Raziel Raziel ! Drape-toi du manteau occulte doublé d'éclairs ! Déplace les monts de l'orgueil ! Découvre Le fleuve Sambation qui n'existe pas Et mélange à minuit les signes de l'alphabet ! Des lettres jaunes et rouges de soufre et de sang Il frappe l'étincelle fait jaillir la rosée Dans l'orgue du barium au cirque des Erigones Il appelle Dieu de ses soixante-douze noms De nuit en nuit avec les cristaux des nébuleuses La poussière des météores le lait de l'aurore australe Raziel édifia en vingt ans le château du Verbe Où Dieu était captif dans ses soixante-douze noms Les soixante-douze chambres de l'extase La chambre du saphir et la salle des tempêtes Le hall de la couronne et le salon des lares La tour des semences et le grenier des pains Il alluma les lampes du Yod magique Façonna la colère de la mer rouge Découvrit le secret derrière la porte des portes : Les corridors qui aboient les escaliers qui sifflent Et des miroirs pour fontaines et pour lacs perdus Et des miroirs verticaux pour les générations d'oiseaux Et des miroirs perplexes pour la mise en grâce des enfants Dieu sortit vêtu de soixante-douze noms (Yvan Goll: Les Cercles Magiques, Editions Falaize, Paris 1951 p. 56/57)