle qu'on peut s'af-
Mais, iurer ,avec la plus grande évidence, de la manière donc fe
nourrit le grain dans la plante. Ceft parclle qu'on vérifie
qu'aulîî-tôt que le grain s'eft rempli, la plante refteinfipide;
£c parconféquent que les fucs qu'elle contenoit d'abordonr
fervi de nourriture au grain , après avoir été améliorés
dans la plante. En effet , les plantes de maïs qui ne rendent
point de graine (elles font ici en grand nombre), font
toujours d'une extrême douceur. On les apporte au mar-
- ché à Mexico ; 6c les enfants, qui en font la plus grande
confommation , les mangent avec autant de plaifir que
les véritables cannes de fucre : auiFi leur donnc-t-on le
nom de cannes. J'ai exprimé quelques-unes de ces plan-
tes, j'en ai fait bouillir la liqueur, 6c j'en ai extrait un
lucreparfait. Dans le Mexique, après avoir femé le maïs
on le laifle fans culture ; il fe convertit alors en cannes , ÔC
ue rapporte aucun fruit.
Quoique plufieurs Auteurs aient donné de très bonnes
defcriptions du magiiey, plante dont on tire le piilque y
clpece de boiffon qui fupplée ici à la rareté du vin , il me
paroît que perfonne ne s'eft donné Ja peine de détermi-
ner la quantité de liqueur qu'on peut extraire de cette
plante. Les habitants de Xachimilco font ceux qui poflTe-
dent le mieux la vraie manière de cultiver le maguey; aufli
cette plante cft-elle plus grande chez eux que par-tout
ailleurs. Un maguey rend en vingt-quatre heures plus
de deux arobes de liqueur , 6c continue d'en fournir au-
tant tous les jours, dans l'efpace de fix ou huit mois (i).
Je vous envoie aullî un fimple qui me paroît être le
meilleur de ceux que l'on a employés jufqu'ici pour la
Cl) L'arobe eft à-peu près de 15 livres j ainfi l'on peur compter
ûjr le pisd de quatre arobes environ pour le quintal.
teinture
M.iguey,
Cafcilctie.
EN CALIFORNIE. 57
teinture en noir. Il fe nomme cafcalottc (i). L'arbre en
eft grand: il croît feulement dans les pays très chauds. Sa
feuille eft petite , &: reflemble fort à celle de Xhuifiachcy
dont je parlerai tout-à-l'heure. Sa fleur eft jaune. L'ac-
croilTement de l'arbre eft auffi, ou même plus lent que
celui du chêne. Je n'ai pas befoin d'en décrire le fruit ,
puifque j'ai l'honneur de vous l'envoyer. On ne trouve
ici de noix de galle que chez les apothicaires, qui en font
ufage dans les remèdes, 8c font obligés de les tirer d'Eu-
rope, Nous n'aurions donc pas de moyen de teindre en
noir, fi la nature ne nous eût procuré le fccours de la caf-
calottc. J'ai dit que la teinture que ce fimple fournit
eft la meilleure de toutes, parcequ'clle eft moins corro-
five que les autres ; auffi porte- t-on ici plus généralement
des étoffas noires , parceque l'expérience a convaincu
que cette couleur eft la plus durable de toutes. En effet
on voit les chapeaux , même les plus communs, ne perdre
jamais rien de leur premier luftre , tl. fe mettre en lambeaux
avant que la couleur en foit le plus légèrement altérée.
iShuifiackc [ i ) fcrt auffi à la teinture en noir , mais avec L'Luifiachc.
moins de fuccès que la cafcalottc. Son principal ufage
eft de fournir l'encre à écrire. Cet arbre demande une
(1) La cafcalotte efl: une efpece d'acacia \ fon fruit eft une filique
{fig. I 6" i, PI. i) longue &: large , fouvent repliée fur elle-même ,
comme on le voit {fig. i ) ; elle eft compofée d'un liber ou paren-
chyme ligneux a, mince (^^. 3 ), couvert d'une écorce épaiffe^j
elle eft extérieurement un peu rougeâtre, & fe réduit aifément en
une poudre fine , lorfqa'elle eft feche. La goulfe renferme plufieurs
graines {fig. 4 ) un peu applaties , d'un jaune clair & luifanr.
On ûit que les gouftes de prefqne tous les acacias donnent une
couleur noire : elles peuvent auili fervir à tanner les cuirs. Sloane
dit que \ acacia indica fert à faire de l'encre. {HiJI. Jamaica.)
(ï) L liuifiache" eft aufti une efpece d'acacia quia du rapport avec
Vinga ou pois fucrin d'Amérique , décrit par plufieurs Botaniftes
[fig. 5 & 6 ). L'écorce de cette filique eft dure , épaiire & noire \ elle
contient plufieurs femences, chacune dans une loge particulière
{fi&' 7)' '"^ goulle étant divifée par cloifon [fig. 5).
H
58 VOYAGE
température chaude; on a cependant la mauvaife cou-
tume de le planter dans des ccrreins froids, tel que
celui de la ville de Mexico oii l'on en compte lepc»
outre ceux qui font dans l'enclos des bains.
Aiuiehustc, Je vous envoie un delîein exa£t de l'arbre monftrueux
d'Attifco , que l'on nomme ahuehucte ; {qs proportions
font prifes avec la plus grande exaditude. Cet arbre eft
toujours d'une extrême grofleur. Je joins ici fa femence
ou fa noix, ôc fa feuille (i).
Sabine. Puifque j'en fuis fur les arbres monftrueux, il ne fera
pas hors de propos de dire un mot au.fabi.no , qui eft dans
le cimetière de Popotta , village éloigné d'environ une
demi-lieue de Mexico. Son tronc, bien mefuré, a feize
vares & demie de circonférence ( notre vare a un peu
moins de trois pieds- de-roi ) (2).
Sapote Dans la cour de la maifon du Vicaire on voit encore
blancco. un arbre qui préfente un phénomène fingulier. On a
coutume d'attacher les chevaux à une de fes branches ,
qui_,en conféquence, fe trouve abfolument dépouillée
de fon écorce ; de manière que l'on n'y voit que la partie
( I ) La figure de cet arbre que Don Alzate a envoyée ne pouvant don-
ner aucune lumière pour déterminer fon efpece , j'ai eu recours au
fruit & à une feuille qui fe font trouvés dans un même paquet ^ & à
leur infpedlion , j'ai penfé qu'ils pouvoient appartenir au cuprejfus
lujitanïca pacula^ fruclu minori. ( Inft. pag. 5 87. )
Les fruits font compofés d écailles {Jig. 8 6" 9 ) , & les femences
font difpofées en dedans comme elles le font dans les coniferesj ainfi
c'eft un vrai cyprès qui ne peut point avoir de rapport avec le cuprejfus
*■ foliis acacis, dccïduis, chaque écaille dans le fruit de ce dernier recou-
vrant la femence. D'ailleurs la feuille qui s'eft trouvée jointe aux
graines de l'arbre du Mexique eft compofée de folioles {fig> 10),
qui ne font point oppofées, comme dans le cyprès à feuille d'acacia. Il
refaite donc de cet examen, que l'arbre dont parle Don Alzate n'eft
point le cyprès à feuille d'acacia : ce n'eft point non plus celui de
Portugal , quoique l'ahuehuete ait un vrai rapport avec celui-ci par
fes fruits. C'eft donc une nouvelle efpece de cyprès non décrite , &
qui entreroit néceflairement dans le genre des cyprès.
(2) Le tronc de cet arbre a done environ 50 pieds de circonfé-
rence.
EN CALIFORNIE. 59
iigneufe. Malgré cela cette branche conferve fa verdeur ,
& donne du fruit comme fi elle étoic revêtue de toute fon
écorcc. L'arbre eft beau , de donne un fruit très agréable.
Nous l'appelions Jàpoie blanco.
Je vous envoie une fcmence que nous appelions ch'ia ; Chia.
on la met en infufion pendant deux heures, on y mêle
du fucre, & on boit la liqueur. C'eft de cette femence
que l'on tire l'huile dont nos Peintres fe fervent pour
broyer leurs couleurs , Se qui produit un 11 bel effet fur
nos tableaux : peut- être lui trouvera-nt-on un autre ufage.
Le moyen dont on fe fert pour cxtrairel'huile eft de faire
griller la femence, ôc de la preflcr enluite(i).
Jeme rappelle une plante qui n'a pas , je crois, fon égale cacahuatc.
parmi les plantes connues : on la nomme cacahuate (2).
On connoîtplufieurs plantes qui nous nourriflent de leurs
racines : mais qu'une plante produife fon fruit dans fa
racine même, c'eft, je crois, une propriété particulière
à celle dont je parle. Je vous envoie la plante & le fruit ;
il ne me refte donc plus qu'à parler de la manière dont
on la cultive. Onlafeme dans les pays chauds; elle réufïic
même dans les climats tempérés. On feme le fruit à la
diftance d'un pied , 6c l'on attend que la plante foit éle-
vée d'environ un demi-pied; on enterre alors cette bran-
che ( qu'ils nomment fifio m lo) , de manière que fes deux
extrémités, la racine & la pointe ,refLent couvertes de
(i) Les graines que nous a envoyé Don Alzate appartiennent à la
plante nommée par M. Von Linnéyi/vi^i hïfpanïca. Cette graine a le-
vé ici, où l'on avoir déjà la plante depuis long-temps. Les Italiens la
cultivent aullî \ M. Harduini en a donné une defcription,& une figure.
(2) Cette plante ell: l'arachinna ou l'arachis de M. Von Linné,
piftache de terre d'Amérique \ elle donne des fruits qui font des
goulTes dont la peau ell fort tendre & caflTante [fig. ii), fur-tout
quand elle eft feclie. On trouve dedans une ou deux amandes 'fig 1 2)
qui font agréables au goût , ce qui les fait nommer piftaches de
terre. Elle eft commune dans tous les pays chauds d'Amérique : elle
a levé dans nos climats dans les ferres chaudes, & y a produit des
fruits \ elle enfonce fon piftil dans la terre , & le fruit y mùtit.
Hij
^o VOYAGE
terre jufqu'au moment delà récolte. Ce temps venu,
on levé les branches de la plante pour en tirer le fruit
qu'on y trouve en abondance. Quoiqu'on ne recom-
mence pas à femer ; le champ , à l'aide de ce qui eft refté ,
produira toujours un nouveau plan. La quantité qu'on
en confomme dans ce royaume , fur -tout pour la
collation , eft incroyable. La manière dont on prépare
ce fruit pour le mettre en étatd'êtremangé , eftdele faire
rôtir à un feu lent. On s'en fert auffi à d'autres ufagcs,
pour fuppléer à la difette d'amandes où nous fommcs
dans ce pays. Ce fruit eft mal- fain, fur- tout pour la gorge.
J'avertis ici que la plante produit fon fruit, non dans la
racine qui s'eft d'abord formée, mais dans l'extrémité qui
eft recouverte de terre. Il faut ajouter une autre circonf-
tance , c'eft que la plante eft dans fa plus grande beauté
lorfqu'il y a du foleil; elle fe fane lorfque cet aftre vient
à lui manquer.
PoifTonsvivi- Je VOUS cnvoic des poiftbns vivipares à écailles, dont
pares à Cwail- • -j '«'j • / s -rr • •
les. Voyez fi- j^ VOUS avois clonne précédemment Une notice (i). voici
gure I, Pi. 1. . __^__
(i) Don Alzate a envoyé à l'Académie ces poiflbns confervés
dans de l'eau-de-vie ; ils ont la peau couverte de très petites écailles ;
leur longueur varie depuis un pouce jufqu'à dix-huit lignes , ôc ils
n'ont guère que cinq , fix & fept lignes dans leur plus grande lar-
geur : ils ont de chaque côté Se près des ouies une nageoire a v deux
autres petites nageoires b fous le ventre , une unique d derrière
l'anus c , qui fe trouve entre la nageoire b & celle unique d ; la
queue e n'eft point fourchue j enfin ce poiflon a encore un aileron/fur
le dos, un peu au defl'us de la nageoire d, que nous avons dit être
fous le ventre.
On connoît dans nos mers quelques poilTons vivipares, comme les
loches , &c. Ces poiflons ont pour la plupart la peau iilTe & fans
écailles. L'aiguille d'Ariftote eft vivipare , & cependant recouverte
d'écaillés larges & dures ; je l'ai pêchée ayant encore des petits dans
la matrice. Quant à ces poilTons vivipares dont parle ici Don Alzate,
c'eft une efpece particulière & nouvelle que nous lui avons obli'
gation de nous faire connoître ; elle fe multiplie dans un lac d'eau
douce voifin de la ville de Mexico,
ni.
HBi^iamft=fi
F^.z. j
Fiq.3.
fi1,#;-c
Fauraa-ovAX' cùi.
Kl^ BauSJ-ard Scu^
Peut . oc
Fin.
TiPtu^^rcur dùl.
IjL. ffaua-^iu-i£ SaUp
EN CALIFORNIE. 61
ce que j'ai obfervé en eux cette année. Si en pre0anc
avec les doigts le ventre de la mère , on en fait fortir les
petits avant le temps , en les examinant au micro(-
cope, on y obferve la circulation du fang telle qu'elle
doit être dans un poifTon déjà grand. Si l'on jette ces
petits poiflons dans l'eau, ils nagent aufli-bien que s'ils
avoicnt vécu depuis long-temps dans cet élément. Les
mâles ont les nageoires 6c la queue plus grandes & plus
noires ; de forte qu'à la première vue on peut facilement
diftinguer les deux fexes. La manière de nager de ces
poiflons eft finguliere; le mâle Se la femelle nagent en-
femble fur deux lignes parallèles ,1a femelle toujours au
defllis , Se le mâle au-deflous : ils confervent auifi tou-
jours entre eux une diftance conftamment uniforme , Se
un parallélifme parfait. La femelle ne fait pas un feul
mouvement , foit de côté , foit vers le fond , qu'il ne foit
à l'inftant imité par le mâle.
Entre les infedes les plus finguliers, on trouve ici une Aiaignées.
araignée qui mérite une attention particulière. Elle ref-
femble fort, par la figure, aux tarentules du royaume
de Naples. Elle peut avoir huit lignes de long; elle eft
velue : fa couleur eft cendrée. Jamais on ne la voit le
jour; elle ne paroît la nuit qu'en temps ferein, mais an-
nonce une pluie prochaine: c'eftun baromètre infaillible.
Un Curieux m'avoit communiqué cette remarque : je l'ai
fouvent vérifiée avec tout le fuccès pofTible ; car toutes les
fois que j'ai vu de cette efpece d'araignées , j'ai remar-
qué qu'en vingt-quatre heures le temps changeoit , Se fe
mettoit à la pluie.
La maripofa plateada , ou le papillon argenté , m'a Papillon,
paru , Meffieurs , d'autant plus digne de votre attention ,
qu'il ne s'en trouve point chez vous j du moins n'en pi.i.fîg^i
trouve-t-on pas la defcription dans l'ouvrage de M. de ^ ?•
Réaumur ( i ). Les cocons que je vous envoie font curieux
(1) Nous avons ici des papillons nacrés qui ne différent de celui da
^1 VOYAGE
par leur ftruâ:ure. Je ne crois pas qu'on en trouve de fem-
blables en Europe. Vous expliquerez mieux que pcrfonne,
' Meffieurs, la manière donc le petit papillon ouvre, en
nallFant, Ion couvercle, ou la porte de Ton cocon , lorf-
que vous aurez examiné l'adrelFe avec laquelle elle eft
ajultée. J'ai tous les ans une infinité de ces cocons, ôc
je n'ai encore pu m'afTurer, ni de la manière donc le pa-
pillon fort, ni de l'induftrie qu'emploie le ver pour tra-
Mexique & de l'Amérique que par la grandeur. Les nôtres font plus
petits & un peu moins colorés Le climat peut produire ces variétés
dans l'efpece. Les papillons nacrés dont il s'agit ici, & les nôtres, font
des papillons diurnes. M. de Réaumur & M. Geoffroy ont décrit
ces derniers , ôc ils annoncent tous deux quils ne connoilTent pas la
chenille qui donne ces papillons.
Par analogie on pourroit croire que ces chenilles , étant de la
clalTe de celles qui donnent des papillons diurnes, ne font point
de coque ; que les chryfalides s'attachent à des branches d'arbres, &
s'y métamorphofent.
Si l'obfervation de Don Alzate eft jufte, & fi réellement le pa-
pillon nacré qu'il nous a envoyé eft forti de ces coques fingulieres,
il en réfulteroit pour nous de nouvelles connoilfances. i°. Comme
nous avons trouvé dans ces coques des dépouilles de chenilles épi-
neufes , nous en pourrions conclure que le papillon nacré provient
dune chenille de cette efpece. z°. Nous pourrions , connoilTant la
coque du papillon nacré du Mexique , qui a beaucoup d'analogie
avec les nôtres , être plus à portée de trouver la coque & la che-
nille qui donnent ces papillons , très communs dans nos climats.
Mais nous craignons que le papillon nacré que Don Alzate nous a
envoyé ne foit point forti de la coque qu'il y joint , & par con-
féquent cette obfervation mériteroit une nouvelle vérification. Ce
qui me fait former ce doute , c'eft que Mademoifelle de Merian a
décrit la chenille de ce papillon diurrxe ; elle la regarde comme ne
faifam point de coque , & die que la chryfalide fe fufpend comme
la plupart de celles de la même clalFe. ( Voyez Infectes de Surinam ,
tome I , planche 2.5.)
Au refte cette coque {fg. 2 £• 3, P/. i) que nous a envoyé Don
Alzate fera toujours finguliere parle couvercle a que fe pratique l'in-
fcde , & qu'il détache à volonté. On voie dans \a./ig. i cette coque,
dont la porte a eft ouverte ; la charnière eft en é , & la coque eft
attachée à une branche dans fa partie c.
EN CALIFORNIE. 65
vaîller fi aitiflcinenc fou cocon , ni enfin comment les
hls, étant glutineux, ne fe collent pas enfembledans le
temps de la formation du cocon. J'aurois bien des chofes
à dire fur nos papillons, mais ce fera pour une autre oc-
cafîon.
Dans une lettre que j'ai eu anciennement l'honneur
de vous écrire, je crois vous avoir dit. Meilleurs, que j'i- ^^"'^""ons
gnorois qu'il y eut des pétrifications dans ce royaume. Je
me fuis allure depuis qu'il s'en trouve quelques-unes dans
le petit lieu de Chalma.; je compte m'y rendre pour
avoir une plus ample connoiflance de ces pétrifications.
J'ai vu des coquilles très précieufes trouvées à Souvra ;
leur matière cft précifément celle dont on tire l'argent
& l'or. On m'aflure auffi que dans la province de Rou-
era on a trouvé, en creufant dans une mine, des corps
humains pétrifiés,dont on a tiré beaucoup d'argent ;&:,
entre autres , le corps d'une fem.me tenant fon enfant dans
l'attitude de lui préfenter le fein. Les deux corps font par-
faitement pétrifiés; ils ont rendu une quantité confidé-
rable d'argent. Ce fait me paroiflant mériter confirma-
tion , j'ai voulu en être aiïuré par la dépofition de té-
moins oculaires. J'ai écrit en conféquence à des perfonnes
de ladite province; j'attends avec impatience Itfur ré-
ponfe.
J'ai donné à M. Chappe une dent molaire , fi exor-
bitamment grofle , qu'elle pefoit plus de huit livres ; elle dune^rTn!
avoit plus de dix pouces de long ^ & le refte en propor- <^=uf ûngu-
tion. De quel animal venoit cette dent? Je l'ignore. On '*^"
me l'avoit donnée comme un os de géant. Ce que je
puis aflurer, c'eft que l'émail de la dent étoit, en grande
partie, confervé. Un Curieux de ce pays pofTede aufîi
un os de jambe, qui malheureufement n'eft point en fon
entier; il en manque une partie. La tête du fémur a un
pied & demi de diamètre. On a trouvé cet os près de
Toluca. L'Indien de qui on l'a acheté, s'en fervoit pour
barrer fa porte ; ce qui n'eft pas étonnant , puifque ce
icre.
^4 VOYAGE
qui rcfte de cet os a encore plus de cinq pieds de lon-
gueur. On m'a rapporté que le Curé du village de Tc-
cali vient de découvrir des os d'une grandeur monftrueufe ,
&, ce qui eft de plus étonnant, qu'il a trouvé des fépul-
cres proportionnés à ces os. Je m'en informerai avec le
plus grand foin , &: je vous communiquerai. Meilleurs,
ce que j'aurai découvert à ce fujet.
Dans vos Mémoires de 1744, on parle de poifTons morts
trouvés dans les puits de Mexico, à l'occafion d'un volcan
qui fit éruption à la Véra-Crux..Rien de plus faux. Quel-
que recherche que j'aie pu faire , je n'ai pu me procurer
aucun éclaircilTementàce fujet. AlaVéra-Cruxonn'apas
la plus légère idée de ce volcan. A Mexico, on ne peut
rien trouver dans les puits; ils font aulîi nombreux que
les maifons, leur profondeur n'excède jamais fix pieds.
L'eau fe trouve à trois pieds au plus, & le plus fou vent
à un pied. Comment y pourroit-on trouver des poiiFons
morts , puifque la Nature feule du terrein empêche qu'il
n'y ait des conduits foutcrrains.
Je parlerai ici d'une fingularité qui fe trouve dans le
domaine royal des mines de Pachuca , en la dépendance
immédiate du département del Salto. C'ell une monta-
gne formée de pierres qui ont toutes les figures imagi-
nables. On trouve les pierres toutes taillées de la grolTeur
&; de la figure dont on les peut defirer; on n'a que la
peine de les détacher du monceau. Ces pierres ne font
pas rangées horizontalement , mais perpendiculairement
à l'horizon ; & telle qu'eft une de ces pierres , on peut
être affuré que toutes celles qui font au delTus ou au def-
fous lui rcllemblent (i).
Ce que je vais rapporter n'eft pas de même efpece ,
mais ne mérite peut-être pas moins d'attention. Il s'agit
(0 Ceci parok erre une pierre de bafalre , pareille à celle du
Comté d'Antïin en Irlande , que l'on appelle Pavé des Géants.
d'une
E N C A L I F O R N I E. 6^
cl'une pierre dont je ne puis fpëcifîer la grandeur , parce-
que la plus grande partie le trouve enfoncée dans la
terre. Sa furface extérieure eft de plus de trois pieds ; fa
couleur eft celle du marbre noir, à l'exception d'une
tache , ou plutôt d'une incruftation de matière diffé-
rente qui s'y trouve comme amalgamée. La fmgularité
de cette pierre confifte en ce que le coup le plus léger
qu'on lui donne avec le doigt y occafionne un fon avec
des vibrations de longue durée : auffi cette pierre a-t-elle
été nommée la pierre cloche, tant le fon qu'elle rend
relîemble à celui d'une cloche. EUefe trouve dans le lit
d'une rivière qui ne coule pas toujours, & qui traverfe
la ville de Cuantla , capitale de ce que nous appelions
Ancilpas , à dix-huit lieues à-peu-près au fud de Mexico.
Voici un fait dont je fuis témoin , 6ë vous le ferez
vous-mêmes , Meilleurs , puifque je vous envoie les pé-
trifications du domaine royal des mines de Huajannato,
dont la beauté eft inimitable. On trouve dans une de ces
mines, des pierres, ou, pour mieux dire, dans toutes les
pierres qu'on tire de cette mine , de quelque manière
qu'on les divife , on voit l'image d'un cèdre admira-
blement imité. Il y a dans quelques-unes de ces pierres
une particularité remarquable ; la partie qui forme l'i-
mage du cèdre eft de pur argent, &: le rcfte de la mine
propre à en fournir. On connoît cette mine fous le nom
de mine du cèdre ^ tant à caufe du cèdre repréfenté fur ces
pierres , que parcequ'à l'entrée de la mine il y a réelle-
ment un très beau cèdre; rencontre aflez finguliere ( i ).
(i) Il y avoir dans la caifle que Don Alzate a envoyée à
l'Académie un morceau de mine d'argent , fingulier par les
cryftaux fpatheux qui s'y trouvent. Ces cryftaux font composés de
lames minces , d'un beau blanc, & qui ont peu de dureté ; expofés
au feu ils s y calcinent , & y deviennent plâtre. Ce plâtre eft très fin,
d'un beau blanc , un peu gros fous les doigts {fig. 4 ^ PI. i.) j mais
nous n'avons rien vu qui relTemblât à un cèdre. On connoît au Pérou
I
.Tochomites,
€6 VOYAGE
yitrifications ^^ vitrifications naturelles que les Indiens appellent
pelijles , fe trouvent dans tout le royaume. Elles abondent
à Mexico, fur-tout dans la partie boréale; mais le lieu
o« elles ie trouvent en plus grande quantité , eft le
village de 7,uiapequaxo , près de Valladolid. On y voit
des montagnes qui ne font pas d'autre matière. C'cft
de là que ce village a tiré fon nom , qui eft celui que l'on
donne à ces vitrifications dans l'idiome de Michoacan ( i ).
Les fils de laine que je vous envoie s'appellent en In-
dien tochomites. On en fait des rubans. Les Indiens les
teignent eux-mêmes par une méthode qui leur eft par-
ticulière , & fort différente de celle qu'on emploie en
Europe. Ils n'achètent pour cela que de la graine d'écar-
Jate; les autres ingrédients qu'ils y mettent, font certai-
«ne mine d'argent qui prend la forme d'une plume ou d'une fougère ;
ferok-ce de celle-là dont l'Auteur auroit voulu faire mention ici?
La caille de Don Alzate contenoit encore des graines , en partie
vermoulues, & qui n'ont point levé \ des fragments de plantes
qu'il a été impoflîble de reconnoître, & auxquelles on a attribué dans
le pays des propriétés. Nous y avons trouvé aufli des boutons de
fleurs d'un grand magnolia, ou cfpece de laurier tulipier , appelle
dc-îns le pays j'o/o/ôc/^z/. Don Alzate dit que cette fleur répand une
odeur très agréable , même étant feche j que l'arbre qui la porte fe
plaît dans les pays chauds , où il devient très grand.
M. Noël , jeune Peintre qui a accompagné M. Cbappe , nous a
remis plufieurs deffeins qu'il a Eiits en traverfant le Mexique , &C
en Californie. Ces defTeins nous offrent , dans la partie des végétaux ,
vm cieige fur lequel fe trouvent une excroiflance monftrueufe , les
fleurs d'un corallodendron ou bois immortel d'Amérique, & celles
d'une autre plante qui nous eft inconnue j parmi les animaux , des
poiflTons , des zoophytes , la main de mer , &c. un lézard qui nous a
paru fingulier Z< que l'on nomme caméléon dans le pays , un qua-
drupède qtie nous n'avons pu rapporter à aucun de nos genres dé-
crits & connus.
(i) Les vitrifications que Don Alzate a envoyées à l'Académie,
font un laitier de volcan , un vrai verre, ferré, pefant, d'une couleur
noire : c'ell la pierre de Galinace des Efpagnois, & probablement
la vraie pierre Obfidienne de Pline. Les plus grands morceaux que
j'ai trouvés dans la caifle de Don Alzate ont 3 pouces ou 3 pouces
E N C A L I F O R N ï E. Cj
nement très peu efTentiels au fuccès. C'efl: ainfi qu'ils
teignent, à très bon marché, en rouge toute efpece de
laine. Quant à leur méthode, c'eft un fecret qu'il m'a
été impollible de pénétrer, quelque effort que j'aie fait
pour y parvenir (i).
Je finirai, Mefîieurs, par un faitfingulier, qui me pa-
roît avoir un grand rapport avec les expériences électri-
ques. Dans une terre de feu Don Alonzc de Gomez, Se-
crétaire duVice-Roi, file en la jurifdiction de Singiuluca,
au nord-eft de cette capitale , dont elle eft diftante d'envi-
ron vingc-dcux lieues, il y avoit un domeflique perclus
de Tes deux bras, je ne fais fi c'étoit de nailFance. On
l'occupoit à garder des ânes. Revenant un foir des champs
à la maifon , il fut furpris par un orage furieux , & fc réfu-
gia fous un arbre pour fe mettre à couvert de la pluie. Là il
fut frappé d'un coup de foudrequi le laifTa quelque temps
évanoui. Il ne fut point blelfé d'ailleurs; au contraire, re-
venu à lui, il eut la fatisfacliondefe trouver le libre ufage
de fes bras & de fes mains. Le fait eft sûr ; je le tiens
d'un Eccléfiaftique d'une probité reconnue , qui en fut
Je témoin, & auquel on doit d'autant plus ajouter foi,
qu'il ignore ablolument ce que c'eft qu'électricité , ma-
tière électrique : il raconte le fait uniquement pour fa
fingularité, fans prétendre l'appliquer à aucun fyftême
phyfique.
& demi fur la plupart de leurs dimenfions , & font épais de trois
lignes environ. Ce que dit Don Alzate prouve qu'autrefois il y
avoir un volcan au lieu ou près du lieu où fe trouve bâtie la ville de
Mexico. Tout ce pays en général offre des reftes d'anciens volcans ,
qui fans doute y ont été très communs.
(ij On n'éprouve pas ordinairement de difficultés pour teindre
la laine; mais il n'en eft pas de même pour le coton. Cependant
il faut auffi pour la teinture de la laine des préparations dont il fe-
roit fingulier que les Mexicains pulTent fe difpenfer pour teindre en
rouse ces tochomites.
68 VOYAGE EN CALIFORNIE.
Telles font, Meflieurs , les obfervations que j'ail'hon)^
ncur de vous communiquer (i). . . &c.
(i ) Cette lettre , dont nous venons de donner l'extrait , a été lue a
l'Académie, &c entendue avec le plus grand intérêt. On eft encore
redevable à Don Alzate d'une carte du Mexique , fort exadte , qu'il
a faite fur les mémoires les plus fidèles des voyageurs qu'il eft à portée
de confulter dans le pays même. Il nous a envoyé aulïï une carte faite
du vivant de Cortès, par laquelle il eft clair que dès ce temps-là on
leconnoifloit la Californie pour une prefqu'ille , & fon étendue
ctoit auftîbien fixée qu'elle la été depuis par les dernières décou-
vertes. Si cette carte eût été publiée dans fon temps , elle eût épargné
bien des difputes fur la Calitornie. Le zèle de Don Alzate y Ramirez
à nous communiquer tout ce qui peut fe trouver d'intéreflant dans
un pays fi nouveau pour nous , fes qualités perfonnelles, & fes con-
noiirances particulières, ont mérité les éloges &c excité la recon-
noilfance de l'Académie , qui s'eft emprelfée de le lui témoigner , ers,.
l'admettant au nombre de fes Correfpondants.
Fin de la première Partie.
OBSERVATIONS
ASTRON O MIQUES
FAITES AU VILLAGE DE S. JOSEPH,
EN CALIFORNIE,
Relativement au p^Jf^g^ d^ Vénus fur le Soleil^ le 3 Juin
de l'année 1770,.
SECONDE. PARTI E.
M
ON SI EUR Chappe arriva au village de S. Jofeph
le 19 Mai de l'année i']6<) , c'eft-à-dire quinze jours
avant celui du palîage de Vénus fur le Soleil. Il n'y
avoir point de temps à perdre: dès le lendemain defon
arrivée , il commença des obrervations préliminaires, qui
le mirent en état de connoîcre & de régler la marche de
fa pendule. Deux jours lui fuffirent pour s'appercevoir
que le balancier étoit trop long ; il le raccourcit. Il vint-
à bouc par-là de faire fuivre à l'horloge le temps moyen à
peu de fécondes près.
Avant d'entrer dans le détail des obfervations nom-
70 VOYAGE EN CALIFORNIE.
breufes auxquelles Ce livra M. Chappe dès le moment de
fon arrivée, il eft à propos de dire un mot de robferva-
toire oii il s'établit, &L des inftruments qu'il employa.
On donna pour logement à M. Chappe une grange fort
fpacieufejqui fervoit à renfermer du maïs. Ce bâtmient
ie trouvoit en allez belle expofition ; M. Chappe réfoluc
d'en faire fon obfcrvatoire. Il fit enlever toute la partie
du toit qui regardoit l'eftjle fud & roucft,&.lafît recou-
vrir avec des toiles qui fe replioient ou s'étendoient à
volonté, de forte qu'en un inftant on pouvoit apperce-
voir ou cacher telle partie du ciel qu'on jugeoit à pro-
pos. Le plancher étoit d'une terre ferme 6c bien battue.
Les principaux inftruments dcftinés aux obfervations
aftronomiques étoient, un quart de cercle de trois pieds
de rayon, delà conftru6lion du fieur Canivet; un autre
petit quart de cercle Anglois d'un pied 6c demi de rayon ;
un inftrument des partages; une machine parallatique;
une excellente lunette achromatique de dix pieds , & une
autre de trois pieds , non moins parfaite , toutes deux du
fieur Dollond ( la lunette de trois pieds groffiiïbit un peu
moins que l'autre , mais elle étoit un peu plus claire);
enfin une excellente pendule de M. Berthoud.
Il fallut commencer d'abord par faire confttuire en
maçonnerie trois piédeftaux pour afTeoir folldement le
quart de cercle de trois pieds, l'inftrument des partages,
éc la machine parallatique. La pendule fut enfuite fixée
contre un bloc ou poteau de cèdre parfaitement fec ,
qu'on avoit apporté de San-BIas pour cet ufage. Ce po-
teau avoit un pied de largeur, fur environ quatre pouces
d'épailTeur. Après l'avoir enfoncé à deux pieds 6c demi
en terre , 8c en avoir affermi le pied par un encairtxmenn
de maçonnerie, on l'aflln-a encore par deux arcboutants
qui le contenoient de deux côtés, tandis que d'un troi-
fieme il étoit appuyé contre le mur, derrière lequel on
avoit é'evé un maffifde briques; de forte qu'il étoit im-
poiîiblede fixer la pendule plus inébranlablcment. Cette
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 7X
pendule étoit en outre enfermée dans une boîte , autour
de laquelle on avoit collé du papier pour fermer tout
accès au vent & à la poufTiere.
Pour foutenir la lunette de dix pieds , on drefla une
poutre d'environ huit à neuf pouces de diamètre. Cette
poutre portoit en haut une potence qui tournoit, à frot-
tement doux , autour d'un axe vertical. C'étoit à l'extré-
mité de cette potence que fcfixoit la lunette, roulant en-
tre deux pivots, de façon qu'on pouvoir la mouvoir avec
facilité , foit dans le fens vertical , foit dans le fens hori-
zontal.
Telles furent les difpofitions par lefquellcs M. Chappe
fe prépara à l'obfervarion du paflage de Vénus. Dès le
30 Mai tous fes inftruments furent établis Se orientés
tels qu'ils dévoient fe trouver au moment de l'obfer-
vation du 3 Juin. L'on fait combien il elT: ciTentiel , dans
la pratique de l'aftronomie , de ne point attendre au
jour même d'une obfervation importante pour s'y pré-
parer. M. Chappe étoit obfervateur trop habile fie trop
expérimenté pour omettre une feule des précautions
qui pouvoient concourir au fuccès de fon opération. «Je
s> m'étois occupé , dit-il dans un endroit de fon Jour-
S5 nal , pendant ma traverfée de Cadix à Véra-Crux , à
»3 calculer toutes les circonftances du paflage de Vénus
M pour S. Jofeph , à combiner toutes les obfcrvations que
« je devois faire, à les diftribuer de façon que l'une ne
» nuisît point à l'autre ^ arrêtant d'avance la place 2c
" la difpofition de chaque inftrument , félon l'opération
" à laquelle je le deftinois. Je drcflai en outre une pan-
" carte oii toutes lescirconftances de l'obfervarion étoienc
53 expofées dans leur ordre , & je la collai la veille contre
« le mur, en face de mes inftruments, afin de pouvoir
i-> me rappcller à chaque inftant ce que j'avois k faire ou
35 à prévoir 'S.
La multiplicité d'obfcrvations qu'offroit à faire le phé-
nomène du pafTage de Vénus, avoit d'abord engagé
71 VOYAGE EN CALIFORNIE.
M. Chappe à fe faire aider dans fes opérations par M. Pau-
}y ; mais , ayant conlîdéré que des obrervations de ce
genre , déjà délicates par elles - mêmes , devenoient
encore plus difficiles par la pofition du Soleil , qui de-
voit fe trouver prefque au zénith, il rélolut de ne s'en
rapporter qu'à lui-même. C'étoit , fans doute, le meilleur
parti : peu d'obfervations , mais bien faites , & dont on eft
sûr , valent infiniment mieux qu'un bien plus grand
nombre , fur lefquelles on pourroit former quelque foup-
çon , & avoir de l'incertitude. L'on verra d'ailleurs que
M. Chappe, par fon aélivité , a fu , pour ainfi dire , fe
multiplier; quoique {eul obfervateur , il n'a pas laifTé
échapper la moindre circonftance intéreffante du paflage
de Vénus : & l'on peut regarder Ion obfervation comme
une des plus complettes qui aient été faites. M. Chappe
jouilToit encore en ce moment d'une bonne fanté. Il ne
tombamaladequehuit jours après, t'eft à-dire le 1 1 Juin.
Des accès de fièvre qui duroient quelquefois vingt-deux
Se vingt-huit heures, interrompirent tous fes travaux
jufqu'au i8 Juin, qu'il obferval'éclipfe de Lune. Il fur-
monta fa foiblefTe pendant quelques jours, &: fit plufieurs
obfervations jufqu'au zi Juin. Mais bientôt la maladie
prit un tel accroillcment, qu'ilfutimpoflîbleàM. Chappe
de fe livrer au moindre travail jufqu'au lo Juillet. Je
trouve dans fon re^iftre une obfervation d'émerlîon du
premier Satellite, faite pendant cet intervalle; mais il
marque au bas qu'il eft extrêmement incommodé , &. que
ia vue eft très fatiguée : aulfi n'ai je fait aucun ufage de
cette obfervation. On la trouvera cependant rapportée
à l'article quatrième, parmi les obfervations du même
genre faites à S. Jofeph. Depuis le lo Juillet jufqu'au 19
du même mois, M. Chappe fit encore un grand nombre
d'obfc rvations : ce n'eit pas qu'il fe portât beaucoup mieux
durant ce court intervalle ; mais ce zèle admirableauquel
il ne îurvécut quequelques in(l:ants,pouvoit encore com-
iioaader à la nature ôc la furmoncer. Ces derniers ejfîort?
furent
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 73
furent bientôt fuivis de ranéantifTcnicnc total. PalFé le
19 Juiilet, on ne trouve plus la moindre obfervation
dans le regiltre de M. Chappc; fon Journal hiilorique
ie termine même au 7 de ce mois.
M. Chappe obierva donc à S. Jofcph pendant un in-
tervalle de deux mois. La diverfité , le mélange , 6c la
grande quantité de Tes obfervations , qui vont faire le
lujetdecette féconde Partie, m'engagent à dérangerun.
peu l'ordre de fon Journal & des dates, pour le ramener à
un arrangement plus fmiple &c plus concis, en expofant,
fous un même coup d'œil , toutes les obfervations du
même genre
Je vais rapporter d'abord les hauteurs correfpondan-
tes prifes à S. Jofeph les différents jours où il a été né-
ccffaire de connoître l'état & la marche de la pen-
dule pour les obfervations particulières. Ce fera».donc au
premier Article qu'il faudra avoir recours pour réduire
au tems vrai les heures des obfervations rapportées
dans les articles fuivants.
Les obfervations qui ont rapport à la vérification des
inffcruments, feront expofées dans l'Article fécond. Celles
qui regardent la détermination de la latitude & de la
longitude de S. Jofeph, viendront après. Enfin dans
l'Article cinquième on trouvera les dérails les plus cir-
conftanciés de l'obfervation du paffage de Vénus, la-
,quelle, pour être complettement rédigée &c calculée,
demande la connoifTance des réfultats des obfervations
précédentes , qui doivent donc naturellement être rap-
portées les premières.
fk^
K
74
VOYAGE EN CALIFORNIE.
ARTICLE PREMIER.
Obfervations pour établir Vetat & la marche
de la Pendule.
J E ne rapporte point ici les hauteurs correfpondantes
prifes les II Se 2 i Mai ; elles ne fervirent qu'à faire
recorinoître qu'il falloic raccourcir le pendule d'environ
une ligne un tiers. Les obfervations intérelTantes ne
commencèrent que le zy Mai.
Matin.
Haut.
(JuSol.
"H. M. Sr Id: M.
Soir.
H. M. s.
Midi
conclu.
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Le 17 Mai.
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conclu.
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Le premier Juin.
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Le 1 Juin.
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OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. ly
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duSol.
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Midi
conclu.
H. M. S. ID. M.lH. M. S. IH. M. S.
Suite du i Juin. L'Epi de la Vierge.
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Le 8 Juin.
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VOYAGE EN CALIFORNIE.
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Le 5 Juillet.
Matin.
Haut,
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Soir.
Midi,
conclu.
H, M. S. |D. M.]H, M. S. |H. M. S.
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Midi moyen.
Equation
Midi vrai. ,
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o 10 17 9
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 77
Parmi les hauteurs correfpondantes précédentes ,
celles du 7, du 9 & du 14 Juillet ont été prifes par
M. Pauly. M. Chappe, ayant été attaqué de la maladie
contagicufe dès le 1 1 Juin, fe trouva ces jours-là hors
d'état d'obferver.
D'après ces obfervations on a la Table fuivante, qui
préfente fous un feul coup d'œil la marche de la pen-
dule durant tout le temps que M. Chappe a obfcrvé à
San-Jofcph, èc indique la correction que l'on doit faire
aux obfervations que nous allons rapporter dans les Arti-
cles fuivants, pour les réduire au temps vrai.
Retard de la'
Avance de la
Jours.
Midi vrai à la
pendule.
pendule fur
le temps
vrai.
Jours.
Midi Yrai à la
pendule.
pendule fur
le temps
vrai.
Mai.
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M. s. T.
Juin.
H. M. s. T.
M. S. T.
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10 17 9
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7S VOYAGE EN CALIFORNIE.
ARTICLE IL
Vérification des Inftruments.
J-j E quart de cercle de trois pieds de rayon , & la petite
lunette achromatique de 3 pieds, montéefurunc machine
parajlatique , furent les inftruments dont M. Chappe fie
le plus fréquent ufage. Il ell donc important de confta-
ter ici leur état. Je vais rapporter toutes les obfervations
que j'ai trouvées dans le regiftre original , relatives à la
vérification de ces inftruments.
fig. }. Le champ de la lunette du quart de cercle étoit garni
de trois fils fixes HR, FI, CD, ôc d'un curfeuroufil
mobile MO.
part,
M.Chappetrouval'épaifleur du fil mobile MO de3, i
L'épailFeur du fil fixe. .FI de 3, i
L'épaiflcur du fil fixe. .CD de 7, o
Le 1 8 Mai au matin , la diftance depuis le milieu du fil
F I jufqu'au bord le plus prochain du fil CD fut trouvée
de 560 parties. Le foir ayant été mefurée de nouveau ,
elle ne fut trouvée que de 5 54^"'', 5 \. C'eft cette der-
nière détermination que M. Chappe défigne être la
plus exacte.
Le 28 Mai, à cinq heures Se demie du foir, un des
bords du Soleil rafant le bord fupérieur du fil CD,
on fit mouvoir le curfeur MO jufqu'à ce que lemiliea
de ce fil touch.u l'autre bord du Soleil , &: l'on trouva
la diftance du milieu du fil F I au milieu du fil MO,
de 139 parties.
Le 29 Mai, à onze heures du matin, la diftance du
milieu du fil FI au milieu du fil MO, fut mefurée de
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 79
Il rëfulte de la première de ces obfcrvacions , que Parties da nu-
793^"'-.^ du micromètre répondoient à 31' 27" 36'", ;Z"i.ct
diamètre vertical apparent du Soleil ; èi. dans l'obfervation de.
du 29 Mai , 794'"'"' , 8 du micromètre répondoienc
à 3 i' 3 5" 5'". D'oii l'on conclut que
100 parties du micromètre valent 0° 3' 58" 7'"
10 . . . 0023 48, 7
I . . . 00222,9
Le 7 Juin M. Chappe démonta la lunette de Ton quart
de cercle , pour melurer l'épaifTeur de l'objedlif qu'il
trouva de 4'''"", 4 , & la diltance de fa furlace exté-
rieure au bout du tuyau, de 22''="', 2. La pofition des ocu-
laires ayant été dérangée dans cette opération , il étoit à
propos de vérifier de nouveau les parties du micromètre.
En conféquence, le 9 Juin, vers trois heures & de-
mie après midi, la diftance du milieu du fil FI au mi-
lieu du fil MO fut mcfurée de trouvée de 184^''"', 4,
& celle depuis le milieu du fil FI jufqu'au bord le plus
prochain du fil CD fut trouvée très exaclcment de 5^1 ,
5? ; ce qui donne le diamètre du Soleil de 746*""", 3 du
micromètre. Or le diamètre vertical apparent du Soleil
étoit alors de 31' 32" 4". D'où l'on conclut que
100 parties du micromètre valent 4 13 30
10 . . . . . 0 25 22
I. . . . . 0231,2
C'efl: cette nouvelle détermination dont il faut le (er-
vir pour toutes les obfervations qui ont été faites à San-
Jofeph, pafle le 7 Juin.
Je n'omettrai point ici une remarque que fit M. Chappe.
Lorfqu'il mefuroit la diftance des fils FI & CD, en
faifant mouvoir le curfeur de F I vers CD, il nela trouvoit
pas la même que lorfqu'il faifoit mouvoir ce même cur-
ieur en remontant de CD vers FI. Cette différence
fans doute doit être attribuée à la tenfion du relfort qui
/l'eft point tout-à-fait la même, foit que le curfeur re-
fîionce , foit qu'il defcende. De plusj on a encore cet
8o VOYAGE EN CALIFORNIE.
inconvénienc dans cous les microme:res; lavoir , que le
reirorc étant plus tendu à médire que le curfeur le prefle
en dctcendanc,.tous les tours du micromètre ne doivent
point être d'une valeur égale, ni proportionnelle entre
eux ; de forte qu'il feroit à fouhaitcr , pour une plus
grande exactitude, que l'Obfervateur eût attention de
vérifier pour chaque centaine départies du micromètre,
ou pour chaque tour du cadran, le nombre de minutes
èc de fécondes corrcfpondantes : ce qui peut fe faire très
facilement par le moyen des mires placées fur le ter-
rein ; méthode la plus exacte fans doute pour la vérifi-
cation du micromètre. Si M. Chappe ne l'employa pas à
San-Jofeph , c'eft qu'il n'en eut point le loifir dans l'in-
tervalle de fes obfervations ; mais on voit par une note
qu'il met dans fon regiftre , qu'il fe propofoit d'y avoir
recours avant de terminer toutes fes opérations , que fa.
maladie Sc fa mort ont il malheureufement interrom-
pues.
Après avoir donné la vérification du micromètre, il
faut pafler à celle de la pofition de la lunette.
, M. Chappe avant difpofé fon quart de cercle dans le
Erreur du , . rr. j r i > j i,- n.
quart de cer- plan du méridien , &: tournant le limbe de 1 inltrument
clc à regard tantôt du côté de l'Orient , tantôt du coté de l'Occident »
des .auteurs. ^^-^^ ^ différentes fois les hauteurs méridiennes fuivantes»
Hauteur méridienne de /3 d'Hercule.
u
7 Juin
8
lo
8 9° o' — 4z'"'"- Le limbe versl'Or.
91 o -4- 105, 5^
91 o -h 1 o 8 , 8 > Le hmbe vers l'Ocç,'
91 0-4-113,83
le 7 Juin %-]"
15 Juillet 87
n
Hauteur méridienne d'Arcîurus,
part.
30' — i9(î, 5
30
200,7
87 30 — iûi, 6
Le limbe vers l'Or,'
llauteuf
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 8i
Hauteur méridienne d'Arclurus.
Le 8 Juia 92° 30'
1 1 Juillet 5)i 30
13 91 30
14 92 30
LelimbeversrOccid.
Prenant un milieu entre ces réfulrats, on a
Haut.mérid.^Sy» 30' — I99'""- le limbe vers l'Or.
d'Arâ:urus (92 30 H- 26^, ôfè limbevers l'Occid.
Somme. . . 180 o
Moit. de l'excès. .
Réduite i
On a pareillement
Haut, mérid. f 89" o'
de /3 d'Hercule^ 91 o
67, €
33 8
25" erreur derinftrument.
42p'"- le limbe vers l'Or.
109, 3 le limbe vers rOccid.
180
Moitié de l'excès. .
Réduite
0 -h 67 3
. • 33 6-1-
1 ^ s' T erreur de l'inftrum.
L'accord parfait de ces deux réfulrats ne doit laifler
aucun doute fur la vérification delà pofition de la lunette
du quart de cercle , dont on peut fixer très exactement
l'erreur à la quantité i' 2 5" -^ dont cet inftrument donne
les hauteurs trop grandes.
La lunette achromatique de trois pieds ayant été dcf-
tinée à l'oblervation des difiTércnces d'afcenfion droite
& de déclinaifon entre Vénus &. le Soleil, pendant le
pafTage, M. Chappe détermina avecle plus grand foin la
valeur des parties du micromètre adapté à cette lunette,
par les mcfures fuivantes des diamètres du Soleil.
Parties du
micromètre
de îa lunette
achromatiq,
de 3 pieds.
-/
U VOYAGE EN CALIFORNIE.
Parc, du micc. Diam. ycttical app . du Soleil.
2 Juin à 9 h. 15' du matin. 843,8 31' 3 3" 53'"
3 à8 25 842,5 31 33 17
3 à 3 42duroir. 843,4 3 1 33 15
D'après la dernière détermination , que M. Chappe dé-
figne comme la plus exacte, il réfulte que
1 00 parties du micromètre valent 3' 44" i'"
10 . . . . . o 22 24, 2
I. . . .. . 0214, 4
Pendant fon fé jour à Cadix , M. Chappe, ayant mefuré
une bafe fur le glacis de la ville, avoit fait la vérifica-
tion du même micromètre, & avoit trouvé que 100 part,
répondoient à 3' 48" 3'". Quoique cette méthode de véri-
fication, par la mefure d'une bafe, foit la plus exaûe,
je crois néanmoins que l'on doit donner la préférence à
la vérification qui a été faite prefque en même temps que
l'obfervation du pallage de Vénus , & qui par-là ne lailTe
point foupçonner qu'il y ait eu le moindre dérangement
dans la pofition des oculaires ôC la longueur de la lu
nette.
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 83
« ' ' """"^
ARTICLE III.
Détermination de la latitude de San-Jofeph,
1^ ou s avons rapporté dans l'article précédent les hau-
teurs méridiennes d'Ard;urus ôc de /2 d'Hercule, obfcr-
vées à différentes fois pour la vérification du quart de
cercle. Ces mêmes obfervations font les meilleures que
l'on puilFe employer à déterminer la latitude de San-
Jofeph , en fail'ant les calculs fuivants.
Hauteur méridienne d'Arclurus.
Obfervée %-j^ 30' — 199 part. Réduite 87° 11' 3 5"-j-
Quantité donthaufle la lunette du quart
de cercle . . . — ï ^ 5 T"
Réfradion . . . . — 02-7
Hauteur vraie . . ; 87 20 7
On trotivc yar le calcul la déclinaifon vraie d'Arc-
turus vers le 1 5 Juillet 17^9 , de 20° 24' 4" -7 boréal.
Aberration -+- 9
Nutation — 5
Déclinaifon apparente d'Ar£turus 20 248-7-
Hauteur vraie . . 87 zo 7
Donc, hauteur de l'équateur . 66 55 587-
Latitude de San-Jofeph . . ^3 4 i -|-
Si l'on calcule de même par /3 d'Hercule, on a fa hau-
teur obfervée réduite de . . 88° 58' 13" T
Hauteur vraie . . 88 5(j 47 -7
Déclinaifon apparente . . 22 o 21 -f
D'où l'on conclut la latitude de
S. Jofeph de . . . ^3 3 34 T
84 VOYAGE EN CALIFORNIE.
Je trouve encore dans le regiftre de M. Ch.ippe une
obfervation faite le 1 3 Juillet de la hauteur méridienne
d'Antarès qu'il trouva de 41° o' -f- 124'"",, % c'eft- à-dire
de 41*' 5' 15", qui, en faifant les corrections convena-
bles, fe réduifent à 41° 2' 42", hauteur vraie d'Antarès.
Je fuppofe la déclinaifon apparente de cette étoile de
25° 54' 5" -7 auftrale. J'ai donc par cette obfervation
d'Antarès la latitude de San-Jofephde 23° 3' ii" ■^.
Prenant un milieu entre ces trois réfultats, on aura
la latitude de San-Jofeph en Californie de 2 3° 3' 3 6" -7.
On peut encore déduire cette latitude d'un grand nom-
bre de hauteurs méridiennes du Soleil obférvées à San-
Jofeph, telles que je les rapporte dans la Table fuivante^
en y joignant les réfultats.
Jours
du
mois.
Haateui méridienne du' Soleil
Lit
tude de
obfervée.
San
-Jofeph.
Juillet.
D. M.
D,
M. s.
12.
50 /j -h 8 bord fup.
^i
} '5
»3
50 5y + 110
13
3 M
14
91 y + 196 i
1?
5 it
Ȕ
89 s — S^9<i bordinfér.
iJ
3 Ji
16
88 30 — 7, }
15
3 40
17
88 }o — ijo, a
iJ
1 39
18
88 10 — }i>i
2.3
3 49
^9
Lai
88 10 — i83,9
itudc moyenne, . : ;
i3
1 50
15
3 $
Il paroît donc que l'on peut établir très exadement
cette latitude de 23° 3' 20".
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 8
ARTICLE TV.
Obfcrvadons pour établir la longitude de San-Jofepk.
Jours
Temps obfervé.
Jours.
Temps
vrai.
Mai.
H. M. S.
Mai.
H M. S
x8
i 34 '8^
17
H 37 14
Emerfion du fécond Satellite. Ciel parfai-
tement ferein.
1 37 o V
39 0 Z'
Matin
14 40 6
41 6
Emerfion du troifiem?.
Le fécond paroît avoir recouvré toute fa
lumière.
45 0 J
46 é| Le troifieme paroît avoir recouvré toute
fa lumière.
II i? 3^^
33 0 J
18
II ji 59
Emerfion du premier Satellite. Lunsttede
Soir.
trois pieds.
Juin.
3) 5«
If a recouvré fa lumière.
Juin.
5
I 31 5
Matin.
4
13 51 11
Emerfion du premier Satellite. Lunette de
10 pieds. Vapeurs légères qui cachent Ju-
piter d'inftant à autre , ce gui rend cette
obfcrvation douteul*.-
6
7 Î5 3
Soir.
6
10
7 J3 58, Emcrlion du premier Satellite. Lunette
de 10 pieds. Jupiter parfaitement termine.
Obferv.-ition parfaite.
10
II 44 II
Soir.
H 40 J7 Emerfiondupremier Satellite. Jupiterdans
les vapeurs , avant l'obfervation , s'elt
éclairci de plus en plus. On voyoit alors
parfaitement les bandes & le difque bien
terminé. Bonne obfervation , ayant bien
faifi l'inftant où il eft forti.
ai
II 3Î 49
Soir.
11
11 31 14 Emcrfion du fécond Satellite. Il y a quel-
ques vapeurs. Cependant on voit très bien
les bandes , & le difque eft aiTez bien ter-
luiné.
15
8 8 ji
Soir.
19
8 1 yi Einçrfion du premier Satellite. Lunette de
trois pieds. Beau temps. J'ai la vue fatiguée
par les veilles & la maladie.
Juillet.
Juillet.
ï4
0 1 15
Matin.
1}
II 51 4?
Emerfion du premier Satellite. Jupiter
bas ne paroît pas bien terminé. La Lune
eft fur l'horizon. Le temps d'ailleurs eft
beau.
16
8 19 S$
Soir.
16
8 19 45
Emetfion du fécond Satellite. Lunette de
10 pieds. Très beau temps. Jupiter bien
terminé. On voit parfaitement ks bandes.
;5
t6 VOYAGE EN CALIFORNIE.
Pour employer ces obfervations à la détermination de
la longitude de San-Jofeph, nous ferons les remarques
fuivantes.
Parmi les obfervations que nous venons de rapporter,
celles des 27 & 18 Mai , des 6 &c lo Juin , Se celle du
1 6 Juillet , paroiirent avoir été les mieux faites &. accom-
pagnées des circonftances les plus favorables. En confé-
quence je les ai calculées avec le plus grand foin par
les tables de M. Wargentin, &c j'ai trouvé ;
£ mer/ion des Satellites pour Paris.
Tempsvrai.
Second. . . 27 Mai 22'» 7' 4*
Premier. . . 28 19 06
Premier . . G Juin 15 22 17
Premier .
Second
. 20 19 9 17
\G Juil. 15 55> ii
Avant défaire lacômparaifon de ces réfultats des tables
avec les obfervations deM. Chappe, il faut avoir égard
à l'erreur de ces tables Se à l'effet des lunettes. En con-
féquence j'ai calculé deux obfervations faites vers ce
même temps à l'Obfervatoire Royal de Paris , par
M. Maraldi.
Emerjlon des Satellites.
Obfcrvé, Calculé. Erreur des cabloc.'
Premier. . 8 Juin 9*^ 51' 9" 9'' 50' 40" — 2.9"
Second. . 24 Mai 8 50 30 8 50 41 -+- ii
La lunette avec laquelle M. Maraldi a fait ce:s obfer-
vations efl; une lunette de 15 pieds, garnie d'un excel-
lent verre de Campani, J'ai cherché dans les regiftresdc
l'Obfervatoire pourvoir fi M. Chappe, avant fon départ,
n'auroic point fait quelque comparaifon de fes lunettes
avec celle de M. Maraldi ; je n'en ai trouvé qu'ime.
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 87
Emerfion du premier Satellite ^ le i6 Mars 1 768.
9'' 41' 50" M. Maraldi; lunette de 15 pieds.
c) 43 3 M. Chappe; lunette achrom. de 10 pieds.
9 42 46 M. Cailini ; lunette achrom. de 3 pieds.
D'après cette épreuve , je fuppoferai la différence entre
la lunette de 10 pieds de M. Chappe & celle de M. de
Maraldi, de 13", dont celle de M. Chappe fait voir plus
tard les immerfions 6c plutôt les émerfions. Quant à
l'autre lunette de 3 pieds, cette différence paroît n'être
que de 4'j dont celle de 3 piedsfait voir plutôt les immer-
fions , que celle de M. de Maraldi ( i ).
Je calcule donc ainfi la longitude de San-Jofeph.
Emerfion du premier Satellite,
calculée pour Paris. . . 6 Juin 15^21' 17"
Erreur des tables -^H- 2-9
^fftt. de la lunette de i opieds
fur celle de M. de Maraldi — 13
Emerfion telle qu'elle eût été
obfervée à Paris avec la lu- .^ „
nette de 10 pieds. . . . 6 Juin 15*122'' 33"
Obfervée à San-Jofeph avec la
lunette de 10 pieds. . . 6 7''5 3' 5^
Différence des méridiens entre
Paris & San-Jofeph. . . 7''28'3 5"
(i ) Je ne prétends pas donner ici , comme très exaâe , cette com-
paraifon entre les lunettes d'après une feule épreuve ; mais pour
approcher du vrai, on ne doit rien négliger , on profite des plus
petites connoiflances. Si les inftruments de M. Chappe eulfent été
rapportés en France , on eût pu faire à loifir ces comparaifons &
vétifications \ encore n'euffent- elles pas été complettes, n'érant pas
faites par M. Chappe lui-même. La vue de l'Obfervateur, fa ma-
nière propre d'obferver & d'eûimer , influent plus qu'on ne penfe
dans les obfervations.
7
x8
40
7
28
3^
7
18
33
7
Z9
ï3
S8 VOYAGE EN CALIFORNIE.
On la trouvera de même par
rémeriîondu premier Satel-
lite du 28 Mai, de ...
Et par celle du zo Juin , de .
Par rémerfioii du fécond Satel-
lite du 27 Mai, de. .
Par celle du 16 Juillet, de . .
Longitude moyenne . , ."^ 7 28 53
MM. Doz ôc Médina ont déduit cette même longi-
tude de leurs obfervations , ôc l'ont trouvée de 7 heures
28' 17".
La méthode de déterminer les longitudes géographi-
ques par l'obfervation des Satellites de Jupiter eft fans
doute la plus fimple, la plus commode, &mêmeunedes
plus exadies du côté de la théorie. Mais la pratique nous
apprend que l'on n'en obtient pas toujours l'extrême pré-
cilion que l'on croiroit d'abord être en droit d'attendre.
A moins d'avoir obfervé dans un lieu un nombre fuffifant,
tant d'immerfions que d'émerfionsd'un même Satellite,
que l'on puifle comparer aux femblables obfervations
faites dans un endroit bien déterminé , dans des cir-
conftances à-peu-près femblables , avec des lunettes dont
on connoifle bien les différences & l'cfFcr, on ne doit
pas, je crois, fe flatter de pouvoir déterminer la longi-
tude plus exaâement qu'à 20 ou 30" de temps près.
Quant à la longitude de San Jofeph que je viens de
déterminer, d'après cinq émcrfions tant du premier que
du fécond Satellite, obfervées par M. Chappe , quoique
quatre de ces obfervations ne difFerent entre elles que de
7", je crois néanmoins devoir donner plus de confiance à
la longitude déduite dirc£tement de l'obfervation du
paiflige de Vénus fur le Soleil , Si. que l'on trouve de
7 heures 28' 6", je crois pouvoir la fixer à 7'* 28' 10" ende-
gres 1 12° 2 30 .
Au
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 89
Au refte, pour ne rien laifler à délirer fur cette matière,
& renfermer dans cet article tout ce qui peut avoir rap-
port au même objet, je vais rapporter ici l'obfervation
de l'éclipfe de Lune du i 8 Juin 17(^9 que M. Chappe a
faite à San-Jofeph quelque temps avant que de mourir.
Je la tranfcris ici telle que je la trouve dans le regiftre
original , écrite de la main de M. Chappe, & accompa-
gnée des plus grands détails.
Il faut fuppofer i avance de la pendule fur le temps
vrai de t! 27"— au commencement de l'éclipfe, & de
z' 41" à la fin. '
EcUpfe de Lune du 1% Juin 17(39.
Temps obfervé.
Heure de la peu- Temps beau Se ferein.
dule.
10^^45' o" On apperçoit à la vue que la Lune entre
dans la pénombre ; mais dans la lunette on
n'appcrçoit aucun changement.
II 8 0 L'éclipfe eft commencée, je crois, d'une
minute. L'ombre eft fi claire, & la Lune fl
bien terminée, que je penfe avoir eftimé ce
commencement trop tard. La lunette de trois
pieds dont je me fers ne fait cependant l'efFet
que d'une lunette de 8 pieds à-peu-près.
II II 41 Grimaldus entre.
13 2. 2. entré.
Il 17 21 Mare humorum entre,
II 18 35 Galileus entre.
19 2'7 entré.
II 1 9 43 Gajfendus entre.
21 20 entré.
II 27 25 Keplerus entre.
î8 I entré.
11 30 41 Ariflarchus entre.
il 31 30 Tycho encre.
M
5>ô VOYAGE EN CALIFORNIE,
1 1 h 3 2' 1" Arijlarchus entré.
II 32 4^ Tycho à moitié entré.
33 32 Tycho totalement encré.
ji 3<3 45 Copernicus entre.
38 30 A moitié entré.
39 44 Totalement entré.
Il 5 (> 33 Manilius entre.
Il 57 30 Dionifius entre.
11 57 50 Manilius entré.
1158 7 Dionifius entré.
12 I 43 Mtnclails entre.
2 18 entré.
12 7 i 3 Plato entre.
9 42 entré.
12 14 58 Eudoxius entre.|^^,g ^^^^^^
16 I entre.'
12 17 30 Arifloteles entre.
1219 I Marc crifium entre.
24 5^ entré.
33 10 Tymochans entre, .j^^^^^^^^^
3 5 8 entre, j
On voit une demi-douzaine de petites étoi-
les de la huitième grandeur, proche de
la Lune.
12 40 47 Le bord de la Lune dans la pénombre : on
voit à la vue, ainfique dans la lunette, le
fcgment de la Lune qui n'eft pas éclipfé.
12 48 G Le bord de la Lune n'ell pas encore dans
l'ombre.
12 54 G Le bord de laLunes'obfcurcit un peu plus ;
mais décidément la Lune n'eft pas encore
éclipfée, 5c il paroît que réclipfe ne fera
pas totale.
13 I o Le bord de la Lune dans le même état. Le
fegmcnt éclairé tourne vers ^/"z/Zo/^/^^ ,• de
forte que dçs parties éclipfées fortent de
l'ombre.
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 91
13** j' o" La partie éclairée augmente.
13 10 o La partie éclairée vis-à-vis à'Harpalus. Le
bord éclairé paroît plus brillant. Ondlftin-
gue Harpalus dans la pénombre.
13 15 30 Le fegment éclairé, toujours vis-à-vis d'//iz/--
palus. Le bord de la Lune eft auffi bien
terminé & auffi clair que hors deséclipfes.
13 20 7 //izr/'û/«J entièrement forti.
13 27 58 Plato i'orz.^rr V CL
,- Cr. ^- S- i res exacte.
29 17 lorti. f
13 31 16 Arifiarchus fort.
31 13 forti.
53 3 ^ 3 ^ Galileus commence à fortir.
13 38 o Gr/wa/ij'z^i&.TyOToc/^am commencent à fortir,
39 58 Grimaldus forti.
13 40 47 Eudoxus forti.
13 41 14 Tymoehans forti.
1343 8 Kepler fort. Douteufe.
48 2D Copernic {oxt.
50 51 forti.
liL o ^^ Manilius fort. ■) t^ /-
^ ^ r • ^ Douteufe.
I 31 iorn-i
14 310 Menelails fort.
4 I forti.
14 II 37 Dionifius fort.
II 54 forti.
14 ,3 20 TycAofort.j^^,^^^^^^^
15 25 lorti.^
14 21 41 Mare crijium fort.
14 40 36 Le bord de la Lune commence à s'éclaircir.
14 41 20 Fin de l'écliple.
14 41 17 Le bord dans la pénombre.
14 4(> o Le bord prefque auffi clair & auffi bien ter-
miné que le reftant du difquc , avec cette
différence, qu'il devient d'une couleur tirant
fur le jonquille lorfqu'il eft vers le bord de
M ij
fi VOYAGE EN CALIFORNIE.
la lunette, au lieu que le reftedu difqueeft
bleu, ce qui eft une preuve qu'il y a encore
de la pénombre qu'on voit à la vue fur la
Lune.
14^48' o" Le bord de la Lune parfaitement terminé j
mais il paroît encore barbouillé à la vue.
L'éclipfe n'a pas été décidément totale ; elle ne m'a paru
que de onze doigts ^.
M. Chappe fe trouva d'une fi grande foîblefTe après
cette obfervation , qu'il ne put obferver la Lune à fon paf-
fage au méridien.
La préfente éclipfc n'ayant été obfervée dans aucun
endroitconnu (du moins n'en ai-jeaucuneconnoifTancejj
nous ne pouvons la comparer qu'au calcul qui en fixe le
commencement à Paris le 18 Juin. . . 18^ 34' 29"
Obfervée à San- Jofeph 11 5 22
Différence des méridiens de San-
Jofeph ÔC de Paris y'* i9' 7"
Fin de l'éclipfe calculée pour Paris. H^ 8' 19"
Obfervée à San- Jofeph ^4 3^ 39»
Difi^érence des méridiens de San-
Jofeph èi, de Paris ..... 7^ 29' 40"
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 93
A R T I C L É V.
Oifcrvanon du pajjage de Vénus fur le dijquc
du Soleil.
JLi'iMPORTANCE de cette obfetvation avoit fait pren-
dre à M. Chappe toutes les précautions poiîlbles , non
feulement pour y apporter de fa part l'attention, la
précifion & l'adrefTe dont il étoit capable , mais encore
pour n'être point trompé £c n'avoir aucun foupçon d'in-
certitude dans les opérations qu'il avoit été obligé de
confier à d'autres , ne pouvant abfolument tout faire par
lui-même.Sondomeftique, fort habitué à compter, étoit
à la pendule. M. Pauly fe tenoit à côté de lui,:fuivoic
la féconde, nommoit lès minutes, :& étoit chargé d'é-
crire. Non content de l'attention de ces deux perfonncs,
M. Chappe pluficurs fois alla par lui-même vérifier la
minute, principalement au premier ôc au fécond contact.
M. Dubois, l'Horloger, étoit occupé à tourner la vis
de la machine parallatique, & à aider M. Chappe dans
la manutention des inftruments.
• Pendant toute la matinée M. Chappe avoit eu la pré-
caution de n'obferver que de l'œil gauche , & de cou-
vrir l'autre, le réfervant pour l'obfervationla plus elTen-
tielle, celle du fécond contact.
En rapportant ici l'obfervation du pafTage de Vénus,
je crois ne pouvoir mieux faire que de tranfcrire fcrupu-
leufemcnt, ôc prefque mot à mot , ce que j'ai trouvé dans
le regillre original , avec les notes ôc explications que
M. Chappe lui-même a ajoutées.
94 VOYAGE EN CALJfORNIE,
Temps obfervé
à la pendule.
Jui
uin.
2 3M7 3i
3 Juin.
0 3 30
Temps vrai.
z3H59'i7" ^"'
5 M
Premier contàcl , à la lu-
nette achromatique de 5
pieds , montée fur une ma-
chine parallatique.
J'apperçois Vénus fai-
fant une petite échancrure
fur le bord du Soleil par-
faitement ternviné. Je ne
crois pas que cette première
phafe s'écarte beaucoup de
la véritable , parceque l'é-
chajicrure étoit très petite,
:,;q j;l j;
Entrée du centre , eflimie.
Je fus très attentif à exa-
miner fi je verrois Vénus
hors du Soleil , avec le croif.
fant qui a été vu dans le
pafTage de 1 76 1 ; mais je ne
lapperçus pas. Je remarquai
feulement que vers le mi-
lieu de l'entrée de cette pla-
nète on diftinguoit une par-
tie du difque de Vénus pro-
che du difque du Soleil , tel
qu'on le voit dans la figure
première, planche troifie-
me. Les deux cornes A & B,
ou continuation du difque
de Vénus, fembloient à la
vérité annoncer le com-
mencement du croiflant,
que je n'aurai peut-être pas
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 95
Temps obfervé
à la pendule.
i Jui»^
lîo.'.:
Temps vrai.
ÏV Eq.T
jfiXp 2j:îîr
ïipf ètcu à càufe que ma 1h-
necte groffifloit beaucoup,
& écoic par conféquent
moins claire.
Second contacl.
A rentrée totale de Vé-
nus j'obfervai très diftinc-
tement le fecqnd phéno-
mène qui avoit été remar-
qué par la plus grande par-
tie desAftronomes en \-jG\.
Leborddudifque de Vénus
s'alongea ( -v^oy. jigtire i )
comrhe s'il était attiré par
le bord du Soleil.
-~ Je n'obfervai point pour
rînftant de l'entrée totale,
celui où le botd de Vénus
commencoit à s'aionf^er;
mais ne pouvant pas douter
que ce point noir ne fît par-
tic du corps opaque de Vé-
nus , j'oblervai le moment
oii il étoit à fa fin : de facon-
quel entrée totale ne peuc
être arrivée plutôt, mais
peut-être plus tard de deux
ou trois fécondes. Le point
noir étoit un peu moins
obfcur que le refte de Vé-
nus, Je crois que ç'eft le
même phénomène que ce-
lui que j'obfervai à Tobolslc
len i7(3U
96 VOYAGE EN CAUJFÛ.RÎîIE<
Temps obfervé
à la pendule
3 Juin.
5^ 53' 9"
6 z i6
6 1 1 3 8
Temps vrai.
5^4' 50" 1 8'"^
6 3 57 lî T
6 13 19 7 T
17 2Ç3i:)T
Premier contaclalafor-
tie , avec la lunette de dix
pieds.
Le Soleil étoit ondoyant
ain{i_ que; Vénus, ce qui
rendoit cette obfervation
très difficile. A ce premier
contact Vénus s'ell alon-
gée plus confidérablemenc
que le matin , en s'appro-
chanttout-à-coup du bord
du Soleil.
Sortie du centre^ eftimée
très exadlement à ce qu'il
m'a paru.
Second contact , ou for^
tie totale. Elle ne me pa-
roît pas être arrivée plutôt,
peut-être 4" plus tard , mais
je n'en fuis pas certain.
Pour obfervcr avec toute la précifion poffible les deux
contacts à la fortie , je difpofai ma lunette de façon
que je ne fulfe pas obligé de la remuer vers ces moments.
Sans cette précaution j'eufTe été dans le cas de perdre
de vue Vénus; de pren4re le fond du ciel pour le bord
du difque de cette planète , ôc de commettre ainfi une
erreur énorme, au lieu qu'en ne quittant pas un inf-
tant de vue, au dernier contait, le bord de Vénus
qui paroifloit un peu plus noir que le fond du ciel ,
j'eus cette phafe avec toute l'exactitude poffible.
J'avais chargé M- Pauly d'obferver à 1^ lunçtte de trois
pieds
ta^. l7o
de îc-. ûardeJ^ SoiJf-
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 97
pkds les deux conta£ls de la forcie ; il étoit déjà un peu
exercé aux obfervations. Il obferva le premier contait
22," plutôt que moi, àc le dernier 37'' plutôt. Comme
il étoit à côté de moi^ je m'apperçus du moment
où il quitta la lunette pour aller à la pendule , ôc
je vis très bien qu'il fixoit trop tôt les moments du pre-
mier ôc du fécond contait ; car je voyois encore Vénus
parfaitement lorfqu'il étoit à la pendule.
On ne peut pas fans doute defirer une obfervation
plus complette de plus détaillée que celle que nous ve-
nons de rapporter. On en conclut la durée dupaffage^ ou
demeure du centre, à San-Jofeph, de ^ ^^' 4fTL\^'\()
& le milieu du paflage à . . . . 3 6 13 20, 2
Mefure des diamètres de P^énus.
M. Chappe fe fervit de la lunette de 3 pieds, garnie
d'un micromètre, pour mefurcr le diamètre de Vénus
dans le cours de fon paffage fur le difque du Soleil.
Diamètre de Vénus en
Temps à la pendule:
parties du micromètre.
Evalue.
3 Juin i'^ i' ,
23,5 . ...
0°
0^52" 38'", 8
I 55
23,5 ....
52 38,8
2 0 .
23,0 ....
51 31, 6
2 17
23,0 ....
51 31,^
3 3^
22,9 ....
51 18,0
3 M
. 22,9 ....
51 18,0
Avec le quart de cercle de trois pieds.
518 . 27,0 . ... ^4 17, 5
N
5>8 VOYAGE EN CALIFORNIE.
J'ignore ce qui a pu faire trouver à M. Chappe
le diamètre de Vénus iî différent de celui qu'ont déter-
miné les autres Aftronomes. On voit fur-tout avec éton-
nement le peu d'accord de la dernière mefure prife au
quart de cercle , avec les précédentes prifes à la lunette de
trois pieds. J'aurois abfolument rejette cette dernière ob-
fervation lî elle n'avoic été répétée deux fois ,&: fi , d'ail-
leurs, je n'euffe remarqué qu'en prenant un milieu entre
fon réfultat & celui des autres , on trouve le diamètre
de Vénus de 57",8; valeur conforme à celle qu'on a
trouvée jufqu'à préfent.
Au refte, la meilleure manière de déterminer ce dia-
mètre eft de le déduire du temps que Vénus a employé
à traverfer le bord du Soleil. Or , par les deux con-
tadls de la fortie , on trouve que cet intervalle de
temps a été à 1 8' z 8", 8 ; ce qui donne le diamètre de Vé-
nus de 56", 4, d'autantplusexaiî}; qu'il faudroit une erreur
d'environ 20" dans la durée de cet intervalle pour pro-
duire une féconde d'erreur dans la mefure du diamètre.
Obfervation de la dijlance des centres de Venus 0 du
Soleil , en afcenfwn & en déclinaifon.
La figure troifieme repréfente la pofition du Soleil 5c
de Vénus dans le champ de la lunette achromatique de
3 pieds montée fur une machine parallatique. Cette lu-
nette étolt difpofée dé façon que le bord boréal du Soleil
fuivit exa£lement le fil FI. Le Soleil s'avançant de I
vers F, Monfieur Chappe obCervoit les pafl"ages des bords
occidentaux du Soleil &: de Vénus au fil horaire HR, ôc
faifant mouvoir le fil mobile MO, il mefuroitladiftance
du bord boréal du So^eil au bord de Vénus le plus pro-
che. D'oii il eft aifé de déduire les difi^érences d'afccnfion
droite 6c de déclinaifon de Vénus 6c du Soleil à chaque
obfervation.
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES, je,
Pajfage au fil horaire.
Temps vrai.
Première obfervation. Seconde obferrac.
Bord occidental du Soleil o^i-j' i'^'\6
BordoccidentaldeVénus. . o'^ 25' ii",7 . . . o 28 54, 6
Boi'd oriental de Vénus ... o 25 15, 7. ..o 28 58, 6
Bord oriental du Soleil.. . o 25 48, 7 . . . o 29 32, 6
3° observation. 4= obfervation. 5' obfervation.
Bord occ. du Sol. 2h 3 7' 5 6'\-j . . 4^ 5 9' 14",$) . . 5*^ 6' 5 ^'\c)
Bord occ. deVén. 2 38 58, 7. .4 59 45,9.. 5 7 19,9
Bord or, de Vénus 2 39 2, 7.. 4 59 49, 9 . . 5 7 23,9
Bord or. du Soleil 2 40 14, 2.. 5 i 42,4.. 5 9 18,4
L'on voit donc que dans la première obfervation le
centre de Vénus fuivoit le centre du Soleil au fil horaire
// ' 1 ' et ' If
33,5 évaluées 0° 7 45
3i, 5 07 29
4, 2 o o 59
45, 7 o io 35
de ... .
Seconde.
Troifieme. Vénus précédoit
Quatrième .
Cinquième. .
47 )
10 51
Temps vraL
3 Juin et 15' 13", 7
r
\
i 39 o>3
i 43 39, 3
2 56 2(î,
3 I 39, 7
3 9 14, 7
3 II 19, I
3 i5 11,9
4 59 47» 9
Lediait). du Soleil.
3 4^
Diftance du bord boréal Différence de décli-
du Soleil & du bord bo- naifon apparente des
rcal de Vénus en parties bords du Soleil & de
du micromerre. Vénus.
. . 74, 5 évaluées 0° i 48" o'", 4
133,5
139,5
143,7
148,0
149,0
150,5
159,0
209,9
Je l'ai fuppofé
d'après le cal. de
843,4
4 59 5,0
5 li 31,4
5
21
55^
5 31 34,0
5 3 5 49,8
5 3<î 3,0
5 5<^ i^,^
7 48 13, <^
31 33 15,®
Nij
loû VOYAGE EN CALIFORNIE.
Auffi-tôt après le premier contact de l'entrée, c'eft-à-
dire à o^ i' 51" temps vrai, M. Chappe mefura au grand
quart de cercle de trois pieds la différence de hauteur
entre le bord inférieur boréal du Soleil 2c le point de
fon difque où Vénus étoit entrée, & il la trouva de
^8,'""- 5, ou î' 43" 6*', 5 dont Vénus étoit plus élevée:
de immédiatement après le premier contad: delafortie,
c'eft-à-dire à 5** 5 8' 19" -f» la différence dehauteurdu point
de fortie &: du bord du Soleil le plus proche fut trouvée
de 8 !•""•, ou 3' II" 51'", 5. Or par le calcul on trouve
que dans la première obfervation la hauteur apparente
du bord du Soleil doit être de 89° 32' 47", ÔC dans la
féconde de 8° 48' zi"; ce qui donne la hauteur appa-
rente du point de l'entrée de 89° 30' 4", & celle du point
de fortie de 8° 51' 35".
Ce n'eft point ici le lieu de fixer le principal réfultat
que l'on peut tirer de cette obfervation par rapport à la
parallaxe du Soleil : nous en parlerons à la fin de cet Ou-
vrage, Quant à préfent il fuffit de dire qu'en fuppofant
cette parallaxe de 8", 6y lecalcul de robfervation propre
de San-Jofeph donne
L'heure vraie delà conjon£tion de . . 2'»45' 57"
Milieu du pafTage 3^45-7^
Plus courte diftance des centres de Vénus
Ôc du Soleil ....... o°io' 7^
Lieu de la conjonction . . . . 2? 13 27 20
Latitude au moment delà conjondt. 10 14
LieuduNœud 2? 14 3^ 3
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. loi
ARTICLE VI.
Eclaircijfements fur la longitude de V^era-Crux , de
Mexico , ainfi que fur différents autres points de Géo-
graphie ^ touchant le Mexique ù la Californie.
jlJ a n s la première partie de cet ouvrage , qui comprend
la relation du voyage de M. Chappe à travers le Mexi-
que , je n'ai point cru devoir entrer dans le détail circons-
tancié d'un journal itinéraire : il n'en eft pas de même
ici, où je crois devoir confirmer & conftater les correc-
tions qui ont été faites à une nouvelle Carte de
l'Amérique feptentrionale y dédiée a l'Académie Royale
des Sciences de Paris par Don Jofeph- Antoine de Al-
\ate y Ramire\ en 1768 , 5c publiée dernièrement par
M. Buache. Les détails font eflentiels à l'objet que je me
propofe dans cet article.
Je commencerai d'abord par la détermination des
deux points principaux ; favoir , la polition de Vcra-
Crux, & celle de Mexico.
De la longitude & de la latitude de Vera- Crux,
Le port de Vera-Crux , autrement dit San- Juan de
£7/«a,el1:, comme l'on fait, un des principaux du golfe du
Mexique. C'eft là où abordent la flotte Efpagnole & les
autres vaifTeaux qui viennent d'Europe au Mexique. On
diftingue Vera-Crux Kieja &C Vera-Crux Nueva.Ycï^-^
Crux Vieja eft iîtuée à quelque diftance de la mer , fur
une petite rivière qui fe décharge dans le golfe ; mais il
n'eft queftion ici pour le préfent que de Véra-Crux Nueva,,
dont la pofition eft la plus cflentielle à déterminer.
Le grand nombre de voyages que les Efpagnols fonc
TOI VOYAGEEN CALIFORNIE.
tous les ans à Vera-Crux femblcroit devoir faire efpérer
une détermination exa6te de la pofitionde ce port. On va
voir cependant combien on étoic éloigné juiqu'ici de la
connoîcre.
Don Jofeph- Antoine de Alzate y Ramirez , dans fa
Carte du Mexique, dédiée &L envoyée en 1768 à l'Aca-
démie, place Véra-Cruxpar 101° 3 o' à l'occident de Pa-
ris , & par 18" 50' de latitude. Dans le Neptune Fran-
çois la longitude de ce lieu eft de 100° 17', fa latitude
de 1 9° (,'.
Voici comme je détermine l'une êc l'autre.
M. Chappe avoit emporté avec lui une montre ma-
rine, qui , du Havre à Cadix, fie dans le refte du voyage ,
avoit toujours annoncé la terre avec la plus grande exac-
titude. Le 7 Février I7<j9 M. Chappe fe trouvant proche
de la pointe de l'ifle de la Dominique , la montre donna
la longitude de 3 15° 31'. Or laCarte deSoplcj publiée par
M. Buache en 1740, la donne de 315° 47'. Suivant
M. Bellin, dans (a Carte de 1766, cette longitude n'eft
que de 31 5° 2'.
On voit donc, qu'admettant comme la meilleure la
longitude delaCartequidifFere le plusdecelledelamontre
marine, l'erreur de cette montre n'étoit, à la Domini-
que, que d'environ 10 lieues.
Trente- fept jours après, c'eft-à-dire le 14 Mars,
M. Chappe étant à Vera-Crux détermina le midi vrai à
la montre marine à (3^ ^ S?""!"- L'avance connue 6c dé-
terminée de cette montre fur le temps moyen , dévoie
être ce jour-là de 41" 1 8", ce qui donne le temps moyen
à Cadix au moment du midi de Vera-Crux, de 6^ 4' 1 8", z ;
d'où retranchant 9' r\" 18'" pour l'équation du temps,
on aura 5 h 54' 56" 54'" pour l'heure vraie de Cadix; y ajou-
tant 3 4' 1 6", différence des méridiens de Cadix & de Paris,
on aura (>^ 29' 13", ou 97° i8'4- pour la différence de
longitude entre Paris & Vera-Crux, qui fe trouve plus
occidentale.
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 103
On voit donc que la moindre erreur des cartes fur la
longitude de Vera-Crux eft de 3°.
. Quoique cette détermination de la longitude de Vera-
Crux par la montre marine ne foit pas auffi exadle ou
auflî exempte de doute que fi elle avoit été déduite d'ob-
fervations aftronomiques nombreufes & bien faites, néan-
moins on peut inférer que cette longitude ne peut être
que peu différente de la véritable, &c fur-tout qu'elle
eu. préférable à celle que donnent les Cartes. En efîxt, de-
puis Cadix jufqu'à la Dominique, la traverfée a été de
75 jours, &fort orageufe; néanmoins on ne peut taxer
la montre que d'une erreur tout au plus de 100 lieues dans
la longitude de la Dominique. Or delà Dominique à la
Vera-Crux il n'y a eu que 37 jours d'intervalle; ceferoic
donc mettre tout au pis que de fuppofer une erreur de
1 5 lieues dans la longitude de Vera-Crux , déterminée
par la montre marine.
D'ailleurs, l'erreur de 30, indiquée par la montre ma-
rine, fetrouvera bientôt confirmée, par rapport à un autre
lieu peu éloigné de Vera-Crux , par des obfervations
mêmes aftronomiques.
PafiTons maintenant à la latitude de Vera-Crux.
Le 15 Mars M. Chappe obfervala hauteur du bord fu-
périeur du Soleil avec fon petit quart de cercle, de 69° 20'
2Î)'""-, ou 69° 16' 44", 9. La lunette baifloitde i 11"-^.
La réfraâion à cette hauteur étoit de 2 2", le diamètre du
Soleil de 1 6' 5". On a donc la vraie hauteur du centre du So-
leil de 69° 2' 39": y ajoutant fa déclinaifon i°47'43", ona
7° 50' 2 2";hauteurdontlecomplément 19° 9'38"eftlala-
titude cherchée de Vera-Crux.
D'après cette détermination, l'on voit que, dans la Carte
du MexiqueVera-Crux fe trouvepl acée environ z o' trop au
fud.
104 VOYAGE EN CALIFORNIE.
De la longitude de Mexico.
M. Chappe ne fie aucune obfervation à Mexico ; mais
Don J. de Alzate nous a envoyé par le canal de M. Pauly
plufieurs obfervations d'éclipfcs des Satellites de Jupiter,
qu'il a faites lui-même dans cette ville, ainll qu'un petit
imprimé qui contient les détails deréclipfe de Lune qui a
eu lieu le II Décembre 1769.
Voici ces obfervations telles que Don J. Alzate les
rapporte.
Immerfion des Satellites.
Obfervé à Mexico. Calculé pour Paris.
i^ Février 1770 à lé^ 38' 49" ^'"''^™'- HP 23I» 19' 53''
29 à 15 45 0 r 21 30 24
«4 Mars à 15 5^ 53 T 11 41 48
Prenant un milieu entre les réfultats des deux dernières
obfervations, on en déduit la longitude de Mexico de
6*^45' 9" à l'occident, ou 101° 15',
Voici maintenant les principales phafes del'éclipfede
Lune du 1 1 Décembre 1769 , obfervée à Mexico.
Temps vrai.
lo'i i^' i" Commencement un peu Incertain.
28 30 L'ombre à Ariftarque.
29 25 Galilée tout- à-fait dans l'ombre.
31 33 L'ombre à Grimaldi.
34 20 L'ombre à Kepler.
38 24 L'ombre à Platon.
39 50 Platon tout-à-fait dans l'ombre.
42 7 L'ombre à Copernic.
43 3 5 L'ombre à Ariftote.
II 3 0 L'ombre à Pline.
3 7 L'ombre à Ménélas.
4 23 Ménçlas tout-à-fait dans l'ombre.
11^
7
^7
14
M"
i8
o
22
54
8
44
24
9
^7
9
^7
43
5«
o
59
^7
4
^4
13
12
13
45
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 105
ri'ï 7' 27" L'ombre à Dionlîus.
L'ombre à Mare cr'ifum.
L'ombre à P romontorium acutum.
Mare crijlum tout- à-fait dans l'ombre.
12 8 4-4 Grimaldi fort de l'ombre.
Kepler fort de l'ombre.
Arirtarque fort de l'ombre.
Ariftarquetout-à-fait forti.
Mare ferenitads fort de l'ombre.
Mareferenitatis tout- à-fait forti.
13 4 24 Mare crijîum fort de l'ombre.
Fin incertaine.
Fin certaine.
Je n'ai pu avoir aucune obfervation en Europe corref-
pondantc à celle-ci ; je l'ai rapportée ici avec un grand
détail , afin que ceux qui feront plus heureux puifTent faire
une comparaifon plus exaclc. En attendant, fi je com-
pare cette obfervation avec le calcul qui me donne la fin
pour Paris, le 12, à 19'» 5 1' 30", j'en déduis la longitude
de Mexico à l'orient de Paris de 6^ 37' "t» mais jen'hé-
fite pas un moment à donner la préférence au réfultat
des obfervations de Satellites fur celui-ci.
L'obfervation de la fortie de Vénus en 1 7(3 9, faite à Me-
xico par le mêmcDonJofcphdeAlzate, nous fournit une
nouvelle détermination de la longitude de cette ville.
M. de la Lande ayant calculé le contact intérieur , &: fup-
pofant la parallaxe du Soleil de 8" -7 > trouve que la
longitude de Mexico doit être de 6\i 49' 52". Cette dé-
termination fera certainement préférable à toute autre, fi
la parallaxe fuppofée eft la véritable, comme on n'en
peut guère douter maintenant , ôc fi l'heure du conta£b a
été bien déterminée.
Je lailîe au Lecteur le choix du réfultat qu'il croira de-
voir préférer. Je ne doute pas , au refte , que le zèle de Don
Alzate y Ramirez , notre Correfpondant, ne nous mette
O
io6 VOYAGE EN CALIFORNIE.
bientôt en état d'établir la pofition exadte de Mexico,
d'après les obfervations qu'il le propofe de faire dans cette
ville. Il a déjà fixé la latitude à 1 9° 54'.
Da.ns\s.ConnoiUance des temps on a fuppofé jufqu'à pré-
fent la longitude de Mexico de 106°. Don J. de Alzate,
dans fa Carte, place cette ville à 1 04° 9' o" à l'oueft de Pa-
ris,ou par 275°-^derifle de Fcr.On voit doncquela plus
petite erreur fur la longitude de Mexico , celle de la Carte
deD. J. de Alzate, étoit encore jufqu'à ce jour de 2^ 44',
Nousavons vu dans les articles précédents 7,^ & 4^, que
la longitude de San-Jofeph devoir être établie de yh 28'
10", ou 1 1 2° 1' 4" ; fa latitude de 23° 3" -5-.
M. Doz l'a déterminée de 25° 5' 1 5"; mais il nenousa
donné aucun détail de fes obfervations qui puifTe nous
faire juger de leur degré deprécifion. D'ailleurs, les ob-
fervations de M. Chappe font trop exades Se trop d'ac-
cord pour ne pas leur donner la préférence en ce point.
L'erreur des Cartes fur la pofition de San-Jofeph n'eft
pas moins confidérable que fur celle de Mexico. En efFet,
Don J. de Alzate, dans fa Carte du Mexique, place San-
Jofeph par 21° de latitude , & 264° ^ de longitude par
rapport à l'ifle de Fer, ou 1 1 5° 14' à l'occident de Paris.
L'erreur de la Carte de Don J. de Alzate eft donc de 3**
12' en longitude, & de 1° 3' en latitude.
D'après les nouvelles déterminations que nous venons
de conftater, l'on voit donc que l'Amérique &c la Cali-
fornie doivent être rapprochées de l'Europe d'environ
quatre degrés de longitude. Combien une erreur aufii con-
fidérable ne pouvolt-elle pas être préjudiciable aux Na-
vigateurs! Elle a furement été funefte à plus d'un vaif-
feau, & les autres n'auront dû leur lalut qu'aux erreurs
particulières de leureftime, qui auront compenfé celles
des Cartes.
PafTons maintenant à la Géographie intérieure du Me-
xique. Les Journaux de M. Chappe nous fourniflent au
moins un itinéraire de la route deVera-Crux à Mexico , &
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 107
de Mexico à la côte occidentale du Mexique, fur la Mer
Vermeille.
Au fortir de Vera-Crux, onfuitleborddelamer^enal-
lantverslenordjpendantenvirondeuxheurcsdechemin; ra-Crus a
prenant enfuite dans les terres, à travers de méchants bois, Mexico.
on arrive au bout de trois heures à une rivière, de l'au-
tre côté de laquelle eftfituée Kera-Crux l^iej a, dont la.
diftance, par rapport à Vera-Crux Nueva , eft d'environ
. 5 lieues.
De Vera-Crux Vieja, on prendle chemin de Xalapa,
Ville la plus prochaine, en pafTant par plulîeurs villages
qui fe trouvent proche de la route, ou fur la route même;
tel eft le hameau de Serio-Rico^ litué fur une hauteur , à
laquelle on parvient par une pente fort douce.
A 2 heures 4" ou 3 heures de chemin de Serio-Rico , on
trouve le hameau de Riconada. Le chemin qui conduit
de l'un à l'autre lieu eft très mauvais, il ne feroit pas pof-
fible d'y pafTer avec des voitures. L'on compte environ fix
lieues de Vera-Crux Vieja au hameau de Riconada. Ce
hameau , au refte , mérite moins ce nom que celui d'habi-
tation , ou de fimple cabaret ; car il n'y a en tout qu'une
feule maifon. Quatre lieues plus loin fe trouve un autre
lieu aulfi peu confidérable , nommé el Plan del Reyo.
Au fortir de ce village on monte perpendiculairement
pour parvenir à une hauteur fort élevée , d'où l'on apper-
çoit le golfe du Mexique , 6c le port de Nueva Vera-Crux.
On defcend enfuiie de cette hauteur, ôc l'on arrive au
bout de deux lieues au hameau de Elcoiolé : enfin, avant
d'arriver à Xabpa , on trouve encore le petit hameau de
las y?«//7zai, proche duquel pafte un ruiffeau d'autant plus
remarquable, que c'eft le fcul qui fe trouve depuis Vera-
Crux.
Xalapa eft adofle à une montagne fort élevée ; une
partie de la ville eft au pied, &: l'autre fur le penchant
même de fa hauteur : Xalapa eft éloigné d'environ \G
lieues de Vera-Crux Vieja. Le thermomètre étant à 14
Oij
io8 VOYAGE EN CALIFORNIE.
&L à i(j°, le baromètre s'y foiuienc à 2 ^ pouces j ji.gnes^^ ^^^
village de Riconada & del Plan del Reyo , à la même
hauteur du thermomètre , le baromètre fe foutienc à
^pouces .lignes ^^
Au fortir de Xalapa, on monte perpétuellement pour
gagner le haut de la montagne où le baromètre fe foutient
à zi^"""^ 9''="" 8, le thermomètre étant à 1°-^. En géné-
ral , depuis cette ville en s'avançantversMexico, le ter-
rein s'élève de plus en plus. A 6 lieues par-delà Xalapa,
on trouve le village de las Bigas. La route poury parve-
nir eft afFreufe ; on monte bi on defcend ians cefTe pour
traverfer une chaîne de montagnes, dont la largeur eft
comprife entre ces deux lieux. Avant d'arriver à las Bi-
gas, on traverfe pendant plus d'une lieue un terrein
aride, qui n'offre que les reftes & les veftiges épars de
quelque ancien volcan, éteint fans doute depuis quelque
temps. D'ailleurs, à 3 lieues à droite de la route, on
apperçoit une montagne fameufe par un volcan qui y
exifte a6tuellement, &, plus encore par fon élévation,
qui , à ce l'on prétend , la rend vifible à 45 lieues en mer.
A 4 lieues de las Bigas , l'on trouve le village de Pe^
rotte.Le thermomètre étant à S'' ~, le baromètre fe fou-
tenoit à 11?°""' 2"^'"" 4. Perotteeft encore éloigné d'envi-
ron 40 lieues de la ville de Mexico; mais les chemins de-
viennent de plus en plus beaux à mefure qu'on approche
de la capitale ; la route eft pratiquée entre deux chaînes
de montagnes affcz élevées, qui tantôt s'en éloignent ôc
tantôt s'en rapprochent.
A lolieuesdePerotte, on trouve le village de 5£2«^I'û^<7.
A z lieues de ce village eft la fameufe moina.gnc d'OnJaSa.
Elle red'emblc beaucoup au Pic de Ténériffc ; on Tapper-
çoit, dit- on, de Mexico quand l'horizon eft fort clair. Le
fommet en eft toujours couvert de neige , 8c le pied très
bien cultivé. C'eft, à ce que l'on prétend, la plus haute
moutagne du Mexique.
Le hameau de Piedros Negrosc^ à 4 lieues de Sant-
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. 109
Yago. Six lieues enfuite par-delà on trouve celui de ^o/za.
Ventura , qui n'eft qu'une fimple auberge. Dansée lieu le
thermomètre étant à 15", le baromètre fe ioutenoit à
^^poucs pi'sn"6; Yei-s Bonaventura les deux chaînes de
montagnes , en s'étendant Se s'éloignant l'iuie de l'autre
de plus de 10 lieues, forment unetrès belle plaine. A deux
lieues environ de Bonaventura, en allant vers Àpa ,
village le plus prochain , on trouve un ruifl'eau. Apa pa-
roît être à 4 lieues de Bonaventura. A 6 lieues à' Apa , on
paiïe par un petit hameau nommé San-Juan Deakoua.
Trois lieues plus loin on en trouve un autre appelle Caf-
pès i èc enfin on arrive à la ville de Mexico , qui eft
éloignée de ce dernier hameau de 6 lieues.
Telle eft la route de Vera-Crux Nueva à la ville de
Mexico, laquelle comprend cnviron7zà75 lieues. Nous
avons déterminé plus haut la différence de longitude de
ces deux villes de 5° 9' -5-. Nous allons maintenant don-
ner le détail de la route de Mexico à la côte occidentale
du Mexique.
La ville remarquable que l'on rencontre dans ce trajet
eft celle Guadalaxara.
Quatorze lieues au-delà de la ville de Mexico, vers Routede Mê-
le nord-oueft , l'on rencontre le village Tepexe del Rio. ^"^° ,^ ^^~
A deux lieues environ de cet endroit , en allant gagner
la F'entaSan Francifco ^ hameau qui n'eft guère éloigné
de plus de 7 lieues , on pafle le pont de Clauta , fur une
petite rivière. Le chemin eft trèsmauvaiSj ôc toujours en-
trecoupé de montagnes.
De San-Francilco , on gagne le hameau de AJJieda a
RoyoArcos^ qui n'en eft qu'à quatre lieues. Cinq lieues
plus loin fetrouveenfuirelafermedeCi/f/'vo.PairéCuervo,
on defcend perpétuellement jufqu'à la petite ville de
San-Juan del Reyo,Ç{mx\çi\ eft qu'à 4 lieues. De San-Juan
del Reyo , on gagne , à environ i o lieues de là , une autre
ville nommée Querctaro j où fe remarque un fort bel
iio VOYAGE EN CALIFORNIE.
aqueduc. Dix lieues encore plus loin eft la ville de Zelaya.
On quitte Zelaya pour fe rendre au hameau de Molino ,
qui en efl: à 6 lieues. De Molino à la petite ville de Ira
Poito , l'on compte environ quatre lieues , ôc cinq de là
au hameau de la Nouragrande.
Au fortir de la Nouragrande , on traverfe un pays abfo-
lument défert, pour gagner à 9 lieues de là le village de
la Cal\ada. Paflé ce hameau, on traverle une plaine ab-
folument déferte, pendant l'efpace de i z lieues, pour arri-
ver au hameau delSerro Gordo^com^o(é de deux ou trois
chaumières feulement , fort éloignées entre elles ; on
trouve danscetrajetune petite rivière. Après SerroGordo,
on trouve le hameau dclosPicachoSydc 12 lieues plus loin,
on rencontre la rivière de Rio Grande y que l'on paffe fur
un pont de 2 6 arches , fore bien conftruit, pour arriver
enfin à la ville de Guadalaxara ^ après un trajet d'en-
viron cent feize lieues depuis Mexico, &; de cent quatre-
vingt-dix depuis Vera-Crux.
La diftance de Guadalaxara au lieu le plus proche de
la côte occidentale du Mexique eft peu coniidérable ;
mais pour gagner la côte à la hauteur de la Californie il
faut remonter beaucoup verslenord-oueft, ce quialonge
un peu cette route.
Au forcir de Guadalaxara, on trouve le hameau de
los Rancho-^, qui en eft éloigné de 6 lieues; & cinq lieues
plus loin le petit village de Malitati , d'où l'on gagne à la
diftance de 3 lieues le petit hameau de Tekita. On entre
enfuite dans les montagnes pour faire une route très rude
pendant cinq lieues jufqu'à la Magdeleine ; de la Mag-
deleine, on defcend à la Sucrerie de Moutfchlùhéy qui en
eft à <j lieues. Au fortir de Moutfchitilté le chemin devient
affreux, & bordé de précipices pendant l'intervalle de 5
lieues ; les .3 lieues fuivantes , pour gagner Yfllan^ font
un peu plus praticables. D'Yftlan , on gagne au bouc de
3 lieues le hameau àiAova Catdan , 6c 5 lieues plus loin
celui de Timlarit , d'où l'on fe rend , après 7 lieues de
OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES, m
route, au hameau de San-Liond ^ qui n eft qu'à 6 lieue|.
de la petite ville de T^e/J/c^.
Enfin de Tepick à San-Blas on ne compte que treize
ou quatorze lieues , dans l'intervalle deiquelles on ne
rencontre que deux petits hameaux,'
Le port de San-Blas eft un nouvel établiiïement fur la
cote du Mexique, à l'embouchure de la rivière de San-
Pedro.
Le trajet de G.uadalaxara à San-Blas eft d'environ
260 lieues. On emploie communément un mois à faire ce
voyage.
Il y a pluficurs ports de la côte du Mexique fur la Mer
Vermeille , d'oii l'on s'embarque pour la Californie. Nous
commencerons d'abord par celui de Matanchel ^ qui eft
le plus méridional; il eft au fud de San-Blas , & formé
à l'embouchure de Rio Grande. Ce port eft mal-fain. Il
ne faut pas y féjourner long-temps; auffiy trouve-t-on
rarement des vaifleaux.
Au nord de San-Blas eft le port de Maiatlan. L'entrée
de ce pof t eft perpendiculaire à la ligne nord de fud , elle
eft formée par trois petits iflots. A l'entrée il y a environ
28 brafTes de fond ; 6c dans le port, par-delà une broche
qui fe trouve un peu à l'eft en entrant, il n'y en a plus
que huit braftes ; & plus loin, dans le grand bafîîn qui
eft à l'intérieur, il fe trouve fi peu d'eau que les barques
feules peuvent y entrer. Mazatlan eft éloigné deMatan-
chel d'environ zo lieues.
Au-deflus de Mazatlan eft le port de Ramada.
Les vents de nord & de nord-oueft font fort communs
fiir la Mer Vermeille, & les courants portent au fud; de
forte que pour gagner la Californie il faut s'embarquer à
la côte du Mexique le plus nord poiîible ; aulTi les lieux
oii l'on s'embarque le plus facilement, & où l'on trouve
le plus de vaifleaux, font à l'embouchure de la rivière de
Sinaloa , & de celle de Mayo, De ces deux endroits, on
m VOYAGEEN CALIFORNIE.
s'embarquefur des petits canots à rames, ôc l'on eit rendu
en trois jours à la côte de Californie.
De San-Blas au cap San-Lucas le trajet eft d'environ
<jO lieues, a 12 lieues ejnviron à l'oueftdeSan-Blas ; &: 10
lieues plus fud, on trouve les trois iflesdéfertes de 5re.-Af a-
rie. Leur direction rcfpedtive eft dans la ligne nord-oueft.
Deux decesiflesjlcs plus proches deSan-BlaSjfontéloignées
entre elles d'environ 3 lieues ; l'on peu t paCTer entre , mais il
faut prendre garde à un rocher qui fe rrouve dans le partage,
proche d'une des deux ifles les plus orientales , qui eft aulli
la plus petite. A l'oueft, près de la troilîeme ifle la plus
occidentale , ell encore une autre petite ifle qui a au
plus une lieue dans fa plus grande largeur; elle s'appelle
le petit San- Juan. C'ell dans la plus occidentale des ifles
de Sainte-Marie que l'on trouve à taire de l'eau à une
petite rivière qui a fon embouchure dans la mer vers le
fud-ouefl: de l'ifle.
Il ne nous reftc plus que peu de mots à dire fur la po-
fition de quelques lieux de la Californie. La Million de
San-Jofeph eft fituée à envion une lieue de la côte fur
une petite rivière qui fe décharge dans la Mer Vermeille.
Le cap San-Lucas, pointe la plus méridionale de la
Californie, eft à 7 lieues environ de San Jofeph, vers le
fud-eft, de forte que fa longitude &. fa latitude ne doi-
vent différer que de quelques minutes de celles de San-
Jofeph.
L'Abbaye de San-Barnabé fe trouve 15 lieues audef-
fus de San-Jofeph , en remontant dans le golfe. C'eft un
des endroits oii l'on aborde le plus aifément.
Enfin, 40 lieues au nord de San-Jofeph, en fuivantla
côte, on trouve le village de San- Anna , pofition qui
n'étoit point rapportée fur les cartes.
) HISTOIRE
HISTOIRE
ABRÉGÉE
DELA
PARALLAXE DU SOLEIL.
Expofé des travaux entrepris a ce fujet , & des réfultats
du Pajfage de Vénus fur le difque du Soleil, obfervé
en 176 1 ù 17(^9.
X-jA parallaxe du Soleil efl: un des points de l'Afti-ono-
nomie qui a le plus joccupé les Savants depuis environ
un liccle. L'influence de cet élément fur tout le fyftême
planétaire en rendoit la recherche extrêmement impor-
tante. L'on ne doit donc pas être étonné des travaux
nombreux, des voyages pénibles , qui ont eu lieu de-
puis quelques années , ni de l'emprciïement qu'ont mon-
tré les nations les plus éclairées de l'Europe à concourir
chacune en particulier au fuccés de cette intéreflfante
découverte.
L'Aftronomic, ainfi que toutefcîence qui n'efl: fondée
que fur l'obfervation &: l'airemblage des faits , ne peut
avoir que des progrès lents. Elle doit tout attendre du
y
114 HISTOIRE ABRÉGÉE
temps. L'époque de chaque fiecle eft celle de quelque
nouvelle découverte donc elle s'enrichit. Des génies
heureux peuvent hâter de quelques pas fa marche vers
la perfection ; mais il eft des découvertes qui tiennent
à des circonftances que rien ne peut accélérer; telle eft
la circonftance du paflage de Vénus. Elle feule pouvolc
difliper abfolumentnos incertitudes fur la quantité delà
parallaxe du Soleil; elle feule pouvoir fixer avec la der-
nière précifion un élément qui avoir varié jufqu'ici, fé-
lon les opinions de divers Aftronomes, ôc félon les
différentes méthodes qu'ils avoient employées à fa recher-
che. Heureux notre fiecle,à qui étoit réfervée la gloire
d'être le témoin d'un événement qui le rendra à jamais
mémorable dans les annales des Sciences!
Mais en quoi donc avoit confifté jufqu'àce jour la dif-
ficulté de déterminer la parallaxe du Soleil ? Qui a pu
faire varier les Aftronomes fur ce point, 6c rendre leurs
méthodes infuffifantes? Comment le paffagedeVénus de-
voic-il leur procurer un réfultat préférable atout autre ^
& exempt de toute incertitude? Enfin quelle conclufioa
en ont-ils tirée ? Ces queftions ont dû naturellement
s'offrir à l'efpritde tous ceux qui ont entendu parler dix
paffage de Vénus, & qui , par goût pour les fciences , y
ont apporté quelque intérêt. Je me propofe de fatisfaire
ici leur curiofité ; d'expliquer le plus clairement qu'il me
fera polîible tout ce qu'on peut defirer de favoir fur cet
objet : je ne prétends pas néanmoins entrer dans tous leg.
détails dont cette matière eft fufccptible, ils demande-
roient feuls un ouvrage particulier, & furpafleroient les
bornes de cet article, qui ne peut être ici placé que
comme un acceffoirc.
que' i^parai La parallaxe du Soleil eft la différence du lieu où cet aftre
laxe Enciuoi nous paroît, VU de la furface de la Terre, au lieu où il
mluité delà p^roîtroit s'il étoit vu du centre du globe; ou , fi l'on veut,.
idéurmincr. c'eft l'angle fous lequel paroît le rayon de la Terre vadi»
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 115
centre du Soleil ( i ), Or l'on fent parfaitement que cet angle
doit être d'autant plus petit, que le Soleil eft plus éloi-
gné de nous. La parallaxe du Soleil eft donc dépendante
de fa diftance à la Terre ; fi cette diftance étoit connue,
on connoîtroit aufli-tôt la parallaxe ; & réciproquement.
Mais dans le triangle parallactique nous ne connoif-
lons qu'un côté qui eft le rayon de la Terre ^ & il n'eft
aucun moyen de fe procurer d'autre donnée par une me-
furc directe. Voilà la première difficulté.
Cette difficulté arrêta d'abord les anciens Aftronomes , Les Anciens
Se demeura long-temps au-deflus de leurs forces ; ils fu- ^* détermi-
rent réduits à former des conjectures. Pétofiris ôc Né- "onjcaStes.
cepfos. Rois d'Egypte, ne croyoient le Soleil éloigné de
la Terre que de 1970 ftades fi).Pythagore, je ne fais d'a-
près quel calcul, fixoit cette diftance à dix-huit mil le lieues.
Ces opinions, comme l'on voit, énormément éloignées
de la vérité. Se que nous regardons aujourd'hui comme
ridicules &. abfurdes, étoient admifes Se fuivics avec rai-
Ion dans ces premiers temps, oîi les connoiftances, foit
dans la théorie ou dans la pratique de l'Aftronomie, fe
trouvoicnt trop bornées pour pouvoir y rien fubftitucr de
préférable. Ce ne fut que vers l'an î.64 avant Jéfus-Chrift
que l'on commença à avoir des idées moins grofficres fur
cet objet; elles furent ducs à Ariftarque de Samos. La
rectification que ce Philofophe apporta à l'opinion de fes
prédéccireurs , quoiqu'encore bien impartaite, eft néan-
moins d'autant plus digne d'éloge qu'elle eft fondée fur
Une méthode fort ingénieufe, dont voici l'idée. MéthoJed'A-
Ariftarque, fuppofant connue la diftance de la Lune riftarque. il
\1T. 1- > „..JI J^ détermine la
a la lerrCj vouloir quau moment de Ja quadrature on p^iaiiaxe du
îTiefurât l'angle d'élongation entre le Soleil ôc la Lune, Soieildej'.
(0 Cet angle a donc fon fommet au centre du Soleil , & a pour
bafe le rayon de la Terre.
(i) Cela ne fait pas 130 lieues.
Pij
ii5 HISTOIRE ABRÉGÉE
ce qui lui donnoit un côté ôc un angle connus dans un
triangle rectangle, dont ladiftance du Soleil à la Terre
fe trouvoit être l'hypotliénule, fie étoit par conléquenE
facile à déterminer. Ariftarque, par ce moyen, parvint à
reconnoître que la parallaxe du Soleil ne pouvoir pas
aller au-delà de trois minutes. Cette quantité , à la vé-
rité, étoit encore vingt une fois environ trop grande;
mais Ariftarque ne pouvoir guère atteindre alors à une
plus grande précilion. 11 fuppoloit connue la diftancede
la Luneàla Terre, &:laconnoiiroit fort mal.D'ailleurs^
Cette mé- fa méthode rigourcuie dans la théorie devient peu (ure
thode, affez cl^ns la pratique , cn cc qu'elle cxigc de failit exaclcment
ingenieufedu , .r t' i iiT 'a>J-
côTé de la le vrai moment dc la quadrature de la Lune , c elt-adire
théorie , eft cclui OU l'angle à la Luneeft juftedc 00°, ce qui nepcut
facilement r • i> J l • ' l • ' J 1
fufceptibie ^c juger que par 1 apparence de la partie éclairée de la
d'erreur dans planète : ct ccttc apparence a des variations trop peu
Ja praticjuc. fenfibles, & refte long-temps la même quoique laLune
change de place. On croit faire l'obfervation au moment
précis de la quadrature, tandis que laLune en eft peuc^
être éloignée d'un tiers de degré ; ce qui influera confi-
dérablement fur la mefure de l'angle à la Terre, par con-
féquent fur la diftance cherchée &: fur la parallaxe. Mal-
gré les difficultés de cette méthode, il eft pourtant certain
qu'elle eft fufceptibie d'une précifion beaucoup plus
grande que celle qu'en avoir tiré fon auteur; en effet ,
nous verrons que par fon moyen Riccioli 6c Vendélius
ont approché beaucoup de la vérité.
La détermination dAriftarque fut long-temps la plus
<î-iï/pïr°que exade & la plus fuivie. Ptolomée, plus 'de trois fiecles
par laquelle après, ayant tenté la même recherche, mais par une autre
Ptolomée dé- n^^ji^oJe trouva 2' 50" pour la parallaxe. La méthode
termine lapa- , > ,,• \ r n >tt-
raiiaxe du So- qu'il employa n etoit autre choie que celle qu Hipparque
îcildei'5o". ^voit indiquée. Elle confiftoit à déterminer dans les
éclipfes de Lune le diamètre apparent de l'ombre, 6c
celui du Soleil : leur fomme retranchée de la parallaxe
horizontale de la Lune, fuppofée connue d'ailleurs j
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 117
donnoit la parallaxe du Soleil (i). A tout bien confidé-
rer, cette méchode d'Hipparque n'étoit gucie préférable
à celle dAriftarque, ni lulccptible d'une précifion beau-
coup plus grande. En effet, elle eft également fondée fur
des éléments dont il efl: très difficile d'établir la jufte
quantité (2.), 6c dans lefquels la moindre erreur inHue
confidérablement fur les rélultats. Auffi voyons-nous que
tous ceux qui ont tenté de s'en fervir, tels que Ptolomée^
Tycho, &.C. ont toujours trouvé une quantité fort éloi-
gnée de la véritable: & l'on pourroit alléguer , en faveur
de la méthode d'Ariftarque, que c'eft en la fuivant que
Vendélinus, au milieu du dernier fiecle vers l'an K347 , VendélinuS
parvinr à réduire la parallaxe du Soleil à i 5",c'cft-à-dire beaucoup de
à 6" 4" près de la véritable, précifîon que perfonnen'avoit la vraie paraU
encore atteinte avant lui. irouv'edÏÏ'.
C'eft donc ici que nous devons fixer nos premiers
fuccès dans la recherche de la parallaxe 'du Soleil. Ric-
cioli , à la vérité, jetta peu d'années après quelque in-
certitude fur la parallaxe établie par Vendélinus, qu'il
prétendoit trop petite de moitié. Eneffer,en employant
auffi les quadratures de la Lune , il trouvoit cette paral-
laxe de 28". Riccioli fe trompoit abfolument ; fon réful- Réfultat dej
tat étoit deux fois trop grand , mais fon erreur ne venoit ["''^afàua'^e
fans doute que du défaut de la méthode dont nous avons du Soleil juf-
expofé ci-deffus les inconvénients. L'on demeura donc l"'»"'^ pre-
encore mcertam pendant quelque temps entre i5&:28 . de létabiiiie-
C'étoit beaucoup, au refte, d'être parvenu à réduire la '"^'" '^^ ''■'^-
parallaxe du Soleil à une auffi petite quantité. Nous al- ^^j sdences.'
Ions voir qu'on ne tarda pas long-temps à la dimmuer
encore.
(i ) Je ne me propofe pas ici de donner la démonftration de cha-
que méthode 5 il faudroit des figures , des explications , en un mot,
des détails qui nous meneroienc trop loin j il me fuffic d en donner
l'efpric.
(2) 11 fuffit d'avoir obfervé une fois une éclipfe de Lune, pour
juger combien il eft difficile de déterminer le diamètre de l'ombre ^
dont la pénombre rend toujours les bornes indécifes.
ii8 HISTOIRE ABRÉGÉE
Déjacommençoicà luire ce beau jour que les Arts &
les Sciences, du pied du trône de Louis XIV, alloient ré-
pandre fur toute l'Europe, L'étabhlTement de l'Académie
Royale des Sciences , époque à jamais mémorable pour
les iîecles qui nous fuivronc (i), venoit de rairembler,
pour ainli dire ^ comme dans un foyer commun, ces gé-
nies éclairés dont les lumières alloient faire briller à nos
yeux un nouveau monde, un nouvel ordre de connoit-
fances. D'un autre côté , la Société Royale de Londres re-
prenoit une nouvelle forme. Digne émule de celle de Pa-
ris, elle voyoit fleurir dans fon fein des noms fameux,
des Savants illuftres , capables d'établir & de foutenir
entre les deux Nations une rivalité èc une égalité conf-
tantc dans l'Empire des Sciences. Halley, Flamfteed, Bra-
, dley en Angleterre; Auzout, Picard, la Hire, Roémer,
Jean-Dominique Caflini en France, par leurs travaux ôc
leur génie failbient éprouver à l'Aftronomie une entière
révolution; chacune des parties de cette fcience fut entre
leurs mains ébauchée ou perfc£tionnée. On juge qu'un
élément auffi important que la parallaxe du Soleil ne
fut point oublié. Les obfervations les plus délicates, les
méthodes les plus ingénieufes furent employées à cette
recherche.
la petitefle Lcs tcntativcsque l'on avoit faites jufqu'alors, les réful-
de la parai- tats qu'on cn avoit obtcnus ,fuffifoient pout faire connoî-
iaxeduSokii ^.^.^ ^^ j^ parallaxe du Solcil étoit une quantité extrême-
eit une nou- I .^„ r -/-ni \r • i
velie difficui- ment petite, & ptelque mlenlible auxobiervations, dont
tédeiadéter- jgg erreurs mêmes pou voient la plupart du temps furpafler
cette quantité Se ranéantir,ce qui la rendoit extrêmement
difficile à déterminer. Il parut donc bien plusnaturel d'a-
voir recours aux planètes, telles que Mars &c Vénus, dont la
(\) L'Académie Royale des Sciences fut écablie en ï666 : & la.
Société Royale de Londres , qui n'étoit d'abord depuis long-temps
qu'une aflemblée volontaire de quelques particuliers , reçut en 1 660
une forme plus ftable.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 119
parallaxe devoir être beaucoup plus fenfibleque celle du
Soleil, ôc par conféquent plus facile à déterminer. La
parallaxe d'une de ces planètes une fois connue, il étoic
aifé d'en déduire celle du Soleil. En eflct, la théorie du laconciurcde
mouvement des planètes nous fait connoître pour tel inf- '«"c des pla-
çant que ce foit les rapports des difbanccs du Soleil &c d'une pius ilniible,
planète quelconque à la Terre; & l'on faitque les paral-
laxes font encre elles dans la raifon inverfe de ces dif-
tances.
Il ne fut donc plus queftion que de chercher à déter-
miner avec la plus grande exactitude poifible la parallaxe
d'une planète.
11 fcroittrop long de détailler ici toutes les méthodes
qui furent ôc qui peuvent être employées à la folution
de ce problême. Nous nous contenterons d'indiquer les
plus ingénieufes , pour nous hâter de venir à celle du
palFage de Vénus, qui eft notre objet principal.
D'après la définition que nous avons donnée ci-deiFus
de la parallaxe ^ il eft aifé d'établir les principes fuivants»
1 °. Qu'au zénith la parallaxe eft nulle, c'cft-à-dire qu'elle
ne change en aucun fens la pofition de l'aftre qui s'y
trouve ; mais depuis le zénith la parallaxe de hauteur va
toujours en augmentant jufqu'à l'horizon où elle eft la
plus grande, ôc fon effet eft de faire paroître l'aftre plus
bas qu'il n'eft véritablement. 2°. Que dans le méridien
la parallaxe d'afcenfion droite eft nulle ; mais elle devient
déplus en plus fenfible, à mefure que l'aftre s'éloigne de
ce cercle ; &C l'effet de la parallaxe dans ce fens eft d'aug-
menter l'afcenfiondroite de l'aftre quand il eft du côté de
l'orient , ôc de la diminuer quand il eft du côté de l'oc-
cident.
De ces deux principes naiflcnt les méthodes fui-
vant-f"; Déterminer
, la paralbxe
1". Qu'un Obfervateur fe place fur le globe de la Terre dune planète.
de façon que la planète, dont il veut déterminer la parai- '^^s'^^'land"
laxe, pafle à fon zénith lorfqu'elle parvient à fa plus latitudes,.
Méthode des
afcenfîons
droites.
Méthode des
jdécliiiaifons.
ïio HISTOIRE ABRÉGÉE
grande latitude fupérieure, cette latitude ne fera aucu-
nement afl-e£tée de la parallaxe; mais la planète parve-
nant cnfuite à fa plus grande latitude intérieure, & fe
trouvant alors éloignée du zénith de l'Obfervateur . fa
latitude fera afledlée de la parallaxe, &: le trouvera dif-
férente de la première , de toute la quantité delà paral-
laxe , qui fera ainli déterminée (i).
1°. Lorfquc la planète pafle dans le méridien , déter-
minez (on afcenfion droite, qui eft alors indépendante
de la parallaxe. Six heures après déterminez encore une
fois cette afcenlion droite, qui fe trouvera alors afFe6lée
de la parallaxe, dont la quantité fera la différence des
deux afcenllons droites oblervéeSj ayant égard toutefois
au mouvement propre de la planète dans l'intervalle des
deux obfervations.
}°. Deux Obfervatcurs placés fous un même méri-
ridicn (i), mais à grande dillance , l'un au nord, l'autre
au midi de l'équatcur, déterminent en même temps la dé-
clinaifon de la planète au moment de fon palîage par le
méridien. Laparallaxe influe alors différemment fur cette
déclinaifon,&:la rend difl'érente dans l'un &: dans l'autre
lieu pour chaque Obfervatcur , d'une quantité qui eft ou
la fomme ou la différence de l'effet de la parallaxe dans
chaque lieu.
Tel cfl: l'cfprit des différentes méthodes (3) qui ont été
(i ) Ce n'eft guère que pour la Lune que cette méthode peut s'em-
ployer avec fuccès.
(zlll n'eft pas néceffaire qu'ils foient fous le même méridien j
mais afin d'être plus clair & plus concis, je n^ parle ici que des cas
les plus fimples j qui montrent mieux l'efprir de la mcrhode.
(3) Toutes ces méthodes font expliquées fort au long dans l'Af-
tronomie de M. de la Lande , Tome 2. , Livre IX ; dans les Inîtitu-
tions Aflronomiques de M. le Monnier , chap. zi , pag. ^16 , 8C
fiiiv. & l'on trouveraune ample application des deux dernières dans
h volume des Voyages de MM. de l'Académie.
imaginées,
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL, m
imaginées , & que Flamftced , J. D. Cailini , mon bifaïeul , obfcrvationî
o \ 11) * rL 1 ' faites en 1671
cC après eux nombre d autres Altronomcs, ont employées pourdcKtmi-
à la recherche de la parallaxe de Mars. Ce tut en 1672 que n" la paral-
1> , • • 1 A/f j •. r _ laxe de Matx.
Ion s en occupa principalement. Mars devoit le trouver
cette année proche de Ion périgée en oppofition avec le
Soleil, fituation la plusfavorable que l'on put dcfirer. Une
autre circonftance également heurcufe ic rencontra en
même temps. M. Richer, Membre de l'Académie Royale
des Sciences, étoit parti l'année précédente pourl'iflede
Caïenne, où il devoit faire nombre d'expériences ôc
d'obfervations pour le progrès de l'Aftronomic & de
la Phyfique. On juge bien que l'on n'avoit pas oublié de
lui recommander les obfervations relatives à la parallaxe
de Mars, & de fe concerter avec lui pour ne laifler échap-
per aucune occafion de vérifier cet élément cflentieL
Tout répondit aux efpérances que l'on avoir conçues, &C
aux précautions que l'on avoir prifes. M. Richer, à
Caïenne, ne cefla pendant les mois d'Août, Septembre,
& Octobre 1 672 , de comparer Mars à diflerentcs étoiles
fixes; tandis que MM. Picard , Roëmcr , &: Caffini , fai-
foient en France, de leur côté, les mêmes obfervations,
qui furent de part Se d'autre multipliées , répétées , faites
en un mot avec toute l'attention &la délicatcffe que l'on
pouvoit attendre de pareils Obfervatcuis.
Les obfervations de Richer ne furent pas plutôt pai've-
nues en France*, que l'on s'emprelTa de les comparer avec
leurs correfpondantes. Le premier réfulat que l'on en tira
ne laifTa pas d'abord de furprendre. En effet, la pre-
mière comparaifon des obfervations de Caïenne avec
celles de M. Picard nedonna aucune parallaxe pourMars.
Dominique Caffini ne put adopter cette conclulîon ; il
penfa que l'efFet de la parallaxe avoit été anéanti par
l'erreur des obfervations. Ayant donc examiné &difcuté
ces obfervations, il conclut que l'on pouvoit foupçon-
ner un quart de minute d'erreur, &C qu'en admettant
tette quantité , la parallaxe de Mars ne pouvoit guère être
Q
112 H î S T O I R E A B R É G É E
plus grande que 25". Cette détermination , qui étoit
. alors purement hypothétique, devint bientôt un réful-
tatfixe ôc certain, lorfque M. Caffini, venant à comparer
Tes propres obfervations avec celles deRichcrjCndéJui-
fit la parallaxe de Mars de 15" -7-. Non content de cela ,
Doniiniqiit M. Callini chercha à déterminer cette même parallaxe
ai.ini deccr- ,^^. ç^^ obfervations feules, indépendamment d'aucune
laxe de Mars comparailon ; il obtmt encore le même relultat. Cette
de ij'. dou double vérification étoit fans doute bien décilive, 6c en
Il conclut cel- ^ \ • r ■ r -r f. ».
kduSokiide mcmc tcmips bien latisrailante pour l Auteur, qui y trou-
s" !• voit une preuve flatteufc de la délicateffe de fes obferva-
tions, ÔC de la bonté de la méthode qu'il avoit em-
ployée ( I ).. La parallaxe du Soleil fe trouva donc fixée , dès-
lors , à 9" -7. Cette détermination ne fut pas, à la vérité,
adoptée d'abord de tous les Agronomes , d'autant plus que
plulieurs d'entre eux, employant les mêmes méthodes qui
avoient fi bien réulli entre les mains de M. Caffini, ne
furent pas, à beaucoup près, auffi heureux, & trouvè-
rent des réfultats fort différents. En effet, M. Picard,
comme nous l'avons déjà dit ci-defifiis, par les obferva-
tions, comparées avec celles dcRicher, trouvoit la pa-
rallaxe nulle, tandis que par fes propres obfervations
feules il la trouvoit de 20". M. de la Hire pareillement
trouvoit des variétés fi grandes dans fes réiiiltats, qu'il
commença par croire la parallaxe du Soleil infenfible ;
mais il finit, pour ainfi dire, comme par accommode-
ment, par la fuppofer toutau plusde 6'^(i). Il n'y eut que
M. Flamfteed, dont les obfervations s'accordèrent parfai-
tement avec celles de M. Caflini, puifqu'cllcs donnèrent
également une parallaxe de 10". L'accord de ces deux
Obfcrvateurs confommés n'étoit pas un foible préjugé
en faveur de la juftefiTe du réfultat.
( I ) Celle des afcenfions drokes dont nous avons fait mention ci-
deffus.
( z) Si cependant on veut employer pour ^.Soleil unefaralluxc de 6",
difoic M. de la Hire , on aura , &ç.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 113
M. Halley, unpeu trop prévenu contre toute méthode
de déterminer la parallaxe du Soleil autre que celle du
paflage de Vénus , étoit du nombre de ceux qui n'ad-
mettoient point la parallaxe établie par MM. Flamfleed
& Caiîini. Il la fuppofoit au contraire une fois & demie
plus grande, c'elt-à-dire d'environ z5"(i).
Nous conviendrons volontiers avec M. Halley qu'au- La mhhoâc
cune obfervation n'étoit plus capabledc fixer la vraiepa- ^^sakenfions
rallaxe du Soleil, que celle du paiFagc de Vénus; mais pioyée avec
il faut avouer auifi, & l'expérience l'a bien prouvé, que |uccès& fans
la méthode de chercher cette parallaxe par celle de varlé'té^^dans
Mars, comme l'a fait mon bifaïcul, mériroit quelque lesréfultats.
confiance, & étoit fufceptible d'approcher de très près
de la vérité. En eiFet, nous avons vu depuis, que toutes
les fois que cette méthode à été employée par un Obfer-
vateur habile & dans des circonftances favorables, elle a
toujours donné des réfultats peu difFércnrs entre eux ;
car en 1704, Mars fe trouvant dans la même pofition
qu'en i6yi, M. Maraldi faifit cette occafion pour véri-
fier la parallaxe du Soleil de la même manière qu'on l'a-
voit fait auparavant; il la trouva de 10". Quinze années
après. Mars étant dans fon oppofition, mêmes opéra-
tions de la parc de M. Maraldi, même réfultat encore.
Enfin M. de la Caille, fe trouvant au cap deBonne-Ef-
pérance en 1751, ne lailTa échapper aucune occafion de
déterminer la parallaxe de Mars. Les obfervations cor-
refpondantes furent faites avec le plus grand foin en
Europe, par tout ce qu'il y avoitdeplus habiles Obferva-
teurs. M. de la Caille de retour, après avoir difcuté,
pefé, & calculé toutes ces obfervations, finit par pon-
clurela parallaxe du Soleil de io"îf'. Un accord fi conftant
entre des obfervations faites & répétées à différents temps,
^»J ■ ■ » Il I— ^«^^^M^»^ Il l»IW M- I , ^— ^— ^ I -■ ■ . -— —, .—
(i) M. Halley varia fouvent fur cette quantité. Il fixa d'abord
la parallaxe à 45", enfuiteillaréduifit à zj ,& enfin à 12, comme
(dans ks Tables.
Rélultât lies
recherches fur
^a p3ralij.,e
du Soleil juf-
qu'au mo-
ment du pre-
*n'ci' partage
^'^ Vénus Ail-
le Soleil en
114 H I S T O I R E A B R É G É E
en différents lieux_, &c par différents Obrervatciirs, fcin-
bloic affiirer que l'on étoic parvenu à la vraie détermi-
nation de la parallaxe du Soleil, qui fut dès-lors fixée à
lû" du commun accord de tous les Aftronomcs. Plulieurs
d'entre eux même ne croyoient pas que le paffage de
Vénus dût apporter un changement bien fenfible dans
ce réfultat , èc n'attendoient ce phénomène que comme
une vériticatlon de ce que l'on avoit déjà trouvé. M. de
la Caille s'en expliquoit affcz clairement dans l'intro'-
duction à Tes Ephémérides , depuis 1765 jufqu'à 1775 ,,
où il die mot pour mot : Enfin , toutes compenfations
faites , on peut établir^ comme une quantité certaine , k
moins d'un quart de féconde près ^ que la parallaxe ho~
ri-^ontale du Soleil dans fa di fiance moyenne a la Terre efi
de vo"^
Ta BLE de la Parallaxe du Soleil félon
divers Afironomes.
Noms des Auteurs.
Arillarque de Samos.
Ptolémée ....
Thycho. . . '. .
Kepler
Vendélinus. . . .
Riccioli. . r . .
J. Dominique Calîîni,
Flamfteed
Picard. " . . . .
La Hire
Halley
Maraldi
Bradley
Jacques Caffini. . .
La Caille
Caflini de Thury. . .
}
Vers l'an
2(^4 avant J. C.
1 50 après J. C.
1570
1617
1647
\6(.6
lôyi
1704
1719
I73(î
— 1719
Parallaxe du Soleil.
3
2'
3'
1'— 1'
50"
15
28''
10'
o
6"
II
45 —M
10"
9"— 12"
10"
10''
10"
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 115
Tel eft le point où nous étions parvenus , lorfque le
paflage de Vénus de 1761 vint nous procurer le moyen
de dillipcr le relie d'incertitude que nous pouvions avoir.
Se de décider la queflionjfoit en confirmant le rélultac
déjà trouvé , foit en le rectifiant. Mais avant d'entrer
ici dans le détail de l'obfervation de ce fameux phéno-
mène , je vais tâcher, comme je l'ai promis en commen-
çant, de faire comprendre comment la détermination
de la parallaxe du Soleil pouvoir en dépendre; il fuffira
enfulte de donner une idée de la méthode que les Agro-
nomes ont fuivie dans leurs calculs, pour conclure cette
parallaxe des obfervations qui ont été faites en différents
endroits de notre globe.
Rappelions-nous un moment ce que nous avons déjà
dit plus haut. Nous avons vu qu'en général l'effet de la I3 parallaxe
parallaxe eft de faire appcrcevoir un aftre dans un lieu <\» Soleil fe
i-rri 1 • ^ •! (T. '-11 -n* acJuitdel'ob-
tout ditt-ercnt que celui ou il eit véritablement. Dans fdvationd'ua
le temps donc où le paffage de Vénus fur le difque du paifage de
Soleil a lieu pour le centre de la Terre , la parallaxe de ^^°"^'
Vénus Se du Soleil changeant la déclinaifon, l'afcenfion
droite , en un mot , la pofition vraie 6c refpeiflive de ces
deux planètes , toutes les circonftances de ce paffage, ob-
fervées d'un lieu quelconque de la Terre, ne font qu'ap-
parentes , c'eft à-dire toutes différentes de celles que l'on
obferveroit du centre de la Terre , qui ibnt les vérita-
bles (i). Les contacts obfervés au commencement ôc à la
fin ne font donc pas les vrais moments de l'entrée ni de
(i) 11 pourroit y avoir quelqu'une des circonftances du paflage,
obfervée fur la Terre , qui feroit la même qu'obfervée du centre.
Par exemple, dans un lieu où l'un des contaâs arriveroit au moment
où Vénus feroit au zénith , ce contaét feroit le même que vu
du centre de la Terre ; mais cela ne change rien à la conféquence où
je veux en venir ici: ainfi je n'ai pas cru devoir entrer dans le détail
de ces petites exceptions qui ne feroient qu'interrompre la fuite des
caifonnemencs , &c embrouiller la matière.
ii.< HISTOIRE ABRÉGÉE
la fortic; en conféquence la durée apparente ou obfer-
vée,la diftance desccnrres mefurée, doivent être difFé-
renres de la durée ôC de la diftance des centres véritables,
& cela d'une quantité relative à la pofition du lieu oii l'on
obferve , &C que j'appelle l'ejfet de la parallaxe (i) pour
ce lieu-là.
Par la durée Je fuppofe quc dans deux lieux différemment fitués fur
dupaiiage. notreglobe,on ait obiervéladurécdu pailagedeVénus f iu-
le difque du Soleil. Ces deux durées apparentes difFéreront
l'uneplus ou moins querautre(i) deladuréc véritablequi
a eu lieu au centre de la Terre. Mais de combien chacune
en difFere-t-elle? D'une quantité inconnue, qui dépend de
la parallaxe que nous ne connoiflons pas non plus, & que
nous cherchons. Or, pour parvenir à déterminer cette
parallaxe, fuppofons-la un moment connue (3), 6c d'a-
(i) Je devois dire des parallaxes ; azlz parallaxe du Soleil & celle
de Vénus fe combinent ici enfemble : mais comme elles agi (lent
toures deux dans le même fens, que d'ailleurs elles font abfolumenc
dépendantes l'une de l'autre , je confidere ici leur effet total.
(z) Il eft avantageux qu'elles différent aulli l'une de l'autre le plus
qu'il ell poffible , comme nous le dirons plus bas.
(3) Cette méthode indirecte de fauffe pofition efl: d'un fré-
quent ufage dans l'Aftronomie , où l'on a fouvent à refoudre des
problêmes de l'efpece de celui-ci. M. duSéjour.l'un de nos Confrères,
lequel eft en poffelîîon d'une analyfe fine & délicate qu'il a appliquée
fi neureufement à la théorie des édipfes , a déjà rélolu rigoureufe-
ment nombre de ces problêmes. Au moyen des formules qu'il a conf-
truites, toutes les queftionsde ce gejiirefe trouveront réfolues d'une
manière direde. Nous ne pouvons que defirer avec empreffemenc
la fuite de fon travail , &c le développement de toutes les méthodes
qu'il nous promet , & qui fourniront un cours complet d Aftrono-
niie analytique, matière abfolument neuve.
11 faut fuppofer connue la parallaxe du Soleil ic celle de Vénus;
mais cela ne fait qu'une fuppofition , parceque ces deux parallaxes
ont un rapport connu entre elles : qui fuppofe l'une, fuppofe l'autre.
Par exemple , fi l'on fuppofe la parallaxe du Soleil de j'', celle d«
Vénus en conjondion doit être de n"}6.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 127
près cette fupporition, calculons l'effet qu'elle a dû pro-
duire fur la durée obfervée dans chaque licU. Si notre
ruppofitioneft: bonne, elle nous donnera la vraie quan-
tité dont la véritable parallaxe a rendu dans chaquelicu
la durée obfervée différente de la véritable; corrigeant
donc de cette quantité chaque durée obfervée, clic fera
réduite à la durée véritable, qui doit fe trouver la même
de part Se d'autre, de pour tous les lieux quelconques;
linon recommencez une autre fuppofition jufqu'à ce que
les durées cbfervées, corrigées de l'effet de la parallaxe,
donnent toutes la même quantité pour la durée vue du
centre de la Terre. Alors la parallaxe de Vénus & du
Soleil _, employée dans cette dernière fuppolîtion, fera
la parallaxe cherchée.
L'on peut encore déduire la parallaxe de la fîmpîe Par un des
obfcrvation d'un même contact, foit del'entrée, foitde '°'^''"^^*
la fortie , déterminée dans plufieurs endroits , dont la
dillérencc de longitude cft parfaitement connue. En
effet, fi Vénus &c le Soleil n'avoient aucune parallaxe,
leurs contacls fcroicnt dans le cas des éclipfcs de Lune,
ou des Satellites de Jupiter, c'ed-à-dire qu'ils arriveroient
&. feroient vifibles dans le même inftant pour tous les
lieux de la Terre ; de forte que les heures de l'obferva-
lion ne différeroicnt uniquement que de la différence de
longitude des Obfervateurs. Si donc,par une fuppofition
S>c un procédé femblablcs à ceux de la méthode précédente,
vous dépouillez de l'effet delaparallaxe, l'obfervarion du
contact faite dans chaque lieu, vous aurez les heures de
chaque contadl vrai (i); lefquellcs_, fi la fuppofition eft
bonne, ne doivent plus différer entre elles que de la quan-
tité dont les lieux del'obfcrvation différent en longitude.
En faifant à-peu-près le même raifonnement , on verra
^ — ■
(i) Nous appelions contads vrais ceux qui ont lieu pour le
centre de la Terre.
izS HISTOIRE ABRÉGÉE
Par la plus quclapatallaxc pcut également fc déduii-c derobfervarioti
ced«ccnïcs' ^^ ^^ P^"^ courte diftance des centres de Vénus £c du So-
leil. En effet, cette plus courre diftance ne fcroit-ellc pas
la même pour tous les lieux de Ja Terre, fi Vénus &: le
Soleil n'avoient aucune parallaxe ? Otez donc de chaque
plus courte diftance obfervée , l'effet de la parallaxe ; èc
' Il votre fuppofition eft bonne , les diftances apparentes
ainfi réduites à la plus courte diftance véritable, doivent
fe trouver toutes égales.
L'onfentpartaitcmentqu'il eft avantageux, pour la fureté
de toutes ces méthodes, d'avoir des obfervationsdu paf-
fage de Vénus faites dansbeaucoup d'endroits où l'effet des
parallaxes foit oppofé &C le plus différent qu'il eft polîîblc j
car alors on ne pourra pas douter que la fuppofition qui
fera vérifiée avec fuccès fur toutes ces obfervations ,
ne donne la véritable parallaxe du Soleil cherchée.
Tels font les différents moyens que nous offre un paf-
M. Halley fagc de Vénus pour déterminer avec précifion la paral-
prcm°[r d'â^ ^^^^ '^^ Solcil. Avant M. Halley , perfonne n'avoit ima-
piiqucriepaf- giné quc l'on pût employer aufli avantageufemcnt ce
fagcde Venus phénomène. Ce n'eft pas que la remarque fût bien diffi-
aiarecheiche 'm v r • • •> n. • r 1 l. r a 1 I
de la parai- cilc a laire, maisc eicamli que ks choIcs , même les plus
laïe. fimples, demandent fouvent, pour être apperçucs, le coup
d'œil de l'homme de génie. Vénus avoir déjà paflé en
1639 fur le difque du Soleil , mais on n'en avoir fu tirer
aucun fruit. Ce ne fut que vers 1678 que l'idée heureufe
d'appliquer ce phénomène à la recherche de la parallaxe ,
vint à l'efprit de l'illuftre Aftronome Anglois, Il recon-
nut dès-lors que fi l'on pouvoir , dans deux lieux choifis
& fort éloignés l'un de l'autre, obferver, à une féconde
près , l'intervalle de temps écoulé entre les deux conta^ls
intérieurs de Vénus Se du Soleil , on en concluroit la
parallaxe à un cinq- centième près. Une pareille préci-
fion eût été certainement bien au-deffus de celle que l'on
pouvoir attendre des autres méthodes employées jufques-
là , & peuc-être de toutes celles que l'on pou voit imaginer.
Dominic^uQ
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL, iz^
Dominique Caffini, qui étoit alors fort occupé de déter-
miner la parallaxe du Soleil par les afcenlions droites &:
les déclinaifons de Mars , ne le flattoit pas à beaucoup
près d'une il grande précifion dans Tes réfultats. Il fen-
toit parfaitement, & l'éprouvoit nombre de fois, qu'il
falloir d'excellents inftruments, une attention extrême,
& la plus grande habileté de la part de l'Obiervateur ,
pour obtenir feulement quelque accord dans les réfultats.
Rien au contraire ne devoir être plus facile à faire , ôc
plus fufceptible d'exa£titude, que l'obfervation du palTage
de Vénus. Nous avouerons cependant, 6c l'expérience le
montrera bientôt , qu'il étoit prefque impoffible d'at-
teindre tout-à-fait à la préciiîon dont s'étoit Hatté M. Hal-
ley. Cet Agronome fuppofoitdans l'obfervation une juf- La parallaxe
telTcpour ainli dire, imaginaire. Mais en réduifantl'ap- p^utfedetet-
M . ^ . " V '^ miner , a un
proxmiation aun centième près , nous pourrons encore centiemeprès,
nous féliciter de jouir d'une méthode qui donne l'éçard pariobferva-
,, ,, ' ,.^. -T'IJ tionaupalla-
de la parallaxe, une precilion inconnue julqu alors dans ge de venus,
rAftronomic.
L'idée ingénieufe de M. Halley, la méthode qu'il pro-
pofoit de fuivre, ne furent bien développées que dans un
Mémoire qu'il compofa en 1 7 1 6 ( i ). Il y aiîigna les lieux de
la Terre les plus favorables pour l'obfervation du pafTage
de Vénus en 17^1, & fixa toutes les circonftances de ce
phénomène. M. Halley avoic alors 60 ans. Quel regrec
fenfible n'étoit-ce pas pour lui , en fongeanc qu'il ne
pouvoir fe flatter de faire lui-même cette obfervation
curicufc , &. d'en pfartager les fruits qui lui appartenoienc
en quelque forte! Si quelqu'un a plus de raifon que les
autres hommes de s'appercevoir &: de fe plaindre de la.
courte durée delà vie, c'eft fans doute l'Aftronome. Ses
yeux , pénétrant dans l'avenir , découvrent & pré-
voient des obfervations curieufes ôc importantes ;
(i) Voyez Tranf. PhUofoph. pag. 454.
R
L'Académie
Royale des
Sciences exa-
mine quels
font les voya-
ges les plus
utiles pour
l'obfeivation
«lu pall'age de
yénus.
Mappemonde
de M. de Lille.
II propofe la
méthode de
déterminer la
parallaxe par
les feuls con-
tads.
130 HISTOIRE ABRÉGÉE
mais le terme de fa vie eft une barriei-e qui s'élève entre
ces phénomènes &: lui, & qui lui ôtcnc tout efpoir d'en
être le témoin.
Nous ne diffimulerons pas que M. Halley fe trompa
dansquelquespofitionsqu'il jugeoit favorables à l'obferva-
tion_, &: qui ne Tétoient point. Une erreur dans fon calcul
dedans les éléments qu'il adopta l'égaraabfolument: mais
cetteerreur ne fut relevée qu'environ quarante ans après.
Pendant les dernières années qui précédèrent celle
du paflage de Vénus , l'Académie Royale des Sciences
s'occupa avec la dernière activité de ce phénomène pro-
chain. AfTurée des fecours du Gouvernement, invitée
même par lui à examiner quels feroient les voyages les
plus utiles à entreprendre pour en préparer la réuf-
ike , elle agitoit fans ceire dans fes aircmblées tou-
tes les queftions èc les recherches relatives à cet
objet. M. de Lifle, l'un de fes plus illuftres Mem-
bres, dont nous regrettons encore aujourd'hui la perte,
exécuta alors le projet ingénieux, dont le paflage de
Mercure lui avoir donné l'idée en 1753, de faire voir
d'un feul coup d'œil tous les endroits où l'on pourroic
obfcrver le paffage de Vénus, &: défaire juger en même
temps du plus ou du moins d'avantage de la pofition de
chaque lieu. Il conftruilît à cet effet une mappemonde
fur laquelle on voyoit, au moyen de cercles qu'il yavoic
tracés , l'heure à laquelle chaque lieu de la Terre dévoie
voir l'entrée & la fortie de Vénus fur le difque du Soleil.
Ce travail donna occafioa à M. de Lfiile de relever l'er-
reur de M. Halley, &: de s'appercevoir que la Baie d'Hud-
fon, & d'autres endroits prefcrits par l'Aftronome An-
glois , n'étoient nullement favorables. Je renvoie abfo-
lumcntleLeifteur à cette mappemonde curieufe^ publiée
au mois d'Août 1760 , ainfl qu'à l'excellent Mémoire où
M. de Lifle propofa de déterminer la paralLixe du Soleil
par la fimple obfervation des contacis, comme je l'ai
expliquéci-delTus.Cetteméchodea l'avantage de pouvoir
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 131
être employée dans un plus grand nombre d'endroits que
celle de M. Halley. En effet, entre tous les lieux où il
étoit poliible de fe rendre, il y en avoit très peu où l'ob-
/ervation de la durée entière pût être faite, mais beau-
coup où quelqu'un des contacls devoit avoir lieu. Il eft
vrai que la méthode de M. de Lille ruppofoit une connoil-
fance parfaite de la longitude de chaque obfervatoire ;
mais cette connoiflance ne peut-elle pas toujours s'ac-
quérir foit dans un moment, foit dans l'autre? De plus. Avantage dd
on pouvoir fe procurer de plus grandes différences dans lamét!ioded«
les obfervations des contacts que dans celles de la durée, M. deLifle,.
comme le montroitlamappemonde de M. deLifle. Deux
Obfervateurs placés , l'un à la Mecque, l'autre à l'ifle de
Pâques (i) _, pouvoient avoir 17' de différence dans l'en-
trée de Vénus. Une pareille différence devoit avoir lieu
dans la fortie oblervée d'une part au Kamtfchatka , de
l'autre au cap des Terres Auftrales. Cette même fortie de-
voit auffi différer de i 2' à Tobolsk & à l'iflc de Sainte-
Hélène. Il n'étoit pas facile, à la vérité , de fe tranfpor-
ter dans plufieurs de ces endroits; mais on pouvoit en
choifir d'autres intermédiaires où l'on eût à-peu-prèsles
mêmes avantages. C'eft ce dont on s'occupa beaucoup
dans le courant de l'année 1760. L'Académie nom-
ma des Commiffaires pour concerter entre eux les
lieux où l'on pourroit concilier d'un côté l'avantage de
i'obfervation, 6c de l'autre la facilité d'y aborder & la
commodité de s'y établir. Le choix des lieux une fois ré-
glé, l'on n'étoit pas embarraiïé de trouver des Aftrono-
jnes qui voulu ffent s'y rendre. Un corps tel que l'Aca-
démie ne manque jamais de Sujets prêts à fe dévouer
pour le progrès des Sciences èi. la gloire de la Nation. Il
ii'eft aucun Académicien dont le zèle ne foit capable de
(i) Cette ifle eft firuée vers le milieu de la Mer du Sud , fous
■Jfi tropique du Capricorne.
Rij
L'Académie
ïmpériale de
récersbourg
démande à
l'Académie
des Sciences
de Paris un
Aftronome
pourvenirob-
ferveienRuf-
lîe le pafTage
de Vénus.
132 HISTOIRE ABRÉGÉE
tout, chaque fois qu'il cft qucftion de fe rendre utile :
& le choix que la Compagnie fait alors d'un de les
Membres pour exécucer une entreprile même pénible,
devient pour lui une préférence Hatteufe èc honorable.
La gloire de l'Académie Royale des Sciences fe trouva
principalement intéreflee dans cette occalion , par un
événement qui fut en même temps pour la Nation un
témoignage àc un hommage flatteur de l'cftime que le?
Etrangers ne peuvent lui refufer. L'Académie Impériale
de Pétcrsbourci eut recours à notre Académie , 6c lui
demanda un de fes Membres pour venir fous les aufpices
de l'Impératrice obferver le paflage de Vénus dans tel
lieu de l'Empire que l'on croiroit le plus favorablement
fitué. On peut juger de l'empreflemcnt de l'Académie à
répondre à une pareille confiance. Après avoir examiné
tous les lieux delaRulIie où l'onpourroit aller faire l'ob-
fcrvation, l'Académie fe décida pour la ville de Tobolsk ,
capitale de la Sibérie; ôc le choix d'un Obfervateur tomba
fur M. Chappe d'Auterochc, jeune Aftronome dont les
talents ne pouvoient être furpafles que par le Zele , Sc
qui y réunilToit un tempérament robufte, propre à ré-
fifter à un voyage auffi pénible.
Pour tirer de l'obfervation de Tobolsk tout le fruit que
l'on pouvoiten efpérer, il falloir fe procurer d'autres ob-
fervations corrcfpondantes , &C en conféqucnce entre»
prendre encore d'autres voyages. Celui des Indes étoiç
déjà arrêté : M. le Gentil , à qui la commillion en avoic
été confiée, vu l'éloignement de fa deftination, avoic
pris les devants, 6c étoit parti dès l'année i-y6o pour
Pondichéry. L'obfervation qu'il comptoit y faire étoit
curieufe & intéreffante, il devoit y voir la durée entière
du pafTage ôc le milieu arriver prefque au zénith. Les An-
glois de leur côté fe difpofoient à envoyer à l'ifle de
Sainte-Hélène. Ces diff^érents lieux , à la vérité , dévoient
fervirdctcrmedecomparaifon avec Tobolsk; mais, com-
me nous l'avons déjà dit, on ne pouvoit trop multiplier les.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 133
©bfcrvations ; l'on eût été condamnable de négliger les
fituations les plus avantageufcs , &c de ne point profiter
de la bonne volonté àc du zèle du Gouvernement qui ne
demandoit pas mieux que de le prêter à tout ce qui pou-
voir être utile relativement à l'objet du pafTage de Vé-
nus. En conféquence , M. de la Lande lut à l'Académie
un Mémoire dans lequel il infifta beaucoup fur l'avan-
tage confidérable d'envoyer un Obfervateur fur la côte
occidentale de l'Afrique , communément appellée la
côte de Cafrerie. Dans cette pofition on devoit obtenir
l'obfervation la plus concluante _, celle qui dévoie faire
face à toutes les autres, & dont l'obfervation même de
Tobolsk tiroit prefque toute fon importance. M. Pin-
gré, Il connu parfes travaux aftronomiques, &: par un
zele intrépide dont il a donné des preuves à l'Académie
par tant de voyages, s'offrit alors pour fe rendre dans tel
lieu que l'on jugeroit à propos. Bien des confidérations
détournèrent cependant de la côte de Cafrerie malgré
\qs avantages que l'on s'y promcttoit;& enfin, après bien
des difcuiîions&: un mûr examen , on fe décida pour une
àt% ifles de l'Océan Ethiopique , appellée l'ijle Rodrigue.
On devoit y voir l'entrée 6c la fortie de Vénus j avan-
tage que n'offroit point la côte d'Afrique.
Enfind'un autre côté, mon père, chargé parM.IcDuc
de Choifeul àe. tracer une perpendiculaire à la méri-
dienne qui traversât l'Allemagne jufqu'à Vienne, devoit
profiter de cette occafion pour aller faire dans cette ville
impériale l'obfervation du paflTage deVénus, conjointe-
ment avec le Père Hell , habile Obfervateur Allemand.
Tels furent les différents voyages projettes par les
Membres de l'Académie. Nous allons dire un mot de leur
exécution.
M. le Gentil partit des côtes de France le 26^ Mars M. ie Gentil'
1760 ,^ & arriva le 10 Juillet à l'ifle de France. La guerre Fndes^°od'n
allumée alprs entre la France 6c l'Angleterre ne lui per- '^o'c obferver
mettant pas de fe rendre à Pondichéry, il réfolut de s'é- Yén,js^^^ ^^
tablir à l'ifle Rodrigue. Comme il étoit près d'exé-
134 HISTOIRE ABRÉGÉE
ciucr ce projet, on fut obligé d'envoyer de l'ifle de France
une frégate à la côte de Coromandel : cette occafîon
écoit trop favorable pour ne pas en profiter. M. le Gen-
til s'embarqua fur cette frégate le ii Mars i-j6i. Les
calmes furent la moindre contrariété que ce vaiîTeau
éprouva. Arrivés à la côte de Malabar le 24 Mai devant
la ville de Mahée, nos voyageurs trouvèrent les Anglois
maîtres de cette place, &: apprirent qu'ils l'étoient aulli
de Pondichéry : uncprompte fuite fut la feule relîourcede
la frégate Françoife. Il ne fallut plus penfer à la côte de
Coromandel , & , au grand regret de notre Académicien ,
on réfolut de retourner à l'ifle de France. Le jour de l'ob-
fervation arriva dans l'intervalle de ce trajet. M. le Gen-
til eut la douleur de fe trouver en mer le 6 Juin par 87*
de longitude environ à l'ell de Paris, 6i 5* 45' de lati
tude aullrale. Les circonftances d'un ciel pur ôc ferein
ajoutèrent encore à fes regrets. Il obferva, auiîî-bicn
qu'on peut le faire de dellus un vaifTeau, l'entrée ôc la for-
tie; mais onfent parfaitement qu'une telle obfervation
ne peut être d'aucun ufage.
M. Chappe partit de Paris à la fin de Novembre i-j6o :
M.ciiappe II parvint aifément à Pétersbourç • mais ce ne fut qu'a-
près une route arrreule , incommode , cC même dange-
reufe pendant l'efpace de près de cinq cents lieues, qu'il
fe rendit à Tobolsk , lieu de fa defttination (i). Il y
arriva le 10 Avril , èc eut tout le temps néceflaire pour
fe préparer à l'obfervation du 6 Juin. En attendant il
détermina très exa£lement la latitude de Tobolsk, de
58° 12' 18 à 12". Il obferva quelques phafes de l'éclipfe
de Lune du 18 Mai, dont le mauvais temps empêcha de
(i) On peut voir les détails curieux de ce Voyage dans le fuperbe
Ouvrage que M. Chappe a fait imprimer à ce fujet , intitulé:
P'oyage en Sibérie j fait par ordre du Roi en 1761 j contenant les
mxurs j les ufages des Rujfcs 3 en ^ vol. in-^°. i vol. de Canes,
Çhe^ Débute père f quai desAuguftins.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 135
voir les principales circonllanccs.il fut un peu plus heu-
reux pour réclipfe de Soleil qui eut lieu trois jours avant
le palFage de Vénus. Il détermina très exactement la
fin de cette écliple le 3 Juin à 6'^ 1 1' 8" temps vrai. Le
paflage de Vénus arriva enfin ; on en verra les principales
phaies dans la Table fuivante, qui comprend aulîi celles
qui ont été obiervées dans tous les autres endroits du
globe. Je ne parlerai donc ici que de quelques circonf-
rancesdont cette Table n'a pu faire mention. M. Chappe
employa une lunette de Campagni de 19^'"'% l'oculaire
avoit i''™" 9"°"" de foyer, èc il elHme que cette lunette
devoit faire l'eiFet d'une lunette de 355""^' dont l'oculaire
feroit de 3 '"'"'" de foyer. Le premier contad de l'entrée
ne fut point vifible à caufe des nuages; mais l'entrée to-
tale, ain/î que les deux conta£ls de la fortie , furent ob-
fervés parfaitement. L'obfervation de M. Chappe fut ac-
compagnée d'une circonllance afTez finguliere : à l'entrée
&: à la fortie de Vénus, la partie de fon difque qui n'é-
toit pas encore, ou celle qui n'étoit plus lur le difque
du Soleil, étoit vifible de environnée d'une efpece d'an-
neau lumineux, en forme de croilTant. Nous parlerons
ci-après de cette apparence avec plus de détail. Il fuffic
de dire ici que M. Chappe , à caufe de l'apparence
de cet anneau j eftima le vrai contact intérieur delà for-
tie trois fécondes plutôt que le contacl de la partie ob-
fcure. Il mefuraaudi avec différentes lunettes le diamètre
de Vénus dans le courant du palTage, &. le détermina
depuis 57"-7 jufqu'à(Î4".Ladiffércnceentre ces diamètres
ne peut avoir été produite, dit cet Aftronome, que par
l'apparence de l'anneau lumineux. Voilà en peu de mots
le précis du Voyage & des Obfcrvations de M. Chappe,
nous allons bientôt en rapporter le réiultat.
M. Pingre partit en 17(^1, &: arriva àPiodrigue au mois ^ p. ,,„
de Mai. Il trouva peu dereffources 6c de commodités dans rend a ime
un lieu qui n'eft habité que par quelques Noirs, fous la con- Ro'^r'gus,
duite d'un ieulOfficier.M.Pingré fut obligé d'avoir fon ob-
i3<î HISTOIRE ABRÉGÉE
fcrvatoire en plein air. Il n'y avoir dans l'iflc ni Maçons
ni Menuifiers pour lui en conftruire un plus folide &c
moins expofé. A peine trouva t-il le moyen de mettre
fa pendule à l'abri du vent. Il fallut toute l'adrefle & la
conltancede cet Aftronome pour réuffir à obfcrver dans
un lieu fi incommode, où les inftrumentsécoient à chaque
inftant expofés à être renvcrfés ou dérangés par de fré-
quentes boufl-ees de vent. Malgré tous ces obllacles la
multiplicité &L l'accord des obfervations de M. Pingre ne
laiflent rien à deflrer. Par un milieu entre quarante ob-
icrvations il détermina la latitude de Rodrigue de 19° 40'
40". Ayant à cœur de déterminer aulîi la longitude de
Ion obiervatoire avec toute la préciiion qu'il étoic poiîî-
ble d'obtenir, il ne fe contenta pas de robfcrvation des
Satellites de Jupiter , il en fit un grand nombre d'occulta-
tions de fixes par la Lune, 6c de diftanccs à cette pla-
nète; & après la difcufiion la plus délicate, les calculs
les plus laborieux , en un mot, après un travail que lui
leul étoit capable d'entreprendre, il détermina la lon-
gitude de Rodrigue de 4'» 3' 26". Le mauvais temps em-
pêcha M. Pingre de voir l'entrée de Vénus; cette planète
étoit déjà entièrement furie difque duSoleil lorfque le ciel
fe découvrit.Notre Aftronome s'en dédommagea en déter-
minant pendant le courant du paflage plus de éo diftances
des bords deVénus &: duSoleil, d'oiiil conclut la plus courte
diftance des centres de 9' ii", 69. Leconta6t intérieur de
la fortie fut obfervé très exactement. En effet , M. Thui-
lier , qui obfervoit avec M. Pingre, l'a déterminé dans
la même féconde. Quant au contact extérieur, il paroîc
un peu douteux, l'interpofition d'un nuage jetta quel-
que incertitude fur le vrai moment de cette dernière
phafe. La lunette dont fe fervit M. Pingre avoit iSf""*';
elle étoit de la fiiçon du fieur George.
^ ^ . , Mon père fit l'obfcrvation du paflagedeVénus à Vienne
jhury va à dans 1 oblervatoirc des Jeiuites,conjointementaveclerere
'S/ienne. Licff^anieS- Son AlteircSéréniffime l'Archiduc Jofephles
O DO I *■
honora
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 137
honora de fa préfence. Le temps ne fut pas des plus fa-
vorables. Quelques intervalles à travers les nuages permi-
rent cependant défaire plufîeurs obfervations de dillance,
& celle du conta£t.
Telles font les obfervations dont nous avons eu le
plus de détails , & qui nous touchoient le plus particu-
lièrement. Je ne m'arrêterai point à toutes les autres non
moins intérelTantes qui ont été faites à Stockolm , à Ca-
jannebourg, à Upfal, à Tornéa, au cap de Bonnc-Ef-
•pérance, 6c en mille autres endroits. La Table fui vante
cxpofera fuffifamment tout ce qu'il eft efTentiel d'en
connoître. J'ai cru qu'il feroit agréable au Le£teur d'y
trouver raflemblées toutes les obfervations du paflage de
Vénus de 17^1 , faites dans les différentes parties du
globe. J'y ai du moins renfermé toutes celles qui font
parvenues à ma connoiflance.
Table générale des Obfervations du pajfage de Vénus fur le dfque
du Soleil y le 6 Juin 1761.
Noms des Lieux.
Obfcrvatcurs.
Meffieurs.
A Parjs , rOb- JMaraldi.
fervatoire Royal. (^Belleri.
Luxembourg. ... 1 La Lande.
Collège de Louis- J R. P. Merville.
• - • . . iR.
le-Grand.
iHôtel de Cluny.
Ecole Militaire.
P. Clouet.
-Mefller.
) Libour.
Sjoly.
*- Baudouin.
I Jeaurat.
Longitude
orientale —
occident, -+-
H. M. S.
+ o
Latitude.
D. M. S.
48 jo 14
Sortie de Vénus.
|f contra, x^ contafl.
8
iS 41
8
18 14
8
i8 ij
8
i8 40
8
j8 16
8
i8 30
8
i8 )l
8
18 }8
H.
M.
s.
8
46
H
8
46
40
8
a6
50
8
47
4
8
4<f
Jf
8
4«
}7
8
4« 4}
8
4«
}«•
8
4<f 4«
8
46 4«
Lunette de 18 pieds.
Lunette de 6 pieds.
Lunette de 18 pieds.
Télefcopede 6 pouces,
Télefcope de ji pouc
Télefcopede5 pieds.
Télefc. Nevct. 4 pi. f
Lunette de 1 8 pieds.
Lunette de 15 pieds.
Lunette de 1 8 pieds.
138
HISTOIRE ABRÉGÉE
Suite de la Table.
Noms des Lieux.
Conflans- fous -Car-
rière
La Muette.
Saint Hubert. .
Lyon
Orléans. . . .
Châloiis
Vire
Bourdeaux. . .
Grecnwich. . .
Saville-Houfe .
Spithal-Squarc.
Shirburn. . . .
Hakney. . , .
Leskcard. . . .
Vienne.
Wezlas. . , .
Ingolftadt . .
Monaco . . .
Vurtzbourg .
Schwefingen
Dilliagen . .
Gottingca . .
Laubac. . . .
Tirnan . . .
Munich . . ,
Bologne ,
Rome . . ,
Florence. .
Madiid . ,
Lisbonne.
Porto. . .
Selinginsk ,
Naples. .
Obfervateurs.
Meilleurs.
La Caille.
Fouchy.
.Ferner.
Le Monnier.
R. P. BeraurJ-.
Joulfe.
Lertrés.
Gaultier.
Definarèts.
BliC
Short.
Cantons.
Hornsby.
DoUond.
Haydon.
l'R. P. Hell.
J R. P. Liefganig.
I _Cafllni de Thury
Ehrmans.
Kratz.
R. P. Hubert.
R. P. Mayer.
R. P. Hauzer.
Mayer.
R. P. Schottl.
R. P. Weifl".
Longitude
orientale —
occident. 4-
H. M.S.
Latitude.
D. M. S,
o i^
0 i4t
» î7
9 59
1 43
8 9
8 56
n 39
9 16
46
32-
13 17
9 ^7
i« 43
— o jfi 10
1
Rodrigue . . . ; .
Le cap de Bonnç-Efp.
Copenhague. . . .
Dronthciin
o
— o
o
o
o
o
o
o
I
o
Zanotti.
R. P. Frizi.
Caflali.
R. P. Audifredi.
R. P. Ximenez.
R. P. Rieger.
Ciera.
D'Alméida.
Rumowski.
R. P. Pingre.
Mafon.
5» o
}6 10
3« 50
31 Î5
H 3Î
31 38
30 n
49 45
° 55
36 jo
Sortie de Vénus.
i'' coutad. i'' contad.
H. M. S. H. M. S.
48 49 zi
48 jl 4J
48 45 ^5
4J 4î Ji
47 5 4 4
48 j7 10
48 50 lî
44 50 18
51 18 40
51 30 50
î' 31 15
jl 39 IX
fi 35 5
50 16 5J
48 li 51
— o 36 5
8 18 54
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8 38 44
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48 30 6
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48 5» 5 5
44 19 36
O
o
+ o
+ o
■ o
— 6
40 41
54 48
14 o
45 55
45 40
57 50
47 '!■
Horrebow.
— 4 3 16
— I 4 15
— o 41 41
— 051 6
41 55 54
43 46 55
40 15 O
3S 45 13
40 45 o
Jl 6 6
40 50 15
Auft.
19 40 40 o
53 55 15
Bor.
5.5 40 45 9
6 5 4O 0 9
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9 36 10
9 47 56
11 30
" 55
11 50
18 7
11 56
H 5 5
15 59 41
9 57 15
9 13 3
S lo 15
Lunette de 15 pieds.
Tc'lcfcope de 4 pieds.
Télelc. Grég. iS pou.
Lunette de 18 pieds.
Lunette de 19 pieds.
Lunette de 11 pieds.
Télcfc. de 16 pouces
Lunette de 15 pieds.
Télefc. de 14 pouces.
Télefc. de 1 8 pouces.
Lunette de ii pieds.
Télefcopc de 1 pieds.
Télefc. de 18 pouces.
Télefc. Newt. 4 pi. i
Lunette de 1 1 pieds.
Lunette de i 8 pieds.
Télefcope de 4 pied.
Télefcope de 6 pieds.
Lunette de 3 pieds {.
Télefc. de i pieds f.
Lunette de 10 pieds.
Lunette de 18 pieds.
Lunette de 1 1 pieds.
Lunette de 16 pieds.
Télefc. Newt. 4 pi.
Télefcope 1 pieds t.
Lunette de 6 pieds.
Lunette de S pieds.
Télefc. Newt. 4 pi. f •
Télefcope de 8 pieds.
Lunette de ij pieds.
Lunette de ii pieds.
Lunette de 8 pieJs,
ifE LA PARALLAXE DU SOLEIL.
r ?9
Obfcrvations de la durée du pajfage de Vénus en ij6i.
Noms des
Lieux.
Entrée de Venus.
Sortie de Vénus.
Obfetvateurs.
Premier
Second
Premier
Second
contaâ:.
contaft.
contaft.
contaiS.
Meiïieurs.
H. M. S.
H. M. S.
H. M. S.
H. M. S.
Tobolsk. . .
L'Abbé Chappe.
iS 41 8 i
19 0 3oi
14 49 10 f
IJ 7 4i î
Madras. . . .
Hirft.
19 51 10
'9 47 fî
ij 59 58
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Abo
• • •
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II 46 j9
Il 4 41 r
Cajannebourg.
Planman.
• • •
16 18 s
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11 iS 11
Scockoltn, . . ■>
Warçentin,
i; XI 37
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Tornea... . ^Lagçrborn.
15 4J Ji
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Pékin R. P. Drofliec.
• • •
10 10 iS,7
'f 59 59,3
i^ '7 57,4
Calmar. . . . Vykftrôm.
• • •
IJ Î5 I
11 13 40
Hernofand. . |^^[°^;
15 10 40
• • •
IJ 58 iS
IS 38 itf
11 1? 11
11 4^ 47
11 46 40
Calcutta. . • 1 . • . ; .
8 II 55
8 14 40
'4 'f Si
14 31 0
Nora.Les titres qui font àla tête de chaque colonne de cette table en facilitent afTcz
rintelligence pour nous exempter d'une plus longue explication ; mais il eft bon
d'avertir particulièrement le Ledeur que quoique les longitudes & latitudes de
chaque ville que je rapporte ici foient celles qui pall'ent pour les plus exaftes &
les plus récemment déterminées , néanmoins je ne les garantis en aucune façoa,
fur-tout celles des lieux où l'on avoit peu obfeivc avant le palTage de Vénus : on
fait combien la longitude d'un lieu eft difficile à établir parfaitement. Cet
élément eft pourtant eflentiel pour tous les endtoits où l'on n'a obfervé que la
.fortie. J'invite donc les Calculateurs qui voudroient entteprcndrc quelque travail
férieux fur le palfage de Vénus , à commencer pat difcuter avec foin la longitude
des lieux dont ils prendront les obfervations. Je préviens auflî qu'autant qu'il
m'a été pofîible j'ai tiré les heures des contaéls des meilleures fources imprimées
que j'ai pu trouver , comme des Mémoires des Obfetvateurs mêmes , ou de ceux
qui les ont les premiers publiés ; il pourra fe trouver néanmoins quelques diffé-
rences entre les heures que je rappot,te, & celles que l'on ttoaver.i dans différents
livres. Moi-même j'ai été plus d'une fois étonné dans mes recherches de voirdif-
férents Auteurs rapporter une même obfcrvation d'un même contaét, à plufîeurs
fécondes de différence. J'aurois bien dcfiré pouvoir marquer la force des
lunettes , plus elfcntielleàconnoître , que leur longueur. Je ne puis m'empêcher,
à cette occafion , de reprocher à nombre d'Aftronomes leur négligence à accom-
pagner leurs obfervations de ces détails utiles. La plupart fe contentent de dire:
j'ai obfervé avec une lunette de telle longueur ; ils n'ignorent pas cependant que
telle autre lunette de même longueur que la leur pourroit faire beaucoup plys
ou moins d'effet. Enfin je n'ai point rapporté dans ma table plufîeurs obferva-
tions qui ont été reconnues mauvaifes à n'en pouvoir douter .telles , par cïeinple,
que celles de Tranqui:bar , de Pétersbourg , de Grandmont près Saint-Thome ,
-qu'aucun Aftronome n'a cru devoir admettre. Ce n'cft pas à dire pour cela que
toute obfervation qui a pu être faite , & qui n'eft point dans ma table , foit mau-
vaife ; il en eft nombre de rrès bonnes qui ne font point parvenues à ma conoif-
fance , & que j'aurois été charmé de comprendre dans ma table.
Sij
Cfoirtant &
140 HISTOIRE ABRÉGÉE
Avant d'entrer dans l'examen des réfultats que Ton
peut tirer des obfervations précédentes , il eft à propos
de dire un mot fur quelques circonftances fmgulieres
qui ont accompagné le palFage de Vénus, 6c en parti-
culier fur l'anneau lumineux dont quelques Obfervateurs
-virent la planète environnée. Le détail abrégé des obfer-
vations de ce phénomène fingulier ne pourra qu'intéref-
fer le Ledeur , ôc remplir le but que nous nous fommes
propofé de donner une idée de tout ce qui peut être in-
téreflant dans la matière que nous traitons.
M. Chappe eft celui qui nous a donné de plus grands
ainieaufijim^ détails fur l'apparence de l'anneau lumineux. Deux mi-
lieux vu au- nutes avant l'entrée totale il apperçut la partie du difque
tourdevéuas. j^ y^nus qui n'étoit pas encore fur le Soleil , 6c remar-
qua autour une petite atmofphere ^ ou apparence lumi-
neufeen forme ctanneau, tel que la figure 4^ le repré-
fente. A la fortie, la même apparence fe repréfenta,
mais plus fenfiblement: c'eft-à-dire environ quatre mi-
nutes après le contact intérieur , la partie auftrale (du
difque de Vénus) déjà fortie , & qui devoit par confé-
quent n'être plus vifible , parut encore ; elle étoit en-
tourée d'un anneau lumineux , en forme de croifTant
( voye\ fig, 4 ). Cette apparence fe conferva pendant l'ef-
pace d'environ 10', & ce ne fut que quatre ou cinq mi-
nutes avant la fortie totale , que la partie auftrale exté-
rieure de Vénus & l'anneau lumineux difparurent abfo»
lument. Cet anneau , ou plutcst ce croiflant lumineux^
f)arut à M. Chappe occuper un peu plus des deux tiers de
a demi-circonférence de Vénus. Sa lumière étoit d'u»
jaune très foncé auprès du corps de la planète , elle de-
venoit enfuite plus brillante vers la partie la plus éloi-
gnée du corps obfcur.
Dans le cours du paffage de Vénus fur le difque du So-
leil, M. Chappe ne vit aucune apparence d'anneau ni
d'atmofphere. Il penfa néanmoins, avec raifon , que ce
croiflant devoit avoir parcouru le difque méridional de
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 141
Vénus dans l'intervalle des deux contacts. Cette conjec-
ture fut en efFet cortiplettement vérifiée par une obfer-
vation faite à Bourdeaux. M. Defmarets , un peu avant le
milieu du paflage (& par conféquent lorîque Vénus
étoit entièrement fur le Soleil), apperçut la petite pla-
nète éclairée en croisant qui occupoit environ les deux
tiers de fes bords ^ ù entammoit le difque ^fans cependant
que les vrais bords cejja/fent de paroître terminés. La
partie la plus large du croijjant étoit tournée vers le
bord méridional du Soleil. Cette lueur , qui rejfembloit ,
ditM. Defmarets, a celle qu'on apperçoit vers la réunion
de deux doigts qu'on préfente a la chandelle en les te-
nant ferrés 3 s'affoiblit^ & pnrut changer de pofition a
mefure que V^énus changea de fituation , ainfi que le re-
préfente la figure 5^.
D'un autre côté, M. de Fouchy, qui obfcrvoit au
château de la Muette , vit encore plus que M. Defmarets.
Pendant toute la durée du pafTage il apperçut conftam-
ment autour de Vénus une efpece d'anneau entièrement
formé .y plus lumineux que le refle du Soleil .^ & qui al"
loit en diminuant a mefure qu'il s'éloignoit de la pla-
nète. Cette couronne paroijfoit d'autant plus vive que le
Soleil étoit plus découvert.
Voilà les trois obfervations les plus pofitives par rapport
àl'atmofphere lumineufequi parut accompagner Vénus.
Ce que plufieurs autres Aftronomes en obferverenc fut
d'une apparence beaucoup moins fenfible , mais cepen-
dant peut vejjir à l'appui des obfervations précédentes.
En effet, à Stockolm, un peu avant l'immerfion totale,
& durant toute l'émerfion , M. Wargentin vit lapartie dé
V^énus qui étoit hors du Soleil environnée d^un bord
lumineux , foible , mais cependant fenfible. A UpfaI ,
Meflieurs Bergman , Melander , & autres , ont tous re-
marqué que le bord de Vénus qui n'étoit pas encart
entré dans le Soleil étoit ceint d'une lumière foible ^,
mais fenfible yen forme d' anneau i de forte que toute la
'141 HISTOIRE ABRÉGÉE
rondeur de 'Vénus parut ^ les trois quarts de fa périphérie
au dedans du Soleil y ù lerefte au dehors. M. le Monnier ,
à Saint-Hubert, où il obfervoiten préfence du Roi , vit,
à Ja fortie, le difque entier de Vénus, quoiqu'il y en eue
déjà une partie hors du Soleil.
En voilà fans doute allez pour confirmer un phénomène
lîngulier. S'il n'eût été vu que d'un ou deux Obferva-
vateurs, &: dans un feul lieu, on eût pu en attribuer
l'apparence à quelque illufion optique ; mais l'obferva-
<tion a été trop générale pour quel'onpuifTe s'en prendre
à l'effet des lunettes, ou à quelque autre caufc acciden-
telle femblable. Rien de plus fingulier, à la vérité , que
les différents afpects qu'a préfenté ce phénomène, félon
\qs différents lieux. ATobolsk, c'eft un croifl'ant lumi-
neux qui ne paroît que hors du difque du Soleil. A Bour-
deaux, au contraire, il n'eft vifible que fur ce difque. A
la Muette , c'eft un anneau tout entier ^ fort brillant pen-
dant tout le paffage. A Saint-Hubert, on ne voit de
croiffant lumineux qu'à la fortie & pendant toute la du-
rée du paffage. \.q% meilleurs Obfervateurs affurent n'en
avoir pas vu la moindre apparence à Paris: il n'y eut que
M. Maraldi à qui Vénus parut environnée d'une lumière
rouge-pâle , qui finijjoit infenjlblement en jaune , ù s'é'
tendoit a un demi-diametre de J^énus. Cette lumière étoit
plus étendue le long du bord du Soleil pendant la fonte.
Mais M. Maraldi, ayant vu quelques jours après les
mêmes couleurs 6c la même apparence autour du difque
de Jupiter , penfaque la lumière qu'il avoit remarquée
autour de Vénus n'étoit qu'accidentelle, ôc caufée par
la fatigue de fes yeux.
Cet anneau lumineux annonceroit-iluneatmofphere
autour de Vénus , ou cette apparence ne viendroit-elle
que de l'excès du diamètre du Soleil fur celui de la petite
planète ? C'eft fur quoi on n'a encore rien conclu , que je
fâche, de bien certain , ni de fatisfaifant. Je ne
dois pas oublier une autre apparence qui fut obfervée à
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 143
Paris par M. de la Lande. Cet Aftronome ne vit point
d'anneau ni de crDifTanclumineux; mais à l'inftant du
premier contacb de la fortie il vit u^ certainement
comme un point noir qui fe détacha ds KtriuZiVour join-
dre le Soleil y &c c'efV alors qu'il fixa le moment da :on-
tadl intérieur. M. Ferner, qui obferva à la Muette 5
M. Short à Londres, le Père Rieger. à Madrid, M. Berg-
man à Upfal , virent la même chofe. Sans m'arrêter à
former des conjectures, Se à imaginer des hypothefcs
qui offrent la plupart du temps plus de doutes que de vrai-
femblance, je m'en tiensàlafimple expofition^ des faits
que je viens rapporter, & je me hâte de paflerà un ob-
jet plus intéreflant , celui du réfultat de l'obfervatjon
du palîage, par rapport à la parallaxe du Soleil.
De toutes les obiervations du palfagr de Vénus faites
en 1761 , il n'en eft aucune intéredante qui n'ait été
difcutée &: calculée par quelque Aftronome, & princi-
palement par M. Pingre. Je ne puis donc mieux faire que
de rapporter ici par extrait les principaux réfultats qu'il en
a tirés (i).
J'ai fait voir plus haut que l'obfervation du pafla^e de ^ ti
Venus orrroit trois diiterents moyens de déterminer la Soieii , con-
parallaxe du Soleil; fa voir, par la durée , par un même <^',"<='^': '^i*"-
conta£t , & par la plus courte diftance des centres. Dans en 1761.
la Table qui renferme toutes les obfervations qui nous
font parvenues , on ne trouve que huit endroits où l'ob-
fervation de la durée ait été bien faite. Nous les avons
raffemblés datrs la Table fuivante. L'on y voie auffi la»
parallaxe du Soleil qui réfulte de chaque durée, compa-
rée à celle de Tobolsk.
(i) Le Ledeur curieux d'entier dans un plus grand détail fur
cette m.itiere, doit lire en entier deux favants Mémoires de M. Pin-
gre , imprimés l'un dans le volume de l'Académie année i7<îi>
page 41 3 j l'autre dans le vol, de l'année 17^5 , page i»
144 HISTOIRE ABRÉGÉE
Villes.
Purée obferyie.
Parallaxe
horizontale
du Soleil.
H. M. S.
Tobolsk. . . .
Stockoltn. . .
Cajannebourg.
UpfaJ
Tornéa. . . .
Pékin
Madras. . . .
Calmar. . . .
5 48 53 î
5 50 45 ï
5 49 54
5 50 i^
5 50 9
5 49 ii,<^
5 51 4}
S 50 39
10,^0
9. 9
8,94
10,44
10, I
9. 5
9» 5
Ces obfervations feroient certainement fufEfantes , &
la véritable parallaxe du Soleil en feroit parfaitement
déduite , iî les Obfervateurs euflent été plus avantageu-
fement placés: mais, comme on le voit par la Table,
toutes les durées obfervécs différent à peine entre elles
de trois minutes de la plus petite à la plus grande rauffi
ne trouve-t-on pas dans les réfultats l'accord parfait que
l'on pouvoit efpérer. Nous ne pouvons donc nous flatter
d'pbtenir,par robfervationdeladuréedu pafTagede ly^Ji,
toute la précifion que l'on s'étoit promife dans la déter-
mination de la parallaxe par une méthode rigoureufê, mais
dont le malheur des circonftances nous a empêchés de tirer
tout le fruit poffible, ayant été privés des obfervations les
plus favorables, telles que celles des Indes, de l'ifle
Rodrigue, de Sainte-Hélène, & d'autres lieux.
ïl faut donc avoir recours aux obfervations du çonta<3:
qui
DE LA PARALLAXE DU SOLEÎL. h5 •
qui a été obfcrvé dans un bien plus grand nombre d'en- Parallaxe du
droits. Parmi toutes ces obfcrvations M. Pino-ré a choifi ^°'^'', ' ,';°P"
celles que renrermc la lable luivantc. On y voit le re- fervation du
fultat qu'a donné chaque obfervation du contact inté- contaa mté-
j t r ■ , \ ] A 1 r ■ rieur de la
ncur de la lortie, comparée a la même oblcrvation fo^ie.
faite au cap de Bonne-Efpérance par M. Mafon ; à rifle
Rodrigue, par M.Pingré;6cà Pékin, par le P. Droilier,
Jéfuite.
Lieux où l'on a obfèrvé
la fortie.
Cap de Bonne-Efpe'rance.
Rodrigue
Pékin
Tobolsk
Stockclm
Cajaniicbourg
Upfal
Tornéa
Paris
Grennwich
Gocitingen
Bologne
Tirnau
Ingolftadc
Sliirburn
Laubac
Dillingen
Wezlas
Lisbonne
Munich
Sclivï-ezingen
Florence. ,
Longitude.
Latitude.
Contaû in-
térieur ob-
fervé à la
fortie.
H. M. s. D. M., s.
ig
16
3J
5i
5'
40î
lî
49
o
lO
II
5
41
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17
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H
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48
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4«
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48
48
38
48
49
45
5J lyAuftral,
40 40
54 '5 Boréal,
iz 11
50
50
yo
yo
14
30
y4
36
50
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o
o
y
30
î-5
yy
o
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H. M. S.
it 59 ji
o }6 49
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zi 30
11 7
11 18
11 j4
10 18
10 19
10 j 8
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11 19
II 4
10
II
II
II 10
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2-1 y
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G
lé
O
9
y9i
I
ly
10
48
lé
46
3y
18
Parallaxe horizon-
tale DU Soleil , en
prenant pour terme de
coniparaifon
C.deB.
Efpér.
y, 87
8,98
8,é5
8,33
8,61
8,60
8, çi
8.19
8.y7
8,;<f
8,58
8,41
8,03
8,4î
8,63
8,11
8,08
7,9>
7,97
7,79
7,69
Réfultat moyen.
. . 8, ,3
en ex-
cluant
Rodrigue.
L'iHe j
RodngJ
Pékin.
y. 87
8,98
10, 10
10,91
10,54
10, 16
10,15
10, o
10, lé
9, «y
9,éo
10, 58
10,44
9,4*
10,15
10,71
10, 10
10,35
11,50
10,77
10, 14 10,48
en excluant le
cap de Bonne-
Efpérance.
1^6 HISTOIREABRÉGÉE
On ne peut efpérer, comme nous l'avons déjà dit,
de déterminer bien exa6tement la parallaxe par l'obferva-
tion d'un feul contadt , qu'autant que l'on connoît
parfaitement , ou tout au moins à lo ou 1 5"près, ladif-
tércnce de longitude entre les lieux dont on compare
les obfervations. Il eft de plus à deiu'er que les heures
où le même conta£t a été déterminé de part &; d'autre,
différent fenfiblemcnt entre elles. Ces conditions n'ayant
pu être également remplies pour chacun des lieux de la
Table précédente , ni les obfervations également bien
faites, on devoit bien s'attendre à quelque variété entre
les réfultats conclus: leur multiplicité devoit alors don-
ner lieu, en prenant une quantité moyenne, d'approcher
beaucoup de la vérité. Mais il faut avouer que l'inéga-
lité qui règne entre les différentes combinaifons que
nous ofîre la Table précédente, jette la plus grande incer-
titude fur la conclufion que l'on doit en tirer. D'un côté, en
portant les yeux fur la troificme colonne, on voit l'accord
fatisfaifant de i6 réfultats compris dans une même fé-
conde ,ce qui fcmble décider en faveur de l'obfervation du
cap de Bonne-Efpérance_, ôcde la parallaxe qui en réfulte ;
de l'autre côté , l'obfervation de l'ifle Rodrigue èc celle
de Pékin paroiffoient fe réunir pour dépofer contre celle
du cap, &c établir un réfultat tout- à-fait différent: entre
autres l'obfervation de Rodrigue ne peut pas abfolumenc
fubfiller avec celle du cap.
Qui peut donc rendre ces deux obfervations incom-
patibles? C'eft malheureufement une queftion bien dif-
ficile à décider. Doit-on avoir quelques incertitudes fur
la longitude du cap deBonne-Efpérance, après le long
féjour qu'y a fait un des plus grands Obfervateurs de
notre fiecle(i)? Celle de Rodrigue paroîtinconftetable-
(i^ M. l'Abbé delà Caille a déterminé la longitude du cap de
Bonne- Efpérance de i*" 4' 18''. M. Mafon a conclucette longitude
par fes propres obfervations de i^ j' ^8".
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 147
ment fixée par les obfervations de M. Pingre. Il y a peu
de différence, à la vérité, entre les heures de robferva-
tioii des contacts; mais cette différence n'eft guère plus
grande par rapport à nombre d'autres endroits qui ont
cependant donné un réfultat cohérent avec les autres.
Faut-il donc foupçonner une des deux obfervations
du conta6t ? Celle du cap, il faut l'avouer, a toutes
les apparences en fa faveur. Admirons ici l'exemple rare
que nous a donné M. Pingre dans cette pccafion , de
la candeur qui doit conduire le véritable Savant dans la
recherche de la vérité. Cet Académicien, frappé du
concert des réfultats de l'obfervation de M. Mafon , eft
le premier à vouloir condamner la fienne ; il cherche
même un moyen de rendre fori erreur probable. Il fup-
pofe d'abord qu'il s'eft trompé dans l'heure de l'attouche-
ment des bords ; & en ayant retranché une minute, il
trouve que fon obfervation, aind corrigée, procure pré-
cifémcnt les mêmes réfultats que celle de M. Mafon.
S'enfuivroit-il de là que M. Pingre eût effedlivemcnc
commis l'erreur qu'il fuppofoit? Ce n'étoit tout au plus
qu'un préjugé favorable à cette opinion. Faire cadrer
une obfervatlon avec une autre, n'eft point la corriger,
ni la rendre meilleure , à moins que celle dont on veut
fe rapprocher ne foit démontrée parfaite. L'impartialité
dans la recherche de la vérité défendoit également à
M. Pingre d'admettre & de reconnoîtrc fon erreur, d'a-
près une comparaifon douteufc, fans démontrer aupara-
vant aux autres, & à lui-même , l'exiftence de cette
erreur, ou du moins une poflibilité plus que vraifem-
blable. Ce fut avec la même candeur que M. Pingre ,
cherchant à découvrir une raifon, un prétexte plauTible
de foupçonner fon obfervation , en examina de nouveau
toutes les circonftances ; mais avec toute la bonne vo-
lonté poffible de fe trouver en défaut, il fut obligé de
conclure qu'il n'étoit pas vraifemblable qu'il fe fût
trompé d'une minute , comme il falloit le fuppofcr,
Tij
148 HISTOIRE ABRÉGÉE
pour fe rapprocher de M. Mafon. En efFet, on ne peut
pas foupçonner une minute d'erreur dans l'eftime d'un
contact quife fait comme un éclair, ôc qui laifle tout au
plus rObfervateur en fufpens l'efpace de crois ou quatre
fecondes.D'unautrecôcél'état de la pendule ôc (a marche
oncétéconftatésavantôc après robfcrvation. Il reftedonc
un dernier ioupçon , èc c'eft auffi le plus fpécieux. En
regardant à la pendule, on a peut-être pris une minute
pour l'autre. Or , on ne peut admettre cette méprife qu'en
luppcfant qu'elle ait eu lieu aulîi pour le contact fui vant,
& dans le même fens, puifque l'obfervation de ces deux
contacts, telle que la rapporte M. Pingre, donne un
intervalle conforme à la théorie , au lieu que fi l'on fup-
pofoit une minute d'erreur pour l'un des deux contacts,
le diamètre de Vénus auroit employé au moins une mi-
nute de trop à traverfer le bord du Soleil. Telles éroienc
les raifons alléguées par M. Pingre pour la défenfe
de fon obfervation; plus il fe juftifîoit, plus il augmen-
toit notre incertitude fur le réfultat qui devoit être
adopté.
11 rcfte encore à rechercher la parallaxe par l'obfer-
vation de la plus courte diftance des centres de Vénus
&: du Soleil. Mais cette méthode eft encore plus dé-
pendante que les autres de l'erreur des obfervations, 6c
peu fufceptible par conféqucnt de décider la qucftion.
M. Pingre cependant ayant conclu cette moindre dif-
tance des centres , des durées obfervées à Tobolsk ,
Stockolm , &: autres lieux , la compara à la moindre
diftance obfervée à Rodrigue , & trouva une parallaxe
favorable à fon premier réfultat , c'eft-à-dire d'en-
viron 10"; mais il fentit bien qu'il ne pouvoit fe pré-
valoir d'un tel accord. Pour confirmer la certitude de ce
réfultat, il eût fallu que la durée du paftage eût été ob-
fervée dans plufieurs autres lieux des parties méridiona-
les de l'Afie ou de rx\frique.
Je ne dois point finir cet article fans faire mention d'un
Mémoire imprimé dans le cinquante-troifieme volume
rente.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 149 .
ides Tran{a6lions Philofophiques. M. Short y difcutanc mm. shon
fort au ionff la même matière que M. Pineré , préten- ^ Pingre
!• , II- " ,/- 1 j-rp' 1 trouvent une
dit établir un relultat dirrerent, en employant cepen- parallaxe du
danc les mêmes méthodes que l'Aftronome François, Soleil diffé-
& Ce fervant en apparence des mêmes obfervations , fans
excepter celle de Rodrigue. Toutes les combinaifons &
tous les calculs de M. Short donnoient, avec un accord
flngulier, 8", 5(3 pour la parallaxe du Soleil. Il eft vrai
que M. Short s'étoit permis de corrigera fa commodité
l'obrervation de M, Pingre ; en ajourant une minute à
l'heure du fécond contact intérieur , il trouvoit le moyen
de faire tout cadrer. M. Short eut-il tort ou raifon de ha-
farder cette altération dans une des données principales?
L'événement , il faut l'avouer , vient de prononcer en
fa faveur (i) : mais l'on doit auifi convenir que M. Pin-
gré eut quelques droits de fe plaindre alors. Puifqu'il
perfiftoit à {butenir l'exa6titude defon obfervation , on
devoit, ou s'en fervir telle qu'il la donnoit, ou n'en faire
aucun ufage. 11 deviendroit dangereux que l'on fe per-
mît ainfî de faire des corrc£lions à une obfervation en
vue de parvenir à un réfultat connu èc fixé d'avance.
M. Pingre accufa de plus M. Short d'avoir ufé d'une fcm-
blable infidélité à l'égard de plufieurs autres obfervations^
d'avoir changé fans fondement lalongitudededifFérents
lieux; en un mot, d'avoir eu pour but, moins la recher-
che de la vérité _, que la confirmation d'un fyftême
adopté. Il oppofoit à M. Short les recherches de
M. Hornsby, Ion compatriote, dont les cah'uls s'accor-
doient à fixer la parallaxe du Soleil à 9", 7. Je n'entrerai
pas plus avant dans cette difcuifion , on peut s'en inftruire
plus au long dans le Mémoire que M. Pingre lut en
(1) Parle palTage de 17(^9 on a reconnu que la parallaxe dm
Soleil étoic efteitivement de 8" ^ , telle que M. Short i'a-voit dé-
terminée par le paflage de 17S1,
d
150 HISTOIRE ABRÉGÉE
176^3 à l'Académie , mais qui ne fut imprimé que dans
le volume de 1765. Ceft alFez long-temps nous arrêter
fur un objet qui n'offre à chaque pas que de nouvelles
incertitudes,
indécifion ^^ réfultat du pafTage de ij6i fe réduifit donc ,
fur le réfuitat j'oic le dire, à nous rendre plus indécis qu'auparavant.
dujaflagedc j^^ parallaxe du Soleil étoit fixée entre 9" ^ & io"f.
Le paffage de Vénus étendit les bornes de cette varia-
tion depuis 8" 4" jufqu'à i o" 4" ( i )• C'eft ainfî que les fpécu-
lations de la théorie ne fe trouvent que trop fouvenc
démenties par la pratique. L'on fe vit en effet bien
éloigné d'avoir obtenu la précifion annoncée par
M. Halley.
Onfcdif ofe ^'^ ^^^^ ^^^ ^^^^ ^^"^ doute d'êtrc inconfolable de la
au paii'age de perte d'une pareille occafion , fî elle n'eût dû fe renou-
1769. Avan, yeller huit années après. Mais le palTage de 1769 nous
dernier paffa- laifToit l'cfpérance du dédommagement, èc devenoit
S«' d'autant plus précieux quec'étoit le dernier phénomène
de cette efpece, dont notre génération pût fe flatter
d'être témoin (2). L'obfervation en devoit être mieux
faite par les mêmes Obfervateurs quelepaffage de ij6i
avoir déjà exercés ; enfin les réfultats dévoient être plus
exa£ls ôc plus concluants , vu les circonftances parti-
culières , plus favorables dans ce dernier paffage que dans
l'autre (3). Auffiréfolut-on de ne négliger aucun des voya-
ges que l'on pourroit juger utiles , afin de fe procurer
(i) Dans cette incertitude les Aftronomes convinrent alTez géné-
ralement d'adopter la parallaxe de 9", en attendant le réfultat da
pafTage de 1759?
( 1) Le pafTage de Vénus le plus prochain n'aura lieu qu'en i S74;
(j) Un pallage aulTi favorable que celui de 1769 n'aura pas lieu
d'ici à long temps. Ceux de i 874 & 18S2 arriveront au mois de
Décembre, faifon ingrate pour les obfervations. D'ailleurs , pour
en tirer tout le fruit pofllble , il fxudroit pénétrer dans le Sud juf-
qu'au cercle polaire , & même au-delà. Dans le pafTage qui arrivera
l'an 2004 , la latitude de Vénus ne fera pas afTez grande , & l'efïet
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 15,
les obfervationsics plus complettcs. L'expérience eft notre
plus grand maître, le fruit de f es leçons nous indcmnife
du prix des années qu'elles nous courent. Le principal
but avoir été manqué en 1761 , faute d'avoir obfervé
dans des lieux où les durées fuflent aflez différentes. Il
étoit eirentiel de ne pas tomber une féconde fois dans le
même inconvénient
M. de la Lande publia dès l'année 17(^4 une Mappe- Voyages in.
monde femblable à celle que M. de Liile avoir drcflee '^'"■1"'^^ ï°^'^
pour le palîage de 1 76 1 . M. Pingre fît auffi imprimer un ^^ '"
Mémoirefortdétailléfurlc choix& l'état des lieux où l'on
pouvoir fe rendre ;& M. Hornsby s'occupa auffi du même
objer. Toutes ces recherches tendirent à démontrer com-
bien il étoit efTentiel de fe tranfporter d'un côté vers le
milieu de la Mer du Sud, de l'autre vers le pôle boréal ,
au nord de la Laponie 6c du Kamtschatka. La Californie
èc le Mexique paroiffoicnt auilî dans une pofitionavan-
tageufe pour l'obfervation de la durée. Dans la partie
méridionale de l'Europe on ne devoir voir que la forrie;
& l'entrée feule devoir avoir lieu pour l'Amérique méri-
dionale. Nous ne nous arrêterons pas à décrire ici tous
les voyages qui furent entrepris en conféquence , ni à
dérailler toutes les obfervations qui furent faites fur la
furface du globe; ce qu'il efl efTentiel d'en connoître fe
trouvera dans la Table générale qui va fuivre bientôt.
Il eft cependant trois principaux voyages qui, par leur
importance &c l'utilité que l'on en a rerirée , méritent d'ê-
tre ici diftingués : celui du R. P. Hell à l'ifle de Ward-
hus ; celui de M. Chappe à la Californie, Se celui des
Anglois à la Mer du Sud.
Il eft inutile de faire connoître aux Savants le nom
de la parallaxe fur les différentes durées du palfage ne fera pas à beau-
coup près aufli fenfible qu'il doit l'être en 1769. Ce ne fera qu'en
201 1 que le paffage de Vénus fera à-peu-près auffi avantageux que
celui de 1769. Mais en 1255 > ^^ 5 J"'" > Vénus paflera fur le
Soleil avec des circonftances plus favorables que dans ce fiecle-ci»
h
152 HISTOIRE ABRÉGÉE
obfervation ^" Pei'C Hcll, Ccc AftionoiTie fuc invité à venir ob-
faiteàWaid- fervei" le pafTage de Vénus dans les Etats Se aux frais
du Roi de Danemarck. On avoir vu pareillement en
176 1 la Rufîie demander à la France un Aftronome.
Cette démarche avoit fait ésralement honneur à l'une &c
à l'autre nation. Le choix du Souverain Danois ne pou-
voir qu'être digne d'éloge dans cette occafion. Le Perc
Hell partit le 28 Avril 17(38, accompagné du PcrcSai-
novics fon confrère. Il arriva à Copenhague au mois de
Juin, &c après avoir traverfé la Laponie il fe rendit à
Wardhus le 11 0(£tobre 1768. C'cft dans cet endroit qu'il
sYtablitpour fairel'obfervation du paflage de Vénus. Ce
phénomène étant encore éloigné, le Père Hell eut tout
le temps de s'y préparer , èc de faire une moiflon abon-
dante d'obfervations de différente efpece dont nous ef-
pérons voir un détail intéreffantdans l'ouvrage conlîdé-
rable que nous promet ce Savant laborieux. Nous re-
grettons feulement qu'il ait rejette dans le dernier vo-
lume, qui ne paroîtra qu'en 1774, les parties aftrono-
" miques, géographiques & phyfiques , parties qui nous
intéreflbient le plus. Nous avons vu, à la vérité, dans un
petit imprimé les détails particuliers du paffage de Vénus
fur le difque du Soleil. Le R. P. Hell fut aidé dans cette
obfervation par le PereSainovics 6c M. Borgreving. Ces
deux derniers Obfervateurs fe chargèrent d'obferver le
premier conta£l de l'entrée. Le Père Hell , prévenu de
rimpoflibilité de fixer exa(flement cet inftant, réferva
toute fon attention pour le contaâ: intérieur. A 9^ 16'
40" M. Borgrcwing avertit qu'il appercevoit une petite
échancrure fur le bord du Soleil , ce qui fut confirmé
quelques fécondes après par le Père Salnovics. Le Père
HcU regardant alors avec une lunette de 8 pieds & demi,
eftlma que la partie du difque de Vénus qui étoit déjà
fur le Soleil pouvoit être évaluée à deux minutes de de-
grés ; & que par conféquent le véritable contaâ: extérieur
dévoie
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL \^y
dévoie être arrivé environ 30" de temps avant le mo-
ment que M. Borgrewing avoit fixé, c'eft- à-dire 9** 16'
I o". Quoique la hauteur du bord du Soleil où Vénus ve-
iioit d'entrer ne fût que de 7° 37', on voyoit parfaitement
ôc diftinclement les bords de la petite planète. Il fallut
redoubler d'attention pour l'obfervation du contaét in-
térieur. Il me paroît impoliible d'apporter plus de foin,
de mettre plus de concert, &: de mieux diftinguer tou-
tes les circonftances que le firent nos Oblervateurs. Le
Père Hell, muni d'une lunette achromatique du fieur
Dollond de 10 pieds & demi , obferva, pour ainfi dire ,
en trois temps le contact intérieur de l'entrée. A 9^ 13'
37", 6 le limbe de Vénus lui parut avoir prefque recou-
vré fa forme circulaire. Le Père Sainovics, avec une lu-
nette de la même longueur, fixa cette apparence 5" plu-
tôt. A 9!^ 34' 4'j 6 les limbes de Vénus & du Soleil fem-
blerent au Père Hcll parfaitement circulaires , de forte
qu'ils paroifloient fe toucher fans mordre l'un lur l'autre.
À ^^ 34' 10", 6 un filet de lumière entre les bords de
Vénus & du Soleil annonça au Père Hell la féparation
des deux difques. Le Père Sainovics obferva ce filet de
lumière 3" plutôt ; ôc M. Borgrev^ing avec une lunette
de 8 pieds & demi ne le remarqua qu'à 9'' 34' 3 2", 6 ; la
hauteur du bord du Soleil étoit alors ào. 6^ 33'. Bientôt
après le ciel fe couvrit, le Soleil difparut, & jetta nos
Obfervateurs dansl'appréhenfion de ne pouvoir obfervetr
Ja fortie de Vénus. Cette circonftance empêcha même
de déterminer aucune pofition de Vénus dans le cours
du pafTage : la plus grande partie de l'expédition
alloit être manquée fans un vent de nord-eft dont le
fouffle heureux vint nettoyer la partie du ciel où fe trou-
voit le Soleil quelque temps avant le moment de la
fortie, dont robfervation fut faite dans les circonftances
les plus favorables. A 15'^ %-]' 24", 6 le limbe de Vénus
étant près de toucher le bord du Soleil, le Père Hellap<^
V
171
154 HISTOIRE ABRÉGÉE
perçut comme une goutte noire (i) Te former entre les
bords des deux planètes. Le P. Sainovics appcrçur aufli
cette goutte noire, mais ne fixa pas le moment de fa
formation. A 15'» %-f }')",6 les bords des deux planètes
fe confondirent en détriiifant la goutte noire. Le
P. Sainovics fixa ce moment une leconde plus tard, èc
M. Borgreving 8" plutôt; ce qui dcvoit arriver ainfi,
relativement à l'effet de fa lunette qui lui avoit flxit ap-
percevoir l'entrée plus tard que les autres. La hauteur du
bord du Soleil à ce premier contadl: de la fortie étoit de
9" 4 -/.Enfin la fortie totale fut déterminée par le R. Père
Hell à 15^14^' 40", 4, ou 44", 4' ; par le Père Sainovics à
1 5l'45'45",4,ôcpar M. Borgrewingà i 5!^ 45' 38"^ 4, le
bord du Soleil étant à 10° 4 o" de hauteur.
Obfcrvation ^^ "^ répéterai point ici ce que j'ai dit précédem-
faire à San- ment fur le Voyage de Californie. Les deux premières
jofephenCa- p^^j-jj^s de cct Ouvragc en contiennent des détails fuffi-
lants. Je dirai feulement que la deftination de M. Chappe
n'avoit pas été d'abord pour la Californie ; on deliroic
infiniment qu'il pût aller dans la Mer du Sud , fituation
la plus favorable pour l'obfervation. M. Chappe projet-
toit en conféquence de fe rendre dans quelqu'une des
ifles de Salomon , fituées vers 180° de longitude, 6c S'*
de latitude auftrale ; mais il ne pouvoit pénétrer dans ces
parages que fur unvailTeauEfpagnol , &. avec la permif-
fion de la Cour d'Lfpagne, peu curieufe ordinairement
de laiiïer les Etrangers prendre connoiflance de ces
mers. AufTi la négociation qui fut entamée à ce fujec
ne put-elle réuffir ; mais en dédommagement on confen-
tit d'accorder paflage à M. Chappe fur la flotte qui de-
(i) Voyez Ohfervatio tranjitûs Venerïs ante d'ifcum SoUs , die
3 Junii j anno ly*?^. Watdhoëliufii, d-c. aR.P.MaximUianoHell^
« S. ^.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 155
voit partir pour l'Amérique fcptcntrionale , 6c on lui
permit de s'établir dans tel lieu du Mexique qu'il defire-
roit , di. même de pénétrer jufqu'à la Californie La Cour
d'Efpagne voulut de plus partager l'honneur de cette ex-
pédition, en nommant de fon côté deux Aftronomes
pour fe joindre à M. Cliappe , & faire avec lui l'obfer-
vation du palEage de Vénus. Il fut décidé en conféquence
que M. Chappe iroit en Californie , èc s'établiroit le
plus près qu'il pourroit de la pointe auftrale de cette
prefqu'ifle vers le cap Saint Lucas j afin d'avoir la durée
la plus courte poflible. Le Lecleur a été précédemment
inftruitdes détails de ce voyage, 6c il ne fe rappelle fans
doute qu'avec peine ce qu'il a coûté. Les fruits que
l'Aftronomie a retirés de cette obfervation précieufe
ne lui ont rendu que plus fenfible, 6c perpétueront
à jamais le fouvenir de la mort de M. Chappe, 6c
de Don Salvador de Alédina , l'un des Aftronomes
Efpagnols.
Tandis que M. Chappe avec les Efpagnols dirigeoit j^'^^'T^'^ll""
fa route vers la Californie, une frégate A ngloife, partie du Sud.
incognito de Plimouth le 2z Septembre 1768 , alla
doubler le cap Horn, pour entrer dans la Mer du Sud
fans en attendre la permiffion de l'Efpagne. Cette frégate,
nommée l'Endcavour ^ étoit commandée parle Capi-
taine Cook. M. Green , habile Aftronome , élevé du
célèbre Bradley, ^ le Docteur Soiander, favant Natu-
ralifte , élevé de M. de Linné , y étoient embarqués.
Le but étoit de connoître quelques ifles de la Mer du
Sud, d'en découvrir d'autres nouvelles , 6c de chercher
à faire l'obfervation du paflage de Vénus dans la poll-
tion la plus favorable que l'on pourroit trouver. Ce pro-
jet fut rempli avec tout le fuccès poflible. Nos Voyageurs
découvrirent une quantité d'ifles nouvelles. Ils abordè-
rent entre autres le I jAvril 1769a l'ifledeTaïti, fituée par
izS° 12,' de longitude à l'occident de Paris, ^ 17° x'è'
y ij
1^6 HISTOIRE ABRÉGÉE
5 5'' de latitude auftrale. Ceft là qu'ils fe fixèrent pour l'ob'
fcrvation du paflage de Vénus. Le temps fut des olus fa-
vorables. MM. Green, Cook&.Solander obferverenttous
trois de concert. Les deux premiers virent le contact ex-
térieur de l'entrée à 5" de diflerence l'un de l'autre;
mais le conta6l intérieur , ou la formation du trait de
lumière qui eut lieu dès que le ligament noir fe détacha ,
fut fixé 20" plutôt par M. Green que par M. Cook :
l'obfcrvation de M. Solander tint à-peu-près le mi-
lieu entre les deux autres , & c'ell: ce milieu qu'il eft
convenable de prendre dans cette occafion ; de force
que l'on doit fixer ce premier contait intérieur à 9^ 44'
4". Il y eut encore 10" de différence entre l'obfervation
de M. Green 6c celle de M. Solander lors du fécond con-
tact intérieur marqué par l'interruption fubite de lumière
entre les bords des deux planètes. L'on doit prendre aullî
le milieu èc fixer ce fécond contait intérieur à 15*^ 14'
8", ce qui donne la durée du paflage de ^^ 30' 4". La
plus courte diftance des centres fut déterminée par
M. Green de 10' 2 5",4. Cette mefure a été prife avec un
micromètre de Dollond. Telle eft l'obfervation dont le
fuccès nous étoit fi important, de qui devoit fervir de
terme de comparaifon à toutes les autres, & principale-
ment à celles du Nord. Elle coûta la vie à celui à qui nous
en fûmes redevables. M. Green mourut aux Indcsàfon
retour. Un autre Aftronome éprouva le même fort dans
le même lieu. M. Veron avoit accompagné M. de Bou-
gain ville dans fon voyage duTour du Monde ; étant arrivé
de trop bonne heure dans la Mer du Sud, il fut obligé de
pafler outre, & de renoncer à y faire l'obfervation du
paflage comme il l'avoit projette. Arrivé à riflede France,'
il voulut gagner Pondichery ^ y arriva trop tard, &: mou-
rut bientôt après, plus à plaindre que MM. Chappe, Mé-
dina , & Green, qui avoient eu au moins la confolatioa
d'avoir rempli leur objet.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL.
M7
Table générale des Obfervanons du pajpige de Vénus fur le difqu^
du Soleil^ le 3 Juin 1769.
Noms des Lieux,
Obfcrvateurs.
Melfieurs.
Longitude 1
orientale — Latitude,
occident. -{-
H. M. S.
A Paris , l'Ob-
fetvatoire Royal.
Collège de Louis-
le-Grand
Pafly
Saint-Hubert. . . .
Rouen
Touloufe
Breft
Bourdeaux
Kergars
La Miffion près de
Caen.
Labicde
Greenvcich
Spithal-Square. . .
Auftinfriars ....
Kew
Windfor.
Shitbucn.^
Oxford. .....
Près Leicefter. . . .
Hawkill
+ o
rCaffini de Tliury.
/ Maraldi.
[ Duc de Cliaulnes.
Ç Meffier.
J Baudouin.
^Zannoni.
^fouchy.
J Bailly.
(^ Bory.
{Le Monnier.
Chabert.
{Bouin.
Dulague.
' d'Arquier.
Garipuy.
Verdun.
Duval le Roy.
Larroque.
I D'Après.
{Rochefort.
Pigott.
1 Faugere,
^Maskelyne.
\ Dunn.
i Hirft.
^Dollond.
Canton.
Aubère.
Docl. Bevis.
Harris.
Maclesfield.
"(^Barticct.
^Hornsby.
S Clare.
"> Sykes.
^-Horfley.
I Ludlam.
{Milotd Alemoor. -J- o
James Hey.
Entrée de Vénus
fur le difquc du Soleil.
i' contart. i" contacl,
D. M. S. H. M. S.
48 jo I4
+ 00 14! 48 51
I 57
4 59
-h o 5 3;
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10 47
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49 2-6 43
45 35 54
48 13
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49 II 10
II 3éT'44 40 45
-4-0 9 16 '51 18 40
9 3i 51 31 15
9 35
10 30 51 19 45
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14 18
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16 ;i
Lunette achr. 3 pi, f
Lunette aclir. de 5 pi,
Lunette aelir. j pi. -f.
Lunette achr. ;z pifds.
Lunette sclir. 3 pieds.
Tèlefc. Crég. 3 pieds.
Télefcopc de 30 pouc.
Lunette achr. 5 pieds.
Lunette achr. 10 pi.{.
Lunette de i 8 pieds.
Lunette âç 16 pieds.
Lunette de 14 pieds.
Téleù. Êrcg. 17 pou.
Lunette achr. 6 pieds.
Télefc. de 31 pouces.
1 élcfcope de 1 pieds.
Lunette achr. 3 pi. f .
Télefcopc de 1 pieds.
Lunette achr. 3 pi. \,
Télefc. gronit 95 fois.
Télefc.grofllt iiofois.
Télefc. de 3 pieds f.
Télefc. de i 8 pouces.
Lunette achr. 3 pi. {.
Lunette de 14 pieds.
Lunette de ii pieds.
Lunette achr. 6 pieds.
Lunette achr. 3 pi. i,
Télefcope de l'opouc.
Lunencachr. 5 ; pcmc.
Télefc. de 18 pouces.
Lunette achr. j pi. {.
-H r S T O I R E ABREGEE
Suite de la Table.
Noms des Lieux.
Obfervateurs.
Longitude
orientale — Latitude,
occident.-
Meilleurs.
H. M. S. D. M. S.
H. M. S. !H. M. S.
,C.Tp Lézard.
iGil>;akar. . ,
.Cadix. . .
iStockoIm.
UpfaL
.Grypswald. ....
Ponoi
iCap Nord
iSaint-Domingue,cap
François.
iiFortRoyal
{Cambridge, Nou-
velle Ansilc:crrc,
o
Norriton.
Lcweflown. . .
f'Iiiladelp'iie. .
'lie Coudre. . .
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■ Wilfon.
^D, Reid.
John Bradley.
Jardine.
Tofino.
Wargentin.
Ferner.
( [ Wilcke.
Melander.
Bergman.
I Salénius.
Henri RoliL
Mailct.
Bayley.
Pingre.
Fleurieux.
Lafilicre.
R. P. CliriRophe.
^5^inthrop.
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Biddle.
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A. de Alzate.
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5aravia. ,
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Manille. ,
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R. P. Mayer.
Le Frère Stahl.
Lexell.
Albert Euler.
KralFt.
Euler.
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R. P. Dollieres.
^R. P. Collas.
Degloir.
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Entrée de Vénus.
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Sortie de Vénus.
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Sud.
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9 43 1*
Télefc. de 18 pouces.
Télefcope de 1 pieds.
Lunette de 7 pieds.
Lunette de 11 pieds.
Lunette achr. 10 pi.
Télefc. de 18 pouces.
Lunette de 10 pieds.
Lunette de 11 pieds.
Lunette de 11 pieds.
Lunette de lô pieds.
Lunette achr. 1 1 pi.
Télefcope de 1 pieds.
Lunette achr. ^ pieds.
Lunette achr. i pi. f
Lunette achr. 5 pieds
Télefcope de 1 pieds.
Télefcope i pieds j.
Lunette de 41 pieds.
Lunette de 5e pieds.
Lunette achr. 4 pi. {.
Télefcope de i pieds.
Lunetteachr.de 18 pi.
Télefcope 3 pieds \.
Télefcope i pieds \.
Lunette achr. 7 pieds.
Lunette de 1 8 pieds.
Lunette de 14 pieds.
Télefc. Grég. j pi. i-
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL.
M9
Obfcrvations de la durée du pajjage de Venus en 17^9.
Noms Jcs
Lieux.
Entrée de Venus.
Sortie de Vénus.
Obfervateurs.
Premier
SecouJ
Picmier
S'.cond
contad.
contaft.
contad.
coiuaft.
Me(Tieurs.
H. M. S.
H. M. S.
H. M. S.
y. M S. j
!\i;'ardlius, dans_^
ilaMerGlaciale
■r. p. Heil.
R. P. Sainovics.
.Borgrcwiiig.
î> 16 10
9 Î4 >o,â
9 34 7,6
9 54 32-, 6
IJ 17 3;, 6
ij 17 36,6
IJ 17 28, <;
'5 4J 4^,4
15 45 45
'5 45 5S, -ijj
|KoIa. ....
Rumowski.
.
9 41 1
15 3J 12.
.Fore d'j Prince
deGalies.dans V Dymond.
0 57 0,;;
I 15 M, î
7 0 48, f
7 19 io, ij
labaied-Hud--< Walles.
(bn. t
Cajanebourg. | Planraan.
0 57 7, 6
I 15 11,3
7 0 45î 5
7 19 1,1;
• • ■
9 io 45 T
IJ 31 17
'l.^^L'^Y'^'^^^-
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San Jofeph ..f^^^^'
Calitornic. ^ ,, , ,.
1 Medina.
II J9 17
II J9 14
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0 17 i(;,9
0 17 ij
0 I7 50
5 54 Ji^. 5
5 54 47.5
5 54 47,5
é 15 19,1
6 iz 41
6 11. a6
Ide du Roi ^
Gcorsres , ou % Grecn.
9 2-5 40
9 4? 55 T
15 14 î
IJ 31 14
de Taïti , J Cook.
9 15 45
9 44 15
15 '4 13
IJ 31 1
dans la Mer J Solander.
9 44 ■>■{
15 32- 13
du Sud. V.
On ne remarqua point dans ce fécond paflage le même pj,e'„omeiie
phénomène qu'en \-]6\ ; je veux dire que l'on ne vit point du ligament
autour de Vénus ce croiffant ou cet anneau lumineux ^'"^'^"7°'?'^
dont nous avons parle précédemment (i). Mais on ob- venus & da
ferva très diftindtement ôc prefque généralement une ^'"^•
goutte noire (pour m'exprimer comme la plupart des Af-
tronomes) ou une efpece àç. ligament qui ^ au moment des
contacts intérieurs de Vénus & du Soleil , fembla réunir
& attacher J pour ainjl dire j leurs bords l'un a l'autre ^ ainfî
(i) Si quelque Obfervateur l'a apperçu dans ce fécond paiïage,
i'obfervation n'a pas été afTez générale pour en faire mention.
Les Obfer-
■vateuïs n'ont
pas tous laili
le moment
du contaû de
la même ma-
nière , ce qui
a pucaufer de
grandes difté-
tences entre
les obferva-
tions S: leurs
(éikluts.
i6q H î S T O I R E ABRÉGÉE
t[u'ii arrivei-oic à peu près à la féparacion ou à l'approche
de deux corps ou globes enduirs d'une matière glutineufc.
Vénus au premier contact intérieur parut s'alonger en Je
féparant du bord du Soleil qui fembloit attaché au fie n : ù
au fécond contact intérieur , 'le bord de Vénus parut s'alon-
ger pour aller joindre celui du Soleil quifembloit l'attirer.
Cette apparence contribua beaucoup dans ce dernier paf-
fage à l'exaititude de robfervatlon. Les bons Obferva-
teurs en profitèrent parfaitement pour fe procurer un
même point de comparaifon entre leurs obfervations^
en failiffant un même inftant, une même circonftance,
comme celle, par exemple, de la rupture du ligament
au premier conta£b intérieur. En 1761 ce mêmcphéno-
'mene avoir eu lieu, mais peu d'Aftronomes l'avoient re-
marqué : le plus grand nombre , faute d'avoir été prévenus,
n'y avoient fait aucune attention , & dans ce cas cette cir-
conftance avoir tourné au défavantage de l'oblervation.
C'eft à cette raifon du moins que je croirois devoir attri-
buer en grande partie le peu d'accord qu'ont donné la plu-
part des obfervationsdans leur réfultat. En effet, par l'ob-
fervation de Wardhus en 1769 , nous voyons que dans le
conta(fb intérieur de l'entrée on a pu remarquer fenfible-
ment trois différentes circonffances , trois différents inf-
tants , èc qu'entre le premier &; le troifieme inftant il y a
eu 13" d'intervalle : or tel Obfervatcur qui aura pris le
premier inftant pour le moment du contaâ:, différera
beaucoup de celui qui aura pris le troifieme inftant. C'eft;
fans doute ce qui a occafionné d'auffi grandes différen-
ces que l'on en a remarqué entre des obfervationsdu pa{-
fage de Vénus , faites cependant dans le même lieu. A
Paris en 1761 , MM. Maraldi, la Lande & Joly ont ob-
fervé chacun le contait intérieur de la lortie avec des
lunettes de même longueur; cependant entre les heures
qu'ils ont marquées, il y a eu i7"dediff^érencedelaplus
petite à la plus grande. A Upfal , MM. Stromer & Mallec
<pnt déterminé la durée, l'un de ?.4", 5c l'autre de 19" plus
çourçQ
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. i6i
courte que M. Bergman. A Tornéa, l'obrervation de
M. Hellant a fait la durée de 5'' 50' 9"; celle de M. de
Lagcrborn de 5'' 50' 21". Eft-il étonnant que de pa-
reilles obfervations on aie tiré des réfultats fore difté-
rents entre eux? En 17(^9, les ObfervareurSj prévenus 6c
exercés par le dernier paiïage , durent naturellement
beaucoup mieux obferver. Ils étoient convenus de pren • La rupture
dre pour le moment du premier contact intérieur celui où !^", ligament
le bord de Vénus fe féparant du bord du Soleil , la goutte ^^ "^fparitioa
ou le ligament noir viendroit à fe rompre & laiflcroit du filet de lu-
appcrcevoir un filet de lumière: & de même pour le fe- "'^^^^/^'of-
cond contact inteneur on devoir prendre l'inflant ou la les deux inf-
formation de la iroutte noire intcrromproit le filet de lu- f^"\^ '^? P',"^
■ t ri • 11 !•/- ^>. raciles a ob-
mierc qui marquoit la leparation des deux diiqucs. Or feiver.&ies
il eft certain que les Aftronom.es qui auront difting-ué &; P'"^^ propres
d'^ • I I 1 1 • j • n 1 • * fi^6'' les
etermme également bien ces deux mitants, doivent deux contais
trouver l'accord le plus fatisfaifant dans le réiultat de intérieurs.
leurs obfervations ; &c ce feroit alors le cas d'efpérer d'ob-
tenir la parallaxe du Soleil à un cinq-cenrieme près : mais
fongeons que pour atteindre à cette précifion il ne fau-
droit pas qu'il y eût plus d'une féconde d'erreur dans les
obfervations, ce qui eft impoflible ; car les meilleurs Ob-
fervareurs ont avoué qu'il pouvoit y avoir 3" ou 4" d'in-
certitude, foit en plus, foit en moins, fur l'heure qu'ils
ont fixée pour les contacts ( i ). Le Père Hell prétend avoir
obfervé la rupture du ligament, au contact intérieur de
(i) Remarquons avec le Père Hell que c'eft improprement que
l'on dit : l'obfervation des contacis. Les vrais contacts de Vénus & du
Soleil font impoflîbles à obferver. C'ell ce qu'il eft facile de démon-
trer. En effet , ne faut- il pas qu'au moment de l'entrée le difque de
Vénus morde fenfiblement fur celui du Soleil pour que l'Obferva-
teurs'apperçoive du commencement du paiïage ? Or le moment où
l'on apperçoit la moindre petite échancrure eft celui où les deux dif-
ques fe coupent déjà , Se non pas celui ou les deux planètes ne fai-
foient que de fe toucher. Ce n'eft donc que par eftime que l'on peuc
X
1^2 HISTOIRE ABRÉGÉE
l'entrée, à moins d'une féconde d'inceicitude (i) ; mais
tous les Obfervateurs n'auront peut-être pas laid cet
inftant avec la même vivacité, èc n'auront pas en des
circonftances auffi favorables. L'état de l'atmofphere ,
l'effet des lunettes influent infiniment fur une femblable
obfervation ; &c c'eft à quoi l'on devroit avoir plus d'é-
gard dans le choix des données que l'on veut calculer.
On cherche la parallaxe du Soleil par un même conta£b
déterminé en différents lieux ; on prend indifféremment
l'obfervation de Paris , celle de Pékin , celle de Rome, &cc.
mais dans chacun de ces lieux, eft- ce de la même façon
juger que le moment de l'atrouchement ou du vrai conra£b a précédé
l'inftanc de la première obfervation de tant de fécondes , félon que
l'échancrure a paru plus ou moins grande j & l'on peut fort bien com-
mettre une minute d'erreur dans cette eftime du conta6t extérieur.
Arrive enfuite le contaifb intérieur : l'Obfervateur le fixe au mo-
ment fenfibleoùil voit un filet de lumière féparer les deux difquesj
mais c'eft là le moment où les deux difques étoient déjà féparés , &
non pas celui où ils ne faifoient que de fe toucher en un feul point,
où il n'y avoir aucun intervalle entre eux , fans cependant que l'un
mordît fur l'autre. Le vrai contait eft donc déjà paîfé au moment où
l'Obfervateur apperçoit le filet de lumière j mais de combien de
temps a-t-il précédé l'obfervation ? Ce n'eft que par eftime que l'on
peut en juger à lo" près. On dira la même chofe des contaéts de la
fortie. L'on doit par conféquent diftinguer les vrais contacts d'avec
ceux que l'on peut appellet les contacts optiques. Ces derniers font
ceux qui fe rendent fenfibles à l'œil de l'Obfervateur. Ceci, au refte,
n'eft pour ainfi dire qu'une queftion de mots ^ il fuffit , pour l'objet
que l'on fe propofe , de déterminer un même inftant. Les contadts
optiques bien obfervés valent autant que les vrais contaéts, s'ils pou-
voient être déterminés. On doit feulement conclure de tout ce que
je viens de dire , qu'il n'eft pas poflible de faire ufige des contads
extérieurs pour la détermination de la parallaxe du Soleil , on ne
doit employer que les contaéls intérieurs.
(i) Mihi j ob fav entes cœli circonjlantias jcontaclus ijîc adeo mo-
mentaneus vifus ejl ^ ut de unius fecundi certitudine dubitare non do-
tuerlm. ( Obferv. Tranf. pag. 60. )
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 1^3
que l'on a déterminé le moment du contaib? eft-ce avec
des lunettes d'un effet à peu près femblable (i)? eft ce
par un ciel également fcrein ? Peut-on, par exemple, faire
ufage avec fureté des obfcrvations de Paris & d'autres
lieux en 1769, où le Soleil étoit fi près de l'horizon
que fes bords étoicnt tremblants, ÔL Vénus abfolument
défigurée ? Auiîi je penfe que dans ce fécond paflage l'on
doit s'en tenir abfolument aux obfervationsde la durée,
qui ayant heurcufcment été déterminée dans les lieux les
plus favorables 6c avec le plus grand fuccès, nous offrent
le moyen le plus fur & le plus concluant de déterminer
la parallaxe du Soleil avec la dernière exactitude. Cent
autres obfervarions du (impie contact, ou de la plus courte
diftance^feroient fans doute d'un moindre poids : comme
plus fufceptibles d'erreurs, elles ne feroient que jetter de
l'incertitude fur le dernier rélultat qui doit être adopté,
èc nous laifferoient peut-être dans la même indécifion
qu'en 1761.
Parmi les fcpt obfcrvations de la durée du paffige de Durée ia
Vénus fur le difque du Soleil en i y 6^, il y en a cinq qui î.^^^,^^ °^'
paroiffent faites avec toute l'exactitude polîible 6c dans les 176p.
circonftances les plus defîrables & les plus propres à faire
(i) Je penfe que ce n'elt que par l'expérience que l'on peurpar^
faicemen: juger de l'effet des lunettes. Se établir entre elles une
comparaifon. Il y a maintenant à Paris plus d'une douzaine de lu-
nettes achromatiques de trois pieds de longueur , toutes de la même
conftrudbion & du même arrifte , M. Dollond. Il s'en faut de beau-
coup qu'elles faflent toutes le même effet. Il eût donc été à defirec
que les Obfervateurs qui dévoient fe difperfer dans différents lieux,
pour l'obfervation du paiïage de Vénus, euffent, avant de partir ,
comparé entre elles les lunettes qu ils dévoient y employer , par
nombre d'obfervations faites enfemble & de concert. Il eût alors été
aifé de réduire leurs oblervarions dupalTage, comme fi elfes avoient
été faites avec la même lunette & par lemêmeObfervateur ; ce qui
n auroi: pas peu contribué à la jufteffe Se à l'accord des réfultats.
Xij
1^4 HISTOIRE ABRÉGÉE
efpérer un réfultatexaft. Telles font lesobfervations de
Wardhus, du Forc-du-Prince , de Cajanebourg vers le
nord, fie celles de l'isle de Taïti 6c de San- Jofeph, vers
le fui, ainfi que les offre la Table fuivante.
Noms des Lieux.
Durée obfervée.
H.
M.
S.
Wardhus. . .
5
53
14
Fort du Prince.
S
45
14,5
Cajanebourg.
6
II
41,5
San-Jofepli. • .
5
37
I3î4
Ifle de Taïti.
5
30
4
Perfonne n'a difcuté ces obfcrvations avec plus de foin
& de fagacité que M. de la Lande. Le Public ne peut fa-
voir trop de gré à cet Aftronome de l'empreflement &
du zèle avec lequel il lui a rendu compte du réfultac de
chaque obfervation à mefure qu'elle lui eft parvenue. Je ne
puis mieux faire ici que de donner le précis de l'excellent
Mémoire que cet Académicien vient de publier, & dans
lequel il a ralfemblé toutes fes recherches fur cette ma-
tière (i). La Table fuivantc offre les réfultats de fes calculs
pour la parallaxe du Soleil d'ans les moyennes diftances.
On trouvera la méthode expliquée fort au long dans le
fécond volume de fon AJironomie y édition de 1771 , 8c
dans le Mémoire que nous venons de citer.
(i) A Paris, chez Lattié , Graveur , rue S. Jacques.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 1^5
Noms des Lieux.
Le Fort du Prince.
San-Jofeph. . . .
Ifle de Tarti . . .
Parallaxe moyenne.
Wardhus.
Cajanc-
bouro;
Le Fort
du
Prince.
San- I
Jofep h.
Parallaxe Ju Soleil, d^iîuicc de la durûc er. j-ifçi
9,08
8, 81
8,71
8,90
8,49
8,48
8,51
8,50
S, tô
8,55
8, y5T
8, jé
8,55
54-
En omettant d'abord toute confidératlon particulière. Différentes
on voit qu'en général les obfervations de iadurée dupaf- parallaxes
ûge s'accordent à fixer la parallaxe du Soleil entre 8", 50, ^^,^£'^"5 ^f
& 8" , 90 , dont le milieu eft S" , 70. Tel efl auifi le réful- tronomes.
tat adopté parle R. P. Hell.M.Euler, d'après Tes calculs,
le fixe à 8", 68. M. Wallot, Correfpondant de l'Acadé-
mie Royale des Sciences, a lu cette année à nos Aflem-
blées les rélultats d'un travail confidérable fur le paf-
fage de Vénus , d'où il conclut la parallaxe du Soleil dans
fes moyennes diftances de 8', 76. M. Pingre établit cette
parallaxe de 8", 88. Enfin M. de la Lande prétend que
la parallaxe moyenne doit être inconteftablement réduite
à 8"-^.
Quoique la différence qui partage ces Aftronomes ne
foit que de trente-huit centièmes de féconde , cette
quantité néanmoins faifant près d'un vingt-troilicmede
la parallaxe totale ^ n'eft point un objet à négliger ; il cft
efTentiel de difcuter avec attention lequel des diffé-
rents réfultats énoncés ci dedus doit être préféré. Met-
tons le Le(fteur à portée d'en décider lui-même, en lui
préfentant les railons qui peuvent appuyer le fentimenc
de chaque Auteur.
En jetcant les yeux fur la Table précédente, on voit
i66 HISTOIRE ABRÉGÉE
d'abord qu'il y a fcpt réfulcats qui fixent avec un accord
fingulier la parallaxe du Soleil entre 8",48,6c8'', 56. L'ob-
fervation feule de Wardhus s'éloigne alFez coniîdérable-
ment de toutes les autres, & n'a pas à beaucoup près le
même accord entre fes propres rélultars. Telle eft la re-
marque que fiiit M. de la Lande : il Te décide en confé-
quence à rejetter robfcrvation de Wardhus, &. n'adop-
tant que les quatre autres dont les (cpt réfultats ne s'é-
cartent entre eux que d'un huit-ccnricme de féconde, du
plus petit au plus grand, il a pour parallaxe moyenne 8",
52 , ou en nombre rond 8" -f. Pour confirmer ce réfultat
il a calculé avec cette parallaxe de %" -^ plulieurs autres
obfervations de fimples contacts , dont il a déduit des du-
rées qui s'accordent parfaitement entre elles, en les rap-
portant à l'obfervation de Paris , comme on le peut voir
par la Table fuivantc.
Noms des Lieux.
Wardhus. . .
Ifle de Taïci. .
Gutief. ....
San-Jofeph. ,
Iakuftsk. . . .
Durée réduire
au centre delà
Terre.
5 42- n, i
î 41 4^.9
; 41 47
î 41 48
5 4' 49
Noms des Lieux.
Cajancbouig.
Fort du Prince.
Orenbourg. . .
PékiE
Durée réduite
au centre de la
Terre.
/ /t
S 41 50,9
5 41 ÎI.7
S 41 Î4
S 41 5S
On voit encore que l'obfervation de Wardhus eft la
feule qui s'éloigne du réfultat commun; & que toutes les
autres fe concilient parfaitement entre elles, dans la fup-
poficion d'une parallaxe de 8"-f. Telles font les preuves
fur lefquelles M. de la Lande fonde fon opinion. Mais
voyons ce que l'on peut y oppofcr.
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 1^7
M. Pingré, loin derejetcer robfervation de WardJius,
prétend au contraire devoir l'adopter 6c en faire Ton terme
de comparaifon, tandis qu'il fupprime celle de Cajane-
bourg. La raifon qu'il donne eft certainement plaufible.:
l'obfervation de Wardhus paroît avoir été faite avec tout
le foin, le concert &C l'habileté pollible; elle efl extrê-
mement complette, & celle de Cajanebourg l'eft beau-
coup moins ; le contact intérieur de la fortie n'y ayanc
pas été obfervé, il faut le conclure par le calcul. En con-
féquence M. Pingré n'employant qu'une feule durée ob-
fervée dans le nord, celle de wardhus,y compare toutes
les autres ; ôi voici fcs réfultats.
Iflc de
Taïti.
San-
Jofeph,
Fort du
Prince.
Parallaxe
moyenne.
Wardhus.
Il
8,86
8.88
9. 19
9j07
Il efl: à remarquer que M. Pingré fupppfe la durée de
Wardhus de 5'' 53' 17", plus grande de 14" que celle
qu'a employé M. de la Lande. ...j-.jr,
La parallaxe moyenne entre ces^ trois réfultats feroic
naturellement de 9", 07 : mais M. Pingré , d'après la com-
binaifon & le calcul de nombre d'autres obfervations , fe
détermine à adopter S^jS 8..Si M.Pingre, après avoir com-
paré les durées de l'isle de Taïti ,• de San-Jofeph
& du Fort-du-Prince à celle de "^^ardhus , eût cnfuite
comparé ces durées entre elles deux à, deux , les réful-
tats qu'il en eiit tirés eulTent été pour le moins aulTi con-
cluants que ceux qu'il a cherchés par les obfervations de
fimples contads, £c peut-être fe fût-il rapgrpché de l'opi-
nion de M. de la Lande. » ;■, ; n
MM. Euler, Walloc Sc le P. Hell ont fuivi le fenti-
1^8 H I S T O I R E A B R É G É E
ment de M. Pingre par rapport à l'obfervation de Caja-
nebourg. Se ils trouvent tous trois, à très peu près, le
même réfultat, qui tient précifément le milieu entre celui
de M. delà Lande ôc celui de M. Pingre, comme on le
voit ci-deflous.
Parallaxe du Soleil.
SelonM.de la Lande [en rejettantWardhus]. . 8^', 50
[en adoptant Wardhus]. . 8 70
Le P. Hell 8 70
l: ' M. Euler 8 68
f ' M. Wallot 8 j6
■ M. Pingre 8 88
La queftion me paroît donc fe réduire à favoir fi l'ob-
fervation de Wardhus doit être adoptée, ou fi l'on doit y
fubftituer celle de Cajancbourg. Il me femble qu'il cft
aile de fe décider fi l'on en juge par l'accord de la plura-
lité des réfultats. Aurefte, le temps, à qui tout doit fa
perfection, éclaircira fur cet article mieux que nous ne
le pouvons faire. Sans doute la longitude de nombre d'en-
droits cil les contacts ont été obfervés , venant un jour à
être parfaitement déterminée,de nouveaux calculs procu-
RcTultat du reront de nouveaux réfultats, de nouvelles combinai-
paiî'agc de fons, qui Contribueront à confirmer ou à rectifier nos con-
]7x?de 8'''î noiffances a6luelles: en attendant, la parallaxe moyenne
adoptée. de huit fécondes & demie étant celle qui s'accorde avec
les meilleures obfervations, celle qui avoit déjà été indi-
quée par le paflage de 1761 ; on peut, à ce que je crois,
radopter,fans craindre de s'éloigner beaucoup de la vérité.
Il me femble du moins que la plupart des Aftronomes fe
rendent à cette opinion , & même qu'ils fe félicitent d'ê-
tre parvenus à la folution complette &C fi defirée d'un
problême qui, jufques-là, leur avoit coûté tant de tra-
vaux mêlés de tant d'incertitudes.
Ayant une fois établi la véritable quantité de la paral-
iaxe du Soleil, on en a fait l'application à la perfection
du
DE LA PARALLAXE DU SOLEIL. 1(^9
du fyftêmc planétaire. La vraie diftance des planètes en-
tre elles, & relpeftivement au Soleil ou à la Terrera été
dès-lors fixée. On n'en connoiiToit jufqu'à préfent que
le rapport : nous pouvons maintenant aiîigner ces diftances
en lieues , ainfi que les autres éléments des planètes. En
voici le calcul fait par M. de la Lande.
Noms
des
PIj
le Soleil,
la Terre.
la Lune.
Mercure.
Vénus.
Mars.
Jupiter.
Saturne,
Anneau.
Diamètres à la
diftance moy
du Soleil.
51
17,0
4.91;
7,0
II. 4
13.7
SI, 7
40,6
Diamètres
en lieues de
1185 toif.
3M'5J
iS6j
781
Ii8o
278J
1911
31644
18956
67518
Diamètres
par rapport à
la Terre.
III, 7j
I.
o, 5141
o, 41176
o,97Iy6
0,67059
I'. 594
10, 100
^5.5*7
GrofTeur par
rapport à la
Terre.
1455015
I
o, 01036
o, 06518 I
0,91 81Î
o, 30155
14793 3
1030, }
Denfité par
rapport à la
Terre.
0,15463
I
0, 68706
1.0377
1, 1750
0,71917
o, 119S4
o, 10450
MalTe par
Vîtefli des
rapport a
graves a
la Terre.
la furface.
365411
455.80
1
15,1058
0,01399
2.8}
0, X4116
11,673
1,170^
18,717
0, 1198g
7.3833
540, 00
39,5;
106, 90
15, 819
■ • •
• . .
Diftances
moyennes
en lieues.
54761680
84515
15456104
151441JO
51966111;
I 80794791;
551604504;
idet
L'obfervation des partages ne nous a pas été moins
utile pour la théorie particulière de Vénus , en nous pro-
curant les réfulrats fuivants.
en
lySï.
en 1769.
Diamètre de Vénus obfervé.
58"
Î7". 1
Plus courte diftance des cen-
tres de Vécus & du Sokil.
9' }o"
10' 7", 7
Demi-durée du paflage. .
a"
5?' 8"
x"" 50' 58"
Heure de la conjonftion de
Vénus & du Soleil.
i"
Temps vrai.
Temps vrai.
10'' 14' iz'"
Lieu de la conjonûion. . .
Latitude
8' 15»
0'
16' 10"
Auft.
}' 4S". 3
31' 50"
l' 15° 17' 11"
Bor.
0" 4' 4". 4
i' 14" 3«' 8"
Lieu du Nœud
i« 14'
170 H ï s T O I R E A B R É G É E, S:c.
Tel cil: à-peu-piès le précis des recherches les plus in-
térefTantes par rapport à la parallaxe du Soleil, Je fou-
haite que le tableau que je viens d'en offrir, ait prélenté
au Lei^eurune idée nette &C inftru£live de cette matière.
J'aurois pu fans doute entrer dans de plus grands détails,
par des difcullions critiques 6c détaillées ; mais peut-
être n'aurois-je fait qu'alonger ce Mémoire, le rendre
plus obfcur, fans procurer d'autres réfultats que ceux aux-
quels on eft déjà parvenu. J'ai tâché de faire mention.
des travaux les plus connus & des meilleurs écrits qui
aient eu pour but la recherche de la parallaxe du Soleil ; il
j'ai omis cependant d'en citer quelques-uns non moins
clignes d'éloges , Ci je n'ai point parlé de tous les voyages,
fi je n'ai point rapporté toutes les obfervations qui ont
pu être faites, je prie les Auteurs de m'excufer: il ne m'a,
pas été poflible d'avoir connoiilance de tout ce qui s'eft
paffé , fur-tout chez les Etrangers, Je devois auifi éviter les
trop longs détails qui deviennent à la fin rebutants &
ennuyeux. Lorfque deux autorités m'on fuffi , j'ai cru inu-
tile d'en emprunter dix (i). Au rcfie je prie le Le£leur
de faire attention que ce n'eft ici qu'un fimple Mé-
moire auquel j'ai ofé donner le titre à'HiJioire abré-
gée delà Parallaxe du Soleil^ dans l'intention d'infpirer
à quelque autre l'idée d'en donner une hii^oire complette
à laquelle j'aurai eu la fatisfatflion de contribuer.
(i) Il y a peut-être deux cents Mémoires compofés à l'occafion
du palTage de Vénus & de la parallaxe du Soleil ; on les trouvera
répandus foit dans les Journaux , foit dans les Mémoires des diffé-
rentes Académies, Chaque Aftroncme a donné fes obfervations ,
fes réfultats, fon opinion; un in-folio n'auroit pas fuffi , s'il eût
fallu recueillir toutes ces voix , & les difcuter l'une après l'autre.
FIN.
Pe l'Imprimerie de Fr. Ambroise DIDOT, rue Pavée.
EXTRAIT DES REGISTRES
JDe l'Acadéhie Royale des Sciences,
Du I" Juillet 177 t.
IVIessieurs Bailly & Jeaurat , qui avoient écé nommés pour
examiner un ouvrage de M. Cassini fils , intitulé , F'oyage en
Californie pour l'oèjervation du pajfage de Vénus fur le difque du.
Soleil j le 3 Juin iy6ç)jpar M. Chappe , en ayant fait l«ur rap-
port , l'Académie a jugé cet ouvrage digne de Timprefllon ; en foi
de quoi j ai figné le préïent certificat. A Paris , le i" Juillet 1772.
GRANDJEAN DE FOUCHY,
Secrétaire perpétuel de l'Académie Royale des Sciences.
PRIVILEGE DU ROI.
JL/ O U I S , par la grâce de Dieu , Roi de France & de Navarre :
A nos amés & féaux Confeillers , les gens tenants nos Cours de
Parlement ^ Maîtres des Requêtes ordinaires de notre Hotel , Grand-
Confeil , Prévôt de Paris , Bailhfs, Sénéchaux ^ leurs Lieutenants
Civils, & autres nos Jufticiers qu'il appartiendra , Salut. Nos
bien amés les Membre^ de l'Académie Royale des Sciences
de notre bonne ville de Patis nous ont fait expofer qu'ils auroienc
befoin de nos Lettres de privilège pour rimprelîion de leurs ou-
vrages. A CES causes , voulant favorablement traiter les Expofants ,
Nous leur avons permis & permettons par ces Préfentes, de faire
imprimer par tel Imprimeur qu'il voudront choifir , toutes les recher-
ches ou obfervations journalières , ou relations annuelles de tout
ce qui aura été fait dans les afîemblées de ladite Académie Royale
des Sciences j les Ouvrages , Mémoires ou Traités de chacun des
particuliers qui la compofent , & généralement tout ce que ladite
Académie voudroit faire paroître , après avoir fait examiner lefdits
ouvrages, & jugé qu'ils font dignes de l'impreffion, en tels vo-
lumes , forme , marge , caraéleres , conjointement ou féparément ,
& autant de fois que bon leur femblera , & de les faire vendre &
débiter partout notre Royaume pendant le temps de vingt années
confécutives , à compter du jour de la date des Préfentes \ fans
toutefois qu'à l'occafion des ouvrages ci-deirus fpécifiés, il en puilTe
être imprimé d'autres qui ne foient pas de ladite Académie.
Faifons défenfes à toutes fortes de perfonnes , de quelque qualité
èc condition qu'elles foient , d'en introduire d'imprellion étran-
gère dans aucun lieu de notre obéifTance : comme anfli 1 tous Li-
braires &C Imprimeurs, d'imprimer ou faire imprimer, vendre,
faire vendre &c débiter lefdits ouvrages, en tout ou en partie, ôc
d'en faire aucunes tradudions ou extraits , fous quelque prétexte
que ce puiiïe être , fans la permifïïon expreffe & par écrit defdits ex-
pofanrs, ou de ceux qui auront droit d'eux, à peine de confifca-
rion des exemplaires contrefaits , de trois mille livres d'amende
contre chacun des contrevenants , dont un tiers à nous , un tiers à
THôtel-Dieu de Paris , & l'autre tiers auxdits expofants , ou à celui
qui aura droit d'eux , & de tous dépens, dommages & intérêts. A la
charge que ces Préfentes feront enregiftrées rout au long fur le Re-
giihe de la Communauté des Imprimeurs & Libraires de Paris, dans
trois mois de la date d'icelles ^ que rimprenioîi defdits Ouvrages
fera faite dans notre Royaume , & non ailleurs _, en bon papier ôc
beaux caradteres , conformément aux Règlements de la Librairie j
qu'avant de les expofer en vente , les manufcrits ou imprimés qui
auront lervi de copie à l'nnprelîion défaits Ouvrages , feront remis
es mains de notre rrèscher îk féal Chevalier, le Sieur d'Agu esse au ,
Chancelier de France, Commandeur de nos Ordres; Se qu'il en
fera enfuite remis deux exemplaires dans notre Bibliothèque publi-
que , un dans celle de notre Château du Louvre , & un dans celle
de norredit très cher & féal Chevalier le heur d'AcuesseaUj Chan-
celier de France^ le tout à peine de nullité des Préfentes. Du con-
tenu defquelles vous mandons & enjoignons de faire jouir lefdits
Expofants & leurs ayants caufe , pleinement & pailiblement , fans
foufFrir qu'il leur foit fait aucun trouble ou empêchement. Vou-
lons que la copie des Préfentes , qui fera imprimée tout au long au
commencement ou à la fin defdits Ouvrages , foit tenue pour due-
menc fignifiée, & qu'aux copies coUationnées par l'un de nos amés
féaux Confeillers & Secrétaires, foi foit ajoutée comme à l'origi-
nal. Commandons au premier notre Huiflîer ou Sergent fur ce re-
quis de faire pour l'exécution d icelles tous aftes requis & nécef-
faires, fans demander autre permiffion , & nonobftaiu clameur de
haro , charte Normande , & lettres à ce contraires : Car tel eft notre
plaifir. Donné à Paris, le dix-neuvieme jour du mois de Février,
l'an de grâce mil fept cent cinquanre , Se de notre règne le trente-
cinquième. Parle Roi en fon Confeil. MOL.
Regiflrèfur le regiflre XII de la Chambre Royale & Syndicale des Libraires &
'Imprimeurs de Paris , N", 4^0, fol. 303, confarmément au Règlement de 171J,
gui fait defenfes, an. 4, i toutes perfonnes de quelque qualité & condition qu elles
/oient, autres que les Libraires & Imprimeurs , de vendre, débiter , ^ faire affl'
cher aucuns livres pour les vendre , foit qu'ils s'en difent les Auteurs , ou autre'
ment , à la charge de fournir à la fufditc Chambre huit exemplaires de chacun ,
prefcritspar l'article laS du même RégUment. A Paris, le 5 Juin îyjo.
LE GRAS, Syndic,
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